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(Deux heures et demie de l'après-midi)
M. HYDE (président): Qu'on ouvre les portes. Let the doors be
opened.
A l'ordre, messieurs. Affaires courantes.
Présentation de pétitions. Lecture et réception de
pétitions. Présentation de rapports de comités
élus. Préparation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés. Présentation de bills
publics.
Parc du Mont-Tremblant
M. LESAGE: « A »
M. LE PRESIDENT: M. Bertrand propose la première lecture d'une.
« Loi concernant le Parc provincial du Mont-Tremblant. » Cette
motion sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND (Terrebonne): M. le Président comme les notes
explicatives le mentionnent ce projet diminue d'environ 235 milles
carrés l'étendue du Parc provincial du Mont-Tremblant qui est
actuellement d'environ 1,155 milles carrés. Il s'agit de donner au parc
des limites naturelles dans sa portion nord-ouest et dans sa partie est. Il
s'agit d'ouvrir dans le secteur soustrait de nouvelles zones pour le grand
public et il s'agit pour mon ministère, dès 1964 de la
préparation d'un plan directeur d'aménagement.
M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture prochaine séance,
M. LESAGE: « B », pour M. Lévesque.
Electrification rurale
M. LE PRESIDENT: Pour M. Lévesque, de Montréal-Laurier, M.
Lesage propose la lecture d'une Loi concernant l'électrification
rurale.
M. LESAGE: On remarquera qu'on ne trouve pas les lettres F.A., mais le
bill sera prêt pour distribution dans le cours de l'après-midi.
Aussi bien en faire la première lecture maintenant. Il s'agit d'un
projet de loi qui a pour objet de faciliter la liquidation des
coopératives d'é- lectricité qui se sont
intégrées au réseau de l'Hydro-Québec.
M. JOHNSON: Mauvaise loi.
M. LESAGE: C'est du consentement des coopératives.
M. JOHNSON: Mauvaise loi quand même.
M. LESAGE: Il y a des contrats qui existent entre les
coopératives et l'Hydro-Québec.
M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture prochaine séance.
M. LESAGE: « C », pour M. Kierans. Ministère du
Revenu
M. LE PRESIDENT: Pour M. Kierans, M. Lesage propose la première
lecture d'une « Loi modifiant la loi du ministère du Revenu.
» Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: Il s'agit d'amendements à la « Loi du
ministère du Revenu » pour rendre plus efficace la perception des
revenus de la province.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LE PRESIDENT: La motion sera-t-elle adoptée?
Adoptée.
LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
M. BELLEMARE: Une autre loi de citron. M. LESAGE: « D ».
Les ingénieurs
M. LE PRESIDENT: M. Beaupré propose la première lecture
d'une « Loi concernant les ingénieurs ».
M. BEAUPRE: M. le Président, tel que donné aux notes
explicatives, il s'agit d'un bill constituant une refonte complète de la
« Loi des ingénieurs professionnels qui, à l'avenir,
devient la « Loi des ingénieurs ». Il y est proposé
que les membres de la corporation portent le titre d'ingénieurs
plutôt que celui d'Ingénieurs professionnels. On donne une
nouvelle définition de l'exercice de la profession; on modifie les
pouvoirs de réglementation, les conditions d'admission à la
profession, les honoraires, le domicile, les modalités et l'exercice de
la juridiction disciplinaire du conseil, de même qu'on donne un pouvoir
de demander une injonction.
M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
M. LESAGE: « E ».
Monuments historiques
M. LE PRESIDENT: M. Lapalme propose la première lecture d'une
« Loi modifiant la Loi des monuments historiques ». Cette motion
sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Le monument de Duplessis? DES VOIX: Explications!
M. LAPALME: Le monument dont il est question ne relève pas de la
juridiction, de l'autorité du musée, ni du ministère.
M. LESAGE: D'ailleurs, il n'est pas historique.
M. BERTRAND (Missisquoi): Pas encore.
M. JOHNSON: Le premier ministre a déjà dit que M.
Duplessis était déjà entré dans l'histoire.
M. BELLEMARE: Oui, oui.
M. LAPALME: Dans ce cas, M. le Président, est-ce qu'on doit
continuer le débat qui avait été commencé il y a
deux ou trois...? Je vais reprendre mon siège?
M. BELLEMARE: Non, non.
M. JOHNSON: Explications, s'il vous plaît.
M. LAPALME: Le projet a pour but de prolonger d'un an, à compter
du 10 juiller, le délai accordé pour l'enregistrement des
arrêtés qui ont décrété le classement
d'immeubles comme monuments historiques avant le 10 juiller dernier, date de
l'entrée en vigueur de la loi. En d'autres termes, on n'a pas eu le
temps de procéder, non pas au classement, mais enfin, disons à
l'arpentage et à toutes les mesures techniques qui doivent
précéder l'enregistrement et on demande un délai
additionnel.
M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
Affaires du jour.
Etudiants de Sorel
M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce que l'honorable ministre de
la Jeunesse pourrait nous donner des informations concernant la grève
des étudiants de Sorel à l'école secondaire? ... si la
grève doit se terminer prochainement ou si une solution pratique doit
être accordée?
M. GERIN-LAJOIE: Je ne suis pas au courant.
M. BELLEMARE: Le ministre n'est pas au courant de la grève de
Sorel?
M. GERIN-LAJOIE: Non.
M. BELLEMARE: Est-ce que le député de Richelieu est au
courant que, chez lui, il y a une grève présentement à
l'école secondaire: 500 élèves sont en grève depuis
hier matin?
M. COURNOYER: Bien, j'ai rencontré hier le maire de la ville de
Sorel ainsi que les échevins. Apparemment, c'est une grève...
M. BELLEMARE: Perlée.
M. COURNOYER: Ils n'ont pas l'air d'aimer le président de la
Commission régionale ainsi qu'un autre président. Ce qui n'a rien
à voir avec le gouvernement. Il n'y a pas eu demande
d'arbitrage ou d'intervention, je n'en ai même pas entendu parler,
sauf hier. C'est la première fois, et je crois que c'est un bon signe
parce que, quand ça va mal dans mon comté, je suis le premier
à le savoir.
M. BELLEMARE: M. le Président, envertu de la loi, il se peut pas
y avoir de grève légale.
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. BELLEMARE: C'est une question, M. le Président, en vertu de la
loi, il ne peut pas y avoir de grève légale?
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. BELLEMARE: Je demande au ministre s'il a pris les dispositions
nécessaires pour faire rentrer dans l'ordre les enfants qui actuellement
donnent un mauvais exemple.
M. COURNOYER: Je comprends, avec ce député, que c'est
toujours regrettable, une grève. Par exemple, j'ai lu hier des
circulaires qui ont été distribuées dans la ville de
Sorel. Le premier paragraphe reprochait que le nom de l'institution ne soit pas
inscrit dans l'annuaire du téléphone; deuxièmement, on
protestait contre le fait qua certains élèves l'an prochain vont
être obligés de traverser la rivière pour aller à
l'école de Tracy et puis certains professeurs aussi. Alors ça
fait partie du plan d'ensemble en attendant et, j'en profite pour saluer mon
collègue de la Jeunesse, j'espère qu'il se fera bientôt une
école régionale secondaire dans la ville de Sorel.
M. JOHNSON: Mais est-ce qu'on a bien compris les nouvelles? Ce sont les
gens de Sorel qui ne veulent pas aller dans la ville du député,
à Tracy?
M. COURNOYER: Mais seulement je dois ajouter que la population de Tracy
est plus docile parce qu'il y en a beaucoup, dont mon fils, qui vont à
Sorel.
M. BERTRAND (Missisquoi): Vous étiez là avant.
Bill 54
M. FORTIN: M. le Président, je désire soulever une
question de privilège. Dans le journal « Le Devoir » du
lundi 13 avril 1964, un compte rendu de l'assemblée de la
Fédération des travailleurs du Québec qui a eu lieu
à Québec rapporte que M. Jean Gérin-Lajoie, un des
officiers de la Fédération des travailleurs du Québec, a
déclaré ceci: « A travers toutes les discussions, au
Conseil supérieur du travail ou au Comité des relations
industrielles, en présence des ministres, 'e gouvernement est
resté silencieux et sourd. Il n'a pas voulu participer à la
discussion sur sa législation. »
Je crois que, si on se réfère d'abord aux débats
transcrits qui ont eu lieu devant le comité des relations industrielles
l'an dernier, on constatera que le premier ministre et les membres du
comité ont discuté du projet de loi. Maintenant, le 11 mars 1964,
j'avais invité à venir à mon bureau les
représentants de la Fédération des travailleurs du
Québec et de la Confédération des syndicats nationaux.
Leurs présidents, M. Provost et M. Marchand, sont venus à mon
bureau avec leurs conseillers juridiques et les principaux officiers de leur
exécutif, et de trois heures trente à sept heures moins vingt du
soir, nous avons étudié le bill 54, nous avons discuté et
nous avons dialogué.
Il y a une chose cependant qu'on semble oublier et c'est celle-ci, que
le gouvernement, lorsqu'il décide d'une politique, elle se décida
d'abord au conseil exécutif et ensuite le gouvernement dépose un
projet de loi en Chambre. Evidemment, il n'appartient pas à un ministre
seul de décider de la politique du gouvernement et de décider
seul d'un projet de loi.
M. le Président, la législation ne se négocie pas.
Il peut arriver au gouvernement d'étudier avec les corps
intermédiaires quels soni les droits et obligations des parties qui
existent, quelle est peut-être la philosophie sociale la plus
acceptée et ensuite il appartient au gouvernement de concrétiser
dans un texte de loi les droits et les obligations et les coutumes qui sont
acceptés par les parties. Mais encore une fois, on ne négocie pas
un texte de loi. Et à la suite de mes réunions avec les
représentants des parties ouvrières, J'ai rencontré
à mon bureau des représentants de l'Association des
manufacturiers canadiens, de l'Association professionnelle des industriels,
l'exécutif de la Corporation des ingénieurs.
Personnellement, j'ai discuté avec des conseillers Juridiques,
tant du côté patronal, que du côté ouvrier et je
crois que lorsque l'on dit que le gouvernement n'a pas discuté de sa
législation, lorsqu'il est resté sourd à toute
étude, je crois que cette affirmation est absolument erronée.
Maintenant, on a parlé dans les journaux d'un invité
mystère et invisible, qui était moi évidemment. Encore
là je dois dire que j'ai reçu en effet
le 23 mars une invitation de monsieur Roger Provost, président de
la Fédération des travailleurs du Québec, et dans sa
lettre, il me disait que mon collègue, l'honorable René
Lévesque, avait fait le tour de la province pour parler de la
nationalisation de l'électricité, que mon collègue,
l'honorable Paul Gérin-Lajoie, avait parlé également du
bill 60, et il m'invitait à venir exposer et discuter de la politique du
gouvernement à ce congrès et même d'assister à un
forum pour expliquer la politique du gouvernement sur le bill 54.
Je lui ai répondu. J'ai d'abord attiré son attention sur
ceci, c'est que lorsque mes collègues ont discuté de la
nationalisation de l'électricité et du bill 60, je cite «
permettez moi de vous signaler qu'en ces deux circonstancès, il n'y
avait aucun projet de loi à l'étude devant l'Assemblée
législative en session. Actuellement le bill 54 a subi une
première et une deuxième lecture et a été
référé au comité de la Chambre pour étude et
discussion article par article. Certaines dispositions ont été
renvoyées à un comité spécial qui étudie les
relations de travail dans les services publics et est appelé à
formuler des recommandations en vue de l'établissement d'une politique
définie en ce domaine. Dans ces circonstances, il serait contraire
à l'éthique parlementaire qu'un ministre, surtout celui qui
propose le projet de loi, en discute en dehors de la Chambre, les
députés en sont saisis publiquement et ce n'est qu'en Chambre ou
en comité que le gouvernement doit exposer sa politique. »
M. le Président, c'est parce que j'ai voulu respecter les
privilèges des membres de cette Chambre que je n'ai pas
agréé l'invitation. J'ai ajouté que dès que le bill
serait accepté, il me ferait plaisir de rencontrer en n'importe quelle
circonstance les unions ouvrières pour leur expliquer les dispositions
du bill 54, et j'ajouterai que je n'ai jamais craint de rencontrer les unions
ouvrières car dès le mois de septembre, lors de la Fête du
Travail, j'ai assisté à une réunion de la
Confédération des syndicats nationaux et le 22 novembre, lors
d'un congrès de la Fédération des travailleurs du
Québec, j'ai accepté leur invitation et j'étais
conférencier à ce congrès. Lorsque le bill 54 sera
adopté et lorsque l'éthique parlementaire et les
règlements de la Chambre me le permettront, soyez assurés que je
répondrai à n'importe quelle invitation qui me sera faite et que
je ne craindrai pas de rencontrer ni les associations de patrons, ni les
associations d'ouvriers pour leur exposer les dispositions de la
législation,
M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce que le ministre du Travail
croit sincèrement que le bill 54 sera étudié durant cette
présente session?
M. LESAGE: M. le Président, il appartient au leader de la Chambre
de répondre à cette question et la réponse est oui.
M. BELLEMARE: Bon. Les invités mystères?
M. LESAGE: Pardon?
M. BELLEMARE: Les invités mystères?
M. LESAGE: Je ne comprends pas.
M. BELLEMARE: Les destinées mystères?
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. BELLEMARE: On est sourd quand on veut.
M. LESAGE: Non, j'ai l'impression... M. LE PRESIDENT: A l'ordre
messieurs.
M. LESAGE: ... que le député de Champlain ne sait pas ce
qu'il dit.
M. BELLEMARE: Le premier ministre, ça lui fait bien trop mal et
puis il sait ce que je veux dire. Oui, M. le Président, les
invités mystères c'est comme un bill mystère. Quand est-ce
qu il sera étudié en temps, mystère.
M. LESAGE: M. le Président, il n'y a pas de mystère.
M. BELLEMARE: Encore un coup de sifflet à côté d'un
cimetière.
M. LESAGE: Non, la réponse est bien simple, c'est lorsque le
Cabinet aura terminé l'étude des amendements au projet qu'il se
propose de déposer à la Chambre comme je l'ai annoncé
hier, je crois. Ces amendements proposés seront déposés et
nous laisserons à l'Opposition un temps raisonnable pour les
étudier avant ce reprendre l'étude en comité
plénier du bill 54. Il n'y a pas de mystère là-dedans.
M. BELLEMARE: On verra ça.
M. JOHNSON: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'intérêt la mise au point du ministre du Travail. Je
crois qu'il avait raison
d'attirer l'attention de la Chambre et de la province mais je demande au
ministre du Travail, est-il d'avis qu'un bill ayant été
agréé à l'Assemblée législative et
étant en instance devant le Conseil législatif pourrait de la
part de son parrain être discuté publiquement en dehors de la
Chambré?
M. BELLEMARE: Ah! M. FORTIN: Quoi?
M. JOHNSON: Est-ce qu'il est conforme à l'éthique
parlementaire qu'a invoquée le ministre du Travaîl de discuter
publiquement hors de la Chambre un bill qui est en instance devant le Conseil
législatif comme le bill 16, par exemple?
M. FORTIN: M. le Président, je suis très surpris et
peut-être un peu flatté que le chef de l'Opposition me demande de
lui donner un cours de procédure parlementaire lui qui est à la
Chambre depuis de nombreuses années alors que moi c'est ma
première expérience. Je crois qu'il est capable de
répondre lui-même à sa question.
M. LAPORTE: C'est un cas désespéré. Il ne saura
jamais... Il se saura jamais...
M. JOHNSON: C'est peut-être l'occasion pour le ministre du Travail
de donner des cours d'éthique parlementaire à ses
collègues.
M. FORTIN: Je ne les ai pas donnés à mes collègues,
M. le Président, c'est à ceux qui m'ont obtenu...
M. LESAGE: No 2, question de M. Bellemare lue et répondue.
UNE VOIX: Mystère.
M. LESAGE: Non, il n'y a pas de mystère là-dedans.
No 3 question du docteur Lizotte lue et répondue.
No 3...
No 5
M. COURCY: Question de M. Raymond lue et répondue.
M. LESAGE: No 15
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. Bertrand (Terrebonne) propose
qu'à cette prochaine séance la Chambre se forme en comité
plénier pour étudier la résolution relative au bill No 28
intitulé « Loi concernant le parc provincial du. Mont Tremblant
». Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée. Pour M. Lévesque,
Montréal-Laurier, M. Lesage propose qu'à cette prochaine
séance la Chambre se forme en comité plénler pour
étudier les résolutions relatives au bill No 30
intitulé:«Loi concernant l'électrification rurale
».
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LESAGE: No 17 pour M. Kierans.
M. LE PRESIDENT: Pour M. Kierans, M. Lesage propose qu'à cette
prochaine séance la Chambre se forme en comité plénier
pour étudier la résolution relative au bill No 31
intitulé: « Loi modifiant la loi du ministère du Revenu
». Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LESAGE: No 18.
M. LE PRESIDENT: M. Bernatchez.
M. JOHNSON: Adopté.
M. BERNATCHEZ: M. le Président, je voudrais continuer
l'exposé des quelques remarques que j'ai adressées à cette
Chambre hier soir de façon la plus objective possible sur la situation
qui prévaut actuellement dans l'agriculture de la province de
Québec.
Inutile de se cacher la vérité et ce n'est pas dans mon
tempérament d'être pessimiste, mais devant la situation critique
qui caractérise actuellement les activités agricoles dans la
province de Québec, nous nous devons d'envisager les faits sous leur
vrai jour et je suis obligé comme tous ceux qui s'occupent de
près ou de loin de l'orientation de l'agriculture dans la province de
Québec de dire que les cultivateurs depuis de nombreuses années
déjà ont voulu se prévaloir des meilleures méthodes
d'élevage et qu'ils se sont imposé jes sacrifices voulus pour
faire un succès de leur exploitation agricole.
Malheureusement, tel que je me suis efforcé avec mes
collègues, hier, de le démontrer à cette Chambre, leurs
efforts n'obtiennent pas la rémunération qu'ils méritent.
En effet, même avec une augmentation de production agricole, même
en améliorant la qualité des produits agricoles, nous sommes
obligés de nous rendre à l'évidence et d'admettre que les
revenus du cultivateur diminuent d'année en année. Nos
populations rurales sont obligées aujourd'hui d'assumer des
dépenses additionnelles qui augmentent considérablement le
coût de production.
Je comprends que dans le passé nous avons mis tout en oeuvre pour
seconder leur travail dans le domaine de la production agricole. Nous avons
fait en sorte que tous les facteurs susceptibles d'influencer la production de
nos produits agricoles travaillent dans l'intérêt des cultivateurs
eux-mêmes. Qu'est-ce que nous n'avons pas fait depuis 1936 notamment,
dans tous les domaines, au point de vue éducationnel, construction
d'écoles d'agriculture, au point de vue crédit, organisation du
crédit agricole provincial, électrification rurale, organisation
d'un conseil de recherche en 1937 par l'Union nationale, conseil de recherche
qui, malheureusement, n'a pas eu la longévité que les
cultivateurs étalent en droit d'attendre. Puisque dès le retour
au pouvoir de l'équipe libérale en 1940, on a.
précisément aboli ce conseil de recherche qui n'a eu la vie
sauve, qui n'a été réinstallé qu'avec encore le
retour au pouvoir de l'Union nationale. Nous avons fait un travail
considérable dans le domaine de l'organisation professionnelle, dans le
domaine de l'organisation coopérative. Nous avons apporté dans
nos paroisses rurales, un appui méritoire et combien important dans
l'amélioration de la voirie rurale.
M. le Président, en dépit de tous ces facteurs
susceptibles d'améliorer les conditions de production de nos
agriculteurs de la province de Québec, aujourd'hui nous entendons les
voix les plus autorisées dans le domaine agricole déplorer une
situation intenable, à savoir que le coût de production ne cesse
d'augmenter malgré que le prix de vente des produits agricoles ne monte
pas au même rythme des dépenses de production.
Pour illustrer cette transformation que nous vivons actuellement dans
nos milieux ruraux, ne serait-il pas à propos au nom des cultivateurs de
votre comté, M. le Président, de rappeler l'importance de
l'agriculture familiale. Si malheureusement dans les milieux responsables, on
semble prêter une oreille plus attentive à l'organisation,
à la mécanisation, à l'industrialisation de l'agriculture,
je dis qu'il est intéressant de prendre connaissance des opinions
émises par des économistes sur le rôle de l'agriculture
familiale dans notre province. Et je voudrais ici vous souligner le
témoignage d'un économiste qui écrivait, en
décembre 1963, dans la revue « Les Affaires » «
L'industrialisation ne doit pas se faire aux dépens de l'agriculture
».
On traitait du développement industriel de la province de
Québec, mais on insistait également sur la
nécessité de prendre les moyens à notre disposition pour
assurer cette industrialisation, mais non aux dépens de l'agriculture
familiale de la province de Québec.
Voici l'opinion que cet économiste exprimait. « Bien peu
d'hommes d'affaires, de financiers et de professionnels se soucient le
moindrement des problèmes d'exploitation et de l'échelle des
revenus des agriculteurs du Québec. Cette absence d'intérêt
est encore remarquable lorsqu'il s'agit de semblables sujets touchant les
fermes de l'ensemble du Canada. C'est bien à tort, croyons-nous, que
l'expansion industrielle et commerciale doit se poursuivre chez-nous
parallèlement à l'évolution agricole. Les
difficultés de nos agriculteurs entraînent du chômage ce qui
réduit le pouvoir d'achat dans des proportions qu'il serait surprenant
de connaître ». Et l'article continue: « Notre propos n'a pas
pour but de dénoncer, ni même de regretter l'industrialisation qui
se poursuit. Il reste cependant que nos gouvernants n'ont pas encore
manifesté une quelconque intention d'élaborer un plan
d'aménagement qui protège notre sol producteur en même
temps qu'il favorise l'avènement au Québec d'une économie
hautement industrielle. »
M. le Président, voilà l'avertissement sérieux,
réfléchi, d'un homme au courant de l'économie politique de
sa province, et qui se refuse à croire à la possibilité
d'une économie prospère dans la province de Québec quand
l'agriculture, elle, sera dans le marasme qu'elle connaît
actuellement.
M. le Président, on parle de spécialisation, on parle
d'amélioration de nos cultures, de l'amélioration des
différentes espèces animales, mettre en oeuvre tous les facteurs
de production tout comme si le cultivateur était le seul responsable de
la situation agricole qui sévit actuellement. Pourquoi ne pas jeter un
coup d'oeil sur les statistiques publiées par le gouvernement, le
gouvernement fédéral, sur les principales dépenses
d'opérations des cultivateurs du Québec entre 1958 et 1962, et
vous y lirez que l'augmentation de la taxe foncière compte pour une
augmentation de 15.8% dans le coût de production des denrées
agricoles. Et si on fait l'évaluation de l'augmentation du coût de
production, nous devons admettre honnête-
ment que ces charges fixes ne sont pas sous la dépendance du
cultivateur, mais qu'il doit en subir les conséquences.
M. le Président, faut-il vous rappeler que le revenu net, avec
toutes ces dépenses additionnelles, avec ces taxes additionnelles que
sont obligés de payer les cultivateurs dans nos paroisses rurales,
est-ce que nous avons besoin de vous démontrer que le revenu net du
cultivateur au Québec, malgré une augmentation dans la production
brute, le revenu net du cultivateur a diminué d'année en
année?
Par exemple, en 1958, le revenu net total des agriculteurs de la
province de Québec représentait $203,699,000 cependant qu'en
1962, toujours d'après les statistiques du bureau fédéral,
le revenu net des cultivateurs de la province de Québec avait
diminué de $203,000,000 à $179,000,000, soit une réduction
de 11.8%.
Comment ne pas admettre la gravité de la situation devant ces
chiffres que je vous expose de la façon la plus objective possible? Je
le répète, il n'est pas de mon intention de décrire une
situation alarmante inutilement. Le problème est trop aigu, le
problème est trop sérieux pour que, d'un commun accord, nous ne
fassions tout en notre pouvoir pour essayer de trouver une solution à
ces problèmes. D'ailleurs, M. le Président, vous avez
certainement lu, vous qui vous intéressez de façon
particulière à l'agriculture, vous avez certainement lu
dans...
M. COITEUX (Duplessis): Il est bon.
M. BERNATCHEZ: ... «Le Soleil» du mardi 7 avril 1964...
M. CADIEUX: Il est profond.
M. BERNATCHEZ: « La patience des cultivateurs est à bout,
Québec doit agir et vite, déclare l'Union catholique des
cultivateurs. »
Voici une pensée maîtresse, au début de l'article,
que vous me permettrez de renouveler à votre attention: « La
longue et traditionnelle patience des cultivateurs québecois est
émoussée et le gouvernement devra prendre d'ici peu une action
positive à la satisfaction de ceux qui endurent depuis trop longtemps.
C'est ce qu'affirme l'Union des cultivateurs en réitérant sa vive
déception à la réponse de la Commission Bélanger au
sujet d'un rapport intérimaire sur l'impôt foncier en milieu
rural. »
Nous pourrions citer autant de témoignages que nécessaire
pour convaincre les membres de cette Chambre de la nécessité de
voir enfin s'implanter dans la province de Québec une politique de
nature à apporter du soulagement dans les milieux ruraux.
J'ai eu l'occasion hier de traiter de la politique mise en oeuvre par le
gouvernement actuel. J'ai dit et je répète que je suis de ceux
qui ont confiance en la loi ARDA mais j'y ai confiance pour une
réalisation lointaine. Je sais que la loi ARDA, si bien
intentionnée soit-elle, ne pourra apporter dans nos milieux ruraux une
amélioration tangible avant 10, 15 ou 20 ans. Je crois que le
problème numéro 1 de l'agriculture du Québec, je le dis
sans arrière-pensée, se situe précisément au
ministère de l'Agriculture de Québec.
Nous avons voulu tout transformer au ministère de l'Agriculture.
Nous avons voulu faire du renouveau. Nous aurons, « on » a (pas
nous), on a tout chambardé les cadres existants pour tout laisser en
plan à un tel point qu'actuellement, au ministère de
l'Agriculture même les experts, les spécialistes tournent en rond
et on attend les ordres et les contre-ordres.
Cette situation, elle est caractéristique du ministère
actuel de l'Agriculture et nous la vivons, nous; nous la subissons, nous, dans
le comté de Lotbinière, un comté essentiellement agricole.
Et vu que le temps mis à ma disposition est trop limité, j'aurai
l'occasion de rencontrer le ministre et de lui montrer le travail combien
déplacé que certains fonctionnaires font dans nos paroisses
rurales au détriment de la meilleure information des cultivateurs. Nous
avons besoin dans nos milieux ruraux, l'agriculture de la province de
Québec a besoin de cadres; elle a besoin d'organisation; elle a besoin
de cercles et elle a besoin de gens compétents, de gens désireux
d'apporter le meilleur d'eux-mêmes pour résoudre les
problèmes sur place.
M. le Président, il est regrettable que l'on ait
procédé à la désorganisation, à la
politisation, si vous voulez, de certains services du ministère et que
l'on ait négligé malheureusement d'y suppléer par des
mesures véritablement efficaces. Nous aurons l'occasion au cours de la
discussion des crédits du ministère d'exposer au ministre, devant
cette Chambre, les erreurs commises, convaincus, je l'espère du moins,
convaincus que le ministre, que les autorités responsables feront tout
en leur pouvoir pour corriger cette situation qui se détériore de
jour en jour.
Non seulement vous avez entendu le président de l'Union des
cultivateurs de la province de Québec dire que la situation s'aggravait
de jour en jour, je pourrais vous dire, M. le Président, je pourrais
vous dire privément que même les agronomes de la province de
Québec trouvent que la situation se détériore grandement.
Alors, pour ces raisons, je voudrais seconder,
appuyer la motion de mon collègue le député de
Frontenac, de mon collègue de Compton, de tous mes collègues de
l'Opposition qui se sont levés pour seconder la motion et approuver les
arguments apportés par le député de Frontenac.
M. MARTIN: M. le Président, parfaitement d'accord avec l'opinion
qu'émettait l'un des membres du Cabinet hier sur la longueur des
débats lorsqu'il s'agit d'agriculture, ce n'est que très
brièvement que j'émettrai mon opinion sur la question
discutée présentement. J'ai écouté avec tout
l'intérêt qui pouvait être suscité chez un
représentant d'un comté agricole l'opinion des
représentants ministériels et aussi les idées
émises par ceux-là de l'Opposition. J'ai remarqué que
ceux-ci concentraient leur énergie à vouloir présenter le
tableau de l'agriculture dans un cadre noir. C'est peut-être pour des
raisons de stratégie politique, mais de toute façon le moyen
utilisé est le même et l'on trouve toutes sortes de raisons pour
discréditer le gouvernement actuel.
On signale avec beaucoup de force la désertion actuelle des
terres et, M. le Président, si l'on se penche sur ce point, l'on devra
admettre que même si, encore aujourd'hui il est des terres qui sont
désertées, ce n'est que la suite logique de l'élan
formidable de désertion qu'a engendré l'ancien régime, le
régime de l'Union nationale, il n'y a pas tellement d'années. La
désertion des terres, cette poussée de désertion a
disparu, il n'en reste que l'élan que l'administration actuelle fera
certainement disparaître avec la politique qu'elle a adoptée.
Il est évident que les problèmes de l'agriculture ne sont
pas tous disparus, et il est probable qu'ils ne soient pas prêts de
disparaître. Il existe des causes profondes qu'aucun gouvernement ne
peut, du jour au lendemain, éliminer. Pour comprendre ces causes, il
s'agit de regarder autour de nous, il y en a plusieurs; mais l'une d'elles peut
être décelés peut-être de la façon suivante,
si on regarde autour de nous, si on regarde les autres classes de la
société, si on regarde les corps de métier, qu'il s'agisse
de plombiers, de coiffeurs, de menuisiers, de barbiers, peu importe, tous ces
corps de métier ont des exigences énormes de classification qui
les obligent, auxquelles ils doivent répondre ou être
rejetés ou être refusés, or, de tous ceux-là qui
sont refusés par les professions, les corps de métier, il n'y a
que deux classes de la société qui les acceptent: le monde
ouvrier manuel ou l'agriculture, et encore dans le monde ouvrier manuel,
aujourd'hui, les employeurs ont des normes de compétence qu'ils exigent,
auxquelles le candidat, l'aspirant doit répondre sous peine d'être
rejeté, eh bien le monde agricole accueille tous ces gens, le monde
agricole les accueille, et c'est non pas la seule raison, mais l'une des
raisons qui fait que l'on voit dans un même rang, dans une même
paroisse, des cultivateurs qui, d'un côté, peuvent prêter
des sommes rondelettes, et tout à côté vous en voyez
d'autres qui ont toutes les difficultés du monde à joindre les
deux bouts.
