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Version finale

18e législature, 1re session
(3 novembre 1931 au 19 février 1932)

Le mercredi 3 février 1932

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable T.-D. Bouchard

La séance est ouverte à 3 h 251.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Rapports de comités:

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le vingt et unième rapport du comité permanent des bills publics en général. Voici le rapport:

Votre comité a décidé de rapporter, sans amendement, le bill suivant:

- bill 163 modifiant la loi des cités et villes relativement au droit de vote des compagnies à fonds social;

- bill 93 constituant en corporation l'Association des maréchaux-ferrants de la province de Québec.

Manutention de la gazoline

L'honorable M. Perrault (Arthabaska), appuyé par le représentant de Lotbinière (l'honorable M. Francoeur), demande la permission de présenter le bill 67 concernant la manutention de la gazoline.

Ce projet de loi a pour but d'empêcher la contrebande de la gazoline, d'exercer un contrôle plus efficace sur la manutention de la gazoline dans les limites de la province de Québec. Le gouvernement veut empêcher, suivant une expression populaire, tout "bootlegging" de la gazoline. Le bill obligera chaque importateur, distributeur ou agent de gazoline à fournir au gouvernement, à la fin de chaque année, un rapport de ses opérations.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

Commission des services publics, experts techniciens et employés

M. Sauvé (Deux-Montagnes), appuyé par le représentant de Rouville (M. Barré), demande la permission de présenter le bill 172 modifiant la loi de la Commission des services publics relativement aux experts techniciens et employés de la Commission.

Le bill a pour but de retirer au gouvernement le droit de nommer les experts et techniciens de cette commission.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

Constituts et régime de tenure dans Hull

M. Guertin (Hull), appuyé par le représentant de Montréal-Verdun (M. Lafleur), demande la permission de présenter le bill 173 modifiant la loi relative aux constituts et au régime de tenure dans la cité de Hull.

La loi relative aux constituts et au régime de tenure dans la cité de Hull rallonge de deux ans, pour les propriétaires de terre de cette cité, la période durant laquelle ils pourront faire l'acquisition de leurs propriétés auprès des propriétaires fonciers, à une valeur fixe.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

Montreal Tramways Limited Loi 1 George V, article 18

M. Cohen (Montréal-Saint-Laurent) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 134 modifiant l'article 18 de la loi 1 George V (1911), chapitre 77 soit maintenant lu une deuxième fois.

Le bill demande la ratification par la Législature du contrat entre la Montreal Tramways Company et les villes de Longueuil et Montréal-Sud, en ce qui concerne le service d'autobus sur le pont du havre.

Adopté sur division. Le bill est renvoyé au comité général.

Pêcheries maritimes

M. Chouinard (Gaspé-Sud) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Dorion (M. Francoeur):

Que cette Chambre est d'avis qu'il serait opportun d'appeler la coopération du gouvernement fédéral en vue du développement de nos pêcheries maritimes.

Comme je suis le représentant d'un comté particulièrement intéressé aux pêcheries, j'ai cru qu'il était de mon devoir de présenter cette motion, inscrite au feuilleton il y a quelques semaines.

Je ne veux être que l'interprète fidèle des pêcheurs de Gaspé. Je n'ai qu'une ambition, exprimer leurs sentiments et leur desiderata avec modération, dans l'espoir de pouvoir, par quelques suggestions, participer à la politique bienfaisante dont ils font l'objet de la part du gouvernement de cette province. Qu'il me soit permis de remercier le gouvernement de ce qu'il a fait pour les pêcheurs de mon comté depuis quelques années. Je veux aussi réclamer pour ces pêcheurs certaines réformes nécessaires à leur industrie.

La pêche est une des plus anciennes industries du Canada. Lors de la Confédération, le gouvernement fédéral avait l'administration de toutes les pêcheries. À la suite de décisions judiciaires, il y eut des changements et, en 1922, le gouvernement fédéral transféra à Québec l'administration des pêcheries de cette province, sauf celles des Îles-de-la-Madeleine.

Aujourd'hui, le fédéral contrôle les pêcheries en eau salée des provinces maritimes et de la Colombie anglaise, les pêcheries en eau douce des provinces des Prairies et celles des Îles-de-la-Madeleine.

En 1930, la valeur totale des pêcheries du Canada était de $47,864,216 et l'industrie employait plus de 80,000 personnes. En 1931, les pêcheurs du Canada ont débarqué plus de huit millions de quintaux de poissons, mais il ne faut pas oublier qu'ils ont opéré dans des conditions défavorables. De plus, le rendement sera certainement moindre pour la dernière année que pour 1930, car la crise mondiale a eu pour effet de faire diminuer les prix sur le marché.

Pour l'année 1930, la valeur de la production des pêcheries de notre province fut de $2,502,998, soit $1,976,798 pour les pêcheries maritimes et $526,200 pour les pêcheries intérieures. Plus de 12,000 personnes y trouvèrent de l'emploi. Dans les premiers onze mois de 1931, les pêcheurs québécois ont débarqué 61,500,000 livres de poisson et 15,000 personnes ont été employées, soit 1,500 dans les exploitations de pêches lacustres et fluviales, et le reste dans les exploitations de pêches maritimes.

J'ai cru à propos de faire cette brève revue de l'industrie de la pêche au pays, avant de traiter des pêcheries maritimes dans notre province et de la coopération que nous sommes en droit d'attendre du fédéral.

Depuis 1922, les pêcheries maritimes sont sous le contrôle de la province de Québec. Il s'est fait du bon travail et, au gouvernement libéral qui dirige ses destinées, les pêcheurs doivent beaucoup. Il suffit de référer aux comptes publics de ces dernières années, surtout, pour s'en convaincre. Grâce aux généreux octrois accordés pour la construction des barges et des chaloupes de pêche, pour les gréments, pour engins à gazoline, etc., nos pêcheurs exercent aujourd'hui leur rude métier dans des conditions plus favorables qu'autrefois.

Ils ont confiance en l'honorable ministre des Pêcheries (M. Laferté) qui connaît bien nos marins pêcheurs, car il les visite souvent, a donné son attention à leur industrie. Ils ont apprécié son oeuvre, l'oeuvre du gouvernement libéral, et ils n'ont pas manqué de donner, l'occasion s'étant offerte, lors des dernières élections, le témoignage de gratitude qu'il leur incombait de donner.

Nos pêcheurs sont aussi reconnaissants au surintendant des pêcheries maritimes qui leur a jamais ménagé ses sympathies. Ils sont confiants que le gouvernement, par une politique généreuse et bien ordonnée, assurera l'essor et la stabilité de cette industrie.

Plus de seize différentes espèces de poissons sont prises dans les eaux maritimes de notre province, mais il est indéniable que la morue séchée est notre plus importante variété. Sur les marchés étrangers, sa qualité est reconnue et elle se vend à prime. Tous les rapports, tant du fédéral que du provincial, justifient cette déclaration.

Pour retenir le marché, le gouvernement a fait des efforts. Des classificateurs et des inspecteurs ont été nommés. Les devoirs de ces officiers consistent à surveiller les établissements où l'on prépare le poisson et à faire la classification lors de l'exportation. C'est un travail délicat mais important. On a dit quelquefois que la classification était trop sévère. Je suis persuadé que nos pêcheurs se convaincront davantage de la nécessité de mettre sur le marché une marchandise de première qualité pour le conserver, ce qui permet aux pêcheurs d'obtenir des prix plus avantageux pour leurs produits. Il faut reconnaître les exigences des marchés étrangers et prendre tous les moyens à notre disposition pour les garder. J'aime à croire que mes paroles ne seront pas mal interprétées par ceux qui n'ont pas partagé cette manière de voir dans le passé, car je ne désire qu'une chose: travailler pour que les pêcheurs reçoivent le meilleur rendement possible, en tenant compte des difficultés à surmonter.

Notre principal marché pour la morue séchée est en Italie. Notre province, jusqu'à date, a compté sur le représentant canadien du commerce pour la vente du poisson.

Or, vu les exigences du marché, je crois que le gouvernement canadien devrait avoir en Italie un représentant attitré du département des pêcheries.

Je ne prétends pas que le représentant actuel du commerce ait manqué en quoi que ce soit dans l'accomplissement de ses devoirs. Loin de moi cette pensée. Les pêcheurs ont cependant à plusieurs reprises constaté que leurs acheteurs en Italie faisaient des représentations qu'ils n'auraient pas faites, s'il avaient eu, sur les lieux, un représentant connaissant ce que c'était du poisson et capable de discuter avec les acheteurs.

