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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le jeudi 9 novembre 1972 - Vol. 12 N° 69

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures dix minutes)

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Présentation de motions non annoncées.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles.

L'honorable ministre des Affaires sociales.

Déclarations ministérielles

Prestations d'aide sociale

M. CASTONGUAY: M. le Président, la Loi de l'aide sociale, comme toutes les lois, doit s'ajuster périodiquement aux changements éprouvés par les bénéficiaires, afin de rendre ses effets aussi adéquats que le législateur le voulait au moment où il l'a fait adopter.

Depuis sa mise en vigueur, en novembre 1970, l'application de la Loi de l'aide sociale a subi plusieurs modifications au plan des règlements qui en découlent. L'arrêté en conseil dont je fais état aujourd'hui vient apporter plusieurs modifications aux règlements de la Loi de l'aide sociale. Il s'avère, en effet, que les barèmes de base relatifs aux prestations d'aide sociale ne correspondent plus à la hausse du coût de la vie, malgré l'augmentation annuelle automatique de 3 p.c. des barèmes pour les prestations payables au titre de la nourriture, du vêtement, des nécessités personnelles et domestiques.

L'indice du coût de la vie, à Montréal, est passé, en effet, de 127.2, en juillet 1971, à 131.7, en juillet 1972. Il s'agit là d'une hausse de 3.5 p.c. L'augmentation automatique prévue par les règlements ne suffit donc pas à compenser les bénéficiaires pour la dépréciation de leurs prestations réelles.

Cette insuffisance apparaît avec encore plus de clarté si on examine l'augmentation des prix de la nourriture, en particulier, qui compte pour plus de la moitié dans le montant alloué pour la nourriture, le vêtement et les nécessités personnelles et domestiques. Au cours de la période se terminant en juillet 1972, les prix de la nourriture ont augmenté de 5.7 p.c.

En haussant les barèmes des prestations, nous avons cherché à compenser davantage les besoins des adultes pour lesquels les prestations nous apparaissent aujourd'hui, selon les indices disponibles, s'avérer trop faibles. Nous avons donc résolu, comme première mesure, à compter du 1er janvier 1973, de hausser de $5 par adulte, soit $10 pour un couple, le montant de la prestation versée au titre de la nourriture, du vêtement et des nécessités personnelles et domestiques.

Cette hausse, qui inclut l'augmentation automatique annuelle de 3 p.c. déjà prévue par les règlements représente un accroissement d'environ 11 p.c. du montant mensuel versé à un adulte et une augmentation d'environ 13 p.c. du montant versé à un couple au titre des besoins réguliers.

Elle ne s'appliquera pas toutefois aux personnes seules aptes au travail et âgées de moins de 30 ans. C'est dire par exemple que grâce à ces nouvelles dispositions, une personne seule obtiendra $52 par mois au lieu de $47 et un couple sans enfant, $88 au lieu de $78 à compter du 1er janvier 1973.

Comme l'indexation automatique de 3 p.c. s'applique également aux enfants, les adultes avec enfant verront leurs prestations globales haussées de plus de $5 ou $10, comme en témoigne un tableau qui est en annexe à cette déclaration.

On ne tiendra plus compte, dans le calcul des revenus des ménages qui hébergent leur enfant de 18 ans et plus, du montant que l'enfant versait ou était censé verser pour défrayer le coût de sa chambre et pension. Nous réduirons d'autre part de $10 le montant mensuel de l'aide accordée à une personne seule hébergée par ses parents et de $15 celui de l'aide versée à une famille qui vit en chambre et pension chez les parents d'un membre de cette famille.

Ces modifications ont pour but de mieux équilibrer les prestations. Comme chacun sait, de nombreuses critiques ont été soulevées récemment, en particulier dans la région de Montréal, concernant les restrictions apportées en septembre dernier quant au supplément de $10 accordé mensuellement sur une recommandation d'un médecin aux personnes qui, en raison d'une maladie, nécessitaient un régime hyperprotéiné.

Il était devenu évident que la réclamation de supplément s'était généralisée dans la région de Montréal, contrairement à l'ensemble de la province. Au début, ce supplément était destiné à faire face à des besoins réels et bien identifiés, mais en cours de route il s'est développé une tendance à l'utiliser pour hausser systématiquement les prestations. Pareille hausse doit évidemment se faire par des modifications susceptibles d'améliorer la condition de tous les bénéficiaires, comme celles que nous apportons aujourd'hui.

D'autre part, afin de continuer à répondre aux besoins des personnes dont l'état nécessite des médicaments hyperprotéinés, j'aurai l'occasion la semaine prochaine d'apporter une solution. En effet, des médicaments hyperprotéinés seront ajoutés à la liste des médicaments, à l'occasion de sa révision le 1er janvier prochain.

L'application du programme d'assistance-médicaments a mis en relief la nécessité de couvrir au titre des besoins spéciaux certaines fournitures et certains accessoires paramédicaux nécessaires à la préservation et au maintien de la santé des bénéficiaires.

Pour cette raison, les articles suivants seront prévus comme besoins spéciaux dès le 1er décembre 1972: l'oxygène, les pansements et bandages, les seringues, les aiguilles ainsi que la liste des fournitures et accessoires paramédicaux nécessaires au traitement des malades qui souffrent d'ostéomie ou de paraplégie.

L'ensemble de ces modifications haussera le budget de l'aide sociale d'environ $10 millions par année. Le gouvernement du Québec, en les effectuant, estime améliorer le régime de l'aide sociale dans toute la mesure où ses possibilités actuelles le lui permettent.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais faire un bref commentaire sur la déclaration ministérielle du ministère des Affaires sociales. Nous l'attendions avec impatience, comme tous ceux qui retirent actuellement des prestations d'aide sociale. Si le ministre nous avait dit qu'il allait au fond du problème, je lui dirais que non. Il en est probablement conscient. Ce ne sont que des mesures provisoires, ce n'est qu'un commencement de réforme. Le ministre le sait, il devra aller beaucoup plus en profondeur. D'ailleurs, nous aurons l'occasion d'en discuter à la première occasion favorable.

Je voudrais vous faire remarquer comme premier point que la table des prestations d'aide sociale a été bâtie vers les années 1968-69, au moment où nous avons adoptée la Loi de l'aide sociale. C'est encore la même table, presque la même table, sauf quelques petites variantes qui étaient en usage en 1972. Donc, M. le Président, on voit le décalage; il y a déjà trois ans et demi que ces tables ont été préparées et elles sont encore en application.

Le ministre a dit qu'il va ajouter, à partir du premier janvier 1973 — peut-être que c'est pour des raisons administratives, nous sommes au début de novembre, il reste encore un mois et demi, un mois et deux tiers à parcourir; je ne sais pas s'il aurait été possible de commencer ces améliorations dès maintenant puisque le montant de $10 enlevé il y a déjà un certain temps — le ministre, dis-je, ajoute $10 mais ça coïncide avec les $10 qui ont été enlevés. Dans sa déclaration, il dit que l'allocation pour diète hyperprotéinique a été utilisée d'une façon générale à Montréal et qu'au contraire, en province, il semble que cela n'ait pas été le cas.

Si cela a été utilisé d'une façon générale dans la région métropolitaine de Montréal, on va arriver au même résultat puisqu'on ajoute les $10 qui déjà étaient accordés par les bureaux pour la diète hyperprotéinée. Le ministre dit qu'il ajoute $10 millions au budget de l'aide sociale. Je ne sais pas s'il tient compte du fait que l'Assemblée nationale a voté une loi modifiant la Régie des rentes, en juin ou en juillet 1972, et la Régie des rentes assume une partie du fardeau financier du ministère des Affaires sociales, parce que la Régie des rentes doit assumer le paiement aux veuves et aux invalides.

Une partie du budget de l'aide sociale va être transférée à la Régie des rentes. Cela soulagera le budget. Alors, je voudrais bien savoir si ces $10 millions sont une addition nette ou s'il faudra tenir compte des sommes qui ont déjà été transférées à la Régie des rentes.

Il y a des catégories de personnes qui sont plus mal en point, par la Loi de l'aide sociale, que d'autres catégories de personnes, et ça tous les députés le savent par les patients, les électeurs qui viennent nous rencontrer à nos bureaux. On retrouve beaucoup plus souvent des mères nécessiteuses, des personnes âgées de 60 à 65 ans, qui n'ont pas encore la sécurité de la vieillesse, et là il y a véritablement un problème pour ces personnes. Je pense que les modifications que le ministre nous apporte aujourd'hui ne règlent certainement pas le cas de ces personnes.

Quant à la mesure qui a pour effet de ne pas comptabiliser dans les revenus les enfants de 18 ans qui sont à la maison, qui demeurent chez leurs parents, ça va être une nette amélioration, parce qu'on pénalisait la famille qui gardait des enfants de 18 ans et plus. En fait, c'est un travail de garder les enfants. La mère de famille devait leur donner à manger et on considérait ça comme un revenu, tandis que d'autres personnes pouvaient aller chercher un certain montant de revenus sur le marché du travail jusqu'à concurrence de $50, $40 en tenant compte des enfants, et ils n'étaient pas pénalisés. Et la famille qui gardait des enfants l'était à partir du premier sou parce qu'on leur déduisait, sous forme de revenu, une partie du coût de la chambre et de la pension. Alors ça va être une amélioration évidente.

Je demanderais au ministre des Affaires sociales maintenant, de faire de l'information, de faire parvenir à chacun des députés de cette Chambre le texte de cette déclaration ministérielle, parce que dès la fin de semaine prochaine les électeurs vont demander aux députés quelles modifications ont été apportées. Il faudra que le député soit en mesure, comme le bureau régional et le bureau local qui, j'imagine, ont dû recevoir aussi le texte de cette déclaration aujourd'hui, de donner la meilleure information possible aux bénéficiaires.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, la déclaration du ministre des Affaires sociales aujourd'hui, je dois dire que j'en suis, d'une part, heureux et, d'autre part, très déçu. Je suis heureux de l'augmentation, M. le Président, mais très déçu du montant de l'augmentation.

Si on analyse l'augmentation du coût de la vie, qui est de 3.5 p.c, ce chiffre n'est nulle-

ment comparable à l'augmentation du coût de la nourriture, qui est de l'ordre de 8 p.c. par année; donc, sur trois ans, de 24 p.c. L'augmentation qui est accordée n'est même pas un rattrapage suffisant uniquement au sujet de la nourriture, sans parler du logement. On peut dire tout de suite, à partir de là, que l'augmentation est nettement insuffisante.

Si on compte $52 uniquement pour la nourriture, cela donne $0.57 par repas; sur cela, l'assisté n'a pas voyagé, l'assisté ne s'est pas habillé, l'assisté n'a pas pu pourvoir à ses besoins personnels et à ses besoins domestiques. Si on pousse un peu plus loin et qu'on regarde une autre faiblesse de la loi no 26, on se rend compte qu'un montant de $29 est accordé aux parents qui gardent leurs propres enfants. Si on ajoute à $29 l'allocation familiale qui est consentie, on se rend quand même compte que, pour des enfants en foyer nourricier, il est dépensé, par l'Etat, au-delà de $70.

Nous devons dire, à partir de la déclaration du ministre, qu'il n'est pas allé au fond des choses; on se rend nettement compte de cela. Le cadeau que le ministre semble faire aujourd'hui aux assistés, il le leur a enlevé il y a un bout de temps. Ce n'est pas un cadeau, comme on le dit assez souvent. On avait dans le passé ce qu'on appelait un gouvernement de $10 et on est rendu maintenant avec un gouvernement de $5. On se rend compte, après avoir pris connaissance de la déclaration du ministre, qu'il n'est pas allé au fond des choses. Nous exigeons — je profite de l'occasion pour le mentionner — que la motion actuellement au feuilleton soit discutée afin de remettre en cause toute la loi no 26.

J'ajoute que, si c'est le sort réservé aux Québécois actuellement, ce n'est pas rassurant pour l'avenir.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, avec tout le respect que je peux avoir pour le ministre des Affaires sociales, je dois dire que nous venons d'entendre à peu près la déclaration la plus insipide et insignifiante qu'on ait entendue depuis deux ans. Je m'explique, M. le Président.

UNE VOIX: Vous avez besoin d'avoir de bonnes explications.

UNE VOIX: II a un texte préparé pour un autre débat.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: Je le répète, M. le Président, la déclaration la plus insipide et la plus insignifiante qu'on ait entendue depuis deux ans. Suite aux questions que nous avons posées depuis passablement de temps, concernant le fameux bill no 26, nous espérions au moins avoir quelque chose qui pouvait satisfaire au minimum et strictement au minimum vital.

On arrive avec une déclaration qui nous dit qu'on va augmenter de $5 par mois le montant qui est versé aux assistés sociaux. Le ministre se glorifie d'une augmentation de $5, parce qu'il nous dit que cela correspond environ à une augmentation de 11 p.c. pour une personne seule et de 13 p.c. pour un couple. Je suis bien d'accord sur cela, quand on part de rien, une augmentation de $5 correspond à un fort pourcentage. Or, cette augmentation de 11 p.c. et de 13 p.c. nous paraît absolument insatisfaisante parce qu'elle ne part de rien.

Quand on pense qu'une personne seule avait $46 par mois pour se nourrir, s'habiller, payer son téléphone et ses dépenses personnelles. Maintenant, on l'augmente à $52. Un couple qui recevait $78, on l'augmente à $88. Ainsi, on pense régler le problème, en particulier, comme le disait le député de Montmagny, des personnes qui sont inaptes au travail. Parce que 61 p.c. des assistés sociaux, contrairement à ce qu'on pense, sont inaptes au travail.

Cela veut dire que ces gens doivent vivre douze mois par année avec des montants comme ceux-là. Je me demande comment le ministre des Affaires sociales, si on lui réduisait son salaire à ce montant, pourrait vivre.

DES VOIX: Ah!

M. LESSARD: M. le Président, le ministre se glorifie aussi...

UNE VOIX: Très fort. UNE VOIX: Démagogue.

M. LESSARD: Démagogue, mais à partir des problèmes qui existent et des problèmes que vous vivez tous les jours. Vous n'êtes même pas capables d'en prendre conscience.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: Démagogue.

M.LESSARD: M. le Président, le ministre nous parle d'une augmentation de $10 millions du budget du ministère des Affaires sociales en ce qui concerne cette catégorie de personnes. Est-ce que le ministre peut nous dire combien il a épargné, par exemple, avec la coupure qu'il a faite concernant les diètes? J'ai un exemple concret et je pourrais lui en citer des centaines. Une personne recevait $40 en ce qui concerne les diètes; et comme aujourd'hui ils sont cinq dans la maison, avec une augmentation de $5, cela va faire $25. Donc, $15 de moins que ce qu'elle avait et avec ce montant elle ne pouvait pas arriver. Je trouve cela passablement ridicule. Donc, les $10 millions que le ministre donne actuellement, je suis assuré qu'il les a épargnés ailleurs.

De plus, le ministre réduit le montant accordé aux personnes seules hébergées par leurs parents. D'accord, les $24 qu'on exigeait autrefois lorsqu'une personne était hébergée par ses parents, on ne les exige plus. Il faut quand même créer une relation entre ce qu'on donne ailleurs, par exemple par le service social, et ce que l'on donne pour les enfants qui sont gardés dans les familles. Actuellement, la loi est tellement ridicule qu'on encourage le divorce. C'est plus facile à une personne, à un moment donné, de divorcer et de faire garder ses enfants par le service social que de les garder chez elle. La raison, c'est qu'on donne $15 pour un enfant contrairement à $49, au minimum, par le service social et cela peut aller jusqu'à $72.

M. le Président, on a fait une étude. On donne $52 à une personne; or, personne ne peut se nourrir avec moins de $10 par semaine, à moins qu'il y en ait qui fassent des miracles. Peut-être que le premier ministre, qui est économiste, pourrait nous expliquer ça.

Il reste $12, M. le Président, pour payer son téléphone, qui coûte $6, pour payer sa pipe, son tabac et tout ce que vous voudrez !

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESSARD: Une étude a été faite par le. Montreal Diet Dispensary, concernant justement les montants qui étaient accordés au point de vue N.V.P.D. ou N.V.D.P. Concernant les logements, je pense que c'est passablement satisfaisant, mais concernant ces montants qui sont accordés ici, on a prouvé, par une étude, que plus la famille est grande — le ministre se glorifie de vouloir soumettre à l'Assemblée nationale des projets de loi pour avantager les familles nombreuses — plus la différence est grande, c'est-à-dire que plus les enfants sont âgés, plus les montants sont minimes.

M. le Président, comment voulez-vous voir une relation entre ce que le ministre nous dit et ce que le ministre fait?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESSARD: Je conclus, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il ne faudrait pas oublier que l'article 184 autorise de brefs commentaires.

M. LESSARD: M. le Président, vous me permettrez de conclure. Tout cela provient de quoi? Tout cela provient du fait que le ministre des Affaires sociales n'a pas été capable, pendant la dernière campagne électorale, de se lever, d'être debout pour réclamer...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Je ne suis pas du tout intéressé à la dernière campagne électorale. A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Messieurs, un peu de calme, s'il vous plait.

L'article 184 autorise, à la suite d'une déclaration ministérielle, de brefs commentaires de la part des partis de l'Opposition. Je pense bien que l'usage a établi que cela ne doit pas entraîner de débat. Je pense bien qu'on s'aventure, actuellement, avec toute la latitude que je veux accorder à la Chambre... D'ailleurs, c'est une nouvelle philosophie du règlement, ce sont des dispositions nouvelles. Nous l'avons permis au député de Saguenay, mais si on veut critiquer la loi maîtresse du bien-être social, la loi no 26, il y a d'autres façons. Si on n'est pas satisfait de la loi, qu'on en demande le rappel.

Par incidence, à la suite de la déclaration d'un ministre, le règlement permet de brefs commentaires, mais cela ne permet pas d'en-chafner avec un débat sur toute la politique sociale du gouvernement. Malheureusement, le règlement ne prévoit pas cela. Permettre qu'on fasse des débats en profondeur sur le bill 26, sur la politique du ministère ou sur les agissements du ministre, ce n'est pas le but des déclarations ministérielles.

M. BURNS: M. le Président, sur la question de règlement, je vous réfère au texte du code Lavoie, comme on se plaît à l'appeler. Ce sur quoi vous avez rappelé à l'ordre le député de Saguenay, c'est la durée de son intervention, ce que vous avez parfaitement le droit de faire, à mon avis, en vertu de l'article 184, deuxièmement. Ce que vous n'avez pas le droit de faire, M. le Président — je vous le dis avec tout le respect que j'ai pour vous — c'est d'intervenir au sujet du contenu de ses commentaires. Il n'y a rien, dans cet article 186, qui vous dit qu'il ne doit pas soulever de débat.

Il est vrai que si un débat doit être soulevé vous allez l'arrêter, mais vous ne devez pas dire au député de Saguenay — je le soumets encore respectueusement — qu'il doit faire nécessairement des commentaires favorables au gouvernement. Ce ne sont pas des commentaires favorables qu'il va faire, et nous n'avons pas l'intention de faire des commentaires favorables. Loin de là.

Mais je ne pense pas, d'autre part — et je vous le dis encore une fois très respectueusement — que vous devez dire au député de Saguenay quel doit être le contenu de sa réponse à la déclaration ministérielle. Et je m'excuse, M. le Président, mais c'est là-dessus que vous avez arrêté le député de Saguenay, et je pense qu'il vous a dit: Je respecte votre décision, vous avez dit que j'ai été trop long, je conclus. Et quand il est arrivé à un point qui n'a pas semblé plaire à la présidence, vous l'avez arrêté. Je ne suis pas d'accord avec vous là-dessus.

M. LEVESQUE: M. le Président, pouvez-vous me permettre simplement de rappeler au député de Maisonneuve que le code Lavoie ne se limite pas à l'article 184?

M. BURNS: Aux déclarations ministérielles, article 184.

M. LEVESQUE: Certainement. Et on a parfaitement le droit de se référer à l'article 184, comme le député l'a fait, et de souligner que le député de Saguenay avait déjà enfreint cet article parce qu'il ne s'agissait plus d'un bref commentaire. Et là je tiens...

M. BURNS: C'est le président qui le décide.

M. LEVESQUE: ... simplement à rappeler à l'honorable député de Maisonneuve qu'il avait raison de reprocher à son collègue d'avoir été trop long, ça, je l'approuve sur cette partie-là de son intervention, mais où je ne suis plus d'accord avec le député de Maisonneuve...

M. BURNS: Je n'ai pas reproché à mon collègue d'être... Arrêtez de faire vos maudits menteurs, s'il vous plaît. Je n'ai pas dit ça.

M. LEVESQUE: C'est ça que vous avez laissé entendre.

M. BURNS: Bien, voyons donc! Arrêtez de faire vos menteurs, s'il vous plaît.

M. LEVESQUE: Et là je m'entends très bien avec le député de Maisonneuve lorsqu'il a qualifié l'intervention du député de Saguenay d'être trop longue, et même peut-être inopportune.

M. BURNS: Bande de "faiseux". Vous êtes une bande de "faiseux". C'est ça que vous êtes.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE: Mais, où je ne m'entends pas avec le député de Maisonneuve, c'est qu'il prend l'article 184 comme le seul du code Lavoie, alors que vous avez été très juste et très sage dans vos remarques, M. le Président, parce que vous avez rappelé à l'honorable député de Saguenay...

M. BURNS: C'est ça qu'on appelle des "faiseux".

M. LEVESQUE: ... que s'il devait parler de la politique d'aide sociale en général, à ce moment-là ce n'était plus un bref commentaire relatif...

M. BURNS: En attendant il y a des gens qui ne mangent pas, et on s'amuse. Ce n'est pas grave, ça. Ce n'est pas très grave, des gens qui ne mangent pas. Cachez-vous derrière le règlement, il y a juste des gens qui crèvent de faim.

M. LEVESQUE: ... à la déclaration très précise et très à point du ministre des Affaires sociales. Le ministre des Affaires sociales a fait une déclaration ministérielle sur un point précis, et d'ailleurs...

M. BURNS: A l'ordre, M. le Président. Il n'est même pas là.

M. LEVESQUE: ... les autres représentants des partis d'Opposition ont très bien saisi...

M. BURNS: Est-ce qu'il faut que je vous demande, M. le Président, de le rappeler à l'ordre?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que je pourrais inviter le leader de la majorité à se limiter au point de règlement soulevé?

M. LEVESQUE: Je le fais de bonne grâce, et avec tellement d'ardeur et de ferveur...

M. BURNS: Faites d'autres histoires. UNE VOIX: Assoyez-vous ardemment. M. CHARRON: Hypocrite.

M. LEVESQUE: ... que ça me fait plaisir, non pas seulement de confondre le député de Maisonneuve qui est absolument en dehors de la question...

M. BURNS: Vous êtes une bande d'hypocrites.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que je pourrais inviter au calme le leader de la majorité, ainsi que le député de Maisonneuve? Je suis prêt à rendre ma décision. Je pourrais peut-être inviter le leader parlementaire du gouvernement et le député de Maisonneuve à venir argumenter dans un salon particulier à trois. Nous pourrions...

Est-ce que je pourrais inviter chaleureusement le député de Saguenay à clore son intervention?

M. LESSARD: Parfait, M. le Président.

Pour vous prouver que ça rejoignait les propos du ministre, c'est que ce problème fondamental rejoint le problème du revenu minimum garanti. Et le ministre se bat depuis passablement de temps pour obtenir cette chose, mais il est bloqué à un moment donné en vertu des règlements, ou en vertu de la politique fédérale. Mais le ministre aurait dû se lever justement pendant la campagne électorale pour réclamer véritablement auprès du gouvernement fédéral ses besoins, ses exigences...

M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LESSARD: ... et pouvoir au moins règler ce problème fondamental, le problème des assistés sociaux, de façon...

M. LEVESQUE: Une question dérèglement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît !

Est-ce que le député a fini son intervention?

M. LESSARD: Non, M. le Président, je n'ai pas terminé.

M. LE PRESIDENT: Sur une question de règlement, l'honorable leader.

M. LE LEVESQUE: M. le Président, j'invoque plutôt une question de privilège parce que je veux être sûr de ne pas être interrompu par une question de règlement.

M. le Président, vous venez d'entendre le député de Saguenay s'éloigner de la question qui faisait l'objet...

M. LESSARD: Une question fondamentale.

M. LEVESQUE: ... de la déclaration ministérielle...

M. LEGER: II s'est rapproché du problème.

M. LEVESQUE: ... du ministre des Affaires sociales.

M. CHARRON : Peureux ! Peureux !

M. LEVESQUE: J'ai accepté de bonne grâce, M. le Président, de mettre fin à mon intervention tout à l'heure, avant même d'avoir terminé. Je l'ai fait simplement...

M. CHARRON: Vous avez peur, c'est tout ce que vous faites, vous avez peur.

M. LEVESQUE: ... pour respecter votre désir.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît !

M. LEVESQUE: Mais, M. le Président, nous nous faisons bouscouler par le Parti québécois.

M. BURNS: Pauvre petit gouvernement !

M. LEVESQUE: II essaye de le faire en abusant...

M. BURNS: Vous êtes très petit pour vous faire bousculer comme ça.

M. LEVESQUE: ... non seulement des droits mais des privilèges de cette Assemblée. Je vous demanderais de dire au député de Saguenay de s'en tenir...

M. BURNS: Pensez donc avant de parler, en niaisant de même.

M. LEVESQUE: ... exactement au bref commentaire stipulé par l'article 184.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, sur la question de règlement.

M. CADIEUX: Une question de privilège.

M. LEVESQUE: C'était une question de privilège.

M. BURNS: J'interviens sur la question de privilège qui est soulevée, qui en est une de règlement, pour l'intelligence assez difficile du député de Beauharnois. Je dis que c'est une question de règlement aussi.

M. CADIEUX: M. le Président, c'est une question de privilège.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CADIEUX: M. le Président, sur une question de privilège.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.

M. CADIEUX: C'est une question de privilège.

M. BURNS: Non, M. le Président...

M. CADIEUX: Je croyais que les nouveaux règlements "interdissaient" l'ouverture...

M. BURNS: II n'y a qu'un "s".

M. CADIEUX: ... du Restaurant "Le Parlementaire" au député de Maisonneuve après trois heures.

M. CHARRON: Cela dépend du nombre de gin qu'il a pris.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. CHARRON: Quand il a pris deux gin, le député de Beauharnois met des "s" partout.

M. BURNS: M. le Président, je veux simplement rappeler le plus calmement possible le fait que vous avez indiqué au député de Saguenay de terminer le plus tôt possible son intervention. Il vous a annoncé qu'il la terminait. S'il y a des choses dans ce qu'il dit qui ne plaisent pas aux députes ministériels, c'est fort possible; nous ne sommes pas ici pour plaire au gouvernement, M. le Président. Le député de Saguenay, en particulier, ne fait pas une intervention pour plaire au leader du gouvernement, le député de Bonaventure.

Je vous dis tout simplement qu'on ne doit pas recourir au règlement facilement, régulièrement et constamment pour interrompre quel-

qu'un quand il dit quelque chose qui ne fait pas plaisir au gouvernement. C'est ce que j'ai à vous dire.

M. CADIEUX: ... de chialer, le député de...

M. LESSARD : M. le Président, est-ce que je peux continuer?

M. LE PRESIDENT: Vous allez continuer, mais très brièvement.

M. LESSARD: D'accord, M. le Président. Je dis que...

M. CADIEUX: ... demandé intelligemment.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESSARD: II va falloir, je crois, que ce gouvernement se pose une question une fois pour toutes. Quelle est la place que ces personnes ont dans la société québécoise? Il faut leur donner leur véritable place de telle façon qu'elles puissent vivre au moins avec un revenu minimum garanti. Et cela dépend de certaines relations fédérales-provinciales. Que le ministre se lève et le dise.

M. CASTONGUAY: M. le Président, en vertu de...

M. ROY (Beauce): M. le Président,...

M. CASTONGUAY: ... l'article 97...

M. ROY (Beauce): ... j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BURNS: J'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît.

M. ROY (Beauce): Dans notre règlement, à l'article 184, M. le Président, il n'est aucunement question d'une réplique.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs !

L'honorable ministre a demandé la parole. Quel article?

M. CASTONGUAY: En vertu de l'article 97, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: Je vais être bref parce que je vais répondre uniquement au député de Montmagny, qui a fait des commentaires intelligents. Le député de Montmagny...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda, une question de règlement.

M.SAMSON: M. le Président, j'invoque le règlement. Je voudrais vous rappeler les dispositions de l'article 103, où il est bien dit que le droit de réplique appartient à un député qui fait une motion de fond, qui a proposé la deuxième ou la troisième lecture d'un projet de loi, à un représentant du gouvernement à l'occasion du débat sur le discours inaugural et du débat sur le discours du budget et au proposeur d'une motion d'envoi d'un projet de loi en commission plénière. Il n'est nullement question de droit de réplique à l'occasion d'une déclaration ministérielle.

M. le Président, il y a là-dessus, je pense, des précédents.

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît! Si je comprends bien, l'honorable ministre des Affaires sociales n'a pas invoqué l'article 103 mais l'article 97. J'aimerais connaître vos commentaires sur l'article 97.

M. SAMSON: M. le Président, l'article 97 se lit comme suit: "Le député qui prend la parole pour donner des explications sur le discours qu'il a déjà prononcé ne peut le faire que lorsque le discours qui les provoque est terminé, à moins que celui qui le prononce ne consente à être interrompu".

M. BURNS: Ce ne sont pas des explications. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. SAMSON: Un instant! M. le Président, vous avez laissé, je pense, assez longtemps le député de Maisonneuve dialoguer tantôt qu'on peut au moins...

M. BURNS: On l'a lu.

M. SAMSON: ... se permettre de revenir sur une question qui a déjà été posée en cette Chambre. Ce n'est pas la première fois.

M. BURNS: Allez, déconnez, cher ami.

M. SAMSON: ... qu'on met en question un droit de réplique sur une déclaration ministérielle qui pourrait engager un débat. Si le ministre veut un débat, je prends vos conseils, M. le Président, et je lui demande de rappeler la loi no 26. On va en parler de la loi no 26, puis on va en parler de la façon dont vous traitez les assistés sociaux dans le Québec présentement.

M. LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: M. le Président, le député de Montmagny a dit que, dans la région de Montréal, j'avais, par ma déclaration, laissé

entendre que tous les bénéficiaires se prévalaient de la possibilité d'obtenir un montant supplémentaire pour les diètes protéinées. En relisant attentivement ma déclaration, on voit que j'ai dit qu'il y avait eu une tendance à utiliser ceci. Alors, il n'est pas juste de dire que c'étaient tous les bénéficiaires et qu'on n'a fait que rétablir une situation; premier des points. Maintenant, je voudrais rappeler que, depuis que nous avons mis en vigueur cette loi en novembre 1970, le budget, qui était, pour l'exercice 70/71, de $225 millions, est passé à $340 millions pendant l'exercice en cours, soit deux ans plus tard, ce qui signifie déjà, au cours de cette période, une augmentation de 25 p.c. des prestations en moyenne. Aujourd'hui, nous venons ajouter une augmentation, pour les besoins ordinaires, de l'ordre de 11 p.c. ou de 13 p.c, selon le cas. Je ne me glorifie pas, comme l'a dit le député de Saguenay, de cette augmentation; j'en ai fait état. Merci.

M. ROY (Beauce): M. le Président, sur une question de règlement, je voudrais vous demander une directive. Est-ce que l'article 97 s'applique à toutes les déclarations, y compris les déclarations ministérielles, ou si, selon l'esprit de notre règlement, il s'applique uniquement lorsqu'il est question de motion?

M. LE PRESIDENT: J'avais déjà donné une directive, je crois, sur l'article 97, à la première partie de la session. Lorsqu'on parle d'un discours qui vient d'être prononcé, j'avais appliqué le mot discours à déclaration ministérielle. L'article 97, je crois, s'applique chaque fois qu'un député prend la parole, lorsqu'il a le droit de prendre la parole. Il peut rectifier les faits, sans soulever de débat, sans amener d'argumentation nouvelle. Il peut rétablir les faits seulement.

M. ROY (Beauce): M. le Président, une demande de directive. Est-ce que ça s'applique également au député qui aurait fait une réplique ou des commentaires après une déclaration ministérielle que le ministre aurait faite?

M. LE PRESIDENT: Si votre réplique a été mal interprétée, oui.

M. ROY (Beauce): Très bien.

M. ROY (Lévis): M. le Président, sur une question de privilège, est-ce que j'ai le droit de vous demander de vous débarrasser des avocats mal intentionnés et de garder les avocats qui sont bien intentionnés?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. PAUL: M. le Président, j'invoque mon privilège personnel. Je vous ferai remarquer qu'aucun député de l'Unité-Québec n'a voulu participer à ce débat de procédure, vu que nous avons hâte de procéder à l'étude de la législation, pour arriver à temps pour le congé de Noël.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Dépôt de documents.

