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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le jeudi 19 décembre 1974 - Vol. 15 N° 100

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de motions non annoncées.

M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce que je peux avoir le consentement de la Chambre pour que, si nous avons des rapports au cours de la journée, nous puissions les déposer?

M. BURNS: D'accord, M. le Président. LE PRESIDENT: Consentement accordé. M. LEVESQUE: Merci.

LE PRESIDENT: Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. LEVESQUE: M. le Président, le ministre des Affaires sociales m'a prévenu qu'il serait quelques minutes en retard. Est-ce que nous pourrions attendre son arrivée et revenir à ce moment à la présentation de projets de loi au nom du gouvernement? Je crois qu'il aurait des explications à donner lui-même.

M. BURNS: Je suis également d'accord.

M. BOURASSA: Cela commence bien la journée.

M. BURNS: Cela va bien.

LE PRESIDENT: Est-ce qu'il n'y en a pas d'autres projets de loi au nom du gouvernement?

M. LEVESQUE: Oui.

M. BURNS: Profitez-en, ce ne sera pas toujours de même.

M. BOURASSA: II y a un autre projet de loi qui s'en vient.

M. LEVESQUE: M. le Président, article e).

Projet de loi no 87 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement propose la première lecture de la Loi modifiant la loi de la Législature et la loi de l'exécutif.

M. LEVESQUE: M. le Président, ce projet de loi suggère un ajustement des indemnités et allocations des membres de l'Assemblée nationale.

M. MORIN: Ah oui?

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. MORIN: Vote enregistré.

M. BURNS: Vote enregistré, M. le Président. A la suite de cette déclaration laconique du leader du gouvernement, je demande un vote enregistré.

M. BOURASSA: Ils ne sont que quatre.

M. LEVESQUE: II faut être quatre, M. le Président, pour demander le vote enregistré.

M. BURNS: II faut être cinq.

M. LEVESQUE: Cinq, je veux dire; est-ce qu'il y en a cinq qui demandent le vote?

M. BURNS: Oui, il y en a cinq.

M. MORIN: Nous allons pouvoir identifier les sangsues des fonds publics !

LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés.

Vote de première lecture

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

Que ceux qui sont en faveur de cette motion de première lecture de la Loi modifiant la loi de la Législature et la loi de l'Exécutif veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Saint-Pierre, Choquette, Garneau, Cloutier, Phaneuf, Lachapelle, Berthiaume, Quenneville, Hardy, Tetley, Drummond, Lacroix, L'Allier, Vaillancourt, Arsenault, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Kennedy, Bacon, Veilleux, Saint-Hilaire, Brisson, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Lamontagne, Gratton, Gallienne, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Pepin, Bellemare (Rosemont), Bonnier, Boudreault, Boutin, Chagnon, Caron, Côté, Harvey (Dubuc), Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Vallières, Samson, Roy, Bellemare (Johnson).

LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaft.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Bédard (Chicoutimi).

LE SECRETAIRE: Pour: 68 Contre: 5

LE PRESIDENT: La motion est adoptée.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: M. le Président, nous avons trois projets de loi qui paraissent en appendice au feuilleton, aujourd'hui. Si on n'avait pas d'objection, on pourrait les déposer immédiatement.

M. BURNS: D'accord.

M. ROY: M. le Président, puis-je demander au leader du gouvernement s'il compte appeler ces projets de loi en deuxième lecture demain?

M. LEVESQUE: Je pense que si le député en prend connaissance, il verra que ces trois projets de loi sont très brefs. Après cela, on pourra répondre peut-être d'une façon plus éclairée à la question de l'honorable député.

M. ROY: Le projet de loi peut être bref, mais la discussion peut être longue.

M. LEVESQUE: C'est pour cela que je veux attendre la réaction, une fois qu'on aura lu les projets de loi.

Les trois projets de loi en appendice, M. le Président.

Projet de loi no 200 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi concernant le Conseil de sécurité publique de la Communauté urbaine de Montréal.

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'article 1 de ce projet prévoit l'institution d'un conseil consultatif pour le Conseil de sécurité publique de la Communauté urbaine de Montréal.

L'article 2 prévoit que les décisions relatives au plan d'allocation des ressources humaines et physiques du Service de la police de la communauté n'auront d'effet que si elles sont confirmées par le gouvernement.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Projet de loi no 82 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Transports propose la première lecture de la Loi modifiant la loi des autoroutes et le code de la route.

L'honorable ministre des Transports.

M. MAILLOUX: M. le Président, l'article 1 et l'article 4 confirment le statut d'agent de la paix aux agents employés par l'Office des autoroutes pour assurer l'observance de la loi et des règlements sur les voies de communications.

L'article 2 décrète que l'amende prévue au sous-paragraphe b) du paragraphe 12) de l'article 49 b) du code de la route est une amende minimum.

L'article 3 permet de terminer l'intégration des cours municipales de trois municipalités de la rive sud de Montréal en autorisant chacune de ces municipalités à renoncer en faveur du procureur général à la poursuite des infractions commises dans son territoire aux lois et règlements concernant la circulation et le stationnement et à convenir du partage des amendes.

M. le Président, j'ajoute que ces amendements sont demandés par mon collègue de la Justice. Quand aux amendements au code de la route, beaucoup plus importants, que désirait le ministère des Transports, il ne nous est pas possible de les apporter avant le début de la prochaine session.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Projet de loi no 84 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi concernant les juges.

M. CHOQUETTE: M. le Président, ce projet prévoit que les juges nommés par le gouvernement du Québec recevront, pour l'année 1975, un montant forfaitaire déterminé d'après l'augmentation de la moyenne des traitements et salaires hebdomadaires pour l'ensemble des activités économiques du Canada au cours des deux dernières années.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles.

L'honorable ministre des Finances.

Fiscalité des compagnies minières M. Raymond Garneau

M. GARNEAU: M. le Président, j'ai mentionné, dans mon discours sur le budget de mars dernier, que deux comités interministériels avaient été chargés d'étudier respectivement la fiscalité des compagnies minières et des compagnies pétrolières. Il était alors implicitement entendu que j'annoncerais, pendant l'année financière 1974/75, des modifications applicables à ces deux secteurs.

Le comité de révision de l'imposition des entreprises minières a obtenu un mandat passablement vaste du conseil des ministres et n'a pas encore terminé son analyse. De plus, il doit poursuivre ses consultations avec les autres provinces canadiennes en vue d'assurer une meilleure harmonisation fiscale.

Notre nouvelle politique d'imposition minière devrait être annoncée lors du discours sur le budget du printemps prochain. Il convient, cependant, de faire part dès maintenant d'une modification fiscale intérimaire applicable à ces compagnies pour l'année 1974/75, c'est-à-dire pour la période s'étendant du 1er avril 1974 au 31 mars 1975.

Les compagnies dont l'exercice financier se termine ou débute au cours de cette période verront leurs bénéfices miniers imposés à des taux majorés de 50 p.c. pour les tranches de profits inférieures à $10 millions et de 100 p.c. pour les tranches excédant $10 millions.

Le taux minimum passera donc de 9 p.c. à 13.5 p.c. et le taux maximum de 15 p.c. à 30 p.c. Par contre, l'exemption de base sera portée de $50,000 à $150,000 pour la même période.

Les compagnies minières devront, d'une part, calculer le montant d'impôt minier qui aurait été payable si l'ancien régime fiscal s'était appliqué durant tout l'exercice financier des compagnies et, d'autre part, le montant qui serait payable si le nouveau régime fiscal s'était appliqué durant tout l'exercice financier de la compagnie. Puis elles détermineront le montant d'impôt payable suivant chacune de ces structures en utilisant le nombre de jours de l'exercice financier compris ou non dans la période d'augmentation.

Les nouveaux taux seront donc, par tranches de profits miniers, déduction faite de l'exemption, de 13.5 p.c. du profit n'excédant pas $1 million, 16.5 p.c. du profit excédant $1 million mais n'excédant pas $2 millions, 19.5 p.c. du profit excédant $2 millions mais n'excédant pas $4 millions, 22.5 p.c. du profit excédant $4 millions mais n'excédant pas $10 millions et 30 p.c. du profit excédant $10 millions.

Cette nouvelle structure de taux devrait rapporter au trésor public environ $15 millions de revenus supplémentaires pour l'exercice 1974/75, tout en maintenant, en moyenne, les compagnies minières québécoises dans une position concurrentielle avantageuse par rapport à celles qui opèrent dans les principales provinces productrices où des modifications fiscales ont été annoncées. Toutes les autres dispositions actuelles de la Loi sur les impôts, de la Loi concernant l'application de la loi sur les impôts s'appliquant aux compagnies minières et de la Loi des droits sur les mines demeureront inchangées, sauf pour ce qui est de certaines dispositions de concordance avec la loi fédérale et dont il est question dans le document intitulé "Renseignements supplémentaires à la déclaration ministérielle", qui sera distribué à tous les membres de cette Chambre.

Par ailleurs, à la suite de notre examen du régime fiscal des compagnies pétrolières et gazières, et à la suite également du budget fédéral, je voudrais faire part de certaines modifications à la fiscalité de ces compagnies. Le régime fiscal des compagnies gazières et pétrolières sera modifié à partir du 6 mai 1974, de façon à incorporer à la Loi sur les impôts et à la Loi concernant l'application de la loi sur les impôts de nouvelles dispositions prévues par l'avis de motion des voies et moyens fédéral du 18 novembre 1974, résumé dans le document annexé qui sera distribué à tous les députés, c'est-à-dire que les redevances et autres paiements ou considérations pouvant être assimilées

à des redevances versées aux gouvernements fédéral et provinciaux, à leurs mandataires ou représentants par des compagnies pétrolières et gazières ne seront plus déductibles dans le calcul de leurs revenus. L'épuisement gagné remplacera l'épuisement automatique et sera déductible jusqu'à la limite de 25 p.c. des bénéfices de production et sera gagné de la même manière qu'au fédéral.

La définition des dépenses admissibles sera la même et celles-ci donneront droit à $1 d'allocation pour chaque $3 de dépenses admissibles. Les frais d'exploration canadiens engagés par une entreprise principale demeureront amortissables au taux de 100 p.c, alors que le taux sera de 30 p.c. sur le solde dégressif pour ce qui est des frais d'aménagement canadiens non engagés au Québec.

Cependant, les dispositions particulières suivantes seront introduites dans la loi québécoise: la part des dépenses admissibles engagées au Québec par les compagnies à partir du 1er janvier 1975 donnera droit à $1 d'allocation d'épuisement gagné pour chaque $2 de dépenses; les frais d'aménagement engagés au Québec par les entreprises principales continueront d'être amortis au taux de 100 p.c. comme antérieurement. J'aimerais mentionner que l'ampleur de notre déficit énergétique en hydrocarbures est tel que ces mesures d'encouragement à la recherche et à la découverte d'hydrocarbures au Québec nous semblent amplement justifiées. Ces modifications à l'imposition des compagnies pétrolières et gazières devraient rapporter dès cette année environ $25 millions supplémentaires au trésor provincial.

A la suite d'un changement important dans la conjoncture économique, l'industrie reliée aux ressources forestières a connu un renversement important de ses conditions d'opération. L'industrie papetière est maintenant favorisée par des prix mondiaux élevés, alors que l'industrie du bois de sciage est violemment touchée par le ralentissement de la construction résidentielle. Face à cette situation, le gouvernement a décidé de réviser sa politique concernant les droits de coupe de ces deux types d'industrie.

Concernant les producteurs de bois de sciage, le gouvernement les autorisera à différer après le 1er avril 1975 les droits de coupe, au montant de $7 millions environ, qu'ils auraient dû payer pour l'année financière 1974/75. Ces droits seront payables sans intérêt sur une période maximale de trois ans à compter du 1er avril 197 5 selon un échéancier qui sera établi suivant les conditions de reprise du marché des bois de sciage.

Par contre les hausses importantes de redevances dans les autres provinces et l'amélioration de la rentabilité de l'industrie des pâtes et papiers justifient une hausse des redevances à compter du 1er janvier 1975, lesquelles seront portées, pour chaque unité de 100 pieds cubes de bois à pâte coupée, de $2.94 à $5 pour les bois résineux, de $2.32 à $4.38 pour les feuillus autres que le peuplier et le tremble et de $1.19 à $2.36 pour le tremble et le peuplier. Malgré ces ajustements, qui entraîneront une hausse de revenu de l'ordre de $8 millions en 1975/76, les producteurs québécois continueront d'être dans une position avantageuse par rapport à leurs concurrents situés dans les autres provinces.

Il convient également d'annoncer en cette Chambre que le gouvernement a décidé d'adopter un programme d'épargne-logement à compter de l'année 1974. Ainsi, en vertu de ce régime, tout contribuable résidant au Canada, de 18 ans, et plus, et qui ne possède pas déjà une habitation pourra verser jusqu'à $1,000 par an à un plan enregistré d'épargne-logement. La contribution totale à un tel plan ne pourra pas excéder $10,000. On ne pourra se prévaloir qu'une seule fois de ce régime et ces versements seront déductibles dans le calcul du revenu.

Le revenu des fonds ainsi placés ne sera pas imposé. Lors de leur retrait, les montants investis dans un plan d'épargne-logement et les revenus qui s'y sont accumulés ne seront pas imposés s'ils servent à effectuer un versement initial sur l'achat d'une maison ainsi qu'à l'acquisition de l'ameublement et des principaux appareils ménagers au moment de l'aménagement. A l'expiration du régime, la totalité des sommes versées et des revenus s'y rapportant devra être retirée dans la mesure où le montant versé dans un régime n'est pas utilisé à l'achat d'une maison et de l'ameublement. Il pourra être transféré à un régime enregistré d'épargne-retraite ou servir à l'achat d'une rente d'étalement, laquelle est assujettie à l'impôt.

Le fonctionnement de ce régime d'épargne-logement s'apparentera à celui du régime actuel d'épargne-retraite. Ainsi ce régime devra être enregistré dans l'année ou dans les 60 jours qui suivent la fin de l'année d'imposition. Enfin, je tiens à mentionner qu'en vertu de la loi québécoise, comme ce sera vraisemblablement le cas en vertu de la loi fédérale suite à mon intervention auprès du ministre fédéral des Finances, les placements des fiduciaires administrant les régimes enregistrés d'épargne-logement auprès des caisses populaires seront considérés comme admissibles.

Egalement le gouvernement a décidé d'inscrire dès 1974, dans la Loi sur les impôts, des dispositions de concordance avec la loi fédérale en ce qui concerne l'exemption des premiers $1,000 de revenu d'intérêt reçus par un particulier. Elles prendront effet rétroactivement à partir du début de l'année civile 1974. Le coût de cette mesure est évalué à environ $50 millions pour une année. Les formulaires d'impôt permettront aux contribuables québécois de se prévaloir des bénéfices de cette exemption de $1,000 ainsi que du programme d'épargne-logement lorsqu'ils rempliront leur déclaration d'impôt pour l'année 1974.

Enfin, le gouvernement fédéral a présenté plusieurs dispositions ayant pour objet de parachever la réforme fiscale entreprise en 1972. De manière à minimiser la différence de structure fiscale entre les provinces, nous allons donner

suite à plusieurs de ces dispositions. On trouvera d'ailleurs, dans le document auquel j'ai fait allusion antérieurement, une liste et un résumé des principales dispositions, prenant effet avant l'année d'imposition 1975, que nous retenons pour le Québec.

La législation mettant en force diverses mesures sera présentée au cours de la prochaine session de l'Assemblée nationale. Cependant, elle aura les effets rétroactifs mentionnés précédemment.

Dans un autre ordre d'idées, je voudrais annoncer dès maintenant que le gouvernement ne reconduira pas l'exemption de la taxe de vente sur l'achat de machinerie industrielle, et cela à compter du 1er avril 1975. La loi de l'impôt sur la vente en détail a été modifiée en 1972 pour exempter la machinerie industrielle achetée entre le 19 avril 1972 et le 31 mars 1975.

Cependant, toute machinerie industrielle achetée après ce soir et avant le 1er avril 1975 devra, pour pouvoir bénéficier de l'exemption, être livrée avant le 1er avril 1976. C'est pour éviter des complications administratives que j'ai voulu annoncer dès maintenant la politique gouvernementale à l'égard de cette mesure.

En terminant, je crois qu'il est important de souligner que cette déclaration s'inscrit dans la ligne de pensée de mon dernier discours sur le budget et constitue la poursuite des politiques sociales-démocrates du gouvernement Bourassa.

LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, avant de me pencher sur les détails de la déclaration ministérielle, il me parait opportun de faire quelques observations de portée générale sur la déclaration du ministre.

Ce qu'il est difficile de comprendre, après toutes les demandes d'indexation de l'impôt émanant des milieux les plus divers, y compris les analyses économiques, c'est que le ministre s'obstine à refuser l'indexation des tables d'impôt sur le revenu des particuliers.

A ce propos, pour répondre une fois pour toutes aux arguments du premier ministre, qui soutient que ce sont les banques, comme il vient de le répéter à sa manière habituelle de collégien, pour répondre à cela et à son autre prétention selon laquelle ce sont prétendument les riches qui bénéficieraient de l'indexation, je voudrais lui citer quelques extraits d'articles parus dans les revues spécialisées en matière de fiscalité. Le premier ministre, s'il est encore "fiscaliste" à ses heures, aura lu certains de ces articles.

M. BOURASSA: Je vais vous répondre.

M. MORIN: Je ne sais pas s'il a le temps de le faire...

M. BOURASSA: Je vais vous répondre.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais faire allusion en particulier à un article fort bien documenté, probablement le meilleur qui ait été publié récemment, dans le Canada Tax Journal de juillet/août 1974. Dans cette revue, on trouve un article signé par MM. Allan, Dodge et Poddar, qui sont tous experts du ministère fédéral des Finances. Cet article démontre, s'il était besoin, que l'indexation a pour but d'éliminer les augmentations de taxes subreptices, presque "involontaires" qui surviennent avec l'indexation, en somme ce que le ministre Turner a appelé les hausses clandestines de taxes qui résultent de la non-indexation des impôts en période d'inflation. Le résultat, écrivent ces auteurs, en est une hausse réelle des taxes. Et ils soutiennent, en conclusion, qu'il faut revenir au revenu réel et non plus au revenu gonflé des "bénéfices" inflationnistes, si l'on veut tenir compte de la capacité de payer, de la capacité fiscale des contribuables.

Le premier ministre s'est fait l'écho de ces débats ici en Chambre et devant le public. Il a dit que l'indexation bénéficiait avant tout à ceux qui se situent dans les échelons supérieurs des salaires. Mais les auteurs en question et plusieurs autres articles démontrent que c'est faux. Et le pire, c'est que le premier ministre le sait.

M. BOURASSA: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. MORIN: En tout cas, cet "admirable" expert financier, qu'il est, devrait le savoir.

LE PRESIDENT: Une question de privilège. M. HARDY: ... faux juriste.

LE PRESIDENT: Un instant, une question de privilège ou quoi?

M. BOURASSA: M. le Président...

M. MORIN: Est-ce une question de privilège?

LE PRESIDENT: J'aimerais le savoir.

M. BOURASSA: Je veux rectifier. Est-ce que le chef de l'Opposition me permet de rétablir les faits?

M. LESSARD: M. le Président, au moment d'une déclaration...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre! ... A l'ordre, s'il vous plaît.

Une question de privilège uniquement si le député se sent attaqué ou se sent...

M. MORIN: M. le Président, je comprends que, d'une certaine façon, il se sente attaqué, parce qu'il n'a pas grand-chose à répondre.

M. BOURASSA: Est-ce que vous me permettez de répondre.

M. MORIN: Vous répondrez après.

LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.

A l'ordre, messieurs! S'il vous plaît!

M. MORIN: M. le Président, dans cet article de juillet/août 1974, qui constitue une contribution récente au débat, les auteurs nous disent ceci, à propos de l'argument selon lequel ce sont les contribuables les plus aisés qui seraient favorisés par l'indexation: "It should be obvious that — malheureusement, M. le Président, il n'existe encore point de "Quebec Tax Journal" — il y en aura peut-être un, quelque jour; à ce moment, nous pourrons citer en français. Pour l'instant, pour être bien sûr que je me fais comprendre, je vais le citer dans la langue de l'original: "It should be obvious that the additional tax incured by a purely inflationary increase in incom will be greater the higher the marginal tax rate. It, therefore, follows — écoutez bien — that, in moving towards a real income tax system, the resulting tax saving will be larger, in absolute terms...

M. BOURASSA: Ah oui! mais c'est ce qui compte.

M. MORIN: ... for high than for low income tax-payers".

LE PRESIDENT: S'il vous plaft, messieurs!

M. MORIN: Oui, si on veut bien me laisser procéder, c'est assez technique...

LE PRESIDENT: S'il vous plaît!

M. MORIN: M. le Président, et j'aimerais bien qu'on écoute. "There is nothing intrinsically inequitable about this result. It is merely the converse of the higher tax imposed by inflation upon higher income tax-payers. Secondly, in endeavouring to assess the equity or progressivity of indexing from the behaviour of the absolute dollars amount of tax saving, this criticism is on extremely shaky ground".

J'espère que le premier ministre me suit. Et, plus loin: "Indexing is a progressive adjustment to the tax system for the relative tax saving falls continuously as taxable income rises". Est-ce que c'est clair?

Je pourrais d'ailleurs en citer encore plus longuement: "It is apparent that, when a theoretically appropriate comparison is made, indexation is revealed as being a non ambiguously progressive measure".

Cet article, dont je ferai parvenir copie au premier ministre, s'il en a besoin...

M. BOURASSA: Oui, je l'ai lu.

M. MORIN: ... démontre... M. BOURASSA: Je l'ai lu.

M. MORIN: ... sans ambiguïté que l'indexation est une mesure qui est progressive sur le plan fiscal...

M. BOURASSA: Oh!

M. MORIN: ... et progressiste sur le plan social.

M. BOURASSA: Oh!

M. MORIN: Et le premier ministre...

M. BOURASSA: C'est incroyable.

M. MORIN: ... aura beau faire des tas de simagrées, le premier ministre aura beau faire des discours pour cacher cette réalité...

M. BOURASSA: ... les preuves.

M. MORIN: ... il ne pourra pas contredire les tableaux qui se trouvent dans cet article.

M. BOURASSA: Ils admettent qu'en termes absolus...

M. MORIN: M. le Président, d'ailleurs, dans plusieurs de mes interventions sur ce même problème, notamment à l'époque de la motion de blâme, j'ai montré, chiffres en main, comment les contribuables qui se trouvent au bas de l'échelle bénéficient plus de l'indexation que ceux qui se trouvent au haut de l'échelle.

Je vous propose une dernière citation avant de passer aux détails de la déclaration ministérielle. La conclusion est la suivante, qu'on trouve à la page 369: "Indexing decreases the share of total taxes paid by lower income tax-payers while increasing their share of disposable income. It is thus unambiguously a progressive matter". M. le Président, je laisse au premier ministre le soin de nous faire, encore une fois, son petit discours clé sur le thème que l'indexation bénéficie avant tout aux riches.

M. BOURASSA: J'ai les premiers ministres sociaux-démocrates du Canada.

M. MORIN: II y reviendra. Pour l'instant, je n'ai pas terminé mon commentaire.

Je me penche maintenant sur les détails de la déclaration ministérielle. On indique dans cette déclaration ministérielle qu'il y aura, en premier lieu, une majoration des taux d'imposition sur les bénéfices miniers des compagnies dont l'exercice financier se termine ou débute au cours de la période allant du 1er avril 1974 au 31 mars 1975.

M. le Président, ce que j'entends dire là-dessus, c'est que ces compagnies, qui vont subir un taux d'imposition un peu supérieur, sont

déjà les entreprises les moins taxées du Québec. Là-dessus, le ministre, d'ailleurs, commet un très bel euphémisme, à la page 3 de sa déclaration: "Tout cela — dit-il— cette nouvelle structure, va maintenir en moyenne les compagnies minières québécoises dans une position concurrentielle avantageuse par rapport à celles qui opèrent dans les principales provinces productrices où des modifications fiscales ont déjà été annoncées". Qu'en termes élégants, fiscalement élégants, ces choses-là sont dites! En somme, les majorations prennent bien garde de toucher à la position préférentielle dont bénéficient déjà au Québec ces compagnies minières.

M. SAINT-HILAIRE: II ne comprend rien! M. MORIN: M. le Président, je note...

M. BOURASSA: C'est épouvantable. Il faut créer du chômage!

M. MORIN: Nous avons trop bien compris, voilà ce qui est. Trop bien compris. M. le Président, je note aussi que l'exemption de base est triplée pour la même période et cela me paraît tout autant significatif.

En second lieu, je traiterai des droits de coupe des compagnies de pâtes et papiers. La hausse de redevances, à notre avis, s'est fait beaucoup trop attendre. On nous annonce maintenant qu'elle va être portée, pour les bois résineux, de $2.94 à $5., pour les feuillus autres que le peuplier et le tremble, de $2.32 à $4.38, et pour le peuplier et le tremble, de $1.19 à $2.36.

M. le Président, ces redevances demeurent inférieures à la rente économique que la collectivité québécoise pourrait tirer de la richesse collective, de ses richesses naturelles. Cela entraîne pour le gouvernement une hausse de revenu qui est à peine de $8 millions. Quant on sait, M. le Président, l'amélioration de rentabilité qu'ont connue ces industries de pâtes et papiers depuis quelque temps, on s'étonne que ce soit là le minuscule surplus que la collectivité retirera de la richesse collective.

Le ministre reconnaît, par un nouvel euphémisme d'ailleurs, que cet "ajustement", comme il dit, ne portera pas réellement atteinte à la position privilégiée de ces compagnies de pâtes et papiers. Ecoutez bien ce bel euphémisme: "Malgré cet ajustement, les producteurs québécois continueront d'être dans une position avantageuse par rapport à leurs concurrents situés dans les autres provinces". Voilà la réalité.

M. le Président, il reste du chemin à parcourir avant que les Québécois puissent devenir les "Arabes" du papier, ou de l'amiante...

DES VOIX: Ha! Ha!

M. MORIN: ... ou de cuivre, ou même du fer.

M. SAINT-HILAIRE: J'espère que les Québécois ne deviendront jamais des Arabes!

M. MORIN: M. le Président, il reste bien du chemin à parcourir avant que nous soyons les Arabes de quoi que ce soit. Merci.

M. SAINT-HILAIRE: S'il fallait que nos Québécois soient des Arabes, cela ferait pitié.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, le ministre, ce matin, en nous annonçant cette mesure, a tenté de faire croire, je pense bien, aux Québécois, par le fait qu'on irait chercher plus d'argent dans certaines entreprises, qu'il s'agirait en quelque sorte d'un cadeau à l'endroit des contribuables du Québec.

Mais, lorsqu'on regarde cette déclaration, lorsqu'on regarde les sous-entendus et lorsqu'on peut lire un peu entre les lignes, on découvre que c'est loin d'être la situation.

On aurait été en droit de s'attendre, je pense, dans le Québec, compte tenu du fait que le gouvernement est le plus grand profiteur de l'inflation actuelle — le gouvernement est à pourcentage dans le système d'inflation que nous connaissons — que non seulement les compagnies, mais les contribuables du Québec puissent se retrouver, eux aussi, dans une situation au moins aussi avantageuse sinon plus que les contribuables des autres provinces.

Au lieu de cela, nous devons malheureusement constater, encore une fois, que le gouvernement ne corrige rien pour le contribuable du Québec, parce que les exemptions de base — je dis bien les exemptions de base — à l'impôt sur le revenu n'ont pas été changées. A titre d'exemple, un père de famille qui gagne de $8,000 à $9,000 par année, compte tenu des augmentations considérables qu'il a dû assumer pour faire vivre sa famille, n'a encore aucune exemption de base pour chacun des enfants qu'il a à sa charge.

Je pense qu'on n'a pas à se réjouir de la piètre performance du gouvernement que nous avons devant nous. Le gouvernement aurait pu et pourrait, à ce moment-ci de l'année, faire un cadeau réel aux contribuables du Québec, mais il manque encore l'occasion de le faire. Pourtant, ce n'est pas parce que le gouvernement ne perçoit pas plus d'argent à cause de l'inflation. Il préfère garder son pourcentage et distribuer quelques miettes.

Pour ce qui a trait aux compagnies minières, le gouvernement va chercher un petit montant additionnel de $15 millions face aux immenses richesses que le Québec possède. Lorsque le gouvernement nous annonce qu'il faut absolument tenir ces entreprises dans une position concurrentielle avantageuse, je dis que nous sommes en train d'hypothéquer dangereusement l'avenir. En effet, pendant que les compa-

gnies viennent chez nous chercher nos richesses naturelles pour rien, il est évident que d'autres attendent peut-être l'occasion d'avoir de meilleurs prix.

A ce moment-là, nos richesses, qui ne sont quand même pas inépuisables, seront épuisées et nous nous retrouverons dans d'autres situations qui ne seront pas celles où, je pense, nous aurions aimé que nos Québécois se retrouvent.

Pour ce qui a trait aux compagnies papetiè-res, je pense que le ministre des Finances aurait dû consulter un peu son collègue du ministère des Terres et Forêts. Lorsqu'on parle d'augmenter quelque peu — je dis bien quelque peu — les droits de coupe des compagnies papetières, avec les immenses privilèges qu'elles ont, compte tenu du fait qu'on se propose de racheter leurs immobilisations, ce qui sera une compensation plus qu'avantageuse, si on regarde un peu entre les lignes, on se demande si réellement le Québec va aller chercher des revenus additionnels.

Dans une troisième mesure, le gouvernement du Québec, et j'en suis très heureux, consent à permettre à ceux qui voudront bénéficier du programme d'épargne-logement du gouvernement fédéral de bénéficier des mêmes avantages de la part du gouvernement québécois.

Cela, c'est une heureuse mesure. J'avais, d'ailleurs, interrogé le ministre des Finances à ce sujet-là, au début de la semaine. Mais il y a quelque chose qui me surprend dans cette déclaration.

Voici ce que dit le ministre à la page 9: "Enfin, je tiens à mentionner qu'en vertu de la loi québécoise, comme ce sera vraisemblablement le cas en vertu de la loi fédérale, suite à mon intervention auprès du ministre fédéral des Finances, les placements des fiduciaires administrant le régime enregistré d'épargne-logement auprès des caisses populaires seront considérés comme admissibles."

Je n'ai rien contre. Evidemment, je suis pour que les caisses populaires soient admises mais, M. le Président, il y a eu des consultations et des communications qui ont été faites hier soir avec l'honorable ministre des Finances fédéral, M. Turner, et le ministre des Finances fédéral est prêt à rendre éligibles les caisses d'épargne et de crédit au Québec. Je me demande pourquoi le gouvernement provincial veut limiter cela et donner l'exclusivité aux caisses populaires alors qu'il y a toute une série de caisses d'entraide économique dans le Québec et tout un réseau de caisses d'établissement qui se sont justement, elles, spécialisées d'une façon particulière pour favoriser l'accès à la petite propriété résidentielle. Il y a belle lurette que les caisses d'établissement, depuis 1960, sont inscrites et font souscrire des plans d'épargne dans la province de Québec, des plans d'épargne-logement.

Je me demande pourquoi le gouvernement de la province impose actuellement une restriction et veut limiter l'application de la loi fédérale pour tâcher de donner l'exclusivité aux caisses populaires. M. le Président, aussitôt que le ministre le pourra, je serai prêt à donner mon consentement pour qu'il nous donne des explications là-dessus; sinon, j'y reviendrai tout à l'heure lors de la période des questions. Je me demande pourquoi cette restriction du gouvernement provincial alors que le fédéral est prêt, lui, en ce qui le concerne, à accepter tout le mouvement des caisses d'épargne et de crédit. M. le Président, le gouvernement, comme dernière mesure, accorde une exemption de $1,000 de revenus provenant d'intérêts à ceux qui ont des revenus d'intérêts. Nous avons demandé qu'il y ait une mesure de ce genre depuis bien longtemps. Je pense que le gouvernement admet quand même l'erreur qu'il a faite il y a quelques années alors qu'on a décidé d'imposer l'intérêt. M. le Président, à ce moment-là, je n'étais pas député, je travaillais à l'intérieur du mouvement des Caisses d'épargne et de crédit du Québec et j'étais en mesure de me rendre compte des conséquences que cette imposition avait eues, des conséquences énormes que cette imposition avait eues à l'effet de décourager l'épargne québécoise. Or, le gouvernement corrige la situation, accordant $1,000 d'exemption d'impôt sur le revenu, c'est-à-dire en ce qui a trait au revenu d'intérêts sur l'impôt sur le revenu. C'est une mesure à laquelle nous souscrivons. J'aimerais bien à ce moment-ci que le ministre des Finances aille un peu plus loin et, compte tenu des petits montants qui sont collectés en intérêts dans les caisses populaires et les petites caisses d'épargne et de crédit, fasse en sorte de relever la base minimale exigée pour remplir une formule fiscale, ce qui a pour effet d'alourdir et de compliquer énormément l'administration des petites caisses d'épargne et de crédit du Québec.

LE PRESIDENT: Dépôt de documents.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement.

Conseil consultatif du travail

M. LEVESQUE: M. le Président, pour et au nom du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qu'il me soit permis de déposer le rapport annuel de 1973/74 du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

LE PRESIDENT: II n'y a pas d'autre dépôt de documents de la part du ministre de la Justice?

Tribunal de l'expropriation

M. CHOQUETTE: Oui, oui. M. le Président,

je voudrais déposer le rapport annuel du Tribunal de l'expropriation pour l'année 1973/74.

Régie des loteries

M. CHOQUETTE: Je veux également déposer le rapport annuel de la Régie des loteries et courses du Québec pour l'année dernière.

LE PRESIDENT: Questions orales des députés. Le chef de l'Opposition officielle. Non, le leader de l'Opposition officielle.

QUESTIONS DES DÉPUTÉS

M. BURNS: Le leader du gouvernement.

M. BOURASSA: Un beau lapsus. Un beau lapsus.

Contrats à une firme d'ingénieurs

M. BURNS: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. J'ai appris comme tout le monde, par l'entremise de média d'information, que le député de Drummond aurait, par l'entremise de la firme d'ingénieurs dont il serait le président, obtenu un certain nombre de contrats du gouvernement depuis 1970 d'une valeur d'environ $6 millions, dit la nouvelle, et, depuis son élection, d'une valeur d'environ $1 million. Je veux savoir du premier ministre s'il est en mesure de confirmer ces faits ou de les infirmer et, d'autre part, ce qu'il a l'intention de faire comme action immédiate dans ce cas.

M. BOURASSA: Je ne sais pas si on permettrait au député de répondre. Je crois qu'il a prévenu le président qu'il aura une question de privilège demain. Avec documents à l'appui.

M. BURNS: C'est au chef de l'exécutif que je m'adresse, et je lui parle d'un de ses députés. Le député de Drummond a tous les droits de faire les rectifications qu'il voudra, c'est un droit que je ne lui nie pas du tout et nous l'écouterons religieusement, mais c'est au chef de l'exécutif que je m'adresse.

M. MALOUIN: Demain.

M. BOURASSA: M. le Président, quand même, on doit donner le temps au député de démontrer, preuve à l'appui, la fausseté des affirmations qui ont été faites. Or le député m'a demandé...

M. BURNS: C'est faux, là?

M. BOURASSA: Le député fait actuellement venir tous les documents nécessaires de Drummondville, pour démentir cette nouvelle qui ternit très injustement sa réputation. Je me passerai de... Le député m'a dit qu'il avait démenti toute cette histoire au journaliste, qui n'a pas tenu compte de son démenti, et qui a publié la nouvelle quand même. Alors il fait venir tous les documents de Drummondville, aujourd'hui, pour expliquer publiquement et pour démontrer publiquement jusqu'à quel point l'article est faux. On verra après ce qu'on fera.

M. BURNS: Alors si je comprends bien, le premier ministre nie l'exactitude de ces faits-là. C'est comme ça?

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai répondu à la question du député.

M. BURNS: Non, vous n'avez pas répondu à ma question.

M. LEVESQUE: Mais voyons, M. le Président, à l'ordre!

M. BURNS: Je veux savoir — parce que ça justifie ou non une question supplémentaire de ma part — je veux savoir si le premier ministre, le chef de l'exécutif du gouvernement québécois, nie les choses qu'on a apprises par l'entremise du media d'information dans le cas du député de Drummond.

M. BOURASSA: Le député pose une question stupide. Je viens de lui dire que le député fait venir de Drummondville tous les documents aujourd'hui même.

M. BURNS: Vous niez l'exactitude des faits?

M. BOURASSA: M. le Président, je lui dis que le député fait venir aujourd'hui tous les documents pour démontrer la fausseté de l'article en question.

M. BURNS: Donc, M. le Président, je comprends, de la réponse du premier ministre, qu'il nie l'exactitude des faits.

M. LEVESQUE: J'invoque le règlement.

LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est la dernière partie, je pense que le règlement prévoit que vous n'avez pas le droit de faire des déductions. C'est prévu à notre règlement.

M. BURNS: M. le Président... LE PRESIDENT: Dernière...

M. BURNS: ... j'ai le droit de comprendre ce que je veux des réponses du premier ministre.

LE PRESIDENT: Cela...

M. BURNS: Et de la façon qu'il les donne, je

suis obligé de les interpréter constamment. C'est rien que ça que j'ai à dire.

M. MALOUIN: Tes petits journalistes peuvent salir de la manière qu'ils veulent.

M. BURNS: Je pose la question suivante au premier ministre: Que le cas du député de Drummond soit exact ou inexact — le premier ministre apparemment prétend que c'est inexact — est-ce que le premier ministre envisage de donner des directives aux députés, comme il l'a fait dans le cas des ministres, afin qu'ils ne soient pas placés dans des conflits d'intérêts?

M. BOURASSA: M. le Président, je ne sais pas si le député de Maisonneuve veut insinuer quoi que ce soit, mais il est au courant — je l'ai dit à plusieurs reprises — qu'il y a actuellement un comité d'étude qui étudie cette question. Des directives ont été données, dans le cas des ministres, qui sont les plus sévères qui ont jamais existées au Québec et au Canada, au sujet de transactions...

M. BURNS: Ce n'est pas sûr, ça.

M. BOURASSA: ... qui, actuellement, sont permises dans la presque totalité des provinces. On est allé au-delà de transactions qui actuellement sont permises dans la presque totalité des provinces. Cela, on ne l'a jamais dit, mais je dis...

M. BURNS: Je veux savoir dans le cas des députés.

M.BOURASSA: J'ai dit: Le député de Maisonneuve connaît la réponse. Pourquoi pose-t-il la question? C'est pour cela que j'interprète la question du député de Maisonneuve comme une insinuation. Il sait fort bien...

M. BURNS: Je ne connais pas votre réponse. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

M. BOURASSA: ... qu'il y a un comité actuellement qui examine le cas...

M. BURNS: Je sais cela.

M. BOURASSA: ... des conflits d'intérêts. Je l'ai dit au moins quinze fois qu'il y a un comité qui étudie actuellement cette question. C'est tout à fait différent des accusations qui sont démenties tour à tour par les députés actuellement, et preuves en main. Est-ce qu'on a prouvé quoi que ce soit contre le député d'Anjou? Est-ce qu'on a prouvé quoi que ce soit contre le député de Louis-Hébert? Est-ce qu'on a prouvé quoi que ce soit contre le député de Drummond?

M. BURNS: Avez-vous prouvé quoi que ce soit contre le député de Taillon?

M. BOURASSA: On a prouvé un document dans le cas du chef de l'Opposition, par exemple.

M. BURNS: Question additionnelle.

LE PRESIDENT: Question additionnelle.

M. BURNS: Les directives, elles vont venir? C'est ce que je veux savoir.

LE PRESIDENT: Al'ordre! Le député de Gatineau.

M. GRATTON: Question additionnelle, M. le Président. Pourrais-je demander au premier ministre s'il entend communiquer avec le Conseil national du Parti québécois pour lui demander s'il va émettre, lui, des directives pour les députés du Parti québécois?

LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda. Oui? Question de privilège.

M. MALOUIN: Non. Question supplémentaire, M. le Président.

LE PRESIDENT: Question supplémentaire. Le député de Drummond.

