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(Dix heures six minutes)
Le Vice-Président (M. La montagne): A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. Bienvenue: Pourriez-vous, M. le Président, reporter cet
article après la période des questions?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Est-ce qu'il y a
consentement unanime?
Des Voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Dépôt de
rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.
Rapport sur le projet de loi no 180
M. Bienvenue: Le greffier en loi de la Législature fait le
rapport suivant que je porte à la connaissance des membres de cette
Chambre. J'ai examiné, suivant les règles de pratique, le projet
de loi no 180, Loi concernant la ville de Longueuil. L'avis régulier est
suffisant et le projet déposé est conforme à l'avis.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Ce rapport est-il
agréé?
Présentation de motions non annoncées. Présentation
de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles. Dépôt de
documents.
L'honorable ministre de l'Education.
DEPOT DE DOCUMENTS
Rapports concernant les universités du
Québec
M. Cloutier: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer les documents suivants: 1) Arrêté en conseil
concernant l'octroi de subventions pour le paiement des dépenses de
fonctionnement des universités du Québec en 1974/75. 2)
Arrêté en conseil concernant l'octroi de subventions pour le
paiement des dépenses de fonctionnement des universités du
Québec en 1975/76. 3) Rapport du ministre de l'Ed ucation sur les
subventions de fonctionnement. 4) Avis du Conseil des universités au
ministre de l'Education sur les subventions de fonctionnement pour 1975/76. 5)
Commentaires du ministère de l'Education sur les recommandations
formulées par le Conseil des universités. 6) Calcul des
subventions de fonctionnement des universités du Québec pour
1974/75. 7) Calcul des subventions de fonctionnement des universités du
Québec pour 1975/76. 8) Règles relatives au financement des
universités du
Québec, pour 1975/76, pour les subventions de fonctionnement.
Contrairement aux deux dernières années où j'avais
l'habitude de déposer simultanément le plan quinquennal des
investissements universitaires en même temps que les subventions de
fonctionnement, je dépose uniquement les subventions de fonctionnement
et je prévois déposer le plan quinquennal des investissements un
peu plus tard au cours de la présente session.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable ministre
des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.
Rapport des Institutions financières Compagnies
et Coopératives
M. Tetley: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du
ministère des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives pour l'année qui se termine le 31 mars 1975.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Question orales des
députés.
L'honorable député de Saguenay.
QUESTIONS DES DEPUTES Grève à Asbestos
Corporation
M. Lessard: Ma question s'adresse au ministre du Travail. S'il
veut me répondre, il va falloir qu'il prenne sa place. Le ministre du
Travail est informé qu'une grève se continue à Asbestos
Corporation. Le 3 mai 1975, selon le journal Le Devoir, le ministre du Travail
a révélé qu'il venait d'ordonner à la Commission
des Accidents du travail de tout mettre en oeuvre pour indemniser, à
leur plein salaire et ce jusqu'à leur retraite, tous les travailleurs
des mines qui seront déclarés éventuellement inaptes au
travail en vertu d'un nouvel arrêté en conseil adopté le
1er mai.
Je voudrais savoir, de la part du ministre du Travail, s'il a
l'intention, avant la fin de cette session, de proposer sa loi pour permettre
aux travailleurs qui seront déclarés inaptes au travail d'obtenir
une pleine compensation de leur salaire. D'autant plus qu'on sait que cela
pourrait être une partie du règlement de la grève actuelle
à Asbestos Corporation, selon les informations des syndicats.
M. Cournoyer: C'est l'intention du gouvernement de proposer une
loi avant la fin de la présente session, sur le problème des
pertes de permis de travail par les individus à la suite de
l'arrêté en conseil 887.
M. Lessard: Le ministre peut-il nous assurer, puisque cela a
été déclaré le 3 mai 1975, que cette loi va
être déposée d'ici la fin de juin?
M. Cournoyer: Je vous ai dit que c'était l'intention du
gouvernement de présenter une loi avant la fin de la présente
tranche de session pour éviter de dire: session, continuation
avant la fin de la présente tranche de session.
M. Lessard: D'accord. Est-ce qu'on peut obtenir aussi
l'assurance, du ministre du Travail ou du ministre des Richesses naturelles,
que seront compris dans cette loi ou dans une autre loi les règlements
ou les normes concernant l'amiantose ou le nombre de fibres par
centimètre cube?
M. Cournoyer: Je ne peux répondre à cette
dernière partie de la question, mais je vous dis que la loi que je
propose est intimement reliée à la mise en application du
règlement qui est fait par le ministre des Richesses naturelles.
M. Massé: M. le Président, pour compléter la
réponse du ministre du Travail, il existe un comité
interministériel pour étudier les normes de salubrité. Les
règlements devraient paraître dans la Gazette officielle dans
quelques mois.
M. Lessard: Une question additionnelle au ministre des Richesses
naturelles. Est-ce que le ministre des Richesses naturelles, suite à
certaines révélations qui ont été faites concernant
les mines d'amiante dans l'Ungava, Asbestos Hill, a fait une enquête
à ce sujet et envoyé ses inspecteurs?
M. Massé: M. le Président, je pense que ce qui a
été déclaré en fin de semaine passée est en
grande partie exact. Je dois dire, d'autre part, que, lorsque l'on mentionne
qu'il existe 145 fois plus de fibres par centimètre cubeque la normale,
c'est qu'il y a eu des échantillons à différents endroits.
Quand on parle de 726 fibres par centimètre cube, c'est dans des
endroits où il n'existe pas de travailleurs. Des recommandations ont
été transmises à la compagnie. Plusieurs
vérifications du ministère nous assurent que, dans la plupart des
cas, il y a eu des changements. Ce que j'ai demandé à mes
fonctionnaires et aux inspecteurs, autant du ministère des Richesses
naturelles que de l'environnement ou que de tout autre organisme, c'est que
d'ici la fin de juin il y ait une inspection des plus sévère dans
cette compagnie.
M. Roy: Une question additionnelle, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le député
de Beauce-Sud, une question additionnelle.
M. Roy: Cela s'adresse au ministre du Travail. Puisqu'on a
parié de l'amiantose, M. le Président, on se rappellera
qu'à la dernière commission parlementaire à laquelle a
comparu la Commission des accidents de travail, il avait été
question de ce sujet.
J'aimerais savoir du ministre du Travail si la commission parlementaire
du travail va siéger à nouveau pour faire comparaître la
Commission des accidents du travail, d'abord sur ce sujet, parce qu'il y avait
des discussions qui avaient été laissées en plan ce
soir-là; il y aura également d'autres sujets à discuter
lorsque la Commission des accidents du travail comparaîtra.
J'aimerais savoir du ministre si c'est son intention je me
répète, M. le Président, je m'ex- cuse de faire
siéger la commission parlementaire avant l'ajournement de nos travaux
pour l'été.
M. Cournoyer: M. le Président, je ne sais pas combien de
fois je vais répondre à cette question. Je peux
référer le député de Beauce-Sud à la
même question qui m'a été posée par le
député de Maisonneuve lors de l'étude de mes
crédits en commission parlementaire; il pourra trouver là une
réponse.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable chef de
l'Opposition officielle.
Projet d'usine d'uranium enrichi
M. Morin: M. le Président, ma question est destinée
au premier ministre. Il y a quelques jours, le ministre français du
commerce extérieur, M. Sé-guard, a déclaré qu'il
était temps que le gouvernement canadien se commette dans le dossier de
l'uranium enrichi, compte tenu de ce qu'il a appelé "les conclusions
positives" du rapport produit par le groupe Canadif.
Il a déclaré qu'avant d'aller plus loin, cependant, il
fallait que le gouvernement français connaisse "la volonté
politique" du gouvernement fédéral.
Le premier ministre du Québec a-t-il effectué des
démarches auprès du ministre fédéral, M.
Mac-donald, en vue de faire avancer ce dossier? Comment le premier ministre du
Québec peut-il concilier ces faits et ces déclarations du
ministre Séguard avec ses propres déclarations, il y a quelque
temps, à savoir que, dans ce dossier, le rôle du gouvernement
fédéral était limité à celui d'un simple
douanier?
M. Bourassa: M. le Président, je vois que le chef de
l'Opposition est en forme ce matin. Je peux lui repondre...
M. Bums: II est toujours en forme. M. Morin: Toujours.
M. Bourassa: Oui, bon. Je peux référer le chef de
l'Opposition à l'interview que j'avais donnée dans le Monde sur
cette question. Je n'ai pas besoin de reprendre ce que j'ai déjà
dit.
Pour ce qui a trait aux démarches entre le gouvernement du
Québec et le gouvernement fédéral, il doit y avoir une
rencontre entre le ministre de l'Industrie et du Commerce du Québec et
M. Macdo-nald dans les prochaines semaines pour discuter de cette question, de
manière à pouvoir prendre une décision définitive
dans les prochains mois, étant donné que nous devons nous
décider sur la deuxième étape s'il paraissait avantageux,
pour le Québec et le Canada, de procéder à
l'établissement d'une telle usine.
Donc, nous devons nous décider avant d'entreprendre cette
deuxième étape qui coûterait de $5 millions à $6
millions, de part et d'autre. Avant de dépenser de tels montants, il
faudrait être assuré de la rentabilité d'une telle usine
pour le Canada et pour le Québec.
M. Morin: M. le Président, en question
supplémentaire, je ne sais si la rencontre entre le ministre de
l'Industrie et du Commerce, M. Saint-Pierre, et le ministre français a
eu lieu. J'ai cru savoir qu'elle devait avoir lieu sous la forme d'une
rencontre du comité mixte France-Québec. A-t-elle eu lieu? Dans
la mesure où il y a eu des échanges entre le gouvernement du
Québec et le gouvernement fédéral, et peut-être
aussi, d'autre part, le gouvernement français, le premier ministre
pourrait-il nous éclairer un peu plus sur la nature des objections que
fait valoir le gouvernement fédéral? Cela tient-il au fait qu'il
s'agit d'exportation d'énergie? Le gouvernement fédéral
veut-il d'abord faire une évaluation des besoins en
électricité non seulement du Québec, mais aussi du Canada,
ou encore cela tient-il tout simplement davantage, dans l'esprit de M.
Macdonald, à la rentabilité du projet?
M. Bourassa: Tous ces facteurs ont déjà
été mentionnés par le ministre fédéral. Dans
notre cas, nous avons fait valoir les avantages, pour le Québec,
notamment, des retombées dans le domaine économique. Nous avons
répondu aux critiques de ceux qui ont dit que ce serait de l'exportation
nette d'électricité en faisant valoir les avantages sur le plan
de l'énergie, pour le Québec, de la conversion d'un kilowatt
d'électricité en énergie sous forme d'uranium enrichi et
en faisant valoir également la possibilité de convertir les
centrales CANDU à l'uranium enrichi, du moins dans une certaine mesure.
Je crois que M. Macdonald a corrigé ses premières
déclarations sur ce point en disant qu'il était possible de faire
une telle conversion, du moins en partie.
C'est l'ensemble de ces éléments qui vont être
discutés et étudiés dans les relations
fédérales-provinciales, c'est-à-dire dans les rencontres
entre le gouvernement du Québec et le gouvernement
fédéral.
M. Morin: Dernière question supplémentaire, M. le
Président. J'imagine que l'Hydro-Québec et le gouvernement se
sont penchés sur la question de la demande intérieure en
électricité au Québec d'ici non seulement 1980 ou 1985,
mais sans doute au-delà, jusqu'à la fin du siècle
présent.
Le premier ministre est-il en mesure de nous dire si cette question de
la demande intérieure en électricité a été
étudiée à fond avant que l'on se lance dans ce projet
d'exportation d'uranium enrichi qui, comme le premier ministre vient de le
reconnaître, correspond à une exportation d'énergie
électrique.
M. Bourassa: M. le Président, personne ne peut
démentir que cela ne correspond pas à une exportation
d'énergie, mais je faisais une distinction avec l'exportation nette,
car, si en fabriquant de l'uranium enrichi, le Québec en consomme,
éventuellement, pour lui, et si la production, l'"input"
d'électricité qui s'y trouve mis aboutit à une plus grande
proportion, à un plus grand montant d'énergie dont profite le
Québec, il n'y a pas d'exportation nette
d'électricité.
Il est évident que le gouvernement du Québec et
Hydro-Québec examinent les besoins énergétiques du
Québec, c'est l'une des raisons du développement de la baie
James. Si l'on devait réduire le développement de la baie James,
comme l'a proposé le chef de l'Opposition à
Sainte-Anne-de-la-Pocatière où il proposait de réduire la
puissance du développement de la baie James, ou il faudrait construire
des centrales nucléaires, ou il faudrait importer de
l'électricité de l'Ontario ou d'ailleurs. Or, on sait que les
taux d'électricité vont augmenter de 30% en Ontario; alors je ne
comprends pas du tout la position du chef de l'Opposition sur cette question.
Je trouve que cela est complètement ridicule de proposerque le
Québec importe l'électricité de l'extérieur
à des coûts sensiblement supérieurs.
M. Morin: M. le Président, sur une question de
privilège. Le premier ministre s'amuse à déformer mes
paroles pour tenter de me prendre en défaut. Le premier ministre est
expert à ce petit jeu qui consiste à prendre les paroles de
l'adversaire et à les retourner à l'envers comme des
crêpes. En ce qui me concerne, j'ai simplement dit qu'il conviendrait,
après avoir fait une étude du développement de la baie
James, une étude approfondie des coûts, de limiter les
dégâts, le cas échéant.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Beauce-Sud.
Pénurie de logements au Québec
M. Roy: M. le Président, j'ai une question à poser
à l'honorable ministre des Affaires municipales, responsable de
l'habitation. Le ministre a-t-il pris connaissance des statistiques qui
démontrent qu'une grave crise de logement est à prévoir au
Québec, compte tenu du fait qu'à Montréal, il y a trois
ans, l'on disposait d'environ 8. 2% de logements vacants, taux qui a
baissé à 1. 5% en avril, et qu'à Québec le taux de
8. 4% d'il y a trois ans est également baissé à 1. 6%.
Etant donné que la situation semble s'aggraver et continuera de
s'aggraver au cours des prochains mois, j'aimerais demander au ministre des
Affaires municipales quelles sont les mesures que le gouvernement du
Québec et j'insiste entend prendre pour corriger cette
situation au Québec.
M. Goldbloom: L'honorable député de Beauce-Sud
devient vraiment québécois, ces jours-ci.
M. Roy: Je suis du Québec et je n'en ai pas honte.
M. Goldbloom: II paraît que vous avez honte de votre parti,
cependant.
M. Le Président, je pensequ'ilyaunedistinction importante
à faire en répondant à la question de l'honorable
député de Beauce-Sud. Il y a deux secteurs dans l'habitation. Il
y a l'entreprise privée qui
oeuvre dans ce domaine et qui produit des logis selon le marché.
Ceux qui peuvent s'adresser à ce marché achètent ou louent
des maisons, des logements de toutes sortes. Je ne crois pas que ce soit de la
responsabilité de quelque gouvernement que ce soit d'intervenir de
façon majeure dans ce marché. Il s'agit plutôt d'aider des
gens qui ne peuvent normalement s'adresser au marché et cela se fait de
deux façons. D'abord, il y a la production de logements sociaux, c'est
notre responsabilité et nous nous penchons présentement sur la
mise en chantier de la programmation découlant des montants
alloués en 1974 et de la programmation pour 1975. Je serai en mesure,
très prochainement, d'indiquer le nombre d'unités de logementsque
nous compterons ajouter à notre stock au cours de cette
année.
Deuxièmement, il y a l'aide que nous fournissons à ceux
qui ne sont pas admissibles au régime d'aide pour le logement social,
mais qui ont besoin d'uneaide pour pouvoir s'adresse rau marché.
Là, le gouvernement fédéral afait une contribution
importante, une contribution de plusieurs millions de dollars, qui est
utilisée par les Québécois et qui sera utilisée par
les Québécois cette année et nous en prenons avantage.
Alors, il y aura augmentation du stock de logements au cours de
l'année.
M. Roy: M. le Président, une question additionnelle. Le
ministre nous parle toujours, évidemment, des logements sociaux.
Je suis en train de me demander si on n'est pas en mesure, à
l'heure actuelle, de diriger une certaine partie de la population vers ces
logements sociaux. Il y avait, au Québec, certaines lois; entre autres,
je me réfère à la Loi de l'habitation familiale, qui a
été un stimulant dans le secteur privé pour permettre
à un certain nombre de personnes de devenir propriétaires d'une
maison unifamiliale. Etant donné que cette loi a pris fin le 30 juin
dernier, je demanderais au ministre, ce matin encore, compte tenu de la
situation et compte tenu de l'urgence du problème, si le gouvernement
serait prêt à réviser sa décision afin de reconduire
cette loi pour qu'elle devienne de nouveau en vigueur, ce qui contribuerait
énormément à relancer l'industrie de la construction
domiciliaire et à faciliter à un très grand nombre la
possibilité d'y avoir accès et d'être propriétaire
d'une maison familiale.
M. Goldbloom: M. le Président, nous venons d'avoir une
injection de plusieurs millions de dollars. De mémoire, je ne voudrais
pas essayer de donner un chiffre, mais j'ai été informé
par le gouvernement fédéral que cette infection a
été un succès complet, c'est-à-dire que c'est
plusieurs millions, plus de $10 millions, si ma mémoire est
fidèle. Des demandes ont été reçues pour utiliser
tout ce montant. Devant ce fait, qui constitue une amélioration
considérable de la situation, nous ne croyons pas nécessaire de
poser des gestes additionnels dans ce domaine. Nous verrons l'effet de cette
injection d'argent fédéral dans le Québec pour le bien des
Québécois.
M. Roy: M. le Président, une dernière question
additionnelle. Le ministre me répond comme s'il était un
fonctionnaire du gouvernement fédéral. Pourtant, j'ai
interrogé le ministre responsable de l'habitation au Québec.
Qu'est-ce qu'il faudra de plus au gouvernement, à la suite des
révélations qui ont été faites, des statistiques
qui ont été publiées, pour qu'il se décide à
prendre ses responsabilités afin de permettre au secteur privé,
aux caisses populaires, aux compagnies d'assurance, qui seraient prêtes
actuellement à le faire, de financer le secteur privé? Les
difficultés proviennent du taux de l'intérêt et de la
hausse considérable des coûts. Il devrait y avoir des politiques
québécoises à ce niveau. Je demande au ministre ce qu'il
faudra de plus pour convaincre le gouvernement du Québec.
M. Goldbloom: M. le Président, quant aux caisses
populaires, nous avons fait des pressions pour que ces institutions soient
reconnues. Je l'ai déjà dit à l'honorable
député, nous continuons de faire ces pressions. J'ai bon espoir
que nous réussirons à faire accepter les caisses populaires comme
prêteurs reconnus en vertu des lois existantes. Cela aidera. Mais cela ne
voudra pas dire que nous pourrons baisser les taux d'intérêt. Nous
sommes obligés de suivre le marché ou bien de donner des montants
additionnels. Il y a des limites aux montants que l'on peut consacrer à
chaque domaine. Nous avons une responsabilité fondamentale. Sans faire
de dirigisme dans ce secteur, même avec l'effort que nous faisons
présentement et que nous ferons au cours de l'année, nous ne
satisferons pas tous les besoins dans le domaine du logement social. Il ne
s'agit donc pas de faire du dirigisme pour augmenter cette clientèle.
Mais c'est notre principale responsabilité et c'est à cette
responsabilité que nous donnons priorité.
M. Roy: M. le Président, seulement une précision.
Le ministre a dit que les caisses populaires seraient reconnues. Veut-il dire
que les caisses populaires seraient reconnues par la Société
centrale d'hypothèques et de logement, un organisme
fédéral?
