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Point de presse de M. François Legault, député de Rousseau

Version finale

Le jeudi 25 juin 2009, 10 h 36

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Dix heures trente-six minutes)

M. Legault: Bonjour, tout le monde. Il y a plus de 10 ans, en septembre 1998, j'acceptais l'invitation de Lucien Bouchard de me joindre à son gouvernement. Si je l'ai fait, c'est parce que je souhaitais contribuer au développement économique du Québec de façon différente après une carrière active dans le monde des affaires. Je voulais aussi redonner à cette société, qui m'avait procuré la chance de réussir professionnellement.

Après plus de 10 ans de vie politique et au terme d'une mûre réflexion, j'en suis venu à la conclusion qu'il est temps pour moi de passer à autre chose et d'envisager d'autres formes d'engagement dans la société québécoise. C'est pourquoi j'annonce aujourd'hui ma démission en tant que député de la circonscription de Rousseau et mon retrait de la vie politique. J'ai réalisé au cours des dernières semaines que j'étais de plus en plus inconfortable dans mon rôle de critique. C'est une fonction nécessaire et incontournable dans notre système politique, mais, après avoir occupé cette fonction pendant six ans, je souhaite aujourd'hui retrouver une occupation d'agir autrement. Je suis un gars d'action, un gars qui, avec des associés, a bâti une compagnie aérienne. À 52 ans, je dois dire que cette soif d'action autre que politique m'a rattrapé. Certains diront que ce n'est pas un bon moment pour quitter Je leur réponds qu'il n'y a malheureusement pas de moment idéal. L'automne dernier, le gouvernement libéral a tenu une élection qui avait pour thème central l'économie Je croyais à cette époque avoir la motivation pour faire un mandat de quatre ans, et ce, même dans l'opposition, mais, au cours des dernières semaines, j'ai bien vu que ma motivation déclinait et que je ne serais pas en mesure de continuer. J'ai cependant souhaité participer à la commission parlementaire spéciale sur la Caisse de dépôt et terminer la session parlementaire et je quitte donc, aujourd'hui, à la veille du congé estival, serein quant au travail accompli.
En 10 années de vie politique, j'ai été appelé à jouer plusieurs rôles. Le plus important est d'avoir représenté les électeurs de la circonscription de Rousseau. J'ai aussi tenté d'assumer pleinement mes responsabilités à titre de député de l'opposition. Et finalement, bien, j'ai eu le privilège d'occuper plusieurs fonctions ministérielles. Malgré les limites de mon action, il y a deux réalisations dont je suis fier et que je voudrais brièvement souligner, d'abord, d'avoir réussi, suite au Sommet du Québec et de la jeunesse, à convaincre Lucien Bouchard d'investir plus de 1 milliard de dollars en éducation. Cet investissement nous a permis de mettre en place les programmes Agir tôt et Agir autrement pour lutter contre le décrochage notamment dans des écoles de milieux défavorisées. Ça nous a aussi permis d'investir dans nos cégeps et dans nos universités en échange des fameux contrats de performance. Cependant, il y a encore beaucoup à faire en éducation. Il faut établir chez les Québécois un rapport plus étroit entre l'éducation et l'avenir de notre nation. Plusieurs Québécois ont fait des bons prodigieux, ont dépassé les attentes de leurs milieux grâce à l'éducation. C'est aussi mon histoire personnelle. Cette opportunité de se dépasser par l'éducation doit être offerte à tous les enfants, à tous les jeunes du Québec, peu importent leurs milieux d'origine.
La deuxième réalisation dont je suis le plus fier concerne la mise en place d'outils qui favorisent une culture des résultats dans nos écoles et nos hôpitaux, notamment les contrats de performance, les plans de réussite et les bulletins des hôpitaux. Là encore, il reste beaucoup à faire.
Je quitte toutefois inquiet pour l'avenir du Québec, inquiet parce que je sens que le Québec s'est engagé dans un déclin tranquille, et cela, malheureusement, trop souvent dans la résignation et l'indifférence. Tout projet politique ambitieux, quel qu'il soit, peu importent les partis, est difficile à réaliser actuellement. Certains me parleront sûrement de la souveraineté, que nous n'avons pas encore réalisée, mais je pourrais aussi dire la même chose du renouvellement du fédéralisme dont le fruit n'en finit plus de mûrir. La question du Québec n'est pas réglée, mais c'est comme si on refusait de se l'admettre collectivement. La même apathie existe pour les défis économiques et sociaux auxquels nous faisons face. Les raisons sont multiples, mais il faut d'abord constater que la perte de confiance et le cynisme de la population à l'égard de la classe politique freinent tout élan. Avant de jeter la pierre à d'autres, je prends ma part de responsabilité, ayant été impliqué en politique depuis plus de 10 ans. Politiciens, citoyens, médias et groupes de pression, nous sommes tous responsables de cette réalité. Cela dit, la fatigue, le cynisme, le fatalisme ne peuvent servir d'excuse pour accepter l'immobilisme et surtout le déclin tranquille du Québec. Le Québec doit retrouver la voie du courage et de l'audace, c'est mon souhait le plus cher. J'aime bien la remarque que le président américain reprend dans plusieurs de ses discours. Il affirme que chaque génération fait face à des défis importants mais que c'est la responsabilité de chacune de ces générations de se retrousser les manches, de relever ces défis pour son bien et pour celui des générations futures.
