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(Quinze heures neuf minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes. Présentation de pétitions.
Pétitions
M. BURNS: M. le Président, au nom du député de
Lafontaine, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de
présenter le projet de loi numéro 102, intitulé Loi
modifiant la loi concernant les commissaires d'écoles pour la
municipalité de ville d'Anjou, dans le comté de Lafontaine.
M. LE PRESIDENT: Ce n'est pas tout de suite. C'est un projet de loi.
M. BURNS: Je m'excuse, M. le Président.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion
pour qu'il me soit permis de présenter la pétition de Joachim des
Riviè-res-Tessier et autres, demandant l'adoption d'une loi concernant
la succession Cyrille Tes-sier, et que cette pétition soit maintenant
présentée, lue et reçue.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
Lecture et réception de pétitions. Présentation de
rapports de commissions élues.
Commission de la Fonction publique
M. BOSSE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la
commission de la Fonction publique a siégé les 9, 10, 11 et 23
mars, relativement au conflit de la classification des enseignants, et qu'elle
a entendu les parties.
M. LE PRESIDENT: Présentation de motions non
annoncées.
Commission de l'Assemblée nationale
M. LEVESQUE: M. le Président, le rapport de la commission de
l'Assemblée nationale.
La commission de l'Assemblée nationale a l'honneur de soumettre
à votre honorable Chambre son cinquième rapport.
Votre commission est d'avis que la pétition et l'avis sont
réguliers et suffisants et que le bill est régulier et conforme
à la pétition et à l'avis dans chacun des cas
ci-après:
Des commissaires d'écoles pour la municipalité de ville
d'Anjou, dans le comté de Lafontaine, demandant l'abrogation de deux
lois les concernant.
M. LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé?
UNE VOIX: Agréé.
M. LE PRESIDENT: Agréé.
Présentation de bills privés.
M. LEVESQUE: M. le Président, aux motions non
annoncées.
Commission de la liberté de la presse
M. LEVESQUE: Avec le consentement unanime de cette Chambre, qu'il me
soit permis de proposer qu'une commission spéciale de onze membres soit
instituée avec pouvoir d'entendre des témoins, d'en assigner, si
besoin est, et de siéger pendant l'ajournement de la Chambre pour
poursuivre l'examen du problème de la liberté de la presse, des
faits qui peuvent la mettre en danger et d'examiner si les lois de la province
en assurent la protection.
Que messieurs Bacon, Bourassa, Cloutier (Ahuntsic), Cloutier
(Montmagny), Drolet, Hardy, L'Allier, Laurin, Leduc, Tremblay (Chicoutimi) et
Veilleux forment ladite commission, que le quorum en soit fixé à
six, que M. Veilleux soit nommé président et que cette commission
tienne une séance le mardi 6 avril 1971, à neuf heures trente, en
la salle 81-A de l'Assemblée nationale.
M. PAUL: M. le Président, je me demande si on a examiné la
procédure que l'on introduit aujourd'hui. Est-ce par voie de motion
annoncée ou par voie de motion non annoncée? De toute
façon, je m'en réfère, en la matière, à mon
collègue, le député de Chicoutimi, qui est le porte-parole
officiel du parti à cette commission spéciale de la
liberté de la presse.
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, il y a eu demande du consentement
de la Chambre. Puis-je demander à la Chambre s'il y a consentement ou
non? Autrement, je crois qu'il faudra que cette motion soit
annoncée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, nous voulons bien
collaborer avec le gouvernement et donner notre consentement.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée, avec le
consentement de la Chambre?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
Commission des Affaires sociales
M. LEVESQUE: M. le Président, avec le consentement unanime de
cette Chambre, qu'il me soit permis de proposer que la commission des Affaires
sociales siège mardi le 6 avril, pendant que la Chambre est en
séance, en la salle 81-A afin de poursuivre l'étude du bill
69.
M. LE PRESIDENT: H s'agit du même cas. Cette motion est-elle
adoptée, avec le consentement unanime de la Chambre?
M. PAUL: M. le Président, si nous pouvions savoir l'heure, ce
serait plus facile.
M. LEVESQUE: Ce serait après la période des questions,
vers quatre heures de l'après-midi.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
Présentation de bills privés. L'honorable
député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour
qu'il me soit permis de présenter, au nom du député de
Lafontaine, le projet de loi numéro 102, intitulé Loi modifiant
la loi concernant les commissaires d'écoles pour la municipalité
d'Anjou dans le comté de Lafontaine.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai l'honneur de proposer que
ledit bill soit référé à la commission des bills
privés et publics, qui tiendra séance mardi, le 6 avril 1971,
à l'heure indiquée au feuilleton.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Y a-t-il d'autres bills
privés?
Présentation de bills publics. M. LEVESQUE: D.
Projet de loi no 97 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Laurier propose la
première lecture du projet de loi concernant le fonds industriel de la
ville de Mont-Royal. Cette motion est-elle adoptée?
M. PAUL: Explications, M. le Président.
M. MARCHAND: M. le Président, permettez-moi de donner des
explications sur le bill 97, que vous venez de proposer. La ville de Mont-Royal
avait créé un fonds industriel au montant de $1,500,000. Elle a
acquis, par voie d'expropriation, un terrain pour fins industrielles et la
sentence de la Régie des services publics a fixé à
$1,502,000, somme qui ne comprend ni les intérêts
accumulés, ni les frais.
La ville désire vendre une partie du terrain à la
compagnie Divco, Division Construction Company Limited, à un prix
inférieur au prix coûtant, opération
considérée comme illégale par le ministre de la Justice;
la ville et la compagnie Divco sont liées par une option à cet
égard. Par ailleurs, en vertu d'une convention liant les trois parties,
Divco s'est engagée à construire une bâtisse industrielle
sur ce terrain. La caisse de dépôt s'est engagée à
acquérir ce terrain et la bâtisse qui y est construite pour
ensuite louer ces immeubles à la compagnie Magnasonic.
Le président de la caisse de dépôt souhaiterait que
l'acquisition de ce terrain par la ville soit légalisée, d'une
façon sûre dans les meilleurs délais, puisque Magnasonic
exige que la bâtisse soit disponible au plus tard le 15 août
prochain. Des démarches avaient déjà été
entreprises par Me Robert Godin, représentant dans cette affaire et la
ville et la caisse de dépôt en vue de la présentation, par
la ville, d'un projet de loi privé. Toutefois, vu l'urgence de
régler cette situation au plus tôt, pour rencontrer les exigences
de Magnasonic, je crois que le gouvernement devrait procéder par voie de
bill, comme le recommande Me Prieur.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance. Y
a-t-il une motion pour le déférer au comité?
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai l'honneur de proposer que ce
projet de loi soit déféré à la commission des bills
publics et privés et qu'il soit étudié le 6 avril 1971
à dix heures de la matinée, à la salle 81-A.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
Déclarations ministérielles. L'honorable ministre des
Affaires sociales.
Règlements de l'aide sociale
M. CASTONGUAY: M. le Président, au cours des dernières
semaines, les membres de cette Chambre, des media d'information et des
mouvements de citoyens défavorisés ont attiré mon
attention et celle des fonctionnaires du ministère des Affaires sociales
sur certains règlements relatifs à la Loi de l'aide sociale. Tel
que je l'ai déjà mentionné, les fonctionnaires du
ministère ont analysé les implications de certains
règlements de la Loi de l'aide sociale, au cours des derniers mois, et
ils ont proposé des amendements que j'ai, par la suite, soumis au
conseil exécutif et qui ont été approuvés cette
semaine. Certaines modifications à ces règlements sont
très importantes.
Ces amendements visent, d'une part, à adapter certains
règlements, afin de respecter, dans toute la mesure du possible,
l'esprit de la loi qui se veut juste et humaine. D'autre part, un autre grand
objectif recherché est l'élimination ou la diminution de
certaines tâches administratives des agents de sécurité
sociale, ce qui aura, sans aucun doute, d'heureux effets sur le service aux
bénéficiaires de la loi.
Parmi les amendements apportés au règlement, j'aimerais
identifier les plus importants et donner quelques explications pertinentes. Un
article des anciens règlements ou des règlements actuels
prévoit le versement de l'aide sous forme de prêt à des
personnes qui ont une équité nette dans une
propriété servant de résidence, c'est-à-dire la
valeur de la propriété basée sur l'évaluation
municipale, moins le montant de l'hypothèque restant à payer,
supérieur à $8,000 et inférieur à $15,000. L'aide
est refusée si une équité nette atteint $15,000 et plus.
Cet article des règlements a certes été celui qui a
suscité le plus de difficultés et d'iniquités. Les
problèmes qu'il provoque sont d'autant plus aigus qu'il affecte surtout
les personnes âgées, les veuves qui ont hérité d'une
propriété modeste et libre d'hypothèque, dans la
majorité des cas, ou encore ceux qui ont consacré une partie de
leur revenu à la constitution d'une équité.
En vertu de l'amendement, l'aide sera accordée à titre
gratuit, même si une personne a une équité nette dans une
propriété servant de résidence, supérieure à
$8,000, mais inférieure à $15,000 ou à $20,000 dans le cas
d'un agriculteur. L'amendement vise à garantir une aide
appropriée, à titre gratuit, en éliminant par le fait
même l'obligation de suivre le cas en vue du recouvrement de l'aide qui
aurait été autrement versée sous forme de prêt.
En pratique, ceci signifie que d'une part les personnes qui ont une
équité nette inférieure à $15,000 seront
admissibles aux prestations sans être obligées d'engager leur
propriété comme garantie de remboursement.
D'autre part, les personnes qui ont une équité nette de
$15,000 et plus seront également admissibles aux prestations; toutefois
les prestations, dans ce cas, seront diminuées en fonction de
l'importance du montant qui dépasse $15,000. Ceci vise à aider
les personnes dans le besoin sans pour autant les obliger à vendre leur
propriété.
Un autre amendement stipule que l'aide à une famille ou à
une personne seule est maintenant fournie à titre gratuit. Il ne sera
donc plus nécessaire de considérer des revenus
réalisés par un requérant au cours des douze derniers mois
précédant sa demande en vue de déterminer s'il y aura
appel de contributions à la reprise du travail.
Je voudrais signaler que les engagements pris depuis le 1er novembre
1970 par des bénéficiaires de la loi seront annulés en ce
qui a trait à leur propriété servant de résidence.
Un projet d'arrêté en conseil à cet effet sera
approuvé dès la semaine prochaine.
Par ailleurs, les compétences des bureaux locaux et
régionaux d'aide sociale sont élargies en ce qui a trait à
la couverture de certains besoins spéciaux. A titre d'exemple, les
bureaux locaux et régionaux pourront respectivement autoriser des
prestations de $25 et $75 au lieu de $15 et $50 pour les médicaments.
Cet élargissement permettra de pouvoir traiter les demandes d'une
façon plus rapide en ayant recours moins souvent au palier central
d'acceptation, soit le ministère, sans pour autant provoquer une
augmentation des déboursés, étant donné qu'aucun
amendement au chapitre des besoins spéciaux ne prévoit le
dépassement des montants qui étaient déjà
prévus au palier supérieur de décision.
Un autre amendement important prévoit que l'enfant
dépendant qui atteint l'âge de 18 ans et qui continue ses
études est considéré comme enfant à charge et non
comme adulte. La table pour les frais de nourriture, vêtements, besoins
personnels et domestiques est majorée de $10 par mois pour cet enfant.
Le passage d'un enfant dépendant qui atteint 18 ans à la
catégorie d'adultes était une cause de réduction selon les
anciens règlements. Pour corriger cette anomalie, l'amendement de cet
article du règlement prévoit un montant additionnel de $10 par
mois pour les besoins énumérés au paragraphe
précédent. Ce montant de $10 compensera également la perte
des allocations scolaires pour l'étudiant.
Avant de terminer, je voudrais insister sur le fait que l'amendement
relatif à l'équité nette qu'a une personne dans une
propriété servant de résidence entrera en vigueur le 1er
mai. Les autres modifications prendront effet le 1er juillet.
De tels délais sont nécessaires afin de préparer
l'impression des règlements refondus, de modifier les cahiers de
procédure et de permettre aux agents de sécurité sociale
de se familiariser avec ces amendements.
Il est possible que d'autres modifications soient apportées
ultérieurement, à la lumière de l'expérience de
l'application de la Loi de l'aide sociale. Enfin, M. le Président, je
voudrais profiter de l'occasion pour féliciter tous les fonctionnaires
qui, directement ou indirectement, ont participé à l'application
de la Loi de l'aide sociale, depuis le 1er novembre 1970, et à la mise
à jour des dossiers des bénéficiaires.
Cette tâche a nécessité un vaste effort collectif
qui n'a pas été rendu facile en raison d'un niveau
élevé de chômage pendant cette période et, en
conséquence, d'un nombre accru de demandes d'aide. Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, nous apprenons avec
grand plaisir les modifications importantes apportées aux
règlements de la Loi de l'aide sociale. Tous les députés
avaient été à même, dans leur bureau, de constater
en pratique les difficultés que posaient ces articles auxquels a
référé le ministre, en particulier cette clause qui
exigeait du bénéficiaire le remboursement de son allocation s'il
avait une équité nette supérieure à $8,000.
Le problème se posait aussi pour les enfants qui atteignaient
l'âge de 18 ans et qui étaient encore aux études. Egalement
aussi, la troisième modification pour l'élargissement de la
compétence des bureaux locaux dans l'appréciation des besoins
spéciaux. Ce sont là des modifications importantes qui vont
permettre aux fonctionnaires de l'aide sociale de faire une meilleure
application de la loi. Elles vont permettre également aux
bénéficiaires de l'aide sociale de régler des
problèmes extrêmement difficiles. M. le Président, je
voudrais ajouter à l'intention du ministre, qu'il reste, à mon
avis, un problème important encore dont il ne nous a pas parlé,
mais auquel il est sensibilisé. J'ai eu l'occasion de parler avec lui de
ce problème et même je lui avais posé une question
antérieurement. C'est au sujet des mères
nécessiteuses.
Il y a là un problème. Je sais que le ministre des
Affaires sociales a commencé à étudier ce
problème-là. Je l'incite à continuer à se pencher
sur toutes les implications qu'il y a pour les mères
nécessiteuses de recevoir une allocation d'aide sociale en vertu de la
nouvelle loi au lieu de l'ancienne.
Alors, je voulais attirer l'attention du ministre des Affaires sociales
sur ce point particulier.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.
M. BOIS: M. le Président, je tiens à remercier très
sincèrement M. le ministre des Affaires sociales d'avoir apporté
les amendements pour lesquels nous avons apprécié sa constatation
après les demandes qui lui furent faites par le public ainsi que,
plusieurs fois, par nous-mêmes.
Nous apprécions infiniment cet élargissement de la loi en
ce qui concerne la question de l'équité domiciliaire et nous
sommes assurés que, dans les questions d'évaluation, un tel
changement visera certainement la majeure partie des cas où il y aura
des résidences qui sont, ce qu'on appelle réellement,
personnelles et non résidences à revenus.
Il y a cependant juste un point et j'appuie les paroles de mon
confrère, le député de Montmagny, quand il parle du
troisième point concernant l'élargissement sur les
médicaments, qui est omis de cette déclaration
ministérielle et que nous aimerions beaucoup voir M. le ministre
approfondir un de ces jours et c'est celui qui concerne
présentement, dans le règlement des allocations, par exemple les
enfants qui sont sur le marché du travail et qui résident avec un
ou des parents invalides. Je sais que M. le ministre s'arrêtera, sans
doute, à considérer ce point et nous apprécierions
infiniment qu'un de ces jours nous ayons une décision
ministérielle à cet effet.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. LESSARD: C'est avec plaisir que nous avons entendu le ministre faire
certaines corrections à la Loi de l'aide sociale. Il y a certaines
remarques qui ont été faites tout à l'heure et que je fais
miennes. Cependant, je voudrais ajouter, en plus, quelques commentaires, en
particulier au sujet de la table qui concerne la nourriture, les
vêtements, les besoins personnels et domestiques. Il me semble que ces
normes-là sont passablement faibles et en particulier pour certaines
régions. Il me semble qu'on devrait tenir compte du coût de la vie
dans les régions touchant ces différents besoins-là.
Même sans tenir compte du coût de la vie, quand on considère
les critères de cette table-là, on s'aperçoit, par
exemple, que pour une famille de deux ou trois enfants, on arrive à
environ $120. Je pense que c'est passablement faible. Je n'ai pas les chiffres
exacts.
Autre remarque que je voudrais faire. On devrait tenir compte aussi,
dans cette loi-là, des catégories de personnes. Actuellement,
tout le monde est traité sur le même pied, tout le monde est
soumis aux mêmes normes.
C'est-à-dire qu'il y a des gens qui vivent continuellement du
service social, grâce à l'aide du ministère des Affaires
sociales. Vous avez des gens qui sont assujettis à cette loi parce
qu'ils sont infirmes, parce qu'ils sont invalides. Ces gens vivent
continuellement sous ce système. Ils ne peuvent pas espérer, dans
trois mois, dans quatre mois, pouvoir travailler à un salaire X qui leur
permettra de payer certaines dettes qu'ils auront accumulées.
II me semble que pour ces gens, on devrait en tenir compte. On devrait
avoir une table différente pour eux. Quant aux autres, il reste que,
comme je le disais tantôt, la table est assez faible.
Il y a aussi les personnes seules à qui on accorde un montant de
$75. Je voudrais bien savoir quelle personne seule est capable de vivre avec un
montant de $75, lorsqu'elle est obligée de payer ses dépenses de
logement, ses dépenses de nourriture, etc.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je m'excuse, je ne sais pas en
vertu de quoi je devrais prendre la parole, mais il me semble qu'on
déborde l'objet du règlement.
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. CASTONGUAY: II me ferait grandement plaisir de reprendre la
discussion de cette question lors de l'étude des crédits du
ministère parce que, précisément, cela fait l'objet des
objectifs de la politique de sécurité de revenu que j'ai
déjà exposée.
Je ne veux pas interrompre inutilement le député mais il
me semble que l'objet des amendements apportés ne visait pas ces points
soulevés par le député.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président, mais quand
même, ce sont des remarques sur les amendements au bill 26.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. Je tiens à
féliciter l'honorable ministre des Affaires sociales pour sa
connaissance approfondie des règlements. Je concours à son
idée parce qu'on ne peut pas, sur une déclaration
ministérielle, commencer un débat sur la politique sociale du
gouvernement, car on sait où cela commence mais on ne sait jamais
où cela finit. Je pense bien que ce que le règlement permet, ce
sont de courts commentaires, strictement sur la déclaration
ministérielle.
M. LESSARD: M. le Président, de même que le
député de Montmagny a attiré l'attention du ministre sur
un point particulier, je voulais tout simplement attirer l'attention du
ministre sur deux points.
M. LEDUC: Vous l'avez fait, alors assoyez-vous.
M. LE PRESIDENT: Dépôt de documents.
Dépôt de documents
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer
le rapport annuel du ministère de la Santé pour l'exercice se
terminant le 31 mars 1970.
M. LE PRESIDENT: Questions des députés.
Questions et réponses
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Projet de cartonnerie
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais
poser, selon un usage qui deviendra une tradition, une question au premier
ministre concernant toujours ce fameux projet de la cartonnerie. J'aimerais
savoir du premier ministre s'il a entre les mains un rapport sur le projet de
cette implantation d'une cartonnerie à Cabano ou à
Sacré-Coeur et si, d'autre part, il est au courant des
négociations qu'ont entreprises un certain nombre de
députés de la région de Québec afin que cette
entreprise soit implantée dans la région de Québec ou dans
Québec même.
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai déjà
répondu que la décision ne revenait pas au gouvernement du
Québec. Je devais discuter de la question avec le ministre des Terres et
Forêts et le ministre des Affaires municipales. Pour l'instant, je vais
prendre avis de la question pour les autres aspects de la question du
député de Chicoutimi, mais je tiens à
répéter que la décision ne revient pas au gouvernement du
Québec.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le
Président. Le premier ministre pourrait-il me dire s'il a reçu de
certaines sociétés de pâtes et papier des
représentations indiquant que l'établissement d'une usine de la
nature de celle dont on parle serait de nature à créer un
problème de concurrence dont souffriraient les industries de pâtes
et papier déjà existantes?
M. BOURASSA: Cette question particulière n'a pas
été soumise à ma connaissance, mais le ministre des Terres
et Forêts pourrait peut-être y répondre plus
précisément.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.
Mine Preissac Molly
M. TETREAULT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Richesses naturelles ou au premier ministre. En prenant en
considération le problème de la mine Preissac Molly, le ministre
peut-il nous dire à quel endroit sont rendues les démarches afin
que les gens de cette région sachent à quel endroit ils s'en
iront?
M. BOURASSA: Nous avons discuté de la question à un bref
conseil des ministres aujourd'hui. Nous étions conscients de l'urgence
de
régler ce problème et le gouvernement a pris une
décision de manière à empêcher la fermeture de la
mine en question.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. LAURIN: Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Dans
le Soleil d'hier, on pouvait lire un article, intitulé: "Munro se
montrerait plus exigeant à l'endroit des provinces."
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Depuis quelques jours, plusieurs questions
sont posées en citant des articles de journaux. Je ne voudrais pas que
cette coutume s'établisse en cette Chambre. Je voudrais me permettre
immédiatement, peut-être, de mettre un frein à cette
coutume avant que ça devienne établi. Il est bien clair, en vertu
du règlement, qu'on ne peut pas poser une question en citant un article
de journal.
Conférence des ministres du
bien-être
M. LAURIN: II s'agit, en fait, M. le Président, de la
deuxième conférence fédérale-provinciale des
ministères du bien-être qui se tiendra à Ottawa au mois de
mai. Dans le communiqué émis par la Presse canadienne, on dit que
le ministre fédéral se montrera plus exigeant en raison des
lacunes constatées dans le système de bien-être des
provinces et de l'absence de solution qu'y apportent les provinces.
La question que je voudrais poser au ministre est celle-ci: Ce
problème du bien-être relève-t-il véritablement de
la juridiction fédérale et non pas de la juridiction
provinciale?
Deuxièmement, à la lumière de ce que cette
communication nous apporte le ministre peut-il nous faire part des
éléments de la politique qu'il entend préconiser à
cette conférence?
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai déjà
mentionné que je ne lis pas un grand nombre de journaux, pour des
raisons que...
Je n'ai pas lu cet article auquel fait allusion le député
de Bourget. Quant aux questions, il me semble qu'elles portent sur des
politiques du gouvernement. J'ai déjà donné les grandes
lignes de cette politique que nous entendons poursuivre.
D'ailleurs, en réponse à une question qui avait
été inscrite au feuilleton, j'ai déjà
indiqué qu'au fur et à mesure que les éléments
précis touchant à divers programmes qui seront modifiés
par cette politique auront été acceptés par le
gouvernement nous les proposerons à la Chambre, s'ils nécessitent
une législation ou, encore, nous les rendrons publics, si cela ne
nécessite que des amendements à nos règlements.
Quant à la question de savoir si le gouverne- ment
fédéral a un rôle dans le domaine de l'assistance, nous
savons que le Parlement du Canada a adopté le régime canadien
d'assistance publique, il y a un certain nombre d'années, et que le
Québec a demandé, en vertu de la loi permettant de se retirer de
certains programmes à frais partagés, le retrait de ce
programme.
M. LAURIN: Question additionnelle. Ne vous semble-t-il pas que le sens,
justement, de ces remarques est que le gouvernement fédéral veut
s'arroger une sorte de rôle de préfet de discipline en ce qui
concerne l'observance de ce règlement d'assistance publique?
UNE VOIX: Question.
M. CASTONGUAY: Vous me demandez une opinion et je ne crois pas que ce
soit le moment de le faire, à l'intérieur de la période
des questions.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Témiscouata.
M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, ma question
s'adresse au ministre des Affaires municipales ou, en son absence, au ministre
de l'Industrie et du Commerce. Il y a quelques jours, je demandais au ministre
des Affaires municipales de déposer en cette Chambre le rapport qu'ont
fait préparer conjointement le ministère des Terres et
Forêts et le ministère de l'Industrie et du Commerce relativement
au projet d'une cartonnerie.
On m'avait dit que pour autant que ce rapport était payé
par un ou deux ministères ce serait le droit du député
d'en exiger le dépôt. C'est la deuxième fois que je demande
ce dépôt.
M. BOURASSA: C'est relié à la question du
député de Chicoutimi?
M. SIMARD (Témiscouata): Bien, relié... Je demande le
dépôt du rapport, tout simplement.
M. LEVESQUE: II est public.
M. SIMARD (Témiscouata): Je ne demande pas où sera
implantée l'usine.
M. TESSIER: M. le Président, l'autre jour, mon collègue de
Témiscouata parlait d'un fonctionnaire du ministère des Affaires
municipales, un M. Dufour. Je voudrais préciser, à ce
sujet-là, que le M. Dufour en question, après informations
prises, n'est un fonctionnaire ni des Affaires municipales ni de l'ODEQ
c'est lui qui a fait allusion à un certain rapport mais il est le
commissaire industriel de la ville de Québec. Ceci dit, quant au rapport
lui-même, il n'a été commandé ni par le
ministère des Affaires municipales ni par l'ODEQ et, s'il a
été commandé par un autre ministère, il faudrait
s'adresser au ministre en titre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le
Président. Le ministre des Affaires municipales pourrait-il nous dire
s'il a reçu un rapport des députés de la région de
Québec, concernant ce projet de cartonnerie?
M. TESSIER: M. le Président, personnellement, je n'ai reçu
aucun rapport d'aucun député.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Plaques d'immatriculation de l'armée
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Transports. Est-ce que le ministre des Transports a eu le temps de
vérifier si les camions de l'Armée canadienne, cantonnés
au Québec, avaient eu le temps de se munir de leurs plaques
d'immatriculation du Québec?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Je me demande s'il y
a urgence, alors que nous allons procéder très prochainement
à l'étude des crédits de chaque ministère. Je pense
que cela peut attendre facilement quinze jours, trois semaines, un mois. Il n'y
a pas urgence nationale à cela, je ne le crois pas.
M. LAURIN: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député...
M. LESSARD: Dans le passé, M. le Président, tous les
gouvernements ont refusé...
M. LAURIN: M. le Président, est-ce que je peux faire une
remarque?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! J'ai rendu ma
décision.
L'honorable député de Portneuf.
Cours de maniement d'armes à feu
M. DROLET: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Il y a une
quinzaine de jours, le ministre nous informait que les cours de maniement
d'armes à feu, qui sont donnés dans nos comtés par les
clubs de chasse et de pêche, étaient donnés gratuitement.
Est-ce que le ministre est au courant qu'un montant allant de $2 à $5
est exigé des citoyens qui suivent ces cours et peut-il nous dire quand
cette lacune sera corrigée?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, je persiste à dire
que les cours ne coûtent rien. Il arrive, dans certains cas, que les
associations de chasse et de pêche, qui fournissent d'autres services
à leurs membres, exigent un montant minimum allant de $3, si vous
voulez, à $5. En l'occurence, c'est une décision qui se prend
à l'intérieur de l'association locale. Je ne voudrais pas que le
député induise la Chambre en erreur je sais que ce n'est
pas son intention, d'ailleurs en soumettant qu'il y a des frais pour ces
cours. D'ailleurs, dans plusieurs endroits de la province, ce seront des
officiers du ministère même qui les donneront gratuitement,
lorsqu'il est possible de le faire. Je pense que le député
conviendra avec moi qu'il est normal qu'une association de ce genre-là,
qui offre d'autres services à ses membres, ait le droit d'exiger une
somme minimum pour d'autres services que l'enseignement du maniement des armes
à feu.
M. DROLET: M. le Président, une question supplémentaire.
Je n'avais pas du tout l'intention d'induire la Chambre en erreur. Justement,
j'ai en main une lettre qu'un membre qui suit ces cours m'a remise. Ils sont
invités à aller suivre ces cours gratuitement. Lorsqu'ils
arrivent à l'endroit pour suivre ces cours, on leur demande un montant
d'argent.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais, M. le Président, justement, en
retour de ce montant d'argent, je sais qu'on donne une carte de membre de
l'association. Alors, la personne en question ne devrait pas être induite
en erreur et, si elle ne veut pas devenir membre, elle n'y est pas
obligée. Le groupement est, quand même, censé donner le
cours gratuitement.
M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire, M. le
Président.
M. LESSARD: Je demanderais au ministre de faire une enquête plus
approfondie, parce que, dans ma région, il n'y a aucun service
supplémentaire et nous payons la somme de $6 pour recevoir ces
cours.
DES VOIX: Question.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.
M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire, M. le
Président. Est-ce que le ministre pourrait dire à cette Chambre
afin qu'on puisse informer la population, vu que les cours sont
donnés gratuitement à quelle place on pourrait s'adresser
ou envoyer nos gens pour avoir des cours gratuits?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Déjà, on a mentionné qu'il y
avait différentes associations de chasse et de pêche. Là,
on ne peut pas décider pour eux du montant pour devenir membre. Mais,
nous avons entraîné, à mon ministère, des
employés qui doivent donner justement ces cours. De la publicité
se fait au fur et à mesure que les cours sont offerts au public, dans
les différentes régions de la province. Nous avons l'intention de
continuer à
faire une publicité autour de cela. Peut-être, certaines
personnes intéressées à suivre les cours n 'ont-elles pas
vu la publicité qui a été faite, mais je sais qu'une
publicité a été faite dans les régions où,
justement, les cours ont été tenus. On continuera à tenir
ces cours et à faire de la publicité dans les journaux
locaux.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Gaspé-Nord.
Publicité de l'alcool et du tabac
M. GAGNON: M. le Président, une question à l'attention du
ministre des Affaires sociales. Pourrait-il me dire s'il a l'intention de
suivre l'exemple de la Colombie-Britannique relativement à la
publicité qui est accordée aux boissons alcooliques ainsi qu'au
tabac?
M. CASTONGUAY: D'abord, comme on vient de me le mentionner, je ne crois
pas que cela concerne les Affaires sociales au premier titre. C'est une
question, je pense bien, qui devrait faire l'objet d'une politique du
gouvernement, si jamais le gouvernement décidait de prendre ce genre de
mesures.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
Pêche en eau douce
M. PAUL: M. le Président, je voudrais poser une question à
l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Est-ce que
le ministre serait en mesure d'informer les pêcheurs commerciaux en eau
douce de la politique définitive de son ministère, si elle a
été établie, et nous communiquer toute nouvelle
susceptible de maintenir encore quelques espoirs pour eux de se livrer à
la pêche commerciale à l'occasion de la prochaine saison de
pêche?
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, le député
m'a déjà fait part de son inquiétude et je peux dire que
je la partage. C'est dans cet esprit que je demande périodiquement des
rapports aux biologistes, entre autres au docteur Corbeil qui est à la
direction générale de la chasse et de la pêche. Et si vous
le permettez, M. le Président, je pourrais peut-être lire un
extrait d'une lettre qui me parvenait hier relativement à l'état
de la pollution d'après les analyses faites récemment. La lettre
est d'ailleurs datée du 1er avril: "Le Service de la faune continue de
prélever à intervalles assez réguliers,
c'est-à-dire selon les possibilités des pêches en hiver,
des échantillons de poissons qui ont été soumis pour
analyse en relation avec la pollution par le mercure. "Il existe des variations
parfois assez grandes dans la teneur de mercure entre les régions, les
espèces et même au sein d'une même expèce.
