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Conférence de presse de Mme Maryse Gaudreault, présidente de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité, et de Mme Véronique Hivon, vice-présidente de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité

Explications concernant les 24 recommandations contenues dans le rapport de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité

Version finale

Le jeudi 22 mars 2012, 11 h 15

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Onze heures trente-cinq minutes)

Mme Gaudreault: ...à tous et bienvenue à cette conférence de presse tant attendue depuis si longtemps. Juste pour le déroulement, pour ce qui est du déroulement, je vais m'adresser à vous pendant une dizaine de minutes, ensuite ce sera à Mme Hivon, et c'est moi qui conclura. Nous passerons ensuite à la période de questions. Alors, bonjour à tous. C'est avec beaucoup de fébrilité que nous nous retrouvons devant vous aujourd'hui.
S'éteindre paisiblement entouré de ses proches ou tout simplement mourir dans son sommeil, voilà ce que la majorité des gens souhaitent pour la fin de leurs vies. Malheureusement, mourir peut parfois être synonyme d'une lente agonie ou d'une longue déchéance. En effet, au cours des dernières décennies, les progrès remarquables de la médecine et de la pharmacologie ont contribué à allonger l'espérance de vie, au prix parfois de la qualité de vie.
Que répond notre société à la souffrance exprimée par certaines personnes en fin de vie? Comment réagir aux demandes d'aide à mourir? Comment assurer à tous une mort dans la dignité? Vous vous rappellerez que c'est sur la prémisse de ces questions très complexes que les travaux de notre commission ont débuté il y a plus de deux ans.
Je suis très heureuse de me retrouver parmi vous avec mes collègues ce matin pour le dépôt d'un rapport très attendu et qui est unanime, celui de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. Nous voilà arrivés à destination pour vous livrer les conclusions et nos réflexions.
Mais, avant de vous les présenter, permettez-moi de revenir quelque peu en arrière. Cette commission spéciale est née, le 4 décembre 2009, de l'adoption unanime d'une motion présentée par ma collègue la députée de Joliette. Ce fut là le début d'une grande aventure humaine, sociale et parlementaire. Notre mandat était d'étudier en profondeur les questions se rattachant à la fin de la vie, les conditions dans lesquelles se déroulent les fins de vie au Québec, les soins de fin de vie, notamment les soins palliatifs, la planification des soins de fin de vie et tout le débat entourant l'euthanasie et le suicide assisté.
Devant des sujets aussi complexes et des termes aussi techniques, nous avons d'abord exploré les différents aspects entourant notre mandat avec 32 experts provenant des disciplines de la médecine, du droit, de l'éthique, de la psychologie, de la sociologie et de la philosophie.
Puis nous avons voulu consulter les citoyens, s'imprégner de leurs histoires, entendre leurs opinions, et notre itinéraire nous a conduits dans huit villes du Québec, où les citoyens sont venus nous rencontrer et échanger avec nous. D'autres ont répondu à notre appel en déposant un mémoire, en répondant à notre questionnaire en ligne ou en nous envoyant leurs commentaires par écrit. C'est avec beaucoup de sérieux, de respect et de maturité que les Québécois ont pris part à la discussion. La participation citoyenne à notre consultation a été impressionnante. Rarement a-t-on vu une commission susciter autant d'intérêt.
Au cours des consultations, plusieurs éléments contradictoires au sujet de l'euthanasie, dans les pays où elle est permise, nous ont été rapportés. Nous avons donc décidé de se rendre sur place pour constater par nous-mêmes ce qu'il en était. Alors, en juin 2011, une délégation de la commission s'est déplacée en Europe pour s'informer du débat en cours en France et pour étudier les expériences en Belgique et aux Pays-Bas. Cette mission a été des plus éclairantes pour la poursuite de nos délibérations. D'ailleurs, je crois important de vous dire qu'à chacune de nos séances de délibération nous avons été habités et guidés par la compassion, la solidarité envers les personnes qui souffrent, le respect de leur autonomie et la protection des personnes vulnérables.
Après plusieurs mois de discussion en profondeur, où nous avons examiné, en regard de ces valeurs, tous les arguments et les enjeux soulevés pendant la consultation générale, nous voilà arrivés à partager avec la société québécoise le fruit de nos réflexions ainsi que nos 24 recommandations unanimes.
Notre premier constat, à la suite de nos consultations: personne ne souhaite le statu quo quant aux soins de fin de vie. Tous reconnaissent qu'il y a des lacunes, que nous pouvons faire mieux. Une bonification des soins de fin de vie nous apparaît essentielle pour le bien des malades et de leurs proches.
D'abord, il faut assurer une meilleure compréhension d'un droit déjà reconnu, celui du refus et de l'arrêt de traitement. Nous avons découvert que la volonté du patient de refuser ou d'arrêter un traitement n'est pas toujours respectée. Également, ce droit n'est pas suffisamment bien connu et compris. Il existe beaucoup de confusion et certains associent même ce droit à l'euthanasie. Afin de lever les ambiguïtés et de mieux éclairer les décisions des malades, une plus grande sensibilisation du public et une meilleure éducation des soignants nous apparaissent nécessaires.
Ensuite, il faut prioriser le développement des soins palliatifs. En consultation, une unanimité est ressortie quant à leur importance. Les soins palliatifs sont la réponse par excellence aux souffrances de la majorité des personnes en fin de vie, mais ils sont à parfaire et, surtout, doivent être davantage accessibles. C'est pourquoi nous recommandons d'améliorer l'accès aux soins palliatifs, y compris pour ceux souffrant des maladies autres que le cancer.
Nous recommandons aussi de prioriser le développement des soins palliatifs à domicile. La majorité des personnes désirent mourir chez elles, mais, la plupart du temps, elles doivent se résigner à se tourner vers l'hôpital.
Nous recommandons aussi d'achever rapidement la mise en oeuvre de la Politique sur les soins palliatifs de fin de vie du ministère de la Santé et des Services sociaux, condition sine qua non à l'amélioration de la qualité des soins en fin de vie. Cette politique demeure pertinente mais est malheureusement encore loin d'être complètement appliquée.
Nous recommandons de dispenser aussi une formation plus adéquate sur les soins palliatifs à tous les intervenants du réseau de la santé. En effet, on nous a dit que la formation comporte des lacunes, et que la culture animant les soins palliatifs est méconnue de plusieurs professionnels de la santé.
Nous recommandons de plus de reconnaître formellement, dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le droit de toute personne dont la condition le requiert à des soins palliatifs. Cette loi doit reconnaître aussi l'obligation pour tout établissement de santé qui donne des soins à des personnes en fin de vie - pardon - de prévoir, dans son offre de services, la mise sur pied de soins palliatifs.
Quant au soulagement de la douleur par l'administration d'un sédatif rendant inconscient, ce qu'on appelle, dans le jargon médical, la sédation palliative, nous avons découvert que l'encadrement de cette pratique varie d'un établissement à l'autre. En effet, dans certains milieux, cette pratique est balisée rigoureusement, mais, dans d'autres, l'encadrement semble plus faible. Aussi, cette pratique de la sédation palliative, surtout la sédation continue qui se prolonge jusqu'à la mort du malade, soulève des questionnements au sein du corps médical. Pour certains, elle est une proximité de la pratique de l'euthanasie. Pour pallier à cette situation, nous recommandons qu'un guide d'exercice et de normes déontologiques soit élaboré pour encadrer rigoureusement la sédation palliative partout où elle est pratiquée.