Pour moi, il y a trois défis qu'il nous faudra surmonter. D'abord, le Québec a toujours un écart de richesse important avec les autres États en Amérique du Nord. Ensuite, nos réseaux publics de santé et d'éducation connaissent de graves problèmes d'efficacité. Et enfin le Québec vit une crise des finances publiques.
Reprenons un par un ces défis. Premièrement, le Québec n'a pas réussi à réduire l'écart de richesse qui le sépare des autres États en Amérique du Nord. Il a un revenu moyen trop faible, qui risque d'encourager l'exode de nos jeunes et de nuire au financement de nos programmes sociaux. Pour créer de la richesse, le Québec devrait investir davantage en éducation. Il faudrait aussi avoir une fiscalité des entreprises plus attrayante pour accroître les investissements et du même coup améliorer notre productivité. Et nous devons également mieux utiliser tous nos outils de développement économique, en particulier la Caisse de dépôt, pour protéger et favoriser la croissance de nos grandes entreprises québécoises.
Deuxièmement, les problèmes d'efficacité qui assaillent nos grands réseaux publics restent trop nombreux. Il faut changer la culture dans nos écoles, dans nos commissions scolaires, dans nos hôpitaux et dans nos agences de santé pour mettre en place une culture de l'évaluation et une culture des résultats.
Troisièmement, l'état des finances publiques du gouvernement du Québec est tel que l'on peut véritablement parler d'une situation de crise. Si on refuse d'y faire face, ce problème de déficit structurel va s'accentuer au cours des prochaines années en raison du vieillissement de la population. On ne réussira pas à protéger nos programmes sociaux si on accepte l'endettement perpétuel du Québec et de ses générations futures. Il est encore temps d'agir, ne restons pas collectivement les bras croisés.
En terminant, je voudrais remercier les personnes qui m'ont accompagné dans ma carrière politique. Dans un premier temps, les citoyens de la circonscription de Rousseau, sans qui cette aventure n'aurait pas pu avoir lieu, je les remercie chaleureusement de m'avoir élu à quatre reprises. J'aurai l'occasion de les saluer plus longuement lorsque je me rendrai dans le comté cet après-midi. Je voudrais également remercier les chefs du Parti québécois avec lesquels j'ai eu la chance de travailler. D'abord, Lucien Bouchard, qui m'a fait confiance et qui m'a offert la chance d'être ministre dans son gouvernement, c'est beaucoup grâce à lui que j'ai pu vivre ces 10 années passionnantes. Je tiens aussi à remercier Bernard Landry, qui m'a accordé sa confiance en me confiant d'importantes responsabilités ministérielles, et M. André Boisclair, qui m'a confié des dossiers importants à titre de député de l'opposition. Je les remercie tous deux de leur soutien. Je tiens aussi à témoigner ma reconnaissance à l'actuelle chef du Parti québécois. Mme Pauline Marois est une femme généreuse, tenace et sans rancune comme on en voit rarement en politique. Elle donne toujours le meilleur d'elle-même pour servir ses concitoyens. De plus, c'est une femme d'équipe. La collaboration était toujours de mise entre elle et moi dans tous les dossiers de nature économique. Je ne peux que lui souhaiter bonne chance dans la réalisation de ses objectifs.
Je veux aussi remercier mes collègues députés pour leur soutien et leur amitié. J'ai eu l'occasion de parler avec certains et certaines d'entre eux et d'entre elles au cours des dernières heures. Ça m'a beaucoup touché. Il y a aussi les recherchistes et les conseillers qui ont fait du boulot fantastique depuis que je suis en politique, en particulier Jean-François Gibeault, avec qui j'ai eu la chance de travailler ces dernières années. Auparavant, j'ai eu la chance de travailler avec Nathalie Verge, Daniel Zizian, Pierre Schetagne et plusieurs autres. Je veux remercier aussi les membres de l'exécutif du Parti québécois de Rousseau qui se sont succédé, en particulier les présidents, Jean M. Poirier et François Barthe, qui ont fait une grande partie du voyage avec moi, sans oublier Lucie, Mimi, Fernand, Jean-Claude, Pierre, Gilles, Patrick et les autres. Un merci très chaleureux au personnel de mon bureau, Line Desrosiers, et plus particulièrement aux deux anges qui ont été là presque depuis le début, Lynne Harpin et Nicole Savard. Merci, Line, merci, Nicole. Je veux aussi remercier Martin Koskinen, mon ami, mon conseiller de tous les instants, celui qui m'inspire à tous les jours et sans qui je n'aurais probablement pas resté 10 ans et demi.
Je veux finalement remercier mon épouse Isabelle et mes deux fils, Xavier et Victor, qui ont 16 ans et 15 ans respectivement. J'ai peine à imaginer qu'ils avaient cinq et quatre ans au début de mon aventure politique. J'ai été absent pour une partie de ces belles années. Je tiens à leur manifester mon amour inconditionnel en cette journée, qui est pour moi la fin d'une étape dans ma vie.
Et je veux vous remercier, vous, les journalistes avec qui je crois avoir eu des échanges respectueux. Oui, vous allez me manquer. Merci.

