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(Quinze heures deux minutes)
M. LEBEL (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Présentation de pétitions. Lecture et réception de
pétitions.
L'honorable député d'Iberville.
Pétitions
M. CROISETIERE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion
pour qu'il me soit permis de présenter la pétition de la
Corporation des électroniciens du Québec, demandant l'adoption
d'une nouvelle loi constituant en corporation la Corporation des
électroniciens du Québec.
M, LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.
L'honorable député d'Yamaska.
M. SHOONER: M. le Président, pour M» Murray, j'ai l'honneur
de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter la
pétition de la Corporation du village de Bois-des-Filion, demandant
l'adoption d'une loi l'autorisant à modifier certains de ses
règlements.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.
L'honorable député d'Yamaska.
M. SHOONER: M. le Président, pour M. Murray, j'ai l'honneur de
faire motion pour qu'il me soit permis de présenter la pétition
de la ville de Laval, demandant l'adoption d'une loi modifiant sa charte.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.
L'honorable député de Richelieu.
M, MARTEL: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour
qu'il me soit permis de présenter la pétition de la commission
scolaire de Contrecoeur, comté de Richelieu, demandant l'adoption d'une
loi abrogeant une certaine loi.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Présentation de rapports de comités élus.
Présentation de motions non annoncées.
L'honorable Secrétaire de la province.
Commission spéciale du bill 89
M. PAUL: M. le Président, vendredi dernier, j'ai Informé
la Chambre de mon intention de présenter aujourd'hui une motion...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais le silence le plus complet
dans les galeries, s'il vous plaît.
L'honorable Secrétaire de la province.
M. PAUL: Je voudrais donc apporter certains faits qui pourront permettre
aux collègues de cette Chambre de juger du besoin de l'adoption de cette
motion.
Au mois de décembre dernier, le bill 89, intitulé Loi des
heures d'affaires des établissements commerciaux était
adopté en première lecture. Ce bill fut
référé au comité de l'industrie et du commerce. Ce
comité a entendu 45 mémoires et il a tenu trois séances.
On comprendra facilement que ce bill est aujourd'hui mort, si l'on tient compte
des règles qui régissent nos travaux.
D'un autre côté, il est nécessaire d'envisager la
présentation, dès cette session, d'une nouvelle
législation. Le comité des industries et du commerce n'existe
plus en raison de la présentation de votre rapport, M. le
Président, par lequel de nouvelles commissions étaient
créées pour diriger la marche des travaux de la Chambre. C'est
pourquoi nous avons pensé qu'il y aurait peut-être avantage
à créer une commission spéciale qui serait
constituée des mêmes membres que ceux qui composaient l'ancien
comité de l'industrie et du commerce, ce qui nous permettrait,
maintenant que nous avons entendu les différents mémoires,
d'envisager laprésen-tation d'un nouveau texte de loi dans une
phraséologie autre que celle que l'on peut retrouver au bill 89.
C'est dans cet esprit de travail nécessaire que je
présente cette motion pour permettre aux membres de cette nouvelle
commission ou de l'ancien comité de continuer l'étude des
différents mémoires, analyser les différentes
modifications qui pourraient être présentées ou
suggérées à l'honorable ministre du Commerce et de
l'Industrie. En même temps, ce dernier pourrait discuter avec les membres
de la commission des amendements qu'ils pourraient apporter dans un nouveau
texte de loi.
Je crois que cette commission spéciale, en
tenant encore une ou deux séances, sera en mesure de recommander
à l'honorable ministre du Commerce et de l'Industrie la
présentation d'une nouvelle loi qui puisse rencontrer, autant que
possible, les désirs de tous les collègues de l'Assemblée
et surtout répondre aux différents arguments qui ont
été soulevés par les différents corps publics
entendus devant le comité. Par conséquent, la motion que je
désire présenter pourrait se lire comme suit: « Qu'une
commission spéciale soit instituée avec mission de continuer le
travail commencé par le comité de l'industrie et du commerce
concernant l'étude d'un projet de loi intitulé Loi des heures
d'affaires des établissements commerciaux, bill 89. Que tous les
mémoires, notes et rapports présentés et soumis au
comité de l'industrie et du commerce lui soient remis.
Que cette commission soit autorisée à siéger
pendant que la Chambre est en séance et les jours où la Chambre
ne tient pas de séance avec pouvoir d'entendre des témoins et
d'envoyer chercher les personnes, les pièces et les dossiers dont elle
aura besoin. Que cette commission fasse rapport à la Chambre au cours de
la présente session.
Que MM. Baillargeon, Beaudry, Brisson, Cadieux, Charbonneau, Gauthier
(Berthier), Goldbloom, Harvey, Houde, Lacroix, Leduc (Laviolette),
Léveillé, Levesque (Bonaventure), Lussier, Martel, Murray, Paul,
Sauvageau, Shooner, Simard et Saint-Germain, forment ladite commission
spéciale. Nous avons voulu, M. le Président, présenter une
commission spéciale avec le même nombre de membres que l'ancienne
commission qui avait effectué un excellent travail.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauharnois.
M. CADIEUX: M. le Président, J'adresse ma question à
l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce. Est-ce que cette commission
recevra encore des mémoires ou si les membres siégeront
seulement?
M. PAUL: Je crois qu'il avait été entendu
l'honorable député s'en rappelle que la dernière
séance que nous avons eue devait être la dernière pour la
présentation de mémoires. Cependant, si demain 11 y avait un ou
deux autres corps intermédiaires qui désiraient se faire
entendre, nous pourrions les entendre.
Je suis sûr que l'honorable député est
intrigué par le texte que l'on rencontre dans le corps de la motion.
C'est parce que j'ai voulu me servir du texte sacramentel que l'on re- trouve
dans la formation de chaque commission de notre Assemblée.
M. CADIEUX: Est-ce que dans l'esprit du ministre de l'Industrie et du
Commerce, il y a un délai de prévu pour la fin des études
de cette commission? Est-ce qu'on doit siéger encore plusieurs fois ou
si, dès la reprise des travaux de la Chambre, après les vacances
de Pâques, nous pourrons être en face d'un projet de loi?
M. BEAUDRY: Oui, M. le Président, nous devons siéger
demain et si c'est possible, une autre semaine lorsque nous reviendrons du
congé de Pâques. Nous soumettrons à l'Assemblée une
législation dans le plus bref délai possible.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Présentation de bills privés.
L'honorable député de Napierville-Laprairie
M. BAILLARGEON: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion
pour qu'il me soit permis de présenter la pétition de la ville de
Candiac demandant l'adoption d'une loi modifiant sa charte.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement unanime à ce que
nous retournions à la présentation de pétitions? Cette
motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Présentation de bills publics. Affaires du jour.
L'honorable ministre d'Etat à la Fonction publique.
M. MASSE: M. le Président, je désire informer...
M. LACROIX: Vous avez reçu un coup de masse.
M. MASSE: Vous allez voir pourquoi J'avais la tête ailleurs.
Déclaration ministérielle Offres
monétaires aux employés d'hôpitaux
M, MASSE: Je désire informer les membres de l'Assemblée
nationale que le comité patro-
nal de négociations dans le secteur hospitalier, composé
de représentants du gouvernement ou des hôpitaux, transmet
aujourd'hui, à ce moment-ci, le 25 mars, à Montréal,
à chacun des divers organismes syndicaux concernés, les offres
monétaires. Ces offres de traitements s'appliquent à 84,000
employés d'hôpitaux. Ces offres de salaires entraînent des
déboursés additionnels de $138,108,000, répartis sur trois
ans, en deux périodes de dix-huit mois. Au cours de la première
étape de dix-huit mois, le déboursé additionnel
s'élèvera à$48,592,000, ce qui représente une
augmentation annuelle de 9.2%. Pour la seconde période, un
déboursé de $40,924,000, représentant une augmentation
annuelle de 7.2%, s'ajoute au premier montant de $48,592,000.
Au début de la deuxième période, le total des
salaires versés annuellement à ce groupe d'employés sera
de $406,570,000. Ces offres sont conformes à la politique salariale du
gouvernement établie pour les secteurs publics et parapublics. Dans un
effort de rationalisation de la structure salariale des hôpitaux, six
critères principaux ont guidé l'élaboration des
offres.
Premièrement, alignement des traitements sur ceux des secteurs
comparables.
Deuxièmement, établissement de lignes de carrières
pour diverses catégories d'employés.
Troisièmement, normalisation de la structure salariale.
Quatrièmement, incitation au perfectionnement.
Cinquièmement, parité de rémunération pour
des fonctions similaires.
Sixièmement, élimination des disparités
régionales.
A ce stade-ci des négociations, les divers organismes syndicaux
et les représentants patronaux ont paraphé ou se sont entendus
sur la quasi-totalité des clauses normatives. Nous sommes convaincus que
la négociation des clauses monétaires se fera avec le même
sérieux et le même souci d'efficacité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: Le ministre d'Etat à la Fonction publique a dit qu'il
y avait six critères principaux qui étaient à la base de
l'offre faite quant à la rémunération. Il a parlé
de parité d'émoluments ou de salaires. Le ministre pourrait-il
nous dire comment se comparent les chiffres des offres faites dans l'ensemble,
en ce qui concerne la rémunération dans les hôpitaux,
comment se comparent ces chiffres avec ceux qui servent de base de salaires
dans les hôpitaux, par exemple en Ontario et en Alberta?
M. MASSE: Sans entrer dans les détails, nous avons tenu compte,
dans l'élaboration de la structure des salaires dans le secteur
hospitalier, comme dans les autre secteurs d'ailleurs, de ce que nous versons
pour des emplois similaires dans d'autres secteurs publics, tenant compte de
l'offre et de la demande en personnel, tenant compte également de ce qui
est payé dans les autres régions nord-américaines.
M. LESAGE: Oui.
M. MASSE: C'est l'ensemble de ces trois facteurs qui nous amène,
dans la structure des traitements, à fixer le traitement pour une
sténodactylo à l'hôpital X à un montant de tant. Je
ne voudrais pas entrer dans tous les détails de l'offre.
M. LESAGE: C'est parce qu'il a été dit souvent que
l'exploitation des hôpitaux dans le Québec cela a
été dit, je ne vous garantis pas que ce soit vrai, c'est en
même temps une question - il a été dit, je le
répète, l'exploitation des hôpitaux dans le Québec
était plus dispendieuse, en général ou en moyenne, qu'en
Ontario ou en Alberta. Les offres maintiennent-elles cette différence
plus avantageuse pour les employés d'hôpitaux du Québec, si
elle existe?
M. MASSE: Pour reprendre les termes du chef de l'Opposition: ç'a
été dit.
M. LESAGE: Oui.
M. MASSE: Et pour reprendre les termes des dirigeants syndicaux: Cela ne
dépend certainement pas uniquement des traitements.
M. LESAGE: Cela ne dépend pas de l'échelle des
traitements?
M. MASSE: Comme disent les chefs syndicaux: Cela ne dépend pas
uniquement de l'échelle des traitements.
M. LESAGE: Cela dépend du nombre des employés?
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
Questions et réponses L'Office de radio du
Québec
M. MICHAUD: Le premier ministre peut-il commenter cette nouvelle
ahurissante diffusée hier soir, sur les ondes d'un poste de
télévision montréalais, à l'effet que l'actuel chef
du cabinet du premier ministre serait nommé à la
présidence de l'Office de radio-télédiffusion du
Québec? Pas de commentaire?
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauharnois.
M. CADIEUX: Le député de Gouin ne s'attendait pas à
avoir une réponse. C'est pour cela que je pose ma question
immédiatement.
M. LE PRESIDENT: Je croyais avoir dit que la question devrait être
référée au feuilleton.
L'honorable député de Beauharnois.
Atelier pédagogique Saint-Thomas
M. CADIEUX; Une question au ministre de l'Education. A-t-il reçu
un télégramme d'une association de parents et de maîtres
qui s'appelle l'Atelier pédagogique de Saint-Thomas, 39 Jacques-Cartier,
Valleyfleld, et me permettrait-il de lui lire ce
télégramme-là? C'est une question d'urgence. Avec la
permission du ministre et la vôtre.
M. LE PRESIDENT: Malheureusement, même si le ministre donnait sa
permission, je me verrais dans la triste obligation de la refuser.
M. CADIEUX: Est-ce que je peux demander au ministre s'il est au courant
que 1,070 élèves n'auront plus de locaux, si la construction
d'une régionale à Salaberry-de-Valleyfield n'est pas entreprise
immédiatement?
M. LE PRESIDENT: Cette question doit être
référée au feuilleton. L'honorable député de
Verdun.
M. CADIEUX: Avec votre permission... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CADIEUX: II reste que ces gens-là sont très
inquiets...
DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!
M. CADIEUX: ... et la décision doit être prise
immédiatement. C'est très urgent, c'est une question de jours
dans le moment. On vient d'apprendre que le CEGEP ne louerait plus les locaux
nécessaires et que 1,070 étudiants seront dehors très
bientôt.
M. GRENIER: A l'ordrel
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: Ils ne veulent plus laisser parler le ministre de
l'Education. Il est beau, mais il n'est pas fin!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député
de Verdun.
Question de privilège
M. WAGNER: Je pose la question des privilèges des membres de
cette Chambre. Le vendredi matin 21 mars, le premier ministre a donné
les réponses suivantes aux questions suivantes. Je cite la page 528 des
Débats de la Chambre: « Sixième question, a): «
Est-il exact que les procureurs de la couronne, avant cette demande de
cautionnement, avaient eu une entrevue avec les officiers supérieurs de
la police de Montréal, au cours de laquelle entrevue ces derniers
s'étaient objectés avec véhémence à toute
suggestion de cautionnement pour « Sonny » Coe? » «
Réponse du premier ministre: « La réponse est non. »
« Question b): « Est-ce que le procureur de la couronne ou les
procureurs de la couronne ont fait part de cette rencontre aux officiers
supérieurs du ministère de la Justice? » «
Réponse du premier ministre: « Non, puisqu'il n'y eut point
d'entrevue. »
En répondant comme il l'a fait, le premier ministre et ministre
de la Justice, en se basant sur les rapports de ses officiers, n'a pas fourni
une version vraie, exacte et complète des faits au sujet de l'affaire
« Sonny » Coe, induisant ainsi la Chambre en erreur et causant
notamment un préjudice grave aux autorités policières de
la ville de Montréal.
M. BERTRAND: Je soulève un point d'ordre.
Le député de Verdun met en doute ma parole et la version
des faits que j'ai présentée à cette Chambre.
M. LESAGE: Non.
M. BERTRAND: J'aimerais bien que, dès le début, il indique
sa source de renseignements.
M. LESAGE: M. le Président, sur le point d'ordre soulevé
par le premier ministre, j'ai ici le texte que vient de lire le
député de Verdun, et je voudrais bien rappeler à la
présidence que le député de Verdun a dit ceci: « Le
premier ministre et ministre de la Justice, en se basant sur les rapports de
ses officiers, n'a pas fourni une version vraie. »
Par conséquent, il n'a pas mis en doute la bonne foi du premier
ministre.
M. BERTRAND: On y verra.
M. LESAGE: Bien, je relis ce que le député de Verdun a
lu.
M. WAGNER: M. le Président, avec votre permission, je continue.
Je dis qu'induisant ainsi en erreur la Chambre et causant notamment un
préjudice grave aux autorités policières de la ville de
Montréal qui s'étaient objectées de multiples fois
à ce que le marchandage de « Sonny » Coe soit accepté
par la Couronne et à ce qu'un cautionnement lui soit accordé, les
faits sont les suivants:
Le 27 février, la police de Montréal apprend que le
marchandage qu'elle a refusé le 18 février a été
accepté par les substituts du procureur général. Une
conversation téléphonique a eu lieu entre un haut fonctionnaire
du département de la police de Montréal et le procureur chef de
la Couronne, Me Louis Paradis, aux fins de mettre ce dernier en garde de ne pas
tomber dans un piège aussi évident.
Le même jour, 27 février, une rencontre a lieu à
l'édifice de la Sûreté municipale entre un haut
fonctionnaire de la police de Montréal et un autre substitut du
procureur général, Me Girouard, celui-là même qui
fit les représentations devant le juge Coderre au nom du procureur
général. La police de Montréal fit part à ce
dernier de ses objections et de son refus d'accepter le marchandage de «
Sonny » Coe.
Le 6 mars, dans l'avant-midi, avant que le cautionnement ne soit
accordé, autre conversation téléphonique entre un haut
fonctionnaire de la police de Montréal et le procureur chef de la
Couronne, Me Louis Paradis, au cours de laquelle conversation la police de
Montréal réitère ses objections au cautionnement. A la
demande même du substitut en chef du procureur général,
l'objection verbale de la police de Montréal et les raisons qui la
motivent sont confirmées par écrit dans une lettre
adressée au procureur chef de la Couronne, Me Louis Paradis,
livrée à ce dernier le matin du 6 mars, à l'intention du
ministre de la Justice, et reçue par le ministre de la Justice qui en
possède l'original ou une copie depuis le 6 mars.
Le 6 mars, dans l'après-midi, le cautionnement est accordé
à « Sonny » Coe. Par la suire, les objections de la police
ont été de nouveau confirmées auprès des hauts
fonctionnaires du ministère de la Justice, y inclus le sous-ministre
chargé des affaires criminelles, et finalement le ministre de la Justice
lui-même.
Voilà les faits qu'il est dans l'intérêt public que
le premier ministre nie ou confirme. Le comportement du ministre qui persiste
à voiler la vérité en se réfugiant derrière
des subtilités techniques...
DES VOIX: A l'ordre!
M. WAGNER: ... nous paraît incompréhensible.
M. BERTRAND: C'est du sadisme.
M. LE PRESIDENT: Je pense que l'honorable député de Verdun
conviendra avec moi que la dernière partie de son intervention est
antiparlementaire, et je l'invite à retirer ses paroles.
M. WAGNER: M. le Président, je me rends à votre demande et
je continue. La question à. laquelle le ministre de la Justice devrait
répondre est celle-ci: Y a-t-il eu, à quelque moment,
auprès des substituts du procureur général des objections
verbales, téléphoniques, écrites ou autres de la part du
département de police de Montréal avant l'octroi du cautionnement
à « Sonny » Coe?
Et pour tirer au clair toute cette affaire, nous suggérons que la
commission parlementaire de l'administration de la justice soit appelée
à siéger immédiatement et qu'elle tienne des audiences
publiques...
DES VOIX: A l'ordre!
M. MALTAIS (Saguenay): Les bandits sont-ils protégés, un
peu!
M. LESAGE: L'article 195.
M. LE PRESIDENT: Je comprends que l'honorable député de
Verdun veut conclure sa question de privilège par une motion ou...
M. LESAGE: Une réclamation en vertu de l'article 195.
M. WAGNER: Alors, M. le Président, que la commission de
l'administration de la justice soit appelée à siéger
immédiatement, qu'elle tienne des audiences publiques, qu'elle puisse
convoquer tous les témoins impliqués, y compris
l'intermédiaire de M. Coe, ce monsieur X qui a réussi à
vendre sa marchandise aux autorités provinciales de la justice.
Qu'elle puisse prendre connaissance de la correspondance et autres
documents, et qu'elle obtienne ainsi que la lumière la plus totale soit
faite sur cette affaire.
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre.
M. BERTRAND: M. le Président, la déclaration que j'ai
faite, devant la Chambre, est fondée, de l'aveu même de celui
î qui j'ai parlé à l'hôtel de ville de
Montréal, hier après-midi, à qui j'ai lu la réponse
et qui m'a dit: Votre réponse est fondée. Celui-là
même auquel 11 fait allusion. Et j'aimerais bien, dans des circonstances
comme celle-ci, savoir où le député de Verdun a obtenu le
renseignement selon lequel une lettre a été transmise au
procureur chef de la couronne à Montréal, lettre de nature
strictement privée et confidentielle, que j'ai vue par après,
mais qui a été transmise au procureur chef de la couronne, le
jour du cautionnement.
UNE VOIX: Avant le cautionnement.
M. BERTRAND: Alors, je me demande où le député de
Verdun est allé chercher des renseignements strictement privés,
privilégiés et confidentiels.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAPORTE: Inventez-en des nouvelles, au moins! Vingt-cinq ont dit cela
avant vous. Vous n'avez même pas l'avantage d'être original.
M. BERGERON: II n'a pas compris encore et il ne comprendra jamais, non
plus.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je regrette de perdre quelques dialogues
fort Intéressants, semble-t-il.
L'honorable député de Chambly.
M. LAPORTE: M. le Président, une question au premier ministre. A
la suite de l'intervention qu'il vient de faire, à la suite de celle du
député de Verdun et devant le début de confirmation que le
premier ministre a faite, n'y aurait-il pas lieu d'acquiescer à la
demande du député de Verdun de convoquer, sans délai, la
Commission parlementaire de la justice, afin de tirer cette affaire au
clair?
M. BERTRAND: M. le Président, j'ai déjà
répondu que toute cette affaire n'était pas
d'intérêt public.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Richmond.
Questions et réponses Manifestation à
l'université McGill
M. LAFRANCE: M. le Président, le premier ministre pourrait-il,
pour rassurer ceux qui s'inquiètent, et avec raison, d'une certaine
manifestation qui devait être tenue en fin de semaine à
l'université McGill, informer la Chambre des mesures qu'il a prises ou
des mesures qu'il entend prendre, afin que cette manifestation monstre ne
devienne pas une manifestation monstrueuse?
M. ROY: Pour réussir, ils vont réussir. M. LE PRESIDENT: A
l'ordre!
M. LAFRANCE: Un instant, c'est très objectif mon affaire, M. le
Président. Pendant que les québécois, non seulement ceux
de Montréal, mais ceux de la région avoisinante
s'inquiètent, avec raison, que leurs enfants ne deviennent les victimes
des Gray, des Lemieux et des Chartrand, qu'entend faire le premier ministre ou
le gouvernement pour prévenir ces manifestations?
M. ROY: Vous leur faites de la publicité.
M. LAFRANCE: Veux-tu te taire. M. le Président, le
député de Joliette pourrait au moins écouter de
façon intelligente, s'il ne peut pas parler intelligemment.
M. BERTRAND: Le député de Richmond veut-il qu'on lui
réponde?
En réponse à la question du député de
Richmond, je tiens à dire que le directeur de la Sûreté du
Québec a toujours reçu, et en particulier dans ce cas,
instruction de collaborer de la manière la plus étroite avec la
Sûreté municipale de Montréal. Au sujet de toutes les
manifestations où l'on peut déceler, et on le
décèle souvent assez longtemps à l'avance, que des actes
de violence peuvent être posés, des
instructions ont déjà été données et
elles ont été répétées au directeur
général de la Sûreté du Québec.
J'aurai d'ailleurs l'occasion, probablement demain après-midi, de
faire une déclaration ministérielle à ce sujet.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député des
Iles-de-la-Madeleine.
Parc Forillon
M. LACROIX: Ma question s'adresse à l'honorable ministre du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Est-ce que l'honorable ministre a
des informations à fournir à la Chambre concernant le parc
Forillon que le gouvernement fédéral voudrait organiser en
Gaspésie et qui a une très grande importance au point de vue
touristique pour le Bas Saint-Laurent et la Gaspésie?
M. LOUBIER: Il y a quelques mois déjà, le conseil des
ministres a désigné, comme ministre responsable de l'application
du plan du BAEQ, le ministre délégué £ la Fonction
publique. Ce ministre est aussi responsable d'un autre organisme dans le cadre
de l'application de ce plan, organisme qui porte le nom d'ODEQ.
Evidemment, toutes les questions du genre sont subséquemment
étudiées par le conseil des ministres, Le ministre responsable de
l'application de ce plan est le ministre délégué à
la fonction publique.
M. LACROIX: Question supplémentaire, M. le Président.
L'honorable ministre croit-il que le ministre responsable de la
réalisation du plan du BAEQ et de l'ODEQ est une entrave à la
réalisation de ce parc?
M. MASSE: Il est évident que les questions du
député sont cousues de fil blanc, pour ne pas dire de fil rouge.
Je ne peux que lui répondre qu'au moment où il pose sa question
des gens sont à Ottawa en train de discuter de cette question. Tel que
prévu par l'entente de coopération que le député
devrait avoir lue, ils sont en train de négocier l'application de cette
entente qui n'avait pas été réglée
précédemment.
M. LACROIX: Une question à l'honorable premier ministre. Pourfaciliter la réalisation du plan du BAEQ, pour faciliter le
développement de la Gaspésie, du Bas Saint-Laurent et des
Iles-de-la-Madeleine, n'y aurait-il pas possibilité de nommer un
ministre à l'esprit moins étroit?
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Chambly.
M. LAPORTE: M. le Président, puisqu'on parle de cette entente
intervenue entre la province de Québec et le gouvernement
fédéral, le ministre, qui l'a sans doute lue, est-il au courant
que le premier ministre de l'époque, M.Daniel Johnson, a lui-même
signé cette entente qui prévoit la création en
Gaspésie d'un parc fédéral, et que c'est bien dit dans
l'entente?
M. MASSE: C'est évident que c'est dit dans l'entente qu'il y
aurait des discussions au sujet...
M, LAPORTE: Non, non.
M, MASSE: ... de l'aménagement...
M. LAPORTE: N'est-il pas dit dans l'entente qu'un parc sera
cédé par bail à l'un des deux gouvernements?
M. MASSE: Même si cela était, ce n'est pas écrit 99
ans.
M. LAPORTE: Non, M. le Président, mais je veux demander au
ministre quel est le sens de cette querelle que l'on veut créer
aujourd'hui en faisant, encore une fois, de la fausse autonomie, lorsque le
principe d'un parc est admis dans l'entente signée par M. Johnson.
M. MASSE: Lorsque deux gouvernements, chacun à l'intérieur
de ses responsabilités, négocient l'application d'une entente, je
ne vois pas pourquoi l'Opposition doive crier à la querelle, alors que
ces gouvernements font exactement le travail qu'ils doivent faire et
s'entendent sur l'application de cette entente.
M. LAPORTE: Je voudrais simplement répondre sous forme de
question: Le ministre est-il au courant que l'Opposition pose ce genre de
questions et fait ce genre de débat parce qu'on est en train de
régler sur le dos des Gaspésiens une querelle politique au sein
de l'Union Nationale?
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales.
M. LUSSIER: M. le Président, j'ai l'honneur de...
M. LEVESQUE (Bonaventure): Sur le même sujet?
M. LUSSIER: Même sujet. ... déposer le rapport du transport
en commun dans l'agglomération de Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bonaventure.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Est-ce que le ministre
délégué à la Fonction publique et responsable de
l'exécution du plan pourrait nous dire quelles sont les démarches
qu'il a entreprises récemment ou qu'il a l'intention d'entreprendre
prochainement afin de sortir de cette impasse?
M. MASSE: J'ai dit précédemment, en réponse
à une question que présentement des fonctionnaires de l'ODEQ sont
à Ottawa en train de négocier cette question d'après les
instructions du ministre délégué à l'ODEQ.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. MALTAIS (Saguenay): M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre.
Sous le titre: « Le RIN cède ses archives à la
Bibliothèque nationale du Québec », l'Office d'information
et de publicité du Québec nous dit que ces importants
documents:banderoles, photographies, affiches il ne parle pas de bombes,
par exemple ont été...
M. LE PRESIDENT: Il semble dès maintenant que je peux
déclarer qu'il s'agit d'une excellente question à inscrire au
feuilleton.
