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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le mercredi 23 juin 1971 - Vol. 11 N° 64

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Quinze heures dix minutes)

M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre messieurs!

Affaires courantes. Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de commissions élues.

Commission de l'Assemblée nationale

M. LEVESQUE: M. le Président, la commission de l'Assemblée nationale a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son 13e rapport. Votre commission est d'opinion que la pétition et l'avis sont réguliers et suffisants et que le bill est régulier et conforme à la pétition et à l'avis dans chacun des cas ci-après: de la ville de Laval, demandant l'adoption d'une loi modifiant sa charte; de la cité de Magog, demandant l'adoption d'une loi modifiant sa charte.

M. LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé? Agréé.

M. PAUL: Oui.

Commission des bills privés et publics

M. BLANK: M. le Président, la commission des bills privés et des bills publics a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son 6e rapport. Votre commission a décidé de rapporter avec des amendements le bill suivant: bill 154, Loi modifiant la charte de la ville de Sainte-Foy.

M. LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé? M. PAUL: On n'a pas de rapport pour Hull?

M. BERTRAND: Où est le projet de loi de Hull?

M. PAUL: On n'a pas de rapport sur le projet de loi de Hull?

M. BERTRAND: C'est "dull"

M. LE PRESIDENT: Présentation de motions non annoncées.

Changements à des commissions

M.PAUL: M. le Président, qu'il me soit permis de faire motion pour que le nom de M. Tremblay (Chicoutimi) soit substitué à celui de M. Cardinal, comme membre de la commission de la Fonction publique.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LEGER: M. le Président, qu'il me soit permis de faire motion pour que le nom de M. Charles Tremblay soit substitué à celui de Marcel Léger à la commission des Transports.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE PRESIDENT: Présentation de bills privés.

Projets de loi privés

M. PEARSON: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter le projet de loi no 124, intitulé Loi modifiant la charte de la ville de Laval.

M. LE PRESIDENT: La motion du député est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou une séance subséquente.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le premier ministre pensait que c'était pour lui, mais c'était pour le projet de loi.

M. BLANK: M. le Président, j'ai l'honneur de faire motion pour qu'il me soit permis de présenter le projet de loi numéro 144 intitulé: Loi modifiant la charte de la cité de Magog.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou une séance subséquente.

Projets de loi privés déférés à la commission

M. LEVESQUE: M. le Président, quant aux bills privés dont nous venons d'adopter la première lecture, qu'il me soit permis de demander le consentement unanime de la Chambre pour que nous puissions procéder à la deuxième lecture afin de déférer ces projets de loi à la commission parlementaire des bills publics et privés et pour que ces projets de loi soient étudiés à la prochaine séance de la commission parlementaire des bills publics et privés à la salle 81-A, mardi le 29 juin 1971 à dix heures du matin.

M. PAUL: Adopté immédiatement.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ces projets de loi. Second reading of these bills.

M. LE PRESIDENT: Troisième lecture, prochaine séance.

M. LEVESQUE: M. le Président, puis-je revenir à l'article "Motions non annoncées" pour qu'à la commission parlementaire de la Fonction publique, les noms de MM. Coiteux, Hardy et Veilleux soient substitués à ceux de MM. Cornellier, Larivière et Saindon.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Présentation de bills publics.

M. LEVESQUE: E.

Projet de loi no 50 Première lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose la première lecture du projet de loi intitulé Loi du développement de la région de la baie James.

M. BOURASSA: M. le Président, ce projet de loi a pour principaux objets de constituer la Société de développement de la baie James qui sera chargée de mettre en valeur les richesses naturelles du territoire décrit à l'annexe ainsi que d'administrer et d'aménager ce territoire; de prévoir que le développement des ressources hydro-électriques du territoire sera effectué par une filiale dont la moitié des actions seront détenues par l'Hydro-Québec et au moins 40 p.c. par la société;

De prévoir la constitution d'autres filiales en collaboration avec Soquip, Soquem et Rexfor où la société détiendra 51 p.c. des actions et chacun de ces autres organismes 49 p.c.

D'ériger le territoire en une municipalité qui sera administrée par la société tout en prévoyant la constitution de conseils locaux qui pourront exercer certains pouvoirs de la société en matière municipale lorsqu'au moins 500 personnes habiteront en permanence une localité sur ce territoire ;

De soumettre toute concession du domaine public dans le territoire à l'avis préalable de la société tout en soustrayant ses opérations de l'application des lois mentionnées à l'article 42.

Les affaires de la société seront administrées par un conseil d'administration de cinq membres nommés par le gouvernement. Il disposera d'un capital-actions de $100 millions payé par le ministre des Finances à raison de $10 millions par année pendant dix ans.

La société devra veiller à la protection du milieu et prévenir la pollution dans le territoire. Elle pourra exproprier tout immeuble situé dans le territoire et se faire concéder tout bien du domaine public qui en fait partie. Elle ne pourra toutefois céder les biens acquis par expropriation ou autrement si ce n'est par vente à l'enchère ou par soumission publique, sauf à ses filiales.

La société devra faire un rapport de ses activités annuellement au premier ministre qui devra le déposer à l'Assemblée nationale.

La filiale de la société qui sera chargée du développement des ressources hydro-électriques du territoire sera administrée par un conseil composé de cinq membres nommés par le gouvernement, dont trois le seront sur la recommandation de l'Hydro-Québec et deux sur celle de la société.

La société pourra aussi constituer toute autre filiale pour des fins d'exploitation des autres richesses naturelles, y compris le tourisme, la chasse et la pêche, pourvu qu'elle détienne au moins 51 p.c. des actions.

Les municipalités déjà existantes sur le territoire et les réserves indiennes ne font pas partie de la municipalité constituée par le projet de loi.

J'avais dit, M. le Président, il y a quelques semaines que j'essaierais de déposer ce projet de loi, l'un des plus importants de mon administration, avant la fête des Canadiens français. C'est donc avec fierté que je le fais aujourd'hui.

M. LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

M. CARDINAL: Sous réserve de la petite annonce de la fin.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. LE PRESIDENT: Déclarations ministérielles.

Amendements à la constitution

M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais résumer la déclaration que j'ai faite hier. J'ai essayé de communiquer avec les différents chefs de l'Opposition mais, comme il était un peu tard dans la nuit, j'ai communiqué avec eux ce matin. Au moins une soixantaine de journalistes attendaient au milieu de la nuit hier; j'ai donc cru normal de leur faire une brève déclaration, quitte à répondre aux questions à l'Assemblée nationale.

Le fédéralisme constitue pour les Québécois le meilleur moyen d'atteindre leurs objectifs économiques, sociaux et culturels. Les Québé-

cois ont appuyé cette option du gouvernement du Québec lors des dernières élections générales. Soucieux de respecter cette volonté clairement exprimée par la population du Québec, le gouvernement s'applique à renforcer le fédéralisme canadien.

Dans cet esprit, il estime que ce fédéralisme doit être décentralisé pour refléter la diversité des régions de notre pays. Ce fédéralisme doit ainsi garantir aux provinces la liberté d'action nécessaire pour qu'elles assument pleinement leurs responsabilités à l'égard de leurs citoyens.

Ce fédéralisme doit aussi permettre au gouvernement du Québec d'assurer l'avenir culturel de la majorité de sa population. La révision constitutionnelle est précisément la voie qui doit nous donner ce type de fédéralisme. Les travaux des trois dernières années ont permis aux Canadiens de progresser dans cette voie. La récente conférence des premiers ministres du Canada a constitué un pas en avant dans cette direction. Des progrès importants ont pu être réalisés en ce qui concerne le mécanisme de rapatriement et de modification de la constitution, les droits politiques et linguistiques, le statut de la cour Suprême.

Dans l'état actuel du dossier de la réforme constitutionnelle, le gouvernement du Québec ne peut toutefois pas faire une recommandation positive à l'Assemblée nationale en ce qui a trait à l'acceptation du présent projet de charge constitutionnelle.

Cette décision relève de la nécessité qu'il y a de convenir dans toute la mesure du possible de textes constitutionnels clairs et précis évitant ainsi de transporter au pouvoir judiciaire la responsabilité qui appartient avant tout au pouvoir politique, c'est-à-dire aux élus du peuple.

Ainsi, les textes traitant de la sécurité du revenu laissent subsister une incertitude qui cadre mal avec les objectifs inhérents à toute idée de révision constitutionnelle. Si cette incertitude était éliminée, notre conclusion pourrait être différente.

Ainsi le gouvernement du Québec entend-il signifier au secrétaire de la conférence constitutionnelle qu'il ne peut accepter ce projet de charte constitutionnelle.

Cette décision du gouvernement du Québec fait appel à la capacité d'innovation et à la détermination de tous les Canadiens et les incite à poursuivre la tâche qu'ils ont entreprise pour donner au Canada une constitution vraiment moderne.

M. BERTRAND: M. le Président, je ne chercherai pas querelle au premier ministre d'avoir, la nuit dernière, remis à la presse la déclaration dont il vient de nous donner lecture. C'est une exception et, quant à moi, je la lui pardonne aisément aujourd'hui. Avant la conférence de Victoria, l'Opposition officielle a multiplié les mises en garde à l'adresse du gouvernement. L'Union Nationale savait, par expérience, que le premier ministre du Québec y serait l'objet de pressions très dures et de manoeuvres très habiles.

A plusieurs reprises, devant la commission parlementaire et à l'Assemblée nationale, elle a dit au chef du gouvernement qu'il devait éviter de se laisser enferrer dans un statu quo inacceptable, qu'il devait éviter de sacrifier à une sécurité illusoire l'avenir du Québec, la fierté du Québec, les droits et les libertés inaliénables du Québec. L'Opposition officielle a même présenté une motion à l'effet que le Québec ne devait accepter aucune formule d'amendement constitutionnel avant que n'ait été résolu le problème capital de la répartition des pouvoirs, spécialement en matière de sécurité sociale.

Le premier ministre a alors déclaré qu'il était d'accord sur l'esprit de cette motion qui a été appuyée sans réserve par nos collègues du Ralliement créditiste. Je suis donc heureux de constater que le premier ministre a tenu compte des réactions des divers groupes parlementaires et de l'opinion québécoise. A mon tour et en plein accord avec le nouveau chef de l'Union Nationale, j'appuie le "non" poli que le premier ministre vient d'opposer à ce que l'on a appelé une charte constitutionnelle.

Maintenant que nous en connaissons le texte et le contexte, nous savons, d'abord, que ce document n'est pas une charte; ce n'est qu'un assemblage de propositions hétéroclites dont aucune ne va au fond du problème et que ne relie aucune idée maîtresse, si ce n'est une volonté intransigeante et manifeste de maintenir, sous un déguisement superficiel, un statu quo depuis longtemps dépassé. De plus, la méthode utilisée pour faire accepter cette charte au Québec, est totalement inacceptable. Inutile de jouer sur les mots: il s'agit d'un ultimatum. On nous donnait à peine dix jours pour accepter ou rejeter en bloc le document, sans en changer un iota.

La version française, d'ailleurs, n'est parue que dans les journaux de samedi dernier. Comment, dans ces conditions, le peuple souverain, véritable détenteur de l'autorité constituante dans un pays démocratique, pouvait-il débattre les propositions qui y sont contenues et participer avec nous, les représentants du peuple, à l'élaboration des décisions à prendre?

Le contenu de ces propositions n'est pas plus acceptable que le contenant. L'article 94-A avait été introduit dans la constitution en 1951, non pas comme une concession d'Ottawa ou du gouvernement central aux provinces, mais comme une permission donnée par les provinces à Ottawa de légiférer dans le domaine des pensions de vieillesse. En 1964, cette concession des provinces à Ottawa a été étendue au régime des rentes et autres prestations connexes. Chaque nouvelle extension de l'article 94-A ne peut qu'augmenter les -pouvoirs du gouvernement fédéral, surtout — et j'appuie là-dessus, M. le Président, c'est fondamental — si l'on ne donne pas aux provinces les moyens financiers d'utili-

ser le droit prioritaire que M. Duplessis avait eu soin de conserver aux provinces en 1951 et que M. Lesage avait sauvegardé en 1964.

Le projet de charte n'accorde aucune compensation aux provinces désireuses d'exercer leur droit de priorité. Le communiqué officiel émis par les premiers ministres, après la conférence de Victoria, dit que tous les aspects financiers des problèmes constitutionnels sont renvoyés à une conférence ultérieure.

Or, cette distinction que l'on continue de faire entre le droit de légiférer et le droit de taxer a toujours été le cheval de Troie de la centralisation. C'est toujours l'érosion des pouvoirs fiscaux qui entraîne la perte de l'autonomie législative. C'est toujours parce qu'elles n'ont pas les moyens d'exercer leurs droits que les provinces finisssent par les perdre. Ce que vaut une priorité purement théorique, M. Trudeau lui-même en est parfaitement conscient. Lui qui a déclaré à la télévision, d'après le compte rendu qu'en a publié le Devoir du 21 juin: "Si le gouvernement du Québec déboutait le fédéral du secteur des allocations familiales, il devra le faire à même ses propres impôts."

Après avoir été taxés par le gouvernement central pour les allocations familiales des autres provinces, les Québécois devraient-ils donc se retaxer entre eux pour maintenir leurs propres allocations? Est-ce là l'image d'une société juste? Il est de l'essence même du fédéralisme que les pouvoirs législatifs et fiscaux soient clairement répartis dans une constitution écrite entre la fédération et les Etats membres. C'est ce que réclame le Québec depuis toujours.

Actuellement, le gouvernement fédéral se sert de son prétendu pouvoir illimité de taxer et de dépenser pour intervenir sans scrupule dans toutes sortes de domaines provinciaux. Il s'en sert comme d'une constitution parallèle ou clandestine qui lui permettrait de contourner et d'annuler à toutes fins pratiques la constitution officielle.

C'est une situation génératrice de conflits innombrables répétés depuis au-delà de vingt-cinq ans qui empêche l'avènement d'une véritable compréhension, d'une véritable amitié, d'une véritable solidarité entre Canadiens de l'une et de l'autre culture. Si, au moins, nous avions un véritable tribunal constitutionnel pour régler les conflits toujours possibles dans un Etat fédéral entre les deux ordres de gouvernement ! Mais comment le Québec peut-il donner sa confiance à un tribunal d'arbitrage dont tous les membres sont nommés par Ottawa et dont tous les pouvoirs sont également définis par Ottawa?

J'invite les premiers ministres anglophones des autres provinces du Canada à se poser la question suivante: Qu'auraient-ils fait à la place du premier ministre du Québec si le Québec eût été anglophone et le reste du pays francophone? Qu'ils se posent la question, qu'ils se mettent dans nos bottes! Ils auraient dit non à un projet de constitution comme celui qui nous a été présenté à Victoria.

Et ce qui me renverse, il n'y a de souplesse dans cette prétendue charte qu'au chapitre des droits linguistiques. Là, les provinces ne prennent que ce qui fait leur affaire. C'est du véritable fédéralisme à la carte.

Si une telle souplesse est possible dans le domaine linguistique, pourquoi s'obstiner à maintenir une inflexible uniformité dans d'autres domaines?

Bref, le Québec ne pouvait répondre que par un non à l'ultimatum. J'ajoute, connaissant le premier ministre du Canada, avec son esprit cartésien, de logique et de méthode, que, si le premier ministre du Canada eût été premier ministre du Québec, il aurait refusé une telle offre de la part des autorités centrales et des autres privinces canadiennes.

Ce n'est pas en pareil cas, M. le Président, une attitude négative que de savoir dire non. C'est parce que M. Duplessis a dit non aux subsides fédéraux, qu'on voulait nous donner en échange de nos droits de taxation, qu'il y a eu, à un moment donné, la péréquation. C'est parce que M. Lesage a dit non à la conférence de 1964, qu'il y a eu, du moins jusqu'à l'avènement du régime Trudeau, généralisation du droit d'option, avec pleine compensation fiscale. Parce que le gouvernement actuel a dit non à la prétendue charte constitutionnelle, je suis convaincu que les autres provinces vont mettre de côté cet ultimatum enfantin et infantile et que l'on va continuer à négocier.