N'oublions pas que le Canada ayant imposé des droits sur les marchandises importées d'Italie, Mussolini a répondu en se servant de la même arme et, en particulier, sur le poisson du Canada, un droit de 15 % a été imposé2. En provoquant cette augmentation de 15 % de la part de l'Italie, le gouvernement fédéral n'a certainement pas aidé nos pêcheurs. S'il juge à propos de ne pas faire davantage, ne serait-il pas possible que la province de Québec ait son propre représentant en Italie, au moins pendant les mois d'exportation? J'ai confiance que cette suggestion sera favorablement considérée.

Je crois de plus qu'il serait opportun pour retenir notre marché de poisson aux États-Unis d'avoir un représentant à Boston et un autre à New York. Nos pêcheurs et nos petits commerçants de poisson en retireraient certainement un grand avantage. Ces agents pourront aider directement nos pêcheurs.

Ces représentants, me dira-t-on, ne donneront pas leurs services gratuitement, et le budget des pêcheries en sera d'autant obéré. Si je réfère aux comptes publics, je vois qu'un montant d'à peu près $12,000 a été payé l'an dernier pour les services de certains officiers sous le contrôle de la Coopérative fédérée. J'apprécie le travail fait par la Coopérative fédérée, mais je crois être encore l'interprète des pêcheurs en disant que les résultats obtenus ne peuvent maintenant justifier le gouvernement de continuer à payer le salaire de ces employés.

Je n'entends pas, par cette déclaration, m'attaquer à l'organisation coopérative. C'est peut-être le seul moyen d'assurer aux pêcheurs la plus forte part du revenu de l'industrie, et il est à souhaiter que nos coopératives locales puissent survivre et se réorganiser. Là n'est pas le point. Je reste d'avis que, durant les prochaines saisons de pêche, des représentants en Italie et aux États-Unis feraient pour les pêcheurs un travail plus efficace que celui que pourraient faire les quelques employés de la Coopérative fédérée, malgré toute leur bonne volonté.

J'ai dit que la morue séchée constitue la variété la plus importante des poissons que nous mettons sur le marché.

Pendant longtemps, dans les provinces maritimes, le principal revenu des pêcheries se trouvait aussi dans le commerce de poisson salé. La mise en vigueur des tarifs Fordney-McCumber et Hawley-Smooth ayant pour effet de réduire considérablement le marché américain, pour le produit des pêcheries du Canada, et le changement des conditions mondiales ont fait subir aux pêcheries de ces provinces d'importantes modifications.

Des efforts ont été faits pour établir un commerce de poisson frais sur le marché canadien. Il est reconnu que les Canadiens ne consomment pas beaucoup de poisson. Ce qui peut paraître étrange, c'est qu'ils en consomment moins depuis que les prix sont réduits.

Le 15 juillet dernier, à la Chambre des communes, M. Rhodes, ministre des Pêcheries, disait: "Un relèvement de 10 livres par tête d'habitant dans la consommation annuelle du poisson augmente la demande de 10 millions de livres". Même si nous atteignions ce chiffre, qui n'a rien d'extravagant, notre consommation resterait encore en deçà des trois quarts de celle de la mère patrie où la population, cependant, se nourrit surtout de viande.

Je ne me fais pas d'illusion. Je me rends compte que des centres de pêcheurs sont échelonnés tout le long de la côte nord et de la côte sud, qu'un quart seulement peut avoir un accès facile aux chemins de fer, et qu'avec notre production actuelle, nous ne pouvons contrôler les marchés de poisson frais au Canada.

Je me rends compte aussi que nous n'avons pas dans Québec de pêcheurs par chalutiers. Nous n'avons dans Québec que des pêcheurs à la ligne ne pouvant exploiter leur industrie que du mois de mai au mois de novembre. Ils sont donc handicapés par les pêcheurs des provinces maritimes. Ils ne peuvent pas par eux-mêmes alimenter le marché toute l'année.

Je sais cependant que le gouvernement de cette province verra à ce que nos pêcheurs puissent bénéficier du travail qui s'annonce pour le développement des marchés de poisson frais. Ici la question de l'entreposage frigorifique peut se poser. N'y a-t-il pas lieu de tenter une expérience en ce sens, afin de conserver notre homard, notre saumon de Gaspé? Il n'est pas à propos de négliger le commerce de poisson frais. Il nous faudra trouver des débouchés, surtout si le gouvernement italien nous ferme son marché.

Il y a moyen de trouver un marché pour le poisson frais dans Québec et dans les autres provinces canadiennes. Il n'y a pas de raisons pour que le poisson réellement frais ne soit pas servi sur la table de nos demeures, dans les hôtels, les restaurants et les wagons-réfectoires. Mais il est désirable que nous prenions notre part, qu'il s'agisse de poisson frais ou congelé par système moderne. S'il y a des organisations qui désirent nous aider, ne les négligeons pas, car c'est à elles qu'un jour les pêcheurs devront leur salut.

Nous pouvons en offrir plusieurs variétés aux consommateurs, et ils seraient contents d'avoir du vrai saumon de Gaspé. L'an dernier, le saumon de Terre-Neuve a envahi nos marchés de Québec et de Montréal. En 1930, il s'est importé un million de livres de saumon de Terre-Neuve. Le gouvernement fédéral aurait dû protéger notre marché contre cet envahissement, car ce saumon, que l'on donne comme du saumon de Gaspé, n'en est pas et cela est de nature à déprécier notre produit sur les marchés extérieurs. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas alors coopéré avec nous en imposant des droits de trois à cinq centins par livre? Puisse cette coopération nous être assurée avant longtemps.

Les pêcheurs, pendant les beaux mois de l'année éprouveront de grandes difficultés à se procurer de la "boëtte3". Désireux de travailler, ils sont très souvent forcés de chômer parce qu'ils n'ont pas de harengs et ne peuvent s'en procurer.

Je suis convaincu que le gouvernement de cette province aiderait grandement les pêcheurs en construisant des entrepôts frigorifiques pour la congélation de la "boëtte". Ils pourront ainsi s'en procurer au besoin et ne seront plus forcés de perdre leur temps le long des quais ou sur les rivages.

Les pêcheurs de Gaspé comptent sur cette aide, et j'ai confiance qu'ils ne seront pas déçus. Ainsi pourront-ils, ces valeureux fils de la mer, travailler davantage et exercer avec plus de satisfaction leur rude métier.

Il est entendu que le gouvernement doit prendre la responsabilité des entreposages de la "boëtte". Tous les pays, y compris Terre-Neuve et le Canada, ont constaté que cette entreprise relevait de l'État.

Que Québec fasse une expérience. Nous en retirerons certainement un avantage.

Si nous ne pouvons compter sur le gouvernement fédéral pour nous construire des entrepôts frigorifiques pour la "boëtte", ne serions-nous pas en droit d'attendre une plus grande coopération dans l'installation d'une station expérimentale sur la côte de Gaspé?

Les services du service biologique de la province, les activités de la station biologique des Trois-Pistoles, ne s'étendent pas aux pêcheries maritimes.

Au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, en Colombie anglaise, le gouvernement canadien a des stations expérimentales. Le fait d'avoir pratiquement fait disparaître toute dualité du contrôle ne devrait pas empêcher une coopération désirable et désirée des pêcheurs. Le département de l'Agriculture à Ottawa contrôle des fermes expérimentales dans notre province et les cultivateurs profitent des recherches souvent faites à grands frais, par des cours pratiques et des démonstrations sur place. La même coopération existe au service des mines, et les pêcheurs prétendent, avec raison, que la même chose pourrait être pratiquée quant aux pêcheries maritimes, et aussi, ils bénéficieraient des cours pratiques qui leur seraient donnés en français et en anglais. C'est une coopération à laquelle ils ont droit.

Les pêcheurs sont en droit d'attendre une coopération plus étroite entre le fédéral et le provincial lorsqu'il s'agit de développer leur industrie. Le gouvernement fédéral ne devrait pas mesquiner sur cette coopération.

M. le Président, quant à ce qui regarde le provincial, les pêcheurs de notre province se demandent si le ministère de la Colonisation et des Pêcheries va leur continuer les généreux octrois qu'il a bien voulu leur accorder dans le passé pour construction de barges. Dans le cas contraire, si vous décidez de ne pas encourager nos pêcheurs par un octroi aussi libéral pour la construction de leurs barges et de leurs "flats", ne pourriez-vous pas leur donner à ces gens, qui souffrent et qui peinent, une prime ressemblant à celle que vous donnez aux colons depuis quelques années, afin de pouvoir faire face à la situation lorsque la saison de pêche est moins bonne?

