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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le samedi 10 juillet 1971 - Vol. 11 N° 73

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Onze heures deux minutes)

M. LAVOIE (Laval) (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Présentation de pétitions.

Lecture et réception de pétitions.

Présentation de rapports de commissions élues.

Présentation de motions non annoncées.

Présentation de bills privés.

Présentation de bills publics.

Déclarations ministérielles.

M. LEVESQUE: M. le Président, pouvons-nous, à la présentation de rapports de commissions élues, recevoir le rapport de la commission parlementaire des Institutions financières, Compagnies et Coopératives relativement à l'étude du bill 45?

M. HARVEY (Chauveau): M. le Président...

Commission des Institutions financières

M. BLANK: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission des Institutions financières, Compagnies et Coopératives a étudié le bill 45 et en suggère l'adoption à la Chambre avec des amendements.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ce rapport est adopté?

M. LAURIN: Non, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ce rapport est reçu?

M. LAURIN: Non, M. le Président.

M. LEVESQUE: Bien voyons, il faut toujours bien les recevoir !

M. BOURASSA: Vous retardez encore les bienfaits pour les consommateurs. C'est ça, le Parti québécois!

M. LAURIN: Nous avons expliqué notre position.

M. BOURASSA: Vous en porterez la responsabilité vis-à-vis des consommateurs du Québec.

M. LEVESQUE: Ces gens veulent aller en commissions parlementaires à tout bout de champ !

M. LE PRESIDENT:

Dépôt de documents. Questions des députés.

Questions et réponses Démission de M. Jacques Paquin

M. PAUL: M. le Président, vous conviendrez que c'est tout un honneur de poser une question un samedi matin. Je voudrais la diriger à mon bon ami, l'honorable leader du gouvernement pour qu'il nous confirme ou nie la nouvelle à l'effet que M. Jaques Paquin, directeur général de la Société de développement industriel du Québec aurait remis sa démission. Si cette nouvelle est fondée, est-ce que l'honorable ministre pourrait nous dire si M. Paquin a donné des raisons de sa démission et quels auraient été les efforts déployés par le ministre aux fins de retenir davantage et plus longtemps lés services de cet excellent fonctionnaire de l'Etat?

M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai lu dans le journal, ce matin, la même nouvelle que l'honorable député de Maskinongé. Cependant, je dois lui dire — je le remercie de l'occasion qu'il me fournit — que la façon dont cette nouvelle était faite ne rendait pas justice au ministère de l'Industrie et du Commerce et ne rendait pas justice non plus aux six fonctionnaires dont on parle.

M. PAUL: C'est pour cela que j'ai posé la question.

M. LEVESQUE: Certainement. Je vous en remercie. Il est normal qu'il y ait des mutations et des changements dans un ministère où il y a un si grand nombre d'employés, comme dans tous les ministères, d'ailleurs.

J'avais dit, au cours de l'étude des crédits, que cinq fonctionnaires étaient passés soit au gouvernement fédéral ou à la Communauté urbaine de Québec. J'avais expliqué que les offres qui leur avaient été faites étaient supérieures à celles qu'il nous était permis de faire par la fonction publique. Il n'y a rien d'irrégulier. D'ailleurs, ces gens travaillent encore avec nos officiers parce que tout le monde travaille pour le développement industriel de la province.

Quant au cas de M. Paquin, il s'agit d'un cas isolé. M. Paquin était un excellent fonctionnaire. D a fait un excellent travail à l'Office du crédit industriel. Je suis bien à l'aise. Je n'étais pas là lorsqu'il a été nommé. En 1970, lorsque je suis arrivé, j'ai fait sa connaissance. Je l'ai trouvé extrêmement sympathique et, d'après le travail qu'il faisait, j'ai trouvé que c'était un homme efficace.

Par contre, il m'a confié lui-même, à ce moment-là, sans vouloir entrer dans les choses intimes, qu'il avait toujours l'idée de retourner dans l'entreprise privée. C'était une question de mentalité, une question d'adaptation à la vie du fonctionnarisme. Par la suite, particulièrement lorsqu'il a été question de mettre fin à l'Office

du crédit industriel et d'amener la Société de développement industriel du Québec, il m'avait confié qu'il aimerait être relevé de ses fonctions.

Je lui avais dit: II serait mieux que vous restiez pour la période de transition parce que la Société de développement industriel est l'héritière de l'Office du crédit industriel. Il y a nombre de dossiers à passer d'un endroit à l'autre. Nous avons besoin de vos services pour cette période de transition.

Et nous avons convenus, ainsi. Cependant, je dois dire que le président de la Société de développement industriel, M. Plourde ne m'a pas encore informé lui-même du désir de M. Paquin de quitter la société bien que j'en ai été personnellement été mis au courant. Maintenant, M. Paquin prendra le temps nécessaire et nous aussi. Nous avons convenu que nous nous assurerions d'un remplaçant, etc. Cela a été fait dans l'ordre depuis plusieurs mois. Que voulez-vous? Cela arrive et ce sont des choses qui peuvent encore se produire.

M. SAMSON: Est-ce que c'était un péquis-te? Cela débarrasserait !

M. LEVESQUE: Je ne pense pas.

Regroupement des fermes

M. DUMONT: Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Nous apprenons ce matin de source sûre que le ministre de l'Agriculture d'Ottawa voudrait procéder au regroupement des fermes non rentables y compris celles de la province de Québec. Est-ce que le ministre de l'Agriculture a été consulté sur cette possibilité du regroupement des fermes dans le Québec?

M. TOUPIN: M. le Président, cette politique du gouvernement fédéral a été proposée à la dernière réunion des ministres de l'Agriculture des provinces, l'an dernier. Elle fera l'objet d'un des articles de la prochaine conférence des ministres de l'Agriculture. Quant à nous, nous avons déjà fait valoir notre point de vue. Nous sommes en principe d'accord sur une politique fédérale générale sur ce qu'on appelle le rajustement en agriculture. Mais nous avons clairement fait valoir au ministre de l'Agriculture du gouvernement fédéral que nous avions sur le territoire québécois à peu près tous les instruments requis pour faire un travail de réajustement de l'agriculture, y compris le regroupement des fermes, etc. D'autres provinces ont fait valoir également leur point de vue qui allait à peu près dans le même sens que celui exprimé par le Québec. Après la réunion des ministres de l'Agriculture prévue pour la semaine prochaine, je serai beaucoup plus en mesure de vous donner la position précise que nous prendrons à ce moment-là.

M. BELAND : Est-ce que le ministre pourrait nous dire quelle est sa position précise à ce sujet du regroupement des terres du Québec?

M. TOUPIN: Je pense que je l'ai dit, M. le Président. Nous sommes en principe d'accord sur une politique générale canadienne. Nous avons fait valoir clairement nos points de vue soit que nous sommes équipés au Québec pour faire ce travail.

M. DUMONT: Une question supplémentaire, M. le Président. Le ministre de l'Agriculture pourrait-il rendre public le mémoire qu'il a présenté concernant ce regroupement des fermes du Québec?

M. TOUPIN: Oui, M. le Président, je pense que je vais rendre public ce document que nous préparons pour cette réunion des ministres de l'Agriculture du Canada.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

Usine Price à Alma

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désire poser une question au premier ministre. Le premier ministre a-t-il reçu, du Conseil central des syndicats nationaux du Saguenay-Lac-Saint-Jean, un télégramme lui demandant son intervention à propos de la fermeture temporaire de l'usine de la Société Price à Alma?

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai communiqué avec M. Morin, je crois, qui m'avait envoyé un télégramme mais ce n'était pas sur cette question-là...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard. Vous avez reçu le télégramme de M. Girard.

M. BOURASSA: ...c'était plutôt sur l'ensemble du problème de l'industrie des pâtes et papier. J'avais discuté à ce moment-là avec M. Morin qui est président ou officier du syndicat de l'endroit. Quant à ce télégramme particulier, je vais vérifier aujourd'hui.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, une question additionnelle. A la suite de la réception du télégramme de M. Claude Girard, du Conseil central des syndicats nationaux, télégramme dont j'ai reçu copie, est-ce que le premier ministre du Québec — il pourra s'enquérir auprès de ses autres collègues — est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce, est-ce que le ministre du Travail ont reçu de M. Jean-Noël Tremblay, député de Chicoutimi, un télégramme demandant au premier ministre et à ses collègues d'intervenir dans le cas de la fermeture temporaire de l'usine Price à Alma, télégramme qui leur a été expédié hier à trois heures de l'après-midi?

M. BOURASSA: On ne m'a pas encore remis le télégramme du député de Chicoutimi, M. Jean-Noël Tremblay, mais aussitôt qu'on le fera, ça me fera plaisir d'en prendre connaissance.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, est-ce que le premier ministre du Québec pourrait engager des négociations avec M. Jean-Noël Tremblay, député de Chicoutimi, au sujet de la fermeture temporaire de l'usine Price à Aima?

M. BOURASSA: Je prends avis de la question, M. le Président.

Usine de l'Anglo Pulp

M. BELAND: Est-ce que le premier ministre pourrait également nous dire s'il est vrai que la compagnie Anglo Pulp s'apprêterait à faire à peu près la même chose vers le mois de septembre?

M. BOURASSA: Je n'ai pas été informé en ce sens-là, M. le Président, mais on est au courant du malaise de l'industrie des pâtes et papier actuellement.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.

Dégâts dans la Beauce

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à poser au premier ministre pour faire suite aux questions que je lui ai posées à deux reprises cette semaine. Est-ce que le premier ministre pourrait me donner des informations ce matin, concernant l'intention du gouvernement?

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai dit au député, hier soir, que j'essayais d'entrer en communication avec les fonctionnaires à qui j'avais demandé d'étudier la question le plus rapidement possible. Comme il était tard et pour des raisons que le député connaît, je n'ai pas pu discuter jusqu'à maintenant avec les fonctionnaires. Je vais essayer de les rejoindre aujourd'hui, si je peux m'absenter de la Chambre.

M. ROY (Beauce): Est-ce que le premier ministre, même s'il n'a pas eu un rapport complet de la situation, pourrait nous donner l'assurance que le gouvernement du Québec est disposé à faire quelque chose pour venir en aide à ces personnes sinistrées qui ont subi des dommages considérables à leur propriété?

M. BOURASSA: M. le Président, il faut quand même que j'attende le rapport qui est fait, pour savoir si c'est arrivé dans d'autres cas où le gouvernement a donné de l'assistance, mais il faut que j'aie les éléments essentiels du rapport et de la situation avant de prendre une décision; je ne peux pas m'engager aveuglément.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Louis.

Mort de milliers de poissons à Valleyfield

M. BLANK: J'ai une question à poser au ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement. Est-ce que le gouvernement a une explication sur la mort de milliers et de milliers de poissons dans la région de Valleyfield, et si oui, qu'est-ce qu'il pense faire?

M. GOLDBLOOM: C'est le 22 juin que des milliers de poissons ont été trouvés morts dans la rivière Saint-Charles, dans la région de Valleyfield. Le 24 juin, suite à des renseignements fournis par le Club sportif des chasseurs et pêcheurs du lac Saint-François et par la Fédération québécoise de la faune, des biologistes du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche se sont rendus sur les lieux et ont fait une évaluation de la situation.

Ils ont trouvé que le taux d'oxygène dans l'eau de la rivière était à une partie par million seulement tandis qu'il en faut au moins cinq et de préférence six à huit pour que les poissons restent vivants. Donc, la cause immédiate est connue, mais la cause principale ne l'est pas encore.

Le lendemain, des télégrammes ont été envoyés et la Régie des eaux du Québec a reçu un appel. Malheureusement, il y a eu malentendu. Un de nos meilleurs fonctionnaires qui a reçu l'appel a cru bon de répondre par téléphone qu'il avait l'impression que c'était à cause d'un débit très faible d'eau dans la rivière, que les poissons étaient morts. Cette réponse n'a pas satisfait les pêcheurs de la région et à juste titre.

On sait que la pollution de cette rivière est causée en partie par les égouts sanitaires des municipalités avoisinantes. Une ordonnance qui a été émise par la Régie des eaux du Québec exige la construction d'un collecteur qui réglera en partie ce problème. Mais là aussi nous ne sommes pas convaincus que nous avons décelé la cause. On a constaté que l'eau était rouge...

M. PAUL: Ce n'est pas surprenant que les poissons soient morts.

M. GOLDBLOOM: Nous soupçonnons donc une source industrielle de pollution, mais les industries de la région nient avoir diversé quoi que ce soit.

Nous n'acceptons pas ces réponses préliminaires, M. le Président.

Je tiens à dire que j'ai envoyé un télégramme en réponse aux chasseurs et pêcheurs qui disent qu'ils ont l'intention de descendre dans les rues. Je leur ai envoyé ce télégramme, dont je fais lecture: "Suite aux communications que vous m'avez envoyées, j'ai ordonné une enquête. Les

rapports préliminaires ne me satisfont pas et j'ai demandé une enquête plus complète et plus approfondie. Vous déclarez, dans votre télégramme du 7 juillet, à M. Gérard Cadieux, que vous savez qui est responsable de la mort des poissons. Je vous prie de me fournir toutes les informations que vous possédez pour que notre enquête en vérifie la justesse. Si l'enquête révèle une cause autre que naturelle, cette cause serait intolérable, et nous n'entendrons pas la tolérer. Le rapport sera rendu public dès que complété."

Je tiens à dire, M. le Président, que si l'on se propose de descendre dans la rue, et que si en même temps on possède des renseignements que l'on ne fournit pas au gouvernement pour lui permettre de faire l'enquête complète et nécessaire, je pense qu'on n'agit pas de façon responsable. Je demande publiquement aux pêcheurs de la région de Valleyfield de fournir incessamment au gouvernement, les renseignements qu'ils possèdent pour nous permettre de vérifier complètement cette situation malheureuse.

M. LE PRESIDENT: M. Paul.

M. PAUL: Une question additionnelle, M. le Président. Je voudrais féliciter l'honorable ministre pour s'être conformé d'une façon tout à fait exemplaire aux dispositions de l'article 687 de notre règlement qui dit que toute réponse doit être brève.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Mines Molybdenite

M. SAMSON: M. le Président, je voudrais poser une question au ministre des Richesses naturelles. Je voudrais savoir s'il pourrait nous faire une déclaration ce matin, concernant les développements de négociations pour les deux mines, Preissac Molybdenite et Molybdenite de La Corne. Je crois qu'il y a eu des négociations assez sérieuses ces jours-ci. Est-ce que vous seriez en mesure, ce matin de nous faire une déclaration?

M. MASSE (Arthabaska): Depuis une semaine, j'ai l'occasion de répondre à une même question du député de Rouyn-Noranda.

Très peu de développement se sont produits à l'exception qu'il y a eu ouverture des soumissions pour la mine Preissac. Aucune soumission ne fut présentée, étant donné que le minimum était fixé à $1.5 million. D'autre part, il semble bien que ce soit le créancier principal, c'est-à-dire la compagnie Metal and Ore qui ait à reprendre la mine pour l'exploiter de nouveau. Quant à la condition essentielle, qui est toujours la même, celle de trouver un financement de $2 millions, à ce jour, malheureusement je n'ai pas de nouvelle plus récente à donner au député de Rouyn-Noranda. Je sais cependant que le comité d'urgence qui devait se réunir mercredi ou jeudi devait rencontrer M. Sampson, le président de Metal and Ore, afin d'explorer toutes les possibilités de réouverture de la mine Preissac et l'augmentation de la production, comme on l'a déjà dit dans cette Chambre.

M. SAMSON: Dans le cas de la Molybdenite de La Corne est-ce que vous avez des développements?

M. MASSE (Arthabaska): Dans le cas de la Molybdenite également, plusieurs investisseurs possibles ont été contactés par le président de la compagnie et par les fonctionnaires de mon ministère. Dans au moins une occasion des ententes ont failli être conclues. Mais je sais que des négociations se poursuivent avec des entreprises privées qui, semble-t-il, pourraient peut-être être intéressées à rouvrir la mine Molybdenite.

M. SAMSON: M. le ministre, est-ce que vous envisagez la possibilité, le cas échéant, de voir à ce que ces mines puissent être rouvertes en étant exploitées conjointement par certains entrepreneurs et par les employés?

M. MASSE (Arthabaska): Je pense, M. le Président, qu'il appartient au comité d'urgence de nous faire des recommandations dans ce sens et, comme on en avait discuté privément avec le député de Rouyn-Noranda, j'attends les recommandations que le comité en question pourra nous faire sur ce sujet précis, cette méthode d'exploitation.

Fermeture d'une mine d'amiante

M. DUMONT: Une question au ministre des Richesses naturelles. Tout près de son comté, soit à Thetford-Mines, une mine d'amiante fermera ses portes le 31 décembre prochain, mettant à pied 131 ouvriers. Est-ce que le ministre a considéré la possibililté d'ouvrir une mine dans les environs afin de réengager ces ouvriers?

M. MASSE (Arthabaska): II n'appartient pas au ministère des Richesses naturelles d'exploiter une mine. D'autre part, je sais que dans la mine dont il fait état, c'est-à-dire la mine Flinkote, une partie des employés mis à pied seraient, selon mes informations, réengagés par la mine Asbestos. D'autre part, pour les mineurs qui ne trouveraient pas d'emploi, on sait qu'il reste jusqu'à la fin de l'année pour tenter de leur trouver une nouvelle occupation. Je pense qu'il appartient davantage au ministère du Travail d'effectuer ce travail.

M. LE PRESIDENT: Affaires de jour.

Question de privilège Hausse du prix du lait

M. LE PRESIDENT: Avant de passer aux affaires du jour, l'honorable député de Maisonneuve aimerait soulever une question de privilège dont il m'a donné avis hier.

M. BURNS: Merci, M. le Président. Ma question de privilège concerne une réponse qui a été faite par le ministre de l'Agriculture hier au député de Nicolet. Le député de Nicolet avait posé au ministre de l'Agriculture une question relativement à l'existence ou à la non-existence d'une ordonnance de la Régie des marchés agricoles concernant l'augmentation du prix du lait. Me référant à la réponse qui a été donnée hier par le ministre, on lit ceci: "L'Association des industriels laitiers avait fait cette demande d'une augmentation du prix du lait. J'ai rencontré hier le président de la régie" — en l'occuren-ce, si on se reporte au moment où ces paroles-là ont été dites, comme je l'ai compris, c'était bien le 8 juillet 1971 — J'ai donc rencontré hier le président de la régie. "Nous en avons discuté quelque peu et il doit me donner aujourd'hui, au cours de l'après-midi, la décision qui a été prise." Evidemment, la régie prend d'abord ses décisions. Je ne sais pas si elle les a prises présentement de façon définitive".

C'est cette dernière phrase qui fait la base de ma question de privilège, relié au fait qu'immédiatement avant la suspension de la Chambre vers 12 h 30, le ministre est revenu en disant que l'ordonnance avait été rendue le 6 juillet.

Or, comme membre de cette Chambre, j'ai trouvé difficile à comprendre que le ministre ait pu rencontrer le président de la régie le 8 juillet, qu'il ait discuté du problème avec lui et qu'il n'ait pas su à ce moment-là que, le 6 juillet, une ordonnance avait été rendue.

Je soulève la question de privilège afin que le ministre puisse se justifier et effacer tout doute dans notre esprit à l'effet que le ministre aurait voulu tromper la Chambre. J'espère et je pense que ce n'est pas le cas. Je veux donner au ministre la chance de se justifier sur ce point.

M. TOUPIN: Effectivement, j'ai rencontré le président de la régie. Nous avons discuté de ce problème d'augmentation des prix du lait, mais je n'ai pas demandé au président de la régie si les régisseurs s'étaient réunis et avaient pris une décision finale. Je dois préciser que notre discussion a porté sur la requête que les producteurs — j'avais donné cette réponse-là, je pense, à une question du député de Nicolet, à savoir si les producteurs allaient toucher une augmentation — j'ai discuté un peu avec le président de cette partie de la question. Il m'a dit qu'une décision serait prise incessamment à compter de cette requête.

Néanmoins, le président de la régie n'est pas tenu de dire au ministre quand une décision est prise concernant une ordonnance de la régie. C'est la raison pour laquelle le lendemain, soit hier, à la demande du chef de l'Opposition officielle, j'ai téléphoné à la régie et les responsables m'ont donné de façon précise la date à laquelle les régisseurs s'étaient réunis et avaient pris la décision de changer l'ordonnance concernant le prix minimum du lait.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. Demande d'ajournement

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, en vertu de l'article 188, je désire proposer l'ajournement de la Chambre pour discuter d'une affaire grave et urgente, c'est-à-dire l'ordonnance émise le 6 juillet dernier par la Régie des marchés agricoles, qui autorisait une hausse du prix du lait allant jusqu'à $0.04 la pinte.

M. LEVESQUE: Ce n'est pas le genre de sujet, M. le Président, qui peut faire l'objet d'une motion exceptionnelle comme celle-là.

M. BURNS: Laissez-le s'exprimer.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Sur la gravité de la question, M. le Président, je veux simplement souligner que cette hausse frappe tous les Québécois, les pauvres comme les riches, et que le montant est estimé entre $8 millions et $16 millions.

Sur l'urgence, M. le Président, je veux souligner que l'ordonnance entrera en vigueur le 19 juillet et que nous n'aurons pas l'occasion de débattre cette question d'ici l'ajournement de l'été. Si, M. le Président, la Chambre voulait demander au gouvernement de prendre des mesures spéciales sur ce sujet, elle n'aura pas d'autre occasion que de le faire présentement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! à l'ordre! Je suis prêt à rendre ma décision immédiatement.

Je considère qu'il s'agit d'une question très importante, qui a des implications économiques sur tous les consommateurs du Québec. C'est un problème, sans aucun doute, qui est urgent et grave. Mais, en vertu du règlement, il est bien reconnu qu'il s'agit de décider s'il est grave et surtout urgent d'en discuter à ce moment-ci.

Pour l'honorable député de Sainte-Marie et tout autre membre intéressé au problème de l'agriculture, au problème des producteurs de lait, au problème des consommateurs également, il y aura une occasion beaucoup plus appropriée, pour discuter de ces questions lorsque le comité de subsides se formera, ou encore à la reprise du débat sur la motion du ministre des Finances pour que la Chambre se forme de nouveau en comité des voies et moyens. C'est donc dire que vous aurez au moins deux, sinon plus d'occasions pour pouvoir discuter de cette question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II y a 25 sujets à discuter.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. LEVESQUE: Article 4.

Projet de loi no 50

M. LE PRESIDENT: Formation du comité plénier.

Comité plénier

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire, pour l'honorable premier ministre, propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier.

Cette motion est-elle adoptée?

M. Robert Burns

M. BURNS: M. le Président, avec votre permission, selon la directive que vous m'avez donnée hier, il semblerait que ce soit à ce moment-ci que je puisse faire motion pour que le bill no 50 soit déféré à la commission parlementaire.

La raison qui m'incite à faire cette motion est à l'effet que nous considérons que nous avons besoin d'un maximum d'informations, afin de juger, sur une base sérieuse, solide et étayée, la valeur de la création de cette Société de développement de la baie James qui fait l'objet du bill 50.

Selon nous, de multiples questions sont demeurées sans réponse, tant au cours du débat qu'au cours de la commission parlementaire qui avait précédé. Nous croyons qu'il est nécessaire, avant que la Chambre ne se prononce définitivement sur l'opportunité d'adopter ce projet de loi, que des spécialistes puissent venir répondre à des questions que les membres de cette Chambre pourraient se poser relativement à la création de la Société de développement de la baie James, que les membres de cette Chambre puissent obtenir ce qu'on appelle la vérité scientifique. Je pense que, peut-être sauf quelques exceptions, en cette Chambre, aucun membre ne prétend pouvoir en arriver facilement à la vérité scientifique relativement à ce problème de la création de la Société de développement de la baie James.

Le projet intéresse plusieurs ministères. On a déjà parlé du ministère des Richesses naturelles, du ministère des Terres et Forêts, de la Chasse et de la Pêche, etc. Nous croyons que la commission qui devrait en prendre connaissance et à qui le projet de loi no 50 devrait être déféré, est la commission de la présidence du conseil.

Alors, en conséquence, M. le Président, appuyé par le député de Bourget, je désire proposer, conformément à l'article 560 de notre règlement, que le bill 50 soit déféré à la commission de la présidence du conseil.

DES VOIX: Vote.

M. LE PRESIDENT: ... que ce soit déféré à la commission permanente...

M. BURNS: ... de la présidence du conseil.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: M. le Président, comme vient de le dire mon collègue, le député de Maisonneuve, nous sommes d'avis qu'avant de pouvoir nous prononcer sur un projet de l'importance de la loi 50, il faut que nous possédions le maximum d'informations. Ceci afin que nous puissions porter sur ce projet de loi extrêmement important un jugement étayé et valable. Or, de multiples questions qui se rapportent au projet de loi et à tout le projet ont été posées avant, pendant la discussion et sont, jusqu'ici, restées sans réponse.

Ces questions, c'est aux spécialistes dans les divers domaines concernés qu'il convient de les poser, afin d'obtenir d'eux les réponses qui rencontrent les critères de vérité scientifique.

Pour ce faire, il faut que ces spécialistes viennent à la barre d'une commission parlementaire et fournissent aux élus du peuple tous les renseignements qu'ils requièrent.

Parmi ces questions encore pendantes, mentionnons les suivantes: D'abord, toutes celles qui touchent le coût, la production de l'électricité.

Le mandat de la filiale hydro-électrique est-il de harnacher les trois rivières du sud, c'est-à-dire le complexe Nottaway — Broadback — Rupert ou les deux rivières du nord, Eastmain et La Grande? Est-ce de procéder à l'aménagement complet de toutes les ressources hydroélectrique du territoire ou de s'en tenir à quelques-unes? Dans l'un ou dans l'autre cas, par où commencerons-nous les travaux, par le nord ou par le sud?

Le mandat serait-il plus restreint et ne comporterait-il que la première phase du projet NBR quitte à ce que soient poursuivies ultérieurement les autres étapes, après un réexamen complet de la question? Je me permets de souligner, M. le Président, que les différences de mandat, à ce niveau, ont des répercussions assez considérables. Est-ce que par le projet de loi no 50, nous engageons le Québec dans la voie de dépenses de $1.8 milliard, ce qui est le coût qu'on nous a donné de la première étape à la commission parlementaire ou de $4.1 milliards, ce qui est le coût complet de l'aménagement des trois rivières NBR ou de $6.5 milliards, ce qui serait le coût de l'aménagement complet des cinq rivières et peut-être même davantage? Avant de signer le chèque en blanc, nous aimerions au moins avoir une petite idée du montant en jeu.

En d'autres termes, est-ce que nous créons

une filiale qui aura pour tâche de produire 1.3 million de kW, ou 5.3 millions de kW ou encore plus de 10 millions de kW? La question n'est pas non plus sans intérêt car elle conditionne toute la planification énergétique pour les vingt prochaines années au Québec. J'ai une autre série de questions qui portent, cette fois, sur l'aménagement des ressources hydro-électriques. Ces questions sont directement reliées à la conception, à l'aménagement et à l'exploitation des ressources hydro-électriques de la baie James. Quels instruments seront utilisés par la filiale pour effectuer la conception_

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je dois interrompre à ce stade-ci le député de Bourget. Il semble vouloir traiter du principe du bill alors que, sur cette motion, tout ce que je peux lui permettre c'est de connaître ses arguments en vue d'éclairer la Chambre. Je voudrais savoir pourquoi le proposeur de la motion, et ceux qui parlent sur cette motion, désirent que ce projet de loi soit étudié par la commission permanente du conseil de la présidence et non pas par le comité plénier. C'est uniquement ça qui m'intéresse.

M. LAURIN: Oui, M. le Président. Nous acceptons maintenant, bien sûr, le principe de la création de la société. Pour savoir quel genre de société, pour savoir quel mandat elle aura, pour savoir les modalités de fonctionnement de cette société, il nous semble qu'il faudrait, pour éclairer justement notre opinion là-dessus, que nous ayons des réponses à toutes sortes de questions qui les unes touchent l'hydro-électricité, les autres les forêts, les autres les mines, afin que nous puissions voir à l'aide des questions et des réponses que nous aurons et des experts que nous pourrons entendre, l'intégration des facteurs socio-économiques dont on doit tenir compte pour les discussions ainsi que pour les décisions qui auront à être prises.

Il nous semble, qu'avant d'en arriver à la nécessité de l'intégration de l'étude de ces facteurs, il importe de procéder par l'analyse de chacun des secteurs. Avant d'en arriver à la synthèse, il faut procéder par la voie analytique. C'est la raison pour laquelle, dans un premier temps, je veux parler de l'étude des différents secteurs, des questions que nous aimerions poser là-dessus et, dans un deuxième temps, montrer que ces facteurs ne peuvent être conçus isolément. Ils ne peuvent être conçus que par rapport à un tout. C'est la raison pour laquelle nous aimerions que ce problème soit étudié surtout à la commission de la présidence du conseil plutôt qu'à la commission des Richesses naturelles, étant donné que le projet comporte des incidences qui bien sûr, pour certaines d'entre elles et peut-être parmi les plus importantes, touchent les richesses naturelles. Il y en a beaucoup d'autres qui touchent d'autres secteurs et c'est la raison pour laquelle je procède de cette façon.

Donc, quant aux questions qui portent sur l'aménagement des ressources hydro-électriques, nous aimerions avoir des réponses sur les questions suivantes: Quels instruments seront utilisés par la filiale pour effectuer la conception et la réalisation des projets? L'entrepreneur général serait-il exclusivement 1'Hydro ou des firmes privées d'ingénieurs qui pourront effectuer la surveillance des chantiers et déterminer les spécifications techniques de l'appareillage à utiliser?

Autre question qui met directement également en jeu l'avenir de l'Hydro: Est-ce qu'on laissera, pendant les dix ou quinze ans que durera la réalisation du projet, l'Hydro rester sur place à attendre son concurrent? Il serait peut-être bon de rappeler que l'Hydro est probablement... Il ne faudrait pas que cela nous glisse des mains et il faudrait, pendant que cette nouvelle société existe, avec les modalités qu'on lui donnera, prévoir justement pouvoir poser des questions sur les mécanismes de coordination entre cette société qui existe actuellement et les liens qu'elle pourra avoir au niveau de la conception, au niveau de la recherche, au niveau de l'exécution des travaux ainsi qu'au niveau de la surveillance de même qu'au niveau de toutes les conséquences qui s'ensuivent, c'est-à-dire le maintien d'un réseau de distribution et de vente.

Il s'agit de voir, à l'aide des questions que nous pourrions poser à des spécialistes, comment cette intégration pourra être faite afin d'assurer la stabilité technique du réseau, afin de pouvoir assurer la distribution du courant électrique sans perte et sans danger de panne. Il y a là des questions techniques, je crois, que nous aurions le devoir et le droit de poser à des gens qui pourraient véritablement nous éclairer. Je tiens à vous signaler, M. le Président, que ces quelques dernières phrases que je viens de prononcer ne sont pas exactement de mon cru puisqu'elles ont été prononcées dans un discours à Rimouski, le 14 décembre 1969, en rapport avec le débat sur l'opportunité de confier à l'entreprise privée la construction de Manic 3 par celui qui était alors candidat à la "cheffe-rie" du Parti libéral, c'est-à-dire l'actuel premier ministre.

Je repose donc la question: Quel serait le rôle de l'Hydro-Québec dans les phases de conception et de réalisation du projet? Quel rôle aurait-elle? Ce rôle serait-il le premier ou serait-il réduit à fournir une aide aux firmes privées qui pourraient avoir reçu le mandat de réaliser ce projet pour sa plus grande partie?

Autre série de questions sur lesquelles nous aimerions avoir des réponses, M. le Président, c'est le calendrier et le rythme des travaux. Nous ignorons en effet qui, aux termes de la loi 50, aura le véritable pouvoir de fixer le calendrier des travaux et éventuellement de modifier ce calendrier afin que les diverses phases du projet soient coordonnées avec les variations des besoins d'électricité ou les autres projets qui

pourraient être mis en chantier. Sera-ce l'Hydro-Québec comme telle qui est la plus à même d'analyser l'évolution des besoins en électricité? Sera-ce la filiale ou sera-ce la nouvelle société dont on vient d'accepter le principe de la création?

Dans ce dernier cas, une autre question essentielle doit être posée, qui demeure toujours sans réponse: Quels seront les liens entre la société mère et la filiale, quel sera le degré d'autonomie de la filiale par rapport à la société mère? La filiale sera-t-elle obligée d'accélérer ses travaux si la société mère éprouvait des difficultés de financement et désirait produire de l'électricité dans les plus brefs délais, même si le Québec n'en avait pas besoin à ce moment-là, ou au contraire, l'autre hypothèse, est-ce que la filiale serait obligée, par exemple, de ralentir ses travaux, sur ordre de la société mère, si la filiale forestière était en retard sur son calendrier de coupe de bois dans les régions à être inondées?

Ceci nous permet de toucher du doigt à quel point il est impensable de considérer une phase du projet sans en considérer l'autre, à quel point il est impossible d'envisager ce qui va se passer dans un secteur, celui de 1'hydro-électricité, sans nous demander ce qui va se passer d'une façon concurrente, particulièrement dans le secteur forestier où la poursuite des travaux conditionne la poursuite des travaux dans d'autres secteurs.

C'est là une autre raison pour laquelle nous croyons à la nécessité de l'étude intégrée de tout le problème à une des commissions, qui peut seule poursuivre ces études d'intégration.

D'autres questions, M. le Président, auxquelles nous n'avons pas eu de réponses, portent sur la rentabilité. C'est peut-être la question la plus fondamentale, à laquelle nous aurions besoin d'avoir des réponses, avant de nous prononcer sur quelque modalité que ce soit, du projet. C'est celle qui sous-tend toutes les questions et celle, au fond, qui aura la plus grande importance pour la population du Québec.

Ces questions, M. le Président, nous voulons bien croire qu'on a essayé d'y répondre jusqu'ici. Mais les réponses qui ont été données nous paraissent, ou fragmentaires ou superficielles. Nous voulons bien croire, par exemple, que l'ingénieur en chef de l'Hydro-Québec a déclaré, à la lumière d'études préliminaires, que le projet semblait rentable, en se référant à la lettre de M. Cahill, du 30 avril. Cela ne nous suffit pas. Nous avons déjà demandé et on ne nous a pas donné de réponse, qu'on dépose toutes les études de rentabilité, qu'on fasse comparaître les ingénieurs de firmes privées qui ont effectué d'autres études de rentabilité, ainsi que des experts canadiens ou américains qui ont eu à mener des études analogues. Nous avons demandé cela, M. le Président. On n'a pas cru bon de répondre à nos questions. Pourtant voici arrivé le moment où il nous faut absolument ces réponses. Seuls des techniciens peuvent vrai- ment nous donner ces réponses. Nous en avons besoin pour étudier d'une façon véritablement scientifique et valable les modalités de fonctionnement, aussi bien de la société mère que des filiales, aussi bien les rapports qui devront être institués entre ces filiales et la société mère. En effet, nous ignorons encore, jusqu'ici, M. le Président, le coût exact en mills de l'électricité qui peut être produite à la baie James, sur les trois rivières inférieures, et surtout sur les deux rivières supérieures. Nous ignorons le coût exact du kilowatt installé, soit du complexe NBR ou soit des deux rivières du nord. Nous ne sommes pas les seuls à ignorer ces éléments fondamentaux car les études sur le terrain, comme on l'a dit plusieurs fois au cours des débats, ne seront pas terminées avant septembre, en ce qui concerne les trois rivières du sud, et avant peut-être plusieurs autres longs mois pour les rivières du nord. Nous savons, cependant, M. le Président...

M. BOURASSA: Tout cela est étudié, M. le Président...

M. LAURIN: ... que depuis la discussion...

M. BOURASSA: Du placotage, du blablabla...

M. LAURIN: ... on a continué de faire des études sur les rivières du nord. Cela fait déjà un mois et demi que ces études se poursuivent, en même temps que sur celles du sud. Il serait très intéressant pour les membres de l'Opposition...

M. BOURASSA: Tout cela a été discuté, M. le Président.

M. LAURIN: ... que l'on puisse avoir des spécialistes pour commenter ces études, afin de savoir quels sont les résultats préliminaires auxquels ils sont arrivés, aussi bien en ce qui concerne la rentabilité propre du projet, que le coût éventuel des projets qui pourraient en être la suite. C'est pourquoi, nous demandons que la commission parlementaire soit convoquée, afin que nous puissions poser des questions à ces spécialistes, à ceux qui sont en autorité pour nous les donner et afin que nous soyons en mesure d'étudier les structures, les modalités de fonctionnement de ces structures.

M. BOURASSA: Tenez votre temps.

M. LAURIN: Nous avons aussi d'autres questions, M. le Président, en ce qui concerne le financement, qui touchent bien sûr aux études de rentabilité, mais qui ont un aspect plus proprement financier et qui nous paraissent également fondamentales. Nous l'avons d'ailleurs signalé à plusieurs reprises. Par exemple, comment le gouvernement entend-il financer le projet?

M. BOURASSA: Ecoutez, M. le Président, où sont les députés?

M. LEVESQUE: Quand le député se retourne, il n'en reste plus un en arrière de lui.

M. LACROIX: Je les comprends, il est tellement ennuyant !

M. LAURIN : Quel sera la dette per capita? Nous avons entendu, bien sûr, quelques réponses mais c'étaient des réponses très vagues, qui engageaient l'avenir de certaines sociétés, mais d'une façon morale, beaucoup plus que technique. Maintenant que le principe du projet de loi est adopté, comme disent les américains: "we must to brass tacks". Nous devons avoir des précisions, beaucoup plus exactes, beaucoup plus documentées, beaucoup plus étendues. Comment le gouvernement entend-il financer dans les détails et jusqu'au bout, jusqu'au dernier sou...

M. BOURASSA: Tout des petits détails.

M. LAURIN: ... le capital du Québec?

Est-ce qu'il entend puiser dans les réserves de l'Hydro-Québec? Est-ce qu'il entend exiger de celle-ci qu'elle augmente considérablement ses taux pour faire payer le projet par la population? Est-ce qu'il entend aller sur le marché américain, et si oui, dans quelle proportion? Et alors, devra-t-il engager toute sa vie le crédit de la province?

M. BOURASSA: M. le Président, le député n'est pas sérieux.

M. LAURIN: ... devra-t-il donner la garantie de l'Hydro?

M. BOURASSA: Le député se discrédite aux yeux de l'opinion publique.

M. LAURIN: II serait vraiment paradoxal qu'on demande la garantie de l'Hydro après qu'on ait limité son rôle. Faudra-t-il, pour satisfaire les exigences des bailleurs de fonds étrangers, que la société leur garantisse un profit, quel que soit le coût de l'électricité produite? L'Hydro devrait-elle s'engager à acheter en bloc toute la production d'électricité au cas où elle n'aurait pas le rôle de maître-d'oeuvre? Si oui, à quelles conditions devrait-elle acheter ces blocs d'électricité? Quelle serait la part du financement provenant de l'autofinancement par l'Hydro-Québec au cas où, encore une fois, elle aurait un rôle plus important à jouer dans la future société? Quelle serait la part qui viendrait des marchés financiers américains? Quelle serait la part provenant d'avances du gouvernement puisque le projet de loi prévoit à un de ses articles des avances du gouvernement? Dans ce dernier cas, ces montants proviendraient-ils d'emprunts, d'émissions d'obligations ou d'augmentations de taxes?

Voilà en somme, M. le Président, un exemple des questions que nous aimerions poser. Ce sont des questions techniques, ce sont des questions délicates et il faudrait que nous ayons quand même des réponses à ces questions car, autrement, comment pourrons-nous discuter des modalités d'exécution, des modalités de structures, des modalités de fonctionnement des filiales et de la société mère? Comment pourrons-nous nous faire une idée des relations à tous les niveaux, sur tous les secteurs qui peuvent exister entre cette société et ses filiales?

Nous avons besoin d'avoir une réponse à ces questions avant même que nous puissions discuter d'une façon valable et scientifique.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement. Je m'en excuse auprès du député de Bourget.

Le député de Bourget demande au premier ministre de nous donner des renseignements.

M. BOURASSA: II n'en aura pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le premier ministre assis déclare tout de suite: Vous n'en aurez pas, vous n'en aurez pas. Est-ce que c'est ça le gouvernement responsable?

M. BOURASSA: Oui.

M. LACROIX: Certainement.

M. BOURASSA: C'est ça un gouvernement qui veut gouverner et qui va gouverner, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela veut dire, M. le Président, que...

M. BOURASSA: Cela veut dire ce que ça veut dire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela veut dire que le gouvernement... le premier ministre nous a répondu, lorsqu'on lui a demandé des renseignements: Vous n'en aurez pas de renseignements.

M. LE PRESIDENT: J'aimerais faire remarquer à l'honorable député de Chicoutimi qu'il vient de violer d'une façon flagrante le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, c'est le premier viol de ma vie.

M. LE PRESIDENT: En ce début de séance, en ce début de journée où nous avons des travaux sûrement très importants à accomplir,

j'inviterais non seulement l'honorable député de Chicoutimi mais tous les membres de cette Chambre à se garder de tels viols.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je m'en excuse. Mais vous m'aviez accusé de viol, je vous ai dit que c'était le premier de ma vie. Je m'en confesse.

M. LACROIX: Cela ne fera pas des enfants forts, M. le Président.

M, LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, il est un autre secteur sur lequel nous voudrions avoir des renseignements avant de pouvoir discuter d'une façon valable les articles en comité plénier. Ces questions touchent à l'exportation, encore une fois, du courant électrique produit. Est-ce que le gouvernement considère toujours l'exportation d'énergie de base comme une hypothèse sérieuse, après ce que nous avons entendu à la commission parlementaire? Dans ce cas, des contacts ont-ils été établis avec des acheteurs éventuels, et si oui, à quel point en sont rendus ces contacts et quels sont les résultats que ces contacts ont donnés? Est-ce qu'ils ont simplement donné lieu à des assurances morales ou est-ce qu'ils ont donné lieu à des engagements précis?

M. SPRING ATE: Le président est en avant.

M. LAURIN: Et si ce sont des engagements précis...

M. SHANKS: Il parle à la tribune.

M. LAURIN: Est-ce qu'on pourrait en savoir les montants et jusqu'à quel point ces engagements peuvent s'étaler dans le temps et jusqu'à quel point ils peuvent comporter déjà des aspects techniques? N'y a-t-il pas danger à ce moment-là si les contacts ont été pris, s'ils ont été fructueux — il faut se poser la question — n'y a-t-il pas danger que le Québec subventionne ainsi — jusqu'à quel point — le développement de ses voisins en consentant lui-même des investissements considérables qu'exige la production d'énergie et ensuite en revendant cette énergie à des pays voisins? On sait que la rentabilité produite par les ventes des courants électriques est très faible comparativement à ce qui peut se produire dans d'autres secteurs. Si des transactions devaient être faites avec l'étranger, le seraient-elles par l'Hydro ou par la nouvelle société étant donné qu'on ne sait pas encore exactement quels seront les rapports qui régiront la société mère et l'Hydro-Québec.

M. BOURASSA: Je l'ai dit hier.

M. LAURIN: Quelle est la part de l'énergie produite qui irait à l'exportation étant donné que nous savons que certains prétendent qu'on peut en exporter beaucoup et que d'autres, dont les spécialistes de l'Hydro que nous avons entendus, disent que toute la production de la baie James suffirait à peine aux besoins du Québec jusqu'en 1984. Il y a là des questions que seuls les techniciens peuvent éclaircir et sur lesquelles les parlementaires doivent avoir des lumières très précises avant de pouvoir se prononcer sur les articles de ce projet de loi extrêmement important.

Délaissant maintenant le champ de l'hydroélectricité pour entrer dans un autre des secteurs qui sera couvert par le projet de loi, celui des forêts, on peut se demander quel est le pourcentage de bois qui pourrait être récupéré de façon rentable. Je lisais un article, il n'y a pas très longtemps, où on disait que seulement la moitié des 13,500,000 cordes de bois pourrait être récupérée étant donné les caractères de cette forêt, étant donné le rythme des travaux. Nous avons besoin de savoir dans quelle proportion ce bois pourrait être récupéré. Ceci peut avoir une extrême importance sur tout le marché du bois d'abord, étant donné la crise que connaît actuellement l'industrie des pâtes et papier, étant donné aussi les conséquences écologiques que ceci peut avoir lorsqu'on laisse du bois pourrir dans l'eau, étant donné également tout ce que nous savons sur les opérations antérieures de Rexfor afin que l'on puisse se rassurer sur la façon dont seront traitées ces millions de cordes de bois qui seront récupérées par Rexfor.

Une autre question à laquelle seuls les spécialistes peuvent nous répondre. Est-ce qu'on envisage de transformer au moins une partie de ce bois sur place? Nous savons qu'il y a des usines pas loin, à Lebel-sur-Quévillon. Est-ce que des arrangements et des contacts ont été pris avec la compagnie Domtar aussi bien pour la coupe de ce bois que pour le transport de ce bois, que pour la transformation de ce bois sur place et éventuellement pour la mise en place d'une nouvelle industrie de transformation du bois?

Quelle quantité donc de bois pourra-t-on récupérer? Sur quel marché prévoit-on l'écouler? A-t-on fait des études de marché qui permettraient de savoir si le bois peut être écoulé sans que cela devienne du dumping? Ne risque-t-on pas de porter un très dur coup aux petits producteurs de bois dont la situation est déjà si alarmante, quand on connaît toutes les protestations dont on a souvent des échos ici en Chambre de la part des offices de producteurs de bois, de telle ou telle ou telle région qui n'arrive que très difficilement à écouler leur production auprès des grandes compagnies forestières?

M. BOURASSA: Démagogue!

M. LAURIN: Ce n'est pas de la démagogie,

ce sont des questions auxquelles nous faisons écho ici très souvent aussi bien des offices de producteurs de bois de la rivière du Sud que ceux du Saguenay et d'autres régions. C'est une situation très alarmante à l'heure actuelle. Est-ce qu'on a pris des précautions? Est-ce qu'on a pris déjà des mesures pour empêcher que cette situation ne devienne davantage alarmante et au contraire, pour profiter de cette occasion, pour faire une planification à l'échelle de tout le Québec de la production du bois, de sa transformation? Encore une fois, quelle sera l'influence de toutes ces opérations forestières très importantes — puisqu'il s'agit de 13,500,000 cordes de bois — sur le prix du bois? Est-ce qu'il n'y aurait pas danger d'en arriver à une sorte de dumping à partir de cette région sur tous les autres marchés existant avec les conséquences extrêmement désastreuses que cela pourrait avoir sur les industries déjà installées et qui vivent déjà dans une situation extrêmement précaire?

Il nous semble, M. le Président, simplement en ce qui concerne les forêts, en ce qui concerne l'aspect industriel et l'aspect commercial du secteur des forêts, qu'il y a là des questions extrêmement importantes, auxquelles seuls des spécialistes soit des ministères concernés, soit appartenant au milieu industriel, peuvent apporter des réponses. Sans parler, comme je le disais tout à l'heure, de l'aspect écologique de la question qui doit être édudié de la façon la plus approfondie possible, surtout à la lumière des expériences qui ont été faites ailleurs, dans d'autres pays, de ces vastes projets qui, si on n'y prend garde, peuvent amener des conséquences dont seulement nos héritiers pourront subir les effets malencontreux par suite de notre manque de prévision.

Dans un autre secteur, M. le Président, celui des mines, il est aussi extrêmement important d'avoir des réponses aussi bien aux questions que nous nous sommes posées jusqu'ici qu'aux autres questions que nous aurions encore à poser.

Evidemment, on a parlé et on parle encore beaucoup du développement minier éventuel qui peut avoir lieu dans ces régions. Mais y a-t-il eu, jusqu'ici, une prospection sérieuse de tout cet immense territoire? Là-dessus, nous aimerions bien entendre les spécialistes du ministère des Richesses naturelles et aussi des représentants de la Société d'Etat Soquem. Est-il exact que les cartes géologiques ne seront terminées que dans quelques années, comme le disait le ministre des Richesses naturelles il n'y a pas très longtemps, lorsque nous discutions de ses crédits à la commission des Richesses naturelles?

A-t-on étudié, également, la qualité des gisements? On nous a dit, très vaguement, qu'il y avait des gisements de zinc, de cuivre, peut-être d'amiante, peut-être de pétrole, également, mais où en sommes-nous rendus dans la prospection de ces études? Est-ce simplement le fruit d'études menées en avion ou par reconnaissance aérienne ou est-ce le fruit d'un travail fait par des prospecteurs qui, d'une façon scientifique et sur le terrain, ont mené ces études? A quel point ces études sont-elles rendues? Il serait très important pour nous de le savoir. En somme, est-ce qu'on a étudié l'ampleur, l'étendue, la qualité de ces gisements? Est-ce que leur rentabilité, par rapport au coût du transport, au coût d'extraction, est maintenant assurée? Si elle n'est pas assurée, quelles études devons-nous encore mener pour que nous puissions en arriver à prouver, d'une façon valable ou même éventuelle, cette rentabilité?