Dépôt de documents

M. BURNS: M. le Président, j'invoque mon privilège, parce que je ne me considère pas parmi les avocats mal intentionnés.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

UNE VOIX: Est-ce qu'on pourrait connaître les autres qui sont comme lui?

M. LE PRESIDENT: Le député de Charlevoix, ministre d'Etat.

Société des traversiers Québec-Lévis

M. MAILLOUX: M. le Président, pour le ministre des transports, qu'il me soit permis de déposer le rapport des états financiers de la Société des traversiers Québec-Lévis, pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1972.

M. LOUBIER: Est-ce que le ministre a d'autres exemplaires pour distribution aux députés?

M. MAILLOUX: M. le Président, je pense que les exemplaires supplémentaires seront disponibles au cours de la séance.

M. LE PRESIDENT: Questions orales des députés.

Questions orales des députés

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.

Grève des employés de l'Hvdro

M. LOUBIER: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre de la province de Québec. M. le Président, dois-je attendre?

M. LE PRESIDENT: On pourrait passer à une autre.

M. LOUBIER: C'est que j'ai une question principale d'une extrême urgence et je voudrais bien que le premier ministre soit présent pour la recevoir. Je sais qu'il est absent depuis quelques secondes seulement.

M. LEGER: Chantez-nous quelque chose en attendant.

M. LEVESQUE: Allez, posez-la tout de même.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Chantez donc l'Internationale pour le PQ.

M. LOUBIER: Est-ce qu'il arrive souvent, comme cela, que le parti ministériel perde le premier ministre?

UNE VOIX: Quand Trudeau le demande.

M. LOUBIER: Est-ce qu'il arrive souvent que le premier ministre fasse faux-bond au parti ministériel?

M. LEVESQUE: Le premier ministre est toujours présent d'une façon ou de l'autre.

M. LOUBIER: Est-ce que le premier ministre était en panne quelque part? Je voudrais demander au premier ministre s'il a l'intention de poser des gestes concrets devant l'état d'urgence créé par la grève des employés de l'Hydro-Québec et plus spécialement devant les pannes qui se multiplient dans toutes les régions du Québec, devant toutes les conséquences d'ordre socio-économiques, devant les accusations de sabotage? Est-ce que le premier ministre a l'intention, s'il n'y a pas règlement de ce conflit d'ici 24 heures, de proposer une loi spéciale à cette Chambre, même si les lois spéciales ne sont pas souhaitées par qui que ce soit pour régler les conflits?

Je demanderais au premier ministre s'il a l'intention de se servir de toutes les règles de procédure et, si, d'ici 24 heures, il n'y a pas eu règlement du conflit, s'il procédera par une loi spéciale.

M. BOURASSA: Je dois dire au chef de l'Opposition qu'il y a eu reprise des négociations ce matin; il faudra donc attendre l'évolution de cette reprise des négociations. Le chef de l'Opposition suggère une loi spéciale de retour au travail ou définissant les services essentiels. On peut peut-être considérer la deuxième suggestion parce que la perception des comptes n'est pas aussi urgente que la fourniture de l'électricité.

M. LOUBIER: Je n'ai pas suggéré, j'ai demandé au premier ministre s'il avait l'intention de présenter une loi spéciale s'il n'y avait pas règlement du conflit d'ici 24 heures. Le premier ministre sait-il si le représentant du syndicat va respecter l'entente à l'effet que le conflit pourrait se régler facilement dans les 48 heures s'il y avait bonne foi entre les deux parties?

M. BOURASSA: Je préférerais attendre le rapport de la première réunion sur la reprise des négociations ce matin avant de commenter davantage.

M. LOUBIER: Quand le premier ministre attend-il ce rapport? Au cours de la journée?

M. BOURASSA: Au cours de la journée, oui.

M. PAUL: M. le Président, question additionnelle. Est-ce que le premier ministre pourrait nous avertir dès ce soir s'il a l'intention de présenter une loi spéciale, considérant que normalement la Chambre ajournera ses travaux demain à une heure jusqu'à mardi et qu'à notre humble point de vue nous ne pouvons laisser la population du Québec sans électricité? Nous invitons et pressons le gouvernement à poser un geste positif dans les circonstances.

M. VINCENT: Question supplémentaire, au premier ministre. Est-ce que les travaux de la ferme, comme la conservation du lait, la traite mécanique, sont considérés comme des services essentiels présentement de la part de l'Hydro-Québec?

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai dit...

M. BURNS: Question de règlement, M. le Président. Actuellement, vous n'avez pas de définition dans le code du travail de ce qu'est un service essentiel.

Je soulève donc la question de règlement à la suite de la demande du député de Nicolet, parce qu'il s'agit d'une opinion juridique. Je ne pense pas que le premier ministre soit ni compétent, ni capable, ni à l'intérieur...

UNE VOIX: Ni aimable.

M. BURNS: Voyons donc!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! messieurs.

M. BURNS: M. le Président, je ne me considère pas compétent pour donner cette opinion.

M. BIENVENUE: II y a une différence entre les deux. Il y en a un qui est premier ministre.

M. BURNS: Ce n'est pas de façon...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! messieurs.

M. BOURASSA: M. le Président, je peux dire qu'à la suite...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que vous désirez changer la formulation de votre question?

M. VINCENT: C'est ça, je pourrais changer la formulation de la question. Est-ce que le premier ministre est en mesure de nous dire si des mesures spéciales sont prises, avec les

syndicats, et également l'Hydro-Québec, pour donner certains services absolument nécessaires pour les travaux de la ferme tels la conservation du lait, la traite mécanique des vaches?

M. BOURASSA: Je ne suis pas au courant de tous ces détails, mais je sais qu'il y a eu des discussions entre le syndicat et le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. A la suite des événements du printemps dernier, on a formé un comité d'études sur cette question très complexe et en même temps très importante, sur la définition des services essentiels. Il ne faut pas que la population soit la première victime de tous ces conflits dans les secteurs public et parapublic. C'est pourquoi nous avons envisagé différentes mesures. Il se peut que le conflit de l'Hydro-Québec précipite une action législative du gouvernement sur cette question des services essentiels pour que la population, comme je viens de le dire, ne soit pas la première victime de ces conflits.

M. LOUBIER: M. le Président, une dernière question supplémentaire. Est-ce que le premier ministre a été informé que, dans différentes régions, des centaines de cultivateurs sont privés d'électricité depuis une journée et que si cela persiste encore 24 heures ou 48 heures, ces cultivateurs seront obligés de sacrifier leurs troupeaux et de les vendre à l'abattoir le plus près?

M. BOURASSA: Je pourrais dire...

M. LOUBIER: Je pourrais donner au premier ministre le nom de la région du comté de Mégantic d'où j'ai reçu des appels téléphoniques, ce matin. A Saint-Ferdinand où il y a trois rangs, le long de la route no 49. Je pourrais même lui donner les noms des cultivateurs et s'il en veut d'autres régions... J'ai eu ces informations.

M. BOURASSA: M. le Président, je peux dire au chef de l'Opposition que mon bureau reçoit de très nombreuses représentations de toute nature depuis deux jours. Mais il reste que c'est un conflit du secteur public et parapublic. Ce n'est pas le premier. Ce n'est pas le seul endroit où cela arrive. On sait que c'est arrivé partout.

Comme je l'ai dit tantôt, il y a des secteurs qui sont moins urgents. Je donnais l'exemple de la perception des comptes. Il y a d'autres secteurs où on ne peut pas attendre indéfiniment la bonne volonté de ceux qui ont à réparer les pannes. C'est cela que le gouvernement a considéré depuis plusieurs mois, parce qu'il y a eu le cas des hôpitaux, vous vous en souvenez, et maintenant, nous avons le cas de la fourniture d'électricité. Alors si la reprise des négociations devait aboutir à un échec, s'il n'y a aucun espoir d'un règlement rapide et si la situation s'aggrave, il est évident que le gouver- nement... Je devrais avoir une idée, au cours des prochaines heures, de l'évolution des négociations.

M. LOUBIER: Pour le premier ministre, dans un délai rapide, ce serait pour ce soir?

M. BOURASSA: Non, je n'ai pas dit que je rendrai la décision ce soir. Mais je dois être informé de l'évolution des négociations actuellement au ministère du Travail à Montréal. J'aviserai selon l'évolution de ces négociations.

M. VINCENT: M. le Président, j'aurais une question supplémentaire, cette fois-ci, au ministre de l'Agriculture. Est-ce que le ministre est entré en communication avec les autorités syndicales de l'Hydro-Québec, comme ce fut le cas pour le ministre en 1968, pour apporter des solutions à ces problèmes d'agriculteurs, dans des régions spécifiques, et où le syndicat va apporter sa contribution? Nous avions réglé une série de problèmes dans les quelques heures après que le problème se fut posé. Si le ministre ne l'a pas fait, je lui demanderais d'entrer immédiatement en communication avec le syndicat...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Là, vous répondez en même temps à votre question. Laissons la chance au ministre de répondre.

M. TOUPIN: Merci, M. le Président. J'attendais pour me lever, parce qu'il était justement en train de donner la réponse que je voulais donner.

M. VINCENT: Pardon? Quelle réponse ai-je donnée à la question? J'ai demandé au ministre s'il était entré en communication...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! C'est une question supplémentaire. Vous avez demandé au ministre s'il a communiqué avec le syndicat. Je suis aussi intéressé que vous à entendre la réponse. Tel que le règlement l'exige, cela doit se limiter à cela. Il y a un abus à la période des questions et j'entends y mettre fin.

L'honorable ministre de l'Agriculture et de la Colonisation.

M. TOUPIN: M. le Président, je n'ai pas eu de contacts officiels avec le ministre du Travail sur cette question. Il est possible que les fonctionnaires en aient eu. Mais lorsque nous discutons de ces problèmes, le ministre du Travail prend, bien sûr, en considération cet aspect du problème qu'est l'agriculture. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'actuellement c'est un secteur considéré aussi prioritaire que n'importe quel autre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: Question supplémentaire, M. le Président, au ministre de l'Agriculture. Est-ce que l'honorable ministre entend faire en sorte que le ministère de l'Agriculture indemnisera les cultivateurs pour les pertes subies dans certains cas.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre ! Question refusée. L'honorable député de Lévis.

M. BELAND: Refusée?

M. ROY (Lévis): M. le Président,...

M. ROY (Beauce): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Je vais donner mes explications. La question principale s'adresse ou vise le problème de la grève de l'électricité. Je n'entends pas qu'on règle, par cette question, les problèmes agricoles. J'entends limiter la période à cette question principale et aux sous-questions directement reliées à la grève de l'électricité, et non pas les mille et une incidences que cela peut amener.

L'honorable député de Lévis.

M. ROY (Lévis): ... ma question supplémentaire est celle-ci : J'ai entendu dire de la part de certaines gens qu'il était impossible de traire les vaches parce qu'il n'y avait pas d'électricité.

M. LE PRESIDENT: Question, question!

M. ROY (Lévis): Question? Je voudrais expliquer le pourquoi de ma question.

M. LE PRESIDENT: Question.

M. ROY (Lévis): Les gens qui ont des congélateurs ne sont pas capables d'avoir l'électricité pour les conserver. Traire des vaches, on peut le faire à la main quand on connaît ça. Mais la viande, on ne peut pas la conserver dans nos mains !

M. BURNS: M. le Président, à l'ordre!

M. ROY (Lévis): Cela prend l'électricité pour refroidir le congélateur.

M. LE PRESIDENT: Question principale du député de Saint-Sauveur.

Motel à Fort-Prével

M. BOIS: M. le Président, en l'absence du ministre des Affaires municipales, ma question s'adresse à l'honorable premier ministre. Nous apprenions aujourd'hui qu'un contrat était accordé, au montant d'environ $180,000, à une entreprise de Joliette pour la construction d'un motel à Fort-Prével. Est-ce que l'honorable premier ministre pourrait nous dire s'il est exact que ce contrat a été accordé sans appel d'offres par le gouvernement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BOURASSA: Le député aurait pu donner avis de la question.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Ecoutez, il y a une disposition de notre règlement qui doit guider la période des questions, et c'est la disposition première. Il y a deux grands critères que les anciens présidents, entre autres l'ancien député de Westmount, avaient élaborés en 1963. Le critère premier est l'urgence. Le critère second est l'intérêt public. Je crois que la question que vous avez posée pourrait facilement également être inscrite au feuilleton. Je ne vois pas une urgence, en ce 9 novembre 1972, qu'on apporte une réponse aujourd'hui même. Je vais me permettre de faire parvenir, dès la semaine prochaine, aux députés de la gauche, une lettre soulignant tous les articles du règlement qui concernent les questions. Aux députés et aux ministres de la droite, je vais faire parvenir une lettre soulignant tous les articles du règlement qui concernent les réponses. Je pense qu'il y aura équilibre de cette manière.

Là, j'ai tout de suite une réticence à votre question, à moins que vous la formuliez autrement et que ce soit urgent.

M. BOIS: M. le Président, j'obéis à votre directive. Ma question au premier ministre est celle-ci, elle va être générale et urgente: Est-ce que le gouvernement a changé sa formule dans l'octroi des contrats aux personnes qui transigent avec le gouvernement?

M. BOURASSA: M. le Président, on n'a pas changé notre formule. Mais si le député avait pu me prévenir de sa question ce matin, j'aurais pu vérifier le cas concret, à moins qu'il pose sa question seulement pour faire perdre le temps de la Chambre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BOIS: Excusez, M. le Président. La semaine dernière, j'ai formulé des questions aux ministres et on m'a répondu par des réponses vagues et loufoques.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

Société Bechtel

M. JORON : M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Elle fait suite à la réponse, qu'il donnait hier, à une question du député de Bourget. Est-ce que le premier ministre a communiqué avec les autorités de

l'Hydro-Québec sur la possibilité de rendre public, immédiatement, le contrat intervenu entre l'Hydro-Québec et la société Bechtel?

M. BOURASSA: Les autorités de l'Hydro-Québec, ces jours-ci et particulièrement aujourd'hui, sont retenues par le conflit dont le député est au courant.

M. JORON: Question supplémentaire, faisant suite également à la réponse du premier ministre, hier, où, dans la même phrase, il parlait à la fois, au sujet de ce contrat, de contrat de gérance et de contrat à titre de consultant. Le premier ministre peut-il préciser aujourd'hui sa pensée et nous dire si le contrat en question est un contrat à titre de consultant ou un contrat de gérance? Peut-il nous dire aussi à combien s'élève le montant de ce contrat particulier et d'autres contrats à d'autres firmes privées, par exemple à la firme Lalonde et Valois?

M. BOURASSA: Si le député pouvait poser ces questions au feuilleton ou attendre à l'occasion d'une réunion de la commission parlementaire, je pourrais lui répondre, car je n'ai pas devant moi les chiffres sur les contrats avec des firmes.

M. JORON: J'ai une dernière question additionnelle, M. le Président, à la suggestion du premier ministre. Celui-ci accepterait-il de faire siéger, dans un bref délai, la commission parlementaire des Richesses naturelles pour que les commissaires de l'Hydro-Québec puissent comparaître et répondre aux questions du public, par l'intermédiaire de leurs députés, sur toute cette question de contrats avec la Société Bechtel, qui est restée malheureusement, depuis plusieurs mois, dans une ambiguïté malsaine?

M. BOURASA: Ambiguïté peut-être pour le député de Gouin, mais un peu moins forte pour son chef. Je suis bien prêt à examiner la suggestion du député, et à en discuter avec les autorités de l'Hydro-Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

Intégration des fonctionnaires

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'adresse ma question au premier ministre qui répondra certainement pour le ministre de la Fonction publique. Est-il à la connaissance du premier ministre que l'opération d'intégration des fonctionnaires est terminée? Si oui, le premier ministre en a-t-il pris connaissance? Pourrait-il dire à cette Chambre s'il a eu des remarques particulières au sujet des résultats de l'intégration?

M. BOURASSA: Pas à ce jour, M. le Prési- dent. Je vais en parler avec le ministre, mais les conclusions ne m'ont pas été fournies là-dessus.

M. CLOUTIER (Montmagny): Le premier ministre pourrait-il, par la même occasion, demander au ministre de la Fonction publique quels ont été les critères qui ont servi de base à l'intégration des fonctionnaires et si on a tenu compte de certains points extrêmement importants, comme les droits acquis, l'ancienneté?

M. BOURASSA: D'accord.

M. LOUBIER: Par la même occasion, le premier ministre pourrait-il demander au ministre de la Fonction publique de nous donner le nombre de fonctionnaires qui se sont vu attribuer des classifications inférieures à celles qu'ils avaient antérieurement? Deuxièmement, par la suite, pourrait-il demander, de plus, au ministre de la Fonction publique de nous dire quel est le nombre de fonctionnaires dont les salaires seront gelés pour des années à venir?

M. BOURASSA: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Etant donné que cela occasionne énormément de recherches, je crois que le règlement prévoit que ce pourrait être une question posée au feuilleton. C'est seulement une suggestion que je fais.

M. LOUBIER: Si vous me le permettez, M. le Président, j'ai été informé qu'à ce jour tout cet inventaire a été fait. Ce serait strictement une question de formalités de le remettre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Hôpital Fleury

M. SAMSON: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre des Affaires sociales, à la suite de l'incident survenu, jeudi de la semaine dernière, à l'hôpital Fleury. On sait qu'après avoir été refusé à l'hôpital Fleury un patient est décédé. Le ministre peut-il nous dire si le ministère a ordonné une enquête dans cette cause? Si oui, où en est rendue l'enquête présentement?

M. CASTONGUAY: J'ai demandé un rapport verbal, premièrement, et un rapport écrit, par la suite. Ce rapport écrit, je ne l'ai pas encore reçu, mais on m'indique que les gestes, à tout le moins, qui devraient être posés à ce moment-ci ont été posés par le Collège des médecins et chirurgiens. Le Collège des médecins et chirurgiens, comme vous le savez, est habilité à juger des actes posés par ses membres. Selon le rapport verbal que j'ai, tout cet incident est relié à un jugement posé par le médecin de garde, au moment où les choses se sont déroulées.

M. SAMSON: Le ministre est-il au courant du fait que le Dr Augustin Roy, registraire du Collège des médecins, aurait mentionné qu'un hôpital a le droit de refuser un malade qui n'est pas de son secteur? Il aurait terminé en disant que ceci est voulu par le gouvernement.

M. CASTONGUAY: Vous avez lu cela dans l'édition du Devoir de mardi matin, je crois. Si vous regardez dans l'édition du lendemain, vous verrez qu'il a corrigé cette affirmation qu'il a faite ou qu'on lui a prêtée et qui est fausse.

La loi no 65 dit clairement qu'un centre hospitalier doit accepter un patient dans tout cas d'urgence, et s'il n'est pas en mesure de lui prodiguer les soins, de prendre les mesures pour que les soins soient prodigués dans un autre centre hospitalier.

Aucun type de zonage n'est imposé par le gouvernement pour les cas ordinaires, de même que pour les cas d'urgence.

M. SAMSON: Question supplémentaire. Etant donné l'importance de la sécurité des citoyens, est-ce que le ministre a l'intention, à la suite du rapport fourni par le Collège des médecins, d'ordonner, s'il y a lieu, une enquête publique à ce sujet?

M. CASTONGUAY: Comme je l'ai dit tantôt, il semble à ce moment qu'il s'agit d'un cas où le premier des gestes à poser est d'examiner le comportement, les gestes posés par le médecin de garde. Ceci est fait par le Collège des médecins. C'est l'autorité constituée.

J'attends, d'autre part, un rapport écrit, et si ce rapport révèle d'autres faits, ou encore si l'enquête du Collège des médecins révélait d'autres faits, à ce moment je jugerai. Pour le moment, je ne peux prendre aucun engagement. Je ne peux dire quoi que ce soit d'autre, je crois, sur le sujet.

M. LE PRESIDENT: Question supplémentaire?

M. ROY (Lévis): Oui. Est-ce que l'honorable ministre a l'intention de faire ajouter les médicaments supplémentaires qui sont prescrits par des médecins à la formule des 3,000 reconnus par le gouvernement?

Cela ne va pas? Je vais m'asseoir.

M. LE PRESIDENT: Malheureusement. L'honorable député de Maisonneuve.

Politique du travail

M. BURNS: En l'absence du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre — absence que je déplore de plus en plus, de jour en jour — je dois poser ma question au premier ministre, ce que je déplore encore davantage, parce qu'il ne répond jamais. Je dois tout simplement poser une question relativement à deux situations qui sont arrivées dans les mois récents: l'une relative à l'abolition des décrets dans le domaine de l'alimentation; l'autre relative à la disparition des permis de travail pour les employés journaliers et non spécialisés dans la construction.

Dans l'un et l'autre cas, il semble que la décision qui a été prise au ministère du Travail a été basée principalement sur le fait qu'on...

M. LEVESQUE: Question.

M. BURNS: M. le Président, j'ai droit, je pense, à un préambule, c'est une question principale. Pour ceux qui ne comprennent pas le règlement, je vous réfère — vous, vous le connaissez — à l'article 173, paragraphe 1, qui parle d' "un préambule inutile". Moi, je vous donne un préambule que je pense utile.

M. LE PRESIDENT: Je pense que c'est un peu un épilogue que vous avez fait. Vous avez posé votre question, et, moi, je l'ai bien saisie. Je me demande si le préambule que vous avez placé à la fin était nécessaire.

M. BURNS: Je n'ai pas encore posé ma question.

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. BURNS: Laquelle? Voulez-vous me dire...

M. LE PRESIDENT: Formulez-là comme vous l'entendez, suivant le règlement.

M. BURNS: D'accord. Suivant le règlement et me basant sur ces deux événements, je demande tout simplement: Est-ce la politique du ministère du Travail d'écarter un certain nombre de problèmes en ne légiférant pas à leur sujet, parce que ce sont des problèmes qui sont difficiles à cerner, ou bien s'il y a une autre intention de politique ministérielle derrière ça? C'est ce que...

M. LEVESQUE: C'est exactement ce que l'article 175 défend. Si on lit cet article, auquel vient de se référer le député de Maisonneuve...

M. BURNS: Je ne me suis pas référé à ça, mais à l'article 173.

M. LEVESQUE: Vous auriez dû vous référer à l'article 175, et vous l'avez fait.

M. BURNS: Ne me faites pas citer des choses que je n'ai pas citées.

M. LEVESQUE: "Une question ne doit contenir que les mots nécessaires..."

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement, l'article 175 concerne la réponse et il me parle d'une question. Maudit "niaisage."

M. LEVESQUE: Très bien, c'est ce dont je parle, la réponse qu'il est impossible de donner à une telle question.

M. BURNS: C'est de la folie, ce qu'on fait ici, voyons donc!

M. LEVESQUE: "Une question ne doit contenir que les mots nécessaires pour obtenir les renseignements demandés. Est irrecevable une question: 2. Qui contient une hypothèse, une expression d'opinion, une déduction, une suggestion, une imputation de motifs." Il n'y a rien de plus clair.

M. LESSARD: Vous n'avez pas d'opinion, pas de politique, vous n'avez rien.

M. LEVESQUE: Cette prétendue question du député de Maisonneuve est empreinte d'irrégularité et répond aux dispositions de notre règlement quant à l'irrecevabilité d'une question. C'était l'exemple le plus parfait.

M. BURNS: Parfait.

M. LESSARD: C'est parce que les questions vous font mal.

M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre.

M. BOURASSA: Le député sait que le ministre du Travail rencontre aujourd'hui les parties dans le conflit de l'Hydro-Québec. Je pense qu'on peut certainement comprendre son absence. Je vais lui transmettre les deux autres questions.

M. BURNS: Est-ce qu'il y a un conciliateur ou s'il n'en a pas nommé? Et ma question, est-ce que vous y répondez ou non?

M. BOURASSA: Pour le décret dans l'alimentation et la disparition des permis de travail, le leader parlementaire, qui s'y connaît, dit que la question est irrégulière.

M. BURNS: M. le Président, c'est de la...

M. le Président, j'ai posé ma question. Je garde tout mon calme, mais je vous dis que c'est très difficile, parce que je me demande ce qu'on vient faire ici quand on pose des questions et qu'on reçoit de telles réponses. Je reviens à la questions de règlement. J'ai tout simplement posé la question sur la politique du ministère relativement à deux événements très précis, c'est-à-dire le non-renouvellement des décrets dans le domaine de l'alimentation et, deuxièmement, l'abolition du permis de travail, étant donné qu'actuellement vous avez trois centrales qui se sont prononcées contre. Je n'irai pas plus loin. Je vous dis...

M. LE PRESIDENT: Permis de travail.

M. BURNS: ... que c'était de ça que je voulais causer, et je demandais au premier ministre si c'était la politique...

M. LEVESQUE: Le ministre du Travail a répondu à ça, il a fait une déclaration ministérielle.

M. BURNS: Non, il n'a pas répondu à cela.

M. LEVESQUE: Certainement qu'il a répondu à cela.

M. BURNS: Non, il n'a pas répondu à cela. M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: Je le sais fort bien; c'est moi qui ai posé la question, la semaine dernière.

M. LEVESQUE: Alors, vous vous répétez.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le premier ministre est libre d'ajouter quelque chose à sa réponse; autrement, nous devrons considérer sa réponse comme finale.

M. BOURASSA: M. le Président, le député veut savoir si ces mesures sont prises à la place de la législation.

M. BURNS: Est-ce qu'elles sont prises comme politique du ministère? C'est ce que je demande, tout simplement. Ce n'est pas compliqué. Vous avez peut-être de la difficulté à le comprendre.

M. BOURASSA: Pourquoi serait-ce contraire à la politique du ministère?

M. BURNS : Comme ça, vous répondez à ma question que c'est la politique du ministère?

M. BOURASSA: M. le Président, je ne sais pas ce que le député entend par politique. Ce sont des mesures proposées par le ministère; cela fait partie d'une politique du ministère. Est-ce que le député veut savoir si c'est à long terme, si c'est permanent? Il n'est pas tellement clair dans sa question.

M. BURNS: M. le Président, une question additionnelle. Je n'ai plus besoin de faire de préambule; je pense que le premier ministre sait de quel domaine je parle. Est-ce la politique du ministère, lorsque, dans deux cas précis que je vous cite, il n'y a pas de solution immédiate, qu'on élimine les quelques solutions à terme qu'on avait? C'est la question que je pose.

M. BOURASSA: Le ministère a des problèmes extrêmement complexes. Le député est informé de ces problèmes comme ancien syndicaliste, toujours syndicaliste.

M. BURNS : Constamment syndicaliste, M. le premier ministre.

M. BOURASSA: D'accord, M. le Président, tant mieux!

M. BURNS: C'est de plus en plus nécessaire qu'il y en ait au Québec, à part de ça, parce que, de la façon dont vous menez ça, ça va être grave tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre !

M. BOURASSA: M. le Président, le ministère, en face de ces problèmes très complexes apporte les meilleures solutions dans les circonstances, quitte à les réviser ou à les améliorer.

M. BURNS: M. le Président, il va y avoir un minidébat là-dessus, ce soir. Cette réponse ne me satisfait pas.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.

Malaise dans les CEGEP

M. CARDINAL: M. le Président, c'est devenu difficile de poser des questions.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous prendre ma place?

M. CARDINAL: Je pose le cahier des règlements devant moi, au cas où il se passerait quelque chose. Le ministre de l'Education, même si je ne lui ai donné aucun avis, s'attendait certainement à la question que je lui adresse par votre intermédiaire et avec votre bienveillante permission. Préambule très bref et utile, je crois, car elle fait suite à ma question de la semaine dernière sur le présumé ou non projet de règlements pédagogiques au niveau collégial.

Ma question est double: Le ministre est-il au courant que la contestation ne fait que s'accroître et que, dans le cas d'un CEGEP en particulier où l'on a voulu établir localement un nouveau système pédagogique, il y a débrayage et que l'on demande au ministre de faire enquête? Deuxièmement, le ministre a-t-il déjà ou a-t-il l'intention un jour de demander l'avis du Conseil supérieur de l'Education, ce qu'exige la loi dans le cas où l'on veut adopter un projet en matière pédagogique?

Double question: a) Est-ce qu'on répond à la demande des 900 étudiants de Saint-Hyacinthe pour une enquête et b) Le conseil supérieur a-t-il été ou sera-t-il consulté avant qu'on aille plus loin?

M. CLOUTIER (Ahuntsic): M. le Président, tout d'abord, je désire remercier le député de Bagot de me poser cette question. Cela va peut-être permettre de changer le sujet un peu, d'améliorer l'atmosphère de l'Assemblée, parce que je dois dire que, depuis quelque temps...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que vous n'aidez pas tellement.

M. CLOUTIER (Ahuntsic): C'est la contagion, M. le Président. A la première partie de la question, je réponds que les difficultés actuelles dans un CEGEP, qui est en fait le CEGEP de Saint-Hyacinthe, ne sont pas liées à l'application du nouveau régime pédagogique. Il s'agit d'une situation qui évolue depuis déjà un certain temps, qui est actuellement en train d'être discutée et qui est suivie de très près. En fait il y aura une réunion, samedi matin, entre l'administration et l'équipe de la DIGEC, de manière à ce que l'on puisse autant que possible en arriver à une solution.

J'ai déjà exposé que le ministère se devait de respecter l'autonomie des CEGEP, laquelle autonomie est d'ailleurs revendiquée par les conseils d'administration, fort justement je crois. Cependant, ceci ne signifie pas que le ministère reste inactif. A la suite de certaines difficultés, l'année dernière, j'avais demandé que l'on mette sur pied un groupe de travail composé de deux fonctionnaires du ministère et d'un représentant de la Fédération des CEGEP, de manière à recevoir toutes les demandes en provenance des diverses institutions.

Quant à la deuxième partie de la question, elle concerne une consultation avec le Conseil supérieur de l'éducation. Cette consultation aura certainement lieu lorsque le moment sera venu. La loi, d'ailleurs, nous l'impose mais il y a un cheminement à respecter. Pour l'instant, ce régime pédagogique est présenté sous la forme d'un document de travail qui est en consultation. Une fois que ces consultations seront terminées, il y aura une approbation donnée au ministère. C'est avant de présenter un programme quel qu'il soit, puisqu'il n'est pas encore déterminé au conseil des ministres, qu'il y aura consultation devant le Conseil supérieur de l'éducation.

M. CARDINAL: Une question additionnelle, M. le Président. Le ministre a élaboré longuement et je reprends le premier point, auquel il n'a pas répondu. Il a le droit de ne pas répondre à la question. Son prédécesseur avait instauré plusieurs enquêtes. Est-ce que le ministre actuel change la politique du ministère en ce sens qu'il n'a pas l'intention de donner suite à cette demande d'enquête dans ce CEGEP en particulier? Deuxième question, est-ce qu'il y a des raisons qui ont motivé le ministère, qui travaille déjà depuis plusieurs mois là-dessus d'après ce que nous a répondu le ministre la semaine dernière, de ne pas avoir encore consulté le Conseil supérieur?

M. CLOUTIER (Ahuntsic): Je n'ai pas saisi la deuxième partie de la question.

M. CARDINAL: Est-ce que le ministère ou le ministre a des raisons particulières qui font que le Conseil supérieur n'ait pas encore été consulté alors que la population est déjà alertée depuis plusieurs mois?

M. CLOUTIER (Ahuntsic): A la première partie de la question, je dois dire qu'il n'y a strictement aucun changement de politique. Il ne peut pas être question, pour le ministère de l'Education, de décréter des enquêtes chaque fois qu'il y a un problème de régie interne, parce que ce serait la négation même du système collégial. Cela signifierait, à toutes fins utiles, que le ministère en assumerait directement l'administration. D'ailleurs, dans le cas particulier de Saint-Hyacinthe, il y a un facteur dont il faut tenir compte, c'est qu'il s'agit d'un campus et non d'un CEGEP indépendant. C'est un campus qui relève du CEGEP Bourg-Chemin, lequel en compte deux autres, et il est parfaitement loisible au conseil d'administration du CEGEP Bourg-Chemin de faire une enquête maison.

En ce qui concerne la deuxième partie de la question, je ne sais pas si je me suis exprimé clairement tout à l'heure, j'ai tenté de mettre en évidence le cheminement qui doit être fait. Il ne peut pas être question de consulter actuellement le Conseil supérieur de l'éducation sur un régime pédagogique qui n'est pas approuvé et qui est en consultation, consultation qui dure d'ailleurs depuis deux ans. C'est d'une façon tout à fait arbitraire qu'on a laissé entendre qu'on n'avait pas consulté. Avant que ce régime pédagogique ne soit envoyé dans les différentes institutions, deux comités s'étaient penchés sur certains aspects du régime, comités composés de professeurs, en particulier dans un des cas, lesquels avaient été nommés par les centrales syndicales.

Et il y a eu des enquêtes auprès de plusieurs milliers d'étudiants, dans un autre cas, et tout cela est à verser au dossier.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques. Dernière question additionnelle.

