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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le lundi 16 décembre 1974 - Vol. 15 N° 97

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures huit minutes)

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

M. LEVESQUE: M. le Président, puis-je demander le consentement unanime pour qu'un dépôt puisse se faire à un autre moment, au cours de la présente séance?

LE PRESIDENT: Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de motions non annoncées. Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. LEVESQUE: Article a).

Projet de loi no 95 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Fonction publique propose la première lecture de la Loi sur les négociations collectives dans les secteurs de l'éducation, des affaires sociales et des organismes gouvernementaux.

L'honorable ministre de la Fonction publique.

M. PARENT (Hull): M. le Président, le présent projet a pour objet de déterminer les règles qui régiront la négociation des conventions collectives entrant en vigueur le 1er juillet 1975 ou après dans les secteurs de l'éducation, des affaires sociales, ainsi que la négociation des conventions collectives dans le secteur des organismes gouvernementaux.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. ROY: Je demande le vote, M. le Président.

M. BURNS: D'accord, M. le Président

LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!

Vote de première lecture

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que ceux qui sont en faveur de la motion de première lecture de la Loi sur les négociations collectives dans les secteurs de l'éducation, des affaires sociales et des organismes gouvernementaux veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Saint-Pierre, Choquette, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Simard, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond, Lacroix, Bienvenue, Forget, Toupin, Massé, Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux, Arsenault, Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bossé, Bacon, Blank, Veilleux, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Picard, Gratton, Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand, Leduc, Caron, Côté, Déziel, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Tardif, Tremblay, Verreault, Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Roy, Bellemare (Johnson).

LE SECRETAIRE: Pour: 66 Contre: 0

LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Projet de loi no 92 Première lecture

LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi modifiant certaines prescriptions.

Le ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: M. le Président, ce projet établit un délai de prescription particulier en matière de responsabilité médicale ou hospitalière, que celle-ci résulte d'un contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, et modifie certains délais de la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

L'article 1 fixe le délai à trois ans à compter de la faute. Cependant le point de départ du délai varie si le préjudice se manifeste progressivement. Dans ce cas, le point de départ consiste dans la date de la première manifestation du préjudice. L'article 2 est un article de concordance. L'article 3 établit que ce nouveau délai est applicable depuis le 1er janvier 1972.

L'article 4 permet de faire réviser tout jugement ou d'annuler toute transaction, règlement ou désistement intervenus entre le 1er janvier 1972 et le 1er janvier 1975, dans les cas où le motif de rejet de l'action, le motif de tels règlement, transaction ou désistement a été la prescription annale de l'article 2262, paragraphe 2, du code civil, pourvu toutefois que ce jugement ou ces actes portent sur des cas de responsabilité survenus depuis le 1er janvier 1972.

Les parties ont jusqu'au 1er juillet 1975 pour obtenir la révision du jugement ou l'annu-

lation du règlement, de la transaction ou du désistement. L'article 5 a pour objet de rendre inapplicable à une instance pendante, au jour de l'entrée en vigueur de la loi, la prescription de trois ans prévue par l'article 1 du projet et la prescription annale du code civil.

L'article 5 donne un délai additionnel pour intenter une action en responsabilité concernant une faute médicale ou hospitalière survenue entre le 1er janvier 1972 et le 31 mars 1972, Les articles 7, 8 et 9, qui modifient la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, visent à augmenter le délai de prescription de toute demande d'indemnisation adressée à la Commission des accidents du travail et à élargir les catégories de bénéficiaire en vertu de ladite loi.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture: Prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles

Dépôt de documents

Questions orales...

M. LEVESQUE: M. le Président, au cas où il nous arriverait d'autres documents, je demanderais le consentement unanime pour dépôt au cours de la présente séance.

M. BURNS: Nous sommes d'accord, M. le Président.

LE PRESIDENT: Questions orales des députés.

QUESTIONS DES DÉPUTÉS

LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

Grève à la United Aircraft

M. BURNS: Hier, avait lieu une assemblée générale des employés de United Aircraft de Longueuil qui sont en grève depuis bientôt un an. Il semble — c'est une confirmation que j'aimerais obtenir du premier ministre en l'absence du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre — que l'une des promesses qui aient été faites aux employés de United Aircraft par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre était que deux des points en litige, soit la formule Rand et le problème du temps supplémentaire obligatoire ou volontaire selon le point de vue patronal ou selon le point de vue syndical, pourraient éventuellement être réglés par voie d'intervention gouvernementale. Le premier point, par l'entremise d'un amendement au code du travail, et le second, par l'entremise d'un amendement à l'ordonnance no 4 de la Loi du salaire minimum.

J'aimerais d'abord que le premier ministre puisse me confirmer que c'est bien là une position gouvernementale. D'autre part, si cela en est une, j'aimerais savoir du premier ministre s'il a l'intention, avant l'ajournement des Fêtes, de déposer la loi qui concerne le problème de la formule Rand et, deuxièmement, de prendre les dispositions requises pour que l'amendement à l'ordonnance no 4 soit fait avant l'ajournement des Fêtes aussi.

M. BOURASSA: Dans le deuxième cas, comme vient de le suggérer le député de Maisonneuve, il n'est pas question de loi. Il s'agit d'un amendement à l'ordonnance. J'en ai discuté avec le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Je ne sais pas si cela faisait partie du contenu des propositions sur lesquelles le vote a été pris hier.

C'est ce qu'examine le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre aujourd'hui: quel était le contenu des propositions sur lesquelles a porté le vote. Quant à une loi sur la formule Rand, cela n'a pas encore été soumis au conseil des ministres.

Je sais que le député de Maisonneuve, leader parlementaire, a déposé un projet de loi.

Je sais qu'il y a toutes sortes d'applications qui peuvent être envisagées dans ce cas, mais cela n'a pas encore été discuté au conseil des ministres.

Je dois dire que le ministre du Travail, aujourd'hui, examine, comme je viens de le signaler, le contenu des propositions sur lesquelles le vote a été pris. Il examine également les mesures à prendre dans le cas de la construction. C'est ce qui l'a retenu à Montréal aujourd'hui. Le député de Maisonneuve est au courant que, comme l'a dit le ministre de l'Industrie et du Commerce, le niveau de la productivité à Montréal actuellement est de quelque 30 p.c. Ceci a des conséquences extrêmement sérieuses sur l'économie de Montréal et peut entraîner, d'ici à six mois, quelques dizaines de milliers de chômeurs additionnels.

M. BURNS: Cela n'a rien à voir avec ma question.

M. BOURASSA: Je veux simplement mentionner les raisons pour lesquelles le ministre du Travail est absent: c'est la gravité de la situation dans le domaine de la construction qui va inciter le gouvernement à prendre des mesures extrêmement énergiques pour y faire face.

M. BURNS: Une question additionnelle, M. le Président. Est-ce que, d'une part, on est en droit de s'attendre à une réponse, soit du premier ministre ou soit du ministre du Travail, relativement aux questions que je lui ai posées en premier lieu, si possible dans le ou les jours qui viennent? Quand je dis "les", je parle plutôt des deux jours qui viennent, étant donné la proximité appréhendée de l'ajournement des Fêtes. Deuxièmement, est-ce que le premier ministre est en mesure de nous dire si le rapport du ministre du Travail en vue de régler la grève de la United Aircraft pourra être déposé devant l'Assemblée nationale?

M. BOURASSA: Je ne sais pas quelle entente est intervenue entre l'Opposition et le ministre du Travail là-dessus. Le ministre du Travail devrait être ici demain matin ou au plus tard mercredi pour répondre aux questions du député de Maisonneuve. Je pourrai communiquer de nouveau avec lui tantôt et je pourrai répondre plus en détail au député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT: Le député de Taillon.

M. BURNS: Une question additionnelle, M. le Président.

LE PRESIDENT: La dernière.

M. BURNS: Et c'est la dernière. Je le fais beaucoup plus parce que le premier ministre semble jusqu'à un certain point prendre avis de mes questions. Est-ce que le conseil des ministres, lorsqu'il examinera la situation, tiendra compte également de la grève de Canadian Gypsum à Joliette, dont le règlement, apparemment, n'est bloqué que par une seule chose actuellement, c'est-à-dire l'adoption de la formule Rand, en ce qui concerne cette entreprise, alors que l'entente de retour au travail semble avoir été négociée favorablement entre les parties. Egalement, semble-t-il, ce problème de la formule Rand serait aussi une pierre d'achoppement au règlement de la grève de Penmans à Saint-Hyacinthe.

M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve fait une distinction dans les deux cas.

Dans le cas de la United Aircraft, il exprime le point de vue que la formule Rand est l'un des points de désaccord alors que dans le cas de la Canadian Gypsum, c'est le seul point de désaccord. Je crois qu'il y avait eu une entente, lorsque la commission parlementaire a été convoquée, pour qu'après que la question de la United Aircraft aura été discutée, on puisse discuter le cas de la Canadian Gypsum.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Taillon, question additionnelle.

M. LEDUC: Question additionnelle au premier ministre, M. le Président. Est-ce que le premier ministre, dans ses conversations avec le ministre du Travail, a causé de la possibilité de convoquer la commission parlementaire en vue d'étudier la situation à la United Aircraft, tel que le mentionne les journaux actuellement?

M. BOURASSA: J'en ai discuté, M. le Président, mais aucune décision n'a été prise à l'occasion de ces discussions.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

Subvention à l'Union des producteurs agricoles

M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et concerne la subvention de $15 millions qui a été accordée à l'Union des producteurs agricoles. Est-ce que je pourrais savoir de la part du ministre s'il a été consulté et s'il a accepté les normes et les critères de répartition qui ont été retenus par l'Union des producteurs agricoles pour verser le montant de $15 millions aux agriculteurs, montant qui a été littéralement arraché au gouvernement du Québec par les agriculteurs?

M. TOUPIN: M. le Président, il n'y a rien eu d'arraché, c'était simplement une décision gouvernementale pour répondre à un besoin. Oui, effectivement, j'ai rencontré les agriculteurs à quelques reprises depuis ce temps, quoiqu'on ait dit récemment que les négociations étaient rompues. C'est faux. Les négociations et les contacts avec l'Union des producteurs agricoles sont demeurés ce qu'ils étaient, ils sont demeurés bons et on a continué à discuter ensemble.

Quant au contenu, aux normes, de la répartition des $15 millions, demain ou mercredi au plus tard, mais plutôt demain, je ferai une déclaration ministérielle sur le sujet.

M. LESSARD: Dernière question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre a l'intention, étant donné que, selon les critères de répartition, l'UPA aurait besoin de $18,500,000, d'accepter de verser $3,500,000 ou $4 millions pour permettre justement une répartition équitable aux agriculteurs?

M. TOUPIN: La déclaration que je ferai demain contiendra tous les éléments de réponse à la question du député de Saguenay.

LE PRESIDENT: Question additionnelle, l'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: Question additionnelle. Est-ce que le ministre de l'Agriculture pourrait nous dire demain, à la même occasion, vers quelle date il entend convoquer la commission parlementaire de l'Agriculture, puisqu'il a dit lui-même à plusieurs occasions qu'il n'avait pas d'objection à cela?

II pourra rencontrer le leader parlementaire du gouvernement pour en discuter avec lui. Et, à l'occasion de cette commission parlementaire, pourrons-nous examiner toute la question agricole, c'est-à-dire la question agricole dans son ensemble? Il n'y a pas seulement la question des éleveurs de bovins mais il y a également la question des oeufs de consommation, FEDCO, au sujet de laquelle j'ai posé une question et j'attends une réponse. Il y a aussi la question du sirop d'érable, la question des génisses qui ont été vendues et dans ce cas le gouvernement n'a pas rempli ses engagements.

Je demanderais au ministre, à ce moment-ci, s'il sera en mesure, demain, de nous faire une déclaration d'ensemble de façon qu'on sache, une fois pour toutes, quelles sont les intentions du ministère.

M. TOUPIN: Disons d'abord, M. le Président, que le gouvernement ne s'est pas dérobé à ses engagements. C'est que tout le programme F-l va prendre fin d'ici quelques semaines. J'ai déjà répondu au député de Beauce-Sud que je ferais une déclaration avant que le programme ne prenne fin. Je suis allé plus loin, j'ai dit que le gouvernement, à ce niveau, respecterait ses engagements. Il va les respecter également. Donc, demain, cela se trouvera dans le contenu de la déclaration que je ferai.

Quant à la commission parlementaire, je maintiens toujours l'idée que j'ai émise il y a quelques mois ou quelques semaines, à savoir qu'elle serait convoquée mais pas dans le mois de décembre, probablement en janvier ou en février, après que j'en aurai discuté avec M. Levesque.

Il y a trois points dont j'aimerais discuter à la commission parlementaire: celui des revenus des agriculteurs, parce que nous allons déposer aussi des documents relatifs à cette question, celui de l'assurance-récolte, parce que je me suis engagé à ce que la commission parlementaire regarde ce problème, et celui également de l'ensemble de la commercialisation des produits de l'agriculture, tant des oeufs, du poulet, etc. Mais cette dernière question pourrait être abordée au moment où nous discuterons du premier problème, c'est-à-dire celui des revenus des agriculteurs, qui implique directement l'organisation de la mise en marché et, par conséquent, la commercialisation du produit.

Donc, il s'agit maintenant d'en discuter avec mon collègue le leader parlementaire pour décider des dates, mais sans doute pas avant la fin de janvier ou le début de février.

M. ROY: M. le Président, une autre question.

LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.

M. ROY: Au cours de cette commission parlementaire, est-ce l'intention du gouverne- ment de faire comparaître les différents organismes devant la commission, de façon que nous puissions les interroger et qu'ils puissent faire part de leurs observations et de leurs recommandations? Quand je parle des organismes, je me réfère non seulement à l'UPA mais on pourrait parler de FEDCO. Est-ce qu'il y aurait lieu, aussi, que soient convoqués devant la commission parlementaire certains représentants du monde du commerce?

En effet, j'ai soulevé déjà devant l'Assemblée nationale ce point des méthodes d'approvisionnement des grandes chaînes d'alimentation. Serait-il possible d'examiner cela devant cette même commission parlementaire?