Quel est la moyen d'arriver à résoudre ce problème?
Il ne m'appartient probablement pas de l'énoncer, les associations
professionnelles peuvent se pencher, doivent se pencher sur une question comme
celle-là et soumettre à la Chambre, et soumettre aux
autorités les so lu tions qui devront être étudiées,
les suggestions qui devront être étudiées. Mais je crois
que sur un point comme celui-là, déjà, le gouvernement a
fait quelque chose d'une façon indirecte; il n'y a pas seulement la
manière directe qui peut aider l'agriculture, la façon indirecte
peut aider aussi grandement, et de ce côté-là, je crois que
le gouvernement, en obligeant les parents à maintenir les enfants
jusqu'à un certain âge aux études, aidera grandement
à résoudre ce problème.
L'agriculture bénéficie également je crois plus que
tout autre, ça c'est au mérite du gouvernement actuel, plus que
tout autre de ce qu'est l'assurance-hospitalisation, c'est le cas de dire que
chez l'agriculteur l'on voit, non pas une classe riche, sauf quelques
exceptions, non pas une classe tout à fait pauvre, mais une classe qui
vit plus ou moins bien et qui, sous l'ancien régime, au moment où
n'existait pas, au temps où n'existait pas l'assurance-hospitalisation,
ce qu'on appelait l'assistance publique, il n'y avait que le pauvre qui
bénéficiait, qui bénéficiait pleinement de
l'assistance publique, celui qui était à l'aise, qui était
riche pouvait payer les frais d'hôpitaux prolongés, mais
celui-là que l'on trouve, à grand pourcentage dans l'agriculture
ne le pouvait pas et était obligé de payer, c'était
là une des raisons qui le maintenait dans une médiocrité
financière tout le temps de sa vie, et chargeait si l'on peut dire ses
héritiers.
M. le Président, au mérite du ministère de
l'Agriculture et du gouvernement actuel s'ajoutent également les
façons plus directes, la politique de crédit, crédit
à long terme, crédit agricole, la politique d'amélioration
des fermes et toutes ces politiques qu'ont reconnu je dirais, en 1962,
puisqu'ils avaient vécu l'expérience de 1960-1962, qu'ont reconnu
dis-je, les cultivatteurs et en particulier les cultivateurs de mon
comté. Les cultivateurs de mon comté n'étaient pas des
gens à prêter l'oreille à tout ce qui pouvait être
dit, et c'est pourquoi en 1960, ils sont restés fidèles à
l'ancien régime, doutant peut-être de ce que les libéraux
leur exposaient, mais
ils ont vu de 1960 à 1962 quelle était la politique du
gouvernement actuel, et en 1962, c'est d'une façon non équivoque
qu'ils se sont prononcés en appuyant grandement le gouvernement actuel,
et ils sont prêts à le répéter à la prochaine
occasion.
Dans mon comté qui est un comté exclusivement rural et en
grande partie agricole,...
M. JOHNSON: C'est présomptueux...
M. MARTIN: Vous n'avez vu, M. le Président, pour répondre
au chef de l'Opposition vous n'avez vu, dans ce geste des cultivateurs de ma
région qui représentent en quelque sorte la province qu'un geste,
ce n'est que la préface de ce qui sera fait par l'administration
présente. Attendez pour voir le bouquet. Ce n'est pas près de
finir.
M. le Président, dans mon comté les fermes ne sont pas
toutes de grandes fermes. La production en a été centrée
sur la culture du tabac et aujourd'hui les marchés ne permettent plus de
pouvoir développer cette culture comme on avait crû autrefois et
les fermes ont été divisées à ce point que dans
plusieurs paroisses de mon comté on ne voit des fermes que de 40, 45 et
50 acres. Cela ne peut pas permettre à un cultivateur de vivre en
développant une culture de, grande culture de troupeaux laitiers, mais
voilà que le gouvernement a compris cette chose et déjà
dans la région de Joliette on en a parlé, je le signale de
nouveau, dans la région de Joliette des entrepôts de patates pour
la classification sont déjà construits et on est
déjà prêt pour la construction d'un deuxième
entrepôt.
Je remercie le gouvernement en quelque sorte au nom des cultivateurs et
des producteurs de ma région.
Je voterai donc nécessairement contre la motion du
député de Frontenac et j'ai l'assurance en ce faisant d'exprimer
l'opinion des agriculteurs et des cultivateurs de ma région. Je suis
certain d'exprimer en leur nom par ce geste mon appréciation, leur
appréciation pour l'attitude du ministre de l'Agriculture et du
gouvernement actuel. Merci.
M. ALLARD: M. le Président, comme mon prédécesseur,
je dois vous déclarer que je n'ai nullement l'intention d'allonger le
débat « tout en l'allongeant un peu ». Evidemment les grands
discours ont été faits et on est rendu aux remarques concluantes
de ce débat. Etant donné que je représente le plus grand
comté agricole de toute la province de Québec, le plus grand en
nombre de fermes, car la Beauce vient en tête avec 3,578 fermes occupant
une superficie de 493,423 acres, il aurait été extrêmement
difficile pour moi de ne pas prendre part à ce débat afin de
démontrer ici dans cette Chambre que les cultivateurs de la Beauce
attendent encore après les promesses faites par le gouvernement en 1960
et en 1962. Si la Beauce a le plus grand nombre de fermes, il n'est pas vrai de
dire que c'est le comté le plus prospère. Loin de là,
c'est peut-être tout le contraire.
Un point entre autres que je voudrais soumettre cet après-midi,
j'en ai déjà parlé, c'est celui de la culture des produits
de l'érable. L'an dernier dans la région de la Beauce, l'Office
des producteurs du sucre et de sirop d'érable de Québec-Sud,
région de la Beauce, a produit quelque trois millions de livres de sirop
d'érable. Eh bien, M. le Président, si la classe agricole et les
Beaucerons en particulier sont si prospères,je vois mal
comment il se fait que sur environ 3,000,000 de livres, il y en a, à
l'heure actuelle, plus de 2,000,000 de livres d'entreposées, non encore
vendues, alors que la production 1964 arrive sur le marché. Il y a un
malaise excessivement grave qui existe là, et je crois que le ministre
de l'Agriculture n'a pas pris les moyens à date de trouver une solution
à ce problème.
L'an dernier, l'aide apportée aux producteurs d'érable de
la Beauce l'a été par le gouvernement fédéral, et
non pas par le gouvernement provincial. Le gouvernement fédéral a
financé l'entreposage de ces 2,000,000 de livres qui sont encore
à vendre. Eh bien, comme vous le savez, M. le Président, les
produits de l'érable pour la Beauce sont d'une importance
exceptionnelle, étant donné qu'il s'agit d'un revenu qui permet
dans la majorité des cas aux cultivateurs, de joindre les deux bouts.
C'est donc d'une importance exceptionnelle, je le répète, et je
crois que le ministre de l'Agriculture devrait se pencher sur ce
problème d'une façon toute particulière étant
donné que l'an dernier cette production est restée sur le
marché libre et que la Beauce à elle seule a produit un peu plus
du dixième de la production totale de la province.
C'est donc dire toute l'importance pour mon comté, car dans la
Beauce, le nombre d'érables entaillés et le volume de production
dépassent ceux de tous les comtés voisins. Comme on le sait, la
Beauce a deux vocations particulières, soit l'agriculture et la
forêt. On se doit d'apporter une attention toute spéciale à
l'agriculture et particulièrement sur la question de la culture de
l'érable d'abord, et deuxièmement à la forêt,
où on devrait s'occuper à reboiser ce qui n'est pas
cultivable.
Lorsqu'on prétend que les cultivateurs sont à l'aise, je
voudrais porter à la connaissance de la Chambre un article paru dans
« La terre
de chez nous » le 2 janvier 1964 à la page 3 sous la plume
de Paul-Henri Lavoie: « Les cultivateurs face à 1964, des
millionnaires qui crèvent de faim. Les revenus des cultivateurs ont
augmenté de 4.6% au cours des neufs premiers mois de 1963. »
Voilà un titre comme plusieurs autres du genre que l'on trouve dans les
journaux à ce temps-ci de l'année, ou que l'on entend à la
radio ou à la télévision. A en croire les statistiques du
gouvernement fédéral il faudrait en conclure que le sort du
cultivateur ne cesse de s'améliorer.
Analysons donc d'un peu plus près ces chiffres soufflés.
Il est bien vrai que les revenus du cultivateur du Canada ont augmenté
de près de 5% au cours des neuf premiers mois de 1963 par rapport
à l'année précédente, mais il faut tout d'abord
préciser qu'il s'agit d'un revenu brut qui en fait ne veut pas dire
grand chose en ce qui a trait au sort du cultivateur. Ainsi pour l'année
1962, même si le revenu agricole pour l'ensemble du Canada avait
augmenté de 5.4% par rapport à 1961 le revenu net du
Québec avait diminué de 11% ainsi que le démontrait le
dernier rapport annuel de l'UCC. On est donc en droit de penser que si les
proportions demeurent les mêmes, ce qui reste au cultivateur à la
fin de l'année 1963 pour vivre et faire vivre sa famille est encore
moindre que ce qui lui restait à la fin de l'année 1962. Ce n'est
pas aux cultivateurs resserrés toujours davantage par les taux des prix
de vente, et coût de revient que l'on fera croire, même avec les
plus belles statistiques, qu'ils s'enrichissent. Il s'agit plutôt, comme
le disait l'entête, d'un millionnaire qui crève de faim un peu
plus chaque jour.
Eh bien! M. le Président, ces chiffres donnés par un
journal qui s'occupe surtout de la classe agricole ne sont pas trompeurs, ils
sont réels, ils sont véridiques et ils démontrent
qu'à l'heure actuelle dans la province il existe un malaise
énorme chez la classe agricole et je crois que la motion par le
député de Frontenac doit être appuyée afin qu'il se
fasse quelque chose de réel, d'efficace pour apporter un soulagement
à la classe agricole.
M. BOULAIS: M. le Président, en relisant les débats d'hier
mon attention a été nécessairement attirée sur cet
amendement proposé par une motion de non confiance de l'Opposition afin
de soulever un débat purement et simplement sur l'agriculture dans cette
province.
Nécessairement, comme tout le monde le sait, représentant
un comté pas essentiellement agricole, mais où la production
agricole est une des plus importantes, étant donné les conditions
tout à fait favorables, tant au point de vue sol, qu'au point de vue
marché, agglomération rurale, organisation de vente,
proximité des marchés, je me vois dans une obligation très
heureuse de prendre la contre-partie de cette motion.
Depuis hier après-midi, nécessairement, l'Opposition s'est
attachée par toutes sortes de moyens oratoires à prouver à
la face de la province que le gouvernement actuel n'avait aucun plan pour
développer cette agriculture industrielle, cette agriculture rentable,
cette agriculture viable que des deux côtés de la Chambre nous
voulons et souhaitons.
J'aurais mieux aimé entendre ces partisans de l'Union nationale,
pleurer et grincer des dents en 1944, 1946, 1948, comme je les ai entendus
moi-même ces griefs de la part de l'Union catholique des cultivateurs
durant les années où nos amis d'en face étaient au pouvoir
mais avec une planification négligée. J'aurais mieux aimé
les entendre à ce moment-là et les cultivateurs aussi, et ceux
qui quittent la ferme également. Parce que, comme le disaient les
orateurs des deux côtés de la Chambre, l'exode rural existe. On
n'a pas besoin de revenir sur ces chiffres. Tous et chacun les connaissent.
Mais cet exode rural est parti d'un point, le point d'après la guerre,
ou pour ainsi dire durant la guerre, où les fonctions
rémunératrices étaient assez grandes dans l'industrie et
le commerce. Cet exode rural est parti de là et n'a fait que s'accentuer
depuis 1944. Et aujourd'hui, on jette les hauts cris quand un mouvement de
population quel qu'il soit, que ce soit de la campagne à la ville ou de
la ville à la campagne, que ce soit d'une profession à une autre
ou d'un métier à un autre métier, quand le mouvement est
parti, nécessairement il s'agit à ce moment-là d'en
prendre acte et de ne pas. par des règlements ou par des lois ou tout
simplement par des petites solutions, mettre ce que l'on appelle des
cataplasmes sur une jambe de bois.
Chez nous, dans le comté de Rouville, je vous donne un exemple.
Oh! Je ne veux pas faire ici de personnalités. Mais c'est un exemple
économique. Entre autres organisations coopératives que nous
avons, je n'en signale que deux: un syndicat coopératif de
Ste-Angèle et la coopérative de conserves de Marieville...
M. JOHNSON: Où est la cidrerie que vous aviez promise en
1960?
UNE VOIX: A l'ordre.
M. BOULAIS: Il me fera plaisir d'en parler. M. JOHNSON: Très
bien.
M. BOULAIS: C'est au moins une affaire que nous étudions...
DES VOIX: Non!
M. BOULAIS: ... tandis qu'en 1956 on n'étudiait même pas.
Chez nous, deux organisations coopératives...
UNE VOIX: Il chante la pomme!
M. BOULAIS: C'est propice du côté de l'Opposition de
chanter la pomme aux cultivateurs. Ces deux organisations coopératives
donc, celle de Marieville et celle de Ste-Angèle, ont été
formées en 1947 ou 1948, celle de Marieville préalablement,
à côté d'une organisation très puissante qui
était celle de St-Jean-Baptiste. Or, depuis 1954 ou 1955, ces deux
organisations, étant donné la proximité d'une
coopérative qui était assez forte, étant donné
aussi leur production non suffisante pour une exploitation économique
rentable, étaient vouées à disparaître.
Pour des raisons politiques ou des raisons purement sentimentales, on a
essayé, de 1956 à 1960, de les renflouer de toutes sortes de
manières, par des garanties, par des octrois, par de l'aide technique
mais, quand une organisation quelle qu'elle soit est vouée à
disparaître, il faut être vraiment franc et dire à. ses
membres, dire à ceux qui en font partie, qu'économiquement ce
n'est pas rentable et par conséquent cela ne veut pas dire que ces
cultivateurs-là doivent négliger leur production ces
cultivateurs-là peuvent continuer leur production dans le même
sens si le marché existe, mais s'affilier à un autre organisme,
ce qu'ils ont fait en s'affiliant partiellement, ou en grande majorité,
à nos organismes coopératifs soit de Ste-Brigitte, près de
Ste-Angèle, soit de St-Jean-Baptiste, près de Marieville.
Nous avons chez nous d'autres organisations qui sont rentables telle la
Coopérative avicole de Marieville mais, encore ici, il y avait à
Marieville deux organismes qui n'étaient pas directement concurrentes
mais qui étaient ni plus ni moins sur le même plan
d'activités: un couvoir et un poste d'abattage. Depuis 1960, non pas
simplement par une action gouvernementale mais par un climat créé
par le gouvernement, ces organismes se sont fusionnés pour
établir chez nous, comme d'ailleurs ils l'ont fait dans d'autres milieux
de la province, cette intégration entre deux mouvements qui doivent
être ensem- ble et faire ainsi un organisme assez puissant pour pouvoir
réaliser cette intégration que les compagnies actuelles tentent
de faire de plus en plus dans l'industrie de la volaille.
Aujourd'hui, grâce à la collaboration entre ces deux
organismes coopératifs: poste d'abattage et couvoir, plus une entente
temporaire mais qui s'avère excessivement utile pour le moment avec la
Coopérative de Granby pour la question des moulées, il y a ce que
l'on appelle au moins, et je ne voudrais pas ici donner des chiffres qui ne
sont pas exacts, mais je peux dire qu'au moins 50% de la politique de cet
organisme coopératif c'est de l'intégration au sens que les
compagnies la pratiquent.
Nous avons aussi, à cause du climat des politiques du
gouvernement actuel, non pas à cause simplement de la lettre
ça ce n'est pas important, ce qui est important c'est de créer un
climat la Coopérative Montérégienne de Rougemont
qui a augmenté son pouvoir de production jusqu'à 550,000 minots
de pommes de seconde classe pour les transformer en jus, en pulpe et en pommes
desséchées.
De quoi parle-t-on parmi les membres de nos entrepôts
coopératifs de pommes? On parle de plus en plus sérieusement de
la vente en commun des pommes entreposées soit à St-Hilaire,
à Rougemont, à St-Paul d'Abbotsford et à Farnham et
déjà l'intégration de la Coopérative de St-Paul
s'est faite avec celle de Farnham et l'on veut, grâce au pouvoir que la
Régie des marchés donne aux offices de producteurs, organiser
d'ici quelques années et même quelques mois cette vente en commun
pour protéger la qualité, protéger la quantité et
régulariser sur le marché le produit afin de régulariser
le prix.
M. le Président, on dit qu'il y a exode, oui. Est-ce un fait
unique dans la province de Québec et au Canada? Dans « La Terre de
chez nous » du 8 avril 1964, on lisait ceci: « En Europe, les
travailleurs agricoles continuent à abandonner les terres pour
l'industrie. Les statistiques qui viennent d'être publiées par
l'Organisation internationale du travail, indiquent que les travailleurs
agricoles italiens quittent la terre au rythme de 1% par an. En France les
travailleurs quittent les exploitations agricoles au rythme de 1% par an. En
Belgique, les travailleurs agricoles ne représentent que 7% aujourd'hui
du total de la main-d'oeuvre active et cet exode se fait à raison
d'environ .4% par année. Il en est ainsi dans les pays de l'Irlande et
de la Grande-Bretagne. »
On a dit que le gouvernement actuel n'avait planifié que du bout
des lèvres. Est-ce que c'est
planifier du bout des lèvres que d'avoir augmenté le
maximum du crédit agricole? Est-ce que c'est planifier du bout des
lèvres que d'avoir établi un prêt à 90% pour
l'établissement des fils de cultivateurs? Est-ce que c'est planifier du
bout des lèvres que de donner un remboursement au bout de 10 ans,
maximum $3,000? Est-ce que c'est planifier du bout des lèvres que
d'avoir réadapté la Loi des sociétés
coopératives agricoles? Est-ce que c'est planifier du bout des
lèvres que d'avoir créé la Régie des marchés
agricoles, qui n'est pas parfaite, tout le monde le sait, mais toute loi doit
être rodée et vous le savez, M. le Président, par votre
expérience, que ce rodage de la Loi de la Régie des
marchés se fera avec l'expérience acquise.
Est-ce que c'est planifier du bout des lèvres que d'avoir
augmenté le nombre d'heures des travaux mécanisés? Est-ce
que c'est planifier du bout des lèvres que d'avoir
réorganisé les districts régionaux agronomiques? Est-ce
que c'est planifier du bout des lèvres que d'avoir intégré
les services vétérinaires qui apppartenaient partiellement au
ministère de la Santé au ministère de l'Agriculture?
Est-ce que c'est planifier du bout des lèvres que d'avoir donné
un nouvel essor à l'industrie animale par l'encouragement au centre
d'insémination artificielle de St-Hyacinthe où, en 1960, nous
n'avions que deux races laitères représentées et
aujourd'hui les quatre races laitères sont représentées
plus une race à boucherie et en 1960 les membres de tous les cercles
d'élevage étaient au nombre d'environ 8,000 ou 9,000 et
aujourd'hui nous sommes rendus au nombre de 15,000? Est-ce que c'est planifier
du bout des lèvres que d'avoir augmenté l'efficacité de la
raffinerie de sucre de St-Hilaire et aujourd'hui, nous en sommes rendus en 1963
à 10,000 acres récoltés?
M. le Président, les affirmations, les hauts cris, les paroles de
découragement que nos amis d'en face, ont lancé à la face
de l'agriculture de cette province, ne sont pas tout à fait exacts, pour
dire très poliment ce que l'on pense. C'est entendu que c'est leur
rôle de critiquer. Nous en sommes de la régionalisation de
l'agriculture, à preuve, et c'est par là que je termine, les
remarques qui actuellement sont mises en pratique par les techniciens du
ministère, les remarques qui ont été publiées et
qui sont mises en pratique actuelle sur la commercialisation des produits
agricoles; ces remarques veulent qu'au début il y ait une concentration
croissante de la demande des denrées agricoles entre les mains d'un
petit nombre d'acheteurs puissants. C'est un fait que certains pratiquent la
concentration verticale, surtout sur le marché de Montréal. Le
commerce de gros des fruits et légumes est l'affaire d'une douzaine
d'acheteurs, c'est un fait, il faut y faire face. A l'inverse, l'offre demeure
très dispersée, sauf quelques exceptions. D'où un
déséquilibre entre les forces économiques en
présence qui dans la mise en marché, qui désavantage les
producteurs. Il faut donc faire face à cette situation. Il faut donc
faire face à ce nouveau genre de marché, à ce nouveau
genre de concentration des produits.
C'est ça qui, malheureusement, temporairement, se trouve à
débalancer dans certaines régions de notre province l'agriculture
et l'agriculteur. Une proportion de plus en plus petite du dollar que le
consommateur consacre à l'achat de vivres retourne au producteur;
même si dans le Québec, actuellement, dans son ensemble, la
vocation agricole qui existait dans l'ensemble de la province de Québec
est de moins en moins évidente, il reste que nous possèdons une
superficie de terres fertiles dans les régions autour des
marchés, sous un climat favorable, qui mérite, au sein d'une
économie industrielle et commerciale, notre pleine attention pour sa
pleine expansion.
Présentement, le gouvernement de Québec a, sur certains
faits économiques, et là nous touchons au domaine national, moins
d'emprise que le gouvernement national, tels la monnaie, les prix, les douanes,
la fiscalité et le crédit. Mais il doit, le gouvernement de cette
province comme d'ailleurs il a essayé et y a réussi
partiellement, à créer un climat de renouveau qui fait certaines
perturbations, et quiconque, plus que moi et certains autres
députés de comtés ruraux, et même non seulement
députés de comtés ruraux, mais attachés par des
fibres familiales, comme le ministre de l'Agriculture l'est, comme certains de
nos amis d'en face le sont, par leur profession ou par leur occupation, qui
plus que tout autre, non pas seulement à titre de député,
mais à titre d'agronome et à titre aussi de praticien en
agriculture, n'est pas au fait depuis déjà 15 ans, non seulement
de cet exode, mais de cette insécurité. Mais d'autre part, nous
savons, nous, praticiens de l'agriculture, que le cultivateur est isolé
individuellement; nous savons, nous qui avons pratiqué en agriculture
depuis 25 ans, les difficultés éducationnelles que nous avons
rencontrées chez nos cultivateurs, soit de notre faute, peut-être
par notre faiblesse, peut-être par notre manque d'adaptation à
certains moments, mais aussi à cause de l'isolement que les cultivateurs
subissent physiquement les uns les autres. Ce n'est pas aussi simple que
certains orateurs ont pu le laisser entendre de résoudre ce
problème économique. En plus d'être un problème
écono-
mique, c'est un problème éducationnel, et en
conséquence, les méthodes que le ministère actuel de
l'Agriculture a établies ne sont pas totales et parfaites, mais elles
sont un effort louable qui mérite la considération non seulement
de cette Chambre, mais la considération de cette province.
M. le Président, pour ces raisons, je voterai donc contre cette
motion de non-confiance.
M. JOHNSON: La cidrerie là?
M. BOULAIS: Voulez-vous que je réponde?
M. GAUTHIER: M. le Président, au cours du présent
débat, plusieurs députés ont donné leur point de
vue sur la situation alarmante que doivent envisager nos cultivateurs
présentement. Nos amis d'en face semblent ne pas s'inquiéter du
tout du sort de nos cultivateurs. Je comprends facilement ces messieurs qui
sont à la merci de la propagande du ministre de l'Agriculture, lui qui
tient entre ses mains le sort de l'agriculteur québecois et qui n'a
d'yeux que pour la planification.
Chez-nous les cultivateurs, M. le Président en sont revenus
depuis longtemps, si vous me permettez l'expression, et si l'on tient compte de
leurs propos, le mot planification est maintenant synonyme
d'émigration.
Permettez-moi de vous rapporter les propos mêmes de cultivateurs
qui sont venus me voir chez-moi, à mon bureau, et je cite: « En
1960, par une publicité bien agencée, on a réussi à
nous faire croire que nous étions les grands oubliés et
aujourd'hui, on se rend compte par nous-mêmes que nous sommes les grands
surveillés. Surveillés en ce sens que c'est maintenant une grande
victoire pour les quelques cultivateurs qui réussisent à assurer
les besoins essentiels de leur famille à même les revenus de la
ferme. »
M. le Président, ces mêmes cultivateurs ont tellement
raison. Le ministre exerce une surveillance si étroite que même en
certains cas, des lois adoptées par l'Assemblée
législative, et qui seraient susceptibles d'aider les cultivateurs, sont
diminuées dans leurs effets par une réglementation que le
ministre fait adopter par le lieutenant-gouverneur en conseil; prenez, par
exemple, la loi 9-10 Elisabeth II, chapitre 55, que l'on appelle la loi pour
faciliter l'organisation et l'aménagement des fermes et qui se
résume à ceci: « Le gouvernement fera une remise de trois
pour cent sur tout emprunt n'excédant pas $3,000 consenti par une
banque, une caisse populaire, etc., en faveur d'un cultivateur du
Québec, pourvu que cet argent serve à l'achat d'animaux
reproducteurs, d'espèces bovine, porcine, ou ovine, d'instruments
aratoires, tracteurs, etc, etc. Nous pouvons lire également à
l'article 6 que le gouvernement est autorisé à rembourser un
montant équivalent à l'intérêt de trois pour cent
sur tout emprunt n'excédant pas $4,000 qu'un agriculteur obtient d'une
caisse populaire ou d'une institution prêteuse, argent qui sera
utilisé pour les fins suivantes: amélioration sur le fonds de
terre, drainage, défrichement, épierre-ment, nivellement, etc,
aussi pour construction ou amélioration de bâtiments, laiterie,
hangar, poulailler, porcherie ou encore achat de matériel agricole
désigné à l'article 7).
Relativement à cette loi, le ministre de l'Agriculture obtenait
l'adoption de l'arrêté en conseil qui porte le numéro 2174,
en date du 2 novembre 1961, qui s'appelle «règlements concernant
la loi de l'amélioration des fermes ». Par cette
réglementation, le montant prêté à l'emprunteur ne
doit pas dépasser le pourcentage suivant du prix d'achat ou du
coût des travaux suivant du prix d'achat ou du coût des travaux:
« A » Pour les animaux reproducteurs 75 pourcent; « B »
instruments aratoires, outillage ou machinerie agricole, articles neufs 66.6
pour cent; « C » instruments aratoires, outillage ou machinerie de
seconde main, ou usagée 60 pour cent; « D »
amélioration sur les fonds de terre spécifiés au
paragraphe 1 de l'article 7 de la loi 75 pour cent; « E »
construction ou amélioration de bâtiments spécifiés
au paragraphe 2 de l'article 7 de la loi, 90 pour cent; « F »
Matériel agricole, approvisionnement d'eau potable, une canalisation
électrique, spécifiés aux paragraphes 3-4 et 5 de
l'article 7 de la loi: 75 pour cent.
Le coût des travaux peut être basé sur une estimation
quand le montant exact est indéterminé ».
Un emprunteur qui veut bénéficier de la part de l'Office
du Crédit agricole d'un remboursement de 3 pour cent
d'intérêt sur un prêt qu'il obtient de la caisse ou de la
banque à un taux qui ne doit pas dépasser 6 pour cent
d'intérêt, supposons pour l'achat d'un taureau reproducteur qui
lui coûtera $500.00, sait très bien que son prêt total
à la caisse ou à la banque ne pourra pas dépasser $350.00.
Si le vendeur du taureau veut être payé comptant, le cultivateur
doit fournir lui-même les $150.00 qui manquent pour compléter le
montant de $500.00.
L'article 4 qui indique ceci: Nécessité du prêt:
« L'emprunteur ne doit pas posséder en argent et en valeurs
mobilières réalisables les disponibilités requises pour
défrayer lui-même en entier le coût des achats ou
améliorations faisant
l'objet d'un prêt sollicité. « Si ses
disponibilités dépassent la mise de fonds requise sans toutefois
atteindre le coût total, le prêt devrait être limité
à l'insuffisance des disponibilités.
Toute personne qui demande un prêt doit déclarer dans sa
demande ses disponibilités en argent ou en valeurs mobilières
réalisables ».
En prenant l'exemple ci-dessus et en l'appliquant à l'article 4,
nous pouvons conclure que si un cultivateur possède $500.00 en banque et
qu'il veut acheter un taureau reproducteur par exemple, d'une valeur de
$500.00, il n'aurait pas droit à un prêt en vertu de la «
Loi de l'Amélioration des fermes ». S'il n'a que $400.00 en
argent, ce qui dépasse la mise de fonds requise de $275.00, mais qui est
encore $100.00 inférieure au coût total de l'achat, il pourrait
alors obtenir un prêt pour l'insuffisance des disponibilités, soit
$100.00.
C'est que les règlements viennent restreindre la portée de
la loi, en imposant des restrictions quant au pourcentage des prêts,
variant selon le cas de 60 à 90 pour cent de la valeur de l'objet que le
cultivateur veut acheter, ou du coût des travaux d'amélioration
qu'il veut entreprendre.
Ces restrictions ont trois conséquences principales: 1.- Elles
permettent surtout aux cultivateurs qui pourraient se passer de l'aide de
l'Etat de faire des emprunts en vue de l'amélioration de leurs
fermes.
En effet, lorsqu'il s'agit de l'achat d'instruments aratoires,
d'outillage ou de machinerie agricole, le gouvernement stipule dans ses
règlements que le prêt effectué par la caisse ou par la
banque né devra pas dépasser 66.6 pour cent du prix d'achat des
articles neufs, et 60 pour cent du prix d'achat des articles usagés.
Seuls les cultivateurs qui sont en mesure de financer par leurs propres
moyens le tiers ou les deux-cinquièmes du coût total de
l'instrument aratoire ou de la machinerie agricole peuvent alors obtenir un
prêt et profiter du remboursement de 3 pour cent d'intérêt.
Ceux qui ont réellement besoin de l'aide du gouvernement, parce qu'ils
n'ont pas assez d'argent liquide dans leur compte de banque pour financer la
balance du montant qui reste à payer au vendeur, ne peuvent pas
effectuer la transaction et profiter des avantages de ces prêts.
Cette loi qui ne règle pas le problème du grand nombre de
cultivateurs qui auraient besoin d'améliorer leurs fermes et qui n'ont
pas assez de valeurs réalisables pour fournir au comptant le tiers du
prix d'achat de la machinerie, le quart du prix d'achat des animaux
reproducteurs...