M. CHARRON: Au sujet du campus de Saint-Hyacinthe, du CEGEP Bourg-Chemin, je veux demander si, lors de la rencontre de samedi entre les officiers de la DIGEC et le conseil d'administration du CEGEP, seront aussi invités les représentants des enseignants et ceux des étudiants. Seront-ils invités à rencontrer la direction de la DIGEC? Je dis pourquoi, M. le Président. Je le voudrais, parce que le conseil d'administration a déjà pris partie dans le conflit. Pour la solution la plus rapide possible du conflit, il ne suffirait pas de consulter une seule partie.

M. CLOUTIER (Ahuntsic): C'est bien l'intention du ministère, mais là encore il convient de tenir compte de la juridiction du conseil d'administration. La rencontre prévue, qui ne sera probablement pas la seule, l'est avec les conseils d'administration. Pour ma part, je crois qu'il est également nécessaire d'entendre les autres parties.

Cependant, il faut bien admettre qu'on ne peut plus accepter, dans une société qui se veut organisée, ces mouvements de débrayage chaque fois qu'il y a un problème de régie interne. Indiscutablement il y a, au niveau collégial, un certain nombre de procédures qui devront être revues. Parce qu'un conseil d'administration prend ses responsabilités, à tort ou à raison, concernant un employé qui doit être remercié, immédiatement il y a des pressions qui s'exercent et qui vont jusqu'au débrayage des étudiants. Or, ces étudiants doivent tout de même se rendre compte qu'ils prennent, vis-à-vis la société qui investit dans leurs études, une responsabilité considérable en plus de compromettre leur année scolaire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que le ministre a débordé un peu la question. Les deux dernières courtes questions aux honorables députés d'Abitibi-Ouest et de Lafontaine.

Revendications des Indiens au suiet de la baie James

M. AUDET: Ma question s'adresse au premier ministre. Quelle attitude se propose de prendre le gouvernement du Québec à la suite des revendications récentes des Indiens et des Esquimaux relativement au développement du territoire de la baie James?

M. BOURASSA: Quelle était la première partie de la question? Je m'excuse, je ne l'ai pas entendue.

M. AUDET: Quelle attitude se propose de prendre le gouvernement pour donner suite aux revendications des Indiens?

M. BOURASSA: Nous avons toujours été prêts à négocier avec les représentants des Indiens. Je les ai moi-même rencontrés après un avis de 12 heures seulement et nous sommes encore prêts à négocier avec eux.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.

Documents demandés aux assistés sociaux

M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Ces jours-ci une lettre a été envoyée à la plupart des assistés sociaux leur demandant la production de 23 documents. Ma question est la suivante: 1) Est-ce que tous les assistés sociaux du Québec l'ont reçue ou si c'est uniquement certains secteurs du Québec?

2) Comme des documents demandent de l'argent pour faire photocopier soit des baptis-taires, des certificats de mariage, etc., s'ils n'ont pas donné leurs documents dans un certain délai, est-ce que les assistés sociaux peuvent être pénalisés, étant donné que dans la lettre on disait "afin de vous éviter des contretemps"? 3) Qui va défrayer le coût de ces documents s'ils ne les ont pas, s'il faut qu'ils paient pour les avoir ou, s'ils ont besoin de les conserver doivent pour cela en envoyer une photocopie?

M. CASTONGUAY: Je prends avis de la question, M. le Président. J'apporterai une réponse à ces questions la semaine prochaine.

M. ROY (Beauce): Question additionnelle, M. le Président, sur le même sujet. Est-ce que le ministère des Affaires sociales accepterait de considérer ces faits et justement de prendre à sa charge le coût des documents qu'on demande aux bénéficiaires de la Loi de l'aide sociale de façon que ces personnes ne subissent pas une diminution de leur prestation puisqu'elles doivent faire des déboursés pour répondre aux exigences du ministère?

M. CASTONGUAY: J'en prends également avis; c'est la même question que le député de Lafontaine m'a posée.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

J'inviterais l'honorable ministre des Affaires sociales à répondre à une question posée par l'honorable député de Chicoutimi.

Centralisation de services chirurgicaux

M. CASTONGUAY: M. le Président, le député de Chicoutimi a posé une question au sujet de l'intention possible du gouvernement ou du ministère des Affaires sociales de centraliser certains services chirurgicaux dans les hôpitaux, les plus grands centres. Son inquiétude portait plus particulièrement sur le service de chirurgie cardiaque ou thoracique de l'Hôpital de Chicoutimi. Est-ce bien la question?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. CASTONGUAY: Vis-à-vis des problèmes, des interrogations que soulèvent le développement et le fonctionnement des services de cathétérisme cardiaque et de chirurgie cardiaque, nous avons formé un groupe de travail composé d'éminents spécialistes dans le secteur et nous avons reçu le rapport de ce comité ou de ce groupe de travail le 25 août dernier.

On signale dans ce rapport d'abord que nous avons plus d'hémodynamiciens et de chirurgiens cardiaques qu'en Ontario, même si notre population est plus faible. Donc, nous ne sommes pas trop mal pourvus sur ce plan. Nous avons un plus grand nombre de services au Québec qu'ils en ont en Ontario; également, nous ne sommes pas trop mal pourvus sur ce plan.

Le rapport souligne également qu'il est important, pour une bonne qualité de soins, que les deux types de services soient liés ensemble et qu'il y ait un certain volume de services, si on veut avoir des équipes qui sont habituées à bien fonctionner. Après avoir établi ces critères de bon fonctionnement, on fait la revue des douze centres qui existent. Quant à l'Hôtel-Dieu Saint-Vallier de Chicoutimi, le rapport note la présence d'une unité d'hémody-namique avec un seul hémodynamicien et note qu'il ne se fait pas actuellement de chirurgie cardiaque. Il note également que le nombre d'examens hémodynamiques est inférieur sensiblement à la norme proposée. C'est pourquoi le comité conclut en disant qu'il émet un doute sérieux sur l'utilité actuelle de ce service.

Sur la réception de ce rapport, nous n'avons pris aucune décision. Nous n'en avons pas pris jusqu'ici, mais nous avons demandé à des officiers du ministère de rencontrer les autorités de l'Hôtel-Dieu de Chicoutimi, pour discuter de la question avec eux. Il s'agit d'une question fort importante. Il s'agit, pour nous comme pour les autorités d'un tel centre hospitalier, d'assurer des services d'excellente qualité, surtout compte tenu de la complexité de ce type de services.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Une brève question au ministre. Est-ce que le ministre pourrait déposer ou nous faire parvenir copie de ce rapport qu'il a reçu? Est-ce que le ministre pourrait, en même temps, demander à ses fonctionnaires de retourner là-bas et de revoir la situation qui a singulièrement évolué depuis le 25 août 1972?

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

Demande de débat d'urgence: Grève à l'Hydro

M. LE PRESIDENT: Un instant. L'honorable député de Beauce m'a donné un préavis, demandant la tenue aujourd'hui, avant d'entreprendre les affaires du jour, d'un débat d'urgence sur la grève de l'Hydro-Québec.

J'aimerais entendre son argumentation, aussi brièvement que l'a fait hier l'honorable député de Bourget.

M. Fabien Rov

M. ROY (Beauce): M. le Président, très brièvement, nous réclamons un débat d'urgence pour discuter des conséquences de la grève qui sévit à l'Hydro-Québec et des moyens que le gouvernement pourrait et devrait prendre pour y mettre un terme au plus tôt.

Nous réclamons que ce débat ait lieu aujourd'hui même pour les raisons suivantes: lo Selon des renseignements précis, un nombre imposant de citoyens du Québec sont privés actuellement d'électricité depuis mardi, et rien n'indique que la situation sera corrigée pour la fin de semaine.

2o L'électricité joue un rôle vital dans notre économie. Or, des commerces et des entreprises doivent subir des pertes quand il s'agit d'entreposage; c'est le cas des usines laitières et les agriculteurs, à l'heure actuelle, sont gravement affectés par cette grève. De plus, la nomenclature des services essentiels semble mal définie. 3o II y aurait eu du sabotage dans différents endroits et même de la violence dans la région de Chicoutimi, augmentant ainsi les risques d'escalade du conflit. 4o Certains politiciens chercheraient à profiter de la fin de semaine pour politiser le conflit pour des fins publicitaires et électorales, risquant ainsi de compromettre les négociations et de prolonger le conflit indéfiniment. 5o II est urgent qu'une décision soit prise avant l'ajournement de la Chambre pour la fin de semaine, considérant la période de l'année ou nous sommes et que la santé publique est en danger. On nous informe qu'au cours de la fin de semaine des personnes seront dans l'obligation de déménager.

Pour ces considérations, nous estimons qu'il est du devoir de la Chambre de se prononcer sur ce conflit qui affecte d'une façon très sérieuse toute la population du Québec. Comme administrer, c'est prévoir, pourquoi attendre des dégâts avant d'agir? Pour ces raisons, nous demandons qu'un débat d'urgence soit tenu dès aujourd'hui de façon que les parlementaires et les membres des différents groupements politiques puissent se prononcer sur ce conflit et suggérer au gouvernement toute amélioration ou encore toute suggestion pertinente.

M. LE PRESIDENT: En vertu du règlement, il est dévolu au président, ce que je considère comme une très lourde responsabilité, de devoir décider seul s'il doit accorder, à l'occasion, un tel débat d'urgence.

Je pense que nous sommes à peu près un des rares Parlements, au monde, où cette responsabilité est laissée à un seul homme. A Ottawa, en Ontario, en Angleterre ou ailleurs, la Chambre se prononce. Ici, nous avons voulu que cette responsabilité soit dévolue à une seule personne. Personnellement, depuis que cette demande m'a été faite, mardi, je trouve cette responsabilité assez lourde.

D'ailleurs, dans le courant de la première partie de la session, lors de la grève des employés du gouvernement — je n'aime pas tellement refuser les responsabilités — j'ai laissé la Chambre décider. Ce n'est pas ce que je ferai aujourd'hui.

Il n'y a aucun doute que ce problème est très sérieux, très grave et a des conséquences nombreuses. Je suis, avec autant d'avidité que vous tous, tout le déroulement de cette grève depuis lundi dernier.

Je n'ai pas à décider si la question est grave et sérieuse car tout le monde, je pense, est d'accord qu'elle l'est. Où je dois intervenir c'est pour décider si cette question doit être discutée d'urgence. Non pas la question elle-même, mais l'à-propos de la discussion et du débat.

Lors de la période des questions, des réponses de l'honorable premier ministre ont indiqué qu'aujourd'hui — d'ailleurs on m'a informé et j'ai fait des recherches ce matin — il doit y avoir une rencontre au bureau du ministre du Travail, si mes informations sont bonnes. On ne peut pas priver la Chambre trop longtemps du droit d'en discuter. Je me pose la question: Est-ce qu'il y a intérêt à ce que cette question soit discutée en Chambre? Il y a un risque, peut-être, de politisation, ce qui est toujours délicat dans une période de négociation.

Pour toutes ces raisons, je n'accorderai pas, aujourd'hui, ce débat d'urgence. Mais je tiens à donner un avis à cette Chambre que si d'ici demain il ne se passe pas des événements favorables qui laisseraient présager une solution assez rapide du conflit — en même temps, je donne cet avis aux ministres qui sont impliqués directement ou indirectement dans le problème, c'est-à-dire le ministre du Travail, le premier ministre, le ministre des Richesses naturelles — il est fort possible, avec certaines réserves et si la demande m'était faite demain, que ce débat soit accordé.

M. ROY (Beauce): M. le Président, considérant les circonstances, est-ce que vous me permettriez de représenter ma motion à nouveau, demain?

M. LE PRESIDENT: Ecoutez, je ne peux pas inviter qui que ce soit. J'ai eu deux demandes mardi et mercredi d'un groupe politique; j'en ai eu une autre d'un autre parti. Tirez vos conclusions. Demain, j'agirai suivant le meilleur jugement possible si une demande m'est faite.

M. LOUBIER: M. le Président, est-ce possible que vous remettiez la décision d'accorder ce débat à la Chambre, aux membres de l'Assemblée nationale ou si vous prendrez vous-même la décision?

M. LE PRESIDENT: J'aime autant me limiter à la déclaration que j'ai faite.

M. LOUBIER: En réponse à la présentation de la motion du député de Beauce, vous avez signalé vous-même, M. le Président, que, s'il n'y avait pas d'amélioration ou de résultat satisfaisant ou sécurisant, vous envisagiez — vous l'avez dit avec beaucoup de prudence et hypothéti-quement — la possibilité d'acquiescer à cette motion. S'il n'y a pas de progrès satisfaisant ou sécurisant et que, d'autre part, vous n'êtes pas, comme vous le disiez tout à l'heure, prêt à prendre seul la responsabilité de cette décision, étant donné la dimension de ce conflit et des répercussions, est-ce qu'à ce moment-là vous allez déférer l'accord ou le refus aux membres de l'Assemblée nationale?

M. LE PRESIDENT: Non, je n'avais pas envisagé cette solution. Ce que je peux vous dire, à la suite de votre intervention, c'est qu'avant de prendre ma décision, demain, je communiquerai avec les leaders parlementaires des quatre partis.

M. LOUBIER: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.

M. LEVESQUE: M. le Président, s'il n'y a pas de débat, demain, comme celui dont vous avez évoqué la possibilité il y a quelques instants, il est possible, pour l'information des membres de cette Chambre, que nous passions au débat sur le budget.

M. LOUBIER: M. le Président, le leader parlementaire me permettrait-il une question? Si le gouvernement décidait ce soir, d'adopter une loi spéciale, y aurait-il possibilité d'en avoir la galée ou d'en avoir une copie, à n'importe quelle heure ce soir ou demain matin de très bonne heure? Oui?

M. LEVESQUE: Si je me fie à notre habitude, nous avons toujours agi ainsi lorsque de telles circonstances se sont présentées, bien que je réponde présentement à une question purement hypothétique.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais vous demander une directive. L'honorable leader du gouvernement vient de nous annoncer que demain, nous aurions probablement un débat sur le budget, ce qui, à toutes fins pratiques, vous placera dans la situation suivante? Vous pourriez répondre demain aux députés de cette Chambre: Je ne donne pas de débat d'urgence sur l'opportunité de discuter de tout le problème de la grève qui sévit actuellement au Québec parce que, aujourd'hui même, il y aura continuation du débat sur le budget et nous serions privés de discuter, dans toutes ses modalités et ses détails, de ce problème particulier.

Suivant les auteurs, "un tel débat ne peut être accordé lorsqu'il n'y a pas occasion prochaine de débattre le problème". Or, dès demain, vous entendrez — je présume de la sagesse et de l'expérience du leader du gouvernement — le leader du gouvernement vous dire: Mais, M. le Président, un tel débat n'est pas nécessaire puisque, à l'ordre du jour, nos travaux prévoient une discussion sur toute question d'intérêt public ou même sur toute question qui relève de la compétence du gouvernement du Québec.

De ce fait, M. le Président, suivant les auteurs de droit parlementaire, vous ne serez plus justifié et vous serez placé dans une situation fort embarrassante, parce que vous allez créer un précédent et, du même coup, mettre de côté cette règle d'économie de droit parlementaire qui n'accepte pas un tel débat lorsqu'il n'y a pas une occasion prochaine de débattre le problème que l'on veut porter à l'attention de la Chambre.

M. LE PRESIDENT: Je remercie l'honorable député de Maskinongé de cet aspect tout à fait valable qu'il apporte à la discussion. Je puis assurer les membres de cette Chambre que même cette annonce du leader parlementaire du gouvernement n'affectera en aucune façon la décision que je rendrai demain, pour d'autres raisons; en aucune façon, parce que la limite du débat est importante. Sur une motion d'urgence, les députés ont droit à vingt minutes et sur une motion du budget, ils ont droit à trente ou vingt minutes.

M. PAUL: Trente minutes.

M. LE PRESIDENT: Un débat d'urgence qui est accepté dans une journée normale de session doit se terminer à six heures...

M. PAUL: Demain, c'est deux heures.

M. LE PRESIDENT: ... ce qui fait deux heures de débat. Demain, la séance, normalement, se termine à une heure, ce qui fait encore deux heures de débat. Je peux assurer le député de Maskinongé que l'annonce qui a été faite n'influencera en rien la décision que je rendrai demain.

M. PAUL: M. le Président, me permettriez-vous de poser une question au leader du gouvernement? Pourrait-il nous donner un nouveau menu de travaux pour demain?

M. LEVESQUE: M. le Président, j'avais fait cette annonce en toute objectivité. Je suis convaincu que nous aurons, demain, toute la latitude nécessaire pour discuter de toutes les choses importantes qui peuvent être à l'ordre du jour.

Et c'est à vous, évidemment, que reviendra cette responsabilité de faire le choix. Mais je trouve assez intéressantes les remarques du député de Maskinongé. Je ne sais pas, mais sauf le respect que je vous dois et votre sagesse que je n'ai jamais mise en doute évidemment, je crois qu'il y avait beaucoup de bon dans ce que disait le député de Maskinongé.

Mais, enfin, j'oublie ça. Maintenant, la commission parlementaire siégera au Salon rouge pour étudier le code des professions, la Loi des arpenteurs. Immédiatement, nous pourrons passer à l'article 6.

Projet de loi no 34 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Camille Samson

M. SAMSON: M. le Président, mardi soir dernier lorsque nous avons terminé les travaux de la Chambre, j'avais l'occasion de faire quelques brèves remarques en ce qui concerne le projet de loi no 34 sur la qualité de l'environnement.

Je voulais souligner à cette Chambre que nous croyons, évidemment, à l'importance d'une loi voulant protéger l'environnement, mais que, parmi toutes les questions que nous nous posons, nous sommes, je pense, en droit de nous demander si la loi no 34 va atteindre exactement les buts fixés par le ministre et désirés par les autres membres de cette Chambre, ainsi que par la population.

Ce pour quoi nous nous posons des questions, c'est que justement la pollution, de nos jours, prend des proportions de plus en plus grandissantes. Lorsque nous avons terminé les travaux, mardi soir dernier, j'avais l'occasion de citer le cas de la pollution par les usines de pâte et papier au Québec, ce qui, évidemment, est connu de tout le monde. J'ai pris l'occasion pour dire justement que, même si nous reconnaissons qu'il nous faut donner toute latitude à l'entreprise privée, qu'il nous faut l'encourager, il reste que cette même entreprise, qui développe et exploite les ressources naturelles du Québec, a certaines responsabilités à prendre.

Parmi ces responsabilités, il y a celle de protéger l'environnement. Donc, dans le domaine des pâtes et papier, il y a beaucoup de pollution. Nous avions dernièrement comme exemple le moulin de papier de Témiscaming, qui vient de fermer, laissant la population du Témiscamingue sans travail, avec sa pollution. Il s'agit donc d'une compagnie privée qui est allée chercher des profits dans ce secteur.

Mais, aujourd'hui, ce qui nous fait davantage penser que, dans le domaine des pâtes et papier, nous n'avons pas demandé aux compagnies ou aux exploitants de prendre toutes leurs responsabilités, c'est que nous retrouvons, dans le Soleil du mercredi 8 novembre, un article très intéressant concernant justement l'usine de pâtes et papier de Témiscaming, qui est fermée.

M. HARDY (président): A l'ordre! L'honorable député de Chicoutimi invoque le règlement.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je m'excuse auprès du député de Rouyn-Noranda, mais est-ce que vous pourriez vérifier s'il y a quorum?

M. LE PRESIDENT: Que l'on appelle les députés. A l'ordre! Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: Merci, M. le Président, je disais que, dans le journal Le Soleil, le mercredi 8 novembre dernier, nous trouvons un article très intéressant qui se lit comme suit: "Les citoyens de Témiscamingue au Québec accusent la compagnie internationale de papier de faire obstacle à toutes les tentatives de racheter et de rouvrir l'usine que la société, qui est une propriété américaine, a fermée dans cette ville en mai dernier sous prétexte qu'elle n'était plus rentable."

Un peu plus loin, on dit ceci: "A la base du conflit, il y a le prix. Il semble que la Compagnie internationale de papier exige la somme de $2.5 millions alors que la compagnie Tembec n'en offre que $1.5 million." Cette compagnie est formée, en l'occurrence, des anciens employés de cette compagnie qui sont intéressés, par une formule coopérative, à en reprendre les activités. Nous retrouvons, je pense, un effet de mauvaise foi d'une entreprise qui a contribué à polluer une région comme, évidemment, il y a pollution dans d'autres régions.

C'est peut-être le temps de se demander, M. le Président, si la loi que nous étudions aujourd'hui ne devrait pas être un peu plus sévère quant à la discipline et aux pénalités à l'endroit de ces représentants de l'extérieur du pays — une compagnie américaine en l'occurrence — qui viennent exploiter nos richesses naturelles et qui nous laissent avec notre pollution. Nous savons que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial apportent une certaine aide à l'entreprise privée pour lui permettre de l'exploiter afin de créer des emplois. On paie à même les taxes des citoyens pour permettre la création de certains emplois; pendant ce temps ces compagnies américaines viennent chercher les profits, viennent faire l'exploitation chez nous et s'en retournent en nous laissant avec nos problèmes et en nous obligeant à prendre, à même les taxes que les citoyens doivent payer, les sommes nécessaires pour faire cette dépollution qui est rendue nécessaire.

Evidemment, M. le Président, cette situation qui est créée présentement à Témiscamingue, nous devons la prendre comme un exemple, mais la même chose pourrait se produire dans d'autres villes, telles que Trois-Rivières, où la compagnie Domtar a certains problèmes de ce temps-ci, et d'autres régions peut-être du Québec.

Nous avons une loi devant nous qui prévoit des sanctions plus ou moins valables parce que, justement, dans une autre article du journal La Presse, le samedi 7 août 1971, concernant encore les compagnies de pâtes et papier, on trouve ceci, sous le titre: "La pollution par les pâtes et papier du Québec. Les compagnies préfèrent payer de légères amendes." Cela veut dire que si la loi prévoit des amendes, il semblerait que ça fait l'affaire des exploitants et on est rendu à se demander si la loi qu'on étudie aujourd'hui n'est pas faite sur mesure pour les exploitants qui l'ont demandée de telle façon. C'est une question que nous nous posons

et que nous avons le droit de nous poser parce que lorsqu'on parle de faire une lutte à la pollution, il semble qu'on oublie de faire la lutte à ceux qui sont les responsables de cette même pollution.

Lorsqu'on vous donne comme exemple la situation de Témiscamingue, moulin à papier, on pourrait aussi vous donner comme exemple la situation des mines dans la région du Nord-Ouest québécois, dans la région de Rouyn-Noranda où nous avons des mines qui sont fermées dernièrement, la mine Cadillac-Molybdenite, la mine Preissac-Molybdenite où des exploitants, encore une fois, sont partis en nous laissant avec cette pollution.

Le gouvernement devra, pour enrayer cette pollution, payer à même les taxes des citoyens. En ce qui concerne le cas de la compagnie Preissac Molybdenite, c'est encore pire. Une autre compagnie américaine est venue s'installer l'été dernier sur le terrain de la mine Preissac Molybdenite, alors que la mine est fermée, alors que les exploitants ont foutu le camp. Cette compagnie américaine est venue s'installer là, non pour donner de l'emploi à des Canadiens, mais pour continuer à polluer l'environnement.

En ce domaine particulier, je reconnais qu'en ce qui concerne le territoire de la mine Preissac Molybdenite le ministre a fait des efforts. Le ministre, suite à des communications, a fait des efforts très intéressants et je dirais même qu'il a pris ses responsabilités pour tenter de corriger cette situation. Mais c'est un exemple qui demeure et qui pourrait se retrouver dans d'autres secteurs. Il nous faut absolument prendre des dispositions pour empêcher que ça nous arrive à nouveau.

Une fois que les mines sont fermées il y a pollution, mais pendant qu'elles sont encore en activité il y a aussi pollution de l'eau, pollution de l'air. Nous pouvons citer en exemple les deux villes de Rouyn et de Noranda, où, à certains jours, il y a un degré de pollution extrême, des gaz qui proviennent de la mine. On n'a rien contre l'entreprise qui exploite. On est intéressé à ce qu'elle continue à faire des profits, mais c'est la responsabilité du gouvernement de faire en sorte que la santé publique soit protégée. Lorsqu'on parle de santé publique, on pourrait non seulement parler de certains jours où il y a un degré de pollution extraordinaire dans les deux villes de Rouyn et de Noranda mais on pourrait parler aussi de la pollution de la santé de ces mineurs qui donnent leur temps. Il y en a qui travaillent à cette mine-là depuis 20 ou 30 ans et, lorsqu'arrive le moment où il faut renvoyer des hommes parce qu'on en a trop, on retourne ces gens-là chez eux avec leur pollution, la pollution de leur santé. Pas un mineur sorti des mines après dix ou quinze ans de travail n'a pas les poumons affectés parce que là aussi il n'y a pas contrôle de la qualité de l'environnement, il n'y a pas contrôle de la pollution.

On permet malheureusement à ces exploi- tants qui proviennent de l'extérieur, pour la plupart des cas, de polluer l'environnement, de polluer l'eau, de polluer l'air et de mettre en danger la santé des travailleurs. C'est le temps plus que jamais, pendant que nous étudions cette loi, de voir les conséquences et de les corriger. On ne peut le faire par de petites amendes, qui peuvent être comparables, si vous le voulez, à des oboles. Pour une compagnie comme la Compagnie internationale de papier, qui a pollué plusieurs régions au Québec, comme une autre compagnie minière qui a pollué aussi certaines régions au Québec, $10,000 d'amende ça n'équivaut même pas au petit cadeau qu'on donne aux employés pour Noël. Cela leur coûte plus cher pour donner une dinde à tout le monde. Et on pense qu'avec ça on va empêcher la pollution?

M. le Président, on peut lire un fascicule publié par l'Association des naturistes; en page 43, voici ce qu'on peut lire. Le titre est le suivant: "La prison pour les pollueurs". Dans une récente parution de Paris-Match, on pouvait lire les lignes qui suivent: Contre la pollution, une seule arme efficace, la prison pour les chefs d'entreprises pollueuses. En Italie, deux industriels viennent d'en faire l'expérience. En Suisse, la loi prévoit six mois de prison pour les pollueurs d'eau. En Angleterre, cinq ans. En France, un industriel du Midi vient d'être condamné à onze jours de prison."

Chez nous, au Québec, la nouvelle loi-cadre sur la qualité de l'environnement prévoit des amendes de $10,000 pour toute infraction subséquente. Ces sommes représentent pour les gros industriels des montants dérisoires.

Il est à prévoir que bon nombre d'industries pollueuses préféreront continuer leur pollution plutôt que de transformer leur méthode de production car des amendes aussi faibles ne les touchent en rien. Ceci confirme exactement l'article paru dans la Presse du 6 août 1971. Je continue, M. le Président. On y dit ceci: "Nos dirigeants font preuve de lâcheté devant l'entreprise privée. Leur attitude, cependant, est facile à comprendre; les caisses électorales des grands partis politiques sont largement alimentées par ces grosses industries pollueuses. "Non seulement faut-il mettre en prison les pollueurs mais aussi les hommes politiques qui les protègent. C'est ce que fera un jour le naturisme social". C'est écrit en toutes lettres dans ce fascicule qui vient de paraître en octobre 1972. Il y a une question que l'on se pose: Pour quelle raison ne veut-on pas sévir contre ces grandes entreprises, contre ces cartels qui sèment la pollution sur notre territoire? Quelle est la véritable raison? C'est à se demander si la loi 34, que nous étudions présentement, n'est pas seulement une épée de Damoclès que le gouvernement voudrait suspendre au-dessus de la tête de ces entreprises afin de s'assurer de l'alimentation de sa caisse électorale pour les prochaines élections au Québec.

C'est pourquoi M. le Président, nous demandons...

M. LE PRESIDENT : A l'ordre! Je suis obligé de rappeler — c'est avec regret, devant cette envolée oratoire — à l'honorable député de Rouyn-Noranda que le temps qui lui est accordé est maintenant expiré.

M. SAMSON: M. le Président, je vous remercie. Je termine brièvement en vous remerciant d'avoir brillamment sauvé le gouvernement que j'étais en train d'accuser de vouloir emplir sa caisse électorale pour les prochaines élections provinciales.

En terminant, nous allons sûrement acquiescer au principe de la loi, nous sommes d'accord, il faut protéger l'environnement, mais sous toute réserve. Nous verrons ce qu'il y aura lieu de faire une fois que nous aurons entendu la réplique du ministre, une fois que nous aurons entendu de quelle façon il entend remédier à cet état de choses et une fois que nous saurons s'il est réellement disposé à protéger au Québec la qualité de l'environnement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.

M. Jean-Guy Cardinal

M. CARDINAL: M. le Président, parlant évidemment du projet de loi 34, sur le principe s'il en est un, Loi de la qualité de l'environnement, malgré le discours apologétique du leader parlementaire, j'ai l'intention de critiquer non pas le ministre — car je respecte tous les collègues de cette Assemblée et tout particulièrement le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement, mais de critiquer le projet de loi 34.

Le projet de loi 34, plusieurs l'ont vu avant ou en même temps que moi, se présente sous un singulier aspect. Tout d'abord, il n'y a pas de ministère. La question a été soulevée dès le début par le leader parlementaire d'Unité-Québec. Ceci ne semble pas grave. On crée un service qui sera branché directement, si on me permet l'expression, sur le conseil des ministres, c'est-à-dire qu'au lieu d'avoir une loi, s'il y a un principe dans le projet de loi 34, c'est tout simplement le suivant: remettre au conseil des ministres le droit de légiférer en l'enlevant à l'Assemblée nationale, ce qui est la façon normale d'un gouvernement et d'un Parlement de fonctionner.

Ce projet de loi me paraît donc être un projet sans principe, mais un projet de loi qui vise des objectifs très précis. Je l'admets. Evidemment, tout le monde est pour la vertu et tous les gens sont contre la pollution. Quant aux objectifs visés par le ministre au nom du gouvernement, nous, d'Unité-Québec, sommes évidemment d'accord. Quant aux moyens que veut utiliser ce même gouvernement pour atteindre ses objectifs, nous ne sommes plus du tout d'accord. Il y aurait plusieurs raisons pour ne pas être d'accord. Certains membres de cette Assemblée les ont déjà exprimées et je n'ai pas l'intention de les répéter.

Dans les vingt minutes qui me sont imparties, en tentant de restreindre tout ce que j'aurai à dire sur un tel sujet et en procédant surtout par des exemples, par des réactions du public par des réactions même du ministre dans les discours qui ont précédé à l'extérieur de cette Chambre, par des réactions de journalistes et d'éditorialistes, je voudrais surtout m'en tenir aux aspects financiers et fiscaux que ce projet de loi aura comme effets.

Le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement étant parfaitement bilingue, je me permettrai d'employer un terme anglais. Je parlerai donc de ce qu'on appellerait, dans le langage médical les "side effects", c'est-à-dire les effets terribles — et le mot n'est pas trop fort — au point de vue économique, financier et fiscal de la loi no 34, si elle était adoptée telle qu'elle est présentée devant nous.

Il s'agit presque de la création d'un nouveau ministère de l'Education, dont le budget, d'ici quinze ans, est absolument inconnu, mais se situe non pas à $1,600 millions, mais à des milliards de dollars. Le gouvernement lui-même nous dit, depuis deux ans, qu'il ne veut pas augmenter les impôts directement, mais il y aura quelqu'un, quelque part, qui va payer.

Actuellement, nous assistons et nous assisterons davantage, avec le projet de loi no 34, à ce phénomène où l'on transpose les impôts que l'Etat devrait normalement prélever au niveau des instances locales, soit par exemple des municipalités de paroisses, des municipalités de villages, des cités, des villes et des communautés urbaines. Nous y reviendrons. Ces impôts sont directement infligés aux contribuables qui aura à les payer à ces municipalités ou organismes. L'expérience du passé, pour ceux qui demeurent dans la région de la communauté urbaine de Montréal, a été concluante à ce sujet. Non seulement nous voyons cette imposition indirecte — non pas au sens d'impôts indirects, mais par des voies d'évitement — mais nous verrons aussi le manque à gagner qui se produira pour beaucoup de personnes qui, déjà, par exemple, autour de lacs ou de rivières, possèdent des terrains dont elles sont soit les habitants ou les propriétaires et qui désirent les vendre un jour.

Nous verrons aussi des règlements dont nous ne connaissons pas la nature, qui, imposeront des fardeaux financiers aux municipalités auxquelles on fera des prêts. La loi le dit clairement et le ministre l'a dit, de toute façon. Des prêts, c'est bien beau pour les municipalités, mais — ici, je rejoindrais nos amis du Ralliement créditiste — il y a le capital et les intérêts sur un nombre d'années. On sait qu'au simple taux de 5 p.c. pour 11 ans, alors qu'on nous parle d'une période de quinze ans, on aura doublé le montant du capital simplement avec les intérêts, en tenant compte d'un taux composé d'intérêts.