M. TOUPIN: M. le Président, dans le cadre des problèmes qui seront discutés à la commission parlementaire,.notamment celui des revenus des agriculteurs ou, tout au moins, de moyens pour tenter de corriger le problème des revenus des agriculteurs et celui également relatif à l'assurance-récolte, toutes les parties intéressées à ces questions pourront se présenter et venir donner leur point de vue.

LE PRESIDENT: Question principale, l'honorable député de Johnson.

Pénurie de travailleurs spécialisés

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, le 29 novembre, j'avais demandé au premier ministre s'il était au courant que des firmes québécoises se tournaient vers l'Europe pour obtenir des travailleurs spécialisés. Je revois aujourd'hui, avec une certaine anxiété, que d'autres compagnies cherchent sur le marché européen des travailleurs spécialisés.

Ma première question: Est-ce que le premier ministre, le ministre du Travail ou le ministre de l'Industrie et du Commerce ont fait quelque chose pour détecter, parmi notre main-d'oeuvre, des travailleurs spécialisés? Deuxièmement, est-il fondé que des firmes engagent présentement des travailleurs spécialisés en Europe?

M. BOURASSA: M. le Président, j'avais demandé au leader de vérifier ce point-là et de répondre à la question.

M. LEVESQUE: M. le Président, en effet, le député de Johnson avait déjà posé la question en Chambre. J'en avais pris avis pour en parler au ministre du Travail. J'avais, à ce moment-là, mentionné que j'étais moi-même préoccupé par cette question, vu que la région dont je suis issu est également très intéressée à ce que l'emploi soit le plus élevé possible. J'en ai parlé avec le ministre du Travail. Il m'a fait cette distinction, je pense, très importante. C'est qu'il ne s'agit pas d'ouvriers de la construction, mais de mineurs ou de gens qui sont reliés au travail sous terre, le travail dans les mines. Les rensei-

gnements que me fournit le ministre du Travail, c'est que les centres de main-d'oeuvre du Canada et les centres de main-d'oeuvre du Québec ne semblent pas avoir de demandes de ce côté-là, malgré tous les efforts que ces centres auraient faits pour intéresser des gens à occuper ces fonctions. C'est ce qui explique qu'on cherche ailleurs.

M. BELLEMARE (Johnson): Question supplémentaire. L'honorable leader du gouvernement, M. le Président, a l'air de trouver cela très ordinaire que l'on cherche ailleurs. Mais je pense, quand on connaît nos régions et particulièrement...

M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. J'ai répondu exactement ce que j'ai perçu de la réponse du ministre du Travail. Je n'ai pas l'intention de recevoir une leçon de quelque nature que ce soit du député de Johnson. Je n'ai fait que mon devoir et je demanderais au député de Johnson de poser de nouvelles questions ou des questions additionnelles, s'il en a.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, si le ministre prend cela comme une insulte, je ne le prends pas, moi. Je considère plutôt ce que font les compagnies à l'extérieur comme une insulte à la province de Québec quand nous avons...

LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE (Johnson): ... dans la province de Québec, des employés, des travailleurs spécialisés...

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

Question! Vous n'avez pas le droit d'argumenter.

Un instant, s'il vous plaît. Un instant. Vous avez posé une question. Le ministre a répondu en donnant les renseignements qu'il avait. Si ça ne fait pas votre affaire, cela ne regarde ni le ministre, ni le président. Mais vous avez le droit de poser une autre question. Vous n'avez pas le droit de commencer un débat sur cette question. Cela a toujours été comme cela à l'Assemblée nationale.

M. BELLEMARE (Johnson): Ah oui! Ah oui!

LE PRESIDENT: Avez-vous une autre question supplémentaire?

L'honorable chef de l'Opposition officielle.

Incendie à Thetford-Mines

M. MORIN: M. le Président, on sait qu'à la suite d'un incendie survenu la semaine dernière, l'usine King Beaver, de l'Asbestos Corporation, à Thetford-Mines, a été complètement détruite et que, du jour au lendemain, 820 travailleurs se sont retrouvés sans emploi. Ceux-ci, appuyés par la population, veulent la reconstruction de l'usine. J'aimerais demander au premier ministre s'il peut nous dire si son gouvernement ou ses représentants ont eu des rencontres — une ou des rencontres — avec les administrateurs de la compagnie. S'il y a eu rencontre, le premier ministre peut-il nous dire quelles sont les intentions de la compagnie quant à la reconstruction de l'usine et au placement des travailleurs, et quelles sont les intentions de son gouvernement?

M. BOURASSA: M. le Président, je comprends que le chef de l'Opposition s'intéresse à cette question, mais avant même qu'il s'y intéresse, le député de Frontenac a fait de très nombreuses représentations. Le ministre des Richesses naturelles s'est rendu sur les lieux, plusieurs hauts fonctionnaires examinent le dossier et nous espérons pouvoir prendre position très rapidement. Je demanderais peut-être au ministre des Richesses naturelles de compléter ma réponse.

M. MASSE: M. le Président, je me suis rendu effectivement jeudi dernier à Thetford où j'ai eu l'occasion de rencontrer les autorités de la mine King Beaver et des autres mines qui ont aussi une activité dans cette région, de même que le directeur du développement industriel, des représentants du syndicat et des autorités municipales. Le but de ces rencontres était d'examiner sur place quelle était la situation, tant du point de vue des travailleurs que du point de vue municipal, et aussi en termes de développement possible à court terme afin de réembaucher ces personnes mises à pied.

D'autre part, on a tenté ensemble de trouver des solutions à très court terme parce qu'il semble que la reconstruction de cette usine qui a disparu à la suite de l'incendie ne pourrait se faire, même s'il y avait une décision dès maintenant, avant deux ans. Alors, il semble que certaines industries de Thetford puissent connaître un développement plus grand, peut-être accéléré. J'aurai, dès la rédaction de mon rapport de cette visite au premier ministre, à rencontrer évidemment le ministre de l'Industrie et du Commerce pour voir quelle sorte d'aide spéciale pourrait être apportée à ces industries qui pourraient réembaucher certains de ces travailleurs.

Aussi, on me dit qu'un certain nombre de travailleurs de la mine pourraient être réembauchés à très court terme. On parle de quelques centaines de travailleurs. D'autre part, en ce qui concerne les affaires municipales, je dois dire que le maire a été un brillant défenseur des intérêts de Thetford-Mines et prévoit présenter au ministre des Affaires municipales son budget à court terme, compte tenu de la perte d'évaluation de cette usine, environ $300,000 de perte de taxes pour Thetford.

Dans l'ensemble, c'est un rapport succinct de ma rencontre là-bas. Evidemment, il restera à trouver des meilleures solutions à court terme.

M. MORIN: M. le Président, c'est un rapport plutôt succinct. J'aimerais demander au ministre s'il est au courant, au moment où il nous parle de replacer des travailleurs dans d'autres industries, du fait que deux autres entreprises ont fermé leurs portes dans cette ville depuis quelque temps, nommément l'usine de roulottes Bellevue et l'usine de motoneiges Snow Jet. Compte tenu de la situation, le ministre a-t-il l'intention de poser des gestes concrets immédiatement, et lesquels? De façon plus précise, a-t-il l'intention, même si ça prend du temps, de participer à la reconstruction de l'usine King Beaver?

M. MASSE: M. le Président, j'ai parlé d'usines existantes qui pourraient augmenter leur production, donc embaucher de nouveaux travailleurs. Evidemment, vous apportez le fait qu'il y en a d'autres qui ont fermé, d'accord. Mais le jeudi 19, cette semaine, les représentants du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre rencontrent les syndiqués et les employeurs afin de mettre sur pied un comité de reclassement.

Quant à la possibilité de participer à la reconstruction de cette usine, je dois dire que les décisions qui doivent être prises par la compagnie ne sont pas encore prises et qu'il faudra de notre part attendre qu'elles le soient.

LE PRESIDENT: Une dernière question additionnelle.

M. MORIN: Bien, M. le Président. Le ministre nous parle de placer des travailleurs dans d'autres usines. Je ne suis pas sûr d'avoir bien saisi la portée de sa réponse. J'aimerais lui demander s'il songeait à replacer ces travailleurs de l'amiante dans d'autres usines, auquel cas sait-il que les travailleurs ont refusé, en fin de semaine, d'allonger la semaine de travail à sept jours dans les deux autres usines? S'il est au courant de cela, qu'entend-il faire pour éponger tout le chômage qui va être créé non seulement par l'incendie de cette usine, mais par la fermeture des autres usines dans la même ville?

M. MASSE: M. le Président, je dis qu'avec les gens de Thetford-Mines, on tente de trouver des solutions à court terme. Il pourrait y avoir, dans certaines usines, une augmentation du nombre d'emplois. Je n'ai pas dit que ça réglerait l'ensemble du chômage à Thetford-Mines, qui se situe à un niveau très élevé actuellement, mais qu'avec les syndiqués, avec les patrons, nous avons examiné différentes possibilités telle une production de sept jours.

Cela implique énormément de difficultés et, comme vous dites, les syndiqués, selon mes informations, ont refusé cette solution en fin de semaine. Il y en aura peut-être d'autres.

LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.

Syndicalisme agricole

M. VEILLEUX: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Suite à la loi qui avait été votée en Chambre sur le syndicalisme agricole, est-ce que le ministre sait qu'il y aurait des fonctionnaires du ministère qui obligeraient les agriculteurs qui payent une cotisation mais ne veulent pas être membres de l'UPA d'adhérer à l'UPA pour recevoir des subventions du ministère ou pour recevoir un retour de taxe sur l'essence du ministère du Revenu?

M. TOUPIN: M. le Président, le ministère de l'Agriculture a ajusté un certain nombre de ses programmes sur la loi 64, c'est-à-dire que les agriculteurs du Québec qui correspondent à la définition de la loi 64 ont droit aux différentes mesures que met à la disposition de l'ensemble des agriculteurs le ministère de l'Agriculture du Québec. Il y a des exceptions pour certains programmes, comme par exemple, le crédit agricole, où il y a une définition particulière dans la Loi du crédit agricole; les programmes de commercialisation, où se trouvent également des définitions particulières et dans la Loi des marchés agricoles dans les différents plans conjoints que se sont donnés les producteurs.

A l'exception de ces programmes, c'est le critère sur lequel nous nous sommes basés pour rendre éligibles aux programmes gouvernementaux les agriculteurs du Québec.

M. VEILLEUX: Question supplémentaire, M. le Président. Cela signifie-t-il que pour obtenir certaines subventions, comme vous le mentionnez, les cultivateurs ou les producteurs doivent, nécessairement, être membres de l'UPA, ou doivent-ils répondre à la description qu'on donne dans la Loi des producteurs agricoles?

M. TOUPIN: II me semble que j'ai été net là-dessus. Le député de Saint-Jean me demande une précision que je vais lui donner tout de suite. Le critère sur lequel nous nous basons n'est pas un critère de membre, n'est pas un critère d'adhésion à une association. C'est un critère qui se trouve dans une loi et le critère dans la Loi des producteurs agricoles ne dit pas qu'ils doivent être membres de l'UPA. Le critère dit qu'un agriculteur reconnu au sens de cette loi est un gars qui vend pour plus de $1,000 de produits agricoles par année. C'est ce que dit la loi 64. C'est simplement ce critère.

Et je suis persuadé qu'il y a des agriculteurs qui reçoivent, présentement, des subventions gouvernementales en vertu de programmes existants parce qu'ils vendent pour plus de $1,000 par année et qui ne sont peut-être pas membres de l'UPA.

M. VEILLEUX: Question supplémentaire, M. le Président. J'ai eu de nombreux appels téléphoniques. J'en ai encore eu un ce matin selon lequel on oblige les producteurs à être membres actifs de l'Union des producteurs agricoles pour avoir droit aux subventions...

LE PRESIDENT: Question.

M. VEILLEUX: ... et paraît-il que cela viendrait... Justement, je demande au ministre s'il y aurait possibilité qu'il enquête dans son ministère pour savoir s'il y a des fonctionnaires qui agissent de cette façon et, s'il y en a, qu'il les arrête. Sinon, j'en donnerai des noms.

M. TOUPIN: II est possible — si le député de Saint-Jean affirme qu'il a des exemples concrets — que de telles choses se produisent. Il y a un lien tellement étroit entre les deux qu'il est possible que certains fonctionnaires du ministère abusent dans ce sens et disent: Si tu veux avoir accès à telle mesure, il faudra que tu sois membre de l'UPA. Personnellement, je n'ai eu aucune information encore à ce sujet.

Néanmoins, je pense qu'il serait nécessaire, puisque la question m'est posée, que nous regardions, tout au moins sommairement, si tel est le cas. Si nous avons des exemples concrets, il est évident qu'il s'agira pour nous de pousser beaucoup plus loin nos regards. On pourrait même faire une enquête pour savoir si tel est le cas, mais ce n'est pas la position du ministère. Je veux dire que la position du ministère n'est pas cela du tout. Nous nous sommes servis de ce critère pour verser des subventions.

M. VEILLEUX: Dernière question supplémentaire, M. le Président.

LE PRESIDENT: Dernière.

DES VOIX: Courte.

M. VEILLEUX: On est libre!

LE PRESIDENT: C'est la dernière, s'il vous plaît.

M. VEILLEUX: M. le Président, dernière question supplémentaire. Est-ce que cela serait possible pour le ministre d'envoyer une note de service disant qu'on ne doit pas dire de telles choses aux producteurs?

M. TOUPIN: Je pense que la suggestion est bienvenue. C'est probablement la première chose qu'on devrait faire, soit d'informer tous les fonctionnaires, à la base notamment, ceux qui sont dans les régions, et leur dire qu'il ne s'agit pas du tout, comme condition, de devenir membre d'une association mais bien, comme condition, d'une définition que nous retrouvons dans une loi pour l'élargir à l'application de programmes.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud, et la suivante et dernière question ce sera l'honorable député de Saguenay.

