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Version finale

15e législature, 3e session
(10 janvier 1922 au 21 mars 1922)

Le lundi 20 mars 1922

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 11 h 301.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Service d'hygiène

L'honorable M. David (Terrebonne) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. David (Terrebonne) propose: 1. Que le lieutenant-gouverneur en conseil nommera un directeur du service provincial d'hygiène, un inspecteur en chef et un secrétaire, et que ces officiers recevront un traitement n'excédant pas, pour le directeur, cinq mille dollars, pour l'inspecteur en chef, quatre mille dollars, et pour le secrétaire, quatre mille dollars.

Adopté.

2. Que le lieutenant-gouverneur en conseil nommera également des analystes, un ingénieur sanitaire, un compilateur de la statistique, des sous-inspecteurs et les autres officiers nécessaires, et que ces officiers recevront, pour leurs services, la rémunération proportionnée aux services qu'ils doivent rendre, fixée par le lieutenant-gouverneur en conseil.

Adopté.

3. Que les membres du Conseil d'hygiène nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil recevront dix dollars par jour pour chacune de leurs assemblées, outre leurs frais de déplacement et de pension et que les membres de droit, aux termes du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi qui accompagne les présentes résolutions, qui assisteront aux assemblées du Conseil, n'auront droit qu'à leurs frais de déplacement et de pension.

Adopté.

4. Que le lieutenant-gouverneur en conseil pourra nommer, avec le traitement qu'il jugera à propos, des officiers d'hygiène chargés d'agir dans tout territoire de la province non érigé en municipalité locale ou dont le conseil municipal n'est pas organisé, et définir leurs pouvoirs; et que ces officiers seront sous le contrôle du directeur du service provincial d'hygiène.

Adopté.

5. Que les dépenses encourues par le service provincial d'hygiène dans l'application des dispositions de la loi qui accompagne les présentes résolutions seront défrayées à même les deniers affectés par la Législature aux fins de l'hygiène publique.

Adopté.

6. Que les dépenses du service provincial d'hygiène seront payées à même les deniers affectés à cette fin par la Législature.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions. Les résolutions sont lues deux fois et adoptées par la Chambre.

Il est ordonné que lesdites résolutions soient renvoyées au comité plénier chargé d'étudier le bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909, soit maintenant lu une deuxième fois.

Ce bill est en corrélation avec toutes les lois concernant la santé publique, groupées en une seule, et gouvernées par le Bureau provincial d'hygiène.

Depuis de nombreuses années, nous n'avons qu'à nous féliciter des services du Conseil supérieur d'hygiène. La réforme actuelle n'est pas un vote de non-confiance envers les membres du Conseil supérieur d'hygiène dont les opérations et les activités dans la province ont obtenu de si excellents résultats et ont contribué pour une si large mesure dans l'amélioration de la santé publique. Le Conseil a fait l'éducation du peuple, mais le temps est venu de faire des réformes.

Le gouvernement considère que le peuple est suffisamment préparé maintenant à se surveiller lui-même au point de vue de l'hygiène pour que l'autorité provinciale prenne le contrôle de la santé publique et développe le système conformément aux nouveaux modes de vie, particulièrement dans les grandes cités et villes. Ce Conseil continuera d'exister pour étudier les divers problèmes qui pourront survenir relativement à la santé publique, et les suggestions qu'il jugera à propos de faire devront être soumises aux officiers du nouveau département qui, eux, seront chargés d'exécuter les règlements adoptés.

Le service que nous nous proposons de créer, à Québec même, sera sous le contrôle du secrétaire provincial qui, par le fait même, devient ministre de la Santé publique. La loi nouvelle nomme un directeur général, dont le salaire sera de $5,000 par année, un inspecteur-en-chef et un secrétaire, qui recevront tous deux $4,000 par année.

En plus de ces officiers, il y aura un Bureau de cinq membres qui recevront une somme de $10 en plus de leurs dépenses de voyage pour chaque assemblée à laquelle ils assisteront. Le directeur sera président du Bureau et les assemblées se tiendront soit à Montréal, soit à Québec et dans les autres villes ou il sera jugé nécessaire. Le Conseil supérieur d'hygiène soumettra aux chefs du service les réformes à faire.

Les quartiers généraux du Bureau provincial d'hygiène resteront à Montréal. Montréal est le centre où il faut le plus de surveillance. En établissant un bureau à Québec, cela ne veut pas dire que l'on veuille écarter Montréal qui restera le grand centre où se manifesteront toutes les activités du département et du Conseil de l'hygiène publique. Montréal conservera le laboratoire, les statistiques, mais le bureau principal du service sera à Québec. Notre but n'est pas de tout centraliser à Québec, mais d'améliorer le service.

Le directeur exercera son autorité sur les membres de ce bureau qui comprendra des analystes, des ingénieurs sanitaires, des inspecteurs statisticiens et autres officiers dont le salaire sera décidé par le lieutenant-gouverneur en conseil; il exercera également son autorité sur le Bureau d'hygiène et sur les autorités sanitaires municipales.

Ce bureau, qui sera établi à Québec, sera assisté d'un conseil composé de huit médecins ayant au moins cinq années de pratique et qui verra aux divers services d'hygiène de la province. L'inspecteur-en-chef aura le contrôle général de l'inspection sanitaire dans la province. Les cinq membres du bureau qui ne feront pas partie du personnel régulier seront maintenus à leur poste au bon plaisir.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je regrette que cette mesure ait été proposée si tard pendant la session. Je crois bien que la mesure a du bon et contribuera à améliorer l'administration (du) service de la santé publique dans la province. J'espère que les officiers que l'on nommera seront compétents, car leur responsabilité sera considérable. Je suppose que les officiers du Conseil d'hygiène qui sont actuellement à Montréal seront appelés à venir résider à Québec. C'est là le point important du projet.

L'honorable M. David (Terrebonne): Il n'est pas question de déménager à Québec les officiers qui sont à Montréal. Le bureau de Montréal restera comme il est aujourd'hui.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Alors, les officiers de Montréal n'ont pas de chance d'être promus.

L'honorable M. David (Terrebonne): J'ai dit les officiers et non les individus.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) constate qu'à la suite de ses remarques le gouvernement augmentera les salaires de ses employés au service d'hygiène. Le directeur aura $5,000 et l'inspecteur $4,000. J'espère en tout cas, dit-il, que l'on nommera des hommes compétents dans le choix des officiers du nouveau département.

L'honorable M. David (Terrebonne): Je tiens à faire remarquer au chef de l'opposition que ce projet a été présenté il y a un mois et qu'en ce qui concerne les nominations des officiers, elles seront faites d'une façon bien judicieuse, et le choix des candidats sera irréprochable. La compétence et les connaissances seront les seules conditions considérées.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Si le projet a été retardé, c'est probablement parce que des indiscrétions ont été commises. On a essayé depuis huit jours à faire croire que le retard de la présentation des mesures était dû à la grève des typographes. Il y a longtemps qu'elle est réglée et c'est injuste pour les ouvriers de leur faire porter la responsabilité des retards qui, au fond, sont dus à des employés incompétents probablement. On pourrait fort bien remettre cette mesure à la prochaine session.

M. Conroy (Montréal-Sainte-Anne) voit cette loi d'un bon oeil et il la croit de nature à aider puissamment l'administration du département d'hygiène dans cette province. Il veut cependant que le gouvernement fixe à $20 par jour la rémunération des membres du Conseil d'hygiène. Par la nouvelle loi, dit-il, le gouvernement fixe cette rémunération à $10 par jour de séance, le paiement des frais de voyage excepté.

Il (M. Conroy) rappelle qu'il avait fait des pressions, l'an passé, pour la création d'un département de l'hygiène ayant son propre ministre, mais apparemment, constate-t-il, le temps n'est pas encore venu de le faire.

Il suggère que les quartiers généraux de ce département soient établis à Montréal, la plus grande ville de la province qui, par la variété des races qui s'y trouvent, par son site commercial, industriel et pour plusieurs autres raisons, peut être considéré comme le centre aussi de tous les maux que le nouveau département sera appelé à combattre. Il demande donc la centralisation à Montréal de tout ce qui aura trait au service d'hygiène.

Il fait l'éloge de tous les médecins éminents qui, jusqu'ici, ont eu à administrer dans la province le service d'hygiène. Ces médecins, dit-il, ont fait preuve toujours d'un zèle remarquable et d'un dévouement sans bornes, et ils ont droit au plus vif témoignage d'appréciation de tous ceux qui les ont vus à l'oeuvre et ont bénéficié de leurs talents.

Il vante l'oeuvre accomplie par le Conseil dont il fait lui-même partie depuis quelques mois. Il loue le travail assidu et intelligent du personnel, en particulier du docteur E.-M.-A. Savard, l'inspecteur général, énergique, dit-il, méthodique et pratique parce qu'il connaît comme pas un la mentalité de nos gens, et qui a fait des merveilles depuis qu'il occupe ce poste responsable. Il loue aussi le Dr Elzéar Pelletier, au fait de toutes les choses de l'hygiène et qui, comme secrétaire, ne saurait être surpassé.

Il fait l'éloge des autres membres du Conseil supérieur d'hygiène. Ce conseil continuera à exister sous un autre nom, dit-il, et quelques changements seront faits dans sa formation. Il faudra une pratique de cinq ans à un médecin pour pouvoir y entrer. Le nouveau service sera beaucoup plus efficace et il y aura plus de cohésion que dans le système actuel. Le Conseil supérieur était composé de dix membres autrefois. Maintenant, il sera composé de huit membres dont le directeur, l'inspecteur et le secrétaire du service. Le directeur sera le président du Conseil d'hygiène. L'action du service d'hygiène se trouvant désormais moins limitée et plus libre, il (M. Conroy) espère qu'elle s'exercera plus efficacement à diminuer le taux alarmant de la mortalité infantile.

(Applaudissements)

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Nomination des juges des sessions et des magistrats de police

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 210 amendant les statuts refondus, 1909, relativement à la nomination des juges des sessions et des magistrats de police soit maintenant lu une deuxième fois.

Le but de ce bill est de permettre au gouvernement de nommer en qualité de magistrat de police et de juge des sessions de la paix des avocats compétents qui auront cinq années de pratique, au lieu de dix années comme le veut la loi actuelle, car, au bout de cinq années de pratique, un bon avocat est capable d'occuper dignement ces fonctions.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pourquoi cela? La position de juge est une position sérieuse qui exige que celui qui l'occupe soit une personnalité. Il importe que la justice soit dirigée, administrée et exercée par des hommes de prestige et de compétence. L'amendement du premier ministre n'est pas justifiable; seul le souci ou une prétendue obligation de nommer quelqu'un l'a inspiré. Il aura pour but de faire certaines nominations de jeunes gens pressés d'arriver à ces positions de magistrats.

Il (M. Sauvé) ne croit pas qu'une période de cinq ans soit suffisante pour être nommé magistrat de police ou magistrat des cours des sessions de la paix. Les charges sont très importantes et le nombre d'années d'expérience ne devrait pas être changé. Le premier ministre semble croire que les juges sont trop vite malades, puisque l'autre jour il a ajusté la qualification pour la pension de dix à huit ans, et il semble aujourd'hui craindre qu'ils ne vivront pas très longtemps. Il veut savoir si le gouvernement a quelque nom en tête, si cela ne signifie pas que certains avocats voudront se faire juges avant les élections. Il dit qu'ils ne sont pas qualifiés d'après la clause restrictive de dix ans. Il déplore le manque de décorum observé dans les cours de police à Montréal.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il est difficile de maintenir un décorum dans les conditions d'encombrement actuelles du palais de justice, mais le problème sera réglé lorsque le nouveau palais de justice sera complété à Montréal. Il (M. Taschereau) estime que, de temps à autres, des candidats de qualité pourront se faire garantir la magistrature, même s'ils n'ont pas les dix années d'expérience requises. Les rôles de ces cours étant chargés, le travail se fera plus vite par des jeunes magistrats que par des vieux. Ce dont on se plaint aujourd'hui, ce n'est pas de l'administration de la justice, mais du fait que la machine ne tourne pas assez rondement. Ce dont la province a le plus besoin, c'est d'avoir une justice prompte. La justice doit être bonne, mais aussi expéditive.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Charte de la Commission métropolitaine de l'Île de Montréal

M. Monet (Napierville) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 143 apportant des modifications additionnelles à la charte de la Commission métropolitaine de l'Île de Montréal soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

M. Monet (Napierville) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

L'article 1 est adopté.

Le comité étudie l'article 2 qui se lit comme suit:

"2. L'annexion du territoire d'une municipalité à une autre municipalité, sous l'autorité de la section précédente, aura les mêmes effets que si elle était faite par les conseils de ces municipalités, en vertu des dispositions du paragraphe quatrième de la section deuxième du chapitre premier du titre onzième des statuts refondus, 1909, mais sans que telle annexion soit soumise à aucune des formalités prescrites par ladite loi."

Cet article est amendé et l'alinéa suivant est ajouté:

"Le secrétaire-trésorier de la commission métropolitaine de l'Île de Montréal devra publier un avis de telle union ou annexion dans la Gazette officielle de Québec, et la résolution entrera en vigueur le jour de telle publication ou à telle date subséquente qui sera fixée dans la résolution et dans l'avis."

L'amendement est adopté.

L'article 2 ainsi amendé est adopté.

Les articles 3 à 5 sont adoptés.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a adopté avec un amendement. L'amendement est lu deux fois et adopté.

M. Monet (Napierville) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Charte de Mont-Joli

La Chambre procède de nouveau, selon l'ordre du jour, à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 94 constituant en corporation la ville de Mont-Joli.

Les amendements sont lus une deuxième fois.

M. Tessier (Rimouski) propose, appuyé par le représentant de Sherbrooke (M. Lemay), qu'il soit envoyé un message au Conseil législatif informant les honorables conseillers que l'Assemblée législative accepte les amendements du Conseil législatif au bill 94 constituant en corporation la ville de Mont-Joli, mais avec l'amendement suivant qu'elle prie le Conseil d'agréer:

Ajouter au commencement desdits amendements le texte qui suit:

"L'article 9 est remplacé par le suivant:

"9. Le territoire de la ville de Mont-Joli comprend le territoire actuel du village de Mont-Joli moins le territoire décrit ci-dessous:

"Partant au coin nord-ouest du territoire du village de Mont-Joli; vers le sud-est en suivant la ligne séparant ce village de la paroisse de Sainte-Luce jusqu'à la limite nord-ouest de la paroisse de Saint-Joseph-de-Lepage; de là, vers le nord-est, la ligne limitative entre Saint-Joseph-de-Lepage et Mont-Joli jusqu'à l'intersection du prolongement de cette ligne avec l'axe de la rivière Métis; de là, vers le nord-ouest, ledit axe jusqu'à sa rencontre avec le prolongement de la ligne entre les deuxième et troisième rangs de la paroisse de Sainte-Flavie; de là, vers le sud-ouest, ladite ligne limitative entre les deuxième et troisième rangs jusqu'au coin nord-ouest du lot numéro quatre cent quatre-vingt-neuf du cadastre de Sainte-Flavie; de là, vers le sud-est, la ligne séparant les lots numéros quatre cent quatre-vingt neuf et quatre cent quatre-vingt-dix dudit cadastre jusqu'au chemin de front du troisième rang; de là, vers le sud-ouest, la ligne nord dudit chemin de front du troisième rang jusqu'à la ligne est de la rue Aubin; de là, vers le sud, traversant le chemin du troisième rang en biaisant jusqu'à l'intersection de la ligne sud dudit chemin avec la ligne nord-est du chemin ou route Matapédia; de là, vers le sud-ouest, traversant ledit chemin Matapédia à angle droit; de là, vers le sud-est, en suivant la ligne nord-est du lot numéro quatre cent quatre-vingt-dix-neuf, environ quarante pieds anglais; de là, vers le sud-ouest, une ligne perpendiculaire à la ligne nord-est dudit lot quatre cent quatre-vingt-dix-neuf jusqu'à la ligne limitative entre les lots cinq cent deux et cinq cent trois dudit cadastre; de là, vers le nord-ouest, ladite ligne jusqu'à son point d'intersection avec la ligne entre les deuxième et troisième rangs; de là, vers le sud-ouest jusqu'au point de départ."

Adopté. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Travaux sur les lacs et cours d'eau

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 183 amendant les statuts refondus, 1909, relativement à certains travaux sur les lacs, rivières et cours d'eau soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Droits sur les successions

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 209 amendant la loi relative aux droits sur les successions.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Que le montant des droits imposés par les sous-paragraphes a, b et c du paragraphe 2, et par le paragraphe 3 de l'article 1375 des statuts refondus, 1909, tel qu'édicté par la loi 4 George V, chapitre 9, section 1, et amendé par les lois 7 George V, chapitre 20, section 1, et 8 George V, chapitre 24, section 1, soit calculé suivant la valeur de la succession, déduction faite des dettes et charges existant au moment du décès.

Adopté.

2. Que le montant des droits imposés par les sous-paragraphes a, b et c du paragraphe 2 et par le paragraphe 3 de l'article 1387b des statuts refondus, 1909, tel qu'édicté par la loi 4 George V, chapitre 10, section 1, et amendé par les lois 7 George V, chapitre 20, section 4, et 8 George V, chapitre 24, section 8, soit calculé suivant la valeur totale des biens mobiliers transmis, mentionnés audit article, déduction faite des dettes et charges existant au moment du décès.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté deux résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées par la Chambre.

Il est ordonné que lesdites résolutions soient renvoyées au comité plénier chargé d'étudier le bill 209 amendant la loi relative aux droits sur les successions.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 209 amendant la Loi relative aux droits sur les successions soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Legs ou héritages

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 208 concernant la saisine de certains bénéficiaires.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolution et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: Que les honoraires payables par l'héritier ou le légataire domicilié ou résidant ordinairement en dehors de la province, auquel sont transmis par le décès d'une personne qui est domiciliée dans cette province des biens mobiliers réellement situés en dehors de la province, avant et aux fins d'obtenir l'envoi en possession ou la délivrance légale des biens mobiliers situés dans, ou situés réellement en dehors de la province, qui lui sont ainsi transmis ou légués, seront calculés sur la valeur réelle des biens mobiliers réellement situés en dehors de la province aux taux suivants:

Si la transmission est en ligne directe, descendante ou ascendante, entre époux, entre beau-père ou belle-mère et gendre ou bru: 3 %;

Si la transmission est en ligne collatérale au degré successible: 9 %;

Si la transmission n'est ni en ligne directe, descendante ou ascendante, ni en ligne collatérale au degré successible, ni entre époux, ni entre beau-père ou belle-mère et gendre ou bru: 15 %;

Le tout, suivant les dispositions du bill qui accompagne la présente résolution.

Cette loi a pour but de déclarer qu'un héritier situé en dehors de la province, héritier de biens meubles situés en dehors de la province, mais appartenant à un citoyen de la province, devra payer une taxe à la province.

Cela vise à éliminer les doutes qui avaient été soulevés par le Conseil privé dans la cause Sharples, et confirmer ce qui avait déjà été fait pendant un nombre d'années par la province. Cette loi ne s'appliquera pas aux successions dévolues avant son entrée en vigueur.

La résolution est adoptée.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution, laquelle est lue deux fois et adoptée par la Chambre.

Il est ordonné que ladite résolution soit renvoyée au comité plénier chargé d'étudier le bill 208 concernant la saisine de certains bénéficiaires.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 208 concernant la saisine de certains bénéficiaires soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

La séance est levée.

 

Deuxième séance du 20 mars 1922

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 3 heures2.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Questions de privilège:

M. Joseph Dufour3

M. Dufour (Matane): M. l'Orateur, je me lève car je dois avoir été visé personnellement par certaines remarques de l'honorable chef de l'opposition4. Comme il n'y a pas d'autre personne de ce nom que moi-même à Saint-Moïse, je me crois visé personnellement. J'ai vendu, il est vrai, de la dynamite pour les travaux de Voirie non pas au gouvernement, mais à la municipalité de Saint-Moïse. Je tiens à dire que la dynamite qu'on a achetée à mon magasin l'a été au prix coûtant, sans aucun profit, à raison de $30 pour 100 bâtons, 100 détonateurs et 100 pieds de mèche.

Le prix était élevé, il est vrai, mais nous devions faire venir cette dynamite de Beloeil et payer des taux de fret de première classe. On ne fait pas venir de dynamite au char à Saint-Moïse, et comme c'est une marchandise qu'on doit garder avec précaution en l'isolant, je ne crois pas que ce prix soit exorbitant.

J'ai vendu cette dynamite non pas au gouvernement, mais à la municipalité qui ne pouvait s'en procurer ailleurs qu'à mon magasin et qui en avait besoin pour ses travaux de voirie, et je n'entends pas que l'on m'accuse d'avoir spéculé.

Je n'ai jamais sollicité personne pour vendre cet explosif et je n'en ai jamais vendu au gouvernement. Je tenais à faire ces déclarations à la Chambre et j'espère que l'on ne dira pas que, parce qu'un marchand vend quelque chose à une municipalité, quand il est député, on peut insinuer qu'il a fait une spéculation. J'espère qu'on cessera de m'accuser à ce sujet.

(Applaudissements)

Code municipal

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 198 concernant les affaires municipales et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909, les statuts refondus, 1888, et le Code municipal soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité5:

Les articles 1 et 2 sont adoptés.

Le comité étudie l'article 3 qui se lit comme suit:

"3. L'article 5929 des statuts refondus, 1909, tel que remplacé par la loi 9 George V, chapitre 59, section 11, et amendé par les lois 10 George V, chapitre 67, section 2, et 11 George V, chapitre 48, section 14, est de nouveau amendé:

"a. En retranchant les mots "ou commutation", dans la première ligne du paragraphe d;

"b. En y ajoutant l'alinéa suivant:

"Cependant, toute municipalité de cité, de ville ou de village peut accorder, pour une période n'excédant pas dix ans, une commutation de taxe à un tel établissement industriel ou commercial, par règlement approuvé par les électeurs propriétaires d'immeubles imposables et par le lieutenant-gouverneur en conseil, conformément aux prescriptions de la loi concernant l'approbation des règlements d'emprunt, mutatis mutandis."

Cet article est amendé et l'alinéa suivant est ajouté:

"Toute infraction aux dispositions du présent article pourra être poursuivie devant un tribunal compétent par un contribuable de la municipalité, par toute personne intéressée ou par le ministre des affaires municipales."

M. Gault (Montréal-Saint-Georges) demande s'il (l'honorable M. Nicol) a eu des nouvelles de la province d'Ontario en ce qui regarde l'abolition de leur loi permettant aux municipalités d'accorder des bonus ou des exemptions de taxes aux nouvelles industries.

L'honorable M. Nicol (Richmond): Le gouvernement est en pourparlers avec le trésorier provincial d'Ontario, et on lui a dit qu'il y avait un bill privé devant la Législature d'Ontario visant l'abolition des bonus ou des exemptions de taxes, mais qu'il a de très bonnes chances d'être adopté par la Chambre, de sorte qu'à la fin de la session la loi ontarienne serait la même que celle de Québec, pour ce qui concerne l'attribution de bonus, du moins. En attendant, la loi actuelle est adoptée par Québec, afin de préserver la province contre l'attraction des nouvelles industries vers l'autre côté des frontières.

M. Smart (Westmount) pose une question.

L'honorable M. Nicol (Richmond): Le ministre ontarien s'attend à ce que ce bill ait force de loi, quoi que ce ne soit pas une mesure gouvernementale. La loi de Québec interdit l'octroi de bonus et d'exemptions de taxes, et des plaintes ont été adressées au gouvernement ici à l'effet que les industries s'installent en Ontario, en raison de la différence dans la législation. Il (l'honorable M. Nicol) dit que, si Ontario promulgue une loi interdisant les exemptions de taxes, le gouvernement de Québec ne les permettra pas ici, mais gardera fidélité avec l'Ontario. La clause demeure dans le bill, dû à l'incertitude quant à ce que fera l'Ontario.

L'amendement est adopté.

L'article 3 ainsi amendé est adopté.

Les articles 4 à 14 sont adoptés.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a adopté avec certains amendements6. Les amendements sont lus deux fois et adoptés.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté les messages suivants, lesquels sont lus ainsi qu'il suit:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, sans amendement, le bill suivant:

- bill 36 sur les convictions sommaires de Québec.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, sans amendement, les bills suivants:

- bill 172 amendant la loi de l'instruction publique;

- bill 180 amendant la loi concernant la possession et le transport des liqueurs alcooliques;

- bill 187 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux bois et forêts;

- bill 199 concernant le rachat de la dette publique;

- bill 204 amendant l'article 29 des statuts refondus, 1909.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, le bill suivant:

- bill 100 amendant la charte de la cité de Montréal.

Charte de Montréal

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 100 amendant la charte de la cité de Montréal.

Les amendements sont lus deux fois.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) n'a pas d'objection à ce qu'on légalise le fait que ces procédures ont eu lieu dans l'annexe au lieu d'avoir lieu, comme le veut la loi, dans l'hôtel de ville même, mais il croit qu'on ne doit pas légaliser toutes ces procédures qui pourraient être autrement illégales.