M. MALOUIN: Est-ce que je pourrais demander au premier ministre s'il a l'intention de changer la Loi de la Législature qui permet à certains petits journalistes d'écrire des faussetés semblables et de s'abriter derrière un paravent? Peut-être qu'ils pourraient se rétracter demain, mais le mal est fait, je crois. Est-ce que le premier ministre pourrait étudier la possibilité de changer cette loi qui permet de telles choses aux journalistes?

M. MORIN: Museler la presse?

M. MALOUIN: Assis-toi, accusé Morin, parce qu'on pourrait en dire d'autres.

M. MASSICOTTE: Vierge offensée!

LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. MALOUIN: Je suis prêt à mettre mon siège en jeu vis-à-vis du...

LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Drummond. Avez-vous quelque chose?

M. BOURASSA: A la suite de l'article qui a été publié ce matin dans la Gazette, il faut certainement comprendre la question du député de Drummond. Je ne sais comment auraient réagi les députés de l'Opposition quand on voit sa réputation ternie aussi gratuitement. Je pense que, pour tous les hommes publics, ce qui compte...

M. MORIN: Je puis très bien comprendre cela, mais je ne m'en prendrai pas à la liberté de la presse, cependant.

UNE VOIX: C'est de la démagogie. M. BOURASSA: M. le Président...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît !

M. BOURASSA: ... je ne m'attends pas à ce que le Parti québécois s'en prenne aux journaux. Personne ne s'attend dans l'opinion publique à ce que le Parti québécois s'en prenne aux journaux. On ne s'attend pas à cela.

UNE VOIX: Ni Radio-Canada.

M. BOURASSA: Je comprends très bien la question du député de Drummond, étant donné le traitement qu'il a subi hier. Le député de Drummond pourra s'expliquer demain. Il a donné avis d'une question de privilège. Il m'a dit qu'il avait dit aux journalistes que tout cela était faux. On n'a pas tenu compte de son démenti. On publie une nouvelle à la une, ternissant sa réputation, comme on l'a fait dans d'autres cas, il y a quelques jours. Je pense qu'il n'est pas étonnant que ces députés se posent des questions sur les changements qui peuvent être apportés aux lois.

LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine. Le suivant, le député de Rouyn-Noranda.

Spéculation foncière dans la région de Hull

M. LEGER: Ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales. Le Ministre peut-il nous dire s'il est exact qu'il a fait faire une étude sur la spéculation foncière dans la région de Hull et qu'il aurait le rapport en main?

M. GOLDBLOOM: Pas précisément dans la région de Hull. Il y a une étude qui se poursuit de façon générale. Je ne me suis pas penché sur une région en particulier.

M. LEGER: Question supplémentaire, M. le Président. Le ministre peut-il nous dire s'il est au courant que M. Marcel Beaudry, les frères Bourque, Maurice Marois, Paul Brunet, Fern Philips, organisateurs libéraux, possèdent tous des terrains dans la partie de Hull qui deviendra regroupée, dont la valeur risque d'augmenter de façon énorme par le regroupement et qu'ils sont tous des organisateurs très près des libéraux?

M. LACROIX: Guy Joron n'en aurait pas? LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! M. GOLDBLOOM: Non. Je ne sais pas qui est propriétaire de quel terrain. C'est précisément pour ne pas poser quelque geste que ce soit en ce qui concerne un transfert possible de territoires que j'ai fait rédiger le projet de loi qui est devant la Chambre, de façon à faire abstraction de toute participation du niveau provincial.

Ce sera par entente entre les municipalités ou ce sera par la recommandation d'une personne professionnelle, s'il y a un changement de délimitation.

M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre est au courant que d'autres députés, en plus des organisateurs libéraux, possèdent des terrains et que dernièrement les terrains ont même tellement augmenté que le député fédéral et ministre Jean-Paul Goyer a vendu un terrain acheté $400,000 pour $8 millions? Est-ce que le ministre est au courant de la grande spéculation foncière qui existe dans le regroupement municipal de Hull, avec les amis organisateurs libéraux qui poussent le projet?

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. MALOUIN: Ils sont bons comme salis-seurs.

M. LESSARD: Les chacals se...

M. GOLDBLOOM: M. le Président, simplement non, je ne suis pas au courant de ces choses. Je n'ai pas l'intention de m'occuper de cet aspect d'un problème qui ne relève pas de ma responsabilité en ce qui concerne le regroupement. Si le député de Lafontaine a des accusations à porter en ce qui concerne des gestes qu'il trouve non conformes au bon ordre, qu'il porte ses accusations et nous ferons enquête.

LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que le ministre comprend maintenant les raisons pour lesquelles les pressions ont été faites sur lui pour qu'il accepte cette fusion forcée de la région, premièrement? Et est-ce que, maintenant que je lui ai donné ces faits, il a l'intention...

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! S'il vous plaît, messieurs! Je crois qu'il y a un projet de loi devant la Chambre, actuellement, et vous aurez l'occasion, soit en commission ou en motion de deuxième lecture, de soulever ce que vous soulevez actuellement.

Formulez votre question pour qu'elle soit acceptable.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que le ministre, à la suite des faits que je viens de lui

donner, a l'intention de faire faire une enquête sur les conséquences de cette spéculation foncière avant que le projet de loi ne soit adopté?

LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît!

M. GOLDBLOOM: M. le Président, d'abord, dans le projet de loi qui est devant la Chambre, on ne touche pas aux limites de la cité de Hull. Deuxièmement...

M. LEGER: Puis les négociations pour l'augmenter...

M. GOLDBLOOM: ... si l'honorable député de Lafontaine veut me faire parvenir par écrit les faits qu'il allègue, je ferai enquête.

M. LEGER: D'accord.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Ministère du Travail

M. SAMSON: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Je voudrais lui demander s'il a pris connaissance, ce matin, d'une déclaration de M. Michel Bourdon de la CSN qui accuse le ministre du Travail de vouloir placer ses amis au ministère du Travail avant sa démission? Pour la meilleure compréhension de la question, M. le Président, il est dit que le ministre du Travail voudrait se débarrasser de MM. Réal Mireault et Claude Mérineau pour les remplacer par MM. Gilles Laporte et Yvon Dansereau. On dit même dans l'article que le conseil des ministres aurait étudié cette question hier soir. Est-ce que...

M. BOURASSA: Hier?

M. SAMSON: Aujourd'hui, ce matin. Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il est vrai que l'on a discuté de cette question au conseil des ministres? S'il est au courant de telles intentions qui sont prêtées au ministre du Travail? Et si... Je vais attendre la réponse, M. le Président.

M. BOURASSA: M. le Président, ce que je peux dire, c'est que l'opposition, actuellement au Québec, quelles que soient ses formes, qu'elle soit parlementaire ou autre, est dangereusement malade.

M. SAMSON: M. le Président, je n'ai pas demandé au premier ministre de faire un diagnostic sur l'opposition au Québec. Je lui ai demandé de me dire s'il était véridique qu'il y a eu de telles discussions au conseil des ministres, si...

M. HARDY: Voyons donc!

M. SAMSON: ... selon lui, ces accusations sont fondées, oui ou non. C'est une question assez précise et je pense que ça pourrait amener une réponse précise.

M. BOURASSA: M. le Président, on passe les trois quarts de la période des questions à commenter des bobards, des racontars, du oui-dire, alors qu'il y a tellement de problèmes concrets actuellement au Québec. Pas une question sur le problème de la construction aujourd'hui. C'est le problème, de loin, le plus sérieux qui affecte...

M. BURNS: Le ministre du Travail n'est jamais là.

M. BOURASSA: Posez-moi les questions.

M. BURNS: Comment voulez-vous qu'on lui pose des questions sur...

M. BOURASSA: Posez-moi les questions.

M. BURNS: ... la construction. Voyons donc!

M. BOURASSA: C'est un dossier que je suis de très près.

M. BURNS: Arrêtez donc!

M. MERCIER: Vous n'aviez pas demandé la parole.

M. BOURASSA: Pas une question.

M. BURNS: A chaque fois qu'on vous pose une question...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: ... en son absence, vous dites: Je vais le consulter.

M. BOURASSA: Pas une question sur le problème des CEGEP.

M. BURNS: Voyons donc! Arrêtez donc de faire des farces!

M. BOURASSA: Simplement des questions qui ont pour but de salir gratuitement les hommes publics, de démolir les institutions.

M. SAMSON: M. le Président, puisque le premier ministre semble vouloir des questions sur la construction, il paraîtrait, selon l'article, que MM. Gilles Laporte et Yvon Dansereau auraient été invités à comparaître devant la commission Cliche, justement sur les problèmes de la construction.

LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Posez votre question. Votre première, que vous

aviez posée tout à l'heure. Est-ce que vous croyez que le ministre qui veut amener deux personnes dans le ministère, c'est d'intérêt public?

M. SAMSON: Oui, M. le Président.

LE PRESIDENT: C'est d'intérêt public?

M. SAMSON: Oui, M. le Président, c'est d'intérêt public.

LE PRESIDENT: D'accord.

M. SAMSON: On veut savoir ce qui se passe.

LE PRESIDENT: Est-ce qu'il faut étudier tous les 30,000 fonctionnaires...

M. SAMSON: Ah non! Un instant.

LE PRESIDENT: ... ou les 100,000 fonctionnaires du Québec individuellement?

M. SAMSON: Non, non, non!

LE PRESIDENT: Je ne vois pas où est l'intérêt public.

M. SAMSON: Ah non!

LE PRESIDENT: Bien, posez votre question.

M. SAMSON: II ne s'agit pas de 100,000 fonctionnaires, il s'agit d'un ministre ou d'un sous-ministre. C'est différent. C'est déjà rendu dans le public. C'est de l'intérêt public. Je demande au premier ministre si c'est parce que ces gens ont été convoqués devant la commission qu'on veut les amener au ministère avant qu'ils soient devant cette commission?

M. BOURASSA: S'il fallait se fier aux journaux... J'ai un journal ici: "Samson...

M. SAMSON: Bien, dites donc!

M. BOURASSA: ... n'a pas respecté sa parole". Fabien Roy.

M. SAMSON: M. le Président, je pose la question de privilège. Je sais que...

UNE VOIX: Samson n'a pas respecté sa parole !

M. SAMSON: Ah non, non! Si j'avais à faire un diagnostic sur le premier ministre et ses acolytes, je ne les trouverais pas dangereusement malades, je les trouverais trop malades.

Mais, je pense que le premier ministre a des réponses à nous donner. Il y a des accusations dans le journal. Ce n'est pas moi qui ai fait ces accusations. Et si vous voulez que la population sache ce qui se passe, donnez des réponses aux questions que l'on pose. Cessez de contourner les problèmes comme vous le faites depuis le début.

M. BOURASSA: M. le Président, le chef parlementaire du Ralliement créditiste ne doit quand même pas se mettre en colère. Il a cité un article du journal. J'en ai cité un autre. C'est tout.

M. ROY: Qu'est-ce que cela peut avoir à faire avec...

M. SAMSON: M. le Président...

M. ROY: ... l'administration de la province?

M. SAMSON: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. ROY: Quel rapport cela peut avoir avec l'administration de la province?

M. SAMSON: J'invoque le règlement, M. le Président. Il s'agit là de l'administration du Québec. Nous avons, dans l'Opposition, et même les députés ministériels, le droit de poser des questions à l'administration. Mais je ne sache pas qu'en vertu de notre règlement le gouvernement ait le droit de poser des questions à l'Opposition. Ce n'est pas nous qui sommes responsables de l'administration, c'est le gouvernement, et c'est le gouvernement qui doit donner des réponses...

LE PRESIDENT: A l'ordre! M. SAMSON: ... quand on...

LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre! ... A l'ordre!

M. BOURASSA: M. le Président, le chef parlementaire, je ne sais pas s'il a assez de recherchistes. Il aurait pris connaissance du fait que le ministre du Travail a démenti la nouvelle.

M. SAMSON: Quand l'a-t-il démentie? M. BOURASSA: II l'a démentie... M. SAMSON: C'est paru ce matin?

M. BOURASSA: Oui, c'est paru. Le ministre Cournoyer a démenti la nouvelle. C'est paru dans un journal. Je pourrai envoyer... Pourquoi poser... Je ne blâme pas le chef parlementaire...

M. SAMSON: Est-ce que le premier ministre...

M. BOURASSA: ... en particulier. M.HARDY: A l'ordre!

M. SAMSON: Mais dites-nous oui ou non... M. BOURASSA: Mais tout ce qu'on fait...

M. SAMSON: ... c'est tout ce que l'on veut savoir.

M. BOURASSA: Bien oui, mais quand même...

LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BOURASSA: ... est-ce ainsi qu'on doit passer le temps précieux de l'Assemblée nationale? On nous reproche parfois, nous, de faire des commentaires. Ici, dans le Devoir: "Bourdon dénonce des nominations à venir que dément Cournoyer." C'était dans d'autres journaux aussi. Alors, pourquoi poser des questions? Je ne blâme pas le député de Rouyn-Noranda en particulier.

M. MERCIER: II n'a que ça à faire, lire les journaux.

M. BOURASSA: Tout ce que fait l'Opposition, c'est poser des questions sur des articles de journaux, qui sont démentis le plupart du temps, alors qu'il y a des problèmes très importants actuellement au Québec. Je veux vous aider à poser des questions pertinentes.

M. SAMSON: Une dernière, M. le Président...

LE PRESIDENT: Dernière question.

M. SAMSON: ... question supplémentaire.

LE PRESIDENT: Dernière.

M. SAMSON: Est-ce que le premier ministre peut nous assurer qu'il n'est pas question de ces changements au ministère du Travail et qu'il n'en sera pas question? Est-ce que le premier ministre peut rassurer cette Chambre?

M. BOURASSA: A quels changements se réfère-t-il? Il y a 50,000 fonctionnaires. Qu'est-ce qu'il me demande, là?

M. SAMSON: Non, non. Il y a un sous-ministre et un sous-ministre adjoint qu'il est question de remplacer par MM. Gilles Laporte et Yvon Dansereau. Est-ce que le premier ministre peut nous dire qu'il n'est pas question et qu'il ne sera pas question de ces changements.

M. BOURASSA: Pour combien de temps? Pour 15 ans, 20 ans?

M. SAMSON: Pour le temps que vous serez là, et cela ne sera pas long!

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

Question suivante, l'honorable député de Johnson.

Démission de M. Dell'Aniello

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je ne voudrais pas passer pour un homme malade, même si je représente l'Opposition. Ma question s'adresse à l'honorable premier ministre. Hier, l'honorable premier ministre a répondu, à ma question au sujet de M. Dell'Aniello, que la nuit portait conseil et que, peut-être, il y aurait lieu de demander la démission de M. Dell'Aniello à cause du poste très important qu'il occupe, présentement, dans la province.

Je demande à l'honorable premier ministre s'il a pris la décision de demander la démission de M. Dell'Aniello.

UNE VOIX: II a démissionné.

M. BELLEMARE (Johnson): II a démissionné? Bon. M. le Président, je viens d'apprendre, par un de mes collègues, qu'il aurait...

UNE VOIX: II faudrait lire les journaux.

M. BELLEMARE (Johnson): Ah non! j'ai autre chose à faire.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BELLEMARE (Johnson): C'est une réponse de l'Opposition. On vient de m'annoncer que...

LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable ministre.

M. LALONDE: M. le Président, pour répondre à la question, lors d'une conversation téléphonique, ce matin, M. DeH'Aniello m'a annoncé qu'il remettait sa démission comme président de la Régie de la langue française.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques, une question additionnelle.

M. CHARRON: Puisque le ministre d'Etat au Conseil exécutif devra maintenant trouver un successeur à M. Dell'Aniello...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre.

M. CHARRON: M. le Président...

LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs! Je ne peux pas suivre.

M. CHARRON: M. le Président, puisqu'on devra procéder à un changement à la direction de la Régie de la langue française, est-ce que le ministre d'Etat a l'intention de nommer quel-

qu'un déjà membre du conseil de la régie ou s'il a l'intention de chercher ailleurs? Deuxièmement, sera-t-il plus vigilant, cette fois, lorsqu'il établira les critères de sélection?

M. LALONDE: M. le Président, non, je ne peux pas me limiter simplement, dans les recommandations que je pourrai faire au conseil des ministres, aux membres actuels de la régie, mais je crois qu'on doit conserver la plus entière liberté.

Quant à la deuxième partie de la question, je la trouve impertinente.

UNE VOIX: Très bien.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Ecole pour enfants semi-éducables

M. BOUDREAULT: M. le Président, ma question sera certainement pertinente et d'intérêt public, surtout dans l'intérêt de mes concitoyens de l'Est de Montréal. Ma question s'adresse à l'honorable ministre de l'Education. La question a deux volets: Le ministre est-il en mesure de nous indiquer quelle est la situation qui prévaut actuellement relativement à la demande de certains parents de l'île de Montréal et à l'intention de la commission scolaire Jérôme Le Royer de construire, dans l'Est de Montréal, une école pour enfants semi-éducables? D'autre part, étant donné que certaines personnes intéressées semblent vouloir faire croire à la population de l'Est de l'île de Montréal que le ministère de l'Education s'oppose à la construction de cette école, le ministre es-il en mesure de réitérer brièvement qu'il ne s'oppose pas à la construction de cette école?

UNE VOIX: Cela a été posé il n'y a pas longtemps.

M. CLOUTIER: Oui, M. le Président, mais c'est la première fois que c'est posé d'une façon claire et précise.

M. LEGER: Est-ce que le ministre a fait poser la question par son député?

M. CLOUTIER: Hier, il s'agissait de la question du député de Lafontaine.

LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education, s'il vous plaît.

M. CLOUTIER: M. le Président, il m'est maintenant possible d'apporter des précisions. Je reprendrai en gros les termes d'une lettre que le sous-ministre du ministère de l'Education a adressée à ma demande au directeur général du conseil scolaire. J'ai eu l'occasion d'expliquer quel était le rôle du conseil scolaire en ce qui concerne les équipements sur l'île.

Premièrement, l'attitude du ministère de l'Education à l'égard des locaux spécialisés pour l'enseignement aux semi-éducables a toujours été de favoriser le réaménagement de locaux qui ne servent plus à l'enseignement régulier, par suite de la baisse des clientèles à l'élémentaire. C'est là une politique générale.

Deuxièmement, cependant, la croissance démographique que connaît une partie du territoire de la commission scolaire Jérôme Le Royer rend peut-être difficile la conversion de locaux pour remplacer ceux qui sont actuellement utilisés pour dispenser l'enseignement aux semi-éducables, locaux qui ne sont pas satisfaisants.

Troisièmement, dans les circonstances, nous avons recommandé au conseil scolaire de chercher à trouver, en collaboration avec les responsables de Jérôme Le Royer, des locaux décents pour l'enseignement dispensé aux semi-éducables.

Il est entendu que le ministère de l'Education ne verrait absolument pas d'objection à donner suite à une résolution du conseil scolaire de l'île de Montréal, qui remonte à l'automne 1973, permettant l'autorisation de construire une école pour semi-éducables s'il n'est pas possible d'utiliser des locaux déjà existants.

Je crois que c'est très clair, le ministère de l'Education laisse le conseil scolaire établir ses priorités et est prêt à accepter sa recommandation, soit un réaménagement de locaux existants, soit la construction d'une école neuve.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, ma question fait suite à la déclaration ministérielle du ministre des Finances tout à l'heure.

Le ministre des Finances pourrait-il me dire s'il est bien au courant que M. Turner a déclaré publiquement qu'il pouvait rendre éligibles au système d'épargne-retraite fédéral toutes les caisses d'épargne et de crédit, c'est-à-dire toutes les caisses d'épargne et de crédit qui sont régies par la Loi des caisses d'épargne et de crédit et non se limiter uniquement aux caisses populaires?

Deuxièmement, j'aimerais qu'il me dise pourquoi, ce matin, dans sa déclaration ministérielle, il s'est limité uniquement aux caisses populaires?

M. GARNEAU: M. le Président, d'abord, il est exact que, pour ce qui est du régime d'épargne-retraite, en vertu des règlements actuels de la Loi de l'impôt, en autant que mes informations soient précises et je pense qu'elles le sont, les placements effectués par les administrateurs des régimes d'épargne-retraite, les placements auprès des caisses populaires sont admissibles actuellement. La seule difficulté qui existait, à notre point de vue, ce n'est pas tellement que le gouvernement fédéral ne voulait pas rendre permissibles des placements dans le cas de l'épargne-logement. Mais, suivant la

tradition habituellement suivie, ou ce qui a été expérimenté dans le passé, avant que tous les règlements soient approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil il se passe toujours trois, quatre ou cinq mois. Comme le cas de l'épargne-logement est particulièrement précis et s'applique dans le temps, puisqu'il ne reste que 60 jours à ceux qui voudront s'inscrire pour le faire, c'est la raison pour laquelle nous demandions au gouvernement fédéral d'agir dès maintenant pour modifier des règlements et non pas attendre trois ou quatre mois comme il l'avait fait dans le cas d'autres lois.

C'est la raison pour laquelle nous avons agi de la sorte. Quand je parle des caisses populaires précisément c'est parce que ça s'inscrivait dans le cadre de la demande que nous avons faite. Je ne voudrais induire personne en erreur, mais je préfère attendre qu'au moins il y ait une percée véritable d'effectuée dans un des secteurs d'épargne et de crédit, et probablement que ça va s'étendre après. Mais il est clair que les caisses populaires sont répandues dans toute la province, c'est un mouvement qui est bien connu non seulement des Québécois mais également des gens qui administrent au niveau fédéral. C'est la raison pour laquelle nous avons d'abord voulu utiliser ce mouvement connu par sa solidité financière, par ses réseaux de vérification, etc., un peu comme fer de lance pour essayer de percer une brèche. Une fois que cette chose sera faite, elle sera vraisemblablement étendue à toutes les caisses d'épargne et de crédit. Mais si on ne réussit pas à passer à travers dès maintenant, avec l'ampleur de l'organisation des caisses populaires, ça ne donne rien d'essayer de le faire avec une organisation qui est très valable mais qui est quand même plus petite, en termes d'ampleur et d'étendue sur le territoire, et d'épargne accumulée en cours.

M. ROY: II me semble qu'il n'y aurait aucune difficulté, au niveau du gouvernement fédéral actuellement selon toutes mes informations, et j'en ai pris plusieurs hier. La seule difficulté que l'on rencontre actuellement serait justement au niveau du gouvernement provincial actuel.

Le ministre serait-il prêt à dire publiquement ce matin que, pour être éligible à administrer le plan d'épargne-logement, toutes les caisses d'épargne et de crédit qui souscrivaient aux normes et aux exigences de la loi...

M. GARNEAU: M. le Président, il y a une distinction importante. Je n'ai jamais demandé que le pouvoir de fiduciaire soit donné aux caisses populaires individuellement ou aux caisses d'épargne et de crédit. Et je ne crois pas que le ministère des Institutions financières, qui a la responsabilité des caisses populaires et de crédit, même les caisses populaires elles-mêmes, dans leur administration supérieure, demande de transmettre le pouvoir de fiduciaire à toutes les caisses populaires. Il y en a de toutes les tailles, il y en a de très petites, il y en a de plus grosses, mais on ne peut pas demander à une caisse populaire qui est toute petite d'avoir les pouvoirs de fiduciaire au même titre que les sociétés de fiducie, comme la Société de fiducie du Québec qui, de toute façon, appartient aux caisses populaires.

Donc, là-dessus, je voudrais qu'on soit bien compris. Il y a eu mésentente, me semble-t-il, de la part de certaines personnes au niveau fédéral, qui disaient: Bien que le Québec donne le pouvoir de fiduciaire aux caisses populaires, il n'y aura pas de problème. Ce n'est pas cela qu'on demande; d'ailleurs, les caisses populaires ne le demandent pas. Tout ce qu'on demande, c'est que les caisses populaires d'épargne et de crédit soient admissibles pour recevoir les placements en vertu des règlements de la loi fédérale et de la loi québécoise pour les fins de l'épargne-logement, de telle sorte que la Société de fiducie qui appartient aux caisses populaires serait l'agent qui enregistrerait les régimes d'épargne-logement, qui en tiendrait la vérification et l'administration générale. Les caisses populaires pourraient recevoir, pour le compte de la Société de fiducie et garder comme placements, les contributions des épargnants à ce nouveau régime. C'est la philosophie qui sous-tend notre demande. J'ai parlé personnellement avec M. Alfred Rouleau, le directeur général de l'ensemble du mouvement Desjardins et mes fonctionnaires ont rencontré les légistes du mouvement Desjardins qui s'occupent de la fiscalité. C'est là-dessus qu'il y a eu entente et c'est notre demande de façon générale pour l'ensemble, évidemment, des caisses d'épargne et de crédit pour autant qu'elles soient en mesure d'avoir un organisme, qui a le pouvoir de fiduciaire, qui voudra transiger avec ces caisses séparées. C'est pourquoi la Société de fiducie des caisses populaires pourrait être habilitée à recevoir les programmes et accepter que les placements soient laissés dans les caisses populaires; d'abord, cela aiderait leur liquidité et, deuxièmement, cela aiderait également à la distribution et à la vente de ce nouveau programme auprès des participants aux caisses populaires.

LE PRESIDENT: Deux dernières questions dans l'ordre suivant, l'honorable député d'Anjou et l'honorable député de Chicoutimi.

M. Laurent Laplante à Radio-Québec

M. TARDIF: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre des Communications. Est-ce que le ministre est en mesure de confirmer la nouvelle à l'effet que Radio-Québec, organisme dont le ministre est responsable, aurait embauché, à titre d'animateur d'une série portant sur les affaires parlementaires, M. Laurent Laplante, éditorialiste au jour-

nal Le Jour et journaliste engagé politiquement?

M. L'ALLIER: M. le Président, je remercie le député d'Anjou de sa question dont il m'avait donné un préavis. Les nominations à Radio-Québec sont faites par les autorités de Radio-Québec, soit le conseil d'administration dans certains cas, qui peut déléguer cette responsabilité au directeur général de Radio-Québec, M. Yves Labonté. Suite aux rumeurs qui ont couru dans les corridors de l'Assemblée, ces derniers jours, au sujet de la nomination de M. Laplante, j'ai vérifié ce matin auprès de M. Labonté. Je dois malheureusement vous confirmer ce qu'il m'a dit, soit que M. Laplante avait vu ses services retenus pour être l'animateur d'une série de télévision à Radio-Québec portant sur les affaires parlementaires.

Je considère, M. le Président, qu'autant l'autonomie de Radio-Québec est absolument essentielle à cet organisme pour qu'il puisse fonctionner comme télévision éducative, autant cette autonomie doit être respectée par tous, y compris par les administrateurs de Radio:Qué-bec quant à l'essence même de Radio-Québec. En effet, il ne s'agit seulement pas d'une autonomie par rapport à l'administration, pas plus que par rapport à la population; il s'agit d'une authentique autonomie qui fait en sorte que l'instrument ne serve à personne d'autre qu'à l'intérêt public. Or, en ce sens, M. le Président, je pense que la nomination de M. Laplante est une mauvaise nomination à Radio-Québec et qu'elle est une erreur de jugement assez grave de la part de ceux qui l'ont faite.

J'ai vérifié auprès de M. Labonté qui m'a dit que le conseil d'administration n'avait été ni informé, ni consulté sur cette nomination, que cette nomination était la responsabilité d'un réalisateur dont il était lui-même responsable, et forcément, je n'ai été moi-même ni consulté ni avisé de cette nomination. Je n'avais pas à être consulté; on aurait pu m'en informer avant que j'aie à solliciter l'information.

Je considère que cette nomination est mauvaise, M. le Président, et, s'il était en mon pouvoir de faire quelque chose pour la faire changer, je le ferais. D'abord, parce que je ne crois pas que M. Laplante, compte tenu de ce que nous avons pu en voir, même s'il est un excellent journaliste de la presse écrite, soit un bon animateur de télévision et maftrise mal cet outil de travail. Deuxièmement, parce qu'il s'agit d'une série d'émissions.

Si l'on devait confier à M. Laplante l'animation d'une émission à l'occasion, je n'aurais évidemment aucune objection. On a déjà demandé par le passé à M. Laplante, comme à bien d'autres journalistes, de collaborer, avec Radio-Québec, à certains types d'émission et d'une façon occasionnelle. Dans ce contexte, je n'aurais aucune objection à ce que M. Laplante vienne à Radio-Québec animer telle ou telle émission d'un caractère qui touche des sujets qu'il connaît plus spécifiquement, soit le ministère de la Justice, soit celui de l'information.

Qu'on lui confie cependant le poste d'animateur dans une série de vingt ou vingt-six émissions portant sur les affaires parlementaires, compte tenu en plus de son engagement politique, s'il veut en assumer la responsabilité, c'est aussi une erreur de jugement de sa part que d'avoir accepté cette responsabilité. L'autonomie de Radio-Québec me permet, M. le Président, d'émettre cette opinion, parce qu'en définitive cette autonomie, si elle me rend responsable de répondre des actes de Radio-Québec devant cette Assemblée, ne m'oblige pas automatiquement à les partager.

M. TARDIF: Une question supplémentaire, M. le Président...

LE PRESIDENT: Oui.

M. TARDIF: Est-ce que le ministre est en mesure de nous laisser savoir quel est le salaire qui est versé à M. Laplante? Sinon, est-ce qu'il pourra informer la Chambre au cours des prochains jours du salaire qui est versé?

M. L'ALLIER: M. le Président, le directeur général de Radio-Québec, M. Labonté, doit me faire parvenir demain une note écrite sur le détail non seulement de cette nomination, mais aussi sur le fait que Radio-Québec aurait demandé d'occuper des bureaux à l'intérieur des espaces déjà réservés à la galerie de la presse. Or, Radio-Québec n'étant pas une télévision d'information, je veux quand même savoir de quoi il s'agit pour pouvoir en informer cette Chambre. Dans la mesure où ces espaces sont réservés à la galerie de la presse, il me paraît important que l'on sache quelles décisions seront prises soit par la galerie, soit par la présidence de l'Assemblée, quels sont les besoins de Radio-Québec en termes de locaux.

Deuxièmement, pour ce qui est de cette série d'émissions, j'aurai demain ou au début de la semaine plus amples informations à fournir au député. J'aurai d'ailleurs l'occasion, avec l'autorisation de cette Chambre, de déposer auprès des membres de l'Assemblée la grille complète et détaillée de la programmation de Radio-Québec pour au moins les six premiers mois de la diffusion, diffusion qui commence en ondes ouvertes le 9 janvier prochain.

M. MORIN: Ue question supplémentaire, M. le Président.

M. BELLEMARE (Rosemont): Une question supplémentaire.

LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle est le suivant. Vous serez le suivant après.

M. MORIN: Je voudrais demander au minis-

tre des Communications s'il se rend compte que la déclaration qu'il vient de faire empiète sur l'autonomie qu'il affecte de respecter, et, deuxièmement, s'il peut...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.

M. MORIN: ... nous donner une définition de ce qu'est "l'engagement politique". Je me rends compte que moi, j'ai un engagement politique. Oui, M. le Président. Le ministre se rend-il compte qu'avec une expression aussi élastique que celle-là, il peut facilement exercer auprès de la presse le genre de chantage qu'on exerce auprès de l'Opposition en ce moment?

UNE VOIX: Le petit choux de Bruxelles.

LE PRESIDENT: Le ministre des Communications.

UNE VOIX: Faites le choux de Bruxelles.

M. L'ALLIER: M. le Président, pour répondre à la question du député de Sauvé, je suis tout à fait conscient du fait que l'autonomie de Radio-Québec est une chose avec laquelle il ne faut pas jouer, mais je voudrais qu'il se rende compte aussi que je respecte cette autonomie. Je n'ai pas demandé à M. Labonté ou au conseil d'administration de rescinder leur décision. Je veux tout simplement, M. le Président, que cette Assemblée sache que cette autonomie ne doit pas être considérée comme m'empêchant, comme responsable d'un organisme qui doit fonctionner dans l'intérêt public, de donner publiquement une opinion sur ce que je considère être, dans un domaine extrêmement important, celui des affaires parlementaires, une nomination qui risque très sérieusement d'entacher la crédibilité de Radio-Québec auprès de ses auditeurs, parce que le député de Sauvé sait très bien, comme tout le monde le sait, qu'en matière d'information, quels que soient les efforts qui pourront être faits par M. Laplante, il continuera parrallèlement d'écrire dans le Journal Le Jour et que les deux fonctions seront assumées parallèlement. Tout le monde sait que ce que l'on considère...

M. MORIN: Est-ce que le fait d'écrire dans Le Jour ostracise quelqu'un?

M. L'ALLIER: Le fait d'écrire dans le journal Le Jour, le journal La Soleil, le journal Le Devoir n'empêche absolument pas un journaliste de travailler à la télévision...

M. MORIN: Ah! Je suis heureux de vous l'entendre dire.

M. L'ALLIER: Ceci étant dit, est-ce que le député de Sauvé pourrait me dire... Je ne peux pas lui poser de question, d'accord, M. le Président...

M. MORIN; Oui, je le veux bien.

M. L'ALLIER: Est-ce que le député de Sauvé pourrait me dire...? Je ne peux pas lui poser de questions. D'accord, M. le Président.

M. MORIN: Oui. Je le veux bien.

M. L'ALLIER: J'aurais aimé connaître ses commentaires, par exemple, si on avait retenu les services de M. Ryan pour animer une série d'émissions sur les affaires parlementaires.

M. MORIN: Pourquoi pas?

LE PRESIDENT: Messieurs, à l'ordre! Question additionnelle. Le député de Rosemont.

M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, ma question sera très simple. Je voudrais tout simplement savoir aussi...

LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE (Rosemont): Après que le collègue d'Anjou a demandé le salaire de M. Laplante, quel est le salaire de Mathias Rioux.

LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

Projet Ferchibal

M. BEDARD (Chicoutimi): Ma question s'adresse au ministre des Transports. La semaine dernière, j'avais demandé au ministre des Transports de faire le point sur le projet Ferchibal et sur la décision à l'effet que le gouvernement fasse procéder à une étude en vue de la construction d'un chemin de fer du lac Albanel à la Baie. Le ministre m'avait dit qu'une décision serait prise sur ce sujet à l'occasion du conseil des ministres qui se tenait hier soir. Je voudrais demander au ministre quelle décision a été prise.

M. MAILLOUX: Effectivement, le Conseil du trésor a accepté hier matin de recommander certaines firmes pour faire les études nécessaires au projet Ferchibal. Ayant été absent quelques minutes du conseil des ministres, hier soir, je ne puis affirmer que le conseil des ministres a accepté le document, ce que je crois. Si le document avait été accepté en soirée, je pourrais le déposer demain à l'ouverture de la Chambre.

M. le Président, si on me permet, le député de Saguenay avait posé certaines questions relativement à l'achat de l'île d'Anticosti. Je voudrais maintenant déposer quelques copies des documents en question et ajouter ceci: On trouvera d'abord un premier document où il y a la déclaration de règlement hors tribunal. Il y a également l'entente réglant les modalités du transfert de la propriété à l'île d'Anticosti. Suite à l'achat des valeurs immobilières de l'île

d'Anticosti, j'avais, dans ma première déclaration, fait référence à l'évaluation de la machinerie dont disposait la compagnie Consolidated-Bathurst, qui, effectivement, ne fait pas partie de la transaction immobilière.

La demande faite par la compagnie Consoli-dated-Bathurst pour cette machinerie s'établissait à $675,000. L'offre qu'avait faite le ministère était de $425,000 et l'entente qui a été conclue, pour laquelle les documents seront signés, est une offre finale de $460,000, acceptée par les deux parties.

Ultérieurement à cet achat de machinerie, il faudra nécessairement qu'après le 31 décembre, période où se termine l'administration par la compagnie Consolidated-Bathurst de l'île d'Anticosti, le ministère des Travaux publics fasse l'inventaire des marchandises dont la Consolidated-Bathurst a eu besoin pour l'administration jusqu'au 31 décembre, que l'on fasse également l'évaluation des revenus qu'a eus la Consolidated-Bathurst, qu'elle devra diminuer de cet inventaire. Le ministère devra également faire l'évaluation de camionnettes qu'avait louées la compagnie Consolidated-Bathurst pour la chasse et la pêche que voudra peut-être retenir le ministère des Travaux publics. A ce moment, cela devrait compléter toute la transaction.

LE PRESIDENT: Dernière question.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, le ministre a changé de sujet assez vite. Je ne sais pas si c'est parce que le sujet est brûlant, mais je voudrais avoir d'autres renseignements, en question supplémentaire, concernant le projet Ferchibal, concernant la construction du chemin de fer, certaines décisions qui auraient été prises.

Le ministre est-il au courant un peu, peut-il nous dire à l'heure actuelle quel est le nom de la firme dont les services auraient été retenus et également nous dire quel est le sens du document qui sera déposé demain à l'Assemblée nationale?

M. MAILLOUX: Si la Chambre me le permettait...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... parler, M. le premier ministre. C'est un dossier libéral. Ce n'est pas un...

M. BOURASSA: Ce sont des choses concrètes. Ce sont des bonnes questions.

M. MAILLOUX: Si la Chambre me le permet, je vais vérifier au conseil des ministres. Si cela a été entériné en fin de séance hier soir, je pourrai déposer le document.

De toute façon, il y a eu des mandats acceptés par le Conseil du trésor à trois ou quatre bureaux de consultants, mais l'information pourra être donnée à la Chambre aussitôt que je me serai procuré le document, s'il a été accepté, hier soir.

LE PRESIDENT: Avant de passer aux affaires du jour, je vais accorder la parole à l'honorable député de Louis-Hébert sur une question de privilège.

Question de privilège Articles de journaux

M. Gaston Desjardins

M. DESJARDINS: M. le Président, je soulève une question de privilège à l'égard de certains articles qui ont été publiés dans certains journaux et qui comportent des accusations fausses, tendancieuses et malicieuses visant à nuire à mon intégrité en ma qualité de député dans cette Chambre.

Je commence d'abord par l'article signé par le journaliste Normand Girard, du Journal de Québec et du Journal de Montréal, en date du 18 décembre 1974. Cet article porte le titre suivant: "Troisième avocat et député libéral dans le pétrin". Tout d'abord, j'avise ces gens, M. le Président, que je ne suis pas dans le pétrin, mais je connais certains journalistes qui pourraient le devenir dans un avenir très rapproché.

L'article débute de la façon suivante: "Le député de Louis-Hébert à l'Assemblée nationale, Me Gaston Desjardins, serait le troisième avocat membre de l'actuelle représentation libérale qui aurait continué à exercer une fonction publique après son élection à l'Assemblée nationale, le 29 octobre 1973".

A la lecture de cet article, M. le Président, le lecteur doit nécessairement conclure que j'ai en fait exercé cette fonction après mon élection, ce que j'ai nié et ce que je nie encore. Mais le journaliste continue, il ne lâche pas facilement, M. le Président. "Il y a quelques temps, j'ai eu l'occasion de rencontrer M. Desjardins dans un couloir du parlement et de m'inquiéter de cette situation. Le député m'a répondu avoir obtenu un jugement attestant qu'il n'avait pas été présent en cour, lors des auditions et poursuites auxquelles son nom était associé, après le 29 octobre 1973". Ceci est exact, M. le Président. Si le journaliste en question s'était donné la peine de prendre connaissance du ugement rendu, il aurait pu affirmer en manchettes que je n'ai pas agi au nom du gouvernement du Québec, depuis mon élection, au lieu de laisser planer des doutes à ce sujet. Le journaliste continue à l'alinéa suivant en disant: "Si tel est le cas, comment se fait-il que le nom d'un procureur puisse continuer à figurer au rôle des causes judiciaires, fonction à laquelle un salaire est rattaché, si ce procureur ne fait pas le travail? "

Voilà encore une insinuation à l'effet que j'aurais agi, ce que j'ai nié à maintes reprises et ce que je nie à nouveau. Il ajoute ceci: "Si, par ailleurs, un juge peut effacer le nom d'un procureur porté au rôle des poursuites sur la prétention de celui-ci selon laquelle il n'y était

pas, il y a davantage lieu de s'interroger de la justice en général".

Je commenterai cela un peu plus loin, mais pour l'instant, je soumets que la justice en général est entre bonnes mains au Québec, M. le Président.

Le journaliste continue et il ajoute: "Lorsque le doute est semé le mal est fait. Aucune dénégation n'arrive à bout de convaincre vraiment".

