(Onze heures quarante minutes)
M. Coiteux : …Mmes MM. les
journalistes, puis merci de votre présence aujourd'hui.
J'en ai déjà parlé dans ces termes-là,
mais, vous savez, quand je suis arrivé en poste comme président du Conseil du
trésor, l'une des premières questions que j'ai posées à mes fonctionnaires — et
puis j'ai aujourd'hui, avec moi, des gens avec qui je travaille au quotidien,
dont je salue la présence et que je remercie aussi — l'une des
premières questions que j'ai posées, c'était : Il y a combien de personnes
qui travaillent pour l'État québécois? Question, en apparence, fort simple, évidemment,
mais qui s'est avérée fort compliquée en même temps. Pas parce qu'ils n'ont pas
la bonne volonté de me donner des réponses immédiates et précises, bien au
contraire, mais ils m'ont dit : M. le ministre, ça dépend ce que vous
entendez par «employés de l'État». Est-ce que vous parlez de la fonction
publique? Est-ce que vous parlez des hôpitaux? Est-ce que vous parlez des
commissions scolaires? J'ai dit : Bien, j'aimerais peut-être avoir un peu
de détail, puis ça serait bien de pouvoir additionner toutes les personnes pour
savoir combien on rémunère de personnes à l'intérieur de l'État québécois.
Alors, ce qu'on m'a répondu, c'est que ce n'était pas possible d'avoir cette
information de manière précise parce que les bases n'étaient pas comparables,
et donc on ne peut pas faire les additions forcément facilement, et d'autre
part parce qu'on avait, dans certains cas, des délais pour obtenir les données
qui pouvaient aller jusqu'à deux ans.
Alors, évidemment, une fois que j'ai su
ça, je me suis dit : Écoutez, ça veut dire qu'on a des lacunes qui sont
quand même importantes parce qu'il y a quand même des grandes organisations…
L'État, c'est que grande organisation, mais il y a quand même des grandes
organisations qui gèrent des effectifs partout dans le monde, hein, les
fameuses entreprises multinationales, et ils sont capables d'avoir,
pratiquement à la semaine près, non seulement le suivi des revenus et des
dépenses, mais également l'évolution des effectifs partout sur la planète.
Alors, même si on a un univers qui est très décentralisé, je pense que,
lorsqu'on parle d'un État moderne, lorsqu'on parle d'un État du XXIe siècle, il
me semblait qu'il allait de soi qu'il fallait qu'on soit capable d'avoir cette
information-là minimalement sur une base mensuelle.
L'information en gestion et donc en gestion
des deniers publics, en gestion de l'appareil public, l'information, c'est
absolument essentiel. Donc, il fallait franchir cette première étape qui était
d'avoir un dénombrement, en temps à peu près réel, rapide, des effectifs à
l'intérieur de tout le périmètre de l'État pour ensuite être capable de mieux
gérer nos effectifs, mieux gérer nos ressources humaines, d'autant plus que,
comme vous le savez, on a le défi des finances publiques au Québec, on a le
défi de ramener et de maintenir l'équilibre budgétaire. Et, les dépenses de
rémunération étant une composante très importante de nos dépenses, 60 %
des dépenses de programmes, il apparaissait très important d'être capable
d'exercer un meilleur contrôle sur l'évolution des effectifs de l'État parce
que c'est important pour l'évolution de la rémunération.
C'est pour ça qu'on a décidé, comme
gouvernement, d'agir et c'est pour ça que j'ai présenté, l'automne dernier, un
projet de loi, qui était le projet de loi n° 15, qui concernait
directement la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des
organismes et des réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État.
C'est un projet de loi qui a été adopté avant Noël dernier, et cette loi,
maintenant, puisqu'il s'agit d'une loi, est devenue un outil important qu'on
utilise notamment dans le cadre de la stratégie de dépenses du gouvernement, de
la mise en oeuvre de notre stratégie de dépenses.
Alors, cette loi, elle vise d'abord à
assurer un dénombrement fréquent et régulier des effectifs de l'État, par
grandes catégories d'emploi et pour l'ensemble de l'État, hein? Ce n'est pas
seulement la fonction publique, c'est l'ensemble de l'État, incluant, bien
entendu, les réseaux publics et donc notamment les grands réseaux de
l'éducation et de la santé. Mais, en même temps, cette loi, elle nous permet
aussi d'exercer un meilleur contrôle sur l'évolution des effectifs, et nous
sommes actuellement en période de contrôle des effectifs. Nous sommes
actuellement, en vertu d'une disposition de cette loi… on a activé une des
dispositions de cette loi pour exercer un contrôle sur les effectifs pendant
l'année 2015‑2016, donc jusqu'au retour à l'équilibre budgétaire, pour
l'ensemble des réseaux et de la fonction publique.
On a donc deux notions importantes :
le dénombrement et le contrôle. Ce sont les deux univers qui sont couverts par
cette loi. Alors, c'est ce qu'on est en train de faire, donc, d'exercer ce
contrôle, et on a commencé à recevoir les informations sur une base mensuelle.
Je suis donc heureux aujourd'hui de vous présenter le premier portrait relié au
dénombrement des effectifs de l'appareil gouvernemental, soit celui de l'année
budgétaire 2014‑2015. Alors, on ne pourra plus dire désormais que nous ne
connaissons pas la taille des effectifs de l'État. C'était le cas avant. Bien,
en tout cas, on ne la connaissait pas aussi précisément qu'on la connaît
aujourd'hui. Ce que je vous annonce aujourd'hui, c'est une première. C'est une
première, ça n'existait pas auparavant.
Évidemment, recueillir un portrait aussi
détaillé des effectifs dans l'appareil gouvernemental constituait un défi de
taille, et la première question qui se posait, c'était d'établir une unité de
mesure qui soit fiable et qui soit comparable à l'intérieur de toutes les
composantes du secteur public. Et c'est dans ce contexte qu'on a choisi, pour
mesurer... et on a demandé de nous transmettre l'information sur la quantité
d'heures rémunérées. Les heures rémunérées, c'est l'unité de mesure qui est
utilisée pour effectuer ce relevé des effectifs de l'État. Donc, les heures
rémunérées, cette information a été recueillie auprès des ministères, des organismes
et des réseaux publics ainsi que des sociétés d'État.
