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Version finale

28e législature, 4e session
(25 février 1969 au 23 décembre 1969)

Le lundi 1 décembre 1969 - Vol. 8 N° 94

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Seize heures trois minutes)

M. LEBEL (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Sanction de lois

M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que le vendredi, 28 novembre 1969, à quatre heures de l'après-midi, au cabinet du lieutenant-gouverneur, en présence du président de l'Assemblée nationale, de M. Paul, délégué du premier ministre; du chef de l'Opposition et du secrétaire de la chancellerie, il a plu à l'honorable lieutenant-gouverneur de sanctionner les lois suivantes:

No 23, Loi du ministère de la Fonction publique.

No 24, Loi des heures d'affaires des établissements commerciaux.

No 29, Loi concernant la copropriété des immeubles.

No 54, Charte de la société québécoise d'initiatives pétrolières.

No 57, Loi de la société de récupération et d'exploitation forestières du Québec.

No 58, Charte de la société de cartographie du Québec.

No 63, Loi pour promouvoir la langue française au Québec.

No 69, Loi sur les matériaux de rembourrage et les articles rembourrés.

No 70, Loi des produits laitiers et de leurs succédanés.

No 73, Loi concernant l'Institut de microbiologie et d'hygiène de l'Université de Montréal.

Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de comités élus. Présentation de motions non annoncées. Présentation de bills privés. Présentation de bills publics.

M. BERTRAND: F.

Bill 76

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la première lecture de la Loi de la Communauté urbaine de Québec.

L'honorable ministre des Affaires municipales.

M. LUSSIER: M. le Président, le chef de l'Opposition me permettra, sans doute, de faire un court résumé des notes explicatives du bill.

M. LESAGE: II ne faudrait pas recommencer la lecture des notes explicatives. Cela ne finit plus.

M. LUSSIER: Non, non.

M. LESAGE: Un court résumé, ça va.

M. LUSSIER: Un très court résumé. J'ai résumé ça.

M. LESAGE: Que le ministre nous dise quelles sont les différences entre ce projet de loi et le projet de loi concernant la Communauté urbaine de Montréal et cela va très bien faire.

M. LUSSIER: Oui, je vous dirai cela à une autre lecture.

M. LESAGE: II me semble que c'est l'occasion toute trouvée.

M. LUSSIER: Oui, oui, ce n'est pas compliqué. Il n'y a pas tellement de différences.

Alors, ce projet propose la création d'un organisme métropolitain dans la région de Québec et l'établissement d'une commission de transport. Cette commission de transport et l'actuel bureau d'assainissement des eaux sont rattachés à l'organisme ainsi créé. La communauté est administrée par un conseil et par un comité exécutif.

Le comité exécutif se compose de huit membres, désignés comme suit: le président, par le lieutenant-gouverneur en conseil, trois membres de la ville de Québec, un de Sainte-Foy et les trois autres des trois autres secteurs.

Le conseil se compose du maire ou d'un autre membre du conseil de chacune des municipalités. Les membres du comité exécutif, sauf le président, doivent être choisis parmi les membres des conseils locaux. Les décisions du conseil sont prises à la majorité des voix des membres présents, chacun d'eux disposant d'une voix pour chaque millier d'habitants de sa municipalité. Les compétences, on pourra les lire dans le texte de loi.

La Commission de transport de la communauté de Québec a juridiction sur un territoire de 29 municipalités. Elle se compose d'un président directeur général nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil et de deux commissaires nommés pas le conseil de la communauté.

Le Bureau d'assainissement des eaux du Québec métropolitain, créé par le chapitre 56 des

lois de 1968, est rattaché à la communauté. La Commission d'aménagement de Québec est dissoute. Cependant, le projet prévoit la création d'une commission d'aménagement de la communauté urbaine de Québec qui agira à titre consultatif en matière d'aménagement, de restauration et d'embellissement du territoire auprès de la communauté des municipalités qui la composent et du gouvernement du Québec.

Outre la subvention de $11,500,000 accordée au bureau d'assainissement, le ministre des Affaires municipales est autorisé à verser à la Commission des transports une subvention représentant 50% du remboursement en capital et intérêts des emprunts contractés par elle, et une subvention pour l'achat de l'équipement actuel des sociétés qui font le transport en commun dans la ville et les environs de Québec et il est aussi autorisé à verser une subvention d'établissement de $2 per capita.

M. LESAGE: M. le Président, un point de clarification. J'ai entendu le ministre dire, au cours de ses explications, que les votes des représentants des municipalités se distribuaient comme suit: ces ou ce représentant de la ou des municipalités avaient droit à un vote par 1,000 contribuables ou par 1,000 électeurs. Est-ce au niveau du conseil ou au niveau de l'exécutif ou aux deux niveaux?

M. LUSSIER: M. le Président, au niveau du conseil. Le conseil est composé d'un membre de chacune des municipalités et ce membre a droit à autant de votes qu'il y a de millier de population dans sa municipalité. Par exemple, Québec compte 165,000 citoyens; alors, il aurait droit à 165 votes; à Sainte-Foy, il y a 63,000 ou 65,000, il aurait droit à 65 votes, et ainsi de suite pour chacune des municipalités.

M. LESAGE: Le ministre n'a pas songé à adopter le même système pour la communauté urbaine de Montréal?

M. LUSSIER: M. le Président, je pense bien qu'à cette occasion-là, nous pourrons en discuter. C'est un autre problème. Il n'est pas aussi facile. Il est beaucoup plus complexe à Montréal d'établir ce système. Nous pourrions en discuter à cette époque.

M. LESAGE: Si c'était facile, évidemment, Je n'aurais pas posé de question.

M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. BERTRAND: M. le Président, il apparaît en appendice à notre feuilleton d'aujourd'hui, à la page 3, trois projets de loi qui ont été imprimés. J'ai transmis les galées au chef de l'Opposition. Je voudrais les appeler avec la permission et le consentement de la Chambre.

M. LESAGE: Je regrette de ne pouvoir donner mon consentement, étant donné qu'il est absolument impossible de réunir avant demain les membres de la commission du caucus libéral s'occupant du travail et de la main-d'oeuvre. De plus, j'ai tenté d'obtenir, après avoir reçu les épreuves — j'en remercie le premier ministre — des consolidations des lois qui sont modifiées; or, il n'en existe pas. Ce sont les membres du secrétariat de l'Opposition qui sont à préparer les consolidations, qui seront prêtes demain. Dans les circonstances, il n'y a aucune utilité à ce que ces projets de loi soient lus en première lecture, aujourd'hui. Enfin, pourrais-je attirer, par votre entremise, l'attention du premier ministre sur le fait qu'étant donné les circonstances nous serions prêts, quant à nous, à ce que l'étude de ces trois projets de loi en deuxième lecture soit fixée péremptoirement à jeudi, afin de ne déranger le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qu'une fois.

M. BERTRAND: Le ministre, d'après les renseignements que j'avais obtenus, doit sortir demain...

M. LESAGE: II doit sortir demain, je le sais. J'ai causé avec lui au téléphone et je lui ai expliqué que je ne croyais pas que nous puissions procéder mardi...

M. BERTRAND: Avant jeudi.

M. LESAGE: Quant à moi, je serais fort disposé à accepter que l'étude de ces trois projets de loi ait lieu jeudi péremptoirement, afin que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre n'ait à se déranger qu'une fois.

Demain, malheureusement, ce n'est pas possible.

M. BERTRAND: Jeudi. J'en appellerai la première lecture demain.

M. LESAGE: Oui... Et je suis prêt...

M. BERTRAND: Simplement parce qu'ils auraient été distribués plus rapidement.

M. LESAGE: Même si j'ai des remarques qui prouveront que je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'il y a dans les projets de loi, disons que je veux collaborer avec le gouvernement pour procéder à l'étude de ces bills. J'aurai des remarques à faire, sous réserve de ce que le comité spécial de mon caucus aura à dire à la suite des études qu'il fera...

M. BERTRAND: M. le Président, je voulais dire au chef de l'Opposition que j'en demandais la première lecture, aujourd'hui, beaucoup plus en vue d'informer les membres de la Chambre...

M. LESAGE: Oui. Disons...

M. BERTRAND: Est-ce qu'on a objection à ce qu'on en appelle la première lecture aujourd'hui?

M. LESAGE: Je n'aurais pas objection, à condition qu'on n'essaie pas de forcer la deuxième lecture demain.

M. BERTRAND: Non, non. Alors, M. le Président, je demanderais d'appeler la première lecture de la Loi modifiant la loi des décrets de convention collective, projet de loi 79.

Bill 79

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre, au nom de l'honorable ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, propose la première lecture de la Loi modifiant la loi des décrets de convention collective.

M. BERTRAND: Etant donné, M. le Président, que les projets de loi seront instamment distribués, je ne donnerai pas lecture des notes explicatives.

M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. BERTRAND: Le deuxième projet, Loi modifiant la loi des accidents du travail. Projet de loi 80.

Bill 80

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre, au nom de l'honorable ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, propose la première lecture de la Loi modifiant la loi des accidents du travail.

M. BERTRAND: On verra également les notes explicatives, très courtes d'ailleurs.

Le troisième: Loi concernant les régimes supplémentaires de rentes établis en vertu de décrets de convention collective, projet de loi 81.

Bill 81

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre, au nom de l'honorable ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, propose la première lecture du projet de loi 81.

Les motions de première lecture seront-elles adoptées?

M. LESAGE: M. le Président, quant au projet de loi 81, j'ai rencontré, ce matin, le sous-ministre du Travail, M. Robert Sauvé. Je lui ai fait des remarques sur un problème soulevé par le bill 81, problème que je considère très important, très sérieux, et je lui ai demandé de bien vouloir les transmettre à qui de droit. Alors, j'aimerais que le premier ministre soit au courant des remarques que je lui ai faites. C'est assez technique, c'est au sujet de la Caisse de dépôt et de placement.

M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture de ces trois projets de loi sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ces bills. First reading of these bills.

M. LE PRESIDENT; Deuxième lecture à une séance subséquente.

Question de privilège

M. LESAGE: M. le Président, je voudrais soulever une question de privilège dont je vous ai brièvement donné avis.

J'ai en main une lettre qui a été adressée par le député de Terrebonne aux contribuables de Rosemere, comté de Terrebonne. C'est une lettre écrite sur du papier de l'Assemblée nationale, enveloppe de l'Assemblée nationale et timbre payé par la princesse, par le gouvernement quoi. Dans cette...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qui paie les pauvres...

M. BERTRAND: Mme Klerans...

M. LESAGE: C'était adressé à tous les contribuables. Dans le fond, ma question de privilège n'est pas une attaque contre le député de Terrebonne. C'est beaucoup plus ce que je voudrais être une mise eh garde contre certaines pratiques qui ne sont plus de notre temps.

Cette lettre dit, entre autres: « A l'automne 1968, nous avions rencontré les autorités municipales — de Rosemere, évidemment — t avions pris connaissance d'un projet au montant d'environ $240,000 pour réfection et pavage d'une distance de deux à trois milles de rue. Nous avions, M. Denis Légaré, ingénieur divisionnaire et moi-même, fait l'inspection de ce projet. « A ce moment-là, nous avions trouvé le coût très élevé pour la distance effectuée. »

UNE VOIX: II s'agit du député de Terrebonne.

M. LESAGE: Je sais, oui. Il n'est pas un ingénieur à l'emploi du gouvernement; il est député. « Lorsque M. Guy Clément, conseiller municipal, et M. Marcel Di Tullio, maire, sont venus nous rencontrer, ils nous ont fait part » — à ce moment-là, nous ne savons plus si c'est l'ingénieur divisionnaire et lui ou s'il s'exprime comme un évêque, je ne sais pas — « qu'ils avaient changé leur projet et que, pour le même montant, la municipalité effectuerait pour environ quinze milles de pavage. « Ç'est ce que M. Légaré et moi-même avions envisagé que, pour ce même montant, la municipalité pouvait effectuer beaucoup plus que deux à trois milles de pavage, tel que le projet initial. « C'est la raison pour laquelle nous avons consenti un octroi à la municipalité. » « Nous avons consenti un octroi à la municipalité. » Je ne savais pas que le député de Terrebonne avait des pouvoirs administratifs quand il s'agit de la dépense publique. »

M. BERTRAND: II n'est pas là.

M. LESAGE: « Cet octroi sera de l'ordre de $6,000 par année. » Là, il apporte une correction. En toute franchise, je lis la lettre telle qu'elle est écrite. « Cet octroi est un engagement personnel du député qui n'engage pas le ministère de la Voirie et qui pourra durer tant et aussi longtemps que je serai député... »

UNE VOIX: Cela va durer longtemps. M. BERTRAND: Alors, c'est éternel.

M. LESAGE: « ... et que le ministère de la Voirie maintiendra un budget de subvention. S'il y a changement de gouvernement, la municipalité devra à nouveau négocier avec le député et le gouvernement en place. »

M. BERTRAND: II est honnête. C'est de l'honnêteté.

M. LESAGE: « Nous avons négocié des ententes semblables avec les municipalités suivantes... »

UNE VOIX: II est réaliste, le gars!

M. LESAGE: « Saint-Louis-de-Terrebonne, Sainte-Anne-des-Plaines, Blainville, Saint-Antoine, Sainte-Adèle, Mont-Tremblant et autres. » M. le Président, malgré le petit correctif qu'il y a, à un moment donné, je dis que la lettre...

M. BERTRAND: II y en a plusieurs.

M. LESAGE: ... est écrite par un député qui s'adresse à des électeurs, dans un langage qui laisse entendre qu'il engage le gouvernement.

Deuxièmement, il avise directement les électeurs que, si le gouvernement n'est pas réélu aux prochaines élections, il va falloir renégocier, laissant entendre par corollaire que, si lui est réélu et que si le gouvernement est réélu, on n'aura pas à renégocier et que les $6,000 d'engagement par année seront versés tous les ans.

Je dis, M. le Président, que c'est le genre de lettre étant donné...

M. DE MERS: II est franc, c'est tout!

M. LESAGE: Oui, c'est peut-être franc pour ceux qui suivent cette méthode, mais je dis qu'en l'année 1970 de telle méthodes sont franchement dépassées. Qu'un député écrive à ses électeurs pour dire: Mon cher monsieur, grâce aux démarches que j'ai faites, le gouvernement a consenti... Cela, je ne puis rien y dire, mais les « je » et les « nous » d'évêque, c'est un peu fort.

M. GRENIER: Ce n'est pas un évêque dans ce coin-là; c'est un pape.

M. LESAGE: M. le Président, ça valait la peine d'être souligné, et d'ailleurs je l'ai fait sans acrimonie.

M. BERTRAND: Au lieu d'utiliser la formule dont vient de parler le chef de l'Opposition, disons que le député a peut-être été plus direct.

M. LESAGE: Oui, il dit: C'est un engagement personnel. Tant que je vais être là, ça va bien aller. Si vous me battez, par exemple, guettez-vous!

M. BERTRAND: D'autre part, il est clair que, sans utiliser les premiers mots qu'utilisait le chef de l'Opposition tantôt, « grâce à mes démarches », c'est implicite que c'est grâce à ses démarches. C'est tellement vrai que, ses démarches cessant, ils devront faire des démarches avec un autre.

M. LESAGE: Evidemment, M. le Président, il appartient à la mère poule de défendre ses poulets, et je comprends bien l'attitude du premier ministre. Quand même, si je n'étais pas ici, si les journalistes n'étaient pas ici, si le premier ministre était seul à son caucus, je suis certain qu'il tiendrait peut-être un autre langage.

M. GRENIER: Est-ce qu'il envoie une copie au ministre?

M. PAUL: Je crois que nous devons trouver que l'honorable député de Terrebonne a une suite dans son action entre...

M. LESAGE: Ah, il a de la suite dans les idées.

M. PAUL: ... la rencontre qui a eu lieu en 1968 et la lettre qu'il envoyait récemment à un certain nombre de ses électeurs, qui doivent être convaincus de son dévouement continu. Mais, je crois, M. le Président, que l'honorable député de Terrebonne, vu qu'il est absent, devra sans doute invoquer très probablement une question de privilège...

M. LESAGE: Pourquoi?

M. PAUL: ... et je crois qu'il conviendrait que sa position lui soit...

M. LESAGE: Tout ce que j'ai fait, c'est de lire sa lettre, d'attirer l'attention de la Chambre.

M. PAUL: ... pour donner des bonnes explications à la Chambre.

M. LESAGE: Ah oui, j'ai lu le mot à mot. Il fera ce qu'il voudra, mais ce n'est plus une chose qu'on doive faire.

Questions et réponses

Coûts moyens de l'éducation

M. LESAGE: M. le Président, une question pour le ministre de l'Education. Je lui en ai donné avis.

Il s'agit du calcul des coûts moyens de l'enseignement dans les écoles publiques et privées pour fins d'octroi des subventions aux institutions privées aux niveaux collégial, secondaire et élémentaire. Il semble, d'après ce que j'en ai lu dans les journaux, que le ministre ou son ministère aurait fait parvenir une lettre aux institutions privées donnant les barèmes de subventions pour l'année courante. Je demanderais au ministre si c'est exact et si cette lettre a été écrite. Est-ce qu'il peut en fournir une copie aux députés?

M. CARDINAL: Je remercie le chef de l'Opposition de m'avoir donné avis de cette question au début de l'après-midi ou au cours de la matinée. Premièrement, la semaine dernière, j'ai approuvé, comme la loi m'y autorise et m'y enjoint, les taux de subventions aux institutions déclarées d'intérêt public ainsi qu'aux institutions reconnues pour fins de subventions.

Deuxièmement, M. Rossignol, directeur du bureau de la reconnaissance des études et des institutions, a adressé, jeudi et vendredi derniers, à chacune des institutions concernées non pas une lettre, mais une formule ainsi qu'une copie d'un mémoire adressé par M. Yves Martin à M. Rossignol, et que j'avais approuvé. Je vais lire ce mémoire.

Malheureusement, je n'ai qu'un exemplaire au moment où je réponds à la question, quitte à apporter des copies pour le chef de l'Opposition. Je vais le lire — il est bref — et j'ajouterai un commentaire. « Sujet: Subvention par élève payable en vertu de la Loi de l'enseignement privé. « Conformément aux dispositions de la Loi de l'enseignement privé, les coûts moyens par élève dans l'enseignement public en 1968-1969 ont été établis à la suite d'études effectuées par les directions générales de l'enseignement collégial, du financement et de la planification.

Avec l'autorisation du ministre de l'Education, je vous communique ci-après les coûts moyens ainsi établis.

Les subventions payables aux deux catégories d'institutions selon les niveaux de même que les droits de scolarité maximaux que peuvent exiger

les institutions. Donc, niveau collégial, coût moyen de l'enseignement public: $1,245 par élève.

Subvention par élève dans les institutions déclarées d'intérêt public, soit 80% de ce montant, $996 par élève; subvention par élève dans les institutions reconnues, pour fins de subventions, c'est-à-dire 60% du même montant, $747.

Niveau secondaire, — je reprends chacune des trois divisions —: Coût moyen de l'enseignement public, $717; subvention dans les institutions déclarées d'intérêt public, $574, et dans les institutions reconnues pour fins de subventions, $430.

Elémentaire, excluant le préscolaire: $385, $308 et $231.

Je continue la lecture du mémoire. « ... Les droits de scolarité maximum que peuvent exiger les institutions seront les suivants: — or les mêmes niveaux, les mêmes institutions — au collégial, institutions déclarées d'intérêt public, $373; institutions reconnues pour fins de subventions, $622; Secondaire, $215, $359; Elémentaire, $115, $192. « Je vous saurais gré de prendre le plus rapidement possible les mesures nécessaires pour assurer le paiement des subventions. Vous voudrez bien également faire préparer à mon intention une estimation aussi précise que possible des sommes requises pour la présente année scolaire de même qu'une répartition de ces sommes selon les versements effectués avant le 1er avril 1970 et après cette date. Je vous remercie de votre collaboration. »

Le seul commentaire que j'ajouterai, M. le Président, de façon à éviter un débat sur ce sujet qui mériterait peut-être, aujourd'hui, de longs développements, c'est que, dans un journal d'aujourd'hui, si je ne me trompe, le Devoir, l'on indique ces chiffres d'une façon générale. Une association, réunie en fin de semaine, se plaint que ce qui est accordé est trop faible. Dans un journal d'aujourd'hui, le Soleil, l'on nous dit que nous finançons à 110% les institutions privées...

M. LE SAGE: M. le Président, après notre conversation téléphonique, j'ai vérifié et c'est dans le Devoir qu'on mentionne 110%...

M. CARDINAL: Bien, enfin...

M. LESAGE: ... dans le même article.

M. CARDINAL: Dans le même journal, ce qui est... je ne juge pas. Je souligne donc que, dans le même journal d'une part, on soutient que ce n'est pas suffisant et d'autre part que c'est 110%. Il y a d'autre part, présentement, des articles écrits dans le journal La Presse à ce sujet. Probablement, M. le Président, que, comme en toute chose, la vérité se situe au milieu, et j'aurais aimé donner des explications plus longues mais je pense que ça peut se faire à un autre moment. Je soulignerai qu'au ministère, présentement, j'ai demandé que l'on étudie de très près cette question. Mais les chiffres que j'ai donnés ont été vérifiés. J'ai même demandé une deuxième vérification après un premier mémoire qu'on m'avait soumis.

D'autre part, je dois dire qu'au ministère même, à ma connaissance, il n'y a pas de plainte, actuellement, qui soit venue d'institutions privées, des secteurs que j'ai mentionnés.

M. LESAGE: Une question seulement. Peut-être que le ministre pourrait me rafraîchir la mémoire. Cela a peut-être été discuté ici; probablement que ce l'a été en commission, à un moment où je n'y étais pas, sur le bill 56. Il s'agit des barèmes pour établir le coût moyen dans le secteur public, coût moyen par élève à chacun des niveaux.

Est-ce qu'on a tenu compte des immobilisations?

M. CARDINAL: M. le Président, le chef de l'Opposition, justement, touche un point très précis. A cause des investissements considérables en matière d'équipement qu'il y a eu, particulièrement après les années 1960, dans le secteur privé, certaines institutions se trouvent dans des situations difficiles parce que — 15 je donne le point précis — d'après la loi, le projet de loi 56 qui est maintenant loi, le service de la dette est compris dans les subventions.

Il est compris, évidemment, non pas pour l'institution prévue; il est compris comme service moyen de la dette au même niveau, dans le secteur public.

La différence se retrouve dans le fait qu'en certaines institutions des investissements considérables ont été effectués, disons depuis 1960. Par conséquent, la comparaison avec le secteur public fait que les sommes qui sont accordées d'après le projet de loi 56 peuvent sembler insuffisantes. Mais il ne faut pas se placer devant une situation qui serait ridicule, où les secteurs privés seraient financés à 80% et recevraient des montants plus élevés que le secteur public, puisqu'il s'agit de 80% de l'année précédente dans le secteur public.

Mais malgré ce que je viens de dire, je répète ce que j'ai mentionné tantôt, à cause de situations particulières, même s'il n'y a pas eu de demande, même s'il n'y a eu que les ar-

ticles dans les journaux, même s'il n'y a eu que ce colloque de fin de semaine, j'ai demandé que l'on étudie ceci au ministère.

M. LESAGE: M. le Président, je ne parlais pas des coûts dans le secteur privé; je m'en tenais à l'établissement du coût moyen basé sur le coût dans le secteur public. Le ministre vient de répondre que, dans l'établissement des coûts moyens dans le secteur public, on a tenu compte du service de la dette. Est-ce qu'on a tenu compte du service de la dette assumée par le gouvernement, y compris les subventions fédérales, suivant le système que m'a expliqué assez longuement, à la commission des engagements financiers, le sous-ministre de l'Education, M. Houde?

M. CARDINAL: M. le Président, oui, quand je parle du coût moyen, je parle... Au niveau secondaire, M. le Président, plutôt que de...

M. LESAGE: M. le Président, je parle en particulier des polyvalentes qui sont financées suivant des méthodes particulières — je n'ai pas l'intention de revenir là-dessus — où le gouvernement assume, ni plus ni moins, les obligations découlant des investissements qui sont payables tant par année, et il est inclus là-dedans une proportion de subvention fédérale.

Est-ce qu'on tient compte de ces montants dans l'établissement du coût moyen?

M. CARDINAL: M. le Président, je vérifierai ce point particulier qui est très technique. Je ferai comme le chef de l'Opposition, je n'entrerai pas dans le détail du financement des polyvalentes parce qu'il y a une échelle, d'après une entente fédérale-provinciale, à ce sujet, mais je répondrai à la prochaine occasion à la question précise qui vient d'être posée.

Collège Bellevue

M. LESAGE: Maintenant, M. le Président, lors de ma conversation téléphonique avec le ministre de l'Education cet après-midi au sujet de ce problème que nous venons d'entamer — c'est tout ce que nous avons pu faire — j'ai attiré son attention sur des déclarations de la directrice du Collège de Bellevue, ici à Québec, qui a laissé entendre que le collège ne serait pas rouvert en septembre. Il est possible que le ministre n'ait pas eu le temps de prendre les informations désirées. S'il n'a pas eu le temps de le faire, j'apprécierais qu'il considère ma question comme avis.

M. CARDINAL: Je remercie le chef de l'Opposition encore une fois pour l'avis. Disons que j'ai déjà certains renseignements. C'est justement un de ces cas d'institution où des investissements importants ont été faits et où le service de la dette, tant au niveau secondaire qu'au niveau collégial, puisqu'il s'agit des deux niveaux, je le souligne, pour l'avantage du chef de l'Opposition, puisqu'au téléphone nous n'avons parlé que du niveau secondaire... Il y adeux niveaux dans cette institution privée, le niveau secondaire et le niveau collégial.

Il y a eu des investissements considérables, ce qui fait que ce collège est obligé de faire face à un service de la dette dont je n'ai pas les chiffres précis, mais qui est plus élevé que le coût moyen dans le secteur public.

D'autre part, dans l'article du journal qui s'intitule: « Réouverture improbable du collège Bellevue », l'on allègue des raisons internes. J'ai communiqué avec Mlle Thérèse Baron, sous-ministre, qui, en fin de semaine, était à cette réunion où l'une des religieuses a été in-torrogée. Cette religieuse, de fait, a donné à Mlle Baron des raisons qu'elle appelle confidentielles pour le moment, qui sont purement de régie interne, et je n'ai pas été libéré de la confidence pour informer cette assemblée.

Tout ce que je peux dire, c'est qu'il s'agit vraiment de raisons internes qui concernent, disons, l'optique que peuvent avoir certaines religieuses responsables de l'administration de cette institution.

J'ajoute ceci: II n'y a eu de la part de cette institution — et là, c'est vérifié — aucune communication, ni avec 1e ministère, ni avec le ministre, à ce sujet. Quatrièmement, j'ai demandé pour ces jours-ci un rapport sur les raisons publiques et les raisons confidentielles qui, d'après l'article de ce journal qui rapporte les déclarations de Soeur Andrée Marcil, conduiraient à la réouverture improbable du collège de Bellevue;

M. LESAGE: Ce sont les Dames de la congrégation qui...

M. CARDINAL: Pardon?

M. LESAGE: Ce sont les Dames de la congrégation qui sont propriétaires?

M. CARDINAL: C'est exact. C'est ça.

Je pense que, pour aujourd'hui, cela donne une partie de la réponse. Aussitôt que j'aurai eu ce mémoire au ministère, j'en ferai part au chef de l'Opposition; si le sujet est jugé d'inté-

rêt plus général, on pourra en revenir à la période des questions devant cette assemblée.

