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Version finale

16e législature, 1re session
(17 janvier 1923 au 15 mars 1924)

Le lundi 10 mars 1924

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 4 h 15.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Menaces de voies de fait contre le ministre des Travaux publics

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) se lève sur une question de privilège. M. l'Orateur, vous êtes le gardien de l'ordre dans cette enceinte et je veux attirer votre attention sur un incident survenu vendredi dernier. À la suite d'un débat, un député de cette Chambre se rendit en arrière de votre fauteuil. Il a injurié le ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault) et, en présence de plusieurs témoins, a déclaré, je ne sais si c'est sous l'empire de la colère, qu'il avait l'intention de m'attendre au passage pour se porter à des violences sur ma personne.

Il a fallu l'intervention de ses collègues pour lui faire remettre à plus tard l'exécution de son projet. Je ne sais sous quelle influence il parlait ni sous quelle impulsion il agissait, mais je ne crois pas que le pugilat soit de mise ici. J'aurai bientôt 45 ans. J'ai commencé à batailler encore jeune, je pratique ma profession depuis 20 ans, je suis député depuis 15 ans et je n'ai jamais été mêlé à des scènes de pugilat. Il est important de savoir si un député, un ministre de la couronne, a le droit de faire son devoir sans craindre la violence, d'exprimer une opinion sans s'exposer à des provocations de ce genre. L'intimidation n'est pas de mise ici et il est de mon devoir de signaler le fait. Il ne faudrait pas que l'on attente1 à la liberté des députés de cette Chambre.

J'aurais pu demander à la loi de me faire justice, j'aurais pu faire une autre procédure devant cette Chambre, gardienne de l'ordre, mais je prends en considération le fait que ce député est nouveau, qu'il a agi sous l'impulsion de la colère, qu'il n'est pas au courant des moeurs parlementaires. Je tiens à conserver tous mes droits de citoyen libre et de législateur. Je ne veux pas me laisser intimider et je puis dire au député en question que, pour les assommeurs, j'aurai toujours du plomb.

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie) se lève pour répliquer.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) lui fait signe de ne pas bouger2.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il est mieux de rester assis. C'est aussi bien comme cela.

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): Je diffère d'opinion.

Obligations, débentures et autres valeurs

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) demande la permission de présenter le bill 173 concernant les pouvoirs de certaines compagnies d'émettre et de réémettre des obligations, débentures et autres valeurs.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

Fonds d'amortissement de corporations municipales et scolaires

L'honorable M. David (Terrebonne) demande la permission de présenter le bill 201 relatif aux dépôts des sommes d'argent destinées aux fonds d'amortissement de corporations municipales et scolaires.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

Loi des cités et villes, 1922

M. Bullock (Shefford) demande la permission de présenter le bill 206 amendant la loi des cités et villes, 1922.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

 

Questions et réponses:

Octroi à Pierreville

M. Laperrière (Yamaska): 1. La municipalité de village de Pierreville a-t-elle demandé au gouvernement un octroi pour l'établissement d'un système de prévention contre les incendies?

2. Quand, par qui et comment cette demande a-t-elle été faite?

3. Quel montant a-t-elle reçu?

4. Quand et à qui le paiement a-t-il été fait?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): 1. Oui.

2. Par une résolution du conseil municipal adoptée à sa séance du 28 décembre 1923.

3. $1,000, acompte sur une subvention de $3,960.

4. Le 28 janvier 1924, par un chèque au montant de $1,000 payable à l'ordre de la municipalité du village de Pierreville.

M. Longtin, employé pour l'administration de la loi Lacombe

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): 1. L'administration de la loi Lacombe a-t-elle eu à son service un M. Longtin?

2. Dans l'affirmative, a-t-il résigné ou a-t-il été destitué?

3. Quelle est la date de son départ?

4. Quelles en sont les causes?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): 1. Oui.

2. Il a démissionné.

3. Le 22 février 1924.

4. Il a exprimé le désir d'être relevé de ses fonctions.

Enquête dans l'administration de la loi Lacombe

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): 1. Y a-t-il eu une enquête dans l'administration de la loi Lacombe depuis 1921?

2. Dans l'affirmative, à quelle date?

3. Par qui a-t-elle été faite?

4. Quels en ont été les résultats?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): 1. Non.

2, 3, 4. ...

Commission des eaux courantes et rivière Sainte-Anne (de-la-Pérade)

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 44 accordant certains pouvoirs à la Commission des eaux courantes de Québec, relativement à l'emmagasinement des eaux de la rivière Sainte-Anne (de-la-Pérade).

Adopté.

École de papeterie de Trois-Rivières

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 208 ratifiant le contrat au sujet de l'école de papeterie des Trois-Rivières.

Adopté.

École technique de Hull

L'honorable M. Nicol (Terrebonne) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 205 modifiant la loi constituant en corporation l'École technique de Hull.

Adopté.

Obligations ou rentes inscrites du gouvernement de cette province

L'honorable M. Nicol (Terrebonne) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 204 concernant certaines obligations ou rentes inscrites du gouvernement de cette province.

Adopté.

Liqueurs alcooliques

L'honorable M. Nicol (Terrrebonne) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 207 modifiant la loi concernant les liqueurs alcooliques.

Adopté.

Vente des terres publiques propres à la culture

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) propose, appuyé par le représentant de Québec-Ouest (l'honorable M. Madden), qu'à sa prochaine séance la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 202 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement à la vente des terres publiques propres à la culture.

Adopté.

Adoption

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 191 concernant l'adoption.

Adopté. Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

Lettre du consul de France

M. l'Orateur porte à la connaissance de la Chambre la lettre suivante:

Consulat général

de la République française

au Canada

Montréal, le 6 mars 1924

Monsieur,

J'ai l'honneur de vous accuser réception de votre lettre du 5 courant à laquelle était annexé le texte d'un ordre du jour voté par l'Assemblée à sa séance du 3 mars.

Conformément au désir exprimé par l'Assemblée, je transmettrai ce texte au gouvernement de la République française, que d'ailleurs j'ai déjà avisé par télégramme de la manifestation de lundi.

Veuillez agréer, Monsieur, l'assurance de ma considération très distinguée.

Le consul général, p. i.

(Signé) M. Verneuil.

Monsieur L.-P. Geoffrion,

greffier de l'Assemblée législative,

Québec

 

Demande de documents:

Embargo sur le bois de pulpe

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'une humble adresse soit présentée à Son Honneur le lieutenant-gouverneur, le priant de bien vouloir mettre devant cette Chambre copie de toute correspondance, télégramme, documents, etc., entre le gouvernement et celui d'Ottawa au sujet de l'embargo sur le bois de pulpe au Canada.