Cependant, les derniers résultats reçus sont très
encourageants et nous espérons pouvoir, pour la prochaine saison de
pêche, considérer d'ouvrir la pêche commerciale par
espèce et par région si le degré de pollution est
inférieur à 0.5 partie par million. Nous pensons notamment
à la carpe et à la barbote qui montrent actuellement une teneur
en mercure inférieure à 0.5 partie par million. "Les
facilités de pêche étant limitées actuellement
à cause de la glace et de la neige qui recouvrent nos nappes d'eau, il
nous faudra attendre qu'il soit possible d'obtenir un plus grand nombre
d'échantillons avant de prendre une décision sur ce sujet. "Un
comité s'occupe du problème du mercure et nous fera les
recommandations appropriées. Toutes les analyses sont faites par le
laboratoire du ministère des Pêches du fédéral,
à Montréal, ce qui assure l'uniformité de la
méthode utilisée et, par le fait même, rend possible la
comparaison entre les résultats d'analyse dans les différentes
provinces. "Pour votre information, nous tenons à souligner que des
barbotes pêchées le 15 mars dans le lac Saint-Pierre indiquent une
teneur en mercure de .25 partie par million. D'autres échantillons
prélevés le 29 mars sont actuellement au laboratoire et les
résultats devraient nous parvenir incessamment."
Dès que les résultats nous seront parvenus sur cette
dernière analyse, je la communiquerai à la Chambre.
M. PAUL: Je voudrais remercier le ministre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
Allocations pour le loyer
M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais poser une question
au ministre des Affaires sociales, à la suite de la déclaration
ministérielle qu'il a faite tout à l'heure et pour laquelle nous
le remercions. Il semble y avoir une interprétation, dans la loi
actuelle, autre que celle de l'esprit de la loi, et qui causerait beaucoup
d'injustices, c'est l'article 3, concernant le montant que l'on accorde aux
gens relativement à l'allocation pour le loyer. Par exemple, lorsqu'un
couple réside avec ses enfants qui sont sur le marché du travail,
l'allocation est réduite à $45, contrairement à ce qu'il
reçoit lorsqu'ils sont aux études, alors qu'ils ont droit en
vertu du règlement no 1, c'est-à-dire dans la zone no 1, à
une allocation de $80 par mois pour leur loyer.
Alors, en plus de réduire l'allocation à $45, on
déduit $24 par enfant. C'est cette chose que je souligne à
l'attention du ministre. Est-ce que le ministre avait l'intention de consulter
le service juridique au ministère des Affaires sociales, afin que cette
situation puisse être clarifiée, et que la loi soit
appliquée selon l'esprit de la loi et non pas un peu de
façon...
M. GARNEAU: Question.
M. ROY (Beauce):... Je veux tout de même expliquer au ministre la
situation, à la suite des représentations que nous avons faites
depuis quelque temps. Je veux demander au ministre s'il a l'intention de
consulter, les conseillers juridiques, le service juridique du ministère
de façon que cette situation puisse être clarifiée?
M. CASTONGUAY: M. le Président, le député m'a
soumis, d'ailleurs, certains cas par écrit. Je lui ai promis une
réponse. La seule réponse que je peux lui donner pour le moment
sur la question spécifique qu'il pose, c'est que la
réglementation de la Loi d'aide sociale est extrêmement complexe.
Elle va demeurer complexe tant et aussi longtemps que cette loi va être
basée sur un critère de besoins, tant et aussi longtemps qu'on
n'aura pas pu la modifier de façon à prendre simplement un
critère de revenu pour déterminer le montant de l'aide.
J'ai dit dans la déclaration, plus tôt, que nous
apporterions, à la lumière de l'expérience, d'autres
amendements à ces règlements, et le cas qu'il mentionne est
déjà à l'étude. Si possible ou si
nécessaire, nous modifierons à nouveau les règlements.
Maintenant, j'aimerais aussi rappeler que dans le cas de l'enfant qui
atteint l'âge de 18 ans, nous avons déjà, dans le
présent règlement, apporté un certain assouplissement. Il
ne faut pas oublier non plus que si l'enfant travaille il a, normalement, et,
je pense, en vertu aussi du code civil, certaines obligations envers ses
parents.
M. ROY (Lévis): Une question supplémentaire qui s'adresse
au ministre des Affaires sociales. Est-ce qu'il y avait un barème
établi de $8,000 pour l'exemption, pour l'évaluation d'un
bâtiment? On a haussé certains barèmes à $15,000.
L'assisté qui a signé une formule indiquant que sa
propriété est évaluée à $15,000, par
exemple, s'il a une propriété qui est évaluée
à $18,000 est-ce que le gouvernement peut reprendre ce qu'il a
versé sur les $3,000 ou sur toute la propriété? Cela nous
est demandé souvent, M. le ministre, je crois que vous pourriez nous
éclairer en nous répondant à ce sujet.
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai donné les grandes
lignes du règlement aujourd'hui, j'ai dit qu'il deviendrait applicable
le 1er du mois de mai étant donné la nécessité
d'envoyer des instructions précises au bureau de l'aide sociale, aux
bureaux régionaux, et ce règlement je l'ai ici, c'est celui qui a
été adopté. Il compte plusieurs pages et je craindrais, M.
le Président, d'entrer dans des détails aussi techniques qui
pourraient par la suite induire en erreur.
Il me semble que là nous entrons à un niveau de questions
suffisamment techniques pour qu'on doive se référer au texte
exact des règlements, aux procédures que recevront les bureaux.
Avec la permission du député, j'aimerais reporter cette question
plutôt au moment où les bureaux auront reçu toutes les
indications. Autrement, toute réponse que je donne, en donnant plus de
détails que le texte du communiqué, est susceptible à mon
avis d'induire en erreur.
M. VINCENT: Alors, M. le Président, c'était justement dans
cet article que je voulais poser une question supplémentaire au ministre
des Affaires sociales en le félicitant d'abord d'avoir fait cette
déclaration aujourd'hui, qui va certainement nous aider dans chacun de
nos comtés.
Ma question supplémentaire était celle-ci: Est-ce qu'il
est physiquement possible pour le ministre pas réalisable
cet après-midi, avant le départ de la plupart des
députés de l'Assemblée nationale, de nous faire parvenir
copie de l'arrêté en conseil afin que nous puissions, dès
la fin de semaine, prendre connaissance en détail de cet
arrêté en conseil qui, en définitive, apporte plusieurs
amendements aux règlements actuels? Si c'était possible, je crois
que ceci serait très apprécié de la plupart des
collègues qui siègent ici en Chambre.
M. CASTONGUAY: Je vais le demander et si c'est possible, ce sera fait.
Maintenant, je ferai remarquer que c'est un règlement qui amende un
autre règlement. Ce n'est pas un texte refondu. Si c'est possible, je
vais demander qu'on en apporte...
M. VINCENT: D'ailleurs, je pense que ce sera publié dans la
Gazette officielle du Québec la semaine prochaine. Cela nous permettrait
de l'avoir un peu avant afin que nous puissions, dès la fin de semaine,
travailler là-dessus.
M. CASTONGUAY: Avec votre permission, je rappelle toutefois qu'il entre
en vigueur, pour la première partie, le 1er mai et pour la
deuxième partie, le 1er juillet.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Lotbinière.
Raffinerie de sucre de Saint-Hilaire
M. BELAND: J'aurais une question à poser à l'honorable
ministre de l'Agriculture. En l'oc-curence, je la poserai à l'honorable
ministre de l'Industrie et du Commerce, s'il veut bien me prêter
attention.
A la suite d'une annonce parue dans la Gazette du 17 mars 1971 et dans
lequel on rapporte que la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire a subi des
déficits de $1,200,000 en 1968 et de $921,000 en 1969, M. le ministre
peut-il nous dire si ces pertes sont dues à la bonne administration,
à l'écoulement des produits à des coûts moindres que
le coût de production ou à cartel quelconque?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est une question d'opinion que vous
demandez au ministre. Ce n'est pas prévu dans les règlements.
C'est strictement une question d'opinion personnelle. Je crois que vous
pourriez formuler votre question autrement.
M. LEVESQUE: D'ailleurs, elle est posée au mauvais ministre. Ce
n'est pas le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a la
responsabilité de la raffinerie. Le député de Nicolet
trouve cela drôle!
M. VINCENT: Je vais répondre. Cela relève d'une
corporation. C'est le prix du sucre.
M. BELAND: Est-ce que l'honorable ministre aurait l'intention de
vérifier la chose ou d'examiner le cas?
M. LEVESQUE: Je suis bien prêt à soumettre la question au
ministre de l'Agriculture qui se fera certainement un plaisir d'y
répondre à la prochaine occasion.
M. BROCHU: Mais il n'est pas là.
Loi de la protection du consommateur
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre des Institutions financières. Est-ce que
l'honorable ministre pourrait nous dire à quel moment il entend
déposer le projet de loi dit de protection du consommateur? Ah! je vois
qu'il est absent. Je m'excuse. Il y a peut-être un autre ministre qui va
répondre. Je note toutefois, M. le Président, que l'honorable
ministre des Institutions financières a fait hier un plaidoyer contre
l'absentéisme. Je demande au ministre de l'Industrie et du Commerce de
nous dire à quel moment on a l'intention de déposer la loi dite
de protection du consommateur.
M. LEVESQUE: Je crois bien, M. le Président, que je doive
à ce moment-ci répondre à la première partie de
l'intervention du député de Chicoutimi en rappelant que l'un de
nos collègues les plus fidèles, ici à l'Assemblée
nationale, c'est le ministre des Institutions financières.
Deuxièmement, quant au dépôt de la loi, discutée
longuement à la commission parlementaire des Institutions
financières, il devrait avoir lieu à la suite de notre
congé de Pâques.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas avant ça!
M. LEVESQUE: Si cela pouvait être avant, que le
député de Chicoutimi soit bien assuré que c'est avec
plaisir que nous le ferons.
Loi de la restructuration scolaire
M. CHARRON: M. le Président, une question du même ordre au
leader du gouvernement. Est-ce que d'ici l'ajournement des vacan- ces de
Pâques le dépôt de la Loi de la restructuration scolaire sur
l'île de Montréal serait fait devant cette Chambre?
M. LEVESQUE: Je préfère attendre le retour du ministre de
l'Education, retour qui aura lieu en fin de semaine. Je lui ferai part de la
question du député à la séance de lundi.
M. CHARRON Très bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. LAURIN: J'avais une question pour le ministre des Communications qui
n'est pas là. J'espère qu'on la lui transmettra.
Nous lui avons posé une question, il y a quelques jours, sur le
dépôt par le ministre fédéral des
Communications...
M. LE PRESIDENT: On m'informe qu'il serait là.
M. LAURIN: Ah! bon.
M. LE PRESIDENT: Si le député veut bien attendre quelques
secondes.
M. LAURIN: J'attendrai quelques secondes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un manque de communication, M. le
Président.
DES VOIX: Le voilà!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On en a récupéré un, M.
le Président.
Télévision par câble
M. LAURIN: M. le ministre, nous vous avons posé, il y a quelques
jours, une question à propos du dépôt des normes de la
télévision par câble par M. Eric Kierans. Vous nous avez
demandé quelques jours pour examiner ces normes. Je me demandais si vous
étiez prêt à nous donner la réponse à cette
question.
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai déjà cette
réponse depuis trois jours dans mes notes. Mais comme la question
m'avait été posée par le député de
Lafontaine et qu'il est absent depuis ce temps, j'attendais son retour en
Chambre pour répondre.
J'ai pris connaissance des documents publiés le 29 mars 1971 par
le ministre des Communications à Ottawa. L'un de ces documents
s'intitule "Notes sur le programme du ministère des Communications
concernant l'application des normes techniques des systèmes de
télédiffusion par câble", le deuxième s'intitule
"Normes techniques et procédures concernant les systèmes de
télédiffusion par câble, systèmes de
télévision à antenne collective".
Après étude de ces documents, j'en arrive à
la conclusion, sur avis des spécialistes en ces matières,
qu'il s'agit de documents de nature purement technique. Pour répondre
plus précisément à la question, ni le ministère des
Communications du Québec ni moi-même n'avons été
consultés par les autorités fédérales à ce
sujet.
Il s'agit de normes techniques et c'est actuellement la
responsabilité du ministère des Communications
fédéral d'établir ces normes techniques d'utilisation
d'équipement en matière de communications. Les documents
déposés ne touchent en rien les conditions, par exemple,
économiques ou sociales d'utilisation de l'équipement. C'est
essentiellement pour un contrôle de la qualité de l'utilisation de
l'équipement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales aimerait
répondre à une question posée préalablement par
l'honorable député de Mégantic.
Renvois à la Régie de
l'assurance-maladie
M. CASTONGUAY: Dans la question, le député s'informait au
sujet de prétendues an-nullations d'emplois à la Régie de
l'assurance-maladie. Le directeur du personnel de la régie nous a
donné les réponses suivantes:
II n'y a eu aucune mise à pied d'employés
réguliers. Il y a eu environ 25 terminaisons d'emplois occasionnels, ce
qui est normal, selon le directeur du personnel de la régie, en raison
du fait que la période d'activité intense suivant la mise en
application du régime est en voie d'être terminée.
Je profite de l'occasion pour dire que c'est exactement la même
chose en ce qui a trait au bureau d'aide sociale. Nous avons recruté un
certain nombre d'employés sur une base occasionnelle pour la
période de révision des dossiers. A mesure que cette
opération est en voie de se terminer on me fait rapport
aujourd'hui qu'elle a été terminée dans le délai de
cinq mois ces emplois ne sont pas renouvelés dans un certain
nombre de cas.
M. DUMONT: Peut-être, M. le Président, le ministre
pourra-t-il nous éclairer. Le but de ma question était surtout de
savoir pourquoi on donne un avis de congédiement le vendredi soir pour
le 31 mars, qui était mercredi, c'est-à-dire seulement deux jours
à l'avance quand ces jeunes n'ont pas eu le temps de chercher d'autres
emplois. C'était surtout pour signaler cette anomalie que j'avais
posé la question. Est-ce que le ministre pourrait nous
éclairer?
M. CASTONGUAY: M. le Président, la régie est un organisme
autonome qui s'administre de la façon qu'elle croit la plus
appropriée. Je demanderai des renseignements pour donner une
réponse au député.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, la période des
questions est-elle terminée?
M. LE PRESIDENT: Elle est terminée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même pas une petite question? Parce que
j'avais une petite question pour le ministre des Richesses naturelles mais je
ne la poserai pas, parce qu'il est présent.
Question de privilège Manifestation au
collège Dawson
M. PINARD: M. le Président, je voudrais vous demander la
permission pour faire une rectification sous forme de question de
privilège, à la suite de la parution, dans le journal The
Montreal Gazette d'aujourd'hui, à la page 3, d'une photographie qui
représente un attroupement d'étudiants du collège
Dawson.
Ils ont fait nier une manifestation pour démontrer leur
opposition au prolongement de la route transcanadienne qui passera à
travers le Carré Viger.
Les étudiants, d'après la nouvelle que je lis dans le
journal et d'après le bas de vignette, auraient tenu cette manifestation
pour symboliser leur opposition au prolongement de cette autoroute qui,
d'après eux, détruira le parc de verdure, et les arbres au centre
de Montréal.
M. le Président, j'aimerais dire que c'est tout à fait le
contraire qui se produira. Si on avait pris la peine de bien s'informer, on
aurait constaté que le ministère de la Voirie, qui est, lui
aussi, soucieux de protéger l'environnement, de protéger les
parcs de verdure, aussi bien dans les villes que dans nos campagnes, a pris les
dispositions nécessaires pour faire passer l'autoroute est-ouest en
tunnel, sous terre. Si, pour des raisons techniques, il devait être
nécessaire, pour une partie du tracé, de détruire le parc
Viger, des dispositions techniques ont été prises pour
reconstituer le parc Viger tel qu'il existe en ce moment. Le parc de verdure
sera bel et bien ce qu'il est en ce moment et, peut-être, mieux que ce
qu'il est en ce moment, parce que nous avons chargé des
aménagistes, des urbanistes et des spécialistes en sylviculture
de reconstituer les lieux et, si possible, de faire mieux que ce qui existe en
ce moment.
Encore une fois, invitation pressante à ceux qui contestent la
décision gouvernementale, aux media d'information et à ceux qui
les représentent de venir nous rencontrer au ministère de la
Voirie. Qu'ils viennent voir la maquette qui est très bien faite,
à l'échelle, qui montre le territoire tel qu'il est en ce moment
et qui est faite de façon réversible pour montrer ce que sera le
territoire du centre de Montréal, la partie ouest de Montréal et
la partie est de Montréal une fois que l'autoroute transcanadienne aura
été prolongée dans ce secteur.
Alors, puis-je demander davantage l'objectivité et
l'honnêteté dans l'information, si on veut contester la
décision gouvernementale? Je sais qu'en vertu du principe de la
liberté d'expression on a droit de faire connaître son opposition.
Je ne peux pas comprendre, cependant, que des journalistes, ceux qui
représentent les media d'information de la presse écrite et
parlée, s'acharnent à vouloir détruire le gouvernement
quand il prend une décision pour revaloriser l'économie de l'Est
de Montréal.
M. le Président, je pense que c'est une mise au point qui
s'impose et, encore une fois, je fais cette invitation pressante de venir
s'informer. S'ils ne veulent pas que nous les informions, nous allons aller
dans le milieu et nous allons informer la population.
M. LAURIN: Voulez-vous recommencer le débat?
M. CHARRON: Si vous aviez soin des citoyens, comme vous avez soin des
arbres.
M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas qu'il y ait eu aucune attaque à
l'endroit des membres de cette Chambre.
M. LAFONTAINE: Le ministre a ouvert un débat. Je veux simplement
dire...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEDUC: Il n'y a pas de débat. Vous voulez suivre les
règlements; nous allons les suivre, nous aussi.
M. LAFONTAINE: Le ministre n'avait qu'à ne pas commencer de
débat.
UNE VOIX: II n'en a pas commencé, c'est vous.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
Peut-être le ministre est-il allé assez loin dans son
exposé, mais les règlements prévoient...
M. LAFONTAINE: C'est justement ça.
M. LE PRESIDENT: De toute façon, ça ne doit pas soulever
de débat et, surtout, je ne dois pas permettre de débat.
M. LEVESQUE: Article 15.
Projet de loi no 14
Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce
propose la deuxième lecture du projet de loi numéro 14, Loi
favorisant la commercialisation du poisson.
M. Gérard D. Lévesque
M. LEVESQUE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande
l'étude à la Chambre.
M. le Président, la Chambre des communes du Canada a
adopté, le 25 février 1970, le bill C-175, Loi concernant la
création de l'Office canadien du poisson salé et la
réglementation du commerce interprovincial et du commerce d'exportation
du poisson salé pour augmenter les gains des producteurs primaires de
normes préparées.
Avant de résumer le contenu de la loi et d'en dégager les
avantages qu'une partie des pêcheurs du Québec pourrait en
retirer, il m'apparaît important de rappeler les raisons qui ont
amené le gouvernement du Canada à intervenir en créant,
justement, l'Office canadien du poisson salé.
Des études en profondeur ont été conduites, ces
dernières années, sur l'industrie du poisson salé dans les
provinces de l'Atlantique. Je mentionne la plus connue, le rapport de la
Commission du poisson salé de l'Atlantique. Il s'est
dégagé de ces études que, premièrement, les 10,000
pêcheurs qui oeuvrent dans l'industrie du poisson salé
connaissaient une productivité en déclin et recevaient des prix
à la baisse depuis 1967, alors que leurs frais d'exploitation
augmentaient.
Deuxièmement, le poisson était généralement
traité d'une façon individuelle et artisanale, avec le
résultat que la qualité du produit n'était pas uniforme et
laissait à désirer. Troisièmement, la concurrence
était de plus en plus grande sur les marchés dominés par
les produits canadiens et les exportations canadiennes de ces produits
diminuaient. Aussi, le gouvernement du Canada a-t-il dû intervenir pour
acheter une partie de la production et l'acheminer vers des pays en voie de
développement. Cela a représenté un peu plus d'un million
de livres, expédiées en 1969.
Quatrièmement, les pêcheurs étaient à la
merci des acheteurs qui, dans les régions isolées, payaient le
prix le plus bas possible. Cinquièmement, la capacité de
transformation était beaucoup trop considérable et donnait lieu
à des coûts fixes anormalement élevés.
Sixièmement, les pêcheurs recevaient une fois l'an,
c'est-à-dire à l'automne, la rémunération de leur
travail, alors que leur mode de vie leur impose des déboursés qui
varient très peu au cours de l'année.
En résumé, une qualité trop variable du produit, la
surcapitalisation dans la transformation, une concurrence serrée sur les
marchés d'exportation et, enfin, des pêcheurs souvent sans
défense devant les acheteurs, voilà succin-tement la situation
qui a amené l'industrie du poisson salé à l'était
de crise, en particulier à Terre-Neuve, au Labrador, et sur la
côte nord du golfe Saint-Laurent. Le gouvernement canadien est venu
à la conclusion que seule une
société de la couronne pouvait apporter une solution
définitive à ce problème.
L'Office canadien du poisson salé, créé par une loi
adoptée par la Chambre des communes le 25 février 1970, est
doté de vastes pouvoirs pour réaliser l'objectif fondamental qui
lui a été fixé, à savoir, relever les gains des
producteurs primaires. L'office peut acheter du poisson brut, fini ou
semi-fini, de la famille de la morue, le recueillir, l'apprêter, le
saler, le sécher et l'empaqueter. Il peut aussi confier ces
opérations à des agents ou organismes locaux. Il peut acheter,
louer ou vendre les biens immobiliers nécessaires à ces
opérations.
Il peut approvisionner les pêcheurs de sel comme de tout autre
matériel nécessaire à la préparation ou à la
manipulation du poisson. H peut faire des prix ou des avances à des
pêcheurs et des producteurs, selon l'article 7 de la loi. En vertu de
l'article 21, il est le seul organisme habilité à exporter la
morue salée.
La province de Terre-Neuve a décidé de participer aux
activités de l'office en 1970. L'office a donc exercé ses
pouvoirs dans l'industrie du poisson salé de cette province, l'an
dernier. Alors, on peut en évaluer les effets qui, d'ailleurs, n'ont pas
tardé à se faire sentir. En effet, les prix à
l'exportation ont augmenté de 6 p. c. et les prix payés aux
pêcheurs eux-mêmes se sont surtout élevés de 25 p. c.
à 33 p. c, selon les qualités du produit. Donc, augmentation de
25 p. c. à 33 p. c. pour les pêcheurs eux-mêmes.
C'est dans la Basse-Côte-Nord du golfe Saint-Laurent que les
pêcheurs peuvent réellement bénéficier des avantages
de l'Office canadien du poisson salé. C'est-à-dire dans cette
région contenue dans le comté de Duplessis. Dans cette
région, on compte près de 600 pêcheurs. Une grande partie
d'entre eux alimentent en poissons frais et en crustacés l'usine de la
Fédération des pêcheurs unis du Québec,
située à Rivière-au-Tonnerre, et l'usine de St. Lawrence
Sea Products Limited, localisée à La Tabatière. Ils
peuvent être impliqués favorablement par les activités de
l'office en écoulant, par son entremise, une partie de leurs captures
des périodes de pointe.
Ce sont tout particulièrement les 200 pêcheurs
côtiers qui produisent pour environ $250,000 de morues salées et
séchées, qui sont le plus en mesure de profiter des
opérations de cette société. Ces pêcheurs
éprouvent des difficultés à s'approvisionner en sel,
à financer leurs opérations et à percevoir des revenus
suffisants. Comme on l'a vu, l'office est en mesure de corriger ces ordres de
problèmes. Il n'y a pas lieu, du moins pour le moment, que les autres
régions maritimes du Québec soient impliquées par
l'office. En effet, aux Iles-de-la-Madeleine, la production de morues
salées est inexistante. En Gaspésie, ce ne sont pas les
pêcheurs qui transforment leur produit. Ces opérations sont
effectuées par quelques usines qui livrent un produit jouissant d'une
bonne renommée sur tous les marchés.
C'est pourquoi, après consultation avec la
Fédération des pêcheurs unis de Québec, St-Lawrence
Sea Products Limited et l'Association des producteurs de poissons du
Québec, je propose que le territoire de la Basse-Côte-Nord puisse
bénéficier des activités de l'Office canadien du poisson
salé. Certains frais pourront être occasionnés au
gouvernement du Québec, à la suite de sa participation aux
activités de l'office. Ils peuvent être de quatre ordres:
Premièrement, le gouvernement du Québec devra défrayer une
partie des dépenses initiales d'exploitation et d'établissement
de l'office. Le gouvernement du Canada a établi que la province de
Québec ne sera pas appelée à débourser plus de
$5,000, soit 5 p. c. d'un montant maximum de $100,000. On peut voir, à
ce sujet, l'article 25, sous-article 2, paragraphe a), du bill C-175.
Deuxièmement, si l'office subit des pertes d'exploitation, le
gouvernement du Québec devra en absorber une partie proportionnelle
à l'importance de la production québécoise dans les
activités de l'office ou à moins de 5 p. c. Article 25,
sous-paragraphe 2, paragraphe a), de la même loi.
Normalement, l'office doit être exploité sans perte. Au cas
de revers toujours possibles, on estime que la contribution maximum du
gouvernement du Québec ne devrait pas excéder $10,000 à
$15,000 par année.
Troisièmement, les provinces participantes doivent accepter de
payer la moitié des indemnités aux propriétaires dont les
installations à l'intérieur de leur juridiction deviendraient
superflues à la suite des activités de l'office. Article 25,
sous-article 2, paragraphe c), de la même loi.
Dans le cas de la province de Québec, une seule installation peut
devenir superflue. Il s'agit du séchoir de Lourdes de Blanc-Sablon.
Par ailleurs, je suis optimiste quant à l'issue de nos rencontres
avec l'office canadien au cours desquelles on discutera de la pertinence pour
l'office d'accorder des contrats de séchage aux propriétaires de
cet établissement. Si le séchoir venait à être
considéré comme superflu, les déboursés du
Québec n'excéderaient pas $30,000 au total.
Quatrièmement, enfin, il ne faut pas écarter la
possibilité qu'exceptionnellement le gouvernement du Québec
contribue financièrement à l'amélioration de
l'installation localisée dans le territoire de l'office au
Québec. Si jamais il arrivait que l'office ne soit plus un actif pour
l'économie de la Basse-Côte-Nord, il sera toujours possible au
gouvernement du Québec de révoquer l'entente qu'il signera.
Dès que l'entente sera signée avec le gouvernement du
Canada, je désignerai un administrateur compétent pour faire
partie du conseil d'administration de l'office en vertu de l'article 3,
paragraphe 1, de la loi.
A la suite des études entreprises par mon ministère,
à la suite aussi de nombreuses consultations qui ont été
faites, je demande à cette
Chambre de donner son approbation au projet de loi qui veut permettre
aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de bénéficier des
avantages de l'Office canadien du poisson salé.
M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de
Gaspé-Nord.
M. François Gagnon
M. GAGNON: M. le Président, le ministre propose l'adoption du
projet de loi 14 qui permet au lieutenant-gouverneur en conseil d'autoriser son
ministère à conclure avec l'Office canadien du poisson
salé une entente qui concernerait la région de la
Basse-Côte-Nord pour l'exploitation du poisson salé.
Comme vous le savez, M. le Président, le gouvernement qui a
précédé le présent gouvernement, et dont le
titulaire du ministère de l'Industrie et du Commerce était M.
Beaudry, a toujours considéré le problème des
pêcheries comme étant de première importance. Comme nous
l'avons constaté il n'y a pas très longtemps, par un
communiqué de l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, on a
senti une amélioration considérable au niveau des
pêcheries.
Le projet de loi qui est devant nous est un bon projet de loi qui va
permettre à certains pêcheurs de la Basse-Côte-Nord de
bénéficier d'un prix convenable pour la vente du poisson
salé. Je sais que l'Office canadien du poisson salé a son
siège social à Terre-Neuve puisque l'organisme
fédéral avait surtout pour but d'avantager les producteurs de
poisson salé de cette province. Le gouvernement du Québec
considère qu'il est de son devoir de conclure une entente avec cette
société pour avantager les pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord. C'est un organisme fédéral qui
possède 24 employés dont plusieurs sont compétents et qui
fonctionne depuis près d'un an.
Le ministère de l'Industrie et du Commerce qui sera appelé
à conclure des ententes devra le faire de façon à
protéger entièrement les droits du Québec et les droits
des pêcheurs de cette région. Il est possible que l'intervention
de cet office cause certains problèmes à la Coopérative
des pêcheries du détroit de Belle-Isle.
Je ne sais pas jusqu'à quel point des problèmes financiers
pourraient survenir mais je n'ai aucun doute que le ministre de l'Industrie et
du Commerce, qui est très conscient de cette difficulté, pourrait
envisager, si la chose survenait, d'aider cette coopérative. S'il
arrivait au plus fort que cette coopérative ait des difficultés
financières au point de connaître des déficits et de
n'être plus rentable, le ministère de l'Industrie et du Commerce,
en collaboration avec l'office fédéral, pourrait s'engager
à dédommager cette coopérative, c'est-à-dire
à acheter toutes les parts sans que les pêcheurs soient
appelés à subir une perte quelconque. Il pourrait y avoir une
contribution de 50 p. c. de la part du ministère de l'Industrie et du
Commerce et de 50 p. c. de la part de l'Office canadien du poisson
salé.
Si j'ai bien compris le ministre, l'entente qui sera conclue ne touchera
aucunement la Gaspésie, puisque, je crois, cette région est assez
bien pourvue au niveau du "marketing"; il y a plusieurs acheteurs. A ce
moment-là, je crois que ça serait simplement perturber la
situation économique des pêcheurs de venir, par l'office
fédéral, qui est un organisme du gouvernement, créer des
problèmes.
M. LEVESQUE : En effet, le député me permettra de rappeler
que c'est justement dans son comté, en particulier, que l'on retrouve un
des produits les plus connus mondialement dans le poisson salé. Dans
Gaspé-Nord, Gaspé-Sud ce produit-là, qu'on appelle le
"Gaspé cured" a un marché extrêmement ferme. C'est pour
cette raison que j'ai mentionné que, pour le moment, il n'était
pas question de couvrir cette région-là. Cela n'empêche pas
que la loi nous permettra, sans doute, de couvrir plus de territoire si les
circonstances le justifient.
M. GAGNON: Très bien, M. le Président. A ce
moment-là, ça pourra peut-être faire l'objet de discussions
au niveau des Pêcheurs unis ou des autres acheteurs. D'ailleurs, lorsque
le ministre parle des produits de la pêche dans ma région, il est
entendu que c'est merveilleux. Il n'y a pas plus que trois ou quatre jours, je
crois, dans le comté de Matapédia, où le ministre
s'était rendu avec M. Marchand, on avait parlé de créer un
ministère de l'Emploi et M. Marchand avait assuré la
région que les Forces armées auraient maintenant un repas de
poisson par jour. A moins que ce soit un fameux poisson d'avril, car cette
nouvelle, je précise, se situait le 1er avril.
Alors, M. le Président, il n'y a aucun doute que l'Opposition
officielle se prononcera en faveur de ce projet de loi, à condition, tel
que j'ai dit, qu'on accorde toute la protection possible aux pêcheurs de
la Basse-Côte-Nord, que cela ne s'applique pas à la
Gaspésie et que le ministère de l'Industrie et du Commerce prenne
toutes ses responsabilités, de façon que cette loi soit la plus
efficace possible et qu'elle bénéficie entièrement aux
pêcheurs de cette région qu'on appelle la Basse-Côte-Nord,
qui n'ont pas été avantagés. Cela permettra à ces
pêcheurs de réaliser un revenu convenable qui pourrait être
comparé à celui des pêcheurs des autres régions de
la Gaspésie.
Je suis convaincu, M. le Président, que le ministre, lorsque la
loi sera adoptée, s'empressera de conclure cette entente, de
façon que les pêcheurs ne subissent pas de préjudice, au
tout début d'une saison, par un retard de l'entente, mais qu'au
contraire ils soient largement favorisés. Encore une fois, l'Opposition
officielle se prononcera en faveur du projet de loi.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Nous avons eu l'occasion,
lorsque le bill C-175 a été adopté par le
fédéral, de voir des protestations assez énergiques,
faites par ceux qui veulent toujours que la libre entreprise continue à
aller de l'avant, à l'effet que le gouvernement s'emparait, à ce
moment-là, du commerce du poisson. Nous avons aussi constaté
qu'immédiatement après l'adoption de ce bill C-175 il a fallu,
à cause des surplus accumulés, que le gouvernement s'empresse
d'expédier, de donner des cargaisons de poisson, de morues salées
au Biafra, au Nigéria, pour nourrir cette population. Il semblait y
avoir déjà des surplus accumulés qui risquaient d'apporter
au gouvernement central des problèmes assez graves d'entreposage,
puisque le gouvernement s'était substitué à l'entreprise
privée.