Également, la planification des soins en fin de vie en cas d'inaptitude nous a interpellés, car plusieurs citoyens nous ont révélé que les directives médicales anticipées ne sont pas toujours reconnues et respectées par les équipes médicales. Nous croyons, au contraire, qu'il est important que les volontés exprimées par le patient soient respectées. Ainsi, nous recommandons que les directives médicales anticipées aient une valeur juridique contraignante. Nous rappelons aussi l'importance pour chaque personne de discuter avec son médecin et ses proches de la fin de sa vie et de ses volontés.
Enfin, c'est sans surprise que je vous apprendrai que nous avons délibéré longuement d'un autre volet touchant la fin de la vie, soit le débat entourant l'euthanasie. Je laisserai Véronique Hivon vous présenter les conclusions de notre réflexion à cet égard.

Mme Hivon: Comme l'a exposé ma collègue, nous sommes convaincus que les soins palliatifs sont la réponse par excellence aux souffrances de la majorité des personnes en fin de vie, d'où l'importance centrale de leur développement. Toutefois, à la lumière de nos travaux, nous sommes tout aussi convaincus que même les meilleurs soins palliatifs ont des limites qui font en sorte que certaines personnes qui souffrent attendent parfois désespérément une réponse en fin de vie. Cette situation pose assurément un défi à la société québécoise et à ses valeurs de compassion et de solidarité. Aussi, après une analyse de l'évolution de la société et un examen exhaustif des enjeux et des arguments qui nous ont été présentés, nous sommes d'avis unanimement qu'une possibilité supplémentaire est nécessaire dans le continuum des soins de fin de vie, soit l'aide médicale à mourir.
L'aide médicale à mourir se veut une réponse exceptionnelle, mais une réponse qui se doit d'exister pour cette minorité de personnes qui vivent une situation de souffrance exceptionnelle, pourvu, bien sûr, que cette aide soit strictement circonscrite et balisée et qu'elle résulte d'une demande libre et éclairée de la personne elle-même. Je vais revenir sur la question spécifique de l'encadrement.
Je peux peut-être spécifier, d'entrée de jeu, que nous avons retenu le terme «aide médicale à mourir» plutôt qu'«euthanasie» afin de bien faire ressortir l'idée de soutien et le contexte médical qui sont au coeur de notre proposition. Le mot «aide» renvoie ainsi à la valeur incontournable de l'accompagnement, alors que le terme «médicale» précise la nature de cet accompagnement qui suppose l'intervention du médecin.
L'aide médicale à mourir est compatible avec l'évolution des valeurs sociales de la médecine et du droit. Les valeurs sociales, en raison notamment de la diversité des idées et des opinions, font désormais une large place au respect de l'autonomie de la personne et à la liberté individuelle. Cela bouleverse notre rapport avec la fin de la vie et la mort et entraîne, pour plusieurs, l'expression du refus d'une agonie longue et pénible. Cette évolution des valeurs se traduit dans les sondages d'opinion qui, depuis 20 ans, indiquent un appui constant, fortement majoritaire, à l'idée d'une aide médicale à mourir, ce qui est d'ailleurs corroboré par notre consultation en ligne qui, bien que n'ayant pas de prétention scientifique, a recueilli un nombre sans précédant de réponses, 6 600, et a révélé un appui de 74 % à une telle ouverture.
En outre, nous estimons que l'évolution des valeurs a été corroborée par les nombreuses associations nationales venues nous faire part d'une position d'ouverture à l'aide médicale à mourir, comme le Collège des médecins. Cette prise de position n'est pas étrangère au fait que l'évolution de la médecine a été, pour sa part, marquée par d'importants développements scientifiques qui ont fourni un imposant arsenal de lutte contre la maladie et la mort, mais parfois au détriment de la qualité de vie. La profession médicale a repensé les approches de soins à la veille de la mort en voyant notamment au développement de l'approche palliative.
Tout en valorisant ces développements, le Collège des médecins affirme que les médecins sont parfois confrontés à leurs propres limites et qu'une sensibilité nouvelle les amène à juger que l'aide médicale à mourir pourrait constituer, dans des circonstances exceptionnelles, une étape ultime du continuum de soins en fin de vie. Cette approche délaisse le terrain du débat sur la légalisation de l'euthanasie pour le replacer dans celui des soins appropriés de fin de vie.
C'est une approche que nous avons faite nôtre, à l'instar du Barreau du Québec, en nous appuyant notamment sur l'évolution du droit et le constat qu'il n'existe, ni au Québec, ni au Canada, aucun cas où un jury a condamné un médecin pour avoir administré un médicament ayant causé la mort. Les poursuites elles-mêmes semblent rarissimes. En fait, le Barreau n'en a relevé aucune au Québec, ce qui lui fait dire que les règles du droit criminel ne sont pas en phase avec la réalité d'aujourd'hui et qu'elles sont devenues pratiquement inapplicables. Ainsi, c'est aussi par le prisme de la santé et des soins que le Barreau analyse la question pour trouver de nouvelles solutions.
De ce côté, rappelons que le Code civil du Québec a consacré, en 1994, le principe de l'autonomie de la personne et la nécessité du consentement libre et éclairé. S'ensuit le droit de refuser ou d'arrêter tout traitement, même si cette décision mène automatiquement au décès. Dans cette optique, l'aide médicale à mourir apparaît davantage comme une évolution que comme une révolution du droit québécois.
C'est à la lumière de ces évolutions que nous avons procédé à un examen en profondeur de l'ensemble des enjeux et des arguments soulevés par les participants à la consultation tenant comme opposant une aide médicale à mourir. Notre rapport en fournit une analyse détaillée, sous forme de questions, qui permet de suivre notre raisonnement. Nous invitons à le lire car c'est un défi de taille, je ne vous le cacherai pas, de le résumer en quelques minutes. Alors, je m'arrêterai essentiellement aux enjeux liés aux soins palliatifs, au respect de la vie et aux risques de dérive.
Comme nous l'avons dit d'entrée de jeu, les soins palliatifs ne peuvent soulager 100 % des personnes en fin de vie, en particulier celles qui sont aux prises avec des maladies dégénératives ou des souffrances réfractaires. Bien qu'existe la possibilité de recourir à la sédation palliative continue, cette option n'est pas toujours applicable. En outre, elle implique l'inconscience complète jusqu'au décès, ce qui peut représenter plusieurs jours, voire parfois deux à trois semaines, donc une fin de vie loin des souhaits des personnes désireuses de rester conscientes ou en contact avec leurs proches. L'option de l'aide médicale à mourir peut alors offrir une avenue supplémentaire pour une minorité de personnes.