Est-ce cela que le ministre a voulu dire?
M. Goldbloom: Cela devient très clair, l'orientation que
prend l'honorable député de Beauce-Sud. Nous, de ce
côté-ci de la Chambre, ne trouvons pas mauvais que le gouvernement
du Canada aide des Canadiens qui habitent le Québec.
M. Roy: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Johnson.
M. Léger: Gouvernement de soumission.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Johnson.
M. Léger: On a un gouvernement qui se soumet.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Des Voix: Allez voir vos enveloppes.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
Tuteurs de certains syndicats de la
construction
M. Bellemare (Johnson): Ma question s'adresse à
l'honorable ministre du Travail. Tel qu'il a été
spécifié dans la loi 29, la nomination des tuteurs aurait
dû être adoptée, je pense, par un arrêté en
conseil hier. Est-ceque l'honorable ministre peut nous dire si les tuteurs ont
été véritablement nommés hier ou s'ils le seront
très prochainement?
M. Cournoyer: Ils n'ont pas été nommés hier.
Le président de la commission de tutelle a été
nommé il y a déjà un bon bout de temps, mais les autres
tuteurs le seront très prochainement.
J'en profite pour répondre à la question qui a
été posée hier ou avant-hier par le député
de Maisonneuve et je ne peux que lire le texte de la loi qu'il citait sans
faire de commentaires puisque je donnerais, à ce moment-là, une
opinion professionnelle. "L'absence ou l'incapacité d'agir du
président ou d'un autre membre du conseil d'administration
n'empêche pas les membres du conseil d'administration d'exercer leurs
fonctions. Il en est de même en cas de vacances au sein dudit conseil.
"
M. Burns: II n'est pas formé, votre conseil, comment
voulez-vous parler d'absence et d'incapacité d'agir?
M. Cournoyer: Un instant, M. le Président! Une Voix:
Taisez-vous donc!
M. Cournoyer: "Est institué un conseil d'administration
pour chacun des syndicats. Ce conseil est composé d'un président
et de deux autres membres nommés parle lieutenant-gouverneur en conseil.
" Il est formé, le conseil, il n'y a qu'une personne de nommée
actuellement, c'est le président; les deux autres postes sont
considérés par le président comme des vacances qui doivent
être remplies. En conséquence, le président a agi comme il
croyait bon de le faire en interprétant son propre mandat.
M. Burns: Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Saint-Louis.
M. Burns: Question additionnelle, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Question
additionnelle.
M. Burns: Ah! C'est la fin du monde! Est-ce que le ministre du
Travail a demandé à l'avocat en chef au Québec,
c'est-à-dire au procureur général, au ministre de la
Justice, si cette interprétation peut être soutenue par le
gouvernement si jamais il y a une poursuite ou une contestation à
l'encontre des gestes qui vont être posés par ce tuteur? M. le
Président, puis-je ouvrircette parenthèse? La parenthèse
c'est qu'on parle dans la loi, je l'admets, d'absence ou d'incapacité
d'agir; mais, pour être absent, il faut d'abord avoir été
là et, pour être incapable d'agir, il faut avoir été
nommé. Il n'y a personne de nommé.
M. Cournoyer: II oublie le deuxième paragraphe qui parle
de vacances, et ce ne sont pas les vacances d'été.
M. Morin: Ce n'est pas très cartésien, ce
raisonnement.
M. Burns: Ce n'est pas fort, votre affaire.
M. Cournoyer: Je n'ai pas à être fort non plus, je
vous dis l'interprétation que le président du conseil de tutelle
a donnée pour expliquer son geste. Ce n'est pas la mienne que je
donne.
M. Burns: Question additionnelle. Là, ça
précise.
M. Cournoyer: Moi, je le demande au ministre de la Justice, le
procureur en chef. Par la voie du député de Maisonneuve,
pourriez-vous examiner la question qu'il vient de poser et donner au ministre
du Travail le soin de donner l'interprétation qu'il faudra?
M. Burns: Question additionnelle. Je comprends le ministre de la
Justice d'être bien embêté avec une telle opinion. Ce qui me
soulage...
Une Voix: Ce n'est pas une opinion, c'est une question.
M. Burns: Non, non, son opinion telle que rapportée par le
ministre du Travail.
M. Cournoyer: Le ministre n'a pas donné d'opinion. Un
instant!
M. Burns: Cela me rassure de savoir que ce n'est pas l'opinion du
gouvernement. Cela me rassure.
M. Morin: C'est bien différent, cela!
M. Burns: M. le Président, je demande au ministre si le
ministre du Travail ou le ministre de la Justice, l'un ou l'autre ou les deux,
ont l'intention de poser des gestes précis auprès de M. Ryan pour
empêcher que des contestations, possiblement inutiles,
n'interviennent.
M. Cournoyer: La réponse est oui. M. Burns: Je
pense que c'est clair, ça. M. Cournoyer: Oui.
M. Burns: Autre question: Quels sont ces gestes que vous avez
l'intention de poser auprès de M. Ryan?
M. Cournoyer: Vous ne le saurez pas, je ne le sais pas. C'est
oui.
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, question
supplémentaire. Voici une déclaration d'un ministre
irresponsable.
M. Cournoyer: M. le Président, ce n'est pas une
question...
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, surtout...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre! Est-ce que
vous avez une question?
M. Bellemare (Johnson): Oui, j'ai une question.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Parce que c'est une
déclaration que vous venez de faire.
M. Bellemare (Johnson): Non, non, ce n'est pas une
déclaration, c'est une constatation. J'ai constaté simplement, M.
le Président. Ma question est: Quand le conseil va-t-il être
formé pour que la tutelle, qui était si urgente, puisse
fonctionner? C'était urgent; on a même mis de côté
toutes les lois de la procédure parlementaire.
M. Cournoyer: M. le Président, elle fonctionne, la tutelle
fonctionne.
M. Bellemare (Johnson): Pardon?
M. Cournoyer: La tutelle fonctionne. On me demande comment faire
pour qu'elle ne fonctionne pas. Actuellement, elle fonctionne.
M. Bellemare (Johnson): Bien non, elle ne fonctionne pas, elle
n'a pas d'autorité en vertu de la loi.
M. Cournoyer: Vous l'avez vu, elle fonctionne.
M. Bellemare (Johnson): La loi spécifie qu'il doit y avoir
un conseil...
M. Cournoyer: On met en doute le premier geste posé par la
commission de tutelle.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cournoyer: Puis à part cela, la prochaine fois que vous
direz que je suis un homme irresponsable, je vais me venger un jour, je vo us
avertis tout de suite.
M. Bellemare (Johnson): Je n'ai pas compris ce qu'il a dit.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le député
de Saint-Louis.
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, je n'ai pas
compris.
M. Cournoyer: Je vous le dirai.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare (Johnson): II va se venger!
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, regardez la
grosseur des deux.
M. Cournoyer: Je vous avertis tout de suite. On ne calculera pas
cela au poids.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Le député de Saint-Louis.
M. Bellemare (Johnson): C'est épouvantable!
M. Lessard: Une question additionnelle, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Additionnelle à
quoi, il n'y a pas de question?
M. Burns: Oui, M. le Président, une question additionnelle
adressée au ministre du Travail. Est-ce que le ministre...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Une question
additionnelle.
M. Burns: Qu'est-ce qu'il y a?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
M. Burns: M. le Président, est-ce que le ministre du
Travail, après avoir eu l'opinion de M. Ryan sur l'absence et
l'incapacité d'agir, donc la vacance, à son sens, a pris
connaissance de la Loi d'interprétation du Québec, chapitre 1 de
nos lois de 1964?
M. Cournoyer: Non.
M. Burns: Est-ce que le ministre a l'intention de consulter la
Loi d'interprétation, chapitre 1 de nos lois de 1964?
M. Cournoyer: M. le Président, le ministre a
demandé, par le truchement du député de Maisonneuve, au
procureur chef du Québec de lui donner un avis sur
l'interprétation à donner aux actions posées par le tuteur
nommé, M. Ryan.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le député
de Saint-Louis.
Université Concordia
M. Blank: J'ai une question à poser au ministre de
l'Education. Même si le ministre des Affaires culturelles a refusé
le projet Valorinvest pour le couvent des Soeurs grises, le problème
n'est pas résolu encore. On sait que l'université Concordia est
propriétaire de beaucoup de maisons sur les rues Crescent, Bishop,
MacKay et qu'elle a besoin de ces maisons pour des fins administratives, ce qui
va nécessiter le déménagement des personnes qui y habitent
et même la démolition pour la conversion de ces bâtisses qui
ont en fait une valeur historique...
Des Voix: Question...
M. Bellemare (Johnson): C'est à son tour, les
questions.
M. Blank: Je pense que j'ai le même droit que les
députés de l'Opposition de donner une petite...
M. Bellemare (Johnson): Préambule, préambule.
M. Blank:... explication avant.
M. Hardy: M. le Président, j'invoque le règlement.
Le député de Saint-Louis, vice-président de la Chambre,
n'est pas obligé de suivre le mauvais exemple des députés
séparatistes.
M. Blank: Je veux attirer l'attention de mon confrère sur
le fait que le règlement me donne le droit de faire un bref
préambule.
Je dis qu'à mon avis Concordia University a fait des
démarches auprès du ministre de l'Education pour
transférer des bureaux administratifs au couvent des soeurs Grises pour
sauver cette place historique et sauver les rues Crescent, MacKay et Bishop.
Est-il vrai que le ministre a reçu telle requête? Si oui, quelle a
été sa réaction?
M. Cloutier: M. le Président, je remercie le
député de Saint-Louis de m'avoir donné un préavis.
Je le félicite de s'intéresser à notre patrimoine. C'est
loin d'être la première question qu'il pose d'ailleurs dans ce
domaine.
Cela se comprend parce qu'il y a dans son comté un grand nombre
d'édifices qui méritent d'être protégés.
M. le Président, je pense que la façon la plus simple de
répondre à la question du député de Saint-Louis est
de lire la lettre que j'ai écrite récemment au recteur de
l'université Concordia.
Ceci me permet, en même temps, d'apporter des précisions
à la réponse que je donnais, suite à une question du
député de Saint-Jacques. "M. le recteur, j'ai reçu votre
lettre du 2 avril dernier, qui était accompagnée du document
intitulé Le campus Sir George Williams, mémoire relatif au site
de son nouveau projet". Votre mémoire aborde deux questions: "a) vos
besoins d'agrandissement des espaces présentement occupés; "b)
votre position concernant la propriété des soeurs Grises. "Pour
ce qui est de la première question, elle fait actuellement l'objet
d'études entreprises par la direction générale de
l'enseignement supérieur sur les prévisions de clientèles
étudiantes anglophones de cette ville et, enfin, sur les espaces qui
devraient être prévus pour satisfaire les besoins des
clientèles attendues. "Pour le moment, le ministère ne propose de
construire que 100, 000 pieds carrés nets des 300, 000 pieds
carrés demandés, soit les espaces nécessaires pour
remplacer l'édifice Norris que le YMCA reprendra en 1979" Entre
parenthèses, il s'agit d'un édifice qui loge actuellement la
bibliothèque de Concordia et, depuis déjà un certain
temps, le ministère cherche, avec les autorités de
l'université, des solutions de remplacement.
Je reprends la lecture de la lettre: "Cette proposition du
ministère doit faire prochainement l'objet d'un avis du Conseil des
universités. "Quant à la deuxième question concernant
l'acquisition par l'université Concordia de la propriété
des soeurs Grises, le ministère de l'Education ne peut, pour le moment,
émettre d'opinion à ce sujet puisque: "a) les ministères
intéressés à cette question n'en sont pas encore venus
à une conclusion quant à la meilleure utilisation que l'on puisse
faire de ces lieux historiques; "b) les études entreprises par la
direction générale de l'enseignement supérieur sur les
besoins d'espace des universités anglophones de Montréal
n'étant pas encore complétées, il est difficile,
aujourd'hui, de justifier les 50, 000 pieds carrés que cette
propriété accorderait à l'université, en plus des
100, 000 pieds carrés nécessaires pour remplacer l'édifice
Norris; "c) aucune étude n'a encore été transmise au
ministère sur les implications financières d'une telle
acquisition, lesquelles pourraient s'avérer beaucoup plus
élevées que celles d'une construction nouvelle sur un terrain
moins vaste. "Je vous prie, M. le recteur, de bien vouloir accepter
l'expression de mes sentiments les meilleurs. "
M. Blank: Est-ce que le ministre fera faire ces études
dans l'avenirou si l'affaire est close pour lui?
M. Cloutier: L'affaire n'est pas close du tout, comme en
témoigne la lettre. Toutes ces études sont en cours. Des
renseignements sont demandés à l'université Concordia. De
plus, le Conseil des universités et la direction générale
de l'enseignement supérieur s'interrogent actuellement sur le nombre de
pieds carrés qui seront nécessaires, compte tenu du
développement des clientèles anglophones. Comme la lettre le
précise fort bien, l'utilisation de Concordia supposerait des
affectations de fonds beaucoup plus élevées, puisqu'on ne
pourrait pas, dans ces conditions, appliquer les normes habituelles.
Alors, tous ces points étant, par définition,
complexes, il est nécessaire d'en envisager tous les aspects et
c'est ce qui se fait actuellement.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bon, deux
dernières questions, sans question additionnelle.
M. Léger: Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le temps est
déjà écoulé, comme vous le savez. L'honorable
député de Lafontaine et l'honorable député de
Beauharnois. Ensuite, il y aura une réponse à une question de
l'honorable ministre des Institutions financières.
M. Léger: Sans question additionnelle, M. le
Président, on ne peut pas...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bien, écoutez,
on va la remettre à mardi; ce n'est pas moi qui fais les
règlements.
M. Léger: M. le Président...
M. Burns: Je pense que vous devriez quand même tenir compte
de l'importance de la question du député de Lafontaine.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bon. A l'ordre,
messieurs! Je pense que faire une question de règlement... Vous
comprenez comme moi que la période est déjà
écoulée. Nous avons commencé à dix heures huit
minutes. Il est capable de poser sa question de façon à tout
comprendre.
M. Burns: M. le Président, je ne veux pas faire une
question de règlement; je veux tout simplement faire une question de bon
entendement...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): C'est ça.
M. Burns:... si vous voulez, relativement à cette
période de questions. Si vous donnez la parole au député
de Lafontaine à ce stade-ci, je vous en remercie, mais il faudrait aussi
permettre au député de Lafontaine d'explorer sa question au
complet. S'il a des questions additionnelles... Il ne le sait pas d'avance s'il
aura des questions additionnelles.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bien, justement, je
préviens.
M. Burns: Cela dépendra de la réponse du
ministre.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): La décision
je vous donne le choix c'est ou bien il n 'y a pas de question du
tout ou bien il y a une question sans question additionnelle. Le temps est
écoulé déjà.
M. Léger: M. le Président...
M. Burns: II ne peut pas le savoir avant.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bien, écoutez,
moi non plus; c'est pour ça que je lui donne le choix.
M. Léger: Surtout que ma question est adressée au
premier ministre.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Pardon?
M. Léger: Comme ma question est adressée au premier
ministre, on est toujours sûr d'avoir des questions
supplémentaires.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Bon.
Conseil des loisirs de Valleyfield
M. Léger: Alors, M. le Président, je vais tenter.
Depuis plusieurs semaines, j'essaie de poser des questions au ministre
responsable du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux
sports. Il est constamment absent. Il y a eu 18 présences du ministre
sur 45 jours de session.
M. le Président, je me vois dans la pénible obligation de
poser ma question au premier ministre. Comme le président me limite
à une question et que j'aime bien être le plus concis et
précis possible, je vais être obligé de faire trois volets,
ce qui permettra au premier ministre de voguer entre les trois.
M. le Président, ma question est la suivante: Est-il exact
je sais que le whip n'aimera pas cette question, c'est certain...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. Lacroix: De toute façon, vous êtes un
imbécile parfait!
M. Léger: Est-il exact que le premier ministre a
demandé à son ministre responsable du haut-commissariat des
explications concernant la décision du ministre de faire
disparaître le Conseil régional des loisirs de Valleyfield, qui
voulait s'approprier le mont Sainte-Agathe pour un projet de vacances, pour le
remplacer par un service régional des loisirs qui favorisait le mont
Rigaud à l'intérieur du comté du député de
Vaudreuil, c'est-à-dire le ministre responsable des sports?
Deuxièmement, est-ce que le premier ministre a reçu des
représentations des personnes de Valleyfield qui lui demandaient de
vérifier cette possibilité de patronage venant du ministre
responsable des sports pour son comté?
Troisièmement, M. le Président, est-ce que le premier
ministre a l'intention de faire enquête sur ce sujet?
M. Bourassa: M. le Président, je vais prendre avis des
questions du député. Je vais vérifier exactement ce qu'il
en est et je répondrai à la prochaine séance.
M. Léger: Est-ce que vous avez reçu des
représentations?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Beauharnois.
Conflit de travail à Union Carbide de
Beauharnois
M. Cadieux: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre du Travail. Elle fait suite à une question que je lui posais la
semaine dernière concernant le conflit à Union Carbide, à
Beauharnois. Le ministre me disait qu'un enquêteur spécial et
très bon, M. Laporte, devait lui fournir un rapport, en fin de semaine,
et qu'après cela, il déciderait s'il y aurait, oui ou non, un
médiateur, je crois. Est-ce que le ministre peut nous éclairer
concernant ce conflit qui n'a pas encore pris fin et qui dure depuis plusieurs
semaines?
M. Cournoyer: II y aura un médiateur. Je pense qu'il a
commencé, d'ailleurs, à travailler hier après-midi. M.
Roger Pilote.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable ministre
des Institutions financières, Compagnies et Coopératives
désire répondre à une question.
Situation dans l'assurance-automobile
M. Tetley: M. le Président, le député de
Lafontaine m'a posé deux questions, une au sujet des restrictions du
marché de l'assurance-automobile et la deuxième au sujet des
primes. J'ai une réponse partielle aux deux questions.
Le député s'est référé au Bureau des
assurances du Canada, le BAC, c'est-à-dire le IBC, the Insurance Bureau
of Canada, et à un de ses dépliants du 29 avril 1975, qui est
émis chaque année, après les résultats du livre
vert. J'ai fait enquête depuis que j'ai reçu le dépliant et
avant les questions du député de Lafontaine. Je ferai
peut-être rapport à la Chambre de mes enquêtes. Mais je
voudrais lire le télégramme que j'ai reçu, ce matin, du
Bureau des assurances du Canada, signé par Charles Moreau, le directeur:
"Les articles de la presse concernant restrictions du marché par les
assureurs reflètent une situation sérieuse mais qu'on ne peut pas
qualifier de crise, situation moins critique au Québec que dans les
autres provinces. "Les résultats techniques des assureurs, en 1974 et
début 1975, très défavorables partout au Canada et
Etats-Unis à cause de l'inflation des dernières années
dont l'effet se fait sentir en 1974 antérieurement. Coût de la
main-d'oeuvre pour réparation de voitures au Canada a augmenté de
23% depuis six mois. Au Québec, l'augmentation a été de
près de 40% en un an, de $13 l'heure à $18 dans certaines villes.
Augmentation du prix des matériaux au Canada, peinture, 22%,
métal en feuilles, 75%, matière plastique, 83%. Stop. "Vu les
résultats désastreux, bon nombre d'assureurs révisent la
composition de leur portefeuille et doivent temporairement ralentir
l'augmentation de leurs affaires tout en continuant de servir les courtiers et
le public. "But satisfaire aux exigences de solvabilité du gouvernement
et contrôler l'ampleur des pertes techniques. Stop. Résultat,
certains courtiers ont difficulté à placer les risques dans les
compagnies habituelles et doivent réorienter le placement de leurs
affaires. Stop. Cela cause des difficultés plus apparentes que
réelles pour le public et sauf exceptions tous trouvent à
s'assurer. Stop. " La situation faite en janvier ou mars ou juillet, et je
répète, faite en janvier ou mars ou juillet, se fait... pardon.