A-t-on l'intention de confier la prospection de cet immense territoire exclusivement à Soquem ou veut-on intéresser les entreprises privées à cette prospection qui devrait, de toute façon, se poursuivre durant quelques années, étant donné l'ampleur du territoire? A-t-on prévu de confier l'exploitation des gisements éventuels à des entrepreneurs privés? Si oui, que faut-il penser de la réaction au projet de loi que nous étudions de la Fédération des producteurs miniers du Québec qui semble manifester une très grande inquiétude?

Voilà, M. le Président, un certain nombre de questions qui touchent le domaine des mines, qui nous paraissent extrêmement importantes, qui peuvent avoir une grande influence sur le succès relatif, absolu ou lamentable du projet puisque, dès le départ, on a voulu intégrer le développement de toutes les richesses naturelles de la région. Il est donc très important pour nous que nous ayons, de la part des spécialistes et des autorités intéressées, des réponses aux questions que nous avons posées afin d'avoir dans la tête une sorte de schéma global de toute la situation et que ceci infléchisse le jugement que nous serons amenés à porter sur chacun des articles de ce projet de loi.

Encore une fois, M. le Président, nous n'avons pas eu l'occasion dans le passé d'avoir des réponses aux questions que nous posions. Et là, à cette heure fatidique où l'approbation finale devra être donnée au projet de loi, il importe que nous ayons ces réponses afin de pouvoir nous faire une idée exacte de toutes ces études et des résultats qu'elles ont donnés.

Une autre série de questions, M. le Président, porte cette fois sur les structures administratives. Ce projet de loi que nous venons maintenant d'adopter en deuxième lecture, dans les circonstances que l'on sait, nous paraît encore une fois assez vague pour qu'il puisse nous amener à poser de très nombreuses questions sur les structures qu'elle met en place et sur leurs modalités de fonctionnement.

Par exemple, quels seront les rapports entre la société de développement et ses filiales? Celles-ci seront-elles autonomes ou seront-elles complètement assujetties aux directives de la société mère? Quels seront les rapports entre la Société et ses filiales, d'une part et, So-quip, Soquem et Rexfor et l'Hydro-Québec,

d'autre part? Quel lien existera-t-il entre la société de développement et les ministères intéressés? Un article dans le projet de loi portait là-dessus mais il était, encore une fois, très général. Il faudrait, avant que nous puissions l'étudier d'une façon précise, que nous ayons une idée de ce qui a été prévu, sur les liens qui pourraient exister entre cette société extrêmement puissante et tous les ministères intéressés, notamment celui des Terres et Forêts, celui de l'environnement, celui de la Voirie et celui du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

Ces rapports entre la filiale et la société mère, entre la société mère et les ministères nous paraissent extrêmement importants à élucider, surtout quand on se rend compte qu'un très grand nombre des interventions qui ont été faites au cours de ces 23 ou 24 heures de débat ont porté précisément sur ces questions et c'est là-dessus que les inquiétudes les plus vives ont été suscitées.

A toutes ces questions s'ajouteraient d'ailleurs d'autres questions qui concerneraient par exemple les Indiens de la baie James, qui concernerait l'environnement, le rôle de l'Hydro-Québec au cours des dix prochaines années, surtout dans l'éventualité où elle n'aurait pas le rôle clef dans ce développement, la politique d'achat que la société de développement devra mettre de l'avant. Même si on nous dit que les règlements devront être acceptés par le lieutenant-gouverneur en conseil, il reste qu'il serait important pour nous de nous rendre compte des intentions du gouvernement en ce qui concerne la politique d'achats que cette future société de développement devrait mettre de l'avant, la manière dont les contrats seraient accordés par la société de développement, par ses filiales. Par exemple, y aurait-il des soumissions publiques? A quelles règles seront soumises les offres? Toutes ces questions sont très importantes et nous aimerions savoir, étant donné qu'il y a une politique du gouvernement que nous connaissons, dont on nous a fait part très souvent en cette Chambre, jusqu'à quel point le gouvernement changera de politique, infléchira sa politique ou, au contraire, gardera la même politique et nous donnera l'assurance morale que cette politique sera instaurée dans cette nouvelle société d'Etat comme elle a existé dans d'autres sociétés d'Etat.

A toutes ces questions, M. le Président, nous n'avons pas trouvé réponse, ni dans les nombreux documents que nous avons poursuivis depuis que l'annonce de ce projet a été faite, ni dans les discours de l'équipe ministérielle, ni dans les documents mis à notre disposition par les divers ministères lors de l'étude des crédits. C'est la raison pour laquelle il nous apparaît absolument essentiel, fondamental, de soumettre ce projet de loi à la commission, la commission qui pourra convoquer tous les témoins, qui pourra exiger la production de tous les documents, de toutes les études, qui pourra, en un mot, fournir à la population et aux députés les informations qui leur manquent actuellement afin de leur permettre de donner un peu d'étoffe à ce projet dont l'impréparation — je ne veux pas y revenir — nous a frappés. Il nous semble, qu'au point de vue analytique, il y a beaucoup d'informations qui nous manquent, que nous pourrions avoir, que seuls des techniciens, en certains cas, peuvent nous donner et d'autre part, que tous les mécanismes de coordination, d'intégration des divers ministères, des diverses filiales, des divers organismes d'Etat ont été très pauvrement élucidés. Nous voudrions poser toutes ces questions qui touchent aussi bien chacun des secteurs que leur intégration, leur coordination. C'est la raison pour laquelle non seulement nous désirons que ce projet soit renvoyé en commission mais qu'il soit renvoyé à la commission de la présidence du conseil, de qui relève en particulier l'Office de planification. Nous aimerions, en effet, que l'Office de planification et de développement du Québec participe d'une façon étroite, d'une façon constante aux travaux de cette commission de la présidence du conseil, aussi bien à cause du rôle et du mandat qu'il a mais aussi à cause des études que lui-même a pu avoir menées soit du point de vue théorique sur le concept même de planification, soit également au point de vue pratique, dans toutes les études qu'il a pu mener dans les diverses régions du Québec.

Il a mené des études en particulier dans une région connexe au Grand-Nord québécois, c'est-à-dire dans la région de l'Abitibi. Les spécialistes de l'Office de planification pourront ainsi éclairer les membres des divers partis sur ces études, sur leurs concepts, sur les aspects pratiques des missions qui leur ont fait rapport. Tout cela afin que les députés aient une meilleure idée de ce que c'est qu'une véritable planification, une véritable intégration, une véritable coordination, afin que les sommes immenses, que le Québec sera appelé à dépenser dans ce domaine, le soient avec la certitude la plus mathématique possible, dans le meilleur intérêt collectif des Québécois. Je vous remercie, M. le Président.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Montmagny.

M. Jean-Paul Cloutier

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais parler très brièvement sur la motion du député de Maisonneuve qu'a appuyée le député de Bourget et dire que nous appuyons cette motion de déférer l'étude du projet de loi no 50 à une commission parlementaire.

La principale raison que je voudrais invoquer à l'appui de cette motion, M. le Président, c'est que nous n'avons certainement pas reçu depuis le début de ce débat, en deuxième lecture,

toutes les réponses que nous aurions été en droit d'avoir sur un projet de loi aussi important.

Pour ma part, je n'ai pu suivre tout le débat en deuxième lecture ayant été retenu, à certains moments, par les travaux d'autres commissions parlementaires. J'ai pris la peine de relire le journal des Débats depuis que nous avons commencé l'étude du projet de loi no 50 et je me suis appliqué surtout à voir si, dans les interventions des députés ministériels, on avait réellement touché le fond du problème et si on avait pris le souci de répondre aux interrogations qui ont été posées de bonne foi de ce côté-ci de la Chambre.

M. le Président, je ne crois pas que, sur un projet de loi aussi important qui va engager, d'après les prévisions qui ont été lancées, pour $6 milliards du crédit de la province et de ses régies gouvernementales — ce qui veut dire en pratique environ $1,000 par citoyen du Québec — je ne crois pas, M. le Président, que nous ayons pris pour étudier ce projet de loi toutes les précautions, que nous ayons fait place à toute la discussion qui normalement entoure les projets de loi de cette importance. Nous n'avons qu'à nous référer, pour un instant, à la façon dont nous étudions d'habitude en cette Chambre des projets de loi importants, que ce soit dans le domaine de la santé, dans le domaine des affaires sociales, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine du travail. Qu'est-ce que l'on fait, M. le Président, à ce moment-là? Le gouvernement, et on a eu des exemples hier, propose que nous nous réunissions devant une commission parlementaire, pour étudier toutes les implications du projet de loi, particulièrement, M. le Président, à l'occasion du projet de loi no 50, où là, on va entrer le plus avant dans le domaine économique.

Avec ce projet de loi, qui traduit en pratique un engagement collectif du Québec, on veut, avec sa mise en pratique mobiliser toutes les ressources, toutes les énergies des Québécois pour le développement de ce vaste territoire. Je crois, pour ma part, que ce n'est pas dans l'atmosphère de cette Chambre, ici, où nous avons assisté depuis quelques jours à des discussions dans lesquelles est intervenue bien plus souvent la passion que la discussion objective du fond du problème, mais davantage en commission parlementaire, moyennant un cadre bien précis que l'on pourrait tracer et non pas en s'en allant à l'aventure, que devrait se faire le travail.

J'écoutais tantôt le député de Bourget nous tracer tout un programme, poser toute une série de questions. J'ai l'impression que malgré le nombre de ses questions, il en aura peut-être oublié et qu'il en trouvera d'autres, M. le Président.

M. LEVESQUE: Oh, oui!

M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne vou- drais pas, M. le Président — et ce n'est pas le sentiment des députés de cette Chambre — que nous allions à une commission parlementaire pour parler de n'importe quoi, n'importe comment. Nous irions suivant un cadre, un plan de travail bien précis. Je crois savoir, par les conversations que j'ai eues avec certains députés, que les ministres qui sont ou qui seront en pratique directement touchés par l'application de cette loi, auraient, eux aussi, une contribution extrêmement positive et importante à fournir devant cette commission parlementaire.

Si nous n'allions pas en commission parlementaire, si nous n'avions pas la chance d'en discuter posément, objectivement, à quel moment pourrions-nous, en cette Chambre, reparler du projet de la baie James, sinon après que cette société aura déposé annuellement son rapport à la Chambre? On sait comment cela se passe, le dépôt annuel d'un rapport d'une commission ou d'une société à la Chambre. Même s'il est possible de réunir une commission, à quel moment pourrons-nous véritablement effectuer un travail d'évaluation, un travail de révision, de discussion sur les étapes qui auront été franchies?

Pour ma part, je suis toujours d'avis qu'une fois ce projet de loi adopté, c'est la meilleure et j'oserais dire la seule et unique chance que nous ayons de discuter sérieusement les implications de cette législation. Je n'en prends qu'un exemple:

Le ministre des Finances qui s'engage et qui engage son gouvernement pour $100 millions, $10 millions par année pendant dix ans. Nous aurons certainement l'occasion au cours de l'étude de ses prévisions budgétaires de poser des questions sur cet engagement de $10 millions qui relèvent de son ministère. Qui nous dit, M. le Président, au moment présent, qu'est-ce qui prouve à cette Chambre que ce sera le seul engagement direct du gouvernement durant tout le temps où se poursuivront les travaux de la baie James? Cette mise de fonds inscrite dans la législation actuelle de $100 millions sera-t-elle suffisante? Qu'est-ce qui nous dit, M. le Président, que le plan de financement auquel on a songé, lequel a certainement commencé à être discuté dans les milieux financiers, va se matérialiser? Est-ce que ce sera celui-là qui sera retenu en pratique? Le gouvernement ne devra-t-il pas moyennant certaines conditions y revenir avec une injection additionnelle de capitaux?

A ce moment-là, M. le Président, quelle serait la réaction Ides autres ministres du gouvernement? Ces $100 millions auxquels s'ajouteront peut-être d'autres fonds directs venant de la province, qui seront requis directement pour le développement de ce projet, créeront certainement, M. le Président, une pression assez considérable sur le développement normal et les programmes normaux des autres ministères gouvernementaux.

M. le Président, c'est un exemple que je vous ai donné du genre de questions que nous

pourrions discuter devant la commission parlementaire. Pourquoi cette commission parlementaire de la présidence du conseil? Entre toutes les commissions parlementaires, nous n'avons pas besoin de nous interroger longuement, il y a tellement de ministères impliqués, tellement de régies gouvernementales impliquées directement ou indirectement par ce projet de loi no 50 que la commission parlementaire de la présidence ou du conseil me semble être la commission parlementaire toute indiquée.

M. le Président, j'entendais tantôt une réflexion du premier ministre. Il a dit au député de Bourget marquant un peu un signe d'impatience que le gouvernement était élu pour gouverner et que le gouvernement prendrait ses responsabilités. Je ne voudrais pas en ce moment soulever un débat avec le premier ministre sur cette attitude qui nous surprend un peu. Je comprends, dans l'atmosphère du débat, atmosphère enfiévrée, après plusieurs jours de discussions, que le premier ministre et ses collègues voudraient voir adopter le plus rapidement possible ce projet de loi.

Malgré la longueur de ce débat fait dans des circonstances un peu difficiles, il est important pour les membres de cette Chambre qui sont ici pour traduire les inquiétudes, pour demander des informations, pour se faire les interprètes de la population en général, que le gouvernement laisse la latitude — et là je ne veux pas dire qu'on ne l'a pas laissée — à l'Opposition de s'exprimer. Nous le faisons cependant dans des conditions extrêmement difficiles.

Mais il est important que le gouvernement ne néglige rien, aucun mécanisme, aucune procédure, qui pourrait faire qu'une fois ce projet de loi adopté, même si nous ne sommes pas d'accord sur certains principes, même si nous ne sommes pas d'accord sur des modalités, même si nous ne sommes pas d'accord sur les étapes que l'on a décidées pour la mise en oeuvre de ce chantier...

Il serait important que tous les membres de cette Chambre, à quelque parti qu'ils appartiennent, à quelque idéologie qu'ils appartiennent, puissent de bonne foi obtenir tous les renseignements qu'ils veulent avoiry tous les renseignements qui nous permettront de nous faire l'opinion la plus juste et la plus éclairée possible sur ce programme qui nous est proposé par le gouvernement.

M. le Président, je fais un appel particulier au premier ministre et à ses collègues malgré l'interprétation qu'on pourrait en donner — de ne pas retenir que la partie péjorative de ce débat, de ne pas retenir que les longueurs de ce débat, pour interpréter faussement notre attitude et notre sens des responsabilités à ce moment-ci. Je crois que l'on doit voir plutôt dans notre attitude l'aspect positif. D faut y voir que nous avons conscience que c'est là un projet de loi important et que nous voulons obtenir les renseignements les meilleurs possibles, une fois que nous aurons passé au travers de cette législation, même si nous ne sommes pas complètement d'accord. Même si nous avons dit que sur le développement de la baie James, sur le programme, sur le principe du développement nous étions d'accord, nous avions de fortes réserves sur les modalités, et je crois que l'intervention du chef de l'Opposition, l'intervention de mes collègues en deuxième lecture, l'intervention des autres membres de l'Opposition ont fortement démontré que nous étions capables d'apporter à l'appui de notre dissidence des arguments sérieux.

Je suis certain aussi que d'autres membres de l'équipe ministérielle, malgré cette solidarité, je suis certain que, de l'autre côté de la Chambre, certains ne sont pas parfaitement d'accord non plus sur les modalités qu'on a retenues pour ce projet de loi. Mais quand le projet de loi sera adopté...

DES VOIX: C'est faux!

M. CARPENTIER: Vous n'avez pas le droit de présumer de nos intentions.

M. CLOUTTER (Montmagny): M. le Président, j'ai été dans une équipe ministérielle, je sais comment ça se passe.

Je serais fort surpris que tous les députés du gouvernement, dans leur for intérieur, soient complètement d'accord sur cette législation. Dans les législations que nous avons adoptées durant quatre ans, même si à certains moments nous n'avons pas exprimé publiquement une dissidence, nous aurions peut-être préféré d'autres modalités. Nous l'avons fait par esprit de solidarité, solidarité ministérielle, pour conserver ensemble le dynamisme et le succès des législations, des programmes d'une politique gouvernementale. C'est essentiel. Dans l'Opposition, nous avons tout ce loisir d'exprimer des dissidences et de dire pourquoi nous sommes dissidents. Mais une fois que le projet de loi sera adopté, même si nous avons montré notre dissidence en Chambre, ce que je veux dire au gouvernement, c'est que nous resterons des Québécois. Nous nous sentons profondément impliqués dans le développement de ce vaste territoire. Nous sommes aussi fiers que n'importe quel membre de cette Chambre. Que le gouvernement réussisse cette opération mais s'il veut que, nous aussi, nous embarquions dans cette opération, et que nous puissions défendre même à ce moment-là une loi qui a été appuyée, qui a été passée, qui a été adoptée ici en cette Chambre, et que nous puissions en faire ressortir davantage les beaux côtés, en faire ressortir davantage les lignes de force, il est important que nous ayons tout le loisir de nous exprimer même si c'est à l'intérieur d'une commission parlementaire. C'est la raison pour laquelle j'appuie cette motion du député de Maisonneuve.

M. PAUL: M. le Président, il est 12 h 30 et nos règlements prévoient une suspension à cette heure.

M. SAMSON: Est-ce que je peux demander la suspension du débat?

M. LE PRESIDENT: Conformément à la motion adoptée, je dois déclarer la séance suspendue à 2 h 30 de même que le débat.

Reprise de la séance à 14 h 30

M. HARDY (président): A l'ordre, messieurs!

L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Camille Samson

M. SAMSON: M. le Président, quelques brèves remarques sur la motion actuellement en discussion. Nous, membres du Ralliement crédi-tiste, avons eu l'occasion, en deuxième lecture, de faire connaître notre point de vue de façon assez complète. Nous avons étudié ce bill avec la plus grande objectivité possible. De ce fait, nous avons rencontré le désir des électeurs que nous représentons.

Inutile de vous dire, M. le Président, que nous avons eu beaucoup de communications en provenance des électeurs de nos différents comtés sur ce sujet qui est de la plus haute importance. Etant les porte-parole de nos électeurs, nous croyons que nous avons le devoir de dire ici ce que nos électeurs nous ont demandé de dire. C'est pourquoi nous avons, dès la deuxième lecture, fait connaître notre accord de principe sur le développement de cette immense région de la baie James. Evidemment, nous avons aussi fait connaître l'urgence d'effectuer ce développement.

Les différentes raisons que nous avons invoquées ont été les suivantes: nous connaissons actuellement, au Québec, une vague de chômage assez importante. Nous avons déjà plusieurs...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. DUMONT: C'est un préambule.

M. LE PRESIDENT: Je veux bien, de même que nous l'avons fait pour l'honorable député de Bourget et pour l'honorable député de Montmagny, manifester beaucoup de latitude. Mais il n'en reste pas moins vrai que le débat doit porter sur l'opportunité que la loi soit étudiée devant une commission parlementaire.

Le député de Rouyn-Noranda doit dire aux membres de cette Chambre quelles sont les raisons pour lesquelles le projet de loi devrait ou ne devrait pas être déféré à une commission parlementaire mais non pas reprendre, évidemment, le débat de deuxième lecture sur cette loi.

M. SAMSON: M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, je crois nécessaire de donner ces explications pour justifier...

M. DROLET: Continuez!

M. SAMSON: ...l'attitude que nous devrons prendre vis-à-vis de la motion. Je n'ai pas du tout l'intention de reprendre le débat de

deuxième lecture. Je trouve qu'il a déjà été trop long.

C'est en vertu des explications que j'ai données que nous croyons utile de faire savoir que, dès la deuxième lecture, nous avons réclamé la convocation d'une commission parlementaire en présence des faits que nous avions devant nous à ce moment-là, c'est-à-dire en présence du bill 50 tel qu'il nous apparaissait. Pourquoi avions-nous demandé la convocation de la commission parlementaire? Parce que nous croyions, à ce moment, que les différents groupes ou les différents agents de l'économie et de l'industrie auraient dû être entendus, mais, pour bien m'expliquer, j'ai fait aussi, à ce moment-là, lecture de revendications en provenance de ces différents corps de l'industrie et de ces différents agents de l'économie.

Si nous l'avons fait à ce moment-là, c'est par crainte de ne pouvoir obtenir, évidemment, la convocation de la commission parlementaire.

Nos demandes ou les témoignages de ces différents agents de l'économie et de l'industrie ne sont pas tombés dans l'oreille de sourds. Nous avons été entendus et c'est avec joie qu'à la fin de la deuxième lecture nous avons entendu le premier ministre nous faire part d'amendements qu'il avait l'intention d'apporter en comité plénier.

Cela explique pourquoi nous avions réclamé, à ce moment-là la convocation de la commission parlementaire. Maintenant, la situation est quelque peu changée, étant donné qu'on nous a fait part des amendements qu'on veut apporter en comité plénier, et, surtout, parce que nous avons eu, depuis la deuxième lecture, c'est-à-dire depuis hier soir, de multiples communications avec les électeurs de nos comtés et les représentants d'associations. Le résultat de ces communications est tel qu'on réclame de nous que ce projet puisse être adopté dans les plus brefs délais.

M. le Président, on nous a demandé à nous, de ne pas faire d'obstruction, surtout pas d'obstruction systématique. C'est ce que nos électeurs nous ont demandé, et nous avons été élus, M. le Président, par le désir de nos électeurs, pour les représenter et nous avons le devoir de répéter ici exactement ce qu'on nous a demandé de faire.

Or, puisque nos électeurs nous ont demandé de ne pas faire d'obstruction, de procéder, puisque la deuxième lecture est maintenant faite, nous ne voyons pas à ce moment-ci ce que pourrait apporter de nouveau, étant donné les changements, je l'explique bien, qu'on a manifestés, le fait de vouloir reporter le projet à une commission parlementaire. Nous croyons qu'en comité plénier, il nous sera permis de pouvoir manifester nos objections s'il y a encore des objections. Toutefois, nous basant sur les amendements qui ont été promis hier soir et sachant que ces amendements vont donner satisfaction aux différents agents économiques et industriels que nous avons tenté de représenter avec toute la force que nous avons, sachant tout cela, M. le Président, et sachant aussi que la population, surtout étant donné la vague de chômage extraordinaire, a d'abord et surtout faim, nous n'avons, je pense, pas d'autre attitude à prendre que de lui permettre dans les plus brefs délais d'obtenir les emplois qui pourront être créés avec ce projet.

Evidemment, il y a, comme dans tous les projets, plusieurs points techniques, mais les gens qui sont en chômage, M. le Président, s'attendent à ce que des membres de l'Assemblée nationale prennent des décisions dans les plus brefs délais, leur permettant de ne plus être en chômage, ces gens-là qui ont faim, permettez-moi l'expression, M. le Président, se foutent des technicités. C'est pour ces différentes raisons et voulant être conséquents avec nous-mêmes, avec les électeurs que nous représentons et voulant satisfaire aux demandes de ces électeurs, voulant également être conséquents avec notre propre programme électoral, qui préconisait le développement de ces richesses immenses que nous possédons, M. le Président.

Pour toutes ces raisons — je pourrais en énumérer encore plusieurs mais je ne crois pas opportun d'allonger davantage le débat — quant à nous, nous voterons contre la motion présentée par le député de Maisonneuve.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. Jean-Noël Tremblay

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, pour les mêmes raisons évoquées par le député de Rouyn-Noranda, nous appuyons la proposition présentée par le député de Maisonneuve. Nous sommes, nous aussi, représentants des électeurs. Nous avons reçu un mandat de ces électeurs, nous sommes attentifs à ce que pensent, à ce que nous disent ces électeurs, mais, avant que d'approuver un projet de loi, avant que les électeurs nous disent exactement ce qu'ils en pensent, il est important qu'ils sachent, du gouvernement, quels sont les tenants et aboutissants de ce projet de loi.

Par conséquent, invoquant les mêmes arguments que le député de Rouyn-Noranda, je dis qu'à ce stade-ci du débat nous n'avons pas le droit de présumer d'une opinion qui n'est pas éclairée et qui, par conséquent, ne peut pas être celle de nos électeurs. Les relations qui s'établissent entre les électeurs et le député vont dans les deux directions. Il faut que, d'une part, nous sachions ce que pensent nos électeurs. Comment les citoyens du Québec, les électeurs de tout le Québec en l'occurence, peuvent-ils être renseignés adéquatement à propos d'un projet de loi au sujet duquel le gouvernement ne nous a encore rien dit de façon précise? Voilà pourquoi, M. le Président...

M. BOURASSA: Oh! ce n'est pas exact.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... nous ne pouvons pas, nous, nous livrer. Nous ne pouvons pas accepter de transiger avec le gouvernement en une matière aussi sérieuse. Nous ne pouvons pas nous rendre à des arguments sentimentaux, nous ne pouvons pas nous rendre à des arguments électoraux en prétextant, en pensant, en présumant que nous pourrions être mal jugés par nos électeurs en nous opposant à un projet de loi qui, aux dires du premier ministre, doit créer 125,000 nouveaux emplois.

Nous sommes d'accord sur l'objectif, nous l'avons dit et répété, mais, précisément pour nous acquitter de notre mandat, précisément pour nous faire les porte-parole ae nos électeurs, nous avons besoin d'obtenir du premier ministre et de ceux qui l'assistent, tous les renseignements utiles.

M. BOURASSA: En comité plénier.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, on peut très bien déclarer sans aucune sorte de preuves, qu'au cours de la nuit, nos électeurs nous ont fait connaître leur opinion sur le projet de loi qui est devant la Chambre. Comment nos électeurs pourraient-ils connaître mieux ce projet de loi que nous, alors que nous qui sommes ici depuis au-delà d'une semaine à en discuter, n'en savons encore rien?

M. BOURASSA: Parce que vous ne voulez pas.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, on se demande alors, quelle est la logique de certaines gens qui ont changé tout à coup de clan, hier soir. C'est pourquoi, je veux appuyer la proposition du député de Maisonneuve, parce que le premier ministre n'a pas encore accepté de faire la genèse du projet de loi, de nous dire, d'abord, à quel moment s'est située la décision du gouvernement. Sur quoi se fonde le jugement du gouvernement? En vertu de quelles orientations politiques, économiques ou sociales, le gouvernement a-t-il décidé de faire cette option? Nous avons demandé et supplié le gouvernement de nous renseigner. Pour ce faire, le gouvernement n'avait qu'un moyen, celui d'accepter de convoquer une commission parlementaire, ainsi que le demande le député de Maisonneuve. Cette commission parlementaire nous donnerait l'occasion, fournirait au gouvernement l'occasion de nous permettre d'entendre des témoins utiles.

M. BOURASSA : II y a eu convocation de la commission parlementaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le premier ministre dit: "II y a eu convocation de la commission parlementaire." C'est exact.

M. BOURASSA: Bon!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais il faut bien situer le moment où cette commission parlementaire a été convoquée. La commission parlementaire a été convoquée à la demande expresse du député de Missisquoi, appuyé par d'autres collègues de cette Chambre, alors que le Parti libéral du Québec, avait annoncé à grand renfort de publicité, le lancement du projet de la baie James. On s'est alors posé la question suivante: Pourquoi le gouvernement du Québec a-t-il fait le choix entre l'énergie électrique et l'énergie nucléaire? Afin de savon-pourquoi le gouvernement avait fait ce choix spécifique dans un ordre qui est rigoureusement scientifique, avec toutes les répercussions économiques que cela entraîne, nous nous sommes demandé alors pourquoi le gouvernement avait fait ce choix.

C'est aux fins de répondre à cette question que les spécialistes de l'Hydro sont venus devant la commission parlementaire et nous ont donné les raisons du choix entre l'énergie électrique et l'énergie nucléaire.

Le député de Missisquoi et moi-même étions alors à la commission parlementaire et nous avons déclaré a ce moment-là, que nous étions satisfaits des renseignements qui nous avaient été fournis par l'Hydro concernant le choix entre l'énergie électrique versus l'énergie nu-claire. Il s'agissait, à ce moment-là, d'une question de choix entre une option que je qualifie d'ordre scientifique. Mais il restait — nous l'avons dit à ce moment-là — des zones grises et nous avons dit: — je l'ai répété hier soir et je l'ai dit dans une intervention antérieure — Nous sommes satisfaits sous toute réserve d'un examen ultérieur de la question. Nous avions précisément déclaré ceci, à la fin des auditions de la commission parlementaire: Le gouvernement a fait un choix s'appuyant en cela sur des rapports de spécialistes dont ceux de l'Hydro-Québec et de certains bureaux d'ingénieurs.

Le premier ministre nous a dit: Nous allons maintenant procéder et nous allons présenter à la Chambre un projet de loi. C'est alors que le député de Missisquoi et moi-même avons déclaré qu'il s'agissait, dans la conception du projet de loi, d'un choix politique dont le gouvernement aurait à rendre des comptes en Chambre. Nous en sommes à ce stade-ci de la procédure, de la démarche du gouvernement en vue de l'aménagement hydro-électrique de la baie James.

Mais voilà que le projet de loi nous est présenté. Il ne correspond absolument pas à ce que nous attendions du gouvernement. Il ne correspond pas, M. le Président, aux orientations que le gouvernement du Québec a suivies depuis des années. Il ne correspond absolument pas à la vocation assignée à une société d'Etat, soit l'Hydro-Québec, depuis des années. C'est la raison pour laquelle nous demandons, encore une fois, comme l'a fait le député de Maisonneuve, la convocation d'une commission parlementaire aux fins de savoir maintenant pourquoi le gouvernement veut procéder de la façon dont il l'indique dans le projet de loi qui est devant nous.

II y a l'aspect scientifique, l'aspect économique, l'aspect financier du projet. Il y a ses conséquences sociales, ses conséquences politiques. Nous voulons connaître du gouvernement quelles sont ses orientations, pourquoi il voudrait créer au Québec une nouvelle régie, une nouvelle société. Je ne devrais pas employer le mot régie, puisqu'il s'agit en fait d'un nouveau gouvernement même pas d'une nouvelle société.

Le but de notre requête, lorsque nous demandons la convocation d'une commission parlementaire, c'est de savoir pourquoi le gouvernement, écartant toutes les sociétés d'Etat qui ont été créées par divers gouvernements du Québec, écartant tous ces mécanismes qui ont fonctionné, toutes ces sociétés qui ont fait leurs preuves, crée-t-il une nouvelle société.

A toutes les questions que nous avons posées, à toutes nos interrogations, nous n'avons pas obtenu de réponse. Qu'on ne vienne pas me dire, pour justifier une volte-face, que la petite déclaration qu'a faite le premier ministre hier soir, à la fin du débat en seconde lecture, disant qu'on proposerait des amendements, soit satisfaisante pour répondre à nos légitimes interrogations. Qu'est-ce qu'a dit le premier ministre? Il a dit qu'il apporterait des amendements. Quels amendements? Quelle en sera la substance? Est-ce que cela changera fondamentalement le principe de ce projet de loi, qui est mauvais, qui est tout au moins suspect? C'est cela qui nous incite à demander à nouveau la convocation d'une commission parlementaire pour que le gouvernement s'explique une fois pour toutes sur ce qu'il entend faire d'un sixième du territoire du Québec, mettant de côté tout ce qui existe, faisant litière des droits des citoyens.

Au lieu de cela, le gouvernement fait une déclaration d'intention en disant, par la voix du premier ministre: Nous allons présenter des amendements, comme on le ferait pour un projet de loi bénin et sans conséquences graves. Or, reprenant des termes qui ont été utilisés hier soir, le premier ministre nous a dit, parlant de ce projet d'aménagement, qu'il s'agissait d'un grand projet collectif. Et cela est important dans la conjoncture actuelle du Québec, conjoncture politique, économique et sociale.

En face de l'opposition qui lui a été faite — je dis bien de l'opposition, non pas de l'obstruction, qui a été faite, parce que ce que nous avons fait ce n'est pas de l'obstruction, c'est de l'opposition saine et une opposition légitime à un projet de loi qui, à notre avis, ne va pas du tout dans le sens des intérêts du Québec et ne constitue pas cette grande entreprise collective à laquelle on voudrait nous associer avant même que nous sachions exactement quel est l'objectif de cette entreprise collective en regard des intérêts de la collectivité québécoise — le premier ministre nous dit: Nous allons vous présenter des amendements. Quels amendements? Quelle en sera la substance? Dans quelle mesure ces amendements répondront-ils aux questions que nous avons posées? D'aucune façon parce que quels que soient les amendements que le premier ministre proposera, ils ne pourront se greffer que sur des articles bien précis du projet de loi.

Or, c'est l'ensemble du projet de loi que nous contestons dans son principe, dans ses modalités. Nous le contestons dans son principe non pas parce que nous refusons l'objectif que poursuit le gouvernement, soit le développement de la baie James, mais l'objectif que poursuit le gouvernement est vicié par les modalités qu'il a choisies pour le mettre en application, pour le réaliser ou pour l'actualiser.

Nous n'avons aucune donnée qui nous permette de justifier notre adhésion ou même notre refus au projet de loi. Comment pouvons-nous alors nous contenter de la déclaration d'intention du premier ministre? Certains pourront peut-être tirer argument d'un éditorial qui a paru dans un quotidien de ce matin disant que le gouvernement va probablement agir dans tel sens ou dans tel autre. Ce sont des conjectures et cela restera conjectures tant et aussi longtemps que le premier ministre ne nous aura pas fait connaître ces amendements qu'il propose d'apporter. Encore...

M. SAINT-PIERRE: En comité.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... quand ces amendements viendront devant nous, ils ne pourront quand même détruire le projet de loi. Ils ne pourront pas écarter le principe du projet de loi, ils ne pourront pas écarter les modalités du projet de loi qui sont aux fins de créer le grand mécanisme d'administration dont on se servira pour régir un sixième du territoire du Québec.

Je ne vois donc pas pourquoi le gouvernement met tant de pression, tant de précipitation à faire adopter ce projet de loi. Je ne comprends pas l'obstination, l'opiniâtreté du gouvernement à refuser de convoquer une commission parlementaire qui permettra, et pas simplement à nous, d'obtenir des renseignements mais qui permettra au gouvernement de se justifier devant l'opinion publique.

Je parle ici au nom des électeurs que je représente, au nom des électeurs d'une très grande région qui sera directement ou indirectement affectée par le projet de développement de la baie James. Il y a un député dans cette Chambre qui est particulièrement touché par le développement de la baie James.

Il y a un député, dans cette Chambre, qui se verra ravir les trois quarts de sa circonscription, si l'on met en application, comme cela est indiqué ici, le projet de développement de la baie James. C'est donc un homme concerné au premier chef. Quand on lui aura ravi les trois quarts de sa circonscription, il sera un quart de député. C'est ça qu'il va devenir, et il accepte d'être dépossédé, M. le Président. Il ne veut pas se joindre à nous pour demander la convocation

d'une commission parlementaire qui permettrait, à lui aussi, d'obtenir des renseignements.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis revenu à la motion, M. le Président, avant que vous ne vous leviez.

M. LE PRESIDENT: Depuis quelques secondes, sinon davantage, l'honorable député de Chicoutimi s'est écarté dans des voies plus ou moins régulières. Je comprends que son éloquence, sa maîtrise de la langue peuvent tromper la vigilance du président, l'enivrer même, mais cela n'empêche pas qu'à un moment-donné, devant un abus dans ce sens, je suis obligé de demander au député de Chicoutimi de revenir à l'objet de la motion, à savoir s'il y a opportunité ou non que cette loi soit étudiée en commission parlementaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je vous remercie de votre directive. Je disais que ce ne sont pas seulement tous les députés de l'Opposition qui sont intéressés à ce que cette commission parlementaire soit convoquée, mais je précisais qu'il y en avait un en particulier qui, plus que d'autres, devrait s'inquiéter des raisons qui justifient le gouvernement d'agir comme il entend le faire. C'est cela l'objet de la requête présentée par le député de Maisonneuve: obtenir qu'une commission parlementaire siège de sorte qu'il soit possible à tous les députés quels qu'ils soient et particulièrement à ceux qui sont plus immédiatement concernés de connaître toutes les raisons d'ordre économique, financier, politique, social de la décision du gouvernement.

On a, hier soir, M. le Président, fait des gorges-chaudes. On a prétendu que nous faisions de l'obstruction et on va le prétendre encore, parce que nous demandons d'être informés. Pensez-vous qu'en notre qualité de représentants du peuple nous avons le droit de voter aveuglément un projet de l'importance de celui-là, le projet du siècle? Pensez-vous que nous sommes disposés à accepter de devenir les naïfs du siècle, en suivant le gouvernement dans sa démarche avant qu'il nous ait renseignés comme nous lui demandons de le faire? Nous avons répété et répété cette demande, M. le Président, d'être informés. Qui nous a renseignés dans cette Chambre? Ni le premier ministre, ni le ministre des Finances, ni le ministre des Richesses naturelles, ni le ministre de l'Education. Aucun des ministres qui ont parlé au nom du gouvernement, en vertu de la solidarité ministérielle, ne s'est aventuré à nous dire exactement ce qui s'était passé au conseil des ministres, quelles avaient été les relations entre l'Hydro-Québec et le gouvernement, entre le gouvernement et les financiers intéressés, entre le gouvernement et les sociétés d'Etat qui sont impliquées dans ce projet de loi. Aucun d'eux ne s'est risqué à nous dire ce qui s'était passé.

Nous ne leur demandons pas de nous livrer des secrets d'Etat. Nous ne leur demandons pas, M. le Président, de déposer des documents qui ne seraient pas, pour l'instant, d'intérêt public, mais nous leur demandons le minimum, soit d'accepter que nous interrogions les personnes qui ont préparé ce projet de loi. Les personnes qui ont préparé ce projet de loi, M. le Président, vous le savez, c'est le gouvernement, mais ce sont les sociétés intéressées. Quand je dis "sociétés", je donne au mot son sens le plus large. Je parle des sociétés d'Etat et je parle de toutes les sociétés financières qui ont eu des contacts avec le gouvernement et qui sont peut-être, à l'heure actuelle, les organismes de pression les plus forts, et cela, au mépris des droits de la députation.

C'est ce que nous demandons au gouvernement, c'est un effort ultime que nous faisons pour pouvoir porter un jugement raisonnable et raisonné sur un fait qui va engager l'avenir de millions de Québécois pour des années et des années à venir. C'est l'avenir de plusieurs générations qui se joue à l'heure actuelle et c'est peut-être, si on fait erreur, l'avenir de tout le Québec qui est en cause.

Nous avons demandé en commission parlementaire que le projet de loi se fasse par étapes. Pourquoi? C'est que compte tenu des opinions qui avaient été exprimées sur le choix entre l'énergie électrique et l'énergie nucléaire, nous considérions — et nous voudrions entendre les experts là-dessus en commission parlementaire — que le gouvernement devait prendre cette précaution absolument essentielle de procéder par étapes afin de voir si, à un moment donné, il n'y aura pas une jonction dans la recherche dans ces domaines de l'énergie électrique versus l'énergie nucléaire de sorte que s'il s'avérait — et cela il faut que les experts nous le disent — que l'énergie nucléaire deviendrait quelque chose de plus rentable et pratiquable par rapport à l'énergie électrique, le gouvernement, à ce moment-là, aura le loisir d'arrêter les travaux, d'utiliser ce qui est déjà fait et de se lancer dans un champ de recherche et d'activité.

C'est cela que nous voulons savoir; nous voulons savoir tout cela; nous voulons savoir aussi pourquoi le gouvernement a changé d'avis à partir du moment où il a, par décret ministériel, accordé à l'Hydro-Québec des pouvoirs extraordinaires. Que s'est-il passé depuis ce moment-là et le moment où le gouvernement a déposé ce projet de loi et le moment où il nous demande de l'adopter? Nous avons le droit de le savoir, et pour cela, il faut avoir en commission parlementaire les gens qui ont été parties à cette négociation, toutes les personnes qui ont été parties à cette négociation, y compris les intéressés et ceux qui en profiteront. C'est assez clair, cela. Ce sont des raisons impérieuses et impératives. Dans le domaine des projets de loi, il doit toujours y avoir un impératif catégorique

qui est le bien commun, l'intérêt collectif. Et l'intérêt collectif, nous le voyons très bien, dans l'initiative de développement du bassin de la baie James.

M. ASSAD: M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais, M. le Président, l'intérêt collectif...

M. ASSAD: M. le Président, le député de Chicoutimi me permettrait-il une question?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): All depends on the question, Sir.

M. ASSAD: Vous avez mentionné tantôt que l'avenir est dans l'énergie nucléaire. Hier, vous avez dit toute la journée que vous êtes pour le développement de la baie James. Etes-vous en faveur du projet de la baie James ou êtes-vous en faveur de l'énergie nucléaire? Il faut décider; on ne peut pas être pour les deux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que mon excellent ami, le député de Papineau, n'a pas compris ce que j'ai dit. J'ai dit qu'au moment où la commission parlementaire a siégé, on nous a expliqué qu'il était préférable à ce moment-ci, à ce stade-ci de la recherche, tant au Canada qu'ailleurs, d'aller du côté de l'énergie électrique. Nous avons dit que les spécialistes de 1'Hydro nous avaient, à cet égard, rassurés mais en demandant, par ailleurs, que le projet soit accompli par étapes. Nous entendons dire ceci: Qu'il est important que le gouvernement se réserve de revenir sur son jugement au cas où, à un moment donné, l'état de la recherche dans le domaine de l'énergie électrique et dans le domaine de l'énergie nucléaire nous permettrait de nous rendre compte qu'il est devenu plus rentable, à un moment donné, que je ne peux pas prévoir, d'aller du côté de l'énergie nucléaire plutôt que de poursuivre des développements dans le domaine de l'énergie électrique.

C'est ça que j'ai voulu dire et j'espère...

M. LACROIX: Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait de lui demander le numéro de l'article du bill 50 qui empêcherait le gouvernement d'agir dans le sens qu'il exprime, si jamais les autorités décidaient que l'énergie nucléaire serait plus profitable que l'énergie électrique? Quel article de la loi défendrait au gouvernement de procéder de cette façon?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je me rends bien compte que le député des Iles-de-la-Madeleine n'était pas présent au pageant du Colisée.

M. LACROIX: Je n'ai pas saisi la dernière phase.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai dit que le député des Des-de-la-Madeleine n'était pas présent au pageant du Colisée, parce qu'il aurait compris l'intention de son gouvernement qui a déclaré qu'il était prêt à investir ou à faire investir $5 milliards à $6 milliards pour le développement hydro-électrique de la baie James. Bon, c'est clair ça, et c'est dans le projet de loi. A partir du moment où la société qui va s'occuper du développement hydro-électrique de la baie James va être créée, il ne sera pas possible de revenir facilement en arrière, d'arrêter le travail. Et justement, M. le Président, si nous demandons la convocation d'une commission parlementaire, c'est pour savoir, de la part des experts, de la part des spécialistes, s'ils ont envisagé, avec le gouvernement, avec tous les organismes intéressés, cette hypothèse qu'évoque le député des Iles-de-la-Madeleine et qui n'est pas évoquée dans le projet de loi que nous avons devant nous.

M. LACROIX: Le député de Chicoutimi, connaissant son intelligence, est-ce que je pourrais seulement faire une remarque...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: Avec la permission du député de Chicoutimi...

M. LE PRESIDENT: Si le député de Chicoutimi le permet. Le député de Chicoutimi ne permet pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voici, M. le Président, hier soir j'ai fait une intervention en deuxième lecture, et j'ai été interrompu exactement 31 fois; je les ai comptées ce matin, en corrigeant les épreuves. Je voudrais bien répondre à la question du député des Iles-de-la-Madeleine, mais je crois qu'il serait mieux avisé de s'adresser aux spécialistes des membres de son gouvernement. Et si les membres de son gouvernement, le cabinet ne convoque pas de caucus et n'a pas convoqué de caucus spécial pour expliquer aux députés le sens, la portée de chacun des articles de ce projet de loi, bien là ce n'est pas ma responsabilité. Je crois que le député des Iles-de-la-Madeleine serait beaucoup mieux avisé de se joindre à nous pour demander la convocation d'une commission parlementaire, afin de voir si, vraiment, le projet de loi répond aux légitimes inquiétudes, je m'en rends compte, que certains de ses collègues ont exprimées...

M. LACROIX: Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait une simple observation?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... M. le Président, de même, qu'aux légitimes inquiétudes qu'un ministre du gouvernement a exprimées lors d'une conversation qu'il a eue avec moi en

me disant qu'il n'avait pris connaissance de ce projet de loi qu'au moment où il allait être déposé à la Chambre. Si nous, les députés de l'Opposition, M. le Président, nous n'avons pas tous les renseignements utiles, si les ministres, si un ministre n'a même pas les renseignements utiles, comment la population dont a parlé tout à l'heure un député peut-elle téléphoner, écrire, envoyer des télégrammes pour supplier ses députés d'approuver ce projet de loi? Nous n'avons pas, nous, les éléments, les députés du Parti libéral ne les ont pas, je me demande si le gouvernement les a tous. C'est pour cela que nous demandons la convocation de la commission parlementaire, afin que lumière soit faite sur tous les aspects de cet immense projet de loi.

M. le Président,...

M. HARVEY (Chauveau): Est-ce qu'il a utilisé sa demi-heure?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... je voudrais, en terminant, faire un appel au premier ministre, faire un dernier appel au premier ministre. Je n'insisterai pas, je crois que, comme c'est votre devoir de le faire, vous vous êtes enquis auprès du secrétaire afin de savoir si mon temps de parole s'achève. Ne vous inquiétez pas, M. le Président, je veux terminer en faisant un appel au premier ministre, lui demander d'accepter de convoquer cette commission parlementaire pour que nous puissions obtenir tous les renseignements dont nous avons besoin.

Je le fais en toute amitié et considération pour le premier ministre. Personne de cette Chambre ne pourra mettre en doute les sentiments de respect et de considération que j'ai pour le premier ministre, pour son autorité, pour la légalité de son gouvernement, sa légitimité et sa respectabilité.

Je fais appel au premier ministre en lui demandant d'être extrêmement prudent et de s'interroger sur son entourage, de se confier plutôt à des spécialistes qui viendraient s'exprimer devant nous. Il risque, lui qui n'a pas encore toute l'expérience des vieux routiers de la politique, de se faire circonvenir. Par la vertu toute puissante de certaines gens qui l'entourent, il risque de devenir, dans l'opinion de la population, un fantoche et un pantin dont on se débarrassera quand on se rendra compte qu'il aura accompli la job qu'on lui a confié — on n'en aura plus besoin — et dont on se débarrassera aussi quand on se rendra compte que le manteau d'Arlequin, dont on l'a recouvert pour des fins que nous connaissons bien maintenant, est délavé et troué et que le temps est venu d'en affubler un autre pour poursuivre la job.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

M. Guy Joron

M. JORON: M. le Président, je veux appuyer la motion du député de Maisonneuve parce qu'il me semble impérieux, à moi aussi comme aux opinants qui m'ont précédé, que le projet de loi soit envoyé à ladite commission pour avoir le temps de l'étudier dans une atmosphère d'ailleurs plus détendue et peut-être moins partisane d'une commission. Je comprends que le premier ministre nous répond qu'en comité plénier nous aurons le loisir de poser toutes nos questions et que nous en aurons les réponses, bien que ce matin — on pourra se référer au journal des Débats — le premier ministre nous a dit le contraire.

Maintenant, on n'a plus le droit d'avoir réponse aux questions. Le député de Bourget demande au premier ministre de nous donner des renseignements, et je cite M. Bourassa au journal des Débats: "II n'en aura pas." Enfin, excusons la chose par une saute d'humeur, peut-être, M. le premier ministre. Il faudrait avoir réponse à un certain nombre d'interrogations d'incertitudes et d'imprécisions. C'est dans le cadre d'une commission parlementaire que nous pouvons avoir tout le temps nécessaire et surtout la possibilité de faire comparaître des experts, des témoins, parce qu'il y a des questions fort précises que nous voudrions poser, qui s'adresseraient, par exemple, à des commissaires de l'Hydro-Québec.

Il faut avoir le temps aussi de prendre connaissance d'un certain nombre de documents. Tout cet exercice aiderait à rendre le débat moins partisan et à l'alléger un peu, et c'est dans le cadre d'une telle commission que nous pouvons le faire. Il existe trop d'imprécisions à l'heure actuelle, trop d'incertitudes et trop d'interrogations, à notre avis, pour que nous soyons prêts à aller immédiatement à l'étape du comité plénier, parce qu'il faudrait avoir réponse à un certain nombre des questions que je mentionnerai tout à l'heure. Il faudrait avoir réponse avant de savoir quels amendements au juste il serait opportun d'apporter au projet de loi.

On ne fait pas des amendements à la légère à un projet de loi qui se veut le projet du siècle, pour employer les mots du premier ministre. Il faut le temps pour faire de bons amendements, pour bonifier le projet de loi, si tant est qu'il soit encore bonifiable, ou alors pour avoir l'occasion de prouver au gouvernement, en dehors de la partisanerie, par le témoignage d'experts et de témoins, que peut-être finalement il serait souhaitable de retirer carrément le projet de loi. Cette possibilité existe toujours, M. le Président, et nous aimerions pouvoir l'exploiter.