Est-ce à dire, comme l'affirment certains, que nous ne devrions pas agir car nous ne le ferions précisément que pour une minorité de personnes? Nous ne le croyons pas. D'abord, la sérénité de plusieurs personnes face à la fin anticipée de leur vie, particulièrement pour certaines souffrant de maladies dégénératives, sera accrue significativement si elles savent que l'option de l'aide médicale à mourir existe, un peu comme une sortie de secours, pour reprendre l'expression d'une participante.
Par ailleurs, il serait peu conforme à nos valeurs de refuser une telle aide pour le seul motif que les personnes qui souffrent de manière intolérable ne sont pas assez nombreuses ou parce que, comme certains le soutiennent, les meilleurs soins palliatifs ne sont pas encore accessibles à tous. À cet égard, il ne faut pas oublier que, même si les meilleurs soins palliatifs étaient accessibles à tous dans l'immédiat, certaines souffrances intolérables demeureraient. Répétons-le, les soins palliatifs et l'aide médicale à mourir ne s'opposent pas mais se complètent car ils participent du même souci de favoriser une bonne mort.
Par ailleurs, notre proposition ne signifie pas que l'on diminue le respect qui est dû à la vie humaine. Pour certains, le respect à la vie doit être absolu, d'autres invoquent son caractère sacré. Seulement, comme nous l'avons vu à la lumière de l'évolution de la société, il existe déjà des circonstances où la valeur de l'autonomie l'emporte sur celle du respect absolu de la vie pour respecter, au-delà de la vie, la personne elle-même. Aussi, dans cette optique, notre proposition invite à accorder une grande importance à la volonté exprimée librement et de manière éclairée de mettre fin pour soi à des souffrances intolérables. À la lumière de l'expérience étrangère, nous savons que cela ne se produira que très rarement, la volonté de vivre étant ancrée très fermement chez l'être humain et constituant en elle-même la plus grande des balises.
Ceci nous amène aux risques de dérive et aux effets négatifs qui pourraient survenir dans un contexte d'ouverture à l'aide médicale à mourir. Ces craintes sont légitimes, et nous les prenons très aux sérieux. C'est notamment pourquoi nous tenions à aller aux Pays-Bas et en Belgique. Or, il y est généralement admis, même parmi les opposants rencontrés, que l'euthanasie n'a conduit à aucune des dérives appréhendées au sujet des personnes vulnérables, âgées ou handicapées, qu'elle n'a pas nui au développement des soins palliatifs, au contraire, et qu'elle a eu un effet plutôt favorable sur la confiance du patient envers son médecin, notamment parce qu'elle favorise le dialogue en fin de vie.
Nous avons la conviction que la société québécoise est capable de prendre les moyens d'éviter les risques, comme les Belges et les Néerlandais l'ont fait. D'ailleurs, les médecins entendus ont confirmé qu'au Québec aucune dérive n'avait été associée au fait que, depuis 20 ans, des personnes, voire leurs proches, peuvent demander un arrêt de traitement comme le retrait d'un respirateur artificiel. Nous avons toute confiance dans le personnel médical et voyons mal pourquoi il en serait autrement avec l'aide médicale à mourir.
C'est ce qui m'amène, en terminant, à présenter les critères et les balises strictes que nous recommandons et qui sont indissociables de toute ouverture à l'aide médicale à mourir. La question centrale est, bien sûr: Qui pourrait faire une demande d'aide médicale à mourir? Nous recommandons que la personne qui demande une telle aide réponde de manière concomitante aux six critères suivants: elle est résidente du Québec; elle est majeure et apte à consentir aux soins au regard de la loi; elle exprime elle-même, à la suite d'une prise de décision libre et éclairée, une demande d'aide médicale à mourir; elle est atteinte d'une maladie grave et incurable; sa situation médicale se caractérise par une déchéance avancée de ses capacités sans aucune perspective d'amélioration; elle éprouve finalement des souffrances physiques ou psychologiques constantes, insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu'elle juge tolérables.
Au-delà de ces critères, plusieurs balises et des mécanismes de contrôle s'imposent. Ainsi, nous recommandons que toute demande d'aide médicale à mourir soit formulée au moyen d'un formulaire signé, que cette demande soit réitérée dans un délai jugé raisonnable selon le type de maladie, que le médecin traitant de la personne doive consulter un autre médecin qui devra attester à son tour du respect des critères de recevabilité de la demande, que le médecin consulté soit indépendant du patient et du médecin traitant et considéré bien sûr comme compétent par rapport à la pathologie en cause; que le médecin traitant ait l'obligation de remplir une déclaration d'aide médicale à mourir. En outre, une instance nationale de contrôle devrait être mise sur pied.
Finalement, en ce qui concerne l'encadrement juridique nécessaire pour mettre en oeuvre l'aide médicale à mourir, il repose d'abord sur l'introduction des critères et balises présentés dans les lois pertinentes. Nous pensons en premier lieu au Code civil et à la Loi sur les services de santé et les services sociaux.
Nous recommandons, en outre, pour s'assurer que les médecins aient toute la liberté d'esprit requise dans leur pratique, que le Procureur général émette une directive sous la forme d'orientations ou de mesures au Directeur des poursuites criminelles et pénales afin d'indiquer qu'un médecin ayant pratiqué une aide médicale à mourir selon les critères prévus à la loi ne peut fait l'objet de poursuites. Cette approche en deux axes rejoint celle proposée par le Barreau du Québec.
Avant de céder la parole à ma collègue pour le mot de la fin, je tiens à dire que ce sont les citoyens et citoyennes du Québec qui ont donné tout leur sens à nos travaux. Ils nous ont fait part de leurs points de vue avec une maturité, une générosité et une qualité d'analyse impressionnantes. Nous tenons à ce qu'ils sachent qu'ils ont été présents avec nous pendant toutes nos délibérations, ce que nous avons d'ailleurs voulu refléter en laissant une large place à leurs témoignages dans notre rapport. Certains nous ont émus, d'autres nous ont troublés, tous nous ont permis d'approfondir les connaissances et les conceptions que nous pouvions avoir au départ. Nous avons été profondément marqués par cette rencontre unique sur un sujet qui relève de la condition humaine. Nous sommes privilégiés d'avoir eu l'occasion de participer à cet exercice démocratique qui a donné tout son sens à notre rôle d'élus.

