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Version finale

16e législature, 1re session
(17 janvier 1923 au 15 mars 1924)

Le vendredi 14 mars 1924

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 11 heures.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté sans amendement les bills suivants:

- bill 23 modifiant le code de procédure civile;

- bill 30 concernant la gazoline;

- bill 140 amendant la loi refondant la loi organique de l'hôpital Notre-Dame de Montréal et ses amendements;

- bill 149 concernant la succession de Joseph Gareau;

- bill 200 modifiant le code municipal relativement à la Cour de magistrat;

- bill 202 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement à la vente des terres publiques propres à la culture.

 

Questions et réponses1:

Département des Pêcheries

M. Smart (Westmount): 1. Quels sont la nature et le personnel de l'organisation qui administre les pêcheries de la province de Québec, pour remplacer celle qu'avait le gouvernement fédéral avant que la province prît la maîtrise des pêcheries?

2. Quelle expérience a acquise chacune de ces personnes dans l'administration des pêcheries commerciales?

3. Se propose-t-on de fonder des fabriques de conserves au moyen des deniers publics, à quelque port sur les rives du fleuve Saint-Laurent, afin de faire l'expérience de la mise en conserve du poisson?

4. Dans l'affirmative, quel poisson le gouvernement se propose-t-il de mettre en conserve?

5. Se propose-t-il de donner ou de prêter ou, par tout autre arrangement, de faire exploiter les fabriques par des particuliers, ou seront-elles exploitées directement comme entreprise publique?

6. Quelle est la capacité de l'espace réservée au poisson dans l'entrepôt frigorifique qui doit être érigé par la Commission du havre de Québec et pour lequel le gouvernement s'est engagé à accorder une somme n'excédant pas $16,000, dans le cas où l'exploitation dudit entrepôt aboutirait à un déficit?

7. La fabrique projetée a-t-elle pour but d'encourager la congélation du poisson par des particuliers le long de la côte de Québec et qui ne possèdent pas actuellement d'entrepôts frigorifiques?

8. Dans le dernier cas, quelle machinerie prépara-t-on ou a-t-on préparée ou préparera-t-on afin de placer ce poisson gelé sur le marché, ou a-t-on fait quelques efforts pour découvrir des débouchés possibles?

9. Le gouvernement fait-il circuler des bateaux de patrouille afin de protéger les pêcheries dans la province de Québec?

10. Dans l'affirmative, quel est le nombre des bateaux de patrouille qui sont employés, quel en est le personnel, quel en est le coût d'entretien?

Si semblable service n'est pas en activité, quelles mesures prend-on pour protéger le territoire du traité sur la rive nord du golfe Saint-Laurent, où on permet aux Américains, en vertu du traité de 1818, de débarquer et de faire sécher du poisson à certaines conditions?

11. Dans le cas de violation des dispositions de ce traité par des citoyens des États-Unis, quelle autorité, si elle en a, possède la province pour faire face à la situation?

L'honorable M. Perrault (Arthabaska): 1 et 2. Le département de la Colonisation a conservé à son service tous les officiers locaux que le gouvernement fédéral avait nommés et qui lui furent recommandés comme très compétents par ce dernier. De plus, il a nommé un inspecteur général qui fut longtemps à l'emploi du département des Pêcheries à Ottawa et qui fut aussi recommandé comme compétent. Il a également nommé un expert en coopératives. Enfin, il a nommé, pour le temps de la dernière saison de pêche, deux classificateurs que leur expérience comme anciens pêcheurs recommandait à ce poste.

3. Il se propose d'aider à la création de telles fabriques.

4. Le homard, le saumon et le maquereau pour commencer.

5. Le département n'exploitera aucune fabrique. Ces fabriques seront exploitées, soit par des particuliers, soit par des compagnies, soit par des coopératives.

6. Une bâtisse spéciale sera construite avec une capacité de un million de livres de poisson.

7. Oui.

8. À l'étude.

9. Non.

10 et 11. Le gouvernement est d'opinion que cette patrouille doit être faite par le gouvernement fédéral qui doit voir à faire observer les traités passés entre le Canada et les autres pays.

Loi de la pêche

L'ordre du jour appelle la deuxième lecture du bill 157 modifiant la loi de la pêche de Québec.

M. l'Orateur déclare que, la Chambre ayant autorisé la présentation du bill 157, il ne lui appartient plus de le déclarer irrégulier et de le mettre de côté; mais il croit de son devoir d'appeler l'attention de la Chambre sur le fait que ce bill a pour objet de décréter que la couronne n'aura plus la pleine propriété de certaine partie du domaine public et qu'il devrait en conséquence être recommandé par le lieutenant-gouverneur conformément aux prescriptions de l'article 447 du règlement.

M. Smart (Westmount) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 157 modifiant la loi de la pêche de Québec soit maintenant lu une deuxième fois.

Il demande d'amender la loi des pêcheries de la province de Québec, en remplaçant les mots "en pleine propriété en faveur de la couronne" par les mots "pour fins de pêche". Par cet amendement, il demande de délivrer les propriétaires riverains de la servitude des trois chaînes établie au long des rivières non navigables et des lacs, et qu'il croit devoir appartenir de droit aux propriétaires riverains.

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) fait un exposé des lois de pêcheries de la province de Québec depuis 1882. Il dit pourquoi le gouvernement ne peut pas rappeler cette loi de 1919 que le député de Westmount demande de rappeler, parce qu'elle est, d'abord, dans l'intérêt public. Ces droits de propriété des pêcheries intérieures sont réservés à la couronne en réalité depuis 1880. Jusqu'en 1882, les pêcheries avaient été administrées par le gouvernement fédéral.

En 1882, la Cour supérieure ayant rendu un jugement dans la cause de la reine vs Robertson, il fut décidé dans cette cause que les rivières non navigables et les lacs appartiennent aux propriétaires riverains jusqu'au milieu de la rivière, et cela conformément à d'autres jugements antérieurs. Lors de ce jugement fut passée la première loi des pêcheries de la province de Québec et par cette loi l'on a commencé à organiser les concessions ou l'autorisation de donner des baux de pêche dans les rivières non navigables et les lacs.

On a amendé les statuts plusieurs fois dans la suite et en 1884 l'on a établi les trois chaînes, c'est-à-dire une bande qui bordait les rivières et les lacs, et cela en faveur de la couronne afin que cette dernière puisse concéder des droits. Pour avoir droit de pêche, il fallait être propriétaire riverain. Cela n'était pas du tout une servitude, mais un droit de propriété de la part de la couronne. Elle pouvait accorder des droits de pêche et des droits de passage pour les colons voisins. Les ministres du temps ont toujours donné instruction de ne pas émettre des billets de location sans réserver ces trois chaînes. Et le fait que le gouvernement accordait un droit de passage sur ces trois chaînes à un propriétaire du lot riverain montre que la propriété appartenait à la couronne.

En 1888, on répéta le statut de 1884 en disant que les propriétaires riverains avaient le droit exclusif des trois chaînes et que les voisins avaient droit de passage. Il en fut ainsi jusqu'à 1899 alors que l'on passa une nouvelle loi et que l'on décida que les provinces avaient la propriété des pêcheries; et le statut de 1899 donnait un effet rétroactif aux droits de pêche. Ce statut a été répété en 1919 à la suite d'une autre cause fameuse qui fut portée jusqu'au Conseil privé et au cours de laquelle il fut évident que la couronne était propriétaire des trois chaînes. Cependant, il y eut des juges dissidents quant à cette propriété et il fut alors décidé par statut que la couronne était en pleine propriété, propriétaire des trois chaînes. On a enlevé des statuts les mots "pour fins de pêche" et on les a remplacés en disant que les trois chaînes étaient en pleine propriété à la couronne. On voulait, par cette loi, enlever tout doute. On désirait aussi empêcher tout conflit à l'avenir.

Cette question est intéressante non seulement pour les droits de pêche, mais pour les forces hydrauliques. Voilà pourquoi l'on ne peut rappeler cette loi de 1919 comme le veut le député de Westmount, parce qu'elle évoque des droits qui datent de 1882.

M. Duranleau (Montréal-Laurier) exprime l'opinion que cette loi devrait être rappelée quand même, vu qu'elle cause des torts considérables à ceux qui se croient raisonnablement propriétaires depuis 1884. Il déclare qu'un jugement du Conseil privé a décidé que les propriétaires riverains étaient propriétaires jusqu'au milieu des lacs et rivières non navigables. C'est afin d'annuler l'effet de ce jugement que le gouvernement en 1919 a fait adopter un statut avec effet rétroactif, disant que les trois chaînes étaient la propriété de la couronne.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) fait l'historique des faits de la cause qui provoqua tout le conflit des pêcheries. Il explique le cas d'un nommé Johnson qui avait acheté un lot d'un colon près du lac Manitou. Cet lot appartenait à un nommé Durocher qui n'avait pas obtenu ses lettres patentes. M. Johnson a vendu le lot à son épouse. Jusqu'à l'an dernier, M. Johnson réalisait que les trois chaînes appartenaient à la couronne. Il voulut même les obtenir du département des Terres, et celui-ci lui a offert de les lui louer à $10 par année, ce qu'il a refusé.

M. Smart (Westmount) croit que la loi actuelle a fait disparaître des droits acquis.

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) propose par voie d'amendement, appuyé par le représentant de Châteauguay (l'honorable M. Mercier fils), que la motion en discussion soit amendée en en retranchant le mot "maintenant" et y ajoutant les mots "dans six mois".

L'amendement est adopté sur division. La motion principale ainsi amendée est adoptée.

Charte de Bagotville

M. Baillargeon (Frontenac) propose que l'ordre du jour appelant la prise en considération en comité général du bill 103 amendant la charte de la ville de Bagotville soit révoqué et que le bill soit retiré.

Adopté.

Ville de Barkmere

M. Ricard (Saint-Maurice) propose que l'ordre du jour appelant la prise en considération en comité général du bill 55 constituant en corporation la ville de Barkmere soit révoqué et que le bill soit retiré.

Adopté.

Pénalité pour émission et vente de valeurs

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 40 établissant une pénalité pour l'émission et la vente, en certains cas, d'actions, d'obligations et autres valeurs soit maintenant lu une deuxième fois.

Il explique que cette loi est corollaire de celle adoptée jeudi. Le gouvernement désire que toutes les compagnies à chartes fédérales qui font affaire dans cette province pour la vente des valeurs, excepté celles dont les actions sont cotées à la Bourse, devront, au début de leurs opérations, faire un rapport au secrétaire provincial, sinon le bill pourvoit à une amende maximum de $1,000.

Adopté sur division. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie l'article 1 qui se lit comme suit:

"1. L'article suivant est inséré dans les statuts refondus, 1909, après l'article 6119j, tel qu'édicté par la loi 14 George V, chapitre (insérer ici le no du chapitre du bill no 37), section 1:

"6119k. Toute compagnie ou corporation, quels que soient le temps, le mode et le lieu de sa constitution en corporation, et quelle que soit l'autorité qui l'a constituée, soit dans la province ou en dehors de la province, qui fait, pour elle-même ou pour une autre compagnie ou corporation, et toute personne qui fait pour une compagnie ou corporation, une ou plusieurs des opérations visées par les articles 6119g et 6119h, sans que les renseignements mentionnés dans ces articles aient été transmis au secrétaire de la province, de la manière y indiquée, est passible, pour chaque infraction, d'une amende n'excédant pas mille dollars; et, à défaut de paiement de l'amende, la personne ou, dans le cas d'une compagnie ou corporation, les officiers ou les directeurs de la compagnie ou corporation qui, par leur vote, ont pu contribuer à la commission de l'infraction par la compagnie ou la corporation, sont passibles d'un emprisonnement n'excédant pas trois mois."

Cet article est amendé. Les mots "constituée en corporation après le (insérer ici la date de l'entrée en vigueur du bill no 37)" sont insérés devant les mots "quels que soient le mode et le lieu".

Le mot "telle" est inséré devant le mot "compagnie" dans le membre de phrase "et toute personne qui fait pour une compagnie ou corporation". La proposition "et qui ne sont pas comprises dans le paragraphe 3 de l'article 6119f" est ajoutée devant "sans que les renseignements mentionnés dans ces articles". Et, dans ce dernier groupe de mots, "dans ces articles" est remplacé par "dans les articles 6119g et 6119h".

L'article ainsi amendé est adopté.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a modifié. Les amendements sont lus deux fois et adoptés.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Écoles protestantes et taxe scolaire de Verdun

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 114 concernant les écoles protestantes et la taxe scolaire dans la cité de Verdun.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie les articles suivants qui se lisent comme suit:

"1. La présente taxe de deux pour cent actuellement prélevée sur les biens immeubles des corporations et des compagnies constituées en corporation de ladite cité, sera maintenue, nonobstant les dispositions de l'article 2891 des statuts refondus de Québec, 1909, ladite taxe devant être répartie tel que pourvu par l'article 2891 des statuts refondus de Québec, 1909, et la loi 13 George V, chapitre 46.

"2. Nonobstant les dispositions des articles 2891 et 2892 des statuts refondus, 1909, ou de toute autre loi contraire ou les remplaçant, la municipalité de la cité de Verdun imposera et percevra la taxe mentionnée dans la section précédente, et aussi une taxe d'un pour cent, pour les fins scolaires, sur la propriété immobilière dans la cité de Verdun, sauf celle qui est mentionnée dans la section précédente et la propriété autrement exemptée par la loi, et imposera aussi, sur tous les tenanciers dans la cité de Verdun, et percevra une taxe pour les fins scolaires, de cinq pour cent sur les revenus imposables des propriétés occupées par eux, et divisera toutes ces taxes entre les commissaires d'écoles catholiques et le bureau des syndics d'écoles protestants de ladite cité de Verdun, en proportion du nombre des enfants qui fréquentent les écoles sous le contrôle de chacune desdites commissions scolaires, de la même manière que les taxes neutres sont divisées en vertu des dispositions des articles 2891 et 2789 des statuts refondus de Québec, 1909.

"3. Toutes les représentations d'amateurs données par les élèves desdites écoles et leurs amis, qui ne reçoivent rien pour leurs services, seront exemptées du paiement de la taxe spéciale imposée en vertu du chapitre second du titre onze des statuts refondus de Québec, 1909, et de 9 George V, chapitre 61, et de leurs amendements.

"4. Le bureau des syndics d'écoles protestants de la cité de Verdun est, par la présente loi, autorisé à exproprier pour les fins scolaires le terrain bâti ou vacant situé dans les limites de ladite cité."

M. Lafleur (Montréal-Verdun): Comme on l'a si bien expliqué devant le comité des bills publics à maintes reprises, la commission scolaire protestante de Verdun, dans le comté que j'ai l'honneur de représenter, est dans une position très critique et je pourrais même dire dans une position désespérée. À moins qu'une solution immédiate ne soit prise, la commission scolaire protestante de Verdun sera forcée de fermer ses écoles et à peu près 3,000 enfants seront dans l'impossibilité de recevoir l'instruction à laquelle ils ont droit.

Ce bill, tel que présenté, demande de prélever une taxe de 1% sur tous les propriétaires, catholiques comme protestants, et une taxe de 5% sur tous les locataires, d'après le loyer qu'ils paient. Cette taxe, dit le bill, devra être collectée par la municipalité de Verdun et sera divisée également entre la commission scolaire catholique et la commission scolaire protestante, ce qui est contraire aux dispositions de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Actuellement, nous, catholiques, payons une taxe de 70 cents par 100 piastres, exactement la même taxe que les contribuables de Montréal paient, tandis que les protestants paient 2 par cent. Cette différence est due au fait que les propriétaires protestants sont en minorité. Maintenant, si la taxe sur les propriétaires est augmentée et si nous imposons une taxe sur les locataires, ce sera de nature à nuire à la construction dans Verdun et en même temps à empêcher les gens d'y venir demeurer, même à chasser les locataires que nous avons actuellement.

J'espère que cette Chambre trouvera un remède à l'état de choses actuel. À mon point de vue, je crois que, un jour ou l'autre, les diverses commissions scolaires de l'île de Montréal pourront se fusionner pour se protéger entre elles. Mais, en attendant, la situation de la commission scolaire protestante de Verdun reste désespérée, et je me demande si le gouvernement de cette province ne pourrait pas, dans les conditions actuelles et dans l'intervalle, venir à son secours, comme il vient de le faire pour l'École technique des Trois-Rivières et pour d'autres institutions, afin d'empêcher la liquidation de cette commission scolaire et de permettre à 3,000 enfants de cette ville de continuer de s'instruire.