Ces restrictions ouvrent la porte aux abus de la part de certaines
entreprises qui sont prêtes à financer la partie non empruntable
du prêt à la condition que le cultivateur
bénéficiaire signe un contrat de longue durée avec elles
pour la fourniture d'une production agricole déterminée.
Tel est le cas qui se passe pour l'installation des réservoirs
pour le refroidissement du lait sur la ferme. Des entreprises privées,
laiteries, vont aider les cultivateurs à se procurer un de ces
réservoirs dont le coût peut être évalué
à environ $100 par vache laitière. Le cultivateur obtient un
prêt de la caisse populaire ou de la banque pour payer les deux tiers du
coût du réservoir; l'entreprise privée en paie l'autre
tiers et oblige le cultivateur à signer un contrat de cinq ou de dix ans
pour l'engager à fournir son lait à cette entreprise durant cette
période où le réservoir pour le refroidissement du lait,
est amorti.
Cette façon de procéder nuit à nos
coopératives qui n'ont ni le droit, ni les moyens de se lancer dans ce
genre de financement ou de commerce.
Ces règlements entravent par conséquent l'expansion
normale du mouvement coopératif dans la province. 3e- Les restrictions
imposées par les règlements encouragent la tricherie dans les
transactions en forçant le vendeur, de connivence avec l'acheteur,
à gonfler le prix de vente pour hausser le plafond du prêt
au-delà du pourcentage permis par les règlements.
Prenons le cas d'un tracteur. Selon les règlements pour l'achat
d'un tracteur neuf le cultivateur a droit à un prêt maximum de
$3,000, mais il ne peut emprunter que les deux tiers du prix d'achat
réel, soit 66 2/3%. Si en réalité le tracteur qu'il
achète vaut $3,000, il n'aura droit qu'à un prêt de $2,000.
Il lui faudra trouver $1,000 ailleurs. Rien n'empêche le cultivateur, de
connivence avec le vendeur, à fixer le prix du tracteur à $4,200,
ce qui lui permettrait de bénéficier d'un prêt de $2,800
sur lequel le gouvernement remboursera 3% de l'intérêt. Dans ce
cas, le prix réel du tracteur étant de $3,000, le cultivateur
n'aura que $200 à débourser de son propre argent.
Il est vrai que d'après l'article 7 des règlements,
l'Office aura droit d'enquête sur le prêt et l'utilisation de la
somme empruntée tant chez l'emprunteur que chez le prêteur. Mais
on hésitera toujours à le mettre en application dans les banques
où il faut chaque fois une permission du bureau chef pour faire
enquête et dans les cas où les amis reconnus du gouvernement
effectuent de telles transactions.
Comme conclusion, M. le Président, les rè-
glements de la Loi de l'amélioration des fermes enlèvent
beaucoup d'importance et d'avantages à la loi telle que
rédigée dans les statuts.
Il est temps de mettre fin à cette politique agricole mise en
application au moyen d'un compte-goutte et de faire confiance aux cultivateurs
de notre province qui ont prouvé depuis 28 ans par le Crédit
agricole qu'ils étaient capables de faire honneur à leurs
obligations.
Il y aurait lieu aussi d'abréger et de rendre plus simple la
formule de 4 pages MT-1 que le cultivateur doit compléter ou faire
compléter par un notaire tellement elle est compliquée, avant
d'obtenir un prêt.
M. MAILLOUX: M. le Président, il semble que plus il y aura de
gouvernements qui se succéderont dans cette Chambre, autant de fois l'on
se renverra la balle en disant à celui des partis qui sera à la
gouverne de la province qu'il est le responsable du sort malheureux dans lequel
se débattent nos agriculteurs des terres marginales.
Nos amis de l'Opposition nous ont dit depuis quelques heures qu'avec le
présent régime il y avait plus de fermes abandonnées que
jamais. Suivant qu'ont progressé les salaires dans le commerce et
l'industrie et avec peut-être l'utopie d'une vie facile dans les centres,
urbains progressera l'exode des fils de cultivateurs vers des salaires plus
alléchants.
Récemment mon comté était le centre d'une grande
mission organisée par l'archevêché de Québec et les
sociologues et les experts devaient scruter quelles étaient les raisons
qui motivaient l'exode de près de 35,000 personnes de Charlevoix depuis
le début du siècle. Comme le tiers de la population vit de la
terre et que cet exode vient surtout de cette classe de la
société, ils se sont penchés davantage sur la classe
agricole et sur les difficultés inhérentes à cette
profession.
Lors d'un forum qui a suivi la présentation d'un volumineux
mémoire, aux questions posées par les cultivateurs
désireux de connaître les suggestions que pouvaient apporter ces
experts qui venaient de terminer des études qui avaient pris de longs
mois de labeur, se basant également sur une étude
économique terminée en 1941 par un économiste tel M.
François-Albert Angers, il ressortait de leurs conclusions que les
terres marginales du comté n'ont jamais eu de vocation agricole et qu'il
était nécessaire d'apporter des changements tellement radicaux
qu'il était impensable d'y songer.
M. le Président, il n'est pas nécessaire de faire de
longues études sur notre agriculture pour constater ce fait. Un
prêtre élevé dans le comté disait ceci en
conclusion: « Certaines terres des hauteurs de Charlevoix seront
difficiles à récupérer car ce ne sont pas des terres
rocheuses mais des roches terreuses. »
Sur des roches terreuses, pour s'y cramponner cela prend un désir
d'abnégation qu'il n'est pas facile de retrouver parmi les fils de
cultivateurs en 1964. Et il est facile de comprendre leur décision de
quitter des terres qui manquent d'un apport qu'elles possédaient
auparavant. Je crois que nos amis d'en face, pas plus que le parti au pouvoir
ne sont responsables, si on a voulu dans le passé donner une vocation
agricole à des terres dont la seule vocation était du domaine
forestier. Ces terres n'ont été viables qu'à la seule
condition que le boisé de ferme apporte le revenu nécessaire aux
besoins de la famille. Tant que nos ancêtres imbus de principes
d'économie que nous ne rencontrons plus aujourd'hui se sont servis de
moyens de fortune à leur disposition pour cultiver ces terres, avec le
revenu d'appoint de la forêt, cela a suffi. Mais quand on a
été obligé de piller ces boisés pour
mécaniser les opérations des terres avec une disproportion de
besoins qu'il est inutile de mentionner, on a rencontré des
difficultés de financement dont aucun régime n'est responsable,
je crois. Et quand les opérations forestières des
concessionnaires des limites gouvernementales sont devenues tellement
mécanisées que le cultivateur ou son fils n'ayant plus
trouvé le revenu nécessaire à la protection de son propre
boisé, alors on a pillé davantage ce boisé et,
résultat: terres à vendre, dont personne ne veut se porter
acquéreur et pour cause. Je n'accuserai pas plus le
précédent régime que celui auquel j'appartiens de cette
malheureuse situation dont tous sont conscients.
On peut donc conclure que des gens ont été dirigés
vers des endroits dont le sol n'a pas la vocation qu'on a voulu lui
prêter et cette erreur entraîne des conséquences de
réadaptation qui ne sont pas faciles de solution.
On a mentionné le travail méritoire de réadaptation
qu'ont tenté les agronomes de la province. Malheureusement
ceux-là sont aux prises avec des difficultés avec des
cultivateurs qui sont devenus méfiants en soldant de leurs
économies plusieurs tentatives qui n'ont pas donné les
résultats espérés. On a chez nous quelques brefs exemples,
si vous permettez, étant beaucoup plus jeune je me rappelle que pour
parer à cette absence de revenu on a tenté, évidemment,
l'élevage du renard dont la plupart de nos cultivateurs ont soldé
les frais par des faillites monumentales. Par la suite, on a recommandé
l'élevage du vison qui a suivi: une faillite tout aussi formidable que
la précédente. Durant
la dernière guerre, une très forte partie de
ceux-là se sont spécialisés dans l'élevage de la
dinde; les profits sont allés dans les goussets des compagnies bien
connues. On a alors voulu relancer ces éleveurs vers l'élevage du
poulet. Trop loin de vastes marchés, quelques-uns ont survécu, la
forte partie a végété. Des spécialistes ont
préconisé que nos terres impropres à la culture soient
organisées en pâturages pour le mouton, ceci il y a deux ans.
Alors est apparue une nouvelle bête chez nous dans le comté, qu'on
appelle le coyote, qui dans la même nuit saignait 50 brebis et, quand on
a voulu pourchasser cette bête, on s'est aperçu qu'elle se
déplaçait de 75 milles en une nuit et occasionnait les
mêmes ravages et, tant qu'un système de bergerie ne sera pas
organisé, inutile de tenter une telle expérience dont nos
cultivateurs feront encore les frais.
Dans mon comté, deux vallées sont seules propres à
la culture rentable: celle de Baie St-Paul et l'autre à la Malbaie ou
les environs immédiats. Parmi les fermiers de ces deux vallées,
il se produit qu'un jour ou l'autre une exception ait à abandonner la
terre. Ces gens-là ont des difficultés comme dans toutes les
autres classes de la société. Quand une de ces terres est
abandonnée, elle a été rachetée de suite et les
gens les plus fortunés de mon comté c'est parmi ces fermiers
qu'on les rencontre dans ces deux vallées-là.
Mais quand vous montez à une altitude de 3,500 pieds et que vous
rencontrez des obstacles tels les six pouces de neige qui se sont abattus sur
toutes les terres élevées du comté le 12 septembre
dernier, eh bien! là on constate que ces terres rocheuses ont à
affronter un climat défavorable et que la seule issue pour ces
populations de survivre elle est synonyme de l'exploitation forestière
qui trop souvent n'existe plus.
Mon prédécesseur comme moi-même avons
hérité d'une agriculture dont nous ne sommes pas responsables de
l'état où elle est rendue. Des formules magiques, je n'en
possède pas plus qu'il n'en possédait.
Devant l'urgence, cependant, du problème, il y a quelques mois
tous les groupements coopératifs, Chambres de commerce,
sociétés coopératives, etc. se réunissaient afin
d'analyser une autre fois la succession dont on a hérité. M.
François-Albert Angers préconisait alors que soient
récupérés les boisés gouvernementaux et une partie
des concessions forestières dont n'ont pas un urgent besoin les
compagnies opérantes.
Nous avons fusionné, depuis, six syndicats forestiers des
paroisses les plus à l'est du comté. Et nous espérons
pouvoir assurer une coupe annuelle de 6,000,000 de pieds de bois qui assurerait
la rentabilité d'un moulin dont les opérations
allégeraient le problème de cinq de ces paroisses dont la
vocation a été faussée.
Le clergé, les autorités civiles, éliminant toute
participation politique, se sont mis à la tête de ces syndicats
afin, évidemment, que nous trouvions les personnes qui sont capables de
nous prouver que leur intégrité sera synonyme de la bonne
réussite de ce moulin.
M. le Président, nous avions pensé qu'avec les terres les
plus défavorisées du comté il serait possible d'organiser
une culture de pommes de terre qui soit rentable chez nous. Il est un fait
indéniable, c'est que dans Charlevoix il se consomme présentement
au-delà de 200,000 sacs de pommes de terre par année que ces
cultivateurs produisent présentement à échelle
réduite dans des conditions pleinement défavorables, avec absence
évidemment de conservation.
Nous espérions qu'avec l'apport qui vient du ministère de
l'Agriculture, soit la contribution de 75% à l'organisation de ces
entrepôts, il nous soit possible d'assurer au moins la conservation du
produit dont nous avons besoin chez nous même. Nous avons, durant les
mois précédents, tenté l'impossible pour convaincre ces
gens-là qu'avec l'appui du gouvernement il leur était
nécessaire de s'organiser un marché ordonné. Et
malheureusement, dans les semaines qui ont précédé, alors
qu'une rencontre finale était organisée avec tous les
intéressés, nous avons plaidé pendant des heures et des
heures. Mais ces agriculteurs sont rendus dans une telle situation que parmi
les 300 personnes intéressées à cette culture nous n'avons
pu trouver que 27 personnes susceptibles d'apporter les quelques centaines de
dollars requis de chacun pour l'organisation d'un tel entrepôt.
Et dans ces conditions, je pense que vous voyez la situation qu'ont
à affronter les députés des régions mi-urbaines
mi-rurales où, évidemment, l'on rencontre des terres marginales
qui ne sont pas récupérables.
Conscient du problème dont je viens de parler, cependant que tout
aussi conscient que ce n'est pas le ministre de l'Agriculture qui est
responsable d'une triste situation dont il a hérité, je voterai
contre l'amendement du député de Frontenac.
M. COURCY: M. le Président, mes collègues de l'Opposition
ont affirmé à maintes reprises que le gouvernement actuel et
tout
particulièrement le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation étaient responsables de la désertion des campagnes
par les agriculteurs de la province, de l'exode rural pour employer une
expression plus appropriée.
Si celui qui vous parle voulait pêcher en eaux troubles, il
pourrait continuer à développer les mythes, les termes populaires
dont certains membres de l'Opposition se sont plu à abreuver les
agriculteurs au cours des dernières décennies, alors qu'ils
qualifiaient les cultivateurs de chez nous de « rois de la terre »,
« nourriciers du genre humain »; les, campagnes? de « source
de citoyens d'élite », de « nobles pourvoyeurs d'hommes aux
villes mangeuses d'hommes » etc. Ils disaient à qui voulait
l'entendre, et aussi près de nous encore qu'en 1959, que l'agriculture
du Québec était aussi prospère qu'on pouvait
l'espérer.
Au risque de déplaire à certaines gens, j'aime parler
franchement aux agriculteurs. Je m'efforce de leur faire comprendre la
nécessité de rajuster l'agriculture du Québec. Je les
invite à ne pas se cantonner dans la routine, et je suis bien
déterminé à aider ceux qui peuvent et qui veulent s'aider
à devenir des actifs dans la province.
Je veux, au risque de déplaire à certains, rappeler encore
une fois certaines vérités concernant l'exode rural. Vous avez
entendu d'Opposition, et en particulier le proposeur de la motion,
député de Frontenac, agronome, et aussi un autre de nos
collègues députés agronomes, le député de
Lotbinière.
Il y a un fait que l'on ne peut ignorer; les pourcentages de la
population rurale et de la population agricole diminuent constamment, surtout
depuis la deuxième guerre mondiale, dans tous les pays qui
s'industrialisent, y compris le Canada et aussi le Québec.
La population agricole en 1931 au Canada était de 31.7%. Elle est
rendue en 1961, suivant les dernières statistiques, à 11.4% au
Canada. Dans la province de Québec, en 1931 le pourcentage de la
population agricole était de 27%; en 1941, 25.2%; en 1951, 19.5% et en
1961 11.1%. Dans le Québec, en vingt ans, de 1941 à 1961, la
proportion de la population agricole est passée de 25.2% à
11.1%.
Pour illustrer ce fait, je choisis deux comtés. Un premier
où les terres agricoles sont plutôt limitées dans une
région que l'on désigne comme marginale au point de vue agricole
et un second comté dans lequel les terres agricoles sont plus
abondantes. Et vous verrez la sincérité de ceux qui depuis hier
en cette Chambre crient au marasme de l'agriculture, crient à l'exode
rural dans la province.
Dans le comté de Frontenac, comté du proposeur de la
motion, là où la bonne terre agricole est rare, la proportion de
la population agricole est passée de 65.2% à 41% au cours de la
période de 1941 à 1961. Cette baisse du pourcentage de la
population agricole représente une chute de 24.1% en vingt ans. Plus de
1% par année. Si l'on considère maintenant le nombre de fermes
ah! lui qui hier parlait de la responsabilité du gouvernement
actuel de vider les campagnes le nombre de fermes dans le comté
de Frontenac est passé de 3,629, en 1941, à 1984, soit une
diminution de 1645 fermes ou près de la moitié; 45% des fermes du
comté de Frontenac sont disparues de 1941 à 1961.
M. le Président,...
UNE VOIX: Quelle est la source?
M. COURCY: Les statistiques du fédéral.
M. GUILLEMETTE: M. le Président, est-ce que le ministre me permet
une question?
UNE VOIX: On vous a écouté.
M. GUILLEMETTE: C'est parce qu'il est en train de répéter
des choses contre lesquelles on a eu à rétablir les faits pendant
qu'il était dans l'Opposition. Est-ce qu'il est au courant que la
statistique fédérale a changé...
M. COURCY: Attendez! Si le député veut attendre je vais
lui donner tout à l'heure les changements de définitions en temps
et lieu.
M. GUILLEMETTE: C'est cela qu'il faudrait commencer par donner.
M. COURCY: Cette diminution s'est surtout produite au cours des cinq
dernières années de la période et c'est à partir de
ce moment-là seulement qu'il y a eu un changement de définitions,
soit dans les statistiques fédérales de 1961.
M. le Président, il y a eu une diminution dans les cinq
dernières années, dans le comté de Frontenac, de 699
fermes suivant les définitions anciennes...
M. JOHNSON: Non, le ministre...
M. COURCY: ... et à cause de la définition nouvelle, il
reste 531 fermes si nous éliminons l'ancienne définition pour
prendre la nouvelle.
M. JOHNSON: Oui. Mais est-ce que le ministre est bien certain qu'il n'y
a pas eu un changement de définition du mot « ferme » dans
les statistiques fédérales vers 1956...
M. COURCY: Oui, il y a eu un changement, et Je l'ai donné tout
à l'heure encore.
M. JOHNSON: Vers 1956, pas 1960.
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: A l'ordre!
M. COURCY: M. le Président, au cours des vingt dernières
années, de 1941 à 1961, le comté de Frontenac était
pourtant représenté à la Législature de 1944
à 1952 par un cultivateur qui est maintenant conseiller
législatif et qui était ministre d'Etat et conseiller du ministre
de l'Agriculture. Depuis 1956, ce comté est représenté par
l'ex-agronome du comté et qui est encore député de
Frontenac. Mais en face de ce problème, en face de la désertion
des campagnes, que disait-il en 1958, M. le Président? Ecoutez ces
paroles du député de Frontenac en 1958 quand ce problème
revenait devant cette Chambre: « Certes, il subsiste des
difficultés mais elles sont la rançon du progrès
incontestable de la province.
La prochaine crise, la prétendue crise dont font grand
état, certains propagandistes, intéressés à
créer un état de psychose chez le peuple pour en retirer des
avantages politiques ce n'est pas une crise de production et de prix, ni
l'abandon de la terre, c'est plutôt affirme le député de
Frontenac, une crise d'adaptation, au progrès peut-être trop grand
que notre agriculture a connu, une crise de dépenses trop
considérables a absorber trop rapidement par une profession qui est
partie de trop bas et qui a vu son standard de vie s'améliorer trop
vite, avec l'électricité etc, etc.
UNE VOIX: Il est changé de bord.
M. COURCY: M. le Président, c'était les
déclarations en cette Chambre le 4 décembre 1958.
M. GERIN-LAJOIE: Certain que tu lui enverras une copie.
M. COURCY: Dans le comté de Lotbinière maintenant, M. le
Président, un des bons comtés agricoles du Québec...
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement, M. le
Président...
M. COURCY: ... la proportion de la population agricole.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. JOHNSON: ... la motion M. le Président prétend que le
gouvernement n'a pas de pensée agricole, deuxièmement, qu'il n'a
pas tenu ses promesses, je pense que le ministre devrait en profiter pour s'en
tenir à la motion et nous dire si oui ou non il dédit ses
promesses.
M. COURCY: M. le Président... quand tout à l'heure, nous
entendions le député de Beauce nous parler de sirop
d'érable, quand nous entendions le député de
Jonquière ou de Roberval nous parler de machinerie agricole, de
tracteurs de « bulldozers » de vaches, de boeufs, de cochons,
ça marchait. Dans le comté de Lotbinière, M. le
Président, la proportion de la population agricole est passée, au
cours de la même période 1941-1961, de 68.2% à 51%, c'est
une diminution de 17.1% en 20 ans.
M. JOHNSON: Qu'est-ce que ça prouve?
M. COURCY: Qu'est-ce que ça prouve M. le Président? Hier
ces diminutions de fermes dans la province de Québec...
M. BERNATCHEZ: Des changements, dans la façon de faire des
statistiques.
M. COURCY: ... étaient la responsabilité du ministre de
l'Agriculture et aujourd'hui pendant l'administration de l'Union nationale, 16
ans passés, ça ne dépendait plus du gouvernement,
ça dépendait des cultivateurs eux-mêmes qui
s'étaient laissés dépasser par l'avancement de
l'agriculture.
M. JOHNSON: Bien voyons donc. C'est l'agriculture ça. Non, non,
le ministre ne veut certainement pas induire la Chambre en erreur, quand bien
même que les villages et les villes auraient augmenté, dans un
comté donné, ça ne veut pas dire que les fermes ont
été abandonnées...
M. COURCY: Attend un peu,... non, non. UNE VOIX: Cela n'est pas un point
d'ordre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: Le ministre donne une statistique tout à fait
inexacte, d'une statistique qui est fausse, pour tenter de
démontrer...
M. HEBERT: Laissez-le parler, il va vous éclairer un peu.
M. COURCY: M. le Président, le chef de l'Opposition, vous
l'entendez, statistiques qui sont fausses, statistiques dont ils se sont servis
hier...
M. JOHNSON: Non, non,...
M. COURCY: ... quant au nombre de fermes dans le comté de
Lotbinière, il est passé de 3,463 à 2,571 au cours des
années 1941-1961, c'est une diminution de 892 unités ou de 25.8%
en 20 ans, il y a eu disparition de 165 exploit tations agricoles par suite du
changement de la définition d'une ferme au recensement de 1961. Les
diminutions réelles de 727 fermes M. le Président. Je suis
tenté de rapprocher M. le Président, je suis tenté...
DES VOIX: A l'ordre.
M. COURCY: ... M. le Président, de rapprocher ces dates du
recensement de celles de certaines étapes de la vie du
député de Lotbinière, pour vous démontrer le
sérieux des accusations d'aujourd'hui. Il a été
nommé agronome dans le comté de Lotbinière en 1938, cette
date est rapprochée de celle de 1941. Il a été élu
député de comté en 1948, cette date est encore près
de 1951 et nommé adjoint parlementaire du ministre de la Colonisation en
1956, or c'est au cours de cette période de 1956 à 1961 alors que
mon collègue du comté de Lotbinière était adjoint
parlementaire, a décru le plus rapidement dans son comté. Au
cours de cette période de 5 ans, il est passé de 2,900 à
2,571...
M. HEBERT: Ils ne nous ont pas dit cela hier.
M. COURCY: ... soit une diminution de 329 en 5 ans, environ 68 par
année en moyenne lors même que l'on tient compte du changement il
reste que la diminution...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. BERNATCHEZ: M. le Président, je soulève un point
d'ordre M. le Président, je crois que...
UNE VOIX: Asseyez-vous, on vous a laissé parler.
M. BERNATCHEZ: ... nous avons démontré depuis hier
après-midi que nous voulions traiter du problème agricole de la
façon la plus objective possible, il est regrettable que celui qui est
le premier responsable...
M. HEBERT: Cela n'est pas un point d'ordre ça.
M. BERNATCHEZ: ... de l'agriculture n'ait pas trouvé d'autres
choses à faire que des farces, en réponse aux discours qui ont
été présentés.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. COURCY: 33 fermes par année, de 1956 à 1961.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement et c'est mon devoir...
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: ... c'est mon devoir et mon droit en vertu du
règlement de corriger immédiatement une erreur que le ministre
vient de commettre et par laquelle il induit toute la Chambre en erreur et
toute la province. Il m'a bien dit tantôt qu'il n'y avait pas eu de
changement de définition entre 1941 et 1960 pour les fermes. Or,
j'affirme qu'il a dit tantôt, M. le Président, que le changement
pour fins statistiques de la définition d'une ferme Il n'avait eu lieu
qu'en 1959 ou 1960. Je lui ai demandé s'il n'était pas sûr
qu'il n'y en avait pas eu un auparavant, entre autres en 1956. M. le
Président, contrairement à ce que vient d'affirmer le ministre,
en 1951 il y eut un changement de définition de fermes, ce qui fausse
toutes les statistiques que le ministre vient de donner à cette
Chambre.
M. COURCY: M. le Président, les statistiques que je mentionne ici
aujourd'hui sont les mêmes qui ont été mentionnées
hier par les membres de l'Opposition, quand ils prenaient les statistiques
fédérales...
M. GUILLEMETTE: M. le Président, je soulève un point
d'ordre.
M. COURCY: ... pour le recensement de leur comté.
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: A l'ordre, messieurs, à l'ordre.
M. GUILLEMETTE: Je soulève un point d'ordre, je soulève un
point d'ordre.
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. COURCY: ... Le député de Lotbinière...
M. LE PRESIDENT: Un instant, à l'ordre, à l'ordre.
M. COURCY: ... n'a pu empêcher la moitié des cultivateurs
de Lotbinière...
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: Un instant. Je ferai remarquer à tous
les députés que ce n'est pas un point d'ordre, que ce n'est pas
invoquer le règlement que de prétendre qu'un député
de quelque côté que ce soit ne se base pas sur les mêmes
statistiques ou n'emploie pas les mêmes normes pour discuter d'un sujet.
Je crois que les député doivent se rappeler les articles 270 et
286 qui permettent, si nécessaire, de revenir après qu'un
député a fini de parler pour faire certaines corrections ou mises
au point de cette nature. Mais actuellement ce n'est pas un point d'ordre, ce
n'est pas une question de règlement, mais plutôt une
interpellation qui est faite et je demande aux députés de s'en
tenir au règlement.
M. GUILLEMETTE: M. le Président, je soulève un point
d'ordre parce qu'en ce qui me concerne, le ministre dit qu'il nous parle des
mêmes statistiques dont je lui ai parlé hier. Je n'ai parlé
en aucun endroit dans mon discours...
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: Un instant. C'est ce que je viens de faire
remarquer au député de Frontenac en particulier, c'est que ce
n'est pas actuellement une question de règlement qu'il soulève,
mais une question d'interprétation de statistiques...
M. GUILLEMETTE: Ah non, non, non. M. LE PRESIDENT SUPPLEANT:
Voici...
M. BERNATCHEZ: Alors, on pourra y répondre?
M. LE PRÉSIDENT SUPPLEANT: Quelle que soit l'affirmation d'un
député, si c'est fait en termes parlementaires, suivant le
règlement, on peut pas en soulevant le règlement essayer de faire
une correction ou une mise au point. C'est ça que je veux mettre en
évidence devant la Chambre.
M. COURCY: Alors, M. le Président...
M. JOHNSON: M. le Président, lorsqu'un député vous
attribue des paroles ou des propos...
M. COURCY: M. le Président, je voudrais...
M. JOHNSON: ... qu'on n'a pas tenus et qu'on a épuisé son
droit de parole, quel est le moyen pour le député de faire la
correction?
M. LE PRESIDENT SUPPLEANT: C'est l'article 286 du règlement qui
est très clair et très précis.
M. COURCY: Alors, M. le Président, je me demande pourquoi le
député de Lotbinière et ses collègues de l'autre
côté de la Chambre...
M.BELLEMARE: 285...
M. COURCY: ... accusent le gouvernement et le ministre de l'Agriculture
et de la Colonisation de favoriser l'exode rural en ne s'occuppant pas assez de
l'agriculture? Ah, pendant que le député de Frontenac, en 1958,
faisait la déclaration que j'ai mentionnée tout à l'heure
vous voyiez tous les membres de l'Opposition qui étaient présents
à cette circonstance applaudir à deux mains pour approuver les
déclarations du député de Frontenac. C'est d'ailleurs ce
que fait le député de Lotbinière. Comment, M. le
Président, peuvent-ils, eux qui ont vu depuis 1960 ce gouvernement
augmenter le budget de l'Agriculture de 15.93%, comment, M. le
Président, ceux-ci peuvent-ils accuser le gouvernement de ne rien faire
pour l'agriculture quand ils ont vu ce même gouvernement doubler les
primes de défrichement et l'étendue défrichée
à primer? Anciennement, 40 acres à $40 de l'acre maximum,
aujourd'hui $60 pour 60 acres par lot qui donne une possibilité de 120
acres primables par établissement de 200 acres. Porté de $10,000
à $15,000 le prêt agricole, prêt agricole qui a fait parler
de lui énormément hier soir, prêt agricole qui était
considéré comme la planche de salut de la classe agricole du
temps de l'Union nationale où durant l'année de 1959 le montant
de $11,145,000 a été déboursé pour les
cultivateurs
de la province. M. le Président, on parle et on fait grand
état de prêts de conversion; les prêts de conversion qui ont
été remboursés en 1959, il y en a eu pour une somme de
$651,725, ce qui laisse de nouvelles sommes, mises à la disposition des
cultivateurs de la province en l'année 1959, la dernière
année de l'Union nationale, de nouvelles sommes distribuées aux
cultivateurs au montant de $10,493,993.
En 1960, dès notre arrivée au pouvoir, nous avons
pensé à améliorer cette Loi du crédit agricole afin
de donner davantage la possibilité aux cultivateurs de chez-nous
d'organiser leur ferme. Que s'est-il passé? $13,483,000 ont
été déboursés par l'Office du crédit
agricole au 31 mars 1960 dont $1,203,747 de prêts d'argent
remboursés par le prêt de conversion, ce qui monte la somme totale
en 1960 à $12,279,439.
En 1961, $14,000,000 dont $1,154,000. remboursés par prêts
de conversion qui laissent de nouveaux montants à la disposition du
cultivateur, ou le montant de $12,928,000. En 1962, nous avons fait approuver
ici en cette Chambre des amendements à la Loi de l'Office du
crédit agricole pour permettre au crédit agricole
fédéral de prêter, lui aussi, aux cultivateurs de la
province en promettant à ceux-ci le remboursement du montant de 3 pour
cent sur leur emprunt afin qu'aux cultivateurs qui emprunteront du
crédit agricole fédéral ça ne leur coûte pas
plus cher que ces emprunts du crédit agricole provincial.
Que s'est-il passé? Pendant ce temps-là, nos officiers du
crédit agricole, nos inspecteurs, dans la campagne, partout, ont
réussi à faire débourser à l'Office du
crédit agricole un montant de $25,844,000 dont le montant de $5,911,000
a été remboursé par les prêts de conversion. En
nouvel argent, prêté aux cultivateurs de chez nous en 1962, le
montant de $19,933,000 plus $1,786,000 qu'a prêtés le gouvernement
fédéral, soit un total de $21,000,000 de nouvelles sommes qui ont
été prêtées aux cultivateurs de chez nous, à
comparer à $10,000,000 de l'Union nationale. Si nous continuons, avec
ces amendements à la Loi du crédit agricole qui ont servi nos
cultivateurs en 1963: $27,150,000, Office du crédit agricole provincial,
et $11,424,000 approuvés par l'Office du crédit agricole
fédéral, ce qui donne un montant total de nouvelles sommes de
$31,000,000 aux cultivateurs de chez nous, à comparer avec les amoureux
des agriculteurs: $10,000,000 par année.
