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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le vendredi 2 avril 1971 - Vol. 11 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Quinze heures neuf minutes)

M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes. Présentation de pétitions.

Pétitions

M. BURNS: M. le Président, au nom du député de Lafontaine, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter le projet de loi numéro 102, intitulé Loi modifiant la loi concernant les commissaires d'écoles pour la municipalité de ville d'Anjou, dans le comté de Lafontaine.

M. LE PRESIDENT: Ce n'est pas tout de suite. C'est un projet de loi.

M. BURNS: Je m'excuse, M. le Président.

M. BIENVENUE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter la pétition de Joachim des Riviè-res-Tessier et autres, demandant l'adoption d'une loi concernant la succession Cyrille Tes-sier, et que cette pétition soit maintenant présentée, lue et reçue.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de commissions élues.

Commission de la Fonction publique

M. BOSSE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission de la Fonction publique a siégé les 9, 10, 11 et 23 mars, relativement au conflit de la classification des enseignants, et qu'elle a entendu les parties.

M. LE PRESIDENT: Présentation de motions non annoncées.

Commission de l'Assemblée nationale

M. LEVESQUE: M. le Président, le rapport de la commission de l'Assemblée nationale.

La commission de l'Assemblée nationale a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son cinquième rapport.

Votre commission est d'avis que la pétition et l'avis sont réguliers et suffisants et que le bill est régulier et conforme à la pétition et à l'avis dans chacun des cas ci-après:

Des commissaires d'écoles pour la municipalité de ville d'Anjou, dans le comté de Lafontaine, demandant l'abrogation de deux lois les concernant.

M. LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé?

UNE VOIX: Agréé.

M. LE PRESIDENT: Agréé.

Présentation de bills privés.

M. LEVESQUE: M. le Président, aux motions non annoncées.

Commission de la liberté de la presse

M. LEVESQUE: Avec le consentement unanime de cette Chambre, qu'il me soit permis de proposer qu'une commission spéciale de onze membres soit instituée avec pouvoir d'entendre des témoins, d'en assigner, si besoin est, et de siéger pendant l'ajournement de la Chambre pour poursuivre l'examen du problème de la liberté de la presse, des faits qui peuvent la mettre en danger et d'examiner si les lois de la province en assurent la protection.

Que messieurs Bacon, Bourassa, Cloutier (Ahuntsic), Cloutier (Montmagny), Drolet, Hardy, L'Allier, Laurin, Leduc, Tremblay (Chicoutimi) et Veilleux forment ladite commission, que le quorum en soit fixé à six, que M. Veilleux soit nommé président et que cette commission tienne une séance le mardi 6 avril 1971, à neuf heures trente, en la salle 81-A de l'Assemblée nationale.

M. PAUL: M. le Président, je me demande si on a examiné la procédure que l'on introduit aujourd'hui. Est-ce par voie de motion annoncée ou par voie de motion non annoncée? De toute façon, je m'en réfère, en la matière, à mon collègue, le député de Chicoutimi, qui est le porte-parole officiel du parti à cette commission spéciale de la liberté de la presse.

M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, il y a eu demande du consentement de la Chambre. Puis-je demander à la Chambre s'il y a consentement ou non? Autrement, je crois qu'il faudra que cette motion soit annoncée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, nous voulons bien collaborer avec le gouvernement et donner notre consentement.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée, avec le consentement de la Chambre?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

Commission des Affaires sociales

M. LEVESQUE: M. le Président, avec le consentement unanime de cette Chambre, qu'il me soit permis de proposer que la commission des Affaires sociales siège mardi le 6 avril, pendant que la Chambre est en séance, en la salle 81-A afin de poursuivre l'étude du bill 69.

M. LE PRESIDENT: H s'agit du même cas. Cette motion est-elle adoptée, avec le consentement unanime de la Chambre?

M. PAUL: M. le Président, si nous pouvions savoir l'heure, ce serait plus facile.

M. LEVESQUE: Ce serait après la période des questions, vers quatre heures de l'après-midi.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Présentation de bills privés. L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter, au nom du député de Lafontaine, le projet de loi numéro 102, intitulé Loi modifiant la loi concernant les commissaires d'écoles pour la municipalité d'Anjou dans le comté de Lafontaine.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.

M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai l'honneur de proposer que ledit bill soit référé à la commission des bills privés et publics, qui tiendra séance mardi, le 6 avril 1971, à l'heure indiquée au feuilleton.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Y a-t-il d'autres bills privés?

Présentation de bills publics. M. LEVESQUE: D.

Projet de loi no 97 Première lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Laurier propose la première lecture du projet de loi concernant le fonds industriel de la ville de Mont-Royal. Cette motion est-elle adoptée?

M. PAUL: Explications, M. le Président.

M. MARCHAND: M. le Président, permettez-moi de donner des explications sur le bill 97, que vous venez de proposer. La ville de Mont-Royal avait créé un fonds industriel au montant de $1,500,000. Elle a acquis, par voie d'expropriation, un terrain pour fins industrielles et la sentence de la Régie des services publics a fixé à $1,502,000, somme qui ne comprend ni les intérêts accumulés, ni les frais.

La ville désire vendre une partie du terrain à la compagnie Divco, Division Construction Company Limited, à un prix inférieur au prix coûtant, opération considérée comme illégale par le ministre de la Justice; la ville et la compagnie Divco sont liées par une option à cet égard. Par ailleurs, en vertu d'une convention liant les trois parties, Divco s'est engagée à construire une bâtisse industrielle sur ce terrain. La caisse de dépôt s'est engagée à acquérir ce terrain et la bâtisse qui y est construite pour ensuite louer ces immeubles à la compagnie Magnasonic.

Le président de la caisse de dépôt souhaiterait que l'acquisition de ce terrain par la ville soit légalisée, d'une façon sûre dans les meilleurs délais, puisque Magnasonic exige que la bâtisse soit disponible au plus tard le 15 août prochain. Des démarches avaient déjà été entreprises par Me Robert Godin, représentant dans cette affaire et la ville et la caisse de dépôt en vue de la présentation, par la ville, d'un projet de loi privé. Toutefois, vu l'urgence de régler cette situation au plus tôt, pour rencontrer les exigences de Magnasonic, je crois que le gouvernement devrait procéder par voie de bill, comme le recommande Me Prieur.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance. Y a-t-il une motion pour le déférer au comité?

M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai l'honneur de proposer que ce projet de loi soit déféré à la commission des bills publics et privés et qu'il soit étudié le 6 avril 1971 à dix heures de la matinée, à la salle 81-A.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Déclarations ministérielles. L'honorable ministre des Affaires sociales.

Règlements de l'aide sociale

M. CASTONGUAY: M. le Président, au cours des dernières semaines, les membres de cette Chambre, des media d'information et des mouvements de citoyens défavorisés ont attiré mon attention et celle des fonctionnaires du ministère des Affaires sociales sur certains règlements relatifs à la Loi de l'aide sociale. Tel que je l'ai déjà mentionné, les fonctionnaires du ministère ont analysé les implications de certains règlements de la Loi de l'aide sociale, au cours des derniers mois, et ils ont proposé des amendements que j'ai, par la suite, soumis au conseil exécutif et qui ont été approuvés cette semaine. Certaines modifications à ces règlements sont très importantes.

Ces amendements visent, d'une part, à adapter certains règlements, afin de respecter, dans toute la mesure du possible, l'esprit de la loi qui se veut juste et humaine. D'autre part, un autre grand objectif recherché est l'élimination ou la diminution de certaines tâches administratives des agents de sécurité sociale, ce qui aura, sans aucun doute, d'heureux effets sur le service aux bénéficiaires de la loi.

Parmi les amendements apportés au règlement, j'aimerais identifier les plus importants et donner quelques explications pertinentes. Un article des anciens règlements ou des règlements actuels prévoit le versement de l'aide sous forme de prêt à des personnes qui ont une équité nette dans une propriété servant de résidence, c'est-à-dire la valeur de la propriété basée sur l'évaluation municipale, moins le montant de l'hypothèque restant à payer, supérieur à $8,000 et inférieur à $15,000. L'aide est refusée si une équité nette atteint $15,000 et plus. Cet article des règlements a certes été celui qui a suscité le plus de difficultés et d'iniquités. Les problèmes qu'il provoque sont d'autant plus aigus qu'il affecte surtout les personnes âgées, les veuves qui ont hérité d'une propriété modeste et libre d'hypothèque, dans la majorité des cas, ou encore ceux qui ont consacré une partie de leur revenu à la constitution d'une équité.

En vertu de l'amendement, l'aide sera accordée à titre gratuit, même si une personne a une équité nette dans une propriété servant de résidence, supérieure à $8,000, mais inférieure à $15,000 ou à $20,000 dans le cas d'un agriculteur. L'amendement vise à garantir une aide appropriée, à titre gratuit, en éliminant par le fait même l'obligation de suivre le cas en vue du recouvrement de l'aide qui aurait été autrement versée sous forme de prêt.

En pratique, ceci signifie que d'une part les personnes qui ont une équité nette inférieure à $15,000 seront admissibles aux prestations sans être obligées d'engager leur propriété comme garantie de remboursement.

D'autre part, les personnes qui ont une équité nette de $15,000 et plus seront également admissibles aux prestations; toutefois les prestations, dans ce cas, seront diminuées en fonction de l'importance du montant qui dépasse $15,000. Ceci vise à aider les personnes dans le besoin sans pour autant les obliger à vendre leur propriété.

Un autre amendement stipule que l'aide à une famille ou à une personne seule est maintenant fournie à titre gratuit. Il ne sera donc plus nécessaire de considérer des revenus réalisés par un requérant au cours des douze derniers mois précédant sa demande en vue de déterminer s'il y aura appel de contributions à la reprise du travail.

Je voudrais signaler que les engagements pris depuis le 1er novembre 1970 par des bénéficiaires de la loi seront annulés en ce qui a trait à leur propriété servant de résidence. Un projet d'arrêté en conseil à cet effet sera approuvé dès la semaine prochaine.

Par ailleurs, les compétences des bureaux locaux et régionaux d'aide sociale sont élargies en ce qui a trait à la couverture de certains besoins spéciaux. A titre d'exemple, les bureaux locaux et régionaux pourront respectivement autoriser des prestations de $25 et $75 au lieu de $15 et $50 pour les médicaments. Cet élargissement permettra de pouvoir traiter les demandes d'une façon plus rapide en ayant recours moins souvent au palier central d'acceptation, soit le ministère, sans pour autant provoquer une augmentation des déboursés, étant donné qu'aucun amendement au chapitre des besoins spéciaux ne prévoit le dépassement des montants qui étaient déjà prévus au palier supérieur de décision.

Un autre amendement important prévoit que l'enfant dépendant qui atteint l'âge de 18 ans et qui continue ses études est considéré comme enfant à charge et non comme adulte. La table pour les frais de nourriture, vêtements, besoins personnels et domestiques est majorée de $10 par mois pour cet enfant. Le passage d'un enfant dépendant qui atteint 18 ans à la catégorie d'adultes était une cause de réduction selon les anciens règlements. Pour corriger cette anomalie, l'amendement de cet article du règlement prévoit un montant additionnel de $10 par mois pour les besoins énumérés au paragraphe précédent. Ce montant de $10 compensera également la perte des allocations scolaires pour l'étudiant.

Avant de terminer, je voudrais insister sur le fait que l'amendement relatif à l'équité nette qu'a une personne dans une propriété servant de résidence entrera en vigueur le 1er mai. Les autres modifications prendront effet le 1er juillet.

De tels délais sont nécessaires afin de préparer l'impression des règlements refondus, de modifier les cahiers de procédure et de permettre aux agents de sécurité sociale de se familiariser avec ces amendements.

Il est possible que d'autres modifications soient apportées ultérieurement, à la lumière de l'expérience de l'application de la Loi de l'aide sociale. Enfin, M. le Président, je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter tous les fonctionnaires qui, directement ou indirectement, ont participé à l'application de la Loi de l'aide sociale, depuis le 1er novembre 1970, et à la mise à jour des dossiers des bénéficiaires.

Cette tâche a nécessité un vaste effort collectif qui n'a pas été rendu facile en raison d'un niveau élevé de chômage pendant cette période et, en conséquence, d'un nombre accru de demandes d'aide. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, nous apprenons avec grand plaisir les modifications importantes apportées aux règlements de la Loi de l'aide sociale. Tous les députés avaient été à même, dans leur bureau, de constater en pratique les difficultés que posaient ces articles auxquels a référé le ministre, en particulier cette clause qui exigeait du bénéficiaire le remboursement de son allocation s'il avait une équité nette supérieure à $8,000.

Le problème se posait aussi pour les enfants qui atteignaient l'âge de 18 ans et qui étaient encore aux études. Egalement aussi, la troisième modification pour l'élargissement de la compétence des bureaux locaux dans l'appréciation des besoins spéciaux. Ce sont là des modifications importantes qui vont permettre aux fonctionnaires de l'aide sociale de faire une meilleure application de la loi. Elles vont permettre également aux bénéficiaires de l'aide sociale de régler des problèmes extrêmement difficiles. M. le Président, je voudrais ajouter à l'intention du ministre, qu'il reste, à mon avis, un problème important encore dont il ne nous a pas parlé, mais auquel il est sensibilisé. J'ai eu l'occasion de parler avec lui de ce problème et même je lui avais posé une question antérieurement. C'est au sujet des mères nécessiteuses.

Il y a là un problème. Je sais que le ministre des Affaires sociales a commencé à étudier ce problème-là. Je l'incite à continuer à se pencher sur toutes les implications qu'il y a pour les mères nécessiteuses de recevoir une allocation d'aide sociale en vertu de la nouvelle loi au lieu de l'ancienne.

Alors, je voulais attirer l'attention du ministre des Affaires sociales sur ce point particulier.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.

M. BOIS: M. le Président, je tiens à remercier très sincèrement M. le ministre des Affaires sociales d'avoir apporté les amendements pour lesquels nous avons apprécié sa constatation après les demandes qui lui furent faites par le public ainsi que, plusieurs fois, par nous-mêmes.

Nous apprécions infiniment cet élargissement de la loi en ce qui concerne la question de l'équité domiciliaire et nous sommes assurés que, dans les questions d'évaluation, un tel changement visera certainement la majeure partie des cas où il y aura des résidences qui sont, ce qu'on appelle réellement, personnelles et non résidences à revenus.

Il y a cependant juste un point — et j'appuie les paroles de mon confrère, le député de Montmagny, quand il parle du troisième point concernant l'élargissement sur les médicaments, qui est omis de cette déclaration ministérielle et que nous aimerions beaucoup voir M. le ministre approfondir un de ces jours — et c'est celui qui concerne présentement, dans le règlement des allocations, par exemple les enfants qui sont sur le marché du travail et qui résident avec un ou des parents invalides. Je sais que M. le ministre s'arrêtera, sans doute, à considérer ce point et nous apprécierions infiniment qu'un de ces jours nous ayons une décision ministérielle à cet effet.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: C'est avec plaisir que nous avons entendu le ministre faire certaines corrections à la Loi de l'aide sociale. Il y a certaines remarques qui ont été faites tout à l'heure et que je fais miennes. Cependant, je voudrais ajouter, en plus, quelques commentaires, en particulier au sujet de la table qui concerne la nourriture, les vêtements, les besoins personnels et domestiques. Il me semble que ces normes-là sont passablement faibles et en particulier pour certaines régions. Il me semble qu'on devrait tenir compte du coût de la vie dans les régions touchant ces différents besoins-là. Même sans tenir compte du coût de la vie, quand on considère les critères de cette table-là, on s'aperçoit, par exemple, que pour une famille de deux ou trois enfants, on arrive à environ $120. Je pense que c'est passablement faible. Je n'ai pas les chiffres exacts.

Autre remarque que je voudrais faire. On devrait tenir compte aussi, dans cette loi-là, des catégories de personnes. Actuellement, tout le monde est traité sur le même pied, tout le monde est soumis aux mêmes normes.

C'est-à-dire qu'il y a des gens qui vivent continuellement du service social, grâce à l'aide du ministère des Affaires sociales. Vous avez des gens qui sont assujettis à cette loi parce qu'ils sont infirmes, parce qu'ils sont invalides. Ces gens vivent continuellement sous ce système. Ils ne peuvent pas espérer, dans trois mois, dans quatre mois, pouvoir travailler à un salaire X qui leur permettra de payer certaines dettes qu'ils auront accumulées.

II me semble que pour ces gens, on devrait en tenir compte. On devrait avoir une table différente pour eux. Quant aux autres, il reste que, comme je le disais tantôt, la table est assez faible.

Il y a aussi les personnes seules à qui on accorde un montant de $75. Je voudrais bien savoir quelle personne seule est capable de vivre avec un montant de $75, lorsqu'elle est obligée de payer ses dépenses de logement, ses dépenses de nourriture, etc.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je m'excuse, je ne sais pas en vertu de quoi je devrais prendre la parole, mais il me semble qu'on déborde l'objet du règlement.

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. CASTONGUAY: II me ferait grandement plaisir de reprendre la discussion de cette question lors de l'étude des crédits du ministère parce que, précisément, cela fait l'objet des objectifs de la politique de sécurité de revenu que j'ai déjà exposée.

Je ne veux pas interrompre inutilement le député mais il me semble que l'objet des amendements apportés ne visait pas ces points soulevés par le député.

M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président, mais quand même, ce sont des remarques sur les amendements au bill 26.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. Je tiens à féliciter l'honorable ministre des Affaires sociales pour sa connaissance approfondie des règlements. Je concours à son idée parce qu'on ne peut pas, sur une déclaration ministérielle, commencer un débat sur la politique sociale du gouvernement, car on sait où cela commence mais on ne sait jamais où cela finit. Je pense bien que ce que le règlement permet, ce sont de courts commentaires, strictement sur la déclaration ministérielle.

M. LESSARD: M. le Président, de même que le député de Montmagny a attiré l'attention du ministre sur un point particulier, je voulais tout simplement attirer l'attention du ministre sur deux points.

M. LEDUC: Vous l'avez fait, alors assoyez-vous.

M. LE PRESIDENT: Dépôt de documents.

Dépôt de documents

M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du ministère de la Santé pour l'exercice se terminant le 31 mars 1970.

M. LE PRESIDENT: Questions des députés.

Questions et réponses

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

Projet de cartonnerie

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser, selon un usage qui deviendra une tradition, une question au premier ministre concernant toujours ce fameux projet de la cartonnerie. J'aimerais savoir du premier ministre s'il a entre les mains un rapport sur le projet de cette implantation d'une cartonnerie à Cabano ou à Sacré-Coeur et si, d'autre part, il est au courant des négociations qu'ont entreprises un certain nombre de députés de la région de Québec afin que cette entreprise soit implantée dans la région de Québec ou dans Québec même.

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai déjà répondu que la décision ne revenait pas au gouvernement du Québec. Je devais discuter de la question avec le ministre des Terres et Forêts et le ministre des Affaires municipales. Pour l'instant, je vais prendre avis de la question pour les autres aspects de la question du député de Chicoutimi, mais je tiens à répéter que la décision ne revient pas au gouvernement du Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le Président. Le premier ministre pourrait-il me dire s'il a reçu de certaines sociétés de pâtes et papier des représentations indiquant que l'établissement d'une usine de la nature de celle dont on parle serait de nature à créer un problème de concurrence dont souffriraient les industries de pâtes et papier déjà existantes?

M. BOURASSA: Cette question particulière n'a pas été soumise à ma connaissance, mais le ministre des Terres et Forêts pourrait peut-être y répondre plus précisément.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.

Mine Preissac Molly

M. TETREAULT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Richesses naturelles ou au premier ministre. En prenant en considération le problème de la mine Preissac Molly, le ministre peut-il nous dire à quel endroit sont rendues les démarches afin que les gens de cette région sachent à quel endroit ils s'en iront?

M. BOURASSA: Nous avons discuté de la question à un bref conseil des ministres aujourd'hui. Nous étions conscients de l'urgence de

régler ce problème et le gouvernement a pris une décision de manière à empêcher la fermeture de la mine en question.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Dans le Soleil d'hier, on pouvait lire un article, intitulé: "Munro se montrerait plus exigeant à l'endroit des provinces."

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Depuis quelques jours, plusieurs questions sont posées en citant des articles de journaux. Je ne voudrais pas que cette coutume s'établisse en cette Chambre. Je voudrais me permettre immédiatement, peut-être, de mettre un frein à cette coutume avant que ça devienne établi. Il est bien clair, en vertu du règlement, qu'on ne peut pas poser une question en citant un article de journal.

Conférence des ministres du bien-être

M. LAURIN: II s'agit, en fait, M. le Président, de la deuxième conférence fédérale-provinciale des ministères du bien-être qui se tiendra à Ottawa au mois de mai. Dans le communiqué émis par la Presse canadienne, on dit que le ministre fédéral se montrera plus exigeant en raison des lacunes constatées dans le système de bien-être des provinces et de l'absence de solution qu'y apportent les provinces.

La question que je voudrais poser au ministre est celle-ci: Ce problème du bien-être relève-t-il véritablement de la juridiction fédérale et non pas de la juridiction provinciale?

Deuxièmement, à la lumière de ce que cette communication nous apporte le ministre peut-il nous faire part des éléments de la politique qu'il entend préconiser à cette conférence?

M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai déjà mentionné que je ne lis pas un grand nombre de journaux, pour des raisons que...

Je n'ai pas lu cet article auquel fait allusion le député de Bourget. Quant aux questions, il me semble qu'elles portent sur des politiques du gouvernement. J'ai déjà donné les grandes lignes de cette politique que nous entendons poursuivre.

D'ailleurs, en réponse à une question qui avait été inscrite au feuilleton, j'ai déjà indiqué qu'au fur et à mesure que les éléments précis touchant à divers programmes qui seront modifiés par cette politique auront été acceptés par le gouvernement nous les proposerons à la Chambre, s'ils nécessitent une législation ou, encore, nous les rendrons publics, si cela ne nécessite que des amendements à nos règlements.

Quant à la question de savoir si le gouverne- ment fédéral a un rôle dans le domaine de l'assistance, nous savons que le Parlement du Canada a adopté le régime canadien d'assistance publique, il y a un certain nombre d'années, et que le Québec a demandé, en vertu de la loi permettant de se retirer de certains programmes à frais partagés, le retrait de ce programme.

M. LAURIN: Question additionnelle. Ne vous semble-t-il pas que le sens, justement, de ces remarques est que le gouvernement fédéral veut s'arroger une sorte de rôle de préfet de discipline en ce qui concerne l'observance de ce règlement d'assistance publique?

UNE VOIX: Question.

M. CASTONGUAY: Vous me demandez une opinion et je ne crois pas que ce soit le moment de le faire, à l'intérieur de la période des questions.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Témiscouata.

M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales ou, en son absence, au ministre de l'Industrie et du Commerce. Il y a quelques jours, je demandais au ministre des Affaires municipales de déposer en cette Chambre le rapport qu'ont fait préparer conjointement le ministère des Terres et Forêts et le ministère de l'Industrie et du Commerce relativement au projet d'une cartonnerie.

On m'avait dit que pour autant que ce rapport était payé par un ou deux ministères ce serait le droit du député d'en exiger le dépôt. C'est la deuxième fois que je demande ce dépôt.

M. BOURASSA: C'est relié à la question du député de Chicoutimi?

M. SIMARD (Témiscouata): Bien, relié... Je demande le dépôt du rapport, tout simplement.

M. LEVESQUE: II est public.

M. SIMARD (Témiscouata): Je ne demande pas où sera implantée l'usine.

M. TESSIER: M. le Président, l'autre jour, mon collègue de Témiscouata parlait d'un fonctionnaire du ministère des Affaires municipales, un M. Dufour. Je voudrais préciser, à ce sujet-là, que le M. Dufour en question, après informations prises, n'est un fonctionnaire ni des Affaires municipales ni de l'ODEQ — c'est lui qui a fait allusion à un certain rapport — mais il est le commissaire industriel de la ville de Québec. Ceci dit, quant au rapport lui-même, il n'a été commandé ni par le ministère des Affaires municipales ni par l'ODEQ et, s'il a été commandé par un autre ministère, il faudrait s'adresser au ministre en titre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le Président. Le ministre des Affaires municipales pourrait-il nous dire s'il a reçu un rapport des députés de la région de Québec, concernant ce projet de cartonnerie?

M. TESSIER: M. le Président, personnellement, je n'ai reçu aucun rapport d'aucun député.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

Plaques d'immatriculation de l'armée

M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Est-ce que le ministre des Transports a eu le temps de vérifier si les camions de l'Armée canadienne, cantonnés au Québec, avaient eu le temps de se munir de leurs plaques d'immatriculation du Québec?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Je me demande s'il y a urgence, alors que nous allons procéder très prochainement à l'étude des crédits de chaque ministère. Je pense que cela peut attendre facilement quinze jours, trois semaines, un mois. Il n'y a pas urgence nationale à cela, je ne le crois pas.

M. LAURIN: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député...

M. LESSARD: Dans le passé, M. le Président, tous les gouvernements ont refusé...

M. LAURIN: M. le Président, est-ce que je peux faire une remarque?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! J'ai rendu ma décision.

L'honorable député de Portneuf.

Cours de maniement d'armes à feu

M. DROLET: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Il y a une quinzaine de jours, le ministre nous informait que les cours de maniement d'armes à feu, qui sont donnés dans nos comtés par les clubs de chasse et de pêche, étaient donnés gratuitement. Est-ce que le ministre est au courant qu'un montant allant de $2 à $5 est exigé des citoyens qui suivent ces cours et peut-il nous dire quand cette lacune sera corrigée?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, je persiste à dire que les cours ne coûtent rien. Il arrive, dans certains cas, que les associations de chasse et de pêche, qui fournissent d'autres services à leurs membres, exigent un montant minimum allant de $3, si vous voulez, à $5. En l'occurence, c'est une décision qui se prend à l'intérieur de l'association locale. Je ne voudrais pas que le député induise la Chambre en erreur — je sais que ce n'est pas son intention, d'ailleurs — en soumettant qu'il y a des frais pour ces cours. D'ailleurs, dans plusieurs endroits de la province, ce seront des officiers du ministère même qui les donneront gratuitement, lorsqu'il est possible de le faire. Je pense que le député conviendra avec moi qu'il est normal qu'une association de ce genre-là, qui offre d'autres services à ses membres, ait le droit d'exiger une somme minimum pour d'autres services que l'enseignement du maniement des armes à feu.

M. DROLET: M. le Président, une question supplémentaire. Je n'avais pas du tout l'intention d'induire la Chambre en erreur. Justement, j'ai en main une lettre qu'un membre qui suit ces cours m'a remise. Ils sont invités à aller suivre ces cours gratuitement. Lorsqu'ils arrivent à l'endroit pour suivre ces cours, on leur demande un montant d'argent.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais, M. le Président, justement, en retour de ce montant d'argent, je sais qu'on donne une carte de membre de l'association. Alors, la personne en question ne devrait pas être induite en erreur et, si elle ne veut pas devenir membre, elle n'y est pas obligée. Le groupement est, quand même, censé donner le cours gratuitement.

M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire, M. le Président.

M. LESSARD: Je demanderais au ministre de faire une enquête plus approfondie, parce que, dans ma région, il n'y a aucun service supplémentaire et nous payons la somme de $6 pour recevoir ces cours.

DES VOIX: Question.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.

M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre pourrait dire à cette Chambre —afin qu'on puisse informer la population, vu que les cours sont donnés gratuitement — à quelle place on pourrait s'adresser ou envoyer nos gens pour avoir des cours gratuits?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Déjà, on a mentionné qu'il y avait différentes associations de chasse et de pêche. Là, on ne peut pas décider pour eux du montant pour devenir membre. Mais, nous avons entraîné, à mon ministère, des employés qui doivent donner justement ces cours. De la publicité se fait au fur et à mesure que les cours sont offerts au public, dans les différentes régions de la province. Nous avons l'intention de continuer à

faire une publicité autour de cela. Peut-être, certaines personnes intéressées à suivre les cours n 'ont-elles pas vu la publicité qui a été faite, mais je sais qu'une publicité a été faite dans les régions où, justement, les cours ont été tenus. On continuera à tenir ces cours et à faire de la publicité dans les journaux locaux.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gaspé-Nord.

Publicité de l'alcool et du tabac

M. GAGNON: M. le Président, une question à l'attention du ministre des Affaires sociales. Pourrait-il me dire s'il a l'intention de suivre l'exemple de la Colombie-Britannique relativement à la publicité qui est accordée aux boissons alcooliques ainsi qu'au tabac?

M. CASTONGUAY: D'abord, comme on vient de me le mentionner, je ne crois pas que cela concerne les Affaires sociales au premier titre. C'est une question, je pense bien, qui devrait faire l'objet d'une politique du gouvernement, si jamais le gouvernement décidait de prendre ce genre de mesures.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

Pêche en eau douce

M. PAUL: M. le Président, je voudrais poser une question à l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Est-ce que le ministre serait en mesure d'informer les pêcheurs commerciaux en eau douce de la politique définitive de son ministère, si elle a été établie, et nous communiquer toute nouvelle susceptible de maintenir encore quelques espoirs pour eux de se livrer à la pêche commerciale à l'occasion de la prochaine saison de pêche?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, le député m'a déjà fait part de son inquiétude et je peux dire que je la partage. C'est dans cet esprit que je demande périodiquement des rapports aux biologistes, entre autres au docteur Corbeil qui est à la direction générale de la chasse et de la pêche. Et si vous le permettez, M. le Président, je pourrais peut-être lire un extrait d'une lettre qui me parvenait hier relativement à l'état de la pollution d'après les analyses faites récemment. La lettre est d'ailleurs datée du 1er avril: "Le Service de la faune continue de prélever à intervalles assez réguliers, c'est-à-dire selon les possibilités des pêches en hiver, des échantillons de poissons qui ont été soumis pour analyse en relation avec la pollution par le mercure. "Il existe des variations parfois assez grandes dans la teneur de mercure entre les régions, les espèces et même au sein d'une même expèce.

Cependant, les derniers résultats reçus sont très encourageants et nous espérons pouvoir, pour la prochaine saison de pêche, considérer d'ouvrir la pêche commerciale par espèce et par région si le degré de pollution est inférieur à 0.5 partie par million. Nous pensons notamment à la carpe et à la barbote qui montrent actuellement une teneur en mercure inférieure à 0.5 partie par million. "Les facilités de pêche étant limitées actuellement à cause de la glace et de la neige qui recouvrent nos nappes d'eau, il nous faudra attendre qu'il soit possible d'obtenir un plus grand nombre d'échantillons avant de prendre une décision sur ce sujet. "Un comité s'occupe du problème du mercure et nous fera les recommandations appropriées. Toutes les analyses sont faites par le laboratoire du ministère des Pêches du fédéral, à Montréal, ce qui assure l'uniformité de la méthode utilisée et, par le fait même, rend possible la comparaison entre les résultats d'analyse dans les différentes provinces. "Pour votre information, nous tenons à souligner que des barbotes pêchées le 15 mars dans le lac Saint-Pierre indiquent une teneur en mercure de .25 partie par million. D'autres échantillons prélevés le 29 mars sont actuellement au laboratoire et les résultats devraient nous parvenir incessamment."