Un instant. "La situation devrait s'améliorer graduellement lorsque les
augmentations de tarifs faites en janvier ou mars ou juillet se feront sentir
dans les résultats et le marché devrait se stabiliser. " C'est
signé Charles Moreau, Bureau des assurances du Canada, auquel vous avez
fait référence.
M. Léger: Question supplémentaire, M. le
Président. Est-ce que le ministre qui vient d'affirmer posséder
le bulletin 7514 du 29 avril 1975 peut le déposer à la
Chambre.
M. Tetley: M. le Président, je ne dépose pas de
document de l'extérieur. Si vous le voulez, c'est un document public qui
a même paru dans le Jour et dans tous les journaux.
M. Léger: M. le Président, cela est faux. Stop.
C'est un document privé des compagnies d'assurance et je demanderais au
ministre de le déposer pour confirmer l'affirmation que j'ai faite
hier.
M. Tetley: Si le document est privé, je ne vais pas le
déposer. S'il est public, c'est public. Moi j'ai cru que tout le monde
l'avait, parce que vous l'avez, et j'ai reçu des lettres de partout du
Québec à ce sujet.
M. Léger: Qu'est-ce qui vous empêche de le
déposer actuellement puisque vous l'avez en main?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Question de
règlement, l'honorable député de Beauce-Sud.
M. Roy: Question de règlement, M. le Président, en
vertu de l'article 177...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. Roy: "... Quand un ministre cite, ne serait-ce qu'en partie,
un document, il peut être requis, sans autre formalité, de le
déposer immédiatement, à moins qu'il ne déclare
qu'il est contraire à l'intérêt public de le faire. " Je
suis entièrement d'accord avec le député de Maisonneuve
que ce document devrait être connu. C'est d'intérêt public,
il devrait être déposé devant l'Assemblée
nationale.
M. Tetley: M. le Président, j'ai cité le
téléphone et je vous en donne une copie.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
M. Lessard: Vous vous lavez les mains, comme d'habitude.
M. Bienvenue: Dépôt de rapports de commissions
élues.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Bourget pour l'honorable député de
Rosemont.
Rapport sur les projets de loi nos 36 et 37
M. Boudreault: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente des Affaires
sociales, qui a siégé le 10 juin 1975 et adopté le projet
de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, sans amendement, et le projet de loi no 37, Loi modifiant la
Loi de la commission des Affaires sociales avec un amendement, et sur
division.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le député
de Saint-Maurice pour l'honorable député de Gouin.
Rapport sur le projet de loi no 16
M. Bérard: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
Institutions financières, compagnies et coopératives qui a
étudié le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi du ministre
des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, article
par article, et l'a adopté sans amendement.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Y a-t-il lieu d'adopter
immédiatement ces rapports?
M. Burns: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Affaires du jour.
Travaux parlementaires
M. Bienvenue: J'annonce qu'immédiatement, à la
salle 81-A, la commission des institutions financières, compagnies et
coopératives va siéger pour étudier les projets de loi
privés 112, 115, 118, 119, 178, 186, 171 et 192. A la salle 91-A, la
commission du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigration, afin d'entendre
la FTQ relativement aux recommandations du rapport Cliche.
Motion pour faire siéger la commission des
affaires culturelles
M. Bienvenue: Au salon rouge, avec le consentement des
différentes oppositions, la commission de l'éducation, des
affaires culturelles et des communications, aux fins d'étudier article
par article le projet de loi no 1, Loi sur le cinéma. Je fais une motion
de cette annonce.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Cette motion est-elle
adoptée?
M. Burns: Vote enregistré, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Que l'on appelle les
députés!
Vote sur la motion
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
Que ceux qui sont en faveur de la motion de l'honorable leader adjoint
du gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Parent (Hull), Mailloux,
Saint-Pierre, Choquette, Cloutier, Lalonde, Lachapelle, Cournoyer, Goldbloom,
Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Lacroix Bienvenue, Forget, Toupin,
Massé, L'Allier, Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux,
Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Kennedy, Bacon, Blank, Bédard
(Montmorency), Séguin, Saindon, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance,
Pilote, Fraser, Picard, Gratton, Gallienne, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher,
Saint-Germain, Harvey (Charlesbourg), Pelletier, Shanks, Bellemare (Rosemont),
Bérard, Bonnier, Boudreault, Chagnon, Marchand, Caron,
Côté, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lapointe, Lecours,
Malépart, Massicotte, Mercier, Parent (Prévost), Picotte,
Sylvain, Tardif, Tremblay, Vallières, Verreault, Morin, Burns,
Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Roy, Bellemare
(Johnson), Leduc.
M. Burns: Le député de Laurier ne s'est pas
levé et on l'a nommé comme ayant voté pour, est-ce qu'on
peut vérifier son opinion?
M. Marchand: M. le Président, cela prouve que je n'ai pas
un visage à deux faces, quand j'ai le dos tourné, ils ne me
reconnaissent pas.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Je voudrais profiter de
l'intervention de l'honorable député de Maisonneuve. J'ai
remarqué que, de moins en moins, on se lève pour voter. Je
voudrais porter à votre attention le fait qu'il faut tout de même
se lever.
Le Secrétaire: Pour: 80 Contre: 0
Le Vice-Président (M. Lamontagne): La motion est
adoptée. Pour le bénéfice des membres des commissions
parlementaires, je vais les rappeler: à la salle 81-A, commission des
institutions financières, compagnies et coopératives pour
l'étude de projets de loi privés.
A la salle 91-A, commission du travail et de la main-d'oeuvre afin
d'entendre la FTQ relativement aux recommandations du rapport Cliche. Et, au
salon rouge, commission de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications, étude article par article du projet de loi no 1, Loi sur
le cinéma.
M. Bienvenue: Les commissions peuvent commencer leurs
séances.
Le Vice-Président (M. Lamontagne):
Immédiatement.
M. Bienvenue: M. le Président, article no 2.
Projet de loi no 2 Deuxième lecture
(suite)
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable ministre de
l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: M. le Président, hier à l'ajournement
nous étions à discuter sur les lois de crédit agricole et
j'avais déjà exposé une très grande partie des
arguments qui ont amené le gouvernement à apporter ces
amendements aux lois du crédit agricole. Et parmi ces arguments se
trouvait celui d'organiser dans la province de Québec, au niveau de
l'économie agricole, des fermes qui soient plus rentables, plus grandes,
qui procurent par conséquent à l'économie la production
requise par cette dernière et, aux producteurs, le revenu visé
par ce dernier.
Etant donné que tout est relié dans le secteur agricole,
qu'il est impossible de penser à développer des fermes sans que
nous regardions du côté des marchés, de l'entreposage, de
la transformation, je terminerai mon intervention par ces quelques propos.
Cette programmation de financement des fermes au Québec devra se
continuer, comme ça se fait déjà depuis quelques
années, dans des structures de commercialisation qui soient encore plus
adaptées, également dans des structures de transformation qui de
plus en plus méritent d'être développées.
Cela devra également se poursuivre dans des programmes de
promotion en vue d'amener le consommateur québécois à
consommer d'abord des produits provenant des fermes
québécoises.
Voilà, dans leurs grandes lignes, les principaux arguments que je
voulais exposer relativement au financement agricole dans la province de
Québec.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. Lessard: J'ai écouté l'intervention du ministre
de l'Agriculture concernant la Loi modifiant la Loi du crédit agricole
et un certain nombre d'énoncés m'ont fait sursauter, en
particulier, lorsque le ministre de l'Agriculture nous dit qu'il est impossible
d'assurer une agriculture rentable sans créer des conditions pour
assurer la rentabilité de la ferme. Je suis d'accord sur l'affirmation
du ministre, mais il faudrait ajouterqu'assurer la rentabilité de la
ferme nécessite aussi des conditions générales
pourdévelopper l'agriculture et assurer des revenus stables à
l'agriculteur, ce qui n'est pas le cas, comme je tenterai de le prouver au
cours de cette intervention.
Le ministre nous a aussi parlé de l'augmentation des revenus des
agriculteurs. J'aurai l'occasion je ne sais pas où le ministre
prend ses chiffres de prouver, au cours de cette intervention, que le
revenu de l'agriculteur baisse constamment depuis 1973. Le revenu net de
l'agriculteur baisse constamment. Le ministre, comme argument massue concernant
le développement de l'agriculture au Québec, nous faisait le
raisonnement suivant. Les agriculteurs, disait-il, n'hésitent pas
à emprunter quand l'économie est bonne. Le ministre concluait en
disant que l'économie agricole se porte bien, puisque les agriculteurs
empruntent de plus en plus.
Nous pourrions aussi faire le raisonnement suivant: Si les agriculteurs
sont obligés d'emprunter de plus en plus, n'est-ce pas justement parce
que l'agriculteur ne trouve plus, à l'intérieur de sa ferme, les
montants nécessaires pour son immobilisation? Les arguments que nous a
apportés le ministre de l'Agriculture peuvent être facilement
renversés et me paraissent vraiment faussés. Je voudrais, au
cours de ce débat...
M. le Président, je voudrais vous indiquer d'abord que nous
n'avons pas quorum. Nous sommes quinze députés à
l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président (M. Blank): Oui, mais je pense qu'il y a
trois commissions qui siègent.
M. Lessard: Je comprends, M. le Président, qu'il y a trois
commissions, mais cela prend vingt députés à
l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président (M. Blank): Ne sonnez pas les cloches,
on ne veut pas déranger les commissions; on va essayer de trouver des
gens. Si on sonne les cloches, ils vont tous venir ici, pensant que c'est un
vote.
A l'ordre, messieurs! Nous avons quorum, nous sommes 21.
M. Lessard: M. le Président, je voudrais quand même,
au cours de cette intervention, tenter de semer quelques doutes dans l'esprit
du ministre, qui nous affirme constamment, tant en commission parlementaire
qu'à l'Assemblée nationale, qu'il n'y a pas de problème
actuellement dans l'agriculture québécoise. Malgré le fait
que les agriculteurs soient obligés de descendre dans la rue pour
essayer d'exprimer leurs problèmes ou d'alerter l'opinion publique;
malgré le fait que l'Union des producteurs agricoles soit intervenue,
à plusieurs reprises, auprès du ministre de l'Agriculture comme
auprès du conseil des ministres, pour essayer de faire valoir ou de
faire reconnaître certains problèmes fondamentaux dans
l'agriculture québécoise, le ministre continue de se fermer les
yeux. Le ministre continue de faire comme une autruche, la tête dans le
sable, et de ne rien voir. Le ministre continue de parler d'augmentation des
revenus des agriculteurs. Le ministre continue de nous affirmer que les
problèmes du marché, il n'y en a à peu près
pas...
M. Mercier: Tu commences à être usé, mon
vieux, change de disque.
M. Lessard: C'est le député de Bellechasse qui veut
faire une intervention?
M. Mercier: Certainement, certainement, je suis en train de dire
que ton disque est usé.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!
M. Lessard: Bien, il faudrait quand même dire au ministre
de l'Agriculture que son disque commence à être usé.
M. Mercier:... mémérer. M. Bienvenue:
Allez.
M. Lessard: M. le Président, avant d'analyser les
éléments essentiels de ce projet de loi, je reconnais les
modifications majeures qu'il comporte par rapport à l'ancienne Loi du
crédit agricole. Je voudrais d'abord, un peu comme l'a fait le ministre,
le situer dans une perspective plus globale, c'est-à-dire dans
l'ensemble de l'économie agricole au Québec. Ainsi, au lieu de se
voiler la face, on pourra voir si le projet de loi qui nous est soumis, ce
matin, nous paraît satisfaisant ou encore pourquoi ce projet de loi ne
pourra modifier la situation présente de l'agriculture
québécoise. Celle-ci ne cesse, malgré les affirmations des
députés libéraux et du ministre de l'Agriculture, de
dépérir depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement et
de ce ministre de l'Agriculture.
Je vais essayer d'utiliser les rapports mêmes du ministre de
l'Agriculture actuel. Je vais essayer d'utiliser les chiffres mêmes, qui
nous ont été exposés en janvier dernier, de façon
particulière, par le ministre de l'Agriculture lors de sa
conférence annuelle, qui lui ont permis de tracer un bilan de
l'agriculture québécoise.
On dirait que le ministre de l'Agriculture, qui est obligé,
annuellement, de présenterce bilan, qui était négatif
à ce moment-là, on dirait que le ministre, dis-je, tente
d'oublier ce bilan maintenant.
En janvier dernier, le ministre de l'Agriculture du Québec
traçait le tableau suivant de l'agriculture québécoise
pour l'année 1974: "Les agriculteurs québécois ont
enregistré, au cours de l'année 1974 par rapport à 1973,
une diminution de leur revenu net de 9%. " Ce sont là des chiffres qui
ont été énoncés par le ministre de l'Agriculture et
dont il ne parle plus ou dont il n'a pas parlé au cours de son
intervention d'hier.
Si l'on additionne le taux d'inflation de 12. 4%, qui touche
naturellement l'ensemble de la population, les producteurs
québécois se retrouvent ainsi avec une réduction de leur
pouvoir d'achat de 21. 4% en 1974. Mais le pire dans tout ça, c'est que
le ministre de l'Agriculture ne pouvait pas nous assurer, lors du bilan qu'il a
tracé, à sa conférence de presse, que la situation ne
continuerait pas de se détériorer au cours de l'année
1975.
L'année 1975 ne promet pas d'être meilleure et le ministre
a dû admettre qu'il était plus que probable que l'agriculteur
québécois subirait une autre diminution de ses revenus au cours
de l'année 1975, d ue, naturellement, à l'augmentation des
coûts de production qui ne cessent de grimper.
Donc, on peut estimer que, compte tenu de l'inflation, les agriculteurs
quebecois auront subi, au cours des années 1974 et 1975, une diminution
de leur revenu net de plus de 40%. C'est quand même un pourcentage
important. Les agriculteurs du Québec auront subi au cours des
années 1974 et 1975 une diminution de leur revenu de 40%. Cela
correspond justement à l'augmentation des salaires des
députés, ou à peu près. Mais la différence,
c'est que pour eux, c'est une diminution, non une augmentation. Est-ce qu'il y
a une classe de la société québécoise qui
accepterait de voir diminuer en deux ans, son revenu net de 40%?
Les agriculteurs du Québec, d'ailleurs, avaient senti cette
situation désastreuse lorsqu'en octobre dernier ils avaient
décidé de descendre dans la rue pour alerter le gouvernement et
alerter l'opinion publique sur la situation.
Mais il ne semble pas que cela puisse avoir porté fruit. Les
réactions de certains députés libéraux, comme les
réactions du ministre de l'Agriculture, nous démontrent qu'on n'a
pas compris encore. Les agriculteurs, probablement, seront dans l'obligation,
encore une fois, pour tenter d'alerter ce gouvernement, de descendre dans la
rue pour obtenir des politiques agricoles.
N'est-ce pas là, M. le Président, une justification de la
contestation? Quand des gens sont obligés, pour faire valoir leurs
revendications, de descendre dans la rue, c'est qu'il n'y a pas d'autre moyen.
Cela prouve qu'il n'y a pas d'autre moyen pour ces personnes de faire
reconnaître par un gouvernement sourd et par un ministre muet leurs
revendications.
Mais encore faut-il se demander si la situation est semblable dans
l'ensemble du Canada. En effet, M. le Président, si on retrouvait une
situation semblable dans l'ensemble du Canada, le ministre pourrait toujours
nous répondre: C'est dû à la conjoncture. Quand ce n'est
pas la conjoncture canadienne, cela devient la conjoncture internationale. M.
le Président, quelle est la situation de l'agriculture dans l'ensemble
du Canada?
C'est encore le ministre de l'Agriculture du Québec qui nous
informait, lors de sa conférence de presse de janvier dernier, que les
recettes de l'agriculture du Québec, en 1974, se sont accrues de 16% par
rapport à 37% pour l'agriculture canadienne. Autrement dit, M. le
Président, les recettes de l'agriculture canadienne se sont accrues deux
fois plus vite que les recettes de l'agriculteur québécois. Si
des agriculteurs québécois ont vu, naturellement, étant
donné les augmentations de prix, l'augmentation de leur revenu brut
cornplètement annulée, ce ne fut pas le cas pour les autres
agriculteurs canadiens dont l'augmentation considérable des revenus
bruts s'est manifestée par une hausse appréciable de leur revenu
net.
M. le Président, voyons comment s'est comporté le revenu
moyen par ferme dans l'ensemble du Canada. J'indique immédiatement que
ces chiffres, qui ontété contestés par le ministre de
l'Agriculture lors d'une émission de télévision que nous
avions faite ensemble, proviennent du rapport de la Conférence des
perspectives agricoles canadiennes de 1975. J'indique que ces chiffres ont
été préparés en prenant le revenu brut des
agriculteurs des provinces canadiennes et en le divisant par le nombre
d'agricuIteurs à temps plein. Je pense, M. le Président, que cela
nous donne le revenu moyen par ferme.
Ces chiffres, aussi, M. le Président, proviennent
d'un rapport qui a été présenté, le 19 juin
1974, au conseil des ministres par l'Union des producteurs agricoles. Seule
l'année 1974aétéextrapolée, puis-que je reprends
tout simplement les chiffres qui ont été préparés
par l'Union des producteurs agricoles du Québec sur les revenus des
agriculteurs québécois et canadiens à temps plein par
région.
Quelle est donc cette situation? Il faut quand même se baser sur
un certain nombre de critères pour évaluer la situation de
l'agriculture au Québec.
Il faut quand même essayer de la comparer à d'autres
régions du Canada. Il me semble que si les statistiques que le ministre
de l'Agriculture nous présente chaque année, en janvier,
lorsqu'il trace le bilan, sont satisfaisantes, il me semble aussi qu'il est
tout à fait normal que nous utilisions les statistiques canadiennes pour
tenter de faire des comparaisons entre la situation de l'agriculteur
québécois et celle de l'agriculture canadienne dans
l'ensemble.
Je donne le tableau, quitte, par la suite, à le discuter et
à le commenter.
En 1971, le revenu moyen par ferme, des agriculteurs à temps
plein était, dans des Maritimes, de $4, 376; dans le Québec, $4,
999; en Ontario, $5, 049; dans les Prairies, $7, 315; en Colombie-Britannique,
$9, 500; moyenne canadienne, $6, 351. Si je donne tous ces chiffres, c'est que
l'on se souvient, que lors d'un débat antérieur, l'on avait
refusé de déposer un tel tableau. Dans les circonstances, je ne
prends pas le risque de faire la demande; je cite donc les chiffres
intégralement.
En 1972: Maritimes, $7, 069; Québec, $5, 837; Ontario, $8, 429;
Prairies, $7, 645; Colombie-Britannique, $11, 021.
En 1973: Maritimes, $12, 732; Québec, $8, 169; Ontario, $12, 163;
Prairies, $16, 602; Colombie-Britannique, $18, 242; moyenne canadienne, $14,
092.
Pour 1974, avec des montants estimés à partir du revenu
brut des agriculteurs, divisé par le nombre d'agriculteurs, nous
arrivons aux chiffres suivants: Maritimes, $11, 204; Québec, $7, 444;
Ontario, $13, 520; Prairies, $24, 019; Colombie-Britannique, $21, 790; moyenne
canadienne, $18, 080.