Les articles sont laissés en suspens.

Le comité, ayant étudié le bill, rapporte progrès.

Amendements aux statuts refondus et au code municipal

L'honorable M. Nicol (Compton) propose que l'ordre du jour appelant la deuxième lecture du bill 27 amendant les statuts refondus, 1909, et le code municipal relativement aux affaires municipales soit révoqué et que le bill soit retiré.

Adopté.

École technique de Hull

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 205 modifiant la loi constituant en corporation l'École technique de Hull.

Adopté.

Il informe alors la Chambre que Son Honneur le lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de résolutions et qu'il le recommande à sa considération.

 

En comité:

L'honorable M. Nicol (Compton) propose: 1. Que la corporation de l'École technique de Hull soit autorisée à contracter un ou des emprunts n'excédant pas en tout trois cent soixante-cinq mille piastres au lieu de la somme de deux cent cinquante mille piastres qu'elle a été autorisée à contracter par la section 5 de la loi 9 George V, chapitre 42, telle que modifiée par la loi 12 George V, chapitre 53, pour les fins mentionnées dans ladite section 5, au moyen d'obligations payables en la manière, aux temps, aux endroits et aux taux d'intérêt qu'elle déterminera, et garanties, tant en ce qui regarde le capital que l'intérêt, par le gouvernement de la province.

Adopté.

2. Que le lieutenant-gouverneur en conseil soit autorisé à garantir le paiement du capital et de l'intérêt du ou des emprunts n'excédant pas en tout trois cent soixante-cinq mille piastres, mentionnés dans la résolution précédente, aux conditions qu'il trouvera convenables.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté deux résolutions, lesquelles sont lues une première fois, une deuxième fois sur division et adoptées sur division.

L'honorable M. Nicol (Compton) demande la permission de présenter le bill 205 modifiant la loi constituant en corporation l'École technique de Hull.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

L'honorable M. Nicol (Compton) propose que le bill soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté sur division.

L'honorable M. Nicol (Compton) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Écoles protestantes et taxe scolaire de Verdun

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité général pour étudier le bill 114 concernant les écoles protestantes et la taxe scolaire dans la cité de Verdun.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie les articles suivants qui se lisent comme suit:

"1. La présente taxe de deux pour cent actuellement prélevée sur les biens immeubles des corporations et des compagnies constituées en corporation de ladite cité, sera maintenue, nonobstant les dispositions de l'article 2891 des statuts refondus de Québec, 1909, ladite taxe devant être répartie tel que pourvu par l'article 2891 des statuts refondus de Québec, 1909, et la loi 13 George V, chapitre 46.

"2. Nonobstant les dispositions des articles 2891 et 2892 des statuts refondus, 1909, ou de toute autre loi contraire ou les remplaçant, la municipalité de la cité de Verdun imposera et percevra la taxe mentionnée dans la section précédente, et aussi une taxe d'un pour cent, pour les fins scolaires, sur la propriété immobilière dans la cité de Verdun, sauf celle qui est mentionnée dans la section précédente et la propriété autrement exemptée par la loi, et imposera aussi, sur tous les tenanciers dans la cité de Verdun, et percevra une taxe pour les fins scolaires, de cinq pour cent sur les revenus imposables des propriétés occupées par eux, et divisera toutes ces taxes entre les commissaires d'écoles catholiques et le bureau des syndics d'écoles protestants de ladite cité de Verdun, en proportion du nombre des enfants qui fréquentent les écoles sous le contrôle de chacune desdites commissions scolaires, de la même manière que les taxes neutres sont divisées en vertu des dispositions des articles 2891 et 2789 des statuts refondus de Québec, 1909.

"3. Toutes les représentations d'amateurs données par les élèves desdites écoles et leurs amis, qui ne reçoivent rien pour leurs services, seront exemptées du paiement de la taxe spéciale imposée en vertu du chapitre second du titre onze des statuts refondus de Québec, 1909, et de 9 George V, chapitre 61, et de leurs amendements.

"4. Le bureau des syndics d'écoles protestants de la cité de Verdun est, par la présente loi, autorisé à exproprier pour les fins scolaires le terrain bâti ou vacant situé dans les limites de ladite cité."

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): J'ai écouté attentivement le député de Verdun (M. Lafleur). Je m'accorde avec mon ami pour reconnaître que les écoles protestantes de Verdun sont dans une situation déplorable. Je ne crois pas, cependant, que nous puissions les aider financièrement. La situation ne sera contournée, à bien dire, que quand toutes les corporations scolaires de Montréal seront sous la direction d'une grande commission scolaire. Il me semble donc que le remède est dans la fusion. En attendant, je propose qu'il y ait entente entre les commissions de Westmount et d'Outremont pour aider autant que possible celle de Verdun qui est, en réalité, dans une très mauvaise situation. Je propose en amendement au bill que la commission scolaire protestante de Montréal soit autorisée à s'annexer la commission scolaire de Verdun.

M. Smart (Westmount) s'oppose à cet amendement. Il demande au premier ministre si le comité protestant du Conseil de l'instruction publique lui a fait des propositions concernant la situation de Verdun. Vu que le comité s'est attaqué avec tant d'empressement aux problèmes de Montréal, il aurait pu faire quelque chose pour Verdun.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Je n'ai reçu aucune proposition.

M. Smart (Westmount): À mon avis, la seule raison d'être du comité protestant, s'il en est une, c'est de travailler pour les divers centres protestants et il aurait au moins pu faire une analyse de la situation de Verdun afin d'éviter les problèmes qu'ils ont actuellement.

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis): La situation est déplorable à Verdun et, dans les circonstances, l'amendement semble être la seule solution.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): Les protestants de Montréal ont toujours été très libéraux en matière d'éducation, mais il faut se rappeler que ce serait aller au-delà de leurs ressources que de leur imposer ce fardeau. Si les écoles de Verdun n'avaient pas été gérées de façon extravagante dans bien des cas, elles ne seraient pas dans cette situation aujourd'hui. Je ne sais pas si les commissaires protestants de Montréal sont favorables à cet amendement, mais je ne crois pas que la législature puisse leur demander cela. Il faut agir immédiatement, parce que les intérêts sur les obligations n'ont pas encore été versés et que les écoles pourraient être saisies. Pourquoi le gouvernement ne prêterait-il pas de l'argent à la commission de Verdun?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Si l'on commence cela, Dieu seul sait comment cela finira.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): C'est ce que vous faites aux Trois-Rivières et à Hull pour les écoles techniques. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement n'avancerait pas un peu d'argent sous forme de prêt.

L'honorable M. Nicol (Compton): Le rôle du comité protestant du Conseil de l'instruction publique n'est pas d'intervenir dans les affaires d'une commission scolaire, mais d'assurer une supervision générale, uniquement dans le domaine de l'éducation, dans les programmes par exemple.

M. Smart (Westmount): Il est intervenu à Montréal.

L'honorable M. Nicol (Compton): Il n'est pas intervenu sur une question financière, mais sur une question qui concerne l'éducation, non seulement à Montréal, mais dans toute la province. Cette question-ci est différente. La commission de Verdun se retrouve dans une situation grave et elle est venue ici pour nous demander de l'aide. On nous a blâmés durant toute la session à cause des taxes. En ce qui concerne l'instruction publique, nous constatons que ce sont les commissions scolaires qui ont la responsabilité de taxer et le gouvernement n'a pas le pouvoir d'imposer des taxes pour les écoles. Il dépense de l'argent pour les écoles, mais l'argent provient d'autres sources.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): Surtout de Montréal.

L'honorable M. Nicol (Compton): Pas de Montréal tant que cela. La commission scolaire de Verdun a des difficultés, pour quelle raison, je ne le sais pas, mais le député de Saint-Georges (M. Gault) nous en donne une. Il dit que c'est parce que l'on a fait des extravagances. Si c'est parce que la population de Verdun s'est montrée extravagante, elle seule doit en porter le blâme. Il existe une loi générale bien connue qui stipule que les écoles doivent être entretenues avec les taxes locales et la population de Verdun devait bien savoir qu'elle serait obligée de payer pour faire construire ses écoles et en assurer le fonctionnement.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): Lorsque j'ai parlé d'extravagances, je voulais dire qu'elle vivait au-dessus de ses moyens.

L'honorable M. Nicol (Compton): C'est une bonne définition du mot "extravagance". Ces gens viennent ici pour avoir de l'argent. Nous leur donnons le pouvoir de fusionner avec la commission de Montréal. Je crois qu'il devrait y avoir une grande corporation scolaire à Montréal pour la minorité protestante de l'île de Montréal. Verdun fait presque partie de Montréal, sauf que la taxe des neutres provenant des industries devrait revenir à Verdun, alors qu'elle est entièrement versée à Montréal. Le député de Saint-Georges (M.Gault) propose que nous leur prêtions de l'argent. On pourrait prendre à notre charge toutes les corporations scolaires et leur prêter de l'argent, mais cela ne serait pas une bonne façon de gérer les affaires publiques. On ne peut faire exception pour une municipalité. Nous n'avons pas le droit de prendre l'argent d'une municipalité et de le donner à une autre.

Les articles 1 à 3 du bill sont remplacés par le suivant:

"1. Sur demande conjointe de la corporation des syndics d'écoles protestants de Verdun et du bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal, le lieutenant-gouverneur en conseil peut, par proclamation, décréter l'annexion, pour les fins scolaires protestantes seulement, de la municipalité scolaire de Verdun à la municipalité scolaire de Montréal et la fusion de la corporation des syndics d'écoles protestants de Verdun au bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal; à compter de la date mentionnée dans ladite proclamation, ladite corporation des syndics d'écoles protestants cesse d'exister et le bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal est substitué à ladite corporation des syndics, en exerce tous les pouvoirs et en assume toutes les obligations.

"À compter de ladite date, le bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal est autorisé à imposer, sur les immeubles possédés par les propriétaires protestants de la cité de Verdun, une taxe scolaire n'excédant pas deux pour cent. Cette taxe sera prélevée de la même manière que l'est la taxe scolaire pour Montréal, sauf que le trésorier de la cité de Verdun est substitué au greffier de la cité de Montréal pour son prélèvement et sa remise audit bureau; ledit trésorier étant tenu de se conformer aux instructions dudit bureau à ce sujet.

"Les commissaires d'écoles catholiques romains de Verdun doivent remettre au bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal la part du produit des cotisations imposées et perçues sur les corporations et compagnies, suivant les dispositions des articles 2891 et suivants des statuts refondus, 1909.

"Les commissaires d'écoles de la cité de Westmount, sur autorisation du surintendant de l'instruction publique, pourront attribuer la somme de deniers qu'ils jugeront à propos de payer aux syndics d'écoles protestants de Verdun pour les aider à équilibrer leur budget pour la présente année courante.

"Le bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal peut également, à même les fonds à sa disposition, remettre aux syndics d'écoles protestants de Verdun, telle somme de deniers qu'il juge nécessaire pour les aider à équilibrer leur budget pour la présente année courante."

L'article ainsi amendé est adopté.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a modifié. L'amendement est lu une première fois, une deuxième fois sur division et adopté sur division.

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Demande de documents:

Loi 9 George V, chapitre 31, sous-sections a, b et c

M. Smart (Westmount) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de tous rapports ou recommandations de la part de tout membre du gouvernement, des officiers des départements ou de toute autre personne ou personnes touchant la loi 9 George V, chapitre 31, sous-sections a, b et c, et avant l'adoption de ladite loi, en 1919, et subséquemment à icelle, jusqu'à cette date; aussi toutes correspondances, tous télégrammes ou autres documents se rapportant à ladite loi, de quelque manière quelconque, depuis qu'elle a été sanctionnée.

Adopté.

Hôpital général du district de Bedford

M. Bullock (Shefford) propose, appuyé par le représentant de Portneuf (M. Hamel), que, vu que le bill 137 amendant la charte de l'Hôpital général du district de Bedford a pour objet de favoriser l'expansion d'oeuvres de bienfaisance publique, tous les droits que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

La séance est levée à 1 heure.

 

Deuxième séance du 14 mars 1924

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 3 heures.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Directeur de l'enseignement protestant

L'honorable M. David (Terrebonne) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 6 concernant le directeur de l'enseignement protestant dans la province soit maintenant lu une deuxième fois.

L'honorable M. David (Terrebonne): Par ce bill, l'on nomme le secrétaire du comité protestant du Conseil de l'instruction publique directeur de l'enseignement protestant dans la province. Le but de la loi est de donner à ce haut fonctionnaire toute l'influence et l'autorité nécessaires pour trancher les difficultés qui surgissent dans le domaine des écoles protestantes. Il est appelé aussi, chaque année, à représenter la province à une foule de manifestations éducationnelles, et ce titre lui donnera plus de prestige. Le docteur Parmelee continuera, toutefois, d'être sous le contrôle du surintendant du Conseil de l'instruction publique.

M. Patenaude (Jacques-Cartier): Rien de changé dans ses fonctions?

L'honorable M. David (Terrebonne): Absolument rien.

M. Smart (Westmount) dit un mot d'éloge à l'adresse du M. Parmelee et félicite le gouvernement d'avoir proposé cette nomination.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie l'article 1 qui se lit comme suit:

"1. Les statuts refondus, 1909, sont modifiés en y insérant, après l'article 2546, le suivant:

"2546a. Le secrétaire du comité protestant est en même temps, sous la direction et le contrôle du surintendant, directeur de l'enseignement protestant dans la province.

"Ses pouvoirs et devoirs sont déterminés par le lieutenant-gouverneur en conseil."

Cet article est amendé et se lit désormais comme suit:

"1. Les statuts refondus, 1909, sont modifiés en y insérant, après l'article 2544, le suivant:

"2544a. Le secrétaire protestant du département de l'Instruction publique est en même temps, sous la direction et le contrôle du surintendant, directeur de l'enseignement protestant dans la province.

"Ses pouvoirs et devoirs sont déterminés par le lieutenant-gouverneur en conseil."

L'article ainsi amendé est adopté.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a modifié. L'amendement est lu deux fois et adopté.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Demande de documents:

Lot de M. Pierre Landry, canton Nouvelle, Bonaventure

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Mercier (M. L'Archevêque), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de toute correspondance, télégramme, requête, échangés entre le gouvernement ou aucun de ses membres et toutes personnes au sujet du lot no 8, appartenant à M. Pierre Landry, dans le troisième rang du canton Nouvelle, Bonaventure, et du rapport fait par M. Pierre Cyr à propos de ce lot.

Adopté.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté sans amendement les bills suivants:

- bill 12 amendant les statuts refondus, 1909, et la loi des cités et villes, 1922, relativement à la Commission des services publics de Québec;

- bill 39 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement aux agents généraux de la province;

- bill 44 accordant certains pouvoirs à la Commission des eaux courantes de Québec, relativement à l'emmagasinement des eaux de la rivière Sainte-Anne (de-la-Pérade);

- bill 197 concernant les colporteurs.

Chemin de fer entre la station de Charette et Trois-Rivières

M. Ricard (Saint-Maurice) propose, appuyé par le représentant de Rouville (M. Bernard), que, dans l'intérêt des cultivateurs du district de Trois-Rivières et des cités de Grand'Mère, Shawinigan-Falls et Trois-Rivières, cette Chambre demande à la Commission des chemins de fer nationaux qu'une ligne de chemin de fer soit construite entre la station de Charette et la cité de Trois-Rivières, de manière à relier cette dernière ville au Canadien National.

Trois-Rivières n'est pas relié aux chemins de fer nationaux et cependant c'est le port de mer de notre région. Il est urgent pour la colonisation, pour l'agriculture, pour le commerce et l'industrie qu'il y ait une ligne entre la région de Saint-Maurice et Trois-Rivières. Cette ligne aurait une longueur d'à peu près 25 milles. Je crois que nous devrions réclamer la construction de ce chemin de fer qui réunirait la cité de Laviolette à la station de Charette, sur le C. N. R. La chambre de commerce de Trois-Rivières approuve ce projet, et j'espère que l'Assemblée législative exprimera le voeu que nous faisons pour qu'un chemin de fer soit bâti.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): La province de Québec s'est toujours montrée des plus généreuses en ce qui regarde les chemins de fer. On a vu que, au lendemain même de la guerre, elle ne reculait pas dans l'entreprise du chemin de fer du Témiscamingue et qu'elle accordait de généreux subsides pour le chemin de ceinture du lac Saint-Jean, projet qui se réalisera bientôt, je l'espère. Le député de Saint-Maurice peut donc être sûr que, en autant que le gouvernement de la province est concerné, il aura l'appui de tous ceux qui ont à coeur le développement de sa région. Nous aiderons à la construction de ce chemin de fer quand le moment sera venu. Cela, bien entendu, en autant que les membres de l'opposition ne nous forceront pas davantage à donner les noms des fournisseurs de la Commission des liqueurs, ce qui empêcherait cette dernière de nous fournir les revenus nécessaires pour aider la colonisation, l'agriculture, la voirie et les chemins de fer.