Approvisionnement en grains de provende

M. ROY: M. le Président, ma question s'adresse encore à l'honorable ministre de l'Agriculture. Elle fait suite à une question que je lui posais mercredi dernier, le 11 décembre, alors que je lui avais demandé s'il pourrait nous faire le point de la situation qui prévalait en ce qui avait trait à l'approvisionnement et à l'entreposage des grains de provende dans les entrepôts de l'Est du pays. Le ministre de l'Agriculture m'avait répondu la semaine dernière qu'il répondrait demain, comme il a répondu tout à l'heure au député de Saint-Jean et aux questions que je lui ai posées: Demain. Est-ce que demain est arrivé et est-ce qu'aujourd'hui c'est considéré, dans l'esprit du ministre, comme demain, et est-ce que je pourrais avoir une réponse?

M. TOUPIN: M. le Président, à la suite d'une réunion tenue dans le comté de Bellechasse par le député de Beauce-Sud et le député de Saguenay...

M. MERCIER: Deux agitateurs professionnels.

M. ROY: J'invoque le règlement. La réunion qui a eu lieu dans le comté...

M. TOUPIN: Je peux répondre à la question, M. le Président...

M. ROY: ... de Bellechasse a traité de la question du transport de lait en bidons. Je veux avoir des réponses en ce qui a trait à la production.

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs!

L'honorable ministre.

M. MERCIER: Agitateurs professionnels.

M. TOUPIN: Je continue seulement pour relever une erreur du député de Beauce-Sud. J'espère que c'est une erreur qu'il a commise lorsqu'il a affirmé ici que je disais toujours: demain. Lorsque vous avez rencontré ces producteurs laitiers, effectivement, un télégramme est parvenu à mon bureau, et la journée même, je vous ai répondu, à vous et au député de Saguenay, que le problème était réglé. Il n'a même pas été question que vous souleviez cette question en Chambre, on l'a réglée immédiatement parce qu'on avait les moyens de la régler sur-le-champ.

Quant aux provendes, j'ai répondu, effectivement, à une question qui me fut posée, que

demain ou après-demain j'apporterais des statistiques. J'ai demandé aux fonctionnaires du ministère de préparer des statistiques. On m'a répondu ceci: Ce qu'on peut vous dire pour le moment, c'est que des bateaux se dirigent vers l'Est et doivent décharger leur cargaison dans les entrepôts ou de Trois-Rivières ou de Montréal ou de Québec, mais nous ne pouvons, pour le moment, vous dire exactement ce que nous trouvons dans ces entrepôts tant et aussi longtemps que ces bateaux ne seront pas entrés dans les ports. J'ai trouvé cela tout à fait logique. Néanmoins, je suis allé un peu plus loin. J'ai demandé: Est-ce que ces cargaisons qui viennent vont répondre à un besoin plus saisonnier qu'immédiat? On m'a dit: Oui, mais il faut encore garder une restriction. Au moment où les déchargements seront faits, c'est à ce moment qu'on sera en mesure de dire si nous en avons assez pour le moment ou s'il y a encore danger, non pas de pénurie, mais danger qu'il y ait un manque, au cours des mois de printemps, notamment. Alors, je ne sais pas si je pourrai faire cette déclaration statistique d'ici deux ou trois jours, mais aussitôt que les cargaisons seront entrées, je ferai le point et j'informerai la Chambre.

M. ROY: M. le Président, une question additionnelle. Je voudrais savoir quelle est la restriction à laquelle le ministre vient de nous référer. Deuxièmement, j'aimerais bien savoir du ministre de l'Agriculture s'il a l'intention de charger quelqu'un, au Québec, de se tenir au courant constamment, de façon que nous puissions être informés lorsque nécessaire et assurer les cultivateurs, les agriculteurs, les producteurs agricoles du Québec d'un approvisionnement stable et suffisant. Est-ce que le ministre trouve normal qu'actuellement le ministre lui-même ne soit même pas en mesure d'informer la Chambre, parce qu'il n'est pas au courant de la situation? On parle de bateaux qui arrivent. Quand les bateaux vont-ils arriver? Quel est le tonnage de ces navires? Quelle est la réserve actuellement qu'il y a dans les silos à grains de l'Est?

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. ROY: C'est la question que je pose: Quelles réserves y a-t-il à l'Est? On a eu une grève l'autre jour, et rien ne nous dit que nous n'en aurons pas d'autres.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! Un peu de calme, messieurs, un peu de calme! Il faudrait commencer la semaine sur un bon pied, quand même. Un peu de calme!

M. ROY: Oui, M. le Président, mais à condition d'avoir des réponses.

M. TOUPIN: Je suis d'accord, M. le Président, pour qu'on commence la semaine sur un bon pied.

UNE VOIX: Un pied-de-roi.

M. TOUPIN: Le député de Beauce-Sud devrait prendre la situation avec un peu plus de calme. De toute façon, cela ne règle pas le problème de monter sur ses grands chevaux, pour employer une expression populaire.

M. ROY: Enlevez vos patins et cela va faire.

M. TOUPIN: Alors, si vous voulez, je vais vous répondre. Mes patins sont suffisamment bien aiguisés pour savoir où je vais.

M. ROY: Cela paraît.

M. TOUPIN: Quand le député de Beauce-Sud m'a posé la question, il y a trois semaines ou un mois, sur les provendes au Québec, j'ai déposé sur la table de cette Chambre un document dans lequel on pouvait, chiffre après chiffre, dénombrer ce qu'il y avait, en termes de boisseaux, de céréales au Québec.

Depuis ce temps, tous les jours, nous suivons la situation de près. Je ne pense pas qu'il soit de coutume, d'abord, et qu'il soit, en même temps, logique que, tous les matins, j'arrive avec mon petit papier et que je dépose sur la table de la Chambre un rapport sur la situation des provendes au Québec.

M. ROY: Ce n'est pas ce que j'ai demandé.

M. TOUPIN: Laissez-moi terminer. On finirait par trouver cela ennuyant. J'ai dit qu'on a déposé un document une fois. Le document a fait l'état de la situation. J'ai déclaré, en même temps, que cet état était précaire et qu'il fallait faire en sorte que le problème se règle. Effectivement, le lendemain, la grève s'est réglée, pas la grève des manutentionnaires, mais celle des inspecteurs de provendes.

Maintenant, on reprend une situation normale. Je sais qu'il y a cinq ou six bateaux qui se dirigent vers l'Est. Ce que je ne puis vous dire pour le moment, parce que je ne le sais pas, c'est si toutes ces céréales seront réservées pour l'Est ou si certaines quantités devront aller à l'exportation. C'est seulement lorsque ces céréales seront entreposées que je saurai à quelles fins elles seront destinées. C'est seulement à ce moment-là que je pourrai intervenir de façon valable. Sinon, je parle pendant que des bateaux voguent sur le Saint-Laurent. Cela ne m'avance pas plus que ça, pour le moment. Je vous dis qu'il y en a qui viennent. Je suis allé plus loin tantôt. Je vous ai dit que ce qui s'en vient assure un minimum de sécurité. Mais je vous ai dit aussi que cette sécurité ne me paraît pas encore assez acceptable. C'est seulement lorsque ce sera entré que je vous dirai ce qui se passe.

LE PRESIDENT: Dernière question, l'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, ma question...

M. CADIEUX: II est ministre. Il n'est pas pilote. Il ne peut savoir où s'en vont tous les bateaux.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

Expropriation de l'île d'Anticosti

M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et concerne l'expropriation de l'île d'Anticosti. Est-il exact que le gouvernement du Québec a dû concéder des droits de pêche à l'ancienne compagnie? Concernant les droits miniers, les négociations se continuent-elles ou est-ce qu'une décision a été prise à ce sujet? Enfin, est-ce que le ministre, suite aux explications qu'il nous donnera, accepterait de déposer l'entente qui a été conclue entre l'ancienne compagnie et le gouvernement?

M. MAILLOUX: M. le Président, est-ce que le député de Saguenay veut une réponse complète quant à la transaction?

La question m'avait été posée par un journaliste en fin de semaine et cela m'a permis depuis de revoir les notes des discussions et de la transaction. Je pense qu'il faudrait quand même se rappeler qu'au moment où le gouvernement du Québec a pensé se porter acquéreur de l'île d'Anticosti un autre ordre de gouvernement y songeait également. Les renseignements assez valables qu'avait le gouvernement du Québec, étaient les suivants: c'est que cet autre ordre de gouvernement était prêt à verser entre $25 millions et $30 millions. Ajouté à cette offre monétaire, il semblait également que la Consol pourrait disposer des droits de pêche pour une période de 20 ans sur la rivière Jupiter, droits de pêche renouvelables.

C'était, semble-t-il, l'offre qui aurait pu être consentie par le gouvernement fédéral. Comme le gouvernement du Québec, connaissant ces discussions, voulait se porter acquéreur de cette parcelle de terre, qui n'appartenait ni au Canada, ni à la province de Québec, nous avons fait faire deux évaluations. La première, faite par le ministère des Travaux publics, rencontrait l'offre monétaire à peu près à mi-chemin entre $25 millions et $30 millions.

Il y a eu une deuxième tentative d'évaluation, celle-là faite par le ministère des Terres et Forêts.

LE PRESIDENT: Un peu de silence, s'il vous plaît! Un peu de silence.

M. MAILLOUX: Au ministère des Terres et Forêts, si l'on compare les prix payés dans tout le Québec pour les transactions que l'on connaît dans les dernières années, le prix moyen des trans- actions est $18.34 l'acre. En Gaspésie, le prix payé dans les dernières années est $17.17 l'acre. Dans l'expropriation dont je parlerai tantôt, le prix payé à la Consol est $10.35 l'acre. Sur la valeur des équipements, l'estimation était de $625,000 de la part de la Consol et le prix versé a été de $460,000.

Il y a eu un avis d'expropriation qui contenait une offre ferme de $23,780,000 sans condition. Malgré les tentatives de la compagnie d'obtenir un montant supplémentaire, la discussion a commencée à $27 millions et $26 millions et le gouvernement du Québec n'a pas voulu modifier l'offre ferme contenue dans l'avis d'expropriation.

Par la suite, il y a eu une déclaration de règlement hors cour pour un montant de $23,780,000. Il y a eu un deuxième document fixant les modalités du transfert de la propriété. On sait que le gouvernement du Québec demandait à la Consol de faire le nécessaire jusqu'au 31 décembre 1974. Par la suite, il y a eu une troisième entente en vue de reporter le paiement qui devait se faire de manière directe pour la somme de $23,700,000. Il y a eu un montant initial de $4 millions de versé et le solde d'environ $20 millions, à intérêt légal de 8 p.c, est payable pour le 15 avril. Il n'y a aucune condition sur les droits de pêche de la rivière Jupiter. Je veux comprendre que la Consolida-ted-Bathurst avait peut-être des réservations de clients éventuels. Il lui appartiendra de s'adresser à un des ministères, qui est le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, à savoir si elle peut accommoder certains des clients à l'endroit desquels elle avait pu s'engager.

M. LESSARD: M. le Président, une question additionnelle. Si je me fie à la déclaration du ministre, il n'y a actuellement, en vertu de cette entente, aucun droit exclusif en ce qui concerne les ressources de pêche ou les ressources minières qui aurait été cédé à la Consol.

M. MAILLOUX: M. le Président, le contrat d'expropriation stipule que pour les $23,700,000, payables de la manière dont j'ai parlé tantôt, il n'y a pas de droit de pêche d'accordé, ni de droit minier ou de droit sous-marin.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, une question supplémentaire à l'honorable ministre. Est-ce que l'honorable ministre peut nous dire quel est le bureau d'avocats qui a transigé, puisque cela s'est fait hors cour?

M. CHOQUETTE: Je ne crois pas qu'il y ait eu de bureau d'avocats qui ait transigé cela.

M. BELLEMARE (Johnson): L'honorable ministre vient de dire que cela s'est fait hors cour.

M. CHOQUETTE: Je crois que ce sont les

conseillers juridiques du ministère de la Justice et les fonctionnaires du ministère de mon collègue qui ont transigé ce règlement.

M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que l'honorable ministre pourrait me donner une réponse demain?

M. MAILLOUX: Oui, je prends avis de la question. Je pense que c'est le contentieux du ministère qui, en fait, a agi.

LE PRESIDENT: Affaires du jour.

M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour qu'immédiatement...

LE PRESIDENT: Un instant. Excusez-moi, j'oubliais une question de privilège que m'avait soulignée l'honorable ministre des Affaires sociales.

Question de privilège Article de journal

M. Claude Forget

M. FORGET: Merci, M. le Président. Certains journaux de jeudi ou vendredi ont reproduit une dépêche de la Presse canadienne, qui faisait suite à une question qui m'a été posée la semaine dernière par le député de Saguenay. Dans cette question, le député de Saguenay m'interrogeait pour savoir si le ministère des Affaires sociales attachait l'importance qu'il faut à la carence de services hospitaliers sur la Côte-Nord et s'il envisageait des mesures concrètes afin de remédier à cette carence.

M. LESSARD: Les services ambulanciers.

M. FORGET: Ma réponse, M. le Président, fut affirmative.

M. LESSARD: Les services ambulanciers.

M. FORGET: Services ambulanciers, c'est bien ce que j'ai dit.

Ma réponse, M. le Président, fut affirmative. Cependant, j'ai eu la surprise de constater, à la lecture des journaux, qu'un compte rendu en avait été donné qui en faussait le sens, reproduisant exclusivement la dernière des remarques du député de Saguenay à l'effet de me demander si le gouvernement attendait qu'il y ait des morts avant de prendre action.

Or, M. le Président, ma réponse affirmative dans un tel contexte tendait à suggérer que nous n'avions pas l'intention de prendre des mesures concrètes, ce qui est exactement le contre-pied de mon affirmation puisque ma réponse s'adressait à ce qui avait fait l'objet de la question plutôt qu'à ce qui a été dit à la toute fin. A cause des bruits de fond qui accompagnent parfois la période des questions, je n'en ai pris connaissance qu'à la lecture des journaux et subséquemment à la lecture du procès-verbal ou du compte rendu des Débats. Je crois donc, M. le Président, que cette mise au point était appropriée, de façon que l'impression qui a pu se dégager à la lecture de ces journaux soit corrigée, puisque encore une fois on a fait dire, par ces comptes rendus, exactement le contraire de ma pensée.