Je voudrais faire les commentaires suivants. En 1971, le Québec
se plaçait donc, par quelques dollars supplémentaires, avant les
Maritimes et était la deuxième parmi les provinces que j'ai
nommées. En 1972, le revenu de l'agriculteur québécois
tombe au dernier rang de toutes les provinces canadiennes. Nous sommes en
train, non seulement dans ce secteur mais dans d'autres aussi, de nous
maritimiser. Nous sommes en train de tomber dans la cave de la
confédération canadienne: le Québec tombe au dernier rang.
La situation ne se modifie pas du tout en 1973, Au contraire, elle se
détériore. En 1974, la situation de l'agriculteur
québécois, qui est encore au dernier rang de toutes les provinces
canadiennes, et se détériore par rapport à l'année
1973.
Voyons ce que cela peut donner comme comparaison. Au cours des
années1971 à1974, les agriculteurs, les producteurs des provinces
maritimes ont vu leur revenu brut augmenter de 156%. En Ontario, les
producteurs agricoles ont vu leur revenu augmenter de 168%.
Dans les Prairies, augmentation du revenu, toujours de 1971 à
1974, de 228%; Colombie-Britannique, augmentation du revenu de 129%; moyenne
canadienne je garde justement le Québec pour la fin
augmentation de 185%. Au Québec, quelle est la situation du revenu de
l'agriculteur québécois? Augmentation de 49%.
Le ministre de l'Agriculture nous disait, dans son intervention d'hier,
que si les agriculteurs empruntent, c'est parce q ue l'économie agricole
va bien. Ne serait-ce pas, M. le Président, plutôt parce que les
agriculteurs ne voient pas augmenter leur revenu au même rythme que les
autres agriculteurs canadiens et se voient dans l'obligation d'aller justement
sur les marchés financiers, au niveau des caisses populaires ou au
niveau des banq ues, en vue d'empêcher la faillite? C'est probablement
cela, la situation: en vue d'éviter la faillite. C'est clair. Ce sont
des chiffres qui peuvent être vérifiés; ce sont des
chiffres qui ont été rapportés à la page 7 du
rapport de l'Union des producteurs agricoles au conseil des ministres du
gouvernement du Québec, en datedu 19 juin 1974, et qui n'ont pas
été contestés jusqu'ici.
M. le Président, le Québec tire le diable par la queue,
comme d'habitude, mais le pire c'est qu'il tire de plus en plus le diable par
la queue; le pire, c'est que le ministre de l'Agriculture continue de se fermer
les yeux, continue de faire comme une autruche, se cacher la tête dans le
sable pour ne rien voir. C'est clair. Augmentation des revenus des agriculteurs
québécois de 49% par rapport à une augmentation moyenne,
pour l'ensemble du Canada, de 185%. Voilà la situation de l'agriculteur
québécois et la situation des revenus de l'agriculture
québécoise.
La question que tous les agriculteurs et que nous aussi, de
l'Opposition, nous nous posons constamment est: Comment le ministre de
l'Agriculture du Québec peut-il, dans les circonstances, se surprendre
que la productivité de l'agriculture québécoise soit moins
forte que celle des autres provinces du Canada? Lorsque le ministre de
l'Agriculture du Québec demande aux agriculteurs d'accroître leur
productivité s'ils veulent voir croître leurs revenus, il fait
preuve soit d'une ignorance inacceptable de la partd'un ministre de
l'Agriculture ou d'une irresponsabilité qu'il nous démontre de
plus en plus de ce temps-ci, particulièrement depuis 1973, et qui
correspond en fait à l'irresponsabilité qui a toujours
caractérisé ce ministre depuis 1971.
La vérité, c'est que le revenu des agriculteurs
québécois n'augmente pas au même rythme que celui des
agriculteurs des autres provinces et que son revenu net diminue constamment
à cause de l'augmentation des coûts de production. Le ministre
pourra tenter de contester ces chiffres et de démontrer, M. le
Président, que la liquidité de l'agriculture
québécoise augmente de plus en plus. Or, je regrette, ces
chiffres sont confirmés par une étude du gouvernement
fédéral, le patron du ministre, étude du gouvernement
fédéral qui a été commandée par la
commission Plumptre et qui a été réalisée par le
professeur Frank T. Denton, David Freshwater et le professeur Leslie Robb.
Cette étude démontre ceci. Les cultivateurs
québécois, affirme-t-on, avec une diminution de 9% de leur revenu
en 1974, pourront
difficilement s'équiper et améliorer ainsi leur
productivité.
Les cultivateurs de l'Ouest ont pu, grâce au prix
élevé des grains, augmenter considérablement leurs revenus
plus de 34% en 1974 et ainsi acheter de l'équipement qui
va accroître leur productivité. Toutes proportions gardées
le cultivateur québécois, selon l'étude de la commission
Plumptre, est celui qui investit le plus pour améliorer son entreprise
agricole. Pour un revenu agricole net de $189 millions, les chiffres de 1972,
les agriculteurs québécois ont investi 121% alors que leurs
homologues ontariens n'ont investi que 116% pour un revenu net de $385
millions. Quant aux Albertains, avec des revenus nets de $334 millions, ils ont
investi 99%. Et ce rapport continue en disant: "On peut donc en déduire
que les agriculteurs québécois, s'ils avaient des revenus plus
élevés avec un tel taux d'investissement, atteindraient une
productivité qui dépasserait de loin celle des autres provinces.
"
Faut-il que le ministre ait du front pour se présenter devant les
agriculteurs québécois et leur demander d'augmenter leur
productivité? La réponse qu'on pourrait faire au ministre, c'est
que lui-même augmente sa productivité. Je pense que ça
serait beaucoup plus efficace pour l'agriculture québécoise.
Et le rapport continue en disant: "Malheureusement, le manque d'aide
gouvernementale, l'absence d'une politique de marché cohérente ne
favorisent pas l'accroissement de leur revenu. " Cela, c'est une étude
du gouvernement fédéral. La théorie qui est
défendue par le ministre de l'Agriculture depuis un certain temps est
complètement opposée à celle-là en tout cas.
Quand le ministre de l'Agriculture demande aux agriculteurs d'augmenter
leur productivité, il devrait lui-même répondre à
cette question en disant aux agriculteurs: On va appliquer des politiques qui
vous permettront d'augmenter vos revenus et, en conséquence, vous
pourrez augmenter votre productivité.
Le quatrième point que constate le rapport présenté
à la commission Plumptre: "Marché ouvert, livré à
toutes les concurrences et les dumpings, tant étrangers que des autres
provinces, le Québec, s'il n'est pas protégé par une
politique provinciale au moins énergique, ne peut développer une
agriculture économiquement rentable qui favoriserait son expansion. " Je
pense que je vais le répéter, parce que ce sont là des
choses que j'ai affirmées avec insistance à la commission qui
avait pour but d'étudier l'ensemble des crédits de l'agriculture.
"Marché ouvert dit la commission Plumptre livré
à toutes les concurrences et les dumpings, tant étrangers que des
autres provinces, le Québec, s'il n'est pas protégé par
une politique provinciale au moins énergique, ne peut développer
une agriculture économiquement rentable qui favoriserait son expansion.
"
Le ministre se rappellera que j'ai dit à plusieurs reprises,
à cette Assemblée nationale comme en commission parlementaire,
que le Québec était devenu le dumping, la poubelle c'est
bien l'expression de l'Amérique du Nord. C'est de plus en plus
l'expression de ce temps-ci, parce qu'on mange même de la charogne qui
nous provient de l'Ontario.
Le Québec est devenu la poubelle de l'Amérique du Nord en
ce qui concerne les produits agricoles, et le ministre ne fait rien. Et la
commission Plumptre, commission du gouvernement fédéral, le
constate, elle souligne abondamment ce fait. Une des conséquences de
cette situation, conséquence qu'on a tendance à négliger
quand on examine la hausse d u prixde l'alimentation, est que la majoration des
revenus agricoles permet d'accroître les investissements et donc,
d'améliorer la productivité du secteur agricole canadien.
La commission, par ailleurs, constate que depuis 1921 la
répartition des terres agricoles canadiennes s'est
déplacée notablement de l'est vers l'ouest. On en compte de moins
en moins, dans l'agriculture canadienne, et particulièrement depuis
1970. Encore là, le ministre de l'agriculture n'a qu'une chose à
nous dire: Cela va bien. C'est vrai. Tel que le disait tout à l'heure le
député de Bellechasse, c'est vrai que je sens que de plus en plus
mon disque est usé. C'est vrai qu'il faut constamment
répéter, à cette Assemblée nationale. Parfois on se
demande si on ne devrait pas tout simplement rester silencieux, si on ne
devrait pas tout simplement arrêter de parler. On réaffirme ces
choses depuis 1970, que ce soit dans le domaine municipal, que ce soit dans le
secteur énergétique, dans le secteur des richesses naturelles il
y a peut-être un ministre qui fait exception, c'est le ministre des
Transports dans celui du travail.
Il n'y a plus rien qui fonctionne dans ce gouvernement, ça ne
marche plus. Il n'y en a plus. C'est vrai que parfois on constate
nous-mêmes qu'on répète constamment les mêmes choses,
mais c'est dans l'espoir qu'un jour ou l'autre ce gouvernement va se
réveiller, c'est dans l'espoir qu'un jour ou l'autre ce ministre de
l'Agriculture va se réveiller et va tenir compte de certaines
recommandations que nous lui faisons à l'Assemblée nationale.
Là, ce n'est pas le député de Saguenay qui l'affirme,
c'est une étude du gouvernement fédéral. On en est rendu
à un point que pour connaître la vérité sur
l'agriculture québécoise il va falloir prendre nos statistiques,
prendre nos informations au gouvernement fédéral parce qu'il n'y
a plus de ministre de l'Agriculture au Québec, parce que les
véritables maîtres de l'agriculture québécoise c'est
à Ottawa qu'ils sont. Toute décision importante concernant
l'agriculture canadienne et qui a des conséquences sur l'agriculture
québécoise se prend à Ottawa et nous n'avons pas de
pouvoirs. Le ministre de l'Agriculture continue constamment à se fermer
les yeux. C'est cela qui est grave.
C'est d'autant plus grave que ce ministre est originaire du secteur
agricole, ce ministre a particulièrement travaillé comme
fonctionnaire à l'Union des producteurs agricoles. On pouvait
naturellement je comprends les agriculteurs espérer
qu'avec un tel ministre l'agriculture pourrait recevoir des politiques qui
soient conformes au développement de ce secteur d'activité. Non
pas que je doute de la volonté du ministre. C'est lui-même qui, il
y a quelque temps je comprends maintenant qu'on l'ait oublié
parce que de plus en plus les ministres deviennent amnésiques, y compris
le premier ministre du Québec allait devant des étudiants
du polytechnique affirmer qu'on ne le comprenait pas à
l'intérieur du cabinet, que ce n'était pas sa faute mais
qu'au conseil des ministres il fallait qu'il développe, qu'il fasse des
énoncés sur l'économie agricole et qu'il était tout
seul à comprendre.
Je pense que ce que disait à ce moment-là le ministre de
l'Agriculture correspond à la réalité. Ce gouvernement n'a
jamais eu comme préoccupation première ou comme
préoccupation importante, par rapport à d'autres secteurs de
l'activité économique du Québec, de s'occuper du secteur
agricole. C'est tellement vrai, quoi qu'en dise encore le ministre de
l'Agriculture, que le budget de l'agriculture québécoise a
diminué constamment.
Pourêtre plus réaliste, le pourcentagedu budget de
l'agriculture du Québec, par rapport au budget de l'ensemble du
Québec, a diminué constamment depuis l'arrivée de ce
gouvernement. En 1962/63, par exemple, le budget de l'agriculture
québécoise, par rapport à l'ensemble des activités
économiques du Québec, correspondait à 6. 1%. En 1969/70,
2. 5%, donc, juste avant l'arrivée du gouvernement Bourassa.
On va prendre maintenant les années du gouvernement Bourassa. En
1970/71, pourcentage du budget, 2. 1%; en 1971/72, 1. 9%; en 1972/73, 2%; en
1973/74, 2%; en 1974/75, à cause des contestations, une
légère augmentation, 2. 4%; en 1975/76, 2%. Je dois dire que,
depuis seize ans, il y eut seulement cinq années où le
pourcentage fut plus faible. Ces cinq années coïncident avec le
gouvernement de M. Bourassa, ce gouvernement tellement conscient des besoins de
l'agriculture québécoise, tel que le disait M. Bourassa, il y a
quelque temps. C'est grave, c'est grave! Le ministre nous expliquait, encore
hier, pratiquement, qu'il se réjouissait de la diminution du nombre de
fermes depuis 1970.
Je ne dis pas que je suis pour le retour à des petites fermes qui
ne sont pas rentables sur le plan économique; je dis qu'il va falloir
conserver la ferme familiale, mais que cette ferme devra être une
entreprise rentable. Je ne suis pas prêt à revenir à une
agriculture artisanale. Cependant, il ne faudrait quand même pas qu'on
fasse des politiques qui auront comme conséquence une diminution de plus
en plus forte du nombre d'agriculteurs au Québec. Qu'on se souvienne que
nous n'avons que 5% du sol qui est cultivable au Québec.
On peut donc en déduire que les agriculteurs
québécois, tel que nous le soumet la commission Plumptre, s'ils
avaient des revenus plus élevés, avec un tel taux
d'investissement, atteindraient donc une productivité qui
dépasserait de loin celle des autres provinces. Malheureusement, le
manque d'aide gouvernementale, l'absence d'une politique de marché
cohérente ne favorise pas l'accroissement de leurs revenus.
Voilà la situation telle que décrite dans cette
étude. Le bilan agricole est pourtant clair, depuis 1970. La base
agricole de ce pays qu'on appelle le Canada se déplace vers l'ouest. Du
point de vue du fédéral, c'est sans doute normal, naturel,
désirable même et rentable, politiquement et
économiquement, mais, du point de vue des Québécois, ce
n'est pas la même chose. Résultats en agriculture: ici c'est le
marasme, là-bas c'est l'abondance. Ici, baisse de 9% du revenu net,
hausse de 36% dans les Prairies; baisse de 21. 4% du pouvoir d'achat de nos
agriculteurs, augmentation dans les Prairies; baisse continue de la part
québécoise dans les recettes agricoles du Canada.
Le pourcentage des recettes ou des revenus des agriculteurs
québécois, par rapport aux revenus de l'ensemble des agriculteurs
canadiens, diminue constamment. En 1970, ce pourcentage était de 15. 7%,
en 1971, 15. 1%, en 1972, 14. 3%; en 1973, 14. 1% et, en 1974, environ 13%.
Résultat des politiques agricoles de ce gouvernement: Notre
situation se détériore de plus en plus. Les revenus agricoles per
capita les plus faibles au Canada, en dessous de tout le monde, même en
dessous des Provinces maritimes.
En plus de tout cela, on prévoit que le revenu net des
agriculteurs au Québec devrait encore diminuer de 8% en 1975. En tenant
cornpte de l'inflation prévue aux alentours de 10%, on arrive donc
à un pouvoir d'achat moyen pour le cultivateur québécois,
en 1975, à peu près égal aux deux tiers de ce qu'il
était en 1973.
C'est grave, M. le Président. Pendant que toutes les autres
classes de la société voient leur revenu augmenter, seuls les
agriculteurs constatent une baisse de leur revenu de plus de 35% au cours des
deux dernières années' Comment voulez-vous que ces gens
augmentent leur productivité?
Il ne faut pas que le ministre de l'Agriculture soit gêné
pour aller leur dire encore d'augmenter leur productivité. "Toupin
en date du 22 novembre 1974, dans la Presse de Montréal
aux agriculteurs: Accroissez votre productivité et vos revenus
augmenteront. " Il faut avoir du front, de la part du ministre de
l'Agriculture, pour aller affirmer une telle chose, quand on constate la
productivité négative de ce ministre de l'Agriculture et de ce
gouvernement depuis 1970.
Une Voix: Cela prend du toupet.
M. Lessard: Oui, cela prend du toupet. A quand l'augmentation de
la productivité du ministre de l'Agriculture? On aimerait obtenir une
réponse à ce sujet.
Alors, dans tout ce bilan global, que viendra donc faire ce projet de
loi pour les agriculteurs québécois, si le ministre continue
à ne rien faire?
Les agriculteurs pourront de plus en plus s'endetter et auront de moins
en moins d'argent pour payer leurs dettes. Comme ils ne sont pas capables de
trouver à l'intérieur de leur propre entreprise, comme c'est le
cas dans tous les secteurs économiques, l'autofinancement
nécessaire pour s'équiper, acheter du matériel nouveau,
améliorer leur ferme, eh bien! ils devront, de plus en plus, passer par
l'Office du crédit agricole. Non pas que cette loi n'améliore
pas, pour l'individu comme tel, la situation. Il est certain que bien souvent
l'endettement ou les emprunts empêchent les faillites. Mais, à
longue période, si le ministre continue de ne rien faire, l'agriculture
québécoise continuera de s'en aller dans le trou et on continuera
d'être à la queue des autres provinces canadiennes. Cela, le
ministre de l'Agriculture, ne semble pas en prendre conscience.
Non seulement ces agriculteurs continueront de
s'endetter, le pire c'est que l'argent des contribuables
québécois s'en ira chez les intermédiaires. Le ministre,
encore là, ne semble pas en prendre conscience. Le 19 mars ce
n'est pas le député de Saguenay les libéraux de
Montréal-Nord demandaient, dans une résolution, au ministre de
l'Agriculture d'exercer une étroite surveillance sur les profits des
intermédiaires dans l'alimentation. Même ces libéraux
s'inquiètent de la situation.
Le ministre, en janvier dernier, disait qu'il n'y avait pas de
problème. Pour que des libéraux s'en scandalisent, il faut que ce
soit grave. Pour que des libéraux commencent à s'en scandaliser,
il faut que la situation soit grave.
Par son refus obstiné d'enquêter chez les
intermédiaires, le ministre se trouve tout simplement à
canaliser, chez ces derniers, l'argent des taxes publiques tandis que
l'agriculteur restera toujours ainsi endetté. L'agriculture, si cela
continue, sera un tonneau sans fond. On va subventionner les agriculteurs, les
prix vont augmenter e til ne restera plus rien pour les agriculteurs, encore
une fois. Ils vont aller s'endetter à l'Office du crédit
agricole. Ils vont emprunter. Et les grandes compagnies multinationales vont
augmenter leurs prix. Il va rester quoi? Voulez-vous avoir des chiffres? On va
vous en donner pour vous éclairer un peu. Je peux vous en donner.
Prenons les compagnies qui fournissent les matières
premières aux agriculteurs: Maple Leaf, de 1969 à 1972, les
profits avaient été de $2, 359, 000; 1973, $7, 859, 000,
augmentation de 333%.
M. Massicotte: Quel est le chiffre d'affaires?
M. Lessard: De 333%.
M. Massicotte: Quel est le chiffre d'affaires brut?
M. Lessard: International Harvester Canada, moyenne 1969-1972,
$7, 620, 000; 1973, $21, 864, 000, augmentation de 287%.
Ah! le chiffre d'affaires aurait augmenté, tout à coup,
considérablement, en un an? Le chiffre d'affaires aurait augmenté
de 287%? C'est drôle, on constate une même moyenne pour l'ensemble
des entreprises multinationales comme si, cette année-là, les
compagnies multinationales, les intermédiaires, avaient
décidé d'augmenter leur chiffre d'affaires tout d'un coup!
Voyons! Ne nous faites pas rire. A défaut d'en pleurer, il faut bien en
rire, par exemple.
Massey-Ferguson, 1969-1972, moyenne des profits, $13, 667, 000; 1973,
$58, 213, 000, augmentation de 426%. Cela, ce n'est pas scandaleux, c'est
normal.
Je pourrais continuer mais cela, c'est en haut de l'agriculteur,
là où l'agriculteur va chercher ses produits primaires. Puisque
les prix ont augmenté, on pourrait s'attendre que les agriculteurs
fassent de l'argent. Mais si c'est un problème d'inflation, on pourrait
aussi s'attendre que les compagnies ne profitent pas de l'inflation.