M. Plouffe (Robert): M. Legault, est-ce que vous partez pour mieux revenir au sein du Parti québécois ou c'est un départ de la politique tout court?

M. Legault: Non, je quitte et je n'ai aucun plan pour revenir. J'ai fait 10 ans et demi, je pense que j'ai fait ma part. J'ai donné 10 ans et demi de ma vie à la vie politique, donc je n'ai aucun plan pour revenir.

Des voix: ...

M. Plouffe (Robert): Le projet de loi n° 40... Est-ce que le projet de loi n° 40 sur le déficit a été un élément majeur dans votre réflexion?

M. Legault: Non. J'avais déjà au cours des dernières semaines, je dirais presque, des derniers mois vu qu'il y avait une baisse de motivation et je souhaitais attendre la fin de la session avant de l'annoncer, ensuite attendre les élections partielles pour ne pas nuire... ou en tout cas le moins possible à mon parti, donc ça n'a rien à voir. Puis ce que... Le projet de loi n° 40, c'était un peu un cri du cœur, pas pour mettre qui que ce soit dans l'embarras mais pour vraiment répéter des inquiétudes que j'ai souvent répétées.
Je pense que les gens qui me connaissent bien savent comment c'est important pour moi, l'équilibre budgétaire puis de vivre selon ses moyens puis ne pas endetter nos enfants. Donc, quand j'ai utilisé des mots comme «les vaches sacrées», ça a fait peut-être réagir des personnes, mais ce que je voulais dire tout simplement, c'est que, si on veut équilibrer les revenus puis les dépenses, il y a juste deux façons: Ou on augmente les revenus ou on diminue les dépenses.
Et puis, quand je parle des dépenses, c'est certain, là, comme je l'ai dit tantôt, que, dans les deux grands réseaux que j'ai eu la chance de diriger, la santé et l'éducation, bien il y a des gains d'efficacité à faire dans ces réseaux. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas les protéger, ce sont les deux réseaux les plus importants, mais il y a des gains d'efficacité à faire, il y a une culture à changer. Il faut avoir une culture de l'évaluation, évaluer chaque établissement et éventuellement même peut-être évaluer chaque professionnel qui travaille dans ces réseaux. Il y a vraiment, là, une culture à changer, il y a des gains d'efficacité à faire dans ces réseaux, et c'est ce que je voulais dire.