LE PRESIDENT: Affaires du jour.

Travaux parlementaires

M. LEVESQUE: M. le Président, d'abord je fais motion pour qu'au salon rouge, immédiatement, la commission des institutions financières, compagnies et coopératives se réunisse pour l'étude, article par article, du projet de loi no 7, Loi sur les assurances.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

Cette commission des institutions financières peut siéger immédiatement.

M. LEVESQUE: M. le Président, voici nos intentions. Elles peuvent être modifiées en cours de route, selon les circonstances, mais nos intentions à ce moment-ci sont les suivantes: Que la Chambre siège cet après-midi pour disposer des articles 2, 3 et 10 du feuilleton. Si tel est le cas, nous ajournerions, à la suite de l'adoption de ces articles, jusqu'à demain dix heures et trois commissions siègeraient simultanément par la suite.

Il y aurait la commission qui vient d'être convoquée au salon rouge et la commission de la justice, à la salle 81-A, pour l'étude des deux projets de loi sur le louage des choses, au nom du ministre de la Justice. A la salle 91, nous étudierions, article par article, le projet de loi no 93, qui normalement aura été adopté en deuxième lecture. Loi modifiant la loi de l'assurance-maladie et la loi de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Si, par hasard, il se développait certains pépins dans l'étude de ce projet de loi, à ce moment-là ce serait le ministre de l'Agriculture qui serait convoqué avec la commission de l'agriculture pour l'étude du projet de loi no 20, article par article.

Est-ce que cela convient à tout le monde? Alors, procédons. Article no 2.

Projet de loi no 19 Troisième lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche propose la

troisième lecture du projet de loi no 19, Loi des agents de voyages.

L'honorable député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, j'aurais quelques commentaires à faire concernant une des lois que nous considérons très importantes et sur laquelle nous avons été d'accord en principe.

Le 18 juin 1971, alors que nous discutions avec l'ex-ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, Mme Claire Kirkland-Casgrain, des crédits du ministère du Tourisme, j'avais posé la question suivante au ministre: Au sujet de ces agences de voyages, considérant le fait que ces agences peuvent influencer le tourisme, les endroits où ce tourisme peut se rendre, est-ce que le ministre a l'intention d'organiser un certain contrôle sur ces agences de voyages?

Le ministre a-t-il l'intention d'établir une loi-cadre qui les obligerait à demander un permis du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et aussi à faire superviser leur administration par ce ministère? La réponse de l'ex-ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche avait été, à ce moment-là, négative sous prétexte que le ministre ne voulait pas s'immiscer dans une décision qui relevait des agences de voyages elles-mêmes. Vous comprendrez, M. le Président, que puisque dès 1971 nous demandions un certain contrôle des agences de voyages, c'est donc dire qu'aujourd'hui nous ne pourrons qu'appuyer ce projet de loi. D'ailleurs, par l'intermédiaire de mon collègue, le député de Saint-Jacques, nous avons appuyé le principe de ce projet de loi en deuxième lecture.

Cependant, M. le Président, nous avions indiqué un certain nombre de réserves qui nous paraissaient très importantes. En effet, il est certain que si nous adoptons une loi comme celle-là, c'est d'abord en vue de protéger le public. A maintes reprises, nous avons eu l'occasion de le constater, les voyageurs ont été aux prises avec des problèmes considérables, soit parce que certains agents de voyages faisaient de la fausse publicité, soit parce que certaines agences de voyages ne pouvaient plus répondre aux responsabilités auxquelles elles s'étaient engagées vis-à-vis du public voyageur.

Cela ne veut pas dire, M. le Président, que nous n'avions pas au Québec un certain nombre d'agences de voyages qui étaient responsables, qui remplissaient leurs obligations. Cependant, quelques agents de voyages, étant donné qu'il n'y avait à peu près pas de contrôle, sinon un contrôle par l'entremise d'un organisme étranger au Québec, pouvaient s'intégrer dans ce secteur et étaient plus ou moins responsables. C'est donc dire, M. le Président, que le premier principe, la première nécessité pour un projet de loi comme celui-ci, c'est d'abord de protéger le public. Je pense que le projet de loi qui nous est soumis va certainement permettre d'en arriver à avoir un certain contrôle efficace et surtout arriver à protéger le public voyageur.

Cependant, M. le Président, nous nous sommes inquiétés, au cours de la deuxième lecture, d'un article de ce projet de loi no 19, en particulier l'article 36 h). En effet, cet article avait pour but, je pense, de céder l'administration comme telle d'un organisme, qui était créé par le gouvernement, aux agences de voyages elles-mêmes, et ceci nous inquiétait avec raison, je pense. Je cite ce que le député de Saint-Jacques avait dit, au cours du discours en deuxième lecture. Il disait ceci ou à peu près ceci: Une loi des agences de voyages devrait aussi protéger les agences elles-mêmes; or, d'après les consultations que nous avons effectuées récemment auprès de quelques agences du Québec, l'enthousiasme à l'endroit du bill 19 semble mitigé. En effet, l'article 36 h), qui semblait soulever plusieurs réactions, se lit comme suit: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut faire des règlements pour confier à une corporation formée d'agents de voyages le mandat d'appliquer, en tout ou en partie, aux conditions qu'il détermine, la présente loi et les règlements adoptés en vertu du présent article".

Les réserves que nous avons soulignées concernant ces articles c'est qu'encore une fois il nous paraissait que le gouvernement du Québec délaissait ses responsabilités concernant le contrôle des agences de voyages.

Le gouvernement voulait laisser à d'autres, c'est-à-dire aux agences de voyages elles-mêmes, la responsabilité de s'autocontrôler, si vous voulez. Cela ne nous paraissait pas être un article du projet de loi qui respectait le principe essentiel pour lequel nous avions demandé, en 1971, un contrôle des agences de voyages, à savoir la protection du public.

En effet, M. le Président, l'Opposition officielle s'est opposée, comme l'a affirmé le député de Saint-Jacques, catégoriquement à cette délégation de pouvoirs réglementaires et a exigé, tant au niveau de la deuxième lecture qu'en commission parlementaire, que l'émission des permis soit effectuée par l'administration publique québécoise et non par un organisme qui serait contrôlé par les agences de voyages.

En effet, nous avions affirmé qu'il fallait absolument que ce soit le gouvernement du Québec qui ait le contrôle sur l'émission des permis et non une agence extérieure au gouvernement, parce que les agents de voyages étaient, selon nous, de véritables professionnels appelés à être réglementés par une corporation. D'ailleurs, s'est constituée, il y a quelques mois, la Fédération des agences de voyages du Québec.

Cette délégation de pouvoirs à une corporation, en tout cas selon ce que nous affirmions, aurait permis, en fait, de donner à une corporation l'arbitrage quand il se serait posé des conflits internes, sans que personne ne puisse avoir la garantie que l'intérêt public puisse être protégé, comme le voulait l'esprit de la loi. Je voudrais répéter une comparaison que le député de Saint-Jacques faisait au cours de la deuxième

lecture, qui était assez claire et qu'on retrouve dans le rapport Castonguay-Nepveu concernant les organismes professionnels.

On peut faire une analogie entre cette corporation d'agents de voyages et les nombreuses corporations professionnelles qui existent au Québec. C'est, en effet, le rapport Castonguay-Nepveu qui, se penchant sur la problématique des organismes professionnels au Québec, a déclaré: "Les besoins de la profession et de la société ne sont pas nécessairement identiques. Le rôle des représentants d'un groupe est incompatible avec celui d'agents de la collectivité". De même qu'on ne peut pas confier exclusivement le contrôle de la santé publique à un organisme médical, soit le Collège des médecins, de même on ne peut accorder exclusivement à un organisme comme le Barreau le soin de protéger le public en ce qui concerne l'administration de la justice, de même qu'on ne peut accepter qu'on puisse confier à un organisme professionnel réunissant les agences de voyages le soin de voir exclusivement à la protection du public.

D'ailleurs, le rapport Castonguay-Nepveu continuait en disant ceci: "Les corporations se voient conférer le pouvoir de contrôler l'admission à l'étude et à l'exercice de la profession qu'elles régissent. La possibilité existe que cet organisme se serve de ces pouvoirs à mauvais escient et en vienne à créer une rareté artificielle de ses membres de façon à les faire bénéficier des conditions de travail plus avantageuses". Par suite du fait qu'avant l'adoption du projet de loi no 65 sur les services de santé on trouvait un peu trop exclusif pour certaines professions le pouvoir de contrôler le bien public.

Il a donc fallu modifier ou déplacer cette responsabilité par un projet de loi.

Alors qu'on n'acceptait pas d'accorder ce principe à des organismes de santé ou à des organismes qui ont à travailler au niveau de la justice, nous trouvions extrêmement curieux qu'on puisse accorder ce pouvoir aux organismes que sont les agences de voyages.

M. le Président, je suis extrêmement heureux de constater, après avoir lu les débats qui se sont déroulés tant au niveau de la deuxième lecture qu'au niveau de la commission parlementaire, que le ministre a présenté un amendement à l'article 36 qui répond, je pense, aux inquiétudes que nous avions soulevées. Nous craignions, encore une fois, que les agences de voyages puissent établir, comme cela a été le cas dans certaines professions au Québec, un certain monopole qui leur aurait permis de contrôler le marché.

Nous craignions aussi que les agences de voyages plus importantes, qui sont souvent des agences de voyages qui ne sont pas sous le contrôle des Québécois, aient une force telle qu'elles puissent contrôler les petites agences de voyages du Québec.

En effet, nous avions la crainte que la Corporation des agents de voyages tente de se garder la plus grande part du marché par le biais d'une administration de la loi et de ses règlements qui peut toujours prêter à interprétation.

On savait déjà que, même actuellement, les petites entreprises qui essaient de naître ou de survivre dans ce secteur ont la vie assez difficile. Par exemple, on demande des lettres de recommandation de trois agences de voyages, qui sont naturellement concurrentes, pour l'accréditation de nouvelles agences. Or, il est normal que ces concurrentes se fassent tirer l'oreille et refusent quelquefois d'accorder les lettres de recommandation.

Il aurait été extrêmement dangereux de laisser à cet organisme professionnel le soin non seulement de surveiller les agences de voyages, mais le soin d'émettre de nouveaux permis.

Bref, nous disions que ce projet de loi favoriserait encore les grosses entreprises les plus puissantes aux dépens des petites. C'est pourquoi nous nous étions opposés à conserver l'article 36 tel quel.

Comme je le disais, je pense que le ministre a accepté les revendications qui ont été faites par l'Opposition officielle et a soumis, en commission parlementaire, un amendement qui remplace complètement l'article 36. Cet amendement nous parait satisfaisant et permettra surtout de pouvoir surveiller les agences de voyages, de confier au gouvernement le soin de surveiller les agences de voyages. Il accordera au gouvernement le soin d'émettre les permis concernant les agences de voyages — ce qui permettra d'avoir une meilleure protection du public — et lui permettra en même temps d'exercer une surveillance sur les agents de voyages, protégeant ainsi les petites agences contre le monopole qu'auraient pu appliquer les grandes agences de voyages dans le projet de loi comme il nous avait été soumis au cours de la première et de la deuxième lecture.

Donc, M. le Président, l'Opposition officielle se réjouit de cet amendement, comme elle se réjouit du projet de loi qui nous a été soumis et qui a été demandé par l'Opposition officielle dès 1971.

Il est entendu que nous voterons en faveur du projet de loi en troisième lecture, comme nous l'avons fait en deuxième lecture.

M. Claude Simard

M. SIMARD: M. le Président, très brièvement, je me rends compte que même les Oppositions sont en faveur du projet de loi no 19, mais j'aimerais ajouter ceci. C'est que l'inquiétude du monopole qu'avaient le député de Saguenay et l'Opposition, en ce qui a trait à l'article 36 h), nous l'avions prévue bien avant. Etant donné que l'association des agents de voyages a été fondée seulement il y a quelques mois, que le projet de loi avait été déposé au comité de législation à peine quelques semaines après la formation de cette association d'agents

de voyages et que c'était la seule et la première agence de voyages à être constituée comme telle, M. le Président, nous avons révisé notre tir, parce que nous ne voulons pas qu'il y ait seulement une agence de voyages qui représente tous les agents de voyages de la province de Québec. Au contraire, nous sommes pour le fait qu'il y ait plusieurs associations d'agents de voyages qui regroupent enfin les agents de voyages de cette province.

Maintenant, seulement un mot pour terminer. Le congrès de l'ASTA a eu lieu, comme vous le savez, M. le Président, il y a quelque semaines, à Montréal; c'est le congrès le plus prestigieux qu'ait connu la ville de Montréal. Ce congrès regroupait plus de 60 pays, plus de 2,000 membres et plus de 5,000 congressistes. Lors des discours de clôture, il a été dit par le nouveau président élu "que tous les gouvernements, autant des pays que des provinces, devraient légiférer sur les agents de voyages". Je suis très heureux, M. le Président, d'annoncer que c'est la première fois, en Amérique du Nord, qu'un gouvernement légifère sur les agents de voyages et la province de Québec est la première.

M. le Président, je remercie autant l'Opposition officielle que les autres Oppositions, tous les membres de la commission et tous les membres de cette Assemblée qui voudront bien voter en faveur du projet de loi no 19, en troisième lecture.

Je vous remercie.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que le projet de loi no 19 est adopté en troisième lecture?

M. MORIN: Non, on a demandé un...

M. VEILLEUX: Adopté.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.

M. VEILLEUX: Le conseil national n'est pas ici pour décider.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! Adopté.

Projet de loi no 4 Troisième lecture

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre de l'Industrie et du Commerce propose la troisième lecture du projet de loi no 4, Loi constituant la Société Inter-Port de Québec.

Est-ce qu'il y a des débats?

Le chef de l'Opposition officielle.