J'aimerais savoir si le gouvernement provincial est intervenu auprès du gouvernement fédéral au sujet de ce projet fédéral d'embargo sur le bois de pulpe et s'il a entretenu une correspondance sur cette question avec le gouvernement fédéral. C'est une question qui est agitée dans tout le pays et qui intéresse vivement la province de Québec, où le commerce de bois se fait sur une grande échelle. Le premier ministre de la province a fait à ce sujet, déjà, certaines déclarations et on désire savoir si des démarches ont été faites dans ce sens. On sait notre opinion sur cette question. Nous avons depuis longtemps proclamé la nécessité de la protection de notre bois et nous avons préconisé cette politique depuis longtemps. Des motions ont été présentées, jadis, par MM. Pelletier et Chicoyne. MM. Nantel et Bourassa l'ont demandée aussi.

Les libéraux d'alors nous disaient que ce que nous préconisions était une utopie. Cependant, en 1910 le gouvernement libéral de Sir Lomer Gouin a presque entièrement adopté ce que l'on appelait une utopie des conservateurs. Ce qui a eu pour résultat de faire établir de nouvelles usines à pulpe et à papier dans notre province, mais il reste la question de l'embargo. Quoi qu'il en soit, à l'heure qu'il est, les opinions sont partagées et le Parti libéral ne s'entend guère là-dessus. Comme le premier ministre a fait à ce sujet des déclarations, il devrait y avoir là-dessus une correspondance que je voudrais connaître avant de traiter la question plus longuement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il n'y a pas de correspondance à ce sujet entre le gouvernement d'Ottawa et celui de Québec. Le chef de l'opposition parle bien de l'opinion des autres à ce sujet, mais il ne nous dit pas la sienne. Ça ne m'étonne pas, car la question est des plus complexes et très compliquée. Ce n'est pas seulement dans notre province que l'on ne s'accorde pas, mais aussi dans les autres provinces où le sujet est aussi embrouillé. Une commission a été nommée pour faire une enquête là-dessus, elle a travaillé dans presque toutes les provinces et elle publiera très prochainement un rapport. Pour moi, personnellement, je suis contre l'embargo. Je n'ai aucune objection à le dire.

Nous avons à conserver notre richesse forestière, qui diminue de trois façons: par la coupe, par le feu et par les insectes. Le feu est la principale cause de la destruction de nos forêts, les insectes arrivent au second rang en fait de dommages infligés et l'exploitation forestière ne se situe qu'au troisième rang. En autant que la coupe est concernée, nous croyons que notre politique est bonne et aura d'excellents résultats: c'est d'inciter les compagnies forestières à faire l'inventaire de leurs forêts de manière à pouvoir ensuite limiter la coupe annuelle à la croissance annuelle. Déjà, un certain nombre de détenteurs de limites ont transmis au ministre des Terres et Forêts un inventaire fort complet. Aussitôt que cet inventaire sera terminé, nous limiterons la coupe annuelle à la croissance annuelle, ce qui aura pour effet d'assurer, dans une certaine mesure, la survivance de la forêt.

Quant aux incendies forestiers, nous savons que ce fléau, chaque année, nous cause de grands dommages, mais nous le combattons dans toute la mesure de nos moyens. Ce fléau détruit, chaque année, 18 fois plus de bois que la coupe. Cette année encore, nous présenterons un nouveau projet de loi de façon à pouvoir coopérer avec le gouvernement fédéral pour rendre encore le travail de la protection de nos bois plus efficace. Restent les insectes contre lesquels, on l'avouera, la lutte est difficile. Cependant, aux États-Unis, on a combattu ce fléau avec succès et, ces jours derniers, on est venu nous demander, de ce côté également, de coopérer avec le gouvernement fédéral dans la lutte entreprise. Il nous en coûtera probablement une somme de $30,000, mais nous coopérerons.

Mais revenons à l'embargo. Notre bois coupé provient des terres de la couronne pour 90%, des terres des colons pour 8% et des compagnies américaines pour 2%. Sur les terres de la couronne, par suite de nos lois, la prohibition de l'exportation est en pratique. Le premier ministre du Canada a déjà dit que l'embargo n'avait pas pour but d'affecter le bois des colons et des cultivateurs où cette mesure ne serait pas nécessaire. Il atteindra seulement le bois coupé sur les terres appartenant en pleine propriété à des compagnies américaines, c'est-à-dire que 2% du bois. Or je me suis toujours demandé s'il valait la peine de décréter cet embargo pour 2% du bois des compagnies américaines et s'exposer à des représailles des Américains.

Il n'y a pas de doute que, si l'on décrétait l'embargo aux seuls bois des colons, on embarrasserait ces colons en leur fermant un excellent marché et en les laissant entièrement à la merci des marchands de bois du Canada. La colonisation souffrirait si l'on ne pouvait continuer de permettre au colon de vendre son bois aux États-Unis. Nous ne parlons que du bois des colons. Les États-Unis sont un bon marché pour ce bois et on devrait laisser au producteur le marché là où il peut le trouver. Je n'ai pas suivi l'enquête de la commission, mais ce que j'en ai vu me confirme que les colons et les cultivateurs et bien d'autres sont contre cette mesure. Je crois que la majorité des intéressés s'est prononcée contre l'embargo devant la commission.

C'est aussi l'opinion dans les autres provinces. J'ai reçu une résolution de la législature du Manitoba se prononçant carrément contre l'embargo. Pour prouver que l'embargo est bon, on dit que cette mesure aurait pour effet d'amener ici des moulins américains. Mais, avec ces moulins, la forêt serait-elle moins menacée d'être détruite? L'argument des moulins est à deux tranchants, car notre bois disparaîtra plus vite avec un plus grand nombre de moulins. J'apprécie cependant les motifs du gouvernement fédéral en faveur de l'embargo, et nous n'avons aucune objection à ce que les fervents de l'idée fassent toutes les enquêtes possibles pour obtenir des renseignements et renseigner les populations sur l'état de nos forêts; mais je ne suis pas prêt à admettre que le gouvernement fédéral doit intervenir dans cette question des forêts, qui doit être laissée aux soins des provinces.

Si le gouvernement fédéral devait adopter une législation qui s'applique à toutes les provinces, il pourrait nuire à quelques-unes d'entre elles. C'est à chaque province à protéger ses forêts et, attendu que les forêts constituent dans toutes les provinces des sources de revenus pour ces provinces, c'est à chaque province à établir des moyens de protection efficaces contre le feu. Quant à ce qui nous regarde, il faut admettre que dans cette question ce qui conviendrait à certaines provinces ne conviendrait pas nécessairement à la nôtre. Les conditions de la Colombie anglaise ne sont pas celles de la province de Québec et ce qui convient à la Colombie anglaise peut ne pas convenir à Québec, à la Nouvelle-Écosse ou au Nouveau-Brunswick. Je crois qu'Ottawa devrait laisser les provinces absolument libres d'adopter les lois qui conviennent à leurs populations industrielles et agricoles.

