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Version finale

29e législature, 1re session
(9 juin 1970 au 19 décembre 1970)

Le mardi 14 juillet 1970 - Vol. 10 N° 17

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Onze heures neuf minutes)

M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes! A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Présentation de pétitions.

Lecture et réception de pétitions.

Présentation de rapports de comités élus.

Présentation de motions non annoncées.

Présentation de bills privés.

Présentation de bills publics.

M. LAPORTE: Il n'y a pas de bills publics, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Il n'y en a pas?

M. LAPORTE: M. le Président, vous avez quelques projets de loi qui sont actuellement en appendice. S'ils ont été distribués en fin de semaine, comme je l'espère, est-ce qu'il serait possible de les appeler immédiatement pour première lecture, afin qu'ils soient inscrits dès demain pour deuxième lecture, les ministres concernés se chargeant de donner les explications nécessaires à cette Chambre? Alors, Loi concernant les explosifs, M. Choquette.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi concernant les explosifs.

Explosifs

M. CHOQUETTE: M. le Président, on me dispensera sans doute de lire les explications qui se trouvent au projet de loi et qui, je pense, sont devant les honorables députés. Si les députés ne les ont pas devant eux, je vais en donner lecture. Est-ce que l'honorable chef de l'Opposition a les explications au projet de loi?

M. BERTRAND: Non, j'ai tout simplement la galée du projet de loi, mais j'ai les notes explicatives. Je doute, par contre, que mes autres collègues, qui font également partie de l'Opposition, mais qui ne sont pas l'Opposition officielle...

M. CHOQUETTE: Je vais lire les explications qui se trouvent au projet de loi. Elles ne sont pas tellement longues et je pense que cela donnera une vue d'ensemble du projet qui est proposé.

Ce projet prévoit que personne ne pourra avoir des explosifs en sa possession, ni en acheter sans détenir un permis à cette fin. Les permis seront délivrés par des membres de la Sûreté du Québec qui doivent refuser de les accorder lorsque le requérant a déjà été déclaré coupable de certains actes criminels ou d'infractions relatives aux explosifs.

En cas de refus, le procureur général peut réviser la décision rendue. Le procureur général peut, par ailleurs, annuler un permis si le détenteur contrevient aux dispositions de la loi ou des règlements relatifs aux explosifs. Toute personne ayant des explosifs en sa possession devra les garder dans des bâtiments ou des contenants conformes aux règlements ou les mettre en dépôt chez son fournisseur lorsqu'elle n'en fait pas usage. Elle doit aussi aviser sans délai les forces policières de tout vol, de toute perte ou de toute disparition de ces explosifs.

Les inspecteurs d'explosifs seront nommés parmi les membres de la sûreté du Québec pour veiller à l'application de la loi. Ces inspecteurs pourront effectuer des enquêtes et saisir des explosifs s'ils constatent que les dispositions de la loi ne sont pas respectées. Les sanctions, qui deviennent plus sévères au cas de récidive, sont prévues lorsqu'il y a infraction à la loi.

Le lieutenant-gouverneur en conseil peut adopter des règlements pour déterminer en particulier les conditions d'utilisation, d'emmagasinage, de vente et de transport des explosifs.

Les personnes qui ont des explosifs en leur possession lors de l'entrée en vigueur de la loi doivent se procurer un permis dans les 60 jours de cette entrée en vigueur.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. BERTRAND: Adopté.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. BERTRAND: Même séance. M. PAUL: Même séance.

M. BERTRAND: Le ministre, étant donné qu'il s'en va à Halifax, m'a fait savoir, hier, qu'il aimerait que nous adoptions ce projet en deuxième lecture et en comité plénier aujourd'hui. Est-ce encore son intention?

M. CHOQUETTE: Justement, M. le Président, je dois quitter pour la conférence des procureurs généraux du Canada, conférence qui aura lieu à Halifax. Je dois partir ce soir. Alors, j'ai demandé aux honorables chefs des différents partis en cette Chambre s'ils consentiraient que nous accélérions la procédure pour adopter cette loi aujourd'hui. On sait, d'ailleurs, que des événements d'une gravité extraordinaire se sont produits à Montréal en fin de semaine. Heureusement, ils n'ont pas eu de conséquences graves, à cause de l'action énergique de la police, mais je crois qu'il est dans l'intérêt public que nous adoptions ce projet de loi le plus rapidement possible.

M. PAUL: M. le Président, quant à nous, de l'Opposition officielle, nous sommes prêts à étudier ce projet de loi, mais l'honorable ministre conviendra sans doute qu'il serait peut-être juste que ce projet ne soit appelé qu'après le lunch, à la séance de cet après-midi, pour nous permettre d'en analyser toutes les conséquences, la portée et les applications.

M. CHOQUETTE: Je n'ai pas d'objection à la procédure indiquée par l'honorable député de Maskinongé pour donner ainsi l'occasion aux députés de prendre connaissance du projet de loi pendant la période du lunch; cela me paraît tout à fait indiqué. Nous pourrions procéder à d'autres projets de loi avant d'appeler celui-ci.

M. LAURIN: Nous exprimons le même désir et vous offrons la même collaboration.

M. CHOQUETTE: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé propose la première lecture de la Loi modifiant la Loi de l'aide sociale, la Loi des allocations scolaires et la Loi des allocations familiales du Québec.

Lois modifiées

M. CASTONGUAY: M. le Président, les articles 1, 2, 4, 5 et 9 de ce projet de loi changent le nom de la Commission d'appel de l'aide sociale en celui de la Commission d'appel de l'aide et des allocations sociales. L'article 8 institue un appel à cette commission de toute décision du ministre rendue en vertu de la Loi des allocations scolaires; l'article 3 du projet donne compétence à cette commission de les entendre.

L'article 6 prévoit que les deniers requis pour la mise en application de la Loi d'aide sociale seront pris, pour l'exercice financier en cours, à même les sommes votées pour la mise en application des lois sociales qui seront remplacées par la Loi de l'aide sociale; les deniers additionnels qui seront requis pendant l'exercice en cours pourront être pris à même le fonds consolidé du revenu. L'article 7 règle l'entrée en vigueur des dispositions de la Loi de l'aide sociale.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à une prochaine séance ou à une séance subséquente. L'honorable ministre du Revenu propose la première lecture de la Loi modifiant la loi des licences.

Licences

M. TETLEY: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter le projet de loi 34. L'article premier de ce projet abroge un article qui dispense de l'obligation d'avoir une licence, les personnes qui tiennent un lieu d'amusement dans une municipalité de moins de 1,000 habitants ou dans une salle servant à des fins éducatives ou religieuses.

L'article 2 du projet autorise le gouvernement à prévoir les cas où une licence ne sera pas requise pour un lieu d'amusement servant à des fins patriotiques, agricoles, religieuses charitables, artistiques ou éducatives.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

L'honorable ministre du Travail propose la première lecture de la Loi modifiant la code du travail.

Code du travail

M. LAPORTE: M. le Président, en 1969, une modification au code du travail a fait disparaître légalement les associations reconnues mais non

accréditées. Le législateur avait voulu frapper les associations de boutique. Malheureusement, chose non prévue à l'époque, on a assassiné sans le vouloir deux associations représentatives, celle de l'Hydro-Québec et celle de la ville de Montréal quant aux ingénieurs et aux cadres. Il n'avait jamais été prévu de les faire disparaître. Comme cela crée une situation extrêmement difficile et annihile des droits acquis, nous amendons la loi pour lui faire dire que les associations syndicales de l'Hydro-Québec et de la ville de Montréal qui existaient avant le 2 août 1969 continuent d'exister légalement et pourront recevoir l'accréditation.

UNE VOIX: Homicide involontaire.

M. LAPORTE: Homicide involontaire, il n'y a pas eu « manslaughter ».

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. TETLEY: M. le Président, au sujet du bill no 34, comme l'honorable ministre de la Justice doit quitter la province ce soir, ce bill pourrait-il être présenté aujourd'hui à la même séance?

M. BERTRAND: A cause du festival « pop »? A cause des liens entre ce projet de loi et le festival « pop »?

M. TETLEY: Le festival « pop », oui, c'est exactement ça, M. le chef de l'Opposition. Le ministre de la Justice s'y intéresse beaucoup, le ministre de la Santé et d'autres ministères aussi.

UNE VOIX: Les Affaires culturelles.

M. TETLEY: Non. Apparemment, cela n'a pas d'intérêt pour ce ministère.

M. LE PRESIDENT: Cette motion afin d'étudier le projet de loi no 34 à la même séance est-elle adoptée?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Déclarations ministérielles.

Enseignants sans emploi

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'ai le plaisir d'annoncer â cette Chambre la formation d'une mission spéciale créée par le ministre de l'Education et chargée de cerner les dimensions exactes du problème touchant les enseignants sans emploi.

J'ai confié â M. Huot, de notre service des relations de travail, la mission de se rendre à Montréal aujourd'hui même, accompagné de membres du Service provincial de placement des étudiants, pour délimiter exactement le problème des enseignants sans emploi. Au cours de la dernière semaine, nous avons rencontré les représentants de la Fédération des enseignants de l'île de Montréal et nous croyons qu'avec cette mission il nous sera possible de cerner exactement les dimensions du problème et de prendre les mesures appropriées par après pour nous assurer que ces enseignants ne demeurent pas sans emploi. Nous avons invité, pour faire partie de notre mission, des représentants de la Corporation des enseignants du Québec et de la Fédération des commissions scolaires, qui se joindront à M. Huot, et ils seront à Montréal aujourd'hui même.

M. CARDINAL: Nous sommes heureux, nous de l'Opposition officielle, de ce geste du ministre. La semaine dernière, si je ne me trompe, il y a eu une question â ce sujet-là et, à ce moment-là, le ministre ne semblait pas croire qu'il y avait un problème réel, d'après la réponse qu'il a donnée. Le geste qu'il pose aujourd'hui vient corriger non pas la situation, mais son opinion à ce moment-là, et on ne peut qu'en être heureux. Est-ce qu'on peut demander au ministre s'il pourrait, d'ici la fin des travaux de cette Chambre, déposer les noms des personnes qui feront partie de cette commission d'étude et nous dire â quel moment son mandat devrait normalement se terminer?

M. SAINT-PIERRE: Avec plaisir, je le ferai.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Nous approuvons également la déclaration ministérielle du ministre de l'Education, en espérant que ladite commission ne se contentera pas de cerner le problème actuel, mais aussi toutes causes à la base pour qu'une pareille situation ne se représente pas â chaque fin d'année scolaire, alors que des étudiants de la formation des maîtres arrivent sur le marché du travail.

Je souhaite que cette commission ait un mandat un peu plus vaste, quitte à allonger la période de son travail, un mandat qui, étant plus vaste, pourrait porter beaucoup plus de fruits.

M. LE PRESIDENT: Dépôt de documents.

Comptes publics

M. BOURASSA: Je dépose un exemplaire des comptes publics pour l'année 68/69. Par inadvertance, cela n'avait pas été fait par l'ancien ministre des Finances.

Commissaires à la régie interne

M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur de déposer copie de l'arrêté en conseil nommant trois députés, membres du Conseil exécutif, commissaires de la régie interne de l'Assemblée nationale.

Rapport de l'Editeur du Québec

M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur de déposer le rapport de l'Editeur officiel du Québec indiquant le nombre d'exemplaires des statuts de chaque session imprimés ou distribués depuis la dernière session, des ministères, corps administratifs, officiers et personnes à qui ils ont été distribués, le nombre d'exemplaires livrés à chacun d'eux, l'autorisation en vertu de laquelle la livraison a été faite et le nombre d'exemplaires des statuts de chaque session qui restent alors en sa possession.

Anniversaires

M. LAPORTE: M. le Président, avant que vous ne passiez à la période des questions des députés, cette Chambre me permettrait peut-être de souligner un anniversaire. Le 14 Juillet était déjà une date chargée d'histoire. Pour nous, Québécois, un autre événement lui donne en quelque sorte un sens nouveau, puisque c'est l'anniversaire de naissance du chef du Parti libéral du Québec, du premier ministre de cet immense coin de terre canadien qui nous est particulièrement cher, le Québec.

L'anniversaire que nous célébrons aujourd'hui nous invite, qui que nous soyons, à faire une pause pour rendre hommage à celui qui assuma, à une heure particulièrement difficile, les destinées de sa province et du peuple qui l'habite.

Un journaliste, récemment retourné à un journal montréalais, coiffait sa chronique de ce ma- tin du titre: « Bonne fête, vieux pays! » saluant ainsi nos amis français dont c'est la fête nationale. Vive la France! Sans doute, mais avec combien plus de raison pouvons-nous nous écrier: Salut, jeune Québec! Salut Québécois, peuple fier, ambitieux, qui travaille ferme à se donner les Instruments de son épanouissement! Salut à son premier ministre qui est aujourd'hui l'expression de toute cette ambition!

Certains ont affirmé, et j'en suis, que c'était peut-être le Parlement de la dernière chance pour la société que nous avons connue depuis 1867. Si nous croyons que la situation est telle, nous ne pouvons que souhaiter que le premier ministre puisse relever le défi qu'il a proposé aux Québécois. Il a le droit de pouvoir compter sur l'appui critique, si l'on veut, de la totalité des Québécois.

Nous souhaitons au premier ministre que le soin qu'il a mis à préparer sa carrière politique, que sa jeunesse qui correspond aux espoirs d'une grande partie de notre population, que l'ampleur du mandat qu'il a reçu des citoyens lui permettent, sans délai, de réaliser le plan de travail qu'il proposait récemment à ses concitoyens: premièrement, procéder à la mise en ordre des affaires de l'Etat et, deuxièmement, faire en sorte que notre société québécoise devienne authentiquement et rigoureusement réformiste.

Le défi qui est le sien, c'est en somme de prouver que le Québec est capable de se hausser au niveau des tâches des années 1970, qu'il peut faire donner à l'expérience canadienne sa véritable mesure, de sorte qu'elle procure au peuple canadien-français et à tous les citoyens en même temps l'épanouissement culturel et la richesse économique. Son défi, c'est aussi de jeter un pont entre les générations et d'amener tous les Québécois, quels que soient leur âge et leur préparation, à participer en commun à la préparation d'un avenir de qualité et à en retirer, chacun, une mesure complète de fruits.

Le chef du Parti libéral du Québec peut compter sur l'appui non pas inconditionnel — cette étape de notre histoire est, j'ose l'espérer, définitivement révolue — mais sur l'appui lucide et volontaire de tous les membres libéraux de l'Assemblée nationale. J'en suis sûr, il peut aussi tabler sur la collaboration de tous les députés dans cette Chambre.

Le premier ministre est à l'aube d'une carrière prometteuse pour les Québécois. Nous profitons avec joie de l'occasion que nous propose son anniversaire pour lui présenter nos félicitations, nos voeux et notre espoir.

A sa femme, à ses enfants dont l'un, François, nous fait l'honneur et le plaisir de nous

visiter ce matin, nos remerciements et toute notre amitié.

M. BERTRAND: M. le Président, je suis très heureux de joindre ma voix à celle du leader parlementaire du gouvernement pour exprimer, au nom de tous mes collègues de l'Opposition, nos meilleurs voeux de bonne fête, de bonne santé, de bon courage au premier ministre actuel.

Même si son anniversaire tombe le jour de la prise de la Bastille, qui a marqué un événement important pour la nation française, en même temps que le signe d'une révolution, aux thèmes de liberté, fraternité, égalité, on ne saurait dire que le premier ministre est un révolutionnaire. C'est un homme calme, c'est un homme pondéré, et je lui souhaite, quant à moi, en cet anniversaire de naissance, des voeux de bonne santé.

Je sais combien la tâche qui lui a été dévolue par son parti, d'abord, et par le peuple du Québec, est lourde, combien elle est exigeante. Celui qui détient ou qui exerce ces fonctions personnifie, aux yeux des Québécois, les espoirs, les inquiétudes de notre peuple.

On lui en demande beaucoup. Je sais qu'il est courageux. Sa jeunesse l'aide énormément. Il peut compter sur l'affection d'une famille qui l'entoure et avec qui, j'espère, il pourra trouver au cours de la journée quelques moments intimes pour se faire souhaiter bonne fête à la mode familiale. On pourra peut-être lui donner la bascule. M. le Président, c'est donc avec infiniment de plaisir que je lui offre mes voeux de bonheur, de santé et de succès.

M. SAMSON: M. le Président, il est extrêmement difficile d'ajouter à ce qu'ont dit le leader du gouvernement et le chef de l'Opposition officielle, tellement ils ont expliqué ce qu'ils ressentent en ce jour. Nous aimerions, quand même, de ce coin-ci de la Chambre, adresser nos voeux de bonheur au premier ministre à l'occasion de son anniversaire, ainsi que nos félicitations. Nous aimerions souligner qu'une journée comme aujourd'hui qui est l'anniversaire du 14 juillet, est évidemment un grand jour. Le 14 juillet signifie, pour les Français, la prise de la Bastille et pour notre premier ministre, il ne signifie peut-être pas cette journée même, mais la prise du pouvoir il n'y a pas tellement longtemps. Il semble donc qu'on ait pris quelque chose d'important, soit en France ou au Québec.

M. le Président, lorsque je suis arrivé en cette Chambre, le premier ministre et moi avions un an de différence. Aujourd'hui, il vient de vieillir d'un an et comme mon anniversaire n'est pas la même journée que le sien, je suis resté au même âge. Cela me donne un peu l'illusion que j'ai rajeuni d'un an ce matin à ses dépens.

De toute façon, nous lui souhaitons beaucoup de bonheur. Nous lui souhaitons pas de garder le pouvoir trop longtemps, mais nous lui souhaitons quand même de demeurer jeune très, très longtemps.

M. LAURIN: M. le Président, il est facile et agréable de souhaiter un joyeux anniversaire et d'offrir nos meilleurs voeux à un homme qui, à 36 ans, accède au poste suprême de premier ministre du Québec. Dirons-nous que les fées se sont penchées sur son berceau et ont présidé à son destin? Ce serait là sous-estimer les qualités dont il a fait montre tout au long de sa vie: son intelligence, son acharnement au travail, son souci de compréhension des problèmes québécois, son flair politique et son dynamisme. Son ascension au firmament politique a, par ailleurs, été d'autant plus rapide qu'il a su chevaucher une vague qui roulait autant de peurs que d'espoirs. Nous le félicitons de son succès et nous comprenons qu'il en savoure les joies. Comme tous les hommes politiques, il n'ignore pas cependant que la roche Tarpéienne est toujours près du Capitole. Sa responsabilité est immense et nous souhaitons pour le bien de tous les Québécois qu'il relève victorieusement le défi qui est désormais le sien, comma vient de l'exprimer le leader parlementaire.

Le Québec est en pleine mutation, il cherche son identité. Il a soif de Justice, il aspire au progrès et à l'épanouissement. Puisse notre jeune premier ministre le mener à travers êcueils et orages à ce dont nous rêvons tous pour lui!

M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais remercier très sincèrement le leader parlementaire, de même que le chef de l'Opposition officielle, le chef du Ralliement créditistes et le chef du Parti québécois des propos très généreux, très aimables qu'ils ont eus à mon endroit.

En fait, recevoir des éloges comme j'en reçois ici ce matin, ce sera toujours tentant, à chaque année, de prolonger la session au-delà du 14 juillet.

Le leader parlementaire de l'Opposition de même que les chefs des oppositions ont exprimé d'une façon très claire que les exigences d'un chef de gouvernement, à cette époque actuelle, sont très grandes. Il y a quand même des avantages pour ceux qui sont prêts ou qui veulent faire de l'action politique. Les incon-

vénients de la vie politique, c'est surtout la famille immédiate qui en supporte les principaux, et les éloges qui m'ont été faits ce matin, je les transmets très volontiers à mon épouse qui m'a tellement appuyé depuis le début de ma brève carrière politique.

Ainsi appuyé, avec l'aide de tous mes collègues, je suis évidemment disposé à faire tout ce qu'on peut faire pour assumer ces lourdes responsabilités. Le fait d'avoir son anniversaire le 14 juillet, la fête de la Révolution française, aurait pu susciter quelque inquiétude chez certains au sujet de mon action future, mais on sait, M. le Président, que dans ce grand pays ami auquel nous sommes tellement attachés, là aussi l'esprit réformiste a remplacé l'esprit révolutionnaire.

C'est dans cette optique et avec résolution que Je poursuivrai les objectifs communs.

Encore une fois, M. le Président, je veux remercier tous mes collègues de l'Assemblée nationale de leurs propos de ce matin.

M. LAPORTE: M. le Président, le premier ministre me prie de rappeler l'invitation qu'il a faite à tous les membres de cette Chambre ainsi qu'à tous les membres de la tribune de la Presse de venir à une courte réception à ses bureaux de premier ministre ici au parlement, de six heures à sept heures ce soir.

M. LE PRESIDENT! Questions des députés. L'honorable député de Bagot.

Bourses du gouvernement fédéral

M. CARDINAL: M. le Président, juste avant que les travaux de cette Chambre ne débutent, j'ai donné avis de la question au ministre; cependant c'est un avis bien court, et s'il n'est pas en mesure de répondre immédiatement j'espère qu'il le fera à brève échéance.

L'éducation est un des rares domaines où la juridiction du Québec est claire, précise et exclusive.

Malgré cela, nous sommes informés par les journaux présentement que, dans plusieurs circonscriptions du Québec, des étudiants, au niveau universitaire, reçoivent des bourses directement du Secrétaire d'Etat du fédéral par l'intermédiaire, dans les comtés, des centres de main-d'oeuvre canadiens.

Ainsi, le député de Maskinongé m'informe—il m'a remis à cet effet une coupure de journal — que onze étudiants de Louiseville, par exemple, bénéficient de cours dans diverses universités du pays grâce à des bourses directes de l'Etat fédéral. Il n'y a pas de doute que c'est une ingérence. Ma question au ministre est la suivante: A-t-il un commentaire à faire? Entend-il réagir? Est-il au courant de cela et laissera-t-il passer cette nouvelle ingérence aussi évidente du gouvernement fédéral en matière d'éducation?

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, le ministre a déjà réagi, puisqu'il y a environ quinze jours j'ai fait parvenir au Secrétaire d'Etat une lettre dans laquelle j'exprimais les réserves que nous avions sur la formule suggérée par le gouvernement fédéral. Je n'ai pas eu de réponse à cette lettre. J'entendais, cette semaine, rappeler au Secrétaire d'Etat l'essentiel de ma lettre et demander une réponse le plus tôt possible. Il me fera plaisir de déposer les documents ensemble.

Le gouvernement fédéral, dans ce cas, il faut le reconnaître, a tenté de résoudre un problème particulier cette année au niveau des emplois d'été pour les étudiants, ce qui a permis, à plusieurs d'entre eux, de fréquenter un campus. Nous croyons, de ce côté-ci de la Chambre, que l'éducation est un domaine qui relève exclusivement des provinces et nous sommes déterminés à faire prévaloir les droits du Québec dans ce domaine.

M. CARDINAL: Question subsidiaire, M. le Président. Le ministre aurait-il l'obligeance, au moment où il aura ceci entre les mains — ce n'est pas un dépôt de documents que je demande — de nous donner la substance de ses écrits et de ceux qu'il reçoit du fédéral à ce sujet?

M. SAINT-PIERRE: Avec plaisir.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.

Travaux mécanisés

M. VINCENT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de la Colonisation. Vu la situation très grave qui existe à l'heure actuelle dans la province de Québec, dans tous les comtés où des milliers de cultivateurs sont privés des services de travaux mécanisés, le ministre de l'Agriculture a-t-il l'intention ou a-t-il pris des mesures spéciales pour donner satisfaction à ces milliers d'agriculteurs qui s'adressent non seulement aux services du ministère, mais à tous les députés qui siègent dans cette Chambre?

M. TOUPIN: M. le Président, la décision est prise au niveau du ministère de l'Agriculture en ce qui concerne les travaux mécanisés. Dans presque tous les comtés, actuellement, des travaux s'exécutent. Plusieurs entrepreneurs ont eu des permis; un certain nombre d'autres en ont fait la demande. Ils n'ont pas encore eu leurs permis, mais ils les auront bientôt.

L'objectif que nous poursuivons au niveau des travaux mécanisés, c'est de voir, comme le disait si bien le député de Nicolet, à ce que les cultivateurs aient le plus tôt possible et le plus efficacement possible, tous les services auxquels ils ont droit. C'est l'objectif que nous visons.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Cadillac Moly Mines

M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question au ministre du Travail. Je l'ai prévenu, ce matin, de ma question. Avec votre permission, j'aimerais donner quelques détails afin de mieux expliquer le cas. Il s'agit de la mine Cadillac Moly Mines dont nous avons pris connaissance dernièrement. C'est un cas extrêmement compliqué. A la demande de quelque 200 employés de la mine, je me suis rendu, samedi soir dernier, les rencontrer. Il y a actuellement une ligne de piquetage établie à l'entrée de cette mine qui a été fermée le 25 juin dernier.

Deux problèmes se posent: le premier, c'est qu'il y a fermeture de la mine sans préavis et, le deuxième, c'est que les employés ne sont pas payés. Il y a eu aussi une lettre du gérant de la mine disant que celle-ci devait fermer le 25 juin et qu'un syndic serait nommé.

Il y a eu une lettre du syndic, la compagnie Guaranty Trust of Canada, qui dit qu'à la Cadillac Moly Mines le syndic verra à garantir les salaires des employés. Mais, il se trouve un autre problème, c'est que la paye du 8 juin dernier a été faite par la compagnie Anglo-American, qui est une autre compagnie et dont les chèques sont revenus pour provision insuffisante, pour tous les employés de la mine.

Actuellement il se produit ceci, et voilà la question que je veux poser. C'est que les directeurs de la mine veulent en faire sortir tout le matériel et, comme ces gens-là ne sont pas payés, c'est la raison pour laquelle il y a ligne de piquetage actuellement; les gens ne veulent pas laisser sortir le matériel avant d'être payés. Je voudrais demander — comme je sais que le ministre avait l'Intention de convoquer les parties en cause — si le ministère a aussi l'intention d'intervenir afin que soient garantis les salaires, et ce à brève échéance, parce que je pense que c'est très urgent pour ces employés qui ont besoin de leur paye.

M. LAPORTE: M. le Président, merci au député, qui m'a prévenu de sa question. Un représentant du ministère devait entreprendre des rencontres demain; devant l'urgence évidente de la situation, ces rencontres ont commencé ce matin. Notre représentant est déjà sur place et je devrais avoir, au cours de la journée, un premier rapport sur le déroulement des pourparlers.

Il est évident qu'il s'agit d'une situation que le ministère du Travail juge très grave. Malheureusement, il n'est pas impossible que ce soit une situation de faillite. La situation nous paraît complexe; au début on se demandait s'il s'agissait d'une faillite et, s'il s'agissait d'une faillite, s'il était possible que cette mine soit achetée par une concurrente; s'il s'agissait d'un « lock-out » déguisé, si les prescriptions de la loi — et manifestement elles ne l'ont pas été — avaient été suivies. C'est le but des rencontres qui commencent ce matin, pour tâcher de démêler cet écheveau. Le ministère et le ministre du Travail feront l'impossible, dans les circonstances, compte tenu de notre responsabilité juridique, pour protéger les droits des ouvriers de cette mine.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Dépenses électorales

M. LAURIN: Ma question s'adresse au premier ministre. Jusqu'ici, près de 35 ou 36 projets de loi ont subi leur première lecture. Le leader parlementaire nous a prévenu jeudi dernier que cela complétait à peu près le menu législatif de la présente session.

Plusieurs de ces projets de loi avaient été préparés par l'ancien gouvernement et, parmi ces projets laissés en plan, nous attendions avec une particulière impatience le projet no 1, parrainé par l'honorable Bertrand, qui amorçait le financement par l'Etat des partis politiques reconnus, afin de favoriser le fonctionnement normal de la démocratie au Québec. Etant donné que le remboursement des dépenses encourues lors de la dernière élection aiderait grandement les partis politiques reconnus à mieux assumer leurs responsabilités à l'endroit de la population, le gouvernement a-t-il l'intention de dépo-

ser ce projet ou un projet analogue corrigé lors de la présente session?

M. BOURASSA: M. le Président, jeudi matin il y aura une réunion de la commission parlementaire. Elle devait avoir lieu la semaine dernière, mais pour rendre service au chef du Parti québécois on l'a remise à cette semaine. Il y a deux ou trois semaines, j'avais annoncé, au programme des discussions de cette commission, la réforme électorale impliquant la carte électorale, tout le mode de scrutin et les problèmes qui sont soulevés ce matin. Comme le député de Bourget fait partie de cette commission parlementaire, je pense que c'est peut-être l'endroit par excellence pour lui pour donner son point de vue.

M. LAURIN: L'objet du projet de loi de l'honorable M. Bertrand était différent puisqu'il avait trait au remboursement des dépenses de la dernière élection.

M. BOURASSA: Ceci pourra être discuté en priorité.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.

Grèves du bâtiment

M. DEMERS: Ma question s'adresse au ministre du Travail. Je n'ai malheureusement pas eu le temps de le prévenir de ma question. C'est au sujet de la grève générale du bâtiment dans la région de la Mauricie, après un déclenchement de grève dans la région du Saguenay. Le ministre a-t-il des renseignements à ce sujet? Et peut-on dire que c'est sérieux, la déclaration d'un monsieur Tremblay, d'Arvida ou des environs, selon laquelle le gouvernement appuie des lèvres la demande de parité de salaires de la province avec ceux de Montréal, alors qu'il ne fait rien pour la réaliser, en fait?

M. LAPORTE: Je peux au moins me servir de mes lèvres pour donner la réponse.

M. DEMERS: J'aimerais mieux que vous vous serviez de ce que vous avez un peu plus haut que les lèvres.

M. LAPORTE : Les employés de la construction du Saguenay, au nombre d'environ 2,000, ont décidé, en fin de semaine, de faire la grève. Je ne connais pas la raison véritable de cet arrêt de travail qui touche 2,000 des 60,000 ouvriers environ de la construction. La raison que l'on in- voque c'est le désir des grévistes de hâter la négociation d'une nouvelle entente collective qui couvrirait toute la province. Les grévistes du Saguenay, ayant pris un vote de grève et respecté toutes les prescriptions de la loi, étaient légalement autorisés à faire la grève. Que leur décision atteigne le but qu'ils lui ont fixé, cela reste à voir.

Tel qu'entendu, les parties en cause étudient actuellement le document que je leur ai fait remettre la semaine dernière, et tel qu'entendu, la négociation reprendra la semaine prochaine. Je réinvite tous les intéressés au calme et à une patience pénible parfois mais absolument nécessaire dans les circonstances. Nous faisons, c'est évident, l'impossible pour obtenir une décision finale le plus tôt possible. Quant au chef ouvrier qui aurait déclaré que nous appuyons seulement des lèvres nos propositions, c'est tout simplement contraire aux faits et stupide.

Conflit chez les producteurs de lait

M. VINCENT: Question supplémentaire également au sujet d'un conflit syndical. Est-ce que le ministre pourrait se renseigner au sujet d'un « lock-out » qui aurait eu lieu la semaine dernière à la Coopérative des producteurs de lait du marché de Montréal, lequel « lock-out » a mis à pied 80 personnes. Le lait, présentement, doit être dirigé vers Granby afin d'y être transformé.

M. LAPORTE: Le « lock-out » existe, en fait, depuis plusieurs jours. Malheureusement, les négociations sont rompues. Comme c'est son devoir, le ministère du Travail a quelqu'un qui tente actuellement de ramener les deux parties à la table des négociations. Je tiendrai cette Chambre au courant des développements.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

Assurance- maladie

M. CLOUTIER: Ma question s'adresse au ministre de la Santé. A la suite de l'adoption du projet de loi no 8 par cette Chambre, est-ce que le ministre a reçu de chacun des quatre groupes professionnels de la santé une indication de leur intention de poursuivre et d'accélérer les négociations afin d'en arriver à une entente le plus tôt possible?

M. CASTONGUAY: J'ai reçu hier un télégramme du président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec nous exprimant

son désir de poursuivre les négociations aussi rapidement possible car, dit-il dans son télégramme, le but de la Fédération est d'établir pour les Québécois le meilleur régime d'assurance-maladie possible.

Ce même télégramme a été envoyé, comme en font foi les journaux, aux autres associations. Je dois dire que je n'ai reçu des dentistes et des optométristes aucune communication, sauf que j'ai reçu une communication téléphonique des médecins spécialistes indiquant également leur désir de poursuivre les discussions.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

Hôpitaux privés

M. CHARRON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. La semaine dernière cette Chambre était heureuse d'apprendre la solution du problème de l'Acton Rubber. J'aimerais demander au ministre du Travail si dans un autre conflit il ne pourrait pas, avec autant de célérité, atteindre autant de succès, soit celui qui concerne le secteur privé des hôpitaux.

Est-ce que le ministre pourrait informer cette Chambre sur l'état actuel des négociations, ou sur l'impasse qui existe actuellement dans les négociations sans nous répéter toutefois qu'il est prêt à intervenir, puisque c'est son devoir? Puisque les négociations sont dans une impasse, quelle idée nouvelle ou quelle proposition nouvelle le gouvernement entend-il mettre de l'avant pour que cette grève qui dure depuis sept semaines...

M. LAPORTE: M. le Président, puisque le député me dicte ma réponse, je dirai simplement: Je n'ai rien à ajouter à ce qui a déjà été dit.

M. CHARRON: Non, Je vous ai demandé bien précisément, M. le Président, quelle idée nouvelle vous aurez pour que les négociations sortent de l'impasse actuelle?

M. LAPORTE: La seule idée nouvelle qu'on peut espérer, c'est que les gens négocient et trouvent une solution. Il n'y en a pas d'autre.

M. CHARRON: Comment allez-vous les faire négocier?

M. LAPORTE: Je comprends que le député de Saint-Jacques a des idées neuves sur tout. Qu'est-ce qu'il a à suggérer, lui, à part des négociations entre les parties?

M. CHARRON: Ce n'est pas moi le ministre du Travail.

M. LAPORTE: Bon, heureusement, d'ailleurs.

M. CHARRON: Je demande au ministre du Travail quelle est son intention, comment il va agir dans le présent conflit.

M. LAPORTE: Mon intention, c'est de laisser le ministre de la Santé et le ministre de la Fonction publique, avec la collaboration des hauts fonctionnaires du ministère du Travail, faire leur devoir, ce qu'ils ont fait fort bien jusqu'ici en espérant une solution prochaine.

M. CHARRON: Bien, ils ne l'ont pas fait fort bien jusqu'ici...

M. LAPORTE: Comment?

M. CHARRON: ... puisqu'il n'y a pas de négociations.

M. LAPORTE: Mais qu'est-ce que vous voulez? Est-ce que le député suggère qu'on les rentre de force au travail? Il y a actuellement, entre les parties, des divergences d'opinions. Et comme dans toute grève, la partie patronale a des exigences et la partie syndicale en a. Tant qu'elles n'ont pas réussi à les fondre et à s'entendre, il y a grève.

Malheureusement, il y a actuellement grève. Il y a des questions de principe sur lesquelles, jusqu'ici, ni l'une ni l'autre partie n'a voulu céder. C'est pour cela qu'il y a un conflit.

M. CHARRON: Est-ce qu'on ne pourrait pas demander au ministre d'employer le sous-ministre si fructueux dans le cas d'ActonVale à la même table de négociations?

M. LAPORTE: Imaginez donc que nous y avions pensé avant vous. Il est déjà dans le problème.

M. CHARRON: Merci.

UNE VOIX: Ce ne sont pas des idées nouvelles; ce sont encore les mêmes idées.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bellechasse.

Travaux mécanisés

M. LOUBIER: M. le Président, tout à l'heure je voulais poser une question additionnelle sur le

sujet soulevé par le député de Nicolet concernant les subventions pour les heures de travaux mécanisés.

Evidemment, cette question se serait adressée — mais s'adresse actuellement également — au ministre de l'Agriculture. Il y a quelques semaines, il nous avait promis qu'il y verrait personnellement et les travaux s'effectueraient d'une façon normale.

Or, pour corroborer l'inquiétude généralisée dans le Québec, j'apprendrai au ministre de l'Agriculture que dans Bellechasse et différents comtés avoisinants à peine 25%, comparativement à 1969, des travaux mécanisés ont été exécutés jusqu'à présent. Si le ministre me le permet, est-ce qu'il a l'intention de respecter l'engagement qu'il avait pris en Chambre à quelques reprises d'informer ses hauts fonctionnaires qu'il n'y aurait pas de discrimination dans l'octroi des permis à être accordés aux différents entrepreneurs et que le champ serait libre pour donner satistaction à tous les cultivateurs?

Est-ce qu'il a l'intention de respecter cet engagement qu'il avait pris lors de la discussion des prévisions budgétaires de son ministère?

M. TOUPIN: M. le Président, l'engagement que j'ai pris, je le disais tantôt au député de Nicolet, c'est de donner dans le plus bref délai tous les services dont les cultivateurs ont besoin et auxquels ils ont droit en vertu de cette masure d'assistance.

Tout à l'heure, vous apportiez des statistiques. Nos dernières constatations révèlent que les heures de travaux mécanisés, dans l'ensemble de la province, cette année, sont avantageusement comparables à celles exécutées l'an dernier. Bien sûr, un certain nombre de problèmes se posent dans certains comtés. Ces problèmes sont actuellement discutés au niveau du ministère et des solutions sont à l'étude. Elles s'appliqueront bientôt; on me disait que ce serait au cours de cette semaine. Un certain nombre de ces problèmes concernent les tracteurs ou les entrepreneurs, car il n'y a pas suffisamment d'entrepreneurs. Alors, nous allons compléter l'ensemble et, bientôt, le tout fonctionnera parfaitement bien.

M. LOUBIER: M. le Président, je suis persuadé que vous me permettrez de dire au ministre qu'il tente, par des périphrases, de noyer tout simplement la question.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

M. LOUBIER: Qu'il cesse donc de faire de la discrimination dans les comtés!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: Qu'il accorde des permis comme cela s'est fait depuis 1960!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais au député de Bellechasse...

M. LOUBIER: Qu'il arrête son patronage éhonté dans les comtés, c'est tout!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: Qu'il prenne ses listes de 1965, s'il veut.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. VINCENT: Une question supplémentaire, M. le Président. Le ministre de l'Agriculture dit que la situation se compare avantageusement, présentement, avec ce qui existait l'an dernier. Nous lui avons demandé, au cours des discussions sur le budget, de nous livrer, justement, ces rapports. A ce moment-là, il nous a dit qu'il ne les avait pas. Est-ce que le ministre pourrait, demain, nous apporter, en cette Chambre, les tableaux des heures de travaux mécanisés exécutées au 15 juin 1970 comparativement au 15 juin 1969? C'est aussi simple que cela.

M. LAPORTE: M. le Président, on demande des documents par une motion au feuilleton.

M. VINCENT: Pardon?

M. LAPORTE: C'est une motion pour production de documents.

M. VINCENT: Non, mais le ministre vient de nous dire qu'il peut nous donner ce renseignement. Cela évitera une série de discussions inutiles, d'avoir ces chiffres.

DES VOIX: Au feuilleton.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.

Plaines d'Abraham

M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. La Commission des Champs de bataille aurait décidé de changer le nom des Plaines d'Abraham en celui de parc George VI, ce qui constitue une véritable provocation pour un grand nombre de Québécois.

M. BOURASSA: C'est de juridiction fédérale.

M. LEGER: Ne conviendrait-il pas — c'est là ma question, M. le premier ministre — que le gouvernement intervienne auprès de ses amis d'Ottawa pour que cette décision soit rescindée afin de protéger l'ordre public?

M. BOURASSA: M. le Président, un journal, ce matin, démentait la nouvelle.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Shefford.

Service téléphonique et stationnement

M. RUSSELL: M. le Président, deux questions s'adressant au ministre des Travaux publics. Premièrement, est-ce qu'il pourrait dire aux députés de cette Chambre où en est rendu le plan qui avait été amorcé pour améliorer le service téléphonique des députés, chose qui a été modifiée un peu durant le mois de mai, mais qui, depuis, semble demeurer en plan et ne pas bouger, donnant un mauvais service aux députés?

Deuxièmement, où en est-on rendu avec les plans de stationnement qui avaient été amorcés et qui devaient être en marche vers le mois de juin? Depuis, la situation ne semble pas s'améliorer, mais plutôt empirer. En effet, lorsque se présentent des situations comme ce matin, les députés sont obligés d'aller stationner dans les rues de la ville de Québec car ils n'ont pas de stationnement ici.

M. TESSIER: M. le Président, sur le premier point, je dois dire que j'ai eu justement, ce matin même, une entrevue avec un des vice-présidents de Bell Canada pour faire une étude complète du système téléphonique. Il semble bien qu'il y a eu dans le passé et qu'il y a encore, actuellement, des abus considérables dans le système téléphonique du gouvernement. En effet, des gens qui n'ont aucune affaire dans l'administration gouvernementale se servent constamment des lignes du Centrex qui sont payées par les contribuables, à même leurs taxes, et qui doivent servir à des fins administratives exclusivement.

En collaboration avec Bell Canada, le ministère des Travaux publics est à faire une étude intensive de tout le réseau téléphonique gouvernemental. D'ici peu, j'espère bien que nous serons en mesure, non seulement de donner satisfaction à tous les députés, aux fonctionnaires, à tous ceux qui font partie de l'administration gouvernementale, mais que nous pourrons également réaliser des économies substantielles en déchargeant le réseau.

Pour ce qui est de la deuxième question, c'est-à-dire le problème du stationnement, je vous avouerai franchement que c'est la première plainte que je reçois d'un député de cette Chambre. Je remercie le député de Shefford d'avoir attiré mon attention sur cette question. Je crois, en effet, que chaque député, quel que soit l'endroit où il siège en cette Chambre, doit avoir un stationnement qui doit lui être réservé à l'année. Ce qui est arrivé au député de Shefford, je présume que cela a dû arriver à plusieurs autres de nos collègues de cette Chambre. Alors, je prends bonne note de cette remarque et je vais donner des instructions immédiates aux fonctionnaires du ministère des Travaux publics de voir à ce que, le plus rapidement possible, chaque député ait sa place de stationnement.

M. RUSSELL: M. le Président, une question supplémentaire. Est-ce que le ministre pourrait maintenant répondre à ma première question, en ce qui concerne les téléphones des députés? Je comprends qu'il y a une étude en cours, un examen qui se fait des faits actuellement, mais cela ne règle pas la question de l'installation des téléphones pour les députés. S'il ne répond pas à la question, on va tenir pour acquis que ceux qui font des irrégularités avec les téléphones, ce sont les députés.

M. TESSIER: Pas du tout. Loin de moi cette pensée. Mais je crois que la question des téléphones des députés fait l'objet de l'ensemble de l'étude. J'espère bien que dans les quelques jours qui suivront, nous serons en mesure d'apporter des correctifs à ce sujet.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, une question supplémentaire au ministre des Travaux publics. C'est bien beau, la dissertation qu'il vient de nous faire sur l'organisation du téléphone, à longue portée, à très longue échéance, mais il reste qu'à l'heure actuelle nous sommes privés, la plupart du temps, du service du téléphone. En ce qui me concerne, on a changé ma ligne trois fois et, actuellement, j'ai communication directe avec le bureau du député des Trois-Rivières. Par conséquent, j'aimerais que le ministre s'avise de voir à ce que la société Bell s'occupe de nous donner des lignes téléphoniques permanentes. On a changé trois fois ma ligne en trois semaines; la semaine dernière, les gens de la société Bell étaient encore à mon bureau et, actuellement, je suis en communication avec le bureau du député de Trois-Rivières.

En ce qui concerne le stationnement, je m'étonne que le ministre ne se soit pas rendu compte que, depuis le début de cette session, nous

éprouvons, tous les matins, du mal à trouver stationnement, parce que déjà, au moment où j'arrive au Parlement, soit à huit heures, huit heures et demie, les « patroneux » du gouvernement ont pris nos places.

M. TESSIER: Il n'y a rien à ajouter à ce que j'ai déclaré tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

Patronage dans Abitibi-Ouest

M. AUDET: M. le Président, je regrette d'avoir à poser cette question au premier ministre, le jour de son anniversaire. De toute façon, pour préciser ma question, les électeurs de mon comté m'assurent que, pour obtenir du travail du ministère de la Voirie, on doit s'adresser à des personnes qui n'ont aucun mandat du peuple et qui sont rattachées aux directives du candidat défait de ce comté. Ma question est celle-ci: Le premier ministre a-t-il l'intention de faire les démarches nécessaires pour faire en sorte que ses déclarations récentes soient respectées?

M. BOURASSA: Certainement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montcalm.

Pêcheurs contestataires

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, cette question s'adresse au ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Je crois que le ministre a été informé que, durant la fin de semaine, des pêcheurs, dits contestataires, ont manifesté pour la nième fois dans le Québec, laissant entendre entre autres que le ministre avait refusé de les rencontrer. Est-ce que le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche a l'intention de rencontrer les représentants de ce mouvement de contestation ou s'il entend faire une déclaration ministérielle à cet effet?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, aucune association n'a demandé à me rencontrer. On m'a écrit, cependant, et j'ai répondu aux lettres qui m'ont été adressées. Mais, de mon côté, j'ai pris sur moi de demander à un certain groupe de contestataires de venir me rencontrer, soit à Montréal ou à Québec, à leur convenance. L'étude des clubs privés n'est pas encore terminée.

Clubs privés

M. LOUBIER: Question supplémentaire. Le ministre doit savoir, avec son expérience, que certaines personnes communiquent encore avec nous, et la raison pour laquelle les fédérations ou les associations ne demandent pas de rencontre actuellement avec le ministre, c'est que c'est le ministre lui-même qui avait indiqué, il y a trois semaines, que, d'ici quelques semaines, le ministre ferait connaître sa politique d'ensemble sur les clubs privés.

Or, les associations se disent: Nous ne sommes tout de même pas pour aller rencontrer le ministre avant que ses orientations ne soient connues, d'où, je pense, l'importance et l'urgence pour le ministre de les définir le plus rapidement possible.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est ça. Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

Télégramme à M. Pompidou

M. JORON: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. C'est une habitude diplomatique, je crois, à l'occasion de la fête nationale d'un Etat, que les chefs de gouvernements d'autres Etats adressent au chef de l'Etat qui célèbre un tel anniversaire des messages, télégrammes, lettres ou ainsi de suite.

Puisque c'est aujourd'hui la fête d'une nation avec laquelle la nation québécoise a, pour le moins, des liens très intimes, je voudrais savoir si le chef du gouvernement du Québec a adressé un tel message au président de la République française, et si oui quel en était le contenu?

M. BOURASSA: Oui, M. le Président, je pourrai faire parvenir la copie du télégramme que j'ai envoyé à M. Pompidou.

M. LE PRESIDENT: On m'informe que le ministre de la Santé a une réponse à donner à une question verbale posée la semaine dernière.

Hôpital d'Asbestos

M. CASTONGUAY: M. le Président, le député de Richmond m'a posé une question relativement à l'hôpital d'Asbestos, la semaine dernière. Le ministère a pris la décision de fer-

mer cet hôpital pour deux raisons majeures. Ce sont les suivantes: premièrement l'existence d'un danger sérieux de glissements de terrain par suite de l'évolution de la mine de l'endroit.

Deuxièmement, les conditions impossibles de séjour des patients, au point de vue de la salubrité, au point de vue de l'hygiène, en raison de la proximité du travail minier qui crée des conditions intolérables et inacceptables. Ce sont les termes exacts des rapports que j'ai reçus des fonctionnaires des services techniques du ministère.

Alors, entre créer des inconvénients à la population, et ceci j'en conviens, ou risquer des vies humaines, nous avons pris la seule décision qu'il était possible de prendre, c'est-à-dire fermer l'institution.

En ce qui a trait aux solutions, si nous avions eu une solution immédiate et permanente à annoncer, je l'aurais fait avec grand plaisir. Tout ce que nous pouvons dire, c'est qu'à court terme l'utilisation de la clinique de la compagnie Canadien Johns-Manville, qui contient onze lits pour les patients et des facilités d'urgence, des démarches se poursuivent pour que les médecins de l'endroit aient accès à cette clinique.

Il y a également, je conviens qu'il y a une certaine distance, l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska qui est à 39 milles, qui compte 313 lits et qui peut accepter les cas d'autres régions comme celle-ci.

Quant à une solution plus permanente, nous en étudions une présentement qui vise à donner à la population une gamme de services de santé aussi complète et diversifiée que possible, et dès que nous aurons terminé les discussions, les pourparlers, nous annoncerons cette décision. On peut être assuré que ce sera fait le plus rapidement possible.

