(Dix heures cinquante-huit minutes)
M.
Therrien
:
Alors, bonjour. Nous réagissons aujourd'hui à la motion déposée qui était tout
simplement de demander au gouvernement qu'il annule toute forme de prime ou de
régime incitatif annuel pour les dirigeants de Bombardier tant et aussi longtemps
que Bombardier, avec la série C, ne ferait pas d'argent et ainsi les
contribuables ne seraient pas dans une situation de bénéfices.
Il faut revoir un peu rapidement l'histoire.
La semaine passée, 93 % des Québécois sont offusqués de l'augmentation de
48 % de la rémunération des principaux dirigeants de Bombardier. Réaction
du premier ministre, il nous dit tout simplement qu'il n'y aura pas de hausse
et il dit avoir eu la confirmation de Bombardier qu'il n'y aurait pas de hausse
de la rémunération — il l'a dit en Chambre — hausse de
rémunération des dirigeants de Bombardier tant et aussi longtemps que la
compagnie ne serait pas dans une situation de profit. Ça, c'est ce qu'il a dit.
La ministre Anglade a renchéri en fin de
semaine pour nous dire qu'il n'y aurait pas de prime pour les dirigeants de
Bombardier tant et aussi longtemps que la série C ne ferait pas d'argent.
C'est ce qu'on a entendu.
Par contre, il faudrait, à un moment
donné, que le premier ministre et la ministre de l'Économie arrêtent d'être les
porte-parole de Bombardier, là, puis soient les porte-parole des Québécois et
qu'ils aient un regard critique sur la rémunération qui sera effectivement
versée aux dirigeants de Bombardier d'après la circulaire qui, au départ, était
distribuée… qui était déjà distribuée la semaine passée et qui a été légèrement
modifiée cette semaine.
Là, M. Marceau va vous parler des
modifications qu'il y a eu, mais vous allez voir que c'est extrêmement clair
qu'à peu près rien n'a changé depuis le moment où on a déposé ces augmentations
de rémunération selon la circulaire initiale et le moment aujourd'hui où
finalement les changements cosmétiques n'ont rien amené de différent dans la rémunération
des dirigeants de Bombardier. Ça veut dire qu'au lieu d'écouter 93 % de la
population du Québec ils ont défendu les dirigeants de Bombardier. Là, on a les
chiffres ici, M. Marceau va vous les présenter.
M. Marceau
: Oui.
Bonjour, tout le monde. Tout d'abord, dire que le refus de voter sur la motion,
là, qui a été présentée par Alain il y a quelques minutes, le refus montre que
le gouvernement n'est pas sérieux puis que Mme Anglade a menti, aussi clairement,
aussi simple que ça, là. Elle a menti quand elle a dit que les dirigeants de Bombardier
n'auraient pas de prime tant et aussi longtemps que Bombardier ne ferait pas d'argent
avec la CSeries. Elle ment. Elle ment tout simplement.
Alors, effectivement, comme Alain le
disait, il y a eu des changements qui ont été très légers dans la circulaire
qui a été rendue publique lundi. Juste pour être au clair pour tout le monde,
là, il y a trois composantes, dans le salaire annuel. Il y a un salaire de base
qui est versé à chacun; deuxièmement, il y a des bonis qui sont versés... le
mot qui est utilisé ici, c'est «régime incitatif annuel», donc des bonis
annuels qui sont versés. Donc, le salaire de base puis les bonis annuels, ils
sont versés immédiatement, puis il y a des montants qui sont versés sous forme
d'actions puis d'options et qui sont encaissables dans quelques années.
Alors, juste pour qu'on soit très, très
clairs, puis ici, j'ai un beau tableau qu'on a fait, qui est ici, comme ça,
donc un tableau qui explique un peu les changements qui ont été apportés à la
rémunération chez Bombardier, en gros, là, pour Alain Bellemare et tous les
autres membres du comité de direction... donc, il y a deux cas, là, il y a M.
Bellemare et les membres du comité de direction puis il y a le cas de Pierre
Beaudoin. Mais commençons par Alain Bellemare et tous les membres du comité de
direction. Pour ces gens-là, la circulaire modifiée, ce qu'elle montre, c'est
que premièrement, le salaire de base annuel et le régime incitatif annuel,
c'est-à-dire les bonis de cette année, ça ne change pas. Zéro changement, O.K.?