Et en 1964, l'année finissant le 31 mars 1964, l'Office du
crédit agricole a déboursé des prêts pour un montant
de $27,000,000, plus $14,710,000 prêtés par l'office du
crédit agricole fédéral, et sur ce montant il y eut un
montant de $6,963,379 remboursés par les prêts de conversion,...
M. BERNATCHEZ: M. le Président.. M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. COURCY: ... ce qui laisse aux cultivateurs de la province un montant
de $35,000,000 en ressources nouvelles.
M. BERNATCHEZ: M. le Président, je tiens à vous informer
immédiatement que probablement demain ou après-demain nous aurons
l'occasion d'étudier les crédits...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs !
M. BERNATCHEZ: ... du ministère de l'Agriculture et les chiffres
que le ministre rient de donner...
M. LE PRESIDENT: Le député de Lotbinière même
s'il prétend qu'il invoque le règlement, n'a pas le droit
d'interrompre le député qui a la parole.
M. JOHNSON: Il est en train de faire des mamours aux cultivateurs.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. COURCY: M. le Président, nous avons depuis 1960
accordé, à certaines conditions, aux jeunes agriculteurs qui ont
un prêt d'établissement une remise jusqu'à concurrence de
$3,000 sur leur emprunt. Du temps de l'Union nationale zéro, M. le
Président.
M. JOHNSON: Il y en a combien qui ont reçu leur remise?
M. COURCY: La remise est après dix ans, M. le
Président.
M. JOHNSON: Ah bon!
M. COURCY: Quand nous aurons la certitude que le fils de cultivateur que
nous avons établi sur une ferme est sérieux, y sera
demeuré et l'aura cultivée cette ferme pendant dix ans.
M. JOHNSON: En attendant, il va crever de faim.
M. COURCY: En attendant, il y a le prêt agricole à 90 pour
cent, à deux et demi pour cent d'intérêt, remboursable
pendant 39 ans 1/2. Nous avons rendu la Loi d'amélioration des fer-
mes opérante, loi d'amélioration des fermes qui a
été passée par l'Union nationale, oui! mais qui
était demeurée dans les statuts, qui était demeurée
cachée, qui n'avait même pas de règlements de faits, et
trouvez-moi un seul cultivateur dans la province qui a été
capable d'emprunter d'après la Loi de l'amélioration des fermes
passée par l'Union nationale avant que nous l'amendions, avant que nous
sortions des règlements et avant que nous prenions entente avec les
banques. Trouvez-moi un seul cultivateur dans la province qui a
été capable d'emprunter avec cette loi de l'Union
nationale...
M. BELLEMARE: C'est ça, finissez,..
M. COURCY: ... aucun n'a été capable d'emprunter, parce
que la loi était mal faite, la loi avait besoin d'être
amendée,
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. BELLEMARE: C'est ridicule, la loi venait d'être passée
et la session a fini au mois de juin.
M. COURCY: Nous avons refondu la Loi des marchés agricoles.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. COURCY: Vous vous souvenez, hier, du député de
Champlain, quand j'ai voulu faire certaines rectifications sur ses dires, vous
m'avez demandé d'attendre mon tour, j'ai attendu, et lui qui aujourd'hui
a parlé devrait attendre, devrait écouter, devrait se
renseigner...
M. BELLEMARE: Je m'en vais vous reprendre sur le budget.
M. BERNATCHEZ: Il va y goûter, le ministre!
M. COURCY: ... pour être capable de dire en cette Chambre la
vérité. Nous avons amendé la Loi des coopératives
agricoles. Nous avons porté les sommes annuelles des garanties
hypothécaires des coopératives agricoles de $300,000 à
$1,000,000.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. COURCY: Nous avons amendé la Loi des coopératives
agricoles.
M. BERNATCHEZ: Il va y goûter demain, le ministre.
M. BELLEMARE: Vous allez rester sur le gril pendant une semaine!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Je rappelle le
député de Lotbinière à l'ordre pour la
deuxième fois.
M. LACROIX: Laissez parler le grand monde!
M. BERNATCHEZ: C'est à lui d'être à l'ordre!
M. COURCY: Ce n'est pas le chantage du député de
Lotbinière, M. le Président... Nous avons organisé
l'enseignement agronomique dans la province, qui depuis nombre d'années
attendait.
Depuis nombre d'années, nos agronomes dans la province
attendaient que quelque chose de nouveau se produise. Personne n'avait eu le
courage de prendre la décision. Nous avons institué
l'enseignement agronomique sur le campus de l'Université Laval,
enseignement universitaire à l'Université. Nous avons aussi
créé de toute pièce l'enseignement technique agricole dans
la province, à Ste-Anne-de-la-Pocatière et à St-Hyacinthe.
Nous sommes à réorganiser l'enseignement professionnel agricole
et quand j'entendais, hier, le député de Lotbinière lancer
des cris d'alarme sur l'enseignement professionnel agricole, quand je
l'entendais, lui, se pencher avec douleur sur le sort de ces jeunes qui
n'avaient pas la possibilité d'aller dans nos écoles
d'agriculture, je ma disais: quel sérieux! quand nous savons que lui,
qui est membre d'une corporation d'école d'agriculture dans le
comté de Lotbinière, n'a même pas assisté à
une assemblée depuis trois ans.
M. BERNATCHEZ: M. le Président... M. LE PRESIDENT: A l'ordre,
messieurs!
M. BERNATCHEZ: M. le Président, je loge une question de
privilège. Le ministre vient de m'attaquer directement. Je tiens
à l'informer, M. le Président,...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BERNATCHEZ: ... que lors de l'étude des crédits de
l'Agriculture, je dirai au ministre devant la Chambre pourquoi je n'y suis pas
allé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
Cela fait deux fois que je rappelle le député de
Lotbinière à l'ordre...
M. BERNATCHEZ: Rappelez le ministre à l'ordre! On va faire venir
monsieur Brunet!
M. LE PRESIDENT: C'est le ministre de l'Agriculture qui a la parole.
M. JOHNSON: M. le Président, nous n'aimons pas, nous non plus,
ces scènes, ces applaudissements désordonnés, mais je
crois que le ministre devrait donner l'exemple et tâcher de traiter le
sujet sérieusement plutôt que d'attaquer un député
parce qu'il n'aurait pas...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. JOHNSON: ... assisté... C'est le ministre qui crée tous
ces désordres.
M. LE PRESIDENT: C'est le ministre de l'Agriculture qui a la parole.
DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: Il est tellement à bout d'arguments qu'il est
obligé de faire des attaques personnelles.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. JOHNSON: Pas encore?
M. LE PRESIDENT: C'est le ministre de l'Agriculture qui a la parole.
UNE VOIX: Le ministre de la Colonisation.
M. COURCY: Nous avons en plus institué un système d'aide
pour le transport des animaux des régions éloignées vers
les abattoirs. Ah, il y a bien d'autres réalisations, mais je sais que
ça ferait mal à l'Opposition. M. le Président, pourquoi,
pourquoi, je me le demande encore une fois, l'Opposition s'acharne-t-elle
à lancer des accusations en l'air et à fausser parfois la
vérité en ce qui a trait à l'exode rural? Au lieu du
comté de Lotbinière, j'aurais pu me servir de plusisurs autres
comtés ruraux, le phénomène est le même partout:
dans le Québec rural, au Canada, aux Etats-Unis et dans tous les autres
pays évolués au monde.
Je ne voudrais pas paraître dur pour le député de
Lotbinière. Si la proportion de la population agricole est passée
de 62.5% à 51% si le nombre de fermes a diminué de 3,059 à
2,571, soit de 488 unités, au cours de la période de 1951
à 1961 par contre, la proportion des fermes commerciales est
passée de 66.7% à 72.3% au cours de cette dernière
décennie du recensement.
Cette augmentation de 5.6 unités est deux fois moins
élevée que la moyenne du Québec pour la même
période, mais elle signifie que la consolidation des fermes progresse,
que le revenu monétaire agricole des bonnes fermes augmente. On observe
le même phénomène dans Frontenac et dans les autres
comtés de la province. Le nombre des fermes commerciales est
passé de 46.7 à 64.2 dans Frontenac au cours de la
dernière décennie 1951-1961. Malheureusement, le fossé qui
sépare les bons cultivateurs de ceux qui réussissent moins bien
s'élargit et s'approfondit de plus en plus et l'exploitant de la petite
ferme vivrière est menacé de s'y enliser.
L'Opposition ne peut reprocher au gouvernement d'élaborer un
programme réaliste de réajustement de l'agriculture du
Québec. Le gouvernement a adopté une attitude honnête
envers la classe agricole et, on a cité le mémoire de l'Union
catholique des cultivateurs, je prends la page 9 de ce mémoire de
1962: « Nous savons que des efforts se font au sein du
ministère de l'Agriculture en vue de doter cette activité
économique d'un plan directeur. »
Et si je tourne à la page 24: « Votre gouvernement a
déjà adopté des législations et posé des
gestes qui nous autorisent à croire en cette bonne disposition envers la
classe sociale que nous représentons. Nous attendons beaucoup du
dialogue qu'il a été possible d'instaurer entre les
autorités gouvernementales et les organisations représentatives
de l'agriculture ».
Oui, c'était la première fois qu'un ministre de
l'Agriculture avait des conseillers qui se réunissent
régulièrement à chaque mois, qui se réunissent pour
discuter de toutes nos politiques agricoles, qui se réunissent pour
parler d'une véritable pensée agricole, où l'on retrouve
des représentants de l'Union catholique des cultivateurs, des
représentants de la coopérative fédérée, les
représentants de nos missionnaires colonisateurs, des
représentants du ministère de l'Agriculture, les
représentants de la Corporation des agronomes. C'est dire des
représentants de toutes les classes de la société qui ont
un intérêt marqué, qui ont un intérêt profond
à l'avancement de notre agriculture québecoise.
M. le Président, plutôt que de farder la
vérité aux cultivateurs, que de leur cacher les faits,
je veux aider les agriculteurs à solutionner leurs
problèmes. Ils veulent augmenter le revenu et le nombre des fermes
commerciales. Nous voulons aider l'agriculteur à devenir un agent de la
vie économique. Pour atteindre ce but, le ministère de
l'Agriculture a déjà adopté de nombreuses mesures
constructives et en élabore présentement bien d'autres, comme je
vous le mentionnais tout à l'heure, et encore là, M. le
Président, j'ai été, comme agronome, blessé un peu
hier dans mon orgueil professionnel quand le député de Frontenac
a accusé nos agronomes de croupir dans l'inaction, eux qui se
dévouent depuis nombre d'années, eux qui travaillent sans
relâche à aider notre agriculture, eux qui rencontrent à un
moment donné des difficultés énormes à convaincre
notre cultivateur d'améliorer ou de suivre les nouvelles techniques, eux
qui se sont dévoués pour l'ensemble de notre classe rurale, et
aujourd'hui l'Union nationale, par la voix de son représentant, vient
dire qu'ils croupissent dans l'inaction.
M. le Président, c'est la première fois depuis la
fondation de la Corporation des agronomes, c'est la première fois depuis
la confédération où un gouvernement de la province ou un
ministère de l'Agriculture invite les agronomes de comté, avec
les agronomes régionnaux, à se réunir, à
étudier et à nous donner leur expérience en
bâtissant un véritable programme régional agricole pour
leur territoire. C'est la première fois que ça se passe, et qui
l'a fait? C'est le ministre de l'Agriculture actuel; et nous sommes
actuellement à compléter ce véritable programme d'action
régionale préparé par l'expérience de nos agronomes
de comté. Qu'on demande à nos agronomes de comté
actuellement le travail qu'ils ont à fairs, ils sont
débordés, M. le Président, et c'est plutôt le
contraire, ce sont des adjoints, c'est du personnel nouveau qu'il leur faut
pour qu'ils soient capables de diriger l'agriculture d'une façon, si
vous voulez, plus merveilleuse encore qu'ils l'ont fait dans le passé et
qu'ils le font encore actuellement.
M. le Président, au lieu de se cantonner dans le rêve de
longs discours qui ne tiennent aucun compte des réalités,
l'Opposition devrait collaborer, dans la mesure de ses moyens, en se mettant
à l'heure de 1964, à la saine orientation de l'agriculture
québecoise. M. le Président, ceux qui actuellement nuisent le
plus à. l'agriculture de notre province, ceux qui actuellement sabotent
davantage l'agriculteur de chez nous, ce sont des hommes comme les membres de
l'Opposition qui discréditent notre agriculture...
M. BERNATCHEZ: Le ministre de la Voirie.
M. COURCY: ... qui crient au marasme, à la misère noire.
Ce sont ces propos, M. le Président, oui ce sont ces propos qui,
actuellement dans la province, font plus de ravage parce que, comme
expérience reçue, j'ai rencontré à un moment
donné des représentants des banques...
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. COURCY: ... qui travaillent sur la loi de l'amélioration des
fermes et qui me disent, M. le Président...
M. JOHNSON: J'invoque le règlement, M. le Président. Le
ministre vient de dire: « Ceux qui nuisent le plus à l'agriculture
dans la province sont les gens de l'Opposition » en nous pointant
particulièrement, qui tiennent des propos pessimistes, qui parlent de
marasme. Le ministre le sait, nous n'avons que redit en Chambre ce que l'UCC et
d'autres autorités ont dit du problème.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, M. COURCY: M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: Suivant un point d'ordre ç'a été
décidé trois fois depuis une demi-heure. Je demande au
député de donner la parole à celui qui a la parole, il
pourra répondre après.
M. COURCY: M. le Président, ceux qui nuisent le plus au
développement de notre agriculture dans la province de Québec, ce
sont ceux qui s'acharnent à traiter de quêteux et de crève
faim nos cultivateurs. Ce sont ceux, M. le Président, qui
détruisent cette noblesse de la propriété, ceux qui
détruisent la considération de notre classe rurale par les autres
classes de la société qui les regardent comme un groupe de gens
à part, qui ne vivent que de service social.
M. le Président, ceux qui nuisent le plus et ceux qui sabotent
à tout jamais l'établissement des fils de cultivateurs, ce sont
ces mêmes gens qui tiennent des propos de dénigrement, des propos
qui réellement renversent, et font honte aux cultivateurs
organisés dans la province de Québec. M. le Président, ah!
je sais, je pense bien que je ne me laisserai pas entraîner de ce
côté, mais nous sommes accusés de ne pas avoir de
pensée agricole. Nous sommes accusés de n'avoir rien fait pour
l'agriculture.
M. le Président, au début de mon exposé sur la
situation de l'agriculture au Québec, je me
sens un peu dans la position du médecin à qui incombe
cette tâche délicate de diagnostiquer la maladie et de prescrire
les remèdes. En présence de collègues qui ont fui cette
responsabilité durant les années ou elle relevait de leur
compétence, telle est en effet la situation de l'actuel ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation à qui furent confiées en 1960
les destinées de ce secteur malade de notre économie
qu'était alors l'agriculture au Québec.
Le gouvernement a assumé ses responsabilités. Il n'a
éludé aucun des problèmes que posait l'essor des
agriculteurs du Québec. Trois ans d'effort ont à peine suffi pour
corriger les situations les plus urgentes. Malgré les nombreuses
initiatives lancées pour guider le travail de nos agriculteurs et pour
améliorer leur situation de vie, quelques brèves années ne
pouvaient suffire à ramener à la santé une agriculture
dont les sources de débilité remontent à plus d'un quart
de siècle en arrière, et ceci est dit par le député
de Frontenac en cette Chambre, en 1953, le 4 décembre.
M. le Président, il n'y a pas à se surprendre que
l'agriculture soit l'une des préoccupations majeures du gouvernement,
même si on proclame de plus en plus la vocation industrielle de l'Etat du
Québec. Son économie ne repose plus essentiellement sur
l'agriculture, mais celle-ci n'en demeure pas moins importante à
plusieurs égards.
Au fait, la production agricole représentait encore, en 1960, le
pourcentage de 5.7% de la valeur nette de l'ensemble des diverses autres
productions, soit $279,500,000 sur un total de $4,820,000,000. Elle venait
immédiatement après les manufactures, 64%, et la construction,
17.1%. Et elle précédait les mines, 5%, les usines
électriques, 4.6%, les forêts, 3.5% et les pêcheries,
.1%.
En 1961, l'agriculture occupait encore 142,000 travailleurs agricoles,
et elle était responsable de milliers d'emplois dans les industries et
les commerces annexes. Elle représente un avoir de plus de
$2,000,000,000, dont 90% est la propriété de Canadiens
français de chez nous. Il faut reconnaître que c'est le seul
domaine économique dont notre peuple est demeuré
véritablement le maître.
De l'importance de l'agriculture dans la vie sociale et
économique du Québec, il faut conclure qu'un gouvernement
conscient de ses responsabilités a le devoir de se pencher avec
sympathie et compréhension sur le sort des agriculteurs, et de bien
étudier leurs problèmes pour y apporter des solutions
appropriées.
M. l'orateur, le problème agricole du Québec est en somme
celui de la possibilité pour la ferme familiale de s'adapter au
progrès technologique et aux changements économiques et sociaux.
Aider la ferme familiale à s'adapter à l'évolution de
l'économie est justement l'objectif de la politique du ministère
que je dirige.
M. LESAGE: Très bien.
M. COURCY: J'ai dit évolution. Ce mot évoque plusieurs
phénomènes dont nous nous devons de prendre conscience. Ainsi,
depuis une quarantaine d'années, l'agriculture canadienne, à
l'instar de celle de beaucoup de pays, a considérablement
augmenté sa productivité. L'augmentation a surtout
été forte depuis la dernière guerre. Alors qu'elle
s'était accrue de 2.56% par année au cours de la période
de 1928 à 1955, la productivité agricole par homme-heure a
augmenté annuellement de 5.96% pendant l'intervalle de 1946 à
1955. On sait que cet accroissement a été le résultat
d'améliorations qui se sont produites dans les productions agricoles et
dans la mise en marché.
Pour nous du Québec, une question se pose. La productivité
de notre agriculture a-t-elle suivi le même rythme d'accroissement que
celle de la productivité canadienne? Malheureusement non. Certes la
productivité par homme dans l'agriculture du Québec s'est
améliorée mais son faible gain en regard de l'évolution
qu'a connue la productivité dans l'ensemble de l'agriculture canadienne
et dans certaines régions du pays en particulier, laisse l'agriculture
du Québec dans un état d'infériorité.
Ce comportement a placé notre cultivateur dans une position
désavantagée vis-à-vis l'agriculture canadienne, voire
même de celle de l'Ontario. Au fait, l'un des problèmes de
l'agriculture québecoise est sa faible productivité par rapport
à la moyenne canadienne, et à celle d'autres régions du
payés. Des études de cette question, telle celle du Professeur
McKenzie, montrent qu'au Québec la productivité par homme, dans
l'agriculture, établit un pourcentage de la productivité agricole
moyenne pour l'ensemble du pays était, au cours des années
1954-1958 de 70.6% au Québec, de 105.6% en Ontario, de 116.5% dans les
plaines de l'Ouest et de 121.8% en Colombie canadienne. Seule, la
productivité de 53.7% dans les Maritimes était inférieure
à celle du Québec.
M. COURCY: ... était au cours des années 1954-1958 de
70.6% au Québec, de 105.6% en Ontario, de 116.5% dans les plaines de
l'Ouest et de 121.8% en Colombie Canadienne. Seule la productivité de
53.7% dans les Maritimes était inférieure à celle du
Québec.
Pour nous, du gouvernement actuel, l'important n'est pas tellement
l'épaisseur de la tranche du budget de la province que nous consacrons
à l'Agriculture, mais plutôt, plutôt je dis bien, la
façon dont nous le dépensons.
De toutes les provinces canadiennes, Québec demeure celle qui par
tête et par ferme dépense le plus pour son agriculture. La classe
agricole saisit l'a-propos de la revision que fait à l'heure actuelle le
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, de sa politique
agricole et de ses mesures d'assistance afin de rendre plus efficace
l'utilisation de son budget. D'ailleurs elle y participe.
Je rappelais il y a un instant que la faible productivité par
rapport à la moyenne canadienne était un problème de
l'agriculture québecoise.
Aujourd'hui, les cultivateurs sont les premiers à
reconnaître qu'un trop grand nombre d'entre eux manquent de connaissance
technique pour conduire avec facilité et succès cette
véritable entreprise qu'est devenue la ferme moderne. C'est pourquoi
l'on demande l'établissement, M. le Président, de groupements de
gestion de fermes.
En attendant que prenne la relève une génération
plus favorisée par l'instruction généralisée
à laquelle elle aura désormais accès, grâce à
la politique du gouvernement actuel, il faut que celle qui oeuvre
présentement puisse par ses contacts avec les agronomes, avec tous nos
vulgarisateurs agricoles, compenser les déficiences de sa formation.
L'Insuffisance de bons sol et de superficie par exploitant est un autre
handicap à notre agriculture. Le cultivateur du Québec a moins de
terre à cultiver que celui de l'Ontario que celui de l'ensemble du
Canada.
En effet, la superficie des terres défrichées par ferme
est de 82 acres dans la province de Québec, est de 104 acres dans la
province d'Ontario et une moyenne de 211 au Canada. Au Québec 8.2% des
fermes ont moins de 50 acres et 19% seulement ont plus de 200 acres. Les fermes
de 51 à 100 acres représentent 30.4% du total et celles de 101
à 200 acres représentent 42.3%. Il faut se réjouir du fait
qu'en ces dernières années la proportion des exploitations de 100
acres et plus a tendance à augmenter.
Au Québec la faible production de céréales sur les
fermes est une autre lacune dont souffre l'agriculture. En 1961-1962 nos
cultivateurs ont importé 27,400,000 de boisseaux de grains
d'alimentation soit une moyenne de 300 boisseaux par ferme.
L'an dernier, la comptabilité des 878 exploi- tations inscrites
dans les concours de ferme au ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation révélait que chacun des concurrents avait
acheté en moyenne 21 tonnes de moulées d'une valeur de $1929. Le
cultivateur du Québec achète au prix de détail des grains
qu'il transforme en produits animaux vendus au prix du gros.
Je crois que nous devons prendre les moyens à notre disposition
pour augmenter la production totale des céréales le plus
rapidement possible dans nos fermes afin de les libérer dans la mesure
du possible des importations coûteuses de l'Ouest canadien.
M. l'Orateur, il résulte de la situation dans laquelle se trouve
l'agriculteur du Québec un problème extrêmement grave. Nous
le savons. C'est celui de l'insuffisance du revenu agricole. En 1962, la
dernière année pour laquelle nous disposons de statistiques, la
ferme québecoise avait un revenu net de $1,876 en regard de $2,862 pour
celle de l'Ontario, soit une différence de près de $1,000 en
faveur de nos voisins.
Au cours de la même année, soit en 1962 également,
chaque ferme de l'Ontario touchait un revenu monétaire de $7,675 alors
que les cultivateurs du Québec devaient s'accommoder d'un revenu
monétaire de seulement $4,763.
Cet aperçu de la situation économique moyenne de la ferme
du Québec permet de supposer que beaucoup de nos agriculteurs ne
disposent pas d'un revenu agricole suffisant pour satisfaire aux besoins vitaux
d'une famille et pour investir ensuite le capital nécessaire à
l'outillage et à la mécanisation indispensable à
l'abaissement du coût de revient. Cette situation économique peu
enviable de l'ensemble des fermes du Québec trouve une explication dans
le fait que seulement deux exploitations agricoles sur trois soit 62,500 sur
95,500 sont commerciales c'est-à-dire qu'elles ont vendues, du moins en
1961, des produits pour une valeur dépassant $1,200. Malheureusement, il
y a plus encore. Des 62,500 fermes commerciales, 39,000 ont à peine
vendu des produits pour une valeur dépassant $2,500. En d'autres termes
40% seulement du total de nos fermes seraient classées dans la
catégorie des fermes rentables.
Une étude sociologique des 23,500 dont la valeur des produits
vendus s'établissent entre $1,200 à $2,499.61 inviterait à
classer leurs exploitants en diverses sous-catégories.
Les uns acceptant volontiers un aussi modeste revenu agricole, d'autres
étant incapables, fautes de ressources naturelles et humaines
d'améliorer leur situation, enfin, une dernière
sous-catégorie d'exploitants désirant fortement relever leur
niveau de vie par la pra-
tique de l'Agriculture et cela d'une façon permanente. Il est
raisonnable de penser que dans cette dernière sous-catégorie,
s'insère un bon nombre de fermes qui moyennant une meilleure
régie et des plans d'aide appropriés pourraient s'élever
au rang de fermes familiales rentables. Il reste deux autres catégories
de fermes M. le Président à mentionner, celles dont la valeur des
produits s'établissaient en 1961 entre 250 à 1199 et qui
groupaient 23.1% des fermes du Québec et enfin, la catégorie des
petites fermes dont le revenu était inférieur à 250 et qui
groupait 11.4% des fermes québecoises.
J'ai déjà eu l'occasion de commenter la situation de ces
deux catégories de fermes, je n'y reviendrai que pour rappeler qu'il y a
probablement quelque chose à faire au point de vue agricole, face
à l'existence, des fermes marginales et des petites fermes, mais chacun
reconnaît qu'il s'agit là d'un ensemble de problèmes qui
déborde de beaucoup la question agricole, qui se rattache à
l'éducation, à l'instruction générale et
professionnelle de population, à l'organisation d'immigration
nécessaire, à l'utilisation de toutes les ressources du milieu
à l'aménagement intégral des territoires ruraux.
A la trop faible proportion des fermes rentables, s'ajoute d'autre
causes à l'insuffisance du revenu net moyen de nos exploitations
agricoles. Il y a par exemple, l'augmentation de ces frais d'exploitation, de
1951 à 1961, ils se sont acquis de 55% alors que le revenu brut n'a
augmenté que de 11%. Je mentionnerai également le coût
élevé de la main-d'oeuvre qui au cours de la même
décennie a augmenté de 25%. La population agricole a
baissé de 227,900 et la main-d'oeuvre active de 62,800. Il faut conclure
que le problème agricole au Québec est grave, le cultivateur,
dans une situation difficile. Comment en est-il demeuré là, alors
que dans la plupart des régions du pays, l'agriculture marque le pas sur
celle du Québec. Je voudrais rappeler quelques causes, avant
d'énoncer les principaux articles du programme que nous nous attendons
de mettre en application pour le mieux être de notre agriculture.
Pour dégager les causes de cette situation de notre agriculture,
il faut faire un retour en arrière. J'évoquerai d'abord, cette
idéologie rurale qui a prévalue qu'à la dernière
guerre et qui a perdu beaucoup d'adeptes depuis. Selon cette idéologie,
le cultivateur pour des raisons sociales et patriotiques devait demeurer
fidèle à son mode de vie sans égard à ses chances
de réussite, aussi le gouvernement jugeait-il de son devoir de lui
accorder l'assistance indispensable dont il avait besoin pour survivre et
demeurer agriculteur. En outre, on réduisait le plus possible les
migrations hors de l'agriculture, sous le prétexte de ne pas aggraver le
chômage. Il est admis aujourd'hui que la solution aux problèmes du
chômage ne repose plus sur l'industrie agricole, souvenons-nous de la
colonisation de 1930. Le patriotisme n'impose plus à un gouvernement le
devoir de retenir la ferme au moyen d'expédients, de petits octrois, de
prestations d'assurance sociale, etc. etc., les cultivateurs qui faute de
ressources naturelles et humaines ne réussissent jamais, ou ne
réussiront jamais comme exploitants agricoles, et contribueront comme
beaucoup le font présentement à fausser le véritable
portrait de notre agriculture du Québec.
M. le Président, pour l'avoir vécu, je suis demeuré
profondément sympathique à la colonisation qui s'est faite durant
la crise, toutefois avec le recul du temps; ah, il nous faut admettre
qu'à l'analyse...
M. JOHNSON: Voyons, ça fait quatre fois qu'il parle des
libéraux cette semaine.
M. COURCY:...des causes de l'état précaire de notre
agriculture, se dégage des erreurs commises dans le choix des
territoires et dans la sélection des colons. Des paroisses de
colonisation sont devenues prospères, soit dans l'Abitibi ou ailleurs,
où on offre de très beaux exemples. Malheureusement beaucoup trop
de paroisses ont été mal fondées, faute de sol productif
et par manque d'organisation de territoire, des colons établis dans ces
conditions ont abandonné la terre, un plus grand nombre encore aurait
immigré en l'absence des subventions gouvernementales, ou de mesures
d'assistance sociale. Aux problèmes que pose l'agriculture du
Québec, l'avenir de ces populations, s'ajoute celui des vieilles
paroisses établies en sols improductifs dont les progrès ont
été causés par des circonstances comme la guerre par
exemple. Peu importe les efforts que l'on déploiera, ces paroisses ne
seront jamais un actif pour notre agriculture. Telles sont M. le
Président quelques-unes des causes lointaines du mal dont est
présentement atteinte notre agriculture.
A ces raisons qui évoquent une époque où
l'agriculture et la colonisation étaient trop souvent
considérées comme des palliatifs à tous les mots
économiques et sociaux, s'ajoutent dans une perspective moins lointaine,
l'accumulation de problèmes, qui auraient dû être
réglés au fur et à mesure qu'ils se présentaient.
Ainsi la consolidation des fermes, aurait dû se
poser depuis longtemps à l'attention des responsables. Dès
notre arrivée au pouvoir, nous avons abordé ce problème et
parce que nous voyions dans une saine politique de consolidation des
exploitations, le point de départ de mesures agricoles progressives pour
plusieurs régions comme l'Abitibi et le Bas St-Laurent pour ne nommer
que celles-là. Et pendant que nos adversaires négligeaient
d'encourager le regroupement des fermes, ou des unités plus rentables,
ce qui conduit à la consolidation des paroisses, à toutes fins
pratiques, une profession de foi envers le secteur laitier de l'industrie
agricole était là le crédo de nos amis.
Ils oubliaient qu'à cause de l'état de marche, ils axaient
leurs croyances sur un secteur faible et qu'il fallait songer à des
ajustements dans les productions agricoles.
En réalité, la production du lait n'est pas la seule
réponse aux problèmes de l'agriculture et certaines productions
spécialisées, telles celles du boeuf, de l'agneau, des oeufs, de
quelques petits fruits, des légumes, peuvent avantageusement être
augmentées. Mais pouvaient-ils exiger tellement de ceux qui
négligeaient de faire entreprendre les études nécessaires
à l'érection d'un plan de réorientation des productions
agricoles du Québec?