Dès que les résultats nous seront parvenus sur cette dernière analyse, je la communiquerai à la Chambre.

M. PAUL: Je voudrais remercier le ministre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.

Allocations pour le loyer

M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais poser une question au ministre des Affaires sociales, à la suite de la déclaration ministérielle qu'il a faite tout à l'heure et pour laquelle nous le remercions. Il semble y avoir une interprétation, dans la loi actuelle, autre que celle de l'esprit de la loi, et qui causerait beaucoup d'injustices, c'est l'article 3, concernant le montant que l'on accorde aux gens relativement à l'allocation pour le loyer. Par exemple, lorsqu'un couple réside avec ses enfants qui sont sur le marché du travail, l'allocation est réduite à $45, contrairement à ce qu'il reçoit lorsqu'ils sont aux études, alors qu'ils ont droit en vertu du règlement no 1, c'est-à-dire dans la zone no 1, à une allocation de $80 par mois pour leur loyer.

Alors, en plus de réduire l'allocation à $45, on déduit $24 par enfant. C'est cette chose que je souligne à l'attention du ministre. Est-ce que le ministre avait l'intention de consulter le service juridique au ministère des Affaires sociales, afin que cette situation puisse être clarifiée, et que la loi soit appliquée selon l'esprit de la loi et non pas un peu de façon...

M. GARNEAU: Question.

M. ROY (Beauce):... Je veux tout de même expliquer au ministre la situation, à la suite des représentations que nous avons faites depuis quelque temps. Je veux demander au ministre s'il a l'intention de consulter, les conseillers juridiques, le service juridique du ministère de façon que cette situation puisse être clarifiée?

M. CASTONGUAY: M. le Président, le député m'a soumis, d'ailleurs, certains cas par écrit. Je lui ai promis une réponse. La seule réponse que je peux lui donner pour le moment sur la question spécifique qu'il pose, c'est que la réglementation de la Loi d'aide sociale est extrêmement complexe. Elle va demeurer complexe tant et aussi longtemps que cette loi va être basée sur un critère de besoins, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas pu la modifier de façon à prendre simplement un critère de revenu pour déterminer le montant de l'aide.

J'ai dit dans la déclaration, plus tôt, que nous apporterions, à la lumière de l'expérience, d'autres amendements à ces règlements, et le cas qu'il mentionne est déjà à l'étude. Si possible ou si nécessaire, nous modifierons à nouveau les règlements.

Maintenant, j'aimerais aussi rappeler que dans le cas de l'enfant qui atteint l'âge de 18 ans, nous avons déjà, dans le présent règlement, apporté un certain assouplissement. Il ne faut pas oublier non plus que si l'enfant travaille il a, normalement, et, je pense, en vertu aussi du code civil, certaines obligations envers ses parents.

M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire qui s'adresse au ministre des Affaires sociales. Est-ce qu'il y avait un barème établi de $8,000 pour l'exemption, pour l'évaluation d'un bâtiment? On a haussé certains barèmes à $15,000. L'assisté qui a signé une formule indiquant que sa propriété est évaluée à $15,000, par exemple, s'il a une propriété qui est évaluée à $18,000 est-ce que le gouvernement peut reprendre ce qu'il a versé sur les $3,000 ou sur toute la propriété? Cela nous est demandé souvent, M. le ministre, je crois que vous pourriez nous éclairer en nous répondant à ce sujet.

M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai donné les grandes lignes du règlement aujourd'hui, j'ai dit qu'il deviendrait applicable le 1er du mois de mai étant donné la nécessité d'envoyer des instructions précises au bureau de l'aide sociale, aux bureaux régionaux, et ce règlement je l'ai ici, c'est celui qui a été adopté. Il compte plusieurs pages et je craindrais, M. le Président, d'entrer dans des détails aussi techniques qui pourraient par la suite induire en erreur.

Il me semble que là nous entrons à un niveau de questions suffisamment techniques pour qu'on doive se référer au texte exact des règlements, aux procédures que recevront les bureaux. Avec la permission du député, j'aimerais reporter cette question plutôt au moment où les bureaux auront reçu toutes les indications. Autrement, toute réponse que je donne, en donnant plus de détails que le texte du communiqué, est susceptible à mon avis d'induire en erreur.

M. VINCENT: Alors, M. le Président, c'était justement dans cet article que je voulais poser une question supplémentaire au ministre des Affaires sociales en le félicitant d'abord d'avoir fait cette déclaration aujourd'hui, qui va certainement nous aider dans chacun de nos comtés.

Ma question supplémentaire était celle-ci: Est-ce qu'il est physiquement possible pour le ministre — pas réalisable — cet après-midi, avant le départ de la plupart des députés de l'Assemblée nationale, de nous faire parvenir copie de l'arrêté en conseil afin que nous puissions, dès la fin de semaine, prendre connaissance en détail de cet arrêté en conseil qui, en définitive, apporte plusieurs amendements aux règlements actuels? Si c'était possible, je crois que ceci serait très apprécié de la plupart des collègues qui siègent ici en Chambre.

M. CASTONGUAY: Je vais le demander et si c'est possible, ce sera fait. Maintenant, je ferai remarquer que c'est un règlement qui amende un autre règlement. Ce n'est pas un texte refondu. Si c'est possible, je vais demander qu'on en apporte...

M. VINCENT: D'ailleurs, je pense que ce sera publié dans la Gazette officielle du Québec la semaine prochaine. Cela nous permettrait de l'avoir un peu avant afin que nous puissions, dès la fin de semaine, travailler là-dessus.

M. CASTONGUAY: Avec votre permission, je rappelle toutefois qu'il entre en vigueur, pour la première partie, le 1er mai et pour la deuxième partie, le 1er juillet.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

Raffinerie de sucre de Saint-Hilaire

M. BELAND: J'aurais une question à poser à l'honorable ministre de l'Agriculture. En l'oc-curence, je la poserai à l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, s'il veut bien me prêter attention.

A la suite d'une annonce parue dans la Gazette du 17 mars 1971 et dans lequel on rapporte que la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire a subi des déficits de $1,200,000 en 1968 et de $921,000 en 1969, M. le ministre peut-il nous dire si ces pertes sont dues à la bonne administration, à l'écoulement des produits à des coûts moindres que le coût de production ou à cartel quelconque?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est une question d'opinion que vous demandez au ministre. Ce n'est pas prévu dans les règlements. C'est strictement une question d'opinion personnelle. Je crois que vous pourriez formuler votre question autrement.

M. LEVESQUE: D'ailleurs, elle est posée au mauvais ministre. Ce n'est pas le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a la responsabilité de la raffinerie. Le député de Nicolet trouve cela drôle!

M. VINCENT: Je vais répondre. Cela relève d'une corporation. C'est le prix du sucre.

M. BELAND: Est-ce que l'honorable ministre aurait l'intention de vérifier la chose ou d'examiner le cas?

M. LEVESQUE: Je suis bien prêt à soumettre la question au ministre de l'Agriculture qui se fera certainement un plaisir d'y répondre à la prochaine occasion.

M. BROCHU: Mais il n'est pas là.

Loi de la protection du consommateur

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre des Institutions financières. Est-ce que l'honorable ministre pourrait nous dire à quel moment il entend déposer le projet de loi dit de protection du consommateur? Ah! je vois qu'il est absent. Je m'excuse. Il y a peut-être un autre ministre qui va répondre. Je note toutefois, M. le Président, que l'honorable ministre des Institutions financières a fait hier un plaidoyer contre l'absentéisme. Je demande au ministre de l'Industrie et du Commerce de nous dire à quel moment on a l'intention de déposer la loi dite de protection du consommateur.

M. LEVESQUE: Je crois bien, M. le Président, que je doive à ce moment-ci répondre à la première partie de l'intervention du député de Chicoutimi en rappelant que l'un de nos collègues les plus fidèles, ici à l'Assemblée nationale, c'est le ministre des Institutions financières. Deuxièmement, quant au dépôt de la loi, discutée longuement à la commission parlementaire des Institutions financières, il devrait avoir lieu à la suite de notre congé de Pâques.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas avant ça!

M. LEVESQUE: Si cela pouvait être avant, que le député de Chicoutimi soit bien assuré que c'est avec plaisir que nous le ferons.

Loi de la restructuration scolaire

M. CHARRON: M. le Président, une question du même ordre au leader du gouvernement. Est-ce que d'ici l'ajournement des vacan- ces de Pâques le dépôt de la Loi de la restructuration scolaire sur l'île de Montréal serait fait devant cette Chambre?

M. LEVESQUE: Je préfère attendre le retour du ministre de l'Education, retour qui aura lieu en fin de semaine. Je lui ferai part de la question du député à la séance de lundi.

M. CHARRON Très bien.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: J'avais une question pour le ministre des Communications qui n'est pas là. J'espère qu'on la lui transmettra.

Nous lui avons posé une question, il y a quelques jours, sur le dépôt par le ministre fédéral des Communications...

M. LE PRESIDENT: On m'informe qu'il serait là.

M. LAURIN: Ah! bon.

M. LE PRESIDENT: Si le député veut bien attendre quelques secondes.

M. LAURIN: J'attendrai quelques secondes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un manque de communication, M. le Président.

DES VOIX: Le voilà!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On en a récupéré un, M. le Président.

Télévision par câble

M. LAURIN: M. le ministre, nous vous avons posé, il y a quelques jours, une question à propos du dépôt des normes de la télévision par câble par M. Eric Kierans. Vous nous avez demandé quelques jours pour examiner ces normes. Je me demandais si vous étiez prêt à nous donner la réponse à cette question.

M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai déjà cette réponse depuis trois jours dans mes notes. Mais comme la question m'avait été posée par le député de Lafontaine et qu'il est absent depuis ce temps, j'attendais son retour en Chambre pour répondre.

J'ai pris connaissance des documents publiés le 29 mars 1971 par le ministre des Communications à Ottawa. L'un de ces documents s'intitule "Notes sur le programme du ministère des Communications concernant l'application des normes techniques des systèmes de télédiffusion par câble", le deuxième s'intitule "Normes techniques et procédures concernant les systèmes de télédiffusion par câble, systèmes de télévision à antenne collective".

Après étude de ces documents, j'en arrive à

la conclusion, sur avis des spécialistes en ces matières, qu'il s'agit de documents de nature purement technique. Pour répondre plus précisément à la question, ni le ministère des Communications du Québec ni moi-même n'avons été consultés par les autorités fédérales à ce sujet.

Il s'agit de normes techniques et c'est actuellement la responsabilité du ministère des Communications fédéral d'établir ces normes techniques d'utilisation d'équipement en matière de communications. Les documents déposés ne touchent en rien les conditions, par exemple, économiques ou sociales d'utilisation de l'équipement. C'est essentiellement pour un contrôle de la qualité de l'utilisation de l'équipement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales aimerait répondre à une question posée préalablement par l'honorable député de Mégantic.

Renvois à la Régie de l'assurance-maladie

M. CASTONGUAY: Dans la question, le député s'informait au sujet de prétendues an-nullations d'emplois à la Régie de l'assurance-maladie. Le directeur du personnel de la régie nous a donné les réponses suivantes:

II n'y a eu aucune mise à pied d'employés réguliers. Il y a eu environ 25 terminaisons d'emplois occasionnels, ce qui est normal, selon le directeur du personnel de la régie, en raison du fait que la période d'activité intense suivant la mise en application du régime est en voie d'être terminée.

Je profite de l'occasion pour dire que c'est exactement la même chose en ce qui a trait au bureau d'aide sociale. Nous avons recruté un certain nombre d'employés sur une base occasionnelle pour la période de révision des dossiers. A mesure que cette opération est en voie de se terminer — on me fait rapport aujourd'hui qu'elle a été terminée dans le délai de cinq mois — ces emplois ne sont pas renouvelés dans un certain nombre de cas.

M. DUMONT: Peut-être, M. le Président, le ministre pourra-t-il nous éclairer. Le but de ma question était surtout de savoir pourquoi on donne un avis de congédiement le vendredi soir pour le 31 mars, qui était mercredi, c'est-à-dire seulement deux jours à l'avance quand ces jeunes n'ont pas eu le temps de chercher d'autres emplois. C'était surtout pour signaler cette anomalie que j'avais posé la question. Est-ce que le ministre pourrait nous éclairer?

M. CASTONGUAY: M. le Président, la régie est un organisme autonome qui s'administre de la façon qu'elle croit la plus appropriée. Je demanderai des renseignements pour donner une réponse au député.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, la période des questions est-elle terminée?

M. LE PRESIDENT: Elle est terminée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même pas une petite question? Parce que j'avais une petite question pour le ministre des Richesses naturelles mais je ne la poserai pas, parce qu'il est présent.

Question de privilège Manifestation au collège Dawson

M. PINARD: M. le Président, je voudrais vous demander la permission pour faire une rectification sous forme de question de privilège, à la suite de la parution, dans le journal The Montreal Gazette d'aujourd'hui, à la page 3, d'une photographie qui représente un attroupement d'étudiants du collège Dawson.

Ils ont fait nier une manifestation pour démontrer leur opposition au prolongement de la route transcanadienne qui passera à travers le Carré Viger.

Les étudiants, d'après la nouvelle que je lis dans le journal et d'après le bas de vignette, auraient tenu cette manifestation pour symboliser leur opposition au prolongement de cette autoroute qui, d'après eux, détruira le parc de verdure, et les arbres au centre de Montréal.

M. le Président, j'aimerais dire que c'est tout à fait le contraire qui se produira. Si on avait pris la peine de bien s'informer, on aurait constaté que le ministère de la Voirie, qui est, lui aussi, soucieux de protéger l'environnement, de protéger les parcs de verdure, aussi bien dans les villes que dans nos campagnes, a pris les dispositions nécessaires pour faire passer l'autoroute est-ouest en tunnel, sous terre. Si, pour des raisons techniques, il devait être nécessaire, pour une partie du tracé, de détruire le parc Viger, des dispositions techniques ont été prises pour reconstituer le parc Viger tel qu'il existe en ce moment. Le parc de verdure sera bel et bien ce qu'il est en ce moment et, peut-être, mieux que ce qu'il est en ce moment, parce que nous avons chargé des aménagistes, des urbanistes et des spécialistes en sylviculture de reconstituer les lieux et, si possible, de faire mieux que ce qui existe en ce moment.

Encore une fois, invitation pressante à ceux qui contestent la décision gouvernementale, aux media d'information et à ceux qui les représentent de venir nous rencontrer au ministère de la Voirie. Qu'ils viennent voir la maquette qui est très bien faite, à l'échelle, qui montre le territoire tel qu'il est en ce moment et qui est faite de façon réversible pour montrer ce que sera le territoire du centre de Montréal, la partie ouest de Montréal et la partie est de Montréal une fois que l'autoroute transcanadienne aura été prolongée dans ce secteur.

Alors, puis-je demander davantage l'objectivité et l'honnêteté dans l'information, si on veut contester la décision gouvernementale? Je sais qu'en vertu du principe de la liberté d'expression on a droit de faire connaître son opposition. Je ne peux pas comprendre, cependant, que des journalistes, ceux qui représentent les media d'information de la presse écrite et parlée, s'acharnent à vouloir détruire le gouvernement quand il prend une décision pour revaloriser l'économie de l'Est de Montréal.

M. le Président, je pense que c'est une mise au point qui s'impose et, encore une fois, je fais cette invitation pressante de venir s'informer. S'ils ne veulent pas que nous les informions, nous allons aller dans le milieu et nous allons informer la population.

M. LAURIN: Voulez-vous recommencer le débat?

M. CHARRON: Si vous aviez soin des citoyens, comme vous avez soin des arbres.

M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas qu'il y ait eu aucune attaque à l'endroit des membres de cette Chambre.

M. LAFONTAINE: Le ministre a ouvert un débat. Je veux simplement dire...

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEDUC: Il n'y a pas de débat. Vous voulez suivre les règlements; nous allons les suivre, nous aussi.

M. LAFONTAINE: Le ministre n'avait qu'à ne pas commencer de débat.

UNE VOIX: II n'en a pas commencé, c'est vous.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

Peut-être le ministre est-il allé assez loin dans son exposé, mais les règlements prévoient...

M. LAFONTAINE: C'est justement ça.

M. LE PRESIDENT: De toute façon, ça ne doit pas soulever de débat et, surtout, je ne dois pas permettre de débat.

M. LEVESQUE: Article 15.

Projet de loi no 14

Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce propose la deuxième lecture du projet de loi numéro 14, Loi favorisant la commercialisation du poisson.

M. Gérard D. Lévesque

M. LEVESQUE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

M. le Président, la Chambre des communes du Canada a adopté, le 25 février 1970, le bill C-175, Loi concernant la création de l'Office canadien du poisson salé et la réglementation du commerce interprovincial et du commerce d'exportation du poisson salé pour augmenter les gains des producteurs primaires de normes préparées.

Avant de résumer le contenu de la loi et d'en dégager les avantages qu'une partie des pêcheurs du Québec pourrait en retirer, il m'apparaît important de rappeler les raisons qui ont amené le gouvernement du Canada à intervenir en créant, justement, l'Office canadien du poisson salé.

Des études en profondeur ont été conduites, ces dernières années, sur l'industrie du poisson salé dans les provinces de l'Atlantique. Je mentionne la plus connue, le rapport de la Commission du poisson salé de l'Atlantique. Il s'est dégagé de ces études que, premièrement, les 10,000 pêcheurs qui oeuvrent dans l'industrie du poisson salé connaissaient une productivité en déclin et recevaient des prix à la baisse depuis 1967, alors que leurs frais d'exploitation augmentaient.

Deuxièmement, le poisson était généralement traité d'une façon individuelle et artisanale, avec le résultat que la qualité du produit n'était pas uniforme et laissait à désirer. Troisièmement, la concurrence était de plus en plus grande sur les marchés dominés par les produits canadiens et les exportations canadiennes de ces produits diminuaient. Aussi, le gouvernement du Canada a-t-il dû intervenir pour acheter une partie de la production et l'acheminer vers des pays en voie de développement. Cela a représenté un peu plus d'un million de livres, expédiées en 1969.

Quatrièmement, les pêcheurs étaient à la merci des acheteurs qui, dans les régions isolées, payaient le prix le plus bas possible. Cinquièmement, la capacité de transformation était beaucoup trop considérable et donnait lieu à des coûts fixes anormalement élevés. Sixièmement, les pêcheurs recevaient une fois l'an, c'est-à-dire à l'automne, la rémunération de leur travail, alors que leur mode de vie leur impose des déboursés qui varient très peu au cours de l'année.

En résumé, une qualité trop variable du produit, la surcapitalisation dans la transformation, une concurrence serrée sur les marchés d'exportation et, enfin, des pêcheurs souvent sans défense devant les acheteurs, voilà succin-tement la situation qui a amené l'industrie du poisson salé à l'était de crise, en particulier à Terre-Neuve, au Labrador, et sur la côte nord du golfe Saint-Laurent. Le gouvernement canadien est venu à la conclusion que seule une

société de la couronne pouvait apporter une solution définitive à ce problème.

L'Office canadien du poisson salé, créé par une loi adoptée par la Chambre des communes le 25 février 1970, est doté de vastes pouvoirs pour réaliser l'objectif fondamental qui lui a été fixé, à savoir, relever les gains des producteurs primaires. L'office peut acheter du poisson brut, fini ou semi-fini, de la famille de la morue, le recueillir, l'apprêter, le saler, le sécher et l'empaqueter. Il peut aussi confier ces opérations à des agents ou organismes locaux. Il peut acheter, louer ou vendre les biens immobiliers nécessaires à ces opérations.

Il peut approvisionner les pêcheurs de sel comme de tout autre matériel nécessaire à la préparation ou à la manipulation du poisson. H peut faire des prix ou des avances à des pêcheurs et des producteurs, selon l'article 7 de la loi. En vertu de l'article 21, il est le seul organisme habilité à exporter la morue salée.

La province de Terre-Neuve a décidé de participer aux activités de l'office en 1970. L'office a donc exercé ses pouvoirs dans l'industrie du poisson salé de cette province, l'an dernier. Alors, on peut en évaluer les effets qui, d'ailleurs, n'ont pas tardé à se faire sentir. En effet, les prix à l'exportation ont augmenté de 6 p. c. et les prix payés aux pêcheurs eux-mêmes se sont surtout élevés de 25 p. c. à 33 p. c, selon les qualités du produit. Donc, augmentation de 25 p. c. à 33 p. c. pour les pêcheurs eux-mêmes.

C'est dans la Basse-Côte-Nord du golfe Saint-Laurent que les pêcheurs peuvent réellement bénéficier des avantages de l'Office canadien du poisson salé. C'est-à-dire dans cette région contenue dans le comté de Duplessis. Dans cette région, on compte près de 600 pêcheurs. Une grande partie d'entre eux alimentent en poissons frais et en crustacés l'usine de la Fédération des pêcheurs unis du Québec, située à Rivière-au-Tonnerre, et l'usine de St. Lawrence Sea Products Limited, localisée à La Tabatière. Ils peuvent être impliqués favorablement par les activités de l'office en écoulant, par son entremise, une partie de leurs captures des périodes de pointe.

Ce sont tout particulièrement les 200 pêcheurs côtiers qui produisent pour environ $250,000 de morues salées et séchées, qui sont le plus en mesure de profiter des opérations de cette société. Ces pêcheurs éprouvent des difficultés à s'approvisionner en sel, à financer leurs opérations et à percevoir des revenus suffisants. Comme on l'a vu, l'office est en mesure de corriger ces ordres de problèmes. Il n'y a pas lieu, du moins pour le moment, que les autres régions maritimes du Québec soient impliquées par l'office. En effet, aux Iles-de-la-Madeleine, la production de morues salées est inexistante. En Gaspésie, ce ne sont pas les pêcheurs qui transforment leur produit. Ces opérations sont effectuées par quelques usines qui livrent un produit jouissant d'une bonne renommée sur tous les marchés.

C'est pourquoi, après consultation avec la Fédération des pêcheurs unis de Québec, St-Lawrence Sea Products Limited et l'Association des producteurs de poissons du Québec, je propose que le territoire de la Basse-Côte-Nord puisse bénéficier des activités de l'Office canadien du poisson salé. Certains frais pourront être occasionnés au gouvernement du Québec, à la suite de sa participation aux activités de l'office. Ils peuvent être de quatre ordres: Premièrement, le gouvernement du Québec devra défrayer une partie des dépenses initiales d'exploitation et d'établissement de l'office. Le gouvernement du Canada a établi que la province de Québec ne sera pas appelée à débourser plus de $5,000, soit 5 p. c. d'un montant maximum de $100,000. On peut voir, à ce sujet, l'article 25, sous-article 2, paragraphe a), du bill C-175.

Deuxièmement, si l'office subit des pertes d'exploitation, le gouvernement du Québec devra en absorber une partie proportionnelle à l'importance de la production québécoise dans les activités de l'office ou à moins de 5 p. c. Article 25, sous-paragraphe 2, paragraphe a), de la même loi.

Normalement, l'office doit être exploité sans perte. Au cas de revers toujours possibles, on estime que la contribution maximum du gouvernement du Québec ne devrait pas excéder $10,000 à $15,000 par année.

Troisièmement, les provinces participantes doivent accepter de payer la moitié des indemnités aux propriétaires dont les installations à l'intérieur de leur juridiction deviendraient superflues à la suite des activités de l'office. Article 25, sous-article 2, paragraphe c), de la même loi.

Dans le cas de la province de Québec, une seule installation peut devenir superflue. Il s'agit du séchoir de Lourdes de Blanc-Sablon.

Par ailleurs, je suis optimiste quant à l'issue de nos rencontres avec l'office canadien au cours desquelles on discutera de la pertinence pour l'office d'accorder des contrats de séchage aux propriétaires de cet établissement. Si le séchoir venait à être considéré comme superflu, les déboursés du Québec n'excéderaient pas $30,000 au total.

Quatrièmement, enfin, il ne faut pas écarter la possibilité qu'exceptionnellement le gouvernement du Québec contribue financièrement à l'amélioration de l'installation localisée dans le territoire de l'office au Québec. Si jamais il arrivait que l'office ne soit plus un actif pour l'économie de la Basse-Côte-Nord, il sera toujours possible au gouvernement du Québec de révoquer l'entente qu'il signera.

Dès que l'entente sera signée avec le gouvernement du Canada, je désignerai un administrateur compétent pour faire partie du conseil d'administration de l'office en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la loi.

A la suite des études entreprises par mon ministère, à la suite aussi de nombreuses consultations qui ont été faites, je demande à cette

Chambre de donner son approbation au projet de loi qui veut permettre aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de bénéficier des avantages de l'Office canadien du poisson salé.

M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de Gaspé-Nord.

M. François Gagnon

M. GAGNON: M. le Président, le ministre propose l'adoption du projet de loi 14 qui permet au lieutenant-gouverneur en conseil d'autoriser son ministère à conclure avec l'Office canadien du poisson salé une entente qui concernerait la région de la Basse-Côte-Nord pour l'exploitation du poisson salé.

Comme vous le savez, M. le Président, le gouvernement qui a précédé le présent gouvernement, et dont le titulaire du ministère de l'Industrie et du Commerce était M. Beaudry, a toujours considéré le problème des pêcheries comme étant de première importance. Comme nous l'avons constaté il n'y a pas très longtemps, par un communiqué de l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, on a senti une amélioration considérable au niveau des pêcheries.

Le projet de loi qui est devant nous est un bon projet de loi qui va permettre à certains pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de bénéficier d'un prix convenable pour la vente du poisson salé. Je sais que l'Office canadien du poisson salé a son siège social à Terre-Neuve puisque l'organisme fédéral avait surtout pour but d'avantager les producteurs de poisson salé de cette province. Le gouvernement du Québec considère qu'il est de son devoir de conclure une entente avec cette société pour avantager les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. C'est un organisme fédéral qui possède 24 employés dont plusieurs sont compétents et qui fonctionne depuis près d'un an.

Le ministère de l'Industrie et du Commerce qui sera appelé à conclure des ententes devra le faire de façon à protéger entièrement les droits du Québec et les droits des pêcheurs de cette région. Il est possible que l'intervention de cet office cause certains problèmes à la Coopérative des pêcheries du détroit de Belle-Isle.

Je ne sais pas jusqu'à quel point des problèmes financiers pourraient survenir mais je n'ai aucun doute que le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui est très conscient de cette difficulté, pourrait envisager, si la chose survenait, d'aider cette coopérative. S'il arrivait au plus fort que cette coopérative ait des difficultés financières au point de connaître des déficits et de n'être plus rentable, le ministère de l'Industrie et du Commerce, en collaboration avec l'office fédéral, pourrait s'engager à dédommager cette coopérative, c'est-à-dire à acheter toutes les parts sans que les pêcheurs soient appelés à subir une perte quelconque. Il pourrait y avoir une contribution de 50 p. c. de la part du ministère de l'Industrie et du Commerce et de 50 p. c. de la part de l'Office canadien du poisson salé.

Si j'ai bien compris le ministre, l'entente qui sera conclue ne touchera aucunement la Gaspésie, puisque, je crois, cette région est assez bien pourvue au niveau du "marketing"; il y a plusieurs acheteurs. A ce moment-là, je crois que ça serait simplement perturber la situation économique des pêcheurs de venir, par l'office fédéral, qui est un organisme du gouvernement, créer des problèmes.

M. LEVESQUE : En effet, le député me permettra de rappeler que c'est justement dans son comté, en particulier, que l'on retrouve un des produits les plus connus mondialement dans le poisson salé. Dans Gaspé-Nord, Gaspé-Sud ce produit-là, qu'on appelle le "Gaspé cured" a un marché extrêmement ferme. C'est pour cette raison que j'ai mentionné que, pour le moment, il n'était pas question de couvrir cette région-là. Cela n'empêche pas que la loi nous permettra, sans doute, de couvrir plus de territoire si les circonstances le justifient.

M. GAGNON: Très bien, M. le Président. A ce moment-là, ça pourra peut-être faire l'objet de discussions au niveau des Pêcheurs unis ou des autres acheteurs. D'ailleurs, lorsque le ministre parle des produits de la pêche dans ma région, il est entendu que c'est merveilleux. Il n'y a pas plus que trois ou quatre jours, je crois, dans le comté de Matapédia, où le ministre s'était rendu avec M. Marchand, on avait parlé de créer un ministère de l'Emploi et M. Marchand avait assuré la région que les Forces armées auraient maintenant un repas de poisson par jour. A moins que ce soit un fameux poisson d'avril, car cette nouvelle, je précise, se situait le 1er avril.

Alors, M. le Président, il n'y a aucun doute que l'Opposition officielle se prononcera en faveur de ce projet de loi, à condition, tel que j'ai dit, qu'on accorde toute la protection possible aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord, que cela ne s'applique pas à la Gaspésie et que le ministère de l'Industrie et du Commerce prenne toutes ses responsabilités, de façon que cette loi soit la plus efficace possible et qu'elle bénéficie entièrement aux pêcheurs de cette région qu'on appelle la Basse-Côte-Nord, qui n'ont pas été avantagés. Cela permettra à ces pêcheurs de réaliser un revenu convenable qui pourrait être comparé à celui des pêcheurs des autres régions de la Gaspésie.

Je suis convaincu, M. le Président, que le ministre, lorsque la loi sera adoptée, s'empressera de conclure cette entente, de façon que les pêcheurs ne subissent pas de préjudice, au tout début d'une saison, par un retard de l'entente, mais qu'au contraire ils soient largement favorisés. Encore une fois, l'Opposition officielle se prononcera en faveur du projet de loi.

M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Mégantic.

M. Bernard Dumont

M. DUMONT: Merci, M. le Président. Nous avons eu l'occasion, lorsque le bill C-175 a été adopté par le fédéral, de voir des protestations assez énergiques, faites par ceux qui veulent toujours que la libre entreprise continue à aller de l'avant, à l'effet que le gouvernement s'emparait, à ce moment-là, du commerce du poisson. Nous avons aussi constaté qu'immédiatement après l'adoption de ce bill C-175 il a fallu, à cause des surplus accumulés, que le gouvernement s'empresse d'expédier, de donner des cargaisons de poisson, de morues salées au Biafra, au Nigéria, pour nourrir cette population. Il semblait y avoir déjà des surplus accumulés qui risquaient d'apporter au gouvernement central des problèmes assez graves d'entreposage, puisque le gouvernement s'était substitué à l'entreprise privée.