Et comme le régime incitatif annuel ne
change pas, c'est dire que des bonis sont versés aux membres du comité de
direction, alors que Bombardier ne fait pas d'argent avec la CSeries. Donc, la
ministre, elle ment lorsqu'elle dit qu'il n'y en aura pas, parce que
présentement, cette année, et vous pouvez le voir par vous-mêmes, là, pour M.
Bellemare, le régime incitatif annuel, cette année, c'est
2 360 900 $. Pour les autres membres de la direction, on parle
de 900 000 $ chacun. Alors, les bonis annuels sont versés.
Pour ces gens-là, en fait, pour M.
Bellemare et les gens du comité de direction, la seule chose qui change, c'est
que les bonis encaissables dans quelques années sous forme d'actions puis
d'options, ceux-là, au lieu d'être encaissables possiblement en 2019, vont être
encaissables possiblement en 2020. Mais notez qu'il n'y a aucun changement dans
les montants non plus.
Alors, si on résume, là, pour M. Bellemare
et pour tous les membres du comité de direction, pour tous ces gens-là, le
salaire de base, qui est ici, dans la... je vous donnerai le tableau, le
salaire de base : inchangé et payable immédiatement; le régime incitatif
annuel, les bonis annuels : inchangés, payables immédiatement. Puis les
régimes d'options et d'actions encaissables dans quelques années, les montants
sont inchangés, mais ils sont encaissables en 2020 plutôt qu'en 2019. C'est le
seul changement qui a eu lieu pour M. Bellemare et ses collègues.
Alors, la ministre Anglade, elle ment en
pleine face de tous les députés à l'Assemblée nationale puis à la face des Québécois
lorsqu'elle est en train de dire qu'il n'y aura pas de bonis qui vont être
versés à ces gens-là tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas d'argent.
M.
Therrien
: Je
pourrais peut-être rajouter quelque chose. Si on regarde pour M. Bellemare, là,
en 2015, régime incitatif, là, c'est 1,2 million en 2015. En 2016, c'est 2,3
millions. Il y a augmentation d'à peu près 45 % de rentes et de régime
incitatif. Ça veut dire que malgré le fait que la compagnie ait une situation
de pertes, que les ventes de la CSeries ont été faites à perte, malgré le fait
qu'on a des revenus qui ont diminué chez Bombardier, on a quand même une augmentation
de la prime de 1,2 à 2,3.
Ça, ça n'a pas changé. C'est une augmentation
de 45 %. C'est ça qu'on donne au président-directeur général de
Bombardier, et cet argent-là, là, ça vient de la poche des Québécois. Et effectivement,
quand on regarde tout ça, une conclusion... Bien, deux conclusions. Première
conclusion, le gouvernement, c'est le porte-parole de Bombardier; puis deuxième
conclusion, c'est Mme Anglade, elle a menti à la population. C'est ce qu'on
peut conclure.
M. Marceau
: Je
pourrais compléter avec le cas de M. Beaudoin, qui est différent des membres...
des cas de M. Bellemare et de la direction. Pour M. Beaudoin, il y a eu un peu
plus de changements. Tout d'abord, son salaire annuel, je vous disais, il y a
les trois composantes. Son salaire de base annuel, lui, est inchangé, donc
payable immédiatement. Ses bonis de cette année, ses bonis annuels, ils sont effectivement
réduits de 100 000 $. Alors, plutôt que d'avoir 943 600 $, il
va avoir 843 600 $, mais il va avoir des bonis quand même. Il va
avoir des bonis quand même. Soyons clairs. Il va avoir des bonis quand même, M.
Beaudoin, cette année.
Puis finalement, pour ce qui est de ses
bonis encaissables dans quelques années sous forme d'options, sous forme
d'actions, là, il y a une réduction plus substantielle. Ça passe, on l'avait
mis hier dans notre communiqué, ça passe de 3 millions de dollars, un peu
plus de 3 millions à environ 1 787 000 $. Alors là, il y a
une baisse plus substantielle pour M. Beaudoin quant aux actions puis aux
options encaissables dans quelques années. Mais soyons clairs, M. Beaudoin, M.
Bellemare et tous les autres membres du comité de direction vont recevoir cette
année des bonis importants.
M. Salvet (Jean-Marc) : Vous
dites que Mme Anglade ment. Est-ce qu'elle a pu simplement être trompée par
Bombardier lorsqu'elle a communiqué avec eux ou induite en erreur comme on dit
dans le jargon de l'Assemblée nationale?