Il (M. Taschereau) propose, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), qu'un message soit envoyé au Conseil législatif informant les honorables conseillers que l'Assemblée législative accepte les amendements du Conseil législatif au bill 100 amendant la charte de la cité de Montréal, mais avec les amendements suivants:

1. Ajouter au paragraphe 10 les mots "en tant seulement qu'elles ont été faites dans ladite bâtisse de l'annexe de l'hôtel de ville, et pourvu qu'elles soient valides sous tous les autres rapports";

2. Remplacer le paragraphe 20 par les suivants:

20. L'article suivant est ajouté comme article 31:

31. L'article 300 de la loi 62 Victoria, chapitre 58 tel qu'amendé par les lois 63 Victoria, chapitre 49, sections 7 et 8; 3 Édouard VII, chapitre 62, sections 22 et 23, 4 Édouard VII chapitre 49, sections 6 et 7; 7 Édouard VII, chapitre 63, sections 10 et 11; 8 Édouard VII, chapitre 85, section 15; 9 Édouard VII, chapitre 81, sections 7, 8 et 9; 1 George V (1re session), chapitre 48, section 29; 1 George V (2e session), chapitre 60, sections 10 et 11; 2 George V, chapitre 56, sections 11 et 12; 3 George V, chapitre 54, section 8; 4 George V, chapitre 73, section 8; 6 George V, chapitre 44, section 12; 7 George V, chapitre 60, section 2; 8 George V, chapitre 84, section 29; 10 George V, chapitre 86, section 2 et 11 George V, chapitre 111, section 1, est de nouveau amendé en y ajoutant, après le paragraphe 12, l'alinéa suivant:

Nonobstant les dispositions contenues au premier alinéa du présent paragraphe 12, et les dispositions des règlements adoptés en vertu des dispositions dudit paragraphe 12, les articles 1419 et suivants des statuts refondus, 1909, et leurs amendements, s'appliquent à la réglementation de la vitesse des véhicules-moteurs dans les limites de la cité.

21. L'article 20 devient l'article 32.

Le bill est retourné au Conseil législatif.

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant, lequel est lu ainsi qu'il suit:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, les bills suivants:

- bill 10 relatif à l'entretien et à la réparation des chemins et amendant diverses lois concernant la voirie;

- bill 70 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec;

- bill 188 amendant le Code de procédure civile, relativement aux appels.

Voirie

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 10 relatif à l'entretien et à la réparation des chemins et amendant diverses lois concernant la voirie. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Charte de Québec

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 70 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Appels

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 188 amendant le Code de procédure civile, relativement aux appels. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Service d'hygiène

L'honorable M. David (Terrebonne) propose, appuyé par le représentant de Bellechasse (l'honorable M. Galipeault), que l'ordre de la chambre voté à la séance de ce matin et portant troisième lecture du bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909, soit révoqué.

Il (M. David) explique que c'est pour permettre à certains députés médecins qui n'étaient pas arrivés ce matin de faire les remarques qu'ils avaient préparées sur cet important sujet.

Adopté.

Il est ordonné que ce bill soit réinscrit au feuilleton pour troisième lecture au cours de la présente séance7.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que le bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909, soit maintenant lu une troisième fois.

M. Poulin (Montréal-Laurier): Je ne sais pas si je me trompe, mais il me semble que si le regretté Dr E.-P. Lachapelle8 était ici aujourd'hui pour prendre connaissance du bill présenté par l'honorable secrétaire de la province, il goûterait un de ces moments d'ivresse que connaissent seuls ceux qui ont vu leur oeuvre couronnée.

En effet, en constituant aujourd'hui un département de la santé publique, le gouvernement confère à l'oeuvre de cet illustre patriote non seulement une approbation solennelle, mais lui assure en même temps une vitalité et une permanence que les membres dévoués du Conseil d'hygiène ne pourraient pas lui donner.

Laissez-moi profiter de la circonstance pour proclamer, au nom des électeurs de Montréal-Laurier, au nom de la profession médicale et au nom de la province tout entière, la dette immense de reconnaissance que nous devons aux premiers pionniers de l'hygiène dans la province de Québec. Depuis 1855, notre province a sans doute fait des progrès consolants sous plus d'un rapport: budget, instruction publique, agriculture, voirie, législation ouvrière, etc. Cependant, je n'hésite pas à affirmer que l'oeuvre la plus désirable, la plus importante, j'allais dire la plus difficile que le gouvernement ait accomplie en ces dernières années, ce fut d'introduire au milieu de notre peuple les notions les plus indispensables d'hygiène qu'exigent les groupements un peu considérables de la population.

Habitués qu'ils étaient à vivre au grand air, dans les travaux si salubres de la vie agricole, nos ancêtres n'avaient que faire d'une foule de précautions qui sont de première nécessité dans les centres industriels. Pour établir dans la province de Québec, en 1885, un système d'hygiène même élémentaire, il fallait, pour en arriver où nous en sommes, entreprendre d'abord une lutte de tous les jours contre l'ignorance et le préjugé surtout. Il fallait combiner, avec une science profonde de nos besoins, une grande délicatesse de procédés, une constance et un dévouement à toute épreuve.

Il s'est trouvé parmi nous des médecins qui pouvaient ambitionner à juste titre de faire une rapide fortune avec leur clientèle et qui n'ont pas hésité, à l'appel du devoir, à l'appel du gouvernement d'alors, à sacrifier leurs plus légitimes espérances pour consacrer toute leur énergie, toute leur science, tout leur dévouement, toute leur vie à assurer la conservation des forces physiques de notre race, suivant le mot heureux du toujours regretté Honoré Mercier9.

Quand on songe que, pendant au-delà de 30 ans, les Drs Lachapelle, les Pelletier, les Beaudry ont travaillé avec un dévouement sans borne pour le bien de la province et de notre race au salaire, j'allais dire ridicule, de $1,200 à $3,000 par année; quand on songe que, malgré les oppositions acharnées que ces vaillants médecins ont rencontrées dans plus d'un quartier, quand on songe qu'avec la modicité des ressources mises à leur disposition, ils sont parvenus petit à petit à nous doter d'un service d'hygiène comme celui que nous avons actuellement, nous sentons le besoin de nous incliner profondément et d'adresser, au nom de la patrie reconnaissante, à ces glorieux disparus qui ont noms: MM. les docteurs E.-P. Lachapelle, l'honorable A.-H. Paquette10, R.-P. Rinfret, C.-E. Lemieux, McDonald, H.-R. Gray, J.-B. Garneau et aussi au seul survivant, à cet érudit et infatigable travailleur qu'est le Dr Elzéar Pelletier, l'hommage de notre éternelle reconnaissance.

Leur oeuvre aujourd'hui est encore vigoureuse et pleine de promesses, mais elle a pris une telle ampleur, elle s'étend sur des terrains si étendus et si variés que le jour est venu de lui accorder un appui plus effectif et plus substantiel de la part du gouvernement.

Les lois les plus sages et les plus opportunes ne sont pas toujours les plus faciles à mettre en application. Comme question de fait, depuis 1887, le Conseil supérieur d'hygiène a pu compter dans maintes circonstances sur la droiture et la soumission de nos paisibles populations; mais, n'est-il pas vrai que parfois ce même Conseil s'est heurté à des oppositions regrettables qui auraient exigé une autorité plus puissante et moins discutable.

L'intention du gouvernement, en établissant un département d'hygiène, est de faire disparaître cette faiblesse et de donner aux lois d'hygiène la même sanction et la même efficacité qu'aux autres lois de la province. Entre autres lois, je n'hésite pas à reconnaître que le trafic de la boisson est une plaie qu'il faut de toute nécessité enrayer, soit par la persuasion ou soit par la force. Je n'ai pas le moindre désir de blâmer le gouvernement d'employer à cet effet des légions d'agents et d'officiers grassement payés; mais je me demande si l'alcool est pour notre population un poison plus violent que les microbes de la tuberculose ou des maladies vénériennes.

Évidemment, l'alcool est un poison, mais vous admettrez avec moi que c'est un poison lent. Vous n'avez qu'à examiner la binette de certains buveurs pour vous convaincre qu'il y en a plusieurs parmi eux qui sont vieux. La tuberculose et les maladies vénériennes ne comptent guère de victimes parmi les vieillards, car elles fauchent sans pitié parmi les jeunes et les hommes mûrs. Ne pensez-vous pas que le temps est venu de déclarer une guerre, sans parti pris, sans répit, sans merci, à ces deux mortels ennemis de notre vie nationale? Ne pensez-vous pas que le temps est venu de jeter dans cette lutte un plus grand nombre de soldats et des soldats mieux payés?

Cette réforme est pratiquement impossible sans la création d'un département spécial, afin de permettre au peuple de se faire rendre un compte exact de l'emploi de ces revenus. J'ai parlé de soldats mieux payés, c'est un détail, direz-vous, puisque la France pendant des siècles a subjugué l'Europe avec des soldats qu'on payait deux sous par jour; mais n'est-il pas temps, pensez-vous, de modifier au plus vite cette antique et étrange idée que les médecins ont assez du sentiment du devoir pour les tenir en action et qu'on peut continuer indéfiniment à les payer moins cher que les plâtriers ou les typos de l'Internationale11.

S'il y a, sur la terre, un homme dont les services sont de première importance pour une société, s'il y a un homme dont la science professionnelle doit couvrir tous les terrains, s'il y a un homme qui expose sa vie journellement pour ses semblables, qui l'abrège nécessairement en répondant aux appels à toute heure du jour et de la nuit, c'est incontestablement le médecin. La moindre chose que nous puissions lui donner, si nous voulons qu'il lutte corps à corps avec l'épidémie qui ne respecte personne, c'est un salaire convenable, pour le moins aussi convenable que celui des avocats et des ingénieurs. Cependant, j'avoue volontiers que, pour assurer les heureux résultats du nouveau bill, le relèvement des salaires des médecins n'est pas le point principal, car les médecins possèdent l'esprit de sacrifice jusqu'à s'oublier pour la cause, "chasser le naturel qui revient au galop".

L'hygiène, pour produire quelques effets, doit se trouver ailleurs que dans les livres et les résolutions du Conseil d'hygiène, elle doit se trouver, au moins dans ses grandes lignes, dans l'esprit et le coeur de tous nos citoyens. Et l'unique moyen pour arriver à l'implanter partout, c'est d'en faire enseigner les éléments dans nos écoles et dans les usines et les manufactures, tâche qui, vous l'admettrez, dépasse indubitablement les attributions du Conseil d'hygiène actuel et qui exige l'intervention directe du gouvernement. C'est que l'éducation est le facteur principal, le levier le plus puissant qu'il faille mettre en jeu pour arriver à obtenir des résultats pratiques. Je n'ignore pas que ce nouveau bill est de nature à susciter plus d'une discussion et peut-être même des craintes légitimes.

Je conçois fort bien qu'on puisse se douter dans l'administration de ce département de l'ingérence indue de la politique. Je sais qu'un élu du peuple, serait-il médecin, n'est pas toujours nécessairement un spécialiste en matière d'hygiène; je sais qu'un ministre d'hygiène ne s'improvise pas et que des erreurs dans les procédés de ce département pourraient devenir douteuses et même irréparables, les morts ne ressuscitent pas; mais je vous prie de remarquer que, si l'ancien Conseil doit être divisé quant au nombre, il ne le sera pas quant à la compétence et au dévouement.

Je vous prie de remarquer que, d'après la teneur du bill, le ministre de l'hygiène est lié par certains articles du bill à agir conjointement et harmonieusement avec son Conseil, et je crois qu'il n'y a pas un seul médecin au Canada qui ne serait heureux de partager avec des conseillers bien informés les responsabilités dans une affaire aussi grave.

Déjà des voix se sont élevées pour protester contre le transfert des quartiers généraux de l'hygiène de Montréal à Québec. Je n'hésite pas à caractériser ces craintes de puériles, car il est bien évident que la forteresse de l'hygiène dans notre province doit nécessairement se trouver au centre de la région la plus exposée. J'ai trop à coeur les intérêts de Montréal pour ne pas comprendre qu'une agglomération de 800,000 âmes en rapport journalier avec tous les grands centres des États-Unis et du Canada est la porte d'entrée naturelle de toutes les épidémies et de toutes les contagions.

C'est donc là que doivent être installés les quartiers généraux de la défense. Cependant, je n'aurais pas cet égoïsme de confiner une question aussi importante aux frontières de la ville de Montréal. Ce n'est pas simplement les ouvriers de nos villes qui doivent bénéficier d'un bon service d'hygiène, mais bien tous les citoyens de la province sans exception, et voilà pourquoi en définitive l'action hygiénique doit partir du gouvernement pour s'étendre dans tous les coins et recoins de la province.

Si le Conseil supérieur d'hygiène a su nous protéger effectivement pendant les épidémies passées, s'il a réussi à nous préserver de la picote l'an dernier et l'épidémie de 1918, nul ne sait ce que l'avenir nous réserve. Armons-nous donc en prévision de plus grosses éventualités et, de cette façon, nous pourrons faire face à l'épreuve quand elle viendra non seulement en bon patriote, mais en homme avisé et prévoyant, ce qui ne gâte rien.

(Applaudissements)

M. Grégoire (Frontenac) félicite le secrétaire provincial (M. David) pour l'innovation nouvelle qu'il crée en demandant à la Chambre d'adopter une mesure qui déjà a reçu l'approbation de toute la population de la province. Il félicite le gouvernement pour la nouvelle oeuvre véritablement philanthropique qu'il fonde pour le plus grand bien de la population entière de la province.

Il (M. Grégoire) fait l'éloge du médecin et des progrès faits depuis Nostradamus12 et Paracelse13, et cela, en dépit des moqueries de Molière14. La médecine, dit-il, est devenue une science positive. Disciples des Pasteur15 (et de) Lavoisier16, les médecins doivent aujourd'hui être les plus savants. Car leur science est le compendium de toutes les lois physiques connues et inconnues. Ils poursuivent les microbes jusque dans leurs retraites. Il (M. Grégoire) fait l'éloge de l'honorable secrétaire provincial (M. David) dont c'est le privilège, dit-il, par toutes ces mesures admirables et bien venues, de nous diriger vers une ère nouvelle.

(Applaudissements)

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Demande d'enquête concernant L.-E.-A. Parrot et J.-F. Pouliot17

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault):

Que le 26 mai 1921, M. Jean-François Pouliot, avocat de Rivière-du-Loup, écrivit au premier ministre de la province de Québec une lettre par laquelle il accusait le Dr L.-E.-A. Parrot, alors député de Témiscouata à la Législature de Québec, d'avoir fait le commerce de lots de colonisation au détriment de la province, mais à son bénéfice personnel et d'avoir obtenu des lots au moyen de représentations frauduleuses;

Que ledit Jean-François Pouliot a, dans la même lettre, demandé au premier ministre d'instituer une "enquête complète sur les concessions dans le comté de Témiscouata";

Que le premier ministre, dans une lettre du 31 mai 1921 adressée au susdit J.-François Pouliot, déclarait que les accusations de ce dernier étaient graves;

Que le Dr Parrot a démissionné comme député du comté de Témiscouata le 22 juin 1921, à la demande du premier ministre qui lui aurait conseillé de se présenter de nouveau devant ses électeurs pour leur expliquer son cas et se faire juger;

Que ledit Dr Parrot n'a pas été choisi et n'a pas été candidat à l'élection partielle qui eut lieu dans le comté de Témiscouata le 22 décembre 1921;

Que la partie de la poursuite criminelle intentée contre M. Jean-François Pouliot par le Dr L.-E.-A. Parrot concernant les lots mentionnés dans la lettre dudit Pouliot au premier ministre de la province, le 26 mai 1921, a été abandonnée, à la demande des procureurs, en l'automne de 1921;

Qu'il appert par le document 55, produit devant cette Chambre le 7 mars 1922, que le 6 juin 1921, William Morin, rentier de la paroisse de Saint-Hubert, comté de Témiscouata, déclare sous serment qu'il a entendu le Dr Parrot, alors député, faire des déclarations de nature à convaincre que la spéculation sur la cancellation ou pour l'obtention de lots se pratique sur une grande échelle;

Que, le 29 mai 1921, de nombreux électeurs réunis à Saint-Antonin ont adopté une résolution demandant au premier ministre l'enquête demandée par le susdit M. Pouliot, dans l'intérêt des colons et des cultivateurs, et que des citoyens de Saint-Hubert et de Saint-Honoré, de Témiscouata ont adopté des résolutions faisant la même demande d'enquête;

Que de semblables spéculations frauduleuses ont été faites aussi sur d'autres lots par des politiciens, candidats du gouvernement, pour des fins de caisse électorale et autres dans le comté de Montmagny avant 1919;

Que les échanges de lots par le gouvernement en vertu de l'article 1553a ont été faits en certains cas au détriment de la province, mais au bénéfice de politiciens dont les uns, alors qu'ils étaient députés ou conseiller législatif, se servaient de leur influence politique pour faire cette spéculation, faisant perdre à la province une grande somme d'argent, et ce, contrairement à l'esprit dudit article 1553a de la loi des terres et forêts;

Que le gouvernement a vendu des lots de colonisation dans le canton Barraute et ailleurs, et qu'il a émis des lettres patentes contrairement à la loi;

Que des politiciens, amis et supporteurs du gouvernement, ont déclaré sous serment, suivant la formule A, article 1558, S.R.Q., 1909, que lesdits lots qu'ils avaient acquis dans le canton Barraute étaient pour eux-mêmes, qu'ils n'étaient les prête-noms de personne, et qu'ils ont déclaré ensuite que ces lots étaient destinés à des parents;

Que le gouvernement a payé de grosses sommes d'argent pour des chemins de colonisation dans l'Abitibi, à l'endroit communément appelé Rivière-Bell, lesquels chemins n'avaient été faits lors desdits paiements;

Que l'article 584 des statuts refondus, 1909, dit:

"Chaque fois que le lieutenant-gouverneur en conseil juge à-propos de faire faire une enquête sur quelque objet qui a trait au bon gouvernement de la province, sur la gestion de quelque partie des affaires publiques, sur l'administration de la justice, sur quelque matière importante se rattachant à la santé publique ou sur une matière se rapportant au bon gouvernement de quelque municipalité de la province, il peut, par une commission émise à cette fin, nommer un ou plusieurs commissaires pour conduire cette enquête.";

Qu'il soit en conséquence résolu qu'une enquête s'impose, pour le bon gouvernement de cette province, sur la gestion des affaires publiques, concernant les terres et forêts et les lots de colonisation depuis 1912, et que le lieutenant-gouverneur en conseil soit prié d'instituer immédiatement une commission suivant ledit article 584 et les dispositions du chapitre quatrième du titre III des statuts refondus, 1909.

Il (M. Sauvé) rappelle un mot de l'abbé Delâtre18, prédicateur du carême à Notre-Dame de Montréal, qui disait dans un sermon que "les seules vies qui comptent sont celles qui se soumettent à la loi divine de l'effort"19. Il dit qu'il a essayé, au cours de la session provinciale, de se soumettre à la loi divine de l'effort. Il regrette que sa motion n'eût pas été étudiée à la séance de vendredi dernier. Il dit regretter d'avoir à ramener ses collègues sur ce débat, mais soutient qu'il est de son devoir, au nom de la bonne administration de la province, de soulever les lacunes, afin qu'elles puissent être corrigées.

Le Soleil du 13 février, dit-il, disait dans un éditorial: "Si maintenant M. Sauvé veut cesser ses dénonciations intempestives et sérieusement aider le gouvernement à se débarrasser des colons de mauvaise foi, il aura mérité des remerciements et nous lui tiendrons compte de son geste." Le 18 février, je faisais adopter par la Chambre une motion pour production de documents. L'organe du gouvernement n'a pas tenu compte longtemps de mon geste, car du moment que le ministre de la Colonisation (l'honorable M. Perrault) fût obligé de livrer à la publicité le nom d'un avocat député qui avait des lots dans le canton Barraute, en Abitibi, et que je voulus me renseigner sur ce cas, Le Soleil me traita de sa façon ordinaire, c'est-à-dire par le mensonge et l'injure en disant qu'il n'y avait pas dans tout cela de quoi fouetter un chat.

De ce que j'ai voulu être des plus délicats envers un collègue, Le Soleil a profité de cette occasion pour dire que j'avais misérablement échoué dans ma tentative de faire une preuve contre un député fédéral. Ceux qui disaient que je n'aurais pas le courage de répéter en Chambre ce que j'avais dit l'été dernier verront que je sais faire honneur à ma parole et qu'un adversaire coupable ne saurait me faire reculer devant mon obligation morale de le combattre, bien que la tâche me soit ingrate et pénible.

Debout maintenant ceux qui disent que je me sauve quand eux, par exemple, ne peuvent se montrer. Ceux qui disaient que je n'aurais pas le courage de répéter mon accusation ont tout fait depuis le commencement de la session pour étouffer la publicité des scandales concernant la spéculation sur les lots. On a tout fait pour bâillonner la presse à ce sujet. Nous verrons demain quels sont les journaux qui auront subi l'influence du régime et qui, pour des considérations inavouables, cachent la vérité au peuple.

L'été dernier, j'ai soutenu que des politiciens, en fonction de députés, avaient mis leur influence au service des gens qui faisaient le trafic des lots de colonisation au détriment de la province; je suis croyablement informé que ces politiciens ont fait le commerce des échanges de lots avec le département et que, par ces échanges, la province a perdu des centaines de milliers de dollars. On m'a dit dans cette Chambre: "Pourquoi des députés ne s'occuperaient-ils pas de rendre service à leurs électeurs qui veulent acheter des lots de colonisation?" À cela, j'ai répondu: "Ce n'est pas la question en cause. Le dévouement pour le bien public est toujours désirable, mais le dévouement en vue de favoriser des spéculateurs au détriment de la province, il est condamnable." C'est ce qu'a fait dans un cas la Cour suprême du Canada dans la cause de Paradis versus Bernier, dont le jugement est cité au volume 62 des rapports de la Cour suprême, pages 217 et suivantes...

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): M. l'Orateur, je soulève une question d'ordre. Vous avez déclaré la motion de mon honorable ami hors d'ordre précisément parce qu'il s'appuyait sur ce jugement. Je ne crois qu'il puisse l'invoquer encore aujourd'hui.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je commence par ce cas pour démontrer que, depuis longtemps, tout un système avait été organisé pour pratiquer la spéculation dans le domaine de terres de la couronne. Voici le cas: Un nommé Alfred Paradis, ingénieur en chef du chemin de fer Transcontinental, avait trouvé le moyen de faire acheter par des prête-noms, MM. Daniel, Joseph et Philéas Bernier, et Adélard Morneau, des lots de colonisation dans le canton Bourdages, dans la paroisse de Sainte-Apolline et une partie du Cap-Saint-Ignace de Montmagny.

Paradis rencontra le défendeur et lui dit que son oncle était un des principaux officiers du département des Terres, qu'il avait l'influence voulue pour empêcher l'octroi desdits lots que Bernier voulait avoir, qu'il serait prêt toutefois à ne pas lui nuire et à lui octroyer le lot 15 (B), Bourdages, au nom de son garçon, mais à la condition qu'en retour le défendeur lui fournisse son nom et lui obtienne le nom de Philéas Bernier, son frère, afin d'avoir du département, pour lui et à son bénéfice exclusif les lots 16 et 17 (B) Bourdages, qui, quoique concédés au nom du défendeur Philéas Bernier, seraient sa propriété à lui, Paradis, ce dernier ajoutant que, si le défendeur refusait cette proposition, il l'empêcherait, grâce aux influences ci-dessus mentionnées, d'avoir même un seul lot.

Les lots ont été achetés pour des fins de colonisation et de culture; ils avaient été classifiés comme tels et la vente recommandée aussi comme telle par Frs Pouliot, inspecteur, dont la fonction est de renseigner le gouvernement. Paradis et Philéas Bernier, etc., ont voulu faire le commerce de bois avec ces lots. Paradis s'était organisé en conséquence, calculant sur l'ignorance de Daniel Bernier. M. Paradis était fortement recommandé au département des Terres, par le ministre de l'Agriculture (lettre produite au dossier). M. Dechêne20, sous-ministre des Terres, répond qu'il va se rendre à son désir aussitôt qu'un arrêté en conseil aura autorisé la vente des lots. Et les lots furent ensuite vendus. Les conditions furent remplies suivant les formules à S.Q.R.21.

Cinq ans après, il s'agit de l'émission des lettres patentes. C'est ici qu'on recommence le jeu. Le département a refusé les lettres patentes pour lot de culture - cas de Daniel Bernier - parce qu'insuffisance de résidence. Le Dr Masson22, député de Montmagny, de son côté, intervient pour Daniel Bernier et déclare que la résidence avait été complète et continue, ce qui était faux de l'aveu de Bernier dans son certificat d'établissement.

Après les pourparlers, et mille détours de Paradis, le protégé ministériel, après la déclaration de Daniel Bernier et la déclaration de l'officier du département des Terres, intervient le 25 mai 1918 M. Élisée Thériault23, le député de l'Islet, qui apprend au sous-ministre Dechêne que le département des Terres avait "étudié la question et qu'il avait été décidé de concéder les lots de ce rang comme terres à bois".

Et ce député apprend au ministre des Terres que Daniel Bernier, qui avait demandé des lettres patentes, parce qu'il avait fait tout le défrichement nécessaire sur un lot de culture, veut avoir sa patente comme lots à bois, tout comme les nouveaux acquéreurs. Et le département des Terres, en apprenant cette nouvelle de la part d'un député aussi influent, opéra la transformation. Alors, six jours après, le député Masson écrit au sous-ministre Dechêne pour dire quoi, M. l'Orateur? Pour dire: "Ce lot est inculte comme tous les voisins qui sont patentés". C'est-à-dire, je suppose: Paradis, le protégé, Philéas Bernier, etc., qui eux avaient été plus avisés que Daniel.