Maintenant, si je vous parlais de millions
d'heures rémunérées, vous aurez peut-être légitimement un peu de difficulté à
voir ce que ça signifie très concrètement. Alors, on a ramené ces millions d'heures
rémunérées, on les a ramenées en équivalents temps complet, une mesure avec
laquelle on est beaucoup plus familiers. Alors, la normalisation, elle a été
faite sur la base d'une semaine de travail de 35 heures. Donc, en
travaillant 35 heures-semaine, ça nous donne un certain nombre de... une
quantité d'heures sur une année complète, si on veut mesurer sur une année
complète; sur un trimestre complet, si on veut mesurer sur un trimestre
complet. Ça nous permet donc de traduire les heures rémunérées en équivalents
temps complet.
Ainsi, on peut maintenant dire qu'au cours
de l'année financière 2014‑2015 l'État québécois comptait 494 528 équivalents
temps complet, donc près de 500 000, mais pas tout à fait
500 000 équivalents temps complet. Je répète le chiffre :
494 528. Ce sont des équivalents temps complet, puis, vous le savez, dans
le secteur public, il y a des occasionnels, il y a des réguliers, il y a des
gens qui travaillent à temps partiel, il y a des gens qui travaillent à temps
complet. Donc, la réalité peut varier d'une personne à l'autre.
On aura éventuellement la capacité de vous
transmettre des données aussi sur le nombre de personnes de façon continue,
mais je peux vous donner aujourd'hui le chiffre au 31 mars 2015. Alors, au
31 mars 2015, l'État employait 591 823 personnes. Il y avait
591 823 salariés dans l'ensemble du secteur public. Cette dernière
donnée, donc, elle deviendra accessible sur une base plus régulière également
au cours des prochains mois, et ça va être possible aussi de suivre cette
donnée au même titre que l'évolution des ETC qu'on est déjà capable de suivre
pour chaque... en fait, pour chaque mois, mais, pour fins d'agrégation, qu'on
vous transmettra publiquement à chaque trimestre.
Maintenant, ça va vous intéresser de savoir
qu'est-ce qui se passe non seulement du côté du dénombrement, mais du côté du
contrôle. Alors, en ce qui concerne le contrôle, qui est important, évidemment,
parce que, dans notre stratégie de retour à l'équilibre budgétaire, on a établi
une cible de croissance des effectifs au total égal à zéro pour l'année en
cours par rapport à l'année précédente. Alors, pour le premier trimestre de
l'année 2015, l'unité de référence était le premier trimestre de l'année 2014,
et il fallait viser une croissance zéro des effectifs au premier trimestre de
2015 par rapport au premier trimestre de 2014, la base comparable, d'accord?
Alors, l'analyse des données sur une base
trimestrielle, soit entre le 1er janvier et le 31 mars 2015,
démontre une diminution globale des effectifs de l'ordre de 486 ETC dans les
organismes publics par rapport à la même période l'année précédente, et donc on
n'a pas eu de hausse du niveau de nos effectifs, on a eu une baisse du niveau
de nos effectifs. Elle s'explique comment, cette baisse? Pour le premier
trimestre de 2015, on a observé une hausse dans les réseaux de la Santé et de l'Éducation.
Cette hausse est de 136 ETC dans les réseaux de la Santé et de l'Éducation et
les organismes dont le personnel n'est pas assujetti à la Loi de la fonction
publique, mais ça a été compensé par une baisse de 622 ETC des ministères et
organismes publics dont le personnel est assujetti à cette loi. Donc, très
légère augmentation dans les réseaux, plus 136, et diminution de 622 dans la fonction
publique, pour qu'au total il y ait eu, donc, cette diminution de 486 ETC au
premier trimestre de 2015 par rapport au trimestre correspondant de l'année
2014.
On peut donc dire que le gel des
effectifs, de manière globale, pour la période du 1er janvier au
31 mars 2015, a été respecté. Ces chiffres démontrent donc que, grâce
à nos décisions, aux décisions gouvernementales, nous avons réussi à donner un
sérieux coup de barre et que nous avons inversé la tendance. Le gouvernement a
donc repris le contrôle de la situation. Bien que nous n'avions pas les données
sur une base heures rémunérées, on avait d'autres instruments de mesure qui
nous permettaient de savoir qu'au cours des dernières années le nombre d'ETC
dans l'ensemble du secteur public progressait de 6 250 par année, et donc
de passer d'une augmentation annuelle de 6 250 à l'absence de croissance,
voire même une diminution comme celle dont je viens de vous parler, ça
constitue tout un renversement de tendance qui montre que l'outil dont on s'est
dotés fonctionne et le sérieux des politiques de redressement financier du
gouvernement également est démontré.
Alors, on peut dire donc que… et je le dis
aux Québécois, aux Québécoises aujourd'hui que le gouvernement a livré la marchandise
qu'il avait annoncée. Bien entendu, nous l'avons livrée pour le premier
trimestre de l'année 2015, mais il faut maintenir le cap, il faut garder le
cap, il faut maintenir les efforts. Ce qu'il est important de retenir
aujourd'hui, c'est qu'au moins, maintenant, on a entre les mains un outil
important de gestion des effectifs de l'État que nous n'avions pas auparavant,
et cet outil, on l'a grâce à cette loi qui a été adoptée à la fin de l'année
2014 sous l'initiative du gouvernement. Et désormais, donc, on a un outil
supplémentaire pour gérer notre État québécois de façon beaucoup plus moderne
que ce qu'on était capable de faire auparavant. Alors, je vous remercie
beaucoup puis je suis disponible pour vos questions.
La Modératrice
:
Tommy Chouinard.
M. Chouinard (Tommy)
:
Tout d'abord, une précision. Est-ce que compte tenu du fait qu'au premier
trimestre 2015, ce trimestre, donc, il y a une baisse de 622 ETC dans la
fonction publique, vous estimez être en mesure de respecter votre engagement
pris à la fin de l'année dernière de réduire de 1 150 postes le nombre de
postes dans la fonction publique?
M. Coiteux : Oui. La tendance
dénote qu'on est tout à fait dans nos cibles, que ça va dans la bonne
direction. Ça, c'est la donnée sur la base des heures rémunérées ramenées en
ETC par une normalisation qui est commune à l'ensemble des secteurs. Mais,
selon nos mesures plus traditionnelles dans le secteur de la fonction publique,
où on a une information plus rapide, plus juste et où on établit des cibles
également, on a un contrôle immédiat, l'année 2014‑2015, déjà, s'est traduite
par une diminution de 1,8 %.
