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(Dix heures huit minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes! A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes.
Présentation de pétitions.
Lecture et réception de pétitions.
Présentation de rapports de comités élus.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés.
Présentation de bills publics.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
M. BOURASSA: M. le Président, suivant les prescriptions de
l'article 9, chapitre 14 des Statuts refondus du Québec, 1964, je
dépose en deux copies les arrêtés en conseil accordant une
pension de retraite aux membres du personnel de la Fonction publique, de
même que les arrêtés en conseil des Affaires
intergouvemementales, tel que prescrits par la loi.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais déposer
ce que j'aurais dû faire hier, si le document avait été
prêt une réponse à une question du
député de Lotbinière.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre des Richesses
naturelles.
M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, j'aimerais déposer
les renseignements relatifs aux normes touchant les bourses d'études
attribuées par le ministère aux étudiants universitaires,
ainsi que les noms des bénéficiaires, en réponse à
une question du député de Montcalm, posée lors de
l'étude des crédits du ministère des Richesses
naturelles.
M. LE PRESIDENT: Questions des députés. L'honorable
député de Rouyn-Noranda.
Cadillac Moly Mines
M. SAMSON: M. le Président, c'est en regard d'une question que
j'ai posée cette semaine, concernant la Cadillac Moly Mines. J'adresse
ma question au ministre du Travail. Je sais, par la réponse qui nous a
été donnée, que des employés du ministère,
des hauts fonctionnaires, sont actuellement à faire une enquête.
Je demanderais au ministre s'il pourrait nous dire, à ce moment-ci, s'il
y à des développements.
M. LAPORTE: Le fonctionnaire qui est allé sur place, M. Gignac,
est actuellementen route duNord-Ouest vers Montréal.Il estprobablement arrivé à l'heure où je vous
parle.J'ai demandé à mon chef de cabinet d'entrer en
contact avec M. Gignac.
Je devrais avoir des renseignements précis d'ici quelques
minutes. Peut-être que cette Chambre me permettrait, même si la
période des questions est terminée, de les donner aussitôt
que je les aurai, dans le courant de la journée.
M. PAUL: C'est parfait.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
Regroupement scolaire
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à
poser à l'honorable ministre de l'Education. Pour faire suite à
la rencontre qui a eu lieu, mardi dernier, avec le représentant des
parents catholiques de la régionale de l'Amiante, le ministre de
l'Education pourrait-il dire à cette Chambre s'il a l'intention de
reporter le projet de regroupement des 8e et 9e années à l'an
prochain dans cette régionale, tel que demandé par cette
association?
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'ai déjà
rencontré l'association depuis plus d'un mois. Nous avons discuté
de la chose avec les responsables de la régionale de l'Amiante, les
commissaires d'école qui sont dûment élus pour avoir un
mandat sur le plan local dans le système scolaire. Nous notons que c'est
un endroit de la province où ce décloisonnement, cette ouverture
des options pour faciliter l'accessibilité de l'enseignement à
toutes les écoles, vient tout juste de se produire. Je suis sensible aux
représentations de l'association des parents catholiques, mais je ne
crois pas dans l'intérêt des fins que nous poursuivons dans
l'éducation de retourner au système qui voulait que
l'école secondaire se poursuive au niveau local dans de petits groupes
n'offrant pas les options nécessaires à la formation des
jeunes.
M. ROY (Beauce): M. le Président, question supplémentaire.
Si j'en juge par les représentations qui ont été faites,
il ne s'agit pas de retourner à l'ancien système, mais
l'association a bien demandé de retarder d'un an pour pouvoir faire les
préparatifs nécessaires.
M. SAINT-PIERRE: Le ministre calcule que
retarder d'un an, dans bien des cas, c'est retourner en
arrière.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
Tarsal Ease Shoe
M. LAURIN: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. L'industrie de la chaussure, comme vous le savez, connaît
actuellement de graves difficultés dans tout le Canada en
général, mais surtout au Québec. La fermeture de Tarsal
Ease Shoe, qui vient de licencier ses 110 employés, n'en est qu'un autre
exemple.
Bien sûr, il y a là une responsabilité
fédérale, puisque le problème des tarifs douaniers et du
contingentement relève exclusivement d'Ottawa, mais il y a aussi une
responsabilité provinciale en ce qui a trait, par exemple, aux relations
patronales ouvrières. Le rapport de la commission provinciale
d'enquête Picard, qui traitait de tous ces aspects provinciaux du
problème, est entre les mains du gouvernement depuis novembre 1968. Il
me semble qu'Userait important que la Chambre et le public en connaissent les
données et les recommandations. Est-il dans les intentions du
gouvernement de déposer bientôt en Chambre le rapport de cette
commission?
M. BOURASSA: Je n'ai aucune objection, mais je voudrais en discuter avec
le ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. LAURIN: Il me semble que le premier ministre peut demander à
son ministre de l'Industrie et du Commerce de déposer ce rapport,
M. BOURASSA: Je préfère en discuter avec le ministre
responsable et avec ses hauts fonctionnaires pour voir les implications du
dépôt; mol, Je n'y vols pas d'objection et je ne vois pas pourquoi
il y en aurait, mais je voudrais en discuter avec lui.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abltibi-Ouest.
Pollution de l'eau
M. AUDET: Ma question s'adresse au ministre du Tourisme, de la Chasse et
de la Pêche, mais, en son absence, je l'adresserai au premier ministre.
En ce qui a trait au bill 30, est-ce que ceux qui polluent les eaux peuvent
être tenus assez responsables pour être poursuivis et
pénalisés en conséquence?
M. LAPORTE: C'est ce qui s'est produit en Saskatchewan et dans une autre
province, je pense.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. GARNEAU: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait de
revenir, pour un instant, aux dépôts de documents pour
déposer le rapport annuel de Sidbec: Il y en aura des copies pour tous
les députés.
M. LAPORTE: M. le Président, je remercie d'abord tous les membres
de cette Chambre qui ont accepté que nous siégions à dix
heures ce matin plutôt qu'à onze heures, en dépit de la
décision qui avait été annoncée à six heures
hier soir. La commission parlementaire de l'Assemblée nationale devait
entendre, à la demande du Parti québécois, M. Jacques-Yvan
Morin, l'expert constitutionnel, mais malheureusement M. Morin est en Europe et
on nous a demandé d'ajourner à plus tard cette
réunion.
Le programme des travaux de la journée, tel qu'annoncé
hier: D'abord, le bill 29, parc Forillon. Deuxièmement, nous songions
à amener immédiatement le projet de loi sur la Communauté
urbaine de Montréal, mais, comme il y a deux amendements à la
rédaction, cela viendra dès que ces amendements seront
prêts à être soumis à la Chambre.
Deuxièmement, ce sera la Loi du Grand Théâtre.
Après la deuxième lecture je crois qu'il y a entente entre
les membres des divers partis le projet de loi sera immédiatement
déféré à la commission parlementaire sur les
Affaires culturelles pour étude,clause par clause. Nous continuerons,
ici à l'Assemblée nationale.
M. PAUL: Pour éviter tout malentendu, quand l'honorable
député parle d'entente, je dirai que nous avons été
pressentis.
M. LAPORTE: Vous avez été pressentis.
M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: Bon, d'accord.
M. PAUL: L'ancien ministre verra probablement et, c'est possible,
à condescendre à accepter le...
M. BOURASSA: Merci. Merci beaucoup.
M. LAPORTE: Je n'ajoute rien pour ne rien gâter.
M. BERTRAND: Autrement dit, à descendre en commission.
M. LAPORTE: Ensuite, nous étudierons le bill no 27 Loi concernant
la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation, la Loi
modifiant le code du travail et pour terminer les deux projets de loi inscrits
au nom du ministre M. Castonguay et nous reviendrons à l'article 2,
reprise du débat sur la motion de M. Bourassa proposant que M. le
Président quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité des voies et moyens. Lorsque nous serons en comité des
voles et moyens, nous ferons les procédures pour d'adoption du bill des
subsides. Le débat sur le budget va reprendre dès que nous aurons
fini les travaux.
M. BERTRAND; Pour continuer la semaine prochaine.
M. LAPORTE: Enfin, la semaine prochaine, la semaine suivante,
l'été prochain, jusqu'à épuisement ou du sujet ou
des députés.
M. PAUL; N'ajoutez rien pour ne rien briser.
M. LAPORTE; M. le Président, je vous demanderais poliment de bien
vouloir appeler l'article no 4.
M. LE PRESIDENT; L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la deuxième lecture du projet de loi no 29, Loi concernant le parc
Forillon et ses environs.
L'honorable ministre des Affaires municipales.
Parc Forillon
M. TESSIER: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de
la province a pris connaissance de ce bill et en recommande l'étude
à la Chambre.
Le projet de loi no 29 concernant le parc Forillon est la suite logique
des événements qui se sont produits depuis quelques
années. Il a débuté avec l'entente Canada-Québec
signée à Rimouski le 26 mai 1968 par l'ancien premier ministre de
la province, M. Daniel Johnson, avec le gouvernement fédéral.
En effet, dans cette entente Canada-Québec pour le
développement du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, il y avait,
entre autres, l'article 55 qui mentionnait ceci: Le Canada entreprendra
l'aménagement d'un parc dans la pres- qu'île de Forillon. Le
Québec se chargera de l'achat du terrain, puis le cédera à
bail libre de charges au Canada pour une période et à des
conditions acceptables aux deux parties.
Pour donner suite à cette première entente du 26 mai 1968,
des négociations ont eu lieu entre les deux gouvernements. Elles
aboutirent le 8 juin 1970, alors qu'une convention fut signée entre les
deux gouvernements, spécifiant, entre autres, que le Québec
s'engage à prendre les mesures nécessaires, avant le 31
décembre 1970, pour libérer les terrains de toute charge dont ils
pourraient être grevés ou pour en acquérir, le cas
échéant, la propriété libre de charges; aviser le
Canada, au fur et à mesure que les dits terrains auront
été libérés ou acquis, et donner libre jouissance
desdits terrains au Canada avant le 31 décembre 1970.
Ceci est une des obligations du Québec dans cette entente.
D'autre part le gouvernement canadien s'engage à ce que
l'aménagement et l'administration reflètent la dualité
linguistique du Canada et plus particulièrement le caractère
français du Québec. Le Canada s'engage, en plus, à
préparer ou à faire préparer un plan d'aménagement
du parc, lequel devra, avant d'être mis à exécution, avoir
été soumis, pour consultation., au ministre provincial. Pour sa
part, le Québec s'engage à préparer ou à faire
préparer un plan d'utilisation des terrains des zones limitrophes au
parc, en respectant l'objet, la beauté naturelle et les qualités
esthétiques dudit parc.
Le bail est pour une période de 99 ans, mais il est
stipulé à l'entente qu'après une période de 60 ans
le Québec peut acquérir du gouvernement canadien le parc
Forillon, en lui remboursant toutes les dépenses en immobilisation qui
ont été faites par le gouvernement central.
Dans l'entente également, en annexe, apparaissent les montants
qui doivent être dépensés durant une période
s'étendant de 1970 à 1976-1977, pour un total, à
l'échéance, de $8,887,000. Alors, ceci est donc l'apport du
gouvernement fédéral.
Quant à la part du gouvernement du Québec, il est
prévu que, pour les fins d'expropriation de même que la
relocalisation des personnes, des familles qui logent présentement sur
l'emplacement du parc Forillon, le paiement des indemnités de
déplacement, le paiement d'indemnité également pour les
reloger, le transport de cimetières, le tout à été
évalué à $5,300,000.
Nous avons dans le présent budget fixé un montant de
$1,500,000 à être dépensé au cours du présent
exercice financier. Ce montant couvrira tous les frais afférents
à l'achat, libres
de toute charge, des terrains en question.
La présente loi a donc pour but d'abord d'exproprier tous les
terrains, bâtiments qui se trouvent à l'intérieur des
limites du parc Forillon dont la description apparaît en annexe à
ladite loi. Cette expropriation est devenue nécessaire parce qu'en vertu
de la Loi des terres et forêts de même qu'en vertu de la Loi de la
colonisation, il existe certaines dispositions auxquelles il serait impossible
de déroger si l'on procédait par les voies normales de
l'expropriation, c'est-à-dire en vertu des dispositions du code
civil.
Le ministère des Travaux publics n'aura pas l'autorité, en
vertu des lois actuelles, de procéder si nous n'adoptons pas la
présente loi qui donnera à ce ministère,
c'est-à-dire au gouvernement, les pouvoirs de procéder de la
même manière qu'il est prévu à la Loi du
ministère de la Voirie, c'est-à-dire par simple
dépôt des plans et négociation avec les
propriétaires. Si on ne s'entend pas, on suivra la procédure
normale qui est de soumettre les cas d'expropriation à la Régie
des Services publics. Voilà pour la première partie de la loi en
ce qui concerne l'expropriation.
Il est également prévu à la Loi des
cimetières que lorsque, pour des fins d'intérêt public, il
y a lieu de déplacer un cimetière, on doit payer une compensation
à la corporation du cimetière ou aux personnes
intéressées dans ledit cimetière. Or, nous
dérogeons, par la présente loi, à ce qui existe dans les
autres lois et, au lieu de payer une indemnité, c'est le gouvernement
qui se chargera lui-même du transport des corps qui peuvent être
dans les cimetières compris à l'intérieur des limites du
parc Forillon.
La présente loi prévoit également qu'il y aura lieu
de procéder le plus tôt possible à l'aménagement du
territoire périphérique au parc et ceci, comme vous l'avez
remarqué, apparaît dans l'entente signée le 8 juin dernier.
C'est pour donner suite à cette entente qu'il sera nécessaire de
réaménager complètement tous les abords du parc.
Comme il y a un nombre considérable de municipalités, soit
en tout, une douzaine, vous comprendrez facilement que toutes ces petites
municipalités dispersées, et dont quelques-unes seront
nécessairement morcelées par l'expropriation du territoire du
parc Forillon, n'ont ni les pouvoirs, ni les capacités administratives
pour dresser, par exemple, un plan directeur d'urbanisme. C'est pourquoi la loi
prévoit la nomination d'un administrateur ainsi que d'un administrateur
adjoint qui, au cours des douze prochains mois, auront les pouvoirs de mettre
sur pied un plan directeur d'urbanisme, de faire adopter des règlements
de construction et de zonage, et également, d'exercer une surveillance
sur les finances de toutes les municipalités en question. Je dois
déclarer à ce moment, M. le Président, que c'est
l'Intention du ministère des Affaires municipales de procéder,
dans l'année qui suivra l'adoption de la présente loi, au
regroupement de 18 municipalités pour n'en former que deux qui seront
celles de Gaspé et de Percé.
L'expérience nous démontre que souvent il arrive que,
lorsque des municipalités sont en instance de fusion ou d'annexion,
celles-ci en profitent pour faire des dépenses qui ne sont ni urgentes,
ni nécessaires. Afin de prévenir un tel état de choses,
l'administrateur de même que l'administrateur adjoint auront les pouvoirs
d'approuver ou de désapprouver telles dépenses. En
résumé, cela revient tout simplement à dire que les 18
municipalités en question sont mises en tutelle pour une période
d'environ un an, c'est-à-dire jusqu'à ce que le regroupement ait
eu lieu. Et il est de mon intention, en tant que ministre des Affaires
municipales, de présenter, dès la prochaine session, une autre
loi connexe à celle-ci, afin de fusionner les dix-huit
municipalités en question et d'en faire deux municipalités, comme
je l'ai mentionné.
Vu que la session est assez courte, vu qu'il y a plusieurs implications
lorsqu'il s'agit de fusions de municipalités, il faut examiner tous les
règlements des différentes municipalités. Il s'agit
là, par conséquent, d'un travail assez laborieux et nous n'avions
réellement par le temps de présenter les deux projets de loi
à la même session. C'est ce qui explique que nous nous sommes
fixé un délai d'un an pour donner suite à cette partie de
la loi en ce qui concerne les fusions de municipalités.
Je crois, M. le Président, que c'est là l'essentiel de la
loi. Evidemment, il ne faut pas perdre de vue son but premier qui est de
promouvoir l'essor économique de la péninsule de Gaspé.
Tout ça découle des études qui avaient été
entreprises par le BAEQ et de l'entente Canada-Québec de 1968, à
laquelle j'ai référé tout à l'heure. Nul doute
qu'avec la création d'un parc national dans la péninsule de
Forillon et avec tous les aménagements connexes qui seront faits, soit
par le ministère de la Voirie, soit par le ministère du Tourisme,
de la Chasse et de la Pêche, nous réussirons à attirer dans
la péninsule de Gaspé un nombre considérable de touristes.
Le but que ce fixe le gouvernement en aménageant le parc Forillon et ses
abords et en fusionnant ces 18 municipalités c'est donc d'attirer les
touristes, ce qui contribuera directement à relever le niveau
économique de cette partie du Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Gaspé-Sud.
M. Guy Fortier
M. FORTIER: M. le Président, vous comprenez que, comme
représentant du comté de Gaspé-Sud, il me fait plaisir
d'appuyer ce projet de loi et de féliciter le gouvernement, le ministre
des Affaires municipales et des Travaux publics pour la
célérité avec laquelle il a présenté ce
projet de loi.
La Gaspésie je crois que tous les représentants en
cette Chambre sont de mon avis a toujours été un peu
défavorisée à cause des distances qui la séparent
des grands centres et aussi des centres industriels, la laissant à la
merci de certaines contingences économiques qui, dans bien des cas,
n'ont pas joué en sa faveur.
Nous avons là un moyen, en stimulant le tourisme, d'augmenter le
développement économique de la Gaspésie. Le tourisme
demeure, malgré tout, l'un des secteurs les plus importants que l'on
puisse développer en Gaspésie. Il est l'une de nos richesses
vitales. Si ce coin du Québec est quelque peu éloigné des
grands centres, il n'en demeure pas moins le plus attrayant de toute la
province du Québec.
Certes, le Québec dispose de nombreux acteurs qui peuvent aider
l'économie touristique, mais nous devons tout faire pour mettre en place
les éléments qui pourront nous aider à faire de cette
province l'une des mieux équipées sur le plan touristique.
Sur le plan économique, le parc Forillon sera un facteur
très stimulant pour les électeurs que j'ai l'honneur de
représenter dans cette Chambre. Si l'on se base sur l'expérience
qui a été vécue dans les autres parcs du Canada,
particulièrement dans l'Ile du Prince-Edouard, où de nombreux
Québécois vont en vacances chaque année, nous ne pouvons
qu'en espérer d'excellents résultats. L'afflux de visiteurs,
grâce à la collaboration des deux gouvernements, pourra fournir,
d'après les chiffres des estimateurs, un nombre approximatif de 3,000
nouveaux emplois d'ici quelques années.
S'il est bien une région qui souffre actuellement de la plaie
principale de notre économie, le chômage, c'est bien celle de la
Gaspésie. La présente loi s'inscrit dans le cadre du but
principal du gouvernement actuel, soit enrayer, dans le plus bref délai,
ce malaise profond qu'est le chômage. M. le Président,
permettez-moi de mentionner que la population que je représente n'a pas
le moyen de se payer le luxe d'une guerre constitutionnelle ou technique avec
une autre autorité gouvernementale, mais elle attend avec impatience la
solution de ses problèmes économiques.
Sans vouloir ouvrir des débats inutiles à ce sujet, nous
ne perdons absolument rien de notre autonomie, que nous accorde la
constitution, en coopérant avec le gouvernement fédéral,
qui dépensera plus de $15 millions pour aider cette région du
Québec. Un gouvernement provincial qui agit ainsi a une politique
réaliste qui donne l'exemple de ce qui constitue un
fédéralisme rentable. Je suis aussi heureux de constater que le
projet de loi va permettre de fusionner des municipalités
périphériques au parc Forillon, ce qui permettra ainsi une
meilleure administration de ces différentes municipalités.
Les gens de mon comté, avec qui j'ai discuté, durant la
dernière campagne électorale, de ce projet, l'ont
approuvé, avec une majorité respectable.
Chacun comprend que l'aménagement du parc Forillon, en plus de
donner de l'emploi, va augmenter l'industrie touristique et va aussi inciter le
ministère de la Voirie à construire des routes qui vont
améliorer le système routier de la Gaspésie. C'est pour
toutes ces raisons, M. le Président, que je suis certain que tous les
représentants de la Chambre sont prêts à accepter ce bill.
Je suis heureux de l'appuyer et de dire que tous les gens de Gaspé-Sud
l'appuient également. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: M. le Président, si nous avions eu en cette Chambre
les patriotes d'autrefois, de la trempe de Bourassa, Lavergne et bien d'autres,
et s'ils avaient entendu le député de Gaspé-Sud dire que
nous n'avons pas les moyens d'engager un débat constitutionnel,
probablement que des protestations énergiques seraient venues de leur
part. Comme nous avons nous, personnellement parce que du
côté économique nous sommes d'accord qu'il y a beaucoup
à faire dans cette province transmis nos protestations
énergiques hier, je ne reviendrai pas tellement sur le sujet. Je sais
cependant que la population jugera que ces paroles sont peut-être les
paroles de gens qui acceptent, en parlant d'un fédéralisme
rentable, de vendre nos droits pour un plat de lentilles. Au début de ce
bill, moi aussi j'ai un peu frémi en lisant ces quelques mots: «
Ce projet a d'abord pour objet de permettre au gouvernement du Québec
d'acquérir rapidement la propriété, pour en
transférer la possession
au gouvernement du Canada... » Voici que le Québec a des
droits et on prend des mesures, on adopte des lois pour se
dépêcher de céder ces droits au gouvernement du Canada. A
la page 3, l'article 8 autorise le gouvernement du Québec à
donner au gouvernement du Canada « libre jouissance des terrains »
requis pour le parc.
C'est ce que j'appelle perdre petit à petit nos droits, sous
prétexte qu'un fédéralisme rentable est nécessaire.
Pour des questions économiques, nous nous empressons de perdre nos
droits. M. le Président, considérant que dans ce coin du
Québec, ce coin de la Gaspésie, il y a beaucoup de chômage,
beaucoup de difficultés, nous sommes d'accord qu'il était
nécessaire de faire quelque chose et nous sommes d'accord pour que ce
parc soit développé mais je pense qu'il faut remarquer les mots
qui sont cités dans ce projet de loi et par lesquels nous abdiquons,
nous Québécois, nos droits.
Personnellement j'ai un peu d'inquiétude à savoir que nous
allons développer là un parc, mais qu'il n'y aura pas encore de
moyens de transport assez rapides pour en profiter. Je pense à une
population comme celle de la ville de Montréal, 2.5 millions, tout
près de 3 millions si on considère les environs, alors qu'avec un
moyen de transport qui serait l'avion... Pour Jasper et Banff, on a
pensé à toutes ces choses avant d'organiser des parcs.
Je déplore beaucoup que nous soyons encore dans l'avenir
obligés d'entreprendre une longue tournée en automobile pour nous
rendre dans ce parc, qui devrait depuis longtemps être
aménagé.
En effet, nous sommes tous persuadés, nous,
Québécois, que la Gaspésie est un des plus beaux coins de
la province de Québec. Seulement, le transport demeurera toujours un
grave problème. Je sais que l'on a longtemps discuté, même
sous une autre juridiction, d'un chemin de fer, ce qui n'existe même pas
encore. Alors que nous pouvons nous déplacer très rapidement de
Québec à Montréal, il nous faudra encore 18 ou 20 heures
pour rejoindre ce parc, même si on tente d'améliorer certaines
routes, à l'heure actuelle.
A tout événement, il reste que, si 3,000 emplois sont
créés là-bas par des millions qui viennent et qu'on semble
pressé d'avoir, des problèmes économiques existent sur une
haute échelle. J'invite le gouvernement à bien les
considérer, pour que la population bénéficie de tous les
avantages possibles. Je sais que, dans ce coin de la Gaspésie, dans les
18 municipalités que nous allons regrouper bientôt, selon ce que
le ministre a déclaré, il y a des cultivateurs qui voudraient,
pour les 3,000 nouveaux emplois qui seront créés, fournir les
produits nécessaires. J'ose espérer que le gouvernement verra
à ce que les produits agricoles ne viennent pas de l'Ontario ni des
Etats-Unis, par exemple. Les cultivateurs de cette région sont
compétents. Ils pourraient être les fournisseurs, les vendeurs de
ces produits à ceux qui travailleront à ce parc et aux touristes
lorsqu'ils arriveront. Afin de connaître une prospérité
constante en Gaspésie, il faut cesser d'importer ces produits qui nous
viennent du reste du Canada, pour une bonne partie, mais très souvent
aussi des Etats-Unis.
Enfin, il y a le problème de la nomination de l'administrateur,
de son adjoint et de plusieurs autres administrateurs. J'ose espérer que
ces administrateurs seront surtout nommés pour leur compétence et
qu'on ne verra pas là des nominations politiques. Il y a toujours
danger, lorsque des organisations semblables sont ébruitées dans
les journaux, que des recommandations viennent au ministre pour que le tout
soit une récompense politique. Nous faisons confiance au ministre pour
qu'il voie à ce que ce soit surtout la compétence des
administrateurs qui soit jugée.
De plus, je voulais poser ces dernières questions, à la
suite des remarques que j'avais à faire au ministre. Il a parlé
des 18 municipalités qui seront regroupées; est-ce que
Percé et Gaspé sont incluses dans la tutelle dont il nous a
parlé ce matin? Comme il parle de regroupement, est-ce que, quand le
regroupement serait fait, Percé et Gaspé, si elles sont sous la
tutelle, demeureront encore sous la tutelle du gouvernement provincial? Ce sont
à peu près les seules observations que nous avions à
faire. Nous nous déclarons en faveur du projet de loi parce que nous
croyons que cela aidera à réduire le chômage qui existe
à une haute échelle.
M. TESSIER: Je pourrais peut-être répondre tout de suite
aux deux questions, étant donné qu'elles m'ont été
adressées directement. Je n'ai pas voulu interrompre mon
collègue. Evidemment, Percé et Gaspé demeureront et, comme
je l'ai mentionné tout à l'heure, ce sont les deux seules villes
qui demeureront. Les 18 municipalités seront regroupées autour de
Gaspé qui formera un grand Gaspé et autour de Percé qui
demeurera également avec un territoire étendu. Il est
évident qu'il n'est pas question de prolonger la tutelle sur
Gaspé ou sur Percé après que le regroupement aura
été effectué.
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: Que le Québec ait besoin de parcs naturels bien
aménagés, cela est une évidence. Le Québec est, en
effet, une terre privilégiée pour le tourisme. Le tourisme est en
train de constituer une de nos ressources nationales les plus fécondes
et la population, surtout dans certaines régions, a absolument besoin de
cet apport afin de relever son économie.
Nous sommes donc favorables à la création de parcs
stratégiquement situés au Québec, très bien
aménagés, à l'exemple de ce qui s'est fait de mieux dans
les autres pays, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, afin que notre
potentiel touristique attire de plus en plus, non seulement les
Québécois, non seulement les Canadiens, mais nos
Américains d'outre-frontière afin qu'ils puissent admirer notre
province, notre Québec, mais aussi qu'ils laissent ici leurs dollars et
contribuent, de cette façon, à améliorer d'une
façon substantielle le niveau de vie de nos habitants.
D'ailleurs, le Québec a déjà commencé dans
cette voie. Il a déjà beaucoup dépensé pour
l'aménagement de ces parcs et, jusqu'ici, il l'a toujours fait à
son propre compte. Nous sommes donc convaincus que ce qui a été
commencé doit être poursuivi et d'une façon,
peut-être plus rapide encore puisque l'industrie touristique prend de
plus en plus d'ampleur et que notre économie en a de plus en plus
besoin.
Il reste, cependant, M. le Président, que le projet qui nous est
soumis prend une importance historique du fait que ce sera la première
fois que le Québec signera une entente avec le gouvernement
fédéral pour l'établissement d'un parc national sur son
territoire.
En effet, ce projet a d'abord pour objet de permettre au gouvernement du
Québec d'acquérir rapidement la propriété, pour en
transférer la possession au gouvernement du Canada, des terrains
nécessaires à l'aménagement du parc Forillon en
Gaspésie, ainsi qu'on peut le lire à l'article 1 du projet de loi
numéro 29.
Jusqu'ici le Québec n'avait jamais accepté de céder
une partie de son territoire pour en confier l'administration au gouvernement
d'Ottawa. A la fin de l'année financière 67/68, on estimait que
le gouvernement central avait dépensé $262,348,025 pour
l'aménagement de tels parcs nationaux au Canada. De cette somme, le
Québec n'a rien reçu puisqu'il n'existe aucun de ces parcs dans
notre province. Pourtant, la Colombie-Britannique en a quatre, 1'Alberta en a
cinq, la Saskatchewan en a un, le Manitoba en a un, l'Ontario en a trois, le
Nouveau-Brunswick en a un, l'Île-du-Prince-Edouard en a un,
laNouvelle-Ecosse en a deux et Terre-Neuve en a un.
Concernant cet aspect pratique, on peut s'interroger sur le nombre de
millions de dollars que le Québec aurait dû recevoir s'il avait
voulu se plier aux exigences du gouvernement fédéral. Dans un
article récent paru dans le Devoir, un professeur à la
faculté de droit de l'Université d'Ottawa estimait ces montants
perdus à $50 millions. Par conséquent, écrivait-il, ce
n'est pas un parc de $10 millions que le Québec devrait recevoir, mais
bien cinq parcs de $10 millions. Pourtant, le Québec n'a jamais
cédé jusqu'ici aux emprises du gouvernement fédéral
en ce domaine. Même M. Lesage, qui avait été ministre des
Affaires indiennes et responsable des parcs nationaux à Ottawa, n'avait
pas cru opportun ni bon de négocier avec le gouvernement
fédéral la création de ces parcs au Québec
lorsqu'il fut devenu premier ministre de cette province.
Comme le soulignait un journaliste du Devoir dans un article
publié en mars 1970, ce n'est pas par hasard ni par oubli que notre
province est restée hostile à cette intervention d'Ottawa chez
elle. Même lorsque les deux gouvernements étaient en harmonie,
comme durant les longs régimes libéraux d'Alexandre Taschereau et
de Mackenzie King, le Québec a préféré se priver de
tels avantages plutôt que de céder des parties importantes de son
territoire au gouvernement fédéral.
Pourquoi, M. le Président, le Québec ne s'est-il pas
prévalu de ce programme fédéral dans le passé?
C'est que l'aménagement d'un tel parc soulève un problème
constitutionnel épineux. En vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, l'aménagement du territoire est une fonction provinciale.
Il est assez évident que l'aménagement d'un parc pour la
conservation de la flore et de la faune, pour l'essor du tourisme et de la
récréation, fait partie de l'aménagement du territoire et
ne peut être rattaché à une fonction du gouvernement
fédéral. Le fait que les autres provinces aient accepté
cet empiétement du gouvernement fédéral sur leurs
territoires ne change absolument rien à la constitution.
L'aménagemant de tels parcs est donc une dérogation au
partage des pouvoirs établi en 1867.
La loi fédérale relative aux parcs nationaux stipule que
ces parcs sont des terres appartenant à Sa Majesté ou dont le
gouvernement du Canada a le pouvoir de disposer, y compris les eaux
s'étendant ou coulant sur ces terres ainsi que les ressources naturelles
de ces terres. Il s'agit donc d'un empiétement sur le domaine des
ressources naturelles et du territoire qui relèvent normalement des
provinces.
Ottawa prend toujours les mêmes méthodes pour
empiéter sur les droits provinciaux et confirmer son pouvoir
centralisateur. Il ne peut pas forcer une province à lui céder
ses prérogatives, mais il prend une voie détournée et il
offre des subventions ou des investissements condionnels, comme cela s'est fait
dans tellement de domaines. Si les provinces veulent en profiter, elles doivent
s'incliner devant les conditions imposées par le gouvernement central,
elles doivent entrer dans le carcan qu'on leur impose par voie
législative. Si le gouvernement provincial résiste et entend
protéger les prérogatives constitutionnelles du Québec, le
gouvernement fédéral lui force la main en faisant appel
directement à la population concernée. Cest encore la tactique
utilisée par un ministre fédéral lorsqu'il prononce, en
avril 1969, un discours devant la Chambre de commerce régionale de
Gaspé au sujet de l'aménagement d'un parc national dans la
presqu'île de Forillon. Ainsi, la perche était tendue.
L'idée allait faire son chemin. On profitait de la pauvreté d'une
population pour lui faire miroiter les millions de dollars et les centaines
d'emplois, afin que, par cette pression, on force le gouvernement du
Québec à accepter les empiétements du gouvernement
fédéral.
C'est donc le couteau sur la gorge que le gouvernement
fédéral oblige le gouvernement québécois à
négocier une telle entente. C'est ce qui faisait dire à l'ancien
ministre des Affaires intergouvernementales, en avril dernier: Si, dans la
confédération canadienne, vivre à deux, c'est vivre
à genoux, je préfère alors vivre seul mais vivre
debout.
A ce sujet, les déclarations du ministre des Affaires indiennes
et du Nord canadien représentent le fédéralisme «
one way » que le gouvernement libéral d'Ottawa veut imposer au
Québec. Si le gouvernement actuel et certains groupes veulent demeurer
en marge de la confédération, disait ce ministre, c'est leur
droit. Mais, qu'ils ne viennent pas demander au gouvernement
fédéral de l'argent pour les appuyer dans leur positionl Si nous
sommes dans la confédération, c'est pour tirer parti de tous les
avantages qu'elle nous offre, sinon il vaut mieux ne pas en faire partie.
Voilà le dialogue qui s'est établi dans les relations
fédérales-provinciales, c'est-à-dire: Vous soumettre ou en
sortir. Seule la position fédérale, selon ces gens, est logique.
Tous ceux qui tentent de s'y opposer sont des séparatistes ou des
crypto-séparatistes. Le fédéralisme sera rentable pour le
Québec pour autant que le gouvernement provincial du Québec se
soumettra aux décisions unilatérales du gouvernement
d'Ottawa.
Certaines déclarations publiées dans les journaux,
continuait ce ministre, suggèrent que le gouvernement
fédéral verse à la province de Québec les fonds
dont il dispose dans son budget pour l'aménagement du parc Forillon.
C'est la Loi des parcs nationaux, répond-il, qui m'autorise, comme
ministre, à dépenser des fonds pour l'aménagement et
l'administration des parcs nationaux au Canada. Je tiens cette autorité
du Parlement et j'entends bien la respecter. Si le gouvernement provincial,
continue-t-il, refuse à tout prix d'établir des parcs nationaux
au Québec, alors il devra employer ses propres fonds pour établir
des parcs provinciaux, comme il en existe dans toutes les provinces,
conformément, d'ailleurs, à la politique que le Québec a
toujours suivie.
M. le Président, nous ne pouvons que dénoncer une telle
attitude du gouvernement fédéral. Cette attitude fut d'ailleurs
la même lorsque l'ancien gouvernement du Québec tenta de
récupérer les $200 millions qui auraient dû être
utilisés pour la création d'une assurance-maladie. C'est
d'ailleurs cette attitude intransigeante, caractéristique d'un
fédéralisme rigide et dépassé, qui explique, en
partie, la montée d'un nouveau parti dans le Québec et la
conviction d'une proportion de plus en plus grande de notre population que la
seule issue possible pour le Québec et qui s'approche de plus en
plus c'est la souveraineté ou l'indépendance.
M. le Président, nous aurions espéré que sur des
points aussi essentiels que l'autonomie de notre province à
l'intérieur des juridictions qui lui sont explicitement confiées
par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, nous puissions faire
l'unanimité en cette Chambre. Mais si nous ne pouvons pas faire
l'unanimité dans le sens contraire au projet de loi qui nous est
présenté, nous continuons quand même d'espérer que
cette unanimité se retrouve dans les partis d'opposition. En somme,
notre opposition est très simple.
Premièrement c'est que l'argent qui va servir au gouvernement
fédéral pour aménager le parc Forillon est tiré de
la poche des Québécois. Ce sont des taxes que les
Québécois donnent à Ottawa. Ils ont donc droit à un
retour pour ces taxes qu'ils versent au gouvernement.
Deuxièmement, ce bail, puisqu'il s'agit d'un bail,
équivaut à toutes fins pratiques à une possession du
territoire par le gouvernement d'Ottawa. Et l'on sait très bien que,
conformément à un certain bouledogue britannique dont nous avons
entendu déjà parler, ce que le gouvernement tient, il ne le
lâche pas facilement et lorsque le moment serait venu de remplir toutes
les conditions qui nous sont imposées, on trouverait mille moyens pour
empêcher que cela
s'accomplisse. Dans les circonstances, pour nous, ce bail
équivaut à une véritable possession et nous ne pouvons que
nous y opposer avec la dernière énergie.
Troisièmement, ce que nous aurions suggéré aurait
plutôt été que le gouvernement fédéral et le
gouvernement provincial fixent le montant requis pour l'aménagement du
parc Forillon, que ce soit $8 millions ou $9 millions ou $10 millions. Ensuite,
il aurait fallu que ce gouvernement demande au gouvernement
fédéral de lui verser cette somme afin que le gouvernement du
Québec puisse, conformément à l'Acte de l'Amérique
du Nord britannique, administrer cette portion du territoire comme il
administre déjà si bien les autres puisse administrer
dis-je, ce parc Forillon pour le plus grand bénéfice de tous les
Gaspésiens, de tous les Québécois, mais dans une optique
proprement québécoise.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous nous
déclarons opposés au principe même de ce projet de loi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montcalm.
M. Marcel Masse
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le ministre nous a
rappelé que ce projet de loi est issu de l'entente de coopération
Canada-Québec qui a été signée au mois de mai 1968
entre le ministre des Terres et Forêts du gouvernement canadien de
l'époque, M. Maurice Sauvé, et le premier ministre du
Québec, M. Daniel Johnson, qui était responsable de ces questions
pour le gouvernement du Québec.
Cette entente de coopération faisait suite à une
série d'études dirigées par le Bureau d'aménagement
de l'Est du Québec, série d'études qui avaient comme objet
principal la relance économique, par l'aménagement du territoire,
de cette région québécoise connue sous le nom de
Bas-Saint-Laurent, Iles-de-la-Madeleine et Gaspésie.
A l'intérieur de ce plan d'aménagement de l'Est du
Québec, un domaine particulier celui d'un parc, a été
accepté par les divers gouvernements. Le ministre nous a rappelé
la clause de l'entente de coopération, qui était très
explicite aux yeux de tout le monde concernant l'aménagement d'un parc
dans ce territoire du Québec.
Il y aurait beaucoup de choses à dire sur les politiques
d'aménagement, présentement, au Québec. Je crois qu'il
serait opportun à ce moment-ci du débat de mettre en garde le
gouvernement du Québec dans cette question de po- litique
d'aménagement qui, vue par Ottawa, peut rapidement devenir un cheval de
Troie pour tout le problème constitutionnel du Québec. Trop
souvent, les politiques d'aménagement sont, de la part du ministre de
l'Expansion régionale et de la part de certaines autorités du
gouvernement canadien, des façons très indirectes d'entrer
directement dans des juridictions du Québec, que ce soit le domaine des
Affaires municipales, de la construction d'aqueducs, de la construction de
réseaux d'égouts, que ce soit dans d'autres domaines comme celui
dont la discussion a été amenée par ce projet de loi:
l'aménagement d'un parc.
M. le Président, le projet de loi que nous présente le
ministre ce matin traite de plusieurs sujets, d'une part des questions
d'expropriation, d'autre part de questions d'aménagement ou de mise en
tutelle de certains pouvoirs de municipalités, et troisièmement,
il est directement basé sur un contrat signé entre le
gouvernement canadien et le gouvernement québécois concernant
l'utilisation et la responsabilité d'un grand territoire connu sous le
nom de parc Forillon.
Il y aurait également lieu, à ce moment-ci, de souligner
qu'il existe, dans le Québec, de vastes territoires qui sont près
des populations québécoises, que ce soit dans la région de
Montréal, le parc du Mont-Tremblant, que ce soit dans la région
de Québec, le parc des Laurentides.
Sans pour autant apporter une réponse définitive à
ce problème, il y aurait peut-être lieu de se demander si, pour le
service des Québécois, l'aménagement de parcs au
Québec ne devrait pas également tenir compte de
l'accessibilité des Québécois à ces zones
vertes.
Il est évident que poser une question semblable nous amène
à penser à une région comme Montréal, un bassin de
2 millions de population, où existe tout près, un parc connu sous
le nom de parc du Mont-Tremblant, très peu aménagé
jusqu'à maintenant par le gouvernement du Québec, et qui pourrait
servir à un nombre beaucoup plus important de Québécois
qu'un parc situé à l'extrémité est de son
territoire qui, lui, servira beaucoup plus aux douairières
américaines qu'aux ouvriers de la région de Montréal.
Sans mettre pour autant en cause les résultats économiques
intéressants pour cette région, il y aurait peut-être lieu
de se demander si, pour les Québécois en général au
point de vue des utilisateurs de parc, un parc situé dans la
région de Montréal ou même dans la région de
Québec n'aurait pas favorisé plus les intérêts
récréatifs si je peux m'exprimer ainsi des
Québécois.
Certes, un grand nombre de Québécois de la région
de Montréal se rendent en Gaspésie annuellement, mais entre ce
nombre qui, pour se rendre en Gaspésie doit disposer d'une semaine, dix
jours de vacances et un nombre beaucoup plus élevé de
Québécois qui profiteraient de leur week-end pour se rendre
à quelques milles de Montréal pratiquer la pêche ou
d'autres sports de plein air, je pense que la réponse est facile
à trouver.
Il reste que de toute façon, M. le Président,...
M. FORTIER: Etes-vous contre le développement touristique de la
Gaspésie?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le député ne
pose même pas une question qui est dans le débat.
M. FORTIER: Voyons donc!
M. MASSE (Montcalm): Ce que je tente de lui faire comprendre c'est que,
vu sous l'angle de l'utilisation par les Québécois, en grand
nombre, d'un parc, un parc situé plus près d'un endroit où
demeure la majorité de ces Québécois serait beaucoup plus
utilisé par ceux-ci qu'un parc situé à l'autre
extrémité du territoire.
M. FORTIER: Je ne suis pas d'accord.
M. MASSE (Montcalm): Il reste que, de toute façon, cela
n'enlève pas l'intérêt à l'intérieur d'un
plan d'aménagement de l'est du Québec de la création ou de
l'existence d'un parc. Est-ce que cela répond à la question du
député? Est-il satisfait?
M. FORTIER: Très bien.
M. MASSE (Montcalm): Or, à l'intérieur de ce territoire de
la Gaspésie, l'entente de coopération prévoyait un parc.
Les discussions ont porté, avec le gouvernement fédéral,
sur ce qu'était un parc, c'est-à-dire quelle conception
allons-nous nous faire de l'existence d'un parc. Tout le monde sait fort bien
qu'il y a diverses sortes d'aménagements possibles d'un parc. Le
gouvernement canadien, rapidement, en est venu à l'existence d'un parc
de type national, qui est une conception de l'aménagement des parcs,
alors que le gouvernement du Québec n'avait pas signé l'entente
dans cette optique mais plutôt dans l'optique de la création d'un
parc de type québécois. La différence est importante et on
la trouve dans le projet de loi.
Pour l'intérêt du député qui semble se poser
des points d'Interrogation, je lui explique, entre autres, quelques
différences, peut-être la plus importante qui est celle-ci: un
parc de type national, selon la loi des parcs nationaux du gouvernement
canadien, empêche toutes sortes d'autres exploitations, dans un
territoire donné, tandis qu'un parc de type québécois
permet ces exploitations.
Il y a des exploitations possibles dans le domaine de la forêt et,
plus particulièrement dans ce parc de la pointe Forillon, il y avait des
exploitations possibles dans le domaine du pétrole. C'est le
ministère des Richesses naturelles je ne mets pas en doute la
qualité de ses fonctionnaires, ni de ses rapports qui a
alerté, à l'époque, le gouvernement du Québec sur
des possibilités qu'il calculait intéressantes dans ce domaine.
Voilà pourquoi, pendant plusieurs mois, le gouvernement du Québec
a tenté d'expliquer au gouvernement canadien l'importance qu'il y aurait
d'amender les textes proposés par le gouvernement canadien au sujet de
la signature du contrat, pour permettre cette recherche et, s'il y a lieu,
cette exploitation dans le domaine du pétrole.
Nous nous basions et nous continuons à nous baser sur des
études préliminaires, certes, mais des études, quand
même, de personnes jugées compétentes par le gouvernement
du Québec, c'est-à-dire les fonctionnaires du ministre des
Richesses naturelles. J'aurais aimé que celui-ci soit présent en
Chambre pour nous dire si ces fonctionnaires ont changé d'idée
depuis le changement ou s'ils persistent dans leur idée.
Je ne voudrais pas m'étendre sur les différences qu'il y a
entre ces sortes de parcs, mais il reste qu'après plusieurs mois de
négociations le gouvernement du Québec en est venu à la
conclusion de l'accord qui a été signé, il y a quelques
semaines, par le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et le
ministre des Affaires indiennes. Très objectivement, cette entente est
en quasi-totalité, si ce n'est pas en totalité, l'entente qui
était prévue avant les dernières élections.
Pour être très objectif, une lecture du contrat m'a permis
de conclure que c'était la même entente au mois de février
qu'au mois de mai. Est-ce que cette entente viole l'intégrité du
territoire québécois? Après avoir moi-même
longuement travaillé à l'étude de ce contrat, je ne crois
pas que ce bail, que ce contrat, viole l'intégrité du territoire
québécois, et je m'explique. Les premières propositions
qui ont été formulées par le gouvernement
fédéral, dans notre esprit, allaient à l'encontre du
principe d'intégrité du territoire québécois,
puisqu'elles
demandaient l'application intégrale de la Loi des parcs
nationaux, c'est-à-dire que le Québec cédait, à
toutes fins que de droit, une partie de son territoire au gouvernement
fédéral.
Ce n'est qu'après de longs mois, pour ne pas dire de longues
années de négociations harassantes que le gouvernement
fédéral a fini par accepter de réaliser, après
consultation avec le gouvernement québécois, l'aménagement
d'un parc sur un terrain qui demeurait la propriété du
gouvernement québécois, puisque le contrat l'indique
lui-même cette propriété reviendrait au gouvernement
du Québec. Donc, il n'y a pas de cessation de terrain. Le gouvernement
du Québec ne cède pas un terrain au gouvernement
fédéral, mais il met à sa disposition, pendant un certain
nombre d'années, une parcelle de son territoire pour permettre
l'aménagement d'un parc, lequel devra être fait après
consultation et étude en commun du gouvernement québécois
et du gouvernement fédéral.
C'est ce que nous cherchions et c'est ce que nous avons réussi
à atteindre après de longs mois de négociations. C'est ce
qui a été accepté, après avoir été
critiqué, alors qu'il était l'Opposition, par le gouvernement
actuel qui s'est empressé de signer cette entente. C'était une
façon pour le gouvernement, de reconnaître l'utilité du
travail que nous avions fait.
Est-ce que, pendant ce temps, les Gaspésiens ont
été privés de ce parc? Je peux vous assurer que non,
puisque les travaux préliminaires d'étude de plans de recherche
se poursuivaient tant par le gouvernement du Québec que par le
gouvernement fédéral.
Il n'y aura pas une journée de retard au sujet de la
réalisation de ce parc dit national. Mais, nous aurons l'occasion de
revenir en comité pour discuter plus à fond de certains points
techniques concernant ce parc.
M. le Président, certes, nous ne sommes peut-être pas en
face d'une solution idéale pour régler le problème des
parcs au Québec. Certes, nous n'avons peut-être pas devant nous la
solution idéale concernant le retard que le Québec a pris dans
l'aménagement de ces parcs. Certes, M. le Président, ce projet de
loi n'est peut-être pas celui qui devrait exister si nous avions toute la
liberté pour réaliser nous-mêmes des types de parcs ou des
aménagements dans le domaine touristique.
Mais, compte tenu des difficultés, compte tenu du retard, aussi
bien dans l'aménagement des sites touristiques de la Gaspésie que
dans l'aménagement des parcs au Québec, je crois que ce projet de
loi est basé sur une entente qui, elle, ne viole pas
l'intégrité du territoire québécois. M. le
Président, nous sommes réticents, ayant
préféré d'autres sortes de solutions; mais, devant
l'acharnement du gouvernement d'Ottawa à vouloir s'introduire
continuellement dans des champs de juridiction québécoise, cette
fois-ci nous l'avons plus ou moins empêché, je crois. Quant
à nous, nous sommes favorables au principe de la loi, avec diverses
réticences que j'ai exprimées tout à l'heure. Nous aurons
l'occasion, en comité de revenir plus à fond sur des
détails techniques et j'espère que le ministre pourra nous
éclairer sur ces questions.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Gaspé-Nord.
M. François Gagnon
M. GAGNON! M. le Président, brièvement, je voudrais
joindre ma voix à ceux qui se sont fait entendre relativement au projet
de loi no 29, qui, suivant les explications que le ministre a données,
permettrait de hâter toutes les procédures et d'aménager ce
parc dans une période de six à sept ans.
Je crois que, si nous voulons être réalistes, nous pouvons
dire que l'aménagement de ce parc demandera une période de dix
à douze ans. Si vous me permettez un exemple, à chaque fois qu'on
à procédé à des ententes, qu'on a donné des
signatures, on a toujours indiqué des temps déterminés. Je
me rappelle, entre autres, la réfection de la route 6, dans l'entente
fédérale-provinciale; on avait prévu qu'elle serait
terminée pour 1968, alors qu'elle le sera pour 1972.
Nous avons là l'exemple que le temps par ceux qui
présentent des projets de loi, est prévu pour être court.
Il s'agit que le peuple écoute et ce sont des informations qui, à
cause des délais, le laissent amorphe. Cette entente,
précisément, provient de l'entente
fédérale-provinciale qui a débutée en 1963. On
avait fait croire aux Gaspésiens que, dans une période de cinq,
six ans, le Klondike serait en gaspésie. C'est l'une des raisons pour
lesquelles tous les Gaspésiens ont montré du
désintéressement, ont été amorphes devant l'entente
fédérale-provinciale; on leur avait fait croire des choses
magnifiques, des choses que l'on croyait devoir transformer la Gaspésie
dans un temps relativement court, et l'on constate que ce temps va
s'échelonner sur une période de 20 années,
peut-être.
Ce projet de loi peut se diviser en trois parties. Premièrement,
acquérir les terrains pour les remettre au gouvernement
fédéral, comme Esau remettait son plat de lentilles.
Deuxièmement, mettre en tutelle dix municipalités.
Troisièmement, nommer des administrateurs. Je
crois, M. le Président, que l'on commet une erreur lorsqu'on
prend dix municipalités au service desquelles il y a 70 administrateurs
depuis de nombreuses années. Ce sont les conseillers municipaux et les
maires, ils travaillent dans l'intérêt de leurs
municipalités, ils connaissent le milieu, ils connaissent la
mentalité d'une population, ils connaissent les problèmes et ils
ont participé, par des comités, au plan d'aménagement. On
les prend et on les met de côté pour la réalisation de tout
ce plan.
Je crois qu'il s'agit là d'une erreur fondamentale et qu'on
regrettera encore de ne pas intégrer, à l'intérieur de
l'aménagement de ces dix municipalités, toutes ces personnes,
tous ces administrateurs qui ont l'expérience acquise, qui sont
pragmatiques face à ce problème, et l'on nommera par la suite un
administrateur. Quel sera cet administrateur? Est-ce que ce sera une personne
qui connaît bien le territoire? Est-ce que ce sera une personne
étrangère aux problèmes et qui aura à «
bulldozer » toutes ces personnes qui, à l'intérieur de ces
dix municipalités en tutelle, seront tout simplement
négligées? Ceci occasionnera des problèmes de nature
à provoquer du retard relativement à la mise en marche de cet
aménagement du parc.
On a également dit qu'environ 3,000 Gaspésiens pourront y
trouver de l'emploi. Encore là, c'est dix fois plus que la
réalité. Il y a, près de chez moi, un parc qu'on appelle
le parc national de la Gaspésie, qui existe depuis 1936, dont les
investissements sont par millions de dollars, et qui emploie environ 125
à 150 personnes durant le temps de pointe, c'est-à-dire la
période touristique. Or, il est à prévoir que le parc
Forillon emploiera une main-d'oeuvre maximum, lorsqu'il sera à son plein
épanouissement de développement, d'environ 300 à 400
personnes. Je crois que c'est là mettre en appétit les
Gaspésiens, qui s'apercevront vite de leur déception face
à des projections qui ne sont pas du tout réalistes, face aux
3,000 personnes dont on avait parlé pour le développement du
parc.
Il y aura également les routes d'accès. Par les routes
d'accès, il y a deux façons de se diriger vers le parc Forillon.
Il y a la route qui part de Mont-Joli, qui encercle une partie de la côte
sud de la Gaspésie, et qui est d'environ 450 milles. Il y a
également celle qui traverse le comté de Gaspé-Nord. Si je
prends comme point de départ la route qui a été refaite en
vertu de l'entente fédérale-provinciale, il y aura environ 100
milles de route à refaire pour donner l'accès au parc Forillon.
C'est donc dire que la route qui permettra un accès facile au parc
Forillon et qui pourra être reconstruite dans un temps relativement
court, je dirai trois ou quatre ans, c'est par le côté nord
puisqu'il s'agit de l'endroit où le touriste rencontre le plus de sites
touristiques, c'est l'endroit qui longe à peu près tout le
littoral, le fleuve Saint-Laurent, et c'est la route que tous les touristes et
que toute la population demandent afin que cette route soit prête en
même temps que le parc Forillon.
Je ne pourrais passer sous silence la lutte épique qui s'est
déroulée, relativement à l'aménagement de ce parc,
entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial,
surtout le gouvernement dont je faisais partie. Je me rappelle, comme l'a dit
le député de Bourget, qu'il y a quelques mois, le ministre
fédéral se rendait en Gaspésie pour tenter de traumatiser
la population. On a réussi jusqu'à un certain point et on a fait
croire à une population que, pour dialoguer avec Ottawa, pour s'entendre
avec Ottawa, il fallait avoir les mains liées et la langue liée.
Je dis qu'il vaut mieux vivre au Québec la langue déliée
et avec des mains pour travailler.
Je crois qu'il s'agit d'un parc qui permettra à la
Gaspésie de connaître un avantage touristique. Mais le
gouvernement actuel ne doit pas seulement se contenter de ce parc, puisque la
saison touristique ne dure qu'environ trois mois, car il ne faut pas oublier
qu'elle est intimement mêlée à la période de
congés scolaires où toutes les familles voyagent, où
toutes les familles décident de prendre des vacances et qu'elles seront
appelées à visiter ce territoire. Je formule donc le voeu que le
gouvernement ne néglige rien pour que les procédures aillent le
plus vite possible, mais qu'également il envisage d'autres mesures pour
aider la région de la Gaspésie à se relever
économiquement à l'intérieur du plan de l'entente
fédérale provinciale de façon que les Gaspésiens
reprennent confiance en l'avenir.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: Je sais que le député de Bourget a
exposé à cette Chambre les principes sur lesquels le Parti
québécois se base pour s'opposer à cette loi.
M. le Président, il y a ici un principe essentiel en cause. Nous
aurions espéré que, sur des points aussi essentiels que
l'autonomie du Québec à l'intérieur des juridictions qui
lui sont explicitement conférées par l'Acte de l'Amérique
du Nord britannique, nous puissions à l'intérieur de cette
Chambre faire l'unanimité.
Malheureusement, le gouvernement actuel semble avoir
décidé de jouer le jeu de la démagogie plutôt que
d'aller expliquer à la population de la Gaspésie qu'il y a ici,
dans ces négociations avec le gouvernement fédéral, des
principes sur lesquels il est difficile de lâcher, des principes pour
lesquels quantité de gouvernements se sont battus dans le
passé.
Les membres du parti au pouvoir ont décidé de jouer la
carte du supposé fédéralisme rentable dont nous a
parlé, au cours de la campagne électorale, le premier ministre.
M. le Président, la timidité du gouvernement actuel devant les
envahissements juridictionnels de son grand frère d'Ottawa nous montre
qu'il entend bien revenir sous le joug du gouvernement central, quitte à
délaisser la sauvegarde des intérêts les plus
élémentaires du Québec.
Nous sommes de plus en plus convaincus que nous nous engageons,
après avoir vécu ce que certains journalistes ont appelé
la révolution tranquille, vers une réaction encore plus
tranquille du gouvernement libéral actuel. L'histoire, après les
expériences du passé, nous dit à nous,
Québécois, d'être extrêmement prudents à
propos de territoires. Nous avons été si souvent frustrés
dans le passé, à l'intérieur de ce régime
constitutionnel, que nous sommes convaincus qu'il n'y a aucune chance à
prendre, avec Ottawa en lui cédant un pouce de notre territoire.
Que l'entente stipule qu'au lieu d'être une cession pure et simple
du Québec au gouvernement d'Ottawa, comme cela aurait du l'être
selon la Loi des parcs nationaux, il s'agit d'un bail emphytéotique ne
change rien au principe qu'il s'agit, encore une fois, d'une violation de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et cela, avec l'accord du
gouvernement québécois actuel.
Qu'on nous comprenne bien! Il ne s'agit pas, par notre opposition
à ce projet de loi, de vouloir priver la région de la
Gaspésie de sommes d'argent qui leur seraient extrêmement utiles
dans les circonstances. Mais nous croyons qu'un fédéralisme bien
compris, non un fédéralisme sclérosé aux principes
du 19e siècle, comme semble vouloir nous le vendre le gouvernement
fédéral actuel, aurait permis au gouvernement
québécois de profiter de ces sommes d'argent, tout en
sauvegardant les principes fondamentaux pour lesquels tant de gouvernements
précédents se sont battus autrefois.
N'oublions pas, M. le Président, que le territoire et les
richesses naturelles sont l'assise même de l'autonomie du Québec.
Il s'ensuit que la province a elle seule l'initiative des mesures à
prendre pour en assurer la conservation et l'exploitation.
C'est pourquoi le Québec a établi son propre
système de parcs. Nous croyons en ce domaine être capables
d'administrer notre territoire national aussi bien que pourrait le faire le
gouvernement fédéral.
Il s'agit pourtant, M. le Président, de notre argent. Il s'agit
ici d'une autre circonstance où le Québec a perdu, comme le
député de Bourget a eu l'occasion de l'exposer tout à
l'heure, près de $50 millions. Ce n'est pas un parc, c'est même
dix parcs que nous aurions le droit d'avoir.
Mais ce que nous reprochons actuellement au gouvernement
fédéral, ce que nous reprochons actuellement à cette loi,
c'est de nous présenter cette situation comme étant un cadeau du
gouvernement fédéral, cadeau, pour autant que nous acceptions de
perdre, pour autant que nous acceptions de plier sur des principes
essentiels.
De plus, M. le Président, nous ne pouvons pas accepter qu'on
puisse donner libre jouissance au gouvernement du Canada sur lesdits terrains
qui auront été acquis par le gouvernement
québécois. D'ailleurs, hier, M. le Président, si vous me
le permettez, on parlait dans le Soleil du parc de la Mauricie et d'un camp
d'étudiants qui devait disparaître par suite de
l'aménagement de ce parc. Donc, nous croyons qu'il nous appartient
décidément de contrôler notre territoire et de ne pas
accepter que les lois fédérales s'imposent à
l'intérieur de nos parcs nationaux.
De plus, cette libre jouissance s'étendra sur une période
aussi longue que 99 ans à moins, bien entendu comme c'est
explicité dans l'entente qu'après 60 ans, sur un
préavis de cinq ans, le gouvernement québécois
décide d'annuler l'entente après remboursement fait au
gouvernement du Canada de toutes les dépenses d'immobilisation encourues
au cours de cette période.
Nous constatons, M. le Président, que ce n'est pas de l'argent
qu'on nous donne actuellement. Nous constatons qu'avec notre argent,
après que nous aurons accepté de laisser tomber tous les
principaux principes pour lesquels nous nous sommes battus, le gouvernement
fédéral nous prêtera de $8 millions à $10 millions
que nous devrons rembourser par la suite si nous ne sommes pas satisfaits de
l'entente ou si, après 60 ans, nous décidons de mettre fin
à cette entente.
Ainsi, M. le Président, sur un territoire de plus de 2.5
milliards de pieds carrés, le Québec se prive, au moins jusqu'en
l'an 2,030, de toute exploration, développement ou exploitation des
mines ou minerais. N'y a-t-il pas là un danger qui pourrait nous faire
revivre les frustations du Labrador?
Nous ne pouvons, M. le Président, au nom d'un
fédéralisme rentable, accepter autant de clauses
qui s'attaquent tant aux principes constitutionnels pour lesquels les
gouvernements se sont battus qu'aux droits souverains du Québec sur son
territoire. Nous voterons, comme l'a exposé le député de
Bourget, contre le projet en deuxième et en troisième
lecture.
M. le Président, en terminant, je voudrais rappeler aux
libéraux que la population du Québec n'a pas encore
pardonné les trahisons du gouvernement Godbout sur les pouvoirs
économiques du Québec. Je termine aussi en soulignant le fait que
l'ancien gouvernement de l'Union Nationale avait établi une commission
pour étudier l'intégrité du territoire. Je crois que cette
commission a étudié le problème de la capitale nationale
et je crois qu'avant de signer une entente qui nous engage pour l'avenir, nous
devrions remettre ce problème à cette commission afin qu'elle
puisse en étudier les conséquences pour l'avenir du
Québec. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Bellechasse.
M. Gabriel Loubier
M. LOUBIER: M. le Président, simplement quelques mots sur le bill
qui nous est soumis. Je voudrais, au début, signaler qu'à mon
sens ce n'est ni une défaite pour le Québec, ni une victoire pour
le gouvernement d'Ottawa. Je m'explique. Dans la loi régissant
l'établissement ou la création de parcs nationaux à
travers le Canada, il est spécifié les conditions suivantes:
premièrement, la province qui veut bénéficier d'un parc
fédéral ou national doit céder en
nue-propriété au gouvernement central le territoire à
être aménagé et, deuxièmement, l'aménagement
de ce parc revient à l'autorité fédérale.
M. le Président, je disais tout à l'heure que nous avons
je pense que ce n'est ni une défaite pour le Québec, ni
une victoire à Ottawa réussi à contourner cet
écueil. Nous avons réussi à faire en sorte que le
Québec soit respecté dans l'intégrité de son
territoire, d'une façon, au moins, juridique et que ce soit
limité dans le temps, en vertu du bail emphytéotique, pour une
durée de x années. Le Québec ne perd pas la
nue-propriété du territoire aménagé en parc
fédéral. Ceci veut dire que le Québec va obtenir une part
de justice à laquelle il a droit depuis de nombreuses années.
Est-ce qu'il faut blâmer les gouvernements
précédents, au provincial et au fédéral? A mon
sens, non. Antérieurement, quel que soit le premier ministre du
Québec, quel que soit le premier ministre à Ottawa, les positions
étaient tellement rigides et tendues qu'on ne voulait délayer
dans aucun compromis l'impératif de la cession de territoire en
nue-propriété. Pour cristalliser cette rigidité, j'ai
trouvé un homme qui, alors qu'il était ministre du Nord canadien
à Ottawa, M. Jean Lesage, devait épouser la doctrine et le dogme
du gouvernement central à l'effet que le Québec n'aurait jamais
de parc national s'il ne voulait pas céder son territoire en
nue-propriété.
Lorsque M. Lesage est devenu premier ministre du Québec, il
aurait aimé obtenir justement des parcs nationaux défrayés
par le gouvernement central, mais, à ce moment-là, il ne pouvait
pas en demander parce qu'il y avait comme impératif, comme premier
ministre du Québec, le respect de l'intégrité du
territoire, et d'une façon absolue. Or, je pense que, par le biais de ce
bail emphytéotique, qui est un compromis, qui n'est pas la solution
idéale, le Québec récupère, au moins, une partie
des sommes d'argent qu'il a remises au gouvernement central, sous forme de
taxes, et qui ont été réparties à différents
moments, depuis cinquante ans, pour l'aménagement de parcs
nationaux.
Quand on songe, par exemple, qu'au-delà de $200 millions ont
été dépensés par le gouvernement central pour doter
les différentes provinces de parcs nationaux. Qu'est-ce qui arriverait,
par exemple, en Colombie-Britannique, si on enlevait les parcs nationaux? Que
serait-il advenu je vous le demande, M. le Président du
sort du tourisme là-bas? Que serait-il advenu dans d'autres provinces,
s'il n'y avait pas eu implantation de parcs nationaux? Aujourd'hui, il y a un
réseau de parcs nationaux à travers le Canada, réseau qui
guide et qui attire des centaines de milliers de touristes, parce qu'on sait
quelle qualité on retrouve sur tous les plans à
l'intérieur de ces parcs.
Or, je pense que, si nous voulons être de bon compte et accepter
le fait qu'au moment où nous discutons de ce projet nous vivons encore
dans la Confédération, il faut, au moins, aller chercher les
avantages que peut nous procurer ce système constitutionnel dans lequel
nous vivons actuellement. J'aurai la remarque suivante pour bien expliciter ma
pensée. Si, un jour, après avoir obtenu deux ou trois parcs
nationaux, le Québec se sépare, pensez-vous que ce sera un
embêtement majeur que de discuter de l'implication de la présence
des parcs nationaux au Québec?
Pensez-vous qu'à ce moment-là, si on ne veut pas discuter
d'une forme de compensation, on exigera qu'on roule les parcs nationaux, les
espaces verts en ballots et qu'on aille les reporter à Ottawa? Non, au
moins,
durant une période de temps X, nous aurons obtenu ces
investissements, nous aurons peut-être fait circuler des millions de
touristes et davantage et fait dépenser au Québec des centaines
de millions de dollars de plus. Au moment où on discute du projet, qu'on
le veuille ou non, nous sommes dans la confédération. Plusieurs
veulent en sortir, mais, à toutes fins pratiques, nous y sommes encore.