Mais revenons plus sérieusement à ce fameux projet de loi no 34, sous l'aspect financier. Je procéderai par des exemples plutôt que d'être dans la théorie. Prenons le cas de la région de l'Estérel, que je connais très bien, personnellement. Avant d'être membre de cette Assemblée, j'ai eu à travailler pour le développement de ce centre qui est devenu une municipalité. Elle est déjà dans des difficultés. L'Estérel se situe autour de trois lacs, dont le principal est le lac Masson. D'après ce qu'on a appris des journaux et même des expertises du service de l'environnement, ces trois lacs, en particulier le lac Masson, seraient dans un état que l'on qualifierait, s'il s'agissait d'un individu, de moribond.

Or, l'on sait que dans cette région les terrains qui ont le plus de valeur sont situés en bordure de ces trois lacs. Ici, je n'ai pas le droit de revenir sur une motion du député de Maskinongé, qui a été malheureusement battue. Mais j'ai le droit de rappeler, cependant, que Me Lacroix, qui est avocat pour la ville de l'Estérel, a fait la remarque très claire que, s'il reconnaissait le manque de qualité — c'est le moins que l'on puisse dire — des eaux qui sont au centre de l'Estérel, il était "très surpris et mécontent qu'on n'ait pas estimé opportun de consulter les autorités de l'Estérel avant d'informer la population."

Que va-t-il arriver de tous ces règlements internes à l'Estérel, où déjà les impôts sont élevés, où déjà des terrains sont en vente en bordure des lacs? Que va-t-il arriver de ceux qui déjà possèdent des immeubles et qui voudront les vendre ou les conserver? Il va arriver qu'ils seront obligés de dépenser beaucoup, pour de multiples raisons que je ne peux pas analyser dans les détails. Premièrement, je manque de temps et, deuxièmement, parce qu'elles ne sont pas dans la loi mais dans des règlements dont nous ne connaissons pas la teneur. Nous n'en connaîtrons pas la teneur avant que la loi ne soit votée par une majorité contre trois partis d'Opposition. Ces gens-là, nécessairement, ou bien auront un manque à gagner ou paieront des impôts supplémentaires. La ville de l'Estérel sera encore plus en difficulté.

Remarquons que c'est un endroit non seulement de villégiature mais que plusieurs des résidences servent à l'année. L'on a calculé que, simplement pour retirer les sédiments du fond d'un des lacs, il en coûterait au moins $100,000. Ici, je ne veux pas être trop technique mais le ministre sait, lorsqu'il s'agit d'épuration des eaux, qu'il y a trois degrés ou trois niveaux, qu'on appelle primaire, secondaire et tertiaire. Le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement a dit que le gouvernement pourrait investir $600 millions pour le traitement des égouts municipaux au cours des quinze prochaines années. Je pense, si je ne m'abuse, qu'il ne parlait que du traitement primaire, qui ne permet que d'enlever ce que l'on appelle les matières solides de l'eau. On n'a même pas encore évalué — si on l'a fait, je n'ai pas les chiffres en main — le traitement secondaire, qui consiste à enlever ce qui reste en suspension et, enfin, le traitement tertiaire, qui permet d'enlever toutes les solutions qui sont dans l'eau de façon à la rendre, à nouveau, potable sinon non polluée.

Le ministre nous dit que le budget du service qu'il dirigera, c'est-à-dire du conseil qui sera créé, sera de $12 millions. Il y a une bonne différence entre $12 millions et $600 millions. Même sur une période de quinze ans, avec l'inflation, le coût de la vie et tout le reste qui serait en dehors de la question mais qui permettrait quand même d'intéressantes discrétions pour le gouvernement, je me demande où les propriétaires fonciers, le long des rivières ou autour des lacs, vont se trouver d'ici ces quinze ans.

Je prends un autre exemple: Sainte-Adèle. A Sainte-Adèle, présentement, il y a ce qu'on appelle vulgairement un développement domiciliaire; disons un centre où l'on construit des édifices, Sainte-Adèle étant devenue une ville.

Sur le lac, déjà, il y a une réglementation locale qui défend les embarcations à moteur. Mais, quand même, là-bas aussi les terrains, sur les bords du lac, sont les terrains les plus chers, donc ceux qui rapportent les taxes les plus élevées à la municipalité.

Les municipalités, que ce soit l'Estérel ou Sainte-Adèle, ont planifié des taxes futures sur les terrains près des lacs. On pourrait parler aussi de tous les lacs qui se trouvent à partir de Saint-Jérôme jusqu'à Saint-Calixte. On pourrait parler tantôt du cas particulier de Saint-Jérôme et de la rivière qui traverse cette autre ville du Québec.

Si, par exemple, comme le ministre l'a dit ou l'aurait dit — ses propos ont-ils été bien rapportés dans les journaux ou non? — on ne peut plus construire qu'à tant de pieds d'un lac, que va-t-il arriver au propriétaire — d'abord, il y a intrusion dans le droit de propriété; je ne m'en scandalise pas mais je le souligne quand même — qui sera pris avec un terrain qui deviendra surtaxé ou qu'arrivera-t-il à celui qui voudra s'établir près d'un lac? Sera-t-il obligé d'acquérir 1,000 pieds de profondeur pour pouvoir quand même avoir accès à ce lac? Questions qui, pour moi, demeurent sans réponses.

L'intervention de l'Etat par réglementation, qui n'est pas sous le contrôle de l'Assemblée nationale, donc qui n'est pas sous le contrôle des élus de chacune des circonscriptions électorales, brimera les municipalités, d'une part en les privant de revenus, parce que certains terrains ne se vendront plus, d'autre part en réduisant à néant leur planification en matière de taxation pour d'autres fins que les fins de pollution.

Quels sont les coûts prévisibles, M. le Président? Pour le Canada, M. André Raynault, dans une étude qui portait le titre d'Aspects économiques de la lutte contre la pollution, donne

des chiffres qui sont vraiment frappants. Selon M. Raynault, d'ici 1980 — ce n'est plus quinze ans — il en coûterait au moins $1.5 milliards pour commencer à dépolluer l'environnement. M. André Raynault, qui est président du Conseil économique du Canada et qui est un professeur reconnu en matière économique, a certainement des raisons sur lesquelles il s'appuie pour donner des chiffres semblables.

Quels seront les coûts des projets actuels? Pour la Communauté urbaine de Montréal, on nous dit $300 millions en dix ans. Ceci, encore une fois, je pense, est un fait qui a été mentionné. Mais ces $300 millions en dix ans, c'est quoi? Il y a $150 millions à la CUM pour un service d'eau adéquat, traitement primaire, probablement. Lorsqu'il s'agit des eaux usées, cela coûtera au moins $300 millions pour le traitement primaire, probablement. Donc, simplement pour la Communauté urbaine de Montréal, nous avons déjà, sur une période de dix ans, au moins $300 millions en jeu.

M. le Président, il y a l'étude des 43 lacs du Québec, qui a déjà été entreprise ou qui est en voie d'être entreprise. Que prévoit-on pour cela? Les dépenses pour analyser les eaux des 43 lacs seraient, au bas mot, de $200 millions. Pour les analyser, M. le Président, pour savoir quel est l'état, la qualité de ces 43 lacs. Or, on sait qu'au Québec, ce qui manque le moins, ce sont des lacs, peu importe la qualité de leurs eaux.

Programme de la Yamaska. Ce programme m'intéresse d'abord particulièrement, puisque la Yamaska et ses affluents traversent la circonscription de Bagot. Il y a déjà plus de deux ans, j'étais très heureux d'apprendre que la Yamaska devait être un plan pilote pour l'analyse des eaux, pour le drainage, pour ce qu'on pourrait appeler la dépollution des eaux.

Le programme de la Yamaska, d'après un rapport dont je n'ai pas le texte — il n'y a pas eu de coulage, si on me permet l'expression en parlant d'eau, comme il y en a eu récemment au ministère de l'Education, sur ce rapport secret, que je traiterai donc de secret — coûterait, d'après ce que j'entends sur la Yamaska, environ $138 millions. C'est un plan pilote. Et Québec nous dit: Nous avons un budget de $12 millions.

Qui donc va payer tous ces millions et milliards dont je n'ai cessé de parler, avec détails à l'appui, depuis quelques minutes? Comment donc seront financés ces millions? Québec dit: Budget de $12 millions pour l'environnement.

Les municipalités doivent payer une partie. Les règlements gouvernementaux vont lui enlever une partie des taxes municipales prévues à cause de nouvelles délimitations des terrains, en bordure des lacs et des rivières. L'évaluation totale de Saint-Jérôme — j'ai dit tantôt que j'en reparlerais — est de $5 millions. Notre dette s'élève à $10 millions. Je me place dans la peau d'un "Saint-Jérômien", si ça s'appelle ainsi.

Comment voulez-vous que cette ville seule assume la responsabilité de purifier la rivière du Nord, alors que le programme, quant à cette rivière, d'après La Presse du lundi 7 août 1972, est d'au moins $6 millions. C'est déjà la moitié du budget de $12 millions.

C'est là tout le problème de la pollution, de bonnes intentions, d'excellents objectifs, des choses qu'il faut réaliser, mais une loi qui donne au gouvernement un blanc-seing avec un budget insuffisant et le tout quant au solde qui se chiffre à $1 milliard est reporté en manque à gagner, en taxation, en perte pour les individus et les municipalités.

M. Parent, maire de Saint-Jérôme, disait: "C'est là tout le problème de la pollution. Les municipalités prises séparément ou même en communauté sont incapables de prendre les travaux d'épuration à leur charge. La solution réside dans des programmes conjoints dont le coût serait réparti" — pas des prêts, pas des impositions par règlement de telle inspection, de tel genre d'égout, de tel genre d'usine d'épuration d'eau, de tel genre de fosse que l'on appelle septique, etc. — "entre différents niveaux de gouvernements."

Où en sont — en passant — les négociations dans ce contentieux aussi de l'environnement, de la pollution avec le gouvernement fédéral quel qu'il soit?

Le financement est donc le problème que je voulais souligner. Comment le gouvernement du Québec entend-il financer le coût des programmes d'assainissement des eaux avec un budget de $12 millions en 72/73 même s'il ne fait que commencer? Et même s'il se donne 15 ans?

Comment les municipalités sont-elles capables, avec les pertes de revenu occasionnées par les dispositions du projet de loi 34 et les règlements qui les complèteront, de réussir à la fois à continuer la planification d'autres domaines et à atteindre les objectifs visés par le ministre?

Les industries ne semblent pas intéressées par cette lutte, et le député de Rouyn-Noranda en parlait tantôt, et surtout les usines de pâtes et papier. Qu'on se réfère aux déclarations, celle de l'ingénieur André Asselin, par exemple, qui ont été faites à Mont-Rolland par les propriétaires de la compagnie Rolland, qui ont dit : Ce n'est pas notre problème à nous, qui avons fait une industrie québécoise ici à tel endroit, maintenant, de tout réparer à nos frais; nous avons fait des profits, mais nous avons donné des emplois pendant des années à des gens du Québec.

Le ministre d'Etat à l'environnement espère beaucoup, et je le cite ici "de la bonne volonté de l'industrie". Moi aussi, mais je me rends compte de la bonne somme que le particulier, riche ou pauvre, aura à payer. Les municipalités sont assez endettées maintenant, elles ne peuvent pas supporter un fardeau plus lourd.

Et enfin, parce que je pense que mon temps achève — au moins quant au discours — je veux en venir là...

M. LE PRESIDENT: Je pense même qu'il est terminé.

M. BIENVENUE: M. le Président, le temps de parole du député est terminé, mais lorsque nous entendons en cette Chambre un discours positif, parlementaire et bien structuré, on oublie le temps.

M. LE PRESIDENT: Et dans le cas de la présidence, je me retrouvais il y a déjà quelques années à un cours de droit civil, et le temps passait sans que je m'en aperçoive.

M. PAUL: M. le Président, dans les circonstances, dois-je déduire qu'il y a consentement unanime pour que l'honorable député de Bagot complète ses remarques?

M. CARDINAL: M. le Président, je n'abuserai pas; je vais terminer. Je pense, enfin, M. le Président, aux citoyens et je reviens au fond de la question. Le ministre responsable de la qualité de l'Environnement pourrait consulter le ministre des Institutions financières pour se rappeler comment le projet de loi 45 a été longuement étudié, après de multiples consultations. Je me dis que les municipalités, que les citoyens, que les organismes qui existent déjà devraient être consultés. Il faudrait que, dans la loi même, au sujet des règlements, en dehors des comités et conseils qu'on prévoit, on établisse un véritable mécanisme de participation permanente de façon que l'on n'arrive pas avec de bonnes intentions — et l'enfer, parait-il, en est pavé — à des résultats aberrants où l'on n'atteindra pas les objectifs visés et où le coût de la lutte contre la pollution, par ricochet, nous conduira à une augmentation d'impôts, à une hausse de la taxe foncière, à une hausse de la taxe d'eau, à une hausse de la taxe pour le prélèvement des ordures ménagères, etc.

La solution du ministre, telle que présentée, menace le salarié moyen et les municipalités déjà surchargées. Comment le Québec peut-il financer ce que propose la section XI — je sais que je n'ai pas le droit de citer d'article — du projet de loi 34 et tout ce qui découle des dispositions de cette loi et de tous les règlements que nous ne connaissons pas? C'est ce que je voulais démontrer, M. le Président. J'espère que, sans faire d'éclat, sans attaquer le ministre, j'ai pu le convaincre et que, sans reculer, il pourra avancer, mais en tenant compte des suggestions de l'Opposition et en établissant dès maintenant des mécanismes de consultation à tous les niveaux pour que nous sachions où nous allons avec ce projet de loi 34.

Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Aurèle Audet M. AUDET: M. le Président, ce projet de loi est d'une grande importance, lorsque nous considérons toute sa portée, toutes ses implications d'ordre social, industriel et économique. Il est à considérer que ce projet de loi n'arrive certainement pas trop tôt afin de tenter de diminuer, si ce n'est d'enrayer, ce fléau de nos temps moderne qu'est la pollution. Il est à se demander cependant, M. le Président, si ce projet de loi sera réellement à la hauteur pour prévoir tout ce que comporte la protection de l'environnement.

En effet, nous voyons dans ce bill 34 surtout des énoncés de principe, qui sont sans aucun doute des plus acceptables, mais qui ne mentionnent d'aucune façon la mise en application de ce projet de loi vu l'absence de règlementation. En somme, on nous demande d'accepter les principes d'un projet de loi sans savoir aucunement de quelle façon la réglementation de cette loi viendra peut-être bouleverser notre industrie, notre économie, notre vie sociale aux dépens de la supposée sauvegarde de l'environnement.

Pourquoi, M. le Président, le gouvernement ne se déciderait-il pas, une fois pour toutes, à nous présenter des projets de loi complets, c'est-à-dire accompagnés de la réglementation? Ceci permettrait aux représentants de la population de connaître davantage la portée des projets de loi et leurs effets sur l'individu comme sur le petit industriel, peut-être au profit du gros industriel qui, lui, pourrait peut-être surnager plus facilement devant l'assaut de la loi trop astreignante plaçant sur un même pied le petit et le gros industriel devant de semblables obligations.

Ce qui serait encore pire est le fait que cette loi que nous propose le gouvernement entrafne-ra, si nous nous arrêtons quelque peu à l'évaluation de ses coûts, des dépenses phénoménales qui ne pourront jamais être absorbées par le Québec sans avoir encore recours aux emprunts à intérêts qui minent depuis toujours notre économie. Il y aurait lieu, avant d'entreprendre cette lutte contre la pollution, qui s'avère un autre élément d'endettement pour notre province et notre population, de commencer par dépolluer notre système monétaire qui contient le pire degré de pollution jamais connu sur notre planète.

En corrigeant ce système monétaire désuet, le gouvernement se donnerait du même coup un outil des plus efficace pour venir au secours de l'environnement et réellement sauver l'économie en même temps. En d'autres termes, M. le Président, je crois des plus valables les principes de dépollution pour conserver notre environnement et je crois que le ministre responsable fait un travail gigantesque en ce domaine, mais nous devons nous rendre compte du fait qu'il n'en a pas les moyens financiers.

Nous serions très heureux, M. le Président, que le gouvernement, dans d'autres domaines, fasse aussi des efforts d'assainissement. Ici, je veux parler d'une pollution qui est beaucoup

plus grave et néfaste, la pollution de l'esprit, de notre jeunesse, de notre population par nos CEGEP et nos maisons étatisées d'éducation ainsi que la libération de l'obscénité qui pollue nos moeurs au Québec.

A l'exemple de cette politique du ministre responsable de la qualité de l'environnement, j'invite les autres ministres...

M. LE PRESIDENT (Lafrance): Sur un point de règlement, le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON : Je veux bien admettre que le député d'Abitibi-Ouest peut avoir toutes les opinions sur toutes les matières litigieuses ou non dans le Québec, c'est parfaitement son droit; s'il veut les conserver également. S'il peut se ramasser tout seul à les avoir, c'est aussi son droit. M. le Président, le projet de loi 34 et, jusqu'à maintenant, le débat se sont limités à la pollution telle que nous l'entendons dans le sens économique du mot. Malgré tout le bon vouloir que je peux avoir à l'égard du député d'Abitibi-Ouest, allonger inutilement le débat en faisant des allusions en dehors du projet de loi viole le règlement de la Chambre.

M. AUDET: M. le Président, je ne prétends pas utiliser tout le temps de parole que j'avais et je crois que je peux faire un petit crochet ici, même en dépit des observations du député de Saint-Jacques. Le gouvernement nous présente aujourd'hui ce projet de loi pour prévoir l'assainissement de l'environnement. Je crois réellement que c'est un voile dont on veut nous couvrir les yeux pour cacher tout ce qu'il y a de mauvais dans la politique gouvernementale aux autres paliers.

Je crois réellement que la protection de l'environnement est une bonne chose et je félicite ici le ministre pour son travail mais je crois aussi que nous devrions nous arrêter à tout ce qu'il y a de polluant dans les politiques gouvernementales actuellement.

Je me fais un plaisir aujourd'hui de demander aux autres ministres de dépolluer aussi leur ministère, soit les ministères de l'Education, des Finances, des Affaires culturelles et de la Justice; qu'ils fassent un ménage dans chacun de leur domaine pour repousser cette pollution qui est, dans bien des cas, beaucoup plus grave, plus profonde et dévastatrice que la pollution de l'environnement.

M. le Président, cette invitation, je la fais au gouvernement. J'invite le ministre à continuer son travail sur l'environnement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre d'Etat à la Voirie.

M. Raymond Mailloux

M. MAILLOUX: M. le Président, mon exposé sera assez bref. Je sais qu'en deuxième lecture il est question de principe. J'ai constaté, cependant, que dans les interventions précédentes, celui qui a occupé le siège du président de la Chambre a été assez large. Ce n'est pas mon intention de prolonger indûment ce débat. Je voudrais traiter de trois points particuliers dans le champ d'activité du ministère de la Voirie et qui ont des relations directes avec le sujet dont il est question dans le projet de loi 34.

Le ministère de la Voirie constate depuis quelques années, en exécutant ses nombreux travaux dans tout le Québec, que de nombreuses usines de béton bitumineux, dont les plans sont assez vieillots, contaminent de façon assez impressionnante les couches d'air par la pollution qui se dégage des cheminées de ces usines où l'on constate que des huiles très lourdes sont chauffées à blanc. Je pense que tous les députés de cette Chambre ont été à même, dans de nombreuses régions, de constater les inconvénients que cela entraîne à la protection de l'environnement.

Qu'il me suffise de rappeler des exemples particuliers qui se situent principalement dans la région que je représente dans cette Chambre, Charlevoix. C'est une région montagneuse où il y a une quantité de lacs propres à la pêche sportive. Dans les deux dernières années nous avons malheureusement constaté, devant les représentations faites par de nombreux clubs sportifs, que l'huile qui se dégageait de ces cheminées se rendait aussi loin qu'un mille, poussée par les vents qui dirigeaient la fumée. Je me rappelle que tout dernièrement, dans la région de Saint-Siméon, près de la traverse Sainte-Catherine, le ministère de la Voirie devait constater qu'une usine avait laissé une telle contamination que dans un lac situé à un mille, par un vent tout à fait particulier, ceux qui s'adonnaient au sport de la pêche voyaient leur ligne à pêche enduite d'huile.

La faune aquatique, dans de telles conditions, ne mourra peut-être pas, mais il est indiscutable qu'elle subit des torts considérables. Dans des conversations précédentes entre les fonctionnaires du ministère et les principaux propriétaires de ces usines-là de même qu'avec l'Association des entrepreneurs de routes, nous avons amorcé des discussions qui permettront, je l'espère, au ministère de la Voirie d'émettre des directives qui fassent que, d'ici l'année 1973, avant que les travaux reprennent dans ce secteur d'activité, l'on impose des conditions ou certains équipements qui seraient ajoutés à toutes les usines de telle sorte que l'ensemble de nos villes et de nos villages ne soit pas pollué davantage, tel que cela s'est trop souvent présenté.

En obligeant l'industrie privée à faire des dépenses assez importantes, dépenses qui semblent se situer dans les $25,000 à chaque usine, il est fort possible que le ministère de la Voirie soit obligé de réviser les prix qui sont consentis à ces entrepreneurs. Mais je pense qu'une dépense aussi minime, pour la protection de l'environnement, est assez bien acceptée. Je pense qu'elle mérite d'être faite.

II y a un deuxième facteur dont s'occupe également le ministère de la Voirie. Peut-être que les honorables députés pourraient me dire qu'il y a déjà eu un projet de loi déposé à cet effet. Je parle ici des cimetières d'automobiles. Les cimetières d'automobiles, souventefois, donnent un mauvais aspect à nos régions touristiques aux abords des routes. Ces premiers cas sont déplorables. Et que dire de ceux qui sur des terrains, aux abords des cours d'eau polluent les rivières?

Il n'y a pas tellement longtemps, dans mon propre comté, pour citer un exemple, la rivière Malbaie était considérée comme une rivière à saumons, la rivière du Gouffre, à Baie-Saint-Paul, était aussi considérée comme rivière à saumons. Il s'y prenait récemment des saumons aussi gros que 30 livres.

Je pense que cela mérite d'être protégé. On constate, malheureusement, que des individus, non soucieux de la protection de l'environnement, déversent des carcasses d'automobiles sur les berges des rivières. Il n'est pas besoin de faire un dessin devant les membres de cette Assemblée pour dire que, si cela dépare les abords des rivières, l'huile qui se dégage des carcasses pendant de longs mois, pour ne pas dire pendant des années, crée un tel problème que la vie aquatique, dans nos rivières, est détruite. Le ministère devra accentuer son action de manière que disparaissent ces déchets dont tout le monde se plaint, et avec raison.

Je constatais récemment que le ministère approuvait des sommes supplémentaires pour ceux qui ont des presses pour détruire une telle ferraille. Ainsi, un peu partout dans la province l'action sera plus directe et les visiteurs qui viennent dans la province de Québec n'auront pas à regarder tous les cimetières d'automobiles sur nos routes. Dans nos rivières, nous donnerons une meilleure protection à la faune aquatique.

Il y a un troisième problème qui attire l'attention du ministère de la Voirie, problème dont on a entendu parler abondamment au cours de l'été dernier. Celui qui vous a précédé tantôt à ce siège, l'honorable député de Terrebonne, aurait peut-être pu en dire davantage. Je pense que tout le monde a vu, dans des coupures de journaux, ce qui s'est produit à Val-David. Le député de Bagot parlait tantôt de l'Estérel. A Val-David, on a vu des entrepreneurs qui doivent exécuter des travaux pour le ministère de la Voirie s'approvisionner d'agrégats dans des endroits qui étaient situés presque au centre du village.

Chacun des membres de cette Chambre a pu constater que les entrepreneurs, parfois, pour éviter des coûts supplémentaires, cherchent à s'approvisionner dans les endroits où il y a le moins de transport à payer. Je pense, sans vouloir parler d'une politique ministérielle, que le ministère de la Voirie devra, dans un avenir très prochain, pour tous les agrégats fournis dont les entrepreneurs auront besoin, peut-être payer davantage pour le millage parcouru pour le transport de ces matières premières. Il faudra peut-être, pour une meilleure protection de l'environnement, assumer cette tâche nouvelle pour garder les abords des routes dans le meilleur état possible.

Lors des rencontres récentes avec les sous-ministres et les hauts fonctionnaires du ministère, il a été fortement question, afin d'éviter des transports trop éloignés pour les travaux que le ministère doit faire exécuter, si cela devenait nécessaire, de voter des sommes dans le but de réensemencer tous les endroits où le ministère doit s'approvisionner. Je pense, en regardant une quantité de routes publiques où l'on voit des gravières laissées dans un état de délabrement, qu'il serait avantageux que l'on dépense quelques dizaines de milliers de dollars obligeant les entrepreneurs, pour remplacer les agrégats qui disparaissent, à réensemencer les lieux, de telle sorte que l'ensemble des visiteurs qui parcourent la province n'aient pas toujours dans la vue des gravières comme chacun des membres de cette Chambre a été à même d'en voir. Cette vue, aux abords des routes, est presque une honte dans bien des cas.

Alors, si le ministère doit engager des sommes supplémentaires dans le but de protéger l'environnement, je pense que ce serait une dépense profitable de fonds publics et qui permettrait que notre industrie touristique en souffre moins. Si le ministère de la Voirie doit en écoper, chacun en bénéficiera.

M. le Président, c'était simplement quelques commentaires, à bâtons rompus, que je voulais apporter sur la présentation du projet de loi 34. Je suis de ceux qui croient que, malgré que les ministères devront dépenser des sommes plus importantes dans le but de protéger l'environnement et de combattre davantage la pollution, c'est devenu une urgente nécessité.

M. LOUBIER: J'avais une question à poser au nouveau ministre, à toutes fins pratiques, responsable à la Voirie. Je profiterai de l'occasion pour le féliciter publiquement de sa nomination. Je lisais les commentaires du journaliste de la Presse, M. Lesage, à l'effet que le nouveau ministre d'Etat était peut-être un des députés les plus modestes et les plus efficaces de cette Chambre. Sans lui faire de compliments à outrance, je dirais, en tout cas, qu'il mérite au moins le respect de tous les députés de cette Chambre pour son travail et son efficacité.

M. le Président, la question que je voulais poser au ministre responsable de la Voirie est la suivante: Est-ce que le ministère de la Voirie a l'intention d'appliquer d'une façon assez intégrale la loi qui avait été adoptée en 1964 et 1965, concernant les cimetières d'automobiles longeant les routes et les cours de rebuts de métaux ou encore les terrains qui étaient remplis de déchets? On avait, à ce moment-là, préconisé que, sur une période de cinq ans, les propriétaires de ces cimetières d'automobiles devaient déménager ailleurs ces débris ou ces carcasses d'automobiles, à 500 pieds du bord de

la route, et que, deuxièmement, sur une période de dix ans, je pense, tout cela devait disparaître complètement mais qu'à court terme, ces cimetières d'automobiles ou ces cours de rebuts de toutes sortes devaient être entourés d'une clôture assez haute pour éviter, à toutes fins pratiques, qu'on voie ces objets.

Le ministère de la Voirie et le ministre ont-ils l'intention de faire appliquer intégralement cette loi qui ne semble pas être comprise ou appliquée depuis plusieurs années?

M. MAILLOUX: M. le Président, si vous me le permettez, je voudrais d'abord remercier l'honorable chef de l'Opposition des félicitations qu'il a eues à mon endroit, de même que le député de Portneuf, qui m'en avait offert précédemment. Nous fêterons, le député de Bellechasse et moi-même, notre dixième anniversaire en politique, je pense, dans quatre ou cinq jours.

M. LOUBIER: C'est vrai.

M. MAILLOUX: C'est un long moment en politique.

M. PAUL: Le 14 novembre.

M. MAILLOUX: Je sais que les titres, en politique, c'est toujours très relatif. Alors, le moins possible de compliments parce que probablement que les fleurs auront des épines par la suite.

Pour répondre à la question de l'honorable chef de l'Opposition, c'est qu'effectivement, le ministère de la Voirie entend accentuer de façon très directe ce qui est déjà entrepris. J'ai tantôt dit que, récemment, plusieurs dizaines de milliers de dollars avaient été affectés à des compagnies possédant les presses nécessaires. Si l'honorable chef de l'Opposition était passé dans une région qui va vers Sainte-Anne-de-Beaupré, je sais que des cours, aux abords des routes, sont actuellement à se nettoyer.

Dans les conversations avec les officiers supérieurs du ministère, nous tentons l'impossible pour que d'autres entreprises puissent agir de la même façon. Il y a cependant des problèmes un peu compliqués, soit le prix que peut recevoir pour la vente des rebuts à certaines compagnies, comme Sidbec ou d'autres. Il y a des négociations en cours dans le but, évidemment, que le rendement de ces presses puisse être meilleur qu'il ne l'est présentement. Mais je voudrais l'assurer que le ministère de la Voirie est bien conscient que l'action entreprise par le précédent gouvernement et par le nôtre fera assurément le nécessaire pour que disparaissent ces cimetières que l'on déplore partout, aux abords des routes.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis, sur une question.

M. ROY (Lévis): Si l'honorable ministre d'Etat me le permet, j'aurais une question à lui poser. Est-ce qu'il pourrait nous dire s'il y aura une loi rigide? Vous savez qu'il y a des vendeurs d'automobiles neuves qui prennent de vieilles automobiles en retour. J'ai des problèmes dans mon comté et il y en a dans d'autres. Ils envoient ça en arrière dans la cour et ils sont pénalisés de $100 par jour pour de vieilles automobiles qui sont "scrapées".

Est-ce que le ministre va avoir une directive à donner à ces gens pour qu'ils sachent s'ils peuvent vendre une automobile de telle année ou non? Le gars pourra alors l'envoyer au rebut ou la garder pour essayer de la revendre.

Est-ce que vous avez une directive à nous donner à ce sujet?

M. MAILLOUX: Je ne sais pas si le règlement me le permet, mais disons que le ministre en titre sera ici prochainement et il aura l'occasion de préciser davantage l'action du ministère de la Voirie.

M. PAUL: Je ferais remarquer à l'honorable ministre d'Etat à la Voirie que le député de Lévis est contre les cartels de "minounes".

M. ROY (Lévis): Si le député de Lévis est contre les cartels, c'est parce qu'il veut donner l'avantage à l'honorable député de Bellechasse d'acheter les résidus pour les revendre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Richmond.

M. Yvon Brochu

M. BROCHU: Très brièvement j'aimerais émettre une opinion sur la deuxième lecture de ce projet de loi que je considère tout à fait important. Dans son ensemble, dans sa teneur, le projet de loi n'est pas essentiellement nouveau puisque, d'après l'étude que j'en ai faite, il s'agit surtout d'une restructuration, d'un regroupement de services existants déjà au niveau de différents ministères pour centraliser les décisions, afin de pouvoir mettre de l'avant certaines politiques en ce qui concerne l'environnement.

On peut dire, je pense, dans l'ensemble qu'il s'agit d'un premier pas vers une action qui pourra être entreprise en ce sens. La protection de l'environnement on en parle énormément, comme on parle énormément aussi de pollution. On en entend parler souvent à la radio, à la télévision. On en parle souvent dans les journaux. Je pense que ça devient des sujets de conversation courants.

Ce qui est plus grave peut-être, c'est que l'on parle d'environnement aussi facilement que l'on bavarde de la pluie et du beau temps.

Ce n'est trop souvent qu'un flot de paroles, mais il y a bien peu de solutions réelles, à mon sens, pour résoudre la crise du milieu humain, celle que l'on connaît actuellement. D'abord, c'est une question de survie. On peut se

demander à un certain moment si, avec des politiques précises mises de l'avant actuellement au niveau de l'action, non pas au niveau des principes, on pourrait réparer la situation de l'écologie en général dans un avenir assez rapproché.

Je pense que c'est un problème majeur, assez grave et qui a une ampleur assez considérable. Ce ne sont pas des paroles en l'air, comme je le disais tout à l'heure, qui nettoieront l'atmosphère. Les gens dans l'ensemble commencent à se lasser d'entendre parler de ce sujet. Nous devrons, je pense, aller plus loin. Dans l'ensemble, sur le principe de la loi, je suis d'accord que c'est un pas de fait mais nous devrons aller plus loin et remonter surtout, dans les études que nous allons faire, aux causes réelles de pollution, que ce soit la pollution de l'eau, la pollution de l'air ou les différentes autres sortes de pollution qui peuvent exister.

Une fois que les causes auront été bien définies, je pense que la seule solution, quelle qu'elle soit en détail, sera d'agir surtout, et j'y tiens. Parce que, comme je le disais, on en a énormément parlé. Il y a eu des études, des recherches faites à différents paliers dans différentes circonstances. Je pense que de ce côté, nous avons suffisamment de renseignements, nous avons des études et des recherches de faites et ce serait tourner en rond que de vouloir encore des mécanismes, des structures pour faire des études et des recherches alors qu'on n'aura pas osé entreprendre une action réelle pour essayer de contrer les effets néfastes de la pollution à différents niveaux.