Mme Gaudreault: Nous sommes, en effet, privilégiés d'avoir vécu cette expérience parlementaire unique, d'autant plus que l'ensemble de nos travaux se sont toujours déroulés dans un esprit exempt de toute partisanerie et sans aucune ligne de parti. La vice-présidente et moi souhaitons d'ailleurs remercier sincèrement tous nos collègues présents avec nous aujourd'hui pour leur grande disponibilité, leur professionnalisme ainsi que leur souci de toujours placer le citoyen au coeur de notre réflexion. Nous avons retourné ensemble chaque pierre, analysé chaque angle de chaque enjeu avec sérieux et profondeur pendant 51 séances de travail, le tout dans un climat de collaboration et de respect exemplaire qui n'est pas, certes, étranger au fait que nous déposons aujourd'hui un rapport unanime.
De plus, nous tenons à remercier les collègues qui ont dû, pour différentes raisons, quitter la commission en cours de route et tout particulièrement Geoff Kelley qui a dirigé avec brio la première année de nos travaux. Nous remercions également la précieuse équipe de recherche ainsi qu'Anik Laplante, l'incontournable secrétaire et femme orchestre de la commission, qui nous ont accompagnés de manière exceptionnelle.
Plus globalement, le débat sur la fin de la vie nous a amenés à réfléchir sur les mentalités face à la mort qui demeurent, encore aujourd'hui, entourées de tabous en rendant difficiles toutes les discussions à ce sujet. Ces mentalités mènent par fois à des décisions de fin de vie qui ne sont pas nécessairement conformes à ce que la personne aurait voulu. Vieillir et mourir sont pourtant des processus naturels de la vie qu'il faut accepter comme faisant partie intégrante de la condition humaine. Nous devons apprendre à apprivoiser la mort et être capable d'en discuter plus ouvertement avec nos proches.
Par ailleurs, nous demandons au gouvernement de remettre un rapport sur la mise en oeuvre de la politique de soins de fin de vie d'ici un an et de présenter un projet de loi sur l'ensemble des recommandations de notre rapport au plus tard en juin 2013. Nous sommes persuadés que nos recommandations contribueront à renforcer l'engagement solidaire que nous avons envers les personnes malades, leurs proches et les soignants.
Enfin, nous croyons que le sérieux de notre démarche et l'importance de la participation citoyenne sauront convaincre le gouvernement de donner suite à nos recommandations dans les meilleurs délais. Il en va du respect des personnes qui traversent l'étape ultime de leur vie. Merci beaucoup.

M. Séguin (Rhéal): Mme Hivon...

Une voix: ...

M. Séguin (Rhéal): Mais il n'y a pas personne de l'exécutif. Bon, je vais y aller.

Des voix: ...

M. Séguin (Rhéal): ...l'aide médicale à mourir, c'est un acte, c'est l'euthanasie. Alors, l'euthanasie est un acte criminel selon le Code criminel. Comment vous conciliez les deux?

Mme Hivon: En fait, ce qu'on dit, c'est que l'aide médicale à mourir, c'est le nom que nous donnons à la réalité qui est connue ailleurs sous le nom d'euthanasie. Ce qu'on dit, c'est que l'aide médicale à mourir fait partie d'un continuum de soins appropriés de fin de vie parce que, compte tenu de l'évolution de la médecine, compte tenu de l'évolution du droit, compte tenu de l'évolution des valeurs et des différentes avancées, il y a des circonstances où la médecine ne peut pas soulager certaines souffrances, dans l'état actuel des choses.
Or, autant le Collège des médecins, face à ses limites, recommande l'addition d'un autre geste possible dans un continuum de soins de fin de vie, et le Barreau du Québec recommande également que nous amendions nos lois en matière de santé et le Code civil pour permettre cette possibilité supplémentaire. Nous sommes confiants qu'en vertu de notre compétence en matière de santé, en matière de lois professionnelles et en matière d'application du droit criminel et de l'administration de la justice, nos assises sont tout à fait solides pour faire la proposition d'aujourd'hui, comme d'ailleurs le Barreau le fait dans le mémoire qu'il a déposé devant nous.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Josée Thibeault.

Mme Thibeault (Josée): Comment on départage l'euthanasie ou l'aide à mourir avec l'assistance médicale de ce qu'on appelle habituellement le «suicide assisté»? Parce que c'est évidemment dans... J'ai lu le rapport, j'ai lu ce qui se passe dans d'autres pays aussi, c'est souvent le reproche qu'on peut faire à certains personnes qui confondent le suicide assisté avec une euthanasie. Et là vous modifiez le terme «euthanasie» pour autre chose, mais ça reste ça quand même.

Mme Gaudreault: Il y a une grande différence entre le suicide assisté et l'euthanasie puisque le suicide assisté demande le concours d'une tierce... d'une deuxième personne pour se donner la mort, et ce n'est pas toujours dans un contexte de fin de vie. Il y a des personnes qui peuvent, à un moment donné dans leur vie, décider qu'ils en sont assez, de mettre un terme à leurs souffrances.
Nous, ce que nous proposons, c'est de vraiment donner une option supplémentaire dans un contexte de fin de vie. Alors, vous avez vu les critères tout à l'heure, la personne doit réponse à l'ensemble de ces critères et doit discuter avec son médecin parce que, nous, c'est aussi dans un environnement médical que ce geste-là doit poser. Seul un médecin pourra répondre positivement à cette demande d'aide médicale à mourir. Alors, pour nous, le suicide assisté ne répondait pas vraiment aux enjeux que nous devions discuter dans le cadre de notre commission, puisque c'est la fin de la vie qui était visée par les recommandations que nous faisons.

