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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mercredi 21 juin 1972 - Vol. 12 N° 50

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures sept minutes)

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Présentation de motions non annoncées.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. LEVESQUE: Article e).

Projets de loi privés

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Taillon propose la première lecture de la Loi concernant la cité de Chambly.

Cette motion est-elle adoptée.

M. PAUL: Explications.

M. LEDUC: M. le Président, dans ce projet de loi, il s'agit, à la demande de la ville de Chambly, d'améliorer certaines conditions qui pourront faciliter une meilleure administration de la ville.

M. PAUL: C'est pour le moins vague, M. le Président, mais nous allons accepter le louable effort qui a été fait.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Son nom est passé au journal des Débats.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: Article f).

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Laurent propose la première lecture de la Loi modifiant la charte de la ville de Saint-Laurent. Il s'agit d'une réimpression.

Cette motion est-elle adoptée?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: Article g).

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Robert-Baldwin propose la première lecture de la Loi supprimant des restrictions de construire grevant certains immeubles situés dans la cité de Beaconsfield.

Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

M. PAUL: In absentia, oui.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Déclarations ministérielles.

Avec votre consentement, nous pourrions peut-être passer immédiatement à la période des questions, mais j'aurais un dépôt de documents du Protecteur du citoyen à faire, après la période des questions, si vous n'avez pas d'objection.

Dépôt de documents Régime de rentes du Québec

M. LEVESQUE: M. le Président, vous me rappelez, justement, qu'il y a des documents que je devais déposer aujourd'hui.

Il s'agit de différentes ententes relatives au régime de rentes du Québec qui avaient été demandées dans le but d'aider à la préparation de l'étude du projet de loi sur le régime des rentes du Québec.

Protecteur du citoyen

M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur de déposer le troisième rapport annuel du Protecteur du citoyen. Il s'agit du rapport pour l'année 1971.

Questions orales des députés.

Questions et réponses

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

Vente de poste de télévision

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser une question au premier ministre, faisant suite d'ailleurs à la question que je lui posais la semaine dernière, que je n'ai pas pu répéter hier parce que j'étais absent. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si lui-même ou son ministre des Communications ont fait des représentations auprès du CRTC, concernant la vente des postes de radio et de télévision CFCF et canal 12?

M. BOURASSA: J'en ai discuté avec le ministre et le sous-ministre. Je crois que le ministre peut répondre à la question du député.

M. L'ALLIER: M. le Président, le ministère des Communications, pas plus qu'il ne l'avait fait dans le passé lorsqu'il s'était agi de la Buchner Corporation ou d'autres sociétés désireuses d'acquérir des biens de communication à Montréal, n'est intervenu et n'interviendra pas auprès du CRTC dont c'est la responsabilité d'appliquer les règlements du CRTC en cette matière.

Quoi qu'il en soit, les contenus de télévision et de radio continuent d'être soumis aux règlements actuellement en vigueur. Si le député s'en souvient, au moment de la présentation de la demande de vente, le 19 juin dernier à Kingston, ceux qui, pour la Société Multiple Access, je crois, ont indiqué leur intention d'acheter, ont fait part également de leur intention, si le contrat de vente était agréé pour eux, de transporter à Montréal le siège social de la société qui compte déjà cinq de ses dix directeurs comme des résidants de Montréal.

Quoi qu'il en soit, c'est une politique du ministère des Communications et du gouvernement précédent également et du gouvernement actuel de ne pas intervenir auprès d'un organisme administratif fédéral dans ces matières.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le Président. Je ne demanderai pas d'opinion au ministre, puisque le règlement ne me permet pas de le faire, mais est-ce une politique établie par le gouvernement de ne pas intervenir en pareille instance? Le ministre des Communications est-il satisfait qu'on lui dise qu'une partie du siège social de la future entreprise, qui exploitera des communications sur le territoire du Québec, soit installée à Montréal? Est-ce que le ministre, pour être bref et pour résumer, croit à de pareils croque-mitaines?

M. L'ALLIER: M. le Président, je n'ai aucun autre commentaire à faire sur la question qui vient d'être posée. Je n'ai pas à donner, comme le dit le député de Chicoutimi, d'opinion. En conséquence, j'attendrai que la décision du CRTC soit rendue pour la commenter.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, question additionnelle. Est-ce que, dans l'optique des projets de loi que le ministre des Communications doit défendre bientôt, il lui apparaît que cette décision du CRTC, qui serait favorable à une entreprise torontoise, ne mettra pas en cause et en péril la politique québécoise des communications qu'il s'efforce, avec beaucoup de fermeté, mais sans succès, de lancer et dont il essaie de monter les mécanismes au Québec?

M. L'ALLIER: II s'agit, dans la question en cause, essentiellement, pour l'instant, du moins, d'après ce qui en est apparent, d'un transfert de propriétés. Les projets de loi 35, 36 ou 37 ne touchent pas à la propriété, ni même à des proportions de propriété québécoise ou canadienne. Je peux ajouter, à l'intention du député de Chicoutimi, que j'ai eu des conversations avec mon collègue des Institutions financières à ce sujet et que lui-même me dit être satisfait du fait que l'acquéreur de ces effectifs de communications soit une société ayant feu et lieu au Québec et son siège social au Québec. Ce serait, en fait, la situation que nous souhaitons voir se réaliser.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

Grève à l'Hydro-Québec

M. GUAY: M. le Président, en l'absence du ministre de la Fonction publique, j'adresserai donc ma question au premier ministre. Considérant la grève de plusieurs employés à l'Hydro-Québec, le premier ministre peut-il assurer cette Chambre que les services essentiels seront maintenus?

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai reçu un rapport il y a quelque temps. On m'a dit qu'à l'occasion d'un premier tour de la situation, vers onze heures, aucun ennui sérieux n'était signalé. Les cadres ont pu entrer dans tous les points de production et les services essentiels étaient en place.

M. GUAY: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que des ententes ont été signées afin de maintenir ces services essentiels?

M. BOURASSA: M. le Président, je pense que la réponse est incluse dans celle que j'ai donnée tantôt, puisque les services essentiels étaient en place.

On me signale qu'il y a eu une légère panne à Matane, qui a été réparée grâce à la collaboration des grévistes. Donc, la situation actuelle est complètement sous contrôle.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Une question additionnelle, M. le Président. Le premier ministre pourrait-il nous dire, dans le cas qui vient d'être évoqué, quels sont exactement les services essentiels et quelle dimension cela prend?

M. BOURASSA: Je ne peux malheureusement pas donner au député la définition technique des services essentiels. Je peux certainement lui répondre que la définition des services essentiels, c'est que les services puissent continuer sans qu'il y ait de dommages sérieux au fonctionnement de la distribution de l'électricité.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Allocations familiales

M. LAURIN: Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Le ministre pourrait-il nous dire si, à la suite de l'entretien qu'il a eu, hier, avec son homologue fédéral, il y a eu rapprochement des deux thèses, outaouaise et québécoise, et, deuxièmement, s'il faut s'attendre à la signature d'une entente sur les allocations familiales d'ici quelques jours?

M. CASTONGUAY: M. le Président, il s'est agi d'une rencontre très cordiale, mais, pour le moment, je ne crois pas qu'il me soit possible d'en dire plus. J'aimerais plutôt faire rapport et discuter de la question avec le premier ministre. En temps opportun, évidemment, le gouvernement dira ce qu'il entend faire dans ce secteur.

M. CHARRON: Une question additionnelle, M. le Président, au ministre des Affaires sociales également. Est-il exact que le ministre de l'Expansion régionale se serait offert comme médiateur entre le ministre de la Santé nationale et le ministre des Affaires sociales du Québec, parce qu'il est parfait bilingue?

M. LE PRESIDENT: Une question additionnelle.

L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: Le ministre des Affaires sociales peut-il nous dire si la cordialité a présidé à un point tel, à cette rencontre, que le ministre a définitivement mis de côté cette possibilité qu'il envisageait de démissionner?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Iberville.

Mesures d'assistance aux cultivateurs

M. CROISETIERE: M. le Président, en l'absence du ministre de l'Agriculture, je poserai ma question à l'honorable premier ministre. Faisant suite à la demande formulée par les cultivateurs des comtés de Saint-Jean, d'Iberville et de Missisquoi, relativement à la perte occasionnée par l'impossibilité d'ensemencer, à cause de la crue des eaux, les terres en bordure du Richelieu, quelles mesures le ministre entend-il prendre pour régler cette situation qui cause des préjudices considérables à ces agriculteurs?

M. BOURASSA: Le député peut-il me dire si des représentations ont été faites par les agriculteurs auprès du ministre de l'Agriculture?

M. CROISETIERE: Oui.

M. BOURASSA: Alors, j'en discuterai avec le ministre.

M. DEMERS: Oui. En quelle année?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.

Fonds de pension de M. Claude Morin

M. TETRAULT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Pourrait-il nous dire quel est le montant du fonds de pension dont bénéficie M. Claude Morin, ancien sous-ministre au ministère des Affaires intergouvernementales, vu sa démission récente?

M. GARNEAU: J'avais eu avis de la question, M. le Président. Si vous aimez mieux que je réponde au feuilleton.

M. LE PRESIDENT: Allez-y.

M. ROY (Beauce): Etant donné que le ministre semble vouloir répondre, j'estime qu'on devrait l'écouter. C'est une question d'intérêt public.

M. GARNEAU: De toute façon, j'ai la réponse, étant donné que j'avais eu préavis de la question il y a quelques jours. La pension de M. Morin serait de $15,043.44 annuellement, payable à compter du 18 mai 1994, date à laquelle il atteindra sont 65e anniversaire de naissance. Cette pension est basée sur 8 ans et 106 jours de service effectué au gouvernement du Québec, soit la période comprise entre le 17 juin 1963 et le 30 septembre 1971. De plus, M. Morin a racheté un an et 46 jours de service antérieur; il a transféré six ans et 273 jours de service, alors qu'il était à l'emploi de l'université Laval, ce qui lui donne un total de 16 ans et 60 jours de service.

Selon les dispositions du troisième alinéa de l'article 47, M. Morin a également droit à dix ans additionnels en tant que sous-ministre, ce qui porte à 26 ans et 60 jours de service le temps qui compte pour sa pension, ce qui lui donne droit, à l'âge de sa retraite, à $15,000 de pension.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.

Ordonnance de la Résie des transports

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ma question s'adresse au ministre des Transports. Est-ce qu'il a pris connaissance d'un télégramme qui lui a été envoyé par des propriétaires de taxis de l'île de Montréal pour protester contre une ordonnance de la Régie des Transports datée du 8 mai 1972?

Deuxièmement, est-ce qu'il est d'accord sue cette ordonnance qui a pour effet de réduire les tarifs, donc les revenus de 1,500 chauffeurs de taxis de sept municipalités de l'île de Montréal?

Et troisièmement, est-ce que le ministre entend intervenir directement auprès de la Régie des transports en vue d'annuler l'effet de cette ordonnance, du moins en ce qui concerne la baisse de $0.10 le mille sur le tarif de $0.50 qui était accordé à sept municipalités de la Communauté urbaine de la ville de Montréal?

M. PINARD: J'ai été mis au courant d'un semblable télégramme qui a été envoyé à mon ministère. Malheureusement, personnellement je n'en ai pas pris connaissance, sauf que j'ai lu dans les journaux l'essentiel des déclarations rapportées par le député. Cela pose tout le problème des pouvoirs, qui sont actuellement accordés à la Régie des transports du Québec, de hausser ou d'abaisser les tarifs, d'adjuger des permis. Et c'est pourquoi le bill 23 est à l'étude devant la Chambre.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Question supplémentaire. Est-ce que le ministre est au courant qu'à Montréal-Nord, 140 chauffeurs de taxis ont fait un arrêt de travail ce matin et que d'autres chauffeurs de taxis, dans d'autres municipalités menacent de faire la même chose?

Est-ce que le ministre a été mis au courant de cet arrêt de travail

M. PINARD: Je n'étais pas au courant d'un arrêt de travail, mais je pense bien que de toute façon j'aurais été au courant de ce phénomène au cours de la discussion que nous ferons du bill 23 cet après-midi. Alors, j'invite le député à faire part de ses remarques aux membres de la commission. Comme nous arrivons au chapitre du transport en commun et à la discussion des règlements qui seront mis en vigueur sur proposition du ministre des Transports à l'intérieur des dispositions du bill 23, je crois que c'est l'occasion pour les membres de la commission d'en discuter plus librement et peut-être de façon plus détaillée.

M. PAUL: Une question additionnelle. Si j'ai bien compris le ministre des Transports, il n'a pas l'intention d'intervenir auprès de la régie concernant l'ordonnance qu'elle vient d'émettre. D'ailleurs, ce serait peut-être indécent de sa part s'il le faisait, et c'était une partie de la discussion que lui avait posée le député de Sainte-Marie.

M. PINARD: M. le Président, vous avez remarqué que je me suis bien gardé de poser quelque jugement que ce soit sur la sentence rendue par la Régie des transports. D'ailleurs, je n'en ai pas le pouvoir en vertu de la loi actuelle et je n'ai pas l'intention de dire quoi que ce soit de plus. Mais quand le bill 23 aura été adopté — et le député de Maskinongé, plus que tout autre, sait pourquoi — comme il contient des dispositions nouvelles à cet égard, j'aurai peut-être l'occasion d'en discuter plus librement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Comme le député de Maskinongé a mal interprété ma question, est-ce que je peux faire une mise au point? J'ai parlé de la dernière ordonnance de la Régie des transports qui a été accordée le 8 mai 1972 et qui annulait une autre ordonnance de la Régie des transports de décembre 1971.

L'ordonnance de la Régie des transports de 1971 accordait un tarif de $0.50 au départ aux chauffeurs de taxi de certaines municipalités de l'île de Montréal et la dernière ordonnance le fixait à $0.40. Donc ces gens-là subissaient une baisse de tarif de $0.10. C'est une ordonnance qui allait à l'encontre d'une autre ordonnance de la même Régie des transports. C'est ça que j'ai voulu dire dans ma question.

M. PINARD: M. le Président, là-dessus je voudrais que le député soit bien honnête envers tous les membres de cette Chambre. Il sait fort bien qu'en vertu de la loi actuelle la Régie des transports a un pouvoir de révision de ses propres ordonnances. Et c'est probablement ce qui est arrivé, elle a usé de ce pouvoir qui lui est accordé par la loi de réviser son ordonnance, probablement à la suite de requêtes à cet effet, ou bien de son propre chef, ce que j'ignore.

Nous l'apprendrons au fur et à mesure que nous explorerons le bien-fondé ou non de cette ordonnance qui a été rendue. Je pense que le député devrait garder ses munitions pour le moment où ce sera possible d'en discuter véritablement, plutôt que de poser des questions susceptibles d'être mal interprétées dans cette Chambre.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai beaucoup de munitions.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

Vérification des véhicules automobiles

M. AUDET: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. En rapport avec l'échéance de 1974 pour la vérification obligatoire des véhicules automobiles, est-ce que votre ministère a l'intention de former des centres spéciaux de vérification des automobiles ou si ceci sera confié aux entreprises privées, c'est-à-dire aux garagistes existants?