M. MALTAIS (Saguenay): C'est d'intérêt public C'est un
communiqué qui est émis par les contribuables: l'Office
d'information et de publicité du Québec.
M. LE PRESIDENT: C'est sans doute d'intérêt public et d'un
grand intérêt pour tous les membres de cette Chambre, mais Je n'en
vols pas l'urgence.
M. MALTAIS (Saguenay): Alors, pourrais-je poser une question
supplémentaire, qui sera également au feuilleton? Pourrais-je
demander les commentaires du premier ministre concernant le fait que, par
contrat, la Bibliothèque nationale s'est engagée à en
distribuer partout et si Geoffroy en aura une copie?
M. BERTRAND: Comme la première question n'a pas été
permise, Je ne peux pas répondre à la question
supplémentaire.
M. MALTAIS (Saguenay): Retenez-vous en arrière, c'est mieux!
Rapport Lacasse
M. LESAGE: M. le Président, est-ce que le rapport que vient de
déposer le ministre des Affaires municipales et qu'on est à
distribuer présentement, est celui dont un résumé
apparaît dans un quotidien publié ce midi et où l'on
déclare et c'est à ma grande surprise que le
document a été déposé ce matin à
l'Assemblée nationale? Est-ce que l'Assemblée nationale a
siégé ce matin, M. le Président? C'est encore une
façon d'informer tout le monde avant les représentants du peuple.
C'est la vieille méthode de l'Union Nationale.
M. LUSSIER: Ne faites pas la question et la réponse.
M. TREMBLAY: Des espions... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LUSSIER: M. le Président, nous avons tenu ce midi une
conférence de presse.
M. LESAGE: C'est cela.
M. LUSSIER: II avait été clairement entendu et
accepté de tous les membres qu'il y avait un embargo qui devait
être respecté jusqu'à cinq heures. Il est extrêmement
regrettable qu'un journal ait fait fi de cette entente et qu'il n'ait pas
respecté l'éthique que les journalistes et les journaux veulent
voir s'établir. Je ne puis que déplorer cet état de
chose.
Contrat de la Churchill Falls
M. LESAGE: M. le Président, est-ce que le contrat entre
l'Hydro-Québec et Churchill Falls Corporation a été
signé?
M. BERTRAND: D'après les derniers renseignements que j'ai eus du
président, il n'y a pas tellement longtemps, le contrat n'a pas encore
été signé.
M. LESAGE : Le premier ministre croit-il qu'il est raisonnable de
laisser les représentants du peuple dans l'ignorance, quant aux
conditions de la lettre d'intention signée par l'Hydro-Québec
à l'endroit de Churchill Falls Corporation, lorsque, en vertu de cette
lettre d'intention, sans doute, puisque le premier ministre vient de le dire,
le contrat n'est pas encore
signé, l'Hydro-Québec a signé des lettres
d'intention s'engageant à vendre au gouvernement de l'Ontario 28
milliards de kilowatts-heures de l'électricité venant de
Churchill Falls, et à l'Hydro du Nouveau-Brunswick, tout
récemment, jeudi ou vendredi dernier, 5 milliards de
kilowatts-heures.
Croit-il raisonnable, premièrement, de tenir les
représentants du peuple dans l'ignorance des conditions de la lettre
d'intention signée à l'égard de Churchill Falls
Corporation, et, deuxièmement, de ces lettres d'intention signées
avec l'Hydro de l'Ontario et l'Hydro du Nouveau-Brunswick? Il faut bien se
rappeler que c'est l'Assemblée nationale qui donne au gouvernement le
pouvoir d'approuver les bilans de l'Hydro-Québec et que c'est
l'Assemblée nationale qui donne au gouvernement le pouvoir de garantir
les emprunts de l'Hydro-Québec. Il s'agit d'une dépense de
quelques centaines de millions de dollars par l'Hydro-Québec pour le
développement des chutes Churchill, et le gouvernement garantit les
emprunts que fait l'Hydro-Québec pour sa part dans le coût du
développement de ce pouvoir hydro-électrique.
Le premier ministre a-t-il l'intention de déposer, avant
l'ajournement de Pâques, lesdites lettres d'intention, pour que nous
puissions savoir si nous sommes justifiés, nous et le gouvernement de
continuer d'engager l'argent des contribuables dans cette aventure.
Est-ce qu'il le fait aux meilleures conditions possibles? C'est
très sérieux. Il s'agit d'un montant très
considérable.
M. BERTRAND: A la première partie de la question du chef de
l'Opposition, des réponses ont déjà été
données. Premièrement, je puis l'assurer que ce n'est pas une
aventure et que, de l'aveu même de tous ceux qui ont examiné le
problème, ce sera une excellente affaire pour le Québec.
Deuxièmement, la commission du ministère des Richesses
naturelles pourra siéger. Dès que le contrat aura
été signé, le président viendra exposer devant la
commission le problème, la solution qu'on a recommandée, tous les
faits et toutes les informations qui seront de nature à éclairer
la Chambre, en particulier les membres du comité et le public. Quant aux
lettres d'intention relatives à la vente de l'électricité,
le chef de l'Opposition sait que, dans ce domaine-là, il faudra une loi.
Cette loi avait d'ailleurs, été proposée, alors que nous
étions dans l'Opposition, par le chef de l'Opposition du temps, qui
devint premier ministre et à qui j'ai succédé. Alors, dans
les deux cas, la Chambre sera pleinement et entièrement
renseignée. On peut en croire celui qui parle et le ministre des
Richesses naturelles, qui est au courant du problème.
M. LESAGE: Il n'en reste pas moins que l'argent des contribuables, par
la garantie donnée par le gouvernement, est engagé pour des
centaines de millions de dollars, sans que les représentants des
contribuables ne soient au courant des conditions. Alors, c'est le point sur
lequel j'ai voulu insister.
Maintenant, je dois poser une question additionnelle au premier
ministre, étant donné la nature de sa réponse. Peut-il
nous dire à quel moment le contrat sera signé? Cela fait un an
que son prédécesseur et lui nous disent que le contrat est
à veille d'être signé.
M. BERTRAND: Je puis donner au chef de l'Opposition la réponse
suivante. J'ai eu l'occasion de rencontrer le président de
l'Hydro-Québec, à mon bureau de l'Hydro, à
Montréal, un lundi matin, il y a déjà au-delà de
trois semaines. A ce moment-là, M. Lessard m'a dit qu'on essayait, en
prenant toutes les précautions, de procéder avec le plus de
diligence possible et que ça pourrait être signé à
la fin de mars ou en avril, mais il n'était pas certain quant à
la date. Je lui ai posé exactement la même question que me pose le
chef de l'Opposition et je crois qu'il a tenu les mêmes propos à
mon collègue, le ministre des Richesses naturelles.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chambly.
M. LAPORTE: Est-ce que je peux demander au ministre des Affaires
municipales que je remercie en passant de sa
célérité à déposer ce rapport si ce
rapport, avant d'être déposé à l'Assemblée
nationale, a reçu l'approbation du conseil des ministres?
M. BERTRAND: Il a été soumis.
M. LUSSIER: Il a été soumis au conseil des ministres et je
le rends public aujourd'hui.
M. LESAGE: Le conseil des ministres l'a regardé passer, sans
commentaire?
M. LAPORTE: M. le Président, partant de cette réponse du
ministre des Affaires municipales, est-ce que je puis, demander au premier
ministre comment il se fait qu'un rapport, daté du 11 mars 1969, nous
est remis le 25 mars 1969, après avoir été soumis au
conseil des
ministres, alors que le rapport Rioux, qui est soumis au conseil et qui
a été déposé il y a déjà plusieurs
semaines.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. LAPORTE: .. n'est pas encore déposé à
l'Assemblée nationale?
M. BERTRAND: On notera que nous n'avons qu'un rapport dans ce
cas-là, alors que, dans l'autre cas, il y aurait...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un rapport minoritaire.
M. BERTRAND: ... trois volumes et un rapport minoritaire. Or, le rapport
minoritaire ne nous est pas encore parvenu.
M; TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas le même
problème.
Le rapport Rioux
M. LAPORTE: Est-ce que je peux demander au ministre de l'Education,
maintenant que le professeur Rioux a donné une importante entrevue au
journal Le Soleil, dans lequel il résume de nouveau le rapport qui avait
été publié presque in extenso dans les journaux, s'il a
l'intention de faire à cette Chambre l'insigne faveur de lui remettre le
rapport?
M. CARDINAL: Je ne suis pas autorisé à remettre ce
rapport. Je pense qu'à plusieurs reprises, j'ai tenté d'expliquer
le plus clairement possible au député de Chambly que
c'était le conseil des ministres qui avait l'autorité de
décider quand ce rapport, qui était devant lui, serait
déposé devant cette Assemblée nationale.
M. LAPORTE: Devant la très grande brièveté des
renseignements que le gouvernement nous donne de façon officielle sur le
rapport Rioux, est-ce que le ministre nous suggérerait de surveiller les
journaux afin de prendre également connaissance du rapport
minoritaire?
Je me permets de souligner avec quel...
M. ALLARD: Vous n'êtes jamais contents. C'est trop tôt ou
trop tard.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAPORTE: Oui, comme le monsieur qui disait: Avant l'heure c'est pas
l'heure et après l'heure ce n'est plus l'heure. Tâchez de
déposer vos rapports à temps.
M. ALLARD: Vous n'êtes jamais satisfait de l'heure.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESAGE: J'aurais une question à poser au premier ministre. Le
député de Chambly a posé au ministre des Affaires
municipales une question qui, pour lui, n'était en fait qu'une
prémisse pour en arriver au rapport Rioux. Mais lorsqu'il a
demandé au ministre des Affaires municipales si le conseil des ministres
avait approuvé les conclusions du rapport, le ministre a répondu:
II a été soumis. J'ai glissé et il l'a laissé
passer, mais étant donné que cela a été soumis au
conseil des ministres, je suis justifié de demander au premier ministre
si le gouvernement a approuvé les conclusions et les recommandations du
rapport Lacasse, s'il a décidé de les mettre en oeuvre et
quand.
M. BERTRAND: Non, mais nous sommes bien résolus à les
étudier et à les examiner de très près.
M. LESAGE: II y a de la gratuité dans ça.
M. BERTRAND: D'ailleurs, le ministre des Affaires municipales a un
comité qui travaille là-dessus et qui doit nous présenter
un mémoire au conseil.
M. LESAGE: On recommande encore la gratuité pour les
piétons sur la Traverse de Lévis?
M. BERTRAND: Ah! Vous avez hâte!
M. LAPORTE: C'est gratuit... s'ils traversent à la nage.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BERTRAND: En hiver, la course en canot.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le temps réservé aux questions
est maintenant expiré.
Bill 1
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Richesses naturelles propose
la deuxième lecture de la Loi modifiant la loi des mines.
L'honorable ministre des Richesses naturelles.
M. ALLARD: Ce bill a été.,.
M. LAPORTE: Voulez-vous m'excuser une seconde? Question de
procédure ou de travaux de la Chambre. Est-ce qu'après
l'étude du bill sur les mines nous revenons à l'étude des
crédits ou si c'est le bill 7? Les subsides tout de suite
après?
M. BERTRAND: Le ministère des Terres et Forêts doit
continuer. Nous avons quatre lois. Articles 3, 4, 8 et 9 de l'ordre du
jour.
M. LAPORTE: Nous passons les quatre lois avant de revenir aux
crédits?
M. BERTRAND: Oui, avant les subsides. M. Paul Allard
M. ALLARD: Ce bill a pour but d'amender deux articles de la Loi des
mines, soit l'article 46 et l'article 76.
Ces amendements ont été demandés par le Conseil
régional du développement et par les différents
groupements du Bas-du-Fleuve qui travaillent, comme on le sait, depuis de
nombreuses années à améliorer la situation
économique qui est actuellement un problème pour cette partie de
la province. Nous avions, par l'article 46, déjà apporté
un amendement pour favoriser le territoire au nord du 52e parallèle.
Etant donné que les conditions de climat y sont plus difficiles que dans
le sud de la province; étant donné que les conditions existant
dans le Bas-du-Fleuve peuvent, jusqu'à un certain point, être
comparables à celles des régions situées au nord du 52e
parallèle, c'est à cet effet que nous avons voulu étendre
le même privilège qui existe dans cette région au
Bas-du-Fleuve. En vertu do l'article 46, une section spéciale concerne
le territoire situé au-delà du 52e parallèle.
En vertu de la loi telle que présentée ordinairement, il y
a douze mois pendant lesquels une concession demeure valide. Or, par cet
amendement, on veut prolonger à 24 mois la période actuelle de
douze mois. Comme on le sait, la période des travaux au nord du 52e
ainsi qu'en Gaspésie étant une période excessivement
réduite à cause du climat, cela empêchait de pouvoir
continuer ou faire progresser normalement les travaux de recherche.
Pour donner une concordance à cet article 46, on a
prolongé aussi, à l'article 76, la quantité d'heures de
travail à être effectuées sur certaines concessions. Etant
donné qu'en vertu de la loi, présentement, sauf au nord du 52e,
il fallait cinq heures de travail par année, nous avons prolongé
à dix heures pour deux ans, ce qui permet à des prospecteurs ou
à des compagnies minières de faire d'abord leurs concessions la
première année, d'y effectuer certains travaux, mais leur donnant
la latitude de faire, dans cette deuxième année, les heures
réglementaires, c'est-à-dire dix heures, au lieu de cinq heures
par année.
Tout ceci dans le but de favoriser le travail de recherche au point de
vue minier en Gaspésie, secteur où, comme on le sait, il y a
actuellement des découvertes intéressantes, des
développements prometteurs. Comme la situation économique de ce
secteur demande des considérations particulières, nous avons cru
bon d'accepter la proposition faite par les différents comités de
citoyens du Bas-du-Fleuve, demandant de profiter des avantages qu'on donnait
à la région située au nord du 52e parallèle.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.
M. Lucien Cliche
M. CLICHE: J'ai étudié le projet de loi que
présente le ministre des Richesses naturelles. Evidemment, les
amendements qu'on apporte à la Loi des mines étant minimes, j'ai
été un peu surpris que l'on s'en tienne uniquement à ces
quelques modifications qui reportent à deux ans les travaux qui sont
normalement faits au cours d'une année. A la fin d'une année, on
doit faire rapport des travaux qui devaient être faits au cours de
l'année précédente. La même procédure revient
à la fin de la deuxième année. On donne deux ans pour
faire la même somme de travaux qui étalent faits pendant la
première année et pendant la deuxième année.
Je déplore, à juste titre, que les amendements
apportés par le ministre à la Loi des mines ne soient de nature
à inciter à une plus grande exploration minière dans la
province, à une découverte plus intensifiée de gisements
miniers. J'aurais aimé que le ministre donne suite à des
suggestions qui lui ont été faites, à des recommandations
et sans doute à des conseils qui lui furent donnés d'inciter, par
une politique fiscale spéciale, une plus grande recherche, comme je le
disais, de gisements miniers. Je pense que la compagnie Soquem fait un effort
tout spécial dans ce sens. Une somme d'un million par année lui
est attribuée pour fins de recherche de gisements. La somme, à
mon point de vue, est bien dépensée. Cela marche assez bien dans
ce sens, mais l'exploration qui serait faite par des individus ou par des
com-
pagnles minières produirait aussi nécessairement, avec le
temps, des découvertes intéressantes de gisements miniers dans le
sol québécois.
Je suis convaincu que le ministre a déjà reçu une
suggestion à l'effet de réduire des droits qui furent
augmentés par notre gouvernement, concernant les permis de mise en
valeur. On sait qu'il faut d'abord un permis de jalonnement, qui coûte
$10.
Une fois le jalonnement fait, les concessions de terrains miniers
jalonnés demeurent durant une période de douze mois la
propriété de celui qui les a jalonnés. A la fin de cette
période, pour conserver ses droits sur les terrains qu'il a
jalonnés, le prospecteur, le détenteur de ces concessions doit
faire rapport au ministère des travaux qu'il doit faire, selon la Loi
des mines.
En plus, on exige des droits de $10 pour le permis de mise en valeur. En
d'autres termes, le renouvellement des droits, la continuation du droit qu'a le
détenteur coûte $10 par permis de mise en valeur, tel qu'on
l'appelle, plus $0.25 l'acre pour le premier renouvellement. Lorsque intervient
le deuxième renouvellement, c'est $0.75 l'acre et encore $10 pour le
permis.
Cette augmentation de droits a été faite en 1965, dans une
bonne intention, sûrement; je ne veux pas blâmer le ministre des
Richesses naturelles de l'époque. A ce moment-là 11 y avait deux
théories: est-ce que l'on permet de détenir des concessions
minières à l'infini pendant une période
indéterminée ou allant jusqu'à dix ans, avec des droits
réduits, ou doit-on augmenter les droits et inciter les gens à
faire des travaux, des découvertes, ou abandonner les concessions afin
que d'autres y fassent des recherches à leur tour?
Je crois que l'expérience a démontré que
comparativement à d'autres provinces, les droits exigés par le
Québec dans ce domaine sont exorbitants, trop élevés, A ce
moment-là" les droits imposés par les autres provinces pour
jalonner des territoires miniers étaient inférieurs aux
nôtres. Mais, depuis, il y a eu une augmentation, et encore actuellement
il en coûte plus cher que dans toute autre province du Canada pour
jalonner, pour maintenir des terrains miniers en vigueur. Je parle des droits,
non des travaux, qui sont demandés par la province.
Il est heureux que la province retire des revenus intéressants de
ses richesses naturelles. Nous sommes tous en faveur de cela sauf lorsque cela
arrive à un point où les droits étant trop
élevés, la recherche diminue et qu'on va chercher ailleurs dans
d'autres provinces. L'on doit, je pense, si l'on veut arriver à la
même somme de revenus de nos richesses na- turelles, trouver une autre
formule de taxation sur les profits. Cela fait moins mal de taxer des profits
de celui qui en fait que de taxer celui qui fait uniquement de la recherche,
car à ce moment-là il ne sait pas s'il fera ou non des profits.
Il fait un investissement et on le taxe. J'en suis, mais dans une certaine
proportion.
J'aurais voulu que les amendements comportent une amélioration
à la loi et que l'on accorde une certaine réduction. Je pense que
le prospecteur a besoin de cette réduction. Ceux qui s'occupent de la
question minière ou qui demeurent dans des villes minières savent
par expérience que la grande majorité des recherches sont celles
que les prospecteurs font par leur travail, leurs courses, leurs recherches, et
les gisements sont généralement découverts par eux. Je
pense à la région de Chibougamau, aux autres régions de
Val d'Or, Cadillac, Malartic, Rouyn ainsi qu'aux régions ontariennes et
aux territoires miniers des Cantons de l'Est.
Alors il faut une période d'au moins trois ans, sinon quatre,
à un prospecteur, pour lui permettre de bien connaître son
terrain, d'avoir le temps de le parcourir, car les saisons n'étant pas
toujours favorables, cela lui prend un certain temps.
Alors c'est plus dispendieux au Québec qu'ailleurs au Canada. Si
je fais cette suggestion, c'est uniquement dans le but d'aider la prospection,
d'aider le prospecteur et non pas d'aider les grandes compagnies qui,
évidemment, en profiteraient, c'est certain, car la loi ne peut pas
s'appliquer uniquement à certaines personnes, elle doit s'appliquer
à tout le monde dans ce domaine.
Alors, je demande au ministre de bien vouloir étudier cette
situation. Cela voudrait dire une réduction pas tellement sensible. Et
si l'on veut récupérer un montant, ne perdre aucun revenu, on
peut, par une autre méthode de taxation de profits, pour ceux qui en
font évidemment, récupérer des sommes qui seraient ainsi
perdues.
Je pense qu'ici, au Québec, on nous donne certains chiffres qui
équivaudraient à ceux que je donne présentement. On dit
que pour détenir, pendant sept années, un terrain minier de
même superficie, en Ontario il en coûterait $1,320 alors qu'au
Québec il en coûte $4,850 pour la même période. C'est
peut-être un nombre d'années un peu trop élevé. Mais
disons que c'est un exemple.
M. ALLARD: M. le Président, je comprends très bien
l'exposé du député d'Abitibi-Est. Je me demande cependant
s'il entre strictement dans les questions de principe du bill en discus-
sion. SI le député le veut Je comprends son point
de vue et je suis d'opinion que nous pouvons nous rencontrer sur bien des
sujets je me demande s'il n'y aurait pas lieu de faire ces discussions
lors de l'étude des crédits, au moment où l'on discuterait
spécifiquement des amendements à être apportés
à la Loi des mines.
M. CLICHE: J'ignore quelle serait la décision du président
actuel sur une question légale semblable, mais disons que je pense que
les députés ont le droit de discuter non pas seulement de ce que
la loi contient, mais également de ce que la loi devrait contenir. Quels
sont les amendements que le ministre devrait apporter? Ce sont les
considérations que je voulais faire concernant les droits.
Maintenant, les amendements que le ministre apporte présentement
ne feront, comme je le disais, que permettre que l'on fasse sur une
période de deux ans les travaux qui devraient être faits à
chaque année.
Je lui demande pourquoi 11 n'a pas eu l'idée d'inclure d'autres
territoires. Je ne m'objecte en aucune façon à ce que les
districts électoraux de Bonaventure, Gaspé-Nord,
Gaspé-Sud, Iles-de-la-Madeleine et toute cette région-là,
incluant le Témiscouata et Rivière-du-Loup,
bénéficient des avantages qu'il accorde. Mais, je ne vois pas
pourquoi d'autres territoires qui font partie de zones
défavorisées ne profitent pas eux aussi des avantages qui sont
accordés présentement par la loi.
Je comprends que, dans la région de la Gaspésie, les
difficultés d'exploration sont peut-être plus grandes qu'ailleurs
dans la province. Les chiffres qui m'ont été fournis
récemment démontrent que, pour la moyenne des travaux de forage
effectués par les compagnies minières, le coût d'un pied de
forage dans ma région, en Abitibi, est inférieure à $5. En
Gaspésie, la moyenne est de $13 à $15, pour différentes
raisons : formation du roc, difficulté d'avoir de l'eau
éloignement, manque de routes carrossables. Il convient donc très
bien que l'on accorde à cette région l'avantage de faire en deux
ans les travaux qui devraient être faits à chaque année.
Mais j'aimerais bien que l'on inclue dans ces amendements d'autres
régions, encore une fois, dites défavorisées. Il y en a
d'autres. Je pense que la région d'Abitibi que je représente, au
point de vue de la taxation, des privileges fiscaux, etc., qui tombe dans la
même catégorie que toutes les régions
désignées au paragraphe 2 du bill numéro 1.
Je voudrais bien que le ministre s'en occupe et je me permettrai
peut-être de proposer un amendement. C'étaient donc les remarques
que je voulais faire à ce stade-ci.
M. ALLARD: M. le Président, je prends bonne note des remarques du
député d'Abitibi-Est. Tout d'abord, sur la possibilité
d'étendre à d'autres territoires le privilège que l'on
accorde au Bas-du-Fleuve, privilège qui existait d'abord uniquement en
faveur de cette partie du territoire au nord du 52e, disons que le principe
peut valablement être étudié afin de considérer la
possibilité de l'étendre ailleurs. Mais étant donné
que le territoire du Bas-du-Fleuve sert actuellement de territoire pilote, si
les résultats s'avéraient avantageux, je ne verrais pas pourquoi,
d'ici très peu de temps, on ne pourrait pas l'étendre au reste de
la province ou à d'autres régions aussi
défavorisées que celle du Bas-du-Fleuve.
Quant aux recommandations faites par le député au sujet de
l'Incitation au développement minier, j'en suis à me demander
s'il ne serait pas au courant de certaines propositions que nous sommes
à étudier présentement dans le but de fournir des
incitations à la recherche minière, donc au développement
minier.
Pour répondre aux propositions faites par le député
d'Abitibi-Est, je dois dire que nous avons toute une série
d'études et que nous sommes à compiler ces recommandations.
Même si elles représentent une diminution pour la province en
revenus directs, je crois qu'il y aurait avantage, à un moment
donné, à faire un sacrifice de certains droits pour inciter un
développement plus fort qui, dans l'ensemble, rapporterait beaucoup plus
à la province que la perte de quelques droits dont le
député faisait mention tout à l'heure.
Ces recommandations sont présentement étudiées par
le ministère. Nous espérons, dans un avenir assez
rapproché, être en mesure d'accorder certaines réductions
du genre de celles qui sont proposées et, peut-être, d'en ajouter
d'autres qui seraient de nature à inciter le développement minier
dans la province.
M. CLICHE: Par une législation que le ministre
présenterait à cette session-ci?
M. ALLARD: n y aurait peut-être lieu, d'abord, de s'entendre sur
les avantages à offrir avant d'arriver avec une loi. Des documents sont
prêts, il reste à obtenir l'accord du Conseil de la
trésorerie et du ministère des Finances afin de savoir s'il est
possible, dès cette année, d'accorder des réductions du
genre de celles qui sont proposées par le député.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Richesses naturelles propose
que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier pour l'étude du bill no 1.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. FRECHETTE (président du comité plénier): A
l'ordre! Alors, article 1, adopté?
M. CLICHE: Un instant, s'il vous plaît. A l'article 1, n'y
aurait-il pas lieu d'ajouter des territoires de la côte nord du
Saint-Laurent? Là, je vois que c'est uniquement la péninsule
gaspésienne, incluant les Iles-de-la-Madeleine, qui
bénéficiera de la présente loi. Pourquoi la Côte
Nord n'en bénéficierait-elle pas, particulièrement, le
comté de Duplessis, le comté de Charlevoix et le comté de
Saguenay?
M. ALLARD: Je comprends très bien la recommandation faite par le
député. Comme je viens de l'expliquer, étant donné
qu'il s'agit d'un territoire pilote, je crois qu'il y aurait lieu, pour cette
année, d'expérimenter ce que pourrait donner un tel avantage.
S'il y avait lieu, un peu plus tard, je n'aurais personnellement aucune
objection à étendre à d'autres territoires la
recommandation faite à l'article 1 pour le territoire du
Bas-du-Fleuve.
M. CLICHE: Le ministre devrait suivre étroitement la marche des
choses et voir si la loi donne les avantages qu'elle devrait donner. Les
amendements que l'on apporte peuvent avoir des conséquences
désavantageuses pour l'exploration minière. Cela peut aider et
celapeut nuire, selon l'attitude que le ministère prendra.
M. ALLARD: C'est justement là, peut-être, qu'il y aurait
lieu de laisser fonctionner, pendant un certain temps, la loi telle
qu'amendée afin de décider après si réellement
c'est un avantage et si, dans ce cas-là, on doit l'étendre
à d'autres territoires.
M. CLICHE: Je veux mentionner le désavantage qui serait le
suivant; Si l'on donne deux ans au détenteur d'une concession
minière pour faires les travaux qu'il devrait effectuer à chaque
année, on accorde deux ans de validité à ses droite
miniers. Pendant ces deux années, il a la liberté de faire ou de
ne pas faire les travaux. Actuellement il a un an. Il peut jouer pendant 12
mois. Pendant ce temps-là, 11 peut faire ou ne pas faire les travaux.
S'il ne les fait pas, évidemment il perd ses droits. Mais pendant une
année, il a eu des droits sur ce territoire minier. Maintenant on
prolonge cette période à deux ans.