Vous voulez le sauver, le Canada? C'est avec le Québec que vous le sauverez. Je suis convaincu donc, M. le Président, qu'on va continuer de négocier et, grand Dieu! , que l'on inventera un fédéralisme assez souple pour convenir à nos deux communautés culturelles et pour faciliter leur solidarité dans le respect total de l'autodétermination de chacune. Nous ne recherchons la guerre avec personne dans ce pays. Nous voulons mettre fin aux deux solitudes, mais nous voulons le faire sur un pied d'égalité et de fierté pour les deux groupes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, il parait que la nuit porte conseil. C'est probablement pourquoi le premier ministre a fait connaître son communiqué vers deux heures quinze, ce matin, et que les chefs de partis d'Opposition n'ont pas pu en prendre connaissance avant ce matin.

M. BOURASSA: J'ai essayé de vous rejoindre; vous étiez à Montréal.

M. SAMSON: Je n'ai pas l'impression d'avoir fait un reproche au premier ministre. J'ai l'impression que ça lui fait plaisir qu'on reconnaisse que c'est à la faveur de la nuit qu'il a trouvé une solution.

M. LACROIX: Alors, vous seriez mieux de

rester debout la nuit, puis de vous coucher le jour.

M. DUMONT: Le premier ministre reste debout la nuit, lui.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. SAMSON: M. le Président, c'est quand même très intéressant venant d'un député back-bencher qui dort le jour sur son banc au lieu de dormir la nuit, chez lui.

M. LACROIX: On nous reproche de ne jamais dormir!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. SAMSON: M. le Président, après de multiples conférences constitutionnelles qui durent depuis de nombreuses années, je pense que la preuve est maintenant faite qu'il ne sert pas à grand-chose de continuer à patauger dans la vieille constitution communément appelée l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Il y a eu, dans le passé, trop de violations et d'interprétations à l'entour de ce texte de loi qui n'est, en fait, qu'un projet de loi privé émanant du Parlement de Londres.

Nous comprenons, M. le Président, que le gouvernement a dû faire face à l'arrogance du gouvernement fédéral de M. Trudeau. C'est pourquoi je pense qu'il faut prendre le taureau par les cornes — le moment est venu de le faire — et travailler maintenant en collaboration plutôt avec les provinces qu'avec le gouvernement central sur la question constitutionnelle. Nous aurions, évidemment, M. le Président, préféré que la commission siège et que le peuple soit consulté avant de donner une réponse à Ottawa. De nombreux télégrammes que nous avons reçus disent à peu près la même chose: "II est inconcevable que le gouvernement du Québec accepte la charte constitutionnelle dans les délais proposés, sans consultation préalable des citoyens du Québec." C'est une chose qui nous a été dite par plusieurs corps publics.

Or, M. le Président, nous aurions préféré que la population soit consultée parce qu'en donnant une réponse avant la date limite fixée par M. Trudeau le gouvernement du Québec a, en quelque sorte, cédé au chantage quant à l'ultimatum et quant à la date. En effet, si le gouvernement avait dit oui, cela aurait voulu dire céder nos droits. Mais, en disant non, cela confirme pour un bon bout de temps, malheureusement, le statu quo. C'est pourquoi nous croyons qu'il est très urgent que la commission parlementaire de la constitution devienne itinérante et consulte le peuple québécois afin que, suite à ces travaux, les conclusions du rapport de ladite commission fassent l'objet d'un référendum auprès des électeurs du Québec.

En résumé, M. le Président, ce n'est pas tout de dire non. Il faut maintenant savoir ce que l'on veut et ce que l'on peut faire de positif. Le problème est donc maintenant posé dans toute sa dimension. Mais il ne faut pas oublier que ce problème n'est pas le seul. Il en est un parmi tant d'autres dont le problème économique, celui du chômage, celui de la pénurie d'investissements. Cependant, la question constitutionnelle...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les chemises blanches!

M. BOIS: Allez donc à votre siège pour parler!

M. SAMSON: ...constitue un outil très important pouvant servir à résoudre plusieurs autres problèmes. C'est pourquoi le gouvernement se doit maintenant de proposer, après consultation, une solution acceptable par le peuple du Québec. La réponse d'hier soir, M. le Président, est négative. Nous reconnaissons cependant qu'il valait mieux dire non que de dire oui, mais c'est négatif. C'est négatif et le gouvernement du Québec doit prendre ses responsabilités. Il a eu beau dire non, mais le communiqué que nous avons reçu est encore pour encenser M. Trudeau, c'est aussi pur et aussi simple que cela. Nous sommes en droit de nous demander si ce n'est pas de nature à aider grandement M. Trudeau dans ses prochaines élections fédérales. Cela voudrait dire que ce serait purement et simplement, encore une fois, de l'électoralisme.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, la décision du gouvernement a été accueillie avec une immense soulagement dans tous les coins du Québec car, tout le monde en est maintenant convaincu, le pire a été évité. Le premier ministre en est bien conscient, lui qui a vu la montée progressive de la campagne du "non" dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs de l'opinion. Je pense qu'il a eu le bon sens et l'intelligence d'écouter ces voix de plus en plus pressantes, et de cela nous devons, au nom du Québec, le remercier.

Il reste toutefois, M. le Président, que ceci nous semble une victoire à la Pyrrhus, c'est-à-dire que le gouvernement du Québec s'est désengagé d'une lutte, d'un conflit où il savait qu'il lui était désormais impossible d'avoir le dessus. En ce sens, ce geste et cette décision nous apparaissent de cet autre angle comme une défaite de la politique gouvernementale exposée lors de la dernière campagne électorale et de l'année de session qui vient de s'écouler.

Où sont en effet, M. le Président, ces appels pour un fédéralisme rentable dont on a tellement entendu parler depuis un an? Où sont ces moyens ingénieux et inédits qu'on devait utiliser pour faire progresser cette cause du fédéralisme rentable? où sont-ils, ces succès? Il faut

plutôt reconnaître, M. le Président, que le premier ministre actuel s'est lui-même enfermé dans ce dilemne impossible lorsqu'en septembre il a accepté que la question de la formule d'amendement devienne un sujet prioritaire de discussion et lorsqu'en février il a laissé tomber cette phrase fatale que la formule d'amendement suggérée paraissait susceptible d'aboutir à un accord. Il s'est ainsi enfermé dans une impasse qu'il ne pouvait dénouer que par le "non" décisif et retentissant qu'il a prononcé hier, mais qui consacre quand même la défaite de la politique qu'il a préconisée il y a un an.

Québec est désormais seul à pouvoir se prononcer pour ce genre de fédéralisme décentralisé qui ressortait des déclarations du premier ministre et du chef de l'Opposition officielle. Nous sommes désormais le seul Etat à avoir le pas, étant donné que toutes les autres provinces et le pouvoir fédéral ont désormais affirmé d'une façon définitive que leur conception du fédéralisme était une conception centralisatrice.

On peut bien rêver du passé; on peut bien faire des rêves pour l'avenir également. Mais l'attitude des deux grands partis en cette Chambre me fait quand même penser à cette attitude d'un poids plume qui persisterait à monter dans l'arène pour se battre contre un poids lourd et qui s'étonnerait de tous les coups et de toutes les blessures qu'il ne cesse de recevoir. Il est désormais entendu que cette conception du fédéralisme décentralisé, malgré sa logique, malgré sa rationalité, ne sera jamais accepté par le reste du Canada et par le pouvoir central. Au contraire, aujourd'hui, le Québec se retrouve dans une très fâcheuse posture. D'une part, il est complètement isolé, car il y aura un "backlash" émotif de la part des autres provinces du Canada à l'endroit du Québec à qui l'on reprochera d'avoir fait avorter la révision constitutionnelle après avoir été celui qui l'a imposée au reste du Canada.

Par ailleurs, la déclaration du premier ministre Trudeau que nous avons entendue à midi laisse bien voir qu'il faut abandonner tout espoir, du moins pour les prochaines années, d'une révision constitutionnelle, car le premier ministre a déclaré qu'il n'était plus question de convoquer une nouvelle ronde de négociations entre les premiers ministres et que c'était au Québec à s'expliquer, à dire ce qu'il voulait, laissant cependant entendre que la cause était entendue.

Dans ces circonstances, M. le Président, le Québec se trouve dans une posture d'autant plus fâcheuse que nous devons négocier très prochainement aussi bien la répartition nouvelle des pouvoirs fiscaux que l'harmonisation des grandes politiques administratives d'Ottawa et de Québec. Dans quel climat vont maintenant se dérouler ces négociations?

Dans un climat de méfiance, dans un climat d'hostilité entre partenaires dont l'un se retrouvera impuissant devant la majorité des autres et durant tout ce temps-là, le fédéral continue sa politique et en particulier dans le champ de la sécurité sociale.

Déjà, au mois d'avril, il a mis en vigueur sa nouvelle politique de pensions de vieillesse, il se prépare à mettre en vigueur sa nouvelle politique d'assurance-chômage, le 1er juillet, qui constitue un nouvel empiètement sur la juridiction du Québec en matière de services sociaux et bientôt, en septembre, il mettra en vigueur son nouveau projet d'allocations familiales qui sera extrêmement difficile à harmoniser avec celui du Québec.

Où sont alors les propositions du rapport Castonguay-Nepveu qui avaient été approuvées par l'ensemble de la population tellement elles se recommandaient par leur logique et par leur rationalité? Où sont les pouvoirs? Où seront les ressources fiscales pour mettre en vigueur ce plan qui répond aux aspirations des Québécois? Comment serait-il possible d'harmoniser cette politique avec la politique fédérale? Comment serait-il possible d'en arriver à une conception intégrée, logique, globale, cohérente de la sécurité sociale au Québec?

Dans les autres domaines, aussi bien ceux qui touchent le souverainisme culturel, dont le premier ministre nous parle souvent, que dans les politiques économiques, il sera de plus en plus difficile de faire bouger le pouvoir central et de faire droit ainsi aux réclamations du Québec.

Le Québec se trouvant dans cette fâcheuse posture, quelles sont les voies qui s'offrent à son examen et à ses décisions? Je pense qu'il n'y en a plus qu'une seule: le Québec doit maintenant se donner les pouvoirs et les ressources que le Canada anglophone vient de lui refuser soit en se hâtant d'occuper les champs qui sont les siens, soit en mettant le fédéral lui-même devant le fait accompli, mais surtout en se mettant au travail lui-même pour écrire sa nouvelle constitution et se donner cette liberté que maintenant, il est évident, le Canada anglophone ne veut plus lui donner.

M. LACROIX: M. le Président, pourrais-je suggérer au député de Bourget de faire parvenir les pancartes sur les Plaines d'Abraham pour le feu de la Saint-Jean ce soir?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Dépôt de documents. Questions des députés.

Questions et réponses

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur

Comité Détresse 26

M. BOIS: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre des Affaires sociales. Le ministre a-t-il pris connaissance du mémoire préparé par le comité Détresse 26 et si

oui, a-t-il l'intention de mettre en application les demandes des veuves et mères nécessiteuses dont le réquisitoire explique vraiment les carences du projet de loi 26?

M. CASTONGUAY: J'ai pris connaissance, M. le Président, de ce mémoire. D'ailleurs, je dois rencontrer certaines des personnes qui en ont fait la rédaction. Quant aux façons de corriger les problèmes qui y sont soulevés, je crois qu'il ne s'agit pas d'une réponse qui peut être donnée d'une façon très simple, c'est une question qui touche à plusieurs politiques et nous pourrons au besoin y revenir lors de l'étude des crédits de mon ministère qui commencent cet après-midi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

Réparations dans les postes d'essence

M. GUAY: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre du Travail. Le ministre pourrait-il nier, infirmer, ou confirmer une rumeur voulant qu'il serait bientôt défendu de faire de la mécanique dans les postes d'essence de la province de Québec?

M. COURNOYER: Je n'ai pas compris 1a dernière partie, de faire de la mécanique...

M. GUAY: De faire de la mécanique dans les postes d'essence de la province de Québec.

M. COURNOYER: Je ne peux ni nier, ni infirmer, ni confirmer cette rumeur, car j'en suis mis au courant pour la première fois. Cela ne viendrait pas de chez nous.

UNE VOIX: Cela viendrait de chez nous.

UNE VOIX: Non, nous ne sommes pas comme ça.

M. CHARRON: M. le Président, me permettrez-vous d'abord de saluer le retour de celui à qui j'adresse ma question, le ministre de l'Education?

M. LEVESQUE: Jamais une déclaration du député de Saint-Jacques n'aura mérité de tels applaudissements.

M. BOURASSA: II a un habit créditiste aujourd'hui.

M. CHARRON: Ce gouvernement-ci est trop faible pour se passer du moindre guerrier.

Projet Multimedia

M. CHARRON: Ma question s'adresse au ministre de l'Education. Est-ce que le ministre peut communiquer à la Chambre les raisons qu'il a invoquées hier pour retarder l'implantation du projet Multimedia?

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, on avait accusé le gouvernement, à la mi-mars, de vouloir retarder ou mettre un projet sur les tablettes. J'en ai moi-même pris connaissance au mois d'août. Tenant compte que c'est un projet aussi important que le rapport Parent, il me semble qu'il a franchi, dans une période relativement courte, les différentes étapes. Qu'il me suffise de mentionner l'approbation, par le conseil des ministres, d'une nouvelle forme d'éducation des adultes au début de décembre. Qu'il me suffise également de mentionner le fait que, vis-à-vis du ministère des Finances, vis-à-vis des nouvelles formules budgétaires, il me fallait approuver un nouveau programme de $2.6 millions.

Au mois de mars, devant la publication de l'arrêté en conseil, tenant compte de la composition de cette commission administrative, des groupes populaires, en particulier l'ICEA, l'Institut canadien d'éducation des adultes, devant nous donner le nom des personnes représentant le milieu, nous ont demandé des délais additionnels pour compléter la consultation. Ces mêmes délais nous ont été demandés également par le Conseil supérieur de l'éducation qui voulait nous donner un avis. Tout ceci pour dire que le gouvernement a accepté ces délais pour s'assurer que le projet allait démarrer dans de bonnes conditions.

Or, nous avons démarré, hier, avec la formation de la commission administrative. Nous avons reçu, avant-hier, les noms de l'Institut canadien d'éducation des adultes, mais il semble impossible et peu réaliste de vouloir miser sur le début de janvier 1972. Donc, nous voyons septembre 1972 comme étant la date la plus rapprochée pour lancer ce projet d'éducation des adultes.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mégantic.

Rénovation de Thetford Mines

M. DUMONT: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales. Le leader du gouvernement m'avait, d'ailleurs, invité à lui poser la question à son retour de Saskatoon parce qu'il devait passer par Ottawa. Le ministre pourrait-il nous dire si les négociations en cours pour obtenir la subvention nécessaire au plan de rénovation de la ville de Thetford Mines, au coût de $10 millions, ont avancé dans les projets annoncés il y a quelque temps?

M. TESSIER: Les négociations progressent, M. le Président, mais il n'y a encore rien de concluant.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.

Perspectives-Jeunesse

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à poser à l'honorable ministre d'Etat aux Affaires sociales et je remarque qu'il quitte la Chambre.

UNE VOIX: II va revenir.

M. ROY (Beauce): J'avais posé la question au premier ministre hier et il m'a demandé de reposer la question au ministre d'Etat aux Affaires sociales. Le ministre pourrait-il nous informer des représentations qui auraient été faites auprès du gouvernement fédéral pour protester contre les décisions unilatérales de celui-ci en ce qui a trait au programme Perspectives-Jeunesse?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense avoir répondu à cette question.

M. ROY (Beauce): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'étais porté à croire que cette question avait déjà été posée et que le ministre y avait répondu. Maintenant, le ministre confirme à la Chambre qu'il a déjà répondu à cette question.

M. ROY (Beauce): M. le Président, je me permets de vous expliquer. Nous avions demandé, l'autre jour, si le gouvernement du Québec avait eu son mot à dire dans les décisions qui avaient été prises concernant les programmes Perspectives-Jeunesse. Aujourd'hui, ma question est la suivante: Etant donné que le ministre nous a déclaré, la semaine dernière, que le Québec n'avait pas été consulté...

M. LE PRESIDENT: Question.

M. ROY (Beauce): ... pourrait-il nous dire si des protestations ont été faites au gouvernement fédéral à cause, justement, de ces décisions unilatérales?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je crois avoir répondu. Si le député veut se référer au journal des Débats, il n'est pas exact de dire que nous n'avons pas été consultés. J'ai dit que nous avions joué un rôle consultatif; je pense bien que nous avons été consultés.