C'est là que le jeu redouble et qu'une bataille paraît s'engager entre Paradis et Bernier. Le 25 mai 1918, le député de L'Islet (M. Thériault) dit que Daniel Bernier veut que son lot soit considéré comme terre à bois, contrairement à ses prétentions antécédentes. Le 2 juillet, le député Masson, de Montmagny, déclare: "Depuis avril 1914, Bernier a résidé à peu près continuellement sur ce lot. Quand il n'y était pas, d'autres membres de sa famille y résidaient.

"Il y a sur ce lot une maison, deux granges, dix animaux et la culture y est très avancée, mais Bernier consentirait à payer $2 l'acre pour obtenir ses patentes." Consentirait! Cela ne veut-il pas dire que ce n'est pas lui qui en fait la demande, que c'est sur la pression et à la demande d'un autre qu'il consentirait. Alors, bien singulière paraît la trouvaille du député de l'Islet (M. Thériault) qui disait le 25 mai que Bernier demandait à être mis sur le même pied que les autres qui avaient payé $2 l'acre pour leurs lettres patentes.

Pour moi, il est clair qu'il y a dans toute cette histoire de lots du canton Bourdages, une spéculation dont Paradis, le protégé ministériel, fut l'instigateur; et il me paraît clair que le département des Terres a favorisé cette spéculation, cédant à des influences politiques, au détriment de la province. C'est d'ailleurs ce qui ressort du jugement rendu par la Cour suprême qui déclare à l'unanimité que la vente a été faite en "des circonstances paraissant étranges, pour ne pas se servir d'une expression plus forte".

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) soulève un point d'ordre en disant que le chef de l'opposition n'a pas droit de faire allusion à ce jugement.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): La Cour suprême a déclaré qu'il lui était impossible de croire que Pouliot, l'inspecteur du gouvernement, s'est trompé quand il certifiait qu'il y avait 50 % de terre à "culture sur chacun des lots". Bernier déclara sous serment qu'après avoir visité son lot il le jugeait propre à faire un établissement agricole. Un autre officier du département des Terres, M. Létourneau, a déclaré aussi après avoir visité le lot Bernier, que le terrain avait été bien préparé pour une culture profitable et qu'il y avait alors 15 acres en foin. Et c'est après cela que le département déclare que les lots sont impropres à la culture.

Tous ces faits sont relatés dans le jugement de la Cour suprême. Ce jugement ajoute: "Le gouvernement, malheureusement, paraît avoir facilité la fraude contre la loi en adoptant l'arrêté en conseil du 2 juillet 1918, mais il est possible qu'il ait ignoré l'achat fait par l'intimé." La Cour suprême a déclaré qu'il y eut "combinaison frauduleuse". Est-ce que ce seul cas ne démontre pas, M. l'Orateur, combien j'avais raison l'été dernier de demander une enquête sur la colonisation et la vente des Terres de la couronne et de dire qu'un inventaire national révélerait un état de choses scandaleux dont souffre depuis longtemps notre province?

Prenons maintenant un autre cas. Voici les faits pour ce qui concerne la spéculation de la Beaulieu Lumber Agency. Je suis informé que dans cette société les intéressés étaient Alcide Beaulieu, de Québec, Arthur Godbout24, alors député, et J.-E. Roberge25, conseiller législatif. Vers 1917-1826, la Société réussit à obtenir du gouvernement l'échange de lots dans la Beauce pour des lots dans l'Abitibi, aux conditions de 3 acres pour une, au bénéfice des intéressés.

C'est alors que MM. Rodolphe Marcotte, neveu du député, Ulric Marcotte, beau-frère du député, et Thibaudeau et frère, chefs libéraux, se mirent sur le chemin et achetèrent les lots qu'ils purent se procurer à bon marché. Les lots dans le canton Jersey furent payés environ $2,325 et revendus à la Lumber Agency $4,400. Il y a à part cela plus de 30 autres lots qui ont été achetés de cette façon dans les cantons Shenley, Linière, Ditchfield, Risborough, plus de 12,000 acres. Ces lots furent revendus à la Beaulieu Lumber Agency qui, elle, les a échangés pour 37,214 acres dans la région de l'Abitibi (cantons Montpetit, Faucher, Le Breton, Bourmont, Chassaigne, Jalebert et Beaudin). L'échange se fit le 5 mars et le 28 novembre 1918. (Voir Procès-verbaux 1922, page 87). Ce sont MM. Godbout et Roberge qui finançaient M. Beaulieu. Ces lots de l'Abitibi furent vendus ensuite par la Beaulieu Lumber Agency à la Compagnie Forestière Bourmont dont les maîtres et actionnaires étaient MM. Beaulieu pour deux cinquièmes, Arthur Godbout pour deux cinquièmes, et J.-E. Roberge pour un cinquième.

Ces terrains de l'Abitibi ont été prospectés et évalués à dix cordes de l'acre, soit plus de 400,000 cordes pour les 37,214 acres. La Cie Bourmont a vendu des milliers de dormants au gouvernement d'Ottawa, réalisant de gros bénéfices, et, finalement, elle a vendu une partie de ses droits de coupe à l'Union Bagg ou à la Saint-Maurice Lumber Co., au prix, me dit-on, de $3 la corde, réalisant au-delà de $400,000. Cependant, le gouvernement, l'été dernier, avait encore sur les bras tous ou presque tous ses lots de la Beauce qu'il offrait en vente à $5 l'acre. Les lots dans le canton Jersey et d'autres ailleurs, me dit-on, ont été déboisés, pillés et sont sans valeur. Voilà pour le cas de la Beauce.

N'est-il pas clair que le gouvernement a fait là une transaction malheureuse qui dénote une grande faute dans son administration des terres? Ne devrons-nous pas penser que le gouvernement, pour consentir à une transaction aussi absurde, a dû céder à l'influence d'amis politiques? Est-il un homme sensé et libre qui puisse soupçonner le contraire et dire que ce marché a été avantageux pour la province? Le 31 janvier dernier, en réponse à des questions que je posai, le gouvernement a déclaré qu'il possédait des lots à Sainte-Sophie de Lévrard27, lots acquis partie par la Brown Corporation, le 5 novembre 1918, et partie de M. J.-Alfred Savoie, le 19 mai 1921. (Voir Procès-verbaux, 31 janvier)

Dans le document 46 produit devant cette Chambre le 20 février 1922, le gouvernement déclare que les terres données en échange à la Brown Corporation sont situées dans la partie nord et la partie centre du canton projeté de Toussaint, 16,000 acres, et dans la partie sud-est du canton projeté de Perrier, 20,000 acres, ... total 36,000 acres: que les terres données en échange à J.-Alfred Savoie sont situées dans les cantons projetés de Chassaigne et de Buies et forment un total de 30,000 acres. Ces lots ont été achetés pour un M. Savoie, par l'entremise d'un M. J.-T. Demers28, qui aurait simplement reçu une commission. C'est un M. Savoie, neveu de M. J.-Alfred Savoie, qui aurait le plus bénéficié de cette transaction. M. Alfred Savoie ne demeure pas à Sainte-Sophie de Lévrard, et je suis informé que M. Alcide Savoie, son neveu, s'est fortement intéressé dans la transaction, qu'il est venu voir l'honorable M. Allard29, alors ministre des Terres, à ce sujet et que la transaction eut lieu par la Brown Corporation, après cette visite de M. Savoie.

C'est M. Alcide Savoie qui s'occupa de l'affaire devant le conseil municipal, et c'est lui, Alcide Savoie, qui a demandé le changement au rôle municipal. Ce M. Alcide Savoie était député quand l'échange des lots s'est fait. Il était intéressé à cette transaction. Pour l'échange des lots dans le canton de Blandford, je suis informé que M. J.-Albert Lainesse, qui a eu lui aussi des lots du gouvernement, est un organisateur du gouvernement de Québec et des députés du comté de Nicolet, et qu'il a fait une transaction heureuse pour lui et malheureuse pour la province.

Montmagny semble avoir été le comté de prédilection pour les spéculateurs sur les lots de colonisation, spéculation qui a rapporté de jolis bénéfices à la caisse électorale du candidat du gouvernement en 1912, et député de 1916 à 191930, M. le Dr J.-E. Masson. Voici un cas qui, à mon sens, illustre bien le trafic des lots de colonisation au bénéfice des spéculateurs, associés de politiciens.

Il s'agit d'un cas au Lac Frontière, comté de Montmagny. B.-C. Howard et al., commerçants de bois, avec l'encouragement du département des Terres et Forêts, avec son assentiment, ouvrirent un établissement sur les bords du Lac Frontière. Les MM. Howard savaient que M. J.-E. Masson, candidat libéral, avait le patronage du gouvernement à Montmagny, s'abouchèrent avec lui pour traiter avec le gouvernement. Ils construisirent une scierie, ouvrirent un village, défrichèrent la forêt, construisirent des habitations sur, paraît-il, la partie est du lot 34, 9e rang, du canton Talon, mais depuis, à cause d'un arpentage, devenu le rang 10 du canton Talon.

Les Howard, qui connaissaient le tabac, voulaient un permis d'occupation du susdit lot, mais au nom d'une tierce personne, ce qui était irrégulier, et le Dr Masson, candidat libéral en 1912 et chef du parti à Montmagny, député de 1916 à 1919, avait promis de faire octroyer ce permis au nom de l'un de ses frères, gardien d'un phare à la Grosse-Île, Jean-Baptiste Masson. Le Dr Masson en fit la demande au gouvernement le 4 octobre 1913, au nom de J.-B. Masson qui ne signa aucune demande et aucun affidavit. Le 13 octobre 1913, le département des Terres autorise la vente à J.-B. Masson. Le 6 novembre 1913, les Howard voulant s'assurer la propriété du lot, payèrent à cette fin $500 au Dr Masson.

Les Howard continuèrent à occuper le lot qu'ils défrichèrent et sur lequel ils érigèrent de nouvelles bâtisses, payant les taxes et toute imposition publique. Jamais Jean-Baptiste Masson n'aurait même vu le lot. Les officiers du gouvernement, agents forestiers, inspecteurs savaient que ce lot était aux Howard, tout le Lac Frontière ainsi qu'une partie du lot 34. J.-B. Masson avait reçu de la même façon l'octroi du lot 38 du rang 9 de Talon. Le 30 mars 1915, le Dr Masson, candidat du gouvernement, écrivait au département des Terres, demandant les lettres patentes du lot 38, disant que ce n'était pas un établissement de colonisation, mais que ce lot était indispensable au bon fonctionnement des industries à cet endroit.

Après une volumineuse correspondance à cet effet, et après l'émanation des lettres patentes, le Dr Masson se concerta avec son frère Jean-Baptiste pour se servir de M. Réal Lavergne, avocat, comme leur agent. Jean-Baptiste vendit alors à Réal Lavergne le susdit lot. Le 4 avril 1916, Réal Lavergne vend le lot avec garantie à M. Édouard Lacroix, de Saint-Georges de Beauce, et le Dr Masson était de connivence avec Lavergne. De cette vente à Lacroix, le Dr Masson a touché $1,500. Il a déclaré sous serment que c'était pour la caisse électorale.

C'est M. Lavergne, un autre chef libéral, qui a juré avoir payé $1,500 à ce Dr Masson dans le printemps de 1916, juste au temps des élections provinciales, alors que le Dr Masson était candidat du gouvernement dans le comté de Montmagny. Devant de pareils faits de malhonnêteté, de malversation, de fraude, de spéculation véreuse, n'avais-je pas raison de dire que des politiciens exerçaient une influence néfaste et scandaleuse dans l'administration de la province? Est-ce qu'il n'y a pas eu abus et malversation? Le gouvernement n'est-il pas coupable de négligence, de favoritisme ou d'incompétence?

Que dire maintenant de ce qui se passe dans le comté de Matane au sujet de spéculation sur les lots? N'est-il pas vrai qu'un politicien jouissant d'une grande influence auprès du gouvernement a fait le commerce injustifiable de lots, pillant les limites et causant des torts considérables à des colons? Est-il vrai qu'il se serait servi de son influence politique sur le gouvernement auprès de colons à qui il proposait de lui laisser couper le bois sur une étendue de cinquante acres par lot et, qu'en retour, il leur ferait faire la remise de leurs lots qui étaient en cancellation? N'est-il pas vrai qu'il a fait le commerce avec M. Marcel Leclerc, du canton Amantgish?

Un M. Jos. Dufour n'a-t-il pas fait couper sur un lot appartenant à Auguste Beaulieu, en l'hiver 1920, environ 2,500 billots après défense de Beaulieu qui n'a pas reçu un sou de compensation? N'est-il pas vrai que, dans les limites de ce M. Dufour, commerçant de bois, dans les "endroits bûchés", il ne reste pas un seul arbre sain pouvant faire un billot de 6 ou 7 pouces de grosseur, et que ce M. Dufour a coupé, contrairement au règlement et à l'intérêt de la province, une grande quantité de billots de sapin, d'épinette grise et blanche n'ayant que cinq ou six pouces à l'abatage. C'est du moins ce que j'ai vu dans une déclaration signée par MM. Auguste Levesque, Jean-Baptiste Otis et George Ducasse.

Prenons le cas Parrot. Ce cas est trop connu pour que nous y insistions trop longuement. Le gouvernement n'a-t-il pas tout fait pour essayer de cacher sa culpabilité et de cacher ses fautes? Je ne reviendrai pas dans les détails de ce scandale politique qui, sous d'autres moeurs plus honnêtes, aurait soulevé les protestations de la presse et fait crouler le gouvernement. Rappelons simplement qu'à la suite de certaines accusations portées par M. J.-F. Pouliot, avocat, le premier ministre demanda à M. Parrot de donner sa démission.

Le gouvernement a tout fait pour cacher l'affaire; il a été jusqu'à prétendre que la cause est devant les tribunaux, quand la partie concernant l'administration publique ne l'est pas, puisqu'elle a été retirée du dossier judiciaire, l'automne dernier, par le procureur du Dr Parrot. Pourquoi le gouvernement a-t-il cherché pareil moyen pour éviter la discussion de sa conduite? N'est-ce pas un aveu de sa faiblesse? Le gouvernement a favorisé scandaleusement le député de Témiscouata. C'est la faute du gouvernement si le Dr Parrot est allé si loin dans la fraude et le déshonneur.

Il a fait alors un chèque au Dr Parrot qui était dû à Michaud, commerçant de bois. Un chèque portant le no 49,875 fait par le département des Terres et Forêts le 29 juin 1918, payable à la Banque de Montréal à l'ordre de E.-A. Parrot, $141, signé Elz. Miville Dechêne. Ce chèque a été négocié par E.-A. Parrot. Ce chèque fut accepté le 11 juillet 1918 par la Banque de Montréal. Il fut payé le 10 juillet 1918. Cette somme était due à M. Michaud pour un montant qu'il avait payé sur le prix de lots du rang 8, Canton Viger.

Le 20 février, le gouvernement me répondait par le ministre des Terres que le gouvernement n'avait pas adressé de lettres et de chèques au montant de $141 au Dr Parrot, étant la somme de trop payée pour lettres patentes des lots 18, 19, 20, 21. Revenant à la charge le 24 février, je demandai au gouvernement s'il n'avait pas envoyé un chèque à l'ordre du Dr Parrot pour une somme de trop payée et, quelques jours plus tard, le ministre des Terres (l'honorable M. Mercier fils) finit par répondre: Oui. Pourquoi avoir répondu non, la première fois? Pourquoi la seconde fois a-t-il répondu: "Oui, mais pas pour lettres patentes", quand j'avais cité exactement le texte?

La conséquence de l'ingérence du député Parrot dans l'administration des Terres, c'est que le député que favorisait tant le gouvernement a empoché l'argent et qu'il ne l'a remis que l'automne dernier, alors qu'il en fut averti par le gouvernement, par M. Dechêne qui avait entendu dire que l'affaire Michaud se brassait à Rivière-du-Loup. Parrot a été jusqu'à faire payer par le département de la Voirie des hommes qui approchaient ses billots au moulin d'Herménégilde Savoie31, situé sur le chemin Témiscouata. Voilà l'homme que le gouvernement protège en refusant une enquête royale à Jean-Frs. Pouliot, son accusateur. Comment le gouvernement peut-il justifier son refus? Par ce refus, il prouve qu'il a peur; par ce refus, il montre sa culpabilité; par ce refus, il s'accuse lui-même.

Le gouvernement dit que la cause de Parrot est en cour et va être jugée. Ce n'est pas exact, c'est faux, car la partie de la plainte concernant les lots a été retirée l'automne dernier, et la plainte aujourd'hui ne porte que sur les accusations de Pouliot, relativement au trafic des lots. Les raisons données par M. Pouliot pour demander l'enquête royale au premier ministre ont été éliminées de l'action de Parrot vs Pouliot. Le gouvernement est donc injustifiable de dire que la cause des lots est devant les tribunaux. C'est une assertion fausse qui a été faite.

Au cours de la session, le 7 février, j'ai demandé: Combien de lots ont été remis en 1921? Le gouvernement m'a répondu en produisant une longue liste de noms au milieu de laquelle se trouvait celui de Élisée Thériault. Je tiens à dire que le ministre de la Colonisation (l'honorable M. Perrault) ne s'est point fait prier, lui, pour produire exactement la liste. (Procès-verbaux 1922, page 146). Élisée Thériault, m'a-t-on dit, est un politicien, un avocat, de cette province. Il a acheté ce lot en faisant sous serment une déclaration que les lots étaient pour lui-même. Le gouvernement connaissait intimement M. Thériault, ils se protégeaient, ils se supportaient l'un et l'autre. La déclaration assermentée de M. Thériault est qu'il a acheté ces lots pour son frère du canton Escourt32.

Mais comment alors pourra-t-il expliquer la déclaration assermentée de M. Thériault que ses lots étaient pour lui-même? Si c'était pour son frère qu'il avait pris ces lots, "vu que son frère ne connaissait pas la loi", paroles du ministre des Terres (l'honorable M. Mercier fils), pourquoi ne lui a-t-il pas remise ensuite? J'ai voulu être délicat envers M. Thériault, mais le Soleil m'a remercié de ma délicatesse en me servant le lendemain une fournée d'injures, disant aux électeurs de L'Islet, de Montmagny et d'ailleurs que tout ce que j'avançais, ce n'était pas vrai et que, dans ce cas, j'avais pitoyablement échoué, mais se gardant bien de rapporter l'affaire telle qu'elle s'était passée. Voilà pour la justice du gouvernement et de son organe.

J'ai plus que cela, M. l'Orateur; dans le dossier 60 produit devant cette Chambre le 14 mars 1922, sur motion adoptée le 17 février 1922, il appert qu'Élizée Thériault, de Québec, a fait sous serment sa déclaration le 20e jour de septembre 1920. C'est alors qu'il a juré que les lots 16 et 17 qu'il demandait d'acquérir, c'était pour lui et qu'il n'était le prête-nom de personne. Il appert aussi dans le document 60 que M. Thériault a écrit plus d'un mois après à Hector Authier33, agent des terres à Amos, que ces lots étaient destinés à son frère. Comment se fait-il alors que Hector Authier, l'agent des Terres, ait accepté cette déclaration et que, cinq jours plus tard, lui, Authier, envoyait à M. Thériault les billets de location, sans dire mot de la dernière lettre de M. Thériault?

Ces lots n'ont été rétrocédés que le 6 décembre 1921 (Document 60), et ils étaient au nom d'Élizée Thériault. Comment l'agent des Terres a-t-il pu agir ainsi? Pourquoi n'a-t-il pas exigé un transport des lots, avec une autre déclaration assermentée? L'agent des Terres a trompé le département des Terres, tout autant que M. Thériault. Cet acte de l'agent des Terres est une violation de la loi. Il démontre les abus qui se commettent dans ce département. Cet acte seul justifie l'enquête que je demande. Dans ce cas, le gouvernement est coupable de négligence, d'incompétence ou de complicité.

Il (M. Sauvé) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), que le débat soit ajourné.

Adopté.

 

Ajournement

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), que, lorsque cette Chambre s'ajournera à cette séance, elle soit ajournée à huit heures et demie, ce soir.

La séance est levée à 6 heures.

 

Troisième séance du 20 mars 1922

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 8 h 3034.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Dépôt de documents:

Crédit agricole

L'honorable M. David (Terrebonne) dépose sur le bureau de la Chambre le document suivant: Réponse à un ordre de l'Assemblée législative, en date du 8 mars 1922, pour copie de communication de correspondance au sujet de l'établissement d'un crédit agricole et autres moyens d'encourager l'agriculture et le mouvement de retour à la terre. (Document de la session no 64)

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté les messages suivants, lesquels sont lus ainsi qu'il suit:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, les bills suivants:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, sans amendement, les bills suivants:

- bill 43 modifiant la loi électorale de Québec;

- bill 46 modifiant la loi électorale du Québec, concernant la confection et la révision des listes;

- bill 49 amendant le Code civil relativement aux enregistrements;

- bill 200 relatif au changement du chef-lieu du district judiciaire de Terrebonne;

- bill 202 amendant la loi concernant la représentation à l'Assemblée législative;

- bill 205 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, sociétés, personnes, raisons sociales et associations;

- bill 206 concernant la préparation et le renouvellement de la liste des jurés pour les districts de Montréal et de Québec;

- bill 207 amendant la loi 7 George V, chapitre 6, accordant certains pouvoirs à la Commission des eaux courantes, relativement à l'emmagasinement des eaux de la rivière Sainte-Anne et tout autre de ses affluents.

Il est ordonné que le greffier se rende à l'Assemblée législative et informe cette Chambre que le Conseil législatif concourt dans les amendements à ses amendements avec un amendement, pour lequel il demande le concours de l'Assemblée législative au bill 92 amendant la loi 7 George V, chapitre 28, concernant la Commission des écoles catholiques de Montréal.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, les bills suivants:

- bill 47 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux véhicules-moteurs;

- bill 167 amendant l'article 460 du Code municipal;

- bill 177 amendant la loi des liqueurs alcooliques.

Commission des écoles catholiques de Montréal

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés aux amendements de l'Assemblée législative faits aux amendements du Conseil législatif au bill 92 amendant la loi 7 George V, chapitre 28, concernant la Commission des écoles catholiques de Montréal. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Véhicules-moteurs

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 47 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux véhicules-moteurs. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Code municipal, entretien des chemins

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 167 amendant l'article 460 du Code municipal. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Liqueurs alcooliques

La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 177 amendant la loi des liqueurs alcooliques. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Demande d'enquête concernant L.-E.-A. Parrot et J.-F. Pouliot

Conformément à l'ordre du jour, la Chambre reprend le débat, ce jour, sur la motion proposée ce jour:

Que le 26 mai 1921, M. Jean-François Pouliot, avocat de Rivière-du-Loup, écrivait au premier ministre de la province de Québec, une lettre par laquelle il accusait le Dr L.-E.-A. Parrot, alors député de Témiscouata à la Législature de Québec, d'avoir fait le commerce des lots de colonisation au détriment de la province, mais à son bénéfice personnel, et d'avoir obtenu des lots au moyen de représentations frauduleuses;

Que ledit Jean-François Pouliot a, dans la même lettre, demandé au premier ministre d'instituer une enquête complète sur les concessions dans le comté de Témiscouata;

Que le premier ministre, dans une lettre du 31 mai 1921, adressée au susdit Jean-François Pouliot, déclarait que les accusations de ce dernier étaient graves;

Que le Dr Parrot a démissionné comme député du comté de Témiscouata le 22 juin 1921, à la demande du premier ministre qui lui aurait conseillé de se présenter de nouveau devant ses électeurs pour leur expliquer son cas et se faire juger;

Que ledit Dr Parrot n'a pas été choisi et n'a pas été candidat à l'élection partielle qui eut lieu dans le comté de Témiscouata le 22 décembre 1921;

Que la partie de la poursuite criminelle intentée contre Jean-François Pouliot par le Dr L.-E.-A. Parrot concernant les lots mentionnés dans la lettre dudit Pouliot au premier ministre de la province, le 26 mai 1921, a été abandonnée, à la demande des procureurs, en l'automne 1921;

Qu'il appert par le document 55, produit devant cette Chambre le 7 mars 1922, que le 6 juin 1921, William Morin, rentier de la paroisse de Saint-Hubert, comté de Témiscouata, déclare sous serment qu'il a entendu le Dr Parrot, alors député, faire des déclarations de nature à convaincre que la spéculation sur la cancellation ou pour l'obtention de lots se pratique sur une grande échelle.

Que, le 29 mai 1921, de nombreux électeurs réunis à Saint-Antonin ont adopté une résolution demandant au premier ministre l'enquête demandée par le susdit M. Pouliot, dans l'intérêt des colons et des cultivateurs, et que des citoyens de Saint-Hubert et de Saint-Honoré, de Témiscouata, ont adopté des résolutions faisant la même demande d'enquête;

Que de semblables spéculations frauduleuses ont été faites aussi sur d'autres lots par des politiciens, candidats du gouvernement, pour des fins de caisse électorale et autres dans le comté de Montmagny avant 1919;

Que les échanges de lots par le gouvernement en vertu de l'article 1553a ont été faits en certains cas au détriment de la province, mais au bénéfice de politiciens dont les uns, alors qu'ils étaient députés ou conseiller législatif, se servaient de leur influence politique pour faire cette spéculation, faisant perdre à la province une grande somme d'argent, et ce, contrairement à l'esprit dudit article 1553a de la loi des terres et forêts;

Que le gouvernement a vendu des lots de colonisation dans le canton Barraute et ailleurs, et qu'il a émis des lettres patentes, contrairement à la loi;

Que des politiciens, amis et supporteurs du gouvernement, ont déclaré sous serment, suivant la formule A, article 1558, S.R.Q., 1909, que lesdits lots qu'ils avaient acquis dans le canton Barraute étaient pour eux-mêmes, qu'ils n'étaient les prête-noms de personne, et qu'ils ont déclaré ensuite que ces lots étaient destinés à des parents;

Que le gouvernement a payé de grosses sommes d'argent pour des chemins de colonisation dans l'Abitibi, à l'endroit communément appelé Rivière Bell, lesquels chemins n'avaient pas été faits lors desdits paiements.