Pour sauver notre demeure, en fait parce que notre demeure, c'est l'écologie, notre environnement, nous devons d'abord comprendre comment elle fonctionne en tant que machine vivante, à interactions multiples et à interconnections multiples. Rien ne vit par soi-même, aucune créature ne se suffit à elle-même et les actions de chaque individu affectent les autres. Une des lois fondamentales de l'écologie, énoncées par le Dr Barry Commaner, est que tout est relié à tout. C'est pour ça que j'ai insisté au point de départ pour mentionner que c'était un problème d'ampleur générale, un problème qui a énormément de conséquences mais un problème qui n'est pas simple, un problème énormément complexe.

A ce sujet, j'aimerais mentionner certaines lacunes qui existent dans la structuration même des ministères et dans leur interaction.

Le problème n'étant pas simple, le ministère de l'Environnement aura absolument besoin d'être appuyé par d'autres ministères dans une action entreprise en commun si l'on veut vraiment arriver à changer quelque chose dans les faits.

Donc, le problème n'est pas simple et la solution n'est pas simple, mais elle se situe d'abord au plan de l'action. Je prends simplement un exemple pour illustrer qu'il devrait y avoir une interrelation et surtout une interac- tion des ministères pour contrer les effets néfastes de la pollution à différents paliers. Simplement, par exemple, au niveau de la faune, on aurait besoin d'énormément plus d'agents de conservation. Sur ça, je pense qu'on a plusieurs rapports. J'en recevais encore récemment des gens de ma région, des Cantons de l'Est. On y note une diminution marquée de la faune et également une atteinte portée à la flore par la pollution.

On devrait dans ce cas avoir une action connexe, en mettant suffisamment d'agents de protection de la faune pour faire de la prévention dans les domaines qui sont encore en bon état si vous voulez, pour les rares domaines qui demeurent encore intacts ou quasiment intacts. Ainsi, on pourrait favoriser le développement d'une flore normale au Québec, qui est une condition essentielle de revie pour l'entourage puisqu'il s'agit de photosynthèse et de tout le mécanisme de purification de l'air par les plages et par la verdure. On pourrait, dans une action commune, arriver à mettre de l'avant des politiques qui, dans le champ d'activité des différents ministères qui sont concernés, soient de nature vraiment à apporter des correctifs.

A présent, il faudrait aller plus loin en remontant vraiment aux causes. Lorsque l'on voit, par exemple, l'étude de certaines rivières, qui se fait par les fonctionnaires actuellement pour maintenir un certain degré qu'on appelle acceptable de pollution de l'eau, entre autres, puisqu'on parle de celle-là, je pense qu'on joue quand même encore au niveau d'un effet, pour dire: On va essayer de normaliser un certain degré acceptable de pollution, mais on ne va pas tellement plus loin. Les amendes imposées à ce niveau-là sont vraiment désuètes, de sorte que les grandes entreprises peuvent entrer ces amendes dans leur fonds de roulement normal ou dans leur coût d'exploitation. Cela devient pour eux, en fait, un jeu d'enfant.

Dans la région de Windsor Mills, entre autres, où on a une usine de papier assez importante, j'ai vérifié cela à la demande de certains commettants de cette région qui m'avaient invité à me rendre sur place et à voir de moi-même ce qui se passait là. Ce sont des gens qui travaillent à cette compagnie qui m'ont invité. J'ai pu constater moi-même que, toute la journée, 24 heures durant, sept jours par semaine, 365 jours par année, on a d'immenses tuyaux de 20, 24 et même 36 pouces qui déversent continuellement dans la Saint-François de l'acide chaud qui détruit toute vie et qui laisse les bords de la rivière dans un état pitoyable.

A côté de cela, vous avez aussi tous les égouts de la ville de Windsor qui se déversent dans la rivière Saint-François qui était autrefois un petit paradis dans la région, où il se faisait énormément de pêche, etc.

Même si on a des gars qui calculent le degré acceptable, c'est encore relatif, on n'a pas encore touché la cause, on joue encore au

niveau de l'effet. Même de ce côté-là, vos inspecteurs, M. le ministre, ne sont pas toujours sur place. J'ai rencontré, là-bas, des employés, des contremaîtres qui ont témoigné eux-mêmes du fait que les normes n'étaient pratiquement jamais respectées. Lorsqu'on avait un surplus de production, on se dépêchait de déverser les déchets le plus possible dans la rivière pour maintenir la production à son niveau, quelles que soient les conséquences, la pollution supplémentaire de la rivière.

Je terminerai là mes remarques, M. le Président, parce que je ne pourrai pas continuer mon intervention ce soir. J'aimerais qu'on remonte aux causes de ce côté-là et qu'on fasse vraiment une action commune avec les autres ministères. En d'autres mots, on a suffisamment parlé de la pollution, on connaît les principes, on connaît les agents polluants, il s'agit maintenant de passer à l'action. Que le ministère se dote d'une structure, d'accord, mais que ça ne reste pas une structure, des comités qui vont mettre des rapports sur des tablettes. Qu'on puisse vraiment et réellement mettre des politiques en action pour contrer les causes, réparer les effets mais surtout s'attaquer aux causes directes du mal. Je pense que c'est une question de survie, et nous n'avons pas 20 ans ou 25 ans encore pour réparer la situation.

Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: Je constate qu'il est six heures, M. le Président, puis-je demander la suspension du débat?

M. LE PRESIDENT: Messieurs, j'ai reçu deux avis, des demandes de renseignements supplémentaires, en vertu de l'article 179, pour qu'on puisse discuter ce soir, avant l'ajournement, de certains problèmes, certains députés invoquant qu'ils ne sont pas satisfaits des réponses apportées à leurs questions.

Maintenant, j'ai un problème quant à une demande du député de Maisonneuve. Cela concerne les décrets du domaine de l'alimentation et du permis de travail pour les employés non spécialisés dans la construction. Tout le monde comprend que l'honorable ministre du Travail est occupé à d'autres problèmes aujourd'hui. Je peux difficilement le convoquer pour ce soir.

M. LAURIN: On vient de recevoir son appel. Il est justement bien mal pris.

UNE VOIX: II a un adjoint parlementaire.

M. LE PRESIDENT: Non, on m'informe qu'il n'y a pas d'adjoint parlementaire au ministère du Travail.

M. CHARRON: Le premier ministre a tellement la science infuse...

M. BOURASSA: M. le Président, je dois partir pour Montréal. Je rencontre même des gens du comté du député de Saint-Jacques demain...

M. CHARRON: Occupez-vous en, surtout les assistés sociaux.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on pourrait, avec votre permission, remettre ce débat possiblement à mardi soir?

M. LAURIN: Si le premier ministre ne peut pas répondre aux questions, il serait peut-être mieux d'attendre...

M. BOURASSA: Ce n'est pas parce que je ne peux pas répondre, c'est parce que je dois être à Montréal ce soir. Je rencontre le premier ministre de l'Ontario demain, comme c'est connu. Je dois rencontrer...

M. PAUL: Vous allez vous enrichir demain...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'honorable député de Portneuf est prêt à procéder, ce soir, sur la demande qu'il a faite concernant le haut-commissariat?

M. DROLET: Je suis prêt.

M. LE PRESIDENT: L'adjoint parlementaire est aussi prêt à procéder. Je dois, en vertu du règlement, annoncer avant six heures quels seront les minidébats qui auront lieu ce soir. Il y en aura un sur la question de l'honorable député de Portneuf.

L'assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

Reprise de la séance à 20 h 45

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs !

L'honorable député de Dorchester.

M. Florian Guay

M. GUAY: M. le Président, bien sûr qu'il me fait plaisir d'intervenir sur un projet de loi aussi important que celui de la qualité de l'environnement. Etant donné que la pollution devient un problème mondial, je n'étais pas pour laisser passer l'occasion sans ajouter mon grain de sel.

Par ce projet de loi no 34, le député de D'Arcy-McGee, qui devient en quelque sorte le premier environnementaliste du Québec, désire que la Chambre lui accorde des pouvoirs par voie législative et veut faire adopter des règlements pour améliorer la qualité de l'environnement.

M. le Président, ayant eu l'occasion d'intervenir sur une motion de renvoi à six mois, je n'ai pas l'intention de répéter les mêmes arguments. En voyant un ministre proposer une loi-cadre sans outils, sans pouvoirs, c'est un peu comme si ce même ministre demandait à ses membres de la Chambre de monter dans une voiture luxueuse dont toutes les commandes seraient à l'intérieur: sous le capot, il y aurait un moteur de 400 chevaux-vapeur, mais le réservoir serait vide d'essence. J'ai eu l'occasion de vivre cette expérience plutôt mécanique. Le résultat a été le même que celui que nous connaîtrons dans l'application de cette loi, si le pouvoir économique n'y est pas.

J'ai été en faveur de la motion de renvoi à six mois, qui avait pour effet de donner le temps au ministre d'Etat responsable de la qualité de l'Environnement de faire connaître aux membres de l'Assemblée nationale de quelle façon, par quels moyens, avec quels outils il tenterait de faire appliquer sa législation.

Même si le projet de loi no 34 lui donne des pouvoirs extraordinaires, des pouvoirs énormes — je qualifie même son projet de loi d'avoir, dans certains secteurs, des dents qui ont une longueur de quatre pouces — s'il n'a absolument rien pour appuyer...

UNE VOIX: Les dents de Camille!

M. GUAY: ... son projet de loi, si aucune mesure économique, si aucune transformation économique n'intervient au moment de l'application, le ministre, c'est bien de valeur, fait fausse route.

Si on regarde les pouvoirs que le ministre se donne, dans son projet de loi, ce sont des pouvoirs assez grands. Bien sûr, le ministre me répondra que s'il n'a pas de pouvoirs, il ne pourra pas régler une situation aussi alarmante et aussi désastreuse. Mais il y a quand même des organismes, dans le passé, qui possédaient certains pouvoirs. Le pouvoir de protéger, d'amé- liorer l'environnement existe actuellement. On n'a qu'à jeter un coup d'oeil sur un article qui a paru dans un quotidien bien connu, au mois d'août 1970, pour se rendre compte que les pouvoirs que le ministre se donne sont des pouvoirs accrus mais qui ne donneront pas de meilleurs résultats que les organismes qui étaient en place, qui n'ont pas réussi, faute de budgets.

Je pourrais citer, M. le Président, comme on le dit ici: "A proprement parler, la Régie des eaux ne dispose d'aucun budget d'opération". Comment voulez-vous qu'un organisme, même avec un pouvoir de contrôle accru, s'il n'a pas d'argent, puisse fonctionner de façon normale, de façon logique, de façon, je dirais même, intéressante.

M. le Président, ce n'est pas là une contradiction, bien sûr, mais cela prouve que même la meilleure législation, la meilleure loi devient impossible à appliquer, surtout dans un domaine comme celui de l'environnement, si ses politiques ne sont pas appuyées par des bonnes mesures économiques,

M. le Président, dans l'exécution du travail à faire pour améliorer la qualité de l'environnement, je dis que c'est un défi à relever. C'est même le défi du siècle, qui ne peut être, cependant, relevé sans être accompagné d'une réforme économique en profondeur.

M. le Président, nous le disons et nous le répétons, le temps s'est chargé de prouver aux législateurs que, sans une réforme économique, la législation n'était pas efficace. Le temps se chargera également de prouver aux même législateurs de cette Chambre que le beau programme, la belle loi, avec un beau principe de la protection de l'environnement, ne pourra être efficace si elle n'est pas appuyée, soutenue, par des bonnes mesures économiques.

M. le Président, j'ai parlé tantôt de contradictions. J'y arrive.

Au moment où un ministre se donne des pouvoirs, ou un ministre a préparé un projet de loi, que je dirais quand même bien pensé —peut-être mal mesuré, mais bien pensé — au moment où ce ministre consacrera des crédits quand même assez élevés pour améliorer la qualité de l'environnement et, comme faisant partie de cet environnement, la qualité de l'eau, je commence à me poser certaines questions sur des contradictions flagrantes.

Pendant que le ministre veut redonner à l'eau sa qualité naturelle, sa qualité première voulue par la nature — il nous dit qu'il tendra à rendre l'eau pure, claire, limpide, propre — un autre ministre dans un autre ministère s'apprête celui-là — qu'on pourrait qualifier de pollueur — à se faire donner par la Chambre des pouvoirs pour ajouter à l'eau un poison qui est trois fois —ou peut-être davantage — plus virulent que l'arsenic.

Je ne serais même pas surpris que l'environ-nementaliste qu'est le député de D'Arcy-McGee appuie cette loi qui est tout à fait opposée au principe de son projet de loi no 34.

Quand on parle de pollution, on touche un très grand secteur. Quand on parle de la qualité de l'environnement, on se rend bien compte que c'est un problème mondial. Ce n'est pas un problème régional, municipal; c'est un problème dont tous les citoyens sont responsables. Ils doivent participer à l'amélioration de cet environnement.

Donner des pouvoirs accrus à un ministre ne règle absolument rien dans cette situation. On pourrait ajouter à la pollution de l'air, de l'eau, du silence, une quantité énorme de genres de pollution. Celle qui est de plus en plus connue et qui crée des problèmes de plus en plus importants après la pollution de l'air et de l'eau, c'est la pollution alimentaire.

Je serais probablement hors d'ordre en y touchant, mais je pense que dans cette notion que le législateur, que la société doivent détenir les instruments qui doivent améliorer l'environnement, il ne faudrait pas oublier la pollution alimentaire. Dans les temps modernes, on parle même déjà de réduire ou de remplacer tous les aliments par des produits chimiques et de préférence concentrés sur une seule tablette.

C'est peut-être là un problème qui semble nouveau. Il n'est, à mon sens, pas plus nouveau que le problème de l'environnement ou de la pollution de l'eau ou de l'air.

Il faudra, tôt ou tard, envisager des mesures avant que la situation devienne trop difficile à corriger.

M. le Président, évidemment, il y a des mesures qui sont applicables et c'est urgent. On voit des titres d'articles de journaux aussi forts, aussi durs que, par exemple: L'eau de la province de Québec est empoisonnée. Il s'agit de regarder pour constater. On dit: La pollution est devenue le problème moderne. Egalement: La pollution des eaux dans les Cantons de l'Est. Il faut réagir vite car le problème est sérieux. On voit des mouvements antipollution qui sont de plus en plus nombreux. Il n'y a pas de solution toute faite pour un problème d'une telle envergure. Cependant, il y a des régions qui sont prioritaires.

M. le Président, en terminant, je répète au ministre que sa loi, si elle n'est pas accompagnée de mesures économiques bien pensées, bien définies, fera comme bien d'autres lois, elle dormira sur des tablettes et n'aura aucun effet sur l'environnement. Cependant, nous formulons l'espoir qu'avec la volonté de tous les membres d'une société, avec une loi bien soutenue, possible d'application, avec des mesures économiques suffisantes il y aura quand même quelque chose à faire.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouville.

M. Marcel Ostiguy

M. OSTIGUY: M. le Président, devant cet important projet de loi no 34, Loi de la qualité de l'environnement, je me devais en tant que député d'un comté qui est entouré de trois cours d'eau, soit les rivières Yamaska, des Hurons et Richelieu, en plus des trois montagnes, les monts Saint-Hilaire, Yamaska et Rougemont, d'intervenir pour l'appuyer.

Cette loi comporte différents sujets mais, en ce qui concerne le comté que j'ai l'honneur de représenter, c'est le problème de l'eau qui retient mon attention.

Je pense que le ministre de l'Environnement avait commandé, il y a déjà un an, une étude très sérieuse sur l'assainissement des eaux de la rivière des Hurons qui se déverse dans la rivière Richelieu.

M. PAUL: J'invoque le règlement. J'écoute avec beaucoup d'intérêt mon collègue le député de Rouville et je me demande en vertu de quelles dispositions il peut qualifier le député de D'Arcy-McGee de ministre de l'Environnement. Il ne peut pas présumer que la loi sera adoptée en deuxième lecture et, par la suite, surtout que l'article 118 de son projet de loi recevra le consentement même de la majorité de cette Chambre.

M. LE PRESIDENT: Je connais les idées avant-gardistes du député de Rouville, mais pour le moment il s'agit du député de D'Arcy-McGee.

M. OSTIGUY: M. le Président, je suis entièrement d'accord avec mon collègue le député de Maskinongé, mais je vois dans le député de D'Arcy-McGee un homme qui a fait un travail énorme dans le domaine de l'environnement, de l'éducation, et pour reprendre de vos paroles, M. le Président, comme je suis réellement un homme avant-gardiste, je vois déjà le docteur Goldbloom comme ministre en titre de la qualité de l'environnement.

De toute façon, en 1972, chaque municipalité, chaque ville de notre belle province connaît des problèmes de pollution, soit de pollution des eaux, ou soit de pollution par les déchets. Et nul, peut-être, plus que celui qui vous parle en ce moment, ne rencontre de difficultés puisque déjà depuis six mois un dépotoir à ciel ouvert a dû être fermé dans le comté de Rouville. Il a dû être fermé parce que le propriétaire de ce dépotoir-là ne se conformait pas aux normes et aux exigences du ministère, c'est-à-dire qu'au lieu de faire l'enfouissement sanitaire tel qu'il était demandé par les hauts fonctionnaires du ministère de l'environnement, il y mettait tout simplement le feu et polluait continuellement des villes telles que Mont-Saint-Hilaire, Otterburn Park, Beloeil et McMas-terville.

C'est le propriétaire du dépotoir qui, par ces moyens de non-conformité, s'est vu forcé de fermer, s'est fait enlever le permis qu'il détenait pour l'exploitation d'un dépotoir. Nous sommes aujourd'hui devant une situation telle que

nous avons des villes qui doivent débourser des sommes allant jusqu'à $1,000 par semaine de plus afin de pouvoir se départir de leurs déchets. Quand je voyais un de nos collègues de l'Assemblée nationale demander que le projet de loi soit reporté à six mois, je me disais qu'il ne fallait pas le reporter à six mois, car nous sommes au moins six ans en retard. Nous devons remercier le député de D'Arcy-McGee, qui n'a pas eu peur de parcourir la province de Québec pour dire aux gens ce qu'était le problème de la pollution et des déchets chez nous.

J'espère que le projet de loi, comme le disait le député de Dorchester tantôt, aura les dents nécessaires afin que chaque municipalité, chaque ville et chaque propriétaire se conforment aux normes et exigences du ministère. Nous sommes rendus à un stade où personne ne veut avoir les déchets de personne; ça, c'est rendu grave, en 1972. Il est clair dans mon esprit que le projet de loi devra certainement subir des amendements, mais je pense qu'au moins le gouvernement actuel a eu le courage de former ce ministère de l'Environnement. Le Dr Gold-bloom, par son courage, a su démontrer à la population qu'il était nécessaire de collaborer pour que la qualité de l'environnement soit conservée dans notre belle province. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, vous me permettrez d'intervenir sur un projet de loi qui me parait l'un des plus importants qu'on ait eu à discuter à l'Assemblée nationale et auquel, d'ailleurs, nous donnerons notre appui, même s'il ne nous paraît pas parfait, au contraire. Le député de Lafontaine et le député de Bourget ont eu l'occasion de démontrer au ministre les faiblesses du projet de loi.

Cependant, pour la première fois, nous avons au Québec un véritable projet de loi qui nous parle au moins de la protection de l'environnement. Pour moi en tout cas, c'est un pas extrêmement important. Parce que le moindre petit pas qui peut être fait en ce sens depuis quelque temps me paraît important. Comme on le disait, hier, depuis passablement d'années ici au Québec, on parle de protection de l'environnement, mais on ne s'en est jamais occupé. Pourquoi? Parce que le Québec a l'avantage d'avoir un territoire immense, d'avoir un territoire extrêmement vaste et qui ne subit pas les conséquences de la pollution comme ailleurs.

Chez nous, nous avons la possibilité de parler de la pêche et de la trappe. Mais, dans d'autres pays, on n'a même pas cette possibilité, parce que cela n'existe pas. C'est devenu un luxe, pour d'autres pays, de pouvoir pêcher ou trapper. Chez nous, c'est une chose qui nous reste encore. C'est une chose, si on veut véritablement s'en préoccuper, qui peut être un apport économique extrêmement important. J'ai déjà eu l'occasion de souligner cela à la commission du tourisme, de la chasse et de la pêche. Nous vivons dans un pays qui est très vaste et qui a toutes les ressources nécessaires pour attirer le touriste.

Nous sommes à proximité des Etats-Unis, surtout de l'Est des Etats-Unis, qui représente 75 millions d'habitants. Bien souvent, nous nous disons: Le fait que nous soyons 6 millions d'habitants sur notre territoire est un désavantage. Je dis non. Au contraire, c'est un avantage extrêmement important. D'ici quelques années, la faune deviendra chez nous un apport touristique très important. Malheureusement, on ne s'en préoccupe pas. Dans la plupart des pays il n'est guère question de protéger la faune terrestre et aquatique, par exemple, pour favoriser la chasse et la pêche. Ce sont des activités de luxe. Chez nous, ce sont des activités dont on peut profiter. Ce sont des activités qui peuvent nous permettre de développer considérablement le tourisme.

Mais, nous n'en avons pas conscience du tout. Je dis que le problème de la pollution n'est pas une question de droit. On a dit hier que le projet de loi no 34 est surtout une codification des différents projets de loi qu'on avait adoptée au ministère des Richesses naturelles, au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et au ministère des Terres et Forêts. Pour moi, ce n'est pas un reproche. Le problème fondamental — je pense que la commission Legendre a soulevé ce problème — est que toutes ces lois étaient réparties dans différents ministères et qu'on ne savait jamais qui était responsable de quoi. Là, c'est un pas de l'avant. On sait qui est responsable et de quoi.

J'espère qu'on va savoir qui va être responsable, par exemple, des cimetières d'automobiles, qui va être responsable de la protection des rivières à saumon dans nos territoires. La question de la pollution, ce n'est pas tant une question économique. Tôt ou tard il faut en prendre conscience.

En ce qui concerne la question économique, la commission Legendre a très bien répondu. C'est que si on ne prend pas conscience qu'on a là un problème cela va nous coûter passablement cher. On disait, dans le rapport de la commission Legendre: "Toute hésitation — on parle en particulier de l'eau parce que l'eau est, je pense bien, plus importante que l'air parce qu'on a d'abord pris conscience de l'eau; l'air est aussi un phénomène très important au Québec, mais l'eau est devenue un problème très important — aura inévitablement pour effet d'augmenter la note que les contribuables devront assumer tôt ou tard." Si on ne fait rien, on devra — là, je résume — dépenser autant d'argent en ce qui concerne la protection de l'environnement qu'on en dépense actuellement pour l'éducation, soit plus d'un milliard de dollars par année.

Le député de Bagot, cet après-midi, parlait du budget du ministère de la qualité de l'environnement. Il était de $12 millions. D'accord, c'est un budget insatisfaisant, c'est un budget qui ne nous permettra pas de résoudre tous les problèmes. Mais, cependant, c'est un début, un commencement. Mais l'important, c'est la volonté. Je doute que le ministre responsable de la qualité de l'environnement, qui me paraît actuellement le ministre en titre, qui me paraît avoir véritablement conscience de ces problèmes, puisse trouver l'audience à l'intérieur du cabinet pour pouvoir véritablement appliquer une politique cohérente dans ce domaine. Pourquoi je dis que j'en doute?

Pour ma part, depuis deux ans ou deux ans et demi que j'ai été élu député et même avant cela, M. le Président, je suis intervenu à maintes et maintes reprises pour faire corriger certaines situations concernant en particulier les cimetières d'automobiles. J'entendais, cet après-midi, le nouveau ministre adjoint à la Voirie nous parler du problème des cimetières d'automobiles. Mais il reste que cela fait, quand même, au moins huit ans que nous avons une loi pour règler ce problème et qu'on ne l'a jamais règlé. Nous avons encore les problèmes et nous les vivons, M. le Président, tous les jours, lorsque nous visitons un peu le Québec.

Pourquoi avons-nous encore ce problème? Parce qu'on ne s'en est jamais préoccupé. Parce qu'on fait des lois, ici, à l'Assemblée nationale, pour s'amuser. Parce qu'on fait des lois qu'on n'applique jamais. On a peut-être une loi, ici, qui est importante, qui est valable. Ce qui est important, M. le Président, c'est qu'on ait au moins la force d'appliquer cette loi. Lorsqu'on parle de pollution, lorsqu'on parle de l'environnement on se bat contre des grandes entreprises, on se bat contre des grosses compagnies. Il s'agit de parler simplement des compagnies de pâtes et papier. Or, depuis pas mal d'années, il n'y a jamais eu un gouvernement qui a décidé véritablement d'appliquer, dans ce sens, des politiques qui soient valables.

Pourtant, on a adopté des lois, mais on ne les a jamais appliquées. On n'a jamais fait d'efforts pour appliquer les lois. J'espère, en tout cas, que le ministre du futur ministère de l'environnement aura la force de se battre à l'intérieur de son cabinet pour réaliser simplement ce qui avait déjà été prévu à l'intérieur d'autres ministères et qui est dans la loi 34. Parce que la loi 34, c'est vrai — le député de Saint-Maurice le disait — est strictement une loi de codification. Mais est-ce que le ministre aura la force, la puissance et le courage d'appliquer ces lois?

Je parlais, M. le Président, des cimetières d'automobiles. Je peux parler, parce que c'est dans mon comté, d'un autre problème qui me paraît particulièrement important, en ce qui concerne les rivières à saumon.

M. le Président, on a tout permis aux compagnies de pâtes et papier du Québec. On leur a tout laissé faire. En particulier, par exemple — je la nomme, M. le Président — la CIP, dans mon comté, à Rivière-Pentecôte, a détruit une rivière à saumon. Normalement, toute compagnie qui modifie un barrage doit, au préalable, obtenir un permis du ministère des Richesses naturelles. Cette compagnie, M. le Président, a tout simplement fait sauter un barrage. On a dit que c'était par inadvertance qu'on l'avait fait.

J'ai fourni au ministère des Richesses naturelles et au ministère des Terres et Forêts deux affidavits à l'effet que les deux personnes qui avaient fait sauter ce barrage avait reçu l'ordre, avaient été mandatées par la compagnie. On n'a absolument rien fait au ministère des Richesses naturelles, et je peux faire parvenir la correspondance au ministre.

Ainsi, le gouvernement fédéral a dû dépenser la somme de $100,000 pour creuser la rivière. Une ex-rivière à saumon. Nous en avons beaucoup au Québec, mais ça appartient aux autres, ça ne nous appartient pas. Les saumons, chez nous, ne mordent pas aux lignes des Québécois, ils mordent aux lignes des anglophones. Ils sont assez anglicisés.

Le gouvernement fédéral a dépensé $100,000 pour creuser cette rivière et actuellement la CIP, à Pentecôte, laisse la région parce qu'elle ne peut tout simplement pas sortir son bois. Etant donné qu'on a fait sauter un barrage, le sable a recouvert le lit de la rivière et même un petit bateau bien ordinaire n'est même pas capable d'entrer au quai.

Je suis intervenu auprès de différents ministères. On n'a pas du tout corrigé la situation. Parce que c'était la CIP. Est-ce que le ministre aura le courage de corriger des situations comme celles-là? La question de la pollution, ce n'est pas tant une question de structures. C'est d'abord la volonté de vouloir régler des problèmes.

J'ai soumis au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche le cas de la compagnie Domtar à Baie-Trinité. On sait que le saumon est un apport touristique extrêmement important. Mais, lorsque des compagnies de bois laissent flotter leur bois sur des rivières, il est appelé à disparaître.

Ce sont des choses que tout le monde connaît. Tous en ont conscience, mais on ne les a jamais corrigées. On laisse faire ces grosses compagnies — et c'est là qu'est le véritable problème — qui ont le droit de faire n'importe quoi, les compagnies de pétrole, les compagnies d'industrie forestière ont le droit de faire n'importe quoi.

M. le Président, je voyais, il y a quelque temps, un communiqué du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche qui nous annonçait qu'en ce qui concerne la Côte-Nord on avait investi passablement d'argent pour mettre des salmonidés dans des rivières à saumon de la Côte-Nord. Cela donne quoi, si on ne fait rien pour régler le problème? Cela donne quoi, par exemple, si on n'empêche pas le flottage sur les rivières du Québec? C'est

bien beau de faire des lois, c'est bien beau de discuter des lois ici à l'Assemblée nationale;on en avait dans le passé; toutes les lois qui sont codifiées à l'intérieur du bill 34 sont des lois que nous avions dans le passé; ce sont toutes des lois qui auraient pu être appliquées dans le passé mais qu'on n'a jamais appliquées parce que les gouvernements étaient bien plus soumis aux grosses entreprises, aux grosses compagnies qu'aux véritables intérêts du Québec. On n'a pas le choix. Il va falloir s'occuper de ce problème; il va falloir prendre conscience de ce problème.

D'autant plus que nous, les Québécois, pouvons faire du Québec, si nous le voulons, la Suisse de l'Amérique du Nord; on peut faire en sorte que le Québec soit le paradis des chasseurs et des pêcheurs; nous pouvons faire en sorte que nous ayons, au point de vue apport de l'étranger, par exemple, l'une des industries touristiques les plus importantes en Amérique du Nord. Parce que, M. le Président, même au point de vue touristique, on n'a rien fait depuis pas mal d'années. Cette année, on constate que $1 milliard nous provient du tourisme. La rivière Matane, par exemple, a apporté dans cette région, en 1965, $300,000; c'est une rivière à saumon; c'est une rivière libérée, une rivière qui appartient au public; c'est une rivière où tout le monde peut pêcher. Malheureusement, on n'a que quelques rivières comme ça au Québec, les autres appartiennent aux autres, appartiennent aux Américains, appartiennent à certaines personnes qui financent les différents partis politiques. Mais, ça peut quand même être chez nous l'un des attraits touristiques extrêmement importants.

Si on laisse corrompre ces rivières, si on ne fait rien, en particulier dans certaines régions comme la basse Côte-Nord, comme la Côte-Nord chez nous, dans la Gaspésie, on peut développer véritablement notre industrie touristique à partir de ça. Mais, M. le Président, on n'a absolument rien fait dans le passé. On laisse ces rivières aux grandes entreprises, aux industries de bois, aux industries de papier qui corrompent tout simplement les rivières et qui font ce qu'elles veulent.

M. le Président, c'est bien beau de présenter un projet de loi comme le bill 34. C'est bien beau de soumettre ça à l'Assemblée nationale. Depuis deux ans, M. le Président, on a eu quelques beaux projets de loi à l'Assemblée nationale. On a eu le projet de loi 276, par exemple, mais ça n'a pas donné grand-chose. On a gueulé, on a parlé pendant passablement de temps pour discuter de cette affaire, mais, en réalité, ça ne donne absolument rien. Là, on parle du bill 34, depuis passablement d'heures, mais ça va donner quoi, M. le Président, sinon une codification des différentes lois qu'on avait à l'intérieur de différents ministères et qui sont là dans le bill 34? L'important, ce n'est pas ça. L'important, c'est le désir, la volonté de pouvoir corriger certaines situations. La volonté de s'attaquer, par exemple, aux compagnies forestières et de leur dire: C'est bien de valeur, mais vous avez créé des situations telles que vous avez gaspillé, au Québec, des ressources économiques fort importantes. En retour, vous allez être obligées de rembourser le ministère, vous allez être obligées de rembourser le gouvernement. Jusqu'ici, on n'a rien fait.

Quand je suis intervenu concernant la rivière Pentecôte, on m'a répondu qu'on ne pouvait rien faire. Le gouvernement a dit que ce n'était pas lui qui avait le contrôle des rivières, c'est-à-dire du lit de la rivière, puis que ce n'était pas la faute de la compagnie, si on avait gaspillé comme ça une rivière. On n'avait pas fait enquête plus que ça. Moi, j'ai fait enquête. Moi, je suis allé véritablement auprès des personnes qui avaient été en partie responsables de ce problème, et elles m'ont dit véritablement ce qui s'était passé.

Est-ce que le ministère va faire ce que les autres ministères ont fait? Est-ce que le ministère de l'environnement, par exemple, va continuer de nous dire qu'on ne peut rien faire en ce qui concerne l'environnement, parce qu'il faut créer des emplois dans la Basse Côte-Nord et qu'il faut donner $40 millions, par exemple, à ITT Rayonier pour vider la forêt, pour couper le bois dans cette région, alors qu'il y a d'autres ressources possibles à développer dans cette région?