Cette tâche indispensable, c'est nous qui avons constitué
le comité d'études chargé de l'accomplir et, après
huit mois de travail, ce comité de commercialisation de produits
agricoles présentait en avril 1963 un rapport. Ses suggestions
constituent les bases d'un plan de réorientation en voie de
réalisation.
L'ignorance de notre propre marché domestique a été
l'une des causes de l'état peu prospère de l'agriculture parce
qu'elle s'est traduite par un manque d'organisation de notre production.
Je mentionnerai maintenant un autre aspect trop longtemps
négligé du problème agricole, celui du crédit;
crédit agricole, $ 7,000 jusqu'à la veille des élections
de 1960, où il a été augmenté à un montant
de $10,000. Un crédit agricole adapté, si vous voulez, à
une petite agriculture vivrière.
M. l'Orateur, vous le constatez, c'est donc à une oeuvre
d'envergure que s'attaque depuis 1960 l'actuel gouvernement du Québec en
matière d'agriculture. Cet effort d'orientation et de modernisation vise
à améliorer le niveau de vie de nos agriculteurs. Beaucoup a
été fait depuis trois ans, mais davantage encore reste à
accomplir. Il faudra du temps pour parachever l'oeuvre entreprise.
Nous avons conscience que les problèmes de l'agriculture du
Québec sont multiples et complexes. A la politique agricole
d'improvisa-tion de ses adversaires, le gouvernement actuel a
préféré étudier d'abord, planifier, afin de
dégager l'orientation qu'il convenait de donner à l'agriculture.
Tout en prenant connaissance de la réalité, il a
réglé, nous l'avons vu, les problè- mes les plus urgents.
Nos amis d'en face ont la critique facile, mais que nous offrent-ils en fait de
suggestions pratiques? Convenons qu'ils n'ont pas plus d'imagination dans
l'Opposition qu'ils n'en avaient au pouvoir.
M. BELLEMARE: Ah!
M. COURCY: Quant à nous, M. l'Orateur, nous continuerons à
oeuvrer pour l'avancement de la classe agricole...
M. BELLEMARE: Il a lâché sontexte.
M. COURCY: ... par le prolongement des initiatives gouvernementales de
1961 à 1963; l'on peut prévoir pour 1964 de nombreux
dévoloppements. Il se dégage du plan d'action à longue
portée mis au point par le ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation et qui tient compte, d'une part, des idées directrices du
Conseil d'orientation économique et du Comité d'étude de
la commercialisation des produits agricoles.
Notre progamme comprend deux parties: une partie de portée
générale qui s'applique à tout le Québec, une
seconde à caractère spécial contient les recommandations
particulières à chaque région agronomique. Le plan
d'action du ministère que je dirige vise à la consolidation de la
ferme familiale, viable et rentable par le rajustement de l'agriculture. Les
mesures de portée générale ont trait à
l'enseignement agricole, à la recherche agricole, à la
commercialisation et à l'aménagement rural.
Dans le domaine de l'enseignement agricole, l'on peut prévoir la
construction, comme le mentionnait le Dremier ministre hier, d'une école
agri-sylvicole à Caplan dans la Gaspésie, établissement
d'ateliers dans plusieurs écoles professionnelles d'agriculture, la
poursuite de l'organisation des instituts de technologie agricole de
St-Hyacinthe et de Ste-Anne-de-la-Pocatière.
Au secteur de la recherche agricole, il y aura répartition des
responsabilités des gouvernements d'Ottawa et de Québec et des
universités dans le domaine de la recherche fondamentale; expansion de
la recherche appliquée dans les fermes appartenant à la province:
Ste-Martine, Deschambault, La Pocatière, St-Hyacinthe; collaboration
à l'établissement, dans
le campus de la faculté de l'agriculture de Laval, d'un
laboratoire fédéral de recherche sur la génétique
des plantes fourragères.
Au secteur de la commercialisation des produits agricoles figure le
développement suivant; continuation de l'aide financière à
la construction des entrepôts frigorifiques où on nous accusait
hier de ne rien faire. Nous avons fait des offres à six
coopératives et sur les six coopératives à qui nous avons
offert les mêmes avantages, trois d'entre elles en ont profité,
dont Joliette a profité pour deux! et nous attendons la décision
des autres; adoption de nouveaux règlements concernant la qualité
et la classification du lait et de la crème, en vertu de la nouvelle Loi
sur l'hygiène des aliments et la santé des animaux;
élargissement de l'activité gouvernementale dans l'inspection des
aliments en particulier ce qui ne s'était jamais fait, l'inspection des
encans publics d'animaux et des viandes; étude, sous l'égide de
la Régie des marchés agricoles du Québec, des circuits
commerciaux en vue de connaître à fond, pour chaque produit ou
catégorie de produits agricoles, la structure et le fonctionnement du
commerce d'expédition, de réception et moyens de transport,
d'examiner l'efficacité et le coût de ces diverses fonctions, de
trouver les moyens d'accroître le caractère compétitif des
productions agricoles du Québec sur les marchés intérieurs
et extérieurs; étude des possibilités des
débouchés domestiques et américains pour le bleuet sauvage
sous toutes ses formes; étude de la rentabilité d'une fabrique de
sous-produits de la pomme: étude de la rentabilité d'une cidrerie
où depuis trois ans le gouvernement actuel travaille à essayer
d'organiser une cidrerie dans la province de Québec. Un jour viendra
où l'Opposition, peut-être plus vite qu'elle ne le croit...
M. le Président, concernant l'aménagement rural...
M. JOHNSON: « La montagne en travail enfanta une souris.
»
M. COURCY: ... l'on prévoit des initiatives telles que:
entreprise, par le personnel du ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation, d'un vaste programme d'utilisation rationnelle des terres et des
territoires agricoles du Québec visant à la préparation
accélérée de cartes de possibilités des sols; la
délimitation des étendues appropriées à
l'agriculture et à la forêt, à l'échelon local,
régional et provincial; l'établissement d'un plan indiquant le
nombre possible d'exploitations agricoles viables dans chaque
municipalité rurale, compte tenu des ressour- ces: hommes, sol, climat,
capital, crédit agricole, des marchés et des possibilités
de remembrement des terres.
M. JOHNSON: Dans ce temps-là le revenu des cultivateurs
baisse!
M. COURCY: Dans le cadre des programmes ARDA, parachèvement de
l'organisation de pâturages communautaires et plusieurs
bleuétières communautaires; continuation d'une étude d'une
foule de projets existants et à venir et poursuite des recherches
actuelles dans les régions pilotes d'aménagement rural.
Les mesures à caractère spécial du programme
agricole de 1964 consistent elles aussi dans le prolongement d'initiatives
déjà encours; elles concernent les productions animales,
productions végétales, horticoles et les productions de
récoltes spéciales; elles découlent de la mise au point de
programmes régionaux de réorientation de la production agricole,
du développement de productions adoptées à chaque
région, de l'orientation accélérée des directives
agronomiques dans le domaine de la gestion des fermes.
Il y a du travail à faire pour consolider les fermes
laitières du Québec, car en 1961, 58 pour cent du total
comptaient moins de 12 vaches alors que l'objectif devrait être d'un
minimum de 25 vaches par ferme. La production de bovins de boucherie est
recommandable dans les régions où, par suite du bas prix des
terres disponibles, l'on peut établir des fermes d'assez grandes
étendues. On pourrait doubler d'ici dix ans, c'est-à-dire porter
de 100,000 à 200,000 de vaches de boucherie dans le Québec. Le
nord-ouest québecois a été choisi comme région
pilote pour cet élevage et quelque 1,200 sujets déjà ont
été implantés l'automne dernier et nous avons l'intention
de continuer dans le même domaine cette année.
M. le Président, nous élaborons, dans le domaine de la
volaille, de la production du porc, de la production ovine...
M. BERNATCHEZ: M. le Président, le ministre...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Cela prend l'assentiment général, le consentement unanime
de la Chambre. Je comprends qu'il y a une heure que le ministre poursuit son
discours...
M. JOHNSON: Très bien!
M. COURCY: M. le Président, je remercie l'Opposition de m'avoir
fourni cette occasion.
Nous allons continuer le développement de l'élevage du
porc dans la province, pour compléter ce que disait le premier
ministre...
M. JOHNSON: Cela c'est le domaine du premier ministre, il en a
parlé.
M. COURCY: Pour compléter ce que disait la premier ministre,
à l'effet que des naisseurs avaient été organisés
dans les comtés de St-Hyacinthe, de Bagot et de Lotbinière, nous
avons aussi en même temps, ce que le premier ministre n'a pas dit,
développé des centres d'élevage dans le nord-ouest
québecois, des centres d'élevage où le gouvernement a
introduit 200 truies d'élevage qu'il prête aux cultivateurs et
dont le cultivateur rembourse, après un an, une truie qui sera
reprêtée à un autre cultivateur pour établir
l'élevage du porc dans le nord-ouest québecois.
L'établissement du porc dans le nord-ouest québecois,
l'élevage qui se développe, dans le nord-ouest québecois,
du porc, de l'agneau, des animaux de boucherie, pour qu'un jour le nord-ouest
québecois soit capable devoir l'établissement, oui, un jour quand
nous aurons des animaux de l'abattoir qui rendra les services aux cultivateurs
de cette partie éloignée de la province.
M. le Président, on parlait d'abattoirs tout à l'heure. On
a déjà voté $1,000,000 ici pour un abattoir, il n'y a
même pas d'animaux dans l'Abitibi. On avait une loi aussi:...
M. GUILLEMETTE: Une autre promesse.
M. COURCY: Promesse de l'Union nationale qui ne s'est jamais
réalisée.
M. JOHNSON: Non, non.
M. COURCY: M. le Président, nous commençons par la base:
introduction d'animaux d'abord, et quand nous aurons des possibilités de
faire vivre un abattoir ou du moins croire que dans quelques années il y
aura possibilité de le faire vivre, il y aura dans ce temps un
établissement. Cela c'est de la logique, ça c'est de la
planification, ça c'est sérieux!
M. BELLEMARE: Le ministre a oublié ses déclarations.
M. COURCY: En ce qui regarde la volaille, M. le Président, le
premier ministre en a parlé hier. Il faut, par tous les moyens
possibles, développer la production végétale, ça
c'est du nouveau, parce qu'elle nécessite moins d'investissements que la
production animale. Les agro- nomes du ministère s'efforcent à
développer dans las petites et moyennes fermes d'élevage une
production végétale qu'on appelle « cash crop »,
revenus de récoltes d'argent.
Il faut dans les fermes où cela convient accentuer la production
horticole, compte tenu dss besoins de la région, mais il faut organiser
en même temps la vente, je le répète, en tenant compte des
besoins de l'acheteur. Le Comité de commercialisation des produits
agricoles a fait des recommandations, à ce sujet et nous nous en
inspirons. Il faut développer les productions végétales
spéciales dans chaque région, par exemple le bleuet dans le Lac
St-Jean, la pomme de terre de semence sur la Côte Nord et dans le Bas
St-Laurent, le maïs à grain dans la région de
Montréal. Il faut à tout prix que le Québec soit moins
dépendant de l'Ouest du Canada et des Etats-Unis, en ce qui a trait au
grain d'alimentation. Le Québec doit s'efforcer de produire plus de
grain d'alimentation s'il veut donner à la production animale une
certaine stabilité.
Le rajustement de l'agriculture auquel nous travaillons sera une oeuvre
de longue haleine parce que les problèmes agricoles, nous l'avons vu,
sont nombreux et complexes. Dans la poursuite de cet objectif, il faut tenir
rigoureusement compte du milieu, c'est-à-dire des conditions de sol, de
climat, du genre d'exploitations et des marchés.
Autrement, l'on bâtit une agriculture artificielle ou
irréaliste. En d'autres termes, l'aménagement de la ferme tout
comme l'aménagement rural doit coller au milieu, c'est-à-dire
doit coller à la réalité. Le programme que le
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation vise c'est le
bien-être de l'agriculture et du défricheur, l'assort de
l'agriculture et l'expansion de l'industrie agricole et para-agricole dans le
Québec.
Il nécessite la collaboration des agriculteurs eux-mêmes,
de tous les groupements et organismes qui oeuvrent à la consolidation de
la ferme familiale et au réajustement de notre agriculture. Sa
réalisation fera de l'agriculteur un agent de la vie économique
et contribuera à édifier une agriculture qui s'intégrera
dans l'économie de l'Etat du Québec et dans celle du Canada.
M. GOSSELIN: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'attention tous les discours qui ont âté
prononcés en cette Chambre depuis le début de la
présentation de la motion de mon collègue, l'honorable
député de Frontenac. J'aimerais, au tout début de ces
remarques, le féliciter chaleureusement pour l'opportunité de
présenter une pareille motion. Nul doute qu'en en-
tendant tous les discours qui ont été prononcés,
cette motion est fort à point. Elle est à point parce qu'elle
reflète, parce qu'elle est le cri d'alarme qu'auraient voulu crier
eux-mêmes les cultivateurs ici, en cette Chambre, s'ils en avaient la
permission.
Tous les orateurs ont été unanimes à dire que notre
agriculture traverse une impasse, que notre agriculture est dans une situation
très critique et tout le discours de l'honorable ministre de
l'Agriculture en a été une preuve. Il nous a parlé pendant
plus d'une heure pour nous dire, pour nous expliquer tous les problèmes
qu'ont £ faire face nos cultivateurs.
En ce qui me concerne, les remarques que j'ai l'intention de faire Je
les ferai de façon très objective. Je les ferai sans aucune
« partisanerie » et je veux apporter à ce débat
l'expérience vécue depuis 1944. M. le Président, toute ma
vie a été auprès des cultivateurs et j'ai travaillé
constamment avec eux et je connais, je crois, tous les problèmes de nos
cultivateurs.
Si l'on voulait reculer en 1954, et aller jusqu'en 1960, et
décerner un certificat de compétence à un parti politique,
je crois qu'on ne pourrait faire mieux que de citer les paroles de l'honorable
premier ministre, monsieur Jean Lesage lui-même, alors qu'il disait en
1957: « Le revenu de nos cultivateurs depuis 1944 à 1957 a plus
que triplé. » C'est monsieur Lesage qui disait ça, alors
qu'il était chef du parti libéral et alors qu'il voulait devenir
le premier ministre de la province.
M. BELLEMARE: Non?
M. GOSSELIN: Et pendant cette étape, M. le Président, de
1944 à 1957, qui était au pouvoir? L'Union nationale.
Or, je n'ai pas l'intention de me gargariser de statistiques. Je n'ai
pas l'intention non plus de citer à cette Chambre, ici, une foule de
chiffres et une foule d'ênumérations qui reviennent à quoi
en somme? Quelqu'un a dit que les statistiques étaient une substance
caoutchoutée qu'on pouvait étirer ou rétrécir au
besoin selon que ça faisait son affaire. On en a vu une preuve tangible,
ici, en cette Chambre puisqu'on a cité certaines statistiques qui en
somme ne reflétaient pas exactement la situation, ne disaient pas non
plus quelle est en somme une ferme, quelle est la grandeur de la ferme et sur
quoi se base-t-on pour faire l'estimation d'une ferme. Non plus, lorsque l'on
parle d'un cultivateur, de quelle façon peut-on citer un cultivateur
prospère, un cultivateur moyen, un petit cultivateur ou encore un grand
cultivateur.
M. le Président, il y a tellement de facteurs dans tout cet
état de chose qu'il est difficile pour tout homme sérieux d'en
venir à une conclusion pratique. Cependant, même si l'on cite des
statistiques, même si l'on entend certains experts soit à la radio
ou à la télévision nous dire que tout va bien, qui souffre
pendant tout ce temps-là? Qui a de la misère pendant tout ce
temps-là? Qui est obligé de quitter sa ferme parce qu'il ne peut
plus vivre pendant ce temps-là? Ce n'est nul autre que le pauvre
cultivateur. On semble s'apitoyer sur son sort, et je crois que tout homme
sérieux aussi, je crois que tous ceux-là qui sont ici en cette
Chambre, et qui ont pris part à la discussion, ont voulu faire
comprendre tout l'urgence qu'il y a de venir en aide à nos cultivateurs
et dans le plus bref délai possible.
Le premier ministre, an début de son allocution, nous a dit qu'il
y avait un grand fléau. Ce fléau-là, il est à la
grandeur de tous nos comtés ruraux. Il n'y a rien de plus
désolant pour un type, qui a à coeur de travailler pour le
bien-être de la population de son comté, pour un
député qui veut se dépenser corps et âme pour le
bien-être de tous les individus de son comté.
Il suffit de voir des paroisses où, il n'y a pas tellement
d'années, il y avait des cultivateurs très prospères,
où il y avait des fermes d'une étendue suffisamment grande pour
faire vivre son homme. Et par contre, on a vu ce brave cultivateur être
obligé de laisser sa ferme. Pourquoi l'a-t-il laissée, M. le
Président? Parce qu'il ne peut pas vivre convenablement, parce qu'il ne
peut pas vendre son produit convenablement.
J'entendais l'honorable premier ministre dire que le ministère de
l'Agriculture et, ces paroles ont été
répétées par le ministre de l'Agriculture,
s'efforçait autant que possible de diriger nos cultivateurs dans
certaines productions qui semblent déficitaires. Oui, M. le
Président, nous reconnaissons qu'il y a des productions dans la province
de Québec où nous sommes déficitaires. Mais même
là, si le gouvernement encourage cette production, qu'adviendra-t-il de
ces produits lorsque le cultivateur les aura entre les mains s'il ne peut pas
les vendre à un prix convenable. Nous savons tous ici dans la province
de Québec et nous savons tous qu'au Canada le produit des cultivateurs
est à la mercie de l'offre et de la demande. Si l'offre est grande et
que la demande est moindre, le cultivateur a un prix moindre pour ses produits.
Si par contre l'offre est basse, l'offre est petite et que la demande est
grande, le cultivateur peut vendre à plus grand prix son produit.
Or, nous disons que le gouvernement actuel a failli à la
tâche. Pourquoi? Parce que, en aucun moment dans le discours de
l'honorable
ministre de l'Agriculture, nous lui avons entendu dire que le
gouvernement actuel se pencfaalt sur la mise en marché des produits
agricoles ce qui a trait à la vente et au prix que nos cultivateurs sont
obligés d'accepter pour leurs produits. En aucune circonstance nous
n'avons entendu non plus le ministre de l'Agriculture nous dire de quelle
façon il y aurait possibilité de baisser le coût de
production de nos produits agricoles.
Ah! non, M. le Président, le discours de l'honorable ministre de
l'Agriculture me faisait beaucoup plus penser au discours du chef d'un parti
politique, au discours plutôt d'un organisateur en chef d'un parti
politique qui n'a autre chose en vue que de regagner des élections, si
nous en avons dans un avenir rapproché...
M. le Président, si l'on regarde le mot à mot du programme
qui a servi à faire élire nos amis d'en Cause, peut-on dire
réellement que ces gens-là ont mis en oeuvre leur programme
politique, et peut-on dire aussi que les faits et gestes du gouvernement que
nous avons pu voir à l'uvre depuis quelques années ont
été conformes à ce qu'ils nous avaient promis.
M. le Président, on n'a qu'a regarder, par exemple, au
deuxième article que nous retrouvons dans le minifeste
présenté pendant la campagne électorale qui dit ceci:
« Article 13, l'agriculture doit être relevée de
l'état pitoyable où elle est présentement par des mesures
énergiques prévoyant entre autre... » Je passe A pour aller
immédiatement à B « La modernisation de l'agriculture tout
en travaillant à la maintenir dans le cadre familial rural ».
Peut-on dire, M. le Président, que l'on s'est efforcé
depuis quatre ans à maintenir cette agriculture dans le cadre de la
famille rurale, M. le Président, lorsqu'on a vu il n'y a pas tellement
longtemps l'honorable ministre de la Jeunesse imposer des normes scolaires qui
ont obligé une grande quantité de nos enfants de famille rurale
à s'expatrier, ou aller à plusieurs milles, pour aller chercher
l'éducation dont ils sont avides et dont ils auraient besoin poor mener
à bonne fin leur vie. Parce que, on se souvient, si l'agriculture il y a
quelques années a été prospère, si l'agriculteur
pouvait vivre convenablement sur sa ferme, nous savons que tous, sans
exception, tous les membres de la famille devaient aider le père dans
l'organisation de la ferme, devaient aider le père dans le travail de la
ferme, mais aujourd'hui, lorsque l'on songe que ces enfants-là partent
le matin à sept heures et qu'ils ne reviennent chez eux qu'à six
heures le soir, croyez-vous, M. le Président, que les enfants peuvent,
en pareilles circonstances, aider leurs parents?
Croyez-vous qu'en pareille circonstance, que le coût de la
main-d'oeuvre qu'on est obligé d'employer et qu'on est obligé
d'engager pour remplacer la main-d'oeuvre que l'on pouvait puiser au sein
même de la famille; croyez-vous que de cette façon-là les
actes correspondent à maintenir notre agriculture dans le cadre de la
famille rurale? Je dis que non, M. le Président.
M. BELLEMARE: Très bien. Politique de grandeur.
M. GOSSELIN: Plusieurs de nos cultivateurs avaient réussi
à faire de leur organisation de ferme une organisation florissante et
une organisation qui rapportait un revenu convenable. Mais c'est
précisément pour les raisons que je viens d'énoncer que
l'on pouvait vivre facilement, et que l'on pouvait faire les profits que l'on
ne fait plus aujourd'hui.
Nous savons, M. le Président, que la mécanisation des
fermes a apporté une certaine amélioration. Mais est-ce que l'on
peut dire que cette mécanisation ne coûte pas cher? Est-ce que
l'on peut dire que le gouvernement actuel a réellement aidé le
cultivateur pour tâcher de se procurer ces instruments aratoires de
façon convenable? Jamais en aucune circonstance et jamais pendant tout
le discours de l'honorable ministre de l'Agriculture, on lui a entendu dire
qu'il avait étudié ou encore qu'il avait fait des recherches pour
savoir comment il se fait que le cultivateur doit payer si cher pour ses
instruments aratoires. En aucune circonstance nous n'avons entendu le...
M. BELLEMARE: Cela ne l'intéresse pas.
M. GOSSELIN: ... ministre de l'Agriculture nous dire qu'il avait fait
des recherches en ce sens-là. Nous savons que le cultivateur doit payer
des sommes formidables pour certains instruments aratoires dont il ne se
servira que quelques heures par année. L'honorable premier ministre
dit...
M. COURCY: Donnez-moi une autre heure et puis je vais vous le dire.
M. BELLEMARE: Planification du patronage!
M. GOSSELIN: Vous donner une autre heure. Je crois, M. le
Président, que nous avons déjà donné suffisamment
longtemps à l'honorable...
M. BELLEMARE: Oui, pour ne rien dire.
M. GOSSELIN: ... ministre de l'Agriculture pour nous prouver son
incompétence et nous prouver..,
M. BELLEMARE: Très bien, Planification du partronage!
M. GOSSELIN: L'honorable ministre de l'Agriculture et le premier
ministre lui-même nous disaient qu'il fallait absolument faire en sorte
de consolider les terres ou encore de faire une organisation coopérative
au sein de plusieurs fermes, il fallait la coopération de plusieurs
cultivateurs pour que l'on mène à bonne fin et que l'on puisse se
procurer certains instruments fort coûteux et dont les cultivateurs ont
besoin pour faire leurs semences ou leurs récoltes.
Or, M. le Président, nous savons ceci nous les cultivateurs, et
les gens de ma région savent aussi que lorsque vient le temps de semer,
la température est aussi bonne pour le voisin comme elle pent être
pour soi-même. Il est très difficile d'acheter en
collectivité certains instruments aratoires parce que nous savons tous
que lorsqu'il est temps de semer, qu'il est temps de récolter, si la
température est idéale elle l'est également pour le
voisin, et l'on ne peut pas faire en sorte que ces instruments aratoires
puissent servir à toute une collectivité en même temps.
Je ne crois pas que ce soit là un moyen d'aider notre classe
agricole, et je ne crois pas non plus que cette suggestion, même si l'on
fait l'impossible pour la mettre au point, aide réellement notre
agriculture.
M. le Président, il y a de nombreux autres points. On a
parlé tout à l'heure qu'il y avait possibilité de faire
des profits considérables dans l'élevage de porcs ou de certains
animaux. Je peux vous parler avec expérience dans ce cas-là. Et
je vous dis que tant et aussi longtemps que le ministère de
l'Agriculture, avec L'U.C.C. et avec tous les organismes compétents ne
se pencheront pas sur la question des grains de provende, sur la question des
grains dont on a besoin ici dans la province de Québec pour mener notre
production à profit, tant et aussi longtemps que le ministère de
l'Agriculture ne se penchera pas sur ce problème nous allons continuer
de voir cet exode rural, nous allons continuer de voir nos cultivateurs
déclarer des faillites. Il faut absolument que le plus vite possible le
ministre de l'Agriculture se penche sur ce problème.
Nous savons que la topographie de notre sol, nous savons
également que l'étendue de productivité de notre sol ne
nous permet pas de pro- duire en aussi grande quantité les grains
nécessaires, les céréales nécessaires pour nourrir
les animaux que nous voulons placer sur le marché. Nous devons vivre en
grande partie, et d'ailleurs c'est le ministre de l'Agriculture qui nous a
cité des chiffres effarants tout à l'heure, sur l'importation des
grains que l'on doit obtenir des provinces de l'Ouest, de ce que l'on doit
faire venir des provinces de l'Ouest pour réaliser ici une production
soit du beurre, des oeufs, de la viande, et autre.
M. le Président, si un tel organisme que je préconise ici
en Chambre depuis 1957 était formé, je suis sûr, lorsque
l'on songe, lorsque l'on sait ce que le cultivateur de l'Ouest canadien
reçoit pour son grain, et lorsque l'on pense et que l'on voit ce que le
cultivateur ici, de l'Est canadien, est obligé de payer pour ce
même grain d'alimentation, on voit là tout de suite quelle
différence considérable qui serait. fort à point pour
aider nos braves cultivateurs et leur permettre de rester sur leur terre.
M. BELLEMARE: Très bien.
M. GOSSSLIN: J'espère que l'honorable ministre de l'Agriculture,
après toutes les données qui lui ont été faites
ici,, cet après-midi, verra à créer le plus vite possible
cet office, ce service qui verra à nous donner ici pour la région
de l'Est de la province et en particulier pour la province de Québec,
cet office de mise en marché des grains de provende.
M. le Président, pendant tout ce temps, qu'est-ce que nos
cultivateurs font? On a fait grand état de ce qui a été
fait dans le passé et est-ce qu'en somme on s'est penché sur
l'avenir de nos cultivateurs? Est-ce qu'en somme, M. le Président, on a
voulu réellement s'intéresser de façon sérieuse
à ce qui adviendra aux cultivateurs qui veulent réellement
demeurer sur leur ferme?
Le ministre nous a dit qu'il faisait tout en son possible pour
tâcher d'aider à maintenir au moins le nombre des cultivateurs
qu'il reste. Je ne crois pas, M. le Président, que le ministre puisse se
glorifier dans plusieurs domaines d'avoir aidé réellement la
classe agricole.
Il n'y a pas tellement longtemps cette fameuse commission de l'industrie
laitière faisait parvenir de nouvelles normes en ce qui a trait à
la qualité du lait qu'on doit faire parvenir à nos laiteries ou
encore que l'on doit faire parvenir à certaines fabriques de lait
condensé. Ces exigences plongent encore le cultivateur dans une
situation désespérée. On voudrait. M. le Président,
que le cultivateur
qui vient à peine d'installer sur sa ferme un refroidisseur
à lait avec canistre, on voudrait qu'il transforme maintenant cette
organisation qui lui a été fort coûteuse et qu'il n'a pas
même fini de payer, on voudrait par les nouvelles normes, par les
nouvelles exigences de ces commissions que l'on transforme...
M. COURCY: M. le Président un point d'ordre. Ce ne sont pas les
exigences de la province, ce sont les exigences du gouvernement
fédéral qui ont été transmises par la Régie.
La Commission de l'industrie laitière n'existe même plus depuis un
an.
M. BELLEMARE: Bien voyons donc!
M. GOSSELIN: Voici, M. le Président,je suis content de l'entendre
dire par l'honorable ministre que la Commission de l'industrie
laitière...
M. COURCY: Elle n'existe même plus.
M. GOSSELIN: Mais, M. le Président, lorsqu'on a fusionné
lorsqu'on a fait disparaître cette Commission de l'industrie
laitière, qui en est responsable? Avec le fameux bill 13, je sais, M. le
Président, qu'il ne m'est pas permis ici, par les règlements de
discuter du bill 13, mais par contre, si l'honorable ministre de l'Agriculture
avait tenu compte à ce moment-là d'un rapport qui a
été présenté, et qui a été soumis au
ministère de l'Agriculture, il n'aurait pas fusionné la
Commission de l'industrie laitière, il n'aurait pas
fusionné...
M. COURCY: Avez-vous voté pour ou contre?
M. GOSSELIN: Non, M. le Président,...
M. BELLEMARE: Le ministre ne voulait pas le voir. Le ministre ne voulait
pas nous le montrer le rapport,
M. GOSSELIN: Nous avons voté pour en tenant compte de certaines
améliorations qu'il y avait, mais par centre nous avons fait une
bataille ici qui mérite d'être mentionnée...
M. BELLEMARE: Ah bon!
M. GOSSELIN: ... et vous demandant de tenir compte de toutes les
suggestions qu'on voulait. Mais vous savez que le gouvernement actuel a une
façon toute particulière..,
M. BELLEMARE: La province a payé pour ce rapport là!
M. GOSSELIN: ... a une façon à lui même ah il
invite à grands cris tous les organismes « Venez au comité
des bills, les portes sont toutes grandes ouvertes ». Mais est-ce qu'en
somme, lors de l'étude du bill 13, on a tenu compte de toutes les
suggestions qui ont été faites par les organismes?
DES VOIX: Bien voyons donc!
UNE VOIX: Cela a été voté en deuxième
lecture.
M. COURCY: Vous avez voté pour.
M. GOSSELIN: Non, M. le Président, on n'a pas voté pour.
C'était une manière polie de nous endormir et de nous
donner...
M. COURCY: Vous avez voté pour. On est catholique et protestant
en même temps.
M. GOSSELIN: Nous avons été témoins et l'U.C.C.
elle-même l'a dit. « La Terre de chez-nous » l'a
répété aussi dans son journal qu'on avait
été fort poli à leur endroit, qu'on les avait
reçus. Mais en somme, qu'est-ce que ça nous a donné
d'aller là, ont-ils di:. On n'a à peu près rien pris de
toutes les suggestions, et par contre, si l'honorable ministre veut nous en
parler, nous pouvons continuer; je vais vous en parler de cette fameuse
régie qu'on a créée. Est-ce qu'en somme la régie
aide les cultivateurs? Ici dans un article, de mardi le 14 avril 1964,
c'est tout récent ça, M. le Président; il me semble que
c'est dans « l'Action » d'aujourd'hui. La Régie
crée une situation ridicule.