Que l'article 584 des statuts refondus, 1909, dit:

"Chaque fois que le lieutenant-gouverneur en conseil juge à propos de faire faire une enquête sur quelque objet qui a trait au bon gouvernement de la province, sur la gestion de quelque partie des affaires publiques, sur l'administration de la justice, sur quelque matière importante se rattachant à la santé publique ou sur une matière se rapportant au bon gouvernement de quelque municipalité de la province, il peut, par une commission émise à cette fin, nommer un ou plusieurs commissaires pour conduire cette enquête."

Qu'il soit en conséquence résolu qu'une enquête s'impose, pour le bon gouvernement de cette province, sur la gestion des affaires publiques, concernant les terres et forêts et les lots de colonisation depuis 1912, et que le lieutenant-gouverneur en conseil soit prié d'instituer immédiatement une commission suivant ledit article 584 et les dispositions du chapitre quatrième du titre III des statuts refondus, 1909.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je crois que les faits que je viens de rapporter sont suffisants pour justifier la motion que je présente et l'enquête que je demande dans l'intérêt public. Si le gouvernement n'a pas peur de la lumière, il n'a pas le droit de refuser une enquête royale. On a dit que la Chambre ne devait pas s'occuper de l'affaire Parrot, parce que l'affaire est déjà devant les cours. Cette prétention-là n'est pas justifiée, car l'accusation portée par M. Pouliot n'est pas complète et ne peut nous éclairer en ce qui nous occupe davantage. Dans les régions de colonisation, les chemins ont été payés avant d'être construits.

J'ai confiance que le gouvernement accèdera à notre demande pour se justifier devant le peuple, si toutefois il en est capable. Par cette motion, je n'ai aucune intention de nature politique; l'avenir en décidera. Si le gouvernement fait refuser l'enquête par sa majorité, il se proclamera le complice et le défenseur de ceux qui sont accusés d'être des spéculateurs et des prévaricateurs qui ont exploité la province. M. le Président, je soutiens que le gouvernement a fait preuve d'incompétence et de favoritisme dans l'administration des terres. Les faits que j'ai démontrés s'appuient sur des lettres, des documents, sur lesquels on peut se renseigner au département. J'appuie mon affirmation sur un jugement de la Cour suprême et sur des faits probants qui ont été prouvés devant les tribunaux, dans des déclarations ou témoignages assermentés. Je m'appuie donc sur le mérite indiscutable.

Il y a longtemps que je dis que les lots vendus n'indiquent pas le progrès de la colonisation, mais en partie la spéculation qui se fait au détriment de la province et de la colonisation. Les rétrocessions du département des Terres confondent les concessions du ministre de la Colonisation. Et voilà qu'éclate au grand jour l'immense spéculation qui s'est faite pour la honte du gouvernement, protecteur de favoris, mais bourreau du bon et brave colon.

Pourquoi devraient-ils s'en tirer impunis, et quelle est l'opinion du public là-dessus? Le gouvernement a-t-il peur de la lumière parce qu'il sait que, si la lumière était faite, cela se retournerait autant contre lui que contre le Dr Parrot? Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas un exemple de ces spéculateurs qui compromettent le gouvernement et abusent de leur patronage? Il est temps que le gouvernement veille à ce que cela cesse. L'affaire Parrot n'est pas qu'un incident. Elle fait partie d'un système établi qui privilégie l'influence politique dans l'octroi des lots, et le gouvernement (se doit) d'accorder l'enquête pour préserver le bon nom de la province.

Ce n'est pas par ambition politique que j'ai présenté cette résolution, l'avenir va le prouver, mais simplement pour me faire l'écho de la justice, pour faire connaître la vérité. Ce qui me fait agir, c'est le désir de défendre consciencieusement les intérêts de ma province et de réprimer les abus que je vois. On me dira: le chef de l'opposition est seul à réclamer cette enquête. Quand bien même je serais seul, ce ne serait pas une majorité de 75 ou 80 qui m'empêchera de comprendre les besoins de ma province35. La garde meurt, mais elle ne se rend pas. On pourra m'écraser, mais je ne me rendrai pas.

 

M. Thériault (L'Islet): Le chef de l'opposition, ayant mêlé mon nom à cette discussion, j'ai cru devoir donner quelques explications. On me permettra de lire les deux affidavits suivants.

"Je, soussigné, Élisée Thériault, député du comté de l'Islet, déclare de mon siège ce qui suit:

"Mon frère Émile Thériault, cultivateur d'Estcourt, m'ayant demandé vers le mois de septembre 1920 de lui retenir deux lots dans l'Abitibi dans le canton Barraute où il désirait aller s'établir avec sa femme et ses huit enfants, je me suis adressé à l'agent Authier d'Amos, qui m'a transmis la formule départementale à cet effet. J'ai rempli cette formule, la croyant nécessaire pour l'obtention des lots et l'ai accompagnée d'une lettre explicative, qui la complétait, informant l'agent que ces lots étaient pour mon frère ledit Émile Thériault, ce qui, du reste, était conforme à l'article 1572 des statuts refondus de Québec, 1909.

"Subséquemment, mon frère m'ayant informé qu'il ne pouvait aller s'établir à Barraute, parce qu'il ne trouvait pas à disposer de sa terre à Estcourt, j'ai de suite fait remise de ces deux lots au département.

"Je dois ajouter qu'il n'y avait aucune idée de spéculation de ma part, ces lots m'avaient été demandés par mon frère pour des fins de colonisation et lorsque je les ai remis au département, aucun travail n'y avait été fait et pas un arbre n'avait été touché; je n'en ai retiré aucun bénéfice.

"Je produis avec la présente déclaration un affidavit de mon frère ledit Émile Thériault qui corrobore les faits ci-dessus.

"Je prie la Chambre de bien vouloir ordonner l'insertion au procès-verbal de la Chambre de la présente déclaration, de même que l'affidavit de mon frère, et que lesdits documents soient ajoutés au document numéro 60 déjà produit devant cette Chambre."

"Je, soussigné, Émile Thériault, étant dûment assermenté, dépose et dis:

"1. Je suis le frère de M. Élisée Thériault, avocat et député à la Législature;

"2. Je suis colon résidant sur le lot 17 du canton d'Estcourt, rang 2, comté de Témiscouata;

"3. Dans le cours de l'automne 1920, quelques colons de Saint-Alexandre-de-Kamouraska, ayant pris des lots dans les cantons de Barraute et de Lanormandière, Abitibi, me vantèrent les avantages de la colonisation dans ces deux cantons et m'invitèrent à aller les joindre;

"4. Lesdits colons (MM. Omer et J.-Bte Dubé) me suggérèrent de concéder les lots 16 et 17 du rang 5, canton de Barraute;

"5. J'étais père de 8 enfants vivants;

"6. Ne pouvant disposer de ma terre et d'un autre lot que j'ai dans le canton d'Estcourt, j'ai demandé à mon frère, Élisée Thériault, député du comté de l'Islet, de bien vouloir me retenir lesdits lots 16 et 17, rang 5 de Barraute, mon intention était alors d'aller voir ces lots, au cas où je vendrais mes propriétés;

"7. Quelques jours après, je fus informé que l'agent des Terres, M. Authier, avait refusé à mon frère de retenir les lots en question et que mon frère, ledit Élisée Thériault, M.P.P., s'était fait remettre les billets de location à son nom;

"8. Je fus également, là et alors, informé que mon frère me transporterait lesdits lots, 16 et 17, rang 5 de Barraute, aussitôt que j'aurais décidé d'aller dans l'Abitibi;

"9. N'ayant pas vendu mes propriétés, et les conditions étant devenues moins favorables dans l'Abitibi à la suite de l'augmentation des taux de fret et de la crise financière, je notifiai mon frère que je n'avais plus besoin desdits lots et ce dernier les a remis au département des Terres.

"Et j'ai signé,
"Émile Thériault
"Assermenté devant moi à Québec,
"ce 15ième jour de mars 1922.
"O.-N. Matte, commissaire de la Cour supérieure
"pour le district de Québec."

Il (M. Thériault) demande en terminant que ces dépositions assermentées soient ajoutées aux autres documents.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) se lève. (Applaudissements de la droite)

Un orage se termine généralement par un coup de tonnerre; mais ce coup de tonnerre n'est pas dangereux et il ne tue personne. En admettant que la session fut un orage, il faut concevoir que le chef de l'opposition s'est cru obligé à la fin de distribuer la foudre; on a pu voir que son coup de tonnerre n'avait fait aucune victime. Le chef de l'opposition a tourné sa lanterne un peu partout; il l'a promenée sur tous les membres du gouvernement, est allé dans l'enceinte auguste du Conseil législatif.

Il a retourné ses flèches sur les membres des deux Chambres. N'est-il pas terrible qu'il n'ait parlé que de cinq cas en onze36 ans sur 50,000 ou 60,000 cas de concession de lots de colonisation? Il ne faut pas se faire d'illusions sur l'idée fondamentale du chef de l'opposition en adressant sa requête; il n'avait pas l'espoir que le gouvernement accepte sa demande. Ce qu'il veut, c'est que le gouvernement dise: Non! pour qu'ensuite il aille, dans une de ses tournées triomphales dont il a le secret, dire et répéter que le gouvernement, tremblant de peur lui a refusé l'enquête qu'il demandait. Ensuite, il s'étendra sur la terreur avec laquelle le gouvernement appréhende la mise à jour d'une corruption sans précédent.

Le gouvernement est parfaitement conscient de l'usage que fera le chef de l'opposition de la campagne actuelle, mais il n'a pas peur. Le gouvernement n'a pas peur d'une enquête, mais il a le sens véritable de sa dignité et de ses responsabilités. Il a le privilège et l'honneur de pouvoir juger lui-même les cas de ses officiers, et il a le droit et le devoir de ne pas laisser de côté ce privilège qu'il a obtenu par une victoire qui est une victoire constitutionnelle et qui lui est chère. Nous avons le droit de nous défendre nous-mêmes et les législatures peuvent juger leurs députés. Jamais, tant que je serai premier ministre, je n'abdiquerai entre les mains de quiconque, même de juges, les devoirs le droit de juger la conduite des membres de mon gouvernement.

(Applaudissements)

Dans le passé, lorsque des accusations étaient portées devant la Chambre, accusations comme celles que vient de faire le chef de l'opposition, elles étaient référées ou bien au comité des comptes publics, au comité des élections et privilèges, ou bien à celui des règlements.

Une étude de l'histoire constitutionnelle démontrerait au chef de l'opposition qu'il fut un temps au Canada où les juges siégeaient dans les parlements avec les députés. Le pays a lutté pendant des années pour rendre la Chambre indépendante des juges et quand, après une longue bataille constitutionnelle, la chose a été réalisée, on a dit que c'était une victoire constitutionnelle. Il fut décidé que chacune des sphères devait être indépendante dans ses compétences respectives. Aujourd'hui, les sphères des juges et du Parlement sont très différentes. Les juges s'occupent des causes qui leur sont présentées et le Parlement juge ses propres membres, et l'enquête relève du comité de la Chambre.

La Chambre a tous les pouvoirs nécessaires pour juger; encore plus de pouvoir que les tribunaux. Il y a amplement de précédents. Tous se rappellent il n'y a pas bien longtemps encore que la Chambre avait à répondre à des accusations lors de cette affaire Mousseau37: c'est un comité de la Chambre qui a fait enquête dans cette affaire et qui a rendu jugement, et rien n'indique que la population n'a pas été pleinement satisfaite des résultats. Ce serait abdiquer nos droits et notre dignité que d'aller dans des cas semblables recourir à des tribunaux du dehors, et une enquête semblable ne pourrait être plus complète. Il n'y a pas de majorité, quelle que soit son importance, capable d'empêcher une enquête parlementaire complète par un comité de la Chambre de se dérouler de manière à faire connaître la vérité...

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Tous les témoins tomberont malades38.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Prenons un à un les cas de soi-disant malversations signalées par le chef de l'opposition. Prenons par exemple le cas du député de l'Islet (M. Thériault) auquel le chef de l'opposition a fait allusion. Le député de L'Islet (M. Thériault) a un frère qui est cultivateur: deux de ses amis établis dans le canton Barraute, en Abitibi, lui conseillent de s'acheter deux lots dans ce canton; il s'adresse à son frère qui est député pour acheter, en son nom, ces deux lots, vu que lui-même, étant père de 8 enfants, ne peut faire les démarches nécessaires; toutefois, n'ayant pu vendre sa terre à Estcourt, il avertit son frère, le député, qu'il ne peut prendre les lots achetés par lui.

Alors le député de l'Islet, qui avait averti l'agent des terres de l'Abitibi que les lots qu'il achetait étaient pour son frère, lui demande de reprendre ces deux lots, vu que son frère ne pouvait aller s'y établir. Voilà les faits dans ce cas. Et c'est cela qui provoque la colère du chef de l'opposition et le fait s'agiter comme un microbe en temps d'épidémie. Il n'y a rien là-dedans pour provoquer la colère du chef de l'opposition. J'en appelle au sens d'honneur, de loyauté et de justice des membres de cette Chambre et je leur demande s'il y a là de quoi faire le moindre reproche au député de L'Islet.

Prenons maintenant le cas du Dr Parrot, ex-député de Témiscouata. On connaît les faits: M. Jean-François Pouliot me formule un jour des accusations de spéculation sur des lots faite par le Dr Parrot, ancien député de cette Chambre; je me hâte d'écrire au Dr Parrot en lui adressant les accusations de M. Pouliot et lui demande de se disculper; le Dr Parrot me répond qu'il va poursuivre M. Pouliot; quinze39 jours plus tard, aucune poursuite n'avait été prise par M. Parrot à qui j'écris de nouveau pour lui dire que les accusations étaient très graves et que son devoir dans les circonstances était de donner sa démission et de se représenter devant ses électeurs qui étaient ses juges.

Le lendemain, j'avais sa démission entre les mains. À ma place, le chef de l'opposition aurait fait la même chose. Tous les journaux de la province de Québec entière et de la province-soeur, même des journaux des autres provinces, m'ont félicité de ma prompte intervention, et ils ont dit à cette occasion que j'avais fait mon devoir et que c'était ainsi que devait agir un chef de gouvernement; quelques-uns ont ajouté qu'ils souhaitaient qu'il en fût ainsi ailleurs.

Tant que j'occuperai la position que j'occupe en ce moment, je saurai voir à la saine administration de notre province et, quand un député manquera à son devoir, je m'empresserai de lui dire exactement ce que j'ai dit au Dr Parrot. Et si nous n'obtenons pas l'appui des députés pour agir de la sorte, nous laisserons d'autres prendre nos places. Le Dr Parrot a démissionné et maintenant, le chef de l'opposition voudrait que l'on fît une enquête. Mais pourquoi une enquête dans cette affaire? Pour savoir, sans doute, s'il y a eu spéculation de la part de l'ancien député Parrot.

Je ne veux pas prononcer un jugement, mais le Dr Parrot paraît bien avoir erré: le fait que ce dernier a démissionné nous donne le droit incontestable de présumer que la preuve était relativement complète et qu'il y a eu spéculation. Pourquoi alors le chef de l'opposition tient-il à ce qu'un juge lui dise que le Dr Parrot a commis une erreur? Nous n'avons pas besoin d'un juge pour venir établir ce que nous présumons; il est entendu que le Dr Parrot a spéculé sur les lots. Maintenant, laissons le chef de l'opposition voir dans les attaques de M. Pouliot une charge contre le gouvernement ou le département des Terres. Qu'il prouve qu'il y a eu d'autres spéculateurs dans cette affaire que le Dr Parrot. Ce dernier a commis une erreur; à quoi sert maintenant de faire enquête sur son cas?

Venons-en à cette affaire de Montmagny qui a également tant scandalisé le chef de l'opposition. Il y a 11 ans40 de cela, et l'un de ceux que l'on accuse est le Dr Masson, ancien député de cette Chambre, qui ne l'est plus depuis plus de trois ans. Il (M. Taschereau) ignore si le chef de l'opposition connaît le Dr Masson, mais si c'était le cas, il saurait que sa caisse électorale n'est pas bien grosse. Et le chef de l'opposition, dit-il, voudrait que l'on fît une enquête sur ses agissements; il voudrait savoir s'il a spéculé. Le Dr Masson a peut-être spéculé, le chef de l'opposition a apparemment toute l'information sur le sujet, mais la chose est allée devant les tribunaux, même devant le plus haut tribunal, et la preuve a été complète à ce sujet. Que ceux qui veulent avoir les renseignements nécessaires consultent tout simplement le dossier de la Cour.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pas sur la place publique.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) parle du cas de la Beaulieu Lumber Agency cité par le chef de l'opposition et qui l'a également scandalisé. Il y a quelques années, dit-il, la Chambre a voté une loi et le chef de l'opposition a voté lui-même pour cette loi qui permettait l'échange de certains lots dans le but de favoriser la colonisation. La chose s'est faite pendant quelque temps; il y a un an qu'elle est arrêtée. On dit que des marchands de bois profitant de cet échange ont fait des profits. Je n'en doute pas. Quel est le marchand de bois, je vous le demande, qui aurait cédé les lots qu'il détenait pour d'autres lots sans qu'il y eût quelque profit pour lui? Autrement, ils ne les auraient pas échangés. Mais le gouvernement en a aussi profité, en assurant pour les colons des lots propres à la culture dans la région la plus anciennement colonisée. Il n'y a pas de mal à cela. Et il n'est pas besoin d'un juge, d'une enquête et d'un tribunal du dehors pour savoir quel profit tel marchand de bois aurait pu faire, que ce soit mille ou six mille dollars, dans de telles circonstances.

Le chef de l'opposition dit que M. Godbout, ancien député de Beauce était intéressé dans l'affaire; il dit aussi que M. Roberge était également intéressé. Il (M. Taschereau) ignore si c'est le cas. C'était leur droit à tous deux d'être intéressés dans une compagnie à fonds social qui faisait des affaires avec le gouvernement. La loi ne leur interdit pas. Leurs échanges n'ont pas été ruineux pour la colonisation, et par conséquent, personne ne peut les accuser.

Encore une fois, où y a-t-il scandale dans cette affaire? Encore ici, il (M. Taschereau) en appelle à l'intelligence et à la loyauté des membres de la Chambre. Le chef de l'opposition ne dit même pas si le gouvernement a fait une mauvaise affaire dans ses échanges. Le seul reproche qu'il fait, c'est que le gouvernement ait contracté des échanges avec des compagnies dans lesquelles un député et un conseiller législatif étaient intéressés, et c'est tout.

L'article des statuts refondus, 1909, par lequel le chef de l'opposition réclame une enquête, stipule bien: "lorsque le lieutenant-gouverneur en conseil estime opportun qu'une enquête soit ordonnée concernant toute question reliée au bon gouvernement de la province". Cela ne relève pas de la Chambre, mais c'est le lieutenant-gouverneur en conseil qui seul peut ordonner une enquête comme celle que demande le chef de l'opposition. La règle invariable pour la Chambre, dans les cas de cette nature, c'est de faire elle-même son enquête. Chaque fois qu'il croira qu'il est de son devoir de référer à un tribunal du dehors pour établir telles responsabilités, il n'hésitera pas à le faire. Mais le moins possible nous aurons recours à un juge pour juger nos chicanes politiques, le mieux ce sera. Juges et législateurs doivent se limiter à leurs sphères respectives.

Chaque fois, du reste, qu'un juge a été appelé à faire enquête sur des affaires politiques, il a laissé invariablement des lambeaux de sa dignité et de sa réputation. En Ontario, deux des juges les plus respectés se sont fait demander de mener une enquête, et aussitôt une presse hostile leur imputait toutes sortes de motifs. Tout au long de l'enquête, ils ont été l'objet d'injures dans ces journaux qui faisaient tout pour anéantir leur réputation auprès du public.

L'opposition, comme nous, a intérêt à garder à nos juges leur dignité et la sainteté de leurs fonctions. La pierre angulaire sur laquelle notre édifice social est établi, c'est une bonne administration de la justice; et nous entendons conserver les juges dans le respect et l'estime de tous. Ils doivent donc rester hors des questions politiques.

Le chef de l'opposition a fait, en terminant, une autre insinuation. Le gouvernement aurait payé certains travaux pour des chemins de colonisation à la Rivière Bell avant que ces travaux ne soient faits. C'est absolument faux et, là-dessus, le chef de l'opposition fait complètement erreur. C'est une affirmation purement gratuite; ma dénégation l'est moins, car nous avons des preuves à l'appui. Si le chef de l'opposition avait jugé à propos de convoquer le comité des comptes publics pour examiner toutes ces affaires, là, la lumière eût été faite en une heure. Mais c'est seulement à la veille de la prorogation qu'il vient réclamer une enquête royale. Maintenant, tant que je serai ici, il n'y aura pas d'enquête royale devant un juge.

M. le Président, le gouvernement n'a peur d'aucune des actions qu'il entreprendra et ne craint pas la lumière, mais le jour où le chef de l'opposition voudra faire une enquête parlementaire sur tous les ministres, s'il le veut, sur tous les députés et sur les conseillers, les employés civils, là, il sera le bienvenu et nous l'invitons d'avance. Qu'il porte des accusations, qu'il nous demande cette enquête et nous la lui donnerons. Il aura pleine et entière justice. Mais les petites tempêtes qu'il soulève en fins de sessions ne tiendront pas.

Quant à ses petites manoeuvres de fin de session pour faire croire au peuple qu'il y a eu scandale et que nous lui avons refusé une enquête, je peux me dire en toute confiance que ces tactiques ne prendront pas plus devant le public qu'elles ne prennent ici. Nous sommes trop préoccupés de l'honneur et de la dignité de cette Chambre pour permettre que ses privilèges soient contestés autrement que par les moyens prévus dans les règles parlementaires.

(Applaudissements)

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) tient à répondre aux accusations du chef de l'opposition, surtout au sujet d'une lettre citée par le chef de l'opposition et dans laquelle il (l'honorable M. Caron) aurait recommandé M. Paradis, ingénieur civil, dans cette affaire de Montmagny, dans le canton Bourdages. Il aurait recommandé pour des lots, à l'exclusion de toutes les autres recommandations qu'il aurait faites. Il donne lecture à ce sujet de deux lettres, l'une de M. Paradis lui-même qui soumettait au ministre les noms de colons pour lesquels il croyait que les lots en question devaient être cédés, et une lettre du ministre de l'Agriculture lui-même à son collègue des Terres et Forêts, l'honorable M. Allard, à qui il recommandait de céder les lots aux colons qui lui étaient désignés par M. Paradis.

C'est donc à dire que je n'ai pas recommandé du tout M. Paradis, comme l'a dit le chef de l'opposition, mais bien les colons qu'il me recommandait dans la lettre qu'il m'a écrite. Cela n'est pas la même chose. Et maintenant, si j'excluais les autres recommandations que j'avais pu faire, c'est une chose bien naturelle; on peut fort bien recommander quelqu'un à la place d'un autre qui n'a plus besoin de l'être et, dans le cas présent, ceux que j'avais précédemment recommandés avaient changé d'avis sur les concessions de ces lots.

Je proteste avec énergie contre toute insinuation de spéculation qui pourrait être portée contre moi durant les vingt années que j'ai passées dans la politique. L'opinion publique est souvent plus maligne que les paroles et voilà pourquoi j'ai tenu à relever les paroles du chef de l'opposition. Je n'ai jamais spéculé. Si je l'avais fait, mes ressources seraient peut-être plus grandes qu'elles le sont, car les occasions ne m'ont pas manqué. Personne ne peut m'accuser d'avoir profité d'une spéculation quelconque. Jamais l'on ne m'a pris à faire de la spéculation et je défie qui que ce soit de venir prouver le contraire dans aucune occasion, ni de près, ni de loin. Mes collègues ne m'ont jamais fait un tel reproche et j'en sortirai qu'ils puissent m'en faire. Je n'ai jamais cherché à faire la moindre spéculation, et ce ne sont pas les spéculateurs qui m'ont manqué.

Il (M. Caron) tient ensuite à donner quelques explications au sujet de ces lots du canton Bourdages qui, d'après le chef de l'opposition, après avoir été déclarés propres à la colonisation, ont ensuite été vendus comme impropres à l'agriculture. Il y a, dit-il, à cela une explication basée sur des faits qu'ignore le chef de l'opposition. Une route de quinze milles de longueur traverse ce canton et cette route est très difficile; elle devait être entretenue par les cultivateurs et les colons du canton, ce qui leur coûtait très cher. Les cultivateurs demandaient que cette route fût entretenue par les propriétaires de limites; la chose était impossible. Le conseil de Cap-Saint-Ignace, un jour, passa une résolution demandant au gouvernement ou bien un octroi spécial pour entretenir cette route, ou en vendre les lots en bordure de cette route, ou bien forcer les propriétaires de limites à entretenir cette route.