M.
Therrien
:
Bien, écoutez, moi, je suis ministre de l'Économie, là, j'appelle la gang de
Bombardier, là, puis ils me disent... Peu importe ce qu'ils vont me dire, là,
moi, j'ai la circulaire ici.
M. Salvet (Jean-Marc) : Oui,
mais vous-même, ça vous a pris, je comprends, quelques heures avant de pouvoir
décoder...
M.
Therrien
: Écoutez,
mercredi, j'ai posé une question en Chambre là-dessus, j'expliquais par rapport
à cette colonne-là.... Je l'ai posée, la question, mercredi. Pourquoi pas
mardi? Je n'étais pas là, mardi. Je l'ai posée mercredi, cette question-là, ça
fait déjà une semaine. Puis mardi, M. Couillard avait dit qu'il n'y aurait
aucune augmentation de rémunération tant et aussi longtemps que la compagnie ne
ferait pas de profits.
Moi, je lui ai posé cette question-là
mercredi. Vous irez voir la motion que j'ai déposée puis j'ai parlé de cette
colonne-là. Moi, là, je suis capable de lire ça. Ça fait que quand, elle, là,
les dirigeants de Bombardier l'ont remplie, l'ont roulée dans la farine, là, peut-être
qu'elle aurait dû avoir le réflexe de vérifier elle-même. Peut-être, à la
limite, qu'elle ne comprend pas c'est quoi une circulaire aussi. C'est un ou
l'autre. Ça fait qu'en quelque part, là, c'est noir sur blanc. Puis là ce qui
est arrivé, c'est qu'en plus de... en plus, la semaine passée, que le premier
ministre nous dise des choses comme ça, en fin de semaine, elle a renchéri,
elle en a rajouté. Elle a dit à tout le monde qu'on ne verserait pas de prime
tant et aussi longtemps que la série C ne ferait pas d'argent. Ça fait
qu'elle en a rajouté. Imaginez, c'est le comble du ridicule. Bien, regardez, c'est
là, là. Allez vérifier.
M. Gagnon (Marc-André) :
La question du collègue, c'est... vous dites que Mme Anglade ment. Est-ce
que ce n'est pas plutôt Bombardier qui ment?
M.
Therrien
:
Non, non. Là, attention, c'est sa responsabilité, là, quand elle dit des choses
en Chambre ou quand elle dit des choses à la population, de vérifier, au
minimum, ce qu'elle dit. Là, là, c'est dans la circulaire, c'est très clair.
Moi, je vous le dis, Bombardier me dit quelque chose, je vais vérifier. Elle
n'a pas vérifié ou elle a cru Bombardier. Elle n'a pas fait son travail et elle
ment à la population. C'est ça, la vérité.
M. Marceau : Juste
ajouter là dessus, dernier point, hier, j'ai posé la question à
Mme Anglade, hier, à la période de questions, il était 14 heures. À
17 heures, on a émis un communiqué de presse, là, qui expliquait... Il y
avait un tableau, dans le communiqué de presse, qui résumait, en fait, ce tableau-ci,
là. Ça, c'était dans le communiqué de presse hier, là.
Ce matin, Alain dépose une motion. Là,
elle a la chance de faire amende honorable et puis elle a la chance de dire :
Bien, j'ai été trompée par Bombardier. Elle ne le fait pas. Alors, écoutez, il
lui appartient de dire : J'ai été flouée, on m'a induit en erreur. Elle a
encore la chance de le faire, et, le cas échéant, le cas échéant, si elle dit
ça, moi, je m'attends à ce qu'elle corrige rapidement la situation, qu'elle
appelle Bombardier puis qu'elle fasse ce qu'elle a dit qu'elle dirait...
qu'elle a promis aux Québécois puis qu'elle s'assure qu'effectivement pas de
boni annuel ne soit versé.
M.
Therrien
:
Juste rajouter, mercredi, là, quand j'ai posé ma question en Chambre, là, j'ai
été extrêmement clair là-dessus, là. Ils m'ont demandé de déposer la circulaire
de la compagnie, page 47. Je l'ai déposée avec les notes. J'ai déposé ça
mercredi parce que, si elle ne savait pas, puis moi, je pose des questions là-dessus,
j'avais l'air informé. J'ai parlé des chiffres, là, puis j'ai déposé ça en
Chambre. Qu'est-ce que ça lui prend de plus?