M. ALLARD: Si le député me permet... justement là,
la raison en est les conditions de climat qui existent en Gaspésie. A
toutes fins pratiques, il arrive que les compagnies ou les prospecteurs ne
peuvent pénétrer qu'à la fin de juin sur leur territoire
à cause des conditions de circulation en forêt. Il leur reste les
mois de juin, juillet, août et parfois septembre. On estime à
trois mois seulement la période possible de travaux étant
donné le climat spécial, comme celui qui existe au nord du 52e.
C'est pourquoi nous avons prolongé cette période à deux
ans, ce qui faciliterait la poursuite des travaux.
Avec la période unique d'un an, il arrive que des compagnies, au
bout d'un an, n'ayant pas eu le temps d'en faire suffisamment et n'ayant pas
obtenu de résultats assez encourageants, discontinuent étant
donné qu'elles sont limitées à douze mois pour faire leurs
travaux. C'est en vertu de ces conditions spéciales que nous proposons
deux ans. C'est pour permettre justement de continuer un travail qui aboutirait
peut-être alors qu'autrement il peut être laissé en
chemin.
M. COITEUX: M. le Président, les remarques que le ministre des
Richesses naturelles vient de faire apportent un argument de plus à la
demande formulée tantôt par le député d'Abitibi-Est
à l'effet que ces droits devraient être étendus à la
Côte Nord. Lorsqu'on parle de conditions climatiques, ce qui semble
être le facteur principal déterminant cet amendement à la
Loi actuelle des mines, lorsqu'on traverse sur la Cote Nord, où l'on a
en plus un territoire complètement Inorganisé au point de vue du
transport comparativement à la Gaspésie, je crois que,
premièrement, on ne peut pas prétendre qu'il y a un meilleur
climat sur la Côte Nord qu'en Gaspésie au point de vue de ce genre
de travail. Deuxièmment, le transport est beaucoup plus difficile et
onéreux pour le prospecteur qui veut oeuvrer dans ces
territoires-là. Ils se trouvent tout de même de 400 à 500
milles de Sept-Iles. Si vous entrez à l'intérieur, vous
avez tout de suite dans les 700 à 800 milles de transport pour
les gens qui vont oeuvrer en bas du 52e. L'argument du ministre porte à
faux s'il ne considère que le climat.
M. ALLARD: Je comprends parfaitement la demande du député.
Comme le disait tout à l'heure le député d'Abitibi-Est, il
est possible que cet amendement soit bon, mais il est aussi possible qu'il ne
le soit pas. Je crois qu'il y aurait avantage à faire
l'expérience dans un territoire pilote, un territoire donné. Si,
à ce moment-là, on réalise qu'il y a réellement
avantage à procéder de cette manière, personnellement je
n'ai aucune objection à l'étendre à d'autres territoires.
Comme le député, je connais les conditions climatiques de son
coin de pays. Elles sont certainement aussi difficiles, sinon plus, que celles
du Bas-du-Fleuve. Je pourrais peut-être conseiller au
député de mettre sur pied un conseil économique dans son
coin, conseil qui ferait les recommandations qui ont été faites
par ceux du Bas-du-Fleuve.
M. CLICHE: M. le Président, j'ajouterai que si le ministre
voulait réellement compléter sa loi et aider de façon
très efficace l'exploration minière dans ce coin de la
Gaspésie où il y a déjà un plan
d'aménagement je suis très sérieux dans mes
remarques il faudrait qu'il aide de façon directe l'exploration
minière. J'ai déjà demandé à feu Pierre
Beauchemin, un des pionniers de l'industrie minière au Québec,
quelle politique le gouvernement devait adopter pour inciter les compagnies
minières à faire plus d'exploration et à découvrir
plus de gisements. A ce moment-là cela fait déjà
une dizaine d'années sa réponse avait été
d'aider en subventionnant l'exploration ou en accordant des privilèges
fiscaux à l'exploration minière.
Si le ministre veut absolument concourir au plan d'aménagement et
au développement économique du Bas Saint-Laurent, 11 devrait
aider au forage, car c'est la façon la plus directe de trouver des
gisements miniers. On peut penser qu'il y en a, mais il faut toujours faire le
forage pour la vérification finale, pour obtenir la teneur, le volume,
etc.
Etant donné qu'il est originaire, lui, de la Gaspésie et
qu'il protège ce coin de pays, pourquoi, avec une loi qui aiderait
réellement ne subven-tionne-t-il pas le forage à diamant qui
coûte plus cher en Gaspésie qu'ailleurs dans la province? Comme je
l'ai dit tout à l'heure, c'est environ $13 à $15 le pied en
Gaspésie, comparativement à $4 ou $5 en Abitibi. On devrait
subventionner le forage à diamant, car, directement, cela favoriserait
l'exploration minière en Gaspésie.
M. ALLARD: Si le député d'Abitibi-Est prête des
intentions de protéger un coin de pays qui m'est cher, je crois qu'il
pourrait, de la même façon, m'aider souventefois à faire
valoir des droits spéciaux en faveur de la Beauce, son pays
d'origine.
En ce qui concerne la Gaspésie, vous n'êtes pas sans savoir
que, par l'entremise de Soquem, nous avons déjà consacré
un pourcentage d'argent le chiffre m'échappe à des
travaux de recherche. Le député a été heureux
d'apprendre, l'an dernier, que le plus gros pourcentage des sommes mises
à la disposition de Soquem était dépensé dans la
région du Nord-Ouest, qui est la sienne, mais que la Gaspésie, je
crois, venait en second lieu avec un pourcentage aussi Intéressant pour
des recherches, du forage et pour essayer de stimuler les découvertes
minières.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 1 adopté. Article 2.
M. ALLARD: A l'article 2, comme je l'ai dit tout à l'heure au
député, étant donné qu'on accorde une
période de deux ans, on permet, dans la deuxième année de
faire les dix heures d'ouvrage, si, la premiere année, à cause de
la période très courte qui permet des travaux sur le terrain, on
peut ne pas être suffisamment avancé pour faire de l'exploration
véritablement. En effet, souvent, ça peut prendre un mois, deux
mois, trois mois à se rendre aux endroits où on veut faire le
travail. Cet article permet, dans la deuxième année, de faire
compter le travail minier dont on n'a pas pu se prévaloir durant la
première saison.
M. LE PRESIDENT: Adopté? Article 3 adopté.
M. FRECHETTE (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté le bill 1 sans amendement.
M. LEBEL (président): Ce rapport sera-t-il adopté?
Adopté.
Troisième lecture à la prochaine séance ou à
une séance subséquente.
De consentement unanime, est-ce que la motion de troisième
lecture sera adoptée?
Adopté.
M. BERTRAND: Pour accommoder pendant quelques minutes le
député de Chambly, nous pourrions peut-être appeler
immédiatement
l'article 6, bill 8, Loi modifiant le code civil.
Il n'y a rien de...
M. LESAGE: Bien, voici, justement...
M. BERTRAND: Si on aime mieux le remettre à jeudi, je n'ai aucune
objection.
M. LESAGE: M. le Président, j'avais les meilleures intentions du
monde, mais, pour me servir d'une expression qui est chère au
député de Maskinongé, j'ai consulté mes avocats
pratiquants...
M. BERTRAND: Oui, combien en avez-vous?
M. LESAGE: ... et ils n'ont pu prendre connaissance du projet de loi
qu'aujourd'hui. Par suite d'une erreur, la semaine dernière, le bill n'a
été distribué que vendredi, après
dîner...
M. BERTRAND: Vous avez raison. J'avais demandé qu'il soit
distribué, mais il ne l'avait pas été.
M. LESAGE: Nos collègues étaient partis pour
Montréal; ils sont revenus à midi et ils viennent de prendre
connaissance du bill. Le député d'Outremont me demandait quelques
heures de grâce.
M. BERTRAND: Nous pourrons peut-être le prendre jeudi. Alors,
d'ici là, vous aurez le temps de l'examiner.
M. LESAGE: Très bien.
M. BERTRAND: Le ministre de l'Education sera ici dans quelques minutes.
Alors, nous pourrons appeler l'article 8.
M. LESAGE: Disons que je suis prêt à faire mon
possible.
M. BERTRAND: Nous appellerons d'abord l'article 8, ensuite, l'article
9.
M. LESAGE: L'article 8, c'est le bill 6?
M. BERTRAND: Les bills 5 et 6. Il y en a deux. Alors, article 8.
Bill 5
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education propose la
deuxième lecture de la Loi modifiant la loi du Conseil supérieur
de l'éducation.
L'honorable ministre de l'Education.
M. Jean-Guy Cardinal
M. CARDINAL: L'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris
connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.
Ce bill, comme je l'ai indiqué, lors du débat en première
lecture, est purement une modification de la loi actuelle du Conseil
supérieur.
Il a été présenté à la demande
même du Conseil supérieur. Il a surtout pour but de
préciser le sens et la portée de certains articles de la loi du
conseil, d'une part, et également, d'autre part, d'ajouter aux quatre
commissions du conseil une cinquième, celle de l'éducation des
adultes.
Ces modifications j'y reviendrai...
M. LESAGE: C'est un petit peu plus que ça.
M. CARDINAL: Oui. Je compléterai. Ces modifications
répondent, d'ailleurs, dans l'ensemble/ aux désirs
exprimés par le conseil lui-même et par ses commissions. Je ne
reprendrai pas chacun des articles des notes explicatives...
M. LESAGE: Nous ferons ça en comité.
M. CARDINAL: ... qui sont, je crois, suffisantes. Je préciserai
cependant qu'en plus d'ajouter cette commission de l'éducation des
adultes, l'on remplace les commissions existantes par une commission de
l'enseignement collégial. Cette commission de l'enseignement
collégial vient du fait, comme on le sait, que les collèges
d'enseignement général et professionnel ont peu à peu pris
sous leur responsabilité, l'enseignement en matière technique et
professionnelle. Les derniers articles corrigent tout simplement les
inexactitudes de la version anglaise de la loi. Je pense que l'on connaît
déjà l'excellent travail du Conseil supérieur de
l'éducation, que ces modifications ne changent en rien la conception de
ce conseil et ne font que mettre plus à jour la législation qui
le gouverne.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jean Lesage
M. LESAGE: Je suis d'accord avec le ministre. Ce projet de loi a pour
but de préciser et de clarifier certaines dispositions de la loi du
Conseil supérieur de l'éducation, mais il a également pour
but, ce que j'appellerai, peut-être en mauvais français, un
réaménagement des commissions du conseil.
Lorsque le conseil a été créé par 12, 13
Eli-
zabeth II, chapitre 15, Je crois Je parle de mémoire,
c'est sujet à correction c'était sur la foi des
recommandations de la commission Parent, à son tome I, page 116,
paragraphe 199. Ce paragraphe se lit comme suit: « Le Conseil
supérieur de l'éducation devra donner son avis sur un grand
nombre de problèmes, conseiller le gouvernement et même les
associations privées. A cause de l'ampleur de cette tâche et de la
diversité des sujets, nous ne croyons pas que le conseil doive se
composer de spécialistes. Il devra être en quelque sorte
polyvalent et capable de Juger des questions dans une perspective d'ensemble.
Mais il faudra nécessairement que le conseil soit assisté de
commissions qui réuniront précisément les
spécialistes d'un domaine ou d'un secteur particulier. Nous recommandons
que le conseil ne multiplie pas ses commissions et que celles-ci soient
limitées à trois: La commission de l'enseignement
élémentaire et secondaire, la commission de l'enseignement
technique et la commission de l'enseignement supérieur. C'est Il chacune
de ces commissions que le conseil référera, selon le cas, les
questions touchant l'un ou l'autre secteur de l'enseignement. »
Le conseil supérieur de l'éducation a été
formé par législation en 1964, par 12 - 13 Elizabeth 11, chapitre
15, comme je le disais tantôt. Lorsque la commission a écrit son
tome 2, l'on pouvait lire à la page 184, le paragraphe 300, dont je cite
un extrait: « Nous avons insisté sur le caractère
polyvalent de l'enseignement secondaire et des instituts ce qu'on
appelait, évidemment, dans le rapport Parent, des instituts, c'est
devenu des CEGEP au niveau collégial Je continue la citation:
« Dans ce contexte, nous croyons qu'une commission de l'enseignement
technique et professionnel ne se légitime plus. Les spécialistes
de l'enseignement technique et professionnel devraient plutôt collaborer
avec les représentants de l'enseignement secondaire et de l'enseignement
préuniversitaire pour favoriser la polyvalence souhaitée.
»
Dans le tome 3, à la page 187, paragraphe 918, ce
paragraphe se lit en partie comme suit Je cite, à partir du
début de paragraphe: « Les enseignements techniques, agricoles,
commerciaux et ménagers de niveau secondaire, ainsi presque
entièrement intégrés à l'école
régionale polyvalente supposent que la direction des programmes du
ministère de l'Education comporte un ou plusieurs spécialistes de
ces enseignements. Il en va de même pour la commission de l'enseignement
secondaire du conseil supérieur de l'éducation
créée par la loi établissant un ministère de
l'Education. « Quant à la commission de l'enseignement technique
et professionnel créée par la même loi, nous avons
recommandé dans le chapitre consacré aux instituts qu'elle
devienne la commission de l'enseignement préuniversitaire et
professionnel. »
La recommandation, par conséquant, de la commission Parent,
c'était que soit formée une commission de l'enseignement
préuniversitaire, qu'on appelle l'enseignement collégial, une
commission de l'enseignement collégial et professionnel. Je ne voudrais
pas que mon collègue, le ministre de l'Education, s'imagine que je lui
cherche une querelle de mots, pas du tout. Je veux soumettre une chose qui
m'est venue à l'idée, à la lecture de ces extraits du
rapport Parent, à la lecture de son projet de loi, lorsque j'ai
songé, par exemple, que, pour ce qui est du niveau collégial, on
traduit généralement les institutions par le mot CEGEP. Je
comprends qu'il y a des institutions privées, mais enfin CEGEP,
ça veut dire collèges d'enseignement général et
professionnel. On laisse à ces collèges d'enseignement de niveau
collégial le titre, la qualification: professionnel,
général ou professionnel. Je comprends que c'est le niveau
collégial, mais, d'un autre côté, le ministre de
l'Education a souligné lui-même, à un moment donné,
même à plusieurs reprises une fois il l'a fait devant moi
au comité de l'éducation, à la commission parlementaire de
l'éducation que nous n'avions peut-être pas eu un nombre
satisfaisant, tout au moins un nombre d'étudiants qui répondaient
à l'attente dans le secteur professionnel postsecondaire. Le ministre se
souviendra de cette discussion que nous avons eue en commission, lorsque nous
avons parlé de la possibilité, par exemple, d'orienter les
étudiants plus vers le secteur professionnel, pour que la proportion de
ceux qui se dirigent vers le secteur professionnel soit relativement plus
importante qu'elle ne l'est présentement.
Les Journaux, les commentateurs ont repris ces arguments. J'ai devant
moi, tout simplement pour me rafraîchir la mémoire, un article de
M. Gilles Boyer, paru dans le Soleil du 22 octobre 1968, c'est un
éditorial où il disait ceci. Je me permets de citer, ce sera
très bref, M. le Président, si vous voulez me permettre, par
exception. « Théoriquement, les CEGEP devaient répondre
à ces besoins les besoins de l'enseignement professionnel
a côté d'un enseignement conduisant à l'université
où l'on formerait un certain nombre d'étudiants à la
pratique des sciences, de nos traditionnelles professions libérales et
d'autres disciplines plus nouvelles, telles les sciences sociales, les CEGEP
devaient préparer directement des étudiants à la pratique
de carrières techniques et professionnelles.
« Or, les CEGEP ont pris une tangente imprévue. Ne
signale-t-on pas que 75% des élèves se dirigent vers
l'université et seulement 25% vers l'enseignement technique et
professionnel? Au départ, on envisageait une orientation dans des
proportions à peu près inverses. »
Alors, je me demande, afin que les commissions du conseil, non seulement
au fond mais dans la forme, dans la description, couvrent tout le champ, s'il
n'y aurait pas lieu d'appeler cette nouvelle Commission de l'enseignement
collégial, Commission de l'enseignement collégial et
professionnel, afin que nous ne l'oubliions pas en Chambre et afin que les
membres de cette Commission de l'enseignement collégial soient en partie
des gens versés dans l'enseignement professionnel.
Avec la disparition de la Commission de l'enseignement technique et
professionnel, il faudra quand même s'assurer qu'à la Commission
des études secondaires parce qu'il y a une Commission des
études secondaires il y ait des membres qui soient des
spécialistes de l'enseignement technique et professionnel.
Je crois qu'à cette nouvelle commission de niveau
collégial, il faudra également des experts dans le domaine de
l'enseignement technique et professionnel puisque, je le répète
encore une fois, le projet de loi aura pour effet, une fois adopté, de
faire disparaître cette Commission de l'enseignement technique et
professionnel.
Je le fais, non pas sous forme de critique mais pour mieux
décrire, peut-être, si l'on veut, l'importance que j'attache au
coup de barre qu'il y a à donner afin que nos jeunes puissent mieux se
préparer, en plus grand nombre, aux fonctions techniques et
professionnelles qui les attendent sur le marché du travail.
Mon Intention, cet après-midi, est de dire de nouveau mon immense
inquiétude. Qu'on songe qu'en 1968, dans le Québec, seulement
3,000 nouveaux emplois ont été créés. En effet, il
y a eu une augmentation de 162,000 à travers le Canada, dont 3,000
seulement dans le Québec. C'est vrai qu'il n'y a eu que 32,000 nouveaux
arrivés sur le marché du travail, en 1968, dans le Québec.
Il y a eu une augmentation de 29,000 chômeurs par rapport à 1967,
ce qui veut dire qu'il n'y a eu que 3,000 emplois de créés.
Quand on sait que d'ici 1974, il y aura c'est un chiffre net que
je donne 500,000 nouveaux arrivés sur le marché du
travail, je pense qu'il y a de quoi s'inquiéter. Il y a de quoi faire un
effort non seulement au ministère de l'Industrie et du Commerce et non
seulement dans le domaine économique, mais aussi au ministère de
l'Education pour orienter les jeunes, les préparer de la façon la
plus parfaite possible aux car- rières qui sont susceptibles de s'offrir
à eux. J'espère que nous n'aurons pas à nous baser sur
l'année 1968, parce que ce serait terriblement inquiétant. Si
nous prenons 1968 comme exemple, ces carrières ne seront pas tellement
nombreuses.
Alors, c'est cette inquiétude, ce souci que je veux traduire par
les quelques remarques que je viens de faire. J'ai dit que d'ici 1974, il y
aurait environ 500,000 nouveaux arrivés sur le marché du travail.
Il y en a eu 32,000 seulement l'année dernière, c'est vrai.
Mais, s'il n'y en a eu que 32,000, ça été à
cause de la prolongation de la scolarité, qui s'est fait sentir
pleinement en 1968. Ceux dont la scolarité a été
prolongée vont déboucher tous ensemble, à un moment
donné, sur le marché du travail. Il n'est pas surprenant que
cette inquiétude se reflète sur la jeunesse, et elle se
reflète. Je sais que le ministre de l'Education a souvent des contacts
avec les jeunes. J'en ai moi-même fréquemment, et cette
inquiétude se traduit extérieurement par toutes sortes de
manifestations. Je ne parle pas spécifiquement de la violence,
comprenons-nous bien; Je parle de la contestation plus souvent non violente
dont nous sommes témoins.
Alors, il faudrait absolument mettre l'accent sur l'enseignement
technique et professionnel. Il ne faudrait pas que le geste que nous allons
poser cet après-midi, en faisant disparaître la commission de
l'enseignement technique et professionnel du Conseil supérieur de
l'éducation, soit interprété comme une espèce
d'abandon de la part des membres de l'Assemblée nationale.
Alors, pourquoi ne pas ajouter, au nom de cette commission de
l'enseignement collégial, comme on l'a fait pour les CEGEP, la
commission de l'enseignement collégial et professionnel? Je le soumets
simplement comme étant une idée qui a peut-être sa valeur.
Peut-être y a-t-il des objections? Enfin, j'ai pensé que
c'était une contribution que Je pouvais apporter.
M. CARDINAL: M. le Président, Je désirerais tout d'abord
remercier le chef de l'Opposition de sa suggestion et le féliciter de
son souci vis-a-vis de la classe étudiante et de son entrée sur
le marché du travail. Il est évident que l'article 3 de ce projet
de loi apporte la modification la plus importante à la loi, puisqu'il
permet de modifier les structures des commissions qui étaient
déjà prévues dans la loi.
L'article 24 actuel de cette loi qui est maintenant connue comme
étant le chapitre 234 des Statuts refondus 1964, indique; « Une
commis-
sion de l'enseignement élémentaire, une commission de
l'enseignement secondaire, une commission de l'enseignement technique et
professionnel et une commission de l'enseignement supérieur du Conseil
sont instituées ». Cet article 24, d'ailleurs, concrétisait
la dernière recommandation du rapport Parent.
Le nouvel article 24 prévoit une commission de l'enseignement
élémentaire il en existe une déjà une
commission de l'enseignement secondaire ce qui est le statu quo
une commission de l'enseignement collégial qui vient, en quelque
sorte, remplacer en partie du moins, et pour un de ses aspects, cette
commission de l'enseignement technique et professionnel et une
commission de l'éducation des adultes.
Je me permettrai de dépasser l'intervention du chef de
l'Opposition et de faire des commentaires sur les deux modifications
apportées à cet article.
La première remarque, c'est que je n'ai pas d'objection,
personnellement, à accepter la suggestion du chef de l'Opposition et a
modifier, en ce sens, le texte du projet de loi qui est devant
l'Assemblée nationale. Cependant, J'expliquerai pourquoi le texte a
été ainsi rédigé, tant pour la commission de
l'enseignement au niveau collégial que pour la commission de
l'éducation des adultes. C'est que le conseil supérieur, en
modifiant sa loi, a voulu, en quelque sorte, calquer ses diverses commissions
sur les divisions déjà existantes au ministère de
l'Education et qui s'appellent l'élémentaire, le secondaire, le
collégial, l'enseignement supérieur et l'éducation des
adultes. C'est purement une raison de concordance entre les divisions du
ministère de l'Education et les commissions qui existeraient,
après l'adoption de ce projet de loi, au Conseil supérieur de
l'éducation.
M. LESAGE: Pourrais-je poser une question? Je pense bien que, si le
député de Vaudreuil-Soulanges était ici, il aurait pu me
donner le renseignement. Je ne suis pas au courant de tous les
mécanismes du ministère de l'Education, mais existe-t-il, au
ministère, une division de l'enseignement technique et
professionnel?
M. CARDINAL: Non, comme telle, non. M. LESAGE: Pas comme telle.
M. CARDINAL: Comme tel, l'enseignement technique et professionnel
maintenant, M. le Président, est contenu soit au niveau de
l'enseignement secondaire lorsque des écoles de métiers ont
été intégrées aux écoles secondaires
polyvalentes ou au niveau collégial. J'ajoute une explication
additionnelle c'était ce vers quoi je me dirigeais c'est
que le niveau de l'enseignement collégial il y a une direction de
l'enseignement collégial au ministère comprend à la
fois et le réseau des collèges d'enseignement
général et professionnel et les institutions privées qui
ne sont pas nécessairement des institutions où il existe un
enseignement technique et professionnel.
Il y a donc deux raisons pour lesquelles le texte a été
ainsi rédigé: la concordance avec les directions
générales du ministère et, d'autre part, le fait que la
commission de l'enseignement collégial au Conseil supérieur de
l'éducation non seulement s'occuperait des CEGEP, des collèges
d'enseignement général et professionnel, mais aussi de
l'enseignement donné dans les institutions privées à ce
niveau et qui survivront grâce en particulier I l'adoption du bill
56.
Le chef de l'Opposition est allé plus loin quand il a
parlé de la préparation des étudiants qui quittent les
collèges d'enseignement général et professionnel pour le
marché du travail. Il a manifesté une inquiétude que
j'avais moi-même manifesté. Il a rappelé une chose qui est
parfaitement exacte au comité permanent de l'éducation, devenu
maintenant la commission de l'éducation de l'Assemblée nationale.
J'avais alors rappelé aux membres de cette commission les efforts que
fait le ministère, en collaboration avec le ministère du Travail,
pour, d'une part, inciter les étudiants à se mieux
préparer à ces tâches dans le domaine technique et
professionnel et, d'autre part, étudier ce marché de façon
à avoir dans nos collèges d'enseignement général et
professionnel des options qui préparent ces jeunes d'aujourd'hui
à ce marché de demain et d'après demain.
Les mots, évidemment, ne changent pas la réalité
des choses,, Les mots, cependant, sensibilisent et les mots ont une certaine
symbolique. Je serais d'accord avec le chef de l'Opposition mais si le fait de
modifier le texte actuel de l'article 24 était interprété
dans le public comme étant une certaine démission du
ministère de l'Education vis-à-vis de nos préoccupations
dans le domaine technique et professionnel, ceci serait malheureux. D'autre
part, je rappelle quand même, une fois de plus, qu'il faudrait bien se
comprendre dans l'emploi des mots et que si, dans le projet de loi, l'on
prévoit qu'il s'agit d'une commission de l'enseignement technique et
professionnel ou tout autre terme qu'on trouvera qui ressemble
à
CEGEP, collège d'enseignement général et
professionnel; on pourrait dire commission de l'enseignement
général et professionnel il faudrait comprendre que cela
déborde les CEGEP et s'applique aussi aux insitutitions de niveau
collégial qui ne sont pas des CEGEP au sens du projet de loi qui portait
le numéro 21, adopté il y a deux ans.
C'est la seule réserve qui me porte à une certaine
prudence avant de modifier le texte. Ce n'est pas une objection de principe. Je
pense que, même si les juristes ne peuvent pas référer au
journal des Débats pour interpréter les effets d'une loi, il y
aura quand même eu cette discussion qui n'en est pas une dans le fond.
C'est une mise au point sur l'emploi des termes dans cet article 24 qui
assurera à la population que la création de cette commission et
la disparition de l'autre ne changeront en rien les préoccupations ni du
conseil ni du ministère quant à l'enseignement technique et
professionnel.
J'ajoute cependant, pour être complet, qu'il en est de même
pour la commission de l'éducation des adultes qui a justement
été prévue dans le nouvel article 24 pour la même
raison que l'enseignement collégial, parce que le ministère de
l'Education, conscient de l'importance du secteur de l'éducation des
adultes, a mis sur pied une direction générale de
l'éducation des adultes le 31 mars 1966.
Le conseil supérieur ne fait donc, dans ces deux suggestions,
dans ce projet de loi, que suivre les initiatives qui ont déjà
été réalisées au ministère de l'Education au
niveau de l'enseignement collégial et dans le domaine de
l'éducation des adultes,
M. LE PRESIDENT: La deuxième lecture sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SERCRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier pour l'étude du bill no 5. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Tousles articles adoptés
à l'unanimité?
M. LAPORTE: Adopté tel quel.
UNE VOIX: Adopté.
M. CARDINAL: Adopté tel que rédigé.
M. LESAGE: Pour les articles 1 et 2, oui. Quant à l'article 3,
tout ce que je voudrais rappeler au ministre, c'est que la recommandation de la
commission Parent, la dernière sur le sujet au tome III, à
l'article 918, que j'ai cité tantôt, se lit comme suit: «
Que disparaisse la commission de l'enseignement technique et professionnel et
qu'elle devienne la commission de l'enseignement préuniversitaire et
professionnel. » C'est pour cela que je pensais à la commission de
l'enseignement collégial. Préuniversitaire ou collégial,
c'est la même chose. Nous suivrions exactement la recommandation de la
commission Parent.