Il reste, tout de même, que, dans le projet de loi qui amende
celui du fédéral, qui nous est proposé, le bill 14, Loi
favorisant la commercialisation du poisson, nous avons quelques questions
à nous poser. J'aimerais bien que le ministre de l'Industrie et du
Commerce en prenne note pour être capable de nous donner une
réponse. D'abord, nous aurions aimé, ici dans la province de
Québec, qu'on dise que ces droits de pêche appartiennent à
la province, avant de dire que tels navires ont le droit de se rendre
jusqu'à tel endroit ou n'ont pas le droit de s'y rendre, discussion qui
eu lieu dernièrement entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement français concernant les îles Saint-Pierre et
Miquelon.
Apparemment, les navires français entrent trop loin dans le golfe
Saint-Laurent et risquent, par des navires assez bien équipés, de
nuire à ceux qui ont des navires à peu près semblables ou
qui n'ont pas une pêche aussi rentable et aussi bien organisée,
depuis nombre d'années. Cela leur permettrait au moins de vivre.
Alors, ces droits, dans le golfe Saint-Laurent, ne sont pas encore
établis. On semble accepter d'emblée que le bill
fédéral C-175 et le bill 14 vont apporter la solution à
tous les problèmes de pêche commercialisée du poisson
salé dans le golfe Saint-Laurent ou les environs des côtes de la
Gaspésie.
Eh bien, je sais que le gouvernement fédéral,
actuellement, avec des subventions assez élevées, fait construire
par la Columbia Fish, qui vient pêcher dans les eaux du golfe
Saint-Laurent, quatre navires au lieu de les faire construire dans la province
de Québec. Je ne peux pas blâmer le gouvernement du Québec
car il n'est au pouvoir que depuis un an. Notre administration aurait dû
prévoir que les bateaux qui viennent dans le golfe Saint-Laurent soient
construits dans la province de Québec. Nous avons des chantiers
maritimes qui peuvent le faire. Quand le gouvernement fédéral
octroie à Columbia Fish des montants extraordinaires pour venir, par la
suite, chercher le poisson dans le golfe Saint-Laurent alors que ces droits de
pêche ne sont pas encore établis, je dis qu'il y a
empiétement, de la part du fédéral. Il y a là
encore un danger de laisser aller nos droits à cause du manque
d'intiative ou du manque d'esprit de créativité, comme nous
l'avons déjà exprimé dans cette Chambre, de certains de
nos administrateurs, qui trop de fois oublient que le Québec a des
droits à exprimer et qu'envers et contre tous nous devons d'abord nous
affirmer pour être capables de pouvoir au moins récolter, en
faveur des Québécois, les richesses dont nous sommes
propriétaires.
Si le bill 14 comme le bill C-175 est adopté, le gouvernement
québécois ne semble pas avoir le choix; il n'a que le choix de
dire: Nous couvrirons le déficit, parce que le fédéral
n'est qu'engagé à 5 p. c. du montant de $100,000. Alors quel sera
ce déficit?
M. LAFONTAINE: M. le Président... M. DUMONT: Quel sera le
montant?
M. LAFONTAINE: ... est-ce que je peux attirer votre attention, avec la
permission du député, simplement parce que nous n'avons pas
quorum en Chambre?
UNE VOIX: Pas encore!
M. LAFONTAINE: Malgré les 72 députés
libéraux!
M. LE PRESIDENT (Leduc): On peut compter. Trente.
M. LAFONTAINE: Vous êtes président, monsieur.
M.PAUL: II y en a un de sorti, M. le Président, donc 29.
UNE VOIX: II y en a un là. M. PAUL : II n'est pas assis.
M. LE PRESIDENNT (Leduc): L'honorable député de
Mégantic.
M. DUMONT: M. le Président, ce droit, à mon sens, devrait,
avec les autorités centrales, être d'abord défini pour
conserver nos richesses. J'ai ici, du professeur François Loriot, une
conférence qu'il a faite récemment. Le professeur Loriot est
docteur en droit public et il parlait justement de la compétence
québécoise dans le golfe Saint-Laurent. Il disait textuellement:
"La juridiction québécoise ne s'arrête pas sur son littoral
à la ligne de basse marée. Le plateau continental appartenant au
Québec s'étend bien au-delà de trois milles des
côtes et rejoint les Iles-de-la-Madeleine. Par un accord de 1964 avec les
autres provinces maritimes, le
Québec a consenti au partage du plateau continental du golfe.
L'on y a découvert les lignes frontalières du Québec sur
cette surface et divers permis d'exploration ont déjà
été accordés au Québec." M. le
Président, je dis qu'avec le projet de loi numéro 14, Loi
favorisant la commercialisation du poisson, nous n'avons pas encore ces droits
établis et que nous commençons à l'envers du bon sens.
Nous aurions dû d'abord, avant de présenter ce projet de loi,
négocier avec Ottawa ce droit prioritaire qui appartient aux
Québécois, à savoir qu'à partir de tel endroit, ce
sont des richesses québécoises. Nous n'aurions peut-être
pas à accepter ce bill 14, qui sera adopté parce que le
gouvernement a 72 députés, mais nous aurions peut-être par
cela permis immédiatement de dire: Puisque vous venez chercher du
poisson dans les eaux québécoises, nous n'avons pas de
déficit à payer puisque ce sont nos richesses.
C'est en regard de cela, M. le Président, que je dis qu'encore
une fois ce bill, sans nous avoir été annoncé
préalablement hier soir, du moins, nous aurions pu nous
préparer cette nuit arrive encore à la dernière
minute et un peu vite. Nous aurions eu beaucoup d'arguments à apporter.
Nous aurions eu l'intention de demander le renvoi de ce projet de loi à
trois mois afin que les personnes intéressées, afin que les
petits propriétaires sachent les implications, viennent nous donner leur
point de vue et qu'encore une fois, ce ne soit pas Québec qui soit
obligé de payer pour ces initiatives tel que le bill C-175 qui, à
mon sens, a permis de favoriser Columbia Fish qui vient chercher notre poisson
dans le golfe Saint-Laurent.
J'aimerais aussi, M. le Président, savoir du ministre...
M. LEVESQUE: Le député me permettrait-il une question
à ce moment-Ici?
M. DUMONT: Certainement.
M. LEVESQUE: Le député, premièrement, a-t-il, dans
ses remarques, tenu compte de l'article 91 de la Constitution,
particulièrement au paragraphe 12...
M. PAUL: Douze. C'est cela.
M. LEVESQUE: ... qui accorde, dans les pouvoirs du Parlement, comme
juridiction fédérale, les pêches côtières et
intérieures?
M. DUMONT: M. le Président, je pense que c'est une très
bonne question. Ce sera peut-être un peu long à y répondre.
Mais j'ai l'habitude, souvent, de consulter les autorités en la
matière, parce que je ne me qualifie pas d'autorité, et j'aime
bien prendre connaissance, surtout, des articles que nous pouvons avoir ici,
à cette Assemblée nationale, ou au Parlement canadien pour
déterminer quels sont les droits des
Canadiens et quels sont les droits des Québécois. A la
suite de la question du ministre de l'Industrie et du Commerce, je me sens
obligé de lire l'article de Me François Loriot, docteur en droit
public, qui détermine exactement quels sont les droits des
Québécois.
Il dit justement, à propos de l'article 90 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, la réglementation des
pêches du fédéral: "Mais cela doit s'interpréter
restrictivement puisqu'il s'agit d'une atteinte au droit de
propriété de la couronne provinciale, comme dans le cas..." Et
là, il cite l'exemple des loups marins où le ministre des
Pêches du fédéral s'approprie ce droit, qui est
plutôt un droit de chasse. Dans cette détermination, il y a
à établir des droits de chasse qui appartiennent, comme pour le
phoque, aux Québécois. La même chose, à mon sens,
devrait exister pour la pêche.
Justement, le professeur Loriot, docteur en droit public, continue en
disant: "Le gouvernement d'Ottawa n'a pas encore acquiescé au partage du
golfe Saint-Laurent convenu entre les provinces en 1964." Il n'a pas, M. le
Président, entériné cet accord, cette entente. On laisse
aller au gré des vagues, au gré du vent, va comme c'est
mené! C'est là que Québec, petit à petit, prend ses
droits et qu'un bon matin, on accuse le gros méchant loup du
fédéral de s'accaparer toutes nos valeurs, ce qui provoque des
explosions de colère d'aucuns, parce qu'ils n'ont pas fouillé
plus loin pour que, d'abord, par l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, nous prenions connaissance des droits qui nous sont
accordés.
Le professeur Loriot continue en disant: "II semble que des raisons
politiques expliquent ce refus, le fédéral désirant garder
pour lui seul ce territoire et les ressources qui s'y trouvent. Les provinces
Maritimes et le Québec maintiennent cependant leurs prétentions
sur cette surface, si l'on en juge par les concessions d'exploration exclusive
que chacune a accordées dans son propre secteur."
Justement, aux Iles-de-la-Madeleine, Québec le premier
ministre l'a déclaré en cette Chambre a permis
l'exploration au point de vue de la recherche du pétrole. Si on le fait
pour le pétrole, pourquoi ne pas le faire pour la pêche?
Pourquoi, quand on nous présente le bill 14, Loi favorisant la
commercialisation du poisson ne pas permettre aussi d'établir, avant
d'accepter ce projet de loi, la ligne de démarcation entre les pouvoirs
qui appartiennent au fédéral et ceux qui appartiennent au
Québec?
Alors, je dis...
M. LEVESQUE: M. le Président, je dois invoquer le
règlement. Premièrement, le député il le sait
fort bien est hors d'ordre. Le principe...
M. DUMONT: Je réponds à la question que vous m'avez
posée.
M. LEVESQUE: ... du bill regarde la commercialisation du poisson,
ça ne touche que la mise en marché du poisson, ça n'a
aucune affaire avec l'industrie primaire, la récolte du poisson, ni avec
la pêche comme telle. Il n'est question à ce moment-ci, dans le
bill, si on le relit, qu'à la commercialisation du poisson, la mise en
marché du poisson.
Deuxièmement, M. le Président, je crois que le
député, dans la réponse à la question que je lui ai
posée, ne tient pas du tout compte de la loi constituante,
c'est-à-dire de la constitution canadienne, de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique qui établit clairement la
juridiction du fédéral. Il ne se rappelle pas non plus les
arrangements pris entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement du Québec précisant que le gouvernement du
Québec a accepté l'administration des pêcheries et non pas
le pouvoir de légiférer comme tel qui est un pouvoir
fédéral.
Alors, je ne sais pas à quoi le député veut en
venir. La seule chose que nous demandons par cette loi, c'est le pouvoir de
faire une entente avec l'Office du poisson salé quant à la
commercialisation d'un certain produit qui aide une certaine population qui se
trouve dans le comté de Duplessis, dans la Basse-Côte-Nord. C'est
tout ce que nous demandons par le bill. Il n'est pas question de savoir la
juridiction des eaux, quels navires pourront côtoyer, ou naviguer
à tel ou tel endroit dans le golfe, dans les eaux territoriales ou en
dehors des eaux territoriales, etc. Ce n'est pas ça du tout qui fait
l'objet du présent bill. D'ailleurs, le député de
Gaspé-Nord l'a très bien compris, et j'espère que le
député de Mégantic reviendra au sujet en question,
malgré que je doive dire, M. le Président, que son exposé
était assez intéressant, mais il n'est pas dans le sujet. Nous ne
demandons pas du tout ça dans le bill.
M. LE PRESIDENT (Leduc): J'ai bien l'impression que le
député de Mégantic qui connaît bien ses
règlements, va se souvenir de l'article 556 de notre règlement et
va revenir à l'à-propos du bill en deuxième lecture.
M. DUMONT: M. le Président, je voulais tout simplement souligner
que...
M. PAUL: M. le Président, j'invoque le règlement. Durant
la période des questions, j'ai entendu de mon siège, une
déclaration fort à point du député de Taillon
voulant que l'on devait respecter le règlement de cette Chambre et comme
je sais que le président actuel est soucieux du respect intégral
de nos règlements, je regrette de vous signaler que nous n'avons pas
quorum.
M. LE PRESIDENT (Taillon): Alors, soucieux de ne pas avoir le quorum, je
vais d'abord compter les députés.
M. LEVESQUE: M. le Président, il y en a derrière vous.
M. LE PRESIDENT (Taillon): Qu'on appelle les députés. Je
suspends la séance à loisir. A l'ordre! L'honorable
député de Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Ce que j'allais
répondre aux propos du ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est que
si nous voulons avoir du poisson à préparer, si nous voulons
avoir du poisson salé à vendre, nous devons aussi
considérer qu'il y a de l'eau dans le golfe et qu'il y a des lignes de
démarcation qui appartiennent... Tout comme avec son collègue du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche qui... Une fois en eau douce, on
est obligé de faire le partage. Le même partage à mon sens
doit exister entre le fédéral et le Québec. Et si on ne
tient pas compte de cet état de choses ou si le ministre de l'Industrie
et du Commerce devient nerveux, c'est parce que, justement, c'est quelque chose
qui semble donner de l'information au public et cela semble un peu le
chatouiller.
Il reste quand même qu'il y a, je crois, dans les
énoncés que nous donnons et surtout dans la continuation, parce
que je n'avais pas fini de répondre à la question du ministre de
l'Industrie et du Commerce qui m'a demandé si j'étais au courant
que les droits des Québécois avaient été
entérinés en vertu de tel accord.
C'est bref; je ne lirai pas tout ce qui est là pour ne pas
importuner cette Chambre. Comme, lorsqu'on permet une question, il est normal
que nous donnions la réponse, M. le Président, j'espère
que vous me permettrez de lire ce bref passage qui donne une très bonne
réponse au ministre de l'Industrie et du Commerce.
C'est le professeur Loriot que je cite toujours: "D'autre part, un
récent jugement de la Cour internationale de justice de La Haye, en 1969
c'est tout récent a complètement démoli les
arguments de la cour Suprême du Canada lorsqu'il expliqua que le droit de
propriété sur le plateau continental est un droit de facto et ab
initio, résultant de la qualité de souverain sur le domaine
adjacent." Il y a longtemps que nous, du Ralliement créditiste, disons
que le domaine "imminent" appartient aux provinces. C'est écrit
clairement, et c'est pourquoi je tiens à le citer. "Or, au Canada, le
souverain sur le domaine et les terres publiques n'est pas le gouvernement
fédéral, mais chacune des provinces maritimes." C'est une des
raisons pour lesquelles il faut établir une ligne de démarcation.
Si nous sommes obligés de payer le déficit, si le ministre de
l'Industrie et du Commerce veut un chèque en blanc pour couvrir le
déficit prévu dans le bill C-175, il faut savoir quelles sont les
richesses québécoises et quelles sont les richesses qui
appartiennent au fédéral. Si cela appartient au
fédéral, automatiquement on n'aura rien à dire, mais si
les bateaux de la Columbia Fish, subventionnés par le
fédéral, viennent pêcher dans les eaux
québécoises, à ce moment-là, on enverra la note au
fédéral.
Les $20,000 ou les $50,000 de déficit qui peuvent exister, selon
ce bill 14, on n'aura pas besoin d'en payer les frais. C'est maintenant, c'est
ici en cette Chambre qu'il faut prendre position et dire au gouvernement
fédéral que nous ne voulons pas accepter ce déficit car on
vient chercher le poisson québécois.
M. LACROIX: Le député de Mégantic me permettrait-il
une question?
M. DUMONT: Certainement.
M. LACROIX: Quand nos bateaux, par exemple, qu'ils soient de la
Gaspésie, des Iles-de-la-Madeleine ou de la Basse-Côte-Nord, vont
pêcher en dehors des limites territoriales de la province de
Québec, quand ils vont pêcher aux alentours de l'Ile-du
Prince-Edouard, de la Nouvelle-Ecosse ou de Terreneuve, qu'est-ce qui leur
arriverait?
Savez-vous que l'on va chercher une partie importante des produits qui
sont traités dans nos usines, à ces endroits-là?
M. DUMONT: Est-ce une question ou un commentaire?
M. LACROIX: Je vous pose la question: Qu'est-ce qui arriverait à
nos chalutiers, à ce moment-là?
M. DUMONT: M. le Président, la question étant
posée, je me permets de répondre que le gouvernement
fédéral vient justement de légiférer pour
accroître l'étendue, sur le littoral québécois,
où on n'a pas le droit d'aller, pour les étrangers du moins,
à 12 milles des côtes québécoises, et canadiennes,
par le fait même. Donc, ce problème est réglé.
Je veux souligner que même à Gaspé-Nord, quand des
importuns viennent pêcher, il y a des gens qui se sont permis de se
servir de leur fusil. Le fédéral a été
obligé d'ordonner une enquête afin de savoir qui était venu
empiéter sur les droits des Québécois. Je sais qu'il y a
des Gaspésiens qui sont décidés à ce point
d'empêcher que nos richesses naturelles qui permettraient cette
commercialisation du poisson aillent à d'autres personnes.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. DUMONT: Ces autres personnes sont du fédéral...
M. LEVESQUE: Je ne veux pas être désagréable, mais
je suis obligé d'invoquer le règlement, parce que,
premièrement, le député fait une dissertation sur quelque
chose qui est complètement en dehors du sujet.
M. DUMONT: M. le Président, j'ai simplement répondu
à la question du député des Iles-de-la-Madeleine.
M. LEVESQUE: Je comprends; qu'on me laisse exposer mon point. Etant
complètement en dehors du sujet, le député cite un
article, ou je ne sais quoi, qui traite des droits sous-marins, de
l'appartenance des terrains sous les eaux. Ils appartiennent aux provinces.
Ici, il s'agit de pêcheries; ce n'est pas le plateau continental, ce
n'est pas du tout la même chose. Lorsque l'on parle du plateau
continental, on parle de ce qui peut avoir rapport au sous-sol soit minier ou
pétrolier.
On ne parle pas de cela du tout. On parle des pêcheries, on parle
des poissons. Si on réfère à la constitution, il est clair
que c'est de juridiction fédérale, que nous l'aimions ou pas, en
vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
Si on veut parler du plateau continental, des droits sous-marins, des
droits miniers sous les eaux, si on veut parler des droits d'exploration pour
du pétrole, etc., on parle d'autre chose à ce moment-là.
Ce n'est pas du tout ici que devrait s'inscrire cette intéressante
intervention du député de Mégantic. Je lui suggère
de garder cette intervention, qui peut avoir son mérite, pour une autre
occasion pendant cette session, occasion qui lui sera sans doute fournie. Mais,
ici, tout ce que je demande dans cette loi, c'est de permettre la
commercialisation du poisson, de conclure une entente avec le gouvernement
fédéral pour assurer un meilleur prix pour le poisson des gens de
la Basse-Côte-Nord. Cela n'a aucune affaire avec la pêche primaire.
Cela a encore bien moins d'affaires avec le plateau continental et la
discussion qu'il y a eu entre le gouvernement fédéral et les
gouvernements des provinces, quant à la juridiction sur ce plateau
continental.
M. DUMONT: M. le Président, le ministre de l'Industrie et du
Commerce, vu sans doute ses nombreuses occupations en plus d'être
ministre, leader parlementaire, depuis quelques jours, il sait que ce
n'est pas un cadeau est obligé d'admettre avec moi et d'admettre
avec cette Chambre comme il ne se rend plus tellement souvent dans son
beau comté qu'il ne se rend pas compte qu'il y a marée
haute et qu'il y a marée basse. Quand c'est la marée haute, on
vient certainement à des endroits où c'est un territoire
québécois. H l'oublie. Je comprends qu'il ne va pas souvent dans
son comté, mais comme il n'a pas assez d'information...
M. LEVESQUE: J'invite le député de Mégantic
à venir au ministère et on va certainement le renseigner, et
comme c'est un homme intelligent, il va comprendre.
M. DUMONT: D'ailleurs, j'ai ici un article, M. le Président, que
je ferai parvenir...
M. LACROIX: ...Donc vous avez des hauts et des bas dans votre
intervention.
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre! A
l'ordre! Je pense qu'on peut accepter que c'est le député
de Mégantic qui a actuellement la parole.
M. LACROIX: II est hors d'ordre complètement...
M. LEVESQUE: II est hors d'ordre complètement. Cela fait deux
fois que j'invoque le règlement...
M. DUMONT: Vous savez, M. le Président, si le
député des Iles-de-la-Madeleine me posait des questions dans
l'ordre, je répondrais dans l'ordre. Il est toujours à
côté de sa coche. Alors, je suis obligé de répondre
à côté, comme il m'a posé la question.
Ce que je voulais préciser, c'est qu'on n'éternisera pas
la discussion, mais je ferai parvenir au ministre de l'Industrie et du Commerce
toute cette communication qui va lui permettre de voir que, encore une
fois...
M. LEVESQUE: Merci.
M. DUMONT: ... on commence à l'envers du bon sens, parce qu'il y
a des droits de pêche qui appartiennent aux Québécois et
qui ne sont pas déterminés. Ma question est donc d'abord de
savoir quelle est la part du Québec, argent parlant, quel montant la
province de Québec a été obligée de payer à
Columbia Fish pour construire les quatre navires qui vont venir chercher le
poisson dans le golfe Saint-Laurent et qui vont être en rapport direct
avec ce bill 14, qui est une loi favorisant, comme on demande, la
commercialisation du poisson. M. le Président, nous avons besoin de
savoir et d'avoir cette indication, car ces quatre chalutiers qui seront
construits dans l'ouest canadien vont probablement favoriser un gouvernement
créditiste et après, on viendra dire que nous, les
créditistes, n'avons pas raison. Pour une fois, on voudrait que cela
favorise le gouvernement québécois et je dis qu'avant d'adopter
ce bill 14, nous devrions demander au fédéral de savoir quelles
sommes les Québécois ont payées pour pouvoir donner une
subvention à la construction de ces navires qui auraient dû
être construits au Québec. Je pose encore la question au ministre:
Quelle somme a obtenue Columbia Fish qui pêche actuellement dans le golfe
Saint-Laurent? Quelle est la somme que le gouvernement québécois
a accordée en subventions pour être capable de dire que ces droits
appartiennent au fédéral, quand ils appartiennent aux
Québécois?
M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de
Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, il me semble qu'une loi favorisant
la commercialisation du poisson pourrait nous permettre de pouvoir parler de
pêche. Avant de pouvoir commercialiser le poisson, il faut pouvoir le
pêcher. Actuellement, personnellement du moins, je m'associe aux
commentaires du député de Mégantic pour constater qu'il y
a chez nous au Québec un problème de pêche. Prenons
simplement un exemple: La B.C. Packers, par exemple, avait obtenu $500,000 de
subventions du gouvernement provincial je crois que c'est du
ministère de l'Industrie et du Commerce pour venir pêcher
dans nos eaux. Il s'agit essentiellement ici d'une loi qui veut permettre
à une partie de la Côte-Nord, en particulier la
Basse-Côte-Nord, de pouvoir vendre son poisson.
Je constate que le député de Duplessis n'est pas ici;
c'est un problème qui le concernait de façon très
particulière. J'ai donc eu l'occasion de visiter la
Basse-Côte-Nord et de constater que la pêche était dans
cette région une activité fort artisanale et non permanente.
C'est-à-dire que les gens n'avaient pas la possibilité, à
cause de l'éloignement des grands centres ou des coopératives de
pêche telles que la Coopérative des pêcheurs unis, de
trouver un marché pour leur poisson. Cela voulait dire que ces gens
faisaient de la pêche d'une façon temporaire. Ils devaient
pêcher tout simplement pour trouver des revenus complémentaires
lorsqu'ils étaient en chômage et qu'ils ne pouvaient pas faire
d'autre travail.
C'est d'ailleurs un peu ce qui explique pourquoi le gouvernement
québécois a certains problèmes dans cette région,
pourquoi il a été impossible d'organiser, comme me l'expliquait
le sous-ministre des Pêcheries, de véritables coopératives
de pêche pour permettre à ces gens de trouver des marchés,
avec la conséquence que la pêche était devenue un domaine
limité à une catégorie de gens qui avançaient en
âge et qui ne pouvaient pas trouver l'initiative, la possibilité
de s'organiser pour faire une véritable pêche commerciale. Avec la
conséquence aussi que les jeunes de cette région se
désintéressent de plus en plus de ce domaine, de cette
activité économique.
Aujourd'hui, devant ces conséquences, devant ces faits qui sont
réels, qui existent, on ne peut pas créer des problèmes de
juridiction provinciale ou fédérale avec des gens qui n'attendent
que de trouver un marché pour leur poisson, ce qui leur permettrait de
vivre tout simplement. Ce n'est certainement pas ces gens de la
Basse-Côte-Nord qui vont devoir payer pour les problèmes que nous
amène un fédéralisme à l'intérieur duquel
une de nos richesses essentielles appartient au gouvernement
fédéral.
C'est pourquoi le gouvernement provincial est obligé,
probablement devant le fait qu'il ne s'est jamais occupé de cette
activité dans la Basse-Côte-Nord, de dire au gouvernement
fédéral: Maintenant, venez nous sauver. Nous autres,
Québécois, on n'a rien fait, on ne s'est pas occupé de la
pêche dans la Basse-Côte-Nord. Il appartient alors au grand
frère d'Ottawa de dire
encore une fois aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord: C'est
encore le gouvernement fédéral qui vient à votre
rescousse.
On est obligé aujourd'hui, devant les conséquences qui
existent actuellement dans cette région, devant le problème
urgent d'y réglementer une activité économique qui devient
de moins en moins rentable, devant le problème de trouver un
marché pour le poisson chez nous, on est obligé de dire: Bien, il
faut accepter un projet de loi comme celui-là.
Mais on peut quand même s'interroger. Alors que partout dans
d'autres pays on a réussi à faire de la pêche en haute mer
une véritable pêche commerciale, une véritable pêche
rentable, chez nous, au Québec, c'est tout simplement un domaine qui est
laissé à l'artisanat parce qu'on est soumis à la
concurrence de tous les pays étrangers qui viennent pêcher
à l'intérieur de nos eaux. On sait que les pêcheurs de la
Gaspésie, par exemple l'an dernier, ont dû se battre avec des
fusils alors que le gouvernement finançait les activités...
M. LEVESQUE: Si le député me permet une question. Est-il
sûr que ce sont des pêcheurs de la Gaspésie qui ont fait
ça?
M. LESSARD: M. le Président, d'après les renseignements
que l'on a, du moins, les gens qui se battaient devaient certainement
être des gars qui étaient dans la pêche puisque l'un des
problèmes qu'on soulevait entre autres pour B. C. Packers, était
qu'on était en train de vider le bas-fond de la mer de ses poissons.
M. LEVESQUE: Est-ce que le député est sûr qu'il
s'agit des pêcheurs gaspésiens?
M. LACROIX: Est-ce que les pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine
doivent être considérés comme des étrangers?
M. LESSARD: Non, M. le Président. Voici, je ne parle pas des
pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine. Je parle essentiellement d'une
compagnie de Colombie-Britannique...
M. LACROIX: Les seigneurs de harengs! Je vous répondrai
tantôt.
M. LESSARD: ... B.C. Packers, qui est venue chez nous pêcher sur
notre territoire.
M. LEVESQUE: M. le Président, je demande au député
de bien se renseigner avant de porter des accusations comme celles-là
sur les pêcheurs gaspésiens. Il ferait mieux de vérifier le
cas auquel il a fait référence et peut-être s'informer au
député de Gaspé-Nord et à ceux qui sont sur place,
avant de venir porter des accusations sur notre région.
M. LESSARD: M. le Président, je vérifierai certainement,
j'ai d'ailleurs un dossier sur cette question. Il y a une chose qu'on peut
dire, c'est que si, aujourd'hui, on est obligé.
M. LEVESQUE: Nous en avons un nous aussi, un dossier.
M. LESSARD: M. le Président, on est obligé aujourd'hui de
discuter d'une loi qui est extrêmement importante, sans avoir tous les
éléments nécessaires en main. On peut blâmer le
gouvernement de vouloir jouer avec l'Opposition au chat et à la souris;
il ne nous dit jamais ce qu'il va faire le lendemain. On ne sait jamais le
travail parlementaire qu'on va faire.
M. LEVESQUE: Une question de privilège, M. le Président.
Il y a déjà longtemps que ce projet de loi est
déposé. Il a été annoncé qu'il serait
appelé. Nous sommes rendus à vendredi après-midi; il n'y a
aucun doute que des événements sur lesquels je ne veux pas
insister ont bouleversé le programme, mais celui qui parle fait partie
d'un groupement qui a été avisé à l'avance des
intentions du gouvernement.
Alors, M. le Président, je ne voudrais pas qu'on insiste trop sur
ce point-là.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Mégantic, sur
un rappel au règlement.
M. DUMONT: M. le Président, je m'étais
préparé en conséquence moi aussi pour étudier
aujourd'hui le bill 22, mais on est arrivé avec le bill 14. C'est ce que
le député de Saguenay a souligné. Hier soir, nous n'avons
pas été avisés que ce serait le bill 14. Nous
espérons, pour l'avenir, qu'au moins la veille le gouvernement nous
annoncera pour le lendemain quel bill nous étudierons. Dans les fins de
semaine, dans nos soirées, comme le ministre de l'Industrie et du
Commerce le fait, nous serons en mesure de bien nous préparer.
M. LEVESQUE : Le gouvernement est toujours prêt à
manifester une excellente collaboration; mais il y a chez nous une obligation
additionnelle, c'est celle d'administrer la province, et nous le faisons par le
truchement de plus d'une vingtaine de ministères. H y a, à la
tête de ces ministères, des gens vers lesquels je dois me tourner,
pour m'assurer qu'ils sont libres, eux et leurs fonctionnaires, pour discuter
dans cette Chambre un projet de loi.
Or, si je ne peux pas avoir de l'Opposition cette collaboration
essentielle à une saine planification, qu'on ne vienne pas surtout
à ce moment-ci nous faire des reproches. Nous avons manifesté je
crois au maximum notre désir de collaborer et d'essayer d'aider
l'Opposition à se bien préparer pour analyser, scruter chacun des
gestes posés par le gouvernement, chacune des mesures que nous proposons
à cette Chambre.
Par contre, nous ne pouvons pas et nous n'accepterons jamais
d'être le jouet des humeurs de l'un ou de l'autre des partis de
l'Opposition.
M. DUMONT: M. le Président, je trouve que le ministre de
l'Industrie et du Commerce, probablement à cause des propos que j'ai
tenus, est devenu un peu nerveux. Tout ce que je voulais souligner c'est que le
leader du gouvernement devrait, quinze heures avant l'ouverture de cette
Chambre, nous annoncer quel projet de loi va être étudié le
lendemain.
M. LESSARD: Alors, je comprends, M. le Président, que des
événements ont pu permettre certains changements dans la
programmation. Mais, simplement, on peut faire la remarque que, depuis le
début de la session, on ne peut pas dire que nous avons
été informés des projets de loi. D'accord, on
dépose une série de projets de loi. Mais, ce serait essentiel, si
l'on veut que l'Opposition puisse faire son travail d'une façon
efficace, que nous connaissions, quelques heures auparavant, les projets de loi
que nous aurons à étudier.
Alors, je termine en disant que j'espère que cette loi permettra
à une partie de la population de la Basse-Côte-Nord de
développer cette activité économique et d'en faire une
activité commerciale qui permettra à ces gens-là de vivre
de la pêche, et non pas simplement de pourrir dans cette activité
en attendant d'avoir un peu de travail. Nous espérons, lorsque les
ententes seront conclues avec le gouvernement fédéral, pouvoir
avoir toute la documentation nécessaire afin de voir si les
intérêts de cette population seront véritablement
protégés.