La proposition est adoptée.

 

Demande de documents:

Prolongement de voies ferrées du Canadien Pacifique

M. Authier (Abitibi) propose, appuyé par le représentant de Hull (M. Lafond), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de toute correspondance échangée, depuis 1922, entre le gouvernement et la Compagnie du chemin de fer Canadien du Pacifique ou les administrateurs des chemins de fer nationaux du Canada, au sujet de la construction projetée d'embranchements ou de prolongements aux voies ferrées actuelles dans la province.

Je désire2 me renseigner sur les projets d'extension des chemins de fer dans notre province. Si l'on songe à tout l'intérêt que cette question comporte pour les régions du nord-ouest de Québec, on admettra que cette curiosité est de bon aloi chez le député de l'Abitibi. La question des chemins de fer a fait couler bien des flots d'encre et d'éloquence en ces dernières années. Mais je ne prendrai pas ici prétexte de ma motion pour, à mon tour, discourir longuement. Je sais trop combien les heures de cette Assemblée sont précieuses en ces derniers jours de la session. Je veux seulement, si vous me le permettez, M. l'Orateur, souligner rapidement quelques faits essentiels, dont la considération me paraît urgente.

La province de Québec a besoin de chemins de fer nouveaux pour mettre en production ses immenses ressources naturelles inexploitées, et elle a droit de demander au gouvernement fédéral de lui en construire. Il est opportun de rappeler ces vérités au moment où les administrateurs du réseau d'État proposent un vaste programme de constructions nouvelles. Il importe de réclamer hautement et clairement notre part de chemins de fer nationaux et, de plus, la compagnie du Pacifique Canadien doit être invitée à prolonger sans délai ses lignes du Témiscamingue et du nord de Montréal.

Nous avons tous été frappés de la place que les questions ferroviaires ont prise dans la politique canadienne à l'ouverture de la présente session fédérale. S'il faut en croire les journaux, et il faut souvent les croire, le chef du Parti progressiste, qui détient la balance du pouvoir à Ottawa, veut exiger la construction de nouvelles voies ferrées dans l'Ouest, et en particulier l'achèvement du chemin de fer de la baie d'Hudson. Le discours du trône annonce un projet de loi à ce sujet. Ce sera sans doute la réédition du bill de l'an dernier, qui proposait d'autoriser l'administration des chemins de fer nationaux à construire un millier de milles de voies nouvelles dans les provinces des Prairies.

Ce projet, comme on le sait, fut rejeté par le Sénat, et ses adversaires pensent qu'il subira le même sort cette année. C'est possible, mais cela n'est pas certain. Il se peut aussi que le Sénat se rende à l'invitation de l'honorable M. Pardee, qui demandait à ses collègues, dans son discours sur l'adresse, d'adopter une manière de voir plus libérale. L'Ouest est en bloc pour l'extension de ses voies ferrées, qui lui assurera une augmentation de population et de richesses. La législature de la Saskatchewan a passé récemment une résolution demandant l'adoption du programme de l'an dernier et la construction immédiate de la ligne de la baie d'Hudson.

Au Manitoba, une association fort active, ayant à sa tête le premier ministre Bracken, agite l'opinion publique en faveur du même projet. Il n'y a aucun doute, pour quiconque sait prévoir quelques années à l'avance, que l'Ouest réussira un jour à imposer ses vues. D'ailleurs, l'Ouest a plus raison qu'on ne le pense généralement. Au lieu de vouloir contrecarrer son progrès, nous devrions chercher à nous y associer. Loin de s'opposer à la construction de chemins de fer nouveaux dans les provinces-soeurs, Québec doit plutôt réclamer sa part de voies ferrées de l'État, une part proportionnée à son importance, à l'étendue de son territoire, à la richesse de ses ressources naturelles qu'il est dans l'intérêt général du Canada d'exploiter: terres, mines et forêts.

Ce serait une grave erreur de notre part d'adopter une attitude passive de laisser-faire, de regarder faire les autres, et il est aussi mal de prendre une attitude d'opposition, provocatrice, de représailles. Il y a de nos gens qui sont tellement énervés par les déficits ferroviaires des dernières années qu'ils ne veulent plus entendre parler de constructions de chemins de fer nouveaux. Si nous adoptons cette opinion maladive, nous nous exposons à ce que nos voisins de l'Ouest nous disent un jour: "Eh bien, on n'en construira plus de chemins de fer chez vous, puisque vous y voyez plus de mal que de bien; mais nous en avons besoin dans l'Ouest, on nous a promis d'en construire une fois la guerre finie, et nous exigeons la réalisation de ces promesses."

L'Ouest, déjà puissant au Parlement fédéral, commandera encore davantage après la prochaine élection qui doit augmenter de 12 le nombre de ses députés. Je le répète donc, tous ceux qui savent prévoir doivent admettre une reprise dans la construction des voies ferrées au Canada, dans un avenir assez prochain. Et alors se pose encore une fois cette importante question pour nous: Quelle sera la part de la province de Québec? Quelle doit être cette part?

Je suis de ceux qui croient que l'on doit revenir au programme de Laurier et de Gouin: relier le Transcontinental à Montréal et à Ottawa d'un côté, à la baie James, de l'autre; relier le Témiscamingue à l'Abitibi; compléter la ceinture du lac Saint-Jean; prolonger les lignes actuelles du Pacifique Canadien dans le nord de Montréal; assurer un bon service de transport dans la Gaspésie et le développement de l'arrière-partie de Rimouski, Matane et Gaspé.

Je laisserai à d'autres de faire valoir le mérite des projets de chemins de fer au lac Saint-Jean et dans la Gaspésie, mais qu'on me permette de dire quelques mots au sujet de ceux qu'intéresse le nord-ouest de la province.

Sir Wilfrid Laurier n'avait pas conçu le Transcontinental comme un grand tronc solitaire de Winnipeg à la mer. Il le destinait à être le centre d'un réseau qui développerait la riche zone argileuse du nord d'Ontario et de Québec, et qui serait rattaché aux principales villes du pays: Toronto, Ottawa, Montréal. Dans Ontario, ce programme a été assez bien exécuté. Des voies ferrées relient le Transcontinental à North Bay et à Toronto, à Sault-Sainte-Marie, à Fort William et à Port Arthur, et par l'accourci du lac Long construit l'an dernier à tous les points de la ligne principale du Canadien Nord.

Dans notre province, on devait en 1914 commencer la construction de la ligne de Montréal à la baie James. Le Parlement fédéral avait voté un million pour les travaux préliminaires. Le gouvernement acheta, je crois, les plans de la North Railway Company, qui avait fait explorer tout le parcours. La guerre arrêta l'entreprise. Depuis, la déconfiture du Canadien Nord et du Grand Tronc Pacifique et l'achat du Grand Tronc vinrent compliquer la question des chemins de fer. Mais il faudra bien, un jour ou l'autre, en revenir au programme de Laurier, qui était fondé sur la géographie physique et économique de notre province. Ne semble-t-il pas que c'est le moment de ramener ce programme à l'ordre du jour, alors que le Parti progressiste veut forcer le gouvernement à reprendre les entreprises interrompues par la guerre?

Il y a une autre raison qui milite fortement en faveur de nos réclamations. Dans la formation du réseau national actuel, la province de Québec en a bien payé sa part et elle a assumé sa part pleine et entière de responsabilités en proportion de sa population et de sa richesse. Elle est loin, cependant, d'avoir reçu une part proportionnelle de voies ferrées. Les provinces de l'Ouest s'étaient bâti un système très étendu de chemins de fer en garantissant les obligations du Canadien Northern. En achetant celui-ci, le gouvernement fédéral a libéré les provinces de l'Ouest de leurs endossements, qu'il a portés à la charge de tout le pays. Québec, qui compte plus de 25% de la population et de la richesse du Canada, s'est trouvé obéré dans cette proportion du coût et du maintien des voies ferrées qui servent au développement des Prairies et de la côte du Pacifique.

D'après l'annuaire statistique, il y avait au Canada, en 19213, 40,000 milles de chemins de fer. Ontario en possédait 11,001 milles, Québec 4,941, le Manitoba 4,403, la Saskatchewan 6,220, l'Alberta 4,474 et la Colombie anglaise 4,325. Ainsi Québec, qui compte plus de 30% de la superficie des neuf provinces, plus de 25% de la population et de la richesse du pays, n'a que 12% des voies ferrées canadiennes. Notre province n'a pas la moitié des voies ferrées d'Ontario, dont la population est à peine plus élevée et dont le territoire est moins étendu que le nôtre de 40%.

Les provinces de l'Ouest, dont la population totale ne dépasse guère celle de Québec, ont quatre fois plus de chemins de fer. Nous avons donc les meilleures raisons du monde de demander au gouvernement fédéral de compléter notre système de chemins de fer selon le programme indiqué naguère par Sir Wilfrid Laurier et Sir Lomer Gouin. Nous devons former le voeu que les représentants de Québec au Parlement canadien sachent faire entendre nos justes réclamations et faire triompher nos droits.

Si nous voulons ouvrir des champs nouveaux au travail, à l'industrie des nôtres, il faut de nouvelles voies de communication. Une étude attentive de la géographie et des ressources de la province nous convainc que la construction de 1,000 à 1,200 milles de voies ferrées, bien localisées, permettrait la fondation de quelque 15 ou 20 villes industrielles et de centaines de paroisses agricoles. Est-il trop tôt pour dresser un tel programme de développement général de la province? Je ne le crois pas. Nos explorations sont maintenant assez avancées; nous connaissons assez bien les terres, les forêts, les perspectives minières et les possibilités hydrauliques de la province pour préparer un plan d'ensemble de leur mise en valeur.

Dans l'ouest de Québec, il est évident qu'il faut rattacher le Témiscamingue à l'Abitibi par le prolongement du Canadien Pacifique jusqu'au Transcontinental. Cette même ligne continuera vers le nord dans le territoire qui s'étend entre les rivières Harricana et Turgeon. Nous ne voyons pas pourquoi la compagnie du Pacifique hésiterait. Ce territoire offre partout les plus riches promesses d'avenir. On y trouve les mines de Boischatel, de Rouyn et de Destor, les terres du Témiscamingue supérieur, puis de l'Abitibi proprement dit, dans le voisinage de Macamic, c'est-à-dire les plus belles terres de la province.

Un autre prolongement des lignes de la même compagnie de Mont-Laurier et de Maniwaki devrait se rendre au grand lac Victoria où il se souderait au chemin de fer qui doit être construit du Transcontinental vers ce point. Il y a dans le bassin de ce lac Victoria et de l'Ottawa Supérieur des milliers de milles carrés de forêts vierges, dont l'exploitation ne sera possible qu'après la construction de ces chemins de fer projetés. Les plus belles forêts de la province sont là, exposées à être détruites par le feu ou parvenues à la maturité dans certains endroits, sans qu'on puisse rien faire pour utiliser leurs produits, faute de chemins de fer.

Au nord du Transcontinental, deux magnifiques vallées descendent doucement vers la baie James: celle de l'Harricana et celle de la Nottaway. L'Harricana est une rivière de la taille du Saint-Maurice, la Nottaway est aussi puissante que le Saguenay. Mais, au lieu de drainer des pays de montagnes comme le Saint-Maurice et le Saguenay, ces rivières du nord coulent à travers des plaines argileuses légèrement ondulées. Un chemin de fer dans chacune de ces deux vallées permettrait la fondation de centaines de paroisses agricoles. Il amènerait la fondation de fabriques de papier, qui utiliseraient les pouvoirs hydrauliques très puissants de ces rivières et le bois d'épinette de qualité supérieure qui abonde sur leurs bords.

Avec des moyens de communication, on peut prévoir l'établissement de papeteries au lac Victoria, sur l'Harricana, la Bell, la Nottaway, la Rupert. À neuf milles à peine au nord de Senneterre et d'Amos, on trouve sur la Nottaway une chaîne de grands lacs dont la superficie totale excède celle du lac Saint-Jean ou du lac Abitibi, qui pourtant a 350 milles de superficie. Là se trouve le confluent de la Bell, de la Chibougamau et de plusieurs rivières ayant un bassin de drainage total d'une vingtaine de mille milles carrés. Il y a des pouvoirs hydrauliques dans le voisinage et les terres d'alentour sont propres à l'agriculture.

Voilà un point stratégique où l'administration des chemins de fer nationaux devrait pousser un embranchement sans tarder, en vue de le continuer plus tard à la baie James, pour y arriver au moment où se terminera la ligne de l'Ouest à la baie d'Hudson. En effet, la construction de ce chemin de l'Ouest à la baie d'Hudson appelle celle d'une voie ferrée correspondante du côté de Québec.

Sir Lomer Gouin l'avait démontré en cette Chambre quand il avait proposé, en 1920, de subventionner le North Railway. On se rappelle ce projet de relier Québec et Montréal à la baie James. L'une des raisons que l'on faisait valoir était que cette route ferait partie d'un système servant à l'expédition des grains de l'Ouest, système plus économique que celui des Grands Lacs. On expliquait ainsi cette proposition: le grain de l'Ouest expédié à Port Nelson, sur la baie d'Hudson, ne pourra pas être tout exporté par la voie du détroit d'Hudson, parce que celui-ci est fermé à la navigation pendant sept, huit et parfois neuf mois par année. Mais la baie d'Hudson et la baie James sont navigables, par contre, huit, neuf et peut-être dix mois par année.

Quoi de plus facile alors et de plus naturel que de faire jouer à ces mers intérieures le rôle que les Grands Lacs tiennent dans le transport entre Winnipeg et Montréal? Le grain sera chargé à Port Nelson, dans des bateaux qui le transporteront à Rupert, du côté de l'est, terminus du chemin de fer qui ira à Montréal et à Québec. La Presse, reprenant en 1913 les calculs de Sir Lomer Gouin, dans une série d'articles remarquables avait établi clairement la supériorité de cette route sur toute autre pour le transport économique des grains récoltés au nord de Saskatoon et de Calgary, c'est-à-dire dans la plus grande partie de l'Ouest.

M. l'Orateur, je crois avoir démontré que notre province a besoin de chemins de fer nouveaux. Ces besoins, je n'ai pas été le premier à les discerner. Sir Lomer Gouin disait en 1912: "La locomotive est le plus puissant agent de colonisation. C'est la voie ferrée qui a le plus contribué au développement de l'Ouest canadien. Le Manitoba a autant de chemins de fer que la province de Québec. L'Ontario en a deux fois plus... Dans Québec, environ 4,000 milles de chemins de fer desservent les rives du Saint-Laurent et les Cantons de l'Est, mais aucune voie ferrée n'est encore en exploitation dans les immenses étendues de terres situées au nord du lac Saint-Jean, de Mont-Laurier et du Témiscamingue.

"La construction de voies ferrées s'impose si nous voulons mettre en valeur la partie septentrionale de notre domaine public. Le sol y est fertile, la forêt riche, les cours d'eau semés de chutes puissantes; l'agriculture, le commerce et l'industrie pourraient y fonder des foyers; nos frères des États-Unis et de l'Ontario pourraient y trouver le libre usage de leur langue maternelle; bref, une population de quelques millions pourrait y vivre dans l'aisance et dans l'abondance."

Sir Wilfrid Laurier exprimait une opinion semblable en 1918. C'était vers la fin de la guerre, alors que les esprits se préoccupaient des moyens à prendre pour relever le Canada de l'abîme où il s'effondrait. Invité à donner son opinion, le vieil homme d'État indiqua comme premier moyen la mise en valeur de nos richesses inexploitées par la colonisation industrielle et agricole; il spécifia qu'il faudrait construire de nouveaux chemins de fer pour ouvrir de nouveaux champs à l'activité de nos populations, pour garder chez nous le surplus annuel des nôtres.

Ces chemins de Sir Wilfrid Laurier et de Sir Lomer Gouin ne nous apparaissent-ils pas plus à propos que jamais au moment où une partie de notre population quitte la province parce qu'elle ne croit pas trouver ici à gagner sa vie aussi bien qu'à l'étranger? J'ose donc prier le gouvernement de faire des instances auprès des autorités du chemin de fer Canadien du Pacifique et des Chemins de fer nationaux pour obtenir la construction immédiate d'une ligne du Témiscamingue à l'Abitibi, et d'une autre de Montréal au Transcontinental, puis à la baie James.