UNE VOIX: II ne comprend pas.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: Question supplémentaire, étant donné qu'il y a confusion. Le ministre nous dit qu'il a été consulté, qu'il a joué un rôle de consultation. Le premier ministre disait qu'il y avait un droit de veto.

M. LE PRESIDENT: Question, s'il vous plaît.

M. SAMSON: Ecoutez, M. le Président, c'est ce que je fais, je la pose, cela vient.

Je demande au premier ministre si sa déclaration du mois de mars, disant qu'il y avait un droit de veto sur cette question, tient encore.

M. BOURASSA: M. le Président, le ministre a répondu, je pense, à cette question la semaine dernière. Je peux m'informer du dossier et je pourrai répondre la semaine prochaine.

M. SAMSON: Le premier ministre s'aperçoit...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.

M. ROY (Lévis): M. le Président, ma question s'adresse au ministre d'Etat responsable du placement des étudiants, si vous voulez. Vu qu'on est à la veille de la Saint-Jean-Baptiste et que, quand il y a une fête, on doit avoir des cadeaux, est-ce que le ministre pourrait nous informer si, à cette date-ci, tous les étudiants qui ont été recommandés par les députés sont déjà en place?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je peux vous dire qu'au moins 80 p.c. des étudiants recommandés ont déjà été embauchés.

M. ROY (Lévis): Merci.

M. BELAND: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que cela voudrait dire qu'il ne resterait que les recommandations qui viennent des députés de l'Opposition?

UNE VOIX: C'est ça.

M. QUENNEVILLE: J'aurai sûrement l'occasion de fournir la liste des étudiants qui ont été employés. Je peux vous dire que plusieurs députés créditistes retireront leurs avancés à ce moment-là.

M. SAMSON: C'est pour ça que les étudiants retirent leur paie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.

Dépollution

M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre d'Etat responsable de l'environnement. Dernièrement, le ministre donnait aux industries du Québec un an pour voir à présenter ou à trouver des solutions pour la dépollution de leur milieu. Le ministre disait aussi qu'il s'attendait à recevoir beaucoup de plans. Est-ce que le ministre peut me dire si,

premièrement, il a l'intention d'attendre un an avant de présenter un plan global pour ces industries? Deuxièmement, si, après un an, toutes les compagnies n'ont pas présenté de plan, est-ce que le ministre a l'intention d'en présenter un qui ressemblerait à celui de la Union Carbide à Beauharnois et qui prendrait cinq ans à se réaliser?

M. GOLDBLOOM: M. le Président, je n'ai pas dit que j'accordais un an. J'ai dit que l'attitude du gouvernement sera différente en 1972 de ce qu'elle est en 1971, car, à ce moment-là, le gouvernement sera muni de la législation nécessaire." Deuxièmement, si les industries ne soumettent pas leurs projets de dépollution, nous irons les chercher.

M. LEGER: M. le Président, je ferai remarquer au ministre que le titre de la Gazette disait bien "You've got one year..."

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est justement pour ces raisons qu'on ne peut pas se référer aux articles de journaux. L'honorable député de Bourget.

Mines de l'Abitibi

M. LAURIN: Ma question s'adresse au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Un comité interministériel a été formé, selon ce que le ministre nous disait, pour étudier la situation des mines en Abitibi. Est-ce qu'on peut demander au ministre si ce comité interministériel a travaille au point que maintenant le ministre peut nous annoncer des décisions?

M. COURNOYER: Je ne peux pas vous annoncer de décisions, mais le comité a travaillé. J'ai justement ici le rapport de ce comité pour les travaux préliminaires. Il ne me reste qu'à trouver, bien sûr, les sommes d'argent requises pour cela.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances aimerait répondre à une question posée à une séance antérieure.

Obligations d'épargne

M. GARNEAU: M. le Président, on m'avait demandé des renseignements additionnels concernant la vente des obligations d'épargne. Comme un journal, tout au moins, a rapporté un chiffre, je voudrais indiquer à cette Chambre que la vente des obligations, dont les entrées sont terminées ou presque, a atteint le chiffre de $140 millions.

M. BOURASSA: Confiance dans le gouvernement; ça, c'est un signe. La Baie-James.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

Northern Electric

M. LEVESQUE: M. le Président, en réponse à une question du député de Lafontaine et suite à un engagement que j'avais pris, il me fait plaisir de déposer copie d'un document notarié daté du 26 mai 1971, relativement à une déclaration par la compagnie Northern Electric Limitée et qui a trait à une subvention accordée à cette compagnie.

Questions inscrites au feuilleton

M. LEVESQUE: M. le Président, article 1. Question de M. Béland, réponse de M. Bourassa.

M. BOURASSA: Lu et répondu.

M. LEVESQUE: Article 12, question de M. Roy (Beauce). Je fais motion pour que cette question soit transformée en motion pour dépôt de document. Réponse de M. Garneau.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. GARNEAU: Document déposé.

M. LEVESQUE: Article 20, question de M. Drolet, réponse de M. Bourassa.

Article 22, question de M. Lavoie (Wolfe). Je fais motion pour que cette question soit transformée en motion pour dépôt de document. Réponse de M. Bourassa.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LEVESQUE: Revenant à l'article 19, question de M. Lavoie (Wolfe), réponse de M. Goldbloom.

M. GOLDBLOOM: Lu et répondu, M. le Président.

M. LEVESQUE: M. le Président, à une question de M. Lavoie (Wolfe) concernant la ville de Disraëli, le premier ministre déposait une réponse rapportée aux procès-verbaux de l'Assemblée nationale no 33 du 5 mai 1971. Aux fins de compléter la réponse fournie à cette Chambre, il conviendrait d'ajouter celle qui a été reçue du ministère des Affaires municipales. Avec le consentement unanime de cette Chambre, je propose donc que le ministre des Affaires municipales puisse déposer le complément à la question du député de Wolfe.

Troisième lecture de projets de loi privés

M. LEVESQUE: M. le Président, aux articles 75, 76, 77 et 78, je fais motion pour que les

projets de loi nos 130, 147, 184 et 192 franchissent l'étape du comité plénier et de la troisième lecture. J'ajouterais à cette liste l'article apparaissant aux projets de loi privés transmis pour étude à des commissions, le projet de loi 154, Loi modifiant la charte de la ville de Sainte-Foy.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour qu'aux articles 79, 80, 81, 82 et 83, les projets de loi nos 100, 118, 134 et 138 ainsi que 150, respectivement, franchissent l'étape de la deuxième lecture et soient déférés à la commission parlementaire des bills privés et des bills publics pour être étudiés mardi prochain, 29 juin, à dix heures du matin à la salle 81-A.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée. Adopté.

M. LEVESQUE: M. le Président, article 36. C'est afin de pouvoir déférer à la commission parlementaire des Affaires sociales l'étude des crédits de ce ministère. Si on veut faire simplement les entrées... D'accord?

DES VOIX: Oui, oui.

M. LEVESQUE: Nous entreprendrons donc immédiatement à la salle 81-A l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales.

M. le Président, article 40.

Projet de loi no 27 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education propose la deuxième lecture du projet de loi no 27, Loi concernant le regroupement et la gestion des commissions scolaires.

M. Guy Saint-Pierre

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, pendant les quelques minutes mises à ma disposition, je voudrais rappeler les objectifs du projet de loi no 27, faire quelques considérations sur les remarques qu'a suscitées le projet de loi et troisièmement, indiquer les points majeurs à propos desquels des suggestions positives nous ont été faites.

Un rappel des objectifs. J'ai, à plusieurs reprises, exposé les objectifs du projet de loi no 27 touchant le regroupement des commissions scolaires. Vous me permettrez de les rappeler brièvement, pour mieux préciser le cadre général des discussions que nous entreprendrons maintenant sur ce projet de loi tel que déposé ici même le 11 avril dernier. 1) Une péréquation des services éducatifs sur l'ensemble du territoire du Québec, au niveau élémentaire. 2) Une décentralisation et une efficacité administratives accrues pour assurer la péréquation de ces mêmes services. 3) Une participation plus intense du milieu à la vie sociale notamment par l'institutionnalisation de la participation des parents en élargissant le cens de l'éligibilité au poste de commissaire et le droit de vote. 4) Une modernisation de la gestion scolaire à tous les paliers.

Dans la réforme des structures scolaires, le projet de loi no 27 se situe dans la continuité des objectifs poursuivis par les politiques amorcées en 63/64. Il vise, en effet, à mettre en place des structures administratives permettant la péréquation des services éducatifs sur l'ensemble du territoire du Québec au niveau élémentaire.

Ce projet de loi complète ou parfait la régionalisation scolaire accomplie au niveau secondaire en ce sens qu'il propose une réorganisation du niveau élémentaire permettant d'assurer une accessibilité réelle à des services éducatifs comparables dans toutes les régions du Québec.

En 1975, en effet, nous aurons vraisemblablement complété la réorganisation de l'enseignement secondaire et notre échéancier prévoit que toute les polyvalentes du Québec seront alors en opération. Pendant ce temps, les structures administratives et l'organisation des services à ce niveau se complèteront et se consolideront.

Il nous faut, dès maintenant, poser les gestes requis pour la réorganisation administrative du secteur élémentaire, conditions sine qua non de la réorganisation des services éducatifs qui justifient en fin de compte notre démarche.

La nécessité du regroupement des commissions scolaires a été reconnue par de nombreux citoyens et par de nombreux organismes, notamment le Conseil supérieur de l'Education, la Fédération des commissions scolaires, la Corporation des enseignants du Québec, les cadres scolaires, de nombreuses associations impliquées et intéressées par la chose scolaire au Québec et, finalement, de nombreuses associations de parents.

Nous voulons profiter de la circonstance qui nous est offerte pour souligner le travail remarquable qu'a effectué la Fédération des commissions scolaires au moment de l'opération du regroupement volontaire. Le projet de loi no 27, comme je l'expliquerai un peu plus loin, vise à compléter ce regroupement volontaire de façon à garantir à tous les mêmes privilèges, les mêmes droits, les mêmes pouvoirs dont jouissent déjà plus de 500 commissions scolaires qui se sont regroupées. Il appartient à l'Etat, gardien du bien commun, de faire maintenant en sorte qu'aucun secteur de la population ne soit lésé dans le domaine des services éducatifs,

qu'une réorganisation administrative a déjà permis de réaliser dans un nombre important de régions.

Le présent projet de loi fonde la péréquation des services sur la décentralisation et l'efficacité administratives. Il vise à fortifier les instances locales qui oeuvrent dans le secteur de l'enseignement élémentaire tout en permettant une meilleure coordination avec les commissions scolaires régionales de niveau secondaire. La nouvelle entité administrative que crée le projet de loi devient un interlocuteur de plus grande valeur et pour le milieu et pour le ministère de l'Education. Il assure une administration centralisée au niveau d'une collectivité locale et non plus d'une seule paroisse ou d'un seul clocher. Par ailleurs, il permet à un autre point de vue, une décentralisation sur laquelle se fondent nos espoirs d'une plus grande efficacité administrative en matière de gestion scolaire au Québec. La décentralisation possède un effet direct sur l'humanisation du système administratif de l'éducation. Il ne s'agit certes pas dans ce cas de rendre l'école plus humaine, plus ouverte, ce qui repose essentiellement sur des services pédagogiques plus dynamiques, mais de rapprocher l'administration de la population d'une région, de lui permettre des recours réels plus immédiats, de lui offrir des informations traitées et complétées en fonction d'une région et non plus un stéréotype d'informations visant un ensemble national.

Le projet de loi institutionnalise la participation de la population et particulièrement des parents au niveau de l'administration des commissions scolaires. Les principales mesures qui traduisent ces objectifs d'amélioration de la participation de la population à la vie scolaire sont les suivantes :

Premièrement, élections au suffrage universel, cens de l'éligibilité au poste de commissaire plus large, division de la commission scolaire en un certain nombre de quartiers dont la répartition appartient aux milieux concernés, enfin, et surtout, aux niveaux de l'école et de la commission scolaire, nous institutionnalisons la participation réelle des parents par la création du comité d'école et du comité consultatif des parents.

Nous avons veillé, de plus, à ce qu'un lien étroit soit établi entre la commission scolaire locale administrant l'élémentaire et la commission scolaire régionale administrant le secteur secondaire. Les mêmes personnes élues par la population au niveau élémentaire seront également ses représentants directs au niveau de la commission scolaire régionale.

Modernisation de la gestion. Enfin, le projet de loi propose l'instauration de processus plus modernes de gestion.

En effet, nous avons introduit les notions de conseil d'administration et de comité exécutif. Nous désirons que le conseil des commissaires d'écoles élabore des politiques globales pour la commission scolaire, prenne les décisions conformes à ces politiques et organise les mécanis- mes voulus pour assurer une supervision et un contrôle efficaces du travail du comité exécutif. Le comité exécutif voit ses tâches définies par le conseil d'administration et s'occupe, entre autres, de l'administration des affaires courantes. Il est clairement établi que le comité exécutif est soumis à l'autorité entière du conseil d'administration.

Certains nous ont reproché de ne pas préciser, dans le texte de loi, l'autorité exacte du comité exécutif et son mandat précis. Je pense qu'un tel point de vue ne veut pas reconnaître les divergences que nous rencontrons à l'échelle du Québec où, dans certaines régions, on voudrait confier au comité exécutif beaucoup de pouvoirs, alors que, dans d'autres secteurs, on voudra plutôt garder au niveau du conseil d'administration la plupart des prises de décisions nécessaires.

Tels sont les grands objectifs que poursuit le projet de loi no 27.

Quelques considérations maintenant sur les remarques générales concernant le projet de loi.

Depuis le dépôt en Chambre, en avril dernier, du projet de loi sur le regroupement des commissions scolaires, nous avons recueilli suggestions, remarques, critiques, objections, recommandations de toute nature et de toute provenance.

Dans cette deuxième partie de mon allocution, je tenterai de faire le point sur un certain nombre de réactions générales que le projet de loi a déjà provoquées.

On peut distinguer cinq types différents de remarques ou d'observations: 1. Les réactions de ceux qui s'opposent absolument au projet de loi dans sa totalité et au regroupement sous quelque forme que ce soit.

Selon ces critiques, le projet de loi affaiblit ou détruit la confessionnalité actuelle du-nisation de l'école, il favorise une centralisation excessive, il reproduit des erreurs commises au moment de la régionalisation des commissions scolaires ou de la création de nos CEGEP. 2. Des réactions provenant de ceux qui ne s'opposent pas au regroupement, mais auraient souhaité qu'il se poursuive sur une base de volontariat et non sur une base législative.

Selon ces critiques, l'expérience du volontariat ou du regroupement volontaire a donné de bons résultats et il eût été souhaitable qu'on la continuât.

Le projet de loi serait fondé sur une approche technocratique du problème à résoudre et ne tiendrait pas assez compte de la réalité complexe au niveau local ou même régional. 3. Des réactions provenant de ceux qui ne s'opposent pas au regroupement ni à la loi en tant que telle, mais qui, par ailleurs, auraient souhaité une plus large participation et une plus longue consultation des intéressés et, en

conséquence, trouvent le projet de loi relativement prématuré.

Selon ces critiques, la participation des intéressés a fait défaut et les premiers concernés n'ont pas été suffisamment consultés. Implicitement, ces critiques suggèrent une reprise des consultations, une plus grande participation et, à toutes fins utiles, une remise à plus tard de l'étude et de l'adoption du projet de loi regroupant nos commissions scolaires. 4. Des réactions provenant de ceux qui trouvent que la loi, dans son ensemble, est satisfaisante et qu'on devrait hâter son adoption plutôt que de perdre ses énergies à discuter des modalités de son application. Selon ces observations, le projet de loi présenterait suffisamment d'éléments positifs pour permettre de passer à l'action immédiatement.

Les solutions aux problèmes concrets d'organisation ou de réorganisation pourraient être trouvées en cours de route et les amendements à la loi formulés au moment jugé opportun. 5. Des réactions provenant de ceux qui soutiennent que le projet de loi ne va pas assez loin et que, malgré les lacunes à ce point de vue, tout retard apporté à son adoption constitue une situation déplorable.