Sachant que cette question est à l'étude, je n'ai pas l'intention d'insister davantage sur le sujet.

J'ai confiance dans l'avenir des pêcheries, assuré de l'essor que leur donnera le gouvernement de Québec. C'est cette conviction qui m'a engagé à demander plus de coopération de la part du gouvernement fédéral, coopération qu'il accorde volontiers à l'agriculture et au service des Mines de cette province.

M. Rochette (Charlevoix-Saguenay): Je commencerai par féliciter l'honorable député de Gaspé-Sud pour l'intéressant débat qu'il a soulevé. Cette question intéresse profondément la population de mon comté.

Les pêcheries sont la huitième industrie du Canada et il n'y a pas de raison pour qu'elle ne fût pas la première de la province de Québec. Nous avons sur la Côte-Nord un des plus considérables champs de pêche du monde. Les quatre plus grands champs de pêche sont situés à l'ouest de l'Europe: au détroit de Behring, sur les côtes du Pacifique et de l'Atlantique. Le champ de l'Atlantique appartient à la province de Québec, dans la proportion de 80 %. Sur la Côte-Nord, il y a 800 à 900 milles de côtes propices à la pêche. Nous avons dans le golfe Saint-Laurent les plus belles pêches en eau profonde qu'il puisse y avoir.

On évalue à $60,000,000 les produits annuels de l'industrie de la pêche, en Canada. La part du Québec est de $3,000,000.

Il s'est élevé des difficultés, des controverses acerbes, au sujet des pêcheries. C'est dire que nos pêcheries ont été un enjeu considérable. Elles ont même fait l'objet de traités. Il a fallu faire des traités avec les États-Unis. Même au traité de Paris, les États-Unis voulaient s'emparer de nos pêcheries. Il y a eu des difficultés, même dans notre pays, et elle ont été réglées en 1920 par le Conseil privé. Il fut décidé que le gouvernement fédéral avait juridiction sur les pêcheries en eau profonde, pour les eaux salées, mais que Québec, les provinces, gardaient4 juridiction pour les eaux intérieures.

Cette dualité de juridiction ne pouvait durer et, grâce au député d'Arthabaska (l'honorable M. Perrault), alors ministre des Pêcheries, nous avons obtenu d'Ottawa, en 1922, le contrôle sur nos pêcheries. Depuis cette date, le gouvernement provincial a organisé un service presque parfait de nos pêcheries. Québec a pu passer une loi des pêcheries qui a amené une amélioration sensible Depuis l'adoption de cette loi, cependant, il semble que le pouvoir central se soit désintéressé de nos pêcheries.

Alors que le gouvernement fédéral ne dépensait pour les pêcheries de Québec, en 1921, que $88,000, l'an suivant, le gouvernement provincial dépensait des centaines de milliers de dollars. On a reconnu que jamais les pêcheries n'avaient obtenu autant d'attention que depuis que la province en a pris la direction.

Notre système des pêcheries a été loué par toutes les autres provinces du dominion. Un journal de Nouvelle-Écosse, intéressé aux pêcheries, demandait l'an dernier à l'honorable E.-N. Rhodes, ministre fédéral des Pêcheries, d'adopter pour le dominion une loi aussi avantageuse que celle de la province de Québec, qui a révolutionné ici le système de nos pêcheries maritimes.

Je dis qu'il est temps que nous demandions la coopération d'Ottawa. Ottawa devrait introduire tous nos produits sur les marchés; c'est Ottawa qui devrait établir un laboratoire de biologie afin de protéger nos pêcheries par des recherches poussées. Le service fédéral de biologie n'a jamais voulu nous donner de station biologique, bien qu'il en ait établi deux dans l'Atlantique. Ottawa a aussi un service de renseignements des pêcheries dont les provinces maritimes profitent, mais dont Québec est privé Pourquoi n'en fait-on pas jouir les pêcheries de la Côte-Nord et de Gaspé? Il y a aussi un service de collection du poisson en haute mer. Pour 10 sous du 100 livres, un bateau nolisé par le gouvernement fédéral va chercher le poisson pris par le pêcheur pour le livrer au marché. Le gouvernement fédéral devrait nous donner ce même service dans Québec.

Les pêcheries du flétan de Québec devraient aussi être exploitées. Toutefois, je dois féliciter le gouvernement fédéral d'avoir fait une enquête sur le flétan. Mais si l'on avait fait ce que je suggère, on aurait trouvé près de l'Île d'Anticosti des bancs de flétan qui auraient été une source de revenus pour nos pêcheurs. Il y a autour d'Anticosti des bancs de flétans tout à fait inexploités. Comme les pêcheurs ne savent pas quoi faire de leur flétan, pour la bonne raison qu'ils n'ont pas de débouchés, ils le rejettent à l'eau. Il faudrait faire quelque chose pour les pêcheurs dans ce sens, et Québec deviendrait grand producteur de flétan.

On a beaucoup parlé des marsouins, mais le gouvernement a fait du bon travail pour les déloger. Les marsouins sont migrateurs et on ne sait quand ils s'en iront. Ils sont ici après avoir miné les pêcheries du Danemark et des côtes d'Europe. Aujourd'hui, c'est la province de Québec qui en souffre et le fédéral devrait aider à le chasser.

Nous devons demander la coopération d'Ottawa. Je suggèrerais qu'il y ait une conférence entre les représentants du Québec et d'Ottawa afin d'en venir à une entente pour agir en coopération au sujet des pêcheries. Sur la Côte Nord et sur les côtes de la Gaspésie, nous avons les plus belles sortes de poissons. Mais si nous exportons 80 % de notre poisson séché, dont les 2/3 aux États-Unis, nous importons des États-Unis 90 % de notre poisson frais.

Nous sommes à un tournant de l'histoire des pêcheries; le poisson séché ne se vend plus, et il faudrait trouver un moyen de conservation de notre poisson frais, grâce à la réfrigération. Nos pêcheurs devraient pouvoir conserver leur poisson à l'état frais, et je demande que le gouvernement fasse quelque chose en ce sens.

Avec la coopération du fédéral et l'esprit dont notre gouvernement a fait preuve depuis bientôt dix ans, nous aurons les plus grands succès avec nos pêcheries.

L'honorable M. Laferté (Drummond): Je remercie le proposeur de cette intéressante motion et je fais le même compliment au secondeur. Ce débat est intéressant à tous les points de vue. Je puis assurer le proposeur le secondeur de cette motion que leurs suggestions seront considérées. Nos pêcheries prennent une importance plus grande chaque année.

Le gouvernement a voulu protéger ses pêcheurs. Nous avons cru devoir faire des économies dans le budget de cette année, mais vous verrez que nous n'avons pas jugé à propos de diminuer les crédits des pêcheries; bien plus, nous les avons augmentés de $60,000, alors que le gouvernement faisait des coupures dans tous les autres domaines de l'administration.

L'an dernier, au cours de la période estivale, d'après une publication du gouvernement fédéral5, 15,000 personnes ont été employées dans les pêcheries québécoises.

Toujours nous nous sommes efforcés de protéger nos pêcheurs contre l'envahissement. Ainsi, le gouvernement a empêché les pêcheurs de Terre-Neuve d'envahir nos eaux, malgré de vives protestations, parfois. Le 15 janvier dernier, j'ai reçu une lettre disant que le gouvernement de Terre-Neuve avait pris des mesures pour empêcher les nationaux de violer les règlements de la province de Québec. Le gouvernement de Terre-Neuve a dit qu'il observerait les règlements édictés par Québec.

L'an dernier, le département a payé $18,904 et $13,730 à ses inspecteurs de chasse et de pêche; il a même donné $15,0006 aux classificateurs de poissons. De plus, le gouvernement a subventionné un grand nombre de barques de pêcheurs pour une somme de plus de $115,000, sans compter les subventions pour les agrès de pêche, dommages subis, etc. Grâce à cette politique, le nombre de pêcheurs a augmenté de 35 à 50 %7 dans Québec.

En secours aux pêcheurs sinistrés, le gouvernement a donné plus de $19,000 au cours de l'année. Nous avons voulu garder non seulement nos fils sur le sol natal, mais aussi garder les fils des pêcheurs chez eux. Nous avons payé $28,059.70, l'an dernier, pour les réclamations des pêcheurs.