Je suggère donc fortement à nos amis d'Ottawa de se procurer toutes les informations, tous les faits réels touchant la situation forestière au Canada, mais de laisser à chaque province le soin exclusif de leurs forêts afin que chaque province puisse adopter des mesures de protection forestière suivant les besoins de la colonisation et de l'agriculture. À en croire les informations glanées par la commission au cours de ses séances de l'Atlantique au Pacifique, je suis convaincu que la mesure projetée ne donnera pas les résultats attendus, qu'elle fera grandement tort à la colonisation et qu'elle nuira à l'agriculture, parce que les forêts de la province constituent un actif de la plus haute importance pour les colons et les cultivateurs. Nous ne devrions rien faire qui pourrait changer les conditions dans lesquelles les cultivateurs et les colons peuvent vendre leur bois ou léser leur marché de quelque façon que ce soit. Nous attendons donc avec intérêt le travail de la commission et d'ici là nous suggérons à Ottawa de laisser à chaque province la libre possession de ses forêts dans ses limites respectives afin que chaque province puisse prendre les démarches nécessaires dans le meilleur intérêt de sa propre population.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le premier ministre vient de faire une déclaration importante en définissant la politique du gouvernement contre l'embargo. Si je peux me permettre, je ferai remarquer au chef du gouvernement que ses déclarations ne sont pas en tout point conformes aux déclarations des chefs de son parti. Si ma mémoire est fidèle, Sir Lomer Gouin s'est déclaré favorable à l'embargo et il est reconnu pour avoir défendu les intérêts de la province avec beaucoup de ferveur. Il semble que quelques-uns de ses successeurs mettent de côté certaines de ses politiques.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Lesquelles?

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Sa politique sur la réciprocité, par exemple.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Quelle politique suivez-vous?

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Celle de Sir Lomer, parce qu'elle est conforme à la politique conservatrice. J'aimerais savoir pourquoi le gouvernement d'Ottawa a créé une commission sur le bois de pulpe, si d'autres provinces sont contre l'embargo. J'aimerais également savoir pourquoi le premier ministre a cité le Manitoba en exemple, si chaque province doit résoudre ses problèmes elle-même. Je maintiens que la situation dans Québec est très différente de celle du Manitoba, parce que le Manitoba a très peu de bois de pulpe.

Il croit qu'on devrait étudier cette politique préconisée par plusieurs hommes publics dans la province. Il cite également le premier ministre qui dit que 90% des forêts appartiennent à la couronne, 8% aux colons, et que 2% appartiennent à des compagnies privées américaines, et il se demande si ces chiffres sont exacts.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): J'ai fait référence aux terres en pleine propriété seulement quand j'ai parlé des 2% et non aux terres sous licence appartenant à la couronne.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il semble que le premier ministre ait changé d'idée au sujet de l'embargo.

La proposition est adoptée.

Code de procédure civile

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 23 modifiant le code de procédure civile.

Adopté. Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Subsides

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Nous allons en comité des subsides?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Oui.

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): L'opposition réclame depuis longtemps la représentation de toutes les classes de la société dans le gouvernement. Les ouvriers ne sont pas encore représentés dans le cabinet. Pourtant, au cours de l'une des dernières élections partielles, le premier ministre a proclamé à une assemblée composée d'ouvriers que ces derniers auraient leur représentant dans le cabinet avant la présente session. La session s'achève et le gouvernement ne semble pas vouloir respecter sa promesse.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Est-ce que le premier ministre a promis de présenter une loi à cette session-ci?

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ce n'est pas une loi qu'on a promis, c'est un représentant ouvrier. La promesse a été faite, et le gouvernement devrait la tenir. Le gouvernement a créé un ministère du Travail, mais il n'a pas encore nommé un ministre du Travail. Le ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault) est encore ministre du Travail. Je dois dire que l'honorable ministre fait des efforts louables et je ne veux pas le mettre en cause sur ce sujet. La classe agricole doit être représentée...

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): La classe ouvrière.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Oui, la classe ouvrière... Voyez-vous, j'aime tant le ministre de l'Agriculture (l'honorable M. Caron) et les cultivateurs.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): L'amitié ne se dément pas. Elle est fidèle jusqu'à la fin.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il s'agit, ici, d'une promesse faite par le premier ministre et qui n'a pas été remplie encore. On l'a faite, sans doute, pour capter la confiance des ouvriers de Richmond.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Mon honorable ami prétend-il que j'ai dit cela dans la ville de Richmond?

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est à Asbestos qu'il a fait cette promesse. C'était pour capter les votes ouvriers. Il n'y a peut-être pas d'ouvrier en cette Chambre, mais il y en a en dehors. Il y a des précédents pour aller en chercher en dehors. On est allé chercher ainsi M. Mitchell, M. Devlin. On a passé par-dessus la tête de bons députés pour amener M. Mitchell. La même chose s'est répétée lorsqu'on a appelé dans le cabinet le trésorier actuel (l'honorable M. Nicol). On a mentionné des députés de cette Chambre pour le poste du Travail. Si on ne les trouve pas dignes, très bien, mais que l'on tienne les promesses.

Si le gouvernement n'avait pas fait de promesse, il serait justifiable de n'en pas nommer, mais c'est en face d'un engagement qu'il se trouve aujourd'hui, et l'opposition a le droit de lui en demander compte. C'est pourquoi j'ai l'honneur de proposer par voie d'amendement, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), que tous les mots après "que", dans la motion principale, soient remplacés par les suivants: "cette Chambre regrette que le gouvernement n'ait point donné à la classe ouvrière la représentation qu'elle doit avoir dans le Conseil exécutif de cette province".

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Dans le dernier Parlement, avant les dernières élections, nous avions en Chambre un certain nombre de bons représentants des ouvriers. En ce qui regarde Montréal, Maisonneuve, Sainte-Marie et Dorion étaient représentés par des ouvriers. Or le chef de l'opposition a fait battre tous ces excellents ouvriers par ses candidats, qui n'étaient pas des ouvriers mais des professionnels. Est-il bien sincère, alors, quand il s'en vient revendiquer les droits des ouvriers dans cette Chambre? Il est vrai que le gouvernement libéral a créé un ministère du Travail et il a fait bien d'autres choses en faveur des ouvriers. Mais ce n'est pas parce que ce ministère est occupé par un professionnel, si modeste soit-il, qu'il faille condamner le gouvernement. Le chef de l'opposition ne viendra jamais nous faire croire que, parce qu'un homme a fait des études classiques, parce qu'il est un professionnel, il ne peut pas prendre en main la cause des ouvriers ni étudier d'une façon pratique la législation ou la question ouvrière.

Dans les divers pays d'Europe, ce sont des professionnels qui sont les législateurs de questions ouvrières les plus avertis. Quand on est petit-fils d'ouvrier, quand on a étudié la question ouvrière sous toutes ses faces et que l'on s'est mêlé à la vie ouvrière, ne peut-on pas s'occuper de la cause des ouvriers? Pour ma part, je me plais à m'occuper de tout ce qui regarde les ouvriers et, malgré ce que pourra dire l'opposition, je continuerai à m'y intéresser encore. On réclame un ministre du Travail, je ne crois pas que cela soit nécessaire. Personne ne viendra dire que nous n'avons pas réussi dans notre législation ouvrière. Notre code a été cité en exemple au congrès de Genève et j'en fus fier. D'ailleurs, nos ouvriers se plaignent-ils autant que l'insinue le chef de l'opposition? Nous les entendons souvent, nos ouvriers, et ils viennent nous voir chaque année, au début de chaque session, pour nous exposer leurs demandes. Ils ne se plaignent pas aussi amèrement. D'ailleurs, à chaque session, nous passons une loi nouvelle à leur bénéfice.