Hôpital de Plessisville

En ce qui a trait, maintenant, à la question que le député de Mégantic m'a adressée, relativement à l'hôpital de Plessisville, qui est ou était sur le point de fermer ses portes, je dois dire que cette institution, à la demande même des religieuses, est en voie de fermer ses portes non pas depuis un mois, mais depuis déjà un an et demi, sinon plus.

Alors, l'étude du cas de l'hôpital de Plessisville, situé cette fois-ci à une dizaine de milles de l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska, est à l'étude, il s'inscrit dans la régionalisation des services de santé dont j'ai déjà parlé!

L'utilisation future de l'édifice fait aussi partie de la question. Sans préjuger des recom- mandations qui pourront m'être faites, je puis dire que nous allons étudier la possibilité que cet édifice soit utilisé à des fins de santé et que nous prévoyons, par d'autres mécanismes tels que des centres de santé locaux, doter de services de diagnostic, de services d'urgence, la population de telle sorte qu'elle ait l'éventail de services dont elle a besoin. Présentement, l'hôpital de Plessisville est ouvert. Merci.

M. LE PRESIDENT: Question supplémentaire?

M. SAMSON: Question supplémentaire, oui. Ceci concerne la première réponse donnée par le ministre. On a compris que l'hôpital d'Asbestos devait fermer par suite de la possibilité de glissements de terrain qui proviendraient des travaux de la mine. Ma question est la suivante: Le ministère a-t-il l'intention d'étudier, en collaboration avec les autorités de la mine, la possibilité d'une certaine responsabilité de la part de la mine?

M. CASTONGUAY: Nous sommes en pourparlers avec les autorités de la mine.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice aurait une réponse à une question verbale.

Cas d'infraction

M. CHOQUETTE: M. le Président, le vendredi 3 juillet, l'honorable député de Maskinongé me posait une question au sujet de la procédure adoptée dans le district de Sherbrooke relativement à des infractions de délit de fuite ou de facultés affaiblies.

Je me suis renseigné et il est exact, comme le laissait entendre l'honorable député de Maskinongé, que les procureurs de la couronne de ce district, plutôt que de procéder par voie de déclaration sommaire de culpabilité, ont procédé par voie d'acte d'accusation dans les cas, justement, de délit de fuite et de facultés affaiblies.

L'on sait d'ailleurs qu'une procédure peut être adoptée plutôt que l'autre. Ceci est à la discrétion de la couronne. Cependant, je tiens à dire à l'honorable député qu'à l'avenir nous emploierons la procédure la moins lourde pour l'inculpé, excepté s'il y a des circonstances spéciales. C'est-à-dire que nous procéderons par voie de déclaration sommaire de culpabilité sous la partie 24 du code criminel, plutôt que par voie de mise en accusation, excepté, évidemment, si les circonstances du cas nous

indiquent que la procédure par voie de mise en accusation devrait être adoptée dans l'intérêt de la justice.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

Ordre du jour

M. LAPORTE: M. le Président, si vous me le permettiez, je ferais savoir de quoi il retourne — quelques députés étaient peut-être absents vendredi — pour le travail de la Chambre d'aujourd'hui, de demain et des jours suivants. Nous allons d'abord, pour quelques minutes, aller en comité des subsides afin de former le comité des subsides pour envoyer à la salle 81-A les crédits du ministère du Bien-Etre social et ensuite les crédits du ministère de la Santé, ces travaux devant commencer à deux heures.

Les présidents des commissions parlementaires qui ont déjà siégé et qui n'ont pas encore fait rapport à la Chambre en profiteront pour présenter leur rapport. Nous reviendrons ensuite en Assemblée nationale et nous étudierons les articles 3 et 4 de notre feuilleton d'aujourd'hui, troisième lecture des bills 2 et 3. Ensuite, deuxièmement à l'ordre du jour, l'article no 7 de notre feuilleton: Loi modifiant la loi des tribunaux judiciaires et le code du travail.

Cet après-midi, aussitôt que nous aurons l'agrément de cette Chambre, la Loi concernant les explosifs et la Loi modifiant la loi des licences, aussitôt que ce sera prêt. Ensuite, troisièmement, deux projets de loi: Loi modifiant le régime de retraite des enseignants et Loi modifiant le régime de retraite des fonctionnaires, deuxième lecture, pour pouvoir les envoyer à la commission parlementaire des Finances. S'il n'y avait pas de débat de deuxième lecture, on pourrait peut-être s'entendre pour les déférer, si les chefs de partis le voulaient bien, en commission puisque c'est assez technique.

Quatrièmement, article no 10 de notre feuilleton, Loi modifiant le code de la route, Mme Kirkland-Casgrain. Cinquièmement, article 13 de notre feuilleton, Loi autorisant des prêts à certains pêcheurs commerciaux. Sixièmement, article no 5 de notre feuilleton, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Article 11 de notre feuilleton, Loi concernant le parc Forillon et ses environs. Huitièmement, article no 12, Loi concernant la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du Québec.

Article 14 de notre feuilleton, Loi modifiant la loi du ministère de la Santé et la loi du ministère de la Famille et du Bien-Etre social, si les crédits sont terminés. Autrement nous passerions à la Loi modifiant la Loi de l'Office du crédit industriel et aux lois qui étaient en appendice aujourd'hui.

Alors, M. le Président, un.

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité des subsides. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Lettre de recommandation

M. LOUBIER: M. le Président, avant que la motion ne soit adoptée, je voudrais poser un grief dans le même sens que celui posé l'an dernier, que l'on retrouve dans les Débats de l'Assemblée nationale, le vendredi 13 juin 1969, aux pages 2819 et suivantes. Cette question avait été soulevée par le député d'Outremont et débutait comme suit: « J'ai un grief qui me paraît important à soulever, même si c'est la fin de la session. C'est au sujet des agissements d'un officier public, plus particulièrement, etc., etc., » Et le député d'Outremont signalait qu'il s'agissait, à la page 2820, d'un acte de patronage éhonté où l'on a agi illégalement, où on s'est servi de sa situation et d'influences politiques pour obtenir des assurances garanties d'exécution et des assurances contre l'incendie, etc., etc.

M. le Président, le député d'Outremont mentionnait qu'il s'agissait pour lui d'un cas de conscience et qu'il se devait de soulever un cas de patronage éhonté, à l'effet qu'un agent d'assurance aurait reçu une recommandation de la part d'un député ministériel. Avec le même esprit de conscience, M. le Président, je porte le grief suivant en vertu d'une lettre datée du 21 mai 1970, signée par le député d'Outremont et ministre de la Justice. Elle se lit comme suit: « A qui de droit. Il me fait plaisir de vous recommander Madame Lisa Reldan du studio de l'Enfant charmant pour du travail professionnel photographique que vous pourriez désirer pour vos enfants. Madame Reldan étant résidante dans la ville de Mont-Royal, comté d'Outremont, mérite de ce fait même votre appui. « La qualité de son travail artistique que je connais est une autre raison qui m'incite à vous recommander Mme Reldan. Bien à vous, Jérôme Choquette, c.r., député d'Outremont et ministre de la Justice. »

Et ce qu'il y a d'un peu déroutant, M. le Président, c'est que cette lettre circule actuellement. Elle a été rédigée pour un rayon d'action très large, en mettant « à qui de droit » et elle s'adresse aux différentes commissions scolaires.

Or, M. le Président, dans la région de Montréal, cette personne, qui est persona grata, possède une lettre sur du papier avec en-tête du cabinet du ministre de la Justice de la province de Québec; elle tente d'obtenir des contrats auprès de toutes ces commissions scolaires, se targuant d'avoir la bénédiction non seulement de M. Untel, de M. Untel, mais, s'il vous plaît, du ministre de la Justice de la province de Québec, celui qui est censé faire respecter toutes les règles du « fair play », de la justice. Eh bien, cette dame se présente pour obtenir des contrats sous pression. C'est l'objet du grief que je formule ce matin, parce que je veux imiter en ceci le député d'Outremont et, avec le même degré de conscience et le même désir d'épurer les moeurs électorales, je veux éviter, comme il le disait si éloquemment, une recrudescence du patronage éhonté dans le Québec.

M. CHOQUETTE: En réponse au grief formulé par le député de Bellechasse, je tiens à dire que, durant la campagne électorale, cette dame m'avait demandé de lui donner une lettre de recommandation. Selon elle, c'était purement et simplement une lettre de recommandation à usage local. En effet, elle dit, par écrit: « M. Choquette, je suis en butte à la concurrence de grandes sociétés photographiques venant de Toronto et de Winnipeg ». Je pourrai montrer la lettre à l'honorable député. Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle là-dedans.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un rôle qui vous serait revenu après les élections.

M. CHOQUETTE: Un instant. Laissez-moi terminer ma réponse. Cette personne m'a dit: M. Choquette, je donne du travail aux Québécois. Des grandes firmes, qui ont des armées de vendeurs sur là route, viennent chercher le travail au Québec et vont faire développer leurs photographies en Ontario et en Alberta. J'ai dit: Madame durant la campagne électorale, je ne peux pas. Je ne voudrais pas vous donner de lettre d'introduction ou même de recommandation parce qu'on pourrait penser que j'essaie, en somme, d'exercer des pressions indues. Ce qui s'est produit, c'est que nous avons gagné l'élection.

Après l'élection, avant même que j'ai été nommé ministre, j'ai dit à ma secrétaire: Donnez-lui une lettre de recommandation, une lettre d'introduction simplement pour les gens d'Outremont, pour les gens de mon comté, les gens de notre milieu auquel elle appartient. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle j'ai dit, dans la lettre: Elle est de ville Mont-Royal et, de ce fait même, elle mérite notre appui. C'était donc à usage purement local. Or, cette dame, ayant reçu cette lettre qui, d'ailleurs, n'a pas été signée par moi, mais par ma secrétaire... Je ne dis pas que je n'ai pas donné les instruction; j'ai donné des instructions. Quant à la signature, ce n'est pas moi qui l'ai rédigée ou qui en ai vu la forme définitive. Or, cette dame, ayant reçu la lettre, l'a fait photocopier à plusieurs exemplaires et l'a envoyée dans un grand nombre de commissions scolaires du Québec. Lorsque j'ai appris ce fait, je lui ai téléphoné et lui ai dit: Ecoutez, madame, il me semble que vous allez un peu loin.

M. BERTRAND: A qui de droit.

M. PAUL: Est-ce qu'elle est allée plus loin?

M. CHOQUETTE: Elle m'a dit: M. Choquette, je regrette de vous avoir mis dans l'eau bouillante. Elle m'a promis, en somme, d'arrêter cette pratique que je déplore moi-même. Mais il faut comprendre dans quel esprit cette missive a été écrite. Ce n'était pas pour exercer des pressions indues, sur aucun organisme public ou aucune personne. C'était à des fins purement locales, puisque cette dame me disait qu'elle était en butte à une concurrence de la part de firmes qui, en somme, ne favorisent pas directement les intérêts du Québec. J'admets que l'on peut affirmer que ma bonne foi a été trompée.

M. LAPORTE: Le député a parlé deux fois sur sa motion.

M. LOUBIER: Si l'on se réfère aux Débats du 13 juin 1969, le député d'Outremont avait parlé à trois reprises sur le même sujet.

M. LAPORTE: Qui surveillait dans ce temps-là?

M. LOUBIER: Je pense que l'on peut m'accorder le même droit aujourd'hui, puisque...

M. LE PRESIDENT: C'est le droit de réplique.

M. LOUBIER: ... c'est exactement dans les mêmes circonstances. Ce que je trouve d'absolument candide de la part du député d'Outremont, c'est qu'il a affirmé à cette Chambre que cette lettre avait été rédigée et donnée avant qu'il ne soit ministre. Or, cette lettre comme en-tête: « Cabinet du ministre de la Justice. »

M. CHOQUETTE: Je n'ai pas dit ça. Je re-

grette. J'invoque le règlement. Le député me cite mal. J'ai dit que j'ai donné des instructions à ma secrétaire aussitôt après l'élection. Après ça, je ne sais pas trop ce qui est arrivé. La date, c'est évident, elle est sur la lettre.

M. LOUBIER: Deuxièmement, ce que je trouve un peu curieux, pour ne pas dire alarmant, c'est que c'est le ministre de la Justice de la province, qui est avocat, s'appuie sur du ouï-dire. Madame Unetelle lui aurait dit que telle compagnie était obligée de faire développer ses films en Ontario. Elle lui aurait dit que telle compagnie, etc..

Il avoue donc honnêtement qu'il s'agit d'un cas de privilège, de patronage qu'il a ratifié d'une façon solennelle...

M. CHOQUETTE: Allez vous coucher! Quand on a fait tout ce que vous avez fait, on ne vient nous reprocher des insignifiances comme ça! Que le grief vienne du député de Bellechasse, c'est ça qui est scandalisant!

M. LOUBIER: M. le Président, si le député d'Outremont a des accusations à porter à l'endroit du député de Bellechasse, qu'il le fasse d'une façon aussi sereine et d'une façon aussi sérieuse que je l'ai fait ce matin, et à ce moment-là, nous pourrons étudier ces cas un à un, et le député d'Outremont se rendra compte que la séance ne sera pas longue.

M. LE PRESIDENT: Bon, je considère l'incident clos.

Est-ce que la motion est adoptée? Celle d'aller en comité...

M. LAPORTE: Ce n'est pas une motion, c'est un grief.

M. BOURASSA: Il parle de la motion proposant d'aller en comité...

M. LE PRESIDENT: La motion proposant d'aller en comité des subsides.

M. LAPORTE: Ah, bon, d'accord! Le grief a été manifestement jugé futile.

Comité des subsides

M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président,...

M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre, messieurs! A l'ordre!

M. LAPORTE: ... est-ce que vous pourriez entendre les présidents des commissions parlementaires qui ont terminé leur travail?

M. LE PRESIDENT (Hardy): Affaires culturelles.

M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai l'honneur de faire part à la Chambre que la commission du ministère des Affaires culturelles a siégé et a adopté tous les articles des crédits budgétaires pour l'année financière 70/71.

M. PAUL: M. le Président, après consultation avec le député de Chicoutimi, nous sommes prêts, nous de l'Opposition, à accepter ces crédits comme ayant été analysés ici.

M. LAPORTE: Je vais vous en proposer quelques-uns tout à l'heure qui n'ont pas encore été votés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A moins que... M. LAPORTE: A moins que non!

M. LE PRESIDENT (Hardy): Affaires intergouvernementales.

M. HARVEY (Chauveau): Le rapport... M. LAPORTE: Le rapport a été fait.

M. HARVEY (Chauveau): ... a été présenté, d'ailleurs, et nous avons à ce moment-là précisé que tous les crédits avaient été adoptés sans aucune restriction.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport au comité plénier de la Chambre que la commission de l'Industrie et du Commerce a siégé et a adopté tous les postes budgétaires à l'exception du poste budgétaire 1, des crédits budgétaires pour l'année financière 70/71.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport à la Chambre que la commission de la présidence du Conseil exécutif a siégé et a adopté tous les articles des crédits budgétaires pour l'année financière 70/71.

M. LAPORTE: M. le Président, j'ai l'hon-

neur de faire motion pour que les rapports faits par les présidents des commissions sur les Affaires culturelles, les Affaires intergouvernementales, la présidence du Conseil, les Institutions financières, Compagnies et Coopératives, l'Industrie et du Commerce, le Travail et la Main-d'Oeuvre, soient acceptés et que ces crédits soient ratifiés par la commission plénière.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté? M. PAUL: Adopté.

M. LAPORTE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour que les crédits budgétaires du ministère de la Famille et du Bien-Etre social, et immédiatement après, ceux du ministère de la Santé, soient étudiés par les commissions parlementaires concernées à la salle 81-A, à compter de deux heures.

Deuxièmement, M. le Président, je voudrais, contrairement au programme que nous avions annoncé vendredi, proposer que vous fassiez rapport, et qu'ensuite la Chambre ajourne son travail jusqu'à deux heures, car il y aura séance du conseil des ministres à midi trente.

M. CARDINAL: Pardon, alors les projets de loi 2 et 3 ne reviennent que cet après-midi?

M. LAPORTE: Oui, oui, nous commencerons immédiatement par les projets de loi 2 et 3 cet après-midi.

M. CARDINAL: Il est possible que j'aie quelque retard cet après-midi. Je pensais que cela viendrait ce matin.

On pourrait quand même, peut-être — Je ne sais pas, moi — prendre le projet de loi sur les tribunaux judiciaires, je pense, et les licences, etc. Cela ne prendra que cinq minutes.

M. LAPORTE: Alors, nous allons commen- cer, si le ministre et cette Chambre le permettent, par le bill 20...

M. CARDINAL: D'accord.

M. LAPORTE: ...suivi de la loi sur les explosifs et de la loi de M. Tetley. Ensuite, nous reviendrons à la troisième lecture des bills 2 et 3.

M. CARDINAL: Je remercie le leader. Je suis entièrement d'accord et je l'assure de ma collaboration.

M. LAPORTE: Les membres des autres oppositions sont d'accord également? Alors, M. le Président, si vous vouliez faire rapport à la Chambre.

M. HARDY (président du comité plénier): M. le Président, le comité a adopté des résolutions et demande la permission de siéger de nouveau.

M. LAVOIE (président): Quand siégera-t-11?

M. LAPORTE: Même séance.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire, pour le ministre des Finances, propose que les résolutions soient maintenant lues et agréées. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LAPORTE: M. le Président, est-ce que vous pourriez suspendre nos travaux jusqu'à deux heures?

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Les travaux de la Chambre sont suspendus jusqu'à deux heures.

Reprise de la séance à 14 h 5

M. LE PRESIDENT; A l'ordre, messieurs!

Régimes de retraite

M. LAPORTE: Il semble que les représentants des trois oppositions, l'Opposition officielle et les deux autres, ont aimablement accepté de ne point faire de débat en deuxième lecture, sur les projets de loi no 23 et no 24, Loi modifiant le régime de retraite des enseignants et Loi modifiant le régime de retraite des fonctionnaires, pour que la motion de deuxième lecture soit adoptée et que l'on puisse immédiatement référer ces deux projets de loi à la commission parlementaire sur les Finances, qui siégerait illico à la Chambre 91-A. Le lieutenant-gouverneur, mis au courant du contenu de ces deux bills, en recommande la votation en cette Chambre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le ministre des Finances, la deuxième lecture de la Loi modifiant le régime de retraite des enseignants. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le ministre des Finances, la deuxième lecture de la Loi modifiant le régime de retraite des fonctionnaires. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire propose, pour le ministre des Finances, que les bills no 23 et 24 soient soumis à la commission permanente des Finances. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LAPORTE: Je remercie cette Chambre et vous prie, M. le Président, d'appeler l'article 7.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture du projet de loi no 20, Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires et le code du travail.

L'honorable ministre de la Justice.

Tribunaux judiciaires et code du travail

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à la Chambre.

Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter vise à corriger certaines anomalies à la Loi des tribunaux judiciaires.

Tout d'abord, la Loi des tribunaux judiciaires prévoit, dans sa rédaction actuelle, que les honorables juges de la cour Supérieure qui sont nommés dans, et pour le district de Trois-Rivières, et dans, et pour le district de Nicolet, district voisin du district de Trois-Rivières, ne sont pas tenus d'exercer leur juridiction comme juges de la cour Supérieure dans d'autres districts judiciaires que ceux de Trois-Rivières et de Nicolet.

La même situation prévaut pour les juges de la cour Supérieure qui ont été nommés pour le district de Saint-François, lesquels ne sont pas tenus d'exercer leur autorité comme juges de la cour Supérieure dans d'autres districts judiciaires que le district de Saint-François et le district voisin de Bedford.

Or, suivant les représentations que nous avons reçues de la part de l'honorable juge en chef de la cour Supérieure et de l'honorable juge en chef adjoint de la cour Supérieure, ces privilèges, qui ont été accordés aux honorables juges de Trois-Rivières et de Saint-François, sont un obstacle à la bonne administration de la justice puisqu'il est manifeste que, parmi les 70 ou 75 juges de la cour Supérieure, ils sont les seuls à posséder, en vertu de la loi actuelle, ce privilège de s'isoler ou de se cantonner dans le district judiciaire où ils ont été nommés. Les honorables juges en chef voudraient — et je pense que cette demande est tout à fait justifiée — pouvoir requérir les honorables juges de Trois-Rivières et de Saint-François d'aller, à l'occasion, siéger dans d'autres districts judiciaires où l'on a besoin de renfort. L'on sait que la plupart des juges résident à Montréal et à Québec et il est nécessaire, pour ces juges, de partir de leur district pour aller dans les districts judiciaires les plus éloignés de la province.

Ceci ne veut pas dire qu'il s'agisse de priver les districts judiciaires de Trois-Rivières et de Saint-François des services constants des juges qui y résident, parce que les justiciables de ces districts judiciaires ont le droit eux aussi d'avoir une justice tout à fait expéditive.

Alors, M. le Président, je considère que les juges de ces districts judiciaires devraient être traités sur le même pied que les autres juges de la cour Supérieure du Québec et devraient ac-

cepter — je pense qu'ils le feront de bonne grace — d'aller dans d'autres districts judiciaires du Québec pour y administrer la justice où nous avons un besoin de juges pour que nos justiciables connaissent une Justice à la fois expéditive et efficace.

La deuxième partie de ce bill traite du paiement des frais de séjour des juges. Les juges sont appelés à voyager dans des districts judiciaires autres que ceux dans lesquels ils ont été nommés. Selon le texte actuel de la Loi des tribunaux judiciaires, les juges auraient droit à une allocation de $30 par jour, en plus de leurs frais de déplacement, de leurs frais de transport. Ce montant est loin d'être exagéré et excessif, excepté dans le cas suivant: S'il y a, dans un palais de justice rural, une chambre du juge, des appartements réservés au juge visiteur. Dans ce cas-là, il nous apparaît tout à fait normal que l'honorable juge, qui, étant appelé à aller administrer la justice en dehors du lieu de sa résidence, ne puisse recevoir à la fois le bénéfice des appartements qui sont mis à la disposition du juge visiteur et également recevoir l'allocation de $30 par jour, ce qui serait exagéré dans les circonstances.

Par conséquent, il s'agit de rétablir la situation et de ne pas consentir, aux honorables juges de la cour Supérieure, malgré tout le respect que nous avons pour eux, les avantages indus qui ne sont pas justifiables dans les circonstances. Puis-je ajouter un autre argument, qui me paraît tout à fait juste? Le fait d'arrêter, dans une loi, le montant exact des frais de voyage ou des allocations de séjour qui peuvent être accordés à un juge, me paraît une chose inopportune parce que nous connaissons un accroissement constant du coût de la vie.

Arrêter ou fixer une fois pour toutes, les frais de séjour ou allocations auxquels les juges peuvent avoir droit au cas où ils visitent des districts judiciaires autres que le leur, c'est, en somme, nous obliger à reviser constamment nos lois sur des points de détails, des points que je qualifierais presque d'insignifiants.

On peut très bien appliquer aux juges de la cour Supérieure les barèmes qui s'appliquent à nos sous-ministres lorsqu'ils vont en voyage pour le compte du gouvernement en dehors du lieu où siège le gouvernement.

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous avons l'intention de faire en sorte que les juges de la cour Supérieure, lorsqu'ils iront rendre justice dans des districts autres que le leur propre, recevront les mêmes allocations que celles qui sont données à nos sous-ministres. Nous tiendrons compte également de cet avantage que représente pour un juge visiteur le fait d'avoir sa chambre au palais de justice.

Je termine en disant que je me suis interrogé sur la question de savoir s'il était opportun de continuer cette coutume assez ancienne, d'avoir à la disposition du juge, des appartements dans le palais de justice. Cette coutume me paraissait désuète, elle me paraissait comporter des complications administratives pour un avantage mineur. Je me suis dit, également, qu'avec les hotels que nous avons aujourd'hui dans le Québec, les juges pourraient bien aller à l'hôtel, comme tout le monde, parce que les hôtels sont confortables et bien plus qu'autrefois. Si on pouvait comprendre qu'autrefois, il fallait donner une chambre au juge dans un palais de justice éloigné, aujourd'hui telles ne sont sûrement pas les conditions qui s'appliquent.

Mais, on m'a donné une réponse assez satisfaisante à cette question en me disant que dans certains endroits, il n'y a pas beaucoup d'hôtels convenables. Il arrive fréquemment que les plaideurs, les avocats, ou les parties se trouvent logés au même hôtel que le juge et que, si le juge devait aller à l'hôtel, cela créerait des complications pour l'administration de la justice, puisque cela imposerait en quelque sorte, aux juges le fait de rencontrer les justiciables et les avocats en dehors des séances de la cour. Ce fait introduirait de l'équivoque, au moins de l'ambiguïté dans l'administration de la justice.

Mais je dirai que personnellement, aussitôt que nous pourrons nous libérer de l'obligation de tenir des appartements à la disposition des juges dans nos palais de justice, je verrais très bien que sur le plan administratif, il faudrait y procéder au plus vite parce que cela libérerait les lieux, et puis on sait qu'il faut avoir une ménagère enfin, tout ce que cela comporte de complications inutiles.

Alors, M. le Président, ce projet de loi est donc présenté dans le but de moderniser en quelque sorte notre Loi des tribunaux judiciaires et la mettre réellement au point. Elle est faite dans le but de mettre tous les juges de la cour Supérieure sur un pied d'égalité.

Elle est faite pour permettre la revision, lorsque cela s'imposera, des allocations de séjour, parce que, si le coût de la vie devait augmenter, il est évident que, à ce moment-la, nous nous empresserions de donner à nos juges une allocation suffisante pour leur permettre de défrayer le coût réel de leur séjour dans d'autres districts judiciaires. Je tiens à dire, en terminant, que le projet reçoit l'approbation des honorables juges en chef de la cour Supérieure, com-

me je le disais tout à l'heure, et je m'assieds en attendant les observations de nos honorables collègues.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: La partie de cette loi qui traite des rémunérations ou des remboursements de dépenses à payer aux différents juges de nos tribunaux ne souffre pas de commentaire. Je crois qu'il s'agit d'une politique administrative de bon aloi et d'amendements qui s'imposaient, afin que nos juges puissent avoir au moins le même traitement que nos sous-ministres, lorsqu'ils sortent à l'extérieur.

Je trouve cependant étrange — et cela me frappe — la faiblesse de résistance du ministre de la Justice, à la suite des représentations qui lui furent faites tant par l'honorable juge en chef de la cour Supérieure, l'honorable juge Dorion, que par celles qui ont pu lui être faites par le juge en chef associé, le juge Challies. Je sais que ses prédécesseurs ont reçu les mêmes représentations. Mon prédécesseur immédiat, l'honorable chef de l'Opposition, avait eu ces représentations de même que certains ministres de la Justice sous l'administration Le sage.

Lorsqu'il s'agit d'amender une loi, c'est pour rendre plus efficace l'administration de la justice. Je ne me hasarderai pas à discuter de la situation qui puisse exister dans les districts de Sherbrooke et de Bedford. Je voudrais cependant saisir cette occasion pour protester contre cet amendement à la loi qui affecte grandement nos juges de la cour Supérieure dans le district des Trois-Rivières. Ce n'est pas pour rien que les législateurs de l'époque — dont l'honorable René Hamel, qui était ministre de la Justice et député de Saint-Maurice en même temps que procureur général — c'est aujourd'hui le juge Hamel — avaient abondé dans le même sens en faisant inscrire dans la loi cette exception en faveur du troisième juge de la cour supérieure qui était nommé, afin que le juge du district de Trois-Rivières demeure, comme il l'a toujours été, à l'entière disposition des justiciables.

Quand on sait, M. le Président, l'encombrement des rôles de la cour Supérieure à Trois-Rivières, en tenant compte de la longueur de certaines causes qui ont paralysé littéralement les activités judiciaires dans ce district, il faut lever son chapeau et respecter toute la compétence, l'esprit de travail, à des heures même indues, de nos juges de la cour Supérieure. Ils n'ont rien négligé pour mettre à jour les rôles de la cour Supérieure de ce district, tout en ne refusant jamais — c'est là, M. le Président, que c'est important — de se rendre aux invitations qui pouvaient leur être faites par le juge en chef de la cour Supérieure de Québec, l'honorable juge Dorion, d'aller siéger à l'extérieur de Trois-Rivières.

Il arrivait, cependant, que l'on s'échangeât du temps ou des semaines d'exercice. D'un autre côté — ce n'est un secret pour personne, non plus — lorsque certains juges venaient siéger ici à Québec — non pas que je veuille blâmer l'attitude de nos juges de la cour Supérieure; c'est naturel, c'est l'humain — il arrivait que, devant une cause contestée, ils se trouvaient une raison, assez souvent, pour ne pas entendre cette cause et que c'était un juge visiteur de Trois-Rivières qui épousait ces causes qui se prolongeaient assez souvent durant deux ou trois semaines d'exercice.

Je crois, M. le Président, que cet amendement à la loi se serait imposé si, par hasard, l'administration de la justice avait été défaillante dans le district de Trois-Rivières ou si nos juges résidents, les honorables juges Marchand, Laroche et Crête, avaient refusé d'aller siéger à l'extérieur du district de Trois-Rivières. Je soumets respectueusement que ces trois juges ne se sont jamais défilés devant les invitations qui leur furent faites par le juge en chef de la cour Supérieure de Québec, l'honorable juge Dorion, d'aller siéger là où leurs compétences pouvaient être utilisées ou leurs services requis.

Au lieu d'amender la loi dans le sens que l'amende ce projet de loi, on aurait dû en profiter pour créer de nouveaux districts judiciaires avec un certain nombre de juges attachés à des districts réunis, comme, par exemple, Saint-Maurice, Nicolet, Trois-Rivières, Arthabaska, et peut-être même Richelieu, et de là assigner un certain nombre de juges qui auraient fait la rotation dans ce grand district ou dans ce collège de districts judiciaires. Ceci aurait permis une efficacité administrative encore plus grande que celle que nous avons jusqu'ici connue. Pourquoi s'arrêter à faire disparaître, dans le but d'améliorer, ce qui n'améliorera aucunement, au contraire. Nous allons créer, encore probablement, un déséquilibre dans le district judiciaire de Trois-Rivières, déséquilibre qu'on a pu faire disparaître grâce à l'esprit de travail, comme je le disais tout à l'heure, grâce à la coopération des avocats locaux et de l'extérieur qui n'ont jamais hésité un seul instant à siéger jusqu'à des heures indues pout tâcher de débarrasser ou de déblayer les rôles de la cour Supérieure.

Qu'apportera cet amendement? Il privera sû-

rement, d'abord, le district judiciaire de Trois-Rivières d'une facilité de justice qu'il avait connue jusqu'ici. Je souhaite sincèrement que cette disponibilité aux voyages, cette restriction que l'on a inscrite dans la loi, à l'article 27, ne créera pas un statut tout à fait extraordinaire qui aurait pour effet de congestionner encore davantage le rôle de la cour Supérieure pour ce district.

Il peut arriver, M. le Président, que, là où il y a réellement des rôles bien encombrés, deux juges de la cour Supérieure soient invités à aller siéger en dehors du district de Trois-Rivières, ce qui sera au détriment des justiciables du district de Trois-Rivières. Et il ne faudrait pas que cette liberté que l'on donne, et qui satisfera aux désirs depuis longtemps rêvés par les honorables juges Challies et Dorion, ait pour effet de paralyser l'administration de la justice dans le district de Trois-Rivières, quand on sait que c'est un gros district judiciaire, pour essayer de déblayer ou de libérer les rôles d'autres districts judiciaires.

Je dis donc, M. le Président, que cet amendement à la loi ne s'imposait pas.

Si on voulait réellement innover, rendre plus efficace, plus expéditive, la justice devant nos tribunaux de juridiction supérieure, le ministre aurait eu avantage à aller plus loin dans cette politique que nous avions l'intention d'établir au ministère, celle de créer des collèges de districts judiciaires pour que la justice soit plus itinérante qu'elle ne l'est actuellement.

Il arrive assez souvent que nos juges venant de l'extérieur, parce qu'ils ont déjà à entendre des causes commencées dans un autre district ou pour toutes autres raisons, soient obligés de raccourcir énormément la durée normale de session de la Cour supérieure. Et l'expérience en est vécue dans le district judiciaire spécialement de Joliette, dans le district judiciaire de Saint-Jérôme, dans le district judiciaire de Richelieu, où l'on voit, à maintes reprises, des sessions non complétées parce que les juges itinérants, dans ces districts, ont accepté de présider ou de juger des causes dans des districts, surtout dans les districts importants comme ceux de Montréal et de Québec.

Cependant, il ne faut pas non plus que la justice soit sédentaire. Et devant l'ensemble des mesures qu'apporte ce projet de loi, je crois que nous devons en voter le principe, tout en regrettant cependant amèrement cette réforme qui est apportée par le premier principe du bill et que l'on retrouve à l'article 1. Je n'ai pas l'intention de discuter l'article 1, mais je me demande si c'est là le meilleur moyen d'expédier l'administration de la justi- ce. Personnellement, je connais très bien, puisqu'il s'agit de mon district judiciaire, les juges de la cour Supérieure de Trois-Rivières, et je sais, après avoir ensuite administré le ministère de la Justice, qu'ils ont toujours été disposés 1 coopérer avec leurs collègues de la cour Supérieure, et je me demande si, sous le couvert d'une efficacité administrative, on ne va pas satisfaire les ambitions personnelles de quelques-uns.

Je soumets donc que cette loi n'apportera absolument rien de nouveau dans l'administration de la justice, dans l'ensemble du Québec. Elle ne fait pas beaucoup plus que statuer sur l'administration de la justice dans les frais de déplacement, de voyage, et ce n'est certainement pas avec une mesure comme celle-là que le ministre de la Justice pourra se vanter d'avoir apporté des réformes en profondeur au sein de son ministère. Le connaissant comme un homme résistant, je m'explique mal là candeur avec laquelle il est tombé aussi facilement devant de pressantes invitations, qui n'étaient pas neuves au ministère de la Justice puisqu'elles m'ont été faites, qu'elles ont été faites à l'honorable chef de l'Opposition alors qu'il était ministre de la Justice, et à d'autres prédécesseurs. Et avant d'accepter une telle mesure, je crois que l'honorable ministre de la Justice aurait dû consulter le Barreau, les procureurs, les avocats et nos confrères des districts concernés afin de connaître leur opinion.

Il aurait dû également consulter les juges affectés par cette mesure, qui n'en savaient rien jusqu'à il y a quelques jours.

Il y a peut-être eu dans cette loi un manque de communication qui, je l'espère, n'aura pas pour effet d'élever des chapelles ou de provoquer des conflits de caractère au détriment des justiciables du Québec.

Je dis donc, M. le Président, que c'est une loi qui en fait n'apporte rien, et comme ce n'est pas une loi qui cause du mal, nous allons voter pour. Elle ne cause pas de mal parce que je sais que nos juges de la cour Supérieure — et je parle pour ceux du district de Trois-Rivières — redoubleront d'efforts afin de maintenir un délai de quatre mois environ seulement — alors que les sessions de la cour Supérieure de Trois-Rivières ont déjà eu jusqu'à 36 mois de retard — ou de six mois au maximum entre le jour de l'inscription et le jour de l'audition de la cause, tout en tenant compte que les juges vont siéger continuellement à Trois-Rivières et à Nicolet, et du fait qu'il y a deux sessions d'assises criminelles qui parfois se prolongent durant quelques semaines. Je sais que nos juges, fiers du résultat — avec raison, d'ailleurs — de leur tra-

vail et de la coopération des avocats auront à coeur de maintenir une justice aussi expéditive que celle que l'on connaît aujourd'hui dans le district de Trois-Rivières.

Je souhaite sincèrement que cette mesure ne viendra pas créer une situation qui soit au préjudice de la bonne administration dans le district judiciaire de Trois-Rivières sous prétexte qu'on va l'amender ailleurs.

Pour essayer de corriger une situation, on en détériore une excellente qui existe ailleurs.

Je soumets donc que cette loi n'aurait pas dû être présentée et que le ministre de la Justice sera le premier, à la suite des représentations qui lui seront faites, à présenter un autre projet de loi dans le sens d'une réforme en profondeur de l'administration de la justice au Québec. C'est ainsi que la population pourra alors, et non pas par cette loi, retirer profit de l'efficacité administrative du ministre actuel de la Justice.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. SAMSON: M. le Président, mes remarques sur ce projet de loi no 20 seront très brèves. D'abord, nous sommes d'accord en principe avec ce bill à l'effet que les juges du district de Trois-Rivières et de Saint-François de Bedford pourront, sur demande, aller siéger dans d'autres districts judiciaires.

Il est bien évident qu'on ne nous propose pas ici une réforme en profondeur de l'administration de la justice, ce que nous aimerions voir dans les mois ou peut-être les années qui vont suivre. Pour le moment, nous sommes d'accord là-dessus. Même plus, nous aimerions, dans le cadre d'une réforme en profondeur de la justice, voir un jour les honorables juges siéger plus souvent à l'extérieur de leur district.

Les raisons qui nous font penser en ce sens sont que nous concevons qu'il est parfois difficile pour certains juges de siéger uniquement dans leur district judiciaire, considérant les nombreuses causes et surtout certaines causes difficiles.

Quand un juge aura l'occasion d'être à l'extérieur de son propre district, nous croyons qu'il lui sera plus facile d'administrer, plus facile de porter des jugements dans certains cas.

Evidemment, cela est fait en vue d'apporter au Québec une meilleure administration de la Justice et en vue de donner une meilleure chance aux juges qui doivent siéger à l'extérieur. Pour toutes ces raisons, nous sommes d'accord avec ce principe qui nous est amené aujourd'hui. Nous sommes aussi d'accord avec l'article 2 qui prévoit que les dépenses doivent être payées pour les voyages et ceci, suivant les dispositions qui s'appliqueront dans les cas concernés.

Nous aimerions souligner que non seulement nous sommes d'accord avec le bill présent, mais que, si nous avions, un jour, la possibilité de voir les juges siéger dans toute la province de Québec — par un système, qui serait étudié à l'avance, évidemment, de rotation quelconque qui permettrait à certains juges de siéger dans plusieurs districts au lieu d'être toujours attachés au même district — nous serions heureux de voir une réforme en ce sens. Evidemment, en deuxième lecture, nous voterons pour ce bill, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.

M. Robert Burns

M. BURNS: M. le Président, nous serons également en faveur du principe de ce bill. Comme les deux autres partis d'opposition, j'aimerais bien souligner que nous ne croyons pas que ce sont de petites réformes comme celle-là, qui vont nous donner une administration de la justice vraiment améliorée. Nous souhaitons que, dans les prochains mois, cette Chambre se penche sur le problème de l'administration de la justice et, en particulier, sur les problèmes de retards dans l'administration de la justice.

A ce stade-ci, je comprends que le gouvernement veut régler un problème de caractère particulier. Nous serons d'accord avec le principe. Si les autres partis d'opposition sont d'accord, dans le but d'accélérer les travaux de la Chambre, nous serions d'accord aussi pour passer toutes les étapes le plus rapidement possible.

M. Jérôme Choquette

M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne voudrais pas allonger inutilement le débat, vu l'accord qui a été donné par tous les partis présents à la Chambre, mais l'honorable député de Rouyn-Noranda, sans être avocat, a quand même soulevé, à mon sens, un argument très fort en faveur du principe de l'abolition des restrictions qui s'attachent aux districts de Trois-Rivières et de Sherbrooke.

Pour la bonne administration de la justice, il est impérieux que les juges ne soient pas

cantonnés à un seul district Judiciaire, avec un seul Barreau. A ce moment-là, il se crée, en quelque sorte, une mauvaise atmosphère, et des déformations. C'est pourquoi il est utile, sur le plan de l'administration de la justice, que les juges se déplacent.

Je dirai au député de Maskinongé — il pourra toujours le répéter aux juges de Trois-Rivières, desquels il est assez proche, étant député de Maskinongé — que si nous voulons les envoyer à l'extérieur de leur district, c'est parce que nous avons confiance en leurs qualités de juristes. Nous ne voulons pas qu'ils limitent leurs talents au seul district de Trois-Rivières. C'est dans cet esprit-là que le projet est présenté. Ce n'est pas pour diminuer la qualité de l'administration de la justice à Trois-Rivières ou dans le district de Sherbrooke; c'est au contraire pour amener ce va-et-vient entre les différents districts judiciaires, ce qui fera qu'à un moment donné le niveau de l'administration de la justice s'élèvera dans toute la province de Québec.

Je termine en remerciant les honorables députés qui ont pris la parole. Ils ont raison de souligner la nécessité de prévoir des mesures plus profondes que celle-ci pour augmenter le niveau de notre justice au Québec. C'est ce à quoi nous allons nous employer. Evidemment, pendant la courte session actuelle, il nous est impossible de faire plus que d'apporter une loi comme celle-ci pour corriger quelques anomalies.

M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LAPORTE: En comité?

M. BERTRAND: En comité.

M. LAPORTE: En comité, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier

M. HARDY (Président du comité plénier): Article 1.

M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas voulu ajouter aux remarques de mon collègue, le député de Maskinongé, quant à l'article 1.

J'imagine un peu la première visite que le ministre de la Justice a reçue à son bureau. Il a reçu le juge en chef, M. Dorion; il a reçu, également, M. Challies. Dès la première entrevue, ces deux nobles gentilshommes, magistrats de haut qualibre, en s'adressant au ministre de la Justice à l'époque — et cela a dû se répéter auparavant — demandaient d'abolir cette restriction qui existe non seulement pour le district de Saint-François — que l'on examine cela au point de vue territorial et au point de vue de la population — mais pour le district de Bedford aussi, disant que les juges nommés dans ces districts doivent d'abord — que l'on note bien d'abord — s'occuper des affaires judiciaires desdits districts et, deuxièmement, répondre aux demandes du juge en chef pour aller siéger en dehors.

Donc, dans mon district — et le connaissant assez bien — jamais, de temps immémorial, on a eu de problème avec l'administration de la justice. La justice a été bien rendue, les causes sont entendues d'une manière accélérée. Tout va bien. Mais, question de fierté, de prestige, messieurs les juges en chef ont toujours été chatouilleux, parce qu'on avait, d'une certaine manière, régionalisé l'administration de la justice. Or, la meilleure manière de bien administrer la justice, c'est d'en régionaliser son administration.

Si on n'avait qu'un juge dans le district, très bien, l'anomalie que notait tantôt le député de Rouyn-Noranda existerait. Les justiciables n'aiment pas à comparaître et les avocats à plaider toujours devant le même juge, mais on n'a pas le problème. Nous avions quatre juges. Il y avait une rotation. Si vous plaidez toujours devant le même juge, il peut prendre en grippe un avocat; l'avocat peut, dans ses relations avec le juge, a certains moments, avoir fait des remarques qui ont pu le blesser. Il devient parfois délicat de plaider toujours devant le même juge. Mais pas de problème, quatre Juges.

Donc, on adopte un projet de loi sur la question du principe d'une justice améliorée, administrativement plus rapide; personne ne s'y oppose. Mais, est-ce bien de faire sauter cette réserve qui existait dans la loi? Pas pour des petits districts, le district de Saint-François comprend plusieurs comtés; le district de Bedford comprend trois comtés, c'est le mien. Alors, chez nous, je pourrais reprendre quasi mot à mot les remarques de mon collègue, le député de Maskinongé. Administration de la justice bonne, administration de la justice accélérée,

administration de la justice à la satisfaction de l'ensemble de là population.

Qu'est-ce qu'on améliore par le projet de loi? Je vous le demande bien. Tout simplement que, lors de là première entrevue de tout nouveau ministre de la Justice avec les juges en chef, la même demande est formulée. On est chatouilleux de son autorité, une autorité qui n'a jamais été mise en question.

Dans les circonstances, M. le Président, aucun doute que j'approuve les remarques du député de Maskinongé, à l'effet que le député d'Outremont a été facilement influençable. C'est probablement le juge Challies, quant à lui, qui le lui a demandé. Il a répondu oui, habitant la ville; ce n'est pas un défaut que d'habiter la ville, au contraire. Mais, les gens du milieu, ayant pratiqué activement comme je l'ai fait, connaissant les problèmes du milieu, sont unanimes à reconnaître que le système que nous avions est meilleur, à plusieurs points de vue. Je note ici l'Association des avocats de province qui a toujours appuyé cette réserve. Pourquoi? Pour permettre une décentralisation des nominations de juges. On a vécu à une époque où seuls les avocats des grandes villes pouvaient être nommés juges.

Seuls ils avaient la science consommée. Seuls ils étaient dignes de rendre la justice. A l'époque, on l'appelait le Barreau rural, cela avait un sens bucolique, cela nous rappelait Virgile, on appelle cela aujourd'hui l'Association des avocats de province, et les avocats de province demandent la régionalisation de l'administration de la justice. Pourquoi? D'abord, pour une meilleure administration de la justice, une justice davantage décentralisée, plus accessible au peuple, plus rapide.

Les avocats ont en vue également, et c'est normal, que les nominations de juges ne soient pas faites seulement des avocats de grandes villes. Il y a d'excellents avocats dans les campagnes et ce n'est pas souffrir d'un complexe d'infériorité, d'aucune manière, que de soulever de tels problèmes. Cela a permis, dans notre district, à des avocats de Rouville, de Sherbrooke, de Granby et d'ailleurs, de monter sur le banc.

Le député d'Outremont n'est pas sensibilisé à tous ces problèmes, c'est normal. Mais qu'il veuille écouter la voix de ceux qui les connaissent, qui les ont vécus. Je me rappelle qu'à ma première entrevue — lui, il a succombé à sa première entrevue avec le juge en chef, moi, je n'ai pas succombé — j'ai regardé le juge en riant et je lui ai dit; Juge, est-ce que ça va améliorer la situation de la justice? Il m'a dit: Well, we think. J'ai dit: Chez nous, la justice est rapide, c'est trois ou quatre mois, alors qu'autrefois, avant que ça n'existe, ça prenait des années. C'est un peu comme à la cour Supérieure de Montréal où les causes prennent un an, deux ans, trois ans avant d'être entendues. C'est cette règle que l'on voudrait étendre dans nos districts. Je dis au député de Rouyn-Noranda qu'on aurait pu en parler tous les deux avant. Il aurait fait un autre discours que celui qu'il a prononcé sur l'article 1.

Nous ne nous opposons pas au principe, au contraire, d'une réforme de notre système judiciaire. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans les détails. J'ai déjà parlé de la création de tribunaux familiaux, de la reprise de notre juridiction, même dans le domaine des cours Supérieures. Tout le domaine de l'administration de la justice devrait relever du gouvernement du Québec. La cour Supérieure, c'est une anomalie constitutionnelle. N'entrant pas dans ces détails et dans ces réformes en profondeur, le ministre de la Justice, probablement de bonne foi, a cru corriger ou trouver une solution à un problème, problème qui n'existe pas chez nous où l'autorité du juge en chef n'a jamais éternise en doute, où les juges n'ont jamais refusé d'aller siéger ailleurs. J'ai à l'esprit, entre autres cas, celui du juge Veilleux, des districts de Saint-François et de Bedford, qui est allé, à plusieurs reprises, siéger à Montréal. Ils n'ont jamais refusé, pas plus qu'auparavant le juge Desmarais, notre ancien collègue, le juge Fortin et le juge Cliche, qui malheureusement est décédé, le juge Fortin, l'ancien ministre du Travail. Il n'on jamais refusé d'aller siéger dans d'autres districts pour permettre aux justiciables des autres districts de faire entendre leur cause beaucoup plus rapidement.

Je regrette que le ministre ait posé cet acte que je qualifie véritablement de faiblesse et de condamnation des attitudes de ses prédécesseurs qui, tous sans exception, avaient dit au juge en chef: quand nous ferons des réformes en profondeur de toute l'administration de la justice, quand nous établirons la justice sur une base beaucoup plus régionalisée et décentralisée, nous pourrons y voir. Pour le moment, je n'ai pas de problème dans l'administration de la justice des districts de Saint-François et de Bedford, je n'ai pas de problème dans le district de Trois-Rivières; quand on n'a pas de problème, on ne s'en crée pas.

Je regrette que le député d'Outremont, ministre de la Justice, ait aussi facilement succombé à la tentation de plaire aux honorables juges en chef.

M. CHOQUETTE: M. le Président, les deux

plus ardents avocats du maintien de ces chasses gardées ou, enfin, de ces districts judiciaires isolés du reste de l'administration de la justice à l'échelle provinciale sont, évidemment, l'honorable député de Missisquoi, chef de l'Opposition, et l'honorable député de Maskinongé.

M. BERTRAND: M. le Président, je m'élève contre l'utilisation de cette expression « chasses gardées ». S'il y en a un qui sait combien, dans les districts de Bedford et de Saint-François, l'accueil est ouvert et tous les avocats sont bien reçus, c'est le député d'Outremont avec qui j'ai eu l'honneur déjà de croiser le fer. Cela, il le sait.