Des jeunes gens ont été envoyés à l'école des pêcheries de Dalhousie, afin de leur donner une bonne éducation dans les différents systèmes de pêcheries.

Nous avons donné toute notre attention aux pêcheries.

Le gouvernement espère continuer encore cette politique, afin que nos pêcheurs demeurent toujours satisfaits de l'aide qui leur est accordée aussi largement.

L'an dernier, nous avons eu chez nous une conférence de biologistes qui sont venus étudier nos pêcheries, et le rapport de ces savants sera connu sous peu. C'est un grand honneur que l'on a fait à Québec.

Le gouverneur a donné des subsides intéressants pour la construction de glacières au Havre-Saint-Pierre, à la Rivière-Saint-Paul et ailleurs.

Je me rappelle les magnifiques conventions que j'ai présidées dans Gaspé et la reconnaissance des pêcheurs envers le gouvernement de notre province. Le gouvernement ne fera pas comme M. Houde qui était là en même temps, à la veille des dernières élections dans les districts de pêcheurs, en promettant une école de pêcheries, comme si nos pêcheurs ne savaient pas pêcher.

Mais chose curieuse, je me rappelle aussi cette autre parole de M. Houde prononcée antérieurement à la conférence internationale des pêcheries à Montréal, à l'Hôtel Windsor, dans un banquet en l'honneur de M. Rhodes. M. Houde, qui ne parlait pas alors comme chef de l'opposition, disait: "Le ministre des Pêcheries est ici. Je suis heureux de dire que c'est sous le ministère de M. Laferté que les pêcheries ont fait le plus de progrès dans notre province."

J'aime mieux cette opinion que celle de la veille des élections, et je puis assurer la province et nos pêcheurs que le gouvernement continuera d'accorder le plus grand appui à nos pêcheries.

Le budget étant voté, nous allons tracer un programme qui satisfera ces pêcheurs. Dans ce domaine comme dans tous les autres, la vieille province marchera toujours de l'avant. Nous, nous ferons mieux, car nos pêcheurs savent leur métier. Nous tâcherons de diriger nos efforts vers la construction d'entrepôts frigorifiques.

La motion est adoptée.

 

Questions et réponses:

Commission des accidents du travail, salaires

M. Guertin (Hull): 1. Depuis le mois d'août 1931, y a-t-il eu quelques augmentations de salaires parmi les employés de la Commission des accidents du travail, y compris les commissaires, médecins, etc.?

2. Dans l'affirmative: a. Quels sont les noms et prénoms de ces employés?

b. Le montant de chacune de ces augmentations?

c. Le salaire actuel de chacun de ces employés qui ont reçu lesdites augmentations?

L'honorable M. Arcand (Maisonneuve): 1. Oui.

2. a. Dr J.-E. Bélanger, M. Jules Vézina, M. J.-E. Cantin, M. J.-O. Bresse, M. Léo-Paul Nadeau, Mesdemoiselles Cécile Duchaine, Annette Bernard, Christine Brodrique, Adrienne Corriveau, Alida Couchy, Anna-Marie Létourneau.

b. Dr J.-E. Bélanger, $500; M. Jules Vézina, $300; M. J.-E. Cantin, $600; M. J.-O. Bresse, $600; M. Léo-Paul Nadeau, $400; Mlle Cécile Duchaine, $120; Mlle Annette Bernard, $60; Mlle Christine Brodrique, $60; Mlle Adrienne Corriveau, $60; Mlle Alida Couchy, $60; Mlle Anna-Marie Létourneau, $60.

c. Dr J.-E. Bélanger, $7000; M. Jules Vézina, $4300; M. J.-E. Cantin, $3000; M. J.-O. Bresse, $3000; M. Léo-Paul Nadeau, $2000; Mlle Cécile Duchaine, $960; Mlle Annette Bernard, $780; Mlle Christine Brodrique, $780; Mlle Adrienne Corriveau, $780; Mlle Alida Couchy, $780; Mlle Anna-Marie Létourneau, $780.

Commission des accidents du travail, nombre d'accidents

M. Guertin (Hull): 1. Quel est le nombre d'accidents soumis à la Commission des accidents du travail, depuis le 1er septembre 1931?

2. Combien ont été réglés définitivement?

3. Combien sont actuellement en suspens?

4. Combien n'ont pas été réglés?

L'honorable M. Arcand (Maisonneuve): 1. Sous la loi des accidents du travail, 1928, (18 George V, chapitre 79) du 1er septembre 1931 jusqu'au 28 janvier 1932: 1,390. Sous la loi des accidents du travail, 1931, (21 George V, chapitre 100) du 1er septembre 1931 jusqu'au 28 janvier 1932: 15,120.

2. Loi des accidents du travail, 1928, 1,134; loi des accidents du travail, 1931, 3,337.

3. Loi des accidents du travail, 1928, 256; loi des accidents du travail 1931, 11,783.

4. Loi des accidents du travail, 1928, 256; loi des accidents du travail, 1931, 11,783.

Commission des accidents du travail, plaintes

M. Guertin (Hull): 1. Depuis le 1er septembre 1931, des plaintes ont-elles été portées contre la Commission des accidents du travail:

a. Contre son fonctionnement?

b. Contre ses décisions ou jugements?

c. Contre ses médecins?

2. Dans l'affirmative, quel est le nombre de plaintes portées:

a. Par les industriels ou leurs représentants?

b. Par les ouvriers ou leurs organisations?

L'honorable M. Arcand (Maisonneuve): 1. a. On s'est plaint assez souvent de la lenteur apportée au paiement des compensations.

b. Je l'ignore.

c. Je l'ignore.

2. Les plaintes étaient verbales ou écrites; il est impossible d'en donner la statistique.

Commission des accidents du travail, nombre d'employés

M. Guertin (Hull): 1. Quel était:

a. Le 1er janvier 1931;

b. Le 1er septembre 1931;

c. Le 1er janvier 1932, le nombre d'employés à la Commission des accidents du travail?

2. Sur ce nombre, combien y avait-il de femmes ou filles et combien d'hommes?

L'honorable M. Arcand (Maisonneuve):

Date Hommes Femmes ou filles Total
a. Le 1er janvier 1931 : 24 55 79
b. Le 1er septembre 1931 : 28 59 87
c. Le 1er janvier 1932 : 44 81 125

 

Commission des accidents du travail, représentants ouvriers

M. Guertin (Hull): 1. Y a-t-il des représentants ouvriers dans la Commission des accidents du travail?

2. Dans l'affirmative, quels sont les noms et traitements de chacun d'eux?

3. Dans la négative, est-ce l'intention du gouvernement de faire une nomination qui représente l'élément ouvrier et quand?

L'honorable M. Arcand (Maisonneuve): 1. Les membres de la Commission des accidents du travail de Québec ont été nommés conformément à l'article 116 de la loi des accidents du travail, 1931, (21 George V, chapitre 100).

2. Les commissaires actuels sont: M. Robert Taschereau, président et Messieurs Simon Lapointe et O. E. Sharpe, commissaires. Leur traitement est prévu par l'article 52 du statut 21 George V, chapitre 100.

3. L'article 52 de la loi 21 George V, chapitre 100 décrète que la Commission des accidents du travail de Québec est composée de trois commissaires.

Louis Parent

M. Guertin (Hull): 1. Un nommé Louis Parent, de Dolbeau, ou des environs de Dolbeau, a-t-il été nommé à un poste quelconque dans la distribution des secours aux nouveaux colons dans les environs de Mistassini?

2. Dans l'affirmative, quel salaire avait-il et combien lui a été payé?

3. Qui a recommandé M. Parent pour cet emploi?

L'honorable M. Laferté (Drummond): 1. Non.

2. et 3. Répondu précédemment.

 

Subsides

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la résolution du budget, se lisant comme suit: "Qu'un crédit n'excédant pas un million de dollars soit ouvert à Sa Majesté pour chemins à la colonisation et aide à la colonisation, pour l'exercice finissant le 30 juin 1933", rapportée du comité des subsides et lue deux fois, mardi le 2 février courant, soit maintenant adoptée.