M. le Président, quelles sont quelques-unes des interrogations, quelques-unes des imprécisions, quelques-unes des incertitudes qu'il serait impérieux d'éclaircir pour poursuivre d'une façon intelligente ce long débat sur le projet de loi no 50? Il en est une, tout récente, qui a surgi dans l'esprit de plusieurs Québécois, à la suite de l'arrêt des travaux que l'Hydro-Québec avait entrepris dans le territoire de la baie James, à même le budget supplémentaire de $26 millions qui lui avait été voté.

Vous me direz que cette question a été posée en Chambre et que le ministre des Richesses naturelles lui a apporté une certaine réponse. M. le Président, nous jugeons cette réponse insuffisante. Nous avons toutes les raisons de croire que c'est après avoir pris connaissance du projet de loi no 50 et même, peut-être, des amendements que le premier ministre a promis d'y apporter que l'Hydro-Québec a décidé de stopper les travaux.

Pourquoi? Parce que l'Hydro-Québec avait entrepris d'acheter pour $12 millions de matériel; elle avait nolisé un bateau et ce matériel devait être livré à un port quelconque, dont le nom m'échapppe, sur la baie James. Ne sachant pas si elle resterait — cette interrogation est née dans l'esprit des commissaires après avoir pris connaissance du projet de loi no 50 — maîtresse des travaux ou si elle ne se verrait pas forcée de revendre ce matériel soit à l'autre société hydro-électrique, soit à des entrepreneurs— parce que, dans le projet de loi, rien n'exclut la possibilité pour cette filiale hydro-électrique de donner en contrat à des entrepreneurs généraux privés la construction de ces barrages —. l'Hydro-Québec se serait alors vue dans la position suivante: forcée de vendre $12 millions de matériel inutilisé qui ne lui sert plus..

M. le Président, allez donc vendre $12 millions de matériel, déjà livré à la baie James! Les acheteurs au monde ne sont pas si nombreux. Devant la possibilité d'avoir à subir une perte considérable sur ses achats de $12 millions, l'Hydro-Québec a sagement préféré arrêter toute l'affaire, avant d'avoir la garantie explicite qu'elle sera seule maîtresse des travaux. Elle ne l'a toujours pas eue.

M. le Président, j'affirme que c'est la raison principale pour laquelle l'Hydro-Québec a arrêté ces travaux. Si le gouvernement ou un ministre veut mettre en doute cette affirmation, que l'on convoque la commission parlementaire, tel que la motion du député de Maisonneuve le demande, et qu'on interroge les commissaires de l'Hydro-Québec pour voir si cette affirmation est erronée ou non.

M. le Président, je mets le gouvernement au défi de poser cette question publiquement aux commissaires de l'Hydro-Québec. en commission parlementaire. C'est une interrogation sérieuse qui crée un doute considérable. Si l'Hydro-Québec a cru bon d'arrêter ces travaux parce que, dans le projet de loi no 50 et, peut-être, dans les conversations que les commissaires ont eues avec le premier ministre, rien ne lui indique qu'elle va continuer d'être le seul grand maître d'oeuvre du développement hydro-électrique au Québec, alors, sa décision est fort compréhensible. On ne peut, d'ailleurs, l'expliquer autrement.

M. le Président, il y a des interrogations et des incertitudes d'une nature moins urgente ou moins évidente que ce qui est arrivé au sujet de cet arrêt de travaux tout récemment. Il y en a d'autres à plus long terme.

Nous disons, M. le Président, que le gouvernement s'engage trop rapidement, à la hâte, à la vapeur, dans ce projet de développement, en lui donnant un cadre opérationnel, qui est le bill 50, pour la raison suivante.

On a dit, et c'est la justification même qu'on a faite du projet, que le projet était essentiel parce qu'il devait coordonner le développement de différents types de ressources, que c'était une opération multidisciplinaire devant toucher non seulement au développement hydroélectrique mais également aux mines, aux forêts, au développement touristique, et que sais-je encore?

M. le Président, dans aucun de ces domaines encore nous avons suffisamment d'inventaire de la question qui permet de justifier justement la nécessité de cet organisme de coordination. Je ne reviendrai pas sur des choses qui ont déjà été dites qui visaient à montrer qu'il y a d'autres façons et beaucoup plus efficaces encore de faire la coordination qu'en faisant cette intégration d'ordre vertical à l'intérieur d'une société de développement. Je ne veux pas revenir là-dessus. Je veux simplement vous faire part, M. le Président, des choses que nous aimerions voir inventorier de façon à pouvoir, avec intelligence, prendre position plus définitivement sur le projet de loi.

Cet inventaire, que nous aimerions faire faire par des experts et des témoins, à l'aide de documents, tout en colligeant les études, si tant est qu'elles existent, nous aimerions en voir les résultats devant une commission. Et voici à quoi il servirait. Un inventaire de quoi? Qu'est-ce qu'il nous faut savoir avant de pouvoir véritablement souscrire, sans avoir peur de se tromper, à ce projet de loi?

A l'heure actuelle, M. le Président, j'ai l'impression que bon nombre de députés ministériels souscrivent au projet de loi, non pas parce qu'ils ont été convaincus de cet inventaire, par ses chiffres, par ses témoignages, mais ce qu'ils ont fait — peut-être qu'on ne peut pas leur reprocher — c'est un acte de foi en leurs dirigeants, en leur cabinet, en leur premier ministre. C'est peut-être la seule façon d'expliquer la hâte extrême qu'ils ont.

M. VEILLEUX: Ne vous creusez pas la tête pour nous autres.

M. GARNEAU: Répondez-lui. C'est vous autres qui proposez la séparation du Québec?

M. VEILLEUX: Occupez-vous de régler vos problèmes dans votre parti et laissez-nous régler les nôtres.

M. JORON: Tout autant que les membres de cette Opposition, tout autant que la population en général, les députés ministériels eux-mêmes seraient fort intéressés de savoir les choses suivantes. Par exemple — je me réfère au discours que prononçait hier le ministre des

Ressources naturelles — qui nous a, un peu à la façon d'un ancien premier ministre canadien, John Diefenbaker, établé une espèce de —ce que Diefenbaker lui-même avait appelé sa grande vision du nord — vision d'un développement presque paradisiaque à la baie James, où de partout s'ouvrent des mines, surgissent des puits de pétrole, se construisent des usines de transformation des produits de la forêt et même un développement touristique. Et on peut voir les images futuristes, que j'oserais qualifier de fantaisistes, qui peuvent venir à l'esprit à ce moment-là, on peut voir des séries d'hôtels le long des plages, s'il y en a, de la baie James, etc.

Cette vision emballante, il faut le concevoir, il est explicable qu'elle puisse attirer l'esprit et enthousiasmer, mais est-elle réaliste? Pour le savoir, il n'y a pas d'autre moyen que de faire un inventaire de chacun des secteurs concernés. Quant aux mines, par exemple, à quoi peut-on s'attendre? Le ministre des Ressources naturelles lui-même nous disait à l'étude des crédits de son ministère, — ou était-ce à l'étude des crédits du ministère. Enfin, vous excuserez si ma mémoire fait défaut — nous disait, en cette Chambre, que les cartes géologiques de la région ne seront terminées que dans plusieurs années et que la connaissance que nous avons des ressources minières de la région, à l'heure actuelle, était primaire.

Je veux bien espérer que la région soit très riche en ressources, mais on ne peut l'affirmer à ce stade-ci et on ne peut surtout pas justifier la mise sur pied d'un projet de loi si considérable à partir de l'argument que peut-être il y a des ressources considérables.

Il y a des façons de terminer et de compléter cette exploration, parce qu'on n'en est qu'au stade de l'exploration. Si on savait par exemple qu'il y a un gisement de nickel ou d'uranium considérable à tel endroit, prouvé, exploré, ayant une teneur, une capacité de tant, on dirait: II faut mettre ça en branle, il faut développer ça, parce qu'on sait qu'il est là, tout ce qui reste, c'est d'ouvrir la mine et de monter peut-être une usine d'affinage.

Là, nous serions peut-être d'accord sur la nécessité de mettre en place immédiatement la société, parce qu'on sait que c'est là, pour exploiter cette affaire-là.

M. FOURNIER: M. le Président, j'en appelle au règlement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gatineau.

M. FOURNIER: L'honorable député est en train de nous parler des conséquences éventuelles des recherches qui seront faites à l'endroit... Je crois que la motion est en vue de savoir si on va en commission parlementaire ou si on va en comité plénier. Dans les circonstances, je crois que le député s'éloigne énormément du sujet de la discussion.

M. LAURIN: M. le Président, je n'ai pas l'impression que le député se soit éloigné du règlement, étant donné que tout ce qu'il a dit, c'est la nécessité d'avoir des réponses à toutes les questions que nous nous posions afin d'avoir un tableau global, afin qu'on soit mieux en mesure d'étudier, article par article, par pièces détachées, un projet qu'on nous a présenté justement comme un instrument de coordination et d'intégration...

M. MARCHAND: C'est pour retarder le projet.

M. LAURIN: A ce titre, je crois que les remarques du député de Gouin étaient parfaitement pertinentes et entraient dans le cadre de la motion du député de Maisonneuve.

M. FOURNIER: M. le Président, s'il faut en croire l'attitude et les paroles du chef parlementaire du Parti québécois, il faudrait faire l'analyse du sous-sol avant de procéder au développement de la baie James, ce que nous ne voulons pas. Nous voulons procéder avec le projet pour le développement économique du Québec et non pas faire l'analyse du sous-sol et de toutes ses conséquences.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Sur le rappel aux règlements de l'honorable Solliciteur général, je tiens d'abord à souligner aux membres de la Chambre qu'il est assez difficile de tracer la frontière exacte entre ce qui est dans l'ordre et ce qui n'est pas dans l'ordre. Théoriquement, c'est facile de le dire, c'est tout simplement qu'on doit parler seulement de l'opportunité de référer le projet de loi à une commission parlementaire. En théorie, ça va bien. Quand on arrive à l'appréciation exacte des faits, cela devient plus difficile.

Toutefois, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le député de Gouin et je pense que, pour une bonne part, le point de règlement soulevé par le Solliciteur général est fondé. En particulier lorsque le député de Gouin parle des cartes géologiques qui ne sont pas encore prêtes, je ne vois pas comment cela a un rapport avec le fait de référer la loi à une commission parlementaire, parce que je ne vois pas — sans être un expert en la matière— comment ce sera la commission parlementaire qui puisse compléter la préparation des cartes en cause.

Je pense qu'au cours de ses dernières remarques, le député de Gouin s'est éloigné de la substance du débat et je l'inviterais très aimablement à revenir au pourquoi de la motion.

M. JORON: Merci, M. le Président. Le pourquoi de la motion, c'est que nous voulons aller en commission pour y établir un certain nombre d'inventaires, comme je le disais tout à l'heure.

Il est vrai, et là-dessus je dois avouer que vos directives sont justes, il est illusoire de préten-

dre, pour ce qui est du point des ressources minières, des cartes géologiques, que c'est en commission qu'on pourra le faire. On pourrait peut-être savoir à quel point en est rendue l'étude des cartes, mais ce n'est pas là — et vous avez raison de le souligner — l'endroit où nous pourrions faire compléter ces cartes. En conséquence, je vais tenter de me restreindre aux choses qui pourraient être faites en commission.

En voici une seconde et celle-là n'exige pas les longues années qui sont requises pour l'établissement d'une carte géologique. Dans le domaine de la forêt, par contre, et là c'est une chose, qu'avec un certain nombre de témoins du ministère de l'industrie et du Commerce, des représentants de l'Association des compagnies canadiennes des pâtes et papier, etc., qui pourrait être établie.

Ce qui pourrait être établi c'est ceci: Quel est l'état des marchés à l'heure actuelle? En mettant sur pied une filiale qui doit s'occuper des ressources forestières à la baie James, on va couper là des millions de cordes de bois. Quel est l'état des marchés? Est-ce que le résultat de cette opération sera bénéfique ou malheureux? Il ne suffit pas de dire qu'on s'en va là couper du bois pour dire que cela va être ça le développement économique. Si le fait d'en couper trop à cet endroit fait que nous ne pouvons plus en couper ailleurs, ce n'est pas une création nette d'emplois. Le marché est-il capable d'absorber la production? C'est la question qu'il faut se poser. Le marché, dans telle circonstance, peut-il absorber ça? La question qu'il faut se poser est à ce moment-là: Est-ce que nous à l'heure actuelle au Québec une capacité excédentaire déjà? On l'a peut-être déjà, M. le Président, excédentaire ou pas, dans ce domaine-là. A ce titre, si nous ne nous posons pas cette interrogation avant et si nous allons aveuglément, sans avoir fait l'inventaire du marché, couper des forêts immenses à la baie James, nous provoquerons peut-être — ce n'est pas l'intention du gouvernement que je mets en doute — au lieu du développement économique, une catastrophe dans ce secteur.

M. LE PRESIDENT: Encore une fois le député de Gouin n'est pas tout à fait dans la note. Il pourrait très bien dire qu'il y a nécessité d'aller en commission pour avoir des réponses sur les répercussions que cela peut avoir sur la forêt. Mais, le député de Gouin va au-delà de ça. Il donne son opinion sur les répercussions possibles. Je comprends qu'encore là la distinction est peut-être ténue, mais elle est là quand même. Le règlement m'oblige à restreindre le débat à la motion. Encore une fois, je prends comme exemple ce que le député de Gouin vient de dire. Il pourrait très bien dire à la Chambre qu'il y a nécessité d'aller en commission pour avoir des réponses, à savoir ce qui se produirait sur l'ensemble de l'industrie forestière au Québec. Mais il n'a pas le droit, à ce stade-ci, de donner ses propres réponses sur ce qui pourrait arriver.

M. JORON: J'espère que vous ne l'interprétez pas comme une réponse, ce n'était pas une réponse affirmative. Je voulais souligner les possibilités causées par le manque d'information, dans une telle aventure. Je n'affirmais rien, j'ai dit: Tels sont les résultats possibles si avant nous n'avons pas fait l'inventaire de la question, de l'état des marchés dans le domaine des produits forestiers. La raison pour laquelle nous voulons aller en commission, c'est pour faire entendre des gens des différents ministères concernés, des associations des producteurs de papier, des experts, et ça, c'est une chose qui pourrait être faite en commission. Y faire cet inventaire-là pour éviter les quelques catastrophes, non pas que j'affirmais, mais que je disais possibles si nous nous lançons aveuglément sans avoir fait cette étape préliminaire de constituer l'inventaire.

Dans un autre domaine qu'on a invoqué, je serais bien content si à la baie James on pouvait développer une industrie touristique non pas que personnellement j'aurais envie d'y aller, pour des raisons d'ordre climatique, mais enfin, c'est autre chose, les goûts ne sont pas tous les mêmes. Avant de penser ou avant de mettre sur pied une société dans le but de favoriser le développement touristique, pourquoi là encore ne pas faire tout simplement le tour de la question? Pourquoi ne pas aller en commission et demander des avis à des experts, à des témoins — il y a des documents qui existent — ne serait-ce qu'à des associations d'agences de voyages, des associations des transporteurs aériens, des associations d'hôteliers qui ont fait des études de marché sur le développement des goûts dans le domaine touristique? Où la population veut-elle aller? Quel type de tourisme est requis aujourd'hui? Là, encore, cela viserait à faire un inventaire du marché pour savoir s'il est illusoire ou pas — je ne prends pas position ni dans un sens ni dans l'autre — de penser que la baie James peut être un lieu de développement touristique.

Elle n'en est peut-être pas un du tout. Alors, il faudrait le savoir avant d'invoquer cela comme argument justifiant le projet de loi no 50. C'est une autre des raisons pour lesquelles nous voulons aller en commission, pour faire le tour de cette question.

Finalement, il y a une troisième série de raisons, M. le Président, qui seront les dernières que j'invoquerai et qui ont trait au financement. C'est peut-être l'un des sujets sur lesquels ont a été le plus parcimonieux, jusqu'à maintenant, dans ce débat. Véritablement, je trouve que c'est peut-être un peu typique, si vous voulez, de notre passé. C'est peut-être en accord sur nos traditions ou avec notre passé de passer assez rapidement sur les questions financières, présumant que, même si nous n'en saisissons pas nous-mêmes toutes les ramifications ou les implications, il y a toujours quelqu'un d'autre qui sera capable, finalement, de débrouiller ces choses qui, pour la plupart d'entre nous, sont compliquées et qu'on veut éviter d'approfondir.

Mais, quand même, M. le Président, je pense qu'il serait souhaitable d'aller en commission, justement, pour entendre, entre autres, le président de l'Hydro-Québec sur ces prévisions de financement pour les dix années à venir. M. le Président, à une commission dont, malheureusement, puisqu'elle n'a pas fait rapport, nous ne pouvons, du moins de façon élaborée, évoquer le compte rendu, la commission qui a siégé les 20 et 21 mai où a comparu l'Hydro-Québec, vous vous rappelerez que deux journées entières de débats n'ont vu que de maigres cinq minutes consacrées à cette question du plan de financement. Je pense que cela se résume, si on relit le journal des Débats que je n'ai pas avec moi, à un petit paragraphe de M. Giroux en réponse à une question que je lui avais posée. Il nous a livré un programme d'investissements possibles pour le financement non pas de l'ensemble du projet des cinq rivières, mais du complexe NBR seulement et tenant compte d'une augmentation des tarifs de 4 p.c., sans que nous ayons pu scruter à fond combien de revenus nouveaux cette augmentation des tarifs allait générer pour l'Hydro-Québec.

Si bien, M. le Président, que nous entreprenons — c'est le projet de loi no 50 qui la met en branle — la plus grosse dépense qui ait jamais été faite au Québec, le plus gros programme d'investissements que nous ayons jamais connu, mais sans véritablement en connaître toutes les implications et surtout le plan.

Disons qu'en gros on a peut-être, relativement, en tout cas, cerné le coût global du projet. On sait, M. le Président, que développer un kilowatt d'électricité coûte $700. Alors, on dit: 10 millions de kilowatts, cela fait $7 milliards. L'ordre de grandeur est juste. Ce n'est pas tellement cela qui est en cause. Ce qui n'est peut-être pas en cause, non plus, c'est le nombre d'années sur lesquelles ces investissements doivent être étalés. Mais nous aimerions savoir, M. le Président, puisque nous savons le montant global, en gros, quelles sont nos possibilités soit de l'emprunter ou soit de le faire payer comptant aux consommateurs d'électricité, c'est-à-dire en augmentant les tarifs.

Comment pouvons-nous équilibrer ces deux formules? Je pense qu'on ne pourra pas répondre à cette question. Il serait hasardeux, M. le Président, de précipiter l'adoption du projet de loi, tant qu'on n'a pas d'abord établi quel est le plafond prévisible de la capacité du Québec d'emprunter sur les dix prochaines années. Il faut partir de là, tenter de situer le plafond d'abord. Cela nécessite, en commission, justement, de faire un certain inventaire de l'état du marché financier et de faire témoigner des experts pour que nous sachions à quoi, en gros, nous pouvons nous attendre. Jusqu'à combien le Québec peut-il raisonnablement penser emprunter sur les marchés financiers au cours des dix prochaines années? M. le Président, nous n'en avons, à l'heure actuelle, aucune idée.

En conséquence, il m'apparaît aberrant de se lancer dans un projet qui implique des investissements aussi considérables avant d'avoir réussi à cerner cette question-là. C'est une chose d'avoir établi d'abord quel est le maximum que l'on peut penser emprunter sur les marchés. Il faut faire l'inventaire des marchés. Que sommes-nous capables d'aller chercher là?

La deuxième chose qu'il faudrait savoir et qu'il faudrait discuter en commission, c'est sur quel marché. Que peut nous offrir le marché américain? Que peuvent nous offrir les marchés internes? Que peut nous offrir le marché européen? Là encore il y aura moyen de savoir un peu mieux où on peut s'attendre d'aller emprunter une partie des capitaux nécessaires.

Nous avons eu certains indices — je le disais dans mon discours de deuxième lecture — à partir d'une déclaration du président de la Prudential Insurance Company of America, qui a toujours été un de nos principaux prêteurs, et qui disait vouloir investir dans le développement de la baie James la même somme qu'elle avait investie dans le développement de Churchill Falls. Or, Churchill Falls a coûté sept fois moins que la baie James.

Si nos principaux prêteurs ne s'apprêtent pas à augmenter de sept fois leur contribution à Churchill Falls, il est peut-être illusoire de penser que l'on va financer autant sur ce marché-là. Ce sont des choses qu'il faudrait inventorier et discuter ensemble en commission. Un autre point qu'il nous faudrait discuter en commission c'est qu'il faut bien se rendre compte que...

M. BOURASSA: Vous pourrez en parler en comité plénier.

M. JORON: ...l'Hydro-James, si vous voulez, ne sera pas seule à emprunter sur les marchés, car le gouvernement continuera d'avoir des besoins d'emprunter pour faire des investissements, que d'autres agences du gouvernement, d'autres émanations du gouvernement auront besoin de faire appel aux marchés financiers.

J'ai demandé au ministre des Finances, lors de l'étude de ses crédits, pour tenter justement d'avoir une réponse à cette question-là, de nous donner une idée, une indication des besoins d'emprunt du gouvernement tout au cours de la période que durera l'aménagement de la baie James pour savoir comment nous partagerons les fonds qui sont requis pour le développement hydro-électrique que l'on fera là-bas et ceux qui seront requis ailleurs.

C'est une autre chose qu'il faudrait établir en commission, si nous en avions le temps, afin de savoir comment se feront ces partages-là, et finalement on arrivera à savoir beaucoup plus précisément ce qu'il reste à emprunter spécifiquement pour les fins de la baie James.

Quand nous saurons cela, nous pourrons nous organiser et savoir sur combien d'années nous pouvons penser le faire, maintenant...

M. BOURASSA: M. le Président, le député me permettrait-il une question?

M. JORON: Certainement.

M. BOURASSA : La société va certainement avoir à comparaître devant la commission parlementaire. H est évident que l'on ne peut pas avoir toutes les réponses aux questions qu'il pose. C'est impensable que la société, que le gouvernement ou que l'Hydro-Québec puissent répondre en détail à toutes les questions du député, mais à l'automne, la société pourra comparaître devant la commission parlementaire et, éventuellement, répondre à toutes ces questions-là. Qu'est-ce qui empêche d'adopter le projet de loi en attendant?

M. JORON: Voici, M. le Président, je veux bien répondre au premier ministre, c'est que si, justement, ces séances d'automne que vous prévoyez amenaient des conclusions — vous étiez absent quand j'ai évoqué d'autres domaines... —

M. BOURASSA : J'écoutais dans mon bureau.

M. JORON: Si ces séances d'automne nous amenaient à la conclusion que nous n'avons plus besoin de la société...

M. BOURASSA: Non, non, ça...

M. JORON: II n'y a rien d'urgent. Le premier ministre dira qu'il faut dès maintenant mettre en branle la construction de routes, la construction d'aéroports, la construction de bases si nous voulons que les travaux puissent débuter à telle date.

Il est bien entendu essentiellement que c'est le projet hydro-électrique qui va débuter d'abord. Que l'Hydro-Québec commence les travaux, et pendant l'été, pendant les séances de la commission que nous réclamons, nous aurons fait le tour de la question, et nous saurons définitivement, à l'automne, si la société est utile ou inutile et on aura extrait de ce débat, et ce serait mon plus grand voeu, je termine là-dessus, toute la partisanerie avec laquelle elle est en train de s'entourer depuis une semaine.

Je comprends que nous sommes des humains et qu'à l'occasion le débat s'échauffe, et c'est regrettable parce que si l'on veut, justement, que ça devienne une oeuvre collective, il ne faudrait pas que ça devienne une question de "c'est mon projet de loi à moi," "tu ne me le feras pas retirer parce que je vais perdre la face devant l'opinion publique. Et s'il est amendé, ça va avoir l'air d'une victoire de l'Opposition."

Si on pouvait arriver, M. le Président, à vider de toute partisanerie cette affaire-là, puisque, finalement, on s'assoyait, comme des hommes sensés, pour dire: Quel est l'état de notre problème? Il faut répondre à nos besoins d'électricité futurs. Comment est-ce qu'on fait ça? Bon, il y a plusieurs façons de le faire. Quelle est la plus rentable? Comment cela va coûter? Comment est-ce qu'on peut financer ces choses-là? Bien, voyons, c'est ça. En d'autres mots, les réponses à ces interrogations-là auraient dû venir avant que le gouvernement agisse d'une façon un peu autoritaire, en disant: Nous avons trouvé la réponse; maintenant, on la justifie. Pourquoi ne pas avoir fait cette oeuvre collective, tous ensemble, là, à laquelle la population aurait d'ailleurs participé, qui aurait fait que ce projet aurait été complètement vidé de cette partisanerie, puis aurait été vraiment le résultat d'un consensus national, ce que, malheureusement, maintenant, il n'est pas?

Mais, il est toujours temps qu'il redevienne "départisané", si vous me passez l'expression. Laissez l'été calmer les esprits; faites siéger la commission, puis, à l'automne, j'ai bien l'impression que vous l'auriez, votre grand projet collectif.

M. LE PRESIDENT: Le ministre de l'Education.

M. Guy Saint-Pierre

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je voudrais prendre quelques instants pour m'opposer à la motion du député demandant que nous convoquions la commission parlementaire pour répondre à des questions.

Je m'y oppose, M. le Président, puisque le type de questions que les honorables membres de cette Chambre nous ont signalées ne me semblent pas pertinentes et reliées au projet de loi no 50. Je m'explique. Ces questions, bien sûr, M. le Président, touchent l'ensemble du projet et témoignent, de la part des membres de l'Opposition, d'une curiosité voire même d'un intérêt qui peuvent facilement se défendre vis-à-vis de l'ensemble du projet de loi. Il me semble que l'ensemble des questions que la plupart des députés ont soulevées ne touchent pas au point fondamental du projet de loi no 50 qui est de donner un type de structure et un type d'organisation pour mener de l'avant le projet. Les questions des honorables membres de l'Opposition sont beaucoup plus des questions spécifiques touchant la rentabilité, touchant l'échéancier, touchant l'intégration de ce projet de loi lui-même.

M. le Président, nous avons eu, au début de mai, deux jours de session où, pendant plus de douze heures, nous avons eu l'occasion, à la commission parlementaire des Richesses naturelles, de poser plusieurs questions à ceux qui étaient, jusqu'à ce jour, responsables de l'ensemble du développement de la baie James. Nous avons pu, à cette occasion, poser de multiples questions à l'Hydro-Québec, elle qui avait, au cours d'une période de plus de douze ans, dépensé plus de $12 millions pour nous donner les éléments d'un projet de développement.

Lors de l'étude des crédits des différents ministères, les membres de l'Opposition ont aussi eu l'occasion de poser des questions pertinentes au ministère des Richesses naturelles, au ministère des Terres et Forêts, au ministère des Finances, touchant l'ensemble des problèmes reliés à cette région du Québec. Tout cela pour dire qu'auprès de ceux qui étaient responsables, jusqu'à ce jour, du développement nous avons toujours eu l'occasion de poser des questions. Mais, pour poser des questions davantage, je pense qu'il est essentiel que le gouvernement, comme il le fait par le projet de loi no 50, opte pour une forme d'organisation.

On peut diverger d'opinion avec le gouvernement. Les débats d'hier soir ont montré que certains auraient préféré continuer de confier l'administration et le développement de cette région, soit à l'Hydro-Québec, soit aux différents ministères. Nous avons vu le choix du gouvernement de confier ceci à une société qui est une institution québécoise. J'admets qu'on peut différer d'opinion sur cette question, mais je ne vois pas la pertinence de retourner à une commission parlementaire pour poser des questions dont justement, la société, comme type d'organisation, devra, dans les délais appropriés, nous rendre compte.

Nous ne demandons pas, dans le projet de loi no 50, aux honorables membres de l'Opposition de partager avec nous dans les moindres détails ce qui semble le succès assuré de ce projet de loi. L'objet même de nos débats et la pertinence de nos questions touchent au type d'organisation le plus approprié pour pousser de l'avant ce développement. En effet, lorsqu'on examine toutes les questions que les différents députés ont soulevées — je leur souligne que ce sont des questions fort pertinentes, qui témoignent de la curiosité et de l'intérêt vis-à-vis du projet — on se rend compte qu'avant d'avoir des réponses il faudra confier à quelqu'un un mandat particulier.

Ce mandat particulier permettra d'aller de l'avant, de pousser plus loin des études, d'analyser tous les différents secteurs qui ont été mentionnés, les possibilités d'exportation, les possibilités de financement, de déterminer un échéancier des travaux qui convienne le plus à l'ensemble du projet. Justement, pour être capables de répondre à des questions intelligentes sur ces points, des questions intelligentes que sûrement au cours des prochains mois les honorables membres de l'Opposition poseront, nous devons, dans un premier temps, confier cette responsabilité à quelqu'un.

A tort ou à raison, le gouvernement a décidé de confier cette responsabilité à une société qu'on appelle la Société de développement de la baie James.

M. LAURIN: Est-ce que le ministre va me permettre de lui poser une question? Le ministre ne penserait-il pas plutôt qu'il aurait convenu, étant donné justement l'ampleur du projet, que l'essentiel de ces questions puisse être posé avant et qu'on ait au moins les grandes réponses, les grandes orientations avant?

Je suis bien d'accord avec lui qu'on ne peut pas répondre à toutes les questions immédiatement justement parce que le projet est trop vaste. Mais n'aurait-il pas été préférable, pour notre propre gouverne personnelle, qu'au moins on ait répondu davantage aux grandes questions qui ont été posées avant?

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, si on analyse les interventions d'hier, aucun député n'a mis en doute la rentabilité du projet, aucun député n'a mis en doute que le projet est un ballon en ce sens que c'était un projet chimérique comme, je ne sais pas, pour le Québec d'envoyer...

M. PAUL: M. le Président, sur un rappel au règlement. Qu'il me soit permis de rappeler à l'honorable ministre de l'Education qu'il ne peut pas se référer à un débat qui a déjà eu lieu et dont on a disposé par un vote.

UNE VOIX: Adopté.

M. VINCENT: Article 285, 7e.

M. SAINT-PIERRE: Bon! je continue. Analysons les questions qui sont soulevées. Je soumets humblement à cette Chambre que personne ne pourrait nous donner, à ce moment précis, des réponses aptes à satisfaire la curiosité des députés. On soulève des questions comme: Quel est le nombre des rivières? Quel sera l'échéancier exact du plan de développement de ce projet? On soulève des questions touchant l'exploitation rationnelle de nos ressources minérales et forestières, on demande s'il y aura des soumissions publiques par cette nouvelle société.

Au sujet de ce type de questions, il me semble que c'est dans quelques mois, lorsqu'on aura confié à quelqu'un la responsabilité de ceci, qu'on devra les poser car il est évident — l'Hydro-Québec l'a dit— qu'avec $12 millions, avec douze ans de travaux on a établi que le projet est sérieux mais — le gouvernement l'a dit lui-même — nous ne pouvons pas donner, actuellement, dans un rapport suffisamment détaillé qui établirait, dans le moindre détail la planification, la réalisation de ce projet. Ce sont des études qui se poursuivent à la fois sur le terrain lui-même, par des explorations géologiques, des explorations touchant la cartographie du territoire, d'autres études techniques sont en cours pour non seulement l'aménagement hydro-électrique, mais d'autres types d'aménagements.

Sûrement, d'ici quelques mois on pourra demander, à celui qui aura la responsabilité de l'ensemble de ces études, de venir nous expli-

quer pourquoi on a choisi tel échéancier, quelles sont les raisons profondes pour lesquelles on a choisi deux rivières au lieu de trois ou cinq rivières à la fois. Ce sont des types de questions auxquelles, même si nous allions en commission parlementaire aujourd'hui, ni l'Hydro-Québec, ni les firmes privées ne pourraient nous donner les réponses satisfaisantes parce que justement, dans les moindres détails, le projet de développement n'est pas arrêté.

Je me permets de souligner des analogies semblables. Nous avons, au cours des dernières années, créer différentes institutions qui appartiennent aux Québécois. Nous avons créé la Société générale de financement, nous avons créé Sidbec, nous avons créé l'Université du Québec, mais à chaque fois que l'Assemblée nationale a adopté un tel projet de loi, nous ne tentions pas, comme Assemblée nationale, comme députés, de délimiter dans les moindres détails l'action même de ces institutions. Nous tentions simplement de convenir tel type d'organisations pouvait le mieux satisfaire le mandat qu'on lui confiait.

Lorsque nous avons créé Sidbec —j'ai regardé moi-même dans le journal des Débats — il n'y a eu aucune discussion sur le projet lui-même, dans ses moindres détails. On confiait simplement à un organisme, qui relevait de l'Assemblée nationale avec les différents contrôles, le mandat d'aller plus loin, d'amorcer des études, d'examiner le financement, de regarder la rentabilité de l'ouvrage, se réservant pour l'Assemblée nationale, chaque année, la possibilité de demander des comptes à ceux qui avaient eu un tel mandat. Lorsque nous avons créé l'Université du Québec, qu'avons-nous créer? Est-ce que l'Assemblée nationale a tenté de délimiter dans les moindres détails le type de recherches que l'Université du Québec entreprendrait?

Est-ce qu'on a tenté de délimiter dans les moindres détails le nombre d'institutions et le nombre de constituantes qui pourraient être créées? Est-ce qu'on a tenté de donner dans les moindres détails les facultés qui pourraient être ouvertes? Non, je pense que la question n'aurait pas été pertinente. On a simplement confié à un type d'organisation, à savoir une université du Québec, un mandat donné. Chaque année, lorsque l'université dépose son rapport annuel, nous pourrions convoquer ses représentants à la commission de l'Education pour leur demander: Pour quelle raison vous n'avez pas une constituante à Gaspé? Pour quelle raison, à Chicoutimi, avez-vous fait tel ou tel programme? Comment expliquez-vous votre programme de recherche? Enfin, toutes les questions que les députés de l'Opposition ont à l'esprit. C'est après que nous avons créé une structure, qui a un mandat et une responsabilité que nous devons lui demander les comptes. Il faut bien s'en rendre compte, ce n'est pas le rôle de l'Assemblée nationale d'être un conseil d'administration. Ce n'est pas le rôle des 108 députés d'être le conseil d'administra- tion de la Société de développement de la baie James. Nous décidons, pour plus d'efficacité, comme nous le faisons aans d'autres ministères, de confier à des personnes le mandat d'exécuter et de remplir une mission que nous leur assignons, nous réservant le droit, une fois l'an, de poser des questions et d'analyser dans les moindres détails l'orientation prise par ces mandataires du gouvernement. Il y a un article du projet de loi qui explique textuellement que les responsables de la Société de développement de la baie James sont des mandataires du gouvernement.

Je suis certain que, dans quelques mois, le gouvernement n'aura aucune objection à demander aux responsables de la société, alors que des études auront été poursuivies davantage, alors qu'on aura défini plusieurs des questions que soulève le député, notamment sur le plan technique, sur le plan financier et sur le plan des exportations, de venir expliquer les décisions qu'ils ont pu prendre et les orientations qui auraient pu être envisagées. Mais, il semble que si nous y allions aujourd'hui même, nous n'aurions aucun interlocuteur, car il n'y a personne aujourd'hui qui est capable de répondre à plusieurs des questions que les honorables membres de l'Opposition soulèvent. Il n'y a personne aujoud'hui qui peut dire: Est-ce qu'on va développer la rivière La Grande ou est-ce qu'on va développer le complexe NBR?

Il y a, au moins, deux cents personnes de l'Hydro-Québec d'autres sociétés qui ont pu avoir des mandats, qui sont sur le terrain et qui justement, recueillent des données pour permettre à quelqu'un de prendre cette décision. Jusqu'à ce jour, de pareilles décisions relèvent de l'Hydro-Québec. Demain, nous disons qu'elles relèveront encore de l'Hydro-Québec, mais avec une participation extérieure, dans un nouveau type de société. Nous pourrions aller en commission parlementaire pour faire venir des témoins et pour nous demander pourquoi tel type d'organisation est bon. Cela ne semble pas être les préoccupations des membres de l'Opposition. Les préoccupations des membres de l'Opposition —je répète qu'elles sont fort pertinentes et que je je les comprends parfaitement— me semblent inappropriées aujourd'hui même, puisque personne ne peut donner des réponses à tous les types de questions qu'on soulève.

Le chef parlementaire du Parti québécois soulève la question: Y aura-t-il des soumissions publiques? Il est évident que le gouvernement désire que cette organisation, comme toutes nos autres organisations au Québec, se conforme à plusieurs règles de gestion acceptées. Mais ce n'est pas aujourd'hui qu'on peut demander ça, parce qu'il n'y a personne qui est responsable de la société. Ce sera dans quelques mois, lorsque la société sera établie, lorsqu'elle aura des règlements internes, qui doivent être approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil, qu'on pourra poser de telles questions.

On pourra leur dire: Comment se fait-il

qu'on donne, pour des procédures d'appels d'offres, tel ou tel règlements et que vous ne les suivez pas? Mais ce ne sont pas des questions qu'on puisse poser aujourd'hui. Je pense que, plus tard, on pourra suivre l'évolution du projet, que constamment l'Assemblée nationale aura des antennes pour suivre l'évolution du projet pour poser des questions et obtenir des réponses de ceux qui en sont responsables, d'une part, le gouvernement, mais, d'autre part, les Québécois qui se verront confier des responsabilités, incluant les gens de l'Hydro-Québec qui auront une participation accrue.

Je pense que la motion, telle qu'on la présente aujourd'hui, est futile et inutile puisque nous ne pourrions avancer dans nos travaux. La question qui se pose devant nous, c'est strictement de pouvoir progresser sur le plan de la législation, sur le type d'organisation qu'on suggère, quitte, dans trois mois ou dans quatre mois, à demander à ceux qui se seront vu confier des responsabilités au sens de la loi d'expliquer les questions fort pertinentes qu'on soulève sur le financement et sur les possibilités d'administration.

Pour toutes ces raisons et si gouverner, comme l'a si bien dit le premier ministre, c'est poser des gestes concrets qui permettent à des Québécois d'assumer des responsabilités, je pense que la Chambre ne peut pas tergiverser. Je pense qu'actuellement l'Hydro-Québec, qui a le mandat, poursuit les études. Je pense même — le président l'a indiqué lui-même dans sa lettre— que l'Hydro-Québec est prête à collaborer avec la nouvelle société.

Sûrement, dans plusieurs mois l'Assemblée nationale, constamment, par le biais du ministre responsable de cette société, on pourra s'enquérir des autres orientations et poser les questions voulues, comme pour d'autres institutions québécoises, comme pour l'Université du Québec, comme pour Soquem, comme pour Sidbec. On pourra demander à ces administrateurs de rendre des comptes à l'Assemblée nationale.

Mais y aller aujourd'hui, c'est simplement partager avec d'autres le désir de faire perdre un peu le temps de cette Chambre puisque nous ne pourrions pas avoir les véritables réponses aux questions que les honorables membres soulèvent.

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.

M. Gabriel Loubier

M. LOUBIER: M. le Président, après avoir entendu le discours du ministre de l'Education, je suis presque assuré qu'il va voter en faveur de la motion. Le ministre de l'Education, au cours de son élaboration, a prouvé hors de tout doute que nous nagions dans le plus grande et entière incertitude. C'est lui-même qui dit, M. le Président: Attendez que la société soit créée et, à ce moment-là, nous verrons s'il y aura demande de soumissions publiques pour les contrats. Attendons, M. le Président, que la société soit créée et là on pourra questionner les membres de cette société. Et tout son discours est fait d'hypothèses, de voeux pieux, tout est fait au conditionnel, M. le Président.

Or, ce que nous voulons, de ce côté-ci de la Chambre, c'est d'avoir des certitudes et c'est justement les raisons pour lesquelles nous nous sommes levés depuis le début pour avoir plus de lumière sur ce projet de loi. Et ce n'est pas quand la société aura été créée qu'il sera temps de prévenir les erreurs ou encore d'empêcher que cette société ne dégénère en un nid de patronage, ou en un nid d'improvisations, ou encore que le sixième du territoire du Québec ne tombe sous la botte de personnes qui n'ont même pas à rendre compte à l'Assemblée nationale et qui ont tout simplement à faire rapport à son auguste majesté qui s'appelle le premier ministre du Québec.

M. le Président, le ministre de l'Education a une drôle d'opinion de la démocratie. Tout à l'heure, dans son discours, il disait: II n'appartient pas, je pense, aux 108 députés de cette Chambre...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président...

M. LOUBIER: J'ai pris note de son affirmation, il n'appartient pas aux 108 députés de cette Chambre de s'interroger à ce sujet ou de devenir ceux qui voudraient contrôler ou surveiller les gestes du conseil d'administration de la société. M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons une tout autre conception du système parlementaire et de la démocratie. Il appartient aux 108 députés de cette Chambre, surtout...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, une question de privilège. Je pense que jamais je n'ai dit dans mon texte qu'il n'appartenait pas aux 108 députés de s'intéresser à ce projet. Ce que j'ai dit, M. le Président, c'est que les 108 députés de cette Chambre ne forment pas le conseil d'administration responsable du développement de la baie James.

Et le député me permettra peut-être une question simplement pour éclaircir jusqu'à quel point nous pouvons être près l'un de l'autre ou loin l'un de l'autre, non pas physiquement mais sur le plan de la conception. Est-ce que le député admet que toutes ses questions, que tous les points d'interrogation, fort valables, qu'il pose, ne touchent pas du tout la société comme type d'organisation responsable du développement mais touchent le projet lui-même? Ce que j'ai tenté d'expliquer dans mon texte c'est que nous n'avons pas demandé à cette Chambre de se lancer dans un projet où il n'y avait rien de fait. Nous avons dit qu'il y a eu $12 millions de dépensés par l'Hydro-Québec sur une période de douze ans. Pendant deux jours, à la commission parlementaire, les dépu-

tés de l'Oppsition ont pu questionner le président de l'Hydro-Québec et ses conseillers techniques sur la rentabilité du projet. Nous ne demandons pas à la Chambre de se lancer dans un projet hypothétique. Nous disons simplement que nous ne pouvons pas répondre à des questions aussi précises et fort pertinentes pour le projet. Toutes ces questions n'ont pas été résolues. Nous ne trouverons pas une réponse aujourd'hui même, parce que les études sont encore en cours. Les interrogations du député ne touchent pas la société comme type de formation, ne touchent pas la société et ses relations vis-à-vis de l'Assemblée nationale, mais touchent beaucoup plus le projet lui-même. Et je dis qu'après $12 millions nous avons suffisamment de fondations pour aller de l'avant dans le projet mais qu'il faudra poser les questions de détail fort pertinentes encore une fois, de financement, d'échéancier, de rentabilité du projet, à ceux qui se verront justement confier ce mandat.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... M. le Président.

M. LE PRESIDENT: H avait la permission.

M. LOUBIER: Si vous l'avez remarqué, M. le Président, je n'ai pas voulu porter à votre attention un point de règlement pour interrompre le ministre. J'aurais aimé l'entendre une heure ou deux pour qu'il essaie d'éclaircir sa pensée et c'est pourquoi je l'ai laissé aller. Mais je ne suis pas plus avancé, sauf qu'on vient de découvrir un autre argument-massue que le ministre nous sert.

Imaginez-vous que $12 millions ont été dépensés et on s'abrite derrière cet argument-là. Etant donné que $12 millions ont été dépensés pour des études, on n'a plus le droit de s'interroger. Toutes les précautions ont été prises, — imaginez-vous donc — $12 millions pour des études. Je pense que le ministre est plus sérieux que ça. Ce n'est pas une question de $2 millions, de $10 millions ou de $20 millions en études qui auraient pu être faites qui vont nous donner la certitude que le gouvernement a raison et qu'il a des motifs sérieux, pour l'avantage de ce projet, de nous demander de voter le bill 50.

M. le Président, le ministre, je pense, a déjà été dans des firmes d'ingénieurs et dans des compagnies. Il doit savoir, à ce moment-là, que dans toute compagnie il y a tout de même un mandat préalable qui est donné pour ses objectifs, pour sa façon d'administrer. Il y a des règlements, il y a des objectifs de fixés.

Or, actuellement, aucun mandat spécifique n'est donné à cette société et je vous explique de quelle façon j'entends cette affirmation. C'est une société qui sera formée de cinq membres. Qui seront ces cinq membres? On ne le sait pas. Quelle compétence...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: Je réponds aux arguments, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je voudrais faire remarquer à l'honorable chef de l'Opposition qu'il s'aventure, d'une manière quasi parfaite, dans l'étude en deuxième lecture du projet de loi. J'ai bien écouté les argumentations du député de Gouin et il défendait très bien sa cause à l'effet que nous devions aller en commission permanente.

L'honorable ministre de l'Education était totalement d'idée opposée. H disait qu'ils n'obtiendraient pas plus en commission permanente les renseignements que désirent obtenir les membres de l'Opposition. Je voudrais bien que l'honorable chef de l'Opposition abandonne, pour un certain moment, l'étude en deuxième lecture du projet de loi, pour établir devant la Chambre qu'il est d'intérêt public d'aller en commission permanente pour obtenir les renseignements qui lui manquent.

M. LOUBIER: M. le Président, je vous remercie de me remettre sur la bonne voie. J'appuierai sans aucune réserve la motion qui est devant cette Chambre, parce que nous devons avoir infiniment plus de détails, plus d'explications que ceux que nous avons reçus jusqu'à maintenant. Le ministre de l'Education nous rappelait qu'il y avait eu douze heures de séance en commission. Je pense que ce ne doit pas être limité par le nombre d'heures.

Nous avons eu devant cette commission, pour sûr, des explications telles que le président de l'Hydro-Québec a conclu en invitant le gouvernement à ne pas former un genre de société du type qu'on nous présente aujourd'hui. Et cela a été à la suite de ces rencontres à la commission que le président de l'Hydro-Québec a établi clairement que la responsabilité entière, que le dynamo, le guide de tout ce projet d'envergure devait être sous l'autorité de l'Hydro-Québec. Si nous retournons en commission, ça va permettre aux députés de cette Chambre, d'obtenir réponse à toutes les questions qui nous viennent à l'esprit, non pas seulement aux 108 députés de cette Chambre, mais à tous les éditorialistes et au peuple de la province pour savoir enfin ce qu'on cache derrière le paravent du bill 50, quel genre d'administration nous voulons donner à cette société, quel sera le mandat explicite et dans la forme d'administration et dans le rayonnement de cette société.

Ce sont là des questions d'importance et pas un seul homme d'affaires du Québec ne donnerait la gestion de son entreprise à une société sans mandat explicite défini, défini non seulement dans les objectifs, dans ses structures, dans son articulation mais également dans le type d'administration qu'on lui demanderait.

Le fait de retourner en commission parlementaire, de poser des questions aux gens de l'Hydro-Québec, qui sont tout de même à l'origine de ce projet, qui ont tramé phase par

phase tout ce projet, et à d'autres experts, des financiers, tout ça permettrait aux membres de l'Assemblée nationale et, par ricochet, au peuple du Québec d'avoir un meilleur éclairage du bill 50. Cela prouverait aussi que le gouvernement veut agir avec sagacité, que le gouvernement veut agir avec prudence dans cette aventure qui va nécessiter l'investissement d'environ $7 milliards.

Le ministre de l'Education — c'est son opinion — prétend que nous en avons eu assez de ces douze heures. Douze heures, encore là, je trouve que c'est une drôle de façon de juger de l'importance des informations que nous avons. C'est vrai que la commission a siégé douze heures. Mais si, pour un projet dont l'envergure sociologique et économique est absolument grandiose, nous avons besoin de quinze ou de vingt heures avant de prendre une orientation définitive, une orientation qui ne permettra pas de retour et une orientation qui demandera au peuple du Québec un investissement et des sacrifices sous toutes les formes, le gouvernement n'a pas le droit de refuser aux élus du peuple d'avoir plus de renseignements, pour que nous puissions comme Québécois responsables vis-à-vis du peuple, nous prononcer en pleine connaissance de cause.

Pour les raisons que j'ai évoquées et également pour vous dire à vous, M. le Président, que j'avais déjà fait une motion, j'avais déjà exprimé mes doutes sur le bill 50, parce qu'il était prématuré, improvisé, nous demandons au gouvernement de nous permettre, par le truchement de la commission parlementaire, de connaître plus à fond les motifs, l'arrière-plan, l'arrière-scène du bill 50 et de faire en sorte que nous puissions, en toute honnêteté et librement, nous prononcer en faveur de ou contre cette société mythologique que l'on veut créer pour l'administration d'un cinquième du territoire du Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Rémi Paul

M. PAUL: Nous avons bien l'intention d'appuyer cette motion qui nous est présentée par le député de Maisonneuve. Je n'en fais pas reproche à l'honorable député de Maisonneuve, mais s'il n'avait pas été placé dans la position de vous demander une directive, je crois que c'est nous-mêmes qui aurions présenté la même motion.

Dans les circonstances, il ne s'agit pas pour nous d'appuyer aveuglément une telle motion mais si nous avions l'intention de la présenter et si nous appuyons cette motion c'est parce qu'à notre point de vue, le résultat ou son acceptation est nécessaire pour la bonne compréhension du présent projet de loi no 50.

N'ayez crainte, M. le Président, je n'ai aucunement l'intention d'invoquer aujourd'hui, dans mes remarques, des arguments politiques. J'ai l'impression que nous en avons discuté suffisamment.