Nos ouvriers sont reconnaissants au Parti libéral de tout ce qu'il a fait pour eux à Ottawa et à Québec. À Ottawa, en particulier, ils ont obtenu des Laurier, des Lemieux, des King une législation meilleure que celle que leur aurait obtenue l'un des leurs. Et, pour ce qui est de Québec, quel est celui qui a le plus fait en faveur de la bonne législation ouvrière que nous avons, et je le dis à son éloge, que le premier ministre actuel de la province alors qu'il présidait aux destinées du département du Travail et des Travaux publics? Aussi lui en sont-ils reconnaissants. Les ouvriers croient-ils que l'on ferait mieux pour eux en nommant un des leurs ministre du Travail? Je ne le crois pas et je ne partage pas l'opinion du chef de l'opposition que le ministre du Travail doit toujours être un ouvrier. Ils ont actuellement un sous-ministre, qui est constamment au milieu d'eux à Montréal. Il est toujours à leur disposition.

Et d'ailleurs, ce ministre du Travail, que le chef de l'opposition réclame, sera-t-il membre de l'union internationale, des unions catholiques et nationales ou d'une autre association ouvrière indépendante? En tout cas, ce n'est toujours pas dans les rangs des messieurs de l'opposition qu'on le prendra, puisque ces messieurs ont réussi à faire battre tous les ouvriers qui se présentaient contre eux. Les ouvriers, j'en suis sûr, nous resteront toujours fidèles, malgré les reproches que peut nous faire le chef de l'opposition et malgré sa petite motion qui, j'en ai bien peur, sera considérée avec beaucoup de scepticisme, car nous nous sommes toujours efforcés de faire notre devoir et nous continuerons d'agir ainsi.

M. Dufresne (Joliette) ne blâme pas les ouvriers de Montréal d'avoir battu les trois ex-députés prétendus ouvriers, car ces derniers n'avaient pas fait en Chambre pour les ouvriers ce qu'ils devaient faire. Ils avaient même voter contre cette demande de l'opposition de nommer un ouvrier dans le cabinet.

Il rappelle la promesse faite par le gouvernement de nommer un représentant des ouvriers dans le cabinet. Le ministère de l'Agriculture est dirigé par un ancien cultivateur. Pourquoi un ouvrier ne pourrait-il pas en faire autant? Un homme est toujours plus qualifié pour représenter sa classe qu'un professionnel. Les ouvriers, qui sont en grand nombre dans la province, ont droit à un représentant et je crois qu'on devrait le leur donner.

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie) se dit aussi de cet avis. Il trouve étrange la déclaration du ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault) disant qu'un professionnel peut aussi bien qu'un ouvrier représenter les intérêts des ouvriers. Il n'est pas possible qu'un professionnel puisse pleinement défendre les intérêts des ouvriers. L'ouvrier, par exemple, serait mieux en mesure d'évaluer la loi sur les accidents du travail que quiconque. Si le ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault) n'avait pas deux portefeuilles, nous aurions peut-être obtenu pour cette session-ci le rapport de la commission d'enquête sur les accidents du travail et remédié au manque de protection qui existe dans certaines industries. On peut trouver bien des ouvriers pour représenter la classe ouvrière dans le cabinet mieux que ne le fait le ministre des Travaux publics.

M. Bray (Montréal-Saint-Henri): C'est un article du programme de l'opposition. On ne pourra pas dire que nous n'avons pas de programme. Je considère que le gouvernement, après ses promesses, a le devoir d'appeler un ouvrier dans le cabinet. Il devrait facilement trouver un ouvrier en dehors de la Chambre pour le nommer ministre du Travail. Cela s'est fait dans d'autres Parlements.

Ce qui s'est passé à Montréal, aux dernières élections, démontre que les ouvriers n'étaient pas très satisfaits du gouvernement. Qu'on prenne le ministre parmi les ouvriers, c'est tout ce que l'opposition demande.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nous sommes très reconnaissants à l'opposition de nous rappeler nos soi-disant promesses et de s'intéresser si ardemment à la classe ouvrière. C'est un intérêt, cependant, qui vient un peu tard. Je me demande moi aussi pourquoi le chef de l'opposition et ses amis, oubliant leur attachement pour les ouvriers, n'ont pas hésité à faire battre à Montréal les députés de Dorion, Sainte-Marie et Maisonneuve, qui pourtant savaient défendre avec énergie les intérêts de leur classe. Mon honorable ami n'aime pas à nous parler de l'âge fortuné où son parti était au pouvoir. Si ce ne fut pas pour le bonheur de la province, ce ne fut pas plus pour celui de la classe ouvrière. Que l'on ouvre les statuts de la province et que l'on cherche la législation ouvrière de cette époque-là. Que l'on cherche bien, on ne trouvera rien. Dans ce temps-là, on ne pensait pas aux ouvriers et on ne leur a pas donné de ministère.

Qui a créé le ministère du Travail? Le Parti libéral. Qui a fait toute la législation favorable aux ouvriers? Le Parti libéral. Le Parti libéral a créé aussi la loi sur les accidents du travail, dont il a constamment élevé l'indemnité de $1,000 jusqu'à $2,500 et, l'an dernier, voulant faire encore plus large et plus généreuse cette loi, il a nommé une commission pour s'enquérir des conditions actuelles du travail. Que n'a pas fait encore le Parti libéral pour la classe ouvrière? Il a aboli les frais dans les actions en bas de $25; il a fait passer la loi Lacombe, il a établi des exemptions pour les saisies, il a construit les écoles techniques et l'École des hautes études commerciales. Maintenant l'on vient nous dire qu'il faudrait un ouvrier dans le cabinet. J'ai dit, en effet, à Asbestos qu'il y aura un représentant des ouvriers dans le conseil et il y en aura un.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Quand?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Dès que la chose sera possible, mais plus vite que mon honorable ami ne le ferait s'il arrivait au pouvoir.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Qui nommera-t-on?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Lorsque le chef de l'opposition occupera ce siège il pourra sans doute arranger les choses mais, entre-temps, il sera sans doute disposé à me laisser choisir mes collègues. Il nous faut du temps pour choisir un bon représentant. Nous en avions des ouvriers en Chambre, comme l'a dit le ministre des Travaux publics et du Travail (l'honorable M. Galipeault). Nous en avions, mais nos adversaires leur ont fait une lutte de corsaires et ils ont réussi à les faire battre en prêchant une politique fausse et en soulevant les préjugés. Encore une fois, nous nous rappelons notre promesse. Nous donnerons un représentant aux ouvriers dans le cabinet. Je suis certain que, le jour où nous choisirons un représentant ouvrier, tous nos amis d'en face le combattront. Il y a eu un seul député ouvrier d'élu aux dernières élections (M. Bertrand) et il a voté avec nous depuis le commencement de la session.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Sur quelle mesure du gouvernement?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il a voté avec nous, en tout cas, tout le temps et il votera encore avec nous.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est un engagement qu'il a pris?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il n'y a pas d'engagement et j'aime mieux qu'il continue à voter sans engagement, car il votera avec plus de sincérité. Aux dernières élections, à Montréal, on a fait une guerre à mort aux candidats des ouvriers et l'on a exhibé de longs programmes en leur faveur. Depuis le début de la session, qu'est-ce que ces messieurs de l'opposition ont fait pour leurs ouvriers, sous forme de projets de législation, d'amendements, etc.?