M. LESAGE: Je remercie le ministre de l'Education, et j'attire de nouveau son attention sur notre intérêt à connaître la base du calcul du coût moyen dans le secteur public, particulièrement en ce qui touche le service de la dette et cette part du service de la dette assumée par le gouvernement, partie par le gouvernement provincial et partie parce qu'il y a réception de subventions fédérales.

Mise à pied éventuelle d'employés de la voirie

M. LESAGE: Maintenant, j'avais fait donner avis par mon secrétaire, mon chef de cabinet, au secrétaire du ministre de la Voirie d'une question que j'avais l'intention de poser,

M. BERTRAND: Le chef de l'Opposition la pose. J'ai ma réponse, mais pas la réponse à la question. Je répondrai que je prends avis de la question...

M. LESAGE: Bon, très bien.

M. BERTRAND: Je fournirai la réponse demain.

M. LESWGE: Entendu.

M. BERTRAND: II s'agirait d'une question dont le chef de l'Opposition a donné avis au sujet d'une mise à pied éventuelle d'employés à la division 7-1 de la Voirie, Saint-Jérôme, Lac Saint-Jean. Je déclare en prendre avis, et nous répondrons demain.

M. LESAGE: C'est à la suite d'une lettre que j'ai reçue du président d'un syndicat régional de la fonction publique.

M. BERTRAND: Le secrétaire du ministre de la Voirie, M. Pierre Tremblay, vient de m'en informer.

Projets de loi retirés du feuilleton

M. LESAGE: M. le Président, je ne veux pas abuser de votre bonté, mais, cette fois-ci, c'est au sujet des travaux de la Chambre. Je voudrais attirer l'attention du premier ministre et du leader du gouvernement sur le feuilleton d'aujourd'hui.

M. BERTRAND: Le feuilleton.

M. LESAGE: Les articles a), b), c). Est-ce l'intention... Le premier ministre, vendredi, a bien voulu nous donner la liste des projets de loi qu'il avait l'intention de présenter d'ici la fin de la session.

Evidemment, vendredi il s'en est tenu aux projets de loi qui n'apparaissaient pas au feuilleton, c'était normal. Mais je sais fort bien, pour ce qui est des autres, que le premier ministre a l'intention...

M. BERTRAND: Je vais déclarer immédiatement que a est retiré.

M. LESAGE: La Loi modifiant la loi des coroners.

M. BERTRAND: Oui.

M. LESAGE: Retirée, consentement accordé.

M. BERTRAND: b est retiré.

M. LESAGE: La Loi modifiant la loi des assurances. On n'est pas prêt? Qu'y a-t-il?

M. BERTRAND: Nous étions prêts, mais nous n'en avons pas eu besoin.

M. LESAGE: Eh bien, ça aiguise ma curiosité.

M. BERTRAND: Il y aura peut-être autre chose qui viendra...

M. LESAGE: La Loi des assurances a besoin...

M. BERTRAND: Cela, c'est un autre problème.

M. LESAGE: Ce n'était pas la refonte qu'on nous a...

M. BERTRAND: Non, ce n'était pas la refonte. C'était le fameux problème de la mutualisation.

M. LESAGE: Ah! alors consentement au retrait.

M. BERTRAND: C'est également retiré; nous n'en avons plus besoin.

M. LESAGE: Le parc Forillon, vous n'en avez pas besoin?

M. BERTRAND: Le parc y sera, mais nous n'avons pas besoin de la loi.

M. LESAGE: Vous n'avez pas besoin de loi. C'est bien ce que je croyais, j'ai toujours pensé que c'était un peu de la poudre aux yeux. D'accord. Je suppose bien que — l'article 3 aussi, le bill 56 — le ministre des Terres et Forêts ne doit pas avoir envie de courir une autre aventure.

M. BERTRAND: Non, nous n'en avons pas besoin, nous avons Rexfor, c'est suffisant.

M. LESAGE: C'est mieux!

M. BERTRAND: Si on me permet, quant à corriger le feuilleton...

M. LESAGE: Nous consentons à la motion pour le rappel de l'ordre de deuxième lecture du projet de loi numéro 56, et je puis assurer le premier ministre...

M. BERTRAND: C'est ça.

M. LESAGE: ... que le député de Duplessis et moi en sommes très heureux. Le député de Duplessis sera évidemment obligé de mettre dans sa poche l'excellent discours qu'il avait préparé.

M. BERTRAND: Alors il l'avait retiré parce qu'il l'a fait sur Rexfor.

Substitution du parrain au bill 10

M. BERTRAND: Si on me permet, quant à corriger le feuilleton, l'article 4 aux affaires du jour, 20 novembre, deuxième lecture bill 10, Loi concernant les régimes matrimoniaux, voudrait-on substituer à mon nom le nom de M. Paul, le ministre de la Justice.

M. LESAGE: Je voudrais dire au premier ministre et au ministre de la Justice que le député de Marguerite-Bourgeoys m'a dit — et je réitère un peu ce que j'ai dit vendredi— qu'elle serait prête à procéder en Chambre et en comité plénier, à l'étude du bill 10, immédiatement après que nous aurons terminé l'étude du bill 26.

M. BERTRAND: La Loi de l'aide sociale. Si on me permet, là-dessus, Je dois dire que le bill 10 sera imprimé en épreuves, d'un format un peu plus grand, pour éviter de le faire réimprimer deux ou trois fois. D'accord?

M. LESAGE: J'en ai reçu deux exemplaires ce matin.

M. BERTRAND: C'est ça.

M. LESAGE: Et j'en ai remis un exemplaire au député de Marguerite-Bourgeoys.

M. PAUL: M. le Président, pour répondre à la suggestion de l'honorable chef de l'Opposition, disons que le bill 10 suivra l'étude du bill 26.

M. LESAGE: C'est ça.

M. PAUL: Mais, il peut arriver qu'il y ait un autre projet de loi qui soit intercallé entre les deux et il est possible que la Loi des tribunaux judiciaires soit appelée avant ou pendant la lecture du bill 10. De toute façon, nous nous entendrons, l'honorable député de Marguerite-Bourgeoys et moi, pour procéder suivant cette convention que l'étude du bill 10 viendrait immédiatement après la Loi de l'aide sociale.

M. LESAGE: Disons que ça vaut jusqu'à demain soir. Je pense que c'est ce que le ministre de la Justice avait en tête.

M. PAUL: C'est ça.

M. BERTRAND: Il vaut mieux prévoir certains départs.

M. PAUL: Numéro 5.

M. LESAGE: Je n'ai pas compris.

M. BERTRAND: Moi non plus.

M. LESAGE: II faut quand même ménager le ministre du Travail, étant donné sa maladie. Je ne voudrais pas le faire venir ici jeudi pour qu'il attende.

M. PAUL: Je vais communiquer avec le ministre du Travail pour l'en informer immédiatement.

M. BERTRAND: Nous l'appelons immédiatement.

M. LESAGE: C'est cela. M. PAUL: Cinq.

Bill 26 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé, et de la Famille et du Bien-Etre social propose la deuxième lecture de la Loi de l'aide sociale.

L'honorable ministre de la Santé et de la Famille et du Bien-Etre social.

M. Jean-Paul Cloutier

M. CLOUTIER: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province ayant pris connaissance de ce bill en recommande l'étude à la Chambre.

Nous sommes maintenant au terme de l'étude du projet de loi no 26 qui a été déposé en cette Chambre au mois de mai dernier et qui a fait l'objet de quatre séances de la commission parlementaire de la Famille et du Bien-Etre social qu'a présidée le député de Portneuf. Ces séances ont été tenues le 11 septembre, le 18 septembre, le 6 novembre et le 20 novembre.

Au cours de ces réunions de la commission parlementaire, nous avons eu l'avantage de recevoir et d'entendre des groupes représentatifs qui s'intéressent aux problèmes sociaux, qui s'intéressent à la législation dans le domaine social. Je voudrais les remercier, au début de cette intervention, de leur collaboration et du sérieux des travaux qu'ils ont apportés devant la commission.

Je les nomme pour renseigner les membres de cette Assemblée qui n'ont pas participé aux travaux de la commission. Il y a une liste assez imposante. Il y a d'abord le Montreal Diet Dispensary, The Allied Jewish Community of Montreal, The Victorian Order of Nurses, le Chapitre français de la Corporation des travailleurs sociaux professionnels du Québec, de Montréal, la Fédération des services sociaux à la famille, le Comité des assistés sociaux du centre-ville - qui est venu deux fois devant la commission — le Conseil régional du bien-être de Sherbrooke, l'Agence de service social de la région de Sherbrooke, le chapitre de la Corporation des travailleurs sociaux professionnels de Sherbrooke, l'Association des familles ouvrières, l'Association des propriétaires des laboratoires médicaux privés du Québec, l'Opération Alarme de Montréal, le Comité d'action sociale de Saint-Jean-d'Iberville, le Comité ouvrier de Saint-Jérôme, le Comité des citoyens de Mercier, le Comité des assistés sociaux du centre-ville de Québec, The School of Social Work at the McGill University, plusieurs groupes d'assistés sociaux de Montréal, plusieurs assistés sociaux à titre individuel, le Secrétariat social de Saint-Roch avec Mgr Lavoie, le Comité des assistés sociaux de la rive sud, le Comité des citoyens de Val d'Or, le Conseil des oeuvres de Montréal, The Montreal Council of Social Agencies, The Montreal Council of Social Aid, la Corporation des travailleurs sociaux et professionnels de la province de Québec, The Family Service Association of Montreal, la Corporation des conseillers sociaux du Québec.

Il y a aussi des organismes qui n'ont pu se présenter, mais qui nous ont fait parvenir des mémoires, lesquels nous avons fait inscrire au journal des Débats.

C'est donc une preuve éloquente de l'avantage et de l'opportunité de donner une chance aux groupements et aux individus qui veulent se faire entendre devant l'Assemblée nationale de le faire au moyen des commissions parlementaires.

Je voudrais également, avant d'entrer dans le vif du sujet, dans le projet de loi lui-même, remercier les membres de la commission parlementaire qui ont suivi assidûment les travaux et qui ont apporté leur entière collaboration dans l'étude d'un sujet qui est, par sa nature même, complexe, délicat. C'est la nature des problèmes que nous étudions, des problèmes qui touchent l'individu et sa famille.

Je veux les remercier, M. le Président, de la façon objective, de la façon pondérée avec laquelle les membres de la commission ont travaillé à ce projet de loi et à sa réglementation. Egalement, il y a un autre précédent que je crois devoir mentionner à cette Chambre, c'est que, peut-être pour la première fois sauf erreur, nous avons étudié un projet de loi tout en ayant à notre disposition le projet lui-même de réglementation et aussi, évidemment, les tables qui appuieront le projet de réglementation et le projet de loi.

Nous avons posé ce geste, afin, comme Je l'ai dit antérieurement, d'aider les membres de la commission parlementaire à se faire une idée du projet de loi et à se faire une meilleure opinion. Peut-être que ç'a été fait en d'autres circonstances...

M. HARVEY: L'assurance-hospitalisation.

M. CLOUTIER: ... mais disons que cette façon excessivement élaborée, je crois que ç'a aidé les travaux de la commission parlementaire.

M. le Président, j'essaierai d'être le plus bref possible, mais pour un projet de loi aussi

important, qui marque une transformation aussi profonde de la législation sociale dans le Québec et également de l'organisation du ministère de la Famille et la dispensation des services à l'échelle de la région, je crois qu'il est important à ce moment-ci, non seulement pour les membres qui siègent dans cette Chambre, mais pour ceux qui viendront après et qui se référeront à nos travaux, que je m'attarde quelques instants sur certains aspects de ce projet de loi et notamment en faisant d'abord un historique de la législation sociale qui nous montrera l'évolution jusqu'à ce jour.

Si on remonte à quelques décennies en arrière et si on se rappelle les principales étapes, la première qu'il faut mentionner, c'est 1921 avec l'adoption de la Loi de l'assistance publique, qui a constitué une des étapes importantes dans le développement des lois sociales au Québec. Avant cette date, les charges de l'assistance furent assumées par la famille et, à son défaut, par la paroisse et les institutions religieuses. La population considérait alors le domaine du bien-être social comme celui de la charité privée et où l'action de l'Etat tenait très peu de place. La preuve de cet état de chose, on la retrouve dans une citation du père Gonzague Poulin dans les travaux qu'il a faits pour la commission d'enquête sur les problèmes constitutionnels à la page 88 Québec, 1955: « On ne concevait pas alors qu'un indigent valide ne puisse pas trouver du travail ou du secours parmi ses proches. Seul l'Indigent inapte au travail, soit à cause de maladie ou de vieillesse, avait droit à l'assistance publique si personne ne pouvait en prendre soin. » Alors on voit quel était à ce moment-là le concept que l'on avait de l'intervention de l'Etat dans ce domaine social.

La situation que j'ai évoquée il y a un instant, celle décrite par le père Poulin, devait subir de profondes modifications, conséquences, évidemment, de l'industrialisation et de l'urbanisation que nous devions connaître au début du siècle et qui devaient peu à peu transformer le mode de vie des Québécois.

En effet, alors qu'en 1867 plus de 80% de la population du Québec vivait en milieu rural, en 1921 cette proportion était de 44%. La période de transition dans laquelle le Québec s'engageait à ce moment-là allait apporter des problèmes nouveaux et nombreux. Le système familial d'assistance se trouva bientôt débordé. Les institutions virent leur tâche prendre rapidement une ampleur à laquelle elles n'étaient pas préparées. Certaines d'entre elles sollicitèrent des contributions financières accrues de l'Etat. La réponse du gouvernement prit alors la forme de la loi de 1921, la Loi de l'assistance publique. Le résultat principal de cette loi fut de confirmer le caractère privé des institutions d'assistance et de leur permettre de puiser dans les fonds publics lorsqu'elles accueillaient ou aidaient une personne indigente.

A la suite de l'adoption de cette loi, un service d'assistance publique fut créé et placé sous l'autorité du Secrétaire de la province. Ce précédent devait ouvrir la voie à l'extension des services publics dans le domaine du bien-être. En vertu de la loi, la charge financière de l'assistance est désormais répartie également entre le gouvernement provincial, les municipalités et les institutions elles-mêmes. Ceux qui travaillent dans le domaine municipal ont eul'occaslon de vérifier cette répartition. Les contributions municipales et gouvernementales sont versées directement aux institutions qui assument la responsabilité de la distribution des services. Aucun organisme gouvernemental n'est habilité à distribuer des services à domicile. Chaque requérant doit faire la preuve de son indigence, d'abord, devant le maire de la municipalité, puis devant l'institution où il désire être admis. En 1936, le Québec a adhéré au programme fédéral conjoint pour aider les personnes âgées de 70 ans ou plus. En 1937, il adopte une loi d'assistance aux mères nécessiteuses. La même année, il accepte encore un amendement à la loi fédérale des pensions de vieillesse et autorise ainsi le versement d'allocations d'assistance aux aveugles nécessiteux.

Cette multiplication des lois sociales, le dé-croissement graduel de la responsabilité familiale à l'endroit de ces indigents, les responsabilités grandissantes des municipalités dans d'autres secteurs, comme l'aménagement urbain et l'éducation par la taxe scolaire, et surtout l'extension de la Loi de l'assistance publique de 1921 à des institutions qu'on appelait « sans mur » allaient obliger l'Etat à intervenir beaucoup plus avant dans le domaine du bien-être social. L'apparition des agences de bien-être et de service social, en même temps que l'adoption d'une mesure permettant le versement d'une assistance à domicile, devait constituer une autre étape importante dans le développement des mesures de bien-être social au Québec.

Le 1er juillet 1959, le gouvernement du Québec signe, avec celui du Canada, un accord rétroactif au 1er juillet 1958. En vertu de cette entente, le gouvernement fédéral s'engage à défrayer la moitié des sommes versées aux personnes en chômage qui sont nécessiteuses. Pour la première fois donc, des prestations sont versées à des personnes qui sont aptes au travail, mais qui sont en chômage. La croissance con-

sidérable et rapide du coût de l'assistance-chômage au Québec qui allait s'ensuivre devait amener le gouvernement du Québec à instituer, le 6 décembre 1961, du temps où le député de Richmond était au ministère de la Famille, le comité d'étude sur l'assistance publique, mieux connu sous le vocable de comité Boucher.

Rendues publiques en 1963, les 71 recommandations du rapport Boucher peuvent être regroupées sous cinq titres. Premièrement, le droit à l'aide sociale. Ce principe veut que tout individu nécessiteux ait droit à une assistance de la part de l'Etat, quelle que soit la cause immédiate ou éloignée de ce besoin.

Deuxièmement, l'unification des lois. Le comité recommande que les diverses lois d'aide sociale à des catégories de personnes nécessiteuses devraient être remplacées par une loi générale, dite loi-cadre. Les lois suivantes sont touchées par cette recommandation: la Loi de la Commission des allocations sociales du Québec; la Loi de l'assistance publique, article 31; la Loi des allocations scolaires, article 8; la Loi de l'assistance aux mères nécessiteuses; la Loi des allocations aux aveugles et la Loi de l'assistance aux personnes âgées.

Troisième recommandation générale, l'unification de l'administration. En effet, depuis sa création, la Commission des allocations sociales du Québec administrait les lois dites catégorisées: assistance aux personnes de 65 à 70 ans, aux aveugles, aux invalides, aux mères nécessiteuses. En 1960, la commission se vit remettre l'administration du programme d'assistance publique à deux catégories nouvelles: inaptes au travail pour douze mois ou plus, que l'on appelle catégorie d), et les veuves et célibataires de sexe féminin de 60 à 65 ans, que l'on nomme catégorie f).

En 1961, les suppléments à ces diverses pensions devenaient aussi de la compétence de la Commission des allocations sociales. D'autre part, les services d'assistance sociale du ministère continuaient de s'occuper des inaptes au travail pour moins de douze mois et des aptes au travail. A l'automne 1966, le ministre de la Famille et du Bien-Etre social rendait possible le rapprochement de la commission et des services d'assistance sociale du ministère. L'intégration graduelle de la commission au ministère s'est réalisée grâce à la collaboration de son président et des commissaires.

Cette unification de l'administration fut favorisée également par la réunion sous un même toit, dans un mime édifice, de tous les services du ministère, également ceux du ministère de la Santé. C'est pour restructurer tous les services d'assistance financière du ministère que le rap- port Boucher devait recommander de faire disparaître le cloisonnement qui existait entre la Commission des allocations sociales et les services d'assistance sociale. Selon le rapport, tous les services responsables de l'assistance financière devraient dorénavant relever intégralement du sous-ministre.

Quatrièmement, le rapport Boucher recommandait que le gouvernement du Québec, pour faire face à ses responsabilités, oriente son action sociale dans la voie de la prévention individuelle et collective et l'exprime dans sa législation. En outre, dans ce souci de réadaptation individuelle et communautaire, il recommandait au gouvernement d'entreprendre des expériences-pilotes axées sur des problèmes sociaux bien définis.

Cinquièmement, le rapport Boucher recommandait que, dans la conception et l'application des mesures de bien-être social, soient établies des relations constantes entre le ministère de la Famille et du Bien-Etre social et les autres ministères. Cette coordination pourrait prendre la forme d'un comité interministériel permanent formé au niveau des sous-ministres.

Comme on vient de le constater, M. le Président, le rapport Boucher permettait au ministère de prendre une orientation générale mieux planifiée, mais ne contenant pas, comme telle, une législation. Il fallait donc tendre à l'application graduelle des recommandations du comité, tout en continuant à distribuer des services à une clientèle de bénéficiaires toujours de plus en plus nombreuse.

Il fallait que le ministère recrute les services de professionnels de qualité en nombre suffisant et qu'il développe un service bien structuré et efficace de planification et de recherche susceptible de lui fournir les éléments requis à l'élaboration d'une politique sociale générale.

La venue au ministère de professionnels de qualité nous a permis d'étudier les lois actuelles en regard des besoins de la population. Cette longue étude nous fit constater, entre autres choses, qu'il n'était pas possible d'adopter une loi générale d'aide sociale sans que, d'autre part, le gouvernement fédéral développe, en collaboration avec nous, son régime canadien d'assistance publique. En même temps que nous participions à ces travaux, tant à Québec qu'au plan des relations fédérales-provinciales, un comité spécial élaborait le cheminement critique de toutes les opérations administratives et autres, nous permettant de mettre au point un projet de loi que j'avais l'honneur de présenter à l'Assemblée nationale durant la session en cours.

Quelle est, M. le Président, après ces brèves

notes historiques, la situation de l'aide sociale dans tout cet ensemble de la sécurité sociale?

L'objectif général des mesures d'aide sociale est de rétablir le niveau de vie si ce niveau de vie est tombé en dessous du minimum déterminé par le législateur. Ces mesures sont complémentaires et constituent un dernier recours une fois que tous les autres moyens ont été épuisés. Ces mesures se reconnaissent à leur caractère résiduaire par rapport au caractère d'universalité des mesures de sécurité sociale proprement dites.

Parmi ces dernières, qui sont à caractère universel, nous retrouvons les autres régimes de maintien du revenu et je nommerai, par exemple, les allocations pour les accidents de travail et maladies professionnelles, les prestations d'assurance-chômage, le régime des rentes, les allocations familiales et les allocations scolaires.

Nous retrouvons aussi des mesures prévoyant la prestation de services. Par exemple, l'assurance-hospitalisation, assistance médicale, assurance-maladie, service de placement d'adultes, service de diagnostic et d'assistance pour enfants et adolescents délinquants, service de diagnostic et d'assistance pour adultes délinquants, service spécialisé pour les mères célibataires, service d'orientation professionnelle et de placement pour les personnes qui entrent pour la première fois sur le marché du travail, pour les chômeurs et les handicapés, service de recyclage, service de réadaptation des invalides, service spécialisé pour les alcooliques et les narcomanes, service spécialisé pour les voyageurs et les immigrants, service aux anciens combattants, aux Indiens, aux Esquimaux, service d'aide à la famille qui sont, évidemment, parmi les services les plus importants, les aides familiales et les soins à domicile.

L'aide sociale, en regard des instruments de sécurité sociale et des services, est un dernier recours et constitue un complément nécessaire aux autres mesures de sécurité sociale. M. le Président, lors des séances de la commission parlementaire, j'ai insisté sur cet aspect de dernier recours de la loi d'aide sociale qui n'est pas un régime général de sécurité sociale devant régler universellement tout le problème de l'aide et de la dépendance sociale. Le projet de loi de l'aide sociale s'impose non seulement dans le but d'améliorer l'action gouvernementale auprès des assistés sociaux, mais aussi d'assurer une plus grande rationalisation de l'administration des programmes actuels d'assistance sociale.

Je reviens à une affirmation que j'ai faite tout à l'heure, à propos du rapport Boucher. Ce rapport avait identifié un certain nombre de problèmes administratifs dans le domaine de l'assistance sociale. Précisément, le rapport Boucher se référait au morcellement administratif, au caractère fortement centralisé et distant de l'administration, à la délégation mal définie des pouvoirs, aux normes administratives défectueuses et au manque de personnel qualifié.

L'expérience du ministère depuis ce temps a confirmé l'acuité de ces problèmes administratifs, surtout si l'on tient compte du fait que la population assistée a augmenté rapidement au cours des dernières années. De plus, l'extension de l'assistance spéciale et supplémentaire a rendu encore plus difficile l'obligation pour les fonctionnaires de tenir compte de multiples critères d'admissibilité et de différents modes de calcul des prestations.

Dans ces circonstances, les opérations devaient demeurer assez fortement centralisées et ne pouvaient donner lieu à une délégation d'autorité nécessaire à l'administration efficace de programmes aussi importants. D'ailleurs, la nécessité pour le personnel d'effectuer dans chaque dossier des opérations assez complexes ne laissait que peu de temps et de ressources à concentrer sur la prévention et la réhabilitation des requérants. Dans un tel contexte, des contrôles financiers très efficaces étaient extrêmement difficiles à exercer.

Le ministère a cependant mis en marche, depuis l'automne 1967, des enquêtes de vérification de façon constante. Ces enquêtes ont démontré combien il est difficile d'exercer une surveillance convenable de programmes divers gérés par des unités administratives ne relevant pas toutes du ministère et basées sur des réglementations différentes. Des enquêtes administratives de contrôle se sont poursuivies à un rythme accéléré et ont continué de se poursuivre parallèlement à la refonte et à la réorganisation des services administratifs de l'aide sociale.

Le ministère a également poursuivi la réorganisation de ses services extérieurs, qui était l'intégration du personnel qualifié des agences sociales et des services municipaux là où le programme d'assistance était encore administré à ce niveau. Il a entrepris une déconcentration d'opérations dans un circuit complet de bureaux gouvernementaux qui assurent la présence de fonctionnaires aux problèmes des individus et des familles, de leurs besoins et de leur circonstance partout sur le territoire.

L'action qui s'imposait était, on le comprendra, d'une extrême complexité, demandait des analyses qualificatives et quantitatives poussées, la conception d'un type de bureau local où

les tâches administratives seraient divisées efficacement, la présence dans chaque bureau, comme au bureau central, d'un groupe diversifié de fonctionnaires à la mesure des taches, y compris celle de la prévention de la dépendance sociale et celle de la réintégration des assistés sociaux à un régime de vie plus normal que celui de l'assistance.

Nous avons adopté des mesures intérimaires ou provisoires au plan de la réglementation, de la coordination des diverses allocations de base avec l'assistance spéciale, de la décentralisation de certains pouvoirs de décision, non seulement aux bureaux locaux, mais aussi à dix responsables régionaux de l'assistance sociale.

Nous sommes encore engagés dans l'application d'un plan d'implantation des bureaux locaux, dans leurs nouvelles dimensions physique et administrative déterminées aussi par la mise en disponibilité des locaux, des emplacements par le ministère des Travaux publics et de la mise en disponibilité des effectifs par la commission de la Fonction publique. Ces mesures ne pourraient toutefois pas suppléer à l'adoption d'une législation unique et plus facile à administrer comme le projet de loi de l'aide sociale présenté actuellement.

Divers groupes sociaux, les assistés eux-mêmes, ont, pour leur part, déploré à maintes reprises la complexité de nos lois d'assistance sociale et de leurs réglementations diverses.

M. le Président, le projet de loi de l'aide sociale s'inspire de la méthode d'assistance reconnue partout pour être la forme primaire de sécurité sociale. Cette approche du projet de loi ne constitue pas par elle-même un système de sécurité sociale, comme je l'ai dit il y a quelques instants, mais elle doit s'inspirer et tenir compte dans la définition de ses objectifs des autres éléments essentiellement complémentaires d'un système de sécurité sociale. Plus le système est évolué, moins important sera le rôle et devra être le rôle de l'aide sociale proprement dite. Quel que soit cependant le degré d'évolution d'un système de sécurité sociale, l'aide sociale fait partie constituante d'un tel système et doit faire corps avec les autres mesures de sécurité sociale et jouer un rôle bien précis et bien déterminé dans le développement socio-économique d'un Etat.

Contrairement à d'autres mesures de sécurité sociale, telles que l'assurance-maladie, le régime des rentes, les accidents du travail, l'assurance-chômage, les objectifs de l'aide sociale ne s'orientent pas vers la protection contre un risque social particulier, ni vers une politique générale de redistribution du revenu. Le motif de l'intervention de l'aide sociale est d'ordre très général, un état de besoins essentiels ne pouvant être satisfait autrement que par l'aide sociale. Cet état de besoins donne ouverture à un droit à l'aide et ce droit est une notion qui situe bien l'aide sociale dans le contexte de la sécurité sociale moderne.