M. CHOQUETTE; Oui.

M. BERTRAND: Il n'y a pas d'enclos autour de nos districts.

M. CHOQUETTE: Enfin, l'honorable chef de l'Opposition comprend très bien ce que je veux dire. Maintenant, pour pousser la logique du chef de l'Opposition et du député de Maskinongé jusqu'à ses conclusions, pourquoi, alors, ne pas réclamer des districts judiciaires fermés pour Hull et pour l'Abitibi? Pourquoi chaque juge qui est nommé dans une région du Québec n'exigerait-il pas que j'amende la Loi des tribunaux judiciaires en sens inverse pour justement qu'il puisse se contenter de rester dans son district judiciaire? Cela démontre jusqu'à quel point cette disposition de la Loi des tribunaux judiciaires, que je demande d'abolir, est absurde. C'est un relent du passé, un reste d'esprit de clocher qui habite encore le chef de l'Opposition et le député de Maskinongé, malgré toute l'estime que j'ai personnellement pour eux.

Alors, je pense qu'ils ont des vues plus larges que ça, qu'ils vont surmonter, en somme, leur difficulté de s'extraire de leurs milieux respectifs et qu'ils vont voir que, sur le plan de l'administration de la justice, en général — je parle pour le Québec — cette mesure est intéressante. Elle va amener des progrès considérables dans l'administration de la justice, même dans les districts des honorables députés qui ont parlé. En effet, le fait d'abolir ces restrictions dans la Loi des tribunaux judiciaires nous permettra d'envoyer dans leurs districts judiciaires respectifs, où ils exercent naturellement leur profession, des juges de l'extérieur, ce qui contribuera à l'accélération de l'administration de la justice dans leurs districts judiciaires et qui amènera un sain échange entre les différents districts judiciaires.

Ceci étant dit, je voudrais dire jusqu'à quel point j'ai de l'estime personnellement pour les juges de Trois-Rivières et pour ceux de Sherbrooke, car j'ai eu l'occasion de plaider de nombreuses causes devant eux. Je voudrais, en somme, que les justiciables des autres districts judiciaires du Québec puissent également profiter de leurs connaissances juridiques.

M. PAUL: M. le Président, il est bien évident que notre collègue de la Justice ne connaît absolument rien de la mentalité des districts ruraux. Il se fait l'excellent avocat d'une mauvaise cause. Ce n'est pas la première fois que nous le voyons plaider une cause aussi vide que celle qu'il a plaidée aujourd'hui. Lorsqu'il est venu, assez souvent, dans le district judiciaire des Trois-Rivières, il a enrichi sa personnalité et ses connaissances juridiques. Je suis sûr que sa fréquentation de notre district judiciaire a grandement contribué à sa formation juridique et lui a permis, finalement, de dépasser ses collègues du cabinet ou de son parti pour occuper les hautes fonctions qu'il occupe aujourd'hui.

M. le Président, ce n'est pas par esprit de clocher que nous nous élevons contre cette disposition de l'article 1 du projet de loi. Au contraire, c'est parce qu'il n'apporte rien de constructif. Il n'y a absolument rien qui va être amélioré dans l'administration de la justice. Nous avions, au moins, quatre districts judiciaires où l'efficacité administrative était reconnue; Trois-Rivières, Bedford, Nicolet et Sherbrooke. Nous prenons le risque de les plonger dans le même dédale de délais qui existe dans les autres districts judiciaires.

Je dis donc, M. le Président, que c'est un affront à faire aux honorables juges des cours Supérieures des susdits districts.

Ce n'est que par condescendance, par imprudence. Je sais, M. le Président, que le ministre de la Justice regrette déjà d'avoir parrainé un tel bill. Il se rend compte que c'est par imprudence qu'il a accepté aussi facilement le mirage de progrès que lui montraient les honorables juges de la cour Supérieure pour les districts de Québec et de Trois-Rivières.

Nous disons donc, M. le Président, que ce n'est pas par esprit de chasse gardée, au contraire, ce n'est pas non plus par esprit de clocher, c'est par ce souci que nous avons de respecter la mentalité et la connaissance du milieu que nous avons, nous, avocats du Barreau rural, des districts ruraux... L'Association des avocats de province est en mesure de juger la meilleure façon d'administrer la justice dans ces districts. Ce n'est pas pour rien que l'honorable chef de

l'Opposition référait tout à l'heure à cette attitude constante, renouvelée annuellement par une résolution adoptée année après année par l'Association des avocats de province, d'étendre — comme je le disais tout à l'heure, non pas dans un seul district Judiciaire, mais dans des districts judiciaires régionalisés — une compétence exclusive à un certain nombre de juges qui pourraient voyager dans ces districts judiciaires. Ainsi, nous assisterions à une véritable réforme de la justice et non pas à une « réformette » inutile comme celle qui nous est présentée par l'article 1 du projet de loi.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: Oui, M. le Président, juste un petit mot avant que ce soit adopté. On a fait mention, dans des interventions, de mon intervention, justement. Je remarque qu'on a souligné que je ne suis pas avocat, ce qui est vrai. Mais, d'un autre côté, je pense que, malgré tout, c'est mon devoir de dire ce que je pense et ce que la population de mon comté pense.

M. le Président, on a pris à témoin, dans les interventions, les avocats satisfaits de certains districts dont nous avons à parler aujourd'hui. Nous, de notre côté, nous ne prendrons pas les avocats à témoins. C'est beaucoup plus la population qui nous intéresse que la satisfaction de certains avocats.

On a mentionné également et on a même souligné très fortement le fait que les juges de ces districts n'ont jamais refusé d'aller siéger à l'extérieur, qu'ils ont toujours offert leur collaboration, etc, etc. Alors, s'ils n'ont jamais refusé de le faire, s'ils ont toujours offert leur collaboration, pourquoi ne seraient-ils pas d'accord avec le bill que nous adoptons aujourd'hui? Justement, nous mettons dans une loi aujourd'hui ce qu'en principe ils sont prêts à faire. Je suis certain que ces gens n'auront pas d'objection à ce faire, puisque dans le passé, suivant les remarques que nous venons d'entendre, ils ont toujours été prêts à donner leur collaboration. Ils pourront, en vertu de la loi que nous adoptons, continuer à donner et à offrir leur collaboration.

M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas l'intention de revenir sur ce que le député de Rouyn-Noranda a dit. Il veut tenter de laisser croire que nous sommes ici pour défendre les avocats. C'est bien mal me connaître.

Cela fait 22 ans que les gens m'élisent, chez nous, et ils ne m'ont jamais considéré comme un avocat là-bas. J'ai parlé des intérêts des justiciables. Quand j'ai dit tantôt que dans une région donnée le premier devoir des juges qui y vivent est d'abord de s'occuper, dans leur district, dans leur région, dans le territoire pour lequel ils sont nommés, de l'administration de la justice, cela est bon. Il n'a qu'à interroger les justiciables qui ont des causes qui traînent devant les tribunaux, à Montréal, pendant trois ans. Ce n'est pas l'avocat qui en subit les conséquences, c'est le justiciable, le contribuable; c'est le peuple.

Dans nos districts, jamais un juge n'a refusé d'aller en dehors. C'est clair. C'est que, s'occupant de l'administration de la justice dans nos districts, il coopérait et obtempérait aux directives du juge en chef à l'effet d'aller aider dans les districts adjacents. Ce n'est pas du tout étroitesse d'esprit, district clos ou district fermé, c'est ce que l'on applique dans tous les domaines, la régionalisation administrative.

M. CHOQUETTE: Pas seulement dans les...

M. BERTRAND: On l'applique dans tous les domaines de l'activité.

Autant que possible, l'organisation administrative gouvernementale suit les régions économiques. Dans le domaine judiciaire, rien ne sera mieux que de faire correspondre aux régions économiques du Québec la redistribution des districts judiciaires. C'est pour ça que mon collègue avait parfaitement raison. Le ministre veut se gonfler en disant que l'article 1 permettra une meilleure administration de la justice. Ce n'est pas une réforme, vous aviez raison, c'est une « réformette », qui est tout simplement un cataplasme pour faire plaisir à deux juges en chef. C'est tout. C'est ça, le fond du problème.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?

M. PAUL: Sur division.

M. HARDY (président du comité plénier): Article 2, adopté? Adopté. Article 3? Adopté. Article 4? Adopté.

M. le Président, le comité a adopté le bill 20, sans amendement.

3e lecture

M. BERTRAND: Nous n'avons pas d'objection pour la troisième lecture, M. le Président.

M. LAVOIE (président): Cette motion de troisième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. BERTRAND: Deuxième, troisième, comité.

M. LE PRESIDENT: La deuxième est adoptée. La troisième? Adopté.

M. BERTRAND: D'accord. La Loi concernant les explosifs. Le bill 35.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture du projet de loi no 35, Loi concernant les explosifs.

L'honorable ministre de la Justice.

Explosifs

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

M. le Président, ayant été nommé récemment ministre de la Justice, j'aurais préféré que l'une des premières lois que j'ai l'honneur d'apporter à cette Chambre soit une loi qui ouvre des perspectives de progrès social, qui nous permette d'envisager le règlement d'un certain nombre de questions qui sont actuellement primordiales pour notre société. Malheureusement, j'ai le devoir de présenter les projets de loi que les circonstances me forcent à présenter. Je suis donc dans la pénible obligation de présenter un projet de loi qui a pour but d'assurer un contrôle plus serré et plus efficace de la possession des explosifs dans notre province. Ce sont les circonstances qui l'ont rendu nécessaire, et on les connaît.

Je n'ai pas besoin de m'étendre très longtemps sur la situation qui prévaut, principalement à Montréal. On connaît la recrudescence des explosions qui ont eu lieu dans la métropole. Nous avons connu, la fin de semaine dernière encore, des incidents au cours desquels, heureusement, il n'y a pas eu de mort, pas de blessure et pas de dommage à la propriété, mais où les forces policières ont dû déployer tous leurs talents pour déceler l'existence de ces engins destructeurs et également pour désamorcer les appareils préparés par des personnes que je ne qualifierai pas actuellement.

En particulier, on sait que dans une des ruelles de la ville de Montréal, la ruelle des Fortifications, les officiers de police ont dû dé- samorcer un appareil qui comportait 150 livres de dynamite, et que c'est grâce au courage, entre autres, du sergent Côté que la population de la ville de Montréal et de ce secteur de la ville n'ont pas connu de véritable holocauste; s'il avait fallu que cette automobile Volkswagen, remplie de dynamite, explose, nous aurions eu un véritable désastre pour la population montréalaise.

Alors, en passant, même en présentant ce projet de loi qui est loin d'être conforme à ma propre attitude naturelle, même en présentant ce projet de loi qui n'est pas conforme à la mentalité du gouvernement actuel, je dois louer au passage le courage des policiers, et en particulier de ceux qui, comme le sergent Côté, et autrefois le lieutenant Plouffe, font ce travail, je ne dirai pas ingrat mais ce travail héroi'que pour notre population du Québec en désamorçant ces engins destructeurs.

Qu'il me soit permis, M. le Président, avant d'aborder l'étude du projet de loi proprement dit, de dire que cette violence, qui s'exprime par ces explosions dans notre métropole et peut-être dans d'autres centres de la province, ne règle absolument aucun de nos problèmes. Non seulement elle ne règle aucun de nos problèmes, mais elle est la négation de la solution de ces problèmes, parce qu'une période de violence comme celle que nous vivons actuellement et qui s'exprime par ces explosions ne peut, en somme, et lorsqu'on a assez d'expérience politique, je pense qu'on le sait, qu'apporter des raidissements de la part de tout le corps social, de la part de toutes les écoles de pensée, elle ne peut que créer un fossé entre les différentes classes de notre population. Elle ne peut qu'inciter le gouvernement à adopter des mesures de plus en plus répressives qui sont la négation du progrès, seule possibilité pour que nous sortions des impasses actuelles que connaît notre société.

C'est donc dire, M, le Président, jusqu'à quel point le travail de ces terroristes est négatif. C'est donc dire jusqu'à quel point leurs actions sont la négation de la solution des problèmes que nous avons à vivre dans le Québec.

Personnellement, je souhaite qu'avec l'aide de la population dans son ensemble, parce que je sais que nous l'avons, nous avons le soutien général de la population, nous, qui représentons l'ordre, nous, qui représentons, en somme, le bon ordre dans la société, avec le concours de la population, ces éléments très limités que représentent les terrosistes ne peuvent arriver à absolument rien contre le corps social, contre la démocratie, contre les principes du parlementarisme tels que nous les connaissons.

En somme, aucun mouvement révolutionnaire ne peut réussir, à moins d'avoir un appui substantiel dans la population. Je pense être en mesure de dire — et tous les députés en cette Chambre le confirmeront — que les révolutionnaires qui ont placé ces engins destructeurs n'ont aucun support généralisé dans la population actuellement, et c'est la raison pour laquelle toutes leurs tentatives, même si elles devaient être destructrices, n'ont aucune possibilité de succès à long terme.

J'ajouterai en terminant les observations générales que je voulais faire valoir, que, suivant nos études des personnalités en cause, de ceux qui agissent dans le sens du terrorisme à l'heure actuelle, il s'agit d'éléments idéologiques inspirés de l'étranger.

Ai-je besoin d'aller plus loin et de dire qu'il s'agit de rejetons du maoïsme, du castrisme ou du communisme international? Par conséquent, je suis en mesure d'affirmer que ces groupes fort limités n'ont aucun appui dans notre population, même si, entre nous, il y a des divergences de vues sur l'avenir constitutionnel de notre province. Je suis obligé de reconnaître que les vues sont partagées sur ce sujet-là. Ce ne sont pas, en somme, les partis présents dans cette Chambre, ce ne sont pas les principales écoles de pensée politique dans notre population qui sont responsables du terrorisme que nous connaissons actuellement.

La population du Québec a toute raison d'avoir confiance en son gouvernement, en ses institutions et elle a toute raison de nous donner un appui entier de ce côté-là, pour que nous agissions avec la plus grande fermeté possible, mais en respectant, évidemment, les principes démocratiques, les principes judiciaires, en respectant les lois que nous connaissons et qui, en somme, visent à la protection de la personne humaine, même si cette personne doit être coupable.

Dans ces limites-là, je pense que la population est avec nous pour que nous exercions une action énergique. Or, dans cette action énergique que nous avons en vue, il y a ce projet de loi de contrôle des explosifs. Sans faire un discours trop élaboré sur cette question, il y a, comme on le sait, des dispositions dans le code criminel qui visent l'utilisation ou la possession des explosifs. Il y a une législation fédérale qui s'appelle; Loi sur les explosifs. Cette loi fédérale vise plutôt à réglementer la fabrication, l'entreposage et la manutention des explosifs.

Il y a, finalement, des règlements qui ont été adoptés en vertu de la Loi des mines provinciale, ainsi que des règlements adoptés en vertu de la Loi des établissements industriels et commer- ciaux. Cette dernière loi est administrée par le ministre du Travail, tandis que la Loi des mines et les règlements qui en découlent sont administrés par le ministre des Richesses naturelles..

Or, les règlements adoptés en vertu de la Loi des établissements industriels et commerciaux et de la Loi des mines sont des règlements qui visent beaucoup plus la protection de l'ouvrier travaillant sur les chantiers de construction ou la protection de l'ouvrier travaillant dans les mines que, en somme, le contrôle des explosifs comme tels, que la réglementation de l'explosif pour autant qu'il s'agit là d'un instrument dangereux qu'on puisse se procurer légalement ou illégalement. Donc, nous n'avons pas, en somme, de législation qui réglemente la possession de l'explosif par tous les citoyens ou de toutes les corporations du Québec.

Il nous semble que, dans les conditions actuelles, il devient impératif de légiférer dans ce domaine-là pour que nous sachions entre les mains de qui les explosifs vont se trouver, d'une façon légale, et pour prévenir les vols et les disparitions d'explosifs. On sait qu'à la base du terrorisme il y a toujours eu des vols ou des disparitions inexpliquées d'explosifs. Nous sommes ici dans un secteur où il faudra s'assurer que les personnes qui ont le droit de se procurer des explosifs se les procureront avec un permis, qu'on leur livrera les quantités dont elles ont besoin, suivant les besoins de leur entreprise, et qu'après en avoir fait usage elles consigneront, chez des dépositaires ou chez leur fournisseur, le surplus ou qu'elles procéderont à la destruction de ces mêmes explosifs.

Il s'agit également de prendre les mesures nécessaires pour assurer une comptabilité des explosifs qui sont mis à la disposition du public, de façon que la personne qui a légalement des explosifs en sa possession soit astreinte à les surveiller.

Maintenant, M. le Président, parmi les dispositions qui se trouvent au projet de loi, il en existe une qui vise ceux qui ont déjà des explosifs en leur possession, ceux qui, en somme, ont acquis des explosifs légalement, mais qui, lorsque cette loi entrera en vigueur, devraient se procurer, dans un délai de 60 jours, un permis pour continuer à posséder légalement ces explosifs.

M. le Président, je termine mes observations sur la deuxième lecture de ce projet de loi en réitérant ce que je disais tout à l'heure. Il est malheureux que les circonstances nous obligent à adopter une loi comme celle-ci, mais nous ne reculerons pas devant notre devoir. Je considère, M. le Président, que, devant la situation que nous vivons au Québec, nous n'avons pas d'autre choix

que d'adopter une législation et une réglementation sévères quant à la possession des explosifs et ceci, pour le plus grand bien de toute la population du Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, loin de moi l'idée de soulever un débat autour de ce problème qui marque l'existence québécoise depuis quelques années. C'est étrange, M. le Président, comme au fur et à mesure qu'on vit avec les responsabilités, on en vient à avoir une continuité de pensée avec ceux qui nous ont prédécés dans l'administration de la Justice.

S'il y a un ministre de la Justice qui a été critiqué, qui a été battu en brèche de toute part et spécialement par les journalistes, qui ont voului lui prêter l'idée de vouloir implanter un Etat policier, c'est bien celui qui vous parle.

Lorsque j'ai assumé mes responsabilités, au mois de juillet 1969, nous connaissions une vague de terrorisme semblable à celle qui déferle aujourd'hui sur le Québec. J'ai, à ce moment-là, M. le Président, adopté une certaine mesure pour combattre l'activité de ceux qui n'ont pas d'autre mission que de renverser l'ordre établi par tous les moyens possibles. Lorsque je mentionnais à l'époque que les principaux agitateurs terroristes étaient des maoïstes, des léninistes, des communistes, on me traitait d'individu qui rêvait en couleur, qui était constamment en éveil et on disait que je faisais la chasse aux sorcières.

Je suis heureux de constater aujourd'hui que l'honorable ministre de la justice, même s'il n'y a pas très longtemps qu'il occupe ses fonctions, s'est déjà rendu compte que les principaux agitateurs, les terroristes les plus reconnus, reçoivent des directives de pays étrangers. C'est dommage que le droit international nous empêche ici, sur le territoire du Québec, avec certains mandats de perquisition, de visiter certaines maisons.

On aurait avantage à les visiter et quelquefois on y trouverait tout ce qui est nécessaire pour continuer cette propagande terroriste et même cette agitation terroriste que tous déplorent.

Lorsque j'ai assumé les responsabilités de ministre de la Justice, j'ai, à l'époque, soit plus précisément en date du 22 août 1969, annoncé un programme en dix points pour combattre le terrorisme. Entre autres, il y avait une mesure qui était la suivante: Réglementation nécessaire quant aux conditions requises pour faire le commerce de dynamite ou de détonateurs; un contrôle constant s'impose; un rapport quotidien devra être fait sur les fins, l'utilisation proposée de la dynamite et des détonateurs. J'ajoutais une note à l'effet que nous devions tenir compte de la juridiction du gouvernement fédéral en la matière.

Même si le ministre de la Justice qui a précédé celui qui est en fonction a été marqué par toutes sortes de caricatures, même s'il a reçu toutes sortes de menaces, il a toujours eu comme résultat pratique de mettre fin à l'activité des terroristes. On sait qu'au point de vue pratique, entre le 23 juillet 1969 et le 12 mai 1970, il n'y a eu qu'une bombe qui a explosé sur le territoire québécois: c'était en septembre lorsque la maison du maire Drapeau a été détruite. Pour être honnête, je dirai qu'il y a eu également deux « bombettes »: l'une au collège Loyola et l'autre à l'université McGill à peu près à l'époque où l'Assemblée nationale adoptait le bill 63.

Je vous fais grâce de tous les qualificatifs dont j'ai été le sujet. Ce qui importe, c'est qu'à l'époque, par les moyens qui avaient été pris et sans vouloir brimer la liberté de qui que ce soit, d'aucun citoyen québécois, nous avons obtenu certains résultats et je regrette qu'ils ne se soient continués depuis l'arrivée à la tête du ministère de la Justice de l'honorable député d'Outremont. Loin de moi l'idée de reprocher au ministre de la Justice une faiblesse de sa part. Absolument pas.

Sous le sceau de la confidence, j'ai cru bon, à l'occasion de la transmission des pouvoirs, soit le 13 mai 1970, de faire une révision de la politique générale du ministère de la Justice et, à ce moment, l'honorable ministre de la Justice et moi-même avions discuté du problème terrorisme au Québec. Je m'étais même permis de le prévenir d'une reprise des activités terroristes dans le Québec. Il est regrettable que nous soyons en face d'un problème qui, comme le disait si bien le ministre de la Justice, n'apporte aucune solution aux différents problèmes qu'on voudrait voir régler par la violence ou le terrorisme.

Sous prétexte, M. le Président, de soustraire notre économie aux puissances capitalistes étrangères, on est parvenu à éloigner ces mêmes capitaux qui pourraient stimuler l'économie dans la province.

Ce n'est pas en détruisant qu'on va bâtir le Québec, et ce n'est pas en démolissant, en faisant table rase de nos institutions passées que nous allons préparer la survie et l'épanouissement du Québec.

Il est malheureux que nous soyons aujourd'hui placés devant ce phénomène qui n'est pas exclusif au Québec. Il faut bien l'admettre. D'autres

provinces ont commencé à connaître l'activité terroriste. Mais on sait, M. le Président, que certaines directives nous venant de pays étrangers étaient à l'effet d'implanter chez nous, par tous les moyens possibles, cette révolution, sous prétexte que nous, Québécois, à majorité d'expression française, représentions, sur le continent nord-américain, le terrain le mieux préparé et le plus apte à adhérer à ces philosophies socialistes, révolutionnaires et communistes.

Comme tout le monde, je souhaite que le ministre de la Justice soit un peu plus respecté; d'ailleurs, je suis heureux qu'on le respecte plus, lui, qu'on n'a respecté son prédécesseur. Quand je dis respecté, je parle de ces média d'information. Il y en a qui sont honnêtes, chapeau bas! Mais il y en a d'autres qui sont beaucoup plus soucieux de susciter la curiosité et de monter en épingle tous les événements susceptibles de créer l'appétit et l'émoi dans la population du Québec, sous prétexte de mieux faire vendre un journal ou de mieux faire écouter la radio.

Je dis, M. le Président, que toutes les mesures ont été prises à l'époque, comme je suis sûr qu'elles sont encore prises aujourd'hui, pour tâcher d'enrayer ce fléau que nous connaissons malheureusement ou heureusement par soubresauts, par spasmes. Je sais quel travail accomplit cette escouade composée de membres de la Gendarmerie royale du Canada, de la police municipale de Montréal et de la Sûreté du Québec. Je sais de quel héroi'sme fait preuve surtout le sergent Côté, comme avec quel héroïsme son prédécesseur, le lieutenant Plouffe, avait maintes fois exposé, lui aussi, sa vie pour le désamorçage de ces bombes.

Je dis que nous devons collaborer avec l'autorité, même policière, et ce n'est pas être mouchard que de dénoncer celui qui projette ou qui met en place un mécanisme pour faire sauter un immeuble, une institution bancaire ou une institution commerciale.

Je dis que le ministre actuel n'a pas pour but de faire des citoyens québécois des mouchards, lorsqu'il fait appel à leur sens des responsabilités, lorsqu'il invite la population à dénoncer, même s'il faut y aller au moyen de primes. La prime de $50,000 dont a parlé le ministre de la Justice, peu de temps après son arrivée au pouvoir, n'était pas chose nouvelle, puisqu'elle avait été instaurée précédemment; elle était même de $62,500, dans le temps de son prédécesseur.

Je sais, M. le Président, que, de plus en plus, l'escouade de l'Intégrité du territoire a confiance dans le résultat final de son travail, et ce au grand soulagement de la population de Montréal et du reste du Québec, d'ailleurs.

Je plains le ministre de la Justice. Je disais même que le pire souhait que je pouvais faire à un ennemi, c'était de lui souhaiter d'occuper un jour le poste de ministre de la Justice, dans les heures troublées que nous connaissons. C'est pourquoi je ne ferai jamais de partisanerie politique avec ces problèmes qui sont beaucoup trop sérieux pour qu'ils prêtent flanc à une gloriole personnelle ou à une publicité qui n'apportera rien comme solution au problème.

M. le Président, je sais que le premier ministre, en fin de semaine, àValleyfield, adéclaré qu'une loi serait présentée, concernant les explosifs. C'est pourquoi nous sommes aujourd'hui en face de cette législation, dont le ministre de la Justice est le parrain. Je regrette, M. le Président, d'avoir à dire que cette loi n'apportera rien comme résultat pratique dans la lutte menée, actuellement, contre l'activité terroriste dans le territoire québécois. Pourquoi? Parce que nous disposons déjà de tout le mécanisme nécessaire pour obtenir le même résultat que celui que vise le ministre de la Justice. Ce n'est pas que cette loi ne soit pas bonne, mais elle n'était pas nécessaire. Elle n'était pas nécessaire, parce qu'en vertu de l'article 5 du chapitre 150 de la Loi des établissements industriels le lieutenant-gouverneur en conseil peut adopter les règlements qu'il faut, non seulement pour garantir et exiger la prudence dans la manipulation, dans la fabrication et dans le transport de la dynamite, mais également toutes mesures jugées nécessaires pour la sécurité publique.

Je dis, M. le Président, — n'en déplaise à mes honorables amis du Parti québécois — que nous avons déjà, dans les statuts revisés du Canada de 1952, une loi qu'est le chapitre 102, où à peu près toutes les activités couvertes par le présent projet de loi le sont également par cette législation fédérale.

Je dis, M. le Président, que, conformément à la déclaration que j'avais faite au mois d'août 1969 et par le biais du chapitre 150, établissements industriels, justement pour éviter ou une dualité de juridiction ou deux textes de loi qui ne seraient pas semblables, nous avions préféré agir par le biais du chapitre 150. C'est ce qui a fait qu'en date du 22 octobre 1969 un arrêté en conseil portant le numéro 3139 était adopté par le cabinet que présidait alors l'honorable chef de l'Opposition.

Il s'agit beaucoup plus d'une loi à caractère psychologique que d'une loi visant à accroître l'efficacité administrative. En vertu des règlements qui existent déjà par l'arrêté en conseil susdit, les membres de la Sûreté du Québec

étaient nommés inspecteurs adjoints, au sens de la Loi des établissements industriels, pour voir à ce que les règlements adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil soient observés.

Cette loi n'apporte rien de nouveau pour combattre l'activité terroriste sur le territoire du Québec. Cependant, elle peut permettre de voir la complexité administrative de la loi fédérale telle qu'elle existe. Nous pourrons intervenir plus rapidement contre ceux qui ne respecteront pas les règlements édictés en vertu de cette loi. Ce qui importe, c'est que nous puissions obtenir le résultat que tous les députés de cette Chambre souhaitent et que la très grande majorité de la population du Québec désire, c'est-à-dire de mettre fin au terrorisme sous quelque forme que ce soit. Ce qu'il y a de curieux, M. le Président, c'est que l'activité terroriste a repris et a coïncidé avec l'élargissement de certains individus renommés dont la marque de commerce a été, durant plusieurs années, l'activité terroriste.

Je souhaite que cette législation soit adoptée, mais il ne faudrait pas que l'honorable ministre de la Justice — et je suis sûr qu'il ne le fera pas; d'autres pourront le faire, mais pas lui — nous fasse des déclarations ronflantes à l'effet que le Québec est prêt à tout mettre en oeuvre pour stimuler l'économie de ses concitoyens.

J'espère que cette législation recevra l'appui de tous. Même si elle n'était pas strictement nécessaire, elle n'est pas inutile. En effet, elle rendra plus souple l'application de certains règlements et de certaines mesures, donnant à ceux qui auront à l'appliquer la possibilité d'agir d'une façon plus rapide. J'ai voulu, M. le Président, montrer quelque peu cet aspect de la législation proposée par l'honorable ministre de la Justice, parce que la population du Québec commence à en avoir assez de certaines déclarations pieuses, mais toujours sans efficacité, parce que non suivies d'une législation ou de mesures effectives. C'est beau de dire qu'on va présenter une loi pour contrôler les explosifs, pour peut-être trouver une excuse à l'impossibilité de mettre en application certains articles d'un programme électoral qui, jusqu'ici... D'ailleurs, nous aurons l'occasion d'y revenir avant la fin de cette session.

J'ai voulu faire une étude très rapide du principe énoncé dans cette loi, afin que l'on ne continue pas — et là je ne parle pas pour le ministre de la Justice — à battre de grands principes, qui jusqu'ici ont été sans résultat. J'espère, M. le Président, que cette lutte d'action, de coopération, menée par le triumvirat dont j'ai plus tôt mentionné les noms, continuera; j'espère que le travail se continuera également au niveau des corps de police municipaux.

J'ai, à l'époque, établi, pour la première fois, un travail de coordination, de lutte contre le terrorisme et non plus seulement un travail de coopération.

J'espère que le ministre de la Justice continuera ses approches avec nos différents chefs de police du Québec pour les inciter à maintenir ce travail de coordination d'action avec le directeur de la Sûreté du Québec et le corps spécialisé de police qui ont à coeur de nous apporter l'intégrité du territoire.

Je souhaite au ministre de la Justice que, durant cette période de relâche que nous connaîtrons après la session qui se terminera probablement cette semaine, nous puissions connaître également une relâche dans l'activité terroriste de ces gens qui ne sont pas très nombreux, j'entends les chefs. Je suis sûr que le ministre de la Justice en viendra aux mêmes conclusions que son prédécesseur, quant à cette nécessité que nous impose parfois la prise de positions, comme il le disait lui-même, qui ne sont pas naturelles ou qui nous répugnent. Je suis sûr que le ministre de la Justice, en présentant cette législation aujourd'hui, l'a fait à contrecoeur, comme ses prédécesseurs l'ont fait, comme le député de Missisquoi, l'honorable chef de l'Opposition l'a fait, comme tous ses prédécesseurs l'ont fait, obligés que nous étions parfois de poser des gestes qui nous répugnaient en tant qu'humains. Mais, en face du devoir ou du bien commun, nous avons été dans l'obligation d'aller de l'avant.

Je souhaite, M. le Président, que cette législation puisse contribuer à créer un climat de confiance renouvelée de la part de la population à l'endroit de l'autorité, de quelque parti politique qu'elle soit, et que, par l'action concertée des citoyens toujours confiants dans cette forme de gouvernement que nous avons et qui est la démocratie, nous n'allions pas sacrifier ces principes de liberté sous toutes ses formes que nous apporte cette même démocratie, sous le prétexte d'adhérer à un régime politique qui n'a pas d'autre philosophie ou d'autre leitmotiv pour le moment que de renverser l'ordre établi afin d'instaurer une philosophie politique qui a fait sa marque même sur le continent nord-américain et dans d'autres parties de l'univers.

Nous avons l'intention d'appuyer ce projet de loi et de souhaiter sincèrement, avec le ministre de la Justice, avec le premier ministre, avec le chef de l'Opposition, avec tous les députés de cette Chambre et la population du Québec, qu'en-

fin nous puissions connaître la véritable paix et le respect des individus et des biens dans le territoire du Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. SAMSON: M. le Président, nous avons devant nous un bill qui veut réglementer la distribution, l'entreposage et la vente des explosifs. Evidemment, ce bill n'est qu'une partie de la lutte que ce gouvernement ainsi que les membres de ce Parlement se doivent de faire contre ce que nous connaissons actuellement, c'est-à-dire une nouvelle vague de terrorisme.

Il est évident que les multiples attentats à la bombe que nous connaissons actuellement ont des causes, des effets et aussi des conséquences. Les causes, évidemment, on va passer là-dessus; il faudrait en parler trop longtemps pour le moment. Ce qui nous intéresse, ce sont les effets, ce qui se produit actuellement, les conséquences de ces actes. En effet, au sujet des conséquences de ces actes, nous connaissons de plus en plus une population dont nous sommes responsables, en tant que membres du Parlement, et qui vit dans l'insécurité du lendemain: Quelle sera là prochaine victime? Personne ne le sait. C'est la grande question, c'est le grand point d'interrogation que se pose notre population actuellement.

On ne peut facilement circuler sur nos routes sans se demander si, à un prochain tournant, une voiture ne sautera pas devant soi. C'est arrivé la semaine dernière à Montréal. On se demande, en circulant sur les artères des grandes villes, dans quelle ruelle une voiture sautera près de soi, ce qui fait que notre population est dans la plus grande insécurité, dans l'insécurité totale, dans la peur de ce qui peut lui arriver.

Il est évident que ceux qui sont loin ne peuvent pas s'imaginer exactement ce que c'est que de vivre cela. Ceux qui ont été près de certaines de ces explosions le savent. Celui qui vous parle a eu l'occasion, un jour, d'être très près de l'explosion d'une voiture avec les membres de sa famille. Quelles sont les conséquences? Il est important que nous le sachions tous. Tout d'abord, tous les membres de la famille, ou presque tous, ont subi un choc nerveux qui a duré quelques semaines. Par la suite, un de mes enfants a eu une lésion au coeur qui a duré trois ans. Les responsables de ces attentats ne sont pas ceux qui doivent payer les pots cassés. C'est la population qui est innocente qui doit payer pour ce qui se passe actuellement dans notre province de Québec.

Ce sont des choses que nous nous devons de dire et de faire comprendre à notre population. Ceux qui sont loin s'en foutent peut-être, mais si un jour ils sont près de ces explosions ou de ces dynamitages, ils comprendront ce que je veux dire.

Il y a un autre danger: c'est que ces attentats à la bombe des terroristes se font souvent dans le but de détruire des choses matérielles. Mais, malheureusement pour les victimes, il se trouve un jour quelqu'un qui est près; il se trouve un jour quelqu'un qui se fait tuer sans jamais même avoir su pourquoi.

Il est évident que nous avons de lourdes responsabilités, aujourd'hui. Je comprends que le ministre de la Justice nous présente un bill qui ne lui plaît pas. Je le comprends, mais je comprends aussi que le ministre de la Justice a des devoirs qu'il doit remplir et qu'il remplit aujourd'hui. C'est pour toutes ces raisons que nous sommes d'accord. Pas partiellement d'accord, mais 100% d'accord avec ce qui nous est présenté aujourd'hui.

Un jour ou l'autre, devant le danger que constituent les actes des terroristes, il se trouvera quelqu'un de la majorité silencieuse qui en aura assez de ça. C'est à ce moment-là que ça deviendra réellement dangereux.

Aussi longtemps que ces terroristes seront les seuls à occuper le plancher des attentats, c'est un demi-mal, mais le jour — et ce jour-là est proche, M. le Président, si on n'arrête pas ces attentats à la bombe — où quelqu'un de la majorité silencieuse se lèvera et décidera de faire sauter une de ces bombes sous le fessier de quelques-uns de ces terroristes, eh bien, nous serons près d'une guerre civile. Ce sera la conséquence de la vague de terrorisme que nous connaissons actuellement.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons qu'approuver cette loi, même si ça répugne à plusieurs membres de cette Chambre de devoir en arriver là. Cela me répugnait aussi lorsque je devais corriger mes enfants en bas âge. Cela répugnait à tous les pères de famille d'en faire autant. Mais, si on ne les corrige pas quand c'est le temps, au bout de 15 ans ou de 20 ans, on est devant des problèmes réels. La même chose aujourd'hui. Cela nous répugne peut-être, mais c'est notre devoir de collaborer à corriger cette situation.

M. le Président, lorsqu'on parle de terrorisme, aujourd'hui, qu'est-ce qu'on voit dans les journaux? On identifie des mouvements, qu'ils soient FLQ, FLP ou FL ce que vous voudrez, comme des mouvements séparatistes, pour lancer de la poudre aux yeux, mais, sincèrement, je ne crois pas que, derrière cette vague de terrorisme, ce soit réellement du séparatisme.

Je serais plutôt porté à penser, comme mon collègue, le député de Maskinongé, que ce sont des personnes qui savent ce qu'elles font et qui suivent un plan bien défini pour préparer une révolution qui favoriserait des idées communistes, maoistes, léninistes ou marxistes, comme vous vous voudrez; c'est surtout ça.

Ce n'est pas pour aider une cause québécoise que ces gens-là font du terrorisme; c'est en suivant presque aveuglément les causes du communisme international. Dernièrement, M. le Président, nous avons été à même de lire dans les journaux que la police de Montréal, en collaboration avec la police provinciale et la police fédérale, avait eu l'occasion de mettre fin à un complot visant à l'enlèvement d'un haut personnage des Etats-Unis au Canada. Les plans étaient faits à l'avance pour exiger des Etats-Unis une rançon de $500,000, et la libération des prétendus prisonniers politiques du Québec, sous le couvert du séparatisme, selon ce qui nous a été rapporté.

Mais, comme je vous le dis, je ne crois pas que ces attentats soient séparatistes; je crois qu'ils sont de type révolutionnaire international. Alors, dans les plans que la police a eu l'occasion de déjouer, on exigeait que des sauf-conduits soient émis, pour laisser sortir du pays des prisonniers politiques soi-disant séparatistes. Et pour aller où? Pour aller à Cuba. Selon notre interprétation à nous, ce n'est sûrement pas pour favoriser l'indépendance du Québec, mais surtout pour favoriser des idéologies ou des philosophies politiques, communistes, extrémistes.

Presque tous, nous savons qu'il y a dans notre province actuellement des jeunes qui s'entraînent à la guérilla.

Et, il n'y a pas très loin de l'entraînement, dans certains camps, dans notre province de Québec, à la guérilla et au terrorisme pratique. Il y a sûrement des parents là-dedans — j'entends parents d'idéologie. C'est entendu que nous réclamons sans arrière-pensées des sentences sévères, voire même exemplaires, à ceux qui seront pris à faire du terrorisme, à ceux qui seront pris à mettre en danger, dans notre province de Québec, la sécurité de la population. Qu'une personne soit tuée lors d'un attentat à la bombe visant seulement et uniquement à détruire du matériel, qu'une personne soit tuée à ce moment, j'appelle cela un meurtre comme toute autre chose. Il faut appeler les choses par leur nom. Qu'une personne soit tuée lors d'un attentat à la bombe ou qu'elle soit tuée à bout portant, le résultat est le même: une personne a été tuée. Ces victimes, passées et futures — parce que si on n'arrête pas le mouvement à sa base, si on ne le détruit pas dans l'oeuf, elles seront nombreuses, plus nombreuses que les victimes du passé — seront des personnes aussi innocentes que celles que nous avons connues qui ont été malheureusement tuées lors de ces attentats.

Ces actes de terrorisme sont toujours faits au nom d'une pseudo-libération, au nom de la grande liberté. On nous parle des pays communistes, ces mouvements terroristes vont même jusqu'à patronner certaines librairies qui vendent des livres sur le marxisme ou sur la façon de faire des révolutions. C'est avec tout ça ensemble que nous en venons à constater les faits que nous devons constater aujourd'hui. Ces mouvements terroristes embrigadent des jeunes de notre province, des jeunes gens qui ne savent même pas pourquoi ils se laissent embrigader. S'ils connaissaient les conséquences de leurs actes, s'ils connaissaient exactement les raisons pour lesquelles ces chefs terroristes les embrigadent, nos jeunes ne suivraient pas. C'est sous de fausses représentations qu'on amène nos jeunes dans ces mouvements en leur parlant de liberté et toujours de liberté. Pourtant ces gens représentent des philosophies politiques communistes du genre de celles qu' il y a dans d'autres pays du monde dont la Russie et la Chine populaire.

Pourtant, ces mêmes personnes qui réclament la liberté à grands cris pour faire de notre province et de notre pays un pays semblable à ceux qu'ils veulent représenter, c'est-à-dire un pays communiste, savent, et nous le savons, que c'est toujours au nom de la liberté que les révolutions se font ou se sont faites dans le passé. Et c'est une fois que les révolutions ont été finies que, justement, la liberté a commencé d'être brimée. On n'a qu'à prendre comme exemple la Tchécoslovaquie qui, il n'y a pas longtemps encore, a tenté de se libérer du joug communiste. Que lui est-il arrivé? Est-ce que c'est avec des discours qu'on a convaincu ces gens de demeurer chez les communistes? Non. C'est avec des canons, c'est avec des fusils, c'est avec de l'armement. Une fois le communisme arrivé dans un pays, c'est à ce moment que la liberté s'en va. Malheureusement, ce sont toujours des étudiants, ou presque, qui, dans le monde, ont suscité des révolutions, et ce sont toujours les étudiants qui, après en avoir eu assez de ces révolutions, ont tenté de se libérer réellement.

Exemple: Tchécoslovaquie, encore une fois. Pourquoi? Parce que, justement, dans la tête de ceux qui ne sont pas des étudiants, il arrive aussi qu'il y a des choses qui mijotent. Aujourd'hui, ceux qui sont amenés le plus souvent

vers les mouvements terroristes, sont malheureusement des gens de la classe étudiante ou presque, en majorité des gens de la classe étudiante et, cela fait partie, M. le Président, d'une philosophie qui s'implante dans notre province de plus en plus. Cela fait partie d'une philosophie qui veut — cela, on est en train de l'entrer dans la tête de nos étudiants, de nos enfants — que le pire ou que les parents sont des vieux jeux et que seule la classe étudiante possède la science et la vérité.

Bien au contraire, ceux parmi les étudiants qui, encore, — parce qu'il y en a encore de ceux-là — sont prêts à prendre les conseils de la génération précédente sont encore les plus sages.

M. le Président, un jour quelqu'un qui s'apparentait de près ou de loin avec ces genres d'idées, me disait qu'il se sentait comme issu de la révolution. Imaginez-vous! Une espèce de fils de la révolution tranquille! C'est ce qui confirmait ce que j'ai toujours pensé, que la révolution tranquille avait été un fiasco, d'ailleurs, quand on voit des jeunes parler comme cela...

En terminant, je pense qu'il est de notre devoir de dire à ces gens que ce n'est pas en détruisant ce qui existe que nous allons construire ce qui n'existe pas, au nom de l'égalité, au nom de la liberté ou de ce que vous voudrez. On est toujours prêt à détruire celui qui possède quelque chose. Je parle des tenants de cette philosophie. On est toujours prêt à détruire. Nous disons — et nous le pensons sincèrement — que ce n'est pas en détruisant le château du riche qu'on va améliorer la cabane du pauvre, mais c'est en travaillant tous ensemble par des lois adoptées dans cette Chambre, comme dans les autres Chambres du pays c'est en retroussant nos manches et en agissant comme des gens qui sont prêts à travailler,... Je vois un honorable collègue de cette Chambre qui me fait des signes. Il reconnaît probablement certains des siens à l'extérieur.

M. BERTRAND: La révolution!

M. SAMSON: M. le Président,...

M. CHARRON: Les communistes!

M. SAMSON: Ce que je veux vous dire...

M. CHARRON: La révolution!

M. SAMSON: Oui, j'entends justement des paroles révolutionnaires qui me parviennent...

M. CHARRON: C'est ça.

M. SAMSON: ... à mes oreilles. De toute façon, M. le Président,...

M. CHARRON: Il commence à entendre des voix, c'est comme Jeanne-d'Arc.

M. SAMSON: J'aimerais vous dire...

M. CHARRON: Jeanne-d'Arc a fini comme ça, aussi.

M. SAMSON: ... que c'est en travaillant... Et ceux qui arrivent, ou qui se pensent issus de la cuisse de Jupiter, qui pensent tout connaître, devraient penser qu'avant eux il y avait du monde qui existait, devraient penser que ce qui existe actuellement a été construit par des personnes qui ont vécu avant eux. Ceux qui n'ont jamais eu l'occasion de gagner leur vie, ni de gagner leur pain à la sueur de leur front, malheureusement, ne comprennent pas toujours ce que l'on dit. Cela leur est venu trop facilement. Quand cela vient facilement, on est évidemment porté à critiquer ceux qui nous ont donné à manger. Qu'est-ce que vous voulez? Cela s'est déjà vu, quelqu'un qui mordait la main de celui qui lui donnait à manger. Ces terroristes sont du genre de ceux qui sont toujours prêts à mordre la main de ceux qui veulent les faire manger.

M. le Président, nous ne pouvons qu'être d'accord avec le gouvernement qui veut entreprendre — évidemment ce n'est pas complet, nous le comprenons, mais c'est un départ — une lutte efficace — nous espérons qu'elle le sera — contre ces actes de terrorisme qui, malheureusement, ne servent d'autres causes que de détruire ce pays qui nous appartient, de détruire ce que nos prédécesseurs ont construit, de détruire les héritages qui nous reviennent et que nous nous devons de laisser à ceux qui suivront derrière nous.

M. le Président, pour toutes ces raisons, nous serons d'accord, et nous félicitons le ministre d'avoir pensé à entreprendre cette lutte contre le terrorisme.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: M. le Président, les interventions que nous venons d'entendre possédaient une forte charge d'émotion, beaucoup plus qu'à l'accoutumée. Cela se comprend, lorsqu'on traite d'une loi qui a pour but de réprimer des attentats. On connaît, en effet, les drames qui peu-

vent résulter de ces attentats, les drames individuels auxquels vient de faire allusion le député de Rouyn-Noranda. On connaît également les drames collectifs qui peuvent en être la conséquence, une sorte de climat de malaise qui règne au sein de la nation, les conséquences économiques déplorables qui peuvent en résulter. Je me joins donc à tous les orateurs qui se sont exprimés jusqu'ici pour déplorer ces conséquences individuelles aussi bien que collectives.

Il reste cependant, M. le Président, qu'il convient de replacer ces événements, tout tragiques qu'ils soient, dans le contexte social contemporain. Ce n'est quand même pas la première fois que, dans un pays, aussi bien au Québec que dans les autres, nous assistons à ces explosions de violence. Je me rappelle, qu'il y a plusieurs années, lors de la guerre d'Algérie, alors que je me trouvais en France, il n'y avait pas un seul jour où nous n'assistions, où les journaux ne nous rapportaient des attentats, des bombes au plastic. Depuis lors, il n'y a pas une année, il n'y a pas un mois où nous ne voyons, dans les journaux, des récits de ces attentats qui se passent aussi bien aux Etats-Unis qu'en France, qu'en Italie, que dans les autres provinces. Ce sont des attentats où il est parfois facile de voir à l'origine des revendications politiques, parfois des revendications sociales et parfois des revendications idéologiques. On dirait que cela est devenu une sorte de phénomène contemporain, une sorte de symptôme d'une fièvre de plus en plus forte qui prend notre civilisation occidentale.

Il n'est peut-être pas inutile de replacer cet événement proprement québécois dans son contexte international et dans le contexte socio-économique dans lequel vit actuellement toute notre civilisation occidentale.

Il est bien évident, M. le Président, que nous favorisons également le principe de ce projet de loi. Ce projet de loi vise, en effet, à rendre plus difficile l'accès aux moyens qui permettent à des terroristes en puissance de nuire à la société. A ce titre, nous ne pouvons qu'être d'accord avec toute loi qui pourra rendre plus difficile l'accès à ces moyens de production en vue de faciliter l'exécution d'attentats qui nuisent, comme on vient de le dire, au climat social d'une collectivité.

De même, nous sommes d'accord pour adopter toute loi qui aurait pour but, par ces moyens ou d'autres, d'éliminer de notre société québécoise les actes de terrorisme. Je n'ai pas besoin de dire ici que notre parti dénonce la violence avec la dernière énergie comme moyen d'arriver aux buts que se propose tout groupe social ou politique que ce soit. Contrairement à ceux qui, il n'y a déjà pas si longtemps, persistaient à nous associer d'une façon directe ou indirecte à ces actes terroristes, nous prenons cette occasion pour affirmer à nouveau, de la façon la plus catégorique et la plus solennelle, que nous nous opposons une fois pour toutes à la violence comme moyen de réalisation des objectifs ou des idéaux que nous nous sommes fixés.

D'ailleurs, nous l'avons déjà fait, M. le Président, à plusieurs reprises. Depuis l'origine de notre mouvement, qui est ensuite devenu un parti, nous avons dénoncé à plusieurs occasions l'emploi, l'utilisation de la violence. Nous l'avons dénoncée à propos du conflit de Saint-Léonard; nous l'avons dénoncée, aussi, avec énergie, à l'occasion des manifestations auxquelles on a donné le nom de McGill français. Nous, l'avons dénoncée également à l'occasion de la célébration de notre fête nationale, en 1968.