La valeur de ces lots en bordure était plus ou moins établie en ce sens que certains lots d'une certaine étendue n'avaient qu'une portion de propre à la culture; de sorte que ces lots se concédaient avec assez de difficultés. Le gouvernement, notamment à la suite de la résolution du conseil de Cap-Saint-Ignace de vendre ces lots, les vendit sur une distance de quatorze acres de chaque côté de la route, Et voilà pourquoi ces lots, déclarés au préalable propres à la culture, furent déclarés ensuite impropres et vendus.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le ministre de l'Agriculture (M. Caron) a fait tout un plat d'un élément de mon discours qui est passé inaperçu. L'honorable ministre de l'Agriculture a cru pouvoir expliquer la question de la concession des lots de chaque côté de la route. Il a trouvé que cela était correct. Il (M. Sauvé) ne désire pas s'en prendre au ministre de l'Agriculture pour ce qu'il a fait pour son ami Paradis. Je ne suis pas avocat, dit-il, je ne suis pas juge d'aucune cour, mais il y a des grands juges qui ont déclaré que le cas est scandaleux...

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il n'y a rien dans l'affaire Thériault.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): L'honorable premier ministre n'est pas fort en météorologie. Autrement, il saurait que quand le tonnerre tombe à côté d'un homme, il ne le tue pas, mais que lorsqu'il le frappe, il le foudroie. Les théories qu'il a avancées tout à l'heure sont contraires à la plus élémentaire justice...

M. l'Orateur: Je ferai remarquer au chef de l'opposition qu'il devrait restreindre un peu ses remarques.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): D'après l'article 276, je suis l'honorable premier ministre là où il m'a entraîné.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): L'article 276 parle du quorum.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) déclare qu'il n'a cité que cinq cas, mais qu'il ne faut pas conclure que c'étaient les seuls. D'ailleurs, dit-il, une seule accusation suffisamment sérieuse pour mériter une enquête peut envoyer un accusé devant les tribunaux. Je veux être indulgent pour mes collègues et je ne veux pas dépasser les limites que je me suis tracées, mais la déclaration du premier ministre me force à en sortir. Mais dans cette affaire41, il y a un accusé et un coupable.

Si ce n'est pas M. Thériault, c'est l'agent des terres du ministre qui a négligé son devoir et accordé à M. Thériault des lots qui n'étaient pas pour un colon. Ce que je trouve curieux, c'est qu'il n'y a aucune lettre avec la déclaration. En fait, le député de l'Islet a envoyé sa déclaration à l'agent des terres, un mois après la lettre qu'il lui avait écrite.

M. Thériault (L'Islet): La formule a été envoyée en même temps que la lettre.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) produit la lettre.

M. Thériault (L'Islet) dit qu'il (M. Sauvé) n'a pas le droit de l'avoir.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je dis que M. Authier a reçu la déclaration un mois après, ou ces documents ne valent rien. Ma parole vaut quelque chose, je suppose. Le député de l'Islet (M. Thériault) a dit que ces lots étaient pour lui, rien que pour lui, et il n'a pas prétendu qu'ils étaient pour quelqu'un d'autre...

Des députés ministériels manifestent42.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Ce n'est pas là le point.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ah! Ça chauffe, de l'autre côté. Moi, je parle de l'assermentation.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Et qu'est-ce que cela fait avec ce qui nous occupe?

M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande à l'Orateur de rappeler à l'ordre le premier ministre.

M. l'Orateur: Je demande que l'on procède régulièrement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): En parlant du député de L'Islet (M. Thériault), il me semble que le chef de l'opposition devrait avoir plus de respect et se servir du langage parlementaire43.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je parle d'après les termes du dossier.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Ce n'est pas le dossier qui parle.

M. l'Orateur: À l'ordre.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) continue son argumentation...

Des députés ministériels: Quelle différence cela fait-il pour ce qui est de la date?

M. l'Orateur: À l'ordre!

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ou celui qui a signé la déclaration du serment a mal agi, ou l'agent des terres a violé la loi. Je défie qui que ce soit de me prouver le contraire. Quant à la question des juges conduisant des enquêtes, il (M. Sauvé) rappelle au premier ministre l'enquête Cannon...

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): C'était une enquête municipale.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Quelle est la différence entre une enquête politique et une enquête municipale? Il y a également l'enquête du juge Cassel; voilà une affaire politique. Il reproche au premier ministre son allusion à l'affaire Bérard44, très dure, dit-il, pour un collègue45. Je me souviens de l'affaire Mousseau, également. Tous les principaux témoins furent à tour de rôle incapables de parler, d'entendre, et de marcher.

Le principal témoin de l'affaire est soudainement tombé malade. On lui a envoyé des médecins et on a constaté que l'homme était incapable de parler ou d'entendre quoi que ce soit46. Et il semble d'ailleurs que ce soit contagieux, car à leur retour pour faire rapport, les médecins n'avaient pas grand-chose à raconter, et l'enquête s'est arrêtée. Il y a eu une demande de réouverture, et le gouvernement de l'époque a répondu en utilisant sa majorité pour stopper la démarche.

Le premier ministre a parlé d'une enquête politique, mais quand il s'agit d'affaires politiques, il est impossible dans les circonstances d'avoir une enquête complète et un jugement impartial. Dès qu'un comité sera nommé, l'enquête sera jugulée.

Le premier ministre a dit que je me débattais comme un microbe en temps d'épidémie. Un microbe en temps d'épidémie, hein? Le dossier du gouvernement est chargé de microbes et c'est pourquoi la tempête éclate un peu partout dans la province sur le gouvernement. Il y a des microbes dans le département des Terres qui l'infectent et l'empêchent d'accomplir ses tâches dans l'intérêt de la province.

Et ces microbes, ce sont des gens comme M. Paradis, ingénieur-civil, qui ont des influences pour obtenir des lots de colonisation. Oh, je sais ce qui arriverait si un gouvernement conservateur était en place. Avec le tempérament que l'on connaît au premier ministre et sa vieille garde libérale, il ne manquerait pas d'y avoir des assemblées dans toute la province pour dénoncer ces scandales terribles. Il y aurait du tonnerre, mais aujourd'hui, un gouvernement libéral vient dire qu'il craint d'exposer les juges à juger des affaires politiques.

L'honorable premier ministre a été très intéressant dans sa conduite vis-à-vis de MM. Pouliot et Parrot. Il ne s'est pas objecté dans cette affaire à ce que la cause aille devant les tribunaux. C'est donc qu'alors il n'avait pas la même tendresse pour les juges.

Quant au chèque de $141 fait à l'ordre du Dr Parrot et dû à M. Michaud, il (M. Sauvé) fait remarquer qu'il y avait certainement un défaut dans la loi et que, si l'affaire Parrot n'avait pas été mise au jour, M. Michaud aurait toujours bien perdu son argent.

Certainement, et c'est pour démontrer qu'il y a eu un système de spéculation et que cela dure depuis des années, que la province perd de l'argent pour permettre à ses favoris de s'enrichir. Et les propos du premier ministre sont de nature à encourager ces spéculateurs à continuer, à aller chercher plus de lots, à faire plus d'argent.

Dans l'affaire du Dr Masson, le premier ministre a dit qu'il croyait que l'ex-député de Montmagny était coupable et que l'affaire avait été en Cour suprême. Le jugement de la Cour suprême, tel qu'il a été rendu, a condamné le gouvernement.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) hoche la tête en signe de désapprobation et murmure quelques paroles qui échappent à l'oreille du député de Deux-Montagnes.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Comment? Comment? Est-ce que l'honorable ministre des Terres (M. Mercier fils) nie?

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): (En riant) Je n'en suis pas sur cela.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Moi j'en suis. (En brandissant le volume dans lequel sont contenus tous les détails de l'affaire Masson)

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) dit qu'un seul juge a fait une telle affirmation et que son opinion ne l'intéresse pas.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Tiens! Voilà maintenant le ministre des Terres qui manque de respect aux juges, après que le premier ministre les ait montés aux nues. Ce n'est pas par le biais d'une élection qu'une enquête peut être tenue et qu'un jugement peut être rendu, car il existe toutes sortes de moyens de remporter une élection...

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) sourit.

M. l'Orateur intervient pour déclarer que le chef de l'opposition dépasse les limites et que, bien qu'il n'ait pas désiré intervenir, il lui semble qu'il se devait de le lui rappeler.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Les déclarations du premier ministre sont de nature à encourager les spéculateurs, mais non pas à rendre justice. Qu'advient-il avec notre système parlementaire? Quand on se porte à la défense des spéculateurs, comment la colonisation peut-elle progresser? Une enquête parlementaire n'est pas suffisante. Les membres de cette Chambre, étant donné qu'ils se doivent de supporter la politique du gouvernement, ne peuvent être impartiaux. Le gouvernement se sert simplement de son écrasante majorité. Le cas du Dr Parrot est sérieux et c'est le devoir du gouvernement d'accorder une enquête. Pour moi, c'est mon devoir de la demander, et si la chose était à recommencer demain, je la demanderais encore, persuadé que je fais ce que je suis obligé de faire, même si je savais que la motion serait vaine.

La motion, étant mise aux voix, est rejetée47.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté les messages suivants, lesquels sont lus ainsi qu'il suit:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, sans amendement, les bills suivants:

- bill 203 créant le service provincial d'hygiène et amendant en conséquence les statuts refondus, 1909;

- bill 208 concernant la saisine de certains bénéficiaires;

- bill 209 amendant la loi relative aux droits sur les successions;

- bill 210 amendant les statuts refondus, 1909, relativement à la nomination des juges des sessions et des magistrats de police.

Il est ordonné que le greffier se rende à l'Assemblée législative et informe cette Chambre que le Conseil législatif a accepté les amendements de l'Assemblée législative aux amendements du Conseil législatif au bill 161 amendant les statuts refondus, 1909, relativement au Collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec.

Il est ordonné que le greffier se rende à l'Assemblée législative et informe cette Chambre que le Conseil législatif a accepté les amendements de l'Assemblée législative et ses amendements au bill 100 amendant la charte de la cité de Montréal.

 

Demande de documents:

Canalisation du Saint-Laurent

M. Bergevin (Beauharnois) propose, appuyé par le représentant de Rimouski (M. Tessier), qu'il soit présenté à Son Honneur le lieutenant-gouverneur une adresse priant Son Honneur de faire déposer sur le bureau de cette Chambre:

Copies des plans et devis, des rapports d'ingénieurs et autres, lettres, résolutions de conseils municipaux et des chambres de commerce sur les pouvoirs d'eau situés entre le lac Saint-François et le lac Saint-Louis, sur le fleuve Saint-Laurent; copies de contrats avec toutes les compagnies déjà existantes, la quantité de chevaux-vapeur développés et le nombre de forces hydrauliques qui pourraient être développées à cet endroit; ordres en conseil du gouvernement de la province de Québec, relatifs aux concessions faites à toutes les compagnies développant des forces hydrauliques à cet endroit; copie de correspondances, rapports de commissions et autres documents au sujet des pouvoirs d'eau et des canaux du Saint-Laurent et autres, depuis 1919 jusqu'à maintenant.

M. l'Orateur, il y a deux ans, lorsque j'eus le plaisir de traiter cette question de l'agrandissement et de l'amélioration des canaux du Saint-Laurent ainsi que du développement des pouvoirs d'eau qui en découlent et qui peuvent être créés en même temps, je ne m'attendais pas à ce que ces importants problèmes internationaux, nationaux et interprovinciaux attireraient si tôt et si sérieusement l'attention publique et provoqueraient une discussion aussi intéressante, tant aux États-Unis qu'au Canada.

Je suis heureux d'avoir l'honneur de me lever de nouveau de mon siège pour traiter d'une question des plus importantes et qui intéresse au plus haut point le Canada tout entier, la province de Québec particulièrement, et plus spécialement la métropole du Canada et ses environs.

Cette question agite à l'heure présente l'opinion politique dans toute l'Amérique du Nord; des controverses sont engagées et des relations internationales marchent de l'avant pour tâcher d'amener la solution de ce problème qui comporte en lui-même la question économique la plus importante qui puisse être traitée entre les gouvernements canadiens, tant fédéral que provinciaux, et le Congrès américain, le Sénat des États-Unis ainsi que les différentes Législatures des États-Unis que la question intéresse.

Qu'il me soit permis, M. l'Orateur, de vous dire que je me place au point de vue entièrement canadien et que je traiterai la question au meilleur de ma connaissance dans l'intérêt de la province de Québec et de son avenir, au point de vue de son trafic et de sa navigation maritime et intérieure et de ses développements industriels et commerciaux dans la situation unique que notre province occupe à ces différents points de vue.

Je dois vous dire que je suis entièrement contre la canalisation du Saint-Laurent lui-même pour plusieurs raisons, d'abord parce que cela détruirait les beautés merveilleuses de notre majestueux fleuve et que ces développements pourraient provoquer des dangers et des difficultés au point de vue de sa réalisation pratique, dans l'exécution des travaux et des obstacles qui se présenteront inévitablement, tel qu'il est prévu par des ingénieurs compétents.

Mais, ce serait une utopie de croire que nous ne devons pas améliorer les canaux du Saint-Laurent qui existent depuis des centaines d'années et qui ont coûté des centaines de millions au Canada et qui ont été créés avec le concours des gouvernements tant conservateurs que libéraux, depuis que le Canada existe.

Non seulement nous avons le devoir d'entretenir et de développer les anciens canaux du Canada, mais il est de notre devoir d'en créer d'autres sur le territoire canadien, si la chose est jugée nécessaire, afin de développer notre commerce plus complètement et plus parfaitement en accord avec les besoins adéquats de l'heure présente.

D'autant plus que les revenus qui peuvent découler des pouvoirs d'eau par la création et l'amélioration de ces canaux rapporteraient suffisamment pour payer le coût de ces travaux et donner une navigation moderne, sans qu'il en coûte un sou aux gouvernements du Canada et des provinces canadiennes.

Il serait important, je crois, dans les circonstances, de définir une fois pour toutes quels sont les droits du gouvernement fédéral sur les rivières navigables et quels sont les droits et les privilèges dont jouissent les provinces, quant à ce qui concerne l'énergie cinétique (la force motrice) qui peut être développée des pouvoirs d'eau créés par les canaux du Canada.

Jusqu'à présent, le gouvernement du Canada a bénéficié des pouvoirs d'eau situés sur les canaux du Canada sous prétexte que ces canaux avaient été construits avant la Confédération. Il y a là un point qu'il s'agirait d'éclaircir et que nos compétences légales pourraient mettre au point et définir, une fois pour toutes, les pouvoirs du gouvernement fédéral et ceux dont devraient jouir les provinces.

Cette question est d'une importance vitale pour elles en ce qu'elle comporte des revenus sur lesquels elles pourront compter d'une façon stable pour maintenir leur échiquier, car il est reconnu que les pouvoirs hydrauliques sont parmi les meilleurs placements dans l'Amérique du Nord.

Me serait-il permis de citer ici une opinion définissant la division faite par l'Acte constitutionnel donnant aux gouvernements provinciaux l'entière propriété des ressources naturelles: le sol, les mines, le fond des rivières et l'eau qui y coule.

L'esprit public n'est pas encore fixé relativement à l'eau, mais l'un de ces jours, le Conseil privé devra l'attribuer formellement aux provinces comme il l'a déjà reconnu implicitement en leur donnant les rivières, et, surtout, les fonds de rivières.

Le fait que le gouvernement fédéral a le contrôle de la navigation ne lui donne pas plus la propriété de l'eau que son pouvoir de créer des chemins de fer et de les faire passer où il veut ne lui donne la propriété du sol. Il lui fait acheter le terrain. S'il n'achète pas l'eau, c'est parce que tous en ont la jouissance gratuite. La sous-section 5 de l'article 92 dit que la "vente et l'administration des terres publiques appartiennent aux provinces". Rapprochée de la sous-section I3 qui leur donne la "propriété et les droits civils", elle comprend tout le domaine compris dans les terres publiques et toutes les ressources naturelles qui peuvent être possédées par le gouvernement.

Aujourd'hui, on tient le pouvoir fédéral responsable de tous les dégâts causés par le Saint-Laurent, par exemple; il n'y a aucune raison de le faire, quand ces dommages ne sont pas causés par quelques-uns de ses travaux ou par les navires sur lesquels il a le contrôle. Pourquoi répondrait-il que le fond des rivières ne lui appartient pas? Les inondations, par exemple, sont causées par des défauts de formation dans le domaine public; c'est à celui qui a la propriété du domaine public à les faire disparaître.

Pour contrebalancer cette charge onéreuse, les provinces, en revanche, ont la propriété des pouvoirs d'eau. Il est vrai que le gouvernement d'Ottawa possède aujourd'hui, dans ses attributions, les pouvoirs résultants des canaux existants; mais c'est par une stipulation spéciale de l'Acte fédéral, article 108, qui dit: "Les travaux et propriétés publics de chaque province énumérés dans la troisième cédule annexée au présent acte appartiendront au Canada".

Or, la troisième cédule contient, comme "travaux et propriétés publics devant appartenir au Canada; Io.- Canaux avec les terrains et pouvoirs d'eau y adjacents (connected therewith, dit l'anglais)". Il ne s'agit pas ici d'une simple division de l'actif appartenant à l'ancien Canada. Le fait que, pour investir le fédéral de cet actif, on est obligé de mentionner nommément les pouvoirs d'eau existants prouve assez clairement que ce n'est pas un droit intrinsèque découlant de l'Acte Impérial et qu'il ne peut se présumer.

Dans tout canal nouveau, par exemple, le Trent, ou la Baie Georgienne, les provinces peuvent réclamer la propriété de ces pouvoirs, si le gouvernement d'Ottawa consent à ouvrir les berges de ces canaux. Comme propriétaire des travaux, il pourrait réclamer une part des revenus pour l'intervention dans ses talus et dans le courant du canal, mais les biefs conduisant l'eau à des usines seront la propriété des gouvernements locaux.

Naturellement, le contrôle de la navigation donne au gouvernement fédéral le pouvoir de multiplier les usages pour l'accommodation des navires et pour tout ce qui s'y rapporte; il a le droit de creuser le lit de la rivière qui ne lui appartient pas, d'y asseoir des phares, d'y faire des barrages pour augmenter l'approvisionnement de l'eau, mais seulement en vertu des pouvoirs incidents nécessaires à l'exercice de son pouvoir principal. Il n'a pas plus la propriété de l'eau qu'il n'a le fond sur lequel elle coule.

Il est nécessaire de poser ce principe, afin d'établir l'absence de pouvoirs et de privilèges pour le gouvernement fédéral dans les concessions de barrages et de tout ce qui se rapporte à l'eau. Si une entreprise détourne l'eau de manière à nuire à la navigation, il a certainement le droit d'intervenir, mais seulement pour cette unique raison. Pour un approvisionnement d'eau indifférent à la navigation, son concours est parfaitement inutile et illégal. Le gouvernement provincial est le seul pouvoir en état d'agir.

La Cour supérieure, d'Ottawa, comme le Conseil Privé, de Londres, ont décidé ce point depuis 1898. Dans la cause de Martha Suzanna, contre le procureur général de Québec, Lord MacNaughten a, le 13 juin 1911, confirmé comme suit, une fois pour toutes, le jugement de la Cour supérieure de 1898:

"Cette question, qui a été la cause de grandes difficultés à cause de la phraséologie de la cédule III, dans l'Acte de l'Acte de l'Amérique britannique du Nord, n'a été finalement réglée qu'en 1899. Quand cette cour a affirmé la décision de la Cour suprême: que dans les mots de la cédule III "Améliorations sur les lacs et les rivières" les rivières, à part des améliorations faites n'étaient pas rangées parmi les droits du dominion, mais appartenaient à la Couronne, gérée par la province."

Il ressort clairement de là que le gouvernement de Québec est le seul capable légalement d'autoriser les héritiers de feu J.-B. Robert, de faire des travaux à Valleyfield, pour "alimenter le canal à Catherinestown, dans la seigneurie et le district de Beauharnois, de manière à pouvoir fournir de l'eau à la rivière Saint-Louis".

Le gouvernement d'Ottawa est tout à fait étranger à ces travaux, parce qu'ils n'affectent pas la navigation et remettent à une autre partie du Saint-Laurent l'eau qu'ils y prennent 17 milles plus haut.

Aujourd'hui la possession du fond des rivières par les gouvernements provinciaux, ou, dans les cas des rivières navigables ou flottables par les propriétaires riverains est de droit élémentaire.

Voilà une opinion qui mérite qu'on la considère sérieusement, vu qu'elle a été écrite par l'un des plus grands journalistes et économistes politiques du Canada, le regretté Monsieur Arthur Dansereau, ancien rédacteur de La Presse et qui a agi pendant longtemps, vers 1867, comme secrétaire et ami de feu Sir Georges Étienne Cartier48, l'autorité compétente et l'homme d'État canadien le plus important de l'époque et qui fut un des fondateurs de la Confédération.

En sorte que l'opinion de ce grand journaliste canadien mérite qu'on apprécie à sa juste valeur ses écrits, lui qui a connu particulièrement l'esprit avec lequel a été fondée la Confédération et rédigé l'Acte de l'Amérique britannique du Nord avec les intentions qu'il comportait, quant aux pouvoirs du gouvernement fédéral et des pouvoirs accordés aux provinces.

Le grand homme d'État canadien, le plus illustre des fils dont s'honore le Canada tout entier, et particulièrement la province de Québec, avait à coeur de développer et d'améliorer les canaux du Saint-Laurent pour protéger la navigation intérieure et maritime du Canada, puisque c'est lui-même et son gouvernement qui ont fait voter les premières sommes nécessaires au creusage du Canal Welland à 25 pieds de profondeur.

Il aurait été inutile pour l'avantage du Canada d'approfondir le Canal Welland, sans que les autres canaux du Saint-Laurent, depuis Prescott à Montréal, fussent creusés à la même profondeur. Et les millions dépensés jusqu'à présent pour approfondir ce canal seraient une pure perte pour le Canada, si les autres canaux n'étaient pas approfondis jusqu'à Montréal.

Une autre preuve que Laurier49 et son gouvernement avaient l'intention d'encourager l'amélioration des canaux, c'est qu'il fit passer un ordre en conseil en 1909, donnant la permission de prendre le surplus de l'eau du Lac Saint-François pour le déverser dans le Lac Saint-Louis par un nouveau canal, dont les plans seraient sujets à l'approbation du gouvernement du Canada.

Un contrat est intervenu entre une compagnie et le gouvernement fédéral, basé sur cet ordre en conseil, ce qui permettrait le creusage d'un canal de 25 X 35 pieds de profondeur entre ces deux lacs, ce qui créerait un canal de navigation entre ces deux points, en même temps que le développement de pouvoirs d'eau jusqu'à concurrence de 500,000 à 1,000,000 (un million) de chevaux-vapeur (suivant la quantité de pieds cubes par seconde qui serait prise). C'était là la politique, sage, saine et éclairée du plus grand homme d'État canadien, qui voyait juste, qui savait s'élever au-delà des intérêts personnels et mesquins et des intérêts spéculatifs particuliers, pour faire triompher les véritables intérêts nationaux du Canada.

Lorsque nous avons entendu et lu les paroles remarquables prononcées au banquet offert à l'honorable M. Lapointe50 à Québec51, dans le mois de février dernier, nous avons été fiers d'applaudir les paroles franchement patriotiques du distingué premier ministre canadien, lorsqu'il déclara que sa politique serait la continuation de celle de Sir Wilfrid Laurier, depuis 1896 à 1911.

Le Canada et la province de Québec peuvent assumer une admirable tâche dans la solution de ces problèmes économiques, dont dépend véritablement une partie de l'avenir du Canada et de la province de Québec.

Non seulement c'était la politique de Sir Wilfrid Laurier, il est peut-être bon de rappeler ici que la Fédération des chambres de commerce, réunie à Sorel en congrès les 12, 13 et 14 juin 1916, a adopté une résolution favorable au projet qui lui a été soumis de construire un canal de 700 pieds de largeur partant du Lac Saint-François au Lac Saint-Louis, pour faciliter la navigation sur le Saint-Laurent, et se rendre plus facilement aux ports de Montréal et de Québec. Si toutes les chambres de commerce de la province de Québec se sont prononcées en faveur de ce projet qui favorise le développement des industries du commerce et de la navigation canadienne, c'est que les plus hautes autorités compétentes dégagées de préjugés approuvent ce projet, dans le meilleur intérêt de la province et du Canada.

Non seulement le projet de loi et ses chefs les plus distingués sont en faveur du creusage et de l'amélioration des canaux du Saint-Laurent. Non seulement, c'est Laurier, avec ses idées élevées et la conception des oeuvres progressives véritablement nationales, qui a demandé la création du nouveau canal de Welland et autres canaux longeant le Saint-Laurent jusqu'à Montréal, mais, le Parti conservateur a endossé cette politique-là, et les associations conservatrices ont passé des résolutions définissant l'appui lui-même accordé à ces projets d'agrandissements de nos canaux canadiens.

Ces associations ont même recommandé les tracés faits par certaines compagnies. J'ai ici en main les résolutions de ces associations, ce qui démontre que tous les partis politiques de notre pays préconisent et endossent ces projets qui comportent en eux-mêmes le plus complet avancement matériel de notre trafic et de notre commerce.

Malheureusement, depuis quelques années, il faut l'avouer, une campagne menée par les trusts, intéressés à ne pas avoir de concurrents, et une certaine presse mal inspirée combattent ce projet, qui est pourtant dans le meilleur des intérêts du Canada et de la province de Québec.

Il est peut-être bon de dire ici que les États-Unis et l'État de New York particulièrement font une campagne de journaux pour tâcher de détourner la saine opinion publique canadienne, afin d'attirer vers les ports américains la navigation du Saint-Laurent qui doit, tout naturellement, nous appartenir et être développée aussi complètement que possible, pour protéger les véritables intérêts canadiens et ceux de l'Empire britannique, en général, mais tout spécialement les intérêts de la province et de la métropole du Canada.