S'il y en a parmi ceux qui m'écoutent qui ne croient pas à la colonisation, qui ne croient pas au nord-ouest de la province de Québec, permettez-moi de les inviter en terminant à méditer sur les faits suivants, qui sont incontestables: au grand lac Victoria et dans les bassins de l'Harricana, de la Nottaway et de la Rupert, il y a des forêts capables d'alimenter à perpétuité une demi-douzaine de papeteries comme celles qui font la richesse du Saint-Maurice, des industries de première grandeur; il y a des millions de chevaux-vapeur en pouvoirs hydrauliques; il y a 8 à 10 millions d'acres de terres propres à l'agriculture, dont le sol argileux vaut les meilleures de la vallée du Saint-Laurent.

Le sous-sol y recèle des ressources minérales comparables, d'après tous les géologues, à celles du nord d'Ontario, c'est-à-dire capables de produire des millions chaque année. La production du nouvel Ontario en or, argent et nickel a été de 50 millions de dollars l'an dernier. Il y a là, suivant le mot de Sir Lomer Gouin, des ressources naturelles dont l'exploitation ferait vivre dans l'aisance et dans l'abondance des millions de Canadiens. Mais il faut d'abord des chemins de fer pour y aller; et le moment est venu d'en réclamer la construction.

Ce voeu est le même que celui qu'exprimait éloquemment Honoré Mercier lorsqu'il était premier ministre de la province, en ces termes: "Je serais un criminel si je ne secondais de tous mes efforts le mouvement colonisateur et si je ne le soutenais de tous les deniers que les Chambres de la province mettent à ma disposition. Le rêve de ma vie politique serait de prolonger nos tronçons de chemins de fer jusqu'à la hauteur des terres et de la relier par une grande ligne de faîte, qui serait en même temps le plus court chemin entre l'Ouest et nos ports de mer. Emparons-nous du Nord! C'est là qu'est l'avenir, le salut de notre nationalité."

M. Lortie (Labelle) approuve la motion du député d'Abitibi (M. Authier).

Une voix: Il y prend goût4.

M. Lortie (Labelle): Inutile, pour moi, de donner les raisons qui me font approuver ce projet du député de l'Abitibi. Ce dernier, d'ailleurs, les a toutes données. Mais je veux saisir l'occasion de demander au gouvernement de faire en sorte en votant le plus tôt possible les subsides nécessaires pour que la compagnie du C. P. R. puisse construire le prolongement de chemin de fer de Mont-Laurier à Sainte-Anne du Lac, chemin qui traverse quatre paroisses bien organisées et qui certainement contribuera à ouvrir plusieurs autres belles paroisses qui feront la prospérité de la partie nord de Montréal et de la province de Québec. Ce serait, d'ailleurs, un grand pas pour le chemin que l'Abitibi réclame. Je demande donc avec instance au gouvernement de faire droit le plus vite possible aux colons de Labelle qui réclament ce prolongement du chemin de fer depuis si longtemps.

L'honorable M. Moreau (Lac-Saint-Jean) tient à appuyer les demandes des députés de l'Abitibi et de Labelle, en disant que l'avenir de la province de Québec n'est assuré que par la construction de nouveaux chemins de fer. Il seconde donc de tout coeur la demande du député de l'Abitibi. Il connaît toute la région pour laquelle on demande la construction de cette voie ferrée et il sait qu'elle n'attend que ce chemin pour se développer et devenir rivale de toutes les plus belles régions agricoles de la province de Québec. Il y a là d'immenses forêts qui n'attendent que d'être judicieusement développées d'une façon payante; il y a aussi de grandes étendues de terre très propre à l'agriculture. C'est une mine qu'il faut exploiter.

J'espère donc que le gouvernement tiendra à encourager la construction de ce chemin. Inutile de penser à agrandir la province si l'on arrête la construction des chemins de fer. Il faut entre tous les centres des moyens faciles de communication. Que serait la région du lac Saint-Jean si elle n'avait pas eu le chemin de fer qui la dessert aujourd'hui? Et si le grand Laurier n'avait pas construit le Transcontinental, que serait aujourd'hui la région de l'Abitibi?

M. Dufresne (Joliette) ajoute quelques mots au débat en réclamant aussi les voies ferrées nécessaires qu'il faut à la région de Joliette, en particulier un embranchement de Saint-Gabriel au Transcontinental.

La proposition est adoptée.

Ventes de concessions forestières du bassin de la rivière Manicouagan

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de toute correspondance, télégrammes, contrats, etc., entre le gouvernement et toute personne relativement aux ventes des concessions forestières du bassin de la rivière Manicouagan.

Il exprime d'abord le regret que cette motion soit discutée à une heure aussi tardive de la session. Il n'a pas de félicitations à faire au gouvernement quant à sa façon de suivre l'ordre du jour; au contraire, il reproche au gouvernement sa façon de traiter l'opposition relativement à l'ordre du jour. La vente en question eut lieu le 30 novembre 1923. La concession avait une superficie de 2,500 milles carrés. C'était la concession la plus considérable jamais faite dans la province. Un seul avis fut donné dans la Gazette officielle, le 25 octobre 1923.

La disposition de nos ressources naturelles est très importante, parce que l'avenir du pays est lié à ces ventes. Il importe surtout d'en peser les conséquences futures. Pour notre province, nos ressources forestières constituent un problème très grave. Beaucoup s'alarment qu'on les laisse dévaster autant. Les forêts de notre province constituent notre réserve d'or la plus précieuse. Elles jouent un rôle primordial dans notre développement économique. Leur étendue productive, sans compter le Nouveau-Québec avec ses 351,780 milles carrés, atteint 125 millions d'acres. La statistique actuelle, qui donne 130 millions d'acres, comme en 1917, ne doit pas être exacte, puisqu'elle ne paraît pas tenir compte de la dévastation.

Il y a actuellement 76,337 milles carrés sous licence de coupe, d'après un renseignement que m'a fourni le ministre des Terres (l'honorable M. Mercier fils) et pour lequel je le remercie. En 1868, il y avait 191,000 milles carrés sous permis de coupe. Depuis, on afferme, par voie d'enchère publique, 68,219 milles carrés, d'après le système renouvelable tous les 12 mois, à compter du 1er mai de chaque année et 415 milles carrés de terrain incendié.

Notre province retire actuellement de nos forêts près de quatre millions de dollars. L'importance du commerce du bois a centuplé depuis 10 ans. La diffusion phénoménale des journaux américains et canadiens a donné à l'industrie de la pulpe une expansion dépassant toute prédiction et justifiant la justesse de la politique de protection préconisée par l'opposition de 1902 à 1910 et combattue jusqu'alors par le gouvernement libéral.

Il est du devoir de tous les hommes publics, de tous nos dirigeants, de se préoccuper de la forêt avec patriotisme et non pas seulement au point de vue spéculation. Il est douloureux d'apprendre que ceux qui s'en préoccupent le plus appréhendent des dangers pour l'avenir de cette ressource nationale. C'est dire combien non seulement le gouvernement mais aussi le Parlement doivent s'intéresser au sort de nos forêts, à nos concessions forestières, à leurs ventes, aux conditions de vente et à leur conséquence.

Depuis la Confédération, le gouvernement a vendu 35,000 milles carrés de concessions forestières, pour un prix global de $6,000,000. Les perceptions, honoraires et droits de coupe ont rapporté $54,875,339.65 en 55 ans. C'est un chiffre important, mais il importe aussi aujourd'hui de considérer l'opportunité ou l'inopportunité de vendre d'immenses limites à des conditions extraordinaires et à des organisations dont l'influence étrangère combinée peut constituer pour nous un danger national.

Nos forêts se dévastent trop vite par deux agents qu'il importe de contrôler: le feu et le spéculateur étranger, associé de politiciens cachés sous des titres de syndicats. C'est dans la forêt exploitée que le feu fait ordinairement ses ravages et sème ses ruines. La presse s'en est alarmée après en avoir cité plusieurs exemples. Nous nous acheminons vers la ruine complète de la forêt. Des autorités prétendent que, dans 10 ans, si cela continue, il n'y aura plus de forêts disponibles dans la province de Québec. (Applaudissements) Le gouvernement devrait prendre les moyens nécessaires pour empêcher les feux de forêt. On produit ici beaucoup plus de bois de pulpe qu'aux États-Unis. L'ogre américain menace nos forêts. Celles-ci constituent un patrimoine qu'il incombe à tous de conserver.

Il rappelle les efforts qui ont été déployés pour imposer l'embargo, illustrant l'importance qu'accorde la population canadienne à ses richesses forestières qui sont entre les mains de propriétaires de journaux américains. Des journaux américains ont d'ailleurs fulminé contre ce projet, fait-il remarquer. Certains propriétaires, ayant exploité leur propres réserves forestières jusqu'à la dernière limite, cherchent de nouvelles terres et s'affairent à piller à toute vitesse les forêts du Canada.

Il cite des chiffres qui illustrent selon lui l'avidité des Américains pour le papier journal et la pulpe de bois, si bien que les réserves pourraient être épuisées. Il cite également L'Économiste canadien de mai 1923 qui fait état de la situation, une multitude de chiffres à l'appui, ainsi que d'autres journaux dans lesquels on mentionne l'avis du très honorable Arthur Meighen. Le pays, on le constate, est très inquiet de cette situation.

Il passe à la question des concessions du bassin de la rivière Manicouagan en y décrivant le district et il souligne que la St. Regis Pulp and Paper Company, la Manicouagan and English Bay Export Company et l'Ontario Pulp and Paper Company possédaient des limites là-bas avant que la concession ne soit accordée à Clarke, en novembre dernier. Il fait de plus remarquer que les 2,500 milles affermés par Clarke n'ont pas été délimités définitivement au moment de la vente à l'enchère de novembre, mais que c'est après la vente que l'acheteur, avec les officiers du département, a dressé une carte de ces limites.

La vente en question eut lieu au palais législatif de Québec, le 30 novembre 1923. Elle fut présidée par le ministre des Terres et Forêts (l'honorable M. Mercier fils). L'enchère porta sur le montant à payer en plus des droits ordinaires de coupe de bois, qui sont actuellement de $2.70 par mille pieds. La Ontario Paper Company offrit $0.05 par mille pieds et M. F. W. Clarke, de Clarke City, représentant de la Gulf Pulp and Paper Company offrit $0.10. Les 2,500 milles carrés furent adjugés à M. Clarke, à raison de $2.80 par mille pieds de bois coupé sur ces limites et d'une prime de $400 par mille carré, ce qui représente une prime totale de $1,000,000.

D'après la clause 6 des conditions publiées dans la Gazette officielle de Québec le 25 octobre 1923, "l'adjudicataire devra, en dedans d'une période de cinq ans, à dater de la date du contrat, construire, dans un rayon de huit milles de l'une des cités de la province de Québec, une usine à pulpe et à papier d'une capacité quotidienne de 200 tonnes de pulpe et de 100 tonnes de papier. Il devra, avant l'expiration des sept années qui suivront le contrat, porter la production de cette usine à au moins 200 tonnes de papier."

D'après la clause 8, tous les bois coupés sur les terrains ci-dessus mentionnés devront être convertis en pulpe ou en papier à l'usine qui sera érigée aux conditions précitées et nulle part ailleurs. Il y a, dans la province de Québec, 21 cités: Granby, Grand'Mère, Hull, Joliette, Lévis, Longueuil, Montréal, Outremont, Québec, Rivière-du-Loup, Shawinigan-Falls, Sherbrooke, Sorel, Saint-Hyacinthe, Saint-Jean (Iberville), Saint-Laurent, Thetford Mines, Trois-Rivières, Salaberry de Valleyfield, Verdun et Westmount. Mais, étant donné l'emplacement de la concession, la cité de Québec sera la cité où, dans un rayon de huit milles, l'usine devra être construite.

Ainsi, tout le bois occupé sur ces 2,500 milles carrés ne pourra être converti en pulpe ou en papier dans les limites du bassin de la rivière de celles-ci, pour la fabrication de la pâte de bois ou du papier avec les bois coupés sur ladite concession forestière, à raison d'une capacité d'au moins 100 tonnes par jour de travail, et aussi développé dans le même délai, au moins 15,000 chevaux-vapeur devant servir à l'exploitation de ladite usine à pulpe ou à papier.

Pour expliquer ce changement, le ministre des Terres et Forêts (l'honorable M. Mercier fils) a fait une déclaration dans un rapport qu'il présentait au cabinet, où on lit: "Certaines demandes ont été faites au ministère des Terres et Forêts pour l'affermage de certaines concessions forestières situées sur la rive nord du fleuve Saint-Laurent, dans le bassin de la rivière Manicouagan et de ses tributaires, et il a été représenté spécialement par ceux qui faisaient telles demandes que leur intention était d'exploiter ces concessions forestières pour la fabrication de pâte à papier; ils ont aussi exprimé leur intention de construire leur usine dans un rayon aussi rapproché que possible de l'une des cités de la province de Québec et de commencer sans délai la construction de leur usine."

Dans 2,500 milles carrés, il y a 1,960,000 arpents. Il est calculé que ces limites peuvent facilement fournir de cinq à huit cordes à l'arpent et, par conséquent, tout près de 10 millions de cordes. Il est admis que le bois se vend $3 la corde net. Retranchez cinq millions pour les parties inaccessibles et improductives, et il reste 25 millions. Des hommes d'affaires, ayant une grande expérience dans le bois, trouvent cette transaction ridicule, scandaleuse, parce qu'elle ferait perdre plus de 20 millions de dollars à la province. D'après le Chronicle de Québec, la Ontario Paper avait offert $3.35 de plus que les droits ordinaires de coupe pour une première concession et il est raisonnable de croire qu'elle aurait offert le même prix.

Pourquoi cette différence entre le prix de cette année et celui de l'an dernier? La limite ouest fut achetée l'an dernier par McCormack5, représentant la Ontario Pulp and Paper, qui fait l'affaire de la Chicago Tribune. Un M. Eshbaugh6 représente McCormack à Québec. Cette année, il y a deux enchérisseurs, McCormack et Clarke, mais pas à chance égale. La clause éliminait la Ontario Paper, qui ne pouvait bâtir deux usines, l'une aux limites ouest et l'autre à huit milles d'une ville. McCormack, représentant la Ontario Paper, de la Chicago Tribune, est mécontent. Un dépôt fut fait huit jours d'avance.

Entre dépôt et vente, Clarke fait un voyage à Chicago et à son retour rencontre Sir Charles Fitzpatrick à Montréal. Quelques heures après, se fait la vente et le même jour on dîne au Club de la garnison: MM. Eshbaugh, Clarke et le notaire Taschereau. Il aurait été question d'un contrat, lequel aurait été examiné ensuite par MM. Galipeault et Boivin ou Saint-Laurent et Gagné. La vente à l'enchère de la limite serait pour le comte de Rothermere d'Angleterre (frère de lord Northcliffe), qui serait aussi intéressé dans la St. Regis Paper.

Je demande à l'honorable ministre si les faits que j'ai mis devant la Chambre sont vrais oui ou non et s'il est capable sous sa responsabilité de les nier. Je lui demande de produire le rapport fait sur chaque limite, les conditions de vente de chaque limite. Je veux savoir qui a fait les dépôts dans chaque cas, si ces dépôts ont été faits en chèques acceptés et sur quelle banque.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) regrette d'être un peu pris par surprise pour répondre aux arguments du chef de l'opposition qui vient de prononcer sur cette question un discours préparé de longue main; il aurait voulu avoir sous la main les états nécessaires pour répondre à ces arguments; toutefois, il se fait fort de mettre les choses au point. Il déclare toutefois qu'il ne veut pas s'occuper de ce qu'il pourrait y avoir de simple critique dans le discours du chef de l'opposition, critique de caractère plutôt désagréable et qui provient surtout de personnes étrangères qui parlent de choses qu'elles ne connaissent pas. Il veut prendre la question telle qu'elle vient.

Il tient cependant à faire remarquer plusieurs assertions tout à fait fausses dans le discours du chef de l'opposition. Ainsi, le chef de l'opposition prétend qu'il n'y a eu qu'un avis de ces ventes de limites de la Manicouagan dans la Gazette officielle. Comme question de fait, il y a eu de ces ventes des avis publiés durant 35 jours, dans tous les journaux de la province, anglais et français, petits et grands. Il est donc faux de dire qu'une seule annonce a été publiée.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pourquoi alors le ministre n'a-t-il pas répondu cela aux journaux qui prétendaient qu'il n'y avait eu qu'un simple avis?