Nous sommes souvent revenus sur le sujet. Ceci nous a valu d'ailleurs l'exclusion du parti de certains partisans qui y étaient entrés pour le mauvais motif, mais nous ne regrettons rien. Nous affirmons encore aujourd'hui, avec toute l'énergie que nous pouvons y mettre, notre politique de pacifisme démocratique et parlementaire en vue d'arriver à l'objectif que nous nous sommes fixé.

Il reste important quand même de signaler que ces attentats n'ont pas toujours une saveur politique. Nous en avons vu beaucoup, récemment, surtout au cours de la dernière année, où il était très facile de dénoter une saveur qui n'avait rien de politique mais qui avait trait plutôt à un certain type de revendication sociale.

Même si nous dénonçons la violence, il faut quand même n'y voir qu'un effet. Il faut quand même n'y voir qu'un symptôme d'une maladie beaucoup plus grave qui est en train de ronger non seulement notre société québécoise, mais également beaucoup d'autres sociétés occidentables. Et à ce titre, le terrorisme est un symptôme comme un autre. Un terrorisme qui constitue peut-être un symptôme plus grave, plus douloureux que les autres, mais quand même la nature n'en est pas changée et, à toutes les fois que nous nous trouvons devant un symptôme, bien sûr, on peut le déplorer, bien sûr, on peut aller chez le médecin pour s'en faire guérir; mais il est encore beaucoup plus important de porter un diagnostic exact, d'essayer de remonter, des causes aux effets, à la cause principale qui est à l'origine de cette maladie, ce qui nous permet ensuite d'élaborer un programme de traitements qui va à la racine de la maladie, qui va au fond des choses et qui amène une exclusion définitive de tous ces symptômes, qui amène non plus une répé-

tition de ces symptômes mais un état de santé qui constitue un état de bien-être pour l'individu comme pour les sociétés.

En ce sens, ce projet nous apparaît certes justifié. Bien sûr. Mais il ne nous paraît pas aller assez loin, car tous ses articles s'attachent justement à la cure de symptômes, mais aucun ne va au mal qui produit ces symptômes.

En somme c'est un projet de loi qui se veut préventif, mais c'est une prévention qui n'est que partielle. Car, dans son esprit, ce projet de loi nous apparaît d'abord symptomatique, c'est-à-dire répressif, et en cela — comme d'autres orateurs l'ont signalé avant moi, et en particulier le député de Maskinongé — on en constatera bientôt les limites et les insuffisances.

D'ailleurs le seul fait que nous ayons assisté au Québec à des vagues successives de terrorisme, à des flambées successives de violence et qu'on n'en arrive jamais à enlever radicalement ce mal qui ronge notre société montre bien que, jusqu'ici, nous n'avons pas su nous attaquer aux véritables causes du phénomène, ce qui fait que nous nous retrouvons toujours en face des mêmes effets. Ce qu'il faut et ce qu'il faudrait au plus tôt, ce serait s'attaquer plutôt à la racine même de la violence. C'est-à-dire aux maux principaux dont souffre notre société québécoise.

J'entendais tout à l'heure le député de Rouyn-Noranda faire le procès du terrorisme et, bien sûr, je partageais un certain nombre des opinions qu'il exprimait. Mais je partageais davantage les idéaux et les idées qu'il exprimait dans un récent article dans le Journal de Montréal, où, au lieu de se contenter de traiter des symptômes, c'est-à-dire du terrorisme, il essayait de remonter aux véritables causes de la violence, aux véritables racines de la violence. Car ce n'est pas rêver en couleur que d'essayer d'analyser, d'énumérer, d'identifier ces causes afin d'être mieux en mesure de les guérir, d'aller au fond des choses et d'amener une guérison radicale.

Pour nous, nous trouvons qu'on a peut-être raison d'accuser ces terroristes — nous le saurons bien quand ils seront arrêtés — de castrisme, de guévarisme, de trotskisme, de léninisme, de marxisme, mais nous trouvons quand même que ces idéologies ont quand même un peu trop bon dos, que cela peut devenir facilement des alibis qui contribuent à rationnaliser un phénomène beaucoup plus complexe, à masquer une réalité beaucoup plus douloureuse.

L'orsque nous ferons le véritable procès des causes qui ont conduit à ces explosions suc- cessives de violence, nous nous apercevrons peut-être qu'il faudra identifier des maladies beaucoup plus profondes de notre société. Ces maladies, je pense bien que tous les membres de cette Chambre les connaissent, mais c'est peut-être douloureux, c'est peut-être difficile de s'y attarder comme il le faudrait.

Parmi ces racines de la violence, il y en a, bien sûr, que tout le monde connaît; par exemple, la pauvreté de notre peuple, le chômage, qui atteint des proportions toujours plus dangereuses à chaque mois qui passe. Les statistiques de l'assistance sociale montrent que nous sommes en train de devenir un peuple de mendiants, alors même que notre Québec vit dans une économie nord-américaine, qu'il vit au sein d'une société d'abondance. Vous savez qu'il n'y a rien de plus nocif pour un pauvre que de voir un riche, alors qu'il sait que lui-même, dans des structures sociales différentes, dans une société qui lui donnerait la chance au plein emploi, à la sécurité d'emploi, il pourrait se payer non pas peut-être cette richesse, mais au moins les éléments essentiels qui lui permettraient de mener une vie digne.

Dans une société où l'écart se creuse toujours davantage entre les riches et les pauvres, entre l'aisance et la pauvreté, non seulement nous avons affaire à un scandale, mais nous créons des conditions de frustration, des conditions d'impatience qui parfois, lorsqu'elles sont canalisées par des agitateurs habiles et expérimentés, peuvent facilement mener aux explosions.

Mais, alors, faudrait-il accuser les agitateurs ou une société qui a créé une sorte de bouillon de culture où les conditions révolutionnaires sont en train de se former sans que les leaders de la société en tiennent un compte suffisant? Il faudrait peut-être aussi parler d'une autre sorte de violence, non plus violence manifeste, mais la violence muette mais terriblement efficace des nantis, des privilégiés qui rompus, enfermés dans leur égoisme s'accrochent à leurs privilèges, s'accrochent à leurs pouvoirs, qui ne veulent pas s'ouvrir les yeux à la réalité sociale contemporaine, qui ignorent, qui méconnaissent les déplorables conditions de vie d'une grande partie de la population et, en particulier, des économiquement faibles, des défavorisés de l'existence et qui non seulement méconnaissent ces conditions, non seulement les ignorent, mais continuent, en se fermant les yeux, de les exploiter, de les assujettir, pour grossir leurs revenus et pour continuer de profiter des bienfaits de cette société d'abondance.

Il faudrait accuser ici justement l'égoïsme de cette portion minime, mais importante de

notre population qui souvent est aux leviers de commande de notre société, l'égoïsme de ces parvenus qui ne veulent pas partager avec leurs frères les bienfaits du progrès technique, les bienfaits de la société de consommation.

Il est bien évident que ce n'est pas en détruisant que l'on bâtira; ce n'est pas, bien sûr, en détruisant le château du riche que l'on bâtira la cabane du pauvre, là n'est pas l'idéal. Il faut surtout viser à partager les bienfaits d'une société dont le progrès est fait pour tout le monde, dont tout le monde a le droit de profiter et, en particulier, ceux qui ont eu le plus de difficulté à bénéficier des bienfaits de cette civilisation.

Il faudrait peut-être accuser ici, peut-être encore plus gravement que certains autres qui sont plutôt des victimes, cette apathie de certains notables bien installés devant les revendications d'un peuple qui veut travailler dans sa langue, qui veut accéder aux postes supérieurs que lui promet sa compétence nouvelle acquise avec les deniers de l'Etat, qui veut accéder aux postes supérieurs dans un climat de dignité et de fierté, qui refuse à tout jamais et qui refusera avec toujours de plus en plus d'énergie une sujétion économique, une humiliation culturelle qui ne sont plus de mise dans un Québec qui a fait un tel effort pour l'éducation de tous ses citoyens jusqu'au plus humble d'entre eux.

Il faudrait peut-être accuser aussi la prudence calculée de certains partisans de l'incitation pour changer cet état de choses que je viens de décrire, alors que la baisse de la natalité, alors que l'intégration des immigrants a une minorité de langue et de culture différente, qui est dans une position privilégiée actuellement dans une société québécoise, le danger que fait courir à notre collectivité cette minorité est un danger que beaucoup d'observateurs non pas révolutionnaires, mais les plus sagaces qui soient, qualifient souvent mortel.

Il faudrait peut-être déplorer enfin, parmi ces racines de la violence, une impasse constitutionnelle qui, depuis le temps qu'elle dure, menace bien de devenir indéfinie.

Cette impasse constitutionnelle nous prive, nous la collectivité québécoise, des ressources et des pouvoirs essentiels à notre épanouissement collectif, alors que les citoyens, de plus en plus informés et politisés, exigent une action de plus en plus vigoureuse et de plus en plus efficace de l'Etat pour que les problèmes réels, qui sont à l'origine de leur pauvreté, soient réglés avec de plus en plus d'efficacité.

Ce n'est que lorsque l'Etat aura réussi à créer des sociétés mixtes véritablement prospères, qu'il aura réussi à créer un développe- ment industriel valable, qu'il aura réussi à moderniser notre agriculture, qu'il aura réussi à procurer des soins de santé suffisants et complets à toute notre population, qu'il aura réussi à loger nos citoyens d'une façon décente qui correspond à leurs idéaux de fierté; ce n'est que lorsque le scandale de cette société d'abondance et de consommation pour les privilégiés cessera et que ce bouillon de culture, dont je parlais tout à l'heure et qui constitue la racine profonde des tendances révolutionnaires, aura cessé, que nous pourrons arriver à l'éradication complète des racines de la violence.

C'est précisément parce que notre société a trop tardé à régler ces problèmes pressants que nous assistons à cette reprise continuelle et épisodique des phénomènes de la violence. Notre population est patiente, elle l'a prouvée plusieurs fois au cours de son existence, mais il y a des patiences qui deviennent parfois des démissions. Si la population se convainc que cette patience est devenue une démission, le climat de frustration, dont je parlais tout à l'heure, augmentera de plus en plus et le danger d'explosion sera toujours renaissant.

En effet — et j'en avertis tous les députés de cette Chambre — le temps travaille contre nous. Il suffit d'être en contact avec certaines couches de la population pour savoir à quel point l'angoisse croit et augmente dans notre société. C'est la raison pour laquelle, bien sûr, tout en acceptant ce projet de loi, nous voudrions qu'à cette mesure répressive, qu'à cette mesure négative, qui est justifiée et nécessaire, s'ajoutent très bientôt d'autres mesures, d'autres attitudes, celles-là beaucoup plus positives, qui correspondent, de la part du gouvernement, à un nouvel effort de lucidité, à un sursaut de fierté qui lui permettra d'adopter des législations qui iront à la racine de ce mal que je décrivais et que je dénonçais, afin que notre peuple, avec ses angoisses, avec ses aspirations et avec ses revendications, se reconnaisse désormais dans ce gouvernement qui est le sien.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté? M. CHOQUETTE: Adopté?

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Gouin.

M. Guy Joron

M. JORON: M. le Président, personnellement, je suis d'accord avec ce bill, mais j'ai-

merais retenir l'attention de cette Chambre pendant quelques instants pour souligner, peut-être avec plus d'insistance, quelques-uns des points que le député de Bourget faisait valoir il y a un instant.

Je suis d'accord avec l'énoncé de principe que faisait le député d'Outremont au début de son explication, au moment du dépôt du projet de loi, lorsqu'il disait que, dès l'instant où des hommes se retrouvent trop nombreux sur un territoire donné, ils doivent s'organiser en société. Cela implique une organisation qui doit fonctionner selon un certain ordre et selon certaines règles. Accepter de vivre en société, c'est, par définition, accepter un certain ordre et le respect de certaines règles.

En ce sens, l'action terroriste n'a aucune place dans la vie d'une société normale. Je suis d'accord avec le député de Rouyn-Noranda — non pas lorqu'il disait que la révolution tranquille a été un fiasco, ce qui m'a, d'ailleurs, étonné, parce que cela semblait vouloir dire que la révolution aurait dû être moins tranquille pour ne pas être un fiasco — sur le sujet suivant: Ce n'est pas drôle lorsqu'on voit de près les effets de l'action terroriste. Je l'ai vécu moi-même, il y a deux ans, à l'occasion de l'explosion d'une bombe au quatrième étage de la Place Victoria, à la Bourse de Montréal.

J'avais à cette époque mon bureau au 6e étage. On peut dire, dans un certain sens, que la bombe m'a presque éclaté sous les fesses. Ce n'est pas drôle, mais immédiatement, ça amène à se poser de sérieuses questions. La question que tous doivent se poser est la suivante : Quand le terrorisme apparaît dans une société, comme ça, qu'est-ce que ça signifie? Quand les murs d'un édifice commencent à se lézarder, qu'est-ce qu'on doit faire? Bien entendu, et simultanément, on doit courir remettre du plâtre sur la fente, mais, en même temps, et très rapidement, on doit courir voir aux fondations mêmes, de façon à s'assurer que ce n'est pas tout l'édifice qui est en train de s'écrouler.

Il n'y a pas de fumée sans feu et je ne souscris pas à l'interprétation qu'ont donnée successivement les députés d'Outremont, de Maskinongé et de Rouyn-Noranda quant à l'origine de cette activité terroriste au Québec. On veut trop facilement faire porter ce phénomène sur un phénomène d'importation étrangère et on se gargarise de mots comme le moïsme, le marxisme, le léninisme, dans certains cas trop souvent sans savoir même ce que ces mots veulent dire.

Le terrorisme ne s'importe pas parce que, comme l'a souligné à un certain moment le député d'Outremont, il ne peut pas s'implanter dans une société où le ferment n'a pas été déposé, n'a pas été déjà semé. C'est à l'intérieur même de la société québécoise qu'il faut chercher les racines de ce mal. Vouloir faire des étrangers, des maoistes, des communistes et des tout ce que vous vous voudrez les boucs émissaires de cette activité c'est, à mon avis, une belle excuse pour le conservatisme le plus rétrograde. Il est facile de lancer la balle; ça nous évite de scruter à l'intérieur de nous-mêmes, à l'intérieur de notre société, les vraies racines de ce mal.

Pour moi, il ne fait aucun doute que ce sont des injustices — le député de Bourget tout à l'heure en a signalé quelques-unes — à l'intérieur même de notre société qui en sont la cause, plus l'incapacité de notre système démocratique tel que nous le pratiquons — parce que la démocratie se pratique de façon différente et à des degrés très différents également, dans divers pays du monde — plus l'incapacité, dis-je, de notre système de permettre totalement et facilement à ces injustices de trouver un canal d'expresssion.

Nous en sommes, nous, les sept député du Parti québécois, un exemple dans cette Chambre. Sept sur 108 alors que nous représentions 24% du vote. C'est déjà un premier exemple d'injustice à l'intérieur même de notre système. J'inviterais en conséquence les membres de cette Chambre à se soucier autant de la santé même de la démocraite, de la véritable démocratie que de maintenir un certain ordre établi. Moi, je suis étonné de voir comment, à la suite des événements de la fin de semaine, dès la première journée de la session on réussit avec une célérité incroyable à adopter un projet de loi visant, et il faut s'en réjouir, à la protection d'un certain ordre.

Qunad il s'agit de défendre l'ordre établi, on peut adopter un projet de loi en une journée, à trois jours d'avis. Mais quand il s'agit par exemple de présenter des projets de loi ou d'adopter des politiques qui, elles, s'attaquent aux racines du mal, il faut traîner de commission en comité, de ci en ça et puis ça prend des mois. Si on pouvait — et ça serait tellement heureux — avoir la même célérité lorsqu'il s'agit de s'attaquer aux causes et non aux effets, il me semble que déjà on aurait franchi un pas considérable.

En terminant, je voudrais tout simplement rappeler à ceux qui se veulent les défenseurs à tout prix d'un ordre établi qu'il y a la un danger c'est que l'ordre ne doit jamais être rigide à aucun moment dans une société, puisque la société, elle, est en constante évolution. Si on lui donne un cadre rigide, fixe, déterminé et immuable dans le temps, il est entendu, l'évolution se continuant à l'intérieur de ce cadre, que des injustices vont

commencer à se créer et qu'on va commencer à se marcher sur les pieds, les uns les autres. Or, il me semble qu'il serait intéressant de cesser de parler d'ordre établi et de commencer à penser en terme d'ordre évolutif. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lotbinière.

M. Jean-Louis Béland

M. BELAND: Il me fait plaisir, d'abord, de féliciter l'honorable ministre qui a bien voulu présenter ce projet de loi concernant les effets et les causes des explosifs. Il vient d'être dit, par le préopinant, que mon chef, le député de Rouyn-Noranda, évidemment, parle d'effets et de causes, parle de révolution non tranquille. Il devrait également se référer, ce député, aux écrits du député de Rouyn-Noranda à ce sujet pour se renseigner. Je comprends évidemment que ça fait mal à la philosophie du Parti québécois, parce que je sais que ce parti est un parti d'extrême gauche.

Il y aurait peut-être autre chose à dire relativement à ce projet de loi. Il est très bon, il y a beaucoup de choses qui y sont insérées, mais je pense qu'il faudrait, et le plus tôt possible, en démontrer, d'une façon plus positive à la population, toutes les conséquences, et donner toute l'information nécessaire pour protéger le public. Je me réfère ici à il y a quelques années, plus précisément en 1965, où moi-même je faisais de la vente d'explosifs. Avec une charge d'explosifs que je m'apprêtais à transporter à ma poudrière, en passant sur le pont de Québec...

M. CHARRON: Cela a sauté!

M. BELAND: ... une automobile est venue doubler une autre automobile qui a bien failli m'arriver en pleine figure. A l'intérieur de ma camionnette, j'avais précisément 14 caisses de dynamite. Je sais qu'une partie ou la majeure partie du pont de Québec se serait écroulée si, justement, on m'avait frappé avec cette charge d'explosifs. Je viens de dire que j'avais cette charge d'explosifs parce que j'en faisais la vente. Donc, c'était légal.

M. CHARRON: A qui les vendiez-vous?

M. BELAND: Entre autres au gouvernement provincial, dans la région où je demeurais. Je tenais à attirer l'attention du ministre à ce sujet, justement à cause de cet incident qui aurait pu être désastreux. Il me semble qu'on devrait mieux renseigner le public qui voyage sur les routes ou qui transporte ces éléments de façon qu'il soit beaucoup mieux protégé. Le public devrait être davantage informé. Il y a beaucoup de jeunes qui se conduisent très bien sur les routes mais, lors de l'incident dont j'ai parlé, c'était un jeune qui était au volant d'une automobile et qui a osé doubler sur le pont de Québec et qui a failli causer une catastrophe sur le pont. Mes derniers mots seront pour féliciter, encore une fois, le ministre de la Justice qui a bien voulu agencer présenter une loi spécifique concernant les explosifs. Je l'invite à réfléchir davantage sur la possibilité de renseigner ceux qui doivent voyager sur les routes avec ces éléments. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. William Tetley

M. TETLEY: Je serai très bref. Les députés de Gouin et de Bourget ont mentionné les conséquences économiques qui étaient peut-être une des causes de base des bombes et des attentats. Le député de Gouin a même mentionné le fait qu' il n'y ait que sept députés péquistes en Chambre, il est vrai, malgré le fait qu'ils aient reçu un vote de 24% de la population.

C'est vrai aussi. Mais, j'ai peur que les députés de Bourget et de Gouin aient suggéré, par leurs remarques, qu'on peut être violent parce qu'il y a eu d'autres groupes de la société qui ont souffert longtemps. Je parle des femmes qui n'avaient pas le droit de vote, je parle des jeunes qui n'avaient pas non plus le droit de vote. C'est le Parti libéral qui a donné ce droit aux femmes et aux jeunes: aux femmes en 1944 et aux jeunes en 1966.

Je parle des anglophones qui n'ont que huit députés malgré un pourcentage de 22%. Est-ce qu'ils ont le droit de lancer des bombes? M. le Président, je vais être clair et j'espère que les députés de Bourget et de Gouin étaient clairs. Je suis contre la violence pour toutes les raisons déjà mentionnées et j'espère que les députés de Bourget et de Gouin sont contre, et le député de Saint-Jacques aussi. Tout le monde doit être contre la violence. Il ne faut pas donner d'excuse à la population. Nous, les députés, ici en Chambre, avons des responsabilités très graves. Il ne faut jamais donner d'excuse. Merci.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Jacques.

M. Claude Charron

M. CHARRON: M. le Président, la dernière remarque du député de Notre-Dame-de-Grâce vient mettre, à mon avis, le « crémage » sur le gâteau autour du débat et elle allait en plein dans l'esprit du débat depuis le début, je pense bien. Il fallait s'attendre qu'à un moment donné cette Chambre se décide à se payer un tel débat.

Pendant quelques instants, j'ai eu l'impression que les vétérans de cette Chambre ont pensé revivre la période du bill 63 où ils étaient ici même, à ce seul endroit, conscients de tenir la forteresse de la langue française au Québec, pendant que jusqu'à l'extérieur de cette Chambre on leur disait le contraire.

Je pense qu'au cours de ce débat nous n'avons pas, dans cette Chambre, écarté l'image avec laquelle on a assez de difficulté dans le public, celle qui veut que l'Assemblée nationale soit une tour d'ivoire, où, à certains moments, tous les partis font coalition un peu pour s'encenser et pour se justifier aussi d'être l'un face à l'autre pendant des semaines interminables.

L'idée qui reste est celle que cette tour d'ivoire vient de connaître encore quelques minutes de son sommet. L'émotivité qui aentouré les débats et que signalait le député de Bourget au début de son intervention est tout à fait symbolique, à mon avis, des gargarismes politiques que cette Chambre sait se donner à quelques occasions sur son petit monde et pour justifier son existence.

On a, au cours de ce débat, condamné, d'une façon assez unilatérale, des philosophies qu'on n'avait pas l'air de connaître — je ne prétends pas les connaître moi-même — mais on les mettait en bloc, tout d'un côté, parce qu'elles ont le dos rond, comme le disait le député de Bourget, et parce qu'il est facile habituellement d'invoquer cela à tout venant.

Notez bien que, dans ce mélange de philosophies qu'on nous faisait à la bonne franquette, j'ai l'impression qu'à certains moments l'ignorance même était au menu, cette ignorance dont nous avons peine, comme collectivité, à nous débarrasser depuis une dizaine d'années.

Bien sûr, on a aussi — et cela ne devait pas manquer — longtemps ronflé, roulé sur la démocratie que nous représentons en ce Québec. Il fallait bien se la payer, à un moment donné. On la nomme, on la flatte, on la coule, on se dit que nous en sommes les porte-étendard et puis, voilà, nous sommes justifiés et nous nous rassoyons.

Maintenant que nous sommes d'accord pour dire que des mesures de sécurité doivent être prises, maintenant que nous avons aussi eu l'occasion de dire, tout le monde en cette Chambre, que ce n'est là que pour arrêter les effets, mais que les causes sont beaucoup plus profondes, maintenant que nous avons, si vous voulez, passé notre heure d' « autoflattement » collectif, après l'adoption le plus rapidement possible, j'espère, de cette loi-diachylon, légiférons, s'il vous plaît, si ce gouvernement en a l'audace et la capacité, pour que nous n'ayons jamais plus à revenir sur un pareil projet de loi.

M. LAPORTE: Il est encore le seul à avoir raison, contre tout le monde. Bon, adopté?

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Abitibi-Est.

M. Ronald Tétrault

M. TETRAULT: M. le Président, même si le député de Saint-Jacques n'est pas en faveur de ce qu'on dit, je voudrais féliciter le ministre de la Justice d'avoir proposé ce bill. Sur les idées qu'on a développées sur le maoïsme, le communisme et de tout ce qui s'ensuit, j'aimerais que certains députés de cette Chambre puissent lire certaines revues américaines faites avec le FBI ou le Bureau fédéral de l'investigation qui disent que ces démarches, ces bombes ou ces attentats sont faits par des éléments communistes. Je vois très mal qu'ici, dans la province de Québec, il existe autre chose, que ce soit un autre groupe, vu qu'il y a une frontière qui est presque inexistante.

Maintenant, M. le Président, si on se rend compte de toutes les démarches et de tous les mots choisis, glorifiés, bien prononcés du député de Saint-Jacques, on pourra remarquer que, lors de l'étude de certains crédits en cette Chambre, les grands discours à n'en plus finir ont été faits par des députés de l'extrême gauche qui sont assis à mon extrême droite. Pour la bonne marche des travaux de la Chambre, je propose qu'on appuie son idée, mais qu'il la mette en pratique.

M. LAPORTE: Adopté. DES VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que la motion de deuxième lecture sera adoptée?

UNE VOIX: Adopté. M. LAPORTE: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre de la Justice propose maintenant que je quitte le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier.

Comité plénier

M. HARDY (président du comité plénier): Article 1.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que l'honorable ministre de la Justice pourrait nous donner une explication quant au silence de la loi au sujet des explosifs?

M. CHOQUETTE: Au silence de la loi... M. PAUL: Sur les explosifs.

M. CHOQUETTE: Est-ce qu'on peut expliquer le silence?

M. PAUL: Nous ne trouvons aucune définition du mot « explosif ».

M. CHOQUETTE: Cest parce qu'il y a des dictionnaires!

M. PAUL: Ah bien, voici, M. le Président, je pense que c'est...

M. BERTRAND: Il y a beaucoup de dictionnaires!

M. PAUL: Je n'ai pas l'intention de faire une motion pour détails pour savoir si c'est Littré, si c'est Larousse...

M. BERTRAND: Beauchemin. M. CHARRON: Robert.

M. PAUL: ... Robert ou un autre, mais est-ce que le ministre pourrait nous donner une explication?

M. CHOQUETTE: Je voulais badiner avec le député de Maskinongé. Nous nous sommes longuement consultés sur la question de savoir s'il fallait inscrire une définition de ce qui est « explosif » dans ce projet de loi.

Mais après avoir examiné la question, il a paru que quand un terme désigne ce qui est le sens commun — parce que le mot « explosif » a un sens commun, il a un sens que l'on retrouve dans les dictionnaires — il n'est pas nécessaire d'exprimer une définition de ce qui est « explosif » ou « matière explosive ». Ceci a l'avantage de ne pas imposer de limitations à ce qui est ordinairement reconnu comme étant des explosifs. Cest la raison pour laquelle nous avons inscrit, pour préciser l'étendue du projet de loi, la phrase suivante à l'article 1: « Dans la présente loi, le mot « explosif » comprend tout détonateur. » Parce qu'un détonateur, c'est distinct d'un explosif.

Maintenant, une des très bonnes définitions que nous avons trouvées du mot « explosif » est celle qui se trouve au dictionnaire Robert.

M. PAUL: Pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi?

M. CHOQUETTE: C'est parce que cela ne sert à rien, dans les lois, d'exprimer ce qui se trouve dans les dictionnaires.

M. PAUL: M. le Président, il ne faut pas oublier une chose, c'est que cette loi devra nécessairement être soumise pour interprétation à un juge, au tribunal. Nous nous exposons à ce qu'il y ait autant d'interprétations de la loi qu'il y a de juges. Si on veut innover dans le droit, dans la législation, je crois qu'on choisit mal la loi qui, en quelque sorte, vient restreindre une liberté.

Je me demande pourquoi on n'irait pas jusqu'à inscrire dans le texte même de la loi l'une ou l'autre des définitions que l'on peut retrouver dans un dictionnaire. J'ai partiellement compris l'explication que nous a donnée le ministre. Ce que je crains, c'est que, devant les tribunaux, devant nos juges de la cour des Sessions de la paix, nous ayons à débattre l'interprétation ou l'application de cette loi. Un juge à l'esprit large trouvera que l'objet saisi n'était pas un explosif, alors qu'un juge, à la mentalité plus conservatrice ou à l'interprétation plus limitative, trouvera peut-être coupable celui qui aurait pu être facilement acquitté devant un autre juge par suite de la règle d'interprétation.

Le ministre nous dit que la définition du dictionnaire Robert semble complète. Pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi? Ce sera là une pierre angulaire qui servira d'interprétation aux juges qui seront chargés de scruter ou d'écouter la preuve qui pourrait leur être offerte au sujet d'une infraction présumé ment commise. Je dis

« présumément », parce que, dans certains cas, peut-être qu'il y aura absence de preuve totalement et, dans d'autres cas, il y aura une preuve évidente de culpabilité. Par suite de l'appréciation trop libérale d'un juge, nous pourrions nous trouver en face de certains dénis de justice dans certains cas.

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable député de Maskinongé a sans doute consulté la loi fédérale sur les explosifs, qui comporte, elle, une définition de ce qui est explosif. Pour montrer jusqu'à quel point sa suggestion amène plus de complication que de simplification du problème, je vais simplement lui lire le début de la définition d'explosif.

M. PAUL: Des pétards.

M. CHOQUETTE: Signifie la poudre à canon, la poudre de mine, la nitroglycérine, le fulmicoton. Est-ce que l'honorable député est préoccupé par le sens de fulmicoton?

M. PAUL: Cela ne se cultive pas dans le comté de Westmount.

M. CHOQUETTE: La dynamite, la gélatine détonante, la gélignite, les fulminates. Cela préoccupe le député de Maskinongé, les fulminates?

M. PAUL: On ne veut pas la reproduction de la loi fédérale, mais seulement une définition.

M. CHOQUETTE: Je sais. Mais l'honorable député semble manifester un esprit juridique plus anglo-saxon que latin. Dans la conception anglo-saxonne de la législation...

M. PAUL: Si c'est un compliment, je l'accepte. Si c'est un défaut, je m'excuse.

M. CHOQUETTE: Dans la conception anglo-saxonne, on fait des textes de loi extrêmement longs, remplis de définitions. On va dans les moindres détails. L'esprit qui préside dans cette Chambre, c'est l'esprit latin, c'est l'esprit de clarté. Alors, c'est la raison pour laquelle il n'y a pas de définition du mot « explosif » dans cette loi.

M. DEMERS: Tenez-nous au courant quand cela arrivera.

M. LAPORTE: Article 1, après explications, adopté?

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2? Adopté. Article 3? Adopté. Article 4? Adopté. Article 5? Adopté. Article 6? Adopté. Article 7? Adopté. Article 8? Adopté.

M. PAUL: A l'article 7, qu'est-ce qui arrive quant à la valeur commerciale de la dynamite que l'on retourne chez un fournisseur qui n'était pas le vendeur?

M. CHOQUETTE: Chez un fournisseur qui n'était pas le vendeur?

M. PAUL: Supposons, par exemple, que j'achète de la dynamite, comme le député de Lotbinière l'a signalé tout à l'heure, et que, pour une raison ou pour une autre, je n'utilise pas complètement ou totalement la dynamite que j'ai achetée. Si mon vendeur à l'époque n'est plus en affaires, je dois retourner la marchandise chez un autre vendeur.

M. CHOQUETTE: Exactement.

M. PAUL: Alors, qu'est-ce qui se produit à ce moment-là au sujet de la valeur commerciale?

M. CHOQUETTE: Quand on dit « retourner » on ne veut pas dire « rétrocéder » la dynamite achetée à son fournisseur ou à un fournisseur. Ce que l'on veut dire, c'est entreposer chez le fournisseur qui a vendu la dynamite ou, s'il n'existe plus, chez un autre fournisseur. C'est-à-dire que des permis seront émis aux fournisseurs, et les fournisseurs seront tenus d'avoir des poudrières, des entrepôts, et d'accueillir la dynamite en consignation de telle sorte que, à l'expiration du permis, celui qui a un surplus de dynamite aura le choix soit de procéder à la destruction de la quantité qui n'est pas utilisée ou de l'entreposer moyennant un loyer qui sera fixé par les règlements.

M. DEMERS: Est-il possible de détruire de la dynamite sans que ça fasse trop de bruit?

M. CHOQUETTE: L'honorable député de Saint-Maurice a-t-il peur du bruit?

M. DEMERS: J'ai peur, oui. Cela m'inquiète.

M. CHOQUETTE: Cela dépend où, cela dépend dans quelles conditions.

M. DEMERS: Vous avez un moyen de détruire de la dynamite? Comment peut-on détruire de la dynamite? En la noyant, quoi?

M. CHOQUETTE: Non, en la faisant sauter.

M. BELAND: M. le Président, j'entends des députés dire que la dynamite brûle; ce n'est pas n'importe quelle sorte de dynamite qui brûle. Pour répondre peut-être davantage au député de Maskinongé concernant le retour de la dynamite, la loi est très explicite dans ce sens-là, et les inspecteurs de la Gendarmerie royale définissent très bien la situation et...

M. PAUL: Ce ne sont pas eux, vous vous trompez de gouvernement.

M. BELAND: La personne qui vend de la dynamite doit détenir un permis, autrement elle ne peut pas la vendre, ou alors elle est en marge de la loi. Ce sont justement des cas semblables qui font présentement l'objet de cette étude, de façon qu'il n'y ait plus, en aucune circonstance, de dynamite qui se vende par des personnes autres que celles qui ont des permis.

M. PAUL: M. le Président, devant le discours d'un dynamiteur d'expérience, je trouve un excellent secondeur aux remarques que j'ai faites à l'effet que notre loi est inutile et que la loi fédérale peut s'appliquer et régler les problèmes que vise l'honorable ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: La loi fédérale n'est pas suffisante.

M. PAUL: Sur quel point?

M. CHOQUETTE: C'est la raison pour laquelle nous sommes obligés... Pardon.

M. PAUL: Sur quel point en particulier?

M. CHOQUETTE: En particulier, la loi fédérale ne réglemente pas du tout la possession de la dynamite. Un règlement a été passé à la suite de cette loi qui cherche à réglementer la possession, mais on sait que ce règlement n'a eu aucune application pratique, et on peut douter de la légalité de ce règlement aussi. Je me permets d'ajouter cet argument qui est très important.

Dans le cas actuel, il s'agit principalement de réglementer la possession de la dynamite. Comme le sait l'honorable député, l'article 26 de la loi fédérale autorise les gouvernements provinciaux et même les municipalités à adopter, soit une législation ou soit une réglementation sur la dynamite, qui vient compléter la législation et la réglementation fédérales. Alors il ne peut pas y avoir d'incompatibilité entre la législation fédérale et notre législation.

M. PAUL; M. le Président, nous n'avons jamais parlé d'incompatibilité de lois. Il peut peut-être y avoir incompatibilité de caractères mais nous n'avons jamais parlé d'incompatibilité de lois. Nous avons dit que c'était une loi qui n'avait pas l'urgence signalée spécialement par l'honorable premier ministre dimanche dernier.

Nous avons dit qu'une législation existait dans les statuts fédéraux et qui pouvait régler les problèmes que voulait régler le premier ministre. Je sais que le ministre doit partir en voyage; incidemment, nous lui souhaitons un excellent voyage à Halifax. Je suis sûr qu'il n'aura pas l'imprudence des déclarations de son collègue, le ministre des Affaires municipales.

M. CHOQUETTE: Halifax, c'est fatal. M. DEMERS: C'est brumeux.

M. PAUL: J'inviterais le ministre à soumettre à ses fonctionnaires, juste pour leur édification personnelle, la définition que l'on trouve à l'article 4 - J du chapitre 102...

M. CHOQUETTE: Article 4 du chapitre 102. M. PAUL: ... des statuts révisés duCanada.

M. CHOQUETTE: Oui, mais que peut-on faire si le fédéral ne le fait pas? Ici, nous agissons, cela est évident, dans les limites de notre compétence constitutionnelle. En plus, nous agissons ici à la suite de l'article 28 de la loi fédérale qui dit que la province peut adopter une législation ou qu'une municipalité peut adopter une réglementation sur la question des explosifs.

Je ne vois pas la portée de la critique de l'honorable député de Maskinongé lorsqu'il nous dit que le gouvernement fédéral pourrait réglementer ce que nous déterminons par notre projet de loi. Si le gouvernement fédéral ne l'a pas fait ou ne l'a pas fait à notre satisfaction, je pense qu'il incombe au gouvernement provincial actuel d'adopter une législation appropriée.

M. PAUL: Il va y avoir duplication de permis.

M. CHOQUETTE: Pardon?

M. PAUL: Il va y avoir duplication de permis. Deux permis seront nécessaires.

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas une mauvaise affaire.

M. DEMERS: Deux permis.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 7, adopté. Article 8? L'honorable député d'Abitibi-Est.

M. TETRAULT: A l'article 8, vous parlez de garder les explosifs dans un bâtiment ou dans un contenant conforme au règlement. On remarque, dans certaines réglons où il y ades mines, que c'est gardé dans une petite cabane ou dans des constructions au milieu d'un champ. Est-ce que ces endroits seront vérifiés pour s'assurer que c'est conforme au règlement?

M. CHOQUETTE: L'honorable député a tout à fait raison de poser la question. Il pourra constater, à l'article 22 du projet de loi, que le lieutenant-gouverneur en conseil devra adopter des règlements pour compléter cette législation, parce qu'il est impossible de prévoir tous les cas pratiques dans un texte de loi comme celui-ci. Il pourra constater que les pouvoirs réglementaires prévus à l'article 22 du projet de loi nous permettent d'adopter des règlements qui soient suffisants pour que les poudrières et les cabanes où l'on garde la dynamite soient gardées en toute sécurité et que l'on puisse éviter le vol.

Je peux ajouter qu'il y a également, en vertu de la Loi des mines, une réglementation sur la question spécifique soulevée par le député dans le domaine minier, en particulier. Il faudra revoir cette réglementation pour qu'elle nous donne pleine satisfaction sur la garde des explosifs qui sont conservés par les compagnies minières.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, à l'article 8, également, j'aimerais demander au ministre s'il est prévu dans les règlements que, pour l'entreposage des explosifs dont on ne fait pas usage, sur certains chantiers de construction, soit de routes ou autres, on oblige les détenteurs de ces permis à avoir des gardiens près des endroits où l'on entrepose la dynamite.

M. CHOQUETTE: On sait que la plupart des vols de dynamite qui ont été commis dans les dernières années l'ont été sur des chantiers de construction, dans des carrières, en somme, dans des endroits où l'on utilise la dynamite à l'occasion de la construction ou de ladémolltion. C'est la raison pour laquelle l'intervention du député est tout à fait à point. J'attire son attention, en particulier, sur l'article 26, sixièmement, qui dit ceci: « Pour fixer les conditions d'utilisation, de destruction, de manipulation, d'emmagasinage, de vente et de transport des explosifs ».

A l'intérieur de cela, il ne nous est pas impossible d'adopter une réglementation efficace. L'honorable député peut être assuré que, dans le domaine des chantiers de construction, il y aura des impératifs qui résulteront de la réglementation et qui nous assureront que les explosifs seront bien gardés.

M. PAUL: M. le Président, dois-je comprendre que dans cette dernière partie de ses remarques, le ministre se réfère à un arrêté en conseil daté du 22 octobre 1969 et dont on peut trouver reproduction dans le no 52 de la Gazette du Québec, 1969, à la page 7242? Pourrait-il nous dire s'il a l'intention également d'apporter des modifications à cet arrêté en conseil? Ce que vient de nous dire le ministre est déjà contenu dans l'arrêté en conseil relatif à l'utilisation, à l'usage des explosifs sur les chantiers de construction.

M. CHOQUETTE! Je connais l'arrêté en conseil en question et je sais quand et comment il a été adopté. C'est un arrêté en conseil qui résulte de la Loi des établissements industriels et commerciaux et qui, par conséquent, vise particulièrement les explosifs dans le domaine de la construction, n'est-ce pas?

Maintenant, je ne suis pas un expert dans les mesures de garde que l'on peut adopter à l'égard des explosifs. Je n'aurais pas la prétention de dire à la Chambre: Eh bien, nous allons prendre telles dispositions concrètes, pratiques pour assurer une bonne garde. Nous allons consulter les autorités de la Sûreté, nous allons consulter nos inspecteurs dans ce domaine et nous allons adopter une réglementation qui préviendra les vols de dynamite comme ceux qu'on a connus dans le Québec, parce que, manifestement, la réglementation qui a été adoptée dans ce domaine était insuffisante. C'est tout ce que je peux répondre à l'honorable député.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Olier.

M. PICARD: Dans le domaine de la réglementation, est-ce que le ministre a l'intention de prévoir une réglementation telle qu'il soit interdit d'entreposer au même endroit et les dé-

tonateurs et la dynamite, les deux au même endroit? A ce moment-là, s'il y a vol, il faudra qu'on commette deux vols pour utiliser la dynamite.

M. CHOQUETTE: L'idée du député est intéressante. Evidemment, si on veut qu'il y ait des explosions légales quelque part, à un moment donné il faudra réunir détonateur et dynamite. Par conséquent, il y aura toujours un moment ou un endroit où il y aura une rencontre des deux. Je ne sais pas s'il nous sera possible de réglementer d'une façon aussi sévère que voudrait le faire le député, mais nous allons sûrement considérer sa suggestion.

M. PAUL: M. le Président, je ferais remarquer à l'honorable ministre de la Justice que ces dispositions existent déjà sous la rubrique 42 dudit arrêté en conseil où il est dit que les détonateurs doivent être placés dans une pièce différente de celle où sont placés les explosifs. Cette disposition existe déjà dans la réglementation adoptée par l'ancien gouvernement.

M. CHOQUETTE: Je pense qu'elle existait même en vertu de la réglementation fédérale.

M. PAUL: Oui.

M. CHOQUETTE: C'est-à-dire que pour la garde, pour éviter que les détonateurs partent d'eux-mêmes et fassent exploser la dynamite, on a spécifié qu'il fallait que les poudrières soient distinctes. Mais il ne faut pas oublier que l'ensemble de cette réglementation a été adopté surtout pour la sécurité des ouvriers qui travaillent dans le domaine de la construction; c'était normal aussi, je suis tout à fait d'accord. Le problème de la sécurité des ouvriers est un problème majeur, mais l'optique de la réglementation à laquelle a fait allusion le député de Maskinongé tout à l'heure — celle adoptée en vertu de la Loi des établissements industriels et commerciaux ainsi que la réglementation du fédéral — est une optique qui est du domaine de la sécurité des employés et non pas une optique comme celle qui nous inspire à l'occasion de la présentation de ce projet de loi, c'est-à-dire prévenir la possession illicite ou illégale de matières explosives quelles qu'elles soient. C'est un point de vue quelque peu différent. Evidemment, ces optiques se rejoignent dans beaucoup de domaines, comme l'a signalé le député d'Olier, comme vient de le signaler le député de Maskinongé, mais l'optique qui préside au présent projet de loi est une réglementation de la possession. Il s'agit de limiter, en somme, l'ac- cès aux explosifs aux seules personnes qui en font un usage légal et de limiter également la quantité que l'on peut se procurer de façon qu'elle soit adéquate seulement pour les besoins de celui qui va l'utiliser.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: Je formule tout simplement la suggestion que voici pour répondre à celle de l'honorable député d'Olier. La réglementation fédérale est très claire là-dessus; il y a un nombre de pieds déterminé entre la poudrière où est entreposée la dynamite et l'autre endroit où se trouvent les détonateurs. A ce moment-là, peut-être qu'une copie, tout simplement, de cette réglementation fédérale suffirait pour, enfin, sur le plan provincial, avoir quelque chose de bien clair là-dessus.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté? Le député d'Olier.

M. PICARD: Sur la remarque du député, je m'explique mal alors les reportages des journaux lorsqu'il y a vol de dynamite et qu'on dit qu'à tel endroit il y a eu 200 bâtons de dynamite de volés et 150 détonateurs. Il semble que la réglementation actuelle ne soit pas suffisante. Il semble que ce soit dans le même édifice, contrairement à ce que dit le député de Maskinongé, qu'on entrepose la marchandise. Je dis que le règlement que le conseil des ministres sera appelé à adopter devrait prévoir qu'il y aura une distance, disons de deux milles, entre les détonateurs et la dynamite. Ils seront obligés alors de commettre deux vols pour s'équiper d'explosifs.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté Article 9, adopté. Article 10, adopté. Article 11, adopté. Article 12, adopté. Article 13, adopté. Article 14, adopté. Article 15, adopté. Article 16.

M. PAUL: Sur l'article 14, avec votre permission, celui qui veut obtenir un permis et qui se voit refuser l'octroi d'un tel permis par la Sûreté du Québec a un appel devant qui?

M. CHOQUETTE: Devant le procureur général.

M. PAUL: Est-ce que la décision est finale?

M. CHOQUETTE: La décision du procureur général est finale.

M. PAUL: Est-ce que ce sera le procureur général ou un comité au sein du ministère?

M. CHOQUETTE: Le procureur général, ordinairement, cherche à agir sur l'avis de ses conseillers. Je pense que c'est l'expérience de l'ancien ministre de la Justice. Dans le domaine des décisions qu'il était obligé de prendre et que je suis obligé de prendre, je ne dis pas que je suis toujours l'avis de mes conseillers, mais je les consulte.

M. PAUL: Vous êtes toujours bien conseillé?

M. CHOQUETTE: En général, je dois dire que je suis bien conseillé.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 14, adopté. Article 15, adopté. Article 16, adopté. Article 17, adopté.

M. BURNS: Est-ce que le ministre pourrait nous dire, étant donné qu'à l'article 17 on voit que ce seront les membres de la sûreté du Québec qui vont voir à l'application de ça — d'abord, ça va demander un grand nombre de membres de la Sûreté du Québec — si ça demandera un accroissement de l'effectif de la Sûreté du Québec?

M. CHOQUETTE: Nous allons former une escouade qui sera spécialement chargée de l'application de cette loi. Comme on a pu le constater par un article en particulier qui a été adopté tout à l'heure, certains membres de la Sûreté auront comme fonction d'accorder des permis ou non. C'était là le régime qui existait durant la guerre alors que, je crois, c'étaient les officiers de la Gendarmerie royale qui émettaient les permis pour la possession d'explosifs. Ce régime a donné d'excellents résultats. Ce qui veut dire qu'en pratique, nous avons l'intention, dans chacun des districts du Québec, d'avoir un ou plusieurs officiers qui seront désignés pour émettre des permis. On pourra s'y adresser, avoir une réponse extrêmement rapide après une vérification de la quantité de dynamite voulue. Quant aux inspecteurs d'explosifs qui sont désignés comme tels dans l'article 17, ce sont ceux qui vont se rendre chez les entrepreneurs, dans les mines, dans les carrières pour vérifier quelle est la quantité d'explosifs en possesion de ces établissements et pour vérifier leur permis.

Les permis vont prendre la forme de visas, de passeports plutôt, où l'on aura inscrit les quantités que ces possesseurs ou utilisateurs de dynamite peuvent avoir en leur possession, et la quantité utilisée. Ensomme, ils seront obligés de garder une comptabilité de l'utilisation. Nos inspecteurs seront nommés en nombre suffisant pour faire ces vérifications, et vérifier les lieux d'entreposage.

Quant au personnel exact requis, il est possible que, dans un avenir rapproché, ceci requière l'augmentation du personnel de la Sûreté. Il est très possible que ceci l'entraîne comme conséquence. Ce sera avec l'expérience, je pense, que nous pourrons juger des besoins de personnel additionnel.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 17, adopté?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18?

M. BURNS: M. le Président,...

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: ... à l'article 18, surtout que l'on vient de voir à l'article 17 que ce sont des membres de la Sûreté provinciale qui font ces inspections-là, il y a peut-être quelques craintes que l'on peut soulever à ce moment-ci dans l'application concrète de la loi.

Je suis bien d'accord qu'il devrait être difficile de faire dire à la loi ce que l'on veut lui faire dire en changeant ce texte-là, sauf qu'il y aurait peut-être lieu, pour le ministre de la Justice — je me pose la question — qu'au moment de la mise en application de la loi, les instructions appropriées soient données aux membres de la Sûreté pour éviter que cet article 18 soit utilisé, peut-être dans des intentions bien louables, par la Sûreté, mais pour contourner un peu le système du mandat de perquisition. Vous avez ici une possibilité de la part des membres de la Sûreté et des inspecteurs en question d'aller voir en tout temps et d'inspecter en tout temps.

Le ministre de la Justice a-t-il l'intention de donner des instructions très précises à l'escouade en question pour éviter que cet article 18 soit utilisé à d'autres fins que celles pour lesquelles il a été conçu?

