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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le jeudi 4 novembre 1971 - Vol. 11 N° 83

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Quinze heures dix minutes)

M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Présentation de pétitions.

Lecture et réception de pétitions.

Présentation de rapports de commissions élues.

Présentation de motions non annoncées.

Présentation de bills privés.

Présentation de bills publics.

Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents.

Questions des députés.

Questions et réponses

M.LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.

Rapatriement des allocations sociales

M. LOUBIER: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre ou, par ricochet, au ministre des Affaires sociales. Où en sont rendues les négociations avec le gouvernement fédéral concernant une entente éventuelle sur l'administration en général ou sur le rapatriement des allocations familiales ou, par extension, des allocations sociales?

Est-il vrai qu'une entente devrait être conclue dans les jours qui suivront ou, au plus tard, d'ici quelques semaines?

M. BOURASSA: Disons que nous l'espérons très vivement. Quand le chef de l'Opposition parle d'une entente d'ici quelques semaines, je pense que le délai parait très raisonnable et même nécessaire.

Le chef de l'Opposition est au courant qu'il y a trois problèmes dans cette discussion: la question de la conception de la politique, du financement et de l'administration. Comme je le disais hier à quelques journalistes, il ne semble pas y avoir de problèmes sérieux pour ce qui a trait à la conception et au financement. Comme c'est une formule originale, il faut que nous nous entendions sur l'administration et sur l'application des différentes lois du revenu. C'est exactement ce que nous discutons depuis quelques semaines et nous espérons arriver à des conclusions aussi rapidement que possible.

M. CLOUTIER (Montmagny): Question supplémentaire, M. le Président. Quel est le ministère qui négocie avec le gouvernement central? Est-ce le ministère des Affaires sociales ou le ministère des Affaires intergouvernementales, ou quelque autre mécanisme de négociation? Est-ce que cela se poursuit au niveau politique ou au niveau des fonctionnaires?

M. BOURASSA: C'est le ministère des Affaires intergouvernementales, notamment le sous- ministre, en collaboration avec des fonctionnaires du ministère des Affaires sociales.

M. CLOUTIER (Montmagny): Une autre question, M. le Président. Quand le premier ministre dit qu'au niveau de la conception il n'y a pas de problème, est-ce que ça veut dire que la primauté ou la priorité législative du Québec serait reconnue?

M. BOURASSA: C'est qu'il n'y a pas actuellement, de la part du gouvernement fédéral, de point de vue du Québec quand la priorité législative n'est pas contestée. Là où il y a des problèmes, c'est pour l'application de cette priorité au niveau administratif et ce que ça peut impliquer, par exemple, sur le plan de la juridiction des différentes lois du revenu.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Manifestations de Manneville

M. SAMSON: M. le Président, c'est une question au ministre des Terres et Forêts. A la suite des développements survenus concernant l'affaire Manneville et les manifestations que nous avons connues, blocage de routes, etc., est-ce l'intention du ministre d'envoyer sur place un officier responsable de son ministère afin d'évaluer la situation et voir à trouver une solution aussi rapidement que possible?

M. DRUMMOND: M. le Président, je pense que le chef de district sur place a déjà fait un bon travail. Mais par contre c'est toujours difficile, lorsqu'on travaille loin de Québec. J'ai bien l'intention d'envoyer un autre officier de mon ministère sur place qui fera rapport sur ce qui se passe actuellement sur les lieux.

M. SAMSON: Question supplémentaire. Le ministre pourrait-il nous dire quels seront les délais? L'officier devra-t-il se rendre immédiatement sur place ou si ça retardera?

M. DRUMMOND: M. le Présisident, la décision a été prise hier soir à cet égard et il est censé se rendre là-bas aussitôt que possible pour discuter de la situation. Je peux dire aussi, en ce qui concerne toute la question des paroisses marginales à cet endroit, que j'ai l'intention d'envoyer trois représentants encore de mon ministère pour discuter de la situation sur place la semaine prochaine.

M. SAMSON: Le ministre a-t-il l'intention de nous faire une déclaration au début de la semaine concernant le résultat de ces rencontres?

M. DRUMMOND: II n'est pas question de garder secret quelque rapport que ce soit. Si je considère valable de faire rapport à la Chambre par déclaration ministérielle, je le ferai.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Question du député des Iles-de-la-Madeleine

M. LAURIN: M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice est en mesure de répondre à la question que lui posait, hier, le député des Iles-de-la-Madeleine?

M. CHOQUETTE: Non, pas actuellement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Témiscouata.

UNE VOIX: II ne sera jamais capable.

M. CHOQUETTE: Peut-être la semaine prochaine.

M. LACROIX: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Je vous accorderais une question supplémentaire, sans commentaire.

M. LACROIX: ...voici ma question supplémentaire: En quelle année le ministre de la Justice va-t-il nous donner une réponse.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Témiscouata.

Livre blanc du ministre des Terres et Forêts

M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, avant de poser ma question au ministre des Terres et Forêts, je voudrais vous demander s'il sera possible, après cette question d'en poser une autre au ministre de la Voirie puisque j'attends depuis deux jours mon tour pour poser des questions.

M. LE PRESIDENT: Commencez par la première, on verra après.

M. SIMARD (Témiscouata): Relativement au livre blanc dont le ministre vient de déposer le premier tome, quand entend-il publier le ou les tomes suivants? C'est ma première question. Est-ce que le ministre serait en mesure de proposer à l'Assemblée nationale et à la population du Québec les éléments positifs pouvant servir de base à une véritable politique forestière? En attendant les solutions à long terme qui pourraient résulter de ces études, que compte-t-il faire dans l'immédiat pour parer aux difficultés très aiguës qui entraînent actuellement de nombreuses mises à pied et des fermetures d'usines?

M. DRUMMOND: M. le Président, je pense que la question est surtout générale. On vient de faire la distribution du premier tome. Il est bien indiqué là-dedans que, lorsque le deuxième tome sera déposé, il ne sera pas seulement question des mesures à long terme mais des mesures suggérées à court, moyen et long termes. C'est un gouvernement très positif et nous allons agir d'une façon très positive dans le domaine des terres et forêts.

M. LOUBIER: Une question additionnelle. Le député de Témiscouata demande au ministre des Terres et Forêts s'il a l'intention de proposer, dans un avenir très rapproché, des mesures législatives qui vont donner suite aux recommandations de son livre blanc.

M. DRUMMOND: Nous sommes un parti très démocratique et lorsque nous déposons nos suggestions en ce qui concerne des solutions valables pour l'industrie forestière, il est bien évident que cela va demander de la législation de la part du gouvernement. C'est aussi facile que ça.

Mais je préfère, après le dépôt de ce document-là, discuter avec tous les intéressés, y compris les membres de l'Opposition, avant d'en arriver à la législation qui va suivre.

M. LOUBIER: Si je comprends bien le ministre, il n'y aura pas de législation, cette année, dans ce domaine-là.

M. DRUMMOND: M. le Président, il y a déjà un bill de déposé et que nous pouvons discuter.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Frontenac.

Bill Muskie

M. LATULIPPE: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable premier ministre. Compte tenu de l'adoption du bill Muskie par le législateur américain, l'honorable premier ministre peut-il assurer cette Chambre ce que son gouvernement entend faire ou a-t-il fait les démarches nécessaires afin de négocier des avantages spéciaux pour toute notre population du sud-est du Québec qui est présentement fortement menacée par l'adoption possible de ce bill?

M. BOURASSA: M. le Président, le député a certainement le droit de poser cette question. J'ai déjà fait des représentations auprès de certains ministres fédéraux pour qu'ils prennent conscience des conséquences très sérieuses que pourrait avoir l'application de la loi Muskie, qui, comme le député le sait, est encore en discussion au Sénat américain. Que le gouvernement fédéral fasse des représentations très fermes, en tenant compte, notamment, des conséquences de l'application de cette loi, si elle était finalement votée, pour de très nombreuses régions du Québec.

M. GUAY: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut nous dire si le gouvernement provincial, au cas où le projet de loi serait adopté, a l'intention d'user de représailles?

UNE VOIX: Représailles?

M. BOURASSA: M. le Président, le député comprendra que sa question est purement hypothétique, et je me demande jusqu'à quel point elle est sérieuse.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. C'est une question que je voudrais non partisane et très positive.

UNE VOIX: C'est rare cela!

Organisme spécialisé pour lutter contre le chômage

M. LEGER: Etant donné que l'automatisation nous amène du chômage possible — on l'a vu à la Presse — étant donné que des mises à pied surviennent de toute part dans la province, est-ce que le premier ministre ne croit pas qu'il y aurait lieu, afin de combattre la détérioration de la situation de l'emploi au Québec, surtout pour les mois d'hiver, d'instituer un mécanisme spécialisé dont la tâche principale serait de surveiller, d'une façon permanente, la situation du chômage dans toutes les industries du Québec et aussi de coordonner les actions éparses qui caractérisent la politique actuelle des gouvernements tant fédéral que provincial?

M. LEVESQUE: Je m'oppose, M. le Président, à ce genre de questions. J'aimerais que vous vous prononciez parce que, si vous ne le faites pas, on pourrait s'en tirer chaque jour avec des questions qui sont un exposé partisan...

M. LAURIN: Ce n'est pas un exposé, M. le Président.

M. LEVESQUE: ... s'il en est un.

M. LEGER: M. le Président, je regrette. Ce n'est pas un exposé partisan.

M. LAURIN: C'est une question très précise. M. LEGER: II y a une situation de fait. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEGER: Je demande au premier ministre: Est-ce qu'il y a...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

DES VOIX: A l'ordre!

M. LEGER: ...un mécanisme précis?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai cru remarquer, au sein de cette question, de la manière dont elle a été formulée, plusieurs affirmations et assertions, ce qui n'est pas permis en vertu du règlement. Vous n'avez qu'à vérifier les articles sur les questions. Une question doit se limiter à une demande de renseignements sans affirmation, sans prise de position. La preuve, c'est que votre question peut soulever un débat, alors qu'une question ne doit soulever aucun débat.

Mais votre question a été formulée. Y a-t-il un ministre qui désire y répondre?

DES VOIX: Non.

M. LEVESQUE: Non. Elle est irrégulière. Elle ne mérite pas de réponse.

M. LEGER: Le premier ministre pourrait-il me dire s'il y a un organisme précis qui pourrait coordonner les efforts de toute la province non seulement devant le niveau de chômage provenant des emplois perdus d'une façon normale dans les industries, mais aussi devant une automatisation qui amène du chômage? Cela veut dire que le gouvernement pourrait avoir un mécanisme spécialisé dont la seule tâche serait de faire cela.

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!

M. LEVESQUE: La question! Le député récidive. Vous le savez, M. le Président. J'ai vu que vous alliez vous lever pour le rappeler de nouveau à l'ordre. Il ne semble pas comprendre les bons conseils que vous lui avez donnés.

M. BACON: De toute façon, il ne comprend pas.

M. LEVESQUE: II ne semble pas se rappeler, non plus, la moyenne de 52,000 nouveaux emplois crées depuis le 1er janvier 1971.

M. LAURIN: C'est parce que la question vous fatigue !

M. DEMERS: Cela, c'est de la récidive!

M. LEGER: Ce qui veut dire que le premier ministre n'a pas de réponse pour un mécanisme régulier.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. LESSARD: Combien de nouveaux chômeurs?

M. BOURASSA: C'est une question qui relève des crédits. Si le député avait posé une question sur le conflit de la Presse, en particulier, sur les changements technologiques de la Presse, d'accord, mais la question me semble relever bien davantage d'un débat général sur les crédits du ministère du Travail.

M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président. Le conflit de la Presse est un exemple patent de cela.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: C'est maintenant une autre assertion.

M. LEGER: Le premier ministre me demande de parler de la Presse.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous une question supplémentaire?

M. LACROIX: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. LACROIX: M. le Président, la question de la Presse est un exemple patent des folies de la CSN et du PQ.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député de Chicoutimi.

Edifice administratif à Chicoutimi

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, dans l'optique du redressement de la situation de l'embauche au Québec et de l'efficacité administrative du gouvernement en ce qui concerne une des plus belles régions du Québec...

UNE VOIX: Question!

M. LEVESQUE: Question!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LOUBIER: Ils sont bien nerveux, aujourd'hui!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre:

M. LEVESQUE: Même poids, même mesure.

M. LOUBIER: Est-ce que la venue de M. Tito vous énerve à ce point?

M. LACROIX: Parlez-vous au nom de l'UN ou de l'UQ?

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, pour faire plaisir au leader parlementaire de la Chambre...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que j'ai le droit de parole, M. le Président? Vous m'avez reconnu. Merci.

Je ne veux pas énerver inutilement le leader parlementaire de la Chambre, mais dans l'optique du redressement de la situation de l'embauche au Québec et de l'efficacité administrative dans une des plus belles régions du Québec, je désirerais poser une question au ministre des Travaux publics et signaler à la Chambre sa présence bienheureuse aujourd'hui.

Est-ce qu'il est exact que le ministre des Travaux publics doit, demain ou dans le jour qui suivra, faire une déclaration, suite aux nombreuses revendications que j'ai faites dans le but d'ériger à Chicoutimi l'édifice administratif dont nous avions décidé la construction au mois d'avril 1970?

M. LEVESQUE: Feuilleton.

M. PINARD: M. le Président, pour faire plaisir à mon bienheureux ami de Chicoutimi, je dois lui dire que lorsque le moment sera venu de prendre cette décision, je l'annoncerai.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Une question additionnelle au ministre des Travaux publics. Les journaux de la région, la radio et la télévision ont annoncé que le ministre devait faire cette déclaration le 5 ou le 6 novembre à Dolbeau. Est-ce qu'il est exact que le ministre doit faire cette déclaration et si l'édifice sera construit à Chicoutimi, là où il y a un grand nombre de chômeurs?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Je crois que le ministre a déjà répondu. Peut-être que le député de Chicoutimi est insatisfait, mais il doit se satisfaire de la réponse du ministre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, une question additionnelle au premier ministre. Est-ce qu'il a pris connaissance du dossier que je lui ai soumis concernant la nécessité de construire l'édifice administratif à Chicoutimi, la capitale régionale?

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, une question de règlement. Le député de Chicoutimi pose présentement une question à caractère purement local. Il pourra soulever cette question lors de l'étude des crédits. Si le député de Chicoutimi veut connaître exacte-

ment ce que pense le ministre des Travaux publics relativement au problème qu'il vient de soulever, il sera le bienvenu à Dolbeau, demain.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Une question additionnelle. Ce n'était pas une question, M. le Président, et vous avez laissé parler le député de Jonquière.

M. LE PRESIDENT: Non, il a invoqué le règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le premier ministre peut me dire...

M. HARVEY (Jonquière): J'ai invoqué le règlement, c'est une question locale.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je m'en excuse, mais j'ai une question additionnelle à l'intention du premier ministre.

Est-il exact que le ministre des Travaux publics —et je pose la question au premier ministre — a écarté un terrain du gouvernement, donc qui ne coûterait rien, pour acheter des terrains qui favoriseraient des amis du député de Jonquière?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, je pose la question de privilège, parce que le député de Chicoutimi vient d'affirmer, devant tous les députés de cette Chambre, l'hypothèse que le ministre de la Voirie préférerait un terrain vendu par des amis du député de Jonquière.

M. le Président, je tiens à déclarer en cette Chambre que si la décision du ministre des Travaux publics est de choisir Jonquière, le ministère possède des terrains en quantité pour localiser l'édifice. De plus, le seul terrain offert dans la cité de Jonquière l'a été par la cité de Jonquière à l'intérieur du programme de rénovation urbaine, terrain déjà payé $1, selon un plan conjoint provincial-fédéral. Si c'est ce que veut dire le député de Chicoutimi, bien sûr que tous les citoyens de la cité de Jonquière et de mon comté sont mes amis, et ils ne sont pas "chèrants."

M. LACROIX: M. le Président, on vient de mettre la peau sur le squelette.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question de privilège, parce que l'observation du député des Îles-de-la-Madeleine est extrêmement désagréable pour son collègue de Jonquière.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. HARVEY (Jonquière): Probablement, M. le Président, que le député des Iles-de-la-Madeleine est conscient que, depuis six mois, avec tous les problèmes de Saint-Jean-Vianney, les 15 livres du député de Jonquière reviendront rapidement lorsqu'il retournera au Revenu.

M. LE PRESIDENT: L'incident est clos. Le député de Beauce.

Commission des Finances

M. ROY (Beauce): M. le Président, je ne voudrais pas faire maigrir le ministre des Finances, mais j'aurais tout de même deux questions à lui poser qui font suite aux déclarations qu'il a faites hier en Chambre, concernant la conférence des ministres des Finances qui a eu lieu à Ottawa lundi et mardi derniers.

Comme le Québec entend faire connaître ses positions en matière fiscale vers la fin de novembre ou au début de décembre, est-ce l'intention du ministre de convoquer la commission parlementaire des Finances avant la tenue de ces assises?

M. GARNEAU: Non.

M. ROY (Beauce): M. le Président, le ministre conserve ses habitudes. J'ai une question supplémentaire. Il est à peu près impossible d'avoir des réponses positives.

M. TESSIER: Comment? Il y a $50 millions.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. TESSIER: Non, c'est très positif.

M. ROY (Beauce): Ce sont des réponses négatives, M. le Président. Sur les $50 millions — je m'adresse au ministre des Affaires municipales — il a déclaré qu'à peu près $20 millions seraient consacrés au Québec. Comme les limites, d'après ce que nous a déclaré le ministre hier, sont d'un demi-million de dollars par projet et que ceci pourrait constituer à peu près un maximum de 40 à 50 projets pour les 1,585 municipalités du Québec,...

M. LE PRESIDENT: Question, s'il vous plaît.

M. ROY (Beauce): ... qu'est-ce que le gouvernement entend proposer, pour les projets acceptables, pour les autres municipalités, une fois les $20 millions écoulés?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que cette question a reçu une réponse hier. Hier, j'ai permis une demi-heure, soit toute la période des questions, sur ce sujet. Je me rappelle très bien que le ministre des Affaires municipales a élaboré très longuement en réponse à ces questions: Quels seraient les projets et les critères considérés?

Je ne pourrai pas permettre de nouveau cette question.

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'ai ici tout ce qu'a déclaré hier le ministre des Affaires municipales; il n'y a rien sur la question que je pose présentement, et c'est pourquoi je voudrais que le ministre donne plus de précisions. Des municipalités vont soumettre des projets et j'aimerais savoir ce que le gouvernement entend proposer pour les projets qui vont satisfaire aux normes et exigences du gouvernement et que celui-ci ne pourra pas accepter du fait que les $20 millions seront écoulés.

J'aimerais savoir du ministre ce que le gouvernement entend faire au sujet de ces projets-là.

M. TESSIER: M. le Président, j'ai répondu hier à cette question; j'ai donné toutes les explications et j'inviterais le député de Beauce à lire le journal des Débats.

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une autre question supplémentaire. Le ministre a déclaré hier également, je l'ai lu,...

M. LE PRESIDENT: Question.

M. ROY (Beauce): ... avoir fait parvenir 1,585 lettres aux municipalités. Est-ce qu'on pourrait demander au ministre de nous faire parvenir copie de ces lettres, à tous les députés de cette Chambre, de façon que nous ayons, nous aussi, les renseignements et les informations dont nous avons besoin?

M. TESSIER: M. le Président, le député de Beauce pourra se procurer une copie de la lettre que j'ai envoyée d'un des maires de son comté.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. RUSSELL: Question supplémentaire.

M. LE PRESIDENT: Question supplémentaire? L'honorable député de Shefford.

M. RUSSELL: M. le Président, faisant suite à la question du député de Beauce, étant donné que le ministre des Finances revient de cette conférence fédérale-provinciale — s'il ne peut pas répondre, peut-être que le premier ministre, étant un économiste, pourra le faire et expliquer la politique de son gouvernement — est-ce que le ministre des Finances ou le premier ministre serait en mesure d'informer cette Chambre des politiques qu'ils ont l'intention d'instaurer à la suite de cette conférence fédérale-provinciale pour alléger le fardeau des contribuables du Québec et relancer l'économie, comme l'a fait l'Ontario?

M. LE PRESIDENT: On y a répondu hier, je crois.

DES VOIX: Non, non.

M. GARNEAU: M. le Président, j'ai répondu hier à cette question. Justement, je vous ai fait parvenir un mot pour vous demander de revenir, tout à l'heure, sur une question de privilège, avant l'appel de l'ordre du jour. En relisant le journal des Débats, je me suis aperçu que j'avais répondu à cette question. Je voudrais corriger une erreur qui s'est glissée dans le compte rendu d'un journal.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Réforme des districts électoraux

M. LAURIN: Ma question s'adresse au premier ministre. Le premier ministre pourrait-il nous informer de la progression des travaux entrepris par la commission permanente de la réforme des districts électoraux? Deuxièmement, pourrait-il nous dire quand la commission de la réforme électorale entreprendra d'autres travaux sur le financement des partis politiques, la carte d'identité électorale, la liste permanente et autres sujets qu'il avait lui-même voulu soumettre à l'attention de cette commission?

M. BOURASSA: M. le Président, quant à la première partie de la question du député de Bourget, je vais m'informer cet après-midi pour ce qui a trait aux travaux sur les districts électoraux.

Quant à la deuxième partie de la question, je n'ai pas d'objection à ce que la commission sur la réforme électorale se réunisse de nouveau pour discuter de différentes questions, dont les sondages. Je pense que le chef de l'Opposition officielle a déclaré il y a quelques jours qu'il voulait qu'un sondage soit examiné en particulier. Il aura l'occasion de soumettre sa proposition à cette commission. Il y a également la formation d'un comité pour examiner le vote proportionnel.

Je comprends que le chef du Parti québécois ne soit pas d'accord avec le député de Bourget puisqu'il croit que nous devons nous imposer un délai de réflexion...

M. LAURIN: Ce n'était pas inclus dans ma question, M. le premier ministre. Je voudrais que vous vous en teniez aux faits.

M. BOURASSA: C'est parce qu'il y a tellement de division actuellement dans le Parti québécois.

M. LAURIN: Ce n'est pas un commentaire électoral que je vous ai demandé.

M. BOURASSA: Justement, en voyant le député de Maisonneuve s'asseoir aujourd'hui, cela me fait penser à une autre division dans le parti.

Je pourrai dire au député de Bourget que, personnellement, je n'ai pas d'objection... Je

pourrai en discuter avec les autres chefs de parti afin que nous convoquions la commission d'ici deux semaines.

M. LAURIN: Question additionnelle, M. le Président. C'est que dans l'échéancier que vous aviez soumis il y a encore beaucoup de travail. Le temps file — 18 mois— et il y a beaucoup d'autres commissions. J'espère que le leader parlementaire pourra nous annoncer très bientôt quand pourra siéger cette commission la prochaine fois.

M. BOURASSA: Nous allons examiner l'horaire. Comme vient de le signaler le député, il y a un très grand nombre de commissions qui siègent et qui doivent siéger, mais nous allons essayer de trouver un moment pour faire siéger celle-ci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.

Budget supplémentaire

M. VINCENT: Ma question s'adresse au ministre des Finances. Le ministre des Finances peut-il nous dire si un budget supplémentaire sera présenté au cours des prochaines semaines? Si oui, à quelle date ce budget supplémentaire sera-t-il présenté?

M. GARNEAU: M. le Président, je répondrai par l'affirmative. Pour ce qui est de la date, j'imagine que ce sera vers la fin du mois de novembre ou au début de décembre, disons vers les derniers jours de la session, probablement. Mais la date n'est pas encore arrêtée.

M. VINCENT: M. le Président, question supplémentaire. Si ce budget est présenté à la fin de novembre ou au début de décembre, de quelle façon le ministre de l'Agriculture a-t-il l'intention de verser aux producteurs à la mi-novembre comme il l'a déclaré, le montant de $5 millions qu'il a annoncé mardi de cette semaine?

M. GARNEAU: M. le Président, pour le début du paiement des subventions, il y a des sommes dans les catégories "subventions" qui ne sont pas encore engagées au ministère de l'Agriculture, et nous allons évidemment utiliser le fonds de secours pour le début des paiements. La raison pour laquelle je présenterais le budget vers la fin de novembre, c'est que je voudrais avoir le temps de faire l'inventaire à chacun des postes budgétaires dans les ministères pour ne pas être obligé de revenir avec des pécadilles lorsqu'il y a eu des dépassements soit pour des augmentations de taux, etc., ou de mauvaises prévisions à un poste budgétaire. C'est la raison pour laquelle je voudrais le retarder autant que possible, mais cela ne retardera certainement pas le paiement aux cultivateurs.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

Manifestations syndicales

M. AUDET: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Le député des Iles-de-la-Madeleine n'a pas eu l'avantage d'avoir une réponse, mais ma question est un peu différente de la sienne. Donc, j'aurai peut-être l'avantage d'avoir une réponse.

Après les émeutes que nous avons vues dernièrement à Montréal, lors d'une manifestation illégale, votre ministère a-t-il l'intention de reconnaître comme responsables, et à leur faire porter la responsabilité des désordres encourus lors de cette manifestation, les différents organismes ou syndicats en cause et de leur en faire payer la note?