M. CARDINAL: Vous voulez dire « de l'enseignement collégial
et professionnel »?
M. LESAGE : Oui. Nous suivrions alors exactement la dernière
recommandation de la commission Parent sur ce sujet.
M. CARDINAL: D'accord. « De l'enseignement collégial et
professionnel ». Article 4.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 3, adopté.
M. CARDINAL: Avec modification.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): L'amendement...
M. LESAGE : Sur la quatrième ligne.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A la quatrième ligne, il
faut ajouter « professionnel ».
M. LESAGE: « Collégial et professionnel ».
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): « Collégial et
professionnel ». Alors, adopté avec amendement. Article 4.
Adopté.
M. LESAGE: Oui.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 5.
M. LESAGE: Cela va.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Articles 6, 7, 8 et 9
adoptés.
M. FRECHETTE (Président du comité plé-
nier): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que
le comité a adopté le bill 5 avec un amendement qu'il vous prie
d'agréer.
M. LEBEL (Président): Le bill amendé sera-t-i1
agréé?
Agréé.
Troisième lecture à la prochaine séance ou à
une séance...
M. LESAGE: Voici, M. le Président. Justement, c'est la
première fois qu'une modification est apportée à un projet
de loi en comité plénier. Est-ce que nous ne devrions pas mettre
en pratique les bonnes résolutions que nous avions tous lors de
l'abolition du Conseil législatif, et revoir le bill tel que
modifié, à moins qu'il y ait grande urgence? Je ne veux
pas...
M. BERTRAND: Ces bills pourront être sanctionnés jeudi ou
vendredi. Il n'y a aucune urgence.
M. LESAGE: C'est beaucoup plus pour la question de principe. Je pense
bien que l'amendement est très mineur, mais quand même.
M. BERTRAND: Le chef de l'Opposition a raison.
M. LESAGE: Soyons prudents.
M. BERTRAND: II faudrait que nos fonctionnaires aient le temps de relire
le bill, de voir s'il n'y a pas des corrections ou des fautes qu'il nous
faudrait corriger.
M. LE PRESIDENT: La troisième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
M. BERTRAND: Article 9.
Bill 6
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de L'Education propose la
deuxième lecture de la Loi modifiant la loi de l'admission à
l'étude de professions.
L'honorable ministre de l'Education.
M. Jean-Guy Cardinal
M. CARDINAL: M. le Président, il s'agit d'un projet de loi
très bref, qui parle par lui-même. Je rappellerai cependant que
cette loi n'est rien d'autre qu'une disposition de concordance pour accorder
les faits avec des lois qui ont été adoptées depuis un
certain temps. Il s'agit de remplacer l'exigence du baccalauréat
ès arts par celle du diplôme de fin d'études
collégiales. On sait que le premier ministre tenait à ce que les
corporations ou chambres professionnelles intéressées soient
consultées; ce qui a été fait directement et par
l'intermédiaire du conseil interprofessionnel. Aucune des chambres que
je mentionnerai n'a eu d'objection.
Je mentionnerai en particulier que les lois ou les chambres qui seront
affectées par ce projet de loi sont les suivantes: Il s'agit tout
d'abord du Barreau qui est régi par la Loi du Barreau, 15-16 Elizabeth
II. chapitre 77, particulièrement à l'article 53; la Chambre des
notaires, qui est régie par la Loi du notariat, Statuts refondus 1964,
chapitre 248, article 37; le Collège des médecins, régi
par la Loi médicale, Statuts refondus 1964, chapitre 249, article
30.
La Loi des dentistes, statuts de 1964, chapitre 253, article 65. La Loi
de pharmacie, chapitre 255 des statuts de 1964, article 8. La Loi des
médecins vétérinaires, chapitre 259 des mêmes
statuts, article 27. La Loi des agronomes, chapitre 260 des mêmes
statuts, article 22. La Loi des architectes, chapitre 261 des mêmes
statuts, article 8. La Loi des arpenteurs, chapitre 263, des Statuts refondus
1964, articles 31 et 33.
M. LESAGE: II n'y a pas une Loi des curés?
M. CARDINAL: Je n'en connais pas, mais, si on retourne au passé,
l'on verra que, pour devenir curé, l'obligation du baccalauréat
n'était pas nécessaire.
M. LESAGE: En effet.
M. CARDINAL: II fallait avoir une licence en théologie.
M. LESAGE: En effet.
M. CARDINAL: Je ne ferai aucun commentaire par suite de ce fait
historique. Je pense que...
M. LESAGE: Le chef de l'Opposition n'apas reçu de mandat.
M. CARDINAL: Je pense qu'il est Important de rappeler, comme dernier
mot, que le baccalauréat ès arts qui, pour toutes ces
professions, il y a de nombreuses années, constituait la seule porte
étroite d'entrée soit, autrefois, sous le régime de
la cléricature, par la voie d'un examen de la Chambre professionnelle,
soit, maintenant, par le passage à des facultés dites pro-
fessionnelles avec les années, s'est tellement
modifiée que, sous l'appellation B.A. ou baccalauréat ès
arts, une multitude de réalités très différentes
étaient en fait reconnues comme à peu près
équivalentes. Jamais les B.A. anglais n'ont été
l'équivalent du baccalauréat de nos collèges classiques,
donné par les facultés des arts, ni même du
baccalauréat français qui est un diplôme terminal
d'études secondaires.
Cette loi vient mettre de l'ordre en donnant une équivalence
officielle au diplôme d'études collégiales, qui sera
à l'avenir décerné par le ministère de l'Education
aux étudiants qui auront terminé un cours dans un collège
d'enseignement général et professionnel grâce au
comité mixte, qui a travaillé au ministère avec les
représentants des facultés et les représentants des
collèges, en est arrivé à un accord absolument unanime sur
la possibilité d'accès à toutes ces facultés avec
l'obtention d'un diplôme d'études collégiales, ce projet de
loi ne fait que rendre officiel ce qui déjà peut devenir, une
réalité de par l'entente entre tous les intéressés
qui volontairement ont voulu mettre de l'ordre dans ce domaine et accepter les
modifications qui se sont produites dans le domaine de l'éducation au
cours des dernières années.
M. Jean Lesage
M. LESAGE: Un mot seulement. Je voudrais attirer l'attention du ministre
de l'Education sur le fait que je n'ai pas réussi à obtenir une
définition de l'expression « études collégiales
». J'ai communiqué avec les conseillers juridiques du gouvernement
et j'ai demandé à M. Normand où je pourrais trouver une
définition de l'expression « études collégiales
».
M. BERTRAND: Ah, il n'y en a pas.
M. LESAGE: Bien, c'est important. Nous disons que le diplôme
d'études collégiales est tenu pour être l'équivalent
du diplôme de bachelier às arts. Alors, qu'est-ce que c'est? Je le
sais que ça va être déterminé par le ministre de
l'Education, mais, dans le moment, on ne sait pas ce que c'est.
M. BERTRAND: II a la réponse.
M. LESAGE: Ah bon, tant mieux! J'ai bien fait d'appeler M. Normand. Il a
alerté le ministre. Je sais qu'en vertu de la Loi du Conseil
supérieur de l'éducation que nous venons de modifier, le Conseil
supérieur de l'éducation veut adopter des règlements, etc,
en vertu de l'article 28, je crois, mais rien dans la loi ne défi- nit
ce que veut dire exactement l'expression « études
collégiales ». Je sais que le ministre peut me répondre:
C'est la même chose pour le baccalauréat ès arts. Il l'a
même mentionné dans son Intervention en disant qu'on l'avait
interprété de toutes sortes de façons. Alors, Je le...
M. CARDINAL: Plus que ça.
M. LESAGE: ... laisse de côté, la déclaration du
ministre quant à ce que pouvait vouloir dire ou ne pas vouloir dire
l'expression « bachelier ès arts », pour dire: Ne serait-il
pas important de savoir exactement ce que ça veut dire «
études collégiales »? Dans nos lois, ce n'est pas
défini; ça l'a peut-être été par
règlement. Si ça l'a été, je serais fort
intéressé de le savoir.
Je sais aussi que le député de d'Arcy-McGee a des
observations à faire sur la formule à employer dans l'article. Je
dois dire dès maintenant puisque je ne puis parler qu'une fois en
deuxième lecture que je partage, je ne dirai pas ses
inquiétudes, mais enfin son point de vue quant à
l'opportunité d'employer la formule de l'article 1, qui serait l'article
3 de la loi.
M. PAUL: Je ne veux pas être procédurier outre mesure, mais
il ne faudrait pas cependant que l'intervention que se propose de faire
l'honorable député de d'Arcy-McGee soit considérée
comme un précédent, puisque l'honorable ministre de l'Education a
usé de son droit de réplique.
M. LESAGE: Le ministre de l'Education n'a pas usé de son droit de
réplique. Il répondait à une question que j'ai
posée. J'ai posé une question. Il a purement et simplement dit
qu'il avait la réponse aux questions que j'avais posées aux
conseillers juridiques du gouvernement.
M. PAUL: Très bien.
M. LESAGE: Il n'est pas intervenu en réplique.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de d'Arcy-McGee.
M. Victor-C. Goldbloom
M. GOLDBLOOM: L'honorable ministre de l'Education, en présentant
ce projet de loi à la Chambre, a dit qu'il ne s'agit que d'une certaine
concordance avec des lois qui existent déjà. Je crois, à
mon humble avis, que ce projet de loi
va un peu plus loin. Son principe est excellent. Son principe est de
faciliter l'accès à l'étude de plusieurs professions dites
libérales à certaines jeunes personnes qui éprouveraient
une difficulté plus grande si la durée des études
était plus longue, non seulement parce que le coût de ces
études sera réduit par l'adoption de ce projet de loi, mais que
les jeunes en question seront en mesure de gagner leur vie à un
âge moins avancé.
Il est à noter que la diminution des exigences préalables
sera, dans certains cas, contrebalancée jusqu'à un certain point
par la modification du cours de formation professionnelle; mais le
résultat ultime en sera néanmoins que la durée totale des
études sera raccourcie d'au moins une année. Ce sera, somme
toute, un résultat heureux car nous connaissons un besoin pressant
d'effectifs dans plusieurs des domaines professionnels qui seront
touchés, surtout ceux de la santé.
Une mise en garde s'impose, cependant. Au fur et à mesure que
nous raccourcissons la formation de nos hommes professionnels, nous les privons
d'une culture générale qui est déjà réduite,
en comparaison de celle que nous connaissions chez les médecins et
autres professionnels d'autrefois. Nous les obligerons donc, de plus en plus,
à être ce que nous souhaitons qu'ils soient tous,
c'est-à-dire étudiants perpétuels.
Le seul commentaire qu'il me reste à faire est celui-ci: dans les
notes explicatives, nous lisons que le projet prévoit que les
détenteurs de diplômes d'études collégiales peuvent
être admis à l'étude et à l'exercice d'une
profession de la même façon que s'ils détenaient un
baccalauréat ès arts. La loi exprime cette idée
différemment. Le texte du projet de loi déclare qu'une personne
détentrice d'un diplôme d'études collégiales est
réputée détenir un baccalauréat ès arts
décerné par une université du Québec.
Je souligne que le principe de ce projet de loi est de déclarer
qu'une personne détentrice d'un diplôme d'études
collégiales est admissible au même titre que celle qui
détient un baccalauréat à l'étude de certaines
professions.
Mais je crois qu'il n'est pas juste de dire que celui qui ne
détient qu'un diplôme d'études collégiales
détient, par l'effet de cette loi, un diplôme pour lequel il n'a
pas fait les études et qu'il n'a pas mérité, un
diplôme donc qui ne lui a pas été décerné par
l'université concernée. Tout de même, je trouve excellent
le principe fondamental du bill.
M. CARDINAL: M. le Président, vous me permettrez de
répondre non pas aux trois objections, mais aux trois commentaires qui
ont été donnés au sujet de ce projet de loi no 6.
La première chose qui a été mentionnée,
c'est qu'il n'y avait pas de définition. Je suis d'accord avec le chef
de l'Opposition. Il n'y avait pas non plus dans le passé de
définition du B.A. D'ailleurs, comme il l'a mentionné
lui-même, j'ai indiqué que ce mot recouvrait des
réalités différentes» La réponse est, je
pense, dans le texte même du projet de loi et dans la
réglementation du ministère.
On dit: « Toute personne qui détient un diplôme
d'études collégiales ...» Si on s'arrêtait là,
je serais d'accord qu'il n'y aurait pas de définition, qu'il n'y aurait
pas de qualification. Mais l'on ajoute « ... décerné par le
ministre de l'Education ou une université du Québec ». L'on
vient donc de le qualifier. Je pense que si on le qualifiait davantage, on
arrêterait une fois de plus la loi à une réalité qui
est celle d'aujourd'hui. Ce diplôme collégial, que le
ministère a le droit de définir et qu'il définira
lui-même de par ses réglementations comme il l'a fait pour le
diplôme d'études secondaires est vraiment une
réalité qui, au cours des années, va évoluer, au
fur et à mesure que les collèges d'enseignement
général et professionnel évolueront.
Je soumets donc humblement qu'il vaut mieux ne pas aller plus loin dans
une définition qui arrêterait, si vous voulez, la notion de ce
diplôme à ce qu'il peut être aujourd'hui et à ce qui
pourrait être modifié dans un très court terme. Nous sommes
à l'an II des CEGEP. Même si nous sommes à l'an II des
CEGEP, l'on sait qu'il existe encore des étudiants qui sont dans des
collèges et qui obtiendront un baccalauréat ès arts, des
étudiants qui sont dans des universités de langue anglaise et qui
obtiendront un B.A. général, un B.A. with honour ou un B.A.
spécialisé, des étudiants qui sont dans des
collèges d'enseignement général et professionnel et qui
obtiendront le premier diplôme collégial qui sera
décerné et qui sera certainement modifié par la suite.
Je pense qu'il vaut mieux avoir une référence à
l'autorité qui définira par sa réglementation ce
diplôme plutôt que de tenter d'en faire une définition dans
la loi. Sur ce point, je pense bien que le chef de l'Opposition ne s'est pas
opposé au texte qui est là. Je soumettrais qu'il vaudrait
mieux...
M. LESAGE: Non.
M. CARDINAL: ... s'en tenir à sa définition très
générale ou plus exactement à cette qualification plus
générale qui est donnée dans la loi.
Deuxième commentaire ou objection. Ledé-puté de
D'Arcy-McGee en voulant répéter mes
termes, dit que j'avais affirmé qu'il s'agissait d'une
concordance avec des textes de loi. Evidemment, nous n'avions pas eu le temps
ni un ni l'autre de relire le journal des Débats. Je crois plutôt
avoir dit qu'il s'agissait d'une concordance entre un texte de loi et la
réalité actuelle après les modifications apportées
au ministère de l'Education. Au contraire, dans toutes les lois que j'ai
mentionnées, il est fait mention du baccalauréat ès
arts.
Enfin, la troisième chose, qui est la plus importante de toutes
et sur laquelle je voudrais défendre le texte, c'est la question
d'équivalence. Je défendrai le texte pour deux raisons. Une
première raison appartient à la consultation que nous avons eue.
Pour ce projet de loi, tel qu'il est rédigé, j'ai
mentionné tantôt que nous avions d'abord sollicité la
consultation des groupes professionnels sur le principe. Sur le principe,
ceux-ci ont été d'accord. Les facultés universitaires ont
été d'accord. Sur le texte, il a fallu beaucoup de temps, presque
une année avant que l'on en vienne à un accord qui satisfasse
tous les groupes. D'ailleurs, il y a des textes de loi dont j'ai cité
des articles et que l'on pourrait compiler pour voir comment la concordance
entre les textes, la réforme du texte par cette loi et ce texte omnibus
pourrait être faite.
Si on voulait modifier ce texte, j'en serais malheureux puisque j'aurais
l'impression qu'il faudrait presque une nouvelle consultation des
intéressés qui ont accepté le texte tel quel.
La deuxième raison que je donnerai au député de
D'Arcy-McGee et au chef de l'Opposition, c'est qu'on me permettra de
référer à une expérience passée. Lorsqu'il
s'agit de définir les équivalences de diplômes, 11 faut
bien savoir pour quelles fins les diplômes sont considérés
équivalents.
Lorsque l'on dit, par exemple, que quelqu'un qui détient un
diplôme d'études collégiales est réputé
détenir un baccalauréat, ceci ne signifie en rien que les
études ont une valeur égale ou inégale, ceci signifie
simplement que, pour certaines fins là, j'en
référerai au texte du projet de loi « ces
études sont réputées équivalentes ».
C'est pourquoi le texte, après avoir dit « est
réputé détenir un baccalauréat » ajoute
« pour les fins de son admission àl'étude et à
l'exercice ». Ce n'est que pour ces fins spécifiques que cette
« réputation » est acceptée. On ne peut pas
l'étendre à d'autres fins. Celui qui détient un
diplôme d'études collégiales ne peut pas prétendre,
pour d'autres fins, qu'il a l'équivalent d'un baccalauréat. Et
celui qui le serait à la fois en dehors de la réalité et
dépasserait de beau- coup l'extension et la compréhension de ce
projet de loi.
Je soumets donc que ce texte étant très bref, ayant
reçu l'assentiment d'une consultation générale, ayant
été en quelque sorte plébiscité par les groupes
intéressés, étant une concordance entre les
réalités actuelles, les structures de l'éducation et les
textes qui existent déjà et qui parfois datent de chacune des
chambres professionnelles, je soumettrais qu'à moins de raisons
très graves, on devrait le conserver dans son texte actuel.
M. LE PRESIDENT: Ces recommandations sont-elles adoptées?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education propose maintenant
que je quitte le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier pour l'étude du bill no 6.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. BERTRAND: Il y a plus de commentaires sur le nouveau président
que sur le projet de loi.
M. ROY (président du comité plénier): Article
1.
M. BERTRAND: Adopté.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, on me permettra de faire un bref
commentaire. Evidemment, avec les explications que le ministre vient de nous
fournir en deuxième lecture, je ne voudrais en rien déranger
l'entente et la compréhension qui ont été atteintes avec
une certaine difficulté et pendant un certain laps de temps, par le
ministre, par le truchement de consultations auxquelles je n'ai pas eu
l'honneur de participer.
Il me semblerait toujours qu'on aurait pu dire que celui qui
détient le diplôme collégial est admissible au même
titre que celui qui détient un baccalauréat ès arts
à l'étude et à l'exercice d'une profession. C'est le
commentaire que j'aurais voulu faire, mais j'accepte volontiers les
explications que donne le ministre, et je crois qu'il est dans
l'intérêt de tous que nous acceptions ce qui a déjà
été accepté par les professions concernées.
M. CARDINAL: Merci, M. le député. Vous me permettrez, M.
le Président, d'ajouter qu'il y a non pas urgence immédiate
à adopter ce texte, mais certains étudiants sont
présentement dans une situation où, dès ce printemps, ils
auront à avoir ou non une équivalence. Alors, il ne faudrait pas
recommencer une consultation.
Je remercie le député de D'Arcy-McGee de sa
compréhension.
M. FRECHETTE (président du comité plénier): Alors,
article 1 adopté.
Articles 2 et 3 également.
M. le Président, J'ai l'honneur de faire rapport que le
comité a adopté sans amendement le bill no 6.
M. LEBEL (président): Ce rapport sera-t-il adopté?
Adopté. Troisième lecture.
M. BERTRAND: Oui, celui-là, M. le Président, je pense bien
que nous pouvons l'adopter.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: Est-ce que, de consentement unanime, la
troisième lecture est adoptée?
M.BERTRAND: Oui, oui. M. LE PRESIDENT: Adopté. M. BERTRAND:
Article 4.
Bill 7
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose la deuxième
lecture de la Loi modifiant la loi électorale.
L'honorable premier ministre.
M. Jean-Jacques Bertrand
M. BERTRAND: M. le Président, je m'en voudrais de priver cette
Chambre des quelques notes que j'ai fait préparer I l'appui de ce projet
de loi.
Vous pouvez être assuré que je laisserai suffisamment de
temps au député de Chambly pour qu'il puisse prononcer son
discours avant six heures.
M. LAPORTE: Merci.
M. BERTRAND: M. le Président, ce projet de loi, on l'aura
noté, vise à abolir les restrictions privant la majorité
des Indiens du Québec de leur droit de vote aux élections
provinciales. Je voudrais donner quelques notes historiques sur ce droit de
vote des Indiens du Québec aux élections fédérales
et provinciales.
L'article 41 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867
prévoyait: « Jusqu'à ce que le Parlement du Canada en
ordonne autrement, toutes les lois qui, au moment de l'Union, seront en vigueur
dans chacune des provinces, seront applicables, dans cette province,à
l'élection des députés à la Chambre des communes.
»
On s'est donc servi des listes électorales provinciales pour les
élections fédérales de 1867 jusqu'à l'adoption
d'une Loi électorale fédérale, en 1885. Or, la Loi
électorale du Québec du temps ne comportait aucune restriction
concernant le droit de vote des Indiens. Comme on s'est servi, au
fédéral, des listes électorales provinciales, les Indiens
du Québec votaient aux élections fédérales. A
partir de 1885, il y eut des listes électorales distinctes pour les
élections fédérales, lesquelles furent établies,
pour ce qui concerne les Indiens, en conformité avec les dispositions de
la Loi fédérale des élections de 1885. Cette loi a
été abrogée en 1898 et, jusqu'en 1920, ce furent, encore
une fois, les conditions d'éligibilité provinciales qui furent en
usage pour les élections fédérales. En 1920, une nouvelle
loi fédérale a été adoptée concernant les
conditions d'éligibilité. Les Indiens vivant dans les
réserves se virent privés de leur droit de vote. La situation
resta à peu près la même jusqu'en 1960, alors que toutes
les restrictions concernant le droit de vote des Indiens furent
abrogées.
Le droit de vote des Indiens aux élections provinciales.
La Loi électorale québécoise ne comportait aucune
restriction à ce sujet avant l'adoption, le 5 mars 1915, de la Loi
modifiant la loi électorale, 5, George V, chapitre 17. Cet article 5
privait les Indiens vivant dans des réserves de leur droit de vote aux
élections provinciales. Cette disposition, on la retrouve reproduite
à l'article 48 de la Loi électorale actuelle et elle est encore
en vigueur aujourd'hui.
Quelle est la situation actuelle du droit de vote des Indiens dans les
autres provinces? En Nouvelle-Ecosse, les Indiens ont toujours eu le droit de
vote aux élections provinciales. Il en est de même à
Terre-Neuve, depuis l'entrée de cette dernière province dans la
Confédération, en 1949. Les Indiens ont obtenu le droit de vote
aux élections provinciales en Colombie-Britannique, en 1949; au
Manitoba, en 1952; en Ontario, en 1954; en Saskatchewan, en 1960; au
Nouveau-Brunswick et dans l'Ile-du-Prince-Edouard, en 1963 et en Alberta, en
1965.
Pour ce qui est des élections territoriales, les Indiens ont
toujours eu le droit de vote dans les Territoires du Nord-Ouest. Ils ont obtenu
ce droit au Yukon, en 1960.
La situation actuelle au Québec.
Un certain nombre d'Indiens, notamment ceux de la baie James, de
même que les Esquimaux du Nouveau-Québec, ont le droit de voter
aux élections provinciales, mais ils l'ont tout simplement parce qu'ils
ne vivent pas dans des réserves. Ce droit est cependant fort illusoire,
puisque les territoires du Nouveau-Québec et de Mistassini ne font
partie d'aucun district électoral.
H faudrait un autre projet de loi modifiant la Loi de la division
territoriale, Statuts refondus de Québec 1964, chapitre 5, pour corriger
cette anomalie.
Quant à la plupart des Indiens du sud, c'est-à-dire
à la majorité des Indiens du Québec, ils n'ont pas le
droit de voter aux élections provinciales, parce qu'ils vivent dans des
réserves et qu'ils tombent ainsi dans le champ d'application de
l'article 48, que nous allons abroger, de notre loi électorale.
Ainsi, par rapport aux autres provinces, le Québec fait donc,
à l'heure actuelle, cavalier seul dans le domaine du droit de vote des
Indiens. Une telle attitude paraît de moins en moins
justifiée.
Quelle est l'attitude des Indiens devant le droit de vote? On sait que
les Indiens étalent et sont encore, dans une certaine mesure, fort
divisés sur l'opportunité pour eux de voter aux élections,
tant fédérales que provinciales. C'est sans doute un peu pour
cela que l'on a tant tardé, même en dehors du Québec,
à leur accorder le droit de vote.
Il ne s'agit d'ailleurs pas, par notre projet de loi, bien entendu,
puisque le vote n'est pas obligatoire pour les citoyens, d'obliger les Indiens
à voter. Ils auront le droit de le faire, même s'ils
considèrent qu'ils seront ainsi susceptibles, à tort toutefois,
de perdre des droits, et il leur sera évidemment loisible de ne pas s'en
prévaloir comme le font malheureusement plusieurs citoyens à
l'occasion des élections, tant fédérales que
provinciales.
Il serait trop long d'énumérer les motifs qui justifient
l'octroi de ce droit de vote au Québec. Je me bornerai à en
énumérer quelques-uns. Premièrement, bien qu'ils jouissent
de certains avantages fiscaux, en vertu de la Loi sur les Indiens par
exemple, les Indiens ne paient pas d'impôt sur le revenu gagné
dans les réserves; de toute façon, la plupart d'entre eux n'ont
pas suffisamment de revenu, règle générale, pour le payer
ils sont quand même assujettis à diverses formes
d'imposition, tel- les que la taxe de vente provinciale, l'impôt sur le
revenu gagné en dehors des réserves. Et, comme l'a
souligné récemment le comité Athorm-Tremblay, c'est le
régime de l'imposition sans représentation, ce qui
évidemment est contraire à nos principes
démocratiques.
Deuxièmement, M. le Président, je crois que l'abolition de
cette restriction contribuera à faire disparaître les
préjugés de certains blancs à l'égard des Indiens,
comme de certains Indiens à l'égard des blancs.
Et, troisièmement, l'octroi de ce droit de vote aux Indiens
pourra peut-être les amener à se sentir un peu plus
québécois et à s'intéresser davantage aux affaires
publiques du Québec.
M. le Président, voila les quelques considérations
historiques et autres que je voulais soumettre en deuxième lecture
à l'attention de cette Chambre, au moment où je propose ce projet
de loi, lequel, iI n'y a aucun doute, aurait dû être adopté
depuis assez longtemps.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chambly.
M. Pierre Laporte
M. LAPORTE: M. le Président, le principe du bill 7, c'est de
modifier la Loi électorale. La modification que l'on nous propose
aujourd'hui et qui m'apparaît, quant à mol, des plus raisonnables,
c'est d'accorder à ceux que nous appelons les Indiens le droit de
vote.
Nous avons opté, dans la province de Québec, depuis assez
longtemps déjà, pour le vote universel.
Il est alors normal que nous poussions le principe jusque dans ses
conclusions les plus complètes et que le droit de vote universel ne
souffre que les exceptions les plus nécessaires. A mon avis
d'autres collègues pourront exprimer le même avis ou parler en
sens contraire c'est une amélioration, et je crois que cette
Chambre devrait s'empresser d'adopter cette loi sans trop de discussion.