On vise une réduction globale de 2 %.
Vous savez qu'on demande des efforts supplémentaires pour se constituer une
marge de manoeuvre correspondant à 1 % de la taille de la fonction
publique pour la réallouer là où les besoins sont importants parce qu'on ne
vise pas une diminution de 2 % partout. On veut réallouer les ressources
là où les besoins sont les plus importants, là où les priorités sont claires et
établies.
M. Chouinard (Tommy)
: Mais
en nombre de postes, là, on en est où sur les 1 150?
M. Coiteux : Bien, on
progresse bien puisqu'on a... on est proches de la réduction de 2 %. On a
établi des cibles pour l'année. Les ministères et organismes qui respectent
leurs cibles sont suivis. Comme on fait le suivi budgétaire, on fait le suivi
des effectifs.
Les ministères et les organismes qui ne
respectaient pas leurs cibles ont dû nous présenter un plan de redressement de
la situation. Il y a déjà des plans de redressement qui ont été déposés et
approuvés au Conseil du trésor au cours des dernières semaines, et également là
on va faire le suivi pour s'assurer que tous atteignent leurs cibles au cours
de l'année.
M. Chouinard (Tommy)
: Maintenant,
deuxième chose, vous aviez dit, lors du dépôt du projet de loi sur le contrôle
des effectifs, si ma mémoire est bonne, que, pour les réseaux de la santé puis
de l'éducation, c'étaient des cas à part, c'est-à-dire qu'il fallait en quelque
sorte protéger, là, les services à la population, donc il ne fallait pas
toucher ça.
Or, il appert qu'avec les compressions
puis les règles budgétaires qui sont présentées, qui prévoient des clauses sur
le contrôle des effectifs qui découle de la loi, il va y avoir 250 postes d'orthopédagogues,
orthophonistes, bon, l'éducation spécialisée, donc des postes quand même… des
gens qui donnent des services aux élèves, qui vont perdre leur… que c'est des
gens à contrat, le plus souvent, donc qui vont tout simplement quitter le
réseau.
Au fond, reconnaissez-vous que ce contrôle
des effectifs là peut mener à une réduction des services à la population?
M. Coiteux : Je vous
rappellerais deux choses. La première, c'est qu'il y a eu une hausse dans les
réseaux. Il n'y a pas eu une diminution des effectifs, mesurée au premier
trimestre de 2015, par rapport au premier trimestre de 2014, dans les réseaux.
Il y a eu une augmentation dans les réseaux.
La raison pour laquelle il y a une baisse
globale, c'est parce qu'il y a une diminution plus forte dans la fonction
publique que la hausse observée dans les réseaux. Lorsqu'on regarde, de manière
plus détaillée, là où est la hausse dans les réseaux, on note que la hausse est
exactement là où on s'attendait à ce qu'elle se fasse et là où elle doit se
faire, notamment du côté des enseignants. Il y a une hausse du nombre
d'enseignants. On respecte les conventions collectives, on respecte les ratios
maître-élèves. Lorsqu'on ouvre une école…
M. Chouinard (Tommy)
:
…donc on n'a pas le choix.
M. Coiteux : Oui, mais ça fait
partie de la loi. La loi dit nommément qu'on respecte les conventions
collectives, c'est bien entendu. On respecte les conventions collectives et,
quand on ouvre une école aussi, on met des enseignants dans les écoles. Alors,
ça, ça n'arrête pas. Compte tenu de ça, compte tenu des besoins dans les
réseaux, il faut qu'on fasse des efforts plus grands dans la fonction publique
ou en revoyant nos manières de faire, en changeant nos priorités.
M. Chouinard (Tommy)
:
…dans les réseaux aussi, là, clairement.
M. Coiteux : Oui, bien sûr.
Mais je vous donne un exemple de la santé, par le biais de la disparition des
agences régionales de la santé. Ce sont des postes de cadres qui sont abolis,
ce ne sont pas des postes…
M. Chouinard (Tommy)
:
Moi, je pose… Je vous interromps, mais c'est simplement… c'est sur le réseau de
l'éducation puis la décision de commissions scolaires, dans leurs plans
d'effectifs qui sont adoptés, d'abolir des postes, donc des gens qui étaient à
contrat, là. On s'entend que c'est plus facile de couper des gens qui sont à
contrat que des enseignants puisqu'il y a des ratios à respecter. Puis là on
coupe donc des orthophonistes, orthopédagogues, donc des gens, là… Ce n'est pas
des cadres. Là, est-ce que, vous, vous dites que c'est des bonnes décisions,
ça?
M. Coiteux : J'aimerais dire
plusieurs choses là-dessus, mais d'abord ce ne sont pas toutes les commissions
scolaires qui prennent les mêmes décisions, qui font les mêmes choix, hein? Ce
ne sont pas toutes les commissions scolaires qui font les mêmes choix. Ça,
c'est la première des choses. Ensuite, mon collègue François Blais est en
dialogue constant, en discussion constante avec l'ensemble des intervenants du
réseau pour s'assurer que les meilleurs choix seront faits.
M. Chouinard (Tommy)
:
…choix, là?
M. Coiteux : Pour s'assurer
que les meilleurs choix seront faits, et j'insiste sur le fait que toutes les
commissions scolaires ne font pas les mêmes choix.
M. Chouinard (Tommy)
:
…pour vous de couper dans ces postes-là?
M. Coiteux : Je ne vais pas me
prononcer sur les choix d'une commission scolaire particulière. Ce que je dis,
c'est qu'il y a un ministre de l'Éducation qui travaille avec les commissions
scolaires, notamment, pour s'assurer que les meilleurs choix soient faits. Il y
a des commissions scolaires qui sont plus performantes que d'autres également. Il
y a des commissions scolaires qui gèrent mieux leurs affaires que d'autres, et
ça, je pense que ça a été reconnu largement. Et il y a des commissions
scolaires, donc, qui ont des efforts de gestion générale, à tous les niveaux,
plus sérieux que d'autres à mettre en action. Ça, c'est une donnée
fondamentale, on ne peut pas en faire abstraction.
Maintenant, dans cela comme dans d'autres
choses, c'est que — puis je l'ai déjà dit dans un autre contexte — on
a des difficultés budgétaires majeures au Québec, puis ça ne sert à rien de se
mettre la tête dans le sable puis dire que le problème n'existe pas, là. Le
problème, il existe. Le problème, il se chiffre en plusieurs milliards de
dollars. Il faut faire des efforts dans plusieurs sphères d'intervention de
l'État.
