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(Onze heures neuf minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes! A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes.
Présentation de pétitions.
Lecture et réception de pétitions.
Présentation de rapports de comités élus.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés.
Présentation de bills publics.
M. LAPORTE: Il n'y a pas de bills publics, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Il n'y en a pas?
M. LAPORTE: M. le Président, vous avez quelques projets de loi
qui sont actuellement en appendice. S'ils ont été
distribués en fin de semaine, comme je l'espère, est-ce qu'il
serait possible de les appeler immédiatement pour première
lecture, afin qu'ils soient inscrits dès demain pour deuxième
lecture, les ministres concernés se chargeant de donner les explications
nécessaires à cette Chambre? Alors, Loi concernant les explosifs,
M. Choquette.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
première lecture de la Loi concernant les explosifs.
Explosifs
M. CHOQUETTE: M. le Président, on me dispensera sans doute de
lire les explications qui se trouvent au projet de loi et qui, je pense, sont
devant les honorables députés. Si les députés ne
les ont pas devant eux, je vais en donner lecture. Est-ce que l'honorable chef
de l'Opposition a les explications au projet de loi?
M. BERTRAND: Non, j'ai tout simplement la galée du projet de loi,
mais j'ai les notes explicatives. Je doute, par contre, que mes autres
collègues, qui font également partie de l'Opposition, mais qui ne
sont pas l'Opposition officielle...
M. CHOQUETTE: Je vais lire les explications qui se trouvent au projet de
loi. Elles ne sont pas tellement longues et je pense que cela donnera une vue
d'ensemble du projet qui est proposé.
Ce projet prévoit que personne ne pourra avoir des explosifs en
sa possession, ni en acheter sans détenir un permis à cette fin.
Les permis seront délivrés par des membres de la
Sûreté du Québec qui doivent refuser de les accorder
lorsque le requérant a déjà été
déclaré coupable de certains actes criminels ou d'infractions
relatives aux explosifs.
En cas de refus, le procureur général peut réviser
la décision rendue. Le procureur général peut, par
ailleurs, annuler un permis si le détenteur contrevient aux dispositions
de la loi ou des règlements relatifs aux explosifs. Toute personne ayant
des explosifs en sa possession devra les garder dans des bâtiments ou des
contenants conformes aux règlements ou les mettre en dépôt
chez son fournisseur lorsqu'elle n'en fait pas usage. Elle doit aussi aviser
sans délai les forces policières de tout vol, de toute perte ou
de toute disparition de ces explosifs.
Les inspecteurs d'explosifs seront nommés parmi les membres de la
sûreté du Québec pour veiller à l'application de la
loi. Ces inspecteurs pourront effectuer des enquêtes et saisir des
explosifs s'ils constatent que les dispositions de la loi ne sont pas
respectées. Les sanctions, qui deviennent plus sévères au
cas de récidive, sont prévues lorsqu'il y a infraction à
la loi.
Le lieutenant-gouverneur en conseil peut adopter des règlements
pour déterminer en particulier les conditions d'utilisation,
d'emmagasinage, de vente et de transport des explosifs.
Les personnes qui ont des explosifs en leur possession lors de
l'entrée en vigueur de la loi doivent se procurer un permis dans les 60
jours de cette entrée en vigueur.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND: Adopté.
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
M. BERTRAND: Même séance. M. PAUL: Même
séance.
M. BERTRAND: Le ministre, étant donné qu'il s'en va
à Halifax, m'a fait savoir, hier, qu'il aimerait que nous adoptions ce
projet en deuxième lecture et en comité plénier
aujourd'hui. Est-ce encore son intention?
M. CHOQUETTE: Justement, M. le Président, je dois quitter pour la
conférence des procureurs généraux du Canada,
conférence qui aura lieu à Halifax. Je dois partir ce soir.
Alors, j'ai demandé aux honorables chefs des différents partis en
cette Chambre s'ils consentiraient que nous accélérions la
procédure pour adopter cette loi aujourd'hui. On sait, d'ailleurs, que
des événements d'une gravité extraordinaire se sont
produits à Montréal en fin de semaine. Heureusement, ils n'ont
pas eu de conséquences graves, à cause de l'action
énergique de la police, mais je crois qu'il est dans
l'intérêt public que nous adoptions ce projet de loi le plus
rapidement possible.
M. PAUL: M. le Président, quant à nous, de l'Opposition
officielle, nous sommes prêts à étudier ce projet de loi,
mais l'honorable ministre conviendra sans doute qu'il serait peut-être
juste que ce projet ne soit appelé qu'après le lunch, à la
séance de cet après-midi, pour nous permettre d'en analyser
toutes les conséquences, la portée et les applications.
M. CHOQUETTE: Je n'ai pas d'objection à la procédure
indiquée par l'honorable député de Maskinongé pour
donner ainsi l'occasion aux députés de prendre connaissance du
projet de loi pendant la période du lunch; cela me paraît tout
à fait indiqué. Nous pourrions procéder à d'autres
projets de loi avant d'appeler celui-ci.
M. LAURIN: Nous exprimons le même désir et vous offrons la
même collaboration.
M. CHOQUETTE: Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé propose la
première lecture de la Loi modifiant la Loi de l'aide sociale, la Loi
des allocations scolaires et la Loi des allocations familiales du
Québec.
Lois modifiées
M. CASTONGUAY: M. le Président, les articles 1, 2, 4, 5 et 9 de
ce projet de loi changent le nom de la Commission d'appel de l'aide sociale en
celui de la Commission d'appel de l'aide et des allocations sociales. L'article
8 institue un appel à cette commission de toute décision du
ministre rendue en vertu de la Loi des allocations scolaires; l'article 3 du
projet donne compétence à cette commission de les entendre.
L'article 6 prévoit que les deniers requis pour la mise en
application de la Loi d'aide sociale seront pris, pour l'exercice financier en
cours, à même les sommes votées pour la mise en application
des lois sociales qui seront remplacées par la Loi de l'aide sociale;
les deniers additionnels qui seront requis pendant l'exercice en cours pourront
être pris à même le fonds consolidé du revenu.
L'article 7 règle l'entrée en vigueur des dispositions de la Loi
de l'aide sociale.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à une prochaine
séance ou à une séance subséquente. L'honorable
ministre du Revenu propose la première lecture de la Loi modifiant la
loi des licences.
Licences
M. TETLEY: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter le
projet de loi 34. L'article premier de ce projet abroge un article qui dispense
de l'obligation d'avoir une licence, les personnes qui tiennent un lieu
d'amusement dans une municipalité de moins de 1,000 habitants ou dans
une salle servant à des fins éducatives ou religieuses.
L'article 2 du projet autorise le gouvernement à prévoir
les cas où une licence ne sera pas requise pour un lieu d'amusement
servant à des fins patriotiques, agricoles, religieuses charitables,
artistiques ou éducatives.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
L'honorable ministre du Travail propose la première lecture de la
Loi modifiant la code du travail.
Code du travail
M. LAPORTE: M. le Président, en 1969, une modification au code du
travail a fait disparaître légalement les associations reconnues
mais non
accréditées. Le législateur avait voulu frapper les
associations de boutique. Malheureusement, chose non prévue à
l'époque, on a assassiné sans le vouloir deux associations
représentatives, celle de l'Hydro-Québec et celle de la ville de
Montréal quant aux ingénieurs et aux cadres. Il n'avait jamais
été prévu de les faire disparaître. Comme cela
crée une situation extrêmement difficile et annihile des droits
acquis, nous amendons la loi pour lui faire dire que les associations
syndicales de l'Hydro-Québec et de la ville de Montréal qui
existaient avant le 2 août 1969 continuent d'exister légalement et
pourront recevoir l'accréditation.
UNE VOIX: Homicide involontaire.
M. LAPORTE: Homicide involontaire, il n'y a pas eu « manslaughter
».
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
M. TETLEY: M. le Président, au sujet du bill no 34, comme
l'honorable ministre de la Justice doit quitter la province ce soir, ce bill
pourrait-il être présenté aujourd'hui à la
même séance?
M. BERTRAND: A cause du festival « pop »? A cause des liens
entre ce projet de loi et le festival « pop »?
M. TETLEY: Le festival « pop », oui, c'est exactement
ça, M. le chef de l'Opposition. Le ministre de la Justice s'y
intéresse beaucoup, le ministre de la Santé et d'autres
ministères aussi.
UNE VOIX: Les Affaires culturelles.
M. TETLEY: Non. Apparemment, cela n'a pas d'intérêt pour ce
ministère.
M. LE PRESIDENT: Cette motion afin d'étudier le projet de loi no
34 à la même séance est-elle adoptée?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Déclarations ministérielles.
Enseignants sans emploi
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'ai le plaisir d'annoncer
â cette Chambre la formation d'une mission spéciale
créée par le ministre de l'Education et chargée de cerner
les dimensions exactes du problème touchant les enseignants sans
emploi.
J'ai confié â M. Huot, de notre service des relations de
travail, la mission de se rendre à Montréal aujourd'hui
même, accompagné de membres du Service provincial de placement des
étudiants, pour délimiter exactement le problème des
enseignants sans emploi. Au cours de la dernière semaine, nous avons
rencontré les représentants de la Fédération des
enseignants de l'île de Montréal et nous croyons qu'avec cette
mission il nous sera possible de cerner exactement les dimensions du
problème et de prendre les mesures appropriées par après
pour nous assurer que ces enseignants ne demeurent pas sans emploi. Nous avons
invité, pour faire partie de notre mission, des représentants de
la Corporation des enseignants du Québec et de la
Fédération des commissions scolaires, qui se joindront à
M. Huot, et ils seront à Montréal aujourd'hui même.
M. CARDINAL: Nous sommes heureux, nous de l'Opposition officielle, de ce
geste du ministre. La semaine dernière, si je ne me trompe, il y a eu
une question â ce sujet-là et, à ce moment-là, le
ministre ne semblait pas croire qu'il y avait un problème réel,
d'après la réponse qu'il a donnée. Le geste qu'il pose
aujourd'hui vient corriger non pas la situation, mais son opinion à ce
moment-là, et on ne peut qu'en être heureux. Est-ce qu'on peut
demander au ministre s'il pourrait, d'ici la fin des travaux de cette Chambre,
déposer les noms des personnes qui feront partie de cette commission
d'étude et nous dire â quel moment son mandat devrait normalement
se terminer?
M. SAINT-PIERRE: Avec plaisir, je le ferai.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Nous approuvons également la déclaration
ministérielle du ministre de l'Education, en espérant que ladite
commission ne se contentera pas de cerner le problème actuel, mais aussi
toutes causes à la base pour qu'une pareille situation ne se
représente pas â chaque fin d'année scolaire, alors que des
étudiants de la formation des maîtres arrivent sur le
marché du travail.
Je souhaite que cette commission ait un mandat un peu plus vaste, quitte
à allonger la période de son travail, un mandat qui, étant
plus vaste, pourrait porter beaucoup plus de fruits.
M. LE PRESIDENT: Dépôt de documents.
Comptes publics
M. BOURASSA: Je dépose un exemplaire des comptes publics pour
l'année 68/69. Par inadvertance, cela n'avait pas été fait
par l'ancien ministre des Finances.
Commissaires à la régie interne
M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur de déposer copie de
l'arrêté en conseil nommant trois députés, membres
du Conseil exécutif, commissaires de la régie interne de
l'Assemblée nationale.
Rapport de l'Editeur du Québec
M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur de déposer le rapport de
l'Editeur officiel du Québec indiquant le nombre d'exemplaires des
statuts de chaque session imprimés ou distribués depuis la
dernière session, des ministères, corps administratifs, officiers
et personnes à qui ils ont été distribués, le
nombre d'exemplaires livrés à chacun d'eux, l'autorisation en
vertu de laquelle la livraison a été faite et le nombre
d'exemplaires des statuts de chaque session qui restent alors en sa
possession.
Anniversaires
M. LAPORTE: M. le Président, avant que vous ne passiez à
la période des questions des députés, cette Chambre me
permettrait peut-être de souligner un anniversaire. Le 14 Juillet
était déjà une date chargée d'histoire. Pour nous,
Québécois, un autre événement lui donne en quelque
sorte un sens nouveau, puisque c'est l'anniversaire de naissance du chef du
Parti libéral du Québec, du premier ministre de cet immense coin
de terre canadien qui nous est particulièrement cher, le
Québec.
L'anniversaire que nous célébrons aujourd'hui nous invite,
qui que nous soyons, à faire une pause pour rendre hommage à
celui qui assuma, à une heure particulièrement difficile, les
destinées de sa province et du peuple qui l'habite.
Un journaliste, récemment retourné à un journal
montréalais, coiffait sa chronique de ce ma- tin du titre: « Bonne
fête, vieux pays! » saluant ainsi nos amis français dont
c'est la fête nationale. Vive la France! Sans doute, mais avec combien
plus de raison pouvons-nous nous écrier: Salut, jeune Québec!
Salut Québécois, peuple fier, ambitieux, qui travaille ferme
à se donner les Instruments de son épanouissement! Salut à
son premier ministre qui est aujourd'hui l'expression de toute cette
ambition!
Certains ont affirmé, et j'en suis, que c'était
peut-être le Parlement de la dernière chance pour la
société que nous avons connue depuis 1867. Si nous croyons que la
situation est telle, nous ne pouvons que souhaiter que le premier ministre
puisse relever le défi qu'il a proposé aux
Québécois. Il a le droit de pouvoir compter sur l'appui critique,
si l'on veut, de la totalité des Québécois.
Nous souhaitons au premier ministre que le soin qu'il a mis à
préparer sa carrière politique, que sa jeunesse qui correspond
aux espoirs d'une grande partie de notre population, que l'ampleur du mandat
qu'il a reçu des citoyens lui permettent, sans délai, de
réaliser le plan de travail qu'il proposait récemment à
ses concitoyens: premièrement, procéder à la mise en ordre
des affaires de l'Etat et, deuxièmement, faire en sorte que notre
société québécoise devienne authentiquement et
rigoureusement réformiste.
Le défi qui est le sien, c'est en somme de prouver que le
Québec est capable de se hausser au niveau des tâches des
années 1970, qu'il peut faire donner à l'expérience
canadienne sa véritable mesure, de sorte qu'elle procure au peuple
canadien-français et à tous les citoyens en même temps
l'épanouissement culturel et la richesse économique. Son
défi, c'est aussi de jeter un pont entre les générations
et d'amener tous les Québécois, quels que soient leur âge
et leur préparation, à participer en commun à la
préparation d'un avenir de qualité et à en retirer,
chacun, une mesure complète de fruits.
Le chef du Parti libéral du Québec peut compter sur
l'appui non pas inconditionnel cette étape de notre histoire est,
j'ose l'espérer, définitivement révolue mais sur
l'appui lucide et volontaire de tous les membres libéraux de
l'Assemblée nationale. J'en suis sûr, il peut aussi tabler sur la
collaboration de tous les députés dans cette Chambre.
Le premier ministre est à l'aube d'une carrière
prometteuse pour les Québécois. Nous profitons avec joie de
l'occasion que nous propose son anniversaire pour lui présenter nos
félicitations, nos voeux et notre espoir.
A sa femme, à ses enfants dont l'un, François, nous fait
l'honneur et le plaisir de nous
visiter ce matin, nos remerciements et toute notre amitié.
M. BERTRAND: M. le Président, je suis très heureux de
joindre ma voix à celle du leader parlementaire du gouvernement pour
exprimer, au nom de tous mes collègues de l'Opposition, nos meilleurs
voeux de bonne fête, de bonne santé, de bon courage au premier
ministre actuel.
Même si son anniversaire tombe le jour de la prise de la Bastille,
qui a marqué un événement important pour la nation
française, en même temps que le signe d'une révolution, aux
thèmes de liberté, fraternité, égalité, on
ne saurait dire que le premier ministre est un révolutionnaire. C'est un
homme calme, c'est un homme pondéré, et je lui souhaite, quant
à moi, en cet anniversaire de naissance, des voeux de bonne
santé.
Je sais combien la tâche qui lui a été
dévolue par son parti, d'abord, et par le peuple du Québec, est
lourde, combien elle est exigeante. Celui qui détient ou qui exerce ces
fonctions personnifie, aux yeux des Québécois, les espoirs, les
inquiétudes de notre peuple.
On lui en demande beaucoup. Je sais qu'il est courageux. Sa jeunesse
l'aide énormément. Il peut compter sur l'affection d'une famille
qui l'entoure et avec qui, j'espère, il pourra trouver au cours de la
journée quelques moments intimes pour se faire souhaiter bonne
fête à la mode familiale. On pourra peut-être lui donner la
bascule. M. le Président, c'est donc avec infiniment de plaisir que je
lui offre mes voeux de bonheur, de santé et de succès.
M. SAMSON: M. le Président, il est extrêmement difficile
d'ajouter à ce qu'ont dit le leader du gouvernement et le chef de
l'Opposition officielle, tellement ils ont expliqué ce qu'ils ressentent
en ce jour. Nous aimerions, quand même, de ce coin-ci de la Chambre,
adresser nos voeux de bonheur au premier ministre à l'occasion de son
anniversaire, ainsi que nos félicitations. Nous aimerions souligner
qu'une journée comme aujourd'hui qui est l'anniversaire du 14 juillet,
est évidemment un grand jour. Le 14 juillet signifie, pour les
Français, la prise de la Bastille et pour notre premier ministre, il ne
signifie peut-être pas cette journée même, mais la prise du
pouvoir il n'y a pas tellement longtemps. Il semble donc qu'on ait pris quelque
chose d'important, soit en France ou au Québec.
M. le Président, lorsque je suis arrivé en cette Chambre,
le premier ministre et moi avions un an de différence. Aujourd'hui, il
vient de vieillir d'un an et comme mon anniversaire n'est pas la même
journée que le sien, je suis resté au même âge. Cela
me donne un peu l'illusion que j'ai rajeuni d'un an ce matin à ses
dépens.
De toute façon, nous lui souhaitons beaucoup de bonheur. Nous lui
souhaitons pas de garder le pouvoir trop longtemps, mais nous lui souhaitons
quand même de demeurer jeune très, très longtemps.
M. LAURIN: M. le Président, il est facile et agréable de
souhaiter un joyeux anniversaire et d'offrir nos meilleurs voeux à un
homme qui, à 36 ans, accède au poste suprême de premier
ministre du Québec. Dirons-nous que les fées se sont
penchées sur son berceau et ont présidé à son
destin? Ce serait là sous-estimer les qualités dont il a fait
montre tout au long de sa vie: son intelligence, son acharnement au travail,
son souci de compréhension des problèmes québécois,
son flair politique et son dynamisme. Son ascension au firmament politique a,
par ailleurs, été d'autant plus rapide qu'il a su chevaucher une
vague qui roulait autant de peurs que d'espoirs. Nous le félicitons de
son succès et nous comprenons qu'il en savoure les joies. Comme tous les
hommes politiques, il n'ignore pas cependant que la roche Tarpéienne est
toujours près du Capitole. Sa responsabilité est immense et nous
souhaitons pour le bien de tous les Québécois qu'il relève
victorieusement le défi qui est désormais le sien, comma vient de
l'exprimer le leader parlementaire.
Le Québec est en pleine mutation, il cherche son identité.
Il a soif de Justice, il aspire au progrès et à
l'épanouissement. Puisse notre jeune premier ministre le mener à
travers êcueils et orages à ce dont nous rêvons tous pour
lui!
M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais remercier très
sincèrement le leader parlementaire, de même que le chef de
l'Opposition officielle, le chef du Ralliement créditistes et le chef du
Parti québécois des propos très généreux,
très aimables qu'ils ont eus à mon endroit.
En fait, recevoir des éloges comme j'en reçois ici ce
matin, ce sera toujours tentant, à chaque année, de prolonger la
session au-delà du 14 juillet.
Le leader parlementaire de l'Opposition de même que les chefs des
oppositions ont exprimé d'une façon très claire que les
exigences d'un chef de gouvernement, à cette époque actuelle,
sont très grandes. Il y a quand même des avantages pour ceux qui
sont prêts ou qui veulent faire de l'action politique. Les incon-
vénients de la vie politique, c'est surtout la famille
immédiate qui en supporte les principaux, et les éloges qui m'ont
été faits ce matin, je les transmets très volontiers
à mon épouse qui m'a tellement appuyé depuis le
début de ma brève carrière politique.
Ainsi appuyé, avec l'aide de tous mes collègues, je suis
évidemment disposé à faire tout ce qu'on peut faire pour
assumer ces lourdes responsabilités. Le fait d'avoir son anniversaire le
14 juillet, la fête de la Révolution française, aurait pu
susciter quelque inquiétude chez certains au sujet de mon action future,
mais on sait, M. le Président, que dans ce grand pays ami auquel nous
sommes tellement attachés, là aussi l'esprit réformiste a
remplacé l'esprit révolutionnaire.
C'est dans cette optique et avec résolution que Je poursuivrai
les objectifs communs.
Encore une fois, M. le Président, je veux remercier tous mes
collègues de l'Assemblée nationale de leurs propos de ce
matin.
M. LAPORTE: M. le Président, le premier ministre me prie de
rappeler l'invitation qu'il a faite à tous les membres de cette Chambre
ainsi qu'à tous les membres de la tribune de la Presse de venir à
une courte réception à ses bureaux de premier ministre ici au
parlement, de six heures à sept heures ce soir.
M. LE PRESIDENT! Questions des députés. L'honorable
député de Bagot.
Bourses du gouvernement fédéral
M. CARDINAL: M. le Président, juste avant que les travaux de
cette Chambre ne débutent, j'ai donné avis de la question au
ministre; cependant c'est un avis bien court, et s'il n'est pas en mesure de
répondre immédiatement j'espère qu'il le fera à
brève échéance.
L'éducation est un des rares domaines où la juridiction du
Québec est claire, précise et exclusive.
Malgré cela, nous sommes informés par les journaux
présentement que, dans plusieurs circonscriptions du Québec, des
étudiants, au niveau universitaire, reçoivent des bourses
directement du Secrétaire d'Etat du fédéral par
l'intermédiaire, dans les comtés, des centres de main-d'oeuvre
canadiens.
Ainsi, le député de Maskinongé m'informeil
m'a remis à cet effet une coupure de journal que onze
étudiants de Louiseville, par exemple, bénéficient de
cours dans diverses universités du pays grâce à des bourses
directes de l'Etat fédéral. Il n'y a pas de doute que c'est une
ingérence. Ma question au ministre est la suivante: A-t-il un
commentaire à faire? Entend-il réagir? Est-il au courant de cela
et laissera-t-il passer cette nouvelle ingérence aussi évidente
du gouvernement fédéral en matière d'éducation?
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, le ministre a
déjà réagi, puisqu'il y a environ quinze jours j'ai fait
parvenir au Secrétaire d'Etat une lettre dans laquelle j'exprimais les
réserves que nous avions sur la formule suggérée par le
gouvernement fédéral. Je n'ai pas eu de réponse à
cette lettre. J'entendais, cette semaine, rappeler au Secrétaire d'Etat
l'essentiel de ma lettre et demander une réponse le plus tôt
possible. Il me fera plaisir de déposer les documents ensemble.
Le gouvernement fédéral, dans ce cas, il faut le
reconnaître, a tenté de résoudre un problème
particulier cette année au niveau des emplois d'été pour
les étudiants, ce qui a permis, à plusieurs d'entre eux, de
fréquenter un campus. Nous croyons, de ce côté-ci de la
Chambre, que l'éducation est un domaine qui relève exclusivement
des provinces et nous sommes déterminés à faire
prévaloir les droits du Québec dans ce domaine.
M. CARDINAL: Question subsidiaire, M. le Président. Le ministre
aurait-il l'obligeance, au moment où il aura ceci entre les mains
ce n'est pas un dépôt de documents que je demande de nous
donner la substance de ses écrits et de ceux qu'il reçoit du
fédéral à ce sujet?
M. SAINT-PIERRE: Avec plaisir.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.
Travaux mécanisés
M. VINCENT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation. Vu la situation très grave qui
existe à l'heure actuelle dans la province de Québec, dans tous
les comtés où des milliers de cultivateurs sont privés des
services de travaux mécanisés, le ministre de l'Agriculture
a-t-il l'intention ou a-t-il pris des mesures spéciales pour donner
satisfaction à ces milliers d'agriculteurs qui s'adressent non seulement
aux services du ministère, mais à tous les députés
qui siègent dans cette Chambre?
M. TOUPIN: M. le Président, la décision est prise au
niveau du ministère de l'Agriculture en ce qui concerne les travaux
mécanisés. Dans presque tous les comtés, actuellement, des
travaux s'exécutent. Plusieurs entrepreneurs ont eu des permis; un
certain nombre d'autres en ont fait la demande. Ils n'ont pas encore eu leurs
permis, mais ils les auront bientôt.
L'objectif que nous poursuivons au niveau des travaux
mécanisés, c'est de voir, comme le disait si bien le
député de Nicolet, à ce que les cultivateurs aient le plus
tôt possible et le plus efficacement possible, tous les services auxquels
ils ont droit. C'est l'objectif que nous visons.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Cadillac Moly Mines
M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question au
ministre du Travail. Je l'ai prévenu, ce matin, de ma question. Avec
votre permission, j'aimerais donner quelques détails afin de mieux
expliquer le cas. Il s'agit de la mine Cadillac Moly Mines dont nous avons pris
connaissance dernièrement. C'est un cas extrêmement
compliqué. A la demande de quelque 200 employés de la mine, je me
suis rendu, samedi soir dernier, les rencontrer. Il y a actuellement une ligne
de piquetage établie à l'entrée de cette mine qui a
été fermée le 25 juin dernier.
Deux problèmes se posent: le premier, c'est qu'il y a fermeture
de la mine sans préavis et, le deuxième, c'est que les
employés ne sont pas payés. Il y a eu aussi une lettre du
gérant de la mine disant que celle-ci devait fermer le 25 juin et qu'un
syndic serait nommé.
Il y a eu une lettre du syndic, la compagnie Guaranty Trust of Canada,
qui dit qu'à la Cadillac Moly Mines le syndic verra à garantir
les salaires des employés. Mais, il se trouve un autre problème,
c'est que la paye du 8 juin dernier a été faite par la compagnie
Anglo-American, qui est une autre compagnie et dont les chèques sont
revenus pour provision insuffisante, pour tous les employés de la
mine.
Actuellement il se produit ceci, et voilà la question que je veux
poser. C'est que les directeurs de la mine veulent en faire sortir tout le
matériel et, comme ces gens-là ne sont pas payés, c'est la
raison pour laquelle il y a ligne de piquetage actuellement; les gens ne
veulent pas laisser sortir le matériel avant d'être payés.
Je voudrais demander comme je sais que le ministre avait l'Intention de
convoquer les parties en cause si le ministère a aussi
l'intention d'intervenir afin que soient garantis les salaires, et ce à
brève échéance, parce que je pense que c'est très
urgent pour ces employés qui ont besoin de leur paye.
M. LAPORTE: M. le Président, merci au député, qui
m'a prévenu de sa question. Un représentant du ministère
devait entreprendre des rencontres demain; devant l'urgence évidente de
la situation, ces rencontres ont commencé ce matin. Notre
représentant est déjà sur place et je devrais avoir, au
cours de la journée, un premier rapport sur le déroulement des
pourparlers.
Il est évident qu'il s'agit d'une situation que le
ministère du Travail juge très grave. Malheureusement, il n'est
pas impossible que ce soit une situation de faillite. La situation nous
paraît complexe; au début on se demandait s'il s'agissait d'une
faillite et, s'il s'agissait d'une faillite, s'il était possible que
cette mine soit achetée par une concurrente; s'il s'agissait d'un
« lock-out » déguisé, si les prescriptions de la loi
et manifestement elles ne l'ont pas été avaient
été suivies. C'est le but des rencontres qui commencent ce matin,
pour tâcher de démêler cet écheveau. Le
ministère et le ministre du Travail feront l'impossible, dans les
circonstances, compte tenu de notre responsabilité juridique, pour
protéger les droits des ouvriers de cette mine.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
Dépenses électorales
M. LAURIN: Ma question s'adresse au premier ministre. Jusqu'ici,
près de 35 ou 36 projets de loi ont subi leur première lecture.
Le leader parlementaire nous a prévenu jeudi dernier que cela
complétait à peu près le menu législatif de la
présente session.
Plusieurs de ces projets de loi avaient été
préparés par l'ancien gouvernement et, parmi ces projets
laissés en plan, nous attendions avec une particulière impatience
le projet no 1, parrainé par l'honorable Bertrand, qui amorçait
le financement par l'Etat des partis politiques reconnus, afin de favoriser le
fonctionnement normal de la démocratie au Québec. Etant
donné que le remboursement des dépenses encourues lors de la
dernière élection aiderait grandement les partis politiques
reconnus à mieux assumer leurs responsabilités à l'endroit
de la population, le gouvernement a-t-il l'intention de dépo-
ser ce projet ou un projet analogue corrigé lors de la
présente session?
M. BOURASSA: M. le Président, jeudi matin il y aura une
réunion de la commission parlementaire. Elle devait avoir lieu la
semaine dernière, mais pour rendre service au chef du Parti
québécois on l'a remise à cette semaine. Il y a deux ou
trois semaines, j'avais annoncé, au programme des discussions de cette
commission, la réforme électorale impliquant la carte
électorale, tout le mode de scrutin et les problèmes qui sont
soulevés ce matin. Comme le député de Bourget fait partie
de cette commission parlementaire, je pense que c'est peut-être l'endroit
par excellence pour lui pour donner son point de vue.
M. LAURIN: L'objet du projet de loi de l'honorable M. Bertrand
était différent puisqu'il avait trait au remboursement des
dépenses de la dernière élection.
M. BOURASSA: Ceci pourra être discuté en
priorité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.
Grèves du bâtiment
M. DEMERS: Ma question s'adresse au ministre du Travail. Je n'ai
malheureusement pas eu le temps de le prévenir de ma question. C'est au
sujet de la grève générale du bâtiment dans la
région de la Mauricie, après un déclenchement de
grève dans la région du Saguenay. Le ministre a-t-il des
renseignements à ce sujet? Et peut-on dire que c'est sérieux, la
déclaration d'un monsieur Tremblay, d'Arvida ou des environs, selon
laquelle le gouvernement appuie des lèvres la demande de parité
de salaires de la province avec ceux de Montréal, alors qu'il ne fait
rien pour la réaliser, en fait?
M. LAPORTE: Je peux au moins me servir de mes lèvres pour donner
la réponse.
M. DEMERS: J'aimerais mieux que vous vous serviez de ce que vous avez un
peu plus haut que les lèvres.
M. LAPORTE : Les employés de la construction du Saguenay, au
nombre d'environ 2,000, ont décidé, en fin de semaine, de faire
la grève. Je ne connais pas la raison véritable de cet
arrêt de travail qui touche 2,000 des 60,000 ouvriers environ de la
construction. La raison que l'on in- voque c'est le désir des
grévistes de hâter la négociation d'une nouvelle entente
collective qui couvrirait toute la province. Les grévistes du Saguenay,
ayant pris un vote de grève et respecté toutes les prescriptions
de la loi, étaient légalement autorisés à faire la
grève. Que leur décision atteigne le but qu'ils lui ont
fixé, cela reste à voir.
Tel qu'entendu, les parties en cause étudient actuellement le
document que je leur ai fait remettre la semaine dernière, et tel
qu'entendu, la négociation reprendra la semaine prochaine. Je
réinvite tous les intéressés au calme et à une
patience pénible parfois mais absolument nécessaire dans les
circonstances. Nous faisons, c'est évident, l'impossible pour obtenir
une décision finale le plus tôt possible. Quant au chef ouvrier
qui aurait déclaré que nous appuyons seulement des lèvres
nos propositions, c'est tout simplement contraire aux faits et stupide.
Conflit chez les producteurs de lait
M. VINCENT: Question supplémentaire également au sujet
d'un conflit syndical. Est-ce que le ministre pourrait se renseigner au sujet
d'un « lock-out » qui aurait eu lieu la semaine dernière
à la Coopérative des producteurs de lait du marché de
Montréal, lequel « lock-out » a mis à pied 80
personnes. Le lait, présentement, doit être dirigé vers
Granby afin d'y être transformé.
M. LAPORTE: Le « lock-out » existe, en fait, depuis
plusieurs jours. Malheureusement, les négociations sont rompues. Comme
c'est son devoir, le ministère du Travail a quelqu'un qui tente
actuellement de ramener les deux parties à la table des
négociations. Je tiendrai cette Chambre au courant des
développements.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.
Assurance- maladie
M. CLOUTIER: Ma question s'adresse au ministre de la Santé. A la
suite de l'adoption du projet de loi no 8 par cette Chambre, est-ce que le
ministre a reçu de chacun des quatre groupes professionnels de la
santé une indication de leur intention de poursuivre et
d'accélérer les négociations afin d'en arriver à
une entente le plus tôt possible?
M. CASTONGUAY: J'ai reçu hier un télégramme du
président de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec nous exprimant
son désir de poursuivre les négociations aussi rapidement
possible car, dit-il dans son télégramme, le but de la
Fédération est d'établir pour les Québécois
le meilleur régime d'assurance-maladie possible.
Ce même télégramme a été
envoyé, comme en font foi les journaux, aux autres associations. Je dois
dire que je n'ai reçu des dentistes et des optométristes aucune
communication, sauf que j'ai reçu une communication
téléphonique des médecins spécialistes indiquant
également leur désir de poursuivre les discussions.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
Hôpitaux privés
M. CHARRON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du
Travail. La semaine dernière cette Chambre était heureuse
d'apprendre la solution du problème de l'Acton Rubber. J'aimerais
demander au ministre du Travail si dans un autre conflit il ne pourrait pas,
avec autant de célérité, atteindre autant de
succès, soit celui qui concerne le secteur privé des
hôpitaux.
Est-ce que le ministre pourrait informer cette Chambre sur l'état
actuel des négociations, ou sur l'impasse qui existe actuellement dans
les négociations sans nous répéter toutefois qu'il est
prêt à intervenir, puisque c'est son devoir? Puisque les
négociations sont dans une impasse, quelle idée nouvelle ou
quelle proposition nouvelle le gouvernement entend-il mettre de l'avant pour
que cette grève qui dure depuis sept semaines...
M. LAPORTE: M. le Président, puisque le député me
dicte ma réponse, je dirai simplement: Je n'ai rien à ajouter
à ce qui a déjà été dit.
M. CHARRON: Non, Je vous ai demandé bien
précisément, M. le Président, quelle idée nouvelle
vous aurez pour que les négociations sortent de l'impasse actuelle?
M. LAPORTE: La seule idée nouvelle qu'on peut espérer,
c'est que les gens négocient et trouvent une solution. Il n'y en a pas
d'autre.
M. CHARRON: Comment allez-vous les faire négocier?
M. LAPORTE: Je comprends que le député de Saint-Jacques a
des idées neuves sur tout. Qu'est-ce qu'il a à suggérer,
lui, à part des négociations entre les parties?
M. CHARRON: Ce n'est pas moi le ministre du Travail.
M. LAPORTE: Bon, heureusement, d'ailleurs.
M. CHARRON: Je demande au ministre du Travail quelle est son intention,
comment il va agir dans le présent conflit.
M. LAPORTE: Mon intention, c'est de laisser le ministre de la
Santé et le ministre de la Fonction publique, avec la collaboration des
hauts fonctionnaires du ministère du Travail, faire leur devoir, ce
qu'ils ont fait fort bien jusqu'ici en espérant une solution
prochaine.
M. CHARRON: Bien, ils ne l'ont pas fait fort bien jusqu'ici...
M. LAPORTE: Comment?
M. CHARRON: ... puisqu'il n'y a pas de négociations.
M. LAPORTE: Mais qu'est-ce que vous voulez? Est-ce que le
député suggère qu'on les rentre de force au travail? Il y
a actuellement, entre les parties, des divergences d'opinions. Et comme dans
toute grève, la partie patronale a des exigences et la partie syndicale
en a. Tant qu'elles n'ont pas réussi à les fondre et à
s'entendre, il y a grève.
Malheureusement, il y a actuellement grève. Il y a des questions
de principe sur lesquelles, jusqu'ici, ni l'une ni l'autre partie n'a voulu
céder. C'est pour cela qu'il y a un conflit.
M. CHARRON: Est-ce qu'on ne pourrait pas demander au ministre d'employer
le sous-ministre si fructueux dans le cas d'ActonVale à la même
table de négociations?
M. LAPORTE: Imaginez donc que nous y avions pensé avant vous. Il
est déjà dans le problème.
M. CHARRON: Merci.
UNE VOIX: Ce ne sont pas des idées nouvelles; ce sont encore les
mêmes idées.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bellechasse.
Travaux mécanisés
M. LOUBIER: M. le Président, tout à l'heure je voulais
poser une question additionnelle sur le
sujet soulevé par le député de Nicolet concernant
les subventions pour les heures de travaux mécanisés.
Evidemment, cette question se serait adressée mais
s'adresse actuellement également au ministre de l'Agriculture. Il
y a quelques semaines, il nous avait promis qu'il y verrait personnellement et
les travaux s'effectueraient d'une façon normale.
Or, pour corroborer l'inquiétude généralisée
dans le Québec, j'apprendrai au ministre de l'Agriculture que dans
Bellechasse et différents comtés avoisinants à peine 25%,
comparativement à 1969, des travaux mécanisés ont
été exécutés jusqu'à présent. Si le
ministre me le permet, est-ce qu'il a l'intention de respecter l'engagement
qu'il avait pris en Chambre à quelques reprises d'informer ses hauts
fonctionnaires qu'il n'y aurait pas de discrimination dans l'octroi des permis
à être accordés aux différents entrepreneurs et que
le champ serait libre pour donner satistaction à tous les
cultivateurs?
Est-ce qu'il a l'intention de respecter cet engagement qu'il avait pris
lors de la discussion des prévisions budgétaires de son
ministère?
M. TOUPIN: M. le Président, l'engagement que j'ai pris, je le
disais tantôt au député de Nicolet, c'est de donner dans le
plus bref délai tous les services dont les cultivateurs ont besoin et
auxquels ils ont droit en vertu de cette masure d'assistance.
Tout à l'heure, vous apportiez des statistiques. Nos
dernières constatations révèlent que les heures de travaux
mécanisés, dans l'ensemble de la province, cette année,
sont avantageusement comparables à celles exécutées l'an
dernier. Bien sûr, un certain nombre de problèmes se posent dans
certains comtés. Ces problèmes sont actuellement discutés
au niveau du ministère et des solutions sont à l'étude.
Elles s'appliqueront bientôt; on me disait que ce serait au cours de
cette semaine. Un certain nombre de ces problèmes concernent les
tracteurs ou les entrepreneurs, car il n'y a pas suffisamment d'entrepreneurs.
Alors, nous allons compléter l'ensemble et, bientôt, le tout
fonctionnera parfaitement bien.
M. LOUBIER: M. le Président, je suis persuadé que vous me
permettrez de dire au ministre qu'il tente, par des périphrases, de
noyer tout simplement la question.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. LOUBIER: Qu'il cesse donc de faire de la discrimination dans les
comtés!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Qu'il accorde des permis comme cela s'est fait depuis
1960!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais au député de
Bellechasse...
M. LOUBIER: Qu'il arrête son patronage éhonté dans
les comtés, c'est tout!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Qu'il prenne ses listes de 1965, s'il veut.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. VINCENT: Une question supplémentaire, M. le Président.
Le ministre de l'Agriculture dit que la situation se compare avantageusement,
présentement, avec ce qui existait l'an dernier. Nous lui avons
demandé, au cours des discussions sur le budget, de nous livrer,
justement, ces rapports. A ce moment-là, il nous a dit qu'il ne les
avait pas. Est-ce que le ministre pourrait, demain, nous apporter, en cette
Chambre, les tableaux des heures de travaux mécanisés
exécutées au 15 juin 1970 comparativement au 15 juin 1969? C'est
aussi simple que cela.
M. LAPORTE: M. le Président, on demande des documents par une
motion au feuilleton.
M. VINCENT: Pardon?
M. LAPORTE: C'est une motion pour production de documents.
M. VINCENT: Non, mais le ministre vient de nous dire qu'il peut nous
donner ce renseignement. Cela évitera une série de discussions
inutiles, d'avoir ces chiffres.
DES VOIX: Au feuilleton.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Plaines d'Abraham
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. La Commission des Champs de bataille aurait décidé de
changer le nom des Plaines d'Abraham en celui de parc George VI, ce qui
constitue une véritable provocation pour un grand nombre de
Québécois.
M. BOURASSA: C'est de juridiction fédérale.
M. LEGER: Ne conviendrait-il pas c'est là ma question, M.
le premier ministre que le gouvernement intervienne auprès de ses
amis d'Ottawa pour que cette décision soit rescindée afin de
protéger l'ordre public?
M. BOURASSA: M. le Président, un journal, ce matin,
démentait la nouvelle.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Shefford.
Service téléphonique et
stationnement
M. RUSSELL: M. le Président, deux questions s'adressant au
ministre des Travaux publics. Premièrement, est-ce qu'il pourrait dire
aux députés de cette Chambre où en est rendu le plan qui
avait été amorcé pour améliorer le service
téléphonique des députés, chose qui a
été modifiée un peu durant le mois de mai, mais qui,
depuis, semble demeurer en plan et ne pas bouger, donnant un mauvais service
aux députés?
Deuxièmement, où en est-on rendu avec les plans de
stationnement qui avaient été amorcés et qui devaient
être en marche vers le mois de juin? Depuis, la situation ne semble pas
s'améliorer, mais plutôt empirer. En effet, lorsque se
présentent des situations comme ce matin, les députés sont
obligés d'aller stationner dans les rues de la ville de Québec
car ils n'ont pas de stationnement ici.
M. TESSIER: M. le Président, sur le premier point, je dois dire
que j'ai eu justement, ce matin même, une entrevue avec un des
vice-présidents de Bell Canada pour faire une étude
complète du système téléphonique. Il semble bien
qu'il y a eu dans le passé et qu'il y a encore, actuellement, des abus
considérables dans le système téléphonique du
gouvernement. En effet, des gens qui n'ont aucune affaire dans l'administration
gouvernementale se servent constamment des lignes du Centrex qui sont
payées par les contribuables, à même leurs taxes, et qui
doivent servir à des fins administratives exclusivement.
En collaboration avec Bell Canada, le ministère des Travaux
publics est à faire une étude intensive de tout le réseau
téléphonique gouvernemental. D'ici peu, j'espère bien que
nous serons en mesure, non seulement de donner satisfaction à tous les
députés, aux fonctionnaires, à tous ceux qui font partie
de l'administration gouvernementale, mais que nous pourrons également
réaliser des économies substantielles en déchargeant le
réseau.
Pour ce qui est de la deuxième question, c'est-à-dire le
problème du stationnement, je vous avouerai franchement que c'est la
première plainte que je reçois d'un député de cette
Chambre. Je remercie le député de Shefford d'avoir attiré
mon attention sur cette question. Je crois, en effet, que chaque
député, quel que soit l'endroit où il siège en
cette Chambre, doit avoir un stationnement qui doit lui être
réservé à l'année. Ce qui est arrivé au
député de Shefford, je présume que cela a dû arriver
à plusieurs autres de nos collègues de cette Chambre. Alors, je
prends bonne note de cette remarque et je vais donner des instructions
immédiates aux fonctionnaires du ministère des Travaux publics de
voir à ce que, le plus rapidement possible, chaque député
ait sa place de stationnement.
M. RUSSELL: M. le Président, une question supplémentaire.
Est-ce que le ministre pourrait maintenant répondre à ma
première question, en ce qui concerne les téléphones des
députés? Je comprends qu'il y a une étude en cours, un
examen qui se fait des faits actuellement, mais cela ne règle pas la
question de l'installation des téléphones pour les
députés. S'il ne répond pas à la question, on va
tenir pour acquis que ceux qui font des irrégularités avec les
téléphones, ce sont les députés.
M. TESSIER: Pas du tout. Loin de moi cette pensée. Mais je crois
que la question des téléphones des députés fait
l'objet de l'ensemble de l'étude. J'espère bien que dans les
quelques jours qui suivront, nous serons en mesure d'apporter des correctifs
à ce sujet.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, une question
supplémentaire au ministre des Travaux publics. C'est bien beau, la
dissertation qu'il vient de nous faire sur l'organisation du
téléphone, à longue portée, à très
longue échéance, mais il reste qu'à l'heure actuelle nous
sommes privés, la plupart du temps, du service du
téléphone. En ce qui me concerne, on a changé ma ligne
trois fois et, actuellement, j'ai communication directe avec le bureau du
député des Trois-Rivières. Par conséquent,
j'aimerais que le ministre s'avise de voir à ce que la
société Bell s'occupe de nous donner des lignes
téléphoniques permanentes. On a changé trois fois ma ligne
en trois semaines; la semaine dernière, les gens de la
société Bell étaient encore à mon bureau et,
actuellement, je suis en communication avec le bureau du député
de Trois-Rivières.
En ce qui concerne le stationnement, je m'étonne que le ministre
ne se soit pas rendu compte que, depuis le début de cette session,
nous
éprouvons, tous les matins, du mal à trouver
stationnement, parce que déjà, au moment où j'arrive au
Parlement, soit à huit heures, huit heures et demie, les «
patroneux » du gouvernement ont pris nos places.
M. TESSIER: Il n'y a rien à ajouter à ce que j'ai
déclaré tout à l'heure.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.
Patronage dans Abitibi-Ouest
M. AUDET: M. le Président, je regrette d'avoir à poser
cette question au premier ministre, le jour de son anniversaire. De toute
façon, pour préciser ma question, les électeurs de mon
comté m'assurent que, pour obtenir du travail du ministère de la
Voirie, on doit s'adresser à des personnes qui n'ont aucun mandat du
peuple et qui sont rattachées aux directives du candidat défait
de ce comté. Ma question est celle-ci: Le premier ministre a-t-il
l'intention de faire les démarches nécessaires pour faire en
sorte que ses déclarations récentes soient respectées?
M. BOURASSA: Certainement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montcalm.
Pêcheurs contestataires
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, cette question s'adresse au
ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Je crois que le
ministre a été informé que, durant la fin de semaine, des
pêcheurs, dits contestataires, ont manifesté pour la nième
fois dans le Québec, laissant entendre entre autres que le ministre
avait refusé de les rencontrer. Est-ce que le ministre du Tourisme, de
la Chasse et de la Pêche a l'intention de rencontrer les
représentants de ce mouvement de contestation ou s'il entend faire une
déclaration ministérielle à cet effet?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, aucune association n'a
demandé à me rencontrer. On m'a écrit, cependant, et j'ai
répondu aux lettres qui m'ont été adressées. Mais,
de mon côté, j'ai pris sur moi de demander à un certain
groupe de contestataires de venir me rencontrer, soit à Montréal
ou à Québec, à leur convenance. L'étude des clubs
privés n'est pas encore terminée.
Clubs privés
M. LOUBIER: Question supplémentaire. Le ministre doit savoir,
avec son expérience, que certaines personnes communiquent encore avec
nous, et la raison pour laquelle les fédérations ou les
associations ne demandent pas de rencontre actuellement avec le ministre, c'est
que c'est le ministre lui-même qui avait indiqué, il y a trois
semaines, que, d'ici quelques semaines, le ministre ferait connaître sa
politique d'ensemble sur les clubs privés.
Or, les associations se disent: Nous ne sommes tout de même pas
pour aller rencontrer le ministre avant que ses orientations ne soient connues,
d'où, je pense, l'importance et l'urgence pour le ministre de les
définir le plus rapidement possible.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est ça. Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
Télégramme à M. Pompidou
M. JORON: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. C'est une habitude diplomatique, je crois, à l'occasion de la
fête nationale d'un Etat, que les chefs de gouvernements d'autres Etats
adressent au chef de l'Etat qui célèbre un tel anniversaire des
messages, télégrammes, lettres ou ainsi de suite.
Puisque c'est aujourd'hui la fête d'une nation avec laquelle la
nation québécoise a, pour le moins, des liens très
intimes, je voudrais savoir si le chef du gouvernement du Québec a
adressé un tel message au président de la République
française, et si oui quel en était le contenu?
M. BOURASSA: Oui, M. le Président, je pourrai faire parvenir la
copie du télégramme que j'ai envoyé à M.
Pompidou.
M. LE PRESIDENT: On m'informe que le ministre de la Santé a une
réponse à donner à une question verbale posée la
semaine dernière.
Hôpital d'Asbestos
M. CASTONGUAY: M. le Président, le député de
Richmond m'a posé une question relativement à l'hôpital
d'Asbestos, la semaine dernière. Le ministère a pris la
décision de fer-
mer cet hôpital pour deux raisons majeures. Ce sont les suivantes:
premièrement l'existence d'un danger sérieux de glissements de
terrain par suite de l'évolution de la mine de l'endroit.
Deuxièmement, les conditions impossibles de séjour des
patients, au point de vue de la salubrité, au point de vue de
l'hygiène, en raison de la proximité du travail minier qui
crée des conditions intolérables et inacceptables. Ce sont les
termes exacts des rapports que j'ai reçus des fonctionnaires des
services techniques du ministère.
Alors, entre créer des inconvénients à la
population, et ceci j'en conviens, ou risquer des vies humaines, nous avons
pris la seule décision qu'il était possible de prendre,
c'est-à-dire fermer l'institution.
En ce qui a trait aux solutions, si nous avions eu une solution
immédiate et permanente à annoncer, je l'aurais fait avec grand
plaisir. Tout ce que nous pouvons dire, c'est qu'à court terme
l'utilisation de la clinique de la compagnie Canadien Johns-Manville, qui
contient onze lits pour les patients et des facilités d'urgence, des
démarches se poursuivent pour que les médecins de l'endroit aient
accès à cette clinique.
Il y a également, je conviens qu'il y a une certaine distance,
l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska qui est à 39 milles, qui compte 313 lits
et qui peut accepter les cas d'autres régions comme celle-ci.
Quant à une solution plus permanente, nous en étudions une
présentement qui vise à donner à la population une gamme
de services de santé aussi complète et diversifiée que
possible, et dès que nous aurons terminé les discussions, les
pourparlers, nous annoncerons cette décision. On peut être
assuré que ce sera fait le plus rapidement possible.
Hôpital de Plessisville
En ce qui a trait, maintenant, à la question que le
député de Mégantic m'a adressée, relativement
à l'hôpital de Plessisville, qui est ou était sur le point
de fermer ses portes, je dois dire que cette institution, à la demande
même des religieuses, est en voie de fermer ses portes non pas depuis un
mois, mais depuis déjà un an et demi, sinon plus.