M. Gagnon (Marc-André) :
Oui, je comprends. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'on commence à faire du
surplace dans le dossier de Bombardier? Parce qu'après tout, là, le
gouvernement, chacun reste campé sur ses positions.
M. Marceau : Lundi soir,
il y a eu de l'information nouvelle qui a été rendue publique, là. Lundi soir,
là, on a eu la nouvelle... la circulaire révisée. C'est un nouvel élément,
hein? On a eu bien des promesses, bien des mots, bien des paroles, mais là, là,
factuellement, ce qui va être proposé à l'assemblée des actionnaires, là, de
Bombardier, ce sont des chiffres révisés marginalement, avec des bonis annuels
versés cette année à tous les membres du comité direction, à
Pierre Beaudoin.
Regardez, que le gouvernement s'amende,
que Mme Anglade dise : Ou bien je vous ai menti ou bien je me suis fait
avoir par Bombardier, mais qu'elle dise une de ces deux choses-là puis qu'elle
s'assure que la situation change, que les Québécois ne versent pas 1,3 milliard
avec aucun impact sur la rémunération des hauts dirigeants. C'est aussi simple
que ça.
M. Lessard (Denis) : À
l'origine, c'étaient les bonis de 2017 et années subséquentes qui…
M. Marceau
: 2016. C'est
du 2016…
M.
Therrien
:
Qui sont versés cette année. Les bonis de 2016 sont versés cette année.
M. Lessard (Denis) : 48 %,
c'était en 2016?
M.
Therrien
: Il
y en a en… 2016, là, si on regardait, par exemple, Alain Bellemare, là, ça
donnait… Ce qui est arrivé, là, je vais faire une histoire courte, là, ce qui
est arrivé, c'est qu'Alain Bellemare, l'année d'avant 2015, il avait été
10 mois et demi là, alors que… donc, il avait eu un salaire pour
10 mois et demi. Ça fait que, quand on a sorti le 48 %, Alain
Bellemare a dit : Bien oui, mais vous vous êtes référé à un salaire qui
était basé sur 10 mois et demi.
Moi, ce que j'ai fait, j'ai fait mes
devoirs, j'ai remis en salaire annualisé, et ça a donné 44 %. Et là quand
je vous parle de 44 %, c'est que la rémunération est sur deux blocs :
le bloc versé en 2017 pour 2016, c'est comme ça que ça fonctionne, ça, c'était
44 % d'augmentation pour M. Bellemare; et le bloc de 2019, qui était les
actions et les options, bien, c'est quelque chose comme 40 %, et c'est ce
deuxième bloc là qui a été reporté à 2020. Mais il n'y a rien là-dedans qui
nous dit que ça, c'est des incitatifs précis à la rentabilité, c'est lié à la
rentabilité, des choses comme ça.
Par contre, ce qu'on sait, c'est que la
rémunération cette année, versée cette année pour 2016, c'est clairement, c'est
écrit : Régime incitatif annuel, c'est écrit note 2. Bien, dans la
note 2, en aucun temps on ne parle de rentabilité. On parle pour dire :
Bien, vous avez cet incitatif-là si vous avez rentabilisé la compagnie. Il n'y
a rien, rien là-dedans. Et la preuve, c'est que la compagnie n'est pas
rentable, et M. Bellemare a avoué qu'il va obtenir l'entièreté de cette
prime-là cette année. Il l'a avoué. Donc, ça veut dire qu'il y a une
augmentation de salaire cette année, bien, de 2016, comparé à 2015, de
44 %.
Alors, quand eux nous disent qu'ils n'ont
pas de prime, ils n'ont pas d'argent de plus, bien là, je me dis : Ils
restent où, eux autres? Ça n'a pas de sens. Bien, ça fait une semaine qu'on
leur explique ça puis qu'on l'a déposé en Chambre, et ensuite on a fait deux
motions, une motion mardi, une motion mercredi, une motion aujourd'hui.
Aujourd'hui, on a pris la motion, là, et ce qu'on a dit, c'est : Si Mme
Anglade hier a dit qu'il n'y aurait pas de prime tant que la série C ne
ferait pas d'argent, bien, on a fait une motion avec ça, on a dit : Bien,
regardez, ce qu'on a fait comme motion. Elle vote contre.
Des voix
: Merci.
(Fin à 11 h 12)