M. CHOOQUETTE: L'honorable député peut être assuré que le ministre de la Justice est aussi conscient que lui des possibilités qui existent toujours, lorsque l'on a un pouvoir d'inspection comme celui-ci, que ces pouvoirs soient, en somme, étendus par ceux à qui on le confie,

c'est-à-dire qu'il dépasserait les cadres de l'article 18. Il ne faudrait pas qu'à la faveur des pouvoirs qui leur sont autorisés, ces inspecteurs d'explosifs abusent de ce pouvoir d'inspection, soit pour ennuyer des citoyens pour d'autres fins, ou soit pour faire des demandes exagérées d'inspection.

Alors, je compte que Je pourrai faire comprendre aux membres de la Sûreté d'utiliser ces pouvoirs à bon escient.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18? Adopté. Article 19? Adopté. Article 20? Adopté. Article 21? Adopté. Article 22? Adopté. Article 23? Adopté. Article 24? Adopté. Article 25? Adopté. Article 26?

L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: Juste une brève question. A l'article 25, c'est une question d'application. Est-ce que le ministère à l'intention de faire de la publicité au sujet de la mise en vigueur de cette loi auprès des fournisseurs pour que les gens ne se fassent pas prendre un peu de court avec ça? Parce qu'il y a un délai de 60 jours pour obtenir les permis, il est possible que des gens se fassent surprendre par la mise en vigueur de la loi. Est-ce qu'il y a quelque chose de prévu en ce qui concerne la publicité qui sera donnée à cette loi chez les fournisseurs ou chez les gens qui, normalement, achètent...

M. CHOQUETTE: Je note la suggestion du député et nous allons nous mettre en communication avec l'Office d'information et de publicité du Québec pour savoir quel programme d'information peut être élaboré à l'égard du public, programme qui ne serait pas trop coûteux, de façon que ce public soit au courant de l'obligation qui lui est faite en vertu de l'article 25.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 25, adopté. Article 26?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 27?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 27, adopté.

M. CHOQUETTE: M. le Président, si vous me permettez de revenir à l'article 22, je pense qu'il y a une disposition qui manque, à la fin de cet article, au sujet de la publication des règlements dans la Gazette officielle, de façon qu'ils n'entrent en vigueur qu'au moment de cette publication. Cela répond peut-être en même temps, en partie, à la question soulevée par le député de Maisonneuve sur l'article 25, mais seulement en partie.

Alors, nous pourrions ajouter un amendement, c'est-à-dire un paragraphe à la fin de l'article 22: « Ces règlements entrent en vigueur à la date de leur publication dans la Gazette officielle du Québec ou à toute autre date ultérieure qui y est fixée. »

Je crois que c'est classique comme façon de s'exprimer sur ce sujet.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'amendement proposé par le ministre de la Justice, à l'article 22, est-il adopté?

UNE VOIX: Adopté.

M. HARDY (président du comité plénier): M. le Président, le comité a adopté le projet de loi numéro 35 avec un amendement.

M. LAVOIE (président): Est-ce que la motion est adoptée?

M. BERTRAND: Adopté. Troisième lecture. Adopté.

3e lecture

M. LE PRESIDENT: Motion de troisième lecture. Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. BERTRAND: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté. M. LAPORTE: Troisième lecture. M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LAPORTE: Le bill de M. Tetley. Le bill 34.

M. PAUL: Ah cela, c'est grave!

M. BERTRAND: Là, il va y avoir de la casse!

M. PAUL: Cela fait longtemps que nous l'attendons.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu propose la deuxième lecture du projet de loi numéro 34, Loi modifiant la Loi des licences.

Licences

M. TETLEY: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

M. BERTRAND: Très bien. Adopté.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, adopté.

Comité plénier. Troisième lecture. Adopté,

M. BERTRAND: Adopté. Vous pouvez partir.

M. TETLEY: J'avais un magnifique discours à prononcer.

M. BERTRAND: Le discours en même temps que votre repas.

M. PAUL: Vous le donnerez à la Gazette.

M. LAPORTE: Conjointement, presque, les articles 3 et 4, les bills 2 et 3. Troisième lecture des deux projets de loi.

M. CARDINAL: M. le Président, pour qu'on s'entende, il y a eu un accord fait à la commission permanente des Institutions financières, coopératives, etc. Nous pourrions peut-être adopter le projet de loi numéro 3 immédiatement, parce qu'il a été débattu en commission et, pour ne pas mêler les deux projets de loi, parce que nos règlements nous le défendraient, nous pourrions adopter le projet de loi numéro 2 tout de suite après, sur lequel j'aurais quelques remarques à faire.

M. LAPORTE: Je suis tout à fait d'accord.

Caisses d'épargne et de crédit

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la troisième lecture du projet de loi numéro 3, Loi modifiant la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Cette motion sera-t-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté. M. CARDINAL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

Associations coopératives

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la troisième lecture du projet de loi numéro 2, Loi modifiant la Loi des associations coopératives.

M. Jean-Guy Cardinal

M. CARDINAL: M. le Président, c'est tout simplement pour me conformer à l'entente que nous avions eue, vendredi dernier. Les cloches nous ont appelés en cet auguste lieu, alors que nous entreprenions l'étude, en commission permanente, du projet de loi numéro 2. J'avais alors, pour faciliter le travail de cette commission, dit avec le ministre de la Justice, que nous étions d'accord sur le projet de loi, sauf quelques remarques qui pourraient être faites en Chambre, au moment de la troisième lecture. Avec votre permission, je me permets donc ces remarques.

Au sujet du projet de loi numéro 3, les journaux — certains d'entre eux au moins — se sont dits surpris, en fin de semaine, que j'aie fortement insisté sur le fait que le projet de loi numéro 3 avait été, tout d'abord, un projet du gouvernement de l'Union Nationale. Je ne vois pas quel est le scandale qu'il y a dans ceci. Je me permets, à nouveau, au sujet du projet de loi numéro 2, de rappeler que, le 11 mars 1970, l'ex-ministre, député de Limoilou, M. Maltais, dirigeant alors le ministère des Institutions financières, avait proposé un projet de loi portant le numéro 2 et qui s'intitulait Loi modifiant la Loi des associations coopératives.

De même, le ministre de la Justice d'aujourd'hui, le député d'Outremont, nous propose un projet de loi no 2, Loi modifiant la Loi des associations coopératives. Il est à noter que la fédération que l'on appelle Co-op Habitat, dont font partie la plupart des coopératives d'habitation, s'est efforcée, ces dernières années, de donner suite aux études faites précédemment sur l'orientation et la restructuration souhaitables du mouvement coopératif d'habitation, de même qu'on l'a fait avec la fédération des Caisses populaires.

Au 31 mars 1970, il y a donc un certain temps, cette fédération avait réalisé la construction d'environ 2,500 logements pour un coût total de $30 millions. Il est à noter qu'il ne s'agit pas de logements subventionnés par l'Etat ou de logements pour les assistés so-

ciaux. Il s'agit plutôt de projets coopératifs au véritable sens du terme, dont le coût en général est inférieur de 15% au coût du marché actuel de la construction.

Les institutions financières du mouvement coopératif du Québec, dans un geste de solidarité, ont mis à la disposition de cette fédération Co-op Habitat l'argent nécessaire pour assurer le financement temporaire requis pour la réalisation de ce projet. J'ai étudié très sérieusement et le projet de l'ex-ministre Maltais et le projet du ministre actuel de la Justice. Je crois qu'il n'y a rien, sauf des détails de concordance, sauf le fait que la Loi de l'assurance-dépôts a été adoptée entre-temps et sauf que le projet no 3 couvre dans le fond toute la substance de ce bill, qui permette à l'Opposition officielle de s'opposer à ce projet.

Tout au contraire, nous ne pouvons, fidèles aux engagements que nous avions pris avant le déclenchement des élections, le 11 mars dernier, qu'être favorables à ce projet de loi qui vient protéger ce nom de Co-op ou de coopératives qui a été abusivement utilisé par certains petits groupes pour donner l'impression qu'ils construisaient des logis à prix modique. Les différences entre les deux projets de loi sont tellement mineures qu'il me fait plaisir de souligner que c'est une continuité qui s'établit entre les deux gouvernements en faveur d'une fédération qui a manifesté par ses réalisations la justification de son existence et qui pourra sans doute dans l'avenir être encore plus importante pour le Québec où, dans le domaine des logis à prix modique, il y a vraiment une lacune. Nous ne pouvons donc qu'être d'accord avec ce projet de loi. Si j'ai réservé ces quelques remarques en troisième lecture, c'est faute de n'avoir pu les faire auparavant à la commission. Par conséquent, nous n'avons aucune réserve à faire et je serais d'accord pour que nous adoptions en troisième lecture, sans même passer par le comité plénier, ce projet de loi no 2.

M. LAPORTE: Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de troisième lecture sera adoptée? Adopté.

M. LAPORTE: Article 10, M. le Président.

M. LE PRESIDENT; L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche...

M. LAPORTE: Ministre intérimaire du ministère des Transports.

M. LE PRESIDENT: ... intérimaire du ministère des Transports, propose la deuxième lecture du projet de loi no 25, Loi modifiant le code de la route.

Code de la route

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

Le bill 25 n'a pour but que de présenter des modifications urgentes au code de la route. Ce projet ne remplace pas un projet plus vaste de révision du code de la route qui sera présenté ultérieurement.

Le but des présents amendements est de prévenir ou, tout au moins, de diminuer les hécatombes que nous avons connus ces jours derniers sur nos routes au Québec. Ces accidents sont causés par les imprudences et souvent par l'insouciance de certains usagers de la route. En imposant des peines plus sévères dans ce projet et en accélérant les procédures devant les tribunaux, nous pensons apporter un remède dans l'immédiat.

L'article 1 a pour but de permettre un meilleur usage des autoroutes en portant la limite de vitesse à 70 milles à l'heure et en interdisant une vitesse inférieure à 40 milles à l'heure aux véhicules trop lents qui constitueraient un obstacle à la circulation des autres véhicules.

L'article 2 décrète l'imposition, en outre des pénalités déjà prévues, d'une peine d'emprisonnement à un conducteur qui contrevient à l'article 50 du code de la route concernant toute vitesse et toute action imprudente susceptible de mettre en péril la sécurité, la vie ou la propriété.

Cet article 2 a aussi pour objet de porter de $10 à $20 la pénalité minimum dans les cas d'infraction aux articles du code de la route traitant de la circulation des véhicules: conduite à droite, croisements, dépassements, passages à niveau et autobus d'écoliers.

Il hausse également les pénalités en cas de récidive. Il contient, en outre, des dispositions de concordance. Quant à l'article 3 de ce projet, il permet au gouvernement d'établir le tarif des honoraires payables aux greffiers, aux huissiers, aux constables, aux avocats et aux témoins dans les poursuites effectuées suivant le code de la route.

Ces honoraires feront partie des frais de la cause. Ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Cette disposition s'appuie sur un arrêt de la cour d'Appel concernant un renvoi relativement aux dépenses en vertu de la Loi des

convictions sommaires du Québec, rapporté en 1962, Banc de la reine, page 533.

La cour a alors soutenu qu'une disposition semblable à celle proposée à l'article 3 était valide. L'article 3-B) du présent projet permet au juge ou au magistrat chargé d'entendre une poursuite suivant le code de la route d'accepter un rapport signé par la personne en autorité qui a constaté l'infraction, au lieu d'exiger la présence à l'audition de cette personne. Le rapport doit être dressé suivant un modèle approuvé par le gouvernement. Un prévenu peut toutefois exiger la présence de ce témoin à l'audition. Mais, s'il est reconnu coupable de l'infraction et si le tribunal est d'avis que le rapport eût été suffisant, ce prévenu peut encourir des frais additionnels.

Enfin, l'article 4 de ce projet porte de $1 à $2 les frais de l'avis sommaire qui doit être envoyé avant toute poursuite pénale, comme on le sait. Cette réglementation est due à l'augmentation inévitable des frais d'administration.

Enfin, l'article 5 permet au lieutenant-gouverneur en conseil de réglementer la vitesse dans les municipalités, si le besoin s'en fait sentir.

En conclusion, comme ces mesures présentent un caractère d'urgence, je crois, M. le Président, qu'elles devraient être adoptées le plus tôt possible.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, nous devons féliciter l'honorable ministre de la présentation de ce projet de loi qui avait été analysé et scruté par son prédécesseur, l'honorable député de l'Islet, à l'époque, M. Fernand Lizotte.

J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que l'honorable ministre n'a pas mis de côté cet excellent travail qui a été accompli par une commission spéciale, crée lors des deux dernières sessions — elle était présidée par l'ancien député de Yamaska, qui pourrait servir d'excellent exemple au député actuel de ce comté — aux fins d'examiner tous les amendements qui s'imposaient pour répondre aux besoins de notre circulation moderne.

J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que le gouvernement se propose de présenter, probablement dans le cours de la prochaine session, une autre législation pour moderniser notre loi et peut-être la rendre plus conforme à celle qui peut exister dans d'autres provinces.

Le gros changement qui se produit en vertu de cette loi a trait aux honoraires qui seront maintenant à la charge du prévenu, de l'accusé devant les tribunaux. C'est, sous une forme déguisée, une certaine taxe, une certaine charge...

M. LAPORTE: C'est vrai. Si c'est un impôt qui peut chasser ce commerce-là du Québec, tant mieux.

M. PAUL: Oui, M. le Président, et j'arrivais justement à cela.

M. LAPORTE: Ah bon!

M. PAUL; C'est une mesure renouvelée parce qu'autrefois cette mesure était appliquée. Le gouvernement Lesage, dans un geste de générosité, avait aboli ces charges qui, autrefois, devaient être payées par les contrevenants à l'une ou l'autre des dispositions de la Loi du code de la route. Il n'est que normal que celui qui se prétend non coupable ou innocent d'une infraction qui lui est reprochée ait à assumer les frais de cour lorsqu'il succombe devant les tribunaux.

D'ailleurs, c'est la politique mise en application dans les causes civiles. Je n'ai aucun doute, cependant, que le juge aura toujours, en certaines circonstances, entière discrétion d'imposer ou non les frais du procureur à celui qui sera trouvé coupable d'une infraction au code de la route.

Cette loi va certainement contribuer à mettre fin à cette hécatombe d'accidents que l'on déplore, surtout durant les fins de semaine, alors que nous avons à regretter la perte de 30, 35 et même parfois 40 citoyens du Québec qui décèdent sur nos routes par suite d'une imprudence commise soit par le chauffeur ou par un tiers venant à sa rencontre ou le dépassant.

Tous les accidents ne sont pas mortels, mais les dommages qui en découlent sont devenus aujourd'hui une charge. Nous avons peut-être là l'explication de la hausse constante des polices d'assurance. Devant ces démons de la vitesse, qui ne se recrutent plus, suivant les dernières statistiques, dans cette catégorie de 18 à 25 ans, mais dans la catégorie de 25 à 35 ans, nous devons prendre tous les moyens possibles pour amener une certaine sécurité sur nos voies publiques.

Ceux-là qui récidiveront devront supporter les conséquences de leur imprudence, de leur entêtement, de leur négligence parfois criminelle. Ce projet de loi est excellent, parce qu'il est présenté par l'honorable ministre, et sur-

tout parce qu'il a été bien préparé par son prédécesseur. Cet excellent mariage des activités des deux ministres vous permet d'apprécier toute la quintessence et la valeur de ce projet de loi que nous appuierons en deuxième lecture.

M. LAPORTE: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre intérimaire des Transports propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier

M. HARDY (Président du comité plénier): Article 1.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Un instant. M. LAPORTE: Article 1, adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté. Article 2?

M. LAPORTE: Adopté. M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté. Article 3?

M. LAPORTE: Adopté.

M. DUMONT: A l'article 3, on détermine que le lieutenant-gouverneur peut établir le tarif des honoraires qui peuvent être accordés aux greffiers, aux huissiers, aux constables, aux avocats, aux témoins. Le ministre ne croit-il pas, dans ce cas, qu'il peut y avoir certains abus et qu'il peut y avoir, de ce fait, des procès qui deviennent, pour certains individus, très dispendieux?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il ne fait pas de doute, M. le Président, que, jusqu'à maintenant, au contraire, les coûts étaient loin d'être convenables par rapport à l'époque où nous vivons. Je pense qu'avec la hausse du coût de la vie et la hausse de toutes les procédures, il s'imposait de laisser une certaine liberté au ministre, qui la recommanderait à ses collègues du cabinet, si cela devenait nécessaire.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté? Adopté. Article 4? Adopté. Article 5? Adopté. Article 6? Adopté.

M. le Président, le comité a adopté le projet de loi no 25 sans amendement.

M. LAVOIE (président): Troisième lecture. M. BERTRAND: Troisième lecture. 3e lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre propose la troisième lecture du projet de loi no 25. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, je remercie les membres de cette Chambre de la célérité qu'ils viennent de démontrer en acceptant cet excellent projet de loi et je remercie le député de Maskinongé de ses remarques. J'ai ici un tableau qui, s'il était distribué à tous les membres de cette Chambre pourrait, je pense, aider à comprendre l'article 50, vitesse excessive, et l'article 66-4, même si c'est un peu sous forme sténographique. Je demanderais donc qu'on le distribue à chaque député.

M. LAPORTE: Troisième lecture. Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LAPORTE: M. le Président, le dessert, il est rare qu'on l'ait avant le repas, mais avant d'aller dîner, nous pourrions également proposer l'article no 13, Loi autorisant des prêts à certains pêcheurs commerciaux.

M. PAUL: Cela peut être long.

Prêts aux pêcheurs

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche propose la deuxième lecture du projet de loi no 30, Loi autorisant des prêts à certains pêcheurs commerciaux.

2e lecture

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la

province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

Le 19 mai 1970. comme ministre responsable du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, j'interdisais la pêche commerciale en eau douce dans une vaste région du Québec, parce que les poissons de ces eaux étaient contaminés par le mercure. Ce problème de contamination du poisson par le mercure a été constaté pour la première fois au Canada en novembre 1969 lorsque des scientifiques ont trouvé que les poissons de la rivière Saskatchewan contenaient des quantités anormales de mercure.

Au mois de mars 1970, des analyses ont révélé qu'une situation semblable existait dans les Grands Lacs et que les poissons étaient pollués par le mercure. Dans chacun de ces cas, les captures des pêcheurs ont été saisies et détruites en vertu de la Loi sur l'inspection du poisson. A la suite de ces constatations, le ministère fédéral des Pêches et des Forêts a commencé, en collaboration avec les provinces, un vaste programme d'analyse dans le but de connaîttre l'étendue des régions affectées par cette pollution et de déterminer les organismes qui en sont responsables.

Dans la province de Québec, ces analyses ont révélé que des poissons provenant des eaux de la rivière Outaouais, entre Hull et le fleuve Saint-Laurent, des eaux du fleuve Saint-Laurent entre la frontière québécoise, dans le lac Saint-François, et le pont de Trois-Rivières ainsi que des eaux de la baie Missisquoi et de la rivière Richelieu contenaient des quantités de mercure supérieures au maximum permis pour la consommation humaine.

Dans le but de protéger le consommateur contre les dangers de cette pollution, le ministère que je dirige a décidé de suspendre toute activité de pêche commerciale dans les eaux ci-haut mentionnées. Comme cette pollution présente des dangers surtout pour les personnes qui mangent régulièrement du poisson, on n'a pas jugé nécessaire, pour l'instant, de mettre fin aux activités de la pêche sportive. On a tout simplement recommandé aux amateurs de réduire autant que possible la consommation des poissons capturés au cours de leurs excursions de pêche.

La fermeture de la pêche commerciale dans la région mentionnée affecte 111 pêcheurs, la plupart à revenu modeste, qui à des degrés divers comptent sur ce travail pour assurer leur subsistance. La moyenne du revenu total de ces 111 pêcheurs pour les trois dernières années est d'environ $250,000 par année. Il ne serait pas juste que ces pêcheurs perdent leur gagne-pain habituel parce qu'une pollution causée par des industries vient endommager le milieu aquatique.

Le projet de loi a donc pour but d'autoriser le ministère à administrer un programme de prêts aux pêcheurs affectés par la fermeture de la pêche commerciale et à avancer à chacun d'eux une somme correspondante à leur revenu moyen annuel.

Ces sommes leur permettront de passer cette période difficile et ils rembourseront ces avances lorsqu'ils auront été indemnisés par les industries responsables de cette pollution.

Au cours de rencontres préliminaires, le ministère fédéral des Pêches et des Forêts s'est dit prêt, comme il l'a fait pour d'autres provinces, à conclure avec le Québec une entente par laquelle il s'engage à avancer la moitié des sommes qui seront prêtées aux pêcheurs et à partager les frais d'administration de mise en application de ce programme.

Les principaux usagers de mercure au Canada sont les fabriques qui produisent du chlore et de la soude caustique au moyen d'un procédé électrolytique. Le plus grand nombre de ces usines se trouvent concentrées le long du fleuve Saint-Laurent. On a estimé à près de 200,000 livres la consommation annuelle de mercure par les fabriques de chlore et de soude du Canada dont un pourcentage considérable remplace le mercure perdu dans les affluents d'usine.

Ces affluents sont donc une des principales causes de la contamination des lacs et des rivières par le mercure. Un comité formé de représentants de plusieurs ministères, Tourisme, Chasse et Pêche, Industrie et Commerce, Affaires municipales, et du ministère fédéral des Pêches et des Forêts sera chargé de la mise en application du programme de prêts. Des membres de ce comité rencontreront les pêcheurs pour leur expliquer le programme de notre ministère et leur indiquer les procédures à suivre pour obtenir un prêt. Chaque demande sera étudiée individuellement et discutée avec le pêcheur intéressé.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: Lorsque nous avons étudié les crédits de l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, cette question a été soulevée concernant la situation vraiment déplorable qui était imposée à ceux qui, de mon comté et d'ailleurs dans cette région sise à l'est des Trois-Rivières, se trouvaient dans l'obligation de recourir à l'assistance sociale pour leur permettre de subvenir aux besoins les plus vitaux de leur famille.

La déclaration du ministre, à l'époque, avait créé un certain enthousiasme et les pêcheurs étaient confiants d'avoir un certain soulagement que pourrait éventuellement leur apporter le ministre par une législation dont la teneur, cependant, les a grandement déçus. Vous comprendrez que ces pêcheurs à faibles revenus n'ont pas d'économies et voici que le gouvernement — je sais que cela ne dépend pas du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, mais des implications financières. Comme le ministre n'est pas responsable des Finances, elle doit se soumettre aux exigences de celui qui est titulaire de ce ministère. Je dis donc que ces pêcheurs sont grandement déçus. On va leur consentir un prêt avec ou sans intérêt. La conséquence sera la suivante, c'est que l'an prochain, pour autant que leur permis de pêche sera renouvelé, ces pêcheurs seront dans l'obligation de rembourser l'argent dont ils auront bénéficié cette année pour leur permettre de subvenir aux besoins de leur propre famille. J'ai eu l'occasion d'en rencontrer quelques-uns en fin de semaine et je crois qu'une fédération ou une association quelconque a été mise sur pied. Les directeurs de cette association se proposaient de rencontrer le ministre pour discuter de cette législation et de toute autre mesure susceptible de les aider dans la situation difficile qu'ils traversent.

Je vous dirai qu'à la lumière des renseignements que je leur ai transmis par le texte de loi dont nous étions en possession depuis la fin de semaine dernière tous m'ont répondu: Dans les circonstances, nous sommes mieux de nous adresser à l'assistance sociale que de nous prévaloir des dispositions de ce projet de loi. S'ils bénéficient de l'assistance sociale, ils ne seront pas dans l'obligation de rembourser leur argent. Tandis que, s'ils veulent se prévaloir des dispositions du bill 30, ils devront, l'an prochain — sans savoir quel sera, à ce moment-là, l'intérêt de la clientèle dans le marché du poisson, vu l'énorme publicité qu'à juste titre on a faite cette année sur les dangers que présente la consommation de ces poissons — avec des revenus incertains, en plus de faire face aux obligations normales de leur famille, rembourser au ministère au moins une partie du capital, même s'ils ont l'avantage de bénéficier d'un prêt sans intérêt.

Je dis donc que cette législation ne règle pas le problème. Cette législation ne secourt véritablement pas les pêcheurs qui se sont vu priver de leur gagne-pain à la suite de certaines ordonnances ou recommandation des autorités fédérales. M. le Président, j'exprime les vues des intéressés et je suis sûr que le ministre a déjà été sen- sibilisé à la réaction d'un très grand nombre de ces 111 pêcheurs qui attendaient beaucoup plus du gouvernement. Ils espéraient que le gouvernement leur donne directement une subvention, parce qu'ils ont à faire face à une situation qu'ils n'ont pas voulue et le gouvernement non plus.

Mais, puisque le gouvernement montre à leur égard un certain intérêt, ils avaient raison de croire qu'ils pourraient bénéficier d'une subvention directe grâce à cette entente intervenue ou à intervenir avec les autorités fédérales. Puisque ce dernier gouvernement est si empressé de secourir, par exemple, les cultivateurs de l'Ouest en leur donnant de l'argent pour qu'ils n'ensemencent pas leurs terres, ils avaient espéré que, pour l'Est, le gouvernement fédéral, dans un geste de coopération à l'endroit de la province, aurait pu consentir certaines sommes d'argent pour les dédommager des pertes qu'ils subissent durant la présente année.

Je sais, M. le Président, que la situation s'améliore. Les informations sont à l'effet que la présence du mercure aurait diminué de 50% depuis le printemps et que, de mois en mois, cette situation s'améliore.

Un autre problème mérite d'être souligné, c'est l'obligation dans laquelle se trouveront placés ces pêcheurs de prendre des procédures en remboursement des dommages qu'ils subissent. Ce n'est pas facile pour ces économiquement faibles de retenir les services d'un avocat pour assurer une certaine indemnité ou compensation des dommages qu'ils subissent.

Il faudra qu'ils établissent une certaine responsabilité en vertu des règles de notre code civil, spécialement celles prévues aux articles 1202 et suivants.

Une certaine preuve, une certaine relation devra être faite entre l'exploitation de l'usine poursuivie, la présence du mercure et les dommages qu'ils subissent. Voilà autant de difficultés, M. le Président, qui font que ces pécheurs sont grandement déçus et n'oseront pas se prévaloir des avantages purement théoriques que leur offre ce présent projet de loi. Il est à espérer, M. le Président, que, suivant les dispositions de l'article 3 et grâce à la collaboration que le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche pourra obtenir d'Ottawa, des concessions beaucoup plus avantageuses puissent être consenties au Québec, afin que ces pêcheurs, affectés par cette directive du gouvernement fédéral et des autorités du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, portée à leur attention dans les premiers jours du mois de mai, puissent avoir une planche de salut et non pas une panacée qui, en fait, ne réglerait rien.

Je dis donc, M. le Président, que le projet

de loi tel que présenté est un idéal économique d'aide sociale, mais qui, en pratique, ne porte pas secours aux pécheurs affectés par cet empêchement de faire la pêche commerciale, dans cette partie sise à l'est de Trois-Rivières, spécialement dans le lac Saint-Pierre et dans le fleuve Saint-Laurent. Je ne serais pas surpris — d'ailleurs l'honorable ministre pourra le constater — que ces pécheurs préféreront de beaucoup se prévaloir des lois de l'assistance sociale plutôt que de cette législation qui, en fait, ne présentera aucun avantage pécuniaire pour eux.

Cependant, M. le Président, comme la collaboration — du moins c'est ce qu'on déclare à grands principes, avec de fortes déclarations — et les relations sont excellentes entre Ottawa et Québec, nous espérons que le charme du ministre pourra convaincre les autorités fédérales. La connaissant comme un excellent plaideur, je suis sûr qu'elle pourra plaider avec avantage, et succès surtout, la cause des pécheurs commerciaux affectés par cette loi. C'est sous cet aspect, M. le Président, que nous voulons appuyer le principe du bill, quitte à ce que chacun de nous, après en avoir analysé toutes les implications, puisse convaincre les intéressés de bénéficier ou de se prévaloir des avantages consentis par cette loi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mégantic.

M. Bernard Dumont

M. DUMONT: M. le Président, comme quand le bill nous a été présenté en première lecture, nous aurions plusieurs observations à faire. A notre point de vue, il ne va pas assez loin dans les deux sens, d'abord parce qu'il n'aide pas suffisamment le pécheur pénalisé par des circonstances dont il n'est pas responsable. Par la suite, je l'avais souligné, M. le président, de mémoire d'homme je me souviens que l'eau salée commence à Montmagny. Je trouve que ce projet de loi devrait inclure la zone qui va de Trois-Rivières à Montmagny, par exemple. Ce sont des pêcheurs qui sont aussi pénalisés, des pêcheurs qui ne continueront pas à gagner leur vie; il y en a à Saint-Michel-de-Bellechasse, il y en a dans Lotbinière, de ces gens qui avaient un revenu. Il me semble que ce projet de loi devrait les inclure, parce que, selon l'explication que nous avons eue du ministre, il n'était pas question de ces régions.

J'ose espérer qu'il sera possible de présenter des amendements, que les revendications de ces pêcheurs oubliés viendront assez vite, et qu'on permettra à ces gens de bénéficier de ce début de loi qui, nous l'espérons, pourra par la suite être amélioré.

En fait, je le disais au début de mes observations, ces pêcheurs ne sont pas responsables de cette situation, mais ils sont obligés de la subir. Il est regrettable que des usines déversent, tout en polluant l'eau, dans notre plus belle richesse, le fleuve Saint-Laurent, ce mercure qui oblige les gens à ne même pas consommer de poisson. Je disais, l'autre jour, que de Trois-Rivières à Montmagny, le poisson se rend dans ce coin, et s'il est empoisonné à Trois-Rivières, il peut aussi l'être fort bien à Montmagny.

Il y a peut-être, dans ce bill 30, quelque chose qui nous fait plaisir, n'en déplaise au député de Maskinongé, bien que je n'aime pas trop l'intrusion du gouvernement fédéral. Il me semble qu'il aurait pu trouver un autre moyen d'aider le gouvernement. On a déjà entendu des réflexions de la part de certains ministres, ou même du premier ministre: Négociation de millions qui laissaient liberté complète, pendant que là, on parle, dans le projet de loi, de 50 - 50. Il y a cependant un article qui nous fait plaisir, soit l'article 1: Prêt avec ou sans intérêt. Nous faisons le souhait que ce soit véritablement sans intérêt et que, de ce fait, tout le monde en cette Chambre en soit satisfait

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.

M. Philippe Demers

M. DEMERS: M. le Président, je voudrais ajouter simplement un mot aux propos qu'a tenus mon collègue de Maskinongé. Dans mon comté, au niveau de Yamachiche et de Pointe-du-lac, il y a un certain groupe de pêcheurs qui vivent eux aussi de la pêche. Cest leur seul revenu. Ils sont pour la plupart très pauvres, et en hiver, ils vivent de l'assistance sociale. Je me demande si le prêt qui leur sera consenti ne les disqualifiera pas au point de vue du bien-être social. Comment pourront-ils remettre ces montants de $2,400 qui leur seront vraisemblablement prêtés tant par le provincial que par le fédéral? Je ne vois en aucune façon comment cette loi peut améliorer le sort de ces gens. S'ils sont inscrits, le temps qu'il faudra, au bien-être social, ils pourront obtenir à peu près de $2,300 à $2,400 par année; c'est exactement le même montant qu'ils ne seront pas obligés de rembourser aux deux gouvernements. Je comprends les intentions du ministre. Elles sont très louables. Je la

félicite d'avoir mis ce projet de l'avant, mais je voudrais que ce fût un prêt à fonds perdu. Que ce soit une donation à ces gens qui ne vivent que de pêche.

Il faudrait nécessairement qu'on enlève le mot « prêts » et qu'on leur donne une subvention. Ce sera un montant de $125,000 qui partira des coffres du provincial. Que ce montant parte du ministère du Bien-Etre social ou du ministère du Tourisme de la Chasse et de la Pêche, c'est le même contribuable et nos gens n'auraient pas besoin de rembourser. C'est le voeu que Je formule. Je suis pour le principe. Je dis que c'est une loi qui n'est ni bonne ni mauvaise. Je voterai tout de même pour le principe de la loi, mais je me demande ce que ça va donner à ces pauvres pêcheurs qui sont victimes d'une pollution qui doit exister depuis bien des années et qui a été découverte tout récemment.

M. LE PRESIDENT! Le droit de réplique de l'honorable ministre.

Mme Claire Kirkland Casgrain

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, les deux leaders parlementaires de l'autre côté de la Chambre m'ont paru passablement pessimistes lorsqu'ils se sont exprimés. Peut-être ne sont-ils pas au courant qu'une loi analogue a été mise en vigueur en Alberta. La, les pêcheurs étaient groupés dans une association — comme ils le sont d'ailleurs en Ontario — et à la suite de prêts qui leur ont été faits, l'association centrale a intenté des poursuites contre les firmes qui polluaient les eaux de mercure, a été remboursée et les pêcheurs ont même obtenu plus que le montant que leur pêche annuelle leur rapportait normalement. C'est l'expérience de Terre-Neuve.

Tout à l'heure, le député de Maskinongé semblait dire que le charme du ministre pouvait aider. Or, il n'est pas question du charme du ministre, mais d'équité. Je suis persuadée que nous serons traités de la même façon que l'Ontario, 1'Alberta et Terre-Neuve. Nous ne pouvons faire d'analogie avec ce qui se passe, par exemple, dans le domaine de l'agriculture parce que dans l'Ouest canadien en ce qui concerne la pêche commerciale le gouvernement fédéral a fonctionné de la même façon, par des prêts avec les gouvernements provinciaux.

Plusieurs options ont été étudiées, évidemment, et nous ne sommes pas les seuls ici dans la province à en être venus à cette conclusion que c'était la solution logique pour vraiment rémunérer les pêcheurs qui étaient privés de leurs revenus de trois mois durant l'année.

L'Ontario a un projet analogue au nôtre et on sait cependant que nous avons une difficulté au Québec parce que jusqu'à récemment nos pêcheurs n'étaient pas groupés en association. Mais justement, ils sont conscients du problème et ils se sont groupés récemment. Ainsi, le gouvernement provincial pourra intervenir dans les poursuites contre les compagnies qui polluent les eaux.

Il est question de prêts. Il me semble que c'est autrement mieux que de se prévaloir des lois d'assistance sociale, autrement on porte atteinte au respect et à la dignité de ces gens-là. Je ne vois pas comment on porte atteinte à la dignité de ces gens-là. D'ailleurs, on ne crée pas un précédent avec cette loi. Il est fort possible que, l'été prochain, les choses rentrent dans l'ordre. D'après les enquêtes que j'ai faites et mes conversations avec des scientifiques, il y a de grandes chances que, l'été prochain, la situation soit rétablie. D'ailleurs, toutes les compagnies qui polluaient les eaux dans cette région que j'ai mentionnée ont cessé, pour une bonne partie, de le faire.

Je dirais plus, elles ont remboursé les associations de pêcheurs, avant même que la cause soit inscrite en cour, dès qu'il y a eu une lettre de réclamation. La publicité, leur était extrêmement nocive, elles n'étaient pas intéressées à ce qu'elle se fasse. Je pense que la façon dont le gouvernement, mon ministère en particulier, a décidé d'agir est logique parce qu'elle respecte la dignité des pécheurs. Ils sont assurés d'un revenu et on les aidera à obtenir un remboursement des compagnies qui polluent les eaux et qui causent cette haute teneur de mercure.

Pour ce qui est de la région de Trois-Rivières à Montmagny, je comprends que la pêche, dans cette région, relève de mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce. Nous savons qu'à l'heure actuelle il n'y a pas lieu d'accorder ces prêts parce que la teneur de mercure n'est pas dangereuse. On n'a pas encore prohibé la pêche dans cette région. Si on devait le faire, il y aurait toujours possibilité d'avoir une loi analogue, qui pourrait être rétroactive. Je ne veux pas m'engager pour mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, mais il n'y a pas de doute qu'il y aurait moyen de trouver une solution pour venir en aide à cette autre catégorie de pêcheurs qui peuvent avoir des problèmes plus tard.

M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier. Adopté?

M. LAPORTE: M. le Président, peut-être pourrions-nous suspendre... Est-ce que c'est adopté en comité?

M. LE PRESIDENT: Non, non. M. PAUL: Non, non.

M. LAPORTE: Non, c'est ce que je disais. Alors, on pourrait s'entendre pour suspendre jusqu'à sept heures trente, plutôt que sept heures, à moins que la Chambre ne s'y oppose farouchement.

M. PAUL: Nous pensions d'aller jusqu'à huit heures.

M. LAPORTE: Eh bien, n'y pensez plus! Le travail va bien et, si vous le vouliez, le travail recommencerait à sept heures et demie. On pourrait faire une autre excellente soirée et cela donnerait une heure et demie pour le dîner.

UNE VOIX: Il faut fêter le premier ministre.

M. LAPORTE: Cela aussi me suggère de ne pas aller jusqu'à huit heures.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à dix-neuf heures trente.

Reprise de la séance à 19 h 33

M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre! Article 1.

Comité plénier

M. PAUL: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre quelles sont les formalités à suivre pour celui qui veut se prévaloir des avantages de cette loi et à qui il doit s'adresser? Est-ce qu'il y a des formules spéciales d'émises ou en voie de préparation pour la présentation de sa demande? Quels sont les documents qui doivent être produits? Sur quels critères va se baser le ministère pour considérer et accepter la demande d'aide d'un pêcheur ou d'un commerçant de pêche, lorsqu'il voudra présenter cette demande?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, il y aura des formules spéciales. Le comité dont j'ai parlé, lors de la première lecture, lorsque j'ai expliqué le projet, va rencontrer les pêcheurs. Pour ce qui est des critères, les voici:

Premièrement, un pêcheur devra posséder un permis de pêche commerciale pour l'année 1970.

Deuxièmement, il devra faire sa demande par écrit, à l'aide de formules spéciales qui lui seront soumises.

Troisièmement, le prêt accordé à chaque pêcheur sera basé sur la moyenne du revenu déclaré pour les trois dernières années, selon les statistiques que ces mêmes pêcheurs remettent régulièrement au ministère de l'Industrie et du Commerce.

Quatrièmement, la somme maximum prêtée à chaque individu sera approximativement 70% de son revenu brut.

Cinquièmement, il n'y aura pas de limite inférieure de prêt. Après discussion, il a été convenu que fixer une limite minimum de revenu pour obtenir un prêt pourrait entraîner des protestations et des plaintes, et qu'il serait préférable, lors des discussions avec les pêcheurs, d'inciter ceux qui ont un faible revenu à ne pas se prévaloir de cette possibilité de prêt qui représenterait pour eux beaucoup plus d'inconvénients que d'avantages.

M. le Président, une remarque a été faite par le député de Maskinongé à l'effet que les pêcheurs qui auraient un revenu et qui auraient ce prêt seraient obligés, dès le début de la saison, de l'utiliser pour rembourser. Ils ne seront pas obligés de rembourser tant qu'eux-mêmes ne seront pas payés par les industries qui polluent les eaux.

M. PAUL: Est-ce qu'il y a — je crois que c'est à l'article 2 — une date limite à la présentation d'une demande d'assistance? Est-ce qu'un pêcheur doit, avant une date donnée, présenter officiellement sa demande d'assistance?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non. Nous n'avons pas prévu de limite dans la loi, ce qui assure une certaine liberté aux pêcheurs.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: Quel serait le taux de l'intérêt, si intérêt il y a? Est-ce que vous avez l'intention de prêter avec ou sans intérêt et, s'il y a intérêt, à quel taux?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non. Lorsqu'ils auront été remboursés, les pêcheurs seront peut-être obligés de payer de l'intérêt. S'ils le sont, ce sera au taux du marché.

M. DEMERS: Sur la formule qu'ils vont signer, est-ce qu'il y aura un taux d'intérêt inclus?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ce sera décidé au moment où on leur présentera la formule.

M. DEMERS: Cela sera par les règlements que le ministre fera et qui seront approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Absolument.

M. DEMERS: Vous ne pouvez pas nous assurer qu'il n'y aura pas d'intérêt?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il n'y aura pas d'intérêt tant que les pêcheurs ne seront pas remboursés.

M. DEMERS: Si les pêcheurs ne sont jamais remboursés, ils ne paieront jamais d'intérêt, ils ne rembourseront jamais?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non, probablement pas.

M. PAUL: Je vois, au paragraphe 2 de l'article 1, qu'il peut aussi, dans les mêmes circonstances, consentir un prêt à une personne. Doit-on entendre exclusivement une personne physique ou une personne morale, c'est-à-dire est-ce qu'une compagnie peut se prévaloir des mêmes avantages?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela peut être une personne morale ou une personne physique. Il faut que ce soit une personne qui vit exclusivement de la pêche, même une compagnie, mais qui vit exclusivement de la pêche. Je pense qu'il faudrait peut-être souligner ici que ceci a pour but de prévenir toutes les demi-mesures qu'il pourrait y avoir, car une foule de marchands pourraient tenter de se bénéficier de cette loi.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2.

M. PAUL: On sait qu'en vertu des dispositions de notre code de procédure il faut que nous ayons un intérêt pour réclamer devant les tribunaux. Or il arrive qu'à l'article 2 on ne semble pas vouloir respecter cet impératif de notre code de procédure, puisqu'on permet au ministre de la Justice de se joindre à un ou à des réclamants.

Nous savons que la plupart de ces pêcheurs devront d'abord essayer d'établir d'où vient la pollution, d'où vient le mercure. Selon la preuve sommaire qui pourra être recueillie, l'action sera dirigée vers les usines établies le long du fleuve Saint-Laurent. Si je m'en rapporte, par exemple, aux pêcheurs de la baie Missisquoi, qui sont également compris dans cette classification ou dans ce nombre de 111, ils devront, eux, exercer un recours exclusivement contre les compagnies de New York, qui sont la principale cause de la présence du mercure dans les eaux de la Baie Missisquoi et du lac Champlain.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le dernier problème que souligne le député de Maskinongé est de nature internationale, et nous avons l'assurance du ministre fédéral des Pêcheries, M. Davis, qu'il nous aidera à résoudre ce problème.

Quant à l'article 2, on a au moins intérêt à récupérer l'argent prêté et à rendre justice aux gens qui subissent quand même des préjudices considérables.

M. PAUL: Ce n'est pas suffisant, M. le Président, de réclamer au nom d'un prêteur. Le prêteur va réclamer pour autant que l'emprunteur ne satisfait pas à ses obligations. Ce n'est pas un principe reconnu par nos tribunaux que le prêteur ait un intérêt suffisant pour présenter une réclamation devant les tribunaux.

C'est seulement en cas de faute de la part de l'emprunteur qu'il peut y avoir à ce moment-là subrogation à l'exercice d'un droit.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le député se plaignait justement cet après-midi que les pauvres pêcheurs, croyait-il ne seraient pas aidés. Mais Justement, le gouvernement est peut-être mieux outillé que l'association des pêcheurs peut l'être, ou le pêcheur individuellement. C'est une façon d'aider le pêcheur.

M. DEMERS: Est-ce que c'est l'équivalent d'une assistance judiciaire qui va être fournie par le ministère de la Justice?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cette aide sera technique et judiciaire.

M. DEMERS: Oui.

M. PAUL: M. le Président, je comprends que le ministre ne peut peut-être pas nous fournir la liste des compagnies présumément en faute. Mais le ministre conviendra que si cette liste était communiquée aux intéressés, ils seraient probablement plus empressés à exercer un recours immédiat.

Ceci leur permettrait peut-être de réclamer leurs propres dommages sans se prévaloir des dispositions de cette loi et d'être indemnisés immédiatement, non pas d'un montant nominal, mais des dommages réels qu'ils peuvent subir. Il y a des pêcheurs commerciaux qui, dans mon comté, par exemple, subissent des pertes de près de $15,000. Ils sont donc intéressés, devant le manque de revenus et la situation financière dans laquelle ils sont placés, à recouvrer personnellement si possible, des dommages, tout en ne voulant pas se servir des dispositions de cette loi.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, nous connaissons certaines des compagnies qui causent la pollution. Il n'y a pas de doute que je prends bonne note de votre remarque. Nous avions justement l'intention de prévenir ces compagnies qui causent ce préjudice aux pêcheurs. Elles seront avisées en temps utile. J'imagine que ce ne sera pas nécessaire d'aller jusqu'au procès. L'expérience nous a d'ailleurs démontré qu'en Ontario, dès qu'ils ont reçu une lettre de mise en demeure, il y en a très peu qui se sont rendus jusqu'aux procédures. Ils ont réglé avant cette étape-là.

M. PAUL: M. le Président, ma demande n'était pas en faveur des compagnies, mais plutôt en faveur des pêcheurs eux-mêmes qui, pour la plupart, ne sont pas très instruits et ne connaissent pas le ou les auteurs de ces dommages. Je comprends que les remarques de l'honorable ministre auront sans doute pour effet de faire cesser cette pollution par le mercure, mais cela ne réglera pas la situation passée et l'état de fait devant lequel se trouvent placés beaucoup de pêcheurs commerciaux.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: J'ai parlé tout à l'heure d'aide technique et judiciaire; c'est justement l'aide que nous allons donner à ces pêcheurs.

M. PAUL: Très bien.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.

Article 3?

M. PAUL: M. le Président, à cet article, l'on voit que le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche peut convenir de certaines ententes avec le gouvernement du Canada pour l'application de la présente loi. Est-ce que le ministre pourrait, à l'occasion de ces discussions, signaler aux autorités fédérales que ces pêcheurs, durant la saison froide, bénéficiaient de prestations d'assurance-chômage, par suite de contributions en timbres qu'ils versaient à la caisse de la Commission de l'assurance-chômage? Il est très probable qu'ils seront dans l'Impossibilité de retirer des prestations durant la prochaine saison, du moins les prestations saisonnières qui couvrent la période du 1er décembre au 15 mai.

Peut-être le ministre pourrait-il discuter d'un amendement possible ou de certaines concessions de la part des autorités fédérales pour que ces gens qui auraient bénéficié depuis deux ou trois ans de prestations d'assurance-chômage durant la saison froide puissent être automatiquement qualifiés, reconnus comme qualifiés, pour recevoir lesdites prestations durant la prochaine saison froide.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le problème a été soumis au gouvernement fédéral. Un haut fonctionnaire du ministère, le docteur Corbeil, qui m'accompagnait, et moi-même avons souligné ce problème au ministre responsable, M. Jack Davis, et je peux vous dire qu'il est à l'étude.

M. PAUL: Très bien.

M. DEMERS: Est-ce que l'entente est signée actuellement?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Pas encore.

M. DEMERS: C'est encore au stade des études?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Encore, oui. C'est-à-dire qu'il y a des négociations en ce moment et c'est en bonne voie de règlement.

M. DEMERS: Les négociations porteraient sur la contribution de 50-50 par le provincial et le fédéral pour un montant approximatif de $250,000? C'est à peu près cela?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, et il y a d'autres problèmes connexes au problème de la pêche commerciale.

M. DEMERS: Est-ce que le fédéral va intervenir sur la pollution? Absolument pas?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y a certaines usines que nous connaissons qui polluaient les eaux et qui ont été averties, justement, par le gouvernement fédéral.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3? Adopté? Adopté. Article 4?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5?

M. PAUL: Adopté.

M. HARDY (président du comité plénier): M. le Président, le comité a adopté le bill no 30 sans amendement.

M. LAVOIE (Président): Troisième lecture?

Troisième lecture M. LAPORTE: Troisième lecture, adopté?

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Bills nos 23 et 24

M. HOUDE (Limoilou): J'ai l'honneur de faire rapport que la commission des Finances a adopté le bill 23, sans amendement et a adopté tous les articles du bill 24 sans amendement.

M. LAPORTE: M. le Président, peut-être, à la suite de pourparlers que nous avons eus avec les chefs des différents partis, pourrions-nous nous entendre pour franchir l'étape du comité plénier et voter les deux projets de loi en troisième lecture.

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Le rapport est-il adopté?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Troisième lecture?

M. BERTRAND: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LAPORTE: M. le Président, avec un délai de quelques secondes qui permettra au ministre des Affaires municipales...

Article 5.

M. BERTRAND: Le projet de loi de la ville de Montréal...

M. LAPORTE: Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Le ministre devrait être ici d'une seconde à l'autre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. L'honorable ministre des Affaires municipales.

Charte de Montréal

M. BERTRAND: Discours.

M. TESSIER: M. le Président, cette loi est plutôt de la nature d'un bill privé, puisque, il s'agit en effet, d'amender la charte de la ville de Montréal. Cependant, vu que des élections municipales doivent se tenir dès le mois d'octobre à Montréal et qu'il avait été décidé qu'aucun bill privé de municipalité ne serait présenté au cours de la présente session, le gouvernement se fait le parrain de cette loi.