M. PINARD: Tout ce problème a été discuté, de façon détaillée, vendredi dernier à la commission parlementaire des transports et, de nouveau, ce matin, en réponse à des questions posées par les membres de la commission parlementaire des transports. Je n'ai pas l'intention de revenir là-dessus. Je puis inviter le député à prendre connaissance du contenu du journal des Débats.

M. AUDET: Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre a l'intention de prendre des mesures avant 1974 afin d'arrêter l'entrée au Québec d'autos...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! On m'informe que cette question a été discutée en profondeur ce matin. Il y aurait lieu, pour l'honorable député d'Abitibi-Ouest, de prendre

connaissance, comme l'a mentionné le ministre, du journal des Débats pour connaître les travaux de la commission des transports sur l'étude du projet de loi no 23.

M.AUDET: M. le Président, si vous me permettez une courte addition. On se plaint beaucoup aujourd'hui que des autos usagées venant de l'Ontario...

UNE VOIX: Cela a été discuté, M. le Président.

M. AUDET: Merci.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! L'honorable député de Saint-Maurice.

Drapeau canadien à Paris

M. DEMERS: Ma question s'adresse au premier ministre. Est-il au courant que des Canadiens en visite à Paris, ont été priés par M. Michaud d'enlever le drapeau canadien qu'ils portaient au revers de leur redingote? Est-ce dans la politique du gouvernement?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois qu'en général, cet après-midi, les questions des députés sont plus ou moins urgentes. Croyez-vous vraiment que ce soit une question urgente?

M. CROISETIERE: Même le premier ministre a hâte de répondre.

M. DEMERS: Est-ce que le premier ministre pourrait répondre à ma question? Est-il au courant de la conduite cavalière de son commissaire à la Maison du Québec?

M.BOURASSA: M. le Président, on m'a soumis cette déclaration d'une agence de presse.

J'ai demandé qu'on fasse enquête pour voir si c'était un incident sérieux ou une plaisanterie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Portneuf.

Société Hachette

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, question additionnelle au premier ministre. Pourrait-il en même temps demander qu'on fasse enquête sur les agissements de M. Michaud avec la Société Hachette, en rapport avec le scandale dénoncé en France?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

L'honorable député de Portneuf.

Hôpital de Courville

M. DROLET: M. le Président, j'aurais une question urgente à poser au ministre des Affai- res sociales. Les nouvelles nous ont appris que l'ouverture de l'hôpital pour malades chroniques de Saint-Augustin de Courville avait été retardée une autre fois. Le ministre peut-il affirmer cette mauvaise nouvelle? Qu'est-ce qui empêche l'ouverture de cet hôpital et quand prévoit-il qu'il pourra ouvrir.

M.CASTONGUAY: Je prends avis de la question.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.

Pollution des eaux du Richelieu

M. LEGER: M. le Président, il y a une dizaine de jours, j'ai posé, en l'absence du ministre d'Etat responsable de l'environnement, une question au ministre des Affaires municipales, et je voudrais la répéter aujourd'hui au ministre qui est de retour de son voyage. Le ministre sait-il qu'une usine que son ministère n'a pas encore osé identifier ou ne veut pas identifier procède à des déversements intermittents de phénol dans l'eau du Richelieu à la hauteur de Saint-Jean, causant de très graves problèmes de pollution au niveau des usines de filtration de Richelieu, Chambly, Victoriaville et de Beloeil, Saint-Hilaire, McMasterville et que des plaintes répétées adressées à la Régie des eaux par les différents maires de ces municipalités n'ont provoqué aucune amélioration de la situation, même si des personnes responsables du ministère ont identifié l'usine en question?

Deuxièmement, le ministre est-il au courant qu'une conserverie et une fromagerie de la région se préparent à fermer leurs portes à cause de ce phénomène?

M.GOLDBLOOM: M. le Président, mon collègue, le ministre des Affaires municipales m'ayant fait part de la question posée en mon absence par le député de Lafontaine, je suis allé aux renseignements. Je dois dire, premièrement, que nous avons deux plaintes: une qui se reporte au mois d'octobre dernier et une autre du mois de mars de cette année. Nous n'avons pas, à ma connaissance, essayé de cacher quoi que ce soit quant à ces événements.

Dans le premier cas, nous avons trouvé que c'est la compagnie Héroux Ltée, qui fait du placage électrolytique et du traitement des métaux, qui a laissé accidentellement déverser dans là rivière une quantité importante de liquide phénolique et les plaintes sont arrivées peu après, la contamination descendant évidemment la rivière. Nous avons donné des instructions à la compagnie en question pour que de tels accidents ne se répètent pas et, effectivement, nous n'avons pas d'autre plainte au sujet de cette usine.

L'accident qui est survenu au début de mars, a eu lieu à l'usine de la Cyanamide du Canada et là aussi, cela a été la rupture accidentelle d'un boyau qui a occasionné le déversement d'une

quantité importante de liquide phénolique et des instructions ont été données à l'usine en question. Nous avons reçu, en date du 23 mai, une lettre confirmant que les mesures préventives ont été prises et invitant l'inspection par nos services.

Le troisième phénomène que je dois souligner, c'est que nous avons appris, au cours de notre enquête, que l'usine de filtration qui doit traiter normalement l'eau potable de la ville de Chambly ne fonction que de façon intermittente. Nous avons donc donné instructions à la ville de Chambly de faire fonctionner son usine régulièrement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, en l'absence du ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, je préfère retenir ma question.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce ou de Lotbinière, mais ce sera certainement la dernière question que je pourrai accorder aux membres du Ralliement créditiste. L'honorable député de Beauce.

Responsabilité des infirmières

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à poser à l'honorable ministre des Affaires sociales. Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il entend statuer bientôt, concernant la situation dans laquelle se trouvent les infirmières du Québec qui, en vertu de leurs responsabilités et des travaux qu'on leur demande dans les hôpitaux, doivent quand même accomplir des actes considérés médicaux qui ont des conséquences juridiques concernant la responsabilité civile? Est-ce que le ministre est au courant de cette situation? Est-ce que le ministre entend légiférer bientôt à ce sujet. Si oui, quelle attitude son ministère entend-il adopter pour corriger cette situation qui pose des problèmes assez sérieux à toutes les infirmières dans tout le territoire du Québec?

M. CASTONGUAY: La question a été soulevée lors de l'étude des projets de loi touchant les corporations professionnelles et, normalement, si une solution peut être apportée à ce problème qui est difficile, elle le sera par le biais de ces projets de loi. Comme vous le savez, l'étude se poursuit présentement en commission parlementaire des affaires sociales.

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question additionnelle à poser à l'honorable ministre. Comme cette situation a actuellement cours au Québec et qu'il y a effectivement des infirmières qui auraient perdu leur licence à cause de ces faits, est-ce que le ministère entend au moins faire quelque chose en attendant que la loi soit adoptée pour clarifier cette situation de façon à éviter que des personnes, en accomplissant leur devoir d'état, se trouvent pénalisées et prennent le risque de perdre leur droit de pratiquer?

M. CASTONGUAY: Nous n'avons aucun contrôle direct sur l'exercice des professions. Ceci est contrôlé par le Collège des médecins, l'Association des infirmières, etc. Nous n'avons non plus aucun contrôle direct sur la distribution des soins en milieu hospitalier. Il s'agit là de la responsabilité des conseils d'administration des hôpitaux et des bureaux médicaux.

Il s'agit d'un problème, dont je connais l'existence, qui présente des aspects complexes mais sur lequel, dans l'état actuel de la législation, il n'est pas possible d'apporter une solution immédiate.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Témiscouata.

Auberge de Jeunesse à Témiscouata

M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, ma question s'adresse au ministre responsable de l'ODEQ. Je pense qu'il dort.

Devant le refus du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports de subventionner ou de financer une auberge de jeunesse dans Témiscouata, est-ce que, par le biais de l'ODEQ — puisqu'on dit, ce matin, dans le journal, que l'ODEQ demeure convaincu de la nécessité d'une auberge de jeunesse dans Témiscouata — le ministre pourrait étudier la possibilité de prendre à sa charge les dépenses d'animation d'un centre dans le comté que je représente?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, d'abord, je dois dire qu'au moment où le député de Témiscouata a posé sa question je ne dormais pas. Mais, s'il avait continué encore un peu plus, j'aurais sûrement dormi!

M. SIMARD (Témiscouata): Dormez moins et trouvez une solution à nos problèmes.

M. QUENNEVILLE: Je dois dire au député de Témiscouata que cette question des auberges de jeunesse est à l'étude et que le rapport, normalement, devrait sortir d'ici une dizaine de jours, tout au plus. A ce moment-là, je pourrai le tenir au courant de ce qui se passe dans son comté.

M. SIMARD (Témiscouata): Question additionnelle. Est-ce qu'on peut espérer que le résultat de l'enquête sera connu avant le mois d'octobre, parce qu'alors il sera trop tard?

M. QUENNEVILLE: II y a beaucoup d'espoir pour le député, M. le Président.

M. SIMARD (Témiscouata): On va vivre d'espoir.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

Grève des débardeurs

M. CHARRON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. Est-ce que, malgré ses performances passées, le ministre du Travail entend toujours intervenir dans le conflit des débardeurs? Deuxièmement, est-ce que l'ancien député de Saint-Jacques pourrait nous dire, en même temps, où il en est dans son intervention dans ce conflit?

M. LE PRESIDENT: Est-ce que je dois intervenir pour...

M. COURNOYER: Me protéger?

M. LE PRESIDENT: ... souligner de quelle juridiction dépendent les dockers?

M. COURNOYER: Non, je peux me protéger seul! Disons que mes performances passées sont de telle nature qu'il semble que le premier ministre du Canada ne parait pas savoir ce qui se passe au Québec! Ce n'est pas la première fois. Quant au reste, je considère, moi aussi, ceci comme une chiure de mouche! Merci.

M. PAUL: Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que c'est le nouveau fédéralisme rentable que nous annonce aujourd'hui le ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Dernière question. L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Mises à pied à la General Motors

M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question au ministre du Travail. Il a tellement l'air en forme aujourd'hui!

Est-ce que le ministre pourrait nous faire de la lumière concernant une information à l'effet que la compagnie General Motors de Sainte-Thérèse serait sur le point de mettre à pied 200 employés et, d'ici quelque temps, un millier d'employés?

M. COURNOYER: Je ne suis pas au courant. Mais il semble qu'habituellement, lors de la période de renouvellement des modèles, il y a des mises à pied à la General Motors. Ceci arrive au mois de juillet.

Cette année, comme vous le savez, la General Motors, non seulement fait de nouveaux modèles, mais révise totalement ses lignes de production pour fabriquer la Vega. Les mises à pied dont il est question ou dont il peut être question peuvent être que de nature temporaire. Il n'est certainement pas question que General Motors réduise sa production de moitié lorsqu'elle prévoit, justement, une augmenta- tion assez considérable du chiffre d'affaires lorsque les lignes de production seront faites pour la Vega.

Je vais vérifier, cependant, l'exactitude de ces propos.

A toutes fins utiles, j'ai probablement reçu un avis à cet effet, s'il s'agit d'une mise à pied de type permanent. Mais, s'il s'agit d'une mise à pied de type temporaire, comme cela se fait chaque année, je ne pense pas qu'il y ait de problème. Je vous en reparlerai demain.

M. BOURASSA: M. le Président, j'en avais discuté avec le ministre du Travail et le président de la compagnie General Motors, il y a environ dix mois. A ce moment, on nous avait expliqué qu'au cours de cet été il y aurait cette période d'adaptation et de transition qui pourrait forcer à certaines mises à pied, mais purement temporaires, avec des conditions de salaire acceptables, à ce qu'il nous a assuré, pour l'ensemble des employés impliqués. Lorsque les nouveaux modèles seront prêts, au mois de décembre, je pense que le niveau de l'emploi sera supérieur, du moins à ce qu'on nous avait dit à ce moment-là, à ce qu'il était auparavant.

M. SAMSON: Une question supplémentaire, M. le Président. Puisque le premier ministre a eu l'occasion de prendre un bon dfner, pourrait-il prendre avis de la question et nous dire quelles conditions seront accordées à ces employés qui manqueront d'emploi d'ici à décembre, si j'ai bien compris?

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances aimerait répondre à une question.

Obligations d'épargne du Québec

M. GARNEAU: Le député de Montmagny m'avait posé une question, la semaine dernière, concernant les obligations d'épargne, à savoir si nous avions l'intention de prolonger la date de mise en vente de ces obligations. Je dois répondre qu'après analyse nous avons décidé de ne pas prolonger la date de la vente des obligations d'épargne. En même temps, je voudrais annoncer à cette Chambre que nous avons dépassé, actuellement, l'objectif de $100 millions que nous nous étions fixé.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BOURASSA: New-York, Québec, la France, l'Angleterre.

M. GARNEAU: Certains nous incitaient à être prudents. Comme je ne voulais pas exagérer la situation, j'avais pris l'attitude la plus conservatrice. La baisse des taux d'intérêt à court terme dans les banques nous a certainement aidés. La publicité occasionnée par cette question qu'a posée le député de Montmagny et par la réponse que j'ai donnée en Chambre, de

même que les nouvelles qui ont paru dans les journaux ont peut-être aidé également à la vente des obligations. A toutes fins utiles, nous avons dépassé notre objectif. Nous avions, ce matin, $109 millions de vendus. Il reste encore cinq ou six jours d'entrées à compter.

M. BOURASSA: Ralliement derrière le gouvernement !

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

Questions inscrites au feuilleton

M. BELAND: M. le Président, l'honorable leader du gouvernement aurait-il quelques réponses à donner à des questions posées au feuilleton de la Chambre?

M. LACROIX: Cela s'en vient.

M. LEVESQUE: M. le Président, article 21. Question de M. Béland. Réponse de M. Toupin.

Pour M. Toupin, lu et répondu, (voir annexe)

Article 25, question de M. Croisetière. Je fais motion pour que cette question soit transformée en motion pour dépôt de documents.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LEVESQUE: Documents déposés par M. Pinard.

M. PINARD: Documents déposés.

M. LEVESQUE: Article 26, question de M. Croisetière. Je fais motion pour que cette question soit transformée en motion pour dépôt de documents.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LEVESQUE: Réponse de M. Tremblay. Documents déposés.

Article 27, question de M. Croisetière. Réponse de M. Pinard.

M. PINARD: Lu et répondu. (voir annexe)

M. LEVESQUE: Article 28, question de M. Croisetière. Réponse de M. Pinard.

M. PINARD: Lu et répondu. (voir annexe)

M. LEVESQUE: Article 31, question de M. Croisetière. Réponse de M. Toupin.

Pour M. Toupin, lu et répondu. (voir annexe)

Article 34, question de M. Cloutier (Montmagny); Réponse de M. Garneau.

M. GARNEAU: Lu et répondu. (voir annexe)

M. LEVESQUE: Article 37, question de M. Vincent, réponse de M. Toupin. Pour M. Toupin, lu et répondu. (voir annexe)

Article 38, question de M. Vincent, réponse de M. Saint-Pierre. Pour M. Saint-Pierre, lu et répondu. (voir annexe)

Article 60, question de M. Lavoie (Wolfe). Je fais motion pour que la question soit transformée en motion pour dépôt de documents.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté,

M. LEVESQUE: Réponse de M. Lévesque. Dépôt de documents.

M. PAUL: Est-ce que l'honorable leader me permet une question? A la question 60, c'est trop long, il faut que ça soit converti en motion.

