(Onze heures quinze minutes)
M. Gaudreault
:
Oui, alors, merci beaucoup d'être ici. Je suis très heureux d'être accompagné
de quelques députés qui sont touchés directement par une crise appréhendée
encore dans l'industrie forestière, particulièrement dans l'industrie du bois
d'oeuvre. Alors, si vous avez des questions précises, peut-être, pour les
collègues qui sont touchés... Les autres collègues qui sont aussi dans les
régions sont avec nous, mais, pour différentes raisons, ne pouvaient pas être
avec nous au point de presse.
Simplement vous dire... Vous avez entendu
ma question au premier ministre. On est extrêmement inquiets parce que mercredi
prochain prendra fin le délai de grâce d'un an qui fait suite à la fin de
l'entente sur le bois d'oeuvre. Et ce qu'on appréhende, c'est de revivre,
j'allais dire le jour de la marmotte, mais c'est la crise du milieu des
années 2000 qui a fait perdre, imaginez, là, au Québec, 20 000 emplois,
290 usines dans le domaine forestier qui ont fermé à peu près dans le
milieu des années 2000. Alors, on ne veut pas se retrouver à une situation
semblable ou pareille aujourd'hui.
Avant de laisser la parole à Sylvain, député
de Bonaventure, je veux simplement vous dire qu'il est inacceptable que le
premier ministre du Québec ne soit pas davantage au front sur cet enjeu-là en
harcelant, je dirais, quotidiennement le gouvernement fédéral. Parce que vous
savez que celui qui se retrouve à la table face au gouvernement américain dans
la négociation sur le bois d'oeuvre, c'est le gouvernement fédéral. Alors,
nous, évidemment, on aimerait bien y être, autour de la table, comme pays,
c'est une des conséquences de la souveraineté. Mais, en attendant, le
gouvernement québécois, avec M. Couillard, devrait harceler pour au moins
s'assurer que le gouvernement fédéral reconnaisse le nouveau régime forestier
qui a été adopté autour de 2010 par le gouvernement du Québec et qui respecte
les normes de libre-échange ou de libéralisation des marchés, plutôt, exigées
par les Américains. Donc, on n'a pas de raison de revivre la crise du bois
d'oeuvre telle qu'on l'a vécue il y a une dizaine d'années. Je laisse la parole
à Sylvain.
M. Roy
: Merci,
Sylvain. Écoutez, au Québec, on a 250 villages dont l'économie vit de
près, bon, de la forêt, dont 100 en vivent exclusivement. Et ce qui va se
passer dans les prochaines semaines, les prochains mois va être extrêmement
dommageable pour les régions du Québec. Ce sont des camionneurs, ce sont des
entrepreneurs forestiers, c'est des gens qui travaillent dans les usines, qui,
actuellement, ne voient pas d'entente se manifester, puis, pour eux, ça va être
extrêmement dommageable.
Comme le disait Sylvain, il va falloir que
le ministre des Forêts, actuellement M. Blanchette, fasse pression sur le
ministre fédéral pour faire une négociation où on reconnaît le régime
québécois, qui vient satisfaire aux doléances des Américains, qui... pour eux,
nous subventionnons, je dirais, l'industrie forestière. Au Québec, 90 % de
la forêt est publique et aux États-Unis, c'est le contraire, 90 % est
privée, donc ils considèrent qu'on est une compétition déloyale. Le nouveau
régime, avec les appels d'offres, est venu, bon, calmer ou à tout le moins
donner un signe que nous allions vers le prix du marché pour la forêt, pour le
bois. Et là il s'agit qu'il faut que notre ministre provincial aille voir le ministre
fédéral pour expliquer que nous avons fait nos devoirs et que nous répondons
aux doléances des Américains. Merci.
M. Dutrisac (Robert) : Alors,
concrètement, là, qu'est-ce qui va arriver à la fin de ce moratoire-là? Il va y
avoir l'imposition d'une surtaxe?
M. Gaudreault
:
Bien, il peut arriver, effectivement... il va arriver une imposition d'une
surtaxe sur le bois qui provient du Québec. Il y a déjà même un contingent de
sénateurs américains, autour de 20, 25, là, sénateurs américains, qui ont exigé
de leur gouvernement de mettre une surtaxe sur le bois qui provient du Québec.