M. CHOQUETTE: M. le Président, le député d'Abitibi-Ouest semble faire allusion à la Loi anti-casseurs — il y a une loi française qui s'appelle la Loi anti-casseurs — qui sera une des alternatives que nous examinerons à la lumière de la situation actuelle parmi les mesures qui devront être adoptées pour que la liberté s'exerce dans la légalité.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.

Mises à pied en Mauricie

M. DEMERS: Ma question s'adresserait au ministre du Travail, mais en son absence je la pose au premier ministre. C'est au sujet de la mise à pied, qui a été confirmée hier soir lors d'une conférence de presse de la compagnie Gulf Oil à Shawinigan, de 550 employés. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire ou s'informer si la négociation et les offres proposées par les gens de la compagnie ont été faites avec la collaboration du ministère du Travail, et s'il y a des moyens de compenser la perte que nous subirons actuellement à Shawinigan et, si je remonte un peu plus haut, à la ville de Trois-Rivières où 850 employés de la Domtar seront mis à pied au début de l'an prochain?

M.BOURASSA: Pour la Domtar, je pense que le chiffre n'est pas encore définitif. Des discussions se poursuivent. C'est au début d'avril, ce n'est pas la semaine prochaine. Pour ce qui est de la Gulf Oil, je vais transmettre la question au ministre du Travail qui, actuellement, consacre toutes ses énergies au règlement du conflit de la Presse; c'est la raison pour laquelle il a été absent de la Chambre cette semaine.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.

Bilan des centrales syndicales

M. BOIS: Ma question s'adresse à l'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives. Est-ce que l'honorable ministre pourrait me dire si la province exige le dépôt d'un bilan des opérations des grandes centrales ouvrières? Dans l'affirmative, est-ce que, dans ces bilans, on autorise l'usage de fonds spéciaux permettant à quelques officiers supérieurs de ces centrales de faire des investissements servant à des démonstrations antidémocratiques?

M. TETLEY: Je crois que la réponse est non, parce que je crois que personne n'a le droit de faire des actes antidémocratiques. Je vais faire enquête. Vous avez un cas spécial à l'esprit, et avec les détails que vous allez me fournir, j'espère pouvoir répondre à votre question demain ou mardi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.

Véhicules de l'armée canadienne

M. BURNS: Ma question s'adresse au ministre de la Justice et concerne une apparente violation du code de la route par les autorités fédérales. Depuis quelque temps, on se rend compte que, dans la province, les véhicules de l'armée canadienne, y compris les automobiles, se promènent avec des plaques du Canada et non pas avec des plaques d'immatriculation du Québec. Ma question au ministre est de savoir si son ministère a étudié la légalité ou l'illégalité de cette attitude des autorités fédérales, et, si oui, ce qu'il entend faire.

M. CHOQUETTE: Je prends avis de la question.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Shefford.

Relance de l'économie du Québec

M. RUSSELL: Ma question s'adresse au premier ministre. Vu le manque d'intérêt ou de souci du gouvernement fédéral au relancement économique du Québec, est-ce que le gouvernement du Québec a l'intention de suivre l'exemple de l'Ontario et utiliser ses propres politiques pour relancer l'économie du Québec, et si tels sont ses désirs, quels sont-ils?

M. BOURASSA: On a déjà répondu. D'ailleurs, c'est déjà fait. Nous avons appliqué une série de politiques, et ce serait prolonger... Si on a eu l'occasion ou si on a essayé de faire porter un débat sur cette question-là, nous avons énuméré à de très nombreuses reprises toutes les mesures qui ont été votées soit sur le plan législatif et sur le plan administratif. La ques- tion du député voudrait tout simplement nous inciter à répéter soit ce que le ministre des Finances ou le ministre de l'Industrie et du Commerce ou moi-même avons dit, et de révéler que notre performance au Québec est cinq fois supérieure à celle de l'ancien gouvernement.

UNE VOIX: II y a eu 105 faillites en septembre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A la suite de la réponse du premier ministre, je désirerais poser une question au ministre de l'Education. On a parlé de mesures en vue de relancer l'économie et de faire face au chômage d'hiver. Quelles sont les décisions qui ont été prises par le ministère de l'Education avec le gouvernement central en ce qui concerne les programmes "Perspectives-Jeunesse" qui doivent être mis en application au cours de l'hiver?

M. SAINT-PIERRE: Des rencontres sont prévues avec les autorités du gouvernement fédéral la semaine prochaine et dans les dix prochains jours. Dès qu'on aura des nouvelles, il me fera plaisir d'annoncer les grandes lignes de ceci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre pourrait nous dire quel est le montant approximatif que le gouvernement central doit mettre à la disposition du gouvernement du Québec, et qui décidera dans les circonstances?

M. SAINT-PIERRE: Je pense qu'il n'y a rien de décidé, M. le Président, et sur les montants et sur les mécanismes qui pourraient nous assurer qu'il n'y aura aucun dédoublement sur le plan des fonctions et qu'il y aura effectivement, complémentarité, comme je l'ai déjà déclaré.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, question additionnelle au ministre. Est-ce que la politique qu'on appliquera en l'espèce sera la même que celle qu'on a appliquée dans le domaine des subventions aux organismes de loisir et qui a fait l'objet d'une question qui n'a pas encore reçu de réponse?

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances m'a donné un préavis qu'il entendait soulever une question de privilège.

Question de privilège Article du Soleil

M. GARNEAU: M. le Président, c'est uniquement pour corriger une erreur qui s'est glissée dans un reportage du journal Le Soleil, sous la signature de M. Jean-Claude Picard. Je rapporte le libellé du journal: "Le ministre a précisé que le gouvernement fédéral versera

environ $20 millions aux municipalités québécoises en vertu de ce programme et, en sus de cette somme, $25 millions seront versés à des groupes populaires qui soumettront des projets et $62 millions seront consentis sous forme de prêts aux municipalités." J'ai relevé le journal des Débats d'hier pour voir si je n'avais pas commis une erreur dans mes explications. Je dois dire que je n'ai pas retrouvé de tels propos. Je voudrais bien le souligner parce que, déjà, des municipalités ont commencé à téléphoner au ministère des Affaires municipales pour demander si c'étaient là des informations précises et elles voulaient avoir des prêts.

Je voudrais indiquer de nouveau ce que j'ai dit hier au cours du débat. C'est que les $62 millions de la caisse d'aide conjoncturelle sont à la disposition du gouvernement du Québec pour entreprendre des travaux à travers la province. Ils ne seront pas utilisés à titre de montants pour faire des prêts additionnels aux municipalités. Je voulais que ce soit bien expliqué pour que les municipalités ne soient pas induites en erreur. Je pense bien que l'erreur s'est glissée de façon involontaire. Je voulais la corriger.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. LEVESQUE: Article 5.

M. CARDINAL: Avant-hier, j'interrogeais le ministre de la Justice au sujet de l'article 5 sur sa notion juridique du viol. Alors, je voudrais revenir, avec la permission de la présidence, sur cette question.

Projet de loi no 83 Comité plénier

M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre!

L'honorable député de Bagot.

M. CARDINAL: Bon, c'est parce que je voulais permettre au ministre de retrouver l'article 5 dans son projet de loi. L'article 5, dans le projet de loi, réfère à une indemnité accordée à un enfant ou à la mère d'un enfant qui serait né à la suite d'un viol. J'ai souligné, à la dernière séance de ce comité plénier, que le viol était dans notre système juridique une notion criminelle. D'ailleurs, le projet de loi no 83 porte comme titre: Indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le ministre a semblé — je l'ai peut-être mal saisi, nous étions en fin de soirée — soumettre que, même s'il n'y avait pas de preuve criminelle qu'il y avait eu viol, il pourrait y avoir, à la suite de certaines présomptions — je ne sais pas si elles seraient juris et de jure ou juris tantum — possibilité d'indemnité.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! M. CARDINAL: C'est parce qu'ils ne savent pas de quoi nous parlons là. Merci, M. le Président. Ceci m'a surpris beaucoup parce qu'évidemment, nous aurions, à ce moment-là, deux notions de cet acte criminel.

L'une qui viendrait du droit criminel et qui exige une preuve très circonstanciée et une autre qui viendrait d'une loi provinciale et qui n'est pas indiquée dans l'article 5, à ce que je sache, qui ne se réfère qu'au mot viol tout simplement. Le ministre pourrait-il être plus explicite, à la suite de cette question qui s'est posée mardi soir, si je ne me trompe, vers dix heures moins cinq?

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ai à soumettre à la Chambre un amendement à l'article 5 tel que proposé, qui permettra, je le pense, de clarifier la question de l'indemnité payable à la mère d'un enfant né d'un viol ou à la personne qui tient lieu de mère pour un enfant né d'un tel viol.

Je vous soumets donc l'amendement en question. L'article 5, dans la forme que je propose que nous l'adoptions, se lirait comme suit: "II peut en outre être accordé à la mère qui pourvoit elle-même à l'entretien d'un enfant né par suite d'un viol, pour l'entretien de cet enfant, une rente mensuelle égale à la rente accordée suivant la Loi des accidents du travail à une veuve ayant un enfant. Si la mère décède, la rente peut être accordée à toute personne compétente qui s'est constituée la mère adoptive de cet enfant et qui en prend soin, à la satisfaction de la commission".

L'objet de l'amendement, ou du moins de la nouvelle rédaction de l'article 5, est de clarifier la question du barème de l'indemnité dans un tel cas.

M. CARDINAL: M. le Président, ma première remarque, c'est que l'amendement proposé, me satisfait personnellement, c'est-à-dire que je le préfère au texte actuel quant à l'indemnité. Ce que le ministre vient de proposer — pour que ceci soit très clair au journal des Débats — c'est que le deuxième alinéa de l'article 5 du projet tel que déposé soit remplacé par le texte qu'il vient de nous lire et qui se rapporte à l'établissement du quantum de l'indemnité dans le cas d'une mère ou d'un enfant.

Mais ceci ne répond pas à la question que j'ai posée, puisque le premier paragraphe demeure ce qu'il est et le deuxième paragraphe répète: "II peut en outre être accordé à la mère qui pourvoit elle-même à l'entretien d'un enfant né par suite d'un viol,...". Nous avons encore le même mot et nous sommes encore devant la même question de preuve. J'espère être assez clair.

M. CHOQUETTE: Vous pouvez toujours être plus clair.

M. CARDINAL: Oui. Justement, je poserai la question d'une façon très brève: Faudra-t-il

une condamnation pour viol pour que cet article 5, deuxième alinéa, s'applique?

M. CHOQUETTE: Non.

M. CARDINAL: Alors là, je ne comprends plus.

M. CHOQUETTE: Non, parce que le projet de loi dit que, s'il y a condamnation pour un acte criminel, celle-ci constituera, aux yeux de la Commission des accidents du travail, une preuve définitive de la commission d'un tel crime. Ceci règle le cas où il y a eu des procédures criminelles qui se sont terminées par une condamnation.

Mais il peut y avoir des cas où il n'y aura pas de condamnation. Il peut y avoir des crimes, par exemple, où l'on ne retrace pas celui qui est l'auteur du viol. Mais, pourtant, il y a bel et bien eu viol. Alors ceci n'empêchera pas la commission, dans ces circonstances ou dans d'autres circonstances similaires, d'accorder une indemnité tout comme si le crime avait été prouvé devant un tribunal criminel.

M. CARDINAL: La réponse du ministre, cette fois-ci, est beaucoup plus claire que celle de mardi passé.

M. CHOQUETTE: Je devais être fatigué.

M. CARDINAL: La question était peut-être plus claire. Si je l'interprète, il veut dire que, par exemple, si une décision d'un coroner établit qu'il y a eu viol, même si on ne peut jamais en retracer l'auteur, la loi s'appliquera.

M. CHOQUETTE: Je regrette mais, évidemment, il faut prendre en considération le fait que le député de Bagot est notaire et non pas avocat. Il pense que les coroners font enquête sur les viols, ce qui, je pense, aux yeux du député de Maskinongé, serait une hérésie juridique.

M. CARDINAL: Pardon, M. le Président.

M. PAUL: Je vous en trouverai une hérésie juridique quand mon collègue aura terminé.

M. CARDINAL: D'abord, je rappellerai au député d'Outremont que...

M. CHOQUETTE: C'est le commissariat des incendies qui fait enquête sur les viols!

M. CARDINAL: C'est comme lorsqu'on enregistrait les volumes d'affaires culturelles au ministère de l'Agriculture. Je n'ai pas commis d'hérésie juridique. Je parlais d'un cas de mort violente, par exemple, d'une mère, enfin d'une personne qui aurait été violée, etc. Je prenais cet exemple pour dire qu'il peut y en avoir d'autres.

Il peut y avoir ce que j'appellerais une expertise médicale en dehors de toute autopsie, quand il n'y a pas de décès, — il est évident qu'on ne peut pas autopsier une personne qui vit et qui a été victime d'un viol — qui établirait qu'il y eut viol. Cette preuve sera admise. Est-ce que dans la loi — je pense que ce sont des articles qui viennent plus loin, 10 et suivants — c'est suffisamment clair pour que l'affirmation du ministre, affirmation que j'accepte, ne soit pas sujette à une interprétation délicate, par la suite, des tribunaux ou de la Commission des accidents du travail?

M. PAUL: M. le Président, je regrette d'être dans l'obligation de condamner temporairement le texte de l'amendement que nous propose le ministre. Je dis bien, temporairement, ou du moins jusqu'à ce que le ministre nous ait fourni la justification de l'emploi des termes qu'on y retrouve, dans l'article 5, tel qu'il est mentionné à l'amendement qu'on vient de nous distribuer.

On y lit, vers le milieu du paragraphe, les mots suivants: "Si la mère décède, la rente peut être accordée à toute personne compétente qui s'est constituée la mère adoptive". Je dis que c'est une hérésie légale, parce qu'en vertu du bill 12, seul un juge de la cour du Bien-Etre social peut constituer une personne mère adoptive de l'enfant. Et, par conséquent, quand le ministre nous invite à consacrer le pouvoir que pourrait se donner une personne de se constituer mère adoptive, c'est une invitation malheureuse et inacceptable parce qu'on ne peut pas, par ces mots, mettre de côté un texte de loi et des dispositions législatives bien précises et déterminées qu'on retrouve dans la Loi de l'adoption.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposons. Nous ne pouvons tolérer une telle initiative de la part du ministre qui, d'un revers de la main, met de côté une loi qui a été adoptée par cette Chambre, après que la commission que présidait mon honorable ami et collègue, député de Montmagny, à la suite de plusieurs représentations pour trouver une loi acceptable en matière d'adoption... je dis que nous ne pouvons pas, dans un texte de loi, amender indirectement la Loi de l'adoption et dire qu'une personne pourra maintenant, nonobstant tout le mécanisme prévu au bill 12, se constituer mère adoptive d'un enfant.

Même la mère naturelle est obligée de se conformer à certaines formalités dont, entre autres, l'enquête par une agence sociale, un consentement de la part de la mère, une lettre de recommandation du curé de la paroisse et d'autres formalités que je n'ai pas l'intention de récapituler cet après-midi.

Dans les circonstances, nous nous inscrivons en faux contre le texte de l'amendement proposé par le ministre.

M.. CHOQUETTE: Je dois dire que je partage l'avis du député de Maskinongé. Le texte qui

était suggéré suivait la phraséologie d'un article qui se rapproche de la situation décrite dans ce paragraphe, je veux dire, la phraséologie d'un article de la Loi des accidents du travail. Mais, comme lui, je trouve que l'allusion à une mère qui se constitue mère adoptive d'un enfant semble assez équivoque en droit.

Je suggère que le texte de la dernière phrase se lise comme suit: "Si la mère décède, la rente peut être accordée à toute personne compétente qui prend soin de cet enfant, à la satisfaction de la commission".

M. PAUL: Oui, alors à ce moment-là vous n'y attachez pas nécessairement le caractère ou l'acte légal de l'adoption.

M. CHOQUETTE: Exactement.

M. PAUL: A ce compte-là, très bien.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Alors on retranche les mots "qui s'est constituée la mère adoptive".

M. CHOQUETTE : Oui et on ajoute "prend soin de cet enfant à la satisfaction de la commission".

M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, la réponse que le ministre de la Justice a donnée au député de Bagot tantôt relativement au cas précis de viol et qui pourrait présumément s'appliquer également à tous les autres cas de crime — peut-être que le problème aurait pu être discuté au niveau de l'article 3 quand le problème se posait lui-même — pose à mon avis un problème de preuve.

Alors, si j'ai bien compris ce que le ministre a dit tantôt, s'il y a preuve devant les tribunaux réguliers d'un acte criminel commis, exemple le viol en ce qui nous concernait, la preuve déposée devant le tribunal compétent servirait à établir la qualification en vertu de cette loi d'indemnisation. Mais, a-t-il dit, si on ne retrouve pas le coupable ou si pour une raison ou pour une autre on n'a pas de condamnation devant les tribunaux, il a dit qu'à ce moment-là il reviendrait à la Commission des accidents du travail de déterminer s'il s'agit bien d'un cas où la personne peut être couverte par la loi.

Alors je me demande quelle genre de preuve la Commission des accidents du travail devra utiliser. Est-ce que c'est la loi de la preuve devant les tribunaux criminels, c'est-à-dire hors de tout doute raisonnable, ou bien est-ce que ce sera la preuve ou la prépondérance de preuve? Soit dit en passant, actuellement, sauf erreur, la Commission des accidents du travail utilise un genre de preuve qui est même encore moins exigeant que la preuve devant les tribunaux civils, c'est-à-dire celle de la prépondérance de preuve.

J'ai eu connaissance de cas personnellement où la Commission des accidents du travail utilise de simples présomptions, comme faisant foi de l'existence d'un accident de travail. Evidemment, il faut le lire maintenant dans l'optique de l'existence d'un crime. Le projet de loi, à ma connaissance, ne dit pas quel genre de preuve devrait être utilisé par la Commission des accidents du travail; si ce sont des tribunaux réguliers on sait déjà quel genre de preuve ils vont utiliser. C'est la question que je me pose à ce stade-ci. Est-ce que le ministre peut me répondre?

M. CHOQUETTE: Je crois que la question du député de Maisonneuve est très pertinente. J'attire son attention sur le deuxième alinéa de l'article 13, qui se lit comme suit: "Toutes les dispositions de la Loi des accidents du travail non incompatibles avec la présente loi s'appliquent mutatis mutandis". Maintenant, je renvoie le député à l'article 59, paragraphe 4, de la Loi des accidents du travail, qui se lit comme suit: "La commission rend ses décisions suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas, et elle n'est pas tenue de suivre les règles ordinaires de la preuve en matière civile; elle peut, par tous les moyens légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières qui lui sont attribuées. Ses décisions doivent être motivées."

C'est donc dire que la preuve exigée devant la Commission des accidents du travail, même au cas où on ne trouverait pas un criminel et que par conséquent on n'aurait pas pu lui faire un procès criminel, sera nettement moins exigeante que la preuve requise devant le tribunal criminel, où on sait que le fardeau de la preuve incombe à la poursuite et l'accusé a le bénéfice du doute. C'est la raison pour laquelle il peut se produire des situations où, même après un acquittement au criminel, en vertu des règles plus souples de la preuve applicables devant la Commission des accidents du travail, on prouve néanmoins la commission d'un crime et ça donne l'ouverture à une indemnité en faveur d'un réclamant.

C'est donc dire que nous sommes larges dans la façon d'envisager la preuve de la commission d'un crime, lorsqu'il s'agit de donner une indemnité à un réclamant.

M. BURNS: Ce qui veut dire, d'après la réponse du ministre, que l'article 60 de la Loi des accidents du travail s'appliquerait probablement aussi, c'est-à-dire celui qui donne à la commission le droit d'assigner des témoins pour les fins de la Loi des accidents du travail. De par la réponse, c'était une autre des questions que je me posais. Si, mutatis mutandis, l'article 60 doit s'appliquer à cette loi-là, ils auraient aussi le droit, je présume, d'assigner des témoins.

Je ne fais pas cela pour embêter le ministre. Ce sont des questions que je me pose vis-à-vis de choses que je trouve peut-être un peu incohérentes parce qu'on a affaire à deux domaines de droit tout à fait différents: le droit criminel et

le droit du travail ou un droit administratif qui est beaucoup moins formaliste. Je me demande si, avec cela, on ne peut pas trouver une situation où les droits de quelqu'un qui est accusé devant les tribunaux ne pourraient pas être brimés, c'est-à-dire le fait qu'un accusé ne soit pas contraignable en matière criminelle alors qu'il pourrait l'être en vertu de l'article 60.

Je m'excuse. Vous allez voir exactement où j'en viens avec tout cela. Au fond, je me dis que cela repose toute la question qui a été discutée par le député de Bourget et certains autres membres de cette Chambre au niveau de l'article 3. Je ne veux pas faire d'accroc à la procédure, je n'étais pas là à ce moment-là pour en discuter, mais l'article 3, quand il parle de commission d'acte ou d'infraction criminelle, au fond, c'est lui qui crée cette ambiguïté. On s'en rend compte immédiatement à ce moment-ci.

Est-ce que le ministre ne voit pas de contradiction dans ces diverses approches? Si on dit, d'une part, qu'il s'agit d'un tribunal administratif, qu'il jugera selon les règles de l'équité et de la bonne conscience de la commission d'un acte criminel; si on voit également les possibilités corollaires d'assigner devant ce tribunal quelqu'un qui n'est peut-être pas encore mis en accusation devant les tribunaux mais qui pourrait peut-être éventuellement l'être, est-ce qu'on ne déroge pas au droit de tout individu éventuellement de ne pas témoigner dans sa propre cause?

M. CHOQUETTE: Si on veut mettre le débat à ce niveau-là, même dans l'état actuel des choses, si un crime se commet et que la victime intente une action civile, en tenant pour acquis que la cause civile soit appelée la première, avant la cause criminelle, évidemment, je pense bien que l'accusé serait un témoin contraignable parce qu'on serait dans un débat civil. Maintenant, il va de soi que l'accusé a comme moyen de ne pas s'incriminer et de demander la protection de la cour. C'est une règle habituellement observée.

M. PAUL: II y a une autre règle. M. CHOQUETTE: Laquelle?

M. PAUL: Le criminel ne tient pas le civil en état.

M. BURNS: C'est cela.

M. PAUL: L'inverse. Le criminel ne tient pas le civil en état.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BERTRAND: Le civil peut être entendu...

M. CHOQUETTE: C'est cela.

M. BERTRAND: ... indépendamment du criminel.

M. CHOQUETTE: Oui. Donc, je trouve que l'objection que fait le député de Maisonneuve n'est pas très forte. Je ne vois pas en quoi le fait que les règles soient applicables au civil et au criminel ou dans le droit administratif par rapport au droit criminel est un obstacle, en somme, à ce que les deux formes de litiges procèdent chacune de leur côté.

J'ajouterai ceci. Il va de soi que lorsqu'une accusation est portée au criminel contre un individu à la suite d'un crime, si une réclamation devait être faite à la Commission des accidents du travail par une victime, en vertu du projet soumis, la commission a le droit de remettre son adjudication jusqu'à ce qu'il y ait jugement final au criminel. S'il y a une adjudication, par exemple, de culpabilité au criminel, cela vient automatiquement de régler le problème de la preuve devant la Commission des accidents du travail.

Nous proposons également un amendement — qui sera l'article 14 et s'insérera après l'article 13 du projet — qui permettrait à la commission de faire des versements en anticipation d'une décision à être rendue lorsqu'elle a toutes les indications, de prime abord, qu'il y a eu commission d'un crime au sens de la loi 83.

Ce sont donc des paiements qui seraient faits en attendant qu'une décision définitive ait été rendue. Alors, je ne sais pas si j'ai répondu à la question du député sur un point.

Il soulève la question de l'article 3 également, il revient à l'article 3.

M. BURNS: Je m'en excuse, je ne voulais pas passer à côté des règles.

M. CHOQUETTE: Non, non.

M. BURNS: C'est un problème et c'est le problème central, en fait. Je ne sais pas si le comité avait été d'accord pour étendre les règles de la discussion, mais je pense que le problème qu'a soulevé le député de Bagot relativement au problème de preuve en matière de viol, au fond, soulève le problème de la preuve et le ministre m'a répondu quant aux divers points de vue sur la preuve. Je l'en remercie.

Maintenant, si je fais le résumé de ce qu'il vient de me dire, c'est-à-dire qu'il y a possibilité que la preuve utilisée soit la preuve devant les tribunaux s'il y a condamnation, que ce soit, d'autre part, une preuve qui est faite devant la Commission des accidents du travail, j'en conviens. Je pose la dernière question, pour fermer la boucle. Est-ce que, dans l'éventualité où un accusé devant les tribunaux réguliers serait acquitté, le texte de loi, selon lui, permet à la Commission des accidents du travail quand même d'accorder une indemnisation à une victime?