Mme Thibeault (Josée): Mais, vous savez, il y a eu des cas au Québec où une personne très malade, mais qui pouvait continuer à vivre plusieurs années, a requis l'aide de quelqu'un pour mourir. Mais elle allait mourir de sa maladie très souffrante de toute façon, mais plus tard, là, que la subtilité est...

Mme Hivon: Bien, en fait, sur l'aspect juridique des choses, le suicide assisté, c'est le fait de fournir à quelqu'un les moyens, donc, de mettre fin à sa vie. L'euthanasie, c'est d'aider quelqu'un à mettre fin à ses souffrances. Juste une précision: le suicide assisté, il est prévu noir sur blanc dans le Code criminel, ce qui n'est pas le cas de l'euthanasie. L'euthanasie, c'est par différentes dispositions que certains disent qu'il y a cet encadrement. Mais, comme vous l'avez vu, il n'y a jamais eu de condamnation par un jury et il n'y a jamais eu non plus au Québec de poursuite en vertu de ces articles-là.
Vous avez tout à fait raison de dire que, le suicide assisté, on le voit plus pour des cas de proches qui aident un proche, alors que l'aide médicale à mourir, c'est vraiment - et c'est pour ça que ce terme-là est celui qui est retenu - c'est vraiment une aide dans un contexte médical par un médecin dans un contexte de fin de vie où on ne peut pas mettre fin aux souffrances de quelqu'un par d'autres moyens. Alors, c'est une nuance qui est très, très fondamentale. Et le suicide assisté se présente beaucoup plus comme un acte isolé plutôt que quelque chose qui se situe dans un continuum de soins en fin de vie dans un contexte médical.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Pierre Asselin, du Soleil. C'est M. Asselin, ça?

M. Pelchat (Pierre): Pierre Pelchat, le Soleil.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): ...excusez.

M. Pelchat (Pierre): Il y a un M. Leblond qui est passé à votre commission parlementaire. Est-ce qu'il faut comprendre aujourd'hui, à sa demande... vous acquiescez à sa demande?

Mme Gaudreault: Oui. Si M. Leblond répondait à tous les critères selon son médecin, il pourra... on pourra accéder à sa demande et avoir une...

M. Pelchat (Pierre): ...de ce que vous en savez avec son passage en commission parlementaire?

Mme Gaudreault: Vous savez, nous ne sommes pas des médecins. C'est vraiment le médecin qui va établir, avec son patient, le moment de la fin de sa vie, le moment où ses souffrances sont devenues intolérables. Et c'est suite aussi à la défense aussi...

Une voix: La déchéance.

Mme Gaudreault: ...la déchéance, pardon, la déchéance avancée. Et il y a aussi... Il n'est pas seul, son médecin. Il devra demander aussi l'avis d'un second médecin pour pouvoir avoir l'autorisation de répondre à M. Leblond.

M. Pelchat (Pierre): Juste une question complémentaire en rapport avec les personnes qui sont déjà malades et les personnes âgées. La crainte exprimée, c'est qu'en acceptant cette forme d'euthanasie médicale... par un médecin, pardon, ça va accroître le fardeau sur ces gens-là de demander, justement, une aide médicale à mourir. Est-ce que vous ne craignez pas justement qu'il y ait des dérapages de ce côté-là?

Mme Hivon: Comme on l'a dit, la volonté de vivre, elle est très fermement ancrée dans les gens. Et d'ailleurs, on peut vous dire qu'en Belgique c'est 0,7 % des décès qui se font via la loi, donc, sur l'euthanasie. Aux Pays-Bas, c'est un peu moins de 2 %. C'est un très petit nombre de personnes qui, en fait, en viennent à n'avoir aucune autre solution pour mettre fin à leurs souffrances et qui le demandent expressément comme l'expression de leur volonté personnelle.
Et, avec les critères qu'on a mis, évidemment, la personne doit être en fin de vie, sa maladie doit être grave et incurable et elle doit avoir des souffrances qui ne peuvent être soulagées et constantes. Alors, ce n'est pas... Ça n'a rien à voir avec une personne âgée qui pourrait avoir une fatigue de vivre, ça n'a rien à voir avec une personne vulnérable. Ce sont vraiment pour des gens en fin de vie.
Et, si je peux ajouter, l'expérience étrangère montre que ça abrège la vie en moyenne d'une dizaine de jours des personnes. Donc, c'est vraiment des gens qui vivent, pour la plupart, 80 %, ce sont des cas de cancer, qui vivent une longue agonie, et qui souffrent, et qui ne trouvent plus de sens à cette souffrance intolérable.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Denis Lessard, La Presse.

M. Lessard (Denis): Vous parlez de souffrances exceptionnelles, vous parlez de souffrances physiques et psychologiques. C'est dur à baliser tout ça. Qui décide que c'est exceptionnel, que c'est... Des souffrances, surtout psychologiques, comment on fait pour évaluer ça, là? Il y a une part d'arbitraire importante que vous introduisez.

Mme Gaudreault: Vous savez, c'est le médecin qui demeure la personne responsable d'établir l'intensité de la souffrance avec son patient. J'ai parlé tout à l'heure de sédation palliative continue, alors imaginez, lorsqu'un médecin décide avec son patient de le mettre dans un état d'inconscience jusqu'à la fin de ses jours, c'est parce que les souffrances sont vraiment intolérables.

M. Lessard (Denis): Des souffrances psychologiques, ça peut être des gens extrêmement déprimés ou extrêmement, tu sais, à cause d'une maladie. Ce n'est pas...

Mme Hivon: On a beaucoup fouillé cette question-là. Beaucoup nous ont dit qu'en fin de vie... beaucoup de médecins de soins palliatifs, d'autres médecins qui sont venus, des gens aussi qui avaient accompagné des proches nous ont exprimé à quel point la souffrance psychologique en fin de vie peut être insupportable, l'angoisse incontrôlable face à la mort, le sentiment de perte de sens complet, le sentiment que l'agonie perdure d'une manière démesurée. Donc, ce sont des éléments qui sont présents.
Des gens doivent, dans l'état actuel des choses, pour certains, prendre des médicaments, des psychotropes très forts pour, par exemple, pouvoir être capables de survivre aux derniers moments d'agonie. Et, bien sûr, on le met dans notre rapport, la présence du psychiatre est requise pour, dès lors qu'il y a un doute du médecin traitant, pour évaluer la question de la souffrance psychologique, pour évaluer aussi l'attitude de la personne, pour être certains qu'il n'y a pas de dépression sévère médicale en fin de vie mais bien une décision libre et réfléchie.