M. le Président, j'ai écouté l'honorable ministre de l'Education. Vous me permettrez de vous déclarer qu'à mon humble point de vue, il n'a pas compris la motion présentée par le député de Maisonneuve. Le député de Maisonneuve n'a pas demandé la convocation de la commission du Conseil exécutif pour connaître les raisons qu'a données le ministre de l'Education, parce que le mandat que nous demandons par cette motion, que nous voudrions voir consentie, accordée, assignée, les instructions précises que l'on voudrait voir accordées à cette commission vont bien au-delà des question secondaires — je dirais même tertiaires — soulevées par le ministre de l'Education.

M. le Président, j'espère que quelqu'un de l'autre côté pourra répondre aux questions suivantes. Nous avons, inscrites au feuilleton du jour, différentes références. On peut les retrouver à la page 4 sous la rubrique: Bills publics transmis pour étude à des commissions.

Nous avons premièrement, M. le Président: Loi concernant la cité de Hull. Commission des bills privés et des bills publics. J'en dispose immédiatement. Deuxièmement: Loi des transports. Commission des transports. Voici, M. le Président, qu'on nous a présenté le projet de loi no 23. L'intention de son parrain était excellente. Il croyait, M. le Président, avoir présenté ou fait préparer une loi qui pourrait couvrir toutes les conséquences et tous les terrains possibles du transport au Québec. Or, ce projet de loi, référé à la commission a inspiré au ministre, à la suite des représentations qui lui furent faites, de reporter sine die l'étude de ce projet de loi. Est-ce que ce projet de loi était aussi important que la loi du siècle, telle que qualifiée par le premier ministre, qu'est le bill no 50?

M. le Président, nous avons ensuite: Loi sur l'évaluation foncière. Tous se rappellent ce qui s'est déroulé ici même, dans cette Assemblée, lorsqu'on a déféré à la commission des Affaires municipales de l'Assemblée nationale ce projet de loi.

Par la suite, M. le Président, nous pouvons lire: Loi concernant la restructuration des commissions scolaires sur l'île de Montréal. C'est un autre projet de loi que le ministre de l'Education a référé à la commission permanente de l'Education.

Nous avons ensuite: Loi du syndicalisme agricole. M. le Président, c'est par analogie. Je n'ai pas l'intention d'entrer, je n'entre pas dans le détail de cette loi. Je l'ai fait pour le bill 23 mais jusqu'à maintenant, je ne fais tout simplement — j'en ai le droit — que me référer sans en discuter à ce qui est inscrit au feuilleton comme point ou base de comparaison.

M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas à faire remarquer au député de Maskinongé le 7 e alinéa de l'article 285 et les notes qu'il y a à cet

article. Il les connaît beaucoup plus que moi. Vous ne pouvez pas vous référer, sauf pour une question de privilège ou de règlement, à un débat qui a lieu pendant la session en cours sur un bill ou une question qui n'est pas alors en discussion. L'autre note dit: II n'est pas irrégulier de se référer à une affaire qui n'est pas alors en discussion si c'est seulement en passant.

M. PAUL: C'est cela. Je passe.

M. LE PRESIDENT: En termes généraux ou par manière d'exemple.

M. PAUL: Je passe sur chacun des titres.

M. LE PRESIDENT: Votre demi-heure passera en "passant" seulement sur des termes généraux!

M. PAUL: Pardon, M. le Président, pardon! C'est la base de l'argumentation que j'ai l'intention de faire.

Je veux tout simplement attirer l'attention des honorables députés et après, je poserai une question. Bill 45, Loi de la protection du consommateur, il y a eu un rapport. Nous entreprendrons l'étude de cette loi probablement lundi ou mardi. Il y a le bill 84, Loi constituant la Commission de transport de la Rive Sud de Montréal, loi qui a un caractère régional, un territoire important, déférée à la commission des Affaires municipales. Le bill 65, Loi de l'organisation des services de santé et des services sociaux, inscrite au nom de l'honorable ministre des Affaires sociales, déférée à la commission des Affaires sociales.

Je pose la question suivante: Y a-t-il une de ces lois qui soit aussi importante, aussi de conséquence pour l'avenir économique du Québec que le bill 50? Mais cependant, parce que ces lois peuvent présenter quelques implications administratives, on ne prend pas le risque, avec raison, de passer des législations qui ne pourraient pas couvrir tous les problèmes soulevés dans l'application de ces lois. Ce sont les commissions désignées qui verront à entendre les corps intermédiaires et les intéressés qui présenteront des mémoires ou auront des remarques à faire sur chacun de ces projets de loi.

Or, voici que pour le projet de loi no 50, qui en réalité ne prévoit pas l'aménagement de la baie James, le bill 50 et c'est le principe même de cette loi, est la formation d'une société chargée de... Or, justement parce que l'on demande la formation d'une société pour voir au développement, à l'exploitation du territoire de la baie James, nous, de l'Opposition, demandons au gouvernement de déférer ce présent projet de loi à la commission du Conseil exécutif. Justement, au Conseil exécutif parce qu'il y a dans de nombreux ministères des organismes prévus. Des rapports, des enquêtes ont été menées ou conduites et normalement, par le fait que plusieurs ministères sont impli- qués, tous ces rapports, ces communications doivent être centralisés au bureau du Conseil exécutif ou au bureau de l'Exécutif, soit celui du premier ministre.

Quand j'emploie nous serons, M. le Président, je suis présomptueux. Je dis que nous serions, parce que je crains de l'issue de cette motion, intéressés de savoir des commissaires de l'Hydro-Québec pourquoi après avoir dépensé un montant de $12 millions les travaux ont été suspendus, nonobstant un arrêté en conseil qui a été adopté le 10 ou le 11 mai 1971. Nous serions intéressés de savoir de MM. les commissaires de l'Hydro quel est l'état des recherches entreprises jusqu'ici, des analyses qui ont été faites, des projections que l'Hydro envisage dans la réalisation de ce projet de loi. Nous serions intéressés à connaître de l'Hydro-Québec quelles sont ses relations avec les autres ministères qui éventuellement peuvent être intéressés dans le développement du territoire de la baie James. Nous aimerions interroger, par exemple, le ministre des Terres et Forêts lui-même, ses fonctionnaires ou chefs de service, pour que nous sachions quelles sont les recherches, quels sont les organismes qui, au ministère des Terres et Forêts, pourraient accentuer le développement des richesses forestières dans le territoire de la baie James.

Nous aimerions savoir, par exemple, en interrogeant les directeurs de Rexfor, quelle est la politique suivie par cet organisme pour le développement des richesses forestières dans le Québec et spécialement quels seraient les moyens dont disposerait cette société pour développer les richesses forestières de la baie James.

Nous aimerions, M. le Président, et nous voudrions entendre les directeurs de Soquem afin qu'ils nous informent des possibilités que possède cette corporation, pour accélérer si possible, l'exploration et l'exploitation des richesses naturelles du territoire de la baie James. Nous aimerions, M. le Président, avoir l'avantage d'entendre les autorités du ministère de la Voirie aux fins de savoir si ce ministère possède les compétences en génie, si ce ministère possède un service approprié, de nature à accélérer et à entreprendre l'aménagement du territoire de la baie James.

Nous aimerions, entendre les directeurs de l'Office du plan pour savoir si, à la lumière de l'expérience vécue depuis l'institution d'un tel office, ce dernier est en mesure de recommander au gouvernement un plan de réalisation pour l'aménagement du territoire de la baie James. Ici, M. le Président, on est mesure d'obtenir une réponse affirmative et positive de chacun de ces ministères concernés ou des organismes de l'Etat. Je dis que le gouvernement, ignorant probablement les propres richesses administratives qu'il possède, sera peut-être le premier à retraiter et à juger que le présent projet de loi no 50 est inutile. C'est là que l'on rencontrera les objectifs, l'argumentation soule-

vée par le chef de l'Opposition, dans son discours de deuxième lecture.

Ce que nous voulons savoir, M. le Président, ce sont les possibilités techniques pour l'Hydro-Québec. En vertu de la loi, M. le Président, une filiale de la grande société centrale sera prévue. Elle sera chargée de s'occuper du développement hydraulique dans le territoire de la baie James. Nous voudrions savoir des directeurs de l'Hydro, si cette dernière est capable de voir à mener à bonne fin l'aménagement hydro-électrique de la baie James.

Nous voudrions savoir si les directeurs de l'Hydro acceptent ce nouveau principe de dénationalisation de l'électricité et, si oui, pour quelles raisons. Nous aimerions, M. le Président, connaître du ministre des Finances quels ont été les approches, en autant que l'intérêt public lui permettrait de le faire, déjà effectués par le ministre des Finances lui-même, ou par une personne déléguée de l'Exécutif, pour connaître les possibilités du financement du projet de la baie James. C'est une question économique fort complexe, M. le Président.

Nous aimerions avoir l'avantage, M. le Président, d'interroger tous ceux-là qui, de près ou de loin, se sont intéressés à différents développements de nos richesses naturelles ou qui ont effectué des travaux de recherche scientifique.

C'est ce que demande la motion de l'honorable député de Maisonneuve. Le gouvernement croit-il utile et nécessaire, comme l'a fait l'ancien gouvernement, de référer à une commission donnée un projet de loi pour être en mesure d'obtenir toutes les statistiques, les informations, les renseignements, les conseils de nature à améliorer la loi ou de permettre de mieux rencontrer les principes d'une loi?

Je me demande alors pourquoi le gouvernement refuserait que la lumière se fasse sur la nécessité absolue — je ne dis pas les avantages — dans laquelle se trouve placé le gouvernement de procéder à l'aménagement de la baie James que par l'intermédiaire de la création d'une société. C'est tout ce que nous voulons savoir. Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement se refuserait d'accorder aux députés, tant du côté ministériel que de l'Opposition, pourquoi le gouvernement refuserait à messieurs les journalistes les informations qu'ils seront ensuite chargés de transmettre à la population par tous les media d'information.

Je ne comprends pas l'attitude du gouvernement dans un projet de loi qui engage des générations à venir. Le gouvernement conviendra que c'est une loi qui ne pourra pas être rescindée dans trois, quatre, cinq ou dix ans. Nous pourrons facilement et nous pourrions présenter une législation pour abroger la création, par exemple, de l'Office du plan. Nous pourrions procéder à l'abolition de certains ministères. De fait, on sait qu'au mois de décembre 1968 on a aboli, par exemple, le Secrétariat de la province. Est-ce que l'on procédera un jour à l'abolition du projet de loi 50? Non, M. le Président. C'est pourquoi la population désire connaître et savoir, c'est tout.

Est-ce que le gouvernement reprochera aux députés de vouloir être bien informés quant à la nécessité absolue et à la motivation du gouvernement de procéder, au moyen d'un nouvel organisme plutôt que par appel aux différents services existants, aux différents organismes sur place pour l'aménagement de la baie James? Si nous avions l'avantage d'être bien informés sur le sujet, comme nous espérons que les ministres le sont, pour ma part je m'engagerais à être un propagandiste de cette excellente loi qui sera susceptible — nous le souhaitons sincèrement — de créer un essor économique à nul autre pareil dans le Québec. C'est pourquoi je le répète, sans enfreindre les règles de procédure, que nous sommes en faveur de l'aménagement de la baie James. Ce que nous combattons, peut-être à tort, possiblement avec raison, c'est le moyen, les modalités que nous demande d'accepter le gouvernement pour la réalisation du projet.

Au soutien de cette motion, je dis qu'il n'y a pas de raison péremptoire justiciable de la part du gouvernement pour en refuser l'acceptation. On ira en comité plénier. Ce n'est pas un argument très fort, et sérieux que nous a servi le ministre de l'Education parce que s'il avait le moindrement d'expérience parlementaire...

M. SAINT-PIERRE: Je n'en ai pas.

M. PAUL: Vous n'avez pas besoin de me le dire. H aurait vite réalisé...

M. SAINT-PIERRE: Voyant les débats, je n'ai pas envie d'en avoir longtemps.

M. PAUL: J'aimerais mieux que vous me parliez de votre siège, je pourrais vous comprendre. Là, je ne fais que vous entendre.

L'étude du présent projet de loi en comité plénier ne nous permettra pas d'entendre les témoins et d'interroger les personnes réellement capables de fournir des réponses à nos questions bien légitimes, aucunement partisanes, mais qui sont motivées par le rôle qui nous incombe à nous de l'Opposition, d'améliorer, si possible, toute législation qui nous est présentée par le gouvernement. Je crois M. le Président, que je me suis tenu dans les règles de la pertinence du débat. Je l'ai fait avec un calme qui contraste grandement avec celui qui a marqué mes propos d'hier soir. Mais comme je le disais, quant à nous, nous avons maintenant fini de politiser le problème. Ce que nous cherchons, c'est la lumière, c'est la bonne compréhension de la part du gouvernement, qui serait heureux, après l'ajournement non pas d'avoir comblé une demande de l'Opposition, mais d'avoir répondu à un besoin d'information qu'a la population du Québec.

Par conséquent, M. le Président, c'est avec empressement que nous appuierons, nous de l'Opposition officielle, la motion présentée par le député de Maisonneuve.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.

M. Clément Vincent

M. VINCENT: M. le Président, au lieu d'entendre certains députés ministériels nous dire qu'il ne faudrait pas perdre de temps, je leur demanderais de prendre entre leurs mains le bill 50, de lire le titre du bill 50 —ce que n'a pas fait le ministre de l'Education — et de bien voir, en lisant le titre seulement, pourquoi nous voulons que ce projet de loi soit référé à la commission de la présidence du Conseil. Si nous appuyons la motion du député de Maisonneuve, c'est afin d'avoir l'opportunité d'étudier à cette commission parlementaire, en partie, non pas le développement de la baie James seulement, mais surtout et avant tout l'objet réel de cette législation, soit la création de la Société de développement de la baie James.

M. le Président, il est bien entendu que si nous nous référions seulement au titre du projet de loi, il n'y aurait probablement pas lieu à ce moment-ci d'aller devant la commission, mais si nous nous référons aux principaux objets de la législation en discussion, nous nous devons d'appuyer la proposition du député de Maisonneuve. Le ministre de l'Education quand il nous a parlé tout à l'heure, a mentionné la Loi créant l'Université du Québec. Mais c'était à ce moment-là la Loi créant l'Université du Québec ou la Loi de l'Université du Québec et non pas la Loi de l'enseignement universitaire au Québec. Quand il nous a parlé de la Loi créant la Société générale de financement, c'était bien la Loi de la Société générale de financement et non la Loi pour promouvoir l'établissement d'usines au Québec. Dans le cas présent, les principaux objets de la législation ne sont pas le développement de la baie James, mais c'est une loi créant ou constituant la Société de développement de la baie James. Ce que nous voulons, M. le Président, devant la commission parlementaire de la présidence de conseil, c'est entendre le ministère des Richesses naturelles ou le ministre des Richesses naturelles, avec ses principaux fonctionnaires, nous dire pourquoi ils se sentent impuissants, pourquoi le gouvernement n'a pas confiance en eux, pourquoi il faut donner à une société le devoir et le pouvoir de mettre en valeur les richesses naturelles du territoire de la baie James.

H faut savoir du ministère des Richesses naturelles et de l'Office de planification du Québec pourquoi il faut créer une société pour administrer et aménager ce territoire, et pourquoi ceux-ci ne sont pas en mesure de le faire.

C'est ça les objectifs de la loi. Et c'est ça qu'il nous faut savoir devant la commission parlementaire de la présidence du conseil. Si l'Office de planification du Québec, si le ministère des Richesses naturelles du Québec, avec des preuves, avec des arguments que n'a pas voulu donner le gouvernement, que n'a pas voulu nous donner le premier ministre, que n'a pas voulu nous donner le ministre de l'Education, que n'a pas voulu nous donner le ministre des Richesses naturelles, si le ministère ou les hauts fonctionnaires du ministère des Richesses naturelles, si les hauts fonctionnaires de l'Office de planification du Québec sont en mesure de nous donner les raisons pour lesquelles une société pourrait mieux, elle, administrer, aménager le territoire de la baie James et mettre en valeur ses richesses naturelles, et bien là nous aurions certaines raisons de comprendre le gouvernement dans ce geste sans précédent qu'il pose.

Deuxièmement, il nous faudrait revenir à la commission parlementaire de la présidence de l'exécutif pour réentendre l'Hydro-Québec non pas seulement sur les études qu'elle a faites pendant douze ans au coût de $12 millions mais entendre ses hauts fonctionnaires ou ses responsables nous dire pourquoi il faut créer une société nouvelle, nous expliquer pourquoi, ce que le gouvernement ne veut pas faire, pour développer les ressources hydro-électriques de la baie James, il faut qu'une grande société crée une filiale dont une partie des actions serait détenue par l'Hydro-Québec.

C'est ça que nous voulons savoir, M. le Président, et c'est ça que le gouvernement ou les ministres qui ont participé aux débats n'ont pas voulu donner. Nous ne demandons pas seulement où en sont rendues les études. Nous voulons savoir pourquoi il faut instituer une autre société pour se substituer à l'Hydro-Québec dans le développement hydro-électrique du territoire. Troisièmement, ce que nous voulons savoir, également, devant la commission parlementaire de la présidence, et c'est pour ça que nous appuyons la motion du député de Maisonneuve, ce que nous voulons savoir des officiers de Soquip, des officiers de Soquem, des officiers de Rexfor, ce sont les raisons, que le gouvernement n'a pas voulu nous donner, que le gouvernement refuse de donner, les raisons pour lesquelles il faut créer une société qui détiendrait une partie des actions d'autres organismes dont ils feraient partie afin d'assurer la vocation de Soquem, en ce qui concerne les mines, de Rexfor, en ce qui concerne le bois, ou de Soquip en ce qui concerne l'huile. C'est ça que nous ne savons pas et ce sont les questions que nous voulons poser devant la commission parlementaire de la présidence du conseil.

Nous voulons également, M. le Président, devant la commission parlementaire de la présidence du conseil, recevoir des réponses aux questions que nous posons au gouvernement et que le gouvernement ou ses ministres ne veulent pas nous donner.

Nous voulons demander aux fonctionnaires ou au ministre des Affaires municipales pourquoi ils ne sont pas en mesure eux-mêmes d'ériger le territoire en une municipalité qui serait administrée par la commission municipale et qu'il faille recourir à une société pour

constituer cette municipalité, pour exercer certains pouvoirs en matière municipale présentement et dans l'avenir.

Est-ce qu'on a besoin — et c'est ça que nous voulons demander au ministère des Affaires municipales — d'avoir une société pour faire ce travail? Egalement dans cette loi, le bill 50 a, à mon sens, un faux titre, ce n'est pas la Loi du développement de la baie James, c'est la loi créant une société et non pas la loi du développement.

Nous voulons aller devant la commission parlementaire de la présidence de l'exécutif pour une cinquième raison, soit demander aux ministères concernés des réponses aux questions que nous avons posées au gouvernement, et que le gouvernement n'a pas voulu nous donner. Pourquoi exempter une société, dans le territoire donné, de certaines législations existantes au Québec? Quand le ministre de l'Education nous parle qu'on a déjà créé la société Sidbec, Société générale de financement, l'Université du Québec, jamais dans aucune circonstance on a soustrait ces sociétés, ces organisations, ces organismes aux lois qui existent au Québec pour toutes les compagnies, pour toutes les sociétés, pour tous les corps publics. A l'avenir, si nous pensons à cette législation, la société qui sera crée sera soustraite de l'application d'une quantité considérable de législations.

Le député de l'Assomption me fait signe que non. Qu'il lise l'article 42 du projet de loi, s'il ne l'a pas lu. Qu'il relise l'article 41, qu'il relise les pouvoirs spéciaux en matière d'expropriation, qu'il relise les articles 34,35. On permet là à une société, de se soustraire aux applications de plusieurs lois mentionnées à ces articles.

Ce que nous voulons savoir? A propos des officiers du ministère des Terres et Forêts, nous voulons leur poser des questions et avoir les réponses que le gouvernement n'a pas voulu donner. A propos des officiers du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, nous voulons leur poser des questions et recevoir des réponses que le gouvernement n'a pas voulu donner. La même chose pour la Régie des eaux, la même chose pour tous les organismes visés à l'article 42.

Est-ce que les ministères sont consentants à exiger, chaque fois qu'ils opéreront sur cette partie du territoire de 100,000 milles carrés, un avis de la société ou encore de soustraire complètement de l'application de ces lois cette société, créée en vertu du bill 50?

Si le principe du bill en question était écrit, comme nous pouvons le lire dans tous les articles du bill, ce serait la loi créant la société de développement de la région de la baie James. Là-dessus, nous posons des questions. Nous n'avons aucune objection au développement de la baie James.Que tous les membres de l'Assemblée nationale relisent les notes explicatives du projet de loi et on verra là que ce projet a pour principaux objectifs de constituer la société de développement. Nous voulons poser des questions sur certains points particuliers.

C'est la raison pour laquelle nous demandons au gouvernement actuel, à ses ministres, à tous les députés qui siègent en face de nous de nous permettre d'aller devant la commission parlementaire de la présidence du conseil recevoir des réponses à des questions pertinentes, à des questions d'intérêt public que nous voulons poser. Nous n'avons pas obtenu ces réponses du gouvernement actuel. On a refusé de nous les donner. Nous espérons avoir ces réponses devant la commission parlementaire de la présidence du conseil. C'est pourquoi nous appuyons la motion du député de Maisonneuve. Nous espérons que le gouvernement, en accord, demande au député de Maisonneuve de retirer sa motion et qu'il propose lui-même la convocation de la commission permanente de la présidence de l'exécutif. Ainsi nous aurons les réponses aux questions auxquelles on n'a pas répondu.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Claude Charron

M. CHARRON: M. le Président, je voudrais, à mon tour, appuyer la motion présentée par le leader parlementaire de mon parti, le député de Maisonneuve. Plusieurs de mes collègues tant de l'Union Nationale que du Parti québécois ont fait valoir les raisons qui nous motivent à présenter cette motion. Jusqu'ici je n'ai entendu qu'une réponse du parti ministériel, celle faite par la bouche du député de Verchères et ministre de l'Education. Je dois dire qu'à l'instar des autres membres de l'Opposition — enfin, de ceux qui combattent le projet de loi, encore aujourd'hui — nous n'avons pas été convaincus par les arguments du ministre. Au contraire. Je sais, M. le Président, que le règlement m'interdit de revenir sur le débat de deuxième lecture. Mais, vous savez qu'à un certain moment de nos travaux plusieurs membres de la Chambre ont fait valoir le manque de préparation qu'avaient les membres de la Chambre pour se prononcer, en toute bonne foi, sur le principe du projet de loi. Cette question est désormais réglée. La majorité gouvernementale, appuyée en cela par son aile créditiste a accepté hier le principe du projet de loi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, j'invoque le règlement. Je crois que nous n'avons pas quorum.

M. LEVESQUE (Bonaventure): II faudrait comprendre pourquoi on n'a pas quorum.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Nous n'avons pas quorum. Je m'objecte à siéger quand nous n'avons pas quorum.

M. LEVESQUE (Bonaventure): Les députés ne sont pas tous obligés d'entendre des choses...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les députés sont tous obligés d'être présents. Faites venir vos députés.

UNE VOIX: Ils ne sont pas ici seulement pour voter.

M. BACON: Je viens juste d'arriver. Maintenant, je suis là.

M. LEVESQUE (Bonaventure): Si c'est une répétition...

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés.

M. LEVESQUE (Bonaventure): Si c'est une répétition du discours d'hier soir, on comprendra pourquoi il n'y a pas de députés.

M. BURNS: Tout le monde a été élu au même titre en cette Chambre, M. le Président, je pense que le leader du Parlement doit respecter...

M. LE PRESIDENT: De toute façon, nous siégeons dans l'illégalité. J'ai déclaré que nous n'avions pas quorum et j'ai demandé qu'on appelle les députés.

Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Nous avons quorum, M. le Président? Je disais donc que les arguments du ministre de l'Education, cet après-midi, sur la motion de l'honorable député de Maisonneuve n'ont fait que nous inciter à appuyer encore plus fortement la motion présentée par le leader parlementaire du Parti québécois. On dit : II est inutile de convoquer la commission du conseil de la présidence parce qu'il est encore trop tôt pour pouvoir répondre aux innombrables questions qui flottent dans l'esprit des membres du parti ministériel. Le projet est encore trop flou, le projet est encore trop vague pour que la commission apportât quelque lumière que ce soit qui puisse satisfaire les besoins légitimement exprimés par chacun des membres du Parti québécois jusqu'ici, que d'autres auront l'occasion de reprendre et que d'autres membres de l'Union Nationale pourront reprendre également.

Et pourtant, M. le Président, s'il est vrai que le projet de loi que nous étudions actuellement n'en est pas un qui sacrifie les instruments collectifs que notre développement des dix dernières années nous a apportés, s'il est vrai que l'Hydro-Québec, au dire même du parti ministériel, cet instrument collectif symbole du développement que nous avons pris comme collectivité au cours des dernières années, n'est aucunement menacé mais au contraire fortement respecté et qu'on lui reconnaît un rôle de tout premier plan, digne de la place qu'elle occupe dans l'histoire économique du Québec; s'il est vrai que la Société québécoise d'exploita- tion minière est pleinement reconnue dans le projet de loi, qu'on lui reconnaît encore une fois le rôle immense qu'elle a joué...

M. FOURNIER: M. le Président, j'invoque le règlement. La motion en discussion est à l'effet d'aller en commission parlementaire plutôt qu'en comité plénier.

M. CHARRON: Je n'ai pas fini ma phrase.

M. FOURNIER: J'écoute le député depuis que les cloches ont sonné, et je constate qu'il n'est pas du tout sur le sujet.

M. CHARRON: Seulement depuis que les cloches ont sonné?

M. FOURNIER: Oui, absolument. A cause des circonstances et de l'attitude du député, je pense bien que c'est pour cela qu'il n'y avait pas grand monde en Chambre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. FOURNIER: De toute façon, je crois qu'il devrait s'en tenir au règlement.

M. LE PRESIDENT: Encore une fois, ceci révèle la difficulté d'arbitrer un tel débat. Si l'honorable député en restait à ce qu'il vient de dire, je serais tout à fait d'accord avec l'honorable solliciteur général. Mais si — je n'ai pas le droit de juger actuellement — l'honorable député de Saint-Jacques en arrive à dire tout ce qu'il a dit tantôt, cela prend des explications, cela prend des réponses, à ce moment-là, il sera devenu dans l'ordre.

Pour le moment, j'avoue qu'il est prématuré pour moi de décider si les propos du député de Saint-Jacques sont dans l'ordre ou non.

M. CHARRON: M. le Président, la langue française est une langue magnifique qui permet des inversions mais, étant trop subtil pour le député de Gatineau, je la construirai de la façon la plus grammaticale possible.

M. le Président, il faut convoquer la commission de la présidence du Conseil parce que, s'il est vrai que l'Hydro-Québec, cet instrument collectif qui est pleinement respecté, au dire du parti ministériel, dans le projet de loi actuel, n'a pas à craindre le projet de loi, je dis, au bénéfice du député de Gatineau, qu'il faut convoquer la commission du conseil de la présidence. S'il est vrai que la Société québécoise d'exploitation minière, autre symbole de l'embryon de pouvoir que nous pourrions avoir dans le domaine minier, si seulement nous consentions à l'épauler un peu plus qu'elle ne l'est actuellement, pourquoi avoir peur de la faire parler à la commission du Conseil? Quand je dis la société, je veux dire, évidemment, son directeur, pourquoi craindre qu'il vienne témoigner à la commission du Conseil de la présidence? Et si

vraiment il est respecté dans le projet de loi, on ne devrait pas avoir peur qu'il vienne apporter des lumières absolument nécessaires sur son appréciation du rôle que lui réserve le projet de loi.

Le projet de loi, M. le Président, a en principe créé une Société d'exploitation de la baie James. On y parle de copartenaires. Et pourtant, à aucun moment depuis le dépôt du projet de loi, les partenaires qui seront impliqués dans l'aventure n'ont même eu l'occasion de nous le dire. Nous avons dit, faussement peut-être, à un moment de nos travaux, qu'on ne respectait pas ces organismes. La réponse ministérielle, que je respecte, était que le gouvernement les respectait pleinement et qu'il allait nous le prouver par des amendements qui sont encore à venir.

Donc, M. le Président, si c'est vrai qu'on les respecte, pourquoi ne pas convoquer, tel que le demande la motion du député de Maisonneuve, cette commission de la présidence du Conseil qui nous permettrait d'entendre "ces organismes" que l'on respecte dans le projet de loi.

M. le Président, vous me permettrez d'ajouter comme commentaire, je crains l'affirmation un peu trop forte mais là n'est pas... et je n'ai pas le droit d'en parler mais la motion actuelle a pour but de convoquer cette commission.

J'aimerais, puisque ces gens-là sont appelés à diriger cette société, aux termes mêmes du projet de loi présenté par le premier ministre, entendre l'avis de l'Hydro-Québec actuellement. S'il est vrai qu'aux termes mêmes du projet et s'il faut en croire les amendements annoncés, qui ont suffi à chavirer le Ralliement créditiste hier soir et qui vont consacrer la primauté de l'Hydro-Québec dans le domaine de l'exploitation des ressources hydro-électriques, pourquoi avoir peur de la faire parler et de lui faire donner son avis, non pas sur l'ensemble du projet, je l'admets — le ministre de l'Education avait raison tantôt — mais sur le rôle même qu'on lui trace dans la société? Non pas reprendre le débat à alpha mais de le reprendre là où nous sommes rendus en deuxième lecture.

Cette Chambre, majoritairement, le parti ministériel et son aile créditiste ont adopté le principe qu'il existerait désormais une société de développement, je n'y reviens plus. Mais nous sommes en droit de voir ce que pensent ceux qu'on vient d'embarquer dans cette société. Les termes du projet de loi décrivent amplement ceux qui seront les partenaires, demain, à l'exception des cinq directeurs que nous ne connaîtrons que plus tard mais que déjà les rumeurs laissent entrevoir. Pourquoi...

M. LEGER: II y a un créditiste là-dedans.

M. CHARRON: ... si quand vous formez une société, quand vous...

UNE VOIX: Parizeau...

M. CHARRON: ... regroupez des gens, pourquoi avoir peur de les laisser faire et pourquoi avoir peur qu'ils viennent dire ce qu'ils pensent du rôle qu'on leur donne? Nous ne savons même pas aujourd'hui si l'Hydro-Québec est satisfaite ou non de ce qui lui prévaut la loi adoptée hier en deuxième lecture.

M. BOURASSA: Le président de l'Hydro va être en comité plénier, M. le Président.

M. CHARRON: Je vais vous citer le président de l'Hydro...

M. BOURASSA: II va être en comité plénier tantôt.

M. CHARRON: Pourrait-on me passer le premier cahier de la Presse? Je vais vous dire pourquoi je suis d'accord et pourquoi M. Giroux est d'accord avec la motion présentée par le député de Maisonneuve. M. Giroux, hier, pour qui le bâillon est devenu pénible, a quand même eu ses premiers mots...

M. BOURASSA: Les saloperies du député de Saint-Jacques, on commence à en avoir assez.

M. CHARRON: M. le Président, M. Giroux a dit: "II semble que le bill 50 subira plusieurs amendements avant de prendre force de loi." Il en est comme nous, aux mêmes interrogations et au même flou. Il dit, appuyant en sorte la motion du député de Maisonneuve: "Si j'ai gardé jusqu'ici le silence, c'est qu'il restait tant de questions en suspens, tant de flou qu'on pouvait se permettre toutes les rumeurs et cela crée toujours des embêtements." M. Giroux, hier, en réponse à une question du journaliste André Chénier du journal La Presse, Power Corporation, Montréal.

Alors, M. le Président...

M. LACROIX: Le député de Saint-Jacques me permettrait-il une question?

M. CHARRON: Non.

M. LACROIX: Je voudrais gentiment lui poser une question.

M. CHARRON : Je ne vous le permettrai pas. Je veux que l'on fasse...

M. LACROIX: Le député de Saint-Jacques refuse-t-il?

M. CHARRON: ... respecter le règlement par le député des Iles-de-la-Madeleine...

M. LACROIX: J'espère que l'on constatera que le député de Saint-Jacques...

M. CHARRON : Je ne vous le permets pas.

M. LACROIX: ... a conscience de son incompétence en refusant de répondre à une question.

M. LEGER: Article 242, deuxièmement, rappelez-vous.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président.

M. HARVEY (Chauveau): Le député de Saint-Jacques pourrait fumer une autre cigarette. Allez-y.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CHARRON: Je n'ai pas le droit de fumer en Chambre, mais j'irai fumer là tantôt.

UNE VOIX: De la mari?

M. CHARRON: M. le Président, il est dommage que, par sa majorité, le gouvernement rejette la motion du député de Maisonneuve car elle permettrait d'éclaircir... Le premier ministre m'a interrompu tantôt en disant que M. Giroux est d'accord sur le projet. Nous n'avons pas eu l'occasion de l'entendre encore. Il est d'accord sur le projet...

M. BOURASSA: II sera au comité plénier tantôt.

M. CHARRON: Le député de Mercier me permettra de préciser...

UNE VOIX: Ah! vos petites saloperies, là!

M. CHARRON: II est venu à la commission parlementaire...

M. LACROIX: Ce n'est certainement pas M. Giroux qui est le premier ministre de la province de Québec.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: C'est un employé de l'Hydro.

M. CHARRON: J'ai relu les témoignages de M. Giroux qui se disait d'accord. Le premier ministre a parfaitement raison là-dessus, sur le projet d'aménagement de la baie James. Il a exprimé quelques doutes que le premier ministre a renversés, c'est son droit. Il est là pour gouverner, il gouverne.

Mais nous n'avons pas entendu l'opinion de M. Giroux sur le bill 50. Comme le rappelait le ministre de l'Education, c'est deux choses. Comme nous l'avons rappelé depuis le début du débat, nous connaissons l'opinion de M. Giroux, nous connaissons l'opinion de Soquem, nous connaissons l'opinion de Soquip, nous connaissons l'opinion de Rexfor sur le projet d'aménagement de la baie James, soit, mais nous ne connaissons pas l'opinion de l'Hydro-Québec, nous ne connaissons pas l'opinion de Soquip, de Soquem, de Rexfor sur le bill 50. Cela, ce sont deux choses, et le ministre de l'Education a été le premier à nous le rappeler tantôt.

Ce que nous demandons par la motion du député de Maisonneuve, ce n'est pas de reprendre ce que la commission des Richesses naturelles a pu apporter comme éclaircissements à sa séance du mois de mai. Nous voulons connaître leur opinion sur un projet de loi bien concret, qui comprend 44 articles et où, à plusieurs articles, cesdits organismes étatiques sont appelés à remplir un rôle.

Ce que je veux demander, moi, à M. Giroux à la commission, si jamais la motion était adoptée, ce n'est pas ce qu'il pense de l'aménagement de la baie James. J'admets qu'on le lui a demandé au mois de mai et qu'on a eu des opinions. Ce que je veux savoir de M. Giroux, c'est: Etes-vous content? Etes-vous satisfait? Avez-vous des amendements à nous suggérer avant le comité plénier quant au rôle que vous réserve le gouvernement actuel dans le projet de loi?

M. BOURASSA: Vous venez de le citer dans la presse, là.

M. CHARRON: Etes-vous d'accord, M. le directeur de Soquem...

M. LACROIX: Qui est comptable vis-à-vis de la population du Québec: le gouvernement ou M. Giroux? Cessez de faire les imbéciles, vous du Parti québécois.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Les travaux, au cours de la journée, se sont déroulés dans une atmosphère relativement paisible. Je comprends que ça fait déjà plusieurs heures que nous siégeons, que la fatigue s'empare de tous les membres de la Chambre, que la fatigue, d'une part, et les opinions divergentes, d'autre part, peuvent faire monter la température, mais j'inviterais quand même, chacun des députés à lutter contre son tempérament, à se faire violence afin que l'on puisse terminer cette séance dans le respect de la morale parlementaire.

M. CHARRON: Merci, M. le Président. Les propos que je tiens sont absolument en accord avec la motion du député de Maisonneuve et ils sont basés sur le sens que j'ai cru voir dans les propos du ministre de l'Education, à son tour de parole. Il nous a dit: Il ne s'agit pas de reprendre le débat que nous avons tenu en commission des Richesses naturelles. C'est pourquoi, dit-il, je n'accepte pas la motion du député de Maisonneuve. Sur cela, je vais lui donner mon accord. Nous ne voulons pas reprendre le débat aur la question: Faut-il ou non aménager la baie James?

Tous les membres de cette Chambre sont d'accord. Ce que nous demandons, ce n'est même pas de faire témoigner des gens sur la question : Y a-t-il du pétrole ou y a-t-il du bois, ce que nous savons; y a-t-il des mouches, ce que nous savons également? Nous disons simplement: Vous, messieurs de Soquem, vous, messieurs de Soquip, vous, messieurs de l'Hydro-Québec, le projet de loi vous réserve un rôle. Est-ce qu'en toute conscience, selon votre opinion, parce que vous êtes des fonctionnaires absolument compétents au service de l'Etat, ces rôles-là sont satisfaisants?

Nous sommes juste à la veille du comité plénier et l'avis que ces messieurs nous apporteraient lors de la session de cette commission de la présidence du conseil pourrait être utile à tous les membres de la Chambre sans exception, quand il s'agira d'apporter des amendements. Le premier ministre nous a annoncé un nombre considérable d'amendements qui devraient venir et dont nous ne connaissons pas encore la teneur, sinon par les rumeurs des journaux. Mais le premier ministre peut-il assurer que le fait que la Chambre a été saisie de la question depuis le début de la semaine ait suffi aux gens de Rexfor, aux gens de Soquip, qui seront demain, M. le Président, dans cette société, les pivots qui assureront la réussite ou non de l'aventure, s'ils n'ont pas l'occasion de venir devant les membres de la Chambre, devant les membres de la commission plutôt, ce qui est beaucoup mieux, car cela enlève, comme le disait mon ami, le député de Gouin, absolument le caractère partisan qui a pu mêler nos débats — nous dire en toute honnêteté: Je crois que le projet de loi devrait nous réserver tel rôle et tel rôle.

M. BOURASSA: Est-ce que le député me permet une question?

M. CHARRON: Ce que ne nous assure pas...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député permet-il une question?

M. CHARRON: Non, M. le Président. Ce que ne nous assure pas actuellement...

M. BOURASSA: Est-ce que le député me permet une question?

M. CHARRON: ... le projet de loi. Nous voulons simplement...

M. BOURASSA: En quoi conçoit-il qu'un gouvernement responsable doit agir?

M. CHARRON: ... cela, M. le Président. Je vais permettre une question au premier ministre.

M. BOURASSA: M. le Président, quelle est la conception d'un gouvernement responsable pour le député? C'est à nous à décider si Soquip, Soquem et Rexfor doivent être intégrés dans la nouvelle société. Pourquoi serait-ce des fonctionnaires qui devraient guider le gouvernement?

M. CHARRON: Alors, quelle est la conception...

M. LACROIX: Lévesque, le peuple l'a rejetté.

M. CHARRON: M. le Président...

M. LEGER: A l'ordre selon l'article 242.

M. CHARRON: ... pouvez-vous le rappeler à l'ordre? Il n'est même pas à sa place et il est assis comme un malade, M. le Président.

M. BOURASSA: M. le Président, une autre saloperie.

M. LACROIX: M. le Président, les petites cochonneries du député de Saint-Jacques me passent dix pieds par-dessus la tête...

M. CHARRON: A l'ordre, M. le Président!

M. LACROIX: ... parce que ce jeune homme-là ne veut pas travailler pour l'intérêt de la province de Québec.

M. CHARRON: A l'ordre!

M. LACROIX: II est le fils spirituel de Mao et l'ami de Castro.

UNE VOIX: Nommez-le, M. le Président.

M. LACROIX: II ne viendra pas imposer, dans la province de Québec, l'anarchie qui ferait l'affaire du PQ, jamais !

UNE VOIX: Nommez-le.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'avertis tous les honorables députés de cette Chambre, siégeant des deux côtés de la Chambre, que je n'ai pas l'intention de continuer à présider dans une atmosphère semblable. J'inviterais tous les députés à respecter le règlement, à respecter le droit de parole de l'orateur qui l'a, sinon je me verrai dans l'obligation de suspendre à loisir.

M. CHARRON: M. le Président, l'intervention du député des Iles-de-la-Madeleine a brisé un échange sérieux que j'avais avec le premier ministre après lui avoir permis sa question. Le premier ministre m'a demandé: Quelle conception avez-vous du gouvernement responsable? Je lui réponds: Quelle conception avez-vous de l'Assemblée nationale? Si vous n'avez pas la conception de l'Assemblée nationale à savoir qu'elle doit être parfaitement informée et

qu'elle doit entendre les membres de cette société dont nous venons d'adopter la création en deuxième lecture...

M. BOURASSA: Vous allez l'entendre.

M. CHARRON: Pourquoi ne voulez-vous pas qu'elle vienne témoigner, avant que nous ayons l'occasion d'apporter des amendements à la loi, cette commission du conseil de la présidence qui nous permettrait d'entendre cela?

M. BOURASSA: On va vous répondre tantôt.

M. CHARRON: Très bien, M. le Président, mais surtout ne m'interrompez pas, conformément à notre règlement. S'il est vrai que ce projet est un projet collectif, s'il est vrai que c'est la loi du siècle, s'il est vrai que c'est le projet qui assurera la relance économique du Québec, pourquoi ne pas faire, à ce moment-ci de nos travaux, pour cette loi qualifiée de la plus importante de l'histoire du premier ministre et qui est vraisemblablement la plus importante qu'il aura jamais à nous présenter au cours de son mandat, pourquoi ne pas lui assurer la même démarche prévue à nos règlements, et qui a été appliquée à des dizaines de reprises sur des projets qui n'avaient, en aucun temps, l'ampleur de celui-là?

M. le Président, je vous réfère à deux commissions: Par exemple, quand il y a eu le projet de loi 23, celui qui prévoit la création d'une nouvelle Régie des transports, le gouvernement n'a, en aucun temps, refusé d'aller en commission à ce stade-ci de nos travaux pour entendre les parties intéressées et les parties qui seront directement impliquées dans le succès de cette Régie des transports. Le bill 27, sur lequel j'ai eu moi-même l'occasion de travailler en commission, n'a pas évité cette phase absolument démocratique et absolument essentielle pour permettre un meilleur jugement des membres de cette Chambre. Une fois référé en commission, on a pris tout le temps nécessaire pour entendre les gens qui auront à assurer le succès du regroupement scolaire dont nous avons adopté hier le principe final.

Le projet de loi no 28, avant même de franchir l'étape de deuxième lecture, vient d'être déféré, par ce même gouvernement qui se refuse dans ce cas-ci — je ne sais trop pourquoi — à la commission. Je suis convaincu que, dans l'esprit du gouvernement, il est essentiel pour assurer la réussite d'un projet de loi, que tous ceux qui, de près ou de loin, auront à y travailler, soient entendus, nous fassent entendre leurs commentaires et nous aident ainsi à dresser ou à établir les meilleures suggestions d'amendements que nous puissions apporter.

Là, face à la loi du siècle, face au projet collectif des Québécois, face au projet de relance économique totale, face à un projet qui doit assurer 125,000 emplois, on veut écarter une procédure qu'on emploie pour des lois mineures. Je ne dis pas, M. le Président — je serais même prêt à faire une concession au premier ministre s'il acceptait — que notre commission devrait être ouverte à tout le monde...

M. VEILLEUX: On n'acceptera que vous autres!

M. CHARRON: ...et que la commission scolaire de je-ne-sais-pas-où pourrait venir faire entendre son avis sur le bill 50; je n'en demande pas tant, M. le Président. Ce que nous aimerions — c'est pourquoi nous avons suggéré la commission de la présidence du conseil — c'est que ceux qui sont nommément impliqués dans le projet de loi, eux, au moins, aient l'occasion de faire entendre leur avis. Je ne demande pas d'appeler les centrales syndicales. Je serais même prêt à limiter mon désir là-dessus. Elles ont déjà fait connaître leur opinion, les éditorialistes, aussi. Mais Rexfor, Soquem, Soquip et l'Hydro-Québec sont nommément impliquées dans le projet de loi. Elles auront demain la gestion de cette entreprise et nous ne savons même pas ce qu'elles en pensent. Nous sommes déjà prêts, au seul avis du gouvernement et des amendements qu'il pourrait accepter, venant des deux partis de l'Opposition. Il pourrait, à ce moment, peut-être créer une loi et l'adopter d'ici lundi ou mardi, je ne sais trop. Alors, après que la loi serait votée, l'Hydro-Québec viendrait nous dire: Nous aurions aimé qu'il soit précisé à l'article 44... Mais il sera trop tard. Nous aurons sauté cette étape essentielle pour qu'une loi soit vraiment démocratique et surtout pour que son succès soit assuré. Il faudrait entendre les sociétés qui sont nommément impliquées, et je pourrais vous citer des articles où ces sociétés d'Etat sont nommées. Il ne s'agit plus de faire témoinger Paul VI. Il s'agit de voir ceux qui auront à assurer le succès de l'entreprise du $4 milliards, $5 milliards, $6 milliards, je ne sais pas, de 50,000 ou 125,000 ou 300,000 emplois, je ne sais pas, de l'aménagement de 2 ou 3 ou 4 rivières, je ne sais pas.

Je donne un exemple que nous vivons actuellement. Mon bon ami, l'honorable ministre des Transports, a fait preuve, au projet de loi... C'est une comparaison, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ne peux pas permettre à l'honorable député de Saint-Jacques de se référer à des travaux d'autres commissions. J'ai toléré tantôt quand il a brièvement parlé d'un autre projet de loi, mais je ne peux pas permettre une autre fois que l'on se réfère à des travaux d'une autre commission qui a siégé pendant la présente session.

M. CHARRON: Je me plie à votre directive, M. le Président, puisque, de toute façon, cette loi est tellement présente que je n'ai pas à la décrire; tout le monde a en tête la procédure

que nous avons suivie pour l'étude de la loi no 23. Tous ceux qui seront impliqués dans le succès de cette loi ont eu et auront encore l'occasion de nous dire: C'est parfaitement normal. Qu'est-ce que ça donnerait à un gouvernement de créer des sociétés quand ceux qui sont dans le bateau n'ont même pas l'occasion de se prononcer? Je refuse l'argument du premier ministre, qui disait tantôt: Ce n'est pas aux fonctionnaires de décider. Soit. C'est un gouvernement responsable, élu avec une majorité assez confortable pour prendre ses décisions. Il nous a prouvé, hier, qu'au-delà des désirs de l'Opposition il était capable de prendre des décisions; je l'admets. Mais il admettra quand même — car ses fonctionnaires ont suffisamment fait leurs preuves, depuis qu'on les a placés à la direction de ces sociétés d'Etat — qu'ils ont au moins le droit non pas de décider, mais de dire leur avis. C'est comme si vous bâtissiez une maison importante dont les futurs habitants, ceux qui auront à en assurer le succès, ne seraient même pas appellés à dire comment ils veulent la voir construire, à suggérer — pas à décider— au constructeur qu'est le gouvernement responsable comment ils voudraient qu'elle soit bâtie.

On a suivi cette procédure pour des lois, M. le Président, que vous me permettrez d'appeler insignifiantes, mais la volonté démocratique du gouvernement était suffisamment forte pour dire: II faut consulter des gens. Nous avons accepté des heures de session impossibles à plusieurs reprises, simplement pour que les gens aient l'occasion de venir en commission et dire: Nous sommes d'accord sur le principe de la loi.

De toute façon, il était trop tard parce que quand on va en commission, le principe est accepté. Mais nous suggérons tel et tel amendement et à vous messieurs du gouvernement responsable d'y faire suite ou de ne pas y faire suite.

J'ai vécu cette expérience, M. le Président, cette semaine quand les organismes, comme la Fédération des commissions scolaires, sont venues dire: Pour assurer le succès de la loi 27 nous vous suggérons tel, tel et tel amendement. Le ministre a été d'une ouverture d'esprit, M. le Président, qu'il me faut mentionner et a accepté un grand nombre de ces amendements et je suis maintenant assuré que le projet de loi 27 va être un succès.

Il est important, quand on construit un bateau de cette importance, de savoir l'avis de l'équipage. Et là, avec cette loi du siècle, ce projet de $6 milliards, cette grande aventure de relance économique, on ne ferait pas la même chose? L'honorable député de Maisonneuve est parfaitement justifié, M. le Président, de demander cela. Il ne s'agit pas de faire de l'obstruction. Il en va même — puis-je employer ses arguments, M. le Président, pour convaincre mes honorables collègues d'appuyer la motion du député de Maisonneuve — du succès électoral de l'équipe en place. Il peut, comme le dit le ministre des Finances, faire le succès du parti Libéral pour des années à venir. Qu'on s'assure donc que la machine est bonne. Pourquoi ne pas entendre l'Hydro-Québec, pourquoi ne pas entendre Rexfor qui peuvent nous suggérer, M. le premier ministre, pas décider — décider, c'est votre sort, vous êtes le gouvernement responsable, ce que j'admets pleinement. — mais vous suggérer à quel endroit il faudrait améliorer votre projet de loi.