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): Est-ce que la commission sur la loi des accidents du travail ne devrait pas faire rapport pour la présente session?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nous n'avions assigné aucune limite de temps à cette commission. Nous voulons que les commissaires prennent tout le temps voulu pour faire une enquête sérieuse. Nous siégeons depuis près de trois mois et c'est la première fois que nous voyons ces messieurs se lever pour revendiquer les droits des ouvriers. Qu'ont-ils fait pour eux? Peut-on nous dire maintenant en quoi pèche notre législation ouvrière? On ne peut rien dire et pour cause. C'est que notre législation est la plus belle et la plus avancée de toutes celles des autres pays. Elle a été citée en exemple à Genève.

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): Y a-t-il eu un rapport de cela de la part du ministre des Travaux publics?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): La commission a fait un rapport. Quoi qu'il en soit, aucun membre de l'opposition ne nous fait encore connaître son programme ouvrier, pas plus le député de Saint-Henri (M. Bray) que celui de Sainte-Marie (M. Houde). Ils n'ont encore absolument rien fait ni dit en faveur de leurs électeurs. Nous sommes pourtant prêts à prendre leurs suggestions.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il y a ma motion.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Cela n'est pas une suggestion; c'est un blâme et nous ne sommes pas prêts à l'accepter. Pour le moment, la politique du gouvernement, sans être parfaite peut-être, est amplement satisfaisante. Le gouvernement va accorder toute l'attention possible au rapport de la commission, qui est encore au travail. Lorsqu'elle aura présenté son rapport et fait des suggestions, le gouvernement rendra la législation ouvrière aussi large et généreuse que possible pour la classe ouvrière.

M. Langlais (Témiscouata) estime que la classe ouvrière mérite autre chose que des compliments et qu'on devrait accorder aux ouvriers un représentant, comme la promesse leur en a été faite. Il ne croit pas que la classe ouvrière soit aussi satisfaite que le disent le premier ministre et le ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault). Et elle l'a montré aux dernières élections. Plusieurs plaies rongent la classe ouvrière: questions d'hygiène et de moralité dans les usines, etc. C'est l'opposition conservatrice qui a réclamé la loi des accidents du travail en 1909, la semaine de 55 heures et autres réformes dans la législation provinciale dont les ouvriers bénéficient.

Le ministre du Travail (l'honorable M. Galipeault) a vanté l'oeuvre du premier ministre, mais qu'est-ce que le gouvernement a fait pour remédier au chômage, cet important problème qui jette la misère parmi notre population? Rien encore au cours de cette session. Si la classe ouvrière avait eu un représentant dans le cabinet et si elle avait eu toute la justice et tout l'honneur auxquels elle a droit, ce représentant aurait vu à ce que les ouvriers fussent mieux protégés. Il aurait pu suggérer quelques mesures adéquates, tandis que le ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault), qui cumule deux portefeuilles, n'a rien à proposer. Et on continuera à promettre un ministère aux ouvriers dans les élections partielles pour oublier ses promesses en Chambre.

M. l'Orateur: Appelez les membres!

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il est 6 heures. Il faut remettre la chose à la séance du soir.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nous avons encore deux minutes avant 6 heures.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Beaudoin, Bray, Dufresne, Faucher, Gault, Houde, Lafleur, Langlais, Pellerin, Sauvé, 10.

Contre: MM. Baillargeon, Bergeron, Bordeleau, Caron, Charbonneau, Dufour (Charlevoix-Saguenay), Fortier, Galipeault, Hamel, Laferté, Madden, McDonald, Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreault, Morin, Ouellet, Perrault, Pilon, Roy, Taschereau, Thériault, 22.

Ainsi, l'amendement est rejeté.

À 6 heures, la Chambre suspend ses travaux.

 

Reprise de la séance à 8 h 30

Subsides

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas quarante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour édifices publics et loi des établissements industriels de Québec, statuts refondus de Québec, 1909, articles 3749 à 3789ff, tels qu'amendés par 8 George V, chapitre 51, 10 George V, chapitre 54, et 11 George V, chapitre 75; 3829-3866, tels qu'amendés par 1 George V, (1re session), chapitre 27, 2 George V, chapitre 36, 3 George V, chapitre 37, et 9 George V, chapitre 50, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Adopté3.

2. Qu'un crédit n'excédant pas six cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le greffier des conseils de conciliation et d'arbitrage, statuts refondus de Québec, 1909, art. 2489-2520 - loi des différends ouvriers de Québec, traitement - pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande qui est le greffier, quels sont ses devoirs et ce qu'il a fait durant l'année. Il demande aussi s'il y a eu des grèves dans les travaux du gouvernement4.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Oui, il y a eu une petite grève à Montréal. Une trentaine d'ouvriers se sont mis en grève.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pourquoi?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Oh! un petit différend qui n'a pas duré.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande si le ministre est en faveur des grèves.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Non.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Alors, en avez-vous peur?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) répond que pour lui elles ne sont pas nécessaires.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) fait allusion au procès intenté par le ministre à un journal qui l'a diffamé et qui depuis a fait la paix avec lui. Il fait remarquer au ministre que, si le gouvernement avait un ouvrier à la tête du département du Travail, le titulaire serait plus au courant.

M. Bray (Montréal-Saint-Henri) pose aussi quelques questions.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 3. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour bureaux de placement des ouvriers, statuts refondus de Québec, 2520d, 1 George V, (1re session), chapitre 19, section 1, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est le bureau de M. Ainey, ça?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): M. Joseph Ainey dirige un des bureaux.