Voyons maintenant, au niveau de la transformation des produits, quelle
est la situation en ce qui concerne les principales chaînes de
transformation.
Canada Packers. Je ne sais pas si j'ai Federal
Packing là-dedans. Non, je ne l'ai pas. Canada Packers, moyenne
1969-1972, $9, 350, 000; 1973, $14, 097, 000, augmentation de 50%.
B. C. Packers, moyenne 1969-1972, $2, 094, 000; 1973, $9, 343, 000,
augmentation de 446%.
Pour faire plaisir à mon collègue, le député
de Maisonneuve, Burns Food, moyenne de 1969-1972... Vous n'êtes pas
actionnaire de cette compagnie?
M. Burns: Non.
M. Lessard: Burns Food, moyenne de 1969-1972, $2, 715, 000.
M. Bacon: Conflit d'intérêts.
M. Lessard: Augmentation ou profits en 1973, $4, 562, 000;
augmentation de 168%.
Nous retrouvons, M. le Président, la même situation chez
Dominion, en fait chez les principales chaînes de distribution: Dominion,
Steinberg, Provigo, etc. Il y a juste les producteurs, à la base, qui,
eux, ne font pas de profits.
Autrement dit, si le ministre ne fait rien, si le ministre ne
contrôle pas les intermédiaires, si le ministre ne contrôle
pas ses marchés, de telle façon que le Québec soit
toujours la poubelle de l'Amérique du Nord, l'agriculture
québécoise, malgré la Loi du crédit agricole, sera
toujours dans la même situation.
En elle-même, la loi me paraît être une bonne loi.
Mais comme elle s'intègre dans une politique générale de
laisser-faire et de laisser-aller, elle ne contribuera qu'à
l'endettement de plus en plus grand des agriculteurs
québécois.
Je dis, M. le Président, que la loi me paraît satisfaisante
puisqu'elle ne fait, en tout cas, au moins que se conformer à la
situation économique du jour. En effet, les deux points majeurs de ce
projet de loi ont pour objectif d'augmenter le crédit agricole, pour les
agriculteurs, qui passera, pour un individu, de $40, 000 à $100, 000 et,
dans le cas de groupes, de $60, 000 à $200, 000. Je pense que cela
correspond à la réalité puisque, depuis 1961, les
investissements moyens par ferme canadienne n'ont cessé d'augmenter.
En 1961, ces investissements étaient de $27, 400, alors qu'en
1971 ils sont de $64, 700 et on prévoit que ce chiffre atteindrait $100,
000 en 1980. Donc, pour satisfaire un tel besoin, une telle augmentation des
investissements, il faut davantage de crédit. Or, ce qui peut passer
pour une hausse du crédit agricole à court terme comme tel, dans
le présent projet de loi, est, en fait, seulement une mise à
jour, compte tenu des besoins et de la valeur décroissante de l'argent.
En fait, avec la présente hausse, on maintient la situation telle quel
le, tout au plus; on l'empêche de se détériorer, maison ne
l'améliore pas ou presque pas.
Je voudrais, M. le Président j'espère que le
ministre nous apportera un amendement à ce sujet souligner le
fait que cette loi n'encourage pas tellement le regroupement agricole et
même est une loi négative en ce qui concerne l'incitation au
regroupement. Pourquoi? Parce qu'un individu pourra recevoir, comme
crédit agricole, $100, 000 et, si trois
individus se regroupent, leur crédit est limité à
$200, 000; alorsque, si chacun empruntait individuellement, ils pourraient
obtenir $300, 000.
C'est donc un découragement des politiques prônées
par le ministère de l'Agriculture, à savoir, autant que possible,
de permettre le regroupement des fermes. D'ailleurs, ce point est
souligné dans La terre de chez nous du 2 avril 1975 où on
écrit ceci: "Ainsi donc, dans le cas du long terme, si le projet
franchit le cap de la troisième lecture dans sa version actuelle, il
deviendrait possible pour un individu d'obtenir un prêt maximum de $100,
000 de l'Office du crédit agricole, à comparer avec un plafond de
$40, 000 à l'heure actuelle. Dans le cas d'un groupe, le montant total
passerait de $60, 000 à $200, 000. En définitive, ces nouveaux
maxima constituent une étape devant permettre à l'office de
financer des fermes familiales industrialisées sans rendre possible,
pour autant, le financement des grosses entreprises agricoles
québécoises et certaines, mu Itifami-liales. Le service
d'étude et de recherche de l'UPA signale à cet effet que les
spécialistes du gouvernement auraient avantage à explorer ces
besoins particuliers de financement pour être en mesure de couvrir
l'ensemble des exploitations. Pour la ferme de groupe, la norme de $200, 000 ne
tient pas compte du nombre de propriétaires exploitants; il demeure
encore plus facile à cinq personnes d'obtenir chacune $100, 000
plutôt que de se grouper et de limiter, en ce faisant, leur crédit
à $200, 000. Il aurait été plus logique, selon l'UPA, de
baser les prêts sur un multiple du nombre de propriétaires
exploitants. " S'il y a cinq propriétaires exploitants, qu'on leur
permette tout simplement de pouvoir emprunter $500, 000.
J'espère, M. le Président, que le ministre de
l'Agriculture, qui nous a annoncé un amendement particulièrement
à cet article, pourrait peut-être nous proposer de hausser ces
$200, 000 à $300, 000. Ce serait plus logique et cela inciterait les
regroupements, alors qu'actuellement, par la loi qui nous est
présentée, on combat en fait le regroupement; on n'encourage pas
les gens à se regrouper.
En ce qui concerne un autr élément essentiel de ce projet
de loi, à savoir l'aspirant agriculteur, il est défini comme
"toute personne physique âgée d'au moins 18 ans et d'au plus 40
ans, propriétaire ou locataire d'une ferme, qui s'adonne à
l'agriculture sans en faire sa principale occupation et s'engage à en
faire sa principale occupation dans les délais et suivant les conditions
fixées par règlement. " Je dis que cela est une modification
majeure, importante et qui va certainement permettre à plus de jeunes de
s'intéresser à l'agriculture. En effet, il y avait beaucoup de
jeunes qui étaient intéressés à l'agriculture, mais
ne pouvaient profiter du crédit agricole à cause du fait qu'ils
se trouvaient un autre revenu d'appoint à l'extérieur de
l'agriculture.
M. le Président, je termine sur ce point. Malgré le fait
que cette loi soit nécessaire, améliore individuellement la
situation de l'agriculteur québécois et lui permette d'avoir
accès à des crédits supplémentaires, je dis, M. le
Président, que le problème de l'agriculture
québécoise n'est pas pour autant réglé. Au
contraire, si le ministre nefait rien pour contrôler les marchés,
contrôler les intermédiaires; fi le ministre ne fait rien pour
assurer non pas la stabilisation des déficits, non pas la stabilisation
des faillites, mais pour assurer des revenus stables aux agriculteurs
québécois, je dis que l'agriculture continuera de se
détériorer au Québec.
M. le Président, le ministre fait payer par la
collectivité québécoise l'absence totale de contrôle
sur les concurrents et le dumping, pratiqué tant par les
étrangers que par les autres provinces et qui détruit le revenu
des agriculteurs, forçant ces derniers à avoir de plus en plus
recours à l'Office du crédit agricole. Les intermédiaires
comme ceux qui viennent vendre leurs produits chez nous en faisant du dumping,
voilà les vrais bénéficiaires de l'aide accrue que le
ministre s'apprête à accorder à la classe agricole, tout en
sachant fort bien que cet argent ne restera pas, en définitive, dans la
poche des agriculteurs et qu'un revenu normal assurerait aux agriculteurs une
indépendance accrue face au crédit agricole. Je dis que le
ministre de l'Agriculture ne devrait plus aller demander aux agriculteurs
d'augmenter leur productivité, mais que le ministre de l'Agriculture
devrait lui-même augmenter sa propre productivité s'il veut
assurer une agriculture rentable au Québec, agriculture qui ne cesse de
se détériorer depuis l'arrivée au pouvoir de ce
gouvernement en 1970.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: M. le Président, qu'il me soit permis de signaler,
au début de mon intervention, la présence d'un groupe
d'étudiants de Saint-Honoré, comté de Beauce-Sud,
accompagnés de leur professeur et de leur souhaiter la bienvenue
à l'Assemblée nationale.
Nous avons ce matin devant nous le projet de loi no 2, Loi modifiant la
loi du crédit agricole. On se rappellera que des amendements à la
Loi du crédit agricole avait été exigés par l'UPA.
On se rappellera également que d'autres organismes avaient exigé
des modifications à la loi de façon qu'elle soit mieux
adaptée aux besoins de l'agriculture québécoise
modèle 1975 et pour les années q ui vont suivre, 1976, 1977 et
les autres.
Il est évident que ce projet de loi ne comporte rien de mauvais
en soi, sauf un point sur lequel je voudrais immédiatement attirer
l'attention du ministre. Dans ce projet de loi, et pour la première fois
dans l'histoire de l'Office du crédit agricole, c'est le
lieutenant-gouverneur en conseil qui va autoriser les augmentations de
crédits qui doivent être mis à la disposition de l'office
pour lui permettre de consentir des prêts aux agriculteurs. Cette
disposition à la loi est complètement nouvelle. On vient de
mettre de côté un principe sur lequel on avait tenu à
l'époque, lors de la création de l'Office du crédit
agricole, voulant que toute augmentation des montants mis à la
disposition de l'office serait dorénavant soumise à la Chambre
parce que ceci faisait l'objet d'un projet de loi qui était soumis
à l'Assemblée législative du temps, aujourd'hui
l'Assemblée nationale.
Et aujourd'hui, du revers de la main, on enlève ce pouvoir au
législateur, pour le donner encore aux technocrates et aux hauts
fonctionnaires du gouver-
nement qui vont préparer un arrêté en conseil qui
sera porté devant la table du conseil des ministres, parmi une multitude
d'autres arrêtés en conseil, de façon qu'on va
régler dans 30 secondes la question importante qui concerne le
crédit agricole.
Je m'oppose à cette mesure. Le député de Vanier
dit: Encore. Oui, M. le Président, malheureusement encore. Si le
règlement de la Chambre me permettait d'interroger nos col
lègues, à savoir si ce projet de loi no 2 a été
soumis au caucus du Parti libéral avant d'être soumis devant
l'Assemblée nationale, jeserais curieux d'avoir les réponses.
Probablement que ce projetde loi, comme les autres, n'a pas reçu
l'approbation d u Parti libéral, du parti qui a la
responsabilité, le mandat d'administrer le Québec.
Comme d'habitude, on a mis encore de côté l'opinion de nos
collègues ministériels, par le fait que les projets de loi sont
précipités devant l'Assemblée nationale du Québec,
sans même que les députés ministériels soient
consultés.
Je le dis et je le répète, sans que les
députés ministériels soient consultés. Et si mon
collègue, le député de Huntingdon, veut intervenir, il a
un pupitre derrière moi; il n'a qu'à se lever, vous demander la
parole et je l'écouterai avec un grand plaisir. Mais à ce moment
je ne lui reconnais pas le droit, d'autant plus qu'il se promène
derrière le fauteuil, d'intervenir dans ce débat, surtout avec un
gros cigare, alors qu'on sait que c'est interdit de fumer à
l'Assemblée nationale.
M. Cadieux:... péquiste.
M. Roy: II veut peut-être démontrer sa
prospérité personnelle. Pour revenir de façon
sérieuse à l'objet du projetde loi qui est actuellement devant
nous, je trouve encore cela mal heureux cette fois. Lorsque le gouvernement est
obligé de représenter un nouveau bill à l'Assemblée
nationale et que ce bill permet aux députés d'interroger le
gouvernement et aux députés ministériels d'intervenir pour
faire leurs recommandations, on vient tout simplement, encore ce matin, comme
dans les autres projets de loi, enlever aux législateurs cette
responsabilité qu' ils avaient de fixer eux-mêmes les montants par
un bill présenté devant l'Assemblée nationale. Cela
permettrait aux membres de l'Assemblée nationale, aux élusdu
peuple d'intervenir dans les affaires du crédit agricole, d'exiger du
gouvernement de rendre des comptes, d'exiger du gouvernement des
précisions quant à l'application de ses politiques et d'exiger du
gouvernement des modifications quant aux politiques et aux modernisations des
lois ou encore de la réglementation. Cela nous permettrait de critiquer
ou de faire des suggestions pertinentes au gouvernement pour ce qui a trait
à l'application de la Loi du crédit agricole, à ses
règlements et la façon dont le crédit agricole est
appliqué dans le Québec.
Encore là le législateur n'aura plus son mot à
dire. Si c'est la philosophie qui anime le gouvernement, il n'aurait
qu'à adopter un projet de loi en Chambre dans lequel on donnerait au
lieutenant-gouverneur en conseil tous les crédits, tous les pouvoirs de
faire tous les règlements dans tous les domaines et le tour serait
joué. C'est en quelque sorte là où nous nous dirigeons
à l'heure actuelle.
Nous sommes limités actuellement, comme députés,
comme élus du peuple, comme représentants élus d'une
population, à des petites questions de détails techniques. Nous
avons de moins en moins notre mot à dire dans les grandes politiques
gouvernementales et dans les grandes décisions administratives du
gouvernement.
Je dis que c'est extrêmement malheureux que le gouvernement
continue de faire la sourde oreille aux mémoires et aux recommandations
qui ont été présentés par le Barreau, la Chambre de
commerce du Québec, dans lesquels on a voulu attirer l'attention non
seulement des législateurs mais également de l'opinion publique
et du gouvernement surtout sur ce pouvoir discrétionnaire totalitaire
qu'on est en train de donner au lieutenant-gouverneuren conseil, aux hauts
technocrates, c'est à un point tel que nous sommes en train de donner
aux technocrates tous les pouvoirs que peut comporter un gouvernement
parallèle.
On aeu l'occasion de le dire dans le passé et je le
répète encore ce matin. Dans un domaine aussi important que celui
du secteur agricole, qu'on fasse en sorte, encore une fois, de
référer le tout au lieutenant-gouverneur en conseil et de
soustraire de ses responsabilités l'Assemblée nationale, je dis
que c'est un abus de pouvoirs. Je ne suis pas d'accord, pour ce qui me
concerne, sur cette situation parce que c'était le seul moyen que nous
avions, à part l'étude des crédits du ministère qui
nous limite quand même à un certain nombre d'heures,
c'était la seule occasion que nous avions d'intervenir dans les affaires
de l'Office du crédit agricole et de faire part de nos observations et
de nos recommandations au gouvernement.
Quand le gouvernement nous parle d'une réforme dans la Loi du
crédit agricole et qu'il nous présente un projet de loi comme le
projet de loi no 2, je pense qu'il aurait été important, au
préalable, de définir les orientations je dis bien les
orientations, je pourrais parler de l'orientation que le gouvernement
entend suivre vis-à-vis du monde agricole. Est-ce que le gouvernement
veut être le sauveur de ce qu'on pourrait appeler la production agricole
ou s'il veut travailler dans l'intérêt des producteurs agricoles
qui sont des citoyens du Québec à part entière, des
citoyens qui paient des taxes, des citoyens qui paient des impôts, des
citoyens qui apportent leur contribution au développement
économique de la province, des citoyens qui jouent un rôle
fondamental, un rôle primordial dans l'économie du Québec
parce que ce sont eux qui ont la responsabilité de nourrir la population
du Québec?
On a l'impression très nette, depuis cinq ans mais surtout depuis
les deux dernières années, qu'on ne cherche pas du tout, qu'on ne
se soucie d'aucune façon des problèmes humains, des
problèmes auxquels les agriculteurs ont à faire face là
où l'action gouvernementale est centrée uniquement vers la
productivité et la production en termes de q uantité de prod uits
agricoles. Si c'était encore l'objectif que le gouvernement poursuivait,
en ce sens que le gouvernement voudrait qu'on produise majoritairement, qu'on
produise tous les produits agricoles qu'on peut produire au Québec de
façon à satis-
faire les besoinsde la société québécoise,
de façon à nous libérer de la tutelle du commerce
international, je dirais qu'au moins nous avons une consolation, mais ce n'est
même pas cela. On ne cherche pas du tout, au Québec actuellement,
à faire en sorte que la production agricole puisse se
développerde façon à assurer au Québec et aux
Québécois une autosuffisance de façon qu'on dépende
de moins en moins des grands marchés internationaux.
Je pense que le premier principe qui devrait guider le gouvernement dans
l'orientation de ses politiques agricoles et c'est fondamental dans la
Loi du crédit agricole c'est que l'agriculture doit être la
responsabilité et l'exclusivité des agriculteurs. En termes
simples, faciles à comprendre pour tout le monde, que l'agriculture
reste aux agriculteurs du Québec. Il y a actuellement la Loi du rachat
des petites fermes, une loi fédérale. Il y a d'autres lois du
gouvernement fédéral qui viennent s'implanter, qui viennent
s'ingérer dans nos politiques agricoles provinciales, qui viennent
contrecarrer "certaines" politiques provinciales. J'en parle à ce
moment-ci parce que la Loi du rachat des petites fermes est une des politiques
qui concernent directement l'Office du crédit agricole du
Québec.
Je le dis à l'intention de l'honorable ministre qui est ici, la
loi fédérale du rachat des petites fermes accorde des primes
à des professionnels, à des in-dustriels qui achètent les
petites fermes de nos petits agriculteurs du Québec à l'heure
actuelle. J'espère que le ministre est au courant.
Si le ministre n'est pas au courant de ce fait, j'ai suffisamment de
dossiers à mon bureau pour lui apporter des preuves.
M. Toupin: II n'y a pas de prime, c'est le vendeur qui en a
une.
M. Roy: Pardon?
M. Toupin: Dans le programme rachat des petites fermes,
l'acheteur n'a aucune...
M. Roy: Oui, on encourage les agriculteurs à laisser leur
ferme; on leur donne des primes pour se débarrasser de leur ferme, pour
permettre aux hommes d'affaires, aux industriels et aux professionnels de
devenir des propriétaires agricoles...
M. Toupin: C'est du rêve.
M. Roy: J'ai desfaits, M. le Président. Le ministre le
sait, le ministre ne peut pas me contredire à ce moment. Il y a des gens
qui s'en vont dans l'agriculture pour trouver un moyen d'avoir plus de
dépenses pour tâcher de diminuer leur impôt sur le
revenu.
M. Toupin: C'est cela, l'argument classique.
M. Roy: Le ministre est d'accord avec moi là-dessus.
Qu'est-ce que fait le gouvernement du Québec, face à cette
situation, face à cette législation qui devraitêtre
dénoncée par le ministre de l'Agriculture du Québec?
M. Toupin: Si le gars produit des produits agricoles.
M. Roy: Tout à l'heure, dans quelques années,
l'agriculture du Québec ce ne sera pas entre les mains des agriculteurs.
Le peu d'agriculteurs professionnels que nous aurons continueront à se
débattre, à se démener contre des entreprises, de grosses
entreprises dans lesquelles on aura mis d'énormes capitaux. Celles-ci
auront atteint des taux de productivité ou des coûts de production
peut-être inférieurs, parce qu'il y aura toutes sortes
d'expédients et toutes sortes de façons de pouvoir
bénéficier de telle ou telle disposition, de telle ou telle
réglementation, mais elles placeront les agriculteurs professionnels,
les agriculteurs authentiques du Québec, dans un état de
dépendance de plus en plus grande.
Cette absence de philosophie, cette absence de principe, cette absence
d'épine dorsale, au niveau du ministère de l'Agriculture du
Québec, ne peut que favoriser l'inquiétude grandissante du monde
agricole et de l'économie rurale dans son ensemble.