M. Jacques-Yvan Morin

M. MORIN: M. le Président, il me paraît important de revenir sur certains aspects de ce projet de loi. J'ai déjà eu l'occasion, en deuxième lecture, de dire pourquoi nous nous opposons à son adoption. Depuis lors, au cours des séances de la commission, j'ai tenté d'obtenir des éclaircissements sur divers aspects du projet, lesquels je n'ai guère obtenus. J'ai tenté également avec d'autres membres de l'Opposition d'obtenir quelques changements, sans succès.

Aussi, vais-je prendre l'occasion de cette troisième lecture pour ramasser les observations qui s'imposent à l'égard du projet de loi portant sur la Société Inter-Port. Je regrette que le député de Montmorency ne soit pas là, car j'ai l'impression qu'il a légèrement induit la commission en erreur, l'autre jour, lorsqu'il a laissé entendre à la commission parlementaire que tous les maires des villes situées à l'intérieur de la zone spéciale de Québec étaient d'accord sur le projet de Société Inter-Port.

Je voudrais citer certains extraits de la transcription des Débats de la commission qui ont eu lieu le 11 de ce mois.

Le député de Montmorency nous apprenait que, le mardi précédent, il y avait eu une assemblée de la Communauté urbaine de Québec, et il ajoutait: "Nous nous sommes divisés en secteurs parce qu'il fallait un représentant additionnel pour former le comité dont M. Goldbloom parlait jeudi dernier. Lors de cette réunion, continue le député, j'ai demandé à chacun des représentants de secteurs de parler à tous les maires de municipalités pour m'assurer que l'avance qui avait été faite — je pense que le député voulait dire l'avancé qui avait été fait — à l'effet que tous les maires sont pour la Société Inter-Port..." il y a trois points de suspension dans le compte rendu. Plus loin, le député continue: "Lorsqu'ils ont donné leur compte rendu concernant le délégué qu'ils voulaient avoir au sein du comité, on a ajouté que tous les maires de la Communauté urbaine de Québec étaient d'accord avec le projet Inter-Port qui avait été adopté en deuxième lecture, hier".

Plus loin, plus exactement à la page R/16-B/1C de la transcription, le député de Montmorency répétait ses affirmations: "Vous pouvez être assuré, disait-il, M. le chef de l'Opposition, que ce n'est pas souvent que je fais des avances — j'imagine qu'il voulait dire des avancés — et lorsque je vous avance que tous les maires sont d'accord, je vous prierais de me croire, s'il vous plaît. Ce n'est pas un avancé gratuit". Le ministre avait l'air satisfait de ces interventions d'un député dont la circonscription se trouve à l'intérieur de la CUQ.

Nous sommes allés aux nouvelles de notre côté pour tenter de savoir si vraiment il en était ainsi. Or, je n'hésite pas à dire que nous avons été induits en erreur et je souhaiterais que le député de Montmorency soit en cette Chambre pour pouvoir nous donner des précisions sur ce qu'il a dit à ce moment.

M. BACON: Allez le chercher.

M. MORIN: M. le Président, il semble bien que la majorité des maires de la région de Québec soit plus ou moins au courant de ce projet de Société Inter-Port. Le ministre nous a affirmé que cela fait deux ans qu'on en discute. Il aurait pu dire qu'on en discute en catimini, parce que, de fait, la plupart des maires, en tout cas une majorité, semblent en avoir très peu entendu parler et semblent peu enclins à prendre position. La plupart ne savent pas de quoi il s'agit, se montrent réticents, n'ont pas d'opinion arrêtée sur le sujet et je crois savoir que certains d'entre eux sont même contre le projet.

Je conseillerais en tout cas au ministre, avant la troisième lecture, de s'enquérir de façon plus précise auprès des maires de la zone spéciale de Québec et de s'assurer que les avancés — sinon les avances — du député de Montmorency sont exacts. Nous avions proposé au tout début, avant la deuxième lecture, qu'on entende les principaux intéressés sur ce projet de loi, c'est-à-dire la Communauté urbaine de Québec et les maires des villes situées à l'intérieur de la zone spéciale.

Depuis lors, les 222 maires appartenant à la Conférence administrative des maires du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Nord, ont fait savoir au ministre qu'ils étaient inquiets de ce projet de loi. Ils ont dû se déplacer, je crois, M. le Président, pour se faire entendre. Cela nous donnait raison. Il a fallu que les maires fassent une démarche auprès du ministre pour lui signifier leur opposition, en tout cas leurs doutes, leur anxiété devant ce projet de loi.

Mais le ministre nous avait dit qu'il n'avait pas l'intention de les entendre. Il n'avait pas l'intention de les entendre publiquement. Je ne sais s'il les a reçus. Je pense qu'il a reçu les représentants de la Conférence de l'Est du Québec. Mais il ne les a pas reçus en plein jour, il ne les a pas reçus en commission parlementaire. Il les a reçus derrière des portes closes, à ce que nous croyons savoir. M. le Président, j'estime, pour ma part, que les événements, depuis que ce projet de loi a été déposé, donnent raison à l'Opposition. Nous étions inquiets de voir un projet de loi être expédié à la vapeur sans que l'on consulte les principaux intéressés. Aussi, je voudrais faire appel une dernière fois au ministre. Je voudrais lui demander de remettre ce projet, de permettre aux intéressés de venir dire tout haut ce qu'ils pensent tout bas, de permettre aux intéressés de prendre connaissance du dossier.

Il y a plusieurs maires de la région de Québec qui sont peu au fait de ce qui se passe, qui ne comprennent pas que l'on puisse créer un organisme qui va, de fait, se trouver en concurrence avec la Communauté urbaine. Celle-ci, en effet, a été l'objet de bien des critiques, comme sans doute la plupart des communautés urbaines, mais, s'il est un domaine où la CUQ s'est montrée efficace, c'est bien celui du développement industriel.

Or, que fait ce projet de loi? M. le Président, il retire, dans les faits, à la Communauté urbaine de Québec ses compétences en matière de développement industriel pour les donner à une société fédérale-provinciale qui, bien sûr, gérera, planifiera le développement d'une zone qui est plus vaste que celle de la Communauté urbaine, mais qui va le faire dans un contexte qui n'est plus celui de la décentralisation auquel le ministre semblait attacher beaucoup d'importance.

M. le Président, ou bien l'on veut décentraliser le développement économique et reconnaître aux régions de véritables compétences, auquel cas, pourquoi ne respecte-t-on pas l'organisme déjà en place, qui fait bien son travail dans ce domaine, et qui est la CUQ? Ou bien la zone de la CUQ n'était pas assez vaste et il faudrait envisager de planifier le développement économique sur une aire géographique plus étendue. Mais, alors, pourquoi s'arrêter en chemin, pourquoi ne regrouper que les municipalités de la zone spéciale, inquiétant par le fait même tous les ports situés en aval de Québec?

M. le Président, il semble s'échapper de ce projet de loi une odeur que l'Opposition a toutes les raisons de redouter. Pourquoi ce traitement spécial pour la région de Québec?

Pourquoi ne donne-t-on pas le même traitement à d'autres régions du Québec, qui ont bien plus besoin encore que leur développement portuaire et industriel soit planifié? Bien sûr, on ne peut en vouloir à une ville comme Québec de vouloir se développer, c'est tout naturel. Mais alors, pourquoi ne pas laisser la chose entre les mains des gens compétents qui ont commencé à développer la région et qui, de surcroît, ont obtenu un certain nombre d'investissements que le ministre connaît très bien, investissements qui n'ont pas tous été annoncés?

M. le Président, il ne fallait pas s'arrêter en si bon chemin. Puisqu'on prétend créer une "société inter-port", il fallait voir à ce que le développement portuaire et industriel — mais surtout portuaire — de toute la vallée du Saint-Laurent située à l'intérieur des frontières du Québec profite d'une société comme celle-là.

Il fallait, si vraiment l'on prétend créer une "société inter-port", songer qu'il n'y a pas que Québec qui soit appelé à se développer comme port dans la vallée du Saint-Laurent. Il fallait songer que, dans le Bas-Saint-Laurent et sur la Côte-Nord, il y a également des régions qui demandent à se développer, qui ont les ressources et qui ont les chemins de fer qui pourraient se rendre jusqu'à quai. Je pense, en particulier, au projet du port de Gros-Cacouna.

Pourquoi, puisque l'on parle de façon enflée il faut l'avouer, d'une "société inter-port", n'avoir pas songé qu'il existe des ports en aval de Québec et pourquoi n'avoir pas saisi l'occasion de développer et de planifier, les uns par rapport aux autres, tous les ports de la vallée du Saint-Laurent?

C'est avec raison que le député de Johnson a

proposé de modifier le titre de ce projet de loi, qui est trop ambitieux par rapport au développement qu'il veut créer. "Société Inter-Port": il ne s'agit, en fait, que du port de Québec et des berges, des rives du Saint-Laurent situées dans les environs immédiats. De surcroît, cette société inter-port n'aura même pas la compétence voulue pour développer les ports eux-mêmes. Sur ce point, le ministre en a quelque peu rabattu depuis que le bill 23 a été soumis à cette Assemblée, dans lequel on faisait allusion à la possibilit que cette société s'occupe également de développement portuaire.

Désormais, on nous parle plutôt de développement industriel qui pourrait profiter des développements portuaires existants ou à venir. Mais il faut préciser que l'existence de cette société ne va modifier en aucune façon le partage des compétences en matière de navigation et en matière portuaire, existant entre Québec et Ottawa. Que l'on aime la chose ou qu'on la regrette — pour notre part, nous la regrettons, tout le monde le sait — la compétence en matière de navigation et en matière portuaire échappe entièrement au Québec; entièrement.

Le pouvoir fédéral a pris soin, en 1865, de se réserver exclusivement ce qui constituait, à l'époque, les grandes compétences d'ordre économique. Il n'a laissé au Québec que les questions qui paraissaient secondaires, locales.

Le pouvoir fédéral savait très bien que les chemins de fer, la navigation et les ports constituaient la base même du développement économique et c'est pourquoi il a jalousement veillé depuis à conserver ces compétences, à ne les laisser jamais diluer par quelque volonté provinciale ou locale que ce soit. Nous connaissons les conséquences, M. le Président; conséquences terribles pour le Québec, tant dans le domaine de la navigation, d'ailleurs, que dans le domaine des chemins de fer. Nous avons au Québec neuf fois moins de rails de chemins de fer que dans l'Ontario; je pense que cela est suffisamment éloquent.

En ce qui concerne les ports, chacun sait la difficulté qu'il y a, chaque hiver, à obtenir que l'entretien du cours d'eau du Saint-Laurent soit exécuté au moment où il doit l'être. Chacun sait que les brise-glaces ont leur port d'attache avant tout à Halifax. Chacun sait que, dès que l'hiver se fait dur et que le fleuve est encombré de glaces, la navigation est interrompue. Chacun sait que Québec même, M. le Président, se trouve en quelque sorte assis entre deux chaises, entre deux pôles de développement: d'une part, Halifax à une extrémité, d'autre part, les ports des Grands Lacs.

M. le Président, cela n'a rien d'étonnant. Comment voulez-vous qu'un Etat qui ne possède pas les compétences nécessaires puisse voir à développer ses propres ports, ses propres chemins de fer? Le Québec n'a reçu que la portion congrue de l'infrastructure nécessaire au développement économique à la fin du 19e siècle et au cours de la première moitié du 20e, je devrais dire les trois quarts du 20e. Le Québec, dans ce domaine des ports et des transports en général, est un Etat impuissant, un Etat qui ne maîtrise pas son développement, son destin économique. Le Québec est un Etat tronqué. Et les ministères qui prétendent s'occuper d'industrie et de commerce, de planification, de pseudo-planification, même de transports, n'exercent que des bouts de compétence. Les ministres pe vent s'illusionner, se rengorger mais ils savent bien que sur l'essentiel ils sont impuissants. Ce ne sont pas eux qui vont prendre les décisions ultimes quant au développement industriel et portuaire du Québec; ce sont d'autres et toujours dans le même sens, dans le sens des intérêts de la majorité qui domine le Canada.

M. le Président, si encore cette "Société lnter-Port" méritait son nom! Si encore cette société valait au Québec la possibilité de s'occuper de son développement portuaire, de planifier les ports de Québec et des environs et du Bas-Saint-Laurent, l'Opposition applaudirait à l'initiative du ministre. Mais ce n'est pas le cas. Cette société est faussement inter-port, c'est en réalité une société de développement industriel régional. Dans la réalité des choses, ce n'est pas plus que cela. Malheureusement, si ce n'est que cela, comme je l'affirme, ce projet vient en conflit avec un organisme existant qui s'occupe déjà de développement régional, qui est la CUQ. J'estime, M. le Président, que la façon de procéder du ministre constitue un coup de Jarnac aux gens qui s'occupent de développement industriel à la CUQ.

Un jour, le chat sortira du sac. Un jour, nous saurons pourquoi ce gouvernement a choisi de procéder de la sorte et d'imposer à des gens qui n'en veulent guère un nouvel organisme qui va venir manger les compétences de l'autre, qui va sans doute même, avant longtemps, être en conflit avec l'autre, à moins que le ministre, mettant toutes ses cartes sur table, ne fasse adopter un projet de loi au terme duquel la CUQ se verrait amputée de ses compétences dans le domaine du développement économique.