M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député des
Iles-de-la-Madeleine.
M. Louis-Philippe Lacroix
M. LACROIX: M. le Président, je ne voudrais pas faire de longues
remarques à propos du bill 14, loi qui va apporter du mieux-être
aux pêcheurs, particulièrement à ceux de la
Basse-Côte-Nord et qui permettra une commercialisation plus raisonnable
des produits de la pêche, particulièrement des pêcheurs
côtiers de ce district de la province de Québec.
Mais avant de passer à d'autres remarques, M. le
Président, je voudrais relever certains propos qui ont été
tenus par les députés de Mégantic et de Saguenay
concernant les pêcheries commerciales du Québec, les
pêcheries à l'intérieur du golfe. Je dirai que les
députés de Mégantic et de Saguenay étaient
certainement fort bien intentionnés, mais je dois reconnaître
qu'ils connaissent fort mal ou fort peu les problèmes des
pêcheries dans la région particulière du golfe
Saint-Laurent.
Quand on parle, par exemple, de la compagnie B.C. Packers qui
pêche dans les eaux du golfe Saint-Laurent, on semble oublier que cette
compagnie exploite une usine de transformation du poisson à Sandy Beach,
en Gaspésie, où on prépare le filet de hareng, où
l'on prépare la farine de poisson et aussi l'huile de foie de morue.
Lorsque l'on reproche, par exemple, à la compagnie B.C. Packers d'avoir
bénéficié de subventions fédérales pour la
construction de chalutiers d'aciers, de bateaux seineurs pour pêcher le
hareng, on pourra faire le même reproche, si vous le voulez, à la
compagnie Gorton, des Iles-de-la-Madeleine, qui fournit du travail, dans les
meilleures conditions possibles, à la population des
Iles-de-la-Madeleine.
L'on parle beaucoup des "stocks" de poissons, des pêches qu'on
exploite peut-être un peu trop considérablement. Oui?
M. LAURIN: Est-ce que le député me permettrait de lui
poser une question?
M. LACROIX: Certainement.
M. LAURIN: Est-il vrai, justement, que la compagnie B.C. Packers a
l'intention de se retirer prochainement du genre d'activités que vous
venez de mentionner?
M. LACROIX: II était question que la compagnie B.C. Packers
ajoute à ses activités. Mais je ne voudrais pas m'aventurer sur
un sujet que je ne connais pas tellement puisque la compagnie B.C. Packers
possède une usine à Sandy Beach, endroit qui est tout de
même assez loin de mon comté. Mais je sais que la compagnie Gorton
a l'intention d'augmenter ses activités dans le golfe Saint-Laurent.
En parlant d'exploitation de nos fonds de pêche et
particulièrement du hareng, je voudrais signaler, en passant, aux
honorables membres de cette Chambre, que l'on parle de surexploitation de ces
fonds, de cette qualité, de cette sorte de poisson.
Je voudrais mentionner, particulièrement pour toutes ces
personnes qui ont, chaque printemps, beaucoup de peine pour les pauvres
loups-marins que nous tuons dans notre région, que nous chassons pour
pouvoir rapporter des revenus plus considérables à nos chasseurs
et à nos pêcheurs. Tous les chalutiers, tous les bateaux seineurs
qui opèrent dans le golfe Saint-Laurent capturent moins de harengs que
les troupeaux de loups-marins n'en détruisent dans le cours de
l'année.
Naturellement, j'aime bien ces belles petites "bibites" qui ont des yeux
charmants, qui sont agréables à voir, mais je vous avouerai
franchement que, comme représentant d'un comté de pêcheurs,
d'un comté qui tire une partie de ses revenus de la chasse aux
loups-marins par la vente de leurs fourrures, je préfère encore
voir les fourrures de ces charmants animaux sur les épaules de nos
belles épouses et de nos belles filles que de les voir dans le golfe
à déprader nos ressources naturelles que sont les
pêcheries.
D'un autre côté, M. le Président...
M. DUMONT: Le député me permettrait-il une question?
M. LACROIX: Certainement.
M. DUMONT: Justement, considérant que les droits de chasse
appartiennent exclusivement aux Québécois, lorsqu'il en voit sur
les épaules des Québécoises de l'autre côté
de l'Outaouais, n'est-il pas un peu jaloux?
M. LACROIX: Je répondrai à l'honorable
député de Mégantic que la chasse aux loups-marins
relève de l'autorité du gouvernement fédéral.
UNE VOIX: C'est faux.
M. LACROIX: C'est l'exacte vérité. Dans le golfe
Saint-Laurent, il y a un quota qui est fixé avec l'assentiment des deux
gouvernements. Dans notre cas, il est fixé à 50,000 unités
par année, excluant la chasse effectuée par les pêcheurs
côtiers.
M. DUMONT: Un empiètement fédéral.
M. LACROIX: La surveillance est faite par le gouvernement
fédéral. Depuis quelques années, en plus de cela,
certaines personnes au coeur tendre, comme M. Davis, par exemple, de la
Société protectrice des annimaux de Fréderic-ton, si ma
mémoire est fidèle, et d'autres membres des
sociétés protectrices des animaux s'inquiètent beaucoup du
sort de nos loups-marins.
Il y en a même un qui a été assez imbécile
pour venir aux Iles-de-la-Madeleine, dans une homarderie. Il voulait, parce
qu'il trouvait cruel d'ébouillanter les homards, qu'on les assomme avec
un revolver avant de les ébouillanter. Quand je vois des
imbéciles de ce genre se promener chez nous et venir faire à la
radio, à la télévision et dans les journaux des sorties
inexactes concernant ce qui se passe autour de chez nous; je vous avouerai, M.
le Président que cela me peine énormément et que cela
peine également ceux que j'ai l'honneur de représenter.
Là-dessus, avant que vous ne me rappeliez à l'ordre, M. le
Président, je reviendrai aux pêcheries et je vous dirai que les
pêcheries, d'après l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, étaient de juridiction fédérale, même
dans la province de Québec, où elles le sont encore en partie.
Depuis 1922 seulement, le gouvernement du Québec a la
responsabilité de l'administration des pêcheries commerciales sur
son territoire.
J'en suis fort aise jusqu'à un certain point, mais je crois que
nous y avons perdu pendant de nombreuses années et qu'encore à
l'heure actuelle, nous ne bénéficions pas tellement du fait que
les pêcheries commerciales au Québec soient la
responsabilité du gouvernement provincial. En effet, nos moyens
financiers ne nous permettaient pas, jusqu'à assez récemment, et
ne nous permettent pas encore suffisamment, de pouvoir faire de la recherche
dans le golfe pour voir si nos stocks de poissons sont surexploités,
pour voir s'il n'y aurait pas d'autres catégories de poissons qui
pourraient l'être avantageusement. Je pense qu'à l'heure actuelle,
nous ne devons pas dédaigner la participation
fédérale.
Quant à moi, il y a cinq ou six ans, j'ai eu le plaisir de
recevoir chez moi, aux Iles-de-la-Madeleine, le ministre fédéral
des Pêcheries. Je lui ai demandé, à ce moment-là,
d'envoyer le bateau fédéral des recherches qui est
attaché, je crois, à la base de Pictou, pour venir faire des
recherches sur les pétoncles autour des Iles-de-la-Madeleine. Cela nous
a permis de découvrir des bancs de pétoncles qui ont
rapporté l'an passé plus de $800,000 aux pêcheurs et,
l'année précédente, plus de $600,000. C'est une
organisation pour la recherche que nous ne possédons pas encore au
Québec.
J'espère que les crédits mis à la disposition de
l'honorable ministre responsable des pêcheries commerciales lui
permettront d'augmenter continuellement et progressivement les effectifs de
notre gouvernement, de notre province pour pouvoir aider davantage les
pêcheurs non seulement des Iles-de-la-Madeleine, mais de la
Gaspésie et de la Côte-Nord.
Lorsqu'on parle des pêcheries dans le golfe Saint-Laurent, peut-on
dire que les stocks de poisson sont la propriété exclusive du
peuple québécois? Je crois que la population de
l'Ile-du-Prince-Edouard, la population de la Nouvelle-Ecosse, la population de
Terre-Neuve, qui bornent tout de même, le golfe Saint-Laurent, pourrait
avoir les mêmes réclamations. Ceux qui connaissent la pêche
qui se pratique dans le golfe savent qu'à peu près à cette
période-ci de l'année nos pêcheurs doivent aller
pêcher à l'extérieur du golfe parce que le poisson est une
ressource toujours en mouvement. Par la suite, le poisson monte dans le golfe
et dans l'estuaire du golfe Saint-Laurent et, naturellement, nos chalutiers le
suivent.
Je pense que l'honorable député de Mégantic oublie
que le gouvernement fédéral a adopté une loi qui
établit les limites territoriales à douze milles du point le plus
rapproché de terre, ce qui ferme le golfe aux pêcheurs
étrangers. Cela a éliminé un très grand nombre de
chalutiers étrangers qui venaient pêcher dans notre territoire,
dans notre région et cela a été de nature à
améliorer considérablement notre position en ce qui concerne les
pêcheries.
De toute façon, M. le Président, nous ne pouvons
qu'approuver les efforts conjugués des gouvernements
fédéral et provincial, lorsqu'ils sont de nature à
améliorer la situation financière de nos pêcheurs. Lorsque
ces mesures permettent à nos pêcheurs de retirer un meilleur
revenu de leur travail qui est excessivement difficile, excessivement dur et
surtout très dangereux, lorsque les deux gouvernements s'accordent pour
adopter des mesures qui ajoutent aux revenus de nos pêcheurs nous ne
pouvons que nous en réjouir. Dans le cas présent, je crois que la
facilité que cela donnera aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord
de disposer
de leur poisson salé est une excellente mesure. Je m'en
réjouis pour eux et j'espère que, dans le développement
des pêcheries aux Iles-de-la-Madeleine, dans un avenir peut-être
pas trop éloigné, nous pourrons, nous également,
bénéficier des avantages de cette législation.
M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député de
Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, je ne veux pas intervenir longtemps
dans le débat. Je n'avais, d'ailleurs, pas l'intention d'intervenir,
mais ce sont les remarques du député des Iles-de-la-Madeleine qui
m'incitent à faire quelques remarques additionnelles.
Lorsque le député des Iles-de-la-Madeleine vante
l'assistance que le gouvernement fédéral peut apporter à
nos pêcheries, surtout au titre de la recherche, cela me fait marrer un
peu doucement. Car une des raisons précises de notre faiblesse dans le
domaine des pêcheries, c'est que, précisément
là, je suis bien d'accord avec lui nos services de recherche ne
sont pas encore suffisamment développés et, surtout, qu'ils se
sont développés beaucoup trop tardivement. Je reconnais que le
député a rempli son devoir, l'an dernier ou il y a deux ans, en
demandant aux autorités du ministère fédéral des
Pêcheries d'effectuer des recherches sur les bancs de pétoncles
qui entourent les Iles-de-la-Madeleine.
Mais, à mon avis, il aurait été beaucoup plus dans
l'esprit d'un fédéralisme rentable et respectueux de toutes les
parties constitutives du Canada de ne pas attendre la demande du
député des Iles-de-la-Madeleine. Je crois qu'il aurait
été de la responsabilité du gouvernement
fédéral de distribuer d'une façon équitable et
d'une façon rapide les crédits dont il dispose pour
l'amélioration de notre parc ichtyologi-que.
M. LACROIX: Me permettriez-vous seulement une remarque? Vous semblez
oublier que, depuis 1922, la responsabilité des pêcheries
commerciales au Québec relève exclusivement du gouvernement
provincial à l'exception du service de l'inspection. Lors de
l'expédition de nos produits à l'extérieur du pays, le
gouvernement fédéral voit à l'inspection des produits de
la pêche pour pouvoir les envoyer sur le marché de l'exportation,
mais la responsabilité des pêcheries relève de
l'administration de la province de Québec.
M. LAURIN: II reste que dans le domaine dont vous parliez, la
juridiction fédérale est bien claire. D'ailleurs, dans ce domaine
de la recherche en biologie marine, nous voyons la même situation que
dans tous les autres domaines où la recherche est
intéressée. Je pense bien que vous serez obligé d'admettre
avec moi que dans ce domaine de la recherche en biologie marine, comme dans
tous les autres, le Québec n'a pas été
particulièrement gâté par les autorités
fédérales. Il me semble que si cette responsabilité avait
été assumée...
M. LACROIX: Je ne voudrais pas embêter l'honorable
député de Bourget, mais avec sa permission je voudrais lui
signaler...
M. LAURIN: Oui.
M. LACROIX: ...qu'au point de vue de la recherche, par exemple, le
gouvernement de l'Union Nationale par la voix du ministre responsable alors,
avait fait appel à la Commission de la fonction publique, par voie de
concours, pour obtenir les services d'une personne responsable de la recherche
pour le district de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine. Personne
n'a répondu malgré le salaire fort alléchant offert. Il
n'y avait personne de langue française.
A ce moment-là, si ma mémoire est fidèle, c'est
l'ancien député de Maisonneuve, M. Beau-dry, qui était le
ministre responsable des pêcheries. Je lui avais dit: Quant à
nous, aux Iles-de-la-Madeleine, que cet homme compétent, que l'on
désire pour effectuer des travaux de recherches, soit chinois, japonais,
nègre ou russe, cela ne nous fait rien en autant qu'il travaillera dans
le domaine de la recherche. Je veux, par là, vous faire comprendre que
c'est extrêmement difficile de trouver des personnes qui ont la
compétence voulue et qui veulent venir dans notre milieu participer
à ces travaux de recherche. Je m'excuse d'avoir interrompu votre
discours.
M. LAURIN: Je voudrais vous répondre par une autre question.
Pourriez-vous me dire si l'Office de biologie marine de Grande-Rivière
existe encore?
M. LACROIX: Oui, il existe encore mais il a beaucoup de travail à
faire, le territoire de pêcherie du Québec étant
très vaste.
M. LAURIN: De toute façon, qu'il s'agisse d'une insuffisance
provinciale, en ce qui concerne le passé ou même à l'heure
actuelle, ou qu'il s'agisse du retard du gouvernement fédéral
à assumer ses responsabilités en ce qui concerne la recherche
marine, nous sommes devant la même difficulté, c'est-à-dire
des résultats, au point de vue de la production, au point de vue de la
commercialisation, qui ne sont pas à l'honneur du Québec, surtout
quand on les compare avec les résultats des provinces maritimes
où la production, en ce qui concerne ce domaine particulier de
l'activité industrielle, a connu un développement
considérable au cours des dernières années.
Un bon jour, il faudra se rendre compte des raisons qui motivent, qui
expliquent ce retard
que nous avons pris. J'espère que le diagnostic que l'on posera
à ce moment-là incitera le gouvernement du Québec à
prendre toutes les mesures qui s'imposent pour combler ce retard le plus
tôt possible. L'un des moyens sera précisément l'accent mis
sur la recherche. D'autres moyens seront les pressions que votre gouvernement
exercera sur le gouvernement "senior" d'Ottawa pour qu'il accorde au
Québec toute la part à laquelle il a droit, d'abord; et,
deuxièmement, toute la part qu'un rattrapage rationnel lui imposerait
pour corriger cette situation au plus tôt.
Vous avez aussi, tout à l'heure, parlé de la chasse aux
phoques. Là aussi, je suis bien d'accord pour dire que la juridiction
fédérale est incontestable. Il reste quand même 'que votre
gouvernement pourrait également faire pression pour que les
méthodes que l'on emploie actuellement pour occire ces petits animaux,
qui donnent une fourrure dont les Québécoises aiment se parer,
pourraient quand même s'améliorer de façon à
être humanisées. Même si ce n'est pas la juridiction du
gouvernement, il reste cependant que votre gouvernement peut faire des
recommandations afin que l'on améliore, dans le sens d'une plus grande
humanité, une chasse que je continue, comme vous, à croire
nécessaire.
M. LACROIX: On prendra des anesthésistes. M. Rémi
Paul
M. PAUL: M. le Président, c'est avec beaucoup
d'intérêt que j'ai écouté toutes les opinions
émises, à l'occasion de l'étude du projet de loi qui nous
est soumis par le ministre de l'Industrie et du Commerce. Il s'agit de
s'arrêter, M. le Président, pour connaître le principe de la
loi à l'étude. Il s'agit d'adopter une loi qui permettra un
écoulement plus facile, en faveur des pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord, de leurs produits. Il arrive que nous avons entendu
beaucoup de remarques sur le commerce du poisson commercial, sur les recherches
que l'on devrait faire, sur la construction des navires de pêche,
voilà autant d'arguments qui seront sans doute
répétés en temps opportun, soit à l'occasion des
crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce.
C'est pourquoi j'ai bien l'intention de m'en tenir strictement au
principe du projet de loi à l'étude. Cependant, je suis à
me demander pour quelle raison le gouvernement fédéral, qui doit
voir à secourir aussi équitablement que possible les secteurs
qu'il veut viser par une législation, ne s'est pas
préoccupé, à l'époque, d'inclure, comme juridiction
accordée à la Commission industrielle des poissons salés,
après consultation avec les provinces, ce territoire compris dans la
Basse-Côte-Nord.
C'est une loi qui a été adoptée par le
fédéral pour venir en aide, exclusivement dans le principe de
cette loi, aux pêcheurs de Terre-
Neuve. Je ne critique pas cette loi d'initiative fédérale.
Mais je me demande pourquoi, depuis cette date, le gouvernement en place, le
ministre de l'Industrie et du Commerce n'est pas intervenu aux fins que le
gouvernement fédéral apporte des modifications à sa propre
loi. Du même coup, les dépenses inhérentes à la mise
en application de cette loi seraient retombées sur le fisc du
fédéral et ne viendraient pas grever le budget provincial.
Cette politique, cette incitation aurait dû être faite par
les autorités du ministère de l'Industrie et du Commerce ou par
le canal autorisé en vertu de notre constitution interne du
Québec, le ministère des Affaires intergouvernementales.
Le gouvernement du Québec se trouve, en quelque sorte,
poussé devant une situation qui devient immorale, si nous la laissons
pourrir davantage, à l'endroit des pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord. Pourquoi? Parce qu'ils se trouvent à entrer en
concurrence avec les pêcheurs de Terre-Neuve qui reçoivent pour
leur pêche des prix qu'eux-mêmes ne peuvent pas retirer, ce qui
fait qu'à proximité de Terre-Neuve, nous voyons des citoyens
canadiens traités différemment, les uns peut-être parce
qu'ils sont habitants d'une province anglaise, et d'un autre côté,
les autres parce qu'ils sont d'une province française.
Je ne prêterai pas ces intentions au gouvernement
fédéral, mais la situation existe, en fait. C'est pourquoi le
gouvernement provincial c'était le moindre acte de
décence, c'était un obligation morale se devait d'aider
ces pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Nous aurions aimé
entendre, aujourd'hui, le député de Duplessis qui, vivant dans le
milieu je regrette son absence à l'occasion de l'étude de
ce projet de loi connaissant le problème du milieu, aurait
été en mesure de nous l'exposer encore avec plus de
détails, parce qu'il vit l'expérience de ses commettants de la
Basse-Côte-Nord.
Il nous aurait donné des raisons qui nous pressent, nous, du
Québec, d'intervenir, peut-être un peu tard, dans une situation
que l'on ne peut pas laisser dépérir davantage. Il y a un
problème qui me chatouille quelque peu. C'est qu'en analysant l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique nous voyons qu'en vertu de l'article 91
il est bien spécifié, au paragraphe 12, que le gouvernement
fédéral a juridiction sur les pêcheries
côtières et intérieures. D'où cette
législation présentée en février 1970 par le
gouvernement fédéral, le bill C-175, Commission industrielle des
poissons salés.
Mais, ce n'est pas cet aspect que je voudrais soulever, à ce
moment-ci, même si, depuis 1922, la province de Québec a
liberté d'action dans la commercialisation du poisson. Je dis qu'en
regardant, en analysant à première vue le principe de ce projet
de loi, je suis quelque peu inquiet. Pourquoi? Parce qu'on semble créer
un certain déséquilibre. On semble rejeter du revers de la main
une juridiction que nous avons
accordée, nous, alors que nous étions au pouvoir, à
un ministre que l'on appelle le ministre des Affaires
intergouvernementales.
Si nous examinons la loi, nous verrons que cette loi, parrainée
à juste titre par le ministre de l'Industrie et du Commerce, va
jusqu'à autoriser le même ministre à signer une entente
je reviendrai tantôt sur les modalités, les implications,
les possibilités de cette entente alors que, normalement et
décemment, ce devrait être le ministre des Affaires
intergouvernementales qui devrait signer une telle entente avec un organisme ou
un gouvernement pour permettre aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord
de bénéficier des avantages qui découlent de l'adoption
par le fédéral de cette loi créant la Commission
industrielle des poissons salés.
Je dis que c'est le ministère des Affaires intergouvernementales
qui devrait signer l'entente avec commissions, organismes ou gouvernements et
non pas le ministère de l'Industrie et du Commerce, même si,
cependant, je reconnais que, de toute nécessité, ce doit
être le ministère de l'Industrie et du Commerce qui voie à
l'application de cette loi.
Mais je dirai que la loi, dans sa phraséologie j'ai bien
l'intention de revenir en comité sur ce point la loi telle que
faite pourra peut-être donner naissance un jour à un conflit de
juridictions. Je me demande pourquoi on n'a pas précisé davantage
ou spécifié quel gouvernement on avait en vue en préparant
la législation qui nous est soumise. Est-ce le gouvernement de
Terre-Neuve? Est-ce le gouvernement canadien ou si ça pourrait
être le gouvernement de la Suède, par exemple, ou de la
Norvège ou de la Russie?
Dans un tel cas, l'application de cette loi deviendrait
inconstitutionnelle. Pourquoi? Parce qu'en vertu de l'article 91 il s'agirait
d'un pouvoir qui appartient à l'autorité fédérale
seule. On nous répondra: II y a eu des ententes signées par le
Québec avec la France et d'autres pays francophones pour le rayonnement
de la culture française. Très bien. Mais, en vertu de la
constitution, l'éducation est de juridiction exclusive du Québec,
alors qu'actuellement, tel que le projet de loi est présenté,
nous voudrions... Je comprends que nous n'avons pas encore
l'indépendance. Il faut vivre dans le contexte de la
fédération où nous sommes placés et dans laquelle
nous sommes dans l'obligation d'évoluer. Je me demande si on n'a pas,
à ce moment-ci, manqué de prudence en ne précisant pas les
gouvernements.
Ah! ce serait très facile de dire: Avec le gouvernement canadien
ou avec un gouvernement provincial ou des gouvernements provinciaux, dans le
but de respecter le fédéralisme rentable, toujours, cependant,
dans une seule voie, une seule direction : la voie fédérale.
Eh bien! je me demande si cette législation que l'on nous
présente aujourd'hui, elle aurait été nécessaire,
si, de l'autre côté, on avait demandé que le gouvernement
fédéral accorde aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord
les mêmes privilèges qu'il a accordés au gouvernement de
Terre-Neuve.
Je dis, M. le Président, qu'il y a un aspect au problème
qui peut paraître bien bénin, mais, d'un autre côté,
c'est un principe d'un projet de loi qui devant l'inaction du gouvernement,
nous obligera à supporter quand même le gouvernement pour corriger
sa propre négligence, son défaut de mettre en application son
fédéralisme rentable en ne faisant pas en temps opportun des
revendications nécessaires dans l'intérêt des
pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. C'est pourquoi nous supporterons le
principe de ce projet de loi, tout en regrettant cependant qu'encore là,
nous soyons dans l'obligation d'être indirectement à la remorque
du gouvernement fédéral en demandant au gouvernement
fédéral de permettre au Québec de permettre à une
classe spécifiée, les citoyens québécois, de se
grever, de s'accrocher, d'être traînés par une loi que le
fédéral avait juridiction et pouvoir de passer mais qui
était surtout bénéfique à l'endroit des habitants
d'une seule province, la province de Terre-Neuve.
Je dis donc, M. le Président, que cette loi, dans son principe,
doit être supportée. Pourquoi? Parce que le gouvernement
réalise qu'il a été négligent. Dans les
circonstances, il n'avait pas d'autre solution que de couvrir sa propre
négligence par une législation préparée à la
vapeur, sans consultation préalable, et surtout en mettant de
côté ce principe reconnu dans notre système de droit
parlementaire québécois, que nous avons une autorité
compétente pour signer des ententes, au nom du Québec. Or cette
autorité n'est pas le ministre de l'Industrie et du Commerce dans ce
secteur particulier, lorsqu'il s'agit de signer une entente avec des organismes
interprovinciaux ou avec des gouvernements provinciaux ou avec le gouvernement
fédéral. Ce n'est malheureusement pas le ministère de
l'Industrie et du Commerce qui est spécialisé, doit surveiller
l'application de cette loi. Lorsqu'il s'agit de ratifier une entente, au niveau
du droit, je dirai national, ce doit être par le mécanisme et le
canal et par la voie du ministère des Affaires
intergouvernementales.
M. Paul-A. Latulippe
M. LATULIPPE: M. le Président, à ce stade-ci j'ai une
très brève intervention pour que le ministre puisse me
répondre tout à l'heure. Je me réfère à un
texte que nous lui avons remis tout à l'heure, un texte que lui a remis
le député de Mégantic. Il y est dit que le Conseil
privé de Londres interpréta la Constitution de 1867, de
façon à satisfaire les deux ordres de gouvernement, par une
série de trois jugements datant de 1898, 1914 et 1920 et que ce tribunal
suprême décida que la propriété des poissons
relevait des provinces, mais que le contrôle des pêcheries
était de compétence fédérale.
A ce moment-là, M. le Président, je me demande si le bill
14, Loi favorisant la comma-cialisation du poisson, relève plus du
contrôle que de la propriété. Si ça relève du
contrôle, ne devrait-on pas demander au gouvernement
fédéral de voir à appuyer de ses deniers le bill 14?
Merci, M. le Président.
M. LEVESQUE: Je propose, M. le Président, que le
député pose cette question en comité.
M. Jean-Noël Tremblay
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais faire
quelques brèves observations à la suite de celles qu'a faites mon
collègue le député de Maskinongé. On nous
présente un projet de loi favorisant la commercialisation du poisson.
Cela a l'air assez bénin en apparence, mais c'est un projet de loi qui
met quand même en cause certains principes. Je n'ai pas d'objection de
principe à approuver le projet de loi, mais il m'apparaït que le
gouvernement du Québec ne semble pas s'aviser de comprendre qu'il a
déjà des pouvoirs et qu'il ne s'en sert pas.
Lorsqu'on a créé, au départ, le ministère
des Affaires fédérales-provinciales et que l'on a, par la suite,
créé le ministère des Affaires intergouvernementales, il
nous a paru, à ce moment-là, que le Québec entendait se
prévaloir des prérogatives qui normalement lui sont
attribuées par le texte même de la constitution et de toutes
celles qui, à la suite de l'évolution historique, à la
suite de l'évolution de la fédération canadienne,
découlent normalement des pouvoirs garantis explicitement au
Québec par le texte même de la constitution canadienne.
Voilà qu'aujourd'hui le gouvernement nous présente un
projet de loi afin de se donner des droits que, à mon avis le
ministre pourra nous répondre là-dessus, les spécialistes
pourront discuter là-dessus il possède déjà.
Si vous me permettez, M. le Président, de faire référence
à ce que disait le député de Montmagny hier dans son
discours, le gouvernement du Québec, encore une fois, nous indique qu'il
est à la remorque du gouvernement central, qu'il se laisse guider
après coup parce qu'il craint les répercussions des gestes qu'a
posés le gouvernement central. Il ne prend pas c'était
là un des arguments du député de Montmagny, hier
l'initiative des opérations dans des domaines qui sont de sa
compétence.
Le député de Maskinongé le faisait observer tout
à l'heure, c'est le ministre de l'Idustrie et du Commerce qui
présente ce projet de loi qui traite une question de commerce. Mais le
ministre de l'Industrie et du Commerce veut obtenir, par ce
truchement-là, des pouvoirs, qui ne pourront être définis
et qui ne pourraient être négociés puisque l'on
parle de négociations d'ententes avec d'autres gouvernements que
dans le cadre de discussions engagées, entreprises par le ministre des
Affaires intergou- vernementales. Je voudrais attirer ici l'attention du
ministre et du gouvernement sur cette exigence que pose, à l'heure
actuelle, l'évolution de la fédération canadienne,
à savoir que le gouvernement du Québec, dans tous les domaines
qui ressortissent à sa compétence, doit non seulement exercer
cette compétence mais doit encore se prévaloir des droits qui
découlent normalement d'une compétence reconnue par un texte et
d'une compétence qui s'est, par la force des choses, par suite d'une
évolution historique, élargie.
Je me demande donc pourquoi le gouvernement n'a pas
procédé d'une autre façon, pourquoi le gouvernement n'a
pas procédé via le ministère des Affaires
intergouvernementales afin d'établir exactement quel est,
premièrement, le rôle de ce ministère et quels sont
exactement les champs de compétence que ce ministère peut, petit
à petit, couvrir et dans lesquels il peut s'engager, compte tenu de
l'évolution de la constitution.
Le député de Montmagny le soulignait il reprenait
des propos que d'autres collègues de notre parti avaient tenus
l'autre jour dans son discours qu'à toutes fins utiles, la constitution
canadienne n'existe plus et que nous sommes en face, d'autre part,
d'envahissements du gouvernement central qui nous autorisent à prendre
l'initiative, à aller au-delà de ce que, mathématiquement,
techniquement, juridiquement, on a reconnu jusqu'ici comme de notre
compétence.
Or, il y a un organe officiel du gouvernement qui est non seulement une
direction du gouvernement, une direction générale d'un
ministère, mais qui est un ministère dont le rôle est
précisément d'examiner toutes ces questions et d'examiner,
d'abord, quels sont les champs de compétence que nous occupons à
l'heure actuelle, de quelle façon on a restreint, on a
rétréci l'aire de liberté que nous avions pour
évoluer dans ces champs de compétence et qui a aussi tout pouvoir
pour déterminer sur quelles avenues le gouvernement du Québec
doit maintenant s'avancer afin de faire progresser cette souveraineté
que le gouvernement du Québec a le droit de revendiquer au nom des
contribuables québécois.
Alors le projet de loi, évidemment, ne pose pas, à mon
sens, de difficultés. Je n'ai pas d'objection à en accepter le
principe, mais il m'apparaft, dans ce texte bénin, que le gouvernement
du Québec agit avec énormément de timidité, qu'il a
l'air de suivre des directives qui lui viennent d'ailleurs, qu'il craint, en
proposant un projet de loi pour se donner des pouvoirs, d'offenser quelqu'un
dont il penserait qu'il s'opposera à une initiative du gouvernement du
Québec dans un domaine qui est le nôtre.
Le gouvernement du Québec a-t-il le besoin de se donner ces
pouvoirs ou a-t-il pensé à inventorier les pouvoirs qu'il
détient déjà? Je demande au ministre de l'Industrie et du
Commerce et à ses collègues d'examiner exactement les pouvoirs du
ministère des Affaires
intergouvernementales et d'aller dans les dossiers de ce
ministère, pour voir de quelle façon pendant quatre ans, nous,
nous avons élargi petit à petit, sans faire de bruit, les
pouvoirs du gouvernement afin de donner aux stipulations expresses de la
constitution 1867 un sens qu'on ne leur avait jamais donné afin de
montrer comment l'évolution du fédéralisme permet aux
Etats membres de la fédération canadienne, et surtout en raison
de l'attitude du gouvernement central une attitude qui se durcit de plus
en plus comment le gouvernement du Québec peut occuper sans
aucune sorte de réticence des champs de compétence.