Les budgets de l'éducation, ils ne sont
pas en réduction, ils sont en légère augmentation. On a déjà vécu une période où
un gouvernement avait décidé d'équilibrer le budget par des coupes drastiques
dans les budgets de l'éducation et de la santé en faisant partir
15 000 personnes en trois mois. Ce n'est pas la stratégie du
gouvernement. La stratégie du gouvernement, elle repose sur la révision des programmes
et des façons de faire. Elle repose sur des fusions d'organismes et elle repose
sur une gestion responsable des effectifs et de la rémunération. Tous ces
efforts-là…
M. Chouinard (Tommy)
:
…monopoliser la conférence de presse, mais je vais…
M. Coiteux : Tous ces
efforts-là concourent à atteindre l'objectif, mais demandent des efforts à
chacun.
M. Chouinard (Tommy)
: J'ai
bien compris. Je comprends très bien, mais je ne veux pas monopoliser la
conférence de presse puis je vais terminer là-dessus, mais je veux bien
comprendre. Je veux savoir si ces coupes de postes là, ça correspond à la
volonté exprimée par le gouvernement de protéger les services à la population.
C'est tout ce que je demande. Je veux juste vérifier si…
M. Coiteux : Le gouvernement
ne vise pas une réduction des effectifs dans les réseaux. Le gouvernement ne
vise pas une réduction des effectifs dans le réseau de l'éducation. Le
gouvernement s'attend même à des hausses dans les réseaux de l'éducation et de
la santé. Le gouvernement, ce qu'il cherche à obtenir, c'est une croissance
zéro des effectifs dans l'ensemble de l'appareil public, et le gouvernement
exerce davantage de contrôle dans sa cour immédiate que sont les ministères et
les organismes.
La Modératrice
: Hugo
Lavallée.
M. Lavallée (Hugo)
:
Bonjour, M. Coiteux. Maintenant que vous avez en main cet outil de
dénombrement des employés, quelle est la vision que vous avez au-delà de
l'atteinte du déficit zéro? Parce que, là, l'objectif est un gel des effectifs
jusqu'à ce que cet objectif-là soit atteint. Par contre, vous avez déjà dit
publiquement : Le pourcentage de dépenses publiques par rapport au PIB du
Québec est très important, a connu une hausse depuis plusieurs années, même
plusieurs décennies; il faut que le ratio de dépenses publiques par rapport au
PIB retrouve un niveau plus stable, plus bas aussi.
Dans ce contexte-là, avec cet outil-là en
main, quelle va être, donc, votre vision pour la croissance ou l'absence de
croissance d'effectifs au-delà du retour à l'équilibre budgétaire?
M. Coiteux : Bon, notre plan budgétaire,
ce n'est pas seulement l'atteinte de l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, c'est
son maintien par la suite, et donc on ne peut pas se permettre une croissance
des dépenses supérieure à la croissance de nos revenus. Je pense, c'est la base
de tout, là. On doit vivre une période pendant laquelle la croissance de nos
dépenses doit être inférieure à la croissance de nos revenus, c'est la période
de retour à l'équilibre budgétaire. C'est ce qu'on vit actuellement, et après,
bien, il faut qu'on s'assure que les dépenses n'augmentent pas plus rapidement
que nos revenus. C'est important, c'est fondamental, parce que, pendant une
longue période, on a fait l'inverse et, parce qu'on a fait l'inverse, on a créé
la monstrueuse dette qui est la nôtre aujourd'hui et qui consomme 10,5 milliards
d'intérêts par année qui ne vont pas dans les écoles, qui ne vont pas dans le
réseau de la santé. Alors, ça, c'est le grand topo.
Évidemment, les dépenses de rémunération,
ça va rester un poste important, et donc, dans la stratégie du contrôle des
dépenses, il faut s'assurer que les dépenses de rémunération ne tirent pas à la
hausse, dans le temps, les dépenses au-delà de la croissance de nos revenus. Il
y a deux façons de faire ça. Il y a d'éviter que les coûts de la main-d'oeuvre
dans le secteur public explosent, et donc ça veut dire qu'il faut qu'on négocie
avec les employés du secteur public une convention collective qui repose sur la
capacité réelle de payer les Québécois. Mais le deuxième instrument,
évidemment, c'est de s'assurer qu'il n'y ait pas une explosion des effectifs
qui viendrait mettre à néant les efforts qu'on fait dans nos négociations avec
les employés du secteur public.
Alors, il faut être responsables des deux
façons : dans la gestion des effectifs et dans la gestion des coûts via,
évidemment, notamment les conventions collectives. Alors, on fait des
propositions, on négocie sur cette base-là, on négocie de bonne foi et on
négocie sur la base du possible et des grands paramètres : le retour et le
maintien de l'équilibre budgétaire; et surtout, en même temps, de ne pas
refaire les erreurs du passé puis dire : Bien, on va signer quelque chose
qu'on n'est pas capable de payer puis on va augmenter les impôts des Québécois pour
payer la facture. On ne le fera plus, ça. On ne veut plus la faire, cette
chose-là.
Donc, on va rester dans un mode gestion
responsable, et là on a un outil qui nous permet de suivre en temps réel si on
a des problèmes particuliers du côté des effectifs, et, si on devait avoir des
problèmes particuliers, on va agir et on va agir en temps opportun parce qu'on
aura l'information en temps opportun.
M. Lavallée (Hugo)
: Je
comprends que vous vouliez faire en sorte que les conventions collectives ne
vous obligent pas à devoir engranger des dépenses qui seraient déraisonnables,
mais en ce qui concerne l'effectif lui-même, sa taille, parce que c'est de ça
dont il s'agit dans cette documentation, est-ce qu'il y aura des objectifs
prédéterminés, au-delà du retour à l'équilibre budgétaire, de croissance, par
exemple, qui sera limitée, du nombre d'employés additionnels qui pourront être
embauchés, au-delà de la question des conventions collectives et des conditions
salariales?
M. Coiteux : Bien, on est en
période de contrôle jusqu'à la fin de l'année financière. La loi nous permet,
si le besoin se fait sentir plus tard, à un autre moment, d'exercer une
nouvelle période de contrôle. Donc, l'outil existe. Mais on ne sera pas
toujours en période de contrôle sur un taux de croissance de zéro, là. Ça ne
sera pas nécessairement toujours comme ça. Mais on a la possibilité d'exercer
des périodes de contrôle, c'est ce que la loi nous permet de faire, mais, pour
l'instant, le contrôle s'applique pour cette année financière seulement.