Alors, l'étude du cas de l'hôpital de Plessisville,
situé cette fois-ci à une dizaine de milles de l'Hôtel-Dieu
d'Arthabaska, est à l'étude, il s'inscrit dans la
régionalisation des services de santé dont j'ai
déjà parlé!
L'utilisation future de l'édifice fait aussi partie de la
question. Sans préjuger des recom- mandations qui pourront m'être
faites, je puis dire que nous allons étudier la possibilité que
cet édifice soit utilisé à des fins de santé et que
nous prévoyons, par d'autres mécanismes tels que des centres de
santé locaux, doter de services de diagnostic, de services d'urgence, la
population de telle sorte qu'elle ait l'éventail de services dont elle a
besoin. Présentement, l'hôpital de Plessisville est ouvert.
Merci.
M. LE PRESIDENT: Question supplémentaire?
M. SAMSON: Question supplémentaire, oui. Ceci concerne la
première réponse donnée par le ministre. On a compris que
l'hôpital d'Asbestos devait fermer par suite de la possibilité de
glissements de terrain qui proviendraient des travaux de la mine. Ma question
est la suivante: Le ministère a-t-il l'intention d'étudier, en
collaboration avec les autorités de la mine, la possibilité d'une
certaine responsabilité de la part de la mine?
M. CASTONGUAY: Nous sommes en pourparlers avec les autorités de
la mine.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice aurait une
réponse à une question verbale.
Cas d'infraction
M. CHOQUETTE: M. le Président, le vendredi 3 juillet, l'honorable
député de Maskinongé me posait une question au sujet de la
procédure adoptée dans le district de Sherbrooke relativement
à des infractions de délit de fuite ou de facultés
affaiblies.
Je me suis renseigné et il est exact, comme le laissait entendre
l'honorable député de Maskinongé, que les procureurs de la
couronne de ce district, plutôt que de procéder par voie de
déclaration sommaire de culpabilité, ont procédé
par voie d'acte d'accusation dans les cas, justement, de délit de fuite
et de facultés affaiblies.
L'on sait d'ailleurs qu'une procédure peut être
adoptée plutôt que l'autre. Ceci est à la discrétion
de la couronne. Cependant, je tiens à dire à l'honorable
député qu'à l'avenir nous emploierons la procédure
la moins lourde pour l'inculpé, excepté s'il y a des
circonstances spéciales. C'est-à-dire que nous procéderons
par voie de déclaration sommaire de culpabilité sous la partie 24
du code criminel, plutôt que par voie de mise en accusation,
excepté, évidemment, si les circonstances du cas nous
indiquent que la procédure par voie de mise en accusation devrait
être adoptée dans l'intérêt de la justice.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
Ordre du jour
M. LAPORTE: M. le Président, si vous me le permettiez, je ferais
savoir de quoi il retourne quelques députés étaient
peut-être absents vendredi pour le travail de la Chambre
d'aujourd'hui, de demain et des jours suivants. Nous allons d'abord, pour
quelques minutes, aller en comité des subsides afin de former le
comité des subsides pour envoyer à la salle 81-A les
crédits du ministère du Bien-Etre social et ensuite les
crédits du ministère de la Santé, ces travaux devant
commencer à deux heures.
Les présidents des commissions parlementaires qui ont
déjà siégé et qui n'ont pas encore fait rapport
à la Chambre en profiteront pour présenter leur rapport. Nous
reviendrons ensuite en Assemblée nationale et nous étudierons les
articles 3 et 4 de notre feuilleton d'aujourd'hui, troisième lecture des
bills 2 et 3. Ensuite, deuxièmement à l'ordre du jour, l'article
no 7 de notre feuilleton: Loi modifiant la loi des tribunaux judiciaires et le
code du travail.
Cet après-midi, aussitôt que nous aurons l'agrément
de cette Chambre, la Loi concernant les explosifs et la Loi modifiant la loi
des licences, aussitôt que ce sera prêt. Ensuite,
troisièmement, deux projets de loi: Loi modifiant le régime de
retraite des enseignants et Loi modifiant le régime de retraite des
fonctionnaires, deuxième lecture, pour pouvoir les envoyer à la
commission parlementaire des Finances. S'il n'y avait pas de débat de
deuxième lecture, on pourrait peut-être s'entendre pour les
déférer, si les chefs de partis le voulaient bien, en commission
puisque c'est assez technique.
Quatrièmement, article no 10 de notre feuilleton, Loi modifiant
le code de la route, Mme Kirkland-Casgrain. Cinquièmement, article 13 de
notre feuilleton, Loi autorisant des prêts à certains
pêcheurs commerciaux. Sixièmement, article no 5 de notre
feuilleton, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Article 11
de notre feuilleton, Loi concernant le parc Forillon et ses environs.
Huitièmement, article no 12, Loi concernant la Fédération
des producteurs d'oeufs de consommation du Québec.
Article 14 de notre feuilleton, Loi modifiant la loi du ministère
de la Santé et la loi du ministère de la Famille et du Bien-Etre
social, si les crédits sont terminés. Autrement nous passerions
à la Loi modifiant la Loi de l'Office du crédit industriel et aux
lois qui étaient en appendice aujourd'hui.
Alors, M. le Président, un.
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité des
subsides. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Lettre de recommandation
M. LOUBIER: M. le Président, avant que la motion ne soit
adoptée, je voudrais poser un grief dans le même sens que celui
posé l'an dernier, que l'on retrouve dans les Débats de
l'Assemblée nationale, le vendredi 13 juin 1969, aux pages 2819 et
suivantes. Cette question avait été soulevée par le
député d'Outremont et débutait comme suit: « J'ai un
grief qui me paraît important à soulever, même si c'est la
fin de la session. C'est au sujet des agissements d'un officier public, plus
particulièrement, etc., etc., » Et le député
d'Outremont signalait qu'il s'agissait, à la page 2820, d'un acte de
patronage éhonté où l'on a agi illégalement,
où on s'est servi de sa situation et d'influences politiques pour
obtenir des assurances garanties d'exécution et des assurances contre
l'incendie, etc., etc.
M. le Président, le député d'Outremont mentionnait
qu'il s'agissait pour lui d'un cas de conscience et qu'il se devait de soulever
un cas de patronage éhonté, à l'effet qu'un agent
d'assurance aurait reçu une recommandation de la part d'un
député ministériel. Avec le même esprit de
conscience, M. le Président, je porte le grief suivant en vertu d'une
lettre datée du 21 mai 1970, signée par le député
d'Outremont et ministre de la Justice. Elle se lit comme suit: « A qui de
droit. Il me fait plaisir de vous recommander Madame Lisa Reldan du studio de
l'Enfant charmant pour du travail professionnel photographique que vous
pourriez désirer pour vos enfants. Madame Reldan étant
résidante dans la ville de Mont-Royal, comté d'Outremont,
mérite de ce fait même votre appui. « La qualité de
son travail artistique que je connais est une autre raison qui m'incite
à vous recommander Mme Reldan. Bien à vous, Jérôme
Choquette, c.r., député d'Outremont et ministre de la Justice.
»
Et ce qu'il y a d'un peu déroutant, M. le Président, c'est
que cette lettre circule actuellement. Elle a été
rédigée pour un rayon d'action très large, en mettant
« à qui de droit » et elle s'adresse aux différentes
commissions scolaires.
Or, M. le Président, dans la région de Montréal,
cette personne, qui est persona grata, possède une lettre sur du papier
avec en-tête du cabinet du ministre de la Justice de la province de
Québec; elle tente d'obtenir des contrats auprès de toutes ces
commissions scolaires, se targuant d'avoir la bénédiction non
seulement de M. Untel, de M. Untel, mais, s'il vous plaît, du ministre de
la Justice de la province de Québec, celui qui est censé faire
respecter toutes les règles du « fair play », de la justice.
Eh bien, cette dame se présente pour obtenir des contrats sous pression.
C'est l'objet du grief que je formule ce matin, parce que je veux imiter en
ceci le député d'Outremont et, avec le même degré de
conscience et le même désir d'épurer les moeurs
électorales, je veux éviter, comme il le disait si
éloquemment, une recrudescence du patronage éhonté dans le
Québec.
M. CHOQUETTE: En réponse au grief formulé par le
député de Bellechasse, je tiens à dire que, durant la
campagne électorale, cette dame m'avait demandé de lui donner une
lettre de recommandation. Selon elle, c'était purement et simplement une
lettre de recommandation à usage local. En effet, elle dit, par
écrit: « M. Choquette, je suis en butte à la concurrence de
grandes sociétés photographiques venant de Toronto et de Winnipeg
». Je pourrai montrer la lettre à l'honorable
député. Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle
là-dedans.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un rôle qui vous serait revenu
après les élections.
M. CHOQUETTE: Un instant. Laissez-moi terminer ma réponse. Cette
personne m'a dit: M. Choquette, je donne du travail aux
Québécois. Des grandes firmes, qui ont des armées de
vendeurs sur là route, viennent chercher le travail au Québec et
vont faire développer leurs photographies en Ontario et en Alberta. J'ai
dit: Madame durant la campagne électorale, je ne peux pas. Je ne
voudrais pas vous donner de lettre d'introduction ou même de
recommandation parce qu'on pourrait penser que j'essaie, en somme, d'exercer
des pressions indues. Ce qui s'est produit, c'est que nous avons gagné
l'élection.
Après l'élection, avant même que j'ai
été nommé ministre, j'ai dit à ma
secrétaire: Donnez-lui une lettre de recommandation, une lettre
d'introduction simplement pour les gens d'Outremont, pour les gens de mon
comté, les gens de notre milieu auquel elle appartient. D'ailleurs,
c'est la raison pour laquelle j'ai dit, dans la lettre: Elle est de ville
Mont-Royal et, de ce fait même, elle mérite notre appui.
C'était donc à usage purement local. Or, cette dame, ayant
reçu cette lettre qui, d'ailleurs, n'a pas été
signée par moi, mais par ma secrétaire... Je ne dis pas que je
n'ai pas donné les instruction; j'ai donné des instructions.
Quant à la signature, ce n'est pas moi qui l'ai rédigée ou
qui en ai vu la forme définitive. Or, cette dame, ayant reçu la
lettre, l'a fait photocopier à plusieurs exemplaires et l'a
envoyée dans un grand nombre de commissions scolaires du Québec.
Lorsque j'ai appris ce fait, je lui ai téléphoné et lui ai
dit: Ecoutez, madame, il me semble que vous allez un peu loin.
M. BERTRAND: A qui de droit.
M. PAUL: Est-ce qu'elle est allée plus loin?
M. CHOQUETTE: Elle m'a dit: M. Choquette, je regrette de vous avoir mis
dans l'eau bouillante. Elle m'a promis, en somme, d'arrêter cette
pratique que je déplore moi-même. Mais il faut comprendre dans
quel esprit cette missive a été écrite. Ce n'était
pas pour exercer des pressions indues, sur aucun organisme public ou aucune
personne. C'était à des fins purement locales, puisque cette dame
me disait qu'elle était en butte à une concurrence de la part de
firmes qui, en somme, ne favorisent pas directement les intérêts
du Québec. J'admets que l'on peut affirmer que ma bonne foi a
été trompée.
M. LAPORTE: Le député a parlé deux fois sur sa
motion.
M. LOUBIER: Si l'on se réfère aux Débats du 13 juin
1969, le député d'Outremont avait parlé à trois
reprises sur le même sujet.
M. LAPORTE: Qui surveillait dans ce temps-là?
M. LOUBIER: Je pense que l'on peut m'accorder le même droit
aujourd'hui, puisque...
M. LE PRESIDENT: C'est le droit de réplique.
M. LOUBIER: ... c'est exactement dans les mêmes circonstances. Ce
que je trouve d'absolument candide de la part du député
d'Outremont, c'est qu'il a affirmé à cette Chambre que cette
lettre avait été rédigée et donnée avant
qu'il ne soit ministre. Or, cette lettre comme en-tête: « Cabinet
du ministre de la Justice. »
M. CHOQUETTE: Je n'ai pas dit ça. Je re-
grette. J'invoque le règlement. Le député me cite
mal. J'ai dit que j'ai donné des instructions à ma
secrétaire aussitôt après l'élection. Après
ça, je ne sais pas trop ce qui est arrivé. La date, c'est
évident, elle est sur la lettre.
M. LOUBIER: Deuxièmement, ce que je trouve un peu curieux, pour
ne pas dire alarmant, c'est que c'est le ministre de la Justice de la province,
qui est avocat, s'appuie sur du ouï-dire. Madame Unetelle lui aurait dit
que telle compagnie était obligée de faire développer ses
films en Ontario. Elle lui aurait dit que telle compagnie, etc..
Il avoue donc honnêtement qu'il s'agit d'un cas de
privilège, de patronage qu'il a ratifié d'une façon
solennelle...
M. CHOQUETTE: Allez vous coucher! Quand on a fait tout ce que vous avez
fait, on ne vient nous reprocher des insignifiances comme ça! Que le
grief vienne du député de Bellechasse, c'est ça qui est
scandalisant!
M. LOUBIER: M. le Président, si le député
d'Outremont a des accusations à porter à l'endroit du
député de Bellechasse, qu'il le fasse d'une façon aussi
sereine et d'une façon aussi sérieuse que je l'ai fait ce matin,
et à ce moment-là, nous pourrons étudier ces cas un
à un, et le député d'Outremont se rendra compte que la
séance ne sera pas longue.
M. LE PRESIDENT: Bon, je considère l'incident clos.
Est-ce que la motion est adoptée? Celle d'aller en
comité...
M. LAPORTE: Ce n'est pas une motion, c'est un grief.
M. BOURASSA: Il parle de la motion proposant d'aller en
comité...
M. LE PRESIDENT: La motion proposant d'aller en comité des
subsides.
M. LAPORTE: Ah, bon, d'accord! Le grief a été
manifestement jugé futile.
Comité des subsides
M. HARDY (président du comité plénier): A
l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président,...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre, messieurs! A l'ordre!
M. LAPORTE: ... est-ce que vous pourriez entendre les présidents
des commissions parlementaires qui ont terminé leur travail?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Affaires culturelles.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai l'honneur de faire part
à la Chambre que la commission du ministère des Affaires
culturelles a siégé et a adopté tous les articles des
crédits budgétaires pour l'année financière
70/71.
M. PAUL: M. le Président, après consultation avec le
député de Chicoutimi, nous sommes prêts, nous de
l'Opposition, à accepter ces crédits comme ayant
été analysés ici.
M. LAPORTE: Je vais vous en proposer quelques-uns tout à l'heure
qui n'ont pas encore été votés.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A moins que... M. LAPORTE: A moins que
non!
M. LE PRESIDENT (Hardy): Affaires intergouvernementales.
M. HARVEY (Chauveau): Le rapport... M. LAPORTE: Le rapport a
été fait.
M. HARVEY (Chauveau): ... a été présenté,
d'ailleurs, et nous avons à ce moment-là précisé
que tous les crédits avaient été adoptés sans
aucune restriction.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de
Trois-Rivières.
M. BACON: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport au
comité plénier de la Chambre que la commission de l'Industrie et
du Commerce a siégé et a adopté tous les postes
budgétaires à l'exception du poste budgétaire 1, des
crédits budgétaires pour l'année financière
70/71.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
à la Chambre que la commission de la présidence du Conseil
exécutif a siégé et a adopté tous les articles des
crédits budgétaires pour l'année financière
70/71.
M. LAPORTE: M. le Président, j'ai l'hon-
neur de faire motion pour que les rapports faits par les
présidents des commissions sur les Affaires culturelles, les Affaires
intergouvernementales, la présidence du Conseil, les Institutions
financières, Compagnies et Coopératives, l'Industrie et du
Commerce, le Travail et la Main-d'Oeuvre, soient acceptés et que ces
crédits soient ratifiés par la commission
plénière.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté? M. PAUL: Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour
que les crédits budgétaires du ministère de la Famille et
du Bien-Etre social, et immédiatement après, ceux du
ministère de la Santé, soient étudiés par les
commissions parlementaires concernées à la salle 81-A, à
compter de deux heures.
Deuxièmement, M. le Président, je voudrais, contrairement
au programme que nous avions annoncé vendredi, proposer que vous fassiez
rapport, et qu'ensuite la Chambre ajourne son travail jusqu'à deux
heures, car il y aura séance du conseil des ministres à midi
trente.
M. CARDINAL: Pardon, alors les projets de loi 2 et 3 ne reviennent que
cet après-midi?
M. LAPORTE: Oui, oui, nous commencerons immédiatement par les
projets de loi 2 et 3 cet après-midi.
M. CARDINAL: Il est possible que j'aie quelque retard cet
après-midi. Je pensais que cela viendrait ce matin.
On pourrait quand même, peut-être Je ne sais pas, moi
prendre le projet de loi sur les tribunaux judiciaires, je pense, et les
licences, etc. Cela ne prendra que cinq minutes.
M. LAPORTE: Alors, nous allons commen- cer, si le ministre et cette
Chambre le permettent, par le bill 20...
M. CARDINAL: D'accord.
M. LAPORTE: ...suivi de la loi sur les explosifs et de la loi de M.
Tetley. Ensuite, nous reviendrons à la troisième lecture des
bills 2 et 3.
M. CARDINAL: Je remercie le leader. Je suis entièrement d'accord
et je l'assure de ma collaboration.
M. LAPORTE: Les membres des autres oppositions sont d'accord
également? Alors, M. le Président, si vous vouliez faire rapport
à la Chambre.
M. HARDY (président du comité plénier): M. le
Président, le comité a adopté des résolutions et
demande la permission de siéger de nouveau.
M. LAVOIE (président): Quand siégera-t-11?
M. LAPORTE: Même séance.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire, pour le ministre des
Finances, propose que les résolutions soient maintenant lues et
agréées. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, est-ce que vous pourriez suspendre
nos travaux jusqu'à deux heures?
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Les travaux de la Chambre sont suspendus jusqu'à deux heures.
Reprise de la séance à 14 h 5
M. LE PRESIDENT; A l'ordre, messieurs!
Régimes de retraite
M. LAPORTE: Il semble que les représentants des trois
oppositions, l'Opposition officielle et les deux autres, ont aimablement
accepté de ne point faire de débat en deuxième lecture,
sur les projets de loi no 23 et no 24, Loi modifiant le régime de
retraite des enseignants et Loi modifiant le régime de retraite des
fonctionnaires, pour que la motion de deuxième lecture soit
adoptée et que l'on puisse immédiatement référer
ces deux projets de loi à la commission parlementaire sur les Finances,
qui siégerait illico à la Chambre 91-A. Le lieutenant-gouverneur,
mis au courant du contenu de ces deux bills, en recommande la votation en cette
Chambre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le
ministre des Finances, la deuxième lecture de la Loi modifiant le
régime de retraite des enseignants. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le
ministre des Finances, la deuxième lecture de la Loi modifiant le
régime de retraite des fonctionnaires. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le
ministre des Finances, que les bills no 23 et 24 soient soumis à la
commission permanente des Finances. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: Je remercie cette Chambre et vous prie, M. le
Président, d'appeler l'article 7.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 20, Loi modifiant la Loi des
tribunaux judiciaires et le code du travail.
L'honorable ministre de la Justice.
Tribunaux judiciaires et code du travail
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude
à la Chambre.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter vise à
corriger certaines anomalies à la Loi des tribunaux judiciaires.
Tout d'abord, la Loi des tribunaux judiciaires prévoit, dans sa
rédaction actuelle, que les honorables juges de la cour
Supérieure qui sont nommés dans, et pour le district de
Trois-Rivières, et dans, et pour le district de Nicolet, district voisin
du district de Trois-Rivières, ne sont pas tenus d'exercer leur
juridiction comme juges de la cour Supérieure dans d'autres districts
judiciaires que ceux de Trois-Rivières et de Nicolet.
La même situation prévaut pour les juges de la cour
Supérieure qui ont été nommés pour le district de
Saint-François, lesquels ne sont pas tenus d'exercer leur
autorité comme juges de la cour Supérieure dans d'autres
districts judiciaires que le district de Saint-François et le district
voisin de Bedford.
Or, suivant les représentations que nous avons reçues de
la part de l'honorable juge en chef de la cour Supérieure et de
l'honorable juge en chef adjoint de la cour Supérieure, ces
privilèges, qui ont été accordés aux honorables
juges de Trois-Rivières et de Saint-François, sont un obstacle
à la bonne administration de la justice puisqu'il est manifeste que,
parmi les 70 ou 75 juges de la cour Supérieure, ils sont les seuls
à posséder, en vertu de la loi actuelle, ce privilège de
s'isoler ou de se cantonner dans le district judiciaire où ils ont
été nommés. Les honorables juges en chef voudraient
et je pense que cette demande est tout à fait justifiée
pouvoir requérir les honorables juges de Trois-Rivières et de
Saint-François d'aller, à l'occasion, siéger dans d'autres
districts judiciaires où l'on a besoin de renfort. L'on sait que la
plupart des juges résident à Montréal et à
Québec et il est nécessaire, pour ces juges, de partir de leur
district pour aller dans les districts judiciaires les plus
éloignés de la province.
Ceci ne veut pas dire qu'il s'agisse de priver les districts judiciaires
de Trois-Rivières et de Saint-François des services constants des
juges qui y résident, parce que les justiciables de ces districts
judiciaires ont le droit eux aussi d'avoir une justice tout à fait
expéditive.
Alors, M. le Président, je considère que les juges de ces
districts judiciaires devraient être traités sur le même
pied que les autres juges de la cour Supérieure du Québec et
devraient ac-
cepter je pense qu'ils le feront de bonne grace d'aller
dans d'autres districts judiciaires du Québec pour y administrer la
justice où nous avons un besoin de juges pour que nos justiciables
connaissent une Justice à la fois expéditive et efficace.
La deuxième partie de ce bill traite du paiement des frais de
séjour des juges. Les juges sont appelés à voyager dans
des districts judiciaires autres que ceux dans lesquels ils ont
été nommés. Selon le texte actuel de la Loi des tribunaux
judiciaires, les juges auraient droit à une allocation de $30 par jour,
en plus de leurs frais de déplacement, de leurs frais de transport. Ce
montant est loin d'être exagéré et excessif, excepté
dans le cas suivant: S'il y a, dans un palais de justice rural, une chambre du
juge, des appartements réservés au juge visiteur. Dans ce
cas-là, il nous apparaît tout à fait normal que l'honorable
juge, qui, étant appelé à aller administrer la justice en
dehors du lieu de sa résidence, ne puisse recevoir à la fois le
bénéfice des appartements qui sont mis à la disposition du
juge visiteur et également recevoir l'allocation de $30 par jour, ce qui
serait exagéré dans les circonstances.
Par conséquent, il s'agit de rétablir la situation et de
ne pas consentir, aux honorables juges de la cour Supérieure,
malgré tout le respect que nous avons pour eux, les avantages indus qui
ne sont pas justifiables dans les circonstances. Puis-je ajouter un autre
argument, qui me paraît tout à fait juste? Le fait
d'arrêter, dans une loi, le montant exact des frais de voyage ou des
allocations de séjour qui peuvent être accordés à un
juge, me paraît une chose inopportune parce que nous connaissons un
accroissement constant du coût de la vie.
Arrêter ou fixer une fois pour toutes, les frais de séjour
ou allocations auxquels les juges peuvent avoir droit au cas où ils
visitent des districts judiciaires autres que le leur, c'est, en somme, nous
obliger à reviser constamment nos lois sur des points de détails,
des points que je qualifierais presque d'insignifiants.
On peut très bien appliquer aux juges de la cour
Supérieure les barèmes qui s'appliquent à nos
sous-ministres lorsqu'ils vont en voyage pour le compte du gouvernement en
dehors du lieu où siège le gouvernement.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous avons
l'intention de faire en sorte que les juges de la cour Supérieure,
lorsqu'ils iront rendre justice dans des districts autres que le leur propre,
recevront les mêmes allocations que celles qui sont données
à nos sous-ministres. Nous tiendrons compte également de cet
avantage que représente pour un juge visiteur le fait d'avoir sa chambre
au palais de justice.
Je termine en disant que je me suis interrogé sur la question de
savoir s'il était opportun de continuer cette coutume assez ancienne,
d'avoir à la disposition du juge, des appartements dans le palais de
justice. Cette coutume me paraissait désuète, elle me paraissait
comporter des complications administratives pour un avantage mineur. Je me suis
dit, également, qu'avec les hotels que nous avons aujourd'hui dans le
Québec, les juges pourraient bien aller à l'hôtel, comme
tout le monde, parce que les hôtels sont confortables et bien plus
qu'autrefois. Si on pouvait comprendre qu'autrefois, il fallait donner une
chambre au juge dans un palais de justice éloigné, aujourd'hui
telles ne sont sûrement pas les conditions qui s'appliquent.
Mais, on m'a donné une réponse assez satisfaisante
à cette question en me disant que dans certains endroits, il n'y a pas
beaucoup d'hôtels convenables. Il arrive fréquemment que les
plaideurs, les avocats, ou les parties se trouvent logés au même
hôtel que le juge et que, si le juge devait aller à l'hôtel,
cela créerait des complications pour l'administration de la justice,
puisque cela imposerait en quelque sorte, aux juges le fait de rencontrer les
justiciables et les avocats en dehors des séances de la cour. Ce fait
introduirait de l'équivoque, au moins de l'ambiguïté dans
l'administration de la justice.
Mais je dirai que personnellement, aussitôt que nous pourrons nous
libérer de l'obligation de tenir des appartements à la
disposition des juges dans nos palais de justice, je verrais très bien
que sur le plan administratif, il faudrait y procéder au plus vite parce
que cela libérerait les lieux, et puis on sait qu'il faut avoir une
ménagère enfin, tout ce que cela comporte de complications
inutiles.
Alors, M. le Président, ce projet de loi est donc
présenté dans le but de moderniser en quelque sorte notre Loi des
tribunaux judiciaires et la mettre réellement au point. Elle est faite
dans le but de mettre tous les juges de la cour Supérieure sur un pied
d'égalité.
Elle est faite pour permettre la revision, lorsque cela s'imposera, des
allocations de séjour, parce que, si le coût de la vie devait
augmenter, il est évident que, à ce moment-la, nous nous
empresserions de donner à nos juges une allocation suffisante pour leur
permettre de défrayer le coût réel de leur séjour
dans d'autres districts judiciaires. Je tiens à dire, en terminant, que
le projet reçoit l'approbation des honorables juges en chef de la cour
Supérieure, com-
me je le disais tout à l'heure, et je m'assieds en attendant les
observations de nos honorables collègues.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: La partie de cette loi qui traite des
rémunérations ou des remboursements de dépenses à
payer aux différents juges de nos tribunaux ne souffre pas de
commentaire. Je crois qu'il s'agit d'une politique administrative de bon aloi
et d'amendements qui s'imposaient, afin que nos juges puissent avoir au moins
le même traitement que nos sous-ministres, lorsqu'ils sortent à
l'extérieur.
Je trouve cependant étrange et cela me frappe la
faiblesse de résistance du ministre de la Justice, à la suite des
représentations qui lui furent faites tant par l'honorable juge en chef
de la cour Supérieure, l'honorable juge Dorion, que par celles qui ont
pu lui être faites par le juge en chef associé, le juge Challies.
Je sais que ses prédécesseurs ont reçu les mêmes
représentations. Mon prédécesseur immédiat,
l'honorable chef de l'Opposition, avait eu ces représentations de
même que certains ministres de la Justice sous l'administration Le
sage.
Lorsqu'il s'agit d'amender une loi, c'est pour rendre plus efficace
l'administration de la justice. Je ne me hasarderai pas à discuter de la
situation qui puisse exister dans les districts de Sherbrooke et de Bedford. Je
voudrais cependant saisir cette occasion pour protester contre cet amendement
à la loi qui affecte grandement nos juges de la cour Supérieure
dans le district des Trois-Rivières. Ce n'est pas pour rien que les
législateurs de l'époque dont l'honorable René
Hamel, qui était ministre de la Justice et député de
Saint-Maurice en même temps que procureur général
c'est aujourd'hui le juge Hamel avaient abondé dans le même
sens en faisant inscrire dans la loi cette exception en faveur du
troisième juge de la cour supérieure qui était
nommé, afin que le juge du district de Trois-Rivières demeure,
comme il l'a toujours été, à l'entière disposition
des justiciables.
Quand on sait, M. le Président, l'encombrement des rôles de
la cour Supérieure à Trois-Rivières, en tenant compte de
la longueur de certaines causes qui ont paralysé littéralement
les activités judiciaires dans ce district, il faut lever son chapeau et
respecter toute la compétence, l'esprit de travail, à des heures
même indues, de nos juges de la cour Supérieure. Ils n'ont rien
négligé pour mettre à jour les rôles de la cour
Supérieure de ce district, tout en ne refusant jamais c'est
là, M. le Président, que c'est important de se rendre aux
invitations qui pouvaient leur être faites par le juge en chef de la cour
Supérieure de Québec, l'honorable juge Dorion, d'aller
siéger à l'extérieur de Trois-Rivières.
Il arrivait, cependant, que l'on s'échangeât du temps ou
des semaines d'exercice. D'un autre côté ce n'est un secret
pour personne, non plus lorsque certains juges venaient siéger
ici à Québec non pas que je veuille blâmer
l'attitude de nos juges de la cour Supérieure; c'est naturel, c'est
l'humain il arrivait que, devant une cause contestée, ils se
trouvaient une raison, assez souvent, pour ne pas entendre cette cause et que
c'était un juge visiteur de Trois-Rivières qui épousait
ces causes qui se prolongeaient assez souvent durant deux ou trois semaines
d'exercice.
Je crois, M. le Président, que cet amendement à la loi se
serait imposé si, par hasard, l'administration de la justice avait
été défaillante dans le district de Trois-Rivières
ou si nos juges résidents, les honorables juges Marchand, Laroche et
Crête, avaient refusé d'aller siéger à
l'extérieur du district de Trois-Rivières. Je soumets
respectueusement que ces trois juges ne se sont jamais défilés
devant les invitations qui leur furent faites par le juge en chef de la cour
Supérieure de Québec, l'honorable juge Dorion, d'aller
siéger là où leurs compétences pouvaient être
utilisées ou leurs services requis.
Au lieu d'amender la loi dans le sens que l'amende ce projet de loi, on
aurait dû en profiter pour créer de nouveaux districts judiciaires
avec un certain nombre de juges attachés à des districts
réunis, comme, par exemple, Saint-Maurice, Nicolet,
Trois-Rivières, Arthabaska, et peut-être même Richelieu, et
de là assigner un certain nombre de juges qui auraient fait la rotation
dans ce grand district ou dans ce collège de districts judiciaires. Ceci
aurait permis une efficacité administrative encore plus grande que celle
que nous avons jusqu'ici connue. Pourquoi s'arrêter à faire
disparaître, dans le but d'améliorer, ce qui n'améliorera
aucunement, au contraire. Nous allons créer, encore probablement, un
déséquilibre dans le district judiciaire de
Trois-Rivières, déséquilibre qu'on a pu faire
disparaître grâce à l'esprit de travail, comme je le disais
tout à l'heure, grâce à la coopération des avocats
locaux et de l'extérieur qui n'ont jamais hésité un seul
instant à siéger jusqu'à des heures indues pout
tâcher de débarrasser ou de déblayer les rôles de la
cour Supérieure.
Qu'apportera cet amendement? Il privera sû-
rement, d'abord, le district judiciaire de Trois-Rivières d'une
facilité de justice qu'il avait connue jusqu'ici. Je souhaite
sincèrement que cette disponibilité aux voyages, cette
restriction que l'on a inscrite dans la loi, à l'article 27, ne
créera pas un statut tout à fait extraordinaire qui aurait pour
effet de congestionner encore davantage le rôle de la cour
Supérieure pour ce district.
Il peut arriver, M. le Président, que, là où il y a
réellement des rôles bien encombrés, deux juges de la cour
Supérieure soient invités à aller siéger en dehors
du district de Trois-Rivières, ce qui sera au détriment des
justiciables du district de Trois-Rivières. Et il ne faudrait pas que
cette liberté que l'on donne, et qui satisfera aux désirs depuis
longtemps rêvés par les honorables juges Challies et Dorion, ait
pour effet de paralyser l'administration de la justice dans le district de
Trois-Rivières, quand on sait que c'est un gros district judiciaire,
pour essayer de déblayer ou de libérer les rôles d'autres
districts judiciaires.
Je dis donc, M. le Président, que cet amendement à la loi
ne s'imposait pas.
Si on voulait réellement innover, rendre plus efficace, plus
expéditive, la justice devant nos tribunaux de juridiction
supérieure, le ministre aurait eu avantage à aller plus loin dans
cette politique que nous avions l'intention d'établir au
ministère, celle de créer des collèges de districts
judiciaires pour que la justice soit plus itinérante qu'elle ne l'est
actuellement.
Il arrive assez souvent que nos juges venant de l'extérieur,
parce qu'ils ont déjà à entendre des causes
commencées dans un autre district ou pour toutes autres raisons, soient
obligés de raccourcir énormément la durée normale
de session de la Cour supérieure. Et l'expérience en est
vécue dans le district judiciaire spécialement de Joliette, dans
le district judiciaire de Saint-Jérôme, dans le district
judiciaire de Richelieu, où l'on voit, à maintes reprises, des
sessions non complétées parce que les juges itinérants,
dans ces districts, ont accepté de présider ou de juger des
causes dans des districts, surtout dans les districts importants comme ceux de
Montréal et de Québec.
Cependant, il ne faut pas non plus que la justice soit
sédentaire. Et devant l'ensemble des mesures qu'apporte ce projet de
loi, je crois que nous devons en voter le principe, tout en regrettant
cependant amèrement cette réforme qui est apportée par le
premier principe du bill et que l'on retrouve à l'article 1. Je n'ai pas
l'intention de discuter l'article 1, mais je me demande si c'est là le
meilleur moyen d'expédier l'administration de la justi- ce.
Personnellement, je connais très bien, puisqu'il s'agit de mon district
judiciaire, les juges de la cour Supérieure de Trois-Rivières, et
je sais, après avoir ensuite administré le ministère de la
Justice, qu'ils ont toujours été disposés 1
coopérer avec leurs collègues de la cour Supérieure, et je
me demande si, sous le couvert d'une efficacité administrative, on ne va
pas satisfaire les ambitions personnelles de quelques-uns.
Je soumets donc que cette loi n'apportera absolument rien de nouveau
dans l'administration de la justice, dans l'ensemble du Québec. Elle ne
fait pas beaucoup plus que statuer sur l'administration de la justice dans les
frais de déplacement, de voyage, et ce n'est certainement pas avec une
mesure comme celle-là que le ministre de la Justice pourra se vanter
d'avoir apporté des réformes en profondeur au sein de son
ministère. Le connaissant comme un homme résistant, je m'explique
mal là candeur avec laquelle il est tombé aussi facilement devant
de pressantes invitations, qui n'étaient pas neuves au ministère
de la Justice puisqu'elles m'ont été faites, qu'elles ont
été faites à l'honorable chef de l'Opposition alors qu'il
était ministre de la Justice, et à d'autres
prédécesseurs. Et avant d'accepter une telle mesure, je crois que
l'honorable ministre de la Justice aurait dû consulter le Barreau, les
procureurs, les avocats et nos confrères des districts concernés
afin de connaître leur opinion.
Il aurait dû également consulter les juges affectés
par cette mesure, qui n'en savaient rien jusqu'à il y a quelques
jours.
Il y a peut-être eu dans cette loi un manque de communication qui,
je l'espère, n'aura pas pour effet d'élever des chapelles ou de
provoquer des conflits de caractère au détriment des justiciables
du Québec.
Je dis donc, M. le Président, que c'est une loi qui en fait
n'apporte rien, et comme ce n'est pas une loi qui cause du mal, nous allons
voter pour. Elle ne cause pas de mal parce que je sais que nos juges de la cour
Supérieure et je parle pour ceux du district de
Trois-Rivières redoubleront d'efforts afin de maintenir un
délai de quatre mois environ seulement alors que les sessions de
la cour Supérieure de Trois-Rivières ont déjà eu
jusqu'à 36 mois de retard ou de six mois au maximum entre le jour
de l'inscription et le jour de l'audition de la cause, tout en tenant compte
que les juges vont siéger continuellement à Trois-Rivières
et à Nicolet, et du fait qu'il y a deux sessions d'assises criminelles
qui parfois se prolongent durant quelques semaines. Je sais que nos juges,
fiers du résultat avec raison, d'ailleurs de leur tra-
vail et de la coopération des avocats auront à coeur de
maintenir une justice aussi expéditive que celle que l'on connaît
aujourd'hui dans le district de Trois-Rivières.
Je souhaite sincèrement que cette mesure ne viendra pas
créer une situation qui soit au préjudice de la bonne
administration dans le district judiciaire de Trois-Rivières sous
prétexte qu'on va l'amender ailleurs.
Pour essayer de corriger une situation, on en détériore
une excellente qui existe ailleurs.
Je soumets donc que cette loi n'aurait pas dû être
présentée et que le ministre de la Justice sera le premier,
à la suite des représentations qui lui seront faites, à
présenter un autre projet de loi dans le sens d'une réforme en
profondeur de l'administration de la justice au Québec. C'est ainsi que
la population pourra alors, et non pas par cette loi, retirer profit de
l'efficacité administrative du ministre actuel de la Justice.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. SAMSON: M. le Président, mes remarques sur ce projet de loi no
20 seront très brèves. D'abord, nous sommes d'accord en principe
avec ce bill à l'effet que les juges du district de
Trois-Rivières et de Saint-François de Bedford pourront, sur
demande, aller siéger dans d'autres districts judiciaires.
Il est bien évident qu'on ne nous propose pas ici une
réforme en profondeur de l'administration de la justice, ce que nous
aimerions voir dans les mois ou peut-être les années qui vont
suivre. Pour le moment, nous sommes d'accord là-dessus. Même plus,
nous aimerions, dans le cadre d'une réforme en profondeur de la justice,
voir un jour les honorables juges siéger plus souvent à
l'extérieur de leur district.
Les raisons qui nous font penser en ce sens sont que nous concevons
qu'il est parfois difficile pour certains juges de siéger uniquement
dans leur district judiciaire, considérant les nombreuses causes et
surtout certaines causes difficiles.
Quand un juge aura l'occasion d'être à l'extérieur
de son propre district, nous croyons qu'il lui sera plus facile d'administrer,
plus facile de porter des jugements dans certains cas.
Evidemment, cela est fait en vue d'apporter au Québec une
meilleure administration de la Justice et en vue de donner une meilleure chance
aux juges qui doivent siéger à l'extérieur. Pour toutes
ces raisons, nous sommes d'accord avec ce principe qui nous est amené
aujourd'hui. Nous sommes aussi d'accord avec l'article 2 qui prévoit que
les dépenses doivent être payées pour les voyages et ceci,
suivant les dispositions qui s'appliqueront dans les cas concernés.
Nous aimerions souligner que non seulement nous sommes d'accord avec le
bill présent, mais que, si nous avions, un jour, la possibilité
de voir les juges siéger dans toute la province de Québec
par un système, qui serait étudié à l'avance,
évidemment, de rotation quelconque qui permettrait à certains
juges de siéger dans plusieurs districts au lieu d'être toujours
attachés au même district nous serions heureux de voir une
réforme en ce sens. Evidemment, en deuxième lecture, nous
voterons pour ce bill, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, nous serons également en faveur
du principe de ce bill. Comme les deux autres partis d'opposition, j'aimerais
bien souligner que nous ne croyons pas que ce sont de petites réformes
comme celle-là, qui vont nous donner une administration de la justice
vraiment améliorée. Nous souhaitons que, dans les prochains mois,
cette Chambre se penche sur le problème de l'administration de la
justice et, en particulier, sur les problèmes de retards dans
l'administration de la justice.
A ce stade-ci, je comprends que le gouvernement veut régler un
problème de caractère particulier. Nous serons d'accord avec le
principe. Si les autres partis d'opposition sont d'accord, dans le but
d'accélérer les travaux de la Chambre, nous serions d'accord
aussi pour passer toutes les étapes le plus rapidement possible.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne voudrais pas allonger
inutilement le débat, vu l'accord qui a été donné
par tous les partis présents à la Chambre, mais l'honorable
député de Rouyn-Noranda, sans être avocat, a quand
même soulevé, à mon sens, un argument très fort en
faveur du principe de l'abolition des restrictions qui s'attachent aux
districts de Trois-Rivières et de Sherbrooke.
Pour la bonne administration de la justice, il est impérieux que
les juges ne soient pas
cantonnés à un seul district Judiciaire, avec un seul
Barreau. A ce moment-là, il se crée, en quelque sorte, une
mauvaise atmosphère, et des déformations. C'est pourquoi il est
utile, sur le plan de l'administration de la justice, que les juges se
déplacent.
Je dirai au député de Maskinongé il pourra
toujours le répéter aux juges de Trois-Rivières, desquels
il est assez proche, étant député de Maskinongé
que si nous voulons les envoyer à l'extérieur de leur
district, c'est parce que nous avons confiance en leurs qualités de
juristes. Nous ne voulons pas qu'ils limitent leurs talents au seul district de
Trois-Rivières. C'est dans cet esprit-là que le projet est
présenté. Ce n'est pas pour diminuer la qualité de
l'administration de la justice à Trois-Rivières ou dans le
district de Sherbrooke; c'est au contraire pour amener ce va-et-vient entre les
différents districts judiciaires, ce qui fera qu'à un moment
donné le niveau de l'administration de la justice
s'élèvera dans toute la province de Québec.
Je termine en remerciant les honorables députés qui ont
pris la parole. Ils ont raison de souligner la nécessité de
prévoir des mesures plus profondes que celle-ci pour augmenter le niveau
de notre justice au Québec. C'est ce à quoi nous allons nous
employer. Evidemment, pendant la courte session actuelle, il nous est
impossible de faire plus que d'apporter une loi comme celle-ci pour corriger
quelques anomalies.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée? Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LAPORTE: En comité?
M. BERTRAND: En comité.
M. LAPORTE: En comité, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (Président du comité plénier): Article
1.
M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas voulu ajouter aux
remarques de mon collègue, le député de Maskinongé,
quant à l'article 1.
J'imagine un peu la première visite que le ministre de la Justice
a reçue à son bureau. Il a reçu le juge en chef, M.
Dorion; il a reçu, également, M. Challies. Dès la
première entrevue, ces deux nobles gentilshommes, magistrats de haut
qualibre, en s'adressant au ministre de la Justice à l'époque
et cela a dû se répéter auparavant
demandaient d'abolir cette restriction qui existe non seulement pour le
district de Saint-François que l'on examine cela au point de vue
territorial et au point de vue de la population mais pour le district de
Bedford aussi, disant que les juges nommés dans ces districts doivent
d'abord que l'on note bien d'abord s'occuper des affaires
judiciaires desdits districts et, deuxièmement, répondre aux
demandes du juge en chef pour aller siéger en dehors.
Donc, dans mon district et le connaissant assez bien
jamais, de temps immémorial, on a eu de problème avec
l'administration de la justice. La justice a été bien rendue, les
causes sont entendues d'une manière accélérée. Tout
va bien. Mais, question de fierté, de prestige, messieurs les juges en
chef ont toujours été chatouilleux, parce qu'on avait, d'une
certaine manière, régionalisé l'administration de la
justice. Or, la meilleure manière de bien administrer la justice, c'est
d'en régionaliser son administration.
Si on n'avait qu'un juge dans le district, très bien, l'anomalie
que notait tantôt le député de Rouyn-Noranda existerait.
Les justiciables n'aiment pas à comparaître et les avocats
à plaider toujours devant le même juge, mais on n'a pas le
problème. Nous avions quatre juges. Il y avait une rotation. Si vous
plaidez toujours devant le même juge, il peut prendre en grippe un
avocat; l'avocat peut, dans ses relations avec le juge, a certains moments,
avoir fait des remarques qui ont pu le blesser. Il devient parfois
délicat de plaider toujours devant le même juge. Mais pas de
problème, quatre Juges.
Donc, on adopte un projet de loi sur la question du principe d'une
justice améliorée, administrativement plus rapide; personne ne
s'y oppose. Mais, est-ce bien de faire sauter cette réserve qui existait
dans la loi? Pas pour des petits districts, le district de
Saint-François comprend plusieurs comtés; le district de Bedford
comprend trois comtés, c'est le mien. Alors, chez nous, je pourrais
reprendre quasi mot à mot les remarques de mon collègue, le
député de Maskinongé. Administration de la justice bonne,
administration de la justice accélérée,
administration de la justice à la satisfaction de l'ensemble de
là population.
Qu'est-ce qu'on améliore par le projet de loi? Je vous le demande
bien. Tout simplement que, lors de là première entrevue de tout
nouveau ministre de la Justice avec les juges en chef, la même demande
est formulée. On est chatouilleux de son autorité, une
autorité qui n'a jamais été mise en question.
Dans les circonstances, M. le Président, aucun doute que
j'approuve les remarques du député de Maskinongé, à
l'effet que le député d'Outremont a été facilement
influençable. C'est probablement le juge Challies, quant à lui,
qui le lui a demandé. Il a répondu oui, habitant la ville; ce
n'est pas un défaut que d'habiter la ville, au contraire. Mais, les gens
du milieu, ayant pratiqué activement comme je l'ai fait, connaissant les
problèmes du milieu, sont unanimes à reconnaître que le
système que nous avions est meilleur, à plusieurs points de vue.
Je note ici l'Association des avocats de province qui a toujours appuyé
cette réserve. Pourquoi? Pour permettre une décentralisation des
nominations de juges. On a vécu à une époque où
seuls les avocats des grandes villes pouvaient être nommés
juges.
Seuls ils avaient la science consommée. Seuls ils étaient
dignes de rendre la justice. A l'époque, on l'appelait le Barreau rural,
cela avait un sens bucolique, cela nous rappelait Virgile, on appelle cela
aujourd'hui l'Association des avocats de province, et les avocats de province
demandent la régionalisation de l'administration de la justice.
Pourquoi? D'abord, pour une meilleure administration de la justice, une justice
davantage décentralisée, plus accessible au peuple, plus
rapide.
Les avocats ont en vue également, et c'est normal, que les
nominations de juges ne soient pas faites seulement des avocats de grandes
villes. Il y a d'excellents avocats dans les campagnes et ce n'est pas souffrir
d'un complexe d'infériorité, d'aucune manière, que de
soulever de tels problèmes. Cela a permis, dans notre district, à
des avocats de Rouville, de Sherbrooke, de Granby et d'ailleurs, de monter sur
le banc.
Le député d'Outremont n'est pas sensibilisé
à tous ces problèmes, c'est normal. Mais qu'il veuille
écouter la voix de ceux qui les connaissent, qui les ont vécus.
Je me rappelle qu'à ma première entrevue lui, il a
succombé à sa première entrevue avec le juge en chef, moi,
je n'ai pas succombé j'ai regardé le juge en riant et je
lui ai dit; Juge, est-ce que ça va améliorer la situation de la
justice? Il m'a dit: Well, we think. J'ai dit: Chez nous, la justice est
rapide, c'est trois ou quatre mois, alors qu'autrefois, avant que ça
n'existe, ça prenait des années. C'est un peu comme à la
cour Supérieure de Montréal où les causes prennent un an,
deux ans, trois ans avant d'être entendues. C'est cette règle que
l'on voudrait étendre dans nos districts. Je dis au député
de Rouyn-Noranda qu'on aurait pu en parler tous les deux avant. Il aurait fait
un autre discours que celui qu'il a prononcé sur l'article 1.
Nous ne nous opposons pas au principe, au contraire, d'une
réforme de notre système judiciaire. Je n'ai pas l'intention
d'entrer dans les détails. J'ai déjà parlé de la
création de tribunaux familiaux, de la reprise de notre juridiction,
même dans le domaine des cours Supérieures. Tout le domaine de
l'administration de la justice devrait relever du gouvernement du
Québec. La cour Supérieure, c'est une anomalie constitutionnelle.
N'entrant pas dans ces détails et dans ces réformes en
profondeur, le ministre de la Justice, probablement de bonne foi, a cru
corriger ou trouver une solution à un problème, problème
qui n'existe pas chez nous où l'autorité du juge en chef n'a
jamais éternise en doute, où les juges n'ont jamais refusé
d'aller siéger ailleurs. J'ai à l'esprit, entre autres cas, celui
du juge Veilleux, des districts de Saint-François et de Bedford, qui est
allé, à plusieurs reprises, siéger à
Montréal. Ils n'ont jamais refusé, pas plus qu'auparavant le juge
Desmarais, notre ancien collègue, le juge Fortin et le juge Cliche, qui
malheureusement est décédé, le juge Fortin, l'ancien
ministre du Travail. Il n'on jamais refusé d'aller siéger dans
d'autres districts pour permettre aux justiciables des autres districts de
faire entendre leur cause beaucoup plus rapidement.
Je regrette que le ministre ait posé cet acte que je qualifie
véritablement de faiblesse et de condamnation des attitudes de ses
prédécesseurs qui, tous sans exception, avaient dit au juge en
chef: quand nous ferons des réformes en profondeur de toute
l'administration de la justice, quand nous établirons la justice sur une
base beaucoup plus régionalisée et décentralisée,
nous pourrons y voir. Pour le moment, je n'ai pas de problème dans
l'administration de la justice des districts de Saint-François et de
Bedford, je n'ai pas de problème dans le district de
Trois-Rivières; quand on n'a pas de problème, on ne s'en
crée pas.
Je regrette que le député d'Outremont, ministre de la
Justice, ait aussi facilement succombé à la tentation de plaire
aux honorables juges en chef.
M. CHOQUETTE: M. le Président, les deux
plus ardents avocats du maintien de ces chasses gardées ou,
enfin, de ces districts judiciaires isolés du reste de l'administration
de la justice à l'échelle provinciale sont, évidemment,
l'honorable député de Missisquoi, chef de l'Opposition, et
l'honorable député de Maskinongé.
M. BERTRAND: M. le Président, je m'élève contre
l'utilisation de cette expression « chasses gardées ». S'il
y en a un qui sait combien, dans les districts de Bedford et de
Saint-François, l'accueil est ouvert et tous les avocats sont bien
reçus, c'est le député d'Outremont avec qui j'ai eu
l'honneur déjà de croiser le fer. Cela, il le sait.