Je pense qu'il exprime là de beaux principes, M. le Président, mais il a été le premier à y déroger, puisque son article en entier comporte un paquet d'insinuations et d'affirmations fausses. Justement, il sème le doute, et une fois le doute semé il s'écrie, en vierge offensée: Lorsque le doute est semé, le mal est fait.

En plus, dans ce même alinéa, alors qu'il parle du mal semé par un doute, ce journaliste mentionne: "Ne faudrait-il pas savoir de la part des greffiers, sténographes et autres clercs mis en cause, sous la foi du serment, ce qui en est vraiment".

M. le Président, c'est justement ce que le journaliste aurait dû faire avant d'écrire son article, aller consulter les clercs concernés, ce qui aurait évité de me salir par ce genre d'article.

Plus loin, il rattache l'intégrité des députés et la mienne en disant: "II semble qu'il soit grand temps pour l'actuel gouvernement de rassurer la population sur l'intégrité d'un certain nombre de députés, objets constants de rumeurs — c'est vrai, objets constants de rumeurs de la part des journalistes, oui — et d'associations à des gestes plus ou moins catholiques. "Si ce ne sont là que des calomnies, que l'on punisse les calomniateurs".

En effet, j'ai l'intention de donner une réponse affirmative aux souhaits de ce journaliste et de tenter, au moins, de punir les calomniateurs.

Plus loin, ce journaliste demande au premier ministre: "Si ces faits sont exacts, d'avoir le courage d'exiger la démission de ces quelques députés qui font passer tous les hommes politiques pour des profiteurs, des voleurs, des transgresseurs de la loi, bref des bandits". Ainsi, par ses insinuations et malgré la réserve qu'il a faite en disant "si ces faits sont exacts", ce journaliste laisse entendre que les députés en général — et moi en particulier — nous sommes de tels individus douteux et que le premier ministre devrait avoir le courage d'exiger notre démission. Ce sont là des allusions directes à mon intégrité, ce qui me cause un préjudice grave.

Je rétablis les faits de la façon suivante, maintenant :

Premièrement, avant mon élection, j'ai agi pour le gouvernement du Québec et j'en suis fier. J'en avais le droit.

Deuxièmement, après mon élection, j'ai démissionné, par écrit, de tous les mandats du Québec et ma lettre de démission porte la date du 31 octobre 1973. Est-ce que cela ne ferait pas une belle manchette, ce que je viens de dire là.

M. HARDY: Bien non!

M. DESJARDINS: ... au lieu d'insinuer...

M. HARDY: Bien non!

M. DESJARDINS: ... ce qu'on insinue depuis quelques jours dans les journaux? Est-ce que cela ne ferait pas une belle manchette, mais dans un journal respectable?

M.HARDY: Ah!

M. DESJARDINS: Troisièmement, je suis allé moi-même porter ma lettre de démission au bureau du ministre de la Justice en date du 31 octobre 1973. J'en ai laissé une copie au bureau du sous-ministre qui me l'avait demandé. Cela aussi ferait une belle manchette, il me semble.

Quatrièmement, depuis mon élection, je n'ai pas agi pour le gouvernement du Québec, ni directement, ni indirectement. Je n'ai pas perçu d'honoraires, ni directement, ni indirectement, depuis le 2 octobre 1973.

Malgré cela, malgré ma démission et mes démarches pour éliminer tout soupçon, j'ai eu vent, à un moment donné, grâce à des renseignements de personnes honnêtes, de l'imminence d'une attaque à mon endroit, en Chambre, cette attaque étant basée, selon mes renseignements, sur des faits semblables à ceux reprochés à l'ex-député de Johnson.

J'ai alors pris le soin de me rendre à la cour et de vérifier personnellement tous les dossiers concernés et d'en vérifier tous les procès-verbaux. Je peux vous dire que c'est une "mautadi-te job"!

J'ai alors constaté que certains procès-verbaux étaient erronés en ce qu'ils stipulaient que j'étais présent ou représenté en cour après mon élection. Or, ces écritures dans les procès-verbaux erronés ont été faites hors ma connaissance et sans mon consentement. Il faut savoir qu'un procès verbal, c'est un document judiciaire, il fait preuve à sa face même et, comme le dirait l'actuel député de Johnson, prima facie.

Il faut comprendre qu'un tel procès-verbal prêtait flanc à une attaque à mon endroit. Selon mes renseignements, qui étaient de source sûre, ce sont justement ces procès-verbaux dont on devait se servir en Chambre pour m'attaquer et me tramer devant la commission de l'Assemblée nationale, Or, j'aurais été acquitté honorablement devant la commission de l'Assemblée nationale, mais combien sali en cours de route et combien sali au retour. Et l'attaquant aurait pu s'en tirer facilement en invoquant la bonne foi, étant donné qu'il avait un procès-verbal, un document judiciaire faisant preuve prima facie.

C'est alors qu'avec mon expérience j'ai pensé à rédiger une requête. Cela a fait mal à certaines

personnes. J'en parlerai tantôt. J'ai rédigé une requête, laquelle a été présentée au juge en chef Albert Dumontier de la cour de Québec. Les conclusions de cette requête demandaient la correction des procès-verbaux erronés.

Le procès-verbal étant un document judiciaire, je prétends que le juge a juridiction sur ce document.

Il y eu audition publique. Le tribunal était présidé par M. le juge en chef. Des témoins ont été entendus, pas seulement moi, M. le Président. La preuve a été prise par un sténographe officiel. Ceux qui veulent des copies, allez en acheter. Je ne vous les fournirai pas. J'ai alors fait la preuve, devant la cour, de ma démission, en déposant ma lettre de démission comme pièce à conviction. J'ai alors fait la preuve que je n'ai pas agi comme procureur du gouvernement depuis mon élection. J'ai alors fait la preuve que je n'ai pas perçu d'argent depuis le 2 octobre 1973, selon la preuve, et le jugement a été rendu, dans tous les dossiers, ordonnant la correction de tous les procès-verbaux erronés.

Ce jugement n'a pas effacé mon nom des procès-verbaux. Un jugement ne peut pas enlever d'un dossier de la cour un document qui y est déjà. Mais il a ordonné la correction. Si on se réfère à ces dossiers, la correction paraît en marge de chacun des procès-verbaux.

Ici, je cite le Bâtonnier du Québec, Me Michel Robert qui, malgré encore le titre plein d'insinuations d'un certain journaliste de la Gazette, mentionne bien ce matin, dans le journal The Gazette, qu'il est possible —je traduis, M. le Président — de faire des requêtes afin de changer les procès-verbaux à l'effet de savoir si l'avocat était présent ou non, à condition que cela corresponde à la réalité.

Eh bien! ma preuve a correspondu à la réalité. Alors, M. le Président, dès que ce jugement a été obtenu, j'en ai remis copie à mes honorables collègues députés de l'Opposition, de même que je leur ai remis la liste de tous les dossiers concernés, corrigés et même d'autres dans lesquels il y avait des erreurs qui ne me concernaient même pas. Je dois dire que l'Opposition — c'est tout à son honneur — a collaboré et m'a indiqué de façon suffisamment claire que ce jugement, quant à moi, en tout cas, semblait fermer ce que j'appelais mon dossier.

Ce jugement est attaqué. On y fait allusion. On essaie de laisser planer des soupçons sur ce jugement. Je comprends qu'il y a des personnes qui auraient préféré que je ne m'en rende pas compte, je comprends qu'il y a des personnes — et ici, je ne vise pas nécessairement l'Opposition, M. le Président, parce qu'il y a de l'opposition en dehors de la Chambre, je ne la nommerai pas bien que j'en aie bien envie — qui auraient bien aimé me salir en Chambre et ternir ma réputation. Cela ne fait pas l'affaire de tout le monde mais il est là, le jugement. Le délai d'appel est expiré, et il va rester au dossier, le jugement.

J'ouvre brièvement une parenthèse pour dire que de telles erreurs dans les dossiers, commises par le greffier en cinquième division, sont parfaitement normales et humaines, vu la bousculade dont le greffier est l'objet lors de l'appel du rôle. En effet, ce greffier doit répondre à tout le monde en même temps et il fait son inscription aux procès-verbaux de la meilleure façon possible. Et de un.

En voici un deuxième, M. le Président. Un article du journal La Presse, signé par Pierre Vennat, 17 décembre 1974, intitulé: La CSN dénonce une nouvelle affaire Boutin. A la fin de l'article, on intitule quelque chose qui me concerne, sous le titre: "L'affaire Desjardins". Le journaliste mentionne ceci: "De plus, la CSN revient sur le cas du député Gaston Desjardins à qui Roger Perreault a confié les mandats de la Commission de l'industrie de la construction dans la région de Québec".

Cette affirmation — et là je me contiens pour dire seulement cela — elle est fausse, puisque j'ai commencé à recevoir des mandats dans le domaine de l'industrie de la construction bien avant l'arrivée de Roger Perreault comme directeur du décret, et je ne connaissais même pas M. Perreault à cette époque.

Mais le journaliste continue: "Comme la CIC n'est pas un organisme gouvernemental, le tout est légal — C'est cela qui aurait dû être la manchette. Le tout est légal. Pourquoi salir? — mais serait, d'après la CSN, nettement indécent". Imaginez! La CSN qui vient dire à quelqu'un qu'il y a quelque chose de nettement indécent.

DES VOIX: Ha! Ha!

M. DESJARDINS: Je crois, M. le Président, que j'occupe là un mandat normal, légal et moral. C'est plutôt le journaliste et M. Audette, de la CSN, qui sont indécents.

Le journaliste continue en citant M. Audette, un représentant de la CSN, qui se permet ici une affirmation gratuite qui touche tous les députés de la Chambre, mais moi en particulier. Elle est lourde de conséquences cette affirmation puisqu'il s'agit d'une accusation de favoritisme lancée contre un avocat-député, avocat qui doit demeurer impartial dans tous les mandats qui lui sont confiés.

Ce M. Audette aurait dit ceci — et il va le ravaler — en se référant à mon conflit d'intérêts dans les causes de la CIC: "Lorsqu'il y a des plaintes, dit-il, contre des amis du parti libéral..." Or, M. le Président, je suis fier d'affirmer dans cette Chambre que, depuis que j'agis pour la CIC, je n'ai jamais reçu, ni directement ni indirectement, la moindre intervention de qui que ce soit pour m'amener à accorder une faveur quelconque, qu'il s'agisse d'une poursuite pénale ou civile. Et j'ajoute: Les principales interventions dans ce domaine à l'égard de poursuites dans l'industrie de la construction m'ont été faites par des députés membres de l'Opposition et... non, un instant, elles ont été

faites à bon droit, en toute honnêteté et en toute conscience par ces députés.

A chaque fois, j'ai demandé à mes interlocuteurs d'exposer leur intervention par écrit et j'ai toujours spécifié que je ne possédais aucune espèce d'autorité pour retirer une plainte au pénal ou pour accorder un rabais dans une réclamation civile et que le tout devait être référé au gérant local, qui seul a autorité en cette matière.

Par conséquent, il n'y a aucun ami ou député qui a tenté de m'impressionner ou de m'influen-cer de quelque façon que ce soit.

Le journaliste continue ses insinuations et ses accusations en référence à l'application des lois sur la sécurité sur les chantiers de construction. Or, je n'ai jamais raçu de mandat sur la sécurité, sur les chantiers de construction.

Je continue. Quant aux honoraires présumément "gloutons" qui me seraient payés, selon l'expression de M. Audette, ce sont des honoraires basés sur le tarif de la cour, tarif vieux d'une cinquantaine d'années, et d'un pourcentage accepté par les avocats depuis environ une cinquantaine d'années également. Ces honoraires n'ont jamais été indexés, comme le salaire de M. Audette l'a sûrement été, et c'est sûrement moins cher et moins élevé que les honoraires des avocats de la CSN.

Et de trois, et je termine avec ce dernier, jamais deux sans trois,, M. le Président. J'arrive ici au sommet de l'incompétence et de la malice ou de la volonté de salir le gouvernement et le député qui vous parle. Ce sommet, on le retrouve dans le journal La Gazette du 18 décembre 1974, dans un article signé par Ralph Noseworthy, remarquez bien le nom: Ralph Noseworthy, dont je pourrais dire "that he is not even worthy to put his nose in this matter."

J'ai dit que c'était le sommet qu'il y avait malice. J'ai dit en anglais, à la radio, je ne me suis pas caché et je le répète: "This article is false, malicious and vicious." J'affirme que cet article est malicieux parce que ce journaliste m'a téléphoné la veille de la parution de l'article et j'ai pris le temps et le soin de lui relater tous les faits pertinents, dans un excellent anglais.

A la fin de cet entretien j'ai insisté auprès du journaliste en lui disant d'être prudent dans son article afin de ne pas toucher à ma réputation de quelque façon que ce soit, vu les dispositions que j'avais prises et que je lui ai expliquées pour justement éviter de telles accusations.

Ce journaliste m'a bien promis qu'il ne relaterait que les faits sans déroger à la vérité.

Regardons l'article brièvement, et je cite: "Gaston Desjardins, Liberal MNA for Louis-Hébert, has violated Quebec law by acting as provincial prosecutor in at least 140 cases after being elected to the National Assembly in the Oct. 29, 1973, provincial elections, The Gazette has learned. "Desjardins, a 42-year-old lawyer, is the second MNA this year to be implicated in Legislature Act violations by acting as provincial prosecutor while holding an Assembly seat. "Jean-Claude Boutin earlier this year faced censure and ejection from the Assembly admit charges he violated the act more than 100 times. Instead, he resigned his Johnson riding seat and was defeated in an Aug. 28 by-election".

M. le Président, j'ai bien mentionné au journaliste, lors de notre conservation téléphonique, that I did not act either directly or indirectly as provincial prosecutor after my election in Louis-Hébert riding. I told him also that my name did appear in the minutes of certain files at the Court without my knowledge and without my authorization and the clerk admitted his errors. I told him also that I have resigned by writing on October 31st, 1973 and that I brought myself that letter to the Justice Department.

Je lui ai dit également que j'avais constaté des erreurs dans les procès-verbaux de la cour, que j'avais présenté une requête en correction, qu'il y avait eu audience publique, que jugement avait été rendu corrigeant tous les procès-verbaux et confirmant ainsi que je n'avais pas agi pour le gouvernement du Québec.

M. le Président, ce journaliste a admis qu'il avait ce jugement en sa possession. Ce n'est pas moi qui le lui ai remis, je ne dis pas que c'est l'Opposition, c'est un document public. Il a admis qu'il avait ce jugement en sa possession et malgré tout cela, il a osé écrire les trois alinéas dont je viens de donner lecture, malgré l'avertissement que je lui ai donné. J'ai été bien clair là-dessus mais le journaliste a préféré affirmer le contraire, me créant ainsi un préjudice très grave.

Malgré ce jugement et malgré tout ce que je lui ai dit, les précautions à prendre, ce journaliste affirme dans son article que j'ai agi dans le dossier 172,030 de la cour des Sessions de la paix de Québec. Je pense que la prudence la plus élémentaire d'un journaliste c'est de vérifier; en vérifiant le dossier, il se serait aperçu que mon nom ne paraissait nulle part dans ce dossier, je l'ai vérifié encore hier, et qu'il s'agissait là d'un dossier dirigé par un autre avocat de Québec, d'une autre étude légale que la mienne.

Ce journaliste continue ses insinuations, j'achève, M. le Président, en faisant allusion au dossier de la CIC; cela leur fait mal, la CIC. Certaines personnes aimeraient peut-être que j'abandonne mes mandats, mais au profit de qui? Est-ce que quelqu'un aurait des suggestions, par hasard? De toute façon, M. le Président, je crois qu'il y a lieu à rétraction. Je demande donc au Journal de Québec, au Journal de Montréal, à Normand Girard, au journal La Presse, au journaliste Pierre Vennat, à Florent Audette, au journal the Gazette et à Ralph Noseworthy: Premièrement, qu'il y ait rétractation dans leur journal respectif en rétablissant les faits; deuxièmement, que la place réservée à cette rétractation soit aussi importante que la place réservée aux accusations fausses; troisièmement, qu'il y ait rétractation de la part

des journalistes mentionnés ainsi que de Florent Audette en accordant autant d'importance à cette rétractation qu'ils ont accordée aux insinuations et aux accusations relatées dans les articles; quatrièmement, si de telles rétractations n'ont pas lieu ou si elles ne sont pas faites à ma satisfaction, j'envisagerai alors les mesures à prendre pour que l'on punisse les calomniateurs; cinquièmement, je dois dire en toute honnêteté que, dans au moins un cas et peut-être dans tous les cas, même s'il y a rétractation, je vous avise à l'avance que je ne renonce à aucun recours et que je ne renonce pas à mes droits à l'égard des journaux et des personnes concernées.

Je termine, M. le Président, en vous disant que la justice humaine, celle qui cherche la reconnaissance et le respect des droits de la personne, en son nom, au nom de cette justice, les faits devraient être rétablis, et je crois qu'on devrait cesser de salir indûment ceux qui tentent d'accomplir leur travail dans la quiétude et dans la paix. Je vous remercie.

M. BURNS: Une question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT: Une question de règlement.

Le député de Maisonneuve.

Motion de M. Bienvenue

Question de règlement

M. Robert Burns

M. BURNS: M. le Président, la question de règlement que j'ai l'intention de soulever a trait à la motion qui paraît en appendice du feuilleton no 100 d'aujourd'hui. Je vous demanderais, ainsi qu'à nos collègues de me donner un peu de latitude pour pouvoir exposer le plus brièvement possible, je l'avoue, M. le Président, la question de règlement.

A la page 7 du feuilleton d'aujourd'hui, paraît une motion au nom du ministre de l'Immigration concernant le chef de l'Opposition, relativement et à la suite de la question de privilège qui a été soulevée, hier, par le ministre de l'Immigration. Or, M. le Président, en date du 26 mars 1974, vous avez décidé qu'avant qu'une motion puisse être inscrite il appartenait au président de décider si, prima facie, il y a atteinte à des privilèges. Je vous cite, à la page 140 des Débats de cette année-là, votre décision: "La coutume parlementaire veut que le président décide si une question de privilège qu'un député soulève est une question qui concerne directement les privilèges de la Chambre ou de quelque député. Il doit juger si, prima facie, il y a atteinte à des privilèges".

Or, je voudrais vous démontrer très brièvement que, dans le cas de la question soulevée par le député de Crémazie, il n'y a, à la face même de la question, absolument aucune matière qui donne ouverture à une accusation de bris de privilège. Notre argumentation, M. le Président, est faite en deux volets. Le premier volet, c'est que l'article 96 de la Loi de la Législature auquel s'est référé le député de Crémazie ne peut conduire à un bris de privilège. Il suffit de comparer le texte de cet article 96...

M. LEVESQUE: J'invoque le règlement.

LE PRESIDENT: Une question de règlement.

M. LEVESQUE: C'est plutôt pour vous demander une directive. A la faveur de cet appel au règlement du député de Maisonneuve, est-ce qu'on n'est pas en train présentement d'entrer dans le débat qui est prévu pour demain?

LE PRESIDENT: Pas encore.

M. BURNS: M. le Président, c'est d'ailleurs pour ça que j'ai rédigé le texte, pour être bien sûr de ne pas entrer au fond. Je ne veux pas discuter du mérite et le leader du gouvernement serait en droit de me rappeler à l'ordre, si je le faisais. Je ne veux que justifier, ici devant la Chambre, principalement à l'endroit du président de l'Assemblée nationale, les raisons qui m'incitent à croire, suite à sa décision du 26 mars, que la motion ne devrait même pas être en appendice aujourd'hui. C'est uniquement là le but, M. le Président. Si jamais je dépasse cette norme, je vous prie de me rappeler à l'ordre et je me rendrai à votre décision immédiatement.

Je disais donc, M. le Président, qu'il suffit de comparer le texte de cet article 96 à celui des articles 75, 77, 78, 79 ou 86 de la Loi de la Législature pour en être convaincu. En effet, les articles 75, 77, 78, 79 et 86 contiennent tous une prohibition précise qui défend aux députés de poser certains gestes et de recevoir certains paiements. Ils sont complétés par une sanction bien définie que l'on retrouve dans le texte même de ces articles ou dans des articles qui s'y réfèrent expressément.

M. le Président je ne vous lirai pas in extenso ces articles; qu'il suffise de se référer simplement pour votre information — évidemment, vous l'avez déjà, cette information — au texte qui est en marge de ces différents articles. Par exemple, à l'article 75, on voit inhabilité des fonctionnaires provinciaux et on parle, encore une fois, d'inhabilité à se présenter comme d'inhabilité à siéger. A l'article 77, on parle de l'inhabilité des fonctionnaires fédéraux; à l'article 78, de l'inhabilité des fonctionnaires d'autres provinces, à l'article 79, de l'inhabilité des entrepreneurs et, finalement, à l'article 86, des récompenses interdites, sanctionné par l'article 88 qui prévoit une prohibition de la même nature.

Alors, je continue.

Au contraire. Si on se réfère au texte du l'article 96 invoqué par le député de Crémazie, on constate qu'il est de nature tout à fait différente. Il ne s'agit pas ici de défendre aux députés de poser certains gestes, mais au contraire de permettre aux autorités de l'Assemblée nationale de verser aux députés certaines allocations pour frais de voyage, maintien de local ou résidence secondaire.

Cela vaut peut-être la peine de lire cet article 96 puisque...

M. LEVESQUE: ... provoquer un débat.

M. BURNS: Non.

M. LEVESQUE: C'est ce qui va arriver.

M. BURNS: M. le Président, je n'argumente pas sur le fond. Je veux simplement...

LE PRESIDENT: Je crois que la question de règlement... Le député de Maisonneuve voudrait conclure que cette motion ne devrait pas être au feuilleton et, sur une base de règlement, qu'il ne s'agirait pas d'une question de privilège. C'est la question.

M. LACROIX: ... la même chance au député de Johnson.

M. LEVESQUE: II faudra permettre au ministre de l'Immigration ensuite...

M. BURNS: Je suis entièrement d'accord.

M. LEVESQUE: Ce qui va arriver, c'est qu'on va avoir le débat aujourd'hui au lieu de demain.

LE PRESIDENT: Non. Je ne permettrai pas d'aller au fond.

M. BURNS: Je suis entièrement d'accord, M. le Président, pour que le ministre de l'Immigration ait à me répondre sur la question de recevabilité. C'est absolument normal et aucunement contesté de ma part.

M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Si j'ai bien compris le sens de votre décision, à laquelle se réfère le député de Maisonneuve, vous avez demandé que le député qui veut ainsi soulever une question de privilège le fasse avant qu'on voie au feuilleton l'avis en question. C'est simplement pour permettre que l'accusation soit, prima facie, assez sérieuse pour être mise en avis. Je comprends le sens de votre décision et je conclus comme ceci: Si vous avez permis qu'elle soit mise en avis, c'est que vous en étiez venu vous-même à la conclusion que, prima facie, il s'agissait d'une question de privilège. Alors, pourquoi commencer à ce moment-ci à vous poser des questions alors que le fait que cela se retrouve en avis est que je présume que vous en êtes déjà venu à la conclusion, que, prima facie — et je dis cela en toute objectivité — il s'agit, à ce moment, d'une question de privilège. Je n'accepterai pas qu'à ce moment-ci on entre dans une discussion qui aurait l'une ou l'autre des conclusions ou des effets suivants: soit que l'on veuille faire un débat aujourd'hui plutôt que demain et qu'on commence à faire ce débat qui est prévu pour demain, ou qu'on mette en doute la sagesse de votre décision d'avoir reconnu qu'il s'agissait là d'une question de privilège, prima facie, qui pouvait faire l'objet d'un avis au feuilleton.

LE PRESIDENT: La manière dont j'interprète cette question de règlement est que cette argumentation qui se fait actuellement pourrait être faite demain.

M. LEVESQUE: ... c'est évident.

LE PRESIDENT: Un instant... Dès qu'on appellerait la motion pour discussion, on dirait: "Question de règlement, M. le Président", et j'invoquerais, en vertu du règlement, que cette motion ne doit pas être appelée parce qu'elle est irrégulière. Je préfère avoir cette question de règlement aujourd'hui plutôt que de l'avoir demain pour pouvoir prendre une décision éclairée. Je crois que cela sera mieux comme cela, plutôt que d'avoir demain une question de règlement, étant donné que c'est un débat qui, normalement, si la motion est acceptée, est limité à trois heures, après l'ouverture de la séance, avec des droits de parole partagés. Vous voyez ce qui pourrait arriver s'il y avait une question de règlement qui pourrait durer une heure demain. Je vais être très prudent pour ne pas permettre au député de Maisonneuve d'aller au fond de la question, mais je voudrais que la question de règlement soit vidée pour donner le temps à la présidence d'être bien éclairée pour pouvoir déjà prendre sa décision dès que cette motion sera appelée demain.

M. LEVESQUE: M. le Président, je respecte votre décision, comme j'ai toujours respecté celle des présidents de l'Assemblée nationale, mais je tiens à vous dire immédiatement que, sans vouloir prêter des intentions au député de Maisonneuve, on sait fort bien que s'il apporte présentement ses arguments, c'est beaucoup plus pour des fins de fond que des fins de forme.

M. BURNS: Je m'oppose à cette dernière remarque...

M. LEVESQUE: ... et je ne permettrai pas autrement que nous...

M. BURNS: ... du leader du gouvernement. M. le Président, j'ai été clair et vous verrez que la conclusion de mon intervention vise quelque chose qui nous intéresse immédiatement, qui

intéresse le chef de l'Opposition immédiatement. C'est pour cela que je n'ai pas attendu à demain pour soulever cette question. Que le leader soit un peu patient et cela va aller bien plus vite. Cela ne sera pas tellement long. Je veux simplement exposer, au niveau de la recevabilité...

Je vous prie de me croire, M. le Président, que je vais m'en tenir à cela, au niveau de la recevabilité d'une question de privilège, tel que mentionné par l'intervention du ministre de l'Immigration, hier, et tel que mentionné dans la motion qui paraît aujourd'hui en appendice.

M. le Président, le député de Crémazie s'est appuyé sur le deuxième alinéa du paragraphe 2 de l'article 96, en voulant faire passer cet alinéa, qui n'est qu'une restriction au paragraphe précédent — comme l'indique d'ailleurs la note dans la marge de cet alinéa — comme s'il s'agissait d'une prohibition. Or, il suffit de lire le texte, M. le Président...

M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait une interruption qui n'a rien à voir avec cela? Est-ce qu'on permettrait à la commission de siéger immédiatement?

UNE VOIX: Laquelle?

M. LEVESQUE: Les affaires sociales ou une autre du choix de l'Opposition; c'est simplement pour que les travaux puissent se continuer,

M. BURNS: Cela dépend, à quelle heure le leader entend-il suspendre?

M. LEVESQUE: A une heure.

M. BURNS: A une heure. A ce moment, cela devient utile qu'une commission siège. Quant à nous, nous n'avons pas d'objection à ce que la commission des affaires sociales siège.

M. LEVESQUE: Et nous pourrons faire la première lecture du projet de loi immédiatement, ce que j'avais retardé tout à l'heure, de consentement. D'accord pour la première lecture?

LE PRESIDENT: On suspend la question de règlement.

Projet de loi no 88 Première lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales propose la première lecture de la Loi modifiant la loi de la protection de la santé publique.

L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. FORGET: Merci, M. le Président. Ce projet de loi a pour but de modifier la Loi de la protection de la santé publique. Je me bornerai, M. le Président, d'en résumer les dispositions principales. L'article 2 impose l'obligation à tout propriétaire d'une usine de filtration de procéder à l'analyse des eaux fournies par l'usine. Il stipule également que, si la teneur naturelle en fluor est inférieure à 1.2 partie par million, le propriétaire de l'usine doit y joindre un appareil de fluoration et opérer cet appareil de façon que les eaux fournies aient une teneur en fluor de 1.2 partie par million.

LE PRESIDENT: Un peu de silence, messieurs!

M. FORGET: Donne des délais dans lesquels ces opérations doivent être effectuées; empêche le propriétaire de l'usine d'opérer l'appareil avant qu'une personne autorisée par le ministre ait délivré un certificat et, finalement, autorise le ministre à financer l'achat et l'installation des appareils de fluoration. L'article 3 impose l'obligation à toute personne qui opère une colonie de vacances ou un studio d'esthétique de détenir un permis délivré en vertu de la loi. L'article 4 impose l'obligation à toute personne qui pratique la crémation de cadavres de détenir un permis, mais crée une exception pour les établissements dans les cas déterminés par règlement.

Les autres dispositions de la loi sont des modifications qui ont pour but d'améliorer le fonctionnement des dispositions actuelles ou des nouvelles dispositions de la loi.

LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. ROY: Je vais demander un vote enregistré, M. le Président.

M. LEVESQUE: Est-ce que vous êtes cinq? M. ROY: On est cinq. M. SAMSON: Oui, six.

M. LEVESQUE: Mais l'inscription de votre dissidence ne suffirait-elle pas?

M. SAMSON: Pas sur la fluoration, non.

LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a lieu de voter immédiatement ou vers une heure moins cinq ou moins dix?

M. LEVESQUE: Très bien, M. le Président, à une heure moins cinq.

LE PRESIDENT: On appellera le vote vers une heure moins cinq.

Vous avez une motion pour faire siéger une commission.

Motion pour faire siéger la commission sur le projet de loi no 93

M. LEVESQUE: Oui, M. le Président, je fais motion pour que la commission parlementaire

des affaires sociales puisse siéger immédiatement afin d'étudier article par article le projet de loi no 93, et cela au salon rouge.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté. Cette commission peut siéger immédiatement.

L'honorable député de Maisonneuve.

Motion de M. Bienvenue (suite)

M. BURNS: M. le Président, je disais donc, avant cette interruption, que le député de Crémazie s'est appuyé sur le deuxième alinéa du paragraphe 2 de l'article 96 en voulant faire passer cet alinéa, qui n'est qu'une restriction au paragraphe précédent, comme s'il s'agissait d'une prohibition. Or, il suffit de lire le texte du paragraphe 2 pour constater que le premier alinéa est une autorisation de paiement et que le deuxième alinéa n'est qu'une restriction apportée à cette autorisation.

J'insiste d'ailleurs sur le libellé même de cet alinéa qui dit: "Aucune allocation ne peut être accordée en vertu de la présente disposition.". Cela montre bien que cet article 96 concerne — j'insiste là-dessus — les autorités de l'Assemblée nationale, ce qu'elles peuvent faire et les limites de leurs compétences. Et c'est parce qu'il ne s'agit pas d'une question...

M. BIENVENUE: Une question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT: Oui.

M. BIENVENUE: Je m'excuse, cela va être très bref. Je ne veux pas empêcher le député de continuer, quant à lui. Mais pour les raisons qu'a invoquées il y a un instant le leader du gouvernement sur la notion que l'on a que, prima facie, c'est recevable puisque vous l'avez permis au feuilleton et que, en conséquence, toute discussion actuellement sur le sujet appartient à la séance de demain, je vous dis à l'avance que, peu importe ce que dira le député de Maisonneuve, je ne me lèverai pas et je ne plaiderai rien, ce matin.

M. BURNS: Vous auriez pu dire ça après, ce n'est pas une question de règlement.

Je dis que c'est parce qu'il ne s'agit pas d'une prohibition. Toujours je tente de justifier la non-recevabilité, j'insiste beaucoup là-dessus; j'aurai d'autres choses à dire si jamais vous trouvez qu'elle est recevable, la motion.

C'est parce qu'il ne s'agit pas d'une prohibition que l'on ne trouve nulle part, dans la Loi de la Législature, de sanctions qui fassent référence à cet article, comme c'était au con- traire le cas pour les articles 75, 77, 78, 79 et 86.

J'en conclus qu'il est impossible que l'article 96 donne ouverture à une question de privilège car, même si le montant forfaitaire a été payé au chef de l'Opposition, selon vos propres directives, M. le Président, et sans qu'il en fasse jamais la demande, il s'agissait tout simplement d'une dépense de fonds publics que vous n'aviez pas le droit d'autoriser, dépenses dont vous seul seriez responsable, M. le Président, en tant qu'administrateur des services de l'Assemblée nationale, aux termes mêmes de l'article 10 de notre règlement.

C'est tout comme si, en vertu de l'article 96, seize voyages statutaires au lieu de quinze étaient payés par erreur à un député. Cela ne rendrait aucunement, à mon avis, le député en question inhabile à siéger.

S'il en était autrement, on voit tout de suite dans quelle sorte de traquenard ou de "frame-up" tous les députés risqueraient de tomber. Si les députés ne pouvaient pas se fier au fait que les sommes qu'ils reçoivent à l'Assemblée nationale sont des sommes qu'ils sont en droit de recevoir, la vie deviendrait absolument impossible pour les députés.

Pour rendre un député inhabile à siéger, il suffirait de lui payer, à son insu, soit un voyage de trop ou une allocation de trop pour assistance aux commissions et le tour serait joué.

Il n'y a, à notre connaissance, aucun cas, dans aucun Parlement du même style que le nôtre, où une telle question de privilège pourrait être possible, à cause des raisons qu'allègue le ministre de l'Immigration.

Le deuxième volet de mon argumentation, c'est qu'en autorisant le paiement, vous avez déjà vous-même décidé que l'article 96 n'empêche aucunement le paiement d'un montant forfaitaire au chef de l'Opposition pour le rembourser des dépenses qu'il a encourues comme membre de la délégation québécoise à la réunion de l'AIPLF à Bruxelles.

En effet, je vous signale le texte même de la lettre que le chef de l'Opposition a reçue de votre adjoint, avant de recevoir le montant en question. Je vais simplement extraire le dernier paragraphe de cette lettre, avec votre permission, M. le Président, pour éviter que je la cite au long.

M. BIENVENUE: ... n'est-ce pas le fond? M. BURNS: A la fin de cette lettre du 29...

M. BIENVENUE: ... le fond, M. le Président?

M. BURNS: Non, M. le Président.

M. BIENVENUE: On n'est pas dans la preuve, M. le Président?

M. BURNS: Non, M. le Président.

LE PRESIDENT: Je pense qu'on est un peu plus loin là, oui.

M. BURNS: Non.

LE PRESIDENT: Bien.

M. BIENVENUE: De toute façon, je ne parle plus.

LE PRESIDENT: Vous avez votre opinion et j'ai la mienne.

M. BURNS: C'est le deuxième volet, M. le Président. Je vous dis que je me force absolument pour ne pas entrer au mérite. Je peux citer tout simplement la fin de cette lettre du 29 juillet 1974, adressée à M. Jacques-Yvan Morin, chef de l'Opposition, et signée par le directeur des relations publiques et interparlementaires, M. Roberto Wilson. Cette lettre se termine comme suit: "Au cours de la réunion dont il fait mention plus haut, il vous sera remis, selon les directives du président Lavoie, l'enveloppe forfaitaire concernant ce voyage".

Ce que je dis, c'est très simple. Vous ne pouvez pas juger au mois de juillet qu'un montant doit être payé au chef de l'Opposition et juger, en décembre — parce que c'est ça qu'on vous demande de faire — que ce même montant ne peut pas être payé et qu'il donne ouverture à un bris de privilège. C'est ça le lien, non pas au mérite, mais le lien concernant la recevabilité de la motion.

Un député qui se fie à votre interprétation, M. le Président, je vous le soumets bien respectueusement, ne peut pas se tromper. Et c'est ça, la question de fond.

Récusation de M. le Président

LE PRESIDENT: Un instant. Je vous interromps immédiatement parce que, premièrement, je ne participerai pas à ce débat. Vous comprendrez que ma position est très... D'ailleurs, mon opinion était arrêtée dès hier. Je vous écoute. Vous me demandez d'interpréter les lois. Ce n'est pas mon rôle d'interpréter les lois.

M. BURNS: Mais la Loi de la Législature?

LE PRESIDENT: Un instant, on n'aura pas de débat sur cela. En plus de cela, mon idée est bien arrêtée depuis hier que la décision qui sera rendue demain sur le sujet sera rendue par un des vice-présidents. Je ne demanderai pas qu'on me récuse. Je vais me récuser moi-même.

Je vous dis également que je pense que c'est tout à fait logique. En effet, je ne peux pas présupposer quelle sera la décision de l'Assemblée, si la motion, toujours dans l'hypothèse, est acceptée, mais je serai tout probablement appelé à comparaître, si enquête il y a, devant la commission de l'Assemblée nationale, comme témoin ou autrement. C'est la raison. Je vous écoute, actuellement, pour qu'il y ait un président ici, pour que ce soit enregistré au journal des Débats et la décision sera rendue par un des vice-présidents.

M. BURNS: Sur la recevabilité, M. le Président?

LE PRESIDENT: Même sur la recevabilité.

M. BURNS: M. le Président, dans tout ce que je vous ai dit là, je n'ai pas indiqué que je n'ai pas confiance en votre jugement sur la recevabilité, loin de là.

LE PRESIDENT: Au cas où il y aurait des doutes, je préfère ne pas le rendre.

M. BURNS: Loin de là, M. le Président. Je tiens même à vous dire que je me sens pas mal plus en sécurité avec vous qu'avec d'autres.

LE PRESIDENT: Bon.

DES VOIX: Ah! Ah!

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: Non, non, on va être clair, là. Je vais vous le dire.

M. CADIEUX: On s'attaque aux vice-présidents.

LE PRESIDENT: Messieurs!

M. BURNS: Je n'ai mentionné personne. S'il y en a qui se sentent visés, qu'ils comprennent.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre.

M. BURNS: M. le Président, en tout cas, qu'il soit clair que moi, je n'insiste pas et même je vous inviterais peut-être au contraire.

LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs!

M. BURNS: Je n'ai pas à discuter de vos raisons, M. le Président.

LE PRESIDENT: J'insiste et je me convaincs moi-même.

M. BURNS: Bon. Si vous êtes convaincu, je n'insisterai pas, mais je peux vous dire — et que ce soit bien clair — qu'en ce qui me concerne j'aurais parfaitement accepté que vous présidiez au moment où la décision sur la recevabilité de cette motion sera rendue.

M. le Président, je vais tout simplement conclure en vous disant — c'est la dernière fois que je me réfère à vous — que c'est de vous dont

il est question, vous comme président et non pas comme individu, dans le paragraphe 2 de l'article 96. Il vous est donc impossible, comme président — et même si ce n'est pas vous, M. le Président, qui rendez la décision, je pense qu'il y a permanence à la présidence; je m'excuse de vous le dire, mais vous êtes une institution comme président et, comme tel, vous avez un caractère de permanence — d'accepter aujourd'hui la recevabilité de la motion du député de Crémazie sans, à toutes fins pratiques, renverser votre propre décision du mois de juillet dernier et surtout sans surprendre la bonne foi du chef de l'Opposition et sans vous faire — je le dis respectueusement, M. le Président — le complice d'un traquenard que je ne saurais qualifier, même s'il n'origine pas de vous.

C'est pourquoi, M. le Président, je vous demande de déclarer qu'il n'y a pas, prima facie, d'atteinte à des privilèges dans la question soulevée par le député de Crémazie et d'ordonner que l'avis qui paraît au feuilleton d'aujourd'hui soit radié.

M. le Président, à la demande du chef de l'Opposition, j'aimerais terminer par une requête, celle de vous prier instamment, vous ou celui que vous désignerez pour rendre la décision, de rendre votre décision, si possible, dès aujourd'hui, afin que, si jamais vous décidiez d'accepter la motion du député de Crémazie, nous puissions en débattre le plus tôt possible. En effet, M. le Président, le chef de l'Opposition tient beaucoup — je me fais son porte-parole en le disant — à ce que cette question soit vidée avant l'ajournement de Noël et je crois que c'est un minimum qu'il est en droit d'exiger.

LE PRESIDENT: A l'ordre! Bon! Aucun commentaire pour le moment. Au sujet de votre dernière requête, je vais en discuter avec les vice-présidents. Je ne peux pas me prononcer pour eux.

Affaires du jour.

M. BIENVENUE: Article 7, M. le Président.

LE PRESIDENT: Article 7. L'honorable député de Saint-Jacques n'est pas là.

M. BURNS: Article 7.

Le leader adjoint accepterait-il que je vérifie, dans les 30 secondes qui viennent, la possibilité que le député de Saint-Jacques se joigne à nous?

M. le Président, on peut continuer, le député de Saint-Jacques n'avait pas parlé. Tout ce qui peut lui arriver, c'est qu'il perde sa priorité s'il n'est pas ici.

LE PRESIDENT: II lui restait trois minutes. M. BURNS: D'accord.