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): Pourquoi? Parce que je ne m'occupe pas le moins du monde de ce que peuvent dire de nous certains journaux qui peuvent commettre des erreurs; parce que je ne veux pas passer mon temps à répondre à des balivernes de ce calibre et dans lesquelles semble se complaire le chef de l'opposition. Quant à l'histoire de ce petit dîner au Club de la garnison, je ne m'en occupe pas plus que de l'an quarante et je m'étonne que l'honorable chef de l'opposition colporte de pareilles histoires.

Je veux maintenant parler des craintes du colonel Gordon et de M. Barnjum. Chez certaines gens, on passe le temps à faire de la statistique et à publier toutes sortes de choses. C'est ainsi que ce M. Gordon dont parle le chef de l'opposition a publié que, dans 10 ans, nous n'aurons plus de forêts. Qu'avons-nous besoin de discuter une opinion aussi absurde? Mais, heureusement, à cette assertion de M. Gordon il y a un correctif. Il a ajouté: "comme cela va", et alors, sans doute, il avait dans l'idée de mentionner les feux qui exerçaient alors leurs ravages dans le Saint-Maurice et il était évident que, si des incendies de cette nature avaient continué, dans 10 ans, nous n'aurions, de fait, plus de forêts. Quant à M. Barnjum, c'est la même chose, c'est le même pessimisme, mais un peu modifié. Lui ne fait disparaître nos forêts que dans 30 ans ou 40 ans. C'est son opinion. Tout de même, on peut voir la stupidité de toutes ces assertions quand on prend la peine de les comparer entre elles.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): J'attire l'attention du ministre sur le fait que les journaux qui ont un tirage de plus de 300,000 aujourd'hui n'en avaient que 20,000 il y a 30 ans et que la prospérité des forêts ne dépend pas du gouvernement de Québec.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): On a fait des demandes auprès du gouvernement pour qu'il ouvre des limites forestières dans le bassin de la rivière Manicouagan. Le gouvernement a exploré ces limites et je suis certain que ceux qui présentent des soumissions pour obtenir des limites forestières ont toute l'information nécessaire et n'ont pas besoin de celle du gouvernement. La transaction de novembre dernier n'a rien d'extraordinaire.

Voilà quelques années, sous les administrations conservatrices, lorsqu'il s'agissait de faire des concessions forestières, on les faisait sans qu'il y eût de demandes. On annonçait pendant très longtemps et l'on mettait les concessions à l'enchère. On les avait annoncées pendant cinq à six semaines et, la plupart du temps, il ne se présentait pas un seul enchérisseur. On avait des offres ridicules ou pas d'offres du tout.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il y a 30 à 40 ans, les conditions n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui. Nos concessions n'étaient pas aussi convoitées et pour cause. Le développement de l'industrie du papier n'avait pas atteint le degré où il est aujourd'hui.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): Prenons de mon temps, si vous voulez. Point n'est besoin de remonter à 30 ans. L'état de choses dont je parle existait voilà tout au plus trois ou quatre ans, sous notre administration. Aux enchères de 1909, après deux mois d'avis, nous n'eûmes pas un seul enchérisseur. Nous fûmes obligés de retirer ce que nous avions alors offert en vente. Même chose en 1912, après sept mois d'avis. En 1921 et en 1922, même chose après trois mois d'avis dans les journaux, pas d'enchères pour les terres publiques offertes en vente: nous avons été obligés de retirer nos terres.

Je pourrais citer un exemple pour montrer les dangers de l'ancienne politique. Nous avions examiné une propriété à grands frais car, quoi qu'on en dise, nous examinons les propriétés avant de les offrir en vente. Une compagnie nous la demandait, mais le jour de l'enchère elle n'enchérissait pas. C'est cette expérience négative qui nous a amenés à faire des changements dans le système de vente de nos concessions.

Il peut cependant y avoir divergence d'opinions sur notre système actuel. Je crois tout de même que c'est le meilleur. Il a donné, quoi qu'il en soit, des résultats des plus encourageants. Nous ne mettons plus aux enchères sans qu'il y ait des demandes. Nous avons décidé de plus que, lorsqu'il y aura des enchères, ceux qui veulent acquérir surenchérissent. L'on exige un dépôt de trois jours avant la vente et donne un avis de 35 jours. Depuis, nous avons eu des enchères, et avons eu des prix des plus acceptables; notre propriété s'est vendue dans des circonstances exceptionnellement favorables.

Dans le cas de Manicouagan, nous avons permis les enchères à condition qu'il y eût, au préalable, des dépôts se montant à $150,000. Les annonces et les enchères se sont faites de façon très régulière. Dans les deux cas, nous avons obtenu des prix qui dépassaient de beaucoup les droits de coupe: dans le premier cas, $3.35 de plus que le prix de la coupe, dans l'autre, $0.10 de plus. Ceux qui ont critiqué la vente étaient surtout mécontents de leur échec. Que quelqu'un ait fait une colère, peu m'importe! Ce n'est pas la première fois que j'en vois dans mon ministère.

On nous a fait le reproche d'avoir obtenu un gros prix dans un cas et un prix moindre dans l'autre cas. Si on allait examiner les lieux, on se rendrait compte qu'il y a une différence énorme et que les conditions n'étaient pas les mêmes. Une des propriétés était moins belle que l'autre. Dans la première, il y a du beau bois à proximité du fleuve, tandis que tel n'est pas le cas dans la deuxième concession. On conçoit que les deux compagnies, qui connaissaient bien ces régions, n'aient pas été disposées à acheter aux mêmes conditions des concessions qui différaient de beaucoup. Nous avons des chiffres exacts, grâce à notre inventaire, sur la valeur des terrains que nous offrons et les enchérisseurs les connaissent au préalable.

On nous a aussi fait le reproche d'avoir exigé, comme condition à la dernière concession, l'établissement d'une usine dans un rayon de huit milles. Dans ce cas également, tout dépend des conditions de la région. Qu'y a-t-il de mal, d'ailleurs, à ce que nous exigions la construction d'une usine, que ce soit à un mille, à deux, à huit milles de l'endroit concédé? N'est-ce pas la promesse de la naissance d'une petite ville manufacturière? Nous avons cru que c'était aussi le moyen d'aider à la solution de la crise du chômage dans les villes et de l'exode aux États-Unis, en assurant à un centre de la province une grande industrie. Il n'y a donc pas de mystère dans cette limite de huit milles.

Les conditions faites à la Ontario Pulp ont été moins onéreuses parce que les forêts y sont plus clairsemées et que la concession est moins bien située. Dans ce cas, on a exigé la construction d'un moulin à la rivière aux Outardes. Le gouvernement n'a pas l'intention de s'astreindre à respecter les conditions de vente qu'il avait observées jusqu'à maintenant, celles-là même que l'on observe depuis la Confédération, mais il veut traiter chaque concession à sa juste valeur, comme ce fut le cas lors de la dernière vente, et tenir compte des circonstances particulières.

La politique que suit le gouvernement dans les concessions forestières est la bonne; elle a eu d'excellents résultats et elle en aura encore. Nous avons voulu abandonner le système du passé avec ses conditions toujours pareilles. Aujourd'hui encore, si un concessionnaire veut nous donner de bonnes garanties, nous mettrons tout de suite des concessions aux enchères et il pourra surenchérir. La Chambre peut être convaincue que, lorsque nous donnerons des concessions, nous n'aurons pas besoin de faire des voyages à Chicago, nous ne nous occuperons non plus de ceux qui peuvent donner des petits dîners au Club de la garnison, mais des intérêts de la province.

Je ne crois pas nécessaire d'en dire davantage. Le gouvernement croit, lorsqu'il a fait une concession, d'avoir bénéficié des conditions qui existaient à ce moment-là. C'est ce qu'il a fait et il continuera à chercher toujours les meilleurs intérêts de la province.

M. Smart (Westmount): S'il est un département du gouvernement qui exige plus d'attention que d'autres, c'est certainement celui des Forêts, et pour d'évidentes raisons. En effet, la forêt est la seule ressource naturelle qui soit sujette à la destruction par le feu, les insectes ou d'autres causes, et l'état actuel de cette ressource forestière est suffisamment inquiétant pour que le gouvernement soit tenu, non seulement de fournir de plus grands efforts pour la conserver, mais également de voir à ce que le plus d'acheteurs éventuels aient la chance de faire une offre, lorsque des terres de la couronne sont vendues aux enchères. Autrement, la partie se jouera entre quelques puissants syndicats et il s'ensuivra des pertes pour le Trésor public.

Dans le cas de cette vente, deux groupes seulement ont fait une offre, parce qu'ils étaient les seuls à connaître la propriété mise en vente. Le gouvernement en est entièrement responsable et ce sont les mêmes parties qui, en janvier de la même année, ont fait une offre, lors de la vente d'une limite attenante, et la Ontario Paper Company a réussi à obtenir cette limite au prix de $3.75 par 1,000 pieds. Lors de la dernière vente, celle qui nous intéresse, les enchérisseurs furent la Ontario Paper Company qui est une filiale canadienne de Chicago Tribune dirigée par M. McCormack et les entreprises Rothermere, représentées par M. F.W. Clarke. La vente fut annoncée un mois seulement avant la mise aux enchères, d'où l'impossibilité pour les autres d'examiner cette propriété, et ceux qui étaient responsables de la mise en vente des premières limites l'étaient également pour les deuxièmes limites. En conséquence, seulement deux compagnies pouvaient faire une offre intelligente et seules ces deux compagnies en ont fait une.

Si on lit attentivement les conditions de vente, on voit qu'elles sont toutes favorables aux compagnies qui font de l'exportation en Grande-Bretagne et qu'elles sont loin d'être favorables aux compagnies qui exportent aux États-Unis. En d'autres mots, elles favorisent Clarke qui travaille pour les entreprises Rothermere et elles ne favorisent pas la Ontario Paper Company. Je ne voudrais pas laisser croire que je suis un partisan du principe selon lequel il faudrait favoriser les entreprises américaines de préférence à celles de la Grande-Bretagne. Au contraire, dans des conditions égales, j'aimerais beaucoup mieux voir nos ressources naturelles entre les mains d'investisseurs britanniques qu'entre les mains d'Américains, mais les intérêts des gens de la province doivent être considérés en priorité et les conditions de vente auraient dû être de nature à inciter bien des acheteurs éventuels à assister à cette vente et elles n'auraient pas dû être arrangées de telle sorte que Clarke en ait le monopole.

Prenons par exemple cette obligation de faire le dépôt une semaine avant la vente, plutôt que 24 heures, comme c'est le cas habituellement. Comment le gouvernement peut-il expliquer cette nouvelle procédure qui a permis à Clarke de savoir d'avance qui étaient les autres enchérisseurs et de négocier avec eux, comme cela a bel et bien été démontré par la suite? Cette condition suffisait à elle seule à permettre aux deux enchérisseurs de se faire complices pour escroquer une importante somme d'argent à la population. Le montant du dépôt de $250,000 était également suffisamment élevé pour que seuls les plus puissants enchérisseurs puissent entrer en lice.

Les conditions exigées quant à la dimension et à la capacité de production de l'usine que doit ériger l'enchérisseur qui l'a emporté correspondent, dit-on, en tous points aux spécifications que Clarke a soumises pour sa propre usine. Le gouvernement a également pris en considération le fait que l'usine doit être située à moins de huit milles d'une ville de la province, parce que cela est avantageux pour la province et la ville de Québec, mais cela est également avantageux pour Clarke, au détriment de la Ontario Paper Company, pour les raisons suivantes: Clarke exportera en Angleterre et il voudra naturellement que son usine soit érigée dans un endroit où il est facile d'avoir de la main-d'oeuvre, un endroit où il ne dépendra pas du nombre d'hommes prêts à aller s'établir avec leurs familles sur la rive nord.

D'autre part, la Ontario Paper Company a ses propres usines en Ontario et, avec de telles conditions de vente, elle serait incapable de les utiliser. Je suis tout à fait d'accord avec l'idée d'obliger l'enchérisseur vainqueur à établir ses usines dans la province, mais pourquoi stipuler qu'elles doivent être situées en deçà de huit milles d'une ville déjà existante? La province ne profiterait-elle pas de la même manière d'une usine érigée n'importe où dans la province, si loin soit-elle?

Avec cette condition qui n'a pas été posée lors de la vente antérieure, la Ontario Paper Company hésitera certainement à faire une offre cette année, et cela stipule seulement ce que Clarke fera naturellement, même si cette condition n'existait pas. De plus, on peut se demander si le gouvernement a inséré cette condition pour le bénéfice de la province ou pour ses amis. On sait que certains amis du gouvernement ont des propriétés ou détiennent des options sur des propriétés près de Québec et qu'ils essaient de les vendre à Clarke pour ses usines.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): De qui s'agit-il?

M. Smart (Westmount): Je ne le dirai pas pour le moment.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Alors ce n'est pas correct de faire de telles déclarations.

M. Smart (Westmount) poursuit en disant qu'un dépôt de $250,000 devait être fait une semaine avant la vente aux enchères et qu'ainsi M. Clarke a su, le jour même de ce dépôt, que son seul compétiteur était la Ontario Paper Company. Sachant cela, il est parti immédiatement pour Chicago où se trouvent les directeurs de Chicago Tribune et de sa filiale, la Ontario Paper Company, mais ce qui s'est passé là n'a pas été divulgué. Entre-temps, le représentant canadien de la Ontario Paper Company, M. Eshbaugh, au cours de la même semaine, a en substance déclaré ceci: "Clarke a essayé de faire marcher McCormack (Chicago Tribune). S'il avait été honnête dans cette affaire, il aurait pu y arriver, mais maintenant que McCormack a déposé son offre, il fera monter autant que possible les enchères pour cette propriété. McCormack viendra lui-même à Québec pour faire son offre. Si Clarke lui avait fait valoir son jeune âge, que c'était son gagne-pain et que McCormack devrait laisser tomber ces limites, il y a de bonnes chances que ce dernier lui aurait mis la main sur l'épaule et lui aurait souhaité bonne chance. Mais, maintenant que Clarke a essayé de faire le malin, il le lui paiera. Même s'il est maintenant allé à Chicago pour rencontrer McCormack, il est trop tard, McCormack le fera suer."

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Ce sont là les mots tels que les a prononcés le représentant canadien de McCormack. À quoi faisait référence M. Eshbaugh lorsqu'il a dit que Clarke avait essayé de faire marcher McCormack? Où a-t-il dit cela et à qui?

M. Smart (Westmount): Ici, dans la ville de Québec.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): À qui?

M. Smart (Westmount): Je n'ai pas l'intention de le dire.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): Ce n'est que pure imagination.

M. Smart (Westmount): Non! Cela ne provient pas de mon imagination. C'est de source sûre.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Est-ce que le député, qui est un honnête homme, donne sa parole d'honneur que ce sont bien là les propos de M. Eshbaugh?

M. Smart (Westmount): Je donne ma parole d'honneur que ces propos m'ont été rapportés par un honnête homme de Québec.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): C'est le genre de propos que nous entendons depuis le début de la session.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Ce sont vos amis Larivière et Pierrey qui vous ont dit ça?

M. Smart (Westmount): Ce qu'ils ont dit est arrivé.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): L'un d'eux est en prison.

M. Smart (Westmount): Non, il travaille pour la Commission des liqueurs. Et, si mes renseignements sont exacts, ces gens l'ont acheté pour qu'il plaide coupable.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il n'a pas plaidé coupable, il a été condamné.

M. Smart (Westmount): Si le premier ministre veut parler, il pourra le faire une fois que j'aurai terminé.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Je crois que l'on n'aurait pas dû permettre au député de Westmount de lire son discours, surtout lorsqu'il est rempli de tels propos.

M. Smart (Westmount): D'autres lisent également leurs discours.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): Je ne suis pas coupable; j'ai simplement cité quelques chiffres.

M. Smart (Westmount): Oh! je parlais du premier ministre.

Il parle ensuite de la manière dont s'est déroulée la vente à laquelle le ministre (l'honorable M. Mercier fils) était lui-même présent. Une fois la lecture officielle des conditions effectuée, le représentant de la Ontario Paper Company a demandé si la ville que sa compagnie avait l'intention d'établir à Manicouagan répondait aux exigences requises. D'après les renseignements que j'ai obtenus, l'honorable ministre a répondu: "Si cette ville existe aujourd'hui, elle répond aux critères; si par contre elle n'existe pas, alors elle ne répond pas aux critères."