Il reste, tout de même, que, dans le projet de loi qui amende celui du fédéral, qui nous est proposé, le bill 14, Loi favorisant la commercialisation du poisson, nous avons quelques questions à nous poser. J'aimerais bien que le ministre de l'Industrie et du Commerce en prenne note pour être capable de nous donner une réponse. D'abord, nous aurions aimé, ici dans la province de Québec, qu'on dise que ces droits de pêche appartiennent à la province, avant de dire que tels navires ont le droit de se rendre jusqu'à tel endroit ou n'ont pas le droit de s'y rendre, discussion qui eu lieu dernièrement entre le gouvernement fédéral et le gouvernement français concernant les îles Saint-Pierre et Miquelon.

Apparemment, les navires français entrent trop loin dans le golfe Saint-Laurent et risquent, par des navires assez bien équipés, de nuire à ceux qui ont des navires à peu près semblables ou qui n'ont pas une pêche aussi rentable et aussi bien organisée, depuis nombre d'années. Cela leur permettrait au moins de vivre.

Alors, ces droits, dans le golfe Saint-Laurent, ne sont pas encore établis. On semble accepter d'emblée que le bill fédéral C-175 et le bill 14 vont apporter la solution à tous les problèmes de pêche commercialisée du poisson salé dans le golfe Saint-Laurent ou les environs des côtes de la Gaspésie.

Eh bien, je sais que le gouvernement fédéral, actuellement, avec des subventions assez élevées, fait construire par la Columbia Fish, qui vient pêcher dans les eaux du golfe Saint-Laurent, quatre navires au lieu de les faire construire dans la province de Québec. Je ne peux pas blâmer le gouvernement du Québec car il n'est au pouvoir que depuis un an. Notre administration aurait dû prévoir que les bateaux qui viennent dans le golfe Saint-Laurent soient construits dans la province de Québec. Nous avons des chantiers maritimes qui peuvent le faire. Quand le gouvernement fédéral octroie à Columbia Fish des montants extraordinaires pour venir, par la suite, chercher le poisson dans le golfe Saint-Laurent alors que ces droits de pêche ne sont pas encore établis, je dis qu'il y a empiétement, de la part du fédéral. Il y a là encore un danger de laisser aller nos droits à cause du manque d'intiative ou du manque d'esprit de créativité, comme nous l'avons déjà exprimé dans cette Chambre, de certains de nos administrateurs, qui trop de fois oublient que le Québec a des droits à exprimer et qu'envers et contre tous nous devons d'abord nous affirmer pour être capables de pouvoir au moins récolter, en faveur des Québécois, les richesses dont nous sommes propriétaires.

Si le bill 14 comme le bill C-175 est adopté, le gouvernement québécois ne semble pas avoir le choix; il n'a que le choix de dire: Nous couvrirons le déficit, parce que le fédéral n'est qu'engagé à 5 p. c. du montant de $100,000. Alors quel sera ce déficit?

M. LAFONTAINE: M. le Président... M. DUMONT: Quel sera le montant?

M. LAFONTAINE: ... est-ce que je peux attirer votre attention, avec la permission du député, simplement parce que nous n'avons pas quorum en Chambre?

UNE VOIX: Pas encore!

M. LAFONTAINE: Malgré les 72 députés libéraux!

M. LE PRESIDENT (Leduc): On peut compter. Trente.

M. LAFONTAINE: Vous êtes président, monsieur.

M.PAUL: II y en a un de sorti, M. le Président, donc 29.

UNE VOIX: II y en a un là. M. PAUL : II n'est pas assis.

M. LE PRESIDENNT (Leduc): L'honorable député de Mégantic.

M. DUMONT: M. le Président, ce droit, à mon sens, devrait, avec les autorités centrales, être d'abord défini pour conserver nos richesses. J'ai ici, du professeur François Loriot, une conférence qu'il a faite récemment. Le professeur Loriot est docteur en droit public et il parlait justement de la compétence québécoise dans le golfe Saint-Laurent. Il disait textuellement: "La juridiction québécoise ne s'arrête pas sur son littoral à la ligne de basse marée. Le plateau continental appartenant au Québec s'étend bien au-delà de trois milles des côtes et rejoint les Iles-de-la-Madeleine. Par un accord de 1964 avec les autres provinces maritimes, le

Québec a consenti au partage du plateau continental du golfe. L'on y a découvert les lignes frontalières du Québec sur cette surface et divers permis d'exploration ont déjà été accordés au Québec." — M. le Président, je dis qu'avec le — projet de loi numéro 14, Loi favorisant la commercialisation du poisson, nous n'avons pas encore ces droits établis et que nous commençons à l'envers du bon sens. Nous aurions dû d'abord, avant de présenter ce projet de loi, négocier avec Ottawa ce droit prioritaire qui appartient aux Québécois, à savoir qu'à partir de tel endroit, ce sont des richesses québécoises. Nous n'aurions peut-être pas à accepter ce bill 14, qui sera adopté parce que le gouvernement a 72 députés, mais nous aurions peut-être par cela permis immédiatement de dire: Puisque vous venez chercher du poisson dans les eaux québécoises, nous n'avons pas de déficit à payer puisque ce sont nos richesses.

C'est en regard de cela, M. le Président, que je dis qu'encore une fois ce bill, sans nous avoir été annoncé préalablement — hier soir, du moins, nous aurions pu nous préparer cette nuit — arrive encore à la dernière minute et un peu vite. Nous aurions eu beaucoup d'arguments à apporter. Nous aurions eu l'intention de demander le renvoi de ce projet de loi à trois mois afin que les personnes intéressées, afin que les petits propriétaires sachent les implications, viennent nous donner leur point de vue et qu'encore une fois, ce ne soit pas Québec qui soit obligé de payer pour ces initiatives tel que le bill C-175 qui, à mon sens, a permis de favoriser Columbia Fish qui vient chercher notre poisson dans le golfe Saint-Laurent.

J'aimerais aussi, M. le Président, savoir du ministre...

M. LEVESQUE: Le député me permettrait-il une question à ce moment-Ici?

M. DUMONT: Certainement.

M. LEVESQUE: Le député, premièrement, a-t-il, dans ses remarques, tenu compte de l'article 91 de la Constitution, particulièrement au paragraphe 12...

M. PAUL: Douze. C'est cela.

M. LEVESQUE: ... qui accorde, dans les pouvoirs du Parlement, comme juridiction fédérale, les pêches côtières et intérieures?

M. DUMONT: M. le Président, je pense que c'est une très bonne question. Ce sera peut-être un peu long à y répondre. Mais j'ai l'habitude, souvent, de consulter les autorités en la matière, parce que je ne me qualifie pas d'autorité, et j'aime bien prendre connaissance, surtout, des articles que nous pouvons avoir ici, à cette Assemblée nationale, ou au Parlement canadien pour déterminer quels sont les droits des

Canadiens et quels sont les droits des Québécois. A la suite de la question du ministre de l'Industrie et du Commerce, je me sens obligé de lire l'article de Me François Loriot, docteur en droit public, qui détermine exactement quels sont les droits des Québécois.

Il dit justement, à propos de l'article 90 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, la réglementation des pêches du fédéral: "Mais cela doit s'interpréter restrictivement puisqu'il s'agit d'une atteinte au droit de propriété de la couronne provinciale, comme dans le cas..." Et là, il cite l'exemple des loups marins où le ministre des Pêches du fédéral s'approprie ce droit, qui est plutôt un droit de chasse. Dans cette détermination, il y a à établir des droits de chasse qui appartiennent, comme pour le phoque, aux Québécois. La même chose, à mon sens, devrait exister pour la pêche.

Justement, le professeur Loriot, docteur en droit public, continue en disant: "Le gouvernement d'Ottawa n'a pas encore acquiescé au partage du golfe Saint-Laurent convenu entre les provinces en 1964." Il n'a pas, M. le Président, entériné cet accord, cette entente. On laisse aller au gré des vagues, au gré du vent, va comme c'est mené! C'est là que Québec, petit à petit, prend ses droits et qu'un bon matin, on accuse le gros méchant loup du fédéral de s'accaparer toutes nos valeurs, ce qui provoque des explosions de colère d'aucuns, parce qu'ils n'ont pas fouillé plus loin pour que, d'abord, par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, nous prenions connaissance des droits qui nous sont accordés.

Le professeur Loriot continue en disant: "II semble que des raisons politiques expliquent ce refus, le fédéral désirant garder pour lui seul ce territoire et les ressources qui s'y trouvent. Les provinces Maritimes et le Québec maintiennent cependant leurs prétentions sur cette surface, si l'on en juge par les concessions d'exploration exclusive que chacune a accordées dans son propre secteur."

Justement, aux Iles-de-la-Madeleine, Québec —le premier ministre l'a déclaré en cette Chambre — a permis l'exploration au point de vue de la recherche du pétrole. Si on le fait pour le pétrole, pourquoi ne pas le faire pour la pêche?

Pourquoi, quand on nous présente le bill 14, Loi favorisant la commercialisation du poisson ne pas permettre aussi d'établir, avant d'accepter ce projet de loi, la ligne de démarcation entre les pouvoirs qui appartiennent au fédéral et ceux qui appartiennent au Québec?

Alors, je dis...

M. LEVESQUE: M. le Président, je dois invoquer le règlement. Premièrement, le député —il le sait fort bien — est hors d'ordre. Le principe...

M. DUMONT: Je réponds à la question que vous m'avez posée.

M. LEVESQUE: ... du bill regarde la commercialisation du poisson, ça ne touche que la mise en marché du poisson, ça n'a aucune affaire avec l'industrie primaire, la récolte du poisson, ni avec la pêche comme telle. Il n'est question à ce moment-ci, dans le bill, si on le relit, qu'à la commercialisation du poisson, la mise en marché du poisson.

Deuxièmement, M. le Président, je crois que le député, dans la réponse à la question que je lui ai posée, ne tient pas du tout compte de la loi constituante, c'est-à-dire de la constitution canadienne, de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique qui établit clairement la juridiction du fédéral. Il ne se rappelle pas non plus les arrangements pris entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec précisant que le gouvernement du Québec a accepté l'administration des pêcheries et non pas le pouvoir de légiférer comme tel qui est un pouvoir fédéral.

Alors, je ne sais pas à quoi le député veut en venir. La seule chose que nous demandons par cette loi, c'est le pouvoir de faire une entente avec l'Office du poisson salé quant à la commercialisation d'un certain produit qui aide une certaine population qui se trouve dans le comté de Duplessis, dans la Basse-Côte-Nord. C'est tout ce que nous demandons par le bill. Il n'est pas question de savoir la juridiction des eaux, quels navires pourront côtoyer, ou naviguer à tel ou tel endroit dans le golfe, dans les eaux territoriales ou en dehors des eaux territoriales, etc. Ce n'est pas ça du tout qui fait l'objet du présent bill. D'ailleurs, le député de Gaspé-Nord l'a très bien compris, et j'espère que le député de Mégantic reviendra au sujet en question, malgré que je doive dire, M. le Président, que son exposé était assez intéressant, mais il n'est pas dans le sujet. Nous ne demandons pas du tout ça dans le bill.

M. LE PRESIDENT (Leduc): J'ai bien l'impression que le député de Mégantic qui connaît bien ses règlements, va se souvenir de l'article 556 de notre règlement et va revenir à l'à-propos du bill en deuxième lecture.

M. DUMONT: M. le Président, je voulais tout simplement souligner que...

M. PAUL: M. le Président, j'invoque le règlement. Durant la période des questions, j'ai entendu de mon siège, une déclaration fort à point du député de Taillon voulant que l'on devait respecter le règlement de cette Chambre et comme je sais que le président actuel est soucieux du respect intégral de nos règlements, je regrette de vous signaler que nous n'avons pas quorum.

M. LE PRESIDENT (Taillon): Alors, soucieux de ne pas avoir le quorum, je vais d'abord compter les députés.

M. LEVESQUE: M. le Président, il y en a derrière vous.

M. LE PRESIDENT (Taillon): Qu'on appelle les députés. Je suspends la séance à loisir. A l'ordre! L'honorable député de Mégantic.

M. DUMONT: Merci, M. le Président. Ce que j'allais répondre aux propos du ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est que si nous voulons avoir du poisson à préparer, si nous voulons avoir du poisson salé à vendre, nous devons aussi considérer qu'il y a de l'eau dans le golfe et qu'il y a des lignes de démarcation qui appartiennent... Tout comme avec son collègue du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche qui... Une fois en eau douce, on est obligé de faire le partage. Le même partage à mon sens doit exister entre le fédéral et le Québec. Et si on ne tient pas compte de cet état de choses ou si le ministre de l'Industrie et du Commerce devient nerveux, c'est parce que, justement, c'est quelque chose qui semble donner de l'information au public et cela semble un peu le chatouiller.

Il reste quand même qu'il y a, je crois, dans les énoncés que nous donnons et surtout dans la continuation, parce que je n'avais pas fini de répondre à la question du ministre de l'Industrie et du Commerce qui m'a demandé si j'étais au courant que les droits des Québécois avaient été entérinés en vertu de tel accord.

C'est bref; je ne lirai pas tout ce qui est là pour ne pas importuner cette Chambre. Comme, lorsqu'on permet une question, il est normal que nous donnions la réponse, M. le Président, j'espère que vous me permettrez de lire ce bref passage qui donne une très bonne réponse au ministre de l'Industrie et du Commerce.

C'est le professeur Loriot que je cite toujours: "D'autre part, un récent jugement de la Cour internationale de justice de La Haye, en 1969 — c'est tout récent — a complètement démoli les arguments de la cour Suprême du Canada lorsqu'il expliqua que le droit de propriété sur le plateau continental est un droit de facto et ab initio, résultant de la qualité de souverain sur le domaine adjacent." Il y a longtemps que nous, du Ralliement créditiste, disons que le domaine "imminent" appartient aux provinces. C'est écrit clairement, et c'est pourquoi je tiens à le citer. "Or, au Canada, le souverain sur le domaine et les terres publiques n'est pas le gouvernement fédéral, mais chacune des provinces maritimes." C'est une des raisons pour lesquelles il faut établir une ligne de démarcation. Si nous sommes obligés de payer le déficit, si le ministre de l'Industrie et du Commerce veut un chèque en blanc pour couvrir le déficit prévu dans le bill C-175, il faut savoir quelles sont les richesses québécoises et quelles sont les richesses qui appartiennent au fédéral. Si cela appartient au fédéral, automatiquement on n'aura rien à dire, mais si les bateaux de la Columbia Fish, subventionnés par le fédéral, viennent pêcher dans les eaux québécoises, à ce moment-là, on enverra la note au fédéral.

Les $20,000 ou les $50,000 de déficit qui peuvent exister, selon ce bill 14, on n'aura pas besoin d'en payer les frais. C'est maintenant, c'est ici en cette Chambre qu'il faut prendre position et dire au gouvernement fédéral que nous ne voulons pas accepter ce déficit car on vient chercher le poisson québécois.

M. LACROIX: Le député de Mégantic me permettrait-il une question?

M. DUMONT: Certainement.

M. LACROIX: Quand nos bateaux, par exemple, qu'ils soient de la Gaspésie, des Iles-de-la-Madeleine ou de la Basse-Côte-Nord, vont pêcher en dehors des limites territoriales de la province de Québec, quand ils vont pêcher aux alentours de l'Ile-du Prince-Edouard, de la Nouvelle-Ecosse ou de Terreneuve, qu'est-ce qui leur arriverait?

Savez-vous que l'on va chercher une partie importante des produits qui sont traités dans nos usines, à ces endroits-là?

M. DUMONT: Est-ce une question ou un commentaire?

M. LACROIX: Je vous pose la question: Qu'est-ce qui arriverait à nos chalutiers, à ce moment-là?

M. DUMONT: M. le Président, la question étant posée, je me permets de répondre que le gouvernement fédéral vient justement de légiférer pour accroître l'étendue, sur le littoral québécois, où on n'a pas le droit d'aller, pour les étrangers du moins, à 12 milles des côtes québécoises, et canadiennes, par le fait même. Donc, ce problème est réglé.

Je veux souligner que même à Gaspé-Nord, quand des importuns viennent pêcher, il y a des gens qui se sont permis de se servir de leur fusil. Le fédéral a été obligé d'ordonner une enquête afin de savoir qui était venu empiéter sur les droits des Québécois. Je sais qu'il y a des Gaspésiens qui sont décidés à ce point d'empêcher que nos richesses naturelles qui permettraient cette commercialisation du poisson aillent à d'autres personnes.

M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. DUMONT: Ces autres personnes sont du fédéral...

M. LEVESQUE: Je ne veux pas être désagréable, mais je suis obligé d'invoquer le règlement, parce que, premièrement, le député fait une dissertation sur quelque chose qui est complètement en dehors du sujet.

M. DUMONT: M. le Président, j'ai simplement répondu à la question du député des Iles-de-la-Madeleine.

M. LEVESQUE: Je comprends; qu'on me laisse exposer mon point. Etant complètement en dehors du sujet, le député cite un article, ou je ne sais quoi, qui traite des droits sous-marins, de l'appartenance des terrains sous les eaux. Ils appartiennent aux provinces. Ici, il s'agit de pêcheries; ce n'est pas le plateau continental, ce n'est pas du tout la même chose. Lorsque l'on parle du plateau continental, on parle de ce qui peut avoir rapport au sous-sol soit minier ou pétrolier.

On ne parle pas de cela du tout. On parle des pêcheries, on parle des poissons. Si on réfère à la constitution, il est clair que c'est de juridiction fédérale, que nous l'aimions ou pas, en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Si on veut parler du plateau continental, des droits sous-marins, des droits miniers sous les eaux, si on veut parler des droits d'exploration pour du pétrole, etc., on parle d'autre chose à ce moment-là. Ce n'est pas du tout ici que devrait s'inscrire cette intéressante intervention du député de Mégantic. Je lui suggère de garder cette intervention, qui peut avoir son mérite, pour une autre occasion pendant cette session, occasion qui lui sera sans doute fournie. Mais, ici, tout ce que je demande dans cette loi, c'est de permettre la commercialisation du poisson, de conclure une entente avec le gouvernement fédéral pour assurer un meilleur prix pour le poisson des gens de la Basse-Côte-Nord. Cela n'a aucune affaire avec la pêche primaire. Cela a encore bien moins d'affaires avec le plateau continental et la discussion qu'il y a eu entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces, quant à la juridiction sur ce plateau continental.

M. DUMONT: M. le Président, le ministre de l'Industrie et du Commerce, vu sans doute ses nombreuses occupations en plus d'être ministre, leader parlementaire, — depuis quelques jours, il sait que ce n'est pas un cadeau — est obligé d'admettre avec moi et d'admettre avec cette Chambre — comme il ne se rend plus tellement souvent dans son beau comté — qu'il ne se rend pas compte qu'il y a marée haute et qu'il y a marée basse. Quand c'est la marée haute, on vient certainement à des endroits où c'est un territoire québécois. H l'oublie. Je comprends qu'il ne va pas souvent dans son comté, mais comme il n'a pas assez d'information...

M. LEVESQUE: J'invite le député de Mégantic à venir au ministère et on va certainement le renseigner, et comme c'est un homme intelligent, il va comprendre.

M. DUMONT: D'ailleurs, j'ai ici un article, M. le Président, que je ferai parvenir...

M. LACROIX: ...Donc vous avez des hauts et des bas dans votre intervention.

M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre! A

l'ordre! Je pense qu'on peut accepter que c'est le député de Mégantic qui a actuellement la parole.

M. LACROIX: II est hors d'ordre complètement...

M. LEVESQUE: II est hors d'ordre complètement. Cela fait deux fois que j'invoque le règlement...

M. DUMONT: Vous savez, M. le Président, si le député des Iles-de-la-Madeleine me posait des questions dans l'ordre, je répondrais dans l'ordre. Il est toujours à côté de sa coche. Alors, je suis obligé de répondre à côté, comme il m'a posé la question.

Ce que je voulais préciser, c'est qu'on n'éternisera pas la discussion, mais je ferai parvenir au ministre de l'Industrie et du Commerce toute cette communication qui va lui permettre de voir que, encore une fois...

M. LEVESQUE: Merci.

M. DUMONT: ... on commence à l'envers du bon sens, parce qu'il y a des droits de pêche qui appartiennent aux Québécois et qui ne sont pas déterminés. Ma question est donc d'abord de savoir quelle est la part du Québec, argent parlant, quel montant la province de Québec a été obligée de payer à Columbia Fish pour construire les quatre navires qui vont venir chercher le poisson dans le golfe Saint-Laurent et qui vont être en rapport direct avec ce bill 14, qui est une loi favorisant, comme on demande, la commercialisation du poisson. M. le Président, nous avons besoin de savoir et d'avoir cette indication, car ces quatre chalutiers qui seront construits dans l'ouest canadien vont probablement favoriser un gouvernement créditiste et après, on viendra dire que nous, les créditistes, n'avons pas raison. Pour une fois, on voudrait que cela favorise le gouvernement québécois et je dis qu'avant d'adopter ce bill 14, nous devrions demander au fédéral de savoir quelles sommes les Québécois ont payées pour pouvoir donner une subvention à la construction de ces navires qui auraient dû être construits au Québec. Je pose encore la question au ministre: Quelle somme a obtenue Columbia Fish qui pêche actuellement dans le golfe Saint-Laurent? Quelle est la somme que le gouvernement québécois a accordée en subventions pour être capable de dire que ces droits appartiennent au fédéral, quand ils appartiennent aux Québécois?

M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, il me semble qu'une loi favorisant la commercialisation du poisson pourrait nous permettre de pouvoir parler de pêche. Avant de pouvoir commercialiser le poisson, il faut pouvoir le pêcher. Actuellement, personnellement du moins, je m'associe aux commentaires du député de Mégantic pour constater qu'il y a chez nous au Québec un problème de pêche. Prenons simplement un exemple: La B.C. Packers, par exemple, avait obtenu $500,000 de subventions du gouvernement provincial — je crois que c'est du ministère de l'Industrie et du Commerce — pour venir pêcher dans nos eaux. Il s'agit essentiellement ici d'une loi qui veut permettre à une partie de la Côte-Nord, en particulier la Basse-Côte-Nord, de pouvoir vendre son poisson.

Je constate que le député de Duplessis n'est pas ici; c'est un problème qui le concernait de façon très particulière. J'ai donc eu l'occasion de visiter la Basse-Côte-Nord et de constater que la pêche était dans cette région une activité fort artisanale et non permanente. C'est-à-dire que les gens n'avaient pas la possibilité, à cause de l'éloignement des grands centres ou des coopératives de pêche telles que la Coopérative des pêcheurs unis, de trouver un marché pour leur poisson. Cela voulait dire que ces gens faisaient de la pêche d'une façon temporaire. Ils devaient pêcher tout simplement pour trouver des revenus complémentaires lorsqu'ils étaient en chômage et qu'ils ne pouvaient pas faire d'autre travail.

C'est d'ailleurs un peu ce qui explique pourquoi le gouvernement québécois a certains problèmes dans cette région, pourquoi il a été impossible d'organiser, comme me l'expliquait le sous-ministre des Pêcheries, de véritables coopératives de pêche pour permettre à ces gens de trouver des marchés, avec la conséquence que la pêche était devenue un domaine limité à une catégorie de gens qui avançaient en âge et qui ne pouvaient pas trouver l'initiative, la possibilité de s'organiser pour faire une véritable pêche commerciale. Avec la conséquence aussi que les jeunes de cette région se désintéressent de plus en plus de ce domaine, de cette activité économique.

Aujourd'hui, devant ces conséquences, devant ces faits qui sont réels, qui existent, on ne peut pas créer des problèmes de juridiction provinciale ou fédérale avec des gens qui n'attendent que de trouver un marché pour leur poisson, ce qui leur permettrait de vivre tout simplement. Ce n'est certainement pas ces gens de la Basse-Côte-Nord qui vont devoir payer pour les problèmes que nous amène un fédéralisme à l'intérieur duquel une de nos richesses essentielles appartient au gouvernement fédéral.

C'est pourquoi le gouvernement provincial est obligé, probablement devant le fait qu'il ne s'est jamais occupé de cette activité dans la Basse-Côte-Nord, de dire au gouvernement fédéral: Maintenant, venez nous sauver. Nous autres, Québécois, on n'a rien fait, on ne s'est pas occupé de la pêche dans la Basse-Côte-Nord. Il appartient alors au grand frère d'Ottawa de dire

encore une fois aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord: C'est encore le gouvernement fédéral qui vient à votre rescousse.

On est obligé aujourd'hui, devant les conséquences qui existent actuellement dans cette région, devant le problème urgent d'y réglementer une activité économique qui devient de moins en moins rentable, devant le problème de trouver un marché pour le poisson chez nous, on est obligé de dire: Bien, il faut accepter un projet de loi comme celui-là.

Mais on peut quand même s'interroger. Alors que partout dans d'autres pays on a réussi à faire de la pêche en haute mer une véritable pêche commerciale, une véritable pêche rentable, chez nous, au Québec, c'est tout simplement un domaine qui est laissé à l'artisanat parce qu'on est soumis à la concurrence de tous les pays étrangers qui viennent pêcher à l'intérieur de nos eaux. On sait que les pêcheurs de la Gaspésie, par exemple l'an dernier, ont dû se battre avec des fusils alors que le gouvernement finançait les activités...

M. LEVESQUE: Si le député me permet une question. Est-il sûr que ce sont des pêcheurs de la Gaspésie qui ont fait ça?

M. LESSARD: M. le Président, d'après les renseignements que l'on a, du moins, les gens qui se battaient devaient certainement être des gars qui étaient dans la pêche puisque l'un des problèmes qu'on soulevait entre autres pour B. C. Packers, était qu'on était en train de vider le bas-fond de la mer de ses poissons.

M. LEVESQUE: Est-ce que le député est sûr qu'il s'agit des pêcheurs gaspésiens?

M. LACROIX: Est-ce que les pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine doivent être considérés comme des étrangers?

M. LESSARD: Non, M. le Président. Voici, je ne parle pas des pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine. Je parle essentiellement d'une compagnie de Colombie-Britannique...

M. LACROIX: Les seigneurs de harengs! Je vous répondrai tantôt.

M. LESSARD: ... B.C. Packers, qui est venue chez nous pêcher sur notre territoire.

M. LEVESQUE: M. le Président, je demande au député de bien se renseigner avant de porter des accusations comme celles-là sur les pêcheurs gaspésiens. Il ferait mieux de vérifier le cas auquel il a fait référence et peut-être s'informer au député de Gaspé-Nord et à ceux qui sont sur place, avant de venir porter des accusations sur notre région.

M. LESSARD: M. le Président, je vérifierai certainement, j'ai d'ailleurs un dossier sur cette question. Il y a une chose qu'on peut dire, c'est que si, aujourd'hui, on est obligé.

M. LEVESQUE: Nous en avons un nous aussi, un dossier.

M. LESSARD: M. le Président, on est obligé aujourd'hui de discuter d'une loi qui est extrêmement importante, sans avoir tous les éléments nécessaires en main. On peut blâmer le gouvernement de vouloir jouer avec l'Opposition au chat et à la souris; il ne nous dit jamais ce qu'il va faire le lendemain. On ne sait jamais le travail parlementaire qu'on va faire.

M. LEVESQUE: Une question de privilège, M. le Président. Il y a déjà longtemps que ce projet de loi est déposé. Il a été annoncé qu'il serait appelé. Nous sommes rendus à vendredi après-midi; il n'y a aucun doute que des événements sur lesquels je ne veux pas insister ont bouleversé le programme, mais celui qui parle fait partie d'un groupement qui a été avisé à l'avance des intentions du gouvernement.

Alors, M. le Président, je ne voudrais pas qu'on insiste trop sur ce point-là.

M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Mégantic, sur un rappel au règlement.

M. DUMONT: M. le Président, je m'étais préparé en conséquence moi aussi pour étudier aujourd'hui le bill 22, mais on est arrivé avec le bill 14. C'est ce que le député de Saguenay a souligné. Hier soir, nous n'avons pas été avisés que ce serait le bill 14. Nous espérons, pour l'avenir, qu'au moins la veille le gouvernement nous annoncera pour le lendemain quel bill nous étudierons. Dans les fins de semaine, dans nos soirées, comme le ministre de l'Industrie et du Commerce le fait, nous serons en mesure de bien nous préparer.

M. LEVESQUE : Le gouvernement est toujours prêt à manifester une excellente collaboration; mais il y a chez nous une obligation additionnelle, c'est celle d'administrer la province, et nous le faisons par le truchement de plus d'une vingtaine de ministères. H y a, à la tête de ces ministères, des gens vers lesquels je dois me tourner, pour m'assurer qu'ils sont libres, eux et leurs fonctionnaires, pour discuter dans cette Chambre un projet de loi.

Or, si je ne peux pas avoir de l'Opposition cette collaboration essentielle à une saine planification, qu'on ne vienne pas surtout à ce moment-ci nous faire des reproches. Nous avons manifesté je crois au maximum notre désir de collaborer et d'essayer d'aider l'Opposition à se bien préparer pour analyser, scruter chacun des gestes posés par le gouvernement, chacune des mesures que nous proposons à cette Chambre.

Par contre, nous ne pouvons pas et nous n'accepterons jamais d'être le jouet des humeurs de l'un ou de l'autre des partis de l'Opposition.

M. DUMONT: M. le Président, je trouve que le ministre de l'Industrie et du Commerce, probablement à cause des propos que j'ai tenus, est devenu un peu nerveux. Tout ce que je voulais souligner c'est que le leader du gouvernement devrait, quinze heures avant l'ouverture de cette Chambre, nous annoncer quel projet de loi va être étudié le lendemain.

M. LESSARD: Alors, je comprends, M. le Président, que des événements ont pu permettre certains changements dans la programmation. Mais, simplement, on peut faire la remarque que, depuis le début de la session, on ne peut pas dire que nous avons été informés des projets de loi. D'accord, on dépose une série de projets de loi. Mais, ce serait essentiel, si l'on veut que l'Opposition puisse faire son travail d'une façon efficace, que nous connaissions, quelques heures auparavant, les projets de loi que nous aurons à étudier.

Alors, je termine en disant que j'espère que cette loi permettra à une partie de la population de la Basse-Côte-Nord de développer cette activité économique et d'en faire une activité commerciale qui permettra à ces gens-là de vivre de la pêche, et non pas simplement de pourrir dans cette activité en attendant d'avoir un peu de travail. Nous espérons, lorsque les ententes seront conclues avec le gouvernement fédéral, pouvoir avoir toute la documentation nécessaire afin de voir si les intérêts de cette population seront véritablement protégés.

M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député des Iles-de-la-Madeleine.