M. CHOQUETTE: La réponse est catégoriquement affirmative.

M. BURNS: Bon alors, je suis entièrement d'accord sur ça. C'était d'ailleurs l'intention et du député de Bourget et de moi-même, quand nous avons soulevé ce problème-là, et c'est ça qui malheureusement m'amène à discuter — je fais attention, M. le Président, pour respecter les règles — de l'article 3. A l'article 3, on ajoute une notion qui, comme l'a dit d'ailleurs le ministre de la Justice, et je suis entièrement d'accord avec lui, est tout à fait conforme à la recommandation de la commission sur l'uniformisation des législations mais qui, d'autre part — je ne sais pas si le ministre l'a remarqué — n'est pas du tout conforme à trois autres lois qui existent actuellement au Canada, sur cette matière là. Je réfère le ministre en particulier à l'article 8 de la même loi en Saskatchewan, à l'article 6 de la même loi au Manitoba et à l'article 7 de la même loi en Alberta, où vous n'avez pas cette référence à la commission d'un acte, c'est-à-dire que c'est un acte criminel qui... je peux — M. le Président est très indulgent à mon égard — référer entre autres, les trois textes étant identiques ou à peu près, à l'article 7 de la loi de l'Alberta qui se lit comme suit: "Where a person is injured or killed and the injury or death a) is in direct result of an act or omission of another person that occurred in Alberta and is within the description of any of the criminal offenses set out in the schedule."

Vous voyez que le critère, au fond, c'est une personne blessée ou tuée mais à la suite, non pas d'un crime comme tel, de la commission d'un crime, mais à la suite d'un acte que l'on retrouve dans l'annexe. C'est un peu le sens qu'a voulu donner à ce problème le député de Bourget quand il en a discuté.

C'est-à-dire nous voulions que, justement, ce que le ministre de la Justice dit qui se fera en pratique soit aussi confirmé par le texte de loi. C'est aussi pour éviter toute ambiguité future lorsqu'un des cas extrêmes se présentera, c'est-à-dire quelqu'un est blessé ou tué à la suite d'un acte criminel, l'accusé est amené devant les tribunaux réguliers mais acquitté. Alors, la Commission des accidents du travail sera peut-être en droit de se poser... même si, au sens de la loi, il y a commission d'un acte ou comme le dit l'article 3: "...se produisant à l'occasion ou résultant directement de la perpétration d'une infraction."

M. BLANK: C'est-à-dire que vous voulez changer le mot "infraction" pour le mot "acte".

M. CHOQUETTE: Voici...

M. BURNS: Selon nous, si nous nous arrêtons à ce point-là, ce qui respecterait totalement ce que le ministre de la Justice vient de nous dire, et encore une fois, je suis entièrement d'accord avec lui que ce soit appliqué comme ça dans les faits, ce serait d'enlever, à l'article 3a), les mots "et se produisant à l'occasion ou résultant directement de la perpétration d'une infraction."

Ce qui ferait que le texte se lirait comme suit: "En raison d'un acte ou d'une omission d'une autre personne dont la description correspond aux actes criminels énoncés à l'annexe de la présente loi". Ce qui remet tout en question le problème de l'actus reus et du mens rea. Je soumets ces remarques au ministre. J'ai comparé ce texte à une des lois qui est en vigueur actuellement: celle de 1'Alberta. Le ministre verra que c'est la même loi qu'on retrouve dans celle de la Saskatchewan à l'article 8, et également la même loi que l'on retrouve dans celle du Manitoba à l'article 6. Je cite l'article 6, paragraphe 1: "Where a person is injured or killed and the injury or death (a) was caused by any act or omission of another person that occured in Manitoba and is within the description of any of the criminal offenses set out in this schedule".

Evidemment, on s'y est penché et, encore une fois, je suis d'accord avec la réponse que le ministre nous a donnée l'autre jour à savoir que son texte ou le texte qu'il propose est tout à fait conforme à la suggestion de la commission pour l'uniformisation de la législation au Canada sauf qu'elle n'est pas conforme à la législation qui existe.

Je fais ces remarques à tout hasard parce que la discussion de ce bill-là n'est pas terminée. Peut-être que le ministre de la Justice voudra bien se pencher sur ce problème qui a déjà été discuté au niveau de l'article 3. A mon humble avis, si je tiens compte de l'existence de ce texte que je viens de signaler, à l'article 3 dans notre projet de loi, si je tiens également compte de la façon dont le ministre de la Justice interprète la mise en application de ce projet de loi, je pense qu'il serait infiniment préférable qu'on revienne à une forme de texte semblable à celui du Manitoba, de la Saskatchewan ou de l'Alberta.

M. CHOQUETTE: J'ai écouté les remarques du député de Maisonneuve qui font suite au plaidoyer du député de Bourget il y a quelques jours sur le même article 3 a). Je comprends le point de vue qu'ils expriment et je ne peux pas partager leur pensée.

Je pense que le projet des commissaires à l'uniformisation des lois est plus adéquat que le texte des lois de l'Alberta et de la Saskatchewan que nous a lu le député de Maisonneuve.

Je crois que le texte suggéré par les commissaires tient compte plus adéquatement du fait qu'il ne s'agit pas d'indemniser quelqu'un pour un acte qui est commis sans intention criminelle, pour certains actes qui ne comportent pas de mens rea ou pour lesquels il n'y a pas de mens rea de la part de la personne qui les commet. Cette personne ne serait pas susceptible d'être indemnisée, en vertu de notre texte de loi. Je vais essayer de donner un exemple. Donnons l'exemple de l'article 244: voies de fait avec une automobile. Je suis à la conduite

de mon automobile. Je rencontre le député de Maisonneuve qui traverse la rue. Je regarde de côté et, par négligence, je frappe le député de Maisonneuve. Par conséquent, il va de soi que cet acte ne saurait tomber sous le coup du bill 83 parce que je n'avais aucune intention de commettre des voies de fait à l'égard du député de Maisonneuve avec l'utilisation de ma voiture. C'est donc que, même en appliquant le texte du bill 83, l'ingrédient du mens rea doit quand même être retenu, parce qu'il y a une foule d'actes que l'on peut commettre sans intention criminelle qui ont toutes les apparences de la criminalité.

Par exemple, j'ai fait allusion à la situation où j'aurais heurté le député de Maisonneuve avec ma voiture. Il va de soi que, si j'avais l'intention de descendre le député de Maisonneuve et que l'on pouvait démontrer la mens rea, je me serais rendu coupable d'un acte criminel. Mais si c'est simplement par négligence, parce que je regarde ailleurs ou parce que j'ai trop bu, ou d'autres fautes de cet ordre-là, à ce moment-là, il manque cet ingrédient nécessaire qui caractérise l'acte pour lequel nous allons payer une indemnité en vertu du texte de loi.

Même si je reconnais que la suggestion du député de Maisonneuve comporte un certain mérite, je pense qu'elle est moins bonne que la suggestion que nous faisons et qui est conforme au projet des commissaires, parce que notre article tient, quand même, compte de cette nécessité de l'ingrédient de la mens rea dans la commission d'un acte pour lequel nous allons indemniser la victime.

M. BURNS: S'il est nécessaire qu'il y ait mens rea, je me demande comment, dans un cas précis où quelqu'un est mis en accusation devant les tribunaux de juridiction pénale et est acquitté, même dans le cas de doute raisonnable à savoir s'il y a mens rea, il serait possible, alors, d'arriver à une situation telle que le ministre nous a mentionnée tantôt où un acquittement se ferait devant les tribunaux criminels, à la suite duquel il y aurait réclamation ou indemnisation consentie par la Commission des accidents du travail. Je veux dire que cela semble incompatible, si vous dites qu'il faut qu'il y ait mens rea si, au fond...

M. CHOQUETTE: Cela ne l'est pas parce que, n'oubliez pas qu'il n'y a pas chose jugée entre l'instance criminelle et l'instance civile. Ceci est un grand principe de droit. Je peux être acquitté devant le tribunal criminel de l'acte dont je parlais tout à l'heure, de voies de fait à l'égard du député de Maisonneuve, mais le député de Maisonneuve peut obtenir ma condamnation devant le tribunal civil. Il n'y a pas de res judicata entre les deux.

Par conséquent, même s'il y a un acquittement au criminel, cela ne vous empêche pas de prouver devant la Commission des accidents du travail que les circonstances indiquent, en général, que j'avais une intention criminelle à votre égard et que, par conséquent, vous avez droit à une indemnité.

M. BERTRAND: M. le Président, la discussion est très intéressante. Il me semble que le titre de votre loi indique sa portée: Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

M. BURNS: C'est ça.

M. BERTRAND: Et non seulement cela, mais vous indiquez, en annexe, quels sont ces actes, vous les précisez.

M. BURNS: II y a même les articles.

M. BERTRAND: Alors, à moins que ce ne soit "Loi de l'indemnisation des victimes"...

M. BURNS: II y a même les articles du code criminel auxquels on réfère dans le projet de loi.

M. BERTRAND: C'est cela, les articles du code criminel. Or, à ce moment-là, je mets en doute l'opinion que vous avez exprimée. J'aimerais connaître l'opinion de vos légistes, de ceux qui ont préparé la loi, d'une part, et, deuxièmement, surtout comment on l'applique, par exemple, en Alberta. Le ministre nous a donné, je pense, des statistiques. Quelles sont les règles que l'on suit? Est-ce que l'on se base sur une demande par écrit, qui indique qu'il y a eu procès criminel, qu'il y a eu condamnation et que moi, je suis une victime de l'acte criminel pour lequel une ou des personnes ont été condamnées? Comment est-ce que cela fonctionne en prenant l'exemple de l'Alberta? Comment applique-t-on la définition qui est donnée dans la loi de l'Alberta, à son chapitre 23, 1969, article 7, que citait tantôt le député de Maisonneuve?

Ce n'est pas aussi clair, je pense, que le ministre veut tenter de nous le laisser croire. Comment l'applique-t-on en Alberta?

M. CHOQUETTE: D'après ce qu'on me dit, la commission, à cet endroit-là, a des formules. Si, par exemple, quelqu'un a une réclamation à faire, il dit: Le 3 novembre 1971, à telle heure, sur la Grande-Allée, près du Parlement, j'ai été victime d'un assaut par un inconnu. Je marchais sur le trottoir et quelqu'un s'est précipité, m'a donné un coup et s'est enfui. Je ne sais pas qui.

Immédiatement, j'ai fait appeler la police sur les lieux, des témoins se sont présentés. Il y a des déclarations de témoins à l'effet qu'ils ont constaté qu'il était vrai que ce jour-là, cet homme avait été victime d'un assaut. C'est donc, comment dirais-je, du droit criminel mais sans le raffinement qui est exigé dans la qualité de la preuve pour obtenir une condamnation criminelle. Evidemment, dans le cas que je cite, il n'y a pas d'accusé parce qu'il a fui.

Mais j'ajouterai ceci, pour le bénéfice du député de Missisquoi et du député de Maisonneuve. Il se peut qu'il arrive très souvent, devant les tribunaux criminels, qu'il y ait des acquittements sur des questions techniques. Disons, par exemple, que la poursuite a oublié de prouver un des éléments essentiels. On pourrait prendre, par exemple, n'importe quelle cause où il y a différents éléments à prouver pour établir le crime, mais disons une cause où la corroboration serait exigée.

M. BERTRAND: De l'ordre de connaissance charnelle.

M. CHOQUETTE: Je pense que, dans le cas de viol, la corroboration est exigée.

M. BERTRAND: II faut la connaissance charnelle. "Carnal knowledge".

M. CHOQUETTE: C'est cela. Là, la corroboration est nécessaire. Supposons qu'il manque cet élément de preuve ou que la couronne fait défaut de le prouver, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu la connaissance charnelle, disons, d'une mineure ou un viol. Alors là, les règles de la preuve seraient moins exigeantes. Mais il faut quand même que cela reste dans l'univers, dans le contexte de la criminalité pour que le bill 83 entre en application.

C'est la raison pour laquelle le député de Missisquoi nous ramenait aux affaires essentielles lorsqu'il disait: Il faut quand même se rappeler le titre de la loi. Ce n'est pas la loi d'indemnisation de tous actes qui ont une apparence ou qui sont matériellement conformes à un acte criminel, c'est une Loi d'indemnisation pour des actes criminels.

M. BERTRAND: D'actes criminels. M. BLANK: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Je crois comprendre que l'amendement à l'article 5, proposé par l'honorable ministre de la Justice, est adopté.

M. BERTRAND: M. le Président, j'ajoute que je ne veux pas que mes remarques laissent entendre que je ne serais pas favorable à une interprétation très large. Je conviens qu'il peut y avoir des actes criminels... J'en ai plaidé, dans ma pratique, où j'ai défendu quelqu'un qui pouvait être accusé de connaissance charnelle et qui a été acquitté. Dieu en soit loué, il a été acquitté parce qu'il y avait un manque de corroboration. Il y a même une cause qui est allée jusqu'en cour Suprême du Canada, cause que j'avais perdue devant le tribunal de chez nous, que j'avais perdue en appel, trois à deux, et que j'ai gagnée en cour Suprême, cinq à zéro. C'est pour cela que je suis mieux de reprendre ma pratique légale!

M. BIENVENUE: C'était un deux dans trois!

M. BERTRAND: II peut y avoir des cas comme ceux-là, des cas frontières. A ce moment-là, par contre, il faudra que les commissaires, à la Commission des accidents du travail, soient extrêmement prudents dans l'examen et l'application d'une telle réclamation, parce que l'individu aurait été acquitté, comme le disait tantôt le député de Maisonneuve. Cela peut être le bénéfice du doute, cela peut être un manque de preuve, c'est-à-dire dans le cas, en espèce, de corroboration. Il faudra que les commissaires soient extrêmement prudents quand ils verront à établir les éléments de cet acte criminel, parce qu'il faudra faire une description et établir autant que possible les éléments de description de l'acte criminel avant d'adjuger sur la réclamation.

Quant à moi, je suis favorable à l'interprétation la plus large possible parce que je reconnais qu'il y aura certainement des actes où des individus auraient été acquittés pour toutes sortes de raisons. Par contre, il y aura eu des victimes d'un acte criminel, lequel acte criminel n'aura pu être imputé à une personne, c'est-à-dire à un criminel.

M. BURNS: En terminant, je veux également dire que je suis pour une interprétation des plus larges de ce texte-là, mais peut-être pourrions-nous dire pour la postérité que l'intention du législateur — si le ministre la représente par ses remarques — est justement...

M. CHOQUETTE: Pas légalement.

M. BURNS: ... que même si un acte criminel n'est pas prouvable au sens de la loi de la preuve en matière criminelle, cela n'empêche pas quelqu'un de bénéficier des dispositions de cette loi, à la rigueur.

M. CHOQUETTE: C'est sûr. Ce que dit le député de Maisonneuve est l'absolue vérité. Ce projet de loi a été préparé en collaboration avec le président et les membres de la Commission des accidents du travail qui comprennent que c'est dans ce sens qu'ils doivent l'interpréter.

M. LE PRESIDENT: L'amendement de l'honorable ministre est adopté. L'article 5 est adopté tel qu'amendé.

Article 6. Adopté.

Article 7.

M. BURNS: A l'article 7, c'est peut-être un simple détail technique que je veux soulever, mais il est normal qu'à ce stade-ci, en comité plénier, on le soulève. Si on lit le texte, du moins le premier paragraphe, on voit: "A compter du jour où la victime ou ses dépendants" — et je m'arrête à cette expression qui

sera le sujet de cette intervention — "avisent la commission de leur intention de réclamer" — là, il y a l'aspect réclamation qui s'insère dans le texte — "le bénéfice des avantages de la présente loi, la commission est de plein droit subrogée aux droits de la victime ou de ses dépendants..."

Personnellement je trouve — et encore une fois j'insiste sur le fait que c'est peut-être uniquement un détail technique — anormal que dans une situation donnée où par exemple, vous avez six dépendants d'une victime et une réclamation, la réclamation des cinq autres qui n'ont pas réclamé soit remise par subrogation automatique — de plein droit, comme dit le texte — entre les mains de la commission.

Je proposerais qu'on amende ce texte aux cinquième et sixième lignes, ainsi qu'aux septième et huitième lignes, en remplaçant les mots "de la victime ou de ses dépendants" par les mots "du réclamant", et en remplaçant également les mots "à la victime ou à ses dépendants" par les mots "au réclamant" aux quinzième et seizième lignes, pour les raisons que je mentionne. Evidemment, si quelqu'un accepte de se pourvoir des dispositions de cette loi, il est partiellement — du moins quant à la partie qui est subrogée entre les mains de la Commission des accidents du travail — empêché de réclamer devant les tribunaux réguliers. Il ne peut réclamer, comme on le fait en vertu de la Loi des accidents du travail, que l'excédent.

Je suggérerais cet amendement, aux cinquième et sixième lignes, aux septième et huitième lignes ainsi qu'aux quinzième et seizième lignes, où on remplacerait les mots "de la victime ou de ses dépendants" par les mots "du réclamant".

M. CHOQUETTE: D'accord.

M. LE PRESIDENT: L'amendement de l'honorable député de Maisonneuve est adopté? Adopté. L'article 7 est adopté tel qu'amendé? Adopté.

Article 8. Adopté.

Article 9.

M. BURNS: A l'article 9, on se rend compte qu'il y a non pas une prescription, mais une déchéance de la réclamation — sans entrer dans les détails techniques que cela comporte — cette déchéance étant fixée à six mois. Je me demande s'il ne serait pas opportun de fixer cette déchéance à un an pour la rendre tout à fait conforme à la prescription en matière de blessures corporelles, en vertu du code civil.

Surtout que, sauf erreur, le rapport des commissaires pour l'uniformisation des lois suggère un an et que les trois lois auxquelles j'ai fait référence tantôt à ma connaissance, ont un droit de déchéance au bout d'un an.

Cela, particulièrement dans le cadre de notre droit civil, aurait pour avantage de mettre ce droit de déchéance en conformité aux disposi- tions du code civil relatives aux réclamations à la suite de blessures corporelles.

Alors j'en fais la proposition. Si on veut être plus formaliste, je propose qu'à l'article 9, à la 5e ligne, on remplace les mots "les six mois qui suivront", par les mots "dans l'année qui suit", ainsi qu'à la 8e ligne, on remplace les mots "de six mois" par les mots "d'un an".

M. CHOQUETTE: Malheureusement, je ne peux pas accepter cette proposition, M. le Président, parce qu'il faut quand même donner un certain délai à la Commission des accidents du travail pour se retourner et exercer des recours possibles contre l'auteur du délit lorsqu'elle est subrogée aux droits des dépendants, des victimes ou des réclamants.

C'est la raison pour laquelle il faut d'abord avoir un délai initial de six mois pour permettre aux réclamants de présenter leur recours à la commission et alors si la commission accepte, elle peut, dans les six mois suivants, exercer un recours contre l'auteur du délit, pour percevoir en vertu de la subrogation. Maintenant, le député pourra constater que nous étions quand même sensibles au problème, parce que nous avons dit que la commission peut prolonger ce délai selon qu'elle le juge légitime. C'est-à-dire que le délai de six mois évidemment s'appliquera, mais la commission ne serait pas empêchée d'en prendre un au bout de neuf mois, parce qu'il peut arriver des circonstances où le réclamant n'a pas pu présenter sa réclamation en temps utile.

Mais il faut quand même protéger le recours en vertu de la subrogation de la commission. La commission est astreinte aux mêmes délais de prescription à l'égard de ces recours qu'ont les tiers, l'auteur des dommages, que la victime elle-même et on ne peut pas échapper à ça.

M. BURNS: Sauf que je faisais cette suggestion, M. le Président, en ayant à l'esprit que si notre code civil en matière de blessures corporelles a pensé que ça prenait du temps dans bien des cas. Ceux qui ont pratiqué en matière de responsabilité, en matière de blessures, savent très bien que, même le délai du code civil d'un an, est très souvent insuffisant pour connaître justement l'extension des dommages, même pour connaître le dommage dans certains cas. Quelqu'un pourrait au cours d'une rixe, au cours d'une bataille recevoir des coups...

M. CHOQUETTE: D'une émeute.

M. BURNS: D'une émeute, M. le Président, recevoir un coup...

M. CHOQUETTE: D'une émeute.

M. BURNS: Qu'est-ce qu'il y a, M. le Président?

M. CHOQUETTE: Peut-être pas, enfin certaines émeutes.

M. BURNS: Prenons tous ces actes criminels-là. Evidemment, quelqu'un peut recevoir une blessure corporelle et pas véritablement connaître l'extension du dommage et même pas savoir l'existence du dommage dans certains cas.

Je me demande pourquoi on ne le met pas conforme...

M. CHOQUETTE: Le député de Maisonneuve a de l'expérience en matière de blessures corporelles, je suis sûr qu'il a plaidé de nombreuses causes dans ce domaine-là. Il sait très bien que même quand il y a des dommages importants subis par des personnes, il est fréquemment impossible de déterminer dans le délai de la prescription d'un an, le quantum exact des dommages.

M. BURNS: Raison de plus dans six mois.

M. CHOQUETTE: Je suis d'accord avec le député, mais ceci n'empêche pas qu'on prenne son action dans l'année et que le quantum des dommages soit déterminé un an et demi ou deux ans après. De la même manière ici, on ne demande pas à la victime de connaître la valeur totale de sa réclamation dans les six mois qui est le délai de la prescription, mais simplement de dire à la commission: J'ai été blessé et je veux réclamer. La Commission des accidents du travail est habituée à des cas comme ça, elle traite tous les jours des accidentés du travail dont on détermine en fait l'incapacité définitive seulement cinq ans après, parce qu'on a subi des dommages et on subi de nombreuses opérations, absences au travail, etc.

Eh bien, il arrive très fréquemment que la valeur de la réclamation ne puisse être déterminée en définitive que bien longtemps après l'expiration du délai de six mois. Par conséquent, le délai est simplement là pour aviser la commission que quelqu'un désire se prévaloir des dispositions de la loi.

M. BURNS: Je veux tout simplement, sans allonger le débat là-dessus, dire tout haut ce que je pense tout bas. Ayant relu les divers arguments du ministre de la Justice au cours de la séance du mardi, je me suis rendu compte qu'une des raisons de l'existence, ou du fait de confier ce recours-là à la Commission des accidents du travail est une raison d'économie.

Je craindrais — c'est ce que je dis tout haut en le pensant tout bas — que la Commission des accidents du travail applique à la lettre ces six mois justement pour des raisons d'économie. J'espère que ce ne sera pas cela. C'était l'une des raisons pour lesquelles je demandais l'extension de ce droit.

M. CHOQUETTE: Non, non.

M. BURNS: Même si la commission a le droit, lorsqu'elle l'estime légitime, d'étendre ce délai, ce ne serait sûrement pas souhaitable que la commission applique à la lettre ce délai de six mois.

M. CHOQUETTE: Je transmettrai vos voeux au président, M. Bellemare.

M. BERTRAND: Je n'ai pas les mêmes craintes, tant que le président actuel sera président de la Commission des accidents du travail.

M. BURNS: Ce n'est pas une critique à l'égard du président, que je trouve très compétent.

M. BERTRAND: La commission peut prolonger le délai d'un mois ou deux.

M. CHOQUETTE: Même elle peut le prolonger de plus de six mois.

M. BERTRAND: D'un an.

M. CHOQUETTE: Elle peut dépasser le délai de prescription?

M. BERTRAND: Oui.

M. CHOQUETTE: II peut y avoir des cas où il n'est nullement question de recours éventuel. La commission peut dire: On accueillera le recours après les délais.

M. BURNS: D'accord.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Louis.

M. BLANK: Moi, je suis d'accord avec le député de Maisonneuve. Je comprends son argument, et je pense que six mois ce n'est pas assez. Depuis que je suis avocat — cela fait 21 ans — je trouve très curieux que notre code civil ait une prescription d'un an pour des blessures corporelles et de deux ans pour des dommages à la propriété. Je crois que c'est seulement pour satisfaire les compagnies d'assurance qui veulent régler le problème des montants en réserve pour des dommages corporels.

Immédiatement après l'article 9, l'article 10 dit que la prescription est interrompue par l'application des bénéfices de cette loi. Je diffère un peu d'opinion avec le légiste. Je pense que l'interruption d'une prescription veut dire qu'une prescription commence à courir encore durant l'année. Il dit non mais on peut mettre très clairement ici qu'une prescription commence du moment que l'application est faite. Cela va protéger la commission et donner du temps pour poursuivre sur la question de subrogation.

Si le citoyen fait une demande le dernier jour de l'année, cela veut dire que la prescription va commencer un an encore après cela.

M. LAURIN: Je suis sûr que cette intervention fera réfléchir le ministre quelques minutes de plus. Elle pourrait peut-être l'amener à rescinder la réponse négative qu'il a faite à la suggestion du député de Maisonneuve.

M. CHOQUETTE: L'intervention du député de Saint-Louis? Le député de Saint-Louis veut abolir complètement la prescription !

M. BURNS: L'allonger, en tout cas.

M. CHOQUETTE: Pardon?

M. BURNS: Je suis bien d'accord avec lui.

M. CHOQUETTE: II est très "prentice minded", comme on dit.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: Est-ce que la commission devra encourir les frais de l'établissement de la preuve de criminalité?

M. CHOQUETTE: Oui, je pense qu'en général l'enquête de la commission sera concluante, mais il peut y avoir des cas où il faudra que le réclamant se fasse représenter et qu'il y ait un véritable procès pour établir la preuve d'un acte criminel et le droit à la réclamation. Il peut y avoir des cas douteux.