Il est évident que, pour certains, les Indiens n'ont jamais eu de
droits véritablement reconnus chez eux, au Canada. Il est bien
évident que, pour certains, les Indiens n'ont pas reçu de l'Etat
toute l'instruction qui leur permettrait de porter un jugement qui nous
paraîtrait suffisamment fondé sur ces questions. Je crois que nous
devons nous excuser collectivement, si nous avons raison, auprès des
Indiens de les avoir traités de cette manière pendant si
longtemps. S'il le faut, nous devrions mettre les bouchées doubles pour
qu'ils deviennent des citoyens à part entière dans le
Québec.
Ce projet de loi me fournit l'occasion de discuter d'un autre
problème qui, lui aussi à mon avis, est relié au respect
des règles de la démocratie, je veux dire le problème
moderne, récent, nouveau, des députés qui se font
élire dans les cadres de ce que la loi appelle un parti reconnu, et qui
changent ensuite d'allégeance. Nous vivons, au Québec, à
ce point de vue, dans une situation un peu particulière puisque c'est
chez nous seulement, à l'exception peut-être n'ayant pas eu
le temps de vérifier de la Colombie-Britannique, que l'on
reconnaît officiellement l'existence des partis politiques et qu'on leur
accorde, à certaines conditions, l'usage exclusif d'un nom.
Le Parti libéral du Québec, l'Union Nationale ou tout
autre parti, quel qu'il soit, qui a présenté aux dernières
élections 10 candidats, ou qui se propose d'en présenter 10
à l'élection en cours, n'a qu'à adresser au
président général des élections pour voir son nom
reconnu officiellement et protégé complètement. Ceci
n'existe ni au fédéral, ni dans aucune province canadienne,
encore une fois, peut-être à l'exception de la
Colombie-Britannique. Nous vivons sous un régime de partis reconnus. Je
cite le paragraphe 20 de l'article 2 des Statuts refondus du Québec,
1964, le chapitre 7, Loi électorale: « Parti reconnu »
désigne le parti du premier ministre ou du chef de l'Opposition
officielle, et un parti qui, aux dernières élections
générales avait dix candidats officiels ou qui, aux
élections générales en cours, est admis à
désigner un agent officiel, suivant l'article 375. »
Le parti qui est admis à désigner un agent officiel est
celui qui présente dix candidats ou qui en a présenté dix
aux élections précédentes. Ce droit exclusif au nom est
confirmé par l'article 117 de notre Loi électorale. Nous lisons
en effet au paragraphe d) les mots suivants je résume le
début de l'article : « Nul bulletin de présentation
n'est valide, s'il n'est accompagné, lors de sa remise au
président des élections: « d) de la désignation de
son parti ou de l'indication indépendant. »
Aujourd'hui, dans le Québec, on se présente devant les
électeurs non seulement avec son nom à soi, comme c'était
le cas jusqu'en 1966, mais avec le nom de son parti, que personne d'autre n'a
le droit d'utiliser, ou alors, on se présente sous l'étiquette
indépendante ou sans aucune mention sur le bulletin de vote.
Vous vous rappellerez, M. le Président, que ce changement n'a pas
été apporté seulement pour protéger le nom d'un
parti politique, mais parce que, jusqu'en 1966, on avait, en quelque sorte,
fait le « commerce » des noms de candidats et des noms de partis
politiques. Et aucun des deux principaux partis politiques
représentés en cette Chambre ne peut réclamer
l'exclusivité de cette méthode.
Cela a commencé vers les années 1950. On a
inventé...
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse d'interrompre l'honorable
député de Chambly. Il semble y avoir une sorte de consentement
unanime de la Chambre à ce que cet exposé se fasse
actuellement?
M. PAUL: Oui.
M. LE PRESIDENT: Alors, il y a consentement unanime. Je m'excuse d'avoir
interrompu. Le député de Chambly.
M. LAPORTE: Je parlerais autrement. Quel serait le principe, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: J'ai cru comprendre que le principe du bill
était presque uniquement de donner le droit de vote aux Indiens. Mais
puisqu'il y a consentement unanime, disons que le scrupule disparaît.
M. LAPORTE: M. le Président, je vous remercie de votre
intervention et je remercie cette Chambre de son accord unanime, mais je
prétends n'en point avoir besoin, puisqu'on vertu des règlements,
je veux discuter le principe. Encore une fols, je rermercie la Chambre. Mais si
l'on me refusait le droit de parler, j'Invoquerais le règlement pour
dire que, au stade de la deuxième lecture, j'ai le droit de discuter le
principe du bill. Si l'on avait intitulé le bill, « Loi pour
accorder le droit de vote aux Indiens », ce serait le principe du bill,
mais le principe du bill, c'est « Amendement à la Loi
électorale ». Alors, à ce moment-là, M. le
Président...
M. BERTRAND: Je pense que la remarque du député de Chambly
est à propos. Dorénavant, nous verrons, en faisant imprimer le
bill, à spécifier davantage.
M. LAPORTE: M. le Président, je vous remercie de votre
intervention. Je remercie cette Chambre, qui évite une discussion de
procédure, que disons je déteste de plus en plus.
Alors, le commerce des noms a commencé vers les années 1950. On
trouvait un homonyme, ou on trouvait un presque homonyme, afin de brouiller les
cartes. Je vais vous don-
ner deux exemples, M. le Président. En 1960, M. Marcel
Dupré, candidat libéral dans le comté de Maisonneuve, a eu
contre lui un adversaire qui n'était connu ni de A ni de B, qu'on n'a
jamais vu, qui n'a fait aucune assemblée, qui s'est contenté de
déposer un bulletin de présentation. Ce fut le commencement et la
fin de sa campagne électorale. Il portait le nom de Maurice
Dupré. Or, ce Maurice Dupré a obtenu 2,267 voix et M. Marcel
Dupré, candidat bona fide, a été battu par 2,130 voix.
Dans le comté de Laurier, il y avait un M. René
Lévesque, candidat libéral, journaliste...
UNE VOIX: Ci-devant libéral.
M. LAPORTE: Bien, il n'était pas ci-devant, il était
ci-après, à ce moment-là.
M. PAUL: II était ci-courant.
M. LAPORTE: Il était si désireux de battre l'Union
Nationale qu'il nous a aidés. Alors il y avait René
Lévesque, journaliste, et l'on a présenté contre lui un
autre René Lévesque, artiste. Je vois le député de
Dorion qui ouvre de grands yeux, parce qu'il a été...
M. BEAULIEU: En 1960?
M. LAPORTE: Oui, c'était en 1960. Comme il vivait dans ces
circonscriptions, il a dû lui-même être abasourdi par cette
pléthore de René Lévesque: René Lévesque,
candidat libéral journaliste; René Lévesque, artiste, que
personne n'a jamais retrouvé, ni avant, ni pendant, ni après
l'élection.
M. BERTRAND: Ce n'était pas un évadé, au moins?
M. LAPORTE: Ce n'était pas un évadé, mais il a pris
910 voix dans le comté de Laurier et M. René Lévesque,
candidat libéral, a été élu avec 129 voix de
majorité. Donc, que ceci se soit passé contre les libéraux
ou que les libéraux aient utilisé cette méthode contre des
candidats de l'Union Nationale, ni l'un ni l'autre n'étaient
justifiés de le faire et nous avons eu raison collectivement, à
l'Assemblée nationale qui portait le nom plus simple
d'Assemblée législative, à l'époque de
modifier la loi pour protéger les candidats et les partis politiques. On
ne peut plus, aujourd'hui, se présenter libéral
indépendant. On peut l'être, mais on n'a pas le droit, sur le
bulletin de vote, à l'étiquette libéral
indépendant. On ne saurait je suis certain que le seul fait
d'accoler ces mots va vous faire sourire se présenter aujourd'hui
comme Union Nationale progressiste. Non seulement c'est impensable, mais c'est
illégal.
M. BERTRAND: Voulez-vous parler du député de
Montmorency?
M. LAPORTE: Moi, je veux lui parler; apparemment, vous ne voulez plus le
faire vous autres. On ne peut plus, aujourd'hui, se présenter que sous
une étiquette protégée ou comme indépendant ou sans
aucune indication sur le bulletin de vote. Quels sont les avantages
attachés à ce système, car nous ne l'avons pas fait
seulement pour protéger les candidats? Le premier avantage est que ceci
contribue à mettre fin à une variété de
véritables fraudes électorales.
UNE VOK: Parlez-vous des Indiens?
M. LAPORTE: Mais non. Comme d'habitude, le député est en
retard. Là, j'ai presque envie de dire: Sortez du bois. Je vais demander
à mes collègues de tenter de me laisser parler sans interruption,
non pas que je déteste les interruptions je les provoque parfois
mais parce que j'ai un sujet assez délicat. Je sais que bon
nombre de mes collègues partagent mon point de vue et qu'il en est
d'autres qui ne sont pas d'accord, des deux côtés de la Chambre.
Alors, j'aimerais mieux que l'on me laisse terminer cette thèse, que je
ne trouve pas comique, que je ne trouve pas facile, mais que je crois
être dans l'intérêt d'une démocratie réelle au
Québec.
Quels sont les avantages de ce système du parti reconnu? La
première raison qui nous a conduits vers ce système,
c'était pour mettre fin à ce que j'ai appelé tout à
l'heure une véritable fraude électorale. Les milliers de gens qui
ont voté pour Maurice Dupré, en 1960, croyaient voter pour Marcel
Dupré et les 910 électeurs qui ont voté pour René
Lévesque, artiste, avaient l'impression de voter pour René
Lévesque, journaliste. Deuxièmement, ce système a pour
avantage de donner une véritable reconnaissance juridique aux partis
politiques. Autrefois, on avait l'impression que, chez nous comme dans le reste
du Canada, les partis avaient quelque chose d'illicite, d'illégal, parce
que nulle part, dans aucune loi, on n'admettait ou ne reconnaissait leur
existence. Aujourd'hui, on est légalement, on est officiellement et on
est exclusivement du parti libéral du Québec, ou de l'Union
Nationale ou du parti québécois ou de tout autre parti, à
la condition que l'on ait présenté à la dernière
élection ou que l'on présente à l'élection en cours
au moins dix candidats
et que l'on enregistre son nom auprès du président
général des élections.
Troisièmement, le candidat a l'assurance, avec le nom
protégé, de profiter à fond de l'étiquette sous
laquelle il se présente car il apparaît sur le bulletin de vote
sous son nom. Puis-je me citer en exemple? En 1956, j'ai décidé
de faire une première incursion en politique provinciale» Je me
suis présenté comme indépendant. J'ai été
battu. En 1961, je n'étais ni plus ni moins fin, ni plus ni moins
acceptable qu'en 1956. Je me suis présenté sous
l'étiquette d'un parti reconnu. J'ai été élu. J'ai
personnellement, dans ma carrière politique, tiré avantage de mon
acceptation d'une philosophie politique, celle du parti libéral du
Québec.
La protection d'un nom légalement accepté nous
amène aujourd'hui à certaines conséquences logiques. Quand
un député décide d'abandonner le parti reconnu sous
l'étiquette duquel il s'est présenté, la loi devrait
prévoir qu'il devra abandonner son siège et redemander un mandat
à ses électeurs.
Aujourd'hui, on présente aux citoyens ce que j'appellerais un
« package deal », c'est-à-dire qu'on présente
Juan-Jacques Bertrand, Union Nationale. C'est un tout indissoluble en vertu de
la loi. Personne d'autre, qu'il s'appelle Jean-Jacques Bertrand et qu'il soit
ou ne soit pas de l'Union Nationale, ne peut offrir aux électeurs ce
tout complet qui s'appelle le premier ministre m'excusera de
répéter Jean-Jacques Bertrand, Union Nationale. Personne
d'autre, aux prochaines élections provinciales, ne pourra prendre le nom
du député de Laurier, René Lévesque, y accoler les
mots Parti québécois et se présenter contre ce parti que
dirige actuellement M. René Lévesque.
Nous offrons aux citoyens un ensemble qu'on ne saurait dissoudre. En
1966, les électeurs du comté de Laurier n'ont pas élu M.
René Lévesque, Parti québécois, mais comme le
disait le bulletin de vote, René Lévesque, libéral. Dans
le comté de Montmorency, les électeurs, en 1966, n'ont pas
élu Gaston Tremblay, Parti nationaliste chrétien, mais Gaston
Tremblay, Union Nationale, Je ne suis pas du tout convaincu que si les
électeurs de Laurier ou de Dorion ou de Montmorency ou de quelque autre
comté avaient eu l'assurance que celui qu'ils élisaient comme
membre d'un parti reconnu allait abandonner son parti après quelques
mois, je ne suis pas du tout convaincu que le sort de l'élection aurait
été le même.
Autrement dit, maintenant que nous avons adopté une des lois
électorales les plus progressistes deux journalistes très
exigeants, MM. Dominique Clift et Richard Daignault, ont écrit à
l'époque que la loi électorale qui avait été
approuvée à l'unanimité par l'Assemblée
législative était une des plus avancées en Amérique
du Nord nous devons aujourd'hui démocratiquement assumer les
conséquences de cette législation.
Les trois députés dont j'ai mentionné les noms
François Aquin est le troisième ont profité
non seulement de l'étiquette sous laquelle ils se sont
présentés, mais la loi leur a donné, par leur
décision de se présenter pour un parti reconnu, d'autres
avantages.
En effet, l'article 380 de la loi dit que « le président
général des élections rembourse, jusqu'à
concurrence de $0.15 par électeur inscrit, les dépenses
électorales encourues et acquittées par l'agent officiel de
chaque candidat. »
L'Etat, pour la première fois en Amérique du Nord,
prévoit que, pour chacun des candidats, une partie des dépenses
permises équivalant à peu près à 60% du coût
de l'élection sera remboursée.
Il y a deux partis, sauf exception la seule exception, c'est le
député indépendant de Sainte-Anne, Frank Hanley, et
peut-être le candidat dans Westmount le candidat
ministériel et le candidat de l'Opposition officielle sont
automatiquement éligibles au remboursement du 60% des
dépenses.
M. Lévesque, M. Aquin, le docteur Gaston Tremblay ont
bénéficié de ces sommes d'argent qui ont facilité
leur élection. S'ils s'étaient présentés
indépendants ou sans aucune étiquette ou pour un parti non
reconnu, il aurait fallu qu'ils obtiennent 20% des voix données au
vainqueur afin d'obtenir le même remboursement.
On ne peut pas accepter d'une part les avantages d'un parti reconnu et
abandonner ensuite ce parti reconnu, sans encourir les conséquences de
cette décision d'abandonner le parti qui nous a valu une équipe,
des structures, qui nous a valu le respect de la loi, parce que le nom en est
exclusif, et qui, dans les cas qui nous intéressent, a valu la
contribution de l'Etat à l'élection.
Allons plus loin. Trois députés élus sous des noms
protégés sont devenus ou parti québécois, ou
indépendant, ou parti nationaliste chrétien. Je pose la question:
Auraient-ils été élus, en 1966, sous ces
étiquettes? Rares sont les indépendants qui ont été
élus dans la province de Québec depuis 1867.
J'avais d'abord imaginé que j'en ferais
l'énumération. Nous retrouvons des noms fort intéressants,
mais je ne voudrais pas prendre indûment le temps de la Chambre. Disons
que, sur approximativement 2,200 députés, depuis
la Confédération, à l'Assemblée
législative et à l'Assemblée nationale, 34 ont
réussi à se faire élire sous une étiquette
indépendante. Le plus connu est évidemment Henri Bourassa, en
1908. Vous avez Armand Lavergne, dans Montmagny, en 1908 et en 1912. Vous avez
des députés qui se sont présentés d'abord pour un
parti politique, l'ont abandonné et ont ensuite été
élus comme indépendants. Ils sont très rares.
Vous avez Champlain, Deux-Montagnes, Benjamin Beauchamp, Georges Duhamel
j'imagine que ce n'est pas l'écrivain français dans
Iberville, en 1886 et en 1887, sous l'étiquette nationale.
Vous avez, dans le comté de Maisonneuve, M. William Tremblay, qui
s'est présenté sous une étiquette fort particulière
et qui illustrait bien, pour les électeurs, le rôle qu'il voulait
jouer; il s'est présenté sous l'étiquette oppositionniste,
en 1927, il a été élu. Vous avez M. Frank Hanley je
pense que c'est lui qui détient le record il s'est
présenté en 1948, en 1952, 1956, 1960 et 1962 comme
indépendant et il a toujours été élu. Je me
souviens qu'en 1952, Je ne nommerai pas son adversaire, qui était un
représentant du parti de l'Union Nationale, a la veille de
l'élection, j'avais rencontré ce candidat à une
assemblée à Trois-Rivières où M. Duplessis
adressait la parole, alors que tous les candidats ferraillaient dur dans leur
comté, ce monsieur était à Trois-Rivières. Nous
avons demandé à ce candidat: « Espérez-vous
être élu demain? » Il dit: « Yes, that would prove
that God has a sense of humour. » Vous avez M. René Chaloult qui a
été élu deux fois. Vous avez M. Alexandre Chauveau, dans
Rimouski, en 1875.
Alors, en tout et partout, depuis la Confédération, vous
avez 34 députés qui ont réussi à se faire
élire ou réélire sous l'étiquette
d'indépendants. Ce qui m'amène à dire que les chances de
ceux qui optent pour autre chose qu'un parti reconnu, qui se présentent
comme indépendants ou pour des tiers partis, démarrent
déjà avec une infériorité qui est attestée
par les statistiques que je viens de donner. Aujourd'hui, ils sont
classés parmi ceux que l'on appelle généralement les
« vire-capots ».
J'aimerais vous donner l'exemple le plus fameux pour démontrer
combien ce système peut conduire à un résultat contraire
à celui qui a été prévu par les électeurs,
qui sont les maîtres. En 1878, il y avait 65 comtés dans la
province de Québec. Les partis de Boucherville et de Joly de
Lotbinière faisaient élire chacun 32 députés. Le
65e était M. Arthur Turcotte, lndépen-dans de
Trois-Rivières, conservateur. M. Turcotte a accepté d'être
orateur pour les libéraux qui se sont maintenus au pouvoir du 8 mars
1878 au 30 octobre 1879, alors qu'ils ont été renversés
par Chapleau, à la suite de cinq défections dans le parti
libéral, soit Alexandre Chauveau, Etienne-Théodore Paquet, Ernest
Racicot, Louis-Napoléon Fortin et Edmond-James Flynn.
M. BERTRAND: Ernest Racicot?
M. LAPORTE: Ernest Racicot.
M. BERTRAND: Le député de Missisquoi?
M. LAPORTE: Il était justement député de
Missisquoi. Il a été élu en 1878 sous l'étiquette
libérale.
M. BERTRAND: C'est ça, avocat.
M. LAPORTE: C'est ça. C'est passé à l'histoire,
c'est demeuré célèbre dans l'histoire de la province de
Québec, sous l'appellation des cinq veaux. On se souviendra que Rumilly,
que les historiens, que les journalistes...
M. BERTRAND: Ils étaient avec Chauveau.
M. LAPORTE: C'est ça. Disons que c'était un peu moins
grave pour au moins deux d'entre eux parce qu'ayant été
nommés ministres dans le gouvernement qu'ils avaient contribué
à mettre au pouvoir, ils devaient à ce moment-là retourner
devant les électeurs pour se faire réélire. Deux d'entre
eux ont dû se représenter at ils ont été
réélus. Mais la loi qui obligeait les ministres à se
représenter devant les électeurs a été
amendée en 1927.
M. le Président, je voudrais aller un peu plus loin pour montrer
que l'on peut véritablement, si la loi n'est pas amendée, se
trouver en présence d'une fraude considérable. J'imagine que
quatre ou cinq ou dix indépendantistes, une option parfaitement
légale et défendable pour ceux qui y croient, que quatre ou cinq
membres du Parti nationaliste chrétien s'infiltrent pour des fins
électorales dans un des deux partis traditionnels. Ces gens-là
réussissent à se faire choisir comme candidats. Il y en a quatre
ou cinq de chaque côté, dans les deux partis traditionnels et au
lendemain des élections, alors que les électeurs ont voté
pour cinq candidats de l'Union Nationale at pour cinq candidats
libéraux, vous avez dix bonshommes qui disent: Nous autres, nous sommes
des indépendantistes ou nous sommes du Parti nationaliste
chrétien. Je prétends qu'à ce moment-là vous auriez
immédiatement dans cette Chambre sept ou huit ou dix ou douze
représentants de partis politi-
ques qui n'ont jamais reçu sous cette étiquette de mandat
des électeurs. Le lendemain des élections, avec la loi actuelle,
ils pourront s'écrier: Surprise! Je suis un membre du Parti
québécois. Je suis un membre du Parti communiste. Je suis un
membre du Parti nationaliste chrétien. Je suis maoïste.
M. le Président, ce stratagème pourrait, en pure fraude,
donner un ou plusieurs députés à des partis politiques
sous l'étiquette desquels ils n'auraient jamais été
élus. Nous avons décidé à l'unanimité de
cette Chambre de protéger les noms des partis politiques. Nous devons
maintenant accepter que cette protection existe pour le candidat qui se
présente et ça, la loi le reconnaît que la
protection existe pour l'électeur qui vote. Et le premier ministre
actuel, et le député de Laurier, et le chef du parti
libéral, et tous ceux qui actuellement dirigent des groupes politiques
insistent sur une chose en affirmant que les électeurs ont droit
à des options claires.
Nous sommes unanimes sur le principe, nous sommes unanimes pour
l'affirmer. J'affirme donc que l'électeur, même sur son bulletin
de vote et surtout sur son bulletin de vote, a droit à une option
claire, savoir très exactement pour qui il vote.
Théoriquement, l'électeur se sert de ce bulletin de vote
une fois tous les quatre ans. Quand on décide de frauder
l'électeur en le privant de son droit de vote, en faisant voter
quelqu'un à sa place ou en l'amenant à voter pour un candidat
qu'il n'approuve pas je reviens à la situation telle qu'elle
était avant 1966 c'est une violation directe de la
démocratie. Il faut protéger l'électeur; 11 faut
protéger le parti politique qui s'offre pour l'administration publique.
Si le chef d'un parti reconnu donne sa signature pour dire que M. Untel est son
candidat pas seulement son candidat personnel, mais qu'il accepte
d'être candidat pour un parti donné il a le droit de savoir
que ceux qui se présentent sous cette étiquette le font
véritablement.
IL faut que cette Chambre se protège également. Qu'il y
ait ici, avec le temps, des membres du Parti québécois ou des
nationalistes chrétiens ou des libéraux ou des membres de l'Union
Nationale, c'est la volonté des électeurs. On ne doit pas faire
de fabrication maison, de candidats de nouveaux ou d'anciens partis, lorsque
les électeurs n'ont pas donné leur consentement. Cette Chambre a
le droit de savoir, au moment où elle sort des élections,
à quel député de quel parti elle a affaire.
Je veux insister sur un sujet bien important: la liberté absolue
de chacun des députés encet-te Chambre de voter comme il
l'entend. Si les députés libéraux, de l'Union Nationale,
des indépendants ou des gens des tiers partis veulent voter pour ou
contre le gouvernement, à quelque moment d'une Législature, c'est
un droit strict et c'est un droit que l'on doit défendre en conscience.
C'est une chose. L'amendement que je vais suggérer, parce que je n'en ai
pas à proposer, ne couvre absolument pas le cas, et ne peux pas le
couvrir, d'un député qui décide de ne pas abandonner son
parti, mais, parce qu'il a changé d'option, décide de voter
systématiquement contre son parti.
Mais si un député a suffisamment de conscience ou de
fierté pour décider qu'il abandonne officiellement, il doit avoir
également conscience qu'il devra aller redemander un mandat à
ceux qui l'ont élu sous une autre étiquette.
M. le Président, beaucoup de députés ont
parlé de ce problème, beaucoup de députés m'ont
parlé de ce problème. Je sais que c'est un sujet de conversation
favori dans maintes réunions. C'est le député de Chambly
qui aura attaché le grelot. Il n'en est ni fier, ni gêné.
Il croit que, dans l'établissement chez nous d'une démocratie
continuellement en progrès, il était normal qu'il le fasse. C'est
pour toutes ces raisons, M. le Président, que je réclamerai, en
temps et lieu, que la Loi électorale soit de nouveau amendée,
afin de prévoir que tout député élu sous
l'étiquette d'un parti reconnu soit automatiquement déchu de son
siège, s'il abandonne son parti, et qu'une élection partielle
soit tenue dans les délais prévus par la loi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche.
M. LOUBIER: Je demanderais, M. le Président, la suspension des
travaux de la Chambre. Maintenant, en ce qui me concerne, j'en aurai à
peine pour cinq ou six minutes. Cela fera suite aux propos tenus par le
député de Chambly.
UNE VOIX: Ce n'est pas nécessaire. M. PAUL: Huit heures
quinze.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit
heures quinze ce soir.
Reprise de la séance à 20 h 17
M. LEBEL (président): L'honorable ministre du Tourisme, de la
Chasse et de la Pêche.
M. Gabriel Loubier
M. LOUBIER: J'aimerais faire suite aux propos tenus par le leader de
l'Opposition dans le cadre de l'amendement qui devrait être porté
à l'attention de la Chambre concernant le ou les députés
qui, au cours de l'exercice d'un mandat, après avoir été
élus sous la bannière d'une formation politique, décident,
pour une raison ou une autre, d'abandonner cette formation politique, de
demeurer quand même en Chambre et de siéger comme
député avec tous les droits et les privilèges que leur
fonction comporte.
Je pense que c'est faire justice au leader de l'Opposition que
d'affirmer qu'il a cerné la question avec beaucoup d'à propos et
qu'il l'a traitée, tant sur le plan historique que sur le plan
constitutionnel et que sur le plan strictement démocratique ou des
valeurs démocratiques. J'aurais souhaité que ceux que l'on a
appelés les veaux, au temps de M. Chauveau, soient en Chambre pour
pouvoir juger des argumentations présentées. En même temps,
ils auraient peut-être eu l'occasion de faire entendre leurs voix pour
expliquer leur attitude. Mais ce n'est pas nouveau. Ce sont ceux qui sont
presque toujours absents qui crient aux quatre coins du Québec qu'ils
ont des droits et des privilèges comme députés, mais qui
ne viennent pas siéger comme un véritable député
devrait le faire.
De toute façon, j'ai déjà exprimé
antérieurement mon opinion et je ne veux pas par là relancer mon
collègue le député de Chambly, mais j'ai
déjà publiquement condamné des députés, ici,
en Chambre, premièrement, et deuxièmement, en comité, lors
de la discussion de mes crédits, j'ai déjà exprimé
non seulement ma désapprobation mais mon mépris pour ces
députés, de quelque formation politique qu'ils soient, qui
s'étaient conduits ou qui avaient l'intention de se conduire de cette
façon. Je l'ai fait en Chambre, il y a quelques mois, à l'endroit
du député de Laurier, et j'ai récidivé avec
infiniment de plaisir et de vigueur, lors de la discussion de mes
crédits budgétaires la semaine dernière en
comité.
Or, M. le Président, je pense que, pour un député,
comme je ne voudrais pas répéter les arguments
présentés par le leader de l'Opposition, il l'a fait avec
beaucoup d'à-propos, et à mon sens, il a cerné le
problème et donné une véritable perspective à cet
état de choses.