M. Louis-Philippe Lacroix

M. LACROIX: M. le Président, je ne voudrais pas faire de longues remarques à propos du bill 14, loi qui va apporter du mieux-être aux pêcheurs, particulièrement à ceux de la Basse-Côte-Nord et qui permettra une commercialisation plus raisonnable des produits de la pêche, particulièrement des pêcheurs côtiers de ce district de la province de Québec.

Mais avant de passer à d'autres remarques, M. le Président, je voudrais relever certains propos qui ont été tenus par les députés de Mégantic et de Saguenay concernant les pêcheries commerciales du Québec, les pêcheries à l'intérieur du golfe. Je dirai que les députés de Mégantic et de Saguenay étaient certainement fort bien intentionnés, mais je dois reconnaître qu'ils connaissent fort mal ou fort peu les problèmes des pêcheries dans la région particulière du golfe Saint-Laurent.

Quand on parle, par exemple, de la compagnie B.C. Packers qui pêche dans les eaux du golfe Saint-Laurent, on semble oublier que cette compagnie exploite une usine de transformation du poisson à Sandy Beach, en Gaspésie, où on prépare le filet de hareng, où l'on prépare la farine de poisson et aussi l'huile de foie de morue. Lorsque l'on reproche, par exemple, à la compagnie B.C. Packers d'avoir bénéficié de subventions fédérales pour la construction de chalutiers d'aciers, de bateaux seineurs pour pêcher le hareng, on pourra faire le même reproche, si vous le voulez, à la compagnie Gorton, des Iles-de-la-Madeleine, qui fournit du travail, dans les meilleures conditions possibles, à la population des Iles-de-la-Madeleine.

L'on parle beaucoup des "stocks" de poissons, des pêches qu'on exploite peut-être un peu trop considérablement. Oui?

M. LAURIN: Est-ce que le député me permettrait de lui poser une question?

M. LACROIX: Certainement.

M. LAURIN: Est-il vrai, justement, que la compagnie B.C. Packers a l'intention de se retirer prochainement du genre d'activités que vous venez de mentionner?

M. LACROIX: II était question que la compagnie B.C. Packers ajoute à ses activités. Mais je ne voudrais pas m'aventurer sur un sujet que je ne connais pas tellement puisque la compagnie B.C. Packers possède une usine à Sandy Beach, endroit qui est tout de même assez loin de mon comté. Mais je sais que la compagnie Gorton a l'intention d'augmenter ses activités dans le golfe Saint-Laurent.

En parlant d'exploitation de nos fonds de pêche et particulièrement du hareng, je voudrais signaler, en passant, aux honorables membres de cette Chambre, que l'on parle de surexploitation de ces fonds, de cette qualité, de cette sorte de poisson.

Je voudrais mentionner, particulièrement pour toutes ces personnes qui ont, chaque printemps, beaucoup de peine pour les pauvres loups-marins que nous tuons dans notre région, que nous chassons pour pouvoir rapporter des revenus plus considérables à nos chasseurs et à nos pêcheurs. Tous les chalutiers, tous les bateaux seineurs qui opèrent dans le golfe Saint-Laurent capturent moins de harengs que les troupeaux de loups-marins n'en détruisent dans le cours de l'année.

Naturellement, j'aime bien ces belles petites "bibites" qui ont des yeux charmants, qui sont agréables à voir, mais je vous avouerai franchement que, comme représentant d'un comté de pêcheurs, d'un comté qui tire une partie de ses revenus de la chasse aux loups-marins par la vente de leurs fourrures, je préfère encore voir les fourrures de ces charmants animaux sur les épaules de nos belles épouses et de nos belles filles que de les voir dans le golfe à déprader nos ressources naturelles que sont les pêcheries.

D'un autre côté, M. le Président...

M. DUMONT: Le député me permettrait-il une question?

M. LACROIX: Certainement.

M. DUMONT: Justement, considérant que les droits de chasse appartiennent exclusivement aux Québécois, lorsqu'il en voit sur les épaules des Québécoises de l'autre côté de l'Outaouais, n'est-il pas un peu jaloux?

M. LACROIX: Je répondrai à l'honorable député de Mégantic que la chasse aux loups-marins relève de l'autorité du gouvernement fédéral.

UNE VOIX: C'est faux.

M. LACROIX: C'est l'exacte vérité. Dans le golfe Saint-Laurent, il y a un quota qui est fixé avec l'assentiment des deux gouvernements. Dans notre cas, il est fixé à 50,000 unités par année, excluant la chasse effectuée par les pêcheurs côtiers.

M. DUMONT: Un empiètement fédéral.

M. LACROIX: La surveillance est faite par le gouvernement fédéral. Depuis quelques années, en plus de cela, certaines personnes au coeur tendre, comme M. Davis, par exemple, de la Société protectrice des annimaux de Fréderic-ton, si ma mémoire est fidèle, et d'autres membres des sociétés protectrices des animaux s'inquiètent beaucoup du sort de nos loups-marins.

Il y en a même un qui a été assez imbécile pour venir aux Iles-de-la-Madeleine, dans une homarderie. Il voulait, parce qu'il trouvait cruel d'ébouillanter les homards, qu'on les assomme avec un revolver avant de les ébouillanter. Quand je vois des imbéciles de ce genre se promener chez nous et venir faire à la radio, à la télévision et dans les journaux des sorties inexactes concernant ce qui se passe autour de chez nous; je vous avouerai, M. le Président que cela me peine énormément et que cela peine également ceux que j'ai l'honneur de représenter.

Là-dessus, avant que vous ne me rappeliez à l'ordre, M. le Président, je reviendrai aux pêcheries et je vous dirai que les pêcheries, d'après l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, étaient de juridiction fédérale, même dans la province de Québec, où elles le sont encore en partie. Depuis 1922 seulement, le gouvernement du Québec a la responsabilité de l'administration des pêcheries commerciales sur son territoire.

J'en suis fort aise jusqu'à un certain point, mais je crois que nous y avons perdu pendant de nombreuses années et qu'encore à l'heure actuelle, nous ne bénéficions pas tellement du fait que les pêcheries commerciales au Québec soient la responsabilité du gouvernement provincial. En effet, nos moyens financiers ne nous permettaient pas, jusqu'à assez récemment, et ne nous permettent pas encore suffisamment, de pouvoir faire de la recherche dans le golfe pour voir si nos stocks de poissons sont surexploités, pour voir s'il n'y aurait pas d'autres catégories de poissons qui pourraient l'être avantageusement. Je pense qu'à l'heure actuelle, nous ne devons pas dédaigner la participation fédérale.

Quant à moi, il y a cinq ou six ans, j'ai eu le plaisir de recevoir chez moi, aux Iles-de-la-Madeleine, le ministre fédéral des Pêcheries. Je lui ai demandé, à ce moment-là, d'envoyer le bateau fédéral des recherches qui est attaché, je crois, à la base de Pictou, pour venir faire des recherches sur les pétoncles autour des Iles-de-la-Madeleine. Cela nous a permis de découvrir des bancs de pétoncles qui ont rapporté l'an passé plus de $800,000 aux pêcheurs et, l'année précédente, plus de $600,000. C'est une organisation pour la recherche que nous ne possédons pas encore au Québec.

J'espère que les crédits mis à la disposition de l'honorable ministre responsable des pêcheries commerciales lui permettront d'augmenter continuellement et progressivement les effectifs de notre gouvernement, de notre province pour pouvoir aider davantage les pêcheurs non seulement des Iles-de-la-Madeleine, mais de la Gaspésie et de la Côte-Nord.

Lorsqu'on parle des pêcheries dans le golfe Saint-Laurent, peut-on dire que les stocks de poisson sont la propriété exclusive du peuple québécois? Je crois que la population de l'Ile-du-Prince-Edouard, la population de la Nouvelle-Ecosse, la population de Terre-Neuve, qui bornent tout de même, le golfe Saint-Laurent, pourrait avoir les mêmes réclamations. Ceux qui connaissent la pêche qui se pratique dans le golfe savent qu'à peu près à cette période-ci de l'année nos pêcheurs doivent aller pêcher à l'extérieur du golfe parce que le poisson est une ressource toujours en mouvement. Par la suite, le poisson monte dans le golfe et dans l'estuaire du golfe Saint-Laurent et, naturellement, nos chalutiers le suivent.

Je pense que l'honorable député de Mégantic oublie que le gouvernement fédéral a adopté une loi qui établit les limites territoriales à douze milles du point le plus rapproché de terre, ce qui ferme le golfe aux pêcheurs étrangers. Cela a éliminé un très grand nombre de chalutiers étrangers qui venaient pêcher dans notre territoire, dans notre région et cela a été de nature à améliorer considérablement notre position en ce qui concerne les pêcheries.

De toute façon, M. le Président, nous ne pouvons qu'approuver les efforts conjugués des gouvernements fédéral et provincial, lorsqu'ils sont de nature à améliorer la situation financière de nos pêcheurs. Lorsque ces mesures permettent à nos pêcheurs de retirer un meilleur revenu de leur travail qui est excessivement difficile, excessivement dur et surtout très dangereux, lorsque les deux gouvernements s'accordent pour adopter des mesures qui ajoutent aux revenus de nos pêcheurs nous ne pouvons que nous en réjouir. Dans le cas présent, je crois que la facilité que cela donnera aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de disposer

de leur poisson salé est une excellente mesure. Je m'en réjouis pour eux et j'espère que, dans le développement des pêcheries aux Iles-de-la-Madeleine, dans un avenir peut-être pas trop éloigné, nous pourrons, nous également, bénéficier des avantages de cette législation.

M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: M. le Président, je ne veux pas intervenir longtemps dans le débat. Je n'avais, d'ailleurs, pas l'intention d'intervenir, mais ce sont les remarques du député des Iles-de-la-Madeleine qui m'incitent à faire quelques remarques additionnelles.

Lorsque le député des Iles-de-la-Madeleine vante l'assistance que le gouvernement fédéral peut apporter à nos pêcheries, surtout au titre de la recherche, cela me fait marrer un peu doucement. Car une des raisons précises de notre faiblesse dans le domaine des pêcheries, c'est que, précisément — là, je suis bien d'accord avec lui — nos services de recherche ne sont pas encore suffisamment développés et, surtout, qu'ils se sont développés beaucoup trop tardivement. Je reconnais que le député a rempli son devoir, l'an dernier ou il y a deux ans, en demandant aux autorités du ministère fédéral des Pêcheries d'effectuer des recherches sur les bancs de pétoncles qui entourent les Iles-de-la-Madeleine.

Mais, à mon avis, il aurait été beaucoup plus dans l'esprit d'un fédéralisme rentable et respectueux de toutes les parties constitutives du Canada de ne pas attendre la demande du député des Iles-de-la-Madeleine. Je crois qu'il aurait été de la responsabilité du gouvernement fédéral de distribuer d'une façon équitable et d'une façon rapide les crédits dont il dispose pour l'amélioration de notre parc ichtyologi-que.

M. LACROIX: Me permettriez-vous seulement une remarque? Vous semblez oublier que, depuis 1922, la responsabilité des pêcheries commerciales au Québec relève exclusivement du gouvernement provincial à l'exception du service de l'inspection. Lors de l'expédition de nos produits à l'extérieur du pays, le gouvernement fédéral voit à l'inspection des produits de la pêche pour pouvoir les envoyer sur le marché de l'exportation, mais la responsabilité des pêcheries relève de l'administration de la province de Québec.

M. LAURIN: II reste que dans le domaine dont vous parliez, la juridiction fédérale est bien claire. D'ailleurs, dans ce domaine de la recherche en biologie marine, nous voyons la même situation que dans tous les autres domaines où la recherche est intéressée. Je pense bien que vous serez obligé d'admettre avec moi que dans ce domaine de la recherche en biologie marine, comme dans tous les autres, le Québec n'a pas été particulièrement gâté par les autorités fédérales. Il me semble que si cette responsabilité avait été assumée...

M. LACROIX: Je ne voudrais pas embêter l'honorable député de Bourget, mais avec sa permission je voudrais lui signaler...

M. LAURIN: Oui.

M. LACROIX: ...qu'au point de vue de la recherche, par exemple, le gouvernement de l'Union Nationale par la voix du ministre responsable alors, avait fait appel à la Commission de la fonction publique, par voie de concours, pour obtenir les services d'une personne responsable de la recherche pour le district de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine. Personne n'a répondu malgré le salaire fort alléchant offert. Il n'y avait personne de langue française.

A ce moment-là, si ma mémoire est fidèle, c'est l'ancien député de Maisonneuve, M. Beau-dry, qui était le ministre responsable des pêcheries. Je lui avais dit: Quant à nous, aux Iles-de-la-Madeleine, que cet homme compétent, que l'on désire pour effectuer des travaux de recherches, soit chinois, japonais, nègre ou russe, cela ne nous fait rien en autant qu'il travaillera dans le domaine de la recherche. Je veux, par là, vous faire comprendre que c'est extrêmement difficile de trouver des personnes qui ont la compétence voulue et qui veulent venir dans notre milieu participer à ces travaux de recherche. Je m'excuse d'avoir interrompu votre discours.

M. LAURIN: Je voudrais vous répondre par une autre question. Pourriez-vous me dire si l'Office de biologie marine de Grande-Rivière existe encore?

M. LACROIX: Oui, il existe encore mais il a beaucoup de travail à faire, le territoire de pêcherie du Québec étant très vaste.

M. LAURIN: De toute façon, qu'il s'agisse d'une insuffisance provinciale, en ce qui concerne le passé ou même à l'heure actuelle, ou qu'il s'agisse du retard du gouvernement fédéral à assumer ses responsabilités en ce qui concerne la recherche marine, nous sommes devant la même difficulté, c'est-à-dire des résultats, au point de vue de la production, au point de vue de la commercialisation, qui ne sont pas à l'honneur du Québec, surtout quand on les compare avec les résultats des provinces maritimes où la production, en ce qui concerne ce domaine particulier de l'activité industrielle, a connu un développement considérable au cours des dernières années.

Un bon jour, il faudra se rendre compte des raisons qui motivent, qui expliquent ce retard

que nous avons pris. J'espère que le diagnostic que l'on posera à ce moment-là incitera le gouvernement du Québec à prendre toutes les mesures qui s'imposent pour combler ce retard le plus tôt possible. L'un des moyens sera précisément l'accent mis sur la recherche. D'autres moyens seront les pressions que votre gouvernement exercera sur le gouvernement "senior" d'Ottawa pour qu'il accorde au Québec toute la part à laquelle il a droit, d'abord; et, deuxièmement, toute la part qu'un rattrapage rationnel lui imposerait pour corriger cette situation au plus tôt.

Vous avez aussi, tout à l'heure, parlé de la chasse aux phoques. Là aussi, je suis bien d'accord pour dire que la juridiction fédérale est incontestable. Il reste quand même 'que votre gouvernement pourrait également faire pression pour que les méthodes que l'on emploie actuellement pour occire ces petits animaux, qui donnent une fourrure dont les Québécoises aiment se parer, pourraient quand même s'améliorer de façon à être humanisées. Même si ce n'est pas la juridiction du gouvernement, il reste cependant que votre gouvernement peut faire des recommandations afin que l'on améliore, dans le sens d'une plus grande humanité, une chasse que je continue, comme vous, à croire nécessaire.

M. LACROIX: On prendra des anesthésistes. M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté toutes les opinions émises, à l'occasion de l'étude du projet de loi qui nous est soumis par le ministre de l'Industrie et du Commerce. Il s'agit de s'arrêter, M. le Président, pour connaître le principe de la loi à l'étude. Il s'agit d'adopter une loi qui permettra un écoulement plus facile, en faveur des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord, de leurs produits. Il arrive que nous avons entendu beaucoup de remarques sur le commerce du poisson commercial, sur les recherches que l'on devrait faire, sur la construction des navires de pêche, voilà autant d'arguments qui seront sans doute répétés en temps opportun, soit à l'occasion des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce.

C'est pourquoi j'ai bien l'intention de m'en tenir strictement au principe du projet de loi à l'étude. Cependant, je suis à me demander pour quelle raison le gouvernement fédéral, qui doit voir à secourir aussi équitablement que possible les secteurs qu'il veut viser par une législation, ne s'est pas préoccupé, à l'époque, d'inclure, comme juridiction accordée à la Commission industrielle des poissons salés, après consultation avec les provinces, ce territoire compris dans la Basse-Côte-Nord.

C'est une loi qui a été adoptée par le fédéral pour venir en aide, exclusivement dans le principe de cette loi, aux pêcheurs de Terre-

Neuve. Je ne critique pas cette loi d'initiative fédérale. Mais je me demande pourquoi, depuis cette date, le gouvernement en place, le ministre de l'Industrie et du Commerce n'est pas intervenu aux fins que le gouvernement fédéral apporte des modifications à sa propre loi. Du même coup, les dépenses inhérentes à la mise en application de cette loi seraient retombées sur le fisc du fédéral et ne viendraient pas grever le budget provincial.

Cette politique, cette incitation aurait dû être faite par les autorités du ministère de l'Industrie et du Commerce ou par le canal autorisé en vertu de notre constitution interne du Québec, le ministère des Affaires intergouvernementales.

Le gouvernement du Québec se trouve, en quelque sorte, poussé devant une situation qui devient immorale, si nous la laissons pourrir davantage, à l'endroit des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Pourquoi? Parce qu'ils se trouvent à entrer en concurrence avec les pêcheurs de Terre-Neuve qui reçoivent pour leur pêche des prix qu'eux-mêmes ne peuvent pas retirer, ce qui fait qu'à proximité de Terre-Neuve, nous voyons des citoyens canadiens traités différemment, les uns peut-être parce qu'ils sont habitants d'une province anglaise, et d'un autre côté, les autres parce qu'ils sont d'une province française.

Je ne prêterai pas ces intentions au gouvernement fédéral, mais la situation existe, en fait. C'est pourquoi le gouvernement provincial — c'était le moindre acte de décence, c'était un obligation morale — se devait d'aider ces pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Nous aurions aimé entendre, aujourd'hui, le député de Duplessis qui, vivant dans le milieu — je regrette son absence à l'occasion de l'étude de ce projet de loi — connaissant le problème du milieu, aurait été en mesure de nous l'exposer encore avec plus de détails, parce qu'il vit l'expérience de ses commettants de la Basse-Côte-Nord.

Il nous aurait donné des raisons qui nous pressent, nous, du Québec, d'intervenir, peut-être un peu tard, dans une situation que l'on ne peut pas laisser dépérir davantage. Il y a un problème qui me chatouille quelque peu. C'est qu'en analysant l'Acte de l'Amérique du Nord britannique nous voyons qu'en vertu de l'article 91 il est bien spécifié, au paragraphe 12, que le gouvernement fédéral a juridiction sur les pêcheries côtières et intérieures. D'où cette législation présentée en février 1970 par le gouvernement fédéral, le bill C-175, Commission industrielle des poissons salés.

Mais, ce n'est pas cet aspect que je voudrais soulever, à ce moment-ci, même si, depuis 1922, la province de Québec a liberté d'action dans la commercialisation du poisson. Je dis qu'en regardant, en analysant à première vue le principe de ce projet de loi, je suis quelque peu inquiet. Pourquoi? Parce qu'on semble créer un certain déséquilibre. On semble rejeter du revers de la main une juridiction que nous avons

accordée, nous, alors que nous étions au pouvoir, à un ministre que l'on appelle le ministre des Affaires intergouvernementales.

Si nous examinons la loi, nous verrons que cette loi, parrainée à juste titre par le ministre de l'Industrie et du Commerce, va jusqu'à autoriser le même ministre à signer une entente —je reviendrai tantôt sur les modalités, les implications, les possibilités de cette entente — alors que, normalement et décemment, ce devrait être le ministre des Affaires intergouvernementales qui devrait signer une telle entente avec un organisme ou un gouvernement pour permettre aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de bénéficier des avantages qui découlent de l'adoption par le fédéral de cette loi créant la Commission industrielle des poissons salés.

Je dis que c'est le ministère des Affaires intergouvernementales qui devrait signer l'entente avec commissions, organismes ou gouvernements et non pas le ministère de l'Industrie et du Commerce, même si, cependant, je reconnais que, de toute nécessité, ce doit être le ministère de l'Industrie et du Commerce qui voie à l'application de cette loi.

Mais je dirai que la loi, dans sa phraséologie —j'ai bien l'intention de revenir en comité sur ce point — la loi telle que faite pourra peut-être donner naissance un jour à un conflit de juridictions. Je me demande pourquoi on n'a pas précisé davantage ou spécifié quel gouvernement on avait en vue en préparant la législation qui nous est soumise. Est-ce le gouvernement de Terre-Neuve? Est-ce le gouvernement canadien ou si ça pourrait être le gouvernement de la Suède, par exemple, ou de la Norvège ou de la Russie?

Dans un tel cas, l'application de cette loi deviendrait inconstitutionnelle. Pourquoi? Parce qu'en vertu de l'article 91 il s'agirait d'un pouvoir qui appartient à l'autorité fédérale seule. On nous répondra: II y a eu des ententes signées par le Québec avec la France et d'autres pays francophones pour le rayonnement de la culture française. Très bien. Mais, en vertu de la constitution, l'éducation est de juridiction exclusive du Québec, alors qu'actuellement, tel que le projet de loi est présenté, nous voudrions... Je comprends que nous n'avons pas encore l'indépendance. Il faut vivre dans le contexte de la fédération où nous sommes placés et dans laquelle nous sommes dans l'obligation d'évoluer. Je me demande si on n'a pas, à ce moment-ci, manqué de prudence en ne précisant pas les gouvernements.

Ah! ce serait très facile de dire: Avec le gouvernement canadien ou avec un gouvernement provincial ou des gouvernements provinciaux, dans le but de respecter le fédéralisme rentable, toujours, cependant, dans une seule voie, une seule direction : la voie fédérale.

Eh bien! je me demande si cette législation que l'on nous présente aujourd'hui, elle aurait été nécessaire, si, de l'autre côté, on avait demandé que le gouvernement fédéral accorde aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord les mêmes privilèges qu'il a accordés au gouvernement de Terre-Neuve.

Je dis, M. le Président, qu'il y a un aspect au problème qui peut paraître bien bénin, mais, d'un autre côté, c'est un principe d'un projet de loi qui devant l'inaction du gouvernement, nous obligera à supporter quand même le gouvernement pour corriger sa propre négligence, son défaut de mettre en application son fédéralisme rentable en ne faisant pas en temps opportun des revendications nécessaires dans l'intérêt des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. C'est pourquoi nous supporterons le principe de ce projet de loi, tout en regrettant cependant qu'encore là, nous soyons dans l'obligation d'être indirectement à la remorque du gouvernement fédéral en demandant au gouvernement fédéral de permettre au Québec de permettre à une classe spécifiée, les citoyens québécois, de se grever, de s'accrocher, d'être traînés par une loi que le fédéral avait juridiction et pouvoir de passer mais qui était surtout bénéfique à l'endroit des habitants d'une seule province, la province de Terre-Neuve.

Je dis donc, M. le Président, que cette loi, dans son principe, doit être supportée. Pourquoi? Parce que le gouvernement réalise qu'il a été négligent. Dans les circonstances, il n'avait pas d'autre solution que de couvrir sa propre négligence par une législation préparée à la vapeur, sans consultation préalable, et surtout en mettant de côté ce principe reconnu dans notre système de droit parlementaire québécois, que nous avons une autorité compétente pour signer des ententes, au nom du Québec. Or cette autorité n'est pas le ministre de l'Industrie et du Commerce dans ce secteur particulier, lorsqu'il s'agit de signer une entente avec des organismes interprovinciaux ou avec des gouvernements provinciaux ou avec le gouvernement fédéral. Ce n'est malheureusement pas le ministère de l'Industrie et du Commerce qui est spécialisé, doit surveiller l'application de cette loi. Lorsqu'il s'agit de ratifier une entente, au niveau du droit, je dirai national, ce doit être par le mécanisme et le canal et par la voie du ministère des Affaires intergouvernementales.

M. Paul-A. Latulippe

M. LATULIPPE: M. le Président, à ce stade-ci j'ai une très brève intervention pour que le ministre puisse me répondre tout à l'heure. Je me réfère à un texte que nous lui avons remis tout à l'heure, un texte que lui a remis le député de Mégantic. Il y est dit que le Conseil privé de Londres interpréta la Constitution de 1867, de façon à satisfaire les deux ordres de gouvernement, par une série de trois jugements datant de 1898, 1914 et 1920 et que ce tribunal suprême décida que la propriété des poissons relevait des provinces, mais que le contrôle des pêcheries était de compétence fédérale.

A ce moment-là, M. le Président, je me demande si le bill 14, Loi favorisant la comma-cialisation du poisson, relève plus du contrôle que de la propriété. Si ça relève du contrôle, ne devrait-on pas demander au gouvernement fédéral de voir à appuyer de ses deniers le bill 14? Merci, M. le Président.

M. LEVESQUE: Je propose, M. le Président, que le député pose cette question en comité.

M. Jean-Noël Tremblay

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais faire quelques brèves observations à la suite de celles qu'a faites mon collègue le député de Maskinongé. On nous présente un projet de loi favorisant la commercialisation du poisson. Cela a l'air assez bénin en apparence, mais c'est un projet de loi qui met quand même en cause certains principes. Je n'ai pas d'objection de principe à approuver le projet de loi, mais il m'apparaït que le gouvernement du Québec ne semble pas s'aviser de comprendre qu'il a déjà des pouvoirs et qu'il ne s'en sert pas.

Lorsqu'on a créé, au départ, le ministère des Affaires fédérales-provinciales et que l'on a, par la suite, créé le ministère des Affaires intergouvernementales, il nous a paru, à ce moment-là, que le Québec entendait se prévaloir des prérogatives qui normalement lui sont attribuées par le texte même de la constitution et de toutes celles qui, à la suite de l'évolution historique, à la suite de l'évolution de la fédération canadienne, découlent normalement des pouvoirs garantis explicitement au Québec par le texte même de la constitution canadienne.

Voilà qu'aujourd'hui le gouvernement nous présente un projet de loi afin de se donner des droits que, à mon avis — le ministre pourra nous répondre là-dessus, les spécialistes pourront discuter là-dessus — il possède déjà. Si vous me permettez, M. le Président, de faire référence à ce que disait le député de Montmagny hier dans son discours, le gouvernement du Québec, encore une fois, nous indique qu'il est à la remorque du gouvernement central, qu'il se laisse guider après coup parce qu'il craint les répercussions des gestes qu'a posés le gouvernement central. Il ne prend pas — c'était là un des arguments du député de Montmagny, hier — l'initiative des opérations dans des domaines qui sont de sa compétence.

Le député de Maskinongé le faisait observer tout à l'heure, c'est le ministre de l'Idustrie et du Commerce qui présente ce projet de loi qui traite une question de commerce. Mais le ministre de l'Industrie et du Commerce veut obtenir, par ce truchement-là, des pouvoirs, qui ne pourront être définis et qui ne pourraient être négociés — puisque l'on parle de négociations d'ententes avec d'autres gouvernements — que dans le cadre de discussions engagées, entreprises par le ministre des Affaires intergou- vernementales. Je voudrais attirer ici l'attention du ministre et du gouvernement sur cette exigence que pose, à l'heure actuelle, l'évolution de la fédération canadienne, à savoir que le gouvernement du Québec, dans tous les domaines qui ressortissent à sa compétence, doit non seulement exercer cette compétence mais doit encore se prévaloir des droits qui découlent normalement d'une compétence reconnue par un texte et d'une compétence qui s'est, par la force des choses, par suite d'une évolution historique, élargie.

Je me demande donc pourquoi le gouvernement n'a pas procédé d'une autre façon, pourquoi le gouvernement n'a pas procédé via le ministère des Affaires intergouvernementales afin d'établir exactement quel est, premièrement, le rôle de ce ministère et quels sont exactement les champs de compétence que ce ministère peut, petit à petit, couvrir et dans lesquels il peut s'engager, compte tenu de l'évolution de la constitution.

Le député de Montmagny le soulignait — il reprenait des propos que d'autres collègues de notre parti avaient tenus — l'autre jour dans son discours qu'à toutes fins utiles, la constitution canadienne n'existe plus et que nous sommes en face, d'autre part, d'envahissements du gouvernement central qui nous autorisent à prendre l'initiative, à aller au-delà de ce que, mathématiquement, techniquement, juridiquement, on a reconnu jusqu'ici comme de notre compétence.

Or, il y a un organe officiel du gouvernement qui est non seulement une direction du gouvernement, une direction générale d'un ministère, mais qui est un ministère dont le rôle est précisément d'examiner toutes ces questions et d'examiner, d'abord, quels sont les champs de compétence que nous occupons à l'heure actuelle, de quelle façon on a restreint, on a rétréci l'aire de liberté que nous avions pour évoluer dans ces champs de compétence et qui a aussi tout pouvoir pour déterminer sur quelles avenues le gouvernement du Québec doit maintenant s'avancer afin de faire progresser cette souveraineté que le gouvernement du Québec a le droit de revendiquer au nom des contribuables québécois.

Alors le projet de loi, évidemment, ne pose pas, à mon sens, de difficultés. Je n'ai pas d'objection à en accepter le principe, mais il m'apparaft, dans ce texte bénin, que le gouvernement du Québec agit avec énormément de timidité, qu'il a l'air de suivre des directives qui lui viennent d'ailleurs, qu'il craint, en proposant un projet de loi pour se donner des pouvoirs, d'offenser quelqu'un dont il penserait qu'il s'opposera à une initiative du gouvernement du Québec dans un domaine qui est le nôtre.

Le gouvernement du Québec a-t-il le besoin de se donner ces pouvoirs ou a-t-il pensé à inventorier les pouvoirs qu'il détient déjà? Je demande au ministre de l'Industrie et du Commerce et à ses collègues d'examiner exactement les pouvoirs du ministère des Affaires

intergouvernementales et d'aller dans les dossiers de ce ministère, pour voir de quelle façon pendant quatre ans, nous, nous avons élargi petit à petit, sans faire de bruit, les pouvoirs du gouvernement afin de donner aux stipulations expresses de la constitution 1867 un sens qu'on ne leur avait jamais donné afin de montrer comment l'évolution du fédéralisme permet aux Etats membres de la fédération canadienne, et surtout en raison de l'attitude du gouvernement central — une attitude qui se durcit de plus en plus — comment le gouvernement du Québec peut occuper sans aucune sorte de réticence des champs de compétence.

Le leader parlementaire qui parraine ce projet de loi devra s'interroger là-dessus et se demander exactement pourquoi il demande ces pouvoirs et se poser la question de savoir s'il ne les avait pas déjà. Il devra aussi apporter, comme l'a souligné mon collègue, le député de Maskinongé, des précisions concernant lesdits gouvernements dont il est question. C'est là tout.le problème. Si, M. le Président, je suis intervenu, c'est pour inciter le gouvernement à utiliser le ministère des Affaires intergouvernementales et à demander aux fonctionnaires de livrer tout ce qu'il y a dans les dossiers qui sont accumulés là et qui prouveront au gouvernement actuel que le Québec, pendant quatre ans, dans ce domaine des relations avec les autres gouvernements, a évolué, a gagné et regagné petit à petit un terrain considérable et que l'effort timide que fait actuellement le gouvernement n'a rien de comparable...