M. le Président, le chef parlementaire de mon parti a fait valoir un nombre considérable de questions que nous aurions l'occasion de poser. Je suis même d'avis, parallèlement au ministre de l'Education, qu'un certain nombre de ces questions étaient prématurées. Mais la commission...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CHARRON: Oui, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques a presque épuisé son droit de parole. Comme question de fait, il l'a épuisé, et je lui accorderais encore quelques instants pour conclure eu égard à quelques interruptions qu'il a pu avoir.

M. CHARRON: Je ne parlerai pas plus, M. le Président, et je vous remercie.

Je terminerai donc avec ceci, M. le Président. Il était possible qu'une ligne de parti vfnt imposer aux membres de cette Chambre le vote qu'ils ont donné en deuxième lecture. Mais nous sommes devant une toute autre question. Il s'agit d'assurer la réussite de ce projet dont nous avons adopté le principe en deuxième lecture. Et je dis en toute honnêteté, à tous les membres de la Chambre, y compris ceux qui seraient intéressés de changer leur opinion juste avant le vote, je veux dire...

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'invoque le règlement en vertu de l'article 285, paragraphe 19.

M. CHARRON: Je n'ai visé personne. Je regrette, je n'ai nommé personne.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce invoque le règlement.

M. ROY (Beauce): Le député de Saint-Jacques a bien dit qu'on a changé notre opinion juste avant de prendre le vote.

M. CHARRON: ... les personnes, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. ROY (Beauce): M. le Président, je pense qu'il interprète nos intentions, et il n'a pas le droit de le faire. En aucun temps, pendant nos

interventions, lors de l'étude en deuxième lecture, nous n'avons pris une position affirmative pour ou contre, M. le Président. En fait, j'ai fait deux interventions dans ce sens, il en a été de même du député de Rouyn-Noranda, et je pense que le député d'Abitibi-Ouest avait dit dans son intervention qu'il voterait en faveur du projet de loi en deuxième lecture, sur le principe du développement de la baie James, ainsi que le député d'Abitibi-Est.

M. le Président, je tiens à préciser ces faits de façon à ce qu'il n'y ait aucune équivoque. Il n'y a pas eu de volte-face en ce qui nous concerne et qu'on cesse de nous prêter des intentions que nous n'avons pas.

M. BURNS: M. le Président, sur le point de règlement d'abord. L'article 285 19ème, "empêche un membre en parlant d'imputer directement ou indirectement des motifs indignes ou des intentions mauvaises à un député". Et le député de Saint-Jacques n'a pas attribué d'intention à un député. Et, M. le Président, je soumets respectueusement que le fait que le député de Beauce ait invoqué le règlement, est beaucoup plus du ressort de l'article 270, c'est-à-dire qu'il prétend que ses paroles auraient été mal interprétées ou quoi que ce soit, chose qu'il pourra toujours corriger éventuellement mais après que le député de Saint-Jacques aura terminé son intervention.

M. ROY (Beauce): M. le Président, sur le même article.

M. LE PRESIDENT: Je suis prêt à rendre ma décision.

Le point de règlement soulevé par le député de Beauce est fondé, malgré la savante interprétation du député de Maisonneuve. Si on se fie au contexte actuel, contexte du débat, contexte général, je pense qu'effectivement l'article 285, 19o, s'applique. Personnellement, j'ai cru comprendre que le député de Saint-Jacques imputait certains motifs à des membres de cette Chambre, sans les avoir identifiés d'une façon plus claire. Je suis convaincu que le point de règlement soulevé par le député de Beauce est fondé. Je demanderais au député de Saint-Jacques de revenir à la motion.

M. LEVESQUE: De conclure, M. le Président. Son temps est expiré.

M. LE PRESIDENT: J'accorde au plus une minute au député de Saint-Jacques pour conclure.

M. CHARRON: Je ne prendrai pas même le temps, M. le Président, je vais simplement dire qu'il en va de l'intérêt pour tous les membres de la Chambre de la réussite de cette société dont nous avons majoritairement accepté le principe hier, que la motion du député de Maisonneuve soit acceptée et que nous ayons l'occasion, après avoir entendu les parties nommément impliquées dans le projet, de suggérer les amendements que nous aurons à faire en comité plénier, d'adopter la troisième lecture et d'espérer pour le plus grand bien des Québécois le succès de l'aventure adoptée hier soir.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.

M. LEVESQUE: Pardon, j'ai le droit de parler.

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, l'honorable leader parlementaire.

M. LEVESQUE: Pas toujours les mêmes!

M. BOURASSA: Cela va être un bon discours à part ça. Vous avez intérêt à l'écouter.

UNE VOIX: Enfin, on va avoir des amendements.

M. Gérard D.Levesque

M. LEVESQUE: M. le Président, lorsque j'ai fait motion pour que nous allions étudier cet important projet de loi en comité plénier, il s'est trouvé un collègue qui a pensé qu'il valait mieux au lieu d'aller en comité plénier. Ceci afin d'étudier sérieusement ce projet de loi, article par article, et de prendre connaissance des amendements qu'avaient annoncés le premier ministre, de prendre connaissance non pas seulement de l'interprétation véritable qu'on devait donner à ce projet de loi, mais également de tout ce qu'on pouvait faire pour apporter les meilleurs éclaircissements possibles. On sait comment on a voulu en certains milieux donner des interprétations fausses à un projet de loi qu'on a qualifié — avec raison — de projet de loi du siècle. Ça faisait tellement mal à certains milieux ou certaines personnes qu'un gouvernement responsable et dynamique mandaté par la population du Québec et ceci ne doit pas être oublié...

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement.

DES VOIX: Assis.

M. BOURASSA: Cela fait mal, cela fait mal.

M. BURNS: Je crois que les règlements doivent s'appliquer des deux côtés de la Chambre de la même façon — comme vous le faites d'ailleurs très bien —. Le leader parlementaire doit sûrement parler sur la motion. Là, actuellement, je n'ai pas entendu le leader parler de la motion.

M. LEVESQUE: Parlant sur ce point d'ordre, qu'il me soit permis de faire une entrée en matière, si modeste soit-elle.

M. SHANKS: Ils ont peur de la vérité.

M. LEVESQUE: Alors, M. le Président, je conçois que...

M. LE PRESIDENT: (Hardy): Le leader parlementaire ne faisait que commencer son intervention. Il faut quand même que je voie l'ensemble des propos qu'il doit tenir pour vérifier s'ils sont dans l'ordre ou non. J'ai cru comprendre, à l'heure actuelle, que les arguments qu'il apportait étaient de nature à démontrer — c'est ce que j'ai cru comprendre jusqu'à présent — que la motion n'était peut-être pas bienvenue. Il faudra que j'entende davantage le leader parlementaire pour décider si ces propos sont dans l'ordre ou non.

M. BURNS: Ma question était prémonitive.

M. LEVESQUE : Je prends bien note de l'intérêt particulier du député de Maisonneuve pour le respect des règlements. Je suis convaincu que cet intérêt ne se traduira pas dans un filibuster comme celui qu'il conduit présentement avec ses collègues depuis...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je vous demanderais une directive, s'il vous plaît, avant de donner la parole au député de Maisonneuve.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Chicoutimi a préséance sur le député de Maisonneuve?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est pour vous demander une petite directive. Est-ce que le temps consacré aux applaudissements est compté dans le temps du discours du député? Hier soir, vous l'avez compté, alors que le leader parlementaire m'a interrompu à lui seul seize fois.

M. BOURASSA: Est-ce que vous êtes jaloux de l'enthousiasme et de la sincérité des collègues?

M. LEGER: A 72, tout ce que vous pouvez faire, c'est du bruit.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. SHANKS: A sept, vous faites la révolution.

M. LE PRESIDENT: Sur ce qui pourrait être interprété comme une demande de directive de la part du député de Chicoutimi, je dirai que, quant à moi, j'ai l'habitude d'interpréter d'une façon très libérale la période de temps accordée à un orateur.

M. PAUL: M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va applaudir.

M. PAUL : Est-ce que vous pourriez me permettre de vous demander de retirer ces paroles? Sont-ce bien des applaudissements que j'ai entendus?

M. LE PRESIDENT: II ne m'appartient pas de juger de cette question. Cela n'entre pas dans le règlement.

L'honorable leader parlementaire.

M. BURNS: Sur une question de règlement...

M. LEVESQUE : J'ai compris que le député de Maskinongé parlait pour le journal des Débats.

M. PAUL: J'espère que mon bon ami, l'honorable leader du gouvernement, ne veut pas que je me livre à mes ébats.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve, sur une question de règlement.

M. BURNS: Sur une question de règlement. Les dernières paroles du député de Bonaventure étaient à l'effet que je menais un filibuster.

DES VOIX: C'est vrai!

M. BURNS: Je pense que vous avez sagement décidé, M. le Président, que certaines interventions étaient acceptables et que d'autres ne l'étaient pas, en vertu de nos règlements. Je ne veux pas que le député de Bonaventure me prête d'intention. Je pense que, normalement, il devrait retirer ces paroles.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: Un professeur de morale, comme dirait le député de Maskinongé à ses meilleures heures.

M. LE PRESIDENT: Pour être conséquent avec moi-même, j'ai bien dit hier que tout député n'avait pas le droit d'imputer d'intention à un collègue, mais qu'il avait parfaitement le droit de juger, d'apprécier ou de qualifier l'attitude ou les propos d'un autre collègue. Or, le leader parlementaire, à tort ou à raison, — c'est à chacun de l'apprécier — a parfaitement le droit de qualifier l'attitude du député de Maisonneuve comme des autres membres de cette Chambre pour autant qu'il le fasse en usant d'un langage parlementaire.

M. LEVESQUE : En effet, M. le Président, comment ne pourrais-je pas qualifier de filibuster ce qui s'est passé dès que nous avons appelé l'article du projet de loi 50, avant même que nous puissions commencer la deuxième lecture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dès que nous "eûmes" appelé.

M. BURNS: La motion...

M. LEVESQUE : Est-ce qu'on va traiter mes propos d'antiparlementaires parce que je n'arrive simplement qu'à faire une petite réminiscence très salutaire pour celui qui a été l'auteur...

UNE VOIX: La motion, M. le Président.

M. LEVESQUE: ...de la motion d'amendement, qui est une preuve additionnelle que c'est vraiment un filibuster que l'on fait présentement. Tous les media d'information l'on dit!

M. CARDINAL: M. le Président, je soulève un point d'ordre!

UNE VOIX: L'obstruction!

M. LEVESQUE: Je comprends que "l'évêque" doit s'incliner devant le "cardinal". D'un autre côté, M. le Président, il y a toujours des limites.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Une chance que vous avez simplement, comme premier ministre, un diacre.

M. LACROIX: Mais "la croix" passe encore en avant du "cardinal"!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre!

M. CARDINAL: Je me demande, M. le Président, si le leader parlementaire est en train de parler sur la motion ou s'il n'est pas en train de faire un discours électoral.

M. LEVESQUE: J'y arrive, j'y arrive! Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Entrez dans la matière et vous allez évacuer le projet de loi.

M. LEVESQUE: M. le Président, si on me le permet simplement, comme nous avons, en de multiples occasions, manifesté une tolérance particulière envers les préambules du député de Chicoutimi...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon, M. le Président. J'invoque le règlement. M. le Président, vous êtes mis en cause. C'est ce qui est grave. On a dit que l'on avait manifesté à mon endroit une tolérance particulière. C'est vous mettre en cause, M. le Président. Vous m'avez toujours laissé faire mes préambules, les appréciant et vous en servant comme exemples de langue pour vos collègues.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable leader parlementaire du gouvernement.

M. BOURASSA: Attendez!

M. LEVESQUE: M. le Président, pour faire plaisir à tous les collègues de l'honorable Opposition...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Retardez le projet de loi !

M. LEVESQUE: ...je tâcherai de mettre fin à ce préambule.

UNE VOIX: D'accord.

M. LEVESQUE: Je compterais cependant, comme échange de bons...

UNE VOIX: Procédés.

M. LEVESQUE: ...procédés, que l'on ne m'interrompe pas.

UNE VOIX: D'accord. M. LEVESQUE: Merci. M. PAUL: Promis.

M. LEVESQUE: M. le Président, la motion que j'avais présentée, à l'effet que ce projet de loi soit immédiatement étudié en comité plénier a été retardée par la motion d'amendement du député de Maisonneuve. Pour le député de Maisonneuve, il était bien important d'aller en commission parlementaire de la présidence du conseil. C'était peut-être plus important pour lui, à ce moment-là, que d'aller, lorsqu'il s'est agi du bill 45, en commission parlementaire des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, qu'il a boycottée avec son parti!

M. BURNS: M. le Président, j'allais invoquer le règlement, mais cela n'en vaut probablement pas la peine.

M. LEVESQUE: Non, parce qu'on s'inquiète moins des consommateurs. Là, ce n'est pas important, mais, quand c'est pour boycotter le projet de la baie James, présenté pour aider tous ceux qui sont en chômage et qui attendent du travail, on s'en va et on perd son temps en commission parlementaire!

M. LESSARD: Il s'agit de la consommation du patronage!

M. LEVESQUE: M. le Président, ce point étant fait...

UNE VOIX: Le petit, là-bas, assieds-toi!

M. LEVESQUE: ...et aucune preuve additionnelle n'étant requise, on me permettra simplement, pour répondre à certaines critiques qui ont été formulées de diverses façons, selon, évidemment, l'intérêt qui était sous-jacent aux

interventions, de dire, M. le Président, que lorsque j'ai fait motion pour aller en comité plénier, j'étais bien conscient qu'il y avait eu des études considérables d'effectuées.

Ces études sont celles effectuées par l'Hydro-Québec, études par l'ABBBL, études par Rousseau, Sauvé et Warren, dont les résultats ont bien indiqué que ce projet était rentable et qu'il était important pour le Québec d'y donner suite. Il y a eu la commission parlementaire des Richesses naturelles qui, pendant deux jours, a siégé, permettant aux parlementaires de s'exprimer et de poser les questions qu'ils voulaient poser aux représentants de l'Hydro-Québec qui étaient là présents et qui ont répondu. Il y a eu ce comité interministériel qui a siégé à sept ou huit reprises. J'entendais l'honorable député de Chicoutimi se poser des questions parce qu'un ministre lui avait dit qu'il n'était pas complètement au courant. Ah! Seigneur, lorsqu'on sait qu'à sept ou huit reprises, le comité interministériel, formé des ministres intéressés et des sous-ministres, des fonctionnaires, ont siégé des journées entières sur ce projet; non, ce n'était pas suffisant pour les exigences du député de Chicoutimi.

Nous avions suffisamment de renseignements, et surtout dans le contexte du discours du ministre de l'Education qui, lui, a bien décrit d'une façon succincte mais combien éloquente, le projet de loi, de quelle façon et dans quelle mesure l'Opposition y a-t-elle fait obstruction. Lorsque je dis l'Opposition je parle de ceux qui se sont opposés au principe du bill particulièrement. Je parle également de ceux qui ont participé à la discussion sur cette motion dilatoire et combien dilatoire du député de Maisonneuve. Lorsque le ministre de l'Education a fait son exposé, il a bien précisé qu'il s'agissait, dans ce cas, d'une loi organique créant une société de développement industriel de la baie James, et qu'il ne s'agissait pas, à ce moment-là de prévoir toutes les réponses à toutes les questions techniques que l'imagination fertile d'un chef parlementaire d'un Parti québécois a pu inventer avec les recherchistes à sa solde.

Questions hypothétiques, questions qui se situent en 1975, 1978 mais questions auxquelles il demandait simplement, fictivement et d'une façon non sérieuse des réponses aujourd'hui.

Lorsque les gouvernements ont eu à créer des sociétés, ils n'ont pas nécessairement été obligés de répondre à toutes les questions dans tous les détails. Que l'on prenne par exemple la Société du parc industriel du centre du Québec, bien chère au coeur du député de Nicolet, que l'on prenne Sidbec, que l'on prenne, par exemple, un projet fédéral mais dans lequel j'ai été particulièrement impliqué, celui de la Société créant l'Expo-67, société canadienne.

Est-ce qu'on pouvait à ce moment dire qui viendra voir et être exposant en 1966 alors qu'on était en 1962? On avait une colossale mission, celle de mettre sur place cet Expo 67 qui a eu le succès que vous connaissez. Bien, à ce moment-là, M. le Président, si on avait demandé soit au maire Drapeau, soit au ministre fédéral ou à moi-même tous les détails de cette gigantesque aventure, nous ne pouvions pas répondre. Nous n'étions pas en mesure de répondre, comme le disait si bien le ministre de l'Education lorsqu'il parlait du projet de la baie James. Ce que nous voulons par cela, par cette loi c'est créer une société qui nous aidera à déterminer non pas seulement toutes les structures ou les détails, mais qui nous aidera à ramener ce projet à la réalisation dont nous avons accepté les objectifs, dont nous avons accepté comme Chambre en deuxième lecture, le principe.

C'est facile de s'asseoir puis de poser des questions comme des enfants. Qu'est-ce qu'il va y avoir, papa? Qu'est-ce qu'il va y avoir, maman? Mais, M. le Président, nous avons une responsabilité à prendre. Il y a ici un gouvernement élu par le peuple du Québec, qu'on s'en rappelle. Nous avons 72 députés sur les 108 circonscriptions électorales, 72 qui ont été mandatés par le peuple démocratiquement. Ce peuple qui nous a élus sait que par justement ce qu'a présenté le parti et son chef le député de Mercier, le premier ministre d'aujourd'hui, nous avons établi que nous voulions qu'il y ait une priorité économique. Le peuple du Québec a mis de côté les autres options, particulièrement l'option séparatiste qui est une menace à la postérité et à l'économie.

M. LAURIN: J'invoque le règlement. DES VOIX: Quel article?

M. LAURIN: J'invoque le règlement, M. le Président. Je demanderais au président de demander aux députés ministériels de faire moins de bruit parce que je perds les paroles du leader du gouvernement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: M. le Président, je voulais simplement indiquer qu'à un moment donné...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président. Est-ce que...

M. VEILLEUX: C'est incroyable.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...vous pourriez demander au premier ministre d'applaudir avec plus d'énergie on ne l'entend pas d'ici?

M. LEVESQUE: M. le Président, laissez faire, le premier ministre, lorsqu'il reviendra à la charge, aura des petites nouvelles pour vous.

M. le Président, le seul point que je voulais faire, c'est non pas seulement sur la légalité du régime, non pas seulement sur la légalité du

présent gouvernement mais sur sa légitimité. Et si on se base sur ce facteur, on demandera à nos amis du Parti québécois de retourner devant le peuple pour obtenir un mandat et peut-être qu'aucun de ceux qui sont devant nous ne reviendra, et j'en suis convaincu, M. le Président, parce que tout le peuple du Québec, incluant l'est de Montréal, tout le monde sera en faveur du développement de la baie James...

M. CHARRON: Est-ce la motion, M. le Président?

M. LEVESQUE: ... et condamnera à jamais ceux qui ont été contre ce projet comme l'ont été depuis mardi, en particulier, et depuis toujours...

M. LEGER: Un point d'ordre, M. le Président, un point d'ordre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: ... et particulièrement je dirai que chaque fois qu'il y a quelque chose pour aider à l'emploi, chaque fois qu'il y a quelque chose pour aider à faire une lutte au chômage, on rencontre sur notre chemin toujours les mêmes, le Parti québécois...

M. LEGER : M. le Président, est-ce qu'on peut demander au leader du Parti libéral de parler sur la motion et d'oublier...

M. LEVESQUE : Avec plaisir, avec plaisir. M. LEGER: ... de contrôler ses émotions? M. LEVESQUE: Très bien, très bien! M. SHANKS: A bas la révolution!

M. LEVESQUE: M. le Président, tout ce que je voulais établir, c'est qu'à un moment donné un gouvernement élu est obligé de prendre ses responsabilités. Je puis appeler bien des témoins, je pourrais retourner aux grands premiers ministres de nos mères patries, on pourrait retourner même à des "Cardinal", si on veut employer un mot que nous avons déjà utilisé. Mais ne serait-il pas intéressant de retourner à ce grand pontife qui dirige aujourd'hui les destinées du Parti québécois, nul autre que mon cher homonyme?

M. le Président, un peu d'histoire...

M. BOURASSA: Ecoutez ça!

M. LEVESQUE: ... un peu d'histoire, vous savez, ce n'est jamais mauvais de l'oublier, car notre maître, le passé, est toujours là pour nous indiquer les voies de l'avenir. M. le Président, ne serait-il pas salutaire pour ce cher député de Bourget qui, je le comprends bien, comprend lui-même tellement bien les politiques gouvernementales... mais que voulez-vous, c'est dirigé par "remote control", comme on dirait en anglais. M. le Président, en plus de l'honorable député de Bourget, je suis convaincu que l'auteur de la motion, mon cher ami le député de Maisonneuve, aura bien avantage à écouter. Ce serait pour lui et pour tous ses sept — j'allais dire, non, je n'emploierai pas les mots "plaies d'Egypte" — mais tout de même... ce ne serait pas parlementaire. Mais je dirai ceci, ce serait très avantageux de revenir à l'attitude, à la philosophie, à la pensée politique du chef du Parti québécois.

Parce qu'il faudrait voir ce qu'un tel type ferait s'il était au pouvoir. La meilleure façon de le savoir, c'est de voir ce qu'il faisait lorsqu'il était au pouvoir.

M. VINCENT: Il était libéral.

M. LEVESQUE: D était libéral, M. le Président, mais il ne l'est pas resté.

M. VINCENT: II était libéral.

M. LEVESQUE: Lorsqu'il a eu à discuter la Loi des mines, c'était lui qui défendait ce projet de loi — si quelqu'un veut s'opposer, j'ai vérifié les règlements, et l'on peut se référer aux débats tant que l'on veut, pourvu que ce ne soit pas durant la session en cours. Or, M. le Président, on sait que l'honorable ancien député de Laurier n'est plus de la session en cours.

M. LACROIX: Il y a le fantôme, là.

M. LEVESQUE: M. le Président, voici ce que disait M. René Lévesque, lorsqu'il a été confronté avec une motion de l'honorable député Lavoie de Wolfe. L'honorable député de Wolfe suggérait, bien respectueusement, comme toujours, que le projet de loi numéro 8, dans le temps, le 2 mars 1965, soit envoyé à une commission parlementaire. Voci donc ce que disait M. Lévesque, et je vous en donne quelques extraits, pour votre édification personnelle, pour les sept, chacun de vous autres ensemble. M. Lévesque disait, en page 960 du journal des Débats, session 1965, volume II, numéros 1 à 26: "Bien, essentiellement là, la raison pour laquelle on ne croit pas qu'il soit indiqué, sauf pour faire beaucoup de perte de temps et de perte de temps vraiment perdu là — je ne dis pas de la perte de temps artificielle — mais on a l'impression que ça serait des délais inutiles." Et il continuait: "Alors si on est sur le bill 8, la plupart des changements qui sont là-dedans, ceux qui sont importants sont des décisions de principes sur lesquels le gouvernement avait à se prononcer. Quand bien même on irait faire des sparages pendant une couple de semaines ou même une couple de jours dans les comités publics, les questions de principe ont été évaluées.

En deuxième lecture, ça a été voté par la majorité représentant le public du Québec, ça a été évalué."

M. le Président, un peu plus loin, il disait ceci et je le rappelle: "II y aura quelques amendements." J'ai pris mes précautions, il n'y a rien que j'ai dit qui n'est pas correct. Il n'y a pas de point d'ordre...

M. LAURIN: Dans l'intervention que nous cite l'actuel leader parlementaire, est-ce...

M. BOURASSA: Cela fait mal.

M. LAURIN: ... qu'il s'agissait du bill 50?

M. LEVESQUE: Asseyez-vous donc.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEGER: Contrôlez vos émotions.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BOURASSA: Allez prendre un café, si ça vous fait trop mal.

UNE VOIX: C'était le même hypocrite qu'aujourd'hui.

M. LE PRESIDENT: A la suite de l'intervention du député de Bourget, je comprends parfaitement qu'il ne s'agissait pas du bill 50. Mais le règlement, en vertu de l'article 285, permet de se référer à des débats qui ont eu lieu à des sessions antérieures et à la session en cours... A l'ordre, s'il vous plaît! Je permets ces propos pour la simple raison qu'il s'agit d'une même situation. A l'ordre, s'il vous plaît! D'une même situation alors que le gouvernement de l'époque proposait d'aller en comité plénier et qu'il y avait une motion incidente pour aller en commission parlementaire. Nous sommes exactement au même point. Et je déduis, je conclus que l'honorable leader parlementaire est tout à fait dans l'ordre.

M. LEVESQUE: Alors, je continue, M. le Président. Je crois qu'il approche 6 heures, et je ne voudrais pas qu'on interprète trop strictement lesirèglements. "Il y aura —dit M. René Lévesque, mon grand ami homonyme — quelques amendements en cours de route. On pourra expliquer également pourquoi certains ont été refusés — vous comprenez bien ça — enfin, il n'y a pas de cachette là-dedans. Ce n'est pas une loi mystérieuse et puis, le long du chemin, on verra les amendements, on pourra les discuter — comme j'ai fait moi-même, M. le Président en suggérant d'aller en comité plénier — et donner exactement l'arrière-plan pour lequel telle ou telle décision a été prise ou pourquoi il y a tel ajustement ou telle modification. Tout ça, ça implique que ce n'est pas un bill qui est parfait mais c'est le genre de texte, je crois, qui a besoin d'être vécu et les gens de l'industrie, la plupart l'admettent d'ailleurs, ceux qui connaissent l'industrie a besoin d'être vécu pendant un an.

Il va y avoir les interprétations qui vont s'établir sur les articles nouveaux. Il va y avoir une sorte de coutume qu'il va falloir commencer à vivre et puis, comme toutes les lois, c'est fait pour être amendé mais quand on sait pourquoi l'amender." Ce n'est pas moi qui le dis, M. le Président. "Alors, on ne voit vraiment pas, sauf pour faire une sorte de perte de temps, absolument, ou alors avoir des pressions artificielles, qu'on a déjà vues par écrit et qui s'imagineraient devoir recommencer. Je crois que c'est la responsabilité" — écoutez-moi ça — "du gouvernement au point où on en est de décider, avec la Chambre, de l'adoption de cette loi. Un point c'est tout." Voilà ce que disait...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: J'en ai des meilleures!

M. LE PRESIDENT: II est six heures...

M. LEVESQUE: Si j'avais le consentement, je pourrais finir dans cinq minutes.

DES VOIX: Non.

M. LEVESQUE: Non? D'accord. On va recommencer.

M. BOURASSA: Cela prouve jusqu'à quel point vous êtes démantelés par les propos du député de Bonaventure.

UNE VOIX: La Chambre suspend... M. PAUL: M. le Président, vous savez...

M. LACROIX: ...les morpions... De l'onguent gris... Il y en a sept qui vont disparaître.

M. PAUL: Vous savez toute l'amitié que j'ai pour mon honorable ami, le leader du gouvernement.

Est-ce qu'il y aurait possibilité de savoir quelle serait la décision qu'il pourrait nous annoncer s'il complétait ses remarques?

M. LEVESQUE: La même. M. PAUL: Laquelle?

M. LEVESQUE: La même que j'aurais faite si vous m'aviez laissé continuer.

M. PAUL: C'est cela qu'on vous demande. Quant à moi, je suis disposé, M. le Président, si nous connaissions, de la part du gouvernement, ses intentions à la suite des remarques complétées du leader...

M. BOURASSA: Est-ce que je comprends

que le leader va accepter qu'on aille en comité plénier immédiatement après les remarques du député de Bonaventure?

M. PAUL: M. le Président!

M. BOURASSA: Alors, à 8 heures, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à vingt heures.

Reprise de la séance à 20 h 2

M. HARDY (président): A l'ordre, messieurs!

L'honorable leader parlementaire du gouvernement.

M. LEVESQUE: M. le Président, je sais que le temps à ma disposition est relativement limité. Alors, loin de moi l'idée de vouloir, même si nous avons eu quelque temps de réflexion, revenir pour tenter de résumer les quelques remarques que j'ai faites avant la suspension.

Vous vous souvenez sans doute, M. le Président, que j'ai essayé, bien objectivement, de rappeler aux honorables membres de cette Chambre que la motion que j'avais faite d'aller en comité plénier avait été malheureusement interrompue par la motion d'amendement de l'honorable député de Maisonneuve, qui croyait, à tort ou à raison — c'est sa responsabilité s'il a ainsi retardé les travaux de la Chambre — qu'il valait mieux aller en commission parlementaire de la présidence du conseil.

J'ai tenté, comme le permet le règlement de cette Chambre, d'apporter certains arguments à l'effet que cette motion d'amendement était dilatoire et n'était pas reliée aux meilleurs intérêts du Québec. J'ai rappelé à la Chambre, évidemment, tous les renseignements qui avaient été donnés, toutes les études qui avaient été faites, soit par l'Hydro-Québec ou par les firmes d'ingénieurs, qui avaient, les unes après les autres, parlé de la rentabilité de ce projet. J'avais parlé de la commission parlementaire des Richesses naturelles, qui avait permis pendant deux jours aux parlementaires de se renseigner et d'interroger à loisir tous les représentants de l'Hydro-Québec qui ont bien accepté de répondre à toutes les questions. J'ai parlé du comité interministériel où plusieurs ministres, membres du Conseil exécutif, ainsi que les sous-ministres et d'autres membres de la fonction publique se sont penchés sur ce problème.

Donc, nous sommes en face d'un sujet qui a été longuement étudié, profondément analysé, soit par les parlementaires, soit par la fonction publique, soit par les corps paragouvernemen-taux ou par les régies, etc.

M. le Président, j'ai ensuite dit que si j'ai fait cette motion principale d'aller en comité plénier, c'est qu'à mon sens je croyais que c'était la formule la plus ordinaire, la plus normale pour renseigner davantage, si possible, les honorables membres de cette Chambre.

A ce moment là, je me suis bien aperçu qu'il fallait que je le dise et j'ai parlé de "filibuster". J'ai évité de parler de l'Union Nationale qui fait son devoir, comme toute Opposition officielle doit le faire.

J'ai évité de parler du Ralliement créditiste qui a été même un peu plus rapide que l'Opposition officielle parce que, dès hier soir, il s'apercevait de son erreur. Mais je parlais

particulièrement du Parti québécois. C'est là que nous nous sommes laissés et qu'il me restait à peu près cinq ou dix minutes, je ne sais pas. J'aimerais continuer avec une petite leçon de choses pour ces honorables amis qui arrivent et qui sont à la veille de partir, mais, entre-temps, à ce moment-ci, je ne peux résister à l'envie de citer encore ce chef — enfin, ce chef — du Parti québécois. Evidemment, comme les membres du Parti québécois, je regrette son absence de la province à ce moment-ci. Je ne sais pas s'il lit les journaux du Québec où il est, mais je lui rappellerais la page 700 des Débats de l'Assemblée législative, en 1965. Bien franchement — c'est sa façon d'être; il est franc et bien ouvert; je connais bien mon homonyme, c'est un Gaspésien — il disait ceci, toujours dans l'étude du même bill: "J'avouerai que, moi comme d'autres, celui qui vous parle, arrivant en 1960 après un gouvernement qui, pendant 16 ans, avait eu les dossiers en main, celui qui vous parle n'ayant aucune expérience puisqu'on arrivait — il y a quelqu'un qui arrive — on a pu dire des choses qui, en étudiant la réalité dans les détails, parfois dans des passages importants, ont eu à évoluer."

Ecoutez-moi ça, ça va vous rendre service. "Je connais seulement les ânes et les imbéciles...

M. VEILLEUX: Le député de Saguenay vient de se reconnaître.

M. LEVESQUE: M. le Président, M. René Lévesque continuait ainsi...

M. VEILLEUX: Le député de Saguenay vient de se reconnaître.

M. LEVESQUE: ... et ç'a déjà été dit bien avant moi, qui n'évoluent pas."

M. le Président, qu'est-ce que vous voulez, M. Lévesque est un homme très intelligent et il savait fort bien qu'une fois qu'on lui a confié des responsabilités... C'est bien beau d'être dans l'Opposition, puis niaiser, puis critiquer, mais une fois qu'on nous a donné la responsabilité du pouvoir, à un moment donné, qu'est-ce que vous voulez? La majorité des citoyens vous disent: C'est à vous, monsieur, c'est à vous, telle équipe, c'est à vous l'équipe du Parti libéral à qui on confie l'administration des affaires de la province. Mais il faut qu'on prenne nos responsabilités, puis qu'on administre, puis qu'on cesse de niaiser dans les commissions et tout ça, puis poser des questions, le genre de questions, de mille questions qu'on a voulu poser au sujet de choses qui vont arriver en 1975, en 1977 en 1980, ce n'est pas ça ! Il faut administrer aujourd'hui! Il faut qu'on prenne nos responsabilités, ce sont les responsabilités d'un gouvernement responsable.

M. le Président, le meilleur témoignage à ce moment-ci que je peux trouver pour convaincre mes amis effondrés du Parti québécois, n'est-il pas celui de leur chef qui disait, à la page 961 des Débats de l'Assemblée législative, session 1965, à un moment donné, alors qu'il était absolument, enfin... Non, non, je ne dirai pas le mot, M. René Lévesque...

M. LESSARD: ... hors d'ordre?

M. LEVESQUE: Ecoutez le sens démocratique de ses paroles: "Parce qu'on a été élu en 1960, qu'est-ce que vous voulez, on a bien le droit de faire les choses, c'est notre responsabilité." Voilà ce qu'il disait. Que disait notre ami René, à un moment donné? Il disait: "On peut accumuler les objections jusqu'à la fin du monde." Ce serait encore un vrai "filibuster", jusqu'à la fin du monde! "On peut accumuler les objections jusqu'à la fin du monde, mais quand même on irait 20 ans en comité ou 20 jours, cela ne changerait pas grand-chose. Maintenant, je m'excuse." Voilà ce qu'a dit le chef du Parti québécois et voici les représentants de celui qui n'est pas ici, malheureusement ou heureusement, je ne le sais pas; je demanderai au député de Laurier de juger.

M. MARCHAND: Heureusement pour l'équipe libérale.

M. BURNS: Vous n'y avez pas gagné au change.

M. LEVESQUE: Un instant. Vous jugez; d'après la Chambre ce soir, je n'ai pas de doute là-dessus.

M. BURNS: Je vais dire comme on dit, M. le Président...

M. MARCHAND: II y a une chose certaine, c'est que la province y a perdu en élisant pendant dix ans l'ancien député de Laurier.

M. BURNS: ... ça "rempironne" au lieu de "s'emmieuter".

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: M. le Président, je n'ai pas l'intention, évidemment, de continuer dans cette veine. Il faudrait que je cite mon ancien collègue, ami et homonyme, gaspésien d'origine, grand ami de celui qui vous parle; j'ai beaucoup de respect pour lui et son jugement. D'ailleurs, on le voit dans les textes.

M. LACROIX: Vous me permettrez, M. le Président, de ne pas partager toutes les opinions de l'honorable leader.

M. LEVESQUE: Loin de moi l'idée, M. le Président, de me servir du journal des Débats comme de l'Ancien Testament; cependant, c'est un testament dont ne peuvent pas tenir compte des gens comme ceux des Iles-de-la-Madeleine qui protestent, mais dont doivent tenir compte,

cependant, les sept plaies d'Egypte ou enfin les sept membres du Parti québécois qui sont les héritiers...

M. LACROIX: Et surtout la peste de Saint-Jacques !

M. LEVESQUE: M. le Président, voici ce que disait le chef du Parti québécois et là, je reviens très sérieusement à la question: "É y a des décisions à prendre là-dedans qui, essentiellement, affectent d'une part le gouvernement qui a été élu pour représenter les citoyens de son mieux, c'est sa responsabilité de présenter des projets de loi." Et il continuait comme ceci: "Je ne vois pas de raisons sérieuses de s'imposer encore une fois des "sparages" publics avec des porte-parole qui auraient été retenus essentiellement pour répéter les mêmes affaires. Parce que, ne vous inquiétez pas..." — et là il continue — "C'est essentiellement technique et tout ce qu'il y a là-dedans l'est aussi. Je pense que l'Opposition en est consciente, alors je ne sais pas où on s'en va avec ce débat-là, franchement! " Moi non plus!

M. le Président, je me réfère encore une fois...

M. BURNS: Est-ce que le ministre me permet une question?

M. LEVESQUE: A la condition que ce ne soit pas pris sur le temps.

M. BURNS: Non, une question très courte. Est-ce que le ministre sait combien de milliards étaient investis dans la loi ou dans le projet en question?

M. LEVESQUE: M. le Président, si on veut évaluer ses principes en dollars — c'est cela que le Parti québécois veut faire, il veut évaluer ses principes en dollars — M. le Président, on ne mérite pas de diriger les destinées d'une province comme le Québec qui, jamais, n'a accepté d'être dirigée par des gens comme ceux que suggère malheureusement le député de Maisonneuve. Jamais ils n'ont réussi à résister à l'opinion publique. Ils ont été mis dehors. Jamais le gouvernement Bourassa ne sera mis dehors parce qu'il n'a jamais évalué ses principes en dollars. Si le Parti québécois est prêt à marchander ses principes pour des dollars, nous arrêterons de discuter, nous arrêterons de parler parce que nous ne serons pas des interlocuteurs valables.

M. le Président, quel que soit le projet de loi en question, qu'il soit de $1 milliard ou de $6 milliards, nous allons continuer d'accorder à la population du Québec la même considération, nous allons continuer d'avoir la franchise que le premier ministre a avec la population du Québec.

Jamais a-t-on vu un premier ministre dans cette province — et j'en ai connu sept person- nellement dans cette Chambre, des gentilhommes, tous — mais jamais je n'ai vu un homme avec un esprit ouvert, une tolérance, une patience comme M. le premier ministre, jamais! Une patience que j'aimerais pouvoir avoir pour moi-même. J'aimerais l'avoir, cette patience et j'admire mon collègue d'à côté, qui me dit toujours: Calme-toi, accepte les choses. C'est le premier ministre le plus tolérant, le plus ouvert, le plus démocrate que j'ai jamais vu, malgré qu'il ait le pouvoir le plus fort, le plus complet que jamais un premier ministre ait eu dans cette province!

C'est la population entière qui l'appuie, mais malgré cela, il a toujours un doute parce qu'il restera peut-être un citoyen ou un groupuscule ou quelque chose quelque part qui aurait une objection. Il a une considération particulière pour les faibles, M. le Président. Et c'est pourquoi vous voyez un parti ministériel extrêmement gentil, extrêmement conscient de la présence des si petits soient-ils, d'un parti ministériel désireux d'être l'illustration de la démocratie. Mais jamais le parti ministériel ne sera l'illustration de la faiblesse et je vous dis, M. le Président, que nous avons des responsabilités à prendre et le premier ministre du Québec est le premier à dire: Nous allons prendre nos responsabilités, nous allons accorder au Québec ce dont le Québec a le plus besoin aujourd'hui, cette priorité économique, cette lutte contre le chômage, cette création d'emplois qui est l'illustration même d'un premier ministre jeune, dynamique, qui sait prendre ses responsabilités et qui les assumera.

M. LACROIX: M. le Président, pour essayer de donner aux gens du PQ un peu plus d'information, est-ce qu'on pourrait demander un rappel au député de Bonaventure?

M. SAMSON: M. le Président, si ça continue comme ça, à la prochaine séance ça va prendre des billets réservés.

M. LEGER: Vote. DES VOIX: Vote.

M. CADIEUX: M. le Président, je lui demanderais de ne pas gâter la sauce.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.

M. Charles Tremblay

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président...

UNE VOIX: Cela va être "plate".

M. LESSARD : Faites comme d'habitude, sortez.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CADIEUX: Cela fait trois fois que vous dites: M. le Président.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, pour appuyer la motion...

M. CADIEUX: Ne vous répétez pas.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... du député de Maisonneuve qui demande que l'étude du projet de loi 50 soit déférée à la commission parlementaire de la présidence du conseil, naturellement, j'appuie la motion du député de Maisonneuve. Maintenant, j'espère que sur les règlements vous serez aussi tolérant à mon égard que vous l'avez été pour le leader parlementaire. Tout de même, si je m'écarte du sujet en discussion, à savoir la motion, vous pourrez me rappeler à l'ordre.

M. le Président, les arguments du leader parlementaire ne m'ont pas convaincu...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, les arguments du député de Bonaventure ne m'ont pas convaincu que la convocation de la commission parlementaire n'était pas importante.

Après la suspension du débat, histoire de m'amuser un peu, j'ai fait des recherches dans le journal des Débats, pour tout simplement prouver, M. le Président, qu'avec le journal des Débats on peut trouver toutes sortes d'interventions de députés qui ont siégé dans cette Chambre.

Si vous me le permettez, M. le Président, j'espère que vous m'accorderez la même permission que vous avez accordée au député de Bonaventure.

UNE VOIX: Est-ce que ce sera aussi long?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, ce ne sera pas aussi long.

D s'agit, tout simplement, M. le Président, du journal des Débats du mercredi 23 avril 1969, lorsqu'il s'est agi de discuter du plan de développement de la région du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine, une autre région du Québec qu'on voulait développer. Remarquez bien que, d'avance, je félicite le député de Bonaventure d'avoir présenté cette motion, dans ce temps-là. Je l'en félicite, car la motion était importante. Vous verrez pourquoi.

Ici, M. le Président, l'honorable député de Bonaventure propose "que cette Chambre prie le gouvernement d'étudier la possibilité de créer une commission spéciale composée de quinze membres en vue de suivre la mise en application du plan de développement de la région du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine ; que cette commission spéciale soit autorisée à faire les études et consultations nécessaires à entendre les personnes et les corps intéressés, à obtenir la communication de pièces ou de dossiers, à assigner des témoins, à siéger même les jours où la Chambre ne tient pas de séance et, aussi, pendant que la Chambre est en séance".

M. le Président, lorsque j'ai lu la motion que le député de Bonaventure avait présentée à cette date, cela a contribué à me convaincre davantage de l'importance d'une commission parlementaire pour étudier toutes les implications, non pas du développement de la baie James, mais du projet de loi no 50, qui est intitulé Loi du développement de la région de la baie James.

Si vous me le permettez, M. le Président, je vous citerai un autre extrait de la déclaration du député de Bonaventure, alors qu'il présentait cette motion, le 23 avril 1969. Voici ce que disait le député de Bonaventure.

M. LEVESQUE: N'essayez pas de copier!

M. BURNS: M. le Président, écoutez comme il le faut!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je félicite le député d'avoir présenté cette motion. On lit ceci: "Je crois donc, M. le Président, que le député, et particulièrement le député du territoire, pourrait remplir son rôle d'une façon plus positive, d'une façon plus concrète et d'une façon plus valable — c'est toujours le député de Bonaventure qui parle — s'il faisait partie d'une commission parlementaire qui pourrait faire les études et consultations nécessaires, entendre les personnes et corps intéressés, obtenir les communications de pièces ou dossiers, assigner des témoins et siéger chaque fois qu'il serait justifié de le faire".

Voici, M. le Président, ce qui a fini de convaincre le député de Sainte-Marie de l'importance de déférer l'étude du bill 50 à une commission parlementaire. C'est le leader parlementaire, le député de Bonaventure, par ses arguments que j'ai lus dans le journal des Débats...

M. LACROIX: S'agissait-il du BAEQ?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II s'agissait du plan de développement du Bas-Saint-Laurent et cela comportait...

M. LACROIX: II y a une différence énorme. Le député de Sainte-Marie ne trompera pas la population du Québec. Je peux lui en parler à n'importe quel moment.

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II s'agissait de millions de dollars et dans le développement de la baie James, il s'agit de milliards de dollars. C'est la raison pour laquelle j'appuie la motion du député de Maisonneuve.

Il s'agit, lorsque nous voulons avoir des informations... Même ce matin, au député de Bourget qui posait une série de questions, le premier ministre a répondu: Vous n'en aurez pas, de réponse.

Pour savoir où nous allons avec le bill 50, pour avoir de plus amples renseignements, il s'agit de convoquer une commission parlementaire, d'écouter ceux qui sont impliqués, ceux qui vont participer au développement de la baie James. C'est pour cela que nous demandons la convocation de la commission parlementaire, pas pour....

M. LACROIX: M. le Président, sur une question de règlement, le député de Sainte-Marie, je crois, était présent cet après-midi, lorsque l'honorable ministre de l'Education a fourni des réponses aux questions précises qui ont été posées. Le député de Bonaventure a répondu aussi à toutes ces questions...

M. BURNS: Voyons donc! Ce n'est pas une question de règlement.

M. LACROIX: Et il est clair, certain, précis,...

M. BURNS: M. le Président, n'utilisez pas deux poids, deux mesures, s'il vous plaît.

M. LACROIX: ... que l'honorable député de Sainte-Marie à ce moment-ci ne veut faire que de l'obstruction.

M. BURNS: M. le Président, je vous le demande: Pas deux poids, deux mesures.

M. LE PRESIDENT: Si le député de Maisonneuve voulait être juste il admettrait qu'il a été très difficile aujourd'hui de présider cette séance.

M. BURNS: Sauf que nous sommes rappelés à l'ordre beaucoup plus vite de ce côté-ci.

M. LE PRESIDENT: Et j'ai dû cet après-midi rappeler à l'ordre autant les députés de la droite que les députés de la gauche. La seule différence, c'est que lorsque nous rappelons les députés de la gauche à l'ordre ils ont toujours l'impression qu'on ne rappelle jamais les députés de la droite.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Votre inspiration n'est pas la même.

M. LE PRESIDENT: J'ai même menacé cet après-midi de suspendre la séance.

M. CARDINAL: Cela aurait été bon.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II faudrait suspendre le président de temps en temps.

M. LE PRESIDENT: Les propos du député de Maisonneuve sont non seulement déplacés mais injustes. Quand même, je ne ferai pas de plus amples commentaires et j'inviterai le député de Sainte-Marie à continuer.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, si j'ai cité des déclarations que faisait le député de Bonaventure lorsqu'il a présenté sa motion, ce n'est pas, croyez-moi, dans l'intention de ridiculiser le député de Bonaventure parce qu'à ce moment-là il avait entièrement raison. D s'agissait de dépenser des millions de dollars dans une région et le député de Bonaventure exigeait que ce soit surveillé par une commission parlementaire permanente qui aurait même le droit de siéger quand la Chambre ne siège pas.

Parce que nous demandons la commission parlementaire, on se moque de nous et on dit qu'on fait un "filibuster." C'est notre devoir de le faire et quand le ministre de l'Education nous dit que la commission parlementaire a siégé, la commission des Richesses naturelles a siégé pour étudier le projet de la baie James et non pas le projet de loi no 50. Or, c'est pour étudier le projet de loi no 50 que nous demandons la convocation de la commission parlementaire, tout simplement parce que nous voulons savoir quel sera le rôle du gouvernement dans la direction et dans les travaux du développement de la baie James.

Qu'est-ce que le ministre des Richesses naturelles, fera quelle sera l'autorité du ministère des Richesses naturelles dans le développement de la baie James, du ministère des Finances, du ministère de l'Agriculture? Tous les ministères sont impliqués dans un projet de $6 milliards qui engage toute la population du Québec, toute l'économie du Québec pendant des années. Et on se moque des membres du Parti québécois en disant qu'on fait un "filibuster," c'est notre devoir de le faire et il n'y a personne qui va nous en empêcher. On le fera jusqu'au bout et vous ne nous intimiderez pas, soyez sûrs de ça. Soyez-en certains.

Qu'est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce va venir faire dans le développement de la baie James? C'est ça qu'on veut savoir à la commission parlementaire. Le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, le ministre des Terres et Forêts, le ministre du Travail, tous les ministères sont impliqués. Où est-elle, l'équipe de bons hommes qu'on nous avait promise le 29 avril pour qu'on soit obligé d'aller en chercher cinq autres pour diriger un projet de cette envergure?

Eh bien, même si je suis un membre du Parti québécois, j'ai confiance que les ministres sont capables de faire le travail mieux que cinq patronneux peut-être. C'est pour ça qu'on veut

étudier les implications du bill 50, et qu'on veut que ça retourne à la commission parlementaire et je suis sincère quand je le dis. Ce n'est pas tout simplement une question de faire un filibuster et de retarder les travaux de la Chambre. Je souhaite que ce projet de loi retourne en commission parlementaire et même si j'ai hâte de prendre mes vacances, si tous les gens ont hâte de quitter cette assemblée, je n'ai pas le droit d'être pour, je n'ai pas le droit de manquer à mon devoir pour me dépêcher d'aller prendre des vacances, c'est un problème trop grave.

Il ne s'agit pas d'une loi des mines, d'une loi de réglementation, comme lorsque le député de Bonaventure citait les déclarations de l'ancien ministre des Richesses naturelles. Il s'agit d'un projet de loi qui engage tout le Québec, tout l'avenir économique du Québec. On sera peut-être obligé de hausser les impôts, de hausser le coût de revient de l'électricité. On ne le sait pas, mais je suis pour le développement de la baie James, je suis pour l'émancipation économique, le développement économique du Québec, je suis pour...

UNE VOIX: C'est pour combattre le chômage.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... mais je veux que la loi soit bien administrée sous la surveillance du gouvernement que le peuple a élu aux dernières élections. C'est ça qu'on veut, pas autre chose. Ce n'est pas une question de faire des "filibusters" puis de faire de la broue aux gens d'en face. C'est une question d'être sérieux et c'est pour ça et que j'appuie la motion du député de Maisonneuve.