M. Guertin (Hull) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault) un amendement qui se lit comme suit:

Que tous les mots après "Que" dans la motion en discussion soient remplacés par les suivants:

Cette Chambre, tout en étant prête à voter le crédit demandé pour chemins de colonisation, regrette qu'au lieu d'exercer l'économie d'une manière judicieuse, le gouvernement a cru devoir l'exercer aux dépens des colons de cette province, en diminuant de $200,000 l'item en question, ce qui représente une diminution de six cent quatre-vingt quatorze mille dollars sur le montant total dépensé jusqu'à date pour l'exercice en cours et pour le même item;

Cette Chambre regrette en plus que la politique d'établissement de chômeurs industriels sur les terres de colonisation, instituée au mois de juillet 1931, au coût initial de $803,212.14 d'après l'état des mandats spéciaux émis durant la vacance du Parlement, soit abandonnée puisqu'aucun crédit n'est demandé pour cette fin.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Barré, Béïque, Duplessis, Élie, Fisher, Gault, Guertin, Lafleur, 8.

Contre: MM. Arcand, Authier, Bachand, Bastien, Bédard, Bélanger, Bercovitch, Bergeron, Bissonnet, Bouthillier, Caron, Casgrain, Charbonneau, Chouinard, Cohen, Côté (Bonaventure), Crête, Dansereau, Delisle, Dillon, Drouin, Duffy, Dugas, Duval, Fauteux, Filion (Laval), Fillion (Lac-Saint-Jean), Fortier, Fortin, Francoeur (Montréal-Dorion), Frigon, Gabias, Gagnon (Frontenac), Gagnon (Kamouraska), Gauthier, Giguère, Godbout, Grant, Laferté, Lahaie, Lamoureux, Lapierre, Legault, Lemieux, Lortie, McDonald, Mercier fils, Messier, Moreau (Roberval), Moreault (Rimouski), Morel, Piché, Plante, Power, Rochette, Sabourin, Saurette, Stockwell, Taschereau (Montmorency), Thisdel, Turcotte, Vautrin, 62.

Ainsi, l'amendement est rejeté.

La résolution est adoptée.

Ville d'Amos

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 53 concernant la ville d'Amos.

Adopté.

 

En comité:

Le comité se réunit sous la présidence de l'Orateur suppléant (M. Vautrin, Montréal-Saint-Jacques).

M. Authier (Abitibi): Amos ne veut que répartir sur 24 années, au lieu de 12, le paiement de ses obligations actuelles.

M. Duplessis (Trois-Rivières): Pendant les élections, on a vanté la prospérité de nos centres. Mais, aujourd'hui, c'est changé: on est obligé de présenter des lois spéciales.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Le député de Trois-Rivières nous a habitués à plus de sérieux que cela. S'il y a une province où il y a moins de misère qu'ailleurs, c'est bien ici. La province de Québec est la mieux située de toute la Confédération à l'heure actuelle. Ontario a dû emprunter $25,000,000 récemment, et le gouvernement fédéral, dont mon honorable ami parle si souvent, a emprunté $175,000,000 et a été heureux de trouver $228,000,0008. Ils n'en auront probablement pas assez.

Amos ne déclare pas un moratoire. En autant que la ville d'Amos est concernée, elle demande le pouvoir d'émettre d'autres obligations lorsque, dans quelques années, les présentes deviendront échues. C'est de la bonne finance.

Je le répète, c'est encore la province de Québec qui passe le mieux la présente crise. Si la situation est moins bonne que dans le passé, nous n'en sommes pas responsables, pas plus que nous ne voulons faire porter les responsabilités sur Ottawa. Chacun fait de son mieux, et je puis dire ceci, c'est que, lorsqu'il s'agira de boucler notre budget, nous serons encore la seule province à avoir un beau surplus.

M. Duplessis (Trois-Rivières): Le premier ministre s'éloigne de la question. Je ne répondrai pas au premier ministre qui a parlé en dehors du bill. Il a parlé de l'Ontario et d'Ottawa. Chose absolument certaine, c'est que la situation n'est pas fameuse ici, avec une province dont le compte de banque est soutiré de $15,000,000 et qui se voit obligée d'imposer de nouvelles taxes. Nous avons tort d'ignorer nos problèmes pour parler de ceux des autres provinces. Le moyen de guérir notre mal, c'est de ne pas en nier l'existence. Je ne vois pas pourquoi au lieu de chercher à guérir le mal, on tâche de faire dévier la question. D'après les dernières statistiques fédérales, il y a plus de faillites ici que partout ailleurs l'année dernière. Rien ne sert de se boucher les yeux en face de cette situation.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): C'est le contraire de ce que j'ai vu.

M. Duplessis (Trois-Rivières): Nous n'avons probablement pas lu les mêmes statistiques.

Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Loi des paroisses et fabriques

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 39 modifiant la loi des paroisses et des fabriques.

Adopté. Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Loi des licences

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 61 modifiant la loi des licences.

Adopté.

 

En comité:

Le comité se réunit sous la présidence de l'Orateur suppléant (M. Vautrin, Montréal-Saint-Jacques).

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): C'est un projet de loi pour permettre au contrôleur du revenu d'avoir une juridiction sur les chalets qui accueillent les touristes, pendant la saison d'été, le long des grandes routes, et aussi sur les bureaux d'information à l'entrée des villes ainsi que sur la sollicitation faite par les propriétaires d'hôtels. Les propriétaires de ces chalets devront faire l'enregistrement des visiteurs.

C'est une mesure de réglementation tant au point de vue moral qu'au point de l'hygiène. Les chalets seront inspectés par nos inspecteurs d'hôtels. Beaucoup de ces chalets ont de l'eau courante et sont bien tenus. Nous voulons voir à ce que tous soient bien tenus, afin d'assurer le confort des voyageurs. La province ne chargera rien à ces chalets pour ce service.

M. Duplessis (Trois-Rivières): Le trésorier va augmenter ses revenus.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Nous ne chargerons rien.

Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Loi des liqueurs alcooliques

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 62 modifiant la loi des liqueurs alcooliques soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté sur division.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Dépôt de documents:

Canalisation du Saint-Laurent

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) dépose sur le bureau de la Chambre la réponse à une adresse, en date du 4 décembre 1931, demandant la production de copie de toute correspondance (télégrammes et lettres) entre le gouvernement de cette province, aucun de ses membres et officiers, et le gouvernement fédéral, aucun de ses membres ou officiers et se rapportant à la canalisation du fleuve Saint-Laurent et à tout développement de la force hydraulique du fleuve Saint-Laurent, et cela, depuis le 1er janvier 1921 inclusivement jusqu'au 23 novembre 1931 inclusivement. (Document de la session no 47)

La séance est levée à 6 heures.

 

Deuxième séance du 3 février 1932

Présidence de l'honorable T.-D. Bouchard

La séance est ouverte à 8 h 40.

Prière.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Article de L'Action catholique

M. Chouinard (Gaspé-Sud): M. l'Orateur, je me lève sur une question de privilège. Je viens de prendre connaissance d'un article paru dans L'Action catholique d'aujourd'hui, au sujet d'une tempête à la Chambre pour la fin de la session. Je lis l'article:

"Il est fortement rumeur ce matin, au parlement, qu'un événement sensationnel termine la session provinciale. Un député de la gauche, M. Aimé Guertin, ferait motion pour traduire à la barre de la Chambre un journaliste de Montréal qui a attaqué un membre de la droite, également de Montréal. Le député de Hull estime qu'en attaquant ce député, le journaliste a attenté à l'honneur de la députation tout entière et c'est la raison pour laquelle la motion serait présentée.

"M. Aimé Guertin agirait ces jours-ci."

Si je me lève, c'est que l'honneur de la Chambre et la réputation d'un député sont en jeu. Je veux savoir si réellement le député de Hull (M. Guertin) réprouve l'article en question, la campagne faite9 par ce journaliste qui s'attaque à une portion notable de la députation.

M. Guertin (Hull): Je suis heureux d'avoir l'occasion de dire quelques mots sur ce sujet. La première nouvelle que j'en ai eue a été la lecture de cet entrefilet de L'Action catholique.

J'ai dit aux journalistes que je ne connais rien de cela. Je ne connais d'ailleurs pas le journaliste dont il s'agit. (Rires) Et je demande à mon collègue, le député de Gaspé-Sud, de dire ce qu'il pense de la chose.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Pourtant, L'Action catholique est un journal sérieux.

Association des maréchaux-ferrants

M. Drouin (Québec-Est) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 93 constituant en corporation l'Association des maréchaux-ferrants de la province de Québec.

Adopté.