LE PRESIDENT: Actuellement, c'est le député de Saguenay sur le débat de deuxième lecture.

Projet de loi no 98

Deuxième lecture (suite)

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, je voudrais vous rappeler que ce n'est pas la première fois que nous avons à discuter dans une période semblable d'un projet de loi semblable. En effet, on se rappelle qu'au cours du mois de décembre 1972, nous avions à étudier un projet de loi dont le principe était semblable, à savoir la fusion de certaines municipalités pour créer la grande municipalité de Gaspé.

En décembre 1972, nous avions aussi insisté sur le fait qu'il était très difficile de discuter d'un projet de loi aussi important alors que nous étions dans une période qui n'était pas propice à cette discussion, où les différents corps intermédiaires, comme les différents individus, comme les municipalités, étaient préoccupés d'abord par autre chose que discuter un projet de loi de cette importance. Nous avions aussi insisté sur le fait qu'il était très difficile pour l'Opposition de pouvoir discuter de ce projet de loi au moment où nous fonctionnons avec les procédures spéciales.

En effet, il est normalement entendu, en vertu des règlements, que nous puissions discuter selon des heures normales, surtout lorsqu'il s'agit de projets de loi fort importants.

A cette période, nous avions aussi la motion de fin de session et nous devions discuter d'un projet de loi aussi important que le projet de loi de Gaspé, qui a créé la municipalité de Gaspé, au moment non seulement d'une période qui n'était pas propice à cette discussion, mais selon des procédures qui étaient anormales.

On se rappelle que malgré les remarques que nous avions pu faire, malgré les interventions que nous avions pu faire auprès de l'ex-ministre des Affaires municipales on a passé outre à ces interventions. Il est vrai que les députés du Parti québécois ont appuyé à ce moment-là le ministre des Affaires municipales, que les députés de l'Opposition ont appuyé le principe de ce projet de loi, les députés du Parti québécois et non pas de l'Opposition au complet puisque l'Union Nationale s'était opposée à ce projet de loi, avait voté contre ce projet de loi. Les députés du Parti québécois ont donc voté, étant donné les explications qui avaient été données par l'ex-ministre des Affaires municipales, avec le gouvernement.

Nous connaissons actuellement les conséquences de ce projet de loi de 1972. Nous savons actuellement qu'en 1972 les députés du Parti québécois, comme les députés ministériels, se sont trompés en créant un éléphant blanc qui n'a donné aucun résultat positif pour la population des régions concernées.

Or, M. le Président, nous disons aujourd'hui encore à ce gouvernement que la période n'est pas propice; nous disons encore à ce gouvernement qu'il faudrait attendre que les groupes

concernés puissent se faire entendre; nous disons encore à ce gouvernement qu'il n'est probablement pas aussi urgent de créer ces deux municipalités qu'on nous propose. Et nous le disons, M. le Président, avec d'autant plus de fermeté qu'en 1972 ce gouvernement nous avait trompés concernant des télégrammes qui avaient été envoyés aux maires, concernant des revendications qui avaient été faites par la population. Ce gouvernement, par l'entremise de l'ex-ministre des Affaires municipales, nous a trompés en 1972. Et nous ne voulons pas, en 1974, que ce gouvernement puisse encore une fois nous tromper; nous ne voulons pas que d'ici un, deux ou trois ans les populations concernées viennent nous voir, nous de l'Opposition comme vous autres du gouvernement, en disant: Vous vous êtes trompés en 1974. Vous vous êtes trompés parce que vous n'avez pas donné le temps aux populations concernées de se faire entendre. Vous vous êtes trompés parce que vous n'avez pas pris le temps nécessaire pour étudier un projet de loi d'une telle importance, un projet de loi qui touche des individus, qui touche des municipalités.

Etant donné l'expérience de l'ex-ministre des Affaires municipales — et vous savez où il est rendu cet ex-ministre des affaires municipales actuellement — étant donné l'expérience que nous avons vécue en 1972, étant donné l'expérience que vivent actuellement des populations dans la municipalité de Gaspé, nous croyons, M. le Président, qu'il serait normal que nous attendions, avant d'accepter un tel projet de loi, que les populations concernées puissent se faire entendre. Je pense qu'il est normal que nous exigions qu'un référendum soit fait avant de nous engager dans un projet de loi d'une telle importance.

M. le Président, ce n'est pas la première fois que les membres de l'Opposition officielle demandent un report à trois mois. Ce n'est pas la première fois que les membres de l'Opposition officielle, sur un projet de loi aussi important, demandent au gouvernement d'en retarder l'adoption. Mais, quand il s'agit de créer une municipalité, quand il s'agit de chambarder toutes les structures d'une région, quand il s'agit de forcer des gens à vivre ensemble, nous croyons que cette demande devient d'autant plus importante. Le programme même du Parti québécois, comme nous avons tenté de l'expliquer, nous oblige, nous parlementaires — parce que nous respectons nos programmes, et c'est là la différence entre les députés ministériels et les députés de l'Opposition — à nous battre ici à l'Assemblée nationale parce que l'une des exigences fondamentales inscrites dans notre programme, lorsqu'il s'agit de regrouper des municipalités, c'est d'abord qu'on passe par le référendum. M. le Président, nous avons l'intention de nous battre pour exiger de ce gouvernement, de ce ministre qu'il respecte au moins ses engagements.

Il disait qu'on ne ferait pas de fusion forcée.

Or, M. le Président, ce ministre, comme l'ex-ministre des Affaires municipales, n'a jamais respecté sa parole concernant les municipalités, n'a jamais respecté sa parole concernant les conseils de comté. Comment voulez-vous qu'actuellement des populations, comment voulez-vous, actuellement, que des municipalités, comment voulez-vous que le conseil de comté aient confiance en ce ministre qui n'a jamais respecté sa parole? Cela peut créer une situation grave au Québec concernant la fusion des municipalités, concernant le regroupement municipal.

On se rappelle que l'ex-ministre des Affaires municipales avait pris aussi cet engagement de ne pas forcer les municipalités à fusionner. On se rappelle aussi, M. le Président, que l'ex-ministre des Affaires municipales avait tenté à quelques reprises d'imposer des fusions. On se rappelle, aussi, la contestation qui s'est soulevée à travers le Québec. On se rappelle la démission de l'ex-minitre des Affaires municipales. Et je pense que le nouveau ministre des Affaires municipales, le ministre actuel, devra probablement, d'ici quelques mois, envisager aussi sa démission, parce que ce ministre n'a plus la confiance des municipalités, parce que ce ministre n'a plus la confiance des conseils de comté du Québec. Je disais qu'il est tout à fait normal qu'on puisse penser à regrouper différentes municipalités du Québec. Nous ne sommes pas contre le regroupement municipal, mais nous le sommes avec la population. Nous sommes d'accord avec les principes généraux qu'on a élaborés concernant le regroupement des municipalités et nous favorisons, nous l'avons dit à maintes reprises, la diminution des municipalités au Québec. En effet, il est anormal qu'on ait autant de municipalités. Cependant, nous le faisons en autant que les municipalités seront consultées et nous jugeons actuellement que ça n'a pas été le cas.

Nous jugeons actuellement qu'en particulier dans la région du Haut-Saguenay, la consultation n'a pas été complètement faite ou n'a pas été aussi profondément faite qu'on tente de nous le faire croire. Nous croyons que des organismes comme les conseils de comté doivent se faire entendre sur ce projet de loi. Nous croyons que ce n'est pas à quelques jours de l'ajournement que nous devrions étudier un projet de loi d'une telle importance. Je voudrais simplement vous donner un exemple de ce que ça peut donner que d'accepter ce projet de loi-là. Les conseils de comté, vous en faites quoi, M. le Président? Vous en faites quoi, M. le ministre, les conseils de comté? Avez-vous une politique concernant les conseils de comté? Est-ce que vous avez décidé de les faire disparaître, les faire disparaître à petit feu? Qu'arrivera-t-il, par exemple, au conseil de comté de Papineau?

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! Le ministre des Affaires culturelles sur une question de règlement.

M. HARDY; M. le Président, j'invoque le règlement. Je comprends qu'à ce stade du débat en deuxième lecture, on étudie le principe d'une loi, on puisse élargir les propos, mais actuellement nous étudions un projet de loi dont le champ est quand même bien circonscrit.

Il s'agit d'un regroupement au Lac-Saint-Jean et à Hull, et voici que le député de Saguenay est en train de demander au ministre s'il y a une politique générale des conseils de comté.

Je ne pense pas que cela soit l'occasion. Je ne dis pas qu'il n'y a pas beaucoup de choses intéressantes à dire sur les conseils de comté, mais il n'y a pas de relation entre le projet actuel et l'élaboration d'une politique générale de conseils de comté.

M. le Président, je vous inviterais, avec beaucoup de respect, à demander au député de Saguenay de respecter la pertinence du débat.

M. ROY: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: J'ai écouté avec attention mon collègue de Saguenay et je viens d'écouter également les remarques du député de Terrebonne. J'ai été en mesure de me rendre compte que le député de Terrebonne aurait intérêt à relire son règlement. Il aurait surtout eu intérêt à écouter mon collègue de Saguenay, parce que si on parle de regroupement municipal, il est évident que dans les régions rurales, voire même semi-urbaines, cela concerne les conseils de comté parce que cela change les relations.

M. HARDY: ... sur place.

M. ROY: Lorsque le député de Saguenay parlait des conseils de comté...

M. HARDY: II parlait d'une politique générale.

M. ROY: ... j'ai les mêmes questions à poser au ministre et j'entends les poser. C'est pourquoi je dis que le rappel au règlement du député de Terrebonne est tout à fait hors d'ordre.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de...

M. LESSARD: M. le Président, je pense que le...

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Question de règlement?

M. BELLEMARE (Johnson): Oui, certainement.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Johnson.

M. BELLEMARE (Johnson): A la suite de l'intervention du député de Terrebonne, l'article 120 se termine par ces mots que vous connaissez bien: "... ou à toute autre méthode d'atteindre ses fins". Les conseils de comté seront frustrés, et c'est bien important qu'on le dise... Je pense que le député de Saguenay... C'est pertinent au débat et l'honorable député qui a déjà occupé le fauteuil sait qu'il y a pertinence au débat.

M. LESSARD: Je pense que le député de Terrebonne, qui a été vice-président de la Chambre, aurait intérêt à relire ses règlements parce qu'il semble que depuis qu'il est ministre des Affaires culturelles, il les a fortement oubliés. Je pense que j'ai le droit, en vertu de ces règlements — pas en vertu des règlements du ministre des Affaires culturelles — en vertu de ces règlements, de parler des implications d'un projet de loi, et cela sera encore plus précis.

Concernant certains conseils de comté de la région de Hull, je voudrais demander ce qu'il adviendra de ces conseils de comté. N'eût été l'intervention inopportune du ministre des Affaires culturelles, le ministre aurait certainement compris et vous-même, M. le Président...

M. HARDY: II n'y a que lorsque vous parlez que c'est opportun. Pour vous faire plaisir, il faudrait...

M. LESSARD: Oui, il y a une politique qui est implicite dans ce projet de loi vis-à-vis des conseils de comté et il faudrait que le ministre nous en parle. Le ministre a-t-il décidé de les faire disparaître à petit feu? Si c'est le cas, qu'il le dise, qu'il fasse exactement comme l'ex-ministre des Affaires municipales l'a fait, l'honorable ministre Tessier, lorsqu'il s'est présenté à un congrès des conseils de comté et lorsqu'il a été rabroué justement parce qu'il est allé dire aux administrateurs des conseils de comté qu'il avait l'intention de les faire disparaître ou du moins de les réformer. Mais la conclusion en arrivait toujours au même.

M. le Président, qu'arrivera-t-il pour le conseil de comté de Papineau, puisque sept municipalités disparaissent qui sont actuellement membres de ce conseil de comté, et dont l'évaluation est estimée à $15 millions. Qu'arrivera-t-il au conseil de comté de Pontiac, alors que la loi fait disparaître quatre municipalités et $9 millions d'évaluation? Qu'arrivera-t-il au conseil de comté de Gatineau, alors que la loi fait disparaître neuf municipalités membres de ce conseil de comté, soit $84 millions d'évaluation sur $128 millions? Or, M. le Président, le ministre s'aperçoit de plus en plus, je pense, que ce projet de loi est contesté et a été contesté. Le ministre devrait prendre conscience qu'à sa place, comme responsable du ministère des Affaires municipales, a déjà siégé un autre ministre qui, lui aussi, avait perdu la confiance des administrateurs municipaux, qui, lui aussi, avait perdu la confiance des différentes munici-

palités du Québec, et ce ministre n'a pas été capable de faire son travail. Ce ministre, en perdant la confiance des personnes mêmes avec lesquelles il devait travailler, a dû démissionner. Je pense que c'est ce qui arrivera à l'actuel ministre des Affaires municipales, qui n'est pas capable de se tenir debout, qui n'est pas capable de respecter ses engagements, de respecter sa parole, M. le Président.

On va vous en citer des engagements que le ministre a pris, on va en citer.

M. HARDY: ...

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! A l'ordre!

M. LESSARD: Le ministre, actuellement, est la marionnette des deux députés régionaux, qui sont les véritables parrains de ce projet de loi.

M. HARDY: ... capable de discuter sur le plan des idées.

M. LESSARD: Que disiez-vous le 24 mai 1973?

M. HARDY: Vous êtes incapable de discuter sur le plan des idées.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! A l'ordre! ...A l'ordre! ...

Comme je l'ai mentionné hier, si le ministre des Affaires culturelles veut intervenir sur ce projet de loi, on va continuer cet après-midi. A l'ordre!

M. LESSARD: Je termine, mais si le ministre des Affaires culturelles, qui ne fout rien à l'intérieur de son ministère, n'est pas capable...

M. HARDY: Continuez à faire des personnalités.

M. LESSARD: ... d'écouter, qu'il retourne à son ministère.

M. HARDY: Vous êtes incapable de discuter d'idées.

M. LESSARD: Voici, M. le Président, ce que le ministre actuel des Affaires municipales disait le 24 mai 1973...

M. HARDY: ... intellectuel.

M. LESSARD: C'est vraiment son style, d'ailleurs, comme ministre des Affaires municipales: "Je serais profondément malheureux si on s'opposait à ce que la commission municipale aille siéger dans quelque région que ce soit de la province pour entendre les intéressés. "C'est comme cela que nous allons nous pencher sur leurs problèmes. C'est un organisme indépendant qui a la responsabilité de conseiller le ministre sur certaines choses, de faire des recommandations. Il faut que la commission aille siéger et que les renseignements qui se dégageront de ces audiences soient fournis à la population. Ce n'est qu'une étape qui n'a rien d'exécutoire". Donc, "j'y tiens beaucoup, vous savez", avec la fermeté habituelle dont il a fait preuve depuis qu'il est ministre. "J'y tiens beaucoup. Je pense que c'est une formule qui est logique et que nous allons poursuivre". C'est là le respect des engagements du ministre actuel des Affaires municipales? Est-ce que la Commission municipale a siégé dans le Haut-Saguenay?

UNE VOIX: Non.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre pourrait nous le dire?

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! Je vous inviterais à terminer en 30 secondes.

M. LESSARD: Je termine, M. le Président. Est-ce, là aussi, l'engagement du responsable de la région du Lac-Saint-Jean auprès de l'Office de planification et de développement économique du Québec, M. Normand Toupin, qui, devant les municipalités disait: Pas de fusion si les quatre maires ne sont pas d'accord. C'est ça, l'engagement de ce gouvernement, c'est ça l'engagement de ce ministre des Affaires municipales?

Vous n'êtes, comme ministre des Affaires municipales qu'une marionnette actuellement entre les mains de patroneux du Parti libéral.

M. BELLEMARE (Rosemont): Vous autres, vous êtes les marionnettes de votre exécutif.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président...

M. BELLEMARE (Rosemont): Vous êtes une marionnette de l'exécutif de votre parti.

M. ROY: ... puis-je proposer la suspension du débat?

UNE VOIX: Des marionnettes du Parti québécois.

M. ROY: Vous ne perdez rien pour attendre. UNE VOIX: II y a un vote.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les députés.

Vote de première lecture sur le projet de loi no 88

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Il

s'agit de la mise aux voix d'un projet de loi, en première lecture, proposé par l'honorable ministre des Affaires sociales, Loi modifiant la loi de la protection de la santé publique.

Que ceux qui sont en faveur de cette motion de première lecture veuillent bien se lever s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Saint-Pierre, Cloutier, Cournoyer, Goldbloom, Quenneville, Hardy, Tetley, Lacroix, Bienvenue, Forget, L'Allier, Harvey (Jonquière), Cadieux, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bossé, Kennedy, Bacon, Veilleux, Brisson, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Lamontagne, Fraser, Picard, Gratton, Gallienne, Carpentier, Faucher, Saint-Germain, Harvey (Charlesbourg), Pelletier, Springate, Bellemare (Rosemont), Bonnier, Boudreault, Boutin, Marchand, Caron, Ciaccia, Côté, Denis, Dufour, Harvey (Dubuc), Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Vallières, Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi).

LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Samson, Roy, Bellemare (Johnson).

LE SECRETAIRE: Pour: 73. Contre: 3.

LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi. First reading of this bill.

LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. LEVESQUE: Suspension à quinze heures.

LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 13 h 8)

Reprise de la séance à 15 h 5

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!

Le député de Beauce-Sud.

Projet de loi no 98

Deuxième lecture (suite)

M. Fabien Roy

M. ROY: M. le Président, aujourd'hui, 19 décembre, le gouvernement propose à l'Assemblée nationale un projet de loi portant le numéro 98, Loi concernant certaines municipalités de l'Outaouais et du Haut-Saguenay. Selon la formule habituelle, Sa Majesté, de l'avis et du consentement de l'Assemblée nationale du Québec, décrète ce qui suit dans ce projet de loi: la constitution de la ville de Jonquière, la constitution de la ville de Chicoutimi, de Gatineau et de Buckingham.

Evidemment, nous ne pouvons nous référer aux notes explicatives qu'il y a dans ce projet de loi: le gouvernement n'a même pas eu le temps de les écrire. C'est un projet de loi de dernière minute, comme d'habitude, qui est proposé à l'Assemblée nationale, alors que nous avons au-dessus de nous une motion qui a été acceptée en Chambre, concernant l'abolition des règles de procédure parlementaire normales, de façon à nous faire siéger à des heures indues.

Ce n'est pas nouveau; nous avons été dans la même situation lorsque le bill 276, Loi favorisant le regroupement des municipalités, a été proposé devant l'Assemblée nationale.

Pourquoi à la dernière minute? Pourquoi au dernier instant, sinon pour obliger les députés à faire le moins d'interventions possible ou encore pour avoir le moins de temps possible pour consulter les personnes concernées afin d'exprimer devant l'Assemblée nationale un point de vue qui reflète les intérêts logiques, normaux, réels de la population concernée?

C'est pourquoi je demande au gouvernement: Pourquoi avoir attendu à la dernière minute pour présenter un projet de loi qui veut mettre de côté la consultation populaire pour imposer, par voie législative, des lois que la population ne désire pas?

Cela fait changement avec les déclarations qu'a faites le ministre des Affaires municipales en Haute-Gatineau, le mardi, 8 mai 1973, et qui ont été rapportées dans le journal Le Droit. Evidemment, à ce moment-là, il y avait des élections dans l'air, il ne fallait pas ameuter la population. Il fallait que la population soit bien rassurée, bien tranquillisée concernant les intentions du gouvernement.

Un gouvernement champion de la participation populaire, un gouvernement soucieux — et M. le Président, je cite leurs propos — du respect des opinions de la population...

M. VEILLEUX: Bravo!

M. ROY: ... et un gouvernement qui se

voulait soucieux de donner au peuple les lois que le peuple attend de lui". Et voici ce que le ministre disait lui-même: "Je ne vais pas imposer le regroupement...

Vous n'applaudissez plus?

UNE VOIX: Attendez.

M. ROY: Je pensais que vous étiez pour continuer d'applaudir.

M. GRATTON: Est-ce que le député me permet une question?

M. ROY: "Je ne vais pas imposer le regroupement...

M. GRATTON: M. le Président, est-ce que le député me permettrait...

M. ROY: ... mais je vais inviter les populations à se pencher sur leurs problèmes d'administration municipale", de dire le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Environnement, le docteur Victor Goldbloom, de passage à Maniwaki, hier matin, en compagnie du député de Gatineau, M. Michel Gratton. Celui qui vient d'invoquer le règlement.

M. GRATTON: M. le Président... UNE VOIX: Le député...

M. ROY: Le ministre Goldbloom, qui représentait les maires des municipalités de la Haute-Gatineau, a souligné qu'il était primordial — c'est le ministre qui parle— "de créer un climat de bonne entente et de consultation entre les municipalités afin qu'elles puissent au moins se rencontrer pour discuter de regroupement municipal". C'était avant les élections.

M. GRATTON: M. le Président, est-ce que le député de Beauce-Sud...

M. ROY: Avant les élections, M. le Président...

M. GRATTON: ... me permettrait une question?

M. ROY: ... le même ministre continue: "Quant au changement d'attitude du ministère des Affaires municipales...

M. GRATTON: Est-ce qu'il m'en permet une, pensez-vous?

M. ROY: ... depuis quelques mois...

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Cela a l'air que le député ne permet pas de question.

M. ROY: ... quant au regroupement... M. le Président, je n'ai pas peur des questions de vos petits stratèges, mais je n'ai que 20 minutes à ma disposition. Et vous êtes les premiers, quand je demande du temps supplémentaires, à me...

M. GRATTON: On vous empêcherait de dire des bêtises.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. ROY: Je ne permets pas de question...

M. GRATTON: On vous empêcherait de dire des bêtises, peut-être.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît !

Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: Je serais entièrement d'accord pour permettre à mes illustres collègues — illustres entre guillemets — d'intervenir sur le projet de loi. Je continue, M. le Président.

Quant au changement d'attitude du ministère des Affaires municipales depuis quelques mois quant au regroupement, le ministre Goldbloom s'est contenté de faire remarquer que chaque ministre exprimait un style de travail à son ministère et que les grosses décisions étaient toujours entre les mains du conseil des ministres au chapitre des politiques d'ensemble. M. le Président, le ministre continue en rassurant la population à l'effet qu'il n'imposerait pas de regroupement municipal obligatoire.

Qu'est-ce que nous avons devant nous, M. le Président? Nous avons une loi qui impose le regroupement municipal obligatoire malgré la volonté des populations concernées et sans que le gouvernement se soit donné la peine de permettre aux populations concernées de s'exprimer. M. le Président, lorsque je dis permettre aux populations concernées de s'exprimer il y a des dispositions dans la loi 276 qui concerne le regroupement municipal.

L'article 2 dit — je le citerai à l'attention de mes honorables collègues — que le ministre, à partir de données lui permettant de croire qu'il y aurait avantage à ce que les municipalités se fusionnent ou qu'une étude soit faite sur l'opportunité pour certaines municipalités de se fusionner, peut établir des unités de regroupement comprenant des municipalités de cité, de ville, de village ou de campagne et y rattacher toute partie de territoire non organisé contiguë à l'une d'elles.

Et le ministre dit plus loin dans sa loi qu'"une requête conjointe peut être présentée par la moitié des conseils des municipalités comprises dans une unité de regroupement et représentant au moins la moitié de la population de toutes les municipalités comprises dans les unités de regroupement". On ajoute que "les municipalités qui ne sont pas comprises dans une unité de regroupement peuvent, quelle que soit la loi qui les régit, présenter une requête

conjointe". L'article 5 dit que "chacun des conseils municipaux qui désire présenter une requête visée à l'article 3 ou 4 doit adopter un règlement à cette fin".

Il est également dit plus loin dans la loi qu'il est question de consulter la population et de soumettre ça à la population par voie de référendum. Or, M. le Président, que fait le gouvernement de sa propre loi? Que fait le gouvernement d'une loi qu'il a votée, qu'il a imposée à l'Assemblée nationale, à la dernière minute d'une session, parce qu'encore là, nous étions à la veille de la fête de Noël et c'était urgent? Il fallait siéger à des heures indues. Je voudrais rappeler au gouvernement, que...

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît! Il y a deux autres caucus ici. S'il vous plaît, le caucus de l'Opposition et le caucus du premier ministre, j'attirerai... Les caucus, dehors, s'il vous plaft.

M. BURNS: Quelques-uns des démissionnaires.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Beauce-Sud.

M. HARDY: Est-ce qu'on était en train de composer un cabinet de coalition?

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, pour revenir au projet de loi, je ne sais pas si ça fait partie d'une tactique gouvernementale d'interrompre les collègues lorsqu'ils parlent d'une question aussi importante que celle que nous étudions. Cela contribue évidemment à améliorer le décorum de l'Assemblée nationale; cela permet une étude objective et un travail objectif et sérieux de la part de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas nouveau. C'est toujours de cette façon et ça ne change pas.

M. GRATTON: C'est du "niaisage" ça, là.

M. ROY: M. le Président, est-ce que je dérange le député de Rimouski? Si je ne vous dérange pas, ayez donc la décence de vous taire.

M. SAINT-HILAIRE: Tu sais que je t'écou-te.

M. ROY: M. le Président, je disais donc que ce projet de loi no 98 qui veut imposer aux populations concernées un regroupement dont elles ne veulent pas, un regroupement non désiré et un regroupement non demandé...

Je me demande quelle est la raison fondamentale qui fait que le gouvernement présente cette loi à ce moment-ci et pour quelle raison il a voulu agir de façon aussi rapide dans une question aussi importante.

On pourrait se demander s'il n'y aurait pas quelques politiciens, quelques membres de l'Assemblée nationale de certains comtés qui auraient des intérêts particuliers à défendre, pour voir s'ils ne sont pas intéressés...

M. GRATTON: Nommez-les.

M. ROY: Oui, je vais nommer le député de Jonquière.

M. GRATTON: Nommes-les.

M. ROY: Oui, je vais nommer le député de Jonquière, entre autres, qui veut peut-être se créer une espèce de royaume pour y placer ses amis. Je pose la question, parce que si le gouvernement avait voulu agir de façon sérieuse...

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, question de privilège.

M. ROY: ... il aurait pu agir autrement.

M. HARVEY (Jonquière): Le texte du projet de loi no 98 identifie bien que le gouvernement crée la ville de Saguenay, comprenant le comté complet de Chicoutimi, une partie de Dubuc et le comté que je représente. C'est une trame urbaine, et les affirmations du député de Beauce-Sud sont stupides parce que je créerais un royaume à d'autres.

UNE VOIX: Elles sont à son image!

M. ROY: Je savais bien qu'en touchant cette question le député de Jonquière se sentirait blessé. La réaction a été très positive. Cela fait mal lorsqu'on parle de ces choses parce qu'on touche à la réalité, quoiqu'en dise et quoiqu'en pense le ministre lui-même. Si le ministre du Revenu et député de Jonquière avait été sérieux pour imposer une loi, pour quelle raison a-t-il inclus la question qui le touche d'une façon particulière à l'intérieur d'une loi qui touche également d'autres territoires du Québec? Pour quelle raison n'a-t-il pas eu le courage — le député de Jonquière — de présenter une loi particulière en ce qui a trait aux gens de son comté? Pourquoi le député de Jonquière a-t-il attendu à la dernière minute pour présenter cette loi à l'Assemblée nationale?

M. le Président, la loi n'est même pas imprimée. Nous avons des feuilles photocopiées devant nous. La loi n'était même pas prête. Elle n'a pas été imprimée selon la formule habituelle à l'Assemblée nationale. Et le ministre du Revenu et député de Jonquière va se sentir vexé par les propos qu'on tient? Qu'il réponde aux questions que je viens de lui poser pour voir si ce n'est pas encore une question de cache-cache, de cachette à la dernière minute pour tâcher de sauver les intérêts de certains amis, pour placer ses amis ou encore pour permettre

de faire plus de patronage, comme il y en a et comme il y en a toujours eu dans son comté depuis qu'il est là.

Il va falloir qu'on appelle les choses par leur nom et qu'on dise la vérité. Je pense que cela commence à être important. Si le député de Jonquière se sent vexé, qu'il donne des explications et qu'il réponde aux questions que je viens de lui poser. Pensez-vous que le ministre a décidé et que les gens ont décidé cela la semaine dernière de fusionner?

Il y a belle lurette que ces plans sont préparés, sont patentés dans les bureaux du ministre ou avec d'autres personnes qui sont près de lui, pour venir à l'Assemblée nationale à la dernière minute. Il y a belle lurette que c'est prêt, M. le Président, mais on attend justement à la dernière minute pour se présenter devant l'Assemblée nationale, de façon que nous soyons pris avec l'étude, dans la même session, de trois, quatre ou cinq autres projets de loi pour que le monde de l'information, limité par les débats que nous avons, limité par l'espace disponible, limité par le temps, ne puisse pas rendre compte exactement de tout ce qui se passe à l'Assemblée nationale et en informer les populations concernées.

On sait cela, M. le Président. On arrive avec un projet de loi comme celui là. Pour quelles raisons n'a-t-on pas voulu procéder selon les formules clairement établies dans la loi 276? Pour quelles raisons refuse-t-on les référendums? Pour quelles raisons refuse-t-on de consulter la population, sinon parce qu'on veut procéder à la dernière minute, en toute hâte, à l'insu de la population? Ainsi, les gens se retrouvent après, alors que le mal est fait et que la loi est votée par l'Assemblée nationale.

M. le Président, ceci démontre que nous avions de bonnes raisons de voter contre la loi 276, en 1971. Nous avons voté contre. Les députés de l'Union Nationale ont également voté contre la loi 276, en 1971. Nous avions raison, parce qu'à ce moment nous représentions tous des comtés ruraux et nous avions rencontré les gens de nos municipalités. Nous avions rencontré les dirigeants municipaux et on ne voulait pas de cette espèce de carcan, de cette loi qui permettait au ministre et au ministère des Affaires municipales de mettre en tutelle certaines municipalités du Québec ou encore d'imposer des vues de regroupement qui ne tenaient aucunement compte des intérêts et des aspirations des populations concernées.

M. le Président, que le ministre nous en nomme une, nous donne en exemple une seule communauté urbaine, un seul cas de regroupement qui s'est fait selon des lois particulières devant l'Assemblée nationale et qui fonctionne à merveille, qui est une réussite.

UNE VOIX: Alma.

M. ROY: Alma, c'est une question différente et c'est très petit, mais je parle de grosses agglomérations qu'on a voulu faire. Qu'on nous en nomme. On ne nous parlera pas de Gaspé, on ne nous parlera pas de la Communauté urbaine de Québec, on ne nous parlera pas de la Communauté urbaine de Montréal, non, qui continuent à administrer et à fonctionner de façon catastrophique, si bien qu'à chaque session on est obligé, à l'Assemblée nationale, de chercher des moyens pour régler les problèmes qu'elles ne peuvent pas régler. Leur situation démontre jusqu'à quel point on est en train de s'embourber avec toutes ces mesures gouvernementales.

M. le Président, le gouvernement n'est pas là pour imposer toujours ses vues aux populations.

Le gouvernement n'est pas là pour toujours imposer ses vues à la population. Le gouvernement est là pour aider la population. Les structures municipales que nous avons au Québec sont quand même des structures qui répondent à des besoins. Le rôle du gouvernement du Québec, ce n'est pas de leur imposer des carcans, de leur imposer des fusions malgré elles. Le rôle du gouvernement du Québec, c'est de les aider, de façon qu'elles puissent offrir les meilleurs services à leur population.

Le seul critère qui nous permet de nous guider dans le domaine des fusions et des regroupements sont des critères qui émanent de la population elle-même, qui peuvent être justifiés par le fait que les gens trouvent des avantages dans les fusions. Mais si les gens ne veulent pas des fusions et si la loi no 276 est un fiasco parce personne ne semble vouloir s'en prévaloir au Québec, ce n'est pas par des projets de loi comme le projet de loi no 98 que nous avons devant nous qu'on va corriger la situation. Le ministre — et cela me surprend — devrait le savoir. Le ministre devrait être au courant. Ce n'est pas quand des lois ne répondent pas aux besoins de la population, alors qu'on a fait en sorte que pour ces lois il y ait un minimum de consultation et un minimum de volontariat à l'intérieur de ces lois, qu'on va corriger le mal par les lois totalement arbitraires comme le projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi no 98.

Nous vons reçu des télégrammes de groupements, d'associations qui protestent justement contre cette fusion. Je vais en lire un qui émane du comté du ministre du Revenu: "Comptons sur votre appui ainsi que sur celui de vos confrères de l'Opposition pour sauver la démocratie au Québec en vous objectant de toutes vos forces contre le nouveau projet de loi des municipalités, présenté par le ministre des Affaires municipales aujourd'hui. Groupement Diffusion, secteur d'Arvida." Cela est de la consultation, ce que ces gens disent. C'est signé par M. Côté, secrétaire.

M. HARVEY (Jonquière): Lucien Côté, un dissident, on le sait.

M. ROY: Nous en avons rencontré des gens

dans votre région hier. Qu'est-ce que les gens sont venus nous dire? Ils sont venus nous dire qu'ils sont contre. Le ministre me fait signe qu'il n'y en a qu'un qui est contre.

M. HARVEY (Jonquière); Une dissidence.

M. ROY : Pour quelle raison avez-vous peur du référendum s'il y a seulement une personne qui est contre? Pour quelle raison avez-vous pour du référendum?

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, une question de privilège.

M. ROY: Pour quelle raison n'a-t-on pas procédé par...

M. HARVEY (Jonquière): J'invoque l'article 96.

M. ROY: ... voie démocratique?

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'ai fait un discours, hier soir, sur la question de fond et j'invoque mon privilège. J'ai parlé d'une dissidence, d'un dissident...

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! ... Ce n'est pas une question de privilège. Vous pourrez vous servir de l'article 96 après le discours du député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, l'honorable ministre n'avait pas à soulever une question de privilège parce que je ne le citais pas. Je ne le citais pas. Il n'y a rien qui le justifie d'invoquer une question de privilège dans de pareilles circonstances.

Je disais donc que ce projet de loi no 98 est un projet de loi totalement arbitraire, un projet de loi qui impose à ces gens des structures municipales, supramunicipales non désirées, qui semblent non désirables, de toute évidence, et à l'intérieur d'un projet de loi dans lequel on a inclus justement la création de quatre regroupements qui pourraient faire en sorte que, justement, il y en ait un ou deux parmi ces regroupements qui pourraient avoir des options différentes.

Je me demande encore pourquoi le gouvernement, sinon pour des raisons de dernière minute, des raisons pour lesquelles il fallait que cela se fasse de toute urgence afin que cela passe le plus rapidement possible, a inclus tout ceci dans la même loi.

En ce qui a trait à la région de la Gatineau, nous pourrions ajouter une chose en disant que justement un rapport a été présenté, le fameux rapport Fullerton. Lorsqu'on regarde la loi, on se rend compte que c'est à peu près les recommandations du rapport Fullerton dont a tenu compte le ministre des Affaires municipales dans l'élaboration et la préparation de ce projet de loi.

Mais encore là qu'est-ce qu'on a fait de la consultation et de l'opinion des dirigeants municipaux de ces endroits, de l'opinion de la population? A un colloque organisé dans le cadre de l'Institut canadien d'administration publique, auquel participaient M. Rocheleau, maire de la ville de Hull, M. Séguin et M. Denis Cunningham, ces trois personnes pourtant concernées par ce projet de regroupement se sont prononcées catégoriquement contre ce fameux rapport. La seule personne qui a défendu le rapport fut le docteur Isabelle, député du comté de Hull au fédéral. Et, évidemment, ce député fédéral n'avait que des éloges à faire sur ce rapport.

M. GRATTON: Question de règlement, M. le Président.

M. ROY: ... et qui, pour lui, était bien étoffé, bien rédigé.

M. GRATTON: Question de règlement, s'il vous plaît, M. le Président.

L'honorable député de Beauce-Sud est en train de charrier sur une question qui n'a absolument rien à voir avec le projet de loi no 98. Il nous parle du rapport Fullerton, qui exprime des opinions sur l'administration de la région de la capitale nationale, autant du côté ontarien que du côté québécois. Comparer ce que le ministre des Affaires municipales fait dans le bill 98 avec ce qui se passe sur le territoire de l'Outaouais est tout à fait faux, tout à fait le fruit de l'imagination du député de Beauce-Sud.

Je l'inviterais à revenir à la pertinence du débat, M. le Président.

M. HARDY: M. le Président, je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon collègue — je regrette — le député de Gatineau. Je pense que le député de Beauce-Sud n'est pas tout à fait en dehors de la question de règlement. Il affirme peut-être des choses fausses — cela ne me surprendrait pas, cela ne serait pas nouveau — mais je pense que l'ensemble de ses propos sont pertinents car il parle d'un rapport qui a trait à une région sur laquelle on veut adopter une loi.

Alors sur la question de règlement, M. le Président, je pense que le député de Beauce-Sud a raison. Sur le fond, je suis prêt à donner raison au député de Gatineau, que le député de Beauce-Sud erre comme trop souvent, malheureusement.

UNE VOIX: Très bien.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Je pense que la définition du débat de deuxième lecture est assez large pour couvrir le cas du rapport Fullerton.

M. ROY: Merci, M. le Président. Le député de Terrebonne a droit à ses opinions concernant le fond. Mais je me rends compte, cependant, que lorsqu'on touche au rapport Fullerton, ça fait mal, ça semble faire très mal du côté ministériel, ça chatouille, ce fameux rapport. Et, lorsque nous en parlons, vous voyez la meute rugir immédiatement. On ne voudrait pas qu'on en parle ou qu'on fasse certaines allusions sur certaines méthodes, certains camouflages habilement faits par le ministre des Affaires municipales et présentés de façon tout à fait inoffensive devant l'Assemblée nationale du Québec, espérant, évidemment, que durant la fin de session, les députés n'auront pas le temps de faire de recherche pour regarder les sous-entendus et ce qui se cache derrière les projets de loi.

C'est là le point. Ils sont surpris lorsqu'on fait allusion au rapport d'une commission d'enquête qui a étudié la question et qui a fait des recommandations. Ils sont tout surpris, ils ne pensaient pas qu'on pourrait y toucher, ils ne pensaient pas qu'on aurait le temps de fouiller là-dedans.

Même si nous devrons travailler jour et nuit, nous allons faire notre travail, nous allons remplir notre mandat, nous allons faire en sorte que justement l'envers de la médaille soit connu devant l'Assemblée nationale et devant la population du Québec.

Comme mon temps de parole est terminé, je dirai donc que ce projet de loi nous paraît complètement inacceptable. Si le gouvernement avait un peu de décence — je ne peux pas, évidemment, refaire la motion que mon collègue de Rouyn-Noranda a faite hier soir — il devrait suspendre l'adoption de ce projet de loi. Si le règlement me le permettait, je demanderais que l'adoption de ce projet de loi soit suspendue pour au moins 48 heures de façon que la commission parlementaire puisse siéger et que nous puissions interroger les personnes concernées. A ce moment-là, nous aurions d'autres points de vue qu'il serait important, qu'il serait très intéressant de connaître avant de procéder à l'étude de ce projet de loi article par article et avant qu'il soit adopté par l'Assemblée nationale.

M. BELLEM ARE (Rosemont): Point de règlement, M. le Président.

M. ROY: M. le Président, c'est la raison pour laquelle je vous demande, encore une fois, en terminant...

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Question de règlement.

M. BELLEMARE (Rosemont): Selon l'ancien règlement, je l'avoue, à la page 95, article e), "II est antiparlementaire d'être hypocrite, pharisien et sans scrupule".

M. ROY: M. le Président, au moins nous devons admettre que le député de Rosemont se reconnaît.

M. BELLEMARE (Rosemont): ...

M. ROY: M. le Président, je demande, encore une fois, en terminant, au gouvernement ainsi qu'au ministre des Affaires municipales...

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!

M. ROY: ... d'avoir suffisamment de sens démocratique, vraiment démocratique, pour suspendre la deuxième lecture de ce projet de loi et de faire en sorte qu'en commission parlementaire nous puissions rencontrer les organismes et les personnes concernées, en leur donnant évidemment le temps de s'organiser pour qu'ils puissent exposer leur point de vue devant la commission parlementaire.