Quand on voit qu'actuellement le Québec tente de faire le
contingentement de la production agricole, tente de distribuer des quotas,
tente de limiter les producteurs agricoles du Québec, et qu'on voit que
d'un autre côté les importateurs, les compagnies importatrices
font des chiffres d'affaires d'or, font les plus grandes affaires qu'ils n'ont
jamais faites, réalisent des millions en détruisant l'agriculture
du Québec, d'une part, et en exploitant le consommateur, d'autre part...
Je vois mon collègue qui fait des signes de la tête. Je comprends
qu'il n'a pas tellement, ce collègue, de problèmes agricoles dans
son comté. J'aimerais quand même porter à son
attention...
M. Dufour: On en a déjà entendu parler.
M. Roy:... certaines statistiques qui vont certainement lui
permettre...
M. Dufour: Je viens d'un comté rural puis je connais
cela.
M. Roy:... et je le lui dis poliment, délicatement, qui
vont lui permettre de se rendre compte et d'apprendre quelque chose, pour ce
qui regarde l'agriculture au Québec.
M. Dufour: Oui, mais...
M. Roy: A une question... M. le Président, le
député n'a pas le droit d'intervenir, il n'est pas à son
siège. Je vous inviterais à le rappeler à l'ordre.
M. Lacroix: II vient d'un comté rural, il vient du
comté de Charlevoix. C'est un comté rural.
M. Dufour: Je me garde bien de rêver tout haut.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lacroix: Oui, M. le Président.
M. Dufour: Bonjour.
M. Roy: Peut-être qu'on aimerait qu'on parle un peu d'autre
chose, mais je ne bifurquerai pas, je vais poursuivre mon intervention sur la
loi qui est actuellement en discussion.
Je veux dire à mes illustres collègues que la province de
Québec a été une province qui, dans le domaine de
l'industrie laitière, s'est toujours située au premier rang des
provinces canadiennes. Je suis convaincu que je n'apprends rien à
personne en disant cela. Sous prétexte de rentabilité, sous
prétexte de modernisation, sous prétexte de nouvelles politiques,
on a procédé à la fusion coercitive des usines
laitières pour rendre l'agriculture du Québec de plus en plus
dépendant d'une seule entreprise laitière, une entreprise de
transformation de produits laitiers de plus en plus grosse, de plus en plus
grande, de plus en plus puissante, réduisant de plus en plus
l'agriculteur à un petit numéro vis-à-vis de ce gigantisme
qu'on a érigé en système. On a fait du Québec et du
Canada, qui était un pays exportateur de produits laitiers, de beurre en
particulier, aujourd'hui, un des pays importateurs.
M. le Président, lorsqu'on regarde les prix que les importateurs
paient pour les produits étrangers qu'ils viennent mettre sur le
marché du Québec, on ne peut pas faire autrement que commencer
à comprendre pourquoi le gouvernement est impuissant, pourquoi il
n'intervient pas.
Parce qu'on sait les chiffres sont là pour le
démontrer que le gouvernement a des intérêts
particuliers quelque part.
Le député de Bellechasse posait au gouvernement
fédéral la question no 1361, le 24 mars 1975; ce n'est pas une
question qui a été posée en 1970, ni en 1972, mais une
question qui a été posée le 24 mars 1975. Cette question
se posait comme suit: "Le Canada a-t-il importé du beurre au cours de la
période allant du 1er avril 1974 au 31 décembre 1974? Dans l'aff
i rmative, dans q uel s pays et à quels prix et quel le est la
quantité importée de chaque pays?"
M. Gaston Clermont, secrétaire parlementaire du ministre de
l'Industrie et du Commerce, répondait de la façon suivante:
"Statistique Canada nous communique les renseignements suivants: les
importations de beurre au Canada, au cours de la période allant d'avril
à décembre 1974, se sont élevées là,
j'attire l'attention de mon collègue de Vanier à 41, 716,
900 livres de beurre pour une valeur de $24, 666, 000. Le tableau ci-dessous
représente la quantité importée de chaque pays
d'expédition et le prix moyen en cents la livre. " Or, du 1 er avril
1974 au 31 décembre 1974, le Canada a importé des Etats-Unis 235,
000 livres de beurre à $0. 44 la livre. Demandons aux consommateurs du
Québec quel prix ils ont payé le beurre lorsqu'ils se sont rendus
dans leurs marchés d'alimentation. Qui a encaissé la
différence, soit plus du double? Ce sont des questions qui
intéresseraient les membres de l'Assemblée nationale. C'est une
question qui intéresserait tous les Québécois, tous les
consommateurs du Québec. De la Nouvelle-Zélande, nous avons
acheté 16, 615, 000 livres de beurre à $0. 61 la livre. Est-ce
que le consommateur du Québec a payé son beurre $0. 70 la
livre?
Est-ce qu'il l'a payé $0. 80 la livre, son beurre? Qui a
empoché les millions de dollars? Peut-être que le
député de Huntingdon, qui siègederrière moi,
pourrait nous le dire. Qui a empoché ces millions, au détriment,
d'une part, de l'agriculture québécoise et, d'autre part, des
consommateurs du Québec? Quels sont ceux qui profitent de la
situation?
En Australie, 15, 680, 000 livres de beurre, à $0. 61 la livre.
Encore là, qui a profité de la situation? Qui a empoché
les millions de dollars?
De la Suède, 6, 613, 000 livres de beurre, à $0. 54 la
livre, moins de la moitié du prix que les consommateurs du Québec
doivent payer. Il y a quand même des limites! Qui empoche ces millions de
dollars, encore une fois? A qui cela profite-t-il? Comment se fait-il que le
Québec soit en train de devenir une province archipauvre? Comment se
fait-il que nos agriculteurs du Québec abandonnent leur ferme, par
milliers, chaque année? Comment se fait-il qu'il y ait tellement de
ventes à l'encan?Comment se fait-il que l'Officedu crédit
agricole refuse tant de prêts?On dit, dans les réponses aux
cultivateurs qui font des demandes de prêts agricoles: Vous n'avez pas
prouvé que votre exploitation était rentable. C'est ça
qu'on dit aux cultivateurs.
On vient encore, ce matin, faire croire à la population du
Québec que, par le bill 2, on va régler les problèmes de
l'agriculture! Même si on est d'accord en partie sur ce projet de loi
je l'ai dit tout à l'heure, c'est une excellente loi en soi
il ne faut pas qu'on se limite à cela. Il va falloir faire en sorte que
les agriculteurs du Québec ne soient pas des éternels
hypothéqués, endettés pour le reste de leurs jours. Il va
falloir, quand même, qu'on leur donne la chance, à ces gens, de
pouvoir prospérer et de pouvoir entrevoir le jour où ils pourront
être libérés des servitudes financières qui
augmentent chaque année. J'entends le ministre dire, en parlant des
agriculteurs du Québec: II faut qu'ils deviennent plus productifs. Il
faut qu'ils augmentent leurs productions. Est-ceque le ministre est en train
d'installer un système d'esclavage pire que celui qu'on connaissait dans
le temps des galères espagnoles?
Qu'on aille donc voir chez les agriculteurs du Québec qui gardent
25, 30, 35 vaches laitières, actuellement, si ce sont des gens qui ne
font pas leur possible, qu'on aille donc voir si ces gens ne font pas preuve
d'intelligence dans l'exploitation de leur ferme. Ce sont des gens qui
travaillent sept jours par semaine. Ce ne sont pas des gens q ui sont
syndiqués et qui sont limités à faire des 30et 35 heures
de travail. On sait cela, M. le Président. Et le ministre a l'audace de
venir dire devant l'Assemblée nationale: Pour permettre aux agriculteurs
du Québec d'accroître leur production. Il y a quand même des
limitesl
M. le Président, qu'on laisse l'agriculture aux agriculteurs
d'abord; cela devrait être la première préoccupation du
gouvernement. La deuxième préoccupation du gouvernement: Qu'on
fasse en sorte que le Québec puisse produire les biens de consommation
qu'il peut produire et dont il a besoin pour satisfaire les consommateurs
québécois sans accroître notre dépendance sur les
marchés internationaux. Bientôt nous aurons des problèmes
de ce côté-là.
M. le Président, le ministre de l'Agriculture notre ministre de
l'Agriculture qui, pourtant, est un expert dans les questions agricoles, un
ministre qui a vécu auprès des agriculteurs de sa région,
un ministrequi a travaillé au niveau des associations agricoles, qand
va-t-il parler au Québec des fermes à dimension humaine? On est
en train de réduire ce qu'il reste d'agriculteurs au Québec dans
l'esclavage le plus total, l'esclavage absolu et cela avec non seulement la
bénédiction du gouvernement mais avec des politiques
gouvernementales qui visent à accroître ce système. C'est
quand même là un point, M. le Président, sur lequel on ne
peut pas être d'accord et sur lequel nous nous opposons de façon
sérieuse. C'est le troisième point sur lequel je voulais attirer
l'attention du ministre.
Un autre point, M. le Président, que je pense important, lorsque
l'Office du crédit agricole fait des prêts pour 39 ans et demi
c'est le règlement, c'est la loi: 39 ans et demi lorsqu'un
agriculteur est âgé de 40 ans et qu'il a recours à la Loi
du crédit agricole, qu'il emprunte pour 39 ans et demi, il n'en demeure
pas moins vrai que sa ferme et son prêt seront payés lorsqu'il
aura atteint l'âge respectable de 79 ans et demi. S'il a 41 ans, c'est un
ciltivateur qui devra attendre d'avoir l'âge de 80 ans...
M. Lessard: Et demi.
M. Roy:... et demi, comme dit mon collègue de Saguenay,
avant d'avoir remboursé l'Office du crédit agricole.
Une Voix: 80 ans. M. Roy: 80 ans.
M. Toupin: 80 ans parce que le premier paiement est six mois en
retard.
M. Roy: Oui mais, quand il y a un retard à cause de la
grève des postes, cela fait 80 ans et demi.
M. Toupin: II va avoir 79 ans et demi quand il va recevoir son
dernier compte.
M. Roy: M. le Président, quand il y a une grève des
postes et qu'il y a des retards comme il y en a à l'heure actuelle, cela
fait facilement 80 ans et demi.
M. Toupin: C'est juste une question mathématique, M. le
Président.
M. Roy: M. le Président, ceci veut dire que cet
agriculteur devra, au moment de prendre sa retraite, vendre son exploitation
agricole soit à un de ses fils, soit à quelqu'un du milieu ou
à une autre personne par l'entremise de courtiers, de services
d'établissement, les caisses d'établissement, les institutions
financières locales, soit encore par l'entremise des services
organisés par l'UPA, les syndicats de production agricole de
façon à trouver quelqu'un qui puisse acheter sa
propriété agricole.
M. le Président, c'est bien beau de dire q ue nous allons
augmenter les prêts agricoles de façon que l'agriculteur du
Québec puisse emprunter jusqu'à concurrence de $100, 000,
s'endetter jusqu'à $100, 000. Cela fait un beau chiffre rond. M. le
Président, à qui cet agriculteur, rend u à 65 ans,
pourra-t-il vendre sa propriété agricole?
M. le Président, on sait qu'actuellement, malheureusement, il n'y
a pas de relève, il n'y a pas de relève ou très peu de
relève en agriculture. Le ministre aura beau nous citer les nouveaux
prêts agricoles qu'il y a eu l'an dernier, ce n'est pas suffisant pour
nous convaincre. On constate que, s'il y a eu de nouveaux prêts
agricoles, le nombre d'agriculteurs enregistrés au Québec a
diminué au cours de l'année. C'est dire qu'il n'y a pas de
relèvesuffisante dans le domaine de l'agriculture. Et, M. le
Président, qui va acheter une ferme d'une valeur de $150, 000 ou $200,
000? Est-ce que ce sont les jeunes qui sortent desécoles? Est-ce que ce
sont les jeunes travailleurs qui, après deux ou trois ans de travail sur
la ferme paternelle ou sur une autre ferme, pour prendre un peu
d'expérience, auront la liquidité nécessaire pour devenir
propriétaires d'une ferme rentable? Quels sont les capitaux,
actuellement, qui sont requis, comme mise de fonds, pour se porter
acquéreur d'une nouvelle exploitation agricole?
M. le Président, la porte est pratiquement fermée. Si un
jeune agriculteur, actuellement, ne reçoit pas de son paternel une
partie de l'héritage de $20, 000 à $25, 000 et qu'on lui vend la
ferme à rabais, il n'est pas admissible au prêt agricole. Si le
jeune agriculteur, avec $3, 000, veut s'acheter une ferme rentable, selon les
normes et les exigences de l'Office du crédit agricole, la porte est
fermée. Il n'y a pas de jeunes agriculteurs qui, avec des capitaux de
$2, 000 à $3, 000, actuellement, peuvent être acceptés par
le prêt agricole et par les sociétés qui font des
prêts éligibles aux subventions.
Peut-être que dans certaines régions du
Québec...
M. Toupin: II y en a eu 1, 200 l'année
dernière.
M. Roy: Dans ma région, les dossiers se multiplient sur
mon bureau, pour lesquels j'ai toujours la même réponse. On fait
parvenir la même réponse au cultivateur: Vous n'avez pas une mise
de fonds suffisante, votre liquidité ou votre équité ne
répondent pas aux normes de l'office, ou votre exploitation agricole
n'est pas rentable.
M. Toupin: C'est vrai.
M. Roy: Bon, le ministre l'admet.
M. Toupin: La dernière...
M. Roy: II faudrait être millionnaire, il faudrait
être riche, pour être capable de s'établir en
agriculture.
M. Toupin: La dernière raison, c'est vrai.
M. Roy: Ai-je la parole, M. le Président? Je n'ai pas
interrompu le ministre.
M. Toupin: Si vous n'avez pas d'argent, je ne vous prêterai
pas d'argent.
M. Roy: Je n'ai pas interrompu le ministre, M. le
Président.
M. Toupin: Je ne vous interromps pas, M. le Président.
M. Roy: Le ministre pourra intervenir tout à l'heure, il
aura droit de réplique en vertu de la loi.
M. Lacroix: Vous dites des faussetés.
M. Roy: Je veuxdire ceci au ministre... Le député
des Iles-de-la-Madeleine, on pourrait lui parler de quelque chose.
M. Lacroix: Allez-y!
M. Roy: On pourrait lui parler de ses consommateurs, à
l'heure actuelle, du prix qu'ils paient le lait, aux Iles-de-la-Madeleine.
M. Lacroix: Je pourrais vous en parler, moi aussi, parce que vous
ne connaissez rien là-dedans, comme dans bien d'autres domaines.
M. Roy: Mais vous vous êtes plaint. Je le comprends, le
député des Iles-de-la-Madeleine, et, pour une fois, je suis
d'accord avec lui. Le gin coûte noins cher que le lait aux
Iles-de-la-Madeleine.
M. Lacroix: Tout cela prouve que vous ne connaissez rien, encore
une fois.
M. Roy: Les gens des lles ont été obligés
d'écrire à celui qui vous parle pour tâcher de
l'intéresser à la question.
M. Lacroix: Imaginez-vous bien que ce n'est pas lui qui va
régler le problème.
M. Roy: M. le Président, je ne suis pas intervenu pour
voir...
M. Lacroix: Vous vous prenez pour un autre.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Roy:... si le ministre... Pas le ministre, M. le
Président, j'ai fait un lapsus épouvantable. C'est le
député des Iles, je le retire immédiatement, j'ai failli
dire le ministre des Iles... Le député des Iles, notre
collègue, député des Iles-de-la-Madeleine, est incapable
de régler la question. C'est la raison pour laquelle il n'y a pas
touché. Dans quelques jours, peut-être dans quelques semaines, on
verra si la situation a été réglée. Je comprends
les gens des Iles. Je comprends le députédes Iles, qui ades
problèmes particuliers, de ce côté, qui demande l'action du
gouvernement et du ministère de l'Agriculture. Je le comprends, je ne le
blâme pas, je ne lui fais pas de reproche à ce moment-ci. Je dis
qu'il a un problème dans son comté, qui est réel et
véritable...
M. Lacroix: Ce n'est pas le seul problème.
M. Roy: Les problèmes que le député des Iles
a chez lui, nous risquons de les retrouver ailleurs, dans d'autres
régions du Québec dans un avenir plus ou moins
rapproché.
M. le Président, je dis, en terminant, à l'intention du
ministre, qu'il y a de jeunes agriculteurs qui ont réussi le tour de
force de se porter acquéreur d'un établissement agricole,
d'exploiter une ferme q ui les fait vivre, mais sans avoir pu
bénéficier d'un prêt de l'Office du crédit agricole
et sans avoir pu obtenir les subventions qui s'y rattachent, sans avoir pu
bénéficier des autres prêts en vertu des autres lois.
M. le Président, quand un agriculteurdu Québec est capable
d'avoir des prêts ailleurs pour s'établir dans l'agriculture et
qu'il est capable de démontrer qu'il y a possibilité de vivre sur
une petite ferme bien organisée à laquelle on a agencé une
série de revenus d'appoint, et que l'Office du crédit agricole ne
reconnaît pas ce cultivateur, ne reconnaît pas cet agriculteur, il
est temps que les membres de l'Assemblée nationale, tous les membresde
l'Assemblée nationale se posent de sérieuses questions. Il y a
quelque chose qui ne va pas quelque part et ce quelque part, actuellement, nous
le disons, c'est au ministère de l'Agriculture. ll y a quelquechose qui
ne tourne pas rond dans l'esprit de quelques personnes qui ont
administré ou appliqué la Loi du crédit agricole.
En ce qui a trait aux fermes rentables, j'aurais pu intervenir et parler
du lait. J'aurais pu intervenir et parler des grains de provende, l'occasion
aurait été idéale. J'aurais pu parler du problème
avec lequel sont actuellement aux prises les éleveurs de bovins de
boucherie. J'aurais pu parlerde la mise en marché de la viande au
Québec, problème qui va avoir des conséquences
extrêmement lourdes pour les éleveurs de bovins de boucherie du
Québec, problème qui va avoir des conséquences pour
plusieurs années auprès de petits producteurs de bovins de
boucherie du Québec. Ce que le gouvernement a fait, c'est-à-dire
ce que le gouvernement n'a pas fait, je m'excuse et je remercie mon
collègue, le député d'Iberville, d'avoir attiré mon
attention ce que le gouvernement n'a pas fait, pas ce que le
gouvernement a fait...
M. Ostiguy: De Verchères.
M. Roy:... ce que le gouvernement n'a pas fait, le ministre a
annoncé, en fin de semaine, M. le Président, que depuis dix ans
nous savions, que c'est nous qui avons informé l'Ontario et c'est cela
qui est important, que ce soit nous qui ayons informé l'Ontario
plutôt que ce soit l'Ontario qui ait informé le Québec. On
vas'en reparler, on aurad'autresoccasionsd'en parler, il y a d'autres lois qui
s'en viennent.
M. Toupin: Je l'ai dit, vous dégonflez une bal-loune
encore une fois.
M. Roy: II y a d'autres lois qui s'en viennent. On pourra en
reparler. Quand un ministre avoue qu'il est au au courant d'une situation
depuis dix ans et qu'il ne fait rien et je cite ses paroles, s'il a
été mal cité,
c'était à lui de faire les rectifications qui s'imposaient
qu'il n'a absolument rien fait, je dis qu'on peut se poser de
sérieuses questions. Il y aurait d'autres secteurs à
développer dans l'économie rurale, dans l'économie
agricole. On a parlé d'une deuxième betteraverie au Québec
qui pourrait favoriser la culture de betteraves dans les comtés de
Nicolet, Lotbinière comme dans le comté de Portneuf. Il y a des
études q ui ont été faites par des gens de
l'Université Laval. Il est prouvé actuellement qu'il pourrait y
avoir une deuxième raffinerie de sucre au Québec, mais quand on
regarde la façon dont celle que nous avions a été
administrée, on s'aperçoit de quelle façon actuellement
elle a servi aux trusts du sucre, de moyen pour hausser les prix de
façon injustifiée, abominable, parce qu'elle n'était
plussur le marché.