M. AUDET: La victime de l'acte criminel devra faire la preuve et en encourir elle-même les frais?

M. CHOQUETTE: C'est possible, dans certains cas. Mais on aura l'assistance judiciaire, dans peu de temps.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que je dois comprendre que la majorité des membres du comité rejettent l'amendement du député de Maisonneuve?

M. CHOQUETTE: Me Dufour me signale que la commission peut attribuer des frais dans un cas comme celui-là pour payer la partie des frais juridiques encourus.

M. AUDET: Est-ce prévu dans le texte de loi?

M. CHOQUETTE: Oui, c'est dans le texte de la Loi des accidents du travail, qui s'applique.

M. LE PRESIDENT: Le comité est-il prêt à se prononcer sur l'amendement du député de Maisonneuve?

Cet amendement est rejeté sur division et l'article 9 est adopté. Article 10, adopté. Article 11, adopté. Article 12, adopté. Article 13, adopté. Article 14. Il y a, si je comprends bien...

M. BERTRAND: II y a un amendement.

M. LE PRESIDENT: ...un amendement, un nouvel article qui remplace l'article 14.

M. CHOQUETTE: Oui, évidemment, je crois que cet amendement se passe de beaucoup de commentaires de ma part. C'est simplement une disposition qui permettra à la commission de faire des avances rapidement au cas où la victime en aurait besoin et avant qu'une décision définitive ne soit prise par la commission sur le droit à l'indemnité.

M. LE PRESIDENT: Alors, le nouvel article 14 est adopté?

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, sur quelles bases cela va-t-il se faire? On dit: La personne qui en fait la demande pour son entretien et ses frais médicaux. Le terme "entretien" est assez vague. Va-t-on se baser sur les avances consenties ordinairement par le ministère des Affaires sociales en pareil cas pour les besoins ordinaires d'une famille? Est-ce qu'il y a un barème quelconque?

On dit à la fin: Si la commission en vient à la conclusion que la demande ne doit pas être accordée, les sommes payées en vertu du présent article ne sont pas recouvrables. Alors, c'est ni plus ni moins qu'une allocation sociale, à ce moment-là; ça devient une allocation d'aide sociale. Les barèmes dont on va se servir seront-ils ceux du ministère des Affaires sociales dans un cas comme ça?

M.,CHOQUETTE: Nous avons suivi textuellement un article identique qui se trouve dans la Loi des accidents du travail déjà, mais nous avons tenu à le réintroduire dans ce texte de loi pour qu'il soit bien clair que la commission peut donner des allocations d'avance, tel que prévu. Je présume que la Commission des accidents du travail emploiera les barèmes habituels qu'elle a dans ce domaine-là, parce qu'elle fait des versements à des victimes d'accidents du travail même avant d'avoir établi le bien-fondé de la réclamation.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, il est stipulé dans la loi 26, la Loi de l'aide sociale, qu'un réclamant qui veut bénéficier de la Loi de l'aide sociale, doit d'abord utiliser tous les mécanismes des autres lois. Si je comprends bien le sens de la loi proposée, c'est qu'il y a les victimes du crime. Alors, elles ont la possibilité, soit d'utiliser les bénéfices de cette loi ou soit de se pourvoir en recours devant les tribunaux. Elles ont une option à exercer.

C'est pour ça que j'ai posé la question au ministre des Affaires sociales l'autre jour. Je voulais savoir s'il y avait eu communication entre les deux ministères, parce qu'à certains moments je crois que le réclamant pourra se prévaloir des dispositions de la Loi de l'aide

sociale, la loi 26, et des lois de la sécurité sociale qui sont plus généreuses. Là, je ne voudrais pas trop m'avancer. Je dis plus généreuses, mais je voudrais vérifier les prestations payées par la Commission des accidents du travail avec lesquelles je suis moins familier. Il est possible que, dans certains cas, les prestations des accidents de travail soient plus généreuses que la loi 26, si l'on fait exception pour les besoins spéciaux.

De toute façon, à celui-là qui demandera au ministère des Affaires sociales une assistance en vertu de la loi 26, on répondra: Utilisez d'abord les mécanismes de la loi no 83, sur l'indemnisation des victimes du crime. La loi dit aussi qu'il pourra recevoir des bénéfices de la loi 26 quand il aura épuisé d'abord les possibilités d'une autre loi. La Commission des accidents du travail est une de ces lois-là.

M. CHOQUETTE: Certainement. Le député de Montmagny a raison. Si quelqu'un aspire à réclamer soit en vertu du bill 83 ou de la loi 26, il doit, à mon sens, d'abord, avoir recours à la Loi des accidents du travail pour obtenir une indemnité. Parce qu'ici il s'agit d'un droit. Donc, ayant épuisé les prestations qu'il a ici, s'il en a besoin d'additionnelles, qu'il ait recours à la Loi de l'aide sociale.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je voudrais faire allusion à des observations que j'ai faites à maintes reprises et que le ministre actuel des Affaires sociales a faites aussi. C'est le souci de toujours rapprocher davantage ou d'intégrer ces différentes lois surtout celles qui comportent des barèmes. Alors, en vertu de la Loi des accidents de travail et en vertu de l'article 14 de cette loi, on va verser des indemnités à une personne, en attendant une décision, des avances pour son entretien et ses frais médicaux.

C'est de là que je dis l'importance d'intégrer davantage et de coordonner davantage toutes ces lois qui, enfin, sont à caractère social.

M. LE PRESIDENT: L'ancien article 14, devenu article 15, est adopté. Article 15, devenu article 16, adopté. Article 16, devenu article 17, adopté. Article 17, devenu article 18, adopté. Article 18, devenu article 19, adopté. Article 19, devenu article 20, adopté. Article 20, devenu article 21, adopté. Article 21, devenu article 22, adopté. Article 22, devenu article 23, adopté. Article 23, devenu article 24, adopté. Article 24, devenu article 25, adopté. Article 25, devenu article 26, adopté.

M. CLOUTIER (Montmagny): J'aurais une autre question à poser au ministre. Etant donné que certaines indemnités versées par la Commission des accidents du travail, même à fonds perdus, en vertu de l'article 14, sont des indemnités à caractère social qui peuvent facilement être comparables à celles que l'on verse en vertu du régime canadien d'assistance publique où il y a un partage fédéral-provincial, est-ce que le ministre a exploré cette possibilité qu'il y ait un partage fédéral-provincial pour une loi de cette nature qui est à caractère social, alors que dans le cas de toutes les lois à caractère social: l'assurance-maladie, l'assurance-hospitalisation, loi 26, régime canadien d'assistance publique, il y a toujours un partage fédéral-provincial?

M. CHOQUETTE: Je n'avais pas pensé à ça. Le député m'y fait penser. Je vais voir si nous pouvons obtenir, en somme, des avantages du côté fédéral à ce point de vue-là.

M. BURNS: M. le Président, une question avant que vous ne quittiez votre siège. On a vu que cette loi chevauche deux ministères, à toutes fins pratiques, par l'entremise de la Commission des accidents du travail. Je me demande s'il ne serait pas à propos d'ajouter un article disant que cette loi relève du ministère de la Justice. On n'a aucun texte. Je ne sais pas si c'est une nouvelle politique de nos légistes de ne pas mettre dans les lois le ministère ou le ministre de qui relève cette loi. Je pense qu'ici, plus dans toute autre loi, il serait nécessaire de dire que l'exécution de la loi est une responsabilité du ministère de la Justice, puisque il est possible, par le truchement de la Commission des accidents du travail, qu'il y ait ambiguïté. Que ce soit le ministère du Travail ou le ministère de la Justice, bien qu'on voie, à l'article 23 devenu l'article 24, que le ministre de la Justice peut faire des ententes avec les autres gouvernements concernant l'application de cette loi. Il reste quand même, je pense, qu'il y aurait lieu de préciser ce phénomène que l'exécution de la loi est une responsabilité du ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: Le député de Maisonneuve touche un point sur lequel je ne suis pas réellement fixé au moment où je me lève pour lui répondre. Je sais que pour ce qui est de la Loi des accidents du travail, il n'est pas inscrit dans cette loi, me dit-on, que c'est le ministre du Travail qui a la responsabilité de l'administration de cette loi.

M. BURNS: Dans les faits, M. le ministre... M. CHOQUETTE: Dans les faits.

M. BURNS: ... la Commission des accidents du travail..,

M. CHOQUETTE: C'est vrai.

M. BURNS: ... quand on étudie les crédits, apparaissent au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. D'ailleurs, dans tous les digestes où on attribue l'application de diverses lois aux divers ministères, on retrouvera la Loi des accidents du travail comme une responsabilité du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. CHOQUETTE: Qu'est-ce que vous suggérez comme article?

M. BURNS: J'aurais suggéré que, peut-être, on ajoute un article, et c'est pour ça que j'ai attendu que tous les articles soient adoptés. Selon les règles de procédure, je dois attendre à la fin. J'aurais suggéré que, peut-être, on ajoute un article, qui peut être l'article 26, immédiatement avant l'article déclarant: "quand la loi devient en vigueur" et qui se lirait tout simplement "le ministre de la Justice est responsable de l'exécution de la présente loi".

M. CHOQUETTE: D'accord.

M. LAURIN: II y a un autre aspect aussi, M. le Ministre. Si on a des demandes de renseignements à faire...

M. BURNS: C'est cela.

M. LAURIN: ...à quel ministre doit-on les faire?

M. CHOQUETTE: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Alors, le député de Maisonneuve propose un article 26 qui se lirait : Le ministre de la Justice a la responsabilité de l'exécution...

M. CHOQUETTE: Est responsable.

M. LE PRESIDENT: ...est responsable de l'exécution de la présente loi.

M. CHOQUETTE: De l'application.

M. DUMONT: M. le Président, d'après cet article, est-ce que le ministre va être obligé, à chaque fois, de donner le consentement d'agir à la Commission des accidents du travail?

M. CHOQUETTE: Ah, non!

M. DUMONT: Non, mais si nous n'adoptons pas un règlement comme tel, il peut même arriver cela.

M. CHOQUETTE: Je pense que cela veut dire responsable de voir au bon fonctionnement du système préconisé par cette loi sans s'ingérer dans les décisions qui devront être prises, en toute objectivité, par la Commission des accidents du travail. C'est ce que cela veut dire.

M. BERTRAND: D'ailleurs, cela fera partie du rapport de la Commission des accidents du Travail. La Commission des accidents du travail sera obligée de mettre, dans son rapport annuel, les activités au titre de la Loi de l'indemnisation.

Deuxièmement, le ministre sera obligé de répondre en Chambre à toutes et chacune des questions des députés relativement à l'application de la loi par la Commission des accidents du travail.

Troisièmement, lors de l'examen des crédits au budget, c'est le ministre de la Justice qui devra répondre non pas du budget, mais des activités de la Commission des accidents du travail en ce qui a trait à la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

M. LE PRESIDENT: Pour que ce soit bien clair, il y a un nouvel article 26, proposé par le député de Maisonneuve, qui est adopté.

M. BERTRAND: Oui.

M. LE PRESIDENT: Et l'ancien article 25 devient maintenant l'article 27.

M. BERTRAND: C'est cela.

M. HARDY (président du comité plénier): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que le comité a étudié le projet de loi no 83 et l'a adopté avec des amendements.

M. BLANK (président): Les amendements au bill no 83 sont-ils agrées? Agrée.

M. BURNS: Est-ce que le Président est d'accord sur tous les amendements?

M. LE PRESIDENT (Blank): J'ai deux chapeaux ici!

M. CHOQUETTE: M. le Président, je suggère que nous procédions à la troisième lecture. Je n'ai rien à dire.

Troisième lecture

M. LE PRESIDENT (Blank): La motion de troisième lecture du bill no 83 est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté. M. BIENVENUE: Article 6, M. le Président.

Projet de loi no 35 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT (Blank): Le ministre des Communications propose qu'on reprenne le débat sur la motion proposant que le bill no 35 soit adopté en deuxième lecture.

Le député de Montmorency.

M. Louis Vézina

M. VEZINA: J'avais commencé, M. le Président, vendredi dernier, à traiter du principe du

bill no 35 et des deux bills qui le suivent. Différentes opinions ont été émises par les opinants qui m'ont précédé et sur lesquelles je reviendrai un peu plus tard.

Je crois qu'entre autres points intéressants que soulève le principe de ces trois lois, de cette trilogie, il y a le droit à l'information du citoyen. Ce droit à l'information, c'est perdre son temps que de dire que c'est un droit essentiel et qu'il faut tout faire pour le préserver. C'est là, je pense, un vieux cliché, voire même un voeu pieux.

Je voudrais, cependant, traiter de la qualité que doit avoir ce droit. Il y a le fait que ce droit comporte l'obligation de faire connaître la source d'où émane l'information et aussi le fait que l'informé a le droit de savoir qui a la responsabilité de l'information qu'on veut bien lui donner. Il est indiscutable qu'en matière de communications, au niveau d'un gouvernement, le sujet est délicat.

Il est indiscutable que les possibilités d'abus, les possibilités d'erreurs flagrantes, les possibilités de faiblesses du système de l'information sont peut-être plus grandes que dans la stricte entreprise privée, parce que le motif de ceux qui conçoivent cette information est fort différent.

On a parlé, M. le Président, à l'occasion de ce débat en deuxième lecture, de contrôle gouvernemental, d'intrusion du gouvernement dans l'information, d'ingérence, de propagande, etc. Ceci tout simplement parce que, dans l'énoncé, fort sobrement fait, d'ailleurs, du ministre responsable, ce principe a été développé que, s'il fallait, d'une part, préserver l'autonomie des structures ou des organismes responsables de l'information, il était aussi essentiel que ceux qui ont la responsabilité de gouverner ce pays, cet Etat ou cette province, puissent avoir les moyens requis pour exercer le contrôle de l'utilisation des fonds publics.

Or, M. le Président, il est bien évident que l'expérience de l'Office d'information et de publicité, jusqu'à maintenant, est fort décevante. Ce fut, à mon sens, un gaspillage de fonds publics, malgré les bonnes intentions de ceux qui occupaient les postes responsables de cet organisme. Aujourd'hui, on dit tout simplement: Le gouvernement veut démantibuler l'OIPQ. Je dis: Oui, il faut le démantibuler, parce que cela devient quasiment du gaspillage. C'est tout. Je ne vois pas pourquoi on s'exciterait du jour au lendemain parce qu'un organisme ne marche pas et qu'on arrêtera de lui faire gaspiller des fonds publics. Cela me parait un peu secondaire.

Ce qui me paraît plus important, c'est la différence entre les propos que l'on tient suivant que l'on siège à votre gauche ou à votre droite, M. le Président. N'ayant jamais eu l'insigne honneur de siéger à votre gauche, me contentant du gracieux privilège de siéger à votre droite...

M. CLOUTIER (Montmagny): Cela viendra!

M. VEZINA: II est vrai que je suis très jeune. Tout peut m'arriver.

Je voudrais, M. le Président, me référer au même débat que les opinants antérieurs ont cité, soit le débat du vendredi 16 mai 1969, à l'occasion de la deuxième lecture de la Loi de l'Office de radio-télédiffusion du Québec.

L'honorable premier ministre d'alors, s'adressant à cette Chambre, dit par exemple, à la page 1723 du journal des Débats: "L'office aura aussi pour fonctions de coordonner la production de documents audio-visuels ainsi que l'acquisition et l'utilisation de l'équipement nécessaire à cette fin par les ministères —je continue la phrase pour ne pas la scinder — et services du gouvernement, ainsi que pour les organismes qui en relèvent".

Le chef du gouvernement d'alors, en présentant le bill 11 de cette session, reconnaissait, dans son énoncé de principe, ce besoin inné et essentiel à la bonne administration que l'utilisation et la production qui pourraient être faites par des organismes gouvernementaux devraient l'être à l'avantage des ministères et autres services gouvernementaux.

Il est essentiel, M. le Président, que les décisions qui sont prises, qu'elles soient législatives ou administratives — imaginons les meilleures décisions qui peuvent être prises par qui que ce soit — resteront lettre morte si ceux pour qui ces décisions sont prises n'en sont pas correctement informés.

Or, pourquoi se scandaliser? Pourquoi jouer à la vierge offensée? Pourquoi ne pas laisser ces moyens à ceux qui ont la responsabilité de décider? Et ça prend souvent beaucoup plus de courage — tous ceux qui ont été appelés à administrer cette province le savent — pour décider que pour critiquer. Pourquoi ne pas leur laisser les moyens de faire connaître exactement le sens et la portée de leurs décisions?

Je sais que nous sommes en matière publique et qu'il est nécessaire que les gestes administratifs soient contrôlés par l'Assemblée nationale. Nous avons des mécanismes. Il y a d'abord les débats, à l'occasion soit du discours d'ouverture soit sur le budget. Il y a la commission des engagements financiers, l'étude des crédits des ministères, toutes des occasions qui, je pense, permettent à ceux qui honnêtement veulent faire leur boulot d'exercer le contrôle, d'avoir des informations nécessaires pour s'assurer de la bonne marche de l'application des différentes lois.

Plus loin, et je cite toujours l'ancien premier ministre: "A ce sujet" — c'est à la page 1723 — "le Bureau de développement audio-visuel a déjà mis à la disposition de différents ministères un premier noyau d'experts, en vue d'accroître l'utilité de chacun des investissements", etc.

On revient donc avec ce même principe — c'était donc logique — qu'il fallait que ce soit mis à la disposition des ministères. Et je pense qu'il faut concourir à l'énoncé d'un tel principe. Le député de Chicoutimi, dans sa critique qu'il faisait en deuxième lecture sur cette loi, nous a

cité certains passages d'anciens députés libéraux de cette Chambre. Après avoir lu le texte de l'intervention du député de Chicoutimi, après avoir lu intégralement les citations qu'il a faites, je me suis permis de lire ce que le député de Chicoutimi, alors ministre de la Couronne, disait pour appuyer la thèse du chef du gouvernement qui proposait l'adoption en deuxième lecture du bill 11.

Je me suis aperçu qu'encore là, suivant que l'on siège à gauche ou à droite, le son de cloche est très différent.

A la page 1744, l'ancien ministre des Affaires culturelles s'exprime ainsi: "Le premier ministre, dans ses observations, lorsqu'il a présenté le projet de loi, a indiqué que l'Office de radio-télédiffision du Québec jouirait d'une certaine part d'autonomie, mais que le gouvernement, justement parce qu'il est responsable de l'éducation, qu'il est responsable de la culture, avait le droit de se réserver un droit de regard, un droit de contrôle sur le fonctionnement de cet organisme du gouvernement."

M. BERTRAND: Le député me permettra une question. S'il a lu le journal des Débats des séances du mois de mai et du mois d'octobre, il aura constaté qu'à ce moment-là le porte-parole du Parti libéral était le député de Gouin, Yves Michaud, et que toute la thèse de M. Michaud, au nom du Parti libéral — il le notera à la page 1730 du journal des Débats du 16 mai — était à rencontre de la thèse que j'ai défendue victorieusement de l'autre côté, une thèse d'un homme de gouvernement qui n'a pas changé d'idée. Je n'ai pas changé d'idée, mais je constate que ceux-là qui siègent maintenant de l'autre côté ont profondément changé d'idée. Et ça équivaut à dire quoi? Qu'est-ce qu'on dit d'un homme qui a deux faces?

M. VEZINA: Qu'il a changé d'idée, et ceux qui ne changent pas d'idée sont dans une maison grise.

M. BERTRAND: Et qu'est-ce qu'on dit d'un parti qui en a deux?

M. VEZINA: Je rappellerai au député de Missisquoi que ceux qui ne changent pas d'idée, dans la région de Québec, on les met tous ensemble dans une maison grise.

M. le Président, j'allais venir aux propos que vient de tenir le député de Missisquoi et tenter de démonter justement que, dans ces genres de débat, ce sont toujours des sons de cloche différents suivant l'optique que vous avez, toujours. Si le député de Missisquoi, alors qu'il présentait la deuxième lecture du bill 11 comme chef du gouvernement, a défendu victorieusement sa thèse, il est aujourd'hui solidaire de celui qui, au nom de son parti, essaie de défendre une autre thèse, puisque...

M. BERTRAND: Non. M. le Président, le député de Montmorency est fort aimable. Il me permet de dialoguer avec lui, je l'en remercie. Aujourd'hui, le devoir de l'Opposition, c'est de rappeler au gouvernement qui est là les engagements qu'il a pris devant la population; c'est ça son devoir. Nous devons lui rappeler, entre autres, d'une manière plus précise, une page que le député de Montmorency va certainement nous lire et que l'on retrouve à la page 1,730 du journal des Débats. A ce moment-là, je dialoguais avec le député de Gouin qui, lui, déclare ceci.

M. VEZINA: M. le Président, je voudrais dialoguer, justement.

M. BERTRAND: II parle au nom du parti. Alors, le dialogue va continuer.

M. VEZINA: Parce que, là, vous prenez tout mon temps et vous me coupez mon temps.

M. BERTRAND: Je n'en ai aucun doute. Donc, il parle au nom de son parti. "Je voudrais ajouter ceci, déclare-t-il — c'est important afin que notre parti ne soit pas accusé d'avoir une position équivoque en cette matière — que nous nous sommes penchés sur l'étude de cette question et que nous avons établi une politique". Et ça continue pour conclure à une commission non seulement autonome, mais indépendante de toute ingérence de la part de l'Exécutif.

Le député de Montmorency, qui est un homme profondément honnête, intellectuellement honnête, je le sais, accepte que je déclare que ceux qui ont renié sont à la droite du président et non pas à sa gauche.

M. VEZINA: M. le Président, c'est trop facile. Je vais vous donner des exemples de reniements, si on veut en parler. C'est extrêmement facile. Vous avez parlé de reniements. Qu'est-ce que l'ancien gouvernement a fait en matière municipale? Des engagements ici, au Patro Roc-Amadour. L'ancien chef du gouvernement a dit: Jamais il n'y aura des communautés urbaines sans consultation populaire. Or, on en a eu trois en l'espace de trois mois.

M. PAUL: Et jamais il n'y aura de ministère de l'Education.

M. VEZINA: Cela, c'est du reniement. Je reviens à mes propos.'

M. BERTRAND: Non, non, mais là on a un cas précis. On a un cas très précis.

M. VEZINA: Je vous disais donc, M. le Président, que, suivant...

M. BERTRAND: Le ministre est moins à blâmer que le député. Au moins, il n'était pas député dans le temps.

M. VEZINA: ... que vous siégez à gauche ou à droite, il y a des sons de cloches différents. Mais, l'ancien chef du gouvernement sait qu'une des principales raisons pour lesquelles il a été défait lors des dernières élections — ce n'est pas sa faute; il a été torpillé par l'intérieur — comme on l'a entendu dire maintes et maintes fois, c'est parce qu'on a manqué de leadership à la tête du gouvernement.

M. PAUL: C'est dans le bill?

M. VEZINA: Cela a permis le torpillage par l'intérieur et l'arrivée d'un certain parti, parce qu'il faut le nommer par son nom, dans cette Chambre.

M. PAUL: Vous autres, vous êtes déjà rendus à la ruine.

M. VEZINA: M. le Président, je pense que le principe qui est en jeu, ce n'est pas d'établir un concours de virginité administrative entre l'actuel ou l'ancien gouvernement; c'est de savoir si, tout en respectant les principes, il y a possibilité d'augmenter la responsabilité de l'Exécutif dans ces organismes. Autrement — cela a été dit par l'ancien ministre des Affaires culturelles aux applaudissements de nos amis d'en face — c'est faire acte de lâcheté de permettre la création d'un gouvernement parallèle.

Je souscris à ces propos que c'est une lâcheté de permettre la création d'un gouvernement parallèle.

C'est faire acte de courage, au contraire, que de prendre ses responsabilités, quitte à donner dans toute la mesure du possible, mais sous la responsabilité de l'exécutif qui, lui, répond à la Chambre — c'est là qu'on voit la structure qui se tient — le maximum d'autonomie possible à ces organismes. Ceci m'amène à parler de ce principe de l'autonomie qui doit être accordée aux différents organismes, notamment ceux qui nous intéressent d'une façon particulière et, parmi ceux-ci, Radio-Québec.

Je trouve mauvais sur le plan des principes, de multiplier les régies, de multiplier les offices autonomes de la structure administrative normale d'une province. Il y a, au point de vue administratif, le cabinet des ministres et des ministères. Par la force des choses, quelquefois pour des raisons purement d'efficacité administrative, d'autres fois pour des raisons qui me paraissent un peu plus absurdes, on a commencé la création de différentes régies. Quelle que soit la couleur ou le nom du parti qui les a faites, c'est le cadet de mes soucis. Je parle au niveau des principes.

Je pense qu'il est facile, lorsque quelque chose est délicat, difficile, de créer une régie et de lui dire: Administrez! Il est beaucoup plus difficile de l'incorporer dans un ministère nouveau ou dans un ministère existant et d'en faire supporter la responsabilité tant par celui qui dirige le ministère que par l'équipe dont il s'entoure. Sinon, on risque d'assister à la mise en pratique de politiques qui ne correspondent pas du tout, mais pas du tout, non seulement au cabinet des ministres, non seulement au parti qui a formé la majorité gouvernementale, mais je dirais même souvent à aucune des politiques prônées par chacun des partis qui composent cette Chambre. Parce que nos lois le permettent, on arrive à l'établissement de pratiques qui sont absolument abusives, à mon sens, si on considère les gens pour lesquels on met en pratique ces règlements.