Ces remarques portent, en particulier, sur le regroupement des locales et des régionales, des commissions scolaires francophones et anglophones, ou catholiques et protestantes.

Face à un aussi large éventail d'opinions, le ministre de l'Education ne peut avoir la prétention de satisfaire tout le monde.

Un certain nombre de réactions s'enracinent dans des mésinterprétations, des malentendus, des appréhensions et, parfois même, des préjugés. D'autres s'enracinent dans des faits observables, des données factuelles, des considérations objectives.

A l'égard de la première catégorie de réactions, le ministre peut encore une fois tenter d'éclaircir certains malentendus, rectifier certaines mésinterprétations, calmer des appréhensions mais il ne peut faire mourir tous les préjugés.

A l'égard de la seconde catégorie de réactions, le ministre doit, dans toute la mesure du possible, tenter de tenir compte des critiques pour autant qu'elles ne sabotent pas le projet de loi dans sa totalité. J'en ferai l'objet de la troisième partie de mon allocution.

Certains des points qu'on a soulevés touchent aux suivants:

Premièrement, la confessionnalité. Le projet de loi respecte absolument le caractère confessionnel des structures, des écoles, de l'enseignement et des services éducatifs en général. Il confirme qu'à l'échelle du Québec nous aurons, à l'extérieur de la région de Montréal, des commissions scolaires dites catholiques ou protestantes.

Il contient même des dispositions qui permettront aux parents d'exercer une action véritable à l'endroit même où le processus éducatif prend place, c'est-à-dire au niveau de l'école.

Deuxièmement, les droits des parents. On fait état que les droits des parents sur l'éducation de leurs enfants seront brimés par le présent projet de loi.

Nous avons, au contraire, cherché à introduire dans la loi des méthodes de représentation équitables au niveau des structures administratives et nous avons innové en institutionnalisant la participation des parents au niveau des activités de l'école et en assurant dans le texte même du projet de loi à la fois le fonctionnement et le financement des comités de parents au niveau de l'école.

Troisième aspect, centralisation excessive. Au sujet de la centralisation excessive, il faut affirmer qu'il y a un malentendu.

D'un point de vue local, il est bien certain que le regroupement des commissions scolaires constitue une forme de centralisation administrative encore que celle-ci soit assaisonnée de correctifs nettement identifiés dans la loi: modes de représentation, comités d'écoles, etc.

D'un point de vue provincial, le regroupement des commissions scolaires vise la décentralisation administrative, en ce sens que la réduction du nombre d'organismes administratifs et leur renforcement structurel permettront au ministère de l'Education de se départir de certains contrôles administratifs que lui impose — contre son gré — la situation qui prévaut à l'heure présente où nous avons plus de 1,000 commissions scolaires à l'échelle du Québec.

Quatrième point, déshumanisation et gigantisme du système. Voici une appréhension qui me semble fausse car le projet de loi vise le regroupement des organismes administratifs pour diverses raisons, notamment pour des raisons d'efficacité organisationnelle.

Rien dans la loi n'impose le gigantisme, qui, nous le reconnaissons, pose des problèmes de relations humaines personnalisées.

Il appartiendra à telle ou telle commission scolaire de décider des mesures à prendre pour favoriser la poursuite des objectifs d'individualisation et d'humanisation qui correspondent à sa philosophie de l'éducation.

Le regroupement des commissions scolaires n'implique pas nécessairement ni le regroupement ni le transport des élèves puisque, différant du niveau secondaire, nous avons au niveau élémentaire un cours qui est essentiellement le même au Québec et où le niveau des options n'implique pas le regroupement de grands ensembles.

Le ministère croit que les modalités d'organisation des services d'enseignement doivent être la responsabilité de la commission scolaire. Celle-ci les détermine à la lumière des impératifs pédagogiques et éducatifs et des exigences organisationnelles, sous les aspects de l'efficacité et de la rentabilité.

Cinquièmement, le caractère antidémocratique et technocratique de notre loi. Je suis bien à l'aise pour parler de cette réaction qu'a provoquée le projet de loi car, sur le sujet du caractère antidémocratique du projet de loi no 27, on peut rappeler que tous mes prédécesseurs ministres, comme moi, ont considéré comme nécessaire, au moment où ils occupaient le poste de ministre de l'Education, de procéder au regroupement des commissions scolaires locales.

Il est facile de voir dans ce fait que l'opération ne se justifie pas par des visées politiques partisanes ni par des idéologies non avouées.

Quant au caractère technocratique, il faut s'entendre. Si l'on veut dire par là qu'il répond à des critères raisonnables, le regroupement se fait, s'est fait ou se fera d'une façon technocratique. Si, au contraire, on veut dire qu'il a été élaboré en circuit fermé par des technocrates en chambre, sans relation aucune avec le milieu, rien n'est plus faux.

A ma connaissance, des miliers de personnes et des milliers d'organismes ont participé, à un moment ou à un autre, à l'élaboration des plans de regroupement des commissions scolaires locales. D'ailleurs, le projet de loi présenté par le présent gouvernement sur le regroupement des commissions scolaires a tenu compte et a analysé les multiples mémoires que nous avons reçus des différents organismes intéressés par l'éducation au Québec.

Sixièmement, le régime du volontariat ou la poursuite de l'opération Regroupement volontaire. Certaines critiques portent sur le fait que le projet de loi se substitue au régime du volontariat. Ce qu'il faut dire, c'est qu'il complète et parfait une opération bien amorcée. Je me suis déjà expliqué sur cette question.

Je crois sincèrement que l'opération Regroupement volontaire a donné tous les fruits qu'il était possible d'espérer et qu'elle ne pouvait plus progresser sans un certain nombre d'amendements à la Loi de l'instruction publique.

Il était devenu absolument nécessaire de compléter ce qui avait été entrepris de concert avec la Fédération des commissions scolaires. La justice nous obligeait à prendre les mesures que nous avons prises. Les retards inévitables qu'aurait entraînés le régime du "volontariat" auraient eu des effets néfastes sur la réussite de l'opération et des conséquences préjudiciables sur les commissions scolaires regroupées et sur la population en général.

Septièmement. Participation ou consultation inadéquate.

La consultation a été une règle constante dans l'élaboration du projet de loi no 27. Les grands organismes directement en cause, du point de vue administratif, ont participé activement à la préparation du projet qui vous est soumis.

Des consultations multiples ont eu lieu à la fois avec le Conseil supérieur de l'éducation, la Fédération des commissions scolaires et son homologue anglophone.

Huitièmement. Le caratère tardif ou pas assez radical du projet de loi.

Le projet de loi sur le regroupement des commissions scolaires locales n'a pas tardé pour autant que je suis en cause.

Dès mon arrivée au ministère, j'ai annoncé que je m'occupais de ce problème. Depuis cette déclaration, j'ai mis en marche les mécanismes nécessaires à l'examen de cette question. La consultation terminée, nous nous sommes assurés de la participation effective des organismes directement en cause et nous avons élaboré le projet de loi 27. Je souhaite seulement maintenant que ceux qui trouvent que nous avons trop tardé nous aident à améliorer rapidement le projet pour que l'on puisse l'adopter et le mettre en vigueur dans les délais prévus.

Quant aux critiques de ceux qui ne trouvent pas le projet assez radical quant au regroupement de l'élémentaire et du secondaire, des anglophones et des francophones, des catholiques et des protestants, je pense qu'ils n'ont pas bien lu lu projet de loi qui laisse ouvertes toutes sortes d'alternatives aux diverses collectivités.

De la même façon que le projet de loi doit avoir suffisamment de flexibilité pour permettre à certains milieux — et j'emploie l'expression — de courir, de procéder à des regroupements de l'élémentaire et du secondaire, je pense, pour avoir parcouru la province de Québec, qu'il nous faut aussi reconnaître que dans d'autres milieux c'est une étape qui ne saurait être acceptée par la population et qui risquerait de saborder les objectifs mêmes que nous nous sommes fixés. C'est donc dire que dans un premier temps, le législateur demande à toutes les régions du Québec de faire l'effort d'au moins marcher, de procéder à ce regroupement des commissions scolaires et que dans un deuxième temps nous laissons à différents milieux qui voudraient courir, qui voudraient aller plus vite, le soin de procéder au regroupement des secteurs élémentaire et secondaire.

Plusieurs suggestions très positives nous ont déjà été faites pour améliorer le projet de loi no 27. Nous les avons examinées attentivement et il me paraît opportun, même au stade d'un discours de deuxième lecture, d'en mentionner quelques-unes, non pas pour indiquer notre intention de les retenir sans que cette assemblée n'ait eu le loisir d'en discuter, voire même de suggérer elle-même certains amendements, mais simplement pour indiquer notre volonté d'être à l'écoute de remarques et de critiques qui nous aideront à préciser les moyens qui nous permettront d'atteindre les objectifs que personne ne semble sérieusement contester, particulièrement lorsque ces remarques et ces critiques ne sont point fondées sur des préjugés mais sur une observation objective des faits et des causes en éducation.

On a touché au territoire des nouvelles municipalités scolaires. Le projet de loi no 27, à l'article 1, prévoit l'établissement, à compter du 1er juillet 1972, de 168 nouvelles municipalités scolaires.

Les municipalités scolaires qui étaient établies exclusivement pour catholiques, soit 71 sur 902, ainsi que celles qui étaient catholiques de fait, soit 831, sont regroupées en de nouvelles municipalités scolaires qui sont établies pour catholiques au sens de l'article 49 de la Loi de l'instruction publique. Certains territoires non organisés sont ajoutés à ces nouvelles municipalités scolaires. Il en est de même pour les municipalités scolaires établies exclusivement pour protestants et les municipalités scolaires qui sont protestantes de fait.

Ces municipalités sont décrites aux annexes a) et b) du projet de loi. Certaines corrections d'ordre technique dont la nécessité apparaît d'ores et déjà évidentes seront apportées à ces annexes en troisième lecture.

Deuxièmement. Le regroupement de l'élémentaire et du secondaire.

Des interprétations du projet de loi no 27 laissaient entendre qu'il n'était pas possible de procéder au regroupement de l'élémentaire et du secondaire avant le 1er juillet 1973.

Il faut noter que le projet de loi no 27 n'abroge pas les articles 495 a) et b) de la Loi de l'instruction publique. En conséquence, il demeure donc possible, avant le 1er juillet 1972, pour les commissions scolaires qui le désireraient d'opérer le regroupement des niveaux d'enseignement élémentaire et secondaire en se prévalant de ces deux articles.

En vertu de l'article 77, le gouvernement peut, en effet, décréter qu'une commission scolaire régionale cesse d'exister si une commission scolaire qui en est l'unique membre lui en fait la demande. La même demande peut être également faite au gouvernement par toutes les commissions scolaires membres d'une même régionale, au moment où elles demandent d'être fusionnées en une seule municipalité scolaire. En un tel cas, la nouvelle commission scolaire ou celle qui subsiste, selon le cas, succède aux droits et obligations de la commission scolaire qui cesse d'exister.

Liquidation des dettes. Concernant les dettes des commissions scolaires, les dispositions de l'article 16 permettent à une commission scolaire, annexante ou fusionnante, d'identifier la part du passif d'une commission scolaire, partie à une fusion ou annexion, qui demeure à la charge exclusive de son territoire. La même disposition s'applique pour le coût des engagements contractuels pour lesquels la commission n'a pas, avant sa fusion ou son annexion, pourvu à l'appropriation des deniers nécessaires. Dans de tels cas, une taxe spéciale, avec l'approbation du ministre, peut être imposée sur le territoire dont il s'agit.

Il nous a été suggéré de modifier cet article en imposant aux commissions scolaires existantes l'obligation de pourvoir à l'appropriation des deniers pour l'acquittement des dépenses inadmissible encourues par ces commissions et de leur laisser la possibilité de répartir cette appropriation sur un certain nombre d'années. 4) Elections et nombre de quartiers, soit l'article 18. Le bill 27 apporte des modifications importantes au chapitre des élections des commissaires. Les commissaires auront l'obligation de diviser, tous les trois ans, pour fins d'élection, leur municipalité scolaire en quartiers dont le nombre varie de neuf à quinze, suivant le nombre d'enfants inscrits dans leurs écoles le 30 septembre précédent. Quant aux syndics d'écoles, ils devront pourvoir à une division de quartiers dont le nombre est fixé à trois.

L'article 19 établit que le nombre des commissaires et de syndics d'une corporation scolaire est égal à celui des quartiers et un candidat ne peut être mis en candidature à la charge de commissaire ou syndic que pour un seul quartier. Selon l'article 25, désormais, tout citoyen canadien majeur, domicilié dans la municipalité scolaire depuis six mois et qui n'est frappé d'aucune incapacité légale, est éligible à la charge de commissaire ou de syndic d'écoles dans n'importe quel quartier de la municipalité scolaire, mais il ne peut être mis en candidature que pour un seul quartier. Cette mesure, on le constatera, représente une fonction nouvelle de démocratisation de nos structures scolaires puisqu'elle permet à un très grand nombre de gens qui, autrefois, ne pouvaient assumer des responsabilités au niveau de la commission scolaire de se porter au service de leur collectivité.

Enfin, par l'article 27, tout citoyen canadien, âgé d'au moins 18 ans, domicilié ou propriétaire dans la municipalité scolaire et qui n'est frappé d'aucune incapacité légale autre que la minorité a le droit d'être inscrit sur la liste électorale et de voter dans chaque quartier où il a qualité l'électeur. A l'article 37, on prévoit que le remplacement des commissaires ou syndics de la corporation scolaire après une nouvelle érection de municipalité scolaire se fera par tirage au sort.

Alors que le projet de loi prévoit la diminution aussi bien que l'augmentation du nombre des quartiers, compte tenu des mouvements de clientèle, nous sommes disposés à retenir une proposition visant à maintenir le nombre de quartiers sur le territoire d'une commission scolaire, nonobstant la diminution du nombre d'enfants. Nous voulons ainsi souligner que le milieu ne voudra probablement pas diviser ses quartiers par l'unique critère du nombre d'enfants d'un endroit à l'autre. 5) Le conseil provisoire qui touche les articles 87 et subséquents. Le projet de loi 27 prévoit, aux articles 87 et suivants, de confier à un conseil provisoire, composé de quinze représentants des commissions actuellement existantes, l'organisation et la mise en place des nouvelles commissions scolaires. Chacun de ces conseils est une corporation qui doit prendre les mesures préparatoires nécessaires à l'établissement et au fonctionnement de la commission nouvelle. Il doit inventorier l'actif et le passif

des commissions scolaires existantes, préparer un plan d'intégration de leur personnel au sein de la commission nouvelle pour l'année scolaire 72/73 et fixer le taux de cotisation applicable pour cette année. Il doit aussi préparer les élections scolaires de juin 1972 pour l'élection de tous les commissaires de la nouvelle commission scolaire.

Les dépenses du conseil provisoire sont assumées par les commissions scolaires existantes, à même leur budget; les personnes à l'emploi des commissions scolaires existantes passeront au service de la corporation nouvelle, conformément au plan d'intégration établi. Aucune commission scolaire existante ne peut valablement contracter une obligation dont l'effet se prolonge après le 1er juillet 1972 sans l'assentiment du conseil provisoire.

Les actes posés par le conseil provisoires lieront chaque commission scolaire nouvelle. Certaines propositions intéressantes nous ont été faites qui pourraient donner lieu à des modifications pour les articles visés. Par exemple, il est suggéré, pour des raisons pratiques, de reporter du 1er août au 15 septembre la date de la formation du conseil provisoire. On nous soumet également que le conseil provisoire devrait avoir, comme une de ses fonctions, de changer, s'il y a lieu, le nom de la nouvelle commission scolaire proposé dans l'annexe.

Enfin, il nous est apparu que la formule établie pour déterminer la composition du conseil provisoire ne répond pas suffisamment aux aspirations des commissions scolaires existantes. Nous sommes disposés à retenir toute proposition qui pourrait rendre mieux justice à la population concernée. 6) Le conseil des commissaires et le comité exécutif.

Pour ce qui est du fonctionnement des nouvelles commissions scolaires, le projet de loi 27 contient des dispositions concernant le conseil des commissaires. Le comité exécutif comprend cinq commissaires nommés par le conseil des commissaires, le directeur général et le directeur général adjoint sont d'office membres de ce comité exécutif mais sans droit de vote.