La réponse du ministre est parfaitement conforme aux clauses de l'ordre en conseil et à l'avis qui en découle annonçant la vente. Il me semble que la question du représentant de la Ontario Paper Company était superflue. On peut même se demander si cet incident n'a pas été monté de toutes pièces pour dissimuler que Clarke et McCormack étaient de connivence. Dans les circonstances, je pense que l'on peut en arriver à cette déduction et, à mon avis, on peut blâmer le gouvernement d'avoir laissé des limites se vendre au prix ridiculement bas de $0.10, par rapport à $3.35 une année auparavant pour la propriété voisine. Les limites forestières prennent généralement de la valeur, plutôt qu'elles n'en perdent, et la Chambre a le droit d'exiger des informations et des explications du gouvernement.

Avant la mise aux enchères officielle, on dit que la Ontario Paper Company a fait une enchère à $0.05 parce qu'elle voulait absolument protéger son dépôt. Clarke a ensuite fait une enchère à $0.10 et la vente a été conclue, entraînant une perte pour la province, si on la compare à la vente conclue antérieurement à proximité de la même rivière, de l'ordre de $20,000,000 à $25,000,000.

Cela nous ramène à la question suivante: Que s'est-il passé à Chicago? Et il serait dans l'intérêt public de savoir si la province est victime d'une entente visant à ne pas laisser monter le prix de ces limites. Est-ce que Clarke et McCormack ont mis leurs intérêts en commun ou y a-t-il eu d'autres arrangements de conclus entre eux, à Chicago, qui auraient dissuadé McCormack de venir faire une offre à Québec, alors que son représentant Eshbaugh avait bien dit qu'il viendrait, laissant son représentant se retirer après qu'une offre ridicule de $0.05 ait été faite, contre une offre à $3.35 l'an passé.

Il évalue la perte que la province doit selon lui supporter. Il s'agit de 2,500 milles carrés, ou 1,600,000 acres, et l'on fait preuve de prudence en ne comptant que 10 cordes par acre sur l'ensemble de la région, soit un total de 16,000,000 de cordes. La région voisine a été vendue aux enchères, en janvier 1923, à $3.35 du mille pied, ou l'équivalent de $2.01 la corde, à raison de 600 pieds la corde. Donc, 16,000,000 de cordes à $2.01 la corde, pour un total de $32,160,000. Voilà comment on peut évaluer cette perte.

L'usine à construire, dont la production sera de 200 tonnes de pulpe par jour d'après les conditions stipulées dans le contrat, nécessitera de 80,000 à 90,000 cordes de bois de pulpe par année, mettons 100,000 cordes. Si le deuxième contrat avait été au même prix que le premier, soit à $2.01 la corde, cela aurait rapporté $201,000 à la province par année, alors que, avec le contrat de M. Clarke, la province ne recevra que $6,000, c'est-à-dire 100,000 cordes à $0.06, soit une perte annuelle de $195,000.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): La parole est à la droite.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nous ne répondrons pas aux commérages.

M. Duranleau (Montréal-Laurier): Les concessions forestières de la rivière Manicouagan sont les plus considérables qui aient été faites de longue date. Les dernières ont été faites le 30 janvier 1923 et le 30 novembre 1923. L'on a concédé, en ces deux circonstances, 4,500 milles carrés de limites à bois.

Avant d'examiner les conditions de ces deux ventes, me serait-il permis de demander à cette Chambre si le gouvernement ne commet pas une imprudence grave, s'il ne donne pas une preuve d'une imprévoyance impardonnable en vendant ou en affermant d'année en année les forêts de la province, en quantité de plus en plus considérable, dans le but d'augmenter ses revenus et de proclamer des surplus et s'il n'aliène pas de façon irrémédiable le plus bel actif de cette province? Le gouvernement doit se rendre compte qu'il dilapide nos ressources forestières, qui ne sont pas inépuisables.

Il fait allusion à la polémique entre M. Avila Bédard, chef adjoint du service forestier, et M. Thos Maher, ingénieur forestier. Le premier est confiant dans la richesse de nos forêts, le second prédit que dans 25 années nos forêts seront épuisées.

Voyons ce qui s'est fait pour Manicouagan le 30 janvier et le 30 novembre 1923. Quelqu'un ayant mis en doute que, pour la vente du 30 janvier comme pour celle de novembre, il y aurait eu enchère sérieuse, le ministre des Terres et Forêts (l'honorable M. Mercier fils) prit la peine d'écrire ce qui suit: "Les résultats obtenus à la vente du 30 janvier... suffiraient à répondre aux deux premières questions de façon satisfaisante. Il y a eu enchère active et remarquable. Trois concurrents, la Gulf Pulp and Paper Company, l'Industrial Development and Service Corporation, l'Ontario Paper Company, se sont disputé la concession de Manicouagan, le premier enchérissant jusqu'à $1.05, le second jusqu'à $3.30 et le dernier l'emportant avec une enchère de $3.35 les mille pieds superficiels."

Ceci était pour démontrer qu'un avis de 30 jours, art. 1924, était suffisant pour attirer des enchérisseurs sérieux. L'honorable ministre prend la peine d'ajouter qu'il aurait pu en invoquant l'article 1624 réduire ce délai à 15 jours... si ç'avait été dans l'intérêt public, naturellement. Ce qui reviendrait à dire que, s'il n'a pas rendu la transaction moins avantageuse pour la province, ce n'est pas faute de savoir comment s'y prendre. Mais j'ai de forts doutes que le délai de 15 jours aurait pu s'appliquer à la concession de Manicouagan, vu qu'il n'est autorisé, dit l'article, que lorsqu'il s'agit de limites de peu d'étendue et de peu de valeur, et qu'il est de l'intérêt public de hâter la vente.

Dans tous les cas, pour la seconde vente, que s'est-il passé? Il n'y avait plus alors que deux intéressés présents, qui étaient aussi présents du reste à la première vente: la Ontario Paper Company, qui a offert $0.05 par mille pieds de bois en plus du droit de coupe ordinaire, et M. Clarke, pour la Gulf Paper Company, qui a remporté le morceau en offrant $0.05 de plus que sa rivale. Et les deux avaient déposé $250,000 sept jours avant la vente pour avoir l'avantage de dire l'un, $0.05 et l'autre, $0.05 de mieux. M. Clarke a donc obtenu la concession pour une prime de $0.10 en plus du droit de coupe de $2.70 exigé par le gouvernement. Mais on appliquait ici un nouveau système.

Voyons le nouveau système. Nous le trouvons dans le rapport adopté par le Conseil des ministres le 23 octobre 1923 et approuvé par le lieutenant-gouverneur le 25 octobre 1923. Les considérants du rapport se lisent comme suit: "Certaines demandes ont été faites au ministère des Terres et Forêts pour l'affermage de certaines concessions forestières situées sur la côte nord du fleuve Saint-Laurent, dans le bassin de la rivière Manicouagan et de ses tributaires, et il a été représenté spécialement par ceux qui faisaient telles demandes que leur intention était d'exploiter ces concessions forestières pour la fabrication de la pâte et du papier; ils ont aussi exprimé leur intention de construire leur usine dans un rayon aussi rapproché que possible de l'une des cités de la province de Québec et de commencer sans délai la construction de leur usine."

Le rapport dit ensuite que la limite commencera à la frontière des limites louées par la Manicouagan and English Bay Company, qu'elle aura environ 2,500 milles carrés, qu'elle est située dans le bassin de la rivière Manicouagan, etc., qu'elle sera cédée au prix d'adjudication de $400 par mille carré, plus la rente foncière, le droit de coupe ordinaire et le prix à l'enchère.

Mais la vente se fait à cause de "certaines demandes". Voici comment le rapport les arrange, les "certaines demandes". Je cite le sens: Quiconque voudra la vente de ces limites à bois déposera $100,000 en même temps que sa demande au ministère; il déposera ensuite $150,000 sept jours avant la date fixée pour l'enchère; toute autre personne désirant prendre part à la vente devra aussi déposer $250,000, toujours "sept jours" avant la date de l'enchère.

Voilà donc les gens postés pour s'entendre, se connaître, pour discuter à fond, sinon l'intérêt public, l'intérêt de la province, du moins leurs intérêts particuliers. Ils ont sept jours pour cela. Pourquoi? Pourquoi cette innovation? Pourquoi aussi innover en exigeant la construction d'une usine de pâte et de papier dans un rayon de huit milles de l'une des cités de la province, au lieu d'en demander la construction et l'exploitation sur place comme dans la vente précédente? Est-ce que cette condition n'était pas de nature à favoriser ceux qui avaient demandé cette vente et à écarter les enchérisseurs?

Le résultat de tout cela, c'est que la province a perdu une somme fabuleuse d'environ $30,000,000, si on compare cette vente à celle de janvier précédent. À l'enchère du 30 novembre, l'excitation ne sera pas telle qu'elle porte l'honorable ministre à l'écrire au Devoir. La Ontario Paper Company offre $0.05 par mille pieds de bois pour une limite située dans le même bassin qu'elle payait $3.35 le mois de janvier précédent et pour laquelle M. Clarke avait offert $1.05 en plus du droit de coupe. Cette fois-ci, M. Clarke offre $0.05 de plus et obtient la limite.

Il y a ici une comparaison intéressante à faire entre ces deux enchères de limites qui sont voisines et à peu près d'égale étendue: janvier 1923, offre de la Ontario Paper and Pulp Company, $3.35, et offre de M. Clarke, $1.05; novembre 1923, offre de la Ontario Paper and Pulp Company, $0.05, et offre de M. Clarke, $0.10. Si vous voulez connaître la perte de la province, un calcul très simple vous l'apprendra:

- 1 mille carré contient 640 acres;

- 1 acre contient un minimum de 10 cordes de bois ou 6,000 pieds superficiels;

- La concession de janvier donnait $3.35 par mille pieds;

- 1 acre donnait donc $20.10 en plus du droit de coupe ordinaire;

- En novembre, l'acre qui a toujours 6,000 pieds de bois ne rapporte que $0.10 le mille, soit $0.60 l'acre.

Si la vente de novembre avait obtenu le même prix qu'en janvier, on aurait le résultat suivant:

- concession du 30 janvier: en milles, 2,500; acres, 640; par acre, 6,000 pieds. Total: 9,600,000,000 à $3.35 = $32,150,000.

- concession du 30 novembre: en milles, 2,500; acres, 640; par acre, 6,000 pieds. Total: 9,600,000,000 à $0.10 = $260,000. Perte: $31,200,000.

Si l'on compare la vente de novembre à celle de janvier, on voit que la province, dans celle de janvier, a donné 500 milles carrés de moins et a reçu environ $24,000,000 de plus. Ces chiffres paraissent très considérables. Ils le sont assurément, mais pas trop si l'on se rappelle qu'ils s'appliquent à une très longue période et je vous assure qu'il n'a pas fallu sept jours aux acheteurs pour s'en apercevoir.

Voilà un résultat qui démontre que les innovations sont souvent dangereuses et qu'il faut y aller avec prudence, et que, si l'honorable ministre a été de bonne foi, ce que je ne mets pas en doute, ceux qui l'ont inspiré l'étaient moins. Voilà aussi, une fois de plus, que le gouvernement vient justifier les demandes répétées qui lui sont faites par une foule de réformes que le bon sens réclame, qu'il donne prise une fois encore à cette opinion courante dans la masse du peuple que tout marché du gouvernement couvre un mystère profitable à quelqu'un, que c'est le peuple qui est roulé, et c'est pourtant lui qui paie. Ni le ministre des Terres (l'honorable M. Mercier fils) ni le gouvernement n'a répondu à ces affirmations.

La proposition est adoptée.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté sans amendement le bill 167 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement à la fermeture des magasins à bonne heure.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté sans amendement les bills suivants:

- bill 170 concernant les élections de marguilliers et les assemblées de marguilliers dans la cité de Québec;

- bill 193 des syndicats professionnels;

- bill 158 amendant le code du notariat;

- bill 191 concernant l'adoption;

- bill 196 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement aux terres publiques et aux bois et forêts;

- bill 205 modifiant la loi constituant en corporation l'École technique de Hull;

- bill 207 modifiant la loi concernant les liqueurs alcooliques.

 

Rapports de comités:

L'honorable M. David (Terrebonne): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le rapport suivant du comité spécial permanent des comptes publics. Voici le rapport:

Le comité spécial permanent des comptes publics a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son troisième rapport comme suit:

Votre comité produit les notes sténographiques de monsieur l'auditeur général, monsieur Joseph Morin.

La séance est levée à 6 h 10.

 

Troisième séance du 14 mars 1924

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 8 h 40.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté sans amendement les bills suivants:

- bill 189 modifiant le code civil relativement aux privilèges des fournisseurs de matériaux et des sous-entrepreneurs;

- bill 204 concernant certaines obligations ou rentes inscrites du gouvernement de cette province;

- bill 208 ratifiant le contrat au sujet de l'école de papeterie des Trois-Rivières.

Travaux de la Chambre

M. Sauvé (Deux-Montagnes) signale au premier ministre les réponses aux interpellations sur lesquelles il compte avant la fin de la session.

 

Demande de documents:

Employés non permanents du gouvernement

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'il soit mis devant cette Chambre un état indiquant: 1) Quel était le 1er juillet 1920 le nombre des employés non permanents dans les services intérieur et extérieur de l'Assemblée législative, du Conseil législatif, de chaque département, ainsi que de tout bureau ou commission relevant du gouvernement de Québec; et quel était le salaire ou traitement global de ces employés. 2) Quel était le 1er juillet 1923 le nombre des employés non permanents dans les mêmes services; et quel était le salaire ou traitement global.

Adopté.

Barrage du Saint-Laurent

M. Tétreau (Montréal-Dorion) propose qu'une humble adresse soit présentée à Son Honneur le lieutenant-gouverneur, le priant de bien vouloir mettre devant cette Chambre copie de toute correspondance, télégrammes, rapports, etc., entre le gouvernement ou aucun de ses membres et le gouvernement fédéral ou aucun de ses membres, au sujet du barrage du Saint-Laurent.

Il souligne l'importance vitale du barrage pour la canalisation des eaux du Saint-Laurent pour la province de Québec, dont les intérêts, en l'espèce, sont menacés. Il déclare qu'il n'entame pas le sujet pour connaître l'opinion du gouvernement, car, dit-il, l'honorable premier ministre l'a ramassée il y a quelques semaines à Montréal dans une formule que j'approuve: "Il faut protéger le Saint-Laurent." Le but que je me propose est plutôt de m'enquérir des moyens dont le gouvernement de Québec entend se servir auprès du gouvernement d'Ottawa pour protéger les intérêts provinciaux et empêcher les Américains de venir s'emparer du Saint-Laurent.

Il fait un bref historique du travail de la Commission hydroélectrique de la province d'Ontario et établit, à l'aide de quelques statistiques sommaires, la somme d'énergie électrique que ses usines distribuent sur le territoire de nos voisins. En 1905, Ontario créait la Commission hydro-électrique pour venir en aide aux industries en leur vendant de l'électricité à des coûts peu élevés. Une usine de $225,000,000 a l'an passé fourni de l'électricité à 250 municipalités, 80 districts ruraux et à 51 compagnies. Les municipalités ont eu la responsabilité de distribuer l'électricité à plusieurs centaines de milliers d'abonnés. C'est une organisation qui voit loin, parce que Sir Adam Beck est depuis longtemps d'avis que, dans le domaine de l'électricité, les projets doivent s'étaler sur une période de 10 ans.

C'est surtout l'ouest de la province d'Ontario qui bénéficie de la houille blanche ontarienne et la ville de Toronto, pour subvenir à ses propres besoins, est en train de construire de nouvelles usines au coût de $800,000. L'est de la province voisine songe à imiter l'exemple de l'ouest et du centre. Dans l'est de l'Ontario, un demi-million de gens ont terriblement besoin d'électricité et la province veut que le gouvernement fédéral défraie le cinquième du coût du barrage, et elle a l'intention d'aller seule de l'avant si Ottawa refuse. Ce qui explique que, à cette fin, on ait songé à capter les forces hydrauliques du Saint-Laurent qui pourraient fournir à cet endroit 750,000 chevaux-vapeur.

Les États-Unis ont prêté la main aux Ontariens pour donner dans le mouvement. L'entreprise de la canalisation serait coûteuse et dangereuse, car nos relations avec les États-Unis, qui sont excellentes aujourd'hui, pourraient être mises en péril par ce projet. Le barrage du Saint-Laurent, qui élèvera le niveau du lac Ontario, est nécessaire au développement de l'énergie électrique, mais il baissera le niveau du Saint-Laurent et touchera les industries de la province de Québec. L'Ontario s'est allié aux États-Unis, non pas pour la canalisation du Saint-Laurent, ce n'est là qu'un prétexte, l'entreprise étant véritablement trop coûteuse par ces temps difficiles, mais pour l'électricité.