Savez-vous ce qui se passe à l'heure présente? L'État de New York, l'oeil toujours largement ouvert, est en voie de détruire Montréal et la province de Québec au point de vue du trafic, du commerce et de la navigation maritime intérieure.

Une grande partie des rapports et des déclarations faites par certains hommes politiques des États-Unis n'est que du camouflage pour empoisonner l'opinion publique canadienne et surtout celle de la métropole du Canada et de la province de Québec. Et cela, afin de donner le temps à l'État de New York et la ville de New York de pratiquer une mainmise sur nos ressources naturelles et détourner le courant de la navigation intérieure et maritime, à travers l'État de New York et vers la métropole commerciale américaine et les autres ports de l'Atlantique.

J'ai ici à la main le prospectus et les rapports qui prouvent l'intention de construire à eau profonde, un canal reliant le lac Ontario et la rivière Hudson, de l'extrémité est du lac Ontario, à la rivière Hudson à Kenwood au sud d'Albany.

Non seulement le tour serait joué, mais la métropole canadienne et la province de Québec deviendraient isolées, pendant que la navigation maritime irait à Toronto, par cette voie, et ainsi les ambitions de la province voisine seraient réalisées à notre préjudice et au bénéfice des États-Unis.

Mais comme nous avons pour nous l'avantage de la distance et que Montréal est plus rapproché de l'Angleterre par 602 milles, en prenant Buffalo pour base, nous occupons une position plus avantageuse pour les Américains et les Canadiens de l'Ouest et ils ne doivent pas ignorer qu'ils devront faire valoir en temps opportun la route du fleuve Saint-Laurent et de ses canaux jusqu'à Montréal, qui raccourcirait si considérablement la distance navigable entre l'Amérique et l'Europe.

Si nous refusons d'étudier dès maintenant les moyens à prendre, pour nous protéger efficacement sur cette importante question, nous nous réveillerons un beau matin pour apprendre que nous avons été sacrifiés au bénéfice de nos puissants voisins et peut-être annexés et rendus en dedans de leurs frontières.

N'oublions pas l'histoire du passé et rappelons-nous que le Canada a été sacrifié à maintes reprises, particulièrement par le traité d'Ashburton, le traité de l'Alaska, et le Chicago Drainage Canal, et qu'il est bien possible que nous le soyons de nouveau dans les négociations déjà entamées entre les gouvernements de Washington et l'Angleterre, sur cette importante question.

N'oublions pas que les sommités de la politique américaine sont en faveur de ce projet et que ces hommes politiques américains feront tout en leur pouvoir pour nous arracher le problème à leur bénéfice d'abord, et en tirer tout le profit possible. Mais nous avons pour nous l'avantage des distances à parcourir et nous occupons la position stratégique, si je puis m'exprimer ainsi. Je dis cela sans motif de provocation, mais cherchant simplement et aussi complètement que possible l'intérêt de ma province et de mon pays.

Voici ce que disait le président Harding52 au sujet de cette question: "La praticabilité du projet d'une voie navigable des grands lacs à l'Atlantique par le Saint-Laurent ne peut-être mise en doute." Telle est la déclaration faite aujourd'hui par le président Harding, parlant devant la convention nationale des agriculteurs.

J'ai déjà parlé, continue le président, des avantages dont jouit l'Europe, par suite de ses facilités d'accès à la mer, de ses facilités plus économiques de transport.

Dans notre pays, nous avons l'une des opportunités les plus attrayantes qu'il existe au monde d'étendre nos voies de transport de plusieurs centaines de milles à l'intérieur des terres. On pénétrera au coeur du continent, avec ses vastes ressources agricoles et industrielles, par la mise à exécution du projet de la route du Saint-Laurent, rendu navigable, depuis les grands lacs jusqu'à l'Atlantique. Si les transatlantiques avaient accès à tous les ports des Grands Lacs, il s'en suivrait un développement énorme de la vie industrielle dans l'intérieur du continent.

On ne peut mettre en doute la possibilité de mettre ce projet à exécution, et quant au coût qu'il entraînerait, il serait insignifiant comparé à l'exécution de quelques autres merveilles du génie civil.

Toutes désorganisées qu'elles sont, les nations centrales de l'Europe s'occupent cependant du développement de leur communication intérieure par voie fluviale. En reliant le Rhin au Danube, on pourra établir un service de navigation de la Mer Noire à la Mer du Nord, de la Méditerranée à la Baltique. Si l'Europe a pu faire taire ses animosités de races et si l'on a pu triompher de difficultés économiques, il semble que nous aurions plus de facilité de faire triompher notre projet.

Voici que M. Herbert Hoover53, l'un des plus grands économistes politiques de notre époque, dit que le creusage des canaux économiserait 10 cents par minot pour l'exportation du blé et que cela permettrait une plus grande production de céréales. Si la chose serait (sic) bonne pour les États-Unis, elle l'est davantage pour le Canada, et ce, non-seulement pour les céréales, mais pour tous les produits agricoles et manufacturés, tant exportés qu'importés d'Europe et d'ailleurs.

J'ai ici les opinions favorables de la part de Mr. W. F. MacLean54, M. P., de Mr. Frank H. Keefer55 et de l'honorable Mr. Jas. A. Robb56, le nouveau ministre du Commerce dans le gouvernement canadien. Voici ce qu'il disait au sujet de la transportation:

"Que le Canada en avait beaucoup, peut-être trop, mais il suggérait que si le Canada voulait concourir avantageusement avec les marchés des pays de l'univers, il doit être préparé à transporter ses marchandises aussi rapidement et aussi bon marché que les pays étrangers. Le Canada a des lignes de chemins de fer et des bateaux. Sûrement le Canada devrait exporter des ports canadiens à des taux aussi bas que les autres parts du continent.

"Ce n'est pas le temps de nous diviser, mais c'est le temps de nous unir et de travailler, avec nos soldats de retour parmi nous; ils sont anxieux de s'établir et de travailler dans la paix, comme ils ont travaillé vaillamment à la guerre. Nos ressources ne seraient d'aucune valeur, si le peuple ne se met pas au travail et ne les développe pas, pour donner de l'emploi au peuple et des revenus à la nation.

Pour accomplir cette oeuvre, je demande l'appui des hommes d'affaires, et je sais que je l'aurai, sans s'occuper des divergences politiques, mais avec l'idée de l'avancement du dominion que nous servons."

Voilà les paroles patriotiques de l'un de nos hommes d'État les plus distingués. Je vous demande pardon, si j'ai interrompu tout à l'heure les déclarations que je voulais vous faire au sujet des intentions des Américains de faire dévier la route du Saint-Laurent par une prise d'eau à l'est du lac Ontario, pour creuser un canal du lac Ontario aux Environ d'Albany sur la rivière Hudson, en passant en partie par le New York State Barge Canal, qui a déjà coûté deux cents millions à l'État de New York, j'ai voulu tout simplement, incidemment donner les opinions des hommes d'État canadiens et américains sur cette question.

J'ai ici la photographie avec le prospectus de ce projet qui isolerait la province de Québec et paralyserait le développement matériel du territoire du fleuve Saint-Laurent au Canada, et qui dirigerait presqu'entièrement le trafic et la navigation intérieure et maritime vers le port de New York et les ports de l'Atlantique des États-Unis.

Voici ce qu'ils disent: "Nous n'avons pas besoin d'aller au Canada pour une route canalisée. La meilleure est indiquée par une ligne noire sur la carte plus bas imprimée. Les raisons sont probantes:

"1. La congestion du terminus de l'État de New York cessera lorsque ce canal sera en opération. Les pouvoirs hydrauliques seront établis où l'on en a le plus besoin dans le centre de l'Est de New York.

"2. 1,400,000 chevaux-vapeur seront développés sans changer le traité des frontières canadiennes. Le revenu des pouvoirs d'eau seul pourra payer pour le coût total de la construction.

"3. Le gouvernement n'a pas besoin de dépenser des centaines de millions, mais retirera une partie des revenus de la compagnie ou corporation et le canal sera mis en usage, sans payer le droit de passage, sa construction étant entièrement payée.

"4. Après que cela sera accompli, alors nous pourrons aider le Canada à construire le canal du Saint-Laurent, mais nous devrons insister qu'il soit de 30 pieds.

"5. Il y a vingt ans passés, Angell, Russell, Cooley, Raymond, Nobel, Wisner, tous de bons ingénieurs et économistes, recommandèrent cette route toute américaine, telle que nous la ferons nous-mêmes sans charge. Leur rapport a coûté un demi-million de dollars.

"6. La traditionnelle économie des ingénieurs de l'armée, qui ignorent les revenus des pouvoirs et autres ressources indirectes, sera obviée par le fait de cette construction.

"7. Les bateaux de fret pourront aller et revenir et gagner de l'argent durant le cours de l'année. Les États-Unis maintiendront le contrôle de la navigation.

"8. Ce canal sera d'une grande valeur militaire comme il a été démontré durant le cours de la grande guerre mondiale. Les eaux des débâcles seront emmagasinées pour en faire usage.

"9. La plupart des marchés de l'univers sont plus rapprochés par cette route et nous avons une saison de navigation plus longue à cet endroit. Le temps de navigation de Duluth à New York sera de moins de 6 jours.

"10. Nous demandons une charte fédérale et que le Congrès déclare que cette route est une voie publique sans payer aucune charge, ni aucun droit de passage.

"Voici les faits positifs et non pas du sentiment. Les Américains doivent contrôler leur navigation jusqu'à la mer.

"C'est le plus grand projet d'ingénieur qui ait été encore émis depuis la construction du Canal de Panama."

"Daté à Washington D. C. Septembre 1er, 1920.

"(Signé) Millard. F. Bowen & Associates."

Voici ce qu'ils ajoutent en pages principales de leur prospectus. Une déclaration du sénateur Lodge57 qui dit: "Nous devrions y songer longtemps, avant de nous joindre à un autre pays pour faire une voie navigable que nous ne pouvons pas contrôler. Le peuple qui contrôle l'embouchure de la rivière contrôle la rivière. Si une voie navigable peut être construite à travers notre pays, je crois que ce canal devrait être construit par cette voie. La route devra être entièrement à travers le territoire américain, ce qui donnerait la réduction du prix de transport pour les produits agricoles de l'Ouest et en même temps se maintiendrait dans les limites de nos frontières.

Aussi longtemps qu'une voie navigable est dans notre territoire, il n'y a pas de danger pour aucune discussion internationale. Un moyen d'avoir de bonne relations aussi étroites que possible avec le Canada, c'est d'éviter les sujets de disputes. Nous prenons un risque que nous mettons le contrôle d'une grande partie de notre commerce le plus important entre les mains d'un autre pays." Congress Records, Page 3845, février 18, 1919.

Si un homme de valeur politique et de l'intellectualité du sénateur Lodge, a fait des déclarations semblables, pourquoi les hommes d'état de notre pays ne prendraient-ils pas une position analogue et ne feraient-ils pas de déclarations semblables, en raison même d'un patriotisme national canadien aussi éclairé que celui du sénateur Lodge, au point de vue américain.

Voilà la question qui doit se poser à l'heure présente à tous ceux qui ont le souci du véritable intérêt public et qui désirent la prospérité assurée de la patrie canadienne, et particulièrement les progrès nouveaux qui s'imposent à la province de Québec et à la métropole.

Montréal occupe une position stratégique, en raison du fait quelle se trouve située à l'embouchure de la rivière Ottawa et au pied des dernières écluses des canaux canadiens, et en même temps tout près de la rivière Richelieu, qui devra se relier par un canal à la Métropole du Canada et amener le trafic du lac Champlain et de la rivière Hudson par la voie du Saint-Laurent, tout en développant entre le lac Champlain et Sorel, qui est à l'embouchure de la rivière Richelieu, un million de chevaux-vapeur, qui seraient si utiles à cette vallée de la rivière Richelieu et du lac Champlain.

Voici maintenant un projet pour régulariser la navigation sur le Saint-Laurent depuis le lac Saint-Pierre jusqu'au lac Ontario. Une jetée régularisant avec écluses sur le Saint-Laurent, près des Îles de Berthier, ce qui empêcherait les grands courants et éviterait les travaux de dragages du Saint-Laurent, de ce point jusqu'à Montréal, et de l'embouchure de la rivière Richelieu jusqu'au bassin de Chambly.

2. Améliorer la rivière Richelieu jusqu'au lac Champlain.

3. Un canal de navigation avec pouvoirs d'eau partant du lac Saint-François jusqu'à Montréal, avec connections jusqu'à Chambly. Les pouvoirs d'eau pourraient être développés à plusieurs endroits entre Beauharnois et Laprairie, où si les conditions le permettent tout le pouvoir qui pourrait être créé par les quatre rapides en venant jusqu'au Bassin de Laprairie: les rapides du Coteau, Les Cèdres, Les Cascades et de Lachine. Il y aurait une possibilité de développer deux à trois millions de chevaux-vapeur à dix milles du centre de Montréal, la métropole du Canada et sa principale citée industrielle.

4. Une division des pouvoirs d'eau pourrait être faite entre le Canada et les États-Unis pour que le Canada, à cet endroit, approfondisse ses canaux à Cornwall et prenne sa part de pouvoirs d'eau disponible dans cette partie de la province d'Ontario.

5. Il faudrait faire disparaître le Rapide Plat.

6. Avoir des travaux régulateurs internationaux au-dessus de la Pointe-Aux-Iroquois, avec canal de navigation, canal de pouvoirs d'eau du côté canadien et développant la part des pouvoirs d'eau disponibles du Canada entre le lac Ontario et le Rapide Plat, sur le sol canadien à la pointe aux Iroquois. Par ce plan, chaque nation aura le contrôle de ses travaux de chacun des deux pays. Car il ne faut pas oublier que le Saint-Laurent à cet endroit forme la frontière internationale sur une certaine distance. Nous devons prendre cela en considération que la Grande Bretagne et les États-Unis ont passé un traité par lequel le chenal du Saint-Laurent serait également libre et ouvert pour les bateaux des deux nations.

Il y a dans la province d'Ontario, un million et demi de forces hydrauliques qui pourront se partager entre les États-Unis et le Canada. Entre le lac Saint-François et le lac Saint-Louis, un canal pourrait développer jusqu'à concurrence d'un million de chevaux-vapeur, mais en continuant ce canal jusqu'à Laprairie et Montréal, il y aurait un million de chevaux-vapeur additionnels, et si nous ajoutons à cela approximativement un million de chevaux-vapeur sur la rivière Richelieu, il y aura donc environ trois millions de chevaux-vapeur dans les limites de la province de Québec, et un million et demi de chevaux-vapeur entre Ontario et les États-Unis.

Quelle aubaine pour la province de Québec si ces travaux et ces projets pouvaient être réalisés.

Mais me dira-t-on, on ne pourrait pas faire usage de toute cette force motrice au Canada. N'y aurait-il pas moyen qu'une partie de cette force motrice soit louée par contrat à nos voisins les Américains, comme la chose existe déjà pour la compagnie "Cedars Rapids" qui expédie plus de 60,000 chevaux-vapeur à Messina Springs aux États-Unis.

Ce qui permet à la province de Québec de retirer des revenus considérables de ce chef et qui se chiffreraient dans les millions par année. Avec les nouveaux développements, le précédent est créé, et si nous ne craignons pas de poursuivre la politique déjà préconisée, la province de Québec pourrait alimenter toutes les industries nouvelles qui viendraient dans ses domaines, puis elle pourrait permettre, par l'entremise du consentement du gouvernement canadien, une exportation raisonnable de force motrice tellement désirée et convoitée par nos voisins au-delà de la ligne 45e, qui n'attendent qu'après nous pour nous faire retirer les énormes bénéfices dont nous sommes privés à l'heure présente.

Avec les études approfondies que le gouvernement peut faire, avec les techniciens et les praticiens qui l'entourent, avec les visions justes et éclairées des compétences économiques, la solution de ces problèmes importants aura sa réalisation prochainement, avant que nos voisins nous aient enlevé ces projets par des développements identiques, qui seront tout à leur avantage et à notre préjudice.

Regardons donc un peu en avant, soyons de notre siècle et des progrès nouveaux qui s'imposent et collaborons ensemble à l'édification des oeuvres véritablement nationales, dont notre pays doit profiter; et la province de Québec, qui occupe cette situation unique, doit profiter plus que toute autre de ces problèmes économiques qui répandront la richesse et la prospérité parmi nos populations, pour le bien-être du bonheur de la patrie canadienne et de notre chère province de Québec.

Qu'il me soit permis de dire que je suis né sur les rives du lac Saint-François, près des bords du canal qui relie ce lac au lac Saint-Louis, deux élargissements du Saint-Laurent.

Ce canal a été construit il y a plus de quatre-vingts années afin de compléter, dans le temps, la navigation entre les Grands Lacs et Montréal, de manière à éviter les trois rapides, l'un entre Valleyfield et Coteau, en second lieu les Rapides des Cèdres situés entre Saint-Timothée et les Cèdres, et ensuite les Cascades entre Soulanges et Vaudreuil d'un côté et les paroisses environnant Beauharnois de l'autre côté.

Ces rapides couvrent une distance de douze à quatorze milles, avec le développement possible de pouvoirs hydrauliques d'un million et demi de chevaux-vapeur. Depuis ma jeunesse, j'eus toujours sous les yeux, ce que la nature a créé si beau et si puissant à l'admiration de l'humanité et pour le bénéfice de notre cher pays. Depuis 25 années de vie publique, je me suis appliqué surtout à l'étude de ces problèmes d'économie politique, qui peuvent tant aider au développement de nos ressources naturelles qui sont si abondantes et si fructueuses.

Déjà, plusieurs pouvoirs hydrauliques ont été créés entre le lac Saint-François et le lac Saint-Louis, qui ont tous contribué à la prospérité de ce district.

C'est pourquoi, nous devons poursuivre le développement de ces ressources naturelles qui produiront de la lumière et de la chaleur, nécessités actuelles de la vie, et aussi le pouvoir pour nos industries déjà établies, et en même temps pour celles qui pourraient être fondées si nous pouvions, à peu de frais, faire ces développements qui seraient avantageux pour notre population. Je crois que, dans un avenir prochain, ces problèmes pourront être réalisés (sic).

Puis, il y a aussi les développements de la rivière Ottawa et la rivière Richelieu, au point de vue de la navigation et des pouvoirs d'eau et de leur communication plus directe et plus profitable avec le fleuve Saint-Laurent.

Deux propositions sont devant le public, afin d'améliorer notre système de voies par eau, afin de relier les Grands Lacs avec Montréal et l'océan. L'un est de creuser nos canaux à 22 pieds et l'autre à 35 pieds.

Il faudra que l'un ou l'autre de ces systèmes soit créé. Le premier sera bientôt complété jusqu'à Prescott, et de cette ville atteindre définitivement Montréal, si le canal Welland n'a pas été creusé, afin de n'aider que nos puissants voisins des États-Unis. Le second présenté par ceux qui ont étudié le problème depuis vingt-cinq ans et qui prétendent avec raison qu'ils peuvent, sans difficulté, amener la navigation entre l'océan et les Grands Lacs ou une partie d'icelle.

Veuillez me permettre d'exprimer mes vues et celles de mes amis sur ce sujet, afin de démontrer les avantages merveilleux que Montréal en retirerait ainsi que la province de Québec, particulièrement les contrées situées sur le parcours en Canada et aux États-Unis, et tous ceux qui bénéficieraient grandement non seulement dans ces localités, mais aussi dans l'univers entier, car c'est une question internationale d'une importance telle qu'elle sera un bienfait pour l'humanité tout entière, particulièrement l'Amérique du Nord et le continent européen, mais plus spécialement le Canada et l'Angleterre.

La nouvelle voie internationale par eau que l'on propose n'aura que 14 écluses entre l'Océan Atlantique et la tête des Grands Lacs, et les vaisseaux ayant une vitesse de 12 noeuds à l'heure pourront faire le trajet de Montréal à Fort William en 95 heures avec aise.

De nombreux ingénieurs éminents de toutes les parties du monde et des groupes d'hommes, qui ont des milliards de dollars investis dans les grands océaniques et navires de fret, ont reconnu la réalisation économique et pratique de cette voie par eau améliorée.

Toutes les routes économiques ont été étudiées au point de vue commercial, national et international. Le projet est si vaste, les services qu'il peut rendre sont si pressants et les résultats de sa réalisation trop durables pour permettre des décisions préconçues; conséquemment, il n'y a que la route la plus réalisable, la plus pratique et économique qui sera utilisée, et ce sera de suivre le cours naturel de l'eau à partir des Grands Lacs à l'Atlantique par le fleuve Saint-Laurent, sans en affecter sa beauté naturelle.

Plusieurs compagnies ont été fondées dans le but de promouvoir le projet de relier l'Atlantique aux Grands Lacs. Depuis vingt-cinq années, ces promoteurs et, subséquemment, ces compagnies n'ont rien négligé dans le but de mettre le public au courant des bénéfices que, non seulement le continent nord américain, mais l'univers entier retirerait de la construction de ce système projeté de navigation et de développement de nos ressources.

Le canal de Panama a été construit en moins de dix années et, en septembre 1920, on a perçu pour plus de $1,000,000 en péages des navires qui ont traversé par ce canal. Nous attirons l'attention spéciale sur le fait extraordinaire que les taux de fret de Chicago à San Francisco, par voie de chemin de fer est de 3,000 milles, par chemin de fer et par eau via le canal de Panama est de 6,299 milles (1,000 milles par rail et 5,399 milles par eau), et quoique le fret est transporté des trains aux navires à un port de l'Atlantique, New York, Philadelphie, Baltimore, etc., le coût du transport est moins élevé par cette voie (rail et eau) que par la route directe de chemin de fer qui est de 3,299 milles plus courte. Ce qui est un témoignage frappant des bénéfices que donne une route complètement par eau.

Depuis l'ouverture du canal de Panama, les ingénieurs ont été convaincus de la nécessité de relier les lacs et les rivières de l'intérieur, afin de créer une expansion de commerce dans ces endroits à des taux de transport moins élevés, pourvoyant par le fait même à un plus grand développement industriel qu'autrefois.

Les bénéfices, en abrégeant la distance entre l'Atlantique au Pacifique pour les ports américains, peuvent s'appliquer aussi bien au Canada. Par l'ouverture du canal de Panama, de tous les ports du Canada, Vancouver est spécialement favorisé. Victoria, sur l'île de Vancouver, et New-Westminster se ressentent des bienfaits de ces changements de transport.

Par voie du canal de Panama, la route de Liverpool à Vancouver a été raccourcie de 5,921 milles; pour un navire d'une vitesse de 300 milles par jour, c'est une épargne de 20 jours sur chaque voyage.

Cette route offre un nouveau débouché pour l'exportation des grains de l'Ouest canadien, qui sont presque tous transportés par chemin de fer aux ports de mer de l'Est.

Ce canal sera un bienfait pour les pays de l'Europe occidentale, dont les produits sont à destination des États du Pacifique et le Nord-Ouest canadien, qui n'auront plus à porter le fardeau d'un long hallage par rail des ports de l'Atlantique, mais qui seront distribués par les chemins de fer des ports du Pacifique.

Des concurrents étrangers comme: la Chine, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, etc., ont beaucoup d'avantages de concourir avec nous par cette voie plus courte et, en conséquence, à des taux plus bas. Ce qui amènerait une réduction importante du coût de la vie.

Ce chenal navigable à eau profonde proposé entre les Grands Lacs et l'Atlantique peut être creusé sans les grandes difficultés qu'ont suscité les canaux de Panama, Manchester, Suez, de la mer du Nord, dans la Baltique et celui de l'État de New York. Ce projet peut être un fait accompli en cinq années, au coût de moins de un milliard de dollars et, en même temps, des canaux subsidiaires de quelques pieds de profondeur entre Fort Severn et le lac Ontario et de la baie Georgienne à Montréal, via Ottawa qui peuvent être complétés et pourraient développer à peu près dix millions de chevaux-vapeur hydrauliques et distribuer en Canada durant sa construction $700,000,000 en salaires, en matériaux, en main d'oeuvre surtout etc., tout en fournissant les pouvoirs hydrauliques pour les chemins de fer électriques, les manufacturiers canadiens ainsi que de la lumière et du chauffage pour les demeures à un taux aussi bas qu'il peut être obtenu n'importe où, de sorte que les fabricants canadiens pourraient produire toutes sortes d'articles et concourir avantageusement avec le marché du monde entier.

On ne peut nier le fait que les moyens de transport influent sur le prix de tout ce qui est acheté et vendu. On doit admettre que la transportation confine d'abord le territoire immédiat du commerce de toutes les villes. Elle fixe la part obtenue par aucune nation dans le commerce du monde, dans l'échange de ses produits. L'impôt de la transportation est de beaucoup le plus onéreux que nous avons à payer pour les produits manufacturés ou agricoles.

Le coût du transport de tout ce que nous mangeons, portons et employons tous les jours est si bien condensé, couvert et distribué dans le prix de chaque article que nous achetons, que rarement nous pensons jusqu'à quel point nous sommes taxés. En 1913, la dernière année normale, la facture du fret pour la famille de cinq personnes en moyenne, comptant le trafic du chemin de fer seulement, a été de plus de cent dollars par année.