Le bois qui sera livré à la papeterie la plus
rapprochée sera celui qui rapportera le moins aux producteurs. La
Régie a oublié également de respecter une convention
qu'elle a elle-même homologuée et qui spécifie que
l'acheteur local doit recevoir $22.85 pour le bois. Je dis M. le
Président qu'en pareilles circonstances cette Régie est
incompétente et qu'elle ne remplie pas non plus le mandat que toute la
Chambre lui a donné, lorsque nous avons voté pour le Bill 13.
Si le ministre veut ma référence, M. le Président,
je dirai tout simplement que c'est dans « L'Action » sous le titre:
Sentence défavorable à des producteurs de bois ». Il faudra
trouver dans tout cet article-là où, il y aurait
possibilité d'obtenir un prix beaucoup plus élevé
qu'on a obtenu, mais par contre la Régie a rendu une sentence
défavorable envers les producteurs de bols et envers nos cultivateurs.
Il y a d'autres domaines aussi.
M. COURCY: La Régie agissait comme arbitre.
M. GOSSELIN: Pardon?
M. COURCY: La Régie agissait comme arbitre.
M. GOSSELIN: Oui, elle a été comme arbitre, dans le
présent conflit, mais est-ce que le ministre désire que je lui
lise tout l'article je peux le faire.
M. COURCY: Vous savez que...
M. GOSSELIN: Dernièrement le ministre recevait une copie de la
sentence arbitrale par laquelle la Régie ordonne que le prix à
être payé sur camion soit $18.60 et celui à être
payé aux producteurs à $15.20, le courtier paiera donc .10 cents
de plus qu'il offrait et les producteurs recevront .15 cents de moins que
demandés. Or, M. le Président, cette sentence a été
bien mal reçu par les producteurs de bois, et nous en contestons la
valeur. Toute personne qui n'est pas complètement au courant du
problème, n'y comprendra rien.
M. LESAGE: Il n'y a pas un avocat qui n'a pas 24 heures pour maudire son
juge.
M. GOSSELIN: En effet, (Pardon, j'aimerais à ce que le premier
ministre répète la phrase qu'il a dite.)
M. LESAGE: Je dis, je ne connais pas d'avocat qui n'a pas 24 heures pour
maudire son juge.
M. BELLEMARE: Il y a des électeurs qui maudissent le premier
ministre 365 jours par année!
M. GOSSELIN: Pendant, M. le Président, que ce même client
là est à maudire son juge, il doit en supporter le fardeau...
M. LESAGE: Bien c'est évident.
M. PINARD: Ils ont le droit de changer d'idée.
M. GOSSELIN: ... je ne parle pas des avan- ces qui ont été
faites, par un juge et le juge en pareille circonstance est supposé
être le seul et unique défenseur des cultivateurs de la province
de Québec.
Et M. le Président, au cours de l'étude...
M. LESAGE: Il n'a aucune conception du point.
M. GOSSELIN: ... des crédits de l'honorable ministre de
l'agriculture nous aurons l'occasion de revenir sur cet état de choses
et nous aurons l'occasion aussi de revenir sur les activités de cette
Régie de mise en marché de produits agricoles et nous verrons
bien là, si réellement elle rend les services qu'on attendait
d'elle.
M. le Président, on a fait grand état des prêts que
l'on faisait aux cultivateurs, je n'ai jamais cru même du temps de
l'Union nationale, et je ne crois pas non plus aujourd'hui que lorsque les
cultivateurs sont obligés d'emprunter que ceci soit un signe favorable,
que ceci soit un signe qui puisse démontrer que nos cultivateurs
jouissent de la prospérité. Si nos cultivateurs M. le
Président ont emprunté plus que jamais, depuis 4 ans en
particulier, ceci est un signe évident de toutes les grandes diffi.
cultés qu'ils ont à faire face aujourd'hui.
M. BELLEMARE: Très bien.
M. GOSSELIN: La différence M. le Président, qui existe
entre l'administration d'aujourd'hui et celle de notre temps, c'est que nos
cultivateurs remboursaient leurs prêts dans ce temps-là, ils ont
obtenu des prêts ils ont remboursé en plus grand nombre, de 1944
à 1955 ou 1956, et ils avaient en grande partie devancé
même le temps qui leur était permis pour faire les remboursements.
Tandis qu'aujourd'hui, c'est le contraire qui se produit, on voit les
cultivateurs qui avaient presque fait disparaître leurs prêts et
devant la situation financière désastreuse dans laquelle ils se
trouvent aujourd'hui, ils sont obligés de revenir devant l'Office du
crédit agricole et demander des prêts très
considérables. Ceci nous démontre clairement que nos cultivateurs
sont dans une impasse. Et il y a quelque chose de plus grave encore, lorsque
l'on voit que c'est la Fédération libérale elle-même
M. le Président qui a jugé bon à un moment donné de
protester et de demander que l'on fasse une enquête sérieuse sur
les lenteurs administratives dans la distribution des prêts
agricoles.
Est-ce que, M. le Président, on veut réellement rendre
service à la classe agricole?
Si on veut réellement rendre service à nos cultivateurs,
M. le Président, qu'ils n'aient pas à attendre 6, 7, 8 et 10 et
parfois 15 mois avant d'obtenir un prêt, M. le Président...
M. BELLEMARE: Deux ans.
M. GOSSELIN: Depuis quatre ans, M. le Président, il existe
à l'Office du crédit agricole une lenteur qui est quasi
inexplicable; on a vu des cultivateurs qui étaient dans une
extrême urgence d'obtenir un prêt, mais par contre avant qu'on ait
terminé toutes les enquêtes à son sujet, M. le
Président, le cultivateur avait déjà eu le temps soit de
mourir ou encore de s'en aller, de déménager de sa terre. Je
réclame, et je demande...
M. COURCY: Voulez-vous me fournir le nom de ce mort-là pour faire
enquête?
M. GOSSELIN: Ah, je peux en fourmir, M. le Président, plusieurs
noms...
M. COURCY: Oui, oui.
M. GOSSELIN: ... mais voyez-vous le sérieux, du ministre de
l'Agriculture lorsqu'on lui fait part, du désespoir dans lequel se
trouvent nos cultivateurs? Il trouve par une petite Question insignifiante, une
petite question qui tient beaucoup plus de la comédie, M. le
Président, que d'un homme sérieux qui veut réellement
règler le sort de nos cultivateurs. J'aimerais, M. le Président,
que ces mêmes...
M. BELLEMARE: Il se fait arranger le ministre!
M. GOSSELIN: ... j'aimerais voir le ministre de l'Agriculture revenir,
non pas revenir dans mon comté parce qu'il n'est pas venu, je
l'avais invité d'ailleurs il n'est pas venu, mais j'aimerais, par
exemple, que certains membres de son parti libéral reviennent faire les
mêmes promesses qu'ils ont faites en 1960 et en 1962. D'ailleurs, la
population du comté de Compton, ne s'est pas laissée leurrer par
ces promesses-là. La population du comté de Compton, a reconnu et
elle savait à qui elle avait affaire, et elle n'a pas voulu faire
l'erreur qu'ont faite plusieurs comtés dans la province. M. le
Président, nous aimerions que l'honorable premier ministre nous
déclenche soit des élections générales, ou soit des
élections dans les trois comtés. Qu'ils viennent tâter le
pouls de la population, par une élection générale...
M. BELLEMARE: Les ouvriers, les cultivateurs.
M. GOSSELIN: ... qu'ils viennent voir si nos ouvriers sont contents,
qu'ils viennent voir si les cultivateurs sont satisfaits, qu'ils viennent voir,
si toute la population de la province de Québec va se laisser tromper
une fois de plus. Et je suis sûr que la réponse sera claire. Elle
sera précise, elle sera nette. On s'ennuie de l'Union nationale et
ça paraît.
M. LACROIX: Elle est bonne celle-là!
M. GOSSELIN: M. le Président, quand je vois mes collègues
ici rire,...
M. LACROIX: Elle est bonne celle-là!
M. GOSSELIN: ... réellement, ça me plan et je suis heureux
de les voir rire, mais c'est lorsque le premier ministre fait allusion à
des élections générales, vous les voyez tous disant:
« Bien, moi, je pense que s'il y a des élections, je ne me
présente pas...
M. LACROIX: Les élections partielles vont venir trop vite pour
vous-autres.
M. GOSSELIN: ... je ne suis pas sûr de mon affaire, ah je suis
rendu pas mal vieux, moi, je pense bien que si le premier ministre nous fait
des élections tout de suite, je m'en vais lâcher le bateau.
» Ah oui, quand le bateau est à couler, M. le Président,
vous les voyez sauter...
M. LESAGE: Je pense que ça serait mieux pour vous de le
lâcher, oui.
M. BELLEMARE: Une petite menace.
M. GOSSELIN: J'ai eu cette même menace-là, en...
M. LESAGE: Ce n'est pas une menace.
M. GOSSELIN: ... entre 1960 et 1962, et l'honorable premier ministre est
venu dans mon comté, ça m'a donné 300 voix de plus.
J'espère qu'il ne me privera pas de 300 autres voix.
M. BELLEMARE: Vous allez avoir assez de Tardif là vous!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. MORISSETTE: Champlain express!
M. BELLEMARE: Vous allez en avoir assez.
M. GOSSELIN: M. le Président, la conclusion que nous pouvons
faire est nulle autre que de féliciter l'honorable député
de Frontenac d!avoir présenté une telle motion, il y a
uns chose que j'ai déplorée lors de toute la discussion de ce
débat j'aurais aimé qu'il soit télévisé,
pour que toute la population agricole de la province de Québec puisse
voir le manque de sérieux qui a été apporté par
certains ministériels qui ont discuté de cette question si grave
de nos cultivateurs. S'ils avaient pu les voir agir sur place, ils auraient vu
le manque de sincérité de ces hommes-là lorsqu'on leur
pose un problème aussi grave que celui de notre classe agricole.
M. le Président, il est clair que le gouvernement dans cette
situation a failli à la tâche, et il est clair que cette motion de
non confiance envers le gouvernement est fort à point, les preuves sont
tangibles. M. le Président, on peut les voir dans tous les
comtés, à la grandeur de nos comtés, on peut rencontrer de
ces cultivateurs qui nous disent le gouvernement libéral nous a
trompés, le gouvernement nous avait promis entre autre une prime sur
leporc, sur le fromage, une prime sur le beurre, le gouvernement nous avait
promis une aide à la production laitière durant la saison
d'hiver, mais qu'est-ce qu'on a vu M. le Président, il n'y a pas
tellement longtemps le gouvernement fédéral a enlevé cette
prime de 25 cents, du cent livres pour la production du lait en hiver. Est-ce
qu'on a vu la ministre de l'Agriculture du Québec se lever et dire, nous
allons remplir notre promesse, et nous du provincial, nous allons vous la payer
cette prime-là, M. le Président, non, on a aimé mieux nous
faire un grand discours, grandiloquant, ici cet après-midi pour essayer
de berner nos cultivateurs encore, on leur a cité uns quantité
considérable de stalls tiques, même d'autres ont crié aux
grands riches vis-à-vis de notre classe agricole, mais M. le
Président, où sont-ils ces grands riches, je serais tenté
de dire qu'on les trouvera beaucoup plus dans les membres de la
fédération libérale ou encore dans les membres de
certaines commissions que le gouvernement libéral...
M. GOSSELIN: Il est six heures, je demande l'ajournement du
débat.
M. LESAGE: M. la Président, suspension de la séance.
M. LE PRESIDENT: La séance est suspendue jusqu'à ce soir,
huit heures.
Reprise de la séance à 8 h p.m.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. GOSSELIN: M. le Présidence n'ai pas l'intention de
résumer tout ce que j'ai dit avant, l'ajournement de la séance ce
soir à 6 heures, mais j'aimerais de nouveau dire à l'honorable
ministre de l'Agriculture à quel point la situation agricole dans la
province de Québec est grave. Je crois que devant tous les
exposés qui ont été faits, nous sommes tous conscients de
cet état da choses et peut-être qu'un des facteurs qui rend cette
situation-là encore plus tragique que l'on puisse l'imaginer, c'est que
lorsque nos braves cultivateurs sont obligés d'abandonner leur ferme
pour se diriger vers les grands centres, si au moins ils avaient
espérance qu'ils pourraient y trouver du travail.
Malheureusement les manquements, malheureusement la faillite du
gouvernement n'est pas uniquement dans le domaine agricole. Elle sa fait sentir
dans plusieurs autres domaines..,
M. LAPORTE: A l'ordre. On ne parle que de l'agriculture.
M. GOSSELIN: C'est ça. J'y arrive. M. le Président, je dis
que le gouvernement n'a pas failli, pardon a failli...
M. LAPORTE: Juste en passant.
M. HEBERT: C'est la meilleure phrase de votre discours.
M. GOSSELIN: Sans aucun doute, M. le Président on me pardonnera
ce lapsus. Le gouvernement libéral...
M. COURCY: C'est le coeur qui a parlé!
M. GOSSELIN: ... M. le Président, en a fait plusieurs qui sont
beaucoup plus déplorables que...
M. LAPORTE: Je ne crois pas que ce soit un lapsus.
M. GOSSELIN: ... ceux que je peux faire ici en cette Chambre parce que
le gouvernement libéral actuel, s'il fallait compter tous les lapsus et
toutes les absences de politique progressive qu'ils nous avaient tant promis et
que nous ne pouvions pas constater dans plusieurs autres domaines
administratifs, nos cultivateurs ne se trouveraient pas dans la situation dans
laquelle ils sont présentement.
Or, M. le Président, pour toutes les raisons que j'ai
énoncées, c'est avec fierté que je seconde la motion qui a
été si bien présentée par l'honorable
député de Frontenac.
M. BROWN: Mr. Speaker, I would certainly like to speak on this motion
because, of all the motions that have been presented in this House since I have
been here, this is the one that is least correct and more the « canard
» than anyone I seen so far since we have been in this Legislative
Assembly. To say the House, while being ready to grant to Her Majesty the money
necessary for the administration of the Province, regrets the Government has no
agricultural policy and it has kept its promises by not taking the necessary
measures to alleviate the impoverishment and depopulation of rural areas. This
is contrary to the truth all the way. There has been no party in the Province
of Quebec, for the history Province, that has done more or tried to do more and
is doing more than the Liberal Party of this Province.
Of course, we realize that the junior party that we have across the way,
Mr. Speaker, they have been only a more 16 years or so, we understand that they
do not really get the concept of the real problems of the Province of Quebec,
naturally. When they have existed for a hundred "years of fifty years, if they
can do so, which i doubt, then they will be abie to get an idea of what the
real problems of the Province are and I can excuse them for making barefaced
mistakes such as this because it is due to the lack of experience.
But I can say this directly that our Government and my Prime Minister
have done more for the farmer in the three years that they have been here, and
that the Cabinet has been more sympathetic to the farmer, than any Government
or any Prime Minister in the history of this Province and I would like to
congratulate my Minister and my Prime Minister and the Cabinet for the
wonderful work that they have been doing,
Now it was most interesting to me to hear our friends from across the
way criticize the record of the Liberal Government since 1960 an to mention
« subventions », that is premiums and things of this type, and how
there was nothing dons; but I think really that figures always prove what you
are saying, And these figures that I would like to quote you deal with counties
in the Opposition. Not only are we working for the farmer but we are also
working for the farmer even in the counties of our Opposition.
Now we will take Argenteuil county for example. In 1956 the amount of
premiums in the help given to Argenteuil county was $20,620. The amount given
us last year by our Liberal government was $50,262.53 making a difference of
$29,642, that the Liberal government that you claim, or pardon me, that, Mr.
Speaker, that our Opposition claims, has no policy and is doing nothing. But
double the amount of money that was given to them than during the years of our
Union Nationale and this particularly with the year 1956 if the honourable
leader of the Opposition would like to know the page, as usual we give out our
information: page 97, 98 and 99 in your Publics Accounts of 1956. If you need
one, I will send it over to him.
M. JOHNSON: Have we got the figures for 1959?
M. BROWN: No, but I am quoting the figures right now in the center of
the time, when the Union Nationale was doing most for the province of Quebec,
or so they said.
M. JOHNSON: Did the member choose the smallest year?
M. BROWN: Take a county, Mr. Speaker, like Bagot. In 1956 the county of
Bagot received $56,147.25 but last year, our Minister, even knowing that it was
a county in the Opposition, gave $140,466.42, $84,319 more than the wonderful
government, supposedly, the Union Nationale gave in 1956.
Now in taking a county such as the honourable member for Compton. In
1956, $20,000. Of course at that time, Compton was in the Opposition, so
naturally we would expect that our Government of the Union Nationale would cut
the people down, but in 1963, $122,159, an increase of $102,138 over 1956, for
example.
Now we will take the county of Dorchester. Of course we are doing
nothing but these are the hard facts: $183,000 plus in our time; in 1956, it
was supposed to be the acme of the pinacle of all the power of the Union
nationale, $47,168, which is a difference of $136,000, more during our regime
than during those times.
Then in Lotbinière, we have a member from Lotbinière that
has been doing a little screaming, Mr. Speaker, about the terrible things the
Liberals are doing but at least they gave him $186,734, when he received then
in 1956, $35,101.
Now, Missisquoi, which is now a county in the Opposition, $69,112 more
than they received during 1956.
M. BERTRAND (Missisquoi): Would the member for Brome permit me a
question?
M. BROWN: I would be delighted to, always, Mr. Speaker,...
M. BERTRAND (Missisquoi): What was the budget of the province in
1956?
M. CREPEAU: It is a public record.
M. BROWN: Unfortunately at this time I do not have the answer to that
question, but I will give it to the Honourable Member tomorrow. That does not
deal specifically with the agricultural problem.
But in Shefford, another county in the Opposition, $123,742 against
$33,088 given during 1956.
And in the county of Beauce, $47,000 and some odd in 1956 and now
$196,342, an increase of $158,000 over of what they received during those dear
old palmy days, Mr. Speaker, of the Union Nationale.
And for our friend from Frontenac, a little bit of a difference in
there, $65,000 in 1956 and during the terrible regime, that is what they say,
of $63,122.21. I mean merely...
M. JOHNSON: Has the member the figure for Westmount...?
M. BROWN: ... as Sir George Bernard Shaw said: « It is the dollar
that counts, regardless of your many words and pretty phrases it never made a
dollar bill... »
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BROWN: Now we did notice that some of the Opposition were talking
about farm loans. Oh! pardon me!
M. RUSSELL: Well, you might cite the figures for Brome County in 1956
and 1963.
M. BROWN: Oh! I intentionally did not do that, Mr. Speaker, but I can
very easily: that was $17,000 in 1956. Now I have not looked that 1963 just at
the time and I do not think it is necessary but the $17,000, I may tell my
honourable Member from Shefford, was the least amount given any county in the
Province of Quebec except the Iles-de-la-Madeleine and it was because I was
member at the time of the liberal party.
M. JOHNSON: The smallest county with the smallest member.
M. BROWN: I mean of the agricultural farmers. Now we...
M. JOHNSON: What are the figures for 1963?
M. BROWN: For Brome? M. JOHNSON: Yes.
M. BROWN: Sure, I'll be glad to give them to you. I hope you will pardon
me for waiting for a minute. I intentionally, Mr. Speaker, would like to give
the figures for the Opposition because it was just an ordinary procedure that
during the time of the Union Nationale, any county in the Opposition was
starved to death and we wish to show them Just how well we can run a government
by treating the Opposition exactly the same as we treat the government in
power. Of course they will tell you differently, but the figures do not lie.
Now the amount for Brome in 1963...
M. BERTRAND (Missisquoi): $36,000.
M. BROWN: $36,340.40. This is for grants and premiums. But I may say a
little later as I will tell you, between the Federal and Provincial
Governments, last year, we can add $67,000 to that for a study in ARDA that our
people in Brome wanted to do, whilemy friends in Missisquoi and Compton could
not get around to do anything about it, ARDA.
Now, we were talking about farm loans and how possibly that the Liberal
Government has no program. But taking again the counties in the Opposition:
Bagot, in 1962, because that is the last year of the proof figures in this
fiscal year book, received 79 loans for an amount of $731,100. Beauce, 140
loans, for the year 1962, for $943,900. Compton, 61 loans for $419,300.
Dorchester, 95 loans for $593,250.
The county of Frontenac which was supposedly so misued surely got 78
farm loans for four hundred and sixty one thousand four hundred dollars, and
the county of Shefford, 86 loans for seven hundred and nineteen thousand one
hundred dollars, Roberval, which I believe the member was talking about, a
hundred and eighteen loans for nine hundred and forty thousans nine hundred and
fifty dollars making a total to the counties in opposition of four million,
eight hundred and nine thousand, roughly speaking and a few more dollars. Now
if this is no policy at all, as our honorable friend have led us to believe,
what would be their policy and what would you call the policy of when they gave
less than half of what we have been talking about right now. In those times
less than half was the greatest policy that ever happened in the Province of
Quebec.
Now with double the money we find that our friends across the way, Mr.
Speaker, are accusing us of doing nothing. I mean that this exemplifies and is
typical of the average psychological approach of the Opposition to things that
are going on today. They really do not realise what is going on. Now I did
notice that one of our honourable friends ask why it was that we were so long
getting farm loans through, that the Farm loan Board was extremely slow and I
would like to be on record as saying this that there is no farm loan ask for in
the Province of Quebec that gave the proper information and was mailed to the
Credit Bureau here, that was not looked aîter in three months aîter
it was received providing it was between the month of May and November.
Now I have had quite a little experience with these farm loans because
one of the jobs that my honourable Minister has given me is to check up on the
cases that are moving slowly and I will give you a typical example of why some
people have not get their farm loans. In one caseafarmer made an application
for a farm loan for ten thousand dollars. He supposedly gave a list of all of
his debts but failed to mention in his application that he owed somebody in
Montreal a private sum of $3,000. The minute that this man in Montreal heard
that the farmer was getting a farm loan he wrote to farm loan in Quebec and
said that he had, a private note signed for $3,000, and he wanted to be paid,
well right away that farm loan was not given because it was a lie by the farmer
to the Farm Loan Board and it had to be looked into. In many cases the farmer
makes a loan without going to his notary, he puts down that he has certain
amounts of land and in fact he does not have those amounts of land and when the
Department goes to check over his farm, then his farm loan is refused until
this is corrected.
Now there are other cases of where we have some terribly absent-minded
notaries, Mr. Speaker, I have been amazed to find that when we try to trace
down some farm loans that have been applied for, for six months we have found
that they have accidently laid in a drawer of a notary of the Province. Now of
course, I know that most notaries are extremely honest and extremely accurate
and tight on their toes but there are some that evidently get these farm loans
mislaid and they were all very sorry when I checked up on some of them;
because
I did go around the counties to find out what was wrong on receiving
notice that some of these applications were late but invariably in these cases
where loans had taken over three months it is due to the fact that the form had
not been completed correctly, or there had been a dishonest statement given in
the form, or the taxes have not been paid, or the insurance has not been paid,
in any of these cases the loan then goes from its seniority at the top of the
pile to the bottom of the pile to be processed again. I feel from my experience
here that the Farm Loan Board is doing an excellent job, they have been
overworked and I feel that they have been really passing out the loans very
well and looking aîter our best interests as well. Talking of the
Honourable Member from Compton, as giving the government a lot of great advise
during his speech, and some of it is very true, it's nice to hear a Member of
the Opposition given us a lot of good advises, but I wonder what happened to
him during the time he was involved in government? I was here from 1956 to
1960, and I failed to hear the Honourable Member from Compton speak many times
only once or twice during that time, and the one time that he did speak, he
spoke a halfan hour on saying what a wonderfun job the Union Nationale was
doing, that in his county everything was moving along very well, no troubles at
all, the week following one of his industries in East Angus closed down for two
days a week and an industry left Scotstown.
M. BELLEMARE: M. le Président, ça n'est pas la motion.
M. BROWN:... he attended a great meeting of farmers in 1960 in
Sherbrooke where they said that the total of all farmers in the area for the
past 15 years were in grave difficulties and nothing was done of it. Now it is
most peculiar to me that the Honourable Member when he was in Parliament and
had a great majority the greatest Prime Minister in the history of the
Province, so he said, why it was that a great many of these difficulties of the
farmers were not all fixed up and in great running shape so that we wouldn't
have any trouble to meet the same problems all over again and I think one of
the main things that he did for his County was to dredge out the Salmon and
Gulf Rivers for an amount of about $400,000; at least I had one delegation of
farmers that came to me and said they were sorry that the River was dredged
because now they did have the overflow to fertilize the fields along the banks
and it is most peculiar to me if the Honourable Member is so interested in
farming, in helping the farmers, that he hasn't got an ARDA group working in
Compton County to get that part of the value given by the Federal and
Provincial governments to help out the farmers in Compton; because I am sure
they need it as he has said, but it is most peculiar, Mr. Speaker, for us to
hear these grand ideas from across the way, when during a period of 1956 to
1960, in my experience all of these speakers were gagged and never said
anything to encourage agriculture whatsoever.
M. GOSSELIN: He yak again. You yak at the yak that you are making here.
You came over and made up my County and it helped me to be elected over again.
I dont know why you are starting that...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. BROWN: Actually I think that the Government has a very good record
during the past three years, naturally we know that our farmers are in trouble,
they are in trouble because of the policy of the Union Nationale government
over the past 16 years, this policy was based on the idea and Mr. Barré
the former Minister of Agriculture described to us many times in the House,
that the idea was that the farmers of Quebec should produce milk and milk for
butter. During the time that we were producing milk for butter, which is the
cheapest price that we have from milk, for instance the Ontatio farmers were
producing milk for other purposes and encouraging more drinking of milk within
the province. As you know, there are two prices of milk one that goes for a
lower price and the other for a price going to fluid milk drinkers. Now being
that the Government itself encouraged farmers to this type of policy, one of
the big jobs in the Liberal Government, has been to undo this policy and see
that our farmers are set up in a modern way to look aîter the needs of
the consumers at this time. There is no time, I think, when you will be able to
say to a farmer that he is going to receive more money than the consumer pays,
and most of the prices that are given by the farmers today are fairly equitable
and within reason, when you take into consideration the foreign market that we
must meet the prices for.
Here, we have a very good record of exports in 1961-1962, the last
proved statistics available in live animals, we exported from the province of
Quebec, $6,914,423 worth and meet the preparations $22,000,000 and a little
more because I would like to quote Round figures, and dairy products
$30,000,000, sugar preparations $8,000,000 and vegetables $8,500,000 and in
fod-
der and feed $19,000,000. Now, it will interest you to know that our
Province of Quebec exported $50,000,000 worth of beverages of which the basic
product, was a farm product. So, that you know when your Province is really
being encouraged in its farming when we are exporting and not just feeding our
domestic market.
Turning to the domestic market as the honourable minister did say, we
are in the position that when we took power that over 50% of what the people
ate in the province of Quebec came from outside sources and outside provinces;
we are working very hard on processing encouraging the farmer to go into
different products, especially the small farmer to change to fruit and
vegetables, that will be canned and frozen, so that they will recover a great
part of this 50% of the consumer market that they lost during the agnized years
of Union nationale government. So that the government certainly has not been
standing still, and I know from the good speech that my Honourable Minister
made, that you realize that Quebec is proceeding ahead, it is not an easy job,
but the farmer is getting untangled, getting to a point where he is self
sufficient.
I would like to go into a bit of ARDA because I feel that ARDA is a
very, very important part of the recovery of the farmer in the province of
Quebec. The fundamental idea of ARDA is to take land in the rural counties and
use it for better uses that will bring in money to the county and to the farmer
in the county.
We have been working very, very hard on this plan of ARDA in Brome
county, and other parts of the province also, but I don't know them nearly as
well but I do know what it is happening in Brome county, and I am extremely
pleased with it. As we have said before, much land all over the province is not
being used today because there is nothing moving it has no value. In the case
of Brome county, with the help of the Department of Roads, in building roads
and the help of the Department of Roads with the autoroute which is a wonderful
help to our whole area and is as large a help to the farmer as anything else,
the land values in Brome county have advanced very much. More than that, there
are three major ski centers that have been promoted and these three major ski
centers, last year, took in more money from these mountains that they axe
located on, than the mountains did produce in one hundred years. It is to be
doubted that any one of the three mountains involved produce more than a $1,000
in a hundred years. Now, these three mountains produce In the neighbourhood of
$15,000 on a week-end. You may say: « Well, this is fine to have boys or
girls going up and down the hill », but what has this to do with farming?
Well, the answer is that it has to do this to farming: that any farm in the
Brome county area now is worth four times the money it was three years ago. If
the farmer has to sell, is he has a piece of land that is not suitable for
farming, he can sell to a summer person from the city or a tourist coming in
and realize some money to help out in the rest of his farming enterprise, but
more than that if a 1,000 people ski on the week-end, those 1,000 people are
going to drink a 1,000 quarts of milk in the area. There are going to eat a
1,000 potatoes in the area, they are going to eat a 1,000 pounds of meat in
Brome county. And this is bringing the customer to your county and this, in
fact, has encouraged our farmers in the county more than anyting else has done
during the last many years.
M. BROWN: Skiing is not the only thing that ARDA is in the habit of
promoting, in studying the total potential of an area, there are many vacant
lots of land that have been recommanded for woods and are good for woods, from
our studies that we have done with ARDA in the district of Bedford, we find
that it is quite practical to set up a hardwood pulp mill. This hardwood pulp
mill would have wood for 30 years with the regular growth that is in the
region. That if planting was started at this time, that there is no reason at
all, that the hardwood pulp mill could not be guaranted on amount o: wood for
next hundred years or more. Another thing that we are studying in Brome at this
time is the use of water in the area, the farm homes for the individual farmer,
so that we can come up with a plan that will be national and provincial to help
out the farmers within their homes to where they can live better and to see
that they have enough water for the future for their farms.
This is a small part of this ARDA study we have done in Brome County. We
found that all of the people are very interested in turning out to meetings and
discussing these things and many of the actual assets that we have are ideas
given us by the people in the Brome County area. I can only say to this House
that if I can be of service in my capacity as parlementary assistant for
Agriculture, to visit you in any of your countries, if you feel that I can be
of service there, I will be very very happy to go to any county and do the best
that I can to tell you what this ARDA is all about, and to try to introduce it
from the point of view of this Government along with the fine civil servants
that we do have.