Elle a pour but principal de donner le suffrage universel aux prochaines élections municipales de la ville de Montréal. Il convient, toutefois, de souligner que le projet de loi no 5 est une mesure essentiellement temporaire, puisque toutes les dispositions législatives régissant actuellement les élections municipales, qu'il s'agisse de lois générales, telles que la Loi des cités et villes

ou le code municipal, ou encore de lois spéciales telles que la charte de Montréal, seront remplacées par une nouvelle loi générale unique s'appliquant à toutes les municipalités du Québec, laquelle sera soumise à cette Chambre lors de la reprise de nos travaux à l'automne.

Je puis même ajouter que cette loi est actuellement prête et rédigée, mais vu qu'elle comporte au-delà de 500 articles et que son étude pourra par conséquent être assez laborieuse, étant donné qu'elle s'appliquera à toutes les municipalités, qu'elle dérogera à toutes les dispositions qui existent dans toutes les chartes des municipalités, que ce soit la ville de Montréal ou la ville Québec. Cette loi, vu son importance, sera donc présentée au cours de la session d'automne.

Dans cette optique, on ferait donc fausse route en cherchant à trouver, dans le projet de loi no 5, un remède à tous les maux qui affligent, selon certains, la loi électorale provinciale, comme on ferait fausse route en y recherchant une refonte complète des dispositions électorales de la charte de Montréal. En présentant ce projet de loi, le gouvernement veut accorder, comme je l'ai mentionné, le suffrage universel, c'est là son principal but, comme le prévoient d'ailleurs les lois générales, et en étant plus généreux encore, puisque ce suffrage universel s'applique aux citoyens de 18 ans et plus. Comme on le sait, actuellement, aux élections municipales, la ville de Québec accorde le suffrage aux citoyens de 18 ans. Il s'agit donc de l'étendre maintenant, à la ville de Montréal et, par la suite, avec la loi générale des élections municipales, à laquelle j'ai fait allusion il y a un instant, de l'étendre à l'ensemble de toutes les municipalités du Québec.

Le projet prévoit également que le conseil n'a aucun contrôle sur la nomination du personnel électoral non plus que sur le déroulement de l'ensemble des opérations électorales. En effet, c'est le président d'élection qui est responsable de la nomination de ce personnel et de la bonne marche des opérations électorales. Le recensement se fera de la même façon que lors des élections provinciales et fédérales: dans les sections urbaines, des avis de révision et des listes électorales seront publiés dans les journaux. En ce qui a trait aux partis reconnus dans le domaine municipal, il faut dire que rien, dans les lois actuelles régissant les municipalités n'en écarte la possibilité, mais il faut ajouter que l'économie générale du système municipal n'a pas été conçue en fonction de l'existence de partis au niveau municipal.

Aussi serait-il absolument nécessaire, avant de s'engager dans cette direction, de mesurer en profondeur toutes les implications de ce chan- gement d'orientation dans l'économie de tout notre système municipal, je le répète.

Le but primordial de cette loi est d'accorder le suffrage universel tout en protégeant le plus possible les électeurs dans l'exercice de leur droit de vote.

M. Rémi Paul

M. PAUL: Cette loi nous est présentée aujourd'hui par le ministre des Affaires suivant un procédé inhabituel. L'on sait que le bill de la ville de Montréal a toujours été présenté à la commission des bills privés et des bills publics, sauf à de très rares exceptions. Cette coutume qui s'appliquait à la ville de Montréal ainsi qu'à toute les municipalités permettait à ceux qui avaient des recommandations à faire ou qui s'y opposaient d'être entendus par la commission d'exposer leur point de vue et de faire les recommandations qui s'imposaient pour que cette charte de la ville de Montréal contienne les modifications qui répondent le plus et le mieux possible à une bonne administration.

Je me demande pourquoi le gouvernement n'a pas suivi cette coutume. Dès le 15 février dernier, l'avant-projet de loi avait été soumis aux hauts fonctionnaires du ministère des Affaires municipales comme aux légistes du gouvernement pour qu'ils en revisent le texte, et ce projet de loi aurait du normalement être présenté devant la commission des bills publics vers la fin du mois de mars. Si le gouvernement avait procédé de cette façon, nous aurions eu l'avantage d'entendre, par exemple, la FRAP, qui nous aurait exposé les raisons pour lesquelles elle s'oppose à certaines modifications, à certains articles du bill, comme le droit de vote que l'on veut donner aux corporations.

Je dis donc que le gouvernement n'a aucune excuse de ne pas avoir pris les moyens nécessaires pour que ce bill soit étudié par la commission des bills privés et des bills publics. Ce qui a été fait la semaine dernière pour les Soeurs de la Providence de Joliette aurait pu être facilement fait pour le présent bill de la ville de Montréal.

C'est avec beaucoup d'intérêt que nous avons écouté les propos du ministre au sujet de cette refonte envisagée de notre système électoral au niveau municipal. Ceux qui l'ignoreraient seront heureux d'apprendre que cette loi tenait grandement à coeur au prédécesseur du ministre actuel, l'ancien ministre Robert Lussier, qui avait travaillé avec acharnement, avec beaucoup de soin, à la présentation de cette loi. Nous-même, nous avions déjà eu l'occa-

sion d'examiner au comité de législation cet avant-projet de loi qui a été préparé à la demande même de l'ancien ministre des Affaires municipales.

Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas signaler le travail excellent accompli par l'ancien ministre des Affaires municipales, Robert Lussier, et c'est avec plaisir qu'à l'automne, nous prendrons connaissance de cet avant-projet de loi. Le ministre actuel des Affaires municipales ne manquera pas alors de rendre un vibrant hommage à son prédécesseur, qui s'est spécialisé dans les législations volumineuses. Tous se rappelleront ces importants projets de loi des communautés urbaines de Montréal, de Québec et de Hull, sans compter les amendements très intéressants qu'il nous avait présentés au cours de la session 1968 relativement au code municipal et à la Loi des cités et villes.

Je dis donc que cette loi est acceptable, parce qu'elle n'est que transitoire. Lorsque nous aurons l'occasion d'étudier cette nouvelle loi électorale dont vient de nous parler le ministre, nous aurons certainement des remarques appropriées à faire afin de sauvegarder ce principe essentiel du suffrage universel dans une démocratie bien vivante.

Pour ce qui est des différents amendements que l'on retrouve dans cette loi, nous en approuvons le principe. Lorsque nous étudierons cette loi en comité plénier, nous verrons que la plupart des amendements proposés au bill 5 sont la transcription presque littérale de certains articles de notre Loi électorale, qui peut prêter à beaucoup de discussions ou de critiques, mais qui était une réforme importante de l'ancien système électoral que nous avions.

Je dis donc, M. le Président, qu'encore pour ce projet de loi le ministre des Affaires municipales n'a pas beaucoup de mérite, si ce n'est que d'être le porte-parole de ses fonctionnaires, le porte-parole des conseillers de la ville de Montréal, qui avaient pris soin, avec les légistes du gouvernement et avec les hauts fonctionnaires de terminer le texte qui nous est soumis aujourd'hui.

C'est pourquoi, M. le Président, en deuxième lecture, nous appuierons le principe de ce bill.

M. BERTRAND: Très bien.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mégantic.

M. Bernard Dumont

M. DUMONT: M. le Président, dans le bill 5 intitulé Loi modifiant la charte de la ville de

Montréal, je remarque surtout dans les notes explicatives que ce projet a pour principal objet de permettre à toutes les personnes domiciliées à Montréal et âgées d'au moins 18 ans de voter aux élections municipales.

Dans un tel bill, qui comporte 17 pages, on a l'impression que tout le monde a hâte d'entrer en vacances! Je me pose la question à savoir si, justement, le ministre a bien analysé toutes les implications de cette déclaration principale. Je ne dis pas que je me prononce contre le vote à 18 ans, mais je me demande si le ministre a bien analysé toutes les implications que cela peut comporter. J'en cite une entre autres, et je me demande s'il pourra tout à l'heure nous donner des explications. Supposons qu'un jeune de 18 ans soit élu conseiller ou qu'il devienne maire de la ville de Montréal.

A ce moment-là, comme il n'a pas le droit, juridiquement parlant, d'agir avant 21 ans, est-ce qu'il est prévu quelque chose dans la loi qui permettra à ces jeunes de 18, 19 ou 20 ans, ayant le droit de vote — supposons qu'on ne choisira pas, à Montréal, un maire aussi jeune, mais il pourrait être conseiller — d'exercer quand même une action?

J'ai l'impression que, dans ces 17 pages d'intervention qu'on peut lire sur les projets présentés, on devrait avoir eu le temps d'étudier plus à fond ce projet de loi.

Quand on voit que, dans une grande ville comme Montréal, il n'y a qu'à peu près 40% ou 45% des gens qui votent, je me demande si on ne devrait pas plutôt chercher la cause qui fait que cette quantité de gens ne sont plus intéressés à voter. Ils ont le droit de le faire à partir de 21 ans, quand leur santé leur permet de se rendre au bureau de votation. A mon sens, avant de donner le droit de vote à 18 ans, on devrait voir pourquoi cette population est apathique et ne semble pas tellement intéressée à continuer à exercer ce droit qui exprime encore notre liberté dans la province de Québec et dans le Canada.

M. le Président, il me semble donc — c'est la critique que je formule à ce moment-ci — qu'on nous présente un peu trop rapidement cette Loi modifiant la charte de la ville de Montréal et qu'on devrait en analyser les articles, ce qui nous donnerait le temps de nous documenter beaucoup plus à fond.

Enfin, lorsque le bill sera étudié article par article, nous aurons plusieurs interventions à faire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. Marcel Léger

M. LEGER: M. le Président, j'ai noté avec un sourire les excuses du ministre, tentant, d'une façon très habile, de nous expliquer au départ les lacunes du projet de loi qui s'en vient. Je trouve cela très habile, mais il n'est pas normal de laisser passer une si belle occasion d'être efficace. En effet, il aurait été possible de commencer une uniformisation de tout le système électoral du Québec par le bill 5 modifiant la charte de la ville de Montréal.

Je pense que cette réforme apportée par le bill 5 au régime électoral de la ville de Montréal est absolument incomplète, déficiente et, je dirais même qu'elle est en retard sur le régime électoral de la province de Québec. Je pourrais qualifier ce bill de cataplasme sur une jambe de bois, parce que le seul avantage que le régime électoral de Montréal nous apporte, c'est l'élection à date fixe. Or, ceci existait avant même la présentation de ce bill 5. C'est sûr que c'est le seul avantage que nous avons, parce que cela empêche quand même les partis d'être pris par surprise à l'occasion du déclenchement d'une élection.

On parle, dans ce bill, du suffrage universel à 18 ans. Ceci, quand même, risque d'être une fiction, si le régime électoral de Montréal n'est pas remanié dans son ensemble.

Les amendements proposés par le bill et qui s'inspirent vaguement de la Loi électorale du Québec ne suffisent pas, je pense, à consacrer dans les faits l'exercice du droit de vote et aussi l'efficacité de ce droit de vote. Avant d'en arriver à l'étude systématique des articles au comité qui va suivre, il est urgent et nécessaire d'en scruter à la loupe les principes.

Dans le monde urbanisé où nous vivons de plus en plus, je pense qu'il est essentiel qu'un gouvernement vise à atteindre le plus large consensus possible des citoyens qu'il a à administrer. Pour atteindre ce consensus, encore faut-il que l'ensemble des principes qui sous-tendent les projets de loi convienne de façon plus ou moins — disons plus que moins — approximative aux besoins de la population. Il est donc nécessaire que le gouvernement accepte d'être limité et surtout orienté par ces besoins. Un gouvernement qui ne tiendrait pas compte de cette évidence ne saurait prétendre être un gouvernement démocratique.

En ce qui concerne le bill 5, c'est d'abord et avant tout cette question qu'il importe de se poser. Dans les principes qui sont à la base de la rédaction des différents articles de ce bill, peut- on dire qu'on découvre un gouvernement réellement soucieux d'obéir au bien commun sous toutes ses formes de la population de Montréal? En fait, c'est la réponse à cette question qui permettra de juger de la valeur réelle de cette loi. Le système électoral de Montréal a un urgent besoin d'être réformé et nous ne pouvons qu'approuver l'idée de le moderniser. Il est proprement aberrant qu'en cette seconde moitié du 20e siècle, une des plus grandes métropoles de l'Amérique en soit réduite au système moyenâgeux du droit de vote basé sur le droit de propriété. Cette façon de conférer le droit de vote était déjà souverainement injuste et faisait une entorse de taille au principe d'égalité de tous les citoyens, principe qui est le fondement supposé de tout instrument démocratique.

Je dirais qu'en plus d'être injuste, démocratiquement parlant, ce système aura réussi jusqu'à maintenant et, puisqu'il n'est pas réformé, continuera encore à créer une longue tradition d'indifférence de l'ensemble des citoyens en face de la chose publique municipale. Le réveil politique municipal demeure encore chez nous, au Québec, quelque chose de nouveau. Il est manifeste que les tenants de ce réveil ont bien souvent commencé par réclamer le suffrage universel à 18 ans, afin de sauvegarder justement le principe dont je parlais plus haut. A ce sujet, il faut se réjouir quand même que le gouvernement ait accepté le principe du suffrage universel à 18 ans. C'est un pas dans la bonne direction, mais, il nous faut le constater, ce n'est qu'un pas bien timide. Ceux qui ont proposé cet amendement à ce bill ne semblent pas avoir profité de l'expérience funeste du 29 avril dernier. On devrait savoir qu'il faut plus que des réformes timides du genre du bill 5 pour éviter que des centaines de citoyens ne puissent se faire inscrire sur la liste électorale. Je pense qu'il faut plus que des « réformettes » pour que des personnes ne soient radiées injustement et d'une façon arbitraire. Je pense que les propositions qu'on nous présente sont suffisamment insignifiantes pour empêcher que des demandes d'inscription soient réellement acheminées pour permettre le vote et que des noms fictifs soient inscrits sur les listes. Je pense qu'il faut plus que des réformes timides pour que des personnes qui ne sont pas électeurs, qui ne sont pas citoyens, soient capables d'exercer un droit de vote qui ne leur appartient pas, permettant par la suite des « télégraphes » que l'on ne peut pas contrôler. Je pense qu'il faut plus que des réformes timides pour que des avis de radiation puissent être envoyés sans contrôler l'envoi et le récépissé. Je pense que même le style du bulletin de vote devrait être repensé

parce que cela donne lieu à une quantité de décisions arbitraires au niveau des bureaux de scrutin.

Dans mon comté uniquement, à l'élection provinciale, j'ai eu le record de votes rejetés soit 2,074, d'une façon très arbitraire; on semblait vouloir ma défaite à tout prix.

Il faut plus, je pense, pour éviter des failles dans ce système, que la présentation de ce projet de loi qui peut permettre encore que des élus ne soient pas réellement les représentants de la majorité de la population.

Je pense aussi que ce projet de loi ne touche même pas au problème des caisses électorales, et ceci empêche le principe de l'égalité des chances de tous les partis reconnus devant la population.

Je pense que ce projet de loi rate aussi une occasion de faire une amélioration des moeurs électorales dans toute la province et surtout dans Montréal. Pour épurer ces moeurs électorales, il faut repenser la loi pour empêcher que des bulletins de vote soient volés et parfois avant même qu'ils ne soient partis du bureau de l'imprimeur. Il faut que les scrutateurs et greffiers aient des pouvoirs discrétionnaires. Il faut empêcher qu'il y ait des irrégularités qui ne soient même pas notées, empêcher que la propagande des partis, durant la période de la publicité, ne soit pas contrôlée, et qu'on frôle tellement le libelle qu'on dépasse certainement de beaucoup l'éthique professionnelle. Je pense, en effet, que si on espère beaucoup de ce projet qui est devant nous, on a des chances dêtre déçu, à moins d'y apporter des correctifs sérieux.

Parler de démocratie, c'est parler de bien commun, c'est parler aussi de l'égalité de tous les citoyens devant les institutions politiques et c'est parler d'efficacité dans l'administration des fonds publics.

Or, ce projet de loi, d'apparence innocente, viole sans vergogne les quelques principes que nous venons d'évoquer. Peut-on dire qu'on respecte le suffrage universel énoncé dans le titre même du bill, lorsqu'on accorde le vote à ces personnes morales qui sont des compagnies, des sociétés commerciales, des corporations à fonds social, des sociétés, des associations, des syndicats?

Au nom de quel droit ces personnes peuvent-elles voter alors que, dans l'intention même du législateur, il reprend d'une main ce qu'il vient d'accorder de l'autre? Si un principe recèle toutes ces implications, il faut craindre que l'acceptation du vote des personnes morales dans ce projet de loi ne soit de ce genre de concessions qu'un homme ou qu'un gouvernement pratique pour tenter de contenter tout le monde et son père.

Je pense qu'au niveau des principes, ce projet de loi pèche déjà gravement contre l'égalité de tous les citoyens en matière politique en accordant le droit de vote à des compagnies.

En troisième lecture, c'est-à-dire au comité plénier, nous présenterons des amendements à cet effet.

Nous avions espéré que ce soit une erreur passagère du bill, mais il n'en est rien. Toujours au niveau des intentions du législateur, il nous faut constater que ce projet de loi pêche autant par ce qu'il dit que par ce qu'il omet.

A plusieurs points de vue, ce projet de loi apparaît comme un recul: aucune participation des partis d'opposition n'est prévue dans la procédure de recensement. Aucun mécanisme n'est prévu pour éviter le monopole de l'administration sortante sur la confection et la révision de la liste électorale. Le droit de vote est aussi accordé aux corporations et aux propriétaires non résidents, comme si on acceptait le fait que la propriété est synonyme du droit de vote.

Sur la carte électorale, le projet de loi 5 ne prévoit aucun changement, laissant, justement, des distorsions épouvantables de secteurs de vote, de districts. Par exemple, dans Saraguay, 305 électeurs vont voter pour un conseiller et être représentés par un conseiller, alors que, dans Mercier, près de 28,000 ne pourront avoir qu'un représentant, et que dans Rivière-des-Prairies 2,500 voteurs ont encore droit à deux représentants.

Tous savent, je pense, quel magistral soufflet a reçu la démocratie le soir du 29 avril lors de la proclamation des résultats du scrutin.

Plus d'un citoyen du Québec, partisan ou non, s'est senti mal à l'aise, sinon tout simplement révolté, en face de l'inéquation à peu près parfaite de la représentativité des différents partis qui composent la députation actuelle de l'Assemblée nationale.

Le principe ou l'idée d'un minimum d'égalité dans la représentation des élus a été battu en brèche ce soir-là de façon trop évidente pour que l'on puisse se boucher les yeux.

M. TESSIER: M. le Président, je formule un point d'ordre. Nous sommes à discuter du bill 5 et non pas de la Loi électorale provinciale. Or, le député de Lafontaine nous parle exclusivement de la loi provinciale.

UNE VOIX: Vous faites de la démagogie.

M. BURNS: M. le Président, cela ne fait peut-être pas plaisir au ministre, les propos

qu'a tenus le député de Lafontaine. Depuis le début, j'ai écouté religieusement ce que le député de Lafontaine était à nous dire. Il s'en est tenu, selon le règlement, à l'à-propos du bill. Je ne vois vraiment pas en quoi il déroge au règlement dans ses commentaires, présentement.

M. DUMONT: J'ai écouté moi aussi, le député de Lafontaine et je puis lui dire qu'il était à faire un très bon discours électoral.

M. LE PRESIDENT: J'ai écouté très attentivement l'exposé du député de Lafontaine. Je dirais que, dans 90% de son exposé, il respecte scrupuleusement le règlement. A l'occasion, il fait certaines analogies, certaines comparaisons entre la représentation des quartiers, et la représentation des comtés. Je lui conseillerais de continuer en limitant ses comparaisons.

Il faut surtout qu'il se rappelle bien que l'essence du bill est d'accorder le vote universel à 18 ans. Jusqu'ici, disons que je suis passablement satisfait de son exposé, sauf que ses analogies et ses comparaisons doivent être assez brèves. A quoi rattacher la représentation des comtés? Comme il le disait, dans Saraguay, 300 électeurs, dans Mercier... J'imagine qu'il pourrait proposer, en comité, un élargissement de la loi, mais pas à ce stade-ci du débat. Je lui demanderais de continuer en respectant le plus possible les principes mêmes du bill.

M. LEGER: Merci, M. le Président. Il faut quand même admettre que les meilleurs exemples peuvent clarifier les principes que l'on veut présenter. Devant le risque de créer une situation semblable à celle qui s'est passée, c'est une occasion toute désignée d'entreprendre par le bill 5 une réforme de la carte électorale de Montréal.

Tout citoyen, actuellement, en saine démocratie, est éligible à tout poste ou à toute fonction publique, à moins d'être privé au maximum, dans des cas prévus par la loi, de ses droits de citoyen. Ce principe, encore une fois, est limité par le projet de loi actuellement devant nous. Peut-on parler de véritable démocratie si, pour être éligible au poste de conseiller municipal ou de maire, il est nécessaire d'être inscrit au rôle d'évaluation ou au rôle des valeurs locatives de la ville?

Pour nous, cela semble être une bien curieuse tournure d'esprit. On dit accorder le suffrage universel à des personnes morales, très indéterminées dans le texte de loi, et on n'accepte même plus la même universalité dans la question d'éligibilité. Pourquoi ne pas plutôt innover un peu? Pourquoi ne pas tout simplement universaliser vraiment le droit de vote à 18 ans et l'éligibilité à 21 ans? Les incapacités de voter prévues par la loi deviendront automatiquement des cas d'empêchement d'éligibilité. Cela, à mon sens, ne requiert pas beaucoup d'imagination et permet à un gouvernement, qui se dit démocratique, de l'être aussi dans les faits.

Rien n'est prévu, non plus, dans le projet de loi pour les dépenses électorales. Cela fausse ainsi les chances égales, au départ, des partis qui veulent se présenter, au niveau des dépenses qu'ils peuvent faire du côté de la télévision, des médiums d'information. Je pense que le suffrage universel à 18 ans, à quelques mois de l'élection municipale, c'est un peu comme un cataplasme qu'on veut appliquer dans une des dernières villes du Québec où le droit d'éligibilité est encore confié à la minorité de personnes qui sont propriétaires ou contribuables à la taxe de location. Ceci exclut, à ce moment-là, des femmes et beaucoup de jeunes.

Aucun effort n'a été fait dans ce bill pour ébaucher des modifications en profondeur, aucun effort pour commencer à Montréal une réforme électorale urgente pour tout le Québec. Face aux élections municipales d'octobre, le gouvernement avait l'occasion de prouver sa sincérité et son sérieux, en donnant suite à ses intentions pieuses de remanier le régime électoral du Québec. Ceci augure très mal pour le projet de quelque 500 articles que le ministre actuel nous propose pour septembre.

Au lieu de réformes d'envergure, on propose des modifications qui ne mettraient même pas la loi de Montréal au niveau de la loi électorale du Québec. Je pense que, pour l'éligibilité et le droit de vote, on est encore plus sévère pour Montréal que, dans la loi électorale du Québec, pour élire les députés à l'Assemblée nationale. L'article 131 de la loi électorale du Québec dit qu'il suffit uniquement d'être majeur et d'être inscrit sur une liste électorale, ce qui suppose tout simplement la question de domicile à l'intérieur d'un secteur de vote, donc dans la province, 18 ans d'âge, être citoyen et n'avoir aucune incapacité.

A Montréal, il faut malheureusement rajouter — ce qui n'a pas été enlevé par le bill — le rôle d'évaluation et de valeur locative. Si on veut uniformiser tous les niveaux, il faut mettre fin à la confusion actuelle des différents modes d'élection au niveau des commissions scolaires, du municipal et du provincial. Dès que le suffrage universel est accepté, il faut rejeter tout critère d'éligibilité qui serait fondé sur la propriété

foncière. Une personne physique devrait équivaloir à un vote.

Quand, sur le plan des principes, on laisse le développement urbain dans Montréal aux mains des intérêts privés, même si le vote peut être minime, quand, sur le plan des principes, on permet d'être éligibles seulement aux personnes qui possèdent des biens ou qui sont inscrites sur la liste des personnes qui paient des taxes municipales, on permet alors à des trusts, à de grosses compagnies, à des spéculateurs, de présenter des candidats à qui, au nom même du principe sacro-saint de l'entreprise privée, est laissé le contrôle de la vie socio-économique des résidents de la ville de Montréal.

Quant à l'éligibilité, on laisse ce droit surtout à des politiciens issus de couches peut-être privilégiées, mais minoritaires. Par exemple, actuellement, près de 90% du conseil municipal de Montréal est composé d'hommes d'affaires, de commerçants ou de professionnels. Je pense qu'il est dangeraux, M. le Président, que ces personnes soient élues en trop grande quantité. Il en faut, c'est sûr, au point de vue de la qualité et de l'expérience qu'ils peuvent donner à la ville de Montréal. Mais, s'ils sont élus en trop grande majorité et que d'autres couches de société ne sont pas représentées, je pense qu'il est dangereux que ces personnes administrent en fonction seulement des intérêts des détenteurs du pouvoir économique et non selon les besoins des salariés.

Le caractère humain, je crois, devrait primer le caractère de propriété et de rentabilité. Ceci, je pense, est incompatible avec un régime électoral moderne et démocratique. On a oublié de faire disparaître cet archaïsme.

Quant au domicile que la personne doit posséder ou du lieu où elle doit demeurer pour avoir le droit d'être inscrite sur une liste électorale, il est important de noter la complexité de cette définition de domicile aux fins de désigner ceux qui ont le droit de vote. Seule une liste électorale permanente et unique, constamment mise à jour par des fonctionnaires du gouvernement peut pallier ces difficultés. Si on se fie seulement à la question de la demeure et des circonstances, on risque de déformer le sens de la démocratie.

Quant aux limites du droit de vote, j'ai peu de commentaires à faire, sauf que l'on peut se demander si tous les députés ici présents, mes confrères de l'Assemblée ici présents en vertu de l'article 8, auraient le droit de vote. En effet, a l'article 8, il est bien dit: « Ne peuvent voter à l'élection municipale que les personnes qui ont prêté serment d'allégeance à une puissance étrangère. »

M. LAPORTE: Quand vous êtes drôle, dites-le-nous. Nous allons rire.

M. LEGER: Je prévoyais que vous alliez écouter. Sur le principe d'une réforme du système électoral à Montréal, nous admettons qu'il s'agit là d'une urgence. Mais quant aux modalités de cette réforme, nous sommes obligés de constater que le gouvernement nous offre une loi timide, une « réformette, » laquelle ne peut même pas se prétendre soucieuse d'une véritable démocratie et des exigences qu'elle comprend. Le vote à 18 ans n'est qu'une poudre aux yeux parce que, premièrement, on accorde des concessions, style personne morale, et on oublie la réforme de la carte électorale, concession de type nettement colonial. Un valet, pour se gagner la faveur de son martre, n'agirait pas autrement.

Mais ce n'est pas du tout. Nous avons devant nous un gouvernement qui s'est fait élire au nom de l'efficacité administrative, et cette efficacité semble vouloir se manifester par de la poudre aux yeux. En effet, si l'on creuse un peu le projet de loi, on s'aperçoit que, par suite d'un manque d'organisation nationale, on prévoit encore ici toute une longue et sûrement dispendieuse procédure de recensement. Justement, dans trop de cas, dans le passé, le recensement nous a permis de constater une des faiblesses de notre système électoral. Dans trop de cas, soit par négligence, soit par fraude, soit par intérêt personnel, pécuniaire ou politique, des noms ont été oubliés sur les listes électorales. Des personnes décédées, des personnes qui étaient déménagées ont été inscrites, tandis que dans d'autres cas, par négligence ou peut-être par fraude, des bons noms ont été radiés sans avis et sans délai.

Seule, je pense, une liste électorale permanente peut corriger cette anomalie. On a souligné le coût élevé pour justifier le refus de cette liste électorale permanente. Mais cet argument est faible quand on constate que, dans les six mois qui vont suivre, il y aura deux recensements à faire et probablement trois: aux paliers municipal, scolaire et provincial. Ces recensements répétés, truffés d'erreurs et d'omissions entraînent des dépenses considérables et nécessitent un système de révision également très coûteux, de telle sorte qu'une liste électorale permanente coûterait moins cher que cette révision. Si, comme de raison, on sort l'argument qu'il est impossible, d'ici l'automne, de mettre sur pied un mécanisme pour prévoir cette correction, il faudrait au moins amender ce régime et permettre justement une nouvelle façon plus démocratique de faire le recensement et la révision. A ce jour, aucune participation des partis au pouvoir ou des

partis d'opposition n'est prévue, ni aucun contrôle pour permettre d'éviter les abus lors du recensement et de la révision.

En raison des élections, il faudra très bientôt effectuer ce recensement à Montréal. Le trésor public doit être très riche puisque c'est le deuxième que l'on prévoit, Je pense qu'ici on s'aperçoit que le gouvernement est incapable d'une action à long terme. Il est très loin des principes d'efficacité administrative à long terme et d'économie maximale des deniers publics. Instaurer une liste électorale unique et permanente pourrait régler ce problème, et tout porte à croire que l'institution actuelle effectuée de façon permanente et hors de l'énervement d'une période électorale amènerait une liste beaucoup plus précise et plus exacte et à un coût beaucoup moindre. Je pense que, pour nous, le simple fait d'inclure l'idée d'un recensement local, à Montréal dans ce cas, montre que ce projet de loi est l'enfant prématuré d'un gouvernement incapable de concevoir à temps une politique à long terme. On peut voir ici que le problème électoral montréalais est une forme inséparable du problème électoral québécois.

Il nous paraît absolument incroyable que le gouvernement ne s'en soit pas aperçu jusqu'à présent. On est loin de l'efficacité que je mentionnais plus haut.

M. le Président, une autre chose qui est liée au système national, c'est qu'un système électoral devrait posséder tous les éléments susceptibles d'endiguer toutes les formes possibles de fraude électorale. Il est bien possible qu'au moment où actuellement nous étudions ce bill pour l'améliorer certaines personnes, dans des coins reculés de la ville ou de la province, étudient de quelle façon elles pourraient frauder ce nouveau système qu'on veut mettre sur pied.

M. LAPORTE: Si on en avait un autre, pensez-vous qu'elles ne le feraient pas?

M. LEGER: Mais, si le projet...

M. LAPORTE; Si on avait ce projet de loi idéal auquel vous rêvez, pensez-vous qu'elles ne le feraient pas aussi?

M. LEGER: Je suis sûr qu'il faut toujours prévoir des améliorations. Comme la police cherche toujours des façons nouvelles d'interrompre les manigances des voleurs, les voleurs trouvent des façons de déjouer la police. C'est sûr! Mais, il ne faudrait pas que la police s'asseoit sur ses lauriers pendant ce temps-là.

M. LAPORTE: Cela va être vrai pour ce bill-là comme pour les autres.

M. LEGER: De toute façon...

M. CHARRON: Cela n'empêche pas de chercher le meilleur, quand même.

M. LEGER: ... si le projet de loi prévoit des mesures coercitives, il reste étrangement silencieux au niveau des mesures préventives. Où en est la carte d'identité de l'électeur qui, à elle seule, pourrait éliminer de nombreux cas de fraudes et de suppositions de personnes? Ce projet de loi n'en parle pas. Il oublie qu'il existe des spécialistes du télégraphe. Il oublie qu'on a encore la possibilité de faire voter des habitants de terrains vagues. Il oublie les armoires à balais, les chambres à fournaise habitées. Il oublie que la démocratie a besoin, pour vivre, de tout ce qui peut l'aider à s'exercer, fût-ce une simple carte d'identité obligatoire avec photographie.

On a beau être immigré depuis 15 ans ou 20 ans, on n'a pas le droit de vote si on n'a pas obtenu sa citoyenneté. Cela ne donne pas plus le droit de vote pour un parti qui prêche le fédéralisme rentable. C'est toujours au nom de cette démocratie que j'effectue ces commentaires sur les principes du bill. Qu'en est-il du mode de scrutin pour pallier l'insuffisance notoire et chronique du vote uninominal à un tour du système britannique qui n'est pas si parfait qu'on veut le penser?

A-t-on pensé à un système de représentation proportionnelle quelconque pour permettre à toutes les tendances de la population montréalaise, surtout au niveau de partis et non pas de personnes qui se présentent de façon indépendante, de s'exprimer ailleurs que dans les rues? Comme il fallait s'y attendre, l'avorton de loi numéro 5 n'en parle pas. Le législateur, qui a décidément la mémoire et l'imagination très courtes, n'en parle pas. Pourtant, on se gargarise et on en parle de cette démocratie. Je pense qu'il faudrait peut-être qu'au pays du Québec on se rende compte qu'un concept aussi généreux que celui de la démocratie recèle des exigences terribles qu'il n'est pas permis d'ignorer.

M. le Président, la répartition proportionnelle peut se faire par étude en comité plénier et je pense qu'il faut la noter. Enfin, la démocratie exige que tous les partis représentant autant d'idéologies diverses aient sensiblement les mêmes chances de faire connaître leur option à la population. Ce principe est purement et simplement ignoré dans le bill qui

apparaît de plus en plus comme une fausse couche. Rien dans ce projet de loi n'assure une limitation des dépenses électorales, permet une reconnaissance des partis ou leur assure une possibilité de publicité dans les différents média.

M. le Président, Je pense que le mode de scrutin actuel ne prévoit pas de réforme de la carte électorale d'une façon suffisante. Pourtant, même s'il y avait une carte électorale parfaite et que chaque district était également redistribué, il y aurait quand même des possibilités, si on ne pense pas au niveau proportionnel, que tout un parti n'obtienne que 48% ou 49% des votes et qu'il n'ait aucun représentant d'élu, parce que c'est l'autre parti au complet qui aurait obtenu 51% ou 52% du vote. A ce moment-là, une grosse couche de la population ne serait pas représentée au niveau de son idéologie.

Le mode de scrutin majoritaire à un tour fonctionne bien dans un système bipartiste, mais moins bien dans un système multipartiste. Je pense qu'on le voit. Le système bipartiste, dans cette Chambre, n'a pas encore été oublié. Très souvent, on a l'occasion de remarquer que le parti au pouvoir demande l'opinion du parti de l'Opposition et ignore les autres partis d'une façon inconsciente.

M. LAPORTE: J'invoque le règlement. Le député de Lafontaine va nous dire à quel moment, sur quel projet de loi, sur quelle discussion j'ai oublié de consulter son leader parlementaire. Lesquels et quand? Assez de ces sottises! Quand?

M. LEGER: M. le Président, je n'ai pas dit spécialement le leader parlementaire, malgré que quelquefois vous ayez demandé de passer par-dessus un comité plénier...

M. LAPORTE: M. le Président, je demande au député — je vais le prendre tranquillement — de donner un seul exemple, un seul exemple, d'une procédure, d'une proposition, de quoi que ce soit qui ait été fait en cette Chambre ou en dehors de cette Chambre depuis le début de la session, sans que je n'aie consulté ou le député qui avait été nommé délégué de son parti à cette commission, ou le leader parlementaire. Qu'il donne au moins un exemple pour soutenir sa thèse.

M. LEGER: M. le Président, le leader parlementaire me demande un exemple. Je vais en citer un. A l'occasion de la commission sur l'assurance-maladie, ce n'était pas le leader parlementaire qui était là, c'était le président de la commission et en l'absence du député de Bourget, qui était retenu ailleurs, j'étais le seul membre du Parti québécois présent. On a demandé si nous étions d'accord pour passer par-dessus un article — que je retrouverai plus tard, si vous le désirez — le parti de l'Opposition officielle a dit :Nous sommes d'accord. On ne l'a pas demandé aux partis qui était présents.

M. LAPORTE: Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui vous empêchait de parler?

M. LEGER: M. le Président, si vous voulez me permettre. Le leader parlementaire m'a demandé une réponse, je la lui ai donnée. Je lui demanderais de pouvoir continuer...

M. LAPORTE : J'avais demandé, autant que possible, un bon exemple.

M. LEGER: Quant au vote, s'il est un principe où on laisse le développement urbain à Montréal aux mains des intérêts privés, même si le nombre de votes est minime, je pense qu'au niveau des principes, il faut nécessairement permettre aux personnes qui ne sont pas propriétaires ou locataires d'être représentées.

C'est pourquoi ma conclusion...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Quelques minutes, seulement, une minute.

M. LEGER: Certainement, M. le Président. Je crois quand même, étant le représentant du chef du Parti québécois, que j'ai droit à une heure.

De toute façon, M. le Président, pour conclure, je pense que ce bill est improvisé. Il se soucie peu de la démocratie. C'est un exemple frappant de la politique de bouche-trou que le bill 5 nous présente dans les principes qui l'animent, et il est inacceptable, je pense, s'il n'y a pas certaines corrections.

Malheureusement, il y a certaines choses que nous devons accepter parce qu'il propose une réforme du vote à 18 ans. A cause de cet avantage, malgré une grande réticence parce que ce bill ne va pas assez loin, qu'il est incomplet et qu'il pèche par des omissions graves, nous voterons uniquement pour le principe, en deuxième lecture, d'une façon affirmative. Nous nous réservons cependant le soin de proposer des amendements appropriés aux articles que nous concevons comme étant incomplets, inadéquats et nettement insuffisants. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.

M. Pierre Laporte

M. LAPORTE: M. le Président, en entendant le député de Lafontaine, Je me suis demandé si nous écoutions les derniers échos de la dernière campagne électorale...

M. LEGER: Cela fait du bien.

M. LAPORTE: ... provinciale ou les premiers bruits de la prochaine campagne électorale municipale.

M. LEGER: Vous n'avez pas vu l'analogie.

M. LAPORTE: Le député de Lafontaine nous a servi des grands principes : la démocratie est devenue la propriété exclusive, la propriété personnelle, inviolable du Parti québécois...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela, c'est vrai!

M. LAPORTE: ... le parti représentant le peuple. Rien, dans ce projet de loi, dit le député de Lafontaine, ne prévoit le moindre article pour que d'autres gens que ceux des classes privilégiées — les classes maudites, à leurs yeux — ne soient représentés au conseil municipal de Montréal. Que ce serait facile, M. le Président, de citer leur propre parti en exemple. Je me suis promené pendant une bonne partie de la campagne électorale avec leurs candidats, la liste de leurs candidats, le parti démocratique, le parti du peuple, le parti qui en voulait aux autres de présenter seulement des gens nantis.

Dans la liste de leurs candidats, M. le Président, vous ne me croirez pas. Si vous étiez le candidat libéral dans le comté de Laval, vous pourriez me croire, parce que vous avez vérifié comme nous. Mais, comme président, M. le Président, vous allez être assez surpris: 65% de leurs candidats étaient des professionnels, 65%, M. le Président. La divine Providence qui veille toujours sur le peuple du Québec a voulu qu'on en ait sept ici, pour voir aux intérêts de l'avenir.

M. le Président, il y a un médecin, excellent d'ailleurs. Il y a un avocat. Il y a un professeur. Il y a un financier et il y a un administrateur. C'est cinq sur sept. Cela fait 5/7, je pense.

M. BURNS: Bonne proportion.

M. LAPORTE: Les gens qui représentent le petit peuple. Dans la charte de Montréal, ils sont pour cela. Dans les élections provinciales avenir, ils sont donc pour cela. Regardez-les, M. le Président. Ils peuvent se lever. Je vais me taire tout à l'heure. Qu'ils disent à cette Chambre qu'ils n'ont pas ici, pour représenter le Parti québécois, 75% de professionnels. On ne leur reproche pas. Ils sont tous à peu près sympathiques.

M. LEGER: On peut représenter...

M. LAPORTE: Qu'ils cessent au moins d'aller reprocher aux autres ce qu'ils n'ont pas fait dans leur propre parti, à commencer par le député de Lafontaine qui s'appelle administrateur. Probablement administrateur de caisses ouvrières seulement.

M. LEGER: Est-ce que le leader parlementaire est toujours au niveau des principes actuellement?

M. LAPORTE: Bien, les vôtres, cela me ramène un peu bas, mais je vais me relever.

M. LEGER: Au niveau de l'esprit, vous allez avoir de la misère.

M. HARVEY (Chauveau): De toute façon, ils ont un psychiatre et ils en ont bien besoin.

M. LEGER: Il est à votre service. UNE VOIX: On pourrait vous le prêter.

M. CHARRON: Etes-vous content de parler pour la première fois?

M. LE PRESIDENT: Je demanderais au ministre du Travail de revenir à son court exposé, assez frappant d'ailleurs, de revenir au principe du bill.

M. LAPORTE: J'ai ceci de particulier. On m'excusera de faire le préambule au début, M. le Président. La loi, qu'est-ce que cela apporte? J'aurais aimé que le député de Lafontaine nous le dise. Tantôt, si on faisait comme on a déjà fait deux fois, demander le vote, ils voteraient tous en faveur. Parce qu'on ne peut pas, en cette Chambre, les défier de vivre à la hauteur des discours qu'ils prononcent. Alors qu'ils dénoncent la loi comme une iniquité, après cela, ils disent: Bien, mon Dieu Seigneur, quand vient le temps de voter contre, ne nous forcez pas trop.

Qu'est-ce que vous voulez? Ils ont prévenu mon geste. Ils ont dit: Sur les principes, oui, mais si on peut arriver en comité pour le projet de loi article par article. Qu'est-ce qu'il dit au niveau des principes? On dit que, pour la première fois à Montréal, la démocratie va être respectée parce que tous les citoyens sans exception — s'il y en a, qu'on nous le dise — de 18 ans ou plus, pourvu qu'ils aient 24 mois de domicile, pourront voter. Est-ce que je dois comprendre que le Parti québécois est contre cela? S'il n'est pas contre cela, est-ce que je peux lui demander s'il trouve que c'est une amélioration?

Deuxièmement, le vote à 18 ans. On a passé sur cela. Probablement que c'est encore un truc inventé par les vieux partis, ça. C'est dans cette Chambre qu'on a décidé de donner le vote à 18 ans, aux électeurs de la province de Québec. C'est dans cette Chambre qu'on a décidé, pour la première fois, de donner le vote généralisé dans la capitale, la ville de Québec et dans votre municipalité, M. le Président, la ville de Laval. Et on est en train de le généraliser dans la province de Québec. C'est normal et c'est sain pour la démocratie. Probablement qu' il était entraîné par d'autres choses; distraitement, le député de Lafontaine a oublié de nous le souligner.

Troisièmement, le cens d'éligibilité. Est-ce que c'est vrai, oui ou non, qu'à Montréal on doit être locataire ou propriétaire? C'est comme un père qui dit: Moi, j'ai eu une fille. Je voulais un garçon, mais, heureusement, la fille, c'était mon deuxième choix. Bien, c'est un ou l'autre à Montréal: on est locataire ou on est propriétaire.

M. LEGER: Comique! Comique!

M. LAPORTE: Et dans les deux cas, on a le cens d'éligibilité. Le député de Lafontaine a peut-être été distrait quand il a lu le projet de loi; il dit qu'on élimine les femmes. Ah, pas nous, quand même! Qu'on nous accuse de n'importe quoi, mais pas de ça! Cela, je ne trouve pas cela injuste. Je trouve ça personnel. « Toute personne physique — jusque-là, ça doit comprendre les femmes — majeure et possédant la citoyenneté canadienne, qui n'en est pas déclarée incapable par la présente charte, peut être mise en candidature et élue ou nommée conseiller si elle ou son conjoint est inscrit au rôle d'évaluation. » L'inscription de la femme comme contribuable rend son marl éligible et sans doute elle-même et, en sens contraire, c'est également vrai.

Toutes les femmes mariées à Montréal peuvent être rendues éligibles par leur mari et toutes les femmes qui paient des taxes et qui sont inscrites au rôle d'évaluation sont égale- ment éligibles. On a oublié de nous le dire. On voudrait maintenant trouver des moyens infaillibles autres que ceux qui sont dans la loi. n y en a sept ou huit pages dans la charte de Montréal. Je serais surpris, mais je prendrais sa parole, si le député de Lafontaine se levait en me disant: Je les ai lues, toutes les prescriptions contre ceux qui violent la loi et les peines qui sont prévues. Mais, je pense qu'il ne les a pas lues. C'est déjà prévu. Doit-on trouver autre chose? Peut-être. Mais, le seul discours qu'a fait le député de Lafontaine nous indique combien cette chose-là est complexe. Nous allons voir les amendements du député de Lafontaine. J'attends ses amendements avec un intérêt véritable. Nous allons voir...

M. LEGER: Vous avez beaucoup d'esprit.

M. LAPORTE: ... ce que ces gens qui ont l'imagination ont trouvé de neuf pour faire — après leurs amendements, si nous les acceptions — une loi électorale qui soit digne d'un parti aussi pur que le leur et, sans doute, digne de tous les citoyens de la province de Québec.

C'est infiniment complexe. La première chose que l'on doit demander aux citoyens — et ça, on sait que ce n'est pas facile — c'est de se protéger eux-mêmes. Le recensement des électeurs sera analogue au recensement provincial. Vous avez, d'abord, deux personnes au provincial qui passent; elles ne sont pas du même parti, c'est une première protection. Il peut arriver qu'il y ait des gens qui vendent leur travail. Disons que nous ne légiférons pas pour ceux-là nous avons la police pour ceux-là. Vous avez deux personnes qui passent de maison en maison; c'est la première chose. Deuxièmement, une fois que la liste a été rédigée, elle doit être affichée sur un poteau à un endroit accessible. Troisième chose, la liste est envoyée dans chaque foyer. Si, à un moment donné, un électeur Jeune, dynamique, du Parti québécois, conscient de ses droits et de son devoir, ne reçoit pas la liste, il doit commencer à s'inquiéter. Il a lu la loi. Il sait ce qu'il y a dedans. Il sait comment elle est terrible la loi qui veut le protéger. Il est rendu à la veille de l'élection et il n'a pas encore reçu sa liste; il doit commencer à se poser des questions.

Il y en a qui oublient ça tout le long. C'est bien gentil de se faire dire par les gens du Parti québécois que nous organisons tout pour le vol des élections, mais on sait que personne n'a de leçon à faire à personne. Il nous arrive, à vous, le matin du vote, des électeurs qui sont de nos amis depuis toujours, des connaissances,

des parents, qui nous disent; Imagine-toi donc, je ne suis pas sur la liste électorale; y a-t-il moyen de faire quelque chose? J'ai oublié, j'étais absent, je n'ai pas vérifié. Que voulez-vous, il n'y a plus rien à faire! Quelles que soient les lois, il faut que le citoyen fasse sa part pour se protéger.

L'une des choses les plus vraies qu'a dites le député de Lafontaine, c'est quand il a souligné la longue tradition d'indifférence. C'est clair. Mais, comment régler le problème? Vous avez eu à Québec le vote universel; vous avez, à d'autres endroits dans la province de Québec, le vote réservé exclusivement aux propriétaires; vous avez des endroits où les propriétaires et tous les autres contribuables votent. Comment mettre fin à cette indifférence? Par l'adoption de lois? J'en doute sérieusement. C'est plutôt par une éducation qu'il faudra faire et par un désir du citoyen lui-même de s'occuper de ses affaires. Il n'y a pas un texte de loi qui peut faire ça; une éducation civique doit être entreprise dès la première enfance.

Il faut, éviter que cela devienne de la propagande ou que cela devienne une façon, pour certains professeurs, d'orienter de futurs électeurs dans un sens ou dans l'autre. L'éducation civique, pour dire aux citoyens que si ça va mal ou s'ils ne sont pas satisfaits et qu'ils ne vont pas voter, ils n'ont ensuite qu'à s'en prendre à eux-mêmes.

Il s'agit d'une « réformette ». C'est devenu le mot de passe de tous ceux qui n'ont pas le courage de dire qu'ils sont satisfaits du projet de loi que nous présentons. C'est une « réformette »! On va donner le droit de vote à des milliers et des milliers de gens à Montréal, et c'est une « réformette »! On va permettre à des milliers de citoyens qui, jusqu'ici, n'avaient pas le droit d'être candidats dans leur ville, la métropole du Canada, et c'est une « réformette »!

Qu'un gouvernement, quel qu'il soit, continue, pendant des sessions, à faire sept, huit ou dix « réformettes » comme cela par année, et c'est finalement tout l'aspect d'une province qui peut en être sensiblement modifié. Il aurait fallu que l'on prévoie, dans la charte de la ville de Montréal, un contrôle des caisses électorales. J'ai hâte de voir quel amendement ils vont nous proposer pour les contrôler.

En parler en Chambre, c'est facile. Cela peut laisser croire qu'on a seul le désir d'atteindre cet objectif-là. J'invite le député de Lafontaine, ce doit être l'expert, puisque c'est lui qui a parlé le premier, à nous proposer tout à l'heure un amendement qui permettrait de contrôler les dépenses électorales au cours de l'élection municipale qui aura lieu l'autom- ne prochain à Montréal. Nous sommes disposés à l'écouter.