En respectant l'impératif constitutionnel du Québec de
l'intégrité du territoire, en contournant cet écuell,
comme je le disais, par un bail emphytéotique, je me demande pourquoi le
Québec se priverait d'un parc Forillon. J'irais même plus loin,
pourquoi le Québec se priverait-il, si c'est fait à des
conditions acceptables, par des compagnies acceptables, d'autres parcs
nationaux au Québec?
En terminant, je voudrais prendre un autre exemple. Le raisonnement de
certaines personnes me fait parfois penser à des héritiers qui,
de génération en génération, se sont
légué le bien paternel, et on était tout fier de dire:
Sans aucune hypothèque. C'est le grand-père qui a
développé ça lentement, qui a laissé ça
à ses fils, sans aucune hypothèque. Avec orgueuil et
fierté, on disait: C'est une famille bien. Les héritiers
voulaient conserver cette même conception de la fierté en disant:
Jamais nous n'hypothéquerons notre terre, parce que c'est un droit
sacré que notre père nous a laissé. Un jour, il arrive
qu'ils découvrent sur cette propriété un puits de
pétrole et les héritiers disent: Pour pouvoir l'exploiter, il
faudrait emprunter ou il faudrait inviter d'autres personnes à donner du
capital pour nous aider à exploiter ce puits de pétrole. Mais,
à cause de leur conception de la fierté, ils se disent: Non,
c'est un droit sacré, nous trahirions nos ancêtres, ce serait un
crime envers tous ceux qui nous ont précédés. Ils ne font
intervenir personne, n'hypothèquent pas leur propriété.
Ils vont mourir très fiers, très orgueilleux, mais pas un maudit
cent dans leur poche. Ils auront privé les générations
futures d'une richesse qu'ils auraient pu léguer.
J'admets que c'est peut-être un exemple qui cloche, mais c'est
tout simplement pour traduire les pensées qui me viennent à
l'esprit lorsqu'on étudie ce bill. En ce qui me concerne, sans trouver
que ce soit la formule idéale, je trouve que c'est au moins acceptable
pour le Québec. C'est un compromis en vertu duquel Ottawa ne peut pas
dire que c'est une victoire éclatante pour avoir mâté le
Québec; d'autre part, le Québec ne peut se sentir coupable
d'aucune trahison à l'endroit des droits du Québec.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, je demande le vote
enregistré.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre des Affaires municipales
exerce-t-il son droit de réplique?
M. Maurice Tessier
M. TESSIER:' Quelques mots, M. le Président, très
brièvement. Je voudrais d'abord profiter de cette occasion pour
féliciter bien sincèrement le député de Bellechasse
pour les paroles tout à fait sensées qu'il a exprimées sur
le projet de loi.
Je ne pourrais cependant pas en dire autant de son collègue, le
député de Montcalm.
Je suis d'accord sur une opinion émise par le
député de Gaspé-Nord lorsqu'il a déclaré que
les Gaspésiens attendaient depuis trop longtemps la réalisation
du plan du BAEQ. Or, je crois que ce matin le chat est sorti du sac puisque
nous avons entendu le député de Montcalm, qui était le
ministre responsable de la réalisation du plan du BAEQ, déclarer
qu'il favorisait plutôt l'aménagement de parcs dans la
région de Montréal, comme le parc du Mont Tremblant.
Je ne suis pas contre, mais je crois que ces paroles indiquent
clairement qu'il n'a jamais voulu comme ministre responsable de la
réalisation du plan du BAEQ, que cette réalisation se fasse
durant les quatre années de l'Union Nationale. C'est ce qui explique
tout le mécontentement qui existe présentement chez la population
de la Gaspésie par suite du retard à réaliser
l'aménagement du territoire du Bas-Saint-Laurent et de la
Gaspésie.
Je vous ferai remarquer, M. le Président, qu'un mois ne s'est
même pas écoulé entre la transmission des pouvoirs, le 12
mai, et le 10 juin, date de la signature de l'entente entre le gouvernement du
Québec et le gouvernement canadien au sujet du parc Forillon. Ceci
indique l'intention bien précise du gouvernement actuel de
procéder avec rapidité à la réalisation du parc
Forillon. Je suis convaincu que, dès la présente saison de 1970,
nous verrons le début des travaux du parc Forillon pour le plus grand
bien de la population de la Gaspésie et particulièrement de la
région de Gaspé, ce qui créera des centaines d'emplois
pour nos chômeurs de cette région.
En terminant, je voudrais simplement souli-
gner ceci: A peu près à chaque projet de loi que le
gouvernement présente, nous voyons les députés
séparatistes de cette Chambre saisir l'occasion de défendre leur
doctrine. Evidemment, je respecte l'opinion de tout le monde, mais je
conçois difficilement tout de même que les députés
séparatistes, comme celui de Bourget et celui de Saguenay qui ont
adressé la parole, considèrent que le gouvernement canadien est
un gouvernement étranger.
Pour ma part, je suis Canadien et je suis fier de l'être. Je n'ai
pas de complexe et je me sens aussi chez moi dans le parc Algonquin de
l'Ontario ou dans le parc Jasper de l'Alberta...
M. CHARRON: Nos belles Montagnes Rocheuses!
M. TESSIER: ... que je le serai dans le parc Forillon de la
Gaspésie.
M. CHARRON: Vive nos belles Montagnes Rocheuses!
M. LE PRESIDENT: Que l'on appelle les députés.
M. LE PRESIDENT: Que celle et ceux qui sont en faveur de la motion de
deuxième lecture veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Laporte, Hardy, Castonguay, Mme
Kirkland-Casgrain, MM. Tessier, parent, Harvey (Jonquière), Quenneville,
L'Allier, Cloutier (Ahuntsie), Tetley, Drummond, Saint-Pierre, Toupin,
Massé (Arthabaska), Goldbloom, Cadieux, Vaillancourt, Houde (Fabre),
Coiteux, Perreault, Brown, Brisson, Kennedy, Séguin, Saint-Germain,
Saindon, Picard, Pearson, Leduc, Fraser, Fortier, Assad, Bacon, Berthiaume,
Bossé, Caron, Carpentier, Cornellier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey
(Chauveau), Houde (Limoilou), Lamontagne, Marchand, Ostiguy, Pelletier, Pepin,
Phaneuf, Pilote, Shanks, Springate, Veilleux, Vézina, Bertrand, Paul,
Cardinal, Vincent, Russell, Boivin, Cloutier (Montmagny), Loubier, Gagnon,
Masse (Montcalm), Lavoie, Croisetière, Demers, Gauthier, Simard
(Témiscouata), Samson, Dumont, Roy (Beauce), Béland, Drolet,
Bois, Roy (Lévis), Brochu, Audet, Latulippe, Guay.
M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre la motion de deuxième
lecture veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Laurin, Burns, Léger, Charron,
Tremblay (Sainte-Marie), Lessard.
Pour: 82 Contre: 6 Yeas: 82 Nays : 6
M. LE PRESIDENT: La motion est adoptée.
L'honorable ministre des Affaires municipales propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plé-nier. Est-ce que cette motion est adoptée?
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): A
l'ordre!
M. LAPORTE: Je suis heureux de voir le député de
Chicoutimi de retour parmi nous.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans un excellent esprit d'ailleurs, comme
à l'accoutumée.
M. LAPORTE: Nous regrettons pour l'histoire que vous n'ayez pu voter,
mais nous comprenons les raisons impérieuses qui ont dû vous
amener en dehors de cette Chambre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, cher ami.
M. BERTRAND: On n'a jamais le droit de commenter.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Projet de loi no 29, article 1.
L'honorable député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): Je ne sais pas si le ministre des Affaires
municipales a des explications à donner avant de recevoir des questions
sur l'article 1.
M. TESSIER: Un instant.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le ministre doit consulter Ottawa ou
s'il peut répondre?
M. TESSIER: Allez-y, j'écoute.
M. MASSE (Montcalm): Je vous ai demandé si vous aviez des
explications à fournir avant qu'on vous pose des questions concernant
l'article 1.
M. TESSIER: Si j'ai des explications à fournir?
M. MASSE (Montcalm): Vous n'avez pas de remarques à formuler,
alors, je vais poser une question. Pour quelle raison l'article 1 accorde-t-il
au ministre des Travaux publics des pouvoirs qui lui sont, en principe,
accordés par des lois de son ministère? Est-ce qu'il y a des
raisons particulières?
M. TESSIER: Il y a certainement des raisons particulières. On me
demande en somme d'expliquer de nouveau ce que J'ai déjà dit.
C'est que nous avons deux lois, la Loi des terres et forêts qui donne des
permis, des concessions.
Il y a également la Loi de la colonisation votre voisin
est bien au courant qui émet des billets de location sur des
lots, et par conséquent, il faut que le ministre des Travaux publics
soit autorisé à aller au-dessus de ces deux lois-là afin
de pouvoir procéder à l'expropriation et de donner des titres
clairs.
Maintenant, tout ça, évidemment, va se faire en
dédommageant les intéressés, les occupants comme les
détenteurs de billets de location qui occupent ces lots-là. Ils
seront dédommagés; ils seront relocalisés. Alors, c'est
pour ça qu'il faut que l'article 1 donne au ministre des Travaux publics
des pouvoirs d'expropriation qu'il n'a pas actuellement. Evidemment, il faut
lire tout le texte de la loi dans son ensemble. On veut lui donner les
mêmes pouvoirs que possède actuellement le ministre de la Voirie.
Le ministre des Travaux publics, actuellement, en vertu de la Loi des travaux
publics, ne possède pas ces pouvoirs qu'a le ministre de la Voirie.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le ministre des Terres et
Forêts a, en vertu de la loi de son ministère, le droit de
concéder pour fins d'exploitation des territoires forestiers. Il a
également les pouvoirs de les reprendre, ces territoires forestiers. Il
en est de même pour le ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation qui a le pouvoir de céder des terrains pour fins de
colonisation et de les reprendre.
Lorsque, de toute façon, ce n'est pas prévu. Ce le serait
par la loi générale d'expropriation du ministre des Travaux
publics. Alors, qu'est-ce que cet article apporte de plus aux statuts du
Québec? Est-ce tout simplement une redonnance, ou si c'est une
nécessité? Si c'est une nécessité, en vertu de
quoi?
M. TESSIER: Voici à titre d'exemple, en vertu de la Loi de la
colonisation, le ministère ou le gouvernement, si vous voulez, peut, en
effet, reprendre. Mais il doit les reprendre pour cause. En d'autres termes, si
un colon, à qui un billet de location a été
concédé, ne remplit pas les obligations inhérentes audit
billet de location, évidemment, à ce moment-là le
ministère peut reprendre le lot.
Mais s'il remplit toutes les conditions de son billet de location, le
ministère ne peut pas reprendre le lot. Il s'agit de l'article 42 de la
Loi des terres et forêts et en ce qui concerne la Loi des terres de
colonisation, c'est l'article 40. Alors, ce sont les deux articles qui
précisent... Si vous voulez que je les lise, je peux bien vous les lire.
Mais vous êtes censé le savoir.
M. PAUL: M. le Président, est-ce que le ministre ne pourrait pas
nous dire, en résumé, que la nécessité de cette loi
c'est pour permettre au ministère des Travaux publics d'exproprier des
terrains qui, en vertu de la Loi des terres et forêts et en vertu de la
Loi des terres de colonisation, ne peuvent pas et ne sont pas susceptibles
d'être expropriés.
M. TESSIER: C'est ça.
M. PAUL: Bien oui, c'était de nous le dire.
UNE VOIX: C'est bien plus simple de le dire comme cela.
M. PAUL: Ah, c'est cela? D'accord. M. TESSIER: Mais il y a plus que
cela. M. PAUL: Plus que cela?
M. TESSIER: Parce qu'il y a trois sortes de terrains: il y a des
terrains qui sont sous billet de location; il y a des terrains sur lesquels il
y a des droits ou des permis de concession du ministère des Terres et
Forêts et il y en a d'autres qui sont des terrains absolument libres de
toute charge, qui sont des terrains « patentés, » comme on
les appelle. Evidemment, dans ces cas, il faudrait procéder en vertu du
code de procédure civile. Mon savant ami sait que ce sont des
procédures assez longues. Il faut d'abord faire des négociations
de gré à gré. Il faut faire un dépôt, etc.
Toute la procédure est détaillée au code civil. Je ne vais
pas la relater au complet.
M. PAUL: Par le ministère des Travaux publics?
M. TESSIER: Il y a des étapes et des délais à
suivre. Or, si nous n'avons pas des pouvoirs spéciaux, si le ministre
des Travaux publics n'a
pas des pouvoirs spéciaux, qu'arrivera-t-il? C'est qu'il peut
s'écouler des mois, des années même, avant que nous
puissions obtenir des titres clairs. Il s'agit en somme, par ce texte de loi,
de procéder très rapidement par simple dépôt du
plan. Or, nous sommes prêts, les descriptions techniques sont faites, le
plan est préparé. Le lendemain de la sanction de la loi, nous
pouvons immédiatement déposer le plan au bureau d'enregistrement
de Percé, qui est le bureau d'enregistrement du comté, prendre
possession immédiatement de tous les terrains avec des titres clairs
c'est le but des articles 1 et suivants et ainsi, suivant
l'entente Canada-Québec intervenue en date du 8 juin qui, en somme,
consacrait l'entente antérieure du 26 mai 1968 signée à
Rimouski, pouvoir nous conformer aux obligations que le gouvernement du
Québec a prises de livrer le plus rapidement possible. Le délai
fixé à l'entente est le 31 décembre 1970.
M. PAUL: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire
quels pouvoirs additionnels obtiendra le ministre des Travaux publics, en vertu
de l'article 1 de cette loi, par rapport à ceux qu'il détient
déjà en matière d'expropriation, sauf pour les terrains de
corporations de cimetières et autres semblables?
M. TESSIER: Ce ne sont pas des pouvoirs additionnels, en vertu de
l'article 1.
M. PAUL: Des pouvoirs plus expéditifs? M. TESSIER: Oui,
exactement.
M. PAUL: Où retrouvons-nous cela dans le texte?
M. TESSIER: Eh bien, il faut lire les autres articles. C'est ce que j'ai
dit il y a un instant. J'ai dit qu'on ne peut pas, évidemment,
considérer l'article 1 seul. Il faut lire en même temps l'article
2 et l'article 3, au moins.
M. PAUL: Est-ce que le dépôt de ces plans n'était
pas déjà fait?
M. TESSIER: Non. On ne peut pas le faire, tant que la loi ne sera pas
sanctionnée.
M, PAUL: Le dépôt des plans n'était pas fait au
ministère des Travaux publics?
M. TESSIER: Les plans sont préparés et sont prêts
à être déposés.
M. RUSSELL: M. le Président, je pense que le ministre induit la
Chambre en erreur. Les plans étaient déposés et tout
était fait. Même, on commençait à faire
préparer les contrats par les notaires. Donc, à ce
moment-là, avant de nommer les notaires, il fallait que les
dépôts soient faits. Et tous les dépôts
étaient faits pour toutes les terres qui pouvaient être
expropriées; et dans le cas des terres qui ne pouvaient pas être
expropriées, nous procédions de gré à gré,
c'est-à-dire avec des ententes avec le ministère des Terres et
Forêts.
M. TESSIER: Non, non. J'ai l'impression que mon
prédécesseur confond avec le plan qui a été
préparé par le ministère des Travaux publics, que j'ai vu
d'ailleurs, que j'ai en ma possession, et qui décrit le territoire du
parc, qui décrit les terrains à être expropriés avec
leur numéro de cadastre. C'est là-dessus, actuellement, que le
ministère, depuis quelques mois, il est vrai, travaille. C'est pour cela
que le ministère des Travaux publics a engagé un certain nombre
de notaires. Une vingtaine de notaires. Incidemment, je tiens à
préciser à ce sujet-là que nous avons engagé tous
les notaires disponibles, sans discrimination, sans tenir compte de
l'allégeance politique des notaires.
M. PAUL: Vous allez admettre qu'il n'y en a pas beaucoup, de notaires,
dans ce territoire-là.
M. TESSIER: Bien, il y en a une trentaine. Evidemment, il y a des bleus,
il ya des rouges, et il y a peut-être des séparatistes.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que l'insistance du ministre pour souligner
qu'il n'y a pas de discrimination...
M. TESSIER: Il y a peut-être des créditistes.
M. MASSE (Montcalm): ... nous permet de conclure qu'il y en a,
d'habitude?
M. TESSIER: Mais non, ce que je voulais dire, c'est que, pour
hâter la procédure, nous avons fait appel à tous les
notaires de la région. Nous avons même été
jusqu'à conclure une entente avec la Chambre des notaires pour
déterminer un horaire forfaitaire pour l'étude des titres de
chaque lot, la rédaction, les recherches de titres, en somme.
M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire quand les notaires ont
été nommés?
M. TESSIER: Quand les notaires ont été nommés? Les
notaires ont été nommés...
M. PAUL: Est-ce que la date du début d'avril...
M. TESSIER: Les notaires ont été nommés, la date
exacte, je ne la sais pas, mais c'est vers la fin de mai. Cela faisait à
peu près une quinzaine de jours, je pense, que j'avais été
assermenté, à ce moment-là.
M. PAUL: Est-ce que le ministre ne pourrait pas vérifier dans ses
registres pour voir si les notaires n'avaient pas tous été
nommés et les services de tous les notaires retenus...
M. TESSIER: Non, non.
M. PAUL: Laissez-moi poser la question.
M. TESSIER: Bien oui, mais je la connais, la réponse.
M. PAUL: Est-ce que vous avez nommé les notaires?
M. TESSIER: Oui, monsieur, c'est moi.
M. PAUL: Comment se fait-il que ce n'est pas le ministre de la
Justice?
M. TESSIER: Ah, parce qu'il y a eu entente! Il y a eu entente entre le
ministère de la Justice et le ministre des Travaux publics, et à
ce moment-là, le ministre de la Justice n'a fait aucune objection.
M. PAUL: Connaissez-vous ma question?
M. TESSIER: Pardon?
M. PAUL: Vous connaissez ma question?
M. TESSIER: Je peux vous dire que les notaires ont été
nommés à la fin de mai 1970 et que, préalablement à
cela, des lettres avaient été envoyées par mon
prédécesseur à un groupe de notaires leur demandant s'ils
étaient intéressés à s'occuper de la chose.
Dans l'intervalle les réponses sont arrivées. Lorsque je
suis entré en fonction, j'ai augmenté cette liste.
M. LOUBIER: La liste a augmenté?
M. TESSIER: Certainement parce qu'au lieu d'avoir 20 notaires nous en
avons eu 30.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce à la suite de lettres de
recommandation du ministre de la Justice?
M. TESSIER: C'est à la suite d'aucune lettre de recommandation,
c'est que nous avons pris tous les notaires.
M. LOUBIER: Par un téléphone?
M. TESSIER: Par lettre. J'ai envoyé une lettre à tous les
notaires leur donnant le mandat précis d'avoir à s'occuper des
recherches de titres. Pour hâter le travail, nous avons demandé
à la Chambre des notaires de nous fournir le nom de stagiaires,
c'est-à-dire de notaires de troisième ou de quatrième
année, et nous avons eu...
M. GAGNON: Le ministre a-t-il la liste des notaires?
M. TESSIER: ... une liste d'une vingtaine de stagiaires qui sont au
travail depuis, je crois, le 1er juin.
M. PAUL: Est-ce 1969 ou 1970? UNE VOIX: C'est 1971.
M. TESSIER: C'est 1970, évidemment. Nous parlons toujours de
1970.
M. GAGNON: Le ministre a-t-il la liste des notaires?
M. TESSIER: Non, je ne l'ai pas.
M. GAGNON: Est-ce que ce sont des notaires habitant le territoire?
M. TESSIER: Je vous suggère de consulter l'annuaire judiciare du
Québec. Vous y trouverez là liste de tous les notaires de tous
les districts de Rimouski à Gaspé, et ce sont ceux-là.
M. LOUBIER: Vous les avez tous pris.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.
M. VINCENT: M. le Président, je voudrais poser une question au
ministre des Affaires municipales. Combien de propriétés au total
seront expropriées pour le parc Forillon?
M. TESSIER: J'ai ça quelque part.
Il y a en tout 1,800 expropriations à faire.
M. VINCENT: Il y a 1,800 expropriations à faire.
M. TESSIER: Oui, Lâ-dessus il y a 350 propriétés qui
ont des constructions...
M. VINCENT: Je pense que...
M. TESSIER: Il y a 750 constructions.
M. VINCENT: Il y a 1,800 expropriations à faire.
M. TESSIER: Cela intéressera peut-être l'ancien ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation de savoir qu'il y a 40% du territoire qui
est sur billet de location...
M. VINCENT: Bon, et c'est là...
M. TESSIER: ... en vertu de la Loi des terres de colonisation.
M. VINCENT: ... que j'en arrive à poser cette question au
ministre des Affaires municipales: De ces 1,800 expropriations qu'il y a
à faire, combien le ministre devra-t-il faire d'expropriations qui,
normalement, ne sont pas susceptibles d'être faites en vertu de la loi
actuelle du ministère des Travaux publics?
M. TESSIER: Je ne comprends pas très bien votre question.
M. VINCENT: Voici. Le ministre, en vertu de la loi du ministère
des Travaux publics, peut procéder, en vertu de l'article 11, par
expropriation; mais en vertu de cette loi 29...
M. TESSIER: Vous admettrez que c'est une longue procédure.
M. VINCENT: ... le ministre veut se donner le pouvoir d'exproprier des
terrains qui, normalement, ne sont pas susceptibles d'être
expropriés, des terrains où il y a des concessions et billets de
location, combien y en a-t-il, de ces expropriations, qui ne sont pas
normalement susceptibles d'être faites?
M. TESSIER: Vous n'avez qu'à faire le calcul. Je vous ai dit
qu'il y en avait 40% sur billet de location. Faites le calcul: 40% de
1,800.
M. VINCENT: Donc, cela signifie que le bill 29, à l'article 1,
est nécessaire pour permettre au ministre de faire l'expropriation d'au
moins 40% des terrains qui sont là et qui serviront au parc Forillon.
C'est aussi simple que cela.
M. TESSIER: Oui, mais en plus de cela, comme je l'ai mentionné,
même dans le cas où il n'y a pas de billet de location et pas de
concession en vertu de la Loi des terres et forêts, c'est la lenteur de
la procédure...
M. VINCENT: D'accord.
M. TESSIER: ... qui nous oblige justement à inclure les articles
1, 2 et 3.
M. VINCENT: J'arrive à ce point-là. On dit que le projet a
d'abord pour objet de permettre au gouvernement du Québec
d'acquérir rapidement la propriété, par voie
d'expropriation ou de gré à gré. Par la suite, le
ministre, dans ses notes explicatives, mentionne que les procédures
d'expropriation seront celles qu'utilise le gouvernement lorsqu'une
expropriation est requise pour les fins de la Loi de la voirie. Le ministre
pourrait-il nous dire si, à son ministère, il y aura un service
spécial pour faire ces expropriations, des personnes qui iront sur place
discuter avec les expropriés, ou si ce sont les services du
ministère de la Voirie qui seront requis, les services qui sont
établis déjà au ministère de la Voirie, avec les
inspecteurs qui sont déjà là, pour faire le travail au nom
du ministère des Travaux publics?
M. TESSIER: Je dois dire tout de suite que ce n'est pas le
ministère de la Voirie ou les officiers du ministère de la Voirie
qui vont faire les expropriations. Ce sont des fonctionnaires du
ministère des Travaux publics. Egalement, travaillent là-dessus,
d'autres fonctionnaires qui relèvent de l'ODEQ, l'Office de
développement de l'Est du Québec qui relève de l'Office de
développement et de planification du Québec.
Alors, nous avons en place des fonctionnaires de l'ODEQ qui ont
travaillé là-dessus en collaboration avec les fonctionnaires du
ministère des Travaux publics. Je pourrais ajouter qu'actuellement il y
a environ 50% du travail qui est fait...
M. VINCENT: C'est ça.
M. TESSIER: Je pourrais peut-être aussi ajouter pour
compléter ma réponse de tout à l'heure, qu'en ce qui
concerne les pouvoirs d'expropriation du ministère des Travaux publics,
à moins que je fasse erreur il s'agit toujours d'une question
d'interprétation, en somme, de donner presque une opinion juridique
l'opinion des conseillers juridiques, du service juridique du
ministère des Travaux publics, croit que l'on doit interpréter
les pouvoirs d'expropriation du ministère des Travaux pu-
blics, comme devant s'appliquer a des terrains sur lesquels le
ministère doit construire des immeubles, on doit faire des travaux, pour
lui-même ou pour d'autres ministères du gouvernement, à la
demande d'autres... C'est ce qui se fait couramment.
C'est à cela seulement que se limiteraient les pouvoirs
d'expropriation du ministère des Travaux publics. Or, dans ce cas
précis, qui nous intéresse, M. le Président, nous
exproprions non pas pour la province, mais nous exproprions pour en
céder ensuite l'aménagement au gouvernement
fédéral. C'est là la distinction et c'est là-dessus
que le service du contentieux, ou le service juridique du ministère, a
eu des doutes sérieux. C'est pourquoi on a inclus, dans la
présente loi, ces pouvoirs spéciaux d'expropriation.
M. VINCENT: Je remercie le ministre. Il a précédé,
par une réponse, une question que je voulais lui poser.
Déjà, jusqu'à maintenant, sur 1,800 expropriations
possibles, il y en a 900 qui sont complétées,
c'est-à-dire, pas les expropriations...
M. TESSIER: Environ 50%.
M. VINCENT: Cela a été fait de gré à
gré? On a complété environ 50%, ce qui veut dire qu'il
resterait...
M. TESSIER: Je crois savoir que, dans 50% des dossiers, sur 1,800
expropriations, ce qui veut dire environ 900 dossiers d'expropriation, il n'y a
eu encore jusqu'à maintenant aucune discussion ou négociation
quant au prix. Ce qui est complété à 50% ce sont les
études des titres seulement. Nous avons fait les relevés
complets, nous avons fait un peu comme on fait pour un rôle
d'évaluation dans une municipalité, nous avons
évalué les bâtiments; après les avoir
mesurés, nous avons regardé la qualité des
matériaux, la vétusté de ces bâtiments,
examiné les terres, si c'étaient des terres en culture, des
terres à bols. Nous avons fait une évaluation, en somme, dans 50%
des l,800 dossiers d'expropriation, mais nous n'avons pas encore
commencé la négociation directe avec les
intéressés.
M. MASSE (Montcalm): Quels montants le ministre prévoit-il pour
payer ces frais d'expropriation?
M. TESSIER: Environ $3,200,000.
M. MASSE (Montcalm): L'article comprend la description d'un territoire
à l'annexe A. Quelles sont les mesures qu'entend prendre le gouvernement
pour aider à diminuer les inconvénients d'un déplacement
pour ces personnes?
M. TESSIER: Cela va plus loin dans la loi. Nous allons nommer un
administrateur, qui sera également chargé de voir, avec une
équipe, bien entendu, où ces gens peuvent être
relocalisés. Comme il ne faut pas créer de bidonville dans la
périphérie du parc, il faut d'abord prévoir où ces
gens seront localisés. Tout ça va évidemment demander une
étude de quelques mois. Ces gens vont également être
consultés.
En d'autres termes, on n'établira pas de force, à un
endroit précis, une famille. On va lui demander, d'abord, où elle
désire habiter, dans quelle partie, en dehors du territoire du parc
Forillon. Une famille qui est habituée à vivre au bord de la mer,
une famille de pêcheurs, qui va manifester le désir de demeurer au
bord de la mer, c'est là qu'on la relogera. Une autre famille qui
manifestera le désir d'être urbanisée, d'aller vivre
à l'intérieur de la ville de Gaspé, ou de Percé,
nous verrons à ce qu'elle soit transplantée à un endroit
qui lui convient. C'est certainement l'intention du gouvernement d'entrer en
contact personnellement avec chacune de ces familles-là, ou chaque
individu, ou chaque chef de famille avant de le déplacer.
M. DUMONT: M. le Président, j'aurais une question. Nous avons
vécu à Thetford Mines un plan de regroupement, comme tel, de
réaménagement et il s'est glissé certaines erreurs. Enfin,
les négociations ont été entreprises par un groupe de
corps intermédiaires.
Alors, je me demande, pour la péninsule gaspésienne, pour
ce parc Forillon, si le ministre accepterait, par exemple, des associations
comme l'UCC, ou les associations de pêcheurs qui formeraient une
association globale pour être capable de négocier des droits
d'ensemble, pour être capable de donner justice, surtout, si on a
tendance à agir trop rapidement. Je pense qu'une association groupant
toutes ces associations, si elle était reconnue, serait en mesure
d'aider les gens de ces régions.
M. TESSIER: La suggestion est excellente. Personnellement, je ne vois
aucune objection à ce que nous consultions différentes
associations dès qu'elles en manifesteront le désir.
M. RUSSELL: M. le Président, seulement quelques remarques sur les
avancés du ministre en ce qui concerne l'arpentage, le plan, le
dépôt des plans et l'évaluation. Est-ce que le
ministre a affirmé, devant cette Chambre, que cela est seulement
partiellement complété ou est-ce que ce n'est pas totalement
terminé avant le premier avril?
M. TESSIER: Non, j'ai dit que le plan est fait, le plan du parc, le plan
descriptif.
M. RUSSELL: Le plan est fait, l'évaluation est complète et
le tout a été déposé avant le premier avril?
M. TESSIER: Non, l'évaluation n'est pas complète parce
que, justement on procède, depuis quelque temps, à compiler tous
les renseignements.
Il est impossible que l'évaluation complète soit faite.
Nous avons fait une estimation générale, je suis bien d'accord,
mais ce que je veux dire, c'est que l'estimation de chacun des 1,800 cas
d'expropriation est complétée à 50%.
M. RUSSELL: M. le Président, il s'agit de négociations, si
je comprends bien, avec les particuliers.
M. TESSIER: C'est cela.
M. RUSSELL: La négociation et l'évaluation sont deux
choses bien différentes. L'évaluation totale a été
faite; ceci a établi l'estimation de tout le territoire.
M. TESSIER: Approximative.
M. RUSSELL; Ceci a été fait par deux ou trois firmes qui,
si ma mémoire est fidèle, travaillaient là-dessus, pour
compléter cette évaluation.
M. TESSIER: Je pense qu'il faut se comprendre. Une estimation globale a
été faite, d'accord, mais c'est approximatif. C'était
surtout du point de vue budgétair. Il fallait tout de même savoir
ce qu'il fallait inclure comme dépenses pour l'année courante et
pour les années à venir. C'est fait. Je suis parfaitement
d'accord que c'est fait et que cela a été fait avant le
changement de gouvernement.
Dans l'ensemble, c'est une affaire de $5,300.000. Ce chiffre, ce n'est
pas au hasard qu'il a été fixé par mon
prédécesseur. C'est à la suite de renseignements qui ont
été recueillis. Cela ne comprend pas seulement l'expropriation
mais également les frais de relocalisation des personnes.
Pour cette estimation globale, d'accord, mais quand on aborde des cas
particuliers, il faut en arriver à quelque chose de bien précis.
Avant d'aller négocier avec un propriétaire et lui offrir,
disons, $8,475, il faut arriver avec quelque chose de bien précis. C'est
cela que nous sommes en train de faire, et c'est là-dessus que nous
avons complété 50% des dossiers.
M. RUSSELL: M. le Président, je comprends, le ministre est
d'accord avec moi, que, lorsque des plans techniques ont été
faits par des arpenteurs-géomètres, ceci a quand même
été déposé en vue de l'expropriation de tout le
territoire. C'est de la même façon qu'on a procédé
partout ailleurs, non pas seulement dans mon temps, mais avant moi, pour toutes
les terres qu'on a achetées pour les besoins du gouvernement. La loi
actuelle donne les pouvoirs au ministre excepté, naturellement, pour les
terrains de la couronne.
M. TESSIER: M. le Président, on revient à la question que
les plans ont été déposés. Déposés
où? Déposés à quel endroit? Au bureau du
ministère, d'accord, mais pas ailleurs.
Ils ont peut-être été déposés au
bureau de l'ancien ministre des Travaux publics...
M. RUSSELL: Un dépôt des plans, c'est au bureau
d'enregistrement du comté...
M. TESSIER: Non. A quoi cela aurait-il servi de déposer les
plans, au bureau d'enregistrement? On n'a pas les pouvoirs tant et aussi
longtemps que cette loi ne sera pas adoptée et sanctionnée, on
n'a pas les pouvoirs d'exproprier.
M. MASSE (Montcalm): Vous les avez les pouvoirs d'expropriation. C'est
le ministre des Travaux publics...
M. TESSIER: Non, on n'a pas les pouvoirs d'exproprier. Je ne suis pas
pour recommencer. J'ai déjà tout expliqué cela, les
pouvoirs qui sont contenus dans la Loi des travaux publics sont
différents des pouvoirs que l'on requiert par la présente loi.
Les pouvoirs que l'on requiert par la présente loi sont des pouvoirs
d'expropriation conformes à ceux qui existent dans la Loi de la
voirie.
M. RUSSELL: La possession préalable.
M. TESSIER: Simple dépôt du plan au bureau
d'enregistrement. Or, nous n'avons pas ces pouvoirs-là,
actuellement.
M. RUSSELL: La seule différence qu'il y a
entre les deux, c'est que les pouvoirs de la Voirie, c'est de la
possession au préalable. Actuellement, les Travaux publics ont le
pouvoir, après, on fait une offre, on dépose les plans et quinze
jours après, on devient propriétaire du terrain ou de la
propriété.
M. TESSIER: Oui, mais il y a plus que cela. En tout cas, je pense qu'on
est en train de donner un cours de droit, mais...
M. RUSSELL: M. le Président, le ministre peut faire un cours de
droit au ministère de la Justice, mais, pas à moi, parce que j'ai
procédé sur un avis de la Justice.
M. TESSIER: Bien oui, en tout cas, on procède légalement
et pour l'information de mon collègue, c'est qu'en vertu de la Loi des
travaux publics, les pouvoirs d'expropriation nous obligent à
déposer un plan pour chaque lot. Cela veut dire 1,800 lots, 1,800 plans
avec l,800 descriptions techniques. Tandis qu'en vertu de la Loi de la voirie,
on peut exproprier d'un seul coup, 1,800 lots, par le dépôt du
plan. Alors vous voyez là une procédure qui est très
simplifiée et qui, évidemment, est une économie.
M. MASSE (Montcalm): Alors, faites-le déposer par le ministre de
la Voirie, s'il a les pouvoirs.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. TESSIER: Ah! ce n'est pas ma faute, si vous ne comprenez rien! Mais
il me semble que je suis assez précis dans mes explications.
M. MASSE (Montcalm): Le ministre a énormément de
difficultés à nous expliquer les pouvoirs supérieurs que
cette loi lui donnerait comme ministre des Travaux publics, mais j'aimerais
qu'il réussisse un peu mieux à nous expliquer l'autre partie que
nous donne cet article no 1. Les gens qui demeurent dans le territoire. Il est
évident qu'on peut discuter un autre article, mais l'article 1 donne la
description du territoire et c'est dans ce territoire que les gens vivent. Moi,
je n'ai pas d'objection, si le leader parlementaire préfère qu'on
discute cela à l'article 10 ou à l'article 1, cela m'est
parfaitement égal.
M. LAPORTE: Moi aussi.
M. MASSE (Montcalm): Cela vous est égal. Alors à l'article
1...
M. TESSIER: Vous avez de la misère à vous convaincre, je
pense, du bien-fondé de la loi et du fait qu'il y a lieu
d'établir un parc dans la péninsule de Forillon.
M. MASSE (Montcalm): Ce dont je voulais me convaincre, c'est de la
connaissance qu'a le ministre de la loi qu'il nous présente. C'est
difficile, parce qu'il n'est pas capable de nous expliquer...
M. TESSIER: J'ai la connaissance, j'ai beau vous l'expliquer, vous ne
voulez pas comprendre ou vous ne pouvez pas comprendre.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, « ce qui se
conçoit bien s'énonce clairement. » La difficulté
qu'a le ministre de nous exprimer pourquoi il demande ces pouvoirs vient
certainement du fait qu'il conçoit mal la nécessité de sa
loi.
M. TESSIER: Je pense que vous êtes le seul en cette Chambre qui ne
comprenez pas.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que nous n'allons
pas demander le vote là-dessus mais la...
M. TESSIER: Si nous prenions le vote, ce serait curieux.
M. MASSE (Montcalm): ... multiplicité des questions... Ceux qui
ont le droit de poser des questions... membres de l'Opposition...
M. TESSIER: Vous êtes mieux de ne pas demander le vote
là-dessus.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, à l'ordre!
Pourriez-vous demander au ministre d'être un peu plus calme, moins
nerveux; s'il veut parler je vais m'asseoir et il parlera.
M. TESSIER: Je ne suis pas nerveux du tout.
M. MASSE (Montcalm): Vous n'êtes pas poli, alors.
M. TESSIER: Cela, c'est vous qui le pensez.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président, pourriez-vous demander au
député de Montcalm de re-
trouver son calme et de discuter du projet de loi. Disons que nous
sommes tous fatigués, le ministre connaît son projet de loi, et le
député a décidé d'essayer de prouver qu'il ne le
connaissait pas. Mais on peut faire ça sans s'invectiver.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, si le ministre veut faire
des jeux de mots sur les circonscriptions électorales, je redemande au
ministre des Affaires municipales, député de Rimouski, de mettre
ses skis calmement dans la piste qu'il avait tracée...
M. LAPORTE: Vous n'êtes pas dans la bonne saison.
M. MASSE (Montcalm): Cela ne sera pas mieux. Maintenant revenons au
projet de loi.
M. TESSIER: Soyons sérieux.
M. MASSE (Montcalm): Revenons, M. le Président, au projet de loi.
J'aurais quelques questions à poser. S'il est important, même s'il
ne nous l'a pas prouvé, d'accorder des pouvoirs supérieurs au
ministre en vertu de l'expropriation, il est surtout important de savoir ce
qu'il fera de ces pouvoirs. Comment les utilisera-t-il? Tant que ce n'est que
de l'expropriation de territoire, c'est une chose qui peut avoir plus ou moins
de conséquence, mais sur ces territoires, vivent plusieurs centaines de
gens. Comment le ministre entend-il résoudre les problèmes de ces
gens? Il nous a fait tout à l'heure quelques déclarations de
bonnes intentions, tout le monde est d'accord avec la vertu, c'est quand arrive
le problème des péchés que les difficultés et les
discussions s'engendrent. Comment le ministre entend-il réellement
résoudre le problème de ces centaines de gens qui habitent ce
territoire.
Il nous a dit tout à l'heure que le problème était
à l'étude; il prendra plusieurs mois pour étudier cela.
Par contre, il préconise l'urgence d'adopter la loi qui lui donnera les
pouvoirs afin de procéder rapidement et remettre les terrains à
la fin de l'année entre les mains de son gouvernement supérieur,
puisque ce n'est qu'un gouvernement de tutelle dirigé par un intendant,
remettre rapidement au gouvernement d'Ottawa les territoires.
Nous, ce qui nous intéresse, ce n'est pas uniquement de donner au
ministre des pouvoirs supérieurs.
M. TESSIER: Ce qui vous intéresse, je crois, c'est de vous
entendre parler!
M. MASSE (Montcalm): C'est également de savoir comment le
gouvernement entend traiter les populations qui vivent dans ces
territoires-là. Je sais qu'il est important, pour le Parti
libéral, comme on le disait tout à l'heure, de reconnaître
le droit d'aînesse du gouvernement fédéral pour un petit
plat de lentilles. Nous, ce qui nous intéresse, c'est de savoir comment
le ministre va se comporter...
M. TESSIER: C'est ce qui vous fait mal au coeur...
M. MASSE (Montcalm): ... comment les gens qui vivent dans ce territoire
seront traités...
M. TESSIER: ... de voir que le gouvernement fédéral
dépense $8 millions et demi ou $9 millions.
M. MASSE (Montcalm): ... c'est cela qui nous intéresse. Donner un
chèque en blanc au ministre, c'est une chose; mais savoir comment il va
traiter ces populations en est une autre.
M. TESSIER: Vous viendrez voir, vous allez vous en rendre compte.
M. MASSE (Montcalm): Qu'il fournisse au Parlement des explications. M.
le Président, pourriez-vous avertir votre ministre qu'il y a des
règlements et qu'il doit, lui aussi, les suivre?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Je rappelle au député de Montcalm
que le président du comité n'a aucun ministre.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, vous avez des espoirs de
l'être, par exemple.
M. LAPORTE: Alors que vous, vous n'en avez plus.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté? Le
député d'Abitibi-Ouest.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, les années que je
vis sont celles qu'a vécu le député de Chambly.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! L'honorable député
d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: M. le Président, au point de vue du regroupement
municipal, est-ce que l'objection de certaines municipalités est pour
quelque chose dans la mise en tutelle des 18 municipalités?
M. TESSIER: Pardon?
M. AUDET: Au point de vue de regroupement municipal, est-ce que
l'objection de certaines municipalités est pour quelque chose dans la
mise en tutelle des 18 municipalités et y a-t-il des
municipalités qui se sont opposées au regroupement?
M. TESSIER: Non, M. le Président. D'après les rapports que
j'ai eus, depuis plusieurs mois, tous les conseils municipaux ont
été rencontrés et il semble qu'il y a une unanimité
complète de la part des 18 municipalités en question, pour le
regroupement. Ce n'est pas une chose qui est autorisée par la
présente loi, cela viendra avec une autre loi. Je crois que nous aurons
l'occasion, à ce moment-là, de rediscuter, plus en détail,
du regroupement des 18 municpalités en question.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre a parlé tantôt de
reloger des populations, autant que possible, dans le milieu où elles
désirent continuer leur vie naturelle. Est-ce que le ministre a
sensibilisé son collègue, le ministre de la Famille et du
Bien-Etre social, étant donné qu'il y a tellement d'implications
sur la famille, à ce moment-là? Cela s'est produit à
différents moments, dans différents programmes, la relocalisation
des familles et des individus.
Il y a des mécanismes qui ont déjà
été mis sur pied, qui existent, mécanismes qui ne sont pas
permanents, mais qui ont été créés à chaque
occasion. Est-ce qu'à l'occasion de l'application de cette loi, il ne
serait pas nécessaire de créer ce mécanisme de
coordination entre les ministères impliqués et le
ministère de la Famille?
M. TESSIER: M. le Président, il existe, cet organisme; il
s'appelle l'ODEQ et il y a eu je ne pourrais pas mentionner le nombre
exact plusieurs réunions avec la population
intéressée, les représentants de l'ODEQ, les
coordonnateurs sur la conférence administrative, les
représentants du ministère de la Famille et du Bien-Etre social,
du ministère des Affaires municipales, etc. Je ne pourrais pas tous les
énumérer, mais je sais pertinemment que des représentants
du ministère de la Famille et du Bien-Etre social étaient
présents lors de ces rencontres avec la population.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'aimerais quand même
que le ministre nous explique très calmement les méthodes, les
moyens qu'il va employer pour ce qui est du déplacement des personnes.
Je pense que la désinvolture avec laquelle il traite les gens qui
habitent ce territoire est pour le moins une honte. Je crois que pour le
ministre, désirer avoir des pouvoirs supplémentaires pour
exproprier rapidement, c'est une chose ce n'est pas ça qu'on
discute à ce moment-ci mais les gens qui habitent ce territoire
voudraient savoir, du législateur... M. le Président, est-ce que
vous pouvez faire asseoir le ministre?
M. TESSIER: M. le Président, c'est ridicule, j'ai expliqué
tout ça. J'ai dit que les gens avaient été
consultés, qu'ils vont continuer à être consultés,
qu'ils vont donner leurs...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, est-ce que vous pouvez
inviter le ministre à s'asseoir.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre!
M. TESSIER: ... préférences, que tout ça va
être discuté. On a 18 mois pour déplacer toutes ces
personnes. Il me semble que c'est assez.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, comment pouvez-vous dire
qu'on a 18 mois pour déplacer ces personnes quand vous nous avez dit
tout à l'heure qu'il faut que vous remettiez les terrains au mois de
décembre?
M. TESSIER: Même si on cède le terrain d'ailleurs,
on va le céder avant le 31 décembre; les terrains vont être
cédés d'ici quelques semaines cela ne veut pas dire que
nécessairement les familles vont être forcées de
déménager.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, le ministre vient de nous dire que
les familles avaient été consultées et qu'elles seront
consultées. De quelle façon se feront ces consultations? Je ne
sais pas si le ministre a expliqué cela tout à l'heure, je
m'excuse.
Est-ce un organisme quelconque, est-ce le conseil municipal
exclusivement qui a été consulté? Est-ce que le conseil
municipal a consulté la population?
M. TESSIER: Ce n'est pas uniquement le con-
seil municipal qui a été consulté. J'ai
mentionné tout à l'heure que les familles avaient
été consultées. Sur les 18 municipalités, il y en a
six qui sont directement morcelées par l'établissement du parc
Forillon. Or, les familles à l'intérieur de ce territoire que
l'on devra relocaliser ont toutes été consultées une par
une. On les a réunies, dans les six municipalités, à la
salle paroissiale et on leur a tout expliqué. Les rencontres il
n'y en a pas eu seulement une, il y en a eu plusieurs vont se
poursuivre, elles se font encore d'ailleurs, présentement, au moment
où je vous parle.
M. MASSE (Montcalm): Ce n'est sûrement pas le ministre qui va les
rencontrer, parce qu'il ne pourrait pas leur expliquer ce qui va se faire. Il
ne le sait pas.
M. TESSIER: C'est en marche actuellement et depuis plusieurs mois. Nous
allons tenir compte de tout ça. Les déménagements ne se
feront pas tous le même jour. On va tenir compte de chaque cas
particulier, de manière qu'il y ait le moins d'inconvénients
possibles pour chaque famille concernée.
M. LESSARD: Il y a consultation, mais est-ce que les familles avaient la
possibilité de s'opposer ou si c'était simplement une
décision qu'on leur annonçait, qu'elles allaient être
relocalisées?
M. TESSIER: Tout le monde, dans la péninsule de Forillon, est
extrêmement heureux de la création du parc, parce que, d'abord,
une bonne partie de ces familles vont y travailler. Elles sont actuellement en
chômage, elles relèvent du bien-être social. Elles vont
être employées de préférence dans les travaux
d'aménagement du parc lui-même par le gouvernement
fédéral et aussi dans les travaux d'aménagement de la
périphérie du parc. Toutes les familles qui ont été
vues non seulement consentent à l'aménagement du parc, mais ont
hâte que les travaux débutent.
M. LESSARD: Vous dites bien toutes les familles. Il n'y a eu aucune
opposition de la part...
M. TESSIER: Non.
M. LESSARD: ... d'aucune famille, à ce sujet-là?
M. TESSIER: Bien non!
M. MASSE (Montcalm): Quelle preuve a-t-on de cela, M. le
Président?
M. TESSIER: Ecoutez, aucune famille. Je ne peux pas déclarer,
évidemment, qu'il ne peut pas y en avoir, peut-être une. Mais les
rapports que j'ai eus c'est que, dans l'ensemble, tout le monde est
désireux que la réalisation de ce projet se matérialise le
plus tôt possible et personne, à ma connaissance, n'a
manifesté, d'aucune manière, son désaccord.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président,...
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): ... comment le ministre entend-il traiter ces
familles? Il nous a expliqué, jusqu'à maintenant, que des
réunions avaient eu lieu à diverses époques,
dernièrement, et le ministre confirme que, selon les rapports qui lui
auraient été remis, la quasi-totalité des familles est
d'accord pour quitter le terrain, pour se reloger ailleurs. A partir de cette
étape-là, le ministre devra fournir à ces familles une
forme d'aide, soit en argent, soit en services de la part de l'Etat, pour les
reloger.
Comment le ministre entend-il fournir cette aide? D'après quelles
normes agira-t-il? Selon quels critères donnera-t-il des ordres à
ses fonctionnaires? Comment entend-il traiter cette population? La question est
pourtant simple.
M. TESSIER: Oui.
M. MASSE (Montcalm): Nous n'avons eu...
M. TESSIER: Si vous arrêtez de parler, je vais vous
répondre.
M. MASSE (Montcalm): ... qu'une partie de la réponse
jusqu'à maintenant: il y eu des réunions. Nous voulons savoir,
avant de donner ce chèque en blanc, au ministre, ce qu'il adviendra de
ces familles. Comment les traitera-t-il? Il nous a dit jusqu'à
maintenant: Ceux qui demeurent sur le bord de l'eau et qui veulent demeurer sur
le bord de l'eau, ils demeureront sur le bord de l'eau. Ceux qui veulent
s'urbaniser, disait-il, c'est assez incroyable de s'urbaniser comme familles,
qui veullent aller vivre à Gaspé, iront vivre à
Gaspé. Est-ce que le ministre va exproprier des terrains pour les faire
vivre là? Comment entend-il procéder?
M. TESSIER: Vous êtes encore plus enfantin...
M. MASSE (Montcalm): Je pense que c'est fondamental.
M. TESSIER: ... que je croyais.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je crois que la
désinvolture avec laquelle le ministre des Travaux publics traite ces
populations...
M. TESSIER: Pas la population, mais vous.
M. MASSE (Montcalm): ... est une honte. Je pense, M. le
Président, que votre hantise de remettre votre plat de lentilles est en
train de vous faire perdre le nord. Pensez un peu à la population qui
vit là. Ne traitez pas ces gens comme le Parti libéral
fédéral vous traite. Au moins, ayez un peu de décence, si
le parti fédéral n'en a pas envers vous. Traitez-les avec
ménagement, traitez-les avec décence. Au fond, faites un peu ce
que le député de Chambly aimerait que son grand chef Trudeau
fasse à son égard.
M. LAPORTE: M. le Président, parlant de plats de lentilles...
M. TESSIER: Ah, vous êtes bien drôle!
M. LAPORTE: ... est-ce que l'on devrait ajourner pour le
déjeuner, ou si le député croit...
M. MASSE (Montcalm): Bien, si le député veut m'inviter, je
serais bien d'accord.
M. LAPORTE: Je vais vous faire manger quelque chose qui va vous endormir
pour l'après-midi!
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, il veut m'imposer le
bâillon.
M. LAPORTE: Celui-là, vous allez le trouver agréable, au
moins, pendant que vous allez le déguster!
Alors, M. le Président, je suggère que vous proposiez que
ce comité suspende ses travaux jusqu'à deux heures.
M. LE PRESIDENT (Hardy): La séance du comité est suspendue
jusqu'à deux heures.
Reprise de la séance à 14 h 4
M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre,
messieurs! Article 1, adopté?
M. GAGNON: Un instant, M. le Président. Tout à l'heure,
nous avions parlé à l'honorable ministre du mandat que devaient
recevoir les notaires. Le ministre pourrait-il me dire si tous les notaires qui
ont été nommés sous l'ancienne administration vont
continuer, sans exception, à exercer leur mandat ou s'il y en a qui ont
été biffés, rayés?
M. TESSIER: Personne n'a été rayé, sauf qu'autant
que je puisse me souvenir il y a deux ou trois notaires qui n'ont pas
répondu à l'offre. Nous leur envoyions une lettre
d'ailleurs, c'est mon prédécesseur qui l'avait faite et j'ai
suivi la même formule pour ajouter quelques notaires leur disant
que nous étions intéressés à requérir leurs
services et de bien vouloir nous faire connaître, par le retour du
courrier ou dans un certain délai de huit ou dix jours, s'ils
étaient intéressés à agir comme tels. Or, je crois
qu'il y en a trois qui ont répondu qu'ils n'étaient pas
intéressés ou qui n'ont pas répondu du tout.
M. GAGNON: Je suis informé qu'un notaire, entre autres, de
Gaspé-Sud... Je comprends que cela s'apparente peut-être à
des circonstances politiques, mais, pour l'information du ministre, je donnerai
son nom. Il s'agit du notaire Vilmont Dupuis.
M. TESSIER: Pardon?
M. GAGNON: Le notaire Vilmont Dupuis, de Chandler qui, lui, avait
été nommé en bonne et due forme. Or, tout
dernièrement, on l'aurait informé que son mandat était
annulé. J'aimerais que le ministre s'enquière de la
véracité de ces faits et, s'ils étaient vrais, qu'il y ait
correction afin que tous les notaires, sans exception, puissent en profiter. Je
dois dire que, dans mon comté, politiquement, ce n'étaient pas
des amis, mais j'ai dû nommer tous les notaires parce que, comme la manne
ne passe pas très souvent en Gaspésie, tous les professionnels
qui oeuvrent là et qui acceptent de faire des sacrifices de revenus
comparativement aux endroits qui sont plus avantagés
économiquement devraient être traités sur un même
pied, avec la même justice. Alors, le ministre corrigera, j'imagine?
M. TESSIER: Je ne me souviens pas de ce nom, M. le Président,
mais je vais vérifier.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté. Article 2.
Adopté? Article 3?
M. TESSIER: Ce sont trois articles qui vont ensemble.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté?
M. RUSSELL: Oui.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 4. Adopté?
UNE VOIX: Adopté.
M. GAGNON: Un instant, M. le Président. Je ne puis pas l'affirmer
au ministre, mais n'y a-t-il pas des types de seigneuries dans ce territoire et
est-ce que le ministre peut agir, même au niveau des seigneuries avec la
loi actuelle, au même titre que pour les terres patentées?
M. TESSIER: Il n'y a pas de seigneuries.
M. GAGNON: Il n'y a pas de territoires de seigneuries?
M. TESSIER: Non.
M. LE PRESIDENT: Article 4, adopté. Article 5?
M. RUSSELL: A l'article 5, il s'agit des droits, non pas
d'expropriation, mais de prise de possession du territoire d'un
cimetière. Est-ce que la Voirie a les pouvoirs nécessaires pour
exproprier un cimetière?
M. TESSIER: La Voirie?
M. RUSSELL: Oui, parce qu'on se reporte à la Loi de la Voirie,
ici. On transmet, au ministre des Travaux publics, les pouvoirs du ministre de
la Voirie, par cette loi. Donc, il faut se référer à la
Loi de la Voirie pour savoir si, réellement...
M. TESSIER: En vertu des pouvoirs de la Voirie, non, je ne l'ai pas.
Mais en vertu de l'article 2, oui, parce que l'article 2 couvre justement ce
cas des cimetières. C'est pour ça d'ailleurs que cela a
été mis dans la loi. Relisez attentivement l'article 2: Les
pouvoirs d'expro- priation conférés par la présente loi
peuvent être exercés à l'égard de tout immeuble
même consacré à un usage public. C'est là qu'on
déroge à la Loi de la voirie. C'est à l'article 3 qu'on
donne les pouvoirs de la Voirie. Cet article complète et augmente les
pouvoirs de la Voirie, à cause de l'article 2.
M. RUSSELL: Est-ce que le ministre prétend que, par cet article,
il y a le pouvoir d'agir, même s'il n'y a pas consentement?
M. TESSIER: A l'égard des cimetières? M. RUSSELL: A
l'article 5, oui. M. TESSIER: Oui, certainement.
M. RUSSELL: Certainement. Donc, c'est lui...
M. TESSIER: Il n'y a pas besoin de consentement dans le cas
d'expropriation.
M. RUSSELL: Non, mais il ne s'agit pas ici d'expropriation, il s'agit du
déménagement d'un cimetière que vous êtes
obligés par la Loi de la voirie, de déménager
ailleurs.
M. TESSIER: Oui, mais est-ce que laportée de votre question est
de savoir si les corporations des cimetières ont été vues
et si on en a discuté avec elles? Si c'est le but de la question, c'est
oui.
M. RUSSELL: Non, ce n'est pas tellement de savoir si elles ont
été vues, c'est de savoir ceci à cet article: S'il n'y a
pas un accord pour la relocalisation, est-ce que le ministre agit et choisit
lui-même le territoire pour relocaliser le cimetière?
M. TESSIER: Oui, après consultation avec les autorités
concernées.
M. RUSSELL: Oui, je comprends, s'il y a consultation, d'accord; mais,
s'il n'y a pas consentement ou entente?
M. TESSIER: A ce moment-là, le ministre prendra ses
responsabilités.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté?
M. GAGNON: Un instant. Ce matin, le ministre a dit que c'était le
ministère qui allait effectuer les déplacements de cadavres. Je
crois c'est mon opinion qu'il y aura certainement
des conflits. A-t-il envisagé la possibilié
d'intéresser les fabriques, qui sont presque sans exception
propriétaires de ces cimetières? Les intéresser et leur
demander si elles ne procéderaient pas au déplacement des
cadavres?
M. TESSIER: Oui, mais je crois qu'à ce moment-là...
M. GAGNON: Dans certaines paroisses il y en a beaucoup moins que dans
d'autres.
M. TESSIER: ... si le député lit l'article 5, il verra que
le tout « doit être fait après consultation de
l'autorité ecclésiastique compétente. » Cela veut
dire qu'il y aura nécessairement entente entre les deux.
M. GAGNON: Oui, mais consultation et acceptation, ce n'est pas
pareil.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Dorion.
M. BOSSE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la
commission de la Famille et du Bien-Etre social a siégé, qu'elle
a étudié les crédits du ministère et a
adopté tous les articles, à l'exception du poste
budgétaire no 15.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté. Article 6,
adopté? Adopté. Article 7, adopté. Article 8,
adopté. Article 9.
M. RUSSELL: L'administrateur est choisi par le ministre?
M. TESSIER: Oui.
M. RUSSELL: Est-il choisi actuellement?
M. TESSIER: Non. Je ne sais pas du tout qui ce sera. Ce que je peux
dire, c'est que nous allons tâcher de trouver une personne
compétente, si possible dans le territoire en question. Ce que nous
allons regarder, c'est la compétence.
M. RUSSELL: Sur quoi va-t-on baser la compétence? Les gens qui
sont compétents en droit ne le sont pas en administration
municipale.
M. TESSIER: C'est en administration municipale qu'elle devra surtout
avoir de la compétence, parce que l'administrateur aura à
surveiller toute l'administration municipale. Il s'occupera également
non seulement du déplacement des personnes, parce que ce sera
peut-être confié à d'autres, mais surtout de la confection
d'un plan directeur d'urbanisme et de tous les règlements de
construction et de zonage. C'est surtout là-dedans que sa
compétence doit primer.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Gaspé-Sud.
M. FORTIER: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
à cette Chambre que la commission de la Santé a adopté
tous les crédits de la Santé, mais qu'elle a gardé
l'article 1 sous réserve pour discussion générale.
M. RUSSELL: Je ne veux pas être légaliste, mais je crois
que ces rapports-là ne doivent pas se faire lorsque nous sommes en
comité.
M. LAPORTE: M. le Président, peut-être que le
député de Shefford est, comme bien d'autres, un expert en
procédure.
M. RUSSELL: Je ne suis pas expert en procédure. Le ministre dit
cela avec le sourire.
M. LAPORTE: Je lui demande avec politesse s'il permet que ce rapport
soit accepté.
M. RUSSELL: Personnellement, M. le Président, je suis satisfait,
parce que je suis présent; mais, il y en a d'autres qui ne sont pas
présents, et la Chambre est en comité, actuellement.
M. LAPORTE: Ceux-là ne pourront pas protester, je n'irai pas les
chercher.
M. RUSSELL: Ils aimeraient être ici pour écouter ces
rapports lorsque la Chambre siège.
M. LAPORTE: Non, non. Cela doit se faire en comité.
M. LE PRESIDENT (Hardy): C'est seulement le rapport, ils n'ont pas
été adoptés.
M. LAPORTE: Cela se fera en comité. M. RUSSELL: Ils ne sont pas
adoptés.
M. LAPORTE: Ils sont simplement proposés à la Chambre, ils
ne sont pas adoptés. Cela va venir dans quelques minutes.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 9, adopté?
M. RUSSELL: Oui, adopté.
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 10?
M. LAPORTE: Adopté. M. TESSIER: Adopté,
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 11?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 12?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 13?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 14?
M. TESSIER: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté.
M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que le
comité a examiné et adopté le bill 29 sans amendement.
3e lecture
M. LAPORTE: Pour la troisième lecture, comme il y a un seul
représentant du Parti québécois, puis-je signaler au
député que ce matin son parti a voté contre le projet de
loi, en deuxième lecture, sur le principe. J'imagine que son parti
voudra également voter contre, en troisième lecture de ce projet
de loi. Peut-être pourrions-nous avoir le même vote
enregistré que ce matin en troisième lecture.
M. BERTRAND: Je demanderais par contre, étant donné qu'en
troisième lecture nous devions voter contre à cause d'une
modalité, que les noms des membres de l'Opposition officielle soient
ajoutés à ceux qui voteraient contre.
M. LAPORTE: Contre, en troisième lecture. D'accord.
M. LE PRESIDENT: La troisième lecture est adoptée avec le
vote enregistré.
M. BERTRAND: Avec le vote enregistré tel que dit.
M. LE PRESIDENT: Le vote enregistré d'aujourd'hui, j'imagine,
M. BERTRAND: Oui, en se basant sur le vote de ce matin.
M. LAPORTE: C'est-à-dire les mêmes votants que ce matin,
mais divisés selon... Enfin, nous nous comprenons.
M. BERTRAND: A ce moment-là, il y aura lieu, probablement,
d'ajouter le nom du député de Gouin, qui n'y était pas ce
matin.
M. LAPORTE: Très bien.
M. BERTRAND: Avec ceux qui sont contre.
M. LAPORTE: Très bien. Vous n'insistez pas pour qu'on l'ajoute au
vote de ce matin?
M. JORON: Non.
M. BERTRAND: Non, il n'y était pas, M. Joron.
M. LAPORTE: L'article no 3, s'il vous plaît, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la deuxième lecture du projet de loi no 9, Loi du Grand
Théâtre de Québec.
Grand Théâtre
M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas l'intention de
prononcer le discours que prononcera mon collègue, le
député de Chicoutimi, mais j'apprécierais d'abord entendre
le ministre des Affaires culturelles.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles.
M. François Cloutier
M. CLOUTIER (Ahuntslc): M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en
recommande l'étude à la Chambre.
Le Grand Théâtre de Québec, que l'on attend depuis
déjà longtemps, est sur le point d'être terminé.
Sans doute pourra-t-il être inauguré
d'ici quelques mois. Dernier né du réseau de centres
culturels construits à l'occasion du centenaire de la
Confédération canadienne, il constituera un pôle
d'attraction extrêmement important, s'inscrivânt dans l'axe
Montréal-Québec, à partir duquel la vie culturelle de
notre collectivité trouvera profit à s'ordonner.
Ne pourrait-on pas d'ailleurs imaginer une collaboration inédite
entre la Place des Arts et le Grand Théâtre, collaboration qui,
par le biais d'échanges de productions, permettrait une action
culturelle plus directe, de manière que le complexe
québécois puisse jouer le rôle qui lui revient et prendre
ainsi toute sa signification? Il faut qu'il soit doté d'une structure
administrative conforme à la nature même de ses activités.
En effet, la gestion d'une maison de théâtre est d'un type
particulier. Il s'agit, à toutes fins utiles, d'une entreprise à
caractère commercial, dont les opérations reposent sur la
location des salles, là mise au point de spectacles et l'exploitation de
divers services. Cela suppose un certain degré d'autonomie. Les
règles habituelles de la fonction publique sont souvent trop rigides
pour être applicables à une telle situation. De plus, les
exigences en matière budgétaire et même comptable sont,
à bien des points de vue, différentes.
Enfin, il faut une direction suffisamment responsable pour permettre la
prise de décisions rapides dans un contexte concurrentiel. Ces divers
impératifs font qu'il est difficile de concevoir ce type de gestion
à l'intérieur même d'un ministère, sous forme de
services spécialisés, par exemple. A la lumière de ce qui
précède, il semble bien que la meilleure formule d'organisation
pour le Grand Théâtre de Québec soit celle d'un organisme
autonome. Le projet de loi dit bill 9, qui est soumis aujourd'hui à
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, propose à cet
effet la création d'une régie. C'est en effet la structure
idéale, lorsqu'une action rapide et diversifiée est
recherchée dans un domaine déterminé. Elle répond
aux objectif d'une saine gestion. En effet, la régie devant faire
approuver annuellement son budget d'exploitation et ses comptes étant
vérifiés régulièrement, le contrôle est aussi
satisfaisant que celui exercé sur un budget de ministère. En
même temps, l'indépendance de la direction étant
assurée permet une action efficace dans la perspective
déjà décrite. Enfin, étant donné que, dans
le présent projet de loi, il y a un seul ministère de tutelle et
que les sept administrateurs sont tous nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil, il n'y a pas lieu de craindre que les
activités envisagées puissent aller à l'en- contre de la
planification générale du ministère des Affaires
culturelles.
Le bill 9 dissout, par son article 17, une corporation constituée
par lettres patentes délivrées en vertu de la troisième
partie de la Loi des compagnies le 5 mai 1969, et connue sous le nom de Le
Grand Théâtre de Québec Ltée. Cette compagnie,
formée par l'ancien ministre des Affaires culturelles, avait pour but
d'administrer le complexe en question. Elle comprenait cinq fonctionnaires du
ministère sur dix administrateurs et elle était
contrôlée par une autre compagnie, soit la Société
d'action culturelle, qui se présentait alors comme une
société de gestion. En fait, il ne nous a pas paru souhaitable de
maintenir cette structure juridique, et ceci pour toute une série de
raisons. C'est, à notre point de vue, un principe discutable de faire
administrer les biens de l'Etat par des sociétés privées,
à responsabilité limitée, qui reçoivent des
subventions du gouvernement à cette fin. L'usage des subventions est
beaucoup plus difficile à contrôler que les budgets d'un
ministère ou d'une régie.