M. Bray (Montréal-Saint-Henri) se plaint que les bureaux de placement fonctionnent mal.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Combien ont-ils placé de gens, vos bureaux?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Environ 15,000 personnes. Des suggestions ont été faites au gouvernement à l'effet de faire disparaître les bureaux de placement privés. La chose a été faite dans la mesure du possible mais, comme il se trouve un certain nombre de sans-travail d'origine étrangère, il faudrait toute une série d'interprètes et une foule d'employés pour s'en occuper. Aussi quelques bureaux privés ont été maintenus et le gouvernement, qui a une entente avec les autorités fédérales, leur impose une taxe spéciale. Les bureaux de placement provinciaux sont très fréquentés et très efficaces. Le nombre de ceux qui y obtiennent des positions augmente considérablement chaque année. Naturellement, il se produit des progressions, suivant le degré de la crise de chômage traversée.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) veut savoir si ceux qui ont charge de ces bureaux font leur travail sur une même base que dans les autres provinces et questionne le ministre des Travaux publics au sujet de la conférence interprovinciale du travail qui eut lieu, en novembre 1922, à Québec.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) dit que le but de cette conférence a été de fournir à tous les ouvriers l'occasion de se rencontrer et de discuter des questions professionnelles les intéressant, mais il n'est pas en faveur des conférences interprovinciales pour discuter l'uniformité du système qui doit être employé pour tenir ces bureaux de placement. Nos lois sont plus avancées que celles des autres provinces et le nombre de nos sans-travail est moins considérable. Chaque province a ses problèmes ouvriers. On ne saurait, même en faisant preuve de la meilleure volonté, les étudier comme si elles ne formaient qu'un seul tout homogène. Du moment que la paix règne parmi nos ouvriers, il n'y a pas de raison d'aller étudier les troubles des autres.

À plusieurs reprises, tous les employés des bureaux de placement ont été convoqués à des conférences générales au cours desquelles les problèmes intéressant les sans-travail sont discutés.

MM. Houde (Montréal-Sainte-Marie) et Gault (Montréal-Saint-Georges) posent des questions au sujet du placement des ouvriers.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): La plupart d'entre eux sont placés dans la ville de Montréal. D'ailleurs, nous publions à ce sujet des rapports quotidiens que nous adressons à Ottawa pour fins de statistiques.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 4. Qu'un crédit n'excédant pas cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le nettoyage des édifices de la législature et des départements; traitements, dépenses contingentes, etc., pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est pas un peu cher?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Tout est net. Le gouvernement agit avec prudence et économie dans ses achats. Tout se passe dans un ordre parfait.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je voudrais savoir s'il y a plus d'employés cette année que l'an passé et à combien s'élève leur salaire.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Le même nombre d'employés figure sur la liste, mais les salaires ont été réduits cette année, puisqu'ils s'élevaient à $51,703 l'an passé.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): Avez-vous un acheteur spécial?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Nous avons un commis préposé aux achats.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) énumère les articles de nettoyage. Chez qui achète-t-on tout ce savon?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Chez différents fournisseurs.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 5. Qu'un crédit n'excédant pas dix-huit mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour assurance des édifices publics en général, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): Est-ce que vos assurances passent par des courtiers?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Non, nous nous assurons directement. Les compagnies ont des agents, naturellement. Par ailleurs, les édifices ne sont pas suffisamment assurés.

L'article est laissé en suspens.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 6. Qu'un crédit n'excédant pas dix mille cent cinquante-trois piastres soit ouvert à Sa Majesté pour taxe d'eau sur les édifices publics en général, cité de Québec, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande pourquoi on ne discute pas immédiatement l'item concernant la somme de $300,000 pour l'entretien des édifices publics, dans l'ordre indiqué au livre du budget. Il dit que ce montant comprend la somme dépensée pour l'entretien de Spencer Wood, résidence officielle du lieutenant-gouverneur5.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) répond qu'il vaut mieux étudier les petits items d'abord.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Ce sont les ministres qui indiquent l'ordre de l'étude des items. Je ne veux pas être désobligeant pour mon honorable ami, mais j'aimerais mieux attendre à plus tard pour cet item de $300,000. Sur cet item, il me manque encore quelques renseignements que j'obtiendrai pour demain.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) cite au chef de l'opposition la règle de la Chambre qui donne raison au ministre des Travaux publics (l'honorable M. Galipeault) et qui statue que les articles du budget sont discutés dans l'ordre indiqué par les ministres: "Les articles du budget sont soumis au comité dans l'ordre indiqué par les ministres."(325-1)

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il n'y a pas eu de différend avec le conseil municipal de Québec au sujet de la taxe d'eau?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Non, pas que je sache.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose: 7. Qu'un crédit n'excédant pas quinze mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les inspections, explorations, etc., (département des Travaux publics), pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Adopté.

8. Qu'un crédit n'excédant pas cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le bureau de poste, traitements, dépenses contingentes, etc., (département des Travaux publics), pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Il fait remarquer qu'il y a une diminution de $2,000 à cet item.

Adopté.

Il propose: 9. Qu'un crédit n'excédant pas six mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour les réparations et entretien des écoles normales, (département des Travaux publics), pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions et demande la permission de siéger de nouveau. Lesdites résolutions sont lues deux fois et adoptées.

Possession de biens de bonne foi

M. Fortier (Beauce) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 203 modifiant le code civil relativement à la possession de bonne foi soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

M. Fortier (Beauce) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

M. Langlais (Témiscouata) demande si un acquéreur d'immeuble prescrit contre son titre, s'il ne l'enregistre pas.

M. Fortier (Beauce): La bonne foi se présume toujours en pareille matière et les intéressés sont toujours admis à prouver que les personnes qui invoquent la prescription sont de mauvaise foi.

Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

M. Fortier (Beauce) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Cité de Québec

M. Létourneau (Québec-Est) propose que les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 75 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec soient maintenant lus une deuxième fois.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): M. l'Orateur, je crois que nous devrions mûrir davantage ce projet de loi, car on nous a proposé un amendement important au sujet d'un échevin anglais. Je ne suis pas antipathique aux anglo-protestants, mais je ne veux pas créer de conflit sérieux entre les deux principales races de cette province. Je veux simplement que justice soit rendue à la minorité protestante anglaise tout comme elle l'est à la population française. La Chambre a adopté le principe de cette représentation spéciale des protestants, que le conseil de ville, selon les remarques du premier ministre, devra accepter ou rejeter. C'est un précédent sérieux. Tous les contribuables protestants suivront peut-être ce précédent. D'autres minorités pourraient également emboîter le pas. Il y a des minorités canadiennes-françaises ainsi que des minorités juives dans certaines villes de la province de Québec. Cela pourrait amener les minorités canadiennes-françaises catholiques de certaines municipalités à demander le privilège qui est accordé aux protestants à Québec. Si demain Trois-Rivières, Westmount ou une autre municipalité nous demandait la même chose que nous accordons à Québec, le gouvernement pourrait-il leur refuser?

Nos compatriotes anglais n'ont pas besoin de concession pour faire de beaux gestes. Je crains que les paroles du secrétaire provincial ne soient considérées comme une leçon pour la majorité des autres provinces. J'ai toujours compris que les citoyens de Québec ont été tolérants pour leurs concitoyens anglo-protestants, et cette mesure sera de nature à faire croire que la population anglaise a été maltraitée. Dans le passé, les protestants ont toujours été représentés au conseil de ville; maintenant, ils ne le sont plus. Je désire ardemment que ces derniers aient un représentant au conseil de ville de Québec. Je crois que leurs concitoyens de langue française ne sont pas contre cette mesure, surtout si on prend en considération le montant des taxes payées par les anglo-protestants.