Le leader parlementaire qui parraine ce projet de loi devra s'interroger
là-dessus et se demander exactement pourquoi il demande ces pouvoirs et
se poser la question de savoir s'il ne les avait pas déjà. Il
devra aussi apporter, comme l'a souligné mon collègue, le
député de Maskinongé, des précisions concernant
lesdits gouvernements dont il est question. C'est là tout.le
problème. Si, M. le Président, je suis intervenu, c'est pour
inciter le gouvernement à utiliser le ministère des Affaires
intergouvernementales et à demander aux fonctionnaires de livrer tout ce
qu'il y a dans les dossiers qui sont accumulés là et qui
prouveront au gouvernement actuel que le Québec, pendant quatre ans,
dans ce domaine des relations avec les autres gouvernements, a
évolué, a gagné et regagné petit à petit un
terrain considérable et que l'effort timide que fait actuellement le
gouvernement n'a rien de comparable...
M. GARNEAU: Le député me permet-il une question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, pas pour l'instant, M. le
Président.
M. GARNEAU: Vous n'avez pas d'exemple à donner.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II est bien près de moins dix; nous
vous en donnerons en temps et lieu. Mangez votre bonbon, là! Pour
l'instant, c'est une occupation à plein temps.
M. le Président, je dis donc que le gouvernement... C'est
déjà un emploi nouveau que de sucer un bonbon.
M. GARNEAU: Nous n'avons pas besoin de l'autorisation du
fédéral pour ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le gouvernement du Québec ne semble pas
se rendre compte de la puissance de l'instrument qu'il a par le
ministère des Affaires intergouvernementales. C'est le sens des
observations qu'a faites le député de Maskinongé. C'est le
sens de celles que je fais parce qu'au-delà de l'objet de ce projet de
loi qu'on nous propose aujourd'hui, il y a tout un ensemble de droits, de
prérogatives dont pourrait user le gouvernement du Québec et dont
il ne veut user qu'avec la bénédiction catholique, apostolique et
romaine du gouvernement central dont il sait très bien qu'il devient de
jour en jour le vassal humilié.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Duplessis.
M. Henri L. Coiteux
M. COITEUX: M. le Président, je m'excuse d'abord auprès de
mes collègues d'avoir été absent cet après-midi.
C'est parce que je me suis occupé des gens du comté de Saguenay
qui ne peuvent pas voir leur député.
M. LESSARD: M. le Président, je soulève une question de
privilège.
La semaine dernière et il y a quelques semaines, le
député de Duplessis a affirmé qu'il s'occupe des gens de
mon comté, comme il vient de le dire. Je veux lui dire qu'il doit
s'occuper des patroneux du comté de Saguenay et qu'il ne s'occupe pas
véritablement des intérêts du comté.
Le député de Duplessis est quand même adjoint aux
Terres et Forêts et lorsque j'ai besoin de communiquer soit avec le
ministère des Terres et Forêts ou son adjoint, je communique avec
le député de Duplessis. D'ailleurs, je suis bien heureux de sa
collaboration.
Mais que le député de Duplessis ne vienne pas dire que le
député de Saguenay ne fait pas son travail dans son comté!
Qu'il fasse autant de réunions que j'en fais dans mon comté et il
s'apercevra que le comté de Saguenay est bien représenté,
pas mal mieux qu'il ne l'était dans les années
passées.
M. COITEUX: M. le Président, je dois dire que je n'ai pas besoin
de faire tant de réunions pour vendre ma politique. Sur la question de
privilège...
M. BURNS: C'est le genre de remarques qui risquent de nous faire
siéger jusqu'à onze heures, M. le Président.
DES VOIX: On siège jusqu'à onze heures.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre d'Etat.
M. COITEUX: Sur la question de privilège du député
du comté de Saguenay...
M. LE PRESIDENT: II ne peut pas y avoir de débat sur la question
de privilège. L'honorable député de Duplessis.
M. COITEUX: M. le Président, j'en ai certainement pour 25 minutes
à parler sur le bill 14. Je dois, d'abord, m'excuser, car le bill 14
concerne exclusivement mon comté. Je puis dire, avant l'ajournement de
la Chambre, que
ceux qui ont critiqué ce bill ne connaissent tout simplement pas
la région de la Basse-Côte-Nord, comme le ministre l'a dit.
Ce soir, à huit heures, c'est mon intention d'éclairer mon
bon ami du comté de Saguenay qui pense connaître la
Côte-Nord.
M. LESSARD: Vous n'étiez même pas ici.
M. BURNS: Vous n'étiez seulement pas ici, comment voulez-vous
éclairer quelqu'un?
M. COITEUX: Je vais peut-être éclairer aussi un peu la
lanterne du député de Chicoutimi. Je demande l'ajournement de la
Chambre. J'aurais à parler...
M. LE PRESIDENT: La suspension. M. PAUL: II est moins cinq.
UNE VOIX: II est moins cinq, il n'est pas six heures.
M. COITEUX: M. le Président, on me dit de continuer
jusqu'à six heures. C'est facile, parce que, sur le bill 14, j'en ai
tellement à dire, surtout pour le comté de Duplessis.
UNE VOIX: Allez.
M. COITEUX: Lorsque j'ai vu le bill 14, M. le Président, je me
suis dit: Enfin, nous avons un ministre de l'Industrie et du Commerce qui
comprend les besoins des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Depuis
nombre d'années, j'essayais de faire comprendre au gouvernement la
position dans laquelle se trouvaient les pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord. Les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord ne
peuvent se comparer aux pêcheurs des Iles-de-la-Madeleine. Il ne peuvent
se comparer aux pêcheurs de Gaspé-Nord.
M. BIENVENUE: ... de Matane.
M. COITEUX: ... ne peuvent se comparer, comme le dit mon collègue
de Matane, aux pêcheurs de Matane. Il n'y en a pas tellement.
M. VEZINA: ... de l'Ile d'Orléans.
M. COITEUX: Et mon ami du comté de Montmorency me dit qu'ils ne
peuvent même pas se comparer aux pêcheurs de l'île.
UNE VOIX: Ce sont des anguilles.
M. COITEUX: Je pense bien, chez nous on ne pêche pas
d'anguilles.
C'est parce que au sujet des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord,
nous avons un comté...
UNE VOIX: Ils pêchent seulement de la barbote.
M. COITEUX: ... de 600 milles de longueur.
Tous les villages ne sont pas réunis par des chemins.
M. LESSARD: Cela fait quatre élections que vous promettez
ça.
M. CHARRON: Cela ne dépend que de vous autres...
M. LESSARD: Ce sont vos promesses électorales.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. COITEUX: Mon cher collègue du comté de Saguenay...
M. DUMONT: M. le Président, si vous me le permettez, sur un point
de règlement.
M. COITEUX: ... quand j'ai dit qu'on n'avait pas de chemin...
M. DUMONT: Le leader du gouvernement m'a rappelé à l'ordre
à deux ou trois reprises, parce que je m'éloignais du sujet.
Pourtant, j'étais dans le sujet. Je crois qu'aujourd'hui on perd un
temps considérable de la façon qu'on procède
actuellement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je demanderais à
l'honorable député de Duplessis de prendre son siège pour
quelques instants. Il faut comprendre que l'honorable député de
Duplessis est à peine dans son introduction, je crois. Il explique. Il
vient à peine de se lever. Je suis bien prêt à accepter...
A l'ordre, s'il vous plaît. Après son court préambule
expliquant le contexte dans lequel le bill 14 doit être
étudié, du fait que son comté est tout à fait
concerné, dès son préambule terminé, je suis
assuré qu'il collaborera pour aller au fond du sujet du bill no 14.
M. COITEUX: M. le Président, le préambule était
l'esprit du projet de loi, parce que j'allais dire qu'il a été
présenté pour les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Ce
bill, c'est son esprit de vouloir venir en aide, grâce à la
généreuse collaboration du ministère de l'Industrie et du
Commerce, aux pêcheurs de la Basse-Côte-Nord. Je comprends
l'intervention du député de Mégantic, il n'a pas autre
chose que des petites truites dans son comté...
M. DROLET: II en a vu une grosse en vous voyant...
M. BROCHU: On va attendre l'introduction longtemps...
M. BIENVENUE: Ils ne veulent pas le laisser parler, c'est
évident...
M. COITEUX: Tout l'après-midi...
M. CHARRON: II vient de mordre, M. le Président.
UNE VOIX: Sis, sis.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ferai remarquer aux honorables
députés de cette Chambre qu'il est six heures.
M. BURNS: M. le Président, je remarque, comme tout le monde,
qu'il est six heures. Je remercie la foule en délire.
M. LACROIX: Vous avez le sens de l'observation
développé.
M. BURNS: Cependant, M. le Président, je n'ai pas l'intention de
faire une motion, mais plutôt une suggestion. Si le parti
ministériel et ceux de l'Opposition étaient d'accord, nous
pourrions peut-être examiner la possibilité d'ajourner la Chambre
à lundi, étant donné que, de part et d'autre, on a fait
valoir que tous avaient déjà des rendez-vous que plusieurs ont
dû annuler. C'est une suggestion que je fais à la Chambre. Quant
à notre parti, je peux vous assurer immédiatement, M. le
Président, que nous serions prêts à donner notre
consentement à l'ajournement à lundi.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement unanime?
M. LEDUC: Non, M. le Président, il n'y a pas consentement
unanime.
M. BURNS: C'est bien ça, c'est de la collaboration.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a suspension ou ajournement?
M. LEVESQUE: Huit heures, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit
heures ce soir.
Reprise de la séance à 20 h 5
M. LAVOIE (Président): A l'ordre, messieurs!
Le député de Duplessis.
M. COITEUX: Ne commencez pas à m'interrompre avant que je
commence, parce que je suis nerveux et puis je n'aime pas être
interrompu.
M. le Président, il est tout de même temps qu'on parle
sérieusement du bill 14. Lorsque l'on a ajourné pour le souper,
ou le dfner comme on dit en français, pour faire plaisir à M.
Charron et au député de Chicoutimi, j'ai pris connaissance des
notes et des discours qui ont été prononcés...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Du projet?
M. COITEUX: ...cet après-midi en ce qui a trait au bill 14. Et je
puis vous dire, M. le Président, sans préjudice, j'espère,
que j'ai été énormément surpris de voir que le
député de Mégantic m'interrompait parce que je ne parlais
pas de l'esprit du bill.
J'ai lu ses notes et je me demande, M. le Président, comment il
se fait que vous ne l'avez pas interrompu dès le début, il n'a
pas parlé de l'esprit du bill une seule seconde dans son discours.
M. DUMONT: J'ai répondu au député des
Iles-de-la-Madeleine.
M. COITEUX: J'ai lu aussi les notes du député de Saguenay.
Le député de Saguenay, c'est un de mes amis, c'était mon
voisin et nous nous aidons mutuellement. Nous ne partageons pas les mêmes
idées politiques, mais je vais demander justement au
député de Saguenay, avant de se prononcer en public, puis
ça va paraître dans les journaux chez lui de se renseigner au
moins sur la Côte-Nord.
Quant au député de Chicoutimi, ça lui a
donné la chance de parler de toutes sortes de choses au point de vue de
la constitution et des grandes idées qu'il préconise, sans parler
du bill.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon?
M. COITEUX: Pour ce qui est du leader de l'Opposition, probablement
qu'il a été déçu que le bill n'englobe pas le
maskinongé parce que le maskinongé ça ne se sale pas.
M. PAUL: Ce n'est pas la première fois que je l'entends.
UNE VOIX: Pas la dernière.
M. COITEUX: M. le président, ce bill est beaucoup plus simple. Ce
bill offre enfin la possibilité aux pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord de gagner leur vie d'une façon absolument
normale et de recevoir au moins l'équivalent de leur labeur, de
la cause de leur souci. Depuis des années, les pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord, avaient deux points pour expédier leur poisson,
soit le vendre frais à l'industrie de La Tabatière ou le
saler.
Quand les pêcheurs de la Basse-Côte-Nord salaient leur
poisson, chaque année, c'était tout un problème de le
vendre, avec le résultat que des acheteurs de Terre-Neuve, du
Nouveau-Brunswick, dans certains cas, venaient et achetaient le poisson
salé des pécheurs de la Basse-Côte-Nord, à des prix
ridicules. Je peux vous citer des cas, dans les trois dernières
années, où les pêcheurs n'ont même pas
été payés.
Cette loi est une loi à l'heure! On pourra parler de
constitution. On a parlé de toutes sortes de choses, cet
après-midi, qui ne concernent pas le bill du tout. C'est beaucoup plus
simple que ça. Le bill, préconisé par le ministre de
l'Industrie et du Commerce, aujourd'hui, veut permettre à ces gens, qui
vivent sur une côte de 500 milles, sans communications, de gagner leur
vie d'une façon honorable. Il n'est pas question de constitution.
M. LEVESQUE: Très bien.
M. COITEUX: II n'est pas question, "and I would like to say that to the
Leader of the Opposition in English, this time. He was speaking of our French
province and English provinces. For your knowledge, I want to tell you that the
English people of all those villages are Quebecers just as much as you and the
"député Charron" is.
S'ils sont Québécois, M. le Président, ils ont
droit à leur subsistance; ils ont droit aux lois du Québec. Ils
ont droit à la même protection à laquelle les
séparatistes du comté de Saint-Jacques ont droit.
M. le Président, cette loi est bien simple. Ce n'est pas une
question de constitution. Ce n'est pas une question de dix milles. Ce n'est pas
une question de pêcheurs qui viennent pêcher dans nos
régions. Ce n'est pas ça du tout.
M. LAURIN: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une
question au député?
M. COITEUX: Certainement. UNE VOIX: Ne t'assieds pas à terre.
M. COITEUX: Excusez-moi si je reste debout; ils ont enlevé ma
chaise.
UNE VOIX: Elle est revenue.
M. LAURIN: When the Honorable Member of Duplessis was not here, we said,
in the name of our Party, that we favoured the principle of this bill. So, I do
not understand why he is attacking the honourable member of Saint-Jacques.
MR. COITEUX: The reason why, Mr. Lau-rin, is simply because...
MR. TREMBLAY (Chicoutimi): Mr. Speaker, so we...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! DES VOIX: Order,
order!
MR. SPEAKER: Order!
A la suite de la permission de l'honorable député de
Duplessis à la question du député de Bourget, la parole
est à l'honorable député de Duplessis.
MR. COITEUX: Can I answer in English? MR. SPEAKER: Sure. You may
proceed.
MR. COITEUX: Because it seems to me that the leader of the Parti
québécois cannot understand French. I am very sorry for him.
M. LESSARD: Est-ce que le député pourrait faire les
mêmes efforts pour donner une route à ces gens?
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Duplessis, s'il vous plaît.
M. COITEUX: M. le Président, je comprends que c'est difficile de
répondre au chef du Parti québécois. Je ne suis pas
psychiatre. Mais je suis tout de même assez pratique pour me rendre
compte que le bill 14 est un excellent bill, un bill qui vient enfin à
la rescousse de cette population qui oeuvre sur la Basse-Côte-Nord et qui
n'est pas connue, malheureusement...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne nous faites pas pleurer!
M. COITEUX: ...de la plupart des membres de cette Chambre. Même le
député de Chicoutimi, qui sourit, aurait quelque chose à
apprendre en venant visiter le comté de Duplessis avec moi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question de
privilège.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, c'est grave. Le
député de...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Duplessis.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai posé la
question de privilège. Vous ne m'avez pas laissé le temps
d'expliquer mon point de vue.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voulais vous dire, M. le Président,
que je suis déjà allé dans le comté de Duplessis.
J'ai demandé qui était député et on ne le
connaissait pas.
M. COITEUX: Probablement que c'était dans le temps où le
député de Duplessis avait des tendances péquistes. Les
péquistes ne me connaissent pas!
M. LESSARD: C'est une majorité à présent!
M. COITEUX: Admettez, M. le Président, que le
député de Chicoutimi, durant un certain temps, avait bien plus
d'amis parmi les péquistes qu'il n'en avait parmi les membres du parti
de l'Union Nationale.
UNE VOIX: C'était un ministre.
M. COITEUX: C'était un ministre dans le temps. Farce à
part, je dois rendre témoignage au député de Chicoutimi.
J'ai toujours été reçu avec une compréhension et
une grande amabilité lorsque je me suis adressé à lui pour
les affaires culturelles de mon comté.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. le Président.
M. COITEUX: M. le Président, cet après-midi, c'est
malheureux, on a parlé de toutes sortes de choses à part l'esprit
du bill. Qu'est-ce que c'est, le bill? C'est que nous avions une population sur
la Basse-Côte-Nord de Kégashka à Blanc-Sablon.
Ce sont les seuls pêcheurs qui, dans la province de Québec,
étaient obligés de saler leur surplus de production qu'ils ne
pouvaient pas livrer à l'usine de poisson frais. Ce n'est pas le cas des
Iles-de-la-Madeleine, ce n'est pas le cas du comté de Gaspé-Nord,
où ils ont, comme l'a dit le ministre cet après midi, le
"Gaspé Cured". On exploitait ces gens et aujourd'hui on fait un reproche
parce qu'on est allé voir le gouvernement fédéral pour
ça.
Un gouvernement peut-il se permettre de mettre sur pied un organisme
international pour vendre le poisson salé, lorsqu'il existe? Nous
faisons partie de Terre-Neuve, dans la Basse-Côte-Nord, pour autant que
la vente du poisson est concernée. Cela coûtera $5,000, qu'on dit,
à la province de Québec, et après? Il en coûte
$150,000 par mois pour le service social actuellement. N'est-il pas temps que
le gouvernement commence à investir de l'argent pour essayer d'enlever
la surchage qui pèse sur le ministère des Affaires sociales?
C'est le but de la loi, c'est ce qu'elle obtiendra. Les gens de chez
nous sont contents. Pensez-vous, en bonne vérité, qu'on va aller
dire au pêcheur de Kégashka: "My dear friend, I cannot give you
that because it is against the
Constitution"? Il va se retourner et dire: Qu'est-ce que c'est que la
constitution? Est-ce un bateau des Clarke, ça?
Il s'ent fout de la constitution, pourvu qu'il puisse gagner son pain
honnêtement et qu'il ne soit pas au crochet du gouvernement. Ce sont des
pêcheurs honnêtes, des travailleurs qui se lèvent encore
à trois heures du matin pour gagner leur pitance. Cette loi-là,
qui va coûter $5,000 à la province, va leur permettre de
pêcher jusqu'au mois d'octobre, parce qu'ils étaient
obligés d'arrêter dès le mois de septembre auparavant, leur
permettre un revenu supérieur peut-être doublant ce qu'ils gagnent
actuellement. Et on va critiquer cette loi et on va penser que c'est contre la
constitution, comme le député de Mégantic l'a dit en
s'aventurant au large? Ce n'est pas une question de pêche.
M. DROLET: Nous savons nager.
M. COITEUX: C'est une question de prise de poissons par des
pêcheurs québécois. "The only fault that we can pronounce
against those fellows, they speak English, that is all, but they are fishermen
and they are Quebecers."
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le député de Duplessis me
permet-il une question?
M. COITEUX: Certainement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pourrait-il nous donner la recette de son
coquetel verbal?
M. COITEUX: Donner quoi?
Un coquetel verbal? Non. Je ne fréquente pas les mêmes gens
que le député. Cela me répugne de le dire, mais je ne
fréquente pas les mêmes gens.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne fréquentez pas les bonnes gens,
alors?
M. COITEUX: Non, non.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends. C'est pourquoi vous n'avez pas
été nommé ministre.
M. COITEUX: M. le Président, si le député veut
éventuellement être chef de son parti, il fait mieux de laisser le
député de Duplessis tranquille. Je n'ai pas son intelligence, je
n'ai pas sa facilité de parole, je n'ai pas sa façon de
s'exprimer, mais j'ai une chose que le député de Chicoutimi n'a
pas: c'est la sincérité à l'égard des
électeurs de mon comté qui m'élisent depuis 1960. J'ai eu
Bourgault contre moi et je peux avoir M. Charron contre moi; je les invite
"toute la gang", à venir me battre si je décide de me
représenter.
M. LESSARD: Est-ce que le député me permet une
question?
M. COITEUX: Oui, M. Lessard, le député de Saguenay. Qu'il
ne m'invite pas à me présenter contre lui parce que je vais
laisser mon comté et je faix aller le battre.
M. LESSARD: Le député pourrait-il nous dire quelle
majorité il a eu à Sept-Iles même?
M. COITEUX: Plus de 2,000 voix.
M. LESSARD: A Sept-Iles?
M. COITEUX: Oui.
M. LESSARD: Dans Duplessis...
M. COITEUX: Non, non.
M. LESSARD: Dans Duplessis, j'ai l'impression que dans quatre ans c'est
le seul discours que le député va faire pour avoir la
Basse-Côte-Nord.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. COITEUX: M. le Président, je m'excuse d'avoir mal
informé la Chambre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. COITEUX: A Sept-Iles, je n'ai pas eu la majorité, c'est
vrai.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. COITEUX: Le Parti
québécois...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ferais d'abord remarquer au
député de Chicoutimi que toutes ses interventions et digressions
font quand même partie des 30 minutes qui lui sont allouées. J'ai
entendu des remarques également...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas parlé, moi!
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, le député de Duplessis. J'ai
entendu également des remarques qui n'étaient peut-être pas
adressées au président, mais qui sont parvenues à mes
oreilles à l'effet que l'opinant pouvait s'éloigner du bill 14.
Il ne faudrait quand même pas, lorsque d'autres députés
l'invitent à des digressions ou l'entraînent dans des questions en
dehors du bill 14, accuser le député s'il se permet de
répondre à ces questions.
Dans l'intérêt de l'opinant et de la Chambre, j'aimerais
que l'on revienne...
M. COITEUX: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: ... au bill 14.
M. COITEUX: ... je suis prêt à revenir à l'esprit du
bill, mais vous connaissez mon caractère quand on me pique.
Ce bill permettra à nos pêcheurs d'envisager l'avenir
économique de leur région d'une façon beaucoup plus
optimiste.
Le gouvernement du Québec ne pouvait pas former par
lui-même un office du poisson salé. Il fallait tout de même
aller chez nos voisins de Terre-Neuve qui avaient déjà cet
organisme préconisé par le gouvernement fédéral. Et
puis après? Que l'argent vienne du gouvernement fédéral ou
que l'argent vienne du gouvernement provincial, c'est l'argent des
contribuables du Québec. Et quand elle est appliquée pour
améliorer les conditions de vie de nos Québécois, qu'ils
parlent français ou anglais, à ce moment-là, je crois que
c'est une bonne mesure. Il ne faudrait tout de même pas prétendre
que le gouvernement du Québec pouvait faire un office du poisson
salé pour quinze villages qui pèchent la morue sur la
Basse-Côte-Nord. Je pense que la décision la plus sage a
été prise par le ministre de l'Industrie et du Commerce qui
présente cette loi.
Je suis convaincu que si le ministre de l'Industrie et du Commerce,
seulement avec cette bonne mesure, se présentait dans mon comté,
il aurait 100 p. c. des votes sur la Basse-Côte-Nord.
C'est une loi excellente. Ce n'est pas une loi constitutionnelle. Ce
n'est pas une loi qui affecte l'intégrité du Québec. Ce
n'est pas une loi qui affecte les grands principes. Aux gens qui veulent
trouver toujours une raison sentimentale pour réprouver les lois parce
que cela touche à Ottawa vous demanderez ce qu'ils feraient pour
régler le cas de la population de la Basse-Côte-Nord? S'ils
n'avaient pas la loi d'Ottawa, il faudrait en faire une, se trouver des
marchés internationaux pour prendre soin de cette production de quelques
centaines de milliers de livres de poissons qui, aujourd'hui, sont
achetées à des prix ridicules. Personne n'a dit, cet
après-midi, que ces pêcheurs étaient exploités
depuis des années. Cette loi va corriger cette situation. Personne ne
l'a dit cet après-midi.
M. LESSARD: Je l'ai dit, cet après-midi. M. BACON: Ah ! Il l'a si
peu dit.
UNE VOIX: II ne l'a pas dit fort.
UNE VOIX: On ne l'a pas entendu.
M. COITEUX: Le député de Saguenay prétend qu'il l'a
dit. Je lui fais confiance. Peut-être qu'il aura une bonne note pour se
faire réélire à la prochaine élection.
UNE VOIX: On verra ça.
M. COITEUX: M. le Président, c'est une excellente loi qui met fin
à l'exploitation de nos
meilleurs pêcheurs de la province de Québec actuellement.
Qu'on aille à Kégashka et l'on verra là des
pêcheurs, douze barques qui, chaque jour, rapportent de 35,000 à
40,000 livres de morue.
On ne peut pas en disposer complètement à l'usine de La
Tabatière, qui est à quelque 180 milles de là. Il faut
qu'ils le salent. Aujourd'hui, les gens, qui arrêtaient de saler du
poisson en septembre, vont continuer à pêcher, parce qu'une loi a
été présentée par le ministère de
l'Industrie et du Commerce du Québec, qui va protéger ces gens,
qui va les encourager à continuer de pêcher parce qu'ils savent
qu'ils pourront vendre leur poisson à un prix juste et raisonnable, sans
être exploités. C'est ça, le but de la loi.
J'ai entendu des discours, cet après-midi. On a dit que cela
aurait dû être au ministère des Affaires
intergouvernementales. Qu'est-ce qu'il connaît, le ministère des
Affaires intergouvernementales, dans la morue? Ce sont des bons ministres, mais
ils ne connaissent pas ça. Le seul gars qui connaît ça,
c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce, parce que c'est un gars de la
Gaspésie. C'est un gars qui connaît ça, la morue.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le premier ministre qui est ministre des
Affaires intergouvernementales. Il ne connaît pas ça?
M. COITEUX: Oui, mais, même si c'est le premier ministre, je ne
l'insulte pas en disant qu'il ne connaît pas la morue. Il ne pêche
pas, lui. Deuxièmement, ce n'est pas tellement le détenteur du
ministère des Affaires intergouvernementales, c'est parce que c'est une
affaire d'industrie et de commerce, une affaire de mise en marché. Il ne
s'agit pas de régler la constitution entre Ottawa et le Québec;
cela relève des Affaires intergouvernementales. Ce n'est pas la question
des douze milles, comme le député de Mégantic le disait
cet après-midi. Ce n'est pas une question de grande constitution, comme
le député de Maskinongé le disait. Ce n'est pas ça
du tout. C'est plus simple que ça. C'est un projet de loi honnête,
c'est un projet de loi qui est proche du peuple, c'est un projet de loi qui
veut aider la population. C'est pour ça que comme député
du comté, je ne suis pas à 100 p. c, mais à 200 p. c. pour
ce projet de loi.
Puis, je me permets de demander aux gens qui voteront contre ce projet
de loi en deuxième lecture de me faire face à la
télévision ou à la radio de mon comté pour
défendre leur attitude.
M. LESSARD: M. le Président, tout le monde a été
pour.
M. COITEUX: Ceux qui ont parlé contre, qu'ils viennent dans mon
comté pour le dire aux pêcheurs. Que le député de
Saguenay vienne dire aux pêcheurs ce qu'il a dit cet
après-midi.
M. LESSARD: Question de privilève, M. le Président. Le
député de Duplessis n'était pas ici cet après-midi
et j'ai l'impression qu'il n'a pas eu le temps de lire ce que j'ai dit cet
après-midi.
Au contraire, j'ai appuyé le bill...
M. BURNS: II ne sait pas lire.
M. LESSARD: ... alors c'est vrai que le député de
Duplessis est tellement ignorant que j'ai l'impression qu'il n'a pas
été capable de lire.
M. COITEUX: M. le Président, je ne demanderai même pas au
député de Saguenay de retirer ses paroles, parce qu'un
professeur, une salade de prof...
M. LESSARD: Ecoutez, vous nous l'avez dit, ce sont vos paroles.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. COITEUX: Un professeur qui parle comme ça, M. le
Président, c'est pire qu'une carpe, alors je ne lui demanderai pas de
retirer ses paroles.
M. LESSARD: Un ingénieur.
M. BOIS: Une question de privilège, s'il vous plaît.
M. COITEUX: Certainement.
M. BOIS: Le député voudrait-il continuer de parler de la
pêche à la morue et non pas de la pêche au
député?
M. COITEUX: Avec plaisir! Vous savez monsieur, mon honorable ami, vous
n'avez qu'à demander au député de Saguenay qu'il me laisse
la paix. Je ne suis pas le genre de gars... J'ai un caractère et je ne
le réformerai pas, j'ai 61 ans. Quand je suis piqué je...
M. LESSARD: Vous démissionnez. M. LAFONTAINE: On ne dirait pas
ça. M. PAUL: On ne dirait pas ça.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): On pensait que c'était 80.
M. COITEUX: J'apprécie énormément les compliments
du député de Labelle et ceux du député de
Chicoutimi. J'aimerais donc ça vous rendre la pareille, M. le
député de Chicoutimi. De toute façon, M. le
Président, farce à part, ce n'est pas une question de chasse au
loup-marin, ce n'est pas une question de biologie marine et ce n'est pas une
question de distance des côtes. Le poisson dont on veut parler dans ce
bill est pêché par des pêcheurs de mon comté.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que le député me
permettrait une question de renseignement ?
M. COITEUX: Certainement.
M. TREMBLAY: Quel est approximativement, le nombre de pêcheurs qui
peuvent être favorisés par cette nouvelle loi?
M. LEVESQUE: M. le Président, il y avait 600 pêcheurs, il y
en avait 200 particulièrement affectés par le travail du poisson
salé.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Une question de renseignement.
M. COITEUX: Je vais corriger le ministre, on en a exactement 210.
M. LESSARD: Nommez-les! Est-ce que le député pourrait les
nommer?
UNE VOIX: A six heures ce soir.
M. COITEUX: Ce sont les dernières informations que j'ai eues
à six heures ce soir.
M. LEVESQUE: Ce n'est pas 200 mais 210. M. LESSARD: Nommez-les!
M. COITEUX: Ecoutez! Tout ça pour résumer qu'on a voulu
faire une immense tempête dans un verre d'eau, cet après-midi.
UNE VOIX: Une chose certaine, le député de Sainte-Marie ne
connaît rien là-dedans.
M. COITEUX: Le gouvernement ne pouvait pas protéger les
pêcheurs de mon comté d'une façon aussi adéquate et
aussi juste qu'il le fait par cette loi. Sentimentalement, on pourra dire que
c'est encore une affaire d'Ottawa, c'est encore une affaire de Terre-Neuve.
Mais les "Newfies" en bas de Blanc-Sablon, they speak exactly the same language
as my fishermen on the coast. Ce sont des gens qui viennent de Terre-Neuve, ce
sont des gens qui sont établis dans le Québec, c'est pour
ça que la loi est faite. Quand il sera question de limites de
pêche, quand il sera question de pêche... On a dévié
cet après-midi sur la pêche au loup-marin, mais on n'en a pas de
loup-marin sur la Côte-Nord.
UNE VOIX: Seulement des phoques.
M. COITEUX: Ceux-là qu'on vient à bout de prendre on les
prend parce que...
M. LACROIX: Ils s'en viennent chez nous.
M. COITEUX: Je ne suis pas nationaliste, je ne suis pas
fédéraliste plus qu'il le faut. Mais si une loi
fédérale permet d'épargner des deniers de la province de
Québec, et c'est ma conclusion, pour protéger à
très peu de frais la population de quelque 19 villages,
disséminés sur 250 milles de côte, sans chemin, sans
télévision, sans radio; si on est obligé de passer par une
loi fédérale pour améliorer le standard de vie de ces
gens-là, je ne comprendrai jamais qu'un Québécois, de
quelque parti politique qu'il soit, puisse s'opposer à pareille
politique bénéfique d'un gouvernement libéral de la
province de Québec.
M. LE PRESIDENT: Avant de donner la parole à l'honorable ministre
de l'Industrie et du Commerce, pour exercer son droit de réplique,
est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent prendre la
parole sur ce projet de loi?
L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Gérard-D. Lévesque
M. LEVESQUE: M. le Président, je serai très bref car je
crois que j'ai eu l'occasion d'exposer assez longuement la politique
gouvernementale et les buts recherchés par cette loi, ses
modalités, son application.