La satisfaction normale d'un état de besoins ne se trouve donc pas dans une aide sociale. Si l'aide sociale parait être la seule source de satisfaction dans une situation ou dans un cas donné, elle ne peut essentiellement être considérée que comme une réponse palliative, une réponse provisoire et non pas définitive.

Assurer à la population la sécurité du maintien du revenu par un régime d'aide sociale appelle d'autres mesures, des mesures de prévention et de réhabilitation qui sont aptes à maintenir la satisfaction des besoins par des sources ordinaires ou normales. Le bénéficiaire d'une aide sociale, qu'il soit tout simplement victime d'une situation sociale, ou qu'il ait lui-même contribué à la création de son état de besoins, est dans une situation anormale, et l'exercice de son droit à cette aide n'est possible que pour le temps où une réponse valable à sa situation de besoins ne peut être donnée que par les mécanismes normaux de satisfaction.

L'aide sociale est donc un moyen d'assurer un certain niveau de vie, mais un moyen rési-duaire par rapport à tous les autres. Les objectifs d'un programme tel que celui-ci seraient faussés s'ils entravaient la satisfaction normale des besoins des individus et des familles ou s'ils ignoraient les mesures de prévention, de réhabilitation destinées à maintenir ou à réinstaller cette satisfaction normale dans la mesure du possible.

C'est donc dans ce contexte de la sécurité sociale, mesures à caractère résiduaire, que le projet de loi no 26 a été conçu et a été élaboré. Il ignore les causes des situations de besoins. Il rrconnaît le droit à l'aide et établit des mécanismes modernes tant pour le faire valoir que pour en décider. Il ne tient aucun compte des caractérisques politiques, sociales ou culturelles de ceux qui désirent s'en prévaloir. Il facilite les conditions d'exercice de ce droit. Il rrconnaît par contre qu'il s'agit d'un moyen exceptionnel et prévoit des mesures et des services pour prévenir ou corriger les situations qui donnent lieu à son application. Ces objectifs se vérifient dans les commentaires que j'aimerais maintenant faire relativement au droit à l'aide sociale, aux modalités de sa détermination ainsi qu'aux instruments qui sont associés à son application.

Pour faciliter à cette Assemblée l'étude du

projet de loi, j'ai déposé un projet de règlements généraux que nous avons étudiés à la commission parlementaire et que je soumettrai à la considération de mes collègues du cabinet, une fois le projet de loi no 26 adopté.

Quel est le droit et l'admissibilité à l'aide sociale? Le projet de loi proclame le droit à des personnes seules et des familles qui sont dans le besoin de retirer des bénéfices de l'aide sociale sans aucune discrimination. Pour garantir le respect et l'exercice de ce droit, le projet de loi no 26 prévoit des possibilités de recours qui sont mises à la portée de tout réquérant ou bénéficiaire qui se sent lésé. Il s'agit du pourvoi en revision et en appel. Ce droit n'est cependant pas illimité. Vous en comprenez certes les raisons. Il faut bien préciser que le droit à l'aide s'interprète comme étant le droit de toute personne qui est privée de moyens de subsistance et dont l'ensemble des biens qu'elle possède ne dépasse pas les normes prévues par règlement de percevoir une aide ou prestation qui correspond à ses besoins.

Vous remarquez qu'en vertu des énoncés précédents l'exercice du droit à l'aide implique la réalisation de certaines conditions, à savoir, premièrement, la privation de moyens de subsistance et, deuxièmement, la nécessité que le montant de l'ensemble des biens possédés soit égal ou inférieur aux normes prescrites par le règlement.

Sans entrer dans les articles mêmes du projet de loi, je voudrais signaler à l'attention des membres de cette Chambre particulièrement les articles 7, 8, 9, 10 et 12 qui précisent la signification de l'expression « moyens de subsistance », en ce qui concerne l'article 7. Cette définition des moyens de subsistance constitue une définition principale autour de laquelle pivote ce projet de loi.

Ce concept fait référence à tout emploi à plein temps, à temps partiel ou saisonnier qui est exercé de façon régulière et non occasionnelle.

Cette conception que nous avons jugé essentiel d'Inscrire dans les stipulations mêmes qui ouvrent la porte de l'admissibilité aux bénéfices prévus dans le projet de loi est la résultante logique de l'un des grands principes sous-jacents à ce projet de législation. En vertu de ce principe, le travail est considéré comme le moyen habituel pour tout adulte de subvenir à ses propres besoins personnels, de même qu'à ceux des membres de sa famille.

Bref, le travail est vu comme étant la voie normale de gagner sa vie. Ainsi, bien que la philosophie sous-jacente au projet de loi con- sidère comme essentiel que tous les individus et familles du Québec, qui sont dans un état de besoin, ne soient pas privés d'un certain minimum décent, on aurait tort d'entendre par là et de conclure que cette nouvelle orientation donnée à ce programme de bien-être encourage la paresse et la dépendance sociale et économique. Bien au contraire, notre objectif est d'un tout autre ordre. Le projet de loi comprend et fait appel, en effet, à tout un ensemble de possibilités nouvelles, de moyens et de ressources dont la nature même combine les impératifs d'une prévention et d'une réhabilitation articulés de façon empirique, mais dynamique.

Je donne un exemple de cet aspect préventif de la loi: l'aide que l'on pourra accorder sous forme de prêts, et un exemple de ces mesures de réhabilitation; l'aide qui est accordée sous forme de services, tel que les auxiliaires familiales, les cours de formation professionnelle, les stages de réhabilitation sociale, de réadaptation au travail et tout le processus de retour à la vie normale. Il y en a bien d'autres, évidemment.

Je crois pertinent d'ajouter que le montant de l'aide accordé dans chacun des cas est variable, puisqu'il a pour base de calcul du déficit. Le montant de l'aide qui est fournie à une personne ou à une famille est donc égal à cet écart déficitaire qui existe entre, d'une part, l'ensemble des revenus et d'autre part, les besoins qui sont calculés selon des normes et des modalités prescrites par règlement. J'aurai, tout à l'heure, l'occasion d'élaborer davantage sur cet aspect. Le tout, évidemment jusqu'à concurrence de certains maxima qui seront, eux aussi, fixés par règlements.

Exceptionnellement et pour fins de prévention et de réhabilitation, nous avons jugé absolument nécessaire d'étendre la portée du droit à l'aide sociale au-delà de celle que je viens de décrire.

C'est ainsi qu'à l'article 8 on prévoit qu'une aide pourra être fournie pour combler les besoins spéciaux d'une famille ou d'une personne seule qui n'est pas privée de ses moyens de subsistance, au moment où il sera jugé nécessaire de verser cette aide pour éviter un plus grand mal, c'est-à-dire avant qu'elle soit privée de subsistance ou qu'elle ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour sa santé ou risque de la conduire au dénuement total.

De plus, il est prévu, à un autre article, qu'au moment où l'aide versée en vertu de l'article 8 s'avérera insuffisante pour éviter que cette famille ou cette personne ne soit privée de ses moyens de subsistance, le ministre pourra lui

proposer un plan de relèvement et lui accorder l'aide sociale pour combler ses besoins ordinaires et spéciaux, à la condition qu'elle accepte de se conformer aux prescriptions du plan quilui est ainsi proposé. A cet égard, vous noterez...

M. LESAGE: M. le ministre, me permettrlez-vous une question?

M. CLOUTIER: Oui.

M. LESAGE: Ces plans de relèvement sont-ils limités au cas où une personne est dans le complet dénuement, sans source de revenus?

M. CLOUTIER: Non, ces plans ne sont pas limités. Dans ce cas-là, la réhabilitation devra s'accompagner d'un plan de relèvement, mais, dans les autres cas, c'est implicite. Il peut y avoir des plans de relèvement.

M. LESAGE: Oui, mais c'est implicite, parce que, d'après le texte du projet de loi, il faut qu'une personne soit complètement démunie de ressources.

M. CLOUTIER: II est implicite dans les autres cas, mais dans celui-là il est nommément mentionné afin que l'agent de sécurité sociale ait l'obligation de proposer au requérant ce plan de relèvement.

M. LESAGE: J'ai l'impression que le député de d'Arcy-McGee fera des remarques au ministre, là-dessus. C'est dangereux, les choses implicites dans du droit statutaire.

M. CLOUTIER: D'accord. Le projet de loi de l'aide sociale comprend aussi deux stipulations qui apportent un complément nécessaire aux trois articles dont je viens de parler. Il est prévu par la loi qu'une personne peut bénéficier de l'aide sociale en attendant le versement d'une somme qui doit lui parvenir, de la réalisation d'un droit ou de la liquidation d'une affaire si elle est autrement admissible à l'aide sociale.

Elle assume alors l'obligation de rembourser, évidemment jusqu'à concurrence des sommes d'argent ou de la valeur des biens qu'elle recevra. Enfin, la loi permet d'aider toute personne qui, en vertu d'une loi, d'un contrat ou d'un jugement, dépend d'une autre personne pour sa subsistance lorsque cette dernière refuse ou néglige de subvenir à ses besoins. Il est cependant prévu que cette personne, dite obligée envers l'autre, doit rembourser là aussi, jusqu'à concurrence du montant de ses obliga- tions envers cette personne, les sommes d'argent et la valeur des autres prestations accordées en vertu de la présente loi.

Le gouvernement est évidemment subrogé aux droits de cette personne jusqu'à concurrence du montant de la valeur des prestations. Dans tous les cas de cette dernière catégorie, pour rendre possible l'établissement d'un déficit, il ne sera pas tenu compte des biens et des revenus de la personne qui est dans l'obligation de subvenir aux besoins de ladite personne ou famille, sans quoi la mojorité des demandes d'aide de ce type devra faire l'objet d'un refus qui risquerait dangereusement de provoquer la détérioration de situations individuelles ou familiales déjà très difficiles et qui sont trop souvent, d'ailleurs, caractérisées par un niveau avancé de désintégration ou de marginalité.

Je vous signale que ces deux derniers articles n'ont pas pour but de remplacer les procédures légales ordinaires qui prévalent dans de telles situations. Au contraire, ils viennent répondre à des situations toutes particulières et temporaires. Par ailleurs, la subrogation légale assure que les procédures normales suivront effectivement leur cours. Voilà, M. le Président, 1'énumération explicite des grands principes et des conditions qui régissent le droit et l'admission à l'aide sociale.

Quelles sont les modalités de détermination de ce droit? Nous venons de voir dans quelles situations l'Individu ou les familles peuvent devenir admissibles à l'aide sociale. Cette admissibilité est toutefois conditionnelle. Si on a pu déterminer un cas de situation difficile, il reste à l'apprécier de façon précise par une étude des biens possédés ainsi que du déficit entre les besoins et les revenus.

En ce qui concerne les biens, l'évaluation des biens constitue, d'une certaine façon, un critère d'admissibilité en ce sens que, malgré l'existence d'an déficit, elle peut conduire au refus de l'aide, si un individu ou une famille possède des biens supérieurs au montant qui sera fixé par les règlements. Si l'aide sociale doit demeurer une mesure résiduaire, il est normal que les familles et les individus tentent de résoudre leur problème eux-mêmes avant d'avoir recours à l'Etat, surtout s'ils ont accumulé des biens importants.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que le règlement sera vraisemblablement plus restrictif au titre de l'avoir liquide pour ceux qui ne sont pas privés de leur moyen de subsistance que pour les autres. Cependant, il ne faudrait pas croire qu'on risquerait, avec une telle disposition, de priver qui que ce soit de ses biens nécessaires et essentiels. C'est ainsi que nous

avons prévu une série d'exclusions dans l'évaluation des biens. On peut citer, par exemple, les meubles essentiels, les effets personnels, tel que prévus au code de procédure civile, l'ensemble des outils, des instruments nécessaires à l'exercice d'un travail, l'équité modeste investie dans la résidence d'un propriétaire. Le projet de règlement permet même de conserver quelque temps un bien dont on ne pourrait disposer immédiatement sans perte importante.

Quant au déficit, une fois admissible au plan des moyens de subsistance comme à celui des biens, le requérant pourra se prévaloir d'une prestation qui est égale au déficit déterminé par la différence entre ses besoins et ses revenus. Si vous le voulez bien, nous allons étudier plus à fond la détermination du déficit. Pour ce faire, j'aborderai successivement le problème des besoins et celui des revenus. Il va de soi que, dans une loi de caractère résiduaire, les besoins considérés doivent l'être dans le contexte d'un minimum décent.

Comment déterminer ce minimum? Car c'est une donnée qui est étroitement reliée à une certaine structure socio-économique. Le minimum du Québec ne sera pas celui de la Californie ou encore celui de pays sous-équipés comme l'Inde. Une structure socio-économique s'évalue à l'aide d'indices. Parmi ceux-ci on a tenu compte, en plus des coûts effectifs, des besoins, du niveau du salaire minimum et de la situation financière, pour ne donner que quelques exemples. Car on ne pourrait considérer la satisfaction des besoins en espèces à un niveau supérieur au salaire minimum en vigueur sans perturber tout le marché du travail et de la main-d'oeuvre.

De même le développement de la sécurité sociale d'un Etat doit suivre et s'appuyer sur son développement économique. Car, dans le cas contraire, elle le ralentirait. Le Québec est actuellement dans une situation financière qui n'est pas facile, et il serait inopportun, à ce moment-ci, de trop grever le budget. Onpeutprévoir une augmentation du niveau des prestations quand le projet de loi sera en vigueur. Il ne faudrait pas cependant s'attendre à une très forte augmentation des prestations. Il faut évidemment procéder par étapes. Le projet sera au début caractérisé davantage par la rationalisation, l'évaluation des besoins qu'il effectuera. C'est ainsi qu'au lieu de prévoir un montant couvrant tous les besoins et ne variant qu'en fonction du nombre de personnes à charge, le projet de réglementation tendra à tenir compte le plus possible de la réalité.

On prévoit, par exemple, un montant couvrant la nourriture, le vêtement ainsi que les nécessités personnelles et domestiques en vertu d'une table bien précise. Ce montant variera en fonction du nombre d'adultes ainsi que du nombre et de l'âge des enfants. Le coût de ces besoins varie peu d'une région à l'autre et d'une personne à l'autre. Le projet de règlement prévoira donc un montant prédéterminé pour tous. C'est ce que j'ai désigné, au cours des travaux de la commission parlementaire, comme la table des besoins ordinaires. Par contre, la situation est différente dans le cas des frais relatifs à l'habitation. Le projet de règlement prévoira donc le paiement au coût, jusqu'à concurrence d'un maximum, de l'ensemble des frais de l'habitation en fonction du nombre de personnes seulement, et non pas de l'âge des enfants.

Enfin, toujours suivant les mêmes critères, il sera tenu compte des variations dues à la condition de logement et des dispositions et différences s'appliquant aux locataires, auxproprié-taires et aux pensionnaires.

Je ne donnerai pas, M. le Président, d'exemple de chiffres; nous en avons discuté à la commission parlementaire. J'ai déposé des tableaux. Je ne crois donc pas, à ce moment-ci, devoir entrer dans des calculs ou des tableaux précis. Nous y reviendrons à une autre occasion, soit au cours des travaux d'étude du comité. Si par rapport aux lois actuelles on ne remarque qu'une faible augmentation pour la personne seule, par contre la famille se voit grandement avantagée par une évaluation beaucoup plus généreuse des besoins des enfants.

C'était une lacune importante de nos législations actuelles et il était opportun de réaliser ce redressement dès une première étape pour que tous reçoivent un montant comparable, quel que soit le nombre de personnes couvertes par ce montant. Cela ne veut pas dire toutefois que nos prestations soient tellement plus basses que celles du reste du Canada, des autres provinces canadiennes ou des Etats-Unis. Au contraire, chez les familles, sauf dans des cas très rares, seul l'Ontario prévoit une prestation supérieure à celle du Québec, ce qui est très acceptable en raison du coût du logement supérieur en Ontario et de la meilleure situation économique de cette province. Aux Etats-Unis, les deux-tiers des Etats prévoient des prestations inférieures pour les familles. On peut donc dire que la loi d'aide sociale — avec le projet de réglementation et des tables — si elle n'est pas la plus généreuse du continent nord-américain, répond quand même relativement bien aux besoins ordinaires.

Dans le cas des besoins spéciaux, le problème est différent. De par leur caractère, ces besoins ne sont accordés que s'ils sont manifestes, et dans certaines circonstances seulement.

On peut dire qu'en principe un besoin spécial

ne sera accordé que si son refus présente un danger pour la santé au risque d'empêcher le retour à la vie normale ou sur le marché du travail normal. Vous pouvez voir, à la suite de cette étude de l'évaluation des besoins, que le gouvernement entend bien respecter l'esprit du projet de loi d'aide sociale, et que s'il tient à lui conserver son caractère résiduaire par rapport aux autres législations, il désire encore plus s'assurer de pouvoir agir dans toutes les situations où les personnes ou les familles pourraient avoir besoin de l'Etat.

Mais, si l'Etat est prêt à faire sa part, il n'agit qu'en dernier lieu, après qu'un requérant a utilisé toutes les ressources à sa disposition. Il faut ainsi faire une évaluation des revenus dont il jouit. C'est ici peut-être que se retrouvent davantage les dispositions positives de la loi, celles qui agiront vraiment pour inciter un bénéficiaire d'aide sociale à reprendre sa situation en main. C'est donc dire que, comme règle générale, si les revenus sont comptabilisés en totalité, on prévoit des dispositions particulières pour les revenus du travail et de la location. Ainsi, dans les cas des personnes et des familles privées des moyens de subsistance, on ne comptabilisera qu'une partie des revenus du travail, les incitant à profiter de toute possibilité de travail qui puisse s'offrir. Ils demeurent ainsi plus prêts à retourner sur le marché régulier du travail tout en contribuant à leur bien-être.

Ici, je voudrais faire remarquer à tous les députés, et particulièrement aux membres de la commission parlementaire, qu'il y aurait probablement lieu, dans les règlements, d'élargir cet article de revenu du travail permis aux bénéficiaires de prestations d'assistance sociale. Nous y reviendrons en comité. Je pourrai indiquer à ce moment-là de quelle façon et jusqu'à quel niveau nous pourrions envisager l'élargissement des mesures projetées.

On a aussi voulu tenir compte de celui qui, après avoir bénéficié de l'aide sociale, retourne sur le marché régulier qu'il avait laissé. Dans certains cas, ce retour est difficile car les risques de redevenir chômeur sont grands. Dans ces cas, on appliquera les mêmes principes que ceux qui sont privés de moyens de subsistance. Pendant une période maximale de six mois, on ne comptabilisera encore qu'un pourcentage des revenus du travail. On peut finalement résumer ces dispositions par une volonté de retourner le plus rapidement possible au travail, celui qui, à cause de diverses circonstances, l'a laissé. Les dispositions reliées au revenu de locations sont du même type que les précédents et visent à ne pas décourager ceux qui aimeraient prendre un chambreur ou un pensionnaire et ainsi arron- dir la prestation gouvernementale. Enfin, il y a aussi divers revenus qui ne seront pas comptabilisés. Je cite les allocations familiales, tant fédérales que provinciales, car elles sont évidemment très importantes pour les grandes familles. Les autres consistent en des montants de faible valeur.

Quels sont maintenant les instruments que nous utiliserons pour mettre cette loi en application? Il y aura, bien certainement, à mettre en place, et ce que nous avons commencé depuis plusieurs mois, l'infrastructure qui aura charge d'administrer ce programme de même que certains autres programmes qui le complètent. J'esquisserai donc rapidement les grandes avenues que l'on prévoit de développement progressif de tous les mécanismes dans l'optique de l'amélioration des services qui doivent être rendus à l'ensemble de la population.

Le ministère compte actuellement 111 points de services répartis à travers la province et qui administrent déjà l'ensemble des programmes d'assistance sociale que le présent projet veut incidemment refondre totalement, unifier rendre cohérent et conforme aux réalités sociales nouvelles. Ces points de services dans la province se répartissent comme suit: 10 bureaux régionaux, qui correspondent aux dix régions administratives de la province, 54 bureaux locaux, 32 bureaux satellites, 6 agences de service social et 9 services municipaux. Donc, actuellement, il y a 111 points de services avant l'application de cette nouvelle loi. L'orientation prise par le ministère de la Famille vise à regrouper dans des bureaux gouvernementaux l'administration directe de l'aide sociale. Ce plan de regroupement, amorcé depuis un peu plus d'un an, comporte, en plus de la nécessité de l'ouverture de nouveaux bureaux, le transfert de responsabilités à partir des agences, des sections économico-sociales des agences de service social ainsi que des services municipaux.

Signalons, M. le Président, que ce plan est en voie d'être complété dans la presque totalité des régions de la province. Je donnerai un exemple: dans la ville de Québec, il n'y avait qu'un seul bureau, autrefois, pour des milliers et des milliers d'assités sociaux; je crois, sauf erreur, qu'il y avait 18,000 dossiers. Il y aura maintenant cinq points de service, cinq bureaux décentralisés et mieux répartis dans Québec, afin d'en faciliter l'accès, d'abord, aux assistés sociaux et, ensuite, d'avoir un meilleur contrôle administratif.

Au cours de l'énumération de ces catégories de points de service que je viens de brosser, M. le Président, vous avez remarqué qu'en tê-

te de liste j'ai rapporté l'existence des dix bureaux régionaux. L'objectif d'une régionalisation progressive, basée sur les principes de la décentralisation administrative et de la déconcentration des pouvoirs de décision et des responsabilités correspondantes, a effectivement présidé, depuis plus d'un an, à la mise en oeuvre et au déroulement progressif du programme de réorganisation des structures administratives des services du ministère de la Famille, plus spécialement à la Direction générale de l'assistance sociale à domicile, qui est devenue depuis la Direction générale de l'aide sociale et qui deviendra, dans les prochaines semaines, la Direction générale de l'aide et de la sécurité sociales.

Cette réorganisation radicale au sein du ministère, ayant présidé à la constitution d'un palier intermédiaire entre le local et le central, s'Inscrit dans toute la politique gouvernementale de régionalisation de chacun des ministères. Elle a pour objectif ultime d'accélérer les prises de décision qui conditionnent directement l'efficacité de nos interventions et contribuent à améliorer sensiblement la qualité des services que nous devons rendre à l'ensemble de la population.

C'est d'ailleurs ce désir de voir s'améliorer sensiblement l'efficacité et la qualité de nos services qui a donné naissance, au sein du ministère de la Famille, à la préoccupation d'une coordination plus poussée de tous les services sociaux. L'articulation des efforts et de toutes les ressources qui oeuvrent dans le champ du bien-être devient la prochaine grande étape à franchir.

A cet égard, nous sommes déjà témoins d'un projet pilote mené à Montréal et qui consiste en une intégration physique de toute une série de services qui oeuvrent dans un même secteur géographique. En l'occurrence, il s'agit du centre communautaire de Pointe-Saint-Charles. Nous suivons avec grand intérêt cette expérience, puisque les interventions unifiées de cette multitude de services nous apparaissent pouvoir produire un service plus complet, adéquat, accessible et efficace. Cette préoccupation a commandé la formation d'une autre nouvelle direction générale, au ministère de la Famille. Il s'agit de la Direction générale de la famille et de la population, dont le titulaire en poste aura précisément pour rôle la coordination des actions et de toutes les ressources en services sociaux divers au Québec. Au sein des services sociaux, il tentera de structurer une saine participation active de tous les éléments de la communauté québécoise afin que toute la collectivité soit mise à contribution et participe directement et activement à la mise en oeuvre des meilleures solutions.

Nous escomptons, M. le Président, enrichir tous ces efforts et énergies déployés dans le but de rendre le meilleur service possible, en multipliant nos tentatives en vue de raffiner la coordination interministérielle et gouvernementale que commande l'extrême complexité et les multiples facettes des problèmes sociaux auxquels mon ministère doit faire face de façon quotidienne.

Nous avons déjà acquis une certaine expérience dans ce domaine, avec le programme de retour à la vie normale, qui tente de mobiliser tous les services gouvernementaux, parapublics et privés qui sont concernés et qui ont foi en la nécessité d'aider les sans-travail à devenir des travailleurs stables et permanents. D'autres députés, je crois bien, élaboreront sur ces travaux spéciaux de coordination interministérielle et sur ces projets pilotes de retour à la vie normale que nous avons explorés avec beaucoup de succès depuis plusieurs années.

Il y a particulièrement, à ce moment-ci, une expérience qui se déroule à Montréal qui a été amorcée par le ministère de l'Industrie et du Commerce et par le ministère du Travail.

Il a pour objet bien précis — ils appellent cela l'opération 5000 — de trouver 5,000 emplois actuellement aux assistés sociaux ou aux personnes aptes au travail qui sont en chômage.

Déjà, j'ai un dossier des premiers rapports sur cette expérience. Après avoir visité quelques industries seulement, il est surprenant de voir quelle est la demande, quel est le chiffre de besoin de travailleurs que ces industries ont mentionné à cette équipe formée de plusieurs des ministères que j'ai mentionnés, aussi d'autres ministères tels que l'Education, de combien de travailleurs ils ont besoin à court terme pour poursuivre des programmes. Il y a donc là une communication étroite à établir entre, d'une part, les employeurs et, d'autre part, ceux qui désirent avoir un emploi. Il y a une communication qui ne se fait pas actuellement. Par cette opération que l'on poursuit actuellement, on a la preuve éloquente des difficultés de communication entre ceux qui désirent obtenir des travailleurs et ceux qui désirent de l'emploi.

Les aspects financiers du projet de loi d'aide sociale, M. le Président, ont retenu notre attention. J'ai dit devant la commission parlementaire que les montants d'augmentation estimés des dépenses totales à faire avec cette nouvelle loi, y compris l'augmentation naturelle des budgets d'année en année, se situeraient entre $25 et $40 millions. Alors que le taux d'augmentation de la population assistée a été fort rapide

au cours des dernières années, ce taux semble actuellement décroître, de sorte qu'en l'absence de modifications profondes aux conditions économiques actuelles on peut espérer que le nombre total des assistés sociaux va tendre à se stabiliser. Il faut cependant se souvenir que, déjà, le Québec compte relativement plus d'assistés sociaux que la moyenne canadienne. De plus, nombre d'assistés sociaux reçoivent déjà des prestations plus élevées que celles prévues par les barèmes de base de la loi actuelle d'assistance publique ou des lois catégorisées d'assistance, par suite des mesures additionnelles de l'assistance spéciale et de l'assistance supplémentaire accordées par arrêté en conseil.

En dernier lieu, les enquêtes administratives ont pour objet d'éliminer de l'assistance sociale les personnes qui ne sont pas dans le besoin au sens de la loi. L'application des normes intérimaires et l'accent mis sur le retour au travail commencent à porter leurs fruits. Ils peuvent faire que l'augmentation de la population assistée, même dans le cadre d'une nouvelle loi, sera faible, du moins à court terme. A ce point, il est important de souligner le caractère difficilement prévisible des déboursés d'assistance sociale, même si nous faisons, évidemment, des estimations que nous tentons de rendre le plus précis possible.

Au cours des récentes années, tant au Canada qu'aux Etats-Unis, il n'a pas existé de relation directe entre les variations du niveau de chômage et l'augmentation de la population assistée, même dans des périodes où le chômage a diminué. Le nombre des assistés a eu tendance à augmenter. D'un autre côté, les périodes d'augmentation du chômage ont entraîné presque nécessairement des accroissements de la population assistée. En conséquence, il est possible que l'assistance sociale se ressente des récentes augmentations de chômage auxquelles peuvent donner lieu dans le Québec des mesures anti-inflationnistes décrétées par un autre ordre de gouvernement.