Je veux éviter de donner des exemples; ce serait, je pense, disgracieux. Je veux l'éviter parce qu'on pourrait interpréter cela comme de petites accusations personnelles ou quoi que ce soit. Mais il y a un exemple qui me frappe: c'est l'Office des autoroutes qui, à mon sens, n'est pas plus utile à cette province que le besoin qu'on aurait d'avoir 75 Assemblées nationales pour siéger. Cela pouvait parfaitement faire l'objet d'un service du ministère de la Voirie. C'est exactement vouloir multiplier les officines administratives. J'ai pris cet exemple parce que je pense qu'il est facile, en ce sens qu'il ne prête pas beaucoup à discussion. On ne me fera pas croire qu'un ministère de la Voirie rationnellement équipé, normalement administré, ne peut pas avoir une division qui s'occupe de la construction des autoroutes. Cela ne m'entre pas dans la tête, je regrette. Pourquoi l'a-t-on fait? Je ne le sais pas.

Je n'ai pas lu — j'aurais peut-être dû le faire — les débats qui ont entouré la création de cette loi. J'aurais peut-être dû prendre des renseignements.

M. HARDY: A l'époque, il n'y avait pas de journal des Débats.

M. VEZINA: S'il n'y avait pas de journal des Débats, évidemment, je ne peux pas le savoir. Il y a sûrement une raison qui, à mon sens, devait être difficile à dire carrément. Ce devait être des intérêts qui poussaient à la création de l'office alors que normalement, à l'intérieur d'un ministère bien équipé, on n'aurait pas eu cette régie. Il y en a bien d'autres.

Aujourd'hui, on voudrait que la Régie des services publics, et Dieu sait si on pourrait en parler longtemps...

M. PAUL: Est-ce que vous avez l'intention de rappeler la loi?

M. VEZINA: Quant à moi, on pourrait la rappeler demain matin.

M. PAUL: Il y a des formalités pour cela.

M. VEZINA: C'est pour cela que j'ai dit "quant à moi", je n'ai pas dit "quant au règlement". On voudrait que Radio-Québec et tous ces petits organismes tentaculaires jouissent d'un statut d'intouchables.

Mais ce sont souvent ces régies d'intouchables qui sont le plus influencées par la partisane-rie politique, peut-être pas des élus mais de ceux qui sont politisés.

M. BERTRAND: Le golf du Mont Sainte-Anne ou de Saint-Féréol relève-t-il d'une régie?

M. VEZINA: Pas encore. Nous l'avons gardé à l'intérieur d'un ministère.

M. PAUL: Mon honorable ami me permet-il une question?

M. VEZINA: Certainement.

M. PAUL: Vous savez toute l'estime que j'ai pour vous.

En écoutant ces propos et ces remarques au sujet des régies, dois-je comprendre que le député a l'intention de voter contre le bill 35 qui va donner des pouvoirs accrus à la Régie des services publics?

M. VEZINA: ... y arriver. Vous êtes toujours en avant de moi. Ah! ces jeunes députés avant-gardistes...

M. PAUL: Vous avez bien raison.

M. VEZINA: ... ils sont toujours à l'avant-garde.

M. PAUL: Clairvoyants.

M. VEZINA: II faut donc, dans les cas où nous avons besoin de tribunaux parajudiciaires, leur laisser la plus entière autonomie dans les décisions qu'ils ont à prendre. Mais dans l'établissement des politiques, une fois que le conseil des ministres établit, par règlement ou autrement, des politiques, ils se doivent de les suivre. Un exemple encore, justement pour éviter les sujets les plus délicats, en matière de transport. Il pourrait arriver que le gouvernement décide qu'il y a une politique de transport dans telle direction plutôt que telle autre pour telles raisons. Alors, pourquoi la régie dirait-elle: Non, nous, nous faisons notre politique. Vous, le gouvernement, ou vous l'Assemblée nationale, avez opté pour telle direction, telle pensée, nous, de la régie, nous décidons autrement, nous ne répondons à personne, nous décidons autrement.

Je dis que ce n'est pas ça une régie efficace. Une régie efficace doit permettre aux citoyens de faire valoir leurs droits devant elle, de les entendre objectivement, de ne subir aucune pression venant de l'extérieur mais d'appliquer les politiques que cette Assemblée ou le gouvernement aura exposées et qu'il voudra mettre en pratique. C'est ça une véritable régie efficace qui s'incorpore dans un régime démocratique.

On pourrait parler de la Régie des alcools...

M. PAUL: Elle est morte.

M. VEZINA: Ou d'une commission de contrôla de je ne sais pas quoi...

M. PAUL: Ne parlez pas des morts.

M. VEZINA: Mais, encore là, c'est trop litigieux. On pourrait parler de la Régie des eaux, elle est rendue devant la cour Supérieure, nous n'en parlerons pas.

M. PAUL: Cela c'est entre les mains du député de D'Arcy-McGee.

M. VEZINA: On pourrait parler de bien d'autres, mais c'est toujours de ces cas qui créent des politiques et qui prennent des positions qui sont absolument à l'encontre de ce que voudrait une majorité qui, à un moment donné, a la responsabilité.

M. BERTRAND: Qu'avez-vous contre la Régie des alcools?

M. VEZINA: C'est-à-dire que je n'ai rien pour.

Alors, Radio-Québec, actuellement, est déjà un fouillis et nous ne pourrons pas y toucher ni la réorganiser. On dira: Continuez, cela va bien, continuez, nous fermons les yeux, vous êtes indépendants.

Je souscris à l'idée du principe qui est donné dans ces lois qu'il faut que ces régies, et tout, relèvent de quelqu'un qui, si ça ne fait pas, puisse peut-être se défendre, d'accord, mais puisse subir la vindicte, si je puis dire, de l'Assemblée nationale, par ses comités ou ses commissions, qui permet au gouvernement d'établir des politiques qui seront suivies par des organismes administratifs. Autrement, c'est le plus beau monstre que nous allons nous bâtir au point de vue de l'administration. Et ça peut bien nous coûter plus cher. Cela nous coûte ce qu'il y a de plus cher dans toute la province de Québec, per capita, pour nous administrer. On dirait que l'on fait exprès — des quêteux à cheval — on fait exprès pour que ça nous coûte cher. Qu'on y mette de l'ordre un peu.

Cela ne veut pas dire que, sur les modalités, il n'y ait pas différents chemins pour arriver aux mêmes fins, je suis d'accord. Je peux dire, M. le Président —j'allais dire Votre Seigneurerie, mais c'est une question de temps, sans doute — que tout en reconnaissant le bien-fondé du ou des principes de ces trois lois, si le ministre veut bien juger à propos d'aller en commission parlementaire, d'entendre la ou les personnes ou les groupements qui peuvent avoir des points de vue sur cette nouvelle structure, cette nouvelle organisation, je serais en faveur, pour ne pas imposer par en haut des volontés. Il faut essayer de trouver un consensus...

M. BERTRAND: En faites-vous une motion?

M. VEZINA: J'en fais l'expression d'une opinion personnelle.

M. PAUL: Ayez donc le courage de vos idées jusqu'au bout.

M. VEZINA: J'en fais l'expression d'une opinion personnelle qui se veut au-dessus de toute partisanerie quelconque et marquée au coin de l'objectivité.

En terminant, j'aurais eu d'autres propos à tenir sur l'importance que j'accorde à la réorganisation de tout le système d'information ou de production d'information au Québec. Un de nos collègues déclarait récemment dans un journal qu'il avait constaté un vacuum politique au Québec. Je ne contesterai ni n'appuierai cette affirmation, mais, si elle était fondée, ce serait peut-être, justement, à cause du manque d'information qui peut exister au Québec, du manque d'information donnée par cette Assemblée nationale et par le gouvernement.

Quand on dit que, par exemple, on se fait poser des questions sur des lois qui ont été votées il y a, quelquefois, deux, trois, quatre ou cinq ans et que les gens demandent encore si la loi existe ou s'il y a une loi qui couvre telle chose, je dis qu'il y a quelqu'un qui n'a pas fait son devoir. L'Assemblée nationale d'alors a adopté une loi X. Il serait normal qu'il y ait eu de la publicité et qu'on ait rejoint les administrés pour leur faire connaître leurs droits et prérogatives en fonction de telle loi. Je pense que c'est essentiel. On l'a fait pour de grandes lois — j'appelle grandes lois celles qui ont eu beaucoup d'échos dans les journaux — mais non pour des lois qui étaient à caractère éminemment social. Je pense à la loi pour indemniser les victimes d'accidents d'automobile. S'il y a une loi à caractère éminemment social, c'est bien celle-là.

Il y a encore des gens qui ignorent qu'elle existe et qui nous demandent s'il n'y a pas un mécanisme qui puisse les aider. Quand on leur dit qu'il y a cette structure, cette organisation, ces gens-là pensent que c'est l'argent du gouvernement. Il faut encore leur expliquer le processus exact pour réunir le fonds requis.

Cela prouve seulement une chose: adoptons les lois les plus exceptionnelles que l'on voudra, prenons les décisions administratives les plus valables, si ceux pour qui les lois sont prises ne sont pas dûment informés, ne sont pas en possession de toutes les données de façon qu'ils puissent reconnaître leurs droits, leurs obligations, etc., vous allez tout simplement continuer d'élargir lamentablement le fossé entre les administrés et les administrateurs. Or, cela a toujours été la cause des mouvements révolutionnaires à travers le monde. Je pense que c'est une constante qui a pu s'accentuer à l'occasion de certaines guerres ou au cours de certains siècles, mais, fondamentalement, c'est toujours ce fossé entre l'autorité dûment établie et les administrés qui a créé des mécontentements, souvent non fondé. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.

M. Camille Samson

M. SAMSON: Quelques brèves remarques concernant les bills que nous discutons présentement. Evidemment, il nous apparaît assez clairement que la philosophie qui ressort de ces différents bills en est une où le gouvernement sera davantage le contrôleur de l'information. Le gouvernement, par ses bills 35, 36 et 37, le fera de façon permanente ou pourra le faire au bon loisir du ministre, puisque l'on donne dans ces bills des pouvoirs extraordinaires au ministre. Quel que soit le ministre en fonction — nous connaissons celui d'aujourd'hui, mais nous ne connaissons pas le prochain — ces ministres pourront réglementer par ces lois que nous discutons aujourd'hui l'information en provenance des différents ministères du gouvernement de sorte que nous pouvons soupçonner qu'elle pourra être facilement dirigée. De là, M. le Président, à nous demander si les lois 35, 36 et 37 n'instaureront pas au Québec l'équivalent de l'agence russe de nouvelles qui s'appelle l'agence Tass ou encore la Pravda, c'est exactement ce qui pourrait nous arriver.

Il pourrait nous arriver que seule l'information qui ferait l'affaire du gouvernement serait diffusée. En ce sens, si c'est là le but visé par le gouvernement, je n'ai pas l'impression qu'il a même besoin de discuter ces bills aujourd'hui parce que déjà le gouvernement actuel, le Parti libéral surtout, est passé maître dans l'art de faire de la publicité, maître dans l'art de faire de la propagande, maître dans l'art de faire croire. Vous savez, pour avoir réussi à faire croire à la population du Québec que ce gouvernement créerait 100,000 emplois en 1971, il fallait quand même être maître dans l'art de la publicité.

Or, si le gouvernement vise, par les bills 35, 36 et 37, de consolider davantage son équipe de publicité, il n'a même pas besoin de nous présenter ces bills. Il est déjà maître en la matière, il est déjà professionnel. Il est capable de réunir, par exemple, assez facilement, quelques milliers de personnes au Colisée de Québec et leur lancer un projet comme celui de la baie James, par exemple, où on nous a laissé entendre lors de cette mémorable assemblée que le projet de la baie James serait la relance économique de l'histoire du Québec, qu'il serait le grand projet, le projet du siècle même. Nous avons constaté assez facilement que lorsque la "balloune" est passée, la réalité est toute autre que ce qu'on nous présente par la publicité.

Le projet avait commencé par une dépense d'environ $8 milliards, si je ne me trompe, et déjà lorsque nous avons discuté du bill 50, on avait réduit cette somme à $4 milliards ou $5 milliards. Aujourd'hui, on entend parler d'une somme beaucoup moindre, peut-être $1 milliard ou $2 milliards. Alors, cela veut dire que si déjà le gouvernement est capable de faire cela,

lorsqu'il lui sera permis avec les bills que nous discutons présentement de créer de toute pièce le ministère de la propagande gouvernementale, qu'est-ce que nous pourrons avoir alors? A quoi pouvons-nous nous attendre, M. le Président?

Nous pouvons nous attendre à tout. Nous pouvons nous attendre à n'importe quoi de la part du gouvernement. Et si le gouvernement, actuellement, n'est pas capable de donner aux Québécois de l'information juste et vraie, ce n'est pas en formant un ministère de l'information ou de la propagande que nous allons avoir une meilleure information. Tout ce que nous aurons de plus qu'aujourd'hui, nous aurons collectivement, les citoyens du Québec, à payer pour la propagande du gouvernement et du Parti libéral. Ce sera la seule différence.

M. le Président, je voudrais souligner un point, pour démontrer jusqu'où nous ne pouvons nous fier à la publicité du gouvernement présentement. J'avais l'occasion, en cette Chambre, le 28 octobre dernier — c'est assez récent — de poser une question au premier ministre concernant la baie James. Voici, en question supplémentaire, ce que je lui demandais: "Une question supplémentaire, M. le Président. Peut-on savoir si le premier ministre s'est rendu, lui-même, dans cette région et s'il pourrait nous faire rapport de ce voyage, s'il y est allé? "

Voici ce que le premier ministre me donnait comme réponse: "Je me suis rendu dans la ville du député de Rouyn-Noranda, où j'ai été très bien accueilli, mais je n'ai pas visité la région de la baie James".

Voilà textuellement ce que le premier ministre me disait le 28 octobre dernier.

J'ai relevé, dans le journal La Frontière de Rouyn-Noranda, en date du 13 octobre 1971, un article qui est assez intéressant. Voici ce qu'on y dit. Le titre: "M. Robert Bourassa à la baie James. Rouyn, le 12 octobre. "Au cours de la dernière fin de semaine, M. Robert Bourassa rencontrait M. Pierre Nadeau, président de la Société de développement de la baie James, au poste de la Grande Baleine, au nord de la baie James". Et l'article continue.

Déjà, M. le Président — le ministère de la propagande n'est pas encore formé — nous ne pouvons pas nous fier à la publicité du gouvernement. En cette Chambre, lorsqu'un député dûment élu par la population et qui représente une population n'est même pas capable d'avoir une réponse qui corresponde avec les faits, Qu'est-ce que ce sera, M. le Président, quand nous aurons le ministère de la propagande?

M. PAUL: C'est vrai.

M. SAMSON: Pourrons-nous, en tant que députés élus, dûment mandatés par la population, poser des questions au ministre de la propagande? Pourrons-nous surveiller le ministre de la propagande? Pourrons-nous surveiller le ministère de la propagande? Pourrons-nous obtenir des réponses à nos questions? Pas plus lorsqu'on aura formé le ministère de la propagande qu'aujourd'hui, avant qu'il ne soit formé.

C'est de cette façon, M. le Président, que le gouvernement traite les élus du peuple. Même si nous sommes dans l'Opposition, vous savez, nous sommes élus au même titre que les députés qui forment le gouvernement. Nous sommes censés avoir les mêmes droits, les mêmes privilèges que les députés qui siègent à votre droite, M. le Président. Or, nous n'avons pas cela. Non seulement nous n'avons pas cela, mais dites-moi — que le futur ministre de la propagande me le dise — de quelle façon nous serons mieux informés par son ministère de la propagande libéral?

Quand, justement, cet après-midi, l'honorable député de Beauce posait une question au ministre des Affaires municipales, à savoir si les députés mandatés, dûment élus par la population pouvaient s'attendre à recevoir des copies de l'information qui a été transmise aux 1,585 municipalités du Québec, qu'est-ce qu'on a trouvé à répondre au député de Beauce? On a dit: Que le député aille s'informer auprès des maires des municipalités de son comté. Est-ce comme cela, M. le Président, qu'on traitera les élus de la population en cette Chambre? Est-ce que ce sera mieux lorsque nous aurons le ministère de la propagande? Est-ce que ce sera mieux lorsqu'on aura formé le ministère de la propagande? Alors que nous sommes les élus de la population et que nous sommes en droit de nous attendre d'obtenir au moins, en cette Chambre, l'information qui...

M. L'ALLIER: Un point d'ordre, M. le Président.

M. SAMSON: ... a été transmise aux différentes municipalités de la province...

M. LE PRESIDENT: Une question de règlement!

M. SAMSON: ... de Québec.

M. LE PRESIDENT: Une question de règlement!

M. L'ALLIER: Une question de règlement, M. le Président.

M. SAMSON: Il me semble que mon affaire allait bien. Vouss n'auriez pas pu rester assis, vous?

M. L'ALLIER: C'est pour vous laisser le temps de reprendre un peu votre souffle. De toute façon, il reste vingt minutes.

M. DUMONT: II en a!

M. L'ALLIER: M. le Président, nous avons accepté, au début de ce débat, de discuter d'une

façon assez large du principe des trois projets de loi. Je ne voudrais pas, cependant — je crois que ce serait mauvais pour l'ordre de ces débats — que nous fassions dévier, en fait, la discussion pour parler de l'information ou des réponses qui peuvent être données en cette Chambre. Dans aucun de ces projets de loi, ni avant qu'ils ne soient amendés, ni après qu'ils seront amendés, il ne sera question de l'information gouvernementale fournie à la Chambre, les organismes du gouvernement n'ayant pas cette responsabilité et l'information qui est fournie à la Chambre étant essentiellement sous la responsabilité des membres de cette Assemblée.

En d'autres mots, les projets de loi touchent des organismes de communication du gouvernement, d'information, de cinéma, Radio-Québec, plus particulièrement. Ces organismes n'ont aucune responsabilité quant à l'information ou quant aux renseignements qui peuvent être fournis en cette Chambre.

Je n'ai pas d'objection à ce que le député de Rouyn-Noranda discute de la qualité ou de la non-qualité de l'information fournie par les organismes ou par les ministères visés par les trois projets de loi que nous avons devant nous.

Je crois cependant que c'est déplacer le débat que de parler des informations qui sont fournies à cette Assemblée, qui, encore une fois, sont la responsabilité de ses membres.

M. SAMSON: M. le Président, j'apprécie grandement l'intérêt que porte le futur ministre de la propagande aux propos que j'ai tenus. Cependant, ça ne me fera changer en rien les idées que j'ai quant aux propos que j'ai l'intention de tenir ici aujourd'hui. Ces propos s'inscrivent dans le cadre du futur ministère de la propagande. Et c'est par voie de comparaison que j'ai cité les choses que j'ai été obligé de citer tantôt.

Le ministre conviendra avec moi que, si je voulais fouiller davantage, je pourrais amener d'autres comparaisons, sinon aussi bonnes que celle-là, peut-être meilleures. Je n'ai pas voulu être trop dur pour le ministre, que je respecte énormément, parce que ce n'est pas contre le ministre — et je voudrais bien qu'il le comprenne — que nous en avons. Nous en avons contre le futur ministère de la propagande. Et évidemment ce ministre sera peut-être le futur ministre de la propagande, à moins qu'on ne connaisse un remaniement ministériel à brève échéance.

Il sera sûrement très heureux de savoir que le carcan qui lui est réservé par le gouvernement ne lui permettra pas de faire passer les opinions ou les idées excellentes qu'il aurait peut-être à manifester. Il sera lui-même pris dans ce carcan. Et c'est en voulant lui rendre service que nous sommes obligés d'expliquer au ministre ce que sera le futur ministère de la propagande et dans quelle voie il s'en va présentement.

Quand il nous aura entendus, quand il nous aura compris — parce que j'espère qu'il va comprendre ce que nous disons — j'ai l'impres- sion qu'il va demander ou bien le retrait de ses bills ou bien d'être changé de ministère, parce qu'il ne voudra pas être celui qui va mettre en application ce ministère de la propagande au Québec. Je reconnais quand même que ce n'est pas dans la philosophie que nous connaissons du ministre actuel. Je me demande qui l'a amené à nous présenter ces bills. Je suis persuadé que le ministre a sûrement tourné en rond pendant plusieurs jours et plusieurs semaines avant de se décider d'amener ces lois devant le Parlement, parce que lui-même est convaincu que, si nous acceptons ces lois, si nous les laissons passer, il rendra un mauvais service à ses électeurs et aux électeurs du Québec dans son ensemble.

C'est tout simplement ça que nous aimerions faire comprendre au ministre. Nous aimerions lui faire comprendre que nous voulons lui venir en aide, parce qu'avec tous les pouvoirs que les bills 35, de même que 36 et 37 lui donneront ça équivaudra à retourner à environ 500 ans en arrière, retourner à l'époque des monarques, où le monarque avait tous les pouvoirs, où il était celui qui régissait tout.

Or, le ministre ne sera probablement pas le ministre de la propagande...

M. HARDY: C'est avant l'imprimerie. C'est fini, ça.

M. SAMSON: ...il sera le monarque de la propagande libérale au Québec. Alors, M. le Président, on pourrait facilement citer des éditoriaux assez intéressants sur le sujet. Nous ne sommes pas les seuls qui pensons comme ça. La population pense comme ça. Mais, malheureusement, elle n'est pas suffisamment capable de lever les boucliers et de venir dire au ministre ici à Québec, en grand nombre, qu'elle ne veut pas de ces bills. Alors, évidemment, nous avons le devoir de nous faire les porte-parole, non seulement des électeurs qui nous ont élus, mais de ceux qui vous ont élus et qui ne pensent pas comme vous présentement. Mais, puisque le gouvernement est déjà rendu dans les nuages, assez loin de la terre, il ne peut plus maintenant aller consulter la population. Qu'est-ce que vous voulez, M. le Président? Nous sommes obligés de faire le travail que les députés des banquettes libérales devraient faire, c'est-à-dire consulter la population. Puisque ça ne se fait pas, on va continuer à le faire et à renseigner le gouvernement du Québec sur les choses que pense la population.

Je pourrais citer un éditorial signé par Paul Gros d'Aillon en date du 25 mai 1971; ce n'est pas d'aujourd'hui, ces gens-là ont vu venir le ministère de la propagande et voici ce qu'il dit: "On sait que les problèmes de l'information ne sont pas les problèmes du grand public. Les citoyens vont réagir avec vigueur sur une augmentation de taxes ou sur une limitation des droits collectifs, mais ils assisteront, sans broncher, au bâillonnement des media d'information.

"II existe un préjugé naturel contre les tâcherons de la plume ou du micro et pourtant que vaudrait la démocratie sans la liberté de l'expression? L'un des droits que le public néglige le plus, parce qu'il le considère comme totalement acquis, c'est son droit à l'information. Il faut avoir vécu dans la privation de ce droit pour en mesurer l'importance". Lorsqu'on parle du droit à l'information, la seule possibilité que le public a d'être bien informé est par l'ensemble des media d'information du Québec, puisqu'ils sont de l'entreprise privée, ils sont en concurrence. C'est la seule possibilité que nous ayons d'assister au moins à l'équilibre.

D'accord, vous me direz que souvent des nouvelles sont interprétées, mais si on lit deux, trois ou quatre journaux par jour on pourra facilement déceler la vérité, parce qu'il y aura ces nuances de chacun des journaux. Mais si le gouvernement prend la maîtrise de l'ensemble, parce qu'il est capable de le faire en vertu des bills 35, de même que 36 et 37, où sera l'équilibre? Nous assisterons à l'emprise du gouvernement sur l'ensemble des media d'information.

Et Paul Gros d'Aillon continue en disant ceci: "Or, il se trouve que cette liberté est menacée. La levée de boucliers n'est cependant pas encore commencée. Seul la semaine dernière le Devoir a-t-il soulevé une partie du problème et commencé à montrer les dents. Nous fonçons dans le même sens et nous avons l'intention de mener une lutte sans répit pour protéger les droits du public".

Il continue en disant ceci: "De quoi s'agit-il? Tout simplement de la transformation subrepticement du ministère des Communications en ministère de l'Information-Québec. Les politiciens sont en train, sous prétexte d'un regroupement des juridictions provinciales en matière de communications — remarquez bien ce qu'il dit là — de tenter d'imposer une véritable dictature de l'information. Les bills 35, 36 et 37 ne sont pas autre chose qu'une mainmise totale du gouvernement sur la presse, la radio et la télévision. "Le premier à en faire les frais sera Radio-Québec qui, sous cette tutelle ministérielle ne devient rien d'autre qu'une officine de propagande au service des ministériels." Je pense que c'est assez clair, qu'on n'a même pas besoin de faire de commentaires sur l'excellent éditorial écrit par Paul Gros d'Aillon. Il continue en disant ceci: "L'Office d'information du gouvernement...

M. L'ALLIER: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. SAMSON: Vous n'allez quand même pas m'obliger à couper cet excellent éditorial de Paul Gros d'Aillon.