M. Lessard (Denis): M. Leblond est atteint de sclérose en plaques, il n'est pas nécessairement en fin de vie. On peut dire, bon, il peut continuer plusieurs années, on ne le sait pas. Mais on l'autoriserait à réclamer ça de son médecin?

Mme Gaudreault: S'il est en fin de vie... Vous savez, la fin de la vie, ça a été aussi... On a eu beaucoup de débats par rapport à comment on qualifie la fin de la vie. Alors, pour certaines personnes, c'est une question de jours, pour d'autres, ça peut être une question de mois, et d'autres peut-être même pour une question d'années, lorsqu'on parle des démences et des maladies comme l'Alzheimer. On parle d'une mort sociale et, ensuite, la mort médicale. Mais, dans le cas de M. Leblond, si, avec son médecin, il établissait qu'il répondait à tous les critères de façon concomitante, c'est vraiment au médecin de juger et de son deuxième avis de médecin de juger s'il est apte à obtenir une aide médicale à mourir.

M. Lessard (Denis): Une dernière question. Vous ne semblez pas vous être entendus sur l'autorisation préalable, c'est-à-dire quelqu'un qui déciderait, si je suis atteint d'Alzheimer, de... Vous demandez une étude là-dessus, d'approfondir ça. Est-ce qu'il y a eu un débat pour dire: Bon, bien, on ne peut pas s'entendre puis...

Mme Hivon: On a discuté... Non, mais on a discuté beaucoup, beaucoup de ça. C'est une situation qui est très, très préoccupante compte tenu aussi du vieillissement de la population. Le fait est qu'on l'a considérée avec beaucoup de sérieux, c'est-à-dire la possibilité qu'une personne qui est atteinte de démence, comme par exemple la maladie d'Alzheimer, puisse le demander de manière anticipée, par exemple en disant: Quand je serai rendu à tel stade où je n'aurai plus conscience de rien, je ne pourrai plus m'habiller seule ou manger seule, j'aimerais pouvoir être aidé à mourir.

Évidemment, vous comprenez qu'au coeur de notre proposition est le consentement libre et éclairé de la personne. Donc, ça posait ce défi-là, mais on se disait qu'il n'était pas nécessairement insurmontable, sauf que nous n'avons pas été éclairés en profondeur sur cet enjeu-là. On doit vous dire qu'il y a uniquement deux médecins, qui étaient des spécialistes des démences, qui sont venus. Très, très peu de citoyens aussi qui sont venus sur cet enjeu-là. Donc, on a jugé, à cause des éléments, je dirais, éthiques très, très importants reliés à cette question-là... parce qu'on comprend qu'il faut, à un moment donné, que quelqu'un pose le jugement de dire: D'accord, la personne qui est devant moi, elle est rendue au stade exactement qu'elle décrit dans ses directives anticipées. Ce qui n'est pas simple de décider, c'est aujourd'hui le jour où on pose le geste d'arrêter ces souffrances-là de la personne, comme elle l'a demandé.
Alors, compte tenu de l'ampleur de ces questions éthiques et médicales, je vous dirais, de la possibilité aussi de nommer les stades des recherches qui sont en cours, on s'est dit que c'était plus sage - on reconnaît que c'est une question fondamentale - mais de référer à la recommandation qu'il y ait un comité d'experts sur le sujet pour éclairer davantage là-dessus.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Jean-Luc Lavallée, Journal de Québec.

M. Lavallée (Jean-Luc): À ce sujet-là, justement, pour poursuivre dans la même veine, la demande anticipée, c'est votre recommandation 17, vous parlez de gens qui pourraient faire une demande, bon, pour éviter justement de se retrouver dans une situation d'inconscience, même à la suite d'un grave accident. Ça veut dire que toute personne, même en santé, pourrait faire la demande anticipée dans l'éventualité de. Est-ce que vous ne craignez pas, dans ce cas-ci, une avalanche de demandes?

Mme Gaudreault: Mais peut-être qu'on pourrait avoir une avalanche de déclarations anticipées par rapport à cette situation très, très précise d'inconscience continue, mais ça ne change rien dans la réalité des gens. S'ils ont pris cette précaution au préalable, c'est seulement dans le cas où cela pourrait survenir.

M. Lavallée (Jean-Luc): Vous calquez le modèle européen. Est-ce que là-bas vous avez vérifié si effectivement il y avait eu de nombreuses demandes dans ce sens-là pour des gens qui sont en pleine forme et en santé?

Mme Hivon: Il y en a... Il y a beaucoup de - on a les chiffres, là, je pourrai fouiller - il y a beaucoup de gens, je pense qu'il y a 11 000 personnes dans le registre - on me dit oui - il y a 11 000 personnes dans le registre qui ont fait une demande anticipée, donc, en Belgique. Par ailleurs, le nombre de cas par année est très petit. Et pourquoi? Bien, la situation d'inconscience complète, à la suite d'une maladie, on pense par exemple à un cancer du cerveau, dans certains cas rares, un accident, ça va se produire très rarement que la personne va avoir besoin en quelque sorte d'une aide pour que ses souffrances soient abrégées parce que souvent elle va être sous respirateur ou tout ça, et la décision va plutôt être de retirer le respirateur par un proche, vous comprenez, Ce qui est tout à fait permis en ce moment. Mais il y a des cas où il n'y a pas d'aide, donc il n'y a pas cette possibilité-là d'arrêter un traitement, et c'est pour ces cas-là très, très spécifiques.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Kevin Dougherty, The Gazette.

M. Dougherty (Kevin): Yes. I wonder, Mme Hivon, if you can explain to me, I'm going to use my translation, «dying with medical assistance», would that be a good translation?

Mme Hivon: We say «medical aid to die».

M. Dougherty (Kevin): OK, fine. What is the difference between that and euthanasia? Euthanasia is very charged to word, you know, people get very excited about these words. Is it the same thing or is it a more precise term? How is it different?