Dans ces circonstances, les coûts de l'aide sociale pourraient s'accroître encore plus que prévus. A cause du fait que la loi se veut résolument de caractère résiduaire par rapport aux autres programmes gouverne mentaux et par rapport au marché du travail, parce qu'elle prévoit des contrôles administratifs rigoureux et parce que son application s'appuiera sur des mesures complémentaires visant à assurer le retour au travail des assistés sociaux, le gouvernement voit donc à ce que les implications financières de cette législation ne posent pas de problèmes sérieux dans une conjoncture financière déjà difficile pour le Québec.

La loi d'aide sociale et sa réglementation vont aussi loin que possible pour soulager les difficultés des familles assistées du Québec tout en respectant les priorités auxquelles le gouvernement fait face dans l'utilisation du budget de l'Etat.

Le gouvernement croit nécessaire, dans la conjoncture actuelle, d'orienter l'emploi de nos ressources vers des mesures de développement économique et social.

On ne doit pas permettre une politique d'aide sociale qui, en accaparant une trop large partie de ses ressources, mette en danger l'application des politiques nécessaires de développement. Le contenu de la Loi de l'aide sociale et ses règlements apparaît au gouvernement susceptible d'apporter le meilleur équilibre possible en fonction des priorités du Québec. La position du gouvernement dans ce domaine n'est cependant pas mue par le seul motif de considération financière, même si nous y apportons une grande attention. Elle rejoint des considérations beaucoup plus profondes, au plan des objectifs, de l'action de l'Etat. Du point de vue du gouvernement, l'Etat doit surtout orienter son action pour établir des conditions qui rendront possible aux citoyens de répondre en toute dignité à leurs besoins et à ceux de leur famille au moyen des résultats de leurs activités sur le marché normal du travail ou par le recours au programme existant de sécurité sociale.

L'attitude du gouvernement ne veut donc pas demeurer passive, et la population du Québec vient d'être saisie d'une première tranche d'un plan destiné à assurer la revision des programmes de sécurité sociale. A ce premier document intitulé: « Orientation pour une politique d'allocation familiale », viendront s'ajouter d'autres documents de cette nature portant sur les autres aspects du problème dans ses relations avec la main-d'oeuvre et l'emploi et avec les réseaux de service.

A ce sujet, en terminant, je voudrais, si je n'enfreins pas le règlement, je crois bien que vous me permettrez de faire, en me référant au plan que nous avons déposé récemment pour la réforme des allocations familiales, vous dire que c'est le résultat d'un travail de plusieurs mois et de plusieurs années, qui nous apparaît la base d'un système cohérent de sécurité sociale dont feront partie et le bill 26 et une réforme des allocations familiales dans l'optique d'une revision totale de la sécurité sociale. Nous avons déposé ce document dans l'espoir que cette orientation que veut donner le Québec à la rénovation de la politique sociale sera entendu et sera pris en considération pour le plus grand bénéfice des citoyens du Québec.

M. Victor-C. Goldbloom

M. GOLDBLOOM: M. le Président, au nom de l'Opposition, je voudrais déclarer que nous allons, il va sans dire, voter pour le projet de loi en deuxième lecture, en troisième lecture également.

Nous ne pouvons cependant nous empêcher, en ce moment précis, de souligner le fait que c'est enfin aujourd'hui, le 1er décembre 1969, trois années et demie après la prise du pouvoir par le gouvernement actuel, que nous sommes enfin en mesure d'étudier en cette Chambre, un projet de loi d'une telle importance. Cette période de trois années et demie a été marquée par de multiples promesses de la présentation de ce projet de loi et à chaque fois, nous avons connu la déception de la remise de l'étude du projet.

J'ai dit, devant la commission parlementaire qui a étudié ce projet de loi, que la seule partie de cette période d'attente que nous n'avons pas regrettée est celle qui a été consacrée à l'audition des mémoires présentés par le grand nombre d'organismes dont le ministre a donné, au début de ses remarques, la liste impressionnante.

Mais à vrai dire, M. le Président, en lisant et relisant le projet de loi et ses règlements, nous ne trouvons à peu près rien là-dedans qui n'aurait pu être adopté il y a trois ans et demi, sauf peut-être les barèmes de prestations qui, évidemment, sont conçus en fonction de la conjoncture économique, et peut-être que la conjoncture économique avant aujourd'hui n'aurait pas permis de présenter les barèmes que nous avons maintenant devant nous.

Quant aux règlements, c'est un regroupement des services, un regroupement des forces, si vous voulez, mais ce n'est pas le pas de géant vers un vrai régime de sécurité sociale que nous aurions espéré faire.

Le ministre a fait l'historique des régimes d'aide sociale. Je me contenterai de faire allusion au rapport Boucher. J'aurai l'occasion, au cours de mes remarques, d'y revenir pour citer certaines de ses recommandations.

La préparation de ce projet de loi a été commencée sous le régime du gouvernementprécé-dent et grâce à l'initiative du député de Richmond. Un texte était déjà en préparation avant les dernières élections provinciales.

Le gouvernement avait à sa disposition tous ces éléments. Il est allé au fil de l'eau pour nous présenter enfin un projet de loi qui a son mérite, mais qui est, en même temps, un peu décevant. Il est décevant parce que nous l'aurions voulu meilleur, nous l'aurions voulu plus aven- tureux, nous l'aurions voulu plus Imaginatif, nous l'aurions voulu plus humain.

Le ministre a souvent dit que c'est une loi-cadre, que le cadre est assez large pour permettre d'y insérer toutes les mesures voulues pour l'aide sociale, pour la réadaptation de l'assisté social.

Il faut dire que nous ne connaissons que le cadre. Pourtant, nous voyons que c'est à la discrétion du ministre de choisir essentiellement ce qui sera inséré là-dedans. Nous avons les grandes lignes de ce qui est dessiné à l'intérieur, mais nous restons devant une discrétion ministérielle qui nous laisse, comme je l'ai dit, un peu déçus.

Si nous faisons l'historique de tous les régimes d'assistance ou d'aide sociale, nous pouvons constater que, même sans indexation, les barèmes de prestations ont suivi plus ou moins — j'insiste là-dessus — l'augmentation du coût de la vie. Mais, cette augmentation n'a jamais été régulière comme sur une rampe. Elle a été très irrégulière comme sur un escalier mal fait. Voici que, de nouveau, nous faisons un autre pas sur cet escalier, mais nous ne bâtissons pas de rampe sur laquelle notre aide sociale pourra monter de façon régulière pour éviter les plaintes et les confrontations que nous avons connues trop souvent au cours des récentes années.

Toute loi d'aide sociale, par le truchement de laquelle l'Etat donne des prestations, est en quelque sorte un régime de revenu minimum garanti. Il en est ainsi de ce projet de loi que nous étudions aujourd'hui. Mais, c'est plutôt une compilation de mesures correctives que nous étudions — mesures qui devront être appliquées post facto, après la panne économique — qu'un vrai moyen de prévenir les difficultés qui peuvent rendre l'aide sociale nécessaire.

Cette aide sociale sera, selon notre projet de loi, accordée sur la base du déficit qui existe entre les besoins d'une famille ou d'une personne seule et les revenus dont elle dispose. Je souligne que la constatation de ce déficit vient après le fait. La révision et l'appel contre cette révision, viennent également après le fait. Même le revenu minimum garanti est une mesure qui est appliquée après le fait de la panne économique. Mais, par le truchement d'un mécanisme d'impôt négatif, un régime de revenu garanti peut réagir un peu plus rapidement. La recommandation 53 du rapport Boucher disait ceci : « En plus de l'assistance financière, on devrait mettre davantage l'accent sur les services à fournir de façon prioritaire aux personnes et aux familles menacées de dépendance sociale. »

Ce principe trouve des allusions dans le bill 26, mais n'y trouve pas les mécanismes néces-

saires pour agir de façon efficace pour prévenir la dépendance sociale. J'ai souvent dit, M. le Président — vous connaissez mon intérêt dans ce domaine de la législation — que, même si nous ne sommes pas en mesure de tout faire pour les assistés sociaux d'aujourd'hui, même si nous ne sommes pas en mesure de fournir aux défavorisés d'aujourd'hui tous les moyens financiers qui leur permettraient de sortir du pétrin, notre régime d'aide sociale doit être ce qu'un organisme bien connu appelle « The Save the Children Fund ». Il faut que nous agissions de façon à sortir les enfants défavorisés, les enfants qui ne sont pas pour leurs propres raisons des assistés sociaux aujourd'hui et qui risquent de demeurer des assistés sociaux à l'avenir, à cause du cercle vicieux dans lequel se trouvent leurs parents, il faut que nous agissions de façon à sortir les enfants défavorisés d'aujourd'hui de ce cercle vicieux et leur épargner cette vie de dépendance que connaissent leurs parents.

Nous savons que les enfants défavorisés absorbent moins bien l'éducation qui leur est offerte et finissent par fonctionner à un quotient intellectuel inférieur à celui duquel le bon Dieu les a doués. C'est grave, M. le Président! Nous devons agir de façon à empêcher cette détérioration qui arrive à trop de nos enfants, tous les jours, dans nos écoles.

Je retourne au rapport Boucher pour en citer la première partie de la recommandation 13: « Le gouvernement du Québec devrait promulguer une législation distincte et unifiée sur le bien-être de l'enfance. »

Cette recommandation remonte à 1963. Nous avons devant nous aujourd'hui une loi d'aide sociale, mais nous n'avons pas devant nous une loi sur le bien-être de l'enfance, et nous en avons un grave et urgent besoin.

Un des problèmes qui me frappent en étudiant ce projet de loi, c'est que nous ne procédons pas à simplifier l'admission au régime d'aide sociale. Le rapport Boucher, dans sa recommandation 25, et je cite encore une fois, disait: « Les procédures de vérification devraient être simplifiées et réduites en nombre pour reposer davantage sur les méthodes modernes d'échantillonnage. » Cette recommandation rejoint l'idée du mécanisme de l'impôt négatif. C'est l'idée d'éviter autant que possible — et je sais que ce n'est pas toujours facile de le faire — les lenteurs, les lourdeurs, les complexités de l'administration bureaucratique pour permettre l'accès au régime à presque tous ceux qui en font une demande qui paraît, au premier abord, justifiée, quitte à vérifier par échantillonnage par la suite.

Il me semble, je n'ai pas de chiffres pour le prouver, mais il me semble que l'étude, la vérification, la revision de chaque cas nous coûte plus cher que la fraude possible de la part des assistés sociaux. Il faut protéger l'argent des contribuables qui est versé aux assistés en prestations. D'accord. Mais nous regrettons de constater que ce projet de loi et de règlements vise beaucoup plus la protection du trésor public que la promotion du potentiel humain des assistés sociaux. Je ne parle pas des intentions du ministre; je parle du texte de la loi et des règlements et de l'impression conservatrice et négative qui s'en dégage.

La crainte de fraude est justifiée surtout dans le cas de ceux qui, par paresse, retirent des bénéfices du régime d'aide sociale mais qui sont aptes au travail et devraient travailler, ou de ceux qui cachent le fait qu'ils travaillent et continuent ainsi de recevoir des allocations sociales.

Je soumets, M. le Président, que la forte majorité de nos assistés sociaux sont inaptes au travail et que ces considérations ne jouent pas à leur égard.

M. le Président, il est six heures, je demande la suspension du débat.

M. PAUL: Jusqu'à huit heures, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit heures ce soir.

Reprise de la séance à 20 heures

M. LEBEL (président): A l'ordre, messieurs!

M. GOLDBLOOM: M. le Président, je parlais de la façon de déterminer l'admissibilité des assistés sociaux au régime d'aide sociale.

Je voudrais citer un des mémoires qui a été soumis à la commission parlementaire, mémoire publié conjointement par le Conseil des oeuvres de Montréal et le Montreal Council of Social Agencies: « Nous reconnaissons la nécessité d'une certaine vérification des demandes d'aide sociale afin que l'aide accordée réponde à des besoins réels. Cependant, nous croyons que la procédure de détermination de l'éligibilité telle que prévue au règlement... risque d'entraîner la violation de la vie privée et le manque de respect de la dignité humaine des citoyens. « Des expériences ont été et sont faites dans divers états américains sur de nouvelles méthodes de détermination d'admissibilité. Un petit groupe d'états a déjà adopté des méthodes simplifiées; un autre groupe effectue des expériences dont le début remonte à plusieurs années et un grand nombre d'états effectuent des expériences pilotes actuellement. « Une publication américaine du « Public Welfare Reporting Center of National Study Service Incorporated » intitulée « Declarations or A Simplified Method of Eligibility Determination » rapporte les résultats de ces expériences de simplification des procédures de détermination d'éligibilité effectuées par plusieurs états américains depuis quelques années. « Ces procédures de détermination de l'éligibilité des candidats à l'aide sociale sur la base d'une déclaration personnelle du candidat sont selon cette publication, appuyées sur l'hypothèse que les individus sont responsables et capables de fournir l'information nécessaire à la détermination de l'éligibilité sans qu'une entrevue personnelle et des efforts souvent inutiles et humiliants de vérification de l'information soient nécessaires. « L'expérience américaine comporterait les avantages suivants: Respect de la dignité des candidats, meilleure utilisation du personnel professionnel, participation maximum des candidats, diminution des erreurs dues aux fonctionnaires, grande rapidité dans l'attribution de l'aide, plus grande efficacité administrative. « Des vérifications de l'efficacité des méthodes simplifiées montrent que dans certains cas il y a régression du nombre de ces inéli- gibles recevant l'aide et que les cas de fraude ne sont pas plus nombreux, étant donné certaines conditions, que dans des procédures plus complexes. « Nous ne pouvons énumérer tous les avantages et inconvénients de ces méthodes simplifiées de détermination d'éligibilité sur la base d'une déclaration personnelle, mais il nous semble que les expériences sont suffisantes pour que l'on envisage l'adoption d'un système semblable au Québec. « Nous recommandons donc que la procédure de détermination de l'éligibilité des candidats à l'aide sociale soit réétudiée à la lumière des expériences étrangères et que tous les efforts soient faits pour expérimenter ici ce qui semble constituer une grande amélioration administrative et sociale. »

Un peu plus loin dans le même mémoire, faisant allusion aux analyses des circonstances et des besoins qui amènent les personnes en cause à recourir à l'aide sociale, le Conseil des oeuvres de Montréal et le Montreal Council of Social Agencies disent ce qui suit: « Nous suggérons également que toutes les précautions soient prises pour respecter la vie privée et la dignité humaine des requérants... Nous recommandons que les vérificateurs évitent de baser leur décision sur des délations. Une des façons d'empêcher les abus en ce sens et dans l'application générale de la loi est de veiller à ce que les administrateurs de la loi reçoivent une formation adéquate. »

Ecoutez ce que le rapport Boucher a à dire sur ce dernier point, les recommandations 27 à 30 inclusivement: « Pour la bonne marche et l'administration ordonnée de l'assistance à domicile, le ministère devrait recruter du personnel préparé aux tâches nouvelles. « Il devrait être possible à un plus grand nombre de fonctionnaires des cadres supérieurs et intermédiaires d'acquérir une formation universitaire plus poussée dans les domaines du bien-être social et de l'administration publique. « Le ministère devrait prévoir pour son personnel un programme continu de formation sur place. « Le ministère de la Famille et du Bien-Etre social devrait accorder une attention toute particulière au choix et à la formation de ceux de ses fonctionnaires qui, de par leurs fonctions, doivent entrer en contact direct avec le public. »

Ce n'est pas l'argent versé en allocations sociales qui peut, à lui seul, modifier la dépendance sociale.

Pour sortir l'assisté social de son cercle vicieux, il faut un intérêt humain, des compé-

tences professionnelles et des services très variés.

Le travailleur social est en mesure de faire un diagnostic social et souvent psychique qui est souvent beaucoup plus important que les calculs financiers faits par l'agent du bureau du ministère de la Famille et du Bien-Etre social.

Il peut discerner et rebâtir la stabilité de la famille ou de la personne. Il peut guider les efforts de l'assisté vers des solutions pratiques et constructives en analysant les compétences de celui-ci et en le dirigeant vers les organismes de la communauté qui peuvent l'aider et que l'assisté lui-même ne connaît pas.

Le rôle du travailleur social, comme avocat de l'assisté, est parmi les plus importants, l'assisté étant plus vulnérable que d'autres citoyens à des abus par des prêteurs, des propriétaires de logements, des hôpitaux, des médecins même et des fonctionnaires. Surtout, M. le Président — et Je retourne pour la dernière fois au rapport Boucher — parce que nous ne donnons pas encore suite à la recommandation 69: « Un bureau d'assistance judiciaire devrait exister dans chaque district. »

Je voudrais terminer mes remarques sur ce projet de loi par trois critiques. Premièrement, le principe de l'indexation des barèmes de prestations à l'indice du coût de la vie ne paraît pas dans le projet de loi. Nous avons reçu, à un moment donné, ce qui se voulait un texte préliminaire du bill 26, texte qui, à ce moment, avait été distribué aux députés de cette Chambre par certains assistés sociaux eux-mêmes. Dans ce texte — et je sais que le ministre n'en a jamais reconnu la paternité et qu'il n'est pas prêt à dire que c'était mon intention à l'époque — il est frappant que dans ce texte il y avait ce principe de l'indexation qui ne paraît pas dans le texte que nous avons devant nous aujourd'hui.

Le ministre a présenté l'argument que son ministère étant, comme on le sait très bien, le ministère des conséquences et vu que d'autres programmes d'aide sociale, telle l'assurance-chômage, ne sont pas indexés au coût de la vie, II est assez difficile pour son ministère, dans ce temps présent, d'appliquer un tel principe. Je soumets de nouveau qu'au moins dans le cas de l'assurance-chômage, la forte proportion des assistés sont inaptes au travail et l'assurance-chômage ne joue point dans leur cas.

Deuxième critique: Les barèmes dont nous venons de prendre connaissance assez récemment se veulent basés sur des principes énoncés et des chiffres soumis dans certains mémoires que nous avons reçus à la commission parlementaire, surtout dans celui du Montreal Diet Dispensary intitulé: Budgeting for basic needs.

Il faut dire qu'à l'analyse de ce que nous présente le ministre on doit conclure que pour dépasser les montants proposés par le Montreal Diet Dispensary comme minimum vital requis, il faut ajouter aux prestations qui sont accordées à tous les assistés sociaux des montants supplémentaires de revenu possible, admissible, acceptable. Là aussi, vu que la plupart des assistés sociaux sont inaptes au travail, il leur sera difficile, voire même impossible, d'obtenir ces montants supplémentaires, additionnels et leur niveau de prestations d'allocations sociales demeurera en bas de ce qui est recommandé par un organisme qui a étudié en profondeur le problème du budget de l'individu ou de la famille qui n'est pas en mesure de pourvoir à ses propres besoins.

Je viens de recevoir une lettre qui me vient du directeur exécutif du Montreal Council of Social Agencies. Je me permets d'en citer trois paragraphes: « In a province whichhad,in 1968, a gross national product of over 17 billions dollars, we find the suggested cash scales reserved for our social casualties to be unacceptable. « As you know, the Diet Dispensary figures are considered the bare minimum for decent human welfare. The gap between its cash figures and those suggested under Bill 26 must be closed. Furthemore, we maintain the position that the family allowance must be computed over and above the amount considred as bare minimum. « We urge you to strongly present our view to the National Assembly ». C'est ce que je viens de faire, M. le Président.

Finalement, je cite de nouveau le mémoire soumis conjointement par le Conseil des oeuvres et le Montreal Council of Social Agencies: « En considérant le bill 26 dans sa réelle perspective, c'est-à-dire comme une mesure d'assistance, nous devons formuler une critique générale très sévère: la possibilité d'arbitraire présente dans beaucoup d'articles du bill qui en diminue singulièrement la portée bénéfique ».

M. le Président, j'ai dit, au début de mes remarques, que nous avons l'intention d'appuyer ce projet de loi, de voter pour son principe en deuxième lecture, de le voir adopter comme statut dans l'intérêt de nos assistés sociaux présents et futurs. Mais il faut dire qu'il nous manque d'autres et de meilleures armes si nous sommes pour entrer en guerre contre la pauvreté, guerre qui, malgré l'adoption du bill 26, ne sera qu'à peine engagée.

M. LE PRESIDENT; L'honorable ministre d'Etat à la Famille et au Bien-Etre social.

M. François-Eugène Mathieu

M. MATHIEU: M. le Président, il y a un point sur lequel je voudrais attirer l'attention de cette Chambre, c'est l'orientation nouvelle de ce projet de loi no 26.

Les diverses lois sociales au Québec datent des années où sévissaient les crises économiques que nous avons connues et, de ce fait, ces lois reconnaissaient presque uniquement le besoin à soulager. Leur grande préoccupation était d'obvier à ce besoin sans trop se soucier, ni de prévention, ni de réhabilitation. Elles reconnaissaient l'état de pauvreté et lui donnaient un genre de sanction ou à peu près.

Ce projet de loi no 26 reconnaît lui aussi le besoin, mais il porte en lui deux principes nouveaux: prévention et réhabilitation, dans leur sens le plus large connu. Il rend possible un plan de relèvement en faisant la liaison et des services en nature et des prestations en argent. Il répond ainsi, au sujet des lois sociales en vigueur, à une critique assez sévère qui était faite jusqu'à ce jour : Les services n'atteignent pas ou presque pas ceux qui devraient en bénéficier. Le renouveau administratif qui accompagne ce projet de loi est orienté pour prévenir ces critiques : service de statistiques, bureau de planification, réseau de bureaux régionaux et locaux et réseau de services aux familles et aux personnes seules sont agencés de façon à faire profiter les récipiendaires d'assistance qui pourront les soutenir dans leur effort de retour à la vie normale.

Dans le but de créer une atmosphère favorable à l'administration de cette nouvelle loi, le ministre de la Famille et du Bien-Etre social a déjà mis sur pied dix comités de retour à la vie normale. Sept autres seront organisés d'ici la fin de cette année fiscale. Il semble que c'est une formule qui intéresse grandement les assistés sociaux, car, à Québec, le président du Comité centre-ville a cru bon devoir jeûner pour hâter la mise sur pied d'un tel comité dans la région où il demeure.

Nous avons aussi, grâce à la collaboration des autres ministères du gouvernement, réussi le retour au travail de nombreux assistés et exploré la création possible de nouveaux emplois, soit dans le domaine des pêcheries, soit dans le domaine des forêts.

Une expérience débute actuellement dans le domaine agricole. Pour faire avancer plus vigoureusement les plans de retour à la vie normale, un comité interministériel a été mis sur pied, le 18 février dernier, dans le but de trouver rapidement de nouvelles méthodes pour ouvrir le marché du travail aux récipiendaires d'assistance sociale. Des suggestions pratiques de ce comité ont déjà été appliquées, par exemple, l'arrêté ministériel numéro 1371 qui prévoit un système de primes pour l'engagement d'assistés sociaux. Ce plan est administré par le ministère du Travail. L'opération 5,000 qui a lieu présentement à Montréal fait aussi partie des mesures suggérées. L'objectif de cette opération est de rechercher les emplois disponibles immédiatement. Un premier rapport des dirigeants de cette opération est très encourageant. On a trouvé une moyenne de 3.6 emplois disponibles par industrie visitée jusqu'à présent. Le comité a, de plus, fait explorer la possibilité de la création d'emplois dans d'autres secteurs du Québec.

Le renouveau administratif, avec regroupement des ressources publiques et des collaborateurs du secteur privé au niveau local et régional, permettra de mieux répondre aux besoins des récipiendaires d'assistance sociale.

Les publications du ministère, M. le Président, ont mis en lumière ce genre d'activités qui font partie de la nouvelle orientation de l'assistance sociale au Québec. J'ai l'impression que nous franchissons, aujourd'hui, d'une certaine façon, la même étape que la Loi des accidents du travail a franchie lorsque, au lieu de verser simplement des prestations à l'accidenté, on a ajouté dans le texte de la loi des articles sur la prévention des accidents et sur la réhabilitation des accidentés.

C'est de ce jour que datent les véritables progrès de la Loi des accidents du travail.

M. LESAGE: Vous n'êtes pas sérieux quand vous dites ce que vous venez de dire?

M. MATHIEU: Certainement. Je crois qu'honnêtement...

M. LESAGE: C'est une comparaison qui n'a pas de sens!

M. MATHIEU: ... on peut présumer qu'un virage semblable est effectué par ce projet de loi d'aide sociale soumis à cette Chambre. Je serai fier, M. le Président, de voter pour le projet de loi 26 en deuxième lecture.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Portneuf.

M. Marcel-R. Plamondon

M. PLAMONDON: Je ne voudrais pas prolonger davantage le débat mais vous me permettrez de dire quelques mots seulement. Je serai très bref.

Etant le président de la commission du ministère de la Famille et du Bien-Etre social qui a eu à étudier ce projet de loi, je voudrais, M. le Président, exprimer ma satisfaction pour la façon dont s'est déroulée l'étude de ce projet de loi. Je voudrais dire au ministre que la façon dont il a procédé m'apparaît, en tout cas — et est apparue à plusieurs — comme étant la formule idéale.

Ce projet a été soumis, il a été déféré à la commission, et chacun des organismes intéressés a pu faire valoir son point de vue sur cette loi.

Le caractère positif des débats a été maintenu à un très haut niveau et c'est dû, je pense bien, aux membres de la commission qui siégeaient et c'est dû également aux organismes qui s'y sont présentés. Comme le ministre l'a souligné, une vingtaine d'organismes ont fait des représentations, ont présenté leur mémoire. Et j'ai toutes les raisons de croire que les modifications que le ministre a dit qu'il apporterait, en comité, eh bien, ces modifications ont certainement ou auront certainement quelque chose à voir avec les représentations qui ont été faites. Ce qui démontre bien que lorsqu'un projet de loi est déféré à une commission, ce n'est pas pour le plaisir de la chose mais bien pour tenter de l'améliorer et de faire un projet de loi qui soit le meilleur possible.

Le bill 26, M. le Président, marque une étape importante dans notre législation d'aide sociale. Depuis de nombreuses années, cette législation était attendue. Il est bien évident qu'on ne peut pas prétendre avoir une loi qui soit parfaite. Si on attendait qu'elle soit parfaite, eh bien, il est fort probable que nous attendrions toute notre vie et toute la vie de ceux qui nous suivront. Mais quand même, c'est une étape importante, et tous les organismes ou presque qui se sont présentés devant la commission ont été unanimes, je dirais, à reconnaître qu'il y avait un élément très valable dans cette loi et que c'était un pas important dans la bonne voie, même si l'on émettait quelques réserves à certains égards.

Cette loi regroupe plusieurs des lois qui étaient éparpillées dans le domaine social. Elle implique une décentralisation administrative, et un point qui m'apparaîl très important, c'est cet aspect sur la réhabilitation, sur la réadaptation sociale, si je puis dire.

Ce problème de réhabilitation est évidemment en relation directe avec tous les autres secteurs de la société, les secteurs de l'économie. Il est en relation directe, aussi, avec tous les autres ministères. Et il est bien évident qu'il est aussi en relation directe avec les autres paliers de gouvernement qui s'occupent de sécurité sociale. On n'a qu'à penser à l'assurance-chomage, aux allocations familiales et à quelques autres lois du genre.