Des voix: ...

Mme Biron (Martine): ...des projets, M. Legault?

M. Legault: Bon. Ce que j'ai dit à mon épouse, c'est que j'essaierai de prendre les six à 12 prochains mois pour profiter de la vie, me ressourcer avec... prendre du temps avec elle, avec mes enfants, et je n'accepterai pas aucune proposition avant six ou 12 mois. Mais je veux faire autre chose que de la politique.

Mme Biron (Martine): M. Legault, dans le milieu privé? Qu'est-ce que vous avez en tête?

M. Legault: Je n'exclus pas de retourner en affaires.

Mme Biron (Martine): Partir une entreprise?

M. Legault: Je n'exclus pas ça. Je n'exclus pas de retourner en affaires.

M. Chartrand (Yves): M. Legault, on a l'impression que, si... que vous êtes assez déçu de la défaite du Parti québécois en décembre dernier, que, si le Parti québécois avait pris le pouvoir, vous auriez fait un autre mandat. C'est l'opposition qui vous... qui vous a usé, là, si je comprends bien?

M. Legault: Bien, d'abord, les gens qui me connaissent savent que la patience, ce n'est pas ma première qualité, là. Tous ceux qui ont travaillé avec moi savent que juste critiquer, moi... Je suis un gars d'action, donc c'est certain que j'aime mieux prendre des décisions. Par contre, je m'étais posé la question. Quand on se présente à des élections, on doit envisager toutes les possibilités. Donc, à l'automne dernier, je me suis posé la question: Est-ce que je pense être capable de faire quatre ans, si c'est le cas, dans l'opposition? Je pensais que oui, sincèrement. Je pensais que oui, mais j'ai bien vu au cours des derniers mois, là, que le six années d'opposition s'accumulaient puis que, là, ça devenait difficile pour moi de me contenter de critiquer puis d'observer. Je suis plus un gars qui aime participer puis construire.

M. Perron (Sébastien): Est-ce que votre position était toujours conciliable avec celle du parti, notamment, je pense, à la stratégie référendaire?

M. Legault: Bien, moi, je pense que Pauline Marois a déposé un plan pour faire avancer le Québec. Je pense que la souveraineté du Québec, c'est toujours une option qui est pertinente. Je continue de penser que les Québécois seraient mieux servis si on avait tous nos pouvoirs, qu'on est une nation, qu'on a toutes les caractéristiques d'un pays, mais c'est aux Québécois de décider. Et, comme je l'ai dit déjà il y a quelques mois, il faut quand même prendre acte du fait que le cynisme et la perte de confiance de la population à l'égard de toute la classe politique rend difficile la réalisation du projet de la souveraineté, mais, quand les Québécois s'y mettent, rien n'est impossible.

Journaliste: ...donc est-ce que vous pensez donc qu'il n'y avait que peu de chances... il y a tellement peu de chances que ça se produise que même ça, ça doit vous démotiver aussi, comme...