 

En comité:

Le comité se réunit sous la présidence de l'Orateur suppléant (M. Vautrin, Montréal-Saint-Jacques).

M. le président: Le bill sera-t-il adopté?

Des voix: Drop! Drop!10

Des voix: Carried! Carried!11

Le comité étudie l'article 23 qui se lit comme suit12:

"23. Nul ne peut être admis à l'exercice du métier de maréchal-ferrant, à moins:

"1. Qu'il n'ait pratiqué ce métier en qualité d'apprenti, pendant une période de trois ans, chez un ou des maréchaux-ferrants;

"2. Qu'il n'ait subi des cours de maréchalerie, et en ait subi avec succès les examens.

"Le présent article ne s'applique pas à un maréchal-ferrant qui - dans les cités et villes d'une population de moins de 12,000 âmes - exercera, à la date de la mise en vigueur de la présente loi, le métier de maréchal-ferrant.

"Tout maréchal-ferrant en dehors des cités et villes pourra devenir membre de cette Association en prouvant qu'il exerçait le métier de maréchal-ferrant lors de la sanction de cette loi ou, dans le cas contraire, en suivant les cours de maréchalerie et en subissant avec succès les examens de l'Association."

M. Gagnon (Kamouraska): Je veux savoir par qui seront donnés les cours de maréchalerie et quelle sera l'institution qui donnera des diplômes aux étudiants en maréchalerie. Où allons-nous avec cette loi-là?

Il est vrai que la loi ne s'appliquera plus, d'après l'amendement, qu'aux villes d'au moins 12,000 âmes, mais enfin, n'est-ce pas ouvrir la porte à un tas d'abus? Je ne voudrais pas voter en faveur d'une loi qui ne fait pas l'affaire des campagnes pour l'imposer aux villes! Je comprends que le bill n'attaque pas les forgerons des campagnes, mais si une loi n'est pas bonne pour les campagnes, je me demande en quoi elle peut être utile pour les villes.

M. Lamoureux (Iberville): Cette loi ne permettrait qu'un monopole. On cherche à tout monopoliser. Je n'ai jamais vu une affaire comme ça.

M. Drouin (Québec-Est): Le député de Kamouraska peut imposer ce bill aux villes. Elles ne s'en plaindront pas. Ce bill a évolutionné (sic) depuis qu'il a été présenté en Chambre pour la première fois. Le dernier amendement apporté ce matin dit que la loi ne s'applique qu'aux villes de plus de 12,000 âmes; c'est-à-dire aux villes de Montréal, Québec, Trois-Rivières, Saint-Hyacinthe, Lachine, Hull, Verdun et Saint-Jean. Je ne crois pas qu'il y ait dans le bill, tel que modifié, aucun danger.

De plus, il y a une école de maréchalerie à Québec, et il n'y a pas de doute que nous avons des médecins vétérinaires qui seront en état d'instruire les apprentis maréchaux. Des cours du soir seront donnés l'été dans les chefs-lieux. Quarante cours seront donnés durant l'été.

Ce bill est non seulement dans l'intérêt des maréchaux-ferrants, mais aussi dans l'intérêt du public. D'ailleurs, la majorité des maréchaux-ferrants sont en faveur du bill. Il y a 700 maréchaux de la province qui appartiennent à l'Association et qui ont tous signés la requête pour demander le bill. Cinq cents autres, qui n'appartiennent pas à l'Association, ont aussi signé cette pétition.

En Europe, il y a des écoles de maréchalerie, surtout en France.

Actuellement, il y a des jugements qui définissent que le maréchal n'est responsable que de sa faute lourde et ce sont pourtant les maréchaux-ferrants qui demandent leur formation en association.

M. Bouchard (Saint-Hyacinthe): Je voudrais savoir si tous les maréchaux de France qui ont un bâton de maréchal dans leur giberne seront astreints à passer des examens en vertu de cette loi pour devenir maréchaux... ferrants!

(Rires et applaudissements)

M. Gagnon (Kamouraska): Si je me suis opposé au bill, c'est parce que l'on exige $10 de chaque forgeron. Ce que l'Association veut, c'est $10 de contribution. Comme il doit y avoir 2,800 forgerons dans Québec, cela représente une somme de $28,000. Si l'Association est une bonne chose, pourquoi vient-on devant la Chambre pour l'imposer à la profession? Si on veut l'imposer, c'est parce que certains intéressés veulent avoir une position!

(Applaudissements)

M. Drouin (Québec-Est): Lorsque les maréchaux demanderont $10, ce sera pour aider à la diffusion de l'enseignement de la maréchalerie dans la province.

M. Legault (Gatineau): Je suis en faveur du bill parce qu'il est dans l'intérêt de la population tout entière.

M. Gagnon (Kamouraska): Je suis opposé au bill parce que les cultivateurs de mon comté n'en veulent pas. Ce qui me fait répudier ce bill, c'est qu'il y a plusieurs maréchaux-ferrants dans mon comté qui font partie de l'Association depuis quelques années et n'ont pas été satisfaits. Je propose que le bill soit renvoyé à six mois.

M. Lamoureux (Iberville): Si on laisse les maréchaux mettre le pied à l'étrier, ils se sauveront avec le cheval.

M. Drouin (Québec-Est): J'ai ici des approbations de gens qui touchent de très près à la classe agricole: les régisseurs des diverses fermes expérimentales; les sociétés protectrices des animaux de Montréal et de Québec; l'Association des éleveurs de chevaux percherons de Québec; le Collège des médecins vétérinaires de Québec nous a aussi écrit favorablement.

On a dit que l'Association avait l'intention d'augmenter les tarifs. Le bill dit que cela ne sera pas et que la concurrence restera ce qu'elle est actuellement.

M. Lamoureux (Iberville) dit qu'il y avait dans son comté un cheval sensé boiter. La Société protectrice des animaux, prévenue, à envoyé un inspecteur qui, sans autre cérémonie, a fait tuer le cheval. Il a fait enquête, flanqué d'un vétérinaire et, dit-il, ils ont payé $50 et les frais pour le cheval.

L'article, étant mis aux voix, est rejeté par 28 voix contre 2413.

Le comité étudie l'article 25 qui se lit comme suit:

"25. Quiconque, sans être porteur d'un diplôme ou d'un permis de maréchal-ferrant, à moins qu'il ne soit apprenti, et sans avoir payé le montant de sa contribution, exerce le métier de maréchal-ferrant, est passible d'une amende de vingt-cinq dollars à cinquante dollars, pour une première infraction, et de cinquante dollars à cent dollars, pour toute infraction subséquente."

M. Gagnon (Kamouraska): M. le Président, j'ai demandé tantôt le renvoi à 6 mois et je maintiens cela.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il faudrait que vous proposiez que le comité se lève et cela disposerait du bill.

M. Gagnon (Kamouraska): J'en suis.

Des voix: Debout! Debout!

La motion, étant mise aux voix, est adoptée par 28 voix contre 2414.

Le comité, ayant étudié le bill, se lève sans faire rapport.

Loi des véhicules automobiles, article 27

M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 159 modifiant l'article 27 de la loi des véhicules automobiles.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie l'article 1 qui se lit comme suit:

"1. L'article 27 de la loi des véhicules automobiles (statuts refondus, 1925, chapitre 35), tel que modifié par les lois 16 George V, chapitre 19, section 6; 17 George V, chapitre 20, section 4, et 18 George V, chapitre 21, section 1, est de nouveau modifié en y ajoutant, après le paragraphe 4, les suivants:

"5. Tout bicycle ou tricycle circulant sur un chemin public entre une heure après le coucher du soleil et une heure avant son lever, doit être muni, en avant, d'une lanterne à feu blanc ou ambré ou d'un réflecteur de même couleur, approuvé par le Bureau, et en arrière, d'une lanterne à feu rouge ou d'un réflecteur de même couleur, approuvé par le Bureau. Chaque lanterne ou réflecteur doit être placé de façon que sa lumière soit facilement vue par le conducteur d'un autre véhicule.

"6. Sujet aux dispositions du paragraphe 7 qui suit, tout véhicule autre qu'un véhicule automobile ou bicycle ou tricycle, doit, lorsqu'il est sur un chemin public entre une heure après le coucher du soleil et une heure avant son lever, être muni d'une lanterne laissant voir un feu blanc en avant et un feu rouge en arrière, placée dans un endroit apparent sur le côté gauche du véhicule. Ces feux doivent être visibles à une distance d'au moins deux cents pieds.