M. LEVESQUE: Oui, parce qu'il y a une liste de déplacements.

Article 85, motion de M. Vincent. Dépôt par M. Pinard.

M. PINARD: Documents déposés.

M. PAUL: C'est M. Tremblay (Sainte-Marie).

M. LEVESQUE: Erreur de copiste. C'est M. Tremblay (Sainte-Marie).

Article 88, motion de M. Cloutier (Montmagny), dépôt de M. Garneau.

M. GARNEAU: Documents déposés.

M. LEVESQUE: Article 93, motion de M. Vincent. Dépôt de M. Massé (Arthabaska).

M. MASSE (Arthabaska): Lu et répondu. (voir annexe)

M. LEVESQUE: Article 94, motion de M. Vincent. Dépôt de M. Lévesque. Documents déposés.

Projets de lois privés Deuxième lecture

M. LEVESQUE: Avec le consentement unanime de la Chambre, j'aimerais appeler les articles 128, 129 et 130 pour permettre de faire franchir à ces projets de loi l'étape de la deuxième lecture.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Fabre propose la deuxième lecture du projet de loi no 141, Loi concernant la Commission de transport de la ville de Laval. Cette motion est-elle adoptée?

M.PAUL: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Limoilou propose la deuxième lecture du projet de loi no 107, Loi modifiant la charte de la ville de Québec. Cette motion est-elle adoptée?

M. PAUL: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Olier propose la deuxième lecture du projet de loi no 136, Loi modifiant la loi de la Communauté urbaine de Montréal. Cette motion est-elle adoptée?

UNE VOIX: Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LEVESQUE: Je fais motion pour que ces projets de loi, soit les nos 141, 107 et 136 soient maintenant déférés à la commission parlementaire des Affaires municipales.

M. PAUL: Quand cela va-t-il être étudié?

M. LEVESQUE: Le plus tôt possible. Il y en a déjà devant la commission. Mais tout dépendra de la célérité avec laquelle on disposera des autres projets de loi.

M. PAUL: Pour éviter toute ambiguïté, nous devons prendre pour acquis que ces projets de loi ne seront pas appelés demain matin devant la commission permanente des affaires municipales.

M. LEVESQUE: Au calendrier nous avons prévu le 27 juin pour les Affaires municipales et le 29 juin pour la Justice. Je ne crois pas que ça apparaisse.

M. PAUL: C'est correct.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Travaux parlementaires

M. LEVESQUE: A la salle 81-A, immédiatement, nous poursuivrons l'étude en commission du projet de loi no 23 et ici, M. le Président, nous sommes entre vos mains.

Motion de M. Guay sur les garagistes artisans

M. LEVESQUE: Puis-je vous rappeler qu'il avait été question des garagistes artisans? Je pense que le ministre du Travail pourrait peut-être faire une mise au point quant à la motion relativement aux garagistes artisans puis on pourrait procéder à l'étude de la motion relativement à l'utilisation de la Banque du Canada pour certains grands projets.

M. LE PRESIDENT: Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre

M. Jean Cournoyer

M. COURNOYER: M. le Président, à la suite des discussions que nous avions eues sur le sujet avant que l'Assemblée ne change son modus procedendi et s'aventure dans les crédits, j'avais cru comprendre que les députés acceptaient la proposition que j'avais faite à l'effet de soumettre à la commission parlementaire, avant de le déposer auprès du conseil des ministres, le projet de règlement sur la qualification professionnelle des employés de garage.

A la suite d'une discussion que j'ai eue ce matin avec le leader parlementaire du Ralliement créditiste, il m'est apparu qu'il semblerait préférable pour tout le monde qu'on accepte tout simplement la motion telle qu'elle est présentée, qui est une invitation à réunir la commission parlementaire — sauf, encore une fois, qu'il s'agit du temps et lieu — sur la la question de la qualification au moment où j'aurai quelque chose à proposer. Donc, je pense bien qu'on peut mettre fin à cette discussion, M. le Président, en disant tout simplement: D'accord, aussitôt qu'elle pourra siéger elle siégera.

M. ROY (Beauce): Est-ce que le chef du gouvernement peut nous dire si la commission parlementaire pourrait quand même siéger durant l'intersession, c'est-à-dire entre le moment où nous ajournerons pour les vacances et la reprise de la session à l'automne?

M. LEVESQUE: II n'y a pas d'objection à ce qu'elle siège durant l'intersession. J'attendrai d'avoir une indication du ministre responsable.

M. ROY (Beauce): Mais si vous n'avez pas d'objection, est-ce que vous accepteriez de prendre des dispositions pour que justement cette commission siège avant la reprise de la session à l'automne?

M. LEVESQUE: Dès que le ministre me fera signe, nous prendrons les dispositions nécessaires.

M. LE PRESIDENT: Article 76.

M. ROY (Beauce): Je peux donc conclure que la motion est acceptée à l'unanimité.

M. LEVESQUE: II s'agit de l'adopter, M. le Président, d'en disposer tout simplement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Conséquemment, je dois demander le vote sur l'article 75.

II semble y avoir une adoption unanime de l'article 75. Cette motion est adoptée à l'unanimité.

Adopté.

Motion de M. Fabien Roy

sur le financement

de la baie James

M. LE PRESIDENT: Article 76. Le député de Portneuf.

M. Antoine Drolet

M. DROLET: M. le Président, nous avons commencé la semaine dernière à étudier une autre motion que notre parti avait inscrite au feuilleton. Cette motion, présentée par le député de Beauce, a semblé sur la fin de la journée de mercredi dernier, susciter plus qu'au début de l'après-midi l'intérêt des députés. Je pense que tous les députés de cette Chambre, en commençant par le ministre des Finances, auraient avantage à relire les discours du député de Beauce, spécialement, qui a fait une rétrospective de ce grand projet de la baie James et surtout de son financement. M. le Président, il est bien beau dire aux citoyens du Québec que nous avons un grand projet en réalisation, mais pour réaliser ce projet, ça prend de l'argent, puis ce fameux argent semble continuellement un mystère pour les gouvernements qui se sont succédé et spécialement pour les ministres des Finances.

Et lorsque les membres de cette Chambre proposent quelque chose de nouveau, on trouve ça drôle. J'ai entendu la semaine dernière le chef de l'Opposition officielle dire que c'était une motion irréaliste. Je ne l'ai pas entendu parce que le ministre des Finances n'as encore répondu, mais celui-ci a laissé entendre à des journalistes à la sortie de la Chambre que c'était une motion illusoire.

Quant au Parti québécois, il n'a pas encore participé au débat sur cette motion. Peut-être cet après-midi, verrons-nous un député parler sur cette motion.

De toute façon, il est quand même curieux de constater que parce que nous voulons suggérer quelque chose au ministre des Finances, suggérer un nouveau mécanisme dans le financement de ce grand projet, il est quand même curieux de voir l'air niaiseux que l'on fait spécialement face aux motions que nous présentons. J'ai bien apprécié, quelques minutes auparavant, le fait que tous les membres de cette Chambre ont accepté à l'unanimité une motion que nous avons présentée il y a quelques semaines, la motion de l'honorable député de Dorchester.

Je vois le ministre des Finances qui discute avec le ministre du Revenu et probablement qu'ils discutent du financement de la baie James.

M. GARNEAU: ... que la motion créditiste.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je veux tout simplement vous dire qu'il ne vous reste que dix minutes à parler. Vous avez déjà eu huit minutes la semaine passée, les deux autres minutes sont déjà écoulées et on peut vous accorder une minute de plus pour vous permettre de terminer.

M. DROLET: M. le Président, je pense que je peux conclure assez rapidement.

M. LE PRESIDENT: S'il y a consentement unanime, vous pouvez continuer.

M. DROLET: Merci, M. le Président. Je savais que le leader du gouvernement, qui semble en pleine forme aujourd'hui avec son nouveau voisin le député de Maisonneuve, et mes collègues de cette Chambre étaient disposés à entendre les allocutions que nous avons à faire, mais je n'en ai pas pour longtemps.

Je veux tout simplement insister auprès du gouvernement pour qu'il n'ait pas peur d'accepter quelque chose de nouveau. On dit souvent que le Québec est en avance dans tout. Oui, le Québec est en tête du chômage, le Québec est en tête dans le domaine des dettes, des emprunts et de la contestation. Pourquoi le Québec ne serait-il pas le premier à préconiser une véritable réforme financière et monétaire? Avec les noms des personnages importants qu'a cités mon collègue le député d'Abitibi-Est la semaine dernière, je sais que le ministre des Finances l'a écouté attentivement, et je suis même persuadé qu'il a relu son discours. Je suis convaincu que le ministre des Finances, comme tous les autres collègues de cette Chambre, sait qu'il y a du bon dans ce que nous préconisons, mais il semble figé, il semble que l'on craigne de retrousser ses manches et de préconiser quelque chose qui améliorerait, une fois pour toutes, notre système financier, notre système économique.

Je dis au ministre des Finances que je suis même prêt à voter contre notre motion — oui, à voter contre notre motion — si on me prouve qu'on a tort et si on est capable de nous proposer des solutions réalistes qui seraient autre chose que l'endettement public. Je sais qu'on ne pourra pas amener autre chose parce qu'à chaque fois qu'on parle d'argent, à chaque fois qu'on parle de financement de quelque projet que ce soit — et spécialement sur ce grand projet de développement de nos richesses dans le nord québécois — on trouve toujours le moyen de financer ces grands projets, spécialement par des emprunts chez les étrangers et par l'endettement public.

En terminant, j'invite et j'insiste auprès du ministre des Finances, auprès du gouvernement actuel, qui se doit d'administrer la province de Québec en homme d'affaires.

Administrer c'est prévoir et je suis convaincu que, si le gouvernement du Québec veut se tourner de temps à autre vers les députés du Ralliement créditiste, il aura certainement, à

l'occasion, des solutions aux problèmes que nous avons dans le moment. Je demande aux autres partis de l'Opposition, comme au gouvernement, de faire bloc, comme lors de la motion précédente, et de voter à l'unanimité afin que nous ayons ce financement sans intérêt ou, si vous voulez, à faible taux d'intérêt qui permettrait le développement de la baie James, donc le développement de nos richesses naturelles en faveur des citoyens du Québec.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît, on n'a pas le droit de manifester dans les galeries.

Le député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. LAURIN: M. le Président, la suggestion du Ralliement créditiste du Québec part d'un bon naturel. J'aimerais aussi beaucoup que le Québec puisse trouver des instances qui puissent lui prêter toutes les sommes dont il a besoin, sans intérêt ou à un faible taux d'intérêt. Donc, en principe, je suis, moi aussi, pour la vertu et la maternité.

Par ailleurs, je vais être très bref, M. le Président, trois raisons me semblent rendre très difficile sinon impossible l'acceptation de la proposition du Ralliement créditiste du Québec. Premièrement, c'est une raison de précédents. Si la chose avait été possible, je pense bien que les deux gouvernements provinciaux créditistes que nous avons connus auraient pris à leur compte cette suggestion et en auraient obtenu l'exécution il y a bien longtemps.

Si cela n'a pas été fait, les raisons restent à trouver et peut-être qu'un orateur du Ralliement créditiste nous le dira dans une prochaine intervention. Mais je dirais quand même que durant une trentaine d'années deux gouvernements provinciaux ont eu la chance de mettre en application cette suggestion et ne l'ont pas fait. J'en conclus qu'elle est très difficile d'application.

Deuxièmement, il me semble que la demande que fait le Ralliement créditiste n'entre pas dans le rôle, la mission qu'une banque centrale doit exercer dans un pays. Je ne crois pas qu'une banque centrale soit là pour faire des prêts mais plutôt pour régir le système bancaire, pour régler le taux du crédit et autres rôles analogues.

Troisièmement, je rappelle ici le proverbe latin Timeo Danaos et dona ferentes. Je craindrais beaucoup qu'un organisme fédéral, en l'occurrence la Banque du Canada, qui ferait des prêts, soit directement soit par l'intermédiaire d'une autre banque d'une aussi grande amplitude, exigerait en retour des concessions, des servitudes de la part du Québec alors que celui-ci est affligé déjà à plusieurs égards par les conditions que lui impose le régime fédéral.

Il me semble que ce serait simplement augmenter l'assujettissement du Québec par rapport au Canada et il me semble, si l'on en croit l'expérience du passé, qu'il faudrait se méfier à l'extrême de toute intervention du gouvernement fédéral dans quelque domaine que ce soit et surtout dans le domaine du financement.

Je pense donc que pour ces trois raisons il nous sera impossible de voter en faveur de la proposition du Ralliement créditiste du Québec.

M. Raymond Garneau

M. GARNEAU: M. le Président, j'aurais aimé pouvoir profiter de la motion du député de Beauce pour traiter en détail des différents aspects du fonctionnement de notre système monétaire. Malheureusement le règlement, qui me limite à vingt minutes, m'empêche d'entrer dans les détails de tout le fonctionnement du système monétaire qui est la théorie sous-jacen-te à la motion du député de Beauce.

J'ai donc dû laisser tomber, dans la préparation des quelques notes que je veux livrer maintenant, plusieurs aspects concernant le rôle de la monnaie, son utilité, les différentes formes de monnaie, le fonctionnement détaillé du système bancaire, entre autres, comment une banque seule ne peut pas créer de monnaie, mais comment le système bancaire peut remplacer la monnaie de papier par de la monnaie scripturale et comment, évidemment, tout cela fonctionne.

Compte tenu du temps restreint mis à ma disposition, je me contenterai, dans un premier temps, d'exposer comment la Banque du Canada s'y prend pour contrôler la masse monétaire suivant les besoins de l'économie. Je verrai, ensuite, quelles seraient les conséquences de l'application de la motion du député de Beauce et son impact sur le niveau général des prix et des coûts, non seulement sur le plan national, mais également en regard de notre position concurrentielle sur les marchés internationaux.

La Banque du Canada dispose de plusieurs moyens pour influencer les réserves des banques à charte et affecter ainsi la disponibilité et le coût du crédit au pays. Elle peut, par exemple, acheter ou vendre des titres sur les marchés monétaires. C'est ce qu'on appelle l'opération "open market". Elle peut aussi déplacer les dépôts du gouvernement fédéral. Elle peut varier son taux de réescompte, varier le coefficient de réserve secondaire. Elle peut, enfin, se servir de son influence morale auprès des banques à charte pour contrôler cette évolution de la masse monétaire suivant les besoins de l'économie.

Cependant, le technique la plus utilisée aujourd'hui, non seulement à la banque centrale canadienne, mais également dans les banques centrales de différents pays, consiste à acheter ou à vendre des titres sur le marché, que ce soit des bons de Trésor ou d'autres titres du gouvernement fédéral.

Dans l'étude de cette motion, je voudrais, pour les fins de la discussion, déposer deux tableaux que j'aimerais voir inscrire au journal des Débats, à ce stade-ci. Je vais référer à ces tableaux. Ce sera pour la meilleure compréhension des lecteurs du journal des Débats éventuellement. Est-ce qu'il y a encore des messagers ou s'ils sont en grève?

M. CLOUTIER (Montmagny): Je voudrais poser au ministre la même question qu'il m'a posée hier. Est-ce que c'est lui qui a préparé les statistiques qui sont sur les tableaux?