L'unanimité de la Chambre est nécessaire pour une mesure de cette importance. Elle devrait refléter aussi les sentiments de toute la population. Cette unanimité n'est pas encore chose accomplie. Il y a eu discussion et dissension à ce sujet à l'hôtel de ville de Québec. Nous aurions dû interroger les intéressés avant de décider de la question. Je crois aussi qu'après avoir entendu l'opinion des anglo-protestants nous serions mieux éclairés et c'est pour cela que j'ai proposé l'autre jour que nous retardions l'étude de l'affaire. Après cela, nous aurions pu voter le projet à l'unanimité.

M. Langlais (Témiscouata) propose par voie d'amendement, appuyé par le représentant de Montréal-Dorion (M. Tétreau), que tous les mots après "que" soient remplacés par les suivants: "l'adoption de l'article nouveau que le comité a inséré dans le bill n'ayant pas été demandée à cette Chambre ni par la pétition présentée par les promoteurs du bill ni par pétition régulièrement présentée par les protestants de la ville de Québec, ce bill soit renvoyé de nouveau au comité des bills privés, avec instruction d'entendre les parties intéressées au sujet de l'opportunité de décréter l'élection d'un échevin protestant en certains cas et de faire rapport de leurs vues en cette matière au plus tard le 13 courant".

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): L'honorable chef de l'opposition a changé d'avis depuis vendredi soir. Mais autant vaudrait dire non tout de suite. Le comité des bills privés a terminé son travail depuis une semaine. La session tire à sa fin, la Chambre doit tenir trois séances par jour. Le comité des bills privés ne peut pas siéger dans ces circonstances. Autant dire que le bill ne passera pas durant la présente session. La manoeuvre de l'opposition n'est ni brave ni généreuse. La chose est devant le public depuis longtemps.

Tout ce que nous faisons est de donner le droit au conseil municipal de Québec, s'il le juge à propos, de faire élire un représentant anglo-protestant pour fins scolaires surtout. Il y a deux sortes d'écoles à Québec, l'école catholique et l'école protestante. Le conseil de ville dirige les dépenses scolaires. Il est juste que les protestants y soient représentés. Si nous voulons rendre justice à nos compatriotes anglais, il faut en donner la chance au conseil de ville de Québec au plus tôt.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il serait peut-être bon de tenir une campagne d'éducation pour permettre à un protestant d'être élu.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Le seul moyen, de toute évidence, d'avoir un échevin protestant est de le faire élire par toute la population protestante ou de faire voter ceux qui paient sur le "panel" protestant seulement. Je crois que l'amendement, qui n'a rien que de juste et de raisonnable, devrait être admis. Le gouvernement a tenu sur cette question une attitude dont il n'a pas à rougir, puisqu'une fois de plus il donnera l'exemple à plusieurs autres gouvernements sur la façon dont les minorités doivent être traitées dans cette province.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): L'opposition n'a pas de leçon de bravoure à recevoir du premier ministre, lui qui a proposé son amendement à la onzième heure, vendredi soir, et sans avoir donné les avis nécessaires. Nous voulons nous aussi rendre justice à nos compatriotes anglais, mais pas à la vapeur du gouvernement. Nous pouvons bien dire: N'allez pas si vite! Il n'y a pas de vengeance à exercer de notre côté. Nous voulons rendre justice aux deux parties, aux protestants et aux catholiques. Peut-être regrettera-t-on cette mesure que l'on appelle une mesure de justice? Je veux étudier la question. Pourquoi nous reprocher de demander de ne pas aller si vite et de donner le temps d'étudier une question d'aussi grande gravité? C'est une demande bien raisonnable. Il y a d'autres minorités dans la province, et il importe d'en tenir compte. Dans certaines villes de la province, il y a des minorités canadiennes-françaises et on ne peut oublier non plus la minorité juive. Tous ont le même droit de demander ce même droit d'être représentés. Je ne veux pas être injuste envers les protestants et, s'il n'y a pas moyen de leur donner justice autrement, j'en serai.

Il serait peut-être possible de régler la nomination des trois commissaires pour les écoles protestantes sans changer le principe de la représentation. La session ne finira pas cette semaine, si le premier ministre continue à nous amener des mesures comme celle-là. Elle finira quand nous aurons fini notre devoir. La Chambre peut demander au comité des bills privés de siéger de nouveau et ça fournira l'occasion de discuter la question plus à fond. Je crois donc que nous devrions renvoyer le bill au comité, comme le propose l'honorable député de Témiscouata (M. Langlais). (Applaudissements)

M. l'Orateur demande si les amendements au bill seront lus une deuxième fois.

Des voix: Oui! Non!

Des députés de l'opposition demandent le vote sur l'amendement.

M. l'Orateur donne ordre d'appeler les membres.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Beaudoin, Bray, Dufresne, Duranleau, Faucher, Houde, Lafleur, Langlais, Ouellet, Pellerin, Sauvé, Tétreau, Thériault, 13.

Contre: MM. Authier, Baillargeon, Bergeron, Bernard, Bordeleau, Caron, Charbonneau, Fortier, Galipeault, Gault, Laferté, Lafrenière (Berthier), Lafrenière (Richelieu), Lamoureux, Madden, McDonald, Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreau, Moreault, Morin, Nicol, Perrault, Pilon, Richard, Roy, Saurette, Savoie, Taschereau, 29.

Ainsi, l'amendement est rejeté.

La motion principale étant mise aux voix, la Chambre l'adopte. Les amendements sont lus une deuxième fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Gazoline

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 30 concernant la gazoline soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Véhicules automobiles

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 176 concernant les véhicules automobiles soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté.

L'honorable M. Nicol (Compton) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

MM. Dufresne (Joliette) et Gault (Montréal-Saint-Georges) posent plusieurs questions au ministre.

L'honorable M. Nicol (Compton) explique son projet de loi. La taxe ne sera plus basée sur le nombre de chevaux-vapeur, mais sur le poids du véhicule. D'après ce nouveau système, la taxe sur les automobiles sera moins élevée, ce qui compensera pour la nouvelle taxe sur l'essence.

L'enregistrement des garages fait partie des dispositions de ce bill, afin de faire obstacle à ceux qui, dit-on, font le commerce des voitures volées. Cette licence n'augmentera cependant pas les revenus, étant donné que tout commerçant propriétaire d'un garage sera couvert par la licence de son garage et que la très grande majorité ont cette licence.

Les camions qui ne sortent pas des villes ne seront taxés par la province que de $10. Les villes percevront ensuite le montant qu'elles fixeront. Il y en a 419 dans la province.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande ce que cela représente pour la cité de Montréal.

L'honorable M. Nicol (Compton) ne possède pas ce renseignement, mais il estime que cette mesure versera dans le trésor de Montréal environ $100,000.