Le conseil des commissaires a les droits et pouvoirs que la Loi de l'instruction publique confère aux commissaires d'écoles.

A l'article 40, on prévoit que le conseil des commissaires peut déléguer, par règlement soumis à l'approbation du ministre, et conformément aux dispositions et aux voeux du milieu, certains de ses droits, pouvoirs et obligations au comité exécutif et également à certains employés du conseil.

Le conseil des commissaires doit tenir au moins quatre sessions par année, mais il serait faux de considérer que la loi stipule quatre sessions par année. C'est bien évident que quatre sessions, c'est un minimum requis. Rien n'empêche les commissaires de se réunir beaucoup plus fréquemment si la chose est nécessaire.

L'administration courante relève du comité exécutif, qui exerce en outre les droits, pouvoirs et obligations qui lui sont délégués par le conseil des commissaires.

Le comité exécutif a, par la loi, l'obligation de tenir au moins deux réunions par mois.

Au sujet du nombre de commissaires qui constituent le comité exécutif, on nous a fait valoir le besoin d'une disposition particulière pour le cas où un conseil de commissaires ne compterait que neuf membres afin d'équilibrer le rapport entre le conseil et le comité exécutif.

Personnel administratif.

L'article 41 amende l'article 204 de la Loi de l'instruction publique dans le sens suivant :

A savoir que le conseil des commissaires a l'obligation de nommer un directeur général, un directeur général adjoint et un secrétaire général. Il lui est permis de nommer, selon les besoins, un directeur des services de l'enseignement, des services aux étudiants, des services du personnel, des services de l'équipement et des services financiers et de réunir certains de ces services sous l'autorité d'un même directeur. Le conseil des commissaires devra, par règlement soumis à l'approbation du ministre, déterminer les fonctions du personnel de direction, répartir les responsabilités du secrétaire trésorier entre le directeur général, le secrétaire général et le directeur des services financiers, s'il y en a un, et nommer le personnel requis pour l'administration.

L'on notera que nous avons retenu pour la commission scolaire et l'élémentaire le principe de l'unicéphalie, c'est-à-dire le principe du directeur général directement responsable au conseil des commissaires et de qui relève tous les employés de la commission scolaire.

Des représentations nous ont également été faites de diverses sources concernant certaines implications des dispositions de cet article et des propositions intéressantes nous ont été soumises pour des modifications qui tiendraient davantage compte de situations existantes et des perspectives de développement de la politique administrative dans les services publics et parapublics. Il faut retenir cependant que nous ne mettons nullement en doute la validité du principe de l'unicéphalie dans la direction administrative des commissions scolaires.

Les comités d'école.

Parallèlement à la mise en place de nouvelles structures administratives au niveau de la commission scolaire, le projet de loi no 27 prévoit une participation officielle des parents au niveau de l'école et au niveau de la commission scolaire.

A cet effet, il est prévu à l'article 18, qu'avant le 15 octobre de chaque année, les parents établissent un comité consultatif pour chaque école.

Ce comité consultatif d'école a pour fonction d'encourager les parents à collaborer à l'amélioration des services scolaires et de faire à la direction de l'école des recommandations pertinentes.

Le directeur de l'école et un représentant désigné par les instituteurs sont d'office membres de ce comité mais sans droit de vote.

La composition des comités consultatifs d'école, les modalités de mise en place, de fonctionnement et de financement seront déterminés par règlement du lieutenant-gouverneur en conseil après consultation avec les différentes associations intéressées dans ce secteur d'activité.

Les présidents des comités consultatifs d'école constituent le comité consultatif de la municipalité scolaire, dont le lieutenant-gouverneur en conseil détermine les modalités de mise en place, de fonctionnement et de financement.

Des suggestions ont été faites sur la réglementation du lieutenant-gouverneur en conseil concernant les comités consultatifs d'école. Nous en avons pris note et nous sommes disposés à retenir toutes suggestions utiles à cet égard.

En conclusion, je crois justifié d'affirmer que le projet de loi no 27 est à la fois opportun et démocratique. Dans l'ensemble de sa facture actuelle et avec les propositions d'amendements dont j'ai parlé plus haut, il répond adéquatement aux objectifs que nous poursuivons tous.

C'est un projet de loi longuement mûri qui avait même été annoncé par mon prédécesseur. Il est le fruit d'une large participation et d'une collaboration des fédérations de commissions scolaires. Il ne s'agit surtout pas d'un projet de loi improvisé et antidémocratique. Nous avons la ferme intention de poursuivre nos efforts dans la direction adoptée.

Evidemment, nous sommes conscients qu'un projet de loi ne peut fixer toutes les modalités que tous et chacun pourraient souhaiter. Il contient toutefois des dispositions qui permettront de se réajuster constamment aux nouveaux besoins.

Nous sommes toujours ouverts à l'examen de toute suggestion positive visant à parfaire ce projet. Cependant, nous n'accepterons pas de le retarder indûment ou de le reporter aux calendes grecques. C'est dans cette perspective que je compte sur la meilleure collaboration de tous les membres de l'Assemblée nationale et des participants aux travaux de la commission parlementaire de l'Education.

Nous croyons sincèrement que les modalités, que les grands principes qui ont animé le projet de loi no 27 nous permettront d'atteindre deux objectifs que nous nous étions fixés: d'une part accroître la participation des parents au niveau de la vie scolaire de chaque milieu et, deuxièmement, accroître la qualité de la gestion scolaire dans notre système tant au niveau de la direction administrative que de la direction pédagogique.

Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT (Veilleux): L'honorable député de Bagot.

M. Jean-Guy Cardinal

M. CARDINAL: M. le Président, si le député de Saint-Jacques ne l'avait pas fait au préalable, cela aurait été mon grand plaisir de saluer le retour du ministre de l'Education. De toute façon, j'ajoute à ce que le député de Saint-Jacques a déjà dit des voeux de prompt rétablissement, si déjà ce n'est pas fait, et des voeux que le ministre demeure avec nous jusqu'à la fin de cette session, qui — je l'espère pour sa santé et la nôtre — ne sera pas trop éloignée de cette date.

Je voudrais aussi remercier le ministre de sa délicatesse à mon égard puisqu'il m'a fait parvenir, hier en fin de journée, le texte de son discours de deuxième lecture. D remarquera que j'ai respecté l'embargo et que ni les journalistes ni quelque autre personne n'ont pu se servir de l'essentiel de ce texte.

Comme le ministre l'a fait, c'est sur une base non partisane que je voudrais voir les principes de ce projet de loi comme il se doit à l'occasion d'une deuxième lecture. Le ministre de l'Education l'a souligné, il n'innove pas entièrement en proposant le projet de loi no 27 puisque déjà son prédécesseur — c'est ce qu'il a dit — et j'ajouterai ses prédécesseurs l'avaient ou prévu ou déjà entamé.

En effet, dès le mois d'octobre 1967, l'honorable député de Missisquoi, alors ministre de l'Education, à une réunion générale du Conseil supérieur de l'éducation qui se tenait au Mont-Gabriel, faisait un très large tour d'horizon des réalisations du ministère de l'Education depuis sa fondation en 1964 et indiquait l'avenir de ce ministère un peu sur la base d'un plan quinquennal. Et déjà en octobre 1967, le député de Missisquoi, devant les membres du Conseil supérieur de l'éducation, invitait les commissions scolaires sur une base volontaire, à diminuer leur nombre, à se regrouper de façon humaine en tenant compte des réalités régionales. A ce moment, il y avait presque 1,800 commissions scolaires au Québec.

Par la suite, j'ai rencontré, dès le mois de novembre 1967, exactement le 23 novembre, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec.

Dans un texte assez long — je ne retiens qu'une phrase précise que j'avais indiquée — j'avais invité fortement la Fédération des commissions scolaires à commencer un travail d'animation, un travail d'approche, un travail de conviction pour que l'on puisse justement diminuer ce nombre énorme de commissions scolaires dont certaines étaient des unités très réduites, très petites qui ne pouvaient pas suffire à donner tous les services requis et surtout n'étaient pas rentables au sens où les contribuables ont à payer pour ces services qui peuvent être donnés à tous les élèves du Québec et qui doivent être de même qualité.

J'avais demandé aux commissions scolaires

de le faire sur une base volontaire, à ce moment-là, mais en spécifiant et en soulignant dans mon discours que ça devait se faire dans un délai court. C'était le 23 novembre 1967. Je dois féliciter, comme le ministre l'a fait, la Fédération des commissions scolaires du Québec d'avoir accepté mon invitation et d'avoir, presque tout de suite après, créé des équipes qui ont parcouru la province, qui ont rencontré des gens, des commissions scolaires locales et régionales, qui ont vu les territoires et qui ont lancé l'opération Regroupement.

Le ministre pourra me corriger, parce que je n'ai plus les derniers chiffres du ministère. Quand je l'ai quitté, il y avait peut-être environ 1,200 commissions scolaires. Il y en a plus de 500 ou environ qui se sont regroupées durant cette période. C'est la différence entre le chiffre que j'ai indiqué tantôt et celui-ci. Cela s'est peut-être poursuivi, mais les commissions scolaires, dans une forte proportion, ont donc accepté l'invitation de la fédération et elles ont accepté aussi les critères et les considérations que la fédération leur proposait.

Le ministre dans son discours, d'avance, répond à de nombreuses objections. Parfois même, M. le Président, sur le plan d'articles précis. Ici, je ne voudrais absolument pas être méchant envers le ministre. J'aurais pu, à ce moment-là, me lever et demander au président d'interrompre le ministre qui, en deuxième lecture, se référait à des articles précis...

M. PAUL: On a donné un accord.

M. CARDINAL: ... à tel et tel article. Cependant, je me rappelle bien que, s'il m'arrivait de commettre des choses semblables, les gens qui occupaient la place que j'occupe aujourd'hui se dépêchaient de se lever rapidement. C'est, cependant, avec patience, intérêt et attention que j'ai suivi le ministre dans son parcours, même lorsqu'il y avait quelques errements dans le domaine du règlement de cette Chambre, M. le leader de l'Opposition.

Donc, le ministre est allé au devant des coups en voulant répondre aux diverses objections, objections, d'ailleurs, qu'il n'est pas le seul à connaître. J'ai ici toute une série d'objections qui sont parvenues aux critiques de l'éducation de l'Opposition officielle. J'ai répondu à chacune de ces personnes, comme le ministre probablement a dû le faire à chacun de ces groupes qui déjà a présenté des objections ou, heureusement parfois, des suggestions au ministre de l'Education.

Je prendrai le sujet d'un haut niveau, dans son ensemble, c'est-à-dire au niveau des principes. Comme ce n'est pas le temps, au moment de la deuxième lecture, de formuler des amendements précis, je voudrais réfléchir devant vous et inviter également le gouvernement à réfléchir avec l'Opposition ou les oppositions et les intéressés qui sont en dehors de cette Chambre. Ce sont les parents, les enseignants, les administrateurs des commissions scolaires, les citoyens qui, présentement, élisent les commissaires. Ce sont les commissaires et les employés de ces commissions scolaires. Je voudrais inviter tous ces gens à réfléchir sur les principes généraux qui doivent guider l'évolution de cette institution qu'est la commission scolaire et qui remonte à déjà très longtemps chez nous.

C'est pourquoi je tenterai en cette Chambre de m'interroger sur la nature et sur le rôle de la commission scolaire. La commission scolaire, telle que constituée par la Loi de l'Instruction publique et par d'autres lois spéciales adoptées depuis ou par des amendements à cette loi de l'Instruction publique, est un corps administratif directement et immédiatement responsable des écoles et de l'enseignement dans un territoire donné.

Elle est donc un instrument créé par le gouvernement et mis au service de la société québécoise en vue d'atteindre certaines fins particulières. Personne n'oserait prétendre que la commission scolaire est une fin en soi, que la commission scolaire soit propriétaire, même, je dirais, des édifices payés par les contribuables, soit propriétaire des enseignants, des employés et des étudiants. Et que les écoles, l'enseignement, le personnel enseignant et les enfants existent en vue de cette fin que constituerait la commission scolaire. Au contraire!

Il va de soi, en saine philosophie, comme on nous l'a appris au collège, que tout moyen, tout instrument doit être nécessairement ordonné à une fin et constamment — aujourd'hui surtout alors que tout évolue — ajusté et réadapté aux fins auxquelles ils est ordonné. Ce n'est pas à nous, qui avons vécu depuis plusieurs années et d'une façon intense des transformations rapides, nombreuses et profondes et parfois sous forme de soubresauts — l'ancien ministre de l'Education qui m'a précédé s'en rappelle, surtout à l'occasion d'un célèbre projet de loi — ce n'est pas à nous qui avons vécu, dis-je, cette période assez longue de 1966 à 1971, où tout évoluait rapidement dans l'éducation, qu'il faut rappeler la nécessité d'adopter l'instrument ou le moyen dont nous disposons. Les commissions scolaires doivent elles-mêmes comprendre, aujourd'hui comme hier, qu'elles doivent s'adapter à ces mêmes changements.

Les travaux des derniers congrès, d'ailleurs, de la Fédération des commissions scolaires, les articles de leur organe officiel, la Revue scolaire, et tout particulièrement ceux des dernières années, de même que leurs récents mémoires, de même que l'action dont j'ai parlé tantôt et qu'ils ont effectuée au cours, tout particulièrement, des deux dernières années, sont la preuve évidente que la grande majorité, je pense, des commissions scolaires est parfaitement consciente de l'évolution profonde de notre milieu et du monde de l'éducation en particulier, de même que de la nécessité d'une évolution aussi profonde des commissions scolaires, mais adaptée aux exigences du temps présent.

D'ailleurs, il suffit de visiter des maisons d'enseignement pour se rendre compte qu'en certains milieux les commissaires eux-mêmes, indépendamment des questions de regroupement, font des efforts remarquables pour parfaire ce qu'on a appelé autrefois la réforme de l'éducation mais qui aujourd'hui, est une consolidation de tout ce qui s'est fait, est un rajustement. Puisque c'est l'évolution de l'enseignement, et non pas des édifices ou des hommes, qui commande l'évolution des commissions scolaires, il n'est peut-être pas superflu de se rappeler rapidement les transformations les plus importantes et les plus récentes afin d'en dégager l'orientation que pourrait prendre l'évolution des commissions scolaires elles-mêmes.

Pour ce qui est des changements, M. le Président, je ne m'arrêterai pas à vous citer des chiffres qui illustrent ce qu'il est convenu d'appeler l'explosion démographique scolaire. Les journaux et les revues en ont publié au cours des années dernières à satiété, et j'en ai déjà eu sur mon bureau plus que je ne pouvais en étudier. Si l'augmentation du nombre des écoliers et des édutiants n'était que le résultat d'une natalité plus élevée, il n'y aurait vraiment pas le problème que nous connaissons actuellement.

D'ailleurs au contraire, tout le monde le sait, la natalité, au Québec, va diminuant.

Il y a eu ce qu'on peut appeler l'évolution de la population scolaire, c'est-à-dire une augmentation quantitative seulement du fait que les étudiants, contrairement à ce qui se produisait autrefois, au lieu de quitter après l'élémentaire, au lieu de quitter au cours du secondaire, au lieu de se mettre sur le marché du travail à la fin du secondaire, commencent au niveau préscolaire et vont presque tous au moins jusqu'à la fin du secondaire. Qu'on se rappelle simplement qu'il y a plus de 50,000 étudiants, déjà, dans les collèges d'enseignement général et professionnel. Ils ne peuvent pas venir d'ailleurs que des écoles secondaires et primaires, les écoles privées, dans ce domaine, étant peu nombreuses.

Cette augmentation, chacun le sait, est aussi le résultat d'une diversification de la population scolaire, qui, dans nos écoles, n'avait autrefois qu'une seule catégorie d'élèves: ceux qui entraient à la petite école pour obtenir un diplôme, à ce titre seulement. Mais on pourrait mentionner, M. le Président, les enfants d'âge préscolaire, les handicapés physiques et psychiques, les adolescents touchés par la prolongation obligatoire de la scolarité, loi qui a déjà été adoptée, ou tout simplement par les exigences d'une scolarité prolongée pour atteindre à une meilleure préparation. Les adultes reviennent dans ces mêmes écoles, soit pour y compléter leur formation de base ou acquérir un complément de formation générale et professionnelle ou s'y recycler. Il y a les immigrants et les enfants d'immigrants qu'il faut intégrer à la société québécoise. Je pourrais poursuivre cette énumération pour montrer cette prolifération de ce que j'appellerai des élèves dans des écoles qui servent aujourd'hui non seulement de telle heure à telle heure pour des enfants mais de plus en plus à toute la communauté québécoise.