M. GARNEAU: Oui et j'en prends la responsabilité.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'accord.

M. GARNEAU: J'ai regardé les notes du député de Montmagny, hier. Malheureusement, mon droit de réplique ne me permet pas de corriger les erreurs qui ont été commises dans l'analyse des pourcentages de croissance des revenus.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est possible, comme je l'ai dit hier. Ce qu'il fallait retenir, c'était la tendance, parce que les calculs ont été faits rapidement.

M. GARNEAU: Vous l'avez fait remonter uniquement à trois ans en arrière, avec des taux de croissance de deux ans. Comme la correction exigée par la nouvelle formule comptable avait été faite à partir de l'année financière 70/71 et que cette année financière comportait 13 mois de revenus, vous avez comparé un taux de croissance de treize mois avec un taux de croissance de douze mois. C'est ce qui explique les 6.8 p.c. que vous aviez aux revenus.

M. CLOUTIER (Montmagny): Mais les chiffres de 70/71...

M. GARNEAU: Ils sont corrigés.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, les chiffres de 70/71 sont calculés d'après la nouvelle méthode, de même que ceux de 71/72 et ceux de 72/73.

M. GARNEAU: C'est ce que je mentionne, mais votre point de départ était une année de treize mois, au lieu de douze mois. En tout cas, peut-être que d'autres de mes collègues pourront vous donner des explications.

Donc, je voudrais déposer les tableaux qui indiquent comment se comporte la masse monétaire à la suite d'une opération d' "open market", (voir annexe II) Dans l'exemple que j'utilise, la Banque du Canada achète du public $150 millions du bons du Trésor et, en guise de paiement, émet des chèques tirés sur elle-même ou plus précisément des traites. Le public dépose ces chèques de la banque centrale dans les banques à charte. Ces dernières les retournent ensuite à la Banque du Canada et elles voient, conséquemment, leurs dépôts à la banque centrale augmenter. Il en résulte, alors, que les réserves des banques à charte sont plus élevées que les réserves exigées et les banques à charte peuvent maintenant accroître leurs prêts et placements. Autrement dit, c'est le processus d'expansion multiple des dépôts qui s'effectue. Ainsi, l'achat de $150 millions de bons du Trésor de la Banque du Canada peut entraîner une augmentation proportionnelle des réserves bancaires, ce qui provoque, si on prend comme taux de réserve 6 p.c, un accroissement de la masse monétaire de $2 1/2 milliards. Il ne s'agit pas nécessairement d'une augmentation des billets de banque en circulation, mais la masse monétaire comprend les billets de banque, entre autres, et la monnaie scripturale.

Il est à noter, toutefois, que l'augmentation de $150 millions dans les réserves bancaires provoque ou peut provoquer, avec un taux de réserve de 6 p.c, une expansion de $2.5 milliards dans la masse monétaire, soit 16 2/3 fois l'augmentation des réserves bancaires, parce qu'on a supposé, comme je viens de la mentionner, une réserve primaire de 6 p.c. et qu'on a supposé également que les possibilités de prêts et placements par les banques à charte étaient illimités. C'est là, évidemment, un point important.

Si le système fonctionnait avec des possibilités de prêts et placements et que le tout fonctionnait, théoriquement, dans l'absolu, il y aurait des possibilités d'une expansion de la masse monétaire de l'ordre de grandeur que je viens d'indiquer. Si la possibilité de prêts et de placements, par les banques à charte, était limitée, ces dernières se verraient forcées de conserver une partie des réserves excédentaires et alors l'augmentation de la masse monétaire serait moindre.

L'intervention de la Banque du Canada, dans ses opérations d'"open market", est donc le moyen privilégié qu'elle utilise pour s'acquitter de la responsabilité qui lui est confiée de contrôler la masse monétaire selon les besoins de l'économie. C'est là une des responsabilités de la Banque du Canada. Le député de Beauce, dans son intervention, la semaine dernière, a cité le préambule de la Loi créant la Banque du Canada et il s'est référé à cette notion.

Considérons, maintenant, la possibilité que la Banque du Canada, comme le suggère le député de Beauce, achète des titres de gouvernements provinciaux ou garantis par les gouvernements des provinces, comme ce serait le cas pour la baie James, plutôt que d'acheter des bons du Trésor du gouvernement fédéral pour s'acquitter de son rôle de contrôle de la masse monétaire, suivant les besoins de l'économie.

Disons d'abord que cette suggestion ne s'avère pas impossible, étant donné, comme le dit le député de Beauce, que les articles,

compris dans la charte de la Banque du Canada, peuvent permettre à cette dernière d'acheter, de détenir, de vendre des titres émis ou garantis par le gouvernement du Canada ou par les provinces.

Par conséquent, la Loi de la Banque du Canada permet à cette institution de prêter à une province ou d'acheter des titres qu'une province émet ou garantit. Toutefois, à la lecture des différents rapports annuels du gouverneur de la Banque du Canada au ministre des Finances du pays, on s'aperçoit que notre banque centrale n'a pas utilisé ce pouvoir que lui confère la loi. Il s'agit donc de voir pourquoi la Banque du Canada n'utilise pas ce pouvoir bien précis, dans quelle mesure elle aurait pu l'utiliser et de quelle façon elle pourrait l'utiliser éventuellement, en tenant compte, bien sûr, de ses objectifs et de sa raison d'être principale.

Auparavant, permettez-moi de vous fournir certains chiffres qui pourront, je l'espère, renseigner davantage sur les possibilités que pourrait offrir la Banque du Canada en tant qu'investisseur. Cette fois, je fais la distinction entre le rôle, les objectifs ou les responsabilités que pourra avoir la Banque du Canada en tant qu'investisseur et en tant qu'organisme devant contrôler la masse monétaire, suivant les besoins de l'économie.

Si on considère la Banque du Canada comme un investisseur éventuel, on doit constater que ce rôle est extrêmement limité. De 1966 à 1970, par exemple, les placements nets, que la Banque du Canada a effectués, se sont élevés à environ $216 millions, en moyenne, par année. Si l'on compare ces possibilités d'investissements, et non pas de "l'open market", de la Banque du Canada par rapport aux besoins financiers du Québec et de 1'Hydro-Québec, on s'aperçoit qu'il s'agit là d'une somme assez minime — d'autant plus que ces $216 millions d'investissements, en moyenne, par année, si on les compare à ce qui est emprunté par l'ensemble des provinces ou par l'ensemble des gouvernements canadiens, soit le gouvernement fédéral, le gouvernement des provinces et le gouvernement des municipalités — comparativement aux besoins qui se sont manifestés durant cette même période de temps.

Ceci démontre, de façon assez évidente, un premier point. C'est que même si la Banque du Canada avait voulu acheter uniquement des titres émis ou garantis par la province de Québec, et aucun émis par les autres provinces ou le pays, elle n'aurait pas pu les acheter tous. C'est-à-dire qu'elle n'aurait pas pu financer, investir pour financer complètement les besoins financiers de la province et de l'Hydro-Québec, encore moins, évidemment, des besoins financiers des municipalités.

Il ne faut donc pas penser que la Banque du Canada est un gros investisseur et il est illusoire de croire qu'elle pourrait acheter tous les titres émis par les provinces et par le gouvernement fédéral. Ce n'est d'ailleurs pas son rôle d'acheter les titres sur le marché. C'est plutôt pour elle, comme on l'a vu, un moyen d'intervention. Quand elle intervient au niveau de la masse monétaire, ce n'est pas en tant qu'investisseur mais c'est plutôt dans ces opérations "d'open market".

Ce premier point étant admis, il s'agit de voir maintenant ce qui empêche la Banque du Canada d'acheter davantage de titres en procédant par le marché "d'open market", en utilisant ce moyen avec des titres des provinces qui pourraient être des bons du Trésor émis par le gouvernement des provinces.

Or, à ce sujet, la raison est assez simple. Tout achat de titre dans l'opération "d'open market", quel qu'il soit, de la part de la banque centrale, a un impact sur les réserves des banques à charte et ainsi un impact sur la masse monétaire.

Nous avons vu en effet que, dans la mesure où les banques à charte ont des réserves excédentaires, elles peuvent alors faire des prêts et placements, ce qui se traduit par une expansion des dépôts et donc une expansion considérable de la masse monétaire. On voit ainsi la nécessité, pour la Banque du Canada, qui a pour mission de contrôler l'expansion de la masse monétaire selon les besoins de l'économie, de surveiller les réserves des banques à charte. Cela, évidemment, c'est un aspect plus technique mais il faudrait y ajouter également certains points qui ont été soulevés par le député de Bellechasse, la semaine dernière, et certains points que vient de soulever le député de Bourget, si on analyse la possibilité de la Banque du Canada d'intervenir sur "l'open market" avec des titres du gouvernement des provinces. A ce moment-là, c'est un autre niveau de gouvernement qui déciderait de notre taux d'endettement et qui déciderait à quel moment on va sur le marché, à quel moment on rachète des titres, uniquement pour fins de contrôle de la masse monétaire.

Si la Banque du Canada ne veut pas que la masse monétaire augmente trop rapidement, elle doit éviter de prendre des mesures qui augmenteraient les réserves des banques à charte, de façon démesurée, ce qui serait le cas si elle achetait trop de titres sur les marchés, dans le cadre de son opération d"open market".

Par conséquent, la quantité de titres que la banque centrale peut acheter sur les marchés est limitée par l'expansion qu'elle veut donner à la masse monétaire. Etant donné cette contrainte sur le nombre de titres que la Banque du Canada peut absorber et étant donné aussi le nombre considérable de titres qui sont émis au pays, il est évident que la Banque du Canada ne peut pas acheter ces titres et créer de la monnaie, de façon démesurée, évidemment, à moins qu'il ne s'agisse...

M. ROY (Beauce): Qui a dit de façon démesurée?

M. GARNEAU: M. le Président, je vais revenir à certains arguments. Jusqu'à maintenant,

j'ai été assez posé dans mes remarques. Je me suis retenu de dire au député de Beauce ce que je pensais, d'une façon émotionnelle, de sa motion. J'ai essayé d'utiliser des arguments plus sereins, plus convaincants mais, si le député de Beauce m'invite à laisser mon texte, je puis le déposer et répondre d'une autre façon à sa motion, qui, peut-être, lui permettrait de comprendre parce que ce seraient des arguments peut-être plus frappants, moins techniques. Mais j'essaie de faire un effort particulier pour que, par la suite, comme moi, il relise l'exposé que je viens de faire. Peut-être qu'avec le temps, en s'efforçant un peu, en lisant certains documents, en retournant à certains volumes, à certains auteurs, en consultant l'expérience des autres pays, il pourra voir que ce que je dis a du bon sens, bien plus qu'il ne le pense.

Par conséquent, la quantité de titres que la banque centrale peut acheter sur les marchés est limitée par l'expansion qu'elle veut donner à la masse monétaire.

Etant donné, maintenant, cette contrainte sur le nombre de titres que la Banque du Canada peut absorber et aussi le nombre considérable de titres qui sont émis au pays, il est évident, comme je viens de le dire, que la Banque du Canada ne peut pas acheter ces titres et créer de la monnaie, de façon démesurée. S'il s'agit d'investissements, évidemment, c'est une autre chose. Elle le fait avec ses avoirs propres, avec les réserves qu'elle a accumulées, avec de l'argent, de l'épargne, en fait, qu'elle a faite. Mais s'il s'agit de ses opérations d'"open market", elle ne peut pas, donc, acheter n'importe quelle quantité de titres, elle ne peut pas émettre indéfiniment du crédit parce qu'à ce moment-là cela augmente la masse monétaire.

Si la Banque du Canada achetait de tels titres — et là on revient à l'investissement, puisque c'est un des aspects de la motion du député de Beauce — et qu'elle utilisait ses réserves, son épargne pour investir dans des titres du Québec, ou garantis par les provinces, pourrait-elle le faire avec intérêt ou sans intérêt? Je dis que si la Banque du Canada achetait des titres dans le cadre de son investissement, des titres sans intérêt, elle favoriserait le gouvernement qui les aurait émis ou elle subventionnerait ce gouvernement, ce qui n'est pas son rôle. En définitive, si la Banque du Canada, à même les centaines de millions de dollars dont elle peut disposer chaque année pour investir dans différents titres, si elle faisait ces placements sans intérêt, cela voudrait dire subventionner le gouvernement d'une province ou un gouvernement municipal aux dépens des possibilités qu'elle aurait d'agir autrement.

Je sais que les députés du Ralliement crédi-tiste se réfèrent souvent à des prêts sans intérêt qui sont consentis par le gouvernement canadien à des pays étrangers. Justement, ces prêts sans intérêt correspondent, à toutes fins utiles, à une subvention qui pourrait être versée à un pays en voie de développement, mais ce n'est pas du tout dans le cadre d'une politique monétaire que l'on fait de tels prêts. C'est bien plutôt dans le cadre d'une politique extérieure, qui vise à aider des pays qui sont en voie de développement, leur permettant d'obtenir des crédits pour acheter de l'équipement, etc.

Mais, à toutes fins utiles, ça revient à dire faire un prêt avec intérêt, et le gouvernement fédéral pourrait donner une subvention au pays X, Y ou Z lui permettant de rembourser l'intérêt. Au lieu de faire ça, on fait un prêt sans intérêt, mais c'est dans une politique extérieure, et non pas...

M. BROCHU: C'est exact. Mais pourquoi est-ce qu'on ne peut pas le faire pour nous-mêmes?

M. GARNEAU: Est-ce que le député de Richmond ne fait pas la distinction entre une politique extérieure et une politique monétaire? Si vous ne faites pas cette distinction, je vais continuer à donner mon exposé, mais n'essayez pas de le lire, vous ne comprendrez jamais rien.

M. BROCHU: Mais est-ce que je peux poser une petite question au ministre à ce sujet?

M. GARNEAU: Je n'ai que vingt minutes. Après ça, si on veut étirer le temps, au bout de vingt minutes vous poserez toutes les questions que vous voudrez.

La motion du député de Beauce, telle que rédigée, impliquerait donc que le gouvernement du Québec, s'il obtenait des prêts sans intérêt, demande à la Banque du Canada de laisser tomber sa politique de neutralité pour en quelque sorte subventionner d'une façon indirecte le gouvernement de la province de Québec. Et alors on pourrait demander de subventionner le gouvernement des autres provinces et on pourrait dire où ils vont prendre l'argent pour pouvoir effectuer de tels prêts, à moins que les citoyens, d'une façon générale, consentent à prêter, sans intérêt, de l'argent à la Banque du Canada, qui elle nous le prêterait sant intérêt. Cela me paraît assez ridicule.

Qui aurait la responsabilité? Si on demandait à la Banque du Canada de faire une discrimination en subventionnant d'une façon indirecte le gouvernement d'une province, d'une municipalité, il s'agirait de savoir quel montant éventuel pourrait être affecté dans cette opération, qui établirait les quotas. Cela deviendrait extrêmement difficile. Partout où il y a eu des changements de régime — où on a renversé le régime capitaliste, où on a mis un régime socialiste, où des mutations profondes ont été faites — jamais cette théorie n'a été appliquée, sauf à deux endroits. J'en retiendrai un en particulier, l'Allemagne, lorsque...