Now, the other thing that I notice in the
motion that is out of the realms of reason all together, is the
depopulation of rural areas. We have here the statistical year book of 1963 and
on page 98, all of the figures for the different counties, we find in the case
of Beauce that in 1951, there were 54,973 people. Today, there are 62,264; in
the county of Bellechasse, in 1951 25,117 people, today: 26,054 is an
increase. In the county of Dorchester, 33,313 in 1951, now 34,711. In the
county of Lotbinière, 27,985 in 1951: 30,234. In the county of Nicolet,
30,335 in 1951, in 1961: 30,827. In Arthabaska: 36,957 in 1951 and in 1961:
45,301.
I am counting these counties in the Opposition Mr. Speaker, because they
are the ones that are bringing the point up. But there is only one case of the
rural counties which contains the greater part of the farmers of the Province,
where the population is less that it was in 1951, so I mean, how could anyone
come out with the statement and say that you are depopulating the rural area?
Here are your figures, you will get an increased population in each cases. It
may amuse you to look at the population of Brome, in 1901, the population of
Brome was 13,381. In 1961, it was 13,393, a gain of 12 people from 1901 and
1951. Today, it is 13,691 in a raw statistics on a survey conducted through the
municipalities, we have gained 1,400 people, just in the last two years, due to
the policy of this Government and his policy in Agriculture along with the
other plan that convert different areas to the proper things that should used
for.
Another thing that I may mention here, as an experiment, we are thinking
in Brome of setting up a cooperative for land use. We find that there are many
areas in the county where there is land not being used. We feel that by this
cooperative we will fence these pieces of land and we will go in the communal
farming throughout the county so that we will be able to use this land rather
than to have it lay at waste.
During one of my visits, Mr. Speaker, I was up to the
Ile-de-la-Madeleine and I can tell you that I really appreciate going there in
my capacity, and it Is a very wonderful island, the only thing is that I found
was a little out of the ordinary was that although the land was the same as
Prince Edward Island, very rich, very nice, the people in Ile-de-la-Madeleine
were importing all of their foods from Prince Edward Island or from the
different parts that were sending farm products in from New Brunswick, the
Gaspe and Prince Edward Island. I did a very careful study of that area, I
looked up the books and there was one farm loan in Ile-de-la-Madeleine during
the 16 years that our friends from across away were involved, and only on the
island itself, four farms that were operating producing products that could use
the people on their island. We are encouraging a program to start in the
Ile-de-la Madeleine so that a great amount of their food, that they are now
paying double the price for, would be raised in the fine land of « des
îles » and I can tell you that the present member has been most
helpful in his work along with me and along with our department so it is only a
natural thing that « les îles » will produce their own food
when they have the land to do it and it will help of the economy of this
particular island.
Now, our friends talk about farm, farmers and people having to leave the
farm, and I know that possibly this may be true in a sense, but if you have a
family of five boys, you certainly can't expect the whole five to live on your
farm and it is only natural that some of those boys will get an education under
a new regime and head for places that industrialize, that will transfer the
products of the farm into a reality and put it on the market, and we should
not, and never should expect to see, that all of these five boys are going to
stay on the farm, but with the present policy of giving 1/3 of the farm loan as
a credit aîter ten years, of increasing the amount to any boy that wants
to go on the farm to $1,000, with the help that we are giving to a farmer to
locate on the farm, I am sure and in my own experience there are lots more boys
who are staying on the farms and a lot more girls are marrying men who are
staying on the family farm. It is due to the policy of the government that we
have had during these past three years. I notice in here that we were
mentionning one thing and other and one of my pet subject, Mr. Speaker, during
the time I was in the Opposition was potatoes. There was one session that I
tried to talk about potatoes for four months and I just could never get around
the talking about them, of course there was none listed in the paper, in the
quotations of the market not one potato given as being available during the
winter for the consumption in the province of Quebec. Now at least we can say
today that if you pick up a newspaper and look in the markets you can at least
buy potatoes in this province of Quebec from Quebec.
Mr. Speaker, all I can say to close is this, that we have a long way to
go, to put the farmer where we hope that he will be, we hope that we will get
all the cooperation possible from everybody in this Legislative Assembly, we
hope that our government will take an even greater interest in farming, as they
have in the past. We are going to keep right on fighting to get the farmers his
proper place in the economy of this province and I know my Prime Minister and
my Minister are with me on this.
M. LOUBIER: M. le Président, étant un député
représentant un comté presque essentiellement agricole je ne
pouvais faire autrement que d'intervenir dans ce débat pour exprimer les
sentiments, les aspirations du peuple agricole, particulièrement celui
de Bellechasse.
Mais étant donné qu'au mois de janvier j'ai
déjà profité de l'occasion en cette Chambre pour exprimer
et traduire, me faire l'écho de tous les problèmes de notre
classe agricole particulièrement dans Bellechasse, je me contenterai
aujourd'hui, M. le Président, de faire certaines remarques de
façon aussi concise que possible, A l'audition de tous les orateurs qui
se sont fait entendre sur le sujet de la motion présentée par le
député de Frontenac, il est bien évident que des deux
côtés de la Chambre nous ne nourrissons pas les mêmes
sentiments et les mêmes opinions sur le problème actuel de la
classe agricole. Si nous écoutons les députés du
côté ministériel, nous avons nettement l'impression qu'on
dit que le cultivateur est prospère et que ça va bien dans la
classe agricole. On dit qu'il y a des problèmes, le premier ministre n'a
pas encore parlé, probablement qu'il interviendra...
M. LESAGE: M. le Président, je regrette infiniment, mais j'ai
parlé pendant au-delà d'une demie-heure hier et je n'ai jamais
dit que la classe agricole était prospère, au contraire, j'ai dit
que sa situation présentait un problème angoissant qu'il fallait
règler.
M. COURCY: J'ai dit la même chose.
M. LOUBIER: Nous sommes heureux, M. le Président d'entendre le
premier ministre...
M. LESAGE: Ne recommencez pas le discours.
M. LOUBIER: C'est le meilleur témoignage que nous avons et c'est
le meilleur support que l'on « puisse-t-avoir » pour dire que la
motion présentée par le député de Frontenac est
bien accueillie en cette Chambre.
M. LESAGE: Qu'on puisse avoir ou que « l'on puisse-t-avoir?
»
M. LOUBIER: Ah, M. le Président, jepense bien que des
leçons de diction du premier ministre, je peux m'en passer.
M. LESAGE: Vous en avez besoin des fois vous.
M. LOUBIER: Mais, M. le Président, je crois qu'il serait bon de
faire appel au témoignage de différents personnages, des hommes
sérieux, des mouvements qui ont beaucoup d'importance qui connaissent le
problème de la classe agricole et si nous lisions dans
«L'Evénement » du 24 octobre 1963 la déclaration
faite par M. Gérard Fortin, du département de sociologie et
d'anthropologie de la Faculté des sciences sociales de
l'université Laval, qui disait ceci: l'agriculture au Québec perd
de l'importance et devient de moins en moins prospère, dans les
campagnes les rangs se vident, les villages grossissent, de plus en plus la
population rurale tire son revenu d'occupations autres que la culture de la
terre, et l'agriculture de la province périclite M. le Président,
sur « Le Soleil » du 14 novembre 1963, M. Yves Dubé et M.
Jean-Marie Martin professeur à la faculté des sciences sociales
de l'Université Laval déclaraient ceci: le gouvernement de
Québec, comme celui du Canada est quelque peu responsable de
l'état actuel de l'agriculture québecoise. Il est plus que temps
semble-t-il que l'on revise la politique agricole et qu'on la rende plus
efficace.
M. COURCY: Est-ce que M. Dubé parlait du gouvernement actuel ou
de l'ancien gouvernement?
M. LOUBIER: M. le Président, il est temps de reviser la politique
agricole.
M. COURCY: Les études de M. Dubé.
M. LOUBIER: En 1963, le 14 novembre 1963, après trois ans de
régime actuel du parti libéral.
M. COURCY: Il a fait ses études, il les a
complétées à l'été 1963, mais ça fait
cinq ans qu'il les avait entreprises...
M. GOSSELIN: C'est pas le même Dubé.
M. LOUBIER: Ce sont des extraits que je produis.
M. COURCY: Les chiffres de M. Dubé se terminent en 1952 ou
1956.
M. LOUBIER: Je n'ai pas tous les détails que le ministre peut
avoir. J'ai le jugement en gros qui a été prononcé par ces
gens que le ministre semble bien comprendre.
M. HEBERT: Il ne sait pas.
M. LAPORTE: Il vous manque l'essentiel.
M. LOUBIER: Sur « Le Soleil » du 5 décembre 1963,
l'association pour l'expansion et la protection de l'industrie agricole dans
l'Est canadien réclame du gouvernement du Québec une
enquête royale sur l'agriculture.
Sur la Presse du 8 février 1964, la situation agricole du
Québec devenu lamentable et un journal sympathique à nos amis
d'en face « Le Canada français de St-Jean » le 31 octobre
1963, et je me permets de citer une partie de l'article sous la signature
d'Yves Gagnon, disait ceci au sujet des cultivateurs « Les grands
oubliés de la politique québecoise, les cultivateurs, ont
décidé de faire entendre leur voix ailleurs qu'à la porte
du député. L'union catholique des cultivateurs a crié fort
à son dernier congrès, c'est un réveil de bonne
augure.
Il y a deux semaines nous avons publié une enquête sur la
situation de l'agriculture dans la région, c'était tout
simplement une application locale de l'étude plus complète
à l'échelle provinciale, mais les mêmes mots se retrouvent
partout. Le cri lancé par l'U.C.C. sera d'autant plus profitable s'il se
traduit chez les agriculteurs par une prise de conscience collective de leur
place dans la société. Nous n'avons jamais eu de classe agricole
dans le sens d'une unité structurée participant à
l'évolution du Québec, nous avons la classe agricole des grands
discours, celle de l'individualisme proverbiale et du conservatisme
dépassé, mais jamais celle d'un mouvement de groupe, d'une
formation syndicale, elle s'impose en 1963. » Et un peu plus loin dans
cet éditorial, sous la signature toujours de monsieur Gagnon, il
terminait ainsi et je pense que le ministre de l'Agriculture va être
heureux d'entendre ces phrases: « mais la classe agricole ce sont les
cultivateurs qui la formeront, ils pourront alors parler d'égal à
égal avec les gouvernants et exiger qu'on montre autant de dynamisme
pour résoudre le problème de l'agriculture que l'on ne fait pour
les ressources naturelles ou l'éducation, mais comme le mentionnait un
ministre provincial avec qui nous causions des problèmes d'agriculture,
ce n'est toujours pas, et c'est écrit dans le journal, ce n'est toujours
pas avec le ministre actuel qu'on va règler ça. »
DES VOIX: Ah, ah.
M. LOUBIER: Eh bien, M. le Président,...
M. RUSSELL: Il connaissait son homme.
M. LOUBIER: ... pour démontrer la situation alarmante et les
sentiments d'inquiétude que développent actuellement nos
cultivateurs, je prends un autre témoignage d'un homme qui n'est pas de
notre parti puisque c'est le député libéral
fédéral du comté de Bellechasse, M. Laverdière, et
j'en avais cité, le 20 janvier, j'en avais parlé à la page
115 que l'on retrouve dans le Journal des débats, où il
était allé dans Bellechasse et en grand article de «
L'Action » qui disait que la situation de l'agriculture dans le
comté de Bellechasse, est des plus alarmantes. Cela c'était un
témoignage, M. le Président, qui ne vient pas de gens de l'Union
nationale, qui vient d'un député qui ne fait pas partie de notre
groupement.
Or, si nous regardons dans l'Annuaire du Québec qui vient de nous
être soumis, à la page 309 de ce rapport « Revenu des
cultivateurs découlant des exploitations agricoles de 1945 à 1962
», il nous est facile de constater que le revenu net total de
l'agriculture pour l'année 1945 était de $144,244,000; 1960,
quinze ans plus tard, le revenu net total découlant des exploitations
agricoles se chiffrait à $185,686,000, une augmentation durant quinze
ans de $40,000,000.
Et si nous regardons pour l'année 1961-1962, de $185,000,000 de
revenu net total en 1960, c'est descendu, en 1961, à $179,000,000 et en
1962. $179,668,000. Or, lorsque l'on supporte la thèse que l'agriculture
de 1945 à 1960 a été dans le pire marasme et que nos
cultivateurs ont été sauvés avec l'avènement du
régime actuel, les chiffres, de façon implacable, nous
démontrent que le revenu net total a diminué depuis 1960 et
ça avec la planification du ministre actuel.
On semble invoquer et prétendre de l'autre côté de
la Chambre que tous les problèmes de l'agriculture vont se règler
par le truchement de la planification. On semble prétendre du
côté ministériel que la planification, va rendre meilleures
nos terres qu'avec une bonne planification les produits seront meilleurs et
qu'avec une bonne planification cela va aider à faire pousser les choux,
grossir les boeufs, mais ça c'est toujours sur papier. Mais dans le
concret quel est la politique que l'on a fait rayonner dans nos centres ruraux
pour apporter réellement un support absolument nécessaire pour la
survivance même de la classe agricole.
Les seuls apports que l'on semble avoir donnés à nos
cultivateurs ç'a été de faire, doubler, tripler
l'impôt foncier pour les commissions scolaires, ç'a
été d'apporter une pluie de 18 ou 20 nouvelles taxes, ç'a
été de ne pas trouver de débouchés sérieux
et adéquats pour la production
de nos cultivateurs et M. le Président, on a semé des
taxes et les cultivateurs récoltent la misère aujourd'hui...
M. LAPORTE: Ils ont récolté des subventions comme les
autres.
M. LOUBIER: M. le Président, autre indice irréfutable
à l'effet que la classe agricole en 1964 ne reçoit pas toute
l'attention voulue du gouvernement actuel. Si nous regardons dans le budget des
estimations budgétaires, des dépenses pour l'année
1964-1965 il est facile de constater, qu'en 1964-1965 le ministère de
l'Agriculture va dépenser moins dans son ministère à un
budget plus petit que le budget 1963-1964 alors que ça va toujours en
diminuant.
M. COURCY: M. le Président...
M. LOUBIER: M. le Président, en 1963-1964 le ministère de
l'Agriculture et de la Colonisation demandait des estimations
budgétaires de l'ordre de $60,228,300.
M. COURCY: Ce n'est pas vrai. C'est faux. M. LAPORTE: Il ne sait pas
lire...
M. LOUBIER: Et en 1964-1965 on prévoit $59,317,400.
M. COURCY: Celui-là c'est vrai.
M. LOUBIER: Pardon? Bien l'autre ce sont des chiffres que j'ai ici.
M. CREPEAU: Une mauvaise copie.
M. LOUBIER: Ce sont vos propres chiffres, ce ne sont pas des chiffres
que l'on a fait.
M. COURCY: ... estimations budgétaires 1963-1964 il verrait que
ce n'est pas...
M. LOUBIER: M. le Président, est-ce que le ministre va renier le
budget des dépenses 1964-1965, le volume que j'ai ici.
M. COURCY: M. le Président,...
M. LOUBIER: C'est inscrit, M. le Président,...
M. COURCY: M. le Président, est-ce que le député me
permettrait une question.
M. LOUBIER: Oui.
M. COURCY: Le député ne comprend pas qu'est-ce que c'est
que des dépenses et qu'est-ce que c'est qu'un budget. C'est ça
qui est regrettable. Les estimations budgétaires 1963-1964 si le
député veut les prendre et les regarder il verra qu'il ne dit pas
vrai. Il y a eu après le budget 1963-1964 il y a eu un mandat
spécial, il y a eu deux budgets supplémentaires qui ont
été additionnés aux dépenses...
DES VOIX: Ah, ah!
M. COURCY: ... qui ont été placés dans les
dépenses pour l'année 1963-1964. C'est tout.
M. CREPEAU: Il faut être instruit. Il n'était pas en
Chambre.
M. LOUBIER: Ah je suis en Chambre plus souvent que bien des
députés. Du côté d'assiduité en Chambre je ne
pense pas qu'on puisse me faire des reproches.
M. le Président, je prends tout simplement les chiffres...
M. CREPEAU: Le député de Papineau.
M. LOUBIER: ... qui ont été produits, que j'ai
cités et évidemment le ministre m'arrive avec d'autres chiffres
c'est un peu comme disait le député de Compton aujourd'hui si on
veut mettre l'élastique avec les chiffres et les statistiques il n'y
aura jamais d'entente parce qu'on trouvera toujours une faille ou une autre
source de renseignements pour contredire ceux qu'on a produits.
M. LESAGE: Non, non, mais vous les avez...
M. COURNOYER: Mais, non, ce sont des mandats spéciaux...
M. LOUBIER: Mais oui, bien j'en ai cité, et M. le
Président...
M. COURNOYER: ... puis il y a deux brefs supplémentaires.
M. LOUBIER: M. le Président, je crois que la motion
présentée par le député de Frontenac, comme je le
disais au tout début, est des plus bienvenue et pourra sûrement
permettre à la population de constater que tous les
députés, de quelque façon, quels que soient les sentiments
qu'ils aient exprimés, au moins ont eu l'opportunité et le
privilège de faire entendre leurs convictions, leur argumentation sur le
problème très crucial de la classe agricole actuellement.
Pour ma part, je supporterai et voterai pour la motion du
député de Frontenac, sachant bien que le gouvernement actuel n'a
qu'à subir les remarques sévères, dures qui ont
été exprimées, qu'ils en supportent l'entier fardeau
puisque c'est nos amis d'en face qui avaient promis de sortir le cultivateur de
la misère et que, depuis 1960, le cultivateur se sent étouffer
par la main implacable d'un gouvernement qui dépense à un rythme
effarant et qui ne sait même pas où il en est rendu aujourd'hui
dans les dépenses c'est parce qu'il y a eu une mauvaise
répartition, un mauvais contrôle et que, là, le
gouvernement actuel n'a pas donné à la classe agricole tout le
support financier, bien dirigé, bien contrôlé qu'elle avait
droit d'attendre pour sa propre survie et quand on sait que ces gens-là,
les cultivateurs, sont renommés pour avoir de la mesure, pour avoir du
bon sens et pour ne pas prendre la mouche à propos de rien, quand un
mouvement comme l'U.C.C. est rendu à un tel point qu'il menace le
gouvernement de demander aux cultivateurs de ne plus payer l'impôt
foncier parce que ça n'a plus de sens, eh bien, il faut que la classe
agricole soit tellement rendue à bout et se sente tellement
ignorée pour en venir à des situations, à des ultimatums
aussi sérieux et qui chambarderaient l'ordre de notre
société dans nos régions.
M. le Président, je serai heureux de voter pour la motion du
député de Frontenac.
M. LACROIX: M. le Président, je voudrais parler brièvement
de la question du cultivateur que l'on se plaît à plaindre
particulièrement depuis deux jours. Et naturellement les cultivateurs
seraient depuis longtemps heureux et prospères si tout le talent que nos
amis de l'Opposition ont mis à démontrer leurs erreurs, ils
l'avaient employé à ne pas les commettre.
Mais depuis deux jours, nous avons entendu de nombreux
députés de l'Opposition qui ont exprimé leurs
doléances à l'endroit de la classe agricole dans la province de
Québec. Mais pas un n'a parlé, par exemple, de l'admiration
qu'ils devaient avoir, que nous devons avoir pour la classe agricole, pour les
cultivateurs. Naturellement, on admire le monde à travers ce que l'on
aime et l'Opposition, les membres de l'Union nationale, nous ont prouvé
pendant de nombreuses années que les cultivateurs ils ne les aimaient
que dans le temps des élections et aujourd'hui ils ne sont pas capables
d'oublier l'électoralisme et ils viennent nous proposer, nous soumettre
une motion de blâme alors que, depuis 1960, le gouvernement
libéral, par un ministre compétent et une équipe qui
s'attaque aux problèmes réels de l'agriculture, fait en sorte de
sortir l'agriculture du marasme ou l'avait plongée le gouvernement de
l'Union nationale.
Ce qui m'a surpris, c'est qu'une motion de blâme à
l'adresse du gouvernement sur l'agriculture soit soumise par un agronome et
qu'elle soit secondée par un député représentant un
comté rural et que les critiques les plus dures soient venues d'un autre
agronome, le député de Lotbinière. Pourtant, M. le
Président, on sait de quelle façon on traitait les agronomes dans
le temps de l'Union nationale.
M. HEBERT: C'est ça.
M. LACROIX: ... et vous savez aussi, M. le Président, vous qui
avez siégé en face du ministre et de ses assistants du temps de
l'Union nationale, mais vous disiez être fort heureux de constater que le
ministre et ses acolytes ne pouvaient au moins pas nuire aux habitants de votre
comté. Eh bien, M. le Président, aujourd'hui,...
M. RUSSELL: Aux habitants, pas aux cultivateurs.
M. LACROIX: ... la motion de blâme vient reprocher au gouvernement
actuel de ne pas avoir de psnsée agricole, mais le député
de Rouville, le député de Yamaska, son assistant, et le
député d'Arthabaska qui était un troisième
assistant, mais croyez-vous, M. le Président, que quand même vous
auriez mis tout l'engrais chimique de la province de Québec dans la
tête de ces gens-là que vous auriez été capable de
faire germer une pensée agricole? Jamais.
M. le Président, l'Opposition marche à reculons vers
l'avenir, les yeux tournés vers le passé. Ils vous parlent du
prêt agricole, mais de 1936 à 1939, de 1944 à 1960, tout ce
que nous avons entendu sur le point du cultivateur et de l'agriculture,
ç'a été le grand chef qui se promenait de par la province
et qui disait: « Je vous ai donné chers cultivateurs, le
prêt agricole. » Mais jamais, par exemple, le grand chef et ses
acolytes qui étaient muets comme des carpes à ce
moment-là, n'ont tenté de trouver une solution pour permettre aux
cultivateurs de le rembourser et de le payer ce prêt agricole-là.
C'est ce que le gouvernement libéral actuel essaie de faire.,.
M. BELLEMARE: Je soulève un point d'ordre. L'honorable
député des Iles-de-la-Madeleine dit qu'il n'y en a pas un qui a
suggéré une méthode pour payer les prêts
agricoles...
M. HEBERT: A l'ordre, à l'ordre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. A l'ordre.
M. BELLEMARE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT; Je voudrais demander au député de
Champlain, puisqu'il dit qu'il voudrait soulever le règlement, je
voudrais que le député de Champlain m'indique en quoi il voudrait
soulever le règlement.
M. BELLEMARE: M. le Président, le député n'a pas le
droit d'affirmer dans cette Chambre qu'il n'y a pas un député qui
ait soumis au moins une solution pour payer le crédit agricole...
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. BELLEMARE: C'est faux. Qu'il aille voir le Conseil d'orientation
agricole du comté de Champlain.
M. LE PRESIDENT: Le député de Champlain était en
Chambre après-midi et toute cette question des interventions a
été expliquée et je dois faire remarquer au
député de Champlain qu'il n'a pas le droit d'intervenir dans un
discours, invoquant le règlement, simplement pour interrompre un
député qui a la parole.
M. BERNATCHEZ: Ce n'est pas un discours, c'est un placotage.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. LACROIX: M. le Président, la situation agricole n'est
peut-être pas des plus reluisantes, mais elle n'est pas non plus aussi
notre que l'a décrite 1'Opposition. Il n'y a pas de situation
désespérée. Il y a seulement des âmes qui
désespèrent des situations. Quant à moi, je ne vous dis
pas que je suis satisfait entièrement parce que je suis un
libéral et un véritable libéral n'est jamais satisfait de
son sort.
Il est toujours â la recherche pour lui-même et pour ses
concitoyens d'une mesure plus vaste et sans cesse relative de bonheur, d'un
niveau de vie équitable pour sa famille, de la justice et de la
prospérité pour tous, permettant ainsi le progrès de la
dignité humaine et l'épanouissement de la personnalité
humaine autant de la classe agricole que de la classe ouvrière. M. le
Président, au- jourd'hui je crois que les gens de l'Opposition nous ont
prouvé encore une fois que, pour eux, les cultivateurs, ce n'est qu'une
question d'électoralisme.
DES VOIX: C'est ça.
M. LACROIX: Que l'agriculture ait des problèmes à
résoudre, certainement! Il y en a toujours eu, il y en a encore, il y en
aura dans l'avenir. Mais je crois qu'actuellement nous avons, dans
l'équipe du parti libéral, des gens qui sont réalistes,
qui veulent s'attaquer à la source du mal et qui veulent y apporter des
remèdes qui soient efficaces et que l'on cesse d'appliquer des
cataplasmes sur des jambes de bols comme on a fait pendant les 16
dernières années du régime de l'Union nationale.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas fort.
M. LACROIX: Le problème capital de l'agriculteur c'est surtout
une surcapitalisation de nos fermes, et nous n'exploitons pas au maximum le
potentiel de nos ressources. Aujourd'hui il nous faut avoir une agriculture
dirigée, il nous faut connaître la qualité de nos sols,
savoir ce que nos sols sont capables de produire de mieux, afin d'aider
réellement nos cultivateurs.
Ce sont nos agronomes qui sont le plus en mesure d'aider efficacement
nos cultivateurs. C'est pourquoi, depuis 1960, alors qu'en 1959 un agronome
recevait $4,000 par année, qu'il était soumis à la
dictature du député, des « patroneux » de chacune des
paroisses, qu'il ne pouvait pas faire son travail efficacement, aujourd'hui ces
mêmes agronomes qui sont des techniciens agronomes reçoivent
$6,400 par année, et peuvent aider efficacement les cultivateurs. Les
talents de nos agronomes sont mieux utilisés, nous leur permettons plus
d'initiative, et c'est pourquoi nos cultivateurs aujourd'hui ont plus confiance
en leurs agronomes et demandent recours de plus en plus à leurs
lumières et à leurs talents.
Eh bien, lorsqu'on vient dire que nos cultivateurs sont dans la
misère, eh bien, à ce moment-là on vient faire du lyrisme.
Qu'on aille dans nos paroisses rurales, et il y a des cultivateurs qui vivent
bien, mais la différence c'est qu'on ne calcule pas tout à fait
les revenus de la même façon qu'un ouvrier. Quand un ouvrier
reçoit $3,000 ou $3,500 par année, il doit vivre sur son salaire
et payer toutes les dépenses inhérentes à l'administration
et au maintien de sa famille, tandis qu'il m'est arrivé dans ma
propre famille, sachez que j'ai des beaux-frères et des
belles-soeurs qui sont cultivateurs et une année une belle-soeur me dit:
« Cette année, nous avons connu une mauvaise année,
l'agriculture n'a pas rendu cette année, il nous a fallu sortir $500 de
la banque tandis que vous autres vous avez votre salaire et, à chaque
semaine, vous touchez votre salaire.
Mais durant cette année, on avait changé de tracteur, on
avait changé d'automobile, on avait acheté aussi un
congélateur, mais ça on ne l'avait pas compté on n'avait
pas comté l'augmentation d'actif. C'est la petite différence
qu'il y a entre celui qui a un revenu régulier de chaque semaine et le
cultivateur.
Naturellement, je crois sincèrement qu'à l'heure actuelle
le parti libéral propose une politique à long terme qui apportera
à la classe agricole une solution à ses nombreux pro-
blèmes et nos cultivateurs connaîtront un avenir meilleur. Je
voterai contre la motion présentée par le député de
Frontenac, parce que grâce à l'actuel ministre de l'Agriculture,
à son courage, à sa détermination, à ses
connaissances et à sa compréhension des problèmes
agricoles, il saura proposer des mesures législatives qui, contrairement
à ce qui se faisait dans le temps de l'Union nationale, ne seront pas
proposées en fonction de la prochaine élection, mais le seront en
fonction de la prochaine génération.
M. BINETTE: M. le Président, si je me lève ce soir dans
cette Chambre, c'est parce que je suis personnellement représentant d'un
comté mi-rural, mi-urbain.
Je voudrais répondre aux derniers arguments apportés par
les gens de l'Union nationale mais, malheureusement, je n'airai rien à
dire sur ce sujet parce que dans tout ce qu'ils ont apporté ce soir, il
n'y avait rien de neuf. En conséquence, je serai donc obligé de
répondre à mon collègue le député de
Brome.
Le député de Brome, dans son allocution tantôt, a
parlé des délais que subissaient les demandes de prêts
agricoles à l'Office du crédit agricole du Québec. Et il a
semblé vouloir faire porter tous ces péchés ou tous ces
délais, si vous voulez, sur la classe des notaires. M. le
Président, je ne voudrais pas faire un plaidoyer « pro domo
», mais je voudrais quand même expliciter un peu la situation.
Nous savons tous dans cette Chambre, et s'il y en a qui ne le savent
pas, eh bien, je vais leur dire que, pour obtenir un prêt agricole, il
faut passer par plusieurs péripéties: la première, il
s'agit de faire une demande officielle; ensuite quand la demande est rendue
à l'Office du crédit agricole, l'office fait un rapport et remet
ce rapport à l'inspecteur qui doit aller faire l'inspection de la ferme;
ensuite l'inspecteur envoie son rapport à l'Office du crédit
agricole et là la procédure suit un cours normal,
préparation et examen des titres etc, et ceci pour vous dire qu'il y a,
dans la demande d'un prêt agricole, plusieurs personnes qui sont
impliquées, et pour réaliser une demande de prêt
agricole.
Tout d'abord il y a le cultivateur, et souvent le cultivateur
lui-même retarde d'aller voir son notaire pour produire les formules
qu'il a reçues ou il retarde de répondre à la demande du
notaire qui l'invite à venir passer à son bureau pour
compléter certaines formules. Ensuite, il y a des notaires qui, de temps
à autre, et il y en a quelques-uns, dirais-je à mon
collègue de Brome, à qui il arrive d'être
négligents; quelques-uns, c'est vrai, j'en ai dans mon comté,
j'en ai un que je pourrais nommer, mais je tairai son nom par charité.
Cependant, ce ne sont pas tous les notaires qui sont négligents, et
affirmer une telle chose, ce serait aussi faux que si je disais que tous les
cultivateurs sont négligents.
Alors il y a donc le cultivateur, le notaire, ensuite il y a les
enquêteurs. Et souvent le notaire attend après le
régistrateur pour obtenir les certificats de recherche; il arrive que
ça prend un mois, d'autres fois deux mois pour obtenir un certificat de
recherche et les raisons sont que les régistrateurs sont
débordés de demandes de certificats, et ces certificats de
recherche demandés par l'Office du crédit agricole étant
assez longs à rédiger et les régistrateurs recevant des
honoraires pas trop élevés pour faire ces certificats, il arrive
qu'ils soient moins pressés pour les faire et les notaires attendent ces
certificats de recherche avant de commencer leur travail.