Je voudrais simplement relever une objection qui a semblé
sous-jacente aux diverses interventions que nous avons entendues du
côté de l'Opposition. Ce que j'ai retenu, c'est qu'on se posait
des questions sur la nécessité de légiférer
à ce moment-ci, parce que, a-t-on dit, les pouvoirs existent
présentement dans la loi organique du ministère des Affaires
intergouvernementales.
M. le Président, nous ne légiférons pas pour le
plaisir de légiférer. Je vous assure, ce soir, que j'en suis plus
convaincu que jamais. S'il y avait moyen de ne pas venir déranger nos
collègues, le vendredi soir, eh bien! nous le ferions avec plaisir et
nous les laisserions continuer à...
M. BURNS: Qui a refusé le consentement unanime?
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. LEDUC: M. le Président, ce n'est pas le leader parlementaire,
c'est le député de Taillon qui a refusé.
M. LEVESQUE: ...et ce refus est venu à la suite...
M. BURNS: De frustrations.
M. LEVESQUE: ...de ce que le député de Maisonneuve
connaît bien, une suite explicable mais injustifiée que l'on
pourrait peut-être appeler une maladie, que je ne voudrais pas
contagieuse: la procédurite!
M. le Président, si nous avions pu éviter de
légiférer, en utilisant une loi existante, nous l'aurions fait.
Nos conseillers juridiques, qui ont
étudié cette situation, nous ont dit que la loi du
ministère des Affaires intergouvernementales ne nous permettait pas de
conclure une entente avec le gouvernement fédéral, entente
relative à la commercialisation du poisson salé. Il existe, il
est vrai, un pouvoir permettant au ministre des Affaires intergouvernementales
de signer les accords avec le gouvernement central. Mais il faut,
d'après nos conseillers juridiques, qu'il y ait un pouvoir
spécifique dans une loi d'un ministère pour ce faire.
Or, nous n'avons pas trouvé dans la loi organique du
ministère de l'Industrie et du Commerce de disposition permettant au
ministre de conclure de tels accords. Dans les circonstances, nous n'avions pas
le pouvoir d'utiliser la loi du ministère des Affaires
intergouvernementales à cet effet.
Devant cet état de choses, nous avons dû nous adresser
à la Législature. C'est ce que nous faisons ce soir.
Quant aux autres objections qui ont été exprimées
de part et d'autre, j'en viens à la conclusion que ce sont des cas
d'espèce et je crois qu'ils ne sont venus sur le tapis qu'à cause
d'une mauvaise connaissance de la géographie de la
Basse-Côte-Nord, mauvaise connaissance de la population et des
problèmes de cette région. Comme cela a été fait
avec sûrement de la bonne volonté, avec un esprit positif, je
serais loin de vouloir enlever à nos honorables collègues dont je
connais l'objectivité et le désir de servir leur province... loin
de moi l'idée de ridiculiser ce que des malins appelleraient l'ignorance
de la question.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de deuxième lecture est
adoptée? Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Adopté?
DES VOIX: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Sur division?
UNE VOIX: Oui.
M. LEVESQUE: Pardon? Sur division?
M. DUMONT: Sur division
M. LEVESQUE: Alors vote, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
M. LEVESQUE: Qui l'a demandé? Est-ce que c'est demandé sur
division?
M. DUMONT: Sur division, s'il vous plaît, M. le
Président.
M. LEVESQUE: Très bien.
M. DUMONT: Nous allons voter.
M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote
M. LE PRESIDENT: Que celle et ceux qui sont en faveur de cette motion de
deuxième lecture veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Castonguay, Pinard, Garneau, Mme
Kirkland-Casgrain, MM. Tessier, Harvey (Jonquière), Lacroix,
Vaillancourt, Mailloux, Arsenault, Houde (Fabre), Coiteux, Bienvenue,
Vézina, Brown, Kennedy, Saindon, Leduc, Bacon, Berthiaume, Bossé,
Caron, Carpentier, Cornellier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau),
Houde (Limoilou), Lamontagne, Marchand, Phaneuf, Pilote, Paul, Lafontaine,
Vincent, Tremblay (Chicoutimi), Lavoie (Wolfe), Gauthier, Simard
(Témiscouata), Laurin, Burns, Charron, Joron, Tremblay (Sainte-Marie),
Lessard.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Que ceux qui sont
contre la motion de deuxième lecture veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Du-mont, Roy (Beauce), Bois, Roy
(Lévis), Té-treault, Latulippe.
M. LE PRESIDENT: Pour: 47 Contre: 6 Yeas: 47 Nays: 6
M. LE PRESIDENT: La motion est adoptée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, puis-je vous faire
remarquer que, si M. Tetley avait été ici, il aurait voté
pour?
M. LEVESQUE: Article 5.
M. LACROIX: Peut-être M. Masse aussi.
UNE VOIX: Ce n'est pas sûr.
M. LEVESQUE: Article 5.
M. LE PRESIDENT: II n'y a pas lieu d'aller en comité?
M. LEVESQUE: Non.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu propose la
deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la loi du
ministère du Revenu.
Projet de loi no 5
2e lecture M. Gérald Harvey M. HARVEY (Jonquière):
M. le Président,
l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de
ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre. Le bill no 5,
Loi modifiant la loi du ministère du Revenu, vise essentiellement
à rendre la perception des impôts et des taxes plus efficace et
plus économique. Cette loi organique du ministère, que nous vous
présentons, M. le Président, avec plusieurs amendements, nous
permettra d'accorder un traitement plus équitable aux contribuables
québécois.
Elle nous permettra également de combattre la fraude fiscale.
Elle aura pour but d'éliminer toute une série
d'échappatoires mieux connues dans le langage fiscal, comme on le dit si
bien en anglais, sous le nom de "loop-holes". Pour atteindre tous ces
objectifs, bien sûr, il fallait inclure dans la loi organique des
dispositions ou des articles que l'on retrouvait dans des lois individuelles et
qui n'existaient pas dans d'autres lois.
Je vous disais que, pour atteindre ces objectifs, la nouvelle loi
organique du ministère regroupe des articles qui existent dans plusieurs
autres lois du ministère. Elle rend également uniformes d'autres
articles laissés dans d'autres lois individuelles pour des raisons que
réaliseront les membres de cette Chambre lors de l'étude des
bills individuels, pour des raisons purement technique et administratives.
Enfin, elle comprend également des articles dont la contrepartie
se trouve déjà dans d'autres lois et dont l'absence créait
un traitement différent d'une loi à l'autre, causant, par le fait
même, de l'iniquité pour le contribuable et de
l'inefficacité administrative. Vous verrez également, au cours de
l'étude de cette loi en comité, des dispositions conformes
à ce qu'annonçait le premier ministre du Québec lors du
discours du budget en juin dernier.
Nous permettrons également au ministère du Revenu d'avoir,
au point de vue administratif, des dispositions qui vont lui donner, devant des
cas bien précis de danger de perdre certaines sommes par des
mandataires, la permission d'exiger, dans des cas bien précis, un
cautionnement ou des sûretés. Par la présentation de ce
bill 5, nous voulons éviter, dans les années à venir,
d'être dans l'obligation d'augmenter, plus rapidement que cela ne doit se
faire, les impôts de la masse des contribuables.
Si notre loi organique, le bill 5 et nos autres lois nous permettent une
meilleure rentabilité ou une perception plus efficace, bien sûr,
à ce moment-là, nous n'aurons pas à avoir recours à
l'augmentation des impôts dans des lois où il est très
difficile pour un contribuable d'échapper ou de se soustraire au
paiement de ces sommes. Il est bien sûr que, et je m'y
réfère pour quelques secondes, lorsque nous passerons à
l'étude d'un autre bill, le bill 6, nous toucherons la masse des
contribuables; c'est de la déduction à la source en grande
partie. Mais lorsqu'on parle des lois à la consommation, la loi
organisque du ministère du Revenu, elle doit permettre, pour une
administration efficace, une cohésion avec les autres lois, qu'elles
soient à la consommation, aux corporations ou toute autre loi de revenu.
Nous voulons des dispositions, M. le Président, qu'on retrouve dans
toutes les lois du revenu, que ce soit en Ontario, en Australie, dans les
autres provinces canadiennes ou dans la loi organique fiscale du
ministère du Revenu national.
Bien sûr, on va me dire, en quelques occasions, que le
français qu'on y retrouve pourrait être amélioré.
C'est sûr. Mais en langage fiscal, M. le Président, il faut se
rappeler, autant à Québec qu'en Saskatchewan ou en Ontario, que
les spécialistes, qui aiment les complications, se
réfèrent au texte. Quand une loi fiscale provinciale a exactement
le même texte en anglais ou en français qu'une loi similaire
fédérale ou d'une autre province, cela évite de mauvaises
interprétations, cela évite d'être dans l'obligation
d'accorder des délais. Cela oblige également ceux qui aiment
retarder de payer certains impôts qu'ils ont perçu comme
mandataires de remettre au fisc ce qu'ils doivent dans les délais
prescrits par la loi ou par les règlements.
M. le Président, à l'étude article par article, je
pourrai donner des explications à tous les membres de cette Chambre. Je
vous assure que ce bill 5 va apporter à ceux qui sont appelés
à faire respecter les lois fiscales au Québec, autant les chefs
de service que ceux qui font partie de l'administration au ministère du
Revenu, un outil indispensable pour permettre aux ministères à
vocation de dépenses de se fier davantage sur les prévisions,
comme on le fait à chacune des années, les chiffres donnant alors
le rendement le plus près possible de la réalité de nos
lois fiscales.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de
Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: M. le Président, je me demande si c'est de cette
façon qu'on va rendre nos lois d'impôt plus humaines, qu'on va
obtenir le sourire du contribuable, si l'on tient compte des amendements que
nous propose le ministre actuel du Revenu. Le ministre actuel du Revenu n'a pas
fait de trouvailles. Il ne peut même pas se vanter d'être le
parrain de ces projets de loi, puisque, le 22 décembre 1969, le ministre
du Revenu de l'époque, M. Raymond Johnston, député de
Pontiac, écrivait à M. Julien Choui-nard, secrétaire
général du Conseil exécutif, Hôtel du Gouvernement,
Québec, la lettre suivante: "Cher monsieur Chouinard, "Pour faire suite
à votre lettre du 12 décembre, nous vous soumettons, tel que
demandé, la liste des lois que nous nous proposons de soumettre pour
amendement à l'Assemblée nationale. Ces amendements
proposés, qui sont en sus de ceux dont le principe a déjà
été
accepté par le comité de législation de
l'Assemblée nationale et dont la présentation n'a pu être
effectuée avant la fin de l'année 1969, affecteront les lois
suivantes, et je vous inviterais à écouter
1'énumération: "La Loi du ministère du Revenu, la Loi de
l'impôt sur la vente au détail, la Loi de la taxe sur les repas et
l'hôtellerie, la Loi de l'impôt sur le tabac, la Loi de la taxe sur
la gazoline, la Loi de la taxe sur les télécommunications, la Loi
du pourcentage sur les honoraires de certains officiers publics. "Les
modifications proposées à ces lois sont nécessaires pour
fins administratives et de concordance et visent à donner au
ministère des moyens efficaces pour percevoir plus adéquatement
les impôts et taxes. "Veuillez agréer, cher monsieur Chouinard,
l'expression de mes sentiments distingués. Le ministre du Revenu".
J'ai eu l'occasion de travailler sur ces projets de loi, étant
membre de la commission de législation de l'ancien gouvernement; nous
nous sommes penchés sur ces lois qui, à prime abord, à
leur lecture, peuvent laisser croire qu'il s'agit d'imposition de nouvelles
taxes alors qu'en réalité il s'agit d'un durcissement de la part
du ministère du Revenu, d'un souci d'enquêtes plus poussées
aux fins d'éviter les évasions fiscales.
Mais ce qui me dépasse, ce qui me scandalise dans le
présent projet de loi, c'est de voir le fédéralisme encore
ou le gouvernement fédéral y mettre son emprise et ses tentacules
de contrôle, de directives à l'endroit des autorités du
gouvernement du Québec. Je n'ai pas le droit de me référer
à un article du présent projet de loi, mais je sais que votre
curiosité est déjà en éveil, je ne lirai pas le
texte de l'article 53 alors qu'on prend le texte de la loi
fédérale, on réfère, dans une loi provinciale, le
contribuable québécois à la rédaction, à
l'interprétation d'une loi fédérale. C'est ça que
l'on appelle le fédéralisme rentable?
On en est rendu à un point, M. le Président, qu'on n'a
même plus la force de se tenir debout devant les exigences de M. Benson
et pour lui faire plaisir, on lui dit: Nous allons prendre votre texte de loi,
monsieur le ministre, et pour ne pas chatouiller la fierté nationale des
Québécois, nous allons tout simplement, par une
référence, dans une expression que l'on appelle mutatis mutandis,
dire, pour que l'interprétation de nos juges soit plus facile, pour que
vous soyez, vous, M. Benson, vous, M. Trudeau, vous, les autorités
fédérales, les grands maîtres de l'interprétation de
notre propre loi provinciale d'impôt.
Voilà ce que l'on retrouve dans cette loi, voilà ce
que...
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Maskinongé me permettrait une question?
M. PAUL: Non. Vous avez un droit de réplique, vous
répliquerez en vertu de l'article 269.
M. HARVEY (Jonquière): Très bien. Non, je demandais...
M. PAUL: Je dis, M. le Président...
M. HARVEY (Jonquière): ...je demandais très
gentiment...
M. PAUL: J'ai dit non.
M. HARVEY (Jonquière): Je comprends.
M. PAUL: Assoyez-vous, j'ai dit non.
M. HARVEY (Jonquière): Je l'ai demandé très
gentiment...
M. PAUL: Je réponds très gentiment non.
M. HARVEY (Jonquière): Je vous remercie, très
gentiment.
M. PAUL: Cela me fait plaisir de vous dire non.
M. LACROIX: II veut rester dans l'erreur.
M. PAUL: M. le Président, je comprends que cela les
chatouille.
M. LACROIX: Pas du tout.
M. HARVEY (Jonquière): Pas du tout.
M. PAUL: Tiens, regardez donc, M. le Président, ça parait
que le printemps est arrivé, les corneilles braillent.
DES VOIX: Ah!
M. PAUL: Je dis qu'il ne faut pas toucher à ces gentilshommes en
chocolat...,
M. GARNEAU: Ils ont peur de l'épouvantail.
M. PAUL: ...dignes serviteurs d'un fédéralisme rampant,
dans le domaine de ce qui nous est le plus sacré, nos droits de
perception directe en matière d'impôt, au lieu de faire notre
propre texte de loi. On a peur.
M. HARVEY (Jonquière): Je vous l'ai dit pourquoi.
M. PAUL: On a peur, mais on a peur de qui et de quoi?
M. HARVEY (Jonquière): De personne. On prend même deux
textes venant de l'Australie.
M. PAUL: M. le Président, pourriez-vous inviter mon honorable ami
à retrouver et à
garder son calme? Cela se comprend; cela se comprend, depuis près
d'une semaine qu'il est prêt à présenter ses lois, à
débattre ses lois. Je l'inviterais à la patience. Nous avons
tellement d'amendements à cette loi que j'ai l'impression que si le
règlement nous permettait de siéger demain, nous serions
obligés de siéger sur ce présent projet de loi.
Je dis, M. le Président...
M. LEVESQUE: Est-ce que c'est une invitation? Est-ce que c'est une
suggestion?
M. PAUL: D'abord vous ne pouvez pas le faire, vous ne connaissez pas
votre règlement. Cela vous prendrait une motion annoncée.
M. LEVESQUE: Avec le consentement unanime.
M. PAUL: Vous ne l'aurez jamais!
M. LEVESQUE: Alors, bien pourquoi?
M. PAUL: Vous ne l'aurez jamais et j'en profite, M. le
Président... Oui, je suis soucieux en vertu de l'article 64.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'invite les honorables membres de cette
Chambre à ne pas dialoguer entre eux, mais à s'adresser à
la présidence.
M. PAUL: Vous, vous connaissez ça, M. le Président! Vous,
vous êtes un véritable parlementaire qu'on laisse croupir
derrière les banquettes arrière plutôt que de vous amener
dans le cabinet alors que vous seriez un actif, un homme d'action, de
réalisation.
M. le Président, il y en a d'autres, mon bon ami le
député des Iles-de-la-Madeleine...
UNE VOIX: II s'attendait à avoir un ministère.
M. PAUL: H pourrait lui aussi...
M. LACROIX: Moi, je ne me prends pas pour un autre.
M. PAUL: M. le Président, vous savez c'est son humilité
qui le fait parler de la sorte. Ce n'est pas le dépit; ce n'est pas la
jalousie non plus. C'est son humilité. Mais je dis, M. le
Président, que dans ce fédéralisme rentable, on commence
à être inquiet. La population du Québec commence à
être inquiète.
Disons que le principe de la loi n'est pas mauvais. Il n'est pas mauvais
parce que c'est une justice sociale que tous les citoyens se conforment aux
lois adoptées par les gouvernements: municipal, scolaire, provincial ou
fédéral. Et si tous les citoyens, M. le Président, avaient
le respect intégral et le sens de l'honneur de remplir leurs obligations
et de se soumettre aux lois imposées par les législateurs, eh
bien peut- être que non seulement nous éviterions une hausse de
l'impôt, mais que nous connaîtrions une diminution de
l'impôt. Sous cet aspect, M. le Président, je dirai que cette loi
a un sens équitable. Cette loi a pour but de placer non pas dans un
statut particulier, mais dans un statut unique, semblable devant le
législateur, tout contribuable québécois.
Mais cependant, ce que nous ne pouvons pas accepter et ce qui est
incompréhensible, M. le Président, c'est cet "aplatventrisme"
devant je ne dirai pas les exigences d'ottawa, je ne le sais pas et je ne peux
pas dire ce que je ne sais pas. Devant les exigences d'Ottawa? Cela se peut. Je
ne peux pas me prononcer... Un empressement naturel de la part des
autorités du Québec à l'endroit de leurs frères et
maîtres d'Ottawa. Quand à moi, je dirai que c'est la seule
explication de cette introduction d'une nouvelle forme de législation
dans nos statuts.
H va falloir maintenant, M. le Président, qu'une province qui est
censée avoir atteint sa majorité, avoir obtenu tous ses droits,
les revendique. Dans un aveu de faiblesse inexplicable, on va inviter le
citoyen québécois à trouver dans les statuts
fédéraux la seule législation qui corresponde à la
mentalité, aux besoins de la population du Québec.
Je dis qu'on va essayer tout à l'heure. On va essayer. Je sens
venir ça. J'ai vu le ministre des Finances aller au secours du ministre
du Revenu puis lui dire:
Bien, vu que, depuis de nombreuses années, la cour de l'Echiquier
et nos tribunaux de juridiction supérieure interprètent la
portée, la signification de la Loi fédérale de
l'impôt, il devient maintenant acceptable, moins difficile,
évident qu'en procédant de cette façon-là, eh bien,
nous sommes sûrs de rester dans l'interprétation juridique du
concept fiscal qu'ont pu donner les tribunaux de la Loi fédérale
de l'impôt.
M. le Président, je vous inviterais à prendre la Loi de
l'impôt sur le revenu du gouvernement du Canada et vous allez y retrouver
de curieuses références à cet article que je n'analyse
pas; c'est le principe que l'on retrouve dans toute cette loi.
Je dis que c'est incompréhensible. Je me demande si la seule
explication qu'on tentera de donner de cette interprétation qui a
été faite par nos tribunaux de la portée, de la
signification et de l'interprétation de nos lois fiscales par les plus
hautes autorités judiciaires du pays est une justification. Mais, grand
Dieu! le gouvernement est rendu bien pauvre pour ne pas être capable
d'engager des traducteurs compétents, capables de traduire la Loi de
l'impôt, de conception anglaise, dans le statut de nos lois provinciales!
C'est devenu alarmant. De deux choses l'une: c'est soit par une soumission sans
réserve à l'endroit du gouvernement fédéral ou
c'est par une indifférence totale de l'asservissement de plus en plus
marqué du Québec à l'endroit des autorités
fédérales. Quand le grand frère lève le
doigt, nous les voyons courber l'échine.
M. le Président, je ne puis pas comprendre qu'un ministre, qui a
le moindrement le sens de l'honneur patriotique et de la fierté
nationale, accepte que, dans une loi dont il est le parrain, l'on ne puisse pas
exiger de ces fonctionnaires ou des fonctionnaires compétents... Si on
n'en a pas au service du gouvernement, qu'on engage du personnel à la
pige et qu'on présente une véritable législation conforme
à l'interprétation française.
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Maskinongé me le permet? Je vais lui dire ce que je suis venu prêt
de faire.
M. PAUL: M. le Président, voulez-vous inviter ce gentil...
M. HARVEY (Jonquière): Très bien, je vous le dirai en
réplique.
M. PAUL: ...ministre à garder son calme...
M. HARVEY (Jonquière): Je vous le dirai plus tard.
M. PAUL: ...encore une fois? Nous aurons l'occasion...
M. HARVEY (Jonquière): D'accord.
M. PAUL: ...de discuter toutes ses explications. Quant à moi, je
n'aurais pas eu le courage d'accepter, dans une loi dont j'aurais
été parrain, une référence aussi servile à
une loi fédérale. Même si le ministre est très bien
intentionné, d'un autre côté, il a fait preuve d'une
indifférence ou d'un manque de fierté incalculable et
indescriptible surtout. J'oserais même dire, M. le Président,
indécent.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, et, surtout, vu que la
conception du principe que l'on retrouve dans cette loi n'est pas du crû
du ministre... Voyons-donc! Je vous ai donné la preuve que l'ancien
ministre du Revenu, grâce à son esprit de travail, d'initiative,
de compétence, de compréhension avait, lui, bien avant le
ministre actuel, saisi cette réforme qui s'imposait dans notre Loi du
revenu. C'est pourquoi...
M. le Président, fermez donc la boîte aux petits enfants!
Je comprends qu'ils sont fatigués. Il est tard. Invitez-les à se
retirer.
M. MAILLOUX: C'est comme l'ancien ministre du Revenu.
M. PAUL: Quand on voit, M. le Président, le désir qui
anime mon honorable, bon ami et confrère, le ministre de la Voirie, de
vouloir disposer de sa loi, j'espère qu'on collaborera avec mon
honorable ami qui est désireux de présenter sa loi. Plus vite
nous pourrons atteindre cette législation, plus vite nous
répondrons à un grand rêve, à une grande ambition
qu'il nourrit.
M. le Président, la loi qui nous est présentée ce
soir n'apporte pas de réforme. Elle rend peut-être uniformes, dans
les différentes lois dont je vous ai donné la liste, les textes
de références, les textes de descriptions. Mais malgré
tout, M. le Président, par respect et par considération pour un
grand ministre du Revenu, l'honorable Johnston, qui est le véritable
parrain de cette législation c'est lui le véritable
parrain de cette législation de cette réforme fiscale,
parce que, en soi, à part ce fédéralisme rampant qu'on y
retrouve, la loi est bonne et excellente, et parce que nous sommes soucieux
d'éviter à la population, aux travailleurs
québécois une hausse de taxes, parce que nous craignons surtout,
M. le Président, à cause de cette épée de
Damoclès qui pend au-dessus de nos têtes depuis le dernier
discours du ministre des Finances, nous devons faire en sorte que nous
collaborions dans toute la mesure du possible avec le ministère du
Revenu pour qu'il apporte des lois efficaces, pour éviter la fraude
fiscale, qui avaient été préparées bien avant son
arrivée au ministère. Tout ce qu'il a eu à faire, c'est de
tirer sur le tiroir. Mais comme il n'était pas trop initié
à la fierté nationale, il s'est tout simplement laissé
passer un texte de loi dont il rougit actuellement, j'en suis sûr.
Mais pour toutes ces raisons, parce que le principe est bon, même
s'il y a une modalité indécente dans la loi, nous serons dans
l'obligation, par souci d'éviter aux contribuables
québécois une hausse d'impôts, de voter pour cette loi.
Cependant, en temps et lieu, nous verrons à faire d'excellentes
recommandations, ou suggestions au ministre, au parrain de ce bill, afin de
rendre cette loi surtout plus française et compréhensible. Parce
que l'économie de cette loi est de mentalité anglaise, il nous
faut, aujourd'hui, trouver une traduction, une phraséologie. Je suis
sûr que le présent projet de loi n'a pas été soumis
à l'Office de la langue française j'en suis convaincu
et encore moins, M. le Président, au ministère des
Affaires intergouvernementales pour savoir si on devrait "s'aplat-ventrir" de
la sorte devant le fédéral.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous voterons pour le
principe de la loi, tout en espérant que le gouvernement ouvrira grande
sa réception aux suggestions d'amendements que nous lui ferons en
comité.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de
Beauce.
M. Fabien Roy
M. ROY (Beauce): M. le Président, le gouvernement, en nous
présentant le projet de loi numéro 5, Loi modifiant la Loi du
ministère du Revenu, l'a fait afin d'être en mesure d'être
capable d'organiser la loi pour qu'il y ait un
traitement plus équitable vis-à-vis de ceux qui ont
à payer des impôts et pour éviter des échappatoires,
des graudes fiscales.
M. le Président, quand on examine ce projet de loi de plus
près, on peut se demander si les moyens qu'on prend pour atteindre les
objectifs qu'on veut justement obtenir par la loi sont Tellement ceux qu'on
voulait avoir. Lorsqu'on parle d'échappatoires, on peut
réellement se demander si, au niveau des échappatoires, cela
concerne les salariés. On sait, M. le Président, que tous les
salariés du Québec se font retenir leur impôt sur le
revenu, sur leur salaire, avant même de toucher leur chèque. Tout
le monde sait cela.
Tous ceux qui ont un salaire se voient déduire l'impôt sur
le revenu avant de recevoir leur chèque. Disons que ce n'est pas dans
cette catégorie de citoyens qu'il y a des échappatoires. Je pense
que tout le monde en conviendra.
Mais, par contre, au sujet du dernier budget que nous a
présenté le gouvernement, nous avons pu faire une étude
comparative des chiffres du budget de cette année et du budget de l'an
dernier. Alors qu'on prévoit un taux de croissance économique et
un taux de salaire global brut payé au Québec entre 7 p. c. et 8
p. c, on prévoit une augmentation des revenus sur l'impôt des
particuliers de 15 p. c.
Alors, M. le Président, nous pouvons nous poser des points
d'interrogation. En ce qui concerne les moyens pris, il est évident que
le gouvernement parle de justice. Nous sommes d'accord que les lois de
l'impôt doivent être justes envers tous les citoyens, envers tous
les contribuables; elles doivent être justes envers ceux qui ont les
moyens et ceux qui doivent travailler à petit salaire. Nous sommes bien
d'accord là-dessus et sur les objectifs de la loi.
En ce qui concerne les moyens prévus dans la loi, nous pouvons
nous interroger assez sérieusement. On parle de justice comme je viens
de le dire, et nous pouvons nous poser des points d'interrogation. On parle de
secret professionnel, de la protection du caractère confidentiel des
dossiers d'avocats lors d'enquêtes fiscales, mais on ne parle pas de
choses du genre qui peuvent exister dans d'autres corps professionnels. Je me
demande si, en vertu des droits des citoyens, droit à la justice, qui
est un droit fondamental, la loi de l'impôt présentée par
le gouvernement, modifiant la loi du ministère du Revenu, respecte les
droits élémentaires de nos citoyens, les droits fondamentaux. Les
citoyens ont tout de même certains droits à la justice. Que dit la
loi? L'article 53 g). "Lorsqu'une personne n'a pas effectué un
paiement...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre! J'allais rappeler à
l'honorable député qu'il ne doit pas, à ce stade des
procédures, entrer dans l'analyse détaillée de chaque
article; ça viendra en comité. Je l'invite à rester sur la
discussion du principe même du projet de loi numéro 5.
M. ROY (Beauce): M. le Président, ce n'est pas mon intention
d'étudier tous les articles mais je veux faire un parallèle entre
les articles concernant l'esprit de la loi et ce que je veux exprimer dans mon
court exposé. Je veux parler de l'article...
M. HARVEY (Jonquière): Vous le ferez en comité tout
à l'heure.
M. ROY (Beauce): M. le Président, il y a quelque chose
d'important que je veux souligner à cette Chambre et j'ai l'intention de
le faire. A l'article 53, je dis ceci...
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président,...
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre!
M. HARVEY (Jonquière): J'aurais pu, tout à l'heure, faire
un discours d'une heure et vous parler d'articles bien spécifiques comme
par exemple l'article où je mets en application une recommandation de la
commission Prévost. Je ne l'ai pas fait, soucieux de respecter le
règlement. Je vous inviterais, M. le Président, à rappeler
gentiment au député de Beauce qu'il aura toute la latitude, en
comité, d'aller au fond des choses sur l'article 53 g). Je lui dirai
alors pourquoi ces dispositions sont contenues à cet article.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'ai compris que le ministre du Revenu se
levait sur une question de règlement, même s'il ne l'a pas
dit.
M. HARVEY (Jonquière): C'est ça.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): J'ai déjà invité
gentiment, pour employer l'expression du ministre du Revenu, le
député de Beauce à s'abstenir de faire l'étude ou
même de s'arrêter au texte d'un article et à s'en tenir au
principe de la loi. Je suis sûr qu'il va se soumettre, conscient que je
suis de sa connaissance de notre règlement.
M. ROY (Beauce): M. le Président, je veux bien me soumettre au
règlement de cette Chambre, mais de toute façon je voulais aussi,
par ce bref exposé, faire valoir le point de vue de notre groupement.
Sans nommer les articles, je dirai qu'il y en a qui ont été
copiés textuellement sur la Loi de l'impôt sur le revenu du
gouvernement fédéral; il n'y a qu'un ou deux mots de
changés, question de les adopter à la Législature
provinciale. On nous parle d'un fédéralisme rentable.
On nous parle d'une législation particulière pour le
Québec, et comme le disait le député de Maskinongé
tout à l'heure, le gouvernement n'a même pas pu prendre
l'initiative de rédiger un texte de loi conforme à l'esprit et
aux droits du Québec à l'heure présente.
M. HARVEY (Jonquière): Pour percevoir $1...
M. ROY (Beauce): M. le Président, je n'ai pas interrompu le
ministre, tout à l'heure.
M. HARVEY (Jonquière): ...en chinois ou en belge, c'est
pareil.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre!
M. ROY (Beauce): Le ministre aura son droit de réplique tout
à l'heure pour faire suite à ces brèves remarques, je
dirai que, sur le principe de la loi, en général, la
planification et l'uniformisation de l'administration doit être
recommandable, mais ce n'est pas le cas ici. On fait d'une loi-cadre fiscale un
véritable code pénal qui ne tient aucunement compte des droits
les plus fondamentaux du citoyen, à savoir la sécurité
juridique, le droit à l'inviolabilité du domicile et au
caractère sacré du secret professionnel, exception faite pour les
avocats. La restriction mentale y est employée à plein.
En pratique, l'intégration du processus de l'action oblique, qui
jouera souvent au détriment du petit contribuable et des petites
entreprises et qui pourra je ne mets pas en doute les intentions du
ministre quand même faciliter le patronage et surtout donner prise
à des abus de contrôle des petits commerçants par les
grandes entreprises ou la formation de consortiums puissants avec incidences
dans plusieurs autres articles. Disparition pratique du secret professionnel.
Sous prétexte de protéger celui du client, on omet,
volontairement ou non, d'autres groupes de professionnels dont les notaires,
les comptables agréés, dans certains cas les médecins,
indirectement ces derniers et d'autres tels les architectes, les entrepreneurs
et les ingénieurs.