M. ROY (Beauce): Pardon, M. le ministre. Je ne suis pas d'accord. Cela n'a jamais été appliqué en Allemagne.

M. GARNEAU: ... Hitler a pris le pouvoir pendant les années de crise. Il a pensé pouvoir régler les problèmes économiques de l'Allemagne en imprimant d'une façon démesurée de la monnaie. Dans n'importe quel livre d'histoire économique que vous allez lire...

M. ROY (Beauce): C'est faux, et vous le savez.

M. GARNEAU: ... vous allez voir entre autres...

UNE VOIX: C'est du bluff que le ministre fait là.

M. GARNEAU: ... qu'on présente assez souvent cette caricature où les gens se dirigent vers le marché avec une brouette remplie de "deutschemarks", de marks allemands, et ils reviennent avec un petit paquet, c'est-à-dire une livre de beurre.

M. ROY (Beauce): C'est de la propagande libérale, de la propagande de René Lévesque en 1962.

M. GARNEAU: Ce n'est pas le Parti libéral, ni René Lévesque, du parti séparatiste, qui a écrit ce texte-là. Je vous renvoie à peu près à n'importe quel ouvrage d'histoire des doctrines économiques...

M. ROY (Beauce): C'est de l'interprétation fausse de l'histoire.

M. GARNEAU: ... ou de l'Allemagne. Vous allez trouver ces choses-là. On pourrait donner des exemples semblables ce qui s'est passé dans certains pays d'Amérique du Sud, où on a pensé, comme les créditistes le pensent, qu'on pouvait régler...

M. ROY (Beauce): Pardon.

M. GARNEAU: ... les problèmes économiques en faisant tourner la machine à piastres. Ce qui préoccupe davantage nos collègues des partis du Crédit social — parce que là il semble bien qu'il n'y aura plus de fusion possible — ce qui les préoccupe essentiellement, c'est de savoir pourquoi — et c'est ça qu'ils ne comprennent pas — le Québec, comme d'autres provinces du Canada, est obligé d'aller emprunter sur les marchés étrangers. Ils ne comprennent pas pourquoi la Banque du Canada n'augmenterait pas la masse monétaire à un rythme suffisant pour que tous les titres émis au pays puissent être absorbés sur nos marchés financiers.

Ils ne comprennent pas pourquoi les taux d'intérêt sont si élevés. Autrement dit, ce qui préoccupe les créditistes a trait non seulement au fonctionnement même du système monétaire ou au rôle que la monnaie joue dans l'économie, mais aussi au rapport qui existe entre notre économie, l'économie nationale et le marché extérieur.

Il est pourtant facile de comprendre que, si la masse monétaire ou le crédit augmentait trop rapidement au pays, il s'ensuivrait bien sûr une forte baisse des taux d'intérêt, ce qui pourrait en principe stimuler les dépenses de consommation, les investissements, donc la demande globale de biens et de services et, par ricochet, la production et l'emploi pourraient augmenter.

Malheureusement, certains effets pervers se feraient bientôt sentir. Le niveau général des prix augmenterait et nos produits seraient de moins en moins concurrentiels sur les marchés internationaux, alors que le produit étranger serait de plus en plus importé. On verrait alors notre balance commerciale et notre balance courante devenir déficitaire. Parallèlement à cela, notre compte capital deviendrait lui aussi négatif du fait que les épargnes seraient attirées à l'étranger par des taux d'intérêt plus alléchants.

Le résultat de cette expansion trop forte de la masse monétaire serait donc de provoquer un déficit considérable dans notre balance des paiements, d'anéantir nos réserves de change étranger et de forcer une dévaluation de notre devise, en plus des différentes contraintes qu'il faudrait alors imposer sur les paiements et sur les échanges.

Les expériences des pays qui subirent très fortement l'inflation dans le passé sont trop éloquentes pour qu'on les répète. Il est trop bien montré que l'inflation est néfaste pour la croissance économique.

L'inflation, en effet, sape la confiance du public dans la monnaie nationale et décourage l'épargne, en particulier celle du petit épargnant qui n'a pas accès au type de placement qui peuvent sauvegarder la valeur de son épargne. L'inflation rend également l'épargne moins disponible pour les investissements à long terme et elle est néfaste pour les entrées de capitaux étrangers à cause des incertitudes qu'elle crée sur le taux de change. Même les capitaux nationaux auront tendance à fuir à l'étranger au cours d'une inflation, car la confiance en la valeur externe de la monnaie diminue.

Par ailleurs, les investissements qui se font auront tendance à être moins productifs du fait qu'on cherchera surtout à tirer profit de l'inflation ou de s'en protéger, par exemple en achetant des terrains ou des biens immobiliers. Enfin, l'inflation provoque des variations considérables dans les prix relatifs et sa distorsion dans les structures des prix entraîne une mauvaise allocation des ressources. Il ne sert à rien de répéter — je viens de le dire — l'expérience que l'Allemangne et plusieurs pays d'Amérique du Sud ont connue pour s'apercevoir que la monnaie ne peut pas jouer un rôle magique dans notre économie et que l'expansion de la masse monétaire est nécessairement limitée par les positions internationales du pays et ou l'augmentation des biens et des services.

Si on ne veut pas accepter cette contrainte externe, il faudrait nécessairement en accepter d'autres, comme le gel des prix et des salaires, des restrictions sur les échanges et les paiements, etc. Je suis toutefois convaincu que nos citoyens sont fiers de la liberté dont ils jouissent actuellement et qu'ils sont prêts, pour la sauvegarder, à faire un usage plus modéré de la variation de la masse monétaire. Quoi qu'il en soit, en 1970 et 1971, la balance des comptes du Canada a connu un surplus assez considérable, ce qui a provoqué une augmentation de nos réserves et des devises étrangères ainsi que des pressions à la hausse sur notre taux de change.

Dans de telles circonstances, l'expansion de la masse monétaire est moins limitée par la position internationale du pays. C'est pourquoi, depuis bientôt deux ans, la Banque du Canada a adopté une politique monétaire plus expansionniste. En 1971, la masse monétaire a augmenté d'environ 15 p.c. au Canada et les taux d'intérêt ont diminué. C'est ce qui explique en partie pourquoi les émissions nettes en monnaie étrangère ont été seulement de $450 millions en 1971 alors qu'elles étaient de $1.4 milliard en 1969.

Si notre position internationale pouvait demeurer aussi bonne à l'avenir qu'elle l'a été en 1970 et en 1971, il est évident que la Banque du Canada, pour éviter toute pression à la hausse sur notre taux de change, devrait adopter une politique monétaire encore expansionniste, forçant ainsi les taux d'intérêt à diminuer davantage. C'est un peu ce qu'elle a fait par des pressions morales auprès des banques, obtenant que celles-ci diminuent leur taux d'intérêt à court terme, ce qui s'est produit il y a à peu près sept ou huit jours.

Dans cette perspective, s'il y avait une augmentation plus grande de la masse monétaire dans le cadre auquel je viens de me référer, les entreprises, les municipalités et les provinces pourraient écouler plus facilement leurs émissions sur le marché canadien et on aurait moins besoin de recourir aux marchés étrangers; ce qui, en définitive, pourrait satisfaire en partie la théorie créditiste.

Je tiens toutefois à signaler qu'on ne serait pas aujourd'hui dans cette position avantageuse, dans la possibilité d'appliquer ces politiques, si, dans le passé, on avait utilisé le crédit à la créditiste.

Un dernier point qui me semble préoccuper le parti créditiste est le fait que notre banque centrale n'adapte pas ses instruments généraux de la politique monétaire à l'objectif de développement régional. Autrement dit, la politique monétaire actuelle s'appuie sur des objectifs nationaux et la question est de savoir dans quelle mesure elle pourrait également tenir compte d'objectifs régionaux, comme le taux de croissance économique dans les différentes régions du pays.

Disons, d'abord, qu'il est possible que la Banque du Canada adapte ses instruments à une action régionale. Par exemple, dans ses opérations d'"open market" elle pourrait — c'est une supposition que je fais — utiliser les pouvoirs que lui confère la loi et faire des opérations avec des titres provinciaux. De la même façon, les coefficients de réserve secondaire pourraient peut-être — c'est là encore une supposition que je fais — être fixés à des niveaux différents selon les régions. Enfin, les pressions morales de la banque centrale sur les banques à charte pourraient varier aussi suivant les régions. Cependant, la plupart des spécialistes sur la question semblent d'accord pour dire que la portée d'une action monétaire régionale serait plutôt faible.

Je réfère les membres de cette Chambre à une étude qui était publiée dans la revue l'Actualité économique et régionale d'octobre et de décembre 1971 intitulé Palliatif ou panacée, l'article expose bien les limites de la théorie voulant que les banques centrales pourraient avoir des taux d'intérêt différenciés d'une région à l'autre. Même si, par exemple, la Banque du Canada achetait des titres du gouvernement québécois, l'impact de cette mesure au Québec pourrait être minime du fait que le capital est très mobile interrégionalement et qu'ainsi les différences dans la rémunération du capital seraient très tôt réduites par les mouvements de capitaux qu'elles susciteraient.

Quoi qu'il en soit, il serait souhaitable que cet aspect de la politique monétaire soit analysé plus à fond et que notre banque centrale soit davantage sensible aux problèmes régionaux. Si elle ne peut pas le faire directement, la Banque d'expansion industrielle, qui relève de la Banque du Canada ou qui a une affinité très grande avec la Banque du Canada, pourrait peut-être être appelée à jouer ce rôle. De notre côté, nous avons déjà proposé à plusieurs reprises la création d'une caisse d'aide conjoncturelle laquelle, dans notre esprit, pourrait faciliter la solution des disparités économiques régionales tout en maintenant les principes des juridictions de chacune des provinces. Plusieurs autres réformes pourraient également être envisagées pour accroître la sensibilité du système monétaire actuel aux problèmes économiques des régions. Nous accueillerons sûrement très favorablement les suggestions qui pourraient nous être formulées dans ce sens. Pour ma part, j'ai exposé mes vues sur ce sujet d'une façon très détaillée devant les membres de l'Institut canadien des affaires publiques.

Dans son exposé, le député de Beauce a rapporté un certain nombre de commentaires ou de propos qu'auraient tenus des personnalités sur le plan international. Il a, à maintes reprises, utilisé le terme de "magicien", etc. Dans son exposé, celui qui a fait le plus de magie, c'est certainement le député de Beauce. Je n'ai pas dit "démagogie" j'ai employé le mot "magie". La magie qu'il a utilisée est de faire dire des choses à des citations qu'il sortait de leur contexte. Entre autres, il a cité une déclaration qu'aurait faite un certain M. Robert

Buron, ex-ministre des Finances de France, à la suite de l'annonce du président Nixon de changer les relations économiques, d'imposer une surtaxe et de faire des changements dans la politique monétaire internationale.

M. Buron disait, je cite les propos du député de Beauce: "Devant la crise qui a surpris les augures financiers les plus compétents, devant leurs messages optimistes aux foules en vacances, la veille encore de la décision du président Nixon, les experts — là, je cite encore le député de Beauce, parce que je pense que les mots suivants s'appliquent peut-être plus à son groupe qu'aux personnes qu'il vient de citer — ces ignorants qui ignorent leur propre ignorance, opposent le système monétaire au système technique comme s'il pouvait exister un système monétaire en soi distinct de la vie économique des peuples et du mouvement des échanges."

En fait, le député de Beauce a utilisé une phrase, tirée hors contexte, d'un ex-ministre des Finances de France. Justement, il n'a tellement pas compris les propos que voulait tenir l'ancien ministre des Finances, que je ne connais pas, que cette phrase qu'il a citée détruit toute la thèse qu'il a essayé de nous exposer. En fait, pour dire que le système monétaire devait être modifié, il citait cette phrase de M. Buron: "Comme s'il pouvait exister un système monétaire en soi, distinct de la vie économique des peuples et du monvenent des échanges." Pourtant, sa proposition, qui est la base de la thèse du crédit social et des partis créditistes — parce que, d'après ce que je peux voir, il y en a trois — justement, c'est qu'on ait un système monétaire qui ne colle pas à la vie économique dans laquelle on est. Il croit, lui — c'est là la thèse du mouvement créditiste — que, quand il y a un problème à régler, on fait marcher la machine à piastres et qu'on émet du crédit. C'est ce qu'il veut dire, parce que la masse monétaire, ça peut être des billets de banque, ça peut être de la monnaie scripturale. On émet des billets de banque et on pense que ça va créer de la richesse.

M. ROY (Beauce): Ce n'est pas de ça que nous avons parlé.

M. GARNEAU: C'est exactement ce que nous a dit le député de Beauce, la semaine passée.

M. ROY (Beauce): Le ministre cherche à interpréter nos propos à sa façon.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. GARNEAU: M. le Président, le député aura tout le loisir de me répondre, car je pense qu'il a un droit de réplique sur une motion semblable.

C'est là toute la théorie créditiste, c'est là toute la base; quand il y a un problème, on fait marcher la machine à piastres. Je rencontrais quelqu'un durant la campagne électorale et je lui disais ceci: — c'était un membre de la presse qui avait suivi la campagne électorale — Je voudrais essayer de comprendre ce que signifie la théorie créditiste. Il m'a dit: Je vais vous expliquer comment je comprends la théorie créditiste. Cela me fait penser un peu à une histoire. C'est comme un gars qui descend de l'autobus et qui voit une petite fille, avec un chat dans ses mains. Il dit à la petite fille: Tu as un bien beau chat, ma petite fille. Combien demandes-tu pour ton chat? Elle répond: $20,000. Il dit: Tu ne pourras jamais vendre ton chat $20,000. La petite fille dit: Oui, je demande $20,000. Le gars s'en va. Le lendemain, il prend le même autobus, descend au même arrêt et voit encore la petite fille avec le chat dans ses mains. Il dit à la petite fille: Tu n'a pas vendu ton chat? Elle dit: Non. Il dit: Tu demandes encore $20,000 pour ton chat? La petite fille dit: Oui, je demande encore $20,000 pour mon chat. Le gars s'en va. La troisième journée, il revient. Il sort de l'autobus et voit la petite fille avec deux petits chiens dans ses bras. Bonjour, ma petite fille, tu as vendu ton chat? Elle dit oui. Il dit: Combien l'as-tu vendu, $20,000? Elle dit: Oui, j'ai eu deux petits chiens de $10,000 chacun pour mon chat. En fait, c'est un peu cela, d'une façon caricaturée si on peut dire, la théorie créditiste. On pense qu'avec deux petits chiens de $10,000 elle était plus riche qu'avec un chat de $20,000 dans les mains.

On pense pouvoir régler les problèmes en faisant tourner la machine à piastres, alors que la richesse collective se situe dans les biens et les services disponibles et que la masse monétaire n'est qu'une façon d'échanger ces biens et ces services. Cette masse monétaire doit croître dans des proportions ou suivant un rythme qui ne soit pas trop grand, trop démesuré par rapport à la croissance réelle des biens et des services. Sans cela, on a une masse constante de biens et de services et on a un volume monétaire plus grand pour faire tourner cette masse constante de biens et de services. Alors, quand on a cinq chaises à vendre, s'il y a $10 de disponibles, on aura $2 par chaise. S'il y a $20 de disponibles et qu'il y a encore cinq chaises, cela veut dire qu'on a $4 par chaise. Cela fait $20, mais il n'y a pas plus de chaises à vendre et il n'y a pas plus de richesse. C'est ça, à mon sens, l'erreur du crédit social.