M. Legault: Non, écoutez, moi, je continue de penser que c'est un choix qui est pertinent. Je pense que le Québec a des grands défis à relever. La souveraineté, c'est un de ces défis-là. Mais, comme je le mentionnais tantôt, moi, je suis très inquiet de trois choses au Québec. Québec, quand on regarde le revenu par habitant, est moins riche que les autres états en Amérique du Nord, puis ça, ça veut dire qu'il y aura peut-être des jeunes, nos enfants qui décideront d'aller élever leurs familles aux États-Unis ou ailleurs. La deuxième chose, c'est qu'il va falloir à un moment donné régler nos problèmes d'efficacité dans nos deux grands réseaux, l'éducation et la santé, pour retrouver la confiance de la population. Parce que, tant qu'on n'aura pas la confiance de la population, ça va peut-être être difficile de proposer des projets collectifs. Puis la troisième chose, bien c'est qu'on a un sérieux problème de finances publiques, puis il va falloir à un moment donné arrêter de se mettre la tête dans le sable puis y faire face.

Journaliste: ...vous dites que la fatigue n'est pas une excuse pour rester les bras croisés, vous faites des constats très durs et vous avez les compétences pour changer des choses puis en même temps vous êtes le premier à baisser les bras.

M. Legault: Oui, je comprends. Je comprends, là, mais j'ai fait 10 ans et demi, j'ai fait ma part. Je pense qu'il n'y a pas personne qui peut me reprocher de ne pas avoir essayé de faire ma part pour faire avancer le Québec. Je vais essayer d'apporter une contribution d'une façon autre au cours des prochaines années. Mais, bon, c'est à d'autres à prendre le relais.

M. Lessard (Denis): Vous avez été témoin, depuis 10 ans, de la scène politique. Est-ce que vous estimez que l'idée de l'option souverainiste a progressé dans la population ou ça a piétiné ou ça a reculé?

M. Legault: Écoutez, là, aujourd'hui, là, je... puis dans les prochains jours, les prochains mois d'ailleurs, j'ai...

M. Lessard (Denis): ...les élections?

M. Legault: Oui, mais je n'ai pas l'intention, là, de commenter l'actualité politique, là. Je me retire et puis je n'ai pas l'intention, là, de commenter la situation Rivière-du-Loup, puis tout ça, là, je n'ai pas l'intention de le faire.

M. Lessard (Denis): ...l'actualité politique, commenter ce qui se passe dans les réseaux, la richesse du Québec. Est-ce que vous pouvez dire... L'idée de la souveraineté, est-ce qu'elle a progressé ou pas?

M. Legault: Bien, ce que j'ai dit, là, c'est... de l'autre côté aussi. Quand on parle... je pense que les Québécois... il y a des Québécois fédéralistes qui souhaiteraient renouveler le fédéralisme, mais le fruit n'arrête plus... n'en finit plus de mûrir, et puis on se retrouve dans une situation où le Québec n'a pas réglé son problème constitutionnel. Donc, je pense que ce qui est vrai pour les souverainistes est aussi vrai pour les fédéralistes.

M. Perron (Sébastien): M. Legault, on a l'impression que la souveraineté, pour l'instant, ce n'est peut-être pas la priorité immédiate, c'est peut-être plus de s'attaquer au fardeau fiscal, à l'économie, aux difficultés de la dette, par exemple.

M. Legault: Bien, je continue à penser que la souveraineté, c'est un projet pertinent. Puis, moi, je suis un ancien puis peut-être un futur homme d'affaires, donc j'aime ça être en contrôle. Donc, de contrôler tous nos pouvoirs, c'est quelque chose, là, que je souhaiterais. Je pense qu'on serait mieux servis, et on contrôlait tous nos pouvoirs. Maintenant, il faut prendre acte qu'actuellement il y a tellement de cynisme, il y a tellement peu de confiance de la population envers la classe politique que tout projet politique, que ce soit la souveraineté du Québec ou que ce soient des projets de création de richesse ou tout projet de société, devient presque impossible à présenter. Donc, on a des questions à se poser, tout le monde. Bon. Moi, le premier, j'ai fait 10 ans en politique, mais, vous aussi, et tout le monde, on doit se poser des questions.

Le Modérateur: Robert Dutrisac.