Je souhaite que cette motion soit appuyée par les membres de l'Assemblée nationale afin de retourner en commission parlementaire; nous allons faire venir les dirigeants de l'Hydro, de Rexfor et de Soquem, les hauts fonctionnaires. Non pas pour venir donner des ordres au gouvernement, mais pour venir conseiller. Quand les ministres étudient des crédits, ils ont leurs conseillers auprès d'eux; qu'on les fasse venir devant la commission afin que nous, les membres de l'Opposition, ayons le droit de poser des questions et non pas avoir des réponses comme celle du premier ministre lorsqu'il a dit: Vous n'en aurez pas, de réponse.

Les sept députés du Parti québécois ont été élus démocratiquement...

M. LACROIX: Par erreur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Nous allons faire notre devoir tant que nous le voudrons. Ce ne sont pas les gens d'en face qui vont empêcher le député de Sainte-Marie d'accomplir son devoir et le mandat que lui ont confié ses électeurs. Cela, ça ne marchera pas; je vais le faire, mon devoir.

M. LACROIX: Ne vous énervez pas, ce ne sont pas vos sept députés qui vont conduire le gouvernement non plus.

M. BURNS: M. le Président, sur une question de règlement. Je demande, par votre entremise, aux députés ministériels d'au moins avoir presque autant de respect à l'égard du député de Sainte-Marie que nous en avons eu à l'égard du député de Bonaventure quand il a parlé.

M. VEILLEUX: Vous n'en avez pas eu.

M. BURNS: Je le demande par votre entremise, M. le Président.

M. VEILLEUX: Ce ne sont pas des députés de même calibre.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, on m'a dit, cet après-midi, qu'on n'avait pas le droit de faire des comparaisons avec des projets de loi qui ont été discutés pendant cette session, mais qu'on pouvait en faire avec des projets de loi qui ont été discutés pendant la session précédente.

Pendant la session précédente, on a eu le bill 8 sur l'assurance-maladie, qui était très important, et on l'a envoyé à la commission parlementaire. Le bill 38, qui obligeait les employés de la construction à rentrer au travail, on l'a dirigé à la commission parlementaire et on a entendu toutes les parties parce que c'était un bill important et cela, sans que l'on fasse des pressions sur le gouvernement. Je pourrais citer des dizaines de projets de loi qui sont actuellement envoyés à la commission parlementaire même avant qu'on en fasse la deuxième lecture.

On rencontre des gens qui demandent: Qu'est-ce que c'est, le développement de la baie James? Comment cela va marcher? On leur dit: Allez demander au premier ministre, il ne veut pas nous le dire, ni le leader parlementaire, ni les autres ministres. Attendez la nomination des cinq; vous irez les voir, ces gens-là, et eux vont vous répondre parce qu'ils seront les véritables "boss" de la Société de développement de la baie James. Attendez leur nomination. C'est cela.

Le leader parlementaire, en citant des déclarations de l'ancien ministre des Richesses naturelles, a essayé de nous intimider avec un "show", a essayé de nous faire un spectacle pour nous ridiculiser parce que le ministre des Richesses naturelles qu'était René Lévesque refusait une commission parlementaire sur un projet de loi de réglementation. Le leader parlementaire le sait. Quand le leader parlementaire a demandé la convocation d'une commission parlementaire pour le Bas-Saint-Laurent, cela impliquait de l'argent et ça l'intéressait. Pourquoi pas la baie James? Pourquoi ne pas agir de même pour le développement de la baie

James? C'est tout ce qu'on vous demande. Le bill 50 est adopté en deuxième lecture.

M. BRISSON: II va être adopté en troisième.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On le sait, il n'y a pas de problème. Vous n'avez qu'à aller vider les tavernes en arrière et à les faire voter.

Pour toutes ces raisons, sincèrement, M. le Président, nous demandons à tous nos collègues des deux partis de l'Opposition, nos collègues d'en face, d'accepter de voter pour la motion du député de Maisonneuve pour envoyer le projet de loi en commission parlementaire et prendre le temps de l'étudier à tête reposée, pas comme on l'a fait depuis une semaine en essayant d'agir à la faveur de la nuit pour nous faire adopter des projets de loi, en essayant de nous épuiser et de nous user, à des heures indues, jusqu'à trois ou quatre heures du matin.

Quand on joue l'avenir du Québec et de toute la nation québécoise, c'est trop important pour cela. C'est pour cela qu'on demande que le projet de loi soit déféré à une commission afin qu'on l'étudie. Qu'on en parle des gens de l'Hydro, qu'on en parle des fonctionnaires, qu'on en parle des autres ministres et après cela on l'amendera le projet de loi s'il y a lieu!

Je termine là-dessus, M. le Président, et je...

M. LEVESQUE: La vie éternelle!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... n'ai pas besoin d'ajouter que je voterai pour la motion du député de Maisonneuve.

UNE VOIX: Vote.

M. BRISSON: Les enveloppes!

UNE VOIX: Ce n'est pas la fontaine de jouvence.

M. Marcel Léger

M. LEGER: M. le Président, j'aimerais appuyer la motion du député de Maisonneuve qui nous propose de renvoyer le projet de loi à la commission parlementaire pour qu'on puisse obtenir de plus amples renseignements. Ce qu'on désire, par cette convocation de la commission parlementaire en question, c'est une occasion de faire répondre à une promesse du chef du gouvernement actuel qui se disait un gouvernement de participation. La participation, c'est s'enquérir auprès de la population, auprès des personnes responsables, auprès des groupes intermédiaires, et auprès des personnes directement impliquées, c'est s'enquérir auprès d'eux de leurs préoccupations, de leurs suggestions et par la suite présenter un projet de loi qui serait réellement une conséquence d'une participation collective à un projet qui se veut collectif.

M. le Président, certains des ministres actuels ont eu cette délicatesse, ont eu cette bonne pensée de permettre à la population, à des corps intermédiaires de venir s'exprimer, de venir donner leur appui pour d'autres projets de loi qui étaient aussi intéressants, qui étaient même moins importants, qui touchaient moins de personnes, qui demandaient moins d'investissements financiers et on n'a pas craint de le faire. Le ministre des Affaires municipales a présenté un projet de loi-cadre, il a présenté un livre blanc sur les affaires municipales, sur la réforme des structures municipales, sur le regroupement des municipalités et il a présenté un projet de loi sur l'évaluation municipale qui est retourné à la population pour qu'on puisse lui apporter des solutions. Le projet de loi pour les consommateurs a été renvoyé à une commission. Nous avons passé trois ou quatre mois là-dessus. Cela a permis d'améliorer énormément cette loi que nous aurons à voter prochainement.

Tandis que dans un projet de cette envergure, qui peut coûter au bas mot six milliards de dollars parce qu'on ne le sait pas combien cela va coûter, on ne sait pas quelle sorte d'investissement supplémentaire nous allons être obligés de requérir pour atteindre les objectifs qu'on veut donner à la société... Quand on regarde le bill 50 et son titre: Loi du développement de la région de la baie James et que le principe même de cette loi est la formation d'une société, alors, M. le Président, ce n'est pas la même chose. La société qu'on veut former et le développement de la baie James ce n'est pas la même chose. La société va peut-être permettre le développement de la baie James. On est en train de créer une société en n'ayant pas en main les renseignements voulus pour permettre à cette société-là d'exercer et d'obtenir les objectifs qu'on veut lui fixer.

C'est aussi ridicule que si on voulait confectionner un habit alors que l'homme que l'on veut mettre dedans n'est même pas encore né. On va avoir, au mois de septembre ou octobre, des chiffres, des rapports. Le président de l'Hydro-Québec nous disait que les chiffres seraient disponibles autour de septembre ou octobre, du moins à l'automne, et qu'à ce moment on pourrait savoir les possibilités de rentabilité, les moyens de financement. On va pouvoir établir des projections. Alors que c'est au mois de septembre ou octobre qu'on aura cela, on veut bâtir une société aujourd'hui. On est en train de créer un habit et l'homme n'est même pas né. Est-ce que ça va "fitter"? Est-ce que l'habit va être conforme à l'homme qui va être créé? M. le Président, on a demandé de convoquer cette commission parlementaire pour être capable d'étudier ces chiffres, d'obtenir ces renseignements qui permettront d'établir par la suite si la société qu'on veut créer aura tous les atouts en main, sera structurée en fonction de ce que nous aurons comme renseignements à l'automne.

M. le Président, on ne sait même pas quel

sort on donnera au développement minier. On ne sait même pas quel sort Soquem et Soquip vont pouvoir récolter à la suite de cette union horizontale que le premier ministre nous propose. M. le Président, nous voulons savoir tout ça. Nous voulons avoir, à cette commission parlementaire, des renseignements sur la production. Quelles sont les étapes nécessaires à la réalisation de ce projet qui nous permettront de savoir le prix, le coût au mill? Si, à l'étape un, on décidait d'arrêter le développement hydro-électrique de la baie James, combien cela coûterait-il? Est-ce qu'on va arrêter à l'étape deux? Combien cela coûterait-il à l'étape deux? Est-ce qu'on va arrêter à l'étape trois et à quel coût en mills?

M. le Président, est-ce qu'on aura besoin d'une production de un million de kilowatts, de cinq millions ou de dix millions? On ne le sait pas. Les chiffres nous seront fournis à l'automne. M. le Président, on veut savoir à cette commission parlementaire quel sera le rôle réel, final de l'Hydro-Québec. Le premier ministre nous dit: J'aurai des amendements à vous proposer en comité plénier. Autrement dit: Si vous voulez être gentils là, si vous acceptez le principe et arrêtez de poser des questions, vous aurez des réponses qu'on a déjà préparées.

Est-ce que décemment on peut se permettre de dire: On vous fait confiance, M. le premier ministre et on est sûr que vous avez des réponses à tout. Notre rôle, M. le Président, est d'obtenir les renseignements avant de voter, avant de donner notre appui. Quel sera le calendrier pour le rythme de ces travaux autant de la société que de ses filiales? Quelle sera cette rentabilité? Est-ce qu'il y a des études de terminées au complet? On nous a dit: II y a eu la commission des Richesses naturelles et on vous a rendu compte des rapports. C'étaient des résumés de rapport. On n'a pas voulu nous donner les rapports complets. On nous a dit tantôt: Vous avez posé toutes vos questions, vous avez eu toutes vos réponses à la commission des Richesses naturelles. Je me rappelle fort bien qu'à certaines questions qu'on posait: Combien cela va coûter? Le président de l'Hydro-Québec, sous le sceau du secret, nous disait-il, répondait : Je ne peux pas vous le dire, je ne peux pas dire d'avance mon coût parce que j'aurai à la vendre, cette électricité. On ne peut pas me demander à moi de faire connaître publiquement mes atouts. Il faut que je garde des as et des jokers dans mon jeu de cartes. C'est donc dire qu'il y a une quantité de questions auxquelles on n'a pas pu avoir de réponse. Mais, à ce moment-là, il n'était pas question de créer une société. On parlait du développement de la baie James alors qu'aujourd'hui on parle de créer une société.

M. le Président, jamais nous n'avons dit que nous étions contre le projet de la baie James tel quel. Nous avons dit que le projet de la baie James devait avoir une certaine forme de développement. C'est sûr, personne ne peut être opposé à ça. Personne ne peut être pour le chômage.

Mais le leader parlementaire nous dit que c'est pour créer des emplois, 125,000 emplois, alors que les chiffres nous ont démontré que le maximum d'emplois serait de 20,000 à 22,000 pour une période précise au milieu de l'été et d'une façon non régulière. Où sont ces 125,000 emplois?

Il a essayé de faire croire qu'on est pour le chômage parce qu'on n'accepte pas ces ballons qu'on nous présente. Il a essayé de faire croire qu'on est contre le développement du Québec parce qu'on refuse de donner à cinq dictateurs possibles, à cinq potentats le droit de vie ou de mort sur une population qui va vivre à l'intérieur de cette future municipalité, et aussi qu'on s'oppose à une organisation dont on ne connaît même pas l'étendue des pouvoirs qu'on lui donne.

M. le Président, on veut avoir une commission parlementaire pour permettre de savoir quel sera le financement, par l'Hydro, de cette société et de la filiale. Il faut se rappeler, M. le Président, le cas de Brinco. Et l'on verra le sérieux des questions qu'on veut poser à cette commission parlementaire. Il faut se rappeler les difficultés nombreuses qu'a dû surmonter Brinco pour financer un projet, au départ plus rentable que celui qu'on nous présente aujourd'hui. Il y avait un site excellent, une seule centrale, un bassin naturel — ce qui n'est pas le cas aujourd'hui — l'énergie à faible coût de revient et exigeant des capitaux de beaucoup moindre importance que ceux d'aujourd'hui, alors qu'à ce moment-là c'était quelque chose comme $900 millions.

Même dans ces conditions optimales qu'on avait à Churchill Falls, Brinco doit essentiellement le financement du projet à la participation de l'Hydro-Québec. On veut savoir, M. le Président, à cette commission parlementaire, quelle sera cette participation de l'Hydro-Québec. A Brinco, le financement ne s'est révélé possible qu'après la signature par l'Hydro du "power contract", en juillet 1968. C'était l'achat en bloc de la majeure partie de l'énergie produite, permettant au projet de s'autofinancer à même les premières entrées de revenus, soit $149 millions.

M. le Président, nous n'avons pas actuellement ces chiffres que nous avons maintenant pour Brinco. Le leader parlementaire nous disait tantôt que, pour un petit projet, le bill 8 présenté en 1965, le chef du Parti québécois avait dit: II faut vivre un an pour le savoir. C'est vrai, pour un petit projet qui n'a pas trop d'importance. Mais est-ce qu'on peut se permettre de voir comment ça va aller sans être certain d'avoir certaines garanties pour un projet de $6 milliards, pour un projet qui englobe l'énergie et les possibilités de toute une génération? M. le Président, ce n'est pas sérieux de faire des comparaisons de ce genre.

M. le Président, je reviens à Brinco. L'engage-

ment de l'Hydro-Québec à pourvoir sans limite la part des fonds provenant de sources extérieures pour toute tranche supérieure à $700 millions. Quelle sera cette relation entre l'Hydro-Québec et la société? C'est ça qu'on veut savoir à la commission parlementaire, M. le Président.

A ce moment-là, l'engagement de l'Hydro-Québec avait été pris pour assumer une partie du service de la dette dans la mesure où elle serait dans l'impossibilité — Brinco elle-même — d'assumer seule le service de la dette. Le paiement par l'Hydro était garanti aussi par des suppléments d'intérêts, c'est-à-dire de 5 1/2 p.c. à 7 3/4 p.c, soit environ $87 millions. Il y avait une rentabilité, d'abord, M. le Président. La garantie aussi de l'Hydro-Québec sur les fonds empruntés en première hypothèque. On veut savoir, M. le Président, à la commission parlementaire s'il y a encore des garanties de cette envergure que l'Hydro-Québec devrait faire, alors que l'Hydro-Québec est un organisme public et que cette société sera un organisme qui aura des pouvoirs qu'on ne pourra pas contrôler, sauf par un rapport au premier ministre, qui pourra nous le soumettre en temps et lieu, à l'Assemblée nationale, une fois que le tout aura été réglé.

M. le Président, dans la mesure où l'expérience de Brinco pourrait s'appliquer au projet de la baie James, il devient évident que l'Hydro-Québec devra jouer un rôle de premier plan dans le financement du projet. M. le Président, une autre preuve de l'importance de la motion présentée par le député de Maisonneuve: une lettre était envoyée dernièrement au premier ministre Robert Bourassa par la Fédération des ingénieurs et cadres du Québec qui réclamait, comme conclusion de ce qui vient de se dire, la convocation de la commission parlementaire pour être entendue.

M. le Président, voici ce que cette lettre disait: "Le projet du gouvernement québécois de confier le développement de la baie James à une régie gouvernementale dont serait écartée l'Hydro-Québec nous apparaît dangereux et nous laisse perplexes quant aux motifs véritables qui sous-tendent cette décision imminente que la Presse du 24 avril nous annonçait en primeur."

M. le Président, on ajoute: "L'Hydro-Québec est actuellement la seule entreprise québécoise qui puisse entreprendre des travaux de cette envergure et les mener à bonne fin. Elle l'a prouvé dans le passé, dans la réalisation du complexe Manic-Outardes. Les cadres, ingénieurs et techniciens qui étaient sur la réalisation de ces ouvrages sont toujours en place et, grâce à l'expérience acquise, sont plus en mesure que quiconque d'assurer un développement rationnel et économique des ressources hydroélectriques de la baie James."

Voilà des affirmations, M. le Président, que nous aimerions pouvoir élaborer. Ce sont des explications que nous aimerions pouvoir agran- dir, que nous aimerions obtenir en commission parlementaire, nous aimerions obtenir des renseignements supplémentaires sur ces possibilités. "L'Hydro-Québec a entrepris des études sur le développement des rivières de la baie James il y a une dizaine d'années et les poursuit de façon intensive depuis cinq ans. Ces ingénieurs et techniciens sont les seuls à posséder une connaissance approfondie du dossier et du terrain sur lequel devront être implantés les ouvrages."

M. le Président, à la commission parlementaire, nous aimerions pouvoir poser des questions à ces techniciens, à ces ingénieurs qui ont fait des travaux. "Ces études sont entrées dans leur phase finale et doivent permettre, à courte échéance, de dégager la solution optimale quant au développement de ce réseau très complexe de rivières."

On poursuit, M. le Président: "II est évident que dans ce contexte, une régie gouvernementale nouvellement créée serait complètement dépassée par l'ampleur de la tâche à accomplir et elle devrait s'occuper de compléter les études et de diriger les travaux de construction."

M. le Président, nous aimerions savoir, à cette commission parlementaire, quelles sont les autres études qui devraient être complétées. "Pour finaliser les études et diriger les travaux, elle devrait forcément faire appel à des compagnies de génie conseil qui, à leur tour, devraient forcément aller chercher leurs renseignements où? A l'Hydro-Québec, puisque c'est cette dernière qui a effectué les recherches et même les études à ce jour."

M. le Président, la lettre continuait: "Si nos renseignements sont exacts, il appert que le gouvernement du Québec aurait été impressionné par les promesses de réalisation rapide des ouvrages du complexe de la baie James faites par certaines compagnies de génie conseil. Les dirigeants de ces compagnies ont l'imagination fertile lorsqu'il s'agit de poursuivre des contrats aussi plantureux que ceux qui seraient accordés par ce complexe. Ils versent alors dans un optimisme irréaliste."

M. le Président, nous aimerions, à cette commission parlementaire, pouvoir aller plus loin dans ces avancés.

La lettre continue: "Nous partageons par ailleurs le désir du gouvernement du Québec de planifier le développement des richesses naturelles de cette région. A cet égard, nous soumettons les recommandations suivantes: "Premièrement, que le harnachement des ressources hydrauliques de la baie James soit confié à l'Hydro-Québec; "Deuxièmement, que les droits d'exploration et d'exploitation minières sur ce territoire soient réservés à Soquem; "Troisièmement, que les droits d'exploitation des richesses forestières soient réservés à Rexfor."

Nous aimerions, M. le Président, demander à cette commission parlementaire les motifs qui poussent cet organisme, la Fédération des ingénieurs et cadres du Québec, à obtenir cette demande. Pour quelle raison désire-t-on obtenir ces recommandations?

On demande aussi: "Qu'un comité de coordination et de planification soit établi par ces trois entreprises — non pas des filiales — et le gouvernement du Québec afin d'assurer un développement ordonné dans cette région."

Voici, M. le Président, les conclusions de cette lettre qui arrivent justement à point pour prouver le besoin de convoquer cette commission parlementaire: "Les décisions qu'a prises ou que prendra prochainement le gouvernement du Québec concernant le développement de la baie James sont d'une importance capitale pour le développement économique du Québec au cours des prochaines décennies. Pour cette raison, nous demandons que toute la question du développement des richesses naturelles de la baie James soit soumise pour étude à une commission permanente.

Eux demandent la convocation de la commission des Richesses naturelles, nous avons demandé celle de la présidence du conseil afin que tous les intéressés puissent nous soumettre leur point de vue. Notre proposition va plus loin parce que nous savons que nous pourrons entendre plus de personnes à cette commission qu'à celle qui est proposée ici.

J'aimerais faire remarquer un point qui confirme la proposition du député de Maisonneuve de convoquer cette commission parlementaire. Il y a un point très important qui n'a pas tellement été touché. J'en ai parlé déjà une fois, dans les arguments fournis. Jusqu'à maintenant, la politique d'achat de l'Hydro-Québec a été une politique réellement québécoise, et nous aimerions qu'à cette commission parlementaire nous puissions nous assurer que cette société poursuivra, parce que ce n'est indiqué nulle part, la même politique d'achat québécoise que l'Hydro-Québec a poursuivie, et je cite quelques chiffres.

M. SAINT-PIERRE: J'invoque le règlement, M. le Président, pourrions-nous rappeler au député de s'en tenir exactement au sens de la motion? On nous parle de la politique d'achat; Nous pourrons en parler lorsque nous serons en comité, que nous étudierons le projet article par article. Je trouve que ce n'est pas une disposition qui se met dans un texte de loi, mais sûrement qu'on peut avoir les garanties de la société de la même façon.

M. LEGER: M. le Président, ce n'est pas un rappel au règlement et je tiens à dire au ministre...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, il y a une motion.

M. LEGER: ... qui est peut-être impatient, que je n'enfreins pas le règlement...

M. SAINT-PIERRE: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. LEGER: ... La politique d'achat de cette nouvelle société, nous aimerions la connaître. Nous sommes très heureux de remarquer que 83 p.c. des achats de l'Hydro-Québec à ce jour, ont été faits au Québec chez des compagnies québécoises. Ce sont...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le règlement...

M. LEGER: ... ces questions-là que nous aimerions poser à la commission parlementaire. Une des raisons, c'est cette politique d'achat qui est une chose essentielle au Québec, et je cite des chiffres: l'Hydro-Québec a placé des commandes, en 1970, pour $250 millions comme suit chez des fournisseurs québécois.

M. SAINT-PIERRE: A l'ordre, M. le Président, nous ne voulons pas avoir le bilan financier de l'Hydro-Québec, nous voulons avoir les raisons...

M. LE PRESIDENT (Blank): A l'ordre! Je pense que cet argument peut être une question de privilège, on a raison, vous allez peut-être trop loin, je vous demande lors de cette commission que vous voulez faire convoquer, à qui désirez-vous poser cette question, la régie n'est pas formée.

M. LEGER: M. le Président, lors de la convocation de cette commission parlementaire, je poserais la question à l'Hydro-Québec pour savoir quel contrôle elle aura sur la filiale. Obligera-t-elle la filiale à suivre la même politique? L'Hydro-Québec qui est au courant de la façon que ça fonctionne chez elle, aura-t-elle les pouvoirs de convaincre la filiale de le faire étant donné que la société sera indépendante? Ce sont des questions que nous voulons poser au ministre à ce moment-là mais avant d'approuver le projet de loi, et de l'étudier article par article.

M. SAINT-PIERRE: Le député me permet-il une question? La filiale a trois directeurs sur cinq qui sont de l'Hydro-Québec. Si l'Hydro-Québec a jugé jusqu'à présent d'avoir une politique d'achat favorisant les institutions québécoises, sûrement que ces trois personnes qui détiendront le pouvoir demanderont les mêmes politiques.

M. LEGER: M. le Président, je tiens à vous faire remarquer que le ministre m'a donné une réponse, il n'a pas posé de question.

M. SAINT-PIERRE: Cela me semble telle-

ment évident que je ne vois pas pourquoi vous voulez poser des questions.

DES VOIX: Règlement!

M. LEGER: M. le Président, le seul point du règlement que pouvait invoquer le ministre c'était de me poser une question et il me donne une réponse. Je ne la lui ai pas demandée; je le sais que l'Hydro-Québec sera représentée par trois personnes à la filiale, mais ça ne veut pas dire qu'elles pourront obliger cette filiale à agir de cette façon-là étant donné que la société mère est elle-même responsable de la filiale.

M. SAINT-PIERRE: Puis-je poser une question au député?

M. LEGER: M. le Président, il ne me reste que trois minutes.

M. SAINT-PIERRE: Le député a-t-il siégé à un conseil d'administration, et peut-il me dire si les trois administrateurs de l'Hydro-Québec sur cinq n'auront pas un pouvoir de décision?

M. LEGER: Alors, pourquoi y a-t-il une régie?

M. SAINT-PIERRE: C'est la filiale qui fait le développement hydro-électrique, lisez votre texte de loi.

M. LEGER: M. le Président, la motion est claire, nous voulons qu'on convoque la commission parlementaire pour pouvoir poser des questions, des questions dans des ordres d'idées différents et importantes. Alors, quand je commence à dire quelle sorte de questions on veut poser, c'est pour donner un appui, de la force à cette motion. Il y a tellement de questions à poser — et je n'en ai énuméré qu'une partie — que c'est pour prouver, justement, que cette commission parlementaire devrait être convoquée, il y a trop de points obscurs. Si le ministre veut répondre aujourd'hui à toutes ces questions-là, je suis d'accord, mais jusqu'à maintenant, on nous a dit qu'on ne voulait pas nous donner de réponse.

Il y a beaucoup d'autres questions qui devraient être posées à cette commission parlementaire. Vous avez un autre point important qui n'a pas fait l'objet d'étude et jusqu'à maintenant, personne n'a semblé répondre.

On donne, à l'occasion du bill 50, un mandat à la Société de développement: "La société doit veiller à la protection du milieu naturel et prévenir la pollution dans le territoire". Cela veut dire quoi? Quelles sortes de moyens a-t-elle? Sur quelles normes va-t-elle se baser pour pouvoir réellement réaliser les objectifs que le bill 50 donne à la Société de développement?

M. le Président, je disais justement les conséquences de ce manque de normes. Parmi les questions qu'on voudrait poser à cette commission parlementaire... il y a un article dans le projet de loi qui abolit la juridiction de la Régie des eaux dans ses territoires et, jusqu'à maintenant, rien ne nous dit quelles seront les normes que cette Société de développement utilisera pour permettre justement de résoudre le problème de la pollution. On ne sait plus quelles normes seront considérées comme adéquates par la société. Est-ce qu'elle va être obligée de prendre les mêmes normes que l'Hydro-Québec et, à ce moment-là, faire face à un dédoublement de services, un dédoublement de laboratoires, etc.

M. le Président, je parlais d'un problème de déplacement du milieu, d'écologie. La Société de développement aura comme filiale aussi une autre société avec Soquip et aussi concernant le développement de la forêt, Rexfor et elles auront à découper une partie importante de forêt dans ce territoire. Qu'est-ce qui peut arriver quand il y a une réduction gigantesque de forêts? On le sait, les forêts fournissent l'oxygène nécessaire à la vie sur terre.

M. le Président, vous êtes sans doute au courant qu'il y a des conséquences qui peuvent résulter d'un projet de cette envergure-là. Je le citais, la dernière fois, je ne veux pas revenir avec l'exemple des sardines, mais je veux donner un exemple de conséquences imprévues. On veut savoir si, à cette commission parlementaire, il y aura quelqu'un qui pourra nous dire que l'on a fait des études sur les conséquences d'un déplacement gigantesque d'arbres, d'une inondation d'un territoire énorme, par le fait qu'on va bâtir un barrage. Est-ce qu'on a fait des études sur les conséquences, seulement un petit paragraphe, d'une conséquence, qu'on ne peut pas prévoir s'il n'y a pas d'études de faites? ...

Alors la conséquence est peut-être un peu drôle. Je lisais ici dans l'Express un exemple qui n'a aucun rapport avec la baie James, mais qui donne comme analogie une conséquence imprévue. On dit, si vous tuez des aigles, vous risquez de vous retrouver avec une invasion de sauterelles; ç'a l'air qu'il n'y a aucun rapport. Bien, voici le rapport qu'il y a. Les aigles empêchent en effet des lézards de proliférer, et vous savez fort bien, quand les lézards prolifèrent, les grenouilles, dont ils se nourrissent, deviennent rares. Alors, quand il n'y a pas assez de grenouilles, les sauterelles augmentent. Alors voyez-vous on va permettre...

M. SAINT-PIERRE: Peut-être bien que dans la baie James...

M. LEGER: ...et les conséquences: on voit une épidémie de sauterelles. Voilà les conséquences qu'il peut y avoir dans un projet où les études ont été faites d'une façon superficielle.

M. BIENVENUE: II n'y a pas de sauterelles dans la baie James.

M. LEGER: Tout ça, tout simplement, avant de terminer, pour vous montrer jusqu'à quel point...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais aux honorables députés du Parti québécois de laisser parler leur confrère.

M. CHARRON: Ce n'est pas un "filibuster", M. le Président.

M. LEGER: M. le Président, la seule raison pour laquelle j'évoque ces différentes conséquences, c'est pour prouver jusqu'à quel point nous avons besoin de renseignements au niveau du coût de l'Hydro-Québec, au niveau du coût de la production de la Société de développement de la baie James, au niveau des calendriers, du rythme des travaux qu'on ne connaît pas, de la rentabilité, le problème de financement, le problème...

UNE VOIX: Des sauterelles.

M. LEGER: ...des politiques d'achat, le problème de la pollution, le problème de l'écologie que je viens de citer, le problème d'exportation, le problème des forêts et des mines, etc. Ce que nous voulons, ce sont des réponses et pour obtenir des réponses... nous voulons ces réponses avant de donner notre appui à un projet de loi de cette envergure et je suis convaincu que nous serions réellement mal placés devant tous les électeurs de nos comtés... Avant-hier, nous représentions, les trois partis de l'Opposition, 55 p.c. de la population du Québec; maintenant, nous représentons peut-être...

DES VOIX: Mais non.

M. LEGER: ...à peu près 46 p.c, parce qu'il y en a qui ont changé d'idée. Mais, à ce moment-là, nous ne pouvons pas honnêtement donner notre appui à un projet de loi quand il y a tellement de points d'interrogation pour lesquels nous n'avons pas eu les réponses dont nous avons besoin pour, après cela, nous permettre de dire: Nous pouvons appuyer un projet qui sera pour le plus grand bien de la province de Québec.

M. SAINT-PIERRE: C'est triste.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, devant l'entêtement de nos collègues d'en face, je me vois aussi obligé...

M. SAINT-PIERRE: II faut parler d'entêtement, oui.

M. LESSARD: ... de venir appuyer forte- ment la motion de mon collègue, le député de Maisonneuve. Cette motion m'apparaît sensée, régulière, normale et absolument nécessaire. Si nous avions eu toutes les réponses aux questions que nous avons posées depuis le début de ce débat, nous n'aurions pas besoin de demander que cette commission puisse siéger.

Vous me permettrez, M. le Président, de prendre à témoin, au sujet des réponses que nous avons reçues des ministres, un journaliste qui n'est certainement pas, à ce qu'il me semble, membre du Parti québécois et qui est reconnu ici comme assez compétent. En effet, dans le Soleil d'aujourd'hui, M. Normand Girard écrit ce qui suit: "II est bien beau de dire que "les Oppositions sont contre la création des nouveaux emplois", comme le gouvernement s'est contenté de dire. Mais, ne serait-il pas plus rationnel et plus propice à une bonne compréhension des choses si le gouvernement, au lieu de demander à son ministre des Finances, M. Raymond Garneau, de prononcer un discours politique, lui avait demandé de répondre aux interrogations d'ordre général et technique, à la fois, que l'on se pose. Cela n'a pas été fait. C'est le problème du gouvernement Bourassa. Il n'appartient pas aux observateurs ou aux journalistes de le résoudre."

M. le Président, il nous appartient, à nous, d'insister pour obtenir toutes les réponses à nos questions. Nous jugeons qu'il est absolument nécessaire de faire siéger la commission de la présidence du conseil, parce que trop de questions se posent auxquelles on n'a pas répondu, parce que ce projet est trop important pour qu'on laisse le gouvernement actuel aller à l'aventure et parce qu'il y a trop de gens qui continuent de s'interroger. On dirait qu'il n'y a que le gouvernement actuel qui a le pas. Actuellement, nous sommes deux Oppositions, qui représentent 44 p.c. de la population, qui se posent des questions normales, des questions logiques qui exigent des réponses.

M. BOSSE: Votre pourcentage diminue à vue d'oeil.

M. LESSARD: II y a aussi, derrière le Parlement, en dehors du Parlement, des gens sensés, des gens responsables, des gens normaux qui, eux aussi, demandent au gouvernement de surseoir, pendant une période de temps limitée, à ce projet parce que nous n'avons pas réponse à toutes les questions. Il semble — et nous l'avons dit — que ce n'est pas parce que nous allons surseoir à ce projet pendant une période de six mois que nous allons nécessairement mettre le projet à l'eau. Il ne s'agit pas, en convoquant la commission de la présidence du conseil, de s'opposer au projet de la baie James. Il ne s'agit pas de s'opposer au développement économique du Québec; il ne s'agit pas de s'opposer à la lutte contre le chômage. Au contraire, s'il y a un parti qui, jusqu'ici en cette Chambre, a poussé le gouvernement actuel à élaborer des projets pour résoudre le problème

du chômage, c'est bien nous, du Parti québécois.

M. BOSSE: Dans l'espoir qu'on ne trouve pas de solution.

M. LESSARD: M. le Président, il y a ici des questions fondamentales. Simplement les circonstances dans lesquelles ce projet-là a été lancé nous amènent, nous, et la population, à nous poser quantité de questions.

D'autant plus, et contrairement à ce qu'on a dit, que ce n'est que pendant deux jours seulement que nous avons pu interroger les experts. Deux jours seulement pour un projet de six milliards et demi, en ne parlant pas de tous les autres investissements qui seront nécessaires: investissements dans les forêts, dans les mines, dans le tourisme. C'est un projet de six milliards et demi et, quand il s'agit d'autres projets de loi, le gouvernement actuel n'hésite pas à accepter d'aller devant une commission parlementaire.

M. le Président, simplement pour vous montrer combien les questions que nous avons à poser à la commission de la présidence du conseil sont importantes, je voudrais à nouveau prendre à témoin un ancien employé de l'Hydro-Québec qui, en 1968, était interrogé à la Commission hydro-électrique du Québec sur le projet que nous discutons aujourd'hui.

Il était interrogé par M. Flamand, qui disait ceci: "Sur la Nottaway, la Broadback, la Rupert, est-ce que vous êtes plus avancés dans vos travaux? " Réponse de M. Baribault, qui était directeur du génie: "Nous avons fait des études assez complètes sur ces rivières." M. Flamand: "Assez complètes. Maintenant, je ne sais pas si vous pouvez me répondre à ce stade-ci. Envisagez-vous de faire des travaux sur les rivières Nottaway, Broadback et Rupert? Est-ce que vous envisageriez — continuait M. Flamand — de faire d'abord des travaux sur des rivières aménagées complètement ou si vous projetez des travaux qui pourraient se faire concurremment sur les trois rivières? Je vous pose la question parce qu'il y a des problèmes de dénivellation de terrain." On demande au gouvernement libéral actuel, et même aux députés libéraux actuels, d'avoir un peu, et de le montrer, le sens des responsabilités. Il s'agit d'engager un projet qui nécessite beaucoup...

M. BOSSE: Vos électeurs!

M. LESSARD: ... d'investissements, un projet qui, on l'a dit et répété, demande la participation collective de tous les Québécois. Il ne s'agit pas de s'opposer, de créer la désunion. Il me semble que, si le gouvernement avait voulu, il aurait, comme le voulait le ministre des Affaires culturelles, créé un véritable projet collectif de tous les Québécois. A cause de son acharnement, à cause des cachettes qu'il fait actuellement, le gouvernement est en train de détruire cet immense projet.

Voici la réponse de M. Baribault, au sujet du projet de la baie James...

M. MAILLOUX: En 1968, cela?

M. LESSARD: Oui, M. le Président, et la région demeure la même. C'est toujours la même chose, M. le Président; les rivières sont encore là, le sol est encore là, c'est toujours le même sol...

M. MAILLOUX: II y a trois ans qu'ils ont arrêté l'étude?

M. LESSARD: "Toute cette région de la province a une topographie très peu favorable à des aménagements hydro-électriques. Nous avons examiné les trois rivières Nottaway, Broadback et Rupert. Nous avons fait des études très débaillées et nous avons constaté qu'il était à peu près impossible d'aménager la rivière Nottaway parce que le terrain ne s'y prête pas. La Broadback aurait pu être aménagée avec assez de difficultés, mais la rivière Rupert semblait la rivière la plus favorable. Nous avons étudié différents types d'aménagement dont l'un entre autres comporterait un détournement d'une partie des bassins de la Nottaway et de la Broadback dans la Rupert et finalement l'aménagement de centrales sur la rivière Rupert."

Voilà, M. le Président, un expert qui lui-même s'interroge sur le problème d'aménagement de l'ensemble de ce projet. Nous, M. le Président, disons que le principe a été accepté. Le principe de la baie James a été accepté, mais ce que nous voulons, M. le Président, c'est simplement pouvoir questionner les experts, questionner les gens qui en l'espace de trois mois, par exemple, sont allés fouiller dans les dossiers de l'Hydro-Québec pour préparer un rapport, à partir des dossiers de l'Hydro-Québec; en trois mois, on a préparé un rapport. Ces gens-là n'ont pas été entendus, M. le Président, à la commission des Richesses naturelles. Devant les nombreuses contradictions qui se soulèvent lorsque nous prenons connaissance de ces rapports, nous ne pouvons que continuer à nous poser des questions. Nous savons comment on s'est organisé pour que les chiffres soient semblables, dans quelle réunion secrète, par exemple, on s'est organisé pour pouvoir rendre des chiffres pareils entre l'Hydro-Québec, ABBDL et la firme Rousseau-Warren...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le règlement. Ce que vient d'affirmer le député est complètement faux, on l'a même dit à la commission parlementaire.

M. BURNS: M. le Président, qu'est-ce que c'est, ces affaires-là?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ne peux pas permettre...

M. SAINT-PIERRE: On nous donne des choses complètement fausses.

M. LE PRESIDENT: ... le député de Saguenay.

M. LESSARD : M. le Président, nous demandons qu'une commission puisse siéger, que la commission de la présidence de l'Exécutif puisse siéger. Pourquoi? Parce que la commission a des pouvoirs que nous n'avons pas, nous, de l'Assemblée nationale. Parce que la commission a autorité pour délibérer et s'enquérir de toutes les affaires et de toutes les matières que la Chambre lui aura envoyées ou qui sont de sa compétence, pour faire de temps à autre des rapports exprimant ses observations et ses vues sur ces affaires et ces matières et pour envoyer chercher les personnes, les pièces et les dossiers dont elle aura besoin. Pourquoi, M. le Président, le gouvernement actuel s'oppose-t-il tant à la convocation de cette commission? Pourquoi, M. le Président, alors que nous n'avons pas reçu actuellement de réponses aux questions que nous avons posées? Parce que, tout simplement, et c'est là la réponse, le gouvernement a certaines choses à cacher? Qu'est-ce que le gouvernement veut cacher? La population a le droit de le savoir.

M. SAINT-PIERRE: On va vous cacher bien vite, vous.

M. LESSARD: C'est le plus grand projet collectif que nous ayons à aménager. M. le Président, il est important que nous ayons la possibilité d'interroger les témoins que la commission jugera...

DES VOIX: Debout.

M. LESSARD: Oui, debout les libéraux et réveillez-vous avant qu'il ne soit trop tard et que l'Hydro-Québec ne soit complètement à terre! Debout, bande d'endormis! Et, M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. LESSARD: ... vous n'êtes pas écoeurés de moisir dans ce parti-là?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! La motion!

M. LESSARD: M. le Président, je reviens à la motion pour féliciter de sa perspicacité, de sa sagesse, de sa connaissance, même, mon collègue, le député de Maisonneuve. Il a jugé que c'était la commission de la présidence du conseil qui devait siéger. On aurait bien pu le demander à la commission des Richesses naturelles parce qu'il y a des mines là-dedans, des mines à développer, des ressources naturelles à développer. On aurait bien pu demander que cette commission-là siège. Non, l'expérience pratique de notre député, de notre collègue, M. le Président, nous a démontré que c'était cette commission qui devait siéger. On aurait même pu demander à la commission du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche comment, par exemple, on va chasser les mouches noires dans cette région. Est-ce qu'on va utiliser du DDT? Non, c'est défendu.

M. VINCENT: Non, mais ils sont exemptés de ces lois.

M. LESSARD: Ah! C'est vrai, eux autres, ils ne sont pas soumis aux lois. C'est une régie complètement dictatoriale, M. le Président.

M. LAVOIE (Wolfe): Le 6-12.

M. LESSARD: ... c'est-à-dire que le gouvernement actuel s'apercevant qu'il n'est même plus capable de gouverner donne tous ses pouvoirs à cette régie sur un sixième du territoire. Mais, M. le Président, et je reviens à la motion, nous avons demandé que ce soit spécifiquement la commission de la présidence du conseil qui étudie ce problème. Pourquoi, M. le Président? Parce que c'est justement à cette commission que nous pouvons interroger tous les experts du gouvernement qui sont responsables de l'Office de planification du Québec. En effet, M. le Président, l'une des raisons qu'on a données pour élaborer ce projet a été de dire qu'il fallait coordonner l'aménagement de l'ensemble des ressources de cette région.

Mais, est-ce qu'on en a besoin de cette régie? Tout à l'heure, le ministre de l'Education, qui est devenu, devant le silence du ministre des Richesses naturelles, le véritable ministre des Richesses naturelles, disait à mon collègue de Lafontaine: Mais, quoi, c'est l'Hydro-Québec, puisqu'il y a trois administrateurs de l'Hydro-Québec qui vont siéger à cette régie. C'est la même chose que l'Hydro-Québec.

M. le Président, si c'est la même chose que l'Hydro-Québec, pourquoi créer une autre Hydro-Québec? Vous venez d'annuler tout ce que vous avez dit...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M.LESSARD: ... depuis le début. M. le Président, nous n'avons pas du tout besoin de ce projet et c'est sur ça que nous voulons particulièrement poser des questions. Parce que l'Office de planification du Québec, qui a été créé justement pour coordonner d'une façon intégrale le développement économique du Québec, pour élaborer au Québec la planification économique, a tous les pouvoirs nécessaires pour coordonner l'ensemble de ces travaux.

M. le Président, est-ce que les responsables et les experts de l'Office de planification du Québec ont été interrogés sur ce projet? Est-ce que les experts, tel que cela leur est demandé, tel que cela leur est permis par la Loi de l'Office

de planification du Québec et par leurs fonctions, ont eu, par exemple, à préparer, pour le compte du gouvernement, des plans, des programmes et des projets de développement économique et social et d'aménagement du territoire, spécifiquement du territoire de la baie James — mon collègue de Saint-Jacques est d'accord avec moi — en vue de la meilleure utilisation des ressources économiques et humaines?

Il y a un intelligent qui vient de m'envoyer quelque chose. Je trouve, M. le Président, que ça n'en vaut pas la peine de reprendre.

C'est le député de Montcalm qui a soulevé cette question de l'utilisation des ressources humaines de ce territoire. Il faudra tenir compte des particularités des régions du Québec et ceci est important, parce que tout le développement économique de la baie James va avoir des conséquences énormes sur l'ensemble des autres régions du Québec, en particulier, lorsqu'il s'agira, par exemple, de développer les ressources forestières.

Là, on se pose des questions. Qu'est-ce qu'on va faire avec ce bois? Je comprends que le député de Matapédia règle tout ça, comme ça, ces affaires-là, en disant: On va le vendre. Mais, justement, on sait ce qui est arrivé, chez nous, avec l'Office de récupération du bois de la Manicouagan. Nous savons, nous, comment ça s'est passé, ça. Est-ce que ce n'est pas exactement ce qu'on veut faire?

M. ARSENAULT: M. le Président, sur un point d'ordre. L'Office de récupération du bois de la Manicouagan a donné au-delà de $100 millions en salaires aux ouvriers forestiers de la Gaspésie et de la Côte-Nord, et il a soldé son budget par un surplus d'au-delà de $20 millions qu'il a versés aux coffres de la province.

M. LESSARD: On pourrait poser des questions, M. le Président: Combien ça a donné au député et combien ça a donné à Joncas? Combien en patronage, M. le Président? Alors, est-ce que l'Office de planification a été consulté dans l'aménagement intégral de ce territoire? C'est important, c'est fait pour cela, cet office-là. On a créé cet office explicitement dans ce but. L'office, M. le Président, a même tous les pouvoirs d'obtenir — vous êtes d'accord, M. le Président — toutes les informations nécessaires de tous les ministères concernant l'aménagement de toutes les ressources.

On n'a pas besoin de régies d'Etat pour cela. Nous avons un organisme qui coiffera l'ensemble des organismes que nous avons déjà. Il faut savoir de la commission parlementaire, M. le Président, qui devrait siéger si cet office a véritablement le pouvoir nécessaire. Or, la loi nous dit que oui. Il faut savoir si cet office a été consulté. Est-ce que, par exemple, cet office a eu à exécuter ou à faire exécuter, même parce que c'est dans son mandat, c'est dans ses pouvoirs, pour les fins prévues aux paragraphes a) et b) que je viens de lire, des recherches, études, enquêtes et inventaires? Est-ce que cet office, M. le Président, a consulté les dossiers de l'Hydro-Québec, a consulté les dossiers cachés de A.B.B.D.L et Warren et Rousseau?

Nous voulons aussi savoir, M. le Président, quelles sont les relations entre le gouvernement actuel et la Société Acres Québec, succursale d'Acres Toronto et le ministre de l'Education, M. le Président...

DES VOIX: Vote!

M. LESSARD: M. le Président, est-ce que l'office aura à coordonner les recherches qui ont été faites par l'ensemble des experts, à coordonner les recherches, les études, les enquêtes et inventaires qui sont faits, soit par les experts, soit par l'Hydro-Québec, soit par les ministères du gouvernement? Il me semble, M. le Président, que nous avons un instrument, qui a tous les pouvoirs nécessaires pour coordonner toutes ces études. Il s'agit de l'Office de planification économique du Québec en vue du développement intégral du territoire.

M. le Président, on ne se sert pas de cela. Que fera-t-on, M. le Président, avec les instruments qu'on a déjà? Faites donc comme d'habitude, si vous ne voulez pas vous renseigner, sortez donc!

UNE VOIX: Personne ne comprend.

M. BOSSE: Lisez le texte et cela fera quand même.

UNE VOIX: D'ailleurs, cela revient au même. Vous ne comprenez pas non plus !

M. LACROIX: Cela ferait dur!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

M. LESSARD: II n'est pas pire ce soir! Il est moins infirme qu'il l'était, M. le Président. Il se lève.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

UNE VOIX: II est aussi malade qu'avant, par exemple !

M. LESSARD: Cela, ça ne se guérit pas!

M. le Président, est-ce que l'Office de planification économique du Québec a fait des recommandations au gouvernement sur ces questions spécifiques d'aménagement du territoire de la baie James? C'est important. Ces gens-là, on les a placés pour cela. Est-ce que le gouvernement actuel n'aurait plus confiance à ces experts qu'il a nommés dans ces régies, qu'il a nommés en 1960, 1962 et 1966, et ensuite d'autres experts qui ont été nommés par le gouvernement de l'Union Nationale?

Mais, M. le Président, nous avons quand

même un gouvernement que nous pouvons contrôler sans donner tout simplement les pouvoirs gouvernementaux à une régie d'Etat qui n'a pratiquement aucune responsabilité devant l'opinion publique.

M. LE PRESIDENT: La motion!

M. LESSARD: M. le Président, j'y reviens. Il faut aller en commission parlementaire. Seule la commission de la présidence du conseil, M. le Président, nous permettra de poser ces questions d'une façon franche, honnête, sereine, non partisane parce que nous ne voulons pas, nous, ici, créer de la désunion à l'intérieur du peuple du Québec au sujet d'un projet aussi important. Nous voulons créer "l'union nationale" de tous les...

M. SAINT-PIERRE: Vous pouvez bien rire!

M. LACROIX: II s'est présenté candidat à la convention libérale. Comme ils n'en ont pas voulu, il est allé à la seule place où il pouvait aller, chez le PQ.

M. LESSARD: M. le Président, cela fait deux fois que le député des Iles-de-la-Madeleine...

M. LACROIX: Là, il m'ouvre une porte, M. le Président, j'ai le droit de l'utiliser. Je soulève une question de privilège!

M. LESSARD: Cela fait deux fois, M. le Président, que le député des Iles-de-la-Madeleine m'accuse d'avoir été libéral. Je l'ai été, M. le Président.

UNE VOIX: II a le droit.

M. LAFRANCE: Une chance que vous ne l'êtes pas resté.

M. LESSARD: Je l'ai été. J'ai le droit. Je l'ai été jusqu'en 1961. J'ai été assez intelligent, M. le Président, pour m'apercevoir que cela ne fonctionnait plus là-dedans, qu'il fallait aller ailleurs, aller plus loin, créer quelque chose.

Ce n'est pas une honte que d'avoir été député libéral contrairement à ce qu'a laissé entendre le député des Iles-de-la-Madeleine.