Ceci est encore plus vrai lorsque des fonctionnaires responsables du
contrôle sont membres du conseil d'administration. Ces fonctionnaires
risquent, en toute bonne foi, de se trouver en position de conflit
d'intérêts. De plus, il y a un désavantage sérieux
auquel on ne semble pas avoir pensé puisque cette structure avait
précisément pour but de conserver un certain contrôle
ministériel, c'est que les membres du conseil d'administration
pourraient éventuellement se perpétuer eux-mêmes et en
arriver à contrôler le conseil à eux seuls.
En résumé, si nous pouvons comprendre les raisons qui ont
poussé l'ancien ministre des Affaires culturelles à créer
une corporation pour administrer le Grand Théâtre, nous ne pensons
pas que cette formule offre toutes les garanties d'une saine gestion des fonds
publics. Nous ne pensons pas, non plus, qu'elle amène plus de souplesse
dans la direction d'un complexe culturel comme le Grand Théâtre,
ni qu'elle permette un contrôle plus assuré de son action.
En revanche, nous sommes d'avis qu'une régie constitue la forme
d'organisation la meilleure dans ce cas particulier et cela, pour les raisons
citées plus haut. Ce n'est d'ailleurs pas par hasard que les
gouvernements ont recours à cette formule lorsqu'il s'agit de faire
assumer par un organisme les activités commerciales.
Cependant, il ne faut pas oublier qu'une structure de gestion n'est pas
une fin en soi. Elle ne peut être qu'un moyen pour réaliser un
objectif. En l'occurence, c'est le théâtre et la vie cultu-
relie de la collectivité qu'il convient de servir. C'est
là, M. le Président, le véritable sens du présent
projet de loi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Jean-Noël Tremblay
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, Je ne m'attendais pas
à ce que le nouveau titulaire des Affaires culturelles
procédât si vite à ce que j'ose appeler l'opération
patronage et qu'il présentât un projet de loi qui n'est, au fond,
que la reprise de celui qui devait donner, il y a déjà quelques
années, naissance au monstre dévorant de la Place des Arts de
Montréal. C'est donc dans l'optique de la démocratisation de la
culture, de l'accessibilité du bien culturel à tous les citoyens,
que j'examinerai ce projet de loi dont il n'est pas exagéré de
dire qu'il risque d'aristocratiser la culture à Québec et de
permettre aux nantis de retraverser la Grande-Allée pour aller s'exhiber
lors des fastueuses premières qu'attendent les snobs de tout acabit, qui
n'ont pas encore accepté l'idée que la culture ne leur appartient
pas de droit et qu'il est temps de la remettre aux mains de ceux qui la font et
qui s'efforcent de la manifester.
La démarche du ministre des Affaires culturelles, sa
précipitation s'expliquerait-elle par la négligence de son
prédécesseur à pourvoir le Grand Théâtre des
mécanismes essentiels à son fonctionnement? C'est à cette
question que je tenterai de répondre en étudiant le formel quod
et le formel quo du projet de loi numéro 9.
Disons d'abord que le formel quod, c'est-à-dire l'objectif du
projet de loi, sa substance et sa justification tiennent à l'exigence de
munir le Grand Théâtre des outils d'administration et de gestion
dont 11 a besoin. J'y avais vu depuis un assez long temps puisque j'avais
constitué la Corporation du Grand Théâtre et que j'en avais
fait nommer les administrateurs. Cette corporation avait commencé son
travail et s'employait avec célérité à mettre en
marche le Grand Théâtre. Déjà, les règlements
étaient rédigés et approuvés et l'on s'occupait de
préparer l'ouverture de cette place des arts. Il n'y avait donc pas
péril en la demeure et eût-on laissé les choses en
état, on se fût trouvé fort satisfait du travail des
membres de la corporation.
Or, de l'avis même desdits membres, ceux-ci n'ont pas
été consultés, sauf de façon accidentelle. Ainsi,
le président du Grand Théâtre, Me Marquis, a
été avisé de la présentation d'un projet de loi de
façon confidentielle par le sous-ministre, M. Frégault, la veille
même de l'annonce de ce projet de loi. Ce n'est qu'une semaine plus tard,
ou à peu près, que le ministre a eu un entretien avec lui, lequel
entretien a consisté surtout à présenter à Me
Marquis des excuses pour la façon dont on l'avait traité.
Les membres ont donc appris que le ministre des Affaires culturelles
s'apprêtait à les congédier, puisqu'il annonçait la
présentation d'un projet de loi dont ils n'avaient pas entendu parler.
Le ministre était-il gêné de congédier des gens qui
travaillaient bénévolement pour les remplacer par d'autres qui
seront payés? Le procédé était pour le moins
indélicat. Mais passons. La raison d'Etat semble avoir prévalu.
Raison d'Etat qui a forte coloration de patronage car, à moins qu'on ne
me prouve le contraire, on ne souhaite pas, au Grand Théâtre, la
présence de gens qui n'ont pas l'insigne mérite d'appartenir
à un « establishment » que l'on connaît bien ici et
auquel veulent s'associer les natifs de Québec que leur fortune
politique autorise à fréquenter aujourd'hui les restes d'une race
qui s'éteint.
Il faut dire de plus que la Corporation du Grand Théâtre
n'était que l'un des rouages d'un mécanisme beaucoup plus
important, celui de la Société d'action culturelle, instrument
administrativement révolutionnaire, dont la fonction était,
précisément, en plus de permettre au ministre des Affaires
culturelles, par lui-même et par la présence de nombreux
fonctionnaires, un contrôle direct sur l'activité culturelle, de
lui fournir les moyens légaux et techniques d'autofinancer une grande
partie de l'activité de son ministère. Je doute fort qu'il se
soit interrogé longuement, comme il dit le faire pour d'autres domaines,
sur la nature de cet instrument et sur ses immenses possibilités.
Peut-être a-t-il été effrayé par ses
dimensions et sa nouveauté? Il a préféré se
rabattre sur une solution de facilité et de faire de la
société du Grand Théâtre une régie autonome.
Ainsi donc César crée une régie du Grand
Théâtre. C'est le formel quo du projet de loi. On verra donc
naître un autre de ces organismes dont le ministre sera comptable devant
l'Assemblée nationale, mais dont il ne pourra, une fois la machine
lancée, qu'approuver les actes, sans égard à leurs
conséquences financières. Le cas de la Place des Arts de
Montréal en administre la preuve péremptoire, même s'il
n'est pas dans mon intention de passer jugement sur la qualité de ses
administrateurs.
Comment fonctionnera cette régie du Grand Théâtre?
C'est là le formel quo du projet de loi. Un conseil d'administration
dont les membres
seront nommés par le gouvernement et qui devra faire approuver
son budget et se soumettre à certaines exigences administratives,
à l'instar de la Régie de la Place des Arts à
Montréal. Cette régie devra présenter un rapport
d'activités, et ses déficits seront comblés à
même les deniers votés à cette fin par l'Assemblée
nationale. Qui sera membre? Quels seront les critères qui guideront le
gouvernement lors des nominations? Quelle sera la valeur de
représentativité de ces membres par rapport à la
société de Québec? On n'en sait rien, sauf, bien entendu,
ce que voudra nous en dire le ministre, lorsque nous examinerons en
détail les articles du projet de loi.
J'imagine que le ministre voudra bien nommer un représentant de
la ville de Québec, un représentant de la Communauté
urbaine de Québec, un représentant des centrales syndicales,un
représentant des universités et des maisons d'enseignement, et
l'un ou l'autre représentant des grands organismes culturels qui
oeuvrent depuis longtemps dans la région de Québec. Je dis donc
que ce projet de loi n'est ni utile, ni original, ni très novateur. Il
consacre un état de fait ancien qui veut qu'on appelle d'ordinaire
à la direction de certaines régies, particulièrement dans
le domaine culturel, des citoyens dont il faut bien rechercher, hélas
trop souvent, les titres ailleurs que dans leur expérience
administrative et leur efficacité.
On pourrait accepter ces méthodes anciennes s'il n'y avait, dans
le cas qui nous occupe, des incidences sérieuses dont la moindre n'est
pas celle de voir s'échapper des mains du ministre le contrôle
d'un instrument de culture dont nous voulions à tout prix qu'il
fût vraiment au service de tous les contribuables.
Car, dans notre esprit, je l'ai déjà déclaré
à un journaliste lors de l'annonce du projet de loi, le Grand
Théâtre devait être le lieu de rencontre de la population du
Québec et des environs avec les oeuvres et les artistes, une sorte de
maison ouverte à toutes les manifestations de l'art, à toutes les
écoles et à toutes les tendances, non pas, donc, un
cénacle, une chapelle d'initiés, pas plus, du reste, qu'une foire
offerte à tous les traficants de l'art et de ses sous-produits.
J'imagine, en effet, que la Régie du Grand Théâtre n'aura
pas à se soumettre aux moeurs administratives du gouvernement, à
la réglementation de la Trésorerie. Cela apparaît noir sur
blanc dans un rapport qui m'avait été présenté en
1968 et que j'ai rejeté. Du reste, un candidat à la direction du
Grand Théâtre m'avait clairement fait savoir dans une note, qu'il
ne voulait pas subir toutes les tracasseries du Conseil de la trésorerie
et devoir passer par toutes les procédures d'examen et de contrôle
de cet organisme essentiel du gouvernement.
Il y a donc lieu de croire que cet avis a dû peser lourd dans la
balance lorsqu'il s'est agi, pour le ministre des Affaires culturelles, de
mettre de côté la société du Grand
Théâtre et de faire préparer le présent projet de
loi.
J'aurais souhaité, cependant, qu'il s'interrogeât davantage
sur les conséquences de l'abandon de ses droits et de ses
responsabilités, car il est clair qu'en remettant l'administration du
Grand Théâtre à une régie indépendante le
ministre se départit du même coup du seul outil qui lui eût
permis d'animer ou de diriger l'activité culturelle de Québec et
des environs.
En effet, comment pourra-t-il maintenant reprendre l'initiative des
opérations et constituer des théâtres d'Etat, des
formations musicales d'Etat, l'Opéra national du Québec,
etc.?
Comment pourra-t-il surveiller et normaliser le rythme de croissance des
organismes qu'il subventionne et les amener à accepter l'idée des
regroupements aux fins de diminuer les coûts d'administration et de
publicité?
Comment lui sera-t-il possible d'empêcher l'émiettement de
l'activité culturelle, les dédoublements de services et de
coûts, le morcellement que lui imposeront les organismes culturels,
valables certes, mais dont il sera très difficile, sinon impossible, de
canaliser les énergies et les efforts?
Il appert, du texte que nous avons devant nous, que le Grand
Théâtre sera, comme tant d'autres, un lieu d'activités
culturelles, quand il devait être le point de convergence de tous les
efforts en ce domaine, l'instrument exemplaire d'une action culturelle
cohérente et planifiée et le lien organique avec les centres
d'art et les centres culturels du Québec, de toute la région et
de l'Etat du Québec.
Je ne sais à quels dieux le ministre a sacrifié ses droits
qui n'étaient, en fait, que ceux de tous les contribuables qui paieront
ce monument. Ce qui est certain, et je le dis sans préjuger des
qualités des administrateurs de la régie dont le ministre nous
parlera sans doute, c'est qu'il y a fort à parier que, par la force des
choses, le Grand Théâtre deviendra un autre monstre
dévorant.
Il eût été si facile, comme nous avions l'intention
de le faire, de revoir en même temps l'acte constitutif de la Place des
Arts de Montréal et celui du Grand Théâtre afin d'inventer
une formule qui eût permis de conjuguer le travail de ces deux
instruments de culture et de
démythifier le rôle de l'un et de l'autre en consacrant,
dans un texte de loi, la vocation éducative de ces places des arts
conçues pour favoriser la culture populaire et l'accessibilité de
tous les citoyens à toutes les formes de la culture vivante.
On nous dira certainement que la Régie du Grand
Théâtre va s'efforcer de sensibiliser les citoyens aux
manifestations culturelles, qu'on y prévoit montrer telle ou telle sorte
de spectacles et que les prix en seront raisonnables. On nous l'affirmerait que
je rétorquerais qu'il ne s'agit là que d'intentions
inspirées par le meilleur naturel. Mais, il importe de ne pas oublier
que, dès que les administrateurs seront en selle, ils auront toute
liberté d'action. La seule présentation et acceptation du budget
annuel du Grand Théâtre n'est pas une garantie contre les abus de
pouvoir et contre les visées de tous les caporaux de la culture.
J'attends du ministre qu'il nous dise comment on fera venir les gens au
Grand Théâtre, comment ils y seront accueillis, qui administrera
les services connexes: bar, restaurant, etc. J'attends qu'il nous rassure sur
la vocation de ce Grand Théâtre, qui ne devait être qu'un
moyen de plus à la disposition du gouvernement pour intéresser le
grand public au vaste mouvement culturel que le ministre responsable a le
devoir d'animer afin que notre communauté humaine se retrouve à
ce sommet de l'éducation qu'est la culture, qu'elle se reconnaisse et se
sente engagée dans le grand oeuvre de construction du pays qu'elle a
porté et dont elle sait qu'il va naître.
Tel quel, le projet de loi ne me paraît pas acceptable. En ce qui
me concerne, je ne pourrai l'accepter en seconde lecture. Je suis d'avance
résigné au coup de force de la majorité
ministérielle. J'essaierai de faire agréer certains amendements
qui ne seront, à tout prendre, que du rapiéçage et des
pis-aller. Il me reste à souhaiter que la Régie du Grand
Théâtre nous épargne, au moins, les pompes des
premières et qu'elle manifeste son désir de «
désaristocratiser » la culture en organisant, pour l'ouverture de
cette maison du peuple, un vaste festival populaire auquel pourront participer,
moyennant un droit d'entrée nominal, tous les citoyens de Québec
et des environs.
Si, d'aventure, ces citoyens ne devaient plus pouvoir y mettre les
pieds, ils auraient eu, une fois, cette consolation d'entrer dans le temple et
de coudoyer les mandarins. Je souhaite vivement que les faits ne me donnent pas
raison, même si la création de cette régie m'incite
à tenir des propos pessimistes et à entretenir des craintes
justement nourries par une expérience administrative et par
lafréquentation de tels hauts lieux de l'esprit.
M. le Président, il avait été entendu, avec le
premier ministre, qu'immédiatement après le débat en
seconde lecture, nous irions en comité afin d'examiner ce projet.
Toutefois, je ne veux pas me tenir d'avance pour battu et afin d'amener
si possible le gouvernement à résipiscence, je propose,
appuyé par le député de Maskinongé, que le projet
de loi no 9 soit déféré à la commission des
Affaires culturelles afin que celle-ci puisse l'étudier et entendre des
témoins, notamment les membres de la Corporation du Grand
Théâtre, les représentants de la ville de Québec,
ceux de la communauté urbaine de Québec et tous autres
témoins que ladite commission jugera nécessaire d'interroger et
dont elle jugera nécessaire de réquérir l'avis.
M. LAPORTE: Vote, M. le Président. M. Rémi Paul
M. PAUL: Je pense bien qu'avant que le vote se prenne, nous devons avoir
le droit de soutenir le point de vue exposé par l'honorable
député de Chicoutimi. Par cette motion nous ne voulons en aucune
façon changer toute l'économie ou les principes du bill. Je
comprends facilement, M. le Président, qu'en vous référant
aux articles 558 et suivants, vous verrez que cette motion de l'honorable
député de Chicoutimi est tout à fait conforme à
notre règlement et spécialement à l'interprétation
qu'a déjà donnée l'un de vos prédécesseurs
sur l'article 558.
M. le Président, ce matin le leader du gouvernement nous a dit:
Nous nous sommes entendus pour que ce bill soit déféré
à la commission des Affaires culturelles. En principe, la motion de
l'honorable député de Chicoutimi rejoint celle du leader de
l'Opposition et celle de l'honorable ministre des Affaires culturelles.
Là où il y a peut-être divergence d'opinion, c'est
peut-être quant au mandat confié à cette commission, mandat
qui, suivant le désir du leader du gouvernement, ne pourrait être
qu'une étude faite par les membres de la commission. Or l'ancien
ministre des Affaires culturelles nous a donné toutes les raisons pour
lesquelles le gouvernement devrait consentir à ce que ce projet de loi
puisse être analysé dans tous ses détails, dans toutes ses
implications et devrait permettre, par exemple, aux autorités de la
ville de Québec de se faire entendre sur ce point. Il devrait permettre
également à tous ceux qui de près ou de loin
s'intéressent aux arts, spécialement ici dans la ville de
Québec et
dans la région, de se faire entendre et de voir quels moyens le
ministre entend prendre pour le bon fonctionnement de cette régie qu' il
entend constituer.
Je ne sais, M. le Président, si le gouvernement a l'intention de
proroger les Chambres ou d'ajourner la présente session. Si le
gouvernement a l'intention d'ajourner la présente session, je ne verrais
pas pourquoi le leader du gouvernement et toute l'équipe
ministérielle ne consentiraient pas à ce que cette motion soit
acceptée. A notre retour à l'automne, à la suite du
rapport qui pourrait nous être présenté par le
président de cette commission, et surtout après avoir eu
l'occasion de connaître les différents points de vue sur la
constitution de cette régie, les députés seraient en
mesure de se prononcer plus facilement, en connaissance de cause, sur les
grands principes qui sont établis par ce projet de loi.
L'expérience des régies a été vécue,
dans le domaine des arts, ailleurs, et ici même dans notre province. Je
ne puis blâmer l'ancien ministre des Affaires culturelles d'inviter son
collègue, le ministre des Affaires culturelles, et tous les membres du
gouvernement à agir avec grande prudence et dans le meilleur des
intérêts et des artistes et du monde du Grand
Théâtre. Je dis donc que le gouvernement devrait analyser toutes
les conséquences et les avantages qu'il en retirerait lui-même et
que les artistes en retireraient si nous étions capables, à la
lumière de ces discussions qui se dérouleront en commission, de
former une régie qui réponde au véritable mandat ou
idéal que se proposait d'atteindre l'ancien ministre et, je suis
sûr, que se propose d'atteindre le ministre actuel des Affaires
culturelles.
Je dis donc qu'en principe nous rejoignons les buts du gouvernement,
parce que le gouvernement voulait déférer, dès ce matin,
ce projet de loi à la commission des Affaires culturelles. Et lorsque le
leader a mentionné ce fait, j'ai bien dit que nous avions
été pressentis parce qu'à ce moment-là je
connaissais la sincérité des sentiments et l'inquiétude
nourrie par l'honorable député de Chicoutimi quant à
l'adoption d'une loi d'une si grande importance et qui peut, par suite d'une
étude trop rapide, nous faire faire et surtout faire faire au
gouvernement et au ministre un faux pas. Il ne faut pas oublier une chose, nous
faisons table rase de la politique que voulait instaurer l'ancien ministre. Il
s'agit maintenant de savoir laquelle des deux mesures est la plus efficace, la
plus appropriée et qui puisse convenir le mieux à une bonne
administration du Grand Théâtre dans la ville de Québec.
C'est donc avec beaucoup de plaisir que j'appuie la motion de l'honorable
député de Chicoutimi.
M. LAPORTE: J'invoque le règlement. Je pense que vous êtes
en présence d'une décision qui est claire. Si vous lisez
l'article 536 de notre règlement, vous verrez que tout bill doit lire lu
deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un
comité. Si vous vous référez à la note, au bas de
la page 156, se rapportant précisément à l'article 536,
vous lirez: « Il est irrégulier de proposer de renvoyer un bill
à un comité plénier avant la deuxième lecture
». Pour plus de sécurité encore, si vous voulez bien vous
référer aux procès-verbaux de l'Assemblée
nationale, le numéro 1, dans lequel vous avez eu l'obligeance de faire
rapport à cette Chambre des décisions qui avaient
été suggérées par la commission permanente sur
l'Assemblée nationale quant aux règlements ou aux modifications
aux règlements qui devaient régir notre session, vous y lirez,
à la page 8, article 28, sous-paragraphe e): « Après la
deuxième lecture, à la demande d'au moins cinq
députés, tout bill est déféré à la
commission parlementaire appropriée à moins que la Chambre ne s'y
oppose ». Je crois qu'il est bien évident que cet amendement est
irrégulier à sa face même.
M. PAUL: Sur un point du règlement, je vous inviterais à
vous référer aux procès-verbaux de la session de 1968
autour d'une motion semblable qui a été présentée
au sujet du projet de loi 85. Je dirai, de plus, que, même si l'article
536 établit un principe, en vertu de l'article 217 de notre
règlement, l'honorable député de Chicoutimi est
parfaitement en droit, par une motion principale, de demander qu'une
règle de notre règlement soit mise de coté. Et, justement,
cette motion présentée par le député de Chicoutimi
est tout à fait conforme aux dispositions de l'article 217.
M. LAPORTE: Si le député me permet,... M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: Le député est évidemment au courant
qu'a moins qu'il y ait unanimité de cette Chambre pour modifier le
règlement cela prend un avis. C'est une motion qui demande un avis, qui
est débattable, voyons!
M. PAUL: C'est justement là...
M, LAPORTE: Le député est fort au courant que ce n'est pas
une motion principale. Voyons donc!
M. PAUL: Je dis, M. le Président, que c'est une motion principale
et incidente qui est faite.
M. LAPORTE: Une motion d'amendement. M. PAUL: Une motion incidente. M.
LAPORTE: Principale? M. PAUL: Non.
M. LAPORTE: Vous venez de dire que c'était une motion
principale.
M. PAUL: Si j'ai dit principale, M. le Président, je retire le
« principal » et je garde les intérêts, sans regarder
le Ralliement créditiste, par exemple.
M. LAPORTE: Il ne va vous rester que cela, tout à l'heure.
M. PAUL: Je dis que l'article 217 parle d'une motion principale ou d'une
motion incidente. Nous sommes actuellement à étudier la motion de
deuxième lecture, qui est une motion principale. L'honorable
député de Chicoutimi, par une motion incidente, nous demande la
suspension d'une règle, qui est la règle 536, dont vient de
donner lecture l'honorable député, le leader du gouvernement.
Je dis que des précédents ont déjà
été établis et par motions principales et par motions
incidentes. Je sais que vous connaissez parfaitement toutes les
décisions qui ont été rendues sur ce point, M. le
Président. C'est pourquoi je dis que l'argument soulevé par
l'honorable député de Chambly n'a pas de force. Par contre, j'ai
beaucoup aimé cette référence qui est faite au
règlement parlementaire que nous avons adopté où il est
dit que nous pouvons, sur la demande de cinq députés, inviter la
Chambre, après deuxième lecture...
M. LAPORTE: Bon.
M. PAUL: Je dis que cet argument démontre une certaine
concession. Déjà l'honorable député de Chambly a
été ébranlé par le sérieux des arguments du
député de Chicoutimi. C'est pourquoi, M. le Président, je
dis que cette motion, telle que présentée, est recevable par la
Chambre.
M. LAPORTE: Est-ce que le député... M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: ... de Maskinongé, qui connaît fort bien son
règlement,...
M. PAUL: Je l'ai oublié, M. le Président. M. LAPORTE: Vous
l'avez oublié? M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: Est-ce que je peux simplement, en ce cas-là, avec sa
permission, lui citer l'article 217 dont il...
M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: ... vient de nous parler?
M. PAUL: L'article 221 aussi.
M. LAPORTE: « La suspension d'une règle on n'a pas
demandé la suspension d'une règle ...
M. PAUL: C'est automatique.
M. LAPORTE: On a proposé un amendement.
M. PAUL: On peut le faire directement ou indirectement, M. le
Président.
M. LAPORTE: Un instant.
M. PAUL: Par le fait qu'il présente cette motion...
M. LAPORTE: Oui, d'accord. M. PAUL: ... évidemment...
M. LAPORTE: Laissez-moi lire, vous allez être tellement
intéressé. « La suspension d'une règle peut
être proposée par motion principale...
M. PAUL: C'est ça.
M. LAPORTE: ... ou par motion incidente. » D'accord?
M. PAUL: Cest ça.
M. LAPORTE: Maintenant, la note: « Une motion portant suspension
du règlement ou de quelque règle ne peut être
proposée que lorsqu'une motion semblable est déjà pendante
ce n'est pas le cas lorsque la question préalable a
été posée ce n'est pas le cas
lorsque la Chambre procède conformément à un ordre
spécial préalablement adopté pour régler la
procédure en cours ce n'est pas le cas ni lorsque la
Chambre procède conformément à une dispense des
règles » ce n'est pas le cas. Si vous voulez trouver
d'autres choses qui ne sont pas dans le livre, c'est d'accord.
Maintenant, si le député voulait m'éclairer, je lui
serais infiniment reconnaissant, pour faciliter mes recherches, de me donner sa
référence sur cette décision de 1968 à laquelle il
s'est référé.
M. CARDINAL: Décembre 1968.
M. PAUL: Décembre 1968. Je comprends, M. le Président, que
le député je ne lui en fais pas un reproche ne s'en
rappelle pas. Alors que nous, nous étions à faire un grand
débat ici, sur le bill 85, l'honorable député se trouvait
à ce moment-là en Europe avec le député de Gouin.
Alors, il ne se rappelle pas ce débat que nous avons fait...
M. LAPORTE: Oui, mais c'est... M. PAUL: ... sur le bill 85.
M. LAPORTE: ... précisément parce que je ne m'en rappelle
pas que je vous le demande. Auriez-vous l'obligeance d'éclairer ma
lanterne? J'avoue mon ignorance.
M. PAUL: M. le Président, non, ce n'est pas que le
député est ignorant, au contraire. Nous saluons sa connaissance
de nos règles parlementaires.
M. LAPORTE: Seulement quand je veux... Je ne veux pas, là; je
veux être ignorant.
M. PAUL: Ah, d'accord!
M. LAPORTE: Je veux que vous me disiez où.
M. PAUL: Si l'honorable député me dit, M. le
Président, que volontairement il veut être ignorant...
M. LAPORTE: Non, non, non.
M. PAUL: ... je lui répondrai que volontairement je lui donnerai
la référence, et librement, lorsque je pourrai lui donner la date
et la journée. Je crois que c'est le 17 ou le 18 décembre 1968.
Mais, comme cela peut varier d'une journée ou deux, je vais rester dans
cette période, M. le Président.
UNE VOIX: Entre le 15 et le 18.
M. PAUL: Entre le 15 et le 18. Comme on le disait en
trigonométrie, plus grand que 15 et plus petit que 18.
M. LEGER: M. le Président...
M. LAPORTE: Alors, je vais chercher cela.
M. LEGER: M. le Président, c'est un point d'ordre.
M. LE PRESIDENT: Alors, est-ce que vous avez l'intention de discuter sur
la motion du député de Chicoutimi?
M. LEGER: Non, c'est tout simplement une erreur, Je pense, que le leader
parlementaire a faite quand il a lu l'article 217, note 1. Il disait toutes les
raisons pour lesquelles on pouvait faire la suspension et c'est le contraire.
Il a dit un petit « que » de trop et cela change tout le sens. Il a
dit : « Une motion portant suspension du règlement ou de quelque
règle ne peut être proposée » et, là, il a
ajouté le petit mot « que ». Or, il n'y a pas de « que
». Cela veut dire que toutes les raisons qu'il y a là, ce sont des
raisons qui empêchaient de le faire.
M. LAPORTE: Qu'est-ce que cela change, au juste? Dites-moi cela.
M. LEGER: Vous avez dit le mot « que », comme si toutes ces
choses permettaient de faire la motion.
M. LAPORTE: D'accord, merci. Je vais référer cela à
l'Office de la langue française.
M. PAUL: M. le Président, pour montrer au gouvernement que nous
sommes d'une grande coopération, nous allons même vous dispenser
de rendre jugement.
M. LE PRESIDENT: Je pense que c'est mieux comme cela.
M. PAUL: Bon!
M. LAPORTE: Vous discutez de jurisprudence et, maintenant, vous faites
preuve de prudence.
M. PAUL: Voici, M. le Président, nous se-
rions prêts à reconnaître que notre motion a
été renvoyée sur division.
M. LE PRESIDENT: J'espère que vous ne m'avez prêté
aucune intention.
M. BERTRAND: Aucune.
M. PAUL: Loin de là, M. le Président, parce que j'aurais
peur que vous ne me remettiez rien.
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, l'amendement est
retiré.
M. PAUL: Non, non. Renvoyé sur division.
M. BERTRAND: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Rejeté. Je ne peux pas...
M. LAPORTE: M. le Président, je n'accepterai, évidemment,
pas mon ignorance a quand même des limites de tomber dans
ce piège...
M. PAUL: Vous ne pouvez pas accepter.
M. LAPORTE: ... qui est manifestement trop ouvert. Il est clair que, si
nous acceptons de rejeter cette motion sur division, c'est parce qu'elle a
été jugée recevable. M. le Président, je vous
inviterais, avec toute la science que l'on vous connaît, à vous
prononcer sur la recevabilité de la motion.
M. BERTRAND: Il est trop tard, il a refusé.
M. LAPORTE: Oui, mais la jurisprudence en 1968, j'aime autant ne pas y
toucher.
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, est-ce que le
député de Chicoutimi retire sa motion?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Rejetée sur division.
M. LE PRESIDENT: Non, je ne suis pas prêt à accepter cette
condition, entant que président.
M. BERTRAND: Votre jugement est déjà rendu?
M. LE PRESIDENT: Oui, je suis prêta rendre mon jugement.
M. BERTRAND: Alors, nous allons vous écouter.
M. LE PRESIDENT: En vertu des articles... M. LOUBIER: L'article 536.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît.
M. BERTRAND: En vertu du livre. M. le Président, ne vous fatiguez
pas à chercher les articles.
M. LOUBIER: Dites: En vertu de la coutume que je viens
d'établir.
M. LE PRESIDENT: En vertu des articles 556 et suivants...
M. BERTRAND: C'est cela.
M. LE PRESIDENT: ... il y a certaines motions d'amendement qui peuvent
être reçues en deuxième lecture. C'est très
limitatif et je ne vois pas que l'amendement du député de
Chicoutimi puisse s'appliquer aux motions permises.
Le député de Maskinongé référait
tantôt à l'article 217. Encore là, également, je ne
vois, dans la motion, rien, aucune demande du député de
Chicoutimi demandant la suspension du règlement pour permettre la
présentation de cette motion.
D'ailleurs, il y a une autre note qui renforce ce qui est dit à
l'article 217 et qui m'amène à refuser cette motion; c'est la
note 12 au bas de l'article 558 où il est dit, comme à l'article
217, d'ailleurs: « Dans le cas d'un bill présenté par un
simple député, on peut proposer le renvoi du bill à un
comité élu. »
M. BERTRAND: C'est injurieux à l'endroit du
député.
M. PAUL: Ce n'est pas un député simple, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Ce serait plutôt injurieux à
l'égard du ministre des Affaires culturelles parce qu'à ma
connaissance, ce n'est pas le député de Chicoutimi qui a
présenté le bill, mais plutôt le ministre des Affaires
culturelles.
M. BERTRAND: D'accord.
M. LE PRESIDENT: En conséquence, je ne peux pas accepter la
motion du député de Chicoutimi, mais je l'invite, d'une
manière tout à fait particulière, à
représenter sa motion immédiatement après la
deuxième lecture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, vous me donnez une
tentation terrible.
M. BERTRAND: Alors, nous n'en appellerons pas de votre
décision.
M. LAPORTE: Le règlement ne vous y autorise pas.
M. PAUL: M. le chef de l'Opposition dit qu'il est respectueux du
règlement.
M. BERTRAND: Nous n'en appellerons pas.
M. LAPORTE: Permettez-moi de souligner combien il est respectueux du
règlement.
M. PAUL: C'est cela.
M. LAPORTE: Certainement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. SAMSON: M. le Président, le bill que nous avons devant nous a
pour objet de constituer une régie qui aurait pour fonction
d'administrer le Grand Théâtre de Québec et d'y monter des
spectacles. C'est un principe extrêmement intéressant.
Ce n'est peut-être pas l'idéal pour la promotion de la
culture dans toute la province de Québec, mais c'est sûrement un
grand pas qui sera fait vers la promotion de cette culture. A ce moment-ci, il
est évident que nous comprenons que pour le bill que nous avons à
discuter aujourd'hui concernant le Grand Théâtre de Québec,
il y a eu du travail de fait par le ministre et également par l'ancien
ministre des Affaires culturelles qui a sûrement fait beaucoup pour la
promotion de cette culture dans notre province de Québec.
Il est bien évident que si on fait des efforts pour permettre
à tous d'avoir accès à ce Grand Théâtre de
Québec, c'est peut-être pour permettre pour rejoindre un
peu ce que l'ancien ministre des Affaires culturelles a dit tantôt
d'en donner l'accès à une classe de la société qui,
malheureusement, dans le passé, ne s'est pas trop
intéressée aux activités culturelles et
théâtrales.
Ce que nous aimerions nous, de ce coin-ci de la Chambre, c'est que
l'accès en soit donné à tout le monde, à toutes les
classes de la société et que soient présentés
à ce Grand Théâtre des spectacles susceptibles justement
d'intéresser toutes les classes de la société. Ce n'est
pas tout d'établir de beaux grands principes et de dire qu'on veut que
tout le monde soit favorisé, que tout le monde ait accès au
théâtre si, d'un autre côté, on ne présente
pas des pièces susceptibles d'intéresser toute la
population...
UNE VOIX: « Deux femmes en or. »
M. SAMSON: Il est entendu que si on présentait «
Deux-femmes en or », cela intéresserait beaucoup plus de gens,
mais je ne pense pas qu'on présente cela au théâtre. Cela
se fait encore sur film, ces choses.
UNE VOIX: « La porteuse de pain. »
M. SAMSON; Pour continuer mon exposé, je voudrais dire que ce qui
se présente généralement et là, je me
réfère aux centres culturels de notre province de Québec
ou en grande majorité, ce sont des spectacles qui
n'intéressent qu'une partie de la population. Si la même chose
devait se produire pour le Grand Théâtre de Québec, je
pense que le but qui est visé par ce projet de loi ne serait
peut-être pas atteint. Si, par contre et n'en déplaise
à certaines personnes de haute culture on présentait dans
ce Grand Théâtre, aussi bien que dans les autres
théâtres de la province, d'ailleurs, quelque chose qui pourrait
intéresser la population qui n'a pas eu la chance de se cultiver comme
plusieurs personnes... Si on veut qu'un jour les buts visés par ce
projet de loi soient atteints, c'est-à-dire que toute la population du
Québec ait accès a cette culture, il faut commencer par donner la
possibilité à la population, à tous ceux qui n'ont pas eu
la chance de connaître cette culture... Peut-être que cela
dépend de certain système d'éducation dans le
passé, qui en est responsable, ce n'est pas à nous de lancer des
accusations aujourd'hui. Mais tout de même, un fait demeure, c'est qu'il
y a place pour la promotion de la culture dans notre province et que si on veut
qu'une telle promotion soit faite, il faut en donner l'accessibilité
à tous. C'est là que nous, nous demandons que le ministère
prenne en haute considération, une fois que nous aurons voté ce
projet de loi permettant d'administrer le Grand Théâtre et d'y
monter des spectacles, le fait que parmi les comédiens qui devront
participer à ces spectacles et parmi les administrateurs, nous puissions
trouver des représentants des différentes classes de la
population.
La culture n'appartient pas qu'à ceux qui se prétendent
les possesseurs de la culture, elle doit être accessible à tout le
monde. Et parce qu'elle doit être accessible à tout le monde, il
doit y avoir place à l'initiative. Il ne s'agit pas seulement de donner
des ordres, mais de dire que nous avons une régie qui va administrer. Il
s'agit aussi de donner libre cours à l'initiative dans ce domaine. On ne
peut pas dicter à l'avance quel genre de spectacle doit être
présenté dans ce genre de théâtre. Nous osons croire
qu'il sera pris en haute considération les recommandations que nous
faisons afin que soient représentées dans cette régie,
dans cette administration, des personnes de différentes classes de la
société.
Il est évident que là-dessus nous faisons confiance au
ministre pour permettre, une fois ce projet de loi adopté, la
réalisation de ce que nous visons. Et Je pense que tous nous visons les
mêmes buts, c'est-à-dire, en un mot, rendre possible à tous
l'accessibilité du Grand Théâtre de Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: M. le Président, nous avons, au cours de
l'étude des crédits des Affaires culturelles, étude aussi
longue qu'intéressante, d'ailleurs, eu l'occasion de rappeler, à
plusieurs reprises, au ministre des Affaires culturelles, la conception que
nous nous faisions d'une culture québécoise, de la diffusion de
cette culture, de l'accessibilité générale à cette
culture. Et nous avons, la plupart du temps, reçu l'accord de principe,
l'assentiment du ministre des Affaires culturelles sur ces
énoncés que nous faisions à tour de rôle.
Le ministre nous répondait, la plupart du temps, qu'il entendait
s'interroger sur l'avenir de la culture, qu'il allait s'interroger sur
l'accessibilité générale à la culture, et qu'il
allait s'interroger sur la diffusion de cette même culture.
Premier fruit que nous en avons, suite des interrogations du ministre
des Affaires culturelles, c'est ce projet de loi numéro 9 sur le Grand
Théâtre de Québec. Nous attendions, après de tels
énoncés, de telles promesses du ministre des Affaires
culturelles, autre chose qu'un projet qui nous ramène en arrière.
La position du Parti québécois sur le projet de loi 9 est assez
facile, nous sommes opposés à la création de régies
dans le domaine culturel.
Le député de Chicoutimi, dans une interven- tion dont je
fais une grande partie mienne, comme dans différentes remarques que nous
avons émises au moment de l'étude des crédits du
ministère des Affaires culturelles, le député de
Chicoutimi a donc donné plusieurs motivations qui sont une charge contre
ces régies.
L'éléphant blanc de la Place des Arts à
Montréal évidemment atteint de plus en plus une réputation
qu'il y aurait lieu de corriger. Ces inventions, ces régies qui ont, la
plupart du temps, le don de catalyser la culture en un seul endroit, entre
quatre murs, de la réserver en même temps, de diminuer en
même temps sa propre portée, toutes ces inventions, par le
ministre des Affaires culturelles qui se dit prêt à promouvoir
l'accessibilité générale, ne devraient pas
apparaître, surtout dans un premier projet de loi présenté
à l'Assemblée nationale, sous son nom.
Le dossier des régies est lourd d'abord parce qu'elles ont trop
souvent collaboré à maintenir une conception de la culture
réservée à une certaine classe, et je ne crois pas que le
Grand Théâtre de Québec fasse à cette occasion,
exception. Nous retrouverions bien facilement labourgeoisie de la
Grande-Allée réinstallée autour d'une table pour diriger
son centre des affaires culturelles.
De la même façon le dossier des régies, sur le plan
administratif, est encore plus lourd.
La plupart du temps, ces administrateurs de bonne conscience se sentent
appuyés tacitement par le ministère des Affaires culturelles ou
par le gouvernement qui, de toute façon, devant leur incompétence
ou leur manque de prévision, fera les frais du déficit de
pareilles régies. C'est ce qui leur permet de faire des rêves de
grandeur et d'établir des politiques de grandeur culturelle mêms
en dépit des définitions du ministre, et c'est cela que nous
espérons ne pas retrouver ici.
Le dossier des régies est également lourd sur le plan
démocratique. En effet, ces chaises, autour des tables de direction, ont
toujours été réservées à des
représentants d'une classe sociale et d'une conception de la culture que
tous les membres de cette Chambre s'il faut se fier aux
énoncés mêmes du ministre des Affaires culturelles
sont prêts à voir disparaître.
Le premier geste du ministre des Affaires culturelles il nous
l'expose avec fierté et en s'en défendant un peu dans sa lecture
de présentation c'est de répéter, à
l'échelle de la ville de Québec et de la Communauté
urbaine de Québec, le massacre culturel de la ville de Montréal,
soit l'éléphant blanc de la Place des Arts. C'est important que
de pareilles régies n'existent plus. D'abord, parce que tous ces
édifices, la Place des Arts à Montréal, le Grand
Théâtre de
Québec, sont financés et construits à même
les contributions que chacun d'entre nous fait à l'Etat
québécois.
Il est important qu'une grande partie des efforts que l'Etat consacre
actuellement au domaine culturel ne soient pas réservés, mais
ouverts, autant dans leur direction que dans le contenu même des
activités artistiques qu'on y verra. Le dossier des régies peut
se fermer sur la note bien simple qu'accepter la création d'une
régie du Grand Théâtre au Québec pourrait sembler
donner au ministre un mandat en blanc pour la poursuite d'une politique qui va
à l'encontre des intérêts que nous représentons en
cette Chambre.
Nous aurons, en comité plénier, l'occasion de proposer des
amendements au ministre. Conscients, nous aussi, de l'arrogance de la
majorité gouvernementale et sachant aussi que ce projet de loi franchira
la deuxième lecture, nous aurons, quand même, l'occasion de
présenter des palliatifs pour éviter la répétition,
à Québec, de ce qui s'est passé à Montréal.
Nous aurions même été favorables à la quasi-motion
incidente de l'ancien ministre des Affaires culturelles pour qu'on fasse une
étude plus approfondie sur l'utilité, la nature et les
motivations de l'existence d'une pareille régie.
Nous le ferons pour la ville de Québec, puisque c'est à
peu près le centre; c'est une ville de grande importance, pour
l'ensemble des Québécois. Nous garderons donc nos interventions
pour le comité plénier, M. le Président.
M. LE PRESIDENT; Peut-être le ministre voudra-t-il exercer sa
réplique? Je le lui demande. Le ministre désire-t-il exercer son
droit de réplique?
M. BERTRAND: Oui, c'est son droit. M. François
Cloutier
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Oui, je serai bref. Je voudrais simplement
remercier ceux qui ont participé au débat. J'ai
écouté, avec beaucoup d'intérêt, les commentaires du
député de Chicoutimi, ainsi que les interventions du
député de Maskinongé, du député de
Rouyn-Noranda et du député de Saint-Jacques.
Je voudrais tout simplement dire qu'il ne faut pas confondre les
objectifs et les moyens. Nous sommes tous d'accord sur les objectifs. Il faut
que la culture soit accessible, qu'elle pénètre partout dans la
collectivité. Il faut que chaque citoyen en arrive à se sentir en
accord avec ce qui se fait autour de lui.
La mesure proposée porte sur les moyens.
Tout le problème consiste à trouver une formule qui assure
une saine gestion d'un complexe qui existe et qui n'a pas à être
remis en question. Il n'y a que trois formules possibles: le service
spécialisé, au sein d'un ministère, la corporation et la
régie. Le sens même de ce projet de loi est de proposer la
formation d'une régie, comme l'avalent d'ailleurs envisagé les
recommandations de la commission consultative du Grand Théâtre et
le gouvernement précédent. Je ne reviens pas sur les raisons
péremptoires du point de vue de la gestion des fonds publics et du
contrôle indispensable; je n'y reviens pas pour en avoir parlé
dans mes remarques préliminaires. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée sur division.
M. PAUL: Très bien.
M. LAPORTE: M. le Président, je propose que le bill no 9 soit
déféré à la commission parlementaire des Affaires
culturelles.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. PAUL: Adopté.
M. LAPORTE: Je propose, si la Chambre m'y autorise, que le nom de M.
Houde (Fabre) soit remplacé par celui de M. Garneau et que le nom de M.
Veilleux soit remplacé par celui de M. Bossé.
M. PAUL: Je fais motion, M. le Président, avec le consentement de
la Chambre, que le nom du Dr Bolvin soit substitué à celui de M.
Masse (Montcalm) comme membre de la commission des Affaires culturelles.
M. LAPORTE: Et que M. Bossé agisse comme président de la
commission. La commission va siéger tout de suite, Je rappelle...
M. DUMONT: Je demanderais que M.Fabien Roy (Beauce) soit remplacé
par M. Yvon Brochu.
M. LAPORTE: Pour que nos collègues le sachent, sont membres de la
commission, que j'invite à se réunir immédiatement: MM.
Bossé, Berthiaume, Cornellier, Harvey (Chauveau) Garneau, Cloutier
(Ahuntsic). Avec les changements que vous avez faits, peut-être qu'ils
sont prévenus tous les deux; alors, en séance
immédiatement.
M. LE PRESIDENT: Les motions proposées par les différents
partis sont-elles adoptées?
M. PAUL: Agrée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A quelle salle?
M. LE PRESIDENT: Salle 81-A, immédiatement.
M. TOUPIN: Article 5.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Agriculture propose la
deuxième lecture du projet de loi no 27, Loi concernant la
Fédération des producteur d'oeufs de consommation du
Québec. L'honorable ministre de l'Agriculture.
Producteurs d'oeufs
M. TOUPIN: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de
la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude
à la Chambre.
M. BERTRAND: Très bien, excellent préambule.
M. PAUL: Ce n'était pas long, mais c'était
sincère.
M. BERTRAND: L'avez-vous réellement rencontré, le
lieutenant-gouverneur?
M. PINARD: Ils ont cassé les oeufs ensemble.
M. BERTRAND: Pouvez-vous nous en assurer?
UNE VOIX: Déclarez-vous ça de votre siège?
M. PAUL: Autrement, ce serait une fausse déclaration.
M. BERTRAND: Mettez-vous votre siège en jeu?
M. Normand Toupin
M. TOUPIN: En vertu de la Loi des marchés agricoles du
Québec, dont les principales dispositions ont été
adoptées à l'unanimité par l'Assemblée nationale,
les producteurs d'oeufs du Québec ont déposé à la
Régie des marchés agricoles du Québec un projet de plan
conjoint, le 18 août 1965. Soumis par référendum à
l'assemblée des producteurs de la province au début de l'an-
née 1966, ce projet était endossé par l'ensemble des
producteurs. Sur un total de 2,771 producteurs admissibles à exercer un
droit de vote à ce référendum, 92.2% des bulletins
reçus à la Régie des marchés agricoles indiquaient
que les producteurs étaient favorables au projet.
Ainsi, la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec obtenait les pouvoirs d'émettre des quota
de production, d'établir des postes de classement des oeufs, de
contingenter la production et la vente, de négocier le prix de vente du
produit visé, d'établir des règlements de classification
et de prélever des cotisations pour pourvoir à l'administration
du plan.
La fédération se compose de quatorze syndicats
régionaux qui groupent la majorité des producteurs commerciaux.
Par un référendum favorable, les producteurs ont exprimé
leur assentiment à un tel plan. Par la suite, lors des assemblées
annuelles, les producteurs ont consenti à des attributions de quota de
mise en marché. Cette dernière phase des contrôles des
volumes s'est autofinancée par prélèvement.
L'expérience démontre que ce genre de contrôle à lui
seul ne donne pas la stabilité prévue. La
fédération, par des études de marché, a
constaté que le circuit de distribution et que certains postes de
classement n'étaient pas efficaces et rentables pour le
bénéfice des producteurs.
Par conséquent, la fédération, par le
règlement no 6 sanctionné par la Régie des marchés
agricoles du Québec le 17 décembre 1968 et mis en vigueur le 11
mai 1970, a voulu organiser sur une base plus rationnelle la commercialisation
et la mise en marché des oeufs au Québec.
Dans l'établissement d'un système de commercialisation,
les buts visés par la Fédération des producteurs d'oeufs
sont les suivants: améliorer la qualité de la production;
stabiliser le prix payé aux producteurs et leur assurer un prix uniforme
à qualité égale; améliorer la rentabilité
des exploitations avicoles; combler progressivement l'écart
défavorable qui existe entre la production et la consommation dans le
Québec.
Pour ce faire, la fédération a, premièrement,
défini quatorze zones à l'intérieur du territoire
québécois, ces zones étant axées sur un ou
plusieurs centres importants de consommation. Deuxièmement, elle a
centralisé physiquement la classification afin de faciliter la
distribution et assurer un meilleur contrôle de la qualité. Enfin,
elle s'engage à assurer la distribution aux acheteurs avec qui elle sera
en contact à titre d'agent exclusif de vente. La
fédération s'est liée par contrat aux postes de classement
pour les services de manutention, ramassage, lavage, mirage, classification,
emballage, entreposage,
etc. De plus, la fédération a signé des contrats
avec les distributeurs qui se sont ainsi engagés à approvisionner
les détaillants et les consommateurs aux temps, époque et endroit
convenus. Le volume des oeufs contrôlés par la
fédération serait, pour l'année en cours, d'environ 63
millions de douzaines selon les études préalables qui ont
été faites.
Pour atteindre les buts qu'elle s'était fixés et qui se
résument en la création d'un canal unique par lequel doivent
passer tous les oeufs consommés au Québec, la
fédération a eu à envisager et envisage encore plusieurs
difficultés d'ordre financier. Les producteurs ont d'ailleurs fait
souvent valoir au cours de la dernière année ces
différentes difficultés. Elle a dû d'abord procéder
à des immobilisations. Elle a dû ensuite embaucher du personnel
pour administrer le plan. Elle doit financer l'achat du matériel
d'emballage. Elle doit faire face à certains frais d'administration et
elle a surtout besoin d'un fonds de roulement pour le début des
opérations de vente. Ce fonds de roulement lui permettra de payer les
producteurs dans un délai raisonnable. En effet, d'après une
analyse faite par un bureau de comptables et s'appuyant sur les
prévisions de production d'oeufs et d'échelles de prix, en tenant
compte des modalités de paiement, une marge de crédit variant de
$370,000 à $433,000 ou à peu près est nécessaire
pour financer les stocks et les comptes à recevoir et ainsi constituer
le fonds de roulement dont a besoin la fédération pour bien jouer
son rôle.
Le projet de loi que je dépose autorise le ministère de
l'Agriculture et de la Colonisation à garantir tout emprunt
contracté par la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec aux fins de se constituer un fonds de roulement
jusqu'à concurrence d'un montant de $400,000 que j'avais prévu
dans le projet de loi. Je propose un amendement pour que ce montant de $400,000
soit porté à $500,000.
Le projet de loi prévoit également que, pour assurer le
remboursement d'un tel emprunt, la fédération sera tenue de
déduire, du produit de ses ventes d'oeufs, un demi-cent par douzaine
qu'elle met en marché. Ainsi, nous croyons mettre à la
disposition des producteurs d'oeufs du Québec tous les instruments dont
ils ont besoin pour mener à bonne fin leur programme de
commercialisation.
M. Philippe Demers
M. DEMERS: M. le Président, je me permets d'intervenir sur le
bill 27 en deuxième lecture; deuxième lecture, deux
députés en Chambre de l'autre côté! Le vendredi 10
juil- let, l'ancien ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, l'actuel
député de Nicolet, demandait au ministre de l'Agriculture et de
la Colonisation s'il y avait urgence dans le problème de la FEDCO,
Fédération des oeufs, et le ministre lui répondait: Aucune
urgence. On nous dit, l'autre jour, lors du dépôt en
première lecture, qu'il y avait urgence. On nous arrive à la
dernière minute, à la fin d'une session, avec un projet de loi
qui, en lui-même, semble assez anodin, mais qui a raison un peu, je
crois, d'inquiéter les membres de cette Chambre sur la façon dont
il nous est présenté. C'est ainsi qu'on avait, en
présentant ce projet de loi, demandé $400,000 de garantie de la
part de la province de Québec; et à force d'en retarder la
deuxième lecture, nous en sommes rendus à $500,000. Ce qui veut
dire, M. le Président, que si la session se prolongeait encore une
semaine, on aurait garanti probablement $1 million à la FEDCO, la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec. Aussi, on
demande que les producteurs d'oeufs soient cotisés à un demi-cent
la douzaine d'oeufs qu'ils produiront.
Est-ce que nous pourrions savoir, M. le Président, si ce sera une
habitude du gouvernement de faire garantir tous les offices de producteurs par
le gouvernement? Si le gouvernement se doit de garantir l'Office des
producteurs, je me demande pourquoi il n'administrerait pas lui-même la
mise en marché. Pourquoi lui-même, le gouvernement, ne verrait-il
pas au contigentement et à ces choses-là? Il y aurait un
responsable quelque part que nous pourrions rejoindre quand nous aurions
affaire à lui. Il faudra, si ça continue, que l'Office des
producteurs de lait ait la même garantie que les producteurs d'oeufs. Il
faudra que l'Office des producteurs de bois de pulpe ait la même
garantie. C'est un précédent qui est extrêmement
dangereux.
Nous ne sommes pas, M. le Président, contre le principe
général. Mais nous trouvons qu'on n'y va pas de main-morte. Il
faudrait nécessairement, si le gouvernement veut réellement aider
le producteur, qu'il donne une subvention, subvention comme en a donné
le précédent gouvernement.
Je voudrais que le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation nous
dise ici, en cette Chambre, quelle utilisation on a faite des $120,000 ou
$125,000 de subventions qui avaient été remises à la
FEDCO, la Fédération des producteurs d'oeufs, il y a à peu
près deux mois? Je voudrais que le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation nous dise comment la Fédération des producteurs
d'oeufs va utiliser le montant de $400,000...
UNE VOIX: Non, $500,000.
M. DEMERS: ... qui sont devenus $500,000? Je voudrais que cela me soit
précisé une fois pour toutes. Je voudrais aussi que le ministre
de l'Agriculture et de la Colonisation me dise ceci: Pourquoi, lors de
l'étude de ses crédits, alors que nous voulions lui parler de cet
office de producteurs, il levait les mains au ciel et disait: Messieurs, ne
touchez pas, la question est sub judice. Aujourd'hui, on veut, en cette
Chambre, en dépit du sub judice qu'on invoquait dans le temps, nous
faire adopter une loi qui ratifierait la constitutionnalité sans l'avoir
déterminée.
Je voudrais, M. le Président, qu'on réponde à
toutes ces questions. Je voudrais aussi qu'on puisse apprécier
l'efficacité de la mise en marché de cet Office des producteurs,
parce qu'il y a de drôles de rumeurs qui circulant dans la population,
actuellement. On nous dit qu'il y a une quinzaine de jours, si ce n'est pas 18,
qui s'écoulent entre la ponte de l'oeuf qui se fait encore par
les poules et la mise sur la table du consommateur. Si vous savez, M. le
Président, que la durée de couvaison d'un oeuf est de 21 jours,
vous pouvez toujours vous questionner sur la qualité de la frafcheur du
produit.
Il faudrait, M. le Président, que cela aussi soit établi.
J'avais demandé, dans le temps, par une motion, qu'on nous mène
ici les membres de la Régie des marchés agricoles pour que nous
puissions poser des questions et que nous sachions de quoi cela retourne, cet
office. Absolument rien, on n'a pas bronché. Et on veut, aujourd'hui,
à la fin de cette session, que nous allions donner un mandat en blanc,
à cet Office des producteurs. Si cela va, il n'y aura pas de
problème, mais, si cela ne va pas, c'est le gouvernement qui va payer,
et nous n'aurons rien à leur dire après leur avoir tout
donné.
Je veux, M. le Président, que le ministre, pour que nous
adoptions cette loi, nous assure que, durant la période de congé,
nous pourrons rencontrer les membres de cette charmante régie et les
questionner sur l'Office des producteurs de lait, sur l'Office des producteurs
d'oeufs, sur l'Office des producteurs de bois, afin que nous sachions, nous les
parlementaires, ce qu'on entend faire dans la mise en marché. Je suis
pour qu'il y ait un syndicalisme agricole qui fonctionne. J'ai souvenance,
je revois le ministre, aujourd'hui qu'il dirigeait, dans le
temps, des marches à Roc-Amadour et qu'il venait nous chanter des petits
cantiques dans la galerie, qu'il venait nous demander de donner le syndicalisme
agricole. Eh bien, ce sera une façon de le donner, le syndicalisme
agricole, en se prononçant là-dessus. Mais l'autre jour, il nous
a parlé du sub judice, et il fallait se tenir au neutre pour ne pas en
parler.
M. le Président, je voterai pour le principe, parce que je suis
et j'ai toujours été pour cette loi, la Loi des marchés
agricoles, qui a été mise en vigueur en 1956 par le gouvernement
de l'Union Nationale, qui a été modifiée par les
libéraux et que nous avons remodifiée et améliorée
énormément en 1967, lors de journées assez
mémorables, à la demande de l'UCC, où était ce
monsieur qui est ministre aujourd'hui.
Je vols rentrer le ministre de la Voirie, qui s'inquiète un peu
de mon intervention. C'est reposant de voir un si beau jeune homme, si bien
habillé, venir nous saluer; nous ne l'avons pas vu depuis quelques Jours
en cette Chambre. Je souligne sa présence.
M. le Président, je voudrais que le ministre réponde
sérleusemont tantôt nous le questionnerons lorsque nous
irons en comité aux questions que nous allons lui poser, que je
viens de lui poser et que nous lui reposerons. Il faudra nécessairement
qu'il nous dise où on mettra les $500,000, la façon dont on les
administrera et si ce sera un précédent pour tous les offices.
Lorsqu'il aura répondu franchement à ces questions, nous verrons
quelle position nous devrons prendre. Merci, M. le Président.
M. Jean-Louis Béland
M. BELAND: M. le Président, ce bill présentement à
l'étude fait certainement suite à la demande d'une foule de
producteurs avicoles qui, aujourd'hui, font partie d'une
fédération de producteurs d'oeufs. Mais, pour en arriver
là, ils ont dû passer des années que je dirais cahoteuses,
dans le sens qu'ils ont été obligés de subir de
très grandes fluctuations de prix causées, à certaines
occasions, par des importations d'oeufs d'autres pays qui noyaient le
marché. On ne tenait pas compte de la quantité exacte qui pouvait
se consommer. Cela enlevait à beaucoup de producteurs le seuil revenu
net qu'ils auraient pu retirer.
Combien de fluctuations de prix ont-ils eu à subir, depuis le
début de l'aviculture dans le Québec?
Cette situation, d'ailleurs, a été créée et
amplifiée durant les dernières années par quelques
contrôleurs qui, eux-mêmes, étaient entrés dans la
production des oeufs et produisaient des oeufs à un rythme effarant.
C'étaient généralement des fabricants de moulées,
qui avaient des poulaillers immenses pouvant loger 100,000, 200,000, 300,000
poules. C'étaient eux qui faisaient la pluie et le beau temps dans la
mise
en marché des oeufs. A ce moment-là, les producteurs, dans
l'ensemble, se sont réveillés et ils ont décidé de
se donner ce que l'on appelle un plan conjoint de producteurs d'oeufs.
Evidemment, cela a entraîné les conséquences que l'on voit
aujourd'hui. Il y a des conséquences heureuses, mais il y a
également de petites anomalies qui ne se sont pas corrigées au
fur et à mesure que nous avancions.
Avec l'étude de ce projet de loi no 27, eh bien, il me semble
qu'il aurait été temps d'examiner beaucoup plus qu'un petit
aspect du problème, parce que, dans son ensemble, le problème
peut comporter cent facettes différentes. Le projet de loi semble
vouloir corriger une situation temporaire qui existe dans cette mise en
marché des oeufs, mais il oublie les autres problèmes qui forment
ce tout. Parmi ces autres anomalies, on voit plusieurs postes de mirage se
fermer. Qu'est-ce que cela a déjà entraîné et
entraînera encore? Evidemment, ces postes de mirage étaient tenus
par quelqu'un. Là, où on voyait ces postes de mirage, il y avait
un, deux, cinq, vingt, vingt-cinq employés. Ces gens-là,
évidemment, sont renvoyés.
Deuxièmement, par suite de la fermeture de ces postes de mirage,
les aviculteurs qui étaient près de ces postes de mirage se
voient obligés de parcourir des distances énormes, puisque c'est
organisé présentement pour qu'il ne reste qu'une vingtaine de
postes de mirage à travers la province. Or, qu'arrivera-t-il lorsque le
plan sera finalement agencé? L'augmentation du coût de transport
des oeufs, est-ce qu'on la fera payer aux consommateurs? Il faudra,
évidemment, prendre la différence quelque part. Est-ce qu'on
déduira cela du prix payé au producteur? Il ne le faudrait
évidemment pas. De quelle façon va-t-on procéder? Est-ce
que tout cela a été pensé?
Est-ce que, également, on a pensé à beaucoup de
petits producteurs j'entends par là, ceux qui ont 500 poules,
1,000 poules qui, justement, vendent leur production au détail au
village voisin? Eh bien, beaucoup de ceux-là s'inquiètent
énormément et se découragent. Qu'allons-nous faire d'eux?
Qu'allons-nous faire de ces producteurs? Est-ce qu'on va leur conseiller,
à eux aussi, de faire appel au bien-être social? Je me le demande
réellement. Je ne demande pas au gouvernement d'acheter des tentes
d'oxygène pour ces aviculteurs qui semblent vouloir,
dépérir, non. Ce n'est pas cela. Mais c'est une situation
d'urgence pour l'ensemble des aviculteurs. A tout événement,
lorsque nous étudierons plus à fond le projet de loi, j'y
reviendrai.
Il ne reste qu'une chose que je veux mentionner ici. C'est qu'à
l'article 4, à un moment donné, il est bien indiqué:
« La fédération est tenue de déduire... » A
mon sens, il aurait fallu employer un autre terme pour expliquer la situation
ou pour déterminer la marche à suivre parce que le gouvernement
exige ainsi de la fédération qu'elle agisse d'une façon
très claire. Il me semble un autre terme aurait du être
trouvé pour laisser un peu plus de souplesse à cet article 4 du
projet de loi présentement à l'étude.
A tout événement, en cette deuxième lecture, nous
du Ralliement créditiste, nous sommes en faveur du principe parce que
cela va améliorer une des nombreuses situations qui existent dans la
mise en marché des oeufs.
Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Cadieux): L'honorable député de
Nicolet.
M. Clément Vincent
M. VINCENT: M. le Président, il me fait d'abord plaisir de
féliciter le ministre pour la première législation qu'il
présente en cette Chambre, législation issue des discussions
qu'il a eues à son bureau avec ses fonctionnaires et avec les
représentants de la Fédération des producteurs d'oeufs de
la province de Québec.
Cette législation n'est pas une législation ordinaire. Le
ministre de l'Agriculture a eu l'occasion, à plusieurs reprises, de
mentionner qu'il était contre écoutez bien, M. le
Président, ça vous intéresse les politiques
à la petite semaine; que les politiques qu'il entendait
préconiser comme ministre de l'Agriculture et de la Colonisation
étaient des politiques à longue portée, des lois qui
seraient inscrites dans les statuts du ministère, des lois...
M. LOUBIER: C'est un complot. M. DEMERS: C'est du sabotage... M.
VINCENT: C'est un complot. M. DEMERS: ... communiste.
M. VINCENT: ... qui permettraient de résoudre non pas un
problème en particulier, mais une quantité de
problèmes.
Voilà que le ministre de l'Agriculture nous présente une
législation qui, si elle est acceptée par la Chambre, sera
périmée dès que l'arrêté en conseil aura
été sanctionné pour garantir un montant, maintenant qu'il
est rendu à
$500,000, à la Fédération des producteurs d'oeufs.
Dans quinze jours, dans trois semaines d'ici, si la Fédération
des producteurs de lait industriel de la province de Québec voulait
bénéficier des mêmes avantages, le ministre ne pourrait que
répondre qu'il n'existe pas de loi pour elle. Si la
Fédération des producteurs de pommes de terre, qui est en
formation, venait rencontrer le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation
pour avoir les mêmes avantages que la Fédération des
producteurs d'oeufs, le ministre dirait : Il n'existe rien dans les statuts de
la province de Québec me permettant de vous garantir un emprunt. La loi
que nous avons adoptée au dernier jour de la session me permet
simplement d'aider, avec une garantie d'emprunt, la Fédération
des producteurs d'oeufs de consommation de la province de Québec.
C'est la première fois qu'au ministère de l'Agriculture et
de la Colonisation on adopte une telle loi, de si courte durée, de si
courte vue.
Elle est patronnée par le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation du Québec, le député de Champlain, qui
déclarait, à Saint-Grégoire dans le comté de
Nicolet, il y a quinze jours, qu'il était contre les politiques à
la petite semaine. Il aurait pu, il me semble, prendre la Loi du
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation. Il aurait pu la
prendre.
M. LAPORTE: Expliquez-nous cela bien clairement.
M. VINCENT: Dans cette loi... M. LAPORTE: L'article 3.
M. VINCENT: ... il y a un article qui permet au ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation, à même un fonds
créé, de $1 million annuellement, de garantir aux
sociétés coopératives agricoles, aux syndicats, un montant
d'argent, qui permet d'apporter un amendement à cette loi et inclure les
fédérations de producteurs. Oui.
M. LAPORTE: Je ne suis pas prêt à dire cela.
M. VINCENT: Oui, il était capable de faire cela.
M. LAPORTE: Oui, il était capable... M. VINCENT: Par un
amendement.
M. LAPORTE: ... mais ce n'est pas cela que nous voulions faire.
M. VINCENT: A ce moment-là, il aurait eu à sa disposition,
chaque année, un montant de $1 million. Il aurait pu venir en aide aux
autres fédérations de producteurs: la Fédération
des producteurs des pommes de terre, la Fédération de producteurs
de porcs du Québec, la Fédération des producteurs de bois,
la Fédération des producteurs de lait industriel, tout simplement
en apportant cet amendement à la loi.
Le gouvernement actuel a adopté une loi permettant au ministre de
l'Agriculture de garantir, jusqu'à concurrence de $16 millions, les
emprunts contractés pour la consolidation des usines laitières.
Non pas un montant de $1 million ou de $500,000 en faveur de telle
fédération coopérative ou de tel autre organisme, mais
pour la consolidation des usines laitières auxquelles on peut garantir
un montant jusqu'à concurrence de $16 millions. De plus, ce qui me
surprend dans cette loi, c'est que, mercredi dernier, je posais une question au
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation du Québec, qui a pris
l'habitude de ne pas répondre.
M. PAUL: C'est cela.
M. VINCENT: Je le félicite aujourd'hui d'avoir donné
l'historique de la Fédération des producteurs d'oeufs. Je le
félicite de l'avoir fait parce qu'au cours de son exposé
budgétaire, nous lui avons fait cette demande à plusieurs
reprises: Qu'il nous donne l'historique de la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation du Québec.