Or je pense, M. le Président, que nous sommes rendus à un point où il faut faire un effort très considérable pour que les assistés sociaux...

Oh, bien sûr, on ne peut pas généraliser. On ne peut pas prêter à tous les mêmes motifs. La plupart sont des gens qui sont dans le besoin, que ce soit de façon permanente ou de façon occasionnelle. Ce qu'il faudrait, dans un système idéal, c'est que ce besoin d'assistance qu'ont certaines personnes dans notre société soit le plus temporaire possible — si je peux m'exprimer ainsi — qu'on puisse replacer ces gens sur le marché du travail, du moins ceux qui le peuvent, rapidement.

Pour ça, on a tort de croire que seules les contingences financières et économiques doivent être considérées. Il y a beaucoup plus que ça. Il faut du personnel compétent. Il faut des travailleurs sociaux à qui on donnera des charges de travail pas trop lourdes afin qu'ils puissent suivre les assistés sociaux, afin qu'ils puissent vraiment les orienter. Ils ont un travail moral, si je puis dire, à faire. Il faut que l'on redonne à certains de ces assistés sociaux qui sont dans un état de dépendance économique, qui sont dans un état de dépendance sociale le goût de vivre. Il faut leur redonner ce sentiment d'être utiles à la société. Il faut que ces gens-là puissent s'intégrer dans le système économique et social. Il faut qu'ils puissent être un actif pour toute la société québécoise. Pour ce faire, il faut des travailleurs sociaux compétents. Il faut des législations adéquates, bien sûr. Il faut l'action de l'Etat. Mais il faut aussi l'intérêt de tous les autres secteurs de la société. Il faut l'intérêt et la collaboration de l'entreprise privée. Il faut aussi la collaboration de la population. Il faut que la population adopte une attitude positive à l'endroit des assistés sociaux. Qu'on ne les considère pas comme des gens rejetés de la société. Qu'on ne les considère pas comme des parasites, mais qu'on tente vraiment de les considérer comme des citoyens à part entière et qu'on fasse le nécessaire pour les faire réintégrer la société.

Il est bien évident, il est bien certain que des événements se sont produits récemment où des gens qui bénéficiaient d'assistance sociale ont été accusés de fraude. Mais encore là, il ne faut pas généraliser. Ce n'est pas l'ensemble des nécessiteux qui sont dans cette situation. Il faut tenter de les comprendre, d'éliminer les profiteurs, mais autant que possible de faire confian-

ce à la très grande majorité qui est honnête, qui est sincère et qui ne demande qu'une chose, vivre par ses propres moyens.

Je crois que le bill que nous étudions en ce moment, la Loi de l'aide sociale, est une étape importante dans cette direction et je souhaite que ceci nous permette, avec les plans de relèvement social qui sont prévus dans cette loi et d'autres étapes, de vraiment atteindre le but — parce que, en fait, cela doit être le but — d'avoir le moins d'assistés sociaux possible dans la société. Je crois que cette loi devrait nous y aider.

Je pense que la loi présentement à l'étude a eu un long cheminement, mais il ne faudraitpas juger — on parlait tout à l'heure du rapport Boucher — de la réalisation des recommandations du rapport Boucher exclusivement par la présentation de la loi que nous avons devant nous.

Ce rapport contenait beaucoup d'autres recommandations dont plusieurs ont été mises en application, sinon en totalité, du moins en partie. Le bill 26 est une étape très valable. Je pense qu'elle mérite que nous en fassions un essai loyal. Je sais que la Chambre a accepté ce principe parce qu'on a dit tout à l'heure qu'on voterait en faveur du principe de cette législation.

C'est ce que je ferai moi-même, M. le Président, avec beaucoup de plaisir. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Richmond.

M. Emilien Lafrance

M. LAFRANCE: M. le Président, disons que j'ai quelques observations à faire, mais je me propose surtout de les faire lors de l'étude en comité.

Je voudrais, en ce moment, me contenter de quelques considérations générales seulement. Disons d'abord que les vues de l'Opposition ont été clairement et bien exposées par le député de d'Arcy-McGee. Nous sommes favorables à cette loi avec certaines réserves, que nous formulerons d'ailleurs en comité. Je crois que nous serions très mal venus, nous de l'Opposition, de nous opposer à cette loi que nous réclamons à cor et à cri depuis 1966, car le ministre actuel s'était bien engagé à présenter ce projet de loi dès la session 66/67.

Ce projet de loi, comme on le sait sans doute, a été amorcé par le gouvernement précédent, dès 1961, d'abord par des représentations qui avaient été faites à la commission Boucher. Nous l'avons mis en chantier, ce projet de loi, dès 1963, en créant un comité ministériel, judiciaire, je ne sais trop comment l'appeler, qui devait préparer ce texte de loi.

Mais, la Chambre comprendra que si le gouvernement précédent n'a pas pu présenter cette loi, c'est qu'il y avait des obstacles. C'est qu'une bonne partie du champ de la sécurité sociale était déjà occupée par Ottawa. Il fallait qu'Ottawa se retire, par exemple, du plan d'assistance-vieillesse de 65 à 70 ans, des pensions d'aveugles, des pensions d'invalides et d'autres. C'est ce que le gouvernement de 1960 à 1966 s'est appliqué à faire, en rapatriant une bonne partie de la législation. Dès 1965, je me souviens personnellement que, au cours d'une conférence fédérale-provinciale, connaissant les intentions du gouvernement fédéral qui se proposait d'adopter une loi générale d'assistance sociale, nous leur avons dit: N'y touchez pas! ça appartient aux provinces, et le Québec, déjà, se propose d'adopter une loi générale d'assistance sociale.

Ici, je me permettrai de dire, pour démontrer qu'il n'y a rien de nouveau dans l'orientation actuelle. Dès 1960, à peine quelques jours après l'assermentation du nouveau gouvernement, celui qui à ce moment-là était premier ministre de la province, le député de Louis-Hébert, déclarait: Toutes les lois sociales seront exclusivement provinciales. Je ne signerai pas d'entente fiscale avec Ottawa. Des ce moment-là, nous avions déjà commencé à orienter la politique sociale du gouvernement.

On a fait grand état de l'espèce de fouillis qui était censé exister au ministère de la Famille et du Bien-Etre social. Eh bien je dois dire, non pas pour me justifier, mais plutôt en toute honnêteté et en toute justice pour mes collaborateurs d'alors, qui sont encore d'ailleurs les principaux collaborateurs du ministre actuel, il faut dire que ce fouillis consistait en des lois dont nous avions hérité en 1960 et en particulier cette loi d'assistance-chômage qui a été votée à la vapeur en 1959 et pour lesquelles nous n'avions aucun cadre ni aucun personnel. Nous avons compté surtout sur les services sociaux pour nous dépanner.

Des le lendemain de la présentation du rapport Boucher, en 1963, nous avons adopté une foule de mesures que je suis très heureux de retrouver aujourd'hui, des mesures qui ne sont pas nouvelles. Par exemple, nous avons embauché des cadres administratifs nouveaux, nous avons créé des bureaux régionaux.

Dès 1966, il existait dans la province au moins une cinquantaine de bureaux régionaux qui avaient pour but de décentraliser l'administration du bien-être. Nous avions trois co-

mités interministériels pour empêcher justement ce chevauchement de direction, d'administration de différents ministères. Nous avions déjà deux projets pilotes qui, depuis ce temps-là, ont été développés. Je félicite le ministre de continuer la politique qu'il a si bien expliquée dans un document intitulé: Retour à la vie normale.

Nous avions deux projets pilotes qui ont d'ailleurs fait leur preuve, soit celui des pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine et celui des travailleurs en forêt. Nous avons aussi recruté un personnel. Il faut dire que lorsque nous sommes arrivés au ministère du Bien-Etre social, en 1966, chose assez paradoxale, il n'y avait alors aucun travailleur social au sein du ministère. Depuis ce temps, on sait que les principaux...

M. HARVEY: En 1960.

M. LAFRANCE: En 1960, plutôt. Il faut dire que depuis ce temps nous sommes très heureux d'avoir au service du ministère, en particulier comme sous-ministre, des travailleurs sociaux qui étaient autrefois des professeurs d'université. Le projet de loi actuel causera sûrement d'amères déceptions en certains milieux, d'abord chez certains rêveurs, des gens qui s'imaginent qu'on peut avoir une espèce de loi messianique, une espèce de loi miracle qui va faire disparaître la misère et la pauvreté à jamais.

Deuxièmement, elle causera sûrement des déceptions chez les assistés sociaux, chez certaines personnes — ce n'est sûrement pas le ministre — qui ont suscité, ce que disait autrefois M. Duplessis, des appétits stériles. Le ministre, cet après-midi, les a mis en garde quand il a dit qu'il ne fallait pas s'attendre à une forte augmentation de l'aide accordée aux nécessiteux. Donc, c'est une loi qui s'est fait beaucoup attendre et qui arrive de façon un peu tardive. Il est très difficile, je crois, de pouvoir faire des comparaisons quant au taux, parce que je crois que l'un des vices de la loi c'est qu'on ne fait pas la distinction entre ceux qui sont aptes au travail et ceux qui sont inaptes au travail.

Dans les taux qui ont été établis par le ministère, on tient compte des gains possibles des assistés sociaux. On sait qu'une forte partie des assistés sociaux ne peuvent pas songer à faire des gains quelconques. En fait, j'écoutais tout à l'heure le député de... — je ne me souviens pas quel comté —.

DES VOIX: Portneuf.

DES VOIX: Chauveau.

M. LAFRANCE: ... de Chauveau qui parlait de la révolution de cette loi. Je crois qu'il faut être un peu plus réaliste. Il y a peu de principes nouveaux dans cette loi. Il n'y a pas d'orientation nouvelle dans cette loi. C'est tout simplement celle qui a été adoptée au cours des années 1960-1966, qui est poursuivie et qui a été améliorée. Presque toutes les mesures que nous trouvons dans ce texte de loi étaient déjà en application par l'intermédiaire de ce qu'on appelle les cas spéciaux. Je crois qu'on vient mettre un peu d'ordre aujourd'hui dans cela en présentant ces textes de loi.

Donc, c'est une bonne loi qui vient mettre de l'ordre dans une loi. C'était le temps de le faire. Un point important, que je me propose de souligner lorsque nous discuterons en comité, c'est que c'est une loi où il y a beaucoup de discrétion qui est réservée au ministre et aux fonctionnaires. On comprendra alors que ce qui pourra donner une certaine valeur à cette loi c'est la compétence des fonctionnaires, des agents de bien-être qui seront chargés de l'appliquer.

Donc, M. le Président, je m'excuse d'apporter quelques considérations aussi décousues, mais ce sont les quelques remarques que je voulais faire à ce stade-ci de l'étude.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Jonquière.

M. Gérald Harvey

M. HARVEY: M. le Président, cet après-midi, le ministre de la Famille et du Bien-Etre social nous a fait un historique très complet des lois de sécurité sociale, autant de celles adoptées par le gouvernement du Canada que de celles qui l'ont été par les gouvernements provinciaux du Québec qui se sont succédé.

Dans les remarques qu'il a faites, il a mentionné, d'une façon très brève, qu'en 1959 le gouvernement provincial avait signé avec le gouvernement fédéral, avec une rétroactivité d'un an, une loi d'assistance-chômage. A ce moment-là, faute de structures gouvernementales au Québec pour l'application et surtout pour la surveillance des deniers qui étaient accordés aux assistés sociaux en chômage, cette loi a conduit à des abus qui ont dû être corrigés par la suite, autant par le gouvernement qui a précédé celui-ci que par le gouvernement actuel.

Le ministre a oublié que, lorsque cette entente a été signée, il y avait au Québec des

élections générales quelques mois après. C'était une magnifique occasion pour le gouvernement du temps, qui avait négligé d'occuper le champ qui était de sa juridiction, soit celui de la sécurité sociale, de tenter, par la signature d'un accord avec le gouvernement fédéral, de légaliser certains cas frontières et d'aider plusieurs milliers de personnes qui étaient alors incapables d'obtenir des pensions qu'on appelait catégorisées, qu'il s'agisse de pensions aux invalides ou autres.

M. le Président, à ce moment-là, les agences de service social du Québec, avec du personnel qu'elles ont recruté du mieux qu'elles ont pu, ont pendant quelques années servi d'administrateurs pour le ministère de la Famille et du Bien-Etre social. Le gouvernement libéral de 1960 s'est vite aperçu qu'il fallait, dans le domaine de la sécurité sociale au Québec, poser des gestes concrets, c'est-à-dire des gestes qui permettraient à un assisté social, à celui qui normalement ne peut pas gagner sa vie, de se sentir une personne humaine comme les autres. Nous voulions qu'il reçoive non pas une pitance de l'Etat, mais une allocation lui permettant de vivre selon son état, qu'il s'agisse d'une veuve, d'un aveugle ou d'un invalide. Nous croyions qu'il devait être capable de vivre décemment dans une province aussi riche que la nôtre.

Aussi, dès juillet 1960, le premier ministre du temps, le député de Louis-Hébert, déclarait que toute la sécurité sociale était de juridiction provinciale. Il n'a pas attendu; dès 1961 une commission d'enquête a été créée, comprenant des personnes très compétentes qui, sur le territoire du Québec, ont entendu les divers organismes sociaux faire des suggestions. En 1963, la commission Boucher présentait un rapport très détaillé, suggérant au gouvernement provincial du temps d'aller rapidement vers une loi-cadre qui mettrait de l'ordre dans le domaine de la sécurité sociale au Québec.

Bien sûr, à ce moment-là, il était impossible d'adopter une loi-cadre parce que, à cause de l'inertie du gouvernement qui avait précédé le gouvernement libéral, il y avait des lois dont le champ était occupé par le gouvernement fédéral et il fallait de toute nécessité récupérer ces plans conjoints fédéraux-provinciaux.

M. le Président, dès 1966, alors qu'à ce moment-là la majorité des plans conjoints de la sécurité sociale, à quelques exceptions près, était récupérée, d'aucuns en 1965, d'autres au début de 1966, il devenait alors possible de présenter une loi-cadre, loi-cadre qu'on aurait espéré voir venir plus vite et surtout tenir compte de ceux dont le retour au travail est possible. Il y en a d'autres qui jamais ne retourneront au travail, c'est-à-dire ceux qui ont reçu une allocation en vertu de l'assistance publique ou encore par la voie de l'assistance-chômage, des gens qui médicalement ne sont pas reconnus comme invalides au sens de la loi actuelle. Ces gens-là ne retourneront jamais au travail, et la loi actuelle ne fait aucune distinction entre ceux dont la possibilité d'un retour au travail est imminente ou ne l'est pas.

M. le Président, il y a également dans cette loi une faiblesse. On incite de nouveau au démembrement de la famille. Bien sûr, la philosophie de considérer la provenance du revenu au foyer est bonne à la base, mais elle permet également le démembrement de certaines familles. On ne considère aucunement une veuve, par exemple, qui a un enfant qui est sur le point de se marier. Celui-ci sera pénalisé et devra lui-même fonder un propre foyer sans avoir eu l'occasion de mettre quelques dollars de côté pour pouvoir fonder son propre foyer. Où re-trouve-t-on, dans la loi-cadre actuelle, un tel principe qui ferait en sorte de cristalliser la famille? Non, c'est en quittant son foyer que ce jeune pourra voir sa mère recevoir une augmentation d'après les tableaux des allocations versées en vertu de la loi-cadre que nous avons actuellement. Où retrouve-t-on le principe d'un adulte qui vit avec ses frères et soeurs ou encore avec son père et sa mère qui a 27 ans ou 28 ans et qui reçoit une allocation comme aveugle ou encore comme invalide? Il se sentira toute sa vie moralement aux crochets de son père et de sa mère. Nous ne retrouvons aucun principe incitant à l'indépendance d'une personne qui est pénalisée en raison d'une infirmité.

M. le Président, bien sûr, la loi-cadre était nécessaire et elle permettra dans certaines circonstances à des assistés sociaux de retourner au travail, mais je trouve extrêmement dangereux qu'on multiplie les cas spéciaux qui prendront le chemin de Québec pour être adopté, non pas parce que je n'ai pas confiance au titulaire du ministère de la Famille et du Bien-Etre social, que je sais un honnête homme, mais les cas spéciaux — les députés le savent, ceux qui représentent des citoyens des régions éloignées, nos bureaux sont inondés par ceux qui viennent nous dire à l'heure actuelle que leur cas considéré comme un cas spécial par un de nos agents des bureaux régionaux que nous avons sur le territoire et qu'il a été expédié à Québec depuis deux mois ou depuis trois mois. Qu'est-ce qui arrivera lorsque la loi entrera en vigueur et que, pour huit ou neuf sur dix cas d'assistés sociaux, il y aura une demande spéciale en vertu des nouveaux règlements ou en vertu de la loi-cadre?

L'agent du Bien-Etre social répondra à cet assisté social: Il s'agit d'un cas spécial pour lequel nous devons obtenir l'approbation à Québec. Eh bien, pendant trois mois les bureaux de députés seront inondés. J'espère que le ministre corrigera la situation actuelle qui prévaut spécialement dans la région duSaguenay-Lac-Saint-Jean, et j'imagime partout ailleurs dans la province. Je ne l'accuse pas d'avoir donné des instructions, mais on ne répond même plus aux lettres qu'on expédie demandant la révision d'un cas d'un assisté social. On nous dit: On peut vous donner l'information par téléphone. Et qu'est-ce que cet assisté social nous répond par la suite? Rien, bien sûr, mais il part de notre bureau convaincu que nous ne nous sommes même pas occupés de son cas.

M. le Président, la philosophie de cette loi aurait été meilleure si on avait considéré d'abord, comme principe, celui ou celle dont on ne peut espérer un retour au travail — c'est par la voie de réglementation ou de tableaux, tels que présentés à la commission, bien sûr — pour une autre catégorie, ceux dont le retour au travail est possible. Vous me direz: L'article 10 les couvre. Si ont lit bien la loi, à l'article 6 on donne la condition pour bénéficier de la Loi d'assistance sociale. A l'article 10, on donne le pouvoir au ministre de continuer d'accorder de l'assistance à une personne qui est qualifiée en vertu de l'article 6. Eh bien, M. le Président, il est bien sûr qu'un type qui a des difficultés présentement et qui a un emploi ne pourra en aucune façon sinon en vertu de règlements spéciaux qui seraient adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil, obtenir de l'aide pour sauver son bateau qui est le bateau familial.

M. le Président, on nous a remis il y a quelques instants des amendements qui seront apportés tout à l'heure en comité à des articles du bill 26. Nous allons, au cours de l'étude en comité, étudier les différents articles de la loi, faire des suggestions ou approuver les suggestions ou les amendements que vient de nous faire remettre le ministre de la Famille et du Bien-Etre social. Mais je voudrais qu'il soit bien entendu qu'en plus de la nourriture, du vêtement, des besoins personnels, des besoins domestiques, il faudrait au Québec, après avoir dépensé des sommes fantastiques pour expérimenter dans deux régions, la région de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, si je me souviens bien, et la région de Saguenay-Lac-Saint-Jean, la possibilité de retour à la vie normale des assistés sociaux aptes au travail. Partant de ces expériences, il aurait été, je pense, beaucoup plus facile pour le ministre actuel de préparer un projet de règlements considérant les deux catégories d'assistés sociaux. Je considère, M. le Président, qu'une épouse qui perd son mari et qui a plusieurs enfants à sa charge est beaucoup plus productive pour un Etat si elle reste à la maison pour éduquer ses enfants qui ne seront pas eux-mêmes plus tard des assistés sociaux. Il vaudrait mieux lui donner une allocation convenable et lui permettre également d'avoir le strict nécessaire pour elle et ses enfants plutôt que de l'inciter, par des règlements, à trouver à l'extérieur des gains qui font en sorte qu'elle néglige elle-même ses propres devoirs familiaux. L'Etat, quelques mois plus tard est dans l'obligation de verser des sommes fantastiques pour placer ces enfants dans des foyers nourriciers.

M. le Président, le bill 26, actuellement, a également une très grande faiblesse. Nulle part l'on retrouve la catégorie de personnes qui, au Québec, reçoivent une allocation avec le sourire. Je pense que le ministre sera d'accord avec moi. Sur 100 assistés sociaux au Québec, parce qu'ils sont tous dans la même boîte, quel que soit le montant que permettrait d'obtenir en supplément le bill 26, un mois après son adoption, il y aura encore un très grand nombre d'insatisfaits. Mais il y en a une catégorie de personnes qui reçoivent une allocation qui est appelée allocation de sécurité de vieillesse; ce sont maintenant toutes les personnes ayant 66 ans ou plus et, dès janvier prochain, celles qui auront 65 ans ou plus. Elles, nous les voyons, à l'occasion.

Tout ce qu'elles demandent, c'est d'être capables, parce qu'en raison de leur âge, elles en ont besoin, de consulter le médecin plus souvent que nous, les jeunes, parce qu'en grande majorité victimes d'une maladie chronique ou ayant besoin de médicaments régulièrement, elles ont besoin d'une carte d'assistance médicale. Où retrouve-t-on, M. le Président, dans ce texte du bill 26, le principe de donner à une personne âgée, celle qui a donné le meilleur de sa vie pour construire sa province, qui a élevé souvent des familles nombreuses, qui n'a même pas réussi, pendant toute une vie, à payer une propriété, qui paie encore loyer, où retrouve-t-on le principe de lui accorder une carte lui permettant l'examen, à l'occasion, chez son médecin de famille, et la possibilité de pouvoir se procurer les médicaments nécessités par son état de santé?

M. le Président, le député de D'Arcy-McGee, cet après-midi, parlait de l'urgence de présenter une législation pour l'enfance. Je suis d'accord avec lui, il y a urgence dans ce domaine. Et il y a également urgence que l'Etat du Qué-

bec s'occupe davantage de ceux qui, avant nous, l'ont construit cet état, ceux qu'on peut considérer comme les personnes âgées de 65 ans et plus, ceux qui, malgré que quelques-unes ont une excellente santé, ne peuvent plus travailler. Ces deux faiblesses de la loi ne m'empêcheront pas de voter en deuxième lecture pour le principe de la loi mais J'aurais espéré que cette loi englobe le groupe de personnes que je viens de mentionner.

M. le Président, avant de terminer, je voudrais signaler de nouveau au ministre de la Famille et du Bien-Etre social de bien vouloir vérifier auprès de ses fonctionnaires supérieurs afin que, dans nos régions, non seulement un accusé de réception soit donné à la suite des plaintes qui sont formulées à nos bureaux. Je ne veux pas faire de personnalités ni donner de noms, mais lorsque quelqu'un vient nous voir à nos bureaux et nous explique une situation, bien sûr il peut se trouver que cette personne nous induise en erreur parce que nous n'avons pas de personnel, dans les bureaux de députés, pour faire enquête si M. Untel ou Mme Unetelle nous a dit la vérité: nous recevons des agents de bien-être, des téléphones nous disant que nous leur avons menti. Ce n'est pas nous. Quand nous écrivons: « Madame m'informe », « elle nous déclare », « elle me fait part », au lieu de recevoir des bêtises semblables, ou encore au lieu de dire aux assistés sociaux de ne plus aller à tel endroit ou à tel endroit, le ministre serait bien mieux de voir à ce que ces directeurs régionaux, ces agents de bien-être prennent en considération la lettre et refusent le cas parce que la lettre dit souvent: On demande la revision de tel ou tel cas selon la loi et les règlements. Bien sûr, si l'électeur ou la personne qui s'est présentée au bureau du député l'a induit en erreur, ce même député sera très heureux de démontrer à cette personne qu'elle-même l'a induit en erreur et qu'il y a impossibilité de reviser son cas.

Enfin, M. le Président, en terminant ces brèves remarques, je dis que le ministre de la Famille et du Bien-Etre social nous apporte aujourd'hui son bill 26 avec trois ans et demi de retard, c'est-à-dire trois ans, pour être plus gentil, parce que cela va faire trois ans et demi seulement dans un mois que l'Union Nationale a pris les rênes du pouvoir et la responsabilité d'administrer. Nous n'y voyons, dans ce projet de loi, qu'un article qui permet de continuer une politique déjà commencée au temps où le député de Richmond occupait le poste de ministre de la Famille et du Bien-Etre social, soit l'incitation d'un retour du travail pour les assistés sociaux qui sont aptes à retourner travailler.

Je voterai donc, en deuxième lecture, pour le bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.

M. Jean Lesage

M. LESAGE: M. le Président, je pourrais peut-être commencer par quelques mots que j'ai entendu prononcer si souvent et qui n'ont pas leur raison d'être, en fait. Ce sont les suivants; « Je n'avais pas l'intention de participer a de débat. » Mais, je refuse de les prononcer.

En effet, il s'agit d'une législation très importante, à laquelle le gouvernement prédécent a participé très activement au cours d'un certain nombre d'années. Lorsque nous avons pris le pouvoir, en 1960 — c'était le 5 ou le 6 juillet — nous étions déjà passablement au courant des besoins essentiels que posait l'élaboration d'une politique d'aide sociale au Canada et au Québec.

Nous avions vécu la période de la création du système d'assistance-chômage par le Parlement du Canada. Nous avions vécu, après le fameux « désormais », la signature d'une entente avec effets rétroactifs par le gouvernement Sauvé, à l'automne 1959. Ces faits ont été rappelés, d'ailleurs, par mes collègues qui ont pris la parole dans ce débat avant moi.

Le 25 juillet 1960, je participais, vingt jours après mon assermentation comme premier ministre, à une conférence fédérale-provinciale qui se tenait dans la capitale canadienne. Avec l'expérience acquise au Parlement du Canada et en suivant de près les événements qui se déroulaient et au Canada et au Québec, durant ma période de préparation intense de 1958 à 1960, j'avais pu réaliser jusqu'à quel point il était essentiel, si l'on voulait avoir une politique d'aide sociale efficace, qui ne fasse pas des assistés sociaux une caste à part, qui puisse en même temps établir des systèmes de prévention, de réhabilitation, qu'il n'y ait qu'un centre de décision. De là, la déclaration faite à la conférence fédérale-provinciale de juillet 1960, qu'ont rappelée, et le député de Richmond et le député de Jonquière.

Par la suite, nous avons, à la recommandation du député de Richmond, institué la commission qui, finalement, a reçu le nom de commission Boucher. C'était au mois de décembre 1961. Le rapport de cette commission a été remis au gouvernement au mois de juin 1963. Déjà, les principes de base du projet de loi qui est à l'étude — je ne parle pas, évidemment, de certains détails que nous nous permettrons de discuter en comité plénier — étaient explicites

dans certaines des recommandations du rapport Boucher que je n'ai pas l'intention de citer toutes ici. Il y en avait soixante et onze. Je voudrais cependant, pour que le dossier soit le plus complet possible, rappeler en particulier les recommandations 9, 10, 11 et 14.

La recommandation 9: « La Loi de l'assistance publique devrait être abrogée et remplacée par une nouvelle loi générale d'assistance sociale ». Qu'on lise aide sociale, si l'on veut. C'est essentiellement ce que l'on fait par le bill no 26.