En 1922, Mackenzie King s'est résolument opposé à un traité visant à creuser le Saint-Laurent. En 1923, le président Coolidge de la république américaine et le premier ministre Ferguson d'Ontario ont montré leurs intentions et gagné les esprits par une campagne de presse bien rétribuée. Ce qui leur a permis, cela fait, d'envoyer auprès de l'honorable M. MacKenzie King une délégation de 250 municipalités qui ne laissa pas d'impressionner le premier ministre canadien. Le très bon M. King a été ferme. Il a prétexté l'économie pour ne pas accepter d'emblée ce projet et il a promis qu'on l'étudierait.

L'exception dilatoire contenue dans le discours du trône du gouvernement fédéral nous donne à espérer que le premier ministre du Canada restera ferme et défendra nos droits. Le port de Montréal est le plus grand intéressé et j'ai confiance que le gouvernement de Québec nous aidera à sauvegarder nos intérêts.

Il énumère alors les conditions qu'il y aurait lieu d'établir pour la réalisation, à notre avantage, de ce grand projet. Dans cette affaire, je suis convaincu que le gouvernement du Canada n'oubliera pas l'importance du problème du canal d'égout de Chicago7. Le gouvernement fédéral solutionna le problème et étudia la question de savoir si la construction du canal de la baie Georgienne ne serait pas, actuellement, plus avantageuse pour la province. Le projet d'aménagement à Carillon pourrait être très bénéfique pour la province de Québec et d'Ontario s'il est dirigé et adéquatement financé par Ottawa.

J'espère qu'une commission de techniciens et de légistes étudiera le projet, nous dira quel peut en être le coût et verra à protéger les intérêts des deux vieilles provinces du dominion, Ontario et Québec, et à prévenir les difficultés entre les États-Unis et le Canada. Le vrai but de la canalisation du Saint-Laurent est le harnachement par la province d'Ontario et les États-Unis des eaux de notre fleuve pour le développement de 3,000,000 de chevaux-vapeur, dont 750,000, au moins, alimenteraient les industries américaines. Nous ne sommes pas seuls à protester. Plusieurs provinces combattent ce harnachement du Saint-Laurent par l'Ontario et les États-Unis. Dans 10 ans, l'Ontario sera capable de vendre de l'électricité à un prix tellement bas que Québec ne pourra pas lui faire concurrence.

Je crois que le moment est venu pour le gouvernement de la province de développer lui aussi les forces hydrauliques pour aider à nos industries et pour fournir l'éclairage à nos campagnes. Si on ne réalise pas cela, Québec sera sur un pied d'infériorité par rapport à Ontario. Montréal est encore à la merci de trusts comme un grand nombre d'autres villes. La Montreal Light, Heat & Power Company, qui avait un capital de $18,000,000, l'a élevé à $64,000,000 et ses clients en portent le fardeau. Je me demande si le gouvernement ne devrait pas faire disparaître ces monopoles et s'emparer de la houille blanche afin d'assurer au peuple l'énergie dans des conditions avantageuses.

Il rappelle l'état actuel de l'industrie de la houille blanche dans la province qui produit, à l'heure qu'il est, 1,000,000 de chevaux-vapeur, et énumère les motifs qui justifieraient le gouvernement de promouvoir avec énergie une entreprise de si vaste envergure et d'une si vitale importance pour notre avenir économique. Il espère enfin que le gouvernement, sur cette question de la canalisation du Saint-Laurent, saura défendre nos droits. (Applaudissements)

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): La Chambre et la province sont reconnaissantes à l'honorable député de Dorion (M. Tétreau) d'avoir attiré leur attention sur une question de toute première importance. Cependant, ce projet du creusage du Saint-Laurent est encore très indéterminé, car le gouvernement fédéral comprend parfaitement que l'état actuel des finances du pays ne permet pas encore sa réalisation. Lorsque j'ai agité cette question à Montréal, je l'ai fait en mon nom personnel seulement, et parce que je croyais la chose opportune. Est-il réalisable, ce projet? Dans mon opinion, pas avant une autre génération.

Si le gouvernement canadien et le gouvernement américain peuvent faire ce travail gigantesque sans empiéter sur les droits de la province ni affecter le volume des eaux du Saint-Laurent, qui est notre plus bel actif, nous n'aurons rien à dire. Chose certaine, cependant, nous veillerons avec un soin jaloux au maintien de nos droits et à la protection de nos intérêts. Quel que soit le gouvernement qui siégera à Ottawa, nous défendrons, dans la mesure du possible, le droit de propriété du lit et des rives du fleuve qui est à nous. Pas une goutte d'eau du Saint-Laurent ne nous sera enlevée. Je ne suis pas ingénieur, mais je crois qu'on ne peut endiguer le Saint-Laurent sans en diminuer le volume. Nos ingénieurs étudieront ces questions techniques et donneront entière satisfaction à l'opinion publique. Nous serons les adversaires du projet en autant qu'il contreviendra à nos intérêts et pourrait entraver ceux du port de Montréal, notre métropole dont nous sommes si fiers.

Mon honorable ami a parlé de la houille blanche de la province et du développement des pouvoirs électriques. Il y a actuellement de 8 à 10% des pouvoirs d'eau qui sont développés dans la province. La construction du barrage de la Grande Décharge, au lac Saint-Jean, presque aussi important que celui de l'Ontario, donnera à l'industrie d'ici peu de temps 1,000,000 de chevaux-vapeur; ce qui doublera exactement notre production actuelle d'énergie électrique, avec la conséquence nécessaire que des usines seront établies dans cette région de la province.

Déjà la compagnie Price Brothers a acheté 200,0008 chevaux-vapeur de la Grande Décharge. Le surplus sera envoyé à Montréal, Québec et dans nos autres centres industriels: ce qui, sans contredit, mettra fin aux monopoles des trusts dont l'honorable député de Dorion parlait tout à l'heure. Il est question, au surplus, de développer les pouvoirs d'eau de Carillon et de Lachine, ce qui augmentera de manière considérable la production de l'énergie électrique dans la province.

À cette question se rattache celle de l'exportation du pouvoir moteur aux États-Unis, qui nécessitera l'étude de l'aspect légal et constitutionnel qu'elle comporte, et qui n'est pas encore élucidée. Il faudra décider si cette question relève du gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial. Nous avons pris les moyens les plus effectifs de nous protéger en décidant que toute concession d'énergie électrique en dehors de Québec comportera un droit double, et que nous triplerons si opportun, sur chaque cheval-vapeur qui sera exporté aux États-Unis ou dans les autres provinces. Ainsi, par la force des choses, nous forcerons les industries à s'établir chez nous et à garder chez nous le bénéfice de ces pouvoirs d'eau que la Providence nous a donnés d'une main si généreuse.

On parle de l'électrification des chemins de fer. Si des compagnies sérieuses sont prêtes à venir nous faire des offres à ce sujet, elles nous trouveront favorables à toute tentative de ce genre dans la province, qui est disposée à les rencontrer et à faire, pour cela, plus que la moitié du chemin.

L'honorable député de Dorion a bien fait d'attirer l'attention de la Chambre sur cette importante question. Je l'en remercie et il peut compter sur le gouvernement pour promouvoir les intérêts de la province de Québec et sauvegarder ceux de notre grande métropole. Je puis lui promettre que, si les droits de notre province sont menacés, nous les défendrons. (Applaudissements)

La proposition est adoptée.

Protection accordée aux actionnaires de la Banque Nationale

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de toute correspondance, document, requête, etc., entre le premier ministre ou le ministre de l'Agriculture et toute personne depuis 1923, relativement à la protection du gouvernement accordée aux actionnaires de la Banque Nationale, et à celle qui est réclamée par des cultivateurs à cause de la situation agricole.

Adopté.

Représentation de la division de Salaberry au Conseil législatif

M. Plante (Beauharnois) propose, appuyé par le représentant de Joliette (M. Dufresne), qu'il soit mis devant cette Chambre copie de documents, lettres, télégrammes et correspondances entre le gouvernement, aucun de ses membres et toutes autres personnes au sujet de la représentation de la division de Salaberry du Conseil législatif.

Il demande au gouvernement de se hâter de remplacer dans la division de Salaberry le siège laissé vacant par l'honorable Sir Lomer Gouin, il y a trois ans. Il rappelle comment, il y a quelques années, des jeunes gens enthousiastes avaient voulu abolir le Conseil législatif. Quelques-uns d'entre eux qui avaient voté en faveur de cette mesure sont aujourd'hui membres du Conseil. Il cite des noms qui, comme lui-même, reconnaissent la nécessité du Conseil législatif dans le bon fonctionnement du rouage parlementaire. Il fait l'éloge de son président distingué, l'honorable M. Turgeon.

Je veux demander au gouvernement de nommer un citoyen de notre région pour nous représenter. Jusqu'à aujourd'hui, nous avons été représentés à la Chambre par des citoyens de Montréal: MM. Racine, Bergevin, Rolland et Starnes. Montréal n'est pas la fin du monde. Je vois sourire mon excellent ami, l'honorable député de Bonaventure (M. Bugeaud). La rumeur publique dit qu'il ira bientôt siéger dans la Chambre haute. J'espère qu'il ne nous quittera pas.

Il fait un nouvel appel au gouvernement pour qu'on nomme un citoyen de la division de Salaberry au Conseil législatif.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il appartenait à notre jeune et vaillant doyen de revendiquer les droits de la Chambre haute. Je suis d'accord avec lui sur tout ce qu'il a dit. Il nous a rappelé des péchés de jeunesse. Si le Conseil législatif n'a pas été aboli, c'est un peu la faute des libéraux. Lorsque nous proposions cette abolition du Conseil, il n'y avait qu'un libéral qui en faisait partie, M. Rémillard. Il avait été nommé à condition de proposer l'abolition du Conseil, mais il ne trouva pas de secondeur. (Rires) Le conseil n'a pas été aboli et c'est une bonne chose, car c'est un corps modérateur qui a combattu les théories nouvelles.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ce n'est pas une théorie nouvelle.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Le Conseil législatif est une excellente institution dont l'utilité se fera sentir de plus en plus. La province de Québec est conservatrice au meilleur sens du terme et elle refuse d'ajouter foi à toutes les innovations de nos voisins des autres provinces et d'outre-quarante-cinquième. Le gouvernement a comblé trois des quatre postes qui étaient vacants l'an passé et le seul siège présentement vacant est celui qu'occupait Sir Lomer Gouin avant d'aller au Parlement fédéral. L'honorable député de Beauharnois (M. Plante) nous demande pourquoi nous ne remplaçons pas Sir Lomer Gouin au Conseil législatif. Recueillir la succession de Sir Lomer Gouin est chose très difficile. On peut lui succéder mais on ne peut pas le remplacer.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Sir Lomer Gouin a-t-il occupé son siège?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Si par "occuper" vous entendez "s'asseoir dedans", non; si, par ce mot, vous entendez "avoir été régulièrement nommé", oui. Des prophéties ont été faites que le gouvernement tomberait bientôt. J'attendais sa chute pour donner une chance à l'opposition de nommer au siège de la division de Salaberry notre jeune et vaillant doyen qui est éminemment qualifié pour occuper un fauteuil à la Chambre haute. (Applaudissements)

La proposition est adoptée.

Enquête sur la véracité des rapports de la Banque Nationale

M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), que cette Chambre, qui a voté une loi engageant le crédit de la province pour assurer la fusion de la Banque d'Hochelaga et de la Banque Nationale, prie le gouvernement du Canada d'instituer une enquête complète sur la véracité des rapports que la Banque Nationale et ses officiers ont fournis au ministère des Finances du Canada depuis cinq ans, ainsi que sur les diverses causes ou opérations qui ont mis en péril les fonds des déposants et des actionnaires de cette banque, et que copie de la présente demande soit transmise au premier ministre du Canada.

Il assure qu'il ne veut pas faire de politique, mais qu'il fait cette demande pour appuyer celle faite par le peuple et exprimée par des journaux. Il se plaint de l'autocratie du gouvernement et manifeste des appréhensions à ce sujet. Il déclare que le gouvernement fédéral fait actuellement une enquête sur les opérations de la Home Bank. La Chambre provinciale pourrait inviter le gouvernement fédéral à en faire autant pour la Banque Nationale, afin de savoir ce qui a bien pu amener cette banque près de l'effondrement, obligeant la province à se porter à sa rescousse. Il ne veut jouer au politicien, mais il rappelle que le premier ministre a refusé une enquête que la Chambre avait demandée alors que le bill était à l'étude, et il dit qu'il est tout à fait logique que la banque, qui relève de la juridiction fédérale, fasse l'objet d'une enquête par les autorités fédérales.

Il fait allusion à la dernière assemblée des actionnaires de la Banque Nationale où MM. Napoléon Lavoie et Charles-A. Paquet, député de Montmagny, ont fait de nombreuses déclarations. M. Paquet a dit que la Machine Agricole n'a pas causé le désastre de la Banque Nationale, car seulement trois millions ont été engloutis dans son industrie. Le gérant de la Banque Nationale, M. Lavoie, a déclaré que la direction était responsable des problèmes auxquels la banque a été confrontée, que certaines instructions n'ont pas été suivies et que certains rapports ont été truqués. Je ne ferai pas de personnalité et je ne veux pas censurer le premier ministre, parce qu'il a été mêlé aux affaires de la banque, ainsi que son frère, son neveu, etc., mais les déposants d'une banque ont droit d'avoir ces renseignements et le peuple de la province qui, pendant 40 ans, garantira 15 millions à la nouvelle banque, doit avoir aussi ces renseignements. J'espère que la Chambre réclamera cette enquête.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Je n'ai qu'un mot à dire sur cette question. On a beaucoup trop parlé de la Banque Nationale. Dans l'intérêt de tous, il eût mieux valu s'en tenir à ce qui a déjà été dit. Je comprends difficilement les sentiments du chef de l'opposition et les motifs des paroles qu'il vient de prononcer. La province de Québec est intéressée dans cette banque, jusqu'à concurrence de 15 millions pendant 40 ans. Elle est le plus fort actionnaire de la Banque Nationale qui a besoin de toute sa réputation pour garder la confiance du public. Pourquoi faire croire à la population que ce n'est pas fini l'affaire de la Banque Nationale? On dit que des erreurs ont été commises. C'est possible, probable même. Mais nous sommes venus à la rescousse de la Banque Nationale précisément dans le but de réparer ces erreurs. Je crois que nous avons en fait avec la Banque d'Hochelaga une des plus belles institutions financières, dont la province peut être fière. Quelle raison aurions-nous de demander au gouvernement fédéral de jeter dans le public toutes les erreurs des cinq dernières années?

En conséquence, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), j'ai l'honneur de proposer à cette Chambre l'amendement suivant à la motion de l'honorable chef de l'opposition: Que tous les mots après "que" soient retranchés et remplacés par les suivants : "cette Chambre, assurée que la fusion de la Banque d'Hochelaga et de la Banque Nationale va créer une puissante institution bancaire en laquelle notre population peut avoir pleine et entière confiance, exprime le voeu que le gouvernement fédéral, dans le but de maintenir cette confiance si nécessaire au crédit financier du Canada, exerce avec grand soin sur toutes nos banques canadiennes le contrôle et la surveillance que lui accorde la loi".

M. Plante (Beauharnois) appuie la motion du chef de l'opposition. Il dit que la gauche a fait de l'opposition loyale, mais non de l'obstruction sur l'affaire de la fusion. Il rappelle les faillites des anciennes banques et le sort de leurs présidents. Certaines faillites ont mené des directeurs en prison. Il fait référence au premier ministre Ferguson qui a refusé d'engager le crédit de la province d'Ontario pour sauver la Home Bank. Il dit que le premier ministre en faisant voter les 15 millions a promis de tenir une enquête après la sanction de la loi. L'enquête demandée devrait être faite dans l'intérêt des actionnaires et des fonctionnaires de la Banque Nationale.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): L'amendement du premier ministre veut dire que le gouvernement fédéral n'a pas fait son devoir dans le passé. Je ne voudrais pas qu'une exception fût faite pour la Banque Nationale, dont le gérant a porté des accusations contre certains officiers. La justice est la même pour tout le monde. Et c'est par souci de la justice que je réclame une enquête à Ottawa.