M. Duranleau (Montréal-Laurier): Il est vrai que plusieurs propriétaires d'automobiles sont de Montréal, mais il est également vrai que les propriétaires de voitures de la campagne utilisent eux aussi les rues de Montréal, et en général ce sont les automobiles de la campagne qui ont des accidents. Les revenus des taxes ne sont pas répartis; ils vont entièrement à la province, qui s'en sert pour l'entretien des routes de la campagne, et Montréal n'a rien. Quant à la concession que le gouvernement a faite, donnant aux villes le droit de taxer les camions excédant 5,000 livres, je ne crois pas que cela rapporte grand'chose à Montréal. On compte tout au plus 350 camions environ à Montréal et on ne peut leur imposer des taux exorbitants. Le trésorier provincial a dit qu'il faudrait payer pour les routes proportionnellement à l'usage que l'on en fait. Mais qu'en est-il du coût élevé que Montréal paie pour l'entretien de ses rues? Ce principe devrait être valable pour Montréal, comme pour le reste de la province. Les élections du 5 février dernier montrent que Montréal ne se considère pas bien traitée.

L'honorable M. Nicol (Compton) répond que les chemins sont d'un grand avantage pour la ville de Montréal, où les populations des campagnes peuvent aller facilement pour y dépenser des sommes considérables.

M. Tétreau (Montréal-Dorion) est du même avis que le député de Montréal-Laurier (M. Duranleau). Montréal n'est pas satisfaite et le gouvernement a pu s'en rendre compte le 5 février dernier. Le gouvernement devrait laisser au moins Montréal taxer les camions afin de payer les pavages. La propriété est surchargée de taxes dans la métropole.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): Ailleurs au pays, ce sont les provinces elles-mêmes qui perçoivent les taxes et il en est ainsi aux États-Unis. En plus, les grandes villes des États-Unis telles que New York et Boston paient pour les routes à l'extérieur de leur propre territoire, sur une distance pouvant atteindre jusqu'à 40 milles en dehors de leurs villes. Ce sont surtout les propriétaires d'automobiles de la ville qui utilisent les routes de la campagne.

M. Bray (Montréal-Saint-Henri): La ville de Montréal doit payer très cher les policiers qui assurent la circulation et, de plus, elle a perdu d'importants revenus à la suite du remplacement des chevaux par les véhicules automobiles. Pour faire le calcul de ses revenus avec cette nouvelle loi, le gouvernement se base sur une taxe de un cent le gallon alors que, en réalité, l'on imposera deux cents le gallon. Certaines sections du boulevard Gouin traversent des fermes et je connais un cultivateur qui a dû payer $12,0006 en un an pour les chemins. De plus, dans les villes américaines, une taxe double est imposée sur les automobiles, l'une imposée par l'État et l'autre par les municipalités. Montréal a demandé à la législature le pouvoir d'imposer une taxe de $5 par véhicule automobile et la législature a refusé. Une taxe municipale de $5 par auto représenterait un revenu considérable pour Montréal et les propriétaires seraient ainsi soulagés du fardeau de taxes destinées à l'entretien des routes. Les taxes sont devenues très élevées à Montréal si on tient compte non seulement des taxes municipales, mais aussi des taxes scolaires.

Il prétend qu'une licence Ford coûterait $35.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): La position de Montréal n'a rien d'exceptionnel; d'autres villes vivent les mêmes problèmes. Montréal profite davantage qu'ailleurs de la circulation automobile parce qu'elle fait des millions de dollars par année avec les touristes qui voyagent en automobile. L'hôtel Mont-Royal a été construit spécialement pour répondre aux besoins des touristes. La législature ne peut pas faire une loi spécialement pour Montréal.

Le comité, ayant étudié le bill, rapporte progrès.

Ajournement

M. Sauvé (Deux-Montagnes) suggère d'ajourner.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), que la Chambre s'ajourne maintenant à 11 heures demain matin.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Nous allons ajourner à 3 heures demain après-midi.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il est entendu depuis cinq jours que nous commençons les trois séances par jour mardi. Nous allons siéger toute la nuit plutôt que de ne pas respecter cette décision.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) proteste en disant que cela empêchera le comité des comptes publics de poursuivre son enquête sur la Commission des liqueurs.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Le comité des comptes publics siégera à 10 heures, pendant que la Chambre siégera à 11 heures. Nous retarderons la séance de la Chambre, s'il le faut. Le gouvernement est tout à fait raisonnable, puisqu'il ajourne à la demande du chef de l'opposition.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ce n'est pas une faveur, il est minuit.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Mais il n'y a pas de règle qui dit qu'il faut lever la séance à minuit. Ajournement à demain, 11 heures!

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est le premier ministre qui a la manie de l'autocratie. J'ai déjà siégé sous un autre premier ministre et jamais l'opposition n'a été traitée de la sorte.

Il propose par voie d'amendement, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), que la motion en délibération soit amendée en y ajoutant les mots "à 3 heures".

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Beaudoin, Bray, Dufresne, Duranleau, Gault, Houde, Lafleur, Langlais, Pellerin, Sauvé, Smart, Tétreau, 12.

Contre: MM. Baillargeon, Bergeron, Bernard, Bordeleau, Caron, Charbonneau, Fortier, Galipeault, Lafrenière (Berthier), Lamoureux, Madden, McDonald, Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreau, Nicol, Ouellet, Perrault, Pilon, Richard, Saurette, Taschereau, 22.

Ainsi, l'amendement est rejeté.

La motion principale étant mise aux voix, la Chambre l'adopte.

La séance est levée à minuit quinze.

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NOTES

 

1. Selon l'Événement, le ministre aurait employé l'imparfait du subjonctif "attentât". L'emploi de ce mot aurait fait sensation en Chambre et il y aurait eu des mouvements à gauche, du côté de l'opposition.

2. Les règlements de la Chambre ne permettent pas de discussion sur une question de privilège.

3. L'Événement fait observer que M. Sauvé laisse passer cette résolution sans discuter, car il paraît satisfait que le ministre ait invité son sous-ministre, J.-A. Métayer, à venir siéger à ses côtés pendant l'étude de ses crédits. Ce que M. Sauvé a réclamé à plusieurs reprises depuis le début de la session.

4. Pendant que M. Sauvé parlait, note le Quebec Chronicle, un jeune homme, qui avait déjà eu une crise d'épilepsie durant la session, fit entendre une plainte dans les galeries et s'évanouit. On le transporta à l'extérieur de la Chambre. Ce qui interrompit les travaux pendant quelques instants.

5. M. Sauvé, d'après l'Événement, voulait probablement provoquer un vote sur Spencer Wood, mais le gouvernement préférait attendre le retour des députés à la Chambre pour voter: il n'y en avait qu'une trentaine à leurs sièges.

6. Ce montant, fourni par la Gazette, semble étonnant, mais il n'y a pas d'autre source pour l'infirmer ou le confirmer.