Il faudra y venir, mais il faudra y venir progressivement. Nous avons décidé, nous, dans la province de Québec, de faire payer une partie des dépenses électorales par les citoyens. Tous les députés élus en ont profité à 100%. Ceci a augmenté très sensiblement le coût des élections. Mais vous ne serez pas surpris, M. le Président, d'apprendre qu'au cours de la dernière campagne électorale certains candidats se sont promenés à accusant les vieux partis d'avoir doublé et triplé le coût des élections dans la province de Québec. C'est bien clair. Cela coûtait $4 millions ou $5 millions et là c'est rendu à $9 millions parce qu'on prend, à même le trésor public, des sommes d'argent pour contribuer à baisser les caisses électorales.

Est-ce qu'il faudra y venir au municipal? Plus que probable. A ce moment-là, il faudra que les citoyens eux-mêmes soient convaincus que la seule façon qu'ils ont de véritablement avoir le contrôle sur les gens qu'ils élisent, c'est de payer à 100% les élections. Je l'ai prêché tant que j'ai pu et je vais continuer; un jour, nous atteindrons cet objectif. J'espère qu'à ce moment-là le député de Lafontaine se souviendra qu'il y en a peut-être d'autres que lui qui ont pensé à cela. Il y en a peut-être d'autres que lui qui ont commencé avant lui. A ce moment-là, s'il prétend que c'est une « réformette », nous demanderons le vote, et comme d'habitude, il votera avec nous.

C'est un projet de loi qui nous semble une amélioration sensible. C'est une loi qui ne prévoit pas tout ce qui devrait être prévu, c'est clair. Je puis dire en passant au député de Lafontaine que, s'il avait véritablement vérifié ses lois, il constaterait que le droit d'imposer la carte d'identité à Montréal existe depuis plusieurs années, que M. le maire Drapeau et M. Saulnier ont demandé aux parlementaire le droit de l'imposer.

Pour toutes sortes de raisons, qui n'ont rien à voir avec le désir de provoquer, d'endurer ou de tolérer la fraude, cela n'a jamais été mis en pratique. L'une des premières nécessités, c'est de trouver une carte d'identité qui va éviter les contrefaçons. C'est vrai, ce que dit le député, qu'il y a toujours des gens qui travaillent pour contourner les lois. J'ai été candidat aux élections municipales à Montréal, dans un quartier que le député de Saint- Jacques connaît bien.

M. CHARRON: Hélas! M. LAPORTE: Pardon?

M. CHARRON: Hélas!

M. LAPORTE: Vous le connaissez bien, hélas? Je comprends!

M. CHARRON: On n'a pas été chanceux, comme ancien politicien.

M. LAPORTE: Moi, étant un professionnel, J'ai au moins eu l'élégance de me faire battre dans ce comté-là. Pas vous! Vous êtes professionnel, vous avez été élu, vous, au milieu d'ouvriers, monsieur, représentant...

M. CHARRON: Moi, je suis professionnel?

M. LAPORTE: Professeur. Vous n'êtes pas professionnel, vous êtes un ouvrier, j'imagine?

M. CHARRON: Continuez donc.

M. LAPORTE: M. le Président, je dis qu'à cette élection-là, on avait exigé, pour identifier les électeurs, un document, le permis de conduire; mais il s'est fait, dans cette journée-là, un trafic considérable de permis de conduire. On l'empruntait; il y a des gens qui empruntaient le permis pendant une couple d'heures pour $10. On n'a pas atteint l'objectif que les autorités, qui avaient passé ce règlement-là, voulaient atteindre, c'est-à-dire contrôler la fraude.

Si on pouvait trouver une carte d'identité qui ne puisse pas être imitée, à ce moment-là on atteindrait l'objectif. Et si, par malheur, on peut provoquer un commerce illicite de cartes d'identité, il y aura des gens, l'année suivante, pour dire que cela a encore été imaginé par les puissances d'argent pour contrôler les électeurs.

Bien, M. le Président, j'aime autant qu'on ne s'embarque pas dans ça, à moins d'avoir trouvé véritablement, au-delà de cette éducation du citoyen dont J'ai déjà parlé, des moyens de contrôle plus efficaces que ceux que nous avons actuellement. Et nous avons pour le faire, à tête reposée, une commission parlementaire qui va prendre le temps de faire un travail sérieux. Et ceux qui vont y participer, car la commission va continuer à siéger quand la session va être prorogée ou ajournée, vont finalement admettre, ou vont être gênés de ne pas admettre, avec quelle liberté de pensée et quelle ouverture d'esprit tous ceux qui voudront apporter une contribution pour véritablement donner à la province de Québec la meilleure loi électorale qui soit, pourront le faire.

A ce moment-là, quand vous parlerez de bulletins de vote, vous ferez venir un expert comme M. François Drouin. Là, vous allez com- prendre combien ce n'est pas facile. Il va vous apporter des bulletins de vote de tous les pays, une soixantaine, peut-être une centaine, et il va vous apprendre, lui, d'après l'expérience qu'il a vécue, les enquêtes qu'il a faites, combien de moyens on a trouvés dans chaque pays pour frauder le bulletin. Après ça, vous viendrez avez calme, vous viendrez avec une assurance que rien ne saurait contredire, proposer que tel bulletin serait celui qui serait parfait. Ce qu'on a suggéré et ce qui s'en vient dans la province de Québec, c'est qu'on ait un seul bulletin de vote, uniforms au municipal, au scolaire, au provincial, et même au fédéral, en ayant des papiers de couleurs différentes qui tous seraient fournis par la même personne et contrôlés par le président des élections, afin que, d'une élection à l'autre, les gens s'habituent à voter de la même façon. Cela éviterait ce qui est arrivé, dans nos comtés aussi. Il ne faut pas imaginer que dans le comté de Chambly il n'y a pas eu de bulletins rejetés...

M. LEGER: Il n'y a pas de grave conséquence.

M. LAPORTE: Je ne m'excuserai pas d'avoir une grosse majorité, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise!

De cette façon, on pourrait éviter que des gens, par ignorance de la loi, en ayant un procédé mécanique uniforme d'une élection à l'autre, ne se privent pas eux-mêmes de leur droit de vote.

Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, parce qu'on donne le droit de vote à 18 ans, parce qu'on donne le cens électoral généralisé, parce qu'on augmente de façon très sensible le cens d'éligibilité, je pense que la loi électorale que nous proposons, à la demande de la ville de Montréal, s'inscrit dans les lois qui me semblent un progrès. Et si, plus tard, à la suite des travaux de notre commission parlementaire, nous en venons à d'autres conclusions, à la suite de recherches sérieuses, nous n'aurons aucune objection, bien au contraire, à ce que tous les membres de cette Chambre se donnent le mot pour transposer au niveau municipal des réformes que nous pourrions alors proposer au niveau provincial. Mais faire le contraire serait mettre la charrue avant les boeufs, serait risquer de faire des réformas mal engagées.

Je constate, et on me permettra bien de le dire en terminant, que le député de Lafontaine, tout en faisant son intervention ce soir, avait d'autres objectifs que de discuter le fond de ce projet de loi. C'est un secret de polichinelle que le PQ songe à présenter des candidats aux pro-

chaines élections municipales. Bonne chance, messieurs! Le député de Lafontaine pourra se vanter d'avoir lancé ce soir, avec le succès que l'on verra, la campagne électorale municipale de Montréal.

M. LEGER: M. le président...

M. LAPORTE: Jusqu'à nouvel ordre, c'est le ministre qui a le droit de réplique; ce n'est pas le député.

M. LEGER: Il y a quand même une affirmation que le ministre a faite...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que le député de Lafontaine peut rétablir les faits, s'il y a des paroles qu'on lui a prêtées qui ne seraient pas exactement celles qu'il a prononcées, mais sans soulever de débat. Il peut rétablir ses propos en vertu du règlement.

M. LEGER: Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Il ne s'agit pas d'apporter d'arguments nouveaux.

M. LEGER: Le leader parlementaire, je n'essaierai même pas de résumer tout ce qui a été dit, nous en aurons l'occasion au cours des discussions en commission. Je voulais tout simplement dire qu'il a affirmé tantôt que les candidats, à 65%, du Parti québécois n'étaient pas représentatifs du peuple. Je voulais dire que, pour être du peuple, je pense qu'on ne doit pas nécessairement être des illettrés, mais des personnes qui ont l'esprit du peuple.

M. LAPORTE: C'est sans conséquence, parce qu'ils ont presque tous été battus.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: J'ai écouté avec beaucoup d'attention l'intervention du député de Chambly, surtout lorsqu'il s'attardait à décrire le genre de candidats qui ont été présentés par le Parti québécois, lors des dernières élections. Il est vrai que le Parti québécois s'est retrouvé avec un certain nombre de candidats que l'on pourrait qualifier de professionnels. On pourrait épiloguer longtemps sur les raisons qui ont pu amener cet état de choses, quand on sait que plusieurs ouvriers hésitent à briguer une charge qui peut les séparer longtemps de leurs activités habituelles ou encore toutes les raisons psychologiques qui peuvent les empêcher de se présenter. Ce que je voulais surtout lui souligner, c'était la chose suivante. C'est que, même si l'on est professionnel, cela n'empêche pas de comprendre les besoins de la population et, en particulier, des secteurs les plus défavorisés de notre population. Je pense bien que le député de Chambly peut reconnaître lui-même que même s'il est avocat, même s'il a été longtemps journaliste, il peut comprendre les besoins de tous les secteurs de la population. Il est donc bien malvenu de reprocher à d'autres d'épouser cette cause de secteurs de la population qu'on peut estimer être parfois négligés par les autorités en place. Je n'ai donc pas à m'en excuser si, à plusieurs reprises, nous serons obligés de donner une voix à ces réclamations de certains secteurs de la population qui, à tort ou à raison, ont parfois l'impression de ne pas se faire entendre comme il se devrait à cette Assemblée.

M. LAPORTE: Si le député me permet, j'ai dit ça tout simplement parce que le député de Lafontaine a affirmé qu'au conseil municipal de Montréal plus de 65% ou 70% des élus étaient des gens, ou professionnels, ou hommes d'affaires. J'ai dit: Avant de jeter des pierres chez le voisin, regardons chez soi. C'est la seule raison qui m'a amené à dire ça.

M. LAURIN: Le député de Chambly a aussi dit que nous avions peut-être l'habitude de nous asseoir plus souvent que de raison sur des grands principes. Il est vrai que nous aimons invoquer les principes. C'est peut-être un des signes de notre naïveté politique que d'invoquer assez souvent les grands principes, mais, que voulez-vous, nous y croyons. Nous croyons que ces principes sont quand même ce qu'il y a de plus important, de plus vital dans une démocratie et qu'une démocratie qui oublierait ses grands principes risquerait rapidement de se corrompre, comme un poisson pourrit facilement par la tête. Ces grands principes, malgré qu'on puisse nous reprocher de les invoquer trop souvent, nous continuerons à les invoquer d'une façon peut-être plus habile, plus stratégique et plus tactique, mais nous continuerons à les invoquer parce qu'ils sont à la base de notre action, parce qu'ils sont à la base de notre programme et que nous n'aurons de cesse que ces grands principes puisse s'incarner pour nous dans une politique qui soit véritablement à l'avantage des Québécois.

J'en arrive maintenant à ce projet de loi

numéro 5. Comme l'a dit le député de Chambly, il est bien probable que ce projet de loi reflète l'opinion des autorités de la ville de Montréal. Mais Je dois quand même avouer, si tel est le cas, que cette opinion des autorités de la ville de Montréal me déçoit profondément. Elle me déçoit parce que je me serais attendu à davantage de la part d'un premier magistrat qui a donné à notre pays, à notre province et à notre ville quelque chose d'aussi remarquable que l'Expo 67 et les jeux oplympiques. Je me serais attendu à ce qu'il manifeste, lorsqu'il s'agit de respecter les principes fondamentaux de la démocratie, la même vision, la même envergure qu'il a manifestée lorsqu'il s'est agi de convier toutes les autres populations du globe à la ville de Montréal, soit pour leur faire admirer les génies que nous avions à présenter, soit pour les convier aux olympiades internationales. Je me serais attendu que dans le domaine fondamental du droit du citoyen à exprimer son vote de la façon la plus juste qui soit, il aurait fait montre de la même clarté, de la même justice, du même degré de respect de l'opinion du citoyen.

C'est vraiment une grande déception car ce n'est un secret pour personne, M. le Président, que le régime électoral de Montréal était probablement un des plus rétrogrades, un des plus réactionnaires qui existât encore dans la province de Québec. Cela était d'autant plus scandaleux que presque toutes les autres municipalités du Québec, y compris la ville de Québec, avaient réussi à se doter au fil des années d'un régime de suffrage électoral qui correspondait davantage aux principes qui doivent sous-tendre une véritable démocratie.

En ce sens, le projet de loi qui nous arrive aujourd'hui ne constitue qu'un ajustement très tardif à la coutume qui s'était déjà installée dans toutes les régions du Québec. Ce n'est donc pas une « réformette », mais bien au contraire un rattrapage et un rattrapage des plus tardifs et des plus partiels à une situation qui constituait un véritable scandale pour toute la population du Québec. Si la ville de Montréal a pu donner l'exemple dans d'autres domaines d'un dynamisme véritablement remarquable, dans ce domaine du suffrage universel et de la représentation démocratique, on peut vraiment dire qu'elle traînait à la queue de presque toutes les villes du continent.

En ce sens, je suis déçu que ces recommandations de la ville de Montréal nous arrivent encore avec ce petit air vieillot, suranné qui ne correspond plus à notre mentalité. Bien sur, on nous dit: Il s'agit d'adopter le vote uni- versel à 18 ans. Je suis d'accord là-dessus et c'est la raison pour laquelle notre parti a décidé de voter en principe pour ce bill. Nous sommes également pour le cens d'éligibilité dont parlait le député de Chambly. Mais par contre, il existe dans ce projet de loi tellement d'autres caractéristiques qui sentent, justement, une période dépassée, qui sentent l'anachronisme à plein nez, qui sentent certaines pratiques que tout le monde déplore, que nous aurions été fortement tentés de voter contre le principe de ce projet de loi.

Mais précisément parce que le vote à 18 ans constitue quand même une des plus grandes conquêtes de la démocratie, parce que ce vote à 18 ans est déjà le fait du Québec, de la province en général et de tant d'autres municipalités, nous ne voulions pas montrer que nous désapprouvions une de ces conquêtes fondamentales du régime démocratique.

Mais il reste quand même qu'en vertu des autres articles du projet de loi qui nous déplaisent profondément, nous avons l'impression qu'on veut nous faire avaler avec du jus d'orange, c'est-à-dire le vote universel à 18 ans et le cens d'éligibilité pour tout le monde, une huile de castor au goût extrêmement désagréable, et là je m'explique. Car, au moment, M. le Président, où tout le monde conclut à la nécessité d'une réforme électorale au niveau provincial, ce projet de loi tend à copier la loi provinciale actuelle dans ce qu'elle a de plus lourd, dans ce qu'elle a de plus dangereux, dans ce qu'elle a de plus inefficace, de plus imparfait et de plus antidémocratique.

J'attends justement, comme le député de Chambly, la commission parlementaire afin que tous les députés de tous les côtés de la Chambre, sans partisanerie politique, amènent en toute lucidité les réformes que chacun d'eux veut proposer à la suite des remarques, des constatations, des observations qu'il a pu faire lors de la dernière campagne électorale et qui nous montrent que cette loi électorale est très imparfaite.

En ce sens, ce projet de loi numéro 5 veut jeter de la poudre aux yeux de la population. Il manifeste, selon nous, une crainte extrêmement conservatrice à innover, une impossibilité à véritablement se mettre au pas des institutions démocratiques les plus modernes.

Par exemple, il semble faire croire à la population qu'il instaure un régime universel de droit de vote, alors que le cens électoral, au terme même de ces articles du projet de loi, apparaît encore très limité. Limité, surtout, dans une des caractéristiques qui sent le plus non seulement notre ancien régime à nous, mais

un ancien régime qu'on avait coutume de dénoncer lorsqu'on étudiait, par exemple, les institutions de l'Angleterre, vers les années 1830 ou 1840, c'est-à-dire un droit de vote attaché aux notions capitalistes de valeur d'occupation ou valeur de propriété.

Ce droit de vote, en particulier, attaché à un droit de propriété qui permet à des non-citoyens de la ville de voter. On n'avait pas vu cela depuis 100 ans, depuis 120 ans, M le Président. Et c'est au scandale de cette Chambre, j'en suis convaincu, dans le fond de son coeur, que nous verrons un article tiré d'une coutume britannique vieille de 130 ans et qui avait été désavouée par les Chambres britanniques nous revenir ainsi, afin d'être entérinée par un projet de loi qui se veut moderne en 1970.

Par ailleurs, la crainte d'Innover se manifeste surtout par l'absence de mention d'une liste électorale permanente avec carte d'Identité, alors que ceci devient une préoccupation de tout le monde, qui reconnaît que c'est devenu une nécessité vitale. Je suis bien d'accord avec le député de Chambly que cette liste électorale permanente et que cette carte d'identité sont difficiles à établir, qu'il y a des dangers à éviter, qu'il y a des abus qu'il faut prévoir, que le processus comporte une certaine lenteur. Je suis bien d'accord, mais ce projet de loi aurait pu, au moins, inclure ce principe afin que, lorsque les travaux de la commission parlementaire auront été complétés, nous puissions faire ce passage plus facilement, ainsi que le député de Chambly l'a laissé entendre.

D'ailleurs, est-ce tellement difficile de faire une liste électorale permanente? Est-ce tellement difficile d'établir une carte d'identité qui ne se prêterait pas aux abus ou aux dangers dont le député de Chambly parlait? Après tout, est-ce que les élèves de nos CEGEP ne possèdent pas déjà leur carte d'identité, selon des procédés techniques extrêmement modernes, le procédé Polardid où la photo est incluse dans la carte même de l'étudiant, ce qui exclut, d'une façon presque mathématique, toute contrefaçon? N'y aurait-il pas eu moyen, si le bill avait été présenté avec des délais suffisants, de prévoir, pour les électeurs, la confection d'une carte d'identité pour fins électorales, à peu près de la façon dont je parle? Je sais, avec le député de Chambly, que, depuis 1961, la ville de Montréal avait demandé cette permission de faire une carte d'identité. Depuis le temps que ce privilège a été demandé, depuis le temps que cette demande a été faite, il me semble que l'administration de Montréal, qui est dirigée, en 1970, par les mêmes personnes qui la dirigeait en 1961, aurait quand même eu le temps de penser à des techniques, de penser à des méthodes qui lui auraient permis de donner suite à ce voeu pieux — parce que c'est bien comme cela qu'on est obligé de le dénommer, puisque, après neuf ans il n'a pas été suivi d'exécution — qu'elle émettait en 1961.

Nous espérons que, lorsque la discussion viendra en comité plénier, le temps sera encore venu de rattraper cette erreur, cette omission et qu'au moins le principe soit respecté, de façon que, lorsque la commission parlementaire aura terminé ses travaux sur le plan provincial, ce soit plus facile de faire bénéficier les électeurs, au niveau municipal, de cette innovation.

Par ailleurs, M. le Président, le système d'énumération, qui semble copié sur la loi provinciale également, ne l'est pas du tout, en réalité. En effet, il n'y a aucun contrôle possible, par quelque opposition que ce soit, et encore moins par la population générale, que l'on invite pas du tout à participer au nouveau système. Il est vrai que jusqu'ici le système de confection des listes, à Montréal, n'a guère été entaché, depuis longtemps, des vices inhérents au système provincial, probablement à cause de la structure des partis, mais cela tenait aux hommes seulement. La nature humaine étant ce qu'elle est, le système qui nous est proposé par le projet de loi donne donc ouverture dans l'avenir à des abus de la même nature que ceux que l'on a pu connaître à d'autres niveaux, fédéral ou provincial.

En fait, ce que comporte de plus inefficace, de plus insignifiant, de plus onéreux et de plus dangereux le système actuel provincial, c'est la façon dont on prévoit les cas de révision. Or, c'est ce que ce projet de loi copie le plus servilement dans la loi provinciale actuelle. Il nous semble que, même s'il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs, on aurait pu — sans quand même établir une politique tout à fait nouvelle, ce qui revient à la commission parlementaire — corriger quelques-uns des abus, des dangers les plus criants et mettre, dans le nouveau projet de loi, quelque chose qui aurait contenté les désirs démocratiques de la majeure partie de la population.

En effet, il serait tellement plus facile, tellement plus efficace, tellement plus juste, par exemple, de faire en sorte que les gens dont on veut radier les noms ou qui veulent s'inscrire parce qu'ils ont été omis, soient sûrs d'être entendus, ce qu'est loin de prévoir le système actuel, ainsi qu'on l'a vu lors des récentes consultations électorales. Il aurait été tellement plus facile, plus efficace et plus juste également de permettre aux électeurs de le faire non par écrit, mais en se présentant tout simplement

à un bureau de révision pendant une période qu'il aurait été permis de déterminer et d'établir.

Au lieu de cela, on prévoit des demandes écrites, des avis qui ne parviennent pas toujours aux intéressés, surtout lorsqu'il y a des intérêts qui interviennent pour permettre des retards postaux qui ne sont pas dus aux grèves perlées ou aux grèves tournantes que l'on connaît en ce moment, mais qui sont dus, au contraire, à des intérêts électoraux.

L'on prévoit, en plus, tout un appareil judiciaire qui entend des causes qu'il ne peut vraiment pas juger, parce que la personne intéressée n'est pas sûre d'être entendue. Là aussi, dans ces tribunaux de révision, il y aurait eu moyen, avec un peu de temps et un peu d'attention, de profiter des expériences récentes et de prévoir un système de révision qui n'aurait pas favorisé la défranchisation d'un grand nombre d'électeurs, comme cela s'est déjà produit et comme cela risque de se produire lors de la prochaine consultation municipale à Montréal.

Sur ce sujet, d'ailleurs, il est facile de prévoir d'autres détails de simplification. Il est certain, par exemple, comme nous l'avons déjà dit, que le test le plus important à faire est celui de la demande d'une liste électorale permanente avec carte d'identité. C'est là que l'on verra si le gouvernement et les autorités municipales sont sérieux ou pas. Mais si la chose demeure impossible pour le moment, à cause, comme je le disais tout à l'heure, des délais et des études techniques qui restent à faire, au moins n'aurait-il pas été possible d'inscrire dans le projet de loi une disposition transitoire qui aurait fait qu'à la prochaine consultation municipale les critères, les principes et les exigences de la démocratie auraient été mieux respectés, quitte à ce que la disposition permanente prévoie, lorsque la commission parlementaire aura terminé ses travaux, qu'au prochain scrutin municipal de Montréal on profite de tous les travaux de la commission parlementaire.

Encore une fois, ceci n'aurait pas été mettre la charrue devant les boeufs, car le vote, où qu'il se déroule, est sacré. Quand le vote se déroule dans la plus grande agglomération du Québec, dans la ville de Montréal qui compte près de 1,600,000 habitants, il est extrêmement important de tout mettre en oeuvre pour que les citoyens soient sûrs que leur vote puisse s'exprimer d'une façon exacte, d'une façon fidèle dans les représentants qu'ils se sont choisis. Je dirais la même chose, bien sûr, pour n'importe quelle municipalité du Québec, mais quand il s'agit d'une grande ville comme Montréal, quand on sait le rôle extraordinai- rement important qu'elle joue dans la vie collective du Québec, il me semble que cette députation devrait faire tous les efforts pour que ces grands principes dont on parlait tout à l'heure soient respectés non seulement dans l'esprit, mais dans la lettre et que toute cette Chambre s'efforce de procurer aux citoyens de Montréal la représentation la plus démocratique qui soit.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales. Je dois avertir la Chambre que, si le ministre prend maintenant la parole, il exerce sont droit de réplique et que ceci mettra, fin au débat.

M. Maurice Tessier

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais d'abord faire part de ma surprise en entendant le leader du Ralliement créditiste, le député de Mégantic, dire à cette Chambre qu'il n'avait pas eu le temps d'examiner le projet de loi. Si je m'en réfère au feuilleton, ce projet de loi a été distribué aux membres de cette Chambre le 12 juin, par conséquent, il y a un peu plus d'un mois. Ma seconde impression a été que le député de Mégantic ne s'était même pas donné la peine de lire le texte du projet de loi 5. En effet, il a émis certains doutes sur la légalité de l'élection d'un maire ou d'un conseiller municipal âgé de 18 ans.

Or, ce n'est pas du tout ce que dit le projet de loi numéro 5. Bien au contraire, les articles 2 et 3, qui parlent du cens d'éligibilité à la fonction de maire ou de conseiller municipal, mentionnent clairement qu'est éligible à ces charges toute personne physique majeure. On sait que, pour être majeur, en vertu de notre code civil, il faut avoir atteint l'âge de 21 ans révolus.

En ce qui concerne le droit de vote, c'est différent. L'électeur, évidemment, n'a pas à remplir le rôle d'administrateur puisqu'il n'est pas éligible s'il n'a pas 21 ans. La loi réduit, cependant, à 18 ans le droit de vote au suffrage universel.

Ces deux considérations précisées, je voudrais, très brièvement, souligner quelques énoncés émis par le député de Lafontaine, qui, sans aucun doute, dans cette Chambre s'est fait le porte-parole du FRAP. En effet, toutes les représentations faites par cette organisation reflètent exactement les énoncés émis par le député de Lafontaine qui, d'ailleurs, comme le FRAP, voit partout de la fraude.

Notre façon de procéder ne nous met pas à l'abri, évidemment, de tous les fraudeurs, mais jusqu'à maintenant, c'est le meilleur système qui ait été trouvé. On a parlé d'une liste électorale

permanente; eh bien, c'est ce qui existait autrefois. Dans la plupart des municipalités, le rôle d'évaluation, c'est ça la liste électorale permanente. Mais, parce que l'expérience a démontré que, souvent, cette liste électorale permanente contenait de multiples omissions ou erreurs, nous avons tenté, par la présente loi, de faire disparaître ces lacunes en procédant de la même manière que nous procédons en vertu de la Loi électorale provinciale ou de la Loi électorale fédérale, c'est-à-dire avec la nomination de recenseurs, et en déterminant un temps pour la confection des listes. Le projet de loi 5 mentionne que l'on doit procéder par rue, numéro par numéro. Par la suite, la liste est affichée et tout le monde en est informé.

Il y a un délai d'une dizaine de jours — pour tous ceux qui se croient lésés et dont les noms n'apparaissent pas sur la liste, ou encore pour les noms qui y apparaissent et qui ne devraient pas y être — pour faire ajouter des noms ou les faire rayer de la liste. Je crois que c'est encore le meilleur système qui a pu être trouvé jusqu'à présent.

Quelle garantie avons-nous, avec une liste permanente, qu'il n'y aurait pas autant ou peut-être même plus d'omissions ou d'erreurs? Si l'électeur ne se donne pas la peine de vérifier la liste électorale, de voir à ce que son nom soit inscrit, je crois qu'il n'a qu'à s'en prendre à lui-même, à sa propre négligence. Qu'on ne vienne pas nous accuser de fraude!

Je tiens à souligner également que le président des élections est à l'abri de toute menace ou contrainte de la part du conseil municipal puisque, s'il survenait une telle menace ou contrainte, il pourrait avoir recours immédiatement à la commission municipale qui ferait aussitôt une enquête à ce sujet.

En somme, il est facile de critiquer. Je crois que les critiques que nous avons entendues, tant de la part du député de Lafontaine que de la part du député de Bourget, sont des critiques négatives. On nous parle de carte d'identité, mais songe-t-on au délai considérable qu'il faudrait si on devait procéder à la mise sur pied de tout un système de cartes d'identité lorsque les élections à Montréal doivent avoir lieu à la fin d'octobre? C'est évidemment un système qui peut être considéré. C'est un système qui pourrait être inclus dans la Loi générale des élections. Comme je l'ai mentionné, elle aura au-delà de 500 articles. Nous pourrons en discuter en comité, nous pourrons l'amender au besoin.

Il s'agit évidemment, avec le bill no 5, d'une loi que je pourrais qualifier d'un peu urgente puisque nous sommes à la veille d'ajourner la présente session à l'automne, à une date pos- térieure à la date des élections. Il faut donc donner — et c'est ce qui importe — à la population de Montréal le suffrage universel et protéger le plus possible l'électeur au cours des prochaines élections. Ce sont là les principales remarques que j'entendais faire en terminant le débat en deuxième lecture avant de procéder à l'examen, article par article, en comité.

M. LE PRESIDENT (Hardy): La motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. BERTRAND: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre des Affaires municipales propose maintenant que je quitte le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier.

M. LAPORTE: Il change de fauteuil. M. BERTRAND: Changez de fauteuil

M. LEGER: M. le Président, y aurait-il possibilité que l'on siège en commission plutôt qu'en comité plénier?

M. LAPORTE: En commission quoi? Voulez-vous répéter?

M. LEGER: En commission parlementaire plutôt qu'en comité plénier?

M. LAPORTE: Bien, M. le Président, je ne comprends vraiment pas la demande du député, puisque, actuellement, tous les députés sont membres du comité plénier. Il voudrait restreindre ça à la commission parlementaire. Si, après l'étude en comité plénier, un député en faisait la demande, on pourrait la considérer, mais je ne comprendrais pas qu'on veuille allonger la procédure. Tous les députés sont membres du comité plénier.

M. LEGER: M. le Président, je peux expliquer la raison pour laquelle je demande cela. C'est simplement pour que ce soit plus rapide et que d'autres choses puissent être étudiées ailleurs pendant que la commission siège.

M. PAUL: Ce n'est pas nouveau. M. LAPORTE: Quoi?

M. PAUL; Je comprends que ce n'est peut-être pas régulier.

M. LAPORTE: Enfin, si c'estle désir du comité plénier, je n'ai pas d'objection à ce qu'on réfère le bill 5 immédiatement à la commission parlementaire sur les Affaires municipales. Sans préavis, il y a des membres qui vont se plaindre.

M. PAUL: La motion a été adoptée, M. le Président.

M. LAURIN: C'est plus facile de discuter autour d'une table.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que vous avez adopté l'affaire avant qu'on ait eu le temps de s'exprimer? Vous êtes rendu à l'article 1 et on ne sait même pas si on siège ici.

M. LAPORTE: Alors, pour rassurer le député, puisque sa demande ne me paraît pas hors d'ordre, loin de là, il serait peut-être préférable que tous les députés puissent l'étudier ensemble. Ce projet de loi, si j'en juge par les interventions de nos amis du Parti québécois, aura peut-être des échos provinciaux. J'aimerais mieux que tous les députés sachent ce qui s'en vient dans ce projet de loi-là, quitte à prendre le temps nécessaire pour l'étudier.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1.

M. LAPORTE: Maintenant, si le député veut s'approcher de nous.

M. BERTRAND: Bien oui, on est prit à prêter quelques fauteuils.

M. LAPORTE: Qu'ils ne prennent pas l'habitude de changer de côté de la Chambre sans...

M. BERTRAND: Le ministre peut peut-être, lui-même...

M. LAPORTE: Oui, on peut se retirer. M. BERTRAND: Nous pouvons nous en aller.

M. TESSIER: Vous voulez que je me rapproche?

M. PAUL: On présume que notre président veut participer au débat.

Comité plénier

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté. Article 2?

M. LEGER: M. le Président, à l'article 2, il est mentionné que toute personne physique majeure peut être mise en candidature si elle ou son conjoint est inscrite au rôle d'évaluation. Alors pour faire suite aux principes que nous énoncions sur l'article 2, pendant la deuxième lecture, nous croyons qu'il serait préférable de simplifier cela. Le leader parlementaire disait tantôt que ça permettait à beaucoup plus de gens de voter. Je suis tout à coup surpris de voir qu'il préfère une chose compliquée à une chose simple. Je pense qu'il serait beaucoup plus simple que toute personne qui est domiciliée dans la ville depuis au moins 12 mois, avant la date de la mise en candidature ou de la nomination, si elle a 21 ans, ait droit d'être éligible.

C'est la raison pour laquelle je ne ferai pas de long discours là-dessus. Je ne vois pas pourquoi on mettrait une restriction superflue à ses possibilités d'éligibilité en lui donnant l'obligation d'être sur le rôle des valeurs locatives. Je pense que ça enlève quand même beaucoup de personnes qui pourraient voter.

M. LAPORTE: Pour éviter une longue argumentation de la part du député, après consultation avec le ministre, avec le premier ministre et avec un des collègue je n'aurais pas d'objection à cela.

M. BOURASSA: Vous voyez comme on est positif.

M. LEGER: On va continuer en comité. Alors, la proposition que je faisais, c'est de remplacer les paragraphes a) et b) par les mots suivants: Si elle est domiciliée dans la ville depuis au moins 12 mois, avant la date de la mise en candidature ou de la nomination, selon le cas.

M. LAPORTE: Il faut quand même qu'on puisse avoir un certain contrôle sur le désir d'une personne d'être domiciliée ou d'être membre de la ville. Si on acceptait un compromis, en disant: que toute personne, mais 24 mois de domicile, au lieu de douze. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. LEGER: D'accord.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Quel est l'amendement exactement, pour les fins du procès-verbal? Si je comprends bien, le député de Lafontaine retire l'amendement.

M. LEGER: Non, je ne le retire pas, il y a une correction. Mon amendement était le suivant, vous avez la copie. Remplacer le paragraphe a) et le paragraphe b) de l'article 2 par les

mots suivants: « ... si elle est domiciliée dans la ville depuis au moins douze mois avant la date de la mise en candidature ou de sa nomination, selon le cas ».

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lafontaine accepte de changer le chiffre 12 par le chiffre 24 dans son amendement.

Cet amendement est-il adopté?

M. LAPORTE: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.

M. LAPORTE: Il ne faudrait pas quand même que, dans votre désir, dont parle le député de Lafontaine, de démocratiser, vous enleviez à une partie des citoyens un droit réel. Dans notre droit municipal, ce qu'on appelle l'économie du droit municipal, la personne qui est contribuable a un droit de regard sur l'administration de la chose municipale. Dans une administration provinciale, devient électeur toute personne qui est citoyenne, et c'est l'objectif que nous voulons atteindre graduellement au municipal. Il y a une dimension différente: c'est que toutes les sommes d'argent sont tirées directement des citoyens contribuables, et c'est ce qui leur donne le droit de regard. La personne domiciliée à Montréal a le droit d'être candidate, il ne faudrait pas qu'on le retire dans le b) aux personnes qui ne sont pas domiciliées à Montréal, qui sont contribuables et qui habitent dans un des territoires de la communauté urbaine. En retranchant 12, on enlèverait le cens d'éligibilité à toute personne domiciliée dans l'une des municipalités du territoire de la communauté. Je pense que c'est aller trop loin.

M. BERTRAND: Je voudrais attirer l'attention des membres du comité. On connaît la complexité de la charte de la ville de Montréal. Je n'ai pas d'objection à ce que nous acceptions des amendements, mais je crois qu'il serait à propos que nous ayons des légistes présents, de manière que l'on puisse voir si l'amendement que nous adoptons à l'article 2 n'a pas de référence à un article qui n'est peut-être pas dans la loi.

M. LAPORTE: Si le chef de l'Opposition me le permet, depuis que nous n'avons plus de Conseil législatif, où l'on corrigeait beaucoup de ces choses-là, il a été entendu, entre les gens qui s'occupent plus particulièrement de la législation, que lorsqu'il y a des amendements substantiels, qu'il y en a un certain nombre, on s'en- gage à ne pas adopter la troisième lecture tout de suite pour que les légistes, le lendemain, puissent nous faire certaines suggestions quant à la rédaction. Se mettre à rédiger des lois sur le coin du pupitre, ici, c'est extrêmement dangereux. Deuxièmement, ce que le chef de l'Opposition dit est exact, les implications, quand on amende le paragraphe a) ça peut avoir des implications qu'on ne prévoit pas 20 articles plus loin. Nous acceptons l'amendement, le ministre des Affaires municipales est d'accord, mais il est entendu que demain, tôt demain matin, les légistes vont recevoir les amendements, nous feront leurs recommandations quant à la façon de les écrire ou quant à leurs implications, le ministre des Affaires municipales fera rapport à la Chambre.

M. LEGER: Je suis d'accord.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté.

M. LEGER: L'article 2, tel qu'amendé.

M. LAPORTE: On maintient 2 b).

M. GARNEAU: L'article 2 a), mais pas 2 b).

M. LAPORTE: Votre amendement, si le ministre des Affaires municipales est de notre avis, remplacerait le paragraphe a), mais nous maintiendrions le paragraphe b).

M. LEGER: Dans le paragraphe b), c'est une personne qui est domiciliée dans la communauté urbaine, mais qui n'est pas nécessairement domiciliée dans la ville de Montréal.

M. LAPORTE: Toute personne qui est domiciliée à Montréal depuis 24 mois pourrait se présenter. Toute personne domiciliée en dehors de la ville de Montréal, mais dans la communauté urbaine, à certaines conditions prévues par la loi, pourrait également se présenter.

M. LEGER: D'accord.

M. GARNEAU: On amende l'article 2 a )et on garde l'article 2 b).

M. LAPORTE: C'est ça; on amende l'article 2 a ) et on garde 2 b).

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté. Article 3? Adopté?

M. LEGER: Un instant. A l'article 3, à notre

avis, cela rend identiques les conditions de l'article 2. Si l'on veut être logique avec l'article 2, il faudrait retrancher l'article 3.

M. TESSIER: L'affaire, c'est que, si vous mettez cela identique, dans l'article 3, cela voudrait dire que quelqu'un qui serait domicilié en dehors de la ville de Montréal pourrait être élu maire. Si vous rendez ça identique. D'ailleurs, c'est un peu pour ça qu'on a mis deux articles différents.

M. LEGER: Si on accepte l'article 2...

M. TESSIER: Autrement, on aurait pu dire maire et conseiller dans le même article.

M. LEGER: D'accord. Si on accepte l'article 2b), d'accord.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté?

M. LEGER: Vous êtes d'accord pour l'article 3?

M. TESSIER: En ce qui me concerne, oui.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté.

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 4? Adopté?

M. LEGER: Article 4, adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5?

M. LEGER: A l'article 5, toute personne domiciliée dans la ville depuis au moins douze mois peut se permettre de voter. Nous proposerions que l'article 5 se lise comme suit: « Tout citoyen canadien âgé de dix-huit ans révolus, qui n'est pas frappé d'incapacité légale ni autrement privé du droit de voter par la présente charte, qui est domicilié dans la ville depuis au moins vingt-quatre mois — je corrige le mot « douze » pour être en concordance avec tantôt — avant le premier septembre de l'année de l'élection est électeur et est inscrit sur la liste électorale.

M. PICARD: Est-ce que vous avez dit citoyen canadien ou citoyen québécois?

M. LEGER: Dans notre esprit, c'est québé- cois, mais actuellement on est obligé de dire canadien.

M. PICARD: C'est parce que cela me surprend.

Lorsque vous mentionnez ici « toute personne âgée de dix-huit ans révolus », à quelle date?

M. LE PRESIDENT (Hardy): Pour procéder un peu avec ordre, je demanderais d'abord au député de Lafontaine de nous indiquer quelle est la partie de l'article 5 que son amendement touche.

M. LEGER: Cela remplace tout l'article 5 parce que...

M. LAPORTE: Est-ce que je peux demander au député qu'est-ce que cela modifie?

M. LEGER: La raison, c'est qu'il y a des personnes qui ne sont pas domiciliées dans la ville, alors que nous voulons que ce soient les personnes qui y sont domiciliées.

M. LAPORTE: Vous voulez limiter le droit de vote à ceux qui sont domiciliés?

M. LEGER: Disons donc que le principe de base était que le droit de vote devait être donné au niveau de la personne qui vit dans la ville et non pas uniquement au niveau du droit de propriété. C'est la raison pour laquelle on apportait cet amendement-là.

M. LAPORTE: Oui, mais...

M. TESSIER: Vous voulez priver du droit de vote ceux qui ne sont pas domiciliés dans la ville, c'est ça?

M. LAPORTE: Vous voulez qu'il y ait des gens de taxés qui n'aient aucun droit de regard sur l'administration de la ville? Comment pouvez-vous défendre ce principe-là?

M. LEGER: C'est qu'actuellement le vote est accordé à une personne qui a des valeurs uniquement.

M. TESSIER: Non, non, non. Là, justement, c'est séparé en deux parties. Une personne n'est pas obligée d'être propriétaire ni locataire pour avoir le droit de vote, si elle est domiciliée dans la ville de Montréal. Ceux qui sont domiciliés à l'extérieur de la ville de Montréal doivent être propriétaires ou loca-

talres. C'est le simple bon sens, je crois, que des gens qui paient des taxes aient un droit de regard sur l'administration. Vous avez un règlement d'emprunt et la ville s'endette; vous avez des règlements de zonage et d'urbanisme. Je pense que ceux qui sont propriétaires pour des centaines de milliers de dollars, souvent des millions de dollars, ont leur mot à dire, sûrement, sur l'élection de leurs administrateurs.

M. LEGER: Est-ce que le ministre pourrait me dire si, dans la ville de Québec, les personnes qui possèdent des valeurs, actuellement — c'est une question d'information — votent?

M. TESSIER: Oui, je crois que oui.

M. LEGER: Vous êtes d'accord. Vous dites que vous croyez; vous en êtes sûr, certain?

M. LAPORTE: Oui.

M. TESSIER: Oui. D'ailleurs, je peux le contrôler ici.

M. LAPORTE: Lorsque nous avons amendé la charte, transformé la charte de la ville de Québec, cela a été le cens électoral universel à 18 ans pour les domiciliés et les gens de l'extérieur devaient avoir des biens-fonds ou être inscrits pour une valeur locative au rôle d'évaluation.

M. TESSIER: Exactement, nous l'avons pour la ville de Québec.

M. JORON: M. le Président, je pense que le principe qui est en jeu, ce n'est pas le « no taxation without representation ». Moi, par exemple, je peux fort bien avoir une propriété, une maison au Mexique sans être citoyen mexicain et sans avoir droit de vote au Mexique. Le point que nous voulons faire valoir est le suivant: Qu'est-ce qui confère le droit de vote? Est-ce que c'est le fait de posséder une propriété ou si c'est le fait d'être un citoyen de la ville? Il ne faudrait pas mêler les cartes.

Nous, nous pensons que le droit de vote rattaché à la propriété est un vestige féodal que nous devrions faire disparaître de...

M. LAPORTE: Non, non...

M. TESSIER: M. le Président, je pense que c'est absolument injuste parce que si quelqu'un paie des taxes, quel qu'en soit le montant, il a le droit de s'exprimer et de choisir ses administrateurs.

M. JORON: De la même façon, moi, si j'ai une petite bicoque de rien du tout en Italie et que je paie $3.25 par année de taxe au gouvernement italien...

M. LAPORTE: Oui, cela, c'est très gentil. C'est très gentil de nous amener en Italie.

M. JORON: ... est-ce que cela devrait me conférer la qualité d'électeur? Le raisonnement est le même.

M. LAPORTE: Si vous vous appuyez sur le droit de citoyenneté, vous n'avez pas le droit de vote parce que vous n'êtes pas citoyen.

M. JORON: Bon, alors...

M. LAPORTE: C'est d'accord. Quand on n'est pas citoyen, on est privé d'un tas de droits. Mais si vous étiez citoyen italien, parlez-nous donc de la loi qui régirait votre petite propriété aux élections municipales?

M. JORON: Là, on essaie de définir la citoyenneté municipale, si vous voulez, dans un sens.

M. LAPORTE: Oui, mais disons que vous, si le mot était parlementaire, je dirais que vous « charriez » un peu.

M. TESSIER: Même si vous demeurez en Italie, si vous êtes citoyen canadien, si vous avez conservé votre citoyenneté canadienne et que vous êtes propriétaire dans la ville de Montréal, en vertu de quoi pouvez-vous refuser le droit de vote?

M. JORON: En vertu du principe qu'on ne considère pas le droit de vote rattaché à la propriété, c'est tout.

M. LAPORTE: Ce n'est pas un principe.

M. TESSIER: Vous ne donnez pas le droit de vote à qui?

M. JORON: D'un principe ou d'une théorie, si vous voulez.

M. LAPORTE: De quoi? En somme, votre raisonnement, cela va. Nous donnerons le droit de vote à tout le monde, nous sommes d'accord, mais nous allons l'ôter à ceux qui ont quelques biens, nous allons leur enlever le droit de regard. Pourquoi? Cela enlève quoi à qui?

M. JORON: Pourquoi? Parce que, finalement, nous aboutirons... Tout à l'heure, la discussion viendra au sujet des corporations. Le même principe sera en jeu, que ce soient les personnes physiques ou les personnes morales, une corporation ou moi. Comme individu, dans ce raisonnement, je pourrais avoir des petites propriétés dans toutes les villes de la province et voter partout. Cela me semble illogique. Je ne peux pas être en même temps...

M. LAPORTE: Et pourquoi pas?

M. JORON: ... citoyen et participer à la vie démocratique de chacune de ces municipalités.

M. LAPORTE: Et pourquoi pas? Quand on veut étendre le droit de vote, on dit: D'accord, le député a proposé un amendement que tout le monde accepte et c'est très bien. Cela fait un pas de plus dans notre législation. Mais de là à dire : Il y a des gens qui l'ont déjà et qui peuvent... On imagine, évidemment, toujours le monsieur qui a un château immense dans la ville de Montréal. Or, il arrive que c'est une veuve qui a une petite propriété et vous voulez lui ôter son droit de regard sur l'administration de la ville.

M. JORON: Ecoutez, il est inutile de poursuivre cette discussion parce qu'en fait c'est peut-être une différence de nature idéologique qui nous sépare, mais pour fins d'information, je voudrais demander au ministre s'il pourrait nous dire approximativement le nombre d'électeurs qui tomberaient dans cette catégorie.

M. TESSIER: Je n'en ai aucune idée.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. le Président, je demanderais au député de Gouin comment il peut concilier le fait qu'en vertu de l'article 2b), il a accepté de donner la permission de se présenter comme candidat aux contribuables qui ne résident pas dans la ville même de Montréal et qu'à ces mêmes personnes, en vertu de l'article 5, il refuserait le droit de vote? C'est une affaire qui n'a pas de bon sens.

M. JORON: Là, il y a la distinction qu'on vient d'introduire au sujet de la communauté urbaine qui...

M. PEARSON: Mais à ce moment-là, il aurait fallu refuser l'article 2b), si vous voulez, en somme, passer l'article 5.

M. LEGER: Il y a quand même le fait qu'une personne peut posséder des propriétés dans plusieurs villes et, à chaque fois qu'il y a une élection, voter dans chaque ville.

M. TESSIER: Pourquoi pas?

M. LEGER: Elle peut donc voter dans toute la province de Québec.

M. TESSIER: Pourquoi, si elle a des intérêts et des propriétés dans trois ou quatre municipalités, n'aurait-elle pas le droit d'exercer son droit de vote?

M. LEGER: Quelle différence y a-t-il au niveau de la loi provinciale, du fait qu'on ne considère pas la propriété, à ce moment-là? Elle sera taxée de la même façon pour la province de Québec.

M. TESSIER: Oui, mais l'administration municipale est bien différente de l'administration provinciale ou de l'administration fédérale.

M. BLANK: Le mode de consultation au municipal, c'est la propriété. Au provincial et au fédéral, ce n'est pas cela.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le député de Lafontaine maintient toujours son amendement?

M. LEGER: Au point de vue de ce principe idéologique, je suis obligé de l'émettre, mais je vois très bien qu'il ne passera pas.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le comité est prêt à se prononcer sur l'amendement du député de Lafontaine?

M. TESSIER: Il demande le vote là-dessus?

M. LAPORTE: Est-ce que le député insiste ou s'il retire simplement son amendement?

M. LEGER: Non, non, on en a discuté et on voit que...

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député retire son amendement et nous revenons à l'article 5. Adopté?

M. LEGER: Adopté.

M. PICARD (Olier): M. le Président, à l'article 5, les personnes âgées de 18 ans révolus, c'est à partir de quelle date? Si ce n'est pas mentionné dans la loi, je ne sais pas de quelle façon on va être capable de l'établir.

M. BERTRAND: Au moment de l'énumération.

M. PICARD (Olier): La loi provinciale prévoit la date; c'est le premier jour de 1'énumération. Mais ici, ce n'est pas prévu.

UNE VOIX: Il faudrait vérifier. Est-ce que c'est spécifié?

M. LAPORTE: On va poser la question demain aux légistes. Si cela peut être automatiquement mentionné à la date de l'énumération.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté. Article 6?

M. LEGER: Avec le principe qu'on a énoncé tantôt. Dans notre esprit, il faudrait que l'article 6 soit retranché, parce que cela revient encore aux mêmes idées que tantôt.