M. le Président, la CUQ est un organisme exclusivement voué aux intérêts de la région de Québec, alors que la Société lnter-Port va tomber, elle, sous la coupe des gouvernements d'Ottawa et de Québec. Si encore on avait prévu le raccordement avec le CUQ, autre qu'une simple présence de la CUQ au conseil d'administration de la Société lnter-Port; si encore on avait prévu par exemple que la CUQ put avoir un certain nombre d'actions dans les 1,000 qui sont créées par le projet de loi; si on avait prévu, par exemple, que le Québec aurait 60 p.c. des parts — comme c'est le cas — la CUQ, 20 p.c, 25 p.c. ou 30 p.c. et le gouvernement fédéral, le résidu, nous nous serions dit: Le gouvernement québécois entend véritablement coordonner le développement de la zone spécia-

le de Québec et il n'hésite pas à inclure la CUQ, reconnaissant de la sorte le rôle déjà assumé par cette communauté dans le développement de la région. Mais ce n'est pas le cas, M. le Président. A toutes fins pratiques, il ne faut pas se le cacher, à toutes fins pratiques, la société dite Inter-Port, qui en fait n'en est pas une, prend la place, se substitue à la CUQ. C'est alors que l'on se rend compte de toute l'importance de la façon de procéder du gouvernement. Si, comme je l'affirme, l'effet de ce projet de loi va être de réduire les compétences de la CUQ dans ce domaine au profit d'une société fédérale-provinciale, si tel est bien le cas, on n'aurait jamais dû procéder de la sorte sans consulter tous les intéressés. Sans doute aura-t-on craint la consultation. En tout cas, on aura eu peur d'une confrontation publique. On aura eu peur, comme le disait le député de Johnson, que la queue du chat ne se voie. Ce projet reflète-t-il la méfiance du ministre a l'égard du régionalisme? Je suis porté à le croire. Quand je parle de régionalisme, je veux dire par là, la constitution de régions qui s'occupent elles-mêmes de leurs intérêts, qui négocient bien sûr avec les gouvernements supérieurs, notamment avec le gouvernement québécois, mais qui gèrent elles-mêmes leur développement, quitte à voir le gouvernement québécois harmoniser le développement des diverses régions. C'est cela que j'entends par régionalisme.

Or, si je considère les effets de ce projet de loi, je suis obligé de constater qu'il prive un organisme régional valable qui a fait preuve de ses compétences et qu'il l'a fait sans qu'il y ait confrontation publique avec la communauté en question, sans que les maires de la zone spéciale aient pu venir donner leur sentiment à l'égard du projet de loi. Pourquoi a-t-on procédé de la sorte? Nous le saurons un jour. Je ne doute pas que nous finirons par comprendre ce qu'il y a là-dessous. Pour l'instant, nous ne pouvons que le soupçonner et je n'irai pas plus loin.

Quand on considère le contrôle qu'exerce le pouvoir fédéral sur les ports du Québec, on ne peut que s'inquiéter. On voit des parcelles entières du territoire québécois qui nous échappent, à toutes fins pratiques, et qui sont sous le contrôle de l'étranger. Je prenais connaissance, récemment, d'un article paru le 18 août 1973 dans le Soleil. Cet article, intitulé "2,000 petits ports confiés au Service des pêches et des sciences de la mer", nous apprenait qu'au Québec 427 petits ports de pêche ou de plaisance sont soit propriété fédérale, soit sous le contrôle du gouvernement fédéral. Cet article nous apprenait également que les crédits affectés par Ottawa à la gestion de ces ports vont plus largement aux autres provinces par comparaison. Par exemple, sur une somme de $10 millions apparaissant au budget, le Québec obtenait $830,000. Double désavantage, M. le Président, que de voir un pouvoir étranger régir le territoire québécois sur certains points qui lui sont essentiels; danger d'un pouvoir qui ne connaît pas nos besoins et qui n'en a cure, danger d'un pouvoir qui ne consacre même pas à l'étude des problèmes de ces ports l'argent qu'il convient.

M. le Président, je pense que cet exemple illustre fort bien la méfiance qui devrait habiter tout Québécois à l'égard du développement du Québec par d'autres. Le développement du Québec ne se fera pas désormais par d'autres. Il ne peut se faire que par les Québécois et à partir de centres de décision situés ici au Québec. Le reste n'est qu'illusion. Quand il faut aller quémander à Ottawa, quand un ministre nous répond — et combien de fois devons-nous nous satisfaire de cela pour réponse —. Je vais d'abord aller voir à Ottawa ce qu'on pense faire, quels sont les projets, les intentions du gouvernement fédéral et, ensuite, je reviendrai et je vous dirai ce qu'il en est et je vous ferai part des intentions du gouvernement québécois...

M. SAINT-PIERRE: Point de règlement, M. le Président.

M. MORIN: Vraiment de règlement?

M. SAINT-PIERRE: Oui, point de règlement. Est-ce qu'on peut inviter le chef de l'Opposition à s'en tenir à la troisième lecture du projet de loi no 4 qui touche la Société Inter-Port de Québec?

M. MORIN: M. le Président, ce projet de loi — pour répondre au ministre — s'inscrit, à moins que je ne m'abuse, dans un projet plus vaste, peut-être, de développement industriel au Québec. Pour montrer la portée du projet de loi ou son absence de portée, il faut scruter le contexte à l'intérieur duquel il s'inscrit.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Oui, sauf que je rappellerai au chef de l'Opposition que le débat de troisième lecture doit surtout se limiter aux détails du projet de loi.

M. BURNS: Ses implications.

M. MORIN: M. le Président, je regrette, mais j'ai des choses à dire sur ce projet de loi.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Allez-y! Je ne vous ai pas encore arrêté.

M. MORIN: Le ministre me répondra tout à l'heure, si j'erre. J'ai tout lieu de croire que ce projet reflète une fois de plus l'état général du Québec qui n'a pas changé depuis 100 ans. Ce n'est pas le Québec qui prend les principales décisions relatives à son développement et ce projet de loi en est une illustration de plus.

Nous ne pourrons même pas, M. le Président, prendre des décisions relatives au développement portuaire de Québec. On pourra développer des centres industriels dans la mesure où il y aura des ports pour répondre aux besoins,

mais le Conseil des ports est un organisme fédéral, que je sache. En créant cette Société faussement Inter-Port, le Québec ne va pas récupérer du même coup la compétence relative à la navigation, ni la compétence relative aux ports. C'est une compétence fédérale qui nous échappe totalement.

M. le Président, il est sans doute temps que j'en vienne à mes conclusions.

Je regrette que ce projet de loi soit de nature, en fin de compte, à nuire à l'esprit d'entreprise dont a fait preuve jusqu'ici la CUQ en matière de développement industriel. Si, encore, nous comprenions toutes les raisons qui ont motivé le ministère de l'Industrie et du Commerce dans la rédaction du projet de loi, si nous pouvions connaître tous les dessous de ce projet, toutes les tractations qu'il cache, tous les intérêts qu'il prétend protéger, tous ceux qu'au contraire il entend combattre, nous pourrions peut-être comprendre mieux pourquoi on nous l'a proposé.

Je ne voudrais pas affirmer que si nous avions eu plus de détails sur le projet, nous aurions voté contre. Si le ministre avait consenti à ce que la commission parlementaire reçoive les principaux intéressés — et j'entends par là la Communauté urbaine de Québec, les maires des villes situées à l'intérieur de la zone spéciale de Québec ainsi que les maires ou les organismes qui s'intéressent au développement portuaire dans le Bas-Saint-Laurent et sur la Côte-Nord — si nous avions pu mettre toutes les cartes sur table et si le ministre avait pu s'expliquer devant tout le monde, nous aurions sans doute fini par conclure que ce projet avait l'appui de tous les intéressés.

M. le Président, il semble bien que ce soit tout le contraire, en fait. D'après ce que nous savons, ce projet inquiète au moins deux régions du Québec: le Bas-Saint-Laurent et la Côte-Nord. Ce projet n'a pas été débattu ouvertement à la Communauté urbaine de Québec. Il a peut-être fait l'objet de tractations de couloirs ou derrière des portes closes, c'est possible, mais nous n'en savons rien. Si tel était le cas, d'ailleurs, j'aurais des réserves à exprimer, car ce genre de tractations doit se faire au grand jour, surtout quand il existe déjà un organisme compétent.

M. le Président, ce qui nous rend méfiants à l'égard de ce projet de loi, je le répète pour la nième fois, c'est, d'abord et avant tout, la façon dont on a procédé pour l'amener devant cette Chambre et nous le faire ingurgiter pour ainsi dire de force, en l'absence des principaux intéressés. Si on avait pu nous démontrer devant les intéressés — en leur présence — que ce projet de loi va favoriser la zone spéciale de Québec sans nuire au développement des autres régions; si on avait pu nous démontrer que ce projet de loi constituant la Société Inter-Port de Québec avait quelques chances de rapatrier au Québec un certain pouvoir de décision en matière portuaire; si on avait pu nous démontrer que ce projet de loi correspondait à une certaine idée des régions et du régionalisme et de l'autonomie que l'on doit reconnaître aux régions dans le domaine du développement économique, nous aurions voté en faveur du projet de loi. Je n'hésite pas à le dire.

Ce qui nous fait voter contre, c'est avant tout la façon choisie par le gouvernement pour faire adopter ce projet de loi, à l'abri des regards indiscrets des intéressés, sans qu'un débat public et complet n'ait lieu. C'est d'abord et avant tout pour cela que nous continuerons de nous y opposer. Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable député de Johnson.

M. Maurice Bellemare

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, j'ai dit et répété devant la commission parlementaire de l'industrie et du commerce que cette loi était un écran de fumée et que je ne pouvais comprendre pourquoi un homme d'une grande puissance de travail et qui a surtout des principes se soit laissé entraîner, un peu malgré lui, dans ce rouage qu'il défend aujourd'hui bien maladroitement.

Il est pris, on dirait, avec une loi qu'il n'a pas voulue mais qu'on lui a imposée. Je regrette l'absence du député de Montmorency parce que je crois deviner que c'est lui qui a été l'instigateur de tout ce mouvement d'Inter-Port, lui qui est maire d'une ville voisine qui s'appelle Beauport et qui, il ne l'a pas caché à la commission parlementaire, a dit: Nous allons en venir à bout, de la CUQ, de la Communauté urbaine de Québec.

Pourquoi cette provocation? Est-ce que c'est là tout l'enjeu du projet de loi qui est devant nous, de la Société Inter-Port? Est-ce que c'est une promesse d'élection? Est-ce qu'on ne s'en servira pas en 1976 et en 1977 — comme on l'a fait en 1973, quelques heures avant l'annonce des élections provinciales, avec le port pour les pétroliers géants de Cacouna — pour annoncer de nouveau qu'il y a des développements extraordinaires qui vont s'accomplir dans ce grand port, qui est tant souhaité par tous ceux qui vivent dans cette région?

Je pense que l'honorable député de Montmorency a "bulldozé" l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, ce grand gentilhomme qui ne se laisse pas facilement manoeuvrer, puisque c'est un dauphin à la succession possible de la grande chefferie libérale. Et je sais qu'hier il faisait état de ses pronostics de l'année et je trouvais qu'il faisait une très bonne photographie.

Je ne peux pas comprendre son attitude dans la défense si véhémente qu'il apporte à ce projet

de loi. Comme l'a dit tout à l'heure l'honorable chef de l'Opposition, moi aussi je m'insurge contre cette participation fédérale, surtout après l'amendement que j'ai proposé et que l'honorable ministre a rejeté du revers du gant en disant: Non, ce n'est pas possible. Nous n'acceptons pas. Dans le bill 23, préalablement à celui que l'on dépose maintenant, le bill no 4, le titre lui-même de la Société Inter-Port de Québec n'atteignait pas véritablement le but pour lequel ce titre avait été donné puisqu'on a fait disparaître dans le nouveau projet de loi le mot "portuaire". C'est là que je me demande en vertu de quoi le gouvernement provincial peut concurrencer la CUQ, qui a déjà, comme l'a dit le chef de l'Opposition, des pouvoirs extraordinaires.

Même s'il en manque, il vaudrait mieux lui en donner de nouveau pour ne pas mettre deux organismes en concurrence lorsqu'il s'agit d'un développement portuaire et du développement d'un complexe industriel de cette importance. Mais, M. le Président, laissez-moi attirer votre attention sur un fait un peu particulier. Le gouvernement fédéral vient, dans un ordre bien spécifique, celui d'un complexe industriel, y porter son argent, y porter son contrôle, exercer, en vertu du protocole d'entente véritablement sa juridiction, qui n'est pas la sienne. Vous le remarquerez, M. le Président, dans le premier attendu, qui est cité au protocole d'entente concernant le mandat et le début des opérations: "Attendu que le gouvernement du Québec a défini certaines zones du Québec à titre de zones spéciales, après consultation avec le Québec"... Donc, c'est l'initiative du gouvernement fédéral qui, lui, décide, après consultation avec les autorités du Québec, de définir ce que sera le plan industriel, et particulièrement dans la cité de Québec.

Au deuxième attendu, M. le Président, on dit: "Attendu qu'en vertu du paragraphe 3 de la loi fédérale le ministre peut conclure avec une province un accord prévoyant que le Canada et cette province peuvent obtenir la constitution en corporation d'un ou de plusieurs organismes"... C'est toujours l'initiative du gouvernement fédéral dans une province qui se veut véritablement bénéficiaire d'un fédéralisme rentable. Mais si le fédéralisme rentable, c'est d'être à genoux devant le veau d'or d'Ottawa, je dis que je n'en suis pas, M. le Président. Et je pense que, là, on a véritablement une conception différente de ce qu'on peut appeler la véritable autonomie et le respect intégral des droits sacrés qui nous appartiennent dans la province de Québec, en vertu de la constitution canadienne.

M. le Président, pourquoi laisser pénétrer encore le gouvernement fédéral? Pour quelque $100,000? M. le Président, devant et au su de tout le monde, dans un protocole d'entente, lui donner large partie dans le bureau de direction comme contrôleur, je dis qu'il y a là, au début, une mésentente formelle entre le député de

Montmorency, qui ne partage pas les points de vue de la CUQ, et son petit patrimoine à lui, à Beauport. Cela, ce n'est pas véritablement travailler en faveur de la collectivité quand on exploite à fond de train et qu'on fait marcher un ministre de la qualité de celui qui est devant moi, M. le Président, pour réaliser ce petit objectif. Cela va causer certainement préjudice à la CUQ, qui a fait véritablement un bon travail jusqu'à maintenant.

M. le Président, pourquoi dire Inter-Port quand on sait que ce n'est pas véritablement le but, que c'est plutôt un complexe industriel qu'on veut établir, avec la bénédiction, la surveillance et surtout la participation fédérale? Croyez-vous que les gens d'en bas, que les gens qui ont désiré depuis longtemps un port pour les pétroliers géants, comme celui de Gros Cacouna, qui a été annoncé à grande publicité, sont heureux de ce soupçon d'un port pour Québec? Non, il n'est pas question de cela, pas du tout. On leur a dit, en commission parlementaire: N'ayez crainte, une déclaration va être faite par l'honorable premier ministre, demain ou après-demain, au sujet de Gros Cacouna et on va vous assurer qu'il va se faire quelque chose.