A cet élargissement des clientèles que les commissions scolaires doivent recevoir et auxquelles elles doivent assurer un enseignement approprié s'ajoute la multiplication des services pédagogiques. C'est un autre phénomène. Autrefois, c'était très simple. Il y avait tel programme, telle matière: le cathéchisme, l'histoire du Canada, l'arithmétique, etc. et on arrivait au bout. Aujourd'hui, on parle d'options et de travaux de recherche que déjà les élèves, même à l'élémentaire, doivent faire. Il faut donc remarquer cet autre phénomène que j'appelle la multiplication des services pédagoqiques dont un enseignement moderne ne saurait se passer.

Que l'on songe un instant au nombre considérable de spécialistes, de toute catégorie et de tout niveau, qu'une commission scolaire doit réunir pour dispenser à des catégories très différentes d'élèves — on vient de le voir, M. le Président, par ce que j'ai déjà dit — des enseignements diversifiés qu'ils requièrent, par exemple dans le domaine des arts, ce qui était oublié autrefois, des sciences, des métiers et des techniques. Que l'on songe également à la multiplication des services auxiliaires non moins indispensables comme l'orientation, le service social scolaire, les services psychologiques, les services de santé, au sujet desquels, d'ailleurs, le ministère autrefois de la Santé et aujourd'hui des Affaires Sociales et le ministère de l'Education ont fait des ententes, l'enseignement correctif, etc., etc., etc.

Est-il possible, M. le Président, qu'une telle variété de services et de spécialistes puissent se concevoir et fonctionner sans une direction pédagogique professionnelle compétente? C'est une autre question qui vient s'ajouter aux deux précédentes.

Les changements n'ont pas seulement affecté les élèves, les services, les cadres, la structure de l'école. Ds ont même atteint ces objectifs. En effet, l'école élémentaire ne peut plus poursuivre l'objectif qu'on lui attribuait, puis-je dire, il y a vingt ans alors que la majorité des étudiants, la majorité des enfants la quittaient pour entrer dans la vie et sur le marché du travail, si on pouvait appeler ça un marché du travail.

Puisque tous les enfants, ou presque, entreprennent et qu'un très grand nombre complètent des études secondaires et même collégiales, il est bien évident que la notion même de l'école élémentaire doit aujourd'hui préparer ces élèves aux études secondaires et non pas à un diplôme terminal d'études élémentaires.

Quant à l'école secondaire, elle n'est pas non plus aujourd'hui comme elle a pu l'être un certain temps, celle d'une élite qui se prépare à des études universitaires, mais elle est devenue l'école de la masse, et combien de fois n'avons-nous pas entendu justement de critiques sur ces monstres qui ont été construits où il y avait des masses terribles d'élèves.

C'est un fait qu'on ne peut pas nier, c'est devenu non plus l'affaire d'un petit groupe, d'une élite, d'une coterie, d'un certain nombre de personnes ayant les moyens ou recevant de l'aide mais l'école de la masse. Et l'école secondaire doit assumer et assurer à tous ces jeunes le minimum de culture générale requis par la société présente au Québec en même temps qu'elle doit assurer, car ceci ne serait pas suffisant, à un très grand nombre d'entre eux la formation professionnelle nécessaire à l'entrée dans un véritable marché du travail. , Enfin, M. le Président, l'école devient rapidement l'un, des éléments les plus dynamiques du milieu, que l'on aime ça ou pas, selon les points de vue, qu'on l'analyse d'une façon ou d'une autre, qu'on la considère de plus en plus comme telle. Ce milieu lui-même s'est développé au point que la petite communauté rurale ou paroissiale n'a presque plus, sur le plan de l'école de vie personnelle propre, tellement elle participe à la vie d'un milieu élargi aux dimensions des métropoles régionales. Qu'il suffise de se rappeler que sous l'ancien gouvernement, je parle de l'Union Nationale avant même que les libéraux ne viennent, que déjà nous avions eu la session de 1958 qui avait été appelée la session de l'éducation et qu'à ce moment-là il y avait eu la guerre autour de la disparition des écoles de rang!

Aujourd'hui qui parle — je suis député représentant d'une circonscription rurale — de ces écoles de rang? Même dans ce milieu rural, tout se fait, au point de vue scolaire, sur le plan régional. Tout n'est pas parfait et je ne veux pas dire que ceci dépend du ministre, comme on me l'a déjà dit, d'ailleurs j'y étais avant, parce qu'il a fallu quand même aller rapidement.

Mais il faut quand même remarquer que les élèves eux-mêmes, que les enfants eux-mêmes ont élargi leurs préoccupations et ils les ont élargies au moins aux dimensions de ce que j'ai appelé ces métropoles régionales.

C'est à toutes ces transformations que j'ai énumérées, en en oubliant bien d'autres, mais je ne voudrais pas abuser du temps de cette Chambre bien que les règlements me donnent beaucoup plus de latitude, que la commission scolaire doit s'adapter si elle veut vraiment remplir son rôle, c'est-à-dire être directement et immédiatement responsable des écoles et de l'enseignement dans toute l'étendue de son territoire.

Les principes généraux. Quelles que soient les modalités de l'organisation des commissions scolaires, elles devront toutes, à mon avis, s'inspirer de certains principes généraux que nous pouvons dégager de la réalité que je viens de tenter de décrire.

L'évolution de notre société exige, tout d'abord, un organisme vraiment démocratique, non pas au sens ancien d'une démocratie d'élection ou de semblant d'élection ou d'élection, comme le mot l'indique, à l'époque électorale, pour choisir des commissaires. Le ministre le sait. Dans quelle proportion les citoyens sont-ils vraiment intéressés à élire des commissaires? Dans une proportion minime. C'étaient les mêmes gens qui étaient là d'année en année parce que personne ne se présentait ou c'était le ministre lui-même qui devait, par arrêté ministériel, nommer les commissaires. Il n'y a pas 20 p. c. des commissions scolaires où cette participation ou cette démocratie de participation existait vraiment. Il ne faut pas partir du juridisme pour cacher la vérité.

Donc, l'évolution de notre société exige, tout d'abord, un organisme vraiment démocratique au sens relativement nouveau d'une démocratie de participation. Je ne voudrais pas qu'on se gargarise avec des mots. Les mots "démocratie, participation", on les emploie tellement que leur sens en est vraiment oublié, sinon perdu ou biaisé. Par là, j'implique une collaboration constante et étroite entre le corps administratif et la population qu'il représente et qu'il sert. Il ne suffit plus que les citoyens et — je le souligne — les parents, en particulier, choisissent ceux qui auront la responsabilité de l'éducation de leurs enfants pour, ensuite, l'oublier et dire: Bon! Us sont élus, qu'ils fassent leur travail! On verra à la prochaine élection, si on y voit.

Il ne suffit plus que les citoyens, et les parents en particulier, choisissent ceux qui auront la responsabilité de l'éducation de leurs enfants, mais ils doivent partager avec eux cette responsabilité, et d'une façon permanente. Les structures et l'organisation de la commission scolaire doivent donc rendre cette participation possible. Quand je parle des structures de la commission scolaire, je pense à toutes les structures dont a parlé le ministre, y compris les comités d'écoles. Je prends ici l'expression "commission scolaire" dans son sens le plus large, je veux dire cette nouvelle institution qui, avec cette démocratie de participation constante et permanente avec tous les intéressés, à tous les niveaux et dans toutes ses structures, vient participer pour le bien et la meilleure éducation de l'enfant.

C'est donc dire que les citoyens, les parents doivent partager avec ces responsables, cette responsabilité. Les structures et l'organisation de la commission scolaire doivent donc rendre cette participation non seulement possible au plan théorique, mais ils doivent inciter les gens à la réaliser sur le plan pratique. La commission scolaire doit donc intéresser à son fonctionnement, et d'une manière directe, le plus grand nombre de parents et de citoyens.

Un deuxième principe, qui me paraît se dégager de la diversité nouvelle des fonctions que doit assumer la commission scolaire, est celui d'une responsabilité réelle et pratique.Il ne s'agit pas — vous me comprendrez — de cette responsabilité juridique dont a, d'ailleurs, parlé le ministre en citant les articles de la Loi de l'instruction publique. Il ne s'agit pas du code scolaire, il ne s'agit pas des responsabilités juridiques attribuées par la loi au ministre, aux fonctionnaires ou à la commission scolaire, mais

bien de la capacité d'assumer toutes les obligations imposés par la loi et par la réalité et dans la réalité.

En ce sens, une commission scolaire est vraiment responsable si elle peut grouper, si elle peut regrouper les ressources humaines et matérielles nécessaires à l'accomplissement de toutes les tâches nouvelles que j'ai décrites il y a un instant que je résume en deux mots: Premièrement, dispenser un enseignement approprié à chacune des catégories d'élèves et, deuxièmement, assurer tous les services scolaires et parascolaires requis auxquels tous, quelle que soit leur langue, leur religion, le lieu où ils habitent, ont un droit égal et se donner une direction pédagogique efficace, capable d'assurer la coordination nécessaire à ces diverses fonctions.

La coordination des fonctions constitue, en effet, un autre principe fondamental, dont doit s'inspirer tout mode d'organisation des commissions scolaires, et le gouvernement doit bien le comprendre.

J'ai déjà signalé, M. le Président, que la continuité — j'emploie le mot avec précision pour ne pas blesser les oreilles lorsqu'on parle de cette jonction entre l'élémentaire et le secondaire et ne pas faire partir en peur des règles simples qui, dans la réalité, peuvent revêtir diverses modalités —j'ai déjà signalé, donc, la continuité qui doit, dorénavant, nécessairement exister entre le cours élémentaire et le cours secondaire. Je me rappelle le temps où je suis passé par chacun de ces cours. Il y avait une partie des élèves qui, au cours élémentaire, se dirigeaient vers le cours classique, d'autres se dirigeaient vers le cours supérieur. Ils ne se partageaient même pas au même moment. Les uns, selon les années, selon qu'il y avait une préparatoire ou qu'il n'y en avait plus, quittaient après une sixième ou une septième; les autres, après une dixième ou une onzième. On ne savait plus où on était. Les élèves recevaient une même préparation pour des buts différents. Il y avait une discontinuité totale. Le petit garçon, parce que rares étaient les petites filles qui le faisaient à l'époque, qui quittait l'école pour entrer au collège entrait dans un milieu complètement nouveau, complètement séparé de l'élémentaire où il avait vécu pendant six ou sept ans. Ceci n'est plus possible dans un système unifié en vertu de la loi 56 adoptée par notre gouvernement quand nous y étions, en décembre 1968.

Donc, je veux souligner la nécessité de cette continuité qui devrait exister entre le cours élémentaire et le cours secondaire. Il va se soi que cette continuité suppose plus qu'une coordination de ces deux niveaux d'enseignement. Il en est ainsi en ce qui concerne les liens entre l'éducation des jeunes et celle des adultes.

Actuellement, je l'ai déjà dit tant au gouvernement que dans l'Opposition, dans nos écoles, les enfants ne vivent pas dans le monde. Ils vivent dans un milieu à part. Le jour, il y a des enfants ou des adolescents qui vont à l'école. Ils ont leur monde à eux, avec leur mode de vie à eux, avec leur vocabulaire à eux, avec les moyens d'éducation qu'on leur fournit à eux. Ils en sortent. Des adultes entrent le soir dans les même édifices et c'est un tout autre jeu qui se fait. C'est tout un autre monde qui existe. Si l'on a pu parler, cet après-midi, dans un autre sujet de deux solitudes, il y a présentement ces deux solitudes entre la jeune génération et celle qui l'a précédée.

C'est ainsi, donc, en ce qui concerne les liens entre l'éducation des jeunes et celle des adultes, puisque ces deux formes d'enseignement ne seront, de plus en plus, que deux étapes du processus continu de l'éducation permanente, qu'on appelle d'ailleurs, aujourd'hui, éducation continuelle ou par d'autres mots.

D'ailleurs, est-ce que ces gens qui viennent le soir ne sont pas les parents de ceux qui sont là le jour, sur un même territoire donné? Si l'on veut qu'entre les deux il y ait compréhension, il faut qu'il y ait au moins entre ces deux la même continuité que je souhaite entre l'élémentaire et le secondaire.

Quant aux enfants handicapés de toute catégorie, problème sur lequel chacun des ministres de l'Education a dû se pencher, il semble de plus en plus généralement admis — je ne suis pas un spécialiste en matière de psychologie, de psychiatrie, d'orientation — d'après ce que je puis lire, que leur éducation doive se faire en coordination aussi étroite que possible avec celle des enfants normaux.

Ce principe de coordination des fonctions s'applique également, et il suffit de le mentionner, aux services auxiliaires. Je n'insisterai pas sur ce point où j'entrerais dans des questions techniques. Je voudrais préciser cependant que cette coordination ne s'oppose pas au maintien de distinctions nécessaires. Ainsi, la continuité entre le cours élémentaire et le cours secondaire n'exclut pas les différences fondamentales de programmes, de méthodes, d'organisation ma-tiérielle, pédagogique et disciplinaire qui existent entre ces deux niveaux d'enseignement, qui sont à définir et qui s'adressent à des enfants d'âges différents à des stades différents d'évolution dans leur vie.

De même la coordination des services auxiliaires entre eux et leur coordination avec les services d'enseignement n'implique nullement la fusion des uns et des autres. Je ne crois pas que le principe de coordination soit un argument décisif en faveur de l'unité immédiate de la direction pédagogique ou administrative, comme je ne crois pas que le maintien des distinctions nécessaires soit un argument décisif contre cette unité de direction pédagogique ou administrative.

M. le Président, le ministre peut voir que par là l'Opposition officielle est vraiment ouverte à un dialogue pour en arriver à une loi qui puisse être la meilleure. S'il en était ainsi, comme il doit exister une continuité analogue entre le secondaire, le préuniversitaire ou le collégial et l'universitaire, il faudrait en toute logique

cartésienne conclure à la nécessité de l'unité de la direction immédiate à partir du préscolaire jusqu'au postuniversitaire.

Jamais personne n'a pu penser une chose semblable en cette Chambre. Mais de là à séparer chacun en des unités absolument sans continuité, je reprends le même terme, il y a toute une marge et, comme en toutes choses, la vérité ou le réalisme se situe probablement entre les deux.

D'autre part, si le maintien des distinctions nécessaires au plan des fonctions était un argument décisif contre l'unité de directions pédagogiques ou administratives, il faudrait morceler la direction de l'enseignement au secondaire et celle de l'enseignement universitaire et professionnel. Ici, on n'a qu'à prendre l'exemple des Collèges d'enseignement général et professionnel. Est-ce que, parce qu'il y a diverses options, il va falloir autant de directions pédagogiques sous prétexte qu'il faudra que, dans ces directions pédagogiques, il y ait des experts dans chaque matière?

Ces considérations m'amènent directement à aborder le problème des modalités d'application et des principes généraux qui doivent régir l'organisation future des commissions scolaires. Quelles sont ces modalités, M. le Président? Vous comprendrez facilement que je n'ai pas eu le temps d'étudier en profondeur les diverses formules selon lesquelles les commissions scolaires pourraient être organisées et pourraient fonctionner pour répondre aux exigences de l'heure.

Entre deux solutions extrêmes que nous rejetons, je l'esprère, en cette Chambre d'un accord unanime, savoir le statu quo qui consisterait à conserver les quelque 1,200 commissions scolaires actuelles et la suppression totale de ces organismes intermédiaires qui placerait toutes les écoles sous la dépendance immédiate et directe du ministère de l'Education.

La Fédération des commissions scolaires catholiques a déjà, au cours de ses études, exploré les avantages et les inconvénients que pourraient présenter chacune des cinq formules qu'elle avait trouvées.

Seulement ce groupe, la Fédération des commissions scolaires, avait proposé au ministre cinq modalités différentes. Le ministre actuel pourra certainement retrouver cela dans ses dossiers. D'ailleurs, avec tous les rapports que l'on reçoit au ministère de l'Education et toutes leurs suggestions, je ne suis pas certain, pas du tout, qu'avec un peu d'imagination, chez les fonctionnaires, chez les associations, chez les parents, chez les membres de l'Opposition ou chez n'importe quel membre de la députation, on ne pourrait pas en suggérer encore autant sinon dix fois plus.