Evidemment, je pourrais citer un certain nombre de personnes qui ont analysé cette thèse et qui en sont toutes venues à la même conclusion. J'imagine que tout le monde ne peut pas se tromper en même temps. Ce n'est pas une question de dire que le Parti libéral s'est opposé à cela, que l'Unité-Québec s'est opposé à ça, que le parti séparatiste s'oppose à ça, mais, dans le monde entier — je ne peux pas croire que tout le monde soit fou en même temps — là où il y a eu des révolutions, là où on a renversé

complètement tous les régimes, on n'a pas utilisé cette formule. Là où on a tenté de l'utiliser, en pensant pouvoir créer de la richesse, cela a amené une inflation telle que cela a obligé les pays à établir un contrôle très strict sur le déplacement des citoyens, les empêchant de sortir de l'argent du pays, d'aller en vacances à l'extérieur, d'importer des biens et des services, de prêter de l'argent à qui ils voulaient. En fait, ce fut une restriction considérable de la liberté des individus.

A mon sens, ceci devrait faire réfléchir les créditistes qui se disent les fervents défenseurs de la liberté individuelle alors que leurs propositions nous mèneraient carrément vers un contrôle total des échanges de la circulation des biens et des capitaux et nous amèneraient évidemment une inflation considérable des prix, des biens et des services.

Compte tenu de ces remarques, il devient illusoire de penser pouvoir souscrire à la motion du député de Beauce. C'est la raison pour laquelle, en tant que représentant du groupe ministériel, je souligne au député de Beauce qu'il nous sera impossible, pour des raisons pratiques, pour des raisons d'intelligence, de voter pour sa motion.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. Florian Guay

M. GUAY: Bien sûr que vous comprenez que j'avais l'intention d'intervenir sur cette motion présentée par le député de Beauce, "proposant que" et on pourrait relire la motion.

J'ai bien aimé l'intervention du député de Beauce, premièrement parce qu'elle était fondée sur la réalité. Ce que je n'ai pas détesté non plus, c'est d'entendre le ministre des Finances. Cela faisait déjà un bon bout de temps qu'on attendait évidemment que le ministre des Finances vienne mettre son mot. Au moins, le ministre des Finances a reconnu certaines choses qu'il s'était toujours refusé d'admettre avant aujourd'hui. Le ministre des Finances vient de nous dire que des prêts sans intérêt, cela existe, que des prêts sans intérêt, cela s'est fait et cela se fait.

Le ministre des Finances vient de nous prouver l'aspect bénéfique d'un taux d'intérêt réduit. Vraiment, ces propos venant du ministre des Finances sont réconfortants. J'aurais aimé que le ministre des Finances, dans ses citations, lui aussi, parle des emprunts du Québec de la Colombie-Britannique. Il n'y a pas touché. Cela aurait été trop plaisant de l'entendre, mais il n'a pas touché à cela.

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles cette motion a été inscrite au feuilleton. On se rend bien compte que, dans ce projet miraculeux, aux dires du premier ministre, à l'annonce de ce projet au Colisée de Québec, devant les militants libéraux, qui est le développement de la baie James, on a cru aussi au miracle. On y croit de temps en temps. Mais jusqu'à maintenant, quoi qu'en disent certains membres du Parti libéral, il y a encore très peu de fait dans ce domaine. Il y a une raison pour laquelle très peu de choses sont faites et il y a quand même une raison pour laquelle cela n'avance pas plus vite que cela.

Quand on pose la question au ministre de la Voirie, il nous la donne la réponse, lui. Quand on pose la question au ministre des Affaires sociales, il nous donne également la réponse. Quand on pose ces mêmes questions au ministre de l'Agriculture, il nous donne la réponse. Pas parce qu'il est plus honnête que l'autre pour nous la donner, mais parce que c'est la seule réponse valable. On n'a pas de capital.

Il va quand même falloir qu'on l'admette ce problème à un moment donné, qu'on l'envisage, qu'on l'étudie, qu'on le regarde bien en face. Le premier problème du gouvernement, c'est ça. On propose des solutions, on dit: Non, ce n'est pas bon. Il s'agit de se rappeler que le premier conducteur d'automobile a fait fuir un paquet de gens. On a dit de lui, c'est un fou, c'est un imbécile et c'est tout ça. Aujourd'hui, l'automobile fait partie de nos habitudes de vie. L'automobile fait partie des besoins. Pourtant, c'était nouveau dans le temps. Ah oui! On a dit de tous les inventeurs, ce sont des fous. On l'a dit! Aujourd'hui, on réalise que ces personnes, ces gens d'avant-garde, ces proposeurs de solutions, ces gens, devrais-je dire, ultramodernes, ont prouvé au monde entier que tôt ou tard, ils ont eu raison.

La première fois qu'on a entendu dire: Les Américains veulent aller à la lune, je me souviens de ce qui a été dit autour de ces propos. On a dit: Ce n'est pas possible. Jamais, cela ne se fera. Pourtant, on a marché sur la lune! Je pense que la motion du député de Beauce est encore plus réaliste que l'idée, d'il y a quelques années, d'aller marcher sur la lune. Si le gouvernement n'a pas recours à d'autres moyens que ceux dont il se sert actuellement pour développer un projet aussi important que celui de la baie James, je suis convaincu, à l'avance, de l'échec. Un échec, cela se voit de plusieurs façons. Quand je parle d'échec, je fais allusion aux éternelles servitudes que s'est créées le gouvernement de cette province, qui devront être payées par les générations futures.

M. le Président, quand nous parlons de nous servir de nos institutions financières, de ce qui a été mis à notre disposition, le ministre des Finances vient nous dire: Cela va créer l'inflation. Que ce soit des capitaux américains, japonais ou canadiens dont nous devions nous servir pour développer notre province, qu'est-ce que cela vient faire avec le mot "inflation" qu'on sert à toutes les sauces? Il ne faut pas oublier que le ministre des Finances nous a, quand même, refilé certains propos qu'il devrait reconsidérer s'il veut être honnête avec lui-même et suivre sa pensée jusqu'au bout. Il a dit : Probablement que notre solution favoriserait la

diminution du chômage. Pour lui, c'est une probabilité. On lui a demandé s'il avait déjà fait la demande au gouvernement central pour l'obtention d'un prêt sans intérêt. Là, il a dit: Non. Cela ne se peut pas, c'est impossible. Mais il dit: Je ne l'ai jamais demandé.

M. ROY (Beauce): Je m'excuse auprès de mon honorable collègue, le député de Dorchester, mais je voudrais vous faire remarquer que nous n'avons pas quorum depuis fort longtemps en cette Chambre. Je pensais que quelqu'un s'occuperait de voir à s'assurer de la présence des députés. Mais je constate qu'il n'y a aucun député de l'Unité-Québec. Je constate que, sur les banquettes ministérielles, il n'y a personne, sauf le ministre que je vois entrer. Nous sommes à peine dix députés en cette Chambre. Je pense qu'il y a lieu d'invoquer le quorum.

M. LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!

L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, avant d'être interrompu, j'étais pour dire que je me souviens qu'il n'y a pas longtemps, le ministre de l'Agriculture, qui a présenté un projet de loi dans le domaine agricole, nous a suppliés d'appuyer son projet de loi. Voyons un peu ce que demandait son projet de loi.

Ce projet de loi permettait une plus grande accessibilité de la classe agricole à des capitaux à taux d'intérêt réduits. Je me souviens, M. le Président, de ce qui s'est produit en Chambre, cette journée-là. Le ministre de l'Agriculture nous supplie d'accepter, l'Opposition officielle nous dit que cela a bien du bon sens mais qu'il faudrait aller plus loin que cela, qu'il faudrait bien demander, avant remboursement de l'intérêt, de faire diminuer ce taux d'intérêt dont nous discutions, à ce moment-là, de 8 p.c. à 7 p.c. Sur le principe, on s'entend. Cela va bien. Mais nous, nous allons encore plus loin. Nous disons: Pourquoi ne serait-il pas possible d'avoir des capitaux pour développer notre province, sans intérêt? On nous dit: Cela n'a plus de bon sens.

M. le Président, le ministre des Finances a souligné, tantôt, l'aspect ridicule. C'est lui qui l'a dit, c'est lui qui pense comme cela, parce qu'il ne pense pas mieux. Je me demande s'il n'est pas plus ridicule de souffrir de la faim, au sein de l'abondance ou encore de fonctionner de la façon qu'on fonctionne actuellement. Pour bien des familles, pour bien des personnes, pour un paquet de gens dans la province, même les animaux ne sont pas réduits à vivre de la sorte.

Cette motion, déposée par le député de Beauce, on pourrait en parler pendant des années. Bien sûr, on fera en sorte que tout cela s'oublie le plus rapidement possible mais je vous parie que, dans très peu d'années, nos propos auront démontré au ministre des Finances et à tout le gouvernement que nous avions raison. On n'a qu'à analyser dans quel cul-de-sac l'économie du Québec est orientée actuellement.

Je pense que cette motion en est une des plus sérieuses et elle mérite une étude bien approfondie. J'aimerais que le ministre des Finances soit capable de nous dire, en cette Chambre: Nous avons essayé et cela n'a pas réussi. Le ministre des Finances, actuellement, ne peut pas nous dire cela parce qu'il n'a pas tenté ce qu'il devait tenter. Nous considérons que le ministre des Finances a failli à ses obligations. Il n'a pas essayé. On a l'impression qu'il n'est pas intéressé à réussir.

M. le Président, quand on parle de crédit réel, je me demande ce que le ministre des Finances en pense. Le crédit réel, en deux mots, c'est nulle autre chose que la confiance. Je dis aujourd'hui en cette Chambre que plus on est obligé de s'éloigner pour tenter de vendre notre confiance, plus cela prouve justement que cette confiance a grandement diminué et qu'il est grand temps de réviser ses positions.

Si des capitaux sans intérêt, c'est bon pour les étrangers, comme l'a souligné tantôt le ministre des Finances, pourquoi cela ne serait-ce pas bon pour nous autres, les Québécois? Je pense que c'est eux qui mériteraient d'abord et avant tout l'accessibilité à des capitaux pour développer un projet aussi important, comme l'a répété à plusieurs reprises le premier ministre et plusieurs de ses ministres. Il est grand temps et il est absolument nécessaire qu'on tente ce qui doit être tenté, qu'on demande ce qui doit être demandé, afin de réussir à développer un projet comme celui-là, de la meilleure façon possible, sans se créer des servitudes que des générations futures devront malheureusement payer très cher.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Richmond.

M. LEDUC: Un autre qui n'a pas compris.

M. LEVESQUE: Est-ce qu'ils croient à ça tout le monde?

M. Yvon Brochu

M. BROCHU: Je n'ai pas la prétention que mon parti soit le dépositaire de toute la vérité. Mais je n'ai pas non plus la prétention de dire — comme j'ai pu l'entendre en cette Chambre et les dernières remarques me le prouvent — que les autres partis sont les dépositaires exclusifs de l'erreur. Je pense plutôt que face aux situations, aux problèmes que nous vivons nous pouvons tirer la leçon que jamais on n'a voulu accepter de remettre vraiment en cause tout un système comptable, qu'on n'a jamais accepté de réviser ses positions et ses méthodes d'approche

en matière de financement pour ce qui concerne nos projets.

Chaque gouvernement municipal, scolaire, provincial a dans ses classeurs sa petite brochure, qui attend quoi? Il a un certain nombre de dossiers, de projets, qui attendent quoi? Ils attendent le bon vouloir des prêteurs des Etats-Unis, de l'Allemagne, de la France, ou plus loin encore si possible. Et, selon l'expression de Gérard Fillion, il s'agit surtout de savoir: "Où est l'argent, et comment aller le chercher? " C'est le moyen et c'est toujours au niveau de ce moyen que tous nos problèmes restent en suspens.

Ils attendent que le contribuable récupère sa capacité d'être plus taxé encore pour réaliser ces projets, que le gouvernement fédéral cesse d'augmenter le nombre des chômeurs et des assistés sociaux, par sa lutte aveugle à son inflation. C'est son petit cheval de bataille, comme c'est le petit cheval de bataille du gouvernement provincial dans plusieurs domaines, parce que sa petite inflation il doit la conserver pour avoir une raison de dire au bout de la ligne: Messieurs, nous n'avons pu répondre de notre mandat adéquatement, à cause de notre petite inflation.

Pendant ce temps le peuple québécois est bloqué dans ses investissements publics. Tous les budgets ont, comme article le plus important, le service de la dette.

Sur les quelques projets qui passent en priorité, le peuple, en empruntant à 9 p.c. et même 9.99 p.c. comme l'Hydro-Québec, paiera ses investissements deux fois, trois fois, par les intérêts sur ses propres travaux, pourtant réalisés par les citoyens du Québec avec les matériaux du Québec.

Pourquoi, dans un projet comme celui de la baie James, avec les bras d'hommes du Québec, avec notre technologie, avec nos scientifiques, devrions-nous aller chercher à l'extérieur ce dont nous avons besoin? Et pourquoi surtout, après l'avoir réalisé, devrions-nous le rembourser à quelqu'un d'autre qui n'est pas nous?

M. GARNEAU: Je vais vous acheter votre petit chat.

M. BROCHU: En un mot, actuellement, le Québec attend le bon vouloir des prêteurs pour décider de ses propres investissements. Et, ceux qu'il réussit à faire, il les paie deux ou trois fois. C'est donc un gouvernement fort dépendant et incapable de réaliser ses propres initiatives puisqu'il attend le bon vouloir des autres.

Devant cet état de choses, n'est-il pas renversant en notre siècle de progrès et de technique étonnante, même parfois effarante, où dans le domaine de la pensée tout est remis en question que les économistes, eux, continuent d'accepter — comme s'il était une institution divine — un système d'endettement universel dont le coût progressant avec le développement fait boule de neige pour menacer de faire craquer tout le système économique lui-même.

Au moment même où tout est remis en question de toutes les façons possibles, comment se fait-il qu'on soit encore au stade de vouloir défendre une façon comptable qui ne nous a menés nulle part, sinon à être dépossédés par ceux de l'extérieur?

Sur ce plan, à mon sens le gouvernement, en refusant comme le ministre l'a indiqué tout à l'heure, d'appuyer cette motion du député de Beauce, refuse en d'autre sorte de voir d'autres possibilités et tient à tout prix à rester dans le même mode de pensée, dans le même mode de fonctionnement et d'aller d'échec en échec en essayant toujours de dire: Bien, nous avons notre petite inflation, nous avons nos petits problèmes, que tout le monde nous remette en cause, mais par contre le gouvernement oublie...

M. GARNEAU: ... que d'en avoir des gros avec votre théorie de fou.

M. BROCHU: ... lui-même de se remettre en cause. Et, M. le Président...

M.LEDUC: Nous avons nos petits créditis-tes.