Mme Hivon: We believe that it's a more precise term because it reflexes two very important values that we have, which is the help accompanying somebody, which means not somebody taking a decision alone, in an isolated state. And furthermore, the second is the fact that it has to be, in all cases, in a medical context, in a medical situation, in the context of a continuum of appropriate care at the end of life.

M. Dougherty (Kevin): There is the case... On assisted suicide, you seem to have not dealt with that or... I'm thinking about the Tracy Latimer's case for instance, you know, in Canada and Sue Rodriguez. I can't think of a case in Québec, sorry, but those are cases that you're not dealing with at all in your report

Mme Hivon: The case of Latimer, we decided that one of our fundamental criteria is that it is the person herself who asks for the assistance. It cannot be, in no case, somebody else who asks for somebody. This is, for us, something very fundamental, so it excludes that. And also, we don't recommend the possibility for people who are minors because we believe it's so important that somebody has to be an adult to take such a decision.

M. Dougherty (Kevin): Can I ask... It took you a long time to come to a unanimous report, and I'm wondering, you know, was there an evolution, was there... were there problems in agreeing on things? Can you tell me how you arrived at the position you arrived at?

Mme Gaudreault: It was a long process because the complexity of the issues, not because a lack of unanimously... unanimity, sorry. No, we were really very close in the debates. Some of them took a long time, like we referred to Alzheimer disease, but we were unanimous almost from the beginning and we're very proud of that.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Tim Duboyce.

M. Duboyce (Tim): Why did you come to the conclusion that this should only be limited to people at the end of... closer to the end of natural life? Why not allow somebody who feels deep distress, or pain, or something else earlier in life to also benefit from this?

Mme Hivon: Because, for us, it's very important to be in a context of care, in a context of medical care. And during life, for example, if you think maybe about somebody who's quadriplegic or doesn't find meaning in their life, they are not at the end of life. They still have hope to feel better, they have hope, we hope, as a society, that there can still be hope for them because they can still have 30 years, 40 years in front of them. It's not the same thing when you have somebody who is at the end of life because they are terminally ill with a cancer or because they have multiple sclerosis in a very advanced stage, and there is no hope of getting better. We say in the criteria «sans aucune perspective d'amélioration», which is not the same thing when somebody is not at the end of life. So, this is a choice that we really decided to make.

M. Duboyce (Tim): I understand the distinction but why are you making that distinction? I understand the distinction you're making, but why...

Mme Hivon: Our mandate was to look at the conditions of... at the end of life, and so we felt we were away from our mandate. But, in our last section, we say that it's a very important issue. And it's a very sensitive issue, and we think it's something that has to be dealt with. But we didn't feel it was our mandate to look at that, which is really something in another perspective. It's something a lot broader than to care about the people and the way we treat them at the end of life.
And also, we were always very, very concerned about the message concerning the importance of life and about prevention of suicide. This is why also we have to say that the expression in itself, «assisted suicide», for us, it's not the reality that we suggest but also, for other considerations, it's an expression that we reject because we feel that the society put so much effort and so much emphasis on the importance to fight for life and to fight against suicide that we cannot send contradictory messages.
Le modérateur (M. Rhéal Séguin): Marianne White.

Mme White (Marianne): I understand the fact that you're using the word «medical aid to die» as opposed to «euthanasia», but does that amount the same thing? In the end, it's just a word that's different.

Mme Gaudreault: Yes, it's the same thing. But we're talking about a medical environment only, so that's why we are not close to Oregon, Washington. They're more like «assisted suicide», and it's not in the medical environment. Us, it's the only... the doctor is the only person who can do this act.

Mme Hivon: And, you know, in the Netherlands... we always talk about euthanasia, but it's not called euthanasia neither, because euthanasia, in itself, the definition is to help somebody end their suffering. It doesn't include in itself, in the definition, the reference to the medical context, and, for us, it's fundamental, and it's the same thing in the Netherlands. That's why it's not the expression there either.

Mme White (Marianne): So, the Québec model would be based on what is going on in the Netherlands and in Belgium.

Mme Hivon: Very close to Belgium...

Mme Gaudreault: Belgium.

Mme Hivon: ...which is the latest model. In the Netherlands, it's a little different because there have been a tolerant policy 20 years before they had... the enacted a legislation, 10 years ago. In Belgium, it wasn't the case. It's something that dates back to 10 years also, but their criteria are a lot stricter. And we were really impressed by the way they dealt with their legislation.

Mme White (Marianne): I'd also like to hear you on the national debate that this report will spark. You know, in the past two years, you know, other provinces have been following what happened in Québec very closely, and it's a sensitive issue, not just in Québec but also elsewhere. Do you hope that, with this report, Québec would be sort of a leader in the country in terms of helping people die with medical help?

Mme Hivon: I think we want to help the debate and to elevate the debate. There is a MNA in Ontario who was telling me: We're watching you and we want to, for you, to go very far because we are very interested in doing the same thing in Ontario. So, we are very conscious that what we depose, this report, will have repercussions... non...

Une voix: Impact.

Mme Hivon: ...impact on the rest of Canada.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Angelica Montgomery.

Mme Montgomery (Angelica): Yes. What you're essentially recommending is that our prosecutors stop applying part of the Criminal Code. What kind of reaction would you expect to get from the federal Government when you're suggesting that our prosecutors not apply the law?

Mme Hivon: We really have to say that our approach, our legal approach, is based on two trends, two fundamental facts. The first one, the criteria, because of our jurisdiction over health, they are included in our health legislation in the part concerning care in the Civil Code and also in the legislation relating to social and health services. OK? This is very clear and this is also the approach that's recommended by the Québec Bar. First of all.
What we're saying is, because there is still this, I would say, «stigmate» - I don't know - this very...

Une voix: Stigma.

Mme Hivon: ...stigma, OK, over the burden and the fact that there are criminal previsions, we want that the doctors feel really at ease and that they can do what the law in Québec allows them to do totally, I would say, in a... with all their medical expertise and that they do not have to worry about something else. So, this is why we bring the second step which is to say that, in the cases where the legislation is followed, no criminal proceedings could be tabled. And I just want to remind you that Québec has this power, has this jurisdiction because we have jurisdiction over the administration of justice and the application of criminal laws. It is Québec that decides if it sues or not somebody in a given situation.
And I want to remind you that this is an approach that was taken in relation to abortion laws in 1976, because we had a little bit of a similar situation, where the courts were never giving a verdict of... never they were recognizing a doctor, a physician guilty after practicing an abortion. The juries themselves never, so the attorney general of Quebec decided at the time that, since he was in front of a case of the fact that the criminal law was not applied, because of the evolution of society, he decided to issue directives to its prosecutors not to prosecute.