Si la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire avait continué
à mettre du sucre sur le marché, elle aurait pu, l'an dernier,
empêcher les trusts, les cartels, du sucre d'exploiter le consommateur du
Québec comme ils l'ont exploité, parce que nous aurions eu
là un outil entre les mains qui nous aurait permis de compenser, de
servir en quelque sorte de modérateur, d'équilibre pour
empêcher l'abus que certaines entreprises, de grandes
sociétés multinationales, exercent sur les consommateurs du
Québec.
Toute une série de mesures sont nécessaires, urgentes au
ministère de l'Agriculture, pour que le Québec puisse compter sur
une classe agricole prospère, sur une économie agricole rentable
et sur une économie rurale qui répondrait aux besoins et aux
aspirations du Québec et qui pourrait même faire l'envie des
autres provinces du Canada.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, je n'ai pas
besoin de vous dire que mes collègues de Saguenay et de Beauce-Sud ont
couvert largement, au point de vue des statistiques, le problème du
crédit agricole. Mais il est peut-être opportun aujourd'hui,
après 40 ans de l'institution d'un crédit agricole provincial, de
rendre un témoignage bien particulier aux cultivateurs de la province
pour leur probité et surtout pour leur excellente performance de payer
leurs dettes, leur endettement.
Les cultivateurs de la province, il y en a 90, 958 depuis 1936 ont
emprunté à l'Office du crédit agricole un montant de $485,
583, 445. De ce montant considérable de $500 millions qui ont
été prêtés à la classe agricole de la
province de Québec, il y a eu seulement 0. 5% à ce jour qui ont
été perdus par l'office. C'est-à-dire qu'il y a eu des
pertes de $202, 822 soit $4. 17 par $10, 000 de prêt.
Il n'y a pas une institution bancaire, pas un organisme quelconque qui
fait des prêts, qui peut se vanter d'avoir administré l'Office du
crédit agricole avec autant de dextérité. Mais aussi
rendons hommage aujourd'hui aux cultivateursqui ont voulu démontrer
d'une manière extraordinairel eur grande honnêteté et la
loyauté qu'ils ont vis-à-vis des prêts dont ils ont eu
besoin dans le temps.
Je ne voudrais pas intervenir trop longtemps, je vais essayer de me
résumer dans quatre ou cinq minutes, pour hâter les travaux de la
Chambre, parce que, sur le crédit agricole, on a eu 36 fois l'occasion
d'en parler dans 36 amendements de la Loi du crédit agricole depuis
1936. Il y a eu à toutes les sessions des lois et des lois. Cette
année, comme disait le député de Beauce, on a fait un
changement de base par une nouvelle législation qui voudra que
maintenant, simplement par arrêté en conseil, le montant soit
fixé.
On augmente de quatre à cinq le nombre de régisseurs. Je
voudrais savoir, tout à l'heure, de l'honorable ministre...
M. Toupin: Le crédit forestier.
M. Bellemare (Johnson): Ah! le crédit forestier. Bon, je
comprends que c'est à cause de ce changement qui va venir durant la
semaine prochaine, probablement, sur le crédit forestier. Est-ceque ce
nouveau régisseur tiendra feu et lieu au crédit agricole? Est-ce
que ce sera administré par le crédit agricole, comme le
prévoit la loi, avec les mêmes régisseurs et les
mêmes montants?
Il y a une chose qui me frappe particulièrement. Le ministre
a-t-il envie de déménager? Parce que, dans la loi, il est dit que
le siège social pourrait être transporté ailleurs
qu'à Québec, dans une région qui devrait être, par
exemple, sur le territoire de la communauté urbaine.
M. Toupin: Sainte-Foy.
M. Bellemare (Johnson): Ah bon! le ministre a
décidé de déménager. C'est peut-être pour
cela qu'on l'a prévu dans la loi.
M. Lacroix: II s'approche du Cap.
M. Bellemare (Johnson): Pas du Cap maintenant, mais d'Acton Vale.
Je comprends aussi qu'il y aura des prêts qui seront, en partie, garantis
par une autre ferme. Une autre ferme inoccupée, par exemple, pourra
servir de garantie maintenant à celui qui demandera un prêt du
crédit agricole. ll y a aussi dans la loi une nouvelle disposition quand
il s'agit de réduire de 66 2/3% à 60%, selon le cas, la
proportion des intérêts que doivent détenir les
exploitants. Je pense que c'est une amélioration à la loi qui
tend vers le service qu'on doit rendre aux cultivateurs.
Que le prêt soit porté de $40, 000 à $100, 000, cela
ne m'impressionne pas, parce que ceux qui vont avoir à se rendre
à $100, 000 parmi les cultivateurs, ce sont des gens qui,
déjà, possèdent une organisation agricole assez
volumineuse et dont l'évaluation doit être au moins de $200, 000.
D'après la statistique que nous a fournie le ministre je ne veux
pas revenir sur toutes les statistiques qui ont été
données la moyenne d'âge est de 36 ans pour un emprunteur
et sa superficie en acres est de 220 acres. Ces emprunteurs représentent
80% de ceux qui, continuellement, font affaires avec le crédit agricole,
pour une valeur de propriété de $26, 000 ou $27, 000.
A ce moment, l'actif réel de l'évaluation de la terre est
de $50, 000 et si on prête à 90%, on va
atteindre le chiffre de $26, 000 au maximum. Là, je dis qu'il y a
peut-être un écart pour le petit qui en a plus besoin que celui
qui a une ferme de 500 acres, avec une évaluation de $150, 000 ou $200,
000. Il y a une moyenne de 80% des petits prêts qui vont se chiffrer
entre $25, 000, $30, 000 et $35, 000 qui ne pourront pas être atteints
parce que, d'après la Loi du crédit agricole, avec 90% sur une
ferme ordinaire de $50, 000, le maximum que pourra obtenir un agriculteur est
de $26, 000.
M. le Président, je pense que cela pourrait subir une
amélioration. Je crois aussi que le ministre va me répondre qu'il
y a un nantissement agricole qui passe de $15, 000 à $40, 000. Je corn
prends cela aussi, parce que c'est dans la loi. Il y a là une
amélioration très sensible.
Maintenant, M. le Président, il y aura aussi une qualité
d'emprunteurs conjoints, qui n'existait pas auparavant dans la Loi du
crédit agricole. J'ai de forts doutes quant à la garantie
supplémentaire et surtout quant à l'efficacité que cela
peut apporter, quand il s'agit d'un prêt agricole avec un emprunteur
conjoint. Hier, le ministre parlait dans son allocution des personnes
mariées ou non mariées. Je me suis mis à rire parce que je
me dis que les personnes non mariées qui pourraient... Même si
c'est l'année de la femme, je vois mal qu'une femme s'occupe de cela. Il
faudrait qu'elle ait une organisation collective, avec un personnel assez
considérable pour diriger toutes les activités. Cela peut
arriver, en de très très rares cas.
Mme Bacon: Est-ce que vous sous-estimez les femmes?
M. Bellemare (Johnson): Non, mais en agriculture, je les vois mal
là. Je les vois plutôt dans des rôles où elles
peuvent utiliser leur doigté, leur gentillesse, parce que c'est un
métier trop rude pour une femme, celui d'agriculteur.
M. Toupin: On a consenti, il me semble, 56 prêts à
des femmes, l'an dernier.
M. Bellemare (Johnson): Je pense que le ministre pourrait
peut-être...
M. Bienvenue: Des prêts à des femmes
prêtes.
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, je dis que la Loi
du crédit agricole, que nous avons eu l'honneur d'instaurer dans cette
province, a fait énormément de bien. Elle aété
modifiée en cours de route. Elle aété mise à la
disposition des cultivateurs d'une manière plus pratique, mais je pense
que mon collègue de Beauce-Sud a touché à plusieurs
points, ce matin, qui sont fort importants pour le ministre.
Sans vouloir reprendre son argumentation sur l'importation, par exemple,
de certains produits agricoles, qui sont considérés chez nous
comme des bases de l'agriculture, surtout l'industrie laitière, je pense
que mon collègue de Beauce-Sud avait parfaitement raison d'attirer
l'attention du ministre sur cette importation massive, qui rentre chez nous
à un prix quasiment dérisoire parce que le consommateur paie le
gros prix.
Alors, c'est la fin de mes remarques. Je neveux pas persister plus
longtemps à dire que j'approuve le projet de loi. Il a sûrement
des choses très intéressantes sur lesquelles nous allons voter
avec plaisir. Mais je pense aussi qu'il faudrait que le petit cultivateur, le
moyen, celui qui n'ira jamais à $100, 000 mais qui aurait besoin de $25,
000 à $30, 000, puisse, à cause de son évaluation,
être d'une manière particulière, traité simplement
par "gentlemen's agreement".
La loi, je pense qu'elle est effective dans son texte. Mais la loi du
législateur est toujours interprétée par des gens qui
l'appliquent. Là, il faudrait qu'il y ait une certaine discrétion
pour ne pas être à cheval sur un principe et dire: Bien, il a $25,
000 et je ne peux pas dépasser à cause de son évaluation.
Il faudrait le faire pour un petit cultivateur; j'en ai un, moi, à
Wickham, qui a subi ce critère inexorable et qui n'a pas pu avoir son
prêt.
Je suis intervenu. J'ai dit: Je vais te comprendre un peu. On l'a
amélioré un peu mais très peu. Alors, je dis que là
il y aurait peut-être une directive ce n'est pas nécessaire
que ce soit dans le règlement à donner aux officiers pour
qu'on puisse aider le petit, qui a besoin de plus, de $30, 000 ou $35, 000, que
celui qui a besoin de $150, 000.
Le Vice-Président (M. Blank): The Honourable Member of
Huntingdon.
M. Fraser: Mr. President, I ask the ajournment of the debate.
Le Vice-Président (M. Blank): Suspension of the
debate.
M. Fraser: The suspension of the debate.
Le Vice-Président (M. Blank): La Chambre suspend ses
travaux jusqu'à quinze heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
Reprise de la séance à 15 h 6
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, messieurs!
M. Bienvenue: M. le Président, de consentement,
pourriez-vous revenir au dépôt de projets de loi au nom des
députés et appeler l'article k)?
Projet de loi privé no 195 Première
lecture
Le Vice-Président (M. Blank): Le député du
Lac-Saint-Jean propose la première lecturedu projet de loi
intitulé Loi concernant la ville de Jonquière.
Est-ce que cette motion de première lecture est
adoptée?
M. Charron: Adopté.
Le Vice-Président (M. Blank): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi. First reading of this bill.
M. Bienvenue: Je fais motion, M. le Président, pour que
l'étude de ce projet de loi soit déférée à
la commission parlementaire élue des affaires municipales.
Le Vice-Président (M. Blank): Cette motion est-elle
adoptée?
M. Charron: Adopté.
Le Vice-Président (M. Blank): Adopté.
Projet de loi no 2 Deuxième lecture
(suite)
M. Bienvenue: On revient, M. le Président, à
l'article 2, étude du projet de loi no 2.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Huntingdon.
M. Bienvenue: M. le Président, les règles de
pratique sont suspendues pour le projet de loi de la ville de Jonquière
dont nous venons de parler.
Le Vice-Président (M. Blank): D'accord pour la suspension
des règles?
M. Charron: Adopté. Le Vice-Président (M. Blank):
Adopté.
M. Kenneth Fraser
M. Fraser: Mr. Speaker, I would like to make a few remarks to
congratulate the Minister of Agriculture for having presented thank you,
boss this bill no 2 to change the Farm Credit Act, to bring the Farm
Credit Bureau more in line with the needs of modern farming and the increasing
need for credit, reasonable credit, at reasonable terms to enable farmers to
expand and develop their farms or exploitations in modern day Quebec.
Increasing the number of members from four to five will help, I hope, to
give faster service when a farmer makes a request for a farm loan. The fifth
man, according to the Minister, will look after the Forest Loan Division.
The age limit will be from 18 to 40, thus encouraging young men to start
farming on their own behalf at a younger age. this Act will increase the
maximum loan to $100, 000 for one person or $200, 000 for a corporation and up
to 90% of the value of the farm, one important change I consider being that it
will not be necessary to take the whole of a person's holdings to guarantee a
loan if a part of the farm gives sufficient guarantee for repayment of the
loan.
I would also like to congratulate the members of the Farm Loan Board on
the efficient manner that they have loaned public money to farmers over the
years. I have found them to be a fine group of men dedicated to helping farmers
and would-be farmers. I have never had a complaint that there has been any
discrimination on their part because of race, religion or language; for this, I
extend to them my congratulations.
M. le Président, j'ai écouté le
député de Saguenay, ce matin, faire un discours dans lequel il
cite encore tous ces chiffres sur l'agriculture, pour encore prouver qu'il est
un cultivateur de la ville, fort en théorie, mais très faible en
expérience. On discute le bill no 2 pour changer les limites des
prêts que les cultivateurs peuvent obtenir de l'Office du crédit
agricole; le député de Saguenay gaspille le temps de la Chambre
pour citer tous ces chiffres. Je lui demande d'aller parler avec un vrai
cultivateur et apprendre comment on utilise les prêts agricoles.
M. Lessard: C'est ce que nous faisons, d'ailleurs, et c'est ce
qu'ils nous disent que l'on vient faire ici.
M. Fraser: Laissez faire, M. Lessard. Lorsqu'un cultivateur
emprunte du crédit agricole, c'est pour acheter une ferme ou agrandir sa
ferme, pour vivre là, lui et sa famille, toute sa vie. C'est une
profession différente des autres. Les cultivateurs ne jugent pas leur
entreprise sur les revenus d'un an, mais ils prennent les bonnes années
et les moins bonnes, et remboursent les prêts et paient la ferme sur une
base de 25, 30 ou 35 ans.
Je laisserais le soin au ministre de l'Agriculture d'essaye r
d'éclai rer le dép uté de Sag uenay; je co nsi dère
que cela est une tâche impossible.
Le député de Beauce-Sud, lui aussi, dans son discours
fracassant, a parlé des millions de livres de beurre importées de
Nouvelle-Zélande à $0. 61 la livre.
Une Voix: $0. 44.
M. Fraser: II a dit $0. 61.
M. Bellemare (Johnson): $0. 44.
M. Fraser: Et ils prétendent que quelqu'un a fait des
millions. Quand on adistribué ce beurre à travers le Canada et
qu'on a payé les frais de transport et de distribution, sans doute que
le profit n'était que raisonnable. Aujourd'hui, tous les travailleurs
dans toutes les professions veulent de gros salaires.
Je demanderais au député de Beauce-Sud s'il veut
travailler pour rien. S'il veut se charger de livrer le beurre partout pour
rien, on peut lui donner le poste. Le député de Beauce-Sud
rêve en couleur, comme il le fait souvent en cette Chambre. Il est aussi
perdu que le député de Saguenay.
M. Lessard: II n'a pas dû me comprendre, M. le
Président; cela doit être le problème.
M. Fraser: Le député de Johnson a fait un petit
discours raisonnable aujourd'hui, mais il le faisait seul. M. le
Président, je vois que mes cinq minutes sont écoulées.
Merci bien.
Le Vice-Président (M. Blank): L'honorable
député de Verchères
M. Marcel Ostiguy
M. Ostiguy: M. le Président, je voudrais, à mon
tour, apporter mes commentaires et les commentaires des cultivateurs du
comté de Verchères sur ce projet de loi no 2, Loi modifiant la
Loi du crédit agricole. Après avoir entendu les discours des
membres des partis de l'Opposition, nous pourrions uniquement commenter les
déclarations qu'ils ont faites ce matin. Par contre, je pense que je
m'en tiendrai plutôt au fond du projet de loi qui aider à
l'agriculture, qui aidera l'agriculteur à améliorer son
revenu.
Il ne faut pas perdre de vue qu'il fut un temps où l'agriculture
était peut-être l'économie numéro 1 dans la province
de Québec. Personne ne soutient plus cette thèse, maintenant,
puisque le développement industriel a vraiment pris place dans la
province de Québec et que l'intérêt général a
porté à reléguer la production agricole au rang des
préoccupations mineures. Il est bien évident que la
véritable place de l'agriculture se situe actuellement entre ces deux
extrêmes.
Dans cette optique, il me paraît essentiel que l'Assemblée
nationale adopte ce projet de loi no 2, soit la Loi modifiant la Loi du
crédit agricole. Principalement, cette loi augmente le montant maximum
des prêts qui peuvent être consentis par l'Office du crédit
agricole. Dans le cas d'un individu, le montant maximum passe de $40, 000
à $100, 000 et de $60, 000 à $200, 000, dans le cas d'un groupe
ou d'une corporation. L'agriculture ne doit pas être
considérée comme une activité économique
vouée à son déclin, loin de là. Certes,
l'importance relative de l'agriculture dans l'économie
québécoise diminue sans cesse.
Mais son importance absolue s'accroît considérablement. En
outre, il y a lieu de s'intéresser au secteur agricole, pour des motifs
d'ordre social et des mobiles découlant de l'évolution de ses
techniques. Un coup d'oeil sur cette activité nous permet d'en mesurer
l'importance.
L'exode rural est un phénomène qui, sans être
particulier au Québec, y est particulièrement manifeste. Dans la
province, la population de toutes les fermes baisse graduellement, de
même que sa proportion par rapport à l'ensemble.
Constituée, en 1941, de quelque 839, 000 personnes, qui
représentaient 25. 2% de la population, en 1971 cette population
agricole est tombée à 335, 000 personnes et ne constitue plus que
5. 6% du total de la population. On prévoitdonc que l'exode rural se
poursuivra, maison prétend que, dans un pays bien
équilibré, avec un haut degré d'autosuffisance, la
population agricole ne peut s'abaisser beaucoup en dessous de 5%.
On prévoit déjà qu'en 1980, la population active ne
représentera plus que 2. 7% de la main-d'oeuvre totale du Québec.
Ces tendances, bien sûr, sont engendrées par l'évolution
générale d'une économie industrialisée et le
développement de la scolarisation en milieu rural. La capitalisation
croissante de l'agriculture résulte, notamment, de la hausse relative du
prix de la terre, de l'aménagement, de l'équipement foncier, de
la substitution du capital mécanique au travail humain, de l'achat
croissant de l'agriculteur aux autres secteurs de l'économie, tels les
carburants, la machinerie, les engrais chimiques, les pesticides et les
aliments du bétail.
En somme, il en coûte de plus en plus cher pour administrer une
exploitation agricole. Nous n'avons qu'à regarder une ferme d'environ
180 acres, là où il y a une cinquantaine de bêtes à
cornes, et nous pouvons être assurés qu' uniquement au point de
vue de l'équipement l'investissement se situe aux environs de $100, 000,
si on comprend l'équipement de la ferme, celui de l'étable,
etc.
C'est donc dire que l'agriculteur actuel, qui cultive avec un tracteur
et toute une kyrielle de machines représentait, en 1971, une mise de
fonds minimum de $60 par acre cultivée. En 20 ans, le parc des tracteurs
est passé de 32, 000 à 81, 000; celui des moissonneuses batteuses
de 420 à 5, 800; celui des presses-ramasseuses, mieux connues sous le
nom de presses à foin, de quelques unités seulement à 31,
000.