La recommandation numéro 10: « La nouvelle loi générale d'assistance sociale devrait former un tout intégré et adapté aux nécessités actuelles et futures du bien-être. Pour ce faire, elle devrait absorber toutes les autres lois sociales similaires. »

Recommandation numéro 11: « Avant que la nouvelle loi générale d'assistance sociale englobe tous les versements d'assistance, il faudrait prévoir une période de rajustement. Les allocations déjà accordées devraient continuer d'être versées pendant un certain temps sous leur forme actuelle. » Et l'on voit le pourquoi de cette recommandation, si nous lisons la recommandation 14 qui suit : « Le gouvernement du Québec devrait poursuivre et intensifier ses efforts pour que le gouvernement du Canada se retire des programmes conjoints d'assistance sociale et compense par un élargissement des champs de taxation les charges accrues qui en découleraient pour le Québec. »

La première chose à faire, c'était d'établir, dans tout le champ de la sécurité sociale, le centre de décision à Québec. Il fallait donc que nous puissions nous retirer des programmes conjoints comme ceux qu'a cités le député de Richmond, pensions aux invalides, assistance-vieillesse, pensions aux aveugles, assistance-chômage, etc.

Nous avons d'abord fait porter nos efforts de ce côté-là. Dès 1963, à une conférence fédérale-provinciale, nous avions réitéré les déclarations faites en 1960, 1961, 1962, lors des conférences fédérales-provinciales. Nous avions particulièrement insisté sur le rapatriement des domaines de la sécurité sociale.

Ce n'est qu'en 1964, dans les quinze jours qui ont suivi la conférence fédérale-provinciale qui s'est tenue ici, à Québec, les 31 mars et premier avril, après que nous eussions discuté d'allocations scolaires, de régime de rente et de retrait des programmes conjoints, particulièrement dans le domaine de la sécurité sociale, que nous avons eu un accord du gouvernement fédéral sur ces points, sur les trois.

Il fallait alors commencer à donner suite aux recommandations du rapport Boucher, comme le disait la recommandation numéro 11: « II faudrait prévoir une période de rajustement. Les allocations déjà accordées devraient continuer à être versées pendant un certain temps sous leur forme actuelle. »

En fait, il y a eu accord de principe pour le retrait des programmes conjoints vers le milieu ou la fin d'avril 1964. La législation fédérale nécessaire n'est venue que de nombreux mois plus tard, en 1965. Alors nous avons continué à presser et à presser pour l'établissement d'un système complet et intégré d'assistance sociale ou d'aide sociale, en vertu d'une loi unique, comme le suggérait le rapport Boucher.

Sur le plan constitutionnel, nous avons réclamé, non seulement le rapatriement de l'assistance-vieillesse, ce qui avait été convenu au mois d'avril 1964, nous avons également insisté, mais sans succès, pour que le champ des pensions de sécurité de la vieillesse contribu-toires soit retourné aux provinces ou du moins, en autant que nous étions concernés, au Québec, moyennant les compensations fiscales qui, dans le cas de ce régime, sont assez faciles a déterminer. En effet, il y a un fonds d'établi par le versement par les sociétés et les individus d'une partie de l'impôt sur les profits des corporations, une partie de l'impôt sur le revenu personnel et une partie de la taxe de vente fédérale.

C'était assez facile, il s'agissait de trouver un mécanisme pour compenser pour la taxe de vente fédérale qui est une taxe indirecte. Nous n'avons pas réussi.

Nous avons réclamé également le retour des allocations familiales, c'est-à-dire la compétence exclusive dans le domaine des allocations familiales. Nous l'avons réclamée, cette compétence exclusive, je m'en souviens très bien, en 1963, en 1964, en 1965. Lors de la conférence sur la pauvreté, qui a été tenue à Ottawa du 7 au 10 décembre 1965, le gouvernement du Québec avait fait des représentations très précises dont je trouve un résumé dans un autre mémoire présenté lors d'une conférence fédérale-provinciale tenue les 7 et 8 janvier 1966 à Ottawa sur le plan canadien d'assistance publique qui, à ce moment-là, était présenté aux provinces, remplaçant l'assistance-chômage.

Dans le mémoire présenté par le gouvernement, plus particulièrement par le ministre de la Famille et du Bien-Etre d'alors, il était suggéré que l'administration des allocations familiales soit transférée au plus tôt au gouvernement provincial. Je cite: « en ce qui nous con-

cerne nous devons dire sans ambages qu'un tel transfert nous paraît éminemment justifié de toute façon, et cela aussi bien pour des motifs d'ordre constitutionnel — nous parlons surtout de la substance et de l'esprit de la constitution sans lesquels, sans jeu de mot, la lettre est morte. Qu'en vue de cette unité harmonieuse de la politique sociale dont nous disions dans notre récent mémoire sur la guerre à la pauvreté — on réfère à ce moment-là au mémoire présenté en décembre — que le gouvernement du Québec est le seul qui puisse et qui doive, sur son territoire, la concevoir et la mettre en oeuvre. »

C'est donc dire que le livre blanc présenté par le ministre de la Famille et du Bien-Etre, et je n'y fais qu'une allusion, comme le ministre l'a d'ailleurs fait à la fin de son intervention de deuxième lecture cet après-midi, livre blanc qu'il a déposé en Chambre il y a peu de temps, n'est pas strictement une innovation. C'est le cheminement lent de la politique que nous avions clairement établie en principe à partir de 1963 et exprimée d'une façon très claire jusqu'en janvier 1966, puisque c'était la dernière conférence fédérale-provinciale à laquelle nous participions avant les élections de juin, et au cours de laquelle il était loisible de mentionner notre réclamation.

Tout de même, nous avions réussi, au début de 1966, à atteindre le point où nous pouvions songer à l'exclusion des pensions de vieillesse et des allocations familiales fédérales dont nous pouvions toujours tenir compte dans nos législations d'aide sociale, le point où il était possible d'avoir une seule loi qui soit administrée suivant les principes que nous trouvions dans les recommandations du rapport Boucher qui, entre autres, recommandait bien — et j'attire l'attention de deux députés de l'Union Nationale qui ont participé au débat ce soir, les députés de Chauveau et de Portneuf — aux recommandations 15 et 16: « Le gouvernement du Québec, face à ses responsabilités, devrait orienter son action sociale dans la voie de la prévention individuelle et collective et l'exprimer dans sa législation. »

Ce n'est donc rien de neuf. Ce n'est pas une invention mirobolante du ministre actuel de la Famille et du Bien-Etre, comme a voulu le laisser croire le député de Chauveau. Pour lui, c'était toute une révélation, c'était une affaire formidable, une nouvelle, un coup de théâtre. Or, c'est la recommandation no 15 qui a été publiée en juin 1963. La recommandation no 16: « Le gouvernement du Québec devrait, en outre, compléter son action sociale préventive d'un souci sans cesse renouvelé et explicitement reconnu dans sa législation sociale de réadaptation individuelle et communautaire. » Alors, ce n'est rien de bien neuf, mais enfin ça y est. Je suis satisfait, ça y est.

M. MATHIEU: C'est l'usage qu'on en fait qui compte.

M. LESAGE: Non, non! il y a plus que ça: c'est qu'on l'inclut dans la législation. Jusqu'à maintenant, les efforts ont été faits, je l'espère, pour diriger la politique d'administration de la sécurité sociale dans ce sens-là. J'ai dit que le projet de loi se basait sur une philosophie sociale qui avait été exposée dans le rapport Boucher. Cette philosophie de la sécurité sociale, que l'on reconnaît comme sous-jacente dans tout le projet de loi no 26 qui est à l'étude, avait été exposée lors de cette conférence sur la pauvreté par le gouvernement du Québec dans le mémoire qu'il avait présenté à cette occasion.

Je pense bien que tout le mémoire serait à lire. Mais ce serait peut-être fastidieux. Je voudrais attirer l'attention sur de brefs extraits: « Dans la mesure où l'on s'occupe d'exercer une action profonde sur l'économie elle-même, il importe que la politique d'assistance soit agencée de façon à pousser, aussi loin qu'il est possible, la réhabilitation et la mobibité des travailleurs, ou de ceux qui peuvent le devenir, et ainsi redonner leur fierté humaine aux assistés sociaux qui l'auraient perdue et les rendre plus rapidement au circuit productif. Une telle politique implique que des ressources importantes soient consacrées à identifier les facteurs qui ont contribué à l'apparition de cas individuels ou collectifs d'assistance. Cette identification des causes permet alors de recourir à ceux des services gouvernementaux qui peuvent corriger la situation. »

Et plus loin, je trouve dans ce mémoire les principes que l'on reconnaît dans le projet de loi à l'étude: « Un tel développement exige une décentralisation géographique de l'organisation des services de bien-être, de santé et d'éducation, pour que les bénéficiaires de ces services puissent les utiliser facilement et qu'en même temps leur développement s'appuie sur la participation des communautés locales, la décentralisation doit prendre la forme d'une régionalisation accompagnée d'une large mesure de responsabilité déléguée. Cette décentralisation pourra se faire sur la base de grandes régions administratives regroupant des unités locales de service. « II est important de comprendre que nous

ne cherchons pas à développer l'assistance sociale de manière à accroître les charges qu'elle représente pour notre budget, mais au contraire de manière à en augmenter l'efficacité et donc, en conjugaison avec une réorganisation de l'économie, à rendre ces interventions de moins en moins fréquentes et de moins en moins lourdes. »

J'écoutais, cet après-midi, le ministre de la Santé et du Bien-Etre social parler des charges financières, donner ses estimations de la hausse ou de la baisse possible du coût de l'aide sociale, et je ne pouvais m'empêcher de songer que toute son argumentation était évidemment motivée par les principes que je viens d'énoncer et qu'il a sans doute fait siens.

Et enfin, dernière citation, de ce mémoire du gouvernement du Québec à la conférence sur la pauvreté: « Dans ces conditions, le gouvernement du Québec est à mettre sur pied — c'était, voyez-vous, en décembre 1965 — une nouvelle politique de sécurité sociale qui implique non seulement une réorganisation des programmes qu'il administre à l'heure actuelle, mais aussi la récupération de programmes fédéraux qui n'auront leur pleine efficacité qu'une fois imbriqués et au besoin repensés dans un tout bien coordonné et bien ajusté aux exigences du groupe humain auquel il s'adresse. Une telle intégration est d'ailleurs requise par la nécessité évidente de considérer les mesures sociales comme partie intégrante de notre politique d'ensemble de développement économique et social. »

C'est donc dire, M. le Président, que personne ne peut être surpris que nous soyons favorables au principe du projet de loi qui est à l'étude. J'y retrouve tous les principes que je viens d'énoncer, je les y retrouve soit sous-jacents au projet de loi, soit clairement indiqués ou clairement précisés dans le projet de loi.

Dans les circonstances, il est évident que c'est sans hésitation que nous voterons pour le principe du projet de loi. Mais, après tout ce que je viens de dire, le ministre de la Famille et du Bien-Etre social et le premier ministre ne seront pas surpris si je me déclare d'accord avec mes trois collègues libéraux qui ont déjà pris la parole en deuxième lecture, soit les députés de D'Arcy-McGee, de Richmond et de Jonquière, pour dire que ç'a pris bien du temps au gouvernement à se réveiller aux réalités et au bien fondé des principes que nous avions déjà élaborés et que le gouvernement de l'Union Nationale a trouvé en blanc et en noir dans les bureaux que ses ministres ont occupés en juin 1966. Tout était là, mais rien ne s'est fait. C'est le retard, le premier ministre pourra dire: Il faut toujours que le chef de l'Opposition trouve quelque chose à redire!

M. BERTRAND: Je n'ai pas eu besoin de le dire, c'est le chef de l'Opposition qui l'a dit.

M. DE MERS: II est payé pour ça.

M. BERTRAND: II se sentait tellement coupable, il a prévenu mes coups!

M. LESAGE: Je ne me sens pas coupable, M. le Président, au contraire je dis que le gouvernement aurait pu agir beaucoup plus rapidement, parce qu'il avait en main toutes les données, tous les principes, toutes les recommandations nécessaires pour agir avec célérité; aujourd'hui, au lieu de nous préparer simplement à l'application d'une nouvelle loi, eh bien déjà à l'expérience cette nouvelle loi serait rodée et nous vivrions peut-être des jours plus heureux pour ceux qui bénéficient de l'aide sociale, jours plus heureux que laissait entrevoir le ministre de la Famille et du Bien-Etre social à la fin de ses remarques.

M. Jean-Paul Cloutier

M. CLOUTIER: M. le Président, s'il n'y en a pas d'autres qui désirent parler, j'ai l'intention d'utiliser mon droit de réplique pendant quelques brèves minutes.

M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer que l'usage du droit de réplique par l'honorable ministre mettra fin au débat de deuxième lecture.

L'honorable ministre de la Santé, de la Famille et du Bien-Etre social.

M. CLOUTIER: M. le Président, très brièvement, parce que j'aurai certainement l'occasion, en comité, de revenir sur certains points qui ont été mentionnés par les membres de cette Chambre qui ont participé au débat et que je veux remercier de façon particulière, les deux députés du côté ministériel, le député de Chauveau, ministre d'Etat à la Famille, et le député de Portneuf, président de la commission parlementaire; et également, du côté de l'Opposition, tous ceux qui dans cette Chambre s'intéressent de façon tout à fait particulière aux législations sociales, le député de D'Arcy-McGee, parce qu'il est le porte-parole de l'Opposition, le député de Richmond, comme ex-ministre de la Famille et du Bien-Etre social, le député de Jonquière, comme son assistant à ce minis-

tère, je crois, et le chef de l'Opposition, évidemment, qui, par ses responsabilités de 1960 à 1966 et maintenant, a eu l'occasion maintes fois de prendre position et de se pencher sur ces législations dans le comaine social.

M. le Président, je n'ai pas l'intention de revenir sur chacune des affirmations qui ont été faites ou chacune des remarques; c'est de bonne guerre, évidemment, que l'on mentionne ce qui, dans l'optique de l'Opposition, lui apparaît comme des insuffisances ou des lacunes dans la législation ou dans le projet de réglementation.

J'ai remarqué surtout que toutes les observations qui ont été faites par nos amis de l'Opposition avaient un point commun. C'est qu'on a, évidemment, tenté de démontrer — je ne serai pas mauvais joueur, M. le Président — que la législation présente s'inspire de la pensée, de la politique et des travaux qui ont été faits de 1960 à 1966. M. le Président, il est indéniable que ce projet de loi fait suite aux travaux du rapport Boucher. D'ailleurs, je l'avais dit dans mon intervention de cet après-midi et j'avais eu l'occasion, maintes fois, auparavant de le dire. Cela faisait suite aux 71 recommandations contenues dans le rapport Boucher, qui, évidemment, ont inspiré le travail des législateurs au ministère de la Famille pour mettre sur papier cette législation.

Donc, M. le Président, je ne m'opposerai pas à ces affirmations qui ont été faites par les membres de cette Chambre, du côté de l'Opposition, qui disent que cette législation est issue, en fait, du travail du gouvernement précédent et que c'est la conclusion logique du rapport Boucher. C'est évident que nous nous sommes inspirés de ces travaux qui étaient complets, à notre sens, en ce qui concerne le mandat précis de la commission Boucher. D'autre part, entre des principes énoncés dans les travaux, dans un rapport, dans les résultats d'une commission d'étude et la mise en législation de toutes ces recommandations, eh bien, il y a un travail très considérable.

A ce moment-ci, je pense que ce ne serait pas une contribution positive au débat si je m'appliquais à faire le partage entre ce qui était fait, d'une part, avant mon arrivée au ministère de la Famille et ce que j'ai dû faire après. Je ne ferai pas ce partage. Disons que ce qui m'intéresse, M. le Président, ce n'est pas la partie qui est en arrière, mais ce sont les taches que nous avons accomplies et celles que nous aurons à accomplir dans l'avenir. Je m'intéresse également à ce qui résultera de la mise en application de cette importante législations la réorganisation des bureaux, la formation du personnel et toutes les tâches associées à cette entreprise complexe et importante.

Alors, M. le Président, dans ce domaine-là, on sait que j'ai l'habitude de rendre à César ce qui est à César et de reconnaître à mes prédécesseurs les efforts qui ont été faits dans les domaines où j'exerce présentement. Je crois bien que l'on nous rendra le témoignage d'avoir pris tous ces travaux qui avaient été faits préalablement et de les avoir traduits, sérieusement, en prenant toutes les précautions d'usage, dans une législation qui va marquer certainement une étape importante dans le domaine de la législation sociale au Québec.

Je crois pouvoir dire, M. le Président, que les gestes que nous avons posés, par ailleurs, dans le secteur de la sécurité sociale — je ne ferai qu'une brève allusion à la législation que nous avons apportée, en 1967, dans le domaine des allocations familiales — montrent que nous avons sérieusement tenté d'apporter dans tout le système cette cohérence nécessaire et essentielle afin que, dans ce domaine de la sécurité sociale et de la législation sociale, nous puissions véritablement, en ayant assumé toutes nos responsabilités et en ayant pris la place que nous réclamons dans ce secteur, dans cette juridiction, que nous puissions véritablement apporter dans la législation, dans l'administration et dans la mise en place des programmes plus de cohérence, de coordination, de rationalisation.

M. le Président, si en d'autres années, comme en 1921 au moment où on a apporté, dans cette Chambre, la première véritable loi dans le domaine de la sécurité sociale, subséquemment en 1936, 1937,1959 et dans les années auxquelles a fait allusion le chef de l'Opposition et les députés du côté de l'Opposition où on a, dans des mémoires sérieux, bien faits, bien présentés, représenté aux autorités fédérales l'importance de rapatrier le secteur de la sécurité sociale, je crois que je puis dire honnêtement que si sont exactes les représentations qu'a faites, il y a un instant, le chef de l'Opposition quand il a raconté toutes les étapes qui ont précédé celle-ci, il est exact de dire que les gouvernements qui se sont succédé ont véritablement compris l'importance qu'il y avait pour le Québec d'avoir en main les outils nécessaires pour faire une action véritablement planifiée dans le domaine social.

Et c'est pour cela que lors des conférences fédérales-provinciales auxquelles j'ai eu le plaisir d'assister et de représenter le Québec, notamment en 1968 et deux fois en 1969, nous avons pris une position très claire dans ce domaine, position logique et continue, dont on peut suivre le fil et la trame à travers les années et à travers les gouvernements.

M. le Président, je crois que ce n'est pas hors contexte maintenant d'en parler juste à la

veille d'une autre conférence dans le domaine constitutionnel, conférence qui se tiendra la semaine prochaine, lundi, mardi et mercredi prochains. Au moment où nous travaillerons sérieusement dans ce domaine de la sécurité sociale avec l'autre ordre de gouvernement et les neuf autres provinces canadiennes, il est important que l'on comprenne que la position du Québec n'est pas une position simplement adoptée pour fins de prestige, pour grossir une masse monétaire ou une masse budgétaire. Ce n'est pas pour cela que nous réclamons, comme le chef de l'Opposition l'a dit tout à l'heure, la sécurité de la vieillesse, que nous réclamons les allocations familiales, continuant en cela la position déjà adoptée par des gouvernements précédents. Je crois que, dans le contexte actuel, ces réclamations prennent une autre dimension. Et j'étais heureux, tout à l'heure, d'entendre les députés de l'Opposition, particulièrement le chef de l'Opposition, dire implicitement combien ils approuvaient et combien toute cette Chambre est unanime pour appuyer la position du Québec dans le domaine du rapatriement de la législation de la sécurité sociale. Je crois qu'avec les gestes que nous avons posés, les travaux que nous avons déposés actuellement vis-à-vis de l'autre ordre de gouvernement, vis-à-vis du gouvernement fédéral, au moment où on se prépare à faire la refonte de toute la sécurité sociale, J'espère que l'on tiendra compte de la position du Québec qui, d'ailleurs, est appuyée sur des documents techniques, est appuyée sur la simple logique et le simple bon sens. Nous voulons mettre de l'ordre dans tout ce secteur de la sécurité sociale.

Le bill 26, celui que nous adoptons présentement, est déjà une base qui fait suite, évidemment, aux travaux du rapport Boucher, au régime canadien d'assistance publique, et c'est la suite logique.

Les autres pièces de cette législation — je l'ai dit dans mon intervention en deuxième lecture cet après-midi — le rapatriement, le dossier des allocations familiales est lui aussi une pièce importante de ce dossier.

Mais nous avons demandé également la sécurité de la vieillesse, nous avons demandé l'intégration de l'assurance-chômage, non pas, comme je l'ai dit tantôt, pour fin de prestige ou pour que le Québec se dise qu'il a ajouté à des programmes, qu'il a ajouté à des budgets mais parce que, en pratique, et nous l'avons mentionné dans nos mémoires, il y a une coordination, une interdépendance très étroite entre tous ces programmes. On n'a qu'à relire les mémoires soumis par le Québec aux conférences pour voir, dans tous les détails, quelle est cette interdépendance, quelle est cette amélioration et cette coordination que nous désirons apporter dans tous les régimes de sécurité sociale.

Or, je crois que c'est le point important qui ressort de toute cette discussion que nous avons eue en deuxième lecture. Et je suis heureux de constater que les membres de l'Opposition votent et approuvent en deuxième lecture et approuveront en troisième lecture cette loi importante qui, encore une fois, comme le disait le député de Portneuf, n'est certainement pas parfaite, malgré le temps, malgré les mois, malgré les efforts, malgré tout ce qu'on apu apporter, malgré tout ce que nos fonctionnaires qui se sont penchés pendant aussi longtemps sur une telle loi ont pu apporter.

Je voudrais dire un mot des délais. On m'a reproché et on a reproché au gouvernement à plusieurs moments, évidemment, les délais de cette législation. Il est entendu qu'il y a eu des délais. C'est mathématique. Je n'ai pas l'intention de le nier. Je n'ai pas l'intention de m'esquiver derrière ces remises qui, à certains moments, ont, disons, déçu celui qui vous parle. Mais d'autre part, en attendant cet événement, cette adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi, nous ne sommes pas restés inactifs. Nous en avons profité pour mettre sur pied des mécanismes administratifs nécessaires pour administrer cette loi. Nous en avons profité pour moderniser nos méthodes, moderniser nos contrôles, l'information, la gestion, la formation du personnel, le recrutement du personnel, toutes opérations qu'il nous aurait fallu faire après l'adoption de la loi.

Et là, nous les avons faites avant l'adoption de la loi, de sorte que, une fois cette loi adoptée, je crois bien qu'il ne s'écoulera pas beaucoup de temps avant que nous ayons terminé de recruter les effectifs nécessaires, les agents de sécurité sociale, des travailleurs sociaux, du personnel de soutien, que nous ayons centralisé dans les régions, que tous les effectifs soient en place, que les décisions soient rendues rapidement, et non pas, comme faisait allusion tantôt le député de Jonquière, que cela prenne deux mois, trois mois avant que des décisions ne soient rendues. C'est vers ça que nous tendons et c'est à toutes ces choses que nos efforts ont tendu depuis plusieurs mois de façon à avoir des mécanismes administratifs les plus souples possible, tout en ne négligeant pas les contrôles.

On sait pourquoi ces contrôles sont Importants. Je n'ai pas besoin d'y revenir ici ou d'élaborer longuement sur ces enquêtes que nous sommes obligés de faire, ces vérifications dans un programme qui coûte aux contribuables du

Québec la somme de $250 millions. Il est entendu que nous devons faire des vérifications même si, comme le député de D'Arcy-McGee le disait cet après-midi ou ce soir, nous devions de préférence procéder par échantillonnage. Je crois que nous n'en sommes pas rendus là. Il nous faut être encore plus prudents et plus sévères au début de l'application d'une loi. Quand tout le système aura été rodé, quand notre personnel aura été formé, quand toute la loi sera en marche, à ce moment-là, je crois bien que, le temps ayant fait son oeuvre et les mécanismes étant mieux rodés, nous pourrons abandonner certains contrôles qui, peut-être, apparaissent, aux yeux de certains membres de cette Chambre ou des assistés sociaux, trop tatillons ou trop sévères.

Je voudrais relever juste une autre remarque. Le député de Jonquière a mentionné tout à l'heure que l'on faisait aux députés certaines réponses non pertinentes et on avait l'air de dire aux membres de cette Chambre, quand ils s'occupaient de faire des représentations au nom des assistés sociaux, que ce n'était pas de leur ressort et qu'ils avaient apporté de faux renseignements, de fausses considérations.

De mon siège, comme titulaire du ministère de la Famille et du Bien-Etre, je veux dire à tous les membres de cette Chambre que je ne tolérerai pas que des agents de sécurité sociale et du personnel de nos bureaux disent aux membres de l'Assemblée nationale que ce n'est pas leur affaire quand ils écrivent pour transmettre des représentations des électeurs de leur comté ou de ceux qui se sont adressés à eux.

M. le Président, si c'est le devoir du député de voter, en Chambre, le bill 26, de s'être penché, durant les travaux de la commission parlementaire, sur un projet de réglementation et un projet de loi, si c'est le devoir du député de contribuer, par son travail, à bâtir la meilleure législation possible, c'est aussi son devoir de représenter son électeur et de transmettre, à nos bureaux locaux et nos bureaux régionaux, des observations qui peuvent être faites par son électeur ou celui qui vient le voir. Il y a une façon de les transmettre, et la façon qui est correcte, c'est celle qui a été mentionnée par le député de Jonquière-Kénogami: M. Untel ou Mme Une-telle m'a demandé de vous transmettre telles informations qui, peut-être, ont échappé à votre attention. Vous ignorez peut-être ces faits qui ont été portés à mon attention. Je vous les soumets, voulez-vous les prendre en considération? Je crois que c'est véritablement là, pour un député, assumer son rôle et rester en contact avec sa population pour prendre la dimension des problèmes humains.

J'espère ne pas avoir à revenir sur cette question vis-à-vis du personnel qui sera chargé d'appliquer la loi, le bill 26 et sa réglementation. Je crois que ces responsabilités seront bien expliquées au personnel qui, dans la pratique, tous les jours, administrera cette loi. J'invite les députés à continuer à assumer pleinement leur rôle, ça fait partie du mandat quileur a été confié par leurs électeurs, s'occuper des problèmes matériels ou des problèmes humains.

M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé, de la Famille et du Bien-Etre propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier pour l'étude du bill 26.

Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier

M. FRECHETTE (président du comité plénier): A l'ordre!

Bill 26, Loi de l'aide sociale, article 1.

M. CLOUTIER: M. le Président, il y a des amendements qui ont été remis au chef de l'Opposition et à ses collègues. A l'article 1, déjà.

M. LESAGE: En avez-vous une copie, M. le Président?

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Non, je n'en ai pas.

M. CLOUTIER: Article 1, au paragraphe b), il faudrait remplacer la définition « famille ».

La nouvelle lecture de l'article serait celle-ci : « Les conjoints ou le survivant ainsi que tout enfant à leur charge et tout enfant non marié qui subvient habituellement et principalement aux besoins de cette famille, le conjoint séparé judiciairement ou de fait ainsi que tout enfant à sa charge et tout enfant non marié qui subvient habituellement et principalement aux besoins de cette famille, les conjoints sans enfants, tout homme ou femme célibataire et tout enfant à sa charge. »

Egalement, à l'article 1, au paragraphe e), il faudrait retrancher, dans les quatrième et cinquième lignes, le mot « assidûment ».

M. GOLDBLOOM: M. le Président, c'est surtout une rédaction différente qui ajoute, à la fin, « tout homme ou femme célibataire et tout enfant à sa charge. » Le ministre pourrait-il, en ce moment, faire pour nous la concordance entre cette définition, qui paraît à l'article 1 b), et les articles 14 et 15, qui parlent de la personne « qui se trouve temporairement hors du foyer familial? » Or, à l'article 1, on parle du conjoint séparé judiciairement ou de fait.