M. GARNEAU: Le député me permet-il une question?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, pas pour l'instant, M. le Président.

M. GARNEAU: Vous n'avez pas d'exemple à donner.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II est bien près de moins dix; nous vous en donnerons en temps et lieu. Mangez votre bonbon, là! Pour l'instant, c'est une occupation à plein temps.

M. le Président, je dis donc que le gouvernement... C'est déjà un emploi nouveau que de sucer un bonbon.

M. GARNEAU: Nous n'avons pas besoin de l'autorisation du fédéral pour ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le gouvernement du Québec ne semble pas se rendre compte de la puissance de l'instrument qu'il a par le ministère des Affaires intergouvernementales. C'est le sens des observations qu'a faites le député de Maskinongé. C'est le sens de celles que je fais parce qu'au-delà de l'objet de ce projet de loi qu'on nous propose aujourd'hui, il y a tout un ensemble de droits, de prérogatives dont pourrait user le gouvernement du Québec et dont il ne veut user qu'avec la bénédiction catholique, apostolique et romaine du gouvernement central dont il sait très bien qu'il devient de jour en jour le vassal humilié.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Duplessis.

M. Henri L. Coiteux

M. COITEUX: M. le Président, je m'excuse d'abord auprès de mes collègues d'avoir été absent cet après-midi. C'est parce que je me suis occupé des gens du comté de Saguenay qui ne peuvent pas voir leur député.

M. LESSARD: M. le Président, je soulève une question de privilège.

La semaine dernière et il y a quelques semaines, le député de Duplessis a affirmé qu'il s'occupe des gens de mon comté, comme il vient de le dire. Je veux lui dire qu'il doit s'occuper des patroneux du comté de Saguenay et qu'il ne s'occupe pas véritablement des intérêts du comté.

Le député de Duplessis est quand même adjoint aux Terres et Forêts et lorsque j'ai besoin de communiquer soit avec le ministère des Terres et Forêts ou son adjoint, je communique avec le député de Duplessis. D'ailleurs, je suis bien heureux de sa collaboration.

Mais que le député de Duplessis ne vienne pas dire que le député de Saguenay ne fait pas son travail dans son comté! Qu'il fasse autant de réunions que j'en fais dans mon comté et il s'apercevra que le comté de Saguenay est bien représenté, pas mal mieux qu'il ne l'était dans les années passées.

M. COITEUX: M. le Président, je dois dire que je n'ai pas besoin de faire tant de réunions pour vendre ma politique. Sur la question de privilège...

M. BURNS: C'est le genre de remarques qui risquent de nous faire siéger jusqu'à onze heures, M. le Président.

DES VOIX: On siège jusqu'à onze heures.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre d'Etat.

M. COITEUX: Sur la question de privilège du député du comté de Saguenay...

M. LE PRESIDENT: II ne peut pas y avoir de débat sur la question de privilège. L'honorable député de Duplessis.

M. COITEUX: M. le Président, j'en ai certainement pour 25 minutes à parler sur le bill 14. Je dois, d'abord, m'excuser, car le bill 14 concerne exclusivement mon comté. Je puis dire, avant l'ajournement de la Chambre, que

ceux qui ont critiqué ce bill ne connaissent tout simplement pas la région de la Basse-Côte-Nord, comme le ministre l'a dit.

Ce soir, à huit heures, c'est mon intention d'éclairer mon bon ami du comté de Saguenay qui pense connaître la Côte-Nord.

M. LESSARD: Vous n'étiez même pas ici.

M. BURNS: Vous n'étiez seulement pas ici, comment voulez-vous éclairer quelqu'un?

M. COITEUX: Je vais peut-être éclairer aussi un peu la lanterne du député de Chicoutimi. Je demande l'ajournement de la Chambre. J'aurais à parler...

M. LE PRESIDENT: La suspension. M. PAUL: II est moins cinq.

UNE VOIX: II est moins cinq, il n'est pas six heures.

M. COITEUX: M. le Président, on me dit de continuer jusqu'à six heures. C'est facile, parce que, sur le bill 14, j'en ai tellement à dire, surtout pour le comté de Duplessis.

UNE VOIX: Allez.

M. COITEUX: Lorsque j'ai vu le bill 14, M. le Président, je me suis dit: Enfin, nous avons un ministre de l'Industrie et du Commerce qui comprend les besoins des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Depuis nombre d'années, j'essayais de faire comprendre au gouvernement la position dans laquelle se trouvaient les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord ne peuvent se comparer aux pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine. Il ne peuvent se comparer aux pêcheurs de Gaspé-Nord.

M. BIENVENUE: ... de Matane.

M. COITEUX: ... ne peuvent se comparer, comme le dit mon collègue de Matane, aux pêcheurs de Matane. Il n'y en a pas tellement.

M. VEZINA: ... de l'Ile d'Orléans.

M. COITEUX: Et mon ami du comté de Montmorency me dit qu'ils ne peuvent même pas se comparer aux pêcheurs de l'île.

UNE VOIX: Ce sont des anguilles.

M. COITEUX: Je pense bien, chez nous on ne pêche pas d'anguilles.

C'est parce que au sujet des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord, nous avons un comté...

UNE VOIX: Ils pêchent seulement de la barbote.

M. COITEUX: ... de 600 milles de longueur.

Tous les villages ne sont pas réunis par des chemins.

M. LESSARD: Cela fait quatre élections que vous promettez ça.

M. CHARRON: Cela ne dépend que de vous autres...

M. LESSARD: Ce sont vos promesses électorales.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COITEUX: Mon cher collègue du comté de Saguenay...

M. DUMONT: M. le Président, si vous me le permettez, sur un point de règlement.

M. COITEUX: ... quand j'ai dit qu'on n'avait pas de chemin...

M. DUMONT: Le leader du gouvernement m'a rappelé à l'ordre à deux ou trois reprises, parce que je m'éloignais du sujet. Pourtant, j'étais dans le sujet. Je crois qu'aujourd'hui on perd un temps considérable de la façon qu'on procède actuellement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je demanderais à l'honorable député de Duplessis de prendre son siège pour quelques instants. Il faut comprendre que l'honorable député de Duplessis est à peine dans son introduction, je crois. Il explique. Il vient à peine de se lever. Je suis bien prêt à accepter... A l'ordre, s'il vous plaît. Après son court préambule expliquant le contexte dans lequel le bill 14 doit être étudié, du fait que son comté est tout à fait concerné, dès son préambule terminé, je suis assuré qu'il collaborera pour aller au fond du sujet du bill no 14.

M. COITEUX: M. le Président, le préambule était l'esprit du projet de loi, parce que j'allais dire qu'il a été présenté pour les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Ce bill, c'est son esprit de vouloir venir en aide, grâce à la généreuse collaboration du ministère de l'Industrie et du Commerce, aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Je comprends l'intervention du député de Mégantic, il n'a pas autre chose que des petites truites dans son comté...

M. DROLET: II en a vu une grosse en vous voyant...

M. BROCHU: On va attendre l'introduction longtemps...

M. BIENVENUE: Ils ne veulent pas le laisser parler, c'est évident...

M. COITEUX: Tout l'après-midi...

M. CHARRON: II vient de mordre, M. le Président.

UNE VOIX: Sis, sis.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ferai remarquer aux honorables députés de cette Chambre qu'il est six heures.

M. BURNS: M. le Président, je remarque, comme tout le monde, qu'il est six heures. Je remercie la foule en délire.

M. LACROIX: Vous avez le sens de l'observation développé.

M. BURNS: Cependant, M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire une motion, mais plutôt une suggestion. Si le parti ministériel et ceux de l'Opposition étaient d'accord, nous pourrions peut-être examiner la possibilité d'ajourner la Chambre à lundi, étant donné que, de part et d'autre, on a fait valoir que tous avaient déjà des rendez-vous que plusieurs ont dû annuler. C'est une suggestion que je fais à la Chambre. Quant à notre parti, je peux vous assurer immédiatement, M. le Président, que nous serions prêts à donner notre consentement à l'ajournement à lundi.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement unanime?

M. LEDUC: Non, M. le Président, il n'y a pas consentement unanime.

M. BURNS: C'est bien ça, c'est de la collaboration.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a suspension ou ajournement?

M. LEVESQUE: Huit heures, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit heures ce soir.

Reprise de la séance à 20 h 5

M. LAVOIE (Président): A l'ordre, messieurs!

Le député de Duplessis.

M. COITEUX: Ne commencez pas à m'interrompre avant que je commence, parce que je suis nerveux et puis je n'aime pas être interrompu.

M. le Président, il est tout de même temps qu'on parle sérieusement du bill 14. Lorsque l'on a ajourné pour le souper, ou le dfner comme on dit en français, pour faire plaisir à M. Charron et au député de Chicoutimi, j'ai pris connaissance des notes et des discours qui ont été prononcés...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Du projet?

M. COITEUX: ...cet après-midi en ce qui a trait au bill 14. Et je puis vous dire, M. le Président, sans préjudice, j'espère, que j'ai été énormément surpris de voir que le député de Mégantic m'interrompait parce que je ne parlais pas de l'esprit du bill.

J'ai lu ses notes et je me demande, M. le Président, comment il se fait que vous ne l'avez pas interrompu dès le début, il n'a pas parlé de l'esprit du bill une seule seconde dans son discours.

M. DUMONT: J'ai répondu au député des Iles-de-la-Madeleine.

M. COITEUX: J'ai lu aussi les notes du député de Saguenay. Le député de Saguenay, c'est un de mes amis, c'était mon voisin et nous nous aidons mutuellement. Nous ne partageons pas les mêmes idées politiques, mais je vais demander justement au député de Saguenay, avant de se prononcer en public, puis ça va paraître dans les journaux chez lui de se renseigner au moins sur la Côte-Nord.

Quant au député de Chicoutimi, ça lui a donné la chance de parler de toutes sortes de choses au point de vue de la constitution et des grandes idées qu'il préconise, sans parler du bill.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon?

M. COITEUX: Pour ce qui est du leader de l'Opposition, probablement qu'il a été déçu que le bill n'englobe pas le maskinongé parce que le maskinongé ça ne se sale pas.

M. PAUL: Ce n'est pas la première fois que je l'entends.

UNE VOIX: Pas la dernière.

M. COITEUX: M. le président, ce bill est beaucoup plus simple. Ce bill offre enfin la possibilité aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de gagner leur vie d'une façon absolument

normale et de recevoir au moins l'équivalent de leur labeur, de la cause de leur souci. Depuis des années, les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord, avaient deux points pour expédier leur poisson, soit le vendre frais à l'industrie de La Tabatière ou le saler.

Quand les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord salaient leur poisson, chaque année, c'était tout un problème de le vendre, avec le résultat que des acheteurs de Terre-Neuve, du Nouveau-Brunswick, dans certains cas, venaient et achetaient le poisson salé des pécheurs de la Basse-Côte-Nord, à des prix ridicules. Je peux vous citer des cas, dans les trois dernières années, où les pêcheurs n'ont même pas été payés.

Cette loi est une loi à l'heure! On pourra parler de constitution. On a parlé de toutes sortes de choses, cet après-midi, qui ne concernent pas le bill du tout. C'est beaucoup plus simple que ça. Le bill, préconisé par le ministre de l'Industrie et du Commerce, aujourd'hui, veut permettre à ces gens, qui vivent sur une côte de 500 milles, sans communications, de gagner leur vie d'une façon honorable. Il n'est pas question de constitution.

M. LEVESQUE: Très bien.

M. COITEUX: II n'est pas question, "and I would like to say that to the Leader of the Opposition in English, this time. He was speaking of our French province and English provinces. For your knowledge, I want to tell you that the English people of all those villages are Quebecers just as much as you and the "député Charron" is.

S'ils sont Québécois, M. le Président, ils ont droit à leur subsistance; ils ont droit aux lois du Québec. Ils ont droit à la même protection à laquelle les séparatistes du comté de Saint-Jacques ont droit.

M. le Président, cette loi est bien simple. Ce n'est pas une question de constitution. Ce n'est pas une question de dix milles. Ce n'est pas une question de pêcheurs qui viennent pêcher dans nos régions. Ce n'est pas ça du tout.

M. LAURIN: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au député?

M. COITEUX: Certainement. UNE VOIX: Ne t'assieds pas à terre.

M. COITEUX: Excusez-moi si je reste debout; ils ont enlevé ma chaise.

UNE VOIX: Elle est revenue.

M. LAURIN: When the Honorable Member of Duplessis was not here, we said, in the name of our Party, that we favoured the principle of this bill. So, I do not understand why he is attacking the honourable member of Saint-Jacques.

MR. COITEUX: The reason why, Mr. Lau-rin, is simply because...

MR. TREMBLAY (Chicoutimi): Mr. Speaker, so we...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! DES VOIX: Order, order!

MR. SPEAKER: Order!

A la suite de la permission de l'honorable député de Duplessis à la question du député de Bourget, la parole est à l'honorable député de Duplessis.

MR. COITEUX: Can I answer in English? MR. SPEAKER: Sure. You may proceed.

MR. COITEUX: Because it seems to me that the leader of the Parti québécois cannot understand French. I am very sorry for him.

M. LESSARD: Est-ce que le député pourrait faire les mêmes efforts pour donner une route à ces gens?

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Duplessis, s'il vous plaît.

M. COITEUX: M. le Président, je comprends que c'est difficile de répondre au chef du Parti québécois. Je ne suis pas psychiatre. Mais je suis tout de même assez pratique pour me rendre compte que le bill 14 est un excellent bill, un bill qui vient enfin à la rescousse de cette population qui oeuvre sur la Basse-Côte-Nord et qui n'est pas connue, malheureusement...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne nous faites pas pleurer!

M. COITEUX: ...de la plupart des membres de cette Chambre. Même le député de Chicoutimi, qui sourit, aurait quelque chose à apprendre en venant visiter le comté de Duplessis avec moi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question de privilège.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, c'est grave. Le député de...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Duplessis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai posé la question de privilège. Vous ne m'avez pas laissé le temps d'expliquer mon point de vue.

UNE VOIX: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voulais vous dire, M. le Président, que je suis déjà allé dans le comté de Duplessis. J'ai demandé qui était député et on ne le connaissait pas.

M. COITEUX: Probablement que c'était dans le temps où le député de Duplessis avait des tendances péquistes. Les péquistes ne me connaissent pas!

M. LESSARD: C'est une majorité à présent!

M. COITEUX: Admettez, M. le Président, que le député de Chicoutimi, durant un certain temps, avait bien plus d'amis parmi les péquistes qu'il n'en avait parmi les membres du parti de l'Union Nationale.

UNE VOIX: C'était un ministre.

M. COITEUX: C'était un ministre dans le temps. Farce à part, je dois rendre témoignage au député de Chicoutimi. J'ai toujours été reçu avec une compréhension et une grande amabilité lorsque je me suis adressé à lui pour les affaires culturelles de mon comté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. le Président.

M. COITEUX: M. le Président, cet après-midi, c'est malheureux, on a parlé de toutes sortes de choses à part l'esprit du bill. Qu'est-ce que c'est, le bill? C'est que nous avions une population sur la Basse-Côte-Nord de Kégashka à Blanc-Sablon.

Ce sont les seuls pêcheurs qui, dans la province de Québec, étaient obligés de saler leur surplus de production qu'ils ne pouvaient pas livrer à l'usine de poisson frais. Ce n'est pas le cas des Iles-de-la-Madeleine, ce n'est pas le cas du comté de Gaspé-Nord, où ils ont, comme l'a dit le ministre cet après midi, le "Gaspé Cured". On exploitait ces gens et aujourd'hui on fait un reproche parce qu'on est allé voir le gouvernement fédéral pour ça.

Un gouvernement peut-il se permettre de mettre sur pied un organisme international pour vendre le poisson salé, lorsqu'il existe? Nous faisons partie de Terre-Neuve, dans la Basse-Côte-Nord, pour autant que la vente du poisson est concernée. Cela coûtera $5,000, qu'on dit, à la province de Québec, et après? Il en coûte $150,000 par mois pour le service social actuellement. N'est-il pas temps que le gouvernement commence à investir de l'argent pour essayer d'enlever la surchage qui pèse sur le ministère des Affaires sociales?

C'est le but de la loi, c'est ce qu'elle obtiendra. Les gens de chez nous sont contents. Pensez-vous, en bonne vérité, qu'on va aller dire au pêcheur de Kégashka: "My dear friend, I cannot give you that because it is against the

Constitution"? Il va se retourner et dire: Qu'est-ce que c'est que la constitution? Est-ce un bateau des Clarke, ça?

Il s'ent fout de la constitution, pourvu qu'il puisse gagner son pain honnêtement et qu'il ne soit pas au crochet du gouvernement. Ce sont des pêcheurs honnêtes, des travailleurs qui se lèvent encore à trois heures du matin pour gagner leur pitance. Cette loi-là, qui va coûter $5,000 à la province, va leur permettre de pêcher jusqu'au mois d'octobre, parce qu'ils étaient obligés d'arrêter dès le mois de septembre auparavant, leur permettre un revenu supérieur peut-être doublant ce qu'ils gagnent actuellement. Et on va critiquer cette loi et on va penser que c'est contre la constitution, comme le député de Mégantic l'a dit en s'aventurant au large? Ce n'est pas une question de pêche.

M. DROLET: Nous savons nager.

M. COITEUX: C'est une question de prise de poissons par des pêcheurs québécois. "The only fault that we can pronounce against those fellows, they speak English, that is all, but they are fishermen and they are Quebecers."

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le député de Duplessis me permet-il une question?

M. COITEUX: Certainement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pourrait-il nous donner la recette de son coquetel verbal?

M. COITEUX: Donner quoi?

Un coquetel verbal? Non. Je ne fréquente pas les mêmes gens que le député. Cela me répugne de le dire, mais je ne fréquente pas les mêmes gens.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne fréquentez pas les bonnes gens, alors?

M. COITEUX: Non, non.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends. C'est pourquoi vous n'avez pas été nommé ministre.

M. COITEUX: M. le Président, si le député veut éventuellement être chef de son parti, il fait mieux de laisser le député de Duplessis tranquille. Je n'ai pas son intelligence, je n'ai pas sa facilité de parole, je n'ai pas sa façon de s'exprimer, mais j'ai une chose que le député de Chicoutimi n'a pas: c'est la sincérité à l'égard des électeurs de mon comté qui m'élisent depuis 1960. J'ai eu Bourgault contre moi et je peux avoir M. Charron contre moi; je les invite "toute la gang", à venir me battre si je décide de me représenter.

M. LESSARD: Est-ce que le député me permet une question?

M. COITEUX: Oui, M. Lessard, le député de Saguenay. Qu'il ne m'invite pas à me présenter contre lui parce que je vais laisser mon comté et je faix aller le battre.

M. LESSARD: Le député pourrait-il nous dire quelle majorité il a eu à Sept-Iles même?

M. COITEUX: Plus de 2,000 voix.

M. LESSARD: A Sept-Iles?

M. COITEUX: Oui.

M. LESSARD: Dans Duplessis...

M. COITEUX: Non, non.

M. LESSARD: Dans Duplessis, j'ai l'impression que dans quatre ans c'est le seul discours que le député va faire pour avoir la Basse-Côte-Nord.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COITEUX: M. le Président, je m'excuse d'avoir mal informé la Chambre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COITEUX: A Sept-Iles, je n'ai pas eu la majorité, c'est vrai.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. COITEUX: Le Parti québécois...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ferais d'abord remarquer au député de Chicoutimi que toutes ses interventions et digressions font quand même partie des 30 minutes qui lui sont allouées. J'ai entendu des remarques également...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas parlé, moi!

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, le député de Duplessis. J'ai entendu également des remarques qui n'étaient peut-être pas adressées au président, mais qui sont parvenues à mes oreilles à l'effet que l'opinant pouvait s'éloigner du bill 14. Il ne faudrait quand même pas, lorsque d'autres députés l'invitent à des digressions ou l'entraînent dans des questions en dehors du bill 14, accuser le député s'il se permet de répondre à ces questions.

Dans l'intérêt de l'opinant et de la Chambre, j'aimerais que l'on revienne...

M. COITEUX: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: ... au bill 14.

M. COITEUX: ... je suis prêt à revenir à l'esprit du bill, mais vous connaissez mon caractère quand on me pique.

Ce bill permettra à nos pêcheurs d'envisager l'avenir économique de leur région d'une façon beaucoup plus optimiste.

Le gouvernement du Québec ne pouvait pas former par lui-même un office du poisson salé. Il fallait tout de même aller chez nos voisins de Terre-Neuve qui avaient déjà cet organisme préconisé par le gouvernement fédéral. Et puis après? Que l'argent vienne du gouvernement fédéral ou que l'argent vienne du gouvernement provincial, c'est l'argent des contribuables du Québec. Et quand elle est appliquée pour améliorer les conditions de vie de nos Québécois, qu'ils parlent français ou anglais, à ce moment-là, je crois que c'est une bonne mesure. Il ne faudrait tout de même pas prétendre que le gouvernement du Québec pouvait faire un office du poisson salé pour quinze villages qui pèchent la morue sur la Basse-Côte-Nord. Je pense que la décision la plus sage a été prise par le ministre de l'Industrie et du Commerce qui présente cette loi.

Je suis convaincu que si le ministre de l'Industrie et du Commerce, seulement avec cette bonne mesure, se présentait dans mon comté, il aurait 100 p. c. des votes sur la Basse-Côte-Nord.

C'est une loi excellente. Ce n'est pas une loi constitutionnelle. Ce n'est pas une loi qui affecte l'intégrité du Québec. Ce n'est pas une loi qui affecte les grands principes. Aux gens qui veulent trouver toujours une raison sentimentale pour réprouver les lois parce que cela touche à Ottawa vous demanderez ce qu'ils feraient pour régler le cas de la population de la Basse-Côte-Nord? S'ils n'avaient pas la loi d'Ottawa, il faudrait en faire une, se trouver des marchés internationaux pour prendre soin de cette production de quelques centaines de milliers de livres de poissons qui, aujourd'hui, sont achetées à des prix ridicules. Personne n'a dit, cet après-midi, que ces pêcheurs étaient exploités depuis des années. Cette loi va corriger cette situation. Personne ne l'a dit cet après-midi.

M. LESSARD: Je l'ai dit, cet après-midi. M. BACON: Ah ! Il l'a si peu dit.

UNE VOIX: II ne l'a pas dit fort.

UNE VOIX: On ne l'a pas entendu.

M. COITEUX: Le député de Saguenay prétend qu'il l'a dit. Je lui fais confiance. Peut-être qu'il aura une bonne note pour se faire réélire à la prochaine élection.

UNE VOIX: On verra ça.

M. COITEUX: M. le Président, c'est une excellente loi qui met fin à l'exploitation de nos

meilleurs pêcheurs de la province de Québec actuellement. Qu'on aille à Kégashka et l'on verra là des pêcheurs, douze barques qui, chaque jour, rapportent de 35,000 à 40,000 livres de morue.

On ne peut pas en disposer complètement à l'usine de La Tabatière, qui est à quelque 180 milles de là. Il faut qu'ils le salent. Aujourd'hui, les gens, qui arrêtaient de saler du poisson en septembre, vont continuer à pêcher, parce qu'une loi a été présentée par le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec, qui va protéger ces gens, qui va les encourager à continuer de pêcher parce qu'ils savent qu'ils pourront vendre leur poisson à un prix juste et raisonnable, sans être exploités. C'est ça, le but de la loi.

J'ai entendu des discours, cet après-midi. On a dit que cela aurait dû être au ministère des Affaires intergouvernementales. Qu'est-ce qu'il connaît, le ministère des Affaires intergouvernementales, dans la morue? Ce sont des bons ministres, mais ils ne connaissent pas ça. Le seul gars qui connaît ça, c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce, parce que c'est un gars de la Gaspésie. C'est un gars qui connaît ça, la morue.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le premier ministre qui est ministre des Affaires intergouvernementales. Il ne connaît pas ça?

M. COITEUX: Oui, mais, même si c'est le premier ministre, je ne l'insulte pas en disant qu'il ne connaît pas la morue. Il ne pêche pas, lui. Deuxièmement, ce n'est pas tellement le détenteur du ministère des Affaires intergouvernementales, c'est parce que c'est une affaire d'industrie et de commerce, une affaire de mise en marché. Il ne s'agit pas de régler la constitution entre Ottawa et le Québec; cela relève des Affaires intergouvernementales. Ce n'est pas la question des douze milles, comme le député de Mégantic le disait cet après-midi. Ce n'est pas une question de grande constitution, comme le député de Maskinongé le disait. Ce n'est pas ça du tout. C'est plus simple que ça. C'est un projet de loi honnête, c'est un projet de loi qui est proche du peuple, c'est un projet de loi qui veut aider la population. C'est pour ça que comme député du comté, je ne suis pas à 100 p. c, mais à 200 p. c. pour ce projet de loi.

Puis, je me permets de demander aux gens qui voteront contre ce projet de loi en deuxième lecture de me faire face à la télévision ou à la radio de mon comté pour défendre leur attitude.

M. LESSARD: M. le Président, tout le monde a été pour.

M. COITEUX: Ceux qui ont parlé contre, qu'ils viennent dans mon comté pour le dire aux pêcheurs. Que le député de Saguenay vienne dire aux pêcheurs ce qu'il a dit cet après-midi.

M. LESSARD: Question de privilève, M. le Président. Le député de Duplessis n'était pas ici cet après-midi et j'ai l'impression qu'il n'a pas eu le temps de lire ce que j'ai dit cet après-midi.

Au contraire, j'ai appuyé le bill...

M. BURNS: II ne sait pas lire.

M. LESSARD: ... alors c'est vrai que le député de Duplessis est tellement ignorant que j'ai l'impression qu'il n'a pas été capable de lire.

M. COITEUX: M. le Président, je ne demanderai même pas au député de Saguenay de retirer ses paroles, parce qu'un professeur, une salade de prof...

M. LESSARD: Ecoutez, vous nous l'avez dit, ce sont vos paroles.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COITEUX: Un professeur qui parle comme ça, M. le Président, c'est pire qu'une carpe, alors je ne lui demanderai pas de retirer ses paroles.

M. LESSARD: Un ingénieur.

M. BOIS: Une question de privilège, s'il vous plaît.

M. COITEUX: Certainement.

M. BOIS: Le député voudrait-il continuer de parler de la pêche à la morue et non pas de la pêche au député?

M. COITEUX: Avec plaisir! Vous savez monsieur, mon honorable ami, vous n'avez qu'à demander au député de Saguenay qu'il me laisse la paix. Je ne suis pas le genre de gars... J'ai un caractère et je ne le réformerai pas, j'ai 61 ans. Quand je suis piqué je...

M. LESSARD: Vous démissionnez. M. LAFONTAINE: On ne dirait pas ça. M. PAUL: On ne dirait pas ça.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): On pensait que c'était 80.

M. COITEUX: J'apprécie énormément les compliments du député de Labelle et ceux du député de Chicoutimi. J'aimerais donc ça vous rendre la pareille, M. le député de Chicoutimi. De toute façon, M. le Président, farce à part, ce n'est pas une question de chasse au loup-marin, ce n'est pas une question de biologie marine et ce n'est pas une question de distance des côtes. Le poisson dont on veut parler dans ce bill est pêché par des pêcheurs de mon comté.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que le député me permettrait une question de renseignement ?

M. COITEUX: Certainement.

M. TREMBLAY: Quel est approximativement, le nombre de pêcheurs qui peuvent être favorisés par cette nouvelle loi?

M. LEVESQUE: M. le Président, il y avait 600 pêcheurs, il y en avait 200 particulièrement affectés par le travail du poisson salé.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Une question de renseignement.

M. COITEUX: Je vais corriger le ministre, on en a exactement 210.

M. LESSARD: Nommez-les! Est-ce que le député pourrait les nommer?

UNE VOIX: A six heures ce soir.

M. COITEUX: Ce sont les dernières informations que j'ai eues à six heures ce soir.

M. LEVESQUE: Ce n'est pas 200 mais 210. M. LESSARD: Nommez-les!

M. COITEUX: Ecoutez! Tout ça pour résumer qu'on a voulu faire une immense tempête dans un verre d'eau, cet après-midi.

UNE VOIX: Une chose certaine, le député de Sainte-Marie ne connaît rien là-dedans.

M. COITEUX: Le gouvernement ne pouvait pas protéger les pêcheurs de mon comté d'une façon aussi adéquate et aussi juste qu'il le fait par cette loi. Sentimentalement, on pourra dire que c'est encore une affaire d'Ottawa, c'est encore une affaire de Terre-Neuve. Mais les "Newfies" en bas de Blanc-Sablon, they speak exactly the same language as my fishermen on the coast. Ce sont des gens qui viennent de Terre-Neuve, ce sont des gens qui sont établis dans le Québec, c'est pour ça que la loi est faite. Quand il sera question de limites de pêche, quand il sera question de pêche... On a dévié cet après-midi sur la pêche au loup-marin, mais on n'en a pas de loup-marin sur la Côte-Nord.

UNE VOIX: Seulement des phoques.

M. COITEUX: Ceux-là qu'on vient à bout de prendre on les prend parce que...

M. LACROIX: Ils s'en viennent chez nous.

M. COITEUX: Je ne suis pas nationaliste, je ne suis pas fédéraliste plus qu'il le faut. Mais si une loi fédérale permet d'épargner des deniers de la province de Québec, et c'est ma conclusion, pour protéger à très peu de frais la population de quelque 19 villages, disséminés sur 250 milles de côte, sans chemin, sans télévision, sans radio; si on est obligé de passer par une loi fédérale pour améliorer le standard de vie de ces gens-là, je ne comprendrai jamais qu'un Québécois, de quelque parti politique qu'il soit, puisse s'opposer à pareille politique bénéfique d'un gouvernement libéral de la province de Québec.

M. LE PRESIDENT: Avant de donner la parole à l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, pour exercer son droit de réplique, est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent prendre la parole sur ce projet de loi?

L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Gérard-D. Lévesque

M. LEVESQUE: M. le Président, je serai très bref car je crois que j'ai eu l'occasion d'exposer assez longuement la politique gouvernementale et les buts recherchés par cette loi, ses modalités, son application.

Je voudrais simplement relever une objection qui a semblé sous-jacente aux diverses interventions que nous avons entendues du côté de l'Opposition. Ce que j'ai retenu, c'est qu'on se posait des questions sur la nécessité de légiférer à ce moment-ci, parce que, a-t-on dit, les pouvoirs existent présentement dans la loi organique du ministère des Affaires intergouvernementales.