Il s'agit, en effet, de moyens, comme je l'ai dit au début, et non de principes dogmatiques. Nous ne sommes pas dans les dogmes ici, nous sommes dans les moyens d'arriver aux fins que j'ai mentionnées. Je comprends très bien les discussions qui se font autour des différentes formules. Je comprends très bien ceux qui craignent le changement, parce qu'ils en ont vu peut-être trop pendant certaines années où les révolutions se faisaient tranquilles.

Je comprends très bien les craintes de ceux à qui les choses n'ont pas été suffisamment expliquées. Elles sont le signe que les gens n'admettent pas qu'un gouvernement leur dise qu'il n'existe qu'une formule idéale et absolue qui ne comporterait que des avantages. Ainsi, il n'existe pas de formule magique qui réglerait automatiquement tous nos problèmes. Si une telle formule existait, M. le Président, il est probable qu'elle serait déjà en application. Il est probable aussi qu'elle serait déjà en discussion, qu'elle aurait déjà évolué et qu'on aurait déjà un nouveau projet de loi pour la modifier.

Si une telle formule existait, il est certain que les prédécesseurs du ministre actuel l'auraient déjà mise en vigueur. Il est certain, en tout cas, que l'ancien gouvernement l'aurait adoptée avec la législation importante, en nombre et en qualité, qu'il a adoptée. Or, il suffit d'une connaissance très superficielle de l'organisation scolaire des autres pays pour constater la grande diversité des modes d'organisation au niveau local et au niveau régional.

Le ministre a dû voyager, comme l'ancien ministre, d'ailleurs. Il a pu se rendre compte que les choses sont différentes en des lieux divers et que chacun de ces systèmes est critiqué, critiquable, améliorable. Même si une telle formule existait dans l'ordre idéal, sur le papier au ministère de l'Education, il n'est pas du tout certain quelle serait la mieux adaptée à la réalité concrète de tous nos milieux diversifiés au Québec.

Plutôt qu'une formule idéale qui ne colle pas à la réalité, je préfère une formule moins parfaite, mais réaliste et qui fonctionnera. Peut-on même affirmer, M. le Président, qu'une formule unique serait bien adaptée à la diversité des milieux socio-économiques et culturels de notre vaste province?

La preuve, c'est que, sous l'ancien gouvernement, on avait proposé le projet de loi 62 et que le ministre actuel nous annonce, pour la région de Montréal, le projet de loi no 28. Ce simple fait, déjà, indique que l'on voit cette diversité. Elle est évidemment, patente entre Montréal et le reste de la province, pris au sens strictement français du dictionnaire.

Mais la diversité dans le milieu scolaire, entre un endroit et un autre, est remarquable. Quiconque a fait le tour des dix campus universitaires se rend compte que les élèves de l'Université de Sherbrooke, de l'université Laval, de l'Université de Montréal, de l'université McGill et de l'Université du Québec à Montréal sont déjà différents. Qui admettra que la région de Québec ressemble, en quoi que ce soit, à la région de Saint-Hyacinthe, et celle de Bagot à celle de Drummond? Il faut être réaliste et s'il faut qu'il y ait une loi qui s'appelle Loi

concernant le regroupement et la gestion des commissions scolaires, il faut que cette loi colle non seulement bien sur le papier du ministère de l'Education mais colle à la réalité québécoise dans toute sa diversité.

La sagesse et la prudence ne consistent pas à ne rien faire, ce n'est pas ce que je soumets au ministre, mais bien à agir en prenant toutes les précautions nécessaires.

En conclusion, M. le Président, nous comprenons cette nécessité de l'action, je le souligne au ministre. Je suis personnellement d'avis que tout ce que les commissions scolaires ont fait en ce domaine est et sera éminemment utile. Cela aura sensibilisé un grand nombre de personnes et d'organismes aux problèmes de l'évolution des commissions scolaires et aura, de ce fait, préparé un grand nombre de personnes à assumer de nouvelles et de plus lourdes responsabilités. Je formule également le voeu que tous ceux qui, comme vous et nous, ont une responsabilité en matière d'éducation soient de plus en plus conscients que l'éducation exige d'eux une solidarité et un sens du bien commun qui transcendent les intérêts particuliers des individus et des groupes. Nous sommes tous, du ministre de l'Education à l'instituteur, sans oublier les commissaires et les députés, au service de toute la population du Québec, désireux d'assurer ce service. Il ne saurait exister entre tous ces divergences fondamentales et parfois, je le dis, irréductibles, dans la recherche honnête de la vérité.

Ici, je me permets une paranthèse. Pourquoi se fait-il qu'au Québec on ait ce manichéisme, c'est-à-dire cette habitude de croire que les méchants ce sont toujours les autres et que si quelqu'un n'est pas membre de son association, c'est nécessairement quelqu'un qui n'est pas honnête et qui ne possède pas la vérité et qui veut, comme le ministre l'a dit, déconfessionnaliser, abolir, détruire? Je suis, en cette Chambre, membre d'un parti, et j'admets qu'il y a des gens compétents dans chacun des autres partis. J'aimerais que tous les gens en cette Chambre l'admettent aussi et que tous les gens intéressés en éducation admettent que leur association au nombre de 10 ou 3,000 ou 30,000 personnes n'a pas nécessairement toutes les informations que possède le ministère, n'a pas nécessairement, dans son entier, toute la vérité et la réalité des choses. La recherche honnête de la vérité, la précision objective et lucide de la réalité et la poursuite désintéressée du bien commun, mais dans un régime humain, non théorique, devraient nous engager dans la seule voie possible, celle de la collaboration intelligente mais non sans cesse sans réserve. C'est pourquoi nous, de l'Opposition officielle, en deuxième lecture, nous voterons en faveur du principe du projet de loi no 27.

M. BERTRAND: Pour le principe. M. PAUL: Le principe.

M. CARDINAL: Je répète que l'Opposition officielle votera en faveur du principe du projet de loi no 27. J'ai souligné que les deux ministres qui ont précédé le ministre actuel avaient déjà ce principe parmi leurs objectifs. Je suis étonné de surprendre certains membres ministériels.

M. BERTRAND: Ils ne connaissent pas l'histoire.

M. CARDINAL: II faut connaître son histoire du Québec, quand même, et savoir où on en est rendu après un certain chemin parcouru.

M. le Président, je reviens à mon sujet. Nous voterons, en deuxième lecture, favorablement au principe du bill. J'ajoute ceci: Nous demandons — d'ailleurs là-dessus, nous sommes encore d'accord avec le ministre — que les intéressés puissent se faire entendre devant la commission parlementaire permanente de l'Education, mais dans un délai de convocation raisonnable, et où on ne fera pas une étude comme celle qu'on a voulu faire, alors que nous étions de l'autre côté, au sujet du projet de loi no 62, une étude article par article de la loi. Ce n'est pas le rôle de la commission parlementaire. C'est le rôle du comité de l'Assemblée nationale.

Nous sommes en deuxième lecture. Si nous allons en deuxième lecture, devant une commission, c'est là que les intéressés, sans précipitation, pourront venir s'exprimer. Il ne faut pas, M. le ministre — c'est une suggestion que je me permets — que votre action en fin de session surtout — je commence à connaître les fins de session— paraisse —je ne fais pas d'imputation de sentiment — un semblant de consultation. Le ministre est trop décent pour hâter des choses en matières si importantes.

Je termine donc, M. le Président, en disant qu'il n'y a aucun problème quant au principe du regroupement des commissions scolaires par région. Nous aurons, en temps et lieu, à un autre moment des travaux de cette Chambre, du travail à faire pour aider le ministre à améliorer la loi. Nous devrons peut-être voir l'annexe parce que, quand on la voit sur le terrain, ce n'est peut-être pas la même chose que quand on la lit dans ce projet de loi.

Sous ces réserves, d'ailleurs normales pour l'Opposition, je ne retire rien de ce que j'ai dit et je pense qu'à ce moment-là je représente vraiment la pensée de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale du Québec. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT (Carpentier): L'honorable député de Richmond.

M. Yvon Brochu

M. BROCHU: M. le Président, je veux à mon tour, à la suite de certaines études qui ont été faites sur le projet de loi, de certaines consultations que nous avons pu faire au niveau des

organismes et associations intéressés, faire certains commentaires relativement à ce projet de loi no 27 visant au regroupement des commissions scolaires.

Depuis plusieurs mois, et même depuis plusieurs années, peut-on dire, une propagande bien orchestrée suit son cours afin de vendre cette idée dans le public que le regroupement est une absolue nécessité. On représente même, comme logique de raisonnement pour vendre ce produit, que le regroupement est indispensable à une éducation de qualité au Québec et même que, sans ce dernier, l'éducation de nos jeunes pourrait se solder par une certaine faillite. Je reviendrai, d'ailleurs, plus loin dans mon exposé sur ce problème de l'accession à un véritable éducation de qualité au Québec et sur les moyens véritables pour y arriver, moyens qui ne sont pas nécessairement liés au regroupement tel que proposé.

Il ne s'agit pas, M. le Président, de s'opposer systématiquement à toute forme de regroupement parce que nous sommes d'avis qu'un certain besoin de ce côté doit être comblé à plus ou moins brève échéance.

Cependant, il y a certains principes fondamentaux ou, plutôt, certains droits inaliéables que l'on ne peut obolir par une loi. En particulier, il y a la responsabilité des parents et du milieu représenté par la commission scolaire, puisque le droit des parents en éducation est antérieur à celui de l'Etat. Il y a également le principe, souvent mis de côté ou quelque peu foulé aux pieds, mais non moins réel et inviolable, de la liberté des parents et du milieu de participer à l'élaboration de politiques nouvelles en matière d'éducation. Surtout, finalement, il y a la liberté de choix dans l'élaboration des politiques et la liberté également d'être entendus.

Il y a, à mon sens, danger réel et fondé de voir mis en application tel quel le projet de loi 27. Cela signifie, d'abord, un éloignement encore plus marqué du centre de décision et des champs d'exécution.

En d'autres termes, avec une superstructure telle que celle qu'on préconise, ceux qui pren-dont des décisions importantes en éducation seront situés encore davantage dans un monde un peu à part, un monde souvent trop théorique risquant ainsi de perdre de vue les réalités dans lesquelles évoluent l'enfant, les parents et aussi les éducateurs.

Le véritable but de l'éducation et de l'enseignement n'est-il pas, en fait, de former un individu en devenir plutôt que de l'informer, c'est-à-dire de lui donner une quantité d'informations? Si notre mode éducatif devient vraiment un processus de formation, à ce moment-là, nous donnons plus d'envergure au savoir et à l'acquis scientifique. L'individu, qui a eu, de cette façon, beaucoup plus de chances d'intégrer son savoir à sa personnalité propre, est en mesure, par voie de conséquence, d'offrir à ses semblables et à la collectivité dont il fait partie un apport qui a beaucoup plus de valeur parce qu'il devient un apport non seulement technique, mais humain à une société.

En somme, l'éducation doit donner une formation à l'individu pour l'utilisation future humaine de ses capacités et elle doit favoriser son adaptation à la société où s'étendra son champ d'action.

D'où l'importance, M. le Président, à mon sens, du milieu dans lequel évolue l'enfant en devenir, l'enfant qui fait partie, à un moment donné, d'un système d'éducation. Pour qu'il puisse, en toute latitude assimiler les valeurs qu'on veut lui inculquer plus facilement, il y a nécessité pour lui d'évoluer à proximité de son propre milieu.

On peut hélas! je pense, se poser certaines questions. Premièrement, malgré que l'éducation soit, au point de départ, une question de gros sous, doit-elle devenir prioritairement une préoccupation administrative plutôt que d'axer ses efforts sur son objectif premier qui est la formation? On peut se demander encore, en continuant avec la même forme de conceptualisation ou d'idée sous-jacente au projet de loi, si, consciemment ou non, on n'est pas en train d'orienter l'élève en devenir à exister en fonction des structures, plutôt que les structures en fonction de l'élève. Là, on pense à une rentabilité éducationnelle; on n'est plus sur un palier de rentabilité administrative. But premier de l'éducation observer. Je pense qu'il ne faut jamais le perdre de vue, malgré les préoccupations administratives qu'on devra rencontrer par la suite.

Demandons-nous aussi si actuellement l'on considère vraiment les enseignants comme des collaborateurs en éducation, des gens impliqués dans une situation et qui doivent aussi être consultés pour l'élaboration de certaines politiques, ou si l'on ne tenterait pas, par la force des choses peut-être, de les considérer de plus en plus comme des fonctionnaires qui doivent remplir un poste.

J'ai eu l'occasion de le souligner un peu hier soir à l'occasion du dépôt du projet de loi no 46 qui demande la négociation au niveau provincial. A mon sens, c'est une atteinte, si l'on revient au projet de loi no 27 qui nous intéresse, à la qualité de l'enseignement, qualité dont une des raisons de base serait justement de considérer les enseignants comme des collaborateurs à part entière plutôt que comme des fonctionnaires. C'est autant de questions, questions fondamentales, que nous avons la responsabilité de nous poser sincèrement. Dans l'optique d'une critique objective, qui se veut génératrice d'améliorations, en fin de compte, que doit être une éducation de qualité, qui a pour objectif la formation d'individus et leur adaptation à une société donnée? Cette forme d'éducation doit être moderne, c'est-à-dire appropriée au temps présent, mais aussi assez flexible et intégrée pour s'adapter, sans trop de heurts, au courant évolutif de toute science et de toute société.

Préparer une personne à une forme de pensée, lui enseigner comment penser plutôt

que quoi penser, ce qui est une ouverture à la recherche et au choix, il y a une façon de développer cette habitude à la recherche et au raisonnement. A mon sens, si l'on tient compte du processus évolutif de l'enfant, on doit, pour favoriser une telle intégration du savoir, tenir compte des impératifs du contact de ce même enfant avec son milieu de vie. On ne peut absolument pas négliger cet aspect important de la formation de l'individu. Il y a certaines conditions de base, M. le Président, si l'on va plus loin aussi pour une éducation de qualité au Québec. En passant, je vous réfère rapidement à un petit volume qui vient de paraître aux Presses libres, qui s'appelle justement Pour une éducation de qualité au Québec, qui est écrit par M. Clément-H. Rondeau, et dont j'ai remis au ministre un exemplaire il y a deux ou trois semaines.

On dit d'abord: "Pour une éducation de qualité, une bonne ambiance physique." A ce moment, on parle du lieu matériel, du lieu de travail qui doit quand même répondre à certaines normes de base en éducation pour que le processus se rende à terme de façon normale et donne les résultats voulus.

Deuxièmement, suffisamment de professeurs pour qu'en fin de compte, ces derniers puissent se mieux donner à leur tâche d'enseignants parce qu'une telle attitude favorise le contact humain avec leurs élèves, avec ceux à qui ils sont chargés d'enseigner ou de donner la préparation nécessaire sur l'apprentissage du comment penser.

Troisièmement, des professeurs de qualité. Pour avoir des professeurs de qualité, il faut quand même leur donner un champ d'action; il faut quand même aussi permettre à ces individus, qui sont directement impliqués dans les situations éducationnelles au Québec, de participer aux décisions qui mettent en cause le devenir de leur travail, de leurs conditions de travail et le devenir de ceux à qui ils ont décidé de consacrer leur carrière, c'est-à-dire les élèves.

Je vais plus loin dans ce sens-là parce qu'à mon avis le gouvernement ne devrait pas avoir peur de ce contact.

A mon sens, dis-je, le gouvernement devrait encore axer davantage la consultation au niveau du personnel enseignant pour élaborer certaines politiques. Parce que ce sont eux, en fin de compte, qui sont impliqués directement dans cette situation. Consultation également avec les parents. J'ajoute également la mise de l'avant encore de possibilités de recherche au niveau de découvertes ou de mises en place, de méthodes modernes d'apprentissage au niveau de l'éducation qui favorisent encore davantage, si on parle sur le plan technique, l'apprentissage de nos différentes matières.