Y a-t-il une définition que le ministre pourrait nous fournir pour indiquer quand la séparation cesse d'être temporaire et devient une séparation de fait? Je pose la question parce que plusieurs agences de bien-être social se sont inquiétées de la définition de la famille qui est fournie ici dans la loi. On dit: Qu'arrive-t-il quand il y a séparation? Est-on obligé, dans tous les cas de séparation, s'il n'y a pas séparation Judiciaire, de tenir compte de celui ou de celle qui n'est pas à la maison, en calculant les besoins de la famille? Je pense que la réponse se trouve entre les articles 1 et 14, mais j'aimerais que le ministre précise pour que nous comprenions exactement de quelle façon il a l'intention de traiter le revenu du conjoint, par exemple, qui n'est pas à la maison.

M. CLOUTIER: Le député de D'Arcy-McGee a-t-il d'autres observations sur les définitions?

M. GOLDBLOOM: Sur?

M. CLOUTIER: Sur les définitions de la famille?

M. GOLDBLOOM: Une seule autre, sur la définition d'un enfant à charge. Là aussi, c'est pour faire la comparaison avec d'autres articles qui paraissent ultérieurement. Si je comprends bien — je reviendrai sur ce sujet un peu plus tard — on définit ici un enfant à charge comme étant celui qui est âgé de moins de 18 ans ou, s'il a plus de 18 ans, qui fréquente une institution d'enseignement.

Il y a des personnes à charge qui ont plus de 18 ans, mais qui ne sont pas en mesure de travailler ou de fréquenter une institution d'enseignement. Je parle tout particulièrement des arriérés mentaux qui doivent rester à la maison, dans certains cas, ou être admis dans des institutions, dans d'autres cas. Je veux comprendre parfaitement l'intention du ministre quant à l'interprétation de la loi. Si je la comprends bien, on ne définit pas « personne à charge » indépendamment d'un enfant à charge.

Si une personne à charge a plus de dix-huit ans, ne fréquente pas d'institution d'enseignement, mais n'est pas capable de subvenir à ses propres besoins, il y aurait lieu de lui accorder, dans le cas par exemple d'un arriéré mental, une aide sociale à titre individuel qui ne serait plus comprise dans les prestations fournies à la famille. Ce sont les deux principales inquiétudes qui m'ont été exprimées par les agences de bien-être social.

M. CLOUTIER: Si c'est un adulte qui a plus que 18 ans, ça devient une personne seule aux fins de la loi; à ce moment-là, il retire des prestations.

M. HARVEY: Pas s'il est au foyer actuellement et que son père travaille et a un revenu convenable; il ne reçoit aucune allocation. J'ai plusieurs cas dont les décisions ont été rendues par la commission, considérant le revenu du père...

M. CLOUTIER: Le député parle de la loi actuelle?

M. HARVEY: Oui, oui, mais même dans celle-là si on ne le définit pas, le même problème, on va le retrouver. Je vous donne un exemple concret, sans nommer de nom; un individu est invalide au sens de la loi même actuelle, médicalement, son père est contremaître ou travaille régulièrement à l'Alcan...

M. LESAGE: Comme député.

M. HARVEY: ...ou comme député.

M. LESAGE: Vous allez briser votre affaire.

M. HARVEY: Non, non, je ne la briserai pas. Je ne la briserai pas. L'individu a 27 ans. Il se sent aux crochets de ses parents et n'a pas cette indépendance qui est censée être la sienne, parce qu'il est rendu à 27 ou à 28 ans. Si on ne corrige pas ça dans la définition, ça donnera ce que c'était autrefois.

M. CLOUTIER: Mais, le député parle d'un exemple, il prend l'exemple d'un enfant adulte de 27 ans qui reste à la maison, chez lui, qui reste dans sa famille, il ne peut pas retirer d'allocation parce qu'il demeure chez lui. Mais, au sens de la nouvelle loi, il est une personne seule et, même s'il demeure chez lui, il peut retirer des allocations parce que, quand ils ont 18 ans et plus, ils sont considérés comme des personnes seules. S'il est en état de besoin, il va retirer des prestations comme une personne seule, parce que ne faisant pas partie de la famille.

M. LESAGE: Bien oui, s'il est en état de besoin, c'est parce que les personnes obligées à lui ne sont pas en état de subvenir à ses besoins. Est-ce que je comprends bien?

M. CLOUTIER: S'il est une personne seule, qu'il est en état de besoin, c'est parce qu'il n'a pas... il lait la preuve de son besoin, il fait la preuve de l'admissibilité en vertu de la loi.

M. LESAGE: Oui, oui, voici, le cas que soumet le député de Jonquière est le suivant: C'est le fils d'un contremaître, il a 27 ans, il est invalide, absolument, il ne travaillera jamais de sa vie, inutile d'y penser. A quel moment peut-il faire la preuve de son besoin? Le ministre dit c'est une personne seule. Mais, est-ce que même en vertu de la nouvelle loi, si le père est contremaître, supposons que le père gagne $75,000 ou $100,000 par année, supposons, bien oui! mais Ù faut une ligne de démarcation quelque part...

M. HARVEY: Ce n'est pas ça.

M. LESAGE: Est-ce que la ligne de démarcation n'est pas l'obligation des parents en ligne directe? C'est ça que je veux savoir, puis est-ce que ce n'est pas la même chose dans la nouvelle loi que dans l'ancienne loi. Il me semble qu'il n'y a rien de changé. J'ai lu le bill, j'ai lu les règlements. L'obligation des personnes obligées en loi demeure, sauf qu'on atténue peut-être, il me semble avoir lu ça, celle des grands-parents et des petits-enfants.

Mais pas dans le cas du père vis-à-vis de son fils et du fils vis-à-vis de son père.

M. CLOUTIER: Dans le cas mentionné par le chef de l'Opposition, évidemment l'obligation des parents demeure...

M. LESAGE: En vertu du code civil.

M. CLOUTIER: ... en vertu du code civil oui, mais en vertu de l'article 26 — si le chef de l'Opposition veut se référer à l'article 26 — il y a subrogation des droits du gouvernement dans le cas où on va venir en aide à cette personne seule qui, par ailleurs, devrait être assistée par...

M. LESAGE: Bien oui, mais...

M. CLOUTIER: Bien, c'est la même chose que pour la pension alimentaire.

M. LESAGE: Oui, mais c'est blanc bonnet, bonnet blanc. Il est clair que, dans le cas soumis par le député de Jonquière, si le ministre — puisqu'on parle toujours du ministre dans la loi — verse des allocations au fils de 27 ans, il sera subrogé et pourra réclamer du père la pension alimentaire du fils en vertu des dispositions de notre code civil. Alors, c'est blanc bonnet, bonnet blanc. Il n'y a rien de changé.

M. TREMBLAY (Bourassa): M. le Président, j'ai moi-même, dans mon comté, un garçon de 19 ans qui est incapable de travailler, invalide pour le reste de ses jours. Le père gagne $6,400 par année et il a cinq enfants. Les quatre autres enfants sont aux études. Il a fait une demande au ministère de la Famille et du Bien-Etre social. Je m'en suis occupé personnellement et il a eu un refus catégorique. Alors, il faut qu'il fasse instruire les autres enfants et qu'il paye un loyer de $125 par mois. Or, ce garçon-là ne reçoit pas d'allocation.

M. CLOUTIER: Evidemment, dans l'étude que l'on fait de la demande du requérant, il faut prendre en considération les revenus et les obligations du chef de famille, du père. Si le ministère juge qu'il doit assister cette personne seule qui demeure dans sa famille, il y a subrogation. C'est plus facile pour le ministère de réclamer du père le remboursement d'une allocation que pour le fils de réclamer de son père la subsistance.

M. LESAGE: Bien, s'il demeure chez son père. C'est le cas qui est soumis par le député de Jonquière. Si l'enfant est dans une institution, il y a, évidemment, subrogation et c'est au ministère de décider s'il fait valoir sa subrogation contre l'obligé en droit. Mais, dans le cas où le fils demeure chez son père, qu'est-ce que ça donne? S'il doit y avoir subrogation et réclamation du ministère, il est bien mieux de ne pas demander de pension, puisque c'est le père qui va la payer, de toute façon.

M. LAFRANCE: Je me demande, M. le Président, s'il ne s'agit pas de cas d'exception, surtout. Je connais, chez nous, de nombreux enfants qui demeurent avec leurs parents. Les parents ont certainement des revenus suffisants pour pourvoir aux besoins de leur enfant, mais on leur accorde une allocation réduite, à ce moment-là. J'en ai justement deux ou trois cas à soumettre cette semaine. Alors, je pense que la politique de la Commission des allocations sociales était d'accorder une allocation réduite dans ces cas-là, en tenant compte de certains avantages qu'ils avaient dans leur famille.

M. CLOUTIER: De toute façon, M. le Président, comme le député de Richmond le dit, ce sont des cas marginaux. Evidemment, ça ne peut pas se reproduire...

M. LESAGE: Ce sont des cas où la ligne de démarcation n'est pas bien claire.

M. CLOUTIER: Disons que chaque cas pourra faire l'objet d'une étude de la part du ministère. On verra, à ce moment-là, quelles sont les possibilités ou quels sont les besoins de cette...

M. LESAGE: Comme me le souffle le député de Bourassa, s'il s'agit d'une famille à revenu très modeste où le fils, invalide pour le reste de ses jours, doit faire comme le petit bonhomme qui s'en va à l'école et qui demande $0.50 à son père pour la cantine, et demande $1 pour avoir des cigarettes — cela arrive souvent — cela peut créer des situations de friction qui sont plus ou moins agréables dans les familles. Alors, s'il avait au moins une allocation, dans les cas, évidemment, où les revenus sont modestes — cela, c'est une question d'appréciation — il y aurait moyen, peut-être, d'éviter des difficultés dans la famille en accordant ce que le député de Richmond mentionnait tantôt, une espèce d'allocation réduite, comme celle que l'on accorde par exemple, pour les médicaments aux personnes qui reçoivent une pension de la sécurité de la vieillesse.

M. HARVEY: II est obligé de demander un paquet de cigarettes.

M. LESAGE: Oui, c'est ça.

M. CLOUTIER: En pratique, je pense bien qu'il s'agit d'une question...

M. LESAGE: II s'agit d'êtres humains et d'éviter, dans les familles, les causes de friction. Pour l'invalide, c'est une vie impossible et ça rend la vie des parents difficile. Ces invalides qui vivent chez leurs parents ont bien assez d'être invalides et de se sentir à la charge des leurs sans qu'on ajoute cet élément qui alourdit les relations familiales.

M. HARVEY: Le député de Bourassa, dans son exemple, avait tellement raison! Prenez un type qui gagne un salaire brut de $6,400 par année; il essuie présentement un refus en raison de son salaire. Ceci est un salaire brut. Quand on considère l'impôt provincial, l'impôt fédéral, la régie des rentes, le fonds de pension, ce type-là gagne à peu près $5,000 par année et son fils de 27 ou 28 ans qui est invalide doit quémander tous les jours, même pour s'acheter un paquet de cigarettes. Je considère que ce n'est pas tellement une politique sociale. Je serais de l'avis du député de Richmond qu'il y aurait moyen, pour certaines nécessités, d'avoir une allocation réduite qui lui permettrait une certaine indépendance relativement à des besoins qui sont autres que le toit car il en a un, puisqu'il est chez lui. Souvent la nourriture que ses parents lui donnent ne coûte pas tellement plus cher quand on a une bouche de plus à nourrir. Une de plus ou une de moins! C'est le principe de donner à cet être humain qui est invalide et parfois le père de son copain invalide retire un peu moins, étant en bas de la ligne de démarcation... Ce sont deux citoyens qui se sentent injustement traités, l'un et l'autre, par le même gouvernement. C'est dans ce sens-là que j'ai...

M. CLOUTIER: De toute façon, il est une personne seule, il peut être requérant. Il peut demander une allocation. Disons qu'on tiendra compte de toutes...

M. HARVEY: Moi, je l'accepte, si le ministre...

M. CLOUTIER: ... les situations de fait.

M. HARVEY: ... me répond que dès qu'il dépasse 18 ans, il est considéré comme une personne seule, même s'il vit au foyer.

M. CLOUTIER: C'est ça.

M. HARVEY: A ce moment-là...

M. CLOUTIER: Oui, d'accord.

M. HARVEY: ... je l'accepte parce qu'il devient éligible.

M. CLOUTIER: Oui, on fera l'étude de ses besoins, de son déficit et la même considération sera apportée à son cas qu'à tous les autres qui sont soumis.

M. HARVEY: Je remercie le ministre de sa précision parce que ça corrige cette lacune.

M. GOLDBLOOM: C'est ça.

UNE VOIX: Un instant.

M. LESAGE: M. le Président, je pense bien

que, dans sa substance, l'amendement améliore le texte, mais il est loin d'améliorer la ponctuation.

M. CLOUTIER: La ponctuation?

M. LESAGE: Oui, clairement. On avait des virgules dans le texte original et on fait la faute d'inscrire des points-virgules. Excusez-moi de m'attacher à ce détail, mais cela ne se fait pas en français. Remplacez les points-virgules dans votre amendement par des virgules parce qu'autrement ce n'est pas français.

M. CLOUTIER: Oui, disons que dans la rédaction...

M. LESAGE: Le texte original était bien ponctué.

M. CLOUTIER: Oui.

M. LESAGE: Mais là, il est mal ponctué.

M. CLOUTIER: Nos légistes n'ont pas d'objection.

M. LESAGE: Mettez des virgules.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 1, adopté avec les amendements. Article 2?

M. LESAGE: M. le Président, avant qu'il soit question d'amendement, est-ce que nous pourrions régler une question tout de suite? Il est question des règlements à l'article 2 pour la première fois. Est-ce que nous pourrions nous entendre pour étudier les règlements proposés lorsque nous étudierons l'article 48?

M. CLOUTIER: Oui, oui, là où on parle...

M. LESAGE: Avec cette assurance de la part du ministre...

M. CLOUTIER: Oui, oui, au lieu de revenir à chacun des articles...

M. LESAGE: ... nous attendrons... M. CLOUTIER: ... nous en parlerons...

M. LESAGE: ... à l'article 48 pour étudier tous les règlements d'un coup au lieu de le faire à chaque fois.

M. CLOUTIER: II est préférable de les étudier à ce moment-là.

M. LESAGE: Nous voyons une autorisation d'adopter des règlements dans des articles...

M. CLOUTIER: D'accord.

M. LESAGE: ... qui sont assez nombreux tout au long du projet de loi.

UNE VOIX: D'accord.

M. CLOUTIER: M. le Président, dans la version anglaise, il y a une modification à l'article 2. Au lieu du mot « may » c'est « is authorized to ».

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 2 adopté avec l'amendement.

Article 3?

M. GOLDBLOOM: M. le Président, est-ce que l'on peut demander de quelle façon le déficit sera calculé?

En particulier, est-ce qu'il sera calculé sur le revenu de l'année précédente ou est-ce qu'il y a un moyen prévu pour faire un calcul plus immédiat, plus courant?

M. CLOUTIER: C'est au moment de la demande, les revenus sont examinés à ce moment-là. Il peut y avoir une variation très rapide entre les revenus de l'année précédente et les revenus du moment où la demande est faite par le requérant.

M. GOLDBLOOM: Oui.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 3adopté.

Article 4.

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 5.

M. GOLDBLOOM: Je pense, M. le Président, que nous reviendrons sur les éléments de cet article quand nous discuterons les règlements parce qu'il y a certaines distinctions à faire entre besoins ordinaires et besoins spéciaux, qui sont faites peut-être différemment dans l'esprit du ministre et dans l'esprit de certains organismes qui ont présenté des mémoires. Je pense qu'il serait utile de revenir là-dessus pour faire préciser, dans l'esprit

du ministre, exactement ce que sont les besoins ordinaires. En termes généraux, nous les connaissons mais il y a des nuances à apporter, je pense. Revenons là-dessus quand nous aurons les règlements devant nous.

M. CLOUTIER: Le député de D'Arcy-McGee ne se scandalisera pas qu'il y ait des différences entre ce qu'ils ont voulu dire, dans les mémoires, et ce que nous avons l'intention d'Inscrire dans les règlements. D'ailleurs, c'est le sens des représentations qui ont été faites par ceux qui sont venus devant la commission.

Mais enfin, nous pouvons réconcilier, aux endroits où le député aura des remarques à faire, l'interprétation que l'on doit donner au règlement, à ce moment-là nous le ferons, à l'article 48.

M. GOLDBLOOM: Oui. M. CLOUTIER: D'accord. M. GOLDBLOOM; D'accord.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors article 5 adopté. Article 6. Adopté aussi?

M. GOLDBLOOM: Oui.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette); Article 7.

M. CLOUTIER: Article 7, il y a un amendement, M. le Président. Dans les deux dernières lignes du premier alinéa, pour remplacer les mots « ou travaille pour son propre compte » par les mots « travaille pour son propre compte ou fréquente une institution d'enseignement ».

M. GOLDBLOOM: Est-ce que le ministre peut nous donner l'explication de cet amendement? Celui qui fréquente une institution d'enseignement ne reçoit pas souvent un revenu pour ce faire. Et pourtant il est, selon l'article modifié, réputé ne pas être privé de moyens de subsistance. Je pense que je comprends un peu la pensée mais je voudrais que le ministre la précise.

M. CLOUTIER: Eh bien évidemment, il y a analogie entre celui qui travaille à temps plein et celui qui fréquente une institution d'enseignement. Ç'est un emploi à temps complet, si l'on veut, excepté les interruptions pour les vacances. Mais celui qui fréquente une institution d'enseignement profite d'aide du gouvernement sous d'autres formes, soit sous forme de bourses d'étude ou d'allocations de formation professionnelle ou enfin... Alors, je crois bien qu'il est assimilé à celui qui détient un emploi à temps régulier.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 7 adopté avec l'amendement. Article 8.

M. GOLDBLOOM: Sur l'article 8, M. le Président, nous arrivons pour la première fois à cette expression « conduire au dénuement total ». Voici que l'on parle de l'aide sociale « qui comble les besoins spéciaux d'une famille ou d'une personne seule qui n'est pas privée de moyens de subsistance lorsque cette aide est nécessaire pour éviter qu'elle n'en soit privée » — d'accord jusqu'à ce point là — « ou qu'elle ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour sa santé » — d'accord encore une fois — « ou risque de la conduire au dénuement total. »

N'y a-t-il pas, M. le Président, des situations qui ne sont pas aussi graves que celles qui risqueraient de conduire une personne ou une famille au dénuement total mais qui seraient quand même des situations qui exigeraient une intervention du ministère?

Est-ce que l'on doit spécifier « dénuement total »?

M. CLOUTIER: Non, voici. Ce n'est pas « et ». Il y a trois cas mentionnés ici. C'est « ou » ! Le premier cas est le moins grave. « Lorsque cette aide est nécessaire pour éviter qu'elle n'en soit privée ou qu'elle ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour sa santé » — c'est déjà plus grave que la première note — et troisièmement, encore plus grave » ou risque de la conduire au dénuement total ». Donc, il y a une gradation. Mais l'un ne renferme pas l'autre évidemment. Il y a trois possibilités donc, qui comportent chacune leur caractère de gravité.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 8, adopté?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 9,il y a un amendement?

M. CLOUTIER: A l'article 9, pour remplacer cet article par le suivant: « Lorsque l'aide sociale accordée à une famille ou à une person-

ne seule en vertu de l'article 8 n'est pas suffisante pour éviter qu'elle soit privée de moyens de subsistance ou qu'elle se trouve dans une situation qui constitue un danger pour sa santé ou risque de la conduire au dénuement total, le ministre lui accorde l'aide sociale pour combler ses besoins ordinaires et spéciaux et peut lui proposer un plan de relèvement. A défaut par cette famille ou personne seule d'accepter le plan qui lui est ainsi proposé, le ministre peut refuser de lui accorder l'aide sociale ou réduire les bénéfices qu'il lui aurait autrement accordés ».

M. GOLDBLOOM: Est-ce que le ministre peut nous dire qu'est-ce qui constitue, pour lui, un plan de relèvement? Est-ce que c'est surtout une aide budgétaire, une aide pour trouver le moyen d'honorer les obligations financières ou est-ce que ce plan peut comprendre également les services nécessaires, les services professionnels de réadaptation?

M. CLOUTIER: Oui. Cela peut comprendre non seulement l'assistance financière qui lui est accordée, en vertu de cet article, mais aussi tout ce qui est connexe. Si le député se réfère à l'article 48h), il aura l'explication complète. L'article se lit comme suit: « Les modalités suivant lesquelles sont établies les prescriptions que peut contenir tout plan de relèvement proposé par le ministre à une famille ou personne seule conformément à l'article 9, y compris les prescriptions relatives à la consolidation des dettes de cette famille ou personne seule et les mesures de formation et de réadaptation auxquelles elles doivent se soumettre ». Il y a donc là un ensemble de possibilités, de mesures ou de services qui sont ajoutés à l'aide financière et qui vont à la source, à la racine des problèmes de ce requérant.

M. GOLDBLOOM: Maintenant, deuxième question. Cet article diffère un peu de celui qui le précède, parce qu'on parle ici de l'aide sociale qui est accordée dans l'article précédent ou plutôt dans l'article 7, on a parlé du risque — pardon, c'est l'article 8, je pense — de tomber dans une situation de dénuement total ou partiel. On parle de l'aide sociale qui est déjà accordée et l'on dit que lorsque cette aide sociale n'est pas suffisante pour éviter ces difficultés dont on vient de parler à l'article précédent et que si cette aide ne semble pas suffisante, là, on proposera — il est loisible au ministre de proposer — à cette famille ou à cette personne un plan de relèvement. Mais n'y a-t-il pas des situations où l'aide sociale est suffisante pour combler les besoins, quand même un plan de relèvement serait indiqué, surtout si l'on tient compte des services de réadaptation dont nous venons de parler?

M. CLOUTIER: Je voudrais juste faire une remarque sur l'observation qu'a faite le député. A l'article 9, on dit que lorsque l'aide sociale est accordée à une famille ou personne seule en vertu de l'article 8 et que ce n'est pas suffisant, mais c'est l'aide sociale qui est accordée pour les besoins spéciaux.

Si ce n'est pas suffisant, en vertu de l'article 9, on lui accorde aussi de l'aide sociale au titre des besoins ordinaires. Là, ça s'accompagne spécifiquement d'un plan de relèvement social complet, avec les services auxquels on a fait allusion, il y a un instant.

On le mentionne de façon spécifique, parce que, là, il s'agit d'une personne qui n'est pas privée de ses moyens de subsistance. On lui accorde des besoins spéciaux, mais aussi des besoins ordinaires, même si elle est sur le marché du travail et si elle n'a pas perdu ses moyens ordinaires de subsistance.

Donc, nous allons plus loin en exigeant un plan de relèvement. Mais, dans les cas mentionnés par le député de D'Arcy-McGee, il n'y a rien qui empêche le ministère par ses agents de sécurité sociale, même pour une personne qui reçoit de l'aide en vertu de l'article 6 — c'est-à-dire une personne qui est complètement privée de travail ou qui est inapte au travail, qui est handicapée, qui reçoit des prestations au titre des besoins ordinaires — de lui proposer aussi un plan de relèvement. Dans ce cas-là, c'est moins indiqué, cependant. En effet, s'il s'agit d'une personne malade, quel est le plan de relèvement? C'est de lui procurer des soins médicaux. S'il s'agit d'une personne qui est privée d'emploi, il s'agit de lui trouver du travail. Cela, c'est dans des cas bien spécifiques où l'on ajoute aux besoins spéciaux des besoins ordinaires, même si la personne travaille.

M. LESAGE: Si je comprends bien, les articles 8 et 9 couvrent le cas des personnes qui ne sont pas complètement démunies, alors que les articles 6 et 10, ensemble, couvrent le cas des personnes complètement démunies.

M. CLOUTIER: C'est ça.

M. LESAGE: Si je comprends bien, c'est un peu une réponse à certaines objections qui ont été faites.

M. CLOUTIER: C'est ça, c'est exact, oui.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 9, adopté?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 10?

M. GOLDBLOOM: M. le Président, le ministre a fait allusion à certaines améliorations qu'il était pour nous présenter en ce qui concerne la possibilité pour une famille ou une personne de garder sur le montant gagné au travail, après le retour sur le marché du travail, une plus forte proportion. Est-ce qu'il...

M. CLOUTIER: Dans la réglementation projetée, nous avons l'intention d'accorder un peu plus de latitude aux gens qui vont retirer des revenus du travail. Ici, il s'agit du cas d'un récipiendaire d'allocation qui retourne au travail.

Pendant une période de six mois, nous allons lui accorder une partie des revenus de son travail, justement pour lui assurer une meilleure intégration sur le marché du travail et une plus grande sécurité.

Alors, pendant six mois, nous ne lui enlèverons pas tous les revenus de son travail. Il y aura une diminution chaque mois, jusqu'à un maximum de six mois. Quand nous passerons à l'article numéro 48, l'article des règlements, nous pourrons considérer de façon plus large les revenus admissibles pour le travail dans le cas de tous les assistés sociaux.

M. GOLDBLOOM: Mais, le ministre, tel que nous l'avions suggéré à la commission parlementaire, semble avoir trouvé une façon de permettre aux revenus d'augmenter un peu plus rapidement que les allocations sociales ne diminueraient pendant cette période critique du retour au travail.

M. CLOUTIER: II s'agit de favoriser davantage l'incitation au travail et de ne pas décourager celui qui...

M. GOLDBLOOM: Exactement.

M. CLOUTIER: ... trouve du travail ou qui cherche, par tous les moyens, à réintégrer le marché du travail. Alors, il s'agit de faciliter son intégration...

Quand nous passerons à l'article des règlements, nous pourrons y revenir et je pourrai, peut-être, donner des exemples, à ce moment-là.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 11, il y a amendement.

M. CLOUTIER: Il y a un amendement, M. le Président. A la troisième ligne de l'article 11, il faudrait remplacer le mot « subvenant » par les mots « en état de subvenir. »

M. LAFRANCE: Je crois que c'est une correction qui est plus juste parce que je voyais là une certaine discrimination. Je ne vois pas pourquoi un religieux qui deviendrait invalide à la suite d'un accident ou d'une maladie à un âge relativement jeune et qui est un contribuable comme les autres aujourd'hui, qui paie de l'impôt, ne serait pas éligible à l'aide de l'Etat. Je crois que cet amendement que vous apportez...

M. LESAGE: Non, non.

M. LAFRANCE: Non?

M. LESAGE; Non, non.

UNE VOIX: C'est le contraire.

M. LAFRANCE: En état de subvenir...

M. LESAGE: L'amendement proposé provient d'un excès de prudence de la part du ministre, mais n'apporte aucun remède à l'objection du député de Richmond.

M. CLOUTIER: Oui.

M. LESAGE: L'objection du député de Richmond demeure, même avec l'amendement proposé. Si le député de Richmond veut qu'un religieux invalide, même si la communauté pourvoit à ses besoins, ait droit à une prestation, il faudrait changer l'amendement.