M. Dutrisac (Robert): Le constat, que vous faites, assez sévère de la situation, cette stagnation que vous constatez, est-ce que c'est la raison principale de votre départ ou c'est essentiellement des raisons personnelles?

M. Legault: Non. Je pense que la raison principale de mon départ, c'est une question de motivation personnelle. Depuis quelques semaines, je me suis rendu compte que la motivation n'était pas là, j'avais le goût de faire autre chose. Oui, je me rends compte que j'ai de la difficulté à être à l'opposition, à critiquer. Moi, j'aime mieux construire. Je suis un gars d'action. Donc, j'ai de la difficulté avec l'opposition. Mais je vous note quand même que j'ai fait six ans, là, sur 10 ans et demi, j'en ai fait six ans dans l'opposition, puis ce n'est pas toujours facile, être dans l'opposition.

M. Dutrisac (Robert): Mais vous étiez cependant le meilleur dans l'opposition, surtout ces derniers temps. Quel tort vous pensez que votre départ va causer au parti?

M. Legault: Bien, écoutez, j'ai essayé de le faire après la session, après les partielles, au début de l'été, au moment, en tout cas, que je trouvais qu'il pouvait y avoir le moins d'impact négatif pour le parti, mais, à un moment donné, je pense que, quand on n'est plus motivé...
Vous savez, être député, là, ça veut dire, le samedi, être à une activité du club de l'âge d'or dans son comté, c'est d'avoir des activités à peu près à tous les soirs, là, faire des cocktails, toutes sortes d'activités. Quand on n'est plus motivé, je ne pense pas qu'on rende service à la population de rester en politique.

Journaliste: Avez-vous l'impression, M. Legault, que le PQ et Mme Marois étaient sensibles à ce nécessaire coup de barre qu'il faut donner, selon vous, aux finances publiques? Est-ce qu'ils étaient suffisamment sensibles? Est-ce que l'oreille était suffisamment tendue à cette nécessité-là dans le parti?

M. Legault: Bien, moi, j'ai toujours senti, là, puis j'ai toujours vu une excellente collaboration avec Mme Marois dans tous les dossiers économiques. Donc, les défis que je vous mentionne, j'ai eu l'occasion d'en discuter souvent avec Mme Marois puis j'ai toujours senti, là, une belle collaboration donc de ce côté-là.

Journaliste: Est-ce que c'était à votre goût?

M. Legault: Bien, écoutez, là, à un moment donné, il faut tous se poser des questions comme politiciens, mais il faut aussi poser des questions au premier ministre, là. Les gens ont élu un gouvernement, c'est ce gouvernement-là d'abord qui devrait avoir le leadership.

M. Lavoie (Gilbert): M. Legault, Mme Marois, à son bilan de session, avait l'impression que vous étiez pour terminer votre mandat. C'est-u après ça que vous lui avez appris ou...

M. Legault: Oui, j'ai vu Mme Marois. Justement, je ne voulais pas créer d'interférence dans le bilan de fin de session. Donc, j'ai vu Mme Marois jeudi dernier, immédiatement après le bilan de fin de session. Elle m'a demandé d'y réfléchir à nouveau jusqu'à lundi. Je l'ai revue lundi matin et je lui ai confirmé que je n'avais pas changé d'idée et donc que j'annoncerais mon départ aujourd'hui, jeudi le 25.

M. Lavoie (Gilbert): Vous avez eu... En sous-question. Vous avez eu plusieurs offres, vous avez eu des offres du privé, des offres... vous avez mentionné ça, là, mais des offres qui pourraient être valables encore dans six mois, un an ou si vous...

M. Legault: Non.

M. Lavoie (Gilbert): ...qui étaient à rejeter?

M. Legault: Non, c'est des offres que... Oui, j'ai eu des offres mais des offres que j'ai refusées et puis je n'ai pas... probablement que ces offres-là ne tiennent plus aujourd'hui, puisqu'ils ont embauché quelqu'un d'autre. Mais je ne veux pas accepter d'offre au moins avant six mois. Je veux prendre le temps de me ressourcer et puis peut-être de voyager un peu, et puis ensuite d'examiner ces choix-là, là. Mais je n'ai pas accepté aucune offre.