Les réponses que nous avions à ce moment-là
étaient: Oh! c'est devant les tribunaux; nous n'avons pas le droit d'en
parler. Appuyé par le député de Chambly. Nous n'avons pas
été capables de connaître le processus qui a
précédé la formation de la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation du Québec. Aujourd'hui, il nous l'a
donnée.
Mercredi dernier, je posais une question, M. le Président, et
vous allez voir jusqu'à quel point le ministre de l'Agriculture n'est
pas intéressé à donner des réponses claires et
précises aux députés de cette Chambre. Ma question
était la suivante.
M. TOUPIN: Cela dépend des questions.
M. VINCENT: A la page 842 du journal des Débats du mercredi 8
juillet 1970. « M. le Président, ma question s'adresse au ministre
de l'Agriculture. Me référant à un
télégramme, dont je n'ai pris connaissance que
ce mâtin, venant de l'Association des meuniers de la province de
Québec, exposant un problème, s'il existe, qui est d'envergure
provinciale, soit le paiement, aux producteurs d'oeufs, par la
fédération, des oeufs livrés, le ministre peut-il nous
dire si ce problème existe réellement à l'heure actuelle?
Si oui, quelles sont les mesures qu'il entend prendre pour assurer le paiement,
aux producteurs d'oeufs, des oeufs qu'ils livrent régulièrement
à la fédération? » Savez-vous ce que le ministre a
répondu?
M. PAUL: Ecoutez la réponse.
M. VINCENT: Savez-vous ce que le ministre a répondu? « M.
Toupin: M. le Président, j'ai rencontré récemment les
responsables de la Fédération des producteurs d'oeufs du
Québec, et tout se déroule normalement; il n'y a pas de
problème...
M. DEMERS: Pas un oeuf de Pâques.
M. VINCENT: ... aigu présentement au niveau de la paie des
producteurs. »
M. LAPORTE: Non.
M. VINCENT: « Si, toutefois, la situation se
détériore à ce point...
M. LAPORTE: Des grimaces comma ça, on n'en a pas besoin.
M. VINCENT: ... nous informerons la Chambre, à ce
moment-là des moyens et des mesures que nous prendrons. » Cela,
c'était mercredi.
M. TOUPIN: C'est exactement ce qu'on a fait; c'est qu'il n'y avait pas
de problème de paie.
M. VINCENT: M. le Président, le ministre de l'Agriculture vient
de nous dire: C'est exactement ce que nous avons fait.
M. TOUPIN: Oui, nous répondons à vos questions.
M. VINCENT: Regardons maintenant ce qu'il a dit vendredi.
M. LAPORTE: Bon!
M. TOUPIN: Qu'est-ce que vous avez con- tre les oeufs? C'est effrayant
comme vous leur en voulez à ces oeufs-là.
M. VINCENT: Vendredi, je posais une question au ministre de
l'Agriculture. « M. le Président, ma question s'adresse au
ministre de l'Agriculture. Au début de la semaine, je posais une
question au ministre de l'Agriculture, à la suite d'un
télégramme que nous avions reçu de l'Association des
meuniers de la province de Québec, concernant le non-paiement des oeufs
aux producteurs. Ma question est la suivante: Sans entrer dans le principe du
projet de loi qui a été déposé ce matin ou encore
dans ses modalités, est-ce que ce projet de loi corrige en entier ce
problème soulevé au cours de la semaine dernière dans
toute la province? »
Le ministre de l'Agriculture répond: « M. le
Président, j'ai répondu hier au député de Nicolet
ce qui suit et je vais le répéter il venait de
déposer la législation; je continue la citation de la
réponse du ministre de l'Agriculture. Il ne m'apparaît pas
exister de problème épineux en ce qui concerne le paiement des
oeufs aux producteurs. « J'ai rencontré à cette fin la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec et elle ne
m'a pas informé que ce problème, s'il existe là, comme
tel, était vraiment sérieux. Alors, on ne me l'a pas
présenté sous cette forme-là. Le projet de loi qui a
été présenté ce matin on aura l'occasion
d'en discuter un peu plus tard ne vient pas répondre à ce
problème-là; il vient mettre à la disposition de la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec un fonds de
roulement. »
M. TOUPIN: C'est clair, il me semble.
M. VINCENT: Le ministre dit: « C'est clair, il me semble. »
Un fonds de roulement, pourquoi?
M. LAPORTE: Ah! c'est là qu'est le pourquoi. Ce n'est pas un
fonds de roulement?
M. VINCENT: Le ministre vient de nous le dire, il y a dix minutes: Un
fonds de roulement permettant à la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation du Québec de payer les producteurs
dans un délai raisonnable.
Donc, M. le Président, mercredi dernier, un problème
était soulevé en cette Chambre sur les retards apportés
dans le paiement aux producteurs des oeufs livrés à la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec.
Le ministre de l'Agriculture dits: Cela n'existe pas; il n'y a pas de
problème. Il dit: Si un problème existe, nous informerons la
Chambre des mesures que nous prendrons. Vendredi, il dépose un projet de
loi. Il n'avait pas consulté le député de. Kamouraska.
M. DEMERS: Lui, il connaît ça.
M. VINCENT: A ce moment-là, nous étions fiers de dire:
Bien, en définitive, il existe un problème. Le ministre veut le
résoudre par un projet de loi. Nous lui posons la question; il dit: Non,
c'est pour créer un fonds de roulement. Un fonds de roulement, pourquoi?
Aujourd'hui, il nous dit que ce fonds de roulement lui permettra de payer les
producteurs dans un délai raisonnable.
Donc, M. le Président,...
M. LAPORTE;. Pour toutes ces raisons nous sommes en faveur du bill.
M. VINCENT: Non, M. le Président... M. BERTRAND: Vous avez
parlé trop vite. M. PAUL: Les oeufs vont se casser avant.
M. LEDUC: Vous allez casser les oeufs à l'intérieur de
votre affaire. Le député de Saint-Maurice est d'accord et le
député de Nlcolet n'est pas d'accord.
M. VINCENT: La question était la suivante...
M. LAPORTE: Alors, le suspense continue.
M. BERTRAND: Non, non, il y avait une nuance dans la prise de
position.
M. LEDUC: La nuance n'est pas nuancée.
M. VINCENT: La question que nous nous posions, à laquelle le
ministre de l'Agriculture devrait répondre, la question que je me posais
quand j'ai lu la législation: Pourquoi $400,000 de garantie? Est-ce que
le ministre a eu l'occasion de faire faire un bilan des besoins de la
Fédération des producteurs d'oeufs avant de préparer cette
législation? Pourquoi $400,000 inscrits dans la législation,
vendredi dernier? Pourquoi? Est-ce qu'il a étudié, avec la
Fédération des producteurs d'oeufs, les besoins futurs? Est-ce
qu'il a étudié? S'il l'a étudié, pourquoi a-t-il
inscrit $400,000 et va-t-il nous arriver, dans quelques instants, avec un
amendement proposant $500,000? Pourquoi?
M. LOUBIER: Il ne le sait pas.
M. TOUPIN: Je vous répondrai tantôt.
M. VINCENT: C'est là que nous disons qu'il aurait
été préférable que le ministre amende la Loi du
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, où il a
à sa disposition $1 million, annuellement, qu'il peut garantir aux
coopératives agricoles. Il aurait pu ajouter les
fédérations de producteurs. C'est aussi simple que ça.
Cette législation aurait pu servir, pour l'information du
député de Chambly, la Loi du ministère de l'Agriculture et
de la Colonisation...
UNE VOIX: Article 2, paragraphe 5. M. VINCENT: J'espère que je
vais...
M. TOUPIN: Vous savez à quoi sert le $1 million qui a
été mis dans la Loi du ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation?
Vous savez quels sont les montants qui sont engagés
actuellement?
M. VINCENT: Oui.
M. TOUPIN: Pourquoi posez-vous la question, alors?
M. VINCENT: Est-ce que le ministre de l'Agriculture pourrait nous
répondre, nous dire quel est le montant du million engagé cette
année?
M. TOUPIN: Le problème ne se pose pas là-dessus
présentement. Je dis que vous savez les raisons pour lesquelles cette
loi est là. Elle est là pour les coopératives.
M. VINCENT: Oui, en vertu de l'article 19 de la Loi du ministère
de l'Agriculture et de la Colonisation, un fonds annuel c'est inscrit
sous la section 4 de l'aide aux sociétés
coopératives agricoles et c'est là l'amendement aux
fédérations de producteurs. C'est là l'amendement qui
aurait pu être apporté.
M. LAPORTE: Qui aurait pu.
M. VINCENT: Je lis l'article 19: Un fonds annuel de $1 million est
créé depuis le 1er avril 1961 et le lieutenant-gouverneur en
conseil, sur la recommandation du ministre, peut affecter ce fonds à des
garanties ou avances aux sociétés coopératives agricoles
régies par la Loi des sociétés coopératives
agricoles, par la Loi des associations coopératives ou par la
Loi des syndicats coopératifs. Il aurait pu faire son amendement
et ajouter: Aux fédérations de producteurs. A ce
moment-là, cela aurait été $1 million annuellement qui
aurait pu être affecté, par des garanties d'emprunts ou des
avances, aux fédérations de producteurs en plus des
sociétés coopératives. Mais non, le ministre
préfère une loi spéciale, avec $400,000 la semaine
dernière et $500,000 bientôt. Qui nous dit que la semaine
prochaine il ne faudrait pas ajouter $100,000 à cette loi?
M. TOUPIN: Cela aurait pu être $1.5 million.
M. VINCENT: Justement.
M. TOUPIN: Votre affaire ne tient pas.
M. VINCENT: Le ministre vient de confirmer la thèse que j'essaie
de lui faire comprendre, qu'il aurait été
préférable d'amender la Loi du ministère de l'Agriculture
et de la Colonisation.
M. TOUPIN: Vous essayez de vous convaincre vous-même.
M. VINCENT: A ce moment-là, il aurait pu garantir $500,000
à la Fédération des producteurs d'oeufs du Québec
ou lui faire une avance de $400,000 ou $500,000. Le ministre n'a pas voulu
amender la loi du ministère. Il a préféré mettre,
dans la loi, sa taille : politique à la petite semaine. Une loi
spéciale pour la Fédération des producteurs d'oeufs. De
plus, le ministre de l'Agriculture a préféré,
contrairement à ce qu'a fait l'ancien gouvernement lorsqu'il a pris un
montant d'argent qu'il a donné en subventions à la
Fédération des producteurs du Québec...
M. TOUPIN: Le problème est resté tel qu'il
était.
M. VINCENT: C'est justement un montant d'argent, M. le Président,
que le précédent gouvernement a donné en subventions
à la Fédération des producteurs d'oeufs du Québec.
Est-ce que le ministre est au courant du montant d'argent qui a
été donné?
M. TOUPIN: Vous, vous le savez?
M. VINCENT: Est-ce que le ministre est au courant du montant d'argent
qui a été donné?
M. TOUPIN: Vous le savez vous? C'est ça qui est important.
M. VINCENT: Est-ce que le ministre sait et peut nous
répondre l'utilisation qui a été faite de ce
montant?
M. TOUPIN: C'est vous qui l'avez donné, ce n'est pas moi.
M. VINCENT: Ah, ah! M. le Président, nous voyons le ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation nous demander de l'autoriser à faire
une garantie d'emprunt de...
M. BERTRAND: De $400,000, presqu'un demi-million de dollars!
M. VINCENT: ... $400,000, maintenant de $500,000 à la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec. Nous lui
demandons quelle a été l'utilisation du montant d'argent qui a
été versé à la fédération il y a
quelques mois, et le ministre dit que c'est à nous de savoir ce qu'ils
en ont fait. Est-ce qu'il a posé la question à la
Fédération des producteurs d'oeufs?
M. TOUPIN: Vous savez fort bien que vous avez donné une
subvention de $125,000.
M. VINCENT: Et qu'est-ce qui a été fait avec cette
subvention?
M. LAPORTE: M. le Président, on est en deuxième lecture.
On va aller en comité tout à l'heure.
M. VINCENT: Qu'est-ce qui a été fait...
M. LAPORTE: M. le Président, J'invoque le règlement.
M. VINCENT: Il n'y a pas de règlement, M. le
Président...
M. LAPORTE: Ah, il n'y a pas de règlement! Oh, pardon! Nous
sommes rendus loin.
M. VINCENT: ... nous sommes sur le principe...
M. LAPORTE: M. le Président, étant donné qu'il y a
peut-être un règlement, puis-je demander au député
de Nicolet, puisque nous sommes en deuxième lecture, d'exprimer son
point de vue. Quant aux questions qu'il voudrait poser au ministre,
peut-être pourrait-il attendre que nous soyons en comité tout
à l'heure.
M. VINCENT: Non. M. le Président, sur le rappel au
règlement du député de Chambly, qui,
à mon sens, n'est pas un rappel au règlement, en
deuxième lecture, je peux le faire. Le ministre aura le droit de
réplique tout à l'heure avant le vote, si le vote a lieu. Il
pourra nous donner une réponse, tout à l'heure, parce qu'il n'a
rien dit de valable à l'occasion de la présentation du projet de
loi en deuxième lecture.
La Fédération des producteurs d'oeufs du Québec a
reçu une subvention de $125,000.
M. TOUPIN: L'homme qui a sauvé les agriculteurs! Fantastique!
M. BERTRAND: Ecoutez donc, c'est sérieux!
M. VINCENT: La Fédération des producteurs d'oeufs...
M. LAPORTE: C'est ça qui est dommage, cela n'est pas
sérieux. Il y a des gens qui sont venus nous voir pour nous dire: Nous
avons un problème actuel de financement temporaire. Nous n'avons pas de
fonds de roulement. Nous leur permettons d'en créer un sans créer
de précédent pour tout de suite.
M. VINCENT: Non, et le ministre...
M. TOUPIN: Le ministre n'a rien fait dans le temps.
M. VINCENT: M. le Président,... M. LAPORTE: C'est clair.
M. VINCENT: ... je sais que si le député de Chambly avait
été ministre de l'Agriculture et de la Colonisation...
M. LAPORTE: Bon.
M. VINCENT: ... la Fédération des producteurs d'oeufs
serait allée le rencontrer.
M. LAPORTE: Bon.
M. TOUPIN: Vous saviez qu'il existait, le problème.
M. VINCENT: Ils auraient dit au député de Chambly: Voici,
M. le ministre, nous avons un probleme, nous voulons nous créer un fonds
de roulement.
M. LAPORTE: Oui.
M. TOUPIN: Vous avez laissé détériorer la
situation.
M. VINCENT: Le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation aura le
droit de...
M. TOUPIN: C'est vous qui l'avez fait ça, ce n'est pas moi.
M. VINCENT: ... parler tout à l'heure.
M. PAUL: M. le Président, est-ce que vous pourriez inviter le
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation à apprendre ses
règlements et à les respecter. Pour le moment, c'est le
député de Nicolet qui a la parole.
M. LE PRESIDENT (Cadieux): Les deux côtés de la Chambre,
s'il vous plaît!
M. LAPORTE: Pourriez-vous faire un détour du côté du
député de Nicolet en même temps, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT (Cadieux): Alors, s'il vous plaît, je demanderais
qu'on s'en tienne au principe du bill. Nous sommes en deuxième
lecture.
M. PAUL: C'est ça.
M. VINCENT: Nous en sommes au principe du bill, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT (Cadieux): L'honorable député de
Nicolet.
M. VINCENT: Si les membres de la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation de la province de Québec
étaient allés rencontrer le ministre, le député de
Chambly, s'il avait été ministre de l'Agriculture, ils auraient
dit au ministre: M. le député de Chambly, nous avons un
problème. Nous voulons créer un fonds de roulement.
Le député de Chambly leur aurait certainement posé
la question: Pourquoi vous créer un fonds de roulement?
Ils auraient dit: C'est pour payer les producteurs car il y a un
délai dans les paiements aux producteurs.
Le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation dit qu'il n'y a pas
de délai. La semaine dernière, vendredi dernier, il a dit qu'il
n'y avait pas de délai. Aujourd'hui il dit qu'il y a un
délai.
Le député de Chambly aurait dit: Oui, d'accord. Alors, il
aurait demandé à ses fonctionnaires: Est-ce qu'il y a
déjà eu une aide de donnée à la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec?
Ses fonctionnaires lui auraient répondu: M. le
député de Chambly, oui. Le ministère de l'Agriculture et
de la Colonisation a versé un montant de $125,000 en subventions
directement à la Fédération des producteurs d'oeufs du
Québec.
Le député de Chambly, contrairement à ce que le
député de Champlain essaie de nous faire croire
présentement, aurait demandé à la Fédération
des producteurs d'oeufs du Québec: Qu'est-ce qui a été
fait avec le montant de $125,000? Donnez-moi un état
détaillé des dépenses ou des paiements que vous avez
effectués avec le montant de $125,000 que vous avez reçu il y a
quelques mois.
Le député de Chambly aurait été en mesure
aujourd'hui, en Chambre, de nous dire: Voici de quelle façon le montant
de $125,000 a été dépensé.
M. LAPORTE: Je l'aurais fait seulement en commission.
M. VINCENT: Voici, M. le Président, de quelle façon le
montant de $125,000 a été dépensé. Le
député de Champlain, lui, dit: Non, c'est vous qui l'avez
donné. Vous devez savoir de quelle façon il l'ont
dépensé.
Ensuite, le député de Chambly, s'il avait
été ministre de l'Agriculture, aurait dit: Voici, en vertu des
lois actuelles, il m'est impossible de vous donner une garantie d'emprunt. Si,
cependant, j'amende la Loi du ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation en ajoutant les fédérations des producteurs
reconnues, à ce moment-là j'ai un fonds annuel d'un million qui
est mis à ma disposition et qui me permet de vous garantir un emprunt,
de vous faire une avance du montant dont vous avez besoin. Je vais proposer un
amendement à la loi du ministère; faites-moi connaître vos
besoins. Là, la fédération serait revenue devant le
ministre et député de Chambly et lui aurait dit: Nous avons
besoin de $400,000, nous avons besoin de $500,000. Tandis que la semaine
dernière, on avait besoin de $400,000 et aujourd'hui, dernière
journée de la session, on nous arrive et on dit: Nous avons besoin de
$500,000.
Mais l'astuce dans tout ceci est la suivante, M. le Président, et
je pense que vous l'avez détectée vous-même...
M. PAUL: Ah oui!
M. BERTRAND: Ah oui!
M. VINCENT: Je pense que vous l'avez trouvée vous-même.
M. BERTRAND: Du moins, cela paraît.
M. VINCENT: Cest, M. le Président, que le ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation du Québec, appuyé en cela par
le gouvernement de la province de Québec, savait très bien que
tous les députés en cette Chambre étaient pour le principe
d'une aide, d'une avance ou d'une garantie d'emprunt parce que nous
avons donné pas même une avance un cadeau de
$125,000 étaient en faveur, dis-je, d'une avance ou d'une
garantie d'emprunt à la Fédération des producteurs d'oeufs
de la province de Québec.
Mais dans la politique d'austérité productive,
d'efficacité administrative, on a décidé d'établir
un nouveau principe dans les législations gouvernementales et surtout
dans les législations agricoles. On impose une taxe...
M. PAUL: C'est cela.
M. VINCENT: ... de vente avec le bill 27, une taxe de vente sur les
produits alimentaires. Dans la législation, contrairement à tout
ce qui existe dans toutes les lois agricoles que ce soit le bill 13, que
ce soit la Loi amendée des marchés agricoles où ce sont
les producteurs eux-mêmes qui décident, en assemblée
générale, de s'imposer un prélèvement, une
cotisation qui servira par la suite aux frais d'administration de leur
groupement cette fois-ci, on impose une taxe de vente sur tous les oeufs
qui se vendront dans la province de Québec après que le bill sera
sanctionné, une taxe de vente d'un demi-cent la douzaine. Une taxe de
vente d'un demi-cent la douzaine...
M. LE PRESIDENT (Cadieux): Je ferai remarquer au député de
Nicolet qu'il lui reste encore deux minutes.
M. VINCENT: D'accord, On impose une taxe de vente d'un demi-cent la
douzaine sur tous les oeufs qui seront vendus dans la province de
Québec.
Le député de Saint-Maurice l'a mentionné tout
à l'heure, nous sommes en faveur du principe d'une aide par garantie
d'emprunt, par avance, à la Fédération des producteurs
d'oeufs de la province de Québec et nous sommes également en
faveur du principe d'une aide aux autres fédérations de
producteurs qui en auront besoin, mais nous sommes contre ce
précédent qu'on crée aujourd'hui d'imposer, par une
législation agricole, une taxe de vente sur des produits alimentaires
qui seront vendus dans la province de Québec.
Nous demandons ceci au ministre: Avant de passer au vote sur la
deuxième lecture, comme il est impossible d'aller devant la commission
parlementaire avant la fin de la session rencontrer les membres de la
Fédération des producteurs d'oeufs de la province de
Québec ou les membres de la Régie des marchés et leur
poser des questions, nous demandons au ministre, avant la deuxième
lecture, vu que tous les députés en cette Chambre sont en faveur
du principe d'une aide par garantie d'emprunt ou avance à la
Fédération des producteurs d'oeufs ou à toutes les autres
fédérations de producteurs de la province de Québec, de
retirer l'article 4 qui impose une taxe de vente indirecte qui sera
payée soit par le consommateur ou qui encore sera déduite de la
paie du producteur.
Si le ministre ne veut pas retirer cet article 4, même si nous
sommes en faveur du principe nous l'avons prouvé avec des
subventions nous nous verrons dans l'obligation de demander que le bill
27, s'il est adopté, le soit sur division.
M. LAPORTE: M. le Président
M. LE PRESIDENT (Cadieux): L'honorable député de
Chambly.
M. Pierre Laporte
M. LAPORTE: Il m'apparaît que c'est une chose très simple.
Le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, après avoir
rencontré les parties intéressées, nous a fait rapport que
l'un des problèmes oublions pour l'instant, puisque ceci n'est
pas de notre ressort, les problèmes d'ordre juridique et les
contestations devant les tribunaux majeurs auxquels devait faire face
cette fédération de producteurs d'oeufs, c'était l'absence
d'un fonds de roulement. Cela ne rendait pas le paiement des salaires ou des
redevances plus ou moins difficile; cela rendait toute l'administration
très difficile, à tous les niveaux.
M. VINCENT: Non, M. le Président. Simplement pour clarifier,
l'administration d'un plan conjoint doit être payée à
même le prélèvement d'un demi-cent la douzaine, en vertu du
plan conjoint.
M. LAPORTE: Oui, oui, mais il reste qu'il n'existait pas de fonds de
roulement et qu'ils sont venus nous dire: Nous voulons avoir un fonds de
roulement.
M. TOUPIN: Le règlement no 6, lui?
M. LAPORTE: De plus, le ministre nous a parlé de l'article 2 de
la Loi de l'agriculture qui l'autorise à octroyer, à même
les fonds à sa disposition, des sommes d'argent, des prêts...
M. VINCENT: Ou des avances.
M. LAPORTE: ... ou des avances. Il nous a parlé de l'article 19,
ce fonds de $1 million qui permet de garantir...
M. BERTRAND: Ils se sont parlé de chiffres.
M. LAPORTE: Mais, nous avons dit: Nous n'acceptons ni l'une ni l'autre
solution, parce que nous ne sommes pas disposés, pour l'instant,
à créer une politique nouvelle. Justement, l'une des demandes du
conseil des ministres a été que ce projet de loi soit très
singularisé, pour que ce soit un cas d'espèce et pas un
précédent, pour l'instant. Cela, c'est clair. S'il y a divergence
d'opinions fondamentale entre le député de Nicolet et le parti
qu'il représente sur la façon dont nous avons
procédé, nous disons qu'il y a chez nous impénitence
totale, que c'est volontairement que nous avons eu recours à ce projet
de loi pour que ce ne soit pas un précédent. A ce
moment-là, puisqu'il y a divergence d'opinions fondamentale sur le
principe, ce sera son devoir de voter contre. Parce qu'on n'a pas l'intention
de modifier cela.
Deuxièmement, cela a d'abord été fixé
à $400,000. Pas parce que le ministre était disposé
à le fixer à $400,000; on savait que c'était plus que
cela. On a dit: On va limiter cela le plus possible, donner, comme les Anglais
diraient, le « rocky bottom ». Il y a quelques jours, le ministre
est revenu en nous disant: Ecoutez, ce n'est pas possible. Et c'est sur les
instances du ministre, qui savait depuis le début, lui, que les chiffres
qu'il nous avait mentionnés dépassaient largement $400,000, qu'on
a dit: D'accord, $500,000.
M. VINCENT: Il a dit: $350,000 à $430,000.
M. LAPORTE: Oui, oui, ne jouons pas sur les mots. Disons que je parle
sérieusement d'un problème très sérieux. Parlons-en
sérieusement. Alors avec $500,000, on revient partiellement à ce
que le ministre voulait au début
Troisièmement, on a dit: Est-ce qu'on va prêter directement
à même les fonds de la province? On a dit: Non. Ils sont capables
de prendre leurs responsabilités. Est-ce qu'on va donner une subvention?
Encore moins, il y a d'autres occasions où on pourra les subventionner.
Il ne faut pas imaginer que les gens de la Fédération des
producteurs d'oeufs sont en train de nous
démolir. Ils sont tous d'accord avec ce qu'on fait. Ils sont
heureux. Nous leur avons dit: Nous allons vous donner le moyen de vous rendre
auprès des institutions normales qui prêtent et là, vous
allez vous créer un fonds de roulement de $400,000 ou de $500,000, le
montant que vous voudrez, jusqu'à concurrence de $500,000.
M. VINCENT: On n'a rien contre ça.
M. LAPORTE: Mais, avec le fonds de roulement, les institutions
bancaires, les caisses populaires ou les institutions de prêts qui vont
avancer de l'argent vont, évidemment, demander qu'il y ait des garanties
de remboursement.
M. VINCENT: C'est ça. Article 2.
M. LAPORTE: Pour que le gouvernement se sente protégé et
qu'il ne risque pas dans un mois, dans deux mois, dans trois mois, d'être
obligé, lui, de rembourser, on a dit: Vous allez vous créer
ce qui est bien connu dans tous les emprunts un...
M. VINCENT: Article 2.
M. LAPORTE: ... fonds de réserve, et c'est exactement ça.
Tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas recueilli la somme qu'ils auront
empruntée à la banque, ils vont garder sur l'argent qui leur
appartient, parce que la fédération des producteurs appartient
aux producteurs, c'est leur affaire à eux, ils ne demandent pas de
cadeau, ils demandent la possibilité de se créer un fonds de
roulement. Nous disons: Vous allez garder, à même vos biens, un
demi-cent la douzaine et, quand vous aurez fini de rembourser, vous aurez votre
fonds de roulement et vous ferez ce que vous voudrez avec le demi-cent. Il me
semble que c'est logique, que ça aide directement, que ça
règle un problème urgent, et ça laisse au ministre
ce qui est fondamentalement important aux yeux du conseil des ministres
la liberté absolue d'avoir le temps d'élaborer sa politique pour
l'ensemble de ces sociétés de coopérateurs. C'est
exactement la politique du gouvernement. Nous réglons un cas
d'espèce volontairement, nous ne voulons pas faire plus que ça.
Nous les aidons complètement et nous leur disons: Maintenant, vous allez
vous aider vous-mêmes.
Deuxièmement, le ministre n'a pas reçu mandat des
électeurs et du gouvernement et n'a pas l'obligation d'être
placé dans la situation de devoir annoncer une politique
complète, parce qu'il y a un cas d'urgence qui se présente. Quand
il y a un incendie, ce n'est pas à ce moment-là que l'association
des pompiers décide de changer le règlement. Ils éteignent
le feu et ils retournent tranquillement...
M. PAUL: Pendant l'incendie, le chef ne vient pas nous dire qu'il n'y a
pas de feu.
M. LAPORTE: M. le Président, nous pourrions oublier les pompiers
et revenir au projet de loi. Le projet de loi, tel que le ministre l'a
expliqué, avec les renseignements que j'ai eus au conseil des ministres,
avec les discussions fréquentes que j'ai eues avec le ministre à
ce sujet, avec le dossier que je tente de me constituer sur chacun des projets
de loi, j'ai l'impression que celui-ci est expliqué de façon
assez claire. Le gouvernement a fait son lit, pas par erreur, c'est volontaire
ce que nous faisons aujourd'hui. Nous le savions qu'il y avait une loi de
l'agriculture, nous avons vu l'article 2 et les autres. Nous avons vu l'article
19 aussi. Nous ne voulons pas y toucher tout de suite, nous le faisons comme
ça. Si on juge que nous agissons de la mauvaise façon, il faudra
voter contre. Actuellement ce n'est pas, je pense bien, de l'arrogance
mais nous avons décidé qu'à notre avis il est mieux
de procéder comme ça pour l'instant. C'est une décision
arrêtée, réfléchie et c'est sur ça que la
Chambre devra se prononcer.
M. VINCENT: M. le Président, le député de Chambly
me permettra-t-il une question?
M. LAPORTE: Sans doute.
M. VINCENT: Il a parlé de fonds de roulement. Le
député de Chambly était-il au courant qu'il y a quelques
mois à peine la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec a reçu une subvention qui lui permettait
de se créer un fonds de roulement, une subvention de $125,000?
D'après les producteurs, cela leur permettait de créer ce fonds
de roulement. Le député de Chambly, ministre du Travail, peut-il
nous dire s'il est au courant de l'utilisation qui a été faite de
ce montant de $125,000?
M. LAPORTE : Pour la première partie de la question, je n'ai
aucune espèce de honte ou de regret à dire que je n'étais
pas au courant; mais, j'imagine que ça n'a pas dû être assez
puisqu'ils sont venus encore en demander.
M. VINCENT: Le ministre pourrait-il nous dire ce qui fut fait avec la
subvention?
M. LAPORTE: J'ai dit au député que les questions qu'il
pourrait vouloir poser sur ça, il pourrait les poser en
comité.
M. PAUL: M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: Nous remercions l'honorable député de Chambly de
nous avoir donné une rétrospective des événements
qu'aurait normalement dû fournir l'honorable ministre de l'Agriculture et
de la Colonisation pour justifier la présentation de cette loi.
M. LAPORTE: Ce qui va vous arriver un jour, c'est que je ne parlerai
plus.
M. PAUL: Non, M. le Président; nous réalisons de plus en
plus combien le rôle du leader parlementaire est indispensable au sein du
gouvernement actuel, parce qu'il est un véritable ministre polyvalent et
il vient...
M. DEMERS: L'homme-orchestre.
M. LAPORTE: Comment disait-il ça en anglais: Timeo Danaos?
Je somme le député de cesser de me faire des compliments,
M. le Président.
M. PAUL: M. le Président, comme dirait le ministre des Affaires
culturelles, je vais dire que le ministre n'a pas eu le temps
d'interpréter et de comprendre la loi qui nous est présentement
soumise, quand il vient de nous dire qu'il ne veut pas créer un
précédent. C'est justement là une loi d'exception...
M. LAPORTE: C'est cela.
M. PAUL: ... en faveur de la Fédération des producteurs
d'oeufs de consommation du Québec. Ce n'est pas un
précédent, si c'est une loi d'exception? Le
précédent n'aurait pas été créé si on
avait amendé l'article 19 de la Loi du ministère de l'Agriculture
et de la Colonisation. A même les subventions générales
votées par l'Assemblée nationale, le ministre aurait pu octroyer
un montant suffisant pour permettre à la fédération de se
créer un fonds de roulement.
Mais non, M. le Président, ce n'est pas un
précédent, c'est une nouvelle taxe. C'est une taxe, et on voit le
Ralliement créditiste qui appuie cela. Il n'a pas saisi qu'on imposait
une taxe d'un demi-cent par douzaine d'oeufs. Le député de
Lotbinière nous a dit! Nous sommas pour cela. Il doit y avoir des
producteurs d'oeufs dans ces comtés créditistes.
M. SAMSON: Ne nous prêtez pas d'intention, même sans
intérêt.
M. PAUL: Non, non, mais c'est un fait. Ils sont tellement
habitués d'encenser le gouvernement qu'ils sont endormis et
empoisonnés dans leur encens.
M. DROLET: Vous êtes en train de nous réveiller.
M. PAUL: Ils ont oublié de réaliser qu'en vertu de cette
loi c'est une taxe qui est imposée sur le dos de la classe agricole du
Québec. Oui, M. le Président. On voit le ministre de
l'Agriculture nous faire des grands signes. Qu'il commence donc par
étudier son ministère, qu'il s'arrête à
l'étude des problèmes avec lesquels se trouve aux prises la
classe agricole aujourd'hui dans le Québec, spécialement dans
l'industrie laitière, et objectivement, aujourd'hui, de cette loi qui
nous est présentée en faveur des producteurs d'oeufs du
Québec!
M. LAPORTE: Puis-je demander au député à qui sera
payée cette taxe-là?
M. PAUL: Si le député occupait son siège, je
répondrais.
M. DEMERS: M. le Président, peut-on demander à l'honorable
leader parlementaire de reprendre son siège?
M. LAPORTE: C'est vrai. M. le Président, je retire la question
que j'ai posée en arrière et je la repose: Le
député pourrait-il me dire à qui sera payée cette
taxe?
M. PAUL: M. le Président, une chose...
M. LAPORTE: Et s'ils se la payaient à eux-mêmes!
M. PAUL: Qu'elle aille à qui elle voudra, cette taxe!
M. LAPORTE: Ah oui?
M. PAUL: Une chose est certaine, nous avons eu un aveu de la part du
leader parlementaire à l'effet qu'aujourd'hui les banques n'avaient plus
confiance dans l'administration gouvernementale actuelle. Ah, oui, oui! Il
s'est référé à l'article 2 et nous a dit que la
fédération s'est présentée aux banques et que les
banques ont dit: Avez-vous des garanties? Alors que nous reviendrons
là-dessus selon l'article 2, le lieutenant-
gouverneur en conseil pouvait garantir le paiement.
Non, on n'accepte pas la solvabilité du gouvernement,
aujourd'hui. D'ailleurs, une nouvelle taxe hier je n'ai pas le droit de
référer à un débat précédent, mais en
passant je vous le dis quand nous avons étudié le code de
la route et une nouvelle taxe aujourd'hui sur le dos des cultivateurs. C'est
une loi qui ne peut être acceptée de la façon dont on veut
l'appliquer. L'ancien ministre de l'Agriculture et de la Colonisation et le
député de Saint-Maurice, comme nous tous d'ailleurs, acceptent le
principe de venir en aide aux producteurs d'oeufs, à la
fédération, mais par des garanties et des avances qui auraient pu
être accordées par un amendement pur et simple de l'article 19 de
la Loi du ministère.
Mais non! On préfère jeter son dévolu sur le dos
des cultivateurs et leur imposer une nouvelle taxe d'un demi-cent le gallon
pour un fonds de roulement susceptible... M. le Président, il faut tenir
compte que, quand j'ai parlé de gallon, j'interprétais les oeufs
écrasés.
M. LAPORTE: Vous êtes rendu dans le caribou.
M. TOUPIN: Ils ne se vendent pas au gallon, non plus.
M. PAUL: M. le Président, je disais donc d'un demi-cent la
douzaine.
UNE VOIX: Cela se vend au gallon, aussi.
M. VINCENT: Pour la pâtisserie, ils se vendent au gallon.
M. PAUL: M. le Président, même le ministre de l'Agriculture
ne savait pas cela, qu'on peut acheter des oeufs au gallon. Il ne sait pas
cela. Il nous disait, il y a une semaine, qu'il n'y avait pas de
problème. Le député de Nicolet lui pose une question. Mais
non, il n'y a pas de problème. On agira en temps et lieu. Il
dépose un bill et il n'y à pas encore de problème.
Mais voici que dans la nuit de samedi à dimanche, probablement
que les poules ont fini leur grain, je ne sais pas, mais le problème
s'est créé. Vendredi, lorsque nous avons siégé, il
n'y avait pas de problème.
Et aujourd'hui on a un problème, M. le Président, c'est
pour créer un fonds de roulement qui permettrait à la
Fédération de payer les producteurs dans un délai
raisonnable. De vendredi dernier à aujourd'hui, il a eu la
lumière. Il a eu la lumière mais c'est parce que d'autres le lui
ont signalé. Le député de Chambly a pu lui dire, à
un moment donné: Ecoute, tu devrais dire ça pour justifier la
présentation de cette loi...
M. LAPORTE: C'est lui qui m'a tout dit
M. PAUL: C'est lui qui vous en a donné? M. le Président,
nous espérons qu'il va nous fournir des renseignements. Depuis qu' il
dirige le ministère, on n'est jamais capable d'avoir de réponse.
Si, au moins, on avait délégué le député de
Kamouraska, je vois qu'il n'est pas à son fauteuil; lui, il
connaît ça, M. le Président, parce que quand nous avons
étudié les crédits...
M. LAPORTE: Ne le provoquez pas.
M. PAUL: ... et que nous avons attaqué le problème de la
Fédération des productuers d'oeufs, le député de
Kamouraska s'est levé et nous a donné des informations...
UNE VOIX: A point.
M. PAUL: ... à point. Lui, il le voyait, le problème,
à ce moment-là. Il a vécu le problème. Il est
allé s'asseoir à côté du ministre de l'Agriculture,
franchement, je crois qu'il a été même menacé de
mort...
M. DEMERS: Il a dit: Fais attention, tu vas casser les oeufs.
M. PAUL: ... à la façon dont le ministre lui a jeté
un regard de désapprobation...
M. BERTRAND: Foudroyant.
M. PAUL: ... parce que le député de Kamouraska avait
osé le renseigner lui-même sur le problème qui existe au
sujet des oeufs aujourd'hui, le problème de l'administration à la
Fédération des producteurs d'oeufs. Je suis sûr, M. le
Président, que le député de Kamouraska est contre la taxe
d'un demi-cent, lui qui a de l'expérience. Je suis sûr qu'il est
contre cette taxe comme, tout à l'heure, les créditistes, qui
vont se raviser, seront contre cette taxe d'un demi-cent la douzaine d'oeufs.
Et ce n'est pas tout, ce qui est plus grave, c'est que, quand nous avons
étudié les crédits du ministère de l'honorable
député de Chambly, l'honorable député de Terrebonne
qui présidait les délibérations de notre comité a
émis des directives sages, à point que nous avons
respectées,parce que le problème était sub judice.
Est-ce que cette loi, M. le Président, qui a été
votée par les années passées, sera jugée
légale ou non, constitutionnelle ou non? S'il ar-
rivait que cette loi, qui est actuellement devant les tribunaux, soit
déclarée inconstitutionnelle par nos tribunaux, à qui
profiteraient les $500,000 qu'on nous demande de voter aujourd'hui à
même une taxe imposée aux cultivateurs, et également aux
consommateurs, M. le Président...
M. BERTRAND: Comment pourrions-nous la remettre?
M. PAUL: M. le Président, c'est une taxe de vente
déguisée de la part d'un ministre qui nous dit: Pas de
problème. Probablement qu'il y aura une autre taxe sur la livre de
beurre, sur le nombre de vaches que les cultivateurs ont dans leurs champs,
puis sur le nombre de gallons de lait qui est produit. C'est peut-être de
cette façon-là, M. le Président, que le ministre de
l'Agriculture entend régler le problème de l'industrie
laitière dans le Québec qui est dans un véritable marasme.
Et cet ancien membre de la Fédération de l'UCC, qui a
participé indirectement à la formation de cette
fédération, qui est probablement aussi bien au courant de la
façon dont la somme de $125,000 a été
dépensée, qui était censée être pour le fonds
de roulement, eh bien, ce même individu est aujourd'hui ministre de
l'Agriculture, et c'est effrayant comme il adore aujourd'hui ce qu'il
brûlait hier.
Et le ministre de l'Agriculture voudrait que nous allions, nous, sous
prétexte que le principe est bon d'aider les producteurs d'oeufs dans le
Québec, accepter une taxe! M. le Président, nous ne pouvons pas
accepter les modalités de ce bill qui en vicient les grands principes
admirables que nous acceptons, que nous sommes prêts à appuyer,
comme le disait tout à l'heure si bien le député de
Saint-Maurice, comme a distingué avec une belle logique le
député de Nicolet.
Pourquoi ne pas déférer cette loi! Cela presse donc bien
de taxer les cultivateurs! Pourquoi cette loi n'est-elle pas
déférée à la commission de l'Agriculture et de la
Colonisation? Là, nous pourrions entendre les membres de la
régie; nous pourrions demander aux membres de la
fédération pourquoi ils veulent avoir $500,000. $100,000
d'augmentation, en trois jours, c'est pire que du crédit social!
$100,000 en trois jours! Vendredi dernier, c'était $400,000;
aujourd'hui, c'est $500,000. La taxe augmente de 1% et le Ralliement
créditiste est pour ça.
Je dis que nous ne pouvons pas l'accepter. Je suis sûr que les
députés qui siègent à l'extrême droite, ceux
du Parti québécois, ne peuvent pas supporter, eux non plus, une
telle me- sure. On nous demande de voter aveuglément un montant de
$500,000 à un organisme qui, peut-être, la semaine prochaine, dans
le mois d'août ou dans le mois de septembre, sera considéré
comme illégal. Je dis que, si on voulait respecter les règles qui
sont habituellement suivies lorsque des problèmes sont devant les
tribunaux on n'aurait pas cherché à nous passer un sapin comme on
veut le faire actuellement.
Est-ce que, par hasard, on craindrait que la loi soit
déclarée inconstitutionnelle et que nous ne puissions pas
récupérer, en aucune façon, le fonds de roulement de
$500,000 que les producteurs d'oeufs seraient quand même obligés
de payer? Si on veut réellement aider la Fédération des
producteurs, qu'on réfère le projet de loi à la commission
de l'Agriculture et de la Colonisation, qu'on interroge comme témoin le
député de Kamouraska. Il a vécu ces problèmes, il
les a épousés; c'est un homme averti, un spécialiste en la
matière. Pourquoi, aujourd'hui, ne nous fait-il pas une grande
déclaration? Je comprends que c'est assez difficile pour lui et
gênant pour le ministre d'entendre un de ses collègues, un simple
député, parler en expert et exposer toutes les implications que
ce problème soulève et les implications que la loi peut apporter
si elle est votée.
C'est pourquoi nous ne pouvons pas approuver cette législation
telle que présentée, même si nous sommes en faveur du
principe d'aider la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec. Je crois que nous rendons aujourd'hui service.
Je vois le député de Yamaska qui représente un
comté agricole, je sais qu'il y a des producteurs d'oeufs dans son
comté. On l'interrogera à son retour chez lui en fin de semaine.
On lui demandera: Quelle a été la motivation de cette nouvelle
taxe que vous venez d'imposer sur le dos des cultivateurs ? Je suis sûr
que l'honorable député, comme beaucoup d'autres, du
côté ministériel serait heureux de dire...
Même le ministre de l'Agriculture pourra en apprendre, à ce
moment-là, sur le véritable fonctionnement de la régie et
des organismes qu'elle crée. Je suis sûr qu'en
référant ce problème devant la commission de l'Agriculture
et de la Colonisation pour étude complète, tous en tireront
profit et avantage. Nous ne nous exposerions pas à subventionner un
organisme qui sera peut-être considéré, par suite de
l'illégalité et de l'inconstitutionnalité de la loi qui
peut être adoptée dans ce cas, comme un organisme qui a
retiré une somme de $500,000 et qui n'a plus les pouvoirs
nécessaires pour récupérer cette somme.
Je dis donc que les arguments soulevés par
le député de Nicolet et par le député de
Saint-Maurice nous justifient grandement de voter contre le principe de cette
loi, à moins que le ministre, qui a toute l'occasion, là, de nous
faire part de sa compréhension du problème, nous donne une
interprétation beaucoup plus réaliste que celle que nous a
donnée le député de Chambly. Elle était
académique, cette explication du député.
M. LAPORTE: Je vais poser une question au député qui m'a
l'air si bien renseigné. Est-il en mesure de dire à cette Chambre
si la Fédération des producteurs d'oeufs alors qu'il
était ministre de la couronne, le député
s'intéressait sans doute à ces questions est venue
demander au gouvernement une garantie comme celle que nous accordons
aujourd'hui?
Est-ce qu'il est en mesure de dire si, oui ou non, la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec est venue
demander au gouvernement une garantie comme celle que nous accordons
aujourd'hui?
M. PAUL: M. le Président, nous avions un ministre tellement
compétent pendant que nous étions au pouvoir, le
député de Nicolet qui occupait la fonction de ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation, que nous n'étions pas inquiets de
la façon dont il administrait le ministère et de la façon
dont il dispensait les subventions à son ministère.
Personnellement, je n'ai jamais eu à l'interroger et je n'ai
jamais été dans l'obligation fâcheuse, comme l'a
été lui-même le député de Chambly, de
vouloir...
M. LAPORTE: Excusez. M. PAUL: Oui.
M. LAPORTE: C'est une réponse trop longue pour en être
une.
M. PAUL: Ah!
M. LAPORTE: Vous n'avez pas répondu à ma question.
M. VINCENT: Je vais répondre. Les membres de la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec sont venus me rencontrer pour avoir un fonds de roulement. A ce
moment-là, nous avons adopté un arrêté en conseil
permettant de leur verser une subvention de $125,000 afin qu'ils puissent se
créer un fonds de roulement.
Aux derniers jours de l'administration, nous avons, avec les avocats du
ministère, envisagé la possibilité de leur donner des
garanties d'emprunt en amendant la loi du ministère, mais sans imposer
de taxe.
M. LAPORTE : M. le Président, la question très claire et
très directe que je pose à l'ancien ministre est la suivante:
Est-il en mesure d'affirmer à cette Chambre que la
Fédération des producteurs d'oeufs n'a pas demandé deux
choses: une subvention et une garantie pour un fonds de roulement? C'est bien
clair, la question. Faites bien attention à votre réponse.
M. VINCENT: Oui, la Fédération des producteurs d'oeufs a
demandé une subvention...
M. LAPORTE: Et?
M. VINCENT: ... qu'elle a obtenue pour...
M. LAPORTE: Oui, répondez.
M. VINCENT: ... lui permettre de faire une étude ou une
enquête sur la mise en marché dans la province de Québec
Cette subvention leur a été versée, en plus des $125,000.
Par la suite, vu qu'il n'existait pas de législation leur permettant de
garantir un montant d'argent pour se créer un fonds de roulement, nous
leur avons versé une subvention inconditionnelle sauf qu'ils
doivent présenter un rapport à l'Auditeur de la province, comme
pour toute subvention supérieure à $5,000 leur permettant
de mettre ce montant d'argent à la banque et d'avoir un fonds de
roulement.
Par la suite, si ce n'était pas suffisant, nous avions
discuté la possibilité d'amender la loi du ministère pour
inclure les fédérations de producteurs pour des garanties
d'emprunt ou des avances. Le député de Chambly comprend le
précédent dangereux créé par l'article 4 de la
présente législation, d'imposer, pour la première fois,
par législation une taxe.
M. LAPORTE : M. le Président, répondre à une
question n'est pas l'occasion de prononcer un autre discours sur une chose qui
n'existe pas, d'ailleurs.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. SAMSON: M. le président, à la suite du discours de
l'honorable député de Maskinon-
gé, discours qui m'a extrêmement intéressé,
d'ailleurs, j'ai remarqué, comme tous les membres en cette Chambre,
qu'il est arrivé un oeuf sur son bureau. Enfin, il a réussi
à pondre quelque chose!
C'est une vraie maladie. Chaque fois qu'il se lève, il a
tellement peur des créditistes qu'il faut toujours qu'il s'en prenne
à eux. Là, on nous prêle des intentions; on nous dit que
nous sommes des encenseurs, que nous encensons, etc., etc.
M. le Président, nous n'avons l'intention d'encenser personne et
cela ne nous ferait rien de ne pas l'être non plus. Ce n'est
sûrement pas avec ce qu'ils ont fait, eux, pendant qu'ils étaient
au pouvoir, que nous les encenserions.
On parle sur le principe d'un bill que le député de
Maskinongé a qualifié de taxe nouvelle. Il n'a pas l'air de
comprendre la différence entre une taxe nouvelle et un mode de
remboursement. Quand ce sont les autres qui parlent, ils disent que ce sont des
taxes et, quand c'étaient eux qui augmentaient la taxe de 6% à 8%
quand ils avaient le pouvoir, ils ne prenaient pas ça pour des taxes,
dans ce temps-là.
M. le Président, il a dit dans son discours que les cultivateurs
seraient taxés d'un demi-cent le gallon. Il a dit, à un autre
moment, que c'étaient des éleveurs d'oeufs.
Eh bien, ce ne sont pas plus des éleveurs d'oeufs, d'ailleurs,
que ce ne sont des cultivateurs de poules.
Avec le bill qui nous est présenté, M. le
Président, il ne s'agit pas je pense qu'il ne faut pas se casser
les méninges trop longtemps pour comprendre cela d'un emprunt. Il
s'agit, pour le gouvernement, de garantir les emprunts dont a besoin la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec. C'est de cela qu'il s'agit, c'est cela, le principe du bill et
pas autre chose.
A l'article 4, on parle d'un mode de remboursement. Il y a une
différence entre un remboursement et une taxe. C'est ce qu'il faut
comprendre. Si c'était une taxe nouvelle, nous n'aurions pas eu besoin
d'entendre le discours du député de Maskinongé pour nous
faire comprendre que c'était une taxe. Nous sommes parfaitement capables
de faire la différence entre une taxe et un mode de remboursement.
D'ailleurs, si cela avait été une taxe, nous aurions
été les premiers, probablement même avant eux, à le
dire. Si c'était une nouvelle taxe, nous serions contre cela et nous
parlerions, tous les douze députés du Ralliement
créditiste, contre la taxe. Mais, ce n'est pas le cas qui nous
intéresse. Le cas qui nous intéresse ici, c'est que la
fédération sera tenue de déduire du produit des ventes
qu'elle effectue un demi-cent par douzaine d'oeufs qu'elle met en
marché, et ceci jusqu'au remboursement de tout emprunt. C'est la
façon de garantir. Il n'y a personne qui prêterait de
l'argent...
M. VINCENT: Sans intérêt.
M. SAMSON: ... sans être garanti d'être remboursé.
Les honorables députés de l'Union Nationale cherchent toujours
à ramener sur le tapis le « sans intérêt ».
Probablement, M. le Président, qu'à force d'en parler ils
finiront pas se convaincre que nous avons raison.
M. PAUL: Ah oui! C'est fort.
M. SAMSON: Nous savons que cela va prendre du temps. Cela, nous le
savons. Nous ne nous cassons pas la tête. Cela prendra peut-être
encore plusieurs années avant qu'ils comprennent. Nous sommes sûrs
que la population, d'ailleurs, comprendra avant eux.
M. PAUL: Priez saint Jude.
M. SAMSON: M. le Président, nous sommes d'accord avec le principe
de ce bill et nous n'avons pas peur de le dire. Nous n'avons pas peur de nos
opinions. Quoi qu'en pense l'honorable député de
Maskinongé, quoi qu'il veuille en dire, ce que nous avons à dire,
c'est à nous qu'il revient de le dire. C'est à nous de penser
à ce que nous voulons dire et ce n'est pas à eux de nous dicter
quoi faire. Ce n'est sûrement pas de l'Union Nationale que nous avons des
conseils à prendre, surtout pas avec la façon dont elle a
administré cette province durant les quatre dernières
années.
M. VINCENT: M. le Président, sur le temps de parole du
député de Rouyn-Noranda, est-ce qu'il me permet une question?
Quand il dit que ce n'est pas une taxe...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que le député de
Rouyn-Noranda permet au député de Nicolet de lui poser une
question?
M. SAMSON: M. le Président, si tout le monde a bien compris,
j'avais fini de parler et lui, il avait fini depuis un bon moment aussi. Il a
parlé deux fois alors qu'il devait parler une fois. Je pense que c'est
assez pour aujourd'hui.
DES VOIX: Il ne veut pas.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, il est bien évident que nous
sommes devant une loi-cataplasme...
UNE VOIX: ... de l'encens.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BERTRAND: Cela sent meilleur.
M. LAURIN: ... une loi d'exception qui vient essayer de résoudre,
de la façon la plus mauvaise possible, un problème urgent.
M. PAUL: C'est cela.
M. BERTRAND: Très bien.
M. LAURIN: Il est aussi devenu bien évident, depuis que plusieurs
interventions ont été entendues, que le ministre de l'Agriculture
marche sur des oeufs depuis le début de ce débat et, au fond,
depuis qu'il est entré en fonctions.
Cela est devenu tellement évident pour tous en cette Chambre que
même la majeure partie des députés du parti
ministériel se sont esquivés sur la pointe des pieds, depuis le
début du débat, pour ne pas écraser ces oeufs. Il est bien
évident également, après les interventions et surtout
après l'intervention très documentée que nous avons
entendue du député de Nicolet...
DES VOIX: Tiens! Tiens! Ah! M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. PAUL: M. le Président, sur un point d'ordre...
UNE VOIX: Qui s'assemble se ressemble.
M. PAUL: Quand l'honorable leader du Parti québécois
parle, c'est logique, ce n'est pas de l'encens. On ne peut pas dire la
même chose à ma gauche, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président, j'annonce la réalisation de
l'entente offerte par le député de Montcalm au PQ.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. VINCENT: M. le Président, en ce qui concerne le
député de Bourget et le député de Nicolet, il n'y a
aucune ressemblance de caractère. Je suis
fédéraliste...
M. LAPORTE: Tous ces oeufs, ça fait un genre d'omelette.
M. VINCENT: ... j'ai été député
fédéral et peut-être qu'un jour, je le serai de
nouveau.
M. LAPORTE: C'est bon, ça, faites vos oeufs.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN: Le député de Nicolet est
fédéraliste, le député de Bourget est
indépendantiste, mais nous avons une amie commune qui est la
logique.
UNE VOIX: C'est fort.
M. LAPORTE: De bonnes fréquentations!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LAURIN: Il est devenu bien évident, M. le président,
depuis toutes ces interventions que nous avons entendues et depuis le
début de cette session, encore une fois, que le député de
Champlain non seulement marche sur les oeufs, mais essaie de nous masquer la
vérité en ce qui concerne le véritable problème de
la Fédération des producteurs d'oeufs du Québec. Non
seulement n'a-t-il pas répondu aux nombreuses questions du
député de Nicolet, posées à la période des
questions, posées lorsque les crédits étaient
discutés devant cette Chambre, mais il a également refusé
ou il a omis de répondre à la question que je lui posais
moi-même et qui gît encore au feuilleton comme un reproche
permanent soit à son ignorance crasse, soit à son embarras ou
à son malaise. C'est la raison pour laquelle nous avons eu tellement
d'interventions cet après-midi. C'est que nous voulons enfin
connaître la vérité sur ce puits qu'est en train de devenir
la Fédération des producteurs d'oeufs du Québec. Cette
Chambre, qui a le droit de savoir, ne sait pas quelle est la véritable
situation et de la Fédération des producteurs d'oeufs et surtout
des producteurs d'oeufs du Québec qui semblent aux prises avec des
problèmes extrêmement difficiles, mais qui ne peuvent être
éclairés au fur et à mesure que le débat se
prolonge, puisque le gouvernement nous refuse les informations auxquelles nous
avons droit.
Cette mauvaise situation de la Fédération des producteurs
d'oeufs, elle nous est connue surtout par les journaux, malheureusement. Cette
situation est tragique pour deux raisons. D'abord, à cause de l'aspect
constitutionnel. Bien sûr que je me garderai bien d'y toucher puisque
c'est sub judice, mais ce qui n'est pas sub judice quand même, ce sont
les protestations que nous avons entendues de la part des autres provinces. Par
exemple du Manitoba où, lors d'une récente conférence des
ministres provinciaux de l'Agriculture, nous avons entendu dire par des
représentants autorisés de cette province qu'ils n'acceptaient
pas la politique actuelle de la Fédération des producteurs
d'oeufs, qu'ils mettraient tout en oeuvre pour la combattre et qu'ils ne
lâcheraient pas le morceau tant que les cours ne se seraient pas
prononcées sur la constitutionnalité de la loi qui a
constitué la Fédération des producteurs d'oeufs.
Mais en attendant, à part ce problème constitutionnel sur
lequel nous aurions quand même aimé être
éclairés par cette Chambre qui compte beaucoup de juristes
très compétents, la fédération semble en
très mauvaise posture également au point de vue
économique. Ce n'est un secret pour personne...
M. DUMONT: M. le Président, est-ce que, actuellement, nous sommes
à discuter du principe général de la vente des oeufs au
Québec ou du projet de loi 27 comme tel...
M. PAUL: Nous comprenons, nous.
M. CARDINAL: Nous comprenons, nous.
M. PAUL: C'est très logique.
UNE VOIX: Nous ne sommes pas sur l'île au trésor.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN: ... que les producteurs d'oeufs sont en mauvaise posture
puisque tous les jours, nous voyons dans les journaux que certains producteurs
d'oeufs n'adoptent pas une politique conforme à celle que
préconise leur fédération, puisqu'eux-mêmes se
sentent obligés d'aller vendre leur production à des compagnies
d'alimentation d'autres provinces et que, souvent, ces oeufs reviennent dans le
Québec par d'autres canaux qui n'avaient pas été
prévus.
Il est évident aussi, d'après ce que nous lisons dans les
journaux, et ce qui a été déposé lors d'une
commission d'enquête, différente de celle que nous
préconisons mais qui, elle, fonctionne, que plusieurs magasins à
succursales, plusieurs compagnies d'alimentation contournent actuellement les
règlements de la Fédération des producteurs d'oeufs et
vont chercher directement, dans d'autres provinces, des oeufs qu'ils devraient
acheter dans la province de Québec. Mais, ne voulant pas s'adresser
à la Fédération des producteurs qui, d'après la
loi, constitue le seul intermédiaire possible, ils contournent
délibérément cette loi et achètent directement dans
les autres provinces, au plus grand détriment des cultivateurs du
Québec.
En voilà assez pour bien indiquer que le malaise de la
Fédération des producteurs d'oeufs est profond, qu'il
mérite un examen attentif de la part des autorités
législatives du Québec, et qu'on aurait du prendre les moyens
pour éclairer la Chambre et la députation en particulier sur les
différents aspects de ce problème.
Nous avons les mêmes objections que les députés de
l'Opposition officielle je le reconnais, vous voyez que j'accepte les
faits lorsqu'il faut les accepter à la plupart des articles de ce
projet de loi. Nous estimons en particulier que cette façon de
procéder constitue un très fâcheux précédent.
On a souligné que d'autres fédérations pourront venir
maintenant, n'importe quand, consulter le gouvernement, lui demander son aide
et demander un projet analogue à celui qui nous est
présenté actuellement. Probablement que la prochaine
fédération qui viendra s'adresser au gouverne ment sera la
Fédération des producteurs de lait dont on sait, après la
politique illogique du gouvernement fédéral, qu'elle est dans une
situation de plus en plus dangereuse, de plus en plus précaire, et il
faudra également prévoir pour elle une loi d'exception. Il est
bien probable cependant qu'après l'exemple que nous donne ce projet de
loi, le gouvernement dira: Nous sommes prêts à vous aider, mais
à la condition que vous vous aidiez vous-mêmes,
c'est-à-dire que vous prévoyiez un mode ingénieux par
lequel nous n'aurons pas un cent à débourser. Tout
l'onéreux sera sur les producteurs de lait qui devront eux-mêmes
trouver les moyens de se sortir du marasme dans lequel ils sont.
Voilà donc les deux raisons pour lesquelles nous sommes contre ce
projet de loi: il constitue un précédent dangereux qui pourra
être imité par toutes les autres fédérations, et
pourquoi pas également par l'Association coopérative des
éleveurs de visons qui demandera également de se faire aider par
le même processus. La deuxième raison; le cadeau que semble faire
ici le gouvernement aux producteurs d'oeufs est une fausse
libéralité. C'est précisément là que la
citation latine que le député de
Chambly commençait à énoncer tout à l'heure
s'appliquerait d'une façon beaucoup plus exacte; il faudrait dire:
« Timeo Danaos et dona ferentes; » je crains le gouvernement
surtout quand il a l'air de nous faire des cadeaux.
M. LAPORTE: Ce que le député n'a pas compris, apparemment,
c'est que nous ne faisons aucun cadeau. Nous faisons ce qu'il semble avoir
condamné, il y a quelques phrases; nous demandons aux producteurs
d'oeufs de s'aider eux-mêmes, ce qu'ils acceptent avec plaisir et qui est
normal.
M. LAURIN: Mais il est sûr que le gouvernement se vantera de ce
projet de loi comme d'un cadeau qu'il fait aux agriculteurs, puisque c'est
l'habitude qu'il prend avec tous les projets de loi qu'il présente. Je
ne vois pas pourquoi l'exception viendrait ici confirmer la règle.
De toute façon, cette garantie est fausse puisque le gouvernement
a l'impression, j'en suis sûr, en réalité, que cette
Fédération des producteurs d'oeufs est tellement insolvable qu'il
a pris les moyens absolument sûrs pour que cette mesure ne lui
coûte absolument pas un cent. Que ce soit pour des raisons
constitutionnelles, que ce soit pour des raisons de méfiance à
l'endroit de la Fédération des producteurs d'oeufs, le
gouvernement s'est arrangé de façon que cette garantie soit
purement nominale, et que l'onéreux du remboursement soit mis sur le dos
d'une fédération de producteurs d'oeufs qui a déjà
d'énormes difficultés à se tirer de ce mauvais pas.
C'est la raison pour laquelle nous demandons que la commission de
l'agriculture soit convoquée et qu'elle ait l'autorité de faire
venir devant elle les membres de la Régie des marchés agricoles,
les membres de la Fédération des producteurs d'oeufs qui, eux au
moins, pourront peut-être nous renseigner sur la véritable
situation.
C'est la raison pour laquelle nous demandons également au
gouvernement de retirer cet article 4 du projet de loi, afin que la
libéralité en soit une véritable, correspondant aux
besoins réels de ces producteurs qui sont dans une situation tragique,
faute de quoi nous nous opposerons au principe de cette loi.
M. LE PRESIDENT; Le ministre désire-t-il exercer son droit de
réplique?
M. Normand ToupinM. TOUPIN: M. le Président... UNE VOIX:
Il a besoin d'être convaincant.
M. TOUPIN: ... la première chose que j'ai remarquée,
depuis que nous avons commencé à discuter ce projet de loi en
deuxième lecture, c'est l'imagination de l'Opposition et notamment du
député de Nicolet. C'est fantastique comme il a de l'imagination
de l'autre côté de la Chambre. Il s'agit de savoir si ce ne sera
pas là sa place définitive.
Le problème des oeufs, dont il est question dans le projet de
loi, était fort bien connu du député de Nicolet. Il savait
très bien qu'il fallait trouver une solution. Au fond, la situation des
producteurs d'oeufs n'est pas détériorée à ce
point. Au moment où les producteurs ont décidé de se
donner un mécanisme de mise en marché, ils ont également
prévu, dans ce mécanisme, des moyens de se financer, mais la loi
ne leur permettait pas de le faire.
Ce que les producteurs veulent présentement, c'est de se
constituer un fonds de roulement en vue d'assurer, purement et simplement, la
bonne marche de la fédération. Ce que le projet de loi
prévoit, c'est de mettre à la disposition de la
Fédération des producteurs d'oeufs un moyen qui leur permettra
d'aller chercher du crédit et un autre moyen qui leur premettra de
rembourser ces crédits-là. Les producteurs ont déjà
accepté ces principes de remboursement en finançant
eux-mêmes des programmes.
M. VINCENT: S'ils ont accepté, pourquoi les oblige-t-on par une
loi?
M. TOUPIN: Ils ont accepté d'autres programmes, non pas
celui-là...
M. VINCENT: Ah, ah!
M. TOUPIN: ... d'autres programmes pour des plans conjoints. Cela aussi
est connu de bien des gens.
M. VINCENT: Ah bon, la vérité sort!
M. TOUPIN: Tout ce que le projet de loi vient faire, au fond, c'est
assurer un financement efficace et stable de la Fédération des
producteurs d'oeufs du Québec. Il ne s'agit pas là d'une
politique à courte vue. Il s'agit d'un moyen auquel les producteurs
auront accès pour faire fonctionner normalement leur organisme et,
ainsi, aller chercher des prix, de sorte que l'agriculture fonctionne bien au
Québec. C'est pour cela que ces organismes existent. C'est pour cela, au
fond, qu'on essaie, avec des projets de lois, de les aider à rendre
efficaces ces organismes et, ainsi à aller se chercher des prix.
Ce sont simplement ces raisons-là qui nous ont guidés.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de deuxième lecture est
adoptée?
M. LAPORTE: M. le Président, je demande le vote.
M. PAUL: Nous aussi, nous le demandons.
M. LAPORTE: Puis-je demander au leader de simplifier les choses? Les
gens du Parti québécois ont dit qu'ils voteraient contre le
projet, et vous?
M. PAUL: Nous sommes contre.
M. LAPORTE: Contre le projet en deuxième lecture.
M. LOUBIER: Vous avez vos amis avec vous. M. PAUL: 84.
M. DEMERS: Vous êtes dans la même omelette.
M. PAUL: Sept douzaines à un demi-cent la douzaine.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAPORTE: D'accord? Est-ce que toutes les farces sont faites sur les
omelettes? Peut-on demander de faire le partage du vote qui a été
enregistré plus tôt?
M. PAUL: Oui.
UNE VOIX: Est-ce que cela marche à votre goût?
M. LAPORTE: D'accord. Vote enregistré. Merci.
M. LE PRESIDENT: Comité?
M. LAPORTE: On ajoutera le nom du député de Saint-Louis au
vote de cet après-midi. Y en a-t-il d'autres qui n'ont pas pu voter ce
matin?
M. PAUL: Le député de Labelle, M. le Président, et
le député de Montcalm.