Dans un autre ordre d'idée, M. le Président, je pense, et d'ailleurs je l'ai souligné rapidement tout à l'heure aussi et ce n'est un secret pour personne, que le problème majeur, ou plutôt, que la cause véritable des difficultés rencontrées en éducation au Québec ou du moins, pour une partie importante d'entre elles, c'est le problème financier. Cependant, il serait de la plus haute fantaisie ou complètement illogique, à mon sens, de prétendre que ce problème d'ordre financier sera automatiquement réglé par le regroupement scolaire qui nous est proposé.

Sur ce sujet, je me pose de sérieuses questions et j'attire aussi l'attention du ministre sur ce fait : Pourquoi nos gouvernements québécois, à venir jusqu'à ce jour, et surtout dans le domaine de l'éducation, s'évertuent à se présenter un peu faussement comme des innovateurs, comme des créateurs de nouveautés, tout en répétant souventefois à plusieurs exemplaires, les erreurs commises dans d'autres provinces ou dans d'autres pays?

Si l'on veut véritablement apporter des améliorations à notre système d'éducation, en lui conservant surtout son but véritable et unique, soit celui de la formation de l'enfant en tant que personne humaine, pourquoi le gouvernement ne s'interroge-t-il pas un peu sur ce qui s'est fait ailleurs ou sur ce qui se fait présentement? A ce moment-là, le ministre pourrait, dans l'établissement de ses politiques et de ses mesures législatives, profiter au maximum des inévitables erreurs des autres, ce qui éviterait une recherche souvent pénible, toujours très coûteuse et dont les résultats laissent fortement à désirer quand ils ne se soldent pas tout simplement par un échec. Qu'on se serve donc de l'expérience des autres pour atteindre directement notre but.

On dit que c'est inscrit dans la nature humaine d'avoir cette possibilité de se servir de l'expérience des autres. Alors qu'on mette cette inscription — si je puis m'exprimer ainsi — à profit. On a qu'à regarder, par exemple, nos voisins de l'Ontario qui ont tenté des expériences similaires déjà et voir la valeur des résultats obtenus. Je cite ici, à titre d'exemple, le journal The Montreal Star, en date du 14 mai 1970, où l'on donne justement une information relative au regroupement, sous le titre: "Big Boards Mean High Cost".

Et on nous dit ceci: "Doctor D.A.Dawson found in a two-year investigation of secondary school boards in the Province that larger boards have higher per student cost and show no significant increase in quality on education."

Alors, M. le Président, je pense, d'après ce que j'ai pu déceler dans la déclaration du ministre, qu'on recherche une rentabilité administrative. A ce moment-là, il conviendrait qu'on s'arrête sérieusement — ce n'est qu'un exemple que je viens de citer, il y en a d'autres — aux expériences qui ont été faites ailleurs, aux objectifs qu'on poursuit, à une éducation de qualité au Québec et aux moyens à prendre pour y arriver.

M. le Président, avec le dépôt en deuxième lecture de ce projet de loi sur le regroupement volontaire, mais obligatoire par voie de législation, le Québec et sa population se trouvent à

un point tournant de leur histoire en éducation, à un carrefour décisif où les deux voies possibles sont définitivement opposées l'une de l'autre tellement l'idée fondamentale de l'une et de l'autre est différente. C'est un peu l'heure du choix final, dirais-je, pour le Québec.

Cela semble peut-être un peu hors d'ordre ou même illogique de prononcer ce mot choix en ce moment en parlant du projet de loi no 27 puisque le gouvernement actuel semble décidé à tout prix à le faire adopter tel quel sans tenir compte de toutes les requêtes qu'il a reçues des parents du Québec et d'un grand nombre d'associations pour que le projet de loi soit rejeté ou tout au moins retardé pour étude sérieuse au lieu d'être imposé démocratiquement à des gens qui non seulement n'en ressentent peut-être pas le besoin, mais n'en veulent tout simplement pas.

Quoi qu'il en soit, nous devons, M. le Président, en tant que législateurs, nous poser une question fondamentale qui, à mon sens, constitue le point de départ de toute discussion valable sur les deux voies ou les deux options qui s'offrent à nous à l'heure actuelle en éducation. La question est la suivante: La commission scolaire représente-t-elle l'Etat ou plutôt les parents? Ou bien, en d'autres termes, de qui la commission scolaire tient-elle son autorité ou par qui est-elle élue, choisie ou déléguée? Par l'Etat ou par les parents?

Si l'on veut répondre adéquatement à une question qui revêt autant d'importance présentement, il nous faut aller plus loin encore et peut-être toucher à la source même des valeurs fondamentales de notre société québécoise et nous poser une question toute simple mais de combien d'envergure:

L'enfant appartient-il aux parents ou à l'Etat? A mon sens, M. le Président, tout le noeud de notre problème réside dans la réponse que nous sommes prêts à apporter à ces questions. De cette réponse toute simple dépend l'orientation future de notre éducation au Québec. En effet, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, si notre premier objectif québécois en éducation est d'abord de viser à une éducation de qualité, rentable au point de vue éducationnel, est-ce que le regroupement est le moyen pour y arriver?

M. le Président, je demande donc au gouvernement Bourassa et, en particulier, au ministre de l'Education, de bien réfléchir, sincèrement et honnêtement, à ces quelques questions, au nom du simple fait qu'ils représentent la majorité et qu'ils doivent tenir compte des volontés de cette majorité, à une simple condition, M. le Président, si la démocratie existe encore. Je ne demande pas, M. le Président, au ministre de me répondre tout de suite, mais plutôt de réfléchir avant. S'il le faut, je lui suggère de se retirer quelques jours dans un endroit tranquille. Bien que le ministre vienne à peine de sortir de l'hôpital, ce n'est pas de faire encore de la bile que je lui souhaite. Qu'il se retire simplement dans un lieu tranquille, non dans un hôpital, hors du champ de tir ou, plutôt, hors de la portée de quelques-uns de ses hauts fonctionnaires à l'esprit centralisateur, qui sont à la source de ce projet de loi antidémocratique. Je pense qu'on peut le dire.

Le ministre comprendra que je ne l'attaque pas lui-même en disant ça. On sait, d'ailleurs, très bien que les hauts fonctionnaires avaient tenté, quoique timidement à l'époque, de faire vendre l'idée par l'UN, appelée communément l'Union Nationale.

M. CARDINAL: Ils ont fait ça?

M. BROCHU: Ils ont fait ça! A ce moment-là, l'idée n'avait pas suivi son cours jusqu'à l'endroit ou l'on aurait désiré la voir aboutir. On change le gouvernement et on reprend le même processus. On retrouve, d'ailleurs, l'idée fondamentale, le même principe de gouvernement, que ce soit d'une couleur ou de l'autre. Cependant, M. le Président, attention à cette fausse démocratie! C'est un mot qui semble de plus en plus drôle, à mon sens. Parfois, si j'étais certains individus et que j'allais en province, je n'oserais peut-être pas le dire trop fort.

Attention à cette fausse démocratie où les lois sont dictées par certains fonctionnaires, où, en somme, les directives viennent d'en haut. C'est de la démocratie contrôlée, de la démocratie imposée qui est, souventefois, non voulue, mais qui est démocratiquement dictée et à laquelle les individus doivent démocratiquement aussi se soumettre.

D'ailleurs, M. le Président, le comité pour le maintien des commissions scolaires a déjà présenté un mémoire à cet égard en vue de maintenir les commissions scolaires ou d'apporter certaines transformations mais non dans le sens de celles qui sont apportées présentement. On y indique clairement cette mise en garde qui veut qu'on n'accepte pas de voir de hauts fonctionnaires diriger les gouvernements mais que ce soit les hommes en place, élus démocratiquement, qui prennent les décisions et qui donnent les orientations.

Pour ma part, je serais beaucoup plus heureux de faire une critique du projet de loi no 27 si je savais, fondamentalement, que cette politique avait été mise de l'avant par le ministre actuel de l'Education, à la suite d'une consultation ou d'une connaissance personnelle du problème éducatif au Québec, et qu'à la suite d'une telle situation, le ministre aurait décidé lui-même ou en conseil des ministres de proposer une législation mais non pas de se soumettre à une législation qui était voulue depuis plusieurs années par de hauts fonctionnaires.

M. le Président, pour bien éclairer ma prise de position là-dessus et parce que moi, personnellement, et aussi les membres de mon groupe, nous croyons en la représentation démocratique d'un comté, nous avons consulté, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous avons demandé

des recommandations à différents corps intéressés, à des parents, à des commissions scolaires et à des associations. Nous avons reçu certaines réponses, en grand nombre. Je vous cite ici, entre autres, une résolution qui m'a été envoyée par la commission scolaire d'Asbestos. Je profite de ces dépôts de documents pour souligner les raisons où les mises en garde que certaines personnes veulent faire au ministre. Et, étant donné que je suis leur voix en Chambre, je me permets, M. le Ministre, de déposer ces documents et d'attirer votre attention sur les raisons qui y sont soulignées. Je vous fais grâce de l'entête de la copie de la résolution: "Considérant que le projet de loi 27, s'il était adopté durant la présente session, laisserait trop peu de temps pour la mise en place des dispositions transitoires; "Considérant que les structures proposées par les commissions scolaires nouvelles sont justement celles des CEGEP lesquels sont loin d'avoir fait leurs preuves;

Considérant que plusieurs articles de ce projet de loi manquent de clarté, sont difficiles à interpréter ou prêtent à confusion, tels que division en municipalités pour fins de taxation et en quartiers pour fins de représentation, confection de la liste électorale, comité exécutif, conseil provisoire, intégration des employés à temps partiel, organisation des cours dans les commissions scolaires nouvelles; "Considérant que ce projet de loi, au lieu de clarifier la Loi de l'instruction publique, ne fait que la rendre plus difficile à comprendre et à appliquer; "Considérant aussi que les parents n'ont aucune garantie d'être représentés par un commissaire de leur quartier tant à la commission scolaire nouvelle qu'à la commission scolaire régionale, "Le commissaire Gaston Lambert propose et il est résolu à l'unanimité que l'adoption du projet de loi no 27 soit reportée et que copie de cette résolution soit envoyée au ministre et au député, etc."

M. le ministre, je pense que, devant une telle résolution, on peut déceler la bonne foi des individus qui veulent participer à l'élaboration de politiques nouvelles en matière d'éducation, sincèrement et honnêtement. Ds profitent de l'occasion pour vous demander d'agir avec extrêmement de prudence parce qu'au niveau du projet de loi no 27 des principes fondamentaux sont mis en cause et certaines garanties ne nous sont pas données à l'intérieur du projet de loi.

D'autre part, M. le Président, l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, fédération de la région de Sherbrooke, nous donne les recommandations suivantes: "Nous désirons apporter à votre attention la demande des délégués de l'AFEAS réunies à l'assemblée annuelle et représentant les 3,250 membres de la fédération de Sherbrooke. "Considérant que le projet de loi no 27 arrive à un moment où le système d'éducation est dans une situation chaotique aux niveaux secondaire et collégial; "Considérant que le projet de loi no 27 expose l'éducation, au niveau primaire, à la même situation déplorable en érigeant des commissions scolaires monstres et fait disparaître un grand nombre de commissions scolaires viables et aptes à répondre adéquatement à l'éducation des enfants au niveau primaire; "Considérant que les parents n'ont pas été convenablement consultés et n'ont pas eu l'opportunité de connaître suffisamment le contenu du projet de loi avant qu'il soit présenté; "Considérant que le projet de loi no 27 enlève le droit primordial des parents d'exercer leur responsabilité dans l'éducation de leurs enfants, "L'AFEAS, fédération de Sherbrooke, réunie en assemblée annuelle en 1971 vous demande instamment de suspendre les débats parlementaires sur le projet de loi no 27 jusqu'à ce qu'il soit modifié de telle sorte qu'il réponde aux aspirations de la population catholique de la province de Québec et qu'il assure le droit primordial des parents d'exercer leur responsabilité dans l'éducation de leurs enfants."

C'est signé par Mme Thérèse Laverdière qui est secrétaire de la fédération.

M. le Président, voilà une autre demande qui est quand même faite au nom d'un corps intermédiaire d'assez grande importance et qui relate sérieusement les problèmes qui sont contenus dans le projet de loi 27 que les parents du Québec, comme les associations, comme les commissions scolaires dans l'ensemble de mon comté craignent de voir adopter tel quel.

J'aimerais continuer en citant également l'Association des commissions scolaires confessionnelles du Québec qui a fait certaines recommandations.

M. le Président, il est six heures, je demande l'ajournement du débat.

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plait. On me fait remarquer que l'honorable député de Richmond aurait épuisé son droit de parole.

M. DUMONT: M. le Président, avec l'indulgence qu'on a accordée à tous les autres porte-parole, j'imagine qu'on laissera au moins quinze minutes...

M. BERTRAND: S'il est le porte-parole il a droit à plus d'une demi-heure.

M. CHARRON: Non.

M. BERTRAND: En vertu de...

M. LE PRESIDENT: Je ne veux pas soulever de difficultés à quiconque en cette Chambre. On me dit que le député de Richmond a commencé à cinq heures vingt-cinq. Il aurait même dépassé son temps de cinq minutes. Je ne

voudrais pas que cette question soit soulevée lundi à la reprise des travaux et que le député de Richmond veuille parler encore dix ou quinze minutes. S'il y a consentement de la Chambre, je suis d'accord mais j'aimerais peut-être que cette question soit réglée.

M. DUMONT: Pourrions-nous demander ce consentement immédiatement?

M. LEVESQUE: Vous en avez pour combien de temps?

M. BROCHU: J'en ai encore pour quelques minutes, c'est difficile à évaluer.

M. LEVESQUE: II est trop tard.

M. BROCHU: Disons que je veux quand même faire montre de gentilhommerie...

M. DUMONT: On a laissé presque une heure au député de Bagot.

M. CARDINAL : M. le Président...

M. LEVESQUE: C'était le député de l'Opposition officielle qui répondait...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre Messieurs! En vertu du règlement, le ministre qui propose une motion de fond a un temps illimité; le député qui répond immédiatement au ministre comme membre de l'Opposition officielle a également un droit de parole illimité; les autres chefs de parti ont une heure, sauf le chef de l'Opposition officielle qui a toujours un temps illimité, et tous les autres députés ont 30 minutes.

M. BROCHU: M. le Président, puis-je vous demander une directive? N'avait-il pas été convenu à un moment donné que le chef de parti pouvait déléguer son droit de parole à un député?

Non pas que j'aie l'intention de remplir l'heure, mais j'ai quand même certaines choses dont j'aimerais faire part à la Chambre.

M. CHARRON: M. le Président, sur le point d'ordre. Votre rappel au règlement est absolument pertinent et je pense que vous l'avez répété en des termes fort clairs. Le député de Richmond n'a droit qu'à une demi-heure, mais, comme il est le porte-parole officiel de son parti dans cette matière, je serais d'accord, au nom de mon parti, pour lui donner le droit de poursuivre pendant quelques minutes, ce que je n'accepterais pas pour n'importe quel autre député.

M. LE PRESIDENT: Pourrions-nous convenir, du consentement unanime de la Chambre, que, lundi, le député de Richmond pourra parler...

M. LEVESQUE: Cinq minutes, pas plus. M. DUMONT: Disons dix minutes.

M. LEVESQUE: Cinq minutes, parce que c'est fête demain.

M. LE PRESIDENT: De toute façon, vous pourrez y penser sérieusement en fin de semaine. Est-ce que la motion d'ajournement du débat de l'honorable député de Richmond est adoptée?

DES VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LEVESQUE : M. le Président, tout en souhaitant une excellente fin de semaine à tous nos collègues de cette Chambre et en les félicitant pour le travail qu'ils ont accompli, qu'il me soit permis, avant de faire la motion d'ajournement, de rappeler à cette Chambre que vous avez vous-même, M. le Président, le programme de la semaine prochaine et que ce programme a été remis aux différents, leaders des partis d'Opposition.

Si les honorables députés veulent en prendre connaissance, je suis sûr que ce sera facile. M. le Président, je dois rappeler que, lundi matin, la commission parlementaire de la Fonction publique se réunira à dix heures, à la salle 81-A. Je propose que la Chambre elle-même s'ajourne à lundi, quinze heures.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. PAUL: Adopté en totalité.

M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à lundi, quinze heures.

(Fin de la séance: 18 h 4)

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