M. Lessard (Denis): M. Legault, est-ce que des gens de l'ADQ vous ont fait des signes pour...

M. Legault: Je n'ai eu aucune discussion avec les gens de l'ADQ?

M. Lessard (Denis): M. Charpentier, monsieur...

M. Legault: Non, aucune discussion.

Mme Biron (Martine): Est-ce qu'on a tenté de vous retenir?

M. Legault: Bien, Mme Marois m'a demandé, quand je l'ai vue jeudi, de la revoir lundi puis d'essayer de repenser à ma décision. Donc, d'une certaine façon, oui, mais ma décision était déjà prise à ce moment-là.

M. Chartrand (Yves): M. Legault, est-ce que, dans le fond, quand on entend ce que vous dites là, vous n'êtes pas déçu un peu par les Québécois mêmes, par le fait qu'ils refusent de bouger? Vous parliez beaucoup de cynisme. Est-ce que vous dites que c'est seulement les politiciens qui sont coupables de cette situation-là ou si ce n'est pas le peuple en entier qui refuse de bouger puis qu'il y aurait un espèce d'hédonisme qui...

M. Legault: Bien, je pense qu'effectivement c'est collectivement qu'il va falloir se poser ces questions-là. Moi, je ne souhaite pas être la première génération qui laisse moins à ses enfants que ce qu'on a reçu de nos parents, mais il faut bien comprendre que, si on ne fait rien puis qu'on continue de voir l'écart de richesse se creuser dans le revenu par habitant avec parité de pouvoir d'achat, là, avec les autres États en Amérique du Nord, si on continue à avoir les problèmes qu'on a en santé et en éducation, si on continue à faire des déficits, là, on en voit, là, pour quatre ans... je pense qu'à un moment donné il va falloir se réveiller, se poser des questions : Comment on se reprend en main, comment on fait pour avoir un avenir un peu plus prometteur? Actuellement, je pars inquiet, mais en même temps, bien, je souhaite que tous les Québécois... puis je pense qu'il y a à avoir beaucoup avec le cynisme et puis je pense qu'on a tous à se poser des questions, politiciens, journalistes et citoyens ordinaires.

M. Chartrand (Yves): Est-ce que cette régression-là est due à six ans de pouvoir libéral, croyez-vous?

M. Legault: Je pense qu'on le voit un petit peu partout, ce cynisme. Bon, on voit qu'aux États-Unis l'arrivée d'un leader charismatique peut changer les choses. C'est certain, là, que, les six dernières années, bon, on n'a pas vu de projet emballant.

M. Plouffe (Robert): Est-ce que vous ne contribuez pas à ce cynisme-là en partant avant la fin de votre mandat?

M. Legault: Bien, écoutez, quand j'ai décidé de me présenter à l'automne dernier, j'étais vraiment convaincu que j'aurais la motivation pour faire les quatre ans, mais, depuis quelques semaines, je me suis rendu compte que je n'avais pas la motivation. Puis, quand on n'a pas la motivation, je pense qu'on est mieux et pour soi mais et aussi pour les citoyens de quitter. Et c'est ce que j'ai réalisé il y a quelques semaines. J'ai quand même voulu compléter la session et je l'annonce à ce moment-ci puis en laissant la place à ceux qui auront peut-être plus de fougue.

M. Grant (John): En anglais, M. Legault.

M. Legault: Yes.

M. Grant (John): Mr. Legault, you seem to suggest that your personal lack of motivation is actually a cultural lack of motivation in Québec and that the cynicism and lack of confidence in politics is essentially stopping the province from moving ahead. I mean, how you do you account for that?

M. Legault: I think that right now we have major challenges in Québec. First, there's a difference in the revenue per capita when you compare with other states in North America, and we have to have a real plan to create wealth. Second, we have major problems, still major problems in our two public networks: health care and education. We will have to change the culture to have more evaluation, more focus on results, and there's a major problem also of public finances in Québec.
So, right now, altogether, we have to realize first that we're not in the right direction and take the correct actions to change that. But, right now, there's a lot of cynicism and a total lack of confidence facing the political people, and it's very tough to present any collective project right now.