M. JORON: Le député de Gouin également. M. PAUL:
Oui, oui.
M. LAPORTE : Oui, il a été ajouté tout à
l'heure.
M. SAMSON: Est-ce qu'on pourrait ajouter aussi le nom du
député d'Abitibi-Est?
M. LAPORTE: Le député d'Abitibi-Est, d'accord.
M. LE PRESIDENT: La motion est adoptée sur division. Non, vote
enregistré.
M. PAUL: Adoptée majoritairement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Agriculture propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forma en comité
plénier. Est-ce que cette motion sera adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre,
messieurs! Projet de loi no 27, article 1.
M. VINCENT: M. le Président, à l'article 1, le ministre
nous a confirmé, il y a quelques instants, que la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec avait reçu une subvention de $125,000. Est-ce qu'il
pourrait informer les membres de ce comité des raisons pour lesquelles
le gouvernement du Québec ou le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation du temps a versé une subvention de $125,000 à la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec?
Quel était le but de cette subvention?
M. TOUPIN: D'abord, la subvention n'était pas de $125,000; elle
était de $100,000.
M. VINCENT: Ah bon! M. le Président, j'ai dit au ministre de
l'Agriculture, hier en arrière de votre siège, qu'il y avait eu
une subvention de $100,000. Aujourd'hui, il me dit que la subvention
n'était pas de $100,000 mais de $125,000.
M. DEMERS: C'est comme les $400,000 qui sont devenus $500,000.
M. TOUPIN: Il y eut une autre subvention donnée par le
gouvernement pour des postes etc. Elle est de $125,000.
M. VINCENT: Est-ce que la subvention était de $125,000 ou de
$100,000? Il commence à clarifier l'affaire. Hier, j'ai dit au ministre
de l'Agriculture qu'il y avait eu une subvention de $100,000
pour se créer un fonds de roulement. Au total $125,000 de
subvention à la fédération. Aujourd'hui, je lui pose la
question: Est-ce qu'il y a eu une subvention de $125,000 de versée et
à quelles fins?
M. TOUPIN: Il y eut une subvention de $125,000 de versée, mais
cette subvention s'appliquait aux postes de classement.
M. VINCENT: Les $125,000.
M. TOUPIN: Les affectations des postes de classement.
M. VINCENT: Il y a eu une subvention de $125,000 de versée, dont
$25,000 s'appliquaient aux postes de classement et $100,000 à un autre
objet. C'est justement la raison pour laquelle ces $100,000 ont
été versés.
M. TOUPIN: Il y eut $125,000 de subvention de donnés pour les
postes. $100,000 de plus furent donnés, ce qui fait un total de
$225,000. Les deuxièmes $100,000 furent affectés à un
fonds de roulement.
M. DEMERS: Est-ce qu'on pourrait, M. le ministre, avoir le détail
de l'utilisation des premiers $100,000?
M. TOUPIN: Les premiers $100,000 ont été affectés
au financement général de la fédération,
c'est-à-dire au financement du règlement no 6, qu'on appelle le
règlement de commercialisation. Ils furent affectés à tout
ce qu'il y a dans le règlement. Il faudrait peut-être vous donner,
lecture de certains articles qu'on trouve dedans, mais ils avaient
été donnés pour fins de fonds de roulement. Ce
n'était pas suffisant, mais ils avaient été donnés
pour fins de fonds de roulement.
M. VINCENT: M. le Président, le ministre nous confirme que les
$100,000 avaient été donnés à la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec, aux fins de
se créer un fonds de roulement. Est-ce qu'effectivement ce montant a
servi à la fédération à se créer un fonds de
roulement ou si, comme vient de l'affirmer le ministre, ce montant a servi
à l'administration générale de la
fédération?
La question est très simple: Est-ce qu'en vertu de
l'arrêté en conseil qui a été adopté pour
faire ce don de $100,000 en vue de créer un fonds de roulement, la
fédération a respecté les conditions imposées par
le ministère? Si oui, à quoi a servi le montant de $100,000?
Sinon, à quoi également a servi le montant de $100,000?
M. TOUPIN: Le montant de $100,000 qui a été versé
au fonds de roulement a servi évidemment pour l'application du
règlement no 6 qui est le règlement de la commercialisation. Dans
le règlement no 6, on retrouvait le paiement des oeufs, le paiement des
emballages et tous les problèmes de coquillage. Les $100,000 ont servi
au fonctionnement de la fédération pour ces différents
points et peut-être d'autres qui sont moins importants,
M. VINCENT: Est-ce que le ministre pourrait nous confirmer si une partie
du montant de $100,000 versé par le ministère de l'Agriculture et
de la Colonisation à la Fédération des producteurs d'oeufs
de consommation du Québec aurait servi à payer une dette
contractée vis-à-vis du fonds de dépense de l'UCC?
M. TOUPIN: Il n'y a pas de montant qui fut pris à même ces
$125,000 pour payer une autre dette à notre connaissance.
M. VINCENT: Est-ce que le ministre a le tableau complet, ce sera plus
simple. Il y aura un rapport de présenté à l'auditeur,
mais le ministre, avant de présenter cette législation, a
certainement demandé à la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation de rendre compte dans les détails de
l'utilisation des $100,000. Est-ce que le ministre pourrait nous donner
l'utilisation de ce montant de $100,000 qui avait été
versé pour créer un fonds de roulement?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. PAUL: Non. Nous attendons la lumière verte.
M. TOUPIN: Est-ce que le député de Nicolet voudrait
reposer la question? C'est qu'elle tourne toujours autour du fonds de
roulement, mais nous allons essayer de la préciser.
M. VINCENT: Le gouvernement du Québec a versé, par
l'entremise du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, une
subvention de $100,000 à la Fédération des producteurs
d'oeufs de consommation du Québec aux fins de créer un fonds de
roulement. Avant de présenter son projet de loi, le ministre a
certainement demandé à la Fédération des
producteurs d'oeufs quelle a été l'utilisation de ce montant de
$100,000. Est-ce que le ministre a reçu un compte détaillé
de l'utilisation de ces $100,000? Si oui, est-ce qu'il pourrait nous donner le
détail de l'utilisation de ce montant? Sinon, s'il
ne peut pas nous le donner, ça veut dire qu'il ne l'a pas
demandé. A ce moment-là, est-ce que la fédération
soumettra son rapport à l'auditeur de la province? C'est aussi simple
que ça.
M. TOUPIN: nIl est bien sûr que nous n'avons pas actuellement
entre les mains un rapport détaillé sur les $100,000 qui furent
donnés sous forme de subvention par l'ancien ministre de l'Agriculture.
Nous n'avons pas de rapport complet sur l'utilisation de ce montant. Nous vous
avons cependant donné tantôt quelques éléments
auxquels ont servi les $100,000. Est-ce que nous avons l'intention d'en
demander un? C'est certain. C'est prévu dans l'ensemble des
conditions.
M. PAUL: Est-ce que le ministre s'est fié tout simplement aux
informations que lui ont fournies les membres de la fédération?
Est-ce que vous avez vérifié les informations qui vous ont
été transmises à l'effet que la somme de $100,000 n'avait
pas été suffisante pour créer un fonds de roulement
efficace?
M. TOUPIN: J'ai rencontré la Fédération des
producteurs d'oeufs à plusieurs reprises depuis que le problème
du fonds de roulement se pose.
On a discuté avec eux de leur situation financière. On a
vu comment le problème se posait. Les $100,000 qui avaient
été donnés l'avalent été pour un fonds de
roulement. Or, ils nous ont dit: Ces $100,000 ne sont pas suffisants pour un
fonds de roulement.
M. PAUL: Avez-vous demandé ce qu'ils avaient fait avec les
$100,000?
M. BERTRAND: Bien oui!
M. TOUPIN: Je viens de vous dire, dans les grandes lignes, ce qu'ils ont
fait avec ces $100,000.
M. PAUL: Oui, mais quelles grandes lignes avez-vous
demandées?
M. TOUPIN: Je vais me faire donner un rapport précis sur la
situation. Mais, pour le moment, les $100,000 qui furent donnés ont
servi au fonds de roulement et ont servi à faire fonctionner le
règlement numéro 6, à payer des oeufs, à payer des
emballages, à payer certains moyens de transport, tout ce qui avait
trait à l'administration du plan conjoint.
M. BERTRAND: M. le Président, ce n'est pas pour être
malcommode du tout. Je voudrais bien que le ministre nous comprenne.
Voilà un organisme qui, en l'espace de quelque temps, a retiré du
gouvernement du Québec $225,000, dont $100,000 pour établir un
fonds de roulement et $125,000 pour d'autres fins.
La semaine dernière, à une question posée par mon
collègue, le ministre a répondu: La fédération n'a
pas de problème. Tout va bien. Quelques jours après, on arrive
avec un projet de loi où on demande une garantie de $400,000,
augmentée, depuis cet après-midi, depuis le discours du ministre,
à $500,000 c'est-à-dire à un demi-million de dollars.
Les représentants du peuple ont le droit de savoir si le ministre
s'est comporté à leur endroit comme un administrateur
compétent, diligent et capable de surveiller la dépense des fonds
publics. C'est pour cela qu'il est ministre.
Or, nous lui demandons en Chambre des détails sur la
dépense de $225,000 et il nous avoue, en toute candeur: Je n'ai rien de
précis, je devrai demander des précisions.
M. le Président, nous avons le droit de nous interroger sur la
compétence de celui qui détient le portefeuille comme ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation. Nous avons le droit de demander, avant
d'adopter un tel projet de loi, d'avoir les renseignements précis pour
la Chambre.
M. TOUPIN: M. le Président, d'abord, ce n'est pas une subvention
de $225,000 qui a été remise à la
fédération. Il s'agit d'un montant de $100,000 qui fut
donné à la fédération pour son fonds de roulement.
Ensuite, le ministère de l'Agriculture et de la Colonisation a mis
à la disposition de ceux qui avaient des postes de mirage et qui
devaient se désaffecter, $125,000. Ce montant de $125,000 n'est pas
remis à la fédération. Il est remis à ceux qui sont
propriétaires de postes de mirage et qui veulent bien se
prévaloir de cette mesure.
M. PAUL: Oui, mais continuez.
M. BERTRAND: Le ministre vient de nous donner quelques explications sur
les $125,000. Nous comprenons donc le ministre me dira si je comprends
bien ou non que les $125,000, d'abord, n'ont pas été remis
à la fédération, qu'ils sont allés à des
propriétaires... Peu importe, ce n'est pas la fédération
qui les a reçus. Il pourra nous dire qui, et tout ça. Il reste
$100,000 qui devaient servir à établir un fonds de roulement.
Or, le ministre demande aujourd'hui un demi-million de dollars pour un
fonds de roulement.
Je crois que nous sommes justifiés de demander au ministre
comment a fonctionné le fonds de roulement établi à
même la subvention de $100,000? Comment fonctionne-t-il à l'heure
actuelle et quelle est l'utilisation que l'on en a faite?
Nous avons le droit de le demander. Nous regrettons d'être
obligés, à plusieurs reprises et à tour de rôle, de
nous lever pour le demander.
M. TOUPIN: Bon, le montant de $100,000 de subvention qui fut
donné par le ministère dans le temps, comme fonds de
roulement...
M. PAUL: Oui, oui, nous le savons.
M. TOUPIN: Je le dis parce qu'il a été donné pour
cette fin-là.
M. BERTRAND: Cela fait dix fois que vous le dites.
M. PAUL: On veut informer le ministre qu'on le sait que c'était
pour le fonds de roulement. On veut avoir autre chose, maintenant. Qu'est-ce
qui a roulé avec?
M. TOUPIN: On a appliqué le règlement numéro 6,
donc...
M. PAUL: Bon.
M. TOUPIN: ... à l'intérieur de ce règlement, il y
avait l'achat des oeufs des producteurs; il y avait des boites, de l'emballage
à faire faire.
Ils ont pris la mise en marché des oeufs au Québec. Or, il
y avait le paiement aux producteurs, il y avait la question de l'emballage, le
décoquillage, par exemple. On achetait des oeufs et on les revendait au
décoqulllage pour maintenir un prix stable, pour que les producteurs
puissent toucher un peu plus. Au fond, les $100,000 ont été
dépensé à cela. Mais, le donner au cent près, c'est
une autre question.
M. VINCENT: Ce qui veut dire, M. le Président, qu'à
l'heure actuelle la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec a dépensé la somme de $100,000 pour
ce que le ministre vient de nous dire, dans les grandes lignes, sans donner de
détails. Le ministre admet Qu'il n'a pas le bilan exact de ce montant de
$100,000, qu'il devrait présenter très prochainement, en vertu de
la loi, je crois, qu'ils doivent présenter cela à l'auditeur. A
l'occasion de la loi que le ministre présente, il aurait dû
insister pour l'avoir. Donc, cela veut dire qu'à l'heure actuelle la
fédération a be- soin d'une garantie d'emprunt. Une garantie
d'emprunt, maintenant. Pour les $100,000, nous n'avons pas les détails,
mais là, elle a besoin d'une garantie d'emprunt. Est-ce que le ministre
sait à quelles fins les $100,000 ont été
dépensés? S'il le sait, la garantie d'emprunt qu'il donnera,
à quelles fins cet argent, qui sera emprunté, sera-t-il
dépensé?
Nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous nous posons la
question: Si le ministre n'est pas capable ou n'a pas été en
mesure avant aujourd'hui de savoir à quoi ont servi les $100,000, est-ce
qu'il sera en mesure de nous dire, par exemple dans quinze jours, trois
semaines ou un mois, à quoi serviront les $400,000 ou les $500,000? Il
faudrait qu'il nous le dise tout de suite. Il faut quand même qu'il soit
en mesure de nous le dire. Tout à l'heure, nous arriverons à
l'article 3, c'est $400,000 qui est marqué. Il nous proposera un
amendement pour $500,000. Nous allons lui poser une question, à ce
moment-là: Pourquoi $400,000 vendredi et $500,000 aujourd'hui? Est-ce
qu'il y a un bilan pour les $400,000? A quoi servira cet argent?
Dans l'article 1, on dit: « Le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation peut, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil,
garantir au nom du gouvernement le paiement en capital et intérêts
de tout emprunt contracté par la Fédération des
producteurs d'oeufs de consommation du Québec. »
Première question: Est-ce que la fédération
empruntera de l'argent? Est-ce que le ministre est au courant si la
fédération en empruntera oui ou non?
M. TOUPIN: La fédération empruntera sûrement de
l'argent pour se constituer un fonds de roulement.
M. VINCENT; Comme cela, le ministre dit que la fédération
empruntera de l'argent. Est-ce qu'à ce jour, le 16 juillet 1970, la
fédération a. contracté un emprunt?
M. TOUPIN: Il n'y a aucun emprunt de contracté par la
fédération, actuellement.
M. VINCENT: Est-ce que la fédération a des dettes?
M. TOUPIN: Il est certain que la fédération a des
dettes.
M. VINCENT: Quelles sont les dettes que la fédération a,
à l'heure actuelle? Ce sont les questions qu'on doit poser à une
fédération ou à un groupe qui vient nous rencontrer pour
avoir
l'aide du gouvernement. C'est normal. Quelles sont les dettes de la
fédération, à l'heure actuelle?
M. TOUPIN: Les dettes de la fédération s'évaluent,
approximativement, à quelques dollars près, à $400,000,
qu'elle doit surtout pour l'emballage.
M. VINCENT: Donc, M. le Président, ce n'est pas aux fins de se
constituer un fonds de roulement. Donc l'emprunt, c'est pour payer des
dettes.
M. PAUL: C'est cela.
M. VINCENT: Dans la loi, on dit bien que le montant que le ministre de
l'Agriculture peut garantir comme emprunt, c'est pour constituer un fonds de
roulement. Et là, le ministre vient de nous dire que c'est pour payer
des dettes.
M. TOUPIN: M. le Président, je n'ai pas dit au
député de Nicolet que ce montant servirait à payer des
dettes. Le député de Nicolet m'a posé une question,
à savoir si la fédération avait des dettes. J'ai dit :
Oui, la fédération a des dettes. Il me semble que c'est
clair.
M. VINCENT: Oui.
M. PAUL: De l'ordre de $400,000.
M. VINCENT: La fédération a des dettes de l'ordre de
combien?
M. LAPORTE: Le ministre n'a pas dit qu'ils payeraient les $400,000 de
dettes avec les $400,000 de fonds de roulement. Ils créent un fonds de
roulement et ils ont des dettes qu'ils payeront à
échéance.
M. VINCENT: Quel est le montant actuel des dettes?
M. TOUPIN: Je viens de vous le dire. Le montant actuel des dettes se
situe entre... Il varie...
M. VINCENT: Le montant actuel des dettes varie entre...
M. TOUPIN: Disons qu'il y a $400,000 pour la question de l'emballage; il
y a $200,000 pour la paie des producteurs, cette paie qui est attribuable
à un système de paie actuellement prévu dans un
règlement.
Alors il y a toujours une paye en arrière. Cette paye est de
$225,000. Alors cela fait $600,000, mais il y a des comptes à recevoir
pour près de $700,000.
M. VINCENT: Ils ont des comptes à recevoir pour $700,000?
M. TOUPIN: Oui, il y a des comptes à recevoir pour à peu
près $650,000 à $700,000.
M. VINCENT: Ils ont des comptes à recevoir pour $700,000. Ils ont
reçu $100,000 de subventions. Est-ce que les comptes à recevoir
de $700,000 peuvent être... En vertu de l'article 88 de la Loi des
banques, est-ce qu'on peut se servir des comptes à recevoir? C'est de la
marchandise qu'ils ont vendue, ça?
M. TOUPIN: Non, la fédération ne peut pas prendre en
garantie les comptes à recevoir qu'elle a, parce qu'ils appartiennent
aux producteurs.
DES VOIX: Bien non.
M. LOUBIER: Non, mais une fédération, en soi, ce n'est
rien, c'est une personne morale. Que les producteurs donnent leurs comptes en
garantie. C'est tout. Qu'ils fassent cession de leurs créances.
M. VINCENT: Pour la fédération, nous avons le tableau. Sur
l'article 1, disons que n'importe quel député en cette Chambre,
s'il était ministre de l'Agriculture, se serait levé et aurait
dit au président du comité: A l'article 1, j'ai telles
informations à vous donner. La Fédération des producteurs
d'oeufs du Québec a présentement des dettes au montant de
$400,000 qui consistent en des emballages, des caisses, machinerie,
installation; $400,000 de dettes. Elle a présentement pour $200,000 de
paiements non faits aux producteurs d'oeufs du Québec, pour un total de
$600,000 qu'elle a dans les livres, qu'elle doit payer. Elle a des comptes
à recevoir pour $700,000. Mais comme ce n'est pas suffisant pour assurer
un roulement normal, elle a besoin d'une garantie d'emprunt du ministre de
l'Agriculture. Et cette garantie d'emprunt, nous la demandons en vertu du bill
27, à l'article 1.
Là, nous posons au ministre cette question. Un fonds de
roulement, $100,000, il n'a pas les détails. Il nous dit que la
Fédération des producteurs d'oeufs contractera un emprunt tout de
suite. Cela veut dire que la semaine
prochaine ou dans quinze jours, lorsque la loi sera votée, le
ministre de l'Agriculture va présenter un arrêté
ministériel, lui permettant de garantir l'emprunt de la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec.
Est-ce qu'à ce moment-là le ministre aura il ne le
sait pas aujourd'hui, il nous le dit, avant de garantir les $400,000 en
détail, à quoi servira l'emprunt contracté de $400,000 ou
de $500,000? A ce moment-là, est-ce qu'il aura, en détail,
à quoi a servi le montant de $100,000 de subventions que la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec a
reçu? Je pense que c'est normal, comme le disait le député
de Maskinongé et leader de l'Opposition, tout à l'heure, que le
ministre ait en sa possession ces documents, car le conseil des ministres va
lui demander ces documents, avant d'accepter de permettre au ministre de
l'Agriculture de garantir cet emprunt. Est-ce que le ministre aura ces
chiffres?
M. TOUPIN: Oui, oui, nous aurons certainement tous les chiffres
nécessaires pour appliquer la présente loi. Présentement,
la demande est faite. C'est-à-dire qu'il y a des comptables qui
travaillent, et bientôt, nous aurons une donnée précise de
la situation économique de la fédération, à tous
les points de vue.
M. VINCENT: Est-ce que cette garantie d'emprunt aura une limite?
M. TOUPIN: Sans aucun doute, elle aura une limite.
M. VINCENT: Cinq ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans, 30 ans, 40 ans?
M. TOUPIN: Bien, écoutez, il ne faudrait peut-être pas se
rendre à 40 ans, moi, je serais porté à dire moins de 10
ans. Quarante ans, c'est un peu loin. On prévoit entre trois ans et cinq
ans. Après discussion avec la fédération, on
prévoit entre trois et cinq ans la période de remboursement.
M. VINCENT: Donc, cela veut dire que, d'ici trois à cinq ans, il
y aura une taxe indirecte sur la vente des oeufs d'un demi-cent la douzaine.
Bien oui, dans la garantie d'emprunt, on dit qu'on prévoit de trois
à cinq ans...
M. LAPORTE: M. le Président, puisque le débat menace
d'être long, est-ce qu'on peut au moins s'en tenir à l'article 1.
Vous aurez l'occasion d'en discuter à l'article 4.
M. PAUL: M. le Président, le ministre est-il en mesure de nous
dire quel a été le montant versé en honoraires et en frais
juridiques à même le fonds de $100,000? Je comprends que la loi
est contestée devant les tribunaux. Les honoraires ont-ils
été payés jusqu'à maintenant? Est-ce que cela a
été pris à même le fonds de roulement? Le ministre
peut-il nous dire quel montant a pu être utilisé à
même la somme de $100,000 pour payer les frais juridiques?
M. TOUPIN: Ce montant de $100,000, qui a été donné
en fonds de roulement, n'a pas servi à ces fins-là. D'abord, il
était défendu qu'il serve à ces fins-là.
Vous connaissez un peu l'administration d'un plan conjoint? Un montant
d'un demi-cent est prélevé présentement sur chaque
douzaine d'oeufs mise en marché. Ce prélèvement d'un
demi-cent sert précisément à administrer la
fédération et non le règlement numéro 6. Or, c'est
avec ces prélèvements que la fédération
s'administre, y compris les frais dont vous venez de parier.
M. LOUBIER: M. le Président, même quand il s'agit d'une
subvention pour fins de loisirs, lorsque ça dépasse un montant,
par exemple, de $1,000 ou avant de donner une subvention même pour des
kiosques d'information touristique aux chambres de commerce, etc., on exige,
à chaque année, un bilan détaillé des
activités, avec les dépenses, les prévisions pour les fins
d'administration, etc. En analysant le rapport qui nous est soumis, nous
décidons, d'une façon lucide et rationnelle, si, oui ou non,
cette Chambre de commerce ou ce groupement mérite d'obtenir une
subvention.
Or, le ministre nous a dit, tout à l'heure, que, depuis quelque
temps, il a rencontré à moult reprises les dirigeants de la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec. Or, le
ministre n'a jamais pensé à demander quelle utilisation a
été faite du montant de $100,000 qui lui avait été
octroyé. Le ministre n'a jamais pensé également à
leur demander à quelles fins avait servi ce montant de $100,000 avant de
leur octroyer un montant additionnel de $400,000 ou de $500,000.
Ce n'est pas pour embêter le ministre, ce n'est pas pour le mettre
dans l'eau bouillante; je le dis très sérieusement. Si
c'était pour cela, je le lui dirais également. Il s'agit d'une
somme de $100,000 qu'on leur a accordée et le ministre vient nous dire,
en Chambre: Je ne sais pas ce qu'on a fait avec ce montant de $100,000 et ce
qu'on va faire avec le montant
de $400,000. Je sais qu'une partie servira à un fonds de
roulement, une partie pour l'emballage, etc. On a donné un chèque
en blanc de $100,000 qui a été endossé par la
Fédération des producteurs d'oeufs du Québec et,
là, on leur donne un autre chèque en blanc sans production de
bilan, sans production d'une analyse des dépenses faites et des
projections pour les prochaines dépenses.
On nous demanderait, à ce moment-là, d'accepter les
explications très vagues du ministre, les voeux pieux de sa
législation. Eh bien, je suis persuadé que, s'il y avait
liberté de vote en Chambre de tous les partis politiques, 99.9% de ses
propres collègues ne pourraient pas accepter les renseignements qu'il
vient de donner, parce qu'on ne sait pas à quoi a servi le montant de
$100,000 et qu'on ignore à quelles fins serviront les $500,000. Et le
ministre est tout surpris de nous voir insister pour savoir quelle utilisation
a été faite du montant de $100,000 et quelle utilisation on fera
du montant de $500,000!
Il me semble que c'est règlementaire, lui qui a rencontré
à maintes reprises les représentants de la
Fédération des producteurs d'oeufs, qu'il le dise donc d'une
façon précise et nous n'aurions pas perdu une demi-heure de notre
temps en Chambre, à la fin de cette session. Qu'il arrête de
tourner autour du pot. Si le ministre ne le sait pas, qu'il nous le dise donc
carrément qu'il a donné un chèque en blanc sans prendre
les précautions voulues et, comme le disait le chef de l'Opposition tout
à l'heure, sans avoir agi avec prudence et avec compétence. Au
moins, nous comprendrons qu'il est nouveau et qu'il a pu faire un mauvais pas.
A ce moment-là, ça l'incitera à être plus prudent
à l'avenir.
Il est impossible que nous puissions accepter non pas les explications,
mais le verbiage du ministre autour d'une somme tout de même assez
rondelette de $500,000. Surtout quand on traverse une période
d'austérité et surtout quand on parle d'efficacité et
d'économie. C'est un grand scandale d'avoir cinq limousines qui ont
peut-être coûté $40,000, alors que là, nous avons
$500,000, un chèque en blanc dont nous ne savons pas où il
va.
M. TOUPIN: Le député de Bellechasse abuse quelque peu.
J'ai donné quand même, je pense, assez d'explications sur
l'utilisation des $100,000 pour que l'on puisse, au fond, savoir à quoi
s'en tenir. En ce qui a trait aux $500,000, d'abord il n'est pas certain que ce
soit $500,000 que l'on autorisera; la loi autorise un maximum de $500,000, mais
cela ne veut pas dire que ce sera $500,000.
Il est bien certain qu'avant de consentir quoi que ce soit, nous aurons
en main les données économiques de base nécessaires et un
rapport comptable de la situation. Il est certain que nous l'aurons en main.
D'ailleurs, comme je le disais tantôt, il est demandé, ce rapport
et nous l'aurons.
M. PAUL: ... si vous l'aviez eu avant?
M. LOUBIER: M. le Président, le ministre vient de nous redire
qu'il n'a pas de rapport sur l'utilisation qu'on a faite des $100,000, qu'il
n'a pas exigé de rapport ou qu'il ne l'a pas eu. Cela ne prend pas une
éternité à une fédération qui a un
secrétariat d'établir à quelles fins ont servi ces
$100,000. Je dis et je répète, le plus consciencieusement
possible, que le ministre a péché, soit par incompétence,
soit par manque de prudence ou par manque de connaissance de l'administration
de la chose publique.
M. LAPORTE: Seul ou avec d'autres. M. LOUBIER: Oui, mon père.
M. TOUPIN: Je l'ai dit au début et je vais le
répéter. Il y a eu un rapport de demandé,
M. LOUBIER: Quand?
M. TOUPIN: Il ne nous est pas parvenu à temps.
M. LOUBIER: Quand a-t-il été demadé?
M. TOUPIN: Il devait être prêt le 10 juillet et à
cause des problèmes que la fédération connaît
actuellement au niveau de l'injonction, on n'a pas pu faire tout le travail
pour nous le produire à temps. Il avait été demandé
pour le 10 juillet et on n'a pas pu nous le fournir. Nous ne l'avons pas encore
et nous espérons l'avoir au cours des prochains jours ou des prochaines
semaines.
Il nous faudra avoir le rapport complet, en tout cas, avant de consentir
quelque garantie de prêt que ce soit à la
fédération. Il nous faudra avoir ces chiffres en main.
M. LOUBIER: Ecoutez, le ministre ne prétendra tout de même
pas que la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec n'a pas de système comptable, qu'elle n'a pas une
comptabilité. A ce moment-là, ce n'est pas un mystère,
cela ne demande pas un mois de préparation pour écrire au
ministre et lui présenter un rapport, même verbal. Le ministre
aurait pu, au moins, avoir la décence d'exiger qu'on lui dise
verbalement, par téléphone ou par la voix d'un
représentant, à quoi ont servi les $100,000. Il aurait pu ainsi
au moins sauver la face en Chambre et répondre de façon
intelligente quant à l'utilisation de ces $100,000.
En même temps, nous aurions pu accepter sa demande, même si
elle nous semble un peu nébuleuse. Ils n'auront peut-être pas
besoin de $500,000; on ne le sait pas trop encore. Tout de même, cela
aurait pu être acceptable si, au moins, il avait eu
l'élémentaire prudence de nous dire à quoi à servi
ce montant, non pas dans tous les détails, à deux cents
près, mais au moins que $5,000 ont servi à telle fin, $15,000
à telle fin, $18,000 à telle fin. Ainsi, la Chambre aurait
été renseignée et les Québécois aussi.
M. TOUPIN: M. le Président, j'ai eu un rapport verbal de
l'utilisation de l'argent. Il me plaît de répondre au
député de Bellechasse que les $100,000 ont servi, comme je le
disais, à l'administration de l'agence et notamment au paiement des
oeufs, à l'emballage et au décoquillage.
Ils ont servi à ça dans une proportion de 90% à
95%. Ce sont les rapports verbaux qu'on nous a donnés; les rapports
comptables devaient entrer pour le 10. Ils ne sont pas encore entrés
mais, on les attend dans les délais les plus courts. Le rapport verbal,
tel que l'a souligné le député de Bellechasse, on l'a eu
et on l'a demandé.
M. LOUBIER: Est-ce qu'on vous a donné des chiffres pour chaque
tête de chapitre: l'emballage, le prix des oeufs, etc? Est-ce qu'on vous
a donné des chiffres?
M. LE PRESIDENT: M. le Président, en vue de mettre...
M. LAPORTE: Deux mots. Le 16 juillet 1969, signé par le ministre
de l'époque, un certain M. Vincent, député de Nicolet, il
y a un rapport au conseil des ministres: La Fédération des
producteurs d'oeufs requiert un fonds de roulement de $1,200,000. On part de
là. Je ne tire la jambe de personne, j'explique. C'est $1,200,000. Le
ministre dit: De ces $1,200,000, une entreprise bancaire serait prête
à prêter $200,000. Nous, le gouvernement, dit toujours le
ministre, pour créer le fonds de roulement, $1,200,000, il y a une
banque qui est prête à prêter $200,000. Nous allons avancer
50%, soit $100,000. C'est toujours le ministre qui parle. Je n'invente rien, il
le sait aussi bien que mol. Les $100,000 ont été versés au
fonds de roulement. Ils y ont servi à l'administration.
M. LOUBIER: Non, non, l'emballage des oeufs.
M. VINCENT: Ils n'ont pas le droit de servir à
l'administration.
M. LAPORTE: Une minute. Cela a servi pour le fonds de roulement à
créer. Le ministre a demandé un rapport comptable. Quand
même on s'exciterait à essayer comme des guêpes, ça
ne change rien. Une minute.
M. PAUL: On aimait mieux l'autre règne que ça.
M. LAPORTE: Il m'est arrivé, par hasard, il y a huit ou neuf
jours, d'aller déjeuner dans un restaurant autour du palais de justice.
Il y avait là Me Pierre Viau, avocat de la fédération,
avec tous les principaux intéressés. Ils ont dit: Nous sommes
justement devant les tribunaux. Tous les officiers de la
fédération, tous ceux qui ont quelque chose à voir avec la
comptabilité sont pris devant les tribunaux depuis deux semaines pour
l'injonction. Le député de Bellechasse dit que non...
M. LOUBIER: Non, non, je répondrai sur cela.
M. LAPORTE: Quand même vous me répondriez, la raison pour
laquelle le rapport comptable n'a pas été envoyé, c'est
que, depuis une longue période, les principaux officiers de la
fédération sont retenus comme témoins devant la cour
Supérieure où se plaide l'injonction sur la
constitutionnalité. Ils ont donné au ministre un rapport verbal
et le rapport comptable va suivre. Deuxièmement, ce n'est pas le
gouvernement qui prête. Ils ont tenté d'aller à la banque,
et ç'a été le premier rapport que nous a fait le ministre,
pour aller donner en garantie leurs $700,000 de comptes. On leur a dit:
Ça n'est pas acceptable, ça, parce que c'était
déjà en garantie sur autre chose. Les comptes appartiennent aux
producteurs, enfin, ce n'est pas un instrument qui peut être donné
en garantie.
Disons que, du point de vue des avocats et du point de vue des
comptables, ça n'est pas un instrument qui pouvait être
donné en garantie pour créer le fonds de roulement. Ils ne
pouvaient donc pas passer par là. Ils sont revenus voir le gouvernement,
disant: Donnez-nous le droit, donnez-nous quelque chose qui va être
accepté comme garantie par la banque. Nous avons donné ça,
mais c'est labanque qui va prêter. La banque va poser toutes les
questions sur l'administration financière. Cela va être
corroboré par le rapport que va recevoir le ministre et nous, avant de
donner notre garantie. Nous allons avoir
tous ces renseignements-là, qui vont compléter ceux que le
ministre vient de donner verbalement et qui, malheureusemant, ne sont pas
appuyés par le rapport comptable pro forma, qui n'a pas pu être
livré, parce que les officiers sont actuellement pris ailleurs pour une
cause. Evidemment, c'est l'existence même de la Fédération
qui est en jeu devant les tribunaux. Cela, l'ancien ministre le sait, le
député de Nicolet le sait.
Je pense donc que, devant ces explications, on devrait adopter l'article
l. Si, ensuite, on a peut-être des remarques, des hésitations ou
des oppositions quant a la retenue que l'on veut faire sur les oeufs, on pourra
en discuter.
M. VINCENT: Je vais donner un coup de main au ministre de l'Agriculture
et ça va compléter ce que le député de Chambly
vient de dire. D'abord, la Fédération des producteurs d'oeufs de
consommation du Québec est une agence de vente et non pas une agence
d'achat. Dites-le, si c'est une agence d'achat? Les oeufs sont en consignation
à la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec; les oeufs, étant en consignation pour être vendus,
ne peuvent pas servir de garantie auprès de la banque.
C'est la première réponse que le ministre aurait dû
donner pour l'information des membres du comité. C'est que la
fédération a besoin de contracter un emprunt pour payer ces oeufs
aux producteurs, parce qu'elle a $700,000 de comptes à recevoir. Les
ventes d'oeufs, à cause du délai, peuvent retarder d'une semaine
ou trois, quatre, cinq jours, six ou sept jours. Entre-temps, ils peuvent payer
les producteurs. Ils ne veulent pas faire ce qui se fait présentement
dans le domaine laitier, laisser les paies 15 jours, trois semaines en retard.
C'est pour ça qu'il y a un délai, présentement, dans le
paiement aux producteurs des oeufs qu'ils livrent à la
fédération, non pas qu'ils vendent à la
fédération, mais qu'ils livrent à la
fédération. C'est la première explication que le ministre
aurait dû nous donner. Cela aurait éclairé les membres du
comité.
Deuxième explication: Pourquoi le ministre ne nous lit-il pas
l'arrêté en conseil que le ministre ne rit pas qui a
permis au ministre de l'Agriculture de verser un montant de $100,000 à
la Fédération des producteurs d'oeufs? Les conditions sont dans
l'arrêté en conseil, et je pose la question suivante au ministre:
Est-ce que le ministre a demandé à la Fédération
des producteurs d'oeufs de consommation du Québec si elle a
respecté les conditions de l'arrêté en conseil pour cette
somme de $100,000? Si oui, qu'elle soumette son rapport, cela sera
vérifié. C'est aussi simple que ça. Cela se fait
normalement dans l'administration. Si le ministre avait, à cinq heures
moins dix, cinq heures moins cinq, lu l'arrêté en conseil, il
aurait dit: Voici quelles sont les conditions qu'elle devait respecter. Le
rapport, c'est bien dommage, je ne l'ai pas demandé; j'ai oublié
de le demander; je vais aller le chercher et je vais l'obtenir pour que je
puisse renseigner les membres du comité. Malheureusement, pas cette
fois-ci, mais à la prochaine occasion. C'est important que nous l'ayons.
C'est aussi simple que ça.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. RUSSELL: Non. Je pense que nous devrions savoir si cet emprunt sera
pour payer les oeufs ou pour payer de l'administration. Il y a là
$700,000, nous a dit le ministre, en comptes à recevoir et ceci est une
garantie aux producteurs qui fournissent des oeufs. On dit que ces comptes
à recevoir ne peuvent pas être utilisés comme garantie
à la banque. Donc, actuellement, on veut faire un emprunt à la
banque, pour payer qui, les producteurs? Pour quelle raison ne peut-on pas
prendre leurs comptes à eux, les donner en garantie, pour les payer
eux-mêmes ?
M. LAPORTE: Demandez ça à votre voisin.
M. RUSSELL: Il n'est pas le ministre de l'Agriculture. Il est là,
le ministre de l'Agriculture.
M. LAPORTE: Le député de Nicolet vient de dire que
ça ne peut pas se faire.
M. TOUPIN: Justement, le député de Nicolet a dit que cela
ne pouvait se faire de prendre les comptes à recevoir parce que les
oeufs sont en consignation à la fédération. La
fédération sert d'intermédiaire entre le marché et
le producteur.
Les comptes à recevoir appartiennent aux producteurs: ils
n'appartiennent pas à la fédération. Cela, il me semble
que c'est clair. Je ne sais pas si, dans l'esprit des uns et des autres, c'est
encore ambigu. Mais dans le mien, c'est clair.
M. RUSSELL: C'est très clair, oui. Mais pour quelles raisons,
s'ils ont $700,000 de comptes recevables, exigent-ils d'être
payés, lorsqu'ils savent que les oeufs sont vendus et pour lesquels la
fédération n'a pas encore été payée?
M. TOUPIN: Les comptes recevables sont de l'ordre de $600,000 à
$700,000. Mais le chiffre d'affaires de la fédération est plus
élevé que ça. Or, c'est tout le roulement, c'est tout le
fonctionnement économique de la fédération. C'est
précisément ce que va venir faire l'emprunt que veut contracter
la fédération. Cela va venir constituer le fonds de roulement
requis pour faire fonctionner normalement l'agence, c'est-à-dire payer
les producteurs, payer l'emballage, payer le transport, etc., les contrats
qu'elle a avec les différents distributeurs, tout ça. Il va
servir à ça, le fonds de roulement comme il sert dans toute
entreprise normale.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté.
M. VINCENT: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait,
à l'article 1 je ne soumettrai pas d'amendement pour que cela
aille plus vite après les mots « en capital et
intérêts de tout emprunt contracté », à la
cinquième ligne... Partons de la cinquième ligne, « en
capital et intérêts de tout emprunt contracté »,
après le mot « contracté », on pourrait remplacer
« la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec » par « des fédérations de producteurs
constituées en vertu de la Loi des marchés agricoles, Statuts
refondus 1964, chapitre 120 ». Ce qui voudrait dire, en
définitive, que cet article 1 ne s'appliquerait pas seulement à
la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation du
Québec, mais s'appliquerait également à toute
fédération de producteurs contituée en vertu de la Loi des
marchés agricoles, Statuts refondus 1964, chapitre 120.
M. LAPORTE: M. le Président, en ce moment, pour les raisons qui
ont été données en deuxième lecture, disons que
nous ne sommes pas disposés, le comité, au moins quant à
nous, à accepter cet amendement.
M. VINCENT: Est-ce que le gouvernement, le leader parlementaire ou le
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, pourrait nous assurer que,
dès l'automne, il pourra insérer une loi dans les statuts qui
permettra au ministre de l'Agriculture et de la Colonisation de faire de
même pour d'autres fédérations de producteurs qui seront
constituées ou qui sont constituées présentement en vertu
de la Loi des marchés agricoles?
M. TOUPIN: Les objectifs que poursuit le gouvernement, le
ministère, en ce qui a trait aux avances de banques et aux plans
conjoints sont les suivants: cette loi constitue un moyen d'aider une
fédération. Le problème de cette fédération,
croyons-nous, va se régler à partir de cette loi. Cela va nous
donner le temps de repenser, de regarder comment doivent fonctionner au
Québec les agences de vente.
Avec le temps, nous verrons comment elles doivent se financer. Nous
devrons peut-être réviser ou amender la Loi de mise en
marché pour prévoir des moyens de créer des agences de
vente, des moyens de créer des fonds de roulement pour que les
producteurs soient en mesure, le moment venu, de faire fonctionner une agence
de vente.
Lorsque la fédération fut mise en place, le premier
problème avec lequel elle fut aux prises fut précisément
celui d'un fonds de roulement. Les représentants sont venus plusieurs
fois au ministère demander les sommes dont ils avaient besoin pour faire
fonctionner normalement la fédération. Ils ont obtenu $100,000,
etc.
M. VINCENT: M. le Président, l'agence de vente est entrée
en fonction à quelle date?
M. TOUPIN: Le 11 mai. M. VINCENT: Quelle année? M. TOUPIN: En
1970.
M. VINCENT: Et le gouvernement précédent a quitté
à quelle date?
M. TOUPIN: Le 11.
M. VINCENT: Le 12 mai 1970.
M. TOUPIN: Le 12, c'est cela.
M. VINCENT: Donc, le gouvernement précédent était
là une journée après l'entrée en fonction de
l'agence et, pour cette journée, ils ont quand même eu
$100,000.
M. TOUPIN: M. le Président, je voudrais apporter une
précision au député de Nicolet. Au moment où
l'agence de vente s'est constituée et au moment où la
fédération a pris le temps d'étudier l'agence de vente,
elle a rencontré le ministère.
M. VINCENT: Oui.
M. TOUPIN: Elle a discuté avec lui de l'ensemble du financement
de l'agence. Le premier problème qui fut soumis au ministère fut
précisément celui du fonds de roulement.
M. VINCENT: C'est cela.
M. TOUPIN: Avec cette loi, nous réglerons le problème de
la Fédération des oeufs et nous mettrons en place un
mécanisme qui, dans l'avenir, permettra aux producteurs, lorsqu'ils
voudront se donner des agences de vente, de se financer et de fonctionner
normalement. C'est pour cela que nous ne voulons pas que cette loi s'applique
à toutes les fédérations. C'est là que cela
deviendrait dangereux. C'est là que le précédent dont nous
parlions au début deviendrait dangereux. C'est là qu'il
s'appliquerait à toutes sortes de problèmes. Là, nous
réglons un problème et, à partir de là, nous allons
apporter une solution valable, permanente, à l'emsemble du reste.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. RUSSELL: M. le Président, si je comprends bien le ministre de
l'Agriculture, il doit y avoir deux comptes: un qui appartient aux producteurs
qui fournissent les oeufs et l'autre, c'est un poste qui fait le mirage, si
vous voulez, l'entreposage, la mise en marché et la manipulation des
oeufs. Est-ce la situation?
Actuellement, l'emprunt va à quel compte? Est-ce qu'il va aux
producteurs, pour se payer eux-mêmes leurs oeufs lorsqu'ils font la mise
en marché ou s'il va pour l'opération de l'emballage, comme l'a
dit le ministre, et la manipulation des oeufs? A qui? A quel compte va cet
emprunt?
M. TOUPIN: Comme je le disais tantôt, la Fédération
des producteurs d'oeufs du Québec s'administre elle-même par un
prélèvement spécial. La Fédération des
producteurs d'oeufs du Québec a le droit de mettre en place une agence
de vente et de l'administrer. Cette agence de vente s'administre
elle-même. Donc, il y aura deux comptes: le compte de l'agence et le
compte de la fédération. Les sommes dont il est question, ici,
s'appliqueront à l'agence de vente exclusivement.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. PAUL: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté sur division.
M. BERTRAND: Sur division, oui.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2?
M. VINCENT: « Ces garanties sont accordées suivant des
modalités et conditions déterminées par le
lieutenant-gouverneur en conseil. » Est-ce que, présentement, le
ministre peut nous donner les modalités et les conditions?
Le ministre dit que c'est urgent d'adopter cette législation, que
la Fédération doit contracter son emprunt très
prochainement. Est-ce que les conditions sont arrêtées. Est-ce que
le ministre pourrait nous donner les conditions que le lieutenant-gouverneur en
conseil imposera ou les conditions qui seront imposées à la
fédération pour l'emprunt?
M. TOUPIN: On a commencé à travailler un peu
là-dessus, ce n'est pas prêt. On attend l'ensemble des rapports
qui doivent venir de la fédération et au moment où on
acceptera la garantie, ce sera prêt. On étudie, on met tout cela
en place. Oui, oui, c'est normal, vous savez.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2, adopté sur division?
M. PAUL: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3?
M. PAUL: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté sur division.
M. VINCENT: M. le Président, à l'article 3...
M. BERTRAND: N'oubliez pas votre amendement.
M. VINCENT: A l'article 3... M. TOUPIN: On le travaille...
M. VINCENT: ... dans le projet de loi no 27, j'avais marqué un
gros point d'interrogation. J'avais inscrit: Pourquoi $400,000?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Si je comprends bien, il y a un amendement de
l'honorable ministre de l'Agriculture...
M. VINCENT: Aujourd'hui, je suis obligé de changer ma question.
Le ministre tout à l'heure a mentionné que le
lieutenant-gouverneur avait pris connaissance de son amendement. Est-ce que le
lieutenant-gouverneur a pris connaissance de l'amendement?
M. TOUPIN: Oui, M. le Président.
M. VINCENT: Le ministre apporte un amendement substituant au chiffre de
$400,000 le chiffre de $500,000. Mais pourquoi ce changement de 25% en l'espace
de trois jours, parce qu'il y a une augmentation de 25% en l'espace de trois
jours?
M. TOUPIN: Je vais donner au député de Nicolet...
M. VINCENT: Non, non, pas au député de Nicolet, aux
membres du comité.
M. TOUPIN: Alors aux membres du comité, voilà. J'ai
rencontré la fédération et la Fédération des
producteurs d'oeufs...
M. PAUL: Quand?
M. TOUPIN: Quand je dis que je l'ai rencontrée, je ne dis pas
toute la vérité. Je devrais dire que je suis entré en
contact avec elle par téléphone.
M. BERTRAND: Avec elle?
M. TOUPIN: Je suis en contact avec elle assez
régulièrement lorsqu'il s'agit d'un problème comme
celui-là. On m'a fait valoir que $400,000 ne seraient peut-être
pas suffisants. On m'a dit que $500,000 seraient peut-être
préférables et on s'est appuyé sur un rapport qui fut
préparé par un bureau spécialisé, Bélanger,
Chabot, Nobert et Angers, qui suggérait dans son étude, qui fut
faite en 1968, je pense, un fonds de roulement qui devrait varier normalement,
j'ai donné les chiffres tantôt, entre $375,000 et $430,000
environ. On m'a donc demandé s'il était possible d'ajouter
$100,000 pour assurer une marge de sécurité.
M. VINCENT: M. le Président, tout à l'heure le
député de Chambly a eu l'occasion de lire un rapport qui avait
été signé par...
M. LAPORTE: M. le Président, pouvons-nous tenir pour acquis que
cela ne sera pas adopté avant six heures?
M. BERTRAND: Il reste trois articles. On pourrait peut-être
ajourner la séance.
M. LAPORTE: Il y aura peut-être une discussion de quelques
secondes sur l'article 4. Comme il y a deux réceptions, l'une de M. le
président pour MM. de la Galerie de la presse et que je dois
moi-même recevoir le commandant d'un navire italien, le Vittorio Venette,
qui nous fait l'honneur de nous visiter, peut-être pourrions-nous
ajourner immédiatement, suspendre la séance jusqu'à huit
heures, après que le député de Dorion aura fait son
rapport.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorion.
M. BOSSE: M. le Président, la commission permanente des Affaires
culturelles a l'honneur de soumettre au comité plénier de la
Chambre son rapport. Cette commission à décidé de
rapporter, avec des amendements, le projet de loi numéro 9, Loi du Grand
Théâtre de Québec.
Cadillac Moly Mines
M. LAPORTE: M. le Président, je m'excuse de ne pas y avoir
pensé avant, mais j'avais à faire rapport quant à la
Cadillac Moly Mines dès que j'aurais les renseignements «Les
chèques de paie des 188 employés de la mine, du 25 mai 1970 au 6
juin 1970, au montant total de $24,000 ont tous été
remboursés hier.
La paie du 6 au 19 juin des employés sera acquittée par
Little Long Lake Gold Mines, qui est une filiale, au montant de $29,849,52.
Pour ce qui est des salaires dus entre le 21 et le 27 juin, c'est encore la
Little Long Lake qui va payer; salaires: $9,664.27, les chèques sont
émis aujourd'hui même. Bénéfices marginaux:
$6,040.70 payés aujourd'hui. Chèques de vacances: $27,220.27,
chèques qui sont prêts.
Quant à l'indemnité de séparation, l'autorisation
de payer sera donnée ces jours prochains, et c'est une somme minime
selon le Syndicat.
Quant aux sommes d'argent qui n'auraient pas été
payées, malheureusement le seul recours des ouvriers pour des sommes
minimes c'est prévu à l'article 98 de la Loi des compagnies. Leur
syndicat leur suggère de poursuivre directement les directeurs de la
compagnie.
M. le Président, voilà le rapport que j'avais à
faire à cette Chambre. Sur 225 employés, approximativement, 188
ont déjà été interviewés par les officiers
du ministère dans ce comité de reclassement afin de tenter de les
replacer ailleurs.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le rapport de l'honorable député
de Dorion sera-t-il adopté?
M. BERTRAND: Oui.
M. SAMSON: M. le Président...
M. BERTRAND: Il y aura des amendements
tantôt. Quels sont les amendements? A ce soir, qu'on ait le temps
d'examiner les amendements.
M. LAPORTE: Je pense que le député de... M. BERTRAND: Oui,
oui.
M. SAMSON: M. le Président, me permettrait-on quelques secondes
pour remercier le ministre dans cette affaire parce que la réponse qu'il
apporte répond à une question que j'ai posée une couple de
fois cette semaine. Cela regarde un problème qui était
très urgent, au sujet d'ouvriers de ma région. Cela a
été réglé, je pense, à la satisfaction de
tous. C'est pourquoi je veux remercier le ministère d'avoir fait
diligence dans ce cas.
M. LE PRESIDENT (Hardy): La séance du comité est suspendue
jusqu'à huit heures.
Reprise de la séance à 20 h 3
Comité plénier (suite)
M. HARDY (président du comité plénier): Article 3.
L'amendement de l'honorable ministre de l'Agriculture changeant le chiffre de
$400,000 pour $500,000 est-il adopté?
M. BERTRAND: Mol, je suis prêt. Adopté.
M. VINCENT: On accepte l'amendement, parce que...
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'amendement est accepté.
M. VINCENT: M. le Président, à l'article 3. Le
député de Chambly, cet après-midi, relisait un document
qui avait été présenté au conseil des ministres,
signé par votre humble serviteur et faisant une demande pour un montant
de...
Donc, se déroule présentement dans mon esprit le film qui
a précédé la présentation au conseil des ministres
de ce projet de loi pour l'acceptation des principes. Le ministre de
l'Agriculture se présente au conseil des ministres et dit: Messieurs,
j'ai besoin d'un projet de loi pour permettre de donner des garanties d'emprunt
à la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation de
la province de Québec, un projet de loi dans lequel nous inscrirons le
chiffre $400,000. Le conseil des ministres accepte; on prépare la
législation. Le ministre, tout à l'heure, nous dit que, sur un
appel de la Fédération des producteurs d'oeufs de la province de
Québec, on l'a informé que $400,000, ça ne serait pas
assez, une augmentation de 25%.
Alors, j'imagine que le premier ministre, la prochaine fois que le
ministre de l'Agriculture apportera au conseil des ministres un projet, va
certainement lui demander si tous les appels ont été faits. C'est
pour ça que, cet après-midi, nous avons...
M. BOURASSA: Vous en voulez donc aux oeufs? Vous en voulez aux
producteurs d'oeufs?
M. VINCENT: Non, non.
M. BOURASSA: Vous êtes contre la classe rurale.
M. PAUL: C'est parce qu'il coupe ses réponses, puis on
attend.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les créditistes applaudissent à
une taxe.
M. VINCENT: Est-ce que le ministre pourrait nous dire sur quoi il s'est
basé pour recommander un montant de $400,000 dans le premier projet et,
par la suite, trois jours plus tard, pour recommander un montant de $500,000 de
garantie d'emprunt, soit une augmentation de 25%?
M. TOUPIN: Aux premières rencontres que j'ai eues avec la
Fédération des producteurs d'oeufs pour étudier le
problème du fonds de roulement, on m'avait demandé une garantie
de $600,000. On a discuté la question un peu plus en profondeur. On
s'est rendu compte qu'une subvention de $100,000 avait été
versée et on a pris soin d'étudier le rapport de Bélanger,
Chabot, Nobert et Angers sur le financement de l'agence de vente. Or,
après étude, on a convenu que $400,000 pourraient faire
l'affaire, pourraient donner à la fédération tout ce dont
elle avait besoin comme fonds de roulement pour bien fonctionner. Après
s'être entendu là-dessus, j'ai continué mes contacts avec
la fédération.
M. VINCENT: ... avec la fédération?
M. TOUPIN: C'est à-dire pas définitivement, la
fédération m'avait demandé $600,000. On en a
discuté un peu et elle m'a laissé. Nous en avons discuté
entre nous et nous avions convenu que $400,000 feraient l'affaire.
Après, je suis entré en contact avec la fédération
et l'UCC. J'ai eu des rencontres directes avec l'UCC et j'ai
procédé par voie téléphonique, à plusieurs
reprises pour la fédération. Après avoir
étudié, notamment, les besoins de la fédération,
ses comptes à recevoir et ses dettes, ce dont on parlait cet
après-midi, on a convenu d'augmenter le montant de $100,000 pour assurer
encore davantage l'efficacité de la fédération dans son
fonctionnement futur au niveau de l'agence de vente. Si j'ai recommandé
$100,000 de plus, c'était pour me rendre à un désir de la
fédération, d'une part, oui, mais aussi après avoir
étudié le dossier. On recommandait de $330,000 à $400,000
environ; or, nous avons augmenté à $500,000. La marge est plus
sûre. On évite ainsi que la fédération revienne nous
voir. Nous sommes certains qu'avec ça elle pourra fonctionner
normalement. Ce sont les raisons qui nous ont amenés à
décider de l'augmenter de $100,000.
M. VINCENT: M. le Président, comma nous prorogeons ce soir, du
moins, d'après les informations...
M. PAUL: A moins d'imprévus.
M. VINCENT: ... à moins d'imprévus, au cas où
si nous revenions seulement en novembre ou décembre la
fédération, dans quinze jours ou trois semaines, pour assurer une
meilleure efficacité de fonctionnement encore, aurait besoin de $100,000
additionnels, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il serait
"prêt à accepter qu'au lieu de $400,000 qu'il y avait il y a deux
jours et de $500,000 qu'il y a ce soir, on inscrive le montant de $600,000, au
cas où il y aurait d'autres communications
téléphoniques?
M. BOURASSA: M. le Président, le ministre, tantôt, a
expliqué que c'était pour faire face à un problème
urgent.
M. VINCENT: Ah oui, d'accord!
M. BOURASSA: Il a pris, après consultation avec les membres de la
fédération, toutes les précautions. Je suppose que la
fédération elle-même doit se rendre compte que la session
ne reprendra pas avant la fin d'octobre. Alors, je pense qu'un montant de
$500,000 répond au problème qui nous a été soumis
pour venir en aide à la classe agricole.
M. VINCENT: Ah bon! Donc, le premier ministre confirme qu'à la
première rencontre, il n'avait pas pris toutes les précautions et
qu'à la deuxième, là, toutes les précautions ont
été prises.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est un problème survenu
assez rapidement. Il ne s'agit pas d'en imputer la responsabilité au
gouvernement ou à la fédération. On sait tous les efforts
qui ont été faits pour créer cette agence qui va permettre
d'aider une partie de la classe agricole. Il n'y a rien d'étonnant qu'au
départ les estimations n'aient pas été précises,
qu'elles aient été plutôt approximatives. Avec $500,000, on
a nettement l'impression, à la suite des discussions et des
négociations qu'on a eues avec la fédération, que le
problème est résolu, du moins à court terme.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 3, adopté. Article 4?
M. VINCENT: M. le Président, je lis cet article...
UNE VOIX: C'est l'article de la mort.
M: VINCENT: ... qui inscrit un nouveau principe dans toutes les
législations gouvernementales: une taxe de vente indirecte sur des biens
de consommation et d'alimentation.
Alors que le premier ministre m'écoute bien. Quatrième
article:
M. DEMERS: Je ne sais pas s'il va Comprendre.
M: VINCENT: Ah, il va comprendre! Je pense qu'il va le comprendre comme
il ne l'a jamais compris.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un « coconomiste! »
M. VINCENT: « Aux fins d'assurer le paiement de tout emprunt
garanti en vertu de l'article 1, la fédération est tenue de
déduire du produit des ventes d'oeufs qu'elle effectue un demi-cent par
douzaine d'oeufs qu'elle met en marché, jusqu'à remboursement de
tout emprunt garanti en vertude l'article 1, en outre des autres
déductions qu'elle est autorisée à faire à
même le produit de ces ventes en vertu de la Loi des marché
agricoles. »
Bon, un demi-cent la douzaine. Je pose la question au ministre de
l'Agriculture. Je dis: Est-ce que la garantie d'emprunt sera bonne pour dix,
vingt, trente, quarante ans? Ilme dit: Non, certainement pas quarante
ans; peut-être dix ans, mais probablement entre trois et cinq ans. Cela
veut dire, M. le Président, pour l'information du premier ministre,
qu'il est possiblequ'au cours des trois ou cinq ans qui viendront la
fédération déduise un demi-cent la douzaine. Cela veut
dire ceci: Si la garantie d'emprunt du gouvernement s'échelonne sur une
période de cinqans, le fédération pourrait
échelonner ses remboursements sur cinq ans. Et Jusqu'au moment où
le dernier dollar est remboursé, en vertu de cette garantie, elle prend
un demi-cent la douzaine.
Ma question est la suivante, et c'est là que le premier ministre
ouvrira les yeux: Combien de douzaine d'oeufs sont vendues dans la province de
Québec par année via la Fédération des producteurs
d'oeufs de consommation?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Consultez le « coconomiste »,
là!
M. BOURASSA: L'ancien ministre pose une question dont il devrait savoir
la réponse. Ila été ministre de l'Agriculture
durant des années.
M. PAUL: Non, non.
M. BOURASSA: Ilne le sait même pas, M. le
Président.
M. VINCENT: C'est 70 millions de douzaines.
M. BOURASSA: C'est complètement ridicule. C'est un aveu
d'incompétence.
M. TOUPIN: Ce n'est pas 70 millions.
M. BOURASSA: Si on ne voulait pas prolonger la session, nous pourrions
épiloguer longtemps là-dessus. C'est décourageant de voir
des questions comme cela.
M. VINCENT: M. le Président, ce qui me surprend à l'heure
actuelle, c'est que le premier ministre de la province de Québec qui a
« autographié », paraphé ce projet de loi...
M. DEMERS: De son nom de plume.
M. VINCENT: ... a oublié de poser la question au ministre de
l'Agriculture. Le premier ministre devrait savoir combien...
M. BOURASSA: Cela nous a été dit... Si l'ancien ministre
veut se calmer...
M. VINCENT: Juste un instant.
M. BOURASSA: Cela nous a été dit à plusieurs
reprises au conseil des ministres...
M. VINCENT: Combien?
M. BOURASSA: ... mais je ne me souviens pas
précisément...
M. VINCENT: C'est 70 millions de douzaines par année.
M. BOURASSA: ... du montant exact.
M. VINCENT: C'est 70 millions de douzaines par année.
M. LAPORTE: C'est de l'omelette, cela!
M. BOURASSA: Le député doit savoir que le premier ministre
a plusieurs milliers de chiffres en tête.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un oeuf par poule, ça fait combien de
poules?
M. VINCENT: Mais, je vous le dis, là.
M. TOUPIN: M. le Président, Je vais répondre à la
question du député de Nicolet.
UNE VOIX: Bon.
M. TOUPIN: Donc, 70 millions de douzaines, il est trop
généreux. C'est 63 millions de douzaines. Cela démontre
que l'ancien ministre ne connaît pas son affaire. L'ancien ministre n'a
jamais connu son affaire.
M, TREMBLAY (Chicoutimi): Vous en avez cassé.
M. VINCENT: M. le Président.,.
M. LAPORTE: Il y a déjà une erreur de 7 millions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il les a cassés, M. BOURASSA: On ne
peut pas s'y fier,
M. VINCENT: Vous venez d'entendre le ministre de l'Agriculture. Est-ce
que Je pourrais informer le ministre de l'Agriculture qu'il se vend chaque
année dans la province de Québec 120 millions de douzaines
d'oeufs, dont 70 millions de douzaines passent par la fédération
ou devraient normalement être produits au Québec, Sur les 70
millions, il y en a 7 millions qui ne sont pas contrôlées par la
fédération, qui vont aller directement aux consommateurs. Ce qui
veut dire que sur les 70 millions qui sont produites et consommées au
Québec, il y en a 63 millions de contrôlées. Est-ce que ce
ne sont pas les chiffres exacts?
M. TOUPIN: Cette fois-ci, M. le député, vous avez dit la
vérité.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! Il a retrouvé ses
poules!
M. VINCENT: Est-ce que 63 millions de douzaines d'oeufs par
année, avec la nouvelle loi du gouvernement Bourassa qui impose une taxe
de vente indirecte sur des produits alimentaires d'un demi-cent la douzaine
d'oeufs..,.
M. BOURASSA} C'est faux! C'est garanti, ce n'est pas une taxe de
vente,
M. VINCENT; Est-ce que ces 63 millions contrôlées par la
fédération ne rapporteront pas en taxe indirecte $315,000 par
année?
M. BOURASSA: Il ne comprend rien.
M. TOUPIN: Quand la fédération contrôlera, pour
répondre au député de Nicolet, tous les
M. VINCENT: Non, non, non, combien la fédération peut-elle
contrôler d'oeufs?
M. TOUPIN: Laissez-moi terminer. Je vais répondre à votre
question:
M. VINCENT: Oui.
M. TOUPIN: Vous m'avez posé une question. Je vais y
répondre. Quand la fédération contrôlera tous les
oeufs mis en marché au Québec, sauf ceux qui sont mis en
marché directement par le producteur chez le consommateur c'est
établi à 63 millions de douzaines environ quand elle
contrôlera tous ces oeufs à un demi-cent la douzaine, faites le
calcul et cela va donner le montant.
M. VINCENT: Un montant de $315,000.
M. TOUPIN: Mais présentement, elle ne contrôle pas tous ces
oeufs.
M, VINCENT: Combien contrôle-t-elle d'oeufs?
M. TOUPIN: Environ 50% de ce qu'elle devrait contrôler,
M. VINCENT: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nommez-les.
M. VINCENT: Pas 50%.
M. TOUPIN: Environ 50%.
M. VINCENT: Non. Environ 50% de la consommation totale du Québec
qui est de 120 millions. D'accord?
M. TOUPIN: Elle contrôle à peu près 50% des oeufs
sur lesquels elle a un pouvoir.
M. VINCENT: Ah, sur lesquels elle a un pouvoir!
M. TOUPIN: Oui.
M. VINCENT: Est-ce que ça ne représente pas un montant de
$315,000 par année?
M. TOUPIN: Cela peut représenter $315,000
par année, si on fait les calculs. Tant mieux, M. le
député, la Fédération remettra plus rapidement sa
dette.
M. VINCENT: Le ministre de l'Agriculture nous a dit cet
après-midi...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez tout casser.
M. VINCENT: ... que la garantie d'emprunt pouvait s'échelonner
sur une période de trois à cinq ans.
M. TOUPIN: M. le Président, j'ai bien dit au député
de Nicolet qu'elle pouvait s'échelonner sur une période de trois
à cinq ans. Elle peut tout aussi bien s'échelonner sur une
période de deux ans; nous mettons les conditions le moment venu.
M. VINCENT: Donc, nous faisons la déduction suivante, M. le
Président; le ministre de l'Agriculture nous confirme que la garantie
d'emprunt il vient tout juste de le dire peut s'échelonner
sur une période de trois à cinq ans. Donc, nous pouvons dire ou
comprendre qu'il est possible que la garantie d'emprunt s'échelonne sur
une période de cinq ans, le ministre vient de nous le dire.
M. DEMERS: A vie.
M. VINCENT: Cela veut dire que $315,000 par année, pendant cinq
ans, ça représente $1,600,000 environ pour une garantie d'emprunt
de $500,000. N'y aurait-il pas lieu, dans l'article 4, que nous
désapprouvons, de l'améliorer afin de limiter les
dégâts de la taxe de vente indirecte imposée par le
gouvernement Bourassa. N'y aurait-il pas lieu, dans l'article 4, de limiter
à $500,000 le produit total du demi-cent la douzaine?
UNE VOIX: Cela va se faire.
M. TOUPIN: M. le Président, j'aimerais bien que le
député de Nicolet lise bien l'article.
M. VINCENT: Oui, je l'ai très bien lu. M. TOUPIN: Laissez-moi
terminer. M. LOUBIER: Nous nous apercevons...
M. TOUPIN: C'est bien marqué en vertu de tout emprunt garanti en
vertu de l'article 1, et l'emprunt ne peut pas dépasser $500,000.
M. VINCENT: Voyons.
M. TOUPIN: Une fois les prélèvements retenus pour ces
montants, là, les prélèvements cessent
automatiquement.