Quand je parle des organismes, je parle non seulement des gens de la région du Saguenay, mais également de la région de l'Outaouais. Si le gouvernement veut être logique avec lui-même, si le gouvernement veut respecter les grandes politiques ou les grandes lignes d'orientation qu'il s'est lui-même données, lorsqu'il dit que la commission parlementaire est ouverte à la consultation et que pas un projet de loi ne passera devant l'Assemblée nationale avant que les personnes intéressées soient consultées, il doit, à ce moment-ci, prendre les dispositions qui s'imposent pour qu'avant que ce projet de loi soit adopté la commission parlementaire tienne ses séances et qu'on puisse consulter les personnes concernées.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Y a-t-il d'autres opinants avant que le ministre exerce son droit de réplique? Le ministre clôt le débat avec son discours de réplique.

M. Victor Goldbloom

M. GOLDBLOOM: M. le Président, il va sans dire que j'ai écouté attentivement, à part les brèves périodes où j'ai dû malheureusement m'absenter de la Chambre, les interventions des députés qui ont voulu s'exprimer sur ce projet de loi.

M. le Président, en faisant ma réplique, je voudrais revenir aux toutes premières remarques que j'ai faites en deuxième lecture. Il s'agit de vider le dossier de la loi 276. Pour le vider, il faut disposer des trois chemises qui y restent. Dans un cas, je ne crois pas qu'il soit opportun d'intervenir de la façon dont nous le faisons dans les deux autres; mais, dans les deux autres, il y a lieu d'agir parce que les dossiers sont mûrs. Il y a lieu d'agir même s'il n'y a pas d'unanimité et elle n'existera jamais, M. le

Président. Quand on a affaire à 140,000 de population, dans un cas, et à 160,000 dans un autre, l'unanimité n'existera jamais. Quand même, comme gouvernement, nous avons la responsabilité de prévoir le meilleur destin possible pour les importantes régions de la province.

L'honorable député de Saguenay a fait allusion aux conseils de comté. Justement, M. le Président, j'ai consacré un temps important hier et aujourd'hui — c'est la raison de mon absence de la Chambre pour un certain temps — à des rencontres avec l'Union des conseils de comté et avec les trois conseils intéressés au regroupement dans l'Outaouais. M. le Président, l'honorable député de Saguenay a cité certains chiffres, a invoqué certaines pertes de revenus pour les conseils de comté intéressés. Je voudrais dire publiquement ce que j'ai dit privément aux conseils concernés: Je vais compenser ces pertes parce que je trouve que c'est normal que la collectivité les compense. Il y a quelques conseils de comté, les trois en question notamment, qui sont doublement impliqués ou dont les municipalités membres sont doublement impliquées dans un conseil de comté, d'un côté, et dans une communauté régionale, celle de l'Outaouais, de l'autre côté. Il y a deux cotisations à payer. La réorganisation et la restructuration de l'Outaouais québécois entraînent une situation différente qui occasionne une perte pour les conseils de comté, parce que certaines municipalités sont englobées dans des unités qui seront régies par la Loi des cités et villes. J'ai accepté de compenser ces pertes parce que je ne veux pas voir disparaître les conseils de comté.

M. le Président, il y a plus que cela. Vous savez, parce que les journaux, les media d'information en ont fait état, que j'ai entrepris déjà l'examen en profondeur des problèmes de la Communauté urbaine de Québec et de la Communauté urbaine de Montréal. Dans le cas particulier de la CUM, le premier ministre s'y est intéressé.

Le ministre de la Justice a constitué, conjointement avec celui qui vous parle, un groupe de travail pour qu'on examine en profondeur et en détail tous les problèmes qui existent. Le ministre de la Justice a ensuite déposé un projet de loi pour améliorer les relations entre les municipalités et les organismes métropolitains qui doivent exister.

Ayant donné ces exemples, M. le Président, je voudrais vous affirmer que j'ai l'intention de faire de même pour la Communauté régionale de l'Outaouais. J'inviterai prochainement, mais pas immédiatement parce que j'ai les deux autres dossiers devant moi, au cours de 1975, les municipalités de la Communauté régionale de l'Outaouais à s'asseoir avec moi et à passer en revue chacun des services et à examiner les structures administratives, le mode de financement, le partage de la responsabilité financière de cet organisme.

M. le Président, le débat de deuxième lecture qui tire maintenant à sa fin n'a pas porté beaucoup sur le fond de la question. Il a porté davantage sur l'opportunité de présenter en ce moment ce projet de loi et a centré son attention sur des suggestions de retard, de délai. M. le Président, ces demandes de retard — et ce n'est pas péjoratif ce que je dis; je ne veux pas prêter quelque intention que ce soit aux honorables députés de l'Opposition — je constate qu'elles arrivent à la suite de certaines mesures prises par certains dissidents, et ces mesures, en toute objectivité, je dois les qualifier de dilatoires.

Il y a eu à plusieurs occasions, dans le débat, une demande de référendum. J'aimerais en parler très ouvertement et aussi objectivement que possible. Il est facile d'invoquer le mécanisme que l'on appelle référendum pour dire que c'est la façon par excellence de consulter la population.

M. le Président, je vous soumettrai, en toute humilité et toute objectivité, que si l'on examine l'historique des référendums au niveau municipal au Québec, on sera obligé de constater une participation terriblement faible. Faible au point d'être inquiétante. Dans un des cas qui nous concernent, dans une municipalité qui compte plusieurs milliers de personnes, une municipalité où l'opposition a l'idée que la fusion dans ce cas avec la ville de Hull était une idée qui semblait répugner à la population, il y a eu un référendum et à peine 1,000 personnes se sont déplacées pour voter. Sur ces 1,000 personnes, il y en avait approximativement 600 contre et 450 pour. Pourtant, quand nous avons fait un sondage scientifique, nous avons trouvé que 80 p.c. de la population était opposée à la fusion. M. le Président, quand on regarde l'historique des référendums, on trouve facilement que ce sont les opposants qui se mobilisent, qui sortent et qui vont voter, et ceux qui sont pour ont tendance à exprimer leur satisfaction en restant chez eux.

Plus que cela, M. le Président, il y a, dans les référendums que nous avons connus, une tendance regrettable à une démagogie facile, à cause du facteur que je viens d'invoquer: une décision prise effectivement par une minorité agissante, contre la volonté d'une majorité satisfaite.

M. le Président, si nous habitions le genre de pays où les lois rendaient obligatoire la présence aux boîtes de scrutin, nous pourrions compter sur un référendum comme expression fidèle de la volonté de la population. Ce n'est pas un tel régime que vous vivons.

Demandez aux conseils municipaux de cette province leur expérience vis-à-vis des référendums. Vous n'aurez pas à demander très longtemps pour apprendre que les conseils municipaux demandent au gouvernement de modifier les règles du jeu quant au référendum, d'augmenter le nombre de citoyens, de contribuables qui peuvent exiger ce référendum et songent — et moi aussi j'y songe — à modifier la formule pour créer un référendum négatif pour que les

opposants puissent prouver leur force véritable dans la population pour bloquer une mesure, pas simplement une question de fusion, mais la question relativement banale d'un règlement d'emprunt.

Combien de règlements d'emprunt au Québec ont été battus au référendum quand le conseil municipal savait pertinemment qu'ils étaient nécessaires? Combien de fois, depuis deux ans, sommes-nous — et je parle comme ministre de l'environnement — appelés, invités à émettre une ordonnance pour passer outre à un référendum, soit pour l'éviter, soit pour passer outre à son résultat parce que le bon sens et l'intérêt du bien commun exigent qu'on passe à l'action? On a voté contre en faible majorité, mais quand même, au sein de cette minorité qui s'est déplacée pour aller voter, il y a eu une majorité contre la mesure.

C'est en partie pour cette raison que j'ai voulu rejoindre la population en faisant un échantillonnage scientifique. Cet échantillonnage scientifique a montré que dans les deux cas qui nous préoccupent — et si je n'agis pas dans le cas de Saint-Hyacinthe, c'est que je n'ai pas fait de sondage dans ce cas et je n'agirai pas sans faire un sondage parce que je veux rejoindre la population par un vrai échantillonnage. Cet échantillonnage, dans les deux cas qui nous préoccupent, a montré une prépondérance d'expression favorable à la fusion que nous proposons.

Il n'y a pas d'unanimité. J'ai dit qu'il n'y en aura jamais. Il y a quand même un large consensus. Ce large consensus nous indique que, dans le Haut-Saguenay, il y a une ville à créer et que, dans l'Outaouais, il y a une force à donner à cette région par la réduction du nombre de municipalités. Nous avons essayé, autant que possible, de répondre à la volonté des gens en proposant ce projet de loi. On prévoit des difficultés dans plusieurs quartiers. J'en suis. Il y en aura sûrement. Si l'on fusionnait et l'on s'en allait, on risquerait, véritablement, de connaître des difficultés majeures. Telle n'est pas notre intention. On va y rester et l'on va aider et l'on va surveiller et l'on va mener à bien les mesures que l'on prend en présentant ce projet de loi pour adoption.

M. le Président, si l'on regarde le Saguenay, on constate que, sur douze, il y en a onze qui sont d'accord.

On me dit que c'est une fusion forcée parce qu'il y en a une qui est dissidente. Si j'agissais dans la perspective de la seule unité de regroupement JAK, ce serait vrai, M. le Président, mais les intérêts de la collectivité saguenéenne exige qu'on passe à l'action, qu'on passe outre à cette dissidence que je regrette. Mais je regrette encore davantage, M. le Président, le fait que la ville d'Arvida ne se soit pas présentée aux tables de discussion. Je pense que ce que nous sommes sur le point de faire preuve, une fois de plus, selon le vieux dicton, que les absents ont toujours tort.

Et dans l'Outaouais, M. le Président, il y a un coin, à l'extrémité ouest du territoire de la communauté régionale, où les municipalités à caractère rural ne sont pas d'accord sur leur fusion. Mais comment pourrais-je les laisser telles quelles? Je peux m'asseoir avec elles et redéfinir, si possible, leur rôle dans la communauté régionale, mais je ne peux pas les en exclure. Il faut que je leur donne un moyen d'expression plus efficace que celui qu'elles possèdent présentement.

M. le Président, en recommandant ce projet de loi pour son adoption par la Chambre, je vous dis simplement: Donnons une nouvelle maturité, donnons un nouvel élan à deux des plus importantes régions du Québec.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que ce projet de loi est adopté en deuxième lecture?

M. MORIN: Vote enregistré.

LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Qu'on appelle les députés!

Vote de deuxième lecture

LE PRESIDENT: A l'ordre! Que ceux qui sont en faveur de la motion de deuxième lecture du projet de loi no 98 veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Choquette, Garneau, Cloutier, Lachapelle, Goldbloom, Simard, Hardy, Tetley, Lacroix, Bienvenue, Forget, Toupin, Massé, Harvey (Jonquière), Cadieux, Arsenault, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Fortier, Bacon, Blank, Veilleux, Saindon, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Lamontagne, Picard, Gratton, Gallienne, Carpentier, Dionne, Faucher, Saint-Germain, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Shanks, Springate, Pepin, Beauregard, Bellemare (Rosemont), Bonnier, Boudreault, Boutin, Chagnon, Marchand, Côté, Denis, Dufour, Harvey (Dubuc), Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte, Sylvain, Tremblay, Vallières, Verreault.

LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy, Bellemare (Johnson).

LE SECRETAIRE: Pour: 71. Contre: 9.

LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée.

Projet de loi déféré à la commission

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que le projet de loi qui vient d'être adopté en deuxième lecture soit maintenant déféré à la commission parlementaire des affaires municipales et que cette commission siège immédiatement au salon rouge, afin que ce projet de loi soit étudié article par article dans la plus grande sérénité et la plus grande objectivité.

DES VOIX: Ha! Ha!

M. BURNS: M. le Président, il y a déjà une commission qui siège.

M. LEVESQUE: M. le Président, ma motion implique que l'autre doit cesser ses travaux.

M. BURNS: II faut le dire à ce moment-là.

M. LEVESQUE: Je puis être plus explicite pour ceux... Non, je ne voudrais pas être insultant à l'égard de mon honorable ami !

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. BURNS: Adopté, M. le Président, avec réticence, parce que le député n'a pas été explicite.

LE PRESIDENT: Cette commission parlementaire des affaires municipales peut siéger immédiatement, la commission des affaires sociales devant suspendre ses travaux.

M. LEVESQUE: M. le Président, le ministre des Affaires sociales a été consulté et a adhéré avec plaisir à cet ordre des travaux, de même que l'Opposition officielle de Sa Majesté.

M. BURNS: Là, c'est plus explicite!

M. SAMSON: Ils sont en train d'humaniser les affaires sociales?

M. LEVESQUE: M. le Président, nous avons l'intention, à ce moment-ci, de procéder aux articles 15, 6 et 5. Ce n'est pas absolu, ce que je viens de dire. On verra ensuite. Mais il est possible que si nous disposions de ces deuxièmes lectures, nous pourrions aller ensuite en commission, la Chambre s'ajournant.

Les commissions, évidemment, ne sont pas encore déterminées, mais les possibilités sont que la commission des affaires municipales poursuive ses travaux jusqu'à ce qu'elle ait disposé du projet de loi qui lui est confié, que la commission de l'agriculture puisse siéger pour déterminer ses travaux sur le projet de loi no 20, que la commission parlementaire de la justice puisse se réunir pour discuter article par article des projets de loi nos 79, 80 et du projet de loi qui va être appelé à l'instant et que la commission parlementaire des affaires sociales puisse également terminer ses travaux quant au projet de loi no 93.

De plus, il faudra bien songer, peut-être, à d'autres commissions dont la convocation pourra être faite un peu plus tard, selon les circonstances. Si nous disposions des articles 15, 6 et 5, on pourrait ajourner la Chambre et procéder seulement en commission, si tout le monde est d'accord sur cette procédure.

M. BURNS: L'article 14 est-il prévu au programme du leader pour aujourd'hui? Je n'ai pas entendu parler de l'article 14, Loi concernant la protection des enfants soumis à des mauvais traitements.

M. LEVESQUE: Pas aujourd'hui.

Projet de loi no 92 Deuxième lecture

LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture du projet de loi no 92, Loi modifiant certaines prescriptions. Est-ce qu'il y a vraiment un principe dans ce bill?

M. CADIEUX: Est-ce que le député Morin a le droit de siéger?

M. CHOQUETTE: M. le Président, il y a sans doute de très grands principes dans ce projet de loi. Je m'étonne qu'un homme de votre profession ne les ait pas décelés à la lecture des articles.

LE PRESIDENT: II y en a plusieurs?

M. CHOQUETTE: Beaucoup. Mais, M. le Président, je pense que nous serions peut-être plus à l'aise pour discuter de ce projet si nous passions immédiatement en commission.

Je fais motion à cet effet.

M. Robert Burns

M. BURNS: M. le Président, je serai d'accord pour abréger le plus possible la deuxième lecture. Je signale simplement, en deuxième lecture, un regret. Au moment où nous nous occupons de certaines prescriptions qui sont prévues au code civil, en particulier dans les cas de responsabilité médicale alors qu'on étend à trois ans le délai de prescription — et c'est parfaitement justifié, normal — je m'étonne qu'on n'ait pas pris cette occasion pour corriger une situation qui est absolument incompréhensible dans le code civil actuel; cela aurait pu se faire avec autant de facilité. Je parle en particulier de la prescription d'un an dans le cas de

blessures corporelles. Alors que les dommages matériels se prescrivent par deux ans, on est devant la situation absurde de voir un vieux code civil, toujours aussi valable évidemment, garder un anachronisme tel qu'on accorde plus d'importance, par la longueur de la prescription, aux dommages matériels, c'est-à-dire deux ans. Mais les dommages personnels, blessures corporelles se prescrivent par un an. Tout le monde qui a eu le moindre contact avec ce genre de réclamations s'est rendu compte qu'il arrive très souvent qu'il y ait des poursuites intentées au bout de onze mois et vingt-huit jours, tout simplement pour sauvegarder les droits de la personne qui a été blessée, qui a subi des dommages corporels.

Souvent, ces actions-là pourraient ne pas se présenter du tout devant les tribunaux si on avait le temps normal pour permettre à la personne qui a subi des blessures corporelles de récupérer suffisamment pour pouvoir quantifier son dommage.

Au moment où on révise certaines prescriptions, et encore une fois on est entièrement d'accord sur la responsabilité médicale, je me demande si un tout petit effort de plus ne devrait pas venir améliorer cette loi en poussant à deux ans au moins, sinon trois ans, comme dans le cas de la responsabilité médicale, le cas de la prescription pour les blessures corporelles.

Je me limite à cela, M. le Président, je pense que je n'ai pas à élaborer davantage. Nous voterons en faveur du projet de loi, malgré les réserves que je viens de faire.

LE PRESIDENT: Le droit de réplique du ministre.

M. Jérôme Choquette

M. CHOQUETTE: Pour répondre au député de Maisonneuve, M. le Président, ma réplique est assez simple, j'abonde entièrement dans le sens, quant au fond, des propos du député de Maisonneuve. Mais je ne peux pas, en fait donner suite à sa suggestion de modifier immédiatement le délai de prescription autre que le délai en matière de dommages qui résultent d'un acte médical ou d'un acte survenu dans un hôpital, parce que le sujet de la prescription en est un sur lequel se penche actuellement l'Office de révision du code civil.

On sait que l'Office de révision a reçu le mandat extrêmement vaste de reprendre les dispositions essentielles du code civil. Le professeur Paul Crépeault et ses collaborateurs examinent à l'heure actuelle les prescriptions qui se trouvent à notre code civil. Je n'ai aucun doute qu'ils vont rapporter à cette Assemblée nationale, par mon intermédiaire, des changements fondamentaux dans les dispositions qui concernent la prescription, et en particulier celle pour les blessures corporelles à laquelle le député de Maisonneuve a fait allusion.

Il est incontestable que le Québec se trouve dans une situation anachronique par rapport à la plupart des autres juridictions. La prescription annuelle ou annale qui s'applique aux blessures corporelles est nettement trop courte et devrait être allongée. Je pense que cette prescription sera éventuellement fixée à trois ans, tout comme l'a dit le député de Maisonneuve; je crois que c'est un chiffre vers lequel nous nous orientons tous. D'ailleurs, des discussions que j'ai eues avec M. Crépeault ainsi qu'avec d'autres spécialistes de la question m'incitent à croire qu'un délai de trois ans en matière de blessures corporelles serait probablement le délai le meilleur, le plus indiqué.

Mais pour le moment, je ne voudrais pas commencer à jouer trop dans les parties du code civil les plus importantes. Je pense que la loi que je présente aujourd'hui correspond à un besoin très particulier qui résulte d'un jugement rendu par la cour Suprême, jugement qui a surpris l'ensemble des avocats et possiblement les hôpitaux ainsi que les médecins. On avait l'impression, généralement, jusqu'à ce jugement récent de la cour Suprême, que la prescription à l'égard des actes médicaux ou hospitaliers aurait été de 30 ans, et ceci en vertu de la théorie de la prescription en matière contractuelle, alors que la cour Suprême a appliqué, dans son dernier jugement, qui, évidemment, va fixer la jurisprudence une fois pour toutes, les délais qui s'appliquent à la prescription délictuelle. Ainsi, beaucoup de demandeurs, beaucoup de victimes de "malpractices" médicaux ou hospitaliers pourraient se trouver dans des circonstances particulièrement difficiles en raison de ce jugement.

Alors, la portée de ce projet de loi est exclusivement de corriger les effets de ce jugement de la cour Suprême qui, comme je le disais tout à l'heure, a causé la surprise. Cela ne veut pas dire, M. le Président, que je ne pense pas qu'il faille corriger d'autres dispositions du code civil au sujet de la prescription, en particulier de la prescription en matière de blessures corporelles. Mais je pense qu'arriver, dans les circonstances actuelles, en fin de session, avec une disposition aussi fondamentale que celle de la prescription en matière de blessures corporelles, je ne serais pas sûr que je présente un projet qui ne causerait pas des perturbations.

Comme je n'ai pas reçu de recommandations définitives de l'Office de révision du code civil à ce sujet, je pensais que ce serait quelque peu téméraire. C'est la raison pour laquelle je ne peux pas donner suite à la suggestion du député de Maisonneuve, malgré qu'il n'y a absolument rien qui nous sépare sur le fond. Je suggère que nous passions maintenant à l'étude du projet de loi en commission, si c'est dans l'ordre.

LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 92, Loi modifiant certaines prescriptions, est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté, M. le Président.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi. Second reading of this bill.

LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice, pour le leader parlementaire du gouvernement, propose la formation de la commission plénière. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. BURNS: Adopté, M. le Président. LE PRESIDENT: Le député de Limoilou.

Commission plénière

M. HOUDE Limoilou (président de la commission plénière): A l'ordre, messieurs! Projet de loi no 92, Loi modifiant certaines prescriptions. Article 1?

M. BURNS: M. le Président, c'est la seule remarque que j'ai à faire sur le projet de loi. Comme je n'avais pas le droit de réplique au ministre et que lui l'avait sur son projet de loi, je lui dis que je comprends les raisons — je pense qu'elles sont justifiées — qui le motivent à ne pas inclure dans le projet de loi les amendements que je lui suggérais relativement aux blessures corporelles. Je suis très heureux, cependant, qu'il semble retenir — comme la plupart des avocats, d'ailleurs, qui ont eu le moindre contact avec le cas en pratique privé des blessures corporelles et qui ont constaté cette espèce de disproportion dont on parlait — le fait que ça devra être corrigé éventuellement et ça me suffit en ce qui me concerne.

Déjà, je pense qu'au moins on a une acceptation en principe, d'une amélioration éventuelle du code civil, relativement à ce type de prescriptions. En ce qui me concerne, M. le Président, vous pouvez faire les écritures concernant le projet de loi. Je n'ai pas d'autres remarques à faire.

M. CHOQUETTE: Avant que le président ne procède à adopter les différents articles, je voulais seulement mentionner aussi, au cas où ça passerait inaperçu, qu'il y a une disposition dans ce projet de loi qui renouvelle le délai pour les victimes d'actes criminels. On sait que, quand nous avions adopté cette loi, nous avions permis à toutes les victimes d'actes criminels, depuis 1966, je pense, de présenter leurs réclamations à la Commission des accidents du travail. Or, il est venu à notre attention que certaines personnes, peut-être à cause du manque d'information, ont présenté leurs réclamations hors des délais.

Elles n'avaient que six mois, six mois ou un an, je ne m'en souviens plus, mais, de toute façon, elles ont perdu leur recours. Alors, nous leur donnerons une nouvelle chance de présenter leurs réclamations. De plus, en ce qui concerne les réclamations en vertu de la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, en général la prescription était de six mois en vertu du projet de loi qui a été adopté par l'Assemblée nationale, il y a quelques années.

Nous changeons ce délai pour donner maintenant un an, parce que nous pensons que ceci va quand même donner l'occasion à ces victimes de faire leur réclamation dans l'année. En fait, l'organisme gouvernemental qui a la charge d'administrer cette loi ne souffrira pas de préjudice du fait que nous allongeons le délai quelque peu.

M. BURNS: D'accord, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Articles 1 à article 10 inclusivement, adoptés sans amendement.

M. HOUDE, Limoilou (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre commission a adopté le projet de loi no 92 sans amendement.

LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé?

M. BURNS: Agréé.

LE PRESIDENT: Agréé. Troisième lecture?

M. BURNS: Troisième lecture, séance subséquente.

M. LEVESQUE: Est-ce qu'on accepterait — ce n'est pas une question de principe — pour libérer le ministre de la Justice, car apparemment il reste seulement quelques minutes... Est-ce que c'est le cas, pour le louage de choses, en commission?

M. BURNS: Oui. Je pense qu'on pourrait... j'accepterais de retourner en commission plénière...

M. LEVESQUE: Ici, en commission plénière?

M. BURNS: Ah oui.

M. LEVESQUE: D'accord.

M. BURNS: Cela va simplifier les choses. On n'aura pas besoin de reconvoquer la commission parlementaire.

M. LEVESQUE: Je remercie le député de Maisonneuve et je fais motion pour révoquer l'ordre de déférence à la commission élue de la justice. M. le Président, je propose que vous quittiez maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en commission plénière pour poursuivre l'étude article par article des projets de loi 79 et 80.

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

Les projets de loi 79 et 80. Vous proposez la formation de la commission plénière pour étudier les projets de loi 79...

M. BURNS: ... et 80.

LE PRESIDENT: ... et 80, conjointement.

M. BURNS: Oui. C'était d'ailleurs le mandat de la commission.

LE PRESIDENT: D'accord. Cette motion est-elle adoptée?

M. BURNS: Adopté.

LE PRESIDENT: Adopté.

Le député de Rivière-du-Loup, s'il vous plaît.

Projets de loi nos 79 et 80 Commission plénière

M. LAFRANCE (président de la commission plénière): A l'ordre, messieurs!

M. CHOQUETTE: Lors de l'étude du projet de loi no 79, une discussion a eu lieu à la commission de la justice relativement au problème des coupures d'électricité dans les édifices à logements multiples et où l'électricité est alimentée dans l'immeuble par un compteur unique.

La situation qui peut résulter de cet état de choses est qu'advenant le défaut par le propriétaire de payer la facture d'électricité due au fournisseur d'électricité, le fournisseur peut, en vertu des aspects de la loi qui le lui permettent, couper le service électrique comme moyen de pression pour forcer un acheteur d'électricité à ainsi payer son compte, avec des conséquences sur le bien-être et possiblement la santé de locataires, qui eux ont payé, par l'intermédiaire de leur loyer, les sommes qui doivent être, en partie, utilisées par le propriétaire d'un tel édifice pour le paiement de l'électricité qui est fournie collectivement.

C'est une situation qui s'est produite à quelques reprises au cours de l'hiver dernier et qui avait fait naître, du côté des locataires, des protestations car ces locataires disaient: Nous avons payé notre loyer, qui comprend l'électricité, et voilà qu'un propriétaire, en faisant défaut à ses obligations vis-à-vis de l'Hydro-Québec ou d'un autre fournisseur d'électricité, entraîne ou cause une interruption de courant qui a des conséquences sur notre situation comme locataires.

Devant le problème que cause cette situation, nous avons examiné plusieurs solutions. Il est incontestable, M. le Président, que cette situation, même si on doit reconnaître que les locataires bénéficient de toute notre sympathie, n'est pas facile à régler au plan juridique. En effet, donner au fournisseur d'électricité, et en particulier à l'Hydro-Québec, un recours aussi efficace que la menace ou l'exécution de la coupure d'électricité, cela est assez difficile. En effet, suivant les autorités de l'Hydro-Québec, la menace de la coupure d'électricité et, parfois même, la mise à exécution de cette menace constituent une arme extrêmement puissante entre les mains de l'Hydro-Québec pour forcer les propriétaires à payer leur compte d'électricité. On peut comprendre qu'une compagnie d'utilité publique, doive, dans la plupart des circonstances, utiliser ce procédé qui fait que les propriétaires respectent leurs engagements.

Lorsque l'on songe à ce problème, surtout à la situation des locataires qui souffrent des conséquences du défaut de propriétaire de donner suite à ses obligations juridiques, et que l'on veut remplacer l'efficacité du recours de la coupure d'électricité par un autre recours juridique, on doit penser, par exemple, à la création d'un privilège immobilier. On peut penser à la création d'un privilège immobilier pour tenir lieu de ce droit de couper l'électricité. Or, la création d'un privilège immobilier, sur le plan juridique, représente des difficultés incontestables surtout dans les circonstances d'une fin de session. Là, on joue dans tous les principes du code civil quant aux privilèges. On est en train d'essayer de situer le privilège que pourrait avoir l'Hydro-Québec par rapport à d'autres privilèges immobiliers.

On doit se demander quels seraient les effets de ce privilège sur le plan des créanciers hypothécaires, et l'on sait que les créanciers hypothécaires sont très considérables sur ce genre d'édifices à appartements multiples.

Donc, même s'il nous paraît que la solution, en définitive, sera la création d'un privilège, je croirais tromper la Chambre si je recommandais immédiatement l'adoption d'une telle protection et d'un tel mode d'exécution pour les fournisseurs d'électricité, car on pourrait faire des erreurs extrêmement graves dans la hâte de la fin d'une session.

C'est donc dire qu'il nous a fallu songer à une solution purement temporaire pour assurer une protection efficace aux locataires, une solution qui serait consacrée par un certain nombre d'articles. Je vais faire distribuer aux honorables collègues certains amendements à la Loi de la conciliation entre locataires et propriétaires. Ils pourront constater, à ces amendements, que nous suggérons une solution qui durerait environ cinq mois, d'ici le 1er juin, et qui ferait que, durant cette période, il sera interdit à tout fournisseur d'électricité, qui dessert un édifice à logements ou appartements multiples qui a un compteur unique, de couper l'électricité.

Par contre, le propriétaire d'un tel édifice

qui ne paiera pas son compte d'électricité dans un délai de 45 jours, ce qui est stipulé aux amendements, non seulement pourra-t-il voir l'Hydro-Québec ou tout fournisseur d'électricité exercer un recours civil rapide contre lui par voie de requête — et nous avons créé une procédure particulièrement accélérée pour ce problème — mais en plus de cela il commettra une infraction pénale qui sera sanctionnable devant les tribunaux criminels.

Il nous a fallu penser à cette façon de procéder pour éviter qu'il n'y ait abus de la part de certains propriétaires devant, en somme, la renonciation forcée par l'Hydro-Québec et les autres fournisseurs d'électricité au recours que leur donnait autrefois leur loi, à leur recours qui est extrêmement puissant et efficace, celui que je décrivais tout à l'heure, la coupure d'électricité.

Alors, nous pensons qu'en tenant la situation dans cet état pendant une période de cinq mois, ceci va permettre à nos légistes de préparer des amendements appropriés au code civil, de façon à créer un privilège en faveur de l'Hydro-Québec et d'autres fournisseurs d'électricité.

Ce privilège pourra être introduit dans le code civil et pourra éviter des interruptions de courant électrique lorsqu'il y aura des édifices à logements multiples et qu'en fait la position des locataires souffrirait préjudice par l'inaction d'un propriétaire.

Je tiens à dire, cependant, que les amendements que nous présentons n'autoriseront pas, M. le Président, tous les propriétaires du Québec, demain matin, quelle que soit leur situation, à ne pas payer leur compte d'électricité ou à s'imaginer que, parce que nous avons adopté ces amendements, ceci est une licence donnée par l'Assemblée nationale à ce qu'ils ne paient pas leur facture d'électricité.

M. BURNS: Quelle est la définition que vous donnez, dans la loi, d'une immeuble à loyers multiples? Est-ce qu'il y a un minimum?

M. CHOQUETTE: Je fais distribuer immédiatement, M. le Président, les amendements.

M. BURNS: Est-ce qu'il y a un minimum de logements?

M. CHOQUETTE: Non, il n'y a pas de minimum. Je vais donner lecture des amendements. "Article 27. Le présent article s'applique exclusivement dans un immeuble comportant plus d'un local d'habitation, au service d'alimentation en électricité d'un local: "a) pour lequel la consommation d'électricité n'est pas mesurée de façon distincte; "b) occupé par un locataire en vertu d'un bail résidentiel comportant pour le propriétaire ou le locateur l'obligation d'acquitter le prix d'un tel service au fournisseur".

Alors, cela ne s'applique qu'à des apparte- ments groupés pour fins résidentielles et au compteur unique.

J'ai seulement lu le premier article, M. le Président, car il y a d'autres articles qui suivent cet article 27.

M. BURNS: M. le Président, j'ai pris connaissance des amendements que le ministre vient de nous soumettre et je me demande s'il ne faut pas faire amende honorable à Me Jacoby, qu'on a inutilement accablé l'autre soir, lorsque nous étions en commission élue.

J'ai nettement l'impression que ces amendements sont de son cru, pas que le ministre ne serait pas capable de pondre de tels amendements, mais sans doute qu'il se réfère à son expert en cette matière pour arriver à obtenir un résultat aussi acceptable de la part de l'Opposition.

En ce qui me concerne, je trouve que du moins de façon provisoire, de façon temporaire, on règle le problème. Je pense que le ministre a été très exact dans sa description de la situation, comme nous l'avions été l'autre soir quand nous avons soulevé le problème.

Je pense qu'au fond la situation actuelle — avant cet amendement — fait tout simplement payer, au point de vue des inconvénients, des conséquences, des difficultés, à quelqu'un qui n'est pas le véritable créancier les suites d'une interruption de l'alimentation en électricité.

C'est ce pourquoi je serai entièrement d'accord là-dessus, je le précise, comme mesure provisoire, temporaire transitoire. Le ministre nous assure qu'il y aura éventuellement une solution à long terme et qu'à ce moment-là ce ne sera peut-être pas celle-ci, quoique celle-ci ne soit pas bête. Je me demande si on ne devrait pas, en envisageant des solutions à long terme, retenir les solutions qui sont là comme étant des éléments de pression de part et d'autre. Auprès du propriétaire et de l'Hydro-Québec qui a, comme le disait le ministre, comme seul moyen de pression d'arrêter son alimentation en électricité. On lui donne donc une autre forme de pression et je pense que, du moins je l'espère, à la pratique, on s'apercevra que cette autre option qui paraîtra maintenant dans le projet de loi saura mettre suffisamment la pression sur le propriétaire, pression qui autrefois était exercée par le retrait de l'alimentation en électricité.

Je remercie le ministre de s'être rendu, du moins au point de vue des résultats, à la demande que nous lui faisions, demande qui, dans le fond, peut se verbaliser et se résumer de la façon suivante: II ne faut pas pénaliser les gens qui ne sont pas, comme tels, créanciers de l'Hydro-Québec et qui ont également l'impression d'avoir rempli leurs obligations à l'endroit du bail qu'ils ont signé avec leur propriétaire.

Encore une fois je serai entièrement d'accord sur cet amendement.

M. CHOQUETTE: Très bien. Je n'ai rien d'autre à ajouter sur ça.

M. SAMSON: Ce ne sera pas long, M. le Président, je voudrais également remercier le ministre des amendements qu'il nous dépose aujourd'hui. En effet, le ministre, en plus de rendre justice à plusieurs locataires du Québec, a été sensibilisé par le regroupement des locataires du Québec métropolitain qui revendiquaient une solution en ce sens depuis quelque temps. Je ne sais pas si le ministre les a rencontrés lundi matin, mais j'ai l'impression que...

M. CHOQUETTE: Je ne les ai pas rencontrés personnellement parce que mon avion n'est pas arrivé à temps, mais Me Jacoby et mes assistants au ministère ont rencontré M. Métayer, je crois, et les autres membres de son groupe ainsi que leur avocat. En fait, on m'a fait part du point de vue des locataires et par la suite il y a eu la discussion, le même soir, sur les projets de loi nos 79 et 80 avec le député de Maisonneuve, qui m'en avait déjà parlé. Nous étions sensibilisés au problème.

Tout cela a fait que ces amendements ont été préparés pour régler ce problème.

M. SAMSON: M. le Président, malheureusement, je n'étais pas présent au début de la semaine, ayant été retenu au loin pour des raisons de mauvais temps, mais je suis heureux de voir que la rencontre a eu lieu avec les hauts fonctionnaires et que finalement, après discussion, une solution est présentée.

J'ai cru comprendre tantôt que le ministre nous parlait de cinq mois, d'une solution pour quatre ou cinq mois.

M. CHOQUETTE: Oui, cela va jusqu'au 1er juin.

M. SAMSON: Jusqu'au 1er juin. Je suis peut-être un peu de l'avis du député de Maisonneuve. Je ne trouve pas cela si mal comme solution. Je me demande s'il ne serait pas valable de la retenir de façon permanente, tout au moins aussi permanente que la loi 80, qui est une permanence, comme vous le savez.

De toute façon, il serait peut-être valable de la retenir et de l'essayer.

Si on voit qu'en pratique cela donne un bon résultat, il serait peut-être bon de la retenir. De toute façon, on n'est pas, quant à nous, fermés à toute autre solution à être envisagée, à la condition que cela respecte le principe. Alors, si le ministre nous présente une autre solution qui respecte le même principe, c'est-à-dire que ces locataires ne subissent pas de préjudice, il n'y aura pas de problème quant à nous. Ce que nous voulions, c'était un résultat, et c'est à l'honneur du ministre, M. le Président. On n'a pas tellement l'occasion de le féliciter; je pense que, quand c'est le temps, il faut en profiter.

C'est à l'honneur du ministre s'il a apporté dans ce cas particulier une solution qui nous donne satisfaction.

M. CHOQUETTE: Je remercie les collègues de leur collaboration et je pense que ce n'est pas seulement moi qui ai fait que nous puissions régler ce problème mais leurs interventions qui ont concordé toutes dans le même sens.

Maintenant, M. le Président, nous avons découvert quelques coquilles dans ce projet de loi no 80. Je voudrais profiter des circonstances actuelles et du fait que nous sommes en commission plénière pour les corriger, si les honorables députés me le permettent, même si certains de ces articles ou, je pense, les deux articles en question ont été adoptés. Je vais faire distribuer aux députés les deux amendements dont il s'agit. L'un a trait à l'article qui traitait de la conversion d'immeubles à logements multiples en immeubles en copropriété. L'autre a trait à l'article qui traitait des immeubles construits et sous l'autorité de la Société d'habitation du Québec. Il y a juste quelques précisions à apporter. Ces précisions m'ont été signalées depuis que nous avons siégé lundi soir. Je m'excuse auprès des députés de présenter cela d'une façon tardive, mais ce sont des choses qui se produisent, je pense bien.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le projet de loi no 80 est adopté, avec l'addition d'un nouvel article qui devait être l'article 27 mais qui, à cause de la nouvelle numérotation, sera l'article 28, ainsi qu'avec les modifications: Ajouter, au paragraphe 5 de l'article 26b) édicté par l'article 16 du projet de loi no 80, l'alinéa suivant — nous allons ajouter en annexe les amendements proposés par le ministre.

M. BURNS: Je demanderais au ministre s'il pourrait simplement élaborer ces amendements; il nous parle de coquilles.

M. CHOQUETTE: Le premier amendement est à l'effet d'ajouter, au paragraphe 5 de l'article 26 b) édicté par l'article 16 du projet de loi no 80, l'alinéa suivant: "Aucun droit d'action n'existe pour le recouvrement du loyer si l'autorisation n'a pas été obtenue". Il s'agit là de donner un recours au cas de conversion non autorisée d'un immeuble en copropriété.

M. BURNS: D'accord. Adopté, M. le Président.

M. CHOQUETTE: Le deuxième amendement, sur la même feuille, consiste à ajouter, au paragraphe 6 de l'article 34 édicté par l'article 22 du projet de loi no 80, le sous-paragraphe suivant: "c) appartenant à la Société d'habitation du Québec". Il faut prévoir les cas où des immeubles sont la propriété de la Société d'habitation du Québec car, depuis un certain temps, la Société d'habitation du Québec a été

habilitée à construire et à être propriétaire de logements à prix modiques.

Par conséquent, ce cas n'avait pas été prévu dans l'ancienne loi de la conciliation entre propriétaires et locataires. Le député de Maisonneuve a manifesté un certain désaccord quant à l'absence de contrôle sur les logements à prix modiques. Par contre, je pense bien qu'il est assez logique que, si les offices municipaux d'habitation ainsi que d'autres logements construits avec l'autorisation de la Société d'habitation ne tombent pas sous le contrôle de la Régie des loyers, à plus forte raison, les logements à prix modiques, construits et appartenant à la Société d'habitation du Québec elle-même, ne devraient pas tomber sous le contrôle de la Régie des loyers.

Par conséquent, je ne demande pas au député de Maisonneuve de voter pour cet amendement avec enthousiasme, mais il est conforme à la position que nous avons adoptée l'autre soir et qui a été amplement discutée de part et d'autre.

M. BURNS: D'ailleurs, tout en n'étant pas d'accord sur l'amendement, c'est évident que je ne ferai pas un long débat là-dessus. Le débat a été fait l'autre soir, je n'ai pas du tout l'intention de le reprendre. Mais comme je n'étais pas d'accord pour qu'on exclue de l'application de la loi les loyers à prix modiques, et comme je n'étais pas d'accord non plus pour qu'on exclue les édifices bâtis après le 31 décembre 1973 pour une période de cinq ans, évidemment je conçois que, dans la logique que le ministre avait défendue l'autre soir, il puisse apporter cet amendement. N'étant pas d'accord sur l'autre attitude, je vous demanderais d'adopter sur division l'amendement proposé par le ministre.