M. LAFRANCE: J'insite moins si la communauté est en état de subvenir. C'est un peu comme une famille.

M. LESAGE: Enfin...

M. LAFRANCE: J'Insiste un peu moins à ce moment-là, quoique j'y voie une certaine discrimination.

M. LESAGE: C'est une prohibition absolue. M. LAFRANCE: Oui.

M. LESAGE: Le cas qui était soumis au ministre tout à l'heure par le député de Jonquière,

en particulier, et le député de Bourassa, de l'invalide dans une famille qui devient une charge au point où cela peut détériorer les relations familiales, cet exemple pourrait être donné pour des communautés. Et à combien plus forte raison l'invalide, dans une communauté, quin'a aucune source de revenu, le pauvre frère ou le pauvre père qui a peut-être 35 ou 40 ans et qui est devenu invalide pour le restant de ses jours! Il n'a pas un cent de revenu personnel. Il est à la charge d'une communauté qui est en état de subvenir à ses besoins, mais qui ne lui versera pas d'argent pour les menues choses comme les cigarettes ou le tabac dont il peut avoir besoin. Le ministre a dit que, dans le cas de l'invalide dans une famille, on pourra tenir compte des circonstances. Mais ici, on ne pourrait pas en tenir compte parce que c'est une prohibition absolue qui est apportée par l'article 11.

M. LAFRANCE: Je pense que c'est la première fois qu'on voit une disposition comme celle-là dans une loi.

M. CLOUTIER: Pardon?

M. LAFRANCE: Est-ce lapremiêre fois que l'on voit une disposition comme celle-là à l'endroit des religieux dans une loi?

M. CLOUTIER: Mes collaborateurs m'informent qu'actuellement les communautés religieuses, subviennent habituellement, aux besoins des membres de leur communauté. Disons habituellement.

M. LESAGE: Oui.

M. CLOUTIER: II peut y avoir des cas extrêmes, évidemment, où même la communauté qui est en état de subvenir aux besoins de ses membres refuse une contribution pour le genre de dépenses mentionnées par le chef de l'Opposition, les dépenses personnelles. Disons les petites dépenses personnelles.

M. LESAGE: J'ai choisi le tabac pour que le député de Richmond ne s'insurge pas.

M. LAFRANCE: Je crois, comme le dit le ministre, qu'habituellement...

M. CLOUTIER: II y a des membres de communautés qui connaissent le tabac.

M. LAFRANCE: ... les communautés pourvoient aux besoins de leurs membres. Je crois qu'il y a là, comme l'a fait remarquer le député de Louis-Hébert, une prohibition qui est assez radicale.

M. CLOUTIER: Disons qu'il serait de plus en plus incompréhensible qu'une communauté ne verrait pas à aider tous les membres de sa communauté, surtout dans ces menues allocations pour dépenses personnelles.

De plus en plus, dans le domaine de l'enseignement, dans le domaine de la santé et dans le domaine du bien-être le personnel des communautés qui oeuvrent dans ces secteurs reçoivent presque la parité de salaire avec les laïques. Bien, pas actuellement...

M. LAFRANCE: Ils ne paient pas d'Impôt?

M. CLOUTIER: ... il y a une allocation qui tient lieu, je crois...

DES VOIX: Ah oui, ils payent des impôts.

M. CLOUTIER: Le député de Saint-Jacques me dit que de ce côté-là il y a actuellement des discussions qui se poursuivent avec les communautés, au point de vue de l'impôt. Je ne crois pas qu'actuellement il y ait des retenues faites sur les salaires dans le domaine de la santé et dans le domaine du bien-être.

M. LESAGE: Pardon? Il est sûr que les enseignants religieux payent de l'impôt sur le revenu.

M. HARVEY: Ils payent à la Régie des rentes, aussi.

M. COURNOYER: On semble ne pas s'entendre sur les exemptions. On ne les considère pas nécessairement.

M. LESAGE: Je sais tout ça. Evidemment, il n'y a personne qui s'entend sur les exemptions.

M. COURNOYER: Non, mais à savoir si un...

M. LESAGE: A savoir quel doit être le montant des exemptions, des déductions, ça c'est le jeu normal de ceux qui préparent des rapports d'impôt sur le revenu. Le député de Saint-Jacques, s'il se tient près du ministre du Revenu, va l'apprendre bientôt.

M. COURNOYER: Je l'ai appris avant aujourd'hui.

M. LESAGE: Bien oui, il l'a probablement appris à ses dépens.

M. COURNOYER: Aux miens!

M. LESAGE: Bien oui, c'est ce que je viens de dire, à ses dépens. Mais, sur ça, il y en a toujours des discussions, surtout pour ce qui est des religieux, des religieuses enseignantes et autres dans le domaine hospitalier, etc. Mais, d'un autre côté, il est sûr qu'en principe et en fait ceux qui reçoivent des salaires payent de l'impôt.

M. COURNOYER: Ah oui, ils payent de l'impôt.

M. CLOUTIER: M. le Président, j'aurai une conversation avec le député de Saint-Jacques parce que la question des retenues d'impôt, dans mon esprit, dans le secteur de la santé, de l'éducation, c'est-à-dire je ne touche pas l'éducation, mais santé et bien-être, dans mon esprit on ne retenait pas d'une façon générale les impôts. Il y a encore un décalage du point de vue des salaires qui tient compte de ce manque à payer de l'impôt. Je sais qu'il y a des discussions actuellement.

M. LESAGE: Le décalage au point de vue des salaires n'est pas particulièrement à cause de l'impôt.

M. CLOUTIER: J'exclus l'enseignement, je parle de la santé et du domaine du bien-être.

M. LESAGE: Même dans les hôpitaux, les religieuses qui sont dans le « nursing » payent de l'impôt.

M. CLOUTIER: D'une façon générale. Bien, avec la nouvelle convention, peut-être là...

M. LESAGE: Ce n'est pas une question de convention, c'est une question de loi fédérale et de loi provinciale.

M. CLOUTIER: De toute façon, je sais que le problème se discute au niveau des communautés...

M. LESAGE: II se discutera toujours. M. CLOUTIER: Oui.

M. LESAGE: Tant qu'il y aura des lois d'impôt et qu'il y aura des communautés.

M. CLOUTIER: Mais là il se discute de façon plus intense. En tout cas, pour revenir à l'observation du député de Richmond, étant donné que de plus en plus on se dirige vers la parité de salaire, je crois bien que les communautés religieuses auraient bien mauvaise grâce de refuser à leur membre des allocations ou des contributions nécessaires surtout pour ces petites dépenses personnelles.

M. LAFRANCE: Je n'insiste pas, M. le Président, mais il me semble qu'il y a une discrimination évidente.

M. CLOUTIER: Mais, de toute façon, si la communauté n'était pas en état de subvenir aux besoins de ses membres, il y a des communautés qui ont fait essentiellement le voeu de pauvreté, et je pense bien que dans ces cas-là, il est évident que la communauté qui vit de la charité du public, on pourrait donner des noms de communautés...

M. LESAGE: La communauté du frère Jean, c'est comme ça qu'on l'appelait?

M. CLOUTIER: Le frère Jean, l'apôtre de l'amour infini.

M. LESAGE: L'apôtre de l'amour infini. Jean de la Trinité.

M. CLOUTIER: Le chef de l'Opposition a des conversations avec...

M. LESAGE: Est-ce qu'ils ont fait voeu de pauvreté, eux?

M. CLOUTIER: Non. Le chef de l'Opposition a des conversations avec le député de Terrebonne; il pourra en parler.

M. LAFRANCE: Ce n'est pas à cette communauté-là que je faisais allusion. Alors, moi je ne veux pas en faire une tempête, mais, à mon humble avis — il n'y a personne qui m'en a parlé — il m'a semblé qu'il y avait quelque chose d'un peu extravagant dans cet article. Je n'insiste pas outre mesure. Je veux attirer l'attention du ministre tout simplement.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, adopté avec l'amendement.

M. LESAGE: Comme dit le député de Matane, c'est une atteinte à la religion. Dire que c'est nous qui avons été accusés de décrocher les crucifix des écoles!

M. LE PRESIDENT: Article 12.

M. CLOUTIER: Article 12, il y a un amendement.

M. LESAGE: Vous n'aviez qu'à ne pas me...

M. CLOUTIER: Au sous-article 1, premièrement.

Il faudrait ajouter à la fin du paragraphe b), après le mot « ministre », les mots « sauf dans la mesure prescrite par les règlements ». Il faudrait insérer, après le paragraphe e), le paragraphe suivant: « f) refuse ou néglige de fournir les renseignements et documents requis pour l'étude de sa demande. »

M. GOLDBLOOM: Est-ce que je peux demander au ministre si l'aide sociale dont parle l'article 12 fait l'objet d'un accord entre le gouvernement du Québec et celui du Canada?

M. CLOUTIER: Oui.

M. GOLDBLOOM: Dans ce cas-là, je suis obligé de demander au ministre comment il établit la relation entre la phraséologie de cet article 12 qui dit que « l'aide sociale peut être refusée, discontinuée, suspendue ou réduite » dans certains cas qui sont énumérés et la loi fédérale du régime d'assistance publique qui dit que le ministre fédéral peut conclure un accord avec toute province selon certaines conditions, certaines stipulations à inclure dans les accords. Et voici que je lis à l'article 15, paragraphe 3), sous-paragraphe a): Stipuler qu'aucune personne ne doit être privée d'assistance publique parce qu'elle refuse ou qu'elle a refusé de participer à un projet d'adaptation au travail.

Il me semble que...

M. CLOUTIER: M. le Président, le député a raison, il y avait une contradiction entre cet article et les stipulations actuelles du régime canadien d'assistance publique. Nous avons fait des représentations au gouvernement fédéral, et on nous assure que les représentations du Québec sont acceptables, ce qui laisse sous-entendre qu' il pourrait y avoir des modifications au régime canadien d'assistance publique.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 13, adopté?

M. GOLDBLOOM: M. le Président, nous étions toujours à l'article 12.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): D'accord.

M. GOLDBLOOM: Je voudrais poser une autre question au ministre au sujet du paragraphe b), qui parle des mesures appropriées de formation ou de réadaptation qui sont indiquées par le ministre. Est-ce que dans cette phraséologie on comprend également la formation ou la réadaptation qui peut être indiquée par le ministre pour une personne autre que le chef de famille?

M. CLOUTIER: Est-ce que le député veut dire une personne autre que le chef de famille qui retirerait des allocations à l'intérieur de la famille?

M. GOLDBLOOM: Non, pas nécessairement, voici ce que je veux dire. Je reviens au cas de l'arriéré mental ou de l'invalide pour qui un programme de réadaptation ou de formation spéciale aurait pu être proposé. L'Association québécoise pour les arriérés mentaux souligne qu'il n'est pas dans l'intérêt de ces personnes de rester à la maison à ne rien faire s'il y a possibilité de leur offrir un tel programme. Donc, cette association voudrait que la condition soit imposée, c'est-à-dire que, s'il y a possibilité de faire quelque chose pour l'arriéré mental — et il en serait de même pour l'invalide, celui qui souffre d'une invalidité physique — l'on impose la condition dans le même sens que le ministre l'impose ici dans le règlement. Donc, je veux savoir simplement si c'est compris dans la phraséologie que nous lisons.

M. CLOUTIER: Non, la contrainte est pour celui qui retire la prestation et non pas tous ses dépendants; je prends exemple du fils de 16 ou 17 ans...

M. HARVEY: Cela n'affecte pas le dépendant.

M. CLOUTIER: Non. Le travailleur social ou l'agent de sécurité sociale peut évidemment suggérer et fortement recommander au chef de famille de faire en sorte que son enfant profite d'un programme de formation professionnelle, s'il a déjà abandonné l'école.

Mais il ne peut pas se servir de cet article-là comme contrainte parce qu'il s'applique au récipiendaire de cette allocation.

M. GOLDBLOOM: Donc, l'incitation sera faite, mais si cette incitation n'est pas acceptée, ce ne sera pas une raison pour le refus de l'aide sociale à cette famille.

M. CLOUTIER: C'est exact. M. GOLDBLOOM: Parfait.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, l'article 12, adopté.

L'article 13? Article 13, adopté.

M. HARVEY: Vous ne faites pas payer l'Intérêt sur l'argent prêté?

M. CLOUTIER: Non.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 14?

M. GOLDBLOOM: Le ministre n'a pas d'autres commentaires à faire sur la question que je lui ai posée au début?

M. CLOUTIER: Est-ce que le député voudrait... Je ne me souviens pas exactement.

M. GOLDBLOOM: Sur la question de l'absence temporaire, sur la séparation temporaire.

M. CLOUTIER: La séparation de fait ou la séparation juridique? Est-ce que le député me demandait si on comptabilisait les revenus, justement, de la personne qui fait une demande?

M. GOLDBLOOM: Si j'interprète bien l'intention du gouvernement, si la séparation est définie comme étant temporaire, on tiendra compte du revenu du conjoint qui n'est pas à la maison dans le calcul des besoins, donc des allocations de la famille.

Mais si l'on définit la séparation comme étant une séparation de fait, même s'il n'y a pas de statut juridique à cette séparation, alors à ce moment-là on permettra au conjoint qui demeure à la maison avec les enfants, par exemple, de ne plus être obligé de tenir compte de ce que l'autre gagne et pourrait, en théorie, contribuer mais ne contribue pas. Alors, est-ce qu'il y a une ligne de conduite qui est tracée aux agents de bien-être social? Est-ce qu'il y a une définition qui peut être donnée pour faire la distinction?

M. CLOUTIER: Les légistes, M. le Président, nous disent que c'est toujours l'article 26 qui s'applique. Même s'il y a séparation de fait, il y a toujours recours possible dans le même cas où il y a séparation légale, séparation juridique.

M. GOLDBLOOM: Or, cela veut dire qu'en principe, quand le ministère constate une séparation de fait, il accorde les prestations qui sont indiquées, quitte à trouver le mari disparu...

M. CLOUTIER: A ce moment-là, si le ministère retardait sa décision d'aider jusqu'à ce qu'il ait éclairci la situation de cette famille, il pourrait se produire un état de dépendance chez cette famille qui a besoin d'être assistée. Le mal pourrait être plus considérable s'il y a délai et s'il y a retard à intervenir. Alors, il y a intervention de la part du ministère. Il n'y a pas comptabilisation des revenus de l'autre conjoint. S'il y a lieu d'exercer des recours, il y a toujours possibilité, par la suite, de les exercer.

M. GOLDBLOOM: D'accord.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 15?

M. GOLDBLOOM: L'article 15, adopté. Nous comprenons que c'est une modification de la politique qui a existé jusqu'à maintenant, c'est-à-dire que la définition donnée par l'article 15 est la même qui paraît à l'article 1, évidemment. On ne dit pas: celui qui reste au foyer ne peut recevoir d'aide sociale à titre individuel, mais: celui qui, selon la définition est membre d'une famille. Ce n'est pas du tout la même chose.

M. CLOUTIER: C'est là où je pourrais dire au député de Jonquière que cela favorise la cohésion de la famille.

M. HARVEY: Parfait.

M. CLOUTIER: C'est un des aspects...

M. GOLDBLOOM: Parfait.

M. LE PRESIDENT: Alors, l'article 15 adopté.

L'article 16?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. M. HARVEY: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 17.

M. LAFRANCE: A l'article 17, M. le Président, il semble y avoir une certaine tendance, en certaines régions, à généraliser ces cas. J'ai l'impression que c'est de nature à développer un peu un certain paternalisme.

Je connais, par exemple, dans une petite localité de mon comté, au moins une quinzaine de familles qui sont assujetties à une espèce d'organisme fiduciaire comme cela. Elles ne disposent pas d'un cent, et ce sont des gens qui seraient certainement capables d'administrer une partie de leur pension. Je me demande s'il n'y a pas une tendance, à l'heure actuelle, à trop généraliser ces cas qui sont certainement de nature à développer cette dépendance, ce paternalisme d'Etat.

M. CLOUTIER: Non. M. le Président, il y a moins de cas actuellement. Cela va en diminuant, les cas qui sont confiés à une tierce personne pour l'administration de l'allocation.

D'autre part, je dois signaler ici qu'il se fait beaucoup d'éducation du point de vue de l'administration du budget familial soit par les associations de coopératives d'économie familiale, les ACEF, que nous subventionnons soit par les mouvements syndicaux, soit par les caisses populaires ou d'autres groupements qui s'occupent d'éducation dans ce domaine. Je pense que, dans plusieurs cas, c'est la réponse aux besoins d'une famille. La réponse, c'est une meilleure administration du budget familial. Et une fois que l'étude du problème ou de la demande du requérant est faite, on constate, dans certains cas, après une période d'administration par une tierce personne, que c'était là le problème et qu'avec une meilleure administration, il est possible de réhabiliter cette famille pour qu'après cela elle puisse, sans retirer d'aide sociale, répondre à ses besoins.

M. LAFRANCE: Mais, si le ministre me dit que ces cas diminuent, cela me rassure. J'avais eu l'impression contraire.

M. CLOUTIER: Très bien.

M. HARVEY: Est-ce que le ministre est au courant qu'on connaît le nom de personnes qui sont censées agir comme administrateurs d'un assisté et que ces personnes ne sont nulles autres que l'épicier qui leur fournit le strict nécessaire en nourriture pour vivre pendant un mois? A plusieurs reprises, j'ai constaté que l'administrateur qui avait été nommé était justement l'épicier qui avait dit: Ecoutez, madame ou monsieur, si vous voulez avoir des denrées alimentaires chez moi, faites-moi envoyer votre chèque. Alors, s'ils achètent pour $70, $75 ou $80 dans le mois et que le chèque est de $120, il leur remet la différence.

A ce moment-là, le principe d'un administrateur pour une personne, ou un foyer qui est censé être incapable de bien équilibrer son affaire en fonction d'une allocation qui lui est versée selon ses besoins se trouve faussé. Et ce ne sont pas des cas d'exception, je vous l'assure! Mais si, comme vous l'avez dit tout à l'heure au député de Richmond, le nombre d'administrateurs pour les assistés sociaux, en raison de l'éducation qui est faite par divers organismes, a tendance à diminuer, il est fort possible, avec les bureaux régionaux et des agents de bien-être qui auront un nombre restreint d'assistés sociaux à suivre dans les dossiers chaque jour, que cela diminuera davantage.

M. CLOUTIER: Oui, le personnel sera plus nombreux dans les bureaux locaux. Nous aurons aussi des agents, spécialisés dans l'administration et dans cette section de la réhabilitation des assistés sociaux, qui pourront eux-mêmes voir à la bonne administration de l'allocation et de la prestation de l'assisté social, quand ce sera indiqué. Auparavant, avec le manque de personnel, une certaine tradition s'était établie avec les années. D'autres mouvements privés, comme la Saint-Vincent-de-Paul, faisaient administrer leurs allocations par l'épicier ou par le marchand général. Evidemment, le député a raison de dire que, dans certains cas, cela ne donne pas tout le rendement que cela devrait donner comme administration. A ce moment-là, l'administrateur ne fait que fournir de la marchandise. Ici, on conçoit l'administration comme une mesure de réhabilitation et d'éducation.

M. HARVEY; Le ministre me permettra également. Moi, je connais quelques personnes qui sont administrateurs pour quinze ou vingt assistés sociaux. Le ministre étant lui-même comptable, il admettra qu'il est très difficile pour un type, qu'il soit membre d'une société Saint-Vincent-de-Paul ou d'un organisme de bienfaisance, de tenir une comptabilité à point et, même s'il le fait, de faire comprendre réellement à l'assisté social qu'il n'est pas un peu spolié. A ce moment-là, cela augmente l'insatisfaction de celui qui reçoit de l'aide de l'Etat, aide qui provient de l'argent des contribuables. Mais, si cela a tendance à diminuer...

M. CLOUTIER: De plus en plus, le personnel spécialisé de nos bureaux fournira ces services aux assistés sociaux.

M. HARVEY: Vos officiers conseilleront à ces travailleurs sociaux d'accentuer leur travail d'éducation pour que les assistés en vien-

nent à administrer eux-mêmes leurs propres chèques d'allocations.

M. CLOUTIER: Oui, et pour qu'Us utilisent aussi tous les services polyvalents fournis par les agences et par les groupes qui s'occupent de l'éducation.

M. HARVEY: D'accord.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 17?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 18?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LAFRANCE: Article 18, à titre d'information, quelles sont déjà les conditions d'éligibilité pour un immigrant, un Néo-Québécois?

M. CLOUTIER: Pour les immigrants, c'est encore le fédéral qui s'en occupe, pour la première année, un an et un jour.

M. LAFRANCE: Après un an, ils sont éligibles...

M. CLOUTIER: Ils sont éligibles pour les prestations de la province.

M. LAFRANCE: Très bien. Je me demandais si c'était modifié.

M. HARVEY: Alors, il n'y a eu aucune modification?

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 19?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 20?

M. GOLDBLOOM: A l'article 20, deux choses. « La forme la mieux appropriée » de l'aide sociale comprend-elle, encore une fois, les services, le plan de relèvement ou de réadaptation? Tout cela peut-il être compris dans cette définition de « la forme la mieux appropriée »?

M. CLOUTIER: C'est ça.

M. GOLDBLOOM: Deuxième question.

Il est dit que le ministre doit, dans le plus bref délai possible, procéder à l'étude du cas de chaque requérant. Qu'arrive-t-il lorsqu'en fin de semaine un problème se pose où l'on a un besoin immédiat de dépannage sans qu'on puisse faire une étude? Je n'ai pas trouvé, dans la loi, de solution exprimée de façon explicite.

M. CLOUTIER: Le ministère a des allocations d'urgence qu'il peut utiliser...

M. GOLDBLOOM: Oui.

M. CLOUTIER: ... dans les cas mentionnés par le député de D'Arcy-McGee, par exemple, en fin de semaine. Il peut aussi utiliser les services de la Saint-Vincent-de-Paul ou des autres groupes qui ont l'habitude de ne pas refuser leur aide.

M. GOLDBLOOM: Je comprends cela, M. le Président, mais nous avons devant nous la loi-cadre de l'aide sociale et je ne trouve pas, là-dedans, une allusion à ces services de dépannage d'urgence. Ne devrait-on pas trouver, dans la loi, une allusion très explicite?

M. CLOUTIER: L'allocation d'urgence est permise par les règlements; ce n'est pas mentionné dans la législation. Ces allocations d'urgence existent actuellement et c'est versé dans des cas d'urgence. Alors, la réglementation nouvelle n'enlèvera pas la possibilité du recours à des allocations d'urgence par le bureau local, dans les cas auxquels pense le député.

M. GOLDBLOOM: Cela n'obligera pas le ministère à procéder à une étude quelconque avant d'accorder une telle aide d'urgence? C'est mon inquiétude au sujet de cet article.

M. CLOUTIER: Le député voudrait-il répéter?

M. GOLDBLOOM: Cet article nous dit que le ministre doit procéder à une étude. Mais, dans les cas d'urgence, on accorde de l'aide sans procéder à une étude. Alors, c'est...

M. CLOUTIER: L'étude ne vient pas du ministère. L'urgence se produit, disons, dans une région éloignée, en Gaspésie, en fin de semaine. Il y a possibilité d'utiliser une allocation d'urgence, et c'est le bureau local qui est habilité à en décider, après une étude sommaire du cas. Il y a aussi, dans toute cette région économique de la Gaspésie, un bureau régional. Au cas où

le bureau local aurait besoin de références ou de renseignements additionnels, il y a un deuxième palier qui est le bureau régional qui est encore plus rapproché. Dans les jours qui suivent, une communication peut s'établir entre le siège social, le ministère et la région.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 20, adopté.?

M. GOLDBLOOM: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 21?

M. GOLDBLOOM: En ayant discuté assez longuement avec mon collègue, le député de Richmond, je comprends la nécessité de cet article 21.

Qu'arrlve-t-il dans le cas où l'endettement de l'assisté social dépasse les montants qu'il aurait le droit de recevoir selon la loi? Y a-t-il des moyens... Evidemment, je comprends que le ministère ne peut pas assumer toutes les obligations de tous ceux qui tombent en panne économique, mais il y a des cas où l'endettement dépasserait les montants auxquels l'assisté social aurait droit. Dans le plan de relèvement y a-t-il moyen de tenir compte de ces choses-là, ou le ministre croit-il que c'est justifié, après étude?

M. CLOUTIER: Justement le député mentionne là un cas où ce sera complexe et difficile. Je pense bien que chaque cas devra faire l'objet d'une étude attentive. Le député comprendra que si l'on ouvre la porte dans un secteur comme celui-là, de l'endettement, on sait en pratique comment cela va se passer. Il y a des gens qui procéderont à des achats de mobilier et d'automobile et qui vont emprunter « sur la finance », comme on dit couramment, et qui vont mettre le ministère en face d'obligations qu'ils ont assumées mais auxquelles ils ne peuvent faire face.

Je crois bien que nous devons être prudents et c'est pour cela que l'article est rédigé de cette façon. Je prends un cas particulier. Je crois bien que dans la réglementation, on traitera différemment le cas d'une personne qui a une automobile qui lui est absolument nécessaire pour son travail. Disons le camionneur qui gagne sa vie avec un camion ou l'assisté social qui a besoin de son automobile ou d'un outil qu'il aurait acheté, je prends le cas du bûcheron avec une scie mécanique. Je pense bien qu'on devra traiter différemment chacun des cas dans l'optique du plan de relèvement. Il n'est pas question d'ouvrir la porte et de payer les dettes contractées par n'importe qui et dans n'Importe quelle condition.

M. GOLDBLOOM: Nous avons parfaitement compris cela. Il est quand même vrai que, dans certains cas, des cas bona fide, cet endettement peut empêcher la réadaptation ou le relèvement de cette famille.

M. LESAGE : II y a beaucoup plus de personnes endettées au Québec et au Canada qu'il n'y a d'assistés sociaux, d'après les chiffres astronomiques qui nous sont...

M. GOSSELIN: D'ailleurs, c'était... M. LESAGE: Pardon?

M. GOSSELIN: Cela a été un slogan du Parti libéral...

M. LESAGE: M. le Président, si le député de Compton veut faire son fin, on peut le faire à deux. S'il veut recommencer — il s'est ennuyée — on peut recommencer, et pas plus tard que tout de suite.

Je vais lui montrer comment on doit compter dans le domaine de la finance. Lui, il n'a jamais compris ça, et il ne comprendra jamais. Tout le monde le réalise.

M. GOSSELIN: Je n'ai jamais eu besoin de la Fédération libérale...

M. LESAGE: Tout le monde le réalise. C'est pour ça que le ministère des Terres et Forêts est si mal administré.

M. CLOUTIER: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Article 21. A l'ordre!

M. CLOUTIER: ... c'est peut-être de ma faute si...

M. LESAGE: Demain. Il est onze heures, M. le Président.

M. CLOUTIER: M. le Président...

M. LESAGE: Vous enverrez fumer le député de Compton, demain.

M. CLOUTIER: ... c'est peut-être ma faute s'il y a eu cette digression, j'ai parlé du bûcheron avec la scie mécanique.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): L'article 21 est adopté?

M. LESAGE: Oui.

M. GOLDBLOOM: Oui.

UNE VOIX: Article 21, adopté. Il est onze heures.

M. LE PRESIDENT: Article 22.

M. LESAGE: Il est onze heures, j'ai des questions à poser.

M. FRECHETTE (président du comité plénier): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas fini de délibérer et qu'il demande la permission de siéger à nouveau.

M. LEBEL (président): Quand siégera-t-il? Prochaine séance.

M. PAUL: M. le Président, demain nous pourrons reprendre l'étude en comité du projet de loi 26, Loi de l'aide sociale, et peut-être la troisième lecture. Ensuite, la deuxième lecture et l'étude en comité du bill no 10 puis la Loi modifiant de nouveau la Loi des tribunaux judiciaires.

M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain après-midi, trois heures.

M. LE PRESIDENT: La Chambre s'ajourne à demain après-midi, trois heures.

(Fin de la séance: 22 h 58)

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