Mais, M. le Président, est-ce que, depuis qu'on parle de la réouverture prochaine du canal de Suez, il n'y a pas là une raison supérieure, puisque les superpétroliers ont perdu beaucoup de leur attrait? Est-ce que c'est normal, M. le Président, que l'amiante qui est sortie ici, une richesse naturelle de notre province, puisse être manipulée et envoyée directement dans les ports des Maritimes? Pourquoi pas chez nous? Ce minerai qui est une ressource naturelle du Québec, pourquoi pas chez nous, dans notre propre port?

Non, M. le Président, M. Marchand semble négliger très fortement sa province qui lui a pourtant donné un témoignage très éloquent encore le 8 juillet dernier.

Je pense que c'est une décision certainement reliée à la guerre qui se fait au Moyen-Orient et plus particulièrement au rôle que jouent les Etats-Unis dans tout ce problème.

Le Québec n'aura pas, au cours des années à venir, les moyens financiers de réaliser ce grand projet; c'est trop considérable pour que le Québec puisse véritablement payer de ses fonds. En voulez-vous une preuve? Son collègue, le ministre des Finances, disait dernièrement ceci: "Je ne crois pas, par exemple, qu'on pourrait facilement se lancer dans la construction d'un secteur témoin dans le pétrole, s'il s'agit d'investir $300 millions ou $400 millions." Ces propos sont rapportés dans le Soleil du 15 novembre 1974, il y a à peine un mois. Non, je pense qu'on s'est fait passer un joli sapin, pas celui qu'on a passé à Paris, mais un joli sapin. Le ministre y va très prudemment, mais, mon Dieu, que ce serait donc encore le temps de dire non, au moins de changer le titre.

Je comprends que les étapes sont franchies,

mais, dans le temps, il aurait pu accepter, au moins, d'en changer le titre et de lui donner véritablement sa valeur. Il s'agit d'un complexe industriel, demandé, exigé, défini par le gouvernement fédéral, qui a imposé son protocole d'entente, et dont il va diriger toutes les activités, à côté d'une organisation provinciale qui a été faite par une loi de notre Parlement et qui constitue la Communauté urbaine de Québec.

On va les mettre en concurrence et vous allez voir dans quelques années, dans quelques mois à peine, la concurrence terrible qui va se produire. Pourquoi? Parce qu'il y a un maire qui est un adjoint parlementaire, qui est le député de Montmorency, qui a fait chanter le gouvernement. Il fait tellement chanter le gouvernement qu'il a réussi à la commission parlementaire à fiare imposer un membre de sa section à lui, en plus.

Le ministre l'a accepté avec beaucoup de révérence. Mais quelle importance a donc ce député contre tout l'intérêt public qui est en cause?

Le ministre, qui a véritablement fait sa marque au ministère après ses nombreux prédécesseurs, je pense, s'est laissé entraîner dans un guet-apens. Il est mal pris parce qu'il est prêt à accepter n'importe quel amendement qui pourrait donner raison au député, et cela, tout au long de la commission parlementaire, nous l'avons remarqué. Lui qui n'est pas timide s'est laissé influencer.

Je pense que, si le port de Cacouna nous est repromis pour 1975, 1976, ça pourrait encore être un autre objectif pour les prochaines élections.

Je n'ai pas, je crois, plus de temps à ma disposition, mais je dis que ce complexe industriel aurait pu se réaliser facilement sans que le gouvernement fédéral vienne y mettre son nez, sous le contrôle de la Communauté urbaine de Québec, avec les moyens qu'aurait pu lui fournir le Commerce et l'Industrie, notre gouvernement. Je pense que c'est là encore une erreur stratégique dans ce qu'on quémande actuellement au fédéral.

Nous sommes devenus des assistés sociaux du gouvernement fédéral, nous sommes des gens qui, à genoux, demandons notre juste part, qui nous est donnée en vertu de la constitution canadienne, si on la respecte intégralement.

Aujourd'hui, nous assistons, dans plusieurs ministères, à des quémandages, à des promenades. Même le ministre des Finances est revenu dernièrement déçu de l'attitude du gouvernement fédéral face à la requête qu'il a faite pour protéger des ressources naturelles qui nous appartiennent et sur lesquelles nous avons pleine et entière juridiction.

Aujourd'hui, nous avons la démonstration du ministre de l'Industrie et du Commerce qui, lui aussi, prend une attitude de quémandeur, d'assisté social du gouvernement fédéral pour obtenir, pour un député, un projet que la CUQ aurait pu réaliser dans des conditions aussi acceptables, comme l'est, M. le Président... Oui, j'ai fini, je termine, M. le Président...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Je rappelais simplement au député de Johnson ce qu'il me rappelait lui-même...

M. BELLEMARE (Johnson): C'est-à-dire que le contenu...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): ... l'article 126.

M. BELLEMARE (Johnson): ... le contenu. Pardon? Je ne vous comprends pas, M. le Président, on parle comme dans un poulailler, là.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je termine et je félicite le chef de l'Opposition du courage qu'il a démontré dans le débat et particulièrement des arguments qu'il a apportés pour prouver à la population qu'il y avait là un enjeu dont on ne connaît pas la fin, mais qu'on voit aujourd'hui, par des modalités d'application différentes, sortir véritablement en dehors des cadres de la juridiction provinciale et se soumettre encore à un gouvernement fédéral.

M. DUFOUR: ... le spectacle...

M. Guy Saint-Pierre

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, sur un projet de loi qui, je l'admets, est important, mais qui ne semblait pas porter à autant de contestation de la part de l'Opposition, je n'avais pas l'intention en troisième lecture de m'étendre énormément pour le justifier. Cependant, face au réquisitoire que le chef de l'Opposition officielle nous a donné sur le projet de loi constituant la Société Inter-Port, sur la politique économique, sur les avenues de notre coopération avec d'autres niveaux de gouvernement et le rôle qu'on doit laisser au gouvernement, à la fois supérieur et à la fois inférieur, je dois soulever quelques points.

Je l'avoue au tout départ, M. le Président, c'est inquiétant. J'ai été surpris des propos du chef de l'Opposition officielle. Il me semble qu'à la commission parlementaire il a pu aborder le sujet dans un climat beaucoup plus serein, en tentant de cerner davantage le problème, que peut-être l'approche beaucoup trop globale à mon sens qu'il a eue dans ses remarques de troisième lecture. Cela me paraît inquiétant pour la démocratie puisque j'ignore si, en fait, j'ai devant moi des marionnettes qui

répondent à des désirs et des choix qui ont été faits non pas par d'autres députés, mais par des membres extérieurs à cette Chambre.

UNE VOIX: C'est vrai.

M. SAINT-PIERRE: En fait, voyant le comportement et les changements, les volte-face des députés du Parti québécois sur, il semble, la rémunération des députés et sur d'autres points de vue, je suis très inquiet pour la démocratie. On pourrait se poser une question: Quel serait notre régime si jamais un jour ce parti prenait le pouvoir et qu'il nous faudrait constater que ceux qui ont la responsabilité de diriger la province ne sont que des marionnettes qui répondent aux assemblées d'hôtels, dans des couloirs, près de la fumée, à Sorel ou ailleurs?

M. MORIN: Le ministre me permettrait-il une question, M. le Président?

M. SAINT-PIERRE: Non, M. le Président, non.

M. MORIN: Puis-je poser une question?

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le ministre a répondu non. L'honorable ministre.

M. MORIN: Parce que...

M. SAINT-PIERRE: Je vois que mon point de vue...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! ... A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

L'honorable ministre.

M. MORIN: Sur une question de privilège, M. le Président.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Question de privilège.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable chef de l'Opposition officielle, question de privilège.

M. MORIN: Le ministre a semblé indiquer que nous avions changé plusieurs fois d'opinion sur ce projet de loi. Je tiens à dire, sur une question de privilège, que c'est faux; nous avons maintenu le même cap depuis le début.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. BACON: Ce n'est pas une question de privilège. A l'ordre!

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): II ne s'agit pas là d'une question de privilège. L'honorable ministre...

M. BACON: Assoyez-vous, votre conseil national ne veut pas que vous vous leviez. Sis, sis, reste tranquille; attends les ordres des autres.

M. MORIN: Le député de Trois-Rivières...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. MORIN: ... aimerait voir augmenter son salaire.

M. BACON: Attendez les ordres des autres.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BACON: Je ne gagne pas $41,000 et je n'ai pas de chauffeur.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BACON: Hypocrite.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je vois que mon point de vue a excité au plus haut point le chef de l'Opposition. Jamais je n'ai dit qu'il a changé son point de vue sur le projet de loi no 4. J'ai dit qu'en commission parlementaire il avait une approche beaucoup plus sereine, tentant de cerner davantage le problème et que, sur un plan plus vaste, je me posais des questions sur le lien qui semble réunir un conseil confédéral ou général — je ne sais comment on l'appelle — et ce qui semble maintenant être des marionnettes.

Venons-en au projet de loi no 4, M. le Président, pour voir les contradictions de l'Opposition. Souvent on accuse le gouvernement de faire faire des études et de ne pas y donner suite. Dans le projet de loi no 4, non seulement le gouvernement provincial, mais la communauté urbaine, la ville de Québec, la chambre de commerce et le gouvernement fédéral, conjointement, il y a quelques années, avaient convenu de la nécessité d'examiner la santé économique de la ville de Québec, du Québec métropolitain.

Suite à ces études qui ont duré beaucoup de temps — et j'en passe parce qu'on a déjà débordé — qu'on a appelées le rapport ABBDL, il est sorti une recommandation. C'est la nécessité de doter la région de Québec d'un élément nouveau, qui ne pouvait être la panacée à tous les problèmes mais un instrument nouveau qui avait donné des résultats dans d'autres pays du monde, une société mixte chargée en particulier de développer plus l'avantage que pouvait représenter le port dans l'agglomération métropolitaine de Québec.

Les maires, bien sûr, ont été mis au courant. Les chambres de commerce ont ce rapport depuis deux ans, depuis trois ans. Nous avons eu de multiples discussions. Déjà, je pense, il y a deux ans, on déposait un premier projet de loi qui tentait de mettre sur papier comment nous envisagions la structure d'un pareil organisme. Depuis ce temps, de multiples rencontres ont eu lieu entre mes fonctionnaires, moi-même et à peu près tous les gens dans le Québec métropolitain qui sont intéressés réellement par le développement économique. Même, à l'époque, je pense qu'un des illustres représentants du Parti québécois de la région de Québec, M. Taillon, a participé de ce côté-ci des négociations, pour tenter de nous justifier comment Inter-Port était une société nécessaire.

Maintenant qu'il est dans l'Opposition, évidemment, il doit se conformer à un schème de négativisme et dire que ce n'est pas bon, que c'est un ballon politique.

M. MORIN: M. le Président, sur un point de privilège...

M. SAINT-PIERRE: Ce que nous avons fait, M. le Président, c'est une série...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! Une question de privilège.

M. MORIN: On met en cause un fonctionnaire qui n'est pas là pour se défendre.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Bien justement ce n'est pas à vous d'invoquer le privilège.

Le ministre.

M. SAINT-PIERRE: Heureusement qu'il n'est pas ici parce que j'aurais de la misère à m'en tenir au projet de loi no 4. Je pourrais parler longuement de la loyauté des fonctionnaires vis-à-vis d'un gouvernement, quel qu'il soit, sur le plan du parti politique qu'il représente. Mais revenons au projet de loi no 4, M. le Président. Nous avons donc depuis deux ans déposé un projet de loi, eu de multiples consultations. Nous n'avons pas voulu obtenir de cette Chambre un chèque signé en blanc. Nous avons préparé même un projet de protocole d'entente que nous avons largement distribué pour montrer à tous les intéressés où nous tentions d'aller.

Inutile de reprendre tous les débats, on sait qu'il y a une opposition qui est représentée dans la personne de M. Armand Trottier. Ce dernier nous a envoyé un mémoire et je le félicite de l'intérêt qu'il porte au projet de loi. Nous l'avons invité au ministère de l'Industrie et du Commerce. Pendant une réunion de trois ou quatre heures, avec M. de Coster, mon sous-ministre en titre, et d'autres fonctionnaires, nous avons revu l'ensemble de tout ceci.

Par après, un projet de loi, légèrement modifié pour éviter tout malentendu en ce qui touchait l'aspect portuaire du projet de loi, fut présenté; il est devant nous. Nous enregistrons la désapprobation de M. Armand Trottier quant à ce projet de loi, mais nous constatons que, dans tous les autres milieux, personne ne nous envoie de télégramme, sauf ceux que vous avez mentionnés, le conseil des maires, que nous nous sommes empressés de recevoir, pas en cachette. Mais il ne nous a pas semblé nécessaire qu'à chaque fois que le gouvernement veut parler à des représentants de la population il faille nécessairement le faire devant la commission parlementaire.

Je pense que ce serait abuser du temps de cette Chambre. La suggestion du chef de l'Opposition c'est que la zone de la communauté urbaine n'est peut-être pas assez grande, qu'il faudrait, pour fins économiques, élargir la communauté urbaine, présenter devant cette Chambre un projet de loi qui, sur le plan municipal, amènerait d'autres municipalités dans la Communauté urbaine de Québec.

M. MORIN: Ce n'est pas cela.

M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas ça? Très bien. M. le Président, il nous a semblé, en particulier, qu'en voulant doter la région de Québec d'un instrument nouveau en matière de promotion industrielle il était inutile de tenter d'alourdir ce qui est déjà un processus fort complexe, fort controversé dans la population et qui sûrement mérite un rythme de croisière plus lent. Cet organisme ne doit pas être alourdi de problèmes additionnels à ceux qu'il a déjà en matière de transport en commun, en matière d'évaluation foncière ou autres.