M. L'ALLIER: Une petite question.

M. SAMSON: Quand on cite, il faut citer jusqu'au bout.

M. L'ALLIER: Je voudrais savoir dans quel journal cela a été publié.

M. SAMSON: Ah! vous ne savez pas pour qui il travaille? Voyez-vous, M. le Président, comment ils vont être perdus quand ils vont avoir étatisé les moyens de communications. Ils ne savent même pas dans quel journal Paul Gros d'Aillon écrit, et c'est un de nos éditorialistes reconnus. Comment voulez-vous que le ministre ait le contrôle sur son ministère. Je lui ai dit tantôt qu'il sera le premier à être "encarcané". Il vient de me le prouver, il ne connaît même pas l'éditorialiste Paul Gros d'Aillon.

M. L'ALLIER: M. le Président, je pose la question parce que j'ai vu des articles ailleurs signés par le même auteur.

M. SAMSON: Ah bon! disons que c'était dans Montréal-Matin. Est-ce que vous en voulez un exemplaire pour vos dossiers? Il continue en disant ceci: "L'Office d'information du gouvernement, déjà démembré et privé de toute initiative, passe au rang des outils du pouvoir sous la coupe directe du ministre. Comme nous voilà loin des grandes déclarations de principe énoncées en 1969 par M. Jean Lesage." C'est un gars que vous connaissez, c'est quelqu'un que vous avez connu, Jean Lesage. Si vous ne le connaissez pas, je vais vous dire qui c'est, c'est le premier ministre actuel du Québec, c'est lui qui mène actuellement, Jean Lesage.

M. CROISETIERE: II écrit dans quel journal?

M. SAMSON: Etant donné qu'on veut fabriquer au Québec un ministère de l'information, il ne serait peut-être pas mauvais de dire au ministre de la future propagande ou au futur ministre de la propagande qu'actuellement le Québec est gouverné par un triumvirat dont les noms sont Jean Lesage, Paul Desrochers et Alcide Courcy.

Peut-être que le ministre pourrait prendre cela en note pour en faire la publication dès que sera formé le ministère de la propagande. Les citoyens du Québec seraient sûrement intéressés à connaître ceux qui mènent réellement le Québec présentement. Voici comment Paul Gros d'Aillon continue: "Nous sommes loin des grandes déclarations de principe énoncées en 1969 par MM. Jean Lesage et Yves Michaud, loin du contrôle parlementaire en comité mixte que demandaient ces deux parlementaires."

Mon doux Seigneur! Comme ils sont bons ces libéraux-là quand ils sont dans l'Opposition! Mais quand ils sont au pouvoir, ils font exactement ce que les autres faisaient avant qu'ils soient là.

Etant donné qu'ils sont tellement bons dans l'Opposition, étant donné qu'ils avaient tellement de bonnes idées, ce serait peut-être une suggestion à faire au peuple du Québec de les retourner dans l'Opposition dans les plus brefs délais, ce serait peut-être le meilleur service à rendre et à la population et au Parti libéral. Mais on continue en disant ceci:

M. PAUL: Vous n'applaudissez pas? Ils n'applaudissent pas.

M. SAMSON: Attendez, nous vous ferons signe quand ce sera le temps d'applaudir.

M. Paul Gros d'Aillon continue ainsi: "Mais ce n'est pas tout, le ministère veut s'arroger le droit de régir à son gré l'information toute entière, il veut aller jusqu'à réglementer l'admi-nistration, l'exploitation et la propriété de n'importe quel journal, poste de radio ou de télévision. Nous ne sommes pas loin de la censure. Le sens donné au terme communication, par le ministère de M. l'Allier permettrait au gouvernement d'intervenir à tous les niveaux de l'information écrite ou parlée."

J'ai dit cela tantôt, M. le Président, nous retournons 500 ans en arrière en donnant à un seul homme tous les pouvoirs, nous retournons à la monarchie alors que le monarque avait tous les pouvoirs. Je reconnais que le ministre ferait un beau monarque, je reconnais ça, il est joli, mais ce sera quand même un momarque de l'information ou de la propagande du gouvernement.

Paul Gros d'Aillon continue en disant: "De quelque manière que l'on considère le projet de loi, il sert de point d'appui à l'établissement d'un contrôle sur tous les messages d'information tout autant que sur les modes de transmission. Il est plus que temps de crier alerte. Nous espérons — et voici ce que disait M. Gros d'Aillon, cela va intéresser aussi nos collègues qui siègent du même côté, à votre gauche, M. le Président — que les partis de l'Opposition feront front commun pour parer au danger qui menace les problèmes de l'information." C'est peut-être bien loin du pain quotidien, mais le pain sans la liberté a un goût amer qui le rend indigeste.

M. le Président, je me demandais pour quelle raison le ministre n'avait pas pris connaissance de cet éditorial, je me demandais pour quelle raison le ministre ne s'en était pas inspiré.

Je n'ai plus besoin de me le demander. Le ministre a répondu à cette question en posant une question: Qui est M. Paul Gros d'Aillon? S'il ne connaît pas l'auteur, s'il ne savait pas dans quel journal l'auteur écrivait, encore moins pouvons-nous croire qu'il ait pris le temps de lire cet excellent article qui résume exactement la situation.

Or, je voudrais que le ministre prenne ces choses en considération. Je voudrais que le ministre, avec ses conseillers, prenne en considération les excellentes suggestions qui sont faites en provenance de l'Opposition à savoir que nous avons suffisamment d'organismes d'information et de publicité au Québec et que nous n'avons pas besoin d'un organisme gouvernemental. Nous n'avons pas besoin d'étatiser tout le monde. Dans les bills 35, 36 et 37, la possibilité est donnée au ministère, même au ministre puisqu'il a tous les pouvoirs, d'étatiser les moyens de communication. On pourrait même, à l'intérieur de ces juridictions qui seront données au ministre, assister à un effort vers l'étatisation généralisée des moyens de communication au Québec puisqu'il sera permis au gouvernement non seulement d'exploiter des entreprises gouvernementales, mais aussi de participer à l'exploitation des entreprises privées.

Quant on dit participer à l'exploitation des entreprises privées, de là à prendre le contrôle de ces entreprises privées déjà existantes, il n'y a qu'un pas. Evidemment, il y a un danger. Par exemple, avec tous ces pouvoirs que se donne le ministre, il pourrait arriver que même sans son consentement, des officiers de son ministère agissent — cela pourrait se faire — comme agents provocateurs de certains organismes de communication. Comme résultat —je cite en exemple la question du téléphone au Québec — on pourrait trouver toutes sortes de moyens pour obliger ces compagnies de téléphone à augmenter leur prix, à augmenter les taux pour leur donner plus de raisons d'entreprendre une campagne visant à les étatiser.

Or, à l'occasion de manifestations dernièrement, on entendait dire, justement: Ce n'est pas de notre faute, c'est parce qu'on nous a provoqués. Ce n'est pas notre faute, c'est la police qui a provoqué. Cela a créé des problèmes. Alors, si cela se dit ailleurs, cela se fait peut-être. C'est peut-être vrai qu'il y a eu provocation. Bien, cela pourrait se faire aussi au niveau du ministère de la propagande. On pourrait, de façon très rusée, provoquer une hausse des taux afin de donner au gouvernement de bonnes raisons pour entreprendre une campagne d'étatisation et, par le fait même d'étatiser l'entreprise privée, l'entreprise du téléphone au Québec. Les conséquences, nous les savons. Nous avons l'Hydro-Québec qui a été étatisée. Qu'estce que cela a rapporté comme conséquences? Augmentation des taux et augmentation du coût de l'administration. Les revenus que le Québec était en droit d'attendre de cette étatisation ne sont pas ceux qu'on nous a promis. Pourtant ici, dans une petite brochure qui a été publiée par le Bell Téléphone, nous voyons que cette compagnie est passablement taxée. Nous voyons que, pour sa part, Bell Téléphone a payé, en impôts directs, aux divers gouvernements, fédéral, provincial et municipaux, $172 millions en 1970. De plus, la compagnie a perçu et remis aux gouvernements en cause un montant supplémentaire d'environ $92 millions en impôts divers, ce qui forme un total de $264 millions ou l'équivalent de $44 par téléphone en service.

Cela, c'est l'enreprise privée, M. le Président,

qui donne un excellent service actuellement aux Québécois et qui opère à un coût moindre que ce serait si la même entreprise était étatisée. Or, justement, le ministre se donne des pouvoirs qui pourraient aller jusqu'à provoquer l'étatisation d'une compagnie comme Bell téléphone ou ses filiales. A ce moment-là, cela ne rendrait pas service à la population, mais lui permettrait d'être davantage exploitée pour les moyens de communications dont elle a besoin de se servir. M. le Président, comme il est six heures, je voudrai suggérer la suspension du débat.

M. LE PRESIDENT: Le débat est suspendu jusqu'à...

M. LEVESQUE: Vingt heures quinze, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: ...vingt heures quinze.

Reprise de la séance à 20 h 28

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!

L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, lorsque nous avons suspendu le débat, à six heures, j'en étais à discuter, à l'intérieur du cadre des bills 35, 36 et 37, de l'éventualité, pour le futur ministère de la propagande, d'en arriver, par ces lois, à susciter chez les entreprises privées qui exercent présentement au niveau des communications, par différentes méthodes aussi rusées les unes que les autres, des augmentations de taux aux abonnés. En ce qui concerne, par exemple, le cas de la compagnie de téléphone Bell ou de ses filiales, ce serait très possible. La provocation d'augmentations des taux aboutirait sûrement à une campagne qui pourrait être sous la juridiction du futur ministère de la propagande ou encore d'autres qui sont intéressés à étatiser davantage au Québec. Nous pouvons prévoir que le tout pourrait facilement déboucher sur une campagne pour l'étatisation des services de téléphone au Québec.

Or, j'ai dit cet après-midi que cette ou ces compagnies privées opèrent présentement à meilleurs coût que ne pourrait le faire aucune des entreprises d'Etat. La compagnie Bell, à elle seule — je peux le lire dans un dépliant qui a été publié — a versé, en 1970, la somme de $264 millions en impôts aux gouvernements provincial, fédéral et municipaux. Ce n'est sûrement pas à dédaigner.

On peut lire un peu plus loin que, depuis 1960, les impôts, par appareil, ont augmenté de 90 p.c. Ce taux d'accroissement est environ quatre fois plus élevé que celui des dépenses d'exploitation au cours de la même période. En 1970, la charge fiscale de Bell Canada a augmenté de 16 p.c. comparativement à celle de 1969.

On peut facilement prévoir que, si nous donnons davantage des pouvoirs au futur ministère de la propagande, évidemment le gouvernement a tous les moyens à sa disposition pour augmenter davantage les charges fiscales de cette entreprise privée et, par voie de conséquence, provoquer — puisqu'on pourra augmenter les charges fiscales — une augmentation des taux, parce qu'il est bien clair que, dans le domaine des entreprises privées, les actionnaires poseront des questions aux dirigeants si les profits baissent trop.

Si on augmente les taxes d'une part, c'est bien clair que les profits vont baisser et les actionnaires poseront des questions, ce qui fait que nous serons obligés d'assister à une hausse des taux. Une fois établie la hausse des taux, on donnera aux tenants de l'étatisation, des raisons de partir en campagne pour l'étatisation de cette entreprise privée, comme ce fut le cas pour l'Hydro-Québec en 1962/63.

Il est bien évident que nous ne pouvons

admettre une telle éventualité. Et justement, les bills qui nous sont présentés donneront au futur tsar des Communications — puisque c'est un tsar qu'on va nommer quand on aura accepté ces bills 35, 36 et 37; je disais cet après-midi que nous assistons à un retour en arrière d'environ 500 ans — les pouvoirs à une seule personne. On donne les pouvoirs au ministre à l'intérieur des bills 35, 36 et 37. Cela me fait dire qu'en étatisant les communications, en créant le ministère de la propagande, ça nous fait en même temps assister à la création de l'agence Tass du Québec.

Si c'est l'agence Tass du Québec, on pourrait facilement penser que le ministre est le tsar du Québec. C'est ce que nous ne voulons pas qu'il arrive, nous n'accepterons pas que ça arrive et nous n'accepterons pas non plus que le ministre soit pris à ce piège-là. Le ministre est en train de se laisser prendre au piège des technocrates de l'étatisation. C'est aussi simple que ça, c'est dans ce ministère-là comme dans les autres, les ministres changent mais les tsars dans les ministères ne changent pas.

C'est pour ça qu'en 1971 on nous présente des bills sur l'étatisation des communications, mais ça a commencé avant ça.

On a entendu aujourd'hui et la semaine dernière les orateurs du Parti libéral et de l'Opposision officielle qui se disaient entre eux que pendant que le Parti libéral était dans l'Opposition il disait les mêmes choses ou à peu près les mêmes choses que ce que dit l'Opposition officielle aujourd'hui, alors que l'Opposition officielle d'aujourd'hui était le gouvernement du temps, puis on proposait quelque chose qui ressemble à ça.

M. le Président, plus ça change, plus ça se ressemble. Plus ça change, plus c'est pareil et, justement, plus ça change, moins ça change. Plus on change les ministres, plus on change les gouvernements, s'il n'y a rien qui change à l'intérieur des ministères, si l'esprit à l'intérieur des ministères ne change pas, M. le Président, il n'y a rien de changé. On change les façades, on change l'empaquetage, mais on ne change pas le produit. C'est ce qui arrive à l'intérieur du ministère des Communications présentement.

Je voudrais mettre le ministre en garde parce que ces bills 35, 36 et 37 vont faire de lui un roi, vont faire de lui quelqu'un qui a les pouvoirs absolus, mais en même temps vont faire de lui un esclave de ces lois, un esclave de ces bills, un esclave de son ministère, un esclave des technocrates qui sont ceux qui ont préparé les bills 35, 36 et 37. Le ministre lui-même n'est sûrement pas convaincu de l'opportunité de voter en faveur de ces bills.

M. le Président, on est sur le point d'assister à la création de toutes pièces du ministère de la propagande libérale, on est sur le point de brimer les droits de l'Opposition, puisque si c'est le gouvernement qui contrôle la publicité, si c'est le gouvernement qui contrôle la propagande, qu'est-ce que l'Opposition pourra dire à ce moment-là? Qu'est-ce que l'Opposition pourra faire comme publicité si on contrôle en partant du gouvernement? Je voudrais donc mettre le ministre en garde, parce que, justement, au moment où il pense tout étatiser, au moment où il pense tout contrôler, au moment où il pense former un ministère de la propagande, eh bien, en même temps, M. le ministre, si vous voulez m'accorder quelques instants...

M. LEDUC: II vous écoute continuellement.

M. SAMSON: Le ministre est en train de discuter avec le ministre de la Voirie. Il pourra peut-être reprendre cela ce soir; ses chemins pourront attendre jusqu'à demain. Au même moment, M. le ministre, où vous êtes en train de parler, de discuter sur un bill, pour former le ministère de la propagande, voici ce qui se passe dans les CEGEP et les universités du Québec. Un communiqué, un trac a été distribué aujourd'hui par la CSN. Voici ce qu'il dit: Etudiants, travailleurs, les syndicats sont maintenant prêts à considérer l'étudiant comme un travailleur au même titre que l'ouvrier.

Cela veut dire que l'étudiant doit nécessairement prendre conscience de ce qui se passe à l'extérieur de son CEGEP ou de son université. Cela veut dire que les étudiants doivent travailler conjointement avec les ouvriers pour créer une force valable afin de se protéger et de faire valoir leurs droits sociaux communs. Cela veut dire aussi que les étudiants doivent appuyer les revendications faites par les travailleurs; c'est pourquoi nous devons appuyer concrètement les gars de Lapalme." C'est signé: "Manifestons avec les gars de Lapalme. Rendez-vous au 155 Charest Est, etc., jeudi 4 novembre 1971." C'est distribué pas la CSN.

Au moment où vous vous apprêtez à prendre le contrôle de la propagande, on passe des tracts comme ceux-là aux étudiants dans les universités, dans les CEGEP pour les inciter à sortir des universités et des CEGEP pour aller dans la rue participer à la manifestation qui a lieu ce soir avec les gars de Lapalme. Nous ne savons pas de quelle façon se terminera cette manifestation. On sait toujours comment ça commence mais on ne sait jamais comment ça finit. La preuve, nous l'avons eue vendredi soir dernier à Montréal.

Au lieu de perdre du temps à penser à des lois pour enrégimenter la propagande qui serait saine de la part des autres partis politiques, de la part des journaux responsables à travers le Québec, vous devriez prendre plus de temps pour surveiller ce qui se passe, alors qu'on enrégimente nos étudiants actuellement par l'entremise de la CSN ou de Chartrand, à Montréal, ou de Lemieux, par exemple. Ils sont invités plus souvent qu'à leur tour à aller visiter les étudiants dans les universités et les CEGEP pour essayer de les enrégimenter.

Je crois que ce gouvernement doit prendre ses responsabilités. C'est assez de temps de

perdu. On perd déjà assez de temps à vouloir enrégimenter la publicité dans la province de Québec et à vouloir prendre la maîtrise absolue et complète des media d'information ainsi que des moyens de communication. On en aurait beaucoup à dire. Evidemment, nous considérons que le ministre a voulu, dans son bill, affirmer quelque peu les droits du Québec en matière de communication. Dans ce domaine-là, si on regarde les bills — je n'ai pas l'intention de parler des articles, M. le Président — à un certain article du bill 35 ou 36, on retrouve l'affirmation de certains droits.

Au dernier article du bill, on dit que le bill sera appliqué sauf l'article où on affirme nos droits. Cela veut dire que, d'un côté, on affirme et, de l'autre côté, on n'est pas trop certain.

Or, j'ai justement ici, M. le Président, dans ce domaine-là, un article du Soleil du 9 décembre 1970. Ce n'est pas d'hier que des gens pensent aux juridictions dans le domaine des communications. C'est un article écrit par Claude Tessier, titré: "Les gouvernements doivent répartir leur juridiction respective dans le domaine des télécommunications. Le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec doivent s'asseoir à la même table pour discuter de leur juridiction respective dans le domaine des télécommunications afin de clarifier une fois pour toutes la situation". Nous en sommes. "Pour le président de Québec Téléphone, M. Bénéteau, il est anormal qu'en 1970 le monde complexe des télécommunications soit régi par une entente qui date de 1867. Il nous apparaît urgent que les autorités des gouvernements fédéral et provincial se penchent sur la situation et s'efforcent d'y apporter, dans le plus bref délai, les mesures correctives qui s'imposent, dit le président du plus grand réseau de téléphone indépendant du Québec. M. Bénéteau propose la création d'un conseil général des télécommunications similaire au conseil général de l'industrie qui réunirait les spécialistes, les industriels et les exploitants des télécommunications. "Ce conseil général des télécommunications pourrait conseiller le ministère des Communications du gouvernement du Québec sur les mesures à prendre dans ce domaine. M. Bénéteau a fait cette proposition au cours d'une conférence au club Rotary de Québec".

M. le Président, si les bills n'étaient que l'affirmation de nos droits et de certaines juridictions en matière de télécommunications, nous en discuterions dans un esprit différent, mais ce qui ressort surtout de ces bills-là, c'est l'empiétement que le gouvernement entend faire dans le domaine des communications, de la presse, de la radio, de la télévision et aussi les pouvoirs que se donne le ministre. Lorsque nous voyons dans ces bills que le gouvernement pourrait s'approprier certaines actions dans les entreprises privées, nous sommes réellement inquiets. Nous nous demandons à quel moment le gouvernement prendra le contrôle complet de l'ensemble des média de publicité au Québec.

Si on se base sur le bill, on peut voir que le ministre se réserve des pouvoirs extraordinaires. A ce moment-ci, cela correspond à l'esprit des lois qui nous sont suggérées depuis déjà un bout de temps. On nous propose une loi qui n'est pas plus claire qu'il le faut et on se réserve le droit d'appliquer cette loi par voie de règlements. La réglementation, on a connu ça pour le bill 23, on a connu ça pour tous les bills qui nous sont présentés. On nous présente un bill qui ne veut pas dire grand-chose et on se réserve tous les droits de passer des règlements qui auront force de loi par la suite. Cela n'est sûrement pas normal. Est-ce que le gouvernement se rend compte ou est-ce que le gouvernement admet que tous les députés en cette Chambre sont mandatés, que tous les députés en cette Chambre représentent des électeurs? Quand on nous fait adopter des lois et que le gouvernement se réserve par la suite le droit de fonctionner par voie de réglementation, cela veut dire qu'on se fout des députés de cette Chambre. On se fout de l'Opposition. On se fout de ceux qui sont élus par la population pour la représenter.

Or, je pense que le gouvernement devrait, à ce moment-ci, faire un examen de conscience sérieux non seulement pour les bills 35, 36 et 37, mais pour les lois futures, pour celles dont on n'a pas encore discuté. Qu'on cesse donc de nous préparer de la législation où on se réserve tous les pouvoirs par la suite, où c'est le conseil des ministres, le lieutenant-gouverneur en conseil qui décide tout par la suite.

On n'a pas besoin d'aller plus loin. On a justement assisté cet après-midi, de la part d'un ministre, à un refus d'instruire ou d'informer les députés de cette Chambre. Si on procède par réglementation, est-ce que le gouvernement fera les efforts nécessaires pour nous donner toute l'information? Je crois que non. De ce côté-là les efforts ne sont pas sérieux. On n'est pas prêt à informer les députés, mais pourtant, pour ce qui est de la publicité, là, on y va, là, on est prêt, là, on est maître en la matière.

Je le disais cet après-midi et je pourrais le répéter toute la soirée et j'aurais encore raison, le gouvernement n'a pas besoin des bills 35, 36 et 37 pour prendre le contrôle de la propagande, pour faire la propagande du Parti libéral. Il est parfaitement capable de le faire sans les lois qui nous sont présentées actuellement. Il l'a prouvé d'ailleurs.

M. le Président, le ministre aurait tout intérêt à retirer ces bills avant qu'il ne soit trop tard. Il sera l'esclave de ses propres bills et il sera probablement celui qui, le premier, voudra revenir devant la Chambre pour les amender, mais comme il sera trop tard, comme il en sera devenu l'esclave, il devra porter l'odieux des bills 35, 36 et 37. Je demande au ministre de prendre en considération cette suggestion. Retirez-les pendant qu'il est encore temps et si vous refusez de les retirer, le moins que vous puissiez accepter, c'est que vous envoyiez les bills en commission parlementaire pour que les intéres-

sés, les experts dans le domaine des communications puissent venir témoigner devant cette commission parlementaire, et que nous connaissions le son de cloche de l'entreprise privée en ce qui concerne le bâillonnement que vous vous apprêtez à faire en ce qui concerne l'étatisation de l'entreprise privée.

Le ministre devrait prendre en sérieuse considération ces suggestions que nous lui faisons avant qu'il ne soit trop tard. N'attendons pas d'assister à la naissance de l'agence Tass du Québec avant de réagir. Les députés du côté du gouvernement devraient réagir immédiatement. S'ils ont encore le droit de parole en cette Chambre, qu'ils ne laissent pas uniquement le ministre défendre son bill. Je suis persuadé que les députés du côté du gouvernement ne sont pas d'accord avec l'étatisation qu'on est en train de faire du domaine des communications. Je suis persuadé qu'ils en auraient long à dire si on les laissait parler. Mais comment voulez-vous que le gouvernement retire ses bills? Comment voulez-vous que le gouvernement se retire le droit de prendre le contrôle de la propagande du Parti libéral alors qu'il ne laisse même pas la liberté à ses députés de s'exprimer en cette Chambre, et pas seulement sur les bills 35, 36 et 37? Les députés du gouvernement sont ceux qui parlent le moins souvent. Laissez-les donc parler. Ils ont quelque chose à dire et alors vous verrez que les députés du gouvernement sont des gens qui, eux aussi, ont des électeurs à représenter en cette Chambre, qui, eux aussi, ont des opinions à faire valoir.

S'ils vont dans leur comté aussi souvent qu'ils le laissent entendre, à ce moment-là, ils viendront dire, en Chambre, ils viendront dire ici, à Québec, ce que les électeurs réclament d'eux. Ce que les électeurs réclament d'eux, M. le Président, ce n'est sûrement pas le ministère de la propagande du Québec.

M. LE PRESIDENT: Le très honorable député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: C'est le cas de dire, M. le Président, que vous me donnez au moins "la palme" ce soir.

M. le Président...

M. LEDUC: Très honorable Président.

M. PAUL: Je vais être obligé de m'asseoir.

M. le Président, vous ne sauriez croire comme nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt le parrain de ce projet de loi. Nous l'avons pris en pitié. Nous avons constaté qu'il était cette colombe, entre les mains du cabinet, pour tenter d'être l'instrument de la décapitation de la liberté de presse au Québec.

Le ministre des Communications s'est candidement levé et il nous a demandé d'appuyer le principe du projet de loi no 35. M. le Président, je me demande si on n'aurait pas dû commencer par le bill 37, suivre avec le bill 36, pour finir par le bill 35. Si le ministre nous avait présenté son projet de loi au printemps, comme le signalait le très illustre collègue de Chicoutimi, je crois qu'il aurait probablement ébranlé quelque peu notre confiance. Il a un visage angéli-que. Nous ne pouvions soupçonner, à ce moment-là, qu'il était l'exécutant des hautes oeuvres de la mise en place d'un ministère de la propagande.