M. CHOQUETTE; Oui.
M. BERTRAND: Il n'y a pas d'enclos autour de nos districts.
M. CHOQUETTE: Enfin, l'honorable chef de l'Opposition comprend
très bien ce que je veux dire. Maintenant, pour pousser la logique du
chef de l'Opposition et du député de Maskinongé
jusqu'à ses conclusions, pourquoi, alors, ne pas réclamer des
districts judiciaires fermés pour Hull et pour l'Abitibi? Pourquoi
chaque juge qui est nommé dans une région du Québec
n'exigerait-il pas que j'amende la Loi des tribunaux judiciaires en sens
inverse pour justement qu'il puisse se contenter de rester dans son district
judiciaire? Cela démontre jusqu'à quel point cette disposition de
la Loi des tribunaux judiciaires, que je demande d'abolir, est absurde. C'est
un relent du passé, un reste d'esprit de clocher qui habite encore le
chef de l'Opposition et le député de Maskinongé,
malgré toute l'estime que j'ai personnellement pour eux.
Alors, je pense qu'ils ont des vues plus larges que ça, qu'ils
vont surmonter, en somme, leur difficulté de s'extraire de leurs milieux
respectifs et qu'ils vont voir que, sur le plan de l'administration de la
justice, en général je parle pour le Québec
cette mesure est intéressante. Elle va amener des progrès
considérables dans l'administration de la justice, même dans les
districts des honorables députés qui ont parlé. En effet,
le fait d'abolir ces restrictions dans la Loi des tribunaux judiciaires nous
permettra d'envoyer dans leurs districts judiciaires respectifs, où ils
exercent naturellement leur profession, des juges de l'extérieur, ce qui
contribuera à l'accélération de l'administration de la
justice dans leurs districts judiciaires et qui amènera un sain
échange entre les différents districts judiciaires.
Ceci étant dit, je voudrais dire jusqu'à quel point j'ai
de l'estime personnellement pour les juges de Trois-Rivières et pour
ceux de Sherbrooke, car j'ai eu l'occasion de plaider de nombreuses causes
devant eux. Je voudrais, en somme, que les justiciables des autres districts
judiciaires du Québec puissent également profiter de leurs
connaissances juridiques.
M. PAUL: M. le Président, il est bien évident que notre
collègue de la Justice ne connaît absolument rien de la
mentalité des districts ruraux. Il se fait l'excellent avocat d'une
mauvaise cause. Ce n'est pas la première fois que nous le voyons plaider
une cause aussi vide que celle qu'il a plaidée aujourd'hui. Lorsqu'il
est venu, assez souvent, dans le district judiciaire des Trois-Rivières,
il a enrichi sa personnalité et ses connaissances juridiques. Je suis
sûr que sa fréquentation de notre district judiciaire a grandement
contribué à sa formation juridique et lui a permis, finalement,
de dépasser ses collègues du cabinet ou de son parti pour occuper
les hautes fonctions qu'il occupe aujourd'hui.
M. le Président, ce n'est pas par esprit de clocher que nous nous
élevons contre cette disposition de l'article 1 du projet de loi. Au
contraire, c'est parce qu'il n'apporte rien de constructif. Il n'y a absolument
rien qui va être amélioré dans l'administration de la
justice. Nous avions, au moins, quatre districts judiciaires où
l'efficacité administrative était reconnue;
Trois-Rivières, Bedford, Nicolet et Sherbrooke. Nous prenons le risque
de les plonger dans le même dédale de délais qui existe
dans les autres districts judiciaires.
Je dis donc, M. le Président, que c'est un affront à faire
aux honorables juges des cours Supérieures des susdits districts.
Ce n'est que par condescendance, par imprudence. Je sais, M. le
Président, que le ministre de la Justice regrette déjà
d'avoir parrainé un tel bill. Il se rend compte que c'est par imprudence
qu'il a accepté aussi facilement le mirage de progrès que lui
montraient les honorables juges de la cour Supérieure pour les districts
de Québec et de Trois-Rivières.
Nous disons donc, M. le Président, que ce n'est pas par esprit de
chasse gardée, au contraire, ce n'est pas non plus par esprit de
clocher, c'est par ce souci que nous avons de respecter la mentalité et
la connaissance du milieu que nous avons, nous, avocats du Barreau rural, des
districts ruraux... L'Association des avocats de province est en mesure de
juger la meilleure façon d'administrer la justice dans ces districts. Ce
n'est pas pour rien que l'honorable chef de
l'Opposition référait tout à l'heure à cette
attitude constante, renouvelée annuellement par une résolution
adoptée année après année par l'Association des
avocats de province, d'étendre comme je le disais tout à
l'heure, non pas dans un seul district Judiciaire, mais dans des districts
judiciaires régionalisés une compétence exclusive
à un certain nombre de juges qui pourraient voyager dans ces districts
judiciaires. Ainsi, nous assisterions à une véritable
réforme de la justice et non pas à une « réformette
» inutile comme celle qui nous est présentée par l'article
1 du projet de loi.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Oui, M. le Président, juste un petit mot avant que ce
soit adopté. On a fait mention, dans des interventions, de mon
intervention, justement. Je remarque qu'on a souligné que je ne suis pas
avocat, ce qui est vrai. Mais, d'un autre côté, je pense que,
malgré tout, c'est mon devoir de dire ce que je pense et ce que la
population de mon comté pense.
M. le Président, on a pris à témoin, dans les
interventions, les avocats satisfaits de certains districts dont nous avons
à parler aujourd'hui. Nous, de notre côté, nous ne
prendrons pas les avocats à témoins. C'est beaucoup plus la
population qui nous intéresse que la satisfaction de certains
avocats.
On a mentionné également et on a même
souligné très fortement le fait que les juges de ces districts
n'ont jamais refusé d'aller siéger à l'extérieur,
qu'ils ont toujours offert leur collaboration, etc, etc. Alors, s'ils n'ont
jamais refusé de le faire, s'ils ont toujours offert leur collaboration,
pourquoi ne seraient-ils pas d'accord avec le bill que nous adoptons
aujourd'hui? Justement, nous mettons dans une loi aujourd'hui ce qu'en principe
ils sont prêts à faire. Je suis certain que ces gens n'auront pas
d'objection à ce faire, puisque dans le passé, suivant les
remarques que nous venons d'entendre, ils ont toujours été
prêts à donner leur collaboration. Ils pourront, en vertu de la
loi que nous adoptons, continuer à donner et à offrir leur
collaboration.
M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas l'intention de revenir
sur ce que le député de Rouyn-Noranda a dit. Il veut tenter de
laisser croire que nous sommes ici pour défendre les avocats. C'est bien
mal me connaître.
Cela fait 22 ans que les gens m'élisent, chez nous, et ils ne
m'ont jamais considéré comme un avocat là-bas. J'ai
parlé des intérêts des justiciables. Quand j'ai dit
tantôt que dans une région donnée le premier devoir des
juges qui y vivent est d'abord de s'occuper, dans leur district, dans leur
région, dans le territoire pour lequel ils sont nommés, de
l'administration de la justice, cela est bon. Il n'a qu'à interroger les
justiciables qui ont des causes qui traînent devant les tribunaux,
à Montréal, pendant trois ans. Ce n'est pas l'avocat qui en subit
les conséquences, c'est le justiciable, le contribuable; c'est le
peuple.
Dans nos districts, jamais un juge n'a refusé d'aller en dehors.
C'est clair. C'est que, s'occupant de l'administration de la justice dans nos
districts, il coopérait et obtempérait aux directives du juge en
chef à l'effet d'aller aider dans les districts adjacents. Ce n'est pas
du tout étroitesse d'esprit, district clos ou district fermé,
c'est ce que l'on applique dans tous les domaines, la régionalisation
administrative.
M. CHOQUETTE: Pas seulement dans les...
M. BERTRAND: On l'applique dans tous les domaines de
l'activité.
Autant que possible, l'organisation administrative gouvernementale suit
les régions économiques. Dans le domaine judiciaire, rien ne sera
mieux que de faire correspondre aux régions économiques du
Québec la redistribution des districts judiciaires. C'est pour ça
que mon collègue avait parfaitement raison. Le ministre veut se gonfler
en disant que l'article 1 permettra une meilleure administration de la justice.
Ce n'est pas une réforme, vous aviez raison, c'est une «
réformette », qui est tout simplement un cataplasme pour faire
plaisir à deux juges en chef. C'est tout. C'est ça, le fond du
problème.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. PAUL: Sur division.
M. HARDY (président du comité plénier): Article 2,
adopté? Adopté. Article 3? Adopté. Article 4?
Adopté.
M. le Président, le comité a adopté le bill 20,
sans amendement.
3e lecture
M. BERTRAND: Nous n'avons pas d'objection pour la troisième
lecture, M. le Président.
M. LAVOIE (président): Cette motion de troisième lecture
sera-t-elle adoptée? Adopté.
M. BERTRAND: Deuxième, troisième, comité.
M. LE PRESIDENT: La deuxième est adoptée. La
troisième? Adopté.
M. BERTRAND: D'accord. La Loi concernant les explosifs. Le bill 35.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 35, Loi concernant les
explosifs.
L'honorable ministre de la Justice.
Explosifs
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande
l'étude à la Chambre.
M. le Président, ayant été nommé
récemment ministre de la Justice, j'aurais préféré
que l'une des premières lois que j'ai l'honneur d'apporter à
cette Chambre soit une loi qui ouvre des perspectives de progrès social,
qui nous permette d'envisager le règlement d'un certain nombre de
questions qui sont actuellement primordiales pour notre société.
Malheureusement, j'ai le devoir de présenter les projets de loi que les
circonstances me forcent à présenter. Je suis donc dans la
pénible obligation de présenter un projet de loi qui a pour but
d'assurer un contrôle plus serré et plus efficace de la possession
des explosifs dans notre province. Ce sont les circonstances qui l'ont rendu
nécessaire, et on les connaît.
Je n'ai pas besoin de m'étendre très longtemps sur la
situation qui prévaut, principalement à Montréal. On
connaît la recrudescence des explosions qui ont eu lieu dans la
métropole. Nous avons connu, la fin de semaine dernière encore,
des incidents au cours desquels, heureusement, il n'y a pas eu de mort, pas de
blessure et pas de dommage à la propriété, mais où
les forces policières ont dû déployer tous leurs talents
pour déceler l'existence de ces engins destructeurs et également
pour désamorcer les appareils préparés par des personnes
que je ne qualifierai pas actuellement.
En particulier, on sait que dans une des ruelles de la ville de
Montréal, la ruelle des Fortifications, les officiers de police ont
dû dé- samorcer un appareil qui comportait 150 livres de dynamite,
et que c'est grâce au courage, entre autres, du sergent Côté
que la population de la ville de Montréal et de ce secteur de la ville
n'ont pas connu de véritable holocauste; s'il avait fallu que cette
automobile Volkswagen, remplie de dynamite, explose, nous aurions eu un
véritable désastre pour la population montréalaise.
Alors, en passant, même en présentant ce projet de loi qui
est loin d'être conforme à ma propre attitude naturelle,
même en présentant ce projet de loi qui n'est pas conforme
à la mentalité du gouvernement actuel, je dois louer au passage
le courage des policiers, et en particulier de ceux qui, comme le sergent
Côté, et autrefois le lieutenant Plouffe, font ce travail, je ne
dirai pas ingrat mais ce travail héroi'que pour notre population du
Québec en désamorçant ces engins destructeurs.
Qu'il me soit permis, M. le Président, avant d'aborder
l'étude du projet de loi proprement dit, de dire que cette violence, qui
s'exprime par ces explosions dans notre métropole et peut-être
dans d'autres centres de la province, ne règle absolument aucun de nos
problèmes. Non seulement elle ne règle aucun de nos
problèmes, mais elle est la négation de la solution de ces
problèmes, parce qu'une période de violence comme celle que nous
vivons actuellement et qui s'exprime par ces explosions ne peut, en somme, et
lorsqu'on a assez d'expérience politique, je pense qu'on le sait,
qu'apporter des raidissements de la part de tout le corps social, de la part de
toutes les écoles de pensée, elle ne peut que créer un
fossé entre les différentes classes de notre population. Elle ne
peut qu'inciter le gouvernement à adopter des mesures de plus en plus
répressives qui sont la négation du progrès, seule
possibilité pour que nous sortions des impasses actuelles que
connaît notre société.
C'est donc dire, M, le Président, jusqu'à quel point le
travail de ces terroristes est négatif. C'est donc dire jusqu'à
quel point leurs actions sont la négation de la solution des
problèmes que nous avons à vivre dans le Québec.
Personnellement, je souhaite qu'avec l'aide de la population dans son
ensemble, parce que je sais que nous l'avons, nous avons le soutien
général de la population, nous, qui représentons l'ordre,
nous, qui représentons, en somme, le bon ordre dans la
société, avec le concours de la population, ces
éléments très limités que représentent les
terrosistes ne peuvent arriver à absolument rien contre le corps social,
contre la démocratie, contre les principes du parlementarisme tels que
nous les connaissons.
En somme, aucun mouvement révolutionnaire ne peut réussir,
à moins d'avoir un appui substantiel dans la population. Je pense
être en mesure de dire et tous les députés en cette
Chambre le confirmeront que les révolutionnaires qui ont
placé ces engins destructeurs n'ont aucun support
généralisé dans la population actuellement, et c'est la
raison pour laquelle toutes leurs tentatives, même si elles devaient
être destructrices, n'ont aucune possibilité de succès
à long terme.
J'ajouterai en terminant les observations générales que je
voulais faire valoir, que, suivant nos études des personnalités
en cause, de ceux qui agissent dans le sens du terrorisme à l'heure
actuelle, il s'agit d'éléments idéologiques
inspirés de l'étranger.
Ai-je besoin d'aller plus loin et de dire qu'il s'agit de rejetons du
maoïsme, du castrisme ou du communisme international? Par
conséquent, je suis en mesure d'affirmer que ces groupes fort
limités n'ont aucun appui dans notre population, même si, entre
nous, il y a des divergences de vues sur l'avenir constitutionnel de notre
province. Je suis obligé de reconnaître que les vues sont
partagées sur ce sujet-là. Ce ne sont pas, en somme, les partis
présents dans cette Chambre, ce ne sont pas les principales
écoles de pensée politique dans notre population qui sont
responsables du terrorisme que nous connaissons actuellement.
La population du Québec a toute raison d'avoir confiance en son
gouvernement, en ses institutions et elle a toute raison de nous donner un
appui entier de ce côté-là, pour que nous agissions avec la
plus grande fermeté possible, mais en respectant, évidemment, les
principes démocratiques, les principes judiciaires, en respectant les
lois que nous connaissons et qui, en somme, visent à la protection de la
personne humaine, même si cette personne doit être coupable.
Dans ces limites-là, je pense que la population est avec nous
pour que nous exercions une action énergique. Or, dans cette action
énergique que nous avons en vue, il y a ce projet de loi de
contrôle des explosifs. Sans faire un discours trop élaboré
sur cette question, il y a, comme on le sait, des dispositions dans le code
criminel qui visent l'utilisation ou la possession des explosifs. Il y a une
législation fédérale qui s'appelle; Loi sur les explosifs.
Cette loi fédérale vise plutôt à réglementer
la fabrication, l'entreposage et la manutention des explosifs.
Il y a, finalement, des règlements qui ont été
adoptés en vertu de la Loi des mines provinciale, ainsi que des
règlements adoptés en vertu de la Loi des établissements
industriels et commer- ciaux. Cette dernière loi est administrée
par le ministre du Travail, tandis que la Loi des mines et les
règlements qui en découlent sont administrés par le
ministre des Richesses naturelles..
Or, les règlements adoptés en vertu de la Loi des
établissements industriels et commerciaux et de la Loi des mines sont
des règlements qui visent beaucoup plus la protection de l'ouvrier
travaillant sur les chantiers de construction ou la protection de l'ouvrier
travaillant dans les mines que, en somme, le contrôle des explosifs comme
tels, que la réglementation de l'explosif pour autant qu'il s'agit
là d'un instrument dangereux qu'on puisse se procurer légalement
ou illégalement. Donc, nous n'avons pas, en somme, de législation
qui réglemente la possession de l'explosif par tous les citoyens ou de
toutes les corporations du Québec.
Il nous semble que, dans les conditions actuelles, il devient
impératif de légiférer dans ce domaine-là pour que
nous sachions entre les mains de qui les explosifs vont se trouver, d'une
façon légale, et pour prévenir les vols et les
disparitions d'explosifs. On sait qu'à la base du terrorisme il y a
toujours eu des vols ou des disparitions inexpliquées d'explosifs. Nous
sommes ici dans un secteur où il faudra s'assurer que les personnes qui
ont le droit de se procurer des explosifs se les procureront avec un permis,
qu'on leur livrera les quantités dont elles ont besoin, suivant les
besoins de leur entreprise, et qu'après en avoir fait usage elles
consigneront, chez des dépositaires ou chez leur fournisseur, le surplus
ou qu'elles procéderont à la destruction de ces mêmes
explosifs.
Il s'agit également de prendre les mesures nécessaires
pour assurer une comptabilité des explosifs qui sont mis à la
disposition du public, de façon que la personne qui a légalement
des explosifs en sa possession soit astreinte à les surveiller.
Maintenant, M. le Président, parmi les dispositions qui se
trouvent au projet de loi, il en existe une qui vise ceux qui ont
déjà des explosifs en leur possession, ceux qui, en somme, ont
acquis des explosifs légalement, mais qui, lorsque cette loi entrera en
vigueur, devraient se procurer, dans un délai de 60 jours, un permis
pour continuer à posséder légalement ces explosifs.
M. le Président, je termine mes observations sur la
deuxième lecture de ce projet de loi en réitérant ce que
je disais tout à l'heure. Il est malheureux que les circonstances nous
obligent à adopter une loi comme celle-ci, mais nous ne reculerons pas
devant notre devoir. Je considère, M. le Président, que, devant
la situation que nous vivons au Québec, nous n'avons pas d'autre
choix
que d'adopter une législation et une réglementation
sévères quant à la possession des explosifs et ceci, pour
le plus grand bien de toute la population du Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: M. le Président, loin de moi l'idée de soulever
un débat autour de ce problème qui marque l'existence
québécoise depuis quelques années. C'est étrange,
M. le Président, comme au fur et à mesure qu'on vit avec les
responsabilités, on en vient à avoir une continuité de
pensée avec ceux qui nous ont prédécés dans
l'administration de la Justice.
S'il y a un ministre de la Justice qui a été
critiqué, qui a été battu en brèche de toute part
et spécialement par les journalistes, qui ont voului lui prêter
l'idée de vouloir implanter un Etat policier, c'est bien celui qui vous
parle.
Lorsque j'ai assumé mes responsabilités, au mois de
juillet 1969, nous connaissions une vague de terrorisme semblable à
celle qui déferle aujourd'hui sur le Québec. J'ai, à ce
moment-là, M. le Président, adopté une certaine mesure
pour combattre l'activité de ceux qui n'ont pas d'autre mission que de
renverser l'ordre établi par tous les moyens possibles. Lorsque je
mentionnais à l'époque que les principaux agitateurs terroristes
étaient des maoïstes, des léninistes, des communistes, on me
traitait d'individu qui rêvait en couleur, qui était constamment
en éveil et on disait que je faisais la chasse aux sorcières.
Je suis heureux de constater aujourd'hui que l'honorable ministre de la
justice, même s'il n'y a pas très longtemps qu'il occupe ses
fonctions, s'est déjà rendu compte que les principaux agitateurs,
les terroristes les plus reconnus, reçoivent des directives de pays
étrangers. C'est dommage que le droit international nous empêche
ici, sur le territoire du Québec, avec certains mandats de perquisition,
de visiter certaines maisons.
On aurait avantage à les visiter et quelquefois on y trouverait
tout ce qui est nécessaire pour continuer cette propagande terroriste et
même cette agitation terroriste que tous déplorent.
Lorsque j'ai assumé les responsabilités de ministre de la
Justice, j'ai, à l'époque, soit plus précisément en
date du 22 août 1969, annoncé un programme en dix points pour
combattre le terrorisme. Entre autres, il y avait une mesure qui était
la suivante: Réglementation nécessaire quant aux conditions
requises pour faire le commerce de dynamite ou de détonateurs; un
contrôle constant s'impose; un rapport quotidien devra être fait
sur les fins, l'utilisation proposée de la dynamite et des
détonateurs. J'ajoutais une note à l'effet que nous devions tenir
compte de la juridiction du gouvernement fédéral en la
matière.
Même si le ministre de la Justice qui a
précédé celui qui est en fonction a été
marqué par toutes sortes de caricatures, même s'il a reçu
toutes sortes de menaces, il a toujours eu comme résultat pratique de
mettre fin à l'activité des terroristes. On sait qu'au point de
vue pratique, entre le 23 juillet 1969 et le 12 mai 1970, il n'y a eu qu'une
bombe qui a explosé sur le territoire québécois:
c'était en septembre lorsque la maison du maire Drapeau a
été détruite. Pour être honnête, je dirai
qu'il y a eu également deux « bombettes »: l'une au
collège Loyola et l'autre à l'université McGill à
peu près à l'époque où l'Assemblée nationale
adoptait le bill 63.
Je vous fais grâce de tous les qualificatifs dont j'ai
été le sujet. Ce qui importe, c'est qu'à l'époque,
par les moyens qui avaient été pris et sans vouloir brimer la
liberté de qui que ce soit, d'aucun citoyen québécois,
nous avons obtenu certains résultats et je regrette qu'ils ne se soient
continués depuis l'arrivée à la tête du
ministère de la Justice de l'honorable député d'Outremont.
Loin de moi l'idée de reprocher au ministre de la Justice une faiblesse
de sa part. Absolument pas.
Sous le sceau de la confidence, j'ai cru bon, à l'occasion de la
transmission des pouvoirs, soit le 13 mai 1970, de faire une révision de
la politique générale du ministère de la Justice et,
à ce moment, l'honorable ministre de la Justice et moi-même avions
discuté du problème terrorisme au Québec. Je
m'étais même permis de le prévenir d'une reprise des
activités terroristes dans le Québec. Il est regrettable que nous
soyons en face d'un problème qui, comme le disait si bien le ministre de
la Justice, n'apporte aucune solution aux différents problèmes
qu'on voudrait voir régler par la violence ou le terrorisme.
Sous prétexte, M. le Président, de soustraire notre
économie aux puissances capitalistes étrangères, on est
parvenu à éloigner ces mêmes capitaux qui pourraient
stimuler l'économie dans la province.
Ce n'est pas en détruisant qu'on va bâtir le Québec,
et ce n'est pas en démolissant, en faisant table rase de nos
institutions passées que nous allons préparer la survie et
l'épanouissement du Québec.
Il est malheureux que nous soyons aujourd'hui placés devant ce
phénomène qui n'est pas exclusif au Québec. Il faut bien
l'admettre. D'autres
provinces ont commencé à connaître l'activité
terroriste. Mais on sait, M. le Président, que certaines directives nous
venant de pays étrangers étaient à l'effet d'implanter
chez nous, par tous les moyens possibles, cette révolution, sous
prétexte que nous, Québécois, à majorité
d'expression française, représentions, sur le continent
nord-américain, le terrain le mieux préparé et le plus
apte à adhérer à ces philosophies socialistes,
révolutionnaires et communistes.
Comme tout le monde, je souhaite que le ministre de la Justice soit un
peu plus respecté; d'ailleurs, je suis heureux qu'on le respecte plus,
lui, qu'on n'a respecté son prédécesseur. Quand je dis
respecté, je parle de ces média d'information. Il y en a qui sont
honnêtes, chapeau bas! Mais il y en a d'autres qui sont beaucoup plus
soucieux de susciter la curiosité et de monter en épingle tous
les événements susceptibles de créer l'appétit et
l'émoi dans la population du Québec, sous prétexte de
mieux faire vendre un journal ou de mieux faire écouter la radio.
Je dis, M. le Président, que toutes les mesures ont
été prises à l'époque, comme je suis sûr
qu'elles sont encore prises aujourd'hui, pour tâcher d'enrayer ce
fléau que nous connaissons malheureusement ou heureusement par
soubresauts, par spasmes. Je sais quel travail accomplit cette escouade
composée de membres de la Gendarmerie royale du Canada, de la police
municipale de Montréal et de la Sûreté du Québec. Je
sais de quel héroi'sme fait preuve surtout le sergent Côté,
comme avec quel héroïsme son prédécesseur, le
lieutenant Plouffe, avait maintes fois exposé, lui aussi, sa vie pour le
désamorçage de ces bombes.
Je dis que nous devons collaborer avec l'autorité, même
policière, et ce n'est pas être mouchard que de dénoncer
celui qui projette ou qui met en place un mécanisme pour faire sauter un
immeuble, une institution bancaire ou une institution commerciale.
Je dis que le ministre actuel n'a pas pour but de faire des citoyens
québécois des mouchards, lorsqu'il fait appel à leur sens
des responsabilités, lorsqu'il invite la population à
dénoncer, même s'il faut y aller au moyen de primes. La prime de
$50,000 dont a parlé le ministre de la Justice, peu de temps
après son arrivée au pouvoir, n'était pas chose nouvelle,
puisqu'elle avait été instaurée
précédemment; elle était même de $62,500, dans le
temps de son prédécesseur.
Je sais, M. le Président, que, de plus en plus, l'escouade de
l'Intégrité du territoire a confiance dans le résultat
final de son travail, et ce au grand soulagement de la population de
Montréal et du reste du Québec, d'ailleurs.
Je plains le ministre de la Justice. Je disais même que le pire
souhait que je pouvais faire à un ennemi, c'était de lui
souhaiter d'occuper un jour le poste de ministre de la Justice, dans les heures
troublées que nous connaissons. C'est pourquoi je ne ferai jamais de
partisanerie politique avec ces problèmes qui sont beaucoup trop
sérieux pour qu'ils prêtent flanc à une gloriole
personnelle ou à une publicité qui n'apportera rien comme
solution au problème.
M. le Président, je sais que le premier ministre, en fin de
semaine, àValleyfield, adéclaré qu'une loi serait
présentée, concernant les explosifs. C'est pourquoi nous sommes
aujourd'hui en face de cette législation, dont le ministre de la Justice
est le parrain. Je regrette, M. le Président, d'avoir à dire que
cette loi n'apportera rien comme résultat pratique dans la lutte
menée, actuellement, contre l'activité terroriste dans le
territoire québécois. Pourquoi? Parce que nous disposons
déjà de tout le mécanisme nécessaire pour obtenir
le même résultat que celui que vise le ministre de la Justice. Ce
n'est pas que cette loi ne soit pas bonne, mais elle n'était pas
nécessaire. Elle n'était pas nécessaire, parce qu'en vertu
de l'article 5 du chapitre 150 de la Loi des établissements industriels
le lieutenant-gouverneur en conseil peut adopter les règlements qu'il
faut, non seulement pour garantir et exiger la prudence dans la manipulation,
dans la fabrication et dans le transport de la dynamite, mais également
toutes mesures jugées nécessaires pour la sécurité
publique.
Je dis, M. le Président, n'en déplaise à mes
honorables amis du Parti québécois que nous avons
déjà, dans les statuts revisés du Canada de 1952, une loi
qu'est le chapitre 102, où à peu près toutes les
activités couvertes par le présent projet de loi le sont
également par cette législation fédérale.
Je dis, M. le Président, que, conformément à la
déclaration que j'avais faite au mois d'août 1969 et par le biais
du chapitre 150, établissements industriels, justement pour
éviter ou une dualité de juridiction ou deux textes de loi qui ne
seraient pas semblables, nous avions préféré agir par le
biais du chapitre 150. C'est ce qui a fait qu'en date du 22 octobre 1969 un
arrêté en conseil portant le numéro 3139 était
adopté par le cabinet que présidait alors l'honorable chef de
l'Opposition.
Il s'agit beaucoup plus d'une loi à caractère
psychologique que d'une loi visant à accroître l'efficacité
administrative. En vertu des règlements qui existent déjà
par l'arrêté en conseil susdit, les membres de la
Sûreté du Québec
étaient nommés inspecteurs adjoints, au sens de la Loi des
établissements industriels, pour voir à ce que les
règlements adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil soient
observés.
Cette loi n'apporte rien de nouveau pour combattre l'activité
terroriste sur le territoire du Québec. Cependant, elle peut permettre
de voir la complexité administrative de la loi fédérale
telle qu'elle existe. Nous pourrons intervenir plus rapidement contre ceux qui
ne respecteront pas les règlements édictés en vertu de
cette loi. Ce qui importe, c'est que nous puissions obtenir le résultat
que tous les députés de cette Chambre souhaitent et que la
très grande majorité de la population du Québec
désire, c'est-à-dire de mettre fin au terrorisme sous quelque
forme que ce soit. Ce qu'il y a de curieux, M. le Président, c'est que
l'activité terroriste a repris et a coïncidé avec
l'élargissement de certains individus renommés dont la marque de
commerce a été, durant plusieurs années, l'activité
terroriste.
Je souhaite que cette législation soit adoptée, mais il ne
faudrait pas que l'honorable ministre de la Justice et je suis sûr
qu'il ne le fera pas; d'autres pourront le faire, mais pas lui nous
fasse des déclarations ronflantes à l'effet que le Québec
est prêt à tout mettre en oeuvre pour stimuler l'économie
de ses concitoyens.
J'espère que cette législation recevra l'appui de tous.
Même si elle n'était pas strictement nécessaire, elle n'est
pas inutile. En effet, elle rendra plus souple l'application de certains
règlements et de certaines mesures, donnant à ceux qui auront
à l'appliquer la possibilité d'agir d'une façon plus
rapide. J'ai voulu, M. le Président, montrer quelque peu cet aspect de
la législation proposée par l'honorable ministre de la Justice,
parce que la population du Québec commence à en avoir assez de
certaines déclarations pieuses, mais toujours sans efficacité,
parce que non suivies d'une législation ou de mesures effectives. C'est
beau de dire qu'on va présenter une loi pour contrôler les
explosifs, pour peut-être trouver une excuse à
l'impossibilité de mettre en application certains articles d'un
programme électoral qui, jusqu'ici... D'ailleurs, nous aurons l'occasion
d'y revenir avant la fin de cette session.
J'ai voulu faire une étude très rapide du principe
énoncé dans cette loi, afin que l'on ne continue pas et
là je ne parle pas pour le ministre de la Justice à battre
de grands principes, qui jusqu'ici ont été sans résultat.
J'espère, M. le Président, que cette lutte d'action, de
coopération, menée par le triumvirat dont j'ai plus tôt
mentionné les noms, continuera; j'espère que le travail se
continuera également au niveau des corps de police municipaux.
J'ai, à l'époque, établi, pour la première
fois, un travail de coordination, de lutte contre le terrorisme et non plus
seulement un travail de coopération.
J'espère que le ministre de la Justice continuera ses approches
avec nos différents chefs de police du Québec pour les inciter
à maintenir ce travail de coordination d'action avec le directeur de la
Sûreté du Québec et le corps spécialisé de
police qui ont à coeur de nous apporter l'intégrité du
territoire.
Je souhaite au ministre de la Justice que, durant cette période
de relâche que nous connaîtrons après la session qui se
terminera probablement cette semaine, nous puissions connaître
également une relâche dans l'activité terroriste de ces
gens qui ne sont pas très nombreux, j'entends les chefs. Je suis
sûr que le ministre de la Justice en viendra aux mêmes conclusions
que son prédécesseur, quant à cette
nécessité que nous impose parfois la prise de positions, comme il
le disait lui-même, qui ne sont pas naturelles ou qui nous
répugnent. Je suis sûr que le ministre de la Justice, en
présentant cette législation aujourd'hui, l'a fait à
contrecoeur, comme ses prédécesseurs l'ont fait, comme le
député de Missisquoi, l'honorable chef de l'Opposition l'a fait,
comme tous ses prédécesseurs l'ont fait, obligés que nous
étions parfois de poser des gestes qui nous répugnaient en tant
qu'humains. Mais, en face du devoir ou du bien commun, nous avons
été dans l'obligation d'aller de l'avant.
Je souhaite, M. le Président, que cette législation puisse
contribuer à créer un climat de confiance renouvelée de la
part de la population à l'endroit de l'autorité, de quelque parti
politique qu'elle soit, et que, par l'action concertée des citoyens
toujours confiants dans cette forme de gouvernement que nous avons et qui est
la démocratie, nous n'allions pas sacrifier ces principes de
liberté sous toutes ses formes que nous apporte cette même
démocratie, sous le prétexte d'adhérer à un
régime politique qui n'a pas d'autre philosophie ou d'autre leitmotiv
pour le moment que de renverser l'ordre établi afin d'instaurer une
philosophie politique qui a fait sa marque même sur le continent
nord-américain et dans d'autres parties de l'univers.
Nous avons l'intention d'appuyer ce projet de loi et de souhaiter
sincèrement, avec le ministre de la Justice, avec le premier ministre,
avec le chef de l'Opposition, avec tous les députés de cette
Chambre et la population du Québec, qu'en-
fin nous puissions connaître la véritable paix et le
respect des individus et des biens dans le territoire du Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. SAMSON: M. le Président, nous avons devant nous un bill qui
veut réglementer la distribution, l'entreposage et la vente des
explosifs. Evidemment, ce bill n'est qu'une partie de la lutte que ce
gouvernement ainsi que les membres de ce Parlement se doivent de faire contre
ce que nous connaissons actuellement, c'est-à-dire une nouvelle vague de
terrorisme.
Il est évident que les multiples attentats à la bombe que
nous connaissons actuellement ont des causes, des effets et aussi des
conséquences. Les causes, évidemment, on va passer
là-dessus; il faudrait en parler trop longtemps pour le moment. Ce qui
nous intéresse, ce sont les effets, ce qui se produit actuellement, les
conséquences de ces actes. En effet, au sujet des conséquences de
ces actes, nous connaissons de plus en plus une population dont nous sommes
responsables, en tant que membres du Parlement, et qui vit dans
l'insécurité du lendemain: Quelle sera là prochaine
victime? Personne ne le sait. C'est la grande question, c'est le grand point
d'interrogation que se pose notre population actuellement.
On ne peut facilement circuler sur nos routes sans se demander si,
à un prochain tournant, une voiture ne sautera pas devant soi. C'est
arrivé la semaine dernière à Montréal. On se
demande, en circulant sur les artères des grandes villes, dans quelle
ruelle une voiture sautera près de soi, ce qui fait que notre population
est dans la plus grande insécurité, dans
l'insécurité totale, dans la peur de ce qui peut lui arriver.
Il est évident que ceux qui sont loin ne peuvent pas s'imaginer
exactement ce que c'est que de vivre cela. Ceux qui ont été
près de certaines de ces explosions le savent. Celui qui vous parle a eu
l'occasion, un jour, d'être très près de l'explosion d'une
voiture avec les membres de sa famille. Quelles sont les conséquences?
Il est important que nous le sachions tous. Tout d'abord, tous les membres de
la famille, ou presque tous, ont subi un choc nerveux qui a duré
quelques semaines. Par la suite, un de mes enfants a eu une lésion au
coeur qui a duré trois ans. Les responsables de ces attentats ne sont
pas ceux qui doivent payer les pots cassés. C'est la population qui est
innocente qui doit payer pour ce qui se passe actuellement dans notre province
de Québec.
Ce sont des choses que nous nous devons de dire et de faire comprendre
à notre population. Ceux qui sont loin s'en foutent peut-être,
mais si un jour ils sont près de ces explosions ou de ces dynamitages,
ils comprendront ce que je veux dire.
Il y a un autre danger: c'est que ces attentats à la bombe des
terroristes se font souvent dans le but de détruire des choses
matérielles. Mais, malheureusement pour les victimes, il se trouve un
jour quelqu'un qui est près; il se trouve un jour quelqu'un qui se fait
tuer sans jamais même avoir su pourquoi.
Il est évident que nous avons de lourdes responsabilités,
aujourd'hui. Je comprends que le ministre de la Justice nous présente un
bill qui ne lui plaît pas. Je le comprends, mais je comprends aussi que
le ministre de la Justice a des devoirs qu'il doit remplir et qu'il remplit
aujourd'hui. C'est pour toutes ces raisons que nous sommes d'accord. Pas
partiellement d'accord, mais 100% d'accord avec ce qui nous est
présenté aujourd'hui.
Un jour ou l'autre, devant le danger que constituent les actes des
terroristes, il se trouvera quelqu'un de la majorité silencieuse qui en
aura assez de ça. C'est à ce moment-là que ça
deviendra réellement dangereux.
Aussi longtemps que ces terroristes seront les seuls à occuper le
plancher des attentats, c'est un demi-mal, mais le jour et ce
jour-là est proche, M. le Président, si on n'arrête pas ces
attentats à la bombe où quelqu'un de la majorité
silencieuse se lèvera et décidera de faire sauter une de ces
bombes sous le fessier de quelques-uns de ces terroristes, eh bien, nous serons
près d'une guerre civile. Ce sera la conséquence de la vague de
terrorisme que nous connaissons actuellement.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons qu'approuver cette loi,
même si ça répugne à plusieurs membres de cette
Chambre de devoir en arriver là. Cela me répugnait aussi lorsque
je devais corriger mes enfants en bas âge. Cela répugnait à
tous les pères de famille d'en faire autant. Mais, si on ne les corrige
pas quand c'est le temps, au bout de 15 ans ou de 20 ans, on est devant des
problèmes réels. La même chose aujourd'hui. Cela nous
répugne peut-être, mais c'est notre devoir de collaborer à
corriger cette situation.
M. le Président, lorsqu'on parle de terrorisme, aujourd'hui,
qu'est-ce qu'on voit dans les journaux? On identifie des mouvements, qu'ils
soient FLQ, FLP ou FL ce que vous voudrez, comme des mouvements
séparatistes, pour lancer de la poudre aux yeux, mais,
sincèrement, je ne crois pas que, derrière cette vague de
terrorisme, ce soit réellement du séparatisme.
Je serais plutôt porté à penser, comme mon
collègue, le député de Maskinongé, que ce sont des
personnes qui savent ce qu'elles font et qui suivent un plan bien défini
pour préparer une révolution qui favoriserait des idées
communistes, maoistes, léninistes ou marxistes, comme vous vous voudrez;
c'est surtout ça.
Ce n'est pas pour aider une cause québécoise que ces
gens-là font du terrorisme; c'est en suivant presque aveuglément
les causes du communisme international. Dernièrement, M. le
Président, nous avons été à même de lire dans
les journaux que la police de Montréal, en collaboration avec la police
provinciale et la police fédérale, avait eu l'occasion de mettre
fin à un complot visant à l'enlèvement d'un haut
personnage des Etats-Unis au Canada. Les plans étaient faits à
l'avance pour exiger des Etats-Unis une rançon de $500,000, et la
libération des prétendus prisonniers politiques du Québec,
sous le couvert du séparatisme, selon ce qui nous a été
rapporté.
Mais, comme je vous le dis, je ne crois pas que ces attentats soient
séparatistes; je crois qu'ils sont de type révolutionnaire
international. Alors, dans les plans que la police a eu l'occasion de
déjouer, on exigeait que des sauf-conduits soient émis, pour
laisser sortir du pays des prisonniers politiques soi-disant
séparatistes. Et pour aller où? Pour aller à Cuba. Selon
notre interprétation à nous, ce n'est sûrement pas pour
favoriser l'indépendance du Québec, mais surtout pour favoriser
des idéologies ou des philosophies politiques, communistes,
extrémistes.
Presque tous, nous savons qu'il y a dans notre province actuellement des
jeunes qui s'entraînent à la guérilla.
Et, il n'y a pas très loin de l'entraînement, dans certains
camps, dans notre province de Québec, à la guérilla et au
terrorisme pratique. Il y a sûrement des parents là-dedans
j'entends parents d'idéologie. C'est entendu que nous réclamons
sans arrière-pensées des sentences sévères, voire
même exemplaires, à ceux qui seront pris à faire du
terrorisme, à ceux qui seront pris à mettre en danger, dans notre
province de Québec, la sécurité de la population. Qu'une
personne soit tuée lors d'un attentat à la bombe visant seulement
et uniquement à détruire du matériel, qu'une personne soit
tuée à ce moment, j'appelle cela un meurtre comme toute autre
chose. Il faut appeler les choses par leur nom. Qu'une personne soit
tuée lors d'un attentat à la bombe ou qu'elle soit tuée
à bout portant, le résultat est le même: une personne a
été tuée. Ces victimes, passées et futures
parce que si on n'arrête pas le mouvement à sa base, si on ne le
détruit pas dans l'oeuf, elles seront nombreuses, plus nombreuses que
les victimes du passé seront des personnes aussi innocentes que
celles que nous avons connues qui ont été malheureusement
tuées lors de ces attentats.
Ces actes de terrorisme sont toujours faits au nom d'une
pseudo-libération, au nom de la grande liberté. On nous parle des
pays communistes, ces mouvements terroristes vont même jusqu'à
patronner certaines librairies qui vendent des livres sur le marxisme ou sur la
façon de faire des révolutions. C'est avec tout ça
ensemble que nous en venons à constater les faits que nous devons
constater aujourd'hui. Ces mouvements terroristes embrigadent des jeunes de
notre province, des jeunes gens qui ne savent même pas pourquoi ils se
laissent embrigader. S'ils connaissaient les conséquences de leurs
actes, s'ils connaissaient exactement les raisons pour lesquelles ces chefs
terroristes les embrigadent, nos jeunes ne suivraient pas. C'est sous de
fausses représentations qu'on amène nos jeunes dans ces
mouvements en leur parlant de liberté et toujours de liberté.
Pourtant ces gens représentent des philosophies politiques communistes
du genre de celles qu' il y a dans d'autres pays du monde dont la Russie et la
Chine populaire.
Pourtant, ces mêmes personnes qui réclament la
liberté à grands cris pour faire de notre province et de notre
pays un pays semblable à ceux qu'ils veulent représenter,
c'est-à-dire un pays communiste, savent, et nous le savons, que c'est
toujours au nom de la liberté que les révolutions se font ou se
sont faites dans le passé. Et c'est une fois que les révolutions
ont été finies que, justement, la liberté a
commencé d'être brimée. On n'a qu'à prendre comme
exemple la Tchécoslovaquie qui, il n'y a pas longtemps encore, a
tenté de se libérer du joug communiste. Que lui est-il
arrivé? Est-ce que c'est avec des discours qu'on a convaincu ces gens de
demeurer chez les communistes? Non. C'est avec des canons, c'est avec des
fusils, c'est avec de l'armement. Une fois le communisme arrivé dans un
pays, c'est à ce moment que la liberté s'en va. Malheureusement,
ce sont toujours des étudiants, ou presque, qui, dans le monde, ont
suscité des révolutions, et ce sont toujours les étudiants
qui, après en avoir eu assez de ces révolutions, ont tenté
de se libérer réellement.
Exemple: Tchécoslovaquie, encore une fois. Pourquoi? Parce que,
justement, dans la tête de ceux qui ne sont pas des étudiants, il
arrive aussi qu'il y a des choses qui mijotent. Aujourd'hui, ceux qui sont
amenés le plus souvent
vers les mouvements terroristes, sont malheureusement des gens de la
classe étudiante ou presque, en majorité des gens de la classe
étudiante et, cela fait partie, M. le Président, d'une
philosophie qui s'implante dans notre province de plus en plus. Cela fait
partie d'une philosophie qui veut cela, on est en train de l'entrer dans
la tête de nos étudiants, de nos enfants que le pire ou que
les parents sont des vieux jeux et que seule la classe étudiante
possède la science et la vérité.
Bien au contraire, ceux parmi les étudiants qui, encore,
parce qu'il y en a encore de ceux-là sont prêts à
prendre les conseils de la génération précédente
sont encore les plus sages.
M. le Président, un jour quelqu'un qui s'apparentait de
près ou de loin avec ces genres d'idées, me disait qu'il se
sentait comme issu de la révolution. Imaginez-vous! Une espèce de
fils de la révolution tranquille! C'est ce qui confirmait ce que j'ai
toujours pensé, que la révolution tranquille avait
été un fiasco, d'ailleurs, quand on voit des jeunes parler comme
cela...
En terminant, je pense qu'il est de notre devoir de dire à ces
gens que ce n'est pas en détruisant ce qui existe que nous allons
construire ce qui n'existe pas, au nom de l'égalité, au nom de la
liberté ou de ce que vous voudrez. On est toujours prêt à
détruire celui qui possède quelque chose. Je parle des tenants de
cette philosophie. On est toujours prêt à détruire. Nous
disons et nous le pensons sincèrement que ce n'est pas en
détruisant le château du riche qu'on va améliorer la cabane
du pauvre, mais c'est en travaillant tous ensemble par des lois adoptées
dans cette Chambre, comme dans les autres Chambres du pays c'est en retroussant
nos manches et en agissant comme des gens qui sont prêts à
travailler,... Je vois un honorable collègue de cette Chambre qui me
fait des signes. Il reconnaît probablement certains des siens à
l'extérieur.
M. BERTRAND: La révolution!
M. SAMSON: M. le Président,...
M. CHARRON: Les communistes!
M. SAMSON: Ce que je veux vous dire...
M. CHARRON: La révolution!
M. SAMSON: Oui, j'entends justement des paroles révolutionnaires
qui me parviennent...
M. CHARRON: C'est ça.
M. SAMSON: ... à mes oreilles. De toute façon, M. le
Président,...
M. CHARRON: Il commence à entendre des voix, c'est comme
Jeanne-d'Arc.
M. SAMSON: J'aimerais vous dire...
M. CHARRON: Jeanne-d'Arc a fini comme ça, aussi.
M. SAMSON: ... que c'est en travaillant... Et ceux qui arrivent, ou qui
se pensent issus de la cuisse de Jupiter, qui pensent tout connaître,
devraient penser qu'avant eux il y avait du monde qui existait, devraient
penser que ce qui existe actuellement a été construit par des
personnes qui ont vécu avant eux. Ceux qui n'ont jamais eu l'occasion de
gagner leur vie, ni de gagner leur pain à la sueur de leur front,
malheureusement, ne comprennent pas toujours ce que l'on dit. Cela leur est
venu trop facilement. Quand cela vient facilement, on est évidemment
porté à critiquer ceux qui nous ont donné à manger.
Qu'est-ce que vous voulez? Cela s'est déjà vu, quelqu'un qui
mordait la main de celui qui lui donnait à manger. Ces terroristes sont
du genre de ceux qui sont toujours prêts à mordre la main de ceux
qui veulent les faire manger.
M. le Président, nous ne pouvons qu'être d'accord avec le
gouvernement qui veut entreprendre évidemment ce n'est pas
complet, nous le comprenons, mais c'est un départ une lutte
efficace nous espérons qu'elle le sera contre ces actes de
terrorisme qui, malheureusement, ne servent d'autres causes que de
détruire ce pays qui nous appartient, de détruire ce que nos
prédécesseurs ont construit, de détruire les
héritages qui nous reviennent et que nous nous devons de laisser
à ceux qui suivront derrière nous.
M. le Président, pour toutes ces raisons, nous serons d'accord,
et nous félicitons le ministre d'avoir pensé à
entreprendre cette lutte contre le terrorisme.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, les interventions que nous venons
d'entendre possédaient une forte charge d'émotion, beaucoup plus
qu'à l'accoutumée. Cela se comprend, lorsqu'on traite d'une loi
qui a pour but de réprimer des attentats. On connaît, en effet,
les drames qui peu-
vent résulter de ces attentats, les drames individuels auxquels
vient de faire allusion le député de Rouyn-Noranda. On
connaît également les drames collectifs qui peuvent en être
la conséquence, une sorte de climat de malaise qui règne au sein
de la nation, les conséquences économiques déplorables qui
peuvent en résulter. Je me joins donc à tous les orateurs qui se
sont exprimés jusqu'ici pour déplorer ces conséquences
individuelles aussi bien que collectives.
Il reste cependant, M. le Président, qu'il convient de replacer
ces événements, tout tragiques qu'ils soient, dans le contexte
social contemporain. Ce n'est quand même pas la première fois que,
dans un pays, aussi bien au Québec que dans les autres, nous assistons
à ces explosions de violence. Je me rappelle, qu'il y a plusieurs
années, lors de la guerre d'Algérie, alors que je me trouvais en
France, il n'y avait pas un seul jour où nous n'assistions, où
les journaux ne nous rapportaient des attentats, des bombes au plastic. Depuis
lors, il n'y a pas une année, il n'y a pas un mois où nous ne
voyons, dans les journaux, des récits de ces attentats qui se passent
aussi bien aux Etats-Unis qu'en France, qu'en Italie, que dans les autres
provinces. Ce sont des attentats où il est parfois facile de voir
à l'origine des revendications politiques, parfois des revendications
sociales et parfois des revendications idéologiques. On dirait que cela
est devenu une sorte de phénomène contemporain, une sorte de
symptôme d'une fièvre de plus en plus forte qui prend notre
civilisation occidentale.
Il n'est peut-être pas inutile de replacer cet
événement proprement québécois dans son contexte
international et dans le contexte socio-économique dans lequel vit
actuellement toute notre civilisation occidentale.
Il est bien évident, M. le Président, que nous favorisons
également le principe de ce projet de loi. Ce projet de loi vise, en
effet, à rendre plus difficile l'accès aux moyens qui permettent
à des terroristes en puissance de nuire à la
société. A ce titre, nous ne pouvons qu'être d'accord avec
toute loi qui pourra rendre plus difficile l'accès à ces moyens
de production en vue de faciliter l'exécution d'attentats qui nuisent,
comme on vient de le dire, au climat social d'une collectivité.
De même, nous sommes d'accord pour adopter toute loi qui aurait
pour but, par ces moyens ou d'autres, d'éliminer de notre
société québécoise les actes de terrorisme. Je n'ai
pas besoin de dire ici que notre parti dénonce la violence avec la
dernière énergie comme moyen d'arriver aux buts que se propose
tout groupe social ou politique que ce soit. Contrairement à ceux qui,
il n'y a déjà pas si longtemps, persistaient à nous
associer d'une façon directe ou indirecte à ces actes
terroristes, nous prenons cette occasion pour affirmer à nouveau, de la
façon la plus catégorique et la plus solennelle, que nous nous
opposons une fois pour toutes à la violence comme moyen de
réalisation des objectifs ou des idéaux que nous nous sommes
fixés.
D'ailleurs, nous l'avons déjà fait, M. le
Président, à plusieurs reprises. Depuis l'origine de notre
mouvement, qui est ensuite devenu un parti, nous avons dénoncé
à plusieurs occasions l'emploi, l'utilisation de la violence. Nous
l'avons dénoncée à propos du conflit de
Saint-Léonard; nous l'avons dénoncée, aussi, avec
énergie, à l'occasion des manifestations auxquelles on a
donné le nom de McGill français. Nous, l'avons
dénoncée également à l'occasion de la
célébration de notre fête nationale, en 1968.