M. Lavallée (Hugo)
:
Et, par rapport à la question des heures supplémentaires... parce qu'on a vu
que ça a été un problème, notamment dans le réseau de la santé, dans certaines
sociétés d'État aussi, par ailleurs, là, mais parlons du réseau de la santé,
notamment avec le personnel infirmier. Est-ce que les outils dont vous vous
êtes dotés permettent effectivement de resserrer le contrôle sur les heures
supplémentaires? Parce que, là, les heures rémunérées, si je comprends bien, ont
été rapportées à 35 heures par semaine pour tout le monde, là. Donc, ça ne nous
donne pas un portrait plus précis de cette question-là.
M. Coiteux : ...les heures, y
compris les heures supplémentaires qui ont été prises en compte dans le portrait
que vous avez entre les mains. Donc, c'est les heures totales, incluant les
heures supplémentaires. La division par un 35 heures-semaine, c'est un outil de
normalisation. Ça nous permet de comparer tout le monde. Il y a des endroits où
il y a moins d'heures supplémentaires, des endroits où il y a plus d'heures
supplémentaires, mais ce sont toutes les heures qui sont considérées dans ce
portrait, toutes les heures.
M. Lavallée (Hugo)
:
Mais est-ce que vous êtes en mesure de savoir dans quels secteurs il y a des
heures supplémentaires qui, par exemple, seraient déraisonnables, de les
contrôler, de les évaluer? Parce que ce n'est pas... ça ne figure pas...
M. Coiteux : Non. On n'est pas
au stade de qualifier de déraisonnable ou de pas déraisonnable. On est au stade
de faire le portrait, on est au stade de regarder si ça fonctionne, le contrôle
des effectifs. Les premières données qui nous parviennent montrent que ça
fonctionne. C'est très encourageant. C'est très encourageant, il y a un
renversement très important de la tendance. Il n'y a pas de croissance des
effectifs dans le secteur public, à l'heure actuelle, mesurée par les heures
rémunérées, incluant les heures supplémentaires.
Mme Prince (Véronique)
:
Je vais juste me permettre une question rapidement. Je me demandais... Là, vous
avez maintenant un outil de gestion des effectifs, mais à quel point cet
outil-là peut également servir aux négociations, sachant qu'eux peuvent dire :
On n'est pas assez nombreux; oui, vous l'êtes suffisamment, voici nos grilles?
C'est quelque chose qui peut être utilisé par M. Charlebois?
M. Coiteux : Bien, des
discussions... Dans les réseaux, on a des négociations, comme vous le savez,
qui se font à plusieurs tables. Il y a des tables sectorielles. Il y a des
tables sectorielles en santé, il y a des tables sectorielles en éducation, il y
a des tables sectorielles dans la fonction publique. Ces sujets-là sont abordés
pas seulement par le gouvernement, mais par la partie syndicale également qui
s'intéresse à ces questions-là. Donc, il y a des échanges de points de vue qui
se font aux tables de négociation sur cette question-là.
Mais ultimement, le gouvernement doit
administrer le bien public, doit se comporter comme un gestionnaire et a des
décisions à prendre sur le nombre de personnes qu'il veut embaucher. Ce qui ne
veut pas dire qu'on ne peut pas discuter de grandes problématiques de dotation,
de grandes problématiques de main-d'oeuvre avec nos partenaires syndicaux aux
tables de négociation. On le fait, on en parle de ces questions-là.
Mme Prince (Véronique)
:
Puis aussi est-ce que vous avez un outil qui permet de voir l'impact que ça
peut avoir, une croissance zéro, au niveau de la performance, au niveau,
justement, des services rendus, comme disait mon collègue?
M. Coiteux : Bien, ça change
les pratiques, bien entendu. Dans le secteur de la santé, on est en train de
réorganiser le réseau pour qu'il soit capable non pas de donner moins de soins,
mais, au contraire, donner plus de soins à la population. Améliorer l'accès, ça
s'appelle améliorer la productivité du réseau de la santé et c'est ça qu'on est
en train de faire dans le réseau de la santé. Donc, on ne donne pas des cibles
qui sont indépendantes des grandes réformes qu'on est en train d'accomplir.
Dans la fonction publique, c'est la même
chose. En révision des programmes et en révision des façons de faire, on est
capable de vivre avec des effectifs qui sont moindres que ce qu'ils auraient
été si on n'avait rien fait. Le fait qu'on se réorganise, ça nous permet de
faire en sorte que, par l'attrition notamment, là, surtout, on est capable de
vivre, dans certains secteurs, pas dans tous les secteurs, avec moins de
personnel, tout en livrant totalement les services auxquels la population
s'attend.
La Modératrice
:
Jean-Marc Salvet.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Oui. Bonjour, M. Coiteux. Tout de même, une moyenne de croissance de 6 250
ETC au cours des dernières années, est-ce que ces hausses ne reflétaient pas tout
de même, comment dire, des besoins qui existaient? Pour embaucher autant que
ça, ça devait refléter des besoins. J'imagine qu'on n'embauchait pas comme ça
pour le plaisir.
M. Coiteux : Bien, dans les organisations
modernes, lorsque les besoins croissent, il y a différentes façons de répondre
à ces besoins, et une façon très importante puis celle qui est gagnante à long
terme, puis elle est vraie pour le secteur public comme elle est vraie pour le
secteur privé, comme elle est vraie pour toutes les sociétés du monde, par
ailleurs, c'est l'innovation et la productivité.
Alors, c'est certain que, lorsqu'on exerce
une décision gouvernementale de faire attention à la croissance de nos
effectifs, en parallèle on demande, à travers les réformes que nous faisons, à
notre secteur public d'innover et d'être plus productif. On fait, dans notre
secteur public, comme d'autres secteurs publics ailleurs dans le monde ont fait
par ailleurs avec succès, on fait, dans notre secteur public, ce qui s'est fait
aussi dans les grandes organisations. On améliore notre productivité pour
livrer les services, pas seulement en ajoutant des effectifs, mais en faisant
mieux les choses.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Toujours sur le dénombrement, pardon, est-ce qu'on peut avoir les chiffres pour
rapporter les équivalences? Là, par exemple, il y a une diminution globale de
486, ce qui veut dire une hausse de 136 dans la fonction publique, et une
baisse de 622... dans les ministères et organismes, pardon, je... Est-ce qu'on
peut avoir les... combien d'équivalents temps plein sont sous la loi des
employés assujettis à la fonction publique, donc?