Ne vous sauvez pas, messieurs les ministres. Restez. Nous aurons de bonnes petites nouvelles. Vous verrez comment vos collègues du cabinet ont réagi, un jour, lorsque le bill 11 fut présenté.

M. LEDUC: Cela, ça va être bon.

M. PAUL: Oui, Surtout votre motion à vous, honorable et très distingué collègue, que l'on peut retrouver dans les comptes rendus des débats de la Chambre, spécialement dans le cours du mois d'octobre 1969.

M. LEDUC: C'est cela.

M. PAUL: Nous espérons que ce soir vous ferez comme d'autres collègues, que nous entendrons le coq du reniement.

M. le Président, le ministre nous arrive trop tard avec sa loi. Je vois arriver mon très digne ami, le député de quel comté?

UNE VOIX: Notre-Dame-de-Grâce.

M. PAUL: De Notre-Dame-de-Grâce. Je lui ferai la grâce, tout à l'heure, de lire une excellente déclaration.

Pour ceux-là qui n'ont rien à faire, qui ne comprennent rien dans le débat, je vous invite à lire toute la saveur que l'on retrouve à la page 1754 des débats de l'Assemblée nationale, alors que l'humble député de Notre-Dame-de-Grâce exposait des grands principes de pureté qu'on ne retrouve plus chez lui hélas!

Je me demande si le ministre, à toutes fins utiles, ne s'est pas laissé tromper. On lui a demandé de présenter le bill 35 intitulé Loi modifiant la loi de la Régie des services publics. Je n'ose pas faire une motion pour changer le titre de la loi, mais je suis sûr que le ministre réalise déjà qu'à toutes fins utiles cette loi pourrait s'intituler: loi privant la Régie des services publics de son autonomie, ou encore loi abolissant les pouvoirs d'action de la Régie des services publics. Et là nous aurions la traduction exacte du principe que l'on retrouve dans ce projet de loi.

C'est beau, sous le couvert de la plus pure innocence, de nous inviter à la piété et à la confiance à l'endroit du gouvernement et de son exécuteur, non pas testamentaire, mais de son meurtrier, c'est grave, de la liberté...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): H y a une loi de l'indemnisation.

M. PAUL: Et je me demande s'il ne sera pas tout à fait qualifié pour être le premier à bénéficier du bill 83 que nous avons adopté cet après-midi parce qu'il est victime d'une machination machiavélique de la part de ses collègues du cabinet. Et lui, on a voulu l'allier à ce groupe de parlementaires qui ont siégé dans cette Chambre. L'honorable ministre à ce moment-là était un fidèle et modèle employé du ministre des Affaires culturelles. Il ne sait pas...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'étais son modèle.

M. PAUL: ... ce qui s'est passé ici. Et voici qu'on lui demande de décapiter son collègue de pupitre, le ministre des Affaires culturelles.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II est même déjà parti.

M. PAUL: Je suis sûr que l'honorable ministre, ce soir, est à la première de l'opéra Samson et Dalila ici, à Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas Samson et Dalila puisque Samson est ici.

DES VOIX: Dalila aussi.

M. PAUL: Je dis que c'est par sympathie pour le député d'Ahuntsic que nous nous opposons au principe du projet de loi no 35. Est-ce que le ministre a consulté son collègue des Affaires culturelles pour la publication d'une brochure, d'un livre vert — nous passons du blanc au vert — pour une politique québécoise des communications? C'est là, à la page 38, que nous voyons que les films d'information ou à caractère éducatif, les photos, tout ça, vont maintenant relever du Goebbels du gouvernement Bourassa lorsque la loi aura été adoptée.

Et dire qu'on se sert du ministre innocent — dans ce sens qu'il y va avec une grande franchise — on lui demande d'exposer dans cette Chambre la politique du gouvernement. Il a fait foi à ses collègues du cabinet. Et je suis sûr ce soir qu'il a honte de faire partie de cette équipe.

M. le Président, il faudrait qu'il soit beaucoup plus clairvoyant avant d'être l'exécuteur des hautes oeuvres de papa Doc. M. le Président, le projet de loi no 35 va donner au ministre une juridiction et une autonomie "tsarines".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tsaristes.

M. PAUL: Tsaristes, pardon. Merci, mon cher collègue.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tsarine, c'était la femme du tsar.

M. PAUL: C'était Dalila. Bon, continuons.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous faisons de l'autocritique, nous.

M. PAUL: C'est libre chez nous. On trouve, dans les notes explicatives, que "le projet de loi 35 a principalement pour objet d'attribuer à la Régie des services publics une compétence à l'égard de toutes les entreprises de communications relevant de la compétence législative du Québec, tout en prévoyant que le régie devra — remarquez bien — se conformer à la réglementation adoptée par le lieutenant-gouverneur en conseil sur la recommandation du ministre des Communications."

Nous avions un organisme, la Régie des services publics, dont les membres sont d'une compétence reconnue, et dont l'efficacité également est appréciée de tous et voici que l'omnipuissant ministre, titulaire du ministère de la propagande, va imposer ses vues, sa politique à messieurs les régisseurs. Quelle liberté d'action auront maintenant les membres de la régie publique pour s'autodiscipliner ou pour adopter des règlements administratifs pour la bonne marche de la Régie des services publics?

M. le Président, il faudra maintenant attendre le nihil obstat du ministre des Communications. Nous sommes devant une trilogie. On sait qu'une trilogie, c'est une série de trois oeuvres dont les sujets font suite les uns aux autres. C'est pourquoi le ministre, sachant fort bien qu'il était placé dans l'obligation de défendre une trilogie, nous a demandé de mettre de côté certaines règles de procédure pour pouvoir embrasser du même coup les différents principes que l'on trouve dans les projets de loi 35, 36 et 37.

M. le Président, je suis sûr que le ministre connaît très bien cet axiome : Qui trop embrasse mal étreint. Le ministre n'étant pas satisfait, pour la mise en application de sa politique des Communications, d'avoir décapité son collègue, le ministre de Affaires culturelles, veut maintenant imposer ses vues à ses collègues du cabinet qui devront l'écouter.

C'est là que nous voyons, dans le projet de loi 36, que les sept membres de l'ORTQ, dont le président et le vice-président, seront nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil sur la recommandation dû ministre des Communications. Dans les autres lois, on dit que le lieutenant-gouverneur en conseil nomme M. X, Y, Z à tel ou tel poste. Mais non, dans cette loi c'est le ministre des Communications qui va faire ses recommandations à ses collègues du cabinet pour la nomination des nouveaux commissaires à l'ORTQ.

On sait que l'objet de l'Office de radio-télédiffusion du Québec est complètement mo-

difié. Au lieu d'un service complet de radio-télédiffusion, voilà que cet organisme est maintenant réduit à un service de production. Cette production, il la réalise à la demande du ministre, selon ses normes, selon ses débats, selon ses caprices, suivant ce qu'il a décidé, le tout entériné et sanctionné par ses collègues du cabinet. L'ORTQ ne deviendra qu'un exécutant technique de la politique du ministre des Communications.

D'ailleurs, après avoir décapité, à l'insu même du ministre des Affaires culturelles, cette partie qui était de sa compétence, l'Office du film, on a également décapité l'OIPQ. Pas le ministre lui-même, mais par personne interposée. Nous allons assister à la dissolution pure et simple de l'OIPQ. Cette disparition marquera la fin d'un régime où un homme, M. Laurent Laplante, pouvait dire au ministre: Je refuse de communiquer telle information ou de la faire de telle façon pour motif d'intégrité politique de la presse. Qui reste en fonction à l'OIPQ? Personne, deux ou trois employés. Où sont les autres, M. le ministre? Pourquoi ont-ils démissionné?

Est-ce que, par hasard, ils avaient reçu mandat de faire de la propagande politique? L'honnêteté professionnelle des hommes en place les a purement obligés à démissionner. C'est curieux de voir les silences. Je comprends que mon bon ami le leader du gouvernement, dans sa sagesse reconnue, n'avait pas voulu, en 1969, participer au débat autour du projet de loi no 11, vous non plus, M. le Président, vous n'aviez pas voulu participer à ce débat.

Mais il y en a d'autres qui nous ont fait des déclarations de principe — c'était à pleurer — et on nous dira aujourd'hui que nous voulons renier notre passé et la philosophie qui présidait à la base de la présentation du projet de loi no 11. Non, M. le Président. Nous avons, à cette époque, crée un organisme nouveau. Il nous était impossible de procéder autrement. Mais nous avons vu des hommes d'expérience comme mon bon ami, l'honorable député de Drummond, un député obscur qui siégeait à l'arrière ici, c'était le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui a participé au débat et il y avait mon bon ami, le député de Taillon.

M. LEDUC: Brillant garçon.

M. PAUL: Brillant, je l'admets, mais pas encore assez brillant pour que ses mérites soient reconnus par son chef.

M. le Président, il y avait également l'honorable ministre de la Justice, il y avait l'honorable Jean Lesage, le grand maître penseur du premier ministre actuel... You are right, Sir, because the former Prime Minister was a better Prime Minister than Mr. Bourassa.

M. LEDUC: Cela, ce n'est pas gentil et ce n'est pas vrai.

M. PAUL: M. le Président, il y avait également le distingué député de Gouin, celui-là même qui un jour a été catalogué comme étant la grosse Bertha du parti libéral. A ce moment-là les ministres d'aujourd'hui, alors qu'ils étaient de simples députés, nous...

Disons qu'en ce jour de la fête de Lapalme et à la veille de la venue de M. Tito je veux être charitable.

M. DEMERS: Les frères Lapalme.

M. PAUL: C'était encore mieux que... M. le Président, le projet de loi no 36, c'est là que le ministre prend son autorité. Lui, le grand seigneur, le commandant des forces armées de la propagande libérale, il sera l'écho de papa Doc. Regardez-le, M. le Président, il rit, il réalise qu'il a été victime d'une machination diabolique.

UNE VOIX: Pauvre petit diable.

M. PAUL: J'ai assez hâte d'arriver au point où je vais vous lire la déclaration de mon excellent ami le député de Notre-Dame-de-Grâce que j'ai quasiment envie de succomber tout de suite au désir que j'ai. Mais non, je vais le faire attendre parce que je voudrais vous dire un mot de cette autre loi de la trilogie que nous présente le ministre, le projet de loi no 37. A 35, sous le couvert de l'innocence, on nous demande d'adopter une loi; 36, ce sont les pouvoirs que l'ORTQ va maintenant posséder et 37, ce sont les transformations à l'intérieur du ministère des Communications. Quel scandale, M. le Président, en 1969, quand nous avons mis sur pied l'ORTQ! Je sais que vous avez suivi ces débats avec intérêt...

UNE VOIX: Dans le temps, oui.

M. PAUL: ...que vous n'approuviez pas la politique de vos collègues. C'est ce qui fait qu'aujourd'hui, avec la haute position que vous occupez, vous avez une liberté de pensée qui vous permet de mieux apprécier la logique des arguments soulevés par mon distingué collègue, le député de Chicoutimi, qui, d'ailleurs, m'a inspiré moi-même pour faire une intervention bien imparfaite comparée à la sienne.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mon humilité en prend un coup.

M. PAUL: Si cela pouvait le faire engraisser, au moins!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'en passerai au député de Beauce, si j'en ai trop.

M. PAUL: Le ministre, le tsar, l'empereur, le Goebbels du gouvernement...

UNE VOIX: Le pape de la propagande.

M. PAUL: Non, le pope de la propagande, j'aime mieux laisser cela à Claude Ryan, éditorialiste au journal Le Devoir, c'est effrayant comme il ne parle plus souvent. En 1969, il disait que les loups rôdaient autour de la bergerie. Je me demande si les loups l'ont mangé parce qu'on n'en entend plus parler.

Voici que le ministre, cet humble fonctionnaire qui, heureusement, a reçu une excellente formation au contact de son ministre, le député de Chicoutimi, va maintenant décider du droit de vie ou de mort de tout ce qui regarde de près ou de loin l'information au Québec. Si Louis XIV disait un jour: "L'Etat, c'est moi! ", lui se lèvera dans cette Chambre et d'une voix d'autorité dira: L'information, c'est à moi. C'est triste de ne pas avoir informé le ministre de l'information de tous les pièges qui se cachent dans ces projets de loi.

On va nous dire: Vous reniez la politique que vous avez adoptée lors de la présentation du projet de loi 11. Je dis non. Nous voulons voir si les hommes de l'autre côté étaient sincères lorsqu'ils siégeaient de ce côté-ci. Les grands principes de vertu qu'ils ont défendus en 1969, c'est le temps de les appliquer. C'est le temps de faire en sorte que la politique ne soit pas un instrument facile entre les mains d'un seul ministre et que la propagande ne soit pas au service exclusif de l'incompétence qui caractérise tous les ministres du gouvernement actuel.

UNE VOIX: C'est plus vrai que c'était.

M. PAUL: II y a eu d'excellents commentaires sur le principe. Imaginez-vous que mon très distingué ami, l'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. TETLEY: Notre-Dame-de-Grâce. Notre-Dame.

M. PAUL: ... s'était élevé contre l'indécence que l'on retrouvait dans ce projet de loi no 11, parce que nous osions avoir une provision dans la loi à l'effet que des fonctionnaires pouvaient être nommés membres de l'ORTQ. Voici qu'à l'article 1 du projet de loi 36 on lit que les membres de l'office "peuvent être choisis parmi les fonctionnaires du gouvernement ou d'un organisme qui en relève." Le député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. TETLEY: Cela a été mon meilleur discours.

M. PAUL: Avez-vous remarqué, M. le Président, son meilleur discours. Il va être assez difficile pour lui de voter pour le principe du bill 35. On va relire ce qu'il a dit à la page 1754 des Débats du 16 mai 1969: "Je pense au code civil... Le grand juriste! D'ailleurs, c'est un gouvernement qui se caractérise par ses juristes. Vous avez le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez le député de Gatineau. Il nous fait des déclarations qui bouleversent le monde juridique. Je continue. "Je pense au code civil parce que les articles que j'ai cités nous réfèrent à ce code." C'est bon, ça. "L'article 1701 dit: "Le mandat est un contrat par lequel une personne, qu'on appelle le mandant, confie la gestion d'une affaire licite à une autre personne qu'on appelle le mandataire et qui, par le fait de son acceptance, l'oblige à l'exécuter."

Le gouvernement confie quelque chose à l'office et l'office est son mandataire en droit et doit suivre les instructions du gouvernement."

L'article 1709 dit: "Le mandataire —c'est à dire l'office — est tenu d'accomplir le mandat qu'il a accepté et répond des dommages et intérêts, etc."

L'article 1710 dit: "Le mandataire, dans l'exécution du mandat, doit agir avec l'habilité convenable et tous les soins d'un bon père de famille mais surtout et toujours en vertu des instructions du gouvernement ou du lieutenant-gouverneur."

Là, M. le Président, nous voyons plus loin que le ministre actuel passe par une crise de conscience qui l'oblige, à cette époque-là, à voter contre le projet de loi no 11. Cependant, l'Office de radio-télédiffusion du Québec avait une certaine dose d'indépendance et d'autorité. Mais aujourd'hui, tout cela tombe sous la férule du ministre des Communications. Si le ministre a fait son meilleur discours le 16 mai 1969, j'espère qu'il va se lever et nous dire pourquoi aujourd'hui il va voter pour le principe des projets de loi 35, 36 et 37.

M. DEMERS: Demandez-lui de le répéter.

M. PAUL: M. le Président, il y avait un éditorial qui a paru dans le journal Le Soleil et qui commentait la présentation du projet de loi no 11. M. Dubé, éditorialiste, écrivait ceci: "Si l'on veut venir à utiliser Radio-Québec, il faut de toute nécessité prendre le moyen de le soustraire à toute intervention possible de l'un ou de l'autre membre du gouvernement. Le moins que l'on puisse exiger, c'est que l'on fasse une société de la couronne." Vous vous rappelez que mon collègue, le député de Chicoutimi, a parlé de régie indépendante. D'ailleurs, c'est ce que voulait... M. le Président, je sais que vous regardez l'heure. Mais je suis convaincu que mes collègues ne s'opposent pas à ce que je continue!

M. DEMERS: Non, parlez-en au leader!

M. PAUL: D'ailleurs, j'en ai parlé au leader. En poussant plus loin le raisonnement, je me demande si je n'aurais pas droit à une heure et demie parce qu'il s'agit de trois principes, de trois lois que nous étudions dans une seule. De toute façon, disons que personne ne s'aperçoit de l'heure et que je continue en disant que le moins que l'on puisse exiger, c'est que l'on fasse

une société de la couronne. Mon collègue, le député de Chicoutimi, a mentionné la nécessité de mettre en place des régies indépendantes et non pas des marionnettes entre les mains d'un gouvernement et surtout d'un ministre, bien intentionné aujourd'hui mais qui devra subir l'autorité du "brain trust" en place au bureau du premier ministre sinon il se verra décapité ou il sera victime d'un transfuge ou d'un transfert. Transfuge, M. le Président, j'en passe! "S'y joint singulièrement le fond même de ce débat: Radio-Québec devenant une société d'Etat, jouissant d'un large statut d'indépendance par rapport aux pouvoirs politiques." M. Dubé ajoute: "Le jour où l'on voudra ajouter à l'action que Radio-Québec peut jouer dans le domaine de la radiodiffusion éducative une extension qui lui permettra de toucher à toute l'activité gouvernementale, il faudra, de toute évidence, se faire une société d'Etat à l'abri de toute ingérence politique." A quoi assistons-nous, M. le Président? Nous allons, nous, contribuer à la mise en place d'un ministère de la propagande? Non, M. le Président. Pas parce que nous sommes dans l'Opposition mais parce que nous ne pouvons pas tolérer la mise en place d'un tel instrument de propagande politique partisane entre les mains du gouvernement, par la voix de son ministre des communications.

M. le Président, il serait intéressant de vous lire ce que disait le bouillant, dynamique et volubile député de Gouin, le vendredi 16 mai 1969. L'honorable député de Gouin disait ceci: "Le vrai problème qui nous confronte aujourd'hui n'est donc pas de décider si oui ou non le gouvernement du Québec entrera dans le champ de la radiodiffusion, il y est déjà depuis un an. Le vrai problème, c'est de décider si l'Assemblée nationale donnera son approbation à un projet de loi dont le principe même — et j'insiste là-dessus — vise, par son absence de mécanismes de contrôle, la mise en tutelle, par l'exécutif, de l'ORTQ".

M. le Président, c'est drôle. Nos ministres actuels dormaient lorsqu'on a discuté du principe de ces lois au cabinet des ministres ou ils n'ont pas été consultés. C'est seulement au fur et à mesure que les débats se déroulent qu'ils saisiront le reniement des grands principes qu'ils ont exposés dans cette Chambre, dans le cours des mois de mai et d'octobre 1969.

M. le Président, un ex-premier ministre, qui était chef de l'Opposition, dit, à la page 2,964 des Débats de l'Assemblée nationale du jeudi 9 octobre 1969: "M. le Président, je suis dans une situation, actuellement, où il est clair que je n'ai pas d'intérêt à faire de la politique partisane. Disons qu'il est beaucoup plus facile pour moi, depuis le 28 août — on sait que le 28 août, c'est le jour où il a reçu un coup de poignard dans le dos par l'ancien député d'Ahuntsic, Jean-Paul Lefebvre, jusqu'à récemment organisateur en chef du Parti libéral du Québec, au niveau fédéral, je veux être honnête, mais, cependant, on le voit courir dans les corridors depuis quelques jours. Sans doute que papa Doc aura une excellente récompense pour lui — de dégager mon esprit des considérations partisanes et de penser aux conséquences que pourrait avoir l'utilisation d'une arme — parce que c 'est une arme de propagande que l'ORTQ — entre les mains de personnes qui n'auraient peut-être pas ' les scrupules que le premier ministre a ou ceux que je veux avoir".

De ce côté-là, M. le Président, quant à moi, je risquerais ma confiance entre les mains du ministre actuel des Communications. Mais je vous promets que ma confiance serait ébranlée s'il fallait que cela tombe entre les mains du ministre de la Voirie et des Travaux publics, par exemple.

M. le Président, M. Lesage demande alors au premier ministre de bien considérer toutes les conséquences possibles de l'utilisation d'une telle arme par un gouvernement peu scrupuleux. Ce sera écrit et ce sera la loi. Ah! le ministre nous a dit: M. le Président, nous convoquerons la commission parlementaire des Communications. Les députés auront le loisir, l'occasion de questionner tous les membres de l'ORTQ. Mais qu'on le mette dans la loi et qu'on inscrive que l'Assemblée nationale est le maître absolu de toute l'information au Québec. Est-ce que l'on craint de le mettre dans la loi? Si le ministre est sincère — je n'en doute pas — qu'il obtienne le consentement de ses collègues du cabinet pour qu'une telle clause de sécurité soit inscrite dans ses lois.

M. le Président, un jour, un excellent rapport a été publié. C'est le rapport Fowler.

La commission Fowler a recommandé, et je crois que cela devrait s'appliquer ici, que l'organisme — évidemment on sait que le rapport Fowler traitait de tout le problème des activités de la programmation, du budget, de la publicité de Radio-Canada, il parlait de Radio-Canada — ait à rendre compte chaque année au Parlement de la façon dont on a cherché à atteindre les objectifs fixés à la radiodiffusion canadienne. Pour me servir d'une expression chère au ministre du Travail, nous devrions retrouver ce principe dans le projet de loi mutatis mutandis, parce qu'il ne suffit pas, à mon sens, que le contrôle parlementaire soit exercé via les estimations budgétaires.

Je pense que cela doit être beaucoup plus direct, il faudrait en faire l'objet d'une obligation législative, dixit Jean Lesage.

M. LEGER: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. PAUL: Oui.

M. LE PRESIDENT (Hardy): Est-ce que le député de Lafontaine veut prendre son siège?

M. LEGER: Merci, M. le Président. Le député, tantôt, nous a demandé un genre de consen-

tement unanime pour qu'il dépasse sa demi-heure. Comme nous étions suspendus à ce qu'il disait, nous n'avons pas bougé, mais j'aimerais savoir combien de temps il désire pour terminer et est-ce que c'est une permission ad libidum ou simplement une question de quelques minutes de plus?

M. PAUL: Disons que je ne répondrai pas par un argument léger, je vais dire peut-être de huit à dix minutes.

M. LEGER: Nous sommes d'accord.

M. PAUL: M. le Président, ce n'est pas tout. Un ministre de poids, en vertu des responsabilités qu'il occupe, le ministre de la Justice, le député d'Outremont...

M. DEMERS: "D'outremonstration".

M.PAUL: ...est intervenu dans le débat et nous pouvons trouver son intervention aux pages 2973 et suivantes du journal des Débats du jeudi 9 octobre 1969. Le ministre de la Justice disait à l'époque: "J'avais avancé, comme principe, que je considérais que les émissions faites par cet organisme devraient correspondre aux aspirations de la majorité des Québécois. Ceci était la première exigence. La seconde exigence était celle-ci: que, malgré tout, l'organisme devait faire la part des aspirations et des opinions des minorités. On sait que nous vivons dans une société, aujourd'hui, qui est loin d'être la société unanime que nous avons connue autrefois". Et Dieu sait que c'est peut-être encore plus vrai en 1971, le 4 novembre, que ce l'était au mois d'octobre 1969.

Et M. Choquette termine alors son intervention: "...que la Chambre, par un comité, ait un droit de surveillance sur cet organisme, comme d'ailleurs sur l'Office d'information et de publicité." Mais on sait aujourd'hui que l'OIPQ n'existe plus. Le ministre, par personne interposée, a décapité cet organisme.

Le député d'Outremont, à l'époque, avait présenté une motion. Je me demande ce qui arrivera quant à moi: "La Chambre est d'avis que le bill 11, intitulé Loi de l'Office de radiotélédiffusion du Québec, ne soit pas lu maintenant, parce que le bill ne contient pas de mesures suffisantes pour assurer l'indépendance de l'Office de radiotélédiffusion du Québec des influences politiques".

Je vois les nouveaux députés, ils sont surpris, ils se demandent: Mais est-ce possible que nos ministres actuels aient fait des grandes déclarations de principe, des déclarations pieuses en 1969 et qu'en 1971 ils veulent enlever ce qu'il y avait de "sécuritaire" dans le bill 11 où il y avait un certain contrôle, une certaine indépendance de toute influence politique qui était donnée à ces organismes.

Et voilà qu'aujourd'hui on fait disparaître tout ça pour mettre entre les mains du ministre des Communications et du gouvernement un excellent organisme de propagande politique.

Et vous, messieurs les députés, vous allez aller voter pour un tel projet de loi, alors que ceux-là qui ont des responsabilités aujourd'hui et qui occupent des postes de ministres ont exposé à l'époque des principes que nous voulons voir respectés par eux aujourd'hui? Si, alors qu'ils étaient dans l'Opposition, ils nous suppliaient de dégager l'information à tous les niveaux de toute influence politique possible, nous voulons tout simplement que ces mêmes députés, qui occupent aujourd'hui des postes de ministres, soient logiques et qu'ils mettent en application la politique qu'ils ont préchée en 1969.