M. LAFRANCE: A l'ordre!

M. LESSARD: A tout péché miséricorde.

UNE VOIX: Vous êtes loin, par exemple.

M. PILOTE: Content qu'il soit parti.

UNE VOIX: Vous aviez créé la désunion.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: ... comprendre l'intervention que le député de Bellechasse vous a demandé de faire.

M. LESSARD: De toute façon, nous autres au moins nous faisons des interventions sérieuses, logiques et non pas des interventions comme...

UNE VOIX: Bouffon. Debout.

M. LESSARD: .. le député des Iles-de-la-Madeleine, qui ne fait que lancer des invectives. Je vous l'ai dit tout à l'heure, ce serait à vous que vous devriez dire: Debout libéraux, parce que vous êtes en train tout simplement de laisser tomber...

M. BACON: A l'ordre!

M. LESSARD: ... l'un de nos organismes les plus importants comme levier économique du Québec pour créer une officine de patronage...

M. SAINT-PIERRE: Un point d'ordre, M. le Président. Pouvons-nous demander au député de revenir à la motion? Il s'égare constamment.

M. LESSARD: Quant à ça, M. le Président, nous aurions pu tout à l'heure, lors du discours du leader parlementaire du gouvernement, intervenir à maintes et maintes reprises parce qu'il était...

M. BACON: Vous l'avez fait.

M. LESSARD: Alors, M. le Président, que je ne peux que féliciter...

M. SAINT-PIERRE: Le gouvernement de son initiative.

M. LESSARD: ... l'honorable député de Maisonneuve...

M. LACROIX: Asseyez-vous! C'est la seule chose que vous puissiez faire intelligemment.

M. LESSARD: ... pour sa sagesse, sa perspicacité, pour son expérience, même d'un an, mais qu'envient tous les libéraux qui ont été élus depuis peut-être dix ans. Il n'en reste pas beaucoup, mais il en restera moins en 1974, vous allez voir.

M. LAFRANCE: Je ne peux rien...

M. LACROIX: Quand on vous regarde, l'on s'aperçoit que le député que vous êtes n'a pas tellement besoin de la tête mais d'un bon siège.

M. LE PRESIDENT: II reste deux minutes à l'opinant.

M. LESSARD: Merci, M. le Président. Avez-vous tenu compte des applaudissements de

l'autre côté, M. le Président? Parce qu'ils semblent s'éveiller un peu.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Deux minutes de paix.

M. LESSARD: M. le Président, je dis que nous avons tous les instruments nécessaires. Nous voulons, en faisant siéger cette commission parlementaire, avoir la certitude qu'il s'agit, en posant des questions aux experts, véritablement d'un projet qui sera rentable, qui sera logique et cela dans les meilleurs intérêts et des libéraux et des Québécois collectivement. C'est pour ça, M. le Président...

M. LACROIX: Votre souffleur arrive.

M. LESSARD: ... que je ne peux qu'appuyer cette motion. C'est pour cela que, tant et aussi longtemps qu'on ne fera pas siéger cette commission-là, nous ferons une lutte à mort, farouche...

M. SHANKS: Vous êtes déjà mort.

M. LESSARD: ... contre le Parti libéral; nous irons jusqu'à faire maison nette...

M. LACROIX: Ils n'ont jamais été vivants.

M. LESSARD: ... et nous allons le faire en 1974...

UNE VOIX: Maison neuve!

UNE VOIX: Vous ne serez même pas là.

M. LESSARD: ... pour nettoyer la maison. Mais nous espérons que d'ici ce temps-là les libéraux auront l'intelligence, la sagesse, la perspicacité qu'a démontrées le député de Maisonneuve pour appuyer la motion...

M. LACROIX: Vous n'avez jamais été autre chose qu'un foetus.

M. LESSARD: ... que nous leur tendons. C'est une chance que nous leur donnons pour essayer de se sortir du pétrin dans lequel ils se sont lancés le 29 avril dernier avec la Brink's et tout ce que vous voudrez. Merci, M. le Président, et j'espère avoir convaincu mes collègues d'en face.

DES VOIX: Vote.

M. LAURIN: M. le Président, nous demandons le vote enregistré.

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés.

Vote sur la motion

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Que ceux qui sont en faveur de l'amendement proposé par le député de Maisonneuve veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Laurin, Burns, Léger, Charron, Joron, Tremblay (Sainte-Marie), Lessard, Loubier, Paul, Vincent, Cardinal, Tremblay (Chicoutimi), Cloutier (Montmagny), Lavoie (Wolfe), Simard (Témiscouata).

M. LE PRESIDENT: Que celle et ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Hardy, Garneau, Mme Kirkland-Casgrain, MM. Parent, Harvey (Jonquière), Simard (Richelieu), Quenneville, Cloutier (Ahuntsic), Tetley, Drummond, Saint-Pierre, Lacroix, Massé (Arthabaska), Cournoyer, Goldbloom, Vaillancourt, Mailloux, Cadieux, Arsenault, Houde (Fabre), Bienvenue, Perreault, Brown, Blank, Brisson, Séguin, Saint-Germain, Kennedy, Picard, Pearson, Leduc, Assad, Bacon, Berthiaume, Bossé, Caron, Carpentier, Cornellier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau), Houde (Limoilou), Lafrance, Lamontagne, Larivière, Marchand, Ostiguy, Pelletier, Pépin, Phaneuf, Pilote, Shanks, Veilleux, Samson, Dumont, Roy (Beauce), Drolet, Tetrault, Audet, Guay.

Pour: 15 Contre 63.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît ! La motion d'amendement est rejetée. La motion principale est-elle adoptée?

M. LEVESQUE: Adopté.

M. LOUBIER: Non, un instant.

M. PAUL: M. le Président, avec plaisir.

M. BURNS: M. le Président, adopté.

M. LE PRESIDENT: Vote renversé. Motion principale, sur division, vote renversé.

M. PAUL: II n'y en a pas, M. le Président. M. VINCENT: II n'y en a pas. M. LE PRESIDENT: Pardon? M. PAUL: II n'y en a pas.

M. LE PRESIDENT: II y a une motion principale devant la Chambre.

M. PAUL: Voici, M. le Président, la demande est à l'effet que le comité plénier soit formé. H n'y a pas de motion là-dessus, il n'y a pas de vote.

M. LE PRESIDENT: La motion est à l'effet que je quitte... Elle a été faite tout à l'heure,

c'est une motion d'amendement sur cette motion-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On ne veut pas que vous partiez, M. le Président.

M. LOUBIER: Soyez hardi M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La motion à l'effet que je quitte le fauteuil est adoptée.

DES VOIX: Oui, oui.

Comité plénier

M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre! Projet de loi no 50. Article 1, adopté?

M. LOUBIER: Un instant.

M. VINCENT: M. le Président...

M. BOURASSA: Un instant, s'il vous plait.

M. LACROIX: Pour une fois, vous avez un haut fonctionnaire qui n'est pas assis entre deux chaises; il est assis entre le ministre des Finances et le premier ministre.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): On a salué l'entrée d'un président spolié, dépouillé!

M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet.

M. VINCENT: Est-ce que je pourrais, M. le Président, faire la suggestion suivante au premier ministre? Que le titre du bill 50, qui se lit: Loi du développement de la région de la baie James, soit changé, après avoir regardé les autres lois qui ressemblent à celle-ci, pour Loi de la société de développement de la région de la baie James.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Loi créant la société.

M. VINCENT: Ou Loi créant la société de développement de la baie James. L'un ou l'autre titre.

M. BOURASSA: Je ne vois pas ce que cela va changer.

M. VINCENT: M. le Président, cela change beaucoup. Si nous nous référons aux statuts et que nous voulons vérifier la législation créant cette société, il faudrait, quand même, lire: Loi créant la société de développement de la région de la baie James, parce qu'en définitive c'est l'objet principal de la législation.

M. BOURASSA: Cela dépasse la création d'une société. Il y a des filiales qui sont créées, il y a l'aménagement.

M. LOUBIER: Pas le texte de loi.

M. PAUL: M. le Président, j'ai une suggestion de compromis à l'endroit de l'honorable premier ministre. Je vais me référer à l'article 231 du règlement portant sur la divisibilité. Pourquoi ne créerions-nous pas deux lois?

UNE VOIX: Deux bills 25!

M.TREMBLAY (Chicoutimi): On est sérieux.

M.PAUL: Nous pourrions avoir une loi décrétant l'aménagement de la baie James. Nous pourrions, ensuite, avoir la loi créant la société de la baie James.

M. LE PRESIDENT: Je ne veux pas être désagréable à l'endroit de l'honorable député de Maskinongé...

M. PAUL: Vous vous y prenez mal, si vous ne voulez pas m'être désagréable.

M. LE PRESIDENT: ... c'est, tout simplement, mon grand respect du règlement, qui d'ailleurs, est partagé par l'honorable député de Maskinongé. Je suis persuadé que le député de Maskinongé lui-même, en réfléchissant un peu à sa motion ou à sa suggestion, se rendra compte qu'elle est hors d'ordre. Cette motion, en vertu de l'article 231, ne peut être faite qu'en deuxième lecture, puisque le principe du projet de loi lui-même est déjà adopté en deuxième lecture. Je ne peux pas voir comment on peut le diviser...

M. LOUBIER: Attendez, il va vous le dire.

M. LE PRESIDENT: ... en vertu de l'article 231. Il nous a parlé de l'article 231.

M. LOUBIER: Attendez, il va vous le dire.

M. PAUL: Voici, M. le Président: "Une motion portant division d'une question complexe peut être faite en tout temps après que la question complexe a été mise en délibération et avant qu'elle soit mise aux voix".

UNE VOIX: Ah bon!

M. PAUL: M. le Président, je fais une suggestion au premier ministre. Je fais une suggestion. Je ne vous le demande pas, parce qu'en vertu de l'article 232, deuxièmement, il vous appartiendrait, à vous seul, de décider de la recevabilité ou non de la motion, contrairement à 551, par exemple, qui permettrait à la Chambre de se prononcer sur la question. Je dis que c'est une suggestion que je fais à l'honorable premier ministre.

Vous voyez toute la publicité que nous pourrions avoir, double publicité, d'abord, une loi décrétant l'aménagement de la baie James, et une deuxième loi créant la Société de la baie James. Si, par hasard, le premier ministre ne

peut agréer la suggestion que je lui fais, je me demande pourquoi il rejetterait l'excellente suggestion faite par le député de Nicolet et qui entrerait dans le cadre général des titres de nos lois.

Nous n'insistons pas plus que ça, M. le Président. C'est peut-être pour signaler au premier ministre la suggestion du député de Nicolet qui est fort sérieuse et fort à point. Lorsqu'il s'est agi de créer la société du parc industriel de Bécancour, nous avons adopté un titre qui correspond à l'objet final de la loi. Si le premier ministre nous dit que cet amendement n'est pas recevable, nous ne lui en tiendrons pas rigueur, mais il verra sûrement que, dès le début de l'étude de cette loi, nous voulons autant que possible améliorer tous les avantages.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que vous permettez que je termine? Si nous encourageons la loi qui a créé la société du parc industriel de Bécancour, je crois que nous pourrions avoir la loi de la société ou créant la société de l'aménagement de la baie James ou du développement de la baie James.

M. GARNEAU: M. le Président, nous avons analysé les différentes possibilités qu'il y avait de trouver un titre à cette loi no 50. Compte tenu du fait que le texte de loi comprend plusieurs aspects : il crée une société de développement de la baie James, il donne également des pouvoirs à cette société de gérer, en certains domaines, les questions municipales, le texte de loi permet également la création de filiales. Alors, on a pensé qu'il fallait avoir un terme plus générique qui englobe tous les aspects du contenu de la loi. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu, par le titre de la loi, englober l'ensemble du problème que voulait régler le projet de loi no 50, et c'est la raison pour laquelle nous avons suggéré ce titre que l'on retrouve au projet de loi 50, plutôt que le nom de la société elle-même, qui vient évidemment au premier article. Par la suite, on retrouvera dans les autres articles les références à la formation de filiales, et dans la dernière partie, également des références en ce qui regarde l'administration municipale du territoire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, pour répondre au ministre des Finances, il faudrait bien s'entendre pour qu'il n'y ait pas d'équivoque. La loi s'intitule, tel que le veut le gouvernement, Loi du développement de la région de la baie James. Or, l'objet formel du projet de loi est de créer une société en vue du développement de la baie James. Le développement de la baie James, c'est l'objectif général que le gouvernement a proposé à la population lors de l'assemblée du Colisée. Et il a voulu manifester son intention pratique d'attendre cet objectif en présentant un projet de loi portant création d'une société de développement de la baie James. Et c'est tellement vrai, et c'est là l'argument du ministre des Finances, je le lui ressers, c'est qu'à l'article 1, on dit bien qu'une compagnie soit constituée sous le nom de Société de développement de la baie James.

Par conséquent, pour éviter toute équivoque, pour empêcher qu'on pense que ce projet de loi recouvre l'ensemble du problème politique — et je donne au mot son sens le plus large, le plus noble — il faut absolument qu'on change le titre de la loi afin que, dans les statuts, cette loi soit un point de référence précis et exact. Lorsqu'on aura à utiliser en cour ou ailleurs ce texte de loi, on référera à ce moment-là à la Société de développement de la baie James, puisque c'est ça que veut créer le projet de loi que nous avons devant nous.

On ne référera pas au développement de la baie James, c'est un autre problème. Quand on parle du développement de la baie James, c'est une réalité. Quand on parlera de la Société de développement de la baie James, c'en est une autre. Par conséquent, le titre ne doit pas être en porte-à-faux. Il faut absolument, M. le Président, au nom même de la clarté qu'exige la langue française, que le titre soit bien clair et que la loi s'intitule Loi créant la Société de développement de la baie James, ou Loi de la Société de développement de la baie James, ou Loi portant création de la Société de développement de la baie James. Je crois que la formule la plus simple, la plus rapide serait Loi de la Société de développement de la baie James. Autrement on confondra. Les juristes qui auront à manipuler cette loi, parce que la loi est déjà extrêmement contentieuse et on imagine tous les procès qu'elle suscitera, les juristes qui auront à la pratiquer, les administrateurs qui auront à s'en servir ne parleront pas, lorsqu'ils référeront au texte de la loi, du développement de la baie James à ce moment-là, ils parleront de la société qu'ils ont la responsabilité d'administrer.

Alors j'estime que les observations que nous faisons, M. le Président, ne sont pas simplement des observations de forme, mais ce sont des observations absolument essentielles qu'il faut retenir afin qu'il n'y ait pas d'équivoque et que, lorsqu'on parlera de la Loi créant la Société de développement de la baie James, on n'inclura pas dans ce vocable, ou dans cette expression le problème entier du développement de la baie James.

M. LACROIX: Est-ce que le député de Chicoutimi voudrait référer à l'article 16 du bill no 50, s'il vous plaît, et je crois qu'à ce moment-là il se rendra compte qu'il y a une différence entre le projet de loi et le développement de tout le territoire. Si le député veut se reporter à l'article 16.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien voyons,

M. le Président, si le député des Iles-de-la-Madeleine — et je ne lui en fais pas reproche — avait fait son droit, il saurait très bien que ce qu'il vient de dire n'a rien à voir. Il est évident qu'à la suite de la création de la Société de développement de la baie James, il y aura création...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, un point de règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...par la société mère...

M. SAINT-PIERRE: Un point de règlement, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...d'autres sociétés...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je soulève un point du règlement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education sur une question de règlement.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque l'article 564, 7e, qui précise d'une façon très nette que le titre, s'il y a lieu de l'amender, doit être étudié à la fin seulement.

M. PAUL: M. le Président, le ministre ne vient pas de faire une découverte.

M. LOUBIER: Non.

M. PAUL: Parce que nous sommes à l'étude de l'article 1 et nous voulons qu'il y ait relation directe entre l'article 1 et le titre de la loi. Parce que dans l'article 1 — il n'a rien découvert, le ministre — nous lisons ceci: "Une compagnie à fonds social est constituée sous le nom de Société de développement de la baie James". Nous suggérons d'amender le titre de la loi pour qu'il corresponde à l'acte constitutif de cette société, au titre, au baptême, au nom de baptême. Et il s'agira d'identifier cette loi conformément à sa création telle que nous la retrouvons à l'article 1, à moins que le premier ministre, pour garder une certaine analogie, à ce compte-là, change le titre de la loi qu'on lit à l'article 1 pour y trouver: Une compagnie à fonds social est constituée pour le développement de la région de la baie James. Et c'est pour cela que l'étude de l'article 1 doit être en relation directe avec le titre parce qu'autrement on peut prendre le titre de la loi et demander au gouvernement de changer la définition qu'il donne, le nom de baptême qu'il veut donner à cette société de développement de la baie James.

M. LOUBIER: M. le Président, si vous le permettez, j'endosse les propos tenus par le député de Chicoutimi et le député de Maskinon- gé. Dans toutes les autres lois, lorsqu'on a soumis, par exemple, la Loi créant l'Université du Québec, on n'a pas dit: Loi créant le développement de l'éducation universitaire au Québec, mais on a voulu, par ces lois-là, créer des structures. Je trouverais aberrant, M. le Président, de dire que l'on crée une loi pour le développement de la baie James. La société, telle que conçue dans l'esprit machiavélique ou non du premier ministre, sera une structure...

M. GARNEAU: Si vous voulez lancer le débat sur ce terrain-là.

M. LOUBIER: ... qui s'occupera du développement de la baie James. Ce n'est pas une loi qui va mettre en action le développement de la baie James. Je pense que le premier ministre ne devrait pas s'abriter derrière un titre inoffensif. S'il veut avoir autant d'agressivité qu'il a semblé en démontrer depuis quelques jours pour que sa loi soit adoptée, il devra carrément, d'une façon très honnête, dans le titre même de la loi, dire que c'est une loi qui crée une société ou une structure qui va se préoccuper et s'occuper du développement de la baie James et non pas essayer nébuleusement de noyer, dans un titre inodore et incolore, toutes les turpitudes que le gouvernement se prépare à commettre avec cette loi.

M. PICARD: M. le Président, si vous le permettez. A la suite de la suggestion faite par le député de Nicolet, de changer le titre du projet de loi, le député de Maskinongé est même allé plus loin. H a parlé de scinder la loi de façon à avoir une loi pour le développement et une autre loi pour créer la société de développement de la baie James.

M. le Président, j'aimerais faire appel à l'expérience du député de Maskinongé et lui demander si ce serait conforme, à ce moment-là, à l'article 541 qui dit: "Le titre d'un bill public doit en couvrir tout le contenu." D s'agit ici du développement et de la création de la société.

M. PAUL: Le député n'a pas le droit de me demander une "opinion légale."

M. BOURASSA: Le député de Chicoutimi, de même que le chef de l'Opposition disaient qu'on avait l'intention de politiser avec le titre. Ce n'est pas du tout notre intention. Le député devrait savoir que l'un des anciens chefs de l'Union Nationale, M. Duplessis, utilisait les titres de lois pour toutes sortes d'objectifs. Je peux lui citer un cas où il disait: Loi pour réparer les erreurs de l'ancien gouvernement. On pourrait avoir un tas de lois, nous, après le gouvernement de l'Union Nationale.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, sans porter de jugement sur ce qu'a entrepris le gouvernement de l'Union Nationale,

la loi, à ce moment-là, portait avec raison le titre de Loi pour corriger les erreurs du régime libéral, qui avait duré longtemps.

M. LACROIX: Vous serez longtemps dans l'Opposition. Il y a une chose, M. le Président, que je voudrais signaler. L'honorable chef de l'Opposition, tout à l'heure, a parlé de fumisterie ou, si vous voulez, de supercherie. Je crois que l'on veut jouer sur les mots en parlant de la société de développement de la baie James ou de la région de la baie James. A ce moment-là, de quelle façon la définir exactement? Si vous voulez scinder la loi pour dire que c'est une question complexe, d'après l'article 231 du règlement et les suivants, je suis bien prêt à en discuter avec l'honorable député de Bellechasse et avec celui de Maskinongé parce qu'il y a ici, à la page 1101 du journal des Débats du lundi, 13 février 1967, une décision qui a été rendue par le député de Maskinongé, qui, à ce moment-là, était président de la Chambre, concernant, justement, le projet de loi no 25.

Maintenant, le projet de loi actuel s'intitule Société de développement de la baie James. Qu'on veuille ajouter un mot ou qu'on veuille en retrancher un, je pense, à ce moment-là, qu'il faudrait préciser davantage.

Je crois sincèrement, connaissant le député de Bellechasse comme très astucieux, très intelligent, très bon politicien.

Qu'à ce moment-ci, il s'agit de la réalisation, de l'adoption d'un projet de loi fort important pour l'avenir, le développement économique du Québec. Je ne crois pas que même toute la science de l'honorable député de Chicoutimi permettrait, par un mot, de changer quelque chose, sinon de retarder l'adoption d'un projet de loi essentiel au développement économique du Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, ce que dit le député des Iles-de-la-Madeleine n'apporte rien au débat. C'est tout simplement une question de clarté, une question de français en vue de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'ambiguïté. Il y a le problème de la baie James, c'est le grand objectif, et ce sera la responsabilité de la société que nous voulons créer de s'en occuper. Donc, la loi devrait s'intituler Loi de la société du développement de la baie James. C'est une affaire tellement simple, tellement évidente. Qui que ce soit qui a le moindre sens commun admettra qu'il y a une différence entre un objectif que l'on propose et un projet de loi qui vise à créer la structure qui s'occupera de réaliser l'objectif. Je demande cela au premier ministre, tout simplement.

M. BOURASSA: Cela me parait un excès de logique, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Au nom de la langue française et de la clarté française.

M. CARDINAL: M. le Président...

M. LOUBIER: M. le Président, le premier ministre, dans le discours assez frugal qu'il nous a présenté l'autre soir, nous mentionnait qu'il avait découvert un mode de gestion absolument révolutionnaire. Il nous avait dit qu'il abandonnait...

M. BOURASSA: Je n'ai pas dit révolutionnaire.

M. LOUBIER: ... le mode de gestion verticale — c'était le mode classique — mais qu'avec sa loi, il apportait aux Québécois un mode de gestion horizontale.

M. le Président, que le premier ministre soit conséquent et, qu'à ce moment-là, il dise clairement dans sa loi — ce sera au moins, je pense, assez consistant avec son discours — qu'il intitule sa loi pour cristalliser cette révolution de gestion nouvelle horizontale au Québec. Qu'il le dise dans sa loi, qu'il crée la première société du genre au Québec, qui assurera la gestion horizontale, et qu'il dise qu'il crée, tout simplement la Loi créant la Société du développement de la baie James.

M. CARDINAL: M. le Président, pourrions-nous tout simplement, en dehors de toute question électoraliste, demander au permier ministre pourquoi il n'accepterait pas cet amendement qui ne change rine à la substance de la loi et qui la décrit davantage dans sa substance. En ce sens, pourquoi cette négativité à accepter que le titre représente la réalité qu'est la loi?

M. BOURASSA: M. le Président, nous avons examiné cela au comité de législation, comme l'a souligné le ministre des Finances. Nous avions une dizaine de titres Pour les raisons que j'ai données tantôt, parce que cela développe une région, que la société a des filiales, que cela développe une municipalité, le titre nous a paru plus exact. On peut attendre à la fin de la discussion pour voir si les arguments qui ont été avancés seraient justifiés...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord.

M. BOURASSA: ... mais à première vue, je crois que le titre que nous avons chosi parait préférable.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, tout simplement sur ce point de titre, sans m'exprimer sur le mérite même de la suggestion faite par le député de Nicolet ou le député de Missisquoi, quant à nous, nous réservons nos remarques sur le titre en conformité avec les dispositions de l'article 564, comme l'alléguait le ministre de l'Education tantôt. Je pense que c'est parfaite-

ment normal que le titre se discute à la fin. S'il y a un article de notre règlement qui est logique, c'est bien celui-là. Autrement, on risque sérieusement de mettre une étiquette sur une bouteille qui n'est pas encore remplie. Si au cours de la discussion de l'article 1, on se rend compte que le titre du nom de la société ne fait l'affaire de personne, à ce moment-là, on se trouverait obligé de revenir à nouveau après et d'amender le nom de la société.

Quant à nous, nous réservons, en conformité des dispositions de l'article 564, du règlement, nos remarques à la fin du bill, ou au moins après...

M. LE PRESIDENT: Alors conformément à...

M. LACROIX: Le député de Maisonneuve, pour une fois, a été d'une logique que j'accepte entièrement.

M. BURNS: Je commence à être inquiet, M. le Président.

M. LAURIN : M. le Président, pourquoi le député des Iles-de-la-Madeleine gâte-t-il les meilleures interventions qu'il fait?

M. LE PRESIDENT: Si j'ai laissé la discussion se poursuivre, c'est que l'honorable député de Maskinongé n'avait pas fait un amendement comme tel, c'était simplement une suggestion, ça faisait partie de la discussion générale sur l'article 1. Mais il est évident qu'en vertu de l'article 564, l'amendement au titre, s'il devait y en avoir un, doit venir à la fin de l'étude du projet de loi.

M. PAUL: J'ai été assez prudent de ne pas vous proposer un texte écrit.

M. LE PRESIDENT: L'article 1 est adopté?

M. LAURIN : Non, M. le Président. Nous arrivons à l'article 1?

M. LE PRESIDENT: Nous sommes à l'article 1 et nous y sommes déjà depuis un bout de temps.

M. LAURIN : C'est parce que nous discutions du titre et je me demandais si...

M. BOURASSA: Si le député veut lire l'article 1.

M. CARDINAL: Pardon, le titre est inscrit dans l'article 1?

M. BOURASSA: Société de développement de la baie James.

M. CARDINAL: C'est ce que vient de dire le premier ministre.

M. BOURASSA: "Une compagnie à fonds social et constituée..."

M. CARDINAL: Je m'excuse, M. le Président, le premier ministre vient-il de dire que c'est inscrit dans l'article 1?

M. BOURASSA: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce qu'il a dit.

M. CARDINAL: J'en appelle au journal des Débats. Nous y reviendrons à la fin.

M.BOURASSA: Qu'on ne coupe pas les cheveux en quatre sur une chose comme celle-là.

M. CARDINAL : Je ne coupe pas les cheveux en quatre, je reprends les paroles de celui qui dirige le Parlement du Québec.

M. BOURASSA: Lisez l'article 1.

M. LACROIX: Je comprends pourquoi vous êtes toujours demeuré notaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On notera de qui ça vient.

M. LAURIN: Donc, M. le Président, maintenant que nous abordons d'une façon clarifiée et nette l'article 1, je peux me référer au titre du projet de loi qui demeure inchangé pour le moment, c'est-à-dire Loi du développement de la région de la baie James. Ces mots disent bien ce qu'ils veulent dire, il s'agit de développer une région. Lorsque nous avons discuté, en deuxième lecture, nous avons discuté pour ou contre le principe du développement de la région de la baie James au moyen d'une société, au moyen d'un organisme quelconque.

Je garde encore en mémoire quelques très bonnes interventions qui ont été faites à ce sujet, sur les dangers que pouvait constituer tel ou tel ou tel ou tel type de société qui pouvait être jugé opportun pour le développement de cette région de la baie James.

Dans plusieurs des interventions, plusieurs des opinants ont comparé tel type de société, tel type d'organisme, et je me rappelle même que le chef de l'Opposition officielle, le député de Bellechasse, a préconisé, lui, pour sa part, la création d'un ministère afin de présider au développement de cette région.

Il suivait probablement en cela l'exemple d'un ancien premier ministre et chef de l'Opposition qui, lui aussi, avait parlé d'un organisme pour développer une région assez analogue à celle dont il est question dans le projet de loi actuel, le Grand Nord québécois.

Je me rappelle aussi que, dans plusieurs des interventions que nous avons entendues, plusieurs opinants se sont inquiétés des relations

trop distantes qui pourraient exister entre cette société et le gouvernement du Québec, qu'il s'agisse des liaisons avec l'office de planification, qu'il s'agisse des liaisons avec les divers ministères que nous avons, et qui craignaient, justement, qu'à cause de cet écartèlement entre cette organisme qu'on va ficher pour le développement d'une région lointaine et les organismes centraux du gouvernement, l'écart ou la distance était telle que la substance même des décisions gouvernementales pouvait être sérieusement affectée. C'est bien la raison pour laquelle plusieurs des opinants ont suggéré qu'au lieu d'une société à fonds social, on développe quelque chose qui assurerait d'une façon plus organique, d'une façon plus cohérente les liens entre cette société de gestion et les organismes traditionnels gouvernementaux.

Je dois vous avouer que je concours encore à ces vues et que je me suis posé la question, surtout depuis que le principe a été adopté en deuxième lecture, sur la façon de constituer cet organisme ou cette société qui serait le plus apte, selon nous, à présider au développement d'une aussi vaste région.

Je crois bien que je serais porté, comme tout premier choix, je serais porté à me rallier à la solution qui a été préconisée par le député de Bellechasse, c'est-à-dire la création d'un ministère semblable au ministère du Nord qui a déjà été créé dans un autre gouvernement, un ministère qui, lui, justement, nous donnerait l'assurance que l'Etat serait représenté à toutes les étapes de la réalisation du projet et assurerait, à cause de la solidarité ministérielle, à cause des contacts permanents...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je veux bien accorder au député de Bourget beaucoup de latitude, mais je pense qu'actuellement il dépasse largement les cadres de l'article 1.

UNE VOIX: "Filibuster."

M. LE PRESIDENT: ... J'ai fait des efforts au cours des derniers instants, pour suivre la dissertation du député de Bourget, mais je ne vois pas comment ce qu'il dit peut se relier au nom de la société. L'article 1...

M. LAURIN: J'y serais arrivé, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: ... parle du nom de la société. Or, j'ai l'impression qu'il est en train de discuter de tout le principe de cette question. Je ne peux pas permettre au député de Bourget — à moins qu'il réussisse à me convaincre — de continuer dans ces sentiers.

M. LEGER: M. le Président, sur le point d'ordre, je veux simplement faire remarquer que le député de Bourget était en train de présenter un amendement à l'article 1, et pour présenter l'amendement il fallait nécessairement qu'il explique le pourquoi...

M. LE PRESIDENT: Qu'il présente l'amendement.

M. LEGER: C'est ça. Il s'en vient avec un amendement et avant de présenter l'amendement précis, il faut expliquer pourquoi cet amendement serait une solution à l'article 1.

M. LE PRESIDENT: Je ne peux pas permettre cette façon de procéder parce que les députés pourraient faire n'importe quoi en disant qu'ils vont apporter un amendement. Que je voie l'amendement et je verrai si la discussion se rapporte à l'amendement.

M. LAURIN: Voilà, M. le Président, je vous transmets immédiatement le texte de mon amendement qui se lirait comme suit: Que l'article 1 soit amendé en remplaçant les mots "une compagnie à fonds social et constituée sous le nom de Société de..." par les mots "un ministère est institué sous le nom du ministère du" et à b) en remplaçant dans la dernière ligne le mot "corporation" par le mot "département".

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAURIN: Je voudrais expliquer un peu...

M. LE PRESIDENT: Non! je ne veux pas vous laisser expliquer parce que je dois déclarer immédiatement l'amendement irrecevable puisque c'est un amendement qui change tout le principe du projet de loi. Le projet de loi crée une société et dans l'amendement on veut créer un ministère. Ce sont deux choses totalement différentes. L'amendement est déclaré irrecevable.

M. LAURIN: M. le Président...

M. LOUBIER: Si vous permettez, sur le point de règlement...

M. LE PRESIDENT: La décision est rendue.

M. LOUBIER: Est-ce que son auguste majesté me permettrait de lui demander une directive?

M. LE PRESIDENT: Oui! ah oui, oui!

M. LOUBIER: Bon, très bien. M. le Président, étant donné que vous venez d'une façon ex cathedra de vous prononcer sur cet amendement qui est proposé, je vous demande la directive suivante: Est-ce qu'il est possible, M. le Président, de demander aux députés de cette Chambre d'étudier la possibilité, à ce stade-ci — comme dirait le député de Chicoutimi — de modifier l'article 1, pour que cela reflète non pas le principe... On n'en discute pas, du principe actuellement, en ayant discuté en deuxième lecture. Nous sommes en comité plénier, et le vote s'est pris sur le principe, M. le Président.

Or, je ne comprends pas actuellement pourquoi on invoque la question de principe...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je veux bien que le chef de l'Opposition officielle me demande une directive, comme il en a le droit en vertu de l'article 667, mais je ne peux pas lui permettre de profiter de sa demande, de son désir de s'informer, pour faire un discours.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour s'instruire.

M. LOUBIER: M. le Président, qu'est-ce que vous voulez, je suis obligé de coiffer ou de préfacer la demande de mes directives par un préambule qui va vous permettre de comprendre réellement pourquoi je vous demande des directives. Or, nous ne voulons pas changer le principe du bill. Nous voulons tout simplement, par l'amendement proposé par le leader du Parti québécois, donner à l'article 1 une phraséologie qui corresponde véritablement à la réalité. Je vous demande la directive suivante, je vous la demande, M. le Président...

M. LE PRESIDENT: La directive est très simple. Il est évident que le chef de l'Opposition officielle, comme tous les membres du comité, peuvent apporter tous les amendements qu'ils voudront bien apporter à chacun des articles du projet de loi.

Mais ces amendements devront respecter le règlement et, en particulier, ils ne devront pas aller en contradiction totale, globale et absolue avec le principe du projet de loi.

L'esprit juridique du chef de l'Opposition corroborera sûrement ma décision, si celui-ci oublie un instant qu'il est chef politique. Son esprit juridique ne pourra que corroborer ma décision puisqu'il apparaît, d'une façon évidente, prima facie, que l'amendement voulant créer un ministère va à l'encontre, d'une façon on ne peut plus totale, du projet de loi qui vient d'être adopté en deuxième lecture.

La directive est que vous pouvez apporter tous les amendements que vous voulez, en autant que les articles de notre règlement seront respectés. L'amendement de l'honorable député de Bourget ne respecte pas le règlement.

M. LAURIN: M. le Président, il me semble qu'en adoptant le principe du projet de loi...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous parlez sur l'amendement?

M. LAURIN: Non, j'ai un autre amendement à proposer.

DES VOIX: A l'ordre!

M. VEILLEUX: Déposez l'amendement avant, on ne prend pas de risque.

M. LAURIN: Je vais vous le lire d'abord, mais je voudrais juste dire une phrase avant sur certaines remarques qui ont été faites jusqu'ici. En adoptant le principe du projet de loi 50, il me semble que nous avons approuvé un principe, et un principe est une idée. Qu'est-ce que cette idée? C'est l'idée de l'aménagement intégré des ressources naturelles qui se trouvent dans la baie James.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LAURIN: C'est cela...

M. LE PRESIDENT: J'avertis d'une façon très catégorique tous les membres de cette Chambre, c'est mon devoir — et j'entends l'exercer dans toute sa plénitude — d'assurer la liberté totale de tous les membres de cette Chambre de se faire entendre sur cette loi comme sur toutes les autres lois. Mais, je ne permettrai ni au député de Bourget ni à aucun autre député, premièrement, de violer le règlement...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même par moi?

M. LE PRESIDENT: ... et, deuxièmement, de ne pas accepter les décisions du président lorsqu'elles sont rendues, même si elles ne plaisent pas. J'ai rendu ma décision sur l'amendement et je ne permets pas au député de Bourget de commenter cette décision, ni directement, ni indirectement.

Le principe que nous avons accepté dans le projet, c'est de créer une société; c'est le principe qui a été accepté.

M. CHARRON: Le premier ministre nous a dit exactement le contraire.

M. LE PRESIDENT: Je regrette, mais le projet de loi a pour objet, entre autres, de créer une société. On a adopté ce principe, et je ne peux pas permettre que par un amendement on veuille créer un ministère. Ce sont deux choses différentes et c'est impossible. J'écouterai maintenant le député de Bourget sur un autre amendement, mais non pas sur celui-là.

M. LAURIN: Est-ce que je peux vous poser une question, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Vous pouvez me demander des directives.

M. LAURIN: Bon, est-ce que je peux vous demander une directive? S'il est vrai que nous avons adopté le principe d'une société, comment se fait-il que ce projet de loi porte le titre de Loi du développement de la région de la baie James?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si le député de Bourget me permet, ce n'était pas futilement que dès le départ nous

avons engagé le débat sur le titre de la loi. Le premier ministre nous a donné raison.

M. LE PRESIDENT: Oui?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président. Laissez-moi faire mon petit préambule. D'abord, cela va vous permettre de vous reposer.

M. LE PRESIDENT: Je suis en pleine forme.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Harmonieusement, vous allez m'entendre. M. le Président, le premier ministre lui-même, tout à l'heure,...

M. LE PRESIDENT: Ne m'enivrez pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... nous a dit qu'il n'était pas tellement disposé à changer le titre de la loi, compte tenu de la réalité que recouvre ce titre. Or, si la réalité que recouvre ce titre va au-delà de ce qui est proposé à l'article 1, pourquoi ne pourrions-nous pas reprendre tout le débat sur l'opportunité de créer telle société qui aurait le nom de Société de développement de la baie James au lieu de créer un ministère du Nouveau-Québec?

C'est le premier ministre lui-même qui s'est tendu un piège qui vous a embarrassé au point que vous ne pouvez pas porter un jugement aussi catégorique que vous le désireriez. Le premier ministre a relancé tout le débat en n'acceptant pas, dès le départ, de changer le titre de la loi. Nous lui avons ouvert une porte pour accélérer les travaux; nous l'avons, en quelque façon, libéré de ses "enfarges", mais il a refusé notre proposition.

Il a donc rouvert le débat. J'ai l'impression, M. le Président, qu'il vous sera difficile de donner des directives qui aillent au-delà de la volonté qu'a exprimée le premier ministre de façon très nette.

M. LE PRESIDENT: Avec tout le respect que j'ai pour les volontés, les désirs et les paroles du premier ministre comme de tous les membres de ce comité, les seuls critères sur lesquels je dois me baser ne sont pas les paroles d'un membre du comité, mais le règlement et, encore une fois, le règlement m'interdit d'accepter l'amendement du député de Bourget. Je considère l'incident clos.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement. Je vous prierais d'être très circonspect lorsque vous utilisez les termes de la langue française. Ceux-ci ont un contenu sémantique. Un incident, M. le Président, c'est une affaire. C'est ce qu'on appelle en anglais "an affair, an issue". Un incident, en latin, c'est un casus, vous savez cela, M. le Président. Or, ce qu'a proposé le député de Bourget, c'est un argument à l'appui, une proposition d'amendement, donc, vous ne pou- vez pas déclarer que l'incident est clos. Vous dites tout simplement: Le débat est clos sur la proposition d'amendement.

M. LE PRESIDENT: Dans l'esprit de l'honorable député de Chicoutimi, l'amendement du député de Bourget étant une action ou une activité irrégulière, je la considère comme une affaire, un incident, et pour moi, l'incident est clos.

L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, en vertu de l'article 667, est-ce que je peux vous demander une directive? Comment, selon vous, pouvons-nous trouver le principe d'un bill? Est-ce que nous pouvons en cette matière nous fier au titre du projet de loi?

M. LEDUC: Ce n'est pas le discours de deuxième lecture qui changera grand-chose. C'est le principe d'un bill. Je suis à un fauteuil en commission plénière, vous ne pouvez pas me dire que j'ai pris la parole sans permission.

M. CHARRON: Vous pouvez vous taire quand même. Ce n'est pas parce que vous n'êtes pas à votre place que vous devez parler.

M. VEILLEUX: Vous non plus, vous ne l'êtes pas.

UNE VOIX: A part de cela, qu'il mette donc ses culottes courtes.

M. LE PRESIDENT: II est bien clair à l'article 67 que l'on peut adresser des questions au président, sur des questions relatives aux affaires de la Chambre et aux formes de procédure à suivre. Les seules questions, d'après le contexte — et je pense que c'est assez logique — les seules questions qui peuvent être adressées au président du comité ou au président de la Chambre ont trait à des règles de procédure et non pas à savoir mon opinion sur le principe du projet de loi, sur le projet de loi ou sur des choses semblables. Je n'accepterai pas que l'on me demande des directives sur autre chose que sur des règlements ou l'application des règlements de la Chambre.

M. CHARRON: M. le Président, le règlement le dit bien, et c'est pour cela que ma question est parfaitement conforme à l'article 667. Je vous demande, sur une question de procédure, de m'expliquer le règlement qui dit qu'en comité plénier nous ne devons pas toucher le principe du bill. Je vous demande, pour suivre le règlement de la Chambre, pour ne pas toucher le principe du bill: Où est-il? Réside-t-il dans le titre du projet de loi ou selon l'interprétation du gouvernement?

M. LACROIX: Comme on l'avait dit aux journalistes, nous allons vous laisser parler et

vous entretenir avec les journalistes. Quant à nous, nous allons essayer de procéder et de travailler dans le meilleur intérêt de la province de Québec.

M. CHARRON: Très bien! Si j'ai bien compris, vous allez désormais vous taire.

M. LE PRESIDENT: Encore une fois, je ne voudrais pas commencer à donner un cours de procédure parlementaire. Je pense que ce n'est pas mon rôle. Je le peux à l'occasion, et c'est pour cela que l'article 667 le dit, mais je ne suis pas pour donner un cours de droit parlementaire aux membres de cette Chambre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous êtes notre phare, notre bouée.

M. LE PRESIDENT: ...Puisque le règlement dit que c'est en deuxième lecture qu'un principe de loi doit être adopté et que c'est en comité que l'on étudie le projet de loi dans ses détails, il m'apparaît très logique que l'on ne peut pas recommencer en comité plénier l'étude du principe.

M. CHARRON: Je suis parfaitement d'accord, M. le Président, mais où est le principe? Est-ce que c'est le titre de la loi?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, une question reste obscure dans mon esprit et je pense qu'elle peut rester obscure dans l'esprit de plusieurs membres de cette Chambre. H y a quand même une ligne de démarcation qu'il faut établir entre un principe et les modalités d'application de ce principe. Si on dit qu'un principe vise un tel objectif et qu'ensuite, en poursuivant la démarche intellectuelle de quelques pas en avant, on se dit: Comment allons-nous réaliser ce principe? Nous sommes obligés de penser aux moyens que nous allons mettre en oeuvre pour réaliser ce principe. Et là, nous arrivons à cette idée d'un organisme, que ce soit une société, un ministère, une commission, ou n'importe quel organisme qui puisse être adéquat, qui puisse être apte à concrétiser, à actualiser le principe de la loi.

Et c'est précisément la question qui, pour moi, n'est pas réglée par l'adoption du principe du projet de loi et qui manifeste dans l'esprit même du législateur, dans l'esprit même d'un légiste le titre de la loi 50 qui parle de Loi du développement de la région de la baie James. C'est la raison pour laquelle je me crois justifié de vous présenter un deuxième amendement qui se lirait comme suit: Que l'article 1 soit amendé en remplaçant les mots "compagnie à fonds social" par le mot "commission". L'article b), en remplaçant à la deuxième ligne le mot "société" par le mot "commission" et en remplaçant, à la dernière ligne, le mot "corporation" par le mot "commission".

DES VOIX: Vote! Vote!

M. LAURIN: Et par "commission", j'entends quelque chose d'analogue à ce comité interministériel au niveau des ministères, mais qui serait quelque chose de créé par le gouvernement, non pas au niveau des ministères, mais spécifiquement pour les fins poursuivies par le projet de loi no 50, c'est-à-dire le développement de la région de la baie James. Ce qui aurait l'avantage de tenir cette commission beaucoup plus près des organismes gouvernementaux et d'assurer un contrôle de l'Etat beaucoup plus étroit, beaucoup plus assuré...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education sur un point de règlement.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je trouve que l'amendement est complètement irrecevable pour la raison que nous avons, pendant de nombreuses journées, et Dieu sait combien d'heures, écouté tous les fastidieux discours des représentants du Parti québécois. Or, constamment, on s'est appliqué...

M. LAURIN: M. le Président, question de privilège.

UNE VOIX: Est-ce un point de règlement?

M. SAINT-PIERRE: ... à parler contre le principe qui était dans la loi 50 et on a constamment dit au gouvernement qu'au lieu d'être une société autonome avec une filiale, ça devrait être l'Hydro-Québec, ça devrait être un comité. Or, c'était ça un des principes du projet de loi. Maintenant, en comité plénier, on nous propose de changer ceci qui a été accepté en deuxième lecture.

M. BURNS: M. le Président, simplement sur ce point qui est soulevé par le ministre.

M. LE PRESIDENT: Sur le point de règlement?

M. BURNS: Sur le point soulevé par le ministre.

DES VOIX: Vote! Vote!

M. BOURASSA: Vous ne voulez pas siéger demain?

M. BURNS: Essayez de nous faire siéger demain! Vous avez besoin de vérifier le règlement, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On est confessionnel!

M. SHANKS: Pas le PQ!

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve sur le point de règlement soulevé par le ministre de l'Education.

M. BURNS: Sur le point soulevé par le ministre de l'Education, il nous dit que le problème était au niveau du principe dans nos discours, du moins, quand nous nous opposions au principe, c'était le fait que l'Hydro-Québec ne se voyait pas confier le projet de développement. C'est exact. Mais ce qu'un des objets du bill, de par les notes explicatives, semble vouloir dire être le principe ou l'un des principes de ce bill est de créer un organisme autre justement que l'Hydro-Québec. Alors c'est pour cela que le député de Bourget formule une demande d'amendement. Est-ce à dire que parce que dans les notes explicatives, premièrement, l'article premier des notes explicatives, on lit: "... de constituer la société de développement de...", on ne peut plus changer le nom de cela?

Je soumets que ce serait interpréter le règlement et interpréter le principe de façon beaucoup trop restrictive.

M. GARNEAU: M. le Président...

M. BURNS: Ce que le député de Bourget essaie de faire, c'est de changer l'approche à ce qu'un des principes semble déterminer comme constituer un organisme du nom de la Société de développement...

M. GARNEAU: M. le Président, sur la recevabilité...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous parlez sur la recevabilité de la motion? Pas sur le fond.

M. GARNEAU: Sur la recevabilité. M. le Président, étant donné que la motion du député de Bourget est susceptible d'engager des fonds publics — seul le gouvernement est en droit de le faire — je pense que l'amendement est irrecevable.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! La question de la recevabilité de la motion est assez complexe. La motion, telle quelle, ne peut pas me permettre de juger. Si l'idée sous-jacente à la motion est de transformer substantiellement ce que le bill no 50 a adopté en principe, je devrais déclarer irrecevable la motion d'amendement.

S'il ne s'agit que d'un nom, si la substance n'est pas changée — et c'est les articles suivants qui le détermineront — alors je pense qu'à ce stade-ci, puisqu'il s'agit simplement d'une dénomination, d'appeler une chose commission plutôt que société...

M. CARDINAL: Article 1, suspendu.

M. LE PRESIDENT: Oui, d'accord, je pense que j'avais simplement vu le mot "commission" pour "société". Mais le fait de changer les mots "compagnie à fonds social" par le mot "commission" change justement la substance de l'organisme qui va être créé par le bill no 50. Le projet de loi no 50 ayant été voté en deuxième lecture, la Chambre a accepté le principe de créer une société à fonds social. Je ne peux pas permettre un amendement qui viendrait changer ce qui a été adopté en principe en deuxième lecture. Alors, je déclare l'amendement irrecevable.

Ecoutez, je veux que ce soit bien clair. Lorsque j'aurai décidé qu'un amendement est irrecevable, il sera inutile de continuer la discussion sur la décision rendue sinon nous pouvons nous retrouver dans trois semaines encore à discuter une décision que j'aurai rendue ce soir. Alors, la décision est rendue sur l'irrecevabilité de l'amendement de l'honorable député de Bourget et je ne peux pas accepter d'autres discussions sur cet amendement.

M. SAMSON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que d'autres députés veulent parler sur l'article 1 ?

M. SAMSON: Oui, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: Pas sur l'amendement du député de Bourget parce que, quant à nous, nous n'avons pas l'intention de mettre en cause la société aucunement. Nous reconnaissons qu'il faut une société de coordination et c'est pour spécifier notre position que je le fais, M. le Président. Ce sont les attributions de cette société que nous contesterons à certains articles, en temps et lieu. Cette société de coordination, qu'elle s'appelle d'une façon ou de l'autre, ça ne changera pas le principe. Nous sommes d'accord qu'il y ait une société qui permettra de faire cette coordination sur tout le territoire de la baie James.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, suite à ce que vient de dire le député de Rouyn-Noranda, on se rend donc compte que ces gens-là n'ont pas compris exactement de quoi il retourne. Voilà que, pour appuyer le gouvernement, pour venir à la rescousse du gouvernement, qui n'en a pas besoin en raison de sa majorité, le député de Rouyn-Noranda prétend qu'on doit créer une société de coordination, parce que ce n'est pas une société, ça; la société de coordination, ce n'est pas une compagnie à fonds social. Alors, si vraiment il veut

continuer d'aider le gouvernement, histoire de payer ses dettes, qu'il propose autre chose que ça.