M. VINCENT: Si l'article dit également ce que le ministre vient
de dire verbalement, ne pourrait-il pas le spécifier dans l'article?
UNE VOIX: C'est écrit.
M. TOUPIN: Pourquoi écrire une chose alors qu'elle y est
déjà?
M. VINCENT: Non.
M. LAPORTE: On ne change pas un article parce que le
député ne comprend pas.
M. VINCENT: Non, non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'aidez pas votre ministre.
M. VINCENT: Pour l'information du député de Chambly, qui
n'a probablement pas lu l'article 4...
M. LAPORTE: Je vous demande bien pardon. Mes obligations de membre du
conseil des ministres m'amènent à lire ces
articles-là.
M. PAUL: Précisez-les.
UNE VOIX: Donnez des preuves.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Récitez-les.
UNE VOIX; Vous pourriez le relire.
M. VINCENT: Voici ce que dit l'article 4: « Aux fins d'assurer le
paiement de tout emprunt garanti...
UNE VOIX: C'est au pluriel.
M. VINCENT: ... en vertu de l'article 1...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Virgule.
M. VINCENT: Virgule, oui... la fédération est tenue de
déduire du produit des ventes d'oeufs qu'elle effectue un demi-cent par
douzaine d'oeufs qu'elle mot en marché, jusqu'à remboursement de
tout emprunt garanti en vertu de l'article 1. »
M. TOUPIN: Il me semble que c'est clair.
M. VINCENT: Oui.
M. TOUPIN: Cela ne peut pas être plus clair.
M. VINCENT: Cela veut dire que, même si la garantie d'emprunt,
comme le dit le ministre, durait cinq ans, si la fédération
devait encore $50,000 la cinquième ou la quatrième année
sur la garantie d'emprunt, elle devrait, d'après la loi, déduire
un demi-cent la douzaine de tous les oeufs mis en marché par la
fédération. Même si elle devait $50,000, elle doit, en
vertu de la loi, taxer le consommateur ou encore enlever au producteur un
demi-cent la douzaine, ce qui peut lui rapporter $300,000 ou $350,000, alors
qu'elle ne devra que $50,000. Est-ce cela?
M. TOUPIN: Voici, M. le Président...
M. LAPORTE: Soyez clément.
M. VINCENT: Je le suis, justement.
M. TOUPIN: Il m'apparaît évident que le
député de Nicolet ne veut pas comprendre.
DES VOIX: Ah! Ah!
M. TOUPIN: Premièrement, il ne s'agit pas d'une taxe.
UNE VOIX: C'est tellement bien expliqué!
M. TOUPIN: Les producteurs ont pris en charge la
fédération des producteurs d'oeufs; ils ont consenti la mise en
place d'une agence de vente.
M. VINCENT: Nous sommes d'accord.
M. TOUPIN: Les producteurs savent que, pour financer une telle agence,
cela prend de l'argent. Ils se sont heurtés à des
problèmes qui ne leur ont pas permis de se procurer les fonds dont ils
avaient besoin. Maintenant, ils nous le demandent; on le leur offre et ils sont
prêts à payer pour l'avoir.
M. VINCENT: Non.
M. TOUPIN: Ce n'est pas une taxe; c'est un moyen qu'ils se donnent.
M. VINCENT: Non, non.
M. TOUPIN: C'est une épargne qu'ils s'imposent
eux-mêmes...
M. VINCENT: Non, non.
M. TOUPIN: ... pour se constituer un fonds de roulement.
M. VINCENT: Non, non.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! A l'ordre! Je rappelle l'honorable
député de Nicolet à l'ordre. L'.honorable ministre de
l'Agriculture est à donner les explications réclamées
à maints reprises par les honorables membres du comité.
J'aimerais bien qu'on laisse à l'honorable ministre de l'Agriculture et
de la Colonisation de terminier les explications qu'il est a donner.
M. TOUPIN: C'est dit...
M. LOUBIER: Je me rassois.
M. TOUPIN: Non, écoutez, nous ne sommes pas tous du comté
de Bellechasse.
M. LOUBIER: Vous êtes plus éloquent assis que debout. On
vous comprend mieux.
UNE VOIX: L'homme n'est grand qu'à genoux.
M. LAPORTE: Vous, c'est le contraire.
M. TOUPIN: Cela m'apparaît évident également, pour
répondre au député du comté de Nicolet..
M. DEMERS: Comprenez.
M. TOUPIN: ... que si on consent une garantie sur $500,000, les
prélèvements vont être retenus jusqu'à concurrence
du remboursement des $500,000. Si on prête seulement $200,000 ils seront
retenus jusqu'à concurrence de $200,000...
M. VINCENT: C'est la question qu'on pose.
M. TOUPIN: Bien sûr que c'est ainsi que cela va se
dérouler. Comment voulez-vous que cela se déroule autrement?
M. VINCENT: C'est la question qu'on pose.
M. TOUPIN: C'est à celle-ci que je tiens à répondre
et c'est à celle-ci aussi que je crois répondre, si vous voulez
bien comprendre.
M. VINCENT: Donc, M. le Président, le ministre a dit, au nom du
gouvernement, que le pré-
lèvement d'un demi-cent la douzaine ne dépassera d'aucune
façon le montant qui sera garanti par le gouvernement.
M. TOUPIN: Absolument. Il semble que cela va de soi.
M. VINCENT: Ne le dépassera d'aucune façon. Si, la
première année je pose autrement la question la
Fédération des producteurs d'oeufs de consommation, en vertu de
la loi contrairement à ce qu'a dit le ministre tout à
l'heure à l'effet que c'était imposé volontairement, non,
c'est obligatoirement, légalement en vertu d'une loi fait son
prélèvement d'un demi-cent la douzaine sur les ventes d'oeufs et
récupère $300,000, au cours des six mois suivants elle va
chercher $150,000, ce qui fait $500,000. Cela veut dire que dès ce
moment, même si la garantie d'emprunt du gouvernement dure trois, quatre
ou cinq ans, dès ce moment, dans un an et demi ou un an et cinq mois,
elle n'aura plus besoin de faire le prélèvement d'un demi-cent la
douzaine.
UNE VOIX: Avez-vous compris?
M. VINCENT: Non, que le ministre nous le dise!
M. TOUPIN: Bien sûr que cela peut arriver ainsi; cela va
dépendre des conditions qu'on va mettre dans l'acte de garantie. Mais il
est évident que la loi le dit, la Fédération n'a pas le
droit de retenir un demi-cent sur les ventes d'oeufs pour d'autres fins que
celle de rembourser le montant emprunté. C'est ce qui est
évident, le montant garanti. Cest ce qui est évident et c'est ce
qui est clair. Et il me semble que c'est ce qu'on devrait comprendre.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, je voudrais qu'il n'y ait qu'une poule
qui parle à la fois...
M. TOUPIN: Il ne faut pas qu'elle chante.
M. PAUL: Merci, M. le Président. Comme le ministre de
l'Agriculture vient de reconnaître une possibilité de la part de
la Fédération de prolonger le terme de remboursement et que les
conséquences seraient que la Fédération retirerait plus
que le montant garanti, qu'il me soit permis de faire une suggestion à
l'honorable leader parlementaire. A l'avant-dernière ligne de l'article
4...
M. LAPORTE: Un instant. Oui, oui, je l'ai devant moi,
théoriquement.
M. PAUL: ... Si nous ajoutions, M. le Président, «
jusqu'à concurrence du remboursement de tout emprunt garanti
».
UNE VOIX: Cela soulagerait le ministre. M. LAPORTE: On mettrait
ça où? M. PAUL: A l'avant-dernière ligne.
M. BOURASSA: On peut mettre cela dans l'acte de garantie.
M. PAUL: Pourquoi ne pas le mettre dans la loi?
M. BOURASSA: Le député de Maskinongé a dit
lui-même hier qu'on ne pouvait pas corriger les lois sur le coin de la
table. Alors, on va mettre cela dans l'acte de garantie.
M. CARDINAL: On n'est pas sur le coin de la table, nous sommes en
comité.
M. PAUL: Je comprends. Le premier ministre conviendra-t-il qu'un texte
de loi lie péremptoirement toutes les parties, et qu'il ne peut souffrir
d'interprétation quand le texte est clair.
M. LAPORTE: Ah non!
M. PAUL: Alors, si nous disions: Jusqu'à concurrence du
remboursement de tout emprunt garanti en vertu de l'article 1, à ce
moment-là, nous faisons disparaître la situation décrite
par le député de Nicolet et qu'a reconnue comme possible le
ministre de l'Agriculture. A ce moment-là, nous sommes assurés
qu'au moins la retenue ne se prolongera pas au-delà du montant du
capital et des intérêts.
M. BOURASSA: Je suggère au député de
Maskinongé de faire confiance au gouvernement comme la population l'a
fait en avril dernier, dans l'acte garanti.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avec les canards que vous avez
couvés.
M. LOUBIER: Cela veut dire qu'éventuellement les oeufs seront
transportés par la Brinks.
M. LAPORTE: Non, parce qu'ils vont aboutir à Toronto.
M. LOUBIER: Cela ne sera pas « Lafferty » des
cultivateurs.
M. VINCENT: J'aurais une question à poser au ministre de
l'Agriculture, au sujet de la loi d'un demi-cent la douzaine. Advenant le cas
où dans quinze jours il recommande l'adoption d'un arrêté
ministériel et qu'il garantit à la fédération
$500,000, si la fédération, dans deux ans, avait remboursé
$300,000 au gouvernement, et si le ministre, à ce moment-là avait
libéré sa garantie d'emprunt vis-à-vis du gouvernement de
$200,000, donc le gouvernement se verrait encore responsable de $300,000.
Est-ce qu'à ce moment, advenant un problème urgent,
épineux, le ministre de l'Agriculture pourrait garantir à nouveau
un autre montant de $200,000?
M. TOUPIN: Je pense que le député de Nicolet pose une
question purement hypothétique.
M. VINCENT: Non, non.
M. TOUPIN: Il m'apparaît évident, quant à moi, que
nous réglerons les problèmes le jour où ils se poseront.
Je ne présume pas que des problèmes se poseront, mais on les
réglera le jour où ils se poseront, et si celui-là se
pose, on pourra le régler à ce moment-là.
M. VINCENT: La question est très simple. Si la loi permet au
ministre de l'Agriculture de garantir un emprunt de $500,000, qu'il utilise au
maximum la loi d'une garantie de $500,000 dans un an, que la
fédération remette complètement les $500,000, est-ce
qu'à ce moment-là le ministre pourrait, dans deux ans, avec la
même loi, garantir un autre montant de $200,000, $300,000, $400,000 ou
$500,000?
M. LAPORTE: Certainement, mais à la condition que le maximum de
$500,000 ne soit jamais dépassé.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Saint-Maurice...
M. DEMERS: J'aurais une question à poser au ministre de
l'Agriculture.
M. LAPORTE: A titre de banquier, est-ce que vous allez prêter?
M. DEMERS: Oui, oui. Je vais vous prêter quelque chose.
M. LAPORTE: sans intérêt?
M. DEMERS: Peut-être avec intérêt.
Je voudrais savoir du ministre de l'Agriculture et de la Colonisation
si, lorsque le montant de la garantie qu'il demande, $400,000...
UNE VOIX: Non, $500,000.
M. DEMERS: Non, non, il était de $400,000...
UNE VOIX: Ah bon!
M. DEMERS: ... il exigeait un prélèvement d'un demi-cent
la douzaine. Est-ce qu'il va tenir compte, maintenant qu'il est monté
à $500,000, qu'il faudrait peut-être augmenter aussi d'un
demi-cent? Je pose la question au ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation.
M. LAPORTE: Cela a été...
M. DEMERS: Je ne parle pas aux économistes et aux gars qui
bâtissent des parcs en Mauricie. Je parle au ministre de l'Agriculture et
de la Colonisation.
M. TOUPIN: M. le Président, je vais répondre au
député de Saint-Maurice que, si on avait eu l'intention de le
faire, vous le verriez dans le projet de loi.
M. DEMERS: C'est parce qu'il y a une foule de choses que vous vouliez
faire et qui ne sont pas dans le projet de loi.
M. VINCENT: M. le Président, le député de Chambly a
répondu tout à l'heure. Est-ce qu'il voudrait juste relire
l'article 3?
M. LAPORTE: Je vais le relire.
M. VINCENT: Juste le relire bien calmement. « Le montant total des
garanties accordées en vertu de l'article 1 ne peut excéder,
à l'égard du capital, la somme de $400,000. »
Donc, quand il y a une garantie d'accordée,c'est
calculé, d'après l'auditeur, comme étantaccordé une fois. C'est le problème qui s'estposé avec la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire.A ce
moment-là...
M. TOUPIN: Un autre beau problème.
M. VINCENT: ... c'était accordé. On nepouvait plus
revenir parce que la garantie avaitdéjà été
accordée.
M. LE PRESIDENT (Hardy); Article 4, adopté.
M. VINCENT: Non, M. le Président, à l'article 4, nous
avons la certitude, la confirmation du ministre que, d'aucune façon
même si la garantie d'emprunt s'échelonnait sur une période
de trois ou cinq ans, le demi-cent la douzaine ne pourra excéder le
montant total de la garantie.
M. TOUPIN: Entièrement d'accord.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté sur division?
M. VINCENT: Oui.
M. DEMERS: J'aurais une autre question à poser, si on me le
permet, au ministre de l'Agriculture et de la Colonisation. Je voudrais savoir
du ministre combien... Ah, il m'écoute tellement bien!
UNE VOIX: Quand il écoute, il ne répond pas.
M. LOUBIER: S'il n'écoute pas, il va être meilleur.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! A l'ordre! Article 4,
adopté?
M. DEMERS: Non, avant de l'adopter, je voulais poser une autre question
au ministre de l'Agriculture. Mais je lui écrirai, je pense que cela va
être meilleur!
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté?
M. CHARRON: Qu'est-ce que le ministre est en train de nous pondre?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 6?
M. VINCENT: L'article 5, M. le Président, juste un instant. A
l'article 5: « Les sommes que le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation peut être appelé à payer en vertu des
garanties accordées sous l'autorité de la présente loi
sont prises à même le fonds consolité du revenu.
»
M. LAPORTE: Voulez-vous poser des questions sur le fonds
consolidé?
M. CHARRON! Qu'est-ce qu'il y a de mal dans ça?
M. VINCENT: Non, je ne poserai pas cette question qui m'a
été posée par un type qui a déjà
occupé...
M. LAPORTE: Qui a acheté une faux...
M. VINCENT: ... le poste de ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation pendant six ans. Mais, quelles sont les dépenses que le
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation prévoit? La seule chose
qu'il a à faire, c'est un arrêté en conseil.
M. LAPORTE: Il peut arriver que la fédération ne fasse pas
honneur à ses obligations. A ce moment-là, les sommes
nécessaires seraient prises à même le fonds
consolité.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté. Article 6?
M. PAUL: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Alors, article 5, adopté sur division.
Article 6?
M. PAUL: Sur division, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté sur division.
M. LAPORTE: Non, non, unanimement. M. PAUL: Non, non.
M. LAPORTE: Faites rapport.
M. HARDY (président du comité plénier): M. le
Président, le comité a étudié le bill 27 et l'a
adopté avec un amendement.
M. LAVOIE (président): L'honorable ministre de l'Agriculture
propose que l'amendement soit maintenant lu et agréé. Cette
motion sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND: Sur division.
M. LAPORTE : Troisième lecture.
3e lecture
M. LE PRESIDENT: Adopté? M. BERTRAND: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Troisième lecture, adoptée sur
division.
M. LAPORTE: M. le Président, auriez-vous l'obligeance d'appeler
l'article numéro 6, le bill 31?
M. BERTRAND: Là, nous allons en avoir un débat!
M. PAUL: Lui, cela va être clair, M. le Président. Cela ira
vite! J'en suis convaincu.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé propose la
deuxième lecture du projet de loi numéro 31, Loi modifiant la Loi
du ministère de la Santé et la Loi du ministère de la
Famille et du Bien-Etre social.
L'honorable ministre.
Santé, Famille et Bien-Etre
M. CASTONGUAY: M. le Président, je crois que les notes
explicatives donnent clairement le but de ce bill. En fait, ce bill est
destiné à permettre d'adapter le fonctionnement du
ministère à son accroissement au cours des années. Le
nombre des dossiers exigeant la signature du ministre est extrêmement
élevé. Il augmente constamment. Dans un très grand nombre
de cas, ces dossiers prennent une allure de routine: départs
d'employés, congés de mise à la retraite, congés de
maladie « monnayables », etc.
Le but du bill est de permettre de déléguer à un
sous-ministre adjoint le pouvoir de lier, par sa signature, le
ministère. Evidemment, ce pouvoir doit être assorti de certaines
limitations. C'est pourquoi il ne peut être donné que par le
lieutenant-gouverneur en conseil à une personne désignée
spécifiquement et pour des fins spécifiques également.
Cela doit faire également l'objet d'une publication dans la Gazette
officielle.
Maintenant, en ce qui a trait à la signature de certaines
catégories de documents, tels les certificats d'obligations où la
signature du ministre ou du sous-ministre prennent, bien souvent, un
caractère purement de routine, le bill aura pour effet de permettre
l'utilisation d'appareils automatiques.
En résumé, le principe de ce bill est de permettre une
certaine délégation de pouvoirs de façon à lier le
ministère par la signature d'un sous-ministre adjoint en dedans de
limites précisées par le bill, tel que je viens de l'exposer.
M. CLOUTIER: M. le Président, juste une remarque. Je comprends
parfaitement pourquoi le ministre présente cette législation,
parce que j'ai connu, pendant quatre ans, le volume de travail exigé par
les signatures dans deux ministè- res qui, cette année, ont
$1,350 millions de budget et qui doivent dépenser, pour arriver à
la fin de l'année, $4 millions par jour, sinon cela crée des
problèmes.
J'ai noté que le ministre a dit qu'il allait
déléguer certains pouvoirs, mais qu'il allait se réserver
des signatures importantes. Je comprends qu'évidemment chacune des
transactions, dans ces ministères, engageant des sommes
extrêmement importantes, le ministre devra, tout de même, conserver
un certain contrôle sur l'administration de son ministère.
D'ailleurs, c'est la meilleure façon que peut avoir le ministre de
connaître son ministère, par les documents qui passent devant
lui.
Alors ce sont les seules remarques que je voulais faire au sujet de ce
projet de loi, et sans faire toute la procédure, nous serions
prêts à l'adopter en comité et en troisième
lecture.
M. LAPORTE: Procédure parfaite.
M. LOUBIER: Est-ce que le ministre se réserve les signatures pour
les foyers d'hébergement?
M. CASTONGUAY: Particulièrement celui de Bellechasse.
M. VINCENT: Juste une question au ministre de la Santé.
Peut-être qu'elle s'adresserait plus normalement au premier ministre. Le
premier ministre ne croit-il pas qu'il y a d'autres ministères
également au sein du gouvernement qui auraient besoin de la même
législation, que, d'ici l'automne, on devrait faire une
vérification, et qu'on adopte une loi générale qui
permettrait justement au conseil des ministres d'autoriser d'autres
sous-ministres, qui sont dans certains ministères du gouvernement, de
faire exactement la même chose?
M. BOURASSA: C'est une bonne suggestion que je vais noter.
M. LAPORTE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. LAPORTE: Comité et troisième lecture.
M. LE PRESIDENT: Comité plénier et troisième
lecture. Cette motion de troisième lecture sera-t-elle
adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: Félicitations. M. BERTRAND: Le numéro 33.
M. LAPORTE: M. le Président, auriez-vous l'obligeance d'appeler
l'article no 7.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Santé propose la
deuxième lecture du projet de loi no 33, Loi modifiant la Loi de l'aide
sociale, la Loi des allocations scolaires et la Loi des allocations familiales
du Québec.
L'honorable ministre de la Santé.
Aide sociale et allocations
M. CASTONGUAY: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande
l'étude à la Chambre.
M. LOUBIER: La question des allocations familiales a effrayé le
député de Chicoutimi. Il vient de quitter la Chambre.
M. CASTONGUAY: Le présent projet de loi a pour but d'apporter
certaines modifications à la...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CASTONGUAY: ... à la Loi de l'aide sociale sanctionnée
le 12 décembre 1969, de façon à en assurer en meilleur
fonctionnement lors de sa mise en vigueur. Il s'agit, de façon
générale, de changements plutôt mineurs et de nature
technique que l'on peut regrouper sous trois chefs principaux.
En premier lieu, le projet de loi prévoit une extension du champ
d'appel de la commission d'appel de l'aide sociale, prévue à la
section 7 de la loi, à toute décision du ministre rendue en vertu
de la Loi des allocations scolaires. C'est donc dire qu'on pourra appeler
devant cette commission des décisions au titre de l'aide sociale qui
remplace les allocations dispensées en vertu des anciennes lois
catégorisées d'assistance, des décisions du ministre en
vertu de la Loi des allocations familiales, et des décisions en vertu de
la Loi des allocations scolaires. Il est donc apparu nécessaire de
changer le titre de la Commission d'appel de l'aide sociale en celui de la
Commission d'appel de l'aide et des allocations sociales.
Quant au financement, maintenant, étant donné que la Loi
de l'aide sociale, qui a été sanctionnée à la fin
de l'année 1969, prévoyait, pour l'année financière
se terminant le 31 mars 1970, que, les sommes requises pour l'application de la
loi devaient être prises à même les deniers accordés
pour l'application des dispositions législatives abrogées par la
loi, c'est-à-dire les lois catégorisées d'assistance, il
est apparu nécessaire également que la loi soit modifiée
de façon à prévoir que les deniers requis pour sa mise en
application soient pris, pour l'exercice financier en cours, à
même les sommes votées pour la mise en application des lois
sociales qui seront remplacées par la Loi d'aide sociale. En fait, c'est
la même chose que l'an dernier, sauf qu'on a reporté la date d'un
an, étant donné que cette disposition de la loi expirait le 31
mars 1970.
Enfin, quant à l'entrée en vigueur de la loi, le
présent projet de loi prévoit que la section 5, qui traite de la
commission d'appel de l'aide et des allocations sociales, pourra entrer en
vigueur à une date antérieure à l'entrée en vigueur
générale de la loi. La raison de cette disposition provient du
fait qu'il sera nécessaire de procéder à la nomination des
membres de la commission d'appel, préalablement à l'entrée
en vigueur de la loi, de façon qu'ils puissent accomplir le travail
préliminaire nécessaire pour rendre le fonctionnement
adéquat de la commission possible dès l'entrée en vigueur
de la loi.
M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai deux ou trois questions à poser au
ministre. Plutôt que d'aller en comité, je pense bien qu'on me
permettra de les poser, même si nous sommes en deuxième
lecture.
M. BOURASSA: D'accord.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, évidemment, nous
sommes d'accord sur l'appellation différente et pour que la Commission
d'appel de l'aide sociale s'occupe également des allocations scolaires
et des allocations familiales. Mais, le ministre prévoit-il le
fardeau de travail étant augmenté, je ne sais pas dans quelle
mesure revenir avec un projet de loi pour augmenter le nombre de
commissaires à la commission d'appel?
M. CASTONGUAY: La loi telle qu'elle a été adoptée
prévoit que la commission d'appel est composée de six membres,
mais il y a également une disposition qui permet au
lieutenant-gouverneur en conseil d'en nommer un plus grand nombre, si
nécessaire. Alors, il n'y aurait pas nécessité, à
moins que je ne me trompe dans l'interprétation de la loi, de changer
cette disposition si le fardeau était trop lourd.
M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre parle dans son projet de loi de
l'entrée en vigueur de la Loi d'aide sociale. Nous avons eu l'occasion,
avant-hier, lors de l'étude des prévisions budgétaires, de
parler de la date d'entrée en vigueur de la loi. Les fonds
prévus, au moment où le gouvernement décidera d'appliquer
la loi, seront pris dans le fonds consolidé, après que le budget
aura été épuisé.
Je voudrais mentionner ceci au ministre. Etant donné que
l'application de la Loi d'aide sociale est attendue avec beaucoup d'impatience
dans tous les milieux concernés et on sait pourquoi le
ministre, qui nous a dit, lors des prévisions budgétaires, que le
nouveau délai fixé était le 1er janvier il avait
demandé de raccourcir ce délai; on lui a dit le 1er novembre
ne pourrait-il pas, avec ses fonctionnaires, revoir toute cette
question? On sait que le personnel, maintenant, est presque tout en place.
Environ 500 personnes ont été recrutées; il y a eu des
périodes de formation de personnel, le printemps dernier, et les bureaux
sont ouverts. Dès que le ministre sera assuré que les
mécanismes administratifs sont suffisamment étanches, ne
pourrait-il pas, avec ses fonctionnaires revoir s'il n'y a pas
possibilité de gagner encore du temps sur la date qui lui a
été mentionnée?
M. CASTONGUAY: M. le Président, cette loi est attendue depuis
très longtemps. Ce n'est pas une question de six mois; c'est une
question de plusieurs années. L'attente dure depuis plus longtemps
même que la vie du gouvernement précédent. Lorsque les
fonctionnaires m'ont montré tout le cheminement pour arriver à
l'application de cette nouvelle loi, et ont indiqué comme date de
départ le 1er janvier, je n'ai pas voulu soulever d'espoirs inutiles en
annonçant une date qui ne pourrait pas être respectée. J'ai
demandé qu'on fasse tout ce qui était possible de faire pour que
la loi prenne effet le 1er novembre.
Evidemment, j'entends suivre ça d'aussi près que possible.
Si nous étions capables, cornue le suggère le
député de Montmagny, de mettre la loi en vigueur avant le premier
novembre, nous le ferions évidemment, avec grand plaisir. Si c'est
humainement possible, vous pouvez être assuré que ça va
être fait.
M. DEMERS: Rendre financièrement réalisable tout ce qui
est humainement possible.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. BOURASSA: Troisième lecture?
M. BERTRAND: Comité plénier, troisième lecture.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, article 8.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose la
deuxième lecture du projet de loi numéro 36, Loi modifiant le
code du travail.
Code du travail
M. BERTRAND: Votre gros projet. Enfin, il va travailler pour lui.
M. LAPORTE: M. le Président, je prierais cette Chambre
d'être sérieuse. Le code du travail a été
amendé, en 1969, pour éliminer toutes les associations de
boutique. On a utilisé un processus légal pour dire que les
associations reconnues qui pouvaient théoriquement négocier avec
l'employeur, sans que l'employeur ne soit obligé de négocier avec
elles, étaient éliminées pour reconnaître les
associations accréditées par l'organisme désigné
pour le faire.
Quand on l'a amendé, on a oublié qu'il y avait deux
associations, qui n'étaient pas des associations de boutique, qui
avaient une présence très importante, c'étaient celles de
l'Hydro-Québec et la ville de Montréal, les ingénieurs.
Elles ont été éliminées, ces deux associations,
parce qu'il faut qu'on soit un employé au sens du code du travail, pour
être reconnu. Les cadres ne sont pas des employés au sens du code
du travail.
On a donc, involontairement, en 1969, éliminé deux
associations qui avaient déjà négocié et obtenu des
conventions collectives avec la ville de Montréal et avec 1'Hydro. Ce
que nous voulons, cette année, c'est simplement dire que les
associations des employés de la ville de Montréal et de 1'Hydro
sont reconnues au sens du code du travail, celles qui ont
négocié, en 1968, des conventions collectives, afin qu'on ne
retourne pas ces deux groupes d'employés à la loi de la jungle,
qui était celle qui prévalait avant et qui pourrait
peut-être faire l'affaire de certaines gens.
L'amendement que nous proposons, c'est que l'Association de la
commission hydro-électrique de Québec et celle de la ville de
Mont-
réal soient reconnues et soient ensuite, pour toutes leurs
négociations, soumises au code du travail.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, je dois d'abord dire que nous serons
d'accord avec ce bill. J'espère que le ministre du Travail nous sera
reconnaissant de cette condescendance à son égard, à
l'occasion de ce premier bill.
DES VOIX: Oh! Oh! M. LAPORTE: Oui.
M. BURNS: Cependant, M. le Président, j'aurais quelques
très brèves remarques, parce que la présence même de
ce bill est un signe de très sérieuses lacunes dans notre droit
du travail. Quand je dis de très sérieuses lacunes, je ne le dis
pas de façon négative; tout le monde est prêt à
admettre que notre législation des relations de travail est jeune, la
première loi significative remontant en 1944. D'autre part, je suis
également prêt à admettre que nous avons probablement la
législation du travail la plus d'avant-garde en Amérique du Nord,
celle qui, entre autres, reconnaît le droit de grève aux services
publics, celle qui donne un droit d'accréditation aux professionnels,
celle qui, aussi, depuis quelque temps, depuis les amendements que le ministre
du Travail a mentionnés, a accéléré
énormément le processus d'accréditation.
Ici, je ne peux m'empêcher de rendre hommage à l'ancien
ministre du Travail, M. Maurice Bellemare, qui, assisté d'un
sous-ministre très compétent, que le ministre actuel aura
l'occasion d'utiliser sans aucun doute, a réussi à soumettre une
législation les bills 50 et 65 de la dernière
Législature qui a réglé le problème des
retards le règlement des problèmes en matière de relations
de travail, particulièrement en matière d'accréditation et
de discussion des problèmes de congédiement pour activités
syndicales.
Cependant c'est une lacune. C'est le voeu que j'exprime. Je demande au
ministre du Travail d'être aussi audacieux que son
prédécesseur et dans un avenir très rapproché, de
penser à une législation du travail pour le syndicalisme des
cadres, le syndicalisme relativement nouveau des professionnels, des gens de la
direction. Entre autres, on a eu des problèmes très concrets chez
les camionneurs artisans.
Je pense qu'il faudra repenser cela le plus tôt possible,
dès la prochaine session c'est le voeu que j'exprime pour
élargir la définition de salarié ou pour nous donner enfin
une loi du syndicalisme des cadres. Dans ces circonstances, M. le
Président, ce sont les quelques remarques que j'avais à formuler
et nous serons d'accord avec le principe de ce bill.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LAPORTE: Deuxième lecture, troisième lecture.
M. BURNS: Comité plénier. Troisième lecture,
non.
M. LAPORTE: Inutile de dire que je remercie cette Chambre de sa
collaboration...
M. BURNS: Comité plénier, M. le Président. M.
LAPORTE: Comité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose...
M. LAPORTE: Je reporte mes remerciements à quelques minutes.
M. LE PRESIDENT: ... que je quitte maintenant le fauteuil et que la
Chambre se forme en comité plénier. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier) Bill 36,
article 1, adopté?
M. BURNS: Non. Je n'ai pas demandé le comité
plénier pour rien, M. le Président. C'est justement relativement
à cet article 1, d'ailleurs le seul à part celui mettant en
vigueur le bill. Je me pose des questions, M. le Président, relativement
aux deux dernières lignes et demie de l'article 1, ou de l'ajouté
à l'article 20, ces lignes se lisant « à compter du 1er
janvier 1972, ces associations sont soumises aux règles
générales alors applicables à l'accréditation
» .
Voici la nature des questions que je me pose. Je pense que ce bout de
phrase constitue une épée de Damoclès qu'on suspend
au-dessus des deux syndicats visés, le syndicat des ingénieurs de
l'Hydro et celui de la ville de Montréal.
Je n'ai pas à développer et je ne veux pas critiquer ici
en cette Chambre, quoique je ne puisse m'empêcher de le remarquer, le
légalisme dont ont fait preuve les deux institutions visées, soit
la ville de Montréal et l'Hydro-Québec qui avaient accepté
de reconnaître ces deux syndicats d'ingénieurs après une
lutte très sérieuse dans un cas, qui avaient
négocié de bonne foi après cette lutte, qui avaient
accepté de signer une convention collective et qui, maintenant, avec les
amendements des deux bills dont on a parlé tantôt, refusent
totalement de négocier avec ces deux groupes.
La crainte qui se présente à nos yeux en lisant ce texte,
c'est que, comme il n'y a pas actuellement de dispositions législatives
relativement au syndicalisme des cadres et comme l'accréditation que
cette Chambre s'apprête à donner à ces deux groupes ne
vaudrait que jusqu'au 1er janvier 1972, on peut se demander ce qui arrivera de
ces deux syndicats si une loi sur le syndicalisme des cadres adoptée aux
problèmes de ces deux syndicats d'ingénieurs n'est pas
édictée à la date mentionnée, soit au 1er janvier
1972. Pour cette raison, M. le Président, je propose que dans la 3e
avant-dernière ligne, tout ce qui suit les mots «
commissaire-enquêteur » soient rayé de l'article. Je ne
crois pas, en toute humilité, que cela puisse changer quoi que ce soit
à l'intention du bill. Cela aurait, d'autre part, l'avantage d'accorder
cette sécurité dont ont besoin ces deux syndicats pour le cas
où, en 1972, cette Chambre ne se serait pas encore prononcée sur
une loi de syndicalisme des cadres protégeant ces employés.
D'autre part, troisième avantage, cela nous éviterait, au 1er
janvier 1972, devant une nouvelle crise, d'être obligés de
légiférer à nouveau dans un texte comme
celui-là.
Je propose ça et je pense que ça ne change pas
l'intention, et j'insiste sur cela. Si l'intention du gouvernement est vraiment
de soumettre, éventuellement, une législation pour le
syndicalisme des cadres, à ce moment-là, cet article va devenir
complètement désuet, cette loi deviendra désuète et
on n'aura pas changé un iota à la situation. Par contre, on
n'aura pas placé ces deux syndicats dans une situation
d'insécurité dans laquelle ils se trouveraient si on laisse la
dernière phrase après le point-virgule en question, que je
propose d'enlever tout simplement.
M. LAPORTE: Je vais m'opposer personnellement à l'amendement en
posant les règles suivantes. Premièrement, rendre hommage
à quelqu'un. Le député de Maisonneuve s'inquiète de
l'attitude des patrons dans le problème que nous étudions. Celui
qui est venu me demander à moi, ministre du Travail, de proposer le
projet de loi qui est devant nous, c'est le président de l'Hydro, M.
Giroux. M. Giroux m'a dit ceci, ensuite au premier ministre et au conseil des
ministres: Nous avons des projets considérables. Une expansion à
venir très intéressante. Nous ne voudrions pas que ces projets
viennent se heurter à des discussions oiseuses. Pourquoi ne
reconnaîtriez-vous pas, en dépit des amendements qui ont
été apportés l'an dernier au code du travail,
l'association avec laquelle nous avons déjà
négocié? Rendons au moins hommage à M. Giroux,
président de l'Hydro, patron.
M. BURNS: Chose que j'ignorais.
M. LAPORTE: Enfin, je vous le dis avec plaisir. On reconnaîtra que
M. Giroux n'a pas été nommé par nous, et c'est lui qui est
venu demander que ceci soit fait. Première chose, le patron est d'accord
pour continuer à négocier. Deuxièmement, nous avons, au
ministère du Travail, je ne voudrais pas vendre plus de marchandise
qu'il ne faudrait, mais nous avons chez nous, à l'étude, certains
projets quant au syndicalisme des cadres. Le député de
Maisonneuve étant à la fois un homme renseigné sur ces
problèmes et raisonnable, admet que ce n'est pas facile.
M. BURNS: Vous voulez me vendre une idée, là?
M. LAPORTE: Je ne vous prépare pas, je ne vous conditionne pas.
Ce sont des choses que je trouve vraies. Vous êtes à la fois
renseigné sur les problèmes syndicaux, et raisonnable, j'ai pu
l'apprécier depuis le début de la session. Mais ce n'est pas
facile. Est-ce que nous aurons réussi, d'ici deux ans, à nous
entendre, le conseil des ministres, les syndicalistes, les employeurs, sur une
législation, sur le syndicalisme des cadres? Je l'espère. Je n'en
suis pas certain parce qu'il y a des écueils considérables qui
débordent la province de Québec et qui peuvent intéresser
des problèmes canadiens et, que ceci nous plaise ou ne nous plaise pas,
des problèmes nord-américains. Si nous avons réussi, d'ici
1972 et c'est un défi que je me fixe à moi dans le bill
à trouver un texte de loi qui puisse ordonner le syndicalisme des
cadres, aucun problème, tout le monde à ce moment-là sera
couvert. L'Assemblée nationale sera appelée à
décider si nous avons raison ou tort lorsque nous présenterons un
projet de loi.
Si nous n'avons pas réussi, d'ici 1972, si Dieu me prête
vie et si le premier ministre
me conserve dans le poste que j'occupe, peut-être serai-je encore
ministre du Travail, à ce moment-là, disons que je m'engage
personnellement à demander la prolongation de cette loi qui est
limitée à 1972. Je crois que la ville de Montréal et
l'Hydro-Québec ont autre chose à faire que de retourner à
la loi de la jungle avec leur syndicat qui inclut certains fonctionnaires des
cadres. Je ne vois pas personnellement de problème; 1972, quant au
sous-ministre du Travail, au ministre du Travail et à l'équipe
avec laquelle j'ai le plaisir d'oeuvrer actuellement, c'est pour nous le
défi de tâcher de trouver une solution avant ce moment-là.
Si nous ne trouvons pas de solution, il nous sera loisible de revenir devant ce
Parlement pour demander une prolongation de ce que nous suggérons
aujourd'hui.
M. BURNS: Juste une dernière remarque. M. le Président,
d'abord je dois mentionner que J'avais une tout autre version. Je ne mets pas
en doute les paroles du ministre du Travail sur l'accord des patrons,
mais...
M. LAPORTE: Voulez-vous mettre « les patrons » au
singulier?
M. BURNS: Alors, un patron, d'accord. C'est peut-être ça
qui m'a lancé sur une autre piste, parce que je connaissais l'attitude,
en tout cas, d'un des deux patrons.
D'autre part, Je me pose la question. Je ne veux pas en faire un long
débat, je pose simplement cette question-ci: Quels dommages les parties
concernées, qui ont un problème, qui viennent nous voir
actuellement pour résoudre ce problème-là,
souffriraient-elles si nous rayions cette dernière phrase en question?
Je vais tout simplement m'attacher à cette notion qu'on appelle la
sécurité industrielle, que souvent les patrons allèguent
eux-mêmes. Alors, la sécurité industrielle, ce n'est pas
quelque chose d'unilatéral. Ce n'est pas quelque chose qui ne marche que
dans le sens des patrons. Souvent on est porté à penser que c'est
ça parce que la sécurité industrielle ou la paix
industrielle, appelons-la comme ça, c'est toujours quelque chose dont
les patrons parlent eux-mêmes.
Nous avons, pour une fois, un cas où la paix industrielle
concerne les syndicats en question. J'admets, avec le ministre du Travail, que
c'est bien qu'il se fixe une date d'échéance, le premier janvier
1972, pour régler le problème du syndicalisme de cadre. Mais, je
ne crois pas que ce soit nécessaire d'imposer dans une loi cette
échéance que le ministre du Travail se donne à
lui-même. Si vous regardez la balance des inconvénients je
ne sais pas si l'ex- pression est très française, mais elle est
très courante dans le domaine juridique je pense qu'entre
l'échéance que le ministre du Travail se fixe, d'une part, et
cette sécurité ou cette paix industrielle dont les syndicats
devraient jouir, il faut nécessairement pencher du côté de
cette sécurité industrielle. La date du premier janvier 1972,
c'est une date qui est complètement en l'air, sauf le fait, que le
ministre du Travail mentionnait, de l'échéance qu'il se
donnait.
D'ici le 1er janvier 1972, il est fort possible que vous ayez une
convention collective qui empiète sur cette date, donc qu'au moment du
premier janvier 1972 vous n'ayez plus pour ce groupe-là, qui va
recommencer à négocier grâce à cette loi, de
convention collective. Parce qu'après cela on retombe dans les lois
applicables au code du travail et donc c'est un syndicat reconnu comme les
autres. On vient Juste de le faire. Evidemment, le ministre dit qu'il est
prêt à s'engager à renouveler cette loi. Il reste quand
même, malgré la promesse formelle du ministre, qu'on place les
deux syndicats en question et peut-être les patrons jusqu'à un
certain point, malgré que ce soient eux qui ont le haut du pavé
dans une situation comme celle-là, on place, dis-je, les deux syndicats
dans une situation d'insécurité ou de « non-paix »
industrielle...
M. LAPORTE: Je n'ai pas de...
M. BURNS: ... si on n'enlève pas ce délai-là. Ce
n'est que cela que j'avais à dire.
M. LAPORTE: Si le député veut juger de la situation, nous
avons aujourd'hui le code du travail qui couvre tout le monde, qui, à
l'occasion des amendements de 1969, a fait disparaître un grand nombre
d'associations de boutique. Il en reste deux. Je ne les appelle pas, loin de ma
pensée, associations de boutique, mais il reste deux excroissances qui
sont en dehors du code du travail. Ce sont les associations de
l'Hydro-Québec et de la ville de Montréal. Je ne souhaiterais
pas, personnellement, que ces deux associations, aussi bien pour elles, pour la
partie patronale que pour nous du ministère, aient l'impression que
ça puisse durer au-delà de 1972. Ce sont les deux
dernières exceptions qui sortent du code du travail. Je ne veux pas que
qui que ce soit ait l'impression que c'est la pérennité.
M. BURNS: Je veux tout simplement mentionner au ministre du Travail
qu'il en existe d'autres de ce genre, des syndicats de bonne foi, appelons-les
comme ça, c'est-à-dire pas des « syndicats de boutique
». Il en existe d'autres,
entre autres et je ne veux pas le mentionner en cette Chambre
un syndicat qui vient de renouveler sa convention collective, qui est
placé dans à peu près la même situation que ces deux
syndicats-là, mais l'employeur a accepté et les relations sont
parfaites.
Alors, c'est pour ça que nous n'avons pas un troisième
syndicat visé par cette loi. Il y en a d'autres également. Mais,
c'est uniquement ce délai que je considère purement factice,
sinon la raison que le ministre a mentionnée...
M. LAPORTE: Si le député veut me le permettre, disons que,
sans arrogance...
M. BURNS: Non, non. C'est sans arrogance.
M. LAPORTE: ... en toute bonne foi de part et d'autre, nous ne sommes
pas disposés, pour l'instant, à aller au-delà de 1972. En
effet, il y a deux façons de régler le problème: ou bien
nous aurons, à ce moment-là, ce que j'espère, mais ce
à quoi je ne m'engage pas, le syndicalisme des cadres ou, alors, nous
proposerons que le délai de 1972 soit prolongé.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté.
Article 2?
M. BURNS: M. le Président, j'aimerais bien qu'on...
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté sur division?
M. BURNS: ... prenne note du fait que c'est mon amendement qui a
été rejeté.
M. LAPORTE: Oui, oui. D'ailleurs, étant donné que nous
avons maintenant le journal des Débats, d'accord.
M. BURNS: Sur division, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'amendement du député de
Maisonneuve est rejeté et l'article 1 est adopté sur
division.
Article 2, adopté?
M. LAPORTE: Adopté.
M. HARDY (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
examiné le bill 36 et l'a adopté sans amendement.
M. LAVOIE (président): Troisième lecture?
3e lecture
M. LAPORTE: Troisième lecture de ce projet de loi?
M. BURNS: M. le Président, nous allons voter en faveur de la
troisième lecture parce qu'il reste, quand même, que le principe
qui est là, plus l'engagement du ministre du Travail, à mon avis,
sont satisfaisants, au moins, en ce qui concerne, moi, député de
Maisonneuve. Mais je pensais à d'autres choses qu'au
député de Maisonneuve en faisant l'amendement. Nous voterons en
faveur.
M. LAPORTE: J'espère que cela vous fera plaisir que cela me fasse
plaisir, votre vote en troisième lecture.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
DES VOIX: Adopté.
M. LAPORTE: L'article 9, pour M.Tessier.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire, pour le ministre des
Affaires municipales, propose la deuxième lecture du projet de loi
numéro 37, Loi modifiant la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
UNE VOIX: Adopté.
Communauté urbaine de Montréal
M. LAPORTE: M. le Président, très brièvement, en
deuxième lecture, nous proposons d'amender la Loi de la
Communauté urbaine de Montréal afin que le comité
exécutif de la Communauté urbaine de Montréal se compose,
à l'avenir, de treize membres; que le président, pour le premier
mandat, soit nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil et qu'une
fois le mandat de quatre années terminé nous revenions à
la procédure actuellement acquise, c'est-à-dire que le
président soit nommé par la communauté urbaine
elle-même, mais pas nécessairement parmi les membres élus
de la communauté urbaine.
Nous proposons également, en amendement, que le
vice-président du conseil soit ou bien représentant de la ville
de Montréal si le président de la communauté urbaine a
domicile dans une autre ville que la ville de Montréal et, s'il arrivait
que le président soit domicilié dans la ville de Montréal,
que le vice-président soit né-
cessairement un membre d'une des municipalités qui ne sont pas de
la ville de Montréal, mais qui sont membres de la communauté
urbaine. M. le Président, c'est là l'essentiel de ce que nous
suggérons. J'ai l'impression que cette Chambre pourrait être
disposée, après un débat plus ou moins long, à
voter ce bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. BERTRAND: M. le Président, nous apportons, cette année,
des amendements à une loi qui a fait l'objet d'une étude
passablement longue et approfondie, alors que mon collègue, l'ancien
ministre du Travail, le Dr Robert Lussier, était titulaire du
ministère des Affaires municipales.
Je n'ai pas besoin de dire que ce projet de loi, d'après nous,
arrivait à son heure, à l'époque, qu'il répondait
à des demandes formulées, depuis très longtemps, par les
citoyens du Montréal métropolitain. Cette année, sans
aucun doute, c'est devant l'opinion publique, à cause de celui qui
occupe le poste de président, M. Saulnier, nous devons revenir avec des
amendements pour régler un problème qui s'est posé
à la suite d'une demande formulée par la communauté
urbaine, apparemment, savoir: l'adoption d'une résolution demandant que
M. Saulnier puisse demeurer président de la Communauté urbaine de
Montréal, même s'il ne se représente pas au poste de
président de l'exécutif de la ville de Montréal.
Pour l'édification de ceux qui s'intéresseront à
l'avenir à ce problème, et pour montrer comment des hommes
peuvent changer d'idée, on n'aura qu'à relire le journal des
Débats de l'époque je n'ai pas l'intention d'en donner
lecture, mais je renvoie ceux qui voudront se documenter à l'index de la
session de 1969, à la page 148, relativement au projet de loi 75
et on pourra, par la suite, consulter le journal des Débats et voir les
opinions qui s'étaient exprimées. Il y en avait qui, à ce
moment-la, demandaient que ce président soit élu au suffrage
universel. Il y en avait d'autres qui proposaient qu'il soit nommé
directement par le lieutenant-gouverneur en conseil. Et d'autres, et cela a
été le projet qui a été accepté, proposaient
qu'il soit nommé par la communauté urbaine elle-même.
Alors l'opinion qui avait prévalu, à la suite même
des recommandations qui avaient été faites, à ce
moment-là, par les autorités de la ville de Montréal,
c'était que le président soit nommé ou élu parmi
les représentants de la communauté urbaine, parmi ceux qui
étaient élus pour représenter la ville de Montréal
et les différentes autres municipalités.
Nous comprenons les circonstances très spéciales qui
entourent l'adoption ou la présentation du projet de loi qui nous est
soumis. Nous acceptons le projet de loi. Nous l'acceptons d'autant plus qu'on
apporte des amendements pour dire que le mandat de celui qui sera nommé
par le lieutenant-gouverneur ne pourra être renouvelé. C'est bien
la teneur de l'amendement ou d'un des amendements qui est proposé au
projet de loi qui nous est soumis.
Alors, dans les circonstances, au nom de l'Opposition, il y aura des
remarques également par mon collègue, le député de
Bagot, au nom de l'Opposition, nous acceptons le projet de loi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.
M. CARDINAL: M. le Président, si vous me permettez, si le
gouvernement n'avait pas apporté les amendements que je viens de lire en
dernière heure, j'aurais été placé dans une
situation inverse de celle où j'étais à l'occasion du
projet de loi no 1. Même si le règlement ne me permet pas de
recommencer un débat sur un projet déjà adopté, je
n'ai pas l'intention de le faire, on me permettra simplement de rappeler
qu'à ce moment-là, je cherchais le principe du projet de loi. Au
contraire, ce projet de loi que nous avons maintenant devant nous, dans sa
première version non amendée, donnait un principe, alors qu'il
s'agissait d'un cas particulier. C'était tout à fait l'inverse du
projet 1. J'étais donc, pour les mêmes raisons, mais à
l'inverse, situé devant un cas de conscience difficile à
résoudre. C'est-à-dire que, pour régler une situation
particulière dans une conjoncture donnée, on adoptait un principe
qui engageait l'avenir jusqu'à une prochaine législation qui
viendrait à nouveau amender la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
D'autant plus que ce qui m'avait frappé, c'est que nos honorables
amis ministériels d'aujourd'hui, qui étaient à ces
banquettes il y a quelques mois, au sujet de ce même projet de loi sur la
Communauté urbaine et au sujet du projet de loi no 62 sur la
réorganisation scolaire de Montréal, avaient tenu des propos
tellement loin de ce qu'ils nous proposent, où l'on nous accusait nous,
alors du gouvernement, d'être contre la démocratie et de vouloir
imposer par notre choix, grâce au ministère des décisions
prises par ce qu'on appelle, dans une phrase de style, le lieutenant-gouverneur
en conseil, que je me sentais donc fort mal pris. Je constatais une fois de
plus comment les avatars, au sens français du terme comme l'emploiraient
l'ancien ministre des Affaires cul-
turelles et le nouveau, sont tels que les vérités semblent
évoluer selon les côtés où l'on se trouve en cette
Chambre.
Donc, je ne puis qu'être satisfait de cet amendement qui fait de
cette loi une exception particulière dans un cas particulier. Ceci ne
résout pas tous les problèmes qui peuvent demeurer au sujet de la
Communauté urbaine de Montréal. Je pense qu'après le chef
de l'Opposition officielle, qui a lui-même constaté des
phénomènes semblables, je puis admettre que nous, quand nous
étions du gouvernement, avions fait le projet de loi du mieux que nous
pouvions alors, mais qu'il n'était certainement pas idéal. Il
n'avait pas subi l'épreuve du temps, mais il ne fallait pas que
l'Opposition d'alors, devenue le gouvernement, vienne défaire ce qu'il y
avait de bien, en particulier au sujet du choix du président de cet
exécutif de la Communauté urbaine de Montréal.
Si cet amendement n'avait pas été apporté, en
particulier à l'article 7, j'aurais été tellement mal pris
que je pense que j'aurais avisé mes collègues des
difficultés de résoudre ce cas de conscience. Maintenant que cet
amendement est apporté, de même que le chef de l'Opposition
officielle l'a dit, je voterai en faveur de ce projet de loi pour cette
raison.
M. BOURASSA: M. le Président, si le député de
Rouyn-Noranda me le permet, je voudrais simplement faire remarquer au
député de Bagot, qui dit que c'est pour un cas particulier, que
dans au moins six communautés urbaines, Hull, Toronto, Winnipeg,
Niagara, Ottawa et Carleton, le président, pour le premier terme, est
nommé pour une période de quatre ans.
M. CARDINAL: D'accord. C'est pourquoi, si on me permet, M. le
Président, de répondre au premier ministre, je dirai que c'est
exactement parce qu'on le fait pour le premier terme que je l'accepte. Je me
rappelle que dans le cas de Hull, l'Opposition d'alors avait quelques doutes.
Evidemment, Toronto étant dans un pays étranger, je ne me
prononcerai pas.
M. BERTRAND: J'ai dit tantôt qu'en Usant le Journal des
Débats, on peut réaliser la vérité de l'adage que,
quand on change de côté, parfois on n'a plus les opinions qu'on
avait de l'autre côté...
M. LAPORTE: Mais quand on change de province?
M. BERTRAND: A ce moment-là, l'ancien chef de l'Opposition, M.
Lesage, disait: Je ne vois pas pourquoi le président de
l'Exécutif serait nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Parce que pour lui, c'était un véritable scandale, c'était
un péché contre les principes fondamentaux de la
démocratie. Le premier ministre aura intérêt...
M. BOURASSA: D'accord.
M. BERTRAND: ... il n'a pas besoin de regarder l'heure, il n'est pas
tard à relire les propos de son ancien chef.
M. LAPORTE: It is later than you think.
M. BERTRAND: Il n'est pas tard, nous sommes ici pour la nuit.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de... M. PAUL: Votre
siège!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, en écoutant les honorables
députés parler, je me compte un peu comme chanceux de ne pas
avoir siégé avant aujourd'hui; je ne suis pas obligé de
fouiller dans les Débats.
Simplement quelques remarques, M. le Président. C'est que nous
serons évidemment en faveur, pour les raisons qui ont été
énoncées, justement par nos collègues de l'Union
Nationale...
M. BERTRAND: Pour une fois.
M. SAMSON: C'est probablement dû au fait que la fin de la session
est proche et que je m'en voudrais de finir cette session sans être
réconcilié avec ces honorables députés.
On dit que le président de la communauté urbaine sera
nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil et que son mandat ne peut
être renouvelé. Si on avait dit, dans le bill, que ce serait
indéfini, c'est possible que nous aurions pensé autrement, mais,
comme c'est présenté de façon assez claire et
précise, nous serons d'accord avec les honorables membres de
l'Opposition et du gouvernement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député
de Bourget.
M. LAURIN: M. le Président, nous connaissons tous les
circonstances particulières qui
amènent le gouvernement à présenter ce projet de
loi. Nous en avons entendu parler dans les journaux et nous savons très
bien que, n'eussent été ces circonstances particulières,
jamais le gouvernement ne nous aurait présenté ce projet de loi.
Nous le regrettons, en un sens, parce qu'il nous semble que la
Législature n'est pas ici pour régler des cas particuliers, mais
pour établir des principes d'ordre général qui doivent
s'appliquer dans toutes les situations.
Il reste, cependant, que nous nous félicitons que ces
circonstances particulières aient amené le gouvernement à
amender la Loi de la communauté urbaine en ce qui concerne le choix de
son président du comité exécutif. En effet, cette Loi de
la communauté urbaine, à l'usage un usage qui n'a pas eu
le temps encore de se prolonger beaucoup nous en a quand même
montré quelques défauts.
En ce qui concerne la Communauté urbaine de Montréal en
particulier, le grand défaut qui n'a pas pris de temps à se
révéler, c'est que le double mandat de président du
conseil exécutif de la plus grande ville du Québec et de
président du conseil exécutif de la plus grande
agglomération urbaine du Québec était véritablement
impossible à cumuler. Ce cumul était au-dessus des forces de tout
homme, quelque génial qu'il soit. Encore une fois, n'eussent
été ces circonstances particulières, peut-être
aurait-il fallu de longues années avant que le gouvernement s'en
aperçut.
Nous nous réjouissons donc que l'occasion nous soit donnée
de critiquer cette ancienne Loi de la Communauté urbaine de
Montréal et de nous opposer à ce double mandat pour la plus
grande agglomération du Québec et peut-être,
également, pour toute agglomération urbaine, quelle qu'elle soit.
En ce qui concerne Montréal, il est évident que ce cumul de
fonctions était trop lourd pour les épaules d'un seul homme. Il y
a également un autre obstacle, un autre inconvénient à ce
cumul des fonctions. Il serait devenu de plus en plus évident que cette
double position de président d'un comité exécutif d'une
grande ville et de président exécutif d'une communauté
urbaine peut facilement amener des conflits d'intérêts. En effet,
il n'est pas facile, pour un président de comité exécutif
d'agglomération urbaine, de toujours choisir en fonction du bien de la
communauté urbaine quand, durant de si longues années, il a
été élu pour gérer les biens d'une ville
particulière.
Donc, pour ces deux raisons: cumul trop lourd de fonctions et menace ou
risque de conflit d'intérêts, nous nous opposons au double mandat
et nous sommes heureux que le gouvernement présente ce projet de loi
qui, bien que d'une façon circonstancielle, a pour but de corriger un
article du projet de loi qui nous semblait dangereux.
Par ailleurs, nous sommes également d'avis qu'il n'est pas bon
que le président du comité exécutif de
l'agglomération urbaine de Montréal soit élu au suffrage
universeL Nous sommes opposés à cette solution pour deux raisons.
D'abord, une raison pratique. Il serait, premièrement, impossible de
mettre en place, pour l'élection d'octobre, les mécanismes
compliqués qui permettraient à ce suffrage universel d'être
tenu selon les règles de la démocratie.
Il est sûr que ces mécanismes seraient très longs
à mettre en branle, exigeraient également des dépenses
assez considérables. Nous ne pensons pas que, dans les quelques mois qui
nous séparent de la prochaine élection de Montréal, il
soit possible d'élire au suffrage universel le président de cette
commission.
Mais, il y a un autre danger, et le gouvernement, prenant les avis
judicieux d'experts, de spécialistes qui ont examiné la situation
d'autres agglomérations urbaines, s'en est rendu compte, et là
nous partageons son avis. Il serait peut-être dangereux de créer,
au niveau de l'agglomération urbaine de Montréal, une sorte de
gouvernement qui ne serait plus un gouvernement municipal, sans être tout
à fait un gouvernement provincial, mais qui pourrait facilement, on ne
sait jamais, si les récriminations de quelques Montréalais
continuent de s'accumuler, donner lieu peut-être un jour à des
réclamations pour la création d'une onzième province au
pays ou d'un mini-Etat au Québec, Et en ce sens, nous sommes d'accord
avec le gouvernement qui a rejeté cette solution de l'élection au
suffrage universel du président du comité exécutif de
l'agglomération métropolitaine de Montréal.
Par ailleurs, M. le Président, nous sommes malgré tout
contre la mesure qu'entend prendre le gouvernement pour changer, pour pallier
cette situation du double mandat. Il nous semble, en effet, qu'il ne convient
pas que ce soit le gouvernement du Québec qui nomme le président
que nous avons ce soir nous savons maintenant que ce serait seulement pour un
mandat. Cela atténue beaucoup la portée des critiques que nous
voulions faire au projet, mais il reste quand même que le principe
demeure: Le gouvernement entend s'arroger le droit, ne serait-ce que pour un
mandat de nommer le président du comité exécutif de
l'agglomération urbaine de Montréal et cela nous semble
dangereux.
En effet, M. le député de Missisquoi rappelait tout
à l'heure les paroles de l'ancien chef du gouvernement libéral,
M. Jean Lesage, qui s'opposait à cette mesure. Il ne nous a pas
donné
tous les arguments de M. Jean Lesage, mais il me semble que, si le
député de Missisquoi nous avait donné tous ces arguments,
le principal aurait été le suivant: Il revient au seul
gouvernement du Québec, puisque au fond les gouvernements municipaux ne
sont que des émanations du gouvernement québécois, de
définir les pouvoirs des municipalités. Il le fait constamment,
d'abord par des lois organiques, ensuite par des amendements qu'il apporte de
temps à autre à la Loi des cités et villes. Il lui revient
exclusivement de définir les pouvoirs, mais non pas de se mêler de
choisir les hommes qui vont présider aux destinées de ces
villes.
C'est là un principe très dangereux. Le gouvernement a le
devoir, bien sûr, lorsqu'une situation d'urgence se développe dans
certaines municipalités, de déléguer des administrateurs
qui peuvent à l'occasion prendre en tutelle certaines
municipalités, mais on sait que c'est une situation d'urgence, une
situation exceptionnelle. Là, au nom de l'intérêt public,
le gouvernement est parfaitement justifié d'intervenir pour changer des
hommes, mais c'est une situation d'exception, encore une fois, qui ne devrait
pas être érigée à l'état de principe. C'est
là précisément un des dangers du projet de loi que nous
étudions ce soir, qu'un précédent soit créé,
que le gouvernement prenne l'habitude de choisir, ne serait-ce que pour un
terme limité, déterminé, les hommes qui vont
présider aux destinés de quelque chose d'aussi important qu'une
communauté urbaine.
Et à ce titre, M. le Président, même si l'amendement
apporté par le gouvernement vient limiter la portée de la
critique que nous faisons, nous continuons quand même à presser le
gouvernement de changer d'avis là-dessus, afin que ceci ne soit pas
interprété comme une sorte d'abus de pouvoir de la part du
gouvernement québécois, afin que ceci ne soit pas
interprété comme une intrusion dangereuse pour l'avenir dans les
affaires d'une agglomération ou d'une ville et que ceci ne risque pas
d'entacher des principes essentiels de démocratie en vertu desquels les
citoyens doivent eux-mêmes choisir ceux qui président à
leur destinée.
Ce que nous avons proposé plus tôt et nous le
proposerons en troisième lecture c'est un amendement qui, tout en
amenant pratiquement les mêmes résultats auxquels le gouvernement
veut aboutir, changerait quand même les modalités selon lesquelles
ce résultat serait atteint.
En somme, le sens de notre amendement serait de faire nommer, bien
sûr, comme le gouvernement l'entend, le président du comité
exécutif de l'agglomération métropolitaine par les membres
actuels du comité exécutif de l'agglo- mération urbaine.
Après tout, la majorité au sein de ce comité
exécutif est déjà assurée à une certaine
ville qui a des idées très précises sur le candidat qui
devrait présider à cette commission et il n'y aurait guère
de danger que les résultats soient changés. Mais par ailleurs,
ceci donnerait la satisfaction, je crois, aux membres de cet exécutif de
choisir eux-mêmes, eux qui ont été
délégués pour ce faire par leur population, celui qui
devrait présider à leurs travaux.
Ceci aurait un grand avantage. Non seulement ceci respecterait les
principes de la démocratie; non seulement ceci serait conforme aux vues
de l'ancien premier ministre libéral et ici je me plais à
reconnaître l'étendue de sa science et de sa compétence,
surtout en ces matières de droit civil mais ceci aurait beaucoup
d'autres avantages également. Nous ne savons pas ce que deviendra cette
Communauté urbaine de Montréal. Nous ne savons pas de quelle
façon elle évoluera. Nous l'avons vue, par exemple, s'emparer
actuellement et a bon droit des services de police afin d'amener une sorte
d'uniformisation des services, afin d'amener une plus grande efficacité.
Bientôt, nous la verrons probablement s'occuper d'autres problèmes
d'intérêt commun pour toutes les municipalités de
l'île, peut-être, par exemple, les problèmes d'urbanisme,
les problèmes de transport. Il peut arriver un moment où le
comité exécutif de cette agglomération urbaine sera
peut-être plus puissant que les autorités respectives de chacune
des cités et villes et à ce moment-là, le gouvernement du
Québec se trouvera peut-être en face d'un pouvoir dont il aura
intérêt à modérer les impatiences, modérer le
pouvoir, également, car nous savons que le pouvoir galvanise facilement
les énergies, et plus on en a, plus on en veut avoir. Peut-être
qu'il serait sage de laisser évoluer cette Communauté urbaine de
Montréal avant de voir quels sont les pouvoirs qui seront les siens,
quels sont peut-être les dangers qu'ils pourront faire courir à
certaines de nos institutions démocratiques dont le gouvernement
québécois.
En plus, cela nous permettra peut-être, dans l'intervalle de ces
quatre années, de reprendre la question de la composition de
l'exécutif de la communauté urbaine, des modes d'élection
du président de l'exécutif. Nous avons étudié trois
ou quatre modèles jusqu'à présent. Aucun n'a semblé
être tout à fait satisfaisant. En moins de quelques mois, nous
avons évolué, nous avons proposé d'autres formules. Est-ce
qu'il ne serait pas sage, à la lumière de l'expérience, de
prendre une solution qui nous permettrait de continuer l'étude de ce
problème et peut-être d'en arriver à une solution qui
serait meilleure
que toutes celles que nous avons proposées jusqu'ici, justement
parce qu'elle s'appuierait sur une meilleure connaissance des principes et des
faits et qu'elle s'appuierait en même temps sur l'expérience?
Donc, en conséquence, nous appuierons, bien sûr, le principe de
cette loi, mais nous nous réservons de proposer en troisième
lecture ou en comité plénier l'amendement dont je parlais afin
que le gouvernement puisse, peut-être pour une fois, profiter des
idées que peuvent avoir certains partis d'opposition pour le plus grand
profit des citoyens de Montréal et de la région
métropolitaine.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader de l'Opposition propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier pour l'étude de ce bill. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Comité plénier
M. HARVEY (Chauveau) (président du comité plénier):
Bill 37, article 1.
M. TESSIER: M. le Président, avant d'étudier en
comité les articles, je voudrais produire ici des amendements aux
articles 1, 7 et 13.
M. BOURASSA: A l'article 1, le deuxième alinéa de
l'article 7 de la Loi de la Communauté urbaine de Montréal
édicté par cet article 1 du bill est remplacé par le
suivant... Je pense que le chef de l'Opposition, le chef parlementaire du PQ et
le chef du Ralliement créditiste ont les amendements.
M. PAUL: Nous les avons. UNE VOIX: Nous les avons.
M. BOURASSA: « Le président est nommé par le
lieutenant-gouverneur en conseil. Son mandat ne peut être
renouvelé. »
D'accord? Adopté?
M. LAPORTE: Adopté.
M. PAUL: Adopté, M. le Président.
M. BURNS: Non, non.
M. BOURASSA: Article 2?
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Article 2.
M. BURNS: Un instant. Tel que l'a mentionné le
député de Bourget il y a quelques minutes, l'amendement...
M. BOURASSA: C'est à l'article 7, son amendement.
M. BURNS: Ah, excusez-moi! On n'est pas à l'article 1, M. le
Président?
M. BOURASSA: Non, non.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Nous sommes...
M. BOURASSA: Il me semble que l'amendement du député de
Bourget est pour l'article 7.
M. BURNS: Non, non, à l'article 1. M. BERTRAND: C'est à
l'article 1...
M. BOURASSA: D'accord. On a écouté avec attention les
propos du député de Bourget, mais, on préfère sans
vouloir prolonger le débat, s'en tenir à notre amendement.