Nous sommes souvent revenus sur le sujet. Ceci nous a valu d'ailleurs
l'exclusion du parti de certains partisans qui y étaient entrés
pour le mauvais motif, mais nous ne regrettons rien. Nous affirmons encore
aujourd'hui, avec toute l'énergie que nous pouvons y mettre, notre
politique de pacifisme démocratique et parlementaire en vue d'arriver
à l'objectif que nous nous sommes fixé.
Il reste important quand même de signaler que ces attentats n'ont
pas toujours une saveur politique. Nous en avons vu beaucoup, récemment,
surtout au cours de la dernière année, où il était
très facile de dénoter une saveur qui n'avait rien de politique
mais qui avait trait plutôt à un certain type de revendication
sociale.
Même si nous dénonçons la violence, il faut quand
même n'y voir qu'un effet. Il faut quand même n'y voir qu'un
symptôme d'une maladie beaucoup plus grave qui est en train de ronger non
seulement notre société québécoise, mais
également beaucoup d'autres sociétés occidentables. Et
à ce titre, le terrorisme est un symptôme comme un autre. Un
terrorisme qui constitue peut-être un symptôme plus grave, plus
douloureux que les autres, mais quand même la nature n'en est pas
changée et, à toutes les fois que nous nous trouvons devant un
symptôme, bien sûr, on peut le déplorer, bien sûr, on
peut aller chez le médecin pour s'en faire guérir; mais il est
encore beaucoup plus important de porter un diagnostic exact, d'essayer de
remonter, des causes aux effets, à la cause principale qui est à
l'origine de cette maladie, ce qui nous permet ensuite d'élaborer un
programme de traitements qui va à la racine de la maladie, qui va au
fond des choses et qui amène une exclusion définitive de tous ces
symptômes, qui amène non plus une répé-
tition de ces symptômes mais un état de santé qui
constitue un état de bien-être pour l'individu comme pour les
sociétés.
En ce sens, ce projet nous apparaît certes justifié. Bien
sûr. Mais il ne nous paraît pas aller assez loin, car tous ses
articles s'attachent justement à la cure de symptômes, mais aucun
ne va au mal qui produit ces symptômes.
En somme c'est un projet de loi qui se veut préventif, mais c'est
une prévention qui n'est que partielle. Car, dans son esprit, ce projet
de loi nous apparaît d'abord symptomatique, c'est-à-dire
répressif, et en cela comme d'autres orateurs l'ont
signalé avant moi, et en particulier le député de
Maskinongé on en constatera bientôt les limites et les
insuffisances.
D'ailleurs le seul fait que nous ayons assisté au Québec
à des vagues successives de terrorisme, à des flambées
successives de violence et qu'on n'en arrive jamais à enlever
radicalement ce mal qui ronge notre société montre bien que,
jusqu'ici, nous n'avons pas su nous attaquer aux véritables causes du
phénomène, ce qui fait que nous nous retrouvons toujours en face
des mêmes effets. Ce qu'il faut et ce qu'il faudrait au plus tôt,
ce serait s'attaquer plutôt à la racine même de la violence.
C'est-à-dire aux maux principaux dont souffre notre
société québécoise.
J'entendais tout à l'heure le député de
Rouyn-Noranda faire le procès du terrorisme et, bien sûr, je
partageais un certain nombre des opinions qu'il exprimait. Mais je partageais
davantage les idéaux et les idées qu'il exprimait dans un
récent article dans le Journal de Montréal, où, au lieu de
se contenter de traiter des symptômes, c'est-à-dire du terrorisme,
il essayait de remonter aux véritables causes de la violence, aux
véritables racines de la violence. Car ce n'est pas rêver en
couleur que d'essayer d'analyser, d'énumérer, d'identifier ces
causes afin d'être mieux en mesure de les guérir, d'aller au fond
des choses et d'amener une guérison radicale.
Pour nous, nous trouvons qu'on a peut-être raison d'accuser ces
terroristes nous le saurons bien quand ils seront arrêtés
de castrisme, de guévarisme, de trotskisme, de léninisme,
de marxisme, mais nous trouvons quand même que ces idéologies ont
quand même un peu trop bon dos, que cela peut devenir facilement des
alibis qui contribuent à rationnaliser un phénomène
beaucoup plus complexe, à masquer une réalité beaucoup
plus douloureuse.
L'orsque nous ferons le véritable procès des causes qui
ont conduit à ces explosions suc- cessives de violence, nous nous
apercevrons peut-être qu'il faudra identifier des maladies beaucoup plus
profondes de notre société. Ces maladies, je pense bien que tous
les membres de cette Chambre les connaissent, mais c'est peut-être
douloureux, c'est peut-être difficile de s'y attarder comme il le
faudrait.
Parmi ces racines de la violence, il y en a, bien sûr, que tout le
monde connaît; par exemple, la pauvreté de notre peuple, le
chômage, qui atteint des proportions toujours plus dangereuses à
chaque mois qui passe. Les statistiques de l'assistance sociale montrent que
nous sommes en train de devenir un peuple de mendiants, alors même que
notre Québec vit dans une économie nord-américaine, qu'il
vit au sein d'une société d'abondance. Vous savez qu'il n'y a
rien de plus nocif pour un pauvre que de voir un riche, alors qu'il sait que
lui-même, dans des structures sociales différentes, dans une
société qui lui donnerait la chance au plein emploi, à la
sécurité d'emploi, il pourrait se payer non pas peut-être
cette richesse, mais au moins les éléments essentiels qui lui
permettraient de mener une vie digne.
Dans une société où l'écart se creuse
toujours davantage entre les riches et les pauvres, entre l'aisance et la
pauvreté, non seulement nous avons affaire à un scandale, mais
nous créons des conditions de frustration, des conditions d'impatience
qui parfois, lorsqu'elles sont canalisées par des agitateurs habiles et
expérimentés, peuvent facilement mener aux explosions.
Mais, alors, faudrait-il accuser les agitateurs ou une
société qui a créé une sorte de bouillon de culture
où les conditions révolutionnaires sont en train de se former
sans que les leaders de la société en tiennent un compte
suffisant? Il faudrait peut-être aussi parler d'une autre sorte de
violence, non plus violence manifeste, mais la violence muette mais
terriblement efficace des nantis, des privilégiés qui rompus,
enfermés dans leur égoisme s'accrochent à leurs
privilèges, s'accrochent à leurs pouvoirs, qui ne veulent pas
s'ouvrir les yeux à la réalité sociale contemporaine, qui
ignorent, qui méconnaissent les déplorables conditions de vie
d'une grande partie de la population et, en particulier, des
économiquement faibles, des défavorisés de l'existence et
qui non seulement méconnaissent ces conditions, non seulement les
ignorent, mais continuent, en se fermant les yeux, de les exploiter, de les
assujettir, pour grossir leurs revenus et pour continuer de profiter des
bienfaits de cette société d'abondance.
Il faudrait accuser ici justement l'égoïsme de cette portion
minime, mais importante de
notre population qui souvent est aux leviers de commande de notre
société, l'égoïsme de ces parvenus qui ne veulent pas
partager avec leurs frères les bienfaits du progrès technique,
les bienfaits de la société de consommation.
Il est bien évident que ce n'est pas en détruisant que
l'on bâtira; ce n'est pas, bien sûr, en détruisant le
château du riche que l'on bâtira la cabane du pauvre, là
n'est pas l'idéal. Il faut surtout viser à partager les bienfaits
d'une société dont le progrès est fait pour tout le monde,
dont tout le monde a le droit de profiter et, en particulier, ceux qui ont eu
le plus de difficulté à bénéficier des bienfaits de
cette civilisation.
Il faudrait peut-être accuser ici, peut-être encore plus
gravement que certains autres qui sont plutôt des victimes, cette apathie
de certains notables bien installés devant les revendications d'un
peuple qui veut travailler dans sa langue, qui veut accéder aux postes
supérieurs que lui promet sa compétence nouvelle acquise avec les
deniers de l'Etat, qui veut accéder aux postes supérieurs dans un
climat de dignité et de fierté, qui refuse à tout jamais
et qui refusera avec toujours de plus en plus d'énergie une
sujétion économique, une humiliation culturelle qui ne sont plus
de mise dans un Québec qui a fait un tel effort pour l'éducation
de tous ses citoyens jusqu'au plus humble d'entre eux.
Il faudrait peut-être accuser aussi la prudence calculée de
certains partisans de l'incitation pour changer cet état de choses que
je viens de décrire, alors que la baisse de la natalité, alors
que l'intégration des immigrants a une minorité de langue et de
culture différente, qui est dans une position privilégiée
actuellement dans une société québécoise, le danger
que fait courir à notre collectivité cette minorité est un
danger que beaucoup d'observateurs non pas révolutionnaires, mais les
plus sagaces qui soient, qualifient souvent mortel.
Il faudrait peut-être déplorer enfin, parmi ces racines de
la violence, une impasse constitutionnelle qui, depuis le temps qu'elle dure,
menace bien de devenir indéfinie.
Cette impasse constitutionnelle nous prive, nous la collectivité
québécoise, des ressources et des pouvoirs essentiels à
notre épanouissement collectif, alors que les citoyens, de plus en plus
informés et politisés, exigent une action de plus en plus
vigoureuse et de plus en plus efficace de l'Etat pour que les problèmes
réels, qui sont à l'origine de leur pauvreté, soient
réglés avec de plus en plus d'efficacité.
Ce n'est que lorsque l'Etat aura réussi à créer des
sociétés mixtes véritablement prospères, qu'il aura
réussi à créer un développe- ment industriel
valable, qu'il aura réussi à moderniser notre agriculture, qu'il
aura réussi à procurer des soins de santé suffisants et
complets à toute notre population, qu'il aura réussi à
loger nos citoyens d'une façon décente qui correspond à
leurs idéaux de fierté; ce n'est que lorsque le scandale de cette
société d'abondance et de consommation pour les
privilégiés cessera et que ce bouillon de culture, dont je
parlais tout à l'heure et qui constitue la racine profonde des tendances
révolutionnaires, aura cessé, que nous pourrons arriver à
l'éradication complète des racines de la violence.
C'est précisément parce que notre société a
trop tardé à régler ces problèmes pressants que
nous assistons à cette reprise continuelle et épisodique des
phénomènes de la violence. Notre population est patiente, elle
l'a prouvée plusieurs fois au cours de son existence, mais il y a des
patiences qui deviennent parfois des démissions. Si la population se
convainc que cette patience est devenue une démission, le climat de
frustration, dont je parlais tout à l'heure, augmentera de plus en plus
et le danger d'explosion sera toujours renaissant.
En effet et j'en avertis tous les députés de cette
Chambre le temps travaille contre nous. Il suffit d'être en
contact avec certaines couches de la population pour savoir à quel point
l'angoisse croit et augmente dans notre société. C'est la raison
pour laquelle, bien sûr, tout en acceptant ce projet de loi, nous
voudrions qu'à cette mesure répressive, qu'à cette mesure
négative, qui est justifiée et nécessaire, s'ajoutent
très bientôt d'autres mesures, d'autres attitudes,
celles-là beaucoup plus positives, qui correspondent, de la part du
gouvernement, à un nouvel effort de lucidité, à un sursaut
de fierté qui lui permettra d'adopter des législations qui iront
à la racine de ce mal que je décrivais et que je
dénonçais, afin que notre peuple, avec ses angoisses, avec ses
aspirations et avec ses revendications, se reconnaisse désormais dans ce
gouvernement qui est le sien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté? M. CHOQUETTE: Adopté?
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Gouin.
M. Guy Joron
M. JORON: M. le Président, personnellement, je suis d'accord avec
ce bill, mais j'ai-
merais retenir l'attention de cette Chambre pendant quelques instants
pour souligner, peut-être avec plus d'insistance, quelques-uns des points
que le député de Bourget faisait valoir il y a un instant.
Je suis d'accord avec l'énoncé de principe que faisait le
député d'Outremont au début de son explication, au moment
du dépôt du projet de loi, lorsqu'il disait que, dès
l'instant où des hommes se retrouvent trop nombreux sur un territoire
donné, ils doivent s'organiser en société. Cela implique
une organisation qui doit fonctionner selon un certain ordre et selon certaines
règles. Accepter de vivre en société, c'est, par
définition, accepter un certain ordre et le respect de certaines
règles.
En ce sens, l'action terroriste n'a aucune place dans la vie d'une
société normale. Je suis d'accord avec le député de
Rouyn-Noranda non pas lorqu'il disait que la révolution
tranquille a été un fiasco, ce qui m'a, d'ailleurs,
étonné, parce que cela semblait vouloir dire que la
révolution aurait dû être moins tranquille pour ne pas
être un fiasco sur le sujet suivant: Ce n'est pas drôle
lorsqu'on voit de près les effets de l'action terroriste. Je l'ai
vécu moi-même, il y a deux ans, à l'occasion de l'explosion
d'une bombe au quatrième étage de la Place Victoria, à la
Bourse de Montréal.
J'avais à cette époque mon bureau au 6e étage. On
peut dire, dans un certain sens, que la bombe m'a presque éclaté
sous les fesses. Ce n'est pas drôle, mais immédiatement, ça
amène à se poser de sérieuses questions. La question que
tous doivent se poser est la suivante : Quand le terrorisme apparaît dans
une société, comme ça, qu'est-ce que ça signifie?
Quand les murs d'un édifice commencent à se lézarder,
qu'est-ce qu'on doit faire? Bien entendu, et simultanément, on doit
courir remettre du plâtre sur la fente, mais, en même temps, et
très rapidement, on doit courir voir aux fondations mêmes, de
façon à s'assurer que ce n'est pas tout l'édifice qui est
en train de s'écrouler.
Il n'y a pas de fumée sans feu et je ne souscris pas à
l'interprétation qu'ont donnée successivement les
députés d'Outremont, de Maskinongé et de Rouyn-Noranda
quant à l'origine de cette activité terroriste au Québec.
On veut trop facilement faire porter ce phénomène sur un
phénomène d'importation étrangère et on se
gargarise de mots comme le moïsme, le marxisme, le léninisme, dans
certains cas trop souvent sans savoir même ce que ces mots veulent
dire.
Le terrorisme ne s'importe pas parce que, comme l'a souligné
à un certain moment le député d'Outremont, il ne peut pas
s'implanter dans une société où le ferment n'a pas
été déposé, n'a pas été
déjà semé. C'est à l'intérieur même de
la société québécoise qu'il faut chercher les
racines de ce mal. Vouloir faire des étrangers, des maoistes, des
communistes et des tout ce que vous vous voudrez les boucs émissaires de
cette activité c'est, à mon avis, une belle excuse pour le
conservatisme le plus rétrograde. Il est facile de lancer la balle;
ça nous évite de scruter à l'intérieur de
nous-mêmes, à l'intérieur de notre société,
les vraies racines de ce mal.
Pour moi, il ne fait aucun doute que ce sont des injustices le
député de Bourget tout à l'heure en a signalé
quelques-unes à l'intérieur même de notre
société qui en sont la cause, plus l'incapacité de notre
système démocratique tel que nous le pratiquons parce que
la démocratie se pratique de façon différente et à
des degrés très différents également, dans divers
pays du monde plus l'incapacité, dis-je, de notre système
de permettre totalement et facilement à ces injustices de trouver un
canal d'expresssion.
Nous en sommes, nous, les sept député du Parti
québécois, un exemple dans cette Chambre. Sept sur 108 alors que
nous représentions 24% du vote. C'est déjà un premier
exemple d'injustice à l'intérieur même de notre
système. J'inviterais en conséquence les membres de cette Chambre
à se soucier autant de la santé même de la
démocraite, de la véritable démocratie que de maintenir un
certain ordre établi. Moi, je suis étonné de voir comment,
à la suite des événements de la fin de semaine, dès
la première journée de la session on réussit avec une
célérité incroyable à adopter un projet de loi
visant, et il faut s'en réjouir, à la protection d'un certain
ordre.
Qunad il s'agit de défendre l'ordre établi, on peut
adopter un projet de loi en une journée, à trois jours d'avis.
Mais quand il s'agit par exemple de présenter des projets de loi ou
d'adopter des politiques qui, elles, s'attaquent aux racines du mal, il faut
traîner de commission en comité, de ci en ça et puis
ça prend des mois. Si on pouvait et ça serait tellement
heureux avoir la même célérité lorsqu'il
s'agit de s'attaquer aux causes et non aux effets, il me semble que
déjà on aurait franchi un pas considérable.
En terminant, je voudrais tout simplement rappeler à ceux qui se
veulent les défenseurs à tout prix d'un ordre établi qu'il
y a la un danger c'est que l'ordre ne doit jamais être rigide à
aucun moment dans une société, puisque la société,
elle, est en constante évolution. Si on lui donne un cadre rigide, fixe,
déterminé et immuable dans le temps, il est entendu,
l'évolution se continuant à l'intérieur de ce cadre, que
des injustices vont
commencer à se créer et qu'on va commencer à se
marcher sur les pieds, les uns les autres. Or, il me semble qu'il serait
intéressant de cesser de parler d'ordre établi et de commencer
à penser en terme d'ordre évolutif. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de
Lotbinière.
M. Jean-Louis Béland
M. BELAND: Il me fait plaisir, d'abord, de féliciter l'honorable
ministre qui a bien voulu présenter ce projet de loi concernant les
effets et les causes des explosifs. Il vient d'être dit, par le
préopinant, que mon chef, le député de Rouyn-Noranda,
évidemment, parle d'effets et de causes, parle de révolution non
tranquille. Il devrait également se référer, ce
député, aux écrits du député de
Rouyn-Noranda à ce sujet pour se renseigner. Je comprends
évidemment que ça fait mal à la philosophie du Parti
québécois, parce que je sais que ce parti est un parti
d'extrême gauche.
Il y aurait peut-être autre chose à dire relativement
à ce projet de loi. Il est très bon, il y a beaucoup de choses
qui y sont insérées, mais je pense qu'il faudrait, et le plus
tôt possible, en démontrer, d'une façon plus positive
à la population, toutes les conséquences, et donner toute
l'information nécessaire pour protéger le public. Je me
réfère ici à il y a quelques années, plus
précisément en 1965, où moi-même je faisais de la
vente d'explosifs. Avec une charge d'explosifs que je m'apprêtais
à transporter à ma poudrière, en passant sur le pont de
Québec...
M. CHARRON: Cela a sauté!
M. BELAND: ... une automobile est venue doubler une autre automobile qui
a bien failli m'arriver en pleine figure. A l'intérieur de ma
camionnette, j'avais précisément 14 caisses de dynamite. Je sais
qu'une partie ou la majeure partie du pont de Québec se serait
écroulée si, justement, on m'avait frappé avec cette
charge d'explosifs. Je viens de dire que j'avais cette charge d'explosifs parce
que j'en faisais la vente. Donc, c'était légal.
M. CHARRON: A qui les vendiez-vous?
M. BELAND: Entre autres au gouvernement provincial, dans la
région où je demeurais. Je tenais à attirer l'attention du
ministre à ce sujet, justement à cause de cet incident qui aurait
pu être désastreux. Il me semble qu'on devrait mieux renseigner le
public qui voyage sur les routes ou qui transporte ces éléments
de façon qu'il soit beaucoup mieux protégé. Le public
devrait être davantage informé. Il y a beaucoup de jeunes qui se
conduisent très bien sur les routes mais, lors de l'incident dont j'ai
parlé, c'était un jeune qui était au volant d'une
automobile et qui a osé doubler sur le pont de Québec et qui a
failli causer une catastrophe sur le pont. Mes derniers mots seront pour
féliciter, encore une fois, le ministre de la Justice qui a bien voulu
agencer présenter une loi spécifique concernant les explosifs. Je
l'invite à réfléchir davantage sur la possibilité
de renseigner ceux qui doivent voyager sur les routes avec ces
éléments. Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. William Tetley
M. TETLEY: Je serai très bref. Les députés de Gouin
et de Bourget ont mentionné les conséquences économiques
qui étaient peut-être une des causes de base des bombes et des
attentats. Le député de Gouin a même mentionné le
fait qu' il n'y ait que sept députés péquistes en Chambre,
il est vrai, malgré le fait qu'ils aient reçu un vote de 24% de
la population.
C'est vrai aussi. Mais, j'ai peur que les députés de
Bourget et de Gouin aient suggéré, par leurs remarques, qu'on
peut être violent parce qu'il y a eu d'autres groupes de la
société qui ont souffert longtemps. Je parle des femmes qui
n'avaient pas le droit de vote, je parle des jeunes qui n'avaient pas non plus
le droit de vote. C'est le Parti libéral qui a donné ce droit aux
femmes et aux jeunes: aux femmes en 1944 et aux jeunes en 1966.
Je parle des anglophones qui n'ont que huit députés
malgré un pourcentage de 22%. Est-ce qu'ils ont le droit de lancer des
bombes? M. le Président, je vais être clair et j'espère que
les députés de Bourget et de Gouin étaient clairs. Je suis
contre la violence pour toutes les raisons déjà
mentionnées et j'espère que les députés de Bourget
et de Gouin sont contre, et le député de Saint-Jacques aussi.
Tout le monde doit être contre la violence. Il ne faut pas donner
d'excuse à la population. Nous, les députés, ici en
Chambre, avons des responsabilités très graves. Il ne faut jamais
donner d'excuse. Merci.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: M. le Président, la dernière remarque du
député de Notre-Dame-de-Grâce vient mettre, à mon
avis, le « crémage » sur le gâteau autour du
débat et elle allait en plein dans l'esprit du débat depuis le
début, je pense bien. Il fallait s'attendre qu'à un moment
donné cette Chambre se décide à se payer un tel
débat.
Pendant quelques instants, j'ai eu l'impression que les
vétérans de cette Chambre ont pensé revivre la
période du bill 63 où ils étaient ici même, à
ce seul endroit, conscients de tenir la forteresse de la langue
française au Québec, pendant que jusqu'à
l'extérieur de cette Chambre on leur disait le contraire.
Je pense qu'au cours de ce débat nous n'avons pas, dans cette
Chambre, écarté l'image avec laquelle on a assez de
difficulté dans le public, celle qui veut que l'Assemblée
nationale soit une tour d'ivoire, où, à certains moments, tous
les partis font coalition un peu pour s'encenser et pour se justifier aussi
d'être l'un face à l'autre pendant des semaines interminables.
L'idée qui reste est celle que cette tour d'ivoire vient de
connaître encore quelques minutes de son sommet.
L'émotivité qui aentouré les débats et que
signalait le député de Bourget au début de son
intervention est tout à fait symbolique, à mon avis, des
gargarismes politiques que cette Chambre sait se donner à quelques
occasions sur son petit monde et pour justifier son existence.
On a, au cours de ce débat, condamné, d'une façon
assez unilatérale, des philosophies qu'on n'avait pas l'air de
connaître je ne prétends pas les connaître
moi-même mais on les mettait en bloc, tout d'un côté,
parce qu'elles ont le dos rond, comme le disait le député de
Bourget, et parce qu'il est facile habituellement d'invoquer cela à tout
venant.
Notez bien que, dans ce mélange de philosophies qu'on nous
faisait à la bonne franquette, j'ai l'impression qu'à certains
moments l'ignorance même était au menu, cette ignorance dont nous
avons peine, comme collectivité, à nous débarrasser depuis
une dizaine d'années.
Bien sûr, on a aussi et cela ne devait pas manquer
longtemps ronflé, roulé sur la démocratie que nous
représentons en ce Québec. Il fallait bien se la payer, à
un moment donné. On la nomme, on la flatte, on la coule, on se dit que
nous en sommes les porte-étendard et puis, voilà, nous sommes
justifiés et nous nous rassoyons.
Maintenant que nous sommes d'accord pour dire que des mesures de
sécurité doivent être prises, maintenant que nous avons
aussi eu l'occasion de dire, tout le monde en cette Chambre, que ce n'est
là que pour arrêter les effets, mais que les causes sont beaucoup
plus profondes, maintenant que nous avons, si vous voulez, passé notre
heure d' « autoflattement » collectif, après l'adoption le
plus rapidement possible, j'espère, de cette loi-diachylon,
légiférons, s'il vous plaît, si ce gouvernement en a
l'audace et la capacité, pour que nous n'ayons jamais plus à
revenir sur un pareil projet de loi.
M. LAPORTE: Il est encore le seul à avoir raison, contre tout le
monde. Bon, adopté?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Abitibi-Est.
M. Ronald Tétrault
M. TETRAULT: M. le Président, même si le
député de Saint-Jacques n'est pas en faveur de ce qu'on dit, je
voudrais féliciter le ministre de la Justice d'avoir proposé ce
bill. Sur les idées qu'on a développées sur le
maoïsme, le communisme et de tout ce qui s'ensuit, j'aimerais que certains
députés de cette Chambre puissent lire certaines revues
américaines faites avec le FBI ou le Bureau fédéral de
l'investigation qui disent que ces démarches, ces bombes ou ces
attentats sont faits par des éléments communistes. Je vois
très mal qu'ici, dans la province de Québec, il existe autre
chose, que ce soit un autre groupe, vu qu'il y a une frontière qui est
presque inexistante.
Maintenant, M. le Président, si on se rend compte de toutes les
démarches et de tous les mots choisis, glorifiés, bien
prononcés du député de Saint-Jacques, on pourra remarquer
que, lors de l'étude de certains crédits en cette Chambre, les
grands discours à n'en plus finir ont été faits par des
députés de l'extrême gauche qui sont assis à mon
extrême droite. Pour la bonne marche des travaux de la Chambre, je
propose qu'on appuie son idée, mais qu'il la mette en pratique.
M. LAPORTE: Adopté. DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que la motion de deuxième lecture
sera adoptée?
UNE VOIX: Adopté. M. LAPORTE: Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre de la Justice propose
maintenant que je quitte le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier.
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): Article
1.
M. PAUL: M. le Président, est-ce que l'honorable ministre de la
Justice pourrait nous donner une explication quant au silence de la loi au
sujet des explosifs?
M. CHOQUETTE: Au silence de la loi... M. PAUL: Sur les explosifs.
M. CHOQUETTE: Est-ce qu'on peut expliquer le silence?
M. PAUL: Nous ne trouvons aucune définition du mot «
explosif ».
M. CHOQUETTE: Cest parce qu'il y a des dictionnaires!
M. PAUL: Ah bien, voici, M. le Président, je pense que
c'est...
M. BERTRAND: Il y a beaucoup de dictionnaires!
M. PAUL: Je n'ai pas l'intention de faire une motion pour détails
pour savoir si c'est Littré, si c'est Larousse...
M. BERTRAND: Beauchemin. M. CHARRON: Robert.
M. PAUL: ... Robert ou un autre, mais est-ce que le ministre pourrait
nous donner une explication?
M. CHOQUETTE: Je voulais badiner avec le député de
Maskinongé. Nous nous sommes longuement consultés sur la question
de savoir s'il fallait inscrire une définition de ce qui est «
explosif » dans ce projet de loi.
Mais après avoir examiné la question, il a paru que quand
un terme désigne ce qui est le sens commun parce que le mot
« explosif » a un sens commun, il a un sens que l'on retrouve dans
les dictionnaires il n'est pas nécessaire d'exprimer une
définition de ce qui est « explosif » ou «
matière explosive ». Ceci a l'avantage de ne pas imposer de
limitations à ce qui est ordinairement reconnu comme étant des
explosifs. Cest la raison pour laquelle nous avons inscrit, pour
préciser l'étendue du projet de loi, la phrase suivante à
l'article 1: « Dans la présente loi, le mot « explosif
» comprend tout détonateur. » Parce qu'un détonateur,
c'est distinct d'un explosif.
Maintenant, une des très bonnes définitions que nous avons
trouvées du mot « explosif » est celle qui se trouve au
dictionnaire Robert.
M. PAUL: Pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi?
M. CHOQUETTE: C'est parce que cela ne sert à rien, dans les lois,
d'exprimer ce qui se trouve dans les dictionnaires.
M. PAUL: M. le Président, il ne faut pas oublier une chose, c'est
que cette loi devra nécessairement être soumise pour
interprétation à un juge, au tribunal. Nous nous exposons
à ce qu'il y ait autant d'interprétations de la loi qu'il y a de
juges. Si on veut innover dans le droit, dans la législation, je crois
qu'on choisit mal la loi qui, en quelque sorte, vient restreindre une
liberté.
Je me demande pourquoi on n'irait pas jusqu'à inscrire dans le
texte même de la loi l'une ou l'autre des définitions que l'on
peut retrouver dans un dictionnaire. J'ai partiellement compris l'explication
que nous a donnée le ministre. Ce que je crains, c'est que, devant les
tribunaux, devant nos juges de la cour des Sessions de la paix, nous ayons
à débattre l'interprétation ou l'application de cette loi.
Un juge à l'esprit large trouvera que l'objet saisi n'était pas
un explosif, alors qu'un juge, à la mentalité plus conservatrice
ou à l'interprétation plus limitative, trouvera peut-être
coupable celui qui aurait pu être facilement acquitté devant un
autre juge par suite de la règle d'interprétation.
Le ministre nous dit que la définition du dictionnaire Robert
semble complète. Pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi? Ce sera
là une pierre angulaire qui servira d'interprétation aux juges
qui seront chargés de scruter ou d'écouter la preuve qui pourrait
leur être offerte au sujet d'une infraction présumé ment
commise. Je dis
« présumément », parce que, dans certains cas,
peut-être qu'il y aura absence de preuve totalement et, dans d'autres
cas, il y aura une preuve évidente de culpabilité. Par suite de
l'appréciation trop libérale d'un juge, nous pourrions nous
trouver en face de certains dénis de justice dans certains cas.
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable député
de Maskinongé a sans doute consulté la loi fédérale
sur les explosifs, qui comporte, elle, une définition de ce qui est
explosif. Pour montrer jusqu'à quel point sa suggestion amène
plus de complication que de simplification du problème, je vais
simplement lui lire le début de la définition d'explosif.
M. PAUL: Des pétards.
M. CHOQUETTE: Signifie la poudre à canon, la poudre de mine, la
nitroglycérine, le fulmicoton. Est-ce que l'honorable
député est préoccupé par le sens de fulmicoton?
M. PAUL: Cela ne se cultive pas dans le comté de Westmount.
M. CHOQUETTE: La dynamite, la gélatine détonante, la
gélignite, les fulminates. Cela préoccupe le député
de Maskinongé, les fulminates?
M. PAUL: On ne veut pas la reproduction de la loi
fédérale, mais seulement une définition.
M. CHOQUETTE: Je sais. Mais l'honorable député semble
manifester un esprit juridique plus anglo-saxon que latin. Dans la conception
anglo-saxonne de la législation...
M. PAUL: Si c'est un compliment, je l'accepte. Si c'est un
défaut, je m'excuse.
M. CHOQUETTE: Dans la conception anglo-saxonne, on fait des textes de
loi extrêmement longs, remplis de définitions. On va dans les
moindres détails. L'esprit qui préside dans cette Chambre, c'est
l'esprit latin, c'est l'esprit de clarté. Alors, c'est la raison pour
laquelle il n'y a pas de définition du mot « explosif » dans
cette loi.
M. DEMERS: Tenez-nous au courant quand cela arrivera.
M. LAPORTE: Article 1, après explications, adopté?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2? Adopté. Article 3?
Adopté. Article 4? Adopté. Article 5? Adopté. Article 6?
Adopté. Article 7? Adopté. Article 8? Adopté.
M. PAUL: A l'article 7, qu'est-ce qui arrive quant à la valeur
commerciale de la dynamite que l'on retourne chez un fournisseur qui
n'était pas le vendeur?
M. CHOQUETTE: Chez un fournisseur qui n'était pas le vendeur?
M. PAUL: Supposons, par exemple, que j'achète de la dynamite,
comme le député de Lotbinière l'a signalé tout
à l'heure, et que, pour une raison ou pour une autre, je n'utilise pas
complètement ou totalement la dynamite que j'ai achetée. Si mon
vendeur à l'époque n'est plus en affaires, je dois retourner la
marchandise chez un autre vendeur.
M. CHOQUETTE: Exactement.
M. PAUL: Alors, qu'est-ce qui se produit à ce moment-là au
sujet de la valeur commerciale?
M. CHOQUETTE: Quand on dit « retourner » on ne veut pas dire
« rétrocéder » la dynamite achetée à
son fournisseur ou à un fournisseur. Ce que l'on veut dire, c'est
entreposer chez le fournisseur qui a vendu la dynamite ou, s'il n'existe plus,
chez un autre fournisseur. C'est-à-dire que des permis seront
émis aux fournisseurs, et les fournisseurs seront tenus d'avoir des
poudrières, des entrepôts, et d'accueillir la dynamite en
consignation de telle sorte que, à l'expiration du permis, celui qui a
un surplus de dynamite aura le choix soit de procéder à la
destruction de la quantité qui n'est pas utilisée ou de
l'entreposer moyennant un loyer qui sera fixé par les
règlements.
M. DEMERS: Est-il possible de détruire de la dynamite sans que
ça fasse trop de bruit?
M. CHOQUETTE: L'honorable député de Saint-Maurice a-t-il
peur du bruit?
M. DEMERS: J'ai peur, oui. Cela m'inquiète.
M. CHOQUETTE: Cela dépend où, cela dépend dans
quelles conditions.
M. DEMERS: Vous avez un moyen de détruire de la dynamite? Comment
peut-on détruire de la dynamite? En la noyant, quoi?
M. CHOQUETTE: Non, en la faisant sauter.
M. BELAND: M. le Président, j'entends des députés
dire que la dynamite brûle; ce n'est pas n'importe quelle sorte de
dynamite qui brûle. Pour répondre peut-être davantage au
député de Maskinongé concernant le retour de la dynamite,
la loi est très explicite dans ce sens-là, et les inspecteurs de
la Gendarmerie royale définissent très bien la situation
et...
M. PAUL: Ce ne sont pas eux, vous vous trompez de gouvernement.
M. BELAND: La personne qui vend de la dynamite doit détenir un
permis, autrement elle ne peut pas la vendre, ou alors elle est en marge de la
loi. Ce sont justement des cas semblables qui font présentement l'objet
de cette étude, de façon qu'il n'y ait plus, en aucune
circonstance, de dynamite qui se vende par des personnes autres que celles qui
ont des permis.
M. PAUL: M. le Président, devant le discours d'un dynamiteur
d'expérience, je trouve un excellent secondeur aux remarques que j'ai
faites à l'effet que notre loi est inutile et que la loi
fédérale peut s'appliquer et régler les problèmes
que vise l'honorable ministre de la Justice.
M. CHOQUETTE: La loi fédérale n'est pas suffisante.
M. PAUL: Sur quel point?
M. CHOQUETTE: C'est la raison pour laquelle nous sommes
obligés... Pardon.
M. PAUL: Sur quel point en particulier?
M. CHOQUETTE: En particulier, la loi fédérale ne
réglemente pas du tout la possession de la dynamite. Un règlement
a été passé à la suite de cette loi qui cherche
à réglementer la possession, mais on sait que ce règlement
n'a eu aucune application pratique, et on peut douter de la
légalité de ce règlement aussi. Je me permets d'ajouter
cet argument qui est très important.
Dans le cas actuel, il s'agit principalement de réglementer la
possession de la dynamite. Comme le sait l'honorable député,
l'article 26 de la loi fédérale autorise les gouvernements
provinciaux et même les municipalités à adopter, soit une
législation ou soit une réglementation sur la dynamite, qui vient
compléter la législation et la réglementation
fédérales. Alors il ne peut pas y avoir d'incompatibilité
entre la législation fédérale et notre
législation.
M. PAUL; M. le Président, nous n'avons jamais parlé
d'incompatibilité de lois. Il peut peut-être y avoir
incompatibilité de caractères mais nous n'avons jamais
parlé d'incompatibilité de lois. Nous avons dit que
c'était une loi qui n'avait pas l'urgence signalée
spécialement par l'honorable premier ministre dimanche dernier.
Nous avons dit qu'une législation existait dans les statuts
fédéraux et qui pouvait régler les problèmes que
voulait régler le premier ministre. Je sais que le ministre doit partir
en voyage; incidemment, nous lui souhaitons un excellent voyage à
Halifax. Je suis sûr qu'il n'aura pas l'imprudence des
déclarations de son collègue, le ministre des Affaires
municipales.
M. CHOQUETTE: Halifax, c'est fatal. M. DEMERS: C'est brumeux.
M. PAUL: J'inviterais le ministre à soumettre à ses
fonctionnaires, juste pour leur édification personnelle, la
définition que l'on trouve à l'article 4 - J du chapitre
102...
M. CHOQUETTE: Article 4 du chapitre 102. M. PAUL: ... des statuts
révisés duCanada.
M. CHOQUETTE: Oui, mais que peut-on faire si le fédéral ne
le fait pas? Ici, nous agissons, cela est évident, dans les limites de
notre compétence constitutionnelle. En plus, nous agissons ici à
la suite de l'article 28 de la loi fédérale qui dit que la
province peut adopter une législation ou qu'une municipalité peut
adopter une réglementation sur la question des explosifs.
Je ne vois pas la portée de la critique de l'honorable
député de Maskinongé lorsqu'il nous dit que le
gouvernement fédéral pourrait réglementer ce que nous
déterminons par notre projet de loi. Si le gouvernement
fédéral ne l'a pas fait ou ne l'a pas fait à notre
satisfaction, je pense qu'il incombe au gouvernement provincial actuel
d'adopter une législation appropriée.
M. PAUL: Il va y avoir duplication de permis.
M. CHOQUETTE: Pardon?
M. PAUL: Il va y avoir duplication de permis. Deux permis seront
nécessaires.
M. CHOQUETTE: Ce n'est pas une mauvaise affaire.
M. DEMERS: Deux permis.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 7, adopté. Article 8?
L'honorable député d'Abitibi-Est.
M. TETRAULT: A l'article 8, vous parlez de garder les explosifs dans un
bâtiment ou dans un contenant conforme au règlement. On remarque,
dans certaines réglons où il y ades mines, que c'est gardé
dans une petite cabane ou dans des constructions au milieu d'un champ. Est-ce
que ces endroits seront vérifiés pour s'assurer que c'est
conforme au règlement?
M. CHOQUETTE: L'honorable député a tout à fait
raison de poser la question. Il pourra constater, à l'article 22 du
projet de loi, que le lieutenant-gouverneur en conseil devra adopter des
règlements pour compléter cette législation, parce qu'il
est impossible de prévoir tous les cas pratiques dans un texte de loi
comme celui-ci. Il pourra constater que les pouvoirs réglementaires
prévus à l'article 22 du projet de loi nous permettent d'adopter
des règlements qui soient suffisants pour que les poudrières et
les cabanes où l'on garde la dynamite soient gardées en toute
sécurité et que l'on puisse éviter le vol.
Je peux ajouter qu'il y a également, en vertu de la Loi des
mines, une réglementation sur la question spécifique
soulevée par le député dans le domaine minier, en
particulier. Il faudra revoir cette réglementation pour qu'elle nous
donne pleine satisfaction sur la garde des explosifs qui sont conservés
par les compagnies minières.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, à l'article 8,
également, j'aimerais demander au ministre s'il est prévu dans
les règlements que, pour l'entreposage des explosifs dont on ne fait pas
usage, sur certains chantiers de construction, soit de routes ou autres, on
oblige les détenteurs de ces permis à avoir des gardiens
près des endroits où l'on entrepose la dynamite.
M. CHOQUETTE: On sait que la plupart des vols de dynamite qui ont
été commis dans les dernières années l'ont
été sur des chantiers de construction, dans des carrières,
en somme, dans des endroits où l'on utilise la dynamite à
l'occasion de la construction ou de ladémolltion. C'est la raison pour
laquelle l'intervention du député est tout à fait à
point. J'attire son attention, en particulier, sur l'article 26,
sixièmement, qui dit ceci: « Pour fixer les conditions
d'utilisation, de destruction, de manipulation, d'emmagasinage, de vente et de
transport des explosifs ».
A l'intérieur de cela, il ne nous est pas impossible d'adopter
une réglementation efficace. L'honorable député peut
être assuré que, dans le domaine des chantiers de construction, il
y aura des impératifs qui résulteront de la réglementation
et qui nous assureront que les explosifs seront bien gardés.
M. PAUL: M. le Président, dois-je comprendre que dans cette
dernière partie de ses remarques, le ministre se réfère
à un arrêté en conseil daté du 22 octobre 1969 et
dont on peut trouver reproduction dans le no 52 de la Gazette du Québec,
1969, à la page 7242? Pourrait-il nous dire s'il a l'intention
également d'apporter des modifications à cet arrêté
en conseil? Ce que vient de nous dire le ministre est déjà
contenu dans l'arrêté en conseil relatif à l'utilisation,
à l'usage des explosifs sur les chantiers de construction.
M. CHOQUETTE! Je connais l'arrêté en conseil en question et
je sais quand et comment il a été adopté. C'est un
arrêté en conseil qui résulte de la Loi des
établissements industriels et commerciaux et qui, par conséquent,
vise particulièrement les explosifs dans le domaine de la construction,
n'est-ce pas?
Maintenant, je ne suis pas un expert dans les mesures de garde que l'on
peut adopter à l'égard des explosifs. Je n'aurais pas la
prétention de dire à la Chambre: Eh bien, nous allons prendre
telles dispositions concrètes, pratiques pour assurer une bonne garde.
Nous allons consulter les autorités de la Sûreté, nous
allons consulter nos inspecteurs dans ce domaine et nous allons adopter une
réglementation qui préviendra les vols de dynamite comme ceux
qu'on a connus dans le Québec, parce que, manifestement, la
réglementation qui a été adoptée dans ce domaine
était insuffisante. C'est tout ce que je peux répondre à
l'honorable député.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Olier.
M. PICARD: Dans le domaine de la réglementation, est-ce que le
ministre a l'intention de prévoir une réglementation telle qu'il
soit interdit d'entreposer au même endroit et les dé-
tonateurs et la dynamite, les deux au même endroit? A ce
moment-là, s'il y a vol, il faudra qu'on commette deux vols pour
utiliser la dynamite.
M. CHOQUETTE: L'idée du député est
intéressante. Evidemment, si on veut qu'il y ait des explosions
légales quelque part, à un moment donné il faudra
réunir détonateur et dynamite. Par conséquent, il y aura
toujours un moment ou un endroit où il y aura une rencontre des deux. Je
ne sais pas s'il nous sera possible de réglementer d'une façon
aussi sévère que voudrait le faire le député, mais
nous allons sûrement considérer sa suggestion.
M. PAUL: M. le Président, je ferais remarquer à
l'honorable ministre de la Justice que ces dispositions existent
déjà sous la rubrique 42 dudit arrêté en conseil
où il est dit que les détonateurs doivent être
placés dans une pièce différente de celle où sont
placés les explosifs. Cette disposition existe déjà dans
la réglementation adoptée par l'ancien gouvernement.
M. CHOQUETTE: Je pense qu'elle existait même en vertu de la
réglementation fédérale.
M. PAUL: Oui.
M. CHOQUETTE: C'est-à-dire que pour la garde, pour éviter
que les détonateurs partent d'eux-mêmes et fassent exploser la
dynamite, on a spécifié qu'il fallait que les poudrières
soient distinctes. Mais il ne faut pas oublier que l'ensemble de cette
réglementation a été adopté surtout pour la
sécurité des ouvriers qui travaillent dans le domaine de la
construction; c'était normal aussi, je suis tout à fait d'accord.
Le problème de la sécurité des ouvriers est un
problème majeur, mais l'optique de la réglementation à
laquelle a fait allusion le député de Maskinongé tout
à l'heure celle adoptée en vertu de la Loi des
établissements industriels et commerciaux ainsi que la
réglementation du fédéral est une optique qui est
du domaine de la sécurité des employés et non pas une
optique comme celle qui nous inspire à l'occasion de la
présentation de ce projet de loi, c'est-à-dire prévenir la
possession illicite ou illégale de matières explosives quelles
qu'elles soient. C'est un point de vue quelque peu différent.
Evidemment, ces optiques se rejoignent dans beaucoup de domaines, comme l'a
signalé le député d'Olier, comme vient de le signaler le
député de Maskinongé, mais l'optique qui préside au
présent projet de loi est une réglementation de la possession. Il
s'agit de limiter, en somme, l'ac- cès aux explosifs aux seules
personnes qui en font un usage légal et de limiter également la
quantité que l'on peut se procurer de façon qu'elle soit
adéquate seulement pour les besoins de celui qui va l'utiliser.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Lotbinière.
M. BELAND: Je formule tout simplement la suggestion que voici pour
répondre à celle de l'honorable député d'Olier. La
réglementation fédérale est très claire
là-dessus; il y a un nombre de pieds déterminé entre la
poudrière où est entreposée la dynamite et l'autre endroit
où se trouvent les détonateurs. A ce moment-là,
peut-être qu'une copie, tout simplement, de cette réglementation
fédérale suffirait pour, enfin, sur le plan provincial, avoir
quelque chose de bien clair là-dessus.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté? Le
député d'Olier.
M. PICARD: Sur la remarque du député, je m'explique mal
alors les reportages des journaux lorsqu'il y a vol de dynamite et qu'on dit
qu'à tel endroit il y a eu 200 bâtons de dynamite de volés
et 150 détonateurs. Il semble que la réglementation actuelle ne
soit pas suffisante. Il semble que ce soit dans le même édifice,
contrairement à ce que dit le député de Maskinongé,
qu'on entrepose la marchandise. Je dis que le règlement que le conseil
des ministres sera appelé à adopter devrait prévoir qu'il
y aura une distance, disons de deux milles, entre les détonateurs et la
dynamite. Ils seront obligés alors de commettre deux vols pour
s'équiper d'explosifs.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté Article 9,
adopté. Article 10, adopté. Article 11, adopté. Article
12, adopté. Article 13, adopté. Article 14, adopté.
Article 15, adopté. Article 16.
M. PAUL: Sur l'article 14, avec votre permission, celui qui veut obtenir
un permis et qui se voit refuser l'octroi d'un tel permis par la
Sûreté du Québec a un appel devant qui?
M. CHOQUETTE: Devant le procureur général.
M. PAUL: Est-ce que la décision est finale?
M. CHOQUETTE: La décision du procureur général est
finale.
M. PAUL: Est-ce que ce sera le procureur général ou un
comité au sein du ministère?
M. CHOQUETTE: Le procureur général, ordinairement, cherche
à agir sur l'avis de ses conseillers. Je pense que c'est
l'expérience de l'ancien ministre de la Justice. Dans le domaine des
décisions qu'il était obligé de prendre et que je suis
obligé de prendre, je ne dis pas que je suis toujours l'avis de mes
conseillers, mais je les consulte.
M. PAUL: Vous êtes toujours bien conseillé?
M. CHOQUETTE: En général, je dois dire que je suis bien
conseillé.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 14, adopté. Article 15,
adopté. Article 16, adopté. Article 17, adopté.
M. BURNS: Est-ce que le ministre pourrait nous dire, étant
donné qu'à l'article 17 on voit que ce seront les membres de la
sûreté du Québec qui vont voir à l'application de
ça d'abord, ça va demander un grand nombre de membres de
la Sûreté du Québec si ça demandera un
accroissement de l'effectif de la Sûreté du Québec?
M. CHOQUETTE: Nous allons former une escouade qui sera
spécialement chargée de l'application de cette loi. Comme on a pu
le constater par un article en particulier qui a été
adopté tout à l'heure, certains membres de la Sûreté
auront comme fonction d'accorder des permis ou non. C'était là le
régime qui existait durant la guerre alors que, je crois,
c'étaient les officiers de la Gendarmerie royale qui émettaient
les permis pour la possession d'explosifs. Ce régime a donné
d'excellents résultats. Ce qui veut dire qu'en pratique, nous avons
l'intention, dans chacun des districts du Québec, d'avoir un ou
plusieurs officiers qui seront désignés pour émettre des
permis. On pourra s'y adresser, avoir une réponse extrêmement
rapide après une vérification de la quantité de dynamite
voulue. Quant aux inspecteurs d'explosifs qui sont désignés comme
tels dans l'article 17, ce sont ceux qui vont se rendre chez les entrepreneurs,
dans les mines, dans les carrières pour vérifier quelle est la
quantité d'explosifs en possesion de ces établissements et pour
vérifier leur permis.
Les permis vont prendre la forme de visas, de passeports plutôt,
où l'on aura inscrit les quantités que ces possesseurs ou
utilisateurs de dynamite peuvent avoir en leur possession, et la
quantité utilisée. Ensomme, ils seront obligés de garder
une comptabilité de l'utilisation. Nos inspecteurs seront nommés
en nombre suffisant pour faire ces vérifications, et vérifier les
lieux d'entreposage.
Quant au personnel exact requis, il est possible que, dans un avenir
rapproché, ceci requière l'augmentation du personnel de la
Sûreté. Il est très possible que ceci l'entraîne
comme conséquence. Ce sera avec l'expérience, je pense, que nous
pourrons juger des besoins de personnel additionnel.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 17, adopté?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18?
M. BURNS: M. le Président,...
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: ... à l'article 18, surtout que l'on vient de voir
à l'article 17 que ce sont des membres de la Sûreté
provinciale qui font ces inspections-là, il y a peut-être quelques
craintes que l'on peut soulever à ce moment-ci dans l'application
concrète de la loi.
Je suis bien d'accord qu'il devrait être difficile de faire dire
à la loi ce que l'on veut lui faire dire en changeant ce
texte-là, sauf qu'il y aurait peut-être lieu, pour le ministre de
la Justice je me pose la question qu'au moment de la mise en
application de la loi, les instructions appropriées soient
données aux membres de la Sûreté pour éviter que cet
article 18 soit utilisé, peut-être dans des intentions bien
louables, par la Sûreté, mais pour contourner un peu le
système du mandat de perquisition. Vous avez ici une possibilité
de la part des membres de la Sûreté et des inspecteurs en question
d'aller voir en tout temps et d'inspecter en tout temps.
Le ministre de la Justice a-t-il l'intention de donner des instructions
très précises à l'escouade en question pour éviter
que cet article 18 soit utilisé à d'autres fins que celles pour
lesquelles il a été conçu?
M. CHOOQUETTE: L'honorable député peut être
assuré que le ministre de la Justice est aussi conscient que lui des
possibilités qui existent toujours, lorsque l'on a un pouvoir
d'inspection comme celui-ci, que ces pouvoirs soient, en somme, étendus
par ceux à qui on le confie,
c'est-à-dire qu'il dépasserait les cadres de l'article 18.