Cependant, j'aimerais souligner davantage un aspect de la question,
savoir; qu'un député, à brûle-pourpoint, pour
quelque raison que ce soit, a abandonné le parti politique auquel il
appartient, sous l'étendard duquel il s'est présenté, avec
le programme duquel il s'est présenté, sans compter l'atout
extrêmement important et quasi indispensable, et qui est consacré
par la loi, des montants qui lui sont remis lorsqu'il est candidat officiel
d'une formation politique en règle avec la loi, lorsqu'il a joui
également de la publicité de ce parti, lorsqu'il a Joui
également du prestige du chef du parti, quel qu'il soit, car le chef a
toujours du prestige, a toujours du panache pour des clientèles
données. Lorsqu'un candidat devient député, qu'il
prêche devant sa population, qu'il se présente sous
l'étendard du parti libéral ou de l'Union Nationale, qu'il jouit
des sommes d'argent, de la publicité, sans compter qu'après avoir
vérifié le résultat des élections, depuis 1936,
mais depuis 1940 et 1944 plus particulièrement, il est prouvé
que, dans la presque totalité des comtés de la province de
Québec, il y a 75% à 80% des électeurs qui ne changent pas
d'allégeance. Ce qui veut dire que, par exemple dans Nicolet, en 1936,
il y avait 52% des voix pour l'Union Nationale, 44% pour le parti
libéral, et tout la trajectoire. Il y a en 1940, 44%; en 1944, 48%; 49%
en 1948; 50% en 1952 contre 49.2%; 54% contre 41.7%; 52.8% contre 47%, etc.
etc.
Vous prenez les comtés un 3. un, et quel que soit le candidat en
lice, comme individu, quelle que soit sa personnalité, quelle que soit
sa valeur, quel que soit son panache, un candidat pour le parti libéral
ou pour l'Union Nationale, dès le départ, a une clientèle
assurée d'entre 35% et 42% et c'est immuable depuis vingt ans, selon les
statistiques.
C'est donc dire, de façon pratique et réaliste, qu'un
candidat libéral dans le comté de Bellechasse par exemple
peu importe quel sera le candidat contre lui peut compter au
départ, indépendamment de sa qualité et de sa valeur, sur
40% à 42% du vote. La différence du résultat ou de la
victoire se situe, dans presque la totalité des comtés, entre 2%,
4%, 6%, 8% et, très exceptionnellement, 10%.
Je pense que si l'on veut être lucide, si l'on veut être
objectif c'est un autre argument de fait qui s'ajoute à tous les
arguments de droit et d'histoire qui ont été soumis par le
député de Chambly il me semble que si l'on veut vivre en
démocratie sous le régime d'une constitution, si l'on veut que
cette démocratie soit vivante, que, réellement, le peuple
gouverne, que ce vieil adage qui a traversé les siècles: «
vox populi, vox Del » s'applique bien dans un système
démo-
cratique, si l'on veut que le droit sacré du peuple à une
démocratie vivante s'applique il faut, à mon sens, respecter le
verdict qu'une population a donné lors d'une élection.
Un vote, cela devient, cela demeure et cela restera l'instrument le plus
précieux pour le peuple vivant en démocratie, parce qu'une fois
tous les quatre ans ordinairement, selon l'usage c'est le peuple
qui, pour une journée, est maître de ses destinées. C'est
le peuple qui, pour une journée, a dans ses mains le sort du
gouvernement qu'il désire et c'est lui qui, librement, une fois, se sert
de cet instrument et fait que la démocratie a encore de la valeur.
Or, un député élu j'essaie, même si
j'ai de la difficulté, de retenir des expressions qui marqueraient mon
profond mépris, comme je l'ai déjà dit... Quand un
député ou quand un parti politique est au pouvoir durant quatre
ans, on dit parfois comme argument: Oh, le parti libéral, l'Union
Nationale, les partis reconnus ont prôné tel programme, ont
juré qu'ils réaliseraient tel projet! Eh bien! Il appartient au
peuple, après quatre ans, selon l'usage, de décider, s'il a
été trompé, qu'il doit continuer à avoir confiance
en cette équipe.
On sait fort bien qu'un programme politique, de quelque parti que ce
soit... Il faut être honnête; la conjoncture change tellement
rapidement, tant sur le plan économique que sur le plan social, qu'il
faut attendre trois ou quatre ans pour pouvoir se prononcer d'une façon
objective. A la lumière des événements qui se sont
déroulés, du climat politique qui régnait et des
conditions socio-économiques qui ont prévalu durant cette
période-là, il appartient au peuple de juger de la valeur de
l'action ou encore de la valeur des hommes après que leur mandat a
été complété.
Si un député change d'allégeance après six
mois ou un an, à mon sens, c'est un sabotage direct des fondations
mêmes de notre système démocratique. Pour reprendre un peu
les propos du député de Chambly, si l'on versait dans
l'extrême, sans être dramatiques et sans chasser les
sorcières à satiété, un groupe de
députés pourrait réussir à s'infiltrer par le
soupirail dans un parti politique et, à gagner, par toutes sortes
d'artifices, la confiance d'une convention se présentant sous tel
étendard politique. Cela deviendrait, à ce moment-là, un
cheval de Troie et, dès que l'élection serait passée,
dès que le parti politique auquel ils ont adhéré serait au
pouvoir, ces gens-là auraient la corde pour faire danser qui que ce soit
ou, encore bien pire, pourraient arriver en Chambre avec des idéologies
diamétralement opposées à celles prêchées par
le ou lesdits partis politiques et même verser, à ce
moment-là, dans des idéologies politiques ou dans des
philosophies qui ne seraient jamais acceptées par la population qui les
aurait élus.
Je pense que les députés qui ont, depuis quelque temps,
pour une raison ou pour une autre, quitté la formation politique avec
laquelle ils s'étaient assuré un siège en Chambre,
usurpent le siège qu'ils occupent actuellement ou qu'ils n'ont
reçu aucun mandat démocratique des populations qui les ont
élus.
Quelques-uns, qui veulent être plus théoriques que
pratiques et qui veulent se lancer dans de très, très hautes
considérations qui donnent le vertige à tous ceux qui veulent
vivre les pieds sur terre et être pratiques, vont dire: Oh, mais, sur le
plan de ma conscience, je ne pouvais plus demeurer dans tel parti politique. Je
ne pense pas que l'un ou l'autre des partis politiques soit dans un état
de dégradation tel qu'il s'en trouve un, deux ou trois pour dire que
ça n'a plus de sens et qu'ils sont absolument égorgés par
leur conscience.
Le député de Chambly l'a souligné à bon
escient, chaque député en cette Chambre et c'est un droit
acquis et consacré chaque député dans cette Chambre
a pleine liberté, lorsqu'il y a un vote sur un projet de loi quelconque
ou sur des amendements quelconques, de faire valoir sa conscience. Il n'y a pas
un député qui soit prisonnier d'un parti politique à tel
point que, si sa conscience l'étreint tellement et le fait
dépérir moralement, il ne puisse pas avoir une position virile
et, à ce moment-là, se prononcer, même si c'est contre son
parti.
UNE VOIX: Très bien!
M. LOUBIER: M. le Président, d'autres diront: Oui, mais lorsque
je me suis présenté pour tel parti politique, il avait un
programme donné, il avait une philosophie donnée. Comment
expliquer ce paradoxe si, au bout d'un an, de six mois, de trois mois ou d'un
an et demi, le même député alors que le mandat n'est pas
terminé, puisqu'il est de quatre ans, sait d'avance que le programme ne
sera pas réalisé, ou que l'orientation d'un parti ne sera pas
complètement définie, et que le parti politique qu'il soit
de l'Opposition ou qu'il soit au pouvoir, que ce soit pour une raison d'option
constitutionnelle, d'option d'éducation ou d'autres options
socio-économiques ... comment peut-il savoir d'avance que le
programme ne sera pas réalisé, alors que le mandat et le terme
des élections sont, selon l'usage, de quatre ans?
Ce sont des faux-fuyants faciles qui cachent beaucoup d'autres buts
inavoués, qui cachent
beaucoup d'autres objectifs individuels qui ne sont pas ceux à la
hauteur de l'intérêt de la collectivité ou du parti
politique en question.
M. le Président, je dis que c'est un sabotage. Je dis que, de la
part de ces gens-là, comme Je l'ai fait et comme je l'ai
déclaré dans le passé, c'est une tricherie monumentale.
Lorsque l'on plaide la valeur sentimentale, morale de la conscience d'un
député en question, lorsque l'un ou l'autre de ces
députés se sent la mission, entend des voix, et que c'est le
destin d'un peuple qu'il veut sauver, et que si, à ce moment-là,
il veut arriver à sa vocation, répondre aux voix qu'il
l'appellent vers des sommets idéalistes, s'il est si sûr de sa
vocation, si sa mission est tellement sacrée, est tellement
élevée, s'il est tellement convaincu qu'il répond
là à un désir de la population, il a justement le devoir
de retourner devant sa population. Il doit se faire donner un mandat
précis pour répondre à ces voix qui l'appellent la nuit ou
autrement et là, par sa population, recevoir un mandat net,
précis, non équivoque, pour répondre à ces voix qui
veulent le diriger vers les plus hauts sommets.
M. CADIEUX: Il va manquer de voix! M. LOUBIER: Alors, M. le
Président...
M. CADIEUX: Il se peut qu'il lui manque des voix à cette
occasion-là.
M. LOUBIER: M. le Président, en terminant, comme Je l'ai
signalé, la question a été très bien
traitée, le sujet très bien couvert par le député
de Chambly. Mais je ne voulais pas, en ce qui me concerne en tout cas, qu'on me
dissocie de la proposition faite par le député de Chambly. Au
contraire, Je trouve qu'elle est bienvenue, elle est à propos, et non
pas pour des considérations mesquines de parti politique.
Il y a le jeu des principes qui se situe au-dessus de ces
considérations partisanes. A mon sens, il est temps de mettre de
l'ordre, de régulariser la situation et de prévoir, dans la loi,
des situations telles que celles que nous avons vécues
dernièrement.
En terminant, je dirai que l'amendement suggéré devrait
être inséré au plus tôt dans la Loi
électorale. A ce moment-là, je plaide pour son bien-fondé.
Je dis qu'il s'agit de la dignité même des députés,
non pas parce qu'ils ont déserté une formation politique, mais
parce qu'ils ont trahi le mandat qu'ils ont reçu. Il y va de leur
dignité comme membres de l'Assemblée nationale. Je pense que cet
amendement les proté- gerait de ce que j'appellerais une
lâcheté. Deuxièmement, il y va du respect de la
démocratie. C'est souvent dans la bouche de ceux-là qu'on entend
le plus souvent le mot « démocratie », l'expression «
Il faut répondre aux impératifs de notre destin comme peuple
» ou l'expression « reconquête de notre autonomie sur tous
les plans ». Comme je le disais au début, pour employer
l'expression de M. Chauveau, ce sont ces veaux qui ne sont pas en Chambre et
qui devraient l'être pour essayer d'expliquer leur présence.
Troisièmement, je pense qu'il faut régler cette situation
par considération pour les collègues de cette Chambre et par
considération pour la Chambre elle-même. Ces gens-là savent
fort bien intérieurement qu'ils n'ont pas de mandat et qu'ils n'oeuvrent
pas dans les cadres démocratiques qui nous permettent d'évoluer
actuellement. Ils vont à l'encontre de la volonté de la
population; ils vont à l'encontre de la loi et ils pêchent surtout
contre leur propre dignité, contre leur propre fierté. Je
félicite le député de Chambly d'avoir fait cette
suggestion. Quant à moi, j'y abonde à 100% et j'appuierai, de
toutes les façons, les efforts qui seront faits pour insérer le
plus rapidement possible cet amendement dans la Loi électorale.
M. Georges-E. Tremblay
M. TREMBLAY (Bourassa): M. le Président, le député
de Chambly a fait un très bon discours cet après-midi, ainsi que
le député de Bellechasse. Seulement, moi, je vois une chose dans
le parti libéral je ne sais pas si on l'a dans d'autres partis;
je respecte les autres partis je regarde cela d'un autre point de vue.
Je crois que, dans cette Chambre, même si je suis député
libéral, j'ai le droit de voir cela d'une autre façon. Un
député nouvellement élu doit passer au moins deux ans dans
cette Chambre avant de savoir ce qui s'y passe. Si les nouveaux
députés sont honnêtes envers cette Chambre, ils
l'admettront.
Le député de Bellechasse a parlé des programmes
électoraux. Je crois que j'aurais un bon discours à faire dans
cette Chambre là-dessus; il durerait cinq heures. Je ne ferais pas de
politique de parti, à ce moment-là. Dans les programmes
électoraux, on essaye d'endormir la population pour se faire
élire. Je trouve cela très malhonnête. Je vous l'avoue
sincèrement, c'est très malhonnête. Je peux vous dire que,
dans mon comté, je ne me suis pas fait élire de cette
façon-là. Quand on arrive dans cette Chambre et qu'on entend les
discours disant qu'il faut être des hommes de parti, je suis
bien d'accord là-dessus. De là à marcher à
terre moi, je suis gros et la bedaine me traînerait à terre
je ne suis pas d'accord sur ce point-là.
Il faut toujours dire comme les chefs de parti. Mais ce sont les gens de
nos comtés, l'élec-torat que nous devons représenter.
Quand je vois ceux qui sont élus depuis 1960 ou 1962, remarquez
bien, je leur laisse leur idée, je leur laisse leur conviction. Mais,
mol ma conviction c'est que le député qui est élu en cette
Chambre remarquez bien que ce n'est pas ma conviction, ça va
peut-être l'être d'ici dix ans, on ne le sait jamais s'il
est au pouvoir, si ça ne lui plaît pas et que le gouvernement ne
suit pas la règle, ne suit pas son programme, il a le droit de
représenter sa population comme il l'entend. Il a eu le mandat de
représenter ses électeurs et, à ce moment-là, s'il
ne représente pas ses électeurs, s'il suit le programme et que le
programme n'est pas suivi, comme on dit souvent, comme l'Union Nationale,
à l'heure actuelle si vous regardez le programme de l'Union
Nationale, M. le Président, il y avait 108 promesses, il y en a si peu
près 8 ou 9 qui sont réalisées à l'heure actuelle
alors, je ne blâmerais pas un député de l'Union
Nationale qui à un moment donné, dirait: Je ne peux plus
siéger avec les choses avec lesquelles je me suis fait élire. Je
ne peux pas être contre ça.
Je suis assez honnête que si mon parti était au pouvoir et
qu'il faisait la même chose que l'Union Nationale, je ne l'accepterais
pas. Je suis honnête avec vous. Je vous le dis, parce que Je me suis fait
élire avec l'étiquette de l'Union... non, pas de l'Union
Nationale, jamais...
M. le Président, ça prend un député
libéral pour dérider l'Union Nationale, parce qu'à l'heure
actuelle, ils sont tellement sérieux avec leur prochain congrès,
franchement, ça prend un député libéral pour les
dérider un peu. Cela me fait plaisir, seulement, j'ai été
élu avec le parti libéral.
Il y a seulement une chose, et mon discours ne sera pas long.
M. ROY: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Bourassa): ... il y a une chose que je ne pourrais pas
voter. Remarquez bien, je ne suis pas contre mon parti, je ne suis pas contre
le ministre de la Chasse, de la Pêche et des Sports et tout ça.
Seulement, M. le Président, je n'accepterais pas...
M.BERTRAND: Etc.
M. TREMBLAY (Bourassa): ... qu'un député dans cette
Chambre remarquez bien, je ne me lève pas souvent en cette
Chambre, M. le Président, Je ne me lève pas souvent, parce que
j'ai eu le malheur de passer proche de me faire sortir de cette Chambre, parce
que je posais trop de questions Seulement, ce soir il y a une chose que
je peux vous dire, que je vous demande, M. le Président. Je demande
à cette Chambre qu'on laisse la liberté aux
députés. Qu'on laisse la liberté et, dans l'avenir, encore
plus la liberté aux députés de voter sur les lois et sur
les choses qui représentent le député lui-même.
C'est la seule chose que je peux vous demander, M. le Président. Je vous
laisse sur ça. Seulement il y a une chose que je ne peux pas. Je ne peux
pas admettre qu'un député ne pourra voter suivant son
opinion.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. MICHAUD: M. le Président, le projet de loi que...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. MICHAUD: M. le Président, le...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Gouin.
M. Yves Michaud
M. MICHAUD: M. le Président, le projet de loi que nous avons
devant nous, projet de loi no 7, projet de loi gouvernemental visant à
donner aux Indiens domiciliés dans nos réserves le droit de vote
et d'être inscrits sur les listes électorales, a d'incontestables
mérites.
Je pense qu'il est temps que l'on donne enfin le droit de vote aux
Indiens à cette tranche de la population qui n'a peut-être pas
écrit, un peu par notre faute, la plus belle page d'histoire du
Québec et qui ne s'est pas inscrite dans la lignée de la
tradition démocratique parlementaire.
M. le Président, c'est un souci de démocratisation de la
part du gouvernement qui est louable. Je serais bien le dernier des derniers
à essayer de critiquer ce projet de loi qui est valable en sol.
Le gouvernement du Québec veut faire d'une portion de notre
population, d'une catégorie de nos concitoyens, des hommes libres,
égaux en droit, des contribuables à part entière, habiles
à choisir leurs représentants, ce sont là, si j'ose ainsi
m'exprimer, des vertus cardinales
de tout gouvernement. L'Union Nationale ajoute donc, et le gouvernement
comme tel, un élément de démocratisation à nos lois
déjà existantes, et je dis: Bravo!
Je ne trouve pas étrange que le gouvernement manifeste autant de
libéralisme à l'endroit des Indiens de cette catégorie de
nos citoyens, mais je trouve, par ailleurs, un peu suspecte cette commode et
tranquille impudeur au sujet du problème numéro 1 de la
démocratie québécoise, lequel problème est la
représentation équitable du peuple au sein de l'Assemblée
nationale. Tout notre système politique repose sur le régime
représentatif par le moyen du suffrage universel qui assure la
représentation du peuple dans nos parlements et dans nos
assemblées délibérantes.
Pour choisir nos gouvernements, nous avons une idée simple,
commode, facile, incontestable : la règle de la majorité,
c'est-à-dire que ceux qui sont appelés à exercer la
décision politique sont censés représenter l'expression
majoritaire de la volonté populaire régulièrement
exprimée par le truchement des scrutins et des élections. Cette
règle de la majorité, nous la vivons tous les jours, toutes les
semaines dans ce parlement, alors que le gouvernement présente des lois,
lesquelles lois deviennent en vigueur une fois qu'elles ont passé par le
chemin de la règle de la majorité.
Or, cette règle qui est tellement respectée ici, il est
arrivé et il arrive encore qu'elle soit ouvertement bafouée au
Québec, que les gouvernements, et plusieurs furent ceux-là
d'entre eux qui exercent le pouvoir, ne représentent pas l'expression
majoritaire de la volonté nationale. J'ai écouté avec
beaucoup d'attention le député de Bellechasse et ministre du
Tourisme qui parlait d'élus du peuple, d'hommes politiques qui pouvaient
usurper leur siège en changeant d'étiquette politique
après avoir été élus sous la bannière d'un
autre parti.
M. LOUBIER: Sans repasser devant le peuple.
M. MICHAUD: Bien sûr, il y a une indécence dans ce fait,
mais il y a également une indécence, et celle-là plus
grande, dans le fait que, par le truchement du découpage
électoral, des gouvernements puissent arriver en exercice du pouvoir, ne
représentant pas l'expression de la volonté populaire,
l'expression de la règle de la majorité et puissent gouverner. Et
je dis que s'il y a dans le cas du député élu sous
l'étiquette d'un parti qui change éventuellement de parti, une
usurpation de pouvoirs, il y a une usurpation de pouvoirs beaucoup plus grande
dans le cas d'un groupe politique. Je ne veux pas faire d'allusions
personnelles ou d'allusions collectives, même à des groupes
politiques existants. Je dis qu'à la base même de notre
système, il y a un vice fondamental à corriger.
Je ne veux pour seul exemple d'usurpation de pouvoirs, et je le choisis
à titre d'exemple uniquement parce qu'il a pu se répéter
au cours de l'histoire politique du Québec, à la dernière
législative de juin 1966, le parti libéral du Québec
obtient 48% des suffrages exprimés, l'Union Nationale en obtient 41%. Et
je m'étonne que cela ne dérange pas le sommeil de nos
démocrates. Je m'étonne que ceux qui partent toujours en guerre
contre les abus de pouvoirs, contre les usurpations de pouvoirs demeurent si
aphones et si hébétés devant un des vices fondamentaux de
notre système représentatif. Je me dis: Pourquoi tous les partis
politiques qui se succèdent à la barre du pouvoir, pourquoi ces
feintes, ces calculs, ces hésitations, ces reculs, cette volonté
obstinée de ne pas vouloir, une fois pour toutes, regarder les choses en
face et, ensemble, corriger ce qui m'apparaît comme le vice fondamental
de la démocratie québécoise? Les gouvernements du
Québec c'est arrivé sont presque toujours en
état permanent d'usurpation du pouvoir au profit d'une caste de citoyens
privilégiés.
D'un côté, le gouvernement, avec le projet de loi no 7,
donne le droit de vote aux Indiens; de l'autre, il maintient une situation
injuste qui fait que les électeurs des centres urbains sont
sous-représentés au Parlement de leur nation.
M'expliquera-t-on, M. le Président, enfin un Jour en vertu de
quel principe un électeur de Brome, de Bagot, de Montcalm, de
Bellechasse, de Missisquoi, a cinq fois plus de poids, d'autorité et de
prestige...
M. BERTRAND: C'est élémentaire.
M. MICHAUD: ... pour choisir ses gouvernants qu'un électeur de
Gouin, de Dorion, d'Ahuntsic, de Verdun ou de Maisonneuve? Au nom de quel
principe de justice et d'équité, par quel artifice, par quelle
aberration de l'esprit peut-on admettre cette situation de nos gouvernants qui
tolèrent qu'il existe dans notre société
démocratique des citoyens inférieurs qui sont les citoyens
urbains sous-représentés au Parlement de leur nation?
Je me dis que cette situation est nocive non seulement pour les
centaines et les centaines de milliers de Québécois qui vivent
dans les centres urbains, mais qu'elle est également nocive pour
ceux-là même des citoyens que cette situation prétend
protéger. Cette situation du mau-
vais découpage de la carte électorale défavorise
les citoyens des comtés ruraux sur les plans économique,
politique et social parce qu'elle crée un état de balkanisation
de nos régions, de morcellement et de découpage contraires aux
propres intérêts des citoyens qui vivent dans les comtés
ruraux du Québec. La carte électorale du Québec, à
l'heure actuelle, fait plus que créer des injustices sur le plan de la
représentation du peuple. Elle rend impraticable et elle freine les
politiques de développement régional avant même que
celles-ci soient mises en application.
Je me demande, M. le Président, au nom de quoi cela arrive. Tout
le monde sait qu'aucune planification ne peut véritablement
réussir que si elle est greffée, articulée sur des
régions homogènes et intégrées. Or, la situation
actuelle est désastreuse parce qu'elle repose d'abord sur le maintienne
privilèges anciens, sur un refus, je le répète,
obstiné de la part des gouvernements de corriger la
représentation parlementaire et de l'adopter aux conditions
présentes de notre société. Pourquoi, M. le
Président, au nom de quoi cette situation humiliante qui fait que des
centaines de milliers de Québécois sont
sous-représentés, situation qui provoque, et c'est d'autant plus
grave, l'avortement systématique des efforts de redressement et de
développement régional?
Parce que le Parlement de Londres, il y a cent ans, a voté dans
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique une loi protégeant des
comtés en vertu de situations qui existaient alors et qui ne doivent
plus avoir cours aujourd'hui.
Le monde change, évolue avec une rapidité extrême.
Nous sommes à l'époque de la cybernétique, de
l'informatique. Nous sommes à l'époque des cosmonautes qui
violent les espaces intersidéraux. Et, sur des problèmes comme
ceux-là, nous avançons à petits pas d'enfants; nous
balbutions des réformes alors que se pose à notre attention un
problème aussi crucial et grave que celui de la représentation
des citoyens dans un Parlement, dans une assemblée
délibérante.
La réforme de nos collèges électoraux s'Impose,
comme il faut d'ailleurs, je pense, réviser toute notre conception de la
représentation parlementaire. Je le dis ici sans scandale; il va falloir
un jour songer à la représentation des fractions minoritaires de
l'opinion publique, ce que nous appelons les tiers partis, tiers partis qui
sont, je crois, injustement balayés par le système du bipartisme.
Les gouvernements sont en état et en acte de mensonge permanent
lorsqu'ils laissent se perpétuer des situations injustes comme celle du
découpage élec- toral actuel et aussi lorsqu'ils écartent
automatiquement à la représentation à l'Assemblée
nationale les tiers partis.
Il y a ce problème et celui-là est grave de
la légitimité du pouvoir quand il ne représente, comme
c'est le cas actuel, comme cela a été le cas il y a des
décennies, quand il ne représente qu'une fraction de la
souveraineté populaire.
Le problème soulevé par le député de
Chambly, repris par le député de Bellechasse, de l'affiliation
d'un élu du peuple a un parti politique, de la possibilité ou de
l'éventualité pour ce dernier de changer d'allégeance,
bien sûr est un problème grave.
Je suis de ceux qui croient également qu'il y a une
indécence à se faire élire sous l'étiquette d'un
parti pour ensuite en changer. Mais je me dis que cela, bien que condamnable,
est moins condamnable encore que le système actuel qui fait que le
découpage électoral est injuste d'une part, et d'autre part que
le système actuel ne favorise pas, par un réflexe de
défense tout à fait normal que Je m'explique bien, les partis,
dits traditionnels, de l'émergence des nouvelles forces politiques au
Québec, car il faut bien se rendre compte qu'il y en a.
Nous évoluons, insensiblement peut-être, vers une sorte de
pluralisme politique, vers une multiplicité des partis. Je n'ai
qu'à regarder l'histoire présente: il y a le Parti
québécois, le Parti nationaliste chrétien, le
Crédit social; il y avait le RIN, le RN, le Parti libéral
unifié de récente date, le Ralliement crédltiste, l'Union
des électeurs, le Bloc populaire, il y a une vingtaine d'années.
Le moins que l'on puisse dire sans sourire, c'est que le jeu de la politique
québécoise est plus prolifique pour engendrer des nouveaux partis
que les Québécoises elles-mêmes, depuis quelques
années.
Tout cela devrait nous faire un peu réfléchir sur les
conditions d'exercice de la démocratie québécoise. Ce
n'est peut-être pas par hasard que ces groupuscules politiques naissent
au rythme des amours et au rythme des saisons. Il y a, bien sur, une
explication à cela. N'est-il pas permis de se demander, sans crier au
scandale, si nos partis tratltlonnels ne devraient pas être assez
tolérants pour protéger en leur propre sein et admettre la
multiplicité des tendances et des orientations?
Je prends l'exemple américain. Je constate qu'il y a deux grands
partis traditionnels: le parti démocrate et le parti républicain.
A l'intérieur de ces formations politiques, toutes les tendances, toutes
les familles, si vous voulez, spirituelles et politiques peuvent être
intégrées
et harmoniser leurs conflits éventuels à
l'intérieur de mêmes formations.