M. BURNS: Bien, je vois ça. C'est d'ailleurs l'habitude du
gouvernement.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Alors, si j'ai bien compris...
M. BURNS: Je n'ajouterai pas tellement à ce que le
député de Bourget a mentionné, sauf que j'aimerais
expliquer, maintenant que le gouvernement a produit un amendement, pourquoi
nous aurions préféré un amendement permettant d'abord,
pour cette fois-ci, étant donné que nous avons quatre ans pour y
penser, étant donné également que la Communauté
urbaine de Montréal est relativement nouvelle, et nous aurions durant
ces quatre ans-là le temps de repenser à ce
problème...
M. BOURASSA: On va y repenser, nous aussi.
M. BURNS: Oui, vous allez y repenser,
sauf qu'en attendant cela va être le lieutenant-gouverneur en
conseil qui va continuer à le nommer pour ces quatre ans.
M. BOURASSA: Il est nommé pour quatre ans.
M. BURNS: Nous considérons qu'il aurait été
infiniment préférable et beaucoup plus normal que ce soit le
conseil ou le comité exécutif lui-même qui nomme ce
représentant. D'autre part, nous admettons les difficultés que
peut comporter le problème du double mandat, si on pense à une
charge dans une ville comme Montréal, tenue conjointement avec celle du
comité exécutif de la Communauté urbaine; c'est
évident que c'est une charge très lourde.
D'autre part, nous considérons que le président du
comité exécutif de la communauté urbaine, s'il avait
été nommé par le comité exécutif
lui-même, cela respecterait davantage les principes qui président
à cette délégation de pouvoirs que le gouvernement fait en
matière de municipalités.
Alors, pour cette raison, nous voterons contre cet amendement.
Evidemment, comme le chef parlementaire le dit toujours sans arrogance, vous
savez évidemment que cet amendement sera adopté et que le
nôtre ne le sera pas. Il reste quand même que nous voterons contre
cet amendement pour les raisons que je mentionnais.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Si j'ai bien compris, l'article 1
est adopté sur division.
M. LAPORTE: Sur division, mais avec l'amendement...
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Avec l'amendement proposé: Le
président est nommé par le lieutenant-gouverneur en
conseil...
M. BURNS: Simplement une question, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Je vous en prie.
M. BURNS: Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire exactement
pourquoi il considère cet amendement comme étant une
amélioration à la situation, telle qu'il l'avait
présenté dans le bill 37 à l'article 1?
M. BOURASSA: Vous voulez dire que...
M. BURNS: Je voudrais savoir...
M. BOURASSA: ... ce ne soit pas renouvelé?
M. BURNS: Non, je veux dire que l'amendement que le gouvernement
propose, en quoi cela améliore-t-il ce bill?
M. BOURASSA: C'est-à-dire... M. BURNS: C'est
déjà...
M. BOURASSA: ... soit que cela l'améliore, soit que cela le rende
plus clair. C'est que la nomination par le lieutenant-gouverneur en conseil ne
peut pas être renouvelée. Le député de Bagot a
exprimé tantôt à plusieurs reprises les raisons pour
lesquelles il a été réticent à adopter le bill, tel
qu'il était exprimé dans sa première version...
Nous avons décidé qu'il était plus clair d'arriver
avec cet amendement.
M. LAURIN: M. le Président, j'ai présenté une
argumentation au gouvernement libéral. Il se contente de dire, d'une
façon très brutale: Nous sommes contre, mais il ne répond
pas du tout par une contre-argumentation. Après tout, si les lois de la
logique, de la raison et de l'intelligence devaient triompher, il me semble que
le gouvernement devrait, au moins, se donner la peine de donner les raisons
pour lesquelles il pense que son amendement est préférable au
nôtre.
M. BOURASSA: M. le Président, nous proposons notre propre
amendement qui constitue la réponse à l'amendement
dudéputé de Bourget.
M. LAURIN: Ce n'est pas une réponse; c'est simplement un
énoncé de phrase sans aucune raison qui le sous-tende. Vous ne
nous avez donné aucune des raisons qui pourraient laisser croire
à cette Chambre que votre amendement est meilleur.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est notre réponse.
M. LE PRESIDENT (Harvey-Chauveau): Si j'ai bien compris, l'article est
adopté sur division.
M. BURNS: Ah non! Une minute, M. le Président. Est-ce que je
peux, quand même, faire une dernière remarque
là-dessus?
M. LE PRESIDENT (Harvey-Chauveau): Je pense que vous avez parlé
suffisamment sur la question.
M. LESSARD: M. le Président, il n'appartient pas au
président de ce comité de déterminer si le
député...
M. LAPORTE: Bon, si vous voulez vous... UNE VOIX: Oui, c'est au
président. DES VOIX: Ah! Ah!
M. BURNS: M. le Président, je veux tout simplement faire
remarquer que l'amendement présenté par le gouvernement ne change
strictement rien à ce qu'il proposait. En pratique, cela ne change
strictement rien. Ce que l'amendement veut dire, tout simplement, c'est que,
d'ici quatre ans, le gouvernement devra revoir la formule.
M. LAPORTE: Si vous analysez les articles les uns avec les autres, cela
veut dire que, pour le premier mandat, comme ce fut le cas à Toronto,
comme ce fut le cas à Winnipeg, comme ce fut le cas à Carleton,
comme ce fut le cas a Niagara, c'est le gouvernement qui va nommer le
président. Vous avez une institution neuve et, au lieu de nommer une
personne qui soit directement représentante d'une municipalité,
vous avez quelqu'un qui peut coiffer le tout. Une fois que ceci s'est fait
pendant quantre ans, il est possible d'imaginer que, la période de
rodage étant terminée, la communauté urbaine peut
élire son propre président de façon beaucoup plus sereine.
C'est ce qu'on dit. Mais si vous analysez tous les articles les uns avec les
autres, cela veut dire que, la première fois, le conseil de ministres le
nomme et que la deuxième fois, le président sera élu par
la communauté urbaine. C'est ce que cela veut dire, si vous analysez les
articles les uns avec les autres.
M. BURNS: M. le Président, j'aimerais savoir en quoi c'est
tellement préférable que, pour cette fois-ci, ce ne soient pas,
justement, les personnes qui sont élues par chacune des
municipalités et déléguées à ce
comité exécutif qui puissent s'exprimer librement. En quoi est-ce
préférable que ce soit le lieutenant-gouverneur en conseil,
plutôt que ces gens à qui le gouvernement de la province a
délégué des pouvoirs, dans chacune des
municipalités, de se faire élire et, ensuite, de s'exprimer? En
quoi est-ce préférable? Je ne le vois vraiment pas.
M. LAPORTE: Pour les mêmes raisons que, partout ailleurs au
Canada, on a jugé que, pour commencer, pour mettre la chose en marche,
il était normal que ce soit l'Etat central ou le gouvernement de la
province qui nomme le premier administrateur qui puisse, comma je l'ai dit
tantôt, être au-dessus et coiffer tout le monde.
M. BURNS: M. le Président, à part de suivre le reste du
Canada sur une affaire comme cela, en quoi a-t-il été jugé
très profitable, dans les autres endroits, de procéder de cette
façon? Moi, cela ne me satisfait pas.
M. LAPORTE: Quant à l'argument de suivre le Canada, en avez-vous
un autre pour l'infirmer? Cela a été jugé bon partout.
Est-ce que cela devient mauvais parce qu'il y en a déjà dix qui
l'ont trouvé bon?
M. LAURIN: A quels endroits? Pourriez-vous nous les nommer?
M. LAPORTE: Toronto, Winnipeg, Niagara, Carleton, près d'Ottawa,
cela fait quatre, Hull.
M. LAURIN: M. le Président, je ne suis pas du tout d'accord que
cela a été jugé tellement bon à Toronto parce que,
moi aussi, je lis en anglais quand même. Et j'ai lu beaucoup d'articles
contre le mode de nomination du président de Toronto.
M. LAPORTE: M. le Président, d'abord cela m'étonne
beaucoup que le député puisse lire en anglais.
M. LAURIN: Couramment à part cela. Et je parle couramment.
M. LAPORTE: Deuxièmement, nous avons consulté, disons,
l'un des experts les plus dégagés, ni un libéral, ni un
unioniste, ni même un séparatiste. Il s'agit de M. Carl Goldenberg
qui juge que ce qui a été fait ailleurs est une formule
acceptable, qui a donné de bons résultats et qui pourrait
être rentable ici.
M. BURNS: M. le Président, si je comprends bien, c'est M.
Goldenberg qui décide de la législation au Québec.
M. LAPORTE: De la même façon que, quand M. Burns
était conseiller de la CSN, ce n'était pas lui qui
décidait, mais il donnai!: de très bons conseils.
M. BURNS: M. le Président, sur un point
d'ordre. Je ne vois pas comment je devrais être nommé dans
cette Chambre par le leader parlementaire.
M. LAPORTE; Alors que le député de Maisonneuve
était M. Burns, il lui arrivait de donner...
M. BURNS: Il l'est encore, M. le Président.
M. LAPORTE: ... certains conseils, mais jamais il ne va prétendre
que c'est lui qui décidait.
M. BOURASSA: M. le Président, je réfère le
député de Maisonneuve aux propos mêmes du
député de Bourget qui, durant son exposé, a dit que, sur
la question du suffrage universel, on avait bien fait de suivre l'avis de
M.Goldenberg.
M. LAURIN: Mais c'est précisément cela, M. le premier
ministre. M. Goldenberg s'est prononcé contre une formule, mais il s'est
pas du tout prononcé pour la formule qui est inscrite ici.
M. BOURASSA: Oui.
M. LAURIN: Du moins, les journaux n'en ont pas fait état.
M. BOURASSA: Bien oui, mais les journaux ne peuvent pas faire
état de tout ce que font les experts.
M. LAURIN: D'ailleurs, même s'ils en avaient fait état, je
reste encore avec ma question. J'ai présenté une argumentation et
tout ce qu'on m'a répondu, c'est une affirmation de fait: Nous sommes
72, nous allons vous battre, mais nous n'avons pas besoin de présenter
une contre-argumentation.
M. BOURASSA: M. le Président, je l'ai signalé
tantôt, nous jugeons que, pour le premier mandat, il est
préférable que ce soit le lieutenant-gouverneur en conseil ou le
gouvernement qui le nomme. Par la suite, cela pourrait être la
communauté urbaine, mais il y a une période de transition qui est
nécessaire.
M. LAURIN: Mais, est-ce que cette période ne serait pas aussi
bien assurée si les membres actuels du conseil exécutif, qui
savent très bien où ils veulent aller, en arrivaient au
même résultat que le gouvernement ambitionne par une
méthode différente qui respecterait davantage les principes
démocratiques?
M. BOURASSA: Oui, mais les membres ont déjà exprimé
leur point de vue et nous croyons que notre méthode est
préférable, bien humblement.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Alors, article 1, adopté.
M. LAURIN: Sur quoi votons-nous, M. le Président? Est-ce que nous
votons sur le sous-amendement à l'amendement?
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Non, nous votons sur l'article
1.
M. BURNS: Sur division, M. le Président. M. LAPORTE: Sur
division, très bien.
M. BOURASSA: Nous votons sur l'article 1, tel qu'amendé par le
ministre des Affaires municipales...
M. LAPORTE: Sur division.
M. BOURASSA: ...ou par le premier ministre.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Article 2?
M. BOURASSA: Adopté.
M. LAPORTE: Article 2, adopté.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Article 3? Adopté. Article 4?
Adopté. Article 5? Adopté. Article 6? Adopté. A l'article
7, il y a un amendement. Article 23. A l'ordre, s'il vous plaît! Nous
allons maintenant permettre à M. le ministre d'exprimer les...
M. LESSARD: Est-ce qu'il y a un ministre des Affaires municipales? Qui
est ministre? On demande si le ministre des Affaires municipales est parti pour
Ottawa.
M. LAPORTE: Est parti pour où? M. LESSARD: Pour Ottawa?
M. LAPORTE: Non, pas plus que vous, vous n'êtes parti pour la
gloire.
M. LESSARD: J'ai l'impression que le parti au pouvoir a hâte de
partir ce soir aussi.
M. TESSIER: Je crois que tout le monde a eu des copies des
amendements.
UNE VOIX: Est-ce qu'on peut l'expliquer? M. DEMERS: Cela amende quoi,
ça?
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): A l'ordre!
M. TESSIER: L'article 7 a été amendé. Vous avez eu
des copies. Alors, l'article 23 se lira désormais comme suit: «Le
président du comité exécutif doit, au moment de sa
nomination, être domicilié de façon continue depuis douze
mois dans un même secteur. Il doit, par la suite, être
domicilié dans le territoire de la communauté». Alors,
c'est un léger amendement à l'article qui existait
déjà.
M. PAUL: M. le Président, est-ce qu'on veut tenir compte du
domicile élu...
M. TESSIER: Pardon?
M. PAUL: ... ou si on parle du domicile réel?
DES VOIX: Réel.
M. TESSIER: Du domicile réel, ah oui!
M. PAUL: Très bien.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Adopté. Article 8?
Adopté. Article 9? Adopté. Article 10?
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Adopté. Article 11?
Adopté. Article 12? Adopté. Il y a un amendement à
l'article 13. Le ministre va donner des explications.
M. TESSIER: Il y a un article additionnel, l'article 14 qui se lit comme
suit: « Cette présente loi entrera en vigueur le 26 octobre 1970,
» c'est-à-dire à la date des élections municipales
de Montréal.
M. LE PRESIDENT (Harvey Chauveau): Je m'excuse cependant, M. le
Ministre... Article 14, adopté avec amendement.
M. HARVEY (Chauveau) Président du comité plénier:
M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que nous avons
adopté tous les articles de la loi avec amendements.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
que les amendements soient maintenant lus et agréés.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. BURNS: Sur division, M. le Président, dans ce bill
Saulnier.
M. LAPORTE: Sur division. 3e lecture
M. LE PRESIDENT: Ce projet de loi est adopté sur division en
troisième lecture.
M. BURNS: Sur division, le bill Saulnier. M. CHARRON: Sur division, le
bill Saulnier.
M. LAPORTE: Article numéro 1, M. le Président.
Grand Théâtre
M. PAUL: M. le Président, l'honorable leader parlementaire me
permettra une question. Je crois que nous n'avons pas passé à la
troisième lecture du projet de loi du Grand Théâtre de
Québec.
M. LAPORTE: Je m'excuse, M. le Président, j'étais en train
de rapetisser le Grand Théâtre. Puis-je appeler l'article 3 de
notre règlement pour la troisième lecture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le Grand Théâtre, M. le
Président.
M. DEMERS: On vient de frapper les trois coups.
Les trois coups sont frappés.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre siège en
comité plénier.
Cette motion sera-t-elle...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dispensé, nous allons passer à
la troisième lecture.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la troisième lecture du projet de loi numéro 9, Loi du Grand
Théâtre de Québec.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre...
UNE VOIX: Nous pouvons laisser parler le ministre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si le ministre veut
parler avant moi... Il ne parlera pas?
M. CLOUTIER (Ahuntsic): M. le Président, je crois avoir dit tout
ce que j'avais à dire au sujet de ce projet de loi.
M. DE MERS: Cela aura été son meilleur discours.
M. LAPORTE: ... de Chicoutimi.
M. LE PRESIDENT: Je crois comprendre que le ministre renonce à
son droit de parole?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il vient de parler.
M. LE PRESIDENT: Je tiens à l'aviser qu'il n'y a pas de droit de
réplique sur la troisième lecture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne veux
évidemment pas ranimer le débat que nous avons eu cet
après-midi, non plus que celui qui a marqué les mémorables
séances de l'étude du budget des Affaires culturelles. Toutefois,
nous avons, cet après-midi, subi les assauts de la majorité
ministérielle qui nous a imposé un projet de loi dont je
désire, ce soir, au nom de mes collègues, me dissocier.
En effet, le ministre des Affaires culturelles, écartant, d'un
revers de main, un ensemble de mécanismes et d'instruments dont nous
avions muni son ministère pour qu'il l'administrât avec
compétence, autorité et dans l'intérêt des citoyens,
afin de promouvoir la diffusion de la culture, l'accessibilité du bien
culturel à tous les citoyens de tous les milieux, le ministre, dis-je, a
présenté un projet de loi qui crée une régie du
Grand Théâtre de Québec.
Ce projet de loi, comme j'ai eu l'occasion de le dire cet
après-midi, n'apporte rien de nouveau puisque, déjà, nous
avions mis en place tous les mécanismes nécessaires à la
gestion du Grand Théâtre. Il a surtout ce défaut
c'est l'aspect que je veux souligner avant que de clore ce débat
de remettre entre les mains d'un groupe d'administrateurs, qui n'auront pas
beau- coup de comptes à rendre au gouvernement, même si la loi
semble leur en faire l'obligation, l'administration, la gestion et la conduite
d'un organisme qui devait être le moteur par excellence de la politique
de la diffusion de la culture du ministère des Affaires culturelles,
telle que le ministre l'a lui-même énoncée au cours de
l'étude de ses crédits.
Il recrée, d'autre part, une forme d'aristo-cratisme en
matière de culture, et il y a fort à craindre que le Grand
Théâtre de Québec ne devienne pas, comme il devrait
l'être dans notre esprit et notre volonté, cet instrument mis au
service de tous les citoyens. Je ne veux évidemment pas préjuger
de la qualité des administrateurs, mais le fait que le
lieutenant-gouverneur se soit réservé le droit, par ce projet de
loi, de nommer tous les membres du Grand Théâtre de Québec
nous apparaît comme une mesure à forte coloration politique.
De plus, le ministre des Affaires culturelles n'a pas cru bon de nous
renseigner sur les critères qui nous eussent rassurés sur le
caractère représentatif des personnes qu'il entend nommer. Que
sera donc le Grand Théâtre de Québec, que sera donc cette
régie du Grand Théâtre de Québec? Nous n'en savons
rien, sauf qu'il sera administré par des personnes nommées par le
gouvernement et que celles-ci seront nanties de tous les pouvoirs
d'administration que le ministre aurait du se réserver.
Nous avons beaucoup insisté sur le caractère de
représentativité des membres de cette régie du Grand
Théâtre. Nous avons demandé, sous forme d'amendement, qu'on
reconnaisse à la ville de Québec, à la Communauté
urbaine de Québec, à l'université Laval et à
certains organismes culturels, à des centrales syndicales le droit de
siéger au conseil d'administration de ce Grand Théâtre.
Cela nous a été refusé et nous avions même
posé un geste qui invitait le gouvernement à prendre acte de
notre désir de le voir assurer la représentativité de tous
les milieux au sein de cet organisme de la Régie du Grand
Théâtre.
Mais, le rouleau compresseur de la majorité ministérielle
nous a empêchés de doter cette régie de certains
mécanismes qui en auraient fait un instrument véritablement
démocratique. Il nous reste donc, M. le Président, à
déplorer que le ministre des Affaires culturelles et, par lui, le
gouvernement n'aient point voulu tenir compte de notre volonté. Nous
souhaitons malgré tout que le Grand Théâtre de
Québec devienne vraiment cet instrument de création et de
diffusion culturelles qu'il devait être et que les contribuables, qui
l'ont érigé, qui vont le payer, puissent y trouver accès
à des prix raisonnables.
M. le Président, nous n'avons donc pas l'Intention d'approuver
cet acte du gouvernement. Nous ne demandons pas le vote, mais vous comprendrez
bien que nous nous dissocions du geste du gouvernement et que nous n'entendons
pas approuver cette démarche qu'il a faite et qui ne me paraît pas
s'inscrire dans la ligne de pensée qu'avait pourtant exprimée
avec beaucoup d'insistance le ministre des Affaires culturelles, alors qu'il
essayait de définir l'orientation de son ministère.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Brièvement, M. le Président, nous
n'approuverons pas non plus, en troisième lecture, le projet de loi no
9, parce que l'étude que nous en avons faite cet après-midi,
à la commission permanente des Affaires culturelles, n'a pas
apporté les résultats que nous escomptions. Aucun amendement n'a
été accepté, sauf un mineur à l'article 2. Donc,
tout ce que nous avons exprimé, quant à notre opposition à
la régie, quant à notre opposition à la conception et la
diffusion de la culture qu'il y a derrière ce projet de loi, persiste,
demeure. Je rappelle au ministre des Affaires culturelles, en terminant, nos
dernières remarques à la fin de l'étude cet
après-midi, à savoir que le ministère des Affaires
culturelles est parti d'un fort mauvais pied avec le projet de loi no 9.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Fonction publique.
M. GARNEAU: M. le Président, en tant que représentant d'un
des comtés de la ville de Québec, je me réjouis que cette
loi du Grand Théâtre soit enfin acceptée par
l'Assemblée nationale. L'ancien ministre des Affaires culturelles, le
député de Chicoutimi, a mentionné qu'il avait
proposé certains amendements en commission, cet après-midi, qui
n'avaient pas été acceptés. Pourtant, il a oublié
de souligner ceci, c'est que le ministre des Affaires culturelles, dans les
réponses qu'il a apportées aux questions du député
de Saint-Jacques et du député de Chicoutimi, a bien
indiqué que c'était l'intention du gouvernement de consulter les
corps intermédiaires auxquels le député de Chicoutimi
faisait allusion, avant de nommer les neuf régisseurs du Grand
Théâtre de Québec étant donné
l'amendement.
Depuis déjà plusieurs mois, les citoyens de Québec
qui circulent sur le boulevard Saint-Cyrille voient cet immense édifice.
Même durant la campagne électorale, dans des assemblées
contradictoires que j'ai tenues avec mes adversaires, on a soulevé ce
point du Grand Théâtre, cet immeuble qui était là
depuis des mois et des mois et qui ne servait pas. Je pense que
l'Assemblée nationale donne au gouvernement les structures
nécessaires pour administrer cet édifice et qu'enfin un immeuble
de plusieurs millions de dollars puisse servir à la population du
Québec métropolitain. C'est dans ce sens qu'il faut se
réjouir de l'adoption de cette loi.
Evidemment, c'est un instrument administratif qui n'est peut-être
pas parfait, mais que nous jugeons nettement supérieur aux
méthodes de gestion qui avaient été conçues par
l'ancien ministre des Affaires culturelles. L'ancien ministre suggérait
des sociétés à caractère privé, dont les
administrateurs étaient nommés par le ministre et sur lesquels la
Chambre, à toutes fins pratique, n'avait aucun mode de contrôle,
étant donné que c'étaient des subventions et que ces
sociétés privés rendaient compte qu'au ministre.
Je pense que la structure proposée par le bill 9 est beaucoup
plus démocratique et qu'elle répond beaucoup plus justement aux
normes régulières d'administration des deniers publics et la loi
présentée par le ministre des Affaires culturelles est une loi,
je pense, progressive qui permettra de diffuser la culture non seulement aux
citoyens de la ville de Québec, mais aussi à ceux de toute sa
banlieue. Je tiens à en féliciter le ministre des Affaires
culturelles.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous me permettrez, M. le Président, de
poser la question de privilège parce que les observations du ministre de
la Fonction publique comportaient deux choses qui ne sont pas exactes et que je
ne puis pas laisser passer sans les relever.
D'abord, il a laissé entendre qu'il y avait eu retard de la part
du ministre qui a précédé celui qui est actuellement
ministre des Affaires culturelles...
DES VOIX: C'est vrai.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qu'il y avait eu retard dans la
construction du Grand Théâtre et dans la mise du
Grand-Théâtre au service de la population. Cela est absolument
inexact. Le cheminement critique s'est accompli normalement. Il y a eu des
accidents de parcours absolument incontrôlables et qui ne
dépendaient pas du ministre des Travaux publics qui avait la
responsabilité de la construction.
Deuxièmement c'est encore là une réponse et
j'ai le droit de poser la question de privilège là-dessus pour
rétablir les faits le ministre
de la Fonction publique a laissé entendre que nous n'avions pas
muni le Grand Théâtre des instruments qui nous eussent permis de
le mettre en activité. Nous l'avions fait, nous avions
créé, indépendamment du jugement qu'on peut porter sur les
mécanismes que nous avions mis en place, les mécanismes; la
corporation existait, elle avait commencé de fonctionner, elle avait
déjà préparé l'ouverture du Grand
Théâtre. Par conséquent, les remarques du ministre de la
Fonction publique ne sont absolument pas exactes et on ne pourrait leur donner
qu'une interprétation démagogique.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LAPORTE : Sur division plus prononcée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Très accentuée.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Troisième lecture?
M. LAPORTE: Adopté.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Surdivision.
M. LAPORTE: No 1.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité des
subsides. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, une seule motion: Que les
crédits budgétaires de la Fonction publique, de la Santé,
du Bien-Etre social et de la Famille, tels que votés par les commissions
permanentes de cette Assemblée nationale, soient adoptés.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: Voudriez-vous faire rapport, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): M. le Président, le comité a
adopté des résolutions et demande la permission de siéger
à nouveau.
M. LAVOIE (Président): Quand siégera-t-il? M. LAPORTE: Un
jour!
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances propose que les
résolutions soient maintenant lues et agrées. Cette motion
sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LAPORTE: No 2.
Débat sur le budget
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. Fabien Roy
M. ROY (Beauce): Je veux d'abord remercier mon chef, le chef du
Ralliement créditiste du Québec, le député de
Rouyn-Noranda, de la confiance qu'il me témoigne en me confiant la
responsabilité de l'analyse et de la critique objective du budget
présenté par le gouvernement. Je voudrais aussi lui rendre un
hommage particulier pour le travail magnifique qu'il fait en cette Chambre
depuis le début de la session.
Avant de débuter, je voudrais faire une mise au point. Je n'ai
pas l'intention de m'attaquer à des hommes ni à un parti en
particulier. Je veux que ce soit bien compris, car la seule différence
qu'il y a entre la politique économique et sociale des deux vieux
partis, c'est-à-dire le Parti libéral et le parti de l'Union
Nationale, c'est la couleur seulement. Il n'y a pas d'autre chose. On a beau
changer les hommes, les résultats sont toujours les mêmes.
Or, mes remarques s'adressent aussi bien, M. le Président, au
gouvernement qu'à l'ancien gouvernement.
D'ailleurs le budget a été préparé par
l'Union Nationale. Elle s'en est elle-même vantée. Il a
été présenté par le gouvernement libéral.
Quant à l'autre parti qui est situé à notre extrême
droite, je dis que nos problèmes économiques ne trouveront pas de
solution dans la formule du serment à la reine, ni dans le socialisme et
encore moins dans le séparatisme.
C'est donc, M. le Président, au système que je vais
m'attaquer et aussi à des méthodes administratives usées
et rejetées par les entreprises modernes. Or, le 18 juin dernier, le
premier ministre, qui assume également les fonctions du ministre des
Finances, a remis aux membres de cette Chambre le document contenant les
prévisions budgétaires pour l'exercice financier 70/71, et a
prononcé, par la même occasion, le discours du budget.
Ce budget était attendu par le peuple du Québec depuis
fort longtemps. Tous se sou-
viendront que ce budget devait être présenté vers la
fin de février ou au début de mars et que l'ancien gouvernement,
pour des raisons que nous ignorons mais que nous avons le droit de supposer,
avait daigné décréter les élections
générales plutôt que de le présenter.
Qu'y avait-il donc dans ce fameux budget pour qu'il fasse si peur
à l'ancien gouvernement, et pour que le gouvernement actuel le
présente avec si peu d'enthousiasme? Rien de nouveau, sinon encore un
déficit, de nouvelles dettes, la preuve que rien n'est changé au
Québec sinon quelques définitions.
Dans toute administration saine et efficace, lors de la
présentation d'un budget, il y a deux choses: il y a d'abord les
chiffres, et il y a aussi l'orientation. Dans le cas d'un gouvernement, il y a
aussi la politique économique que le gouvernement entend suivre. Les
chiffres ne sont que les reflets bons, médiocres ou mauvais de cette
orientation.
Or, si l'on juge la politique économique du gouvernement par les
chiffres contenus dans le budget, le reflet est peu luisant et nous avons
l'impression que le gouvernement vient tout simplement de manquer le bateau de
la relance économique et que nous nous retrouvons, tous ensemble, dans
une petite chaloupe de sauvetage. Pourquoi? Parce que le gouvernement, quel
qu'il soit, a une double responsabilité: il a d'abord la
responsabilité d'administrer la province de façon saine et
efficace. Il a aussi la responsabilité d'orienter et de diriger tout
l'ensemble de l'économie québécoise. L'un ne va pas sans
l'autre et l'un ne va pas contre l'autre.
Ceci veut dire également voir au bien-être de la
population, voir à ce que chacun ait sa part des biens
créés et mis à la disposition des hommes, et voir à
ce que tout l'organisme économique et social joue parfaitement son
rôle. Or, M. le Président, le 18 juin 1970 alors que la science et
la technique ont fait des prodiges pour améliorer le sort de
l'humanité, alors que nous avons des produits en abondance partout et de
toutes sortes, alors que les frontières de la distance sont presque
éliminées, que l'homme a même réussi à mettre
le pied sur la lune, en même temps et au moment même où je
vous parle, il y a des enfants de chez nous qui ont faim. Il y a des familles
qui sont dans la misère. Il y en a qui souffrent du manque de soins. Il
y en a qui vivent dans des taudis infectes.
M. le Président, le 18 juin 1970 on a présenté
à la population de la province de Québec un budget
d'austérité. A cette austérité, pour mieux la faire
avaler à la population, on a ajouté un grand mot, un mot savant,
on a ajouté « l'austérité productive. » Pour
calmer la population, on invente des slogans. On dit ceci: Peuple du
Québec, serrez-vous la ceinture. Si vous êtes rendus au dernier
trou, percez-en un autre et serrez encore. On dit aux gens: Vous vivez
au-delà de vos moyens, alors que la plupart n'ont même plus les
moyens de vivre. On a encore un autre slogan disant ceci: Epargnez et
investissez dans l'industrie. Alors, M. le Président, pour les
chômeurs, je pense que c'est assez difficile d'épargner. Ce qu'ils
demandent, c'est du travail. Pour ceux qui vivent des allocations du
bien-être social, c'est également difficile d'épargner.
Pour tous ceux qui sont dans la misère ou encore qui doivent se
contenter d'une maigre pitance de $60 par semaine, c'est encore impossible
d'épargner.
Quelle logique et quelle sincérité: Et le gouvernement
d'ajouter: Nous avons réussi le tour de force de consolider le budget de
la province. Ceci, évidemment, avec un nouveau déficit. Quelle
différence avec l'ancienne administration? C'est $230 millions de
déficit l'année dernière; $207 millions de déficit
cette année. On vient dire qu'on a consolidé le budget. On l'a
consolidé aux dépens de qui, cette pseudo-consolidation?
Aux dépens de tous les travailleurs qui sont déjà
surtaxés; aux dépens des chômeurs, M. le Président,
qui ne demandent pas autre chose que du travail et dont la liste s'allonge
continuellement; aux dépens des assistés sociaux parce que le
gouvernement n'est même pas capable d'appliquer le bill 26 en vue de
soulager leur misère; aux dépens de toutes nos institutions qui
doivent attendre des moments favorables; aux dépens de nos entrepreneurs
qui se sont fait suspendre leurs contrats et qui devront attendre de nouveaux
contrats; aux dépens de nos industriels qui attendent, eux aussi,
d'avoir des commandes afin de donner du travail à leurs employés
et d'être capables d'administrer de façon efficace; aux
dépens de nos municipalités qui sont dans la misère et
pour lesquelles nous n'avons aucune solution; enfin, aux dépens de nos
commissions scolaires qu'on songe à faire disparaître pour
éliminer leurs revendications.
Alors consolider quoi, M. le Président? Tout cela aux
dépens de l'économie québécoise. Pourquoi? Pour
sauver la finance, parce qu'on refuse de prendre ses responsabilités. On
aime mieux rire, M. le Président, dans cette Chambre, lorsqu'on parle de
faire des réformes financières. Est-ce que le gouvernement actuel
ou l'ancien gouvernement n'ont pas les mains libres? Est-ce que les caisses
électorales sont
tellement puissantes qu'ils ne peuvent même pas présenter
des solutions logiques? Alors, pourquoi maintenir à tout prix cette
dictature financière et obliger l'individu à servir les
intérêts de la finance d'abord et avant tout?
Ce budget, M. le Président, je le qualifie de budget
d'incapacité, incapacité à résoudre les
problèmes économiques du Québec, incapacité
à résoudre les problèmes des chômeurs et
incapacité à résoudre les problèmes financiers.
Le gouvernement a présenté un tableau conjoncturel pour
élaborer et justifier son incapacité, n lui fallait un coupable
et il l'a trouvé. Ce grand coupable, c'est la conjoncture actuelle. M.
le Président, je vais citer ce que M. Giscard d'Estaing, ministre des
Finances de France, déclarait récemment. Il suggère de
mettre d'abord de l'ordre dans les économies nationales. Il continue en
disant que les Etats devraient mettre de l'ordre dans leur maison avant de
tenter de résoudre les problèmes économiques mondiaux et
il ajoute que les prétendus problèmes économiques
internationaux ne sont, en fait, que des problèmes d'économie
nationale. Et nous pourrions en citer d'autres.
Dans ce budget, M. le Président, est-ce qu'on a tenu compte de
l'ensemble de l'économie québécoise? Est-ce qu'on a tenu
compte de ses immenses possibilités? Est-ce qu'on a tenu compte,
également, de ses ressources presque sans limite? Est-ce qu'on a tenu
compte de la main-d'oeuvre disponible? Est-ce qu'on a tenu compte de l'immense
potentiel québécois? Nous croyons que non, M. le
Président, et la preuve de nos « avances », je crois qu'elle
est évidente.
Mon analyse comprendra deux parties. La première traitera du
système actuel. En effet, contrairement à ceux qui ont ri de nous
hier, nous pouvons expliquer le système actuel, M. le Président.
Il faut, d'abord, comprendre le système actuel avant d'être en
mesure de comprendre des réformes économiques. La deuxième
traitera de la réforme économique et financière que nous
préconisons.
Tout d'abord, je dois souligner le fait que le document que nous a remis
le gouvernement est bien pauvre. Il y a une tradition, dans l'entreprise, qui
veut que, lorsqu'on présente un budget, on le présente de
façon comparative avec le budget de l'année
précédente, ce que le gouvernement a oublié de faire.
Puet-être qu'on avait peur des comparaisons, peut-être qu'on avait
peur de prouver que c'était du pareil au même ou encore qu'on
avait peur des créditistes.
De plus, M. le Président, une entreprise ou une
société qui convoque ses actionnaires pour rendre des comptes ou
faire approuver ses budgets lui remet en même temps un bilan. Ce bi- lan
démontre les disponibilités, le montant des immobilisations, le
montant des exigibilités, le montant de la capitalisation, le montant de
l'avoir-propre, etc. Alors, où est-il le bilan de la province de
Québec? M. le Président, nous avons eu une session qui a
duré six semaines et je cherche encore le bilan de la province de
Québec dans cette enceinte. Nous ne l'avons pas. M. le Président,
il est assez difficile d'administrer une province ou une entreprise sans avoir
le bilan, parce qu'avec un bilan, nous savons au moins où nous sommes.
Je pense que c'est important de savoir où nous sommes pour être en
mesure de déterminer où nous voulons aller.
M. GARNEAU: Est-ce que le député de Beauce a lu les
comptes publics?
M. DEMERS: C'est un gouvernement de ca-chotiers, nous l'avons toujours
dit.
M. ROY (Beauce): J'ai l'impression, M. le Président, que le
gouvernement a beaucoup à apprendre pour placer la province sur la voie
de la prospérité.
UNE VOIX: Pourquoi avez-vous caché le bilan?
M. ROY (Beauce): Une petite analyse des revenus. Je les ai
classifiés en quatre catégories. Il y a les revenus fiscaux, les
revenus des privilèges, honoraires et permis, les revenus divers et
aussi les revenus du gouvernement fédéral. A ce moment-là,
je demanderais à nos collègues du Parti québécois
de bien ouvrir leurs oreilles. Les revenus fiscaux sont passés de 68.6%
à 64.2%, alors qu'aucune taxe n'a été diminuée dans
la province. M. le Président, les honoraires et permis, les droits que
la province perçoit sont passés de 5.8 à 5.2. Il y a eu
une diminution dans ce domaine de 0.6%. On n'a pas eu d'explication. Les
revenus divers ont, par contre, connu une augmentation grâce à
Loto-Québec et aux revenus additionnels de la Régie des alcools
cette année. Quant au gouvernement fédéral et ceci,
je pense que c'est assez important pour faire réfléchir tout le
monde les revenus qui étaient de 20.9%, revenus directs du
gouvernement fédéral l'année dernière, sont
passés à 25.5%, donc une augmentation de 4.6%.
M. le Président, que nos collègues du Parti
québécois écoutent: 25% de nos revenus viennent
directement d'Ottawa. Dans moins de 16 ans, nous recevrons 100% de nos revenus
directement d'Ottawa. C'est extrêmement grave.
Est-ce que nous connaissons un degré de pauvreté accrue ou
si c'est le gouvernement provincial qui perd ses droits? Il y a matière
à réflexion.
Nous constatons de plus que 90% des revenus n'ont d'autre source que la
fiscalité, que ce soit la fiscalité provinciale ou la
fiscalité fédérale. Mais que fait-on de nos ressources
naturelles? Nous les donnons, tout simplement. Je demanderais à nos
honorables députés d'écouter, parce que je pense qu'ils
auraient dû mettre en pratique les choses que nous
préconisons.
DES VOIX: Bravo! Bravo!
M. ROY (Beauce): Sur le plan des ressources naturelles, J'ai fait une
analyse de trois ans. Les revenus de nos ressources naturelles ont
représenté, pour la province la plus riche du monde au point de
vue des ressources naturelles, 2.5% des revenus globaux en 68/69.
M. DEMERS: Où avez-vous mis le bilan?
M. ROY (Beauce): En 69/70, 2.35%, diminution de 0.15%. Nouvelle
diminution en 70/71, 2.13%. Nous considérons dans ce domaine une
diminution de nos revenus, et à ce rythme-là, dans neuf ans les
revenus de nos ressources naturelles égaleront un gros zéro. Il
n'y a aucune indication dans le budget ni dans le discours du budget à
ce sujet. Pour exploiter les mêmes ressources naturelles qui nous ont si
peu rapporté, le gouvernement a dépensé, pour leur mise en
valeur, 5 9% en 6 8/69. Il a dépensé 62% en 69/70. Il a
dépensé 61% en 70/71. Un pour cent de diminution en une
année pour améliorer cette situation et encore là, on a
regardé dans le discours du budget et on n'a rien trouvé, sinon
de l'austérité productive. Donc, aucune indication pour une
politique de mise en valeur des ressources naturelles au profit des
Québécois. Même si on regarde avec une lentille, on ne
trouve absolument rien.
Je voudrais faire également quelques considérations sur
les dépenses et faire une analyse des ministères à
vocation économique: l'Agriculture, l'Industrie et le Commerce, les
Ressources naturelles, les Terres et Forêts, le Tourisme, la Chasse et la
Pêche. J'ai pris les cinq ministères à vocation
économique et nous constatons que les montants investis par le
gouvernement dans ce domaine ont représenté 5.2% en 69/70
c'est dire l'importance que l'ancien gouvernement a attaché à
l'expansion de l'économie québécoise et cette
année, 5.5%, soit une augmentation de 3/10 seulement sur l'ensemble du
budget.
Je crois que le gouvernement a raison de dire qu'il ne fera pas de
miracles cette année, et cela se comprend très bien. Je suis
convaincu que s'il y a des miracles, ils n'auront certainement pas lieu dans ce
genre d'orientation économique. Ce qui étonne dans ces chiffres,
c'est la part consacrée à l'agriculture. C'est dérisoire.
Je ne peux m'expliquer les raisons qui incitent le gouvernement comme
l'ancien gouvernement à agir de la sorte. Si le gouvernement
s'est donné pour mission, dans le passé cornue aujourd'hui, de
détruire l'agriculture dans le Québec, qu'il le dise donc, une
fois pour toutes tout haut et aux cultivateurs, s'il vous plaît!
Même pas 2.5% du budget pour un secteur de l'économie du
Québec qui est encore un des plus importants, secteur primaine pour un
besoin primaire: manger. Dans ce petit et minable budget, de plus des sommes
sont consacrées à la voirie, à la construction de ponts
qui n'ont rien à voir avec l'agriculture. Qu'est-ce qu'on attend pour
corriger cette situation?
Nous avons un marché domestique de produits alimentaires de plus
de $2 milliards et notre production québécoise ne
représente même pas 40%. Si notre production était
supérieure dans ce domaine, il se ferait plus de mise en marché,
il y aurait également plus de transports, de manipulation, de
préparation, ce qui veut dire que nous aurions là une source de
création d'emplois nouveaux, ce qui améliorerait
considérablement l'économie québécoise. Nous
n'aurions même pas besoin de capitaux étrangers ni d'augmenter
notre servitude envers la finance internationale. Qu'attend le gouvernement
pour agir? La caisse électorale, comme je le disais tout à
l'heure, attache-t-elle le gouvernement pour qu'il soit incapable d'agir, une
fois au pouvoir?
Nous savions que l'ancien gouvernement connaissait ça, la caisse
électorale.
UNE VOIX: Simard.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
Je demanderais la collaboration des députés de ma droite
et de ma gauche pour laisser le député de Beauce continuer son
exposé.
M. ROY (Beauce): Demain, il s'en trouvera pour dire que le Québec
n'a pas de vocation agricole et on ira même jusqu'à ajouter, avec
de beaux grands mots savants, que nous ne pouvons concurrencer le marché
international et que nos agriculteurs devront se recycler, et ce même
à 56 ans. Ceux qui ont le plus besoin de recyclage, je crois que ce sont
ceux qui veulent recycler les autres.
Quel est le secteur de notre économie qui peut
concurrencer le marché international au Québec? Que le
gouvernement nous le dise donc! Nous sommes tellement endettés,
tellement taxés et surtaxés que nos coûts de production
sont trop élevés. Les agriculteurs ne sont pas plus en cause que
les autres, mais ils en sont les victimes et ce ne sont pas eux les coupables.
Le gouvernement le sait très bien. Nous pourrions citer plusieurs
exemples. La Hollande a même dû emprunter sa terre de la mer; ce
sont des investissements énormes pour avoir une terre fertile. Nous
avons également Israël qui a dû irriguer le désert de
Gobi, qui est devenu très fertile. Nous avons également le
Dannemark et la Suède, qu'ont-ils faits? Ces gouvernements ont
adopté des politiques appropriées, mais nous reviendrons un peu
plus tard sur le sujet.
Je voudrais parler un peu du budget de l'Education. Un milliard de
dollars en 1970 Pourquoi? Un milliard au niveau du gouvernement seulement, sans
compter les budgets des commissions scolaires régionales et locales. Un
milliard pour régler les problèmes de l'éducation, je
crois que non. C'est la plus belle tour de Babel que nous n'ayons jamais vue
dans le monde depuis qu'on a construit la vraie après le
déluge.
Au nom de l'instruction de nos enfants, on s'est tout permis, tout, on
atout chambardé, rien n'a été épargné,
même Dieu. Demandez aux parents ce qu'ils en pensent. Demandez à
ceux qui ont des enfants, pas à ceux qui n'en ont pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a plusieurs célibataires dans
cette Chambre.
M. ROY (Beauce): Demandez aux instituteurs ce qu'ils en pensent, pas les
faux professeurs, les vrais. Demandez aux jeunes qui sortent des études
avec des dettes et qui ne peuvent se trouver du travail ce qu'ils en pensent,
alors qu'on leur avait promis l'instruction gratuite à tous les niveaux.
Demandez aux contribuables comment ils trouvent ça, l'instruction
gratuite. L'ancien gouvernement et le gouvernement actuel ont-ils fait des
études pour connaître nos besoins, les besoins de nos jeunes, les
possibilités d'emploi qu'il y avait, soit au niveau du ministère
de l'Industrie et du Commerce, soit au niveau du ministère de
l'Education, soit au niveau d'autres ministères?
On a dit aux enfants: Instruisez-vous, mais on n'a même jamais
fait aucune étude pour connaître les débouchés et
les possibilités que les jeunes auraient de se placer une fois qu'ils
auraient fait tous les sacrifices pour s'instruire.
Avec ce milliard de dollars, est-ce qu'on a réglé le
problème de nos commissions scolai- res? Non, M. le Président. On
se propose plutôt de les faire disparaître afin qu'elles deviennent
muettes au plus tôt parce que cela commence à être
gênant. Avec ce milliard, est-ce qu'on règle le problème de
nos institutions supérieures? Non plus, M. le Président. Avec ce
milliard, va-t-on pouvoir payer les professeurs à temps? Pas plus. Avec
ce milliard, est-ce que nos étudiants seront moins endettés? Nous
croyons que non, M. le Président.
Qu'est-ce qu'on va faire avec ce milliard? Continuer les mêmes
bêtises qu'auparavant, continuer le même gaspillage qu'auparavant,
continuer à bâtir des écoles d'un luxe digne du
château de Versailles, continuer à exécuter les plans de
pseudo-planificateurs qui n'ont jamais pris la peine de prendre un crayon pour
calculer le coût de leurs rêveries, continuer à
considérer nos enfants comme de la simple marchandise qu'on peut
manipuler sans considération, continuer à bafouer toute morale et
à enlever l'image du Christ de la vue de nos enfants au plus tôt
parce que, pour plusieurs, cela commence à être gênant.
Je ne réponds pas à ces questions, M. le Président.
Ce sera au gouvernement d'y répondre au cours de la présente
année. Le présent gouvernement sera responsable de ce milliard et
nous lui demanderons d'en rendre compte. Je pourrais parler également du
budget de la Famille et du Bien-Etre social. Il y aurait beaucoup à
dire, car ce ministère fait couler beaucoup d'encre. Les lois sont mal
adaptées; elles sont imprécises, donc extrêmement
difficiles d'application. Elles sont loin de répondre aux besoins des
familles qui doivent s'en prévaloir pour subsister.
Les difficultés, dans ce domaine, sont d'ordre économique.
Tant et aussi longtemps que le gouvernement ne changera pas le système
actuel, les injustices augmenteront et ce, jusqu'à ce que tout
s'écroule. Il est inconcevable qu'en 1970 des familles soient encore
obligées de se nourrir avec $0.10 pour le repas de chacun. Je pourrais
en citer de multiples exemples. Sur ce point, nous ne le lâcherons pas
nous, de ce côté-ci de la Chambre. Il est impensable d'obliger des
familles de 3 enfants, donc un total de 5 personnes, à vivre avec $140
par mois, tandis que le loyer seul coûte $70. Qu'est-ce que le
gouvernement entend faire au cours du présent exercice?
Va-t-il proposer une nouvelle loi pour remplacer le bill 26
déposé par l'administration précédente? Le peuple
veut le savoir. J'ose croire, même si j'ai des doutes très
sérieux, que le gouvernement actuel va prendre ses
responsabilités et voir à ce que chaque personne vivant dans le
Québec puisse, au moins, manger trois repas par jour, se loger comme un
être humain et avoir de quoi se vêtir. C'est un minimum vital.
Quant à l'infrastructure de la province, il n'en est aucunement
question dans le budget, ce qui prouve que le gouvernement manque totalement de
réalisme quand il entend relancer l'économie du Québec. La
relance de l'économie, est-ce un voeu ou une réalité? Le
passif de notre infrastructure égale l'actif. On en est rendu à
taxer les taxes pour payer des intérêts aux étrangers.
Prenons deux domaines: le domaine des Travaux publics et celui de la
Voirie. Le gouvernement, l'année dernière, avait investi 11.5% du
budget dans ce domaine. Cette année, il a investi 10.8% diminution dans
ce secteur vital de l'économie québécoise, alors que nous
sommes déjà en retard sur les autres provinces. Encore une autre
preuve du manque de réalisme du gouvernement actuel, comme du
gouvernement précédent. Le gouvernement est-il sérieux
lorsqu'il parle de la relance de l'économie? Ce qui est encore plus
grave, c'est que le gouvernement a des revenus directs pour ces deux
ministères, du moins, en ce qui a trait au ministère de la
Voirie. Il n'est pas facile d'en faire une bonne analysa, parce qu'il y a des
travaux publics dans au moins huit ministères et qu'il y a
également de la voirie dans au moins cinq, ce qui indique bien l'ordre
et l'efficacité de l'administration de la province. Mais, tout de
même, les revenus, en ce qui a trait aux taxes sur l'essence, aux plaques
et aux permis, se chiffrent par $378 millions pour l'année 69/70, alors
que le gouvernement a dépensé $142 millions, si nous diminuons
les immobilisations. Il faut inclure dans les dépenses la
dépréciation, ce qui serait très normal; cela a
représenté 38%. Pour cette année, le gouvernement a
diminué de 1%, pour avoir 37%.
Nous pouvons conclure que le gouvernement ne dépense même
pas 40% des sommes qu'il reçoit directement pour ce ministère.
Est-ce que le gouvernement peut appeler ça de la justice pour tous les
automobilistes du Québec, pour toutes nos entreprises de camionnage qui
sont aux prises avec la concurrence déloyale des chemins de fer? Est-ce
que c'est logique et juste pour nos commerces? On trouvera probablement un
autre mot savant pour expliquer cela.
Or, pendant ce temps, nous continuons d'être en retard sur les
autres. Notre voirie rurale est dans un état lamentable partout dans la
province. Au sujet de la route 23 qui relie la vieille capitale aux
états de la Nouvelle-Angleterre: rien dans le budget. La route no 1 qui
relie la vieille capitale à la région de l'amiante : aucune
sortie ou de sortie convenable pour venir au nouveau pont de Québec. La
route no 2 qui part de Québec en allant vers Trois-Rivières, dans
quel état se trouve-t-elle?
Nous sommes au moins trente ans en retard. M. le Président, dans
le comté de Beauce, dans le comté que j'ai l'honneur et le
plaisir de représenter, un comté rural où de nombreuses
industries québécoises qui font honneur au Québec se sont
installées, et cela à 30 milles de Québec, eh bien, dans
le comté de Beauce, M. le Président, en 1970, nous avons encore
huit villages qui n'ont même pas de sorties en asphalte.
Et dire que nos voisins, les Américains, ont trouvé le
moyen de relier la terre à la lune. Alors le gouvernement, au lieu de
faire des voyages en France, devrait faire des voyages aux Etats-Unis de temps
en temps.
Lorsque le gouvernement parle d'un budget de consolidation, nous nous
demandons sur quoi il se base pour faire telle affirmation. Le tableau F qu'on
nous a présenté indique des crédits initiaux de
$3,645,000,000, alors que le tableau de la page 25 indique un budget des
dépenses de l'ordre de $3,677,000,000. Donc, une augmentation, sur le
premier budget, de $22 millions. Ce que nous constatons, M. le
Président, c'est que le gouvernement a fait des réductions de
dépenses de l'ordre de $60 millions d'une part, et que d'autre part il a
augmenté ses crédits de dépenses de $97 millions. Ce qui
est plus grave c'est qu'on a diminué les crédits de certains
secteurs productifs, comma l'agriculture, l'industrie et le commerce, les
richesses naturelles, les terres et forêts, alors qu'on a augmenté
les dépenses dans le secteur administratif de plus de $25 millions. Le
solde concerne le secteur des services. M. le Président, le gouvernement
appelle cela de la consolidation, sans doute pour éblouir la population
et laisser croire que l'équilibre de l'économie
québécoise s'en trouvera en meilleure posture.
Encore là le gouvernement joue sur les mots. Quant au financement
de la province, nous avons eu l'occasion d'en parler. Peu après la prise
du pouvoir, le gouvernement a fait un emprunt de $50 millions, cela a
été annoncé dans les journaux du 31 mai 1970, et on a
attribué au marché favorable l'emprunt de $50 millions que le
Québec a négocié à un taux de 9 1/2%.
Le même jour, dans le même journal: le Canada finance un
barrage en Malaisie au coût de $50 millions par l'entremise de la Banque
du Canada...
UNE VOIX: Sans intérêt.
M. ROY (Beauce): Sans intérêt s'il vous plaît. Mon
collègue de l'Union Nationale commence à comprendre, M. le
Président, $50 millions. Si on demandait au gouvernement s'il a
osé faire la demande à la Banque du Canada pour
voir si elle serait prête à consentir à acheter des
obligations de la province, je serais curieux d'en connaître la
réponse. Et le même jour, on lit dans les mêmes journaux,
qu'il y aune baisse de bons du Trésor, qui étaient fixés
à 6.46%, donc de 3% inférieurs au taux des obligations.
Dans les chiffres que le gouvernement nous a remis, on constate que la
province s'est déjà prévalu du privilège des bons
du Trésor. Alors, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas
procédé de la même façon pour alléger le
budget de la province de Québec? On ne nous en a pas soufflé un
seul mot. On a eu la même chose cette semaine. On nous a annoncé
un nouvel emprunt de $50 millions à un taux encore pas tellement
favorable. Or, dans les journaux, le même jour, le gouvernement
fédéral, par l'entremise de la Banque du Canada, a consenti un
prêt de $15 millions à Israël sans intérêt. Pour
confirmer ce que nous avons déclaré hier en cette Chambre,
à savoir que le marché de l'argent est à la baisse, on a
vu que la Banque centrale d'Allemagne venait de baisser son taux d'escompte de
7 1/2% à 7% d'intérêt. Cela continue, c'est toujours la
même chose et la population du Québec se réveille, un beau
matin, avec le tableau des dettes suivant; les dettes publiques au
Québec, les dettes de la province, les dettes de 1'Hydro, les dettes des
1,652 municipalités, les dettes des commissions scolaires, CEGEP,
régionales, hôpitaux et universités, pour un grand total de
$10,637 millions, $10 milliards de dettes au Québec! Le Québec a
été développé par les Québécois et,
lorsque Champlain en a pris possession, il n'est pas écrit dans
l'histoire du Canada qu'il l'avait acheté. Comment se fait-il...
M. BOURASSA: Bon. Champlain est arrivé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je voudrais faire remarquer au
député de Beauce qu'il aurait épuisé son temps de
parole.
M. SAMSON: M. le Président, il avait été bien
entendu que mon représentant pouvait se prévaloir de mon droit de
parler pendant une heure. Cela a été compris. Tous les partis se
sont entendus là-dessus. D'ailleurs, lorsqu'on a présenté
le budget, je n'ai parlé que quelques minutes pour que mon droit ne soit
pas épuisé afin que l'honorable député de Beauce
prenne ma place. Il a droit de parler pendant une heure.
M. LE PRESIDENT: J'avais justement demandé au secrétaire
adjoint de l'Assemblée nationale le nom des membres de cette Chambre qui
avaient pris la parole sur le discours du bud- get. On m'a informé
qu'à la suite de l'honorable premier ministre, le chef de l'Opposition
officielle, le député de Rouyn-Noranda, le député
de Bourget et, par la suite, le député de Beauce avaient
parlé.
M. SAMSON: Est-ce que vous me le permettez, M. le Président? Il
avait été entendu, étant donné que, pour la
première fois, brisant la tradition, l'honorable chef de l'Opposition a
parlé le soir même de la présentation du budget si
l'honorable leader du gouvernement était présent, il pourrait, je
pense, vous le dire qu'on nous accordait quelques brefs commentaires et
que ceci ne dérangeait pas notre droit de parole. Je vois le leader du
gouvernement qui arrive; je pense qu'il pourra témoigner de ce que
j'avance. C'est l'entente qui avait été faite, à ce
moment-là. Ceci concernait le Ralliement créditiste et le Parti
québécois.
M. LE PRESIDENT: Je ne sais pas si on peut me rafraîchir la
mémoire, mais est-ce qu'il y a consentement de la Chambre?
M. LAPORTE: M. le Président, je n'ai pas objection; nous avons
discuté de cette question au début de la session avec les divers
leaders des oppositions et, si le chef du Ralliement créditiste a
cédé son droit de parole à un de ses collègues,
nous nous étions entendus, je pense, pour qu'il puisse parler une heure.
Si cette entente n'était pas respectée, évidemment, cela
vaudrait malheureusement ou heureusement pour le député qui va,
dans quelques minutes, parler pour le Parti québécois. Sans que
ce soit un engagement pour l'avenir, puisque nous devrons rediscuter certaines
ententes pour la prochaine session, je pense que, cette fois-ci, il est acquis
que le représentant du Ralliement créditlste et le
représentant du Parti québécois, comme le
représentant de l'Union Nationale peuvent parler durant une heure.
M. LE PRESIDENT: Dans ce cas-là, avec le consentement de la
Chambre et pour confirmer l'entente qu'il y a eue, je permats au
député de Beauce de continuer pendant encore environ une
demi-heure.
UNE VOIX: Pardon?
M. LE PRESIDENT: C'est une permission in extenso. Libre à lui de
l'exercer, ainsi qu'au représentant du Parti
québécois.
M. ROY (Beauce): Merci, M,, le Président.
Or, je disais donc que cette province, qui est actuellement
endettée de $10 milliards, n'avait rien coûté au
début. Comment se fait-il aujourd'hui que nous nous trouvons dans une
telle situation?
M. le Président, le responsable, évidemment, c'est le
système économique qui a toujours été soutenu par
les partis politiques qui ont eu à administrer la province, au cours des
années passées. Alors, ce montant de dette nous oblige
aujourd'hui à payer à chaque année $752 rallions, dans la
province de Québec seulement, et ceci ne comprend pas les
intérêts que nous devons également payer sur la dette
nationale du Canada. Cela, c'est seulement au Québec. Si nous calculons
le montant que cela peut coûter par jour, eh bien, cela représente
plus de $2 millions d'intérêts par jour, 365 jours par
année.
M. le Président, les statistiques démontrent que, pour
créer un emploi dans le secteur privé il faut un investissement
moyen de l'ordre de $7,000. Cela veut dire qu'actuellement, avec le montant que
nous payons en intérêts sur la dette de notre province, nous
pourrions créer 107,400 emplois nouveaux par année, seulement
avec l'intérêt de la dette. Alors, le problème du
gouvernement serait immédiatement résolu. Le ministre de la
Santé a été obligé de fermer une quantité de
foyers pour personnes âgées. Or, le coût de
l'intérêt par jour nous permettrait de payer comptant, sans aucune
dette, cinq foyers de $400,000, et ceci par jour à longueur
d'année.
C'est cela, M. le Président, le résultat de
l'administration que nous avons connue, d'un système économique
que nous contestons et que nous dénonçons. Pour résumer,
nous nous trouvons présentement dans des dettes publiques énormes
et le gouvernement actuel, comme l'ancien, n'a aucune solution à
présenter. Nous avons, au Québec, le record du chômage, et
cela augmente à chaque jour.
Nous avons le record des taxes et des impôts au Canada. Notre
agriculture est dans le marasme. Nos familles sont dans la misère et
cela continue. Trop de produits sur le marché. Nos ressources naturelles
sont exploitées par des étrangers. Nos industries se vendent aux
Américains. Notre commerce de détail glisse entre les mains des
autres. Notre population émigre aux Etats-Unis ou ailleurs. Nos
étudiants sont obligés de s'en aller ailleurs pour gagner leur
vie. Et on court encore après des capitaux étrangers sans avoir
de politique à ce sujet.
Voilà, M. le Président, le bilan d'un système
économique dépassé, d'un système économique
faux à la base, d'un système économique incapa- ble
d'envisager l'avenir, d'un système qui nous conduit directement à
la ruine et directement à la faillite, et qui a malheureusement
duré 103 ans de trop.
De plus, ce système est doublé d'une administration qui
manque de dynamisme, qui manque d'efficacité, de coordination et qui
utilise encore des méthodes rejetées depuis longtemps dans le
commerce et l'industrie.
M. le Président, ce que le budget aurait dû contenir ou
prévoir, à l'intérieur même du système
actuel, ce sont quatre priorités dont nous déplorons l'absence:
Attacher une plus grande importance aux ministères à vocation
économique, particulièrement l'Agriculture, le Commerce et
l'Industrie et au développement de nos ressources naturelles. L'argent
versé aurait contribué à accroître les emplois et le
produit national brut. Il y aurait donc eu, pour la province, des revenus
additionnels et une diminution du nombre des assistés sociaux, donc un
allégement sur le budget.
Deuxièmement, des précisions sur l'attitude que le
gouvernement entend adopter vis-à-vis des investissements
étrangers. Dans quelle proportion les entrées nettes de capitaux
se feront-elles? 10% des investissements? 20% des investissements? 30% ou 100%
des investissements? Qu'est-ce que le gouvernement attend pour nous faire
connaître sa politique dans ce domaine? Nous sommes portés
à croire, M. le Président, que le gouvernement n'a pas de
politique établie et nous considérons ce fait extrêmement
grave.
Troisièmement, des mesures permettant la participation des hommes
d'affaires québécois dans le développement de nos
ressources naturelles, afin que leur mise en valeur se fasse au profit des
Québécois. Nous n'avons également rien vu dans le budget,
ni dans le discours du budget à ce sujet.
Quatrièmement, définir la position exacte du gouvernement
du Québec vis-à-vis de nos droits constitutionnels et les
positions que le Québec entend adopter et défendre. Est-ce que le
gouvernement du Québec entend faire valoir son point de vue dans
l'élaboration des grandes politiques économiques du
fédéral? M. le Président, en ce qui nous concerne, nous
sommes très précis. Nous voulons l'occupation pleine, totale et
globale de tous les champs d'action garantis au Québec par l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, y compris la fiscalité, la
sécurité sociale, les droits individuels, la
propriété privée, l'éducation, la culture et
l'immigration. Encore là, M. le Président, de la part du
gouvernement, rien de précis. On nous parle tout simplement de la bonne
foi.
M. le Président, ce que nous proposons au
gouvernement, c'est un programme en cinq points:
Premièrement, là réforme du système
économique et financier pour que le crédit du Québec soit
utilisé pour les besoins du Québec et pour qu'on cesse, M. le
Président, de prendre l'épargne disponible, qui est une
propriété privée et qui devrait servir à financer
le secteur privé, plutôt que de laisser le crédit, qui est
une propriété publique, financer le secteur privé comme
cela se fait à l'heure actuelle. Ce qui fait, M. le Président,
que le système marche à l'envers. Nous voulons donc que le
crédit de la société québécoise serve la
société québécoise.
Deuxièmement, nous voulons, M. le Président, la mise en
valeur des ressources naturelles au profit des Québécois. Nous
voulons, d'abord, des crédits à long terme et à faible
taux d'intérêt pour la création et le développement
d'industries de transformation de nos ressources naturelles. Ensuite,
étude et mise en application d'un programme visant à la
conservation et à l'utilisation rationnelle de nos ressources
naturelles, principalement l'eau et la forêt, et l'application d'une
politique visant à enrayer la pollution de l'air et de l'eau.
Troisièmement, l'application d'un système d'escompte de
10% aux consommateurs québécois de tout produit transformé
et usiné au Québec, comprenant au moins 75% de matières
premières et de main-d'oeuvre québécoise. Révision
de tous les baux d'exploitation de nos richesses naturelles en vue de faire
verser des redevances par les entreprises qui les exploitent. Concessions et
permis d'exploitation accordés par soumissions publiques et non pas de
gré à gré comme cela se fait actuellement. Financement de
l'Hydro-Québec par des avances de crédit nouveau, sans
intérêt. Refinancement progressif de sa dette comme les autres
pays savent si bien le faire en se servant de notre institution nationale, la
Banque du Canada. Création de salons d'exposition permanents visant
à faire connaître les produits du Québec.
Comme exemple, il me fait plaisir de citer la Colombie-Britannique. Les
revenus que la Colombie-Britannique tire de ses ressources naturelles
représentent 14.4% de leur dernier budget. Cela représenterait,
au Québec, $500 millions de revenus additionnels. Comme le gouvernement
de la Colombie-Britannique en dépense environ 50% pour leur mise en
valeur, cela veut dire que, si on faisait la même chose dans la province
de Québec, il nous resterait net, $250 millions.
Alors, je pense qu'il serait sage que le gouvernement songe à
envoyer des délégations commerciales pour faire des études
en Colombie-
Britannique, au lieu d'aller visiter les pays qui sont plus pauvres que
nous et qui auraient peut-être des choses à apprendre chez nous,
dans notre pays.
Nous voulons une administration juste et honnête pour que cessent
le favoritisme et le gaspillage. Nos Maisons du Québec coûtent
combien? Nous avons tenté de le savoir lors de l'étude des
crédits des différents ministères, mais il y a au moins
trois ministères qui consacrent des sommes pour l'établissement
et le fonctionnement de nos Maisons du Québec à
l'étranger. Nous finirons par avoir les chiffres.
L'assurance-hospitalisation nous a coûté, grâce à
l'administration de l'ancien gouvernement, $230 millions de plus qu'en Ontario.
On ne nous a pas dit pourquoi.
Le patronage, sous toutes ses formes, même si on appelle cela de
la reconnaissance, coûte combien à la province? Les
privilèges spéciaux accordés ici et là nous font
perdre combien d'argent? Le luxe dans nos écoles et j'en passe. Sur le
deuxième et le troisième points du programme que nous
préconisons, il serait possible pour le gouvernement de réaliser
de $700 millions à $800 millions par année.
Quatrièmement, avec cet argent, il serait possible
d'établir au Québec une politique sociale plus réaliste et
plus humaine. Nous avons préconisé, dans notre programme, les
allocations familiales suivantes: $5 additionnels pour les enfants de 1 an
à 12 ans, par six mois. Les enfants de 12 ans et plus,
fréquentant une école, $10 additionnels par six mois. Des
allocations d'études, pour les 18 ans et plus, de $50 par mois et des
pensions de retraite, pour les 60 ans et plus, de $150 par mois.
Admissibilité automatique du conjoint et du soutien de famille quel que
soit son âge, pour parer à une injustice épouvantable qui
se commet dans notre province actuellement.