Il ne faudrait pas qu'à la faveur des pouvoirs qui leur sont
autorisés, ces inspecteurs d'explosifs abusent de ce pouvoir
d'inspection, soit pour ennuyer des citoyens pour d'autres fins, ou soit pour
faire des demandes exagérées d'inspection.
Alors, je compte que Je pourrai faire comprendre aux membres de la
Sûreté d'utiliser ces pouvoirs à bon escient.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18? Adopté. Article 19?
Adopté. Article 20? Adopté. Article 21? Adopté. Article
22? Adopté. Article 23? Adopté. Article 24? Adopté.
Article 25? Adopté. Article 26?
L'honorable député de Maisonneuve.
M. BURNS: Juste une brève question. A l'article 25, c'est une
question d'application. Est-ce que le ministère à l'intention de
faire de la publicité au sujet de la mise en vigueur de cette loi
auprès des fournisseurs pour que les gens ne se fassent pas prendre un
peu de court avec ça? Parce qu'il y a un délai de 60 jours pour
obtenir les permis, il est possible que des gens se fassent surprendre par la
mise en vigueur de la loi. Est-ce qu'il y a quelque chose de prévu en ce
qui concerne la publicité qui sera donnée à cette loi chez
les fournisseurs ou chez les gens qui, normalement, achètent...
M. CHOQUETTE: Je note la suggestion du député et nous
allons nous mettre en communication avec l'Office d'information et de
publicité du Québec pour savoir quel programme d'information peut
être élaboré à l'égard du public, programme
qui ne serait pas trop coûteux, de façon que ce public soit au
courant de l'obligation qui lui est faite en vertu de l'article 25.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 25, adopté. Article 26?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 27?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 27, adopté.
M. CHOQUETTE: M. le Président, si vous me permettez de revenir
à l'article 22, je pense qu'il y a une disposition qui manque, à
la fin de cet article, au sujet de la publication des règlements dans la
Gazette officielle, de façon qu'ils n'entrent en vigueur qu'au moment de
cette publication. Cela répond peut-être en même temps, en
partie, à la question soulevée par le député de
Maisonneuve sur l'article 25, mais seulement en partie.
Alors, nous pourrions ajouter un amendement, c'est-à-dire un
paragraphe à la fin de l'article 22: « Ces règlements
entrent en vigueur à la date de leur publication dans la Gazette
officielle du Québec ou à toute autre date ultérieure qui
y est fixée. »
Je crois que c'est classique comme façon de s'exprimer sur ce
sujet.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'amendement proposé par le ministre de
la Justice, à l'article 22, est-il adopté?
UNE VOIX: Adopté.
M. HARDY (président du comité plénier): M. le
Président, le comité a adopté le projet de loi
numéro 35 avec un amendement.
M. LAVOIE (président): Est-ce que la motion est
adoptée?
M. BERTRAND: Adopté. Troisième lecture. Adopté.
3e lecture
M. LE PRESIDENT: Motion de troisième lecture. Cette motion
sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté. M. LAPORTE:
Troisième lecture. M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LAPORTE: Le bill de M. Tetley. Le bill 34.
M. PAUL: Ah cela, c'est grave!
M. BERTRAND: Là, il va y avoir de la casse!
M. PAUL: Cela fait longtemps que nous l'attendons.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu propose la
deuxième lecture du projet de loi numéro 34, Loi modifiant la Loi
des licences.
Licences
M. TETLEY: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de
la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude
à la Chambre.
M. BERTRAND: Très bien. Adopté.
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, adopté.
Comité plénier. Troisième lecture.
Adopté,
M. BERTRAND: Adopté. Vous pouvez partir.
M. TETLEY: J'avais un magnifique discours à prononcer.
M. BERTRAND: Le discours en même temps que votre repas.
M. PAUL: Vous le donnerez à la Gazette.
M. LAPORTE: Conjointement, presque, les articles 3 et 4, les bills 2 et
3. Troisième lecture des deux projets de loi.
M. CARDINAL: M. le Président, pour qu'on s'entende, il y a eu un
accord fait à la commission permanente des Institutions
financières, coopératives, etc. Nous pourrions peut-être
adopter le projet de loi numéro 3 immédiatement, parce qu'il a
été débattu en commission et, pour ne pas mêler les
deux projets de loi, parce que nos règlements nous le
défendraient, nous pourrions adopter le projet de loi numéro 2
tout de suite après, sur lequel j'aurais quelques remarques à
faire.
M. LAPORTE: Je suis tout à fait d'accord.
Caisses d'épargne et de crédit
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
troisième lecture du projet de loi numéro 3, Loi modifiant la Loi
des caisses d'épargne et de crédit. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
DES VOIX: Adopté. M. CARDINAL: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
Associations coopératives
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
troisième lecture du projet de loi numéro 2, Loi modifiant la Loi
des associations coopératives.
M. Jean-Guy Cardinal
M. CARDINAL: M. le Président, c'est tout simplement pour me
conformer à l'entente que nous avions eue, vendredi dernier. Les cloches
nous ont appelés en cet auguste lieu, alors que nous entreprenions
l'étude, en commission permanente, du projet de loi numéro 2.
J'avais alors, pour faciliter le travail de cette commission, dit avec le
ministre de la Justice, que nous étions d'accord sur le projet de loi,
sauf quelques remarques qui pourraient être faites en Chambre, au moment
de la troisième lecture. Avec votre permission, je me permets donc ces
remarques.
Au sujet du projet de loi numéro 3, les journaux certains
d'entre eux au moins se sont dits surpris, en fin de semaine, que j'aie
fortement insisté sur le fait que le projet de loi numéro 3 avait
été, tout d'abord, un projet du gouvernement de l'Union
Nationale. Je ne vois pas quel est le scandale qu'il y a dans ceci. Je me
permets, à nouveau, au sujet du projet de loi numéro 2, de
rappeler que, le 11 mars 1970, l'ex-ministre, député de Limoilou,
M. Maltais, dirigeant alors le ministère des Institutions
financières, avait proposé un projet de loi portant le
numéro 2 et qui s'intitulait Loi modifiant la Loi des associations
coopératives.
De même, le ministre de la Justice d'aujourd'hui, le
député d'Outremont, nous propose un projet de loi no 2, Loi
modifiant la Loi des associations coopératives. Il est à noter
que la fédération que l'on appelle Co-op Habitat, dont font
partie la plupart des coopératives d'habitation, s'est efforcée,
ces dernières années, de donner suite aux études faites
précédemment sur l'orientation et la restructuration souhaitables
du mouvement coopératif d'habitation, de même qu'on l'a fait avec
la fédération des Caisses populaires.
Au 31 mars 1970, il y a donc un certain temps, cette
fédération avait réalisé la construction d'environ
2,500 logements pour un coût total de $30 millions. Il est à noter
qu'il ne s'agit pas de logements subventionnés par l'Etat ou de
logements pour les assistés so-
ciaux. Il s'agit plutôt de projets coopératifs au
véritable sens du terme, dont le coût en général est
inférieur de 15% au coût du marché actuel de la
construction.
Les institutions financières du mouvement coopératif du
Québec, dans un geste de solidarité, ont mis à la
disposition de cette fédération Co-op Habitat l'argent
nécessaire pour assurer le financement temporaire requis pour la
réalisation de ce projet. J'ai étudié très
sérieusement et le projet de l'ex-ministre Maltais et le projet du
ministre actuel de la Justice. Je crois qu'il n'y a rien, sauf des
détails de concordance, sauf le fait que la Loi de
l'assurance-dépôts a été adoptée entre-temps
et sauf que le projet no 3 couvre dans le fond toute la substance de ce bill,
qui permette à l'Opposition officielle de s'opposer à ce
projet.
Tout au contraire, nous ne pouvons, fidèles aux engagements que
nous avions pris avant le déclenchement des élections, le 11 mars
dernier, qu'être favorables à ce projet de loi qui vient
protéger ce nom de Co-op ou de coopératives qui a
été abusivement utilisé par certains petits groupes pour
donner l'impression qu'ils construisaient des logis à prix modique. Les
différences entre les deux projets de loi sont tellement mineures qu'il
me fait plaisir de souligner que c'est une continuité qui
s'établit entre les deux gouvernements en faveur d'une
fédération qui a manifesté par ses réalisations la
justification de son existence et qui pourra sans doute dans l'avenir
être encore plus importante pour le Québec où, dans le
domaine des logis à prix modique, il y a vraiment une lacune. Nous ne
pouvons donc qu'être d'accord avec ce projet de loi. Si j'ai
réservé ces quelques remarques en troisième lecture, c'est
faute de n'avoir pu les faire auparavant à la commission. Par
conséquent, nous n'avons aucune réserve à faire et je
serais d'accord pour que nous adoptions en troisième lecture, sans
même passer par le comité plénier, ce projet de loi no
2.
M. LAPORTE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de troisième lecture
sera adoptée? Adopté.
M. LAPORTE: Article 10, M. le Président.
M. LE PRESIDENT; L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche...
M. LAPORTE: Ministre intérimaire du ministère des
Transports.
M. LE PRESIDENT: ... intérimaire du ministère des
Transports, propose la deuxième lecture du projet de loi no 25, Loi
modifiant le code de la route.
Code de la route
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en
recommande l'étude à la Chambre.
Le bill 25 n'a pour but que de présenter des modifications
urgentes au code de la route. Ce projet ne remplace pas un projet plus vaste de
révision du code de la route qui sera présenté
ultérieurement.
Le but des présents amendements est de prévenir ou, tout
au moins, de diminuer les hécatombes que nous avons connus ces jours
derniers sur nos routes au Québec. Ces accidents sont causés par
les imprudences et souvent par l'insouciance de certains usagers de la route.
En imposant des peines plus sévères dans ce projet et en
accélérant les procédures devant les tribunaux, nous
pensons apporter un remède dans l'immédiat.
L'article 1 a pour but de permettre un meilleur usage des autoroutes en
portant la limite de vitesse à 70 milles à l'heure et en
interdisant une vitesse inférieure à 40 milles à l'heure
aux véhicules trop lents qui constitueraient un obstacle à la
circulation des autres véhicules.
L'article 2 décrète l'imposition, en outre des
pénalités déjà prévues, d'une peine
d'emprisonnement à un conducteur qui contrevient à l'article 50
du code de la route concernant toute vitesse et toute action imprudente
susceptible de mettre en péril la sécurité, la vie ou la
propriété.
Cet article 2 a aussi pour objet de porter de $10 à $20 la
pénalité minimum dans les cas d'infraction aux articles du code
de la route traitant de la circulation des véhicules: conduite à
droite, croisements, dépassements, passages à niveau et autobus
d'écoliers.
Il hausse également les pénalités en cas de
récidive. Il contient, en outre, des dispositions de concordance. Quant
à l'article 3 de ce projet, il permet au gouvernement d'établir
le tarif des honoraires payables aux greffiers, aux huissiers, aux constables,
aux avocats et aux témoins dans les poursuites effectuées suivant
le code de la route.
Ces honoraires feront partie des frais de la cause. Ce qui
n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Cette disposition s'appuie
sur un arrêt de la cour d'Appel concernant un renvoi relativement aux
dépenses en vertu de la Loi des
convictions sommaires du Québec, rapporté en 1962, Banc de
la reine, page 533.
La cour a alors soutenu qu'une disposition semblable à celle
proposée à l'article 3 était valide. L'article 3-B) du
présent projet permet au juge ou au magistrat chargé d'entendre
une poursuite suivant le code de la route d'accepter un rapport signé
par la personne en autorité qui a constaté l'infraction, au lieu
d'exiger la présence à l'audition de cette personne. Le rapport
doit être dressé suivant un modèle approuvé par le
gouvernement. Un prévenu peut toutefois exiger la présence de ce
témoin à l'audition. Mais, s'il est reconnu coupable de
l'infraction et si le tribunal est d'avis que le rapport eût
été suffisant, ce prévenu peut encourir des frais
additionnels.
Enfin, l'article 4 de ce projet porte de $1 à $2 les frais de
l'avis sommaire qui doit être envoyé avant toute poursuite
pénale, comme on le sait. Cette réglementation est due à
l'augmentation inévitable des frais d'administration.
Enfin, l'article 5 permet au lieutenant-gouverneur en conseil de
réglementer la vitesse dans les municipalités, si le besoin s'en
fait sentir.
En conclusion, comme ces mesures présentent un caractère
d'urgence, je crois, M. le Président, qu'elles devraient être
adoptées le plus tôt possible.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: M. le Président, nous devons féliciter
l'honorable ministre de la présentation de ce projet de loi qui avait
été analysé et scruté par son
prédécesseur, l'honorable député de l'Islet,
à l'époque, M. Fernand Lizotte.
J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que l'honorable
ministre n'a pas mis de côté cet excellent travail qui a
été accompli par une commission spéciale, crée lors
des deux dernières sessions elle était
présidée par l'ancien député de Yamaska, qui
pourrait servir d'excellent exemple au député actuel de ce
comté aux fins d'examiner tous les amendements qui s'imposaient
pour répondre aux besoins de notre circulation moderne.
J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que le
gouvernement se propose de présenter, probablement dans le cours de la
prochaine session, une autre législation pour moderniser notre loi et
peut-être la rendre plus conforme à celle qui peut exister dans
d'autres provinces.
Le gros changement qui se produit en vertu de cette loi a trait aux
honoraires qui seront maintenant à la charge du prévenu, de
l'accusé devant les tribunaux. C'est, sous une forme
déguisée, une certaine taxe, une certaine charge...
M. LAPORTE: C'est vrai. Si c'est un impôt qui peut chasser ce
commerce-là du Québec, tant mieux.
M. PAUL: Oui, M. le Président, et j'arrivais justement à
cela.
M. LAPORTE: Ah bon!
M. PAUL; C'est une mesure renouvelée parce qu'autrefois cette
mesure était appliquée. Le gouvernement Lesage, dans un geste de
générosité, avait aboli ces charges qui, autrefois,
devaient être payées par les contrevenants à l'une ou
l'autre des dispositions de la Loi du code de la route. Il n'est que normal que
celui qui se prétend non coupable ou innocent d'une infraction qui lui
est reprochée ait à assumer les frais de cour lorsqu'il succombe
devant les tribunaux.
D'ailleurs, c'est la politique mise en application dans les causes
civiles. Je n'ai aucun doute, cependant, que le juge aura toujours, en
certaines circonstances, entière discrétion d'imposer ou non les
frais du procureur à celui qui sera trouvé coupable d'une
infraction au code de la route.
Cette loi va certainement contribuer à mettre fin à cette
hécatombe d'accidents que l'on déplore, surtout durant les fins
de semaine, alors que nous avons à regretter la perte de 30, 35 et
même parfois 40 citoyens du Québec qui décèdent sur
nos routes par suite d'une imprudence commise soit par le chauffeur ou par un
tiers venant à sa rencontre ou le dépassant.
Tous les accidents ne sont pas mortels, mais les dommages qui en
découlent sont devenus aujourd'hui une charge. Nous avons
peut-être là l'explication de la hausse constante des polices
d'assurance. Devant ces démons de la vitesse, qui ne se recrutent plus,
suivant les dernières statistiques, dans cette catégorie de 18
à 25 ans, mais dans la catégorie de 25 à 35 ans, nous
devons prendre tous les moyens possibles pour amener une certaine
sécurité sur nos voies publiques.
Ceux-là qui récidiveront devront supporter les
conséquences de leur imprudence, de leur entêtement, de leur
négligence parfois criminelle. Ce projet de loi est excellent, parce
qu'il est présenté par l'honorable ministre, et sur-
tout parce qu'il a été bien préparé par son
prédécesseur. Cet excellent mariage des activités des deux
ministres vous permet d'apprécier toute la quintessence et la valeur de
ce projet de loi que nous appuierons en deuxième lecture.
M. LAPORTE: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre intérimaire des Transports
propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (Président du comité plénier): Article
1.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Un instant. M. LAPORTE: Article 1,
adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté. Article 2?
M. LAPORTE: Adopté. M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté. Article 3?
M. LAPORTE: Adopté.
M. DUMONT: A l'article 3, on détermine que le
lieutenant-gouverneur peut établir le tarif des honoraires qui peuvent
être accordés aux greffiers, aux huissiers, aux constables, aux
avocats, aux témoins. Le ministre ne croit-il pas, dans ce cas, qu'il
peut y avoir certains abus et qu'il peut y avoir, de ce fait, des procès
qui deviennent, pour certains individus, très dispendieux?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il ne fait pas de doute, M. le Président,
que, jusqu'à maintenant, au contraire, les coûts étaient
loin d'être convenables par rapport à l'époque où
nous vivons. Je pense qu'avec la hausse du coût de la vie et la hausse de
toutes les procédures, il s'imposait de laisser une certaine
liberté au ministre, qui la recommanderait à ses collègues
du cabinet, si cela devenait nécessaire.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté? Adopté.
Article 4? Adopté. Article 5? Adopté. Article 6?
Adopté.
M. le Président, le comité a adopté le projet de
loi no 25 sans amendement.
M. LAVOIE (président): Troisième lecture. M. BERTRAND:
Troisième lecture. 3e lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre propose la troisième
lecture du projet de loi no 25. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, je remercie les membres
de cette Chambre de la célérité qu'ils viennent de
démontrer en acceptant cet excellent projet de loi et je remercie le
député de Maskinongé de ses remarques. J'ai ici un tableau
qui, s'il était distribué à tous les membres de cette
Chambre pourrait, je pense, aider à comprendre l'article 50, vitesse
excessive, et l'article 66-4, même si c'est un peu sous forme
sténographique. Je demanderais donc qu'on le distribue à chaque
député.
M. LAPORTE: Troisième lecture. Adopté. M. LE PRESIDENT:
Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, le dessert, il est rare qu'on l'ait
avant le repas, mais avant d'aller dîner, nous pourrions également
proposer l'article no 13, Loi autorisant des prêts à certains
pêcheurs commerciaux.
M. PAUL: Cela peut être long.
Prêts aux pêcheurs
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche propose la deuxième lecture du projet de loi no 30, Loi
autorisant des prêts à certains pêcheurs commerciaux.
2e lecture
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la
province a pris connaissance de ce bill et il en recommande
l'étude à la Chambre.
Le 19 mai 1970. comme ministre responsable du Tourisme, de la Chasse et
de la Pêche, j'interdisais la pêche commerciale en eau douce dans
une vaste région du Québec, parce que les poissons de ces eaux
étaient contaminés par le mercure. Ce problème de
contamination du poisson par le mercure a été constaté
pour la première fois au Canada en novembre 1969 lorsque des
scientifiques ont trouvé que les poissons de la rivière
Saskatchewan contenaient des quantités anormales de mercure.
Au mois de mars 1970, des analyses ont révélé
qu'une situation semblable existait dans les Grands Lacs et que les poissons
étaient pollués par le mercure. Dans chacun de ces cas, les
captures des pêcheurs ont été saisies et détruites
en vertu de la Loi sur l'inspection du poisson. A la suite de ces
constatations, le ministère fédéral des Pêches et
des Forêts a commencé, en collaboration avec les provinces, un
vaste programme d'analyse dans le but de connaîttre l'étendue des
régions affectées par cette pollution et de déterminer les
organismes qui en sont responsables.
Dans la province de Québec, ces analyses ont
révélé que des poissons provenant des eaux de la
rivière Outaouais, entre Hull et le fleuve Saint-Laurent, des eaux du
fleuve Saint-Laurent entre la frontière québécoise, dans
le lac Saint-François, et le pont de Trois-Rivières ainsi que des
eaux de la baie Missisquoi et de la rivière Richelieu contenaient des
quantités de mercure supérieures au maximum permis pour la
consommation humaine.
Dans le but de protéger le consommateur contre les dangers de
cette pollution, le ministère que je dirige a décidé de
suspendre toute activité de pêche commerciale dans les eaux
ci-haut mentionnées. Comme cette pollution présente des dangers
surtout pour les personnes qui mangent régulièrement du poisson,
on n'a pas jugé nécessaire, pour l'instant, de mettre fin aux
activités de la pêche sportive. On a tout simplement
recommandé aux amateurs de réduire autant que possible la
consommation des poissons capturés au cours de leurs excursions de
pêche.
La fermeture de la pêche commerciale dans la région
mentionnée affecte 111 pêcheurs, la plupart à revenu
modeste, qui à des degrés divers comptent sur ce travail pour
assurer leur subsistance. La moyenne du revenu total de ces 111 pêcheurs
pour les trois dernières années est d'environ $250,000 par
année. Il ne serait pas juste que ces pêcheurs perdent leur
gagne-pain habituel parce qu'une pollution causée par des industries
vient endommager le milieu aquatique.
Le projet de loi a donc pour but d'autoriser le ministère
à administrer un programme de prêts aux pêcheurs
affectés par la fermeture de la pêche commerciale et à
avancer à chacun d'eux une somme correspondante à leur revenu
moyen annuel.
Ces sommes leur permettront de passer cette période difficile et
ils rembourseront ces avances lorsqu'ils auront été
indemnisés par les industries responsables de cette pollution.
Au cours de rencontres préliminaires, le ministère
fédéral des Pêches et des Forêts s'est dit
prêt, comme il l'a fait pour d'autres provinces, à conclure avec
le Québec une entente par laquelle il s'engage à avancer la
moitié des sommes qui seront prêtées aux pêcheurs et
à partager les frais d'administration de mise en application de ce
programme.
Les principaux usagers de mercure au Canada sont les fabriques qui
produisent du chlore et de la soude caustique au moyen d'un
procédé électrolytique. Le plus grand nombre de ces usines
se trouvent concentrées le long du fleuve Saint-Laurent. On a
estimé à près de 200,000 livres la consommation annuelle
de mercure par les fabriques de chlore et de soude du Canada dont un
pourcentage considérable remplace le mercure perdu dans les affluents
d'usine.
Ces affluents sont donc une des principales causes de la contamination
des lacs et des rivières par le mercure. Un comité formé
de représentants de plusieurs ministères, Tourisme, Chasse et
Pêche, Industrie et Commerce, Affaires municipales, et du
ministère fédéral des Pêches et des Forêts
sera chargé de la mise en application du programme de prêts. Des
membres de ce comité rencontreront les pêcheurs pour leur
expliquer le programme de notre ministère et leur indiquer les
procédures à suivre pour obtenir un prêt. Chaque demande
sera étudiée individuellement et discutée avec le
pêcheur intéressé.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: Lorsque nous avons étudié les crédits de
l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, cette
question a été soulevée concernant la situation vraiment
déplorable qui était imposée à ceux qui, de mon
comté et d'ailleurs dans cette région sise à l'est des
Trois-Rivières, se trouvaient dans l'obligation de recourir à
l'assistance sociale pour leur permettre de subvenir aux besoins les plus
vitaux de leur famille.
La déclaration du ministre, à l'époque, avait
créé un certain enthousiasme et les pêcheurs étaient
confiants d'avoir un certain soulagement que pourrait éventuellement
leur apporter le ministre par une législation dont la teneur, cependant,
les a grandement déçus. Vous comprendrez que ces pêcheurs
à faibles revenus n'ont pas d'économies et voici que le
gouvernement je sais que cela ne dépend pas du ministre du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, mais des implications
financières. Comme le ministre n'est pas responsable des Finances, elle
doit se soumettre aux exigences de celui qui est titulaire de ce
ministère. Je dis donc que ces pêcheurs sont grandement
déçus. On va leur consentir un prêt avec ou sans
intérêt. La conséquence sera la suivante, c'est que l'an
prochain, pour autant que leur permis de pêche sera renouvelé, ces
pêcheurs seront dans l'obligation de rembourser l'argent dont ils auront
bénéficié cette année pour leur permettre de
subvenir aux besoins de leur propre famille. J'ai eu l'occasion d'en rencontrer
quelques-uns en fin de semaine et je crois qu'une fédération ou
une association quelconque a été mise sur pied. Les directeurs de
cette association se proposaient de rencontrer le ministre pour discuter de
cette législation et de toute autre mesure susceptible de les aider dans
la situation difficile qu'ils traversent.
Je vous dirai qu'à la lumière des renseignements que je
leur ai transmis par le texte de loi dont nous étions en possession
depuis la fin de semaine dernière tous m'ont répondu: Dans les
circonstances, nous sommes mieux de nous adresser à l'assistance sociale
que de nous prévaloir des dispositions de ce projet de loi. S'ils
bénéficient de l'assistance sociale, ils ne seront pas dans
l'obligation de rembourser leur argent. Tandis que, s'ils veulent se
prévaloir des dispositions du bill 30, ils devront, l'an prochain
sans savoir quel sera, à ce moment-là, l'intérêt de
la clientèle dans le marché du poisson, vu l'énorme
publicité qu'à juste titre on a faite cette année sur les
dangers que présente la consommation de ces poissons avec des
revenus incertains, en plus de faire face aux obligations normales de leur
famille, rembourser au ministère au moins une partie du capital,
même s'ils ont l'avantage de bénéficier d'un prêt
sans intérêt.
Je dis donc que cette législation ne règle pas le
problème. Cette législation ne secourt véritablement pas
les pêcheurs qui se sont vu priver de leur gagne-pain à la suite
de certaines ordonnances ou recommandation des autorités
fédérales. M. le Président, j'exprime les vues des
intéressés et je suis sûr que le ministre a
déjà été sen- sibilisé à la
réaction d'un très grand nombre de ces 111 pêcheurs qui
attendaient beaucoup plus du gouvernement. Ils espéraient que le
gouvernement leur donne directement une subvention, parce qu'ils ont à
faire face à une situation qu'ils n'ont pas voulue et le gouvernement
non plus.
Mais, puisque le gouvernement montre à leur égard un
certain intérêt, ils avaient raison de croire qu'ils pourraient
bénéficier d'une subvention directe grâce à cette
entente intervenue ou à intervenir avec les autorités
fédérales. Puisque ce dernier gouvernement est si empressé
de secourir, par exemple, les cultivateurs de l'Ouest en leur donnant de
l'argent pour qu'ils n'ensemencent pas leurs terres, ils avaient
espéré que, pour l'Est, le gouvernement fédéral,
dans un geste de coopération à l'endroit de la province, aurait
pu consentir certaines sommes d'argent pour les dédommager des pertes
qu'ils subissent durant la présente année.
Je sais, M. le Président, que la situation s'améliore. Les
informations sont à l'effet que la présence du mercure aurait
diminué de 50% depuis le printemps et que, de mois en mois, cette
situation s'améliore.
Un autre problème mérite d'être souligné,
c'est l'obligation dans laquelle se trouveront placés ces pêcheurs
de prendre des procédures en remboursement des dommages qu'ils
subissent. Ce n'est pas facile pour ces économiquement faibles de
retenir les services d'un avocat pour assurer une certaine indemnité ou
compensation des dommages qu'ils subissent.
Il faudra qu'ils établissent une certaine responsabilité
en vertu des règles de notre code civil, spécialement celles
prévues aux articles 1202 et suivants.
Une certaine preuve, une certaine relation devra être faite entre
l'exploitation de l'usine poursuivie, la présence du mercure et les
dommages qu'ils subissent. Voilà autant de difficultés, M. le
Président, qui font que ces pécheurs sont grandement
déçus et n'oseront pas se prévaloir des avantages purement
théoriques que leur offre ce présent projet de loi. Il est
à espérer, M. le Président, que, suivant les dispositions
de l'article 3 et grâce à la collaboration que le ministre du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche pourra obtenir d'Ottawa, des
concessions beaucoup plus avantageuses puissent être consenties au
Québec, afin que ces pêcheurs, affectés par cette directive
du gouvernement fédéral et des autorités du
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, portée
à leur attention dans les premiers jours du mois de mai, puissent avoir
une planche de salut et non pas une panacée qui, en fait, ne
réglerait rien.
Je dis donc, M. le Président, que le projet
de loi tel que présenté est un idéal
économique d'aide sociale, mais qui, en pratique, ne porte pas secours
aux pécheurs affectés par cet empêchement de faire la
pêche commerciale, dans cette partie sise à l'est de
Trois-Rivières, spécialement dans le lac Saint-Pierre et dans le
fleuve Saint-Laurent. Je ne serais pas surpris d'ailleurs l'honorable
ministre pourra le constater que ces pécheurs
préféreront de beaucoup se prévaloir des lois de
l'assistance sociale plutôt que de cette législation qui, en fait,
ne présentera aucun avantage pécuniaire pour eux.
Cependant, M. le Président, comme la collaboration du
moins c'est ce qu'on déclare à grands principes, avec de fortes
déclarations et les relations sont excellentes entre Ottawa et
Québec, nous espérons que le charme du ministre pourra convaincre
les autorités fédérales. La connaissant comme un excellent
plaideur, je suis sûr qu'elle pourra plaider avec avantage, et
succès surtout, la cause des pécheurs commerciaux affectés
par cette loi. C'est sous cet aspect, M. le Président, que nous voulons
appuyer le principe du bill, quitte à ce que chacun de nous,
après en avoir analysé toutes les implications, puisse convaincre
les intéressés de bénéficier ou de se
prévaloir des avantages consentis par cette loi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: M. le Président, comme quand le bill nous a
été présenté en première lecture, nous
aurions plusieurs observations à faire. A notre point de vue, il ne va
pas assez loin dans les deux sens, d'abord parce qu'il n'aide pas suffisamment
le pécheur pénalisé par des circonstances dont il n'est
pas responsable. Par la suite, je l'avais souligné, M. le
président, de mémoire d'homme je me souviens que l'eau
salée commence à Montmagny. Je trouve que ce projet de loi
devrait inclure la zone qui va de Trois-Rivières à Montmagny, par
exemple. Ce sont des pêcheurs qui sont aussi pénalisés, des
pêcheurs qui ne continueront pas à gagner leur vie; il y en a
à Saint-Michel-de-Bellechasse, il y en a dans Lotbinière, de ces
gens qui avaient un revenu. Il me semble que ce projet de loi devrait les
inclure, parce que, selon l'explication que nous avons eue du ministre, il
n'était pas question de ces régions.
J'ose espérer qu'il sera possible de présenter des
amendements, que les revendications de ces pêcheurs oubliés
viendront assez vite, et qu'on permettra à ces gens de
bénéficier de ce début de loi qui, nous l'espérons,
pourra par la suite être amélioré.
En fait, je le disais au début de mes observations, ces
pêcheurs ne sont pas responsables de cette situation, mais ils sont
obligés de la subir. Il est regrettable que des usines déversent,
tout en polluant l'eau, dans notre plus belle richesse, le fleuve
Saint-Laurent, ce mercure qui oblige les gens à ne même pas
consommer de poisson. Je disais, l'autre jour, que de Trois-Rivières
à Montmagny, le poisson se rend dans ce coin, et s'il est
empoisonné à Trois-Rivières, il peut aussi l'être
fort bien à Montmagny.
Il y a peut-être, dans ce bill 30, quelque chose qui nous fait
plaisir, n'en déplaise au député de Maskinongé,
bien que je n'aime pas trop l'intrusion du gouvernement fédéral.
Il me semble qu'il aurait pu trouver un autre moyen d'aider le gouvernement. On
a déjà entendu des réflexions de la part de certains
ministres, ou même du premier ministre: Négociation de millions
qui laissaient liberté complète, pendant que là, on parle,
dans le projet de loi, de 50 - 50. Il y a cependant un article qui nous fait
plaisir, soit l'article 1: Prêt avec ou sans intérêt. Nous
faisons le souhait que ce soit véritablement sans intérêt
et que, de ce fait, tout le monde en cette Chambre en soit satisfait
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.
M. Philippe Demers
M. DEMERS: M. le Président, je voudrais ajouter simplement un mot
aux propos qu'a tenus mon collègue de Maskinongé. Dans mon
comté, au niveau de Yamachiche et de Pointe-du-lac, il y a un certain
groupe de pêcheurs qui vivent eux aussi de la pêche. Cest leur seul
revenu. Ils sont pour la plupart très pauvres, et en hiver, ils vivent
de l'assistance sociale. Je me demande si le prêt qui leur sera consenti
ne les disqualifiera pas au point de vue du bien-être social. Comment
pourront-ils remettre ces montants de $2,400 qui leur seront vraisemblablement
prêtés tant par le provincial que par le fédéral? Je
ne vois en aucune façon comment cette loi peut améliorer le sort
de ces gens. S'ils sont inscrits, le temps qu'il faudra, au bien-être
social, ils pourront obtenir à peu près de $2,300 à $2,400
par année; c'est exactement le même montant qu'ils ne seront pas
obligés de rembourser aux deux gouvernements. Je comprends les
intentions du ministre. Elles sont très louables. Je la
félicite d'avoir mis ce projet de l'avant, mais je voudrais que
ce fût un prêt à fonds perdu. Que ce soit une donation
à ces gens qui ne vivent que de pêche.
Il faudrait nécessairement qu'on enlève le mot «
prêts » et qu'on leur donne une subvention. Ce sera un montant de
$125,000 qui partira des coffres du provincial. Que ce montant parte du
ministère du Bien-Etre social ou du ministère du Tourisme de la
Chasse et de la Pêche, c'est le même contribuable et nos gens
n'auraient pas besoin de rembourser. C'est le voeu que Je formule. Je suis pour
le principe. Je dis que c'est une loi qui n'est ni bonne ni mauvaise. Je
voterai tout de même pour le principe de la loi, mais je me demande ce
que ça va donner à ces pauvres pêcheurs qui sont victimes
d'une pollution qui doit exister depuis bien des années et qui a
été découverte tout récemment.
M. LE PRESIDENT! Le droit de réplique de l'honorable
ministre.
Mme Claire Kirkland Casgrain
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, les deux leaders
parlementaires de l'autre côté de la Chambre m'ont paru
passablement pessimistes lorsqu'ils se sont exprimés. Peut-être ne
sont-ils pas au courant qu'une loi analogue a été mise en vigueur
en Alberta. La, les pêcheurs étaient groupés dans une
association comme ils le sont d'ailleurs en Ontario et à
la suite de prêts qui leur ont été faits, l'association
centrale a intenté des poursuites contre les firmes qui polluaient les
eaux de mercure, a été remboursée et les pêcheurs
ont même obtenu plus que le montant que leur pêche annuelle leur
rapportait normalement. C'est l'expérience de Terre-Neuve.
Tout à l'heure, le député de Maskinongé
semblait dire que le charme du ministre pouvait aider. Or, il n'est pas
question du charme du ministre, mais d'équité. Je suis
persuadée que nous serons traités de la même façon
que l'Ontario, 1'Alberta et Terre-Neuve. Nous ne pouvons faire d'analogie avec
ce qui se passe, par exemple, dans le domaine de l'agriculture parce que dans
l'Ouest canadien en ce qui concerne la pêche commerciale le gouvernement
fédéral a fonctionné de la même façon, par
des prêts avec les gouvernements provinciaux.
Plusieurs options ont été étudiées,
évidemment, et nous ne sommes pas les seuls ici dans la province
à en être venus à cette conclusion que c'était la
solution logique pour vraiment rémunérer les pêcheurs qui
étaient privés de leurs revenus de trois mois durant
l'année.
L'Ontario a un projet analogue au nôtre et on sait cependant que
nous avons une difficulté au Québec parce que jusqu'à
récemment nos pêcheurs n'étaient pas groupés en
association. Mais justement, ils sont conscients du problème et ils se
sont groupés récemment. Ainsi, le gouvernement provincial pourra
intervenir dans les poursuites contre les compagnies qui polluent les eaux.
Il est question de prêts. Il me semble que c'est autrement mieux
que de se prévaloir des lois d'assistance sociale, autrement on porte
atteinte au respect et à la dignité de ces gens-là. Je ne
vois pas comment on porte atteinte à la dignité de ces
gens-là. D'ailleurs, on ne crée pas un précédent
avec cette loi. Il est fort possible que, l'été prochain, les
choses rentrent dans l'ordre. D'après les enquêtes que j'ai faites
et mes conversations avec des scientifiques, il y a de grandes chances que,
l'été prochain, la situation soit rétablie. D'ailleurs,
toutes les compagnies qui polluaient les eaux dans cette région que j'ai
mentionnée ont cessé, pour une bonne partie, de le faire.
Je dirais plus, elles ont remboursé les associations de
pêcheurs, avant même que la cause soit inscrite en cour, dès
qu'il y a eu une lettre de réclamation. La publicité, leur
était extrêmement nocive, elles n'étaient pas
intéressées à ce qu'elle se fasse. Je pense que la
façon dont le gouvernement, mon ministère en particulier, a
décidé d'agir est logique parce qu'elle respecte la
dignité des pécheurs. Ils sont assurés d'un revenu et on
les aidera à obtenir un remboursement des compagnies qui polluent les
eaux et qui causent cette haute teneur de mercure.
Pour ce qui est de la région de Trois-Rivières à
Montmagny, je comprends que la pêche, dans cette région,
relève de mon collègue, le ministre de l'Industrie et du
Commerce. Nous savons qu'à l'heure actuelle il n'y a pas lieu d'accorder
ces prêts parce que la teneur de mercure n'est pas dangereuse. On n'a pas
encore prohibé la pêche dans cette région. Si on devait le
faire, il y aurait toujours possibilité d'avoir une loi analogue, qui
pourrait être rétroactive. Je ne veux pas m'engager pour mon
collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, mais il n'y a pas
de doute qu'il y aurait moyen de trouver une solution pour venir en aide
à cette autre catégorie de pêcheurs qui peuvent avoir des
problèmes plus tard.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée? Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre propose que je quitte maintenant
le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier.
Adopté?
M. LAPORTE: M. le Président, peut-être pourrions-nous
suspendre... Est-ce que c'est adopté en comité?
M. LE PRESIDENT: Non, non. M. PAUL: Non, non.
M. LAPORTE: Non, c'est ce que je disais. Alors, on pourrait s'entendre
pour suspendre jusqu'à sept heures trente, plutôt que sept heures,
à moins que la Chambre ne s'y oppose farouchement.
M. PAUL: Nous pensions d'aller jusqu'à huit heures.
M. LAPORTE: Eh bien, n'y pensez plus! Le travail va bien et, si vous le
vouliez, le travail recommencerait à sept heures et demie. On pourrait
faire une autre excellente soirée et cela donnerait une heure et demie
pour le dîner.
UNE VOIX: Il faut fêter le premier ministre.
M. LAPORTE: Cela aussi me suggère de ne pas aller jusqu'à
huit heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à dix-neuf
heures trente.
Reprise de la séance à 19 h 33
M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre!
Article 1.
Comité plénier
M. PAUL: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au
ministre quelles sont les formalités à suivre pour celui qui veut
se prévaloir des avantages de cette loi et à qui il doit
s'adresser? Est-ce qu'il y a des formules spéciales d'émises ou
en voie de préparation pour la présentation de sa demande? Quels
sont les documents qui doivent être produits? Sur quels critères
va se baser le ministère pour considérer et accepter la demande
d'aide d'un pêcheur ou d'un commerçant de pêche, lorsqu'il
voudra présenter cette demande?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, il y aura des formules
spéciales. Le comité dont j'ai parlé, lors de la
première lecture, lorsque j'ai expliqué le projet, va rencontrer
les pêcheurs. Pour ce qui est des critères, les voici:
Premièrement, un pêcheur devra posséder un permis de
pêche commerciale pour l'année 1970.
Deuxièmement, il devra faire sa demande par écrit,
à l'aide de formules spéciales qui lui seront soumises.
Troisièmement, le prêt accordé à chaque
pêcheur sera basé sur la moyenne du revenu déclaré
pour les trois dernières années, selon les statistiques que ces
mêmes pêcheurs remettent régulièrement au
ministère de l'Industrie et du Commerce.
Quatrièmement, la somme maximum prêtée à
chaque individu sera approximativement 70% de son revenu brut.
Cinquièmement, il n'y aura pas de limite inférieure de
prêt. Après discussion, il a été convenu que fixer
une limite minimum de revenu pour obtenir un prêt pourrait
entraîner des protestations et des plaintes, et qu'il serait
préférable, lors des discussions avec les pêcheurs,
d'inciter ceux qui ont un faible revenu à ne pas se prévaloir de
cette possibilité de prêt qui représenterait pour eux
beaucoup plus d'inconvénients que d'avantages.
M. le Président, une remarque a été faite par le
député de Maskinongé à l'effet que les
pêcheurs qui auraient un revenu et qui auraient ce prêt seraient
obligés, dès le début de la saison, de l'utiliser pour
rembourser. Ils ne seront pas obligés de rembourser tant
qu'eux-mêmes ne seront pas payés par les industries qui polluent
les eaux.
M. PAUL: Est-ce qu'il y a je crois que c'est à l'article 2
une date limite à la présentation d'une demande
d'assistance? Est-ce qu'un pêcheur doit, avant une date donnée,
présenter officiellement sa demande d'assistance?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non. Nous n'avons pas prévu de limite dans
la loi, ce qui assure une certaine liberté aux pêcheurs.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: Quel serait le taux de l'intérêt, si
intérêt il y a? Est-ce que vous avez l'intention de prêter
avec ou sans intérêt et, s'il y a intérêt, à
quel taux?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non. Lorsqu'ils auront été
remboursés, les pêcheurs seront peut-être obligés de
payer de l'intérêt. S'ils le sont, ce sera au taux du
marché.
M. DEMERS: Sur la formule qu'ils vont signer, est-ce qu'il y aura un
taux d'intérêt inclus?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ce sera décidé au moment où
on leur présentera la formule.
M. DEMERS: Cela sera par les règlements que le ministre fera et
qui seront approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Absolument.
M. DEMERS: Vous ne pouvez pas nous assurer qu'il n'y aura pas
d'intérêt?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il n'y aura pas d'intérêt tant que
les pêcheurs ne seront pas remboursés.
M. DEMERS: Si les pêcheurs ne sont jamais remboursés, ils
ne paieront jamais d'intérêt, ils ne rembourseront jamais?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non, probablement pas.
M. PAUL: Je vois, au paragraphe 2 de l'article 1, qu'il peut aussi, dans
les mêmes circonstances, consentir un prêt à une personne.
Doit-on entendre exclusivement une personne physique ou une personne morale,
c'est-à-dire est-ce qu'une compagnie peut se prévaloir des
mêmes avantages?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela peut être une personne morale ou une
personne physique. Il faut que ce soit une personne qui vit exclusivement de la
pêche, même une compagnie, mais qui vit exclusivement de la
pêche. Je pense qu'il faudrait peut-être souligner ici que ceci a
pour but de prévenir toutes les demi-mesures qu'il pourrait y avoir, car
une foule de marchands pourraient tenter de se bénéficier de
cette loi.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2.
M. PAUL: On sait qu'en vertu des dispositions de notre code de
procédure il faut que nous ayons un intérêt pour
réclamer devant les tribunaux. Or il arrive qu'à l'article 2 on
ne semble pas vouloir respecter cet impératif de notre code de
procédure, puisqu'on permet au ministre de la Justice de se joindre
à un ou à des réclamants.
Nous savons que la plupart de ces pêcheurs devront d'abord essayer
d'établir d'où vient la pollution, d'où vient le mercure.
Selon la preuve sommaire qui pourra être recueillie, l'action sera
dirigée vers les usines établies le long du fleuve Saint-Laurent.
Si je m'en rapporte, par exemple, aux pêcheurs de la baie Missisquoi, qui
sont également compris dans cette classification ou dans ce nombre de
111, ils devront, eux, exercer un recours exclusivement contre les compagnies
de New York, qui sont la principale cause de la présence du mercure dans
les eaux de la Baie Missisquoi et du lac Champlain.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le dernier problème que souligne le
député de Maskinongé est de nature internationale, et nous
avons l'assurance du ministre fédéral des Pêcheries, M.
Davis, qu'il nous aidera à résoudre ce problème.
Quant à l'article 2, on a au moins intérêt à
récupérer l'argent prêté et à rendre justice
aux gens qui subissent quand même des préjudices
considérables.
M. PAUL: Ce n'est pas suffisant, M. le Président, de
réclamer au nom d'un prêteur. Le prêteur va réclamer
pour autant que l'emprunteur ne satisfait pas à ses obligations. Ce
n'est pas un principe reconnu par nos tribunaux que le prêteur ait un
intérêt suffisant pour présenter une réclamation
devant les tribunaux.
C'est seulement en cas de faute de la part de l'emprunteur qu'il peut y
avoir à ce moment-là subrogation à l'exercice d'un
droit.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le député se plaignait justement
cet après-midi que les pauvres pêcheurs, croyait-il ne seraient
pas aidés. Mais Justement, le gouvernement est peut-être mieux
outillé que l'association des pêcheurs peut l'être, ou le
pêcheur individuellement. C'est une façon d'aider le
pêcheur.
M. DEMERS: Est-ce que c'est l'équivalent d'une assistance
judiciaire qui va être fournie par le ministère de la Justice?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cette aide sera technique et judiciaire.
M. DEMERS: Oui.
M. PAUL: M. le Président, je comprends que le ministre ne peut
peut-être pas nous fournir la liste des compagnies
présumément en faute. Mais le ministre conviendra que si cette
liste était communiquée aux intéressés, ils
seraient probablement plus empressés à exercer un recours
immédiat.
Ceci leur permettrait peut-être de réclamer leurs propres
dommages sans se prévaloir des dispositions de cette loi et d'être
indemnisés immédiatement, non pas d'un montant nominal, mais des
dommages réels qu'ils peuvent subir. Il y a des pêcheurs
commerciaux qui, dans mon comté, par exemple, subissent des pertes de
près de $15,000. Ils sont donc intéressés, devant le
manque de revenus et la situation financière dans laquelle ils sont
placés, à recouvrer personnellement si possible, des dommages,
tout en ne voulant pas se servir des dispositions de cette loi.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, nous connaissons
certaines des compagnies qui causent la pollution. Il n'y a pas de doute que je
prends bonne note de votre remarque. Nous avions justement l'intention de
prévenir ces compagnies qui causent ce préjudice aux
pêcheurs. Elles seront avisées en temps utile. J'imagine que ce ne
sera pas nécessaire d'aller jusqu'au procès. L'expérience
nous a d'ailleurs démontré qu'en Ontario, dès qu'ils ont
reçu une lettre de mise en demeure, il y en a très peu qui se
sont rendus jusqu'aux procédures. Ils ont réglé avant
cette étape-là.
M. PAUL: M. le Président, ma demande n'était pas en faveur
des compagnies, mais plutôt en faveur des pêcheurs eux-mêmes
qui, pour la plupart, ne sont pas très instruits et ne connaissent pas
le ou les auteurs de ces dommages. Je comprends que les remarques de
l'honorable ministre auront sans doute pour effet de faire cesser cette
pollution par le mercure, mais cela ne réglera pas la situation
passée et l'état de fait devant lequel se trouvent placés
beaucoup de pêcheurs commerciaux.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: J'ai parlé tout à l'heure d'aide
technique et judiciaire; c'est justement l'aide que nous allons donner à
ces pêcheurs.
M. PAUL: Très bien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.
Article 3?
M. PAUL: M. le Président, à cet article, l'on voit que le
ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche peut convenir de
certaines ententes avec le gouvernement du Canada pour l'application de la
présente loi. Est-ce que le ministre pourrait, à l'occasion de
ces discussions, signaler aux autorités fédérales que ces
pêcheurs, durant la saison froide, bénéficiaient de
prestations d'assurance-chômage, par suite de contributions en timbres
qu'ils versaient à la caisse de la Commission de
l'assurance-chômage? Il est très probable qu'ils seront dans
l'Impossibilité de retirer des prestations durant la prochaine saison,
du moins les prestations saisonnières qui couvrent la période du
1er décembre au 15 mai.
Peut-être le ministre pourrait-il discuter d'un amendement
possible ou de certaines concessions de la part des autorités
fédérales pour que ces gens qui auraient
bénéficié depuis deux ou trois ans de prestations
d'assurance-chômage durant la saison froide puissent être
automatiquement qualifiés, reconnus comme qualifiés, pour
recevoir lesdites prestations durant la prochaine saison froide.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le problème a été soumis au
gouvernement fédéral. Un haut fonctionnaire du ministère,
le docteur Corbeil, qui m'accompagnait, et moi-même avons souligné
ce problème au ministre responsable, M. Jack Davis, et je peux vous dire
qu'il est à l'étude.
M. PAUL: Très bien.
M. DEMERS: Est-ce que l'entente est signée actuellement?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Pas encore.
M. DEMERS: C'est encore au stade des études?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Encore, oui. C'est-à-dire qu'il y a des
négociations en ce moment et c'est en bonne voie de
règlement.
M. DEMERS: Les négociations porteraient sur la contribution de
50-50 par le provincial et le fédéral pour un montant
approximatif de $250,000? C'est à peu près cela?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, et il y a d'autres problèmes connexes
au problème de la pêche commerciale.
M. DEMERS: Est-ce que le fédéral va intervenir sur la
pollution? Absolument pas?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y a certaines usines que nous connaissons qui
polluaient les eaux et qui ont été averties, justement, par le
gouvernement fédéral.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3? Adopté? Adopté.
Article 4?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5?
M. PAUL: Adopté.
M. HARDY (président du comité plénier): M. le
Président, le comité a adopté le bill no 30 sans
amendement.
M. LAVOIE (Président): Troisième lecture?
Troisième lecture
M. LAPORTE: Troisième
lecture, adopté?
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion est adoptée?
Adopté.
Bills nos 23 et 24
M. HOUDE (Limoilou): J'ai l'honneur de faire rapport que la commission
des Finances a adopté le bill 23, sans amendement et a adopté
tous les articles du bill 24 sans amendement.
M. LAPORTE: M. le Président, peut-être, à la suite
de pourparlers que nous avons eus avec les chefs des différents partis,
pourrions-nous nous entendre pour franchir l'étape du comité
plénier et voter les deux projets de loi en troisième
lecture.
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Le rapport est-il adopté?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Troisième lecture?
M. BERTRAND: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, avec un délai de quelques
secondes qui permettra au ministre des Affaires municipales...
Article 5.
M. BERTRAND: Le projet de loi de la ville de Montréal...
M. LAPORTE: Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Le
ministre devrait être ici d'une seconde à l'autre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la charte de la
ville de Montréal. L'honorable ministre des Affaires municipales.
Charte de Montréal
M. BERTRAND: Discours.
M. TESSIER: M. le Président, cette loi est plutôt de la
nature d'un bill privé, puisque, il s'agit en effet, d'amender la charte
de la ville de Montréal. Cependant, vu que des élections
municipales doivent se tenir dès le mois d'octobre à
Montréal et qu'il avait été décidé qu'aucun
bill privé de municipalité ne serait présenté au
cours de la présente session, le gouvernement se fait le parrain de
cette loi.