M. CHOQUETTE: Très bien.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'amendement est adopté sur division.

M. BURNS: Sur division.

M. CHOQUETTE: M. le Président, je présume que vous avez noté les deux amendements que j'ai...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On les a déposés en annexes au projet de loi.

M. CHOQUETTE: Ils sont déposés, n'est-ce pas?

Alors, M. le Président, c'est tout ce qu'il y avait à dire de notre côté sur le projet de loi no 80 qui a été amendé à trois reprises cet après-midi. Je n'ai rien d'autre à ajouter sur le projet de loi no 79. Je m'excuse, M. le Président, je dois retirer ce que je viens d'avancer. Je crois qu'il y aura un amendement dans le même sens que celui apporté à la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires, le projet de loi no 80, relativement aux immeubles appartenant à la Société d'habitation du Québec. Il y aura, dis-je, un amendement dans le même sens à apporter au bill 79, la loi qui amende le code civil. Cet amendement a exactement le même effet, et il se lit ainsi: Introduire dans le projet de loi un article 7 a): L'article 1664 a) dudit code est modifié par l'insertion, après le paragraphe 2, du suivant: "3. appartenant à la Société d'habitation du Québec".

Alors je vous remets, M. le Président, copie de cet amendement. Vous l'avez, d'ailleurs, je ne sais pas si l'Opposition l'a. Nous faisons distribuer des exemplaires mais c'est le même problème que précédemment.

M. BURNS: Je conçois que c'est le même problème, et je présume que cet amendement sera adopté mais je vous demanderais d'inscrire ma dissidence. Donc, adopté sur division.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le nouvel article 7 a) est adopté sur division. Il faudra renuméroter totalement le reste du projet de loi en conséquence. Alors le projet de loi no 79...

M. BURNS: C'est un 7 a), ça ne changera pas les numéros.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): C'était le dernier...

M. BURNS: Non, non, ce n'est pas le dernier article, on insère un 7 a) au lieu de mettre 8 et de renuméroter. Cela ne change pas le numérotage.

M. LEVESQUE: En ce cas ça ne change pas le numérotage.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors les deux projets de loi sont adoptés sur division.

M. BURNS: Non, non! les projets de loi sont adoptés.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Adopté.

M. BURNS: Le ministre a quand même fait un effort louable dont on l'a félicité et je pense que le projet de loi est adopté.

M. LAFRANCE (président de la commission plénière): J'ai l'honneur de vous faire part que la commission plénière a étudié les projets de loi nos 79 et 80 et les a adoptés avec des amendements.

LE PRESIDENT: Ce rapport de la commission plénière, qui a étudié les projets de loi no 79 et 80, est-il agréé?

M. BURNS: Agréé.

LE PRESIDENT: Agréé.

M. LEVESQUE: Article 6.

Projet de loi no 59 Deuxième lecture (suite)

LE PRESIDENT: Reprise du débat. Il s'agit du droit de réplique du ministre des Affaires intergouvernementales.

M. Gérard-D. Levesque

M. LEVESQUE: M. le Président, je voudrais exercer mon droit de réplique et simplement relever certains propos qui m'ont frappé davantage dans les interventions de nos honorables amis d'en face, que je remercie, d'ailleurs, pour l'intérêt qu'ils ont manifesté à l'étude de ce projet de loi.

D'abord, on me permettra de faire quelques commentaires sur l'intervention de l'honorable chef de l'Opposition, surtout relativement au mandat du ministère tel que défini à l'article 10. L'intention du projet de loi, comme je l'avais d'ailleurs souligné vendredi soir dernier, n'est pas de modifier la nature du mandat de coordination du ministère, mais plutôt d'en préciser la portée.

L'article 10 cité par le chef de l'Opposition ne définit, en effet, qu'une partie de ce mandat. Il ne remplace pas à lui seul l'article 2 de la loi actuelle. Cette dernière disposition se trouve, en vérité, remplacée par les articles 10 à 15 et 34 à 36 du projet.

Il importe donc de le lire dans le contexte de l'ensemble des dispositions nouvelles dont l'effet n'est manifestement pas de réduire le mandat du ministère, mais plutôt de l'expliciter.

Le deuxième alinéa de l'article 10 que le chef de l'Opposition a cité hors contexte, en le comparant à l'article 2 de la loi actuelle, vise à habiliter le ministre à établir et à maintenir avec les autres gouvernements et leurs ministères les relations que le gouvernement du Québec juge opportun d'avoir avec eux. Je veux souligner les mots établir et maintenir.

La loi actuelle n'attribue formellement qu'un pouvoir de surveillance à l'égard de ces relations. Le texte proposé confie au ministre — je le répète — la fonction de les établir et de les maintenir. Je ne vois pas comment on peut interpréter cette disposition comme ayant effet de restreindre le mandat actuel du ministère.

En fait, le projet de loi attribue au ministre trois types de responsabilités en ce qui a trait aux matières visées à l'article 10. Premièrement, il élabore la politique du gouvernement en matière de ralations exétieures et assure la mise en oeuvre de cette politique.

Le texte du premier alinéa de l'article 10 qui attribue ce pouvoir au ministre comporte peut-être un défaut que j'ai l'intention de proposer de corriger par une modification, lors de l'étude détaillée du projet.

A la troisième ligne — je me permets d'annoncer cet amendement — le mot "intergouvernementales" doit être remplacé par le mot "extérieures" pour traduire clairement cette idée. Donc, au niveau de la politique, la responsabilité du ministère porte sur l'ensemble des relations extérieures.

Deuxièmement, il établit et maintient avec les autres gouvernements et leurs ministères les relations...

M. MORIN: Je vois que le ministre a bien compris mon intervention.

M. LEVESQUE: Voyez-vous, lorsqu'on essaie de bonifier une loi, nous en savons gré et nous essayons d'apporter toute correction qui semble de nature à améliorer la situation. "Il établit et maintient, en deuxième lieu, avec les autres gouvernements et leurs ministères les relations que le gouvernement du Québec juge opportun d'avoir avec eux". A ce niveau, ce sont les relations intergouvernementales qui sont visées et non les relations extérieures dans l'ensemble. Je crois bien que le chef de l'Opposition est prêt également à admettre cette distinction. Parce que ce n'est pas notre intention — je le souligne — de monopoliser l'établissement et le maintien de l'ensemble des relations avec des tiers à l'extérieur du Québec.

M. MORIN: Jamais!

M. LEVESQUE: Des relations de caractère privé n'intéressent un ministère comme le nôtre que dans leur ensemble et non pas du point de vue de l'établissement et du maintien de chacune d'elles. Cela est l'évidence même. Seules les relations intergouvernementales doivent être assumées par nous. Les ministères sectoriels pourront continuer à. développer les relations qu'ils ont présentement avec des personnes autres que les gouvernements et les organismes qui y sont rattachés. Ils le feront cependant dans le cadre de la politique que j'ai mentionnée il y a quelques instants.

Enfin, le ministère coordonnera les relations des organismes du gouvernement, fonction compatible avec tout statut d'autonomie qui puisse leur être confié ou conféré. Comme vous le voyez, cet élément du mandat du ministère se trouve explicité et nuancé par l'article 10, et non pas restreint. Si je considérais le chef de l'Opposition comme un lecteur moyen — mais ceci n'est pas dit péjorativement — les propos qu'il a tenus vendredi là-dessus m'indiqueraient que la lettre de la disposition projetée ne traduit peut-être pas d'une façon suffisamment claire ces nuances. Nous examinerons donc, lors de l'étude détaillée du projet, les possibilités de modifications susceptibles de clarifier l'article 10.

M. MORIN: Bien.

M. LEVESQUE: C'est le premier point que, réellement, avait soulevé le chef de l'Opposition. Il y en avait un autre qui avait attiré mon attention; c'est la question de la ratification des traités, etc., visée à l'article 15.

Le débat de deuxième lecture a permis au chef de l'Opposition d'étaler avec un certain humour des connaissances techniques sur le droit international traditionnel. Il a plus particulièrement invoqué le sens donné par le droit international traditionnel. Il a plus particulièrement invoqué le sens donné par le droit international classique au terme "ratification" qui paraît à l'article 15 du projet. Abordant la question selon une approche statique du droit international et du droit constitutionnel, il a formulé deux hypothèses sur l'interprétation à donner à cette disposition qui habilite le ministre à recommander au gouvernement la ratification des traités ou accords internationaux dans les domaines ressortissant à la compétence constitutionnelle du Québec. Ou bien, affirme-t-ii, la disposition vise les traités et accords conclus par le gouvernement fédéral, et alors l'utilisation du terme "ratification" serait techniquement incorrecte, car selon lui, on ne peut ratifier un accord que l'on n'a pas conclu...

M. MORIN: Bien, vous avez compris.

M. LEVESQUE: ... ou bien, poursuit le chef de l'Opposition, dans l'alternative, le texte s'applique à des traités conclus par le gouvernement du Québec. Là, une telle portée lui conférait le caractère de geste historique pour l'avenir du Québec. Voilà. Evidemment, le chef de l'Opposition préfère la seconde hypothèse, car dans son esprit...

M. MORIN: On ne peut rien vous cacher.

M. LEVESQUE: ... elle se situe dans une perspective qui mène à un objectif qui lui est cher et qui nous divise pour l'instant.

M. MORIN: Peut-être pas pour toujours?

M. LEVESQUE: Je dis "pour l'instant", car je ne puis m'empêcher d'observer, comme la plupart des journalistes, des observateurs de la scène politique le font depuis quelques mois en particulier, que le groupe politique du chef de l'Opposition officielle évolue, quant à cette idée fondamentale de l'indépendance, dans la bonne direction.

M. MORIN: Oh!

M. LEVESQUE: II s'agit d'une évolution très lente, mais à l'égard de laquelle il ne faut pas désespérer. J'ai pour ma part une confiance inébranlable, M. le Président, dans la force de la raison pour déterminer l'avenir des peuples.

Lors des dernières élections, cette puissance de la raison s'est d'ailleurs manifestée de façon éclatante au Québec, à telle enseigne qu'il a fait naître au sein de l'Opposition officielle un commencement de sagesse qui permet d'espérer qu'un jour ils nous rejoindront sur la voie de la construction du Québec, dans laquelle nous sommes engagés particulièrement depuis 1970.

M. CHARRON: Vous avez de la misère à dire cela sans rire.

M. LEVESQUE: C'est parce que je vous vois venir. Je vois le retour au bercail.

M. SAMSON: C'est un effort louable que vous faites là.

M. LEVESQUE. Est-ce utopique de penser ça ou est-ce qu'on peut s'imaginer qu'avec ce qui se fait depuis quelque temps...

M. SAMSON: C'est statique.

M. LEVESQUE: ... ce que l'on entend, ce que l'on observe, il n'y a pas un retour vers le bon sens?

M. SAMSON: C'est statique.

M. LEVESQUE: Enfin, oui! Vous pensez que c'est statique. Le chef du Ralliement créditiste pense que c'est statique. Il a peut-être raison. Mais moi, je n'ai pas fini d'espérer. Je ne désespère pas encore.

De toute façon, je n'ai pas l'intention d'amorcer un débat sur cette question aujourd'hui et je veux bien...

M. MORIN: Je croyais.

M. LEVESQUE: ... fermer cette parenthèse. Revenons, pour un instant, à l'astucieuse alternative présentée par le chef de l'Opposition quant à l'interprétation de l'article 15.

Je me permettrais, à cet égard, de lui rappeler, sans prétendre bien sûr ajouter à son bagage considérable de connaissances techniques en droit international classique et traditionnel, que, par ratification, on entend généralement l'acte par lequel un engagement pris par un gouvernement envers un autre gouvernement est approuvé par les organes habilités par le droit constitutionnel à engager internationalement l'Etat.

Or, les organes étatiques ayant pouvoir de signer un traité ou un accord ne sont généralement pas les mêmes que ceux qui sont compétents pour les ratifier. Il est vrai qu'aucun traité n'est conclu, c'est-à-dire n'engage juridiquement, tant que l'échange des ratifications n'a pas été fait. Il n'est pas exact de dire cependant, à mon sens, que l'on ne peut ratifier un traité que l'on n'a pas signé. Cette distinction est spécialement importante dans un régime fédéral comme le nôtre, où la souveraineté est partagée entre deux ordres de gouvernement.

M. MORIN: Est-ce que le ministre me permettrait une question d'ordre technique?

M. LEVESQUE: Je vais terminer. On s'en va en commission. On va certainement en parler...

M. MORIN: C'est une question importante tout de même.

M. LEVESQUE: On va certainement en parler. Or, selon notre interprétation du droit constitutionnel canadien, seuls les Etats membres sont habilités à ratifier, au sens technique du terme, les engagements pris par le gouvernement fédéral dans les domaines de leurs compétences car seule cette approbation peut rendre obligatoires les dispositions du traité.

M. MORIN: Cela est inexact.

M. LEVESQUE: Vous n'avez qu'à penser...

M. MORIN: Cela est inexact.

M. LEVESQUE: ... à l'OIT, nombre de résolutions...

M. MORIN: Non.

M. LEVESQUE: ... elles ne sont pas mises en oeuvre avant que les instances où se trouvent la souveraineté et la compétence en aient décidé.

M. MORIN: Oui, mais vous confondez ratification et mise en oeuvre.

M. LEVESQUE: Laissez-moi terminer. Je vais peut-être vous convaincre, c'est l'espoir qu'il me reste. Bon!

La question d'échange des instruments de ratification, qui doit être distinguée de celle de la ratification comme telle, n'est pas soulevée par l'article 15. Donc, le premier volet de l'alternative posée par le chef de l'Opposition doit être nuancé considérablement. Techniquement, le gouvernement du Québec, à titre d'organe habilité implicitement par le droit constitutionnel canadien, peut ratifier un traité qu'il n'a pas signé. L'article 15 peut donc viser les traités conclus par le gouvernement fédéral.

Il importe d'ajouter cependant que l'approche conservatrice du chef de l'Opposition, qui nous conduit à discuter de façon savante de vieilles notions du droit international classique envisagées comme un ensemble de règles figées et statiques, n'est pas celle du gouvernement ni celle que traduit l'article 15.

M. MORIN: Vous dites cela sur le plan technique?

M. LEVESQUE: Oui. Attendez, je n'ai pas terminé. L'utilisation du terme "accords internationaux", en plus du terme "traités" dans cette disposition illustre bien que nous enten- dons nous situer dans une perspective dynamique. Selon cette approche, la seule d'ailleurs qui tienne compte de la réalité juridique québécoise, on appelle ratifications — et celle-ci, c'est peut-être une définition un peu plus dynamique, un peu moins conservatrice, un peu moins traditionnelle, un peu moins classique...

M. MORIN: Un peu moins exacte, pour tout dire.

M. LEVESQUE: Bien oui, mais vous ne l'avez pas entendue encore. Comment pouvez-vous dire ça? C'est ça que je ne comprends pas.

M. MORIN: Bien, voyons.

M. LEVESQUE: Voici, je vais vous la soumettre...

M. MORIN: II ne faut pas jouer sur les mots.

M. LEVESQUE: Enfin. L'acte par lequel — là vous me direz ce que vous en pensez après; non, vous n'avez pas le droit —...

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! Je ne sais pas si vous avez l'impression qu'on est en train...

M. LEVESQUE: Non, M. le Président.

M. MORIN: C'est un débat passionnant, M. le Président.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Oui. Mais, tout de même, c'est le droit de réplique.

M. LEVESQUE: D'accord, M. le Président. L'acte par lequel...

Pour revenir, voici une définition que je soumets à l'attention de l'honorable chef de l'Opposition et aux membres de cette Chambre: L'acte par lequel le gouvernement du Québec, habilité à ce faire par l'article 15, approuve un traité conclu par le gouvernement fédéral ou un accord conclu par lui ou l'un de ses ministères avec un gouvernement étranger et lui donne force obligatoire sur le territoire du Québec.

M. MORIN: "Approuve", pas "ratifie".

M. LEVESQUE: C'est cela, la ratification. Ma définition...

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, une fois de plus! Ecoutez, nous allons nous conformer au règlement.

M. LEVESQUE: C'est en définitive, M. le Président, l'acte par lequel le gouvernement assume effectivement les obligations d'un traité ou d'un accord international. Au-delà de l'as-

pect formel auquel le chef de l'Opposition se rattache, cette définition rejoint l'essentiel de la notion de ratification. Son application, et les accords conclus par le gouvernement du Québec, est donc, selon cette perspective évolutive, tout à fait justifiée.

Permettez-moi de noter enfin que cette mesure, en introduisant dans la constitution interne du Québec un mécanisme de la ratification, reflète en bonne partie une pratique en voie de s'établir. Le geste n'a donc pas le caractère de précédent historique que le chef de l'Opposition a eu l'habilité, si l'on veut, de lui conférer. Parce qu'il ne vise pas que les traités fédéraux, il témoigne cependant, de façon non équivoque, de la conception que le Québec se fait du partage des compétences au Canada en matière de relations internationales.

M. le Président, quant au député de Rouyn-Noranda, il a insisté, lors de son intervention, sur le caractère fondamental du dossier de la fiscalité dans le domaine des relations fédérales-provinciales. Je ne saurais souscrire davantage à ses propos qu'en lui rappelant l'importance primordiale que le gouvernement a attachée, depuis les dernières années, à ces questions.

En effet, le gouvernement du Québec s'est employé avec détermination, fermeté et compétence à obtenir un consensus au sein des onze gouvernements canadiens en vue de la modification de certains éléments fondamentaux du financement de la fédération canadienne. C'est ainsi que le système de péréquations, comme l'a souligné le premier ministre, a pu être modifié de manière à élargir la base de calcul des paiements faits aux provinces. Cette conclusion des impôts scolaires, par exemple, dans la liste des sources de revenus admissibles au titre de la péréquation, contribuera de façon significative à réduire l'écart qui sépare le Québec des provinces mieux nanties sur le plan économique.

Ces paiements de péréquations, il faut le noter, constituent des transferts nets en vue de permettre de financer l'exercice de compétences purement provinciales, purement québécoises. Compte tenu des disparités de revenus entre les deux ordres de gouvernement au Canada, ils constituent un pas dans la bonne direction vers l'exercice effectif des compétences attribuées aux provinces par la constitution.

D'autre part, le gouvernement du Québec a amorcé avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des autres provinces des discussions qui conduiront, en 1977, à un nouveau partage fiscal. Le financement des programmes de santé de même que la sécurité du revenu font, dans cette perspective, l'objet d'une attention toute particulière de la part du ministère des Affaires intergouvernementales, de la part du ministère des Finances et de la part du ministère des Affaires sociales.

Evidemment, ces discussions avec le gouvernement fédéral ne produisent pas toujours des résultats immédiats et spectaculaires. Parfois, elles donnent même l'impression d'avoir conduit à des échecs. C'est le cas des représentations faites par le Québec, de concert avec l'ensemble des gouvernements des provinces, auprès du ministre fédéral des Finances relativement à la taxation des ressources. C'est ainsi que le ministre des Finances du Québec, comme l'a souligné le député de Johnson, a pu manifester sa déception, à l'issue de la dernière conférence fédérale-provinciale des ministres des Finances, devant l'inflexibilité du ministre fédéral des Finances. En décidant de supprimer la déductibilité des redevances provinciales de l'impôt fédéral s'appliquant aux entreprises qui exploitent les ressources naturelles, le ministre fédéral des Finances place évidemment les provinces productrices dans un carcan du point de vue de leur système de redevances.

Cette suppression de la marge de manoeuvre est le résultat du parallélisme des deux systèmes fiscaux au Canada. Les deux ordres de gouvernement, selon le droit constitutionnel, sont parfaitement libres d'aménager les impôts directs comme ils l'entendent. La constitution, en effet, leur attribue des pouvoirs parallèles dans ce domaine. La capacité de payer du contribuable constitue cependant une limitation sérieuse à l'exercice de ces droits. C'est pourquoi les accords fiscaux interviennent, afin d'éviter ce qu'on a appelé la double taxation.

Il est dommage que, dans le domaine de taxations des entreprises exploitant les ressources, une telle entente n'ait pas eu lieu lors de la dernière conférence des ministres des Finances. Rien n'exclut cependant qu'un compromis puisse intervenir à ce sujet au niveau de la conférence des premiers ministres qui devrait normalement avoir lieu en début d'année. Dans cette perspective, la proposition faite par le Québec de hausser l'abattement proposé par le ministre des Finances tient toujours.

Ces décisions du gouvernement fédéral constituent, à notre avis, des abus de droit, comme l'a indiqué le ministre des Finances du Québec. Elles sont cependant valides, à première vue, selon le droit constitutionnel. Il ne nous est donc pas possible, techniquement, de parler d'empiètement dans le domaine des ressources naturelles, à moins de faire un procès d'intention au gouvernement fédéral.

Je sais que le député de Johnson, soit par tempérament, soit par l'effet de l'influence qu'ont eue sur lui les chefs de l'Union Nationale, a une conception très pittoresque et très romantique des relations fédérales-provinciales.

Dans son intervention d'hier matin, il s'est étonné de ce qu'il a appelé le manque de fermeté des attitudes du gouvernement dans ses relations avec le gouvernement central. Il s'est même demandé ce que le ministre des Affaires intergouvernementales attendait pour faire ce qu'il a appelé une vraie scène au gouvernement fédéral.

Eh bien, je lui répondrai ceci: L'effort de ce ministère, que nous avons restructuré au cours

des deux dernières années, porte sur une rationalisation des rapports avec le gouvernement fédéral. A cette fin, nous avons mis sur pied des mécanismes de concertation que j'ai décrits lors de l'étude de nos crédits au printemps de 1974. Ces mécanismes dont les deux éléments essentiels sont, au palier des fonctionnaires...

S'il vous plaît, M. le Président, voulez-vous rappeler votre président à l'ordre? Merci.

Ces mécanismes, dont les deux éléments essentiels sont, au palier des fonctionnaires, le comité consultatif des relations intergouvernementales et, au palier ministériel, le comité interministériel des Affaires intergouvernementales, ont permis d'assurer une qualité sans précédent au dossier des relations fédérales-provinciales.

Les fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales, dont le rôle est notamment d'assurer le soutien de ces instances interministérielles, ont manifesté dans ce cadre une compétence et une loyauté qui leur ont valu une crédibilité sans tache dans l'ensemble du gouvernement.

J'espère que ce témoignage que je tiens à leur rendre est de nature à rassurer le député de Rouyn-Noranda qui se demandait dans quelle mesure la philosophie des fonctionnaires s'accordait avec celle du gouvernement.

Si j'ai bien compris ce qu'il a dit, il référait à certains fonctionnaires qui ne sont plus au ministère. Cet effort de rationalisation...

M. SAMSON: Je les ai nommés, M. le Président.

M. LEVESQUE: ... des relations fédérales-provinciales, appuyé sur des dossiers solides, a permis d'établir des éléments de stratégies dans l'ordre des relations interprovinciales et fédérales-provinciales, stratégies qui vont au-delà de la simple attitude théâtrale qui rend le député de Johnson un peu nostalgique. Si, dans certaines circonstances, la tactique des coups de poing sur la table paraît utile pour faire avancer une question, eh bien, elle n'est pas exclue. Un gouvernement moderne ne saurait, cependant, en faire une règle générale.

Le ministre des Affaires intergouvernementales ne fera donc pas de scène, au sens où le député de Johnson l'entend, à moins d'avoir l'assurance qu'elle produira des résultats positifs, car c'est bien par nos résultats dans ce domaine que nous serons jugés et non pas par la beauté du spectacle que nous aurons donné à la population.

Je vous remercie, M. le Président.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion de deuxième lecture est-elle adoptée?

M. MORIN: Adopté, M. le Président.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Adopté.

LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi. Second reading of this bill.

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que vous quittiez maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en commission pléniè-re pour étudier ce projet de loi no 59, Loi du ministère des Affaires intergouvernementales, et cela article par article.

LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Commission plénière

M. HOUDE, (Limoilou) (président de la commission plénière): A l'ordre, s'il vous plaît! Projet de loi no 59, Loi du ministère des Affaires intergouvernementales. Article 1?

M. MORIN: M. le Président, pouvons-nous parler du titre, s'il vous plaît? Ai-je la parole?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Oui, allez !

M. MORIN: Merci. Le ministre nous a appris il y a quelques instants qu'il entendait proposer une modification à l'article 10 en substituant au mot "intergouvernementales" le mot "extérieures", si j'ai bien compris. L'article 10 se lirait donc comme suit: "Le ministre a pour responsabilité d'élaborer et de proposer au gouvernement une politique en matière de relations extérieures et de mettre en oeuvre la politique adoptée par ce dernier". Je me suis réjoui tout à l'heure, en deuxième lecture, de cet amendement que le ministre a l'intention d'apporter à l'article 10, qui est le principal article, pour la définition de ses responsabilités.

Aussi, M. le Président, maintenant que le ministre a lui-même qualifié de façon plus précise et je dois dire aussi un peu plus ferme, ses responsabilités, je proposerais que le titre du projet de loi et le nom du ministère qu'il a l'honneur d'administrer soient modifiés et que, désormais, le titre soit "Loi du ministère des Affaires extérieures". De même, dans les articles qui suivent, comme l'article premier, on trouverait évidemment la même modification; chaque fois que le mot "intergouvernementales", qui est quelque peu péjoratif, qui, j'allais dire, diminue les véritables responsabilités du ministre, qui ne convient plus au statut du Québec aujourd'hui, est employé, qu'on le remplace partout par le mot "extérieures".

M. LEVESQUE: M. le Président, ce n'est pas la première fois que cette suggestion est faite. On me pose de temps en temps la question à savoir si c'est un ministère des Affaires extérieures. Quelquefois, lorsque l'on veut faire com-

prendre à quelqu'un moins initié, de l'extérieur, ce qu'est le ministère des Affaires intergouvernementales, on nous pose la question: Est-ce que c'est comme le ministère des Affaires extérieures ou est-ce un ministère des Affaires étrangères, etc.?

M. MORIN: Je n'ai pas proposé "étrangères" encore, simplement "extérieures".

M. LEVESQUE: Oui. M. le Président, si j'ai parlé de l'amendement que nous allions suggérer à l'article 10, c'est pour souligner que nous nous intéressons à la politique pour autant que l'on touche aux activités extérieures. Mais on trouvera dans le projet de loi, en dehors de ce changement, une préoccupation qui ne touche en général que les relations intergouvernementales et je crois que ce titre ou ce nom est plus fidèle au mandat du ministère, à ce qu'il est véritablement.

Maintenant, je ne ferai pas de querelle avec le chef de l'Opposition pour lui dire que cela n'a pas de sens. Je pourrais poser la même question, si j'étais assis à la Chambre des Communes ou dans un comité et demandais au gouvernement fédéral pourquoi il conserve toujours le nom de ministère des Affaires extérieures? Il me semble que ce n'est pas à moi à lui dire quoi faire, mais si j'étais là, je poserais la question, je dirais: Mais pourquoi ne changez-vous pas cela pour ministère — maintenant, là — des Affaires étrangères? J'ai déjà dit en blague que lorsque Ottawa changera son titre, son appellation de ministère des Affaires extérieures pour les Affaires étrangères, on pourra songer peut-être à changer le nom du ministère des Affaires intergouvernementales pour le ministère des Affaires extérieures.

M. MORIN: M. le Président, ce serait peut-être de nature à hâter le changement au niveau fédéral si le Québec adoptait dès maintenant le mot "extérieures". On verrait peut-être au cours des prochains mois les fédéraux se dépêcher d'adopter le mot "étrangères"...

M. LEVESQUE: C'est peut-être...

M. MORIN: "... les mots relations étrangères". C'est pour cela que j'ai proposé l'amendement! D'autant plus que le ministre lui-même n'est pas insensible au regain de prestige verbal que lui vaudrait cette modification puisqu'il l'a proposée pour l'article 10. Je maintiens ma proposition.

M. LEVESQUE: Non.

M. MORIN: Le ministre m'a l'air d'être tout près d'accepter mon amendement, et, au fond, qu'est-ce qui l'empêche de le faire? Peut-être un petit coup de pouce, un petit peu de courage, que sais-je? ce projet de loi, nous nous sommes aperçus que la préoccupation à travers tous ces articles du projet de loi ce sont les relations intergouvernementales. J'ai mentionné, dans la réplique, que nous n'avions pas l'intention d'intervenir dans les relations des ministères avec les tiers qui ne sont pas des gouvernements à l'extérieur du Québec. Alors je pense que le titre lui-même, l'appellation du ministère correspond à une réalité. Maintenant, comme je l'ai dit, on pourrait en discuter toute la soirée, mais je ne fais pas de querelle au chef de l'Opposition de l'avoir suggéré et je ne dis pas que c'est une suggestion qui n'est pas valable.

M. MORIN; Mais vous ne l'acceptez pas? Enfin, je maintiens ma proposition. Je trouve que les temps sont mûrs, que ce mot d'intergouvememental, vraiment, minimise trop, à tout le moins sur le plan verbal, les ambitions du ministère dont nous traitons.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors le titre, accepté sur division?

M. MORIN: Sur division.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 1.

M. MORIN: Je n'ai pas d'observation particulière. Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 2.

M. MORIN: Même chose.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 3.

M.MORIN: Un instant, voulez-vous? Oui, cela va.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté, article 4.

M. LEVESQUE: Les neuf premiers articles sont les articles réguliers ou traditionnels des ministères.

M. MORIN: Oui, je sais, mais, prenons le temps de les adopter l'un après l'autre, si vous le voulez bien. Nous sommes à l'article 4.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 4, oui.

M. MORIN: Bien.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 5.

M. MORIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 6.

M. MORIN: Cela va.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 7.

M. MORIN: Un instant, voulez-vous? Bien, adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté, Article 8.

M. MORIN: De même.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 9.

M. MORIN: A l'article 9, je dois faire observer au ministre que jusqu'ici ses rapports se sont fait plutôt attendre et, si je ne m'abuse, j'ai même vu passer deux rapports annuels ensemble, le même jour, soit avant-hier ou lundi, je ne sais plus.

M. LEVESQUE: C'est pour respecter un engagement que j'avais pris devant le chef de l'Opposition, lors de la convocation de la commission des affaires intergouvemementales, de la présidence du conseil, etc. J'avais dit à ce moment-là que je regrettais cette habitude qui semblait être devenue traditionnelle, que les rapports arrivaient trop tard. Alors j'ai demandé aux fonctionnaires du ministère de faire un effort considérable, ce qu'ils ont fait. Je pense bien que nous sommes à jour et que nous sommes un des premiers ministères à avoir déjà mis le rapport 1973/74 entre les mains des membres de l'Assemblée nationale et du public.

M. MORIN: Alors, si j'interprète bien les propos du ministre, cet article 9 n'est pas de pure forme. Il a l'intention de s'y conformer. Nous pouvons compter sur ses rapports...

M. LEVESQUE: De fait, le rapport que j'ai déposé hier, j'avais jusqu'à la reprise, en 1975, pour le déposer. Nous sommes plusieurs mois en avant de l'obligation légale; même je trouve que cette obligation c'est très bien, mais en plus de ça on voudrait être un peu plus rapide que la loi ne l'exige.

M. MORIN: Le ministre pourrait-il me dire, dans ces conditions, quand nous recevrons, au plus tard, le prochain rapport de son ministère?

M. LEVESQUE: Si le chef de l'Opposition savait ce que cette promesse que j'avais faite m'a fatigué et combien j'ai disputé dans le ministère, parce que ce n'est pas facile.

Il y a beaucoup de gens qui doivent collaborer à la mise en place d'un rapport annuel. Alors, je ne voudrais pas faire de promesse, mais est-ce que je puis dire simplement le voeu que j'ai exprimé?

M. MORIN: Oui, c'est bien. Je ne tends pas de piège au ministre.

M. LEVESQUE: Non.

M. MORIN: Je lui demande: D'après la loi, telle que rédigée, quelle sera la date ultime du dépôt du prochain rapport?

M. LEVESQUE: Ce serait à la session de 1976, si elle avait lieu, supposons, en février 1976.

M. MORIN: Février ou mars 1976?

M. LEVESQUE: Oui. J'espère qu'on l'aura...

M. MORIN: Est-ce que...

M. LEVESQUE: Le sous-ministre dit à l'automne 1975, mais moi j'aimerais que ce soit à l'été 1975.

M. MORIN: Bien.

M. LEVESQUE: Alors, on ne s'entend pas trop, mais enfin.

M. MORIN: Est-ce que, dans l'intervalle, le ministre compte déposer le bilan des rapports entre Ottawa et Québec, ce fameux bilan tenu secret et dont je l'ai entretenu in extenso durant l'étude de ses derniers crédits? Est-ce une possibilité qu'enfin nous ayons ce fameux document qui reste enfoui dans les archives du ministère ou sur lequel le ministre reste assis?

M. LEVESQUE: Je dirai au chef de l'Opposition que ce rapport n'est pas enfoui. C'est un excellent document de travail qui nous sert continuellement, et particulièrement depuis que nous avons restructuré le ministère et depuis que nous avons mis sur pied particulièrement le comité des hauts fonctionnaires, le CCRI — Comité de coordination des relations intergouvernementales — et que nous avons mis sur pied ce comité interministériel dont j'ai déjà parlé lors de l'étude des crédits qu'on appelle le CIDA — le Comité interministériel des affaires intergouvernementales qui siège... D'ailleurs, je viens de retirer mon sous-ministre, M. Brière, d'une réunion du CIDA qui est présentement en marche.

M. MORIN: Vous n'y étiez pas vous-même, M. le ministre?

M. LEVESQUE: J'y étais. Je suis revenu à la course. Vous savez, on essaie d'être un peu partout, mais on n'a pas le sens de l'ubiquité encore.

M. CHARRON: A qui le dites-vous?

M. LEVESQUE: Je veux dire au chef de l'Opposition que c'est un instrument de travail extrêmement utile pour ces instances, en particulier, et pour les fonctionnaires qui l'utilisent, chapitre par chapitre, selon les fonctions qu'ils occupent et les sujets qu'ils doivent traiter. Mais quant à le déposer, il est en évolution constante. On parle toujours de la mise à jour de différents chapitres.

Je crois que nous l'avons toujours considéré comme document de travail. Nous en avons discuté longuement. Je n'ai pas changé d'idée, pas parce que je ne puis pas changer d'idée. Il y a seulement une sorte de gens qui ne changent pas d'idée. Je ne voudrais pas en être. Pour le moment, je ne crois pas qu'il soit d'intérêt public d'en faire la distribution, malgré que je peux assurer le chef de l'Opposition qu'il n'y a pas le secret de la bombe atomique là-dedans.

M. MORIN: Non. Le Québec n'en est pas encore là. Mais la question que je me pose est celle-ci: Peut-être n'ai-je pas assez insisté là-dessus lors de l'étude de vos crédits. Il y a tout de même des choses qui sont sorties dans la presse et qui ont créé une impression, disons, pénible, sur l'état des rapports intergouvernementaux auxquels participe le Québec, et je me demandais si cela n'était pas dans l'intérêt du ministère et du Québec aussi qu'on sache exactement à quoi s'en tenir.

Nous avons pris connaissance de bribes, de morceaux de rapport qui étaient d'ailleurs très négatifs sur l'état de nos rapports avec Ottawa. Je pense que sur 25 ministères, il y en avait 20 où le rapport était essentiellement négatif.

M. LEVESQUE: Voici, M. le Président...

M. MORIN: Ne croyez-vous pas que cela clarifierait l'atmosphère...?

M. LEVESQUE: Si le chef de l'Opposition me le permet, d'abord, je dois dire que je continue cette discussion, sachant que nous sommes hors du sujet, de toute façon, mais...

M. MORIN: Voyez. Nous parlons des rapports détaillés de votre activité.

M. LEVESQUE: Oui. Je ne ferai pas de procédure.

M. MORIN: Bon.

M. LEVESQUE: Je sais que le chef de l'Opposition dit que cela a eu une publicité un peu pénible ou je ne sais pas. Quant au contenu lui-même, je n'ai pas d'objection du tout à en faire part à ceux qui s'intéressent particulièrement au sujet des relations intergouvernementales.

La seule chose, c'est l'élément stratégie qui me retient. Ce n'est pas la question de ne pas parler du contentieux Ottawa-Québec. C'est simplement parce que nous ne croyons pas qu'il soit dans l'intérêt public de mettre sur la table à tout moment, parce que ce dossier est continuellement en évolution, les documents dont une partie contient une stratégie que nous ne croyons pas justifié de publier. C'est tout.

M. MORIN: Oui, je n'en ferai pas non plus un débat de fond. Je me demandais seulement dans quelle mesure il ne serait pas utile de vous appuyer sur une opinion publique un peu mieux renseignée dans ce domaine. Or, une opinion publique bien renseignée, c'en est une à qui on remet autre chose que des fuites; c'est une opinion publique qui n'est pas réduite à spéculer sur l'état véritable des dossiers, comme c'est le cas depuis quelques années en matière d'affaires intergouvernementales.

M. LEVESQUE: Tout gouvernement a une stratégie vis-à-vis de ses relations avec les autres gouvernements. Je ne vois pas qu'il y ait un gouvernement qui étale complètement tout le contentieux qu'il a avec d'autres gouvernements, particulièrement en ce qui peut toucher une certaine stratégie. Mais à chaque fois qu'un dossier est préparé, est prêt et qu'il y a une conférence fédérale-provinciale, cela sert et, à ce moment, la problématique est connue, la stratégie est mise à jour et le ministre sectoriel en question, ou le premier ministre, à certains moments, devient le porte-parole, et beaucoup des éléments du bilan sont utilisés pour publication.

M. MORIN: Si j'ai bien compris le ministre — et je n'entends pas en faire un plat — la réponse à ma question au sujet du rapport du bilan des rapports fédéraux-provinciaux, c'est, pour l'instant, "non". C'est bien cela?

M. LEVESQUE: C'est ça.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 9, adopté?

M. MORIN: Oui, adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 10.

M. MORIN: A l'article 10, le ministre nous a fait part tout à l'heure d'une modification.

M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que l'article 10 soit modifié, a) en remplaçant, dans la troisième ligne du premier alinéa, le mot "intergouvernementales" par le mot "extérieures"; b) en remplaçant, dans la quatrième ligne du deuxième alinéa, le mot "opportune" par les mots "opportun d'avoir avec eux"; c) en remplaçant le troisième alinéa par le suivant: "II coordonne toutes les activités du gouvernement à l'extérieur du Québec ainsi que celles de ses ministères et organismes".

M. MORIN: Pourriez-vous répéter ce dernier amendement?

M. LEVESQUE: Je vous ai fait parvenir le texte. J'avais demandé qu'on le fasse.

M. MORIN: Je l'ai dans la pile de papiers, un petit instant.

Bien, je vois que dans le dernier alinéa le ministre s'est rendu aux observations que je faisais sur son mandat, l'autre jour, et qu'en somme il accepte qu'on revienne à la rédaction de l'article 2 de la loi existante.

M. LEVESQUE: Afin qu'il n'y ait pas de malentendu. Le chef de l'Opposition a semé un doute, non pas seulement chez moi, mais chez mes collaborateurs, et nous avons convenu d'apporter cette correction afin que ce soit plus clair et que le mandat soit encore plus explicite.

M. MORIN: Cette fois, le ministre m'oblige vraiment. Je le remercie; c'est un progrès sensible.

M. LEVESQUE: Je remercie le chef de l'Opposition de sa contribution positive.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 10, adopté tel qu'amendé?

M. MORIN: Un instant, M. le Président, il y a un dernier alinéa. Oui, je pense qu'on peut l'adopter.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté tel qu'amendé. Article 11.

M. MORIN: A l'article 11, il y a une petite faute de frappe, peu de choses en somme, mais il me semble que lorsqu'on parle des Québécois, on devrait y mettre un Q majuscule. C'est ce qu'on fait d'habitude pour les peuples qui se respectent.

M. LEVESQUE: Je n'ai pas d'objection, mais je ne sais pas ce que les légistes pensent de cela.

M. MORIN: C'est conforme à l'usage. Quand on dit les Britanniques, les Français, les Egyptiens, c'est toujours avec une majuscule, toujours.

M. LEVESQUE: Oui, j'aimerais mieux cela.

M. MORIN: Merci. Alors, c'est adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, dans la quatrième ligne...

M. MORIN: C'est adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): ... Québécois, avec une majuscule.

L'article 11 est adopté, avec amendement. Article 12?