Nous faisons aussi affaire avec les secrétaires trésoriers
de municipalités, et il arrive que ces derniers retardent de quelques
jours pour faire parvenir les documents requis. En plus de ça, il faut
comprendre que les inspections pour un prêt agricole se font entre le 1er
mai et le 1er novembre; c'est la période efficace pour faire une
inspection sur une terre par l'agronome-inspecteur. Eh bien, si le cultivateur
fait sa demande au mois de septembre, et que sa demande entre à l'Office
du crédit agricole à la fin de septembre, il peut arriver que
l'inspection sur cette demande ne soit pas faite avant le mois de mai ou de
juin de l'année suivante, étant donné le temps et le
nombre de demandes que les enquêteurs ont à compléter.
Alors sur une demande d'un cultivateur, entrée au mois de
septembre, si l'inspection n'est pas faite immédiatement avant le
1er novembre, eh bien, qu'est-ce qui se produit? Il y a six mois de
délai qui sont dus aux circonstances et aux exigences de la loi et des
règlements de l'Office du crédit agricole. Et ça ne
dépend ni des notaires, ni des cultivateurs, ni des
régistrateurs, ni des secrétaires-trésoriers; à ce
moment-là, ça dépend des délais qui sont
fixés par les règlements de l'Office du crédit
agricole.
M. BELLEMARE: Il y a des notaires influents?
M. BINETTE: Ah! Il y a des notaires influents, il y a des notaires
compétents...
UNE VOIX: Il y en a d'autres qui sont plus rapides...
M. BINETTE: M. le Président, tandis que je suis debout, vous me
permettrez, en plus de faire cette rectification de mon collègue, le
député de Brome,...
M. BELLEMARE: Très bien.
M. BINETTE: ... vous me permettrez de dire que j'approuve cependant tout
ce qu'il a dit dans le reste de son discours...
M. BELLEMARE: Bien, ce n'est pas tous les jours...
M. BINETTE: ... et je l'approuve à 100% parce que je l'ai bien
écouté et vous voyez que j'ai bien entendu la question...
M. GOSSELIN: La meilleure partie de son discours, c'est quand il a
parlé des notaires.
M. BINETTE: Cela vous a frappé, c'est ça? M. BELLEMARE:
Vous aussi.
M. BINETTE: Vous me permettrez donc, M. le Président, tout de
même de dire quelques mots sur la motion du député de
Frontenac. Cette motion se divise en deux parties. La première partie se
lit en résumé comme suit: que la Chambre regrette que le
gouvernement n'ait pas de pensée agricole, et la deuxième que le
gouvernement a manqué à ses promesses en ne prenant pas les
mesures nécessaires pour endiguer l'appauvrissement et la
dépopulation des régions rurales.
Si nous examinons la première partie de sa motion, nous voyons
que le député de Frontenac, aussi bien que plusieurs autres
membres de l'Opposition, subissent malgré eux l'influence bienfaisante
du gouvernement actuel. Un exemple frappant, c'est d'entendre dans la bouche
des députés de l'Opposition des expressions comme «
pensée agricole » et des termes comme « planification
».
L'expression avoir une pensée agricole est tirée du
programme préconisé par le parti libéral du Québec
en 1960. Nos amis d'en face se plaisent à employer cette expression, je
ne les blâme pas, lorsque quelqu'un découvre quelque chose de
bien, c'est normal qu'il en soit fier.
C'est le cas du député de Frontenac qui vient d'en faire
la découverte. Son parti aurait dû, lui aussi, faire la
découverte de cette pensée agricole durant les longues
années où il a été au pouvoir. Mais malheureusement
nous connaissons ce qui s'est passé durant cette période, mon
collègue, le député des Iles-de-la-Madeleine l'a
laissé entendre tantôt, le contrastre est grand entre la politique
à courte vue ou de cataplasme, sur une jambe de bois comme disait mon
collègue des Iles, le contrastre est grand entre la politique à
courte vue dis-je à laquelle l'Union nationale avait habitué la
population agricole, et la pensée agricole que le député
de Frontenac reproche à tort au gouvernement de ne pas avoir
aujourd'hui.
Avoir réellement une pensée agricole c'est exactement ce
que fait le gouvernement actuel. En premier lieu, en 1960, il s'est
contenté de réveiller le cultivateur de sa torpeur pour lui dire
que s'il continuait à se faire leurrer plus longtemps par l'Union
nationale avec sa politique « de courte vue », le marasme dans
lequel se trouvera l'agriculture d'ici quelques années sera
insurmontable. Le cultivateur a compris sa situation grave et il a
endossé le gouvernement actuel. « Le grand oublié »,
comme on l'appelait à ce moment-là, s'est donc
réveillé quand il a entendu sonner l'alerte, et ce fut un dur
réveil lorsqu'il a réalisé que sa situation était
tellement grave qu'elle serait peut-être insurmontable.
Aussi, le cultivateur aurait voulu voir son problème se
règler immédiatement, c'est normal. Mais un tel problème
ne se règle pas du jour au lendemain. Dès que le gouvernement
actuel a été en place, il a pris d'abord toutes les mesures
d'urgence qui s'imposaient et qui pouvaient donner des résultats
immédiats afin d'empêcher un grand nombre de cultivateurs de
sombrer dans le marasme.
Une des premières mesures que le gouvernement actuel a
passé fût d'augmenter de $10,000 à $15,000 les prêts
agricoles, et ensuite, de créer le prêt d'établissement du
fils de cultiva-
teur consistant dans la remise, après dix ans, du tiers du
montant du prêt jusqu'à concurrence de $3,000. Le gouvernement a
ensuite les prêts d'organisation et d'amélioration de fermes que
l'on appelle aussi les prêts à court et à moyen terme. Vint
ensuite la loi des marchés agricoles dont on vous a parlé,
laquelle a été une refonte complète en plus d'une
modification très grande en ce qui concerne la juridiction de l'office
des marchés agricoles et la Commission de l'industrie
laitière.
En effet, en créant la Régie des marchés agricoles,
les conflits de juridiction qui existaient entre les deux organismes
antérieurs ont disparus, Nous pourrions citer également la loi
des coopératives, la loi modifiant la loi des produits laitiers, la loi
de l'aménagement rural et du développement agricole, ce sont
là les principales mesures et les mesures prises par le gouvernement
pour parer à la situation d'urgence qui existait au moment où il
a pris le pouvoir.
En dernier lieu, tout en prenant les mesures d'urgence pour
empêcher les cultivateurs de sombrer dans le marasme, le gouvernement,
par ses experts, a fait faire une étude approfondie du problème
agricole afin d'en connaître tous les angles. Le seul moyen de
réaliser une solution valable du problème agricole était
d'établir une planification bien ordonnée de notre agriculture.
Comment? D'après les études qui ont été faites nous
voyons, et je ne répéterai pas ici tout ce qui s'est dit, mais je
vais résumer, nous voyons qu'en augmentant la production dans certains
domaines et en la réduisant dans d'autres comme l'a
démontré le premier ministre lors de son exposé, il
faudrait par exemple augmenter la production du boeuf, de la volaille et du
porc, et diminuer la production du lait où nous avons dans ce domaine
des surplus. Mais tout en faisant cela il faut éviter de créer
des problèmes en surchargeant le marché avec une production mal
dirigée.
La planification, les membres de l'Opposition ne semblent pas tous le
réaliser. C'est une politique à long terme dont les effets
bienfaisants se feront sentir au cours des années qui viennent. En
attendant, il ne fallait pas laisser le cultivateur dans le désarroi et
c'est ce que le gouvernement a fait en adoptant certaines mesures de
portée plus immédiate, comme je l'ai mentionné
tantôt.
Quant à la deuxième partie de la motion du
député de Frontenac qui blâme le gouvernement de ne pas
avoir endigué l'appauvrissement des cultivateurs et la
dépopulation rurale, je constate que cette deuxième partie de la
motion du député de Frontenac est un aveu candide de sa part que
le problème était déjà très grave en
1960.
En effet, quand on parle d'endiguer la marche d'une chose, c'est que la
précipitation est grande et c'est ce qui existait en 1960. C'est ce que
reconnaît le député de Frontenac dans la deuxième
partie de sa motion.
Quant à la dépopulation rurale, il s'agit là d'un
phénomène qui n'est pas unique à la province de
Québec mais d'un phénomène qui est dû à
l'industrialisation et à la mécanisation. Le premier ministre
d'ailleurs l'a exposé clairement hier après-midi et je n'ai pas
l'intention de revenir sur cette question.
Ce phénomène cependani n'est pas nouveau et il est
arrivé avant 1960, bien avant 1960. Si nous regardons les statistiques,
comme vous l'a démontré le ministre de l'Agriculture cet
après-midi, le nombre des fermes tend à diminuer à cause
de la consolidation et à cause de la mécanisation et de
l'industrialisation dont je parlais tantôt.
Si nous prenons par exemple les statistiques de mon comté, le
comté des Deux-Montagnes.Il y avait, en 1951, environ 1500 fermes tandis
que, lors du recensement da 1961, il n'en restait plus que 1311. Et pourtant
l'Union nationale devrait penser qu'elle avait un bon gouvernement et que le
représentant du comté, durant cette période de 1951
à la fin de 1959, était à mon avis, ce qu'il y avait de
mieux dans l'Union nationale. Cependant, le nombre de cultivateurs a quand
même diminué de près de 200 dans le comté des
Deux-Montagnes. Qu'est-ce que l'Union nationale a fait pour empêcher
cette désertion? Elle a tenté, par sa politique à courte
vue, de règler le problème mais rien n'y fit.
Cependant, je ne mets pas le blâme seulement sur la politique
à courte vue de l'Union nationale parce qu'il s'agit là d'un
phénomène qui se répète dans plusieurs pays du
monde. Si nous voulons être réalistes, c'est ainsi, je crois,
qu'il faut penser, Ce que le gouvernement actuel fait pour endiguer
l'appauvrissement du cultivateur et la dépopulation rurale, c'est
l'établissement de sa politique à long terme par une
planification bien ordonnée, comme je le disais, de l'agriculture de la
province de Québec.
Le ministre de l'Agriculture se penche tous les jours sur le
problème et sur ces cas que nous voudrions tous, tant que nous sommes,
d'un côté ou de l'autre de cette Chambre, voir
réglés le plus tôt possible. Cependant, je crois que nous
sommes des hommes assez sérieux pour croire qu'un problème
semblable ne se règle pas du jour au lendemain et que la planification
déjà commencée dans ce domaine sera la seule à
pouvoir nous donner des résultats importants. Et il ne faudrait pas
entre temps crier famine, faire croire toutes sortes de mythes aux cul-
tivateurs pour que ces derniers pensent que leur situation est pire
qu'elle ne l'est en réalité.
Evidemment, comme je le disais tantôt, cela prendra quelque temps
pour réaliser cette politique parce qu'il y a des impondérables
que seul peut permettre de règler. Parce qu'il faut faire des
dexpériences. Et c'est avec le résultat de ces expériences
que nous pourrons un jour déterminer exactement la politique à
suivre.
Le temps viendra sous peu, et nous l'espérons tous dans cette
Chambre, où nous pourrons parler de l'agriculture bien planifiée
et florissante dans la province de Québec pour le plus grand bien de la
population de cette province et particulièrement pour le plus grand bien
des cultivateurs grâce à cette politique à long terme que
le gouvernement a établie et continue d'établir.
Mon avis, il s'agit là d'un sujet trop grave pour y mettre de la
partisanerie aveugle, et je demande à l'Opposition de tâcher
d'apporter un peu plus de critique constructive plutôt que de faire
toujours une critique négative qui ne mène à rien. Pour
toutes ces raisons, M. le Président, je voterai, je voterai contre la
motion.
DES VOIX: Vote, vote!
M. PINARD: M. le Président, me serait-il permis pendant quelques
minutes de parler moi aussi d'un sujet qui me tient autant à coeur
qu'à n'importe quel autre membre de cette Chambre, que nous soyons du
côté ministériel ou du côté de l'Opposition.
Etant représentant d'un comté mixte rural et industriel, je crois
qu'il est de mon devoir de dire moi aussi ce que je pense de la situation de
l'agriculture à l'heure actuelle. J'ai écouté
attentivement, et sans interrompre surtout, les discours qui ont
été prononcés des deux côtés de la
Chambre,
M. JOHNSON: Quand vous étiez en Chambre.
M. PINARD: Evidemment quand mes fonctions ne me retenaient pas à
mon bureau...
M. JOHNSON: C'est plus exact.
M. PINARD: Mais j'ai été suffisamment en Chambre pour
savoir que le député de Bagot a dit, ce que les
porte-parole...
UNE VOIX: Il n'était pas toujours en Chambre,...
M. PINARD: ... de l'Opposition ont dit et surtout n'ont pas dit. Mais
j'ai aussi entendu les remarques qui ont été faites du
côté ministériel, et principalement par le ministre de
l'Agriculture lui-même. J'aimerais insister sur une situation qui n'a pas
été tellement expliquée, il me semble. C'est qu'on cherche
tellement de l'autre côté de la Chambre à noircir la
situation sur le plan agricole qu'on est entrain, je pense, de donner un
complexe véritable d'infériorité, un complexe de
défaitisme aux cultivateurs du Québec. Et je pense avoir raison
de l'affirmer. Quand des personnes en autorité, non seulement le
prétendent, mais peuvent donner des preuves certaines de ce que j'avance
en ce moment, malgré toutes les lois salutaires qui ont
été adoptées par les gouvernements de cette province.
Dans le temps de l'Union nationale, depuis 1960, nous sommes un peu tous
d'accord pour dire que malgré les efforts constants des gouvernements la
situation agricole ne s'est pas améliorée en proportion des
objectifs visés par l'adoption des lois sur le plan agricole. Pourquoi?
Il y a eu peut-être des insuffisances dans l'élaboration des lois.
Il y a eu peut-être carence dans la planification agricole. Il y a aussi
des causes qui sont inhérentes à la profession agricole
elle-même, à ses membres qui doivent être les premiers, je
pense, à réaliser la situation où ils sont
présentement, à savoir ce qui ne va pas, à analyser les
causes profondes du mal, à proposer eux-mêmes les remèdes
qu'ils croient être les meilleurs pour corriger la situation.
Il faut cependant l'aide de ceux qui sont les plus en mesure d'apporter
les remèdes qu'ils réclament, notamment le gouvernement, les
associations coopératives qui forment les corps intermédiaires,
et malgré tous ces efforts, il semblerait que bien souvent le
cultivateur qui est par la force même des choses un être
individualiste, ne trouve jamais nécessaire de solidariser ses efforts
pour être à l'heure d'aujourd'hui, alors que dans tous les autres
domaines, l'individualisme ne donne plus les résultats qu'il a
donnés autrefois qu'il faut de plus en plus le groupement des efforts
pour atteindre des buts bien spécifiques et pour donner aussi des
résultats attendus d'une politique établie.
Je voudrais tout de suite dire à la Chambre où je veux en
venir avec cette affirmation. Malgré l'amélioration sensible des
lois agricoles dans le domaine de l'établissement des fils de
cultivateurs, dans le domaine des prêts d'établissement, dans le
domaine des prêts agricoles dans le domaine des crédits offerts
aux cultivateurs pour l'amélioration de sa machinerie pour
accroître la mécanisation de sa ferme,
pour lui permettre d'en faire aujourd'hui une institution
économiquement rentable à caractère commercial et
industriel, qu'est-ce qui arrive?
Malgré tous ces efforts, le rendement n'est pas proportionnel,
certes, il y a des cultivateurs qui réussissent bien, ils ne sont
peut-être pas les plus nombreux, mais ceux qui réusissent bien ce
sont ceux-là même qui ont eu le courage d'étudier la
situation, de consulter les autorités dans le domaine agricole et
notamment les agronomes des comtés qui ont cru à la parole de
l'agronome, qui ont voulu voir en lui un aide précieux, capable d'aller
scruter avec le cultivateur, les causes du mal et d'apporter des remèdes
qui donnent des résultats, non seulement à court terme, mais
à long terme et dans le cas des cultivateurs qui ont
étudié le problème, mais qui ont eu aussi la bonne
idée d'écouter l'agronome, la plupart du temps, ils sont sortis
du marasme où de la situation difficile où ils ont
été momentanément.
Dans le cas d'un trop grand nombre de cultivateurs, qui sont
restés individualistes, qui ne veulent pas étudier la cause du
mal dont ils souffrent, qui cherchent surtout des revenus d'appoint, en dehors
de l'exploitation de leurs fermes, du côté de la Voirie si ce
n'est pas du côté de la forêt, qu'est-ce qui arrive? Eh
bien, l'exploitation agricole ne progresse pas, au contraire, loin d'être
stable, elle périclite. Eh bien souvent quand ils s'adressent au
ministère de l'Agriculture, ils ne sont même pas en mesure de
prouver que même en faisant appel à l'aide du ministère de
l'Agriculture, en faisant appel à l'aide des banques, sur le plan du
crédit, ils seraient capables de rendre leur exploitation agricole
rentable et à cause même de leur attitude parfois trop
défaitiste, ils ne donnent pas confiance à ceux-mêmes qui
veulent leur aider. Mais il y a un climat qui est entretenu, un climat de
défaitisme, qui est entretenu dans la province à l'heure actuelle
et je le regrette infiniment M. le Président, l'ai écouté
cet après-midi, des discours qui ont été prononcés
par des députés de l'Opposition.
Je ne leur reproche pas de dire au gouvernement qu'il y a une situation
qui n'est peut-être pas aussi reluisante que celle que nous voudrions
tous voir exister dans la province sur le plan agricole, qui veulent indiquer
au gouvernement qu'il y a des malaises quelque part et qui propose aussi des
remèdes, des solutions, mais je pense que dans la majorité des
discours qui ont été prononcés du côté de
l'Opposition, il y a eu beaucoup plus de critiques destructives que de
critiques constructives, il y a eu beaucoup plus d'appels au
défaitisme...
M. GOSSELIN: Le ministre est sourd.
M. PINARD: ... que d'appels d'optimisme on veut créer chez le
cultivateur un climat de critique, un climat de défaitisme qui peut
être rentable sur le plan politique momentanément mais qu'est-ce
que ça donnera en définitive à la classe agricole...
M. JOHNSON: Le ministre fait des reproches à l'U.C.C?
M. PINARD: ... que de l'avoir entretenue constamment dans un climat de
critique pour lui faire oublier ses propres fautes?
M. BERTRAND (Missisquoi): Est-ce que le ministre me permet une
question?
M. PINARD: Oui, oui.
M. BERTRAND (Missisquoi): Qui, à l'occasion de la dernière
campagne électorale, a crié « le grand oublié
» dans la province?
M. PINARD: M. le Président, je réponds tout de suite
à la question du député de Missisquoi. C'est une question
d'interprétation peut-être pour le député de
Missisquoi et pour le député de Drummond. Mais je pense qu'en
1959 et en 1960, nous avions raison, nous du parti libéral, de mettre le
doigt sur les malaises graves de l'agriculture...
M. GOSSELIN: C'est dix fois pire aujourd'hui. Est-ce que le ministre le
sait?
M. PINARD: Mais, M. le Président, il faut tout de même
rendre hommage à la vérité parfois et admettre qu'il s'est
fait quelque chose depuis 1960 pour redresser la situation...
M. JOHNSON: Rien d'efficace.
M. PINARD: Je ne dis pas que tout est parfait...
M. JOHNSON: Non!
M. PINARD: ... mais je dis qu'il y a eu des améliorations
sensibles et nombreuses sur le plan de la législation agricole en vue
d'aider les cultivateurs à règler la situation, à
améliorer son sort, à améliorer sa production, à
lui permettre d'augmenter son volume de production agricole, à lui
ouvrir de nouveaux marchés. Mais encore faut-il que le cultivateur ne
reste pas un individu, il faut qu'il solidarise ses efforts.
J'ai l'exemple de cultivateurs qui se sont adressés aux banques
dans mon comté et je sais que la situation s'est produite ailleurs. Les
gérants de banque auraient bien été prêts à
donner l'aide financière demandée par ces cultivateurs, mais
à lire les journaux et surtout les organes qui s'occupent de la question
agricole, « La Terre de chez nous » par exemple, et qu'ils voient
constamment des critiques acerbes contre le gouvernement, contre les politiques
agricoles adoptées par le gouvernement actuel et aussi par l'ancien
gouvernement, ils ont tendance à croire qu'il y a un mouvement
irréversible, que jamais l'agriculture ne reprendra le dessus de la
province de Québec. Et ce faisant évidemment, ils ne donnent pas
confiance aux cultivateurs qui vont s'adresser à eux.
Mais bien souvent le cultivateur lui-même arrive et prend une
attitude défaitiste. Aux questions qui lui sont posées: «
Quelles sont les mesures que vous entendez prendre pour améliorer
l'exploitation de votre ferme? » « Quelles sont les mesures que
vous entendez prendre pour garantir le remboursement du prêt que nous
serions probablement prêts à vous consentir? » Bien souvent,
il n'est jamais question d'adopter des mesures qui seraient de nature à
améliorer l'exploitation de la ferme; au contraire, le cultivateur
répond: « Eh bien, je pense que je vais m'acheter un camion et je
vais gagner suffisamment d'argent à la voirie pour être capable
d'assurer le remboursement de mon prêt. » Qu'est-ce que ça
va donner de plus aux cultivateurs sur le plan agricole lui-même,
proprement dit?
M. JOHNSON: Cela, c'est dans le comté de Drummond.
M. PINARD: Dans le cas des régions où c'est la forêt
qui pourrait devenir un revenu d'appoint, eh bien, on donne comme garantie des
revenus que le cultivateur pourrait gagner au service d'une compagnie
forestière ou au service d'une coopérative qui s'occupe de la
coupe en forêt ou d'un salaire que le cultivateur pourrait gagner chez un
entrepreneur forestier. Mais jamais il n'est question de prendre des mesures
pour améliorer l'exploitation de la ferme. Donc, je ne dis pas que c'est
la majorité des cas, mais ils sont trop nombreux; ce sont des
cultivateurs, qui, en définitive, n'en sont pas, qui demeurent bel et
bien sur une ferme avec leur famille, qui sont propriétaires d'une
ferme, mais qui ne l'exploitent pas en véritables cultivateurs, qui
recherchent ailleurs la solution à leurs problèmes, qui veulent
aller chercher ailleurs le salaire qui pourra leur permettre de faire vivre
leur famille.
Il y a là un malaise qu'il faut étudier et c'est la
responsabilité du gouvernement d'insuffler une dose d'optimisme
suffisante pour donner un encouragement sensible à la classe agricole
pour lui dire que non seulement c'est l'Intention du gouvernement de s'occuper
des problèmes agricoles, mais aussi pour lui prouver qu'il y a un
intérêt pour les cultivateurs à rester sur leur ferme.
C'est entendu que la classe agricole sera victime en quelque sorte des
phénomènes sociaux, des phénomènes
économiques qui, à certaines époques, causent des malaises
dans le cas de toutes les classes de la société. Mais reste une
chose vraie, c'est que l'agriculture dans le Québec restera toujours une
chose vitale, une industrie primordiale.
Evidemment les statistiques sont là pour démontrer que le
nombre des fermes diminue. Le nombre des fermes a diminué sensiblement
depuis 1950. Je pense que si mes statistiques sont précises, en 1956 il
ne restait que 122,617 fermes, comparativement à 134,336 en 1951. En
1963, les statistiques révèlent, et je ne crois pas me tromper,
que le nombre des fermes est diminué à 95,000. Est-ce là
l'indice que la situation agricole s'est aggravée du fait que le nombre
des fermes a diminué? Ce n'est pas là la preuve de l'aggravation
de la situation agricole, non, parce que le problème de la consolidation
des fermes est peut-être un indice que la situation agricole
s'améliore, mais quand l'orientation dans ce domaine est une chose
sérieuse, est une chose planifiée. Le phénomène
s'est produit non seulement dans le Québec, il s'est produit dans les
provinces du Canada, il s'est produit dans tous les pays du monde, même
aux Etats-Unis.
Alors, je pense que c'est la responsabilité conjointe des deux
partis, du parti ministériel et du parti de l'Opposition, de
créer un climat d'optimisme. Malgré les défaillances sur
le plan agricole, tout ne va pas mal! Il ne faut jamais, au risque de ne pas
respecter la vérité, vouloir absolument retirer des avantages sur
le plan électoral et aller déclarer que les politiques
salvatrices adoptées par les gouvernements antérieurs,
adoptées par le gouvernement actuel, n'ont pas donné les
résultats attendus. Evidemment la situation n'est pas encore parfaite.
Mais qui va oser prétendre que, dans l'ensemble de la situation, il n'y
a pas eu des améliorations notables, des améliorations
sensibles?
C'est cela que je voulais soulever ce soir en Chambre, et si vous me le
permettez je
voudrais donner un peu l'exemple de ce qui se passe dans mon
comté. Quarante pour cent à peu près du territoire
agricole de mon comté n'est pas cultivé de façon rentable,
de façon économique. Pourquoi? parce que le territoire agricole
n'est pas tellement riche mais aussi, et c'est surtout là la cause du
mal, parce que l'exploitation rationnelle n'est pas faite de ce territoire,
parce que les cultivateurs qui occupent ce territoire assez pauvre ne veulent
pas s'astreindre à des cultures spécialisées, ne veulent
pas écouter les conseils des agronomes, qui demandent aux cultivateurs
propriétaires des fermes dans ce territoire assez inculte pour les
grandes cultures, de s'astreindre à la culture des petits fruits, par
exemple. Je parle de la région de St-Lucien, où c'est encore une
paroisse de colonisation et je ne vois aucune raison,après 25 ou 30 ans,
que cette paroisse soit encore sous le statut de la colonisation. Qu'est-ce qui
arrive?
Je le dis en toute franchise et je serais même prêt à
aller répéter ça dans la paroisse même lorsque j'ai
l'occasion de le faire. Eh bien, sur le plan agricole, la situation n'est pas
tellement reluisante et c'est vrai, mais je dois dire aussi que les
cultivateurs pour le plus grand nombre n'ont pas donné la preuve qu'ils
étaient véritablement des cultivateurs, ils vont chercher leur
revenu annuel en dehors de l'agriculture, soit en travaillant pour le
ministère de la Voirie, soit en travaillant à l'usine, mais sur
le plan agricole, ils ne progressent pas ou ils progressent très peu
parce qu'ils ne veulent pas implanter chez eux les cultures qui leur sont
suggérées par les agronomes et qui ne connaissent dans cette
matière-là.
Dans d'autres paroisses du comté qui ne sont pas sous le statut
de la colonisation, mais qui représentent tout de même un
territoire agricole pas tellement riche, eh bien, on ne s'occupe pas à
des grandes cultures, on se lance tout simplement dans l'industrie
laitière. Alors que tout le monde sait que c'est une industrie dont le
volume de production annuellement dépasse la consommation. Donc, il y a
un malaise de ce côté, les agronomes le savent, au cours de forums
ils expliquent la situation aux cultivateurs et c'est bien difficile pour eux
d'admettre les causes du mal et aussi d'admettre que les remèdes
proposés seraient de nature à règler les situations.
Dans d'autres paroisses où le territoire, le sol arable est
propice à la culture de la patate ou effectivement il se fait de grosses
récoltes, à ce moment-là le ministère de
l'Agriculture propose la solidarisation des efforts, le groupement des
cultivateurs qui s'adonnent à la production de la patate, nous faisons
des assemblées, nous invitons des représentants du
ministère de l'Agriculture, des représentants de l'Office des
marchés, des représentants des coopératives et nous
essayons de leur faire comprendre qu'ils devraient se grouper à une
coopérative de production et de ventre. Qu'arrive-t-il?
Parce que quelques producteurs ont réussi eux à avoir
depuis quelques années un bon marché, de bons
débouchés pour la vente de leurs patates, eh bien, ils ne veulent
pas ou ils ne sont pas intéressés à se solidariser,
à se grouper avec les autres pour améliorer la situation et pour
permettre au ministère de l'Agriculture qui leur a fait des offres
précises de construire un entrepôt suffisant pour entreposer leur
récolte annuelle, pour leur permettre de vendre à bon prix quand
c'est le temps, mais aussi pour leur permettre d'entreposer une partie de leur
récolte et d'attendre les prix du marché qui ont tendance
à l'augmentaiton à certaines époques de l'année.
Résultat, l'effort reste individuel et sur le plan collectif, nous
n'avons pas réussi à progresser.
Alors, M. le Président, ce sont là les remarques que je
voulais faire. Tout en admettant qu'il y a des malaises, je pense qu'il y a
lieu de dire aussi qu'il y a tout de même matière à
encouragement, qu'il y a eu progression dans le sens de la législation
agricole et que si tout le monde veut mettre l'épaule à la roue,
veut faire abstraction de la partisanerie politique, il est bon parfois de
critiquer le gouvernement, mais 0 est surtout bon de faire de la critique
constructive.
Je pense qu'à ce moment-là, nous aurons créer parmi
la classe agricole un climat d'optimisme qui permettra aux cultivateurs,
surtout aux fils de rester sur le sol, de ne pas aller grossir le nombre
possible des chômeurs dans les villes et qui verront un avenir assez
brillant pour leur permettre de rester sur la terre et de continuer
l'exploitation familiale. Mais dans ce domains comme dans bien d'autres, il
faut avoir des critères plus modernes, des méthodes plus modernes
de production, d'exploitation, il faut penser surtout à produire sur une
base commerciale et sur une base industrielle.
En terminant; c'est là l'invitation que je fais aux membres des
deux côtés de la Chambre et je pense qu'en envisageant le
problème de cette façon, nous nous serons rendus service à
nous-mêmes, parce que nous aurons aéré le problème
de façon réaliste et aussi parce que à cause de notre
action nous aurons réussi à convaincre les cultivateurs
eux-mêmes que non seulement il y a encore possibilité de
progrès mais qu'il y a certitude pour eux d'obtenir du progrès
s'ils veulent
solidariser les efforts avec tous ceux qui ont à coeur
l'avancement de la classe agricole.
M. LESAGE: M. le Président, si le député en a pour
plus que cinq minutes, il vaut mieux Je crois ajourner parce que...
M. RUSSELL: Je n'en ai plus que pour cinq minutes.
M. LESAGE: ... je sais qu'il n'y a rien de plus difficile que de ne
parler que cinq minutes pour commencer un discours.
M. RUSSELL: Je n'en ai plus que pour cinq minutes. Je demanderai
l'ajournement du débat. M. LE PRESIDENT: Adopté. Il est dix
heures.
M. LESAGE: Oui. Demain, évidemment nous entreprendrons
l'étude du bill 99 en deuxième lecture en comité
plénier et en troisième lecture si nous avons le consentement
unanime de la Chambre et s'il reste du temps avant six heures nous continuerons
le présent débat.
M. LE PRESIDENT: La Chambre est ajournée à demain
après-midi à deux heures et demie.