Et les indications qu'on a, c'est qu'à la table de négociation entre le fédéral
et le gouvernement américain, le fédéral défend l'industrie forestière de la
Colombie-Britannique, comme ça a été fait dans le milieu des années 2000.
Alors, le bois de la Colombie-Britannique est favorisé par rapport au bois du
Québec. Alors, on ne veut pas revivre le même scénario et faire en sorte qu'il
y ait deux poids, deux mesures par rapport aux provinces productrices de
forêts.
M. Vigneault (Nicolas) :
Qu'est-ce que vous demandez au premier ministre, de se fâcher un peu plus? Vous
trouvez qu'il est trop mou là-dedans, dans ce dossier-là?
M. Gaudreault
:
Bien, c'est clair. C'est clair qu'il est trop mou. Puis moi, je l'appelle à entendre
les travailleurs de son comté. Il est député du comté le plus forestier du
Québec, le comté de Roberval. Le Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est la région la
plus forestière; Roberval, c'est le comté le plus forestier. Il y a une usine
de papier, déjà — là, on pourrait parler en plus de l'enjeu sur les
papeteries, là, c'est différent avec le papier surcalandré, qui touche un peu
aussi les États-Unis — mais il y a des scieries dans son comté, à
Saint-Prime, il y a des scieries à La Doré, il y a des scieries à
Mistassini. Alors ça, c'est tout dans son comté, là. Donc, il y a plein
d'autres circonscriptions : Duplessis, Bonaventure, il y a des travailleurs
à Chicoutimi, il y a beaucoup de travailleurs dans Labelle, donc, dans les
Laurentides, et c'est comme ça aussi en Abitibi, partout à travers le Québec.
Alors, il faut que le premier ministre joue son rôle de premier ministre, qu'il
ne fasse pas juste nous donner des belles paroles à l'Assemblée nationale, mais
qu'il prenne le téléphone et qu'il appelle Justin Trudeau.
Comme le disait Sylvain, le Québec a fait
ses devoirs en termes de modification de son régime forestier. Comment ça se
fait que le gouvernement fédéral ne le reconnaît même pas? On est loin, là,
parce qu'il faut le faire reconnaître par le gouvernement américain. Mais là on
a le gouvernement fédéral qui ne le reconnaît même pas. Ça ne va pas bien.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que le gouvernement du Québec devrait réfléchir à des mesures de
représailles?
M. Gaudreault
: Il
faut réfléchir, au moment où on se parle, à toutes les possibilités, mais il
faut y aller de façon stratégique. Alors, il nous reste une semaine, là, avant
la fin du délai de grâce et de voir apparaître de nouvelles surtaxes. Alors, il
faut absolument que le premier ministre prenne le téléphone ou qu'il prenne sa
voiture, ou son avion, ou son bateau, ou son rabaska et qu'il se rendre à
Ottawa pour aller rencontrer Justin Trudeau.
M. Caron (Régys) : Là,
vous dites que le gouvernement fédéral que ne plaide pas du tout la cause du
Québec dans ce dossier-là, ignorant même le régime forestier du Québec. Ça fait
quand même plusieurs années que le régime forestier du Québec existe, là.
M. Gaudreault
:
Oui, et en plus la réforme du régime forestier, comme le disait Sylvain, pour
le rendre conforme aux ententes de libre-échange avec la mise en marché
publique, là, par appel d'offres, ça a été fait en 2010, c'était entre autres
avec le ministre Béchard, qui avait parti la réforme qui a été complétée en 2010.
En tout cas, il faudrait revérifier, là, les dates précises, mais, déjà en
2010, le régime a été modifié et pour répondre, justement, au libre marché et à
la mise en marché... à la libéralisation des marchés pour correspondre,
finalement, à ce que Sylvain disait tout à l'heure, au fait qu'on a des terres
publiques ici, en bonne partie, au Québec, mais néanmoins d'avoir un marché
libre pour pouvoir avoir accès à ces terres-là.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Est-ce que vous avez l'impression que Justin Trudeau de fout du Québec là-dedans,
c'est quoi?