M. le Président, nous ne légiférons pas pour le plaisir de légiférer. Je vous assure, ce soir, que j'en suis plus convaincu que jamais. S'il y avait moyen de ne pas venir déranger nos collègues, le vendredi soir, eh bien! nous le ferions avec plaisir et nous les laisserions continuer à...

M. BURNS: Qui a refusé le consentement unanime?

M. LEVESQUE: M. le Président...

M. LEDUC: M. le Président, ce n'est pas le leader parlementaire, c'est le député de Taillon qui a refusé.

M. LEVESQUE: ...et ce refus est venu à la suite...

M. BURNS: De frustrations.

M. LEVESQUE: ...de ce que le député de Maisonneuve connaît bien, une suite explicable mais injustifiée que l'on pourrait peut-être appeler une maladie, que je ne voudrais pas contagieuse: la procédurite!

M. le Président, si nous avions pu éviter de légiférer, en utilisant une loi existante, nous l'aurions fait. Nos conseillers juridiques, qui ont

étudié cette situation, nous ont dit que la loi du ministère des Affaires intergouvernementales ne nous permettait pas de conclure une entente avec le gouvernement fédéral, entente relative à la commercialisation du poisson salé. Il existe, il est vrai, un pouvoir permettant au ministre des Affaires intergouvernementales de signer les accords avec le gouvernement central. Mais il faut, d'après nos conseillers juridiques, qu'il y ait un pouvoir spécifique dans une loi d'un ministère pour ce faire.

Or, nous n'avons pas trouvé dans la loi organique du ministère de l'Industrie et du Commerce de disposition permettant au ministre de conclure de tels accords. Dans les circonstances, nous n'avions pas le pouvoir d'utiliser la loi du ministère des Affaires intergouvernementales à cet effet.

Devant cet état de choses, nous avons dû nous adresser à la Législature. C'est ce que nous faisons ce soir.

Quant aux autres objections qui ont été exprimées de part et d'autre, j'en viens à la conclusion que ce sont des cas d'espèce et je crois qu'ils ne sont venus sur le tapis qu'à cause d'une mauvaise connaissance de la géographie de la Basse-Côte-Nord, mauvaise connaissance de la population et des problèmes de cette région. Comme cela a été fait avec sûrement de la bonne volonté, avec un esprit positif, je serais loin de vouloir enlever à nos honorables collègues dont je connais l'objectivité et le désir de servir leur province... loin de moi l'idée de ridiculiser ce que des malins appelleraient l'ignorance de la question.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de deuxième lecture est adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Adopté?

DES VOIX: Sur division.

M. LE PRESIDENT: Sur division?

UNE VOIX: Oui.

M. LEVESQUE: Pardon? Sur division?

M. DUMONT: Sur division

M. LEVESQUE: Alors vote, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!

M. LEVESQUE: Qui l'a demandé? Est-ce que c'est demandé sur division?

M. DUMONT: Sur division, s'il vous plaît, M. le Président.

M. LEVESQUE: Très bien.

M. DUMONT: Nous allons voter.

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!

Vote

M. LE PRESIDENT: Que celle et ceux qui sont en faveur de cette motion de deuxième lecture veuillent bien se lever.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Castonguay, Pinard, Garneau, Mme Kirkland-Casgrain, MM. Tessier, Harvey (Jonquière), Lacroix, Vaillancourt, Mailloux, Arsenault, Houde (Fabre), Coiteux, Bienvenue, Vézina, Brown, Kennedy, Saindon, Leduc, Bacon, Berthiaume, Bossé, Caron, Carpentier, Cornellier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau), Houde (Limoilou), Lamontagne, Marchand, Phaneuf, Pilote, Paul, Lafontaine, Vincent, Tremblay (Chicoutimi), Lavoie (Wolfe), Gauthier, Simard (Témiscouata), Laurin, Burns, Charron, Joron, Tremblay (Sainte-Marie), Lessard.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Que ceux qui sont contre la motion de deuxième lecture veuillent bien se lever.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Du-mont, Roy (Beauce), Bois, Roy (Lévis), Té-treault, Latulippe.

M. LE PRESIDENT: Pour: 47 Contre: 6 Yeas: 47 Nays: 6

M. LE PRESIDENT: La motion est adoptée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, puis-je vous faire remarquer que, si M. Tetley avait été ici, il aurait voté pour?

M. LEVESQUE: Article 5.

M. LACROIX: Peut-être M. Masse aussi.

UNE VOIX: Ce n'est pas sûr.

M. LEVESQUE: Article 5.

M. LE PRESIDENT: II n'y a pas lieu d'aller en comité?

M. LEVESQUE: Non.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu propose la deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la loi du ministère du Revenu.

Projet de loi no 5

2e lecture M. Gérald Harvey M. HARVEY (Jonquière): M. le Président,

l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre. Le bill no 5, Loi modifiant la loi du ministère du Revenu, vise essentiellement à rendre la perception des impôts et des taxes plus efficace et plus économique. Cette loi organique du ministère, que nous vous présentons, M. le Président, avec plusieurs amendements, nous permettra d'accorder un traitement plus équitable aux contribuables québécois.

Elle nous permettra également de combattre la fraude fiscale. Elle aura pour but d'éliminer toute une série d'échappatoires mieux connues dans le langage fiscal, comme on le dit si bien en anglais, sous le nom de "loop-holes". Pour atteindre tous ces objectifs, bien sûr, il fallait inclure dans la loi organique des dispositions ou des articles que l'on retrouvait dans des lois individuelles et qui n'existaient pas dans d'autres lois.

Je vous disais que, pour atteindre ces objectifs, la nouvelle loi organique du ministère regroupe des articles qui existent dans plusieurs autres lois du ministère. Elle rend également uniformes d'autres articles laissés dans d'autres lois individuelles pour des raisons que réaliseront les membres de cette Chambre lors de l'étude des bills individuels, pour des raisons purement technique et administratives.

Enfin, elle comprend également des articles dont la contrepartie se trouve déjà dans d'autres lois et dont l'absence créait un traitement différent d'une loi à l'autre, causant, par le fait même, de l'iniquité pour le contribuable et de l'inefficacité administrative. Vous verrez également, au cours de l'étude de cette loi en comité, des dispositions conformes à ce qu'annonçait le premier ministre du Québec lors du discours du budget en juin dernier.

Nous permettrons également au ministère du Revenu d'avoir, au point de vue administratif, des dispositions qui vont lui donner, devant des cas bien précis de danger de perdre certaines sommes par des mandataires, la permission d'exiger, dans des cas bien précis, un cautionnement ou des sûretés. Par la présentation de ce bill 5, nous voulons éviter, dans les années à venir, d'être dans l'obligation d'augmenter, plus rapidement que cela ne doit se faire, les impôts de la masse des contribuables.

Si notre loi organique, le bill 5 et nos autres lois nous permettent une meilleure rentabilité ou une perception plus efficace, bien sûr, à ce moment-là, nous n'aurons pas à avoir recours à l'augmentation des impôts dans des lois où il est très difficile pour un contribuable d'échapper ou de se soustraire au paiement de ces sommes. Il est bien sûr que, et je m'y réfère pour quelques secondes, lorsque nous passerons à l'étude d'un autre bill, le bill 6, nous toucherons la masse des contribuables; c'est de la déduction à la source en grande partie. Mais lorsqu'on parle des lois à la consommation, la loi organisque du ministère du Revenu, elle doit permettre, pour une administration efficace, une cohésion avec les autres lois, qu'elles soient à la consommation, aux corporations ou toute autre loi de revenu. Nous voulons des dispositions, M. le Président, qu'on retrouve dans toutes les lois du revenu, que ce soit en Ontario, en Australie, dans les autres provinces canadiennes ou dans la loi organique fiscale du ministère du Revenu national.

Bien sûr, on va me dire, en quelques occasions, que le français qu'on y retrouve pourrait être amélioré. C'est sûr. Mais en langage fiscal, M. le Président, il faut se rappeler, autant à Québec qu'en Saskatchewan ou en Ontario, que les spécialistes, qui aiment les complications, se réfèrent au texte. Quand une loi fiscale provinciale a exactement le même texte en anglais ou en français qu'une loi similaire fédérale ou d'une autre province, cela évite de mauvaises interprétations, cela évite d'être dans l'obligation d'accorder des délais. Cela oblige également ceux qui aiment retarder de payer certains impôts qu'ils ont perçu comme mandataires de remettre au fisc ce qu'ils doivent dans les délais prescrits par la loi ou par les règlements.

M. le Président, à l'étude article par article, je pourrai donner des explications à tous les membres de cette Chambre. Je vous assure que ce bill 5 va apporter à ceux qui sont appelés à faire respecter les lois fiscales au Québec, autant les chefs de service que ceux qui font partie de l'administration au ministère du Revenu, un outil indispensable pour permettre aux ministères à vocation de dépenses de se fier davantage sur les prévisions, comme on le fait à chacune des années, les chiffres donnant alors le rendement le plus près possible de la réalité de nos lois fiscales.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, je me demande si c'est de cette façon qu'on va rendre nos lois d'impôt plus humaines, qu'on va obtenir le sourire du contribuable, si l'on tient compte des amendements que nous propose le ministre actuel du Revenu. Le ministre actuel du Revenu n'a pas fait de trouvailles. Il ne peut même pas se vanter d'être le parrain de ces projets de loi, puisque, le 22 décembre 1969, le ministre du Revenu de l'époque, M. Raymond Johnston, député de Pontiac, écrivait à M. Julien Choui-nard, secrétaire général du Conseil exécutif, Hôtel du Gouvernement, Québec, la lettre suivante: "Cher monsieur Chouinard, "Pour faire suite à votre lettre du 12 décembre, nous vous soumettons, tel que demandé, la liste des lois que nous nous proposons de soumettre pour amendement à l'Assemblée nationale. Ces amendements proposés, qui sont en sus de ceux dont le principe a déjà été

accepté par le comité de législation de l'Assemblée nationale et dont la présentation n'a pu être effectuée avant la fin de l'année 1969, affecteront les lois suivantes, et je vous inviterais à écouter 1'énumération: "La Loi du ministère du Revenu, la Loi de l'impôt sur la vente au détail, la Loi de la taxe sur les repas et l'hôtellerie, la Loi de l'impôt sur le tabac, la Loi de la taxe sur la gazoline, la Loi de la taxe sur les télécommunications, la Loi du pourcentage sur les honoraires de certains officiers publics. "Les modifications proposées à ces lois sont nécessaires pour fins administratives et de concordance et visent à donner au ministère des moyens efficaces pour percevoir plus adéquatement les impôts et taxes. "Veuillez agréer, cher monsieur Chouinard, l'expression de mes sentiments distingués. Le ministre du Revenu".

J'ai eu l'occasion de travailler sur ces projets de loi, étant membre de la commission de législation de l'ancien gouvernement; nous nous sommes penchés sur ces lois qui, à prime abord, à leur lecture, peuvent laisser croire qu'il s'agit d'imposition de nouvelles taxes alors qu'en réalité il s'agit d'un durcissement de la part du ministère du Revenu, d'un souci d'enquêtes plus poussées aux fins d'éviter les évasions fiscales.

Mais ce qui me dépasse, ce qui me scandalise dans le présent projet de loi, c'est de voir le fédéralisme encore ou le gouvernement fédéral y mettre son emprise et ses tentacules de contrôle, de directives à l'endroit des autorités du gouvernement du Québec. Je n'ai pas le droit de me référer à un article du présent projet de loi, mais je sais que votre curiosité est déjà en éveil, je ne lirai pas le texte de l'article 53 alors qu'on prend le texte de la loi fédérale, on réfère, dans une loi provinciale, le contribuable québécois à la rédaction, à l'interprétation d'une loi fédérale. C'est ça que l'on appelle le fédéralisme rentable?

On en est rendu à un point, M. le Président, qu'on n'a même plus la force de se tenir debout devant les exigences de M. Benson et pour lui faire plaisir, on lui dit: Nous allons prendre votre texte de loi, monsieur le ministre, et pour ne pas chatouiller la fierté nationale des Québécois, nous allons tout simplement, par une référence, dans une expression que l'on appelle mutatis mutandis, dire, pour que l'interprétation de nos juges soit plus facile, pour que vous soyez, vous, M. Benson, vous, M. Trudeau, vous, les autorités fédérales, les grands maîtres de l'interprétation de notre propre loi provinciale d'impôt.

Voilà ce que l'on retrouve dans cette loi, voilà ce que...

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de Maskinongé me permettrait une question?

M. PAUL: Non. Vous avez un droit de réplique, vous répliquerez en vertu de l'article 269.

M. HARVEY (Jonquière): Très bien. Non, je demandais...

M. PAUL: Je dis, M. le Président...

M. HARVEY (Jonquière): ...je demandais très gentiment...

M. PAUL: J'ai dit non.

M. HARVEY (Jonquière): Je comprends.

M. PAUL: Assoyez-vous, j'ai dit non.

M. HARVEY (Jonquière): Je l'ai demandé très gentiment...

M. PAUL: Je réponds très gentiment non.

M. HARVEY (Jonquière): Je vous remercie, très gentiment.

M. PAUL: Cela me fait plaisir de vous dire non.

M. LACROIX: II veut rester dans l'erreur.

M. PAUL: M. le Président, je comprends que cela les chatouille.

M. LACROIX: Pas du tout.

M. HARVEY (Jonquière): Pas du tout.

M. PAUL: Tiens, regardez donc, M. le Président, ça parait que le printemps est arrivé, les corneilles braillent.

DES VOIX: Ah!

M. PAUL: Je dis qu'il ne faut pas toucher à ces gentilshommes en chocolat...,

M. GARNEAU: Ils ont peur de l'épouvantail.

M. PAUL: ...dignes serviteurs d'un fédéralisme rampant, dans le domaine de ce qui nous est le plus sacré, nos droits de perception directe en matière d'impôt, au lieu de faire notre propre texte de loi. On a peur.

M. HARVEY (Jonquière): Je vous l'ai dit pourquoi.

M. PAUL: On a peur, mais on a peur de qui et de quoi?

M. HARVEY (Jonquière): De personne. On prend même deux textes venant de l'Australie.

M. PAUL: M. le Président, pourriez-vous inviter mon honorable ami à retrouver et à

garder son calme? Cela se comprend; cela se comprend, depuis près d'une semaine qu'il est prêt à présenter ses lois, à débattre ses lois. Je l'inviterais à la patience. Nous avons tellement d'amendements à cette loi que j'ai l'impression que si le règlement nous permettait de siéger demain, nous serions obligés de siéger sur ce présent projet de loi.

Je dis, M. le Président...

M. LEVESQUE: Est-ce que c'est une invitation? Est-ce que c'est une suggestion?

M. PAUL: D'abord vous ne pouvez pas le faire, vous ne connaissez pas votre règlement. Cela vous prendrait une motion annoncée.

M. LEVESQUE: Avec le consentement unanime.

M. PAUL: Vous ne l'aurez jamais!

M. LEVESQUE: Alors, bien pourquoi?

M. PAUL: Vous ne l'aurez jamais et j'en profite, M. le Président... Oui, je suis soucieux en vertu de l'article 64.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'invite les honorables membres de cette Chambre à ne pas dialoguer entre eux, mais à s'adresser à la présidence.

M. PAUL: Vous, vous connaissez ça, M. le Président! Vous, vous êtes un véritable parlementaire qu'on laisse croupir derrière les banquettes arrière plutôt que de vous amener dans le cabinet alors que vous seriez un actif, un homme d'action, de réalisation.

M. le Président, il y en a d'autres, mon bon ami le député des Iles-de-la-Madeleine...

UNE VOIX: II s'attendait à avoir un ministère.

M. PAUL: H pourrait lui aussi...

M. LACROIX: Moi, je ne me prends pas pour un autre.

M. PAUL: M. le Président, vous savez c'est son humilité qui le fait parler de la sorte. Ce n'est pas le dépit; ce n'est pas la jalousie non plus. C'est son humilité. Mais je dis, M. le Président, que dans ce fédéralisme rentable, on commence à être inquiet. La population du Québec commence à être inquiète.

Disons que le principe de la loi n'est pas mauvais. Il n'est pas mauvais parce que c'est une justice sociale que tous les citoyens se conforment aux lois adoptées par les gouvernements: municipal, scolaire, provincial ou fédéral. Et si tous les citoyens, M. le Président, avaient le respect intégral et le sens de l'honneur de remplir leurs obligations et de se soumettre aux lois imposées par les législateurs, eh bien peut- être que non seulement nous éviterions une hausse de l'impôt, mais que nous connaîtrions une diminution de l'impôt. Sous cet aspect, M. le Président, je dirai que cette loi a un sens équitable. Cette loi a pour but de placer non pas dans un statut particulier, mais dans un statut unique, semblable devant le législateur, tout contribuable québécois.

Mais cependant, ce que nous ne pouvons pas accepter et ce qui est incompréhensible, M. le Président, c'est cet "aplatventrisme" devant je ne dirai pas les exigences d'ottawa, je ne le sais pas et je ne peux pas dire ce que je ne sais pas. Devant les exigences d'Ottawa? Cela se peut. Je ne peux pas me prononcer... Un empressement naturel de la part des autorités du Québec à l'endroit de leurs frères et maîtres d'Ottawa. Quand à moi, je dirai que c'est la seule explication de cette introduction d'une nouvelle forme de législation dans nos statuts.

H va falloir maintenant, M. le Président, qu'une province qui est censée avoir atteint sa majorité, avoir obtenu tous ses droits, les revendique. Dans un aveu de faiblesse inexplicable, on va inviter le citoyen québécois à trouver dans les statuts fédéraux la seule législation qui corresponde à la mentalité, aux besoins de la population du Québec.

Je dis qu'on va essayer tout à l'heure. On va essayer. Je sens venir ça. J'ai vu le ministre des Finances aller au secours du ministre du Revenu puis lui dire:

Bien, vu que, depuis de nombreuses années, la cour de l'Echiquier et nos tribunaux de juridiction supérieure interprètent la portée, la signification de la Loi fédérale de l'impôt, il devient maintenant acceptable, moins difficile, évident qu'en procédant de cette façon-là, eh bien, nous sommes sûrs de rester dans l'interprétation juridique du concept fiscal qu'ont pu donner les tribunaux de la Loi fédérale de l'impôt.

M. le Président, je vous inviterais à prendre la Loi de l'impôt sur le revenu du gouvernement du Canada et vous allez y retrouver de curieuses références à cet article que je n'analyse pas; c'est le principe que l'on retrouve dans toute cette loi.

Je dis que c'est incompréhensible. Je me demande si la seule explication qu'on tentera de donner de cette interprétation qui a été faite par nos tribunaux de la portée, de la signification et de l'interprétation de nos lois fiscales par les plus hautes autorités judiciaires du pays est une justification. Mais, grand Dieu! le gouvernement est rendu bien pauvre pour ne pas être capable d'engager des traducteurs compétents, capables de traduire la Loi de l'impôt, de conception anglaise, dans le statut de nos lois provinciales! C'est devenu alarmant. De deux choses l'une: c'est soit par une soumission sans réserve à l'endroit du gouvernement fédéral ou c'est par une indifférence totale de l'asservissement de plus en plus marqué du Québec à l'endroit des autorités

fédérales. Quand le grand frère lève le doigt, nous les voyons courber l'échine.

M. le Président, je ne puis pas comprendre qu'un ministre, qui a le moindrement le sens de l'honneur patriotique et de la fierté nationale, accepte que, dans une loi dont il est le parrain, l'on ne puisse pas exiger de ces fonctionnaires ou des fonctionnaires compétents... Si on n'en a pas au service du gouvernement, qu'on engage du personnel à la pige et qu'on présente une véritable législation conforme à l'interprétation française.

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de Maskinongé me le permet? Je vais lui dire ce que je suis venu prêt de faire.

M. PAUL: M. le Président, voulez-vous inviter ce gentil...

M. HARVEY (Jonquière): Très bien, je vous le dirai en réplique.

M. PAUL: ...ministre à garder son calme...

M. HARVEY (Jonquière): Je vous le dirai plus tard.

M. PAUL: ...encore une fois? Nous aurons l'occasion...

M. HARVEY (Jonquière): D'accord.

M. PAUL: ...de discuter toutes ses explications. Quant à moi, je n'aurais pas eu le courage d'accepter, dans une loi dont j'aurais été parrain, une référence aussi servile à une loi fédérale. Même si le ministre est très bien intentionné, d'un autre côté, il a fait preuve d'une indifférence ou d'un manque de fierté incalculable et indescriptible surtout. J'oserais même dire, M. le Président, indécent.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, et, surtout, vu que la conception du principe que l'on retrouve dans cette loi n'est pas du crû du ministre... Voyons-donc! Je vous ai donné la preuve que l'ancien ministre du Revenu, grâce à son esprit de travail, d'initiative, de compétence, de compréhension avait, lui, bien avant le ministre actuel, saisi cette réforme qui s'imposait dans notre Loi du revenu. C'est pourquoi...

M. le Président, fermez donc la boîte aux petits enfants! Je comprends qu'ils sont fatigués. Il est tard. Invitez-les à se retirer.

M. MAILLOUX: C'est comme l'ancien ministre du Revenu.

M. PAUL: Quand on voit, M. le Président, le désir qui anime mon honorable, bon ami et confrère, le ministre de la Voirie, de vouloir disposer de sa loi, j'espère qu'on collaborera avec mon honorable ami qui est désireux de présenter sa loi. Plus vite nous pourrons atteindre cette législation, plus vite nous répondrons à un grand rêve, à une grande ambition qu'il nourrit.

M. le Président, la loi qui nous est présentée ce soir n'apporte pas de réforme. Elle rend peut-être uniformes, dans les différentes lois dont je vous ai donné la liste, les textes de références, les textes de descriptions. Mais malgré tout, M. le Président, par respect et par considération pour un grand ministre du Revenu, l'honorable Johnston, qui est le véritable parrain de cette législation — c'est lui le véritable parrain de cette législation — de cette réforme fiscale, parce que, en soi, à part ce fédéralisme rampant qu'on y retrouve, la loi est bonne et excellente, et parce que nous sommes soucieux d'éviter à la population, aux travailleurs québécois une hausse de taxes, parce que nous craignons surtout, M. le Président, à cause de cette épée de Damoclès qui pend au-dessus de nos têtes depuis le dernier discours du ministre des Finances, nous devons faire en sorte que nous collaborions dans toute la mesure du possible avec le ministère du Revenu pour qu'il apporte des lois efficaces, pour éviter la fraude fiscale, qui avaient été préparées bien avant son arrivée au ministère. Tout ce qu'il a eu à faire, c'est de tirer sur le tiroir. Mais comme il n'était pas trop initié à la fierté nationale, il s'est tout simplement laissé passer un texte de loi dont il rougit actuellement, j'en suis sûr.

Mais pour toutes ces raisons, parce que le principe est bon, même s'il y a une modalité indécente dans la loi, nous serons dans l'obligation, par souci d'éviter aux contribuables québécois une hausse d'impôts, de voter pour cette loi. Cependant, en temps et lieu, nous verrons à faire d'excellentes recommandations, ou suggestions au ministre, au parrain de ce bill, afin de rendre cette loi surtout plus française et compréhensible. Parce que l'économie de cette loi est de mentalité anglaise, il nous faut, aujourd'hui, trouver une traduction, une phraséologie. Je suis sûr que le présent projet de loi n'a pas été soumis à l'Office de la langue française — j'en suis convaincu — et encore moins, M. le Président, au ministère des Affaires intergouvernementales pour savoir si on devrait "s'aplat-ventrir" de la sorte devant le fédéral.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous voterons pour le principe de la loi, tout en espérant que le gouvernement ouvrira grande sa réception aux suggestions d'amendements que nous lui ferons en comité.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de Beauce.

M. Fabien Roy

M. ROY (Beauce): M. le Président, le gouvernement, en nous présentant le projet de loi numéro 5, Loi modifiant la Loi du ministère du Revenu, l'a fait afin d'être en mesure d'être capable d'organiser la loi pour qu'il y ait un

traitement plus équitable vis-à-vis de ceux qui ont à payer des impôts et pour éviter des échappatoires, des graudes fiscales.

M. le Président, quand on examine ce projet de loi de plus près, on peut se demander si les moyens qu'on prend pour atteindre les objectifs qu'on veut justement obtenir par la loi sont Tellement ceux qu'on voulait avoir. Lorsqu'on parle d'échappatoires, on peut réellement se demander si, au niveau des échappatoires, cela concerne les salariés. On sait, M. le Président, que tous les salariés du Québec se font retenir leur impôt sur le revenu, sur leur salaire, avant même de toucher leur chèque. Tout le monde sait cela.

Tous ceux qui ont un salaire se voient déduire l'impôt sur le revenu avant de recevoir leur chèque. Disons que ce n'est pas dans cette catégorie de citoyens qu'il y a des échappatoires. Je pense que tout le monde en conviendra.

Mais, par contre, au sujet du dernier budget que nous a présenté le gouvernement, nous avons pu faire une étude comparative des chiffres du budget de cette année et du budget de l'an dernier. Alors qu'on prévoit un taux de croissance économique et un taux de salaire global brut payé au Québec entre 7 p. c. et 8 p. c, on prévoit une augmentation des revenus sur l'impôt des particuliers de 15 p. c.

Alors, M. le Président, nous pouvons nous poser des points d'interrogation. En ce qui concerne les moyens pris, il est évident que le gouvernement parle de justice. Nous sommes d'accord que les lois de l'impôt doivent être justes envers tous les citoyens, envers tous les contribuables; elles doivent être justes envers ceux qui ont les moyens et ceux qui doivent travailler à petit salaire. Nous sommes bien d'accord là-dessus et sur les objectifs de la loi.

En ce qui concerne les moyens prévus dans la loi, nous pouvons nous interroger assez sérieusement. On parle de justice comme je viens de le dire, et nous pouvons nous poser des points d'interrogation. On parle de secret professionnel, de la protection du caractère confidentiel des dossiers d'avocats lors d'enquêtes fiscales, mais on ne parle pas de choses du genre qui peuvent exister dans d'autres corps professionnels. Je me demande si, en vertu des droits des citoyens, droit à la justice, qui est un droit fondamental, la loi de l'impôt présentée par le gouvernement, modifiant la loi du ministère du Revenu, respecte les droits élémentaires de nos citoyens, les droits fondamentaux. Les citoyens ont tout de même certains droits à la justice. Que dit la loi? L'article 53 g). "Lorsqu'une personne n'a pas effectué un paiement...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre! J'allais rappeler à l'honorable député qu'il ne doit pas, à ce stade des procédures, entrer dans l'analyse détaillée de chaque article; ça viendra en comité. Je l'invite à rester sur la discussion du principe même du projet de loi numéro 5.

M. ROY (Beauce): M. le Président, ce n'est pas mon intention d'étudier tous les articles mais je veux faire un parallèle entre les articles concernant l'esprit de la loi et ce que je veux exprimer dans mon court exposé. Je veux parler de l'article...

M. HARVEY (Jonquière): Vous le ferez en comité tout à l'heure.

M. ROY (Beauce): M. le Président, il y a quelque chose d'important que je veux souligner à cette Chambre et j'ai l'intention de le faire. A l'article 53, je dis ceci...

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président,...

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre!

M. HARVEY (Jonquière): J'aurais pu, tout à l'heure, faire un discours d'une heure et vous parler d'articles bien spécifiques comme par exemple l'article où je mets en application une recommandation de la commission Prévost. Je ne l'ai pas fait, soucieux de respecter le règlement. Je vous inviterais, M. le Président, à rappeler gentiment au député de Beauce qu'il aura toute la latitude, en comité, d'aller au fond des choses sur l'article 53 g). Je lui dirai alors pourquoi ces dispositions sont contenues à cet article.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'ai compris que le ministre du Revenu se levait sur une question de règlement, même s'il ne l'a pas dit.

M. HARVEY (Jonquière): C'est ça.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'ai déjà invité gentiment, pour employer l'expression du ministre du Revenu, le député de Beauce à s'abstenir de faire l'étude ou même de s'arrêter au texte d'un article et à s'en tenir au principe de la loi. Je suis sûr qu'il va se soumettre, conscient que je suis de sa connaissance de notre règlement.

M. ROY (Beauce): M. le Président, je veux bien me soumettre au règlement de cette Chambre, mais de toute façon je voulais aussi, par ce bref exposé, faire valoir le point de vue de notre groupement. Sans nommer les articles, je dirai qu'il y en a qui ont été copiés textuellement sur la Loi de l'impôt sur le revenu du gouvernement fédéral; il n'y a qu'un ou deux mots de changés, question de les adopter à la Législature provinciale. On nous parle d'un fédéralisme rentable.

On nous parle d'une législation particulière pour le Québec, et comme le disait le député de Maskinongé tout à l'heure, le gouvernement n'a même pas pu prendre l'initiative de rédiger un texte de loi conforme à l'esprit et aux droits du Québec à l'heure présente.

M. HARVEY (Jonquière): Pour percevoir $1...

M. ROY (Beauce): M. le Président, je n'ai pas interrompu le ministre, tout à l'heure.

M. HARVEY (Jonquière): ...en chinois ou en belge, c'est pareil.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre!

M. ROY (Beauce): Le ministre aura son droit de réplique tout à l'heure pour faire suite à ces brèves remarques, je dirai que, sur le principe de la loi, en général, la planification et l'uniformisation de l'administration doit être recommandable, mais ce n'est pas le cas ici. On fait d'une loi-cadre fiscale un véritable code pénal qui ne tient aucunement compte des droits les plus fondamentaux du citoyen, à savoir la sécurité juridique, le droit à l'inviolabilité du domicile et au caractère sacré du secret professionnel, exception faite pour les avocats. La restriction mentale y est employée à plein.

En pratique, l'intégration du processus de l'action oblique, qui jouera souvent au détriment du petit contribuable et des petites entreprises et qui pourra — je ne mets pas en doute les intentions du ministre — quand même faciliter le patronage et surtout donner prise à des abus de contrôle des petits commerçants par les grandes entreprises ou la formation de consortiums puissants avec incidences dans plusieurs autres articles. Disparition pratique du secret professionnel. Sous prétexte de protéger celui du client, on omet, volontairement ou non, d'autres groupes de professionnels dont les notaires, les comptables agréés, dans certains cas les médecins, indirectement ces derniers et d'autres tels les architectes, les entrepreneurs et les ingénieurs.