L'inviolabilité du domicile, tant légale que
résidentielle est foulée aux pieds, de même que le droit de
tout individu à une défense adéquate, permis de
perquisition n'importe où et n'importe quand, sur demande ex parte du
ministre, par toute personne désignée par le ministre, etc.,
banissement du principe de la sécurité juridique,
premièrement, par l'action oblique, deuxièmement, le transfert
d'une loi à une autre des sommes dues par le gouvernement contre une
imposition contestée ou artibraire. Le gouvernement pourra se payer,
à même des cotisations fixées arbitrairement pour certains
entrepreneurs qui travailleront pour le gouvernement, des biens vendus avant
qu'un contribuable ne soit reconnu coupable. Pourquoi ne pas se
prévaloir de la saisie conservatoire au lieu de l'exécution
forcée avant jugement, discrétionnaire, dangereuse et paradoxale?
On pourra exiger des sûretés réelles de petits
commerçants et des contribuables et accepter des sûretés
personnelles de la part de grosses entreprises ou de petits amis du
régime. Ces articles devraient être amendés de façon
à rendre statutaires les modalités et exigences du ministre.
Cinquièmement, exclusion du principe que seul un officier du
ministère du Revenu doit être habilité à
procéder, pertes et abus ou à favoritisme, en appelant une
personne non liée par le secret professionnel tant comme officier du
ministère que comme faisant partie et étant régi par la
Loi de la Fonction publique. L'officier pénalisé. Cet article
permet au ministre de nommer une personne soustraite aux sanctions
prévues pour un tel officier qui n'accomplirait pas son devoir. Enfin,
la pénalité au minimum pouvant être
répétée cinq fois, si non satisfaite ou non
contestée, devrait tenir compte des mandataires saisonniers, des petits
commerçants et de la publicité qui devrait être faite
à cet effet.
Sous peine de procédures certains articles sont paradoxaux et
prêtent également à des abus. Il y a dans cette loi des
dispositions contradictoires et inacceptables. Bref, c'est une loi-cadre qui a
des incidences et qui aura de profondes répercussions dans plusieurs
autres projets de loi du ministère du Revenu déjà
déposés. En l'occurrence, il serait préférable que
les autres projets de loi soient vus, discutés et étudiés
par la Chambre avant qu'ils ne soient adoptés. Voir le tableau avant de
déterminer la grandeur du cadre. En gros, les transformations de la loi,
de même que les pouvoirs discrétionnaires trop étendus
donnés au ministre, peuvent avoir trop d'importance pour en accepter le
principe d'emblée, sans de sérieuses restrictions.
Motion d'amendement
M. ROY (Beauce): Comme il semble qu'il y aurait évidemment trop
d'amendements apportés à cette loi pour la rendre humaine, plus
juste et plus honnête, il est de mon devoir de proposer la motion
suivante : Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant
tous les mots après le mot "que" par les suivants: La Chambre est d'avis
que le bill doit être reporté à trois mois.
DES VOIX: Vote! Vote!
M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Chambre...
M. DUMONT: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. DUMONT: M. le Président, à la suite de la motion
présentée pour le renvoi à trois mois, justement, nous
avons remarqué, lors des explications qu'a données le
député de Beauce, qu'il y avait, même du côté
ministériel, des avocats et des députés qui se posaient
des questions à savoir quelle loi on étudiait. J'ai entendu, de
l'autre côté, quelqu'un dire: Mais quelle loi est-ce? C'est le
bill 5, Loi modifiant la Loi du ministère du Revenu. Le
député de Beauce a très bien expliqué les
implications de ce bill...
DES VOIX: Vote! Vote!
M. DUMONT: ... qui aura, comme il l'a bien déclaré, des
implications tellement graves que si nous avions ce droit de reporter à
trois mois ce bill no 5, tel que la motion le préconise et le
réclame, nous serions en mesure de permettre aux représentants de
cette Chambre de faire les représentations nécessaires et
d'étudier plus à fons ce projet de loi qui, par les avantages que
le ministre a tenté de démontrer, mais les désavantages
qu'il apporte, nous permettrait durant ces trois mois, de voir toutes les
implications que ce bill no 5 nous présente.
Alors, M. le Président, parce que ce projet de loi demande un
temps de réflexion, parce que le gouvernement semblait avoir beaucoup
d'autres projets de loi urgents, nous demandons donc que le tout soit
renvoyé à trois mois, afin de pouvoir l'étudier plus
spécifiquement et permettre d'éclairer cette Chambre sur ce bill
no 5. Nous demandons son renvoi à trois mois.
DES VOIX: Vote! Vote! Vote!
M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote
M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement
de l'honorable député de Beauce veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Dumont, Roy (Beauce), Drolet, Bois,
Tétreault, Latulippe, Paul, Lafontaine, Tremblay (Chicoutimi), Simard
(Témiscouata).
M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion d'amendement
veuillent bien se lever.
M. LE SECRETAIRE AJOINT: MM. Levesque, Castonguay, Pinard, Garneau,
Tessier, Har-vey (Jonquière), Lacroix, Vaillancourt, Mailloux,
Arsenault, Houde (Fabre), Coiteux, Bienvenue, Vézina, Brown, Kennedy,
Saindon, Leduc, Bacon, Berthiaume, Bossé, Caron, Carpentier, Cornellier,
Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau), Houde (Limoilou), Lamontagne,
Marchand, Phaneuf, Pilote, Laurin, Burns, Charron, Joron, Lessard.
M. LE SECRETAIRE: Pour: 10. Contre: 38. Yeas: 10. Nays: 38.
M. LE PRESIDENT: La motion est rejetée. Est-ce que la motion
principale est adoptée?
M. JORON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. Guy Joron
M. JORON: M. le Président, j'ai été surpris,
à l'audition de certains orateurs précédents, du fait
qu'on semble vouloir exagérer l'importance et les incidences de cette
loi. Il me semble à propos de la replacer dans son juste contexte.
Comme, d'ailleurs, le ministre du Revenu lui-même le signalait, c'est en
grande partie une loi de concordance.
Cette loi, comme d'ailleurs celles qui suivront, qui sont de même
famille et qui s'y rattachent, est une loi à caractère technique
et n'implique pas véritablement de philosophie fiscale ou, enfin, de
facteurs fondamentaux. C'est une loi qui vise à une meilleure
administration des biens publics, dans le sens d'une meilleure perception des
revenus, d'une plus grande effecacité qui vise à éviter la
fraude fiscale.
Ce sont des mesures administratives et techniques sur lesquelles nous
sommes pleinement d'accord. C'est pourquoi nous voterons en faveur de ce projet
de loi en deuxième lecture. Vouloir mieux percevoir nos revenus et
tendre à une meilleure efficacité en ce domaine, c'est une chose
qui, en soi, n'est importante que si elle conduit à autre chose. Pour
citer les paroles du ministre du Revenu lui-même, ce sont des lois qui me
semblent préparatoires. Le Devoir du mardi 30 mars rapportait une
conférence du ministre du Revenu: "Le gouvernement du Québec
travaille actuellement a établir les mécanismes administratifs,
ainsi qu'à uniformiser les lois fiscales, de façon à
préparer une réforme fiscale en profondeur qui pourrait
être effectuée dans un avenir très rapproché".
Un peu plus loin, on lisait ceci: "Le Québec ne peut envisager de
véritables réformes fiscales avant d'avoir mis de l'ordre dans
son appareil administratif et légal. C'est une condition
préalable". C'est dans ce sens, M. le Président, que nous
comprenons aussi ce projet de loi: c'est une préparation à autre
chose qui va venir. L'important, c'est justement la suite de ces projets de
loi, c'est-à-dire, pour encore employer les termes du ministre du
Revenu, des lois qui tendent à humaniser la fiscalité. Humaniser
la fiscalité, ça n'implique pas seulement d'en rendre la
perception plus équitable. Il y a la taxe elle-même, ce qui nous
amènera, évidemment, à la réforme fiscale.
On humanisera davantage la fiscalité quand on aura atteint
l'idéal d'une meilleure répartition du fardeau fiscal. Mais il
est une citation également du ministre du Revenu, à laquelle je
faisais allusion tout à l'heure, où il disait: "Chose certaine,
la réforme fiscale du Québec ne se fera pas avant celle
d'Ottawa". Cela, ça soulève plus d'inquiétudes que celles
qu'ont évoquées deux orateurs précédents.
M. DUMONT: Est-ce que le député de Gouin me permet une
question?
M. JORON: Certainement.
M. DUMONT: Est-ce que le député de Gouin ne croit pas que
les trois mois que nous avons demandés auraient justement permis
d'étudier ces implications qu'il souligne?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! DES VOIX: A l'ordre!
M. BURNS: M. le Président, la Chambre a disposé de ce
point-là. Je ne vois pas pourquoi...
M. DUMONT: Je n'ai demandé que trois mois pour discuter... Six
mois, alors.
M. JORON: M. le Président, je répète que ces lois
comme telles ne visent pas la réforme fiscale elle-même mais ne
visent qu'à déblayer, en quelque sorte, le terrain de
façon à la rendre possible.
Cette dernière citation du ministre du Revenu, le fait qu'elle ne
se fera pas avant celle d'Ottawa, m'inquiète. Elle inquiète
davantage que le scandale qu'ont vu des orateurs précédents au
fait que le texte ou le mécanisme de certaines lois, de certains
articles dans le projet de loi numéro 5 auraient été
copiés ou inspirés de la loi fédérale. On a
évoqué le fédéralisme rampant pour décrire
ce phénomène. Pour ma part, je vous avoue que cette chose ne nous
scandalise aucunement et je n'y vois pas de fédéralisme rampant.
C'est une harmonisation technique, tout simplement. Et je ne vois pas pourquoi,
d'ailleurs, s'il y avait des lois fiscales bien faites à Ottawa, en
Hollande, en Australie ou où vous voudrez on ne s'en inspirerait pas et,
à l'occasion, même on ne les copierait pas.
Alors, le fait que ce soit inspiré d'une loi
fédérale, nous, du Parti québécois, cela ne nous
scandalise aucunement. Je ne vois pas du tout là-dedans de perte de
souveraineté qu'ont évoquée les orateurs
précédents. De la même façon, d'ailleurs, est-ce que
l'on peut penser vous me permettrez d'employer un exemple pour illustrer
qu'il y a perte de souveraineté quand des pays voisins
harmonisent certaines choses ou adoptent des critères, ou des standards
communs? Si, universellement, on a décidé, par exemple, que la
distance entre les rails de chemin de fer serait uniforme pour permettre aux
trains de passer d'une frontière à l'autre, c'est une mesure
d'harmonisation mais qui n'implique aucunement, à notre avis, un
sacrifice de souveraineté nationale.
A cet égard, les propos du député de
Maskinongé surtout m'ont étonné. Il se fait le
défenseur d'une souveraineté qu'il a lui-même
qualifiée d'absolue. Il a parlé d'un Québec qui arrive
à l'âge de la majorité, qui réclame tous ses droits.
Ce qui m'étonne, c'est d'entendre ses propos quand il s'agit de choses
mineures, comme les lois techniques qui nous intéressent, mais de ne pas
les entendre quand il s'agit de choses majeures. On a fait appel à la
fierté, au patriotisme; on a même voulu rendre la loi plus
française. Je pose simplement une question, en terminant: Avait-on,
quand on était au gouvernement, ce même souci de patriotisme, de
fierté de rendre les choses plus françaises quand on a
voté un certain projet de loi qui portait le numéro 63?
M. PAUL: M. le Président, sur une question de privilège.
Peut-être que les péquistes obscurs et aveugles constateront que
le bill 63 n'est pas si mauvais que cela surtout quand on constate que les
Anglais, aujourd'hui, sont les premiers à s'en plaindre...
M. JORON: Point de règlement, M. le Président.
M. PAUL: ... parce que nous leur avons imposé la langue
française dans leurs écoles.
M. JORON: M. le Président, je soulève une question de
privilège. Je ne sache pas que nous discutions le projet de loi
numéro 63.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. JORON: J'avais terminé, M. le Président, et je vous
remercie.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. CHARRON: On va en reparler au bill 28, M. le Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que nous avons vraiment quorum, M. le
Président, avant que je prenne la parole?
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous avons bien quorum.
M. LE PRESIDENT: Si je vous accorde la parole...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président,...
M.PAUL: M. le Président, nous sommes seulement 28 en Chambre.
Qu'on appelle les députés!
M. LE PRESIDENT: Nous avons quorum parce que je sais une chose, lorsque
j'ai compté les députés, nous étions 31.
M. LAFONTAINE: II y en a 28. Là, 29.
M. LE PRESIDENT: Et moi, combien ça fait?
M. LAFONTAINE: Trente.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Jean-Noël Tremblay
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le
député de Jonquière et ministre du Revenu présente
ce soir un projet de loi qui modifie la Loi du ministère du Revenu, une
sorte de loi-cadre, a-t-il dit, dont l'objectif immédiat serait
d'éviter la fraude fiscale et par voie de conséquence,
d'empêcher que le gouvernement, privé de certaines sources de
revenus, soit obligé d'élever les impôts.
Ces objectifs, il est bien entendu que personne ne les conteste.
Ce sont des objectifs normaux, et tout gouvernement qui a le souci de la
bonne administration se préoccupe de savoir de quelle façon les
revenus sont perçus, et se préoccupe également
d'empêcher que des citoyens échappent aux prescriptions
impératives d'une loi.
M. le Président, il y a toutefois, au sujet de cette hausse
d'impôts sur laquelle a insisté le ministre du Revenu quelque
chose qui m'inquiète. Le ministre a semblé insister davantage sur
cet objectif: empêcher la fraude fiscale. Nous sommes d'accord. Il a
enchaîné immédiatement en disant: Pour empêcher,
d'autre part, que le gouvernement ne soit obligé d'augmenter les
impôts.
M. HARVEY (Jonquière): Continuez la phrase.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai la parole.
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'invoque le
règlement. Comme le député de Chicoutimi cite des paroles
que j'ai prononcées, je l'inviterais à continuer. J'ai dit: Soit
dans l'obligation d'augmenter les impôts plus vite qu'il ne devrait le
faire à cause de cela. Cela change tout. Cela fait toute la
différence.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, cela change tellement
peu ce que j'allais dire que cela donne davantage de poids à ce que je
vais vous dire.
M. HARVEY (Jonquière): Nous vous écoutons.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre dit: nous allons, par le moyen de
cette loi, éviter l'évasion fiscale, de sorte que le gouvernement
ne se trouvera pas dans l'obligation d'augmenter plus vite les impôts.
Donc, il y a là un aveu très net de l'intention du gouvernement
d'augmenter les impôts puisque le ministre il vient de le dire
lui-même ne dit pas seulement: Nous allons, par ce moyen,
empêcher une augmentation des impôts, mais: Nous allons
empêcher que cette augmentation ne survienne plus tôt que nous ne
le souhaiterions ou plus tôt que nous ne l'avons déjà
décidé.
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Chicoutimi me permettrait une question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, M. le Président.
M. HARVEY (Jonquière): Merci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II y a donc, M. le Président, dans les
propositions du ministre du Revenu, un aveu et plus qu'un aveu, une confession
et l'expression d'une intention du gouvernement d'augmenter les impôts.
Ainsi, d'un argument dont il s'est servi pour valoriser son projet de loi, il
fait, à toutes fins utiles, un argument qui devrait nous inciter
à être encore beaucoup plus circonspects sur la mesure
législative qu'il propose à notre adoption ce soir.
M. le Président, le député de Maskinongé l'a
dit tout à l'heure, nous n'avons pas d'objection au principe de la loi,
si tant est qu'on puisse appeler cela un principe. Il s'agit simplement d'un
objectif, d'un but de la loi: éviter la fraude fiscale et empêcher
le gouvernement de taxer plus vite qu'il n'a le désir et la
volonté de le faire. C'est très clair maintenant, depuis que le
député de Jonquière a fourni les renseignements que je
n'aurais pas osé lui demander.
Dans l'exposé qu'il a fait, le ministre du Revenu s'est
hâté de parler de la langue de la loi. Je ne viole pas le
règlement, M. le Président, en en parlant. C'est le ministre
lui-même qui nous a invités à examiner la langue de cette
loi. Il nous a dit: On me fera peut-être le reproche de présenter
un projet de loi qui n'est pas rédigé dans un excellent
français. Et, pour justifier cette attitude du gouvernement, il a dit:
II y va d'une question d'interprétation. L'on sait que les lois fiscales
comportent toujours dans leur interprétation des difficultés
importantes, que ceux qui ont à "pratiquer" si je puis employer
cette expression cette loi sont toujours mal à l'aise lorsqu'ils
se trouvent en présence de textes qui comportent des difficultés
d'interprétation considérables.
Donc, dit-il, nous présentons un projet de loi dont le texte,
dont le libellé n'a pas la qualité française qu'il devrait
avoir.
Je ne ferai pas de cet argument, de ce fait un casus belli, mais c'est
quand même inquiétant de voir un gouvernement qui...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
Le député de Chicoutimi comprendra parfaitement qu'il ne
suit pas du tout le règlement actuellement lorsqu'il parle de la
qualité de la langue du projet de loi. Je connais l'expérience du
député de Chicoutimi autant au Parlement
fédéral qu'au Parlement du Québec. Il pourra,
dès l'étape suivante du comité, proposer tous les
amendements qu'il désirera, article par article, pour transposer ce
projet de loi dans la langue de Molière. Je crois qu'il sait
parfaitement que nous devons discuter à ce stade-ci de l'à-propos
des principes généraux, de la valeur intrinsèque ou de la
portée de ce projet de loi. Je ne peux pas lui permettre un débat
sur la qualité de la langue française contenue dans le projet de
loi. Il aura toute l'occasion voulue de le faire en comité.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je veux bien me
soumettre à votre directive, mais il reste toutefois et vous
l'avez entendu que c'est le ministre du Revenu qui a lui-même
posé le problème. Il nous a parlé de la langue...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et il s'est excusé de
présenter un texte en mauvais français...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est la raison pour laquelle j'ai permis au
député de Chicoutimi de parler quelques minutes sur le sujet. Je
ne suis pas intervenu avant trois ou quatre minutes considérant qu'il
répondait à une digression du ministre du Revenu, comme le
règlement le lui permet. Mais je ne pourrais pas lui permettre d'aller
dans un argument de fond sur ce sujet.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens donc au
sujet que j'étais à traiter. Je ne vais pas faire
l'exégèse comme vous m'invitez à ne pas la faire
du texte de loi pour déclarer que la loi n'est pas
française, mais vous me permettrez quand même de noter que la
réserve qu'a apportée le député de Jonquière
lui-même nous indique que cette loi n'a pas été
pensée pour le Québec en fonction du Québec. Le texte
même en atteste, de l'aveu du ministre du Revenu. Pourquoi cela?
M. HARVEY (Jonquière): Vous êtes en contradiction avec
votre collègue. Votre collègue vient de dire que c'est M.
Johnston qui vous avait préparé...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Parce que le projet de loi procède
d'une philosophie fiscale. Le député de Gouin en a parlé
tout à l'heure en disant, parlant des arguments qu'avait utilisés
mon collègue, le député de Maskinongé: II s'agit
simplement d'une question technique. Il s'agit simplement d'une question de
philosophie fiscale. Cet argument, M. le Président, pourrait être
retenu mais il faut bien penser que dans un réaménagement fiscal
et que dans la rédaction d'un projet de loi concernant des
matières fiscales il y a quand même une philosophie juridique qui
sous-tend un projet de loi, qui est quand même exprimée dans un
texte.
Or, cette philosophie juridique et c'est le ministre du Revenu
qui l'a dit lui-même en déplorant la qualité de la langue
de ce projet de loi révèle que le gouvernement du
Québec entend procéder dans le domaine du revenu de la même
façon que l'on procède à Ottawa et de la même
façon que l'on procède dans les autres provinces du Canada. Ce
n'est pas à tort que le député de Maskinongé et que
d'autres députés en cette Chambre ont indiqué au ministre
du Revenu et au gouvernement qu'il était encore une fois à la
remorque du gouvernement central.
Le député de Gouin tout à l'heure disait: Ce n'est
pas un problème, ça. C'est une pure question technique. Je ne
crois pas qu'il y ait là raison de s'inquiéter. On dit: II faut
procéder à une harmonisation des lois fiscales.
Harmonisation fiscale, disait le député de Gouin, tout
à l'heure. Mais cette harmonisation fiscale, elle doit être
inspirée par certains principes qui se retrouvent dans l'ensemble de nos
lois et qui sous-tendent l'économie générale de nos lois.
Ces principes, justement, dans le domaine fiscal, doivent refléter
exactement la mentalité, la philosophie, la façon de voir et la
façon de vivre des citoyens du Québec.
On nous a dit, tout à l'heure: Vous vous attachez ici à
des détails, quand vous ne vous êtes pas attachés à
des questions plus importantes. Je ne reviens pas sur les allusions qu'on a
faites à un projet de loi au sujet duquel, M. le Président, vous
avez fait un rappel à l'ordre. Mais, justement, nous avons là une
occasion, dans un texte juridique, au moment où l'on entreprend une
réforme fiscale en profondeur, de donner à un projet de loi un
esprit, un style qui reflète exactement la conception que nous nous
faisons du juridisme en matière fiscale. Par conséquent, les
arguments que nous invoquons ne sont pas futiles. Il n'y a aucun aspect de la
législation du Québec qui doive être négligé
si l'on veut entreprendre cette réforme en profondeur de toutes nos
institutions et cette réforme dans le domaine fiscal, en
particulier.
Qu'on ne vienne pas me répéter qu'il s'agit, tout
simplement, d'une pure question technique, d'une philosophie fiscale. Une
philosophie fiscale doit comporter nécessairement des principes. C'est
là qu'il est important de parler d'une philosophie juridique. Le
ministre du Revenu l'a si bien compris qu'il a lui-même
déploré la qualité de la langue. Je ne reviens pas sur les
détails de ce problème, M. le Président, parce que, tout
à l'heure, vous m'avez dit que je n'avais pas à le faire. Dans le
projet de loi que nous avions conçu, nous n'avions pas
inséré, dans le texte, les dispositions que l'on y retrouve
à l'heure actuelle. Je ne peux pas faire l'analyse des articles, mais
voyez l'article 53, M. le Président.
Justement, nous n'avions pas inséré ces
dispositions qui démontrent de façon évidente que
le gouvernement du Québec a tout simplement pris un texte juridique
à Ottawa et qu'il essaie de le transposer dans nos lois. Sous
prétexte de rendre plus facile l'interprétation d'une loi
fiscale, il nous impose un texte qui n'est pas du cru québécois,
mais qui est pensé en fonction d'une philosophie fiscale qui n'est pas
la nôtre...
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'invoque le
règlement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...que l'on ne peut pas changer.
M. HARVEY (Jonquière): Le député de Chicoutimi
affirme une fausseté. Il n'a pas "li" la loi. Justement, s'il y a une
législation fédérale, notre loi sera semblable et, si elle
vient en contravention avec les objectifs du développement
économique ou social du Québec, un simple arrêté en
conseil nous permettra de décider qu'elle ne s'applique pas au
Québec. C'est justement pour parer à de telles difficultés
que nous avons mis des mois et des mois à finaliser des textes qui
traînaient depuis 1967.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le
Président. Ce n'est pas un rappel à l'ordre, c'est un
discours.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi a raison.
L'honorable député de Chicoutimi.
M. HARVEY (Jonquière): D'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à
ceci... Le député de Jonquière a parlé, tout
à l'heure, de la mauvaise qualité de la langue et il a dit: Le
député de Chicoutimi n'a pas "li" la loi, plutôt que de
dire: II n'a pas lu la loi.
M. HARVEY (Jonquière): N'a pas lu.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas même de l'anglais.
M. HARVEY (Jonquière): J'ai dit "lu", mais je le dis moins
longtemps que vous, j'ai dit "lu".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à
ceci: Le ministre du Revenu nous présente une loi d'inspiration
outaouaise c'est clair sous-tendue par des principes qui sont
exactement les mêmes que ceux qui sous-tendent les lois fiscales du
gouvernement central.
Or, ce n'était pas du tout dans l'esprit du projet que nous
avions préparé, parce que nous voulions procéder...
M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...à une réforme en profondeur
de la fiscalité selon un esprit qui soit le nôtre.
M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement.
J'aurais une question à poser au député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas à répondre, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous désirez répondre au
député de Lac-Saint-Jean, qui veut vous poser une question?
M. PILOTE: J'aimerais poser une question au député de
Chicoutimi.
M. LE PRESIDENT: Avec la permission...
M. TREBLAY (Chicoutimi): Non, M. le Président, je regrette, mais
je suis en train de faire mon discours...
M. PILOTE: M. le Président, j'invoque le règlement.
Comment se fait-il que tantôt le député de
Maskinongé a dit que M. Johnston, l'ex-ministre, était le parrain
du projet du loi...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas donné la permission...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. PILOTE: ... et il blâme le ministre du Revenu d'avoir mal
préparé le texte?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Chicoutimi n'a pas permis la question.
M. HARVEY (Jonquière): Ils ne sont pas sur la même
voie.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, mon
collègue de Lac-Saint-Jean c'est la première fois que je
l'entends en Chambre, cela me fait plaisir me pose une question, je n'ai
pas trop compris, mais de toute façon, s'il veut des renseignements sur
la politique en général, sur la fiscalité, sur tout
domaine de l'administration, il viendra me voir, je lui donnerai des cours.
M. le Président, poursuivant mes observations, je vais vous dire
ceci, et le député de Gouin l'a signalé tout à
l'heure. Il a parlé de cette priorité qu'Ottawa a dans le domaine
du réaménagement fiscal général. Il a
indiqué qu'il s'agissait là d'un danger, d'un problème
réel. Bien, nous le croyons nous aussi et c'est pour cela que nous nous
attachons à ce que d'autres
appellent des questions de détail. Si on ne commence pas par
donner à nos lois, en matière fiscale, un esprit qui correspond
à ce que nous sommes, à ce qu'est le Québec, si on ne
commence pas dans ce domaine, comment pourra-t-on le faire dans d'autres
domaines? Je m'étonne que cela ne saute pas aux yeux de ceux qui
prétendent que nous devons, dans le Québec, changer la base de
toutes les institutions que nous avons eues jusqu'à présent, en
vue d'atteindre un objectif que nous connaissons, qui a été
exprimé et formulé à maintes reprises par les
représentants du Parti québécois.
La loi que présente le ministre du Revenu, je le disais tout
à l'heure, est une loi qui comporte, bien entendu, des aspects positifs.
C'est une loi dont l'objet est bon et souhaitable. Encore que, et je rejoins
là les propositions du député de Beauce, sur le plan de
son application, particulièrement en ce qui concerne les recours
judiciaires et les pouvoirs qui sont maintenant donnés au ministre,
encore, dis-je, que cette loi présente des difficultés et des
dangers et qu'elle risque, on l'a signalé tout à l'heure, de
favoriser les personnes à revenu plus important, alors que des personnes
à revenu moindre, modeste, ne pourront, elles, jamais échapper
aux rigueurs de cette loi.
Je ne veux, M. le Président, à ce stade-ci de l'examen du
projet de loi, analyser toute la question, parce que cela m'obligerait à
aller dans le détail des articles, mais il reste qu'on a signalé
tout à l'heure des dangers. On a montré que la rigueur des
sanctions que prévoit le projet de loi pose des problèmes et est
de nature à causer certaines inquiétudes. Nous aurons l'occasion,
en comité plénier, de les signaler et mon collègue, le
député de Maskinongé, le spécialiste de ces
questions, pourra faire au gouvernement des suggestions fort opportunes.
Le ministre de l'Industrie et du Commerce a pris tout à coup le
rhume. C'est le vent frais qui souffle de ce côté-là. Le
bon air souffle de notre côté et cela déferle un peu sur la
poussière qu'on voit là-bas. Alors, M. le Président, je
vous dis donc ceci, et le gouvernement devrait y penser, encore une fois: une
loi dont l'objectif est de procéder à une harmonisation fiscale,
un réaménagement des lois fiscales devrait s'inspirer d'un esprit
qui n'est pas celui qui inspire le projet de loi que nous avons devant
nous.
Ce projet de loi vient directement d'une source que nous connaissons
bien, et c'est par sympathie pour le gouvernement central que le ministre du
Revenu a voulu en quelque façon faire de son projet de loi, faire de sa
loi une jumelle des lois fédérales.
C'est pour cela, tout à l'heure, M. le Président, que je
voulais vous démontrer, j'aurai l'occasion de le faire en un autre
moment, que la langue elle-même nous prouve ce que je viens d'avancer. On
ne s'est pas soucié du tout de la langue. On ne s'est pas occupé
du tout de soumettre le projet de loi à l'Office de la langue
française, par exemple. Tout simplement pour ne pas déranger la
sécurité des avocats qui, eux, ayant à plaider, veulent
toujours que les textes français ressemblent le plus possible aux textes
anglais.
Je suis toujours sur l'objectif de la loi parce que le ministre en a
fait un objectif tout à l'heure de cette question de langue. Mais vous
m'avez dit de ne pas trop en parler, je n'en parle pas trop, M. le
Président. Je fais juste y toucher, je l'effleure, je vais juste au bord
de l'illégalité.
M. LACROIX: Ne sortez pas la langue trop loin!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre du Revenu faisait ce soir ses
débuts de ministre.
UNE VOIX: C'est vrai.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je le félicite, c'est la
première loi qu'il a l'honneur et le plaisir de présenter
à cette Chambre. Mais comme il arrive à certains artistes,
à certains chanteurs, à certains petits ténors, on ne lui
a pas confié un bon rôle. Il n'a pas pu se mettre en voix. Un
petit projet de loi copié sur un projet de loi fédéral
dans une mauvaise langue, il est dans la situation d'un chanteur italien qui
serait obligé de chanter en allemand. Alors, ses débuts,
malheureusement, ne seront pas signalés avec grand éclat dans la
presse. Mais ce qu'on retiendra de cela, c'est que le ministre du Revenu se
fait, ce soir, l'interprète d'un autre gouvernement pour nous proposer
un projet de loi qui ne correspond pas du tout à la philosophie fiscale
qui doit devenir la nôtre. Cela, c'est très clair et ça
apparaît nettement dans le projet de loi, et plusieurs
députés, celui de Beauce, celui de Maskinongé, le
député de Gouin y a fait allusion également, plusieurs
députés l'ont signalé.
Alors, nous voulons bien, M. le Président, donner une approbation
de principe à ce projet de loi mais je conserve dans mon esprit
l'expression de l'aveu qu'a fait le ministre du Revenu au sujet des
augmentations d'impôts. Et j'aimerais savoir, quand il nous
répondra, combien d'argent le gouvernement du Québec
retirera-t-il, récupérera-t-il si on parvient à
éviter cette évasion fiscale? Et prenant ce montant qui sera
naturellement approximatif, le ministre, je l'imagine, pourra le comparer au
montant escompté de taxes que son gouvernement s'apprête à
exiger des contribuables québécois, tel que cela apparaît
d'ailleurs en filigrane dans le discours du ministre des Finances. Alors,
j'aimerais qu'il réponde à ces questions-là.
Pourquoi le texte n'a pas été vu par l'Office de la
langue, pourquoi il n'est pas français, pourquoi il est copié sur
celui d'Ottawa? Pourquoi aussi le ministre prend-il le soin de nous
prévenir que son projet de loi va éviter au gouvernement
d'imposer plus vite qu'il ne le veut des taxes et des impôts?
Alors, M. le Président, je veux terminer espérant que le
ministre du Revenu qui a appris son catéchisme pendant plusieurs
semaines parce qu'il y a plusieurs semaines qu'il attend la
présentation de son projet de loi pourra répondre à
nos questions, dissiper nos inquiétudes et nos doutes et s'appliquer,
comme nous l'avons fait nous-mêmes, à démontrer à
nos collègues du Parti québécois, que la réforme
fiscale, l'harmonisation fiscale, dont parlait le député de Gouin
tout à l'heure, n'est pas une chose simplement technique. Mais c'est une
chose beaucoup plus fondamentale qu'on ne le pense puisque...
M. HARVEY (Jonquière): D'abord technique.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'accord! C'est technique dans ses
modalités et ses applications. Mais si l'on pense en terme
général de fiscalité, la fiscalité comprend
l'ensemble de tous les moyens qu'on appelle le revenu d'un gouvernement. Bon!