Si on avait donné $40 millions dans la région de la Côte-Nord pour développer le tourisme, je pense qu'on aurait créé pas mal plus que 1,200 emplois qui sont strictement des emplois secondaires, des emplois de petits porteurs d'eau. D'accord, je parle d'un problème peut-être en dehors de ça, mais qui touche à ça, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Non, le signe que je vous ai fait, ce n'était pas pour vous ramener à l'ordre, parce que vous l'avez reconnu vous-même; c'est que votre droit de parole était expiré.

M. BURNS: Pas de niaisage! Tout le monde l'a dépassé.

M. LESSARD: M. le Président, vous connaissez mes conclusions; parfois, elles sont très longues. Je termine donc en disant que...

M. LE PRESIDENT: Je connais surtout le respect que vous avez du règlement.

M. LESSARD: ... c'est un problème complexe. C'est vrai que la pollution, c'est un problème complexe. C'est vrai qu'on ne peut pas le régler par un simple projet de loi. C'est vrai que, du jour au lendemain, on ne peut pas le régler. En fait, le ministre fait un pas. C'est un problème extrêmement complexe dans le sens que ça met, en tout cas en relation non seulement un, mais plusieurs ministères, le

ministère du Tourisme, le ministère des Terres et Forêts le ministère des Richesses naturelles.

Cela met surtout en relation certains choix économiques. Est-ce qu'on doit, par exemple, dans certaines régions, créer de l'emploi ou protéger, comme le cas actuellement se pose, le parc Jacques-Cartier? Alors, c'est une question d'équilibre entre des problèmes sociaux et des problèmes économiques. Ce n'est pas possible de trouver cet équilibre.

Si on présente une loi comme celle-là, c'est justement parce qu'on a créé un certain déséquilibre au Québec. Cependant, la chose la plus importante que je demande au ministre...

M. LEVESQUE : A l'ordre ! A l'ordre !

M. LESSARD: ... ou au supposé ministre de l'environnement, c'est de ce tenir debout.

M. LEVESQUE: Est-ce terminé, M. le Président?

M. LESSARD: De se tenir debout devant les compagnies forestières, de se tenir debout devant des compagnies comme Quebec Cartier Mining, par exemple, qui polluent la Côte-Nord actuellement — le ministre a visité la région — de se tenir debout devant toute autre compagnie pour respecter les principes qui sont à l'intérieur de son projet de loi. C'est la première qualité que le ministre doit avoir et c'est une qualité qu'on n'a pas connue dans le passé, qu'on n'a pas vécue dans le passé.

Tous les ministres qui avaient des projets de loi, en tout cas certains projets de loi dans leur ministère, ne l'ont jamais fait en ce qui concerne le ministère de la Voirie et le ministère des Richesses naturelles. Est-ce que le ministre pourra au moins appliquer ce qu'il y a là-dedans? C'est ce que je lui demande et j'espère qu'il le fera.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

M. Jean-Noël Tremblay

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. BURNS: Vous commencez à neuf heures huit minutes.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... je ne suivrai pas le député de Saguenay dans la charge qu'il a faite contre les entreprises qui font vivre les citoyens de son comté. S'il est vrai qu'il y a des reproches à adresser aux compagnies papetières de même qu'à l'ensemble d'un grand nombre d'industries, il est vrai également que ces industries ont pris conscience du problème et, à l'heure actuelle, en collaboration avec les gouvernements, s'efforcent d'apporter des remèdes aux maux qu'elles ont elles-mêmes provoqués.

Que cela se fasse avec lenteur, c'est exact, mais il me parait que la loi que présente le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement est de nature à accélérer le processus qui permettra d'apporter des remèdes efficaces à ces problèmes cruciaux qui gênent la vie individuelle et collective du Québec.

J'entendais tout à l'heure le député de Saguenay nous parler du tourisme et nous dire, à ce propos, que la plupart des rivières et des lacs du Québec étaient la propriété de sociétés américaines ou d'individus anglophones. Le député de Saguenay devrait poursuivre ou mener une petite enquête. Il se rendrait compte que bon nombre de ces rivières et de ces lacs constituent des territoires de chasse qui sont occupés par des professionnels, avocats, médecins, comptables, etc., qui, par snobisme, financent la caisse électorale du Parti québécois.

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais vous faire observer que si je ne suis pas d'accord avec le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement, le député de D'Arcy-McGee, ce n'est pas que je ne conçoive pas l'utilité de la loi qu'il présente, de la nécessité de combattre la pollution par tous les moyens dont le gouvernement dispose. Si je n'ai pas l'intention de voter, en seconde lecture, pour ce projet de loi, c'est qu'il me parait que le projet de loi du ministre situe le problème dans une optique tronquée parce qu'au fait, le projet de loi 34 a un titre qui est en porte-à-faux. Il s'intitule "Loi de la qualité de l'environnement". Or, le libellé du projet de loi indique, de façon très nette, qu'il s'agit de la codification d'un ensemble de mesures qui se trouvent déjà dans des lois du gouvernement du Québec et qui, une fois réunies et soumises à l'attention du ministre qui deviendra responsable de l'application de ces lois, permettront d'appliquer des mesures qui, dispersées comme elles le sont à l'heure actuelle, n'ont pu être efficaces.

Il s'agit donc de la réunion d'un ensemble de mesures. C'est ce qui donne d'ailleurs à la loi ce caractère que j'appellerai répressif ou négatif, qui ne touche pas du tout, à mon sens, au fond du problème, mais n'aborde que par le biais le problème général de l'écologie. Le ministre en conviendra avec moi.

C'est justement ce terme écologie qu'il faudra examiner pour bien comprendre pourquoi le projet de loi ne s'attaque pas au problème de l'écologie. Le mot écologie, étymologiquement, vient de deux termes grecs: "oikos", qui veut dire maison ou habitat et "logos", qui veut dire science. Il s'agit de cette partie de la biologie qui traite de la vie des êtres vivants dans leur milieu naturel. Cette motion étant acquise — elle devrait d'ailleurs servir de base et de principe au projet de loi que présente le ministre — cela nous amène à parler du grand problème de l'environnement, puisque l'environnement, c'est l'habitat, c'est le milieu naturel dans lequel évoluent les êtres vivants aux termes mêmes de la notion d'écologie.

Cet environnement, pour être bref, parce que je n'ai pas le temps d'entrer dans le détail, on peut le diviser en trois parties. Il y a d'abord un environnement physique. Il y a un environnement social et il y a un environnement culturel. J'emploie ici le mot culturel au sens anthropologique du terme et non pas au sens esthétique ou académique du terme.

Qu'en est-il de l'environnement physique? Il s'agit évidemment du milieu physique, de l'air, de l'espace, de l'eau, de la flore, de la faune, etc. C'est de cet aspect que traite précisément le projet de loi no 34, puisque le ministre se propose, par ce projet de loi, via la règlementation du lieutenant-gouverneur, de protéger le milieu physique contre tous les agents polluants. Le milieu physique n'est donc que l'un des aspects du grand problème général de l'environnement.

Je suis donc d'accord avec le ministre qui veut rapailler — si je puis employer ce vieux terme québécois — les diverses lois déjà codifiées pour donner à un ministre la responsabilité de leur application. Le ministre comprendra avec moi que, ce faisant, il ne touche qu'à un aspect du problème général de l'écologie et du problème de l'environnement qui en découle, soit la pollution de l'air, de l'eau, de l'espace et tout ce qui menace la flore et la faune. C'est le milieu physique et ce n'est qu'un aspect de ce milieu général, cet habitat naturel qui s'appelle l'environnement.

Qu'en est-il du milieu social? La loi du ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement ne touche que très très peu à cet aspect du problème général de l'environnement.

Il ne se trouve rien dans sa loi qui concerne l'urbanisme, c'est-à-dire la façon de construire les maisons, la façon de les grouper, la façon de créer des milieux de vie qui soient favorables au développement individuel et collectif. Si l'on voulait donner une définition de l'environnement autre que celle qu'a donnée l'autre jour le député de Montmagny, on pourrait le faire au sens juridique et en termes de responsabilité du gouvernement: l'aménagement et la protection d'un milieu ambiant qui favorise la vie individuelle et collective.

Or, le projet de loi no 34 ne traite pas de cet aspect du milieu social. La preuve: les silences ou l'inexistence totale de prescriptions concernant l'urbanisme. Nous vivons dans un monde où se créent, à l'heure actuelle, de grandes concentrations humaines. On amasse dans des villes, sur des aires quand même physiquement très limitées, des masses énormes d'individus sans pour autant prendre des mesures qui permettraient à ces gens de vivre avec confort, avec aise et de se retrouver dans un milieu ambiant qui favorise à la fois leur développement physique, leur développement social et leur développement intellectuel.

De tout ce problème, le projet de loi no 34 ne parle pas si ce n'est que par le biais des cimetières d'automobiles, des déchets, des ordu- res, etc. Cela est un aspect tellement évident qu'on serait étonné qu'un gouvernement ne s'en occupe pas, d'autant plus que les municipalités ont déjà, du reste, cette responsabilité.

Mais j'aurais voulu que le ministre nous présentât une véritable loi-cadre de l'environnement, une loi qui eût pu s'intituler loi portant création d'un ministère de l'écologie...

M. PAUL: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... ou de l'environnement. Il n'était pas nécessaire pour cela que le ministre nous présentât un projet de loi extrêmement complexe mais qu'il situât le problème général de l'écologie dans le cadre d'une loi, quitte, par la suite, à adopter, par des lois ultérieures, les éléments qui seraient venus, si vous voulez, habiter, si je puis employer cette expression, ce cadre juridique qu'il aurait proposé à la Chambre.

Le ministre a, à mon sens — s'il me permet l'expression — manqué le bateau. Il a morcellé le problème. Il a pris une partie du problème, qui traite du milieu physique, sans s'occuper du milieu social. Qu'en est-il encore d'un autre milieu qui fait partie de l'environnement. C'est celui qu'on appelle le milieu culturel, au sens, je le répète pour qu'il n'y ait pas de confusion ou d'équivoque, anthropologique du terme, pour se développer normalement, non pas physiquement mais sur le plan intellectuel pour acquérir les vertus du citoyen — j'emploie le mot "vertu" dans son sens étymologique le plus fort —. Il est nécessaire que le citoyen se trouve dans un milieu ambiant qui favorise son plein épanouissement intellectuel. Cela ne veut pas dire simplement fréquenter des écoles, aller aux concerts ou aux spectacles. Cela veut dire que le milieu physique, que le milieu social, que tout ce qui constitue l'environnement, dans son vrai sens du terme, permettent à un individu de se réaliser comme être humain, d'atteindre cette perfection humaine qui est l'idéal de tout être humain et qui est une des règles de base d'une société politiquement organisée qui, elle, a la responsabilité de favoriser l'épanouissement complet de la personnalité des individus.

Dans cette optique, M. le Président, le ministre aurait pu nous demander d'examiner, par exemple, toute la question de l'esthétique des lieux physiques, la préservation des paysages, la préservation des sites, rivières, lacs, etc., tout ce qui s'appelle "eau". Le ministre aurait pu nous parler, dans cette optique également, il aurait dû traiter dans son projet de loi, du problème de l'esthétique du bâtiment.

Songez simplement — et, là, les deux aspects se recoupent: l'aspect social et l'aspect que j'appelle intellectuel — à ces immenses maisons de rapport, ce qu'on appelle des HLM, des maisons d'appartements, où l'on oblige des gens à vivre littéralement en cage. Même s'il s'agit de cages dorées, à $700 ou $800 par mois, ce sont quand même des cages. Ce n'est pas un moyen,

dans un pays aussi vaste que le nôtre, de permettre l'épanouissement de la personnalité, d'autant plus que cela provoque un phénomène de concentration dans des lieux où la population est déjà massivement amassée.

Prenez la région de Montréal, prenez la région de Québec. Déjà, à l'heure actuelle, il se produit un phénomène de succion qui amène les habitants des régions dites provinciales ou des diverses régions économiques du Québec dans les grands centres. Il y a, évidemment, sous-jacent à ce problème, toute une série de problèmes économiques dont je ne peux pas traiter dans le cadre de ce débat. Mais, M. le Président, revenant à ce que j'appelle le milieu culturel, il me paraissait nécessaire, naturel, normal et essentiel que le ministre, présentant un projet de loi qui se veut une loi-cadre si l'on tient compte du titre dont il l'a coiffé, nous présentât l'ensemble du problème et nous invitât, par la suite, à légiférer sur chacun des aspects que je viens de mentionner.

En effet, la dimension de l'environnement qui apparaît dans le projet de loi est, à mon sens, beaucoup trop restreinte. Je sais très bien que le ministre a lui-même une vue de l'environnement qui est beaucoup plus large que cela, qui embrasse davantage les trois réalités dont je parlais, soit la réalité physique, la réalité sociale et la réalité culturelle. Mais, pressé par son gouvernement ou désireux, comme la plupart de ses collègues ministres, de nous présenter et de nous faire adopter un projet de loi pour l'inscrire dans un catalogue de lois, il a préféré la solution la plus facile. Il a préféré le raccourci. Au lieu de nous présenter une grande loi-cadre sur l'environnement, il nous présente simplement une loi dont l'objectif — je ne parle pas de principe, parce qu'il n'y a pas de principe dans cette loi — est tout simplement d'amasser les diverses lois qui se trouvent déjà dans nos recueils et de donner la responsabilité de l'application de ces lois à un ministre assisté d'un conseil, comme cela est déterminé aux termes du projet de loi que nous étudions ce soir.

Ainsi, M. le Président, je crois que le ministre a été — je ne veux pas, naturellement, lui prêter d'intentions — frustré et qu'il doit se sentir frustré, parce que je sais que le projet de loi qu'il nous présente ne correspond pas du tout à l'idée qu'il a, lui, de l'environnement et à l'idée qu'il s'était faite d'une législation qui aurait correspondu à l'ensemble des études qu'il nous a dit avoir faites, à l'ensemble des enquêtes qu'il nous a dit avoir menées à travers le Québec et des consultations qu'il a poursuivies à travers le Québec.

En effet, si on examine les différents rapports qui nous ont été soumis par diverses commissions, si on lit les articles des magazines, des journaux et les études scientifiques faites sur le problème de l'environnement, on se rend très bien compte que tous les gouvernements qui veulent légiférer en cette matière particuliè- rement importante de l'environnement commencent par présenter un projet de loi-cadre auquel viennent se greffer, progressivement, des mesures pratiques s'appliquant à tel ou tel domaine.

M. le Président, je ne voudrais en aucune façon être désagréable à l'endroit d'un ministre dont toute l'Opposition a vanté les mérites, ou à tout le moins l'esprit de travail.

M. PAUL: Ce qui est rare...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si le ministre allait être appelé au cabinet comme responsable de l'application de la loi qu'il nous présente ce soir, à sa place je refuserais. Parce qu'automatiquement il ne deviendra pas le ministre de l'environnement, il deviendrait, avec tout le respect que j'ai pour le ministre — je suis désolé d'employer ce mot — le ministre des vidanges, mais pas le ministre de l'environnement.

Or, je sais que le ministre a d'autres ambitions — il a le droit d'en avoir — et qu'il veut véritablement être responsable de l'aménagement et de la protection d'un milieu ambiant qui favorise le plein épanouissement des individus et de la collectivité. C'est ça, l'ambition du ministre, son objectif.

UNE VOIX: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, j'ai commencé au quart, n'allons pas trop vite.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi a encore trois minutes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. le Président.

Je dis donc que le projet de loi comporte un aspect positif qui est celui, au fait, d'éliminer les agents polluants, sous toutes sortes de formes. Retenons cet aspect positif.

Mais qu'on n'aille pas appeler ce projet de loi: Loi de la qualité de l'environnement, parce qu'il n'est pas question d'environnement du tout et que la notion d'environnement n'est pas du tout comprise dans le projet de loi que nous étudions.

Pour ces raisons, en dépit de la sympathie et de l'estime que j'ai pour le ministre responsable de la qualité de l'environnement, et précisément parce qu'on le veut ministre responsable de la qualité de l'environnement, du moins du côté du gouvernement — il semble que ce soit ça — je ne voudrais pas appuyer un projet de loi comme celui-là qui le consacrerait ministre des vidanges. Parce que c'est tout ce que le gouverneur va avoir à faire, comme l'a expliqué mon collègue de Maskinongé; préparer une règlementation afin de déterminer la nature des vidanges, ce qu'on va en faire, de quelle façon on va s'en débarrasser, où on va les mettre, et patati et patata.

Ce n'est quand même pas la responsabilité d'un ministre de s'occuper de cela. Je sais que le ministre veut, comme moi, travailler à cet épanouissement de l'homme dans un milieu physique, social, dans un milieu culturel qui convienne à l'homme moderne du Québec. C'est pour cette raison que je ne voudrais pas que le ministre nous oblige à lui décerner un titre qu'il ne mérite pas.

En dépit de certains aspects positifs, on a parlé de la lutte contre la pollution, tout ça c'est admis, c'est acquis, c'est vendu. On va s'en occuper et le ministre n'a qu'à appliquer ce qu'il y a déjà dans nos lois et tout sera réglé pour cette partie du problème. En dépit de cet aspect positif, parce que le projet de loi est incomplet, j'estime, en toute conscience, que je ne peux pas donner mon approbation en deuxième lecture à un projet de loi qui n'est pas du tout un projet de loi qui porte sur la qualité de l'environnement, et qui me demande simplement d'autoriser le gouvernement à disposer à sa façon des ordures.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

M. Guy Joron

M. JORON: Fort brièvement, je souscris aux efforts louables que fait le ministre responsable de la qualité de l'environnement pour tenter de cerner et de vaincre ce problème qui est la plaie de nos sociétés modernes et de nos sociétés industrielles. Mais je vous avoue que je n'ai pas tellement confiance que la loi que nous allons peut-être adopter bientôt va permettre véritablement de protéger l'environnement et d'endiguer cette pollution, pour les raisons suivantes.

C'est que je fais un parallèle entre les premières mesures ou les premiers moyens que les hommes se sont donnés pour lutter par exemple, contre la criminalité.

La première chose qui leur est venue à l'esprit, fut de faire des lois pénales, de punir, de pénaliser les fauteurs. Et c'est essentiellement ce que la loi de la qualité de l'environnement va permettre au ministre de faire: contrôler, punir et enfin sévir contre les polluants. Les lois pénales il faut quand même se le rappeler, M. le Président, n'ont pas réussi dans l'histoire de l'humanité à endiguer la criminalité.

Il est apparu plus récemment une science plus moderne, celle de la criminologie, qui veut aller aux racines du mal et non pas attaquer le mal par ses effets extérieurs en prévoyant des peines et des sanctions pour les fauteurs. Mais elle veut se rendre jusqu'à la racine pour enrayer le mal lui-même. La loi actuelle est peut-être nécessaire, je pense, mais il faut bien se rendre compte que, dans ce domaine de la lutte contre la pollution, nous en sommes à nos premiers balbutiements. Nous sommes loin encore, et très loin, de nous attaquer à ce que j'appelle la racine du mal. La racine du mal, c'est quoi? Qu'est-ce qui a fait que l'humanité, tout à coup, est prise et mise en face d'un problème de pollution? C'est essentiellement l'exploitation que les hommes, surtout depuis le début de la révolution industrielle, se sont mis à faire des ressources de la terre. Là est apparu un problème de pollution.

Il faut aller, si on veut véritablement atteindre la racine, passablement plus loin que les mesures policières que l'on vise à se donner à travers le bill 34. Tant qu'on n'aura pas cerné, qu'on n'aura pas contrôlé le problème de l'utilisation que les hommes font de leurs ressources physiques, je pense qu'on ne réussira pas véritablement à contrecarrer la pollution dont nous souffrons.

Je veux dire par là que tant qu'il n'y aura pas une espèce de révolution culturelle, jusqu'à un certain point, qui nous permettra de savoir pourquoi on exploite les ressources de la façon qu'on le fait, pourquoi...

M. BURNS: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue de Gouin, mais je pense que nous n'avons pas quorum.

Il faudrait peut-être faire sortir les députés libéraux des différents endroits où ils se trouvent actuellement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Je compte.

L'honorable député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, je pense que l'agent polluant le plus important dans notre société et dans notre monde est dans la tête de chacun d'entre nous. Il est dans nos valeurs culturelles; il est dans les choses que nous désirons. Nous désirons, par exemple, plus de voitures, de plus en plus longues, de plus en plus chromées. Nous désirons plus de bebelles, une deuxième motoneige, un troisième télécouleur et toutes ces choses. La croissance nous est inculquée comme valeur. Dans un moment, nous essayerons de cerner par qui ces valeurs nous sont inculquées et là peut-être que nous trouverons les véritables agents polluants dans la société. Cette croissance entretenue fait qu'on exploite de façon déraisonnée des ressources de la terre, qu'on les exploite souvent pour un rien, qu'on en abuse et qu'on accumule forcément des sous-produits de cette production, des déchets, ainsi de suite.

Tous les problèmes que ça cause, c'est là qu'est l'origine du problème de la pollution auquel on fait face. Puis je pense qu'il serait intéressant de se demander ce qui nous les a foutues dans la tête, ces valeurs, dans la tête de chacun des citoyens, dans la tête de tout le monde, dans la tête de la population qui a créé cette demande pour une croissance de bebelles, très souvent croissance pour la croissance et non pas pour la qualité, et qui nous place aujourd'hui devant les problèmes que l'on sait à l'égard de la pollution.

Je pense qu'il faut se demander, autour de cette question-là, quel contrôle les citoyens, quel contrôle la population a eu, quel mot elle a eu à dire dans la détermination des choses que nous allons produire, en quelle quantité nous allons les faire, pour servir à quelles fins et ainsi de suite.

Il n'y a pas moyen de dissocier ça du régime économique dans lequel on vit. L'une des raisons peut-être pour lesquelles on a à faire face à un tel problème de pollution aujourd'hui, c'est que ce n'est pas la majeure partie de la population, de l'humanité qui a déterminé ce qui allait être produit, en quelle quantité, puis pour quelles fins. De la façon dont fonctionne notre système économique et plus précisément les problèmes reliés à ceux qui contrôlent et qui ont le pouvoir de décision dans notre société, dans notre régime économique, l'on peut peut-être remonter à l'origine du problème de la pollution auquel on a à faire face.

On sait d'ailleurs que ce ne sont pas particulièrement ou surtout les individus qui sont des agents polluants. Ce sont les entreprises industrielles. Or l'industrie aujourd'hui, on le sait tous, en majeure partie est dominée par un nombre assez restreint de grandes entreprises. Cela on le sait, on les a maintes fois identifiées, là sont les principaux agents polluants. On a tort, remarquez, de parler des entreprises comme l'a fait tout à l'heure le député de Chicoutimi en nous disant, commentant l'intervention qu'avait faite avant lui le député de Saguenay, qu'il avait tort de s'en prendre aux grandes entreprises de son comté qui font vivre les citoyens.

Cela, c'est justement le genre de cliché archaïque, chéri et entretenu par ceux qui ont peu de connaissances en matière économique ou par ceux qui, en fait, sont les victimes, sont les aliénés de tant d'années, justement, d'ignorance dans ce domaine. Ce ne sont pas les entreprises qui font vivre les citoyens — je vous le soumets et je pense bien que vous le savez vous-même — ce sont plutôt les citoyens qui font vivre les entreprises, parce que s'il n'y avait pas de consommateurs, il n'y aurait jamais eu d'entreprises. Mais le problème, c'est que les consommateurs n'ont jamais pu contrôler les entreprises. La théorie libérale, si vous voulez, ou la théorie économique du siècle dernier a voulu que les consommateurs exercent un contrôle sur le choix des entreprises par le jeu du marché.

En d'autres mots, les consommateurs qui n'auraient pas voulu de tels produits auraient fait que telle entreprise disparaisse, et ainsi de suite, le jeu de la libre concurrence. Mais on sait aujourd'hui, par le contrôle de la publicité, par le nombre de plus en plus restreint de grandes entreprises, que tel n'est plus le cas, que la population en général et que les consommateurs ont perdu le contrôle des entreprises.

M. LEVESQUE: Vous êtes hors du sujet, mais ça ne fait rien, M. le Président,...

M. JORON: Je ne suis pas hors du sujet du tout. J'essaie de vous faire comprendre que l'origine du problème de la pollution...

M. LEVESQUE: Le député de Maisonneuve est suspendu à vos lèvres.

M. JORON: ... J'essaie de faire comprendre, entre autres — et je vois que je n'y suis pas parvenu, c'est peut-être parce que je suis peu éloquent, pas assez précis, pas assez clair, enfin je tenterai à nouveau — au député de Bonaventure que l'origine du problème de la pollution tient à notre système économique, et la façon dont il fonctionne tient aux mécanismes de contrôle et aux mécanismes de décision à l'intérieur de ces systèmes économiques. Et tant qu'on ne voudra pas parler de ce problème, on parlera de la pollution, comme on a parlé autrefois, il y a des siècles et des siècles, les premières fois qu'on a eu à y faire face, je le disais au début, des problèmes de la criminalité par exemple. La première chose qu'on a pensé à faire c'est des lois pénales; ça n'a rien dérangé. Cela n'a pas endigué la criminalité. De la même façon, tant qu'on ne fera pas l'équivalent, tant qu'on ne fera pas comme le fait la criminologie, une science plus moderne, qui se penche sur les racines, sur l'origine du mal.

Tant qu'on n'aura pas fait la même chose dans ce domaine, on parlera probablement pour rien. On adoptera une loi, à laquelle je vais souscrire, mais qui, je pense, n'endiguera pas le problème.

M. le Président, je ne prendrai pas davantage de temps. Je vais simplement faire une invitation au ministre vu que ces autres sujets sont parfois, peut-être, débattus au conseil des ministres où siège le député de D'Arcy-McGee. Donc, quand ces problèmes seront abordés, qu'il ait, à ce moment-là, la même vigilance ou qu'il soit aussi intéressé à tenter de cerner le problème de la pollution par ce biais. C'est peut-être vraiment le fond du problème ou la véritable façon de l'aborder.

En résumé, je pense que, tant que les citoyens en général ne pourront pas eux-mêmes décider de l'exploitation qui est faite de nos ressources, de leur utilisation et des fins auxquelles cette exploitation doit servir, on aura toujours ce problème de la pollution. Le mieux qu'on pourra faire, comme la loi 34 nous le propose, sera de tenter de le cerner par des lois policières. Le fond du problème restera toujours là tant qu'on n'aura pas abordé cette question fondamentale de savoir qui, dans notre société, va décider de la croissance, de ce qui sera produit et de l'utilisation qu'on va faire de nos ressources. Tant qu'on n'aura pas le contrôle là-dessus, les centres de décision seront particulièrement les grandes entreprises privées dont la fin principale, je ne le conteste pas, n'est pas de se soucier de la protection de l'environnement, des problèmes sociaux et de toutes ces questions-là. Puisque ce n'est, en définitive, qu'une structure de mise ensemble

de capitaux, il reste que la préoccupation principale de la grande entreprise, c'est d'atteindre un certain rendement.

Les à-côtés, les retombées ou les conséquences des activités de nos entreprises industrielles — cela vaut autant pour les entreprises publiques que pour les entreprises privées — resteront les mêmes tant qu'on n'aura pas vidé ou réglé le problème premier de savoir la raison pour laquelle notre économie fonctionne, quelles devraient être ses fins, etc. On aura toujours un problème de pollution parce que finalement ce problème est lié directement à la notion que l'on a de la croissance économique en général.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Berthier.

M. Guy Gauthier

M.GAUTHIER: En commençant mon allocution, M. le Président, je serais tenté de vous faire un aveu. Si je n'avais peur que vous me conseilliez d'aller confier mon cas au député de Bourget, je vous avouerais que je me sens un peu complexé d'avoir à prendre la parole après ceux qui ont eu à le faire avant moi, surtout après avoir entendu de brillantes allocutions.

M. PAUL: Pas Rouville.

M. GAUTHIER: Je n'ai pas nommé Rouville et je ne voudrais pas en nommer d'autres en particulier. Je serait tenté, dis-je, de vous dire, au risque d'encourir les applaudissements des membres du parti ministériel, que j'appuie d'une façon particulière les allocutions des députés de Saint-Maurice, de Chicoutimi, de Bagot et d'autres, puis de me rasseoir tout simplement. La Chambre sera peut-être plus indulgente à mon endroit si elle se rappelle que je ne suis probablement pas le plus bavard dans cette enceinte. Il est, toutefois, de mon devoir d'exprimer mon opinion sur le bill 34. Me rappelant d'une façon particulière que, le 31 octobre dernier, le ministre, parlant en deuxième lecture sur ce fameux bill 34, nous rappelait qu'il avait assisté, un juin dernier à New York, aux Nations Unies, à une conférence sur le sujet qui nous intéresse.

Il nous rapportait, en terminant son allocution, les propos d'une dame Barbara Ward, qui disait, à peu de choses près: Nous avons la chance de pouvoir participer au démarrage du travail, à la prise collective de conscience au début de la protection de l'environnement. Nous protégeons ainsi non seulement la qualité de la vie humaine, mais nous protégeons la vie elle-même.

Je pense bien que c'est évident, que le ministre nous convie à cette tâche. Je tiens à l'assurer, pour ma part que tout le monde l'appuie.

Je fais miennes aussi les paroles du député de Maisonneuve. Je ne voudrais pas que le ministre pense, pas plus lui qu'un autre, qu'on doit ou non appuyer le bill qu'il présente parce qu'il a une binette qui nous plaît ou non. C'est dans ce sens que l'honorable ministre voudra bien prendre mes propos en bonne considération, sans atteinte particulière à sa personnalité.

C'est évident que dans le domaine de la pollution chacun prêche la vertu et presque chacun, pour ne pas dire la grande majorité, pratique le vice. Pour ma part, dans la municipalité où je demeure, je fais comme les autres. Je prêche la vertu et je pratique le vice. Comme le ministre l'a admis, il ne faudrait pas croire tout de même qu'avec le bill no 34 tout est à faire et que rien n'a été fait jusqu'ici.

Le député de Saint-Maurice mentionnait une litanie de mesures qui existent dans nos lois et plusieurs membres de l'Opposition sont même d'accord pour reconnaître que le bill no 34 est peut-être un ramassis de toutes ces lois qu'on peut retrouver ailleurs. On veut peut-être les codifier. Mais ce qui m'inquiète le plus, c'est qu'à l'heure actuelle plusieurs municipalités, surtout la Communauté urbaine de Montréal, la Communauté urbaine de Québec, ont déjà des règlements concernant la protection de l'environnement, que ce soit l'assainissement de l'air, l'eau, le traitement des eaux usées. J'ai l'impression que, si le ministre voyait son bill no 34 adopté tel que, ces municipalités qui ont déjà fait des efforts dans ce sens pourraient peut-être s'en remettre au gouvernement et se désintéresser du travail qu'elles ont déjà accompli.

S'il y a une inquiétude au niveau des municipalités, il y en a aussi une au niveau des entreprises. Encore là, le ministre l'admet lui-même, les entreprises n'ont peut-être pas fait, dans le passé, le travail qu'elles auraient dû faire dans ce sens, mais elles ont montré de la bonne volonté. Je comprends que l'enfer est pavé de bonnes intentions, mais il reste que certaines industries ont fait un travail valable. Je pourrais mentionner entre autres les carrières, les usines de ciment et d'autres industries qui ne me viennent pas à l'esprit. Mais il reste que, dans le domaine industriel, dans le milieu des affaires l'inquiétude est grande. Parce que, comme je le disais au début, si chacun est d'accord pour combattre la pollution, chacun se demande aussi ce que cela pourrait coûter.

Chez les particuliers, l'inquiétude est non moins grande. Je suis un de ces particuliers qui semblent inquiets dans ce domaine. Je prends connaissance ici d'une conférence qui a été prononcée à la Chambre de commerce de la province de Québec en novembre 1971 par M. Jean-Paul Bourdeau, vice-président, section des opérations, à la société Surveyer, Nenniger et Chênevert. Cette conférence était intitulée: Lutte à la pollution, objectifs, coûts et bénéfices. Entre autres choses, je retiens, concernant le coût, une déclaration de M. Bourdeau: "Personne ne s'oppose réellement à l'assainissement de notre environnement, du moins jusqu'à une dépollution convenable. Cependant, le de-

gré d'assainissement nécessaire est toujours associé à deux facteurs: Les coûts impliqués — et une autre question assez importante — et qui paiera la note? " Je pense bien que c'est une inquiétude qui est valable d'autant plus que le ministre lui-même, tel que le rapporte la Tribune de Sherbrooke du vendredi 11 août, 1972, a insisté sur le fait que le ministère de la qualité de l'environnement possède seulement un budget de $12 millions pour faire face à toutes les responsabilités qui lui incombent. Nous devons nécessairement impliquer que d'autres contribuent. Les autres, cela peut être tous nous autres. Encore là, je pense bien que personne n'est contre la protection de l'environnement, personne n'est pour la pollution, chacun veut contribuer à la combattre mais selon ses moyens. A ce sujet, j'ai entendu d'autres députés qui ont mentionné, avec plus ou moins de raisons, qu'il semblait que le petit particulier était plus sujet que les grandes compagnies aux diktats du futur ministère de la qualité de l'environnement ou de la régie. Sans avoir de dent contre une compagnie en particulier, je me permettrais de mentionner au ministre que pas plus tard que la semaine dernière, je recevais d'un de mes électeurs de Lanoraie, dans le comté de Berthier, une lettre...