"7. Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, par règlement, permettre qu'un réflecteur approuvé par le Bureau soit utilisé à la place de la lanterne mentionnée au paragraphe 6 qui précède, sur tout véhicule qui sert généralement à transporter des matières inflammables ou dont la structure ne permet pas de garder des lanternes allumées."

Des voix: Drop! Drop!15

Des voix: Adopté! Adopté!

Des voix: Explain!

M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Il y a 25 ou 30 ans, alors que j'étais très jeune, lorsqu'un cultivateur s'achetait un nouveau bogei, il se serait cru déshonoré s'il n'y avait pas eu de beaux fanaux de chaque côté du siège. Évidemment, la mode est changée et on ne veut plus s'éclairer. Aujourd'hui, que les circonstances l'exigent, on semble avoir la lumière en horreur. C'est une mesure qui s'impose pour la protection des cultivateurs eux-mêmes.

Le bill est bien simple. Nous voulons que tous les véhicules à traction animale portent une lumière la nuit pour circuler sur les grandes routes. Actuellement, tous les autres véhicules sont munis de fanaux. Les agences de transport font de même. Bateaux, avions, etc., sont tous éclairés, et ce, non seulement pour leur propre protection, mais également pour assurer la protection de ceux qui empruntent les mêmes chemins qu'eux. En Ontario, aux États-Unis et dans la plupart des pays européens, il y a une législation forçant les voitures à porter une lumière.

Les cultivateurs risquent leur vie chaque fois qu'ils sortent en voiture, sans munir leur véhicule d'une lumière. Lorsqu'il y a une collision entre voiture et automobile, ce n'est pas l'auto qui en souffre, ordinairement! On veut, que les voitures hippomobiles portent une lumière à l'avant et à l'arrière. Il est patent qu'une de ces voitures roulant sur la route le soir constitue un danger. La voiture est en danger, et celui qui la conduit également. Il y a de nombreux cas démontrant la nécessité des lumières sur les véhicules à traction animale. Qu'on relise les accidents rapportés dans les journaux survenus à cause du manque de lumières, pour s'en convaincre.

Il (M. Caron) affirme que la mesure est supportée par les associations d'automobiles et par des quotidiens influents. Il cite plusieurs articles de journaux qui prouvent que plusieurs accidents sont survenus parce que les voitures ne portaient pas de lumières. Il cite aussi des lettres de coroners de divers districts qui donnent comme cause de nombreux accidents au sujet desquels ils ont été appelés à enquêter sur l'absence de lumières sur les véhicules à traction animale et les bicycles. Il cite une partie du rapport du Dr Laberge, coroner d'Iberville.

M. Lamoureux (Iberville) sursaute, se lève et ajoute quelques détails au sujet d'un accident rapporté par le coroner Laberge, insistant sur le fait que la boisson avait été pour quelque chose dans l'affaire.

M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Je ne parle pas pour les automobilistes, pas du tout, mais pour les cultivateurs, afin de les protéger contre leur propre négligence.

On a dit que l'opinion n'est pas mûre pour accepter un tel projet de loi. Près de Montréal, on a agi par raisonnement pur et on porte un fanal sur sa voiture. L'éducation est donc faite là-bas. Il s'agit là d'une vieille question. Cette question a déjà été amenée en Chambre par l'honorable député de Québec-Ouest (M. Power) et par l'honorable Perron qui a dit que cette mesure s'imposait. En 1928, une loi a été passée autorisant les municipalités à faire des règlements décrétant le port obligatoire des lumières.

Malheureusement, comme dans plusieurs autres cas, les conseils municipaux n'ont pas agi. Une action doit donc être entreprise par la Législature afin de protéger le capital humain d'un danger sérieux et permanent. Si on laisse cela aux municipalités, il est bien possible que l'on n'aura pas de résultats tangibles.

En Ontario, on a passé une loi en 1928 décrétant l'emploi des fanaux. Deux ans avant, on avait demandé de porter des réflecteurs, mais ces réflecteurs ne valent pas dans les courbes, car les rayons provenant des phares de l'auto ne les frappent pas. On a été obligé d'imposer les fanaux et je crois que nous devrions commencer par là tout de suite.

On a dit aussi chez les députés que les députés qui voteraient pour cela se feraient battre dans leurs comtés. Ce n'est pas un argument. Les députés doivent songer à l'intérêt général, prouver au peuple qu'ils sont des éducateurs et ils peuvent être sûrs que, d'ici 6 mois, tout le monde les louera de leur action. C'est notre devoir de protéger le public, même s'il ne le veut pas.

M. Lamoureux (Iberville): Je suis contre le bill parce que le conseil de mon comté s'y oppose. Je suis contre le bill parce que les cultivateurs ne peuvent se rendre aux exigences du bill.

Il faudrait que chaque voiture, chaque pièce de machinerie, porte une lumière. Le cultivateur ne sait pas, quand il part de sa ferme, s'il y reviendra avant le coucher du soleil et il faudrait que les cultivateurs fassent des dépenses considérables pour munir chacune de leurs voitures de cette lumière.

Il (M. Lamoureux) dit n'avoir jamais entendu parler d'une chose semblable auparavant et il ne veut pas non plus en entendre parler à nouveau. Il cite le cas d'une jeune fille qui a été tuée à deux heures de l'après-midi par des automobilistes en état d'ivresse et pose la question: Quoi que ça aurait fait quand même la fille aurait eu une lumière? (Rires)

M. Fillion (Lac-Saint-Jean)16: Je suis contre le bill parce que les automobilistes frappent des voitures, des femmes et des enfants même en plein jour. Le problème, c'est la vitesse et cette envie de dépasser les autres véhicules à toute allure. On ne devrait jamais dépasser à plus de 20 milles à l'heure. Les automobilistes vont trop vite; souvent, on les voit dépasser à 40 milles à l'heure et même plus. S'il y a des accidents, ce n'est pas la faute aux cultivateurs. L'automobiliste ne se sert pas assez souvent de sa corne d'avertissement.

Au lieu de cette loi, on devrait plutôt demander aux automobilistes d'être plus prudents, leur faire observer les lois de la circulation. Je recommande une surveillance plus étroite des automobiles le soir.

On devrait faire une législation plus sévère pour les automobilistes car, ce sont eux les responsables et non les cultivateurs qui roulent tranquillement sur la route avec leurs voitures.

M. Duffy (Compton): Je suis en faveur du bill, en principe, qui ne peut qu'être bénéficiable aux cultivateurs, mais je n'aime pas l'idée d'imposer quelque loi que ce soit aux populations rurales, pas plus qu'à celles des villes. En majorité les cultivateurs sont contre le bill, et leurs souhaits devraient être entendus. Toutefois, il y a une chose sur laquelle je voudrais insister, et c'est sur le fait que la loi actuellement n'oblige pas le port de lumières sur les camions pour indiquer leur largeur. Ils sont sur les routes jour et nuit, ils transportent de lourdes charges, et je crois que nous devrions réclamer au ministre de la Voirie une loi qui forcerait les transporteurs à installer des fanaux indiquant la largeur de leurs véhicules. C'est là une grande cause d'accidents.

M. Legault (Gatineau): Je suis en faveur du bill parce qu'il a pour but de sauver du capital humain. Je représente un comté rural et je suis sûr que mes gens ont assez le sens de la citoyenneté pour dépenser quelques piastres pour sauvegarder leur vie et celle de leurs semblables.

M. Chouinard (Gaspé-Sud): J'approuve les remarques du député des Îles-de-la-Madeleine lorsqu'il dit qu'il faudra en venir à adopter cette loi. Je ne l'approuve pas quand il lit des rapports de coroners qui ne montrent qu'un côté de la question.

Il y avait pourtant beaucoup de lumière dans la vitrine du magasin de la rue Saint-Jean où un automobiliste est allé écraser un jeune homme et une jeune fille, mais le chauffeur ne les a pas vus.

Ce n'est pas le temps, dans une période de crise comme celle-ci, de faire faire des dépenses aux cultivateurs. Il faut attendre de meilleures années pour passer une telle mesure.

M. Gauthier (Portneuf): Je crois que le projet de loi du député des Îles-de-la-Madeleine est bon, mais il serait encore meilleur s'il venait à son heure, s'il était nécessaire. Dans mon comté, presque tous les cultivateurs portent des lumières et les bicyclistes ont tous des réflecteurs. Si je savais que le fait de ne pas porter de lumières aurait pour effet de faire circuler les automobilistes plus lentement, je demanderais même un projet de loi à cet effet, afin que l'on ne fasse plus tellement de vitesse le soir.