Mme Montgomery (Angelica): I'm also wondering how exactly this idea of the end of life or allowing this for the end of life is going to work for people with chronic diseases like Alzheimer's, multiple sclerosis, Lou Gehrig's disease that might last for years. Where do you put the line?

Mme Hivon: Every cases are unique, and this is why the doctor has to decide when it's the end of life... of the life of that person. And we have all the criterias, and they have to be respondent all at the same time, and it may be a question of months before the real end of life in certain cases. And, this is a very - comment on dit ça - it's a doctor's decision in that case, and he has to refer to a second doctor to make sure he made the right evaluation of his patient's situation, and then he could do this terminal act.
And, in the cases of Alzheimer's, we told earlier that it's a question of the person who makes his own decision. So, when you are in an advanced stage of Alzheimer's disease, you can no longer make that decision, and that's why it couldn't be applied.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Final question to Caroline Plante.

Mme Plante (Caroline): ...along with the same line, would you say that you're putting extra pressure on doctors to make that right decision, and what is the additional training that they'll be needing?

Mme Hivon: First of all, we have to say that this is very important in our report: every physician keeps his faculty to conscientious objection, «objection de conscience». So, it's the same with abortion, it's the same with different kinds of practice that exist in the medical sphere. So, the physician, in a way, can't be forced to do something that he or she is not at ease with. As far as the education is concerned... maybe Maryse can answer.

Mme Gaudreault: We were told that, actually, it's about 20 hours in the omnipracticians programs, so which is less... for palliative care, I'm sorry. And we were impressed, when we went the Netherlands, to hear about the scan doctors. Those are doctors that have experienced euthanasia, and we are very conscious that the first time... your first patient that talk to you about this medical aid to die, you must be like... a little uncomfortable. And, in the Netherlands, there is this consulting and support for euthanasia for doctors. You have a phone number, you call there, and there is a doctor helping you making the decision with the patient and then he's going to help you. He is like a mentor to help the physician to practice this terminal act for the first time.

Mme Plante (Caroline): That's what you have in mind for Québec?

Mme Hivon: You will see in the report that we are really impressed with that body, which is there to advise but also to provide the second physician and to make sure that the physician is totally independent from the first one and from the patient, which is really something that guaranties the whole process because many people say: But, you know, if a physician and his patient decide to do something, and the criteria are not totally respected, this is why it's so important to have a second opinion. And, in the Netherlands, they push it a step further and they say: We have a body that is there to refer to a physician that will be totally independent.

Mme Plante (Caroline): ...and 20 hours of training, that's currently in...

Mme Gaudreault: That is for palliative care.

Mme Plante (Caroline): OK, so would you increase that number of hours to...

Mme Gaudreault: Yes.

Mme Plante (Caroline): ...what is the objective?

Mme Gaudreault: It's not sufficient, and we... one of our recommendation is to ask the Collège des médecins to make sure they work with universities to have a program with more hours. You know, the...

Mme Plante (Caroline): ...

Mme Gaudreault: We are not doctors. I'm sorry, but... 20 hours is less...

M. Séguin (Rhéal): M. Khadir, en tant que médecin, est-ce que vous pensez que la communauté médicale va appuyer ces recommandations-là?

M. Khadir: Bien, la plupart des médecins, je suis persuadé, vont être très contents d'apprendre qu'il y a un encadrement, qu'on prend ça en charge collectivement, qu'on ne laisse pas le monde médical, les médecins, les infirmières, avoir seuls à décider, de prendre des décisions parce qu'on comprend bien que la fin de vie survient souvent à l'hôpital, trop souvent pour la plupart, enfin, des gens qui sont venus nous voir, et bien des décisions se prennent qui sont déjà des décisions qu'on prend en essayant de jongler avec les critères qu'on a fini, nous, par ramasser et structurer.
Donc là, enfin, on va travailler tous ensemble de manière plus cohérente, et c'est ça qui est, je pense, une des réalisations de ce travail, c'est de faire en sorte que le médecin soit enfin soulagé. Les premiers temps, ça va être très troublant parce qu'on va mettre des noms, des mots qui sont un petit peu plus chargés sur tout ce processus, mais, à la fin, à la fois les médecins, le personnel et surtout les patients vont être soulagés de savoir que tout ça est encadré, que ce n'est pas laissé à l'à-peu-près ou dans une confusion et juste au bon gré du médecin ou de l'infirmière de l'équipe au moment où ces décisions graves doivent être prises.

M. Duboyce (Tim): ...and just to follow upon that, Mr. Khadir, do you believe, putting your doctor's hat on, do you believe that medical aid to die unofficially happens already?

M. Khadir: This is the reason why we think that it must be contained as a component of the medical assistance to life. We think it's a process and dying is an important process of life itself. And actually. we take a lot of time decisions that tend to be what we call dying with medical assistance. Because when we think about the terminal sedation, palliative sedation, the doctor who takes the decision knows that what he's going to do, he's going to advance the death, and he hopes that the agony will be the shorter and the shorter possible. So, in some way, by willing to alleviate the pain, he's also trying to precipitate the death for the best benefit of the patient who is in agony.
Actually, I bring your attention to page 39, where there is a person, a prominent person who has a lot of experience, of prominent doctor, a lot of experience, Dr. Marcel Boisvert, in palliative care, and he says that we are actually practicing that. Now, with this recommendation, we're going to put a consistent, coherent framework. And I wanted to end with this mention, that actually, in the beginning, when Francis Bacon for the first time introduced the notion of euthanasia, when the first time it was used, it was Francis Bacon, and he was talking about doctors. And what doctors have to consider also be doing not only curing, but thinking that sometimes the best cure, the best help they can give, is to help the patient die.

Mme Hivon: Maybe I would just add one thing. Never forget that it's the Collège des médecins who asked also for the debate in the fall of 2009, following the tabling of their very important report. They asked the National Assembly to look at that under the scrutiny of health care. Because they said: We are confronted every day with the limits of our practice and we need solutions. And we believe that we are bringing solutions not for doctors, in the first instance, but for people who suffer and their doctors who see them suffering without being able to help them.

Le Modérateur (M. Rhéal Séguin): Merci beaucoup.

(Fin à 12 h 34)

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