M. l'Orateur met l'amendement aux voix.

Les députés de l'opposition réclament le vote enregistré.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Authier, Baillargeon, Bercovitch, Bergeron, Bernard, Bertrand, Bissonnet, Bordeleau, Bouchard, Bugeaud, Caron, Charbonneau, David, Dufour (Matapédia), Fortier, Galipeault, Hamel, Lafond, Lafrenière (Berthier), Lafrenière (Richelieu), Lahaie, Laperrière, Lapierre, Lemieux (Gaspé), Lemieux (Wolfe), Lortie (Labelle), Madden, Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreau, Moreault, Morin, Nicol, Oliver, Ouellet, Perrault, Pilon, Ricard, Richard, Roy, Saurette, Taschereau, Thériault, Thurber, 44.

Contre: MM. Beaudoin, Bray, Dufresne, Duranleau, Gault, Houde, Lafleur, Langlais, L'Archevêque, Lortie (Soulanges), Patenaude, Pellerin, Plante, Sauvé, Smart, Tétreau, 16.

Ainsi, l'amendement est adopté.

La motion principale ainsi amendée étant mise aux voix, la Chambre l'adopte.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, les bills suivants:

- bill 15 modifiant la loi de l'hygiène publique de Québec;

- bill 32 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement aux assurances;

- bill 37 concernant l'émission et la vente d'actions, d'obligations et autres valeurs;

- bill 75 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec;

- bill 98 amendant la charte de la corporation du village de La Malbaie;

- bill 159 amendant le code civil relativement aux écrits authentiques;

- bill 166 amendant l'article 407 du code municipal;

- bill 168 modifiant le code civil et le code de procédure civile relativement aux partages et licitations, et déclarant valides certains partages et licitations;

- bill 169 relatif à la tenue des registres de l'état civil par les ministres et rabbins appartenant à la religion judaïque;

- bill 171 modifiant le code municipal relativement à l'entretien de certaines routes;

- bill 173 concernant les pouvoirs de certaines compagnies d'émettre et de réémettre des obligations, débentures et autres valeurs;

- bill 175 relatif aux constituts et au régime de tenure dans la cité de Hull;

- bill 176 concernant les véhicules automobiles;

- bill 201 relatif aux dépôts des sommes d'argent destinées aux fonds d'amortissement de corporations municipales et scolaires;

- bill 206 amendant la loi des cités et villes, 1922.

Tenue des registres de l'état civil par les ministres et rabbins

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 169 relatif à la tenue des registres de l'état civil par les ministres et rabbins appartenant à la religion judaïque.

Les amendements sont lus deux fois.

M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) propose, appuyé par le représentant de Brome (M. Oliver), qu'un message soit envoyé au Conseil législatif, informant les honorables conseillers que cette Chambre refuse d'agréer les amendements du Conseil législatif au bill 169 relatif à la tenue des registres de l'état civil par les ministres et rabbins appartenant à la religion judaïque, parce que ces amendements détruisent toute la portée du bill et le rendent inutile.

Adopté sur division.

Loi de l'hygiène publique

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 15 modifiant la loi de l'hygiène publique de Québec.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Assurances

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 32 modifiant les statuts refondus, 1909, relativement aux assurances.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Émission et vente d'actions et autres valeurs

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 37 concernant l'émission et la vente d'actions, d'obligations et autres valeurs.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Charte de La Malbaie

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 98 amendant la charte de la corporation du village de La Malbaie.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Écrits authentiques

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 159 amendant le code civil relativement aux écrits authentiques.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Code municipal, article 407

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 166 amendant l'article 407 du code municipal.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Partages et licitations

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 168 modifiant le code civil et le code de procédure civile relativement aux partages et licitations, et déclarant valides certains partages et licitations.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Entretien de certaines routes

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 171 modifiant le code municipal relativement à l'entretien de certaines routes.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Obligations, débentures et autres valeurs

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 173 concernant les pouvoirs de certaines compagnies d'émettre et de réémettre des obligations, débentures et autres valeurs.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Constituts et régime de tenure dans la cité de Hull

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 175 relatif aux constituts et au régime de tenure dans la cité de Hull.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Véhicules automobiles

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 176 concernant les véhicules automobiles.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Fonds d'amortissement de corporations municipales et scolaires

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 201 relatif aux dépôts des sommes d'argent destinées aux fonds d'amortissement de corporations municipales et scolaires.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Loi des cités et villes, 1922

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 206 amendant la loi des cités et villes, 1922.

Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.

Cité de Québec

La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 75 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec.

Les amendements sont lus deux fois.

M. Bertrand (Saint-Sauveur): Je n'ai pas bien entendu et je crois que nous venons d'adopter tout ce que le Conseil législatif a changé dans le bill. J'ai un amendement.

M. l'Orateur: En effet, tout est adopté, mais je vais permettre à l'honorable député de proposer son amendement.

M. Bertrand (Saint-Sauveur): Le Conseil législatif s'est prononcé pour l'élection du maire par les échevins et il a amendé le bill dans ce sens-là. Je suis surpris qu'on ait changé le bill de Québec de cette façon. Le peuple veut élire son maire lui-même. On a dit que l'élection du maire coûtait cher. Oui, pour quelqu'un qui s'impose, dont le peuple ne veut pas. Nous venons d'avoir des élections. Pour quelques-uns, ç'a coûté cher pour se faire élire; pour d'autres, ça n'a rien coûté. Pourquoi laisserions-nous à 13 personnes le soin d'élire le maire de Québec? C'est au peuple à choisir le premier magistrat.

Je propose un amendement aux amendements du Conseil législatif. Je propose, appuyé par le représentant de Hull (M. Lafond), qu'un message soit envoyé au Conseil législatif, informant les honorables conseillers que cette Chambre agrée les amendements du Conseil législatif au bill 75 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec, mais en y ajoutant l'article suivant:

"24. L'article 21 n'aura d'effet qu'après que la majorité des électeurs municipaux, consultés par voie de référendum, se sera prononcée en faveur de l'élection du maire par le conseil."

M. Bouchard (Saint-Hyacinthe) dit qu'il serait peut-être bon que le maire soit élu par le conseil dans les petites municipalités, mais il approuve l'amendement du député de Saint-Sauveur (M. Bertrand) et veut l'élection du maire par le peuple.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Il me semblait que les amendements étaient tous adoptés.

M. l'Orateur: Je sais, mais j'ai permis à l'honorable député de proposer son amendement.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Très bien, alors. Nous devrions adopter les amendements apportés par le Conseil législatif. Les opinions sont partagées sur cette question de l'élection du maire de Québec par les échevins. Je crois que l'on commet une erreur en disant que 13 personnes éliront le maire. Ces 13 personnes sont élues par le peuple et l'élection du maire par le conseil est l'élection par le peuple au second degré. Ce mode d'élection est très démocratique.

En France et en Belgique9, qui sont, comme chacun le sait, des pays démocratiques, on a adopté ce système et l'intérêt public ne s'en porte pas plus mal. Il est vrai que la Chambre a biffé cette clause, mais il y avait peu de députés présents. Je crains que, si nous changeons le bill, il mourra entre les deux Chambres. Le parrain du bill (M. Létourneau) est absent et je crois qu'il serait désolé d'apprendre que son bill a eu ce sort malheureux. La Chambre est libre de décider ce qu'elle voudra, cependant.

M. Patenaude (Jacques-Cartier): Je ne connais pas la situation municipale de Québec, mais il me semble que nous devrions laisser la population de Québec libre de choisir le mode d'élection de son maire. Dans les circonstances, je crois devoir me rallier à la proposition de l'échevin de Saint-Sauveur.

M. l'Orateur: L'amendement sera-t-il adopté?

La motion étant mise aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Authier, Baillargeon, Beaudoin, Bercovitch, Bertrand, Bouchard, Bray, Charbonneau, Dufresne, Duranleau, Gault, Hamel, Houde, Lafleur, Lafrenière (Berthier), Langlais, L'Archevêque, Lemieux (Wolfe), Lortie (Soulanges), Morin, Oliver, Ouellet, Patenaude, Pellerin, Perrault, Plante, Sauvé, Smart, Tétreau, Thériault, 30.

Contre: MM. Bergeron, Bordeleau, Caron, David, Dufour (Matapédia), Fortier, Galipeault, Lafrenière (Richelieu), Lahaie, Laperrière, Lapierre, Lortie (Labelle), Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreau, Moreault, Nicol, Pilon, Ricard, Richard, Roy, Saurette, Taschereau, 23.

Ainsi, l'amendement est adopté. (Applaudissements)

Hôpital français

M. Richard (Verchères) propose, appuyé par le représentant de Missisquoi (M. Saurette), que, vu que le bill 126 amendant la loi constituant en corporation l'Hôpital français a pour objet l'expansion d'une oeuvre de charité et de bienfaisance publique, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

Association de bienfaisance des pompiers de Montréal

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Mercier (M. L'Archevêque), que, vu que le bill 110 amendant la charte de l'Association de bienfaisance des pompiers de Montréal a pour objet l'expansion d'oeuvres de bienfaisance et de secours mutuels, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

Succession J.-A. Massue

M. Patenaude (Jacques-Cartier) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Dorion (M. Tétreau), que, vu le rejet par le Conseil législatif du bill 77 amendant la loi 12 George V, chapitre 145, concernant la succession de feu Joseph-Aimé Massue, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

Charte de Bagotville

M. Delisle (Chicoutimi) propose, appuyé par le représentant de Frontenac (M. Baillargeon), que, vu que le bill 103 amendant la charte de la ville de Bagotville a été retiré, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

Ville de Barkmere

M. Richard (Verchères) propose, appuyé par le représentant de Missisquoi (M. Saurette), que, vu que le bill 55 constituant en corporation la ville de Barkmere a été rejeté, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction des frais d'impression et de traduction.

Adopté.

Subsides

L'honorable M. Nicol (Compton) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

M. Langlais (Témiscouata) propose par voie d'amendement, appuyé par le représentant de Montréal-Dorion (M. Tétreau), que tous les mots après "que" soient retranchés et remplacés par les suivants: "cette Chambre regrette que le gouvernement ait négligé de présenter des mesures et d'adopter une politique vigoureuse tendant à améliorer sensiblement le sort des cultivateurs, des ouvriers, des colons et des employés civils".

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) répond aux arguments du député de Témiscouata (M. Langlais) en donnant les causes de la crise actuelle dont souffre tout le pays et qu'il rejette sur les conservateurs: le rejet de la réciprocité en 1911, la participation extravagante à la guerre...

M. Houde (Montréal-Sainte-Marie): Est-ce que les amis de l'honorable ministre de la Colonisation n'étaient pas favorables à l'enrôlement volontaire qui nous a enlevé 300,000 hommes?

L'honorable M. Perrault (Arthabaska): Oui, mais vous avez été pour la conscription, et c'est la conscription qui a été cause de la crise. Et il y a aussi la loi de faillite.

Il énumère tout ce que le gouvernement a fait et annonce qu'il espère pouvoir augmenter la prime de défrichement.

M. Langlais (Témiscouata): Vous avez la bourse.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Oui, et nous allons la garder.

M. Tétreau (Montréal-Dorion) touche aussi à la question des employés civils. Il réclame de meilleurs traitements pour les fonctionnaires.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) affirme que le gouvernement a amélioré le sort des employés, leur a donné des assurances, leur paie une pension ainsi qu'à leur veuve. Il dit que les salaires ont doublé pour les hauts fonctionnaires. Il parle aussi de la clause des salaires raisonnables. Il promet que la Commission du service civil fera encore mieux.

M. Patenaude (Jacques-Cartier): Il y a des employés de 25, 30 et 36 ans de service au palais de justice de Montréal, qui ne gagnent que $1,000 à $1,100 par année.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nommez-les.

M. Patenaude (Jacques-Cartier) donne des noms. Je donne, ajoute-t-il, tous ces faits sans accompagnement d'orchestre. Je crois que l'on ne devrait pas attendre le rapport de la Commission du service civil pour améliorer le sort de ces braves employés, qui ne gagnent que des salaires de famine.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Beaudoin, Bray, Dufresne, Duranleau, Gault, Houde, Lafleur, Langlais, L'Archevêque, Lortie (Soulanges), Patenaude, Pellerin, Plante, Sauvé, Tétreau, 15.

Contre: MM. Authier, Baillargeon, Bergeron, Bernard, Bertrand, Bordeleau, Bouchard, Bugeaud, Caron, Charbonneau, David, Delisle, Dufour (Matapédia), Fortier, Galipeault, Hamel, Lafond, Lafrenière (Berthier), Lafrenière (Richelieu), Lahaie, Laperrière, Lapierre, Lemieux (Wolfe), Lortie (Labelle), Madden, Mercier fils (Châteauguay), Mercier (Trois-Rivières), Moreau, Moreault, Morin, Nicol, Ouellet, Perrault, Pilon, Ricard, Saurette, Savoie, Taschereau, Thurber, 39.

Ainsi, l'amendement est rejeté.

La motion principale étant mise aux voix, la Chambre l'adopte.

 

En comité:

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas trente mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'immigration, colonisation et publicité, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Adopté.

2. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour arpentage, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

Adopté.

3. Qu'un crédit n'excédant pas deux millions deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour amélioration et entretien des chemins, pour l'exercice finissant le 30 juin 1925.

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) explique que l'on a entretenu 1,400 milles de chemins l'an dernier et que l'on en entretiendra 1,700 l'an prochain.

M. Patenaude (Jacques-Cartier) intervient.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) dit que les députés de l'opposition ne peuvent obtenir d'octrois pour la voirie.

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) déclare que les députés de l'opposition comme les députés ministériels ont la même justice au département de la Voirie et qu'il n'y a aucune considération de partisanerie politique dans l'octroi pour la construction, la réfection ou l'entretien des chemins. Le département se base sur les besoins et les demandes des municipalités, et non sur la partisanerie politique. Un député de l'opposition a donc le même droit à la considération de ses demandes au département de la Voirie.

C'est à tort qu'il a été écrit dans un journal de Joliette10 que le député de Joliette (M. Dufresne) n'a pu rien obtenir pour la route Joliette-L'Assomption et qu'il suffisait de son intervention pour que la route ne soit pas construite. Le gouvernement veut construire cette route depuis longtemps, mais il lui faut attendre que les municipalités intéressées s'entendent d'abord à ce sujet.

M. Dufresne (Joliette) déclare que ce manque d'entente est la seule cause du retard dont on se plaint au sujet de la construction de cette route. Il n'a jamais écrit dans un journal de Joliette au sujet de cette route, comme on le lui a reproché. Il remercie le gouvernement d'avoir voté les octrois pour la construction de cette route désirée depuis longtemps. Il ajoute de plus que les octrois qu'il a demandés aux différents départements lui ont été accordés.

La résolution est adoptée.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions et demande la permission de siéger de nouveau. Lesdites résolutions sont lues deux fois et adoptées.

Ajournement

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), que, lorsque cette Chambre s'ajournera, elle soit ajournée à ce jour, le samedi 15 mars, à 10 h 30 de l'avant-midi.

Adopté.

La séance est levée à 1 heure.

__________

NOTES

 

1. La Chambre, selon le Soleil, a applaudi au commencement de la séance M. Télesphore Simard, député de Témiscamingue, qui, pour la première fois de la session a pris son siège à l'Assemblée législative après une maladie de quelques mois.

2. Le Canada estime que le discours de M. Authier est l'un des plus éloquents discours prononcés depuis le début de la session.

3. Les chiffres donnés pour chaque province correspondent à ceux de l'Annuaire statistique du Canada pour le 31 décembre 1920. Mais, pour le nombre total de chemins de fer au Canada, le député a arrondi légèrement le chiffre qui était au 31 décembre 1920 de 39,384.

4. M. Lortie avait fait son premier discours la veille.

5. La Patrie donne le nom de McCormick, la Gazette celui de McCormack.

6. La Patrie écrit ce nom de la façon suivante: Eshbau.

7. Il s'agit du Chicago Drainage Canal construit entre 1892 et 1900 pour permettre à l'eau du lac Michigan d'entraîner vers le sud les eaux polluées de la rivière Chicago plutôt que de les recevoir. À cause de ce détournement des eaux, les États voisins ainsi que le Canada craignaient cependant de voir baisser le niveau des Grands Lacs.

8. Dans le Soleil, il est question de 2,000,000 de chevaux-vapeur. Dans le Star, de 200,000.

9. Dans le Soleil, on mentionne la Suisse au lieu de la Belgique.

10. Il s'agit de l'Étoile du Nord du 21 février 1924.