Elle a pour but principal de donner le suffrage universel aux prochaines
élections municipales de la ville de Montréal. Il convient,
toutefois, de souligner que le projet de loi no 5 est une mesure
essentiellement temporaire, puisque toutes les dispositions législatives
régissant actuellement les élections municipales, qu'il s'agisse
de lois générales, telles que la Loi des cités et
villes
ou le code municipal, ou encore de lois spéciales telles que la
charte de Montréal, seront remplacées par une nouvelle loi
générale unique s'appliquant à toutes les
municipalités du Québec, laquelle sera soumise à cette
Chambre lors de la reprise de nos travaux à l'automne.
Je puis même ajouter que cette loi est actuellement prête et
rédigée, mais vu qu'elle comporte au-delà de 500 articles
et que son étude pourra par conséquent être assez
laborieuse, étant donné qu'elle s'appliquera à toutes les
municipalités, qu'elle dérogera à toutes les dispositions
qui existent dans toutes les chartes des municipalités, que ce soit la
ville de Montréal ou la ville Québec. Cette loi, vu son
importance, sera donc présentée au cours de la session
d'automne.
Dans cette optique, on ferait donc fausse route en cherchant à
trouver, dans le projet de loi no 5, un remède à tous les maux
qui affligent, selon certains, la loi électorale provinciale, comme on
ferait fausse route en y recherchant une refonte complète des
dispositions électorales de la charte de Montréal. En
présentant ce projet de loi, le gouvernement veut accorder, comme je
l'ai mentionné, le suffrage universel, c'est là son principal
but, comme le prévoient d'ailleurs les lois générales, et
en étant plus généreux encore, puisque ce suffrage
universel s'applique aux citoyens de 18 ans et plus. Comme on le sait,
actuellement, aux élections municipales, la ville de Québec
accorde le suffrage aux citoyens de 18 ans. Il s'agit donc de l'étendre
maintenant, à la ville de Montréal et, par la suite, avec la loi
générale des élections municipales, à laquelle j'ai
fait allusion il y a un instant, de l'étendre à l'ensemble de
toutes les municipalités du Québec.
Le projet prévoit également que le conseil n'a aucun
contrôle sur la nomination du personnel électoral non plus que sur
le déroulement de l'ensemble des opérations électorales.
En effet, c'est le président d'élection qui est responsable de la
nomination de ce personnel et de la bonne marche des opérations
électorales. Le recensement se fera de la même façon que
lors des élections provinciales et fédérales: dans les
sections urbaines, des avis de révision et des listes électorales
seront publiés dans les journaux. En ce qui a trait aux partis reconnus
dans le domaine municipal, il faut dire que rien, dans les lois actuelles
régissant les municipalités n'en écarte la
possibilité, mais il faut ajouter que l'économie
générale du système municipal n'a pas été
conçue en fonction de l'existence de partis au niveau municipal.
Aussi serait-il absolument nécessaire, avant de s'engager dans
cette direction, de mesurer en profondeur toutes les implications de ce chan-
gement d'orientation dans l'économie de tout notre système
municipal, je le répète.
Le but primordial de cette loi est d'accorder le suffrage universel tout
en protégeant le plus possible les électeurs dans l'exercice de
leur droit de vote.
M. Rémi Paul
M. PAUL: Cette loi nous est présentée aujourd'hui par le
ministre des Affaires suivant un procédé inhabituel. L'on sait
que le bill de la ville de Montréal a toujours été
présenté à la commission des bills privés et des
bills publics, sauf à de très rares exceptions. Cette coutume qui
s'appliquait à la ville de Montréal ainsi qu'à toute les
municipalités permettait à ceux qui avaient des recommandations
à faire ou qui s'y opposaient d'être entendus par la commission
d'exposer leur point de vue et de faire les recommandations qui s'imposaient
pour que cette charte de la ville de Montréal contienne les
modifications qui répondent le plus et le mieux possible à une
bonne administration.
Je me demande pourquoi le gouvernement n'a pas suivi cette coutume.
Dès le 15 février dernier, l'avant-projet de loi avait
été soumis aux hauts fonctionnaires du ministère des
Affaires municipales comme aux légistes du gouvernement pour qu'ils en
revisent le texte, et ce projet de loi aurait du normalement être
présenté devant la commission des bills publics vers la fin du
mois de mars. Si le gouvernement avait procédé de cette
façon, nous aurions eu l'avantage d'entendre, par exemple, la FRAP, qui
nous aurait exposé les raisons pour lesquelles elle s'oppose à
certaines modifications, à certains articles du bill, comme le droit de
vote que l'on veut donner aux corporations.
Je dis donc que le gouvernement n'a aucune excuse de ne pas avoir pris
les moyens nécessaires pour que ce bill soit étudié par la
commission des bills privés et des bills publics. Ce qui a
été fait la semaine dernière pour les Soeurs de la
Providence de Joliette aurait pu être facilement fait pour le
présent bill de la ville de Montréal.
C'est avec beaucoup d'intérêt que nous avons
écouté les propos du ministre au sujet de cette refonte
envisagée de notre système électoral au niveau municipal.
Ceux qui l'ignoreraient seront heureux d'apprendre que cette loi tenait
grandement à coeur au prédécesseur du ministre actuel,
l'ancien ministre Robert Lussier, qui avait travaillé avec acharnement,
avec beaucoup de soin, à la présentation de cette loi.
Nous-même, nous avions déjà eu l'occa-
sion d'examiner au comité de législation cet avant-projet
de loi qui a été préparé à la demande
même de l'ancien ministre des Affaires municipales.
Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas signaler le travail
excellent accompli par l'ancien ministre des Affaires municipales, Robert
Lussier, et c'est avec plaisir qu'à l'automne, nous prendrons
connaissance de cet avant-projet de loi. Le ministre actuel des Affaires
municipales ne manquera pas alors de rendre un vibrant hommage à son
prédécesseur, qui s'est spécialisé dans les
législations volumineuses. Tous se rappelleront ces importants projets
de loi des communautés urbaines de Montréal, de Québec et
de Hull, sans compter les amendements très intéressants qu'il
nous avait présentés au cours de la session 1968 relativement au
code municipal et à la Loi des cités et villes.
Je dis donc que cette loi est acceptable, parce qu'elle n'est que
transitoire. Lorsque nous aurons l'occasion d'étudier cette nouvelle loi
électorale dont vient de nous parler le ministre, nous aurons
certainement des remarques appropriées à faire afin de
sauvegarder ce principe essentiel du suffrage universel dans une
démocratie bien vivante.
Pour ce qui est des différents amendements que l'on retrouve dans
cette loi, nous en approuvons le principe. Lorsque nous étudierons cette
loi en comité plénier, nous verrons que la plupart des
amendements proposés au bill 5 sont la transcription presque
littérale de certains articles de notre Loi électorale, qui peut
prêter à beaucoup de discussions ou de critiques, mais qui
était une réforme importante de l'ancien système
électoral que nous avions.
Je dis donc, M. le Président, qu'encore pour ce projet de loi le
ministre des Affaires municipales n'a pas beaucoup de mérite, si ce
n'est que d'être le porte-parole de ses fonctionnaires, le porte-parole
des conseillers de la ville de Montréal, qui avaient pris soin, avec les
légistes du gouvernement et avec les hauts fonctionnaires de terminer le
texte qui nous est soumis aujourd'hui.
C'est pourquoi, M. le Président, en deuxième lecture, nous
appuierons le principe de ce bill.
M. BERTRAND: Très bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: M. le Président, dans le bill 5 intitulé Loi
modifiant la charte de la ville de
Montréal, je remarque surtout dans les notes explicatives que ce
projet a pour principal objet de permettre à toutes les personnes
domiciliées à Montréal et âgées d'au moins 18
ans de voter aux élections municipales.
Dans un tel bill, qui comporte 17 pages, on a l'impression que tout le
monde a hâte d'entrer en vacances! Je me pose la question à savoir
si, justement, le ministre a bien analysé toutes les implications de
cette déclaration principale. Je ne dis pas que je me prononce contre le
vote à 18 ans, mais je me demande si le ministre a bien analysé
toutes les implications que cela peut comporter. J'en cite une entre autres, et
je me demande s'il pourra tout à l'heure nous donner des explications.
Supposons qu'un jeune de 18 ans soit élu conseiller ou qu'il devienne
maire de la ville de Montréal.
A ce moment-là, comme il n'a pas le droit, juridiquement parlant,
d'agir avant 21 ans, est-ce qu'il est prévu quelque chose dans la loi
qui permettra à ces jeunes de 18, 19 ou 20 ans, ayant le droit de vote
supposons qu'on ne choisira pas, à Montréal, un maire
aussi jeune, mais il pourrait être conseiller d'exercer quand
même une action?
J'ai l'impression que, dans ces 17 pages d'intervention qu'on peut lire
sur les projets présentés, on devrait avoir eu le temps
d'étudier plus à fond ce projet de loi.
Quand on voit que, dans une grande ville comme Montréal, il n'y a
qu'à peu près 40% ou 45% des gens qui votent, je me demande si on
ne devrait pas plutôt chercher la cause qui fait que cette
quantité de gens ne sont plus intéressés à voter.
Ils ont le droit de le faire à partir de 21 ans, quand leur santé
leur permet de se rendre au bureau de votation. A mon sens, avant de donner le
droit de vote à 18 ans, on devrait voir pourquoi cette population est
apathique et ne semble pas tellement intéressée à
continuer à exercer ce droit qui exprime encore notre liberté
dans la province de Québec et dans le Canada.
M. le Président, il me semble donc c'est la critique que
je formule à ce moment-ci qu'on nous présente un peu trop
rapidement cette Loi modifiant la charte de la ville de Montréal et
qu'on devrait en analyser les articles, ce qui nous donnerait le temps de nous
documenter beaucoup plus à fond.
Enfin, lorsque le bill sera étudié article par article,
nous aurons plusieurs interventions à faire.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: M. le Président, j'ai noté avec un sourire les
excuses du ministre, tentant, d'une façon très habile, de nous
expliquer au départ les lacunes du projet de loi qui s'en vient. Je
trouve cela très habile, mais il n'est pas normal de laisser passer une
si belle occasion d'être efficace. En effet, il aurait été
possible de commencer une uniformisation de tout le système
électoral du Québec par le bill 5 modifiant la charte de la ville
de Montréal.
Je pense que cette réforme apportée par le bill 5 au
régime électoral de la ville de Montréal est absolument
incomplète, déficiente et, je dirais même qu'elle est en
retard sur le régime électoral de la province de Québec.
Je pourrais qualifier ce bill de cataplasme sur une jambe de bois, parce que le
seul avantage que le régime électoral de Montréal nous
apporte, c'est l'élection à date fixe. Or, ceci existait avant
même la présentation de ce bill 5. C'est sûr que c'est le
seul avantage que nous avons, parce que cela empêche quand même les
partis d'être pris par surprise à l'occasion du
déclenchement d'une élection.
On parle, dans ce bill, du suffrage universel à 18 ans. Ceci,
quand même, risque d'être une fiction, si le régime
électoral de Montréal n'est pas remanié dans son
ensemble.
Les amendements proposés par le bill et qui s'inspirent vaguement
de la Loi électorale du Québec ne suffisent pas, je pense,
à consacrer dans les faits l'exercice du droit de vote et aussi
l'efficacité de ce droit de vote. Avant d'en arriver à
l'étude systématique des articles au comité qui va suivre,
il est urgent et nécessaire d'en scruter à la loupe les
principes.
Dans le monde urbanisé où nous vivons de plus en plus, je
pense qu'il est essentiel qu'un gouvernement vise à atteindre le plus
large consensus possible des citoyens qu'il a à administrer. Pour
atteindre ce consensus, encore faut-il que l'ensemble des principes qui
sous-tendent les projets de loi convienne de façon plus ou moins
disons plus que moins approximative aux besoins de la population. Il est
donc nécessaire que le gouvernement accepte d'être limité
et surtout orienté par ces besoins. Un gouvernement qui ne tiendrait pas
compte de cette évidence ne saurait prétendre être un
gouvernement démocratique.
En ce qui concerne le bill 5, c'est d'abord et avant tout cette question
qu'il importe de se poser. Dans les principes qui sont à la base de la
rédaction des différents articles de ce bill, peut- on dire qu'on
découvre un gouvernement réellement soucieux d'obéir au
bien commun sous toutes ses formes de la population de Montréal? En
fait, c'est la réponse à cette question qui permettra de juger de
la valeur réelle de cette loi. Le système électoral de
Montréal a un urgent besoin d'être réformé et nous
ne pouvons qu'approuver l'idée de le moderniser. Il est proprement
aberrant qu'en cette seconde moitié du 20e siècle, une des plus
grandes métropoles de l'Amérique en soit réduite au
système moyenâgeux du droit de vote basé sur le droit de
propriété. Cette façon de conférer le droit de vote
était déjà souverainement injuste et faisait une entorse
de taille au principe d'égalité de tous les citoyens, principe
qui est le fondement supposé de tout instrument démocratique.
Je dirais qu'en plus d'être injuste, démocratiquement
parlant, ce système aura réussi jusqu'à maintenant et,
puisqu'il n'est pas réformé, continuera encore à
créer une longue tradition d'indifférence de l'ensemble des
citoyens en face de la chose publique municipale. Le réveil politique
municipal demeure encore chez nous, au Québec, quelque chose de nouveau.
Il est manifeste que les tenants de ce réveil ont bien souvent
commencé par réclamer le suffrage universel à 18 ans, afin
de sauvegarder justement le principe dont je parlais plus haut. A ce sujet, il
faut se réjouir quand même que le gouvernement ait accepté
le principe du suffrage universel à 18 ans. C'est un pas dans la bonne
direction, mais, il nous faut le constater, ce n'est qu'un pas bien timide.
Ceux qui ont proposé cet amendement à ce bill ne semblent pas
avoir profité de l'expérience funeste du 29 avril dernier. On
devrait savoir qu'il faut plus que des réformes timides du genre du bill
5 pour éviter que des centaines de citoyens ne puissent se faire
inscrire sur la liste électorale. Je pense qu'il faut plus que des
« réformettes » pour que des personnes ne soient
radiées injustement et d'une façon arbitraire. Je pense que les
propositions qu'on nous présente sont suffisamment insignifiantes pour
empêcher que des demandes d'inscription soient réellement
acheminées pour permettre le vote et que des noms fictifs soient
inscrits sur les listes. Je pense qu'il faut plus que des réformes
timides pour que des personnes qui ne sont pas électeurs, qui ne sont
pas citoyens, soient capables d'exercer un droit de vote qui ne leur appartient
pas, permettant par la suite des « télégraphes » que
l'on ne peut pas contrôler. Je pense qu'il faut plus que des
réformes timides pour que des avis de radiation puissent être
envoyés sans contrôler l'envoi et le
récépissé. Je pense que même le style du bulletin de
vote devrait être repensé
parce que cela donne lieu à une quantité de
décisions arbitraires au niveau des bureaux de scrutin.
Dans mon comté uniquement, à l'élection
provinciale, j'ai eu le record de votes rejetés soit 2,074, d'une
façon très arbitraire; on semblait vouloir ma défaite
à tout prix.
Il faut plus, je pense, pour éviter des failles dans ce
système, que la présentation de ce projet de loi qui peut
permettre encore que des élus ne soient pas réellement les
représentants de la majorité de la population.
Je pense aussi que ce projet de loi ne touche même pas au
problème des caisses électorales, et ceci empêche le
principe de l'égalité des chances de tous les partis reconnus
devant la population.
Je pense que ce projet de loi rate aussi une occasion de faire une
amélioration des moeurs électorales dans toute la province et
surtout dans Montréal. Pour épurer ces moeurs électorales,
il faut repenser la loi pour empêcher que des bulletins de vote soient
volés et parfois avant même qu'ils ne soient partis du bureau de
l'imprimeur. Il faut que les scrutateurs et greffiers aient des pouvoirs
discrétionnaires. Il faut empêcher qu'il y ait des
irrégularités qui ne soient même pas notées,
empêcher que la propagande des partis, durant la période de la
publicité, ne soit pas contrôlée, et qu'on frôle
tellement le libelle qu'on dépasse certainement de beaucoup
l'éthique professionnelle. Je pense, en effet, que si on espère
beaucoup de ce projet qui est devant nous, on a des chances dêtre
déçu, à moins d'y apporter des correctifs
sérieux.
Parler de démocratie, c'est parler de bien commun, c'est parler
aussi de l'égalité de tous les citoyens devant les institutions
politiques et c'est parler d'efficacité dans l'administration des fonds
publics.
Or, ce projet de loi, d'apparence innocente, viole sans vergogne les
quelques principes que nous venons d'évoquer. Peut-on dire qu'on
respecte le suffrage universel énoncé dans le titre même du
bill, lorsqu'on accorde le vote à ces personnes morales qui sont des
compagnies, des sociétés commerciales, des corporations à
fonds social, des sociétés, des associations, des syndicats?
Au nom de quel droit ces personnes peuvent-elles voter alors que, dans
l'intention même du législateur, il reprend d'une main ce qu'il
vient d'accorder de l'autre? Si un principe recèle toutes ces
implications, il faut craindre que l'acceptation du vote des personnes morales
dans ce projet de loi ne soit de ce genre de concessions qu'un homme ou qu'un
gouvernement pratique pour tenter de contenter tout le monde et son
père.
Je pense qu'au niveau des principes, ce projet de loi pèche
déjà gravement contre l'égalité de tous les
citoyens en matière politique en accordant le droit de vote à des
compagnies.
En troisième lecture, c'est-à-dire au comité
plénier, nous présenterons des amendements à cet
effet.
Nous avions espéré que ce soit une erreur passagère
du bill, mais il n'en est rien. Toujours au niveau des intentions du
législateur, il nous faut constater que ce projet de loi pêche
autant par ce qu'il dit que par ce qu'il omet.
A plusieurs points de vue, ce projet de loi apparaît comme un
recul: aucune participation des partis d'opposition n'est prévue dans la
procédure de recensement. Aucun mécanisme n'est prévu pour
éviter le monopole de l'administration sortante sur la confection et la
révision de la liste électorale. Le droit de vote est aussi
accordé aux corporations et aux propriétaires non
résidents, comme si on acceptait le fait que la propriété
est synonyme du droit de vote.
Sur la carte électorale, le projet de loi 5 ne prévoit
aucun changement, laissant, justement, des distorsions épouvantables de
secteurs de vote, de districts. Par exemple, dans Saraguay, 305
électeurs vont voter pour un conseiller et être
représentés par un conseiller, alors que, dans Mercier,
près de 28,000 ne pourront avoir qu'un représentant, et que dans
Rivière-des-Prairies 2,500 voteurs ont encore droit à deux
représentants.
Tous savent, je pense, quel magistral soufflet a reçu la
démocratie le soir du 29 avril lors de la proclamation des
résultats du scrutin.
Plus d'un citoyen du Québec, partisan ou non, s'est senti mal
à l'aise, sinon tout simplement révolté, en face de
l'inéquation à peu près parfaite de la
représentativité des différents partis qui composent la
députation actuelle de l'Assemblée nationale.
Le principe ou l'idée d'un minimum d'égalité dans
la représentation des élus a été battu en
brèche ce soir-là de façon trop évidente pour que
l'on puisse se boucher les yeux.
M. TESSIER: M. le Président, je formule un point d'ordre. Nous
sommes à discuter du bill 5 et non pas de la Loi électorale
provinciale. Or, le député de Lafontaine nous parle exclusivement
de la loi provinciale.
UNE VOIX: Vous faites de la démagogie.
M. BURNS: M. le Président, cela ne fait peut-être pas
plaisir au ministre, les propos
qu'a tenus le député de Lafontaine. Depuis le
début, j'ai écouté religieusement ce que le
député de Lafontaine était à nous dire. Il s'en est
tenu, selon le règlement, à l'à-propos du bill. Je ne vois
vraiment pas en quoi il déroge au règlement dans ses
commentaires, présentement.
M. DUMONT: J'ai écouté moi aussi, le député
de Lafontaine et je puis lui dire qu'il était à faire un
très bon discours électoral.
M. LE PRESIDENT: J'ai écouté très attentivement
l'exposé du député de Lafontaine. Je dirais que, dans 90%
de son exposé, il respecte scrupuleusement le règlement. A
l'occasion, il fait certaines analogies, certaines comparaisons entre la
représentation des quartiers, et la représentation des
comtés. Je lui conseillerais de continuer en limitant ses
comparaisons.
Il faut surtout qu'il se rappelle bien que l'essence du bill est
d'accorder le vote universel à 18 ans. Jusqu'ici, disons que je suis
passablement satisfait de son exposé, sauf que ses analogies et ses
comparaisons doivent être assez brèves. A quoi rattacher la
représentation des comtés? Comme il le disait, dans Saraguay, 300
électeurs, dans Mercier... J'imagine qu'il pourrait proposer, en
comité, un élargissement de la loi, mais pas à ce stade-ci
du débat. Je lui demanderais de continuer en respectant le plus possible
les principes mêmes du bill.
M. LEGER: Merci, M. le Président. Il faut quand même
admettre que les meilleurs exemples peuvent clarifier les principes que l'on
veut présenter. Devant le risque de créer une situation semblable
à celle qui s'est passée, c'est une occasion toute
désignée d'entreprendre par le bill 5 une réforme de la
carte électorale de Montréal.
Tout citoyen, actuellement, en saine démocratie, est
éligible à tout poste ou à toute fonction publique,
à moins d'être privé au maximum, dans des cas prévus
par la loi, de ses droits de citoyen. Ce principe, encore une fois, est
limité par le projet de loi actuellement devant nous. Peut-on parler de
véritable démocratie si, pour être éligible au poste
de conseiller municipal ou de maire, il est nécessaire d'être
inscrit au rôle d'évaluation ou au rôle des valeurs
locatives de la ville?
Pour nous, cela semble être une bien curieuse tournure d'esprit.
On dit accorder le suffrage universel à des personnes morales,
très indéterminées dans le texte de loi, et on n'accepte
même plus la même universalité dans la question
d'éligibilité. Pourquoi ne pas plutôt innover un peu?
Pourquoi ne pas tout simplement universaliser vraiment le droit de vote
à 18 ans et l'éligibilité à 21 ans? Les
incapacités de voter prévues par la loi deviendront
automatiquement des cas d'empêchement d'éligibilité. Cela,
à mon sens, ne requiert pas beaucoup d'imagination et permet à un
gouvernement, qui se dit démocratique, de l'être aussi dans les
faits.
Rien n'est prévu, non plus, dans le projet de loi pour les
dépenses électorales. Cela fausse ainsi les chances
égales, au départ, des partis qui veulent se présenter, au
niveau des dépenses qu'ils peuvent faire du côté de la
télévision, des médiums d'information. Je pense que le
suffrage universel à 18 ans, à quelques mois de l'élection
municipale, c'est un peu comme un cataplasme qu'on veut appliquer dans une des
dernières villes du Québec où le droit
d'éligibilité est encore confié à la
minorité de personnes qui sont propriétaires ou contribuables
à la taxe de location. Ceci exclut, à ce moment-là, des
femmes et beaucoup de jeunes.
Aucun effort n'a été fait dans ce bill pour
ébaucher des modifications en profondeur, aucun effort pour commencer
à Montréal une réforme électorale urgente pour tout
le Québec. Face aux élections municipales d'octobre, le
gouvernement avait l'occasion de prouver sa sincérité et son
sérieux, en donnant suite à ses intentions pieuses de remanier le
régime électoral du Québec. Ceci augure très mal
pour le projet de quelque 500 articles que le ministre actuel nous propose pour
septembre.
Au lieu de réformes d'envergure, on propose des modifications qui
ne mettraient même pas la loi de Montréal au niveau de la loi
électorale du Québec. Je pense que, pour
l'éligibilité et le droit de vote, on est encore plus
sévère pour Montréal que, dans la loi électorale du
Québec, pour élire les députés à
l'Assemblée nationale. L'article 131 de la loi électorale du
Québec dit qu'il suffit uniquement d'être majeur et d'être
inscrit sur une liste électorale, ce qui suppose tout simplement la
question de domicile à l'intérieur d'un secteur de vote, donc
dans la province, 18 ans d'âge, être citoyen et n'avoir aucune
incapacité.
A Montréal, il faut malheureusement rajouter ce qui n'a
pas été enlevé par le bill le rôle
d'évaluation et de valeur locative. Si on veut uniformiser tous les
niveaux, il faut mettre fin à la confusion actuelle des
différents modes d'élection au niveau des commissions scolaires,
du municipal et du provincial. Dès que le suffrage universel est
accepté, il faut rejeter tout critère d'éligibilité
qui serait fondé sur la propriété
foncière. Une personne physique devrait équivaloir
à un vote.
Quand, sur le plan des principes, on laisse le développement
urbain dans Montréal aux mains des intérêts privés,
même si le vote peut être minime, quand, sur le plan des principes,
on permet d'être éligibles seulement aux personnes qui
possèdent des biens ou qui sont inscrites sur la liste des personnes qui
paient des taxes municipales, on permet alors à des trusts, à de
grosses compagnies, à des spéculateurs, de présenter des
candidats à qui, au nom même du principe sacro-saint de
l'entreprise privée, est laissé le contrôle de la vie
socio-économique des résidents de la ville de
Montréal.
Quant à l'éligibilité, on laisse ce droit surtout
à des politiciens issus de couches peut-être
privilégiées, mais minoritaires. Par exemple, actuellement,
près de 90% du conseil municipal de Montréal est composé
d'hommes d'affaires, de commerçants ou de professionnels. Je pense qu'il
est dangeraux, M. le Président, que ces personnes soient élues en
trop grande quantité. Il en faut, c'est sûr, au point de vue de la
qualité et de l'expérience qu'ils peuvent donner à la
ville de Montréal. Mais, s'ils sont élus en trop grande
majorité et que d'autres couches de société ne sont pas
représentées, je pense qu'il est dangereux que ces personnes
administrent en fonction seulement des intérêts des
détenteurs du pouvoir économique et non selon les besoins des
salariés.
Le caractère humain, je crois, devrait primer le caractère
de propriété et de rentabilité. Ceci, je pense, est
incompatible avec un régime électoral moderne et
démocratique. On a oublié de faire disparaître cet
archaïsme.
Quant au domicile que la personne doit posséder ou du lieu
où elle doit demeurer pour avoir le droit d'être inscrite sur une
liste électorale, il est important de noter la complexité de
cette définition de domicile aux fins de désigner ceux qui ont le
droit de vote. Seule une liste électorale permanente et unique,
constamment mise à jour par des fonctionnaires du gouvernement peut
pallier ces difficultés. Si on se fie seulement à la question de
la demeure et des circonstances, on risque de déformer le sens de la
démocratie.
Quant aux limites du droit de vote, j'ai peu de commentaires à
faire, sauf que l'on peut se demander si tous les députés ici
présents, mes confrères de l'Assemblée ici présents
en vertu de l'article 8, auraient le droit de vote. En effet, a l'article 8, il
est bien dit: « Ne peuvent voter à l'élection municipale
que les personnes qui ont prêté serment d'allégeance
à une puissance étrangère. »
M. LAPORTE: Quand vous êtes drôle, dites-le-nous. Nous
allons rire.
M. LEGER: Je prévoyais que vous alliez écouter. Sur le
principe d'une réforme du système électoral à
Montréal, nous admettons qu'il s'agit là d'une urgence. Mais
quant aux modalités de cette réforme, nous sommes obligés
de constater que le gouvernement nous offre une loi timide, une «
réformette, » laquelle ne peut même pas se prétendre
soucieuse d'une véritable démocratie et des exigences qu'elle
comprend. Le vote à 18 ans n'est qu'une poudre aux yeux parce que,
premièrement, on accorde des concessions, style personne morale, et on
oublie la réforme de la carte électorale, concession de type
nettement colonial. Un valet, pour se gagner la faveur de son martre, n'agirait
pas autrement.
Mais ce n'est pas du tout. Nous avons devant nous un gouvernement qui
s'est fait élire au nom de l'efficacité administrative, et cette
efficacité semble vouloir se manifester par de la poudre aux yeux. En
effet, si l'on creuse un peu le projet de loi, on s'aperçoit que, par
suite d'un manque d'organisation nationale, on prévoit encore ici toute
une longue et sûrement dispendieuse procédure de recensement.
Justement, dans trop de cas, dans le passé, le recensement nous a permis
de constater une des faiblesses de notre système électoral. Dans
trop de cas, soit par négligence, soit par fraude, soit par
intérêt personnel, pécuniaire ou politique, des noms ont
été oubliés sur les listes électorales. Des
personnes décédées, des personnes qui étaient
déménagées ont été inscrites, tandis que
dans d'autres cas, par négligence ou peut-être par fraude, des
bons noms ont été radiés sans avis et sans
délai.
Seule, je pense, une liste électorale permanente peut corriger
cette anomalie. On a souligné le coût élevé pour
justifier le refus de cette liste électorale permanente. Mais cet
argument est faible quand on constate que, dans les six mois qui vont suivre,
il y aura deux recensements à faire et probablement trois: aux paliers
municipal, scolaire et provincial. Ces recensements
répétés, truffés d'erreurs et d'omissions
entraînent des dépenses considérables et nécessitent
un système de révision également très
coûteux, de telle sorte qu'une liste électorale permanente
coûterait moins cher que cette révision. Si, comme de raison, on
sort l'argument qu'il est impossible, d'ici l'automne, de mettre sur pied un
mécanisme pour prévoir cette correction, il faudrait au moins
amender ce régime et permettre justement une nouvelle façon plus
démocratique de faire le recensement et la révision. A ce jour,
aucune participation des partis au pouvoir ou des
partis d'opposition n'est prévue, ni aucun contrôle pour
permettre d'éviter les abus lors du recensement et de la
révision.
En raison des élections, il faudra très bientôt
effectuer ce recensement à Montréal. Le trésor public doit
être très riche puisque c'est le deuxième que l'on
prévoit, Je pense qu'ici on s'aperçoit que le gouvernement est
incapable d'une action à long terme. Il est très loin des
principes d'efficacité administrative à long terme et
d'économie maximale des deniers publics. Instaurer une liste
électorale unique et permanente pourrait régler ce
problème, et tout porte à croire que l'institution actuelle
effectuée de façon permanente et hors de l'énervement
d'une période électorale amènerait une liste beaucoup plus
précise et plus exacte et à un coût beaucoup moindre. Je
pense que, pour nous, le simple fait d'inclure l'idée d'un recensement
local, à Montréal dans ce cas, montre que ce projet de loi est
l'enfant prématuré d'un gouvernement incapable de concevoir
à temps une politique à long terme. On peut voir ici que le
problème électoral montréalais est une forme
inséparable du problème électoral
québécois.
Il nous paraît absolument incroyable que le gouvernement ne s'en
soit pas aperçu jusqu'à présent. On est loin de
l'efficacité que je mentionnais plus haut.
M. le Président, une autre chose qui est liée au
système national, c'est qu'un système électoral devrait
posséder tous les éléments susceptibles d'endiguer toutes
les formes possibles de fraude électorale. Il est bien possible qu'au
moment où actuellement nous étudions ce bill pour
l'améliorer certaines personnes, dans des coins reculés de la
ville ou de la province, étudient de quelle façon elles
pourraient frauder ce nouveau système qu'on veut mettre sur pied.
M. LAPORTE: Si on en avait un autre, pensez-vous qu'elles ne le feraient
pas?
M. LEGER: Mais, si le projet...
M. LAPORTE; Si on avait ce projet de loi idéal auquel vous
rêvez, pensez-vous qu'elles ne le feraient pas aussi?
M. LEGER: Je suis sûr qu'il faut toujours prévoir des
améliorations. Comme la police cherche toujours des façons
nouvelles d'interrompre les manigances des voleurs, les voleurs trouvent des
façons de déjouer la police. C'est sûr! Mais, il ne
faudrait pas que la police s'asseoit sur ses lauriers pendant ce
temps-là.
M. LAPORTE: Cela va être vrai pour ce bill-là comme pour
les autres.
M. LEGER: De toute façon...
M. CHARRON: Cela n'empêche pas de chercher le meilleur, quand
même.
M. LEGER: ... si le projet de loi prévoit des mesures
coercitives, il reste étrangement silencieux au niveau des mesures
préventives. Où en est la carte d'identité de
l'électeur qui, à elle seule, pourrait éliminer de
nombreux cas de fraudes et de suppositions de personnes? Ce projet de loi n'en
parle pas. Il oublie qu'il existe des spécialistes du
télégraphe. Il oublie qu'on a encore la possibilité de
faire voter des habitants de terrains vagues. Il oublie les armoires à
balais, les chambres à fournaise habitées. Il oublie que la
démocratie a besoin, pour vivre, de tout ce qui peut l'aider à
s'exercer, fût-ce une simple carte d'identité obligatoire avec
photographie.
On a beau être immigré depuis 15 ans ou 20 ans, on n'a pas
le droit de vote si on n'a pas obtenu sa citoyenneté. Cela ne donne pas
plus le droit de vote pour un parti qui prêche le
fédéralisme rentable. C'est toujours au nom de cette
démocratie que j'effectue ces commentaires sur les principes du bill.
Qu'en est-il du mode de scrutin pour pallier l'insuffisance notoire et
chronique du vote uninominal à un tour du système britannique qui
n'est pas si parfait qu'on veut le penser?
A-t-on pensé à un système de représentation
proportionnelle quelconque pour permettre à toutes les tendances de la
population montréalaise, surtout au niveau de partis et non pas de
personnes qui se présentent de façon indépendante, de
s'exprimer ailleurs que dans les rues? Comme il fallait s'y attendre, l'avorton
de loi numéro 5 n'en parle pas. Le législateur, qui a
décidément la mémoire et l'imagination très
courtes, n'en parle pas. Pourtant, on se gargarise et on en parle de cette
démocratie. Je pense qu'il faudrait peut-être qu'au pays du
Québec on se rende compte qu'un concept aussi généreux que
celui de la démocratie recèle des exigences terribles qu'il n'est
pas permis d'ignorer.
M. le Président, la répartition proportionnelle peut se
faire par étude en comité plénier et je pense qu'il faut
la noter. Enfin, la démocratie exige que tous les partis
représentant autant d'idéologies diverses aient sensiblement les
mêmes chances de faire connaître leur option à la
population. Ce principe est purement et simplement ignoré dans le bill
qui
apparaît de plus en plus comme une fausse couche. Rien dans ce
projet de loi n'assure une limitation des dépenses électorales,
permet une reconnaissance des partis ou leur assure une possibilité de
publicité dans les différents média.
M. le Président, Je pense que le mode de scrutin actuel ne
prévoit pas de réforme de la carte électorale d'une
façon suffisante. Pourtant, même s'il y avait une carte
électorale parfaite et que chaque district était également
redistribué, il y aurait quand même des possibilités, si on
ne pense pas au niveau proportionnel, que tout un parti n'obtienne que 48% ou
49% des votes et qu'il n'ait aucun représentant d'élu, parce que
c'est l'autre parti au complet qui aurait obtenu 51% ou 52% du vote. A ce
moment-là, une grosse couche de la population ne serait pas
représentée au niveau de son idéologie.
Le mode de scrutin majoritaire à un tour fonctionne bien dans un
système bipartiste, mais moins bien dans un système
multipartiste. Je pense qu'on le voit. Le système bipartiste, dans cette
Chambre, n'a pas encore été oublié. Très souvent,
on a l'occasion de remarquer que le parti au pouvoir demande l'opinion du parti
de l'Opposition et ignore les autres partis d'une façon
inconsciente.
M. LAPORTE: J'invoque le règlement. Le député de
Lafontaine va nous dire à quel moment, sur quel projet de loi, sur
quelle discussion j'ai oublié de consulter son leader parlementaire.
Lesquels et quand? Assez de ces sottises! Quand?
M. LEGER: M. le Président, je n'ai pas dit spécialement le
leader parlementaire, malgré que quelquefois vous ayez demandé de
passer par-dessus un comité plénier...
M. LAPORTE: M. le Président, je demande au député
je vais le prendre tranquillement de donner un seul exemple, un
seul exemple, d'une procédure, d'une proposition, de quoi que ce soit
qui ait été fait en cette Chambre ou en dehors de cette Chambre
depuis le début de la session, sans que je n'aie consulté ou le
député qui avait été nommé
délégué de son parti à cette commission, ou le
leader parlementaire. Qu'il donne au moins un exemple pour soutenir sa
thèse.
M. LEGER: M. le Président, le leader parlementaire me demande un
exemple. Je vais en citer un. A l'occasion de la commission sur
l'assurance-maladie, ce n'était pas le leader parlementaire qui
était là, c'était le président de la commission et
en l'absence du député de Bourget, qui était retenu
ailleurs, j'étais le seul membre du Parti québécois
présent. On a demandé si nous étions d'accord pour passer
par-dessus un article que je retrouverai plus tard, si vous le
désirez le parti de l'Opposition officielle a dit :Nous sommes
d'accord. On ne l'a pas demandé aux partis qui était
présents.
M. LAPORTE: Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui vous empêchait de
parler?
M. LEGER: M. le Président, si vous voulez me permettre. Le leader
parlementaire m'a demandé une réponse, je la lui ai
donnée. Je lui demanderais de pouvoir continuer...
M. LAPORTE : J'avais demandé, autant que possible, un bon
exemple.
M. LEGER: Quant au vote, s'il est un principe où on laisse le
développement urbain à Montréal aux mains des
intérêts privés, même si le nombre de votes est
minime, je pense qu'au niveau des principes, il faut nécessairement
permettre aux personnes qui ne sont pas propriétaires ou locataires
d'être représentées.
C'est pourquoi ma conclusion...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Quelques minutes, seulement, une minute.
M. LEGER: Certainement, M. le Président. Je crois quand
même, étant le représentant du chef du Parti
québécois, que j'ai droit à une heure.
De toute façon, M. le Président, pour conclure, je pense
que ce bill est improvisé. Il se soucie peu de la démocratie.
C'est un exemple frappant de la politique de bouche-trou que le bill 5 nous
présente dans les principes qui l'animent, et il est inacceptable, je
pense, s'il n'y a pas certaines corrections.
Malheureusement, il y a certaines choses que nous devons accepter parce
qu'il propose une réforme du vote à 18 ans. A cause de cet
avantage, malgré une grande réticence parce que ce bill ne va pas
assez loin, qu'il est incomplet et qu'il pèche par des omissions graves,
nous voterons uniquement pour le principe, en deuxième lecture, d'une
façon affirmative. Nous nous réservons cependant le soin de
proposer des amendements appropriés aux articles que nous concevons
comme étant incomplets, inadéquats et nettement insuffisants.
Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.
M. Pierre Laporte
M. LAPORTE: M. le Président, en entendant le député
de Lafontaine, Je me suis demandé si nous écoutions les derniers
échos de la dernière campagne électorale...
M. LEGER: Cela fait du bien.
M. LAPORTE: ... provinciale ou les premiers bruits de la prochaine
campagne électorale municipale.
M. LEGER: Vous n'avez pas vu l'analogie.
M. LAPORTE: Le député de Lafontaine nous a servi des
grands principes : la démocratie est devenue la propriété
exclusive, la propriété personnelle, inviolable du Parti
québécois...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela, c'est vrai!
M. LAPORTE: ... le parti représentant le peuple. Rien, dans ce
projet de loi, dit le député de Lafontaine, ne prévoit le
moindre article pour que d'autres gens que ceux des classes
privilégiées les classes maudites, à leurs yeux
ne soient représentés au conseil municipal de
Montréal. Que ce serait facile, M. le Président, de citer leur
propre parti en exemple. Je me suis promené pendant une bonne partie de
la campagne électorale avec leurs candidats, la liste de leurs
candidats, le parti démocratique, le parti du peuple, le parti qui en
voulait aux autres de présenter seulement des gens nantis.
Dans la liste de leurs candidats, M. le Président, vous ne me
croirez pas. Si vous étiez le candidat libéral dans le
comté de Laval, vous pourriez me croire, parce que vous avez
vérifié comme nous. Mais, comme président, M. le
Président, vous allez être assez surpris: 65% de leurs candidats
étaient des professionnels, 65%, M. le Président. La divine
Providence qui veille toujours sur le peuple du Québec a voulu qu'on en
ait sept ici, pour voir aux intérêts de l'avenir.
M. le Président, il y a un médecin, excellent d'ailleurs.
Il y a un avocat. Il y a un professeur. Il y a un financier et il y a un
administrateur. C'est cinq sur sept. Cela fait 5/7, je pense.
M. BURNS: Bonne proportion.
M. LAPORTE: Les gens qui représentent le petit peuple. Dans la
charte de Montréal, ils sont pour cela. Dans les élections
provinciales avenir, ils sont donc pour cela. Regardez-les, M. le
Président. Ils peuvent se lever. Je vais me taire tout à l'heure.
Qu'ils disent à cette Chambre qu'ils n'ont pas ici, pour
représenter le Parti québécois, 75% de professionnels. On
ne leur reproche pas. Ils sont tous à peu près sympathiques.
M. LEGER: On peut représenter...
M. LAPORTE: Qu'ils cessent au moins d'aller reprocher aux autres ce
qu'ils n'ont pas fait dans leur propre parti, à commencer par le
député de Lafontaine qui s'appelle administrateur. Probablement
administrateur de caisses ouvrières seulement.
M. LEGER: Est-ce que le leader parlementaire est toujours au niveau des
principes actuellement?
M. LAPORTE: Bien, les vôtres, cela me ramène un peu bas,
mais je vais me relever.
M. LEGER: Au niveau de l'esprit, vous allez avoir de la
misère.
M. HARVEY (Chauveau): De toute façon, ils ont un psychiatre et
ils en ont bien besoin.
M. LEGER: Il est à votre service. UNE VOIX: On pourrait vous le
prêter.
M. CHARRON: Etes-vous content de parler pour la première
fois?
M. LE PRESIDENT: Je demanderais au ministre du Travail de revenir
à son court exposé, assez frappant d'ailleurs, de revenir au
principe du bill.
M. LAPORTE: J'ai ceci de particulier. On m'excusera de faire le
préambule au début, M. le Président. La loi, qu'est-ce que
cela apporte? J'aurais aimé que le député de Lafontaine
nous le dise. Tantôt, si on faisait comme on a déjà fait
deux fois, demander le vote, ils voteraient tous en faveur. Parce qu'on ne peut
pas, en cette Chambre, les défier de vivre à la hauteur des
discours qu'ils prononcent. Alors qu'ils dénoncent la loi comme une
iniquité, après cela, ils disent: Bien, mon Dieu Seigneur, quand
vient le temps de voter contre, ne nous forcez pas trop.
Qu'est-ce que vous voulez? Ils ont prévenu mon geste. Ils ont
dit: Sur les principes, oui, mais si on peut arriver en comité pour le
projet de loi article par article. Qu'est-ce qu'il dit au niveau des principes?
On dit que, pour la première fois à Montréal, la
démocratie va être respectée parce que tous les citoyens
sans exception s'il y en a, qu'on nous le dise de 18 ans ou plus,
pourvu qu'ils aient 24 mois de domicile, pourront voter. Est-ce que je dois
comprendre que le Parti québécois est contre cela? S'il n'est pas
contre cela, est-ce que je peux lui demander s'il trouve que c'est une
amélioration?
Deuxièmement, le vote à 18 ans. On a passé sur
cela. Probablement que c'est encore un truc inventé par les vieux
partis, ça. C'est dans cette Chambre qu'on a décidé de
donner le vote à 18 ans, aux électeurs de la province de
Québec. C'est dans cette Chambre qu'on a décidé, pour la
première fois, de donner le vote généralisé dans la
capitale, la ville de Québec et dans votre municipalité, M. le
Président, la ville de Laval. Et on est en train de le
généraliser dans la province de Québec. C'est normal et
c'est sain pour la démocratie. Probablement qu' il était
entraîné par d'autres choses; distraitement, le
député de Lafontaine a oublié de nous le souligner.
Troisièmement, le cens d'éligibilité. Est-ce que
c'est vrai, oui ou non, qu'à Montréal on doit être
locataire ou propriétaire? C'est comme un père qui dit: Moi, j'ai
eu une fille. Je voulais un garçon, mais, heureusement, la fille,
c'était mon deuxième choix. Bien, c'est un ou l'autre à
Montréal: on est locataire ou on est propriétaire.
M. LEGER: Comique! Comique!
M. LAPORTE: Et dans les deux cas, on a le cens
d'éligibilité. Le député de Lafontaine a
peut-être été distrait quand il a lu le projet de loi; il
dit qu'on élimine les femmes. Ah, pas nous, quand même! Qu'on nous
accuse de n'importe quoi, mais pas de ça! Cela, je ne trouve pas cela
injuste. Je trouve ça personnel. « Toute personne physique
jusque-là, ça doit comprendre les femmes majeure et
possédant la citoyenneté canadienne, qui n'en est pas
déclarée incapable par la présente charte, peut être
mise en candidature et élue ou nommée conseiller si elle ou son
conjoint est inscrit au rôle d'évaluation. » L'inscription
de la femme comme contribuable rend son marl éligible et sans doute
elle-même et, en sens contraire, c'est également vrai.
Toutes les femmes mariées à Montréal peuvent
être rendues éligibles par leur mari et toutes les femmes qui
paient des taxes et qui sont inscrites au rôle d'évaluation sont
égale- ment éligibles. On a oublié de nous le dire. On
voudrait maintenant trouver des moyens infaillibles autres que ceux qui sont
dans la loi. n y en a sept ou huit pages dans la charte de Montréal. Je
serais surpris, mais je prendrais sa parole, si le député de
Lafontaine se levait en me disant: Je les ai lues, toutes les prescriptions
contre ceux qui violent la loi et les peines qui sont prévues. Mais, je
pense qu'il ne les a pas lues. C'est déjà prévu. Doit-on
trouver autre chose? Peut-être. Mais, le seul discours qu'a fait le
député de Lafontaine nous indique combien cette chose-là
est complexe. Nous allons voir les amendements du député de
Lafontaine. J'attends ses amendements avec un intérêt
véritable. Nous allons voir...
M. LEGER: Vous avez beaucoup d'esprit.
M. LAPORTE: ... ce que ces gens qui ont l'imagination ont trouvé
de neuf pour faire après leurs amendements, si nous les
acceptions une loi électorale qui soit digne d'un parti aussi pur
que le leur et, sans doute, digne de tous les citoyens de la province de
Québec.
C'est infiniment complexe. La première chose que l'on doit
demander aux citoyens et ça, on sait que ce n'est pas facile
c'est de se protéger eux-mêmes. Le recensement des
électeurs sera analogue au recensement provincial. Vous avez, d'abord,
deux personnes au provincial qui passent; elles ne sont pas du même
parti, c'est une première protection. Il peut arriver qu'il y ait des
gens qui vendent leur travail. Disons que nous ne légiférons pas
pour ceux-là nous avons la police pour ceux-là. Vous avez deux
personnes qui passent de maison en maison; c'est la première chose.
Deuxièmement, une fois que la liste a été
rédigée, elle doit être affichée sur un poteau
à un endroit accessible. Troisième chose, la liste est
envoyée dans chaque foyer. Si, à un moment donné, un
électeur Jeune, dynamique, du Parti québécois, conscient
de ses droits et de son devoir, ne reçoit pas la liste, il doit
commencer à s'inquiéter. Il a lu la loi. Il sait ce qu'il y a
dedans. Il sait comment elle est terrible la loi qui veut le protéger.
Il est rendu à la veille de l'élection et il n'a pas encore
reçu sa liste; il doit commencer à se poser des questions.
Il y en a qui oublient ça tout le long. C'est bien gentil de se
faire dire par les gens du Parti québécois que nous organisons
tout pour le vol des élections, mais on sait que personne n'a de
leçon à faire à personne. Il nous arrive, à vous,
le matin du vote, des électeurs qui sont de nos amis depuis toujours,
des connaissances,
des parents, qui nous disent; Imagine-toi donc, je ne suis pas sur la
liste électorale; y a-t-il moyen de faire quelque chose? J'ai
oublié, j'étais absent, je n'ai pas vérifié. Que
voulez-vous, il n'y a plus rien à faire! Quelles que soient les lois, il
faut que le citoyen fasse sa part pour se protéger.
L'une des choses les plus vraies qu'a dites le député de
Lafontaine, c'est quand il a souligné la longue tradition
d'indifférence. C'est clair. Mais, comment régler le
problème? Vous avez eu à Québec le vote universel; vous
avez, à d'autres endroits dans la province de Québec, le vote
réservé exclusivement aux propriétaires; vous avez des
endroits où les propriétaires et tous les autres contribuables
votent. Comment mettre fin à cette indifférence? Par l'adoption
de lois? J'en doute sérieusement. C'est plutôt par une
éducation qu'il faudra faire et par un désir du citoyen
lui-même de s'occuper de ses affaires. Il n'y a pas un texte de loi qui
peut faire ça; une éducation civique doit être entreprise
dès la première enfance.
Il faut, éviter que cela devienne de la propagande ou que cela
devienne une façon, pour certains professeurs, d'orienter de futurs
électeurs dans un sens ou dans l'autre. L'éducation civique, pour
dire aux citoyens que si ça va mal ou s'ils ne sont pas satisfaits et
qu'ils ne vont pas voter, ils n'ont ensuite qu'à s'en prendre à
eux-mêmes.
Il s'agit d'une « réformette ». C'est devenu le mot
de passe de tous ceux qui n'ont pas le courage de dire qu'ils sont satisfaits
du projet de loi que nous présentons. C'est une «
réformette »! On va donner le droit de vote à des milliers
et des milliers de gens à Montréal, et c'est une «
réformette »! On va permettre à des milliers de citoyens
qui, jusqu'ici, n'avaient pas le droit d'être candidats dans leur ville,
la métropole du Canada, et c'est une « réformette
»!
Qu'un gouvernement, quel qu'il soit, continue, pendant des sessions,
à faire sept, huit ou dix « réformettes » comme cela
par année, et c'est finalement tout l'aspect d'une province qui peut en
être sensiblement modifié. Il aurait fallu que l'on
prévoie, dans la charte de la ville de Montréal, un
contrôle des caisses électorales. J'ai hâte de voir quel
amendement ils vont nous proposer pour les contrôler.
En parler en Chambre, c'est facile. Cela peut laisser croire qu'on a
seul le désir d'atteindre cet objectif-là. J'invite le
député de Lafontaine, ce doit être l'expert, puisque c'est
lui qui a parlé le premier, à nous proposer tout à l'heure
un amendement qui permettrait de contrôler les dépenses
électorales au cours de l'élection municipale qui aura lieu
l'autom- ne prochain à Montréal. Nous sommes disposés
à l'écouter.