M. BROCHU: ... on prête sans intérêt, c'est vrai, à des pays étrangers — je n'ai aucune objection — pour assurer le développement de ces pays pour les aider, et c'est formidable. Par contre, pourquoi n'est-on pas capable de le faire pour nous-mêmes, ici? Pourquoi n'est-on pas capable de réaliser le même processus pour nos entreprises chez nous et pour un développement aussi important que celui de la baie James que nous connaîtrons bientôt?

Le Canada emprunte aux Etats-Unis. Les Etats-Unis vont chercher des capitaux en France. L'Argentine essaie d'aller chercher des capitaux en Europe, en Australie et dans d'autres pays. Une question bien simple, une question peut-être simpliste: Est-ce que vous pourriez me nommer le nom du pays prêteur? Quel est ce fameux pays dans l'univers qui possède toutes les richesses et toutes les possibilités de financer les autres pays? Nommez-le.

Je pense qu'à ce niveau on peut trouver une partie de la réponse dans notre question. On a eu plusieurs objections au cours des discussions. Une des premières objections était l'inflation, et le ministre l'a soulignée lui-même. Il y aura trop d'argent en circulation. Le gouvernement va se mettre à imprimer de l'argent. Ce sont les paroles du ministre. Quand une municipalité va emprunter $100 millions à New York, qu'est-ce qu'elle fait? Elle draine de l'argent ici. Alors, quelle différence, quel changement? Il y aurait toute une distinction à faire sur l'inflation et beaucoup de nuances, d'accord. Entendons-nous sur les mots et sachons de quoi nous parlons.

M. GARNEAU: Vous relirez mon discours, vous allez voir.

M. BROCHU: Au cours d'un "panel" à la télévision sur ce sujet, un économiste définissait très dogmatiquement l'inflation: Hausse inconsidérée des prix causée par une disproportion entre l'offre et la demande, celle-là ne pouvant répondre à celle-ci, traduisant en termes pratiques trop d'argent disponible devant la capacité de production. Or, un représentant du ministère de l'Industrie et du Commerce répondit à l'économiste traditionnel que sa définition ne collait pas à la réalité.

Au Québec, les commerçants se fendent en quatre pour vendre et ça, vous le savez. Les industriels doivent couper la production et ça, vous le savez également. Ils imaginent des plans pour garder en permanence leurs employés que le chômage menace et que les syndicats veulent protéger par un salaire garanti et ça, vous le savez également, parce que vous le vivez, le problème. Et le gouvernement donne des subventions à ces industries pour conserver de la main-d'oeuvre alors que trois ou quatre ans après on met la même main-d'oeuvre dehors en se servant de ces capitaux pour mécaniser. Vous savez que le problème est là.

Il n'y a pas d'inflation au Québec. L'économiste du Québec, les deux pieds dans le bain des affaires, le démontre. Les effets similaires à l'inflation traditionnelle, à la hausse des prix sont en partie importés d'autres parties du Canada et en partie causés par leur base de la pyramide d'intérêts que les citoyens payent depuis 50, 30 et 20 ans sur le développement public, pyramide qui se traduit en taxes qui entrent dans le prix des produits, hausse qui se réflète dans des augmentations de salaire, et le cercle vicieux continue toujours.

L'économiste de salon, lui, les deux pieds sur le bureau, doctus cum libro, savant avec le livre, raisonne d'après des principes élaborés. Il y a des siècles, alors que régnait une économie de privations, chacun devait travailler dix ou douze heures par jour, chacun, artisan ou professionnel, devait tirer lui-même de le terre une partie de sa nourriture ou de son vêtement. Ce sont ces économistes de salon qui, pour guérir leur inflation, ne font que créer du chômage qui se transforme avec le temps en assistance sociale et en hausse de taxes. M. le Président, c'est là le portrait de ce que nous avons à vivre et c'est la réponse à l'objection d'inflation que je voulais donner au ministre tout à l'heure.

Deuxièmement, on va dire: II y aura trop d'argent en circulation. Nous avons déjà répondu qu'en allant emprunter $100 millions dans un pays étranger, le gouvernement drainait $100 millions nouveaux. Il est vrai que cette permission lui est donnée par des prêteurs étrangers, mais ce faisant il se déclare lui-même en tutelle et décerne un beau diplôme d'incompétence à son équipe comptable de conseillers qui ont la tâche de planifier le développement du Québec. Cette attitude, M. le Président, est une attitude de démission, et quelqu'un qui démissionne est quelqu'un qui abandonne la mission qui lui avait été confiée et la responsabilité qu'il avait également de mener tout un peuple à bon terme et d'assurer le développement économique, social et culturel de tout un peuple.

J'ai entendu d'autres objections aussi à l'effet que c'est du ressort du fédéral de demander l'assistance de la Banque du Canada pour réaliser notre projet de la baie James. J'ai entendu le député de Bourget dire: II ne faudrait pas. S'il entre trop d'argent et si ça ne va pas assez mal, on ne pourra pas se séparer. Cela revient à cela, au bout de la ligne.

Lorsque l'Hydro-Québec ou le Québec importent ici $300 millions de crédits nouveaux à la suite d'un accord avec les financiers d'un pays étranger, est-ce que le fédéral va y mettre son nez? Non. C'est le même principe, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'avertis l'honorable député de Richmond qu'il devra s'apprêter à conclure, puisque ses dix minutes sont presque terminées, sinon terminées.

M. BROCHU: Merci, M. le Président. Je continue à m'apprêter encore plus rapidement. Chacun, avec deux secondes de réflexion, peut constater que toute communauté humaine, province, ville ou municipalité qui construit un pont en construit deux autres par le système d'argent-dette; si une école est construite, deux autres le sont aussi par le même système. Pourtant, on cherche encore les économistes diplômés qui contestent ce cancer. Au pied du mur, ils nous disent: Cela se fait comme cela en Amérique.

Le plus bel exemple est M. Parizeau, sans le nommer, une personne qui a couché dans tous les lits et qui ressort, au bout de la ligne, avec la même forme de syphilis parce qu'il n'a pas réglé le problème.

M. LEDUC: C'est pas mal fort comme argument, cela!

M. BROCHU: Au bout de la ligne on dit: On va essayer autre chose, mais à l'intérieur même du système. On va replâtrer les jambes de bois avec des bouts de bois encore. Devrait-on demander aux économistes diplômés, s'ils Veulent être pris au sérieux lorsqu'on voit les résultats absurdes du système, de faire tabula rasa de leurs préjugés et de certaines fausses sciences apprises dans des manuels maintenant arriérés parce qu'on ne les a jamais remis en question.

Il est temps que les contribuables regardent les faits et réclament de leur gouvernement ou de ceux qui sollicitent leur vote d'agir avec intelligence, sans suivre une routine séculaire, démodée, devenue fausse prémisse en raison des changements majeurs survenus dans notre monde moderne, scientifique, technologique et social.

Je termine avec un petit exemple, celui-ci: A un moment donné, un président d'entreprise avait une promotion à offrir à un individu. Deux individus étaient susceptibles de l'avoir. Le premier avait quinze ans d'expérience et le deuxième cinq ans. Celui qui avait quinze ans d'expérience se disait, en bon émule du gouvernement libéral: Je suis sûr de l'avoir; j'ai quinze ans d'expérience. Il n'y a pas de problème avec cela. Avant d'avoir même sa promotion, le gars s'achète un bateau et une maison. Tout va bien et il dit à sa femme: Je viens d'avoir une augmentation de $4,000; ce n'est qu'une question de temps, il n'y a pas de problème.

A un moment donné, le gérant de l'entreprise fait venir les deux bonshommes, celui de cinq ans d'expérience et celui de quinze ans d'expérience et demande à celui de quinze ans d'expérience: Qu'est-ce que tu ferais à ma place? J'ai deux individus, toi et l'autre, un a quinze ans d'expérience et l'autre, cinq ans. Celui qui a quinze ans d'expérience a répété la même expérience durant quinze ans, alors que le second a appris à modifier, il a été plus loin et s'est transformé. Il a répondu: Je prendrais celui qui a cinq ans d'expérience. Le gérant lui a dit: Tu es dehors. C'est l'autre qui a eu la promotion.

Je termine sur cet exemple pour dire que, depuis 250 ans, on a répété la même expérience. Notre gouvernement provincial n'a qu'une année d'expérience et il s'en tient à celle-là sans vouloir regarder plus loin s'il n'y aurait pas d'autres possibilités d'en arriver à développer le Québec et d'être maîtres chez nous. Afin de développer nos richesses et pouvoir dire que le Québec nous appartient vraiment, il faut d'abord s'appartenir soi-même. Au lieu d'aller à l'étranger, à l'extérieur chercher les capitaux dont nous avons besoin, nous mettre en tutelle pour les années à venir et hypothéquer les autres générations, ayons donc le courage de voir une autre méthode, de la considérer et d'aller plus loin dans ce domaine pour que, chez nous, ce soit vraiment un Québec où il fait bon vivre dans tout le contexte de technologie, de richesses naturelles que nous avons, de bras d'hommes. Tout est à notre disposition; il s'agit de s'en servir, mais de changer le "gearage" entre les deux oreilles.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. Léo Pearson

M. PEARSON: Trente secondes, M. le Président. Quand le Crédit social réussira à implanter son système quelque part dans le monde et pourra le faire fonctionner, je commencerai à me poser des questions.

Lorsque je constate que leurs propres adeptes créditistes, lorsqu'ils réussissent à prendre le pouvoir, sont dans l'impossibilité d'appliquer leur propre doctrine, je me pose d'autres questions. Voilà pourquoi en attendant, M. le Président, je garde mon esprit ouvert et voterai contre la motion du Ralliement créditiste.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Aurèle Audet

M. AUDET: M. le Président, juste quelques mots sur la motion du député de Beauce pour démontrer, une fois de plus, le bien-fondé de nos avancés lorsque nous invitons le gouvernement à faire en sorte que les nouveaux crédits émis soient des émissions de crédits qui ne portent pas d'intérêt, c'est-à-dire des émissions de crédits venant de la Banque du Canada, ne portant pas d'intérêt.

J'écoutais le ministre des Finances tout à l'heure nous dire justement que la masse monétaire avait augmenté, l'an dernier, de 15 p.c. Je crois que lorsqu'il y a une augmentation de la masse monétaire ceci veut dire que nous avons fait, par cette augmentation, une nouvelle représentation des richesses canadiennes. Donc, si nous faisons une nouvelle représentation des richesses canadiennes, pourquoi ne ferions-nous pas une représentation libre de dettes puisque cette richesse canadienne appartient aux Canadiens? Aujourd'hui, lorsque nous faisons une augmentation de la masse monétaire, nous la faisons sous forme de prêts portant intérêt. Donc, à qui appartiendra cette nouvelle augmentation de nos richesses canadiennes si nous représentons cette nouvelle richesse par des prêts portant intérêt? Cette nouvelle augmentation de richesse appartiendra à ceux qui ont prêté, à ceux qui ont acheté les obligations canadiennes, à ceux qui ont servi à faire la nouvelle augmentation de la masse monétaire.

Nous disons, nous, que ces nouveaux crédits représentant de nouvelles richesses canadiennes devraient être de nouveaux crédits ne portant pas d'intérêt, c'est-à-dire qu'ils seraient, par le fait même, la propriété des Canadiens. Le ministre des Finances, tout à l'heure, justement, disait que le crédit est ni plus ni moins qu'une forme d'échange entre des produits et des services. Il disait que, entre autres, que s'il s'agit de vendre des chaises, il faut absolument avoir un crédit qui facilite ces échanges. De quelle façon? Pourquoi réellement devrions-nous payer intérêt sur de l'argent qui sert à échanger des biens et des services? Pour quelle raison paierions-nous de l'intérêt sur cet outil qui sert de moyen d'échange entre biens et services? C'est inconvenable, en 1972, que nous ne puissions comprendre que l'argent et le crédit sont simplement un moyen d'échange mais n'est pas une richesse en elle-même.

L'argent et le crédit ne sont que le reflet des réalités, le reflet de richesses réelles. C'est pour cette raison que le crédit nouveau ne doit pas porter d'intérêt. De quelle façon le ministre des Finances pourrait-il concevoir qu'il serait possi-

ble aux Canadiens ou aux Québécois de rembourser le capital émis sous forme de prêt plus l'intérêt? Nous savons si bien que lorsque nous augmentons la masse monétaire par un nouveau capital, par de nouveaux crédits, il n'y a que le capital qui est émis, et la partie qui représente l'intérêt n'a jamais été mise en circulation. Si seulement le capital a été mis en circulation, comment pouvez-vous croire que nous puissions remettre capital plus intérêt? Ce n'est pourtant pas dur à comprendre.

C'est aussi simple que deux et deux font quatre. On ne peut remettre dix lorsqu'il y en a eu seulement cinq de crées. C'est impensable. L'intérêt devrait être remis sous forme de richesse réelle que les Canadiens possèdent.

Lorsque nous parlons, par exemple, du problème de la baie James, à qui appartiennent les immenses territoires du nord du Québec? Ces richesses inouïes sont là depuis des siècles et des siècles et elles appartiennent aux Québécois. Pourtant, ce n'est qu'en 1972 qu'on a commencé à exploiter ces richesses. On n'a trouvé rien de mieux, pour exploiter ces richesses, que d'aller emprunter ou vendre des obligations québécoises aux Américains pour représenter de nouvelles richesses québécoises. Il aurait été si facile de représenter nos nouvelles richesses québécoises par de nouveaux crédits québécois ne portant pas intérêt. Mais si, au contraire, nous représentons cette nouvelle richesse québécoise par des crédits américains portant intérêt, nous ne serons jamais propriétaires de nos richesses du nord du Québec. Ce sera une propriété américaine.

Il serait si facile de garder notre Québec pour les Québécois, par des crédits nouveaux représentant de nouvelles richesses et ce, sans intérêt, pour le bien de la communauté du Québec. Pensez-y bien, mes amis. C'est un problème simple. C'est tellement simple que je crois que c'est pour cette raison que vous ne le comprenez pas. C'est la simplicité même. Vous aimez mieux compliquer les choses, parler de masse monétaire et donner des prêts sans intérêt aux étrangers alors que vous ne voulez même pas le faire pour nous-mêmes.

M. VEILLEUX: Ce n'est pas nous qui contrôlons la Banque du Canada.

M. AUDET: Demandez-le au moins à la Banque du Canada. Vous n'osez même pas le demander. Ce serait si facile de demander au moins à la Banque du Canada d'agir comme agent financier de la province de Québec. C'est écrit en toutes lettres dans la Loi de la Banque du Canada. Elle peut servir d'agent financier pour les provinces canadiennes. Mais on n'ose pas élever la voix et même le demander.

M. VEILLEUX: C'est dans la mesure de votre parti.

M. AUDET: M. le Président, je ne veux pas aller plus loin. Je sais qu'on ne comprendra pas davantage. Les députés de Beauce, de Richmond et de Dorchester l'ont dit.

M. VEILLEUX: Ils ne comprennent pas.

M. AUDET: On s'obstine à ne pas voir clair dans la misère que nous avons d'administrer dans cette province. On aime mieux tout donner aux étrangers, avoir des dettes qui ne se paieront jamais et donner nos biens à la haute finance. Merci, messieurs.

DES VOIX: Vote! Vote!

M. LE PRESIDENT: Si l'honorable député de Beauce, proposeur de la motion, exerce son droit de réplique, ceci mettra fin au débat.