M. MORIN: Un instant, M. le Président. Voulez-vous nous laisser chaque fois quelques secondes pour qu'on relise attentivement?

M. le Président, si je comprends bien, il s'agit, avant tout, des organisations internationales qui ont des locaux ou des représentants sur le territoire du Québec. A l'heure actuelle, il y a avant tout l'OACI, n'est-ce pas? dont les quartiers généraux sont à Montréal.

M. LEVESQUE: La première partie de la phrase couvre toutes les organisations internationales, comme par exemple l'Agence de coopération culturelle et technique. La deuxième partie couvre disons l'OACI.

M. MORIN: Dans la deuxième partie, est-ce que des organismes autres que l'OACI sont visés?

M. LEVESQUE: Non.

M. MORIN: Pour l'instant, il n'y en a pas d'autres.

M. LEVESQUE: Pour l'instant, non.

M. MORIN: Dans la première partie de l'article 12, est-ce qu'il s'agit dans votre esprit de toutes les organisations internationales, y compris par exemple l'UNESCO?

M. LEVESQUE: Dans la deuxième partie, si on veut simplement s'en tenir aux organisations internationales, c'est l'OACI. Mais il faut lire: "... il maintient à cet effet les liaisons nécessaires avec les représentants de ces derniers..." Ces derniers, ce ne sont pas seulement les organisations internationales, ce sont également les gouvernements...

M. MORIN: Les autres gouvernements.

M. LEVESQUE: Pardon?

M. MORIN: Les autres gouvernements.

M. LEVESQUE: Bien oui. Alors, à ce moment-là, il y en a plusieurs.

M. MORIN: A ce moment-là, cela peut être aussi bien les consuls...

M. LEVESQUE: Les consulats.

M. MORIN: ... que les ambassadeurs, quoique... Non, il n'y en a pas, que je sache, sur le territoire du Québec.

M. LEVESQUE: Ce sont des consulats... M. MORIN: Oui, des consulats.

M. LEVESQUE: ... que nous avons en particulier.

M. MORIN: Ou encore des bureaux de commerce.

M. LEVESQUE: Oui, il y a des bureaux de... M. MORIN: Est-ce que...

M. LEVESQUE: ... qui viennent d'autres gouvernements, même d'autres provinces du Canada ou des Etats des Etats-Unis.

M. MORIN: Oui. Il y a quelques années, votre prédécesseur ou l'un de vos prédécesseurs — à moins qu'il n'ait pas été titulaire de votre ministère, mais en tout cas il s'occupait d'affaires intergouvernementales — M. Paul-Gérin La-joie, avait fait une déclaration dans laquelle il soutenait que les représentants des Etats étrangers, en particulier les consuls, devaient obtenir l'exequatur du gouvernement québécois. Est-ce que c'est toujours le cas? Est-ce que vous maintenez cette revendication?

M. LEVESQUE: Non. Ce n'est pas le cas. Nous maintenons une liste officielle; cependant on aura remarqué que j'ai déposé un autre projet de loi qui tient compte d'une certaine réciprocité.

M. MORIN: Notamment, dans le traitement fiscal.

M. LEVESQUE: Oui.

M. MORIN: Oui, mais ce n'est pas...

M. LEVESQUE: Notamment.

M. MORIN: ... de cela que je vous parle. Ce dont je vous parle, c'est la revendication bien précise de... Je ne sais pas s'il était votre prédécesseur. En fait, je pense qu'il était, dans ce temps, ministre...

M. LEVESQUE: De l'Education.

M. MORIN: ... de l'Education. Mais il s'occupait...

M. LEVESQUE: Oui, oui.

M. MORIN: ... de questions intergouvernementales. Votre prédécesseur, vous le savez, a bel et bien déclaré que les consuls en poste au Québec devaient désormais requérir, obtenir l'exequatur.

M. LEVESQUE: II a peut-être formulé le voeu qu'il en soit ainsi mais il faudrait que je vérifie. A notre connaissance, cela n'a pas eu lieu. Cela n'a pas été le cas.

M. MORIN: Pourrais-je inviter le ministre à relire la déclaration de son prédécesseur, en 1965, pour être plus précis, par laquelle non seulement il formulait un voeu, mais il affirme que juridiquement les consuls doivent obtenir l'exequatur de Québec?

M. LEVESQUE: Ce n'est pas le cas.

M. MORIN: Vous avez abandonné cette revendication.

M. LEVESQUE: Apparemment, cela n'a pas été fait, mais je vais vérifier. Au moins, je pourrai en parler, à un moment donné, au chef de l'Opposition.

M. MORIN: Bien. De doute façon, si le ministre oublie de m'en parler, je lui en recauserai lors de l'étude des crédits.

M. LEVESQUE: D'accord.

M. MORIN: Alors, pour cet article...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 12, adopté?

M. MORIN: Article 12. Encore une ou deux questions.

A l'heure actuelle, le Québec a-t-il des rapports, des communications officielles avec l'UNESCO?

M. LEVESQUE: Evidemment, il faut définir ce qu'on entend par communications: communications officielles, communications directes.

M. MORIN: Je ne pense pas à la correspondance.

M. LEVESQUE: Nous avons des participations, mais nous n'avons pas de communications formelles et directes.

M. MORIN: Pas avec l'UNESCO? M. LEVESQUE: Non.

M. MORIN: Avec l'Organisation internationale du travail?

M. LEVESQUE: C'est la même chose.

Cependant, dans ces cas, nous devons dire que, surtout durant la dernière année, nous avons commencé à nous intéresser davantage aux relations entre notre gouvernement et ces organismes internationaux. Nous nous sommes intéressés particulièrement à la préparation des conférences auxquelles nous participons avec le gouvernement fédéral.

M. MORIN: Le ministre pourrait-il me dire, pour résumer tout cela, quelles sont les institutions spécialisées avec lesquelles le Québec a des communications officielles, à l'heure actuelle?

M. LEVESQUE: II y a l'Agence de coopération culturelle et technique avec laquelle le gouvernement du Québec, étant donné qu'il est un...

M. MORIN: Un membre participant.

M. LEVESQUE: ... gouvernement participant, a des relations directes.

M. MORIN: C'est tout? C'est modeste.

M. LEVESQUE: Si on laisse les organismes internationaux pour le moment, on peut parler du gouvernement de France avec lequel nous avons des liens directs et privilégiés.

Il y a évidemment les Etats membres de la fédération canadienne, ainsi que l'Etat central.

M. MORIN: Bien sûr, mais là vous n'avez pas le choix, tandis que, pour les autres, vous auriez le choix.

Bon. Pour l'article 12, réduit à ces modestes proportions dans les faits, nous sommes prêts à l'accepter.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 12, adopté. Article 13?

M. MORIN: M le Président, je voudrais demander au ministre ce qu'il peut faire lorsque la compétence constitutionnelle du Québec n'est pas respectée par le pouvoir fédéral.

Je vois qu'il a le souci de veiller à ce qu'elle le soit, ce qui suppose que, quelquefois, elle ne l'est pas.

M. LEVESQUE: Je vais vous donner l'exemple des meuneries.

Nous avons décidé d'aider même vis-à-vis des frais judiciaires. Alors, il y a là un geste que nous avons posé. Je ne peux pas faire tout le tour de la question. S'il y avait quelque chose dans l'article auquel s'opposait le chef de l'Opposition, je serais très heureux de le regarder avec lui. Mais je pense qu'une des choses que le ministère doit faire, c'est bien de veiller à ce que soit respectée la compétence constitutionnelle du Québec.

Je pense que dans le mandat dont on parlait tout à l'heure, c'est un élément essentiel et peut-être le premier élément.

M. MORIN: Oui, bien sûr et je ne suis pas en désaccord...

M. LEVESQUE: Les relations fédérales provinciales.

M. MORIN: ... avec ce qu'a dit le ministre. D'ailleurs je m'étais déjà réjoui de voir qu'il avait accordé son appui aux meuneries dans leur imbroglio avec le gouvernement fédéral, avec les tribunaux fédéraux.

Le sens de ma question, c'est: quels sont les moyens à la disposition du ministre lorsque surgit un grave conflit, un conflit permanent de compétence constitutionnelle? Le ministre sait qu'il y en a.

M. LEVESQUE: II y a les tribunaux.

M. MORIN: II y en a dans la main-d'oeuvre, les communications...

M. LEVESQUE: II y a les tribunaux.

M. MORIN: Les tribunaux.

M. LEVESQUE: II y a les conférences fédérales-provinciales, si vous le voulez, la pression politique, il y a divers moyens, il y a tout un processus de consultations, il y a, enfin, 1,000 moyens.

M. MORIN: Mais, revenons au premier que vous avez indiqué, M. le ministre, celui des tribunaux.

M. LEVESQUE: Je l'ai nommé le premier mais...

M. MORIN: Ce n'est pas votre préféré.

M. LEVESQUE: Peut-être que c'est celui qui vient lorsque les autres moyens ayant été utilisés se sont avérés inutiles.

M. MORIN: Autrement dit, c'est le moyen ultime.

M. LEVESQUE: Oui.

M. MORIN: Est-ce que c'est, selon vous, un moyen satisfaisant?

M. LEVESQUE: Voulez-vous parler de la cour constitutionnelle que vous envisagez ou si vous voulez parler de la cour Suprême?

M. MORIN: Nous parlons de l'état des choses existantes. Nous parlons du pitoyable présent.

M. LEVESQUE: Je pense que lorsque vous posez la question, si on continuait à discuter, on arriverait à ce point-là, et...

M. MORIN: Pour ne rien vous cacher, c'est à ce point-là que j'essaie d'en venir.

M. LEVESQUE: Alors, le gouvernement du Québec a déjà exprimé assez clairement, à plusieurs reprises, qu'il préférerait un autre statut que celui qu'a présentement la cour Suprême, si cette cour doit être la cour de dernière instance en matière constitutionnelle.

Nous ne croyons pas qu'une cour, nous l'avons dit à maintes reprises, je n'ai pas d'objection à le répéter, formée exclusivement par la volonté d'un des gouvernements au litige, ce n'est pas satisfaisant. Je suis convaincu que ce sont des hommes de grand calibre, d'une grande objectivité, d'une grande honnêteté, mais simplement la structure elle-même ne semble pas répondre à notre satisfaction simplement intellectuelle.

M. MORIN: Maintenez-vous les positions de vos prédécesseurs ou des premiers ministres antérieurs du Québec, notamment M. Lesage et M. Johnson, à l'effet de ne pas reconnaître la

compétence de la cour Suprême du Canada, en particulier dans certains domaines comme les droits miniers sous-marins?

M. LEVESQUE: Nous avons dit, dans les droits miniers sous-marins, qu'il s'agissait là d'un problème qui, dans notre esprit, devrait avoir un règlement d'ordre politique.

Nous nous refusions à voir ce problème décidé par les tribunaux. Je pense bien que le gouvernement central, depuis lors du moins, a accepté ce point de vue du Québec.

M. MORIN: Vous êtes donc sûr que le gouvernement central n'aura pas recours à un avis consultatif de la cour Suprême sur cette question? Vous en êtes assuré?

M. LEVESQUE: Evidemment, nous ne sommes pas les seuls en cause dans cette question. Si le chef de l'Opposition a suivi le dossier récemment, on a vu qu'une province en particulier, Terre-Neuve, semblait plus intéressée à une décision ou à un avis de la cour Suprême.

M. MORIN: Je dois dire que sa position est constitutionnellement beaucoup plus forte que celle du Québec.

M. LEVESQUE: Je ne peux pas faire d'admission de cette nature, vu le mandat qui est le mien. C'est peut-être...

M. MORIN: Je sympathise avec le ministre et je n'insiste pas. Tout cela pour dire que les moyens d'action dont dispose votre ministère sont, tout de même, en définitive, limités par un certain carcan constitutionnel, qui fait partie de la nature des choses dans ce pays et qui limite la portée réelle, la portée dans les faits de cet article 13. Mais, enfin, M. le Président, si on ne peut pas être volontaire, il faut au moins...

M. LEVESQUE: Le chef de l'Opposition admettra que, lorsqu'on analyse les moyens que les Etats ont pour régler, par exemple des conflits entre Etats, que l'on pense à la Cour internationale de justice ou que l'on pense aux Nations Unies, il y a toujours un endroit où peut-être on ne retrouve pas tous les moyens aussi satisfaisants que l'on voudrait pour avoir raison, quand on voudrait avoir raison.

M. MORIN: Cest une question de degré, n'est-ce pas, et je pense que le ministre serait peut-être plus content de plaider devant la Cour internationale que devant la cour Suprême, à ce qu'il m'a dit tout à l'heure.

M. LEVESQUE: M. le Président, je n'ai pas dit cela. Je n'ai rien dit, tout à l'heure.

M. MORIN: Le ministre n'a rien dit tout à l'heure, M. le Président. Puisqu'on ne peut pas se montrer plus brave que les faits ne nous le permettent, eh bien, montrons-nous velléitaires et adoptons l'article 13.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 13, adopté. Article 14?

M. MORIN: Ah! j'ai une question. Il semble qu'il y ait eu là une certaine dilution de l'autorité du ministère. On dit que "le ministère collabore avec les autres ministères du gouvernement dans la mise en oeuvre à l'extérieur du Québec des politiques dont ils ont la responsabilité". On énumère certains domaines, comme l'immigration, l'éducation, l'industrie et le commerce, les communications et les affaires culturelles. Est-ce que cela ne va pas à l'encontre de l'article 10 dans lequel on disait qu'il coordonnait les relations entre... Il faut que je prenne connaissance de l'amendement une fois de plus.

M. LEVESQUE: Voici ce que l'on veut dire par là, M. le Président.

C'est que nous n'avons pas voulu enlever — je ne sais pas si c'est assez clair, on pourrait peut-être le clarifier si on veut — c'est que l'on n'a pas l'intention d'assumer la responsabilité du contenu sectoriel. C'est pourquoi l'on dit que le ministre collabore avec d'autres ministères du gouvernement dans la mise en oeuvre, à l'extérieur du Québec, des politiques dont ils ont la responsabilité. Cette responsabilité c'est la responsabilité sectorielle purement et simplement, responsabilité interne du ministère. C'est pour ça que nous ne voulons pas entrer dans le contenu lui-même parce que ça ça ne regarde pas précisément le ministère des Affaires intergouvernementales, pas plus qu'au gouvernement du Canada le ministère des Affaires extérieures va introduire dans le contenu même des politiques qui sont la responsabilité propre du ministre sectoriel.

Mais nous ne pouvons cependant pas être étranger à cela. C'est pourquoi nous collaborons avec.

M. MORIN: Autrement dit, l'article 14 doit être interprété à la lumière de l'article 10. D'après l'article 10, vous coordonnez toutes les activités du gouvernement à l'extérieur du Québec ainsi que celle des ministères...

M. LEVESQUE: Oui.

M. MORIN: ... et organismes et l'article 14 se situe à une sorte de niveau inférieur, qui est celui des politiques internes. J'ai bien compris?

M. LEVESQUE: Pas nécessairement inférieur mais disons sectoriel.

M. MORIN: Sectoriel.

M. LEVESQUE: Je n'aimerais pas dire ça.

M. MORIN: Non, je comprends. Je com-

prends, mais le ministre sait la haute opinion que j'ai de son ministère. Est-ce qu'il ne serait pas nécessaire de préciser peut-être, je n'en fais pas un plat, mais est-ce qu'on ne pourrait pas ajouter "internes" après "des politiques", ou "sectorielles"? Je pense que "internes" serait plus précis.

M. LBVESQUE: Vous pouvez l'ajouter.

M. MORIN: Comment? On peut l'ajouter. Bon, alors, pour que les choses soient en bonne et due forme, je propose qu'à l'article 14, à la 4e ligne, le mot "internes" soit ajouté après le mot "politiques".

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Est-ce que cet amendement est adopté? Adopté. Article 14, adopté avec amendement.

M. MORIN: Adopté. L'article 14 est adopté aussi, oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 15.

M. MORIN: A l'article 15...

M. LEVESQUE: Vous me permettrez, c'est parce que je posais une question au sous-ministre en même temps.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: Lorsqu'on dit "internes", on veut dire... Vous avez proposé d'ajouter "internes".

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: Oui. Ce qu'on veut dire par là, c'est sectoriel. Je pense par exemple à l'immigration, qui a des responsabilités externes au Québec; par définition immigration est sélection des immigrants. En mettant le mot "internes" l'on n'a pas l'intention à ce moment-là d'enlever au ministère de l'Immigration ses responsabilités sectorielles.

M. MORIN: Ce n'est pas le sens de... M. LEVESQUE: Non.

M. MORIN: Maintenant, si le ministre... Je ne veux pas non plus créer des embêtements au ministre. J'ai fait cette proposition d'amendement en toute bonne foi. Si elle crée des embêtements, le ministre n'a qu'à le dire. On peut peut-être mettre le mot "sectoriel" à la place. Mais je pense que c'est le mot "interne" qui rend exactement ce que le ministre m'a dit, en tout cas. Cela va?

M. LEVESQUE: Très bien. On va vivre avec cela.

M. MORIN: Bien.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté...

M. MORIN: Oui. L'article 14 est adopté, mais...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): ... avec l'amendement. Article 15.

M. MORIN: ... l'article 15 n'est pas encore adopté.

UNE VOIX: Non, je le sais.

M. MORIN: Le ministre m'a expliqué tout à l'heure qu'il utilisait le mot "ratification" dans un sens dynamique, mais je dois lui dire que sur le plan du droit international, il y a des limites à la façon dont on doit utiliser les mots. Si le ministre veut bien se référer à la convention de Vienne sur le droit des traités, il verra que la ratification a un sens hautement technique. La convention de Vienne représente, à l'heure actuelle, l'état du droit international. C'est une codification de la coutume et je ne crois pas qu'on doive s'éloigner trop de ces termes.

Je ne veux pas non plus diminuer la portée du tournant historique que le ministre est en train de faire prendre à son ministère avec cet article, à supposer que la seconde hypothèse dont je faisais état la semaine dernière soit l'hypothèse correcte, mais je me demande si ce que le ministre veut dire n'est pas "l'approbation" des traités, qui est un terme beaucoup plus général et qui s'accommode mieux de la dynamique.

M. LEVESQUE: C'est une mise en oeuvre. C'est plus qu'une approbation, c'est une mise en oeuvre. C'est une acceptation, par nous, un engagement, par nous, de mettre en oeuvre des dispositions d'un accord.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: A ce moment, on appelle cela "ratification". Maintenant, je suis prêt à vivre avec cela pour mes propres fins, parce qu'il ne s'agit pas pour moi de commencer à écrire du droit international, ni pour nous ici. Si, dans la conception du chef de l'Opposition, l'alternative lui plaît plus, il la comprendra comme cela.

M. MORIN: C'est-à-dire que je n'ai pas d'objection.

M. LEVESQUE: Je ne veux pas enlever de plaisir ou de jouissance au chef de l'Opposition. S'il voit là-dedans quelque chose d'un geste historique, il sera très heureux. Cela ne changera pas le texte de l'article 15 du projet de loi. Quant à moi, ce qu'il veut dire, c'est que le

gouvernement du Québec, par l'article 15, peut ratifier.

Si on n'aime pas le mot "ratifier", c'est accepter et mettre en oeuvre et rendre obligatoires des dispositions sur lesquelles on s'était entendu dans un accord ou un traité, au niveau international.

M. MORIN: Seulement pour clarifier cette question, dois-je comprendre que le Québec va émettre des lettres de ratification?

M. LEVESQUE: Cela ne préjuge pas de cela.

M. MORIN: M. le ministre, qui ratifie, en général, émet des lettres de ratification.

M. LEVESQUE: Ce qui arrive, je ne pense pas que nous soyons en droit international purement, proprement dit. Il y a là un mécanisme interne et il y a la transmission de cette décision ensuite par les canaux réguliers.

M. MORIN: Vous voulez dire que vous communiquez votre soi-disant ratification au pouvoir fédéral, c'est ça?

M. LEVESQUE: Dans certains cas. Cela n'exclut pas que l'on puisse faire autrement. Mais, cela implique cette possibilité.

M. MORIN: Alors, cela fait deux ratifications pour un même Etat?

M. LEVESQUE: C'est-à-dire que même si le gouvernement fédéral ratifie quelque chose sur lequel il n'a pas compétence, qu'est-ce que cela vaut? C'est lettre morte.

M. MORIN: C'est-à-dire qu'il peut le faire techniquement. Il ne peut pas mettre en oeuvre.

M. LEVESQUE: II peut le faire, mais qu'est-ce que cela donne?

M. MORIN: II ne peut pas mettre en oeuvre. Si on utilise les mots justes.

M. LEVESQUE: Même s'il prétendait pouvoir le faire ou même s'il prétend pouvoir le faire, la mise en oeuvre est soumise à la volonté du gouvernement du Québec dans les domaines qui sont de la compétence exclusive de ce gouvernement. C'est cela que je dis.

M. MORIN: C'est fort bien dit, mais ce qui m'étonne un peu, c'est que le ministre semble confondre ratification et mise en oeuvre. Pour ce qui est de la mise en oeuvre, je n'ai jamais eu le moindre doute que dans les cas où cela relève de la compétence exclusive du pouvoir québécois, du gouvernement québécois, le seul pouvoir apte à mettre en oeuvre c'est bien, effectivement, cette Assemblée, n'est-ce pas? Mais cela ne veut pas dire pour autant, si l'on s'en tient au sens technique des mots, que le gouvernement québécois soit habilité, dans l'état actuel de la constitution, à ratifier ces mêmes accords.

M. LEVESQUE: C'est la question de définition du mot "ratifier" qui peut faire qu'on pourrait discuter chacun prenant sa définition, mais nous croyons être habilités à ratifier au sens technique du mot. La définition utilisée par le chef de l'Opposition me porte à croire que ce n'est pas réellement une ratification.

M.MORIN: Pas si...

M. LEVESQUE: Mais je pense que nous allons rester avec ce texte.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: En effet, que ce soit dans l'optique du chef de l'Opposition ou dans l'optique que j'ai essayé d'élaborer et de définir, ce texte correspond à ce que veut l'Assemblée nationale.

M. MORIN: Oui. Le ministre ou le sous-ministre connaissent-ils la pratique antérieure? Effectivement, il y a eu des cas où le Québec a donné son approbation ou son consentement — souvent, les textes expédiés par Québec étaient rédigés en anglais; alors, si vous regardez dans vos archives, vous allez trouver "the Quebec's consent"— à des accords conclus et ratifiés par le pouvoir fédéral. Je pense, en particulier, aux conventions sur la procédure civile. Le ministre sait cela.

M. LEVESQUE: C'est exact.

M. MORIN: Bon. Il y a donc des précédents et le mot "approbation" ou le mot "consentement" a déjà été utilisé dans le passé. Si je comprends bien, c'est cela que le ministre a dans l'idée, sauf qu'il emploie un mot nouveau, un néologisme, et qu'il appelle ça la ratification.

M. LEVESQUE: Sous le parapluie "ratification", vous avez l'exemple que vous venez de donner. Mais il peut, avec l'évolution des choses, y avoir d'autres genres qui rentrent sous le parapluie "ratification", quant à ma conception.

M. MORIN: Oui. Tout à l'heure, le ministre disait que j'évoluais dans son sens. Si je comprends bien, il est en train d'évoluer dans le mien.

M. LEVESQUE: Ce que je viens de dire n'est pas du tout dans le sens de ce que vient de dire le chef de l'Opposition. Mais il y a des accords, par exemple, qui peuvent être... Le droit international évolue. Il y a des choses qui n'auraient pas été pensables il y a dix ans. Mais,

même avec le régime fédéral que nous connaissons, il y a des gestes, que nous avons posés récemment dans le domaine international, qu'il n'aurait pas été possible même d'envisager il y a dix ans.

M. MORIN: Oui. Je vois qu'il est six heures.

M. LEVESQUE: Est-ce que je puis demander au chef de l'Opposition... A ce moment, je quitte le chapeau de ministre des Affaires intergouvernementales et je reprends celui du leader du gouvernement. J'aimerais pouvoir donner une indication aux membres de l'Assemblée des commissions qui pourront être convoquées ce soir.

M. MORIN: Nous avons adopté quinze articles, M. le Président, parce que j'allais consentir à ce que l'article 15 soit adopté.

M. LEVESQUE: Oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'article 15, adopté.

M. MORIN: Oui. Mais il nous en reste, ma foi, encore 25. Je ne peux pas vous dire de façon précise combien de temps cela va prendre. Je vois que j'ai des questions. Peut-être trois quarts d'heure, une heure, peut-être un peu plus même. Cela dépendra de la volubilité du ministre.

M. LEVESQUE: Est-ce qu'on pourrait essayer de convoquer les commissions pour neuf heures, réunir la Chambre de huit heures et quart à neuf heures, espérant que, comment appelez-vous cela, l'humilité ou je ne sais quoi, la coopération... On peut convoquer les commissions pour neuf heures?

M. MORIN: Je pense que probablement, pour neuf heures, on peut compter avoir fini.

M. LEVESQUE: Je remercie le chef de l'Opposition. Les commissions suivantes devront se réunir à neuf heures.

Faites donc rapport, s'il vous plaît. Excusez-moi.

M. HOUDE, Limoilou (président de la commission): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre commission n'a pas fini de siéger et demande la permission de siéger à nouveau.

LE PRESIDENT: Permission accordée.

Travaux parlementaires

M. LEVESQUE: M. le Président, les commission suivantes siégeront ce soir, à partir de neuf heures, dans les salles suivantes:

Au salon rouge, où on vient de suspendre les travaux, il s'agit de la commission parlementaire des affaires municipales, qui poursuivra ses travaux non pas à neuf heures, elle, mais à huit heures quinze.

A neuf heures, à la salle 81-A, la commission des affaires sociales, pour l'étude des projets de loi au nom du ministre des Affaires sociales. Je pense qu'il ne s'agissait que d'un projet de loi, le projet de loi no 93.

A la salle 91-A, également à neuf heures, le projet de loi no 20, Loi sur l'assurance-récolte, à la commission de l'agriculture.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, pour ce qui est du projet de loi no 20, Loi sur l'assurance-récolte, mon collègue de Beauce-Sud et moi-même sommes fortement intéressés mais nous sommes pris, actuellement, à l'autre commission. Je pense que l'honorable ministre va concéder que sur l'assurance-récolte, on a fait tous les deux des débats. Actuellement, nous sommes pris avec un...

M. LEVESQUE: L'honorable député comprendra que nous avons convoqué...

M. CARPENTIER: II est membre de toutes les commissions.

M. BELLEMARE (Johnson): Non, non, non. Je ne vais pas partout. C'est impossible.

M. LEVESQUE: ... non pas seulement le ministre de l'Agriculture, mais les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture. J'ai beaucoup de compréhension et de sympathie pour le député de Johnson, qui doit se diviser en trois lorsqu'il y a trois commissions qui siègent, mais d'un autre côté on ne peut pas paralyser les travaux de la Chambre, surtout à ce moment-ci. J'espère que le député de Johnson ne m'en voudra pas, qu'il pourra peut-être passer une heure à un endroit et une heure à l'autre.

J'ai toujours manifesté beaucoup de bonne volonté, j'aimerais bien pouvoir faire plaisir; d'ailleurs, je sais que le député de Chicoutimi est bien intéressé, c'est sa propre région qui est touchée. Il était sans doute à la commission parlementaire des affaires municipales mais, à neuf heures, il devra aller à la commission parlementaire des affaires sociales. C'est la même chose pour les ministériels qui, eux aussi, aimeraient, j'en suis convaincu, particulièrement dans le domaine social ou agricole, être à la commission parlementaire des affaires municipales. Moi-même, j'aimerais être aux trois.

M. MORIN: M. le Président, n'avions-nous pas retardé un vote cet après-midi?

M. LEVESQUE: Nous l'avons fait, je pense. LE PRESIDENT: C'est ce matin, je crois.

M. MORIN: Je me suis absenté dans l'intervalle.

M. LEVESQUE: M. le Président, nous avions convenu, ce matin, que nous pourrions déposer un rapport. Il s'agit du rapport sur les assurances. La Loi sur les assurances.

M. CHARRON: M. le Président.

LE PRESIDENT: C'est inscrit au nom du député de Lévis. Vous avez la parole.

Rapport sur le projet de loi no 7

M. CHAGNON: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des institutions financières, compagnies et coopératives qui a étudié le projet de loi no 7, Loi sur les assurances, et qui a adopté tous les articles et leurs amendements.

LE PRESIDENT: Rapport déposé. Est-ce qu'on peut s'entendre pour que le délai pour apporter des amendements au projet de loi soit prolongé peut-être jusqu'à demain midi?

M. LEVESQUE: D'accord, M. le Président.

M. BURNS: Volontiers.

LE PRESIDENT: Consentement?

M. LEVESQUE: Sans affecter les étapes, s'il y a lieu.

M. MORIN: Non, sans modifier les étapes. LE PRESIDENT: Sans modifier les étapes...

M. LEVESQUE: Je ne crois pas que cela les modifie, mais au cas où.

LE PRESIDENT: ... de l'étude du projet de loi.

M. LEVESQUE: M. le Président, la Chambre ajournera vers neuf heures, d'après les consultations que nous avons eues tout à l'heure, pour que les trois commissions puissent siéger à partir de neuf heures.

En attendant, je propose la suspension de la Chambre jusqu'à vingt heures quinze.

LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à vingt heures quinze.

(Suspension de la séance à 18 h 10)

Reprise de la séance à 20 h 22

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. LEVESQUE: Je fais motion pour que vous quittiez maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en commission plénière.

LE PRESIDENT: Pour étudier...?

Projet de loi no 59 Commission plénière (suite)

M. LEVESQUE: Le projet de loi dont l'étude a été entamée avant la suspension, soit le projet de loi no 59, Loi du ministère des Affaires intergouvernementales.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

UNE VOIX: Adopté.

M. MERCIER (président de la commission plénière): A l'ordre, messieurs!

M. MORIN: II y a d'abord le titre du chapitre 3, M. le Président, sur lequel j'aurais quelques observations. Depuis 1965 environ, on a créé cette expression d'ententes intergouvernementales. Je me suis toujours demandé si elle était heureuse ou pas, si elle traduisait bien le genre d'accord qui est conclu par le Québec. Effectivement, les premières "ententes" conclues par le Québec étaient intitulées accords; avant que la terminologie ne devienne plus sûre, on parlait d'accords. D'ailleurs, je fais remarquer au ministre que, dans le troisième paragraphe de l'article 16, on trouve une définition de l'entente qui est la suivante: "On entend par "entente intergouvernementale", dans la présente loi, un accord intervenu, etc." Donc, ce vocabulaire, qui ne pèche pas par précision, me paraît peut-être un peu trop vague et je ne vois pas pourquoi le ministère des Affaires intergouvernementales hésite à parler d'accord, carrément d'accord.

En tout cas, je le proposerai au ministre. Avant d'en faire une proposition en bonne et due forme, j'aimerais bien qu'il me donne son sentiment là-dessus. Autrement dit, il s'agirait d'enlever ce mot d'"entente" et de parler d'accords gouvernementaux.

Etant donné qu'on a choisi le mot "intergouvernementales" de préférence au mot "extérieures", je pense qu'il faut garder intergouvernementaux. Mais le mot "ententes" ne me parait pas satisfaisant. Il étonne en tout cas. Je puis assurer le ministre qu'il étonne à l'étranger.

On se demande ce que c'est, ce mot "ententes", qui n'existe pas dans le vocabulaire technique du droit international. Alors, je proposerais

que le chapitre III soit intitulé Les accords intergouvernementaux et que, dans tous les articles suivants où le mot "ententes" paraît, on y substitue le mot "accords", ce qui entraînerait peut-être une petite modification de l'article 16, par la suite, où on définit une entente comme étant un accord. Si le ministre accepte l'idée du mot accord, on pourrait, par la suite, dire: On entend par accord intergouvernementaux — là, on peut utiliser le mot entente qui n'a pas de sens technique — toute entente intervenue entre le gouvernement, etc.

Autrement dit, le titre officiel, le vocable officiel serait "accords intergouvernementaux". Je regrette que le sous-ministre n'ait pas été là pour entendre...

M. LEVESQUE: J'attendais l'arrivée du sous-ministre, parce que moi, je n'avais pas une bonne réponse prête. Il semble que le sous-ministre, non plus, n'a pas une bonne réponse prête, parce que, dans le fond, ce sont des synonymes.

M. MORIN: Bien, pas tout à fait. C'est parce que accord, c'est le mot qui est consacré sur le plan international. On parle toujours d'accords internationaux ou...

M. LEVESQUE: Par contre, voici ce qui me vient à l'esprit: Si c'était simplement les accords...

M. MORIN: Intergouvernementaux.

M. LEVESQUE: ... entre le gouvernement du Québec et un gouvernement étranger, je songerais peut-être naturellement au mot accord. Là, j'essaie de nuancer un peu; peut-être que j'ai tort, mais je crois que le mot ententes se prête mieux à l'ensemble des accords, si on veut, qui touchent les relations entre Etats membres de la fédération canadienne. Là, ce serait plutôt des ententes intergouvernementales. Je réfléchis tout haut, laissez-moi finir.

Je crois que de tels accords entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec pourraient être plus dans le genre d'entente suivant: Je pense à l'entente-cadre, par exemple, de développement régional. Il s'agit là beaucoup plus d'une entente que d'un accord.

Je crois que c'est un terme plus générique, à mon sens. Je n'ai pas eu le temps de l'étudier. C'est ma première réaction, je l'avoue, mais je crois qu'entente, dans mon esprit du moins, est plus générique que le mot accord, qui semble plus technique au point de vue d'ententes internationales, d'Etat à Etat.

M. MORIN: II faut peut-être se référer à l'anglais pour voir à quel point on a créé pour le Québec un vocabulaire qui en quelque sorte minimise la portée de ce qu'il fait. En anglais, c'est le mot "agreement"...

M. LEVESQUE: C'est peut-être plus réaliste.

D'ailleurs, en anglais, on garde le même nom "agreement, agreement".

M. MORIN: Bon, bien c'est cela.

M. LEVESQUE: "... the words "intergovernmental agreement" mean an agreement...".

M. MORIN: Voilà. Bon. Je pense que le ministre commence à comprendre mon point. En anglais, qu'il s'agisse d'accords internationaux, on emploie le mot "agreement"; qu'il s'agisse d'accords interprovinciaux ou fédéraux-provinciaux, c'est toujours "agreement". Je ne vois pas pourquoi vous ne standardiseriez pas le vocabulaire en français aussi.

M. LEVESQUE: II me semble que le mot accord en français a une connotation un peu différente. Je crois qu'en ayant deux mots en français c'est justement parce qu'il y a une nuance entre le mot accord et le mot entente. Et je pense que ce que nous faisons présentement, enfin, ce qui colle le plus à la réalité de nos relations intergouvernementales et la conclusion des ententes, c'est le mot entente qui le traduit le mieux.

M. MORIN: Vous avez failli dire accord, et vous auriez eu raison, parce qu'en fait... Ecoutez. Vous ne m'avez pas convaincu, M. le ministre. J'espérais vous convaincre plus facilement que cela.

M. LEVESQUE: D'accord. On va simplement vérifier certaines définitions et on y reviendra à la fin, si l'on veut, parce que je ne veux pas en faire une question de...

M. MORIN: Non, mais cela aurait l'avantage, à l'égard de l'extérieur, de simplifier peut-être la situation du Québec. Lorsqu'on entend utiliser cet étrange vocabulaire qui n'est connu nulle part, qui est spécifique au Québec, à l'étranger on dit: Qu'est-ce que c'est, entente? Cela n'a pas cours dans le jargon technique. On ne parle jamais de cela. On a inventé cela pour le Québec, une sorte de diminutif qu'on a inventé pour le Québec. Alors, je trouve que c'est désuet. A l'époque où l'on hésitait, où le Québec faisait ses premiers pas dans ce domaine, on pouvait peut-être se contenter d'une telle expression.

Aujourd'hui, je n'en vois pas la raison.

M. LEVESQUE: Voulez-vous prendre la suggestion d'attendre et d'y revenir simplement? C'est une question de vocabulaire.

M. MORIN: Alors on pourra y revenir tout à l'heure.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 16.

M. MORIN: L'article 16 est suspendu, si je comprends bien.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 17.

M. MORIN: A l'article 17, M. le ministre, je suis amusé de trouver l'expression "approuvées" et non "ratifiées". L'expression que je vous suggérais tout à l'heure d'employer à la place de "ratification".

M. LEVESQUE: Approuvées, voulez-vous dire?

M. MORIN: Bien oui, vous utilisez justement le mot "approuvées" et non "ratifiées". Pourquoi ne standardisez-vous pas votre vocabulaire? Pourquoi ne dites-vous pas également ici "ratifiées"?

M. LEVESQUE: Je pense que "ratifiées" comprend plus qu'une approbation, parce que cela implique peut-être une décision de l'Assemblée nationale.

M.MORIN: Ah! non. M. LEVESQUE: Peut-être.

M. MORIN: La ratification est toujours un acte de l'Exécutif.

M. LEVESQUE: Je comprends, mais elle donne suite à une approbation ou un vote de l'Assemblée nationale. On ne peut pas donner suite à des accords dans le domaine du travail... Des accords internationaux, souvent, cela prend une législation.

M. MORIN: Je m'excuse, M. le ministre, on confond encore "ratification" et "mise en oeuvre".

M. LEVESQUE: La mise en oeuvre, oui.

M. MORIN: La ratification, c'est de ça qu'il s'agit ici. L'approbation est un acte de l'Exécutif, tandis que la mise en oeuvre, est un acte législatif.

M. LEVESQUE: Justement, je pense que je suis de plus en plus convaincu qu'"ententes intergouvernementales" est l'expression juste, parce qu'ici, il s'agit autant d'accords ou d'ententes qui sont approuvés et qui touchent les rapports entre le gouvernement du Québec et d'autres Etats membres de la fédération.

M. MORIN: Mais dans la langue...

M. LEVESQUE: A ce moment, il n'y a pas de ratification, il n'y a pas de traité. Cela couvre l'ensemble, c'est beaucoup plus générique.

M. MORIN: J'ai beaucoup moins d'objection à utiliser "approuvées" ici, qui me paraît peut-être plus réaliste, qu'à l'utilisation de "ratifier" dans l'article 15, si ma mémoire est bonne, pourvu qu'on en vienne, éventuellement, à la conclusion que les mots "accord intergouvernemental" est plus juste. On peut effectivement approuver un accord intergouvernemental. Je n'en fais pas un plat; je voulais attirer l'attention du ministre sur ce vocabulaire quelque peu hésitant. Je suis prêt à approuver l'article 17.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 17, adopté. Article 18?

M. MORIN: Un instant, M. le Président. Est-ce que le ministre pourrait expliquer la portée de cet article?

M. LEVESQUE: ... assuré que lorsqu'une loi prévoit la signature d'un ministre, le présent projet de loi ne le libère pas de cette obligation, à moins que le lieutenant-gouverneur en conseil...

M. MORIN: Vous êtes sûr que c'est cela que cela veut dire? J'ai l'impression, puisqu'il s'agit de donner effet aux ententes, que cela veut dire que le ministre, si je le comprends bien...

M. LEVESQUE: II y aura deux signatures: celle du ministre des Affaires intergouvernementales et celle du ministre que la loi indique.

M. MORIN: Pour donner effet, c'est-à-dire tous les décrets d'application, éventuellement. C'est cela?

M. LEVESQUE: Je crois qu'il est important que, si une loi exige la signature d'un ministre sectoriel, et que cette signature continue d'être requise, cette loi-ci ne libère pas le ministre de cette obligation.

M. MORIN: Autrement dit, il y a des actes gouvernementaux...

M. LEVESQUE: Mais, ici, on parle...

M. MORIN: ... qui vont exiger deux signatures.

M. LEVESQUE: Non. Mais il ne faut pas oublier qu'il s'agit toujours des ententes intergouvernementales.

M. MORIN: Oui. J'ai compris. Mais est-ce que cela signifie que, dans certains cas...

M. LEVESQUE: Mais pas des décisions internes, disons, d'application. Ce n'est pas ça qui est touché. Ce sont les ententes elles-mêmes.

M. MORIN: Bien oui, mais ici on parle de donner effet aux ententes. Donner effet aux ententes, c'est les mettre en oeuvre, c'est les appliquer.