Il faudra y venir, mais il faudra y venir progressivement. Nous avons
décidé, nous, dans la province de Québec, de faire payer
une partie des dépenses électorales par les citoyens. Tous les
députés élus en ont profité à 100%. Ceci a
augmenté très sensiblement le coût des élections.
Mais vous ne serez pas surpris, M. le Président, d'apprendre qu'au cours
de la dernière campagne électorale certains candidats se sont
promenés à accusant les vieux partis d'avoir doublé et
triplé le coût des élections dans la province de
Québec. C'est bien clair. Cela coûtait $4 millions ou $5 millions
et là c'est rendu à $9 millions parce qu'on prend, à
même le trésor public, des sommes d'argent pour contribuer
à baisser les caisses électorales.
Est-ce qu'il faudra y venir au municipal? Plus que probable. A ce
moment-là, il faudra que les citoyens eux-mêmes soient convaincus
que la seule façon qu'ils ont de véritablement avoir le
contrôle sur les gens qu'ils élisent, c'est de payer à 100%
les élections. Je l'ai prêché tant que j'ai pu et je vais
continuer; un jour, nous atteindrons cet objectif. J'espère qu'à
ce moment-là le député de Lafontaine se souviendra qu'il y
en a peut-être d'autres que lui qui ont pensé à cela. Il y
en a peut-être d'autres que lui qui ont commencé avant lui. A ce
moment-là, s'il prétend que c'est une « réformette
», nous demanderons le vote, et comme d'habitude, il votera avec
nous.
C'est un projet de loi qui nous semble une amélioration sensible.
C'est une loi qui ne prévoit pas tout ce qui devrait être
prévu, c'est clair. Je puis dire en passant au député de
Lafontaine que, s'il avait véritablement vérifié ses lois,
il constaterait que le droit d'imposer la carte d'identité à
Montréal existe depuis plusieurs années, que M. le maire Drapeau
et M. Saulnier ont demandé aux parlementaire le droit de l'imposer.
Pour toutes sortes de raisons, qui n'ont rien à voir avec le
désir de provoquer, d'endurer ou de tolérer la fraude, cela n'a
jamais été mis en pratique. L'une des premières
nécessités, c'est de trouver une carte d'identité qui va
éviter les contrefaçons. C'est vrai, ce que dit le
député, qu'il y a toujours des gens qui travaillent pour
contourner les lois. J'ai été candidat aux élections
municipales à Montréal, dans un quartier que le
député de Saint- Jacques connaît bien.
M. CHARRON: Hélas! M. LAPORTE: Pardon?
M. CHARRON: Hélas!
M. LAPORTE: Vous le connaissez bien, hélas? Je comprends!
M. CHARRON: On n'a pas été chanceux, comme ancien
politicien.
M. LAPORTE: Moi, étant un professionnel, J'ai au moins eu
l'élégance de me faire battre dans ce comté-là. Pas
vous! Vous êtes professionnel, vous avez été élu,
vous, au milieu d'ouvriers, monsieur, représentant...
M. CHARRON: Moi, je suis professionnel?
M. LAPORTE: Professeur. Vous n'êtes pas professionnel, vous
êtes un ouvrier, j'imagine?
M. CHARRON: Continuez donc.
M. LAPORTE: M. le Président, je dis qu'à cette
élection-là, on avait exigé, pour identifier les
électeurs, un document, le permis de conduire; mais il s'est fait, dans
cette journée-là, un trafic considérable de permis de
conduire. On l'empruntait; il y a des gens qui empruntaient le permis pendant
une couple d'heures pour $10. On n'a pas atteint l'objectif que les
autorités, qui avaient passé ce règlement-là,
voulaient atteindre, c'est-à-dire contrôler la fraude.
Si on pouvait trouver une carte d'identité qui ne puisse pas
être imitée, à ce moment-là on atteindrait
l'objectif. Et si, par malheur, on peut provoquer un commerce illicite de
cartes d'identité, il y aura des gens, l'année suivante, pour
dire que cela a encore été imaginé par les puissances
d'argent pour contrôler les électeurs.
Bien, M. le Président, j'aime autant qu'on ne s'embarque pas dans
ça, à moins d'avoir trouvé véritablement,
au-delà de cette éducation du citoyen dont J'ai
déjà parlé, des moyens de contrôle plus efficaces
que ceux que nous avons actuellement. Et nous avons pour le faire, à
tête reposée, une commission parlementaire qui va prendre le temps
de faire un travail sérieux. Et ceux qui vont y participer, car la
commission va continuer à siéger quand la session va être
prorogée ou ajournée, vont finalement admettre, ou vont
être gênés de ne pas admettre, avec quelle liberté de
pensée et quelle ouverture d'esprit tous ceux qui voudront apporter une
contribution pour véritablement donner à la province de
Québec la meilleure loi électorale qui soit, pourront le
faire.
A ce moment-là, quand vous parlerez de bulletins de vote, vous
ferez venir un expert comme M. François Drouin. Là, vous allez
com- prendre combien ce n'est pas facile. Il va vous apporter des bulletins de
vote de tous les pays, une soixantaine, peut-être une centaine, et il va
vous apprendre, lui, d'après l'expérience qu'il a vécue,
les enquêtes qu'il a faites, combien de moyens on a trouvés dans
chaque pays pour frauder le bulletin. Après ça, vous viendrez
avez calme, vous viendrez avec une assurance que rien ne saurait contredire,
proposer que tel bulletin serait celui qui serait parfait. Ce qu'on a
suggéré et ce qui s'en vient dans la province de Québec,
c'est qu'on ait un seul bulletin de vote, uniforms au municipal, au scolaire,
au provincial, et même au fédéral, en ayant des papiers de
couleurs différentes qui tous seraient fournis par la même
personne et contrôlés par le président des
élections, afin que, d'une élection à l'autre, les gens
s'habituent à voter de la même façon. Cela éviterait
ce qui est arrivé, dans nos comtés aussi. Il ne faut pas imaginer
que dans le comté de Chambly il n'y a pas eu de bulletins
rejetés...
M. LEGER: Il n'y a pas de grave conséquence.
M. LAPORTE: Je ne m'excuserai pas d'avoir une grosse majorité,
qu'est-ce que vous voulez que je vous dise!
De cette façon, on pourrait éviter que des gens, par
ignorance de la loi, en ayant un procédé mécanique
uniforme d'une élection à l'autre, ne se privent pas
eux-mêmes de leur droit de vote.
Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, parce qu'on
donne le droit de vote à 18 ans, parce qu'on donne le cens
électoral généralisé, parce qu'on augmente de
façon très sensible le cens d'éligibilité, je pense
que la loi électorale que nous proposons, à la demande de la
ville de Montréal, s'inscrit dans les lois qui me semblent un
progrès. Et si, plus tard, à la suite des travaux de notre
commission parlementaire, nous en venons à d'autres conclusions,
à la suite de recherches sérieuses, nous n'aurons aucune
objection, bien au contraire, à ce que tous les membres de cette Chambre
se donnent le mot pour transposer au niveau municipal des réformes que
nous pourrions alors proposer au niveau provincial. Mais faire le contraire
serait mettre la charrue avant les boeufs, serait risquer de faire des
réformas mal engagées.
Je constate, et on me permettra bien de le dire en terminant, que le
député de Lafontaine, tout en faisant son intervention ce soir,
avait d'autres objectifs que de discuter le fond de ce projet de loi. C'est un
secret de polichinelle que le PQ songe à présenter des candidats
aux pro-
chaines élections municipales. Bonne chance, messieurs! Le
député de Lafontaine pourra se vanter d'avoir lancé ce
soir, avec le succès que l'on verra, la campagne électorale
municipale de Montréal.
M. LEGER: M. le président...
M. LAPORTE: Jusqu'à nouvel ordre, c'est le ministre qui a le
droit de réplique; ce n'est pas le député.
M. LEGER: Il y a quand même une affirmation que le ministre a
faite...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que le député de
Lafontaine peut rétablir les faits, s'il y a des paroles qu'on lui a
prêtées qui ne seraient pas exactement celles qu'il a
prononcées, mais sans soulever de débat. Il peut rétablir
ses propos en vertu du règlement.
M. LEGER: Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Il ne s'agit pas d'apporter d'arguments nouveaux.
M. LEGER: Le leader parlementaire, je n'essaierai même pas de
résumer tout ce qui a été dit, nous en aurons l'occasion
au cours des discussions en commission. Je voulais tout simplement dire qu'il a
affirmé tantôt que les candidats, à 65%, du Parti
québécois n'étaient pas représentatifs du peuple.
Je voulais dire que, pour être du peuple, je pense qu'on ne doit pas
nécessairement être des illettrés, mais des personnes qui
ont l'esprit du peuple.
M. LAPORTE: C'est sans conséquence, parce qu'ils ont presque tous
été battus.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député de Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: J'ai écouté avec beaucoup d'attention
l'intervention du député de Chambly, surtout lorsqu'il
s'attardait à décrire le genre de candidats qui ont
été présentés par le Parti québécois,
lors des dernières élections. Il est vrai que le Parti
québécois s'est retrouvé avec un certain nombre de
candidats que l'on pourrait qualifier de professionnels. On pourrait
épiloguer longtemps sur les raisons qui ont pu amener cet état de
choses, quand on sait que plusieurs ouvriers hésitent à briguer
une charge qui peut les séparer longtemps de leurs activités
habituelles ou encore toutes les raisons psychologiques qui peuvent les
empêcher de se présenter. Ce que je voulais surtout lui souligner,
c'était la chose suivante. C'est que, même si l'on est
professionnel, cela n'empêche pas de comprendre les besoins de la
population et, en particulier, des secteurs les plus défavorisés
de notre population. Je pense bien que le député de Chambly peut
reconnaître lui-même que même s'il est avocat, même
s'il a été longtemps journaliste, il peut comprendre les besoins
de tous les secteurs de la population. Il est donc bien malvenu de reprocher
à d'autres d'épouser cette cause de secteurs de la population
qu'on peut estimer être parfois négligés par les
autorités en place. Je n'ai donc pas à m'en excuser si, à
plusieurs reprises, nous serons obligés de donner une voix à ces
réclamations de certains secteurs de la population qui, à tort ou
à raison, ont parfois l'impression de ne pas se faire entendre comme il
se devrait à cette Assemblée.
M. LAPORTE: Si le député me permet, j'ai dit ça
tout simplement parce que le député de Lafontaine a
affirmé qu'au conseil municipal de Montréal plus de 65% ou 70%
des élus étaient des gens, ou professionnels, ou hommes
d'affaires. J'ai dit: Avant de jeter des pierres chez le voisin, regardons chez
soi. C'est la seule raison qui m'a amené à dire ça.
M. LAURIN: Le député de Chambly a aussi dit que nous
avions peut-être l'habitude de nous asseoir plus souvent que de raison
sur des grands principes. Il est vrai que nous aimons invoquer les principes.
C'est peut-être un des signes de notre naïveté politique que
d'invoquer assez souvent les grands principes, mais, que voulez-vous, nous y
croyons. Nous croyons que ces principes sont quand même ce qu'il y a de
plus important, de plus vital dans une démocratie et qu'une
démocratie qui oublierait ses grands principes risquerait rapidement de
se corrompre, comme un poisson pourrit facilement par la tête. Ces grands
principes, malgré qu'on puisse nous reprocher de les invoquer trop
souvent, nous continuerons à les invoquer d'une façon
peut-être plus habile, plus stratégique et plus tactique, mais
nous continuerons à les invoquer parce qu'ils sont à la base de
notre action, parce qu'ils sont à la base de notre programme et que nous
n'aurons de cesse que ces grands principes puisse s'incarner pour nous dans une
politique qui soit véritablement à l'avantage des
Québécois.
J'en arrive maintenant à ce projet de loi
numéro 5. Comme l'a dit le député de Chambly, il
est bien probable que ce projet de loi reflète l'opinion des
autorités de la ville de Montréal. Mais Je dois quand même
avouer, si tel est le cas, que cette opinion des autorités de la ville
de Montréal me déçoit profondément. Elle me
déçoit parce que je me serais attendu à davantage de la
part d'un premier magistrat qui a donné à notre pays, à
notre province et à notre ville quelque chose d'aussi remarquable que
l'Expo 67 et les jeux oplympiques. Je me serais attendu à ce qu'il
manifeste, lorsqu'il s'agit de respecter les principes fondamentaux de la
démocratie, la même vision, la même envergure qu'il a
manifestée lorsqu'il s'est agi de convier toutes les autres populations
du globe à la ville de Montréal, soit pour leur faire admirer les
génies que nous avions à présenter, soit pour les convier
aux olympiades internationales. Je me serais attendu que dans le domaine
fondamental du droit du citoyen à exprimer son vote de la façon
la plus juste qui soit, il aurait fait montre de la même clarté,
de la même justice, du même degré de respect de l'opinion du
citoyen.
C'est vraiment une grande déception car ce n'est un secret pour
personne, M. le Président, que le régime électoral de
Montréal était probablement un des plus rétrogrades, un
des plus réactionnaires qui existât encore dans la province de
Québec. Cela était d'autant plus scandaleux que presque toutes
les autres municipalités du Québec, y compris la ville de
Québec, avaient réussi à se doter au fil des années
d'un régime de suffrage électoral qui correspondait davantage aux
principes qui doivent sous-tendre une véritable démocratie.
En ce sens, le projet de loi qui nous arrive aujourd'hui ne constitue
qu'un ajustement très tardif à la coutume qui s'était
déjà installée dans toutes les régions du
Québec. Ce n'est donc pas une « réformette », mais
bien au contraire un rattrapage et un rattrapage des plus tardifs et des plus
partiels à une situation qui constituait un véritable scandale
pour toute la population du Québec. Si la ville de Montréal a pu
donner l'exemple dans d'autres domaines d'un dynamisme véritablement
remarquable, dans ce domaine du suffrage universel et de la
représentation démocratique, on peut vraiment dire qu'elle
traînait à la queue de presque toutes les villes du continent.
En ce sens, je suis déçu que ces recommandations de la
ville de Montréal nous arrivent encore avec ce petit air vieillot,
suranné qui ne correspond plus à notre mentalité. Bien
sur, on nous dit: Il s'agit d'adopter le vote uni- versel à 18 ans. Je
suis d'accord là-dessus et c'est la raison pour laquelle notre parti a
décidé de voter en principe pour ce bill. Nous sommes
également pour le cens d'éligibilité dont parlait le
député de Chambly. Mais par contre, il existe dans ce projet de
loi tellement d'autres caractéristiques qui sentent, justement, une
période dépassée, qui sentent l'anachronisme à
plein nez, qui sentent certaines pratiques que tout le monde déplore,
que nous aurions été fortement tentés de voter contre le
principe de ce projet de loi.
Mais précisément parce que le vote à 18 ans
constitue quand même une des plus grandes conquêtes de la
démocratie, parce que ce vote à 18 ans est déjà le
fait du Québec, de la province en général et de tant
d'autres municipalités, nous ne voulions pas montrer que nous
désapprouvions une de ces conquêtes fondamentales du régime
démocratique.
Mais il reste quand même qu'en vertu des autres articles du projet
de loi qui nous déplaisent profondément, nous avons l'impression
qu'on veut nous faire avaler avec du jus d'orange, c'est-à-dire le vote
universel à 18 ans et le cens d'éligibilité pour tout le
monde, une huile de castor au goût extrêmement
désagréable, et là je m'explique. Car, au moment, M. le
Président, où tout le monde conclut à la
nécessité d'une réforme électorale au niveau
provincial, ce projet de loi tend à copier la loi provinciale actuelle
dans ce qu'elle a de plus lourd, dans ce qu'elle a de plus dangereux, dans ce
qu'elle a de plus inefficace, de plus imparfait et de plus
antidémocratique.
J'attends justement, comme le député de Chambly, la
commission parlementaire afin que tous les députés de tous les
côtés de la Chambre, sans partisanerie politique, amènent
en toute lucidité les réformes que chacun d'eux veut proposer
à la suite des remarques, des constatations, des observations qu'il a pu
faire lors de la dernière campagne électorale et qui nous
montrent que cette loi électorale est très imparfaite.
En ce sens, ce projet de loi numéro 5 veut jeter de la poudre aux
yeux de la population. Il manifeste, selon nous, une crainte extrêmement
conservatrice à innover, une impossibilité à
véritablement se mettre au pas des institutions démocratiques les
plus modernes.
Par exemple, il semble faire croire à la population qu'il
instaure un régime universel de droit de vote, alors que le cens
électoral, au terme même de ces articles du projet de loi,
apparaît encore très limité. Limité, surtout, dans
une des caractéristiques qui sent le plus non seulement notre ancien
régime à nous, mais
un ancien régime qu'on avait coutume de dénoncer lorsqu'on
étudiait, par exemple, les institutions de l'Angleterre, vers les
années 1830 ou 1840, c'est-à-dire un droit de vote attaché
aux notions capitalistes de valeur d'occupation ou valeur de
propriété.
Ce droit de vote, en particulier, attaché à un droit de
propriété qui permet à des non-citoyens de la ville de
voter. On n'avait pas vu cela depuis 100 ans, depuis 120 ans, M le
Président. Et c'est au scandale de cette Chambre, j'en suis convaincu,
dans le fond de son coeur, que nous verrons un article tiré d'une
coutume britannique vieille de 130 ans et qui avait été
désavouée par les Chambres britanniques nous revenir ainsi, afin
d'être entérinée par un projet de loi qui se veut moderne
en 1970.
Par ailleurs, la crainte d'Innover se manifeste surtout par l'absence de
mention d'une liste électorale permanente avec carte d'Identité,
alors que ceci devient une préoccupation de tout le monde, qui
reconnaît que c'est devenu une nécessité vitale. Je suis
bien d'accord avec le député de Chambly que cette liste
électorale permanente et que cette carte d'identité sont
difficiles à établir, qu'il y a des dangers à
éviter, qu'il y a des abus qu'il faut prévoir, que le processus
comporte une certaine lenteur. Je suis bien d'accord, mais ce projet de loi
aurait pu, au moins, inclure ce principe afin que, lorsque les travaux de la
commission parlementaire auront été complétés, nous
puissions faire ce passage plus facilement, ainsi que le député
de Chambly l'a laissé entendre.
D'ailleurs, est-ce tellement difficile de faire une liste
électorale permanente? Est-ce tellement difficile d'établir une
carte d'identité qui ne se prêterait pas aux abus ou aux dangers
dont le député de Chambly parlait? Après tout, est-ce que
les élèves de nos CEGEP ne possèdent pas
déjà leur carte d'identité, selon des
procédés techniques extrêmement modernes, le
procédé Polardid où la photo est incluse dans la carte
même de l'étudiant, ce qui exclut, d'une façon presque
mathématique, toute contrefaçon? N'y aurait-il pas eu moyen, si
le bill avait été présenté avec des délais
suffisants, de prévoir, pour les électeurs, la confection d'une
carte d'identité pour fins électorales, à peu près
de la façon dont je parle? Je sais, avec le député de
Chambly, que, depuis 1961, la ville de Montréal avait demandé
cette permission de faire une carte d'identité. Depuis le temps que ce
privilège a été demandé, depuis le temps que cette
demande a été faite, il me semble que l'administration de
Montréal, qui est dirigée, en 1970, par les mêmes personnes
qui la dirigeait en 1961, aurait quand même eu le temps de penser
à des techniques, de penser à des méthodes qui lui
auraient permis de donner suite à ce voeu pieux parce que c'est
bien comme cela qu'on est obligé de le dénommer, puisque,
après neuf ans il n'a pas été suivi d'exécution
qu'elle émettait en 1961.
Nous espérons que, lorsque la discussion viendra en comité
plénier, le temps sera encore venu de rattraper cette erreur, cette
omission et qu'au moins le principe soit respecté, de façon que,
lorsque la commission parlementaire aura terminé ses travaux sur le plan
provincial, ce soit plus facile de faire bénéficier les
électeurs, au niveau municipal, de cette innovation.
Par ailleurs, M. le Président, le système
d'énumération, qui semble copié sur la loi provinciale
également, ne l'est pas du tout, en réalité. En effet, il
n'y a aucun contrôle possible, par quelque opposition que ce soit, et
encore moins par la population générale, que l'on invite pas du
tout à participer au nouveau système. Il est vrai que jusqu'ici
le système de confection des listes, à Montréal, n'a
guère été entaché, depuis longtemps, des vices
inhérents au système provincial, probablement à cause de
la structure des partis, mais cela tenait aux hommes seulement. La nature
humaine étant ce qu'elle est, le système qui nous est
proposé par le projet de loi donne donc ouverture dans l'avenir à
des abus de la même nature que ceux que l'on a pu connaître
à d'autres niveaux, fédéral ou provincial.
En fait, ce que comporte de plus inefficace, de plus insignifiant, de
plus onéreux et de plus dangereux le système actuel provincial,
c'est la façon dont on prévoit les cas de révision. Or,
c'est ce que ce projet de loi copie le plus servilement dans la loi provinciale
actuelle. Il nous semble que, même s'il ne faut pas mettre la charrue
devant les boeufs, on aurait pu sans quand même établir une
politique tout à fait nouvelle, ce qui revient à la commission
parlementaire corriger quelques-uns des abus, des dangers les plus
criants et mettre, dans le nouveau projet de loi, quelque chose qui aurait
contenté les désirs démocratiques de la majeure partie de
la population.
En effet, il serait tellement plus facile, tellement plus efficace,
tellement plus juste, par exemple, de faire en sorte que les gens dont on veut
radier les noms ou qui veulent s'inscrire parce qu'ils ont été
omis, soient sûrs d'être entendus, ce qu'est loin de prévoir
le système actuel, ainsi qu'on l'a vu lors des récentes
consultations électorales. Il aurait été tellement plus
facile, plus efficace et plus juste également de permettre aux
électeurs de le faire non par écrit, mais en se présentant
tout simplement
à un bureau de révision pendant une période qu'il
aurait été permis de déterminer et d'établir.
Au lieu de cela, on prévoit des demandes écrites, des avis
qui ne parviennent pas toujours aux intéressés, surtout lorsqu'il
y a des intérêts qui interviennent pour permettre des retards
postaux qui ne sont pas dus aux grèves perlées ou aux
grèves tournantes que l'on connaît en ce moment, mais qui sont
dus, au contraire, à des intérêts électoraux.
L'on prévoit, en plus, tout un appareil judiciaire qui entend des
causes qu'il ne peut vraiment pas juger, parce que la personne
intéressée n'est pas sûre d'être entendue. Là
aussi, dans ces tribunaux de révision, il y aurait eu moyen, avec un peu
de temps et un peu d'attention, de profiter des expériences
récentes et de prévoir un système de révision qui
n'aurait pas favorisé la défranchisation d'un grand nombre
d'électeurs, comme cela s'est déjà produit et comme cela
risque de se produire lors de la prochaine consultation municipale à
Montréal.
Sur ce sujet, d'ailleurs, il est facile de prévoir d'autres
détails de simplification. Il est certain, par exemple, comme nous
l'avons déjà dit, que le test le plus important à faire
est celui de la demande d'une liste électorale permanente avec carte
d'identité. C'est là que l'on verra si le gouvernement et les
autorités municipales sont sérieux ou pas. Mais si la chose
demeure impossible pour le moment, à cause, comme je le disais tout
à l'heure, des délais et des études techniques qui restent
à faire, au moins n'aurait-il pas été possible d'inscrire
dans le projet de loi une disposition transitoire qui aurait fait qu'à
la prochaine consultation municipale les critères, les principes et les
exigences de la démocratie auraient été mieux
respectés, quitte à ce que la disposition permanente
prévoie, lorsque la commission parlementaire aura terminé ses
travaux, qu'au prochain scrutin municipal de Montréal on profite de tous
les travaux de la commission parlementaire.
Encore une fois, ceci n'aurait pas été mettre la charrue
devant les boeufs, car le vote, où qu'il se déroule, est
sacré. Quand le vote se déroule dans la plus grande
agglomération du Québec, dans la ville de Montréal qui
compte près de 1,600,000 habitants, il est extrêmement important
de tout mettre en oeuvre pour que les citoyens soient sûrs que leur vote
puisse s'exprimer d'une façon exacte, d'une façon fidèle
dans les représentants qu'ils se sont choisis. Je dirais la même
chose, bien sûr, pour n'importe quelle municipalité du
Québec, mais quand il s'agit d'une grande ville comme Montréal,
quand on sait le rôle extraordinai- rement important qu'elle joue dans la
vie collective du Québec, il me semble que cette députation
devrait faire tous les efforts pour que ces grands principes dont on parlait
tout à l'heure soient respectés non seulement dans l'esprit, mais
dans la lettre et que toute cette Chambre s'efforce de procurer aux citoyens de
Montréal la représentation la plus démocratique qui
soit.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales. Je dois
avertir la Chambre que, si le ministre prend maintenant la parole, il exerce
sont droit de réplique et que ceci mettra, fin au débat.
M. Maurice Tessier
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais d'abord faire part de ma
surprise en entendant le leader du Ralliement créditiste, le
député de Mégantic, dire à cette Chambre qu'il
n'avait pas eu le temps d'examiner le projet de loi. Si je m'en
réfère au feuilleton, ce projet de loi a été
distribué aux membres de cette Chambre le 12 juin, par
conséquent, il y a un peu plus d'un mois. Ma seconde impression a
été que le député de Mégantic ne
s'était même pas donné la peine de lire le texte du projet
de loi 5. En effet, il a émis certains doutes sur la
légalité de l'élection d'un maire ou d'un conseiller
municipal âgé de 18 ans.
Or, ce n'est pas du tout ce que dit le projet de loi numéro 5.
Bien au contraire, les articles 2 et 3, qui parlent du cens
d'éligibilité à la fonction de maire ou de conseiller
municipal, mentionnent clairement qu'est éligible à ces charges
toute personne physique majeure. On sait que, pour être majeur, en vertu
de notre code civil, il faut avoir atteint l'âge de 21 ans
révolus.
En ce qui concerne le droit de vote, c'est différent.
L'électeur, évidemment, n'a pas à remplir le rôle
d'administrateur puisqu'il n'est pas éligible s'il n'a pas 21 ans. La
loi réduit, cependant, à 18 ans le droit de vote au suffrage
universel.
Ces deux considérations précisées, je voudrais,
très brièvement, souligner quelques énoncés
émis par le député de Lafontaine, qui, sans aucun doute,
dans cette Chambre s'est fait le porte-parole du FRAP. En effet, toutes les
représentations faites par cette organisation reflètent
exactement les énoncés émis par le député de
Lafontaine qui, d'ailleurs, comme le FRAP, voit partout de la fraude.
Notre façon de procéder ne nous met pas à l'abri,
évidemment, de tous les fraudeurs, mais jusqu'à maintenant, c'est
le meilleur système qui ait été trouvé. On a
parlé d'une liste électorale
permanente; eh bien, c'est ce qui existait autrefois. Dans la plupart
des municipalités, le rôle d'évaluation, c'est ça la
liste électorale permanente. Mais, parce que l'expérience a
démontré que, souvent, cette liste électorale permanente
contenait de multiples omissions ou erreurs, nous avons tenté, par la
présente loi, de faire disparaître ces lacunes en procédant
de la même manière que nous procédons en vertu de la Loi
électorale provinciale ou de la Loi électorale
fédérale, c'est-à-dire avec la nomination de recenseurs,
et en déterminant un temps pour la confection des listes. Le projet de
loi 5 mentionne que l'on doit procéder par rue, numéro par
numéro. Par la suite, la liste est affichée et tout le monde en
est informé.
Il y a un délai d'une dizaine de jours pour tous ceux qui
se croient lésés et dont les noms n'apparaissent pas sur la
liste, ou encore pour les noms qui y apparaissent et qui ne devraient pas y
être pour faire ajouter des noms ou les faire rayer de la liste.
Je crois que c'est encore le meilleur système qui a pu être
trouvé jusqu'à présent.
Quelle garantie avons-nous, avec une liste permanente, qu'il n'y aurait
pas autant ou peut-être même plus d'omissions ou d'erreurs? Si
l'électeur ne se donne pas la peine de vérifier la liste
électorale, de voir à ce que son nom soit inscrit, je crois qu'il
n'a qu'à s'en prendre à lui-même, à sa propre
négligence. Qu'on ne vienne pas nous accuser de fraude!
Je tiens à souligner également que le président des
élections est à l'abri de toute menace ou contrainte de la part
du conseil municipal puisque, s'il survenait une telle menace ou contrainte, il
pourrait avoir recours immédiatement à la commission municipale
qui ferait aussitôt une enquête à ce sujet.
En somme, il est facile de critiquer. Je crois que les critiques que
nous avons entendues, tant de la part du député de Lafontaine que
de la part du député de Bourget, sont des critiques
négatives. On nous parle de carte d'identité, mais songe-t-on au
délai considérable qu'il faudrait si on devait procéder
à la mise sur pied de tout un système de cartes d'identité
lorsque les élections à Montréal doivent avoir lieu
à la fin d'octobre? C'est évidemment un système qui peut
être considéré. C'est un système qui pourrait
être inclus dans la Loi générale des élections.
Comme je l'ai mentionné, elle aura au-delà de 500 articles. Nous
pourrons en discuter en comité, nous pourrons l'amender au besoin.
Il s'agit évidemment, avec le bill no 5, d'une loi que je
pourrais qualifier d'un peu urgente puisque nous sommes à la veille
d'ajourner la présente session à l'automne, à une date
pos- térieure à la date des élections. Il faut donc donner
et c'est ce qui importe à la population de Montréal
le suffrage universel et protéger le plus possible l'électeur au
cours des prochaines élections. Ce sont là les principales
remarques que j'entendais faire en terminant le débat en deuxième
lecture avant de procéder à l'examen, article par article, en
comité.
M. LE PRESIDENT (Hardy): La motion de deuxième lecture
sera-t-elle adoptée? Adopté.
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre des Affaires municipales
propose maintenant que je quitte le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier.
M. LAPORTE: Il change de fauteuil. M. BERTRAND: Changez de fauteuil
M. LEGER: M. le Président, y aurait-il possibilité que
l'on siège en commission plutôt qu'en comité
plénier?
M. LAPORTE: En commission quoi? Voulez-vous répéter?
M. LEGER: En commission parlementaire plutôt qu'en comité
plénier?
M. LAPORTE: Bien, M. le Président, je ne comprends vraiment pas
la demande du député, puisque, actuellement, tous les
députés sont membres du comité plénier. Il voudrait
restreindre ça à la commission parlementaire. Si, après
l'étude en comité plénier, un député en
faisait la demande, on pourrait la considérer, mais je ne comprendrais
pas qu'on veuille allonger la procédure. Tous les députés
sont membres du comité plénier.
M. LEGER: M. le Président, je peux expliquer la raison pour
laquelle je demande cela. C'est simplement pour que ce soit plus rapide et que
d'autres choses puissent être étudiées ailleurs pendant que
la commission siège.
M. PAUL: Ce n'est pas nouveau. M. LAPORTE: Quoi?
M. PAUL; Je comprends que ce n'est peut-être pas
régulier.
M. LAPORTE: Enfin, si c'estle désir du comité
plénier, je n'ai pas d'objection à ce qu'on réfère
le bill 5 immédiatement à la commission parlementaire sur les
Affaires municipales. Sans préavis, il y a des membres qui vont se
plaindre.
M. PAUL: La motion a été adoptée, M. le
Président.
M. LAURIN: C'est plus facile de discuter autour d'une table.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que vous avez adopté
l'affaire avant qu'on ait eu le temps de s'exprimer? Vous êtes rendu
à l'article 1 et on ne sait même pas si on siège ici.
M. LAPORTE: Alors, pour rassurer le député, puisque sa
demande ne me paraît pas hors d'ordre, loin de là, il serait
peut-être préférable que tous les députés
puissent l'étudier ensemble. Ce projet de loi, si j'en juge par les
interventions de nos amis du Parti québécois, aura
peut-être des échos provinciaux. J'aimerais mieux que tous les
députés sachent ce qui s'en vient dans ce projet de
loi-là, quitte à prendre le temps nécessaire pour
l'étudier.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1.
M. LAPORTE: Maintenant, si le député veut s'approcher de
nous.
M. BERTRAND: Bien oui, on est prit à prêter quelques
fauteuils.
M. LAPORTE: Qu'ils ne prennent pas l'habitude de changer de
côté de la Chambre sans...
M. BERTRAND: Le ministre peut peut-être, lui-même...
M. LAPORTE: Oui, on peut se retirer. M. BERTRAND: Nous pouvons nous en
aller.
M. TESSIER: Vous voulez que je me rapproche?
M. PAUL: On présume que notre président veut participer au
débat.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté. Article 2?
M. LEGER: M. le Président, à l'article 2, il est
mentionné que toute personne physique majeure peut être mise en
candidature si elle ou son conjoint est inscrite au rôle
d'évaluation. Alors pour faire suite aux principes que nous
énoncions sur l'article 2, pendant la deuxième lecture, nous
croyons qu'il serait préférable de simplifier cela. Le leader
parlementaire disait tantôt que ça permettait à beaucoup
plus de gens de voter. Je suis tout à coup surpris de voir qu'il
préfère une chose compliquée à une chose simple. Je
pense qu'il serait beaucoup plus simple que toute personne qui est
domiciliée dans la ville depuis au moins 12 mois, avant la date de la
mise en candidature ou de la nomination, si elle a 21 ans, ait droit
d'être éligible.
C'est la raison pour laquelle je ne ferai pas de long discours
là-dessus. Je ne vois pas pourquoi on mettrait une restriction superflue
à ses possibilités d'éligibilité en lui donnant
l'obligation d'être sur le rôle des valeurs locatives. Je pense que
ça enlève quand même beaucoup de personnes qui pourraient
voter.
M. LAPORTE: Pour éviter une longue argumentation de la part du
député, après consultation avec le ministre, avec le
premier ministre et avec un des collègue je n'aurais pas d'objection
à cela.
M. BOURASSA: Vous voyez comme on est positif.
M. LEGER: On va continuer en comité. Alors, la proposition que je
faisais, c'est de remplacer les paragraphes a) et b) par les mots suivants: Si
elle est domiciliée dans la ville depuis au moins 12 mois, avant la date
de la mise en candidature ou de la nomination, selon le cas.
M. LAPORTE: Il faut quand même qu'on puisse avoir un certain
contrôle sur le désir d'une personne d'être
domiciliée ou d'être membre de la ville. Si on acceptait un
compromis, en disant: que toute personne, mais 24 mois de domicile, au lieu de
douze. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. LEGER: D'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Quel est l'amendement exactement, pour les fins
du procès-verbal? Si je comprends bien, le député de
Lafontaine retire l'amendement.
M. LEGER: Non, je ne le retire pas, il y a une correction. Mon
amendement était le suivant, vous avez la copie. Remplacer le paragraphe
a) et le paragraphe b) de l'article 2 par les
mots suivants: « ... si elle est domiciliée dans la ville
depuis au moins douze mois avant la date de la mise en candidature ou de sa
nomination, selon le cas ».
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lafontaine accepte
de changer le chiffre 12 par le chiffre 24 dans son amendement.
Cet amendement est-il adopté?
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.
M. LAPORTE: Il ne faudrait pas quand même que, dans votre
désir, dont parle le député de Lafontaine, de
démocratiser, vous enleviez à une partie des citoyens un droit
réel. Dans notre droit municipal, ce qu'on appelle l'économie du
droit municipal, la personne qui est contribuable a un droit de regard sur
l'administration de la chose municipale. Dans une administration provinciale,
devient électeur toute personne qui est citoyenne, et c'est l'objectif
que nous voulons atteindre graduellement au municipal. Il y a une dimension
différente: c'est que toutes les sommes d'argent sont tirées
directement des citoyens contribuables, et c'est ce qui leur donne le droit de
regard. La personne domiciliée à Montréal a le droit
d'être candidate, il ne faudrait pas qu'on le retire dans le b) aux
personnes qui ne sont pas domiciliées à Montréal, qui sont
contribuables et qui habitent dans un des territoires de la communauté
urbaine. En retranchant 12, on enlèverait le cens
d'éligibilité à toute personne domiciliée dans
l'une des municipalités du territoire de la communauté. Je pense
que c'est aller trop loin.
M. BERTRAND: Je voudrais attirer l'attention des membres du
comité. On connaît la complexité de la charte de la ville
de Montréal. Je n'ai pas d'objection à ce que nous acceptions des
amendements, mais je crois qu'il serait à propos que nous ayons des
légistes présents, de manière que l'on puisse voir si
l'amendement que nous adoptons à l'article 2 n'a pas de
référence à un article qui n'est peut-être pas dans
la loi.
M. LAPORTE: Si le chef de l'Opposition me le permet, depuis que nous
n'avons plus de Conseil législatif, où l'on corrigeait beaucoup
de ces choses-là, il a été entendu, entre les gens qui
s'occupent plus particulièrement de la législation, que lorsqu'il
y a des amendements substantiels, qu'il y en a un certain nombre, on s'en- gage
à ne pas adopter la troisième lecture tout de suite pour que les
légistes, le lendemain, puissent nous faire certaines suggestions quant
à la rédaction. Se mettre à rédiger des lois sur le
coin du pupitre, ici, c'est extrêmement dangereux. Deuxièmement,
ce que le chef de l'Opposition dit est exact, les implications, quand on amende
le paragraphe a) ça peut avoir des implications qu'on ne prévoit
pas 20 articles plus loin. Nous acceptons l'amendement, le ministre des
Affaires municipales est d'accord, mais il est entendu que demain, tôt
demain matin, les légistes vont recevoir les amendements, nous feront
leurs recommandations quant à la façon de les écrire ou
quant à leurs implications, le ministre des Affaires municipales fera
rapport à la Chambre.
M. LEGER: Je suis d'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.
M. LEGER: L'article 2, tel qu'amendé.
M. LAPORTE: On maintient 2 b).
M. GARNEAU: L'article 2 a), mais pas 2 b).
M. LAPORTE: Votre amendement, si le ministre des Affaires municipales
est de notre avis, remplacerait le paragraphe a), mais nous maintiendrions le
paragraphe b).
M. LEGER: Dans le paragraphe b), c'est une personne qui est
domiciliée dans la communauté urbaine, mais qui n'est pas
nécessairement domiciliée dans la ville de Montréal.
M. LAPORTE: Toute personne qui est domiciliée à
Montréal depuis 24 mois pourrait se présenter. Toute personne
domiciliée en dehors de la ville de Montréal, mais dans la
communauté urbaine, à certaines conditions prévues par la
loi, pourrait également se présenter.
M. LEGER: D'accord.
M. GARNEAU: On amende l'article 2 a )et on garde l'article 2 b).
M. LAPORTE: C'est ça; on amende l'article 2 a ) et on garde 2
b).
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté. Article 3?
Adopté?
M. LEGER: Un instant. A l'article 3, à notre
avis, cela rend identiques les conditions de l'article 2. Si l'on veut
être logique avec l'article 2, il faudrait retrancher l'article 3.
M. TESSIER: L'affaire, c'est que, si vous mettez cela identique, dans
l'article 3, cela voudrait dire que quelqu'un qui serait domicilié en
dehors de la ville de Montréal pourrait être élu maire. Si
vous rendez ça identique. D'ailleurs, c'est un peu pour ça qu'on
a mis deux articles différents.
M. LEGER: Si on accepte l'article 2...
M. TESSIER: Autrement, on aurait pu dire maire et conseiller dans le
même article.
M. LEGER: D'accord. Si on accepte l'article 2b), d'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté?
M. LEGER: Vous êtes d'accord pour l'article 3?
M. TESSIER: En ce qui me concerne, oui.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté.
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 4? Adopté?
M. LEGER: Article 4, adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5?
M. LEGER: A l'article 5, toute personne domiciliée dans la ville
depuis au moins douze mois peut se permettre de voter. Nous proposerions que
l'article 5 se lise comme suit: « Tout citoyen canadien âgé
de dix-huit ans révolus, qui n'est pas frappé d'incapacité
légale ni autrement privé du droit de voter par la
présente charte, qui est domicilié dans la ville depuis au moins
vingt-quatre mois je corrige le mot « douze » pour
être en concordance avec tantôt avant le premier septembre
de l'année de l'élection est électeur et est inscrit sur
la liste électorale.
M. PICARD: Est-ce que vous avez dit citoyen canadien ou citoyen
québécois?
M. LEGER: Dans notre esprit, c'est québé- cois, mais
actuellement on est obligé de dire canadien.
M. PICARD: C'est parce que cela me surprend.
Lorsque vous mentionnez ici « toute personne âgée de
dix-huit ans révolus », à quelle date?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Pour procéder un peu avec ordre, je
demanderais d'abord au député de Lafontaine de nous indiquer
quelle est la partie de l'article 5 que son amendement touche.
M. LEGER: Cela remplace tout l'article 5 parce que...
M. LAPORTE: Est-ce que je peux demander au député
qu'est-ce que cela modifie?
M. LEGER: La raison, c'est qu'il y a des personnes qui ne sont pas
domiciliées dans la ville, alors que nous voulons que ce soient les
personnes qui y sont domiciliées.
M. LAPORTE: Vous voulez limiter le droit de vote à ceux qui sont
domiciliés?
M. LEGER: Disons donc que le principe de base était que le droit
de vote devait être donné au niveau de la personne qui vit dans la
ville et non pas uniquement au niveau du droit de propriété.
C'est la raison pour laquelle on apportait cet amendement-là.
M. LAPORTE: Oui, mais...
M. TESSIER: Vous voulez priver du droit de vote ceux qui ne sont pas
domiciliés dans la ville, c'est ça?
M. LAPORTE: Vous voulez qu'il y ait des gens de taxés qui n'aient
aucun droit de regard sur l'administration de la ville? Comment pouvez-vous
défendre ce principe-là?
M. LEGER: C'est qu'actuellement le vote est accordé à une
personne qui a des valeurs uniquement.
M. TESSIER: Non, non, non. Là, justement, c'est
séparé en deux parties. Une personne n'est pas obligée
d'être propriétaire ni locataire pour avoir le droit de vote, si
elle est domiciliée dans la ville de Montréal. Ceux qui sont
domiciliés à l'extérieur de la ville de Montréal
doivent être propriétaires ou loca-
talres. C'est le simple bon sens, je crois, que des gens qui paient des
taxes aient un droit de regard sur l'administration. Vous avez un
règlement d'emprunt et la ville s'endette; vous avez des
règlements de zonage et d'urbanisme. Je pense que ceux qui sont
propriétaires pour des centaines de milliers de dollars, souvent des
millions de dollars, ont leur mot à dire, sûrement, sur
l'élection de leurs administrateurs.
M. LEGER: Est-ce que le ministre pourrait me dire si, dans la ville de
Québec, les personnes qui possèdent des valeurs, actuellement
c'est une question d'information votent?
M. TESSIER: Oui, je crois que oui.
M. LEGER: Vous êtes d'accord. Vous dites que vous croyez; vous en
êtes sûr, certain?
M. LAPORTE: Oui.
M. TESSIER: Oui. D'ailleurs, je peux le contrôler ici.
M. LAPORTE: Lorsque nous avons amendé la charte,
transformé la charte de la ville de Québec, cela a
été le cens électoral universel à 18 ans pour les
domiciliés et les gens de l'extérieur devaient avoir des
biens-fonds ou être inscrits pour une valeur locative au rôle
d'évaluation.
M. TESSIER: Exactement, nous l'avons pour la ville de Québec.
M. JORON: M. le Président, je pense que le principe qui est en
jeu, ce n'est pas le « no taxation without representation ». Moi,
par exemple, je peux fort bien avoir une propriété, une maison au
Mexique sans être citoyen mexicain et sans avoir droit de vote au
Mexique. Le point que nous voulons faire valoir est le suivant: Qu'est-ce qui
confère le droit de vote? Est-ce que c'est le fait de posséder
une propriété ou si c'est le fait d'être un citoyen de la
ville? Il ne faudrait pas mêler les cartes.
Nous, nous pensons que le droit de vote rattaché à la
propriété est un vestige féodal que nous devrions faire
disparaître de...
M. LAPORTE: Non, non...
M. TESSIER: M. le Président, je pense que c'est absolument
injuste parce que si quelqu'un paie des taxes, quel qu'en soit le montant, il a
le droit de s'exprimer et de choisir ses administrateurs.
M. JORON: De la même façon, moi, si j'ai une petite bicoque
de rien du tout en Italie et que je paie $3.25 par année de taxe au
gouvernement italien...
M. LAPORTE: Oui, cela, c'est très gentil. C'est très
gentil de nous amener en Italie.
M. JORON: ... est-ce que cela devrait me conférer la
qualité d'électeur? Le raisonnement est le même.
M. LAPORTE: Si vous vous appuyez sur le droit de citoyenneté,
vous n'avez pas le droit de vote parce que vous n'êtes pas citoyen.
M. JORON: Bon, alors...
M. LAPORTE: C'est d'accord. Quand on n'est pas citoyen, on est
privé d'un tas de droits. Mais si vous étiez citoyen italien,
parlez-nous donc de la loi qui régirait votre petite
propriété aux élections municipales?
M. JORON: Là, on essaie de définir la citoyenneté
municipale, si vous voulez, dans un sens.
M. LAPORTE: Oui, mais disons que vous, si le mot était
parlementaire, je dirais que vous « charriez » un peu.
M. TESSIER: Même si vous demeurez en Italie, si vous êtes
citoyen canadien, si vous avez conservé votre citoyenneté
canadienne et que vous êtes propriétaire dans la ville de
Montréal, en vertu de quoi pouvez-vous refuser le droit de vote?
M. JORON: En vertu du principe qu'on ne considère pas le droit de
vote rattaché à la propriété, c'est tout.
M. LAPORTE: Ce n'est pas un principe.
M. TESSIER: Vous ne donnez pas le droit de vote à qui?
M. JORON: D'un principe ou d'une théorie, si vous voulez.
M. LAPORTE: De quoi? En somme, votre raisonnement, cela va. Nous
donnerons le droit de vote à tout le monde, nous sommes d'accord, mais
nous allons l'ôter à ceux qui ont quelques biens, nous allons leur
enlever le droit de regard. Pourquoi? Cela enlève quoi à qui?
M. JORON: Pourquoi? Parce que, finalement, nous aboutirons... Tout
à l'heure, la discussion viendra au sujet des corporations. Le
même principe sera en jeu, que ce soient les personnes physiques ou les
personnes morales, une corporation ou moi. Comme individu, dans ce
raisonnement, je pourrais avoir des petites propriétés dans
toutes les villes de la province et voter partout. Cela me semble illogique. Je
ne peux pas être en même temps...
M. LAPORTE: Et pourquoi pas?
M. JORON: ... citoyen et participer à la vie démocratique
de chacune de ces municipalités.
M. LAPORTE: Et pourquoi pas? Quand on veut étendre le droit de
vote, on dit: D'accord, le député a proposé un amendement
que tout le monde accepte et c'est très bien. Cela fait un pas de plus
dans notre législation. Mais de là à dire : Il y a des
gens qui l'ont déjà et qui peuvent... On imagine,
évidemment, toujours le monsieur qui a un château immense dans la
ville de Montréal. Or, il arrive que c'est une veuve qui a une petite
propriété et vous voulez lui ôter son droit de regard sur
l'administration de la ville.
M. JORON: Ecoutez, il est inutile de poursuivre cette discussion parce
qu'en fait c'est peut-être une différence de nature
idéologique qui nous sépare, mais pour fins d'information, je
voudrais demander au ministre s'il pourrait nous dire approximativement le
nombre d'électeurs qui tomberaient dans cette catégorie.
M. TESSIER: Je n'en ai aucune idée.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. le Président, je demanderais au
député de Gouin comment il peut concilier le fait qu'en vertu de
l'article 2b), il a accepté de donner la permission de se
présenter comme candidat aux contribuables qui ne résident pas
dans la ville même de Montréal et qu'à ces mêmes
personnes, en vertu de l'article 5, il refuserait le droit de vote? C'est une
affaire qui n'a pas de bon sens.
M. JORON: Là, il y a la distinction qu'on vient d'introduire au
sujet de la communauté urbaine qui...
M. PEARSON: Mais à ce moment-là, il aurait fallu refuser
l'article 2b), si vous voulez, en somme, passer l'article 5.
M. LEGER: Il y a quand même le fait qu'une personne peut
posséder des propriétés dans plusieurs villes et, à
chaque fois qu'il y a une élection, voter dans chaque ville.
M. TESSIER: Pourquoi pas?
M. LEGER: Elle peut donc voter dans toute la province de
Québec.
M. TESSIER: Pourquoi, si elle a des intérêts et des
propriétés dans trois ou quatre municipalités,
n'aurait-elle pas le droit d'exercer son droit de vote?
M. LEGER: Quelle différence y a-t-il au niveau de la loi
provinciale, du fait qu'on ne considère pas la propriété,
à ce moment-là? Elle sera taxée de la même
façon pour la province de Québec.
M. TESSIER: Oui, mais l'administration municipale est bien
différente de l'administration provinciale ou de l'administration
fédérale.
M. BLANK: Le mode de consultation au municipal, c'est la
propriété. Au provincial et au fédéral, ce n'est
pas cela.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le député de
Lafontaine maintient toujours son amendement?
M. LEGER: Au point de vue de ce principe idéologique, je suis
obligé de l'émettre, mais je vois très bien qu'il ne
passera pas.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le comité est prêt
à se prononcer sur l'amendement du député de
Lafontaine?
M. TESSIER: Il demande le vote là-dessus?
M. LAPORTE: Est-ce que le député insiste ou s'il retire
simplement son amendement?
M. LEGER: Non, non, on en a discuté et on voit que...
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député retire son amendement
et nous revenons à l'article 5. Adopté?
M. LEGER: Adopté.
M. PICARD (Olier): M. le Président, à l'article 5, les
personnes âgées de 18 ans révolus, c'est à partir de
quelle date? Si ce n'est pas mentionné dans la loi, je ne sais pas de
quelle façon on va être capable de l'établir.
M. BERTRAND: Au moment de l'énumération.
M. PICARD (Olier): La loi provinciale prévoit la date; c'est le
premier jour de 1'énumération. Mais ici, ce n'est pas
prévu.
UNE VOIX: Il faudrait vérifier. Est-ce que c'est
spécifié?
M. LAPORTE: On va poser la question demain aux légistes. Si cela
peut être automatiquement mentionné à la date de
l'énumération.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté. Article 6?