M. Coiteux : Bien, dans cet
univers-là, il y a eu une baisse de 622.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Sur un total de combien, pardon?
M. Coiteux : Ah! bien, on l'a.
On pourra vous fournir tous les détails…
M. Salvet (Jean-Marc)
:
…dans ce qui est assujetti à la Loi sur la fonction publique, il y a combien de
gens? Et dans les réseaux et autres, il y a combien de gens?
M. Coiteux : Oui. Bien là, sur
cette base-là, sur la base heures rémunérées, on les convertit en ETC, on peut
vous donner les chiffres absolus, il n'y a aucun problème. D'ailleurs, vous
l'avez dans le portrait. Vous l'avez, dans le portrait, pour l'ensemble de
l'année 2014‑2015, mais on a les données trimestrielles aussi qu'on peut vous
fournir.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Les négociations collectives avec les syndicats, comment se déroulent-elles actuellement?
Comment qualifieriez-vous leur déroulement actuel?
M. Coiteux : Bien, écoutez,
ceux qui pensent qu'il n'y a aucune possibilité de progresser doivent constater
qu'on continue de se parler, que ça fonctionne de ce point de vue là. Il y a
des échanges qui sont intéressants aux tables de négociation. Il n'y a personne
qui actuellement songe à quitter les tables de négociation. Donc, on avance. On
avance. Il faut avoir un peu de patience dans ce domaine-là, hein? Il faut
avoir un petit peu de patience, mais on avance.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Vous ne vous êtes sans doute pas fixé d'échéancier encore, là, ou vous en avez peut-être
un en tête. Mais vous souhaiteriez que ce soit réglé pour quand? Outre la
formule du «le plus rapidement possible», est-ce que ça doit être réglé pour
d'ici la fin de l'année?
M. Coiteux : On ne s'est pas
donné de date. On ne s'est pas donné de date, mais on souhaite, comme vous le
dites si bien, y arriver le plus rapidement possible. Mais ce qu'on veut ultimement,
c'est une entente qui soit dans l'intérêt de l'ensemble des Québécois, et, dans
cette entente qui soit dans l'intérêt de l'ensemble des Québécois, il faut que
ça soit une entente qui soit compatible avec le maintien de l'équilibre
budgétaire, compatible avec notre objectif de ne pas hausser les impôts des Québécois,
au contraire, qui soit compatible avec notre objectif de réduction des impôts
des Québécois parce qu'on a l'intention d'éliminer la taxe santé au cours des
prochaines années.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Décréter est-il inenvisageable à l'heure actuelle? Un décret, éventuellement, est-ce
que c'est envisageable, inenvisageable?
M. Coiteux : Un décret pour...
M. Salvet (Jean-Marc)
:
…imposer les...
M. Coiteux : Non. Nous, on est
en mode négociation pour en arriver à une entente négociée. C'est dans cet
esprit-là qu'on est aux tables de négociation. On veut en arriver à une entente
qui soit dans l'intérêt de tous.
La Modératrice
: Davide
Gentile.
M. Gentile (Davide) : Donc,
il est hors de question pour vous de décréter quoi que ce soit avant l'été ou
au début de l'automne?
M. Coiteux : On est en
négociation dans l'idée que nous allons arriver à une entente avec nos
partenaires syndicaux. Je suis convaincu qu'ils sont là dans le même esprit que
nous.
M. Gentile (Davide) :
...écarté avant l'été?
M. Coiteux : On travaille
ensemble pour en arriver à une entente négociée. Sinon, on ne serait pas là. On
est là parce qu'on veut une entente négociée, on est convaincus qu'il y a des
façons de travailler ensemble pour en arriver à une entente négociée. C'est
dans cet esprit qu'on est là.
M. Gentile (Davide) : Donc, vous
écartez pour l'instant... vous n'êtes pas dans cet état d'esprit là avant le
1er juillet, là?
M. Coiteux : Je n'y pense même
pas.
M. Gentile (Davide) : Et pour
le début de l‘automne?
M. Coiteux : Je n'y pense pas.
M. Gentile (Davide) : Vous
n'y pensez pas.
M. Coiteux : Je ne pense qu'à
une chose, c'est en arriver à une entente négociée. C'est mon souhait et c'est
dans cet esprit qu'on travaille.
M. Gentile (Davide) : Dans le
réseau de la santé, la FIQ a reçu ses offres sectorielles. Quand on les lit, on
comprend qu'on souhaite avoir plus de flexibilité, entre autres, par rapport au
temps supplémentaire. Est-ce que ça, pour vous, c'est important d'obtenir des
concessions là-dessus? Je sais que vous n'êtes pas dans le fin détail, là, de
chacune des tables, mais quand même, est-ce que c'est important d'avoir des
concessions des syndicats pour limiter les coûts en temps supplémentaire, entre
autres en santé, ou si c'est un gros facteur?
M. Coiteux : Regardez, le
cadre financier, il est très clair. Le cadre financier, il est très clair. Les
enjeux que nous avons mis sur la table, les enjeux que la partie syndicale a
mis sur la table aussi, on doit les discuter. On doit en arriver à une entente
négociée à l'intérieur du cadre financier que nous avons mis sur la table. On
ne peut pas compromettre l'équilibre budgétaire, et il n'est pas question de
maintenir l'équilibre budgétaire en augmentant les impôts parce qu'on aura
négocié quelque chose qui est incompatible avec les impôts que les Québécois
paient aujourd'hui, là.
Alors, ça, ces paramètres-là, ils restent…
ils sont fondamentaux. À l'intérieur de ce cadre-là, il y a énormément de
choses qui peuvent être faites, et ça dépend, bien sûr… puis je présume de
cette volonté, de part et d'autre, de trouver un bon terrain d'entente.
M. Gentile (Davide) : Est-ce
que ces négociations-là sont importantes, à votre avis, pour que M. Barrette
réussisse son virage en santé?
M. Coiteux : Ce que fait M.
Barrette, c'est… Ce que fait mon collègue de la Santé, c'est une réforme
profonde de notre manière de gérer le système de santé dans le but d'augmenter
l'accès, même, je dirais, de faire en sorte que tous les Québécois vont accéder
à un médecin, que les Québécois auront les soins auxquels ils s'attendent. On
doit le faire à l'intérieur aussi des moyens financiers qu'on est capable de
consacrer au secteur de la santé, qui sont déjà colossaux, qui sont déjà très
importants.