En 1913, $79,719,344 tonnes de fret ont passé par le canal du Sault-Sainte-Marie au débouché du lac Supérieur. Si ce même volume de fret eût été transporté sur une même distance par voie ferrée, au taux moyen perçu par les chemins de fer des États-Unis et du Canada, le coût aurait été de $445,555,488.59 de plus que le transport par eau cette année-là. Songez-y, presque un demi-milliard de dollars de plus que le destinataire aurait eu à payer pour ce fret, et cela, par un seul canal. Naturellement, ce surplus aurait été ajouté par le destinataire sur le coût de cette commodité, quand il l'aurait vendue.

Ce projet qui est d'une importance provinciale nationale, internationale et mondiale ne doit pas être considéré seulement au point de vue local, ou pour le bien qu'il ferait dans un certain district, ce qui ne serait pas logique ni raisonnable sous le rapport économique. On a besoin de l'étudier dans un esprit de largeur d'idée, en égard des services qu'il rendrait. Si le public doit être instruit sur ce sujet, il doit l'être bien, car en étant mal renseigné, c'est pis que ne pas être renseigné du tout. Tout homme a droit d'avoir une opinion honnête sur toute entreprise nationale, mais on devrait se méfier des expressions d'opinions sans portée, incorrectes et trompeuses, surtout quand il s'agit d'un projet de cette importance. La principale difficulté n'est pas de trouver les fonds pour cette entreprise, mais c'est de contrecarrer les faux rapports et la littérature trompeuse.

Il est évident que les fausses représentations faites par plusieurs orateurs et la littérature distribuée lors de la quinzième convention annuelle du Congrès national des rivières et havres, tenue à Washington, D.C. le 10 décembre 1919, et en maintes circonstances ont été lancées dans le but de tromper le public en général, mais tous ces faux rapports ne peuvent pas modifier le fait que ce projet est réalisable et économiquement pratique, et quand il sera complété tel qu'on le propose, la distance navigable entre tous les ports des lacs Supérieur, Michigan et Huron, sera actuellement de 602 milles nautiques plus près de Liverpool qu'aucune route des États-Unis ou même par le State Barge Canal de New York.

Le projet a tenu l'intérêt public en éveil. L'Ouest est fortement organisé pour le supporter: les forces financières, industrielles, agricoles et sociales ont été recrutées, afin qu'il réussisse. L'Ouest est l'entrepôt, la source de provisions et de produits illimités, et nécessaires dont l'Est a besoin, mais les artères de distribution sont obstruées et la circulation actuelle des produits si encombrée que la situation est absolument intenable. Le besoin le plus pressant du monde entier aujourd'hui est un moyen de transport plus rapide et à meilleur marché. Les énormes pertes de vaisseaux de cargaison durant la guerre, les régions dévastées et les sacrifices imposés aux moyens de transport, afin de faire face à la situation, ont créé une condition difficile dans les systèmes de transport sans précédent dans l'histoire du monde.

C'est un fait reconnu et indiscutable que pour résoudre le problème de transport, c'est aussi celui de résoudre le coût de la vie. Les facilités de transport moins coûteuses et la diminution des taux signifient l'augmentation de la production, et par conséquent plus de production, à bon marché, amènera une diminution dans le coût des nécessités et des accessoires nécessaires à la vie, tels que, le combustible, la lumière, la chaleur, le pouvoir moteur, etc., et une amélioration des conditions générales de l'existence.

La valeur des bonnes voies de communication pour le progrès et le bien-être commun est devenu si évident, depuis ces dernières années, que l'on y dépense des milliards de dollars chaque année en améliorations. La valeur des routes de transport, améliorées et raccourcies est si grande, pour tous les pays en particulier et du monde entier en général, que quand elles sont réalisées, elles deviennent une cause de changements économiques qui ont non seulement amélioré les voies de transport, mais aussi l'aspect industriel du monde entier; c'est ce qui est arrivé à l'ouverture des canaux de Suez de Manchester, de la Mer du Nord, de la Baltique et de Panama.

L'Ouest en a compris le besoin vital et est décidé à tout prix d'aider le projet jusqu'à ce qu'il soit réalisé dans le plus court délai possible. Il ne se laissera pas entraver par les congestions des terminus de chemin de fer, et par le manque de facilités pour le chargement de ses produits manufacturés à bord des océaniques de grosseur suffisante pour transporter le fret avec économie, de la tête des Grands Lacs aux marchés européens, alors que par négligence la route naturelle du commerce reste inactive, lorsqu'avec l'amélioration nécessaire des navires de gros tirants d'eau pourront faire escale à tous les ports importants du Saint-Laurent et des Grands Lacs.

Il n'y a pas de difficultés sérieuses de travaux à surmonter, vu que toute l'entreprise peut être complétée en cinq ans de travaux actuels de construction, le capital privé pour cette fin étant si facile d'accès pour que les travaux se fassent tout de suite, sans recevoir pratiquement de secours des gouvernements.

Afin de pouvoir créer une voie rapide par eau pouvant relier l'Océan Atlantique avec la tête des Grands Lacs, il y a quelques considérations fondamentales dont le bon sens est compris par tous les gens éclairés et dont l'esprit est exempt de préjugés. La première de ces considérations est la route elle-même. Tous admettront qu'elle doit suivre le cours qui sera la plus économique, le plus réalisable et le plus serviable possible. Cette route devrait être choisie pour des fins de la plus parfaite honnêteté, exempte de telles considérations et d'influences locales, qui favoriseraient le petit nombre au détriment de la masse.

Cette nouvelle route par eau, améliorée devrait être construite non seulement pour les besoins de la génération actuelle, mais aussi pour celles à venir. Le Canada est à son enfance et les États-Unis, qui recevront les bénéfices inhérents à cette route par eau, sont encore à l'état de croissance. Comme la nécessité de cette voie fluviale est si urgente à l'heure actuelle, de quelle importance sera-t-elle quand elle sera au service d'un autre vingt-cinq ou cent millions de population et des milliers de milles carrés nouveaux développés et exploités rationnellement dans le pays?

Pour être économique, il faut que la route soit profonde, large, rapide et avec le plus petit nombre d'écluses possibles. Dans leur rapport, les ingénieurs de l'une des compagnies, la "Great Lakes and Atlantic Canal and Power Company Limited" ont conclu en outre qu'elle sera aussi droite que possible, elle ne doit pas avoir moins de 35 pieds de profondeur et de 400 pieds en largeur, avec seulement 14 écluses pour équilibrer la différence du niveau, qui est de 578 pieds entre le port de Montréal et la tête du lac Supérieur.

En jetant un coup d'oeil sur la charte des grands lacs, elle démontre alors qu'ils sont très profonds et en conséquence navigables pour aucun bateau océanique: le lac Saint-Clair et la section ouest du lac Érié est la seule partie peu profonde qui entraverait la navigation, mais la route proposée par la "Great Lakes and Atlantic Canal and Power Company Limited" sera traversée par un canal direct entre le lac Huron et le lac Érié.

Il est bon de remarquer qu'aucune autorité accréditée sur le transport n'a jamais donné d'opinion à l'effet que la création de cette route océanique dépréciera en aucune façon la valeur et l'usage des systèmes de transport actuellement établis. Au contraire, il est prévu, comme conséquence, que les artères actuelles du transport économique seront stimulées, afin de déployer plus d'activité et de donner un service meilleur en leur destinant le fret qui, logiquement, leur appartient, tandis que les cargaisons pesantes ou autres qui tiennent le haut prix du transport par la nécessité de transbordement, ou de manutention en route, atteindront leur destination en évitant ce coût additionnel.

Un des résultats des plus désirables serait une distribution plus égale de l'équipement de notre système de transport, par rail, un soulagement général et permanent de la congestion actuelle de nos systèmes de transport, et un déversement plus solide et facile de toutes les commodités allant à l'Est et à l'Ouest, du Nord au Sud, permettant alors à tout le nord du continent américain de faire concurrence au commerce du monde entier, sur un pied aussi favorable de transport qu'aucun autre pays au monde. Si la route par eau proposée était ouverte, il y aurait quatre-vingts pour cent des bateaux océaniques du monde entier, qui pourraient faire le trafic jusqu'aux Grands Lacs.

Des hommes qui ont investi leurs fonds dans des vaisseaux à fret d'un tonnage de 25 milles tonnes ont prouvé qu'ils seront capables de porter aucune sorte de cargaison de la tête du lac Supérieur à l'Océan Atlantique par cette route, à condition que cette voie par eau n'ait pas moins de 35 pieds de profondeur, et de 400 pieds de largeur, et réduire de 50 % le coût actuel ou à aucun prix réduit pour transporter le même tonnage à New York, par le "New York State Barge Canal".

Des millions de tonnes d'aliments et autres nécessités sont accumulés dans l'Ouest et le Nord-Ouest qu'ils ne peuvent expédier à cause du manque de transport pour faire face à la tâche. Il n'y aura jamais trop de voies de communication, soit par rail, eau, moteur ou autres moyens, afin de pouvoir se protéger contre la congestion du transport du fret dans les districts d'où les produits américains ou canadiens proviennent, afin qu'ils atteignent le marché.

C'est induire le public en erreur de lui faire croire que la majorité du tonnage de fret ne consiste que dans le transport du blé des Grands Lacs à l'océan et en Europe, quand cela ne forme qu'un faible pourcentage du tonnage expédié des Grands Lacs en Europe.

Du moment que les constructeurs de navires sur les Grands Lacs sauront que cette route à eau profonde sera complétée, ils entreront en concurrence sur le pied plus avantageux avec les meilleurs chantiers de construction du monde entier, pour construire des navires nouveaux chauffés à l'huile, afin d'utiliser cette route par eau, améliorée, vu qu'il n'y a aucun endroit qui offre plus de chance et plus de facilité pour la construction de tels navires, que les chantiers situés sur le Saint-Laurent et les Grands Lacs, et particulièrement dans les chantiers de construction de Montréal, qui occupera une situation des plus propices pour des industries de ce genre. Nous verrons aussi une plus grande activité régner aux chantiers maritimes de Québec, Lévis, Lauzon, Trois-Rivières, Sorel, etc.

Le chenal de 35 pieds que le gouvernement fait creuser actuellement entre Montréal et l'Océan, a été l'ouvre-l'oeil pour induire Toronto, Hamilton, Windsor, Fort William etc., et bon nombre de villes américaines à entreprendre une dépense combinée de centaines de millions de dollars en améliorations de havres dans le même esprit de nécessité et de progrès, et avec une prévision louable. Doit-on condamner telle prévision? Le pessimiste recevra sa réponse dans quelques années.

L'accomplissement de cette grande route par eau stimulera la construction d'autres canaux, comme subsidiaires, des tramways, des routes pour moteurs à traction, nouveau terminus de fret, améliorations des barges spéciales pour canaux, et le moyen le plus expéditif pour la manutention du fret mécaniquement au moyen d'accessoires tels que le Kircherier Patented Unit System, pour camions-moteurs, wagons, barges et océaniques. Induisant les cultivateurs, les marchands, les fabricants et détaillants de toutes sortes de commodités, à devenir propriétaires de leurs propres unités de transport du type étalon pour colis, liquides, fruits, volailles et réfrigérants, aussi bien pour bestiaux sur pied, pour que la cargaison soit envoyée plus facilement, plus sûrement et plus directement du producteur au consommateur.

Les villes ne peuvent pas vivre d'elles-mêmes. Elles dépendent sur les campagnes avoisinantes et sur le commerce de leur pays et des pays étrangers. La ville de Détroit, Michigan, qui a tenu la tête sur toutes les villes du nord américain en augmentation de population et de progrès industriel, durant les dix dernières années, doit son succès remarquable à l'esprit d'initiative industrielle de ses citoyens.

Montréal, géographiquement, est mieux situé et occupe une position plus avantageuse que la plupart des villes américaines, à part le développement de ses grands pouvoirs hydrauliques en perspective qui seront à la base fondamentale de ses industries; elle devrait être en mesure de fabriquer toutes sortes de commodités à un coût de production suffisamment bas pour faire concurrence avec le marché du monde entier. Détroit est à mi-chemin entre la tête des Grands Lacs et Montréal, et il y a au-delà de 50,000,000 de tonnes de fret qui passent à un quart de mille en face de son port à chaque saison sans arrêt. Le passage de ce fret ne semble pas avoir nui à son progrès.

1. Montréal deviendra la clef de voûte du Saint-Laurent et des Grands Lacs et le pivot de la navigation maritime de l'Amérique du Nord.

2. Située aux pieds de la dernière écluse des canaux du Saint-Laurent, ses chantiers maritimes actuels verront leur main-d'oeuvre se multiplier et de nouvelles industries de construction maritime s'établir sur l'Île de Montréal et ses environs.

3. Montréal recevra et expédiera plus facilement et plus directement d'Europe et d'ailleurs ses importations et ses exportations de produits agricoles et manufacturés.

4. Elle aura l'avantage de recevoir la matière première des fers et aciers, etc., qui leur viendront du Canada et des États-Unis, le fret étant beaucoup réduit, elle verrait s'établir des industries qui lui permettraient de développer ses fabriques et son commerce.

5. Étant le centre de distribution de toutes les compagnies de chemin de fer canadiens, elle verrait une nouvelle orientation de commerce maritime, attirant vers ses chemins de fer le nouveau cours qui dirigera le trafic durant l'hiver dans les ports maritimes, canadiens: Saint-Jean, Halifax, et Québec même surtout lorsque la navigation d'hiver sera établie, projet qui sera inévitablement résolu un de ces jours.

6. La navigation de petit tonnage et de tous les gros bateaux de navigation intérieure qui hiverneront ici occuperait une partie de nos classes ouvrières au travail, pour la réparation des outillages et de ses flottes.

7. Même tous les bateaux complètement chargés devront inévitablement faire un stage pour faire leurs entrées de douane et d'accise, et pour se pourvoir d'alimentation et tous besoins de leur bateau durant la traversée, ou pour le voyage vers les Grands Lacs et vice versa.

8. L'économie seule sur le fret du charbon pour la consommation de la Métropole se chiffrerait par millions à chaque année, que dire de l'économie qui en résulterait pour toute la province de Québec.

9. Quelle aubaine pour Montréal d'avoir à sa disposition un million et demi de forces motrices pour l'alimentation de son commerce et ses industries, pour le chauffage et l'éclairage et autres commodités à l'usage de la métropole et de la province.

10. Quel avantage pour la classe laborieuse qui verrait 200 ou 300 millions de piastres de travaux pour les dits développements des pouvoirs hydrauliques et la construction des canaux dans la partie ouest de la province de Québec.

Voilà quelques-unes des raisons pourquoi Montréal et tous les corps publics devraient être en faveur de cet immense projet dont les conséquences se feront sentir immédiatement par les sommes dépensées pour la construction des dites oeuvres et dont les résultats seront merveilleux pour l'avenir de la métropole et de la province de Québec.

Montréal occuperait donc une situation unique tout à l'avantage de son commerce et de ses industries, et tout au bénéfice de sa population qui devrait se doubler d'ici à dix ans. Elle occuperait donc une situation particulièrement avantageuse dans l'univers économique.

Quels avantages immenses aussi pour les districts où les forces motrices seront développées pour l'extension de leur commerce et de leurs industries, le confort moderne, le bien-être et l'augmentation de leur population. Qu'il me soit permis de dire en terminant tous les bénéfices immenses qui découleraient de la construction d'un canal et des pouvoirs d'eau dans le comté et le district de Beauharnois qui possède actuellement les chutes les plus considérables qu'il y a à développer dans la province de Québec, et dans l'Amérique du Nord.

Aucuns des hommes qui s'occupent de cette route à eau profonde sont opposés au projet du canal de la baie Georgienne ou à aucun autre système de canaux. Ils voudraient, au contraire, que le canal de la baie Georgienne soit construit tout de suite, à une profondeur de quatorze pieds de la baie Georgienne au lac Nipissing, 7 pieds du lac Nipissing au-dessus du Summit à la ville d'Ottawa, 35 pieds d'Ottawa au fleuve Saint-Laurent. Une telle construction serait adéquate au pays et développerait autant de pouvoirs hydrauliques le long de la route entre la baie Georgienne et Montréal.

Aucun système de canaux ne peut intervenir avec cette route rapide à eau profonde et ne peut intercepter sa réalisation. Supposons que le canal de la baie Georgienne soit construit d'après les plans et tracés faits par le gouvernement fédéral, à 22 pieds de profondeur, il n'aurait aucun effet pour empêcher la construction de cette route à eau profonde.

Il ne pourrait pas servir plus qu'un dixième du trafic à être transporté, ne le serait pas à des taux de concurrence, avec des vaisseaux qui passeront par cette voie par eau, à cause des nombreux obstacles sérieux devant être rencontrés entre la Baie Georgienne et Ottawa. Les eaux de la Baie Georgienne sont maintenant à 578.51 pieds au-dessus du niveau de la mer, et les vaisseaux quittant la Baie Georgienne pour Montréal devront être élevés sur le sommet à une hauteur de 677 pieds au-dessus de la mer, ou un soulèvement de 98.49 pieds à son premier niveau à travers un passage très dangereux, dispendieux et lent.

Il faut se faire une idée que d'Ottawa à la Baie Georgienne c'est un canal ininterrompu, qui nécessite continuellement un ralentissement de vitesse pour les vaisseaux, tandis que de Prescott à Hamilton et surtout le parcours à travers les Grands Lacs, les vaisseaux peuvent aller à pleine vitesse. De plus, quand même les travaux seraient complétés, avec tout le soin et à n'importe quel prix, il n'y a aucune sauvegarde contre les avaries aux écluses en montant ou en descendant des hauteurs des terres à travers cette route artificielle que la nature n'aide en aucune façon.

Au cas d'un accident par la rupture d'une des écluses sur la hauteur des terres, cela exposerait des pertes de vie en submergeant les environs et des millions de dollars de dommages à la propriété, un retard incalculable dans la navigation et un coût prohibitif pour remplir et réparer le chenal d'eau élevé. Il y a aussi un grand danger que le peu d'eau des petits lacs sur le sommet ou sur la hauteur des terres puisse se vider dans les diverses fissures de la formation géologique.

Le courant du commerce suivra toujours la direction où il y a moins d'obstacles et les moyens les plus faciles de transport amènent la baisse des taux de fret en un mouvement régulier, fréquent et rapide. L'élimination du transbordement, la réduction des taux d'assurance et la sécurité de la route est (sic) un facteur important qu'il faut considérer, et un autre facteur important, c'est l'unité et l'uniformité de l'expédition. Quelle route plus économique pourrait-on construire ou améliorer ouvrant une voie navigable par les lacs à eau profonde jusqu'à la mer, de 3,000 milles de parcours, qu'en suivant le chenal naturel et vaincre ses obstacles facilement surmontables, et, par le fait être récompensé par d'amples développements de forces hydroélectriques.

Le pouvoir d'eau du Saint-Laurent qui est gaspillé, qui peut être développé en même temps avec économie durant la construction de cette voie à eau profonde, équivaut à 7,750,000 tonnes de charbon par année. Du capital privé est accessible pour construire cette route à eau profonde et développer tous les pouvoirs d'eau possibles et permettre le passage gratuit à travers cette route et fournir la lumière, le chauffage et la force motrice au consommateur à un prix aussi réduit qu'aucune autre usine d'utilité publique établie en Canada ou aux États-Unis. En considération d'un octroi de privilèges pour les forces hydrauliques, tous les canaux seraient construits pour le bénéfice du pays sans aucune charge pour la navigation.

Le peuple a un droit inné que les ressources naturelles du pays soient développées dans toute leur plénitude et que les dons providentiels en richesses naturelles faciles de développement, comme cette route à eau profonde, soient utilisés pour son bénéfice, afin de profiter de leurs bienfaits et des progrès nouveaux qu'ils apportent dans leur accomplissement.

La conception de cette voie à eau profonde et le développement des pouvoirs d'eau, le long de son parcours, seraient une source toujours augmentante de revenus pour la province pour des années à venir. Elle aiderait et faciliterait les problèmes de transport du monde entier et ferait des districts avoisinants de son parcours, des endroits superbes pour y vivre plus avantageusement.

Les ingénieurs éminents, qui ont passé leur vie à se familiariser avec l'historique et les données de tous les importants canaux et pouvoirs d'eau à développer dans toutes les parties du monde, et qui ont approuvé la réalisation et la nécessité économique de cette route pratique à eau profonde par le fleuve Saint-Laurent et ses canaux, doivent être abasourdis de voir l'ignorance et l'audace grossière d'hommes, occupant des positions de confiance, essayer à discréditer cette voie par eau en employant des arguments faux et impossibles.

Ce projet est d'une importance mondiale. Sa réalisation sera bientôt un fait accompli et ce sera pour le Canada et tout le continent américain une aubaine de prospérité; elle fera époque dans les annales de ce nouveau monde et les résultats qui en découleront seront ressentis dans les coins les plus reculés de l'univers.

J'ai maintes fois entendu diverses personnes dire et j'ai lu plusieurs journaux traitant des bons sentiments qui existaient entre les deux nations de langue anglaise des Îles britanniques et le peuple américain. Par la réalisation de cette vaste et profitable entreprise, les deux grandes nations de langue anglaise seront sûrement unies par un lien d'économie politique comportant la plus grande entreprise commerciale et industrielle dans laquelle les intérêts de l'Europe occidentale et le continent américain sont concernés.

Ces nations qui ont été si intimement liées pour la défense de la civilisation, et maintenant qu'elles ont mis à l'écart leurs rivalités d'antan, ne peuvent-elles pas unir leurs efforts pour une noble cause et résoudre ce problème dans lequel leurs intérêts mutuels sont combinés devant l'univers, même en préparant une situation de défense mutuelle et conjointe, au cas d'éventualités futures.

Car nous ne devons pas oublier le vieux proverbe: "Si vous voulez la paix, préparez-vous pour la guerre." La réalisation de ce grand travail, sans aucun doute, contribuera à faire fléchir le coût élevé de la vie et établir de meilleures relations entre les nations qui dirigent les destinées du monde civilisé. Les États-Unis et le Canada d'un côté, les peuples anglais et français et leurs alliés en Europe, par la solution de ces oeuvres immenses, créeront entre eux un nouveau lien de commerce et d'industrie, leur permettant de fraterniser davantage dans leurs destinées futures.

Laissez-moi attirer votre attention sur un fait qui reflète sur notre bien-aimé pays, c'est l'importance d'une meilleure entente entre l'Ouest et l'Est du Canada. Souvenons-nous qu'Ontario et Québec sont les deux provinces où le projet devra s'accomplir et amènera des relations journalières entre elles, et étant toutes les deux le centre du Canada, par leur échange quotidien de commerce et leurs idées, elles créeront des meilleurs sentiments entre les provinces de l'Est et de l'Ouest.

Je crois que c'est par l'exécution de ces projets et la solution de ces problèmes que nous pourrons atteindre l'idéal du peuple canadien parmi lequel la paix, la concorde et l'harmonie prévaudront pour le bonheur et la prospérité de notre bien-aimé pays, pour le développement matériel et moral de nos relations internationales et aussi pour la solidarité du monde progressif et pour l'avancement de la civilisation moderne...58

(Rires de la Chambre)59

Les députés entrent un à un dans la Chambre pour former le quorum.

(Applaudissements de la Chambre)

M. Bergevin (Beauharnois) tente de parler.

(Applaudissements de la Chambre)60

M. Bergevin (Beauharnois) demande à la Chambre la permission de lui expliquer le tracé du canal sur une carte61.

(Applaudissements et rires de la Chambre)

(Désordre dans la Chambre)

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) félicite le représentant de Beauharnois (M. Bergevin) pour ce discours62.

(Désordre dans la Chambre)

M. Sauvé (Deux-Montagnes) félicite le député de Beauharnois (M. Bergevin). Il propose, appuyé par le représentant de Québec-Comté (M. Leclerc), que le discours que M. Achille Bergevin, député de Beauharnois, vient de prononcer sur la motion ci-dessus soit imprimé et distribué aux frais de l'Assemblée63.

(Acclamation de la Chambre)

Adopté.

Et la Chambre continue de siéger après minuit, mardi matin.

 

Demande de documents:

Vente et échange de lots

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Mégantic (M. Lapierre), qu'il soit déposé sur le bureau de cette Chambre: Copie de toutes correspondances, documents, jugements judiciaires, etc., entre le gouvernement et certaines personnes au sujet de plaintes contre l'administration du gouvernement concernant les terres de la Couronne, ou la vente de lots de colonisation ou échange de lots dans les comtés de Nicolet, de Beauce, de Montmagny, de Témiscouata, Kamouraska et dans l'Abitibi, depuis 1916 jusqu'à ce jour.

Adopté.

Union des municipalités

M. Thériault (L'Islet) propose, appuyé par le représentant de Napierville (M. Monet), que les droits additionnels qu'ont payés les promoteurs du bill 91 constituant en corporation l'Union des municipalités de la province de Québec leur soient remboursés.

Adopté.

Chester Thompson Parker

M. Lapierre (Mégantic) propose, appuyé par le représentant de Québec-Centre (M. Cannon), que les frais additionnels qu'a payés le promoteur du bill 102 autorisant le Collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec à admettre Chester Thompson Parker à l'exercice de la profession de dentiste lui soient remboursés.

Adopté.

Municipalité de Larouche

M. Gaudrault (Chicoutimi) propose, appuyé par le représentant de Matane (M. Dufour), que les droits additionnels qu'ont payés les promoteurs du bill 112 érigeant la municipalité de la paroisse de Larouche leur soient remboursés.

Adopté.