Quant à nous, il n'y a aucune contradiction de notre part. Nous voulons donner l'occasion, à ces hommes en place de prouver la sincérité des sentiments qu'ils prônaient en 1969. M. Lesage également, encore, sur le même principe de l'indépendance nécessaire de toute intervention politique, disait ceci: On ne peut pas prétendre sérieusement qu'un gouvernement dont le chef d'un parti politique, c'est normal, dont les ministres sont ses principaux lieutenants pourra, malgré toute sa bonne volonté, toute la bonne volonté de ceux qui l'entourent, contrôler absolument, d'une façon impartiale, un office qui a à sa disposition un instrument aussi puissant et peut-être aussi dangereux. Je dis qu'il faut que dans le projet de loi nous retrouvions moins de contrôle par le gouvernement et plus de contrôle par le Parlement.

M. le Président, nous voulons donner l'occasion au Parti libéral de mettre en application cet article de son programme politique, où était pris un engagement de laisser la propagande libre de toute influence politique partisane. Je dis que le gouvernement a l'occasion de respecter — lui qui se dit toujours fort — les engagements qu'il prend. J'espère qu'il respectera celui-là, consacré dans un programme politique — qui m'échappe pour le moment, M. le Président, je ne le retrouve pas — où il était dit que l'information devrait être dégagée de tout contrôle et de toute influence.

Dans les circonstances, M. le Président, ne nous demandez pas d'appuyer ces projets de loi, c'est impossible. Premièrement, parce que nous ne voulons pas contribuer à la mort d'un organisme quasi-judiciaire indépendant qui est la Régie des services publics. Nous ne participerons pas à l'établissement d'un organisme qui deviendra un instrument entre les mains du gouvernement au lieu d'être un organisme dégagé de toute influence politique tel qu'il existe aujourd'hui.

La Régie des services publics avait cette liberté d'adopter ses propres règlements. Voici que maintenant la Régie des services publics devra se faire l'écho, devra entériner les idées politiques, les idées du ministre des Communications et de tout le gouvernement.

C'est un pas en arrière. Le principe du bill

35, nous ne pouvons pas l'appuyer. J'ai hâte de voir quelle attitude aura, par exemple, mon bon ami le député de Robert-Baldwin, qui était également intervenu dans ce débat et qui avait condamné le principe du projet de loi no 11; j'espère que l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche pourra être revenu à temps d'Australie pour respecter tous les grands principes qu'il nous exposait autour du bill 11 et que l'on retrouve à la page 2988 du journal des Débats du jeudi 9 octobre 1969. Pour ce qui est de l'honorable député de Robert-Baldwin, on peut retracer sa déclaration à la page 2989 des Débats de l'Assemblée nationale.

Les députés de l'arrière-ban, les députés obscurs, les députés muets du gouvernement en place hésiteront avant de voter. Ils vont comparer la logique du projet de loi no 35 avec les grandes déclarations faites à l'époque par les gens en place tels que les députés de Drummond, de Notre-Dame-de-Grâce, de Marguerite-Bourgeoys, de Taillon, de D'Arcy-McGee et autres. C'est une excellente occasion pour le gouvernement, pour les membres de l'Exécutif de prouver la sincérité des déclarations qu'ils nous ont faites autour du bill 11 et de respecter les grandes promesses que l'on retrouve dans le programme libéral.

Nous ne pouvons pas dissocier l'un de l'autre les projets de loi 35, 36 et 37 parce que c'est une trilogie, comme le mentionnait indirectement le ministre. Je suis sûr que le gouvernement fera quand même adopter ces lois-là. Soixante-douze, dont plusieurs robots, c'est important. Nous allons nous réveiller avec les principes que l'on tente de retrouver et qui sont camoufflés dans les projets de loi 35, 36 et 37, mais nous allons surtout voir le gouvernement voter le principe de l'instauration d'un ministère de la propagande.

J'entends le député de Montmorency. Je l'entends tousser, aboyer. Je ne veux pas employer le terme aboyer, je le retire, M. le Président, je l'ai pas dit. J'ai entendu l'écho de Montmorency.

M. DEMERS: Les chutes.

M. PAUL: Quand le gouvernement voudra être logique avec les grands principes de pureté qu'il nous a prêchés, qu'il nous a prônés, qu'il a défendus alors que la plupart de ses ministres siégeaient de ce côté-ci, quand il voudra respecter l'engagement pris dans son programme des élections du mois d'avril 1970 et quand il voudra être sincère avec lui-même, nous l'appuierons. Quant à nous, nous ne renierons pas l'attitude que nous avons prise.

Je vois mon honorable ami le député de Montmorency bâiller. Il n'y était pas, M. le Président, lors des remarques faites par mon bon ami le député de Rouyn-Noranda qui nous a fait un très bon discours...

M. VEZINA: Amitiés suspectes.

M. PAUL: Pardon?

M. VEZINA: II y a des amitiés suspectes.

M. PAUL: J'aime peut-être mieux des amitiés suspectes que des liaisons dangereuses.

M. VEZINA: Les secondes sont les plus agréables.

M. PAUL: C'est moins enivrant, cependant. M. le Président, vous connaissez les raisons pour lesquelles nous allons voter contre les projets de loi, mais nous espérons que le ministre apportera des amendements pour mettre un mécanisme de surveillance et de contrôle entre les mains du Parlement pour que nous puissions encore exercer notre liberté de scruter l'information au Québec. Cette grande déclaration qu'il nous faisait en disant qu'il mettrait à la disposition des membres de l'Assemblée nationale tous les renseignements qu'ils voudront avoir au sujet de l'information, qu'il consacre ce principe dans la loi par un amendement approprié.

Lorsque nous aurons l'avantage d'aller en commission parlementaire — le ministre nous l'a dit — nous pourrons questionner les gens du métier, nous pourrons interroger certains journalistes pour connaître leur opinion, nous pourrons obtenir toutes les informations qui nous sont nécessaires et connaître également les moyens que nous devons prendre pour combattre l'instauration d'un ministère de la propagande au Québec. C'est pourquoi nous voterons avec empressement contre les principes du projet de loi 35, tout en respectant les déclarations de principe que nous avons faites autour du bill 11 et qui demeurent, parce que nous, nous avions le respect de la liberté des individus, le respect des minorités dans l'information, ce qui va disparaître totalement avec l'abolition de l'OIPQ déjà confirmée et avec celle de l'ORTQ qui s'en vient. Pourquoi? Parce que nous assisterons à l'instauration d'une autorité exclusive, d'une espèce de tsar dans l'information. Parce que nous sommes pour la démocratie, nous combattrons ce projet de loi, étant tout à fait opposés à l'instauration, à l'arrivée et à la consécration d'un Goebbels dans le gouvernement du Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Taillon.

M. Guy Leduc

M. LEDUC: M. le Président, c'est un "backbencher" qui prend maintenant la parole. Mon intervention sera très brève. Je voudrais surtout relever une des toutes dernières... Je vais citer le député de Chicoutimi tantôt.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Faites-le tout de suite, ce sera un bon discours.

M. LEDUC: Cela va être la meilleure partie de mon discours. Alors, patientez.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous voulez être bref? Citez-moi, cela va régler le problème.

M. LEDUC: Le député de Maskinongé tantôt terminait son intervention en disant que l'Opposition officielle allait respecter les déclarations de principe qu'elle avait défendues lors de l'étude du projet de loi 11.

Je voudrais citer le plus exactement possible, quelques phrases que prononçait, il n'y a pas tellement longtemps, le député de Chicoutimi à l'occasion de l'étude des projets de loi que nous avons devant nous: "Qu'est-ce que fait le gouvernement? Il nomme lui-même les membres de l'office. Il en augmente le nombre et il soumet l'activité de l'office à une réglementation qui va émaner du pouvoir de l'Exécutif. Il oblige ces organismes à prendre leurs ordres directement du gouvernement, puisque c'est le ministre des Communications qui aura la mainmise sur tout ce qui s'appelle communications de près ou de loin. C'est le ministre des Communications qui va être le Goebbels, qui va transmettre les ordres du dictateur, qui va imposer au Québec une information dans le domaine gouvernemental, une information dirigée. A preuve, la disparition de tous les fonctionnaires qui occupaient des postes importants soit à l'OIPQ ou soit à l'ORTQ".

J'ai bien l'impression que le député de Chicoutimi — que j'estime un bon copain, un bon ami — n'a pas eu l'occasion, avant de faire son intervention, de lire l'intervention qu'il faisait, le vendredi 16 mai 1969, et qu'il pourra relire à la page 1746 du journal des Débats où, justement, il avait été question d'avoir une certaine indépendance au sein de l'ORTQ. En fait, il avait été même suggéré que ce soit une régie tout à fait indépendante des responsabilités gouvernementales.

Je vais vous lire deux paragraphes. Un extrait de la brillante intervention du député de Chicoutimi en ayant à l'esprit qu'on se référait à ce moment-là au bill 11. "M. le Président — c'est M. le député de Chicoutimi qui parle — le député de Gouin est d'accord pour la création de Radio-Québec. Il estime que c'est une mesure progressive, dynamique, la meilleure, a-t-il dit, présentée par les gouvernements. Il est contre les modalités, il est contre la structure, parce qu'il ne veut absolument pas qu'il y ait aucune sorte de droit de regard reconnu au gouvernement dans une matière capitale comme celle de l'éducation et de la culture. "J'estime — c'est le député de Chicoutimi qui parle — que ce serait une démission de la part du gouvernement que d'abandonner la responsabilité d'une chose comme l'éducation et la culture dans le cas de l'Office de radio-télédiffusion du Québec, que d'en faire un organisme qui pourrait aller son chemin sans avoir d'autres comptes à nous rendre que de présenter à la fin de l'année des états financiers, un bilan dont nous n'aurions que le loisir d'approuver. En somme, c'est là une des propositions du député de Gouin, on veut en faire ce qu'on appelait autrefois une corporation de la couronne, une régie indépendante comme on pourrait dire aujourd'hui".

Je pense que le député de Chicoutimi, connaissant son talent et la richesse de son vocabulaire, pourra me corriger dans mon interprétation, peut-être. Mais j'ai quand même l'impression, à la lecture de ces deux documents qui ont, en fait, à peine deux ans, entre 1969 et 1971, qu'il y a là une contradiction sérieuse.

A l'ORTQ, on accuse le ministre de devenir dictateur. Je pense bien que, si le gouvernement avait décidé de devenir dictateur, il n'aurait sûrement pas augmenté le nombre des membres de l'ORTQ de cinq à sept. Au lieu d'en avoir cinq pour le contrôler, il en aura sept.

Deuxièmement,...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sera plus de patronage, c'est tout.

M. LEDUC: Pardon?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est plus de patronage.

M. LEDUC: Patronage?

M. PAUL: Parlez de cela à M. Desrochers, il connaît cela, lui.

M. LEDUC: Augmenter le nombre de cinq à sept donnera peut-être l'occasion de faire du patronage en reconnaissant le talent de Québécois, de quelque parti politique que ce soit, qui pourront mettre au service du Québec leurs talents et ceci à l'intérieur de l'ORTQ. Si c'est cela du patronage, engager des gens compétents, peu importe de quel parti politique ils font partie, j'en...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quel que soit le parti politique auquel ils appartiennent.

M. LEDUC: Merci, M. le député de Chicoutimi.

M. VEZINA: II va le manger s'il continue. UNE VOIX: Est-il beau!

M. LEDUC: Alors, j'ai bien l'impression, M. le Président, que cette objection n'est pas bien sérieuse si on constate qu'un gouvernement, quel qu'il soit, a reçu la responsabilité d'administrer, a reçu la responsabilité de diriger les destinées d'une province. Si la population, au bout de quatre ans, n'en est pas satisfaite, elle n'aura qu'à faire avec nous ce qu'elle a fait avec vous.

Tantôt, avant l'intervention du député de Maskinongé, le chef du Ralliement créditiste faisait au gouvernement le reproche de perdre du temps à adopter des lois pour enrégimenter la propagande quand on devrait régler... Là, je m'excuse mais cela revenait à quelque chose comme régler le problème des grèves ou des manifestations, je crois.

UNE VOIX: Ce n'était pas si clair que cela.

M. LEDUC: Non, c'était clair, ce que le député de Rouyn-Noranda a dit. C'était très clair, mais je n'ai pas eu le temps de prendre toutes les notes.

M. SAMSON: Avez-vous le texte?

M. LEDUC: Certainement. Je pense bien, M. le Président, que chaque ministre, à l'intérieur d'un cabinet, a ses responsabilités et que même si un des ministres est en Chambre à défendre un de ses projets de loi, il n'empêche pas que d'autres peuvent en même temps essayer de régler d'autres problèmes. Ce n'est sûrement pas perdre du temps que de créer un organisme ou d'améliorer un organisme qui aura la responsabilité de renseigner la population sur ce qui se passe au Québec. Un des grands défauts de l'administration gouvernementale que nous avons depuis plusieurs années — cela ne s'adresse pas nécessairement au gouvernement précédent, cela s'adresse à un très grand nombre de gouvernements qui nous ont précédés— aura été de ne pas renseigner ou de ne pas assez renseigner la population.

Peu importe le parti auquel nous appartenons, c'est un reproche que nos commettants nous font régulièrement. Qu'on ait, à ce moment-ci, enfin décidé de doter le gouvernement d'un instrument qui aura la responsabilité de faire connaître les législations qui sont adoptées à Québec, comme on dit, d'expliquer les lois, je pense que personne qui est conscient de ses responsabilités, comme député, ne peut en faire reproche au gouvernement.

A l'occasion de l'étude du projet de loi sur la protection du consommateur, M. le Président, presque tous les députés qui ont fait des interventions ont insisté pour que le consommateur soit bien renseigné sur ses droits, après la sanction de cette loi. Déjà, sans que le gouvernement soit encore doté de cet instrument, le ministère des Institutions financières a commencé à renseigner la population. Justement, c'est loin d'être parfait. Avec l'organisme que nous sommes en train de créer, nous pourrons, après qu'il aura été bien rodé, satisfaire — oh! combien imparfaitement — la soif de nos électeurs qui veulent être renseignés. Nous électeurs, M. le Président, dans cette Chambre, ce sont les six millions de résidants du Québec.

Je disais tantôt "combien imparfaitement". Même si nous aurons les organismes ou les outils nécessaires pour communiquer à la popu- lation ce qui se passe à Québec, je pense bien que personne ne s'attend à la perfection, mais sûrement que la situation qui existera dans quelques semaines sera de beaucoup supérieure à celle qui existe aujourd'hui.

Si j'ai bien compris la législation qui nous est présentée, par cette information — on parle de propagande, on parle de Goebbels; ce sont des mots qui sont trop faciles — on communique à la population les renseignements qu'elle nous demande quotidiennement. Il est trop facile, M. le Président, de tomber dans la démagogie — c'est bien cela, M. le député de Chicoutimi — dans un débat comme celui-ci. C'est beaucoup trop facile de dire qu'on aura affaire au ministre de la propagande, au ministre de ceci, au ministre de cela.

Il me semble qu'au-dessus de la partisanerie politique on devrait admettre que, pour une fois, un effort sérieux se fait pour renseigner nos commettants. Même si la majorité d'entre nous ne voudra pas l'admettre ouvertement, je pense que, si nous faisons un examen de conscience et que nous nous arrêtons à analyser les demandes que nous avons, nous admettrons, au plus profond de nous-mêmes, que cela ne nous est pas toujours facile, à chacun d'entre nous, d'expliquer avec objectivité et dans ses moindres détails la législation qui est adoptée ici, à Québec. Peu de gens, dans cette Chambre, peuvent se flatter d'être au courant de chacun des débats, de chacunes des idées qui sont avancées soit par les partis de l'Opposition, soit par le gouvernement. Peu de gens peuvent facilement renseigner leurs commettants d'une façon honnête. Non pas parce que nous voulons être malhonnêtes. Quand je dis honnêtes, c'est parce que nous voulons essayer de leur donner le plus de renseignements possible. Nous n'en sommes pas capables. Ne rêvons pas en couleurs. Nous ne sommes pas capables, sauf peut-être une ou deux exceptions.

Nous l'avons l'instrument. Nous allons être capables de renseigner nos gens. Et si les renseignements qui y sont inclus ne font pas notre affaire, ça sera le devoir de l'Opposition de se lever et dire: C'est de la propagande, ça. Mais on le dira quand ce sera vraiment de la propagande. Il ne s'agira pas de prendre des mots et de jongler avec ces mots-là pour transformer un renseignement valable et sérieux en propagande, ce n'est pas vrai.

Soyons honnêtes. Nous avons enfin un instrument qui va pouvoir nous aider peut-être à nous faire respecter un peu plus comme députés. Je pense que tous et chacun d'entre nous...

M. VEZINA: On parle des forces vives du Québec.

M. LEDUC: Non, ce ne sont pas les journaux, c'est pour savoir si je dois continuer pendant les dix minutes que j'avais pensé avoir à ma disposition; je n'en ai que pour cinq minutes, je devrai écourter. Les journaux n'ont

aucune espèce d'importance. S'ils étaient importants et si c'était valable, nous pourrions nous fier à eux pour renseigner la population comme il le faut. Mais, malheureusement, nous ne pouvons pas nous fier à eux. Eux, ils la retournent la législation qu'il y a ici. Ils la retournent de façon que ça fasse leur affaire. C'est leur droit, je les respecte, ce sont de bons copains. Quant à moi, je compte faire ma vie politique sans eux.

Lorsqu'on est seul avec soi-même et ça nous arrive, chacun d'entre nous, d'être seul et de penser au rôle que l'on joue comme député, de penser un peu à ce qu'on a fait dans la journée, la semaine ou le mois, on dit: Est-ce que j'ai fait un boulot valable? Et souvent il va nous arriver, lorsqu'on revoit les gens qu'on a rencontrés, soit dans nos bureaux, soit au parlement, de constater qu'inconsciemment on aura probablement mal renseigné les gens.

Ils nous arriveront avec un article de journal en disant: Qu'est-ce que c'est cette affaire-là? Et nous n'aurons pas tous les outils comme députés pour pouvoir répondre comme il le faut. Pourquoi? Parce que ce qu'il y aura dans les journaux aura été mal interprété.

Nous en avons eu une preuve ce midi, une déclaration du ministre des Finances où $62 millions étaient tombés de je ne sais où et c'était rendu dans le Soleil.

M. TREMBLAY (Chicoutimi):- Le ministre n'avait pas été très précis non plus.

M. LEDUC: Je pense bien que le ministre avait été plus que précis. Et peut-être que si nous avions eu cet instrument d'information vous auriez eu un meilleur entendement de ce que le ministre des Finances avait dit. Mais enfin.

M. LEGER: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. LEDUC: Certainement.

M. LEGER: Comment qualifieriez-vous le film sur l'autoroute est-ouest pour renseigner la population en plein milieu d'un débat politique? Est-ce que c'est de la propagande ou de l'information pure et simple?

M. VEZINA: Un chef-d'oeuvre.

M. LEDUC: Merci au député de Lafontaine. Justement ce n'est pas moi qui serai là. Parce que je ne pourrai pas donner un renseignement objectif. Ce seront des fonctionnaires qui expliqueront la situation à la population, mais ça ne sera pas le député de Taillon, parce que peut-être, sans les renseignements dont j'ai besoin, je pourrais ne pas être objectif dans mon explication aux gens qui me poseront la question au sujet de l'autoroute est-ouest.

J'aime mieux me fier à un organisme qui a la responsabilité, qui est structuré pour renseigner la population, j'aime mieux me fier à eux qu'à mon jugement.

M. LEGER: Organisme autonome.

M. LEDUC: Je pense bien que le député de Lafontaine va être d'accord.

M. LEGER: Organisme autonome, d'accord, mais pas autonome, non.

M. LEDUC: Organisme autonome en ce sens que, pour répéter ce que le député de Chicoutimi disait, et M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A quelle page?

M. VEZINA: II doit avoir quelques niaiseries à dire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quel tome de mes oeuvres?

M. LEDUC: "J'estime que ce serait une démission — à la page 1746 des Débats de l'Assemblée nationale, le vendredi 16 mai 1969 — de la part du gouvernement que d'abandonner la responsabilité d'une chose comme — au cas où le député de Chicoutimi voudrait me corriger — l'éducation et la culture..."

M. LOUBIER: Volte-face.

M. LEDUC: "dans le cas de l'Office de radio-télédiffusion du Québec."

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Volte-face. M. le Président, est-ce que vous me permettriez de faire la mise au point...

UNE VOIX: II n'a pas fini.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II faudrait d'abord que le député continue de lire tout ce que j'ai dit. Alors s'il était honnête, le député lirait ceci: "J'estime que ce serait une démission de la part du gouvernement que d'abandonner les responsabilités d'une chose comme l'éducation et la culture dans le cas de l'Office de radiotélédiffusion du Québec que d'en faire un organisme qui pourrait aller son chemin sans avoir d'autres comptes à nous rendre que de présenter à la fin de l'année des états financiers, un bilan dont nous n'aurions que le loisir d'approuver. En somme c'est là une des propositions du député de Gouin."

M. VEZINA: Volte-face.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, c'est là que je veux faire la mise au point

qui s'impose. J'ai bien déclaré en Chambre, et c'est dans le journal des Débats, qu'il était nécessaire pour le gouvernement d'avoir à sa disposition un organisme qui lui permette d'informer la population. J'ai dit: Le gouvernement doit avoir un outil, mais cet outil, ai-je dit, ne sera efficace et objectif que si on le confie à des gens qui n'auront pas à recevoir des ordres directement du ministre des Communications. Par conséquent, ce que dit le député de Taillon, c'est exactement ce que j'ai dit l'autre jour et ce qui est conforme à ce que je disais le 16 mai 1969. Et en ce qui concerne...

M. PAUL: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et c'est là l'autre partie de la mise au point — en ce qui concerne l'Office de radiotélédiffusion du Québec, j'avais déclaré, en mai 1969, que cet organisme nous le crééions à ce moment-là, qu'il serait mis à l'usage et...

M. VEZINA: Volte-face.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qu'il appartiendra ensuite au gouvernement et à l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale de voir à ce que cet organisme fonctionne comme il devait fonctionner...

M. VEZINA: Volte-face. Sépulcre blanchi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... quitte, avions-nous dit, et le député de Missisquoi avait dit la même chose, quitte à reprendre ce projet de loi, à l'améliorer et à en faire ce que l'on souhaitait alors, une régie indépendante. Nous avons marqué la première étape. A l'usage, nous nous sommes rendu compte que ce n'était pas suffisamment efficace. Nous pouvons donc maintenant passer à l'autre, celle qui consiste à créer une régie indépendante.

M. VEZINA: Volte-face.

M. LEDUC: Oui, je termine dans trente secondes. La première fois que j'ai cité le député de Chicoutimi, à la page 1746, il admettra que j'avais lu les deux paragraphes au complet, n'est-ce pas? Je n'ai cité que le début du deuxième paragraphe il y a quelques instants.

M. le Président, je maintiens que la décision du gouvernement est excellente. S'il y a à l'améliorer un jour, on l'améliorera. Je pense que la législation que présente le ministre des Communications est un grand pas vers une amélioration plus que désirée par la population. Enfin, à l'usage, je suis convaincu que chacun d'entre nous, peu importe le parti auquel nous appartenons, nous serons très heureux d'avoir à notre disposition l'ORTQ et tous les organismes qui sont mentionnés dans les projets de loi 35, 36 et 37 pour nous rendre service et surtout donner du service à notre population. Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.

M. LOUBIER: Ah oui! avec plaisir.

M. PERREAULT: M. le Président, avant d'entreprendre l'étude de ces trois projets de loi, je propose la suspension du débat.

M. LE PRESIDENT: La motion d'ajournement du débat est-elle adoptée?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. PINARD: M. le Président, je demande l'ajournement des travaux de la Chambre à mardi, trois heures, puisque la Chambre ne siégera pas demain. Je pense que le leader parlementaire avait déjà annoncé les travaux que nous entreprendrons la semaine prochaine. Ajournement de la Chambre à mardi, trois heures.

Je pense qu'il y avait eu une entente à l'effet que la commission parlementaire des Affaires sociales siégerait mardi à seize heures.

M. PAUL: Non, à dix heures.

M. PINARD: Je ne sais pas si c'est une erreur. Sur le tableau, c'est indiqué seize heures. Est-ce qu'il y a eu une correction pour dix heures?

M. CLOUTIER (Montmagny): Non, non, mardi, seize heures.

M. PINARD: Mardi, seize heures. Cela reste tel quel.

M.PAUL: La Chambre va siéger quand même.

M. PINARD: La Chambre siégera quand même à trois heures et la commission parlementaire des Affaires sociales se réunira à quatre heures pour l'étude du bill 65 à la salle 81-A.

M. PAUL: Je présume que mardi nous continuerons l'étude des projets de loi nos 35, 36 et 37.

M. PINARD: Oui. Mardi, pour faire suite à la motion d'ajournement du député de l'Assomption, les débats continueront sur la trilogie des bills, comme l'a dit tantôt le député...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La triologie de Pagnol.

M. PINARD: Enfin, cela n'a pas été toujours drôle de l'autre côté de la Chambre ce soir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Elle est drôle, la triologie de Pagnol.

M. LE PRESIDENT: La Chambre est ajournée à mardi, quinze heures.

(Fin de la séance: 22 h 7)

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