M. SAMSON: M. le Président, je n'ai pas, ni moi ni les membres de notre parti, de leçon à recevoir de personne en cette Chambre, encore moins du député de Chicoutimi, qui a le don de se mettre les pieds dans les plats.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: J'accepte évidemment la décision que vous avez rendue de déclarer mon amendement irrecevable, même si nous n'avons jamais parlé de cette question de fonds social en cette Chambre. Donc, j'ai encore mes doutes sur le fait qu'elle soit incluse dans le principe du projet de loi, puisqu'on n'en a pas parlé. Il reste quand même, M. le Président, conformément à ce que je disais à un certain moment de mon exposé, qu'on peut parler quand même des modalités d'exécution de ce principe. Une autre des modalités d'exécution auxquelles j'ai pensé, vous y fermerez peut-être la porte, encore une fois, M. le Président, en déclarant mon amendement irrecevable, mais nous y avons quand même pensé et je voudrais le soumettre à votre bonne attention.

M. SHANKS: Le troisième amendement.

M. LAURIN: L'article 1, amendé, se lirait alors comme suit: a) En remplaçant les mots: Une compagnie à fonds social est constituée sous le nom de société, par les mots: "Un organisme est constitué au ministère du Conseil exécutif sous le nom d'Office" et, b), en remplaçant dans la dernière ligne le mot "corporation" par le mot "board". A la justification de cet amendement, M. le Président, je dois souligner que l'organisme qui s'occupe de la planification au Québec actuellement est l'Office de développement — un mot qu'on retrouve dans le projet de loi 50 — et de planification du Québec et qu'il y a une loi constitutive...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Pour les mêmes raisons, et je n'ai pas l'intention de détailler de nouveau, je renvoie les membres du comité au motif que j'ai soumis tantôt. Pour ces mêmes motifs, je déclare l'amendement de l'honorable député de Bourget irrecevable.

M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais poser une question au député de Bourget.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce pose une question à l'honorable député de Bourget sur l'article 1?

M. ROY (Beauce): Sur l'article 1. Combien le député de Bourget a-t-il d'amendements à présenter pour changer le nom de la société?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Je remercie beaucoup le député de Beauce de me poser la question. C'est comme s'il s'adressait déjà au futur gouvernement.

M. ROY (Beauce): Quel nom auriez-vous choisi si vous aviez été là?

M. SAMSON: On n'a pas le droit de... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAURIN: Puisque les amendements que j'ai proposés sur les modalités d'application du principe de la loi 50 n'ont pas eu l'heur de recevoir un agrément de la part du président, je porte mes remarques sur un autre sujet. Et cette fois, elles porteront sur un sujet qui est cher à un certain nombre de députés dans cette Chambre dont, en particulier, le député de Chicoutimi, j'en suis bien sûr. J'ai des doutes, M. le Président, sur les mots "société de développement de la baie James" dans l'article 1. Je me demande s'il n'aurait pas fallu plutôt lire "société de développement de la baie de James". Je voudrais ici poser... Tous les mots sont importants...

M. LEDUC: En lettres minuscules ou majuscules?

M. LAURIN: ... dans un projet de loi. On a déploré assez souvent dans cette Chambre les entorses que l'on faisait subir à sa majesté la langue française pour que, dans ce projet de loi du siècle, qui doit constituer un projet collectif...

M. SHANKS: Anti-peuple.

M. LAURIN: ... on prenne soin au moins de prendre toutes les précautions pour que sa majesté, la véritable majesté, sa majesté la langue française soit respectée dans ce projet de loi. Et je voudrais demander au premier ministre, qui est le parrain de cette loi, s'il peut nous assurer que toutes les études ont été faites pour que cette Chambre puisse être assurée à son tour que l'orthographe "baie James" est ici conforme à l'opinion qui est répandue dans les cercles de phonétistes et de linguistes du Québec.

M. LE PRESIDENT: Evidemment, je déclare l'amendement de l'honorable député de Bourget recevable. Discussion.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je crois que les préoccupations du député de Bourget...

M. BOURASSA: C'était pour ça le débat marathon depuis quatre jours, pour changer en baie de James?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On n'en est encore qu'à l'apéritif. D'accord? Alors, M. le Président, je trouve que les préoccupations du député de Bourget...

M. LACROIX: ... votre langue le mot "de" est difficile à prononcer de temps en temps.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, au printemps, les batraciens se font entendre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je disais donc que la proposition du député de Bourget était quand même considérable au sens étymologique du terme, c'est-à-dire digne de considération et non pas au sens où l'entend communément le député des Iles-de-la-Madeleine, énorme, gros, éléphantesque.

Je disais donc que cette proposition mérite considération. Il ne faut pas, M. le Président, bien entendu, en faire ce que j'ai coutume d'appeler un casus belli, un sujet de guerre. Référence: Lafontaine, Le chat, la belette et le petit lapin.

M. le Président, il a été porté à ma connaissance qu'à la suite des discussions qui se sont engagées et auxquelles la presse a fait écho, on avait découvert des cartes françaises, rédigées par des Français de France, et qu'on retrouvait sur...

M. LACROIX: ... et non pas les gens de par ici.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... ces cartes la mention "baie James" et non pas "baie de James". J'ai nettement l'impression que cette discussion pourrait devenir une querelle académique.

Nous pourrions quand même accepter pour l'instant ce nom, quitte à demander au premier ministre de s'enquérir auprès des experts...

UNE VOIX: Le Dr Papa Doc.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... lexicologues, lexicographes, linguistes, phonéticiens, etc, étymologistes... En voulez-vous encore? J'en ai, vous savez. Nous pourrions demander au premier ministre de consulter ces gens, de nous soumettre cela et nous, nous ferions après cela une proposition pour convoquer une commission parlementaire afin d'interroger ces gens!

M. SAMSON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON : Je me demande réellement, M. le Président, quel intérêt cela apportera de plus, le fait qu'on change le nom, que cela s'appelle baie James ou baie de James, au pauvre ouvrier...

M. CARDINAL : Pourquoi êtes-vous obligé d'en parler, d'abord?

M. SAMSON: ... qui ira gagner sa vie, là-bas?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'argent n'a pas d'odeur pour le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, voulez-vous rappeler à l'ordre l'honorable député de Chicoutimi...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. SAMSON: ... qui a l'air à avoir la tête à pouvoir louer des appartements, tellement elle est vide!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement!

M. SAMSON: J'ai la parole, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Chicoutimi sur une question de règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement!

M. SAMSON: Parfait, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne me suis pas attaqué du tout au député de Rouyn-Noranda. J'ai tout simplement fait une petite réflexion en passant. J'ai dit: L'argent n'a pas d'odeur!

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je comprends que ce qu'il vient de dire n'a pas plus d'odeur qu'il n'en a lui-même.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tant mieux parce que, de votre côté, cela ne sent pas bon!

M. SAMSON: Quand on ne sent rien, on ne vaut pas mieux non plus!

M. PAUL: M. le Président...

M. SAMSON: M. le Président, je voulais dire que cela n'apporte aucune espèce d'intérêt. Cela m'apparaît comme étant, de la part du député de Bourget et de son groupe du Parti québécois, de l'obstruction systématique. Cela m'apparaît comme quelqu'un qui veut absolument parler

pour le plaisir de s'écouter parler. C'est aussi simple que cela.

M. le Président, pour vous démontrer comme c'est simple que d'en parler...

M. CARDINAL : M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

L'honorable député de Bagot sur un point du règlement. J'invite les honorables députés à bien soulever le règlement.

M. SAMSON: M. le Président, il n'y a pas de point d'ordre là-dessus.

UNE VOIX: Non! Qu'a-t-il à dire?

M. CARDINAL: M. le Président, j'invoque le règlement. M. le Président, je ne vois pas en quoi...

UNE VOIX: Quel article?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

M. LACROIX: II y a trop longtemps que vous n'êtes pas venu en Chambre. Vous ne vous rappelez plus les règlements.

M. CARDINAL: M. le Président, je ne vois pas en quoi l'intervention du député vient avancer les débats, en invoquant que d'autres députés les retardent.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CARDINAL: Ce n'est pas pertinent à l'article.

M. LE PRESIDENT: Et la question de règlement du député de Bagot n'est pas pertinente non plus.

Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: ... j'ai le droit de parole.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): j'invoque le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: J'ai été élu, M. le Président, pour représenter mes électeurs et j'ai l'intention de les représenter.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: Ce n'est ni l'Union Nationale, ni le Parti québécois, qui...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. SAMSON: ... m'empêcheront de parler en cette Chambre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je supplie le président. J'invoque le règlement.

M. SAMSON: J'ai parlé pendant deux minutes et ils ont pris 22 heures, M. le Président, du temps de la Chambre. Et ils veulent nous faire la morale!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: Lorsqu'on parle, M. le Président, de...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque de plus en plus le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: ... changer le nom, en cette Chambre, je voudrais vous démontrer...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque toujours le règlement !

M. SAMSON: ... jusqu'à quel point c'est stupide.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque encore le règlement.

M. SAMSON: J'avais un jour, M. le Président, un bon ami qui ressemblait à l'honorable député de Chicoutimi.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. SAMSON: II s'appelait Francis-Anatole-Benoît-Aristide-Panthaléon et il disait: Appelez-moi Jos, M. le Président !

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. SAMSON: C'est aussi simple que cela.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. SAMSON: Cela n'a pas plus de sens que cela, M. le Président.

Je vous demanderais de rappeler à l'ordre l'honorable député qui n'est pas reconnu et qui parle en même temps que moi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoquais le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A deux ou trois reprises, depuis quelques instants, les honorables députés, et en particulier le député de Bagot, ont invoqué le règlement sur des motifs tout à fait déraisonnables et des questions de règlement qui n'étaient fondées sur rien. Et c'est la raison pour laquelle, contrairement à ce qui doit se faire normalement, j'ai semblé, pendant un certain temps, ne pas entendre la question de règlement soulevée par le député de Chicoutimi. Mais...

M. LOUBIER: J'ai hâte de savoir ce que vous comprenez, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: ... je suis bien prêt à écouter le député de Chicoutimi sur sa question de règlement, mais je l'inviterais fortement à bien vouloir, comme le demande le règlement, me signaler l'article sur lequel il s'appuie pour invoquer le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je vous remercie de tout coeur, mais le retard que vous avez apporté à m'entendre m'a privé de mes arguments et je vous prive du plaisir que vous auriez eu à savoir pourquoi j'avais invoqué le règlement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. PAUL: Avec...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda avait la parole lorsque le député de Chicoutimi a invoqué le règlement.

M. SAMSON: M. le Président, je permets au député de Maskinongé de parler.

M. PAUL: Je demande la permission à mon honorable ami de Rouyn-Noranda de poser une question au premier ministre. L'honorable premier ministre n'a-t-il pas l'impression, comme moi, que les ondes intellectuelles sont quelque peu brouillées, et dans les circonstances...

UNE VOIX: De votre côté, oui, c'est vrai!

M. PAUL: ... M. le Président, je me permets de demander au premier ministre...

DES VOIX: Non!

M. PAUL: Monsieur le premier ministre, je répète bien poliment une demande logique. C'est beau de dire non, mais il y en a qui n'ont pas toujours donné l'exemple de l'assiduité dans cette Chambre, et l'on ne peut pas m'en faire le reproche ainsi qu'à de nombreux députés. Et malgré ceux qui crient, non, M. le Président, je redemande poliment à l'honorable premier ministre s'il veut consentir à un ajournement des travaux de la Chambre ce soir.

M. BOURASSA: Nous pourrions adopter quelques articles.

M. LOUBIER: Non!

M. LACROIX: M. le Président, je demanderais à l'honorable premier ministre, bien poliment, de répondre à l'honorable député de Maskinongé, qui est un homme assidu en cette Chambre, et qui, je crois, doit admettre que je suis aussi assidu que lui dans toutes les possibilités, que nous devons travailler jusqu'à minuit. Nous avons du travail à faire, nous avons des lois à adopter, nous sommes ici, dans cette Chambre, des gens qui veulent travailler sur quelque chose. Quant à moi, si on veut parler pour la baie de James, je demanderais à l'honorable député de Chicoutimi, qui est spécialiste en dialectique, de me demander si demain je devrais dire, quand le député de Chicoutimi aura des chaleurs, s'il pourrait dire qu'il a de des chaleurs.

M. PAUL: M. le Président, je me permets de demander une autre fois à l'honorable premier ministre s'il a l'intention ce soir d'ajourner les travaux de cette Chambre.

M. BOURASSA: M. le Président, si j'acceptais la requête du député de Maskinongé, ça voudrait dire que ceux qui présentent, comme on vient de le faire, des amendements tout à fait irresponsables et saugrenus pourraient être justifiés de continuer à agir comme ça.

M. PAUL: D'une façon bien calme, je demande une autre fois et le premier ministre sait fort bien...

DES VOIX: C'est du chantage!

M. PAUL: Un instant, s'il vous plaît. M. le Président, je demande, et l'honorable premier ministre sait fort bien toutes les conséquences de la demande que je lui fais...

DES VOIX: Chantage!

M. PAUL: II y a peut-être des discussions de gentilhommes qui peuvent se dérouler pour essayer de progresser dans les travaux de la Chambre. Je dis que, personnellement, au nom du simple bon sens, quelques-uns d'entre nous ont de longues distances à parcourir pour retourner chez eux. Le leader du gouvernement conviendra que nous pouvons espérer logiquement terminer la semaine prochaine nos travaux parlementaires dans un court délai. C'est pourquoi, M. le Président, je me permets de demander au premier ministre que l'ajournement de la Chambre soit prononcé jusqu'à lundi prochain.

M. DUMONT: M. le Président, si vous me le permettez, le vendredi, 28 mai 1971, à la page 1,914 du journal des Débats, le député de Maskinongé donnait lui-même la réponse à la question qu'il vient de poser. Je lis textuellement: "Je comprends mal que l'on veuille dans certains milieux interpréter la motion présentée par le leader du gouvernement comme une motion de clôture, car, si nous en lisons le texte, nous comprendrons, pourvu que nous ayons un minimum d'intelligence — on sait que le député de Maskinongé est intelligent — que cette motion est faite justement dans le but de fournir plus d'occasions aux députés de participer à l'étude des différentes questions qui nous sont soumises par le gouvernement, qui, en vertu de l'article 126, a toujours entière discrétion de déterminer quels doivent les projets de loi appelés pour étude et considération."

Je crois que c'est la réponse.

M. BURNS: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai laissé tantôt, avec une certaine tolérance, à l'honorable député de Maskinongé le loisir et la latitude de formuler une question à l'endroit du premier ministre, mais je ne peux pas laisser continuer cette discussion qui n'a rien à voir avec l'article 1.

M. BURNS: Sur un point de règlement, M. le Président, quelques brèves remarques. Je veux, tout simplement, dire que j'endosse les propos du député de Maskinongé. Je peux même dire au premier ministre que le fait que l'ajournement se fasse avant minuit ne devrait pas être considéré, si c'est ça qui l'inquiète, comme une victoire de l'Opposition. C'est tout simplement dans le but, M. le Président...

DES VOIX: Non!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BURNS: Regardez, M. le Président, comme ça avance bien; voyez-vous? Je pense que j'ai parlé très calmement, que je ne parle pas avec un verbe violent pour provoquer justement ces invectives. C'est justement la preuve de ce que le député de Maskinongé est en train de vous dire qui se fait dans le moment, alors que j'endosse la suggestion du député de Maskinongé très calmement et dans l'intérêt, je pense, de l'ensemble de la Chambre.

M. LEGER: La parole est au premier ministre.

M. BOURASSA: Le député de Maskinongé a dit "au nom du simple bon sens". Nous lui répondons, comme au député de Maisonneuve: Au nom du simple bon sens, pourquoi ne pas adopter quelques articles, pourquoi ne pas arrêter de présenter des amendements qui, selon toute certitude, ne peuvent pas être acceptés?

M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, au moment où le député de Maskinongé m'a demandé de lui céder la parole, je n'avais que quelques instants avant de terminer mes remarques. En toute franchise, M. le Président, nous ne voyons pas ce que ça pourrait changer, à tout point de vue pratique, d'ajouter, avant le mot James, "de" ou de ne pas l'ajouter. Je vous dirai, M. le Président, que la baie de James, on n'entend pas ça tellement souvent. Ce qu'on entend, c'est la baie James.

M. le Président, je pense que nous n'avons pas, quand même, à légiférer en vue de donner des leçons de français aux Français qui, eux-mêmes, appelleraient ça la baie James.

De toute façon, un Français, qui était de passage ici, l'autre jour, me demandait à quel endroit il pouvait trouver un emplacement de "camping". J'ai dit: Chez nous, nous appelions cela un emplacement de campement.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Un campement et un camping c'est bien différent. Un campement, ce sont les Indiens.

M. SAMSON: M. le Président, j'ai compris que ce même Français était en week-end, alors que, moi, j'étais en fin de semaine. C'est pour cela que je trouve totalement inutile de se chamailler sur des choses qui n'apportent rien. Quant à nous, nous n'avons pas l'intention de continuer le débat sur ce sujet. Nous sommes prêts à accepter cet article tel quel.

M. CHARRON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: ... sur l'amendement proposé par le député de Bourget, je ne veux pas faire de discours; je veux simplement poser une question au premier ministre. Le premier ministre est certainement au courant —c'est pour cela que cela a l'air loufoque — que cette question a soulevé de l'intérêt. Elle a, d'abord, été soulevée par un éditorialiste, dans le Devoir. Un fonctionnaire, je crois, a répondu au journaliste qui suggérait d'ajouter la particule "de"qu'il avait tort.

Tout ce que je veux savoir du premier ministre, c'est si cette chose l'a intéressé au point de demander un avis à l'Office de la langue française, qui existe, sous la juridiction du ministère des Affaires culturelles. J'admets les remarques qui ont pu être lancées par les députés ministériels à l'effet qu'il ne s'agit pas de faire une guerre autour de cela; il s'agit simplement de s'assurer. Si tel avait été le geste posé par le premier ministre, cela aurait pu être une question de jours pour avoir un avis des linguistes qui sont déjà au service du gouvernement. Il ne s'agit pas de faire une commission royale d'enquête.

Est-ce que, oui ou non, le premier ministre a déjà demandé à l'Office de la langue française son avis sur la question?

M. BOURASSA: M. le Président, quand la population du Québec saura que les membres du Parti québécois font perdre le temps de la Chambre sur des choses comme cela, il n'en restera pas beaucoup après la prochaine élection.

M. LEGER: M. le Président...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que le premier ministre ne doit pas prendre les choses de cette façon-là. La demande du député de Bourget et celle du député de Saint-Jacques sont des choses très logiques, très simples, très pertinentes. On ne lui fera pas un débat de 25 heures sur la question du nom. On lui pose tout simplement la question suivante: Est-ce que le gouvernement a consulté l'Office de la langue française? Parce qu'il y a une dispute, actuellement, entre des linguistes, cela peut paraître futile à certaines gens. On lui demande, tout simplement, de nous dire s'il a consulté l'office et l'on n'arrêtera pas l'étude du projet de loi parce qu'on n'aura pas la réponse ce soir.

On lui demande tout simplement de consulter l'office, si on ne l'a pas fait, et de nous dire s'il vaut mieux mettre "baie de James" ou "baie James", quelle que soit l'importance que certaines gens accordent à la langue française.

M. BOURASSA: M. le Président, le projet de loi a été discuté au conseil des ministres et le ministre des Affaires culturelles était présent. Il a, au moins, autant de talent que le député de Chicoutimi et il était d'accord sur le projet de loi.

M. CARIDNAL: Pardon, M. le Président! Le ministre des Affaires culturelles est responsable de l'Office de la langue française, mais il n'est pas l'Office de la langue française, malgré toutes les qualités que je lui reconnais.

La question posée au premier ministre est la suivante: Est-ce que l'Office de la langue française a été consulté, oui ou non? C'est clair! Est-ce que le premier ministre veut avoir un débat là-dessus?

M. BOURASSA: M. le Président, je fais confiance au ministre des Affaires culturelles; c'est ma réponse.

M. CARDINAL: Vous ne répondez pas à la question.

M. BOURASSA: C'est ma réponse. Si vous n'êtes pas satisfait...

M. CARDINAL: Est-ce que, oui ou non, l'office a été consulté?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: Comment, à l'ordre? UNE VOIX: II a répondu.

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre est parfaitement libre de donner la réponse qu'il veut.

M. CARDINAL: Pardon, on n'est pas en Chambre, là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président. Je regrette. Le président peut fort bien dire que le premier ministre est libre de donner la réponse qu'il veut, lorsqu'on pose des questions à la période des questions, mais, lorsqu'on étudie un budget ou qu'on fait l'examen d'un projet de loi ou qu'on pose une question qui n'est pas d'une gravité exceptionnelle et qui est bien simple, on a quand même droit à une réponse tout au moins respectueuse. J'ai posé la question très poliment, très gentiment au premier ministre: Est-ce qu'on a consulté l'Office de la langue française? S'il ne peut pas me le dire ce soir, qu'il me dise tout simplement: Nous allons revoir la question. C'est tout.

M. BOURASSA : Je ne sais pas si cela en vaut la peine.

M. LEGER: Est-ce que le Premier ministre ne pourrait pas à ce stade-ci nous donner les fameux amendements qu'il veut nous présenter de façon que nous puissions au cours de la fin de semaine qui nous reste, étudier la valeur de ces amendements et, quand le Premier ministre daignerait nous soumettre un amendement à un article quelconque, n'avoir que quelques secondes ici pour les discuter? Est-ce que le Premier ministre peut me répondre?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEGER: Est-ce qu'il est possible de nous présenter les amendements pour qu'on puisse les étudier en fin de semaine? J'attends la réponse du Premier ministre, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: II n'y a pas d'amendement à l'article 1. Nous sommes à discuter l'article 1. A moins qu'il y ait consentement unanime de la Chambre pour qu'on propose des amendements sur d'autres articles, je ne peux pas permettre qu'on le fasse, sauf s'il y a consentement unanime.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voudrais quand même qu'on comprenne le bon sens. Le Premier ministre, pour nous demander justement d'accélérer les travaux lorsque nous avons engagé des débats de fond, nous a dit qu'il y aurait des amendements et qu'il en proposerait.

Considérant que nous allons évidemment ajourner à minuit et que nous aurons à revenir sur ce projet de loi, il serait extrêmement important et utile, pour accélérer les travaux, que nous ayons le texte de ces amendements afin de les étudier, d'en juger le mérite. A ce moment-là, nous pourrions concourir avec le gouvernement à l'examen...

M. LEVESQUE: De consentement unanime.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais, M. le Président, ce n'est pas une question de consentement unanime, cela, M. le Président. On est seulement à l'article 1...

M. LE PRESIDENT: Je rappelle le député de Chicoutimi à l'ordre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... on va en faire de la procédure. On va en faire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je suis debout.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je parle sur l'article 1. Je parle sur l'article 1. D'accord?

M. LE PRESIDENT: Très bien! Parlez sur l'article 1.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Parlant sur l'article 1, M. le Président —on va en parler longtemps — le gouvernement nous propose par l'article 1 de créer, de constituer une société.

Une compagnie à fonds social est constituée sous le nom de Société de développement de la baie James, en français et "The James Bay Development Corporation", en anglais. Bon, ça, c'est l'article 1. C'est tout le problème qui est posé là. Or, à propos des intentions du gouvernement qui sont manifestées ici dans l'article 1, nous avons engagé des débats qui ont été assez longs parce que nous avons cru devoir faire entendre la voix de la population, la voix de l'Opposition, la voix des parlementaires légitimement élus afin de connaître les intentions réelles du gouvernement.

L'opposition que nous avons faite on en a voulu l'interrompre en nous disant — et c'est le premier ministre qui a parlé à ce moment-là, ès qualité — le premier ministre nous a dit: Nous proposerons des amendements. Bon. Et il nous a demandé...

M. BOURASSA: Des clarifications. UNE VOIX: Attendez-les.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... d'attendre les amendements avant de nous prononcer. Ce n'était pas très logique en passant. Puisque nous en sommes à l'article 1, le premier ministre déclare tout de suite, il n'y a pas d'amendement à l'article 1. Bon, admettons qu'il n'y ait pas d'amendement à l'article 1.

M. BOURASSA: Est-ce qu'on peut l'adopter?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président. L'article 1, comme je viens de le dire, pose tout le problème. Avant que de pouvoir adopter l'article 1, nous voudrions connaître les amendements qui vont se greffer à d'autres articles de la loi et qui vont nous éclairer sur la signification de l'article 1, sur sa portée véritable.

M. BERTHIAUME: Hors d'ordre, M. le Président, hors d'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est bien simple et c'est bien clair.

M. BROWN: Adopté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors avant de pouvoir nous prononcer en toute lucidité, en pleine lumière, sur la valeur, sur la portée, aussi large qu'elle parait être, de l'article 1, nous voudrions connaître du premier ministre ses intentions en ce qui a trait aux autres articles qui, eux, vont probablement nous donner des indications sur l'article 1, sur sa portée, sur le sens de cet article et sur la nature même de la société que le gouvernement se propose de créer par l'article 1 du projet de loi 50. Il est donc extrêmement important que le premier ministre nous éclaire à ce moment-ci et nous indique quels sont les amendements qu'il entend proposer afin que, une fois adopté l'article 1, nous ne soyons pas prisonniers d'une tactique ou d'une stratégie du gouvernement.

Il me semble que c'est là un argument raisonnable, c'est une argumentation fondée en droit et en justice de savoir où nous allons. Je suis bien prêt, moi, puisque maintenant les choses sont faites, je suis bien prêt...

M. BOURASSA: Est-ce que je pourrais poser une question au député?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... à accepter l'article 1 à la condition que le premier ministre nous dise exactement qui va venir se greffer sur le projet de loi...

M. LEVESQUE: Un instant.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... à la suite de l'article 1 parce que, dès là que j'aurai accepté l'article 1, je deviendrai prisonnier du geste que j'aurai posé si je ne sais pas ce qu'il y a dans les amendements aux autres articles et qui pourraient donner un sens très différent à l'article 1 tel qu'il est proposé, tel qu'il est libellé dans le document que nous avons entre les mains.

J'aimerais donc avoir de la part du premier ministre un geste de collaboration. Il est clair — je l'ai dit tout à l'heure — que nous n'aurons pas le temps d'ici minuit d'adopter tout le projet de loi, mais si le premier ministre avait l'amabilité de nous présenter ses amendements, nous pourrions, lundi ou lorsqu'on décidera de convoquer la Chambre à nouveau, nous pourrions très bien, nous aurions le temps, le loisir d'étudier ces amendements, cela faciliterait l'étude ultérieure du projet de loi et nous permettrait, selon le gré du gouvernement, de l'adopter.

Je n'engage pas ici, évidemment, qui que ce soit ou moi-même, mais nous pourrions quand même discuter, lors des prochaines séances de la Chambre, de ce projet de loi en connaissance de cause, sachant exactement ce que comporte l'article 1 qui crée la Société de développement de la baie James.

M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président...

M. LEVESQUE: J'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire.

M. LEVESQUE: Cela va faire! Un instant! M. le Président, le député de Chicoutimi est probablement bien intentionné, parce que c'est un homme juste, honnête, objectif et un homme qui a donné beaucoup, au cours de la présente session, pour apporter une certaine contribution. Bon, ceci étant dit, je ne suis pas d'accord avec lui pour la raison suivante. Le député de Chicoutimi, présentement, essaie de faire une négociation globale. Or, nos règlements nous demandent, et que voulez-vous que j'y fasse, je suis le serviteur, l'esclave et le prisonnier des règlements de cette Chambre. Nous allons cependant, M. le Président, essayer d'améliorer, de bonifier nos règlements. Mais en attendant, nous devons nous y conformer. Et dans cet exercice de nous conformer aux règlements de la Chambre, nous devons procéder article par article. On demande présentement à l'honorable premier ministre d'apporter tous les amendements à la fois. Je pense que c'est contre la lettre et l'esprit de nos règlements. Je suis convaincu que l'honorable premier ministre serait très heureux, si on faisait fi des règlements, de pouvoir le faire. Mais lui-même est prisonnier des règlements.

M. CHARRON: S'il y a le consentement unanime.

M. LEVESQUE: II n'y a pas de consentement unanime, M, le Président...

M. CHARRON: S'il y avait...

M. LEVESQUE: ... parce qu'on ne peut pas consentir aux mêmes choses que le député de Saint-Jacques. Jamais je ne consentirai...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. LEVESQUE: ... à avoir la même philosophie que le député de Saint-Jacques.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable leader parlementaire.

M. LEVESQUE: M. le Président, ce serait une prostitution que de m'associer au député de Saint-Jacques dans quelque proposition que ce soit. Etant donné ceci, il n'y a pas consentement unanime, donc nous devons procéder article par article pour respecter le règlement. Et quel que soit le député dans cette Chambre, quelle que soit sa brillante personnalité, quel que soit son âge peu avancé ou quel que soit son langage peu accepté, quel que soit le genre de représentation qu'il puisse faire, chacun de ces députés, des 108, doit à un moment donné respecter le règlement. Or, le règlement dit que quelque projet de loi que nous ayons à étudier doit l'être en comité plénier, article par article. Alors je suggère que nous revenions non pas seulement à l'esprit, mais à la lettre des règlements et que nous étudiions l'article 1.

M. LEGER: M. le Président...

M. CARDINAL: M. le Président, sur le point soulevé...

M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.

M. CARDINAL: M. le Président, nous pouvons nous emprisonner dans cette camisole de force qu'est le règlement. Je voudrais rappeler cependant deux précédents qui se sont produits au cours de cette longue semaine, jour et nuit, et qui sont venus de la collaboration de l'Opposition officielle, et j'en appelle à deux ministres de votre gouvernement qui pourront en être les cautions. A l'étude du projet de loi 27, malgré le règlement qu'a invoqué le leader parlementaire, l'Opposition officielle avait quatre amendements à proposer. Dès le début de la séance, le ministre de l'Education en est témoin, pour aider les débats, par esprit de collaboration, pour accélérer les débats, j'ai, dès le début de la séance, déposé les quatre amendements que nous proposions.

A la commission qui a étudié le projet de loi 45, dès le début de la séance, j'ai indiqué au ministre responsable des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, quels étaient les amendements, dans l'ordre des principes que nous proposions.

Je comprends que le leader parlementaire ait le droit d'invoquer le règlement et ait le droit d'exiger qu'il s'applique. Je comprendrais, d'autre part, que de même que nous avons eu cet

esprit de collaboration qui a facilité, dans ces deux commissions, et qui a permis dans les deux cas, en une seule journée, de régler deux projets de loi très importants, que l'on puisse peut-être, du côté gouvernemental nous offrir la même collaboration. C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président,...

M. LEGER: M. le Président, suite aux remarques...

M. LEVESQUE: Un instant, un instant... UNE VOIX: Voulez-vous regarder en arrière.

M. LEVESQUE: Le ministre de l'Education a été pris à partie et c'est à lui que revient le droit de parole.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education sur une question...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je suis heureux que le député de Bagot ait souligné les discussions et les modalités qui ont donné lieu à nos discussions au projet de loi 27 en comité plénier. Mais la remarque qu'il me lance me permet de lui rappeler qu'en l'espace d'une journée au comité plénier, il a été possible d'adopter plus de 119 articles, que durant toute cette journée, à la fois, de la part de l'Opposition, de l'Union Nationale, des Créditistes ou du Parti Québécois, on a vu une opposition qui a été capable de porter des arguments positifs et des remarques constructives et que, réellement, les parlementaires du Québec ont fait avancer la législation. Et nous n'avons pas assisté au spectacle scandaleux d'aujourd'hui où toute une partie de l'Opposition, en partie dans cette direction-là, a fait perdre le temps de cette Chambre, a fait perdre le temps constamment pour nous empêcher d'avancer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, sur le rappel au règlement du député de...

M. LEGER: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Vous parlez tous ensemble.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...du ministre de l'Education, tout ce qu'il vient de dire est justement une démonstration à l'appui de la demande que j'ai faite au premier ministre. Si nous avons pu procéder avec autant de célérité en commission parlementaire à certains endroits — et j'étais là — c'est parce que le gouvernement avait bien voulu nous faire connaître la substance et même le texte des amendements qu'il entendait nous proposer. Par conséquent, l'argument dont il se sert, c'est celui dont je me suis servi tout à l'heure lorsque j'ai demandé au premier ministre de nous faire connaître ses amendements.

M. CADIEUX: En temps et lieu.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, ayant disposé de ce rappel au règlement en ce qui me concerne, je reprends ce que j'étais à dire sur l'article 1.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je parlais au sujet de l'article 1, j'ai été interrompu par le député de Bonaventure.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas fini, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: J'admets tout ça et nous avons jusqu'à minuit.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'accord.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Chicoutimi voudrait bien aussi respecter la présidence et le droit de parole des autres membres du comité?

M. LEVESQUE: M. le Président, lorsque j'ai invoqué le règlement, j'ai demandé qu'on s'en tienne à ce règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce que je vais faire.

M. LEVESQUE: Et qu'on s'en tienne à l'article 1.

M. LE PRESIDENT: Alors, d'une façon très stricte et catégorique parce que, jusqu'ici, je considère et je m'en repens, avoir laissé trop de lattitude au député de Chicoutimi en ce qui a trait à cette question des amendements. Evidemment, avec beaucoup d'habileté, avec la maîtrise exceptionnelle qu'il a de la langue française,il a réussi à rattacher ça de quelque façon à l'article 1, mais il a encore une fois — il avait commencé ce matin — ce soir violé le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une bonne moyenne.

M. LE PRESIDENT: Et je ne permettrai pas...

M. CADIEUX: C'est bien lui. On le reconnaît.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Je ne permettrai en aucun temps, à partir de maintenant, au

député de Chicoutimi de parler d'amendements autres que ceux qui devraient s'appliquer à l'article 1.

M. PAUL: M. le Président... M. LEGER: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. LEGER: M. le Président, je suis derrière vous, mais vous pouvez quand même réaliser que je demande la parole de temps en temps.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. LEGER: Il faudra que je change de place.

M. PAUL: M. le Président, j'ai écouté les propos de l'instituteur, l'honorable ministre de l'Education...

M. LEVESQUE: Le député de Lafontaine pourrait-il écouter le député de Maskinongé et respecter un peu les règlements?

M. LEGER: M. le Président, j'aimerais bien pouvoir parler à mon tour, mais le président ne me voit jamais.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: Même si le député de Maskinongé a des choses désagréables à me dire, c'est lui qui a la parole.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, je n'ai pas de paroles désagréables à adresser à qui que ce soit. Mais cependant, M. le Président, j'ai une motion à faire. En vertu de l'article 332, je voudrais faire la motion suivante, basée sur la note 2, à l'effet que le président quitte maintenant le fauteuil. Je vais justifier la présentation de ma motion.

M. le Président, la nature humaine et les capacités intellectuelles ont une limite. Considérant que nous avons siégé à des heures indues, avec ténacité, et que nous avons étudié des projets de loi très importants, il est compréhensible et humain que tous les députés soient quelque peu épuisés, les uns plus ou moins, les autres davantage.

Il arrive, M. le Président, que votre autorité est méconnue. C'est regrettable. C'est également une circonstance ou une atmosphère qui rendent tout à fait inutiles les délibérations que nous pourrions avoir jusqu'à minuit.

Je me permets donc dans les circonstances, M. le Président, de vous suggérer de faire rapport. Si le gouvernement veut réellement utiliser le droit qu'il a de nous faire siéger jusqu'à minuit, il pourra appeler un autre article qui reste au feuilleton. Peut-être que changeant de sujet de discussion, il nous sera possible de rapporter progrès à minuit.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, considérant qu'il s'agit d'une motion débat-table, je propose, conformément à l'article 332, que vous quittiez maintenant le fauteuil et que vous fassiez rapport.

M. LEVESQUE: M. le Président, nous avons tous le droit de participer à ce débat. Voici une motion débattable. Je suis convaincu que les 72 membres du Parti libéral auraient beaucoup d'arguments à apporter à l'encontre de cette motion.

Je comprends cependant, M. le Président, que nous ne pourrons pas tous parler là-dessus parce que nos règlements nous imposent une certaine clôture à minuit, le samedi soir. Nous ne pouvons pas siéger le dimanche. La motion qui a été adoptée avec un enthousiasme modéré par les honorables membres de cette Chambre il y a quelque temps contenait cette disposition, que nous ne siégions pas le dimanche.

Alors, M. le Président, il est exactement 11 h 40 minutes. Cette motion est probablement inspirée par un sens que je ne qualifierais pas de l'honorable député de Maskinongé. Comme je comprends combien illusoire serait notre désir de vouloir progresser d'une façon réellement positive à nos travaux, j'en profite pour lui rendre hommage. C'est peut-être la dernière fois que j'en ai l'occasion parce que je m'imagine bien que nos travaux parlementaires se termineront précipitamment lorsqu'enfin ceux qui font une obstruction systématique, et je ne parle pas de celui qui vient de parler, s'apercevront que le peuple du Québec condamne à jamais ce genre d'obstruction, ce "filibuster". Je comprends que, pris dans ce contexte, le député de Maskinongé veut mettre fin à cette farce monumentale que seuls ne décèlent pas ceux qui doivent être les informateurs de l'opinion publique. Ceux-ci, je mesure mes paroles, devraient décrire à ce moment-ci exactement ce qui se passe ici alors que presque tous les membres de l'Assemblée nationale approuvent le gouvernement et son action. On devrait le dire dans tous les journaux, à la télévision, à la radio, parce que les élus du peuple repoussent ce que les sept membres du Parti québécois essaient d'imposer à cette assemblée.

S'il y a une responsabilité pour le gouvernement du Québec, s'il y a une responsabilité pour l'Opposition officielle, s'il y a une responsabilité pour le Ralliement créditiste et si cette responsabilité est foulée aux pieds par le Parti québécois, il y a une responsabilité pour ceux qui sont responsables de l'information dans cette province de dire ce qui se passe ici à l'Assemblée nationale.

M. le Président, le peuple du Québec sollicite la coopération des media d'information, le

peuple du Québec demande que ses élus aient une voix dans les media d'information, que l'on respecte l'intégrité de l'information, que l'on respecte l'objectivité et que l'on dise ce que disent les 72 députés libéraux. Que l'on dise ce que disent les 17 députés de l'Opposition officielle et que l'on dise ce que disent les 12 membres du Ralliement créditiste et que les media d'information cessent d'être à la solde des 7 parmi les 108.

M. le Président, j'ai toujours été tolérant. On m'a même accusé d'être trop tolérant. Tout ce que j'ai fait dans ces seize années de vie politique, c'est d'essayer d'être objectif, de comprendre tous mes voisins et de faire preuve d'une charité presque évangélique.

Mais, M. le Président, j'ai mon voyage! Lorsqu'on lit certains journaux, lorsqu'on écoute certaines informations venant de certains media d'information — je ne me gêne pas pour le dire — il y a une concertation, il y a un militantisme.

M. le Président, la population du Québec a le droit d'être informée objectivement. Que l'on cesse présentement ce petit jeu. Je sais que le premier ministre du Québec va me reprocher ce que je dis présentement, parce que, lui, c'est l'exemple, l'illustration de la tolérance. Il a cette caractéristique de pouvoir accepter toutes les classes de la société, toutes les accusations, même les plus viles, qui ont été faites particulièrement par certains milieux que je ne dénoncerai pas d'une façon précise.

UNE VOIX: Ecoeurants!

M. LEVESQUE: M. le Président, quant à moi, je suis prêt à mettre mon avenir politique en jeu, parce que je n'accepte plus ce genre d'information qui, plus que jamais, change la nature des choses quant à l'information qui est donnée. M. le Président, je mesure ce que je dis. Je n'ai jamais utilisé de violence dans mes propos. J'ai toujours été objectif, autant que possible, mais, M. le Président, ce soir, je crois qu'il est temps que l'on dise à certaines personnes qu'on n'est pas là pour faire du militantisme, mais du journalisme.

Je n'irai pas plus loin dans ces remarques. A ce moment-ci, il est 11 h 45, je voudrais simplement qu'on revienne à l'article 1 du projet de loi et qu'on l'étudie dans la sérénité qui devrait inspirer nos débats. Nous travaillons pour la province de Québec, nous travaillons pour le Québec, quels que soient nos arguments politiques.

Les Québécois et les Québécoises, ces 6 millions de personnes, ont le droit de savoir ce qui se passe dans l'Assemblée nationale.

Qui fait l'obstruction présentement, une obstruction systématique, un "filibuster" contre la prospérité du Québec? Qui? Qu'on le dise, qu'on n'essaie pas de faire des interviews à gauche et à droite pour savoir comment se comportent les 7 sur les 108. Qu'on demande donc aux 101 ce qu'ils pensent, eux qui sont également élus par le peuple du Québec.

On a l'impression, à un moment donné, qu'il faut s'asseoir, écouter, se complaire, se demander si ces sept représentent 23 p. c, 21 p. c. ou 20 p. c; ils sont battus et ils seront plus battus que jamais à la prochaine élection.

J'ai le respect des institutions parlementaires, et je fais un appel particulier à mes bons amis les media d'information, pour qu'on respecte ce qui se passe ici à l'Assemblée nationale. Voici un premier ministre dont on connaît la tolérance, non pas seulement le dynamisme et la jeunesse, la valeur et la compétence, mais dont on connaît la tolérance, un premier ministre qui est prêt à accepter de se soumettre à la dernière question du dernier venu. Mais, M. le Président, il ne faut pas exagérer à tout jamais.

Il y a ici 72 députés démocratiquement élus. Qui peut mettre en cause cette légitimité? Il y a là, du côté du Ralliement créditiste, douze députés légitimement élus; il y a là, du côté de l'Union Nationale, 17 membres légitimement élus par la population. Mettez-vous cela dans la tête: II y en a 101 légitimement élus, aussi honnêtes, aussi légitimes, aussi valables, dans chacun de leur comté, que ces sept — enfin, je ne dis rien — ...

UNE VOIX: Ces sept plaies d'Egypte.

M. LEVESQUE: ... également légitimement élus, si vous voulez, légalement élus. J'espère que l'on a compris le message. Je ne voudrais pas le faire faire par d'autres. Je n'ai jamais fait faire mes messages par d'autres et je n'ai jamais essayé de solliciter les faveurs de qui que ce soit, particulièrement de ceux qui m'écoutent. Merci.

M. SAMSON: M. le Président, sur la motion d'ajournement, évidemment, nous sommes conscients que nous assistons présentement à une joute, à un espèce de duel à finir. Il y a, d'une part, M. le Président, le gouvernement, qui a ses responsabilités, qui veut faire avancer ses travaux, et d'autre part, un parti en cette Chambre, je ne dirai pas deux, M. le Président, je dirai un, qui, lui, semble ne pas avoir de responsabilités, et fait depuis deux jours de l'obstruction. Ils se sont juré d'arrêter par tous les moyens possibles le bill 50.

M. le Président, si le gouvernement voulait absolument passer un article avant minuit, je crois que c'est raté maintenant. Il aurait peut-être fallu comprendre mieux les honorables députés du Parti québécois. Je pense qu'on ne les a peut-être pas compris. Avec eux, M. le Président, j'ai l'impression qu'il faut commencer par la queue, il faut commencer par la fin. Au lieu de commencer par l'article numéro 1, vous auriez dû commencer par le dernier article, l'article 44, par exemple, qui dit que la présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction. C'est

généralement le seul article qu'ils ne discutent pas, M. le Président. Comment pouvons-nous croire que ces gens sont sérieux quand, depuis deux jours, on présente motion par dessus motion, aussi inutiles les unes que les autres, M. le Président? Ils auront à rendre des comptes à la population du Québec.

M. le Président, la population qui nous regarde en ce moment, s'attend à ce que ce bill soit adopté dans les plus brefs délais pour développer cette région de la baie James.

Nous avons, nous aussi, nos opinions. C'est bien clair que nous ne partageons pas toujours les opinions des trois autres partis en cette Chambre, mais lorsque arrive un sujet aussi important que celui-là, aussi grave de conséquences, un sujet qui constitue une planche de salut pour l'économie de notre province de Québec, on n'a pas le droit de discuter de façon partisane.

M. le Président, la population ne nous a pas élus pour faire de la politicaillerie. On nous a élus pour venir en cette Chambre représenter les électeurs. Surtout — je n'ai pas honte de le dire — les quatre partis en cette Chambre, lors de la dernière campagne électorale, ont fait valoir qu'ils voulaient relancer l'économie de la province de Québec. Ce sont les promesses qui ont été faites par les quatre partis qui siègent actuellement en cette Chambre et nous avons, nous, du Ralliement créditiste, ainsi que les autres, la responsabilité de ne pas faire obstruction au moins lorsque nous avons un bill devant nous qui est susceptible de relancer l'économie au Québec, qui est susceptible de donner du travail au quelques 200,000 chômeurs que nous avons actuellement, qui est susceptible de donner de l'emploi à plusieurs des quelque 500,000 assistés sociaux que nous avons présentement au Québec.

Alors que la population a faim, alors que la population demande que le gouvernement prenne ses responsabilités, on a devant nous un gouvernement qui prend ses responsabilités. Même si je ne suis pas toujours d'accord avec ce qui est fait en cette Chambre, et nous l'avons prouvé, qu'on ne vienne pas nous dire que nous sommes toujours prêts à appuyer le gouvernement. Le gouvernement est le premier à se plaindre du Ralliement créditiste. Quand c'est le temps de faire la lutte, on la fait et on l'a prouvé lors du bill 27.

Les députés du gouvernement viennent d'applaudir justement parce qu'ils reconnaissent une saine démocratie.

M. BURNS: Vous êtes de toute beauté!

M. SAINT-PIERRE: Vous, vous n'êtes pas de toute beauté, par exemple!

M. SAMSON: Le gouvernement a reconnu que nous avons des droits. Le gouvernement a reconnu démocratiquement que lorsque nous avons une lutte à faire et que nous la faisons objectivement, on n'a pas de reproche à nous faire.

Mais, nous n'avons pas le droit, au nom de certains principes, sous le prétexte de vouloir protéger certains petits amis qui sont dans une certaine compagnie de la couronne présentement, de faire de l'obstruction systématique en vue de faire avorter le bill no 50. C'est ce que nous ne ferons pas, et nous n'accepterons pas, M. le Président, de nous laisser associer, non plus, à des partis qui veulent faire de l'obstruction.

Toutefois, nous reconnaissons que ce genre d'obstruction n'est pas sérieux — je termine, M. le Président — aussi peu sérieux que l'Association du Parti québécois du comté de Jean-Talon qui a envoyé des chèques de $1.03 à chaque chef de parti, M. le Président. Nous ne sommes pas avares; nous n'acceptons pas les chèques du Parti québécois, nous, du Ralliement créditiste.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LOUBIER: M. le Président...

M. HARDY (président du comité plénier): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que le comité n'a pas fini de délibérer et qu'il demande la permission de siéger à nouveau.

M. LAVOIE (président): Quand siégera-t-il? A la prochaine séance.

M. LOUBIER: M. le Président, je m'excuse, j'avais demandé la parole. Il n'est pas minuit et je comprends très mal l'attitude assez arrogante et méprisante du président qui vient de quitter le fauteuil de ne pas permettre au chef de l'Opposition d'adresser la parole, alors qu'il n'est pas minuit. M. le Président, d'une façon beaucoup plus sereine, j'ai écouté les propos du leader parlementaire et les propos tenus par le chef du Ralliement créditiste. Je ne commente aucunement l'attitude et les commentaires des deux opinants qui m'ont précédé, mais je pense, M. le Président, que c'est l'illustration parfaite de ce climat de tension qui existe actuellement dans cette Chambre. Je pense que les deux opinants qui ont tenu des propos que je laisse le soin à tout le monde d'analyser et de juger sont la preuve flagrante...

M. LE PRESIDENT: Avec la permission de l'honorable chef de l'Opposition. Je suis bien d'accord pour le laisser parler; il est près de minuit. Si on lui permet de continuer, il faudra absolument que ce soit du consentement unanime de la Chambre.

M. LOUBIER: II n'est pas minuit, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je vous préviens qu'il est minuit dans quelques secondes. Je n'ai aucune objection si la Chambre y consent.

M. SAMSON: M. le Président, question de consentement, est-ce ça que vous nous demandez?

M. LE PRESIDENT: Dites-moi oui ou non.

M. SAMSON: M. le Président, l'honorable député de Chicoutimi m'a refusé son consentement sur le bill no 27; je refuse le mien, ce soir.

M. LOUBIER: M. le Président, il reste, au moins, une minute.

M. LEVESQUE: Je crois qu'à ce moment-ci il faudrait que nous fassions motion pour que le comité plénier puisse siéger à nouveau.

M. LOUBIER: M. le Président, si le chef du Ralliement créditiste et le leader parlementaire m'interrompent alors qu'il reste encore une minute, c'est bien évident que je ne pourrai pas terminer...

DES VOIX: Il est minuit.

M. LEDUC: On ne peut plus siéger après minuit. Vous voulez savoir quand nous allons ajourner, après minuit, nous ne siégeons plus.

UNE VOIX: Le comité plénier. M. LAVOIE (Wolfe): Le bâillon!

M. LOUBIER: M. le Président, en terminant, je réalise...

M. SAMSON: Je refuse mon consentement, M. le Président, il est minuit.

DES VOIX: II est minuit. M. LOUBIER: II est minuit. M. LE PRESIDENT: La séance est levée. (Fin de la séance: 0 heure)

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