M. LEGER: Avec le principe qu'on a énoncé tantôt.
Dans notre esprit, il faudrait que l'article 6 soit retranché, parce que
cela revient encore aux mêmes idées que tantôt.
M. TESSIER: Ah, ça, je n'accepte pas cela! Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 6, adopté. Article 7?
M. TESSIER: Est-ce parce que vous croyez que les compagnies et les
corporations ne sont pas séparatistes? C'est pour cela que vous voulez
les retrancher?
M. LEGER: C'est-à-dire, elles le sont peut-être trop dans
notre esprit.
UNE VOIX: Dans votre esprit.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 7? Adopté.
M. LEGER: D'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8?
M. TESSIER: Article 7, adopté? Ça va bien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté?
M. LEGER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 9?
M. LEGER: Article 9, pour le même principe. On aurait voulu
retrancher l'article 9, qui serait inutile, si cela n'avait été
adopté ailleurs, puisque la qualité de propriétaire ou de
locataire donnait le droit de vote.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté sur division?
M. LEGER: C'est ça.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10?
M. LEGER: A l'article 10, qui modifie l'article 204 de la loi, voici ce
que nous proposions. Cest que, pour l'élection tant des conseillers que
du maire, les électeurs ne votent qu'une fois dans le district où
ils sont domiciliés.
M. TESSIER: Voulez-vous répéter?
M. LEGER: Pour l'élection tant des conseillers que du maire, les
électeurs ne votent qu'une fois dans le district où ils sont
domiciliés. Cest qu'on n'a parlé que de l'élection, on ne
parlait pas du maire.
M. BLANK: Si je comprends bien, vous voulez dire qu'une personne a,
disons, trois propriétés: une dans le quartier de Saint-Louis,
une dans le quartier de Notre-Dame-de-Grâce et une dans le quartier de
Bourget. Elle a droit de vote dans seulement un quartier.
M. LEGER: Un vote pour l'élection des conseillers et du
maire.
M. BLANK: Bien, pour le maire, il y a seulement un vote
actuellement.
M. LEGER: C'est ça.
M. BLANK: Pour les échevins, elle peut voter aux trois endroits.
Mais, si elle a deux ou trois propriétés, elle n'a pas droit de
vote deux ou trois fois dans le même quartier.
M. LEGER: D'accord.
M. BLANK: Ce ne serait pas logique non
plus, parce que, quand on vote pour tel ou tel conseiller dans un
district, on vote parce qu'on a confiance à ces gens-là. On veut
qu'ils protègent le zonage, etc. On a un intérêt
différent, peut-être, dans chaque quartier. Maintenant le droit de
vote est limité à un vote dans un quartier, même si vous
avez une douzaine de propriétés. C'est la raison, car, dans
chaque quartier, il peut y avoir un intérêt différent pour
la personne. Peut-être qu'il y a un intérêt à garder
une section de la ville commerciale, une autre section résidentielle, et
je veux voter pour des gens qui ont tendance à satisfaire mes besoins.
Cest pour cela que je pense que le système actuel, le système
d'un vote dans chaque district où vous avez des
propriétés, pour les échevins, mais seulement un vote pour
le maire, c'est logique.
M. LEGER: D'accord, mais, d'un autre côté, cela permet de
voter trois fois. Quand même, les décisions qui vont être
prises, que ce soit dans un des trois quartiers, elles vont être prises
seulement une fois, pour le maire.
M. BLANK: Oui, mais on vote seulement une fois dans le quartier.
M. LEGER: D'accord. Mais, c'est en accord avec le principe de
tantôt, une personne, un vote. Disons que, logiquement, notre
préoccupation est qu'une personne a droit à un vote.
C'est pour éviter quelque chose qui est contre cette idée
là que nous proposons un amendement.
M. BLANK: On ne comprend pas, moi je dis: Un vote dans chaque quartier.
Ce sont des élections différentes dans chaque quartier; c'est une
élection dans le quartier de Saint-Louis; c'est une élection dans
le quartier de Bourget. Il n'y a qu'un vote pour chaque élection, parce
que toutes les élections se font la même journée, ça
ne change rien.
M. LEGER: On vote quand même trois fois.
M. BLANK: Oui, dans trois différentes élections.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député d'Olier.
M. PICARD: M. le Président, je me demande comment vous allez
concilier ce qu'il y a à l'article 10 avec le dernier paragraphe de
l'article 12 où il est dit: « Tout électeur n'est inscrit
qu'une fois sur la liste électorale de la ville. » Alors, comment
pourra-t-on vo- ter dans trois quartiers différents si on n'est inscrit
qu'une fois?
M. LAPORTE: L'article 204 lui donne le droit de voter une fois dans le
district où on a son domicile.
M. LEGER: L'article 204 donne le droit de voter trois fois tandis que
l'article 12 le corrige. A la page 67, à l'article 204 on lit ceci:
« Pour l'élection des conseillers, les électeurs votent
dans le district où se trouvent les immeubles qui les qualifient comme
tels. Lorsqu'ils sont qualifiés comme propriétaires, locataires
ou occupants dans plus d'un district, ils peuvent voter dans chacun de ces
districts. »
M. LAPORTE: Quel article?
M. LEGER: L'article 204.
M. PICARD: L'article 12 le contredit.
M. LAPORTE: M. le Président, à Montréal,
l'électeur domicilié à Montréal ne vote qu'une
seule fois pour trois échevins, puisqu'il y a quinze districts qui
élisent chacun trois échevins, dans le district où il a
son domicile.
S'il n'est pas domicilié à Montréal, s'il est
qualifié par des propriétés, c'est la
propriété la plus importante qui le qualifie dans un seul
district, actuellement.
M. LEGER: Il y aurait donc un amendement à l'article...
M. LAPORTE: Cela a été amendé, il y a des
amendements tous les ans.
M. BERTRAND: Vous ne les avez pas là-dedans, il y en a quatre...
Ne vous fiez pas...
M. LAPORTE: Si les députés qui s'intéressent aux
affaires de Montréal prenaient le soin de demander à la ville de
Montréal une charte à jour, c'est amendé tous les ans,
vous avez des codifications. Je sais que le ministre a une codification qui
date de 1970. Cela a été amendé pour enlever le droit de
vote dans autant de districts qu'on a de propriétés et de le
limiter à un endroit, là où on a son domicile.
M. LEGER: Alors, c'est opposé à ce que disait le
député de Saint-Louis tantôt.
M. BLANK: Ceci prouve qu'un bon avocat peut apporter des arguments sur
n'importe quoi.
M. LAPORTE : Jusqu'à il y a quelques secondes, j'étais de
l'avis du député de Saint-Louis.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10, adopté.
M. LEGER: C'est-à-dire qu'il n'y a pas... « pour
l'élection des conseillers et du maire, les électeurs ne votent
qu'une fois dans le district où ils sont domiciliés », cela
revient à la même chose. Mais dans l'article 10, ce n'est pas ce
qui est mentionné.
M. TESSIER: Pardon?
M. LAPORTE: Autrefois il fallait la qualification foncière.
Maintenant qu'il y a le vote général, ce ne doit être que
ce que nous appelons un amendement de concordance. Cela fait disparaître
des mots, j'imagine, qui parlaient de qualifications foncières ou
locatives.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10, adopté. Article 11.
M. LEGER: A l'article 11, actuellement c'est le greffier, je
pense...
M. LAPORTE: C'est parce que, dans l'ancien article, on parlait de
résidence. Comme la loi définit maintenant le domicile, on
remplace, dans le texte, le mot « résidence » par le mot
« domicile ».
M. LEGER; D'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11?
M. LEGER: Voici l'amendement que nous aimerions apporter à
l'article 11, soit remplacer le troisième alinéa de l'article 206
dans lequel on dit: « L'estimateur doit fournir au président
d'élection, avant le 3 septembre de l'année de l'élection,
la liste des personnes qualifiées le 1er août; il signe cette
liste et la certifie, sous serment prêté devant un juge de paix,
comme exacte au meilleur de ses connaissances et croyance. L'estimateur doit
ajouter à la description de l'immeuble l'adresse de tout électeur
non domicilié dans la ville. »
Nous proposons de remplacer le troisième alinéa de
l'article 206 par le suivant: « Le président d'élection
nomme des énumérateurs sur recommandation des chefs de partis
politiques municipaux ayant manifesté leur intention de présenter
des candidats au moins à la moitié des postes de conseiller.
»
M. TESSIER: Oui, mais, une minute.
M. LEGER: Si vous voulez me permettre, je vais finir.
M. LAPORTE: Oui, d'accord.
M. LEGER: Après cela, on va s'expliquer. « Ces
énumérateurs ne seront rémunérés que si le
parti politique qui les a recommandés s'avère être un parti
reconnu le jour de la présentation officielle des candidats. Si le
président d'élection ne reçoit pas de recommandations en
nombre suffisant, il comble lui-même les vacances. »
J'explique les raisons et, après cela, vous pourrez me
répondre. Actuellement, nous croyons que les partis politiques reconnus,
qui pourraient l'être par un article qui va venir bientôt, n'ont
pas l'occasion d'être présents à l'établissement de
là liste électorale et à la révision. C'est la
raison pour laquelle les partis politiques municipaux qui seraient reconnus
selon une façon précise, qu'on verra plus tard, auraient le droit
d'être présents immédiatement. Une des conséquences,
lorsque ce n'est pas fait je m'excuse de revenir à
l'élection provinciale c'est que les partis non reconnus
n'avaient pas le droit d'avoir un représentant qui passait de porte en
porte; ils n'avaient pas, à cette occasion-là, la
possibilité d'avoir les listes électorales exactes en même
temps que les partis reconnus.
C'est la raison pour laquelle nous croyons que c'est une chose
désuète que de ne pas permettre à un nouveau parti d'avoir
une chance égale à celle du parti qui est au pouvoir ou qui est
sortant de charge.
M. TESSIER: M. le Président, la loi municipale, en
général, ne reconnaît pas officiellement les partis
politiques. Il n'y a rien, d'ailleurs, qui définit ce qu'est un parti
politique. Là, il faudrait modifier complètement la Loi des
cités et villes et le code municipal. Cela n'existe pas officiellement,
des partis politiques. Comment allez-vous déterminer et définir
un parti politique?
M. LEGER: Il faut quand même admettre que c'est possible par
règlement.
M. TESSIER: Allez-vous donner un statut particulier à la ville de
Montréal, qui serait la seule municipalité où il y aurait
des partis politiques reconnus, lorsque cela n'existe pas, ni dans la charte de
la ville de Québec, ni dans la Loi des cités et villes?
M. BERTRAND; Le ministre fait peut-être erreur, parce que c'est
dans la ville de Montréal qu'est né le premier parti politique
municipal au Québec.
M. TESSIER: Officieusement.
M. BERTRAND; Là Ligue d'action civique, d'abord, puis le Parti
civique. Personne, même son chef, Jean Drapeau, n'a jamais nié
qu'il s'agissait de l'instauration, dans le domaine municipal, du règne
des partis politiques. Je pense que le ministre fait erreur. De même, M.
Lamontagne n'a jamais prétendu que la ville de Québec ne comptait
pas de parti politique, au contraire. Parce que le Parti civique, dans la ville
de Québec également...
M. TESSIER: Oui, mais ce n'est pas un parti politique dans le
sens...
M. BERTRAND: ... est un parti reconnu.
M. TESSIER: ... où on l'entend, en vertu de la loi provinciale ou
de la loi fédérale. C'est cela que je veux dire.
M. BERTRAND; Le problème est beaucoup plus le fait que ce n'est
appliqué dans aucune municipalité du Québec.
M. LAPORTE: Cela amènerait, évidemment des amendements
extrêmement nombreux de concordance.
Le député voudrait-il, son point de vue ayant
été accepté conme sujet de discussion, que le tout soit
déféré à la commission parlementaire qui pourra, en
temps utile, traiter de l'opportunité de reconnaître ou de ne pas
reconnaître les partis politiques au niveau municipal? Je sais que
nombreux sont ceux qui jugent que le moment est venu de les reconnaître,
d'en encourager la création, mais si on veut généraliser,
uniformiser, je vous promets que, chez nous, à Boucher-ville, les partis
politiques vont être moins populaires que dans la ville de
Montréal.
Vous devez avoir autant que possible, et c'est un des objectifs que le
ministère des Affaires municipales recherche depuis déjà
quelques années, une uniformisation de nos lois municipales.
Merci donc au député pour l'idée neuve qu'il lance.
Peut-être pourrions-nous en discuter à la commission parlementaire
dont il fait partie, j'imagine.
M. LEGER: M. le Président, je suis très heureux de voir
que le ministre du Travail trouve que c'est une idée neuve, mais, avec
toute l'habileté qu'on lui connaît, il pourrait certainement
trouver une façon de permettre à la ville de Montréal de
reconnaître par règlement un parti qui aurait certaines
qualités. Entre autres, une de ces qualités pourrait être
d'avoir des candidats au moins à la moitié des postes qui sont
à pourvoir. S'il était possible de le permettre à la ville
de Montréal, il y aurait toute une suite de conséquences. Il y a
une administration sortante actuellement qui est quand même
constituée en parti politique, il faut l'admettre, que ce soit
officieusement ou pas. Or, ces personnes que nous admirons pour la plupart ont
quand même une occasion trop forte de faire une compétition
absolument inégale à d'autres personnes qui veulent se
présenter, si on ne donne pas à ces dernières le titre de
parti reconnu.
Nous avons vu ici en Chambre comment il était difficile d'avoir
le titre de parti reconnu officiel. Comment ça va-t-il être
à Montréal, si la province de Québec ne
légifère pas là-dessus?
M. LAPORTE: Cela a été difficile?
M. LEGER: Je parle de parti reconnu officiel.
M. LAPORTE: Cela a été difficile ici en Chambre?
M. LEGER: Je ne parle pas de parti reconnu, mais de parti reconnu
officiel.
M. LAPORTE: Je regrette, mais je vais toujours vous ramener à ces
choses-là. Encore une fois, vous seriez aimable de dire à cette
Chambre à quel moment cela a été difficile, quelles
difficultés vous avez rencontrés pour vous faire
reconnaître comme parti politique en cette Chambre.
M. LEGER: M. le Président, le ministre sait fort bien que nous
avons proposé un amendement qu'il a trouvé ridicule. Il a dit
qu'il avait déjà fait un gros effort pour nous faire plaisir et
que, devant la population, il se sentait très à l'aise pour dire
qu'il avait offert de reconnaître le parti. Sur ce point-là, nous
sommes d'accord, c'est une minimum vital.
M. LAPORTE: Cela n'a pas été difficile.
M. LEGER: Mais le point sur lequel je ne suis pas d'accord, c'est que
nous avons amené autre chose, un autre argument...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! A l'ordre! On pourrait
peut-être revenir...
M. LEGER: ... qui était celui d'avoir un parti reconnu
officiel.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Le député de
Gouin.
M. LEGER: De toute façon, c'est un aparté.
M. LAPORTE: Ah, c'est très bien. C'était la grenouille,
qui devenait grosse comme le boeuf.
M. PEARSON: M. le Président...
M. TESSIER: Je crois que le député pourra revenir sur
cette question lors de la présentation de la loi générale
des élections municipales. Cela sera l'occasion d'en discuter. Cest un
sujet extrêmement complexe qui va nécessiter bien des
études parce que, justement, comme on le soulignait, il y a probablement
un tas d'articles qui devraient être modifiés. Or, le bill no 5,
est un peu une loi d'urgence pour les élections qui s'en viennent dans
quelques mois à Montréal. Je crois donc qu'il n'y a pas lieu
d'incorporer la question des partis politiques dans le bill no 5.
M. JORON: M. le Président, si vous me permettez d'obtenir
l'attention encore quelques instants sur ce sujet, j'ai compris l'explication
que donnait tout à l'heure le député de Chambly quant
à l'idéal d'uniformisation des lois municipales dans la province
de Québec. Mais il faut bien comprendre que si, de toute façon,
Montréal a une charte particulière, c'est parce que c'est un cas
très particulier dans le Québec, une ville de 1.5 million
d'habitants quand la plus importante ville suivante tombe à environ
200,000. C'est la ville de Laval, si ma mémoire est exacte, qui est la
deuxième ville au Québec. Il y a là une marge
considérable. Or, on avait peut-être déjà vu dans
les élections municipales récentes de la ville de Laval
apparaître ces difficultés de recensement.
De par sa dimension même, Montréal demande peut-être
un statut particulier. Cest d'ailleurs la raison pour laquelle elle a une
charte spéciale.
D'autre part, si vous avez déjà accordé le droit de
vote universel à 18 ans aux autres villes, je ne vois pas pourquoi, pour
une fois, Montréal ne pourrait pas être en avance sur le reste de
la province à ce sujet, puisque c'est là que le problème
est le plus urgent. L'administration d'une ville de 1.5 million d'habitants,
qui a un budget d'environ $300 millions par année, c'est une grosse
affaire. Renverser un gouvernement municipal, seuls des gens organisés
peuvent le faire. Par définition, l'administration d'une telle ville
devient la chose d'un parti politique. On n'a pas besoin de se raconter des
histoires; ça existe depuis déjà dix ans à
Montréal. On les a nommés tout à l'heure; la Ligue
d'action civique, le Parti civique; on a oublié le Rassemblement pour le
Grand Montréal et enfin les autres de défunte mémoire. Je
me demande si, quand même, on ne pourrait pas faire un effort et
considérer cet amendement immédiatement pour un cas particulier
qui est la ville de Montréal.
M. TESSIER: Pour ma part, je ne suis pas prêt à
considérer un amendement dans ce sens. Justement, on veut faire
disparaître toutes ces disparités dans les différentes
chartes et abolir, en somme, ce statut d'exception qu'a la ville de
Montréal, de sorte que nous ayons une loi générale qui
couvre toutes les municipalités sans exception, y compris
Montréal.
M. JORON: Vous êtes contre le statut particulier, si je comprends
bien.
M. TESSIER: Pas de discrimination.
M. PEARSON: Il me semble que cet amendement n'a pas été
fouillé à fond. Il devrait, au moins, dire: « S'il y avait
plus d'un parti politique qui présente des candidats dans tous les
quartiers ou, au moins, dans un certain nombre de districts de la ville.
» Autrement, supposez qu'il n'y ait qu'un parti, le Parti civique, qui
présente des candidats; il serait le seul, d'après votre
amendement, à pouvoir nommer les récenseurs, si l'autre parti ne
réussit à avoir des candidats que dans un nombre limité de
districts électoraux. Il y a donc plusieurs implications, à mon
sens, qui n'ont pas été fouillées. Cela appelle trop
d'autres amendements.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Robert-Baldwin.
M. SEGUIN: Non seulement y a-t-il plusieurs implications, mais je
voudrais attirer l'attention du député, qui a fait mention tout
à l'heure d'une charte particulière pour Montréal, sur le
fait qu'il y a dans la province plusieurs centaines de municipalités qui
ont des chartes particulières. Ce n'est pas particulier à la
ville de Montréal ou à la ville de Québec. Un très
grand nombre de municipalités ont une charte spéciale.
Deuxièmement, il faut aussi se souvenir que la ville de Montréal
fait partie d'une entité parmi plusieurs; il y en a 29 dans
la communauté urbaine. Il faut donc ne pas établir de cas
spéciaux. Cela fait pour Montréal, dans ce cas-ci. Il faudrait,
en même temps, considérer le fait que nous sommes, lorsque nous
discutons de la région de Montréal, une communauté
urbaine. Je suis pour la loi telle qu'elle est présentement et non pas
pour un amendement.
Je pense, sans être très dogmatique là-dessus, que
faire une suggestion contraire pour une entité de cette
communauté urbaine, à ce moment-ci, serait mal procéder.
Ce ne serait pas bien vu, parce qu'il faut considérer Montréal
comme faisant partie d'un tout. On parle surtout, ces jours-ci, de cette
communauté urbaine. Je voulais tout simplement faire cette remarque au
député qui a fait allusion, tout à l'heure, à cette
question de charte particulière pour la ville de Montréal. Cela
n'existe pas, puisque, déjà, dans la province, des centaines de
villes ont des chartes bien particulières à leur
municipalité.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lafontaine.
M. LEGER: Pour répondre à la question du
député de Saint-Laurent, il faut admettre une chose, c'est qu'un
parti reconnu officieusement, lorsqu'il est en place va indirectement nommer
les greffiers qui, eux, choisissent les recenseurs. Je pense que ce n'est
absolument pas logique.
M. TESSIER: C'est faux, ça. Le parti qui est en place ne nomme
pas indirectement les recenseurs. C'est le président d'élection
lui-même, de son autorité, qui nomme les recenseurs. Si vous
croyez que le président d'élection est un homme malhonnête,
dites-le franchement.
M. LEGER: Ce n'est pas la question que j'ai soulevée; je n'ai pas
dit que la personne était malhonnête.
Je pense qu'il serait beaucoup plus logique et beaucoup plus souple que
les personnes qui s'occupent de l'énumération soient les
personnes mêmes qui auront à subir le résultat du travail
qu'elles vont faire au niveau de l'élection qui s'en vient. Il n'est pas
normal que, s'il y a un deuxième ou un troisième parti qui veut
se présenter à l'échevinage, il n'ait pas accès
aussi rapidement que le parti au pouvoir aux renseignements concernant les
listes électorales. Il y a des conséquences malheureuses qui
surviennent quand nous recevons les listes électorales trop en
retard.
Si on relit tranquillement l'amendement, je pense que cela ne casse
rien, c'est très simple. Cela commencerait à ouvrir la porte
à une démocratie beaucoup plus large. Voici un exemple de ce que
j'ai avancés Le président d'élection nomme les
énumérateurs sur recommandation des chefs de partis politiques
municipaux ayant manifesté leur intention de présenter des
candidats au moins à la moitié des postes de conseiller.
L'énumération j'explique, là se fait
nécessairement avant la date du dépôt des bulletins de
présentation. Il faut donc, nécessairement, si on veut pouvoir
faire l'énumération, que le président d'élection
sache quels sont ceux qui se présenteront. C'est la raison pour laquelle
on dit: ... de manifester leur intention de présenter des candidats au
moins à la moitié des postes de conseiller.
Ces énumérateurs-là ne seront
rémunérés pour éviter le danger qu'une
personne se présente en disant qu'elle aura une équipe avec des
candidats à tous les postes, pour se faire de la publicité, pour
avoir le droit de faire l'énumération, pour retirer un profit des
salaires qu'ils pourraient gagner que si le parti politique qui les a
recommandés s'avère être un parti reconnu le jour de la
présentation officielle des candidats. Autrement dit, si on
déclare que c'est la moitié des postes, il faudra que, le jour de
la présentation des candidats, il y ait au moins la moitié des
postes de représentés dans ce parti-là pour que les
énumérateurs puissent être payés pour leur
travail.
Si le président d'élection ne reçoit pas de
recommandations en nombre suffisant, il combinera...
M. TESSIER: Me permettriez-vous une question, s'il vous plaît?
Vous suggérez là que ce soient les partis politiques qui
recommandent les énumérateurs au président
d'élection.
M. LEGER: C'est ça.
M. TESSIER: Il est prévu dans la charte qu'il y a deux
énumérateurs par section de votation. Or, s'il y a cinq partis
politiques, lesquels de ces cinq partis politiques vont suggérer les
énumérateurs? Il y en a deux à nommer et il va y avoir
cinq partis politiques.
UNE VOIX: Cela fait dix.
M. TESSIER: Comment allez-vous arranger cela à la lumière
du bill 5?
M. LEGER: Une chose est certaine, c'est qu'à la lumière de
ce qui s'en vient à Montréal
on peut dire que s'il y avait trois partis reconnus ayant des candidats
dans tous les postes, cela pourrait être un maximum. Mais il se pourrait
éventuellement qu'il y en ait plus. Actuellement, on prévoit le
cas plus normal où il y en aurait peut-être deux ou trois. A ce
moment-là, cela pourrait se faire par équipe de trois. Je ne dis
pas d'aller faire cela en équipe de cinq, ce serait ridicule.
M. TESSIER: Vous voulez dire qu'ils nommeraient trois
énumérateurs?
M. LEGER: Mais, normalement par équipe de deux.
M. LAPORTE: Mais, théoriquement, il peut y en avoir quatre, cinq,
six, huit, dix ou douze?
M. LEGER: Bien sûr, il peut y en avoir dix, c'est sûr.
M. LAPORTE: Un congrès à chaque porte. M. PEARSON: M. le
Président...
M. TESSIER: ... cinq partis politiques, cinq
énumérateurs...
UNE VOIX: C'est fou, ça.
M. LEGER: La question, c'est que les candidats qui seront
représentés aient la chance de participer à
l'énumération.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: J'ai une question à poser au député de
Lafontaine. Supposons le cas inverse. Vous avez un deuxième parti qui
présente des candidats dans seulement la moitié des districts.
Est-ce que ce parti-là aurait lui-même le droit de nommer des
énumérateurs dans tous les autres districts?
M. LEGER: Le droit de l'énumération, c'est qu'il est parti
reconnu, s'il a la moitié des candidats selon les postes qui sont
ouverts. A ce moment-là, il a le droit d'aller partout, parce que le
résultat des élections, dans les secteurs où il ne sera
pas présent, fait quand même qu'ils seront moins nombreux comme
votants une fois qu'ils seront rendus au pouvoir. Il faut nécessairement
qu'il y ait un droit de regard sur toute l'énumération de la
ville de Montréal.
M. LAPORTE: Avez-vous pensé à ce qui va arriver si vous
avez cinq partis politiques, par hasard? Cela fait 12,500
énumérateurs.
M. LEGER: Ecoutez, est-ce que vous prévoyez ça pour
Montréal, cinq partis politiques?
M. LAPORTE: Non, non.
M. LEGER: Il n'y en a jamais eu depuis dix ans. Il s'en présente
un actuellement.
M. LAPORTE: Si vous consultez seulement votre voisin de droite, il va
vous dire que, lorsque l'on légifère, on ne
légifère pas en disant: Il n'y en aura pas plus que trois. Si,
tout d'un coup, il y en a cinq, huit. On légifère.
M. LEGER: M. le Président,...
M. LAPORTE: Vous pourriez ajouter à votre amendement: En
espérant toutefois qu'il n'y en aura pas plus que trois. Il peut bien y
en avoir trois, cinq, huit et dix.
M. BURNS: De toute façon, M. le Président, si l'objection,
c'est qu'il peut y en avoir quatre ou cinq, quel principe serait vraiment
détruit par le fait qu'il y ait cinq énumérateurs, s'il y
a cinq partis?
M. LAPORTE: Ce n'est pas un principe. Je fais remarquer au
député de Maisonneuve que, physiquement, il faut bien, à
un moment donné... Le député de Bourget nous a dit
tantôt il faut le répéter que les principes
qui restent suspendus en l'air, cela ne donne pas grand-chose.
M. LEGER: Revenez à notre niveau.
M. LAPORTE : Il faut les convertir en législation. Si vous aviez
cinq partis reconnus à Montréal, cela voudrait dire 12,500
personnes qui font le recrutement. La démocratie est-elle plus
protégée par 12,500 personnes qui sont choisies n'importe comment
ce n'est pas des farces, choisir 12,500 personnes que par 2,500
qui ont toujours... Si vous en avez deux, vous avez déjà une
protection multipliée par cent, parce que, pour que vous puissiez avoir
de la collusion, il faut que vous en achetiez un et parfois deux. Alors, quand
vous avez deux énumérateurs, vous avez déjà une
grande protection. Si vous en mettez trois, quatre, cinq, à ce
moment-là, c'est ce que j'appelle un congrès à chaque
porte. Est-ce que vous imaginez à part cela, l'attitude des
électeurs qui voient arriver,
à un moment donné, une caravane de trois, quatre ou cinq
personnes qui s'en viennent faire le recrutement?
UNE VOIX: Ce serait beau dans un deux-pièces.
M. LAPORTE: Pardon?
M. DEMERS: Dans un deux-pièces.
M. LAPORTE: Dans un deux-pièces.
M. LEGER: Mais, au niveau du principe, M. le Président...
M. LAPORTE: Au niveau du principe, nous sommes d'accord. Que voulez-vous
que nous fassions?
M. LEGER: ... n'accepteriez-vous pas, comme on le voit dans la Loi
électorale du Québec, que les partis qui sont reconnus aient
quand même le droit de participer au recensement?
M. LAPORTE: Je comprends, mais ce que nous voudrions vous faire
admettre, ce soir, c'est qu'il n'y a pas, actuellement, de partis
légalement reconnus.
UNE VOIX: Légalement.
M. LAPORTE : Vous voulez introduire, par le biais d'une
énumération, le principe des partis reconnus. Est-ce que je puis
au moins vous dire combien cela a été complexe, la
législation que nous avons faite? Le jour où, pour la
première fois, dans l'histoire du Québec, cette Assemblée
nationale a décidé d'avoir des partis reconnus, savez-vous le
nombre de lois qu'il a fallu vérifier, le nombre d'articles qu'il a
fallu soumettre à nos légistes pour dire: Cela influencera telle
affaire?
Actuellement, vous faites entrer dans le bill le cheval de Troie.
Qu'est-ce qui va descendre de chaque côté? On ne le sait pas. Le
principe que vous suggérez mérite au moins une chose, c'est
d'être étudié très attentivement. Nous n'avons ni le
temps et soyons modestes ni la capacité juridique, tous
tant que nous sommes, ce soir, j'exclus volontairement nos experts
légistes de le faire sérieusement. Si nous voulions faire
cela, il serait très possible au Parti québécois...
C'était un autre amendement; que nous ont-ils dit sur un autre bill? On
nous présente un bill qui a été préparé
à la vapeur, le bill sur les explo- sifs, parce qu'à un moment
donné cela correspondait à l'opinion publique. Eh bien,
dites-vous donc la même chose, ce soir, Dites-vous-le à vous.
Si vous apportiez, comme cela, sans préparation suffisante, avec
une excellente intention, je ne veux pas discuter cela... Quand je ne suis pas
d'accord, je le dis assez rudement, mais là, je suis d'accord; c'est une
idée qui doit être creusée. Nous n'avons pas le temps de
creuser cela ce soir. Apportez-la à la commission parlementaire et,
là, nous l'étudierons avec plaisir. Si elle peut être
adaptée à nos lois, c'est avec satisfaction qu'unanimement nous
en ferons part au ministre des Affaires municipales. Je pense que c'est
suffisant pour l'instant. Vous avez lancé une idée qui
mérite d'être reprise ailleurs, mais je suggérerais que
nous puissions maintenant adopter cet article.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Olier.
M. PICARD: M. le Président, à deux reprises, le
député de Lafontaine a utilisé comme argument la situation
qui prévaut lors d'une élection provinciale, à savoir que
le parti au pouvoir reçoit, de même que l'Opposition officielle,
des copies des listes électorales, alors que les autres partis en place
doivent attendre que le président d'élection leur fasse parvenir
la liste imprimée.
Dans le cas du bill présentement à l'étude, il n'y
aura pas de distribution de la première liste, comme nous l'avons au
provincial. Si vous lisez l'article 26, vous verrez que la seule distribution
qui sera faite sera faite par le président d'élection à
quiconque en fera la demande. A ce moment-là, il faudra que les gens
paient pour avoir la liste, à l'exception des candidats qui, eux, auront
droit gratuitement à cinq copies de la liste. Tout le monde sera alors
sur un pied d'égalité.
Je pense que c'est l'argument le plus important qu'on ait utilisé
pour demander que l'on permette aux gens des tiers ou des autres partis de
participer à la préparation des listes. Etant donné que
vous n'avez pas ici cette situation que vous aviez aux élections
provinciales, je ne vois pas où est votre argumentation.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Avant d'aller plus loin, je rappelle que,
depuis le début de cette séance, plusieurs membres du
comité ont parlé assis à leur siège, contrairement
au règlement. Je ne voudrais quand même pas qu'on prenne cette
habitude. Je demande que l'on respecte le règlement.
M. PICARD (Olier): Mex excuses, M. le Président.
M. LEGER: La réponse que nous donne le député
d'Olier ne me satisfait pas. Comme, au provincial, la même situation se
présente, le recenseur est quand même une personne très
sympathique à la cause du parti au pouvoir, son adjoint est sympathique
à la cause du parti de l'Opposition. Je pense qu'il faut se rendre
compte que la personne nommée par le greffier peut aussi transmettre
très facilement une copie, sans que personne ne le sache, au parti au
pouvoir. C'est donc la raison pour laquelle, dès que la liste est faite,
il devrait normalement constituer en même temps une liste pour les partis
de l'opposition.
M. LAPORTE: Très bien, adopté.
M. LEGER: Tout ce problème-là n'arriverait peut-être
pas si on avait accepté le principe je suis sûr que le
ministre du Travail va sauter, je sais que vous ne sautez plus maintenant, cela
fait tellement longtemps que vous avez sauté de la liste
électorale permanente. Cela aurait réglé ce
problème, parce que la liste aurait été
immédiatement prête. Lors de la déclaration des
élections, tous les partis de l'Opposition...
M. TESSIER: Cela ne l'aurait pas réglé davantage.
M. LAPORTE: Vous me faites penser au temps...
M. TESSIER: M. le Président, maintenant que nous avons entendu
les opinions de tout le monde, je propose que l'on accepte l'article 13.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LEGER: Excusez-moi, je n'ai pas...
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 12, adopté?
M. LEGER: Vous proposez que l'article 11 soit adopté...
M. BURNS: Sur division, M. le Président. M. LEGER: Sur
division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11, adopté sur division. Article
12?
M. LEGER: Un instant. Encore là, à l'article 12, nous
voudrions retrancher les mots: « et doivent faire mention de sa
qualité de propriétaire, occupant ou locataire, selon le cas.
»
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 12, adopté?
M. BURNS: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Sur division. Article 13? Adopté.
Article 14? Adopté. Article 15?
M. LEGER: A l'article 15, il est question de plaintes lors de la
confection des listes, c'est-à-dire la question de révision.
Voici ce que nous aimerions apporter comme amendement. Nous voudrions que
l'article 213 de la charte de Montréal se lise comme suit : « Sur
demande produite suivant l'article 212, la liste électorale est
révisée, entre le 25 septembre et le 5 octobre de l'année
de l'élection, par une commission de trois membres nommés dans
chaque district électoral. Le président d'élection nomme
les réviseurs sur recommandation des chefs des partis politiques
municipaux ayant manifesté leur intention de présenter des
candidats à au moins la moitié des postes de conseiller. Ces
reviseurs ne sont rémunérés que si le parti qui les a
recommandés s'avère être un parti reconnu lors de la
présentation officielle des candidats. » Cela revient quand
même à ce qu'on disait tantôt.
M. TESSIER: C'est la même chose que tout à l'heure.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 15, adopté sur division.
M. LEGER: Cela veut donc dire que si on l'adopte, on refuse ici, ce
soir, la reconnaissance d'un parti reconnu au niveau municipal. C'est clair?
C'est ça.
M. LAPORTE: On refuse la reconnaissance, c'est ça.
M. LEGER: L'Assemblée nationale s'est donc prononcée
contre la présentation d'un parti politique officiel reconnu, à
Montréal.
M. LAPORTE : Cela s'appelle tiré par les cheveux.
M. LEGER: Cela fait mal.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 15, adopté sur division. Article
16? Adopté.
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 17?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18? Adopté. Article 19?
Adopté. Article 20?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 21?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 22?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 22.
M. LEGER: Entre l'article 22 et 22 a), l'article 256 de la charte de
Montréal pourrait être modifié en remplaçant, au
deuxième paragraphe, le mot « neuvième » par «
quinzième ». Autrement dit, il s'agirait de donner quinze jours
d'avis pour que le président d'élection donne avis de la
nomination des vice-présidents, de l'adresse de leur bureau, ainsi que
de l'heure et de l'endroit de la mise en candidature. » Actuellement, il
y a une semaine pendant laquelle les candidats peuvent présenter
à la population leur programme, leurs idées et tenter de
convaincre le corps électoral de voter pour eux.
Nous, proposons qu'il y ait une période plus longue pour
permettre justement qu'un parti, qu'il soit officieux ou officiel, puisse
présenter son programme à la population. Ceci vient en
concordance avec d'autres articles ultérieurs qui demanderaient
justement que les candidats qui représentent un parti puissent avoir
des...
M. LAPORTE: Votre amendement est-il rédigé?
M. LEGER: Oui.
M. LAPORTE: J'aimerais, au moins, le voir.
M. TESSIER: L'article 22 traite de l'article 233. Vous nous
présentez un amendement pour 256. Ai-je bien compris que l'article 22
est adopté et que vous nous proposez un article 22-a)?
M. LEGER: Oui. C'est-à-dire avant d'arriver à l'article
23.
M. LAPORTE: Cela va.
M. TESSIER: Alors, l'article 22 est adopté?
M. LEGER: Oui.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 22, adopté.
M. LEGER: C'est pour cela que je l'ai appelé à l'article
22-a). C'est pour répondre à l'article 256, pour prolonger la
période où les candidats d'un parti peuvent expliquer à la
population leur programme électoral. Je voudrais qu'elle passe de neuf
à quinze jours.
M. LAPORTE: Encore une fois, je regrette que le député
n'ait pas une charte à jour; c'est 11 jours au lieu de 9, dans la loi
telle qu'elle existe.
M. TESSIER: En somme c'est un compromis entre neuf et quinze.
M. LEGER: L'amendement serait alors de 11 à 17.
M. BERTRAND: Il faudrait changer tous les délais.
M. LEGER: Changer les délais pour permettre à un parti de
s'exprimer devant la population.
M. LAPORTE: De 11 à 17. M. le Président, nous
étudierons ça pendant la vacance parlementaire.
M. BERTRAND: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Sur division, article 23.
M. LEGER: On ne peut pas l'adopter sur division, il n'y a pas
d'article.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 23, adopté. Article 24,
adopté. Article 25, adopté.
M. LEGER: Avant l'article 26, M. le Président, je voudrais
seulement noter ceci. Je pense que c'est impossible de le faire à cause
de ce qui a été adopté antérieurement, mais, au
niveau de l'identification des partis politiques, je voulais qu'à
l'article 287 de la loi le nom du parti soit inscrit sous le nom du candidat.
Comme ça n'a pas été adopté, je voulais simplement
le noter.
M. LAPORTE: Très bien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 26, adopté.
M. LEGER: Après l'article 26, je voudrais faire mention d'un
problème au niveau des districts électoraux. Je vais lire
l'amendement et l'expliquer par la suite: « L'article 35 de la charte de
Montréal est modifié de la façon suivante: « Aux
fins des élections municipales, le territoire de la ville est
divisé en 52 districts électoraux de population égale,
l'écart en population de chaque district par rapport à la moyenne
ne devant jamais être supérieur à 15% c'est
l'amendement que je propose Les découpages des districts devant
respecter dans la mesure du possible leur homogénéité
sociale, culturelle et géographique.
Les limites de ces districts sont fixées par règlement du
conseil adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit
être tenue le 26 octobre 1970 » ... C'est donc dire que c'est
possible que cela soit fait à Montréal, puisqu'il y aurait
seulement un délai de deux mois et que nous savons qu'il y a
déjà à Montréal des études de faites sur les
modifications de la carte électorale de Montréal. « Les
limites de ces districts sont fixés par règlement du conseil
adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit être
tenue le 26 octobre 1970. Le conseil de ville doit réviser tous les
quatre ans la carte électorale de façon qu'elle réponde
aux normes ci-haut énoncées, l'adopter par règlement et la
rendre publique deux mois avant la date fixée par l'élection, par
la suite ».
Je m'explique. Tout à l'heure, dans la deuxième lecture,
nous avons remarqué qu'il y avait des « distorsions » dans
la carte électorale de Montréal. On y voyait des quartiers comme
Mercier qui avaient, pour le nombre d'électeurs comparativement au
nombre de conseillers élus, des différences allant jusqu'à
64.6%: soit 28,394 électeurs par conseiller. En comparant avec le
district de Saraguay, on y avait 309 électeurs pour un conseiller, et,
avec Rivière-des-Prai-ries, 3,511 électeurs pour deux
conseillers.
A cause des études que la ville de Montréal a
déjà faites, nous pensons qu'on a le temps de faire la correction
suivante, soit de permettre qu'il n'y ait pas plus de 15% de différence
entre les districts électoraux. Cela amènerait, comme
résultat, que le secteur de Saraguay serait fusionné avec le
quartier de Laval et que le quartier de Rivière-des-Prairies pourrait
être inclus dans le quatier de Saint-Michel. Ceci obligerait à
supprimer le conseiller de Saraguay et celui de Sainte-Anne, parce qu'il y en
avait un de trop, et à supprimer les deux conseillers de
Rivière-des-Prairies, ce qui donnerait 48 candidats aux postes de
conseillers.
On en rajouterait aux quartiers qui sont réellement populeux,
soit deux à Mercier, un à Laval, un à Ahuntsic, un
à Rosemont, un à Côte-des-Neiges, ce qui ferait un total de
54 conseillers. La différence ne pourrait être que de 15% en plus
ou en moins; cela ferait du quartier de Saint-Jacques le moins populeux avec
14,000 votants il y a toute une échelle de préparée
ici et le quartier de Saint-Michel-Rivière-des-Prairies en aurait
19,000. Sivous voulez me permettre, je pourrais peut-être relire
l'amendement. Vous l'avez lu?
M. LAPORTE: On vous fait confiance. M. le Président,
personnellement, je m'oppose vigoureusement, au nom des principes
démocratiques défendus par le député de Lafontaine,
à permettre à un conseil municipal qui est dominé
actuellement, à deux ou trois échevins près, par un seul
parti politique, d'avoir la haute main sur le découpage des districts
électoraux de la ville de Montréal.
Ce serait absolument antidémocratique. Ceci pourrait conduire
à des abus inouïs. Le député de Lafontaine exige que
le Parti civique, à Montréal, ne soit pas indirectement le seul
à faire l'énumération et il est disposé à
donner au Parti civique, directement, la capacité de découper la
carte électorale de Montréal, si le parti le désire,
à son goût. J'exige, quant à moi, que ce soit une loi de
l'Assemblée nationale qui modifie la charte de la ville de
Montréal.
Si la ville doit revenir tous les quatre ans pour faire revoir ses
districts électoraux et les rendre démocratiques, nous n'avons
pas d'objection.
C'est toutefois une loi de l'Assemblée nationale qui doit donner
aux citoyens de la ville de Montréal la certitude que cela va être
fait au su et au vu de tout le monde et dans l'Intérêt
démocratique de tous les citoyens.
M. LEGER: M. le Président, je pense qu'on était du
même avis. Ce que le ministre du Travail dit actuellement, c'est ce que
je propose.
Je pense qu'il a mal saisi l'amendement. Je lui ai proposé de le
relire, je vais la relire. « Aux fins des élections municipales...
» c'est un amendement...
M. TESSIER: Est-ce que vous me permettrez de donner une
précision. Dans la loi électorale générale que nous
allons présenter dès la prochaine session, un mécanisme
est prévu pour la répartition de tous les quartiers dans les
municipalités, de manière que cela soit mieux
équilibré. Cette loi-là va s'appliquer également
à l'encontre de la charte de Montréal, parce qu'elle va
s'appliquer...
M. LESSARD: Debout, M. le ministre.
M. TESSIER: Excusez-moi, M. le Président. Elle va s'appliquer
à l'ensemble des municipalités de la province et va primer les
dispositions existantes dans les différentes chartes des
municipalités. C'est donc dire que lorsque cette loi aura
été adoptée, il y aura une nouvelle répartition des
quartiers en vertu de ce nouveau mécanisme.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Olier.
M. PICARD: M. le Président, pour ajouter aux remarques du
ministre des Affaires municipales, j'aimerais faire remarquer au
député de Lafontaine que c'est cette Chambre, qui vient
d'adopter, il n'y a pas tellement d'années, les projets de loi de
fusion. Je donne comme exemple Saint-Michel, où il était
prévu, dans les règlements d'annexion de Saint-Michel à
Montréal, quatre conseillers pour représenter ce quartier au
conseil municipal de Montréal.
Je vous assure que si nous faisons les changements proposés par
le député de Lafontaine, c'est donc dire que l'on prendra
toujours avec un grain de sel les promesses ou la législation
adoptée par l'Assemblée nationale de Québec pour les
fusions futures de municipalités du Québec.
M. LEGER: M. le Président, je tiens à faire remarquer que,
dans les changements de l'amendement proposé, il n'est pas du tout
question de changer le nombre de conseillers de la ville de Saint-Michel. Je
n'ai parlé que de deux à ajouter à Mercier, un à
Laval, un à Ahuntsic, un à Rosemont, un à
Côte-des-Neiges et d'enlever le représentant de Saraguay, les deux
de Rivière-des-Prairies, parce qu'ils vont être fusionnés
ailleurs...
M. PICARD; Et fusionner les deux de Rivière-des-Prairies à
ceux de la ville de Saint-Michel. Alors, au lieu de six conseillers, vous allez
en avoir trois.
M. LEGER: M. le Président, on va quand même constater que
le quartier de Saint-Michel n'a actuellement que 19,000 électeurs avec
le quartier de la Rivière-des-Prairies et que la différence est
quand même à l'intérieur des 15% que nous proposons.
Mais si vous voulez me le permettre, je vais relire l'amendement qui n'a
pas été lu complètement. On pourra ensuite, discuter si
c'est bon ou si ce n'est pas bon. Voici notre point de vue. « Aux fins
des élections municipales, le territoire de la ville est divisé
en 52 districts électoraux de population égale, l'écart en
population de chaque district par rapport à la moyenne ne devant jamais
être supérieur à 15% et le découpage des districts
devant respecter, dans la mesure du possible, leur
homogénéité sociale, culturelle et géographique.
Les limites de ces districts sont fixées par règlement du conseil
adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit être
tenue le 26 octobre 1970. Comme vous voyez, c'est le droit de regard du
provincial Le conseil de ville doit reviser tous les quatre ans la carte
électorale de façon qu'elle réponde aux normes ci-haut
énoncées, l'adopter par règlement et la rendre publique
deux mois avant la date fixée par élection ». C'est
là l'amendement qui est proposé.
M. LAPORTE: Je propose...
M. TESSIER: La rendre publique deux mois avant la date des
élections, cela veut dire qu'on n'a jamais le temps de procéder
à tout ce redécoupage des quartiers et de tenir les
élections au mois d'octobre. Comme je le soulignais, tout ce
mécanisme sera prévu dans la loi générale
municipale.
M. LAPORTE: Je propose que cet amendement soit rejeté.
M. TESSIER: Je propose l'adoption de l'article 26.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Nous allons commencer par disposer de
l'amendement. L'amendement est rejeté?
M. LEGER: Sur division, comme de raison. M. LE PRESIDENT (Hardy):
Article 27, adop-
té. Article 28. Adopté. Article 29. Adopté. Article
30, adopté.
M. LAPORTE: Avec la permission du ministre, est-ce qu'il me serait
possible de revenir à la page 4, article 6, paragraphe 2: « Le
greffier fait publier... » l'avant-dernière ligne, «
l'article 200, au plus tard le 1er juillet de l'année de
l'élection. » Comme nous sommes rendus au 14, il faudrait
peut-être suggérer...
M. TESSIER: Je propose, suivant la suggestion qui vient d'être
faite par le ministre du Travail, que nous amendions ce paragraphe à la
page 4, deuxième paragraphe pour remplacer le mot « premier
» par le mot « vingtième », ou « vingt
».
M. LE PRESIDENT (Hardy): Cet amendement est-il adopté?
M. PICARD: Il faudrait s'assurer que ce délai soit suffisant
parce que c'est seulement six jours et il faudra attendre que le projet de loi
soit sanctionné et aviser toutes ces corporations; un délai de
six jours, c'est tout de même vite.
M. LAPORTE: Disons que le projet de loi devrait être
sanctionné jeudi, l'avis sera lundi prochain. Cela laisse le temps
nécessaire.
M. LE PRESIDENT (Hardy): M. le Président, le comité a
adopté le bill 5 avec des amendements.
M. LAVOIE (Président): Est-ce que les amendements proposés
par le ministre des Affaires municipales sont maintenant lus et
agréés?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LAPORTE: Troisième lecture.
M. BERTRAND: Je n'ai pas d'objection, quitte à
vérifier.
M. LEGER: Non.
M. BURNS: Nous nous objectons à ce que la troisième
lecture ait lieu immédiatement.
Ajournement
M. LAPORTE : Alors, à la prochaine séance. Je vais
suggérer que cette Chambre s'ajourne à demain matin à dix
heures. Après avoir cons- taté, entre nous, que nous avons fait
une excellente journée de travail.
Demain, nous adopterons le programme suivant: Premièrement,
troisième lecture du bill numéro 5.
M. PAUL: M. le Président, est-ce que l'honorable leader du
gouvernement pourrait se rappeler que demain, c'est la journée des
députés et que je lui ai signalé...
M. LAPORTE: Ah oui, excusez...
M. PAUL: ... notre intention d'apporter une motion,
M. LAPORTE: Alors demain, nous appellerons d'abord la motion inscrite au
nom du député de Saint-Maurice relativement à nos amis du
Ralliement créditiste. Si nous réussissons à nous sortir
de ces questions monétaires sans trop de dommages...
M. SAMSON: Sans que cela coûte trop cher!
M. LAPORTE: ... nous reviendrons aux affaires du jour du gouvernement
dans l'ordre que je viens de commencer à énumérer.
Premièrement, bill numéro 5; deuxièmement, bill
numéro 29, le parc Forillon; troisièmement, Loi du Grand
Théâtre de Québec; quatrièmement, Loi concernant la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation;
cinquièmement, bill numéro 28; sixièmement, Loi du
ministère du Travail; septièmement, bill numéro 31 et,
huitièmement, Loi modifiant la Loi de l'aide sociale, la Loi des
allocations scolaires et la Loi des allocations familiales du Québec
avec la possibilité d'un léger changement. Il est possible que le
ministre de l'industrie et du Commerce doive s'absenter. Je demanderais
à ce moment-là à cette Chambre la permission d'appeler,
avec préséance, le projet de loi numéro 28, Loi modifiant
la Loi de l'Office du crédit industriel qui ne devrait pas, je pense,
susciter de débat...
M. PAUL: Parfait.
M. LAPORTE: ... à n'en plus finir.
M. le Président, je propose l'ajournement de cette Chambre
à demain matin, dix heures. Nous ajournerons de midi trente à
deux heures ou deux heures et demie et nous siégerons jusqu'à six
heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à demain matin,
dix heures.
(Fin de la séance: 22 h 52)