Il y a l'exemple américain, il y a également l'exemple
français. En France, le parti gaulliste, sur beaucoup de points
extrêmement dur et extrêmement intransigeant, tolère
cependant dans son sein une famille spirituelle marginale qui s'appelle les
républicains indépendants sous la conduite de M.
Giscard-D'Estaing. Et M. Giscard-D'Estaing n'est pas excommunié de la
majorité gaulliste parce que lui ou son groupe peuvent à
l'occasion différer d'opinion sur tel ou tel point de la politique
française.
Ce n'est pas faire scandale, je pense, que de réfléchir
sur ces questions. Je suis d'autant plus à l'aise pour dire toutes ces
choses qu'à l'intérieur de la formation politique à
laquelle j'appartiens, j'ai toujours joui d'une extreme totale liberté
de parole et d'expression.
Je me demande si des réflexes tratitionnels de peur, dont
l'exemple le plus frappant a été le discours du
député de Bellechasse, des réflexes que je dirais normaux,
des réflexes normaux parce que, bien sûr, cela vient briser les
règles du jeu, je me demande si les réflexes traditionnels de
défense des partis dits reconnus, devant la montée des tierces
formations, servent finalement les fins de la discussion et du débat
politique.
Je dis que le danger des tiers partis bien sûr, je le
constate c'est le morcellement de l'opinion publique en groupuscules et
ses conséquences inévitables, c'est-à-dire
l'instabilité ministérielle, l'impossibilité, finalement,
pour les citoyens de se choisir des gouvernements.
D'ailleurs, l'histoire n'est pas éloquente sur les excès
de la démocratie, le régime de la représentation
proportionnelle, par exemple, la multiplicité des formations politiques
dans la république de Weimar, ces excès qui ont
préparé le lit c'est vrai du fascisme et du nazisme
hitlérien.
Je dis qu'il y a là des problèmes tout aussi graves qu'a
favorisés la multiplicité des groupes et des formations.
Finalement, nous desservons le bien commun. Mais là-dessus, pour ma
part, et ne parlant qu'en mon nom, je serais plutôt porté à
libéraliser les partis traditionnels reconnus, à ouvrir, à
l'intérieur de ceux-ci, les voies les plus grandes, les plus
libérales de la contestation politique plutôt qu'à
favoriser l'émiettement de la pensée politique dans des
groupuscules, dans des cénacles ou des chapelles qui seront toujours
intolérantes, parce qu'ils sont à la poursuite d'un pouvoir
lointain et inaccessible.
H y a ce problème et tant d'autres que, à l'occasion de
l'étude d'une loi électorale, nous devrions nous poser, le
problème du financement des partis politiques par l'Etat. Je suis un de
ceux qui croient que les partis politiques devraient être financés
par l'Etat, puisqu'un pas a déjà été fait par
l'ancien gouvernement pour financer les dépenses électorales des
candidats qui briguent les suffrages à une élection. Je crois que
nous devrions faire un pas en avant, répondre à cette partie
torturée, inquiê-te, angoissée, à tort ou à
raison, de l'opinion qui est d'accord avec le financement des partis politiques
par l'Etat.
Tout cela pour dire qu'en ces choses, à l'occasion de
l'étude d'une telle loi, il reste beaucoup à faire, que nous
sommes tragiquement en retard, bien que nous votions des lois progressistes
dans beaucoup de secteurs, pour tout ce qui concerne l'amélioration de
notre système. Nous sommes éternellement, je pense, retardataires
dans l'amélioration du système du régime
représentatif de la carte électorale, qui est à la base
même du fonctionnement de notre système démocratique. Je
dis: Le peuple du Québec tolérera-t-il encore longtemps nos
hésitations, nos calculs, notre prudence un peu maladive devant ces
problèmes qui devraient nous solliciter de toutes parts et qui devraient
revendiquer notre attention la plus immédiate? Je pose la question et
j'y réponds un peu en disant: Je me permets de douter que la
société québécoise tolérera longtemps notre
inaction dans ce domaine.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette); L'honorable député
de Duplessis.
M. Henri Coiteux
M. COITEUX: M. le Président, dès la présentation du
bill 7, après avoir pris connaissance des notes explicatives, Je
m'étais proposé d'Intervenir. Naturellement, le titre de la loi:
Loi modifiant la loi électorale, a ouvert les portes à beaucoup
d'autres discussions très intéressantes, mais il n'en reste pas
moins vrai que la raison qui motivait mon intervention, au départ, est
restée la même. Je puis dire ici que je suis cent pour cent
d'accord avec le député de Chambly, avec le député
de Bellechasse, pour qu'un député élu, s'il veut continuer
à siéger en Chambre, s'il change d'allégeance politique
ce qui est son droit se doive, en saine démocratie, de
retourner devant ses électeurs et de leur dire: Voici, je me suis fait
élire libéral, Je me suis fait élire Union Nationale, mais
aujourd'hui,
Je suis autre chose, et je viens vous demander un mandat clair et
net.
Je pense qu'à ce moment-là, personne ne serait
lésé. On ne conteste pas, aux gens qui veulent nous laisser, le
droit de le faire. Ce que l'on conteste, c'est la fausse représentation,
étant donné, comme l'a mentionné tantôt le
député de Bellechasse, qu'ils ont profité de la propagande
d'un parti, de l'argent d'un parti reconnu, et que ces gens-là sont
aujourd'hui élus avec toute la représentativité et la
force d'un parti. Ils sont, I mon sens, usurpateurs du titre de
député, tel que confié par les électeurs.
Pour ce qui est de la remarque, beaucoup plus scientifique, du
député de Gouin, je suis d'accord, en principe, sur ce qu'il a
dit au point de vue de la représentativité.
Mais, lorsque tout cela se discutera, j'espère bien être
présent, parce que représentant un comté qui a tout de
même 700 milles vers le nord et 650 milles vers l'est, je crois que si on
veut donner au comté de Duplessis le même nombre
d'électeurs que dans le comté de Gouin, le travail physique du
représentant public sera tout simplement impossible.
Même au point de vue des principes qu'on préconise et que
je partage, il y a sûrement certaines exceptions qui devront, lors de la
discussion de ce problème, être envisagées.
Là où je veux en venir, c'est que, représentant
d'un comté qui possède, à mon sens, le plus grand nombre
d'Indiens actuellement dans le Québec, je me devais de me lever pour
approuver, en deuxième lecture, le principe d'une loi par laquelle nous
donnerons le droit de vote aux Indiens.
D'ailleurs, lors du premier discours que J'ai fait en cette Chambre, en
1960, j'ai été appelé à commenter le vote des
Esquimaux, étant donné qu'ils n'avaient pas voté pour moi.
Le député de Bagot du temps me taquinait et me demandait comment
expliquer que le vote des Esquimaux n'ait pas été
libéral.
Je lui disais qu'en 1960, les Esquimaux étant
complètement à l'extérieur du reste de la province et
n'ayant presque pas pris de contacts directs avec la population actuelle du
Québec ne pouvaient pas psychologiquement donner un vote qui
signifiait quelque chose pour l'administration de la province. En effet, les
facteurs qui les incitaient à voter pour tel ou tel gouvernement
étaient loin d'être basés sur un minimum de connaissances
nécessaires pour donner un vote efficace dans l'administration de la
société québécoise.
Je disais que les Indiens du Québec avaient beaucoup plus de
raisons d'obtenir au plus tôt de la province le droit de vote.
Actuellement, nous avons à Sept-Iles une très grosse
réserve indienne. Nous avons des résidents à Moliotonam.
Nous avons une réserve indienne à la Romaine, une à.
Saint-Augustin, une à Mingan et une à Schefferville. Ces
gens-là, depuis des années, vivent en contact direct avec la
population québécoise. Presque tous, du moins les adultes,
possèdent suffisamment de français pour se rendre compte de
l'efficacité des lois et peuvent porter un jugement beaucoup plus proche
de la vérité que les Esquimaux.
C'est pourquoi je suis heureux que cette loi vienne aujourd'hui de
façon que ces gens, qui sont actuellement psychologiquement prêts
à donner un Jugement valable sur la politique du Québec,
deviennent enfin des citoyens à part entière de la province de
Québec. Je serai heureux de voter, en deuxième lecture, pour
l'adoption de ce bill.
DES VOIX Vote! Vote!
M. Gaston Tremblay
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président, quelques mots
seulement sur ce bill 7. Je félicite le gouvernement d'avoir
amendé cette loi afin d'accorder aux Indiens un droit qu'ils auraient
dû posséder depuis longtemps, le droit de vote que l'on devrait
aussi, par la même occasion, accorder aux Esquimaux.
En ce qui concerne les incidences qu'on a faites lors de ce bill
concernant le grand scandale qu'il y a pour un député de quitter
les cadres traditionnels d'un parti, l'Union Nationale ou le parti
libéral, je trouve que c'est un peu ridicule d'en parler. Cette
liberté de conscience que doit posséder le député,
11 doit pouvoir l'exprimer par les gestes qui s'imposent en certaines
circonstances, surtout dans les circonstances que j'ai vécues l'automne
dernier.
L'Indécence qu'il y a, c'est Justement de discuter et de vouloir,
au fond, nier le droit du député de laisser son parti qui a
oublié son programme. Qu'on ait cette liberté, M. le
Président! Que la Chambre fasse une loi d'exception et je sais ce que le
public en pensera! Il est absolument nécessaire, pour la liberté
parlementaire, que les députés puissent s'exprimer en dehors des
cadres des vieux partis tradition-nalistes.
M. ROY: Essayez donc celai Essayez donc de vous faire élire!
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre!
M. TREMBLAY (Montmorency): Lorsque l'on connaît la discipline que
l'on impose aux députés, lorsque l'on connaît aussi
l'esprit de parti que manifestent certains députés...
M. ROY: Essayez-donc de vous faire élire avec votre parti!
M. TREMBLAY (Montmorency): ... qui vont Jusqu'à la
négation des biens du peuple et de la population qu'ils
représentent, je pense que la liberté et le droit du
député d'exprimer librement ses opinions en dehors des cadres des
vieux partis, en dehors des principes du bipartisme que l'on veut actuellement
faire reconnaître, doivent être conservés. Je ne pense pas
qu'il soit logique qu'on ait pris la peine d'en parler, même à
l'occasion du bill 7.
Malheureusement, je n'ai pu assister à la séance de cet
après-midi; j'aurais voulu me préparer davantage pour
répondre aux prétextes...
M. LEDUC (Taillon): Le devoir d'un député, c'est
d'être en Chambre.
M. TREMBLAY (Montmorency): J'y suis, sauf en de très rares
occasions. Peut-être que certains membres de cette Chambre savaient que
je ne serais pas ici cet après-midi.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre I
M. LAPORTE: Si J'avais su que le député de Montmorency ne
serait pas en Chambre...
M. LOUBIER: Il n'est jamais là.
M. ROY: Il n'est jamais en Chambre, pas plus ce soir que d'habitude.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. LAPORTE: J'aurais été heureux que le
député de Laurier, auquel j'ai remis les notes que j'ai
utilisées cet après-midi, et le député de
Montmorency aient été en Chambre. J'ai fait une intervention
assez délicate. Je pense que c'est le rôle d'un
député élu, même s'il renonce à son parti,
d'être en Chambre.
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président, je conclus en disant
qu'il est absolument nécessaire que le député conserve sa
liberté d'expression en cette Chambre, même en dehors des cadres
des vieux partis. Je suis sûr que je représente ici une partie
importante de l'opi- nion de la population... Voulez-vous me laisser parler,
s'il vous plaît, messieurs!
M. ROY: Allez vous faire exorciser!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. ROY: Faites-vous exorciser!
M. DEMERS: Un petit coup de goupillon!
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président, je voterai pour le
bill 7. Je trouve cependant un peu saugrenues ces digressions qu'on a
apportées au bill 7 concernant la représensation de certains
comtés par des députés qui ont eu le courage, en fait, de
s'affirmer comme indépendants et d'émettre des idées qui
représentaient celles du peuple.
M. ROY: Vous n'aurez pas le courage de vous présenter comme
indépendant. Jamais!
M. LOUBIER: Vous n'avez pas le courage de vous présenter devant
le peuple, par exemple.
M. ROY: Vous n'avez pas eu le courage de vous présenter comme
indépendant.
M. LE PRESIDENT: (M. Fréchette): A l'ordre!
M. TREMBLAY (Montmorency): Si le gouvernement veut bien
démissionner, j'aurai le courage de me représenter.
M. ROY: Essayez cela tout de suite.
M. TREMBLAY (Montmorency): Devant les promesses oubliées, Je sais
que le gouvernement n'a pas ce courage. Il a usurpé son droit de
représenter la population. Lui-même n'a pas le courage de se
présenter devant 1'électorat.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre I
M. ROY: Vous ne représentez personne, sauf Léo
Tremblay.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre!
M. ROY: Vous profitez de l'occasion d'être ici pour
l'assister.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre!
M. TREMBLAY (Montmorency): Soyez assuré que je serai
présent à ce moment-là.
M. GRENIER: Démission immédiate!
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre!
UNE VOIX: Démission!
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre! Je remarque que le
dialogue s'est...
M. LOUBIER: C'est le plus célèbre « patro-neux
» qu'il y ait.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): ... engagé entre...
M. LOUBIER: C'est le plus vulgaire « pa-troneux » qu'il y
ait.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): ... les collègues des deux
côtés...
M. TREMBLAY (Bourassa): Soyez polis pour un membre de la Chambre.
M. LE PRESIDENT: (M. Fréchette): A l'ordre!
M. GRENIER: Demandez au député qu'il ne réponde
pas.
M. LOUBIER: Il est tellement « patro-neux! »
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Je voudrais bien, si l'on a des
messages à transmettre à des collègues, qu'on les fasse
passer par la présidence.
L'honorable député de Saint-Laurent.
M. Léo Pearson
M. PEARSON: M. le Président, Je serai très bref. Ce sera
le discours le plus court que vous aurez entendu sur ce bill. Je ferai
simplement quelques brèves remarques, sans trop de commentaires, qui se
limiteront à quelques suggestions. Premièrement, je
suggérerais que le gouvernement statue sur des élections
partielles qui auraient lieu, par exemple, à chaque année,
peut-être à date fixe si un comté l'exigeait.
Une autre suggestion qui pourrait être étudiée
à son mérite également, ce serait qu'au lieu, à un
moment donné, lorsqu'on est élu pour cinq ans, de risquer qu'il y
ait des élections au bout de deux ans ou de trois ans, qu'un
gouvernement dure cinq ans et qu'on statue également sur une date, comme
les conseils municipaux ou les commissions scolaires et que les
élections aient lieu à date fixe, au bout de cinq ans, par
exemple. Alors, le gouvernement le sachant, se prépareraient en
conséquence.
Troisièmement, je suggérerais, M. le Président,
qu'il y ait une revision plus régulière de la carte
électorale. Je donne comme exemple mon comté où on s'est
servi, je crois, d'une carte assez ancienne. Lorsque les élections de
1966 sont arrivées, une paroisse complète avait poussé
depuis la revision de cette carte-là. Un autre exemple: depuis 1966, 11
y avait dans mon comté environ 50,000 électeurs. Depuis à
peine deux ans et demi que je suis élu, il y a déjà un
nouveau comté dans mon comté puisque nous sommes rendus à
près de 60,000 électeurs, ce qui veut dire déjà une
augmentation de 10,000.
C'est presqu'un nouveau comté comparé à certains
autres. A cause de cela Je suggérerais qu'on fasse une revision plus
régulière, qu'un comité peut-être permanent revise
régulièrement ces choses-là pour faire de petits
changements, sans risquer qu'il y ait un chambardement complet.
J'ai l'impression qu'on attend, avant de reviser la carte
électorale, de changer la province au complet. Or, il y a des situations
particulières, comme celle qui existe actuellement dans mon
comté. Probablement que des situations semblables existent dans d'autres
comtés où on pourrait changer, disons, deux ou trois rues de
comté.
Quatrièmement, M. le Président, j'ai l'impression, c'est
une opinion personnelle, qu'on ne devrait pas prendre le mors aux dents quant
aux députés qui peuvent quitter le parti ou changer
d'étiquette. S'ils ont trompé la population, j'ai l'impression
que la population va se souvenir de leur adresse et qu'ils ne feront pas plus
qu'un terme. S'ils ont changé d'étiquette à cause d'un
problème de conscience, à ce moment-là ce sera au peuple
également à juger.
Mais Je pense qu'on devrait, par contre, si Je me réfère
à une Idée mentionnée par le député de
Chambly cet après-midi, statuer pour éviter, à un moment
donné, s'il y avait une espèce d'infiltration, qu'un gouvernement
découvre, quelques jours après les élections, que quatre
ou cinq députés détiennent la balance du pouvoir et
risquent à tout moment de jeter le gouvernement par terre. On pourrait
statuer, rendre illégal le fait qu'un certain nombre de
députés, se liant ensemble du côté
ministériel, puissent, par exemple, paralyser un gouvernement ou faire
du chantage. Je pense que ce se-
rait beaucoup plus sérieux. Il y aurait beaucoup plus de
conséquences graves que statuer tout simplement sur le fait qu'un
député puisse changer de parti.
A ce moment-là, Je pense que le peuple, se servant de son gros
bon sens, s'il juge qu'on a usurpé son vote, se vengera à
l'élection qui viendra. Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Laurier. A
l'ordre!
M. René Lévesque
M. LEVESQUE (Laurier): Puisqu'on parle du bill 7, qui est un amendement
à la Loi électorale, je pense bien que je n'ai pas besoin de
dire, ayant été, pendant un certain temps, dans un domaine, que
connaît bien aussi le député de Duplessis, qui concerne les
gens du Grand-Nord du Québec ou les Indiens de nos réserves, je
n'ai pas besoin de dire que je suis favorable à cet amendement.
Je regrette que l'idée ne nous en soit pas venue dans le temps
où j'étais dans un autre gouvernement, parce que Je trouve que
c'est une réparation extrêmement tardive, mais mieux vaut tard que
jamais, d'une injustice qui avait été commise et qui
s'était perpétuée aux dépens de gens qui sont nos
concitoyens. En fait c'est une injustice qui est tellement tardive qu'il faudra
peut-être se faire à l'idée que ça va prendre un
certain temps.
Il va falloir attendre, et je crois que les premières
réactions le démontent, il va falloir attendre pour briser peu
à peu le mur d'indifférence et même, dans beaucoup de cas,
le mur de méfiance qu'on va trouver chez nos concitoyens Indiens qui,
trop longtemps, ont été négligés, admettons-le,
dans certains cas, méprisés, certainement exploités, et
qui se méfient de l'homme blanc et de ce qu'ils appelleraient
sûrement, ceux des Indiens qui ont fait leurs humanités, des
cadeaux grecs qu'on prétend leur faire.
De toute façon, que, dans nos lois, soit inscrit ce droit
fondamental pour des gens qui sont nos concitoyens, encore une fois, mieux vaut
tard que jamais.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est très tard.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est très tard. On né sera pas
surpris, d'autre part, si je ne suis pas parfaitement d'accord avec le long et
vertueux développement que le député de Chambly a fait cet
après-midi sur un autre aspect de la Loi électorale. Je le
remercie, en passant, de la courtoisie qu'il a eue de me faire parvenir ses
notes. Je regrette d'avoir été absent. Je cherchais justement le
député d'Ahuntsic...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ah! oui.
M. LEVESQUE (Laurier): ... qui s'intéresse en particulier
à des aspects de notre régime électoral, à la carte
électorale, depuis longtemps. J'ai découvert, tout à
l'heure, qu'il n'y était pas. Il y a d'autres absents. Il y a quelques
jours c'était jeudi ou vendredi j'aurais pu être
méchant. J'avais averti des journalistes en haut il y en a deux
qui s'en souviennent qu'on n'avait même pas quorum en Chambre. Or,
la Chambre n'était pas divisée en comité des
crédits, et elle ne comptait pas trente députés. A un
moment donné, il y en avait 24.
M. LAPORTE: Vous y étiez?
M. LEVESQUE (Laurier): Oui, justement, curieusement, j'y étais.
Ce qui prouve qu'il est plus facile de camoufler les absentéistes
professionnels, comme il y en a des doux côtés de la Chambre,
quand ils sont noyés dans un groupe où l'anonymat se
déguise facilement. On le sait. Il faudrait peut-être cesser
certaines hypocrisies. De toute façon, je voulais simplement...
M. LEDUC (Taillon): L'année dernière, sur 62 votes, vous
avez voté trois fois.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE (Laurier): Je voulais simplement remercier le
député de Chambly de la courtoisie qu'il avait eue de me faire
parvenir ses notes. Forcément, je n'ai pas eu grand temps pour les
étudier. Je voudrais également demander afin de garder
tout le respect que je dois à la seule représentante de
l'élément féminin dans cette Chambre au
député de Marguerite-Bourgeoys, si ça ne la
dérangeait pas d'aller faire son monologue à sa place. Parce que
le député de Marguerite-Bourgeoys, quand ses sentiments prennent
le dessus sur sa raison, a une voix relativement perçante.
M. LAPORTE: Elle reste en désaccord avec vous.
M. LEVESQUE (Laurier): Elle peut rester en désaccord, mais
pourquoi pas à sa place?
M. LEDUC (Taillon): Vous sentez-vous i votre place, vous?
M. BERTRAND: Le député de Laurier va y goûter. Il
n'a pas fini.
M. PAUL: Est-ce qu'il a peur de se faire jouer dans le dos?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE (Laurier): Ayant très rapidement lu ces notes, ayant
eu, forcément je n'entrerai pas dans les détails; je n'y
étais pas un certain petit rapport résumé de
l'intervention apparemment très éloquente du député
de Bellechasse et comme je ne doute pas qu'il y ait un certain nombre
d'honorables gentlemen des deux côtés dont ça rejoint aussi
bien les convictions partisanes que certaines inquiétudes partisanes qui
commencent à se développer dans nos vieux partis, je trouve que
le député de Chambly, malgré tout, restreint
dangereusement le problème.
Il trouve l'occasion, dans un amendement qui sera probablement le seul
à la Loi électorale, cette année... Enfin, si je pense aux
précédents, là, je me dis que, si le gouvernement avait eu
à amender la Loi électorale d'une façon substantielle, il
l'aurait probablement fait, car je ne soupçonne pas le
député de Missisquoi de nous apporter des grenailles une par
une.
Donc, le bill 7 est probablement la somme totale de la réforme
électorale que le gouvernement entrevoit. Je trouve et on me
permettra de le dire que le souci que le député de
Chambly, dans son intervention, porte au développement de la
démocratie dans notre vie électorale est dangereusement restreint
et assez caricatu-rallement étriqué. Comme le
député de Gouin j'ai peut-être perdu des passages
il aurait pu, comme leader du parti d'Opposition en Chambre,
s'intéresser quelque peu aux problèmes Dieu sait que son
propre parti en a été la victime de la carte
électorale qui est un des éléments fondamentaux.
M. LAPORTE: J'invoque le règlement. Je veux bien que le
député de Laurier caricature mon intervention. J'ai dit au
député de Gouin, avant qu'il intervienne, que la carte
électorale ne relevait pas de la loi que nous étudions
actuellement, le bill 7. Il faudra un autre bill et, lorsque ce bill sera
amené ou lorsque nous ferons un programme électoral, nous en
parlerons.
Actuellement, il s'agit de modifier la loi électorale du
Québec, qui n'a rien à voir, légalement, au point de vue
de la procédure parlementaire, avec la carte électorale, rien du
tout.
M. LEVESQUE (Laurier): Ce n'est pas tout à fait un appel au
règlement, mais c'est une précision que j'accepte. C'est vrai que
cela ne concerne pas directement la loi électorale, mais puisque...
M. BERTRAND: Si le député de Laurier me le permet...
M. LEVESQUE (Laurier): Ah Seigneur, je suis flatté de votre
intervention.
M. BERTRAND: Nous avons laissé le député de Gouin
en parler quand même. Il a parlé de la redistribution
électorale tantôt. Il en a parlé, si le
député de Montréal-Laurier veut en parler...
M. LEVESQUE (Laurier): Ce ne sera pas très long. Je voulais
simplement souligner que lorsqu'on se préoccupe aussi intensément
que le député de Chambly semble le faire, dans ses notes
soigneusement préparées, de la démocratie de notre
régime, je suis surpris qu'un sujet aussi fondamental au point de vue
démocratique n'ait pas semblé le préoccuper. Je suis
sûr que le gouvernement s'en préoccupe, le député de
Missisquoi en particulier, parce que je voudrais quand même arriver
à une conclusion assez rapidement la-dessus.
M. LEDUC (Taillon): Ce ne sera pas facile.
M. LEVESQUE (Laurier): Le député de Mlsslsquoi a souvent
parlé comme tant d'autres dans notre vie publique je suis
prêt S croire que le député de Missisquoi est
peut-être beaucoup plus sincère que beaucoup d'autres il a
souvent parlé, dis-je, de démocratiser la vie publique dans le
Québec, de la démocratiser vraiment et non pas seulement de se
gargariser avec des mots. Alors, je note simplement comme une des choses dont
l'absence m'a frappé, dans l'intervention vertueusement
démocratique qu'on vient de me fournir, cette absence pour l'instant
officielle de préoccupation à propos de la carte.
Il y a une autre chose...
M. LAPORTE: Peut-être parlez-vous du problème que j'ai
soulevé.
M. LEVESQUE (Laurier): Oui.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, mais ce n'est pour l'instant, on ne sait
pas...
M. LEVESQUE (Laurier): Il y a une autre chose qui est également
grave et qui, elle, est
singulièrement pernicieuse, qui doit intéresser aussi le
député de Missisquoi, parce qu'il a parlé de la
démocratie interne dans les partis, et cela concerne directement la loi
électorale.
Vous avez dans cette Chambre deux partis que nous appelons
officiels...
UNE VOIX: C'est cela.
M. LEVESQUE (Laurier): Que la loi reconnaît d'une façon
exclusive sous le nom de parti du premier ministre et parti du chef de
l'Opposition. Sauf erreur, ce bipartisme légal qui, à mon humble
avis, ne reflète plus grand chose dans le pluralisme réel de la
société québécoise, est encore la structure
évidente sur laquelle repose notre loi électorale, en
dépit des réformes qu'il ne faut pas sous-estimer
qui lui ont été apportées ces dernières
années. Vous avez deux partis dans cette Chambre qui, au niveau de leurs
candidats, dans 108 comtés du Québec, reçoivent maintenant
un financement public qui atteint des montants considérables et qui le
reçoivent automatiquement.
M. LEDUC (Taillon): C'est effrayant de parler comme cela.
Lisez donc la loi électorale. Après cela, vous pourrez
passer des commentaires comme ceux que vous venez de passer. La
connaissez-vous, votre loi électorale?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le nouveau parti est le plus vieux.
M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): A l'ordre!
M. LEDUC (Taillon); Commencez donc par faire vos preuves et vous
critiquerez après.
M. LE PRESIDENT: (M. Fréchette): A l'ordre!
M. LEVESQUE (Laurier): Mais recevant ce financement...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le plus jeune et le plus vieux des partis...