Nous pourrions également, avec cet argent que nous pourrions
récupérer grâce à une administration saine et
efficace porter les pensions aux aveugles pensions aux invalides, pensions aux
inaptes au travail et pensions aux mères nécessiteuses à
$150 par mois, et, de plus, finis le supplice des enquêtes. Tous les
bénéfices sociaux seraient ajustés à intervalles
réguliers suivant la hausse du coût de la vie.
Cinquièmement, la survie et le développement de
l'entreprise privée. Pour cela, le gouvernement devra lui accorder les
mêmes avantages qu'il accorde aux entreprises publiques et aux
entreprises étrangères. Les statistiques prouvent qu'il faut
environ $5,000, $6,000 et peut-être $7,000 d'investissement pour
créer un emploi dans le secteur privé, alors qu'il en
faut de $60,000 à $70,000, selon les mêmes statistiques,
pour créer un emploi dans le secteur public. De plus, M. le
Président, l'entreprise privée n'a rien coûté
à l'Etat, c'est elle, l'entreprise privée, qui a
développé notre province. Elle a permis le niveau de vie que nous
connaissons, afin de garantir à chaque homme et à chaque femme
vivant dans le pays la sécurité avec la liberté.
Un industriel déclarait récemment: L'industrie menace
d'étouffer sous les exigences des syndicats et du gouvernement; les
industries sont littéralement traquées, d'une part, par les
exigences syndicales et, d'autre part, par la législation qui les
étouffe graduellement.
C'est à ce demander si l'on n'est pas en train d'étrangler
l'entreprise privée. Si le gouvernement voulait vraiment s'en donner la
peine et pouvait agir librement, sans attache des grosses caisses
électorales, il pourrait élaborer des politiques pour favoriser
le développement économique du Québec par des entreprises
de chez nous, mais il devra se libérer du carcan de la finance actuelle
et des préjugés sur des politiques que nous
préconisons.
Pour terminer, notre nouveau gouvernement a-t-il l'intention de laisser
Ottawa empiéter sur nos droits? A-t-il l'intention de demander la
permission a Ottawa chaque fois avant d'agir? A-t-il l'intention de se promener
continuellement à New York, à Toronto, pour développer nos
ressources naturelles? A-t-il également l'intention de retourner
emprunter en Colombie-Britannique ou encore d'aller en Allemagne, à
Paris ou à Londres chercher les moyens de faire des échanges
entre nous pour bâtir des routes, des ponts, des écoles, des
usines, en un mot développer notre province?
Le présent gouvernement a quatre ans pour répondre
à cette question et j'ose croire qu'il le sait. Quant à nous,
notre position est claire et précise, le Québec de demain sera
à nous, si on fait la réforme que nous préconisons, ou il
sera aux étrangers, si nous ne prenons pas nos responsabilités en
matière économique et financière.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Gouin.
M. Guy Joron
M. JORON: On ne peut, M. le Président, parler du budget de l'Etat
sans souligner, pour en faire ressortir l'importance, l'étendue du
rôle économique de celui-ci dans une économie moderne.
Je parlerai de l'Etat sans distinguer les deux niveaux de gouvernement
en lesquels notre système constitutionnel le fractionne pour finalement
le paralyser et même l'opposer à lui-même. En ce sens, il
faut qualifier le régime fédéral, tel que nous le
pratiquons tout au moins, de schizophrénie constitutionnelle, alors
qu'il s'en trouve d'autres pour le qualifier de rentable.
L'Etat, dis-je, dans toutes les économies capitalistes ou
partiellement capitalistes de l'Occident, est devenu le principal agent
économique. Chez nous, il perçoit en impôts plus du tiers
du produit national brut. Cela en fait, et de loin, le plus important
consommateur, le plus important investisseur et le plus important employeur,
soit environ 18% de la main-d'oeuvre.
Ajoutons à cela son pouvoir de légiférer.
D'ailleurs, il l'exerce dans des domaines de plus en plus nombreux. L'Etat est
devenu le premier agent et le moteur du développement économique.
Le développement et le progrès des nations est maintenant
lié à leur volonté et à leur capacité
d'utiliser cet instrument sous des formes qui, bien sûr, peuvent varier
d'un Etat à l'autre. Les succès des pays qui, les premiers, l'ont
compris, en font une preuve éloquente.
Ce n'est pas à un appétit, que certains qualifient de
vorace, qu'il faut attribuer la croissance de la ponction fiscale que l'Etat
prélève sur le produit national brut ponction qui, il y a
25 ans, s'élevait à l'équivalent d'environ 10% ou 15% du
produit national brut et qui, aujourd'hui, voisine 35% mais bien au fait
que l'Etat ne fait que répondre à une demande sans cesse accrue
émanant des citoyens, demande pour des services sans cesse plus
nombreux.
C'est donc le processus même de la démocratie qui a
assuré et qui a amené l'élargissement du rôle de
l'Etat. Ceci, parce qu'on s'est vite rendu compte de la puissance et de
l'efficacité de la mise en commun des ressources d'une
société. S'il est vrai que dans une économie moderne, les
gros et les puissants ont des avantages certains, il est également vrai,
surtout pour de petits pays comme le nôtre, que nous avons besoin d'un
Etat fort et puissant. Refuser à l'Etat ce rôle, c'est, d'une
part, se craindre soi-même et c'est, d'autre part, craindre la puissance
et l'efficacité, d'où toute l'Importance du budget de l'Etat.
La façon dont celui-ci s'assurera des revenus aura des
conséquences sociales, économiques et culturelles
considérables. Les impôts modifient la distribution du revenu dans
une société. Cela modifie, par conséquent, la nature
même des relations entre les membres de cette société et
même la qualité des hommes. La façon dont l'Etat
dépensera ses revenus aura aussi des conséquences de même
nature, en plus
d'orienter et de susciter, par un choix de priorités, le
développe mont économique.
En présentant un budget, le gouvernement d'un Etat fait donc
beaucoup plus qu'annoncer un programma de dépenses. Il décide, en
fait, de l'orientation et des objectifs globaux de toute une
société. Bien conscients de toutes ces implications, c'est ainsi
que nous abordons l'étude du budget de l'Etat, même s'il ne
s'agit, au fait, que d'un demi-budget, puisque le Québec n'est encore,
malheureusement, qu'un demi-Etat. Les Québécois ne pourront donc,
encore cette année, contrôler directement l'utilisation que de la
moitié des deniers qu'ils versent en impôts.
M. le Président, au nom de 24% des Québécois et de
plus de 30% des Québécois français, j'entreprends de
critiquer le budget que le gouvernement a présenté, non pas dans
un sens purement comptable. Il serait facile, par exemple, de souligner des
truquages habituels et traditionnels qui paraissent dans ce budget.
Il serait facile de souligner le fait que le gouvernement, ayant omis de
présenter le bilan des comptes de l'Etat, on ne peut
véritablement savoir quelle en est la condition financière. Se
finance-t-il à même des crédits bancaires augmentés,
à même des comptes non payés? On ne peut, à ce
stade, le savoir.
Je ne critiquerai pas non plus le ministre des Finances, bien qu'il
serait peut-être ironique de le faire. Je relisais la critique que
l'actuel ministre des Finances faisait l'année dernière, alors
qu'il était critique financier de l'Opposition. Il s'était
étonné du fait que le budget antérieur annonçait
$50 millions de crédits périmés; lui-même nous en a,
cette année, servi $80 millions.
Mais je situerai plutôt ma critique sur le plan philosophique. De
la même façon que toute présentation d'un budget part d'une
évaluation de la situation économique, j'analyserai, dans un
premier temps, cette situation économique telle que nous l'apercevons,
pour en déduire l'action que celle-ci commande, mais que le budget du
gouvernement se refuse. Et dans un deuxième temps, la situation
socio-culturelle, parce que ces autres dimensions de la réalité
humaine commandent également une action de l'Etat, action qui, bien
sûr, a des incidences budgétaires.
Enfin, j'indiquerai, dans une dernière partie, des incidences,
sur le budget de l'Etat, du régime constitutionnel dans lequel nous
vivotons, en soulignant comment un changement à ce régime
permettrait à l'Etat de remplir pleinement son rôle et de mieux
rejoindre, de mieux répondre aux aspirations des citoyens. Quelle est
donc la situation économique du Québec? Est-il suffisant à
ce propos de rappeler, comme le fait le budget, que la lutte anti-inflationiste
se poursuit en Amérique, que l'inflation ne menace cependant pas autant
le Québec, que les taux d'intérêt ont augmenté
partout, qu'un ralentissement des activités a déjà
commencé en Amérique, pour conclure que, dans cette situation, et
je cite : « Le Québec se doit de poursuivre une politique
d'expansion économique » .
Ce n'est pas la banalité de la conclusion qui me frappe, ce sont
davantage des motivations à courte vue, et des visions à bout de
nez de notre situation économique. N'y avait-il pas, sans écrire
tout un volume, des choses beaucoup plus fondamentales et pertinentes à
dire sur notre économie? Quelques-uns de ces mots les plus profonds
à souligner dans l'amorce d'une solution à plus long terme? Mais
ce gouvernement a une bien courte vision et de bien courtes solutions aussi. Ce
n'est donc pas de lui, ce budget en fait la preuve, qu'il faut attendre le
redressement économique qui s'impose. Quels sont les points saillants de
la situation économique? Il faut se pencher d'abord sur la structure
même de notre économie. Un rapide coup d'oeil sur la
répartition de nos expéditions manufacturières indique
déjà une faiblesse majeure de notre secteur industriel, alors
qu'en Ontario 50% des expéditions manufacturiêres peuvent
être attribuées à l'industrie lourde ou à
l'industrie à technologie avancée. Ce pourcentage tombe à
30% au Québec. Sachant que c'est là le type d'industrie qui paie
les plus hauts salaires, qui entraîne le plus de recherches
scientifiques, et qui a les effets d'entraînement les plus
considérables, on voit tout de suite les conséquences de cette
situation structurelle sur les revenus, le chômage et ainsi de suite.
Environ le tiers de notre main-d'oeuvre industrielle est employée
dans des industries légères en perte de vitesse, comme le
textile, le vêtement, le cuir, la bonneterie, etc. Il faut donc
préparer de toute urgence la mutation de notre industrie, et cela veut
dire l'expansion de l'industrie lourde ou de l'industrie à fort contenu
technologique.
Deuxièmement, il faut analyser l'état des investissements,
puisque la croissance future est déterminée par les
investissements d'aujourd'hui. Quelle est donc la situation des investissements
et leur évolution depuis quelques années? Considérons
d'abord les investissements totaux au Québec. En 1969, il auront
été de $4,500 millions, le même chiffre qu'en 1966. Quatre
années de stagnation. En pourcentage des investissements canadiens, ce
qui est plus significatif encore, on passait, en 1960, à 24.2%, en 1965,
à 24.6% et, en 1969, on tombe à 20.7%, alors que la population du
Québec représente 28.5% de la population du Canada. Il
est clair que, si cette situation devait persister, nous prendrions un
retard de plus en plus considérable.
Considérons maintenant les investissements chapitre par chapitre.
Les investissements manufacturiers, secteur moteur vital de notre Industrie.
Cela nous permettra, d'ailleurs, de savoir si la mutation dont nous parlions
tout à l'heure est en train de se faire. Les statistiques fort
intéressantes et pertinentes nous montrent les faits suivants. En
pourcentage des investissements manufacturiers de l'Ontario, ceux du
Québec, pendant la dernière décennie, ont
évolué de la façon suivante: à partir de 1960, 55%
pour tomber, en 1965, à 47%. Depuis 1966, une remontée puisque,
de 47%, on passe à 49%, à 50% et finalement à 53%, pour
une moyenne de la décennie de 52%. Ces chiffres démontrent
plusieurs choses. Puisque c'est au secteur manufacturier que se concentre
l'essentiel de l'investissement privé, surtout étranger, il faut
donc conclure, de ces chiffres, que l'évolution du problème
constitutionnel au Québec et la montée des
indépendantistes n'a non seulement eu aucune influence sur les
investissements directs étrangers, mais qu'on pourrait même croire
le contraire, puisque, dans la période de 1960 à 1965, on passe
de 55% à 47% et que, de 1966 à aujourd'hui, on revient à
53%.
M. BOURASSA; Si le député me permet de lui poser une
question. Evidemment, il joue avec des pourcentages. Il a acquis une
habileté à jouer avec les chiffres et je l'en
félicite.
M. JORON: Je l'ai appris de vous.
M. BOURASSA: Mais les chiffres absolus seraient peut-être plus
éclairants pour l'Assemblée que simplement des comparaisons de
pourcentage.
M. JORON: Si vous me permettez, je vais poursuivre mon discours.
M. LAPORTE: Cela évite de répondre. M. JORON: Cela
n'évite pas de répondre.
M. BOURASSA: Si le député me permet, j'ai
écouté son discours de mon bureau; je l'avais déjà
rencontré. Il a mentionné tantôt les crédits
périmés.
M. JORON: Le point que je veux faire valoir est le suivant: les
investissements manufacturiers aussi bien que publics ont ralenti, et vous le
savez, partout en Amérique du Nord.
M. BOURASSA: Je vous répondrai dans deux minutes.
M. JORON: La réponse est intéressante. Cela me permet
d'ajouter un paragraphe à mon discours et cela va me permettre de vous
éclairer.
M. LAPORTE: Est-ce qu'il est trop tard pour vous poser des questions sur
les crédits périmés?
M. JORON: Non.
M. BOURASSA: J'ai entendu ça de mon bureau. Si j'ai assumé
$80 millions de crédits périmés, c'est que, dans les
dépenses, nous avons ajouté $97 millions qui normalement auraient
été financés par des budgets supplémentaires.
M. JORON: Après avoir comprimé les dépenses au
maximum.
M. BOURASSA; Cela permettait au gouvernement de pouvoir utiliser
beaucoup plus les crédits périmés.
M. BERTRAND: Si le député me le permet, vous allez avoir
des crédits périmés beaucoup plus élevés que
ceux prévus et,...
M. BOURASSA: Tant mieux, les taxes vont baisser.
M. BERTRAND: ... je suis convaincu que vous reviendrez à
l'automne avec un budget supplémentaire.
M. BOURASSA: Est-ce que le chef de l'Opposition peut me donner l'ordre
de grandeur du budget supplémentaire?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BERTRAND: Ecoutez...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. BOURASSA: Cela fait $5 millions...
M. DEMERS: C'est selon votre appétit.
M. BERTRAND: Au moins $30 millions.
M. DEMERS: Selon l'appétit
M. BOURASSA: Même si c'était vrai...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: ... cela se compare avec les $170 millions du
précédent gouvernement.
M. LE PRESIDENT: Je peux supposer que tous les intervenants ont eu la
permission du député de Gouin.
M. BERTRAND: Je dois dire que le député de Gouin a
été très aimable. J'ai regardé son sourire et, me
prévalant de...
M. LE PRESIDENT: De ce sourire...
M. BERTRAND: ... son sourire, j'ai parlé.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. JORON: J'en reviens au pourcentage des investissements manufacturiers
au Québec en rapport de ceux de l'Ontario puisque, pendant les cinq
dernières années, le Québec, il est vrai, a connu une
certaine effervescence constitutionnelle, chose qui n'est pas le cas en
Ontario. Ne faut-il pas s'étonner que, pendant cette période, les
investissements au Québec, en pourcentage de ceux de l'Ontario,
continuent malgré tout d'augmenter?
Le deuxième point que je voulais faire valoir, c'est
l'inefficacité administrative dont le premier ministre actuel accuse
l'ancien gouvernement. Ces chiffres démontrent également ou bien
que l'inefficacité administrative importe peu ou bien, tout simplement,
qu'elle n'existait pas. Ainsi sont détruits du même coup les deux
arguments que le gouvernement avance comme promesse
d'accélération des investissements. Qu'ils soient
fédéralistes et qu'ils se veulent efficaces n'apporte aucune
garantie de relance économique.
Voyons plutôt ce qui est arrivé au poste des
investissements domicilaires et des services publics. En pourcentage de ceux de
l'Ontario toujours, au chapitre des investissements domiciliaires, on passe de
80% en 1962 a 58% en 1968; aux services publics, sur la même
période, de 85% à 64%. On sait que ces investissements sont
étroitement liés les uns aux autres et que l'Etat est ici
l'origine et la principale source de crédit C'est donc à ce
chapitre à large mesure qu'il faut scruter la diminution des
investissements au Québec.
Mais où faut-il donc chercher les moyens de relance
économique? En partie, dans les investissements domiciliaires et des
services publics, également dans des investissements sup- plétifs
au secteur manufacturier et principalement dans l'industrie lourde, dans les
secteurs de pointe, si l'on désire, en même temps, transformer
notre structure.
En résumé, tout cela dans un rôle plus accru de
l'Etat. Si j'appelle l'Etat à un plus grand rôle, ce n'est pas,
sur ce point tout au moins, à partir de quelque conception
idéologique que ce soit. C'est uniquement par pragmatisme, parce que
nous ne pouvons pas nous permettre de faire autrement, au risque de
perpétuer une misérable stagnation.
Mes propos seraient peut-être différents, si j'habitais la
Californie. Au Québec, nous n'avons pas le choix. Ou plutôt si,
nous avons le choix entre le statu quo ou la stagnation et le progrès.
Quel est le choix du statu quo? Un Etat qui n'intervient peu et qui attend des
autres l'essentiel du développement de son économie. C'est la
prière pour que la manne tombe. C'est l'appel au grand capitalisme.
Voilà quelques siècles que cette philosophie préside
à notre développement
A-t-elle réglé les problèmes dont nous souffrons
aujourd'hui? Il ne fait aucun doute que si nous choisissons d'aller de l'avant,
notre Etat devra intervenir beaucoup plus directement, non pas dans le sens des
nationalisations, mais se faire lui-même créateur d'entreprises
nouvelles et, par voie de conséquence, d'emplois nouveaux.
Les formules, ici, peuvent alors varier. Soit que ce soient, ce qu'on
appelle, des sociétés de la couronne, ou des
sociétés de type « joint venture » en partnership
avec des sociétés étrangères et ainsi de suite.
Le financement de ce développement proviendra de plusieurs
sources. Du budget même de l'Etat, d'une part, si celui-ci est
disposé à augmenter ses emprunts. Deuxièmement, d'une
meilleure canalisation de l'épargne, si celui-ci veut
légiférer en conséquence. Troisièmement, d'une
épargne accrue, si celui-ci veut l'inciter, d'une part et a le courage,
d'autre part, de la forcer.
Le budget que le gouvernement propose non seulement n'atteint aucun de
ces objectifs mais fait même marche arrière sur plusieurs points.
Premièrement...
M. BOURASSA: Démagogie!
M. LAPORTE: Basse démagogie!
M. JORON: ... il diminue certains crédits prévus par
l'ancien ministre des Finances...
UNE VOIX: Démagogie!
M. JORON: ... à certains postes qui ont une incidence
économique.
M. BOURASSA: Le député de Gouin est terrible.
M. JORON: Le premier grand parc industriel du Québec voit ses
crédits coupés de $9 millions à $5.8 millions. Le Centre
de recherche industrielle voit ses crédits coupés de $4 millions
à $1.5 million. Le Plan et étude...
M. BOURASSA: J'invoque le règlement, M. le Président.
Est-ce que le député me permettrait? Quand même, Je connais
son honnêteté intellectuelle. Nous avons expliqué
clairement, à la satisfaction de tous les députés,
pourquoi les crédits du Centre de recherche industrielle...
UNE VOIX: Nous n'étions pas satisfaits. M. BURNS: M. le
Président...
M. JORON: Vous avez déjà présenté votre
budget...
M. BURNS: M. le Président, quel article du règlement le
premier ministre invoque-t-il?
M. BOURASSA: Je veux rendre hommage à l'honnêteté
intellectuelle du député de Gouin.
M. BURNS: Ce n'est pas une question de règlement, M. le
Président.
M. BOURASSA: Question de privilège, M. le Président!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LAPORTE: Si on ne peut même plus rendre hommage à
l'honnêteté intellectuelle, M. le Président, où en
sommes-nous?
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre, avec la permission du
député de Gouin, pourrait rétablir certains faits.
M. BURNS: Mais le premier ministre a invoqué le règlement.
Je ne vois pas en quoi il invoque le règlement...
M. BOURASSA: M. le Président...
M. BURNS: ... en ce qui concerne les déclarations du
député de Gouin.
M. BOURASSA: ... avec la permission, c'est parce que... Je suis le
dernier à vouloir prolonger les débats, mais je pense que dans le
cas du Centre de recherche industrielle, M. le Président, nous avons
donné toutes les raisons de la réduction. C'était
physiquement impossible de les dépenser cette année à
cause de la préparation des plans qui nous ont été soumis.
C'est aussi simple que cela.
M. JORON: Si vous vous engagez à les dépenser
l'année prochaine, j'accepte votre explication.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. JORON: De toute façon, ce n'étaient pas là les
arguments principaux.
M. LAPORTE: Heureusement, heureusement!
M. JORON: Tenez-vous bien, cela s'en vient.
M. BOURASSA: Merci de l'aveu, M. le Président.
M. JORON: Deuxièmement, il prétend, d'autre part, diminuer
les emprunts de $603 millions à $440 millions et ce, au moment
même où il se targue d'avoir meilleur accès au
marché financier que l'ancien gouvernement, au moment même
où, prend-il soin de le dire lui-même, la poussée
inflationniste est moins forte au Québec qu'ailleurs et pourtant, le
chômage plus critique. Cela, il nous semble, aurait dû commander,
non pas une diminution des emprunts, mais l'inverse.
Troisièmement, il ne souffle mot, dans son budget, d'un vaste
programme de rénovation urbaine et de construction domiciliaire,
programme de $250 millions annoncé par l'ancien gouvernement. J'ai
même demandé au ministre des Affaires municipales, en cette
Chambre, et je n'ai reçu aucune réponse; sans doute, me dira-t-il
d'aller négocier directement avec Ottawa.
M. DEMERS: Cela se comprend.
M. JORON: Quatrièmement, non seulement le budget n'annonce
aucunement l'Intention du gouvernement d'accroître la participation de
l'Etat à l'activité économique mais au contraire, dans une
longue supplication adressée
à l'entreprise privée et aux capitalistes
étrangers, il confirme son intention de reléguer à
d'autres le fardeau, dans des circonstances bien aléatoires de toute
façon, du développement de notre économie.
Le ministre d'Etat à l'Industrie et au Commerce soulignait
d'ailleurs l'importance accrue au conseil général de
l'industrie... et je le cite: « Le ministère accordera plus
d'importance au conseil afin que cet organisme joue un plus grand rôle.
» Ce conseil réunit 58 représentants de l'Establishment
québécois, dont 16 sont de langue française, et qui
représentent vous savez quels intérêts.
M. BOURASSA: Adanac.
M. JORON: Est-ce là le conseil qui va présider à
l'avenir économique du Québec? Est-ce là la voix qu'auront
les Québécois à ce conseil dont on veut
considérablement augmenter l'importance?
M. BOURASSA: Considérablement.
M. JORON: N'aurait-il pas fallu y inclure à tout le moins que ce
conseil ne double pas déjà le travail du ministère de
l'Industrie et du Commerce, et y avoir des représentants de toute la
population, du monde syndical et des différentes couches de la
société? Connus il est ironique de relire ce que le premier
ministre, alors qu'il était critique financier de l'Opposition, disait
dans cette Chambre le 29 avril 1969. Il se disait, surpris de l'importance, en
paroles à tout le moins, qui était accordée dans le budget
d'alors au développement économique. Il nous a cette année
inondé de plus de paroles encore, de promesses de 100,000 emplois par
exemple, alors qu'il savait fort bien qu'il n'est pas du tout dans les pouvoirs
du gouvernement du Québec de déterminer la création de ces
emplois. Il le sait très bien, notre économie étant
reliée...
M. BOURASSA: Défaitiste!
M. JORON: ... aux autres économies de l'Amérique du Nord.
L'essentiel de la relance économique qui apportera ces emplois viendra
de toute façon de Washington ou d'Ottawa. Alors il me semble que
c'étaient là beaucoup de mots, une démagogie très
facile...
M, BOURASSA: C'est ce qu'on a ce soir.
M. JORON: ... après trois ans de ralentissement économique
en Amérique du Nord, que de promettre qu'en 1971 il se créerait
100,000 emplois. Il va s'en créer 125,000 ou l50,000automatiquement de
toute façon.
Mais, s'il nous inonde de paroles, au niveau des projets concrets, on
fait nettement marche arrière par rapport à l'ancien
gouvernement, et non seulement de quelques pas, c'est au dixneuvième
siècle que sa philosophie du développement économique nous
ramène. C'est un retour au laisser-faire et au libéralisme
traditionnel. On voit clairement d'ailleurs que le Parti Libéral,
maintenant purgé depuis trois ans de ses éléments
progressistes, redevient aujourd'hui lui-même, c'est-à-dire le
véhicule d'une idéologie dépassée et d'une autre
époque. On peut de plus se demander si sa servitude à
l'entreprise ne découle pas, en plus de sa philosophie, de liens
financiers très étroits avec celle-ci. Le gouvernement
libéral craindrait-il...
M. BOURASSA: Des preuves.
M. JORON: ... de mettre l'Etat en compétition avec ses propres
bâilleurs de fonds?
M. BOURASSA: Des preuves.
M. JORON: D'ailleurs cela m'amène à dire, M. le
Président, qu'il est urgent de souligner la démystification que
nous devons entreprendre au Québec d'un concept fort mal compris, celui
de l'entreprise. On doit cesser de faire croire à la population que la
prospérité chez nous vient essentiellement des étrangers
et des entreprises.
Le rapport de la Commission Porter montrait que, de 1946 à 1962
ou 1963, le pourcentage des investissements totaux faits au Canada
représentait 91% de l'épargne totale. On peut présumer, en
gros, que cet ordre de grandeur des chiffres s'applique au Québec. Il
est donc dangereusement illusoire de faire croire à la population que,
sans l'apport du capital étranger, il n'y aurait pas de
développement économique ici. Rappelons que 90% du
développement, comme dans le reste du Canada, est financé, ici,
à même l'épargne locale.
Il faudrait, à ce propos, expliquer comment se finance une
entreprise. Des lignes de crédits bancaires accordés à une
entreprise, c'est de l'épargne locale qu'on met à sa disposition.
Lorsque l'entreprise fait des emprunts à plus longs termes, en
émettant des obligations, par exemple, sur le marché local, c'est
encore de l'épargne locale qu'on vient drainer. Finalement, quand
l'entreprise se finance à même ses profits réinvestis, elle
se finance, par conséquent, à même le pouvoir d'achat des
con-
sommateurs. Ainsi, les entreprises dont 100%, parfois, des actions
votantes peuvent appartenir à des société
étrangères peuvent quand même se financer à 95%
à même l'épargne locale.
Ce n'est pas l'entreprise qui est le pivot du développement,
c'est le consommateur. Et c'est la présence de ce dernier qui fait
accourir la première.
En conclusion sur cette première partie, le budget n'offre aucune
garantie de correction de la situation économique, ni de relance. Le
gouvernement se refuse à l'action. Bien que le discours du budget nous
ait dit qu'il ne sera pas inactif, il s'empresse aussitôt d'ajouter qu'il
compte sur l'entreprise privée, sur l'attrait que son efficacité
exercera sur elle et, enfin, sur la coopération d'Ottawa. Voilà
de bien maigres garanties, surtout à la lumière de
l'histoire.
Dans une deuxième partie, M. le Président, il importe de
jeter un coup d'oeil sur certains aspects de la réalité sociale
et culturelle du Québec, pour bien voir si, d'une part, le gouvernement
en est conscient et, d'autre part, s'il entend, tel qu'en témoigne son
budget, agir sur cette réalité. Bien sûr, le discours du
budget fait mention du taux de chômage inacceptable qui afflige le
Québec, le taux de chômage maintenant le plus élevé
au Canada et systématiquement, depuis des décennies, voisin du
double de celui de l'Ontario. La solution à ce problème se
rattachant à la deuxième partie de mon exposé étant
directement liée au volume des investissements et au
développement économique, je n'y reviendrai pas.
Il y a le problème, aussi cuisant, de l'inégalité
de la distribution des revenus dans une société,
réalité que le discours du budget évite d'ailleurs
d'appeler par son nom; on préfère parler d'équité
fiscale, c'est plus vague et surtout moins compromettant. Que nous propose,
à ce chapitre, le gouvernement? Le discours du budget, il faut le dire,
est assez muet sur le sujet de la réforme fiscale. On se dit d'accord
avec l'esprit du livre blanc du gouvernement fédéral et on nous
renvoie aux propos qu'a tenus le ministre des Finances, à la
dernière conférence de Winnipeg. Or, justement, qu'a dit le
ministre des Finances à Winnipeg? Les voeux pieux d'usage sur
l'équité fiscale, mais accompagnés d'une condition qui
ouvre la porte aux retraits les plus spectaculaires. Et je le cite: «
C'est donc dans cette optique de développement économique que le
Québec entend surtout aborder la question de la réforme fiscale.
» Cela ne veut pas dire qu'il faut mettre en veilleuse l'objectif de la
répartition équitable du fardeau fiscal.
Bien au contraire, le Québec est pleinement d'accord avec
l'objectif d'équité fiscale contenu dans le livre blanc. Mais cet
objectif ne sera pleinement atteint que si l'essor économique est
assuré. Puis, au nom toujours du développement économique,
le ministre des Finances procède à détruire en bonne
partie l'esprit qui anime le livre blanc. Déjà, celui-ci
atténue la portée de la réforme fiscale
suggérée par le rapport Carter aux principes duquel, je
m'empresse de le dire, nous du parti québécois souscrivons sans
réserve atténue, dis-je, la portée du livre blanc.
Je n'en soulignerai que quelques exemples.
D'abord, au sujet de l'imposition des gains de capitaux, le ministre des
Finances proposait à Winnipeg, d'une part, entre autres choses,
l'incorporation au revenu de 50% seulement du gain réalisé.
Deuxièmement, la taxation au moment de la réalisation, ce qui
peut provoquer non seulement le gel des actifs, mais da toute manière
retarder indéfiniment le prélèvement de la taxe.
Au sujet de l'imposition des petites entreprises et des industries
extractives, le ministre des Finances se refuse de placer ces entreprises sur
un pied d'égalité avec les autres et désire
perpétuer certains privilèges fiscaux. Pourquoi? Son
argumentation va dans le sens qu'il existe au Québec beaucoup de petites
entreprises et qu'il faut donc assurer leur survie et, d'autre part, que les
ressources naturelles sont très importantes dans l'économie du
Québec.
Au nom du développement économique, on fait ainsi une
entorse à l'égalité fiscale. Or, le premier ministre, par
ailleurs, nous parle souvent de la nécessité de fusionner et
d'intégrer les petites entreprises pour leur permettre de mieux faire
face à la compétition. Pourquoi désire-t-il alors une
incitation fiscale à rester petit?
Deuxièmement, le premier ministre devrait savoir que la trop
grande dépendance de notre économie sur le secteur primaire est
une de ses faiblesses structurelles. Il devrait savoir aussi que nulle part au
monde les ressources naturelles ont été la garantie du
développement économique. Les pays les plus
sous-développées en sont une preuve éclatante. Pourquoi
alors conserver ces privilèges? Il n'y a pas M. le Président, de
contradiction entre justice fiscale et développement économique.
Mais il semble de toute évidence y avoir contradiction entre justice
fiscale et les privilégiés que le gouvernement entend
favoriser.
Outre Winnipeg, que nous propose le budget comme réforme fiscale?
Quelques mesures
d'une envergure qui n'échappera sans doute à personne.
Entre autres, certains crédits d'impôts spéciaux pour les
mères de famille, la possibilité pour les athlètes et les
artistes d'étaler leurs revenus sur un certain nombre d'années,
et ainsi de suite. Je n'en ai pas, bien entendu, contre les mères de
famille, les athlètes ou les artistes, mais on voit la profondeur des
réformes impliquées, le tout accompagné, comme à
l'habitude, de quelques autres voeux pieux, mais pour l'avenir.
Il aurait fallu, M. le Président, et c'est ce qu'un gouvernement
péquiste aurait fait, entamer une révision complète du
régime fiscal. Nous savons bien que plusieurs modifications peuvent
prendre un certain temps à être complétées. Rien ne
nous aurait empêchés, cependant, d'en annoncer à tout le
moins le principe. Il y a bien plus d'ailleurs que la vraie imposition des
gains de capitaux. La justice fiscale commanderait en plus le respect et
peut-être l'amélioration du principe de la progressivité
des impôts, principe que le gouvernement vient d'ailleurs d'attaquer par
le mode de financement de son régime d'assurance-maladie. Je ne
répéterai cependant pas ici ce que j'ai déjà dit
à ce sujet en commission. Nous nous serions également
attaqués au principe de l'équité qui doit sous-entendre
aussi la taxe de vente.
Je l'ai aussi suggéré au premier ministre en commission
des Finances, il aurait eulieude prévoir diminuer cette taxe sur les
objets de nécessité vitale, pour l'augmenter sur les objets de
luxe.
M. BOURASSA: M. le Président, si le député me
permet...
M. JORON: M. le Président, j'en viens maintenant à ces
problèmes...
M. BOURASSA: Est-ce que le député me permettrait une
petite question?
M. CHARRON: Est-ce que le député de Mercier veut
s'asseoir? Vous vous en permettez pas mal.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le député de Gouin
permet une question?
M. CHARRON: Deux économistes analogues.
M. BOURASSA: Au lieu de me servirde mon droit de réplique
tantôt, je ne me servirai pas de mon droit de réplique.
M. CHARRON: Est-ce que le député de Mercier veut
s'asseoir? Il va apprendre des choses.
M. LAPORTE: Le député de Saint-Jacques est
complètement hors d'ordre.
M. JORON: Si le premier ministre veut présenter un
deuxième budget je...
M. BOURASSA: Non, non, seulement une question. Vous
référez à une suggestion qu'on afaite au comité des
Finances. Je veux demander au député de Gouin, est-ce qu'il
pourrait nous dire il fait un long exposé comment le Parti
québécois aurait financé sa réduction de $1
milliard dans les taxes? Le député de Saint-Jacques me disait
hier qu'il s'était adressé à l'intelligence des
électeurs, il promettait des réductions de taxes de $1 milliard,
c'est cela s'adresser à l'intelligence, parlez-nous donc de cela!
M. JORON: Tout au moins à l'occasion de cette question, on voit
que le Parti québécois ne s'adressait pas à vous pendant
la campagne électorale. Je ne sais pas où vous prenez votre $1
milliard, mais vous mêlez...
M. LAPORTE: Pour mieux vous comprendre, c'est censé être
intelligent...
M. CHARRON: Le spécialiste économiste de Chambly,
où prenait-il son $1 à $0.65?
M. LAPORTE: Mon cher homme, dans votre programme puis dans votre
défaite.
M. CHARRON: Allez-y donc, le député de Chambly.
M. BOURASSA: Page 58 de l'Option Québec, lisez, vous allez voir
la réponse au $1.
M. PAUL: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Maskinongé
sur un point de règlement.
M. LAPORTE: Le député veut se porter à la
défense du député de Saint-Jacques. C'est inutile, il est
trop tard.
M. PAUL: M. le Président, je veux tout simplement me porter
à la défense des règlements de la Chambre. Je suis
sûr que l'honorable premier ministre voudrait bien se réser-
ver l'occasion de nous répondre. Nous allons pouvoir la lui
donner.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Je reconnais le point d'ordre invoqué
par le député de Maskinongé comme étant
fondé et je donne au député de Gouin son droit de
parole.
M. JORON: M. le Président, j'en viens maintenant à ces
problèmes d'ordre culturel qu'aucun budget présenté en
cette Chambre n'a jamais abordé de front. Il est temps, croyons-nous, de
cesser ce jeu d'autruche et d'appeler maintenant un chat, un chat.
Premier point. Ne faut-il pas s'inquiéter du fait que les
Québécois français qui sont 80% de la population en ce
pays ne contrôlent qu'une bien faible partie de son économie, que
ce contrôle, au secteur secondaire, secteur pourtant si vital puisqu'il
est le moteur du développement économique, ne
s'élève qu'à 20%. Rien n'indique que cette situation
s'améliore, bien au contraire. Quelle possibilité d'action reste
donc à cette collectivité, si ce n'est l'utilisation du seul
levier puissant à sa disposition, son Etat? Nous revenons ainsi au
rôle créateur que celui-ci devrait jouer dans l'économie. A
condition, bien entendu, que le gouvernement qui dirige cet Etat y soit
installé pour défendre les intérêts de la
collectivité québécoise française et non ceux de la
minorité qui contrôle notre économie et qui d'ailleurs
représente la moitié de l'électorat du parti
ministériel.
Deuxième point. Ne faut-il pas s'inquiéter
également de ce que, dans ce pays français à 80%, le
salarié anglophone ait un salaire moyen de 50% plus élevé
que le Québécois français? Ce sont là les chiffres
que nous procurait la Commission fédérale sur le bilinguisme et
le biculturalisme. La compensation partielle que pourrait opérer
immédiatement un système de taxation plus redistributif ne
devrait-elle pas être étudiée de toute urgence? Et s'en
trouverait-il d'assez mesquins pour la qualifier de raciste? La justice et
l'égalité, M. le Président, sont des idéaux humains
et non pas ethniques.
Il faut dire, en terminant cette deuxième partie, que toutes ces
injustices d'ordre culturel, social et économique que j'ai
signalées et auxquelles le gouvernement ne se montre que peu sensible,
tel qu'en témoignent non pas les discours électoraux, mais tel
qu'en témoigne son premier budget, c' est-à-dire la
concrétisation de ses intentions, ces injustices, dis-je, sont le
ferment d'agitation et de malaises qui, déjà, secouent notre
société.
Nous croyons, M. le Président, que la vie en
société nécessite l'ordre et la paix. Mais, je l'ai
déjà dit en cette Chambre, non pas l'ordre établi fixe et
statique, mais au contraire l'ordre qui évolue pour répondre aux
aspirations de la société et empêcher les injustices de se
multiplier.
En conclusion, je n'ai peut-être pas... C'est pour vous à
part ça.
M. LAPORTE: Vous faites vraiement l'unanimité.
M. JORON: Je n'ai peut-être pas été, dans cet
exposé, bien tendre à l'endroit du gouvernement. On me dira que
ce n'était d'ailleurs pas mon rôle. Néanmoins, je ne
voudrais pas, M. le Président, terminer sans, dans une dernière
partie et en guise de conclusion, étudier brièvement les
incidences du régime constitutionnel dans lequel nous étouffons
et qui limite singulièrement la marge de manoeuvre et,
con-séquemment, l'imagination et le pouvoir créateur de tous les
gouvernements québécois, fussent-ils rouges ou bleus, plus jeunes
ou plus vieux.
Quelle que soit la qualité des hommes au pouvoir dans ce
gouvernement provincial, je connaissais déjà celle du
premier ministre et, par réputation, celle de quelques autres ministres,
j'ajouterais qu'il m'aurait été agréable d'en
découvrir d'autres au cours de cette session s'ils s'étaient fait
valoir quelle que soit, dis-je, leur qualité, ils resteront
impuissants parce que le carcan fédéral sape à la base
leur possibilité d'agir.
La confection d'un budget implique le choix d'affecter des sommes
à différents objectifs. Un budget, normalement, fixe des
priorités. Mais dans notre régime, ce choix s'avère
impossible. Comment le citoyen québécois peut-il choisir,
à titre d'exemple, entre plus d'éducation, de santé ou de
développement économique, au détriment de dépenses
militaires quasi inutiles, car ces juridictions appartiennent à des
niveaux de gouvernement différents. Si personne ne peut effectuer ce
choix, c'est-à-dire trancher la question, le choix ne sera pas fait
Quels auraient été les choix d'un gouvernement
québécois qui aurait disposé d'un budget de $7 milliards?
Comment le gouvernement du Québec peut-il lancer des programmes nouveaux
quand ses disponibilités budgétaires se voient graduellement
canalisées dans des programmes fédéraux qu'il n'a pas
choisis et qui ne coincident pas nécessairement avec nos
priorités. Comment le gouvernement québécois peut-il
prétendre créer 100,000 emplois nouveaux quand les grands
instruments créateurs d'emplois, sans parler d'une partie importante des
ressources fiscales, appartiennent à un autre gouvernement? Il ne peut
alors,
et c'est d'ailleurs ce qu'il fait, que formuler des souhaits,
émettre des voeux pieux et des supplications adressées ici et
là.
Nous attendrons donc que la manne tombe, que le gouvernement central
entreprenne une réforme fiscale avant d'en avoir une, etc., etc. Parce
que le Québec ne dispose pas des grands instruments de
développement, il doit rester à la remorque d'un autre
gouvernement.
Le conservatisme rétrograde du gouvernement actuel s'explique, en
partie, par ce fait. Le régime constitutionnel le condamne au
conservatisme, en même temps que ses alliés et ses bailleurs de
fonds l'y invitent. Mais, les Québécois ont néanmoins des
besoins pressants. Ils ont soif de justice et de progrès. Ils
souhaitent, au fond, un gouvernement qui peut et qui veut être
progressif. Beaucoup d'entre eux ont déjà formulé ce
souhait aux dernières élections.
Nous sommes convaincus qu'une majorité d'entre eux l'exprimera la
prochaine fois. C'est la nécessité et l'urgence du progrès
qui donnera au Québec une administration contrôlée par et
pour des Québécois, c'est-à-dire un gouvernement du Parti
québécois.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président,...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Jean-Noël Tremblay
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... je ne veux pas abuser du temps qu'il reste
à la Chambre avant l'ajournement ou la prorogation de cette session, je
n'en sais trop. Mais je crois nécessaire de faire quelques observations
générales sur la situation du Québec à propos du
budget qu'a présenté le ministre des Finances et premier ministre
du Québec.
Je n'ai pas spécifiquement compétence pour discuter dans
le détail des aspects techniques du budget qu'a présenté
le premier ministre. Ce budget, évidemment, laisse deviner certaines
orientations politiques dont le moins qu'on puisse dire est qu'elles sont d'une
nature centralisatrice inquiétante.
Il nous paraît, évidemment et cela est bien
compréhensible si l'on se reporte à l'histoire du Parti
libéral du Québec, qui n'est au fait que la succursale du Parti
libéral d'Ottawa que le gouvernement libéral s'est mis
à la remorque du gouvernement central. Je ne crois pas qu'il puisse
s'autoriser de la majorité des sièges qu'il détient en
cette Assemblée nationale pour croire que le dossier du pacte
fédératif de 1867 soit définitivement clos. Il est, en
effet, des réalités qu'il importe de considérer à
ce moment où le Québec s'engage, où le Québec se
trouve plus précisément à un carrefour de son histoire, un
carrefour de ses orientations politiques, un carrefour de son orientation
constitutionnelle. Et le fait qu'il se trouve en Chambre 72
députés libéraux n'indique pas que le Québec ait
fait nécessairement option pour la thèse préconisée
par le Parti libéral.
Il est donc important, dans la perspective, dans l'optique du budget
qu'a présenté le premier ministre, de repenser le problème
général de la constitution du Québec et le problème
beaucoup plus important encore de l'intégration du Québec
à l'intérieur de ce qu'on est obligé d'appeler le cadre
confédératif.
En effet, M. le Président, il s'est avéré, lors des
dernières élections, qu'une bonne partie des citoyens ont
manifesté leur désir de voir s'opérer un changement dans
le Québec. Ces citoyens ont manifestement indiqué qu'ils
n'étaient pas satisfaits du statu quo, qu'ils voulaient que le
Québec se donnât une constitution qui lui fût propre et que
le Québec se dégageât de plus en plus des liens qui,
jusqu'à présent c'est un lieu commun de le dire ont
paralysé son évolution économique et sociale.
Il n'y a pas lieu, pour l'instant, en ce qui me concerne, d'indiquer
quelle peut être l'option de l'Union Nationale, quelle peut être
l'option de ses partisans et quelle peut être l'option de ceux qui
siègent sous cette bannière en cette Assemblée nationale.
Mais je crois qu'il est important de réfléchir, donnant suite aux
observations qu'a faites le député de Gouin, sur une conjoncture
qui se présente comme étant de plus en plus complexe, une
conjoncture qui inquiète de plus en plus les citoyens du Québec
et particulièrement la jeune génération qui,
sensibilisée aux problèmes politiques de l'heure, s'interroge sur
l'avenir du Québec et sur la raison d'être de toutes ces
institutions qui, depuis toujours, se sont efforcées de maintenir ici la
langue et la culture française.
Les jeunes s'interrogent aujourd'hui sur ce qu'est le Québec et,
ce faisant, ils s'interrogent sur ce qu'ils sont. Ils s'interrogent sur leur
personnalité et ils essaient de découvrir à travers les
difficultés enfin, ils essaient de voir à travers ces
nuages, ce voile qui leur cache des réalités beaucoup plus
importantes ils essaient de découvrir, dis-je, leur
identité. Ils essaient de trouver leur personnalité. Ils essaient
également de trouver cette voie qui doit les mener vers ce qu'on
appelle, en anglais, un accomplissement total de leur être qui
corresponde réellement à ce qu'ils sont essentiellement.
C'est pourquoi, M. le Président et je ne
m'étonne pas que nos collègues du Parti libéral ne
veuillent point prêter une oreille attentive à ce que je dis
il est important de réfléchir sur le sens du dernier
scrutin, d'y réfléchir à la lumière des faits, des
événements qui se sont produits depuis le 29 avril, à la
lumière également des gestes d'un gouvernement qui semble vouloir
se livrer, pieds et poings liés, au gouvernement central.
Il est important de réfléchir à tout cela et de
penser que, même si nous avons été légitimement
élus par des citoyens, nous ne représentons pas
nécessairement tous les citoyens et nous n'exprimons pas
nécessairement la volonté des citoyens. C'est pourquoi, M. le
Président je terminerai là-dessus j'estimn que le
dernier scrutin fournit à tous les nommas politiques sérieux,
à tous ceux qui s'interrogent sur l'avenir du Québec, des raisons
additionnelles de se demander quelle est notre situation à
l'intérieur du cadre confédératif, quelle pourra
être dans l'avenir cette situation et de quelle façon il sera
possible de trancher ce noeud gordien qui constitue pour nous et qu'à
constitué, depuis 1867, pour tous les Québécois
sincères, cette association avec une communauté humaine et
tellement différente de la nôtre qu'elle nous force à nous
interroger de façon sérieuse, de façon profonde et de
façon réaliste sur le sort du Québec, sur son avenir et,
de façon plus précise, sur ce nouveau mode d'association qu'il
nous faudra bien inventer afin que la vie des Québécois, afin que
la vie des membres de cette communauté de langue et de culture
françaises ne soit pas celle que nous avons connue et corresponde
véritablement aux aspirations d'une comnunauté qui a voulu
bâtir un pays, un pays qu'elle a porté et, comme je le disais cet
après-midi, dont elle sent que ce pays doit et va naître.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, nous avions cru comprendre qu'il
avait été entendu que chaque parti s'en tiendrait, ce soir,
à un orateur, pour ce débat. Cependant, comme un autre membre de
cette Chambre a cru bon de parler sur le budget...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'était son droit.
M. SAMSON: Même si c'est son droit, nous le reconnaissons, M. le
Président, je peux difficilement résister à la
tentation...
M. LAPORTE: Oui, mais essayez donc!
M. SAMSON: M. le Président, comme j'ai été sage
lorsque mes collègues ont parlé...
M. DEMERS: Seigneur, prends pitié.
M. SAMSON: ... comme je n'ai interrompu personne, je vous prierais de
demander, M. le Président, à ces honorables députés
de ne pas m'interrompre.
M. LAPORTE: On va essayer.
M. SAMSON: Je vous prierais, M. le Président, de demander
à ces honorables députés de ne pas m'interrompre.
M. LAPORTE: Nous allons essayer.
M. SAMSON: Alors, Je disais donc qu'il m'est difficile de
résister...
M. LESSARD: Point d'ordre, M. le Président. Il me semble que le
député de Rouyn avait déjà utilisé son droit
de parole et, ce soir, au moment où son collègue a parlé,
il avait annoncé à cette Chambre qu'il avait cédé
son droit de réplique à son collègue.
M. SAMSON: M. le Président, si vous le permettez, je vous
référerais au journal des Débats du 18 juin dernier, alors
que le leader parlementaire a bel et bien expliqué à cette
Chambre que le chef du Ralliement créditiste et le chef du Parti
québécois n'ayant dit que quelques mots ceci leur permettait
d'utiliser leur droit de parole. C'est de ça que je me prévaut et
je continue. J'allais dire que...
M. BURNS: M. le Président, il a cédé son droit de
parole et nous attendons une décision de votre part là-dessus,
tel que l'a dit le député de Saguenay.
M. LAPORTE: Je parle sur le point d'ordre, M. le Président,
étant donné que jusqu'ici, en dépit de ce que j'ai pu dire
ce matin à mon grand désappointement dans un certain journal,
personne n'a été empêché de parler. Nous avons
été extrêmement intéressés par le discours du
député de Gouin, nous avons été absolument
sidérés par l'intervention du député de Saguenay,
pourrions-nous nous entendre pour laisser quelques minutes au
député de Rouyn-Noranda? Ensuite, si quelqu'un du Parti
québécois veut lui répondre, nous demanderons la
même faveur, même si nous tombons de sommeil à un moment
donné.
M. LESSARD: M. le Président, sur le point d'ordre, j'invoque le
règlement. Le leader parlementaire du gouvernement...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESSARD: M. le Président, un peu de sérieux. Le leader
parlementaire du gouvernement, lorsqu'il invoque les règlements, il veut
bien que ces règlements soient appliqués.
Il semble qu'actuellement on donne des privilèges à
certaines personnes, naturellement c'est le même parti.
Considérant le fait que le député de Rouyn-Noranda avait
cédé son droit de réplique, j'attends votre
décision à ce sujet.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget, sur la
question de règlement.
M. LAURIN: Après consultation avec mes collègues, nous
accordons le droit de parole à l'aile créditiste du Parti
libéral.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président, j'autoriserais le
député de Saguenay à parler une troisième fois sur
le point d'ordre, maintenant.
M. LE PRESIDENT: Avec le consentement unanime de la Chambre et du fait
que je me rends compte que le député de Rouyn-Noranda peut
difficilement résister, la Chambre et ce n'est pas le
président lui accorde le droit de parole.
M. SAMSON: M. le Président, je désirerais remercier tous
les honorables membres de cette Chambre pour la marque de confiance qu'on vient
de manifester à mon endroit. Je disais que je trouvais qu'il
m'était difficile de résister à l'emploi de mon droit de
parole. Mais, M. le Président, je voudrais qu'il soit inscrit dans les
annales, dans le journal des Débats, que durant cette session j'ai
été le seul député qui a commencé à
parler une journée pour finir le lendemain. Je croyais que mon
collègue de Chicoutimi aurait réussi le tour de force, mais non,
ça prenait un créditiste pour le réussir. Toutefois, M. le
Président, je disais, quoique j'aie beaucoup d'intérêt pour
les orateurs de cette Chambre...
DES VOIX: Ah, non! Pas d'intérêt!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. SAMSON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Du fait que c'est le commencement d'un jour nouveau,
j'accorde la parole au député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Merci, M. le Président. En ce dix-septième jour
de juillet 1970, j'allais dire, et cela fait cinq minutes que je tente de vous
le dire, que j'ai résisté et que je ne parlerai pas ce soir.
M. BOURASSA: M. le Président, pour suivre le bon exemple, je
n'exercerai pas mon droit de réplique.
M. BERTRAND: Il n'y en a pas. M. DEMERS: Il n'y en a pas.
M. BOURASSA: Pour clôturer le débat, je crois que...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Je pense bien que l'on ne peut
pas permettre à l'honorable premier ministre un droit de réplique
sur cette motion. Toutefois, en vertu de l'article 271 du règlement...
Je voulais invoquer l'article 271, mais le secrétaire m'avise que c'est
l'article 270. L'article 271 dit bien que « le ministre qui a pris la
parole sur une motion demandant communication de documents, ou sur une motion
proposant que la Chambre se forme en comité des subsides ou en
comité des voies et moyens, peut la prendre de nouveau, et autant de
fois qu'il est nécessaire de le faire pour expliquer ou pour
rétablir, s'il y a lieu, des faits qui ont avancés après
son premier discours, mais il doit se borner à expliquer et
rétablir ces faits. »
M. BOURASSA: M. le président, de toute façon, je croyais
que le ministre des Finances, pour clore le débat, avait un droit de
réplique, mais je n'avais pas l'intention de l'exercer, tout simplement
parce que, de ce côté-ci de la Chambre, nous concevons que c'est
assez de discours et qu'il faut passer à l'action.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Combien de nouveaux emplois aujourd'hui?
M BOURASSA: 16,000 chômeurs de moins, d'après les
statistiques.
M. LE PRESIDENT (Lavoie): Est-ce que la motion de l'honorable ministre
des Finances proposant que le président quitte maintenant le fauteuil et
que la Chambre se forme en comités des voies et moyens est
adoptée?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LAPORTE: Il s'agit, M. le Président, du bill des subsides.
Alors, est-ce qu'on peut imaginer que cette Chambre autorise les inscriptions
au procès-verbal?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Lavoie): Les résolutions sont
agréées.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): M. le Président, avec la permission de
cette Chambre, j'aimerais déposer un document qui m'est parvenu cet
après-midi seulement. Il s'agit du rapport annuel de la Régie de
la Place des Arts pour l'exercice courant.
M. CHARRON: On aurait du l'avoir avant le bill 9.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Est-ce que j'ai la permission de cette
Chambre?
M. CHARRON: Si vous étiez plus efficace, on l'aurait
peut-être eu avant le bill 9.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Je remercie M. le Président.
Dépenses du gouvernement
M. LE PRESIDENT (Lavoie): L'honorable ministre des Finances propose
l'adoption du projet de loi numéro 32, Loi octroyant à Sa
Majesté les deniers requis pour les dépenses du gouvernement pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1971 et pour d'autres
fins du service public? Ce projet de loi sera-t-il adopté?
M. LAPORTE: M. le Président, j'imagine que le serment qui a
été prêté par les péquistes nous permet de
voter unanimement en première lecture, deuxième lecture,
troisième lecture, et comité.
M. LAURIN: Une fois qu'on a commencé à boire le calice, on
le boit jusqu'à la lie.
M. BOURASSA: Adopté, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Lavoie): J'espère que ce n'est pas à mon
bureau qu'on va le boire. Adopté?
M. LAPORTE: Adopté.
M. BOURASSA: J'ai l'honneur de faire motion pour que les commissions
parlementaires mentionnées aux pages 10 et 11 des procès-verbaux
de l'Assemblée nationale du Québec puissent siéger pendant
l'ajournement de cette session.
Les membres qui en font partie continuent d'en être membres, qu'un
nombre égal de membres proportionnel à chaque parti et
nommés par chaque parti soit ajouté à chaque commission et
que chaque commission ait le droit de remplacer, séance tenante, un ou
plusieur de ses membres en en informant le président. Cela permettra
particulièrement de réunir la commission parlementaire de
l'Assemblée nationale pour discuter des réformes
électorales.
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Remerciements
M. LAPORTE: Avant de proposer l'ajournement de cette Chambre, et non pas
la prorogation de la Chambre, je voudrais très brièvement
remercier d'abord le premier ministre, les membres du conseil des ministres et
mes collègues libéraux, qui m'ont d'abord fait l'honneur de me
désigner comme leader parlementaire pendant cette session, et qui ont
permis que les travaux de cette Chambre se déroulent avec
célérité et avec efficacité.
Je voudrais également remercier avec infiniment de
sincérité les membres des trois oppositions, l'Opposition
officielle, que je désigne par son chef officiel, le chef de
l'Opposition, le Ralliement créditiste, que je désigne par le
député de Rouyn-Noranda, et les membres du Parti
québécois, par le député de Bourget. Ils ont
véritablement contribué à nous permettre, je crois, de
donner à cette province l'impression qu'il est possible de faire
beaucoup de travail, de le faire dans le respect du droit de parole de tous les
députés, et de le faire avec efficacité. Si l'on exclut
une demi-journée que je mettrai au débit de cette session, je
crois que nous avons fait énormément de travail. J'ai appris
à connaître des députés nouveaux avec lesquels nous
avons peut-être eu des divergences d'opinions fréquentes, mais
j'ai appris à les estimer, je les reverrai avec plaisir lors de la
reprise de cette session et ils nous aideront, avec l'expérience
acquise, à faire de ce Parlement un instrument moderne et efficace.
Je remercie tout ce Parlement. Je remercie
les journalistes qui ont communiqué au public l'écho de
nos travaux. Je remercie tous les membres du personnel. Je remercie, M. le
Président, le secrétaire général de cette
Assemblée et ses adjoints, je remercie les pages qui,
discrètement, ont fait pour nous beaucoup de travail. Je termine ces
remerciements en proposant que cette Chambre s'ajourne au mardi 27 octobre
1970.
M. BERTRAND: M. le Président, j'ai commencé cette session
au pouvoir. Je la termine dans l'Opposition. Il y a une chose qui me
réjouit. Hier, je lisais la vie de Napoléon. Un chef d'Etat.
Napoléon, un guerrier, à l'époque, terminait sa vie
politique à Sainte-Hélène. Chez nous, au moins, dans notre
pays démocratique, on peut gagner, on est au pouvoir, on peut perdre, on
est dans l'Opposition. Non pas sur une Ile, éloigné de tout,
méprisé par tous, au contraire. On est dans un climat
d'amitié, de fraternité et d'égalité.
C'est donc avec infiniment de joie, malgré l'épreuve, que
j'appuie la motion d'ajourner au 27 octobre, au 23...
M. LAPORTE: Le 27 octobre. M. BOURASSA: A 3 heures.
M. BERTRAND: Je tiens à remercier tous mes collègues, ceux
qui m'entourent, qui ont été avec moi non seulement dans le
succès et dans l'épreuve, qui sont demeurés avec moi, qui
ont combattu avec moi et à qui j'ai voulu donner toute la
liberté, la latitude, la responsabilité de répondre des
actes qu'ils avaient posés et d'interroger ceux-là qui leur ont
succédé.
Je les remercie et, en particulier, on me permettra d'adresser à
celui qui est à ma gauche, des remerciements d'une manière
très particulière pour la tâche ingrate qu'il a voulu
accepter, de diriger avec moi les travaux de cette Chambre, mon collègue
le député de Maskinongé dont tous connaissent la bonhomie,
le dévouement, l'intelligence et également le sens juridique. Je
le remercie et je tiens à vous remercier également, M. le
Président, de la manière dont vous avez présidé ces
séances de laChambre.
Aux yeux de quelques-uns de ceux qui sont ici, j'apparais, malgré
une jeunesse qui, je l'espère, paraîtra encore longtemps, le doyen
de cette Chambre. J'ai connu plusieurs régimes. J'ai connu
l'époque où nous étions 82 du côté du pouvoir
et 8 du côté de l'Opposition. C'est donc que je ne suis pas
pessimiste, voyant d'un côté 72 députés et de mon
côté, quant à moi, 17 députés. Le pouvoir
pourrit vite. Le premier ministre actuel le sait. Et c'est pourquoi il faut que
l'homme politique accepte le combat, accepte la défaite parce que les
régimes qui dureront longtemps ont duré. A l'heure actuelle, la
population s'attend que ses députés agissent comme nous l'avons
fait depuis quelques semaines: essayer de donner l'efficacité
administrative et également l'efficacité législative.
M. le Président, je vous félicite d'avoir
présidé nos travaux de façon qu'après un mois nous
pouvons terminer les travaux parlementaires, quitte à les ajourner d'ici
l'automne. Je vous remercie.
Je remercie également tous ceux qui beso-gent dans l'anonymat,
car il y a des gens qui nous entourent et qui travaillent pour que la Chambre
et tous les services qui y sont connexes puissent produire d'une manière
abondante tous les travaux que nous avons à présenter, les
légistes, ceux qui s'occupent du journal des Débats, donc
à tous directement ou indirectement responsables du bon ordre des
travaux de la Chambre, je dis merci.
Il y en a un qui, en Chambre, est arrivé sans doute avec un
tempérament peut-être intrisan-geant, le vice-président de
nos travaux. Je tiens à le féliciter d'avoir accepté que
les députés de cette Chambre ne marchent pas avec le gourdin. Il
a compris que l'atmosphère de cette Chambre est difficile, et je crois
que tous les députés de cette Chambre voudront rendre
témoignage au vice-président d'avoir non seulement
évolué, mais d'avoir compris que la Chambre est le carrefour de
toutes les opinions, des suggestions, des recommandations et que chacun a son
tempérament et sa personnalité pour l'exprimer.
Je pense que tous mes collègues voudront rendre hommage au
vice-président, le député de Terrebonne, pour la
manière dont il s'est acquitté de sa fonction, surtout dans les
dernières semaines de notre session.
M. le Président, Je vous remercie, quant à moi et au nom
de tous mes collègues. Je tiens également à dire au chef
du parti péquiste en Chambre et au chef du parti créditiste,
combien il nous a été agréable de les connaître.
Durant une campagne électorale, on se connaît de loin, mais nous
avons réalisé que tous, au-delà des considérations
partisanes, nous voulons travailler véritablement pour le Québec,
pour notre groupe, et que nous voulons mettre au-delà des
considérations des partis politiques, d'abord et avant tout,
l'intérêt du public. Merci.
M. SAMSON: M. le Président, pour le groupe que je
représente, pour nous tous, cette session
est une expérience nouvelle. Nous croyons cependant, que c'est
une belle expérience pour nous. Nous avons connu en cette Chambre des
débats objectifs, des débats orageux, mais c'est sans amertune
que nous finissons aujourd'hui nos travaux. Au début, évidemment,
par notre manque de connaissance des règlements, cela nous a
été un peu difficile, mais, grâce à la collaboration
de tous les membres de cette Chambre, nous avons réussi à ce
qu'on nous laisse nous exprimer. Nous avions dit, au départ, que nous
offrions notre collaboration et que nous aimerions voir des débats
objectifs. Je pense que la session que nous terminons en est une où nous
avons connu un travail considérable de la part de tout le monde.
Je voudrais me Joindre à l'honorable chef de l'Opposition
officielle pour dire que, au-dessus de nos couleurs politiques, nous avons
été à même de constater la compréhension de
tous les députés.
M. le Président, la collaboration que nous avions offerte au
départ, nous la maintenons et, à la reprise de cette session,
nous continuerons à l'offrir.
En terminant, je veux remercier le chef du gouvernement, le chef de
l'Opposition officielle et le chef du Parti québécois pour la
collaboration qu'ils ont manifestée. Je vous remercie également,
M. le Président, ainsi que le vice-président pour la grande
compréhension que vous avez manifestée durant cette session.
M. LAURIN: Dans mon existence, M. le Président, c'est la
troisième initiation que je connaisse. La première, je l'ai
connue lorsque je suis entré au cours classique; la deuxième, en
première année de médecine et chaque fois
l'expérience a été très douloureuse. On
m'étirait les membres d'une certaine façon mais, en même
temps, c'était une expérience fascinante parce que j'entrais dans
un monde nouveau où j'avais voulu entrer et où je
prévoyais de grandes satisfactions pour l'avenir. Cette
expérience a été la même, cette fois. J'ai
trouvé l'aventure assez douloureuse à certains égards et
à certains moments mais, par ailleurs, la fascination de tout ce monde,
ses coutumes et ses expériences provoquées en moi a
compensé largement pour les difficultés.
Notre parti avait dit, au cours de la campagne électorale,
à plusieurs reprises, que nous voulions entrer dans le système,
que nous voulions peut-être changer le système, d'une certaine
façon, mais à l'intérieur et c'est bien ce que nous avons
fait. Nous avons appris, à nos dépens parfois, que le
système avait ses mauvais, ses bons côtés, qu'il
était dur pour ceux qui voulaient le changer de l'intérieur, pour
ceux qui voulaient s'acclimater à lui. C'est une expérience qui a
été très agréable en même temps que difficile
pour nous.
Heureusement, M. le Président, nous avons eu dès le
début votre présence qui nous a adouci certains de ces moments et
nous vous en sommes très reconnaissants.
A la fin de cette session, je peux dire que les expériences que
nous avons faites ont été très fructueuses. Je pense, par
exemple, aux travaux en commission, Je pense aux discussions apropos de
certains projets de loi qui nous ont fait connaître des
compétences de tous les partis avec lesquels il était très
agréable de discuter. Nous avons appris beaucoup et, maintenant, en
même temps que Je remercie le chef du gouvernement, les chefs des
oppositions, pour paraphraser la parole d'un homme célèbre qui
vient à peine d'être prononcée par notre groupe: «
Fini le temps des discours, c'est le temps de l'action. »
M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais simplement exprimer mon
accord avec ce qui a été dit par mes quatre
prédécesseurs, féliciter particulièrement tous les
collègues de cette Chambre pour le travail très constructif qui a
été fait et terminer en annonçant une bonne nouvelle, je
pense, aux employés sessionnels, c'est-à-dire leur assurer la
sécurité d'emploi jusqu'à la reprise de la session.
M. LE PRESIDENT: La sanction?
Sanction de bills
M. LAPORTE: Il y aura sanction de bills dans quelques minutes. J'imagine
que les représentants des quatre partis voudront bien être
présents chez le lieutenant-gouverneur.
M. LE PRESIDENT: Nous nous rendrons, dès l'ajournement, chez le
lieutenant-gouverneur, en compagnie des chefs de partis, pour une sanction de
projets de loi.
Ajournement
M. LE PRESIDENT: Madame, messieurs, chers collègues, merci de
votre collaboration. Vous m'avez rendu le travail très facile, du moins
depuis quelques Jours. Je ne vous souhaite pas de vous aguerrir d'ici l'automne
et essayons de connaître des jours fructueux et agréables
jusqu'à la reprise des travaux de la Chambre, le 27 octobre, à
trois heures de l'après-midi. Merci.
(Fin de la séance: 0 h 24)