L'inviolabilité du domicile, tant légale que résidentielle est foulée aux pieds, de même que le droit de tout individu à une défense adéquate, permis de perquisition n'importe où et n'importe quand, sur demande ex parte du ministre, par toute personne désignée par le ministre, etc., banissement du principe de la sécurité juridique, premièrement, par l'action oblique, deuxièmement, le transfert d'une loi à une autre des sommes dues par le gouvernement contre une imposition contestée ou artibraire. Le gouvernement pourra se payer, à même des cotisations fixées arbitrairement pour certains entrepreneurs qui travailleront pour le gouvernement, des biens vendus avant qu'un contribuable ne soit reconnu coupable. Pourquoi ne pas se prévaloir de la saisie conservatoire au lieu de l'exécution forcée avant jugement, discrétionnaire, dangereuse et paradoxale? On pourra exiger des sûretés réelles de petits commerçants et des contribuables et accepter des sûretés personnelles de la part de grosses entreprises ou de petits amis du régime. Ces articles devraient être amendés de façon à rendre statutaires les modalités et exigences du ministre.

Cinquièmement, exclusion du principe que seul un officier du ministère du Revenu doit être habilité à procéder, pertes et abus ou à favoritisme, en appelant une personne non liée par le secret professionnel tant comme officier du ministère que comme faisant partie et étant régi par la Loi de la Fonction publique. L'officier pénalisé. Cet article permet au ministre de nommer une personne soustraite aux sanctions prévues pour un tel officier qui n'accomplirait pas son devoir. Enfin, la pénalité au minimum pouvant être répétée cinq fois, si non satisfaite ou non contestée, devrait tenir compte des mandataires saisonniers, des petits commerçants et de la publicité qui devrait être faite à cet effet.

Sous peine de procédures certains articles sont paradoxaux et prêtent également à des abus. Il y a dans cette loi des dispositions contradictoires et inacceptables. Bref, c'est une loi-cadre qui a des incidences et qui aura de profondes répercussions dans plusieurs autres projets de loi du ministère du Revenu déjà déposés. En l'occurrence, il serait préférable que les autres projets de loi soient vus, discutés et étudiés par la Chambre avant qu'ils ne soient adoptés. Voir le tableau avant de déterminer la grandeur du cadre. En gros, les transformations de la loi, de même que les pouvoirs discrétionnaires trop étendus donnés au ministre, peuvent avoir trop d'importance pour en accepter le principe d'emblée, sans de sérieuses restrictions.

Motion d'amendement

M. ROY (Beauce): Comme il semble qu'il y aurait évidemment trop d'amendements apportés à cette loi pour la rendre humaine, plus juste et plus honnête, il est de mon devoir de proposer la motion suivante : Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant tous les mots après le mot "que" par les suivants: La Chambre est d'avis que le bill doit être reporté à trois mois.

DES VOIX: Vote! Vote!

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Chambre...

M. DUMONT: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mégantic.

M. DUMONT: M. le Président, à la suite de la motion présentée pour le renvoi à trois mois, justement, nous avons remarqué, lors des explications qu'a données le député de Beauce, qu'il y avait, même du côté ministériel, des avocats et des députés qui se posaient des questions à savoir quelle loi on étudiait. J'ai entendu, de l'autre côté, quelqu'un dire: Mais quelle loi est-ce? C'est le bill 5, Loi modifiant la Loi du ministère du Revenu. Le député de Beauce a très bien expliqué les implications de ce bill...

DES VOIX: Vote! Vote!

M. DUMONT: ... qui aura, comme il l'a bien déclaré, des implications tellement graves que si nous avions ce droit de reporter à trois mois ce bill no 5, tel que la motion le préconise et le réclame, nous serions en mesure de permettre aux représentants de cette Chambre de faire les représentations nécessaires et d'étudier plus à fons ce projet de loi qui, par les avantages que le ministre a tenté de démontrer, mais les désavantages qu'il apporte, nous permettrait durant ces trois mois, de voir toutes les implications que ce bill no 5 nous présente.

Alors, M. le Président, parce que ce projet de loi demande un temps de réflexion, parce que le gouvernement semblait avoir beaucoup d'autres projets de loi urgents, nous demandons donc que le tout soit renvoyé à trois mois, afin de pouvoir l'étudier plus spécifiquement et permettre d'éclairer cette Chambre sur ce bill no 5. Nous demandons son renvoi à trois mois.

DES VOIX: Vote! Vote! Vote!

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!

Vote

M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement de l'honorable député de Beauce veuillent bien se lever.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Dumont, Roy (Beauce), Drolet, Bois, Tétreault, Latulippe, Paul, Lafontaine, Tremblay (Chicoutimi), Simard (Témiscouata).

M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion d'amendement veuillent bien se lever.

M. LE SECRETAIRE AJOINT: MM. Levesque, Castonguay, Pinard, Garneau, Tessier, Har-vey (Jonquière), Lacroix, Vaillancourt, Mailloux, Arsenault, Houde (Fabre), Coiteux, Bienvenue, Vézina, Brown, Kennedy, Saindon, Leduc, Bacon, Berthiaume, Bossé, Caron, Carpentier, Cornellier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau), Houde (Limoilou), Lamontagne, Marchand, Phaneuf, Pilote, Laurin, Burns, Charron, Joron, Lessard.

M. LE SECRETAIRE: Pour: 10. Contre: 38. Yeas: 10. Nays: 38.

M. LE PRESIDENT: La motion est rejetée. Est-ce que la motion principale est adoptée?

M. JORON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.

M. Guy Joron

M. JORON: M. le Président, j'ai été surpris, à l'audition de certains orateurs précédents, du fait qu'on semble vouloir exagérer l'importance et les incidences de cette loi. Il me semble à propos de la replacer dans son juste contexte. Comme, d'ailleurs, le ministre du Revenu lui-même le signalait, c'est en grande partie une loi de concordance.

Cette loi, comme d'ailleurs celles qui suivront, qui sont de même famille et qui s'y rattachent, est une loi à caractère technique et n'implique pas véritablement de philosophie fiscale ou, enfin, de facteurs fondamentaux. C'est une loi qui vise à une meilleure administration des biens publics, dans le sens d'une meilleure perception des revenus, d'une plus grande effecacité qui vise à éviter la fraude fiscale.

Ce sont des mesures administratives et techniques sur lesquelles nous sommes pleinement d'accord. C'est pourquoi nous voterons en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture. Vouloir mieux percevoir nos revenus et tendre à une meilleure efficacité en ce domaine, c'est une chose qui, en soi, n'est importante que si elle conduit à autre chose. Pour citer les paroles du ministre du Revenu lui-même, ce sont des lois qui me semblent préparatoires. Le Devoir du mardi 30 mars rapportait une conférence du ministre du Revenu: "Le gouvernement du Québec travaille actuellement a établir les mécanismes administratifs, ainsi qu'à uniformiser les lois fiscales, de façon à préparer une réforme fiscale en profondeur qui pourrait être effectuée dans un avenir très rapproché".

Un peu plus loin, on lisait ceci: "Le Québec ne peut envisager de véritables réformes fiscales avant d'avoir mis de l'ordre dans son appareil administratif et légal. C'est une condition préalable". C'est dans ce sens, M. le Président, que nous comprenons aussi ce projet de loi: c'est une préparation à autre chose qui va venir. L'important, c'est justement la suite de ces projets de loi, c'est-à-dire, pour encore employer les termes du ministre du Revenu, des lois qui tendent à humaniser la fiscalité. Humaniser la fiscalité, ça n'implique pas seulement d'en rendre la perception plus équitable. Il y a la taxe elle-même, ce qui nous amènera, évidemment, à la réforme fiscale.

On humanisera davantage la fiscalité quand on aura atteint l'idéal d'une meilleure répartition du fardeau fiscal. Mais il est une citation également du ministre du Revenu, à laquelle je faisais allusion tout à l'heure, où il disait: "Chose certaine, la réforme fiscale du Québec ne se fera pas avant celle d'Ottawa". Cela, ça soulève plus d'inquiétudes que celles qu'ont évoquées deux orateurs précédents.

M. DUMONT: Est-ce que le député de Gouin me permet une question?

M. JORON: Certainement.

M. DUMONT: Est-ce que le député de Gouin ne croit pas que les trois mois que nous avons demandés auraient justement permis d'étudier ces implications qu'il souligne?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! DES VOIX: A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, la Chambre a disposé de ce point-là. Je ne vois pas pourquoi...

M. DUMONT: Je n'ai demandé que trois mois pour discuter... Six mois, alors.

M. JORON: M. le Président, je répète que ces lois comme telles ne visent pas la réforme fiscale elle-même mais ne visent qu'à déblayer, en quelque sorte, le terrain de façon à la rendre possible.

Cette dernière citation du ministre du Revenu, le fait qu'elle ne se fera pas avant celle d'Ottawa, m'inquiète. Elle inquiète davantage que le scandale qu'ont vu des orateurs précédents au fait que le texte ou le mécanisme de certaines lois, de certains articles dans le projet de loi numéro 5 auraient été copiés ou inspirés de la loi fédérale. On a évoqué le fédéralisme rampant pour décrire ce phénomène. Pour ma part, je vous avoue que cette chose ne nous scandalise aucunement et je n'y vois pas de fédéralisme rampant. C'est une harmonisation technique, tout simplement. Et je ne vois pas pourquoi, d'ailleurs, s'il y avait des lois fiscales bien faites à Ottawa, en Hollande, en Australie ou où vous voudrez on ne s'en inspirerait pas et, à l'occasion, même on ne les copierait pas.

Alors, le fait que ce soit inspiré d'une loi fédérale, nous, du Parti québécois, cela ne nous scandalise aucunement. Je ne vois pas du tout là-dedans de perte de souveraineté qu'ont évoquée les orateurs précédents. De la même façon, d'ailleurs, est-ce que l'on peut penser — vous me permettrez d'employer un exemple pour illustrer — qu'il y a perte de souveraineté quand des pays voisins harmonisent certaines choses ou adoptent des critères, ou des standards communs? Si, universellement, on a décidé, par exemple, que la distance entre les rails de chemin de fer serait uniforme pour permettre aux trains de passer d'une frontière à l'autre, c'est une mesure d'harmonisation mais qui n'implique aucunement, à notre avis, un sacrifice de souveraineté nationale.

A cet égard, les propos du député de Maskinongé surtout m'ont étonné. Il se fait le défenseur d'une souveraineté qu'il a lui-même qualifiée d'absolue. Il a parlé d'un Québec qui arrive à l'âge de la majorité, qui réclame tous ses droits. Ce qui m'étonne, c'est d'entendre ses propos quand il s'agit de choses mineures, comme les lois techniques qui nous intéressent, mais de ne pas les entendre quand il s'agit de choses majeures. On a fait appel à la fierté, au patriotisme; on a même voulu rendre la loi plus française. Je pose simplement une question, en terminant: Avait-on, quand on était au gouvernement, ce même souci de patriotisme, de fierté de rendre les choses plus françaises quand on a voté un certain projet de loi qui portait le numéro 63?

M. PAUL: M. le Président, sur une question de privilège. Peut-être que les péquistes obscurs et aveugles constateront que le bill 63 n'est pas si mauvais que cela surtout quand on constate que les Anglais, aujourd'hui, sont les premiers à s'en plaindre...

M. JORON: Point de règlement, M. le Président.

M. PAUL: ... parce que nous leur avons imposé la langue française dans leurs écoles.

M. JORON: M. le Président, je soulève une question de privilège. Je ne sache pas que nous discutions le projet de loi numéro 63.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

M. JORON: J'avais terminé, M. le Président, et je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. CHARRON: On va en reparler au bill 28, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que nous avons vraiment quorum, M. le Président, avant que je prenne la parole?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous avons bien quorum.

M. LE PRESIDENT: Si je vous accorde la parole...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président,...

M.PAUL: M. le Président, nous sommes seulement 28 en Chambre. Qu'on appelle les députés!

M. LE PRESIDENT: Nous avons quorum parce que je sais une chose, lorsque j'ai compté les députés, nous étions 31.

M. LAFONTAINE: II y en a 28. Là, 29.

M. LE PRESIDENT: Et moi, combien ça fait?

M. LAFONTAINE: Trente.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. Jean-Noël Tremblay

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le député de Jonquière et ministre du Revenu présente ce soir un projet de loi qui modifie la Loi du ministère du Revenu, une sorte de loi-cadre, a-t-il dit, dont l'objectif immédiat serait d'éviter la fraude fiscale et par voie de conséquence, d'empêcher que le gouvernement, privé de certaines sources de revenus, soit obligé d'élever les impôts.

Ces objectifs, il est bien entendu que personne ne les conteste.

Ce sont des objectifs normaux, et tout gouvernement qui a le souci de la bonne administration se préoccupe de savoir de quelle façon les revenus sont perçus, et se préoccupe également d'empêcher que des citoyens échappent aux prescriptions impératives d'une loi.

M. le Président, il y a toutefois, au sujet de cette hausse d'impôts sur laquelle a insisté le ministre du Revenu quelque chose qui m'inquiète. Le ministre a semblé insister davantage sur cet objectif: empêcher la fraude fiscale. Nous sommes d'accord. Il a enchaîné immédiatement en disant: Pour empêcher, d'autre part, que le gouvernement ne soit obligé d'augmenter les impôts.

M. HARVEY (Jonquière): Continuez la phrase.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai la parole.

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'invoque le règlement. Comme le député de Chicoutimi cite des paroles que j'ai prononcées, je l'inviterais à continuer. J'ai dit: Soit dans l'obligation d'augmenter les impôts plus vite qu'il ne devrait le faire à cause de cela. Cela change tout. Cela fait toute la différence.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, cela change tellement peu ce que j'allais dire que cela donne davantage de poids à ce que je vais vous dire.

M. HARVEY (Jonquière): Nous vous écoutons.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre dit: nous allons, par le moyen de cette loi, éviter l'évasion fiscale, de sorte que le gouvernement ne se trouvera pas dans l'obligation d'augmenter plus vite les impôts. Donc, il y a là un aveu très net de l'intention du gouvernement d'augmenter les impôts puisque le ministre — il vient de le dire lui-même — ne dit pas seulement: Nous allons, par ce moyen, empêcher une augmentation des impôts, mais: Nous allons empêcher que cette augmentation ne survienne plus tôt que nous ne le souhaiterions ou plus tôt que nous ne l'avons déjà décidé.

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait une question?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, M. le Président.

M. HARVEY (Jonquière): Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II y a donc, M. le Président, dans les propositions du ministre du Revenu, un aveu et plus qu'un aveu, une confession et l'expression d'une intention du gouvernement d'augmenter les impôts. Ainsi, d'un argument dont il s'est servi pour valoriser son projet de loi, il fait, à toutes fins utiles, un argument qui devrait nous inciter à être encore beaucoup plus circonspects sur la mesure législative qu'il propose à notre adoption ce soir.

M. le Président, le député de Maskinongé l'a dit tout à l'heure, nous n'avons pas d'objection au principe de la loi, si tant est qu'on puisse appeler cela un principe. Il s'agit simplement d'un objectif, d'un but de la loi: éviter la fraude fiscale et empêcher le gouvernement de taxer plus vite qu'il n'a le désir et la volonté de le faire. C'est très clair maintenant, depuis que le député de Jonquière a fourni les renseignements que je n'aurais pas osé lui demander.

Dans l'exposé qu'il a fait, le ministre du Revenu s'est hâté de parler de la langue de la loi. Je ne viole pas le règlement, M. le Président, en en parlant. C'est le ministre lui-même qui nous a invités à examiner la langue de cette loi. Il nous a dit: On me fera peut-être le reproche de présenter un projet de loi qui n'est pas rédigé dans un excellent français. Et, pour justifier cette attitude du gouvernement, il a dit: II y va d'une question d'interprétation. L'on sait que les lois fiscales comportent toujours dans leur interprétation des difficultés importantes, que ceux qui ont à "pratiquer" — si je puis employer cette expression — cette loi sont toujours mal à l'aise lorsqu'ils se trouvent en présence de textes qui comportent des difficultés d'interprétation considérables.

Donc, dit-il, nous présentons un projet de loi dont le texte, dont le libellé n'a pas la qualité française qu'il devrait avoir.

Je ne ferai pas de cet argument, de ce fait un casus belli, mais c'est quand même inquiétant de voir un gouvernement qui...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

Le député de Chicoutimi comprendra parfaitement qu'il ne suit pas du tout le règlement actuellement lorsqu'il parle de la qualité de la langue du projet de loi. Je connais l'expérience du député de Chicoutimi autant au Parlement

fédéral qu'au Parlement du Québec. Il pourra, dès l'étape suivante du comité, proposer tous les amendements qu'il désirera, article par article, pour transposer ce projet de loi dans la langue de Molière. Je crois qu'il sait parfaitement que nous devons discuter à ce stade-ci de l'à-propos des principes généraux, de la valeur intrinsèque ou de la portée de ce projet de loi. Je ne peux pas lui permettre un débat sur la qualité de la langue française contenue dans le projet de loi. Il aura toute l'occasion voulue de le faire en comité.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je veux bien me soumettre à votre directive, mais il reste toutefois — et vous l'avez entendu — que c'est le ministre du Revenu qui a lui-même posé le problème. Il nous a parlé de la langue...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et il s'est excusé de présenter un texte en mauvais français...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est la raison pour laquelle j'ai permis au député de Chicoutimi de parler quelques minutes sur le sujet. Je ne suis pas intervenu avant trois ou quatre minutes considérant qu'il répondait à une digression du ministre du Revenu, comme le règlement le lui permet. Mais je ne pourrais pas lui permettre d'aller dans un argument de fond sur ce sujet.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens donc au sujet que j'étais à traiter. Je ne vais pas faire l'exégèse — comme vous m'invitez à ne pas la faire — du texte de loi pour déclarer que la loi n'est pas française, mais vous me permettrez quand même de noter que la réserve qu'a apportée le député de Jonquière lui-même nous indique que cette loi n'a pas été pensée pour le Québec en fonction du Québec. Le texte même en atteste, de l'aveu du ministre du Revenu. Pourquoi cela?

M. HARVEY (Jonquière): Vous êtes en contradiction avec votre collègue. Votre collègue vient de dire que c'est M. Johnston qui vous avait préparé...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Parce que le projet de loi procède d'une philosophie fiscale. Le député de Gouin en a parlé tout à l'heure en disant, parlant des arguments qu'avait utilisés mon collègue, le député de Maskinongé: II s'agit simplement d'une question technique. Il s'agit simplement d'une question de philosophie fiscale. Cet argument, M. le Président, pourrait être retenu mais il faut bien penser que dans un réaménagement fiscal et que dans la rédaction d'un projet de loi concernant des matières fiscales il y a quand même une philosophie juridique qui sous-tend un projet de loi, qui est quand même exprimée dans un texte.

Or, cette philosophie juridique — et c'est le ministre du Revenu qui l'a dit lui-même en déplorant la qualité de la langue de ce projet de loi — révèle que le gouvernement du Québec entend procéder dans le domaine du revenu de la même façon que l'on procède à Ottawa et de la même façon que l'on procède dans les autres provinces du Canada. Ce n'est pas à tort que le député de Maskinongé et que d'autres députés en cette Chambre ont indiqué au ministre du Revenu et au gouvernement qu'il était encore une fois à la remorque du gouvernement central.

Le député de Gouin tout à l'heure disait: Ce n'est pas un problème, ça. C'est une pure question technique. Je ne crois pas qu'il y ait là raison de s'inquiéter. On dit: II faut procéder à une harmonisation des lois fiscales.

Harmonisation fiscale, disait le député de Gouin, tout à l'heure. Mais cette harmonisation fiscale, elle doit être inspirée par certains principes qui se retrouvent dans l'ensemble de nos lois et qui sous-tendent l'économie générale de nos lois. Ces principes, justement, dans le domaine fiscal, doivent refléter exactement la mentalité, la philosophie, la façon de voir et la façon de vivre des citoyens du Québec.

On nous a dit, tout à l'heure: Vous vous attachez ici à des détails, quand vous ne vous êtes pas attachés à des questions plus importantes. Je ne reviens pas sur les allusions qu'on a faites à un projet de loi au sujet duquel, M. le Président, vous avez fait un rappel à l'ordre. Mais, justement, nous avons là une occasion, dans un texte juridique, au moment où l'on entreprend une réforme fiscale en profondeur, de donner à un projet de loi un esprit, un style qui reflète exactement la conception que nous nous faisons du juridisme en matière fiscale. Par conséquent, les arguments que nous invoquons ne sont pas futiles. Il n'y a aucun aspect de la législation du Québec qui doive être négligé si l'on veut entreprendre cette réforme en profondeur de toutes nos institutions et cette réforme dans le domaine fiscal, en particulier.

Qu'on ne vienne pas me répéter qu'il s'agit, tout simplement, d'une pure question technique, d'une philosophie fiscale. Une philosophie fiscale doit comporter nécessairement des principes. C'est là qu'il est important de parler d'une philosophie juridique. Le ministre du Revenu l'a si bien compris qu'il a lui-même déploré la qualité de la langue. Je ne reviens pas sur les détails de ce problème, M. le Président, parce que, tout à l'heure, vous m'avez dit que je n'avais pas à le faire. Dans le projet de loi que nous avions conçu, nous n'avions pas inséré, dans le texte, les dispositions que l'on y retrouve à l'heure actuelle. Je ne peux pas faire l'analyse des articles, mais voyez l'article 53, M. le Président.

Justement, nous n'avions pas inséré ces

dispositions qui démontrent de façon évidente que le gouvernement du Québec a tout simplement pris un texte juridique à Ottawa et qu'il essaie de le transposer dans nos lois. Sous prétexte de rendre plus facile l'interprétation d'une loi fiscale, il nous impose un texte qui n'est pas du cru québécois, mais qui est pensé en fonction d'une philosophie fiscale qui n'est pas la nôtre...

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...que l'on ne peut pas changer.

M. HARVEY (Jonquière): Le député de Chicoutimi affirme une fausseté. Il n'a pas "li" la loi. Justement, s'il y a une législation fédérale, notre loi sera semblable et, si elle vient en contravention avec les objectifs du développement économique ou social du Québec, un simple arrêté en conseil nous permettra de décider qu'elle ne s'applique pas au Québec. C'est justement pour parer à de telles difficultés que nous avons mis des mois et des mois à finaliser des textes qui traînaient depuis 1967.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président. Ce n'est pas un rappel à l'ordre, c'est un discours.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi a raison. L'honorable député de Chicoutimi.

M. HARVEY (Jonquière): D'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à ceci... Le député de Jonquière a parlé, tout à l'heure, de la mauvaise qualité de la langue et il a dit: Le député de Chicoutimi n'a pas "li" la loi, plutôt que de dire: II n'a pas lu la loi.

M. HARVEY (Jonquière): N'a pas lu.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas même de l'anglais.

M. HARVEY (Jonquière): J'ai dit "lu", mais je le dis moins longtemps que vous, j'ai dit "lu".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à ceci: Le ministre du Revenu nous présente une loi d'inspiration outaouaise — c'est clair — sous-tendue par des principes qui sont exactement les mêmes que ceux qui sous-tendent les lois fiscales du gouvernement central.

Or, ce n'était pas du tout dans l'esprit du projet que nous avions préparé, parce que nous voulions procéder...

M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement.

UNE VOIX: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...à une réforme en profondeur de la fiscalité selon un esprit qui soit le nôtre.

M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement. J'aurais une question à poser au député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas à répondre, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous désirez répondre au député de Lac-Saint-Jean, qui veut vous poser une question?

M. PILOTE: J'aimerais poser une question au député de Chicoutimi.

M. LE PRESIDENT: Avec la permission...

M. TREBLAY (Chicoutimi): Non, M. le Président, je regrette, mais je suis en train de faire mon discours...

M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement. Comment se fait-il que tantôt le député de Maskinongé a dit que M. Johnston, l'ex-ministre, était le parrain du projet du loi...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas donné la permission...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. PILOTE: ... et il blâme le ministre du Revenu d'avoir mal préparé le texte?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Chicoutimi n'a pas permis la question.

M. HARVEY (Jonquière): Ils ne sont pas sur la même voie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, mon collègue de Lac-Saint-Jean — c'est la première fois que je l'entends en Chambre, cela me fait plaisir — me pose une question, je n'ai pas trop compris, mais de toute façon, s'il veut des renseignements sur la politique en général, sur la fiscalité, sur tout domaine de l'administration, il viendra me voir, je lui donnerai des cours.

M. le Président, poursuivant mes observations, je vais vous dire ceci, et le député de Gouin l'a signalé tout à l'heure. Il a parlé de cette priorité qu'Ottawa a dans le domaine du réaménagement fiscal général. Il a indiqué qu'il s'agissait là d'un danger, d'un problème réel. Bien, nous le croyons nous aussi et c'est pour cela que nous nous attachons à ce que d'autres

appellent des questions de détail. Si on ne commence pas par donner à nos lois, en matière fiscale, un esprit qui correspond à ce que nous sommes, à ce qu'est le Québec, si on ne commence pas dans ce domaine, comment pourra-t-on le faire dans d'autres domaines? Je m'étonne que cela ne saute pas aux yeux de ceux qui prétendent que nous devons, dans le Québec, changer la base de toutes les institutions que nous avons eues jusqu'à présent, en vue d'atteindre un objectif que nous connaissons, qui a été exprimé et formulé à maintes reprises par les représentants du Parti québécois.

La loi que présente le ministre du Revenu, je le disais tout à l'heure, est une loi qui comporte, bien entendu, des aspects positifs. C'est une loi dont l'objet est bon et souhaitable. Encore que, et je rejoins là les propositions du député de Beauce, sur le plan de son application, particulièrement en ce qui concerne les recours judiciaires et les pouvoirs qui sont maintenant donnés au ministre, encore, dis-je, que cette loi présente des difficultés et des dangers et qu'elle risque, on l'a signalé tout à l'heure, de favoriser les personnes à revenu plus important, alors que des personnes à revenu moindre, modeste, ne pourront, elles, jamais échapper aux rigueurs de cette loi.

Je ne veux, M. le Président, à ce stade-ci de l'examen du projet de loi, analyser toute la question, parce que cela m'obligerait à aller dans le détail des articles, mais il reste qu'on a signalé tout à l'heure des dangers. On a montré que la rigueur des sanctions que prévoit le projet de loi pose des problèmes et est de nature à causer certaines inquiétudes. Nous aurons l'occasion, en comité plénier, de les signaler et mon collègue, le député de Maskinongé, le spécialiste de ces questions, pourra faire au gouvernement des suggestions fort opportunes.

Le ministre de l'Industrie et du Commerce a pris tout à coup le rhume. C'est le vent frais qui souffle de ce côté-là. Le bon air souffle de notre côté et cela déferle un peu sur la poussière qu'on voit là-bas. Alors, M. le Président, je vous dis donc ceci, et le gouvernement devrait y penser, encore une fois: une loi dont l'objectif est de procéder à une harmonisation fiscale, un réaménagement des lois fiscales devrait s'inspirer d'un esprit qui n'est pas celui qui inspire le projet de loi que nous avons devant nous.

Ce projet de loi vient directement d'une source que nous connaissons bien, et c'est par sympathie pour le gouvernement central que le ministre du Revenu a voulu en quelque façon faire de son projet de loi, faire de sa loi une jumelle des lois fédérales.

C'est pour cela, tout à l'heure, M. le Président, que je voulais vous démontrer, j'aurai l'occasion de le faire en un autre moment, que la langue elle-même nous prouve ce que je viens d'avancer. On ne s'est pas soucié du tout de la langue. On ne s'est pas occupé du tout de soumettre le projet de loi à l'Office de la langue française, par exemple. Tout simplement pour ne pas déranger la sécurité des avocats qui, eux, ayant à plaider, veulent toujours que les textes français ressemblent le plus possible aux textes anglais.

Je suis toujours sur l'objectif de la loi parce que le ministre en a fait un objectif tout à l'heure de cette question de langue. Mais vous m'avez dit de ne pas trop en parler, je n'en parle pas trop, M. le Président. Je fais juste y toucher, je l'effleure, je vais juste au bord de l'illégalité.

M. LACROIX: Ne sortez pas la langue trop loin!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre du Revenu faisait ce soir ses débuts de ministre.

UNE VOIX: C'est vrai.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je le félicite, c'est la première loi qu'il a l'honneur et le plaisir de présenter à cette Chambre. Mais comme il arrive à certains artistes, à certains chanteurs, à certains petits ténors, on ne lui a pas confié un bon rôle. Il n'a pas pu se mettre en voix. Un petit projet de loi copié sur un projet de loi fédéral dans une mauvaise langue, il est dans la situation d'un chanteur italien qui serait obligé de chanter en allemand. Alors, ses débuts, malheureusement, ne seront pas signalés avec grand éclat dans la presse. Mais ce qu'on retiendra de cela, c'est que le ministre du Revenu se fait, ce soir, l'interprète d'un autre gouvernement pour nous proposer un projet de loi qui ne correspond pas du tout à la philosophie fiscale qui doit devenir la nôtre. Cela, c'est très clair et ça apparaît nettement dans le projet de loi, et plusieurs députés, celui de Beauce, celui de Maskinongé, le député de Gouin y a fait allusion également, plusieurs députés l'ont signalé.

Alors, nous voulons bien, M. le Président, donner une approbation de principe à ce projet de loi mais je conserve dans mon esprit l'expression de l'aveu qu'a fait le ministre du Revenu au sujet des augmentations d'impôts. Et j'aimerais savoir, quand il nous répondra, combien d'argent le gouvernement du Québec retirera-t-il, récupérera-t-il si on parvient à éviter cette évasion fiscale? Et prenant ce montant qui sera naturellement approximatif, le ministre, je l'imagine, pourra le comparer au montant escompté de taxes que son gouvernement s'apprête à exiger des contribuables québécois, tel que cela apparaît d'ailleurs en filigrane dans le discours du ministre des Finances. Alors, j'aimerais qu'il réponde à ces questions-là.

Pourquoi le texte n'a pas été vu par l'Office de la langue, pourquoi il n'est pas français, pourquoi il est copié sur celui d'Ottawa? Pourquoi aussi le ministre prend-il le soin de nous prévenir que son projet de loi va éviter au gouvernement d'imposer plus vite qu'il ne le veut des taxes et des impôts?

Alors, M. le Président, je veux terminer espérant que le ministre du Revenu qui a appris son catéchisme pendant plusieurs semaines — parce qu'il y a plusieurs semaines qu'il attend la présentation de son projet de loi — pourra répondre à nos questions, dissiper nos inquiétudes et nos doutes et s'appliquer, comme nous l'avons fait nous-mêmes, à démontrer à nos collègues du Parti québécois, que la réforme fiscale, l'harmonisation fiscale, dont parlait le député de Gouin tout à l'heure, n'est pas une chose simplement technique. Mais c'est une chose beaucoup plus fondamentale qu'on ne le pense puisque...

M. HARVEY (Jonquière): D'abord technique.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'accord! C'est technique dans ses modalités et ses applications. Mais si l'on pense en terme général de fiscalité, la fiscalité comprend l'ensemble de tous les moyens qu'on appelle le revenu d'un gouvernement. Bon! Le revenu et l'utilisation qu'on peut faire de ce revenu...