Dans mes onze ans de pratique, je n'ai vu que quelques accidents de voitures dus au manque de lumières sur les voitures et souvent, ce n'était pas la faute du cultivateur. Ce sont plutôt les automobilistes qui n'ont pas de fanaux assez forts. Que l'on surveille davantage les automobilistes qui sont enclins à faire plus de vitesse le soir, alors que les dangers d'accidents sont plus grands.

M. Fisher (Huntingdon): Je suis en faveur de ce projet. Ce bill est l'un des meilleurs que le gouvernement a présentés durant la session.

Il me fera grand plaisir de voter en faveur de la mesure. Le gouvernement dépense $100,000 pour l'abolition des passages à niveau, mais je déplore le fait que les conducteurs ne respectent pas le règlement les obligeant à s'y arrêter. Un véhicule sans lumières représente non seulement un danger pour lui-même, mais aussi pour tous les autres véhicules qui circulent sur les mêmes routes.

Les cultivateurs ne sont pas seuls sur les routes. Il y a les automobilistes qui paient des taxes et qui ont tout aussi droit à la considération. Je connais des automobilistes qui se sont tués en se précipitant dans un fossé parce qu'ils ont tenté d'éviter une collision avec une voiture. Par contre, si la loi passe, elle devra être renforcée; sans cela, elle n'aura aucun effet.

M. Barré (Rouville): Je suis contre le projet parce que le port de la lumière est souvent impraticable. Le cultivateur de retour chez lui après une journée de travaux sur sa terre est très susceptible de se faire prendre sans lumières sur la route. La loi devrait se limiter à rendre le port des lumières obligatoires pour les cyclistes seulement, et non pour tous les propriétaires de voitures hippomobiles. La mesure n'est pas nécessaire. J'aurais préféré une discussion du projet, article par article.

M. Francoeur (Montréal-Dorion): Je crois que le bill vient à son heure. Le projet a été adopté comme un item du programme de la Ligue de la sécurité publique de la province de Québec, qui nous a évité un grand nombre d'accidents depuis son institution. Dans la région de Montréal, le port de lumières va de soi.

M. Lemieux (Wolfe): Si le député des Îles-de-la-Madeleine (M. Caron) ne craint pas le vote des électeurs de son comté, c'est qu'il n'y a pas un seul véhicule-moteur chez-lui. Il n'a pas à craindre le vote de ses électeurs! Pour moi, j'habite un comté rural et je ne partage pas son opinion. Avant que les cultivateurs ne se retrouvent dans la situation rendue impossible par le bill, on devrait prendre leurs droits en considération.

Les accidents se produisent aussi fréquemment en plein jour que le soir, et les automobilistes devront être plus prudents. Le projet de loi, quoique j'admette les principes du bill, est injuste parce qu'il rendra l'automobiliste encore plus imprudent, parce qu'il entravera la liberté du cultivateur.

Sur 50 accidents d'automobiles, il y en a 45 qui sont causés par la boisson qui a obscurci la vue du chauffeur. Plutôt que d'adopter le bill, demandons au ministre de la Voirie d'enlever leur licence aux chauffeurs qui sont cause d'un accident alors qu'ils sont en boisson, non pas pour quelques mois, mais pour plusieurs années, pour 3 ou 4 ans. Cela leur servira de leçon.

Les principales cause d'accidents en cette province sont l'alcoolisme et les infractions à la loi de la circulation, et non pas le manque de lumières sur les véhicules à traction animale. Les automobilistes en état d'ivresse représentent un danger permanent pour ceux qui sont sur la route. À cause de ce goût qu'ont les gens des villes pour toujours plus de vitesse, les cultivateurs se voient la plupart du temps obligés de conduire avec une roue dans le fossé.

M. Legault (Gatineau): Il est temps d'imposer la prudence aux cultivateurs. Il est dans l'intérêt de tous que les municipalités rurales collaborent le plus tôt possible avec les villes.

M. Gagnon (Kamouraska): Je proteste contre un article du Progrès du Golfe reproduit dans le Devoir et L'Action catholique au sujet de ce bill. Nous ne sommes ni des suiveux ni des lâcheux, nous sommes conscients de nos responsabilités et je sais que mes électeurs ne veulent pas de ce projet de loi. Ces journaux sont favorables au bill. C'est leur droit, mais on ne devrait pas nous traiter de suiveurs. Nous devons tenir compte de l'opinion de nos électeurs puisque nous les représentons ici. Chaque député est élu pour représenter son comté, et non pour faire l'éducation de ses électeurs. Dans Kamouraska, le quatre-cinquième de la population s'oppose à l'idée d'obliger le port de lumières. Je voterai donc contre le bill la tête haute.

Des voix: Vote!

L'article, étant mis aux voix, est rejeté par 30 voix contre 21.

M. Lemieux (Wolfe) propose que le comité se lève.

La motion, étant mise aux voix, est adoptée par 30 voix contre 2117.

Le comité, ayant étudié le bill, se lève sans faire rapport.

Loi des mines

L'honorable M. Perrault (Arthabaska) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 202 modifiant la loi des mines de Québec soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté sur division.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Subsides

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

Adopté.

 

En comité18:

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent soixante mille dollars soit ouvert à Sa Majesté pour encouragement à l'agriculture en général, pour l'exercice finissant le 30 juin 1933.

M. Barré (Rouville): Pourquoi y a-t-il une augmentation de $60,000 par rapport à l'an dernier?

L'honorable M. Godbout (L'Islet): Cette augmentation est nécessitée pour le Journal d'agriculture, dont les crédits figuraient autrefois sous un autre item, et pour différents autres objets.

Le ministère n'aura pas de budget supplémentaire cette année-ci.

M. Duplessis (Trois-Rivières), M. Gault (Montréal-Saint-Georges) et M. Fisher (Huntingdon) posent quelques questions.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose: 2. Qu'un crédit n'excédant pas deux cent soixante-dix mille dollars19 soit ouvert à Sa Majesté pour écoles d'agriculture, École de médecine vétérinaire et École de laiterie de la province de Québec, pour l'exercice finissant le 30 juin 1933.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions et demande la permission de siéger de nouveau. Lesdites résolutions sont lues deux fois et adoptées.

La séance est levée à 11 h 30.

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NOTES

 

1. L'Événement du 4 février 1932, à la page 8, écrit 3 h 30.

2. L'Événement du 4 février 1932, à la page 8, écrit 15 cents.

3. Des appâts.

4. Le Soleil du 4 février 1932, à la page 15, écrit "perdait". Il s'agit d'une erreur.

5. Le Canada du 4 février 1932, à la page 3, écrit que M. Laferté cite un rapport de l'honorable M. Rhodes, ministre fédéral des Pêcheries.

6. Le Soleil du 4 février 1932, à la page 15, écrit $14,000. C'est toutefois le seul journal qui avance ce montant.

7. Le Soleil du 4 février 1932, à la page 15, écrit 35 à 40 %. C'est le seul journal qui avance ces pourcentages.

8. L'Événement du 4 février 1932, à la page 8, nous présente une version contraire aux autres journaux. Selon ce journal, M. Taschereau aurait dit: "Ottawa a dû se contenter de $128,000,000 et elle n'en aura probablement pas assez.!"

9. Selon Le Soleil du 4 février 1932, à la page 15, il s'agit d'une campagne faite contre les juifs.

10. Rejeté! Rejeté!

11. Adopté! Adopté!

12. En fait, le comité plénier étudie la proposition adoptée, en matinée, par le comité permanent des bills publics.

13. Un vote debout a été pris. MM. Taschereau, Laferté et Godbout ont voté en faveur de l'article et M. Mercier fils contre l'article, selon La Presse du 4 février 1932, à la page 29.

14. Ce qui a pour effet de tuer le bill.

15. Voir note 10.

16. M. Fillion est un ancien officier de la circulation, selon Le Devoir du 4 février 1932, page 2.

17. Ce qui a pour effet de tuer le bill.

18. M. J.-A. Grenier, sous-ministre de l'Agriculture, accompagne le ministre de l'Agriculture (l'honorable M. Godbout) pour renseigner la Chambre, selon L'Événement du 4 février 1932, page 8.

19. L'Événement et Le Soleil spécifient qu'il s'agit d'une augmentation de $40,000 sur le budget de l'an dernier.