M. LEVESQUE (Laurier): Nous en discuterons en détail.
Mais recevant ce financement, ils ne sont pas obligés et ils sont
quand même subventionnés très largement à même
les fonds publics par cette voie-là... En réalité
on regardera les textes, peu importe la théorie, nous ne chicanerons pas
là-dessus mais en pratique c'est un fait. Recevant ainsi des
subventions très substantielles, ils ne sont pas obligés de
publier en même temps l'ensemble de leurs sources de revenus,
d'étaler en même temps le détail de leurs dépenses
aussi bien que de leurs revenus, et le total, surtout quand nous savons qu'en
même temps qu'ils reçoivent ces subventions à même
les fonds publics, ils sont entretenus depuis toujours et d'une façon
que peut-être les chefs de parti connaissent...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ah bon!
M. LEVESQUE (Laurier): Parce qu'il est arrivé des cas où
les chefs de parti ne le savaient même pas, parce qu'ils étaient
contestés à l'intérieur de leur formation politique, mais
qu'en général, seuls les chefs de parti et leur caissier, la
plupart du temps désigné par eux-mêmes, connaissent.
Donc, traditionnellement, la vie publique du Québec, telle
qu'elle est représentée dans cette Chambre, à part les
quelques indépendants, sur lesquels, pour l'instant, portent les notes
démocratiques du député de Chambly, la vie publique du
Québec repose j'aime beaucoup Alcide parlant de Sarto Marchand
UNE VODC: Nous ne sommes pas capables de vous suivre... Allez donc droit
au but...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
UNE VOIX: Parlez-nous de Melchers!
M. LEVESQUE (Laurier): Donc, la vie publique du Québec
oui, j'en parlerai si j'ai le temps, avec plaisir repose sur deux
vieilles formations politiques qui datent du 19e siècle, qui, depuis,
tel que cela a été consigné pour les deux niveaux de
gouvernement dans ce rapport qui s'appelle le rapport Barbeau qui ramasse de la
poussière depuis trois ans à l'autre niveau de gouvernement et
que les grands démocrates de cette Chambre n'ont pas l'air de consulter
très souvent, reposent sur le financement par les gros
intérêts...
M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement de la
façon suivante. Il y a actuellement au feuilleton de l'Assemblée
nationale une motion du député de Laurier, M. Lévesque,
sur le financement des partis politiques. Je me réserve le droit de
discuter la motion et d'aborder tous les sujets qui sont actuellement
traités par le député de Laurier. Je ne pense pas que sur
ce que nous discutons actuellement, il y ait lieu d'aborder cette
question-là.
C'est lui qui a inscrit la motion et je me propose d'y aller à
fond quand il en parlera. Deux fois déjà, je l'ai invité
à discuter publiquement, complètement, à la
télévision devant n'importe qui de ce problème du
financement des partis politiques. J'ai reçu jusqu'à maintenant
une réponse négative. Mais en vertu des règlements de
notre Assemblée nationale, ce n'est pas le temps, puisque lui-même
a une motion au feuilleton sur laquelle je discuterai, ce soir de parler de
ça, mais bien des amendements à la loi électorale.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, sur le point d'ordre,
cette motion pour laquelle normalement je n'ai pas de secondeur et que le
député de Chambly m'a offert...
M. LAPORTE: Je vous seconderai avec plaisir.
M. LEVESQUE (Laurier): ... discrètement l'autre jour de soutenir
en la transformant en proposition de création d'un comité...
M. LAPORTE: Oui.
M. LEVESQUE (Laurier): ... sur cette motion, il est évident que
le même sujet revient. Je n'ai pas eu le temps de consulter mon
éminent caucus pour savoir s'il m'était interdit de discuter de
ce sujet-là qui concerne directement la loi électorale, qui n'est
pas impliqué dans le bill 7. Pas plus que ne l'étaient les notes
savantes du député de Chambly.
M. LAPORTE: Parlez donc du sujet de l'affaire!
M. LEVESQUE (Laurier): Oui, mais je ne vols pas en quoi il y avait une
question de règlement là-dedans. Les éminentes intentions
du député de Chambly ne constituent pas une question de
règlement.
M. LAPORTE: M. le Président, ce que je veux savoir, c'est si le
député de Laurier est d'avis, oui ou non, que lorsqu'on change
d'option en cours de route on doit retourner devant les électeurs.
DES VOIX: A l'ordre!
M. LAPORTE: La caisse électorale, c'est une autre affaire.
M. LEVESQUE (Laurier): Donc, vous avez dans cette Chambre, et c'est
directement im- pliqué dans la loi électorale, deux vieilles
formations politiques entretenues. J'ai fait partie de l'une d'entre elles
pendant près de sept ans. J'ai appris dans cette formation politique
et le député de Chambly en sait quelque chose...
M. LAPORTE: A être élu.
M. LEVESQUE (Laurier): ... à quel point sont entretenus en
coulisses par les gros intérêts qui sont intéressés
toujours au maintien...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Sarto Marchand... les mêmes qui vous
financent...
M. LEVESQUE (Laurier): ... ce qui est complètement faux... un
système et un régime pernicieux, extrêmement dangereux
où la caisse centrale...
M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LEVESQUE (Laurier): ... administre les fonds...
M. LESAGE: Oui, mais il y a une motion au nom du député de
Laurier qui apparaît au feuilleton et qui porte justement sur le
financement des partis politiques. Comme question de fait, j'attends que cette
motion soit appelée pour répondre à ce qui, je crois, sera
le discours du député de Laurier, basé sur la motion qu'il
a inscrite au feuilleton.
Il prétend, le député de Laurier, que nous avons
oublié le rapport Barbeau. Nous ne l'avons pas oublié. Comme
question de fait, le rapport Barbeau, dans la plupart de ses conclusions et de
ses recommandations, suit de très près les règles qui ont
été édictées par cette Chambre, par
l'Assemblée législative du temps.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est un point d'ordre?
M. LESAGE: C'est un point d'ordre... par l'Assemblée
législative du Québec, à l'instigation du gouvernement
dont faisait partie le député de Laurier. Il y a au feuilleton
une motion qui porte directement sur le financement des partis politiques et il
est clair qu'à l'occasion d'un autre débat, on ne saurait toucher
à cette question. Le règlement est formel sur ce point. En
conséquence, je pense que ce serait causer une injustice à
l'égard de ceux qui ont déjà participé au
débat de deuxième lecture sur ce bill,
de les mettre dans une situation où ils ne pourraient
répondre au député de Laurier.
M. LE PRESIDENT: Cet après-midi, lors de l'intervention de
l'honorable député de Chambly, on se rappellera que J'ai
momentanément rappelé à l'ordre l'honorable
député de Chambly, qui, d'après moi, dépassait les
cadres du débat qui était soumis à cette Chambre.
A ce moment-là, il m'a paru que le consentement unanime de la
Chambre était accordé à l'honorable député
de Chambly pour discuter Jusqu'à un point qui m'a paru, je le
répète, outrepasser les cadres du bill qui était soumis
à cette Chambre. A ce moment-là, m'appuyant sur le consentement
unanime de la Chambre qui, d'après moi, est souveraine, et qui
dépasse de beaucoup la décision que peut rendre humblement le
président de cette Chambre, j'ai permis l'élargissement de
débat.
H m'a cependant été permis, à l'heure du
dîner, de réfléchir longuement sur cette question. Je dois
dire que le titre du bill c'est mon humble opinion, je vous la soumets
respectueusement, mais je pense l'approfondir dans les jours qui vont suivre
le titre du bill, d'après moi, ne justifie par
l'élargissement du débat jusqu'au point où nous sommes
allés aujourd'hui. Pas plus que le libellé d'une
procédure, dans le domaine de la procédure civile, ne Justifie ou
ne permet d'aller plus loin que les conclusions. Pour m'expliquer, Je soumets
à cette Chambre l'exemple d'une procédure qui serait
libellée en procédure civile exception à la forme, et qui,
en fait, serait une exception déclinatoire ou serait une autre
procédure; ceci ne permettrait pas, je pense, au juge de décider
comme s'il s'agissait d'une exception à la forme, iI devrait juger par
le contenu de la procédure et par les conclusions de la
procédure.
Dans le cas qui nous occupe présentement, je dois dire que nous
avons élargi le débat d'une façon très
considérable, du consentement unanime de la Chambre. Mais ça ne
devraitpas aller, Je pense, jusqu'à discuter devant cette Chambre, ce
soir, d'autres lois que la Loi électorale. Nous avons accepté,
lors de l'intervention de l'honorable député de Chambly, de
discuter de toute la loi électorale, contrairement à l'opinion
que j'ai soumise respectueusement à cette Chambre, mais je pense que
tout le monde conviendra qu'au moins l'on ne devrait pas dépasser les
cadres de la loi électorale proprement dite. J'invite donc l'honorable
député de Laurier à s'en tenir à. la loi
électorale, comme Je l'ai permis aux autres membres de cette Chambre, au
cours des délibérations. L'honorable député de
Laurier.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, je suis forcément
d'accord avec votre décision, ce que vous venez d'expliquer comme
façon d'interpréter l'élargissement du débat. Si je
vous comprends bien, nous avons donc le droit j'avais presque fini,
d'ailleurs, au moment où cette petite esclandre vous a ramené de
vos appartements de discuter de l'ensemble de la loi électorale.
Je parlais du financement des partis, au moment où vous êtes
revenu. Le financement des partis auquel d'ailleurs a fait allusion, dans sa
propre intervention, le député de Chambly, fait d'une
façon assez évidente partie intégrante de la loi
électorale. C'est un des sujets.
M. PAUL: M. le Président, sur un rappel au règlement.
M. LEVESQUE (Laurier): Bien voyons. Ai-je compris ou n'ai-je pas
compris?
M. LEDUC (Taillon): Vous n'avez pas compris.
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel
M. LEDUC (Taillon): Essayez de suivre ce qui se passe et vous allez
comprendre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel
M. PAUL: M. le Président, les remarques que vous nous avez
adressées étaient teintées d'un esprit juridique
remarquable. Pour celui qui a voulu comprendre, vous avez tracé une
ligne de conduite que nous devons suivre dans l'étude de la loi dont la
Chambre est présentement saisie.
Les directives que vous nous avez données doivent être
scrupuleusement suivies. Si l'honorable député de Laurier voulait
parler du financement des partis politiques, il pourrait le faire en suivant
vos directives, s'il ne s'était pas placé lui-même dans une
camisole de force. Si nous nous référons au feuilleton du
mercredi 19 mars, à l'article 45, nous voyons que le
député de Laurier a fait inscrire une motion traitant du mode de
financement des partis politiques. De ce fait, il ne peut en discuter en vertu
des dispositions de l'article 285, onzièmement, de notre
règlement qui dit qu'on ne peut « se référer
à une affaire renvoyée à un comité, inscrite au
feuilleton ou annoncée dans le feuilleton ».
Je crois que c'était le sens des remarques de l'honorable chef de
l'Opposition. D'ailleurs, lorsque l'honorable député de Chambly
s'est
levé je l'avais fait presque au même moment que lui
c'était justement pour vous rappeler cet article et surtout pour
signaler au député de Laurier qu'il ne pouvait discuter de
n'importe quel sujet, même si, par tolérance, nous avons permis
qu'il s'attaque rapidement à la Loi de la division territoriale, qui
était le chapitre 5 de nos statuts, alors que nous sommes à
étudier la Loi électorale, qui est le chapitre 7 de nos
statuts.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, pour vous éviter
d'avoir à vous prononcer sur l'intervention pontificale du
Secrétaire de la province, j'avais terminé sur ce
chapitre-là. Je veux simplement noter, à l'intention il me
semble que je l'ai noté assez clairement du premier ministre qui,
avec son cabinet, prend des décisions sur les réformes possibles
ici et que j'ai souvent entendu parler de démocratie d'une façon
qui m'impressionne, que notre carte électorale est dans un triste
état et que les partis politiques traditionnels qui sont tous deux dans
cette Chambre sont financés partiellement à même les fonds
publics et partiellement à même des caisses en coulisse.
DES VOIX: A l'ordre!
M. LEDUC (Taillon): Il n'a rien compris. Il n'a absolument rien
compris.
M. LOUBIER: II essaie de minimiser les autres pour couvrir ses
turpitudes. Il barbouille les autres pour essayer...
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel
M. LEDUC (Taillon): C'est chef d'un parti, à part ça,
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel
M. LOUBIER: Pour couvrir ses infamies, il salit tout le monde.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que l'honorable
député de Laurier a très bien compris le sens des
remarques que j'ai adressées à cette Chambre, il y a quelques
instants.
Je regretterais de me voir dans la triste obligation de rappeler
nominativement à l'ordre le député de Laurier. Je compte
donc qu'il s'en tiendra au principe du bill qui est actuellement devant cette
Chambre, compte tenu de l'élargissement que nous lui avons donné
cet après-midi.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, pour être bien
clair, si je mentionne la motion qui est au feuilleton, est-ce que je mentionne
par là un sujet exclu? J'avoue que je n'ai pas eu le temps de faire une
longue étude de procédures sur des notes que le
député de Chambly m'a remises ce soir. Si j'étais absent,
c'était peut-être ma faute, mais je suis arrivé ce soir
pour discuter d'un cas ou l'on parle aussi bien de moi, comme
député dans cette Chambre, en élargissant un débat
d'une façon assez dramatique, cet après-midi, à propos
d'un bill qui concernait, au départ, les Indiens et les Esquimaux.
Je veux bien qu'on se barre les jambes dans la procédure
jusqu'à deux milles par-dessus la télé, mais je
prétends qu'on doit avoir le droit de parler, dans cette Chambre, de
sujets qui concernent la Loi électorale, puisqu'on l'a
élargie.
M. LEDUC (Taillon): Il n'a rien compris, encore.
UNE VOIX: Laissez-le parler.
M. LOUBIER: II vient faire une comédie une fois par mois en
Chambre.
M. LEDUC (Taillon): Le député de Laurier n'est pas
brillant.
M. LOUBIER: Si vous veniez plus souvent en Chambre, vous en
connaîtriez peut-être plus.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LOUBIER: Il est toujours parti. M. LE
PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: IL est toujours absent.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je comprends que l'honorable
député de Laurier me reproche peut-être l'attitude que j'ai
prise cet après-midi. Il faut quand même admettre, je pense, que
la Chambre est souveraine. Je ne suis que l'humble porte-parole de cette
Chambre. Lorsque la Chambre, de consentement unanime, adopte une attitude, je
dois la respecter comme humble président de cette Chambre. Je pense que
l'honorable député de Laurier devrait adopter la même
attitude.
Si j'ai permis, cet après-midi, en mon âme et conscience,
un élargissement du débat ce qui m'a paru l'être, du
moins c'est que je me suis appuyé, à ce moment-là,
sur le consentement unanime de la Chambre. Ce soir, il est
manifeste que la Chambre ne donne pas son consentement...
M. LE VESQUE (Laurier): J'ai cru le remarquer.
M. LE PRESIDENT: ... parce que l'honorable député de
Laurier dépasse les limites que nous avons, de consentement unanime,
adoptées et acceptées d'emblée cet après-midi. Mais
ce soir, puisque nous avons fixé certaines limites cet
après-midi, je pense que l'honorable député de Laurier,
qui est un parlementaire d'expérience, voudra bien accepter de ne pas
les dépasser.
UNE VOIX: Laissez-le parler.
M. LE PRESIDENT: D'ailleurs, j'ai bien conscience de ne pas priver le
député de Laurier de son droit de parole car, au feuilleton, il a
inscrit une motion qui lui donnera le droit a ce moment-là Je me
ferai le défenseur de son droit de discuter de tout ce
problème. Mais, aujourd'hui, il faut s'en tenir aux limites qui ont
été tracées cet après-midi, du consentement unanime
de la Chambre. J'espère que j'ai été clair cette
fois-ci.
L'honorable député de Laurier.
M. LEVESQUE (Laurier): D'accord, M. le Président. De toute
façon, 11 restait les points essentiels des notes extraordlnairement
préoccupantes, au point de vue démocratique, du
député de Chambly. Ce qui le fatigue terriblement, cela
m'Intéresse de le savoir; et si on a élargi le débat avec
ce bel ensemble, d'un consentement unanime, c'est vraiment que cela fatigue des
deux côtés. Cela implique quelque chose.
M. LOUBIER: Présentez-vous donc devant le peuple.
M. LEVESQUE (Laurier): Je pense que le président a dit...
M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Chambly.
M. LAPORTE: Cet après-midi, vous avez rappelé le
député de Chambly à l'ordre parce qu'il élargissait
le débat.
Vous avez déclaré à ce moment-là: Puisque
vous avez l'unanimité. J'ai dit, M. le Président: Je n'invoque
pas l'unanimité, je prétends que j'ai le droit, en vertu des
règlements de l'Assemblée nationale, de discuter de toute la loi
électorale, puisque le bill est intitulé amendement à la
Loi électorale. Ce n'est donc pas par privilège, ce n'est pas par
consentement unanime. Je suis prêt ce soir à défendre le
droit du député de Laurier au consentement unanime de la Chambre,
à discuter de n'importe quel article de la Loi électorale,
n'importe quand. Il en a le droit comme moi, mais je n'accepte pas que le
député de Laurier discute du financement des partis politiques
parce qu'il a inscrit une motion que je me propose d'ailleurs de discuter quand
elle sera étudiée. Deuxièmement, s'il veut parler de la
carte électorale, ce n'est pas le bill qu'on étudie actuellement.
Je suis prêt à discuter n'importe quelle chose, mais ce soir, nous
parlons de la Loi électorale. Qu'il en parle comme 11 voudra.
Peut-être peut-il pendant quelques minutes traiter du problème que
j'ai discuté cet après-midi, son cas à lui qui a
lâché le parti, pour en accepter un autre.
M. BERTRAND: M. le Président, en parlant sur le point d'ordre qui
vient d'être soulevé par le député de Chambly, je
voudrais ajouter que personne en cette Chambre ne voudra, malgré les
allusions malveillantes que le député de Laurier vient de faire
aux députés des deux côtés de cette Chambre, priver
le député de Montréal-Laurier de son droit de parole ici.
Mais nous aimerions l'entendre, c'est clair, sur le problème qui a
été soulevé les deux autres nous en parlerons en
temps et lieu cet après-midi par le député de
Chambly, problème auquel j'ai déjà personnellement fait
allusion, comme d'autres députés en cette Chambre, à
savoir si un député élu dans une formation politique
à l'occasion d'une élection générale et qui
abandonne son parti, doit, oui ou non, se représenter devant le peuple
pour faire sanctionner et confirmer le nouveau choix, ou la nouvelle option
qu'il a prise.
M. le Président, le député de Laurier dira ce qu'il
voudra, il s'agit là d'un principe. Il peut avoir une opinion...
M. LEVESQUE (Laurier): SI vous vous taisez...
M. BERTRAND: ... qui ne soit pas la nôtre. Qu'il exprime son
opinion, personne ne va l'en empêcher.
M. LEVESQUE (Laurier): Si vous vous taisez, c'est ce que je vais faire,
parce que s'il n'y avait pas de point d'ordre, ni d'un bord ni de
l'autre...
M. LOUBIER: Arrêtez d'insulter tout le mondii.
M. LEVESQUE (Laurier): J'étais en train justement d'aborder le
sujet. J'ai dit, M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE (Laurier): ... que ce que j'avais trouvé curieux, en
parlant des trois députés qu'a mentionnés le
député de Chambly qui avaient changé d'allégeance
et ça m'avait frappé c'est que vous-même, M.
le Président, aviez dit que quand on a élargi le débat du
bill 7 sur ce sujet-là cet après-midi, si je vous ai bien
compris, vous aviez cru sentir un consentement unanime à cet
élargissement.
C'est là-dessus que le député de Chambly s'est
levé. Je ne comprends pas encore pourquoi. Tout ce que je disais, c'est
que ça me paraissait refléter...
M. LEDUC (Taillon): Ce n'est pas drôle d'être chef de parti,
puis de ne pas comprendre.
M. LEVESQUE (Laurier): ... ce consentement unanime que vous avez
vous-même évoqué. Quand on a élargi le débat
cet après-midi sur ce sujet, ça me paraissait évoquer une
certaine inquiétude qui règne des deux côtés
à propos de ces députés qui peuvent changer
d'allégeance.
Le député de Chambly a mentionné trois
députés. Il aurait pu en mentionner quatre. Seulement, il a
été d'une délicatesse et d'une discrétion
exceptionnelle, parce qu'on n'a parlé que de partis et non pas du
député de Robert-Baldwin, qui s'est fait élire contre le
parti libéral et qui est allé le rejoindre. Le
député de Marguerite-Bourgeoys doit en savoir quelque chose.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, sûrement, j'ai été
élue par la population.
M. LEVESQUE (Laurier): Qui a été élu contre le
parti libéral et qui a ensuite changé son allégeance
vis-à-vis des électeurs qui l'avaient élus. Je comprends
cette délicatesse extrême, mais j'aimerais bien, si on fait un cas
de tout ça, que le député de Chambly aille jusqu'à
quatre.
M. LEDUC (Taillon): Revenez donc au sujet. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Je comprends que c'est gênant. M. LE PRESIDENT: Pour me
permettre d'en- tendre et de juger en temps opportun les propos de l'honorable
député de Laurier, je pense que tout le monde conviendra qu'il
faut actuellement l'écouter en silence, comme on doit le faire pour tous
les membres de cette Chambre. L'honorable député de Laurier.
M. LEVESQUE (Laurier): Je disais donc qu'il y en avait quatre et non
trois, et que le député de Chambly a eu une légère
absence de mémoire que Je comprends très bien. Je n'ai pas
à Juger les trois autres cas. Je voudrais simplement, très
rapidement, parler du mien.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y en a seulement un qui est important, non les
trois autres.
M. LEVESQUE (Laurier): Remarquez que J'ai été
flatté depuis quelque temps. Le premier ministre, dans son premier
discours de la session, m'a lancé un défi, me disant
qu'aussitôt que j'aurais démissionné, il ouvrirait le
comté de Laurier à une élection de remplacement. Il y en a
plusieurs autres. Je sais que le whip du gouvernement, le député
de Wolfe, s'est également lancé récemment dans une
diatribe à ce sujet. Maintenant, c'est le leader du gouvernement.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: II a raison.
M. LEVESQUE (Laurier): Je trouve ça flatteur, parce que plus on
s'acharne, plus ça souligne que ça inquiète.
M. LOUBIER: Plus ça souligne que c'est répugnant.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE (Laurier): Je rappellerais, si on me permet tout simplement
de parler pendant quelques minutes qui restent...
M. LOUBIER: Allez-y, ça fait trois quarts d'heure que vous
babillez et que vous tournez autour.
M. LEVESQUE (Laurier): Je croyais qu'il y avait des choses plus
Importantes que ça au point de vue démocratique, mais c'est
curieux comme ça ne vous intéresse pas.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Vous êtes si souvent en Chambre.
M. LEVESQUE (Laurier): Je te jure que le genre de parti que vous
représentez, vos préoc-
cupations de démocratie m'impressionnent terriblement. L'offre
dont le premier ministre m'a gratifié récemment, dans un discours
où la limite d'une demi-heure ne m'a permis de reprendre le sujet,
l'offre, Je l'avais faite moi-même à deux reprises à son
prédécesseur, le premier ministre Johnson, dans cette Chambre,
pendant la première session qui a suivi.
Je voudrais expliquer cela en deux mots, ma démission du parti
libéral, à l'automne 1967, c'est-à-dire, pendant la
session 1967-1968, strictement en ces termes; Pourvu que vous ne «
taponniez » pas pendant des mois pour laisser traîner un
comté pour ne pas savoir ce qui se passe. Je l'ai fait, l'offre, et
à deux reprises. Pourquoi Je ne la fais plus maintenant? Je n'accepterai
pas, malgré tous les haro sur le baudet, aussi bien du chef du
gouvernement que de ses partisans...
M. BERGERON: Peureux.
M. LEVESQUE (Laurier): ... de deuxième ou de troisième
rangée, que les allusions ou les notes pseudo-démocratiques du
député de Chambly... Je vais l'expliquer en deux mots.
Quand J'ai lâché le parti libéral...
M. BERGERON: Peureux.
M. LEVESQUE (Laurier): ... à l'automne 1967, au moment où
l'on prétendait imposer, par deux dirigeants seulement qui tordaient
tous les bras publiquement, à la télévision ou ailleurs
le chef du parti et le député de
Notre-Dame-de-Grâce, aujourd'hui parti pour des mondes meilleurs
qu'on prétendait, dis-Je, imposer, sur un sujet fondamental qui n'avait
pas été discuté ni décidé à ce
moment-là, par aucun congrès du parti...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Son ami.
M. LEVESQUE (Laurier): ... un véritable système de crois
ou meurs, Je suis parti, pas longtemps. Je suis aussi parti je le ferai
noter à des gens ici avec les quatre cinquièmes...
M. CADIEUX: J'invoque mon privilège de député
simplement pour déclarer ceci: Qu'on ne m'a jamais tordu un bras et que
j'ai toujours pu dire, au sein de mon parti, ce que Je croyais et ce que Je
pensais. C'est faux que le chef du parti ou qu'un autre ait tordu les bras d'un
député dans le parti libéral. Vous n'avez pas le droit de
déclarer cela. Si nous avions gardé le pouvoir, vous seriez
encore avec nous autres.
M. LEVESQUE (Laurier): Cela est douteux. J'ai dit...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: On ne peut pas tordre les bras des absents.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il m'est permis... A l'ordre! A l'ordre!
M. LOUBIER: M. le Président, il n'a pas répondu, il s'en
est sauvé. Il a dit n'importe quoi.
M. LE PRESIDENT: Avant qu'il soit 10 heures, je me permets de rappeler
aux honorables membres de cette Chambre qu'il est permis d'exprimer leur
opinion fermement, vigoureusement, mais jamais avec violence. Sur ce, Je
reconnais qu'il est dix heures.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, si J'avais le
consentement unanime, J'en aipour deux ou trois minutes.
M. BERTRAND: Oui, allez-y. Je n'ai pas d'objection à ce que le
député de Laurier termine; 11 n'est pas encore dix heures.
M. LOUBIER: Autrement, nous pouvons être deux mois sans le
revoir.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président, comme je suis convaincu que le
député de Laurier sera avec nous jeudi, puis-je déclarer
qu'il est dix heures?
M. LE PRESIDENT: Il est dix heures.
M. LAPORTE: M. le Président, puis-je demander au premier ministre
ce que nous ferons demain?
M. BERTRAND: Nous aurons le budget supplémentaire demain. Etant
donné l'urgence, le ministre des Finances sera prêt à
discuter ce budget supplémentaire, de même que le
sixième...
M. LEVESQUE (Laurier): Je m'excuse. Il paraît que,
réglementairement, je dois demander l'ajournement du débat.
M. BERTRAND: Oui, avec plaisir. Alors demain, le sixième et le
douzième...
M. LESAGE: Non, c'est le sixième et plus. M. BERTRAND: Oui, le
sixième et plus,
M. LESAGE: Ce sont les crédits provisoires, et il y a un budget
supplémentaire de quelques millions de dollars. Le ministre des Finances
m'a remis les détails. Nous serons prêts à en discuter
demain, comme d'ailleurs des crédits provisoires.
M. BERTRAND: Je dois dire que c'est extrêmement urgent que nous
votions ces crédits demain.
M. LESAGE: Entendu.
M. BERTRAND: Demain, à trois heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre s'ajourne à demain, trois heures.
(Fin de la séance: 22 heures)