M. Gaudreault
:
Bien, ça commence à être plus qu'une impression, ça ressemble à une certitude,
là. Alors, il faut que le premier ministre du Québec... Nous, ici, on est à l'Assemblée
nationale, on aimerait bien ça être autour de la table des négociations directement
avec les États-Unis. Mais il faut que le premier ministre du Québec fasse en
sorte que le premier ministre du Canada comprenne le régime forestier du québécois,
accepte les arguments et aille défendre le régime forestier québécois face aux
Américains parce que la réalité, là, et là ce n'est pas de la théorie, autour
de 2008, avec la crise qui a commencé au milieu des années 2000,
20 000 emplois, 290 usines, 290 usines, on va faire un
chiffre rond, 300 usines qui ont été fermées à cause de la dernière crise
du bois d'oeuvre. Donc, on ne parle pas de choses théoriques, on parle de travailleurs,
travailleuses forestières.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Et pensez-vous que le gouvernement devrait compenser les entreprises
forestières du Québec si jamais il y avait des tarifs qui se faisaient imposer?
M. Gaudreault
:
Comme je répondais à votre collègue tout à l'heure, il faut envisager toutes
les stratégies. Mais, au moment où on est, là, il faut absolument, d'abord et
avant tout, défendre et protéger l'industrie forestière du Québec.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Sur un autre dossier. Quel bilan dressez-vous de votre parcours comme chef de
l'opposition?
Une voix
: Très bon,
très bon.
M. Gaudreault
:
Merci. Merci, les collègues. Bien, oui, je suis satisfait. Honnêtement, je suis
satisfait de ce travail. Je le fais, je le faisais, je continue de le faire
encore pour les heures qui sont devant moi pour le bien du parti et pour le
bien des Québécois et des Québécoises qui ont besoin d'une opposition
officielle plus forte que jamais parce que ce gouvernement-là est un
gouvernement qui fait reculer le Québec. Alors, moi, dès que j'ai été nommé
chef, j'ai voulu m'investir de ce rôle-là pour le parti, mais pour les Québécois
aussi et, honnêtement, avec un certain recul, je pense qu'on a réussi.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Qu'est-ce qui a été plus difficile, gérer la course, gérer les prises de
position, les attaques contre votre ingérence politique?
M. Gaudreault
:
Répondre à vos questions, les journalistes.
Des voix
: Ha, ha, ha!
Journaliste
: Celle-là
est difficile particulièrement.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Plus que les accusations d'ingérence?
M. Gaudreault
:
Très, très difficile. Bien, ça, c'est de la question de course au leadership,
et nous avons eu des échanges à l'intérieur de nos caucus sur différents
enjeux, différentes questions. Mais, vous savez, ça fait partie de la course,
là, d'avoir parfois le ton qui monte un peu. Mais vous avez vu, et vous-même,
vous l'avez dit lors du débat au Devoir en début de semaine, c'est un
débat qui était calme, qui était serein. Alors, je pense que tout le monde est
rendu dans cet état d'esprit.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Vous avez voté pour qui?
M. Gaudreault
: Je
n'ai pas voté encore.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Vous allez voter pour qui?
M. Gaudreault
:
Bien, je vais voter, point.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Quel est le principal défi, selon vous, non seulement du chef du Parti
québécois, mais du chef de l'opposition officielle, là, en Chambre, notamment?
M. Gaudreault
: Au
sens large?
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, bien, de votre successeur qui va être nommé vendredi soir, là, si vous
aviez à lui laisser une note sur votre bureau.
M. Gaudreault
:
Oui, bien, c'est de continuer de faire la démonstration éloquente
quotidiennement que c'est un gouvernement qui fait reculer le Québec, c'est un
gouvernement qui est mauvais pour le Québec. Dans l'histoire récente du Québec,
je pense que c'est le gouvernement également qui défend le moins les intérêts
du Québec face au gouvernement fédéral. On vient d'en parler sur le dossier du bois
d'oeuvre, à plein d'égards c'est la même chose. Donc, il faut qu'on continue ce
rôle institutionnel qui nous a été confié par les Québécois. On aurait préféré
être de l'autre côté de la Chambre, mais les Québécois en ont décidé
différemment en 2014. Alors, ce rôle institutionnel qui est de faire
l'opposition officielle, il est extrêmement important, puis c'est de mettre le
gouvernement, justement, face à ses propres contradictions et de le démontrer
de façon claire aux Québécois et aux Québécoises.
Maintenant, l'autre élément, évidemment,
pour le rôle de chef de l'opposition officielle, c'est de démontrer que la
seule alternative à ce gouvernement, c'est le Parti québécois, et je suis
convaincu que le prochain chef, quel qu'il soit, sera capable de faire cette
démonstration. Merci.
(Fin à 11 h 26)