Pour y arriver, on a besoin de changer nos
manières de faire, et mon collègue de la Santé a montré à quel point il est
capable de changer les manières de faire, et c'est ce qu'on est en train de
faire. Et il aborde, dans ce domaine comme dans d'autres et en particulier aux
tables de négociation, il aborde cette négociation dans ce même esprit
d'améliorer l'accès au réseau de la santé pour l'ensemble des Québécois.
M. Gentile (Davide) : Mais le
projet de loi n° 10, à votre avis, peut être implanté même si les
négociations traînaient, en santé, par exemple?
M. Coiteux : Le projet de loi
n° 10 s'applique indépendamment des négociations qui sont en cours.
M. Gentile (Davide) :
Indépendamment.
M. Coiteux : Indépendamment.
La Modératrice
: Régys
Caron.
M. Caron (Régys)
: Oui.
Bonjour, M. Coiteux. Bonjour aux gens qui vous accompagnent. 486 ETC en moins,
au premier trimestre 2015, ça veut dire une économie de combien, ça, M.
Coiteux?
M. Coiteux : On va la
multiplier par un salaire moyen, là, mais… non, je n'ai pas…
M. Caron (Régys)
:
...pas figuré ça.
M. Coiteux : On va vous donner
un chiffre là-dessus. Regardez, à l'époque où il y avait une croissance… Quand
on était à 6 000 par année, on était à un peu plus de 1 % de
croissance, 1,3 % de croissance des effectifs. Alors, 1 %, c'était à
peu près 380 millions, ça vous donne une idée. Donc, 1,3 %, on avait
une croissance de la rémunération, là, juste par croissance des effectifs, qui
était supérieure à 400 millions. Alors, ça vous donne une idée. On pourra
vous fournir des chiffres plus détaillés, là, pour répondre à cette question.
M. Caron (Régys)
: Mais
ce sont des départs à la retraite, ça, ou… De quelle nature est cette
diminution?
M. Coiteux : C'est un élément
important, les départs à la retraite. Vous savez, avant, on était… Ce n'est pas
le seul, mais c'est un élément important.
Il y a eu une époque où, dans la fonction
publique, il y avait la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur
deux. On avait cette règle-là. Le problème avec cette règle-là, c'est que ce
n'était pas dans tous les ministères que les gens partaient à la retraite au
même rythme. Donc, il y avait des asymétries qui se créaient et même, je
dirais, des comportements stratégiques à un moment donné. Les gens, peut-être,
ne souhaitaient pas avoir des… embaucher des gens d'expérience qui auraient
apporté beaucoup à leur organisation, alors qu'ils étaient sur le point de
prendre leur retraite, puisqu'ils auraient perdu des effectifs par la suite en
vertu de l'application mécanique de cette règle.
Alors, on a changé cette règle. Aujourd'hui,
on applique des cibles qui vont, ultimement, être différenciées selon les
ministères. Pour l'instant, on a demandé des efforts communs à tout le monde,
mais pour se constituer la marge de manoeuvre avec laquelle on va pourvoir aux
besoins.
Alors, les départs à la retraite, et nos
cibles dans la fonction publique, évidemment, sont l'une des sources
principales des chiffres que vous voyez là, de l'atteinte de notre objectif. Ce
n'est pas le seul, évidemment, parce qu'il peut y avoir aussi des contrats
très, très, très temporaires, et puis quand on a une gestion flexible des
ressources humaines, bien, on peut décider, finalement, qui va être alloué à
quel poste et c'est ce qu'on voit actuellement à l'intérieur des réseaux.
M. Caron (Régys)
: Vos
cibles sont une baisse des effectifs de 2 % dans la fonction publique, un
gel global dans l'ensemble de l'appareil de l'État. Avec un résultat comme ça
au premier trimestre, est-ce que vous avez quelque espoir de répéter ça au
cours des trois trimestres et d'aller au-delà de votre cible?
M. Coiteux : On exerce…
D'abord, le fait d'avoir l'information va nous permettre de prendre des mesures
correctives, si nécessaire. Alors, maintenant, on a établi des cibles, on a
communiqué des cibles au réseau, via les ministres responsables. On a
communiqué nos cibles aux ministères et organismes à l'intérieur de la fonction
publique et on fait le suivi de nos cibles. On fait le suivi. Ça, c'est un
instrument fondamental de suivi. Dans la fonction publique, évidemment, on est
en interaction avec les ministères, les organismes de façon beaucoup plus
étroite. On fait un suivi encore plus étroit que celui-là.
M. Caron (Régys)
: …l'intention
ou l'espoir que ça soit au-delà, là? Parce que, dans le fond, si cette
performance-là se répétait d'ici la fin de l'année, on arriverait à une réduction
globale de près de 1 500 ou peut-être même 2 000.
M. Coiteux : Écoutez, c'est un
résultat qui est encourageant, ce premier résultat. Je vais rester humble, là,
parce qu'on va regarder ce qui va se passer dans les prochains trimestres.
L'information va nous permettre d'agir en temps opportun, si c'est nécessaire,
mais on vise l'objectif de réduction globale de 2 % dans la fonction
publique et de gel dans l'ensemble du secteur public. Tant mieux si c'est parti
de la bonne façon. On va être très attentifs, on prendra les moyens qu'il le
faut, si nécessaire.
M. Caron (Régys)
: Vous
avez évoqué les réseaux, vous dites : On ne veut pas diminuer les
effectifs des réseaux. Avec ce qu'on entend depuis les derniers mois, des gens,
par exemple, dans les centres de jour ou dans des établissements de santé qui
se font dire de porter une couche parce que, bon, les besoins de la cause sont
ainsi, ou encore dans le réseau de l'éducation où les commissions scolaires
disent : On risque de fermer des écoles de village, l'augmentation des
effectifs élèves dans certaines commissions scolaires nous oblige à embaucher
des profs et offrir plus de services, quelle lecture faites-vous de l'évolution
des services, au moment où on se parle, avec ce qu'on a entendu depuis que vous
êtes au pouvoir?
M. Coiteux : Regardez, je
dirais la chose suivante, là : On change beaucoup d'habitudes, en ce
moment, au Québec, mais c'est nécessaire parce que, si on continuait de faire
les choses comme on les faisait avant, bien, cette année on aurait eu… on s'en
irait vers un déficit de 7 milliards, là, si on n'avait pas changé les
habitudes, si on n'avait pas donné un coup de barre. Ça ne serait pas vers
l'équilibre budgétaire qu'on s'en irait, on s'en irait vers un déficit de
7 milliards si on avait dit oui à toutes les demandes, si on avait donné suite
aux coûts de systèmes, entre guillemets. Qui sont quoi finalement? Qui sont le
résultat de programmes qu'on a conçus sans égard à la capacité de payer des
Québécois. Si la capacité de payer des Québécois nous donne des recettes
fiscales en hausse de 3 % par année puis qu'on se retrouve avec des
programmes dont les coûts augmentent de 5 % à 6 % par année, on n'a
pas le droit de rester les bras croisés puis ne rien faire.
Alors, on est en train de changer les
façons de faire. Puis le secteur de la santé, c'en est un dans lequel on fait
beaucoup de changements, pas pour diminuer les services, pour donner plus de
services.
M. Caron (Régys)
: Est-ce
que ça vous interpelle, M. Coiteux, quand quelqu'un nous dit ici, au Parlement :
On s'est fait dire de porter une couche. Ça vous dit quoi ça? Ce n'est pas une
baisse de services?
M. Coiteux : Bien, je ne sais
pas si cette situation-là, si vous aviez posé la question, il y a un an ou il y
a deux ans, vous auriez peut-être eu des choses qui n'auraient pas été drôles à
entendre non plus, dans le réseau. C'est ce sur quoi on doit travailler. C'est
ces choses-là inacceptables auxquelles on doit remédier. Ce n'est pas juste une
question d'argent, c'est une question de comment on s'organise dans les
réseaux. Et le ministre de la Santé travaille sur ces questions-là.
Ce genre de problèmes là qui surgissent,
ils surgissaient l'an dernier puis ils surgissaient il y a deux ans. Il faut
les corriger. Il faut les corriger, mais ça serait une erreur de croire que c'est
strictement une question d'argent. C'est d'abord et avant tout une façon de
s'organiser. C'est des directives, c'est des façons de fonctionner dans nos
réseaux qui doivent changer. Elles doivent changer pas seulement pour des
raisons financières, elles doivent changer parce qu'il y a des situations
inacceptables, comme celle que vous décrivez, qui existent. On doit les
corriger, mais ce n'est pas parce qu'on va corriger ces choses-là que c'est une
question purement d'argent. On réallouera les sommes aux besoins prioritaires
lorsqu'on aura la marge de manoeuvre pour le faire. Mais, en attendant, on doit
mieux faire les choses, puis ça, ça veut dire d'innover puis d'être plus
productifs dans le réseau public.
M. Caron (Régys)
: …que
l'évolution des services aujourd'hui ne vous satisfait pas?
M. Coiteux : On peut toujours
faire mieux. C'est pour ça qu'on va en politique. On va en politique pour mieux
servir nos citoyens. Alors, on doit améliorer les choses en santé, on doit
améliorer les choses en éducation, on doit améliorer les choses pour faire en
sorte qu'on ait une plus grande croissance économique, qu'on ait plus
d'investissements dans notre économie pour qu'ultimement, nos recettes
fiscales, elles augmentent plus vite qu'elles augmentent aujourd'hui, pas parce
qu'on va puiser dans la poche des contribuables, mais parce qu'on a une
économie plus dynamique.
Pour y arriver, il faut qu'on travaille
tous ensemble, il faut qu'on change nos manières de faire. Si on laissait aller
le déficit, si on laissait aller la dette, on aurait plus d'impôt, on aurait
des entreprises moins compétitives, on aurait moins d'investissements, on
aurait moins de recettes fiscales puis on serait obligés de couper les
services, ultimement. C'est ce qu'on ne veut pas faire. Alors, on fait le
redressement des finances publiques et, pour le faire bien, on fait la révision
des programmes, on fait la révision des organismes et des structures et on gère
mieux nos effectifs.
Puis bientôt, on va avoir l'occasion de
s'en reparler, on va mieux gérer nos projets informatiques puis on aura
d'autres chantiers de rénovation de l'État. Pourquoi? Pour être capable d'avoir
plus de moyens, pour les allouer aux bonnes priorités, pour faire en sorte que
notre population en ait davantage, mais ait une économie capable aussi de lui
en donner davantage. C'est ça, le programme du gouvernement. Est-ce que c'est
facile? Non, ce n'est pas facile, ça demande des changements à tout le monde.
C'est ça qu'on voit actuellement.
Donc, il y a des gens qui trouvent
difficile le changement, et c'est normal. C'est tout à fait normal, mais, collectivement,
on n'a pas le choix. Il faut qu'on réussisse ensemble ces grands changements.
Ce qui est encourageant, c'est qu'on s'en va dans la bonne direction et on va
persister dans cette direction-là parce qu'on est convaincus qu'ultimement
c'est comme ça que la population va mieux vivre puis qu'on va avoir plus de
moyens pour faire face aux grandes priorités.
M. Caron (Régys)
:
…trop généreux en 2010 avec les syndicats?
M. Coiteux : Écoutez, je vais
me baser sur la situation d'aujourd'hui. La situation d'aujourd'hui, c'est que,
lorsqu'on est arrivés, on avait un dérapage très sérieux des finances
publiques. La dernière fois où il y a eu une situation assez dramatique de cet
ordre-là, c'est à la fin des années 90. À l'époque, il y a un gouvernement qui
a pris une stratégie particulière, qui a décidé de précipiter des départs à la
retraite. Il n'y a pas eu d'autres éléments dans la stratégie, ça a été le seul
élément de leur stratégie.
Comme vous avez constaté, nous, on
travaille sur plusieurs chantiers à la fois parce qu'on est convaincus que ça
va être la façon avec laquelle on ne va pas seulement régler le problème de
2015‑2016, mais on va régler le problème des prochaines années, peut-être même
de la prochaine décennie. Mais, pour ça, il faut qu'on travaille fort, puis il
faut qu'on travaille ensemble, et il faut qu'on travaille aussi avec les
syndicats.
La Modératrice
: Est-ce
qu'il y avait d'autres questions? Merci, M. Coiteux, merci aux messieurs qui
vous accompagnent.
M. Coiteux : Merci beaucoup.
(Fin à 12 h 24)