M. Fabien Roy

M. ROY (Beauce): Au cours de cette motion qui est discutée pour la deuxième semaine, nous avons eu l'occasion d'entendre les porte-parole des différents partis d'Opposition, qui ont fait valoir leurs opinions sur cette motion. Nous avons également entendu l'honorable ministre des Finances.

Avant de commenter leurs propos, qu'il me soit permis de remercier mes collègues pour les interventions qu'ils ont faites, pour l'élément nouveau qu'ils ont apporté dans la discussion. Je veux les féliciter et les remercier pour l'intérêt qu'ils ont manifesté à cette motion, parce qu'elle fait partie de notre programme politique et que nous estimons qu'il est de la plus haute importance pour le gouvernement de reconsidérer le système économique.

Il y a eu les premiers propos du chef de l'Unité-Québec, qu'il a résumés tout simplement par ces mots: illogisme incommensurable. Après avoir relu ses propos et regardé les arguments qu'il a apportés, je dirai tout simplement que, de sa part, c'est de l'ignorance incommensurable. C'est pourquoi je n'irai pas plus loin à ce sujet.

Pour ce qui est de l'intervention des membres du Parti québécois, j'ai été très surpris d'entendre, de la bouche même de ceux qui veulent libérer le Québec, la motion de précédents, alors qu'eux-mêmes veulent nous lancer dans une aventure nouvelle sans trop savoir où nous allons, pour permettre aux Québécois d'être vraiment maîtres chez eux.

On vient nous donner, comme argument, que l'Alberta et la Colombie-Britannique n'ont pas eu recours à la Banque du Canada.

Je pense que le chef parlementaire du Parti québécois pourrait se référer à son chef de parti, M. René Lévesque, qui, à ce moment-là, était avec M. Lesage au conseil des ministres. Ils sont allés emprunter de l'argent en Colombie-Britannique. Pour les dépenses administratives gouvernementales, l'Alberta et la Colombie-Britannique n'empruntent pas. Elles ont mis des

prêts à la disposition des municipalités — si on avait été honnête, on l'aurait ajouté — et pour le développement du secteur public de leur province. Il serait assez étonnant de donner des chiffres.

Or, des précédents ont été créés. Tous les jours des précédents sont créés au Québec. Mais on se ferme les yeux. L'Hydro-Québec a quand même eu un prêt à faible taux d'intérêt de la Banque du Canada. Cela n'a pas provoqué l'inflation. La Banque d'expansion industrielle émane directement de la Banque du Canada. C'est à tous les jours que la Banque d'expansion industrielle fait des prêts directement de la Banque du Canada. La Banque du Canada achète les obligations de la Banque d'expansion industrielle; elle en avait, au 31 mai 1972, pour $484,772,000, en plus d'avoir le capital-actions de $57 millions de la Banque d'expansion industrielle.

Ceci est pour dire que des précédents ont été créés. Il n'y a pas de risque à vouloir créer un précédent de ce côté parce que ce serait bénéfique. Quant aux propos de l'honorable ministre des Finances, je voudrais quand même être honnête avec lui; je dois le féliciter pour le sérieux qu'il a mis dans la tentative qu'il a faite. Il a donné un exposé très scientifique, très académique pour tenter de nous convaincre que, dans le système économique actuel, il n'est pas possible d'utiliser les services de la Banque du Canada. Malheureusement le temps ne me le permet pas, mais je pourrais prendre son discours, le défaire d'un bout à l'autre et lui démontrer clairement qu'il y avait énormément de contradictions. Il nous a même prouvé, à trois reprises, que nous avions raison.

M. le Président, j'ai été quand même quelque peu surpris...

M. GARNEAU: ... votre petit chat!

M. ROY (Beauce): ... et quelque peu déçu de voir de quelle façon le ministre des Finances a terminé son intervention. Il l'a terminée en racontant une histoire. Evidemment, on raconte des histoires pour amuser les enfants. Mais le ministre a quand même oublié de nous raconter une...

M. GARNEAU: C'est ça que je viens de faire avec les créditistes.

M. ROY (Beauce): ... histoire.

M. GARNEAU: C'était justement pour ça.

M. ROY (Beauce): Le ministre a quand même oublié de nous raconter une histoire. Le ministre a oublié de nous raconter l'histoire du prêt sans intérêt que la société Rexfor, société paragouvernementale, a consenti à la finance internationale, à ITT. Le gouvernement lui-même l'a fait...

M. GARNEAU: J'ai expliqué tout ça. Si le député relit le texte...

M. ROY (Beauce): Vous avez expliqué tout ça, je comprends. Mais je parle du principe...

M. GARNEAU: ... il va voir quelle différence il y a entre une subvention et un prêt sans intérêt.

M. ROY (Beauce): du prêt sans intérêt.

M. GARNEAU: Ce n'est pas un prêt, c'est une subvention.

M. ROY (Beauce): Vous êtes allés emprunter aux Etats-Unis, dans les banques qui contrôlent les actions de ITT, à 8 1/2 p.c. d'intérêt pour reprêter à la filiale Rayonier. Vous n'avez qu'à regarder le capital-actions de cette compagnie et faire les recherches qui s'imposent, pour vous rendre compte...

M. GARNEAU: ... emprunté à 8 p.c.

M. ROY (Beauce): ... que cette compagnie est la propriété, en grande partie, des plus grandes banques américaines, là où vous allez vous tramer à genoux pour créer des servitudes au Québec.

M. le Président, on parle...

M. GARNEAU: Je vais acheter votre petit chat.

M. ROY (Beauce): ... de la Banque du Canada et des possibilités qu'il y a. Aujourd'hui même, dans les journaux du Québec, il y a une émission de $400 millions d'obligations du gouvernement fédéral d'annoncée. L'article dit ceci: "La Banque du Canada a convenu d'acheter $250 millions des obligations, ce qui laisse $150 millions disponibles pour le public." Je ne sache pas que le fait que la Banque du Canada achète $250 millions, aujourd'hui même — c'est daté du 1er juillet mais l'annonce parait dans les journaux d'aujourd'hui — va déséquilibrer le système monétaire international, qu'on va provoquer la ruine du Canada et qu'on va provoquer, tout simplement, la faillite économique et l'inflation au Canada. Je pourrais citer...

M. GARNEAU: C'est exactement ce que j'ai dit.

M. ROY (Beauce): ... de plus, mais mon temps de parole est limité, M. le Président...

M. GARNEAU: C'est exactement ce que j'ai dit.

M. ROY (Beauce): J'ai dit que nous avions demandé des prêts sans intérêt pour des raisons bien simples. A ce moment-là, cela va répondre

également à l'inquiétude que l'honorable député de Bourget avait.

Lorsque la Banque du Canada a ses obligations, elle perçoit elle-même les intérêts. Dans les états financiers de la Banque du Canada, pour l'année 1971, on voit Revenus du portefeuille des titres et autres revenus: $292,583,000.

UNE VOIX: Je suis tanné de l'entendre parler.

M. ROY (Beauce): C'est un document de la Banque du Canada. La Banque du Canada a dépensé...

M. GARNEAU: Pas sans intérêt.

M. ROY (Beauce): ... pour l'administration —je demande qu'on m'écoute, M. le Président, je pense que j'ai le droit de parole, quand même — $292 millions que la Banque du Canada a perçus en intérêts, et ses frais d'administration ont été de $25,700,000. La Banque du Canada, que fait-elle avec ses bénéfices à chaque année, M. le Président? Revenus nets versés au compte du receveur général du Canada —ce ne sont pas les créditistes qui l'ont écrit, c'est le rapport annuel de la Banque du Canada — $265,494,000. M. le Président, cela n'a même pas coûté 9 p.c, pour toute l'administration de la Banque du Canada, des sommes qu'elle perçoit, et elle perçoit ces sommes à un taux d'à peu près 7 p.c. d'intérêt. Cela revient à dire 9 p.c. de 7 p.c. d'intérêt, cela fait .06 p.c. C'est pourquoi nous disons qu'il y a lieu de songer à abolir l'intérêt parce que si on payait de gros intérêts à la Banque du Canada, il s'ensuivrait que les Québécois paieraient une taxe indirecte à la Banque du Canada pour permettre au gouvernement fédéral d'encaisser les profits. C'est pourquoi nous disons que la Banque du Canada devrait offrir ce service au Québec ou remettre la proportion, si vous voulez, qui se situe à un peu plus de 1/2 de 1 p.c. d'intérêt.

M. le Président, je pourrais citer des économistes brillants, diplômés du London School of Economics, qui ont avoué la faillite du système, qui ont avoué qu'ils ont été complètement incapables. Malheureusement, le temps ne me le permet pas. Mais je dirai tout simplement ceci, en terminant, à l'adresse du ministre: Vous nous avez donné un cours, M. le ministre, sur le système économique actuel. Nous le connaissons. Mais je pense que nous avons dit souven-tefois que nous ne l'acceptons plus. Il est désuet. Votre système économique, à l'heure actuelle, qu'est-ce qu'il provoque? Nous sommes dans l'inflation par-dessus la tête, dans la province. Nous avons du chômage, dans la province de Québec. Nous avons de l'endettement pyramidal. Tous les malaises et les grandes sorcières que le ministre tentait d'illustrer tout à l'heure, nous les connaissons. C'est votre système qui nous le donne.

M. GARNEAU: Elles sont en avant de nous autres, un petit peu à droite, les sorcières.

M. ROY (Beauce): Au moins, la réplique du ministre m'aura permis de constater une chose. C'est qu'il a parlé non pas comme ministre des Finances de la province de Québec mais plutôt comme défenseur d'un système économique.

M. GARNEAU: Ayez donc du bon sens. Je n'ai pas parlé de dépenses!

M. ROY (Beauce): J'ai plutôt des doutes quant à ses fonctions de ministre des Finances de la province de Québec, alors que ses fonctions, comme ministre des Finances, devraient être de prendre l'intérêt et de travailler à la promotion des Québécois...

M. GARNEAU: Sans intérêt! Sans intérêt, la caisse créditiste !

M. ROY (Beauce): ... et regarder pour que les Québécois puissent bénéficier de leur richesse, puissent travailler dans leur province et que nous ne soyons pas dans l'obligation d'avoir des servitudes envers les pays étrangers, comme nous en avons, et d'aller emprunter des masses de $4 à $5 milliards, sur le plan international.

M. le Président, au cours de mon exposé, j'avais dit les dangers qu'il y avait d'aller emprunter sur le marché international des capitaux pour financer l'immense projet de la baie James. Pas plus tard qu'en fin de semaine, à Sept-Iles, le baron Edmund de Rothschild a déclaré, en parlant du projet de la baie James, qu'un financement reposant trop largement sur de l'argent en provenance de l'extérieur peut causer de fortes variations au taux de change de la monnaie du pays concerné. Nous en sommes conscients. Il y a des risques. C'est M. de Rothschild qui le dit lui-même. Je l'avais dit moi-même, la semaine dernière, parce que c'est élémentaire. Vous relirez nos interventions.

D peut en résulter un déséquilibre des paiements internationaux. J'en ai parlé la semaine dernière. Le ministre ne nous en a pas parlé dans sa réplique.

M. GARNEAU: Le baron de Roy.

M. ROY (Beauce): Surtout quand le financement est assuré principalement par des emprunts obligataires.

M. le Président, lorsque nous parlons d'utiliser le crédit de la province, ce crédit du Québec, c'est notre crédit. Ce n'est pas le crédit de l'Alberta ni le crédit de l'Ontario.

M. GARNEAU: Pas d'intérêt.

M. ROY (Beauce): C'est notre crédit. Le crédit, c'est la capacité, pour un peuple, de produire un bien ou un service et de le livrer à une date déterminée. Or, nous avons les richesses, nous avons la main-d'oeuvre, nous avons les

entreprises. Nous sommes capables de nous doter d'une infrastructure au Québec. Nous avons tout ce qu'il faut, sauf l'argent. Pourtant, si le ministre avait fait un petit retour en arrière...

M. LE PRESIDENT: Votre temps est terminé.

M. ROY (Beauce): Me permettrait-on de conclure?

M. LE PRESIDENT: II faudrait qu'il y ait consentement unanime.

M. GARNEAU: II n'y a pas consentement.

M. LE PRESIDENT: II n'y a pas consentement. Je regrette. Je suis bien peiné à l'endroit de l'honorable député de Beauce mais il n'y a pas consentement unanime.

M. ROY (Beauce): Je constate quand même que le gouvernement a peur de nos arguments.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. DEMERS: Vous masquez vos sentiments.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la motion est rejetée sur division?

M. ROY (Beauce): Vote enregistré.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cinq députés le demandent?

Que l'on appelle les députés!

Vote sur la motion

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Suis-je dispensé de la lecture de la motion?

DES VOIX: Dispensé.

UNE VOIX: C'est obligatoire.

M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion du député de Beauce veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Roy (Beauce), Latulippe, Brochu, Tétrault, Béland, Guay, Samson, Audet.

M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaft.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Hardy, Castonguay, Pinard, Garneau, Tessier, Tremblay (Bourassa), Parent, Harvey (Jonquière), Quenneville, Tetley, Lacroix, Massé, Goldbloom, Houde (Fabre), Coiteux, Vaillancourt, Perreault, Brisson, Saint-Germain, Kennedy, Picard, Pearson, Leduc, Fraser, Fortier, Berthiaume, Caron, Carpentier, Dionne, Faucher, Giasson, Harvey (Chauveau), Houde

(Limoilou), Lamontagne, Larivière, Marchand, Pepin, Pilote, Shanks, Veilleux, Paul, Tremblay (Chicoutimi), Cloutier (Montmagny), Boivin, Lafontaine, Lavoie (Wolfe), Croisetière, Demers, Laurin, Tremblay (Sainte-Marie), Masse.

M. LE SECRETAIRE: Pour: 8 Contre: 52

LE PRESIDENT: La motion est rejetée. Est-ce qu'on peut considérer qu'il est six heures?

M. TETLEY: II est six heures exactement. Ajournement

M. LEVESQUE: Dans ce cas-là, M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre. Demain matin, je pense bien que tout le monde est au courant des commissions parlementaires.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Lesquelles?

M. LEVESQUE: Bonne question. Liberté de la presse, affaires municipales...

M. LE PRESIDENT: Deux commissions? DES VOIX: Trois.

M. LACROIX: Les engagements financiers à la salle 91; au salon rouge, la liberté de la presse et les affaires municipales à la salle 81.

M. PAUL: ... les informations au leader.

M. LEVESQUE: Soyez charitables, à ce moment-ci. A la salle 91-A, demain à dix heures, commission parlementaire des engagements financiers; à dix heures également, demain matin, à la salle 81-A, commission parlementaire des affaires municipales pour l'étude de projets de loi privés; au salon rouge, à dix heures également, commission parlementaire de la liberté de la presse.

M. PAUL: Pour demain après-midi, est-ce que le ministre pourrait être moins cachottier? Qu'est-ce que nous ferons?

M. LEVESQUE: Nous avons l'intention d'appeler le projet de loi relatif aux malades mentaux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est à la suite du vote de tantôt?

M. LEVESQUE: Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, quinze heures.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

L'Assemblée ajourne ses travaux à demain, quinze heures.

(Fin de la séance à 17 h 45)

ANNEXE Référer à la version PDF page 1529 à 1534

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