M. PAUL: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue, le député de Berthier. Il me semble entendre des voix, des murmures qui nous dérangent grandement. Je suis fort surpris que les députés ministériels ne s'intéressent pas plus aux implications de la loi que présente le député de D'Arcy-McGee. Alors,...

M. OSTIGUY: Vous entendez des voix!

M. PAUL: M. le Président, ceux qui crient, qu'ils se lèvent donc pour parler sur le projet de loi et qu'ils nous apportent une contribution généreuse.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Berthier.

M. GAUTHIER: Mon électeur, M. le Président, me rapporte qu'il est propriétaire d'un terrain de camping déjà existant. Il a acheté, dernièrement, pour agrandir son terrain, une surface de 285 pieds sur 300 pieds. Il m'a dit: "Le ministère de la qualité de l'environnement — parce que le monsieur croit que le ministère existe comme tel déjà — a des ingénieurs et des supposés techniciens en génie sanitaire." Entre parenthèses, il me dit: "Celui qui est venu ici est diplômé en télévision et travaille au ministère pour calculer la grandeur des champs d'épuration des égouts. Ce n'est pas dans sa ligne. C'est mon opinion." C'est peut-être aussi mon opinion si le fait est exact. L'homme en question est peut-être qualifié pour épurer les écrans, mais le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on peut douter de sa compétence parce qu'il semble s'être trompé de canal!

Il reste que mon électeur se plaint des exigences et des contraintes auxquelles on veut l'astreindre. Je ne discuterai pas du bien ou du mal-fondé de ces contraintes. Evidemment, n'importe qui ne peut pas ouvrir un terrain de camping sans s'astreindre à certaines exigences. Mais je trouve tout de même étrange qu'on s'en prenne à ce type et qu'on oblige cette personne à construire 700 pieds de champ d'épuration du liquide ou quatre trous de huit pieds de diamètre et onze pieds de profondeur. Ce sont peut-être des exigences qui sont valables. Mais tout cela se passe dans la municipalité de Lanoraie, municipalité qui est aux prises avec des problèmes financiers depuis des années et des années, et qui ne peut même pas parvenir à se construire un système d'aqueduc. C'est tout de même un peu drôle.

Il reste aussi que l'honorable ministre me faisait parvenir, en date du 6 octobre 1972 — je l'en remercie d'ailleurs — copie de la lettre qu'il adressait à M. Gérard Beauséjour, maire de Saint-Michel-des-Saints. Il annexait à sa lettre un rapport qui est fait par M. Normand Desroches, inspecteur de la santé publique, concernant un problème dont la municipalité de Saint-Michel-des-Saints s'est plainte à bon droit, au sujet de la pollution du lac Taureau.

Je retiens ici le paragraphe important de la lettre de l'honorable ministre. Tout de même, cela me surprend: "Je serai heureux de communiquer avec la compagnie concernée si vos propres démarches n'obtiennent pas les améliorations nécessaires". Dans un cas, vous avez un particulier qui, tout de suite, demain matin, ne peut rien faire, s'il ne s'astreint pas aux exigences du ministère, de la régie ou de qui cela relève à l'heure actuelle, et le ministre dit: Je serai heureux de communiquer. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas agi tout de suite? Entre parenthèses, le ministre sera obligé d'agir, parce que la municipalité s'en remettra à la teneur de la lettre et lui fera parvenir la réponse de la Consolidated-Bathurst, qui dit qu'elle ne peut pas satisfaire aux exigences qui sont inscrites dans le rapport de M. Desroches.

Il y a deux choses qui me surprennent là-dedans. Pourquoi, dans le cas d'un particulier, est-on si exigeant et, dans le cas d'une compagnie, laisse-t-on faire et attend-on?

Je disais, au début de mon intervention, que chacun prêche la vertu mais que tout le monde pratique le vice. Il est évident que, dans les milieux ruraux dans lesquels je vis et aussi dans le comté rural que je représente, les gens, chez nous, ne sont pas plus pollueurs, ne sont pas plus en faveur de la pollution et sont autant contre la pollution que les citadins de la ville. Mais il reste qu'à mon point de vue, si on veut prêcher la vertu, il faudrait tout de même au moins nous donner la chance de pratiquer aussi la vertu. Je trouve paradoxal qu'on puisse aujourd'hui ou demain donner des droits au ministre. Le ministre nous disait justement, dans son discours du 31 octobre: "II

me reste à dire, M. le Président, que le but de cette éventuelle loi est d'établir une uniformité à l'échelle de la province, en ce qui concerne une foule de règlements qui, présentement, sont adoptés ou ne sont pas adoptés par les municipalités".

Il faudra comprendre, M. le ministre, que nos municipalités rurales ont les mêmes sentiments que les municipalités urbaines. Certains règlements ne sont pas adoptés parce qu'elles n'en ont tout simplement pas les moyens.

Dans les milieux ruraux comme le comté que je représente, il n'y a que quelques municipalités qui ont un système d'égout, deux ou trois, et une usine de filtration. La majorité n'ont même pas de système d'aqueduc. Et on sait que les gens de la campagne n'aiment pas à boire de l'eau qui vient de n'importe où, qui n'est pas épurée, pas filtrée.

Je pourrais vous mentionner entre autres le cas de Saint-Michel-des-Saints, où j'habite. En 1969, la municipalité, à la tête de laquelle j'étais comme maire, a voulu se doter d'un système d'égout pour les eaux domestiques, de surface avec une usine d'épuration. L'estimation a été de $883,000 pour une population de 2,079 personnes. Comment voulez-vous que nous soyons en faveur de l'épuration? Nous ne sommes pas plus fous que d'autres. Nous voudrions bien nous autres aussi nous astreindre à certaines lois uniformes, mais nous n'en sommes pas capables.

Et même la Commission municipale a fini par dire: Oubliez ce projet, vous n'en avez pas les moyens. C'est un cas typique, mais il y en a d'autres que nous pourrions vous nommer un peu partout.

Tout ce que j'ai à dire là-dessus, c'est que moi aussi je suis en faveur de la vertu. Je prêche la vertu mais malheureusement je pratique le vice, au moins dans ce domaine. Je répète au ministre que nous sommes en faveur du combat qu'il mène contre la pollution, nous l'en félicitons. Mais nous ne voulons pas qu'il obtienne ce qu'il dit être un pouvoir important, celui d'intervenir et de faire exécuter ce que la municipalité a négligé de faire. Je comprends qu'il nous a parlé de l'aide financière qui pourrait être accordée à ces municipalités via le gouvernement fédéral et la Société centrale d'hypothèques et de logement. Mais des sixièmes ça en prendrait beaucoup. Je me demande de quelle manière nous pourrions nous doter de services, comme le disait le chef de l'Opposition à l'endroit du député de Lévis, pour au moins satisfaire nos petits besoins.

Je pense, M. le ministre, que le gouvernement devrait commencer par établir des priorités et surtout un échéancier. Il devrait donner aux villes ce dont elles ont besoin — personne n'en doute — et donner aux campagnes le nécessaire auquel elles ont droit. Je suis complètement contre l'idée du ministre d'établir l'uniformité à l'échelle de la province. Le ministre des Affaires municipales d'hier, le député de Ri- mouski, a déjà dit que les municipalités rurales n'étaient pas plus arriérées que d'autres et étaient capables de se payer des services comme les gens de la ville. C'est vrai et c'est faux. Il y a tout de même une limite.

Il y a des fois où on n'est plus capable de payer. Il ne faudrait jamais oublier que la propriété qu'un type peut avoir à la campagne n'aura jamais la même valeur marchande de revente qu'une propriété identique en ville.

Partant de cette idée, je vous prie, M. le ministre, d'établir des priorités et des échéanciers. Oubliez la question d'uniformité. Dans les circonstances, à mon grand regret, je suis obligé de voter contre ce bill en deuxième lecture.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.

M. Ronald Tétrault

M. TETRAULT: M. le Président, quand j'ai pris connaissance du projet de loi 34, j'ai été fort surpris de sa teneur, surtout en sachant que le futur ministre de l'environnement — si une telle chose vient à se faire dans notre Parlement — a assisté à plusieurs conférences, à New York, par exemple, si je ne me trompe, et à Stockholm. Il a lu les rapports de ces conférences, du moins.

J'aimerais, M. le Président, pour commencer, lire un petit article qui a été rédigé par le Dr Paul Ehrlich, de la section de biologie de l'université de Stanford. Je crois que le député de D'Arcy-McGee le connaît très bien. Il commence son article en disant: "Notre planète affronte une crise d'une ampleur véritablement atterrante. Les biologistes et les experts en matière de population parlent de la mort de la terre. Des avertissements ont été lancés au sujet d'une famine mondiale menaçante qui tuerait des centaines et des millions d'hommes. Mais pourquoi? Où en sommes-nous donc à l'heure actuelle? A quel point cette crise présente-t-elle un caractère d'urgence? Qu'est-ce qui nous attend au juste? "

Le Dr Ehrlich, qui est aussi l'auteur d'un ouvrage intitulé "The Population Bomb" — l'explosion de la population — a particulièrement insisté sur la tragédie qui nous attend à moins que nous ne prenions dès maintenant des mesures énergiques. Ce spécialiste a condensé tous ces points dans une revue.

M. le Président, il parle de mesures énergiques. En regardant et en essayant de comprendre le projet de loi 34, je ne peux pas y voir ce qu'on appelle des mesures énergiques. M. le Président, comme le disait si bien le député de Berthier, le ministère de l'environnement ou la Régie des eaux de la province de Québec demande à certaines municipalités de faire des travaux assez importants pour contrôler la pollution.

Il se voit, du fait même que cette fameuse régie est sous l'autorité ou la responsabilité des

Affaires municipales, refuser en maintes occasions des subventions justement demandées pour faire spécialement ce que la Régie des eaux lui recommande.

Je pourrais citer le cas de la ville de Val d'Or, qui est dans mon comté. Lorsqu'on a parlé d'un projet d'épuration des eaux, complètement d'accord avec la Régie des eaux de la province de Québec, notre bon ministère des Affaires municipales y a opposé un non catégorique et on arrive avec une loi de l'environnement qui va prendre des sanctions contre ces mêmes municipalités.

On parle aussi dans ce fameux bill surtout des problèmes des municipalités. On semble complètement ignorer le fait que l'industrie cause 80 p.c. des agents de pollution dans la province de Québec. Je ne voudrais pas blâmer l'industrie globalement, mais je voudrais aussi, M. le Président, souligner quelques faits importants. Je vais prendre le comté d'Abitibi-Est, dans la région de Clova; il y a une compagnie qui s'appelle la CIP et qui présentement fait de très grands efforts pour dépolluer les eaux de la rivière Gatineau et je la félicite énormément de ce qu'elle fait.

D'autre part, M. le Président, je ne peux pas comprendre comment un ministère ou la Régie des eaux peut poursuivre une compagnie comme Domtar, qui a une usine à Portneuf, qu'on s'en aille devant la cour, que la compagnie soit accusée d'être un agent de pollution, soit trouvée coupable d'avoir pollué le Saint-Laurent et ne se voit imposer qu'une modique amende de $1 pour avoir pollué le Saint-Laurent. C'est faire de notre système parlementaire un système juridique complètement ridicule; c'est faire des lois qui n'ont absolument pas de dents, des lois qui ne peuvent pas freiner ou arrêter les différentes industries de polluer nos eaux et c'est cette loi qu'on demande aux parlementaires de voter, afin de pouvoir créer un ministère. Je ne sais pas quelle sorte de ministère on va créer, un ministère qui n'a aucun pouvoir, un ministère qui, nous dit M. Jolicoeur, qui est régisseur à la Régie des eaux, n'a que 80 personnes pour faire son ouvrage, alors qu'on estime qu'en 1981 on va avoir vérifié au moins 42 lacs et 42 rivières dans la province de Québec.

Vérifiez, M. le Président, si ces 42 rivières sont polluées ou non, je ne trouve pas que ce soit un travail assez important présentement, parce que personne n'a besoin de vérifier si le Saint-Laurent est pollué, il est pollué. Il arrive encore que M. Jolicoeur, dans le même projet de loi qui nous est proposé...

M. VEILLEUX: Ils vont jeter du chlore dans le fleuve pour le dépolluer.

M. TETRAULT: Avez-vous autre chose de plus intelligent à nous dire?

M. ROY (Beauce): M. le Président, si un député veut adresser la parole il doit d'abord être à son fauteuil et, deuxièmement, se lever.

M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas entendu le député de Saint-Jean.

M. ROY (Beauce): M. le Président, vous pourrez vérifier dans le journal des Débats demain matin; ses paroles y seront.

M. LE PRESIDENT: Je verrai le journal des Débats mais, pour le moment, je n'ai pas entendu le député de Saint-Jean.

L'honorable député d'Abitibi-Est.

M. TETRAULT: M. le Président, comme le disait M. Jolicoeur, dans un article paru dans le Soleil, la province de Québec s'apprête à créer un ministère de l'Environnement, un ministère sans fond. Il nous dit que présentement nous sommes au moins de dix à vingt ans en arrière de l'Ontario et qu'il faudrait au moins $600 millions pour rendre nos eaux potables ou notre pollution industrielle contrôlable.

Dans la région d'Abitibi-Est il y a une compagnie — j'ai déjà fait une plainte au ministère ou à la Régie des eaux — qui s'appelle Domtar, qui s'est installée dans un endroit extraordinaire, où il y a un beau grand lac qui s'appelle le lac Quévillon, et qui est un agent de pollution dans cette région. Les représentants du ministère y sont allés, les mêmes représentants sont revenus et rien n'est arrivé. On dit que les industries créent des emplois, je suis d'accord; on dit que l'industrie est l'épanouissement économique du Québec, je suis d'accord, mais quel prix les citoyens du Québec sont-ils obligés de payer pour avoir ces mêmes industries dans nos régions?

Le député de Rouyn-Noranda a fait état du cas de la mine Preissac aujourd'hui; il y a eu un groupe d'écologistes dans le Nord-Ouest québécois, spécifiquement dans la région de Val-d'Or, qui a porté plainte auprès du ministère. Le ministère nous a répondu qu'il ferait quelque chose. Il a fait quelque chose, il a interdit qu'on brûle les résidus de cuivre dans la région pour une période de trois jours. Trois jours après, cette compagnie, qui importait des produits américains pour les brûler dans la province de Québec, a continué exactement la même chose. Si le président voulait prendre le jet du gouvernement pour aller voir, il verrait qu'on le fait encore aujourd'hui.

On les avertis, comme des garçons dociles on leur a dit: Soyez beaux, soyez fins, ne faites pas cela, ça pollue l'air. Les gars répondent. D'accord, on ne le fera pas. Quand le représentant du ministère est parti on met encore le feu dans les résidus de cuivre et on pollue encore toute une région. Ce n'est même pas l'extrait de nos produits, c'est l'extrait de produits américains. Il n'y a absolument rien dans la loi, sauf une modique amende de $10,000, contre ceux qui polluent l'air ou les cours d'eau dans la province

de Québec. Je trouve ridicule, cette loi qui doit régler un problème d'importance mondiale, un problème qui existe dans la province de Québec comme partout ailleurs au Canada ou dans le monde, un problème qui est accentué tous les jours, un problème qui augmente de plus en plus spécifiquement dans nos grands centres. Lorsqu'on dit qu'à une compagnie X, agent de pollution, on imposera $10,000 d'amende afin d'arrêter sa pollution, c'est rire des parlementaires de présenter une telle loi qui parle d'une amende de $10,000.

J'aurais aimé que le futur ministre de l'Environnement — si telle chose vient à exister — mette dans son projet de loi un article qui dise clairement et précisément que toute compagnie qui pollue l'air ou l'eau est obligée de défrayer les coûts pour rectifier la situation.

Qu'une compagnie comme Domtar qui pollue une rivière entière est obligée de payer pour dépolluer les eaux. On aurait eu une loi avec des dents, une loi applicable au Canada. Dans ce même bill, on arrive à un article où il est dit, et je ne le comprends pas encore, que le ministre, après avoir averti, a encore une période de quinze jours pour avertir de nouveau la personne. Est-ce que c'est une loi ou pas? Est-ce que c'est une loi pour régler un problème ou si c'est une loi pour jeter de la poudre aux yeux de la population du Québec afin de pouvoir dire: finalement on a une loi sur l'environnement, une loi qui est peut-être semblable à celle des produits pétroliers dans la province de Québec? Exactement neuf mois après, on nous donne la règlementation.

M. le Président, ce projet de loi, je suis complètement d'accord qu'il doit exister dans notre belle province. Je suis complètement d'accord que nous en avons absolument besoin pour faire quelque chose. Nos cimetières d'autos, les montagnes de déchets qui existent, nos compagnies qui font la vente aujourd'hui et qui emballent toute leur marchandise sont des agents de pollution. Nous leur disons de contrôler la pollution. Pourquoi le gouvernement et le ministère n'essaient-ils pas de créer une industrie pour réutiliser ces mêmes déchets? Quelque chose qui va finalement enlever ou freiner la pollution dans notre belle province de Québec. Mais il n'y a absolument rien. On ne parle même pas de cela. On dit peut-être... Cela me fait penser à certains politiciens. Peut-être oui... Peut-être sur la clôture... les deux oreilles à terre et il n'y a rien qui bouge.

Donc, je crois que cette loi peut devenir bonne. J'espère de tout coeur que le ministre va apporter des amendements à cette loi, qu'il va apporter quelque chose de tangible, quelque chose dont on pourra se servir pour la population et contre un groupe d'agents polluants tels les industries, les municipalités. On a des experts ou des présumés experts en télévision, comme le disait le député de Berthier, qui se promènent autour des chalets et disent que les fosses septiques ne sont pas bonnes. C'est un grand agent de pollution de nos lacs, d'accord. Je crois que le problème est minime quand on connaît le problème majeur de la province de Québec. Ce sont les centres où il y a beaucoup de population, les centres industrialisés, et c'est à ces endroits qu'il faut corriger l'agent de pollution et non dans les petites campagnes.

On a un projet dans le Nord-Ouest québécois qui s'appelle le fameux projet du développement de la baie James. Ce développement vient de commencer et déjà la rivière Bell, qui est située dans Matagami, avec le lac Matagami, est déjà polluée. Qu'est-ce que le gouvernement fait pour arrêter cette pollution? C'est son propre projet. Ce n'est pas le projet du voisin. Ce n'est pas le projet de l'Ontario. Ce n'est pas le projet de la Domtar ou de la CEP ou de n'importe quelle autre compagnie, c'est le projet du gouvernement et il est lui-même l'agent polluant principal qui pollue les eaux de la rivière Bell et du grand lac Matagami. On va continuer le développement de ce projet et on va finalement polluer le bassin de la baie James où il y a encore, dans un rayon de 50 milles, de l'eau potable, de l'eau qui n'est pas polluée. Lorsque ce fameux projet sera terminé, on va dire qu'on a pollué, mais on a une loi de l'environnement qui n'a absolument pas de dents.

On ne peut pas l'empêcher, parce que c'est la technologie qui avance. Il ne faut pas faire autre chose. Je crois que le ministre et le vice-premier ministre devraient s'arrêter et regarder les problèmes. Dans la Gaspésie, où c'est plus vieux que le Nord-Ouest québécois, Dieu sait combien les rivières sont polluées et combien les compagnies continuent encore les mêmes efforts qu'elles ont faits dans les années passées.

M. BIENVENUE: Elles sont les plus belles.

M. LEVESQUE: Ce sont les plus limpides et les moins polluées du monde.

M. BIENVENUE : Les saumons y vivent avec allégresse !

M. TETRAULT: Après avoir écouté ces interventions, M. le Président, disons que ce sont les moins polluées.

Donc, cette loi ne donne absolument rien. Le principe est épatant et peut apporter quelque chose. Mais, lorsqu'on lit ce qui est écrit dans les 126 articles, on s'aperçoit qu'il n'y a pas grand-chose. On s'aperçoit que les municipalités seront encore pénalisées. Ce sera encore les municipalités qui seront empêchées, par le ministre des Affaires municipales, de poursuivre les développements nécessaires. Elles vont être punies. On voit encore que les grosses compagnies, et peut-être les fournisseurs de fonds du Parti libéral ne seront pas touchés. Merci.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Dubuc.

M. Roch Boivin

M. BOIVIN: M. le Président, il serait normal de reconnaître l'effort de participation de l'honorable ministre d'Etat dans l'élaboration de ce projet de loi no 34 sur la qualité de l'environnement. Il a tenté de coordonner les fonctions et les pouvoirs départis aux différents ministères, régies, commissions et corporations.

La grande question qui se pose maintenant serait qu'il nous dise dans quel cadre administratif il veut les placer, c'est-à-dire que le gouvernement devrait nous faire connaître, dès à présent, si la lutte contre la pollution devrait se faire au sein d'un ministère, d'une régie, d'un service ou d'un office.

Lorsqu'on nous dit qu'un ministre sera désigné par le conseil des ministres, doit-on comprendre que nous assisterons à la naissance d'un superministère conduit par un superministre qui regroupera sous un même toit toutes les fonctions et responsabilités envers la qualité de l'environnement? S'il en est ainsi, qu'en sera-t-il du ministère du Travail avec ses lois du travail et son code du bâtiment? Qu'adviendra-t-il du ministre des Affaires municipales avec ses directions, ses institutions municipales qui relèvent de lui avec des pouvoirs délégués? Le ministre des Affaires sociales, qui a pour devoir de protéger la santé publique, pourra-t-il encore exercer son pouvoir de surveillance? Conserve-ra-t-il son pouvoir d'émettre des ordonnances comme il l'a fait jusqu'à aujourd'hui? Que sera-t-il ce ministre éventuel? Quelle structure soutiendra ses efforts et dirigera son cheminement?

M. le Président, si tel n'est pas le cas, s'il ne s'agit pas d'un superministère, il serait possible, selon les élaborations du projet de loi no 34, que l'on désigne tantôt l'un, tantôt l'autre des ministres comme responsable de l'application de cette loi. Si importante qu'elle soit, elle ne trouverait ses assises nulle part.

Pourtant, nous avons tous été les témoins ébahis de cette pérégrination du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports. Il a été ballotté d'un ministère à l'autre, subissant les conceptions différentes des divers milieux où il devait échouer. Il n'a guère reçu d'autre traitement que celui qu'on offre d'urgence à un naufragé.

M. le Président, le ministre que l'on a chargé de la responsabilité de l'élaboration de ce projet de loi a eu tort de ne pas profiter de l'occasion que lui a offerte l'Assemblée nationale d'aller en commission parlementaire avant la deuxième lecture. Il n'en serait revenu que plus fort de l'appui d'organismes qui seraient pour lui des alliés dans sa lutte à entreprendre contre la pollution, pour le bénéfice de l'oeuvre qu'il veut accomplir, c'est-à-dire bâtir l'environnement idéal pour la société d'aujourd'hui et de demain.

M. le Président, sa méthode de travail est bien différente de celle du ministre des Affaires sociales, qui apporte pourtant d'importantes législations. Lui, il s'évertue à réveiller et même à créer des sociétés de participation qu'il rencontre en commission parlementaire avant la deuxième lecture. Elles lui fournissent de substantielles corrections au point d'obliger souvent la réimpression.

Je sais que le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement est attaché au ministère des Affaires municipales, dont le titulaire est le ministre du bill 48, le ministre du bill 20 et le ministre du bill 276. Il est à se demander s'il n'est pas lui-même une malheureuse victime de la pollution de son environnement.

M. le Président, je sais que le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement a beaucoup voyagé. Je l'invite à lire le journal des Débats. Il comprendra peut-être mieux ce qui a conduit son ministre dans l'impasse qui, aujourd'hui, ébranle son gouvernement.

Le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement, dans ses voyages multiples et à long cours, qu'a-t-il trouvé de profitable pour l'élaboration de son projet de loi? N'a-t-il pas contribué à semer davantage la panique pour une cause — qu'on le tienne pour acquis — qu'on est en train de transformer en mythe? Si le ministre d'Etat responsable de la qualité de l'environnement ne conduit pas cette lutte à la pollution d'une façon raisonnable et raisonnée, il pourrait être jugé comme le pourvoyeur éhonté d'une société industrielle avide de profits rapides pour laquelle il sacrifierait une société de consommation impuissante.

Je comprends bien mal qu'on impose au profit d'une société industrielle un montant d'environ $500 à $600 à tous les automobilistes pour installer sur un véhicule un système antipollution lorsque ce véhicule aura à circuler sur 90 p.c. des territoires où cela ne comporte aucun danger.

Je comprends aussi bien mal tout ce gaspillage qu'on impose aux municipalités pour le paiement de certains équipements inutiles, pour le peu d'efficacité de la disposition finale des eaux usées. Les matières organiques qu'elles apportent dans une proportion de dilution normale, je le concède, entrent normalement dans les cycles biologiques.

A la suite d'une question que je posais un jour privément à un ingénieur qui se préoccupe particulièrement de pollution, mes problèmes de conscience comme maire d'une municipalité assez importante se sont dissipés.

Il me disait que les eaux usées comportaient une partie de pollution pour 500 parties que pouvait apporter dans le même cours d'eau la pollution industrielle. Devant ces faits, à savoir que diverses positions devraient être prises à des lieux différents, pourquoi cette déclaration de guerre totale et générale contre tous et partout à la fois, en ramenant le pouvoir de règlementation à l'exécutif de la province?

Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas

confiance aux municipalités qui ont oeuvré de façon extraordinaire dans ce domaine sous l'oeil vigilant des ministères de qui relevaient les questions en cause? Par exemple, la Communauté urbaine de Montréal a édicté trois règlements concernant la pollution de l'air. La ville de Québec a édicté trois règlements sur la pollution par le bruit, les règlements 1083, 1548, 1869 et deux règlements sur la pollution de l'atmosphère, numéros 1643 et 1750.

Elles n'ont pas attendu le gouvernement pour agir. Dans bien d'autres municipalités, on n'a pas à souffrir d'imposition de réglementations qui ne pourraient qu'apporter tout un gaspillage inutile. L'aide que devraient apporter les gouvernements supérieurs pourrait être dans le domaine technique et financier.

Dans l'éventualité du manque d'une municipalité à édicter des règlements appropriés pour la qualité de l'environnement, le ministre des Affaires sociales n'a qu'à édicter par ordonnance qu'on rappelle inévitablement la municipalité à la raison. Je conçois très mal qu'une réglementation parte du gouvernement de la province, car cette règlementation, si on vise à l'uniformité, apportera un gaspillage inutile pour des traitements non conformes à la réalité.

Quel que soit le sort qu'on réserve au projet de loi no 34, qu'on le confie à un service du ministère d'un ministre actuel ou d'un ministre éventuel ou à une régie, je voudrais dire un mot du directeur dont on prépare l'avènement comme d'un messie.

Le député de Maskinongé a longuement parlé de ces 90 pouvoirs qu'on réclame pour lui de l'Assemblée nationale, pouvoirs à la fois exécutifs et judiciaires. Ce personnage que bâtit la loi no 34 serait incontestable, et de plus on le voudrait incontesté.

Cette espèce d'antagoniste de l'ombudsman n'aurait tantôt d'égal que son ministre, tantôt que son juge. Il serait à la fois dénonciateur, juge, exécuteur des hautes oeuvres. Il serait bien digne d'un régime de colonels. Ou plutôt aurait-on trouvé ce personnage tout bâti au fond du moyen âge qu'on nommait l'inquisiteur?

M. LEVESQUE: Ce sont vos recherchistes qui commencent à faire leurs griffes.

M. PAUL: C'est plus positif que votre prédécesseur.

M. BOIVIN: II remplacerait tantôt les élus du peuples, ministres, députés, maires et conseillers municipaux, tantôt les consultants spécialistes en finances, en administration, en urbanisme et en génie. A bien y penser, il faudra revenir aux convictions du député de Maskinongé: Ce projet de loi est à repenser. De la façon dont le ministre qui en est responsable est engagé, je compte sur le leader du gouvernement pour le laisser mourir de sa belle mort avec la fin de la session, pour le plus grand bien de la société québécoise.

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de la loyale Opposition.

M. PAUL: C'est beau, ça.

M. LEVESQUE: Le député de Maskinongé a déjà parlé comme chef de parti.

M. Gabriel Loubier

M. LOUBIER: J'avais craint, pour un instant, M. le Président, que vous...

M. LEVESQUE: Pas comme député, par exemple.

M. LOUBIER: ... ne fassiez un lapsus, en disant la "royale" Opposition.

M. le Président, après les exposés marqués au coin d'une logique qu'on pourra reconnaître assez facilement qui ont été, faits d'une façon très objective par tous mes collègues, je pense que je dois souligner ce travail, cette participation ou cette contribution tant du député de Maskinongé qui a battu la marche que des autres députés qui lui ont succédé. Je pense que c'était une façon extrêmement constructive et positive de faire en sorte que des projets de loi d'une nature aussi importante puissent être scrutés, analysés de façon aussi forte que celle qu'ont utilisée les députés d'Unité-Québec.

Cela m'amène, M. le Président, avec regret, à signaler à votre attention le désintéressement assez dramatique et assez mystérieux témoigné par les députés ministériels sur un projet de loi d'une telle envergure. Il y a certains députés ministériels qui sont intervenus dans ce débat, mais avec tellement peu de préparation, tellement peu de sérieux sur l'essence même du projet que l'on a cru bon tout simplement d'encenser le ministre responsable de la qualité de l'environnement. Je me souviens, entre autres, d'une incartade du leader parlementaire qui, d'une façon que je qualifierais de caricaturale, est venu essayer d'exposer à cette Chambre la qualité du ministre plutôt que la qualité du projet de loi que présentait le ministre en cause.

Dès le début de mes remarques, j'aimerais signaler que, pour ma part, j'ai infiniment de respect, d'amitié et de considération pour le député de D'Arcy-McGee. En passant, j'ai trouvé un peu déplacée et incongrue l'intervention du député de Bonaventure, parce qu'il voulait nous mettre dans une position telle qu'en critiquant ce projet de loi, c'était, à toutes fins pratiques, faire une attaque ad hominem et personnelle à l'endroit du député de D'Arcy-McGee.

Or, je pense que notre rôle de parlementaire se situe bien au-dessus des hommes et des personnalités, avec leurs défauts ou leurs qualités. Nous sommes ici pour étudier un projet de loi qui aurait pu être un des premiers jalons dans cette nouvelle politique à court terme, à moyen terme concernant la pollution.

C'est devenu un cliché de dire que le

problème de la pollution est extrêmement important et plus particulièrement dans le Québec. Je pense que c'est une préoccupation universelle. Il y a même eu des congrès internationaux; entre autres en 1967, à Washington, un congrès eut lieu qui s'intitula: "Water for Peace". Il regroupait 80 ou 90 Etats du monde entier, pour discuter de ce problème qui devenait de plus en plus grave, de plus en plus aigu sur tous les continents. Or, M. le Président, au Québec plus spécifiquement, il ne faudrait pas verser dans cette psychose lorsqu'on parle de pollution, une psychose qui est aujourd'hui en train de contaminer les esprits mêmes des Québécois. On présente ce spectre de la pollution comme étant une forme de bonhomme sept heures, une sorte de cancer qui est en train de tout détruire sur les plans social, culturel, physique, comme le mentionnait le député de Chicoutimi tout à l'heure.

Oui, c'est un problème important; oui, il faut poser des gestes concrets; oui, il est essentiel d'apporter des lois qui ont une répercussion à court terme, à moyen terme et à long terme. Mais, de grâce, n'en faisons pas une psychose collective et tentons plutôt d'analyser le problème selon ses dimensions, avec ses répercussions et ses conséquences tant sur le plan social que sur le plan culturel et économique.

Je dirai que c'est un projet de loi extrêmement décevant. On en aurait attendu, comme premier jalon, beaucoup plus. On aurait attendu beaucoup plus de cohérence, de logique, de sens pratique dans la première loi qui nous est présenté par le député de D'Arcy-McGee. C'est une loi décevante et les raisons ont été énumérées par tous mes collègues et les autres députés qui ont pris la parole. Je voudrais éviter de répéter toutes les raisons qui font que cette loi est décevante pour les Québécois. Mais je voudrais succintement essayer de faire une synthèse de tout ce qui a été dit, pour expliquer, premièrement, que la structure du service est absolument absente dans le projet de loi, structure qui est imperceptible à ce stade-ci de la présentation du projet de loi.

Je voudrais également dire qu'il y a une absence d'imagination qui fait défaut dans ce projet de loi, qu'il n'y a absolument rien qui nous indique des prévisions, des coûts de mise en application des objectifs énumérés dans ce projet de loi. Je voudrais en faire une critique positive et, en second lieu, tenter d'exposer au ministre quelle est notre position à nous, de l'Unité-Québec, de l'Opposition officielle.