Le fait que la plupart des agriculteurs soient propriétaires de
leur ferme ne signifie pas qu'ils soient libres de toute dette, loin de
là. Le cultivateur puise de plus en plus aux diverses sources de
crédit agricole car pour poursuivre il doit recourir sans cesse et
davantage aux techniques modernes de production. Il a besoin de crédits
de toutes sortes pour améliorer la productivité de sa ferme tout
comme uneindustrie, comme un marchand a besoin, lui aussi, de crédits
pour faire fonctionner son industrie ou son commerce.
Le nombre de fermes, au recensement de 1971, était aux environs
de 60, 250 comparativement à 134, 300 en 1951. En 1975, les statistiques
nous disent qu'il reste environ 55, 000 fermes au Québec. Il est
à remarquer cependant que la superficie moyenne par ferme atteignait, en
1971, 180 acres contre 125 en 1941. Cette augmentation, bien sûr, est
attribuable à plusieurs facteurs dont la mécanisation, l'exode
des cultivateurs et la disparition d'un grand nombre de fermes marginales. Je
pense qu'hier le ministre de l'Agriculture, dans son exposé, soulignait
l'importance d'avoir des fermes rentables. Il est bien en-
tendu, il est sûr que les petites fermes, si nous ne
prévoyons pas un regroupement, ne pourront vraiment pas subir
l'influence du développement économique qui se fait à
travers le monde entier.
A cette consolidation sur le plan horizontal, qui s'exprime par
l'agrandissement desfermes, s'ajoute aussi une consolidation verticale qui se
manifeste par l'amélioration du fonds de terre tels le drainage, la
fertilisation, et par une meilleure gestion. Le souci qu'a le gouvernement du
Québec du bien-être des agriculteurs se concrétise par les
travaux du ministère de l'Agriculture dont les activités leur
sont entièrement consacrées. Son action s'exerce dans des
domaines aussi variés que l'aménagement, la production, la
commercialisation, la vulgarisation, la recherche et le crédit.
Le Gouvernement Bourassa, depuis 1970, par l'application de lois
réalistes, contribue à assurer une meilleure rentabilité
des exploitations agricoles. De concert avec les groupements agricoles, le
gouvernement travaille à la valorisation des agriculteurs sur le plan
social et économique.
Nous n'avons qu'à regarder, nonobstant la pen-sée de nos
collègues de l'Opposition, l'agriculteur au Québec, actuellement,
celui qui a une ferme rentable, retire des revenus convenables, et je puis vous
en assurer que les agriculteurs du comté de Verchères qui n'ont
pas des fermes marginales retirent des revenus convenables.
L'agriculture québécoise vit actuellement une mutation
historique. Malgré les problèmes que posent les changements, de
grands espoirs sont permis. L'agriculteur homme d'affaires formé et
informé se substitue de plus en plus à l'habitant qui
évoquait traditionnellement le statut d'un homme sédentaire
isolé et le plus souvent soumis à la nature et aux autres hommes.
Là aussi, je pense que l'agriculteur, en 1975, est devenu vraiment un
homme d'affai res. Il l'est devenu vraiment au même titre que n'importe
quelle autre classe de la société. L'éducation se propage.
Elle produit des hommes capables de s'adapter à de nouvelles formes de
production et d'organisation, suggérées par l'évolution et
par l'utilisation finale des produits ainsi que par le jeu du commerce
international.
Le gouvernement est pleinement conscient de l'ampleur des
difficultés à surmonter dans le déve-loppement et la
modernisation de l'agriculture. L'objectif de son action est d'aider
l'agriculteur à faire la transition entre ce qu'est l'agriculture
d'aujourd'hui et ce que devra être l'agriculture de demain. Comme je l'ai
souligné précédemment, les agriculteurs
québécois ont besoin de crédits agricoles de plus en plus
adaptés à la situation existante et ils les exigent.
En 1951, un agriculteur québécois produisait suffisamment
de produits agricoles pour nourrir seize personnes. Le même agriculteur,
en 1971, produit suffisamment d'aliments pour nourrir 47 personnes. Une telle
évolution, je pense, exige, de la part de l'agriculteur et de tous ceux
qui s'intéressent vraiment au secteur de l'agriculture, une constante
adaptation. L'Office du crédit agricole travaille donc à ajuster
à la situation québécoise son système de
financement.
A ce chapitre, les membres de cette Chambre ont déjà
voté des crédits supplémentaires pour des fins de
crédit agricole. Aujourd'hui, M. le Président, nous avons
à modifier la Loi du crédit agricole.
Le Québec se dote graduellement d'un système de
financement agricole articulé, fonctionnel et de plus en plus
complet.
Je pense que les projets de loi que présente le ministre de
l'Agriculture, celui que nousdiscutons, le projet de loi no 2, et les projets
de loi nos 3, 4 et les autres, sont vraiment des projets de loi pour aider,
encore unefois, l'agriculteur dans son exploitation. Et ainsi cela permet de
mieux répondre aux impératifs d'une agriculture de plus en plus
complexe, de plus en plus exigeante du point de vue des techniques de
production, et de plus en plus avide de capitaux.
Nous avions déjà amendé la Loi du crédit
agricole. Aujourd'hui, nous voulons augmenter les maximums possibles
répondant aux besoins de plus en plus grands des agriculteurs
québécois. A ses débuts, la Loi du crédit agricole
prévoyait exclusivement l'octroi de prêts hypothécaires aux
agriculteurs. Et ici, je voudrais rendre un hommage tout à fait
particulier à l'honorable Laurent Barré qui a été,
lui aussi, comme moi, député du comté de Rouville et qui a
été le fondateur, le promoteur, le parrain de la Loi du
crédit agricole. Je veux rendre aussi un hommage tout particulier aux
membres de la famille Barré qui, encore dans le comté de
Rouville, sont de vrais bons cultivateurs, des exploitants de fermes qui
réussissent très bien.
Alors, à cette époque, de $6, 000 qu'étaient les
prêts du crédit agricole, le maximum des prêts fut
porté à $40, 000, en 1972, dans le cas d'un individu, et à
$60, 000 dans le cas d'un groupe. Le projet de loi no 2, que nous proposons
aujourd'hui, augmente le crédit à $100, 000 dans le cas d'un
individu et à $200, 000 pour un groupe.
Ceci nous prouve, je pense, l'évolution constante qu'il y a eue
dans l'agriculture depuis 1936, depuis la date où l'honorable
Barré déposait le projet de loi créant l'Office du
crédit agricole.
Les agriculteurs québécois il ne faut jamais
l'oublier sont à la merci du climat, de la nature et de la
température. Le domaine agricole est un secteur clé de notre
économie, comme j'ai tenté de le démontrer depuis 1970. Le
gouvernement Bourassa s'est engagé à redonner à cette
classe agricole la fierté et la possibilité
d'épanouissement qu'elle est en droit d'exiger. Et, ce matin, lorsque
j'écoutais le députéde Beauce-Sud parlerde la
raffineriedesucre de Saint-Hilaire, bien, je m'excuse, le député
de Beauce-Sud aurait avantage à étudier les états
financiers et les rapports de la raffinerie de sucre, les succès qu'a
connus la raffinerie de sucre en 1974et aussi les succès qu'ont connus
les producteurs de betteraves à sucre, en 1974.
C'est bien beau de dire qu'on a laissé aller des cartels de
sucre.
M. Roy: C'est vrai.
M. Ostiguy: II ne connaît rien là-dedans, le
député de Beauce-Sud. Tout ce qu'il sait, c'est prendre
du sucre pour le mettre dans son café. Cela, il connaît
ça. Mais en fabriquer, du sucre, c'est une autre affaire.
M. Roy: Une grande déclaration.
M. Ostiguy: Nous devons, M. le Président, aussi
c'est là un objectif de notre gouvernement créer une
autosuffisance dans la mesure du possible en approvisionnement pour la
consommation québécoise. Pour ce faire, les agriculteurs doivent
produire. Pour produire, c'est bien simple, c'est clair, ils ont besoin de
capitaux. Une industrie qui ne peut s'agrandir, faute de capitaux, se verra
dans une bien mauvaise situation financière, il en est de même
pour l'agriculture.
Pourquoi le ministre de l'Industrie et du Commerce travaille-t-il si
ardemment à élaborer des politiques au niveau de la SDI? C'est
pour aider l'industrie. Le ministre de l'Agriculture, avec l'Office du
crédit agricole, doit aussi fournir les capitaux nécessaires pour
l'amélioration de l'agriculture les années soixante-quinze.
Le Québec a besoin, M. le Président, d'une agriculture
forte et rentable. Deux nouveaux types d'agriculteurs seront maintenant
admissibles pour l'obtention d'un prêt agricole. Il s'agit de l'aspirant
agriculteur et des coopératives d'exploitation agricole. L'exploitant
agricole âgé de 18 à 40 ans pourra obtenir un prêt
pouvant atteindre 90% de la valeur de la ferme, à la condition, bien
sûr, que celui-ci détienne 20% des intérêts du groupe
auquel il appartient. De plus, cette nouvelle loi détermine
l'intérêt annuel que produit tout versement arriéré
de principal ou d'intérêt. Egalement, l'Office du crédit
agricole pourra, en plus de prêter de l'argent, surveiller et participer
à la réalisation du programme pour lequel l'emprunt fut
effectué.
M. le Président, en terminant j'aurais beaucoup de choses
à dire dans le secteur agricole, mais nous avons plusieurs lois et nous
aurons sûrement l'occasion d'y revenir je voudrais
réitérer mon appui au projet de loi no 2 et au ministre de
l'Agriculture. Les agriculteurs de Verchères que j'ai l'honneur de
représenter appuient fermement cette loi. Le ministre de l'Agriculture
le sait parce qu'il est venu rencontrer les agriculteurs du comté de
Verchères et nous avons eu un dialogue très amical, nonobstant,
encore une fois, le passage d'un certain député de Saguenay ou
quelque chose comme cela.
Les agriculteurs de Verchères le font dans leur
intérêt et dans l'intérêt de tous les agriculteurs
québécois. Le gouvernement, M. le Président, s'est
engagé à doter le Québec d'une structure agricole solide
et qui sait s'adapter à l'évol ution québécoise. Le
Québec désire une agriculture forte et rentable; c'est ce que le
gouvernement Bourassa veut donner aux Québécois. Merci, M. le
Président.
M. Mark Assad
M. Assad: M. le Président, je ne voudrais pas laisser
passer l'occasion...
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Papineau.
M. Assad:... de dire quelques mots sur cette question du
crédit agricole. Comme M. le Président et moi-même venons
d'un peuple où, au moins, nos ancêtres étaient des
cultivateurs, je voudrais seulement dire quelques mots dans le sens que, il y a
quelque temps, il y a eu une conférence internationale, àToronto,
concernant l'avenir de l'agriculture. Le directeur de la United Nations Food
and Agricultural Organization, M. Walter Pawley, y avait déclaré
que, si l'on espérait que, dans les années à venir, les
nations produisent assez de nourriture pour toutes les nations sous
développées, il fallait faire un partage, et que les nations
développées, comme l'Europe, une partie de l'Afrique et surtout
l'Amérique du Nord, donnent un coup de main. Il est intéressant
de regarder les chiffres pour se rendre compte que 40% de toute la nourriture
produite dans le monde est produite en Amérique du Nord. Cela donne une
idée de l'obligation morale que nous avons de donner de l'aide à
tous les autres pays qui sont actuellement sous-développés.
Pour ramener cela à notre niveau, ici, le crédit agricole,
je crois que les cultivateurs du Québec, dans le passé,
étaient pi utôt des gens qui avaient une vocation, car, pour les
cultivateurs, les bénéfices étaient très minimes.
Au fur et à mesure des années, nous nous rendons compte qu' il
faut que nos cuItivateurs soient aidés par l'Etat pour que leur
entreprise soit rentable, car si elle n'est pas rentable, avec les
années, nous verrons le nombre de cultivateurs diminuer. Mais les
mesures que le ministre a présentées ici sont un début. Je
crois que cela sera accueilli par plusieurs cultivateurs comme un espoir qu'ils
pourront peut-être rejoindre les autres couches de la
société ou qu'ils auront des bénéfices qui en
vaudront la peine. Ce sont des mesures que nous connaissons que nous allons
présenter dans cette assemblée. Je crois qu'il y aura un
renouveau, ou au moins un peu d'espoir, et que ceux qui ont encore cette
vocation et qui veulent devenir cultivateurs, qui veulent avoir une entreprise,
nous allons leur rendre un grand service.
Une autre chose est intéressante. Un des plus grands inventeurs
du 20e siècle est un nommé Fuller, qui est un homme assez
âgé maintenant. Je me souviens d'avoir lu une interview qui avait
eu lieu aux Etats-Unis. Les Etats-Unis lui ont rendu hommage en 1967 lors de la
construction deTerre des hommes, où leur pavillon, que nous connaissons,
la boule, était l'invention de Fuller, qui était en avance de 20
ans.
On disait que c'était impossible son affaire, parce que
c'était impossible de construire des structures de cette envergure, que
c'était pour s'écraser. Mais, après avoir prouvé
que c'était possible, les Etats-Unis lui ont rendu hommage en
construisant à Terre des hommes en 1967. Mais Fuller avait
été questionné une fois. Ils ont dit: Dans le monde
actuel, avec les techniques que nous possédons dans le moment, est-il
possible de nourrir tout le monde, disons dans 25 ans, dans l'avenir? Fuller,
qui était un homme réaliste, un inventeur, je citerai ses
paroles,
traduites naturellement malheureusement il n'était pas
affecté par le bill 22, il ne parlait pas le français
malgré que c'était un grand inventeur: Nous avons les techniques
dans le moment pour assurer assez de nourriture que chaque individu sur la
terre pourrait être 20 livres: au-dessus de son poids. Il y avait des
techniques...
M. Gratton: II y en a qui le sont déjà.
M. Assad: II y en a qui le sont déjà, on a
l'avance, on a la vitesse accrue déjà. Mais, disons qu'il est
intéressant de constater ce qu'il avait dit, que nous avons des
techniques dans le moment pour produire amplement. Mais ce qu'on croyait qui
était l'obstacle majeur, c'est qu'il a dit que des hommes publics ne
prenaient pas l'agriculture au sérieux.
M. Lessard: Bravo! C'est vrai. M. Assad:
Malheureusement... M. Lessard: Le ministre de l'Agriculture.
M. Assad: Non, c'est le contraire, parce que, s'il y a un
ministre que j'envie dans cette Chambre, c'est bien le ministre de
l'Agriculture parce qu'il a un ministère qui est passionnant.
M. Roy: Vous n'êtes pas exigeant.
M. Assad: M. le Président, peut-être que je ne suis
pas exigeant mais au moins je suis réaliste et je m'aperçois que
le ministre de l'Agriculture, actuellement, a certainement la piqûre,
comme on dit...
M. Lessard: II n'a pas l'argent. M. Assad:
Malheureusement.
M. Roy: Auriez-vous toléré le commerce de la viande
avariée si vous aviez étéà la placedu ministre?
M. Bienvenue: A l'ordre, M. le Président!
M. Assad: En tout cas, le ministre de l'Agriculture actuel, il y
a une chose qu'il a et qui est la plus importante de toutes; il a la bonne foi
et il a un ministère, comme je l'ai mentionné, qui est
passionnant. Il y a l'évolution des années; malgré que ce
soit lent, cela ne fait rien du moment qu'on avance. Nous allons avoir un essor
dans le domaine de l'agriculture au Québec...
M. Bienvenue: Pas un Lessard, un essor! M. Assad: Non,
non, pas de cette sorte-là. M. Lessard: L'essor du Québec
serait assuré.
M. Assad: No us allons avoir, je crois, des années qui
vont être prospères pour nos cultivateurs et j'espère que
ce sera bientôt. Cela prend du temps, mais je suis convaincu que d'ici
quelques années nous allons voir les premiers signes d'une agriculture
qui sera saine et prospère au Québec.
M. Roy: Ce n'est pas "Quebec approved", c'est "Toupin
approved".
Le Vice-Président(M. BIank): S'il n'y a pas d'autres
opinants, la réplique du ministre mettra fin au débat.
Le ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: Je ne voudrais pas être long, M. le
Président, parce que d'autres lois suivent d'autant plus,
même si je voulais l'être, ma taille ne me permettrait pas de le
faire avec mes 5'5" et je voudrais réserver du temps aussi pour
ces lois. C'est seulement un certain nombre de points que je voudrais apporter
pour réfuter ainsi un certain nombre d'arguments qui sont venus de
l'autre côté. D'abord, le discoursdudéputéde
Saguenay, c'est exactement le même qu'il a fait il y a quatre mois et
c'est celui qu'il a fait aussi, il y asix mois, et c'est exactement celui qu'il
va faire probablement d'ici un ou deux mois, lorsque de nouvelles lois
viendront.
M. Lessard: Vous ne comprenez pas plus.
M. Toupin: Cela dénote une chose, c'est qu'il est
emprisonné dans sa théorie des chiffres de la même
manière qu'il est emprisonné dans sa théorie
politique.
Il n'est pas capable de voir à l'extérieur d'une ligne
droite tracée. C'est son problème, au fond. Il n'arrive pas
à ouvrir ses horizons, à côtéd'un certain nombre de
statistiques qui, d'ailleurs, méritent une interprétation
très souvent.
Je vais relever un certain nombre d'affirmations qu'il afaites, pour
démontrer jusqu'où cela peut être folichon parfois
d'interpréter des statistiques sans en connaître exactement les
significations profondes. Au départ, il a soutenu que les revenus
agricoles en 1974 avaient diminué de 9%, ce qui est vrai. C'est nous qui
le lui avons dit, parce que c'est nous qui avons rendu ces statistiques
publiques. Un peu plus loin, il dit: Ce n'est plus 9%, c'est 40%. Où est
la vérité? Est-ce 9% de diminution ou si c'est 40% de diminution?
Nous soutenons que c'est 9%. Il y a eu augmentation dans les autres provinces
du pays. C'est vrai qu'il y a eu augmentation.
M. Lessard: Une augmentation du coût de la vie.
M. Toupin: Oui, je parlerai de cela tantôt.
M. Lessard: De 21. 4%
M. Toupin: Des augmentations qu'il y a eu dans les autres pays.
Donc, il y a une contradiction là-dedans que, personnellement, je
n'arrive pas à comprendre.
M. Lessard: Je vous comprends, c'est parce que vous ne voulez
pas.
Le Président: A l'ordre!
M. Toupin: II y a un deuxième point. Le
député de Saguenay n'a pas cru bon de signaler que, depuis 1971,
les revenus nets des producteurs québécois ont doublé. Il
n'a pas cru bon de le dire. De $4, 500que nous avions à ce moment, nous
approchons les $9, 000 en 1974. Ils ont doublé.
M. Lessard: Je vous l'ai dit. Parlez-nous des autres
provinces!
M. Toupin: Nous apporterons d'autres corrections pour les autres
affirmations que vous avez faites. Vous ne pouvez pas réfuter que les
revenus agricoles ont doublé au Québec. C'est un fait.
M. Lessard: ll ne faut pa sêtre menteur non plus!
M. Toupin: Un autre point. Lorsque le député de
Saguenayfait des comparaisons, il prend lesstatisti-ques de 1971. Il est vrai
qu'en 1971, les revenus agricoles des Maritimes étaient plus bas que
ceux du Québec. Il est aussi vrai qu'il y avait une marge, entre les
revenus du Québec et ceux de l'Ontario, à peu près
égale à celle qui existe présentement. Il y a toujours eu
une marge de revenu net entre les pro-ducteurs de l'Ontario e tceux du
Québec, comme il y a toujours eu une marge de surplus entre les
producteurs de la Colombie-Britannique, ceux des provinces de l'Ouest et ceux
de l'Ontario. Il y a toujours eu une marge en moins. Cela s'explique. Il y a
des raisons à cela, parce que les consommateurs onta-riens ne paient pas
plus cher leur alimentation que les consommateurs québécois.
Si les entreