(Quinze heures quarante minutes)
Mme Lamarre : Alors, bonjour. D'abord,
je tiens à exprimer mes plus sincères condoléances aux proches de
M. Dumont, décédé dans une violente volte-face en motoneige il y a
quelques semaines. Je tiens aussi à exprimer toute ma sympathie à tous les gens
qui ont été témoins de ça et qui ont collaboré parce que je pense qu'il y a eu énormément
d'efforts qui ont été déployés par des citoyens pour faire en sorte que la situation
n'ait pas cette fin tragique à laquelle on assiste aujourd'hui.
Nous, la question qu'on se pose dans un
dossier comme celui-là, c'est : Qu'est-ce qui aurait dû être fait? Et
notre constat, c'est que, dans un contexte aussi urgent, eh bien, je pense que
le ministre doit avoir une position qui permet une ouverture aux ambulanciers.
Il doit clarifier en tout cas et prévoir qu'est-ce qui va se passer pour pas
qu'un événement comme celui-là ne se reproduise. C'est un événement tragique,
un événement où il y avait un contexte particulier, et je pense que les gens
ont essayé d'agir de bonne foi, mais de toute évidence, dans l'anticipation de
ce qui doit se passer dans une situation comme celle-là, je pense qu'il faut
trouver d'autres moyens pour ne plus que des gens revivent une situation aussi
pathétique que celle à laquelle ils ont été exposés.
Mme Richer (Jocelyne) : D'autres
moyens, ça veut dire quoi, Mme Lamarre?
Mme Lamarre : Bien, c'est de
prévoir, c'est probablement... je pense que c'est au ministre à les déterminer.
Mais là on a un contexte qui est très particulier où on avait des ambulanciers,
qui ont les compétences pour sauver des vies, qui étaient à très, très courte
distance, à trois kilomètres, qui étaient dans un contexte où leur vie n'était
pas elle-même menacée.
Alors, ils ont respecté une consigne, une
consigne ministérielle, et je pense qu'il faut revoir. Ça semble être une
vieille consigne, une vieille convention, alors je pense qu'il faut revoir,
avoir un peu plus de souplesse, et clairement, le ministre peut trouver
d'autres options s'il le juge à propos, mais certainement, on peut comprendre
le désespoir et l'incompréhension des gens qui... des proches et des
intervenants aussi qui ont essayé d'agir dans ce domaine-là, dans ce
contexte-là, alors qu'il y avait vraiment une situation de vie ou de mort qui
était en jeu.
Mme Dufresne (Julie) : Mais est-ce
que c'est un problème de directive, de formation ou de jugement de la part des
gens?
Mme Lamarre : Bien, écoutez,
je pense que le ministre doit y répondre, mais ça semble être plus une question
de directive à ce moment-ci et je crois que les ambulanciers, en 2016,
devraient avoir une certaine latitude pour être capables de, justement, prendre
des décisions qui sont déterminantes, là, qui font la différence entre la vie
et la mort d'une personne qui est accidentée dans un contexte où leur propre
vie n'est pas en danger.
Mme Dufresne (Julie) : Mais
ça passe par, donc, une consigne ministérielle, ou un projet de loi modifié ou
une loi...
Mme Lamarre : Bien, en fait,
ce qu'on me dit, c'est que ça date d'il y a très longtemps alors il faudrait
voir qu'est-ce qui... dans quel contexte c'est imposé de cette façon-là, ou c'est
enseigné, ou c'est prescrit aux ambulanciers.
Donc, il ne s'agit pas du tout de blâmer
les ambulanciers. Les ambulanciers ont appliqué quelque chose qui leur était
convenu, qui était convenu pour eux, mais je crois qu'il y a lieu, à partir de
cette expérience-là, d'actualiser et de faire en sorte que ça ne se reproduise
plus, là, parce qu'on peut comprendre que c'est totalement inacceptable, là,
pour les familles proches. On se rend compte, même les proches aidants, là, les
gens qui sont allés vraiment intervenir en première ligne, d'attendre des minutes
interminables et des minutes qui font la différence quand quelqu'un est en
hémorragie, là, au niveau de sa survie.
Mme Dufresne (Julie) : Le Dr
Barrette, ce matin, pour revenir sur l'émission qui a été diffusée hier et les
échanges que vous avez eus la semaine dernière, a dit que, pour lui, le dossier
était clos, qu'il avait très hâte à la période de questions demain. Est-ce que
vous jugez que c'est le cas, que le dossier est clos?
Mme Lamarre : Bien, écoutez,
moi, je crois qu'il aurait... J'aurais aimé au moins des excuses. Je crois
qu'il le doit. Il ne peut pas être aussi agressif à mon endroit une journée, et
faire des fausses accusations, et, le lendemain, tout simplement dire :
Ah! finalement, je me suis trompé, c'est la personne la plus intègre que je
connaisse. Ça ne fonctionne pas comme ça.
Alors, quand on porte atteinte à
l'intégrité des gens, je pense qu'il faut y réfléchir beaucoup plus
sérieusement que ça. Donc, j'espère encore avoir des excuses. Je pense que ce
serait la bonne façon pour lui d'indiquer qu'il a clairement l'intention de
changer, qu'il a clairement l'intention, parce que ce n'est pas quelque chose
d'inusité, là, c'est quelque chose qu'il a perpétué pendant deux ans, alors de
prendre quelques secondes pour s'excuser clairement... Je pense qu'aussi, quand
je regarde la réaction des gens, les gens ont été très surpris et très déçus qu'il
ne s'excuse pas.
Mme Richer (Jocelyne) :
Avez-vous l'impression, dans ce dossier-là, que le ministre Barrette et le premier
ministre vous traitent à la légère?
Mme Lamarre : Bien, en tout
cas, je me questionne beaucoup sur la... Quand le premier ministre nous a
clairement dit, en début de session parlementaire, qu'il voulait absolument
avoir, en début de législation, de notre 41e législature, qu'il voulait
que ça se passe autrement, qu'il voulait avoir plus de respect mutuel, et quand
il le répète encore à d'autres moments... je pense que, là, il y a vraiment, vraiment
eu dérive majeure, et il me semble que ce serait la moindre des choses que le premier
ministre fasse finalement... exprime des regrets publics. Puisque son ministre
ne semble pas être capable de le faire, qu'au moins lui le fasse.
Mme Richer (Jocelyne) : M.
Couillard disait même que ses ministres devraient s'abstenir de dire ce que lui
ne dirait pas...
Mme Lamarre : S'abstenir de
dire que?
Mme Richer (Jocelyne) : De
faire des remarques que lui ne ferait pas.
Mme Lamarre : Exactement.
Alors, est-ce qu'on doit conclure du silence du premier ministre qu'il serait d'accord
avec ce que son ministre fait? Il cautionne jusqu'à un certain point. Ça
m'apparaît mériter certainement une intervention publique.
Mme Dufresne (Julie) : Mais,
sans vouloir détourner le débat, il n'en demeure pas moins que votre propre chef
a lui-même employé le mot «tartufe» pour parler du Dr Barrette. Est-ce qu'il
n'y a pas des fautes qui ont été commises de part et d'autre?
Mme Lamarre : Bien, je crois
qu'à un moment donné il y a une notion de densité de répétition. Vous savez,
l'intimidation, le harcèlement, dans la définition, c'est quand c'est
répétitif.
Alors, il y a une différence entre un
incident exceptionnel et une répétition. Et je pense que vous qui êtes souvent
présents, vous êtes en mesure de constater que, dans le cas de M. Barrette à
mon endroit, il y a répétition, il y a une constance, et c'est sa stratégie, et
c'est une stratégie qui essaie de m'intimider, mais qui ne réussit pas. Ceci
étant dit, je pense que la semaine dernière, il est vraiment allé très, très
loin, et là il a porté atteinte à mon intégrité avec de fausses accusations. Alors,
c'est pour ça que je dénonce.
Mme Richer (Jocelyne) : Juste
une dernière question à ce sujet, parce que l'ex-député libéral Gilles Ouimet,
ce midi, à la télé, a dit que le Commissaire à l'éthique devrait intervenir parce
que l'attitude générale du ministre peut laisser croire qu'il a enfreint un
article, l'article 6, alinéa 3°, qui dit que les parlementaires sont tenus de
faire preuve de respect entre eux. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce que
le Commissaire à l'éthique devrait faire enquête?
Mme Lamarre : Bien, moi, je
pense que cet événement-là a été amplement médiatisé et que toutes les
instances qui ont une certaine autorité et qui considèrent que c'est important,
le respect mutuel, pour... pas seulement pour les individus, je vous dirais, personnellement,
ce que j'ai eu à dénoncer, c'est aussi pour le respect de l'institution.
Moi, je crois beaucoup au respect de l'institution,
de l'Assemblée nationale, de la démocratie, et je pense que, quand on laisse
aller des choses comme celles-là, on contribue au cynisme de la population et
au discrédit. Et pour moi, je ne veux pas que ça arrive. Je trouve que c'est
trop important qu'on ait confiance dans nos gouvernements, qu'on ait confiance
dans nos politiciens. Et c'est beaucoup ça qui m'anime, un peu comme quand
j'étais président de l'ordre, je me portais vraiment… pour qu'on ait toujours
une intégrité irréprochable.
Alors, je pense qu'on a vraiment du
travail à faire tous ensemble, mais je pense que là, cette fois-ci, sincèrement,
la priorité et la balle est du côté du premier ministre et de son ministre de
la Santé. Merci beaucoup.
(Fin à 15 h 49)