M. HARVEY (Jonquière): C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Donc, il est extrêmement important que cette philosophie fiscale nous révèle qu'il y a sous les mots qui l'expriment, des principes qui nous indiquent exactement quelles sont les orientations fondamentales de la politique gouvernementale en matière fiscale puisque sans fiscalité, sans revenu, le gouvernement ne peut entreprendre aucune sorte de réforme dans aucune sorte de domaine.

C'est ce genre d'inquiétude que doit dissiper le ministre du Revenu et c'est à ce genre de question qu'il doit répondre en reprenant les divers aspects que nous avons évoqués et qui ne nous empêcheront pas d'accepter le principe de sa loi, mais qui nous obligeront évidemment à en faire une analyse poussée et à proposer des amendements, tous les amendements qui correspondent à ces exigences que nous avons exprimées concernant la philosophie et les principes qui sous-tendent et qui inspirent le projet de loi no 5.

M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic. M. Bernard Dumont

M. DUMONT: Merci, M. le Président. Ce projet de loi no 5 intitulé Loi modifiant la loi du ministère du Revenu, en principe, nous serons en faveur, car nous sommes nous aussi d'accord pour empêcher la fraude fiscale. Là où ne sommes pas d'accord avec le ministre du Revenu, c'est dans la façon d'appliquer cette loi. Et je demande au ministre, compréhensif quand il le veut bien, de présenter lui-même des amendements, parce que cette loi qui sera appliquée dans le Québec par la suite aura des répercussions très graves. Le député de Beauce tout à l'heure a signalé des choses qui sont à mon sens d'une conséquence très grave, entre autres quand il disait qu'une loi-cadre fiscale devient un véritable code pénal qui ne tient aucunement compte des droits les plus fondamentaux du citoyen à savoir la sécurité juridique, le droit à l'inviolabilité du domicile et au caractère sacré du secret professionnel. Alors je pense que dans ça il y a matière à réflexion et que le ministre dans la réplique devrait ou nous donner une bonne explication de tous ces détails, ou nous présenter justement avant que la loi ne soit adoptée, des amendements qui permettraient que cette loi soit réellement acceptable.

Il y a aussi, M. le Président, une remarque qui, je crois, mérite d'être soulignée et à laquelle le ministre, c'est une question que nous lui posons, devra répondre, à savoir pourquoi ne pas se prévaloir plutôt de la saisie conservatoire au lieu de l'exécution forcée avant jugement?

Je prends comme exemple un homme d'affaires qui aurait fraudé le gouvernement du Québec de $500,000, et au lieu d'utiliser ce que nous réclamons, nous la saisie conservatoire, bien, par le biais que la loi lui permettra, il pourrait liquider ses biens et nous pourrions retrouver dans les coffres de cet homme d'affaires peut-être $25,000, $30,000 ou $50,000. Et s'il y a eu une fraude de $500,000, eh bien, le gouvernement perdra $459,000 ou $375,000 ou $425,000. Or, la suggestion que nous faisons de se prévaloir de la saisie conservatoire nous permettrait de dire qu'il y aurait, avec les autres remarques que le député de Beauce a faites, dans l'application, déjà, une amélioration, bien que cette loi d'inspiration fédérale, donc inspirée du code anglais, par sa traduction s'applique mal aux Québécois. Nous aurions voulu plutôt une loi d'inspiration québécoise pour une loi-cadre qui aura des incidences et de profondes répercussions sur plusieurs autres projets de loi. Moi aussi, j'appuie le député de Beauce dans ce qu'il a déclaré, savoir que les autres projets de loi auraient dû être déposés pour voir toutes les incidences. C'est pourquoi nous écouterons religieusement le ministre répondre à ces questions qui ont été posées correctement par l'Union Nationale et que nous posons nous-mêmes. Nous espérons que le ministre comprendra que nous sommes pour le principe mais que nous voulons voir la loi améliorée, non pas pour détruire les petits commerces et les petits commerçants du Québec, mais pour être capable de sévir contre ceux qui veulent, par cette fraude fiscale, réussir encore une fois à tromper le gouvernement. C'est pourquoi, surtout, dans cette suggestion très juste d'utiliser plutôt la saisie conservatoire que l'exécution forcée avant jugement, nous voyons une proposition juste et honnête de la part du Ralliement créditiste.

M. BURNS: Une question de règlement.

Est-ce que vous croyez que nous avons quorum, M. le Président? Surtout que le député de Taillon n'est pas en Chambre, lui qui a demandé que nous siégions ce soir. Je vous demanderais, M. le Président, de vérifier si nous avons bien quorum. Le député de Notre-Dame-de-Grâce non plus n'y est pas. Bon nombre de ministres n'y sont pas, il y en a seulement quatre ici...

M. LACROIX: Le député de Maisonneuve remplace son whip.

M. BACON: Le député de Saguenay, le député de Saint-Jacques.

UNE VOIX: Alouette!

M. LAURIN: On est présent à 50 p. c.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Réponse: oui.

M. BURNS: Nous avons quorum? Merci, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même en l'absence du ministre des Institutions financières.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de Montmorency.

M. Louis Vézina

M. VEZINA: M. le Président, depuis que nous discutons du principe du bill, je veux vous avouer bien franchement que cela me fait sourire un peu. Cela me fait sourire de voir le haut degré de naïveté que certains entretiennent en matière de fiscalité. J'entendais, par exemple, M. le Président, des gens qui nous parlaient de la conception du juridisme fiscal au Québec. La conception du juridisme fiscal au Québec, cela a été, c'est et ce sera toujours de trouver un trou pour passer à côté de la loi. Ce n'est pas autre chose que ça. Etre assis sur des principes philosophiques en matière de fiscalité, c'est s'assurer d'une façon permanente la perte de revenus pour le Québec.

Quant à moi, M. le Président, si je ne pensais qu'à mes intérêts personnels, je me joindrais aux doléances exprimées par l'Opposition officielle et par les créditistes et moi aussi, je dirais: La loi est trop sévère. La loi est en mauvais français. Déférez-là à trois mois, six mois, un an.

Plus ce sera loin, plus l'évasion fiscale continuera, plus ceux qui profitent des trous actuels de la loi, plus ceux qui profitent actuellement de la faiblesse des moyens de coercition du ministre riront et s'amuseront. Pendant qu'on référera à l'Office de la langue française — deux ou trois ans, au minimum, avant d'avoir le rapport — on continuera à faire de la fraude fiscale, alors que le premier devoir du ministre du Revenu, c'est de s'assurer la perception totale et entière des impôts que tous et chacun doivent payer. Ce n'est pas rêver en couleurs.

Tantôt, M. le Président, le député de Beauce nous parlait des ouvriers ou des petits salariés. Eux, ils n'en font pas d'évasion fiscale. Mais, dire que la loi est inhumaine, dire que la loi donne trop de pouvoirs, c'est protéger le gros aux dépens du petit. Quand on me parle de saisies conservatoires, pour l'information du député de Mégantic, cela ne peut pas être déclaré séance tenante. Il faut que ce soit exécuté lorsque déclaré bon et valide. C'est rêver en couleurs de parler de cela. En matière de fiscalité, il faut nécessairement que le ministre puisse agir vite. Si, d'autre part, on a des textes qui ne collent pas au tout de la fiscalité canadienne et je dirais même du nord des Etats-Unis, c'est tellement facile de passer à côté. Il y a des spécialistes dans ces questions. J'ai eu l'occasion de travailler avec eux. On en trouve, des trous.

Quand on sait, M. le Président, le temps que cela prend au ministre actuel qui manque de pouvoirs pour agir, on a le temps de sortir des biens. On a vu cela, M. le Président. Et cela, au détriment de ceux pour qui, comme nous, les députés, on déduit cela à la base sur le chèque. D n'y a pas de fraude fiscale pour un député.

Mais ceux qui sont à leur compte? Les corporations qui font des profits. Les corporations ne sont pas toutes en faillite. Il y en a qui font des profits. Elles font des efforts pour ne pas payer l'impôt. Et il faudrait que le ministre attende des années et que continue la fraude fiscale, pendant qu'Ottawa s'est organisé et va chercher les impôts qui lui reviennent ! Nous, à Québec, nous ferons de la philosophie, de la littérature en matière de fiscalité.

On sait les difficultés budgétaires. Tout le monde crie après le gouvernement. C'est défendu d'aller chercher l'argent, défendu. Cela, ce n'est pas une bonne mesure. Quand le ministre présente des lois qui doivent amener des contribuables à... Il faut que tout le monde paie l'impôt sur le même pied, sinon c'est de l'injustice.

Si je voulais profiter des faiblesses fiscales, moi aussi, je blâmerais le ministre du Revenu de ne pas soumettre cela à toutes sortes de comités. Je lui demanderais même d'avoir un texte... Nous pourrions nous amuser encore plus en matière de fraude. Cela rendrait service à ceux qui fraudent l'impôt.

Mais, en pratique, M. le Président, le principe de ce bill est aussi simple que de donner des instruments de travail au ministre du Revenu. On parlait de l'inviolabilité du domicile. M. le Président, quand quelqu'un va commettre un vol à main armée, on prévoit les moyens pour faire les enquêtes et trouver les voleurs. Pour ceux qui fraudent l'impôt, nous n'avons pas le droit. Frauder l'Etat, c'est permis. C'est une vertu, frauder l'Etat. Il ne faudrait pas que le ministre du Revenu ait les moyens de prendre des mesures très sévères contre ces gens.

Je ne dis pas, M. le Président, que cette loi

doit être citée comme étant la meilleure loi fiscale au monde. Je n'ai pas cette prétention. Mais c'est un sérieux pas en avant. Si on pouvait appliquer plus souvent ce principe, nous, les petits salariés du Québec, nous aurions peut-être l'impression que tout le monde est sur le même pied et ce serait moins choquant de payer nos impôts.

M. le Président, qui aime payer des impôts? Personne. C'est toujours désagréable de payer des impôts. Mais nous vivons en société, dans une collectivité. Nous devons nous organiser. Pour cela, il faut que tout le monde dépose son pécule. Mais, ce qui est frustrant, c'est quand on sait, pour l'avoir vécu et l'avoir vu, que des gens qui, à cause de leurs revenus, devraient payer $15,000, $20,000 ou $50,000 d'impôts, en paient $8,000, $10,000 ou $12,000. Ces gens se promènent en disant: As-tu vu le Revenu, à Québec? Je les ai eus!

Et il serait défendu a notre ministère du Revenu de s'équiper de ce que j'appellerai ce système de fraude fiscale qui est érigé au Québec à une échelle beaucoup plus élevée que la plupart des gens de cette province peuvent l'imaginer. Il faut l'avoir vécu pour voir le nombre de trucs légaux que permettent les lois actuelles. On ne peut blâmer le ministère du Revenu du Québec, sous tous les gouvernements, parce que ça prenait du temps à agir à cause de toutes sortes de raisons administratives et que certains pouvoirs ne lui étaient pas accordés. On a vu des contribuables sortir des biens du Québec et au moment où on venait pour exécuter des saisies contre des gens qui devaient des dizaines de milliers de dollars, qui normalement auraient eu les moyens de payer leur dû, il ne restait plus de biens, les valeurs mobilières étaient parties, rendues en Suisse, aux Bermudes, etc. Le gouvernement de la province perdait de l'argent. On se retournait et on disait: Nulla bona. Il n'y avait pas de biens, on fermait le dossier. Mais celui qui est salarié, comme disait le député de Beauce, il n'a pas le choix, on retient l'impôt à la source.

M. le Président, si le ministère du Revenu non seulement ne possède pas les pouvoirs prévus au bill 5 mais ne se donne pas d'autres pouvoirs éventuellement, ça sera encore au détriment de la masse des travailleurs du Québec et pour favoriser certains individus ou corporations qui, eux, parce qu'ils sont à leur compte, parce qu'ils possèdent toutes sortes de moyens ou qu'ils se font conseiller toutes sortes de moyens, réussiront à éviter de payer au ministère du Revenu du Québec les sommes d'argent qui normalement devraient lui être versées.

Malgré que sur le plan sentimental l'on puisse reprocher des défauts de forme, malgré que sur le plan politique l'on puisse tenter de faire dévier le débat sur une chicane constitutionnelle, je me rallie beaucoup plus aux propos du député de Gouin qui dit que tout simplement c'est de mettre Québec à l'heure de 1971 en matière de récupération fiscale. C'est, à mon sens, une excellente loi.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: M. le Président, pour ma part je me contenterai de quelques brèves remarques. Le député de Gouin vous a dit au nom de notre groupe que nous favorisions toute mesure qui avait pour but de freiner ou d'éliminer la fraude fiscale. Je dois dire que le discours du député de Montmorency m'a véritablement émerveillé, j'ai été frappé par la connaissance approfondie qu'il avait de toutes les façons dont on pouvait frauder le fisc.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons lui demander de faire nos rapports d'impôt.

M. LAURIN: Et j'espère que ses adversaires, lors de la prochaine campagne électorale, ne diront pas que ses connaissances étaient suspectes.

Il y a un autre principe du projet de loi pour lequel nous sommes fortement, c'est celui de l'humanisation. Nous sommes conscients, en effet, qu'il y a plusieurs catégories de travailleurs au Québec dont les revenus sont variables d'une année à l'autre et nous pensons qu'il n'est que juste que la perception de l'impôt sur ces revenus variables soit étalée sur plusieurs années et que l'Etat se base sur la moyenne des revenus plutôt que sur le revenu annuel.

Nous savons que l'Etat a cédé en ce domaine aux pressions, aux représentations qui ont été exercées depuis longtemps par les diverses catégories de travailleurs touchés, en particulier les artistes et les sportifs, mais nous suggérons quand même au gouvernement de penser à d'autres catégories de travailleurs qui peuvent se trouver dans des situations identiques et dont la voix n'est pas assez forte pour avoir encore été entendue par le gouvernement.

Je ne connais pas toutes ces catégories de travailleurs; je connais cependant les écrivains, certains journalistes, malgré toute la réputation qu'on leur fait dans certains quartiers, et je pense que si l'on veut humaniser cette loi, si l'on veut être juste pour toutes les catégories de citoyens, il faudrait quand même que le gouvernement, à l'occasion de la présentation de ce projet de loi, fasse un inventaire de toutes les catégories de travailleurs qui pourraient profiter de cette humanisation de la loi.

Par ailleurs, je reconnais que le ministre du Revenu a déclaré que, même si les projets de loi qu'il présente actuellement sont nombreux, ils ne constituent, dans son esprit, qu'un préalable à cette réforme fiscale en profondeur qu'il envisage. Je sais bien qu'il est conscient des inégalités fiscales actuelles et je sais bien qu'il entend, dans la mesure de ses moyens, y mettre

ordre le plus tôt possible. Nous avons retrouvé cette même préoccupation dans le discours du budget, alors que le ministre des Finances énumérait lui-même deux ou trois domaines où la fiscalité ne lui semblait pas équitable, à l'heure actuelle. Cependant, je rejoins ici la préoccupation de mon collègue de Gouin lorsqu'il disait qu'il était inquiétant de voir l'état d'esprit, pour ne pas dire la philosophie, qui présidait à l'action du ministre en ce domaine.

Dans l'article auquel mon collègue faisait allusion, en effet, le ministre du Revenu s'était refusé à préciser la date d'entrée en vigueur de la réforme en profondeur à laquelle, selon lui, travaille actuellement l'équipe ministérielle, malgré que cette équipe ministérielle possède, depuis longtemps, un document de base auquel il peut se référer dans l'élaboration de ses réformes fiscales en profondeur, c'est-à-dire le rapport de la commission Bélanger. C'est la raison pour laquelle cette réforme, qui n'a que trop tardé, doit être mise en plan immédiatement, mais c'est également la raison pour laquelle nous nous inquiétons que le ministre ait insisté sur le fait que le sort de la réforme fiscale du Québec soit intimement lié à celle que le gouvernement fédéral fera à l'échelle nationale.

Nous nous inquiétons donc beaucoup que le ministre ait émis l'opinion que le fédéral devra élaborer sa réforme fiscale avant que le Québec suive, sur le même chemin, et élabore la sienne. Il nous semble, en effet, que c'est une attitude dangereuse et qui n'est peut-être pas pragmatique, également. Pourquoi attendre que le champ de la fiscalité québécoise soit envahi par des empiètements, comme cela s'est produit dans tant d'autres domaines, et que nous en soyons réduits à être sur la défensive et à repousser un adversaire qui s'est avancé trop loin sur notre territoire? Est-ce que la meilleure façon de se défendre n'est pas d'attaquer ou plutôt d'occuper le terrain qui est le nôtre, de l'occuper pleinement, de l'occuper entièrement, avec toutes les armes techniques que la science administrative met actuellement entre nos mains.

D'ailleurs, M. le ministre, les bienfaits de la fiscalité québécoise, dont nous pouvons nous féliciter aujourd'hui, n'ont-ils pas été acquis à la suite d'initiatives québécoises qui, en apparence, allaient à l'encontre de positions prises par d'autres gouvernements? Je vous réfère ici, par exemple, à l'institution de l'impôt sur le revenu instauré pour la première fois dans le Québec en 1954. C'était alors une initiative bien modeste, c'était un grain de sénevé, mais il a fallu plusieurs années avant que ce grain de sénevé devienne quand même un arbre respectable puisque nous savons maintenant que nous occupons la moitié du champ de l'impôt sur le revenu.

Dois-je également rappeler au ministre d'une équipe ministérielle que c'est par des prises de position catégoriques d'un premier ministre du

Québec, en ce qui concerne le rapatriement de points d'impôt, que nous avons pu continuer à faire des progrès dans ce champ qui est tellement important pour le progrès du Québec et en particulier de l'économie québécoise. Il me semble que cette attitude dynamique, que cette attitude vigoureuse nous paraît plus conforme aux intérêts du Québec.

M. le ministre, vous, en tant que ministre du Revenu québécois, et le ministre des Finances en tant que ministre des Finances du Québec, n'êtes-vous pas plus conscients des besoins du Québec, des aspirations du Québec, des problèmes et des difficultés du Québec que nos homologues d'un autre gouvernement? Ne vous semble-t-il pas que vous êtes en bien meilleure posture pour penser aussi bien à la philosophie qu'aux détails d'une politique fiscale qui serait véritablement adaptée à nos besoins?

A l'occasion, donc, de la présentation de ce projet de loi, je souhaiterais que le ministre du Revenu et que ses homologues du comité de législation prennent l'occasion par les cheveux pour réitérer, dans la réplique que vous allez faire dans quelques instants, qu'ils prennent l'initiative de commencer à jeter les fondements d'une politique fiscale proprement québécoise qui, bien sûr, tienne compte du contexte fédéral dans lequel nous vivons, mais qui tienne compte, bien davantage encore, de toutes les études que vous connaissez, j'en suis sûr, et des éléments fondamentaux des réformes que votre équipe peut avoir élaborées dans le secret du conseil des ministres. Qu'il profite de cette occasion pour faire connaître à la population les éléments fondamentaux de cette politique et les mesures principales, essentielles que vous envisagez pour traduire, dans la réalité fiscale, les aspirations du Québec, ainsi que les difficultés ou les problèmes que nous connaissons à l'heure actuelle.

Je souhaite donc, à la fin de cette deuxième lecture du projet de loi, que vous déclariez à cette Chambre que vous entendez, avec votre équipe, occuper immédiatement et pleinement tout le champ de la fiscalité québécoise, dans le sens de nos meilleurs intérêts.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable ministre des Finances.

M. Raymond Garneau

M. GARNEAU: M. le Président, je voudrais faire quelques remarques sur le projet de loi no 5 pour dire jusqu'à quel point ce premier projet de loi dont nous entreprenons l'étude, et qui fait partie d'une série de neuf projets de loi, est important pour le gouvernement du Québec. J'ai souligné, dans le discours du budget de la semaine dernière, qu'avant même de songer à quelque réforme que ce soit du côté de la taxation, il fallait travailler ardument à apporter à nos lois les amendements nécessaires

pour nous permettre de percevoir les sommes qui nous étaient dues.

M. le Président, cette réforme fiscale que nous entreprenons avec l'étude du bill no 5 avait été annoncée dans le discours du budget du 18 juin dernier et, n'eussent été des événements pénibles de l'automne 1970, il est plus que probable que ces projets de loi seraient déjà dans nos statuts.

L'objectif visé, c'est donc de faire en sorte que, par équité fiscale, le ministère du Revenu et le titulaire de ce ministère puissent bénéficier de tous les atouts, de tous les instruments, de tous les textes juridiques nécessaires à percevoir les sommes qui sont dues.

Je pense que le premier principe d'équité fiscale, c'est de percevoir ces sommes qui autrement sont conservées par des contribuables récalcitrants qui trouvent, comme le disait le député de Montmorency, toutes sortes de trucs, qui font preuve d'une très grande imagination pour ne pas payer les impôts qui sont dues au gouvernement.

M. le Président, nous avons l'intention —je l'ai indiqué en reprenant ici les propos du premier ministre — d'entreprendre une réforme fiscale en profondeur. Le député de Bourget, le chef du Parti québécois, a parlé de philosophie fiscale, a parlé d'une taxation québécoise. Mais je pense qu'il faut faire une distinction entre le partage fiscal, qui fait l'objet de discussions et qui fera l'objet de discussions lors des négociations pour le renouvellement des accords fiscaux de 1967—1972 et les techniques, et les lois qui permettent au gouvernement de quelque juridiction que ce soit de percevoir les impôts que ces lois lui permettent déjà de percevoir. Ce partage fiscal a déjà été indiqué comme étant nécessaire, comme étant prioritaire, non seulement au niveau des points d'impôt mais également au niveau des transferts nets de revenus.

Le premier ministre, et je l'ai fait moi-même, a indiqué qu'il fallait être prudent, si nous nous attachions trop exclusivement aux transferts de points d'impôt, parce que, évidemment, le point d'impôt est relié plus directement à la croissance du revenu, alors que les transferts fiscaux nets, basés sur des améliorations à la péréquation, peuvent être beaucoup plus avantageux pour le Québec.

Je voudrais apporter quelques remarques sur les propos qu'a tenus le député de Maskinongé concernant l'origine du bill 5, à savoir si c'est un projet conçu par l'ancien gouvernement ou par le nouveau gouvernement. C'est toujours facile de répéter, à chaque fois qu'il y a un projet de loi: Ah! à un moment donné, un comité, en 1967, avait déjà travaillé là-dessus. Mais je pense que ce qui est important, c'est de traduire des intentions, de les traduire dans l'action. C'est ce que le ministre du Revenu fait ce soir en présentant le projet de loi no 5.

Mais ce qui est le plus surprenant dans les propos du leader de l'Opposition officielle, c'est qu'alors qu'il dit que le projet de loi no 5 est l'inspiration de l'ancien ministre du Revenu, et député de Pontiac, M. Johnston, du même souffle, il dit que ce projet de loi n'a pas de sens, qu'il est rédigé dans un mauvais français...

M. PAUL: M. le Président, sur un point d'ordre! En vertu de l'article 270 du règlement.

UNE VOIX: Non, vous ne me dites pas!

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Le député de Maskinongé.

M.PAUL: Merci, M. le Président. Je n'ai jamais dit ça. J'ai surveillé l'honorable ministre des Finances qui a dormi une partie de la veillée et quand j'ai dit...

M. GARNEAU: M. le Président, question de privilège.

M. PAUL: ... M. le Président...

M. GARNEAU: Question de privilège, M. le Président.

M. PAUL: Non, je regrette.

M. GARNEAU: M. le Président, question de privilège.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre! Le ministre des Finances se lève sur une question de privilège.

M. PAUL: C'est réglé.

M. GARNEAU: Je comprends que le député de Maskinongé qui a une très grande expérience de la Chambre veut voir inscrits dans le journal des Débats les propos qu'il vient de tenir. Mais vous comprendrez que je ne peux accepter que ces propos restent sans réplique étant donné que c'est complètement faux. Alors qu'il parlait je me suis même souvenu de la référence mutatis mutandis, il parlait des références aux lois fédérales, je me suis souvenu des projets de loi sur lesquels j'avais travaillé alors que j'occupais d'autres fonctions, dans d'autres disciplines et que nous avions ces références dans d'autres lois que son propre gouvernement, alors qu'il était au pouvoir, avait incluses dans les textes de loi.

Je suis allé chercher les références pour pouvoir mieux les lui citer.

M. PAUL: M. le Président...

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Je laisse continuer le député de Maskinongé sur son rappel au règlement.

M. PAUL: Maintenant, M. le Président, en vertu de l'article 285, 19e, je suis obligé de

prendre la parole du ministre qui ne dormait pas, même s'il avait les yeux fermés. Ce qui est plus grave, c'est qu'il n'a pas compris. Cela est plus alarmant. C'est plus alarmant. En aucun temps, M. le Président, je n'ai dit que nous avions accepté le texte des lois que nous avions et je le répète, je le répète, jamais nous n'aurions consenti à un tel "aplatventrisme" devant le gouvernement central, devant vos maîtres d'Ottawa.

M. GARNEAU: Ce n'est pas un point d'ordre.

M. PAUL: Oui, en vertu de l'article 270 du règlement, lisez-le, lisez-le!

M. GARNEAU: Ce n'est pas une réplique.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Je suis convaincu que le député de Maskinongé est satisfait. Il vient de faire valoir les points qui avaient été mal compris, ce dont il se plaignait.

M. PAUL: M. le Président, plus que satisfait.

M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Alors, le ministre des Finances.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre s'endormait cet après-midi et ce soir.

M. GARNEAU: Tout le monde étant satisfait, M. le Président, je vais continuer. Du même souffle alors que le député de Maskinongé soulignait que l'action du ministre du Revenu n'était que la reprise de lois conçues par l'ancien ministre du Revenu, M. Johnston, du même souffle, il disait que ce n'était pas un bon projet de loi et, finalement, il concluait en disant que même si ça ne donnait rien, il allait voter pour le bill no 5, parce que c'était pour empêcher une certaine fraude fiscale.

C'est une chose incompréhensible, M. le Président. Tous les propos du député de Maskinongé, il faudrait les reprendre au texte pour s'apercevoir jusqu'à quel point il y avait contradiction par-dessus contradiction. Mais revenant à un point qu'il a traité avec beaucoup de passion, beaucoup de conviction, je voudrais référer le député de Maskinongé aux statuts de 1966/1967 — c'est maintenant le chapitre 32 — loi sanctionnée le 29 juin 1967. A l'article 2 de ce bill, de ce chapitre 32, on indique que la Loi du ministère du Revenu, de l'impôt du revenu est modifiée, et l'article 12 se lit de la façon suivante:

Sont exclus du calcul du revenu d'un contribuable, pour une année d'imposition, tout montant qui est déclaré exclu par les règlements et sous réserve des dispositions expresses au contraire contenues dans les règlements, tout montant qui, pour la même année d'imposition, est, pour les fins de l'impôt fédéral sur le revenu, exclu du montant du revenu par la Loi du Parlement du Canada, et, M. le Président, les références directes...

M. PAUL: Est-ce que le ministre me permettrait une question. Est-ce que le texte n'est pas écrit dans les statuts, le texte écrit, c'est cela que nous reprochons au gouvernement, c'est de ne pas avoir le courage de faire son texte...

M. GARNEAU: ... une référence directe à un statut fédéral, imaginez-vous...

M. PAUL: ... un texte écrit.

M. GARNEAU: ... c'est un scandale aujourd'hui et, dans leur temps, ils présentaient des projets de loi avec des références... D'ailleurs, le fondateur de l'Union Nationale, M. le Président, dans le premier projet de loi qu'il a voté pour l'impôt sur le revenu... Relisez ce texte et vous allez voir des références continuelles à la loi fédérale, non seulement au point de vue des textes, mais au point de vue de l'interprétation, M. le Président. Je ne comprends pas le député de Maskinongé qui se scandalise aujourd'hui, alors que dans...

M. PAUL: Est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. GARNEAU: Mais, M. le Président... M. PAUL: Très bien.

M. GARNEAU: Le député de Maskinongé blâme le ministre du Revenu de se référer à des lois fédérales.

M. PAUL: M. le Président, je signale qu'il est onze heures.

DES VOIX: II n'est pas onze heures.

M. HARVEY (Chauveau): II n'est pas encore onze heures.

M. GARNEAU: Le même projet de loi, M. le Président...

M. PAUL: M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est onze heures?

DES VOIX: II n'est pas onze heures. M. GARNEAU: ... qui modifiait...

M. PAUL: M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est onze heures?

UNE VOIX: II manque deux minutes.

M. LEVESQUE: Puis-je signaler au député qu'il n'est pas onze heures?

M. HARVEY (Chauveau): II est dans l'erreur, comme d'habitude.

M. LE PRESIDENT: Je remarque qu'il est onze heures moins deux minutes.

M. PAUL: Moins deux minutes, merci, M. le Président. Je vais faire une motion. Je voudrais faire une motion pour que vous puissiez disposer des deniers nécessaires pour que ceux qui ont besoin d'avoir un examen de la vue puissent en bénéficier parce que, quant à nous, nous voyons onze heures.

M. GARNEAU: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. GARNEAU: Je comprends que le député de Maskinongé n'aime pas...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est maintenant onze heures?

M. GARNEAU: M. le Président, je comprends que le député de Maskinongé et maintenant le député de Chicoutimi...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Onze heures.

M. GARNEAU: ...n'aiment pas qu'on leur prouve leur turpitude, leur inconséquence...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Onze heures, onze heures, M. le Président !

M. GARNEAU: ...jusqu'à quel point... M.TREMBLAY (Chicoutimi): Onze heures.

M. GARNEAU: M. le Président, je demande l'ajournement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il est onze heures.

M.GARNEAU: M. le Président, je demande l'ajournement du débat.

M. DUMONT: Est-ce que nous pouvons savoir quels travaux nous entreprendrons lundi après-midi?

UNE VOIX: Demain matin.

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à lundi...

M. BURNS: M. le Président, sur une question de privilège. Je voudrais remercier le député de Taillon de nous avoir permis de siéger ce soir.

M. LEDUC: Bienvenue.

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à lundi, quinze heures.

M. DUMONT: Nous aimerions savoir, lundi à trois heures, quels projets de loi seront présentés.

M. LEVESQUE: Le député n'a qu'à consulter son feuilleton.

M. DUMONT: Mais, M. le Président, nous avons eu, aujourd'hui, le projet de loi 14...

M. PAUL: M. le Président...

UNE VOIX: Voulez-vous faire taire la mouffette de l'Union Nationale?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. DUMONT: En ce qui concerne...

M. HARVEY (Chauveau): Vous violez le règlement !

M. DUMONT: Alors, pour la bonne marche de la Chambre, M. le Président, je demande quel projet de loi sera discuté à trois heures, lundi, et nous avons le droit de le savoir.

M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à lundi, quinze heures.

(Fin de la séance: 22 h 58)

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