M. Grant (John): Do you think that another three or four years of Charest's liberals will in anyway change that? Have you any hope that...

M. Legault: I think it's the responsibility of everybody, of all the parties to present an alternative, to present courageous projects to change this direction.

M. Dougherty (Kevin): ...and education, you talked about inefficiencies, and I can see on one hand the unions in those areas, they're gonna say: Ah, they want to cut jobs again, you know, it's terrible already. And on the other hand Charest would say: Oh... he wants to cut education and health, you know, it's the same...

M. Legault: Yes. I said that.

M. Dougherty (Kevin): Yeah. So how do you fix that?

M. Legault: I think that it would be to the advantage of everybody, including unions, to be more efficient in our networks. It's a lot happier to work where it's efficient, and right now I think that in our schools, in our hospitals there major lacks of efficiency, and I think we have to change the culture. People, including people from unions, have to accept that professionals like nurses, doctors, teachers should be evaluated, but it's a bit a vache sacrée to say that. So we have to face these challenges.

Mme Montgomery (Angelica): Mr. Legault, can I just get you to repeat if you haven't already? Why is it that you're leaving now rather than leaving before the election that was just six months ago.

M. Legault: Okay. Six months ago, I asked myself: Would I be motivated for the next four years, even if I'm in the opposition? I thought at the time that the answer would be yes. But, in the last few weeks, I saw that the motivation wasn't there anymore. So I wanted to finish this session, wait for the by-election, and that's why I announce that today. Because, when you don't have motivation, it's better for you but also better for the citizens too that you leave. Because you need a lot of motivation to be there on every Saturday night, every night of the week, mostly, meeting these people. So, unfortunately, I don't have today the motivation, and I want to do something else.

M. Dougherty (Kevin): Do you have any regrets?

M. Legault: Regrets? Maybe not to have do enough, when I was a minister, to change this culture. I've started with the performance contracts, but maybe not to do enough. And maybe, I would say, without naming people, maybe some personal attacks also that you have to do when you are in the Opposition, that I regret a bit sometime. But I wouldn't give you names this morning.

M. Lavoie (Gilbert): Raymond Bachand? Raymond Bachand?

M. Legault: I don't give you names, any names this morning.

La Modératrice: Last question.

M. Lyons (Shawn): ...you were... This is for... you say it's for personal reasons, obviously. But what do you think your departure now says about the current state of your party, its leadership and even the... at least the short-term future of the sovereignty movement?

M. Legault: Yeah. I think that, first, regarding sovereignty... I still think that it's a pertinent option. I think that would be... we would be better to have all our powers to take our decisions. But I have to admit that, because of the cynicism and because of the lack of confidence of the population, it's very though right now to present this kind of project, but it's also very though to present any economic or social projects.

M. Lyons (Shawn): What's next for you?

M. Legault: For the next six to 12 months, I expect to take good time with my family. And, after that, I don't exclude to go back in business.

M. Lyons (Shawn): ...plans, by the way?

M. Legault: Yes, most probably, with my family. Yeah.

Mme Montgomery (Angelica): Why not wait to run for the PQ leadership later on?

M. Legault: There is no leadership right now, and I have confidence in Mme Marois.

La Modératrice: Merci.

M. Boivin (Simon): ...se demande si vous allez laisser de côté votre allocation de transition de 130 000 $? La question est posée.

M. Legault: Non. Non, non. Je vais prendre ce que j'ai le droit. Et puis je ne pense pas que je suis venu en politique pour faire de l'argent.

La Modératrice: Merci.

M. Lessard (Denis): Votre démission est-u effective aujourd'hui ou en septembre, quand la Chambre revient?

M. Legault: Non. Je vais aller signer ça. Je suppose que c'est effectif aujourd'hui. Oui.

La Modératrice: Merci.

M. Legault: Merci beaucoup, tout le monde.

(Fin à 11 h 09)

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