M. TESSIER: Ah, ça, je n'accepte pas cela! Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 6, adopté. Article 7?

M. TESSIER: Est-ce parce que vous croyez que les compagnies et les corporations ne sont pas séparatistes? C'est pour cela que vous voulez les retrancher?

M. LEGER: C'est-à-dire, elles le sont peut-être trop dans notre esprit.

UNE VOIX: Dans votre esprit.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 7? Adopté.

M. LEGER: D'accord.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8?

M. TESSIER: Article 7, adopté? Ça va bien.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 8, adopté?

M. LEGER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 9?

M. LEGER: Article 9, pour le même principe. On aurait voulu retrancher l'article 9, qui serait inutile, si cela n'avait été adopté ailleurs, puisque la qualité de propriétaire ou de locataire donnait le droit de vote.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté sur division?

M. LEGER: C'est ça.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10?

M. LEGER: A l'article 10, qui modifie l'article 204 de la loi, voici ce que nous proposions. Cest que, pour l'élection tant des conseillers que du maire, les électeurs ne votent qu'une fois dans le district où ils sont domiciliés.

M. TESSIER: Voulez-vous répéter?

M. LEGER: Pour l'élection tant des conseillers que du maire, les électeurs ne votent qu'une fois dans le district où ils sont domiciliés. Cest qu'on n'a parlé que de l'élection, on ne parlait pas du maire.

M. BLANK: Si je comprends bien, vous voulez dire qu'une personne a, disons, trois propriétés: une dans le quartier de Saint-Louis, une dans le quartier de Notre-Dame-de-Grâce et une dans le quartier de Bourget. Elle a droit de vote dans seulement un quartier.

M. LEGER: Un vote pour l'élection des conseillers et du maire.

M. BLANK: Bien, pour le maire, il y a seulement un vote actuellement.

M. LEGER: C'est ça.

M. BLANK: Pour les échevins, elle peut voter aux trois endroits. Mais, si elle a deux ou trois propriétés, elle n'a pas droit de vote deux ou trois fois dans le même quartier.

M. LEGER: D'accord.

M. BLANK: Ce ne serait pas logique non

plus, parce que, quand on vote pour tel ou tel conseiller dans un district, on vote parce qu'on a confiance à ces gens-là. On veut qu'ils protègent le zonage, etc. On a un intérêt différent, peut-être, dans chaque quartier. Maintenant le droit de vote est limité à un vote dans un quartier, même si vous avez une douzaine de propriétés. C'est la raison, car, dans chaque quartier, il peut y avoir un intérêt différent pour la personne. Peut-être qu'il y a un intérêt à garder une section de la ville commerciale, une autre section résidentielle, et je veux voter pour des gens qui ont tendance à satisfaire mes besoins. Cest pour cela que je pense que le système actuel, le système d'un vote dans chaque district où vous avez des propriétés, pour les échevins, mais seulement un vote pour le maire, c'est logique.

M. LEGER: D'accord, mais, d'un autre côté, cela permet de voter trois fois. Quand même, les décisions qui vont être prises, que ce soit dans un des trois quartiers, elles vont être prises seulement une fois, pour le maire.

M. BLANK: Oui, mais on vote seulement une fois dans le quartier.

M. LEGER: D'accord. Mais, c'est en accord avec le principe de tantôt, une personne, un vote. Disons que, logiquement, notre préoccupation est qu'une personne a droit à un vote.

C'est pour éviter quelque chose qui est contre cette idée là que nous proposons un amendement.

M. BLANK: On ne comprend pas, moi je dis: Un vote dans chaque quartier. Ce sont des élections différentes dans chaque quartier; c'est une élection dans le quartier de Saint-Louis; c'est une élection dans le quartier de Bourget. Il n'y a qu'un vote pour chaque élection, parce que toutes les élections se font la même journée, ça ne change rien.

M. LEGER: On vote quand même trois fois.

M. BLANK: Oui, dans trois différentes élections.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député d'Olier.

M. PICARD: M. le Président, je me demande comment vous allez concilier ce qu'il y a à l'article 10 avec le dernier paragraphe de l'article 12 où il est dit: « Tout électeur n'est inscrit qu'une fois sur la liste électorale de la ville. » Alors, comment pourra-t-on vo- ter dans trois quartiers différents si on n'est inscrit qu'une fois?

M. LAPORTE: L'article 204 lui donne le droit de voter une fois dans le district où on a son domicile.

M. LEGER: L'article 204 donne le droit de voter trois fois tandis que l'article 12 le corrige. A la page 67, à l'article 204 on lit ceci: « Pour l'élection des conseillers, les électeurs votent dans le district où se trouvent les immeubles qui les qualifient comme tels. Lorsqu'ils sont qualifiés comme propriétaires, locataires ou occupants dans plus d'un district, ils peuvent voter dans chacun de ces districts. »

M. LAPORTE: Quel article?

M. LEGER: L'article 204.

M. PICARD: L'article 12 le contredit.

M. LAPORTE: M. le Président, à Montréal, l'électeur domicilié à Montréal ne vote qu'une seule fois pour trois échevins, puisqu'il y a quinze districts qui élisent chacun trois échevins, dans le district où il a son domicile.

S'il n'est pas domicilié à Montréal, s'il est qualifié par des propriétés, c'est la propriété la plus importante qui le qualifie dans un seul district, actuellement.

M. LEGER: Il y aurait donc un amendement à l'article...

M. LAPORTE: Cela a été amendé, il y a des amendements tous les ans.

M. BERTRAND: Vous ne les avez pas là-dedans, il y en a quatre... Ne vous fiez pas...

M. LAPORTE: Si les députés qui s'intéressent aux affaires de Montréal prenaient le soin de demander à la ville de Montréal une charte à jour, c'est amendé tous les ans, vous avez des codifications. Je sais que le ministre a une codification qui date de 1970. Cela a été amendé pour enlever le droit de vote dans autant de districts qu'on a de propriétés et de le limiter à un endroit, là où on a son domicile.

M. LEGER: Alors, c'est opposé à ce que disait le député de Saint-Louis tantôt.

M. BLANK: Ceci prouve qu'un bon avocat peut apporter des arguments sur n'importe quoi.

M. LAPORTE : Jusqu'à il y a quelques secondes, j'étais de l'avis du député de Saint-Louis.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10, adopté.

M. LEGER: C'est-à-dire qu'il n'y a pas... « pour l'élection des conseillers et du maire, les électeurs ne votent qu'une fois dans le district où ils sont domiciliés », cela revient à la même chose. Mais dans l'article 10, ce n'est pas ce qui est mentionné.

M. TESSIER: Pardon?

M. LAPORTE: Autrefois il fallait la qualification foncière. Maintenant qu'il y a le vote général, ce ne doit être que ce que nous appelons un amendement de concordance. Cela fait disparaître des mots, j'imagine, qui parlaient de qualifications foncières ou locatives.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10, adopté. Article 11.

M. LEGER: A l'article 11, actuellement c'est le greffier, je pense...

M. LAPORTE: C'est parce que, dans l'ancien article, on parlait de résidence. Comme la loi définit maintenant le domicile, on remplace, dans le texte, le mot « résidence » par le mot « domicile ».

M. LEGER; D'accord.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11?

M. LEGER: Voici l'amendement que nous aimerions apporter à l'article 11, soit remplacer le troisième alinéa de l'article 206 dans lequel on dit: « L'estimateur doit fournir au président d'élection, avant le 3 septembre de l'année de l'élection, la liste des personnes qualifiées le 1er août; il signe cette liste et la certifie, sous serment prêté devant un juge de paix, comme exacte au meilleur de ses connaissances et croyance. L'estimateur doit ajouter à la description de l'immeuble l'adresse de tout électeur non domicilié dans la ville. »

Nous proposons de remplacer le troisième alinéa de l'article 206 par le suivant: « Le président d'élection nomme des énumérateurs sur recommandation des chefs de partis politiques municipaux ayant manifesté leur intention de présenter des candidats au moins à la moitié des postes de conseiller. »

M. TESSIER: Oui, mais, une minute.

M. LEGER: Si vous voulez me permettre, je vais finir.

M. LAPORTE: Oui, d'accord.

M. LEGER: Après cela, on va s'expliquer. « Ces énumérateurs ne seront rémunérés que si le parti politique qui les a recommandés s'avère être un parti reconnu le jour de la présentation officielle des candidats. Si le président d'élection ne reçoit pas de recommandations en nombre suffisant, il comble lui-même les vacances. »

J'explique les raisons et, après cela, vous pourrez me répondre. Actuellement, nous croyons que les partis politiques reconnus, qui pourraient l'être par un article qui va venir bientôt, n'ont pas l'occasion d'être présents à l'établissement de là liste électorale et à la révision. C'est la raison pour laquelle les partis politiques municipaux qui seraient reconnus selon une façon précise, qu'on verra plus tard, auraient le droit d'être présents immédiatement. Une des conséquences, lorsque ce n'est pas fait — je m'excuse de revenir à l'élection provinciale — c'est que les partis non reconnus n'avaient pas le droit d'avoir un représentant qui passait de porte en porte; ils n'avaient pas, à cette occasion-là, la possibilité d'avoir les listes électorales exactes en même temps que les partis reconnus.

C'est la raison pour laquelle nous croyons que c'est une chose désuète que de ne pas permettre à un nouveau parti d'avoir une chance égale à celle du parti qui est au pouvoir ou qui est sortant de charge.

M. TESSIER: M. le Président, la loi municipale, en général, ne reconnaît pas officiellement les partis politiques. Il n'y a rien, d'ailleurs, qui définit ce qu'est un parti politique. Là, il faudrait modifier complètement la Loi des cités et villes et le code municipal. Cela n'existe pas officiellement, des partis politiques. Comment allez-vous déterminer et définir un parti politique?

M. LEGER: Il faut quand même admettre que c'est possible par règlement.

M. TESSIER: Allez-vous donner un statut particulier à la ville de Montréal, qui serait la seule municipalité où il y aurait des partis politiques reconnus, lorsque cela n'existe pas, ni dans la charte de la ville de Québec, ni dans la Loi des cités et villes?

M. BERTRAND; Le ministre fait peut-être erreur, parce que c'est dans la ville de Montréal qu'est né le premier parti politique municipal au Québec.

M. TESSIER: Officieusement.

M. BERTRAND; Là Ligue d'action civique, d'abord, puis le Parti civique. Personne, même son chef, Jean Drapeau, n'a jamais nié qu'il s'agissait de l'instauration, dans le domaine municipal, du règne des partis politiques. Je pense que le ministre fait erreur. De même, M. Lamontagne n'a jamais prétendu que la ville de Québec ne comptait pas de parti politique, au contraire. Parce que le Parti civique, dans la ville de Québec également...

M. TESSIER: Oui, mais ce n'est pas un parti politique dans le sens...

M. BERTRAND: ... est un parti reconnu.

M. TESSIER: ... où on l'entend, en vertu de la loi provinciale ou de la loi fédérale. C'est cela que je veux dire.

M. BERTRAND; Le problème est beaucoup plus le fait que ce n'est appliqué dans aucune municipalité du Québec.

M. LAPORTE: Cela amènerait, évidemment des amendements extrêmement nombreux de concordance.

Le député voudrait-il, son point de vue ayant été accepté conme sujet de discussion, que le tout soit déféré à la commission parlementaire qui pourra, en temps utile, traiter de l'opportunité de reconnaître ou de ne pas reconnaître les partis politiques au niveau municipal? Je sais que nombreux sont ceux qui jugent que le moment est venu de les reconnaître, d'en encourager la création, mais si on veut généraliser, uniformiser, je vous promets que, chez nous, à Boucher-ville, les partis politiques vont être moins populaires que dans la ville de Montréal.

Vous devez avoir autant que possible, et c'est un des objectifs que le ministère des Affaires municipales recherche depuis déjà quelques années, une uniformisation de nos lois municipales.

Merci donc au député pour l'idée neuve qu'il lance. Peut-être pourrions-nous en discuter à la commission parlementaire dont il fait partie, j'imagine.

M. LEGER: M. le Président, je suis très heureux de voir que le ministre du Travail trouve que c'est une idée neuve, mais, avec toute l'habileté qu'on lui connaît, il pourrait certainement trouver une façon de permettre à la ville de Montréal de reconnaître par règlement un parti qui aurait certaines qualités. Entre autres, une de ces qualités pourrait être d'avoir des candidats au moins à la moitié des postes qui sont à pourvoir. S'il était possible de le permettre à la ville de Montréal, il y aurait toute une suite de conséquences. Il y a une administration sortante actuellement qui est quand même constituée en parti politique, il faut l'admettre, que ce soit officieusement ou pas. Or, ces personnes que nous admirons pour la plupart ont quand même une occasion trop forte de faire une compétition absolument inégale à d'autres personnes qui veulent se présenter, si on ne donne pas à ces dernières le titre de parti reconnu.

Nous avons vu ici en Chambre comment il était difficile d'avoir le titre de parti reconnu officiel. Comment ça va-t-il être à Montréal, si la province de Québec ne légifère pas là-dessus?

M. LAPORTE: Cela a été difficile?

M. LEGER: Je parle de parti reconnu officiel.

M. LAPORTE: Cela a été difficile ici en Chambre?

M. LEGER: Je ne parle pas de parti reconnu, mais de parti reconnu officiel.

M. LAPORTE: Je regrette, mais je vais toujours vous ramener à ces choses-là. Encore une fois, vous seriez aimable de dire à cette Chambre à quel moment cela a été difficile, quelles difficultés vous avez rencontrés pour vous faire reconnaître comme parti politique en cette Chambre.

M. LEGER: M. le Président, le ministre sait fort bien que nous avons proposé un amendement qu'il a trouvé ridicule. Il a dit qu'il avait déjà fait un gros effort pour nous faire plaisir et que, devant la population, il se sentait très à l'aise pour dire qu'il avait offert de reconnaître le parti. Sur ce point-là, nous sommes d'accord, c'est une minimum vital.

M. LAPORTE: Cela n'a pas été difficile.

M. LEGER: Mais le point sur lequel je ne suis pas d'accord, c'est que nous avons amené autre chose, un autre argument...

M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! A l'ordre! On pourrait peut-être revenir...

M. LEGER: ... qui était celui d'avoir un parti reconnu officiel.

M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Le député de Gouin.

M. LEGER: De toute façon, c'est un aparté.

M. LAPORTE: Ah, c'est très bien. C'était la grenouille, qui devenait grosse comme le boeuf.

M. PEARSON: M. le Président...

M. TESSIER: Je crois que le député pourra revenir sur cette question lors de la présentation de la loi générale des élections municipales. Cela sera l'occasion d'en discuter. Cest un sujet extrêmement complexe qui va nécessiter bien des études parce que, justement, comme on le soulignait, il y a probablement un tas d'articles qui devraient être modifiés. Or, le bill no 5, est un peu une loi d'urgence pour les élections qui s'en viennent dans quelques mois à Montréal. Je crois donc qu'il n'y a pas lieu d'incorporer la question des partis politiques dans le bill no 5.

M. JORON: M. le Président, si vous me permettez d'obtenir l'attention encore quelques instants sur ce sujet, j'ai compris l'explication que donnait tout à l'heure le député de Chambly quant à l'idéal d'uniformisation des lois municipales dans la province de Québec. Mais il faut bien comprendre que si, de toute façon, Montréal a une charte particulière, c'est parce que c'est un cas très particulier dans le Québec, une ville de 1.5 million d'habitants quand la plus importante ville suivante tombe à environ 200,000. C'est la ville de Laval, si ma mémoire est exacte, qui est la deuxième ville au Québec. Il y a là une marge considérable. Or, on avait peut-être déjà vu dans les élections municipales récentes de la ville de Laval apparaître ces difficultés de recensement.

De par sa dimension même, Montréal demande peut-être un statut particulier. Cest d'ailleurs la raison pour laquelle elle a une charte spéciale.

D'autre part, si vous avez déjà accordé le droit de vote universel à 18 ans aux autres villes, je ne vois pas pourquoi, pour une fois, Montréal ne pourrait pas être en avance sur le reste de la province à ce sujet, puisque c'est là que le problème est le plus urgent. L'administration d'une ville de 1.5 million d'habitants, qui a un budget d'environ $300 millions par année, c'est une grosse affaire. Renverser un gouvernement municipal, seuls des gens organisés peuvent le faire. Par définition, l'administration d'une telle ville devient la chose d'un parti politique. On n'a pas besoin de se raconter des histoires; ça existe depuis déjà dix ans à Montréal. On les a nommés tout à l'heure; la Ligue d'action civique, le Parti civique; on a oublié le Rassemblement pour le Grand Montréal et enfin les autres de défunte mémoire. Je me demande si, quand même, on ne pourrait pas faire un effort et considérer cet amendement immédiatement pour un cas particulier qui est la ville de Montréal.

M. TESSIER: Pour ma part, je ne suis pas prêt à considérer un amendement dans ce sens. Justement, on veut faire disparaître toutes ces disparités dans les différentes chartes et abolir, en somme, ce statut d'exception qu'a la ville de Montréal, de sorte que nous ayons une loi générale qui couvre toutes les municipalités sans exception, y compris Montréal.

M. JORON: Vous êtes contre le statut particulier, si je comprends bien.

M. TESSIER: Pas de discrimination.

M. PEARSON: Il me semble que cet amendement n'a pas été fouillé à fond. Il devrait, au moins, dire: « S'il y avait plus d'un parti politique qui présente des candidats dans tous les quartiers ou, au moins, dans un certain nombre de districts de la ville. » Autrement, supposez qu'il n'y ait qu'un parti, le Parti civique, qui présente des candidats; il serait le seul, d'après votre amendement, à pouvoir nommer les récenseurs, si l'autre parti ne réussit à avoir des candidats que dans un nombre limité de districts électoraux. Il y a donc plusieurs implications, à mon sens, qui n'ont pas été fouillées. Cela appelle trop d'autres amendements.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Robert-Baldwin.

M. SEGUIN: Non seulement y a-t-il plusieurs implications, mais je voudrais attirer l'attention du député, qui a fait mention tout à l'heure d'une charte particulière pour Montréal, sur le fait qu'il y a dans la province plusieurs centaines de municipalités qui ont des chartes particulières. Ce n'est pas particulier à la ville de Montréal ou à la ville de Québec. Un très grand nombre de municipalités ont une charte spéciale. Deuxièmement, il faut aussi se souvenir que la ville de Montréal fait partie d'une entité parmi plusieurs; il y en a 29 dans

la communauté urbaine. Il faut donc ne pas établir de cas spéciaux. Cela fait pour Montréal, dans ce cas-ci. Il faudrait, en même temps, considérer le fait que nous sommes, lorsque nous discutons de la région de Montréal, une communauté urbaine. Je suis pour la loi telle qu'elle est présentement et non pas pour un amendement.

Je pense, sans être très dogmatique là-dessus, que faire une suggestion contraire pour une entité de cette communauté urbaine, à ce moment-ci, serait mal procéder. Ce ne serait pas bien vu, parce qu'il faut considérer Montréal comme faisant partie d'un tout. On parle surtout, ces jours-ci, de cette communauté urbaine. Je voulais tout simplement faire cette remarque au député qui a fait allusion, tout à l'heure, à cette question de charte particulière pour la ville de Montréal. Cela n'existe pas, puisque, déjà, dans la province, des centaines de villes ont des chartes bien particulières à leur municipalité.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Pour répondre à la question du député de Saint-Laurent, il faut admettre une chose, c'est qu'un parti reconnu officieusement, lorsqu'il est en place va indirectement nommer les greffiers qui, eux, choisissent les recenseurs. Je pense que ce n'est absolument pas logique.

M. TESSIER: C'est faux, ça. Le parti qui est en place ne nomme pas indirectement les recenseurs. C'est le président d'élection lui-même, de son autorité, qui nomme les recenseurs. Si vous croyez que le président d'élection est un homme malhonnête, dites-le franchement.

M. LEGER: Ce n'est pas la question que j'ai soulevée; je n'ai pas dit que la personne était malhonnête.

Je pense qu'il serait beaucoup plus logique et beaucoup plus souple que les personnes qui s'occupent de l'énumération soient les personnes mêmes qui auront à subir le résultat du travail qu'elles vont faire au niveau de l'élection qui s'en vient. Il n'est pas normal que, s'il y a un deuxième ou un troisième parti qui veut se présenter à l'échevinage, il n'ait pas accès aussi rapidement que le parti au pouvoir aux renseignements concernant les listes électorales. Il y a des conséquences malheureuses qui surviennent quand nous recevons les listes électorales trop en retard.

Si on relit tranquillement l'amendement, je pense que cela ne casse rien, c'est très simple. Cela commencerait à ouvrir la porte à une démocratie beaucoup plus large. Voici un exemple de ce que j'ai avancés Le président d'élection nomme les énumérateurs sur recommandation des chefs de partis politiques municipaux ayant manifesté leur intention de présenter des candidats au moins à la moitié des postes de conseiller. L'énumération — j'explique, là — se fait nécessairement avant la date du dépôt des bulletins de présentation. Il faut donc, nécessairement, si on veut pouvoir faire l'énumération, que le président d'élection sache quels sont ceux qui se présenteront. C'est la raison pour laquelle on dit: ... de manifester leur intention de présenter des candidats au moins à la moitié des postes de conseiller.

Ces énumérateurs-là ne seront rémunérés — pour éviter le danger qu'une personne se présente en disant qu'elle aura une équipe avec des candidats à tous les postes, pour se faire de la publicité, pour avoir le droit de faire l'énumération, pour retirer un profit des salaires qu'ils pourraient gagner — que si le parti politique qui les a recommandés s'avère être un parti reconnu le jour de la présentation officielle des candidats. Autrement dit, si on déclare que c'est la moitié des postes, il faudra que, le jour de la présentation des candidats, il y ait au moins la moitié des postes de représentés dans ce parti-là pour que les énumérateurs puissent être payés pour leur travail.

Si le président d'élection ne reçoit pas de recommandations en nombre suffisant, il combinera...

M. TESSIER: Me permettriez-vous une question, s'il vous plaît? Vous suggérez là que ce soient les partis politiques qui recommandent les énumérateurs au président d'élection.

M. LEGER: C'est ça.

M. TESSIER: Il est prévu dans la charte qu'il y a deux énumérateurs par section de votation. Or, s'il y a cinq partis politiques, lesquels de ces cinq partis politiques vont suggérer les énumérateurs? Il y en a deux à nommer et il va y avoir cinq partis politiques.

UNE VOIX: Cela fait dix.

M. TESSIER: Comment allez-vous arranger cela à la lumière du bill 5?

M. LEGER: Une chose est certaine, c'est qu'à la lumière de ce qui s'en vient à Montréal

on peut dire que s'il y avait trois partis reconnus ayant des candidats dans tous les postes, cela pourrait être un maximum. Mais il se pourrait éventuellement qu'il y en ait plus. Actuellement, on prévoit le cas plus normal où il y en aurait peut-être deux ou trois. A ce moment-là, cela pourrait se faire par équipe de trois. Je ne dis pas d'aller faire cela en équipe de cinq, ce serait ridicule.

M. TESSIER: Vous voulez dire qu'ils nommeraient trois énumérateurs?

M. LEGER: Mais, normalement par équipe de deux.

M. LAPORTE: Mais, théoriquement, il peut y en avoir quatre, cinq, six, huit, dix ou douze?

M. LEGER: Bien sûr, il peut y en avoir dix, c'est sûr.

M. LAPORTE: Un congrès à chaque porte. M. PEARSON: M. le Président...

M. TESSIER: ... cinq partis politiques, cinq énumérateurs...

UNE VOIX: C'est fou, ça.

M. LEGER: La question, c'est que les candidats qui seront représentés aient la chance de participer à l'énumération.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: J'ai une question à poser au député de Lafontaine. Supposons le cas inverse. Vous avez un deuxième parti qui présente des candidats dans seulement la moitié des districts. Est-ce que ce parti-là aurait lui-même le droit de nommer des énumérateurs dans tous les autres districts?

M. LEGER: Le droit de l'énumération, c'est qu'il est parti reconnu, s'il a la moitié des candidats selon les postes qui sont ouverts. A ce moment-là, il a le droit d'aller partout, parce que le résultat des élections, dans les secteurs où il ne sera pas présent, fait quand même qu'ils seront moins nombreux comme votants une fois qu'ils seront rendus au pouvoir. Il faut nécessairement qu'il y ait un droit de regard sur toute l'énumération de la ville de Montréal.

M. LAPORTE: Avez-vous pensé à ce qui va arriver si vous avez cinq partis politiques, par hasard? Cela fait 12,500 énumérateurs.

M. LEGER: Ecoutez, est-ce que vous prévoyez ça pour Montréal, cinq partis politiques?

M. LAPORTE: Non, non.

M. LEGER: Il n'y en a jamais eu depuis dix ans. Il s'en présente un actuellement.

M. LAPORTE: Si vous consultez seulement votre voisin de droite, il va vous dire que, lorsque l'on légifère, on ne légifère pas en disant: Il n'y en aura pas plus que trois. Si, tout d'un coup, il y en a cinq, huit. On légifère.

M. LEGER: M. le Président,...

M. LAPORTE: Vous pourriez ajouter à votre amendement: En espérant toutefois qu'il n'y en aura pas plus que trois. Il peut bien y en avoir trois, cinq, huit et dix.

M. BURNS: De toute façon, M. le Président, si l'objection, c'est qu'il peut y en avoir quatre ou cinq, quel principe serait vraiment détruit par le fait qu'il y ait cinq énumérateurs, s'il y a cinq partis?

M. LAPORTE: Ce n'est pas un principe. Je fais remarquer au député de Maisonneuve que, physiquement, il faut bien, à un moment donné... Le député de Bourget nous a dit tantôt — il faut le répéter — que les principes qui restent suspendus en l'air, cela ne donne pas grand-chose.

M. LEGER: Revenez à notre niveau.

M. LAPORTE : Il faut les convertir en législation. Si vous aviez cinq partis reconnus à Montréal, cela voudrait dire 12,500 personnes qui font le recrutement. La démocratie est-elle plus protégée par 12,500 personnes qui sont choisies n'importe comment — ce n'est pas des farces, choisir 12,500 personnes — que par 2,500 qui ont toujours... Si vous en avez deux, vous avez déjà une protection multipliée par cent, parce que, pour que vous puissiez avoir de la collusion, il faut que vous en achetiez un et parfois deux. Alors, quand vous avez deux énumérateurs, vous avez déjà une grande protection. Si vous en mettez trois, quatre, cinq, à ce moment-là, c'est ce que j'appelle un congrès à chaque porte. Est-ce que vous imaginez à part cela, l'attitude des électeurs qui voient arriver,

à un moment donné, une caravane de trois, quatre ou cinq personnes qui s'en viennent faire le recrutement?

UNE VOIX: Ce serait beau dans un deux-pièces.

M. LAPORTE: Pardon?

M. DEMERS: Dans un deux-pièces.

M. LAPORTE: Dans un deux-pièces.

M. LEGER: Mais, au niveau du principe, M. le Président...

M. LAPORTE: Au niveau du principe, nous sommes d'accord. Que voulez-vous que nous fassions?

M. LEGER: ... n'accepteriez-vous pas, comme on le voit dans la Loi électorale du Québec, que les partis qui sont reconnus aient quand même le droit de participer au recensement?

M. LAPORTE: Je comprends, mais ce que nous voudrions vous faire admettre, ce soir, c'est qu'il n'y a pas, actuellement, de partis légalement reconnus.

UNE VOIX: Légalement.

M. LAPORTE : Vous voulez introduire, par le biais d'une énumération, le principe des partis reconnus. Est-ce que je puis au moins vous dire combien cela a été complexe, la législation que nous avons faite? Le jour où, pour la première fois, dans l'histoire du Québec, cette Assemblée nationale a décidé d'avoir des partis reconnus, savez-vous le nombre de lois qu'il a fallu vérifier, le nombre d'articles qu'il a fallu soumettre à nos légistes pour dire: Cela influencera telle affaire?

Actuellement, vous faites entrer dans le bill le cheval de Troie. Qu'est-ce qui va descendre de chaque côté? On ne le sait pas. Le principe que vous suggérez mérite au moins une chose, c'est d'être étudié très attentivement. Nous n'avons ni le temps et — soyons modestes — ni la capacité juridique, tous tant que nous sommes, ce soir, — j'exclus volontairement nos experts légistes — de le faire sérieusement. Si nous voulions faire cela, il serait très possible au Parti québécois... C'était un autre amendement; que nous ont-ils dit sur un autre bill? On nous présente un bill qui a été préparé à la vapeur, le bill sur les explo- sifs, parce qu'à un moment donné cela correspondait à l'opinion publique. Eh bien, dites-vous donc la même chose, ce soir, Dites-vous-le à vous.

Si vous apportiez, comme cela, sans préparation suffisante, avec une excellente intention, je ne veux pas discuter cela... Quand je ne suis pas d'accord, je le dis assez rudement, mais là, je suis d'accord; c'est une idée qui doit être creusée. Nous n'avons pas le temps de creuser cela ce soir. Apportez-la à la commission parlementaire et, là, nous l'étudierons avec plaisir. Si elle peut être adaptée à nos lois, c'est avec satisfaction qu'unanimement nous en ferons part au ministre des Affaires municipales. Je pense que c'est suffisant pour l'instant. Vous avez lancé une idée qui mérite d'être reprise ailleurs, mais je suggérerais que nous puissions maintenant adopter cet article.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Olier.

M. PICARD: M. le Président, à deux reprises, le député de Lafontaine a utilisé comme argument la situation qui prévaut lors d'une élection provinciale, à savoir que le parti au pouvoir reçoit, de même que l'Opposition officielle, des copies des listes électorales, alors que les autres partis en place doivent attendre que le président d'élection leur fasse parvenir la liste imprimée.

Dans le cas du bill présentement à l'étude, il n'y aura pas de distribution de la première liste, comme nous l'avons au provincial. Si vous lisez l'article 26, vous verrez que la seule distribution qui sera faite sera faite par le président d'élection à quiconque en fera la demande. A ce moment-là, il faudra que les gens paient pour avoir la liste, à l'exception des candidats qui, eux, auront droit gratuitement à cinq copies de la liste. Tout le monde sera alors sur un pied d'égalité.

Je pense que c'est l'argument le plus important qu'on ait utilisé pour demander que l'on permette aux gens des tiers ou des autres partis de participer à la préparation des listes. Etant donné que vous n'avez pas ici cette situation que vous aviez aux élections provinciales, je ne vois pas où est votre argumentation.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Avant d'aller plus loin, je rappelle que, depuis le début de cette séance, plusieurs membres du comité ont parlé assis à leur siège, contrairement au règlement. Je ne voudrais quand même pas qu'on prenne cette habitude. Je demande que l'on respecte le règlement.

M. PICARD (Olier): Mex excuses, M. le Président.

M. LEGER: La réponse que nous donne le député d'Olier ne me satisfait pas. Comme, au provincial, la même situation se présente, le recenseur est quand même une personne très sympathique à la cause du parti au pouvoir, son adjoint est sympathique à la cause du parti de l'Opposition. Je pense qu'il faut se rendre compte que la personne nommée par le greffier peut aussi transmettre très facilement une copie, sans que personne ne le sache, au parti au pouvoir. C'est donc la raison pour laquelle, dès que la liste est faite, il devrait normalement constituer en même temps une liste pour les partis de l'opposition.

M. LAPORTE: Très bien, adopté.

M. LEGER: Tout ce problème-là n'arriverait peut-être pas si on avait accepté le principe — je suis sûr que le ministre du Travail va sauter, je sais que vous ne sautez plus maintenant, cela fait tellement longtemps que vous avez sauté — de la liste électorale permanente. Cela aurait réglé ce problème, parce que la liste aurait été immédiatement prête. Lors de la déclaration des élections, tous les partis de l'Opposition...

M. TESSIER: Cela ne l'aurait pas réglé davantage.

M. LAPORTE: Vous me faites penser au temps...

M. TESSIER: M. le Président, maintenant que nous avons entendu les opinions de tout le monde, je propose que l'on accepte l'article 13.

M. LAPORTE: Adopté.

M. LEGER: Excusez-moi, je n'ai pas...

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 12, adopté?

M. LEGER: Vous proposez que l'article 11 soit adopté...

M. BURNS: Sur division, M. le Président. M. LEGER: Sur division.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11, adopté sur division. Article 12?

M. LEGER: Un instant. Encore là, à l'article 12, nous voudrions retrancher les mots: « et doivent faire mention de sa qualité de propriétaire, occupant ou locataire, selon le cas. »

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 12, adopté?

M. BURNS: Sur division.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Sur division. Article 13? Adopté. Article 14? Adopté. Article 15?

M. LEGER: A l'article 15, il est question de plaintes lors de la confection des listes, c'est-à-dire la question de révision. Voici ce que nous aimerions apporter comme amendement. Nous voudrions que l'article 213 de la charte de Montréal se lise comme suit : « Sur demande produite suivant l'article 212, la liste électorale est révisée, entre le 25 septembre et le 5 octobre de l'année de l'élection, par une commission de trois membres nommés dans chaque district électoral. Le président d'élection nomme les réviseurs sur recommandation des chefs des partis politiques municipaux ayant manifesté leur intention de présenter des candidats à au moins la moitié des postes de conseiller. Ces reviseurs ne sont rémunérés que si le parti qui les a recommandés s'avère être un parti reconnu lors de la présentation officielle des candidats. » Cela revient quand même à ce qu'on disait tantôt.

M. TESSIER: C'est la même chose que tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 15, adopté sur division.

M. LEGER: Cela veut donc dire que si on l'adopte, on refuse ici, ce soir, la reconnaissance d'un parti reconnu au niveau municipal. C'est clair? C'est ça.

M. LAPORTE: On refuse la reconnaissance, c'est ça.

M. LEGER: L'Assemblée nationale s'est donc prononcée contre la présentation d'un parti politique officiel reconnu, à Montréal.

M. LAPORTE : Cela s'appelle tiré par les cheveux.

M. LEGER: Cela fait mal.

M. LAPORTE: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 15, adopté sur division. Article 16? Adopté.

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 17?

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 18? Adopté. Article 19? Adopté. Article 20?

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 21?

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 22?

M. TESSIER: Adopté.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 22.

M. LEGER: Entre l'article 22 et 22 a), l'article 256 de la charte de Montréal pourrait être modifié en remplaçant, au deuxième paragraphe, le mot « neuvième » par « quinzième ». Autrement dit, il s'agirait de donner quinze jours d'avis pour que le président d'élection donne avis de la nomination des vice-présidents, de l'adresse de leur bureau, ainsi que de l'heure et de l'endroit de la mise en candidature. » Actuellement, il y a une semaine pendant laquelle les candidats peuvent présenter à la population leur programme, leurs idées et tenter de convaincre le corps électoral de voter pour eux.

Nous, proposons qu'il y ait une période plus longue pour permettre justement qu'un parti, qu'il soit officieux ou officiel, puisse présenter son programme à la population. Ceci vient en concordance avec d'autres articles ultérieurs qui demanderaient justement que les candidats qui représentent un parti puissent avoir des...

M. LAPORTE: Votre amendement est-il rédigé?

M. LEGER: Oui.

M. LAPORTE: J'aimerais, au moins, le voir.

M. TESSIER: L'article 22 traite de l'article 233. Vous nous présentez un amendement pour 256. Ai-je bien compris que l'article 22 est adopté et que vous nous proposez un article 22-a)?

M. LEGER: Oui. C'est-à-dire avant d'arriver à l'article 23.

M. LAPORTE: Cela va.

M. TESSIER: Alors, l'article 22 est adopté?

M. LEGER: Oui.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 22, adopté.

M. LEGER: C'est pour cela que je l'ai appelé à l'article 22-a). C'est pour répondre à l'article 256, pour prolonger la période où les candidats d'un parti peuvent expliquer à la population leur programme électoral. Je voudrais qu'elle passe de neuf à quinze jours.

M. LAPORTE: Encore une fois, je regrette que le député n'ait pas une charte à jour; c'est 11 jours au lieu de 9, dans la loi telle qu'elle existe.

M. TESSIER: En somme c'est un compromis entre neuf et quinze.

M. LEGER: L'amendement serait alors de 11 à 17.

M. BERTRAND: Il faudrait changer tous les délais.

M. LEGER: Changer les délais pour permettre à un parti de s'exprimer devant la population.

M. LAPORTE: De 11 à 17. M. le Président, nous étudierons ça pendant la vacance parlementaire.

M. BERTRAND: Sur division.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Sur division, article 23.

M. LEGER: On ne peut pas l'adopter sur division, il n'y a pas d'article.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 23, adopté. Article 24, adopté. Article 25, adopté.

M. LEGER: Avant l'article 26, M. le Président, je voudrais seulement noter ceci. Je pense que c'est impossible de le faire à cause de ce qui a été adopté antérieurement, mais, au niveau de l'identification des partis politiques, je voulais qu'à l'article 287 de la loi le nom du parti soit inscrit sous le nom du candidat. Comme ça n'a pas été adopté, je voulais simplement le noter.

M. LAPORTE: Très bien.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 26, adopté.

M. LEGER: Après l'article 26, je voudrais faire mention d'un problème au niveau des districts électoraux. Je vais lire l'amendement et l'expliquer par la suite: « L'article 35 de la charte de Montréal est modifié de la façon suivante: « Aux fins des élections municipales, le territoire de la ville est divisé en 52 districts électoraux de population égale, l'écart en population de chaque district par rapport à la moyenne ne devant jamais être supérieur à 15%— c'est l'amendement que je propose — Les découpages des districts devant respecter dans la mesure du possible leur homogénéité sociale, culturelle et géographique.

Les limites de ces districts sont fixées par règlement du conseil adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit être tenue le 26 octobre 1970 » ... C'est donc dire que c'est possible que cela soit fait à Montréal, puisqu'il y aurait seulement un délai de deux mois et que nous savons qu'il y a déjà à Montréal des études de faites sur les modifications de la carte électorale de Montréal. « Les limites de ces districts sont fixés par règlement du conseil adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit être tenue le 26 octobre 1970. Le conseil de ville doit réviser tous les quatre ans la carte électorale de façon qu'elle réponde aux normes ci-haut énoncées, l'adopter par règlement et la rendre publique deux mois avant la date fixée par l'élection, par la suite ».

Je m'explique. Tout à l'heure, dans la deuxième lecture, nous avons remarqué qu'il y avait des « distorsions » dans la carte électorale de Montréal. On y voyait des quartiers comme Mercier qui avaient, pour le nombre d'électeurs comparativement au nombre de conseillers élus, des différences allant jusqu'à 64.6%: soit 28,394 électeurs par conseiller. En comparant avec le district de Saraguay, on y avait 309 électeurs pour un conseiller, et, avec Rivière-des-Prai-ries, 3,511 électeurs pour deux conseillers.

A cause des études que la ville de Montréal a déjà faites, nous pensons qu'on a le temps de faire la correction suivante, soit de permettre qu'il n'y ait pas plus de 15% de différence entre les districts électoraux. Cela amènerait, comme résultat, que le secteur de Saraguay serait fusionné avec le quartier de Laval et que le quartier de Rivière-des-Prairies pourrait être inclus dans le quatier de Saint-Michel. Ceci obligerait à supprimer le conseiller de Saraguay et celui de Sainte-Anne, parce qu'il y en avait un de trop, et à supprimer les deux conseillers de Rivière-des-Prairies, ce qui donnerait 48 candidats aux postes de conseillers.

On en rajouterait aux quartiers qui sont réellement populeux, soit deux à Mercier, un à Laval, un à Ahuntsic, un à Rosemont, un à Côte-des-Neiges, ce qui ferait un total de 54 conseillers. La différence ne pourrait être que de 15% en plus ou en moins; cela ferait du quartier de Saint-Jacques le moins populeux avec 14,000 votants — il y a toute une échelle de préparée ici — et le quartier de Saint-Michel-Rivière-des-Prairies en aurait 19,000. Sivous voulez me permettre, je pourrais peut-être relire l'amendement. Vous l'avez lu?

M. LAPORTE: On vous fait confiance. M. le Président, personnellement, je m'oppose vigoureusement, au nom des principes démocratiques défendus par le député de Lafontaine, à permettre à un conseil municipal qui est dominé actuellement, à deux ou trois échevins près, par un seul parti politique, d'avoir la haute main sur le découpage des districts électoraux de la ville de Montréal.

Ce serait absolument antidémocratique. Ceci pourrait conduire à des abus inouïs. Le député de Lafontaine exige que le Parti civique, à Montréal, ne soit pas indirectement le seul à faire l'énumération et il est disposé à donner au Parti civique, directement, la capacité de découper la carte électorale de Montréal, si le parti le désire, à son goût. J'exige, quant à moi, que ce soit une loi de l'Assemblée nationale qui modifie la charte de la ville de Montréal.

Si la ville doit revenir tous les quatre ans pour faire revoir ses districts électoraux et les rendre démocratiques, nous n'avons pas d'objection.

C'est toutefois une loi de l'Assemblée nationale qui doit donner aux citoyens de la ville de Montréal la certitude que cela va être fait au su et au vu de tout le monde et dans l'Intérêt démocratique de tous les citoyens.

M. LEGER: M. le Président, je pense qu'on était du même avis. Ce que le ministre du Travail dit actuellement, c'est ce que je propose.

Je pense qu'il a mal saisi l'amendement. Je lui ai proposé de le relire, je vais la relire. « Aux fins des élections municipales... » c'est un amendement...

M. TESSIER: Est-ce que vous me permettrez de donner une précision. Dans la loi électorale générale que nous allons présenter dès la prochaine session, un mécanisme est prévu pour la répartition de tous les quartiers dans les municipalités, de manière que cela soit mieux équilibré. Cette loi-là va s'appliquer également à l'encontre de la charte de Montréal, parce qu'elle va s'appliquer...

M. LESSARD: Debout, M. le ministre.

M. TESSIER: Excusez-moi, M. le Président. Elle va s'appliquer à l'ensemble des municipalités de la province et va primer les dispositions existantes dans les différentes chartes des municipalités. C'est donc dire que lorsque cette loi aura été adoptée, il y aura une nouvelle répartition des quartiers en vertu de ce nouveau mécanisme.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député d'Olier.

M. PICARD: M. le Président, pour ajouter aux remarques du ministre des Affaires municipales, j'aimerais faire remarquer au député de Lafontaine que c'est cette Chambre, qui vient d'adopter, il n'y a pas tellement d'années, les projets de loi de fusion. Je donne comme exemple Saint-Michel, où il était prévu, dans les règlements d'annexion de Saint-Michel à Montréal, quatre conseillers pour représenter ce quartier au conseil municipal de Montréal.

Je vous assure que si nous faisons les changements proposés par le député de Lafontaine, c'est donc dire que l'on prendra toujours avec un grain de sel les promesses ou la législation adoptée par l'Assemblée nationale de Québec pour les fusions futures de municipalités du Québec.

M. LEGER: M. le Président, je tiens à faire remarquer que, dans les changements de l'amendement proposé, il n'est pas du tout question de changer le nombre de conseillers de la ville de Saint-Michel. Je n'ai parlé que de deux à ajouter à Mercier, un à Laval, un à Ahuntsic, un à Rosemont, un à Côte-des-Neiges et d'enlever le représentant de Saraguay, les deux de Rivière-des-Prairies, parce qu'ils vont être fusionnés ailleurs...

M. PICARD; Et fusionner les deux de Rivière-des-Prairies à ceux de la ville de Saint-Michel. Alors, au lieu de six conseillers, vous allez en avoir trois.

M. LEGER: M. le Président, on va quand même constater que le quartier de Saint-Michel n'a actuellement que 19,000 électeurs avec le quartier de la Rivière-des-Prairies et que la différence est quand même à l'intérieur des 15% que nous proposons.

Mais si vous voulez me le permettre, je vais relire l'amendement qui n'a pas été lu complètement. On pourra ensuite, discuter si c'est bon ou si ce n'est pas bon. Voici notre point de vue. « Aux fins des élections municipales, le territoire de la ville est divisé en 52 districts électoraux de population égale, l'écart en population de chaque district par rapport à la moyenne ne devant jamais être supérieur à 15% et le découpage des districts devant respecter, dans la mesure du possible, leur homogénéité sociale, culturelle et géographique. Les limites de ces districts sont fixées par règlement du conseil adopté au moins deux mois avant l'élection qui doit être tenue le 26 octobre 1970. — Comme vous voyez, c'est le droit de regard du provincial — Le conseil de ville doit reviser tous les quatre ans la carte électorale de façon qu'elle réponde aux normes ci-haut énoncées, l'adopter par règlement et la rendre publique deux mois avant la date fixée par élection ». C'est là l'amendement qui est proposé.

M. LAPORTE: Je propose...

M. TESSIER: La rendre publique deux mois avant la date des élections, cela veut dire qu'on n'a jamais le temps de procéder à tout ce redécoupage des quartiers et de tenir les élections au mois d'octobre. Comme je le soulignais, tout ce mécanisme sera prévu dans la loi générale municipale.

M. LAPORTE: Je propose que cet amendement soit rejeté.

M. TESSIER: Je propose l'adoption de l'article 26.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Nous allons commencer par disposer de l'amendement. L'amendement est rejeté?

M. LEGER: Sur division, comme de raison. M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 27, adop-

té. Article 28. Adopté. Article 29. Adopté. Article 30, adopté.

M. LAPORTE: Avec la permission du ministre, est-ce qu'il me serait possible de revenir à la page 4, article 6, paragraphe 2: « Le greffier fait publier... » l'avant-dernière ligne, « l'article 200, au plus tard le 1er juillet de l'année de l'élection. » Comme nous sommes rendus au 14, il faudrait peut-être suggérer...

M. TESSIER: Je propose, suivant la suggestion qui vient d'être faite par le ministre du Travail, que nous amendions ce paragraphe à la page 4, deuxième paragraphe pour remplacer le mot « premier » par le mot « vingtième », ou « vingt ».

M. LE PRESIDENT (Hardy): Cet amendement est-il adopté?

M. PICARD: Il faudrait s'assurer que ce délai soit suffisant parce que c'est seulement six jours et il faudra attendre que le projet de loi soit sanctionné et aviser toutes ces corporations; un délai de six jours, c'est tout de même vite.

M. LAPORTE: Disons que le projet de loi devrait être sanctionné jeudi, l'avis sera lundi prochain. Cela laisse le temps nécessaire.

M. LE PRESIDENT (Hardy): M. le Président, le comité a adopté le bill 5 avec des amendements.

M. LAVOIE (Président): Est-ce que les amendements proposés par le ministre des Affaires municipales sont maintenant lus et agréés?

M. BERTRAND: Adopté.

M. LAPORTE: Troisième lecture.

M. BERTRAND: Je n'ai pas d'objection, quitte à vérifier.

M. LEGER: Non.

M. BURNS: Nous nous objectons à ce que la troisième lecture ait lieu immédiatement.

Ajournement

M. LAPORTE : Alors, à la prochaine séance. Je vais suggérer que cette Chambre s'ajourne à demain matin à dix heures. Après avoir cons- taté, entre nous, que nous avons fait une excellente journée de travail.

Demain, nous adopterons le programme suivant: Premièrement, troisième lecture du bill numéro 5.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que l'honorable leader du gouvernement pourrait se rappeler que demain, c'est la journée des députés et que je lui ai signalé...

M. LAPORTE: Ah oui, excusez...

M. PAUL: ... notre intention d'apporter une motion,

M. LAPORTE: Alors demain, nous appellerons d'abord la motion inscrite au nom du député de Saint-Maurice relativement à nos amis du Ralliement créditiste. Si nous réussissons à nous sortir de ces questions monétaires sans trop de dommages...

M. SAMSON: Sans que cela coûte trop cher!

M. LAPORTE: ... nous reviendrons aux affaires du jour du gouvernement dans l'ordre que je viens de commencer à énumérer. Premièrement, bill numéro 5; deuxièmement, bill numéro 29, le parc Forillon; troisièmement, Loi du Grand Théâtre de Québec; quatrièmement, Loi concernant la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation; cinquièmement, bill numéro 28; sixièmement, Loi du ministère du Travail; septièmement, bill numéro 31 et, huitièmement, Loi modifiant la Loi de l'aide sociale, la Loi des allocations scolaires et la Loi des allocations familiales du Québec avec la possibilité d'un léger changement. Il est possible que le ministre de l'industrie et du Commerce doive s'absenter. Je demanderais à ce moment-là à cette Chambre la permission d'appeler, avec préséance, le projet de loi numéro 28, Loi modifiant la Loi de l'Office du crédit industriel qui ne devrait pas, je pense, susciter de débat...

M. PAUL: Parfait.

M. LAPORTE: ... à n'en plus finir.

M. le Président, je propose l'ajournement de cette Chambre à demain matin, dix heures. Nous ajournerons de midi trente à deux heures ou deux heures et demie et nous siégerons jusqu'à six heures.

M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance: 22 h 52)

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