M. le Président, nous nous faisons accuser de donner un traitement spécial, un traitement particulier à la région de Québec. La réponse est simple, c'est qu'il y a un problème particulier dans la région de Québec, un problème que je me suis efforcé de vous expliquer, un déséquilibre sur le plan de l'emploi, où le secondaire est à la fois faible et cantonné dans des secteurs traditionnels dans des secteurs où la croissance n'est pas suffisamment forte.

C'est justement le but de la Société Inter-Port de tenter, grâce à l'avantage que peut avoir non seulement sur le plan du port, mais sur le plan de l'ensemble de son agglomération la ville de Québec pour la développer, de combler cette lacune dans le secteur secondaire.

M. le Président, le rejet par le Parti québécois de la Société Inter-Port est pour moi un refus de donner à la ville de Québec, à la région de Québec, les instruments qu'elle réclame et dont elle a besoin pour corriger tant de choses.

Je lisais, récemment...

M. MORIN: Relisez ce que j'ai dit.

M. VEILLEUX: Ecoutez et vous allez comprendre.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. SAINT-PIERRE: On sait, à plusieurs reprises, comment le Parti québécois, en invoquant des arguments d'ordre constitutionnel, s'oppose et, en fait, fait des crises de toutes sortes lorsqu'on tente, au niveau fédéral, d'établir des liens avec les municipalités.

Sur ce point, le gouvernement provincial est d'accord sur cette position d'éviter, pour les fins de respect de notre constitution canadienne, que des liens directs ne s'établissent entre le gouvernement fédéral et les municipalités. Pourtant, dans le projet de loi qui nous concerne, nous avons pris cette précaution pour que toutes les sommes d'argent, que toute l'approbation des plans de développement, les schèmes de préparation, la planification en ce qui touche ce complexe industriel se fassent directement entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Mais le parti séparatiste n'aurait aucune crise de conscience — il faut bien le voir dans ses propos — si, après avoir refusé cette Société Inter-Port, le gouvernement fédéral commençait à subventionner directement non seulement la Communauté urbaine, mais même un organisme à l'intérieur de la Communauté urbaine de Québec? N'y a-t-il pas une contradiction éclatante et qui invite à tellement de désordre?

Je lisais récemment dans le journal Le Jour que M. Pierre Bourgault trouvait que les gens du parti séparatiste jouent trop souvent aux scouts. J'ai un peu l'impression que, devant le projet de loi sur la Société Inter-Port, en le qualifiant de ballon politique, on veut jouer aux scouts, mais, en même temps, on donne un coup bas aux aspirations des gens de la région de Québec qui ont besoin de la Société Inter-Port et qui la réclament.

Il ne me semble pas que c'est le moment de dire ici ce qu'a fait le gouvernement fédéral. Je n'ai pas à le défendre. Il est capable de se défendre seul. Le chef de l'Opposition a-t-il une objection au fait qu'en 1973 les chemins de fer du Québec ont déchargé 121,783,000 tonnes de marchandises? A-t-il des objections au fait qu'au niveau des ports — je lui mentionne en passant — pour la première fois de son histoire, en 1973, le port de Québec a fait plus de transbordement, a manipulé plus de marchandises que le port d'Halifax qui a toujours été son concurrent numéro 1? Peut-être que ce sont les politiques du gouvernement fédéral amorcées il y a quelques années, à la demande du gouvernement du Québec, pour déblayer les glaces sur le Saint-Laurent qui ont donné ce premier résultat.

Nous ne voulons pas arrêter là. Nous voulons aller plus loin. Nous ne pensons pas que la Société Inter-Port soit une panacée à tous les problèmes du Québec métropolitain, mais c'est un instrument, c'est un outil fort important. Le Parti québécois refuse à la ville et à la région de Québec cet outil important.

Le bilan du Parti libéral, en matière économique, me semble fort imposant et il est inutile, pour moi, de transporter des chiffres. Cela m'inquiète, d'ailleurs, premièrement parce que, du côté séparatiste, en matière économique ou en matière de régionalisme, par ce qu'on a entendu dire, on est plutôt toujours dans des schèmes théoriques.

Cela m'inquiète également, dans un deuxième temps, puisque les nouveaux venus du côté séparatiste sont les éléments les moins valables de l'Union Nationale. Voyez quelle combinaison nous allons avoir tantôt!

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. SAINT-PIERRE: Brièvement, en matière économique, on pourrait projeter dans l'avenir ce qui arriverait avec l'indépendance. Dieu sait les nuages noirs! On se rappelle, d'ailleurs, que, tentant d'expliquer les difficultés qu'avait le gouvernement de l'Union Nationale en matière d'investissements, un groupe de spécialistes internationaux à l'intérieur d'une étude très poussée de l'OCDE, les avait attribuées à deux causes: le terrorisme et les possibilités de la séparation du Québec du Canada.

M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le député de Saguenay sur une question de règlement. A l'ordre!

M. MALOUIN: Parle-nous des salaires!

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saguenay sur une question de règlement.

M. LESSARD: Question de règlement...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que l'honorable ministre...

M. LESSARD: Sur une question de règlement.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Grat-ton): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. SAINT-PIERRE: Une question de privilège.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le député de Saguenay sur une question de règlement.

M. LESSARD: M. le Président, question de règlement, est-ce que le ministre...

M. SAINT-PIERRE: Question de privilège.

M. LESSARD: ... pourrait s'asseoir, M. le Président?

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. SAINT-PIERRE: Question de privilège.

M. LESSARD: M. le Président, j'ai soulevé une question...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable ministre sur une question de privilège. Je reviendrai à votre question de règlement après.

M. LESSARD: En quoi une question de privilège?

M. SAINT-PIERRE: Très sereinement, M. le Président, c'est pa: que le député de Johnson a pensé que je l'avais associé aux séparatistes et aux éléments moins valables de l'Union nationale, ce qui n'était pas mon intention. Le député de Johnson et le député de Montmagny sont parmi les éléments valables de l'Union nationale, ce sont les autres...

M. LESSARD: M. le Président, question de règlement.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable député de Sague-nay sur une question de règlement.

M. LESSARD: Une question de privilège, M. le Président, c'est en vertu de l'article 49. Je vous indique, M. le Président, que d après l'article 126 des règlements...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. LESSARD: ... "le débat sur la motion de troisième lecture d'un projet de loi est restreint à son contenu. Cette motion ne peut être amendée...

M. MASSICOTTE: Cela vous fait mal. M. LESSARD: Voici, M. le Président...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: ... Chaque parti reconnu n'a droit qu'à un seul discours."

M. MASSICOTTE: Pour un chanteur, cela fait mal.

M. LESSARD: C'est que tout à l'heure, lorsque le député de Sauvé, le chef parlementaire, a parlé du projet de loi, il parlait des implications de ce projet de loi vis-à-vis du gouvernement fédéral, mais le ministre est en train de nous faire le discours qu'il a fait hier sur le développement économique du Québec. Je vous inviterais à demander au ministre de se soumettre à l'article 126 du règlement.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M.Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! ... A l'ordre! ......A l'ordre! ... J'inviterais le ministre... J'ai tâché d'être large envers le chef de l'Opposition, je l'ai été avec le ministre, peut-être que nous pourrions maintenant tous revenir sur une note harmonieuse.

M. SAINT-PIERRE: En conclusion, M. le Président, je pense qu'en matière de développement régional, en matière économique, le gouvernement libéral a su non pas s'emprisonner dans une théorie dogmatique quelconque, mais faire preuve à chaque instant, pour capter le maximum et donner les avantages sur le plan économique... Qu'il me suffise de signaler que cela montrera jusqu'à quel point et dans quel contexte doit s'inscrire la Société Inter-Port, qui ne répond pas à une théorie qu'on peut retrouver dans un grand livre, mais qui répond à une analyse réelle de la situation économique du Québec qui tente justement de donner aux Québécois eux-mêmes ici, à 60 p.c. de majorité, un instrument — pas la panacée — qui permettra de corriger l'écart que nous avons décelé au niveau de la faiblesse de l'industrie secondaire dans la région métropolitaine de Québec.

M. le Président, je pense que ce ne sont pas des voeux pieux, surtout lorsqu'on sait que dans les quatre années qui ont précédé notre venue au pouvoir, les investissements totaux n'avaient augmenté que de 4 p.c. de 1966 à 1970, alors qu'ils ont augmenté de 83 p.c. depuis la venue du gouvernement Bourassa.

M. le Président, il y aura bien sûr d'autres mesures qui seront prises par le gouvernement, que ce soit dans la région de Gros Cacouna et dans la région de Sept-Iles, dans toutes les régions du Québec. Le projet Inter-Port s'inscrit dans ce souci que, sur le plan économique, il nous faut faire preuve à la fois de maturité, d'audace et de réalisme, trois qualités qu'on ne peut retrouver dans le programme économique du parti séparatiste.

Pour ces raisons, M. le Président, le projet de loi no 4 mérite l'approbation de cette Chambre.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable chef de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. MORIN: En vertu de l'article 96, M. le Président, j'aimerais rétablir les faits. Parmi toutes les choses étonnantes que le ministre a dites, il y en a une qui m'étonne plus que les autres. Il m'a fait dire des bêtises que je n'ai jamais dites. Le ministre a soutenu que je m'était montré favorable à des contacts directs entre le pouvoir fédéral et les municipalités

pour fins de subvention ou de financement. C'est une insinuation incompréhensible. Je pensais qu'il avait suivi mon discours et qu'il avait compris les motifs que j'ai invoqués. Je l'ai toujours pris pour un honnête homme, pour un homme intellectuellement droit; je ne m'explique pas...

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: Je ne m'explique pas pourquoi il me fait dire des choses que je n'ai pas dites.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Les faits sont rétablis. Est-ce que cette motion de l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, que ce projet de loi no 4, Loi constituant la Société Inter-Port de Québec, soit lu pour la troisième fois sera adoptée?

M. LESSARD: Vote enregistré, M. le Président.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Est-ce qu'il y a cinq députés?

UNE VOIX: Non.

M. LESSARD: On demande le vote enregistré, M. le Président.

LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Qu'on appelle les députés!

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

Vote de troisième lecture

LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion de troisième lecture du projet de loi no 4, Loi constituant la Société Inter-Port de Québec, veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Saint-Pierre, Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Simard, Quenneville, Mme Bacon, MM. Tetley, Lacroix, Bienvenue, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux, Houde (Fabre), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bacon, Blank, Veilleux, Pilote, Lamontagne, Picard, Gratton, Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand, Leduc, Côté, Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.

LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Roy, Bellemare (Johnson).

LE SECRETAIRE: Pour: 53 Contre: 8

LE PRESIDENT: La motion est adoptée.

Travaux parlementaires (suite)

M. LEVESQUE: M. le Président, bien que notre programme n'ait pas été complété tel que prévu à cause des pépins que nous avions — et je ne regarde pas particulièrement le chef de l'Opposition officielle lorsque je parle de pépins — malgré cela, nous allons essayer...

M. ROY: Est-ce que vous regardez le député de Sherbrooke?

M. LEVESQUE: ... de donner suite au programme tel que prévu, avec amendements. Nous allons proposer l'ajournement de la Chambre afin que trois commissions puissent siéger ce soir. Celle qui est présentement au salon rouge continuera l'étude du projet de loi no 7; à la salle 81-A, la commission de la justice entreprendra l'étude des projets de loi nos 79 et 80 et, à la salle 91-A, la commission parlementaire de l'agriculture entreprendra l'étude du projet de loi no 20, article par article.

Avant de demander l'ajournement", M. le Président, nous allons, à cause de certaines exigences du ministère des Finances, dès demain ajouter une heure à l'étude du budget supplémentaire. Les questions qui seront alors abordées seront au choix de l'Opposition ou des Oppositions. Nous avons l'intention de commencer vers onze heures la poursuite de l'étude du budget supplémentaire pour la terminer à midi. Ensuite, nous reprendrons les projets de loi suivants, pas nécessairement dans l'ordre que je vais les donner: article 14, projet de loi no 86; article 15, projet de loi no 91; article 16, projet de loi no 96; article 18, projet de loi no 90; article 4, projet de loi no 46 et article 5, projet de loi no 59.

Evidemment, M. le Président, l'article 10, projet de loi no 93.

M. le Président, tel qu'entendu, il y avait eu consentement pour qu'on puisse revenir au dépôt de rapports de commissions élues; j'aimerais, avant de proposer l'ajournement, revenir à cet article.

Le député de Taschereau.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Taschereau.

Rapports sur les projets de loi nos 40 et 41

M. BONNIER: M. le Président, j'ai deux

rapports. Le premier, c'est: Conformément au règlement de l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente des affaires sociales qui a étudié le projet de loi no 40, Loi de la Commission des affaires sociales.

En deuxième lieu, conformément à notre règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente des affaires sociales qui a étudié le projet de loi no 41, Loi modifiant la loi sur les services de santé et les services sociaux.

LE PRESIDENT: Ces deux rapports sont déposés. Peut-il y avoir entente pour que les députés qui désireraient apporter des amendements soit aux rapports ou d'autres amendements aux projets de loi aient jusqu'à demain midi, au lieu de jusqu'à ce soir?

M. LEVESQUE: D'accord.

M. BURNS: Etendre un peu le délai.

LE PRESIDENT: D'accord.

M. LEVESQUE: Est-ce que, depuis que nous avons annoncé le budget supplémentaire pour demain, il y a un sujet qui est venu à l'esprit de l'Opposition et qu'elle voudrait privilégier?

M. CHARRON: L'éducation.

M. MORIN: Les finances, les terres et forêts.

M. ROY: M. le Président, j'aimerais bien discuter de l'agriculture aussi.

M. LEVESQUE: Je vois que l'on s'entend aussi bien là-dessus que sur autre chose.

M. MORIN: Nous avons des questions sur tous les ministères.

M. LEVESQUE: Peut-être feriez-vous mieux de consulter le conseil national.

M. MORIN: M. le Président, je vois qu'on ne sait pas ce que c'est qu'un parti démocratique.

M. LACROIX: On sait ce que le parti pense de ses députés, par exemple. Il les traite comme des imbéciles et des enfants, des séniles.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain dix heures.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté.

LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 17 h 59)

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