Je voudrais d'abord faire cette critique fondamentale du projet de loi 34 sur la qualité de l'environnement. Premièrement, faiblesse extrême de la structure juridique, sujet qui a été abordé par le député de Saint-Maurice. On me permettra de dire de façon résumée et succincte que d'abord on ne retrouve dans le projet de loi aucune définition fondamentale de la structure. Je pense que le ministre le reconnaîtra très facilement. Il y a absence complète d'identification sur le plan juridique de la structure fondamentale de ce service, de ce simulacre de ministère ou de cet embryon de régie, on ne le sait pas encore.

On se demande même et on est en lieu de se demander si ce projet de loi marque un premier pas ou marque le pas définitif pour la création d'un ministère de l'environnement. Est-ce que ce projet de loi profile la naissance d'un service quelconque, encore mal défini et encore là imperceptible? Ou est-ce qu'on débouchera sur une structure qui s'appellera, comme le disait tout à l'heure avec beaucoup d'à-propos le député de Dubuc, une régie? Nous nageons dans le vague le plus complet quant à la structure même, au pivot organique de ce service ou de cette loi qui devrait déboucher sur des politiques pour combattre la pollution et en même temps pour prévenir la pollution.

La deuxième critique que je voudrais formuler est la suivante: II y a un accent extrêmement embarrassant, énigmatique de mis sur la répression de la pollution. Je pense que c'est le député de Maskinongé qui a souligné avec beaucoup d'intelligence et beaucoup de sérieux que ce projet de loi défend de faire telle ou telle chose. On ne peut pas faire telle chose, vous ne pourrez pas faire telle autre chose, etc. C'est une litanie de "ne pas faire quelque chose"; je pense qu'encore là nous nous noyons dans une loi où partout il y a une saveur de négativisme et où on ne voit rien de positif, d'audacieux et qui fasse appel à l'imagination pour des politiques cohérentes.

Il n'y a aucune mention de la pollution existante. Il n'y a aucune mention de l'environnement. Il y a une définition très étroite. Par exemple, il y a une chose qu'on oublie complètement dans ce projet de loi qui, à mon sens, aurait dû embrasser tout le champ de la pollution et cerner tous les éléments polluants; on ne retrouve absolument rien en effet concernant les contrées sauvages, les lacs, la rénovation. Je pourrais en citer à l'infini.

Il y a une troisième critique qui me paraît de bon escient et qui devra, à mon sens, faire réfléchir le député de D'Arcy-McGee, qui est un homme pondéré, sérieux, un homme qui veut, qui a de la bonne volonté; il y a une autre critique que je voudrais lui formuler concernant le projet de loi no 34. Il y a dans ce projet de loi la saveur assez forte d'une solution bureaucratique de nos problèmes. A ce moment, loin de moi l'idée de vouloir condamner le travail des fonctionnaires ou des conseillers qui ont rédigé le projet de loi, parce que c'est le devoir et le rôle des fonctionnaires, des experts et des conseillers d'apporter au ministre, aux politiciens et au gouvernement des solutions idéales et souvent des solutions idéalisées. Mais il appartient aux politiciens, à ceux qui sont les traits d'union entre le peuple et ce cénacle de penseurs, il appartient aux politiciens législateurs d'humaniser et de rendre réalistes les

solutions ou les projets de loi qui sont soumis par ces experts.

Or, ce n'est pas dans le sens péjoratif que je dis que c'est une solution bureaucratique de nos problèmes. On ne connaît même pas le rôle du directeur du service, si ce n'est qu'il est une espèce de garde-chiourme. On ne sait pas trop quel sera son rôle, très mal défini, très mal articulé, et ce qui se passera à ce moment. On ne le sait pas. Je trouve que c'est une solution bureaucratique pour règler les problèmes de pollution et en même temps arriver avec des politiques audacieuses et créatrices pour prévenir la pollution, je dis qu'on y retrouve une règlementation excessive. Ce serait, à toutes fins pratiques, donner un chèque en blanc au ministre, malgré sa bonne volonté, malgré l'intégrité qu'on lui reconnaît, malgré toutes ses qualités qui ont été énumérées de façon un peu trop exhaustive peut-être par le leader-parlementaire. Cela portait même à peut-être ridiculiser le caractère très sérieux du ministre. Mais ce serait donner un chèque en blanc au ministre, sans savoir exactement quelles seront les orientations, quel sera le rôle de ce directeur, quel sera véritablement le rôle également du ministre lui-même et sa responsabilité quelle sera, vis-à-vis de ses autres collègues, son autorité pour l'application des politiques qu'il voudrait mettre de l'avant.

Il y a un silence assez mystérieux autour de ces précisions qui auraient été, à mon sens, absolument essentielles pour donner de la valeur et de l'impact à ce projet de loi.

Il y aurait une quatrième critique que je voudrais formuler, M. le Président. Il n'y a aucune analyse des rapports avec les lois et les règlements existants. Il n'y a aucune relation de signalée, où que ce soit, dans ce projet de loi, dans le préambule, donnant, par exemple, une certaine autorité au ministre éventuel de la qualité de l'environnement, pour essayer de mettre de la cohérence dans toutes les autres lois ou tous les autres règlements qui existent, afin que le ministre puisse véritablement faire en sorte qu'il ait le contrôle de tous les aspects, toutes les implications ou tous les éléments qui, à quelque degré que ce soit, rejoignent cette préoccupation de pollution.

Je pourrais dire que le ministre aurait dû nous signaler, par exemple, qu'il y avait une collection de lois et de règlements éparpillés ailleurs. Je vais lui en citer : les lois de l'hygiène publique qui relèvent du ministère des Affaires sociales; les règlements provinciaux d'hygiène qui relèvent du ministère des Affaires sociales; le code de l'habitation, le code des municipalités, la Loi des cités et villes. Est-ce que le ministre pourrait nous donner l'assurance qu'il y aura, à ce moment-là, une codification ramenée sous son autorité pour que véritablement il puisse avoir une marge de manoeuvre assez confortable et assez sécurisante pour assurer une action positive dans tous les secteurs? Silence complet sur ce plan, à mon sens extrêmement important.

Le ministre aurait eu, peut-être, intérêt — et cela aurait renseigné davantage, je pense, les membres de cette Chambre ou l'Opposition — à se référer à la solution fédérale. Il aurait constaté qu'il y a eu inscription dans une loi-cadre, la loi de 1970, sur l'organisation du gouvernement, la partie I, ministère de l'Environnement 1970, 19-20 Elizabeth II, chapitre 42, des lois dont le ministre se voit confier l'application. Je pourrais faire l'énumération de toutes ces lois qui ont été ramenées sous la coupole, l'autorité, l'hégémonie du ministre qui avait la responsabilité de la qualité de l'environnement.

Or ici, au Québec, comme premier geste concret que l'on pose, on fait abstraction de toute cette coordination qui est absolument essentielle pour que véritablement on ait des structures et des politiques qui ne viennent pas en contradiction sur ce problème.

Une autre critique. Je pense qu'elle est sérieuse. Les députés de Chicoutimi, de Montmagny, de Berthier l'ont signalé. C'est qu'il n'y a pas d'incitation. Il n'y a rien qui fait appel, ou qui stipule, ou qui mentionne même la participation des citoyens dans le cadre de toute cette politique nouvelle antipollution ou pour prévenir la pollution.

Il n'y a eu, à mon sens, aucune participation populaire au préalable et il n'y en a pas de prévue après l'adoption de ce projet de loi. Il n'y a également aucune précision du rôle du conseil consultatif, de sa composition, de son autorité. Je pense que le ministre aurait dû nous signaler, au moins nous profiler quel serait le rôle de ce conseil, sa composition, etc.

Une sixième critique, M. le Président, c'est qu'on n'a prévu aucune disposition quant à l'éducation populaire. Le ministre fera-t-il appel aux services du ministère de l'Education? Le ministre fera-t-il appel à Radio-Québec? Quels seront les véhicules d'information, de sensibilisation dont se servira le ministre?

Une septième critique, M. le Président, il n'y a aucune disposition... Il me reste trois minutes, à ce qu'on me dit.

M. LEVESQUE: Je viens de demander...

M. BURNS: II a commencé à dix heures et demie.

M. LEVESQUE: A dix heures vingt-huit.

M. LOUBIER: M. le Prérisent, je pense bien que le leader parlementaire n'est pas parcimonieux au point de priver...

M. LEVESQUE: En temps ordinaire, non, mais ce soir, oui.

M. PAUL: Ce soir, oui?

M. LEVESQUE: Oui.

M. PAUL: M. le Président, un instant. Quand

j'ai parlé, en deuxième lecture, il y a eu consentement unanime pour que je dépasse mon temps. Par conséquent, je n'ai pas parlé, à ce moment-là, au nom du chef du parti.

M.LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! Puis-je demander au secrétaire général adjoint à quelle heure le député de Bellechasse a commencé?

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: A dix heures vingt-sept.

M. LE PRESIDENT: A dix heures vingt-sept. Y a-t-il consentement ou non?

DES VOIX: Non! UNE VOIX: Oui!

M. LEVESQUE: Une minute, d'accord. Une minute. C'est pour qu'il finisse ses phrases, après tout. C'est tellement intéressant.

M. PAUL: Nous allons prendre cela en banque, M. le Président.

M.LOUBIER: Disons que je retiens les commentaires qui s'imposeraient, en l'occurrence.

M. LEVESQUE: ... il y en a qui abusent du temps de la Chambre.

M. LOUBIER: Cela ne compte pas sur mon temps, M. le Président. Je passe sous silence ce que je voulais dire.

M. le Président, quelle est notre position à nous, d'Unité-Québec et de l'Opposition?

L'environnement, on le reconnaît de tous les côtés de la Chambre, c'est trop précieux pour que sa qualité soit régie par une loi qui me paraît aussi incolore, inodore, je dirais même insipide, aussi faible et aussi bureaucratique. 1) Nous proposons d'abord la création d'un véritable ministère ou encore d'une régie de l'environnement capable d'assurer de façon fonctionnelle, de façon organique et dynamique la qualité de l'environnement à tous les niveaux et sur tous les territoires au Québec, avec une autorité telle que l'on puisse, vis-à-vis des autres ministères, faire justement cette coordination qui s'impose absolument et avoir un leadership via un ministère ou une régie vis-à-vis de tous les autres ministères du gouvernement. 2) La création de conseils consultatifs nationaux et régionaux avec des pouvoirs bien définis sur le modèle proposé par un groupe intermédiaire en Californie, par exemple. Et c'est là qu'on rejoindrait cette préoccupation de participation, de sensibilisation au niveau des localités, au niveau des régions. 3) La création de grandes directions. Par exemple une direction de recherche sur l'environnement, une direction de l'amélioration de l'environnement. Une autre section sur le contrôle, l'analyse de la pollution. Je vais plus rapidement, M. le Président, même si c'est intéressant. 4) Nous proposons l'adoption par l'Assemblée nationale de certains amendements aux lois actuelles qui traitent de pollution, sans pour cela écarter les lois existantes. La solution serait que le projet de loi énumère toutes les lois, ou parties de lois, et tous les règlements déjà édictés qui seraient sous la responsabilité du ministre éventuel de l'environnement.

Exemple: la Loi de la conservation de la faune et d'autres lois qui seraient sous l'autorité, le leadership du ministère ou de la régie. 5) La redéfinition ou tout simplement la définition du rôle du directeur pour en faire vraiment le protecteur ou l'ombudsman de la qualité de l'environnement au Québec.

Surtout, et je termine, tenir compte des disparités régionales, des conditions régionales dans la conservation de l'environnement pour édicter les règlements. On ne pourra jamais traiter la région métropolitaine de Montréal par voie de règlements de la même façon que l'on pourra traiter la région de la Gaspésie, par exemple, et on ne pourra pas imposer selon la capacité de payer des gens de la Gaspésie...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

M. LOUBIER: ... des fardeaux à ces municipalités comparables à ceux qui seraient imposés à la ville de Montréal, puisque le degré de pollution, d'abord...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Vous ne semblez pas vous aventurer vers une conclusion quelconque. Je n'ai aucune objection... le temps est expiré depuis quatre minutes. Est-ce qu'il y a consentement unanime, oui ou non?

M. LAURIN: Non.

M. GIASSON: On peut s'en aller en Abitibi tout de suite parce que Montréal et la Gaspésie...

M. LEVESQUE: Nous avons donné notre consentement tout à l'heure et nous ne le renouvelons pas.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement, oui ou non?

M. LEVESQUE: Non.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: Je remarque que le leader parlementaire a dit non.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président...

M. LEVESQUE: On voulait savoir...

M. PAUL: II va parler maintenant. La semaine prochaine.

M. LEVESQUE: J'ai encore une liste à donner au député de Maskinongé des gens qu'il pourrait faire revenir. On a tous les noms et on va les lui donner après.

M. PAUL: Pardon?

M. LEVESQUE: Les noms de ceux qu'il pourrait faire revenir.

M. PAUL: Cela vous inquiète!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai reconnu le très honorable député de Maisonneuve.

M. Robert Burns

M. BURNS: Je remercie le très honorable président. M. le Président, il est très difficile pour un député de l'Opposition d'être contre un projet de loi qui a pour objet de confier à un ministre la responsabilité de préparer et de mettre en oeuvre une politique de protection de l'environnement, d'instituer un conseil consultatif de l'environnement et d'attribuer au directeur des services de l'environnement des pouvoirs de surveillance et de contrôle de la qualité de l'environnement.

M. le Président, il est très difficile dans ces circonstances d'être contre un projet qui a soi-disant pour object les choses que je viens de lire et qui apparaissent sous les notes explicatives du projet de loi. Sauf — et j'ouvre une parenthèse à ce sujet-là — que je me demande si on n'abuse pas très souvent de ces notes explicatives, si on ne nous donne pas dans les notes explicatives des objets de projet de loi, des buts ou des principes de projet de loi qui n'ont dans le fond aucune véritable résonance à l'intérieur du projet de loi.

Il y a une autre parenthèse que je fais, parce que le député de D'Arcy-McGee, semble-t-il, a la chair très tendre, à un point tel qu'il a été obligé, peut-être pas lui mais en tout cas son leader parlementaire s'est senti obligé avant-hier de venir à sa rescousse et de dire: Ce projet de loi-là est d'une qualité exceptionnelle, parce que, regardez cet homme, comme il a des qualités exceptionnelles. C'est une chose, M. le Président, que l'autre soir — et je le dis — au début j'ai reconnue sans aucune restriction: le député de D'Arcy-McGee n'est pas du tout en cause dans ce projet de loi.

Nous admirons le député de D'Arcy-McGee, nous croyons que c'est un homme qui a des qualités extraordinaires et c'est une chose — remarquez-le — que je peux dire en toute liberté, voyant le résultat des dernières élections en ce qui concerne le candidat de notre parti dans D'Arcy-McGee, mais probablement que ce sera un signe des élections prochaines dans D'Arcy-McGee. M. le Président, ça n'a strictement aucun rapport, c'est ce que je veux dire tout simplement au départ, toute critique que nous puissions faire à l'égard du projet de loi n'a rien à faire à l'égard du député de D'Arcy-McGee, du ministre qui attache son nom à ce projet de loi.

Cependant, M. le Président, je pense que le projet de loi — et je reviens à ce que je disais tantôt — quand on lui donne un objet aussi vaste et aussi grand que celui-ci, il est très important de voir s'il pourra remplir les buts que du moins on tente de laisser croire à la population qu'il remplira. Je ne veux m'atta-cher qu'à un seul des aspects de ce projet de loi. Sans citer d'article, nous avons dans ce projet de loi un énoncé qui se trouve à l'article 119, qui dit que la couronne et ses représentants — on est encore "poigné" avec cela, malheureusement, en droit actuel, la couronne, c'est le gouvernement — qui nous dit donc que la loi s'applique au gouvernement et à tous ses ministres et organismes. Je ne cite pas d'article, M. le Président, j'ai tout simplement référé au bout dans lequel...

UNE VOIX: C'est pour répondre au député de Matane.

M. BURNS: D'ailleurs, M. le Président, je pense que vous avez admis depuis le début cette façon de faire. Je veux tout simplement orienter un peu la discussion. Je suis d'accord pour dire que cette loi permet que le gouvernement et les autres organismes qui en répondent soient soumis à ce projet de loi. Tout le monde sait —je n'ai pas besoin de donner un cours très élaboré là-dessus — que la loi d'interprétation nous dit que, si des statuts ne mentionnent pas spécifiquement les dispositions que je viens d'énoncer, ces statuts ne s'appliquent pas au gouvernement.

M. PAUL: M. le Président, sur un rappel au règlement, je m'excuse auprès de mon collègue. Si le leader du gouvernement avait voulu tout à l'heure donner liberté de parole au chef de l'Opposition, nous aurions consenti à ce que les débats dépassent onze heures ce soir mais, dans les circonstances, devant l'agréable attitude du leader du gouvernement, je dois vous signaler qu'il; est onze heures.

M. BURNS: M. le Président...

UNE VOIX: II est à peu près onze heures.

M. BURNS: ... on me laissera, selon l'heure que vous voyez et selon l'angle où vous voyez l'heure, quand même la possibilité de demander l'ajournement du débat pour que je puisse continuer le brillant exposé que j'avais commencé à vous faire.

M. LEVESQUE: M. le Président, pendant que vous vous apprêtez à demander si cette motion est adoptée, je ferai simplement remarquer à l'honorable député de Maskinongé que le règlement m'indique que je dois prendre sa parole.

M. PAUL: C'est bien. Comme le leader semble d'une amabilité extraordinaire, est-ce qu'il irait jusqu'à nous informer des travaux que nous devrons envisager demain?

M. LEVESQUE: Cela dépendra des lois qui auront été adoptées.

Débat relatif aux questions orales Jeux d'hiver

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, messieurs. Je ne peux pas procéder, malheureusement, à l'ajournement de l'Assemblée, parce qu'en vertu de l'article 179...

M. PAUL: Pour les travaux sérieux, j'entends.

M. LE PRESIDENT: ... je dois donner la parole à l'honorable député de Portneuf. De toute façon, la motion est automatiquement adoptée en vertu du règlement. Je n'ai pas à la mettre aux voix. Le débat est nécessairement ajourné.

L'honorable député de Portneuf.

M. Antoine Drolet

M. DROLET: M. le Président, lors de la période des questions, hier après-midi, le ministre de l'Education et son adjoint parlementaire, responsable du haut-commissariat, ont reçu une série de questions concernant ce fameux Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports et plus spécialement sur la question qui fait les manchettes des journaux depuis quelque temps, soit l'abolition ou le retrait des Jeux d'hiver de 1972.

Il est curieux de voir, en 1972, le retrait de ces jeux, lorsque l'on sait que, l'année dernière, pour la première année, ces jeux ont été un véritable succès, puisqu'ils ont permis à un grand nombre de jeunes de faire du sport et surtout d'apprendre comment faire du sport à la veille des Jeux olympiques de 1976. Je trouve impensable que le gouvernement vienne nous dire en pleine Chambre, hier, que la seule raison qui l'empêche de faire ces Jeux d'hiver, c'est le manque d'argent. C'est toujours cette fameuse question du manque d'argent, alors qu'on sait bien que, pour un budget assez raisonnable, le haut-commissariat aurait pu certainement faire ces Jeux d'hiver de 1972. De là découle, je crois, la véritable question: Qu'est-ce qui se passe au haut-commissariat? Comment se fait-il qu'un front commun ait été formé justement pour le maintien de ces Jeux d'hiver?

Ce front commun groupe, à Montréal, toutes les fédérations de sports d'hiver? Il a fait parvenir au ministre de l'Education six télégrammes. On demandait: Qu'est-ce qui se passe? Comment se fait-il que les jeux d'hiver n'ont pas lieu? A chacun des télégrammes, un M. Gignac, secrétaire du ministre, a accusé réception mais il n'a jamais donné de réponse claire et précise. Qu'est-ce qui se passe encore une fois? Nous ne le savons pas. Tout ce que nous savons, c'est qu'il y a des démissions régulièrement, démissions, mécontentements dans ce haut-commissariat.

J'aimerais savoir, lors de la réplique de l'adjoint parlementaire, s'il peut confirmer l'existence de la lettre suivante, datée du 24 octobre 1972 et signée par M. Yves Bélanger. Selon plusieurs, il serait la cause de ce qui se passe présentement au haut-commissariat, c'est-à-dire qu'il ne se passe rien. Est-ce qu'il est véridique que ce M. Bélanger aurait fait parvenir au sous-ministre, M. Martin, une lettre datée du 24 octobre, demandant une transformation totale et même l'abolition de la Corporation des jeux du Québec, l'abolition de Mission Québec 76 — qui, d'après ce que nous avons vu dans les journaux, est un nid à chicane — et l'abolition de la CSQ? Nous aimerions savoir véritablement ce qui se passe et nous aimerions savoir quand le ministre ou son adjoint parlementaire mettra de l'ordre, comme il nous l'a dit lors de l'étude des crédits du ministère de l'Education lorsque nous sommes arrivés à l'article du haut-commissariat.

Les preuves sont maintenant faites. Il y a absolument rien qui bouge au haut-commissariat. On tourne en rond. Je ne veux pas accuser le député de Vaudreuil-Soulanges ni l'ancien responsable du haut-commissariat, le député de Fabre. Ils sont peut-être les deux seuls, dans le gouvernement actuel, qui connaissent ce que sont les sports et les loisirs. Mais ils semblent bloqués par quelqu'un. Si ce n'est pas un ministre, c'est peut-être la personne que j'ai nommé tantôt, du haut-commissariat. Il semblerait qu'il y a tout un dossier contre cette personne. Il y a certainement quelque chose qui bloque quelque part. Cela ne fait que tourner en rond. Il n'y a rien qui bouge. La preuve est que, dans tous les journaux, il n'y a pas une semaine qui se passe sans qu'on ait des nouvelles de cette inaction dans cet organisme du gouvernement.

J'aimerais savoir également du haut-commissaire s'il est vrai qu'il était prévu, au budget de cette année, un montant d'environ $100,000 pour les jeux d'hiver de 1972, comment il se fait qu'ils ne se font pas et où sont allés ces $100,000.

M. le Président, je termine en demandant au responsable du haut-commissariat de donner les véritables raisons pour lesquelles les jeux ne se font pas. Sinon, qu'il les fasse. Je lui demande

également de convoquer la fameuse commission parlementaire, afin que toutes ces fédérations puissent venir se faire entendre. Peut-être qu'à ce moment-là le chat sortira du sac. Le député...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. DROLET: J'avais ma montre, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Paul Phaneuf

M. PHANEUF: M. le Président, il est malheureux que vous soyez obligé de limiter ce débat à cinq minutes parce que je pense qu'il était très bien parti. On était en train de faire un excellent tour d'horizon d'une situation qui pourrait être, mais qui n'est pas tout à fait comme le député vient de la décrire.

Vous avez mentionné, dans votre exposé, les jeux d'hiver du Québec. Premièrement, il faudrait que vous soyez au courant que le gouvernement n'avait pas prévu les jeux d'hiver du Québec. Si on relit la correspondance qui s'est établie entre le haut-commissariat et la Corporation des jeux du Québec, qui a le mandat de tenir ou de ne pas tenir les jeux, vous verriez qu'en date du 20 avril 1972 — c'est quand même au printemps, tout de suite après l'acceptation du budget, débat auquel vous avez pu participer — on disait ceci: Lettre à M. Poisson, qui était alors le président: "Pour faire suite à notre discussion sur les Jeux du Québec, alors que vous avez déposé le rapport sur l'organisation des Jeux d'été de 1971, qui se sont tenus à Rivière-du-Loup, je vous confirme notre intention d'apporter un soutien financier à votre corporation pour la tenue d'une seule manifestation des Jeux du Québec par année".

Voici que le haut-commissariat se prononçait déjà, le 20 avril 1972, sur la tenue d'un jeu. A ce moment-là, le choix avait été fait, à savoir que c'étaient des jeux d'été. Donc, ce n'est pas une nouvelle pour la corporation, à ce stade-ci.

Sur le plan des budgets, c'est la même chose. Une lettre avait été adressée et signée par le ministre Cloutier, responsable du haut-commissariat, par le biais du ministère de l'Education, en date du 25 mai, expliquant exactement le budget et ce que le haut-commissariat a l'intention de donner comme argent pour organiser les Jeux du Québec, en 1972. Quand vous parlez des Jeux d'hiver de 1972, il faudrait peut-être apporter une petite correction. Ce seraient les Jeux d'hiver de 1973, s'ils avaient lieu, parce qu'on ne peut pas les tenir avant qu'il y ait de la glace, de toute façon.

Deuxièmement, Mission-Québec 1976. On en a beaucoup parlé. Cela fait suite à une recommandation d'un comité qui s'appelait

Comité-Québec 1976 qui a fait des recommandations et qui avait été mis sur pied à la demande même du haut-commissariat.

Faisant suite à ces recommandations, le gouvernement a institué ce qu'on appelle aujourd'hui la Mission-Québec 1976. De dire que tout va mal dans la Mission-Québec 1976 parce qu'une personne a démissionné, c'est aller un petit peu plus loin.

Il faudrait quand même questionner les fédérations impliquées au niveau des Jeux olympiques 1976 et qui correspondent aux fédérations qui sont financées par cette mission. Mais vous savez fort bien qu'après consultation avec la mission il y a déjà des fédérations qui ont obtenu l'argent nécessaire pour le développement d'élites pour obtenir une participation de 30 p.c. de Québécois dans les équipes canadiennes en 1976. Défi de la mission.

Troisièmement, l'autre sujet — parce que le temps passe quand même — vous mentionnez une lettre à M. Yves Bélanger qui est signée Yves Martin. Il est quand même normal pour des fonctionnaires dans une planification à court, à moyen ou à long terme de faire des suggestions à de hautes autorités dans le ministère. Dans ce cas-là, c'est exactement ce qui est arrivé.

Dès mon arrivée au haut-commissariat, j'ai parlé de consolidation des organismes existants. Donc il n'est pas question pour l'homme politique d'abolir quoi que ce soit actuellement, au contraire. Et la preuve est qu'actuellement on consolide ce qui existe. Même le haut-commissariat est en train de se consolider — quoi qu'on en pense — et pour le reste, à moyen et à long termes le gouvernement et les fonctionnaires peuvent quand même proposer des modifications et des changements dans des mandats que nous avons confiés et qu'ils nous reste à négocier dans un temps futur.

Dans un premier temps, les Jeux du Québec ont eu lieu à Chicoutimi. Cela a été un succès qu'on est en train d'évaluer. Mais aussi, un des mandats de la Corporation des jeux du Québec, c'est de nous donner quand même un rapport, pour que nous puissions, nous, les évaluer. Parce que j'aurai à répondre tantôt — ainsi que d'autres personnes — des deniers publics qui ont été dépensés pour tenir ces jeux. Et je n'ai pas encore le rapport final de la corporation.

Je sais qu'il y a des lenteurs parce que les gens sont un peu essoufflés. Je les ai questionnés. C'est beau de dire que ça ne tourne pas rond. C'est trop facile. Si vous aviez été à Chicoutimi l'été passé, vous auriez eu l'occasion de questionner les véritables animateurs sportifs des 15 conseils régionaux de loisirs. Et ils nous ont dit — je les ai rencontrés moi aussi, les 15, à ce moment-là — qu'ils étaient quand même un peu essoufflés. Pour eux, c'était important et ils ont le temps de réfléchir et de reprendre un peu leur souffle. Il faut quand même regarder quand tout ça a été créé.

Cela ne fait quand même pas dix ans. Il y a

quatre ans, il n'y avait rien; maintenant, il existe pas mal de choses. Cela a évolué, ça va continuer à évoluer. Tout n'est pas fait et j'espère que, dans un avenir rapproché, on aura franchi encore de grandes étapes.

Pour ce qui est de dire que tout va mal au Québec, lisez la Presse de ce soir. Le Québec a cinq ans d'avance sur la Colombie-3ritannique en ce qui a trait à l'athlétisme et vous savez quel parti est au pouvoir en Colombie-Britannique! Là-dessus, merci.

M. LEVESQUE: Tout en remarquant les applaudissements nourris à l'endroit du député de Vaudreuil, je fais la motion suivante: Qu'on ajourne les travaux de la Chambre à demain.

M. DROLET: Vous ne faites pas la suggestion qu'il soit nommé ministre?

M. LEVESQUE: C'est inscrit dans le journal des Débats. Pour répondre à la question du député de Maskinongé, il y a quelques instants, apparemment vous auriez reçu, si je comprends bien, non? Enfin, si vous recevez des avis, des demandes pour un débat d'urgence et que vous l'accordiez, ce sera ça. S'il n'y a pas de demande de débat d'urgence ou si une demande était refusée, à ce moment-là, nous ferions l'une des deux choses suivantes: soit continuer le débat sur la loi 34 ou encore procéder à la poursuite du débat sur le budget ou les deux à la fois.

M. BURNS: M. le Président, je ne sais pas comment on interprète le règlement...

M. LEVESQUE: Pardon?

M. BURNS: Je ne sais pas comment on interprète le règlement à ce sujet, mais, habituellement, une heure avant la fin de la séance — et je pense que, dans le règlement, on précise que c'est à cinq heures de l'après-midi — vous nous dites les avis de demandes de débats d'urgence qui vous ont été faits. Pour rassurer le leader parlementaire du gouvernement, je peux lui dire que j'en ai soumis une copie au président pour demain.

M. LE PRESIDENT: Le mardi ou le jeudi.

M. BURNS: Oui, c'est la directive que j'allais vous demander: qu'est-ce qui arrive de l'avis que je vous ai donné cet après-midi relativement à un débat d'urgence?

M. LE PRESIDENT: Je dois annoncer avant dix-huit heures le mardi ou le jeudi quels sont les débats qui pourront dépasser l'heure.

M. BURNS: Alors il n'y en aurait pas demain.

M. LE PRESIDENT: C'est le mardi et le jeudi, en vertu de l'article 179.

M. BURNS: Très bien, on va être fixé.

M. LE PRESIDENT: C'est le règlement qui est fixe.

M. LEVESQUE: Le débat d'urgence.

M. LE PRESIDENT: Non, non, on parle de...

M. LEVESQUE: Ah! du minidébat.

M. BURNS: Non je parle du débat d'urgence, M. le Président, de l'avis que je vous ai donné que, demain, j'avais l'intention de proposer une motion en vue d'avoir un débat d'urgence.

M. LE PRESIDENT: L'article dit, si je me rappelle bien, qu'avant les affaires du jour, d'abord cet avis doit m'être donné une heure avant la séance.

M. BURNS: Une heure au plus tard. Je vous l'ai donné avant ça, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: II y en a d'autre aussi qui m'en ont donné.

M. BURNS: Pas avant moi, ce n'est pas possible.

M. LE PRESIDENT: Ce n'est pas ce soir que je dois dévoiler tout ce que j'ai reçu.

M. BURNS: M. le Président, je ne veux pas vous forcer à dévoiler quoi que ce soit, mais je dois vous dire que vous veniez à peine de rendre votre décision, cet après-midi, que je vous avais remis une copie de mon avis.

M. LE PRESIDENT: Jusqu'ici j'en ai trois. M. BURNS: Bon d'accord.

M. LEVESQUE: II y a quelqu'un qui a peut-être couru un peu plus vite. M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain dix heures.

M. LE PRESIDENT: L'assemblée ajourne ses travaux à demain dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 23)

NOTE DE L'EDITEUR: Cette annexe devait paraître dans l'édition d'hier (no 68). Elle fait suite à une série de questions inscrites au feuilleton.

ANNEXE

Personnel agricole dans Lotbinière

Question de M. Béland 1. a) Combien de personnes sont à l'emploi du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, comté Lotbinière? b) Quels sont leurs noms? c) Quels sont leurs titres? d) Travaillent-elles toutes à temps plein, sinon lesquelles ne travaillent qu'à temps partiel?

Réponse de M. Toupin 1. a) 13. 1. b) et c) Blondin, Dr. Denis Médecin-vétérinaire

Chabot, Charles-Henri Technicien

Descarreaux, Gilles Agronome — Crédit agricole

Garneau, Ludovic Agronome

Lemay, Marius Inspecteur

Lemay, Marc-Albert Agronome

Léonard, Fernand Agronome

Martel, Diane Sténo-dactylographe * Paquette, Leopold Inspecteur de produits laitiers Roy, Jean-Paul Agronome * Simard, Julien Inspecteur de produits laitiers Touchette, Marcel Inspecteur de colonisation Sylvain, France Sténo-dactylographe * Exercent leur fonction alternativement dans les comtés de Mégantic et de Lotbinière. 1. d) Oui, à l'exception d'une sténo-dactylographe qui ne travaille qu'à titre occasionnel.

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