Le revenu et l'utilisation qu'on peut faire de ce revenu...
M. HARVEY (Jonquière): C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Donc, il est extrêmement important que
cette philosophie fiscale nous révèle qu'il y a sous les mots qui
l'expriment, des principes qui nous indiquent exactement quelles sont les
orientations fondamentales de la politique gouvernementale en matière
fiscale puisque sans fiscalité, sans revenu, le gouvernement ne peut
entreprendre aucune sorte de réforme dans aucune sorte de domaine.
C'est ce genre d'inquiétude que doit dissiper le ministre du
Revenu et c'est à ce genre de question qu'il doit répondre en
reprenant les divers aspects que nous avons évoqués et qui ne
nous empêcheront pas d'accepter le principe de sa loi, mais qui nous
obligeront évidemment à en faire une analyse poussée et
à proposer des amendements, tous les amendements qui correspondent
à ces exigences que nous avons exprimées concernant la
philosophie et les principes qui sous-tendent et qui inspirent le projet de loi
no 5.
M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic. M.
Bernard Dumont
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Ce projet de loi no 5
intitulé Loi modifiant la loi du ministère du Revenu, en
principe, nous serons en faveur, car nous sommes nous aussi d'accord pour
empêcher la fraude fiscale. Là où ne sommes pas d'accord
avec le ministre du Revenu, c'est dans la façon d'appliquer cette loi.
Et je demande au ministre, compréhensif quand il le veut bien, de
présenter lui-même des amendements, parce que cette loi qui sera
appliquée dans le Québec par la suite aura des
répercussions très graves. Le député de Beauce tout
à l'heure a signalé des choses qui sont à mon sens d'une
conséquence très grave, entre autres quand il disait qu'une
loi-cadre fiscale devient un véritable code pénal qui ne tient
aucunement compte des droits les plus fondamentaux du citoyen à savoir
la sécurité juridique, le droit à l'inviolabilité
du domicile et au caractère sacré du secret professionnel. Alors
je pense que dans ça il y a matière à réflexion et
que le ministre dans la réplique devrait ou nous donner une bonne
explication de tous ces détails, ou nous présenter justement
avant que la loi ne soit adoptée, des amendements qui permettraient que
cette loi soit réellement acceptable.
Il y a aussi, M. le Président, une remarque qui, je crois,
mérite d'être soulignée et à laquelle le ministre,
c'est une question que nous lui posons, devra répondre, à savoir
pourquoi ne pas se prévaloir plutôt de la saisie conservatoire au
lieu de l'exécution forcée avant jugement?
Je prends comme exemple un homme d'affaires qui aurait fraudé le
gouvernement du Québec de $500,000, et au lieu d'utiliser ce que nous
réclamons, nous la saisie conservatoire, bien, par le biais que la loi
lui permettra, il pourrait liquider ses biens et nous pourrions retrouver dans
les coffres de cet homme d'affaires peut-être $25,000, $30,000 ou
$50,000. Et s'il y a eu une fraude de $500,000, eh bien, le gouvernement perdra
$459,000 ou $375,000 ou $425,000. Or, la suggestion que nous faisons de se
prévaloir de la saisie conservatoire nous permettrait de dire qu'il y
aurait, avec les autres remarques que le député de Beauce a
faites, dans l'application, déjà, une amélioration, bien
que cette loi d'inspiration fédérale, donc inspirée du
code anglais, par sa traduction s'applique mal aux Québécois.
Nous aurions voulu plutôt une loi d'inspiration québécoise
pour une loi-cadre qui aura des incidences et de profondes répercussions
sur plusieurs autres projets de loi. Moi aussi, j'appuie le
député de Beauce dans ce qu'il a déclaré, savoir
que les autres projets de loi auraient dû être
déposés pour voir toutes les incidences. C'est pourquoi nous
écouterons religieusement le ministre répondre à ces
questions qui ont été posées correctement par l'Union
Nationale et que nous posons nous-mêmes. Nous espérons que le
ministre comprendra que nous sommes pour le principe mais que nous voulons voir
la loi améliorée, non pas pour détruire les petits
commerces et les petits commerçants du Québec, mais pour
être capable de sévir contre ceux qui veulent, par cette fraude
fiscale, réussir encore une fois à tromper le gouvernement. C'est
pourquoi, surtout, dans cette suggestion très juste d'utiliser
plutôt la saisie conservatoire que l'exécution forcée avant
jugement, nous voyons une proposition juste et honnête de la part du
Ralliement créditiste.
M. BURNS: Une question de règlement.
Est-ce que vous croyez que nous avons quorum, M. le Président?
Surtout que le député de Taillon n'est pas en Chambre, lui qui a
demandé que nous siégions ce soir. Je vous demanderais, M. le
Président, de vérifier si nous avons bien quorum. Le
député de Notre-Dame-de-Grâce non plus n'y est pas. Bon
nombre de ministres n'y sont pas, il y en a seulement quatre ici...
M. LACROIX: Le député de Maisonneuve remplace son
whip.
M. BACON: Le député de Saguenay, le député
de Saint-Jacques.
UNE VOIX: Alouette!
M. LAURIN: On est présent à 50 p. c.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Réponse: oui.
M. BURNS: Nous avons quorum? Merci, M. le Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même en l'absence du ministre des
Institutions financières.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de
Montmorency.
M. Louis Vézina
M. VEZINA: M. le Président, depuis que nous discutons du principe
du bill, je veux vous avouer bien franchement que cela me fait sourire un peu.
Cela me fait sourire de voir le haut degré de naïveté que
certains entretiennent en matière de fiscalité. J'entendais, par
exemple, M. le Président, des gens qui nous parlaient de la conception
du juridisme fiscal au Québec. La conception du juridisme fiscal au
Québec, cela a été, c'est et ce sera toujours de trouver
un trou pour passer à côté de la loi. Ce n'est pas autre
chose que ça. Etre assis sur des principes philosophiques en
matière de fiscalité, c'est s'assurer d'une façon
permanente la perte de revenus pour le Québec.
Quant à moi, M. le Président, si je ne pensais qu'à
mes intérêts personnels, je me joindrais aux doléances
exprimées par l'Opposition officielle et par les créditistes et
moi aussi, je dirais: La loi est trop sévère. La loi est en
mauvais français. Déférez-là à trois mois,
six mois, un an.
Plus ce sera loin, plus l'évasion fiscale continuera, plus ceux
qui profitent des trous actuels de la loi, plus ceux qui profitent actuellement
de la faiblesse des moyens de coercition du ministre riront et s'amuseront.
Pendant qu'on référera à l'Office de la langue
française deux ou trois ans, au minimum, avant d'avoir le rapport
on continuera à faire de la fraude fiscale, alors que le premier
devoir du ministre du Revenu, c'est de s'assurer la perception totale et
entière des impôts que tous et chacun doivent payer. Ce n'est pas
rêver en couleurs.
Tantôt, M. le Président, le député de Beauce
nous parlait des ouvriers ou des petits salariés. Eux, ils n'en font pas
d'évasion fiscale. Mais, dire que la loi est inhumaine, dire que la loi
donne trop de pouvoirs, c'est protéger le gros aux dépens du
petit. Quand on me parle de saisies conservatoires, pour l'information du
député de Mégantic, cela ne peut pas être
déclaré séance tenante. Il faut que ce soit
exécuté lorsque déclaré bon et valide. C'est
rêver en couleurs de parler de cela. En matière de
fiscalité, il faut nécessairement que le ministre puisse agir
vite. Si, d'autre part, on a des textes qui ne collent pas au tout de la
fiscalité canadienne et je dirais même du nord des Etats-Unis,
c'est tellement facile de passer à côté. Il y a des
spécialistes dans ces questions. J'ai eu l'occasion de travailler avec
eux. On en trouve, des trous.
Quand on sait, M. le Président, le temps que cela prend au
ministre actuel qui manque de pouvoirs pour agir, on a le temps de sortir des
biens. On a vu cela, M. le Président. Et cela, au détriment de
ceux pour qui, comme nous, les députés, on déduit cela
à la base sur le chèque. D n'y a pas de fraude fiscale pour un
député.
Mais ceux qui sont à leur compte? Les corporations qui font des
profits. Les corporations ne sont pas toutes en faillite. Il y en a qui font
des profits. Elles font des efforts pour ne pas payer l'impôt. Et il
faudrait que le ministre attende des années et que continue la fraude
fiscale, pendant qu'Ottawa s'est organisé et va chercher les
impôts qui lui reviennent ! Nous, à Québec, nous ferons de
la philosophie, de la littérature en matière de
fiscalité.
On sait les difficultés budgétaires. Tout le monde crie
après le gouvernement. C'est défendu d'aller chercher l'argent,
défendu. Cela, ce n'est pas une bonne mesure. Quand le ministre
présente des lois qui doivent amener des contribuables à... Il
faut que tout le monde paie l'impôt sur le même pied, sinon c'est
de l'injustice.
Si je voulais profiter des faiblesses fiscales, moi aussi, je
blâmerais le ministre du Revenu de ne pas soumettre cela à toutes
sortes de comités. Je lui demanderais même d'avoir un texte...
Nous pourrions nous amuser encore plus en matière de fraude. Cela
rendrait service à ceux qui fraudent l'impôt.
Mais, en pratique, M. le Président, le principe de ce bill est
aussi simple que de donner des instruments de travail au ministre du Revenu. On
parlait de l'inviolabilité du domicile. M. le Président, quand
quelqu'un va commettre un vol à main armée, on prévoit les
moyens pour faire les enquêtes et trouver les voleurs. Pour ceux qui
fraudent l'impôt, nous n'avons pas le droit. Frauder l'Etat, c'est
permis. C'est une vertu, frauder l'Etat. Il ne faudrait pas que le ministre du
Revenu ait les moyens de prendre des mesures très sévères
contre ces gens.
Je ne dis pas, M. le Président, que cette loi
doit être citée comme étant la meilleure loi fiscale
au monde. Je n'ai pas cette prétention. Mais c'est un sérieux pas
en avant. Si on pouvait appliquer plus souvent ce principe, nous, les petits
salariés du Québec, nous aurions peut-être l'impression que
tout le monde est sur le même pied et ce serait moins choquant de payer
nos impôts.
M. le Président, qui aime payer des impôts? Personne. C'est
toujours désagréable de payer des impôts. Mais nous vivons
en société, dans une collectivité. Nous devons nous
organiser. Pour cela, il faut que tout le monde dépose son
pécule. Mais, ce qui est frustrant, c'est quand on sait, pour l'avoir
vécu et l'avoir vu, que des gens qui, à cause de leurs revenus,
devraient payer $15,000, $20,000 ou $50,000 d'impôts, en paient $8,000,
$10,000 ou $12,000. Ces gens se promènent en disant: As-tu vu le Revenu,
à Québec? Je les ai eus!
Et il serait défendu a notre ministère du Revenu de
s'équiper de ce que j'appellerai ce système de fraude fiscale qui
est érigé au Québec à une échelle beaucoup
plus élevée que la plupart des gens de cette province peuvent
l'imaginer. Il faut l'avoir vécu pour voir le nombre de trucs
légaux que permettent les lois actuelles. On ne peut blâmer le
ministère du Revenu du Québec, sous tous les gouvernements, parce
que ça prenait du temps à agir à cause de toutes sortes de
raisons administratives et que certains pouvoirs ne lui étaient pas
accordés. On a vu des contribuables sortir des biens du Québec et
au moment où on venait pour exécuter des saisies contre des gens
qui devaient des dizaines de milliers de dollars, qui normalement auraient eu
les moyens de payer leur dû, il ne restait plus de biens, les valeurs
mobilières étaient parties, rendues en Suisse, aux Bermudes, etc.
Le gouvernement de la province perdait de l'argent. On se retournait et on
disait: Nulla bona. Il n'y avait pas de biens, on fermait le dossier. Mais
celui qui est salarié, comme disait le député de Beauce,
il n'a pas le choix, on retient l'impôt à la source.
M. le Président, si le ministère du Revenu non seulement
ne possède pas les pouvoirs prévus au bill 5 mais ne se donne pas
d'autres pouvoirs éventuellement, ça sera encore au
détriment de la masse des travailleurs du Québec et pour
favoriser certains individus ou corporations qui, eux, parce qu'ils sont
à leur compte, parce qu'ils possèdent toutes sortes de moyens ou
qu'ils se font conseiller toutes sortes de moyens, réussiront à
éviter de payer au ministère du Revenu du Québec les
sommes d'argent qui normalement devraient lui être versées.
Malgré que sur le plan sentimental l'on puisse reprocher des
défauts de forme, malgré que sur le plan politique l'on puisse
tenter de faire dévier le débat sur une chicane
constitutionnelle, je me rallie beaucoup plus aux propos du
député de Gouin qui dit que tout simplement c'est de mettre
Québec à l'heure de 1971 en matière de
récupération fiscale. C'est, à mon sens, une excellente
loi.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable député de
Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, pour ma part je me contenterai de
quelques brèves remarques. Le député de Gouin vous a dit
au nom de notre groupe que nous favorisions toute mesure qui avait pour but de
freiner ou d'éliminer la fraude fiscale. Je dois dire que le discours du
député de Montmorency m'a véritablement
émerveillé, j'ai été frappé par la
connaissance approfondie qu'il avait de toutes les façons dont on
pouvait frauder le fisc.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons lui demander de faire nos rapports
d'impôt.
M. LAURIN: Et j'espère que ses adversaires, lors de la prochaine
campagne électorale, ne diront pas que ses connaissances étaient
suspectes.
Il y a un autre principe du projet de loi pour lequel nous sommes
fortement, c'est celui de l'humanisation. Nous sommes conscients, en effet,
qu'il y a plusieurs catégories de travailleurs au Québec dont les
revenus sont variables d'une année à l'autre et nous pensons
qu'il n'est que juste que la perception de l'impôt sur ces revenus
variables soit étalée sur plusieurs années et que l'Etat
se base sur la moyenne des revenus plutôt que sur le revenu annuel.
Nous savons que l'Etat a cédé en ce domaine aux pressions,
aux représentations qui ont été exercées depuis
longtemps par les diverses catégories de travailleurs touchés, en
particulier les artistes et les sportifs, mais nous suggérons quand
même au gouvernement de penser à d'autres catégories de
travailleurs qui peuvent se trouver dans des situations identiques et dont la
voix n'est pas assez forte pour avoir encore été entendue par le
gouvernement.
Je ne connais pas toutes ces catégories de travailleurs; je
connais cependant les écrivains, certains journalistes, malgré
toute la réputation qu'on leur fait dans certains quartiers, et je pense
que si l'on veut humaniser cette loi, si l'on veut être juste pour toutes
les catégories de citoyens, il faudrait quand même que le
gouvernement, à l'occasion de la présentation de ce projet de
loi, fasse un inventaire de toutes les catégories de travailleurs qui
pourraient profiter de cette humanisation de la loi.
Par ailleurs, je reconnais que le ministre du Revenu a
déclaré que, même si les projets de loi qu'il
présente actuellement sont nombreux, ils ne constituent, dans son
esprit, qu'un préalable à cette réforme fiscale en
profondeur qu'il envisage. Je sais bien qu'il est conscient des
inégalités fiscales actuelles et je sais bien qu'il entend, dans
la mesure de ses moyens, y mettre
ordre le plus tôt possible. Nous avons retrouvé cette
même préoccupation dans le discours du budget, alors que le
ministre des Finances énumérait lui-même deux ou trois
domaines où la fiscalité ne lui semblait pas équitable,
à l'heure actuelle. Cependant, je rejoins ici la préoccupation de
mon collègue de Gouin lorsqu'il disait qu'il était
inquiétant de voir l'état d'esprit, pour ne pas dire la
philosophie, qui présidait à l'action du ministre en ce
domaine.
Dans l'article auquel mon collègue faisait allusion, en effet, le
ministre du Revenu s'était refusé à préciser la
date d'entrée en vigueur de la réforme en profondeur à
laquelle, selon lui, travaille actuellement l'équipe
ministérielle, malgré que cette équipe
ministérielle possède, depuis longtemps, un document de base
auquel il peut se référer dans l'élaboration de ses
réformes fiscales en profondeur, c'est-à-dire le rapport de la
commission Bélanger. C'est la raison pour laquelle cette réforme,
qui n'a que trop tardé, doit être mise en plan
immédiatement, mais c'est également la raison pour laquelle nous
nous inquiétons que le ministre ait insisté sur le fait que le
sort de la réforme fiscale du Québec soit intimement lié
à celle que le gouvernement fédéral fera à
l'échelle nationale.
Nous nous inquiétons donc beaucoup que le ministre ait
émis l'opinion que le fédéral devra élaborer sa
réforme fiscale avant que le Québec suive, sur le même
chemin, et élabore la sienne. Il nous semble, en effet, que c'est une
attitude dangereuse et qui n'est peut-être pas pragmatique,
également. Pourquoi attendre que le champ de la fiscalité
québécoise soit envahi par des empiètements, comme cela
s'est produit dans tant d'autres domaines, et que nous en soyons réduits
à être sur la défensive et à repousser un adversaire
qui s'est avancé trop loin sur notre territoire? Est-ce que la meilleure
façon de se défendre n'est pas d'attaquer ou plutôt
d'occuper le terrain qui est le nôtre, de l'occuper pleinement, de
l'occuper entièrement, avec toutes les armes techniques que la science
administrative met actuellement entre nos mains.
D'ailleurs, M. le ministre, les bienfaits de la fiscalité
québécoise, dont nous pouvons nous féliciter aujourd'hui,
n'ont-ils pas été acquis à la suite d'initiatives
québécoises qui, en apparence, allaient à l'encontre de
positions prises par d'autres gouvernements? Je vous réfère ici,
par exemple, à l'institution de l'impôt sur le revenu
instauré pour la première fois dans le Québec en 1954.
C'était alors une initiative bien modeste, c'était un grain de
sénevé, mais il a fallu plusieurs années avant que ce
grain de sénevé devienne quand même un arbre respectable
puisque nous savons maintenant que nous occupons la moitié du champ de
l'impôt sur le revenu.
Dois-je également rappeler au ministre d'une équipe
ministérielle que c'est par des prises de position catégoriques
d'un premier ministre du
Québec, en ce qui concerne le rapatriement de points
d'impôt, que nous avons pu continuer à faire des progrès
dans ce champ qui est tellement important pour le progrès du
Québec et en particulier de l'économie québécoise.
Il me semble que cette attitude dynamique, que cette attitude vigoureuse nous
paraît plus conforme aux intérêts du Québec.
M. le ministre, vous, en tant que ministre du Revenu
québécois, et le ministre des Finances en tant que ministre des
Finances du Québec, n'êtes-vous pas plus conscients des besoins du
Québec, des aspirations du Québec, des problèmes et des
difficultés du Québec que nos homologues d'un autre gouvernement?
Ne vous semble-t-il pas que vous êtes en bien meilleure posture pour
penser aussi bien à la philosophie qu'aux détails d'une politique
fiscale qui serait véritablement adaptée à nos
besoins?
A l'occasion, donc, de la présentation de ce projet de loi, je
souhaiterais que le ministre du Revenu et que ses homologues du comité
de législation prennent l'occasion par les cheveux pour
réitérer, dans la réplique que vous allez faire dans
quelques instants, qu'ils prennent l'initiative de commencer à jeter les
fondements d'une politique fiscale proprement québécoise qui,
bien sûr, tienne compte du contexte fédéral dans lequel
nous vivons, mais qui tienne compte, bien davantage encore, de toutes les
études que vous connaissez, j'en suis sûr, et des
éléments fondamentaux des réformes que votre équipe
peut avoir élaborées dans le secret du conseil des ministres.
Qu'il profite de cette occasion pour faire connaître à la
population les éléments fondamentaux de cette politique et les
mesures principales, essentielles que vous envisagez pour traduire, dans la
réalité fiscale, les aspirations du Québec, ainsi que les
difficultés ou les problèmes que nous connaissons à
l'heure actuelle.
Je souhaite donc, à la fin de cette deuxième lecture du
projet de loi, que vous déclariez à cette Chambre que vous
entendez, avec votre équipe, occuper immédiatement et pleinement
tout le champ de la fiscalité québécoise, dans le sens de
nos meilleurs intérêts.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): L'honorable ministre des Finances.
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: M. le Président, je voudrais faire quelques remarques
sur le projet de loi no 5 pour dire jusqu'à quel point ce premier projet
de loi dont nous entreprenons l'étude, et qui fait partie d'une
série de neuf projets de loi, est important pour le gouvernement du
Québec. J'ai souligné, dans le discours du budget de la semaine
dernière, qu'avant même de songer à quelque réforme
que ce soit du côté de la taxation, il fallait travailler ardument
à apporter à nos lois les amendements nécessaires
pour nous permettre de percevoir les sommes qui nous étaient
dues.
M. le Président, cette réforme fiscale que nous
entreprenons avec l'étude du bill no 5 avait été
annoncée dans le discours du budget du 18 juin dernier et, n'eussent
été des événements pénibles de l'automne
1970, il est plus que probable que ces projets de loi seraient
déjà dans nos statuts.
L'objectif visé, c'est donc de faire en sorte que, par
équité fiscale, le ministère du Revenu et le titulaire de
ce ministère puissent bénéficier de tous les atouts, de
tous les instruments, de tous les textes juridiques nécessaires à
percevoir les sommes qui sont dues.
Je pense que le premier principe d'équité fiscale, c'est
de percevoir ces sommes qui autrement sont conservées par des
contribuables récalcitrants qui trouvent, comme le disait le
député de Montmorency, toutes sortes de trucs, qui font preuve
d'une très grande imagination pour ne pas payer les impôts qui
sont dues au gouvernement.
M. le Président, nous avons l'intention je l'ai
indiqué en reprenant ici les propos du premier ministre
d'entreprendre une réforme fiscale en profondeur. Le
député de Bourget, le chef du Parti québécois, a
parlé de philosophie fiscale, a parlé d'une taxation
québécoise. Mais je pense qu'il faut faire une distinction entre
le partage fiscal, qui fait l'objet de discussions et qui fera l'objet de
discussions lors des négociations pour le renouvellement des accords
fiscaux de 19671972 et les techniques, et les lois qui permettent au
gouvernement de quelque juridiction que ce soit de percevoir les impôts
que ces lois lui permettent déjà de percevoir. Ce partage fiscal
a déjà été indiqué comme étant
nécessaire, comme étant prioritaire, non seulement au niveau des
points d'impôt mais également au niveau des transferts nets de
revenus.
Le premier ministre, et je l'ai fait moi-même, a indiqué
qu'il fallait être prudent, si nous nous attachions trop exclusivement
aux transferts de points d'impôt, parce que, évidemment, le point
d'impôt est relié plus directement à la croissance du
revenu, alors que les transferts fiscaux nets, basés sur des
améliorations à la péréquation, peuvent être
beaucoup plus avantageux pour le Québec.
Je voudrais apporter quelques remarques sur les propos qu'a tenus le
député de Maskinongé concernant l'origine du bill 5,
à savoir si c'est un projet conçu par l'ancien gouvernement ou
par le nouveau gouvernement. C'est toujours facile de répéter,
à chaque fois qu'il y a un projet de loi: Ah! à un moment
donné, un comité, en 1967, avait déjà
travaillé là-dessus. Mais je pense que ce qui est important,
c'est de traduire des intentions, de les traduire dans l'action. C'est ce que
le ministre du Revenu fait ce soir en présentant le projet de loi no
5.
Mais ce qui est le plus surprenant dans les propos du leader de
l'Opposition officielle, c'est qu'alors qu'il dit que le projet de loi no 5 est
l'inspiration de l'ancien ministre du Revenu, et député de
Pontiac, M. Johnston, du même souffle, il dit que ce projet de loi n'a
pas de sens, qu'il est rédigé dans un mauvais
français...
M. PAUL: M. le Président, sur un point d'ordre! En vertu de
l'article 270 du règlement.
UNE VOIX: Non, vous ne me dites pas!
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Le député de
Maskinongé.
M.PAUL: Merci, M. le Président. Je n'ai jamais dit ça.
J'ai surveillé l'honorable ministre des Finances qui a dormi une partie
de la veillée et quand j'ai dit...
M. GARNEAU: M. le Président, question de privilège.
M. PAUL: ... M. le Président...
M. GARNEAU: Question de privilège, M. le Président.
M. PAUL: Non, je regrette.
M. GARNEAU: M. le Président, question de privilège.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): A l'ordre! Le ministre des Finances se
lève sur une question de privilège.
M. PAUL: C'est réglé.
M. GARNEAU: Je comprends que le député de
Maskinongé qui a une très grande expérience de la Chambre
veut voir inscrits dans le journal des Débats les propos qu'il vient de
tenir. Mais vous comprendrez que je ne peux accepter que ces propos restent
sans réplique étant donné que c'est complètement
faux. Alors qu'il parlait je me suis même souvenu de la
référence mutatis mutandis, il parlait des
références aux lois fédérales, je me suis souvenu
des projets de loi sur lesquels j'avais travaillé alors que j'occupais
d'autres fonctions, dans d'autres disciplines et que nous avions ces
références dans d'autres lois que son propre gouvernement, alors
qu'il était au pouvoir, avait incluses dans les textes de loi.
Je suis allé chercher les références pour pouvoir
mieux les lui citer.
M. PAUL: M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Je laisse continuer le député
de Maskinongé sur son rappel au règlement.
M. PAUL: Maintenant, M. le Président, en vertu de l'article 285,
19e, je suis obligé de
prendre la parole du ministre qui ne dormait pas, même s'il avait
les yeux fermés. Ce qui est plus grave, c'est qu'il n'a pas compris.
Cela est plus alarmant. C'est plus alarmant. En aucun temps, M. le
Président, je n'ai dit que nous avions accepté le texte des lois
que nous avions et je le répète, je le répète,
jamais nous n'aurions consenti à un tel "aplatventrisme" devant le
gouvernement central, devant vos maîtres d'Ottawa.
M. GARNEAU: Ce n'est pas un point d'ordre.
M. PAUL: Oui, en vertu de l'article 270 du règlement, lisez-le,
lisez-le!
M. GARNEAU: Ce n'est pas une réplique.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Je suis convaincu que le
député de Maskinongé est satisfait. Il vient de faire
valoir les points qui avaient été mal compris, ce dont il se
plaignait.
M. PAUL: M. le Président, plus que satisfait.
M. LE PRESIDENT (Bienvenue): Alors, le ministre des Finances.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre s'endormait cet après-midi
et ce soir.
M. GARNEAU: Tout le monde étant satisfait, M. le
Président, je vais continuer. Du même souffle alors que le
député de Maskinongé soulignait que l'action du ministre
du Revenu n'était que la reprise de lois conçues par l'ancien
ministre du Revenu, M. Johnston, du même souffle, il disait que ce
n'était pas un bon projet de loi et, finalement, il concluait en disant
que même si ça ne donnait rien, il allait voter pour le bill no 5,
parce que c'était pour empêcher une certaine fraude fiscale.
C'est une chose incompréhensible, M. le Président. Tous
les propos du député de Maskinongé, il faudrait les
reprendre au texte pour s'apercevoir jusqu'à quel point il y avait
contradiction par-dessus contradiction. Mais revenant à un point qu'il a
traité avec beaucoup de passion, beaucoup de conviction, je voudrais
référer le député de Maskinongé aux statuts
de 1966/1967 c'est maintenant le chapitre 32 loi
sanctionnée le 29 juin 1967. A l'article 2 de ce bill, de ce chapitre
32, on indique que la Loi du ministère du Revenu, de l'impôt du
revenu est modifiée, et l'article 12 se lit de la façon
suivante:
Sont exclus du calcul du revenu d'un contribuable, pour une année
d'imposition, tout montant qui est déclaré exclu par les
règlements et sous réserve des dispositions expresses au
contraire contenues dans les règlements, tout montant qui, pour la
même année d'imposition, est, pour les fins de l'impôt
fédéral sur le revenu, exclu du montant du revenu par la Loi du
Parlement du Canada, et, M. le Président, les références
directes...
M. PAUL: Est-ce que le ministre me permettrait une question. Est-ce que
le texte n'est pas écrit dans les statuts, le texte écrit, c'est
cela que nous reprochons au gouvernement, c'est de ne pas avoir le courage de
faire son texte...
M. GARNEAU: ... une référence directe à un statut
fédéral, imaginez-vous...
M. PAUL: ... un texte écrit.
M. GARNEAU: ... c'est un scandale aujourd'hui et, dans leur temps, ils
présentaient des projets de loi avec des références...
D'ailleurs, le fondateur de l'Union Nationale, M. le Président, dans le
premier projet de loi qu'il a voté pour l'impôt sur le revenu...
Relisez ce texte et vous allez voir des références continuelles
à la loi fédérale, non seulement au point de vue des
textes, mais au point de vue de l'interprétation, M. le
Président. Je ne comprends pas le député de
Maskinongé qui se scandalise aujourd'hui, alors que dans...
M. PAUL: Est-ce que le ministre me permettrait une question?
M. GARNEAU: Mais, M. le Président... M. PAUL: Très
bien.
M. GARNEAU: Le député de Maskinongé blâme le
ministre du Revenu de se référer à des lois
fédérales.
M. PAUL: M. le Président, je signale qu'il est onze heures.
DES VOIX: II n'est pas onze heures.
M. HARVEY (Chauveau): II n'est pas encore onze heures.
M. GARNEAU: Le même projet de loi, M. le Président...
M. PAUL: M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est onze
heures?
DES VOIX: II n'est pas onze heures. M. GARNEAU: ... qui modifiait...
M. PAUL: M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est onze
heures?
UNE VOIX: II manque deux minutes.
M. LEVESQUE: Puis-je signaler au député qu'il n'est pas
onze heures?
M. HARVEY (Chauveau): II est dans l'erreur, comme d'habitude.
M. LE PRESIDENT: Je remarque qu'il est onze heures moins deux
minutes.
M. PAUL: Moins deux minutes, merci, M. le Président. Je vais
faire une motion. Je voudrais faire une motion pour que vous puissiez disposer
des deniers nécessaires pour que ceux qui ont besoin d'avoir un examen
de la vue puissent en bénéficier parce que, quant à nous,
nous voyons onze heures.
M. GARNEAU: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. GARNEAU: Je comprends que le député de
Maskinongé n'aime pas...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, puis-je vous signaler
qu'il est maintenant onze heures?
M. GARNEAU: M. le Président, je comprends que le
député de Maskinongé et maintenant le député
de Chicoutimi...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Onze heures.
M. GARNEAU: ...n'aiment pas qu'on leur prouve leur turpitude, leur
inconséquence...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Onze heures, onze heures, M. le
Président !
M. GARNEAU: ...jusqu'à quel point... M.TREMBLAY (Chicoutimi):
Onze heures.
M. GARNEAU: M. le Président, je demande l'ajournement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il est onze heures.
M.GARNEAU: M. le Président, je demande l'ajournement du
débat.
M. DUMONT: Est-ce que nous pouvons savoir quels travaux nous
entreprendrons lundi après-midi?
UNE VOIX: Demain matin.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la
Chambre à lundi...
M. BURNS: M. le Président, sur une question de privilège.
Je voudrais remercier le député de Taillon de nous avoir permis
de siéger ce soir.
M. LEDUC: Bienvenue.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la
Chambre à lundi, quinze heures.
M. DUMONT: Nous aimerions savoir, lundi à trois heures, quels
projets de loi seront présentés.
M. LEVESQUE: Le député n'a qu'à consulter son
feuilleton.
M. DUMONT: Mais, M. le Président, nous avons eu, aujourd'hui, le
projet de loi 14...
M. PAUL: M. le Président...
UNE VOIX: Voulez-vous faire taire la mouffette de l'Union Nationale?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. DUMONT: En ce qui concerne...
M. HARVEY (Chauveau): Vous violez le règlement !
M. DUMONT: Alors, pour la bonne marche de la Chambre, M. le
Président, je demande quel projet de loi sera discuté à
trois heures, lundi, et nous avons le droit de le savoir.
M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à lundi, quinze
heures.
(Fin de la séance: 22 h 58)