M. LEVESQUE: Pardon? Excusez-moi.

M. MORIN: Donner effet à une entente, c'est l'appliquer, c'est la mettre en oeuvre. Bon. Alors, expliquez-moi. Est-ce que cela signifie que, sur le plan interne, quelquefois cela va être une signature autre que celle du ministre et même, dans certains cas, cela pourrait être la signature, votre signature, plus celle d'un autre ministre ou celle d'une autre personne qui a signé l'entente?

M. LEVESQUE: Cela peut être la signature — on le verra à l'article 19 — avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur, du ministre des Affaires intergouvernementales seul. Mais l'article 18, à moins qu'il n'y ait cette autorisation, indique que le ministre sectoriel doit, lui aussi, signer. Autrement dit, c'est une ou deux signatures. Mais, pour avoir seulement une signature du ministre des Affaires intergouvernementales, cela prend l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil.

M. MORIN: Bien. D'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 18, adopté?

M. MORIN: Je suis prêt à l'adopter, oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 19?

M. MORIN: Pourriez-vous, comme pour l'article 18, élaborer un peu le sens précis de cet article?

M. LEVESQUE: II me semble que j'ai été assez clair. Pour rendre valide une entente intergouvernementale, il s'agit d'avoir la signature du ministre sectoriel. Il est normal que le ministre sectoriel ne perde pas l'autorité sur les responsabilités qui lui incombent par la loi. Mais on veut être sûr également que, s'il s'agit d'ententes intergouvernementales, le ministre des Affaires intergouvernementales y participe. Donc, deux signatures.

Cependant, l'article 19, lui, permet que seul le ministre des Affaires intergouvernementales y participe et signe seul. A ce moment-là, il ne peut pas le faire, c'est normal, sans que ses collègues du cabinet ne l'aient autorisé à ce faire, incluant le ministre sectoriel. Par exemple, en cas de maladie, d'absence.

M. MORIN: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 19, adopté. Article 20?

M. MORIN: Le ministre pourrait-il, à l'égard du second alinéa de cet article, indiquer dans quelles circonstances une commission scolaire peut être habilitée à signer une entente, au nom du gouvernement, avec un autre gouvernement, comme le gouvernement du Canada ou un gouvernement étranger?

M.LEVESQUE: Premièrement, une commission scolaire ne fait jamais une telle entente en son nom, mais au nom du gouvernement.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: On me dit qu'il arrive certains cas, comme les commissions scolaires dans le Grand Nord, dans le Nouveau-Québec, la question des Indiens, qui doivent s'engager vis-à-vis du gouvernement fédéral dans le domaine de l'éducation, de l'enseignement aux Indiens. Il y a également l'éducation des adultes, lorsqu'il y a des ententes entre une commission scolaire qui va donner des cours aux adultes dans certains cas précis et dont les fonds proviennent du gouvernement fédéral dans une compétence de lutte au chômage.

A ce moment-là, la commission scolaire ne le fait pas en son nom mais au nom du gouvernement du Québec et elle y est autorisée au préalable.

M. MORIN: Est-ce seulement la conclusion qui doit être autorisée au préalable ou si la négociation doit l'être également? Autrement dit, est-ce que l'initiative peut venir de la commission scolaire qui entame des négociations avec le gouvernement fédéral, par exemple, votre autorisation n'intervenant qu'au moment de la conclusion, avant la conclusion?

M. LEVESQUE: C'est pour cela que nous avons marqué "avec l'autorisation préalable" pour éviter toute initiative de la part d'une commission scolaire.

M. MORIN: Alors, ce ne serait pas mieux de mettre "négocier" à la place de "conclure", parce que conclure, techniquement, c'est seulement le dernier acte? Quand on a fini de négocier, on conclut l'accord.

Je vois que votre sous-ministre est d'accord, ce serait peut-être "négocier" qui serait le mieux, ou "négocier et conclure", je ne le sais pas.

M. LEVESQUE: Ce n'est pas cela qui me frappe; c'est qu'on devrait peut-être utiliser la négative à ce moment-là.

M. MORIN: J'aimerais mieux, moi, la négative, personnellement. En fait, ce que vous avez dans l'idée, c'est une interdiction.

M. LEVESQUE: Oui.

M. MORIN: Vous le présentez autrement, comme une sorte d'autorisation.

M. LEVESQUE: ... négocier, j'aimerais mieux la négative.

M. MORIN: Moi aussi. On pourrait dire alors: "Aucne commission scolaire ne peut négocier une telle entente au nom du gouvernement sans l'autorisation préalable de ce dernier".

M. LEVESQUE: Je ferai remarquer que le premier alinéa est négatif. Le toutefois amène donc une demande de positif dans le deuxième.

M. MORIN: Oui. "Négocier" réglerait le problème.

M. LEVESQUE: Peut-être que le mot "ou" serait mieux: "négocier ou conclure"...

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: ... et non pas "et" parce qu'à ce moment-là il faudrait les deux.

M. MORIN: Oui, d'accord. "Négocier ou conclure".

M. LEVESQUE: "Négocier ou conclure".

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, après "nullité", on dit: "négocier ou conclure". Article 20, adopté?

M. MORIN: Un instant, un instant.

M. LEVESQUE: Une commission scolaire peut — c'est la première ligne du deuxième alinéa...

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: "Toutefois une commission scolaire peut négocier ou conclure une telle entente au nom du gouvernement..."

M. MORIN: C'est cela. Maintenant, est-ce que vous voulez qu'on revienne un instant dans le premier alinéa? Je vois "nulle commission scolaire..." Ne croyez-vous pas que ce serait plus français de dire "aucune"? Nulle c'est anglais, je pense, c'est une traduction peut-être un petit peu trop littérale.

M. LEVESQUE: Pas d'objection, si vous pensez que...

M. MORIN: Je pense que c'est nettement mieux de dire "aucune commission scolaire ne peut faire telle chose. Remarquez, c'est...

M. LEVESQUE: Je n'ai pas d'opinion arrêtée là-dessus, on peut laisser aux légistes peut-être, du consentement de la commission, s'il y avait des raisons particulières pour employer "nulle" ou "aucune", de le mettre indifféremment. Je n'ai pas d'objection à accepter l'amendement, sous cette réserve.

M. MORIN: Très bien.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 20, adopté tel qu'amendé?

M. MORIN: Tel qu'amendé et avec l'entente que nous venons de conclure, entente !

M. LEVESQUE: Entente ou accord! M. MORIN: Vous avez... ou accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 21.

M. MORIN: M. le Président, j'aimerais demander au ministre qui est visé par cet article. Quel organisme en particulier? L'on recommence de la même façon, c'est encore...

M. LEVESQUE: Vous avez...

M. MORIN: ... cette mauvaise rédaction qui commence par "nul".

M. LEVESQUE: On va arrêter cela. Il y aura concordance s'il y a lieu.

M. MORIN: Oui, d'accord. Alors, on dirait éventuellement "aucun...

M. LEVESQUE: Organisme public, il est défini au troisième alinéa.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: Alors, c'est ce que je veux dire par organisme public. Il y a trois volets dans le troisième alinéa; il y a les organismes publics: Dont le lieutenant-gouverneur en conseil ou un ministre nomme la majorité des membres; c'est un cas. Le deuxième, c'est: Dont la loi ordonne que les fonctionnaires ou employés soient nommés ou rémunérés suivant la Loi de la fonction publique. Il y a un "ou" si on remarque bien, avant le troisième c'est "ou". Alors, ce n'est pas nécessaire d'avoir les trois éléments, mais un ou l'autre de ces éléments.

M. MORIN: Je vois.

M. LEVESQUE: Le troisième, c'est: Dont les ressources proviennent pour plus de la moitié du fonds consolidé du revenu. Alors on peut songer à l'Hydro-Québec, on peut songer aux universités, on peut songer à une foule d'organismes. C'est pourquoi on a l'article 22 qui permet au lieutenant-gouverneur en conseil d'exclure de l'application de la présente loi en tout ou en partie les catégories — est-ce que c'est cela? Oui — d'ententes qu'il désigne. D'ailleurs, un peu plus loin, dans les disposi-

tions finales, on dit: "La présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction à l'exception de l'article 21". Alors, justement parce qu'on n'a pas toutes les données, on a trouvé plus prudent de mettre en vigueur l'article 21 un peu plus tard lorsque nous aurons complété notre enquête et nos consultations.

M. MORIN: Sur tous les organismes qui sont susceptibles d'avoir conclu des ententes ou d'en conclure.

M. LEVESQUE: Oui, exactement et le type également d'entente qu'il conclut. Alors pour être plus prudents, nous avons jugé à propos, tout en définissant "organisme public", de laisser quelque temps passer, afin de compléter notre étude de la situation.

M. MORIN: D'accord. Est-ce que vous acceptez...

M. LEVESQUE: En rapport avec leur ministère de tutelle. Nous sommes déjà en rapport avec les ministères de tutelle de plusieurs de ces organismes pour nous renseigner davantage, avant de promulguer l'article 21.

M. MORIN: Je comprends. Est-ce que le ministre accepterait de mettre "aucun" à la place de "nul" au début de cet article, de la même façon?

M. LEVESQUE: Mutatis mutandis, si on change un on changera l'autre avec la même réserve. On va laisser les savants légistes nous dire s'ils ont des objections. Quant à moi je n'en ai pas.

M. MORIN: A l'article 21 nous n'avons pas d'objection, ni à l'article 22, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors "nul" est remplacé par "aucun".

M. LAVOIE: M. le Président, avec votre permission, il est vrai qu'il est plutôt rare qu'un président prenne part au débat, mais la coutume parlementaire a toujours permis à un président de prendre part à la discussion en commission plénière ou en commission parlementaire. A la suite de la lecture de l'article 21 et de l'article 22, tels que rédigés, je craindrais que le troisième paragraphe de l'article 21 puisse couvrir l'Assemblée nationale, qui nécessairement est comprise dans la définition qu'on voit au troisième paragraphe de l'article 21, entre autres, "dont le lieutenant-gouverneur en conseil ou un ministre nommé", et un peu plus loin, "dont la loi ordonne que les fonctionnaires ou employés sont nommés ou rémunérés suivant la Loi de la fonction publique" qui s'applique à l'Assemblée nationale.

M. MORIN: Oui, le président a raison là-dessus.

M. LAVOIE: Et, également, "ou dont les ressources proviennent, pour plus de la moitié, du fonds consolidé du revenu." Je pense bien qu'il y aurait danger. Je connais quand même le respect du ministre qui présente le projet de loi pour le grand principe du partage des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. Même si une tutelle amicale pourrait être acceptable de la part du ministre des Affaires intergouvernementales, je pense bien que, dans le respect de l'autonomie de notre Parlement et de l'Assemblée nationale, il faudrait prévoir que cette loi n'assujettirait pas une institution qui est l'Assemblée nationale à l'Exécutif, notamment au ministère des Affaires intergouvernementales.

Et pour cette raison, je pense bien qu'à l'article 22 on pourrait ajouter un paragraphe, après consultation avec les légistes d'ailleurs et préavis, qui pourrait se lire comme suit: sont notamment exclues de la présente loi les ententes auxquelles l'Assemblée nationale est partie. Je ne sais pas si ce serait suffisant. Vous savez que nous faisons partie de deux associations internationales, entre autres l'AIPLF, l'Association internationale des parlementaires de langue française, et CPA, Commonwealth Parliamentary Association ou l'Association des parlementaires du Commonwealth, et il peut y avoir des protocoles, il peut y avoir des échanges.

Il y a eu même un fonctionnaire, qui était du ministère des Affaires intergouvernementales, qui a été prêté à l'AIPLF. Mais si cette rédaction, d'après les conseillers juridiques, est satisfaisante, moi...

M. MORIN: Je suis en gros, d'accord. Je m'interroge seulement sur la meilleure façon d'exprimer la chose. Dans les autres pays, les Assemblées nationales, les Parlements ne concluent pas d'accords, ne concluent pas d'ententes internationales, encore moins, à fortiori, intergouvernementales.

Il y a, généralement, tout de même, certaine sujétion des rapports que pourrait avoir une Assemblée nationale avec les Etats étrangers, sujétion à la diplomatie de l'Etat en question.

La question se pose peut-être moins chez nous, puisque nous n'avons pas encore de diplomatie, sauf celle du président de l'Assemblée, comme à Bruxelles, mais, sur le plan juridique, j'ai quelques hésitations.

M. LAVOIE: Je pourrais vous donner un exemple. Entre autres, lors d'une dernière mission à Paris, au mois d'octobre, nous avons voulu, sans écrit concret, institutionnaliser des échanges de parlementaires. Une année, le Québec recevrait un groupe de cinq ou six parlementaires, ici, en visite au Parlement, en comité de travail, et, l'année suivante, avec une rotation un peu continue, les parlementaires du Québec seraient les invités des parlementaires français. Nous l'avons fait de vive voix, sans écrit. Avec l'évolution qu'a le Parlement du Québec actuellement et l'ouverture que l'As-

semblée a même avec des pays de droit parlementaire britannique ou de l'autre section, de notre tradition de francophonie, ou même avec d'autres pays, nous avons couramment des échanges soit avec la Hongrie, à l'occasion avec la Roumanie ou d'autres. Ce n'est pas l'intention de l'Assemblée de partir en campagne pour établir des relations écrites et formelles avec les autres Parlements. Mais nous voulons pousser encore de l'avant ces échanges. C'est une expérience nouvelle pour les parlementaires québécois et nous voulons apporter à l'étranger notre expérience et la contribution du Québec et du Canada, quitte à aller chercher ailleurs des renseignements utiles pour les travaux de notre Assemblée.

Vous dites que ce n'est pas la coutume, qu'il n'est pas question pour l'Assemblée de signer des traités. Je voudrais me limiter, dans le respect du partage des pouvoirs, entre l'Exécutif et le Législatif. Pour le moment et pour longtemps, c'est cela. Nous devons respecter cette division qui doit exister entre le Législatif et l'Exécutif. La rédaction que vous trouverez convenable sera acceptable à celui qui vous parle.

M. MORIN: Moi aussi, M. le ministre, je suis prêt à m'en remettre à vos conseillers juridiques sur ce point...

M. LEVESQUE: D'accord.

M. MORIN: ... à la condition que vous nous informiez du résultat.

M. LEVESQUE: Oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 21, adopté tel qu'amendé, et article 22, adopté tel qu'amendé. Article 23? Je remarque qu'à l'article 23 il manque un "i" à ministre.

M. MORIN: Oui, cela, c'est l'imprimeur.

A l'article 23, nous n'avons pas d'objection.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 24? Adopté?

M. MORIN: Non, un instant. Si j'ai bien compris la portée de cet article, le délégué général représente, dans le pays où il se trouve, tous les ministères. Quand vous dites "tous les secteurs d'activité qui sont de la compétence constitutionnelle du Québec", vous voulez dire, en fait, aussi bien le ministère de l'Immigration que le ministère des Affaires culturelles, que tous les ministères qui ont des activités à l'étranger? C'est bien cela?

M. LEVESQUE: C'est cela.

M. MORIN: Alors, d'accord pour l'article 24.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 26?

M. MORIN: Non, article 25. Vous avez sauté par-dessus l'article 25.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 25?

M. MORIN: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 26?

M. MORIN: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 27?

M. MORIN: A l'article 27, si vous voulez, on va prendre une seconde. J'ai quelques observations à faire. Oui... Si j'ai bien compris la portée de cet article, cela vous autorise à signer des ententes dans les domaines constitutionnels où il existe une compétence conjointe ou partagée, comme on dit quelquefois, signer des accords avec le gouvernement fédéral, de façon que vous puissiez placer des fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales ou, j'imagine, des fonctionnaires appartenant à d'autres ministères...

M. LEVESQUE: L'Immigration, par exemple.

M. MORIN: ... comme l'Immigration, comme les Affaires culturelles, dans les bureaux des missions diplomatiques ou consulaires canadiennes, là où le Québec n'a pas de délégué.

M. LEVESQUE: ... n'a pas de délégué.

M. MORIN: Bien. M. le ministre, je voudrais attirer votre attention sur l'expérience assez malheureuse de votre collègue de l'Immigration dans ce domaine. Je lisais récemment l'un de ses discours, un discours du 26 mars 1974, dans lequel votre collègue disait ceci: "Avant de mettre en place une politique d'immigration plus dynamique et qui rencontre les besoins du Québec, il faudra d'abord franchir un obstacle majeur, celui de notre absence, doublé de notre ignorance, qui fait que nous ne connaissons pas les candidats à l'immigration, que nous ne les sélectionnons pas, que nous ne les recrutons pas, que nous ne savons pas qui arrive au Québec et, par conséquent, que nous ignorons s'ils correspondent à nos besoins. En d'autres termes, et pourquoi se le cacher — dit toujours votre collègue qui parle — le Québec n'a aucune présence ni aucun pouvoir en ce qui concerne la sélection et le recrutement de ces nouveaux venus". Le ministre faisait allusion au fait que son ministère disposait de seulement sept agents

en poste à l'étranger, dont trois dans les ambassades canadiennes à Athènes, à Beyrouth et à Rome.

Et, là-dessus, il faisait le commentaire suivant. C'est à la page 9 de son discours: "Ces agents ne rencontrent que les candidats du pays où ils sont en mission et sous deux conditions. Il faut que ces derniers acceptent l'entrevue et cela, après avoir été explicitement référés par les agents fédéraux. Par ailleurs, les agents du Québec n'ont pas de pouvoir propre de recrutement aux termes de l'entente". Il s'agit de l'entente signée par le ministre actuel de l'Education, je crois, à l'époque où il était au ministère des Affaires intergouvernementales, une entente qui a fait passablement rire du Québec, je crois, à Ottawa.

M. LEVES QUE: Qui était aux Affaires intergouvernementales?

M. CHARRON: II était à l'Immigration. Quand M. Cloutier...

M. MORIN: M. Cloutier, oui,...

M. CHARRON: ... était à l'Immigration.

M. MORIN: ... quand il était à l'Immigration.

M. LEVESQUE: Ah bon!

M. MORIN: Bon. Alors, cela étant constaté, je me demande si ce système peut fonctionner, s'il répond aux besoins du Québec. Dans tous les cas, semble-t-il, où vous avez utilisé cette formule, d'insérer des fonctionnaires québécois à l'intérieur des missions fédérales, on les a parqués dans les coins et on a fait comme s'ils n'existaient pas.

M. LEVESQUE: Je veux rassurer immédiatement le chef de l'Opposition. Il aura l'occasion de poser la question sans doute à mon collègue qui me suit dans la législation, relativement au ministère de l'Immigration. Mais je dois lui dire que nous n'avons pas l'intention de mettre des gens en poste à l'Immigration et de conclure de telles ententes, qui sont permises par l'article 27, sans la volonté du ministre sectoriel.

Alors, c'est un pouvoir que nous avons. Si le ministre de l'Immigration est d'avis que cela ne répond pas à ce qu'il recherche, nous ne sommes pas obligés d'appliquer l'article 27 si ce n'est pas dans les intérêts du Québec. C'est simplement un pouvoir que nous avons. Il peut arriver, et c'est déjà arrivé, que le ministre nous demande de placer un de ses fonctionnaires à tel endroit, à l'intérieur d'une ambassade. Nous pouvons le faire, à condition qu'il ne s'agisse pas d'une compétence exclusive du Québec et à condition qu'il n'y ait pas de délégué dans ce pays.

M. MORIN: J'ai compris. Est-ce que les fonctionnaires de l'Immigration qui sont en poste à Paris, à Beyrouth, à Rome relèvent de votre ministère, à l'heure actuelle?

M. LEVESQUE: Ceux qui sont à Paris relèvent du délégué général. Ceux qui sont à Beyrouth, etc., pour leurs allocations, etc., pour leur bien-être autrement dit, relèvent de nous. Mais les instructions qu'ils reçoivent, ils les reçoivent de leur ministère, soit le ministère de l'Immigration.

M. MORIN: Est-ce que ces instructions, vous les coordonnez...

M. LEVESQUE: Oui, mais quant au contenu...

M. MORIN: ... en vertu des articles...

M. LEVESQUE: Je parle de la politique de l'immigration du Québec. Cela relève du ministère sectoriel. Nous n'avons pas l'intention de nous attaquer au contenu par l'introduction des dispositions que l'on retrouve dans le présent projet de loi.

M. MORIN: Mais est-ce que, d'après l'article 10,...

M. LEVESQUE: Nous pouvons coordonner.

M. MORIN: Oui, vous coordonnez toutes les activités du gouvernement à l'extérieur du Québec...

M. LEVESQUE: C'est ça.

M. MORIN: ... ainsi que celles de ses ministères et organismes.

M. LEVESQUE: Mais présentement, nous avons — et on le voit un peu plus loin ici, à l'article 30: "Seul le ministre peut affecter à l'extérieur du Québec des membres du personnel de la fonction publique". Cela est un peu plus nouveau.

M. MORIN: Est-ce que vos collègues sont d'accord sur cet article?

M. LEVESQUE: Oui, oui, aujourd'hui. M. MORIN: Aujourd'hui mais pas hier. M. LEVESQUE: Aujourd'hui!

M. MORIN: Bien. Alors l'article 27 peut être accepté, quoique je doute fort qu'il soit vraiment utile.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 27, adopté. Article 28.

M. MORIN: Dois-je comprendre que le

ministre met à la disposition des personnes déléguées à l'étranger des bureaux, même au sein des missions diplomatiques ou consulaires du Canada, ou bien s'il s'agit, dans leur cas, de l'article 28, des bureaux qui relèvent des délégations générales ou des bureaux du Québec à l'étranger?

M. LEVESQUE: Avec l'exception de l'article 27...

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: ... dans tous les autres cas, c'est notre responsabilité.

M. MORIN: Autrement dit...

M. LEVESQUE: C'est l'aspect matériel.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: Evidemment, dans les bureaux fédéraux, on n'a pas besoin de le faire. Ils sont logés.

M. MORIN: Bon, j'ai compris. Je voulais savoir si cela se référait aussi à l'article 27.

M. LEVESQUE: C'est pour cela qu'on commence l'article 28 avec les mots: "Sous réserve de l'article 27..."

M. MORIN: Oui. Bon. Très bien, c'est clair.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 28, adopté? Article 29.

M. MORIN: Oui, adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté.

Article 30.

M. MORIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté?

M. MORIN: Oui, adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 31.

M. MORIN: Un instant, voulez-vous?

M. LEVESQUE: M. le Président, je pense qu'on le comprend. "Le ministre ne peut affecter à l'extérieur du Québec des personnes pour représenter un ministère autre que le sien..." C'est-à-dire que, pour le ministère des Affaires intergouvernementales, cela va de soi. On n'a pas de consultation à faire. Tandis que dans le cas d'un ministère sectoriel, on ne nommera pas quelqu'un sans le consentement du ministère sectoriel.

M. MORIN: J'ai compris, oui. C'est la contrepartie de l'article 30.

M. LEVESQUE: C'est cela, de l'article 30.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 31, adopté?

M. MORIN: C'est ce que vous avez été obligé de concéder pour obtenir l'article 30.

M. LEVESQUE: C'est normal.

M. MORIN: Oui, je comprends. D'accord. Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté.

Article 32.

M. LEVESQUE: On peut même prendre quelqu'un de l'extérieur de la fonction publique et le nommer. Lorsqu'on va dans un ministère sectoriel, c'est normal de demander l'assentiment du ministre.

M. MORIN: Oui, c'est normal. Je ne conteste pas.

Article 32, adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 33.

M. MORIN: Un instant. Oui, cela, c'est la disposition presque standard.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté?

M. MORIN: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 34.

M. MORIN: Est-ce que c'est ce qu'on pourrait appeler — je m'interroge — les pleins pouvoirs que vous visez à l'article 34? L'une des questions que je me suis posées en lisant votre projet de loi, particulièrement au chapitre consacré aux ententes — ce que je préférerais appeler pour ma part les accords — il n'est pas fait allusion aux pleins pouvoirs. Vous savez que dans les accords antérieurs du Québec, particulièrement pour ce qui est de l'accord signé entre le ministre Pierre Laporte et M. François Leduc, ambassadeur de France, cet accord avait fait l'objet de pleins pouvoirs.

M. Laporte avait reçu les pleins pouvoirs. Dans un autre cas, c'est M. Gérin-Lajoie qui a reçu les pleins pouvoirs du conseil des ministres. Est-ce que ces pleins pouvoirs ont disparu de votre pratique gouvernementale?

M. LEVESQUE: Evidemment, les pleins pouvoirs, c'est un mandat qui vient du lieutenant-gouverneur en conseil; c'est le pouvoir d'engager le Québec. Cela a toujours existé, disons, cela se pratique maintenant, mais, d'un autre côté, l'article 34 articule cela d'une façon assez précise.

M.MORIN: Ce ne sont pas vraiment des pleins pouvoirs à l'article 34; c'est simplement une constitution de délégation. Mais cette délégation-là pourrait-elle être appelée à signer des ententes, par exemple?

M. LEVESQUE: La délégation officielle est constituée, mais également mandatée par le lieutenant-gouverneur; elle reçoit un mandat clair et précis.

M. MORIN: Alors, ce sont des pleins pouvoirs, dans ce cas-là.

M. LEVESQUE: Cela peut être des pleins pouvoirs.

M. MORIN: C'est un instrument de pleins pouvoirs. Je n'ai pas très bien saisi votre réponse. Pourquoi n'a-t-on pas prévu les pleins pouvoirs au chapitre consacré aux ententes intergouvernementales?

Je vois que votre sous-ministre fait signe qu'il ne comprend pas. Le sous-ministre doit savoir que, pour qu'une entente puisse être signée de façon à lier le Québec, il faut que la personne qui signe obtienne les pleins pouvoirs. C'est comme cela que ça s'est fait dans le passé au Québec. Le ministre n'a qu'à regarder les archives, ses dossiers, il va trouver cela.

M. LEVESQUE: Cela se fait chaque fois qu'une entente est signée. Le conseil des ministres a l'arrêté et, ensuite, l'annexe en question. A ce moment-là, il autorise le ministre à signer l'entente qui est en annexe.

M. MORIN: Mais ce qui me frappe, c'est que vous avez prévu la "ratification" l'approbation, la mise en oeuvre, mais vous n'avez pas prévu la première étape qui est les pleins pouvoirs. Je ne veux pas en faire un plat, mais il me semble que ça manque.

M. LEVESQUE: Je pense qu'on va vivre avec ça au moins jusqu'à la prochaine session. S'il nous manque des pleins pouvoirs, nous reviendrons.

M. MORIN: En tout cas, j'attire votre attention là-dessus; ça me frappe.

M. LEVESQUE: D'accord.

M. MORIN: Je vois que votre sous-ministre est d'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 34, adopté. Article 35?

M. MORIN: Un instant.

Article 35, paragraphe un, cela va. Mais je voudrais prendre le temps de lire attentivement le second alinéa.

Dans le cas du second alinéa, on suppose que le gouvernement fédéral a signé un accord...

M. LEVESQUE: Avec un gouvernement étranger.

M. MORIN: Avec un gouvernement étranger naturellement dans un domaine qui relève de la compétence du Québec. C'est bien ça? Je vois le sous-ministre qui dit oui de la tête, mais, si le ministre pouvait me répondre, ce serait plus clair.

M. LEVESQUE: II y a, par exemple — on peut illustrer cela — un accord qui me vient à l'esprit: c'est l'accord belgo-canadien, accord scientifique, technique et industriel, si je me rappelle bien le titre. Le Québec a accepté de participer à la mise en oeuvre de cet accord.

M. MORIN: Si je comprends bien, c'est dans les cas où vous auriez voulu vous-même signer l'accord, mais le gouvernement fédéral est arrivé avant vous et vous a damé le pion.

M. LEVESQUE: Non, parce qu'en 1967, lorsque le Canada a fait une entente avec la Belgique, un accord culturel — pas une entente, un accord culturel — le Québec, n'ayant pas été consulté et n'ayant pas été partie à cette négociation, n'a pas voulu y donner suite.

M. MORIN: C'est cela, c'est ce que je dis.

M. LEVESQUE: Tandis que dans l'accord scientifique, nous participons, parce que nous avons été consultés, nous avons été partie à la négociation et nous sommes heureux de participer à la mise en oeuvre. Dans le cas de l'accord culturel belgo-canadien de 1967, même aujourd'hui, "motte".

M. MORIN: Eh! bien, je félicite le ministre parce s'il veut bien se remémorer la chose, cet accord belgo-canadien en matière culturelle avait pour but d'empêcher le Québec d'en signer un, justement. C'était pour...

M. LEVESQUE: Nous étions, d'une part, en négociation avec nos amis belges et, d'autre part, à un moment donné, on s'est aperçu qu'il y avait eu... Je n'étais pas là, à ce moment, c'était un gouvernement antérieur, mais en lisant les dossiers, je m'aperçois de ce qui s'est passé.

M. MORIN: L'ambassade canadienne à Bruxelles a fait son boulot, comme cet été à la conférence de l'AIPLF.

M. LEVESQUE: Hum!

M. MORIN: Bien. M. le Président, cela va pour l'article 35.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 35, adopté. Article 36.

M. MORIN: Je voudrais demander au ministre s'il peut préciser l'expression "participe". J'ai l'intuition qu'elle a un sens bien précis, mais est-ce qu'il ne serait pas plus simple de parler des institutions francophones dont le Québec est membre?

M. LEVESQUE: C'est plus restrictif, plus limitatif. J'aime mieux garder cela plus large.

M. MORIN: Mais qu'est-ce que cela veut dire "les institutions auxquelles nous participons"? Cela ne veut-il pas dire automatiquement qu'on en est membre? Connaissez-vous des cas où...

M. LEVESQUE: J'y pense, je suis...

M. MORIN: ... nous participons sans être membre?

M. LEVESQUE: II y a des situations où nous présidons une délégation canadienne.

Nous voulons même, à l'intérieur de délégations canadiennes — je pense aux sports et loisirs; on voudrait que ce soit assez large, même si nous ne sommes pas membre comme tel. Mais à cause...

M. MORIN: Cela pourrait-il être une participation au sein d'une délégation fédérale? C'est ça que ça veut dire?

M. LEVESQUE: Cela pourrait être ça. C'est-à-dire on ne voudrait pas le rendre plus restrictif, on voudrait avoir les coudées franches là-dedans pour s'assurer de favoriser la consolidation des institutions francophones internationales, même là où nous ne sommes pas membres, mais où nous apportons une participation, où nous sommes présents.

M. MORIN: D'accord, là je comprends. Je m'interrogeais sur la raison pour laquelle c'était rédigé de façon si vague, mais là je comprends très bien pourquoi; alors cela va. Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 36, adopté. Article 37.

M. MORIN: Adopté.

LE PRESIDENT (M.Houde, Limoilou): Adopté. Article 38.

M. MORIN: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 39, adopté.

M. MORIN: Un instant. Oui, d'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Article 40.

M. MORIN: L'article 40, est-ce que le ministre pourrait nous donner des précisions sur l'application concrète de cet article? Quelles sont les personnes des autres ministères qui sont transférées au ministère des Affaires intergouvernementales? Est-ce que ce sont des services, des directions qui sont transférés et ça touche combien de personnes en tout?

M. LEVESQUE: Je pense qu'il y a deux mots importants là-dedans: les mots "fonctions principales", aux troisième et quatrième lignes. Et, la dernière phrase: "Suivant que le détermine le lieutenant-gouverneur en conseil". Nous avons mis ces précisions. Nous n'avons pas l'intention de vider les autres ministères, nous avons l'intention de nous limiter à ceux dont c'est réellement la fonction de s'occuper de la coopération, de la technique de la coopération. Nous n'avons pas l'intention d'enlever tous les gens qui sont dans le contenu dans les ministères sectoriels.

Nous voulons également que cela se fasse progressivement, pas du jour au lendemain, immédiatement demain matin, mais à mesure que le lieutenant-gouverneur en conseil fera les détachements en question, si on veut. Nous songeons par exemple, pour vous donner une illustration — je ne suis pas pour donner toute la nomenclature ou l'énumération — au service de coopération du ministère de l'Education.

On sait qu'au ministère de l'Education il y a un service de coopération assez important et qui s'explique pour des raisons historiques; sa présence précédait la création du ministère des Affaires intergouvemementales. Cela se comprend. Aux Affaires sociales, c'est un peu le même cas, pas tout à fait, mais c'est une création plus récente. Tout de même, là encore, il y a un service de coopération internationale et ainsi de suite.

M. MORIN: A l'Immigration, monsieur...

M. LEVESQUE: A l'Immigration, nous ne songeons à aucun transfert.

M. MORIN: Est-ce qu'il y a d'autres ministères? Vous avez mentionné Education, Affaires sociales...

M. LEVESQUE: II y a certaines personnes dans d'autres ministères, mais ce n'est pas précisé. Les sous-ministres de notre ministère et des ministères en question doivent se rencontrer pour déterminer exactement qui occupe des fonctions dont l'essentiel se relie aux relations intergouvernementales, plutôt qu'au contenu dans le ministère même, aux techniques, autrement dit, de coopération.

M. MORIN: Mais vous avez quand même une idée assez précise.

M. LEVESQUE: Dans les autres ministères, c'est plus difficile à identifier, vous comprendrez, parce qu'ils n'ont pas tous des services de coopération internationale. Mais nous pensons bien que, d'ici à quelques mois, pour le plus gros des effectifs, cela devrait se faire et, ensuite, au cours d'une année ou deux, on devrait être en mesure d'avoir complété l'opération.

M. MORIN: Avez-vous déjà consulté vos collègues à ce sujet?

M. LEVESQUE: Longuement.

M. MORIN: C'est ce que je pensais. Vous n'auriez pas rédigé cet article, vous ne l'auriez pas inclus dans le projet de loi sans déjà amorcer la négociation.

M. LEVESQUE: Comme toujours, évidemment, nous avons eu une acceptation de principe au cabinet. Nous l'avons soumis à la commission de législation. Nous avons eu des discussions là-bas, autant au niveau ministériel qu'au niveau des hauts fonctionnaires, etc. D'ailleurs, cela a été présenté à diverses instances et nous en sommes arrivés à cette conclusion.

M. MORIN: En somme, deux ministères vont être touchés; l'Education et les Affaires sociales. L'Immigration ne le sera pas. En gros, c'est le tableau.

M. LEVESQUE: Non, mais il y a d'autres ministères également. Il y a certainement des gens dans d'autres ministères qui seront affectés, mais cela ne sera pas en grand nombre. Ce sera seulement les personnes — c'est bien spécifié — "dont les fonctions principales correspondent à celles attribuées par la présente loi au ministre".

M. MORIN: Est-ce qu'il y en a à l'Industrie et au Commerce?

M. LEVESQUE: II y en a sûrement. Maintenant, il s'agit simplement de les identifier.

M. MORIN: Y en a-t-il au ministère des Transports?

M. LEVESQUE: Peut-être, mais...

M. MORIN: Pourriez-vous me nommer les ministères, en gros, qui seront touchés, autres que ceux que j'ai déjà mentionnés?

M. LEVESQUE: Aux Affaires culturelles, peut-être quelques-uns.

M. MORIN: Oui. En somme, c'est tout.

M. LEVESQUE: Au ministère des Communications, mais encore avec un point d'interrogation.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 40, adopté?

M. LEVESQUE: II serait prématuré, à ce moment-ci, de donner une liste. Je pense qu'on est mieux d'attendre que les consultations soient terminées. Je serai très heureux, à une question que me posera à moi ou à mon successeur le chef de l'Opposition ou son successeur, enfin, de collaborer.

M. MORIN: Dans un cas comme dans l'autre, on peut penser que cela peut se passer dans plusieurs années.

Cela va pour l'article 40.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 40. Adopté. Article 41. Adopté?

M. MORIN: Oui, cela va.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Alors, revenons à l'article 16 qui est en suspens.

M. MORIN: Oui.

M. LEVESQUE: Cela fait sept ou huit dictionnaires qu'on vient de lire et on n'est pas plus avancé.

M. MORIN: Si vous n'êtes pas plus avancé ou si vous hésitez entre les deux, je dirais qu'à tout prendre vous feriez mieux de pencher pour l'expression qui est connue internationalement.

M. LEVESQUE: Justement, j'aime mieux le mot entente encore, parce que c'est plus générique. Accord est plus technique au point de vue international, tandis que je songe aux ententes que nous avons entre Etats membres de la fédération. C'est pour cela que j'aime mieux garder le mot entente. C'est une préférence, malgré qu'on vient de me dire...

M. MORIN: C'est kif-kif.

M. LEVESQUE: C'est kif-kif. Je le garde. Je peux bien le garder vu que je suis le parrain de la loi.

M. MORIN: C'est le seul argument qu'il vous reste.

Je trouve cela un peu regrettable, parce que sur le plan fédéral-provincial, je crois que les documents fédéraux parlent d'accords, ils ne parlent pas d'ententes. Cela aurait été bon d'avoir le même vocabulaire partout.

M. LEVESQUE: Si jamais je changeais d'idée — la nuit porte conseil — en troisième lecture, je

serais prêt à vous donner raison si mes conseillers disent que... Moi, je n'ai pas de préférence. La petite préférence que j'ai, je la garde, pour tout de suite.

M. MORIN: D'accord. Un dernier argument, qui n'emportera peut-être pas le morceau, mais on ne sait jamais. Vous vous êtes donné du muscle en employant à l'article 15 le mot "ratification", n'est-ce pas? Vous vous comportez dans le vocabulaire comme un Etat qui conclut des accords internationaux. Pourquoi n'utilisez-vous pas le même raisonnement à l'article 16?

M. LEVESQUE: D'accord.

Il y a une chose que je voudrais ajouter, si on me le permet. A l'article 22, on a trouvé une formule — je ne sais pas si cela fait l'affaire des membres de la commission — disant que "sont notamment exclues de la présente loi les ententes conclues dans le cadre des relations établies par l'Assemblée nationale avec des institutions parlementaires à l'extérieur du Québec." Je pense que l'objection ou l'inquiétude manifestée par le chef de l'Opposition trouverait ici une solution. Nous l'avons présenté au président de l'Assemblée nationale qui est d'accord sur ce texte.

M. MORIN: Oui, cela répond à mon inquiétude.

M. LEVESQUE: Finalement, il y avait le mot...

M. MORIN: Nous n'avons pas formellement adopté l'article 16 encore.

M. LEVESQUE: Lequel?

M. MORIN: L'article 16. Si nous devons le faire, M. le Président, nous le considérons comme adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Article 16, adopté.

M. MORIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Un instant, est-ce qu'on peut revenir maintenant à un amendement que nous avions accepté à l'article 14?

M. MORIN: Avons-nous accepté l'article 22, formellement, avec l'amendement?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Oui.

M. MORIN: Oui, très bien. Alors, l'article 14, maintenant.

M. LEVESQUE: A l'article 14, il y avait le mot interne que j'aimerais voir remplacé par un autre, par le mot..." Le ministre collabore avec les autres ministères du gouvernement dans la mise en oeuvre à l'extérieur du Québec des politiques particulières, "plutôt qu"'internes", parce qu'avec le mot "extérieur" juste avant...

M. MORIN: D'accord, d'accord.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Après "politiques" à la quatrième ligne.

M. LEVESQUE: Au lieu d"'internes". On avait accepté un amendement...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Au lieu du mot "internes", inscrire "particulières"?

M. LEVESQUE: "Particulières" au lieu d"'internes".

M. MORIN: Oui. Je suis d'accord, M. le Président, et on peut considérer que l'article 14 est adopté.

Je pense que cela met fin au travail.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le projet de loi no 59, Loi du ministère des Affaires intergouvernementales, est adopté avec amendements.

M. LEVESQUE: Je remercie ceux qui ont participé à l'étude de ce projet de loi et ceux qui ont contribué à l'améliorer.

M. HOUDE, Limoilou (Président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre commission a adopté le projet de loi no 59 avec des amendements qu'il vous prie d'agréer.

LE PRESIDENT: Est-ce que ce rapport est agréé?

DES VOIX: Agréé.

LE PRESIDENT: Agréé.

M. LEVESQUE: M. le Président, les commissions siégeront immédiatement, tel qu'annoncé: Commission permanente de l'agriculture à la salle 91-A, commission permanente des affaires sociales à la salle 81-A, et la commission permanente des affaires municipales au salon rouge.

Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, dix heures.

LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adopté?

DES VOIX: Adopté.

LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 21 h 28)

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