Subsides

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les dépenses se rattachant à la perception des licences, droits sur les successions et taxes sur les corporations commerciales, etc. S.R.Q., 1909, articles 903-1315; 1345-1359; 1374-1387j, etc., pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

2. Qu'un crédit n'excédant pas cent douze mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour régistrateurs: traitements et dépenses contingentes, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

3. Qu'un crédit n'excédant pas cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour divers en général, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

4. Qu'un crédit n'excédant pas cent piastres soit ouvert à Sa Majesté pour Royal Military College of Canada Rifle Association, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

5. Qu'un crédit n'excédant pas trois cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour la Société de géographie de Québec, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

6. Qu'un crédit n'excédant pas trois mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les dépenses se rattachant à l'acte pourvoyant à la construction de logements ouvriers, (9 George V, chapitre 10, 10 George V, chapitre 10), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

7. Qu'un crédit n'excédant pas sept cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour paiement de l'intérêt pour un an au 17 juin 1923, 3 % par année sur $25,000, prix d'achat d'une cour à charbon, à Québec, acquise pour le chemin de fer Québec, Montréal, Ottawa et Occidental, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions et demande la permission de siéger de nouveau. Les résolutions sont lues deux fois et adoptées.

 

Messages du lieutenant-gouverneur:

L'honorable M. Nicol (Richmond) transmet à M. l'Orateur le message suivant de Son Honneur le lieutenant-gouverneur de la province:

M. l'Orateur lit ledit message comme suit:

Le lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet à l'Assemblée législative le budget supplémentaire des dépenses pour l'exercice finissant le 30 juin 1922, conformément aux dispositions de la section 54 de l'Acte de l'Amérique britannique du Nord, 1867, et recommande ce budget à la considération de la Chambre. (Document de la session no 1a)

Hôtel du Gouvernement
Québec, 18 mars 1922

Il est ordonné que le message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur et le budget supplémentaire qui l'accompagne soient renvoyés au comité des subsides.

Subsides

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas trois mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour frais d'administration (dette publique), pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

2. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-deux mille neuf cent seize piastres et soixante-sept centins soit ouvert à Sa Majesté pour traitements, dépenses contingentes, etc. (Assemblée législative) pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

3. Qu'un crédit n'excédant pas quinze mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour impressions et reliure pour les deux Chambres de la Législature, S.R.Q. 1909, article 164, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

4. Qu'un crédit n'excédant pas mille cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour traitements, dépenses contingentes, etc., (Bibliothèque) pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

5. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les traitements (gouvernement civil), pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

6. Qu'un crédit n'excédant pas quarante-trois mille quatre cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour dépenses contingentes, soit: bureau du lieutenant-gouverneur, $2,000; département du secrétaire provincial, $25,000; département du Trésor, bureau du trésorier, $2,500; département du Trésor, bureau des assurances, $400; département du Trésor, bureau du revenu $45,000; département du Trésor, bureau de l'auditeur, $1,000; département des Travaux publics et Travail, $1,500; département de l'Instruction publique, $6,000; pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

7. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'administration de la justice, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

8. Qu'un crédit n'excédant pas sept mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour inspection des écoles, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

9. Qu'un crédit n'excédant pas cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Conseil de l'instruction publique, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

10. Qu'un crédit n'excédant pas mille deux cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour rapport du surintendant de l'Instruction publique, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

11. Qu'un crédit n'excédant pas mille deux cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour allocation aux municipalités les plus méritantes, sujette au rapport des inspecteurs, arrêté ministériel 759 du 2 décembre 1905, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

12. Qu'un crédit n'excédant pas huit cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour gratification pour 10, 15 et 20 ans d'enseignement (provenant autrefois du fonds des écoles élémentaires, $150,000), pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

13. Qu'un crédit n'excédant pas deux mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Monument National, Montréal, sous le contrôle de l'Association Saint-Jean-Baptiste de Montréal, paiement sujet à un arrêté ministériel et aux conditions de l'arrêté ministériel no 187, du 29 mai 1896, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

14. Qu'un crédit n'excédant pas mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les archives canadiennes: pour reliure et renouvellement, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

15. Qu'un crédit n'excédant pas quatre mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Conseil des arts et manufactures, y compris l'enseignement des beaux-arts appliqués à l'industrie, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

16. Qu'un crédit n'excédant pas deux mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Bureau des statistiques de Québec, 3 George V, chapitre 16, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

17. Qu'un crédit n'excédant pas cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les asiles d'aliénés, y compris le transport de patients des prisons aux asiles et autres dépenses contingentes, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

18. Qu'un crédit n'excédant pas soixante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les écoles de réforme et d'industrie, y compris dépenses contingentes, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

19. Qu'un crédit n'excédant pas trente-six mille six cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Bureau d'hygiène de la province de Québec, articles 3867-3982 S. R. Q., 1909, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

20. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour allocation pour le traitement des tuberculeux, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

21. Qu'un crédit n'excédant pas cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'entretien, etc., des édifices publics en général, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

22. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les ponts en fer, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

23. Qu'un crédit n'excédant pas trente mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les réparations aux palais de justice et prisons, etc., pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

24. Qu'un crédit n'excédant pas cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour encouragement à l'agriculture en général, y compris les fermes de démonstration, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

25. Qu'un crédit n'excédant pas dix mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour industrie laitière et inspection des fabriques de produits laitiers, (5 George V, chapitre 31), pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

26. Qu'un crédit n'excédant pas cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'horticulture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

27. Qu'un crédit n'excédant pas dix mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'apiculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

28. Qu'un crédit n'excédant pas six cent vingt-huit mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'amélioration et entretien des chemins, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

29. Qu'un crédit n'excédant pas cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour protection des forêts, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

30. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour arpentages, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

31. Qu'un crédit n'excédant pas cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour la pépinière de Berthierville: entretien, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

32. Qu'un crédit n'excédant pas vingt mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'administration et ventes de terres publiques pour fins d'agriculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

33. Qu'un crédit n'excédant pas trente mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour inspection des lots pour colonisation, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

34. Qu'un crédit n'excédant pas dix mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour pêche et chasse pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

35. Qu'un crédit n'excédant pas cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour comptes en suspens, (Colonisation, Mines et Pêcheries), pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

36. Qu'un crédit n'excédant pas douze mille cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour régistrateurs: traitements et dépenses contingentes, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

37. Qu'un crédit n'excédant pas trois mille cent piastres soit ouvert à Sa Majesté pour un agent général de la province en Belgique, pour dépenses de bureau en sus du montant autorisé par la loi 5 George V, chapitre 18; S. R. Q, 1909, article 712c, pour l'exercice finissant le 30 juin 1922.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolution et demande la permission de siéger de nouveau. Les dites résolutions sont lues deux fois et adoptées.

Voies et moyens

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que la Chambre se forme en comité des voies et moyens.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: Que, pour pouvoir au paiement des subsides qui ont été accordés à Sa Majesté pour la dépense de l'année financière se terminant le 30 juin 1922, il sera permis de tirer du fonds consolidé du revenu de cette province une somme n'excédant pas $1,545,966.77.

Adopté.

2. Que, pour pourvoir au paiement des subsides qui ont été accordés à Sa Majesté pour la dépense de l'année financière se terminant le 30 juin 1923, il sera permis de tirer du fonds consolidé du revenu de cette province une somme n'excédant pas $9,289,555.89.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté deux résolutions. Lesdites résolutions sont lues deux fois et adoptées.

L'honorable M. Nicol (Richmond) demande la permission de présenter le bill 12 octroyant à Sa Majesté les deniers requis pour les dépenses du gouvernement pour les années financières expirant le 30 juin 1922 et le 30 juin 1923 et pour d'autres fins du service public.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté.

L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Benjamin Michaud

M. Sauvé (Deux-Montagnes) tient à dire avant la fin de la session que, s'il a cru à propos de critiquer l'administration de la voirie pour le passé, il tient à rendre un témoignage au sous-ministre de ce département si cruellement éprouvé par la maladie. M. Michaud, dit-il, a accompli une tâche très difficile, ennuyeuse, accablante de responsabilités. Il s'est imposé un travail constant qui a considérablement affecté sa santé. Il lui souhaite un prompt rétablissement.

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) au nom du ministre de la Voirie64, seconde les paroles élogieuses du chef de l'opposition à l'adresse du sous-ministre de la Voirie, M. B. Michaud. Il exprime le voeu que M. Michaud s'en remette rapidement.

La séance est levée à 1 h 45 du matin65.

__________

NOTES

 

1. Le Soleil du 21 mars 1922, à la page 12, rapporte que "beaucoup de députés manquaient cependant à l'appel, mais il y avait amplement quorum." The Gazette du 21 mars 1922, à la page 20, précise que M. Poulin (Montréal-Laurier) n'est pas présent à la séance du matin, arrivant cependant à temps pour prononcer un discours en après-midi. Le Montreal Star du 21 mars 1922, à la page 2, rapporte que du côté de l'opposition, M. Gault (Montréal-Saint-Georges), M. Renaud (Laval), M. Dufresne (Joliette) et M. Smart (Westmount) sont tous absents.

2. Il semble que MM. Smart (Westmount) et Gault (Montréal-Saint-Georges) sont présents à cette séance, après avoir manqué celle du matin.

3. L'Événement du 21 mars 1922, à la page 3, rapporte que cette intervention de M. Dufour a lieu à l'ouverture de la séance de l'après-midi. Par contre, Le Soleil du même jour, à la page 1, mentionne plutôt que c'est au début de la séance du soir que M. Dufour se lève.

4. L'Événement du 21 mars 1922, à la page 3, donne les précisions suivantes sur cette intervention de M. Dufour: "Il y a quelque temps, M. Dufresne, de Joliette, faisait une interpellation pour savoir s'il était vrai que la municipalité de Saint-Moïse avait acheté de la dynamite d'un marchand de Saint-Moïse, pour ses travaux de voirie. Le gouvernement répondit qu'en effet dans les comptes de la municipalité pour ses travaux de chemin, il apparaissait une facture pour un rachat de dynamite, fait chez M. Dufour, marchand. Vendredi soir, au cours de son discours, sur les crédits de la Voirie, dans la chaleur de la discussion, M. Sauvé rappela que, dans les travaux de Voirie, le gouvernement avait employé de la dynamite achetée de M. Dufour, et le chef de l'opposition laissa entendre qu'on avait payé un prix élevé pour cette dynamite. M. Jos. Dufour, qui est marchand à Saint-Moïse n'était pas à la Chambre au moment où M. Sauvé parla de cette histoire de dynamite, et, hier, à l'ouverture de la séance de l'après-midi, il se levait sur une question de privilège."

5. Le comité se réunit sous la présidence de M. Lemieux (Gaspé).

6. Un autre amendement a été adopté en comité. Toutefois, les journaux n'en font pas mention.

7. La Patrie du 21 mars 1922, à la page 4, mentionne que la Chambre a réintroduit le bill de nouveau, "procédure assez rare", afin de permettre au député de Laurier (M. Poulin) de prendre la parole sur le sujet. Au sujet de M. Poulin, le Montreal Herald du 24 février, à la page 10, affirmait que le député allait accepter le poste de superintendant du nouveau Bureau d'hygiène créé par le bill de M. David.

8. Emmanuel-Persillier Lachapelle (1845-1918), médecin; il est à l'origine de la réforme du Collège des médecins, l'établissement du Conseil provincial d'hygiène, la fondation de la Faculté de médecine de l'Université Laval et de l'Hôpital Notre-Dame. Fondateur en 1887 du Conseil supérieur d'hygiène de la province de Québec dont il sera le directeur jusqu'à sa mort. Il est l'un des principaux animateurs de la Ligue anti-tuberculeuse. Il participe également à l'élaboration de nombreuses lois sur la santé publique avec les gouvernements.

9. Honoré Mercier (1840-1894), premier ministre du Québec de 1887 à 1891.

10. Anselme-Homère Pâquet (1830-1891), médecin et député libéral de Berthier en 1863, réélu à la Chambre des communes en 1867, 1872 et 1874. Accède au sénat en 1875 comme représentant de la division de La Vallière. Décédé en fonction.

11. M. Poulin fait allusion à la grève des typographes qui a paralysé les travaux de l'Assemblée législative à partir du 15 février dernier. Voir la séance de cette date pour plus de détails.

12. Michel de Notre-Dame, dit Nostradamus (1503-1566), médecin et astrologue français. Médecin de Charles IX; il est célèbre par son recueil de prédictions Centuries astrologiques (1555).

13. Philippus von Hohenheim, dit Paracelse (1493-1541), médecin et alchimiste suisse dont les travaux ont contribué à l'avancement de la chimie.

14. Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière (1622-1673), auteur dramatique et comédien français. Protégé de Louis XIV, on lui doit de nombreuses pièces de théatre renommées dont Les précieuses ridicules, Les fourberies de Scapin et Le malade imaginaire.

15. Louis Pasteur (1822-1895), chimiste et biologiste français dont les travaux ont mené à la méthode de conservation des liquides fermentescibles (pasteurisation) et l'asepsie chirurgicale. Il découvrit de nombreux bacilles infectieux (maladie du charbon) et fut l'inventeur du vaccin contre la rage en 1885. La création de l'Institut Pasteur (1888) permit à ses élèves et collaborateurs de poursuivre des recherches de microbiologie.

16. Antoine Laurent de Lavoisier (1743-1794), chimiste français dont les travaux, notamment en ce qui a trait à la classification des éléments chimiques, en font le créateur de la chimie moderne.

17. L'affaire Louis-Eugène Parrot, ex-député de Témiscouata (1916-1921) a fait grand bruit en 1921. Accusé par un jeune avocat de Rivière-du-Loup, Jean-François Pouliot, de s'être enrichi aux dépens des colons du comté et du trésor provincial, le député Parrot sera dénoncé par Pouliot, notamment avec l'appui du Devoir. Parrot ayant été sommé de mettre son siège en jeu par M. Taschereau sur cette question, le député de Témiscouata va préférer démissionner le 22 juin 1921. Pendant plusieurs mois, l'opposition conservatrice va poursuivre le gouvernement avec les rumeurs de corruption régnant au département des Terres, suite à cette affaire. Voir la séance du 15 février, pour plus de détails sur cette affaire.

18. L'abbé Gustave Delattre, curé de Notre-Dame de Pellevoisin, à Lille, depuis 1919 et directeur diocésain des oeuvres eucharistiques.

19. Selon L'Événement du 21 mars 1922, à la page 12, il est un peu plus de quatre heures, lorsque M. Sauvé commence son discours.

20. Élzéar Miville Dechêne, sous-ministre des Terres et Forêts de 1912 à 1924.

21. Selon La Presse du 21 mars 1922, à la page 17. Le Devoir du même jour, à la page 1, écrit "A.S.Q.R.", mais nos recherches pour trouver la trace de ces formules sont restées vaines.

22. Joseph-Elzéar Masson (1873-1934), médecin, candidat libéral défait en 1912 dans Montmagny, député dans la même circonscription de 1916 à 1919.

23. M. Thériault (L'Islet) est en Chambre lorsque M. Sauvé mentionne son nom.

24. Arthur Godbout (1872-1932), avocat et député libéral de Beauce de 1902 à 1919. Nommé juge à la Cour de magistrat du district de Beauce en 1921.

25. Eugène Roberge (1865-1935), marchand et conseiller législatif de la division de Lauzon de 1912 à 1935. Il appuya le Parti libéral.

26. Dates de La Presse du 21 mars 1922, à la page 17. L'Action catholique du même jour, à la page 7, mentionne plutôt "1917-19".

27. Sur cette question, voir la séance du 8 février.

28. Nom rapporté par La Presse du 21 mars 1922, à la page 17. Le Devoir du même jour, à la page 2, mentionne plutôt "T.-J. Demers".

29. Jules Allard (1859-1945), avocat et député libéral de Yamaska de 1897 à 1905. Conseiller législatif de la division de Lanaudière de 1905 à 1910. Ministre de la Colonisation et des Travaux publics dans le cabinet Gouin en 1905, ministre des Travaux publics et du Travail en 1905-1906, ministre de l'Agriculture de 1906 à 1919. Démissionne de son poste de conseiller législatif en 1910 pour se faire élire député de Drummond en 1910, jusqu'en 1916. Ministre des Terres et Forêts de 1909 à 1919. Premier ministre intérimaire durant les absences du premier ministre Lomer Gouin. Démissionne en 1919.

30. Selon L'Action catholique du 21 mars 1922, à la page 7, M. Sauvé dit que M. Masson fut "député de 1910 à 1919", ce qui est manifestement une erreur.

31. Nom donné par La Presse du 21 mars 1922, à la page 17. La Patrie du même jour, à la page 8, mentionne plutôt Herménégilde Lavoie.

32. À ce sujet, voir la séance du 17 février.

33. Hector Authier (1881-1971). Journaliste parti s'établir en Abitibi en 1912. Il y sera agent des terres et des mines (1912-1922), maire d'Amos et préfet du comté d'Abitibi (1914-1918) et un homme d'affaires très actif dans la région. Fondateur et directeur du premier journal abitibien L'Abitibi (1920) qui devient plus tard La Gazette du Nord. Député libéral dans Abitibi de 1923 à 1936, puis député libéral à Ottawa de 1940 à 1945.

34. The Montreal Star du 21 mars 1922, à la page 4, rapporte que les galeries sont "remplies de tous les côtés".

35. Selon Le Soleil du 21 mars 1922, à la page 1, le discours de M. Sauvé a duré près de deux heures. L'Événement du même jour, à la page 1, mentionne plutôt qu'il a parlé pendant trois heures.

36. Donnée de The Gazette du 21 mars 1922, à la page 2. La Presse et le Quebec Chronicle dans leur édition du 21 mars 1922, respectivement aux pages 17 et 5, mentionnent plutôt 10 ans et 15 ans.

37. L'affaire Mousseau éclate en janvier 1914. Joseph-Octave Mousseau (1875-1965), député libéral de Soulanges de 1904 à 1914, est accusé de corruption par le Montreal Daily Mail, en rapport à l'adoption d'une loi constituant en corporation la Montreal Fair Association of Canada. Une équipe du Montreal Daily Mail réussit à corrompre Mousseau pour qu'il facilite l'adoption de cette loi, donnant des privilèges financiers à cette association qui, en réalité, était une fausse association construite, pour l'occasion, par l'équipe de ce journal. Après enquête, un comité de l'Assemblée législative trouve Mousseau coupable, et celui-ci doit démissionner de son poste. Le Conseil législatif n'est pas épargné: les conseillers Achille Bergevin (celui-ci est redevenu député et siège à la présente séance) et Louis-Philippe Bérard, qui ont favorisé l'adoption de la loi à la Chambre haute, connaissent le même sort. Pour plus de détails, voir l'introduction de Les débats de l'Assemblée législative, 13e législature, 2e session (du 11 novembre 1913 au 19 février 1914).

38. M. Sauvé fait allusion à la grave maladie dont M. Mousseau surtout a souffert durant l'enquête du comité de l'Assemblée. Pour plus de détails, voir l'introduction de Les débats de l'Assemblée législative, 13e législature, 2e session (du 11 novembre 1913 au 19 février 1914).

39. Donnée du Soleil du 21 mars 1922, à la page 13. L'Action catholique du même jour, à la page 5, mentionne plutôt 13 jours après.

40. Donnée de La Presse du 21 mars 1922, à la page 17, qui mentionne plutôt que l'affaire date d'il y a 23 ans, mais cette date ne concorde pas, puisque le Dr Masson, né en 1873, n'avait que 26 ans en 1899 et était alors simple étudiant en médecine. D'ailleurs, M. Sauvé a fait allusion à cette affaire en relation à la caisse électorale de M. Masson, qui s'est présenté en politique pour la première fois en 1912, ce qui confirme les données de La Presse.

41. L'Événement du 21 mars 1922, à la page 1, précise que M. Sauvé fait allusion à l'affaire entourant le député de L'Islet, M. Thériault.

42. Le Montreal Star du 21 mars 1922, à la page 4, précise que "Il y a eu de nombreuses interruptions de la part des banquettes ministérielles" avant celle-là, mais nous ne pouvons déterminer exactement à quel moment dans le débat.

43. L'Événement du 21 mars 1922, à la page 3, précise que M. Taschereau réagit parce que M. Sauvé a "prononcé le nom de son collègue de L'Islet, sans le faire précéder du mot monsieur".

44. M. Sauvé fait allusion à l'enquête ayant touché Louis-Philippe Bérard lors de l'affaire Mousseau. Bérard avait été nommé conseiller législatif de la division de Lanaudière en 1912, mais fut forcé de démissionner en 1914, suite à ce scandale.

45. M. Sauvé veut parler de M. Achille Bergevin, député de Beauharnois, qui au même moment est à son siège. M. Bergevin (1870-1933), député libéral de Beauharnois de 1900 à 1908, fut conseiller législatif de la division de Repentigny de 1910 à 1913, puis De Salaberry de 1913 à 1914. Il fut forcé de démissionner de son poste suite à l'affaire Mousseau, mais se fit réélire député de Beauharnois de 1919 à 1923.

46. Effectivement, M. Mousseau ne pouvait donc venir témoigner devant le comité de la Chambre. M. Armand Lavergne, député nationaliste membre de comité d'enquête, est l'auteur d'une boutade mémorable sur cette mystérieuse maladie de M. Mousseau: "Lorsqu'un médecin vient dire à la commission que M. Mousseau ne peut venir témoigner, car il est prostré dans un état comateux, on lui demande s'il a tenté de le ranimer. Le médecin déclare avoir utilisé tous les moyens à sa disposition pour le ramener à la conscience. "Avez-vous essayé de l'argent?", demande Armand Lavergne. "Ce n'est pas dans mes moyens", répond le médecin." Pour plus de détails, voir l'introduction de Les débats de l'Assemblée législative, 13e législature, 2e session (du 11 novembre 1913 au 19 février 1914).

47. La Patrie du 21 mars 1922, à la page 8, dit que c'est parce que seulement trois députés de l'opposition sont présents que le vote ne peut être pris. Il en faut cinq normalement pour demander qu'un vote soit tenu.

48. Sir George-Étienne Cartier (1814-1873) dirigea le gouvernement Cartier-MacDonald (Canada-Uni) en 1857 et de 1858 à 1862.

49. Wilfrid Laurier (1841-1919), premier ministre (libéral) du Canada de 1896 à 1911.

50. Ernest Lapointe (1876-1941), avocat et député fédéral de Kamouraska (1904-1919) et de Québec-Est (1919-1941). Il fut ministre de la Marine et des Pêcheries de 1921 à 1924, puis ministre de la Justice de 1924 à 1930 et de 1935 à 1941.

51. Ce banquet s'est tenu à Québec le soir du 21 février.

52. Warren Gamaliel Harding (1865-1923), 29e président des États-Unis (1921-1923).

53. Herbert Clarke Hoover (1874-1964), homme politique américain et 31e président des États-Unis (1928-1932). Dans le cas présent, la citation de M. David fait allusion au rôle qu'avait Hoover de répartir l'aide alimentaire américaine à l'Europe pendant et après la Première guerre mondiale, ainsi qu'à son rôle de ministre du Commerce (1921-1924), auprès des présidents Harding et Coolidge.

54. William Findlay Maclean (1854-1929), homme politique ontarien. Député conservateur de South York de 1892 à 1926.

55. Francis Henry Keefer (1860-1928), homme politique ontarien. Élu député unioniste à la Chambre des communes en 1917. Sous-secrétaire d'État aux Affaires extérieures de 1918 à 1920.

56. James Alexander Robb (1859-1929), maire de Valleyfield de 1906 à 1910, député libéral à la Chambre des communes dans Huntingdon de 1908 à 1929. Ministre du Commerce et de l'Industrie de 1921 à 1923, ministre de l'Immigration et de la Colonisation de 1923 à 1925, ministre des Finances de 1925 à 1929.

57. Henry Cabot Lodge (1850-1924), homme politique américain. Élu à la législature d'État en 1880-1881, élu à la Chambre des représentants de 1887 à 1893, puis sénateur républicain du Massachussets de 1893 à 1924.

58. Selon Le Soleil du 21 mars 1922, à la page 1, le discours de M. Bergevin a duré près de deux heures.

59. Un éditorial du Devoir du 23 mars 1922, à la page 1, décrit ce discours en des termes très différents de celui des habituelles chroniques parlementaires. Ainsi, l'hilarité des députés aurait été déclenchée par quelqu'un qui, "se penchant vers son voisin, dit: "C'est Achille, évidemment, qui veut entreprendre les travaux d'Hercule"." L'article rapporte qu'il y avait bien peu de députés dans la Chambre à ce moment, et que le sergent d'armes fait tinter la sonnette appelant le quorum.

60. Le Devoir du 23 mars 1922, à la page 1, précise que "tous les mots de l'Orateur en étaient coupés, à chaque interstice éclataient des salves."

61. Le Devoir du 23 mars 1922, à la page 1, rapporte que M. Bergevin a fait suspendre une vaste carte derrière lui à un bec de gaz.

62. Le Devoir du 23 mars 1922, à la page 1, explique que M. Mercier fils a de la difficulté à se faire entendre "au milieu du fracas de couvercles des pupitres soulevés rapidement et qu'on laissait tomber avec force."

63. Selon Le Devoir du 23 mars 1922, à la page 1, M. Sauvé se fait entendre "de peine et de misère".

64. L'honorable Perrault n'est que le représentant en Chambre du ministre de la Voirie, le conseiller législatif J.-L. Perron qui est le leader du gouvernement à la Chambre haute.

65. Heure du Journal de l'Assemblée législative. Plusieurs journaux donnent des heures différentes: selon Le Soleil du 23 mars 1922, à la page 1, il est minuit précis, pour L'Événement du 23 mars 1922, à la page 3, la Chambre s'ajourne à 11 h 30, alors que L'Action catholique du 23 mars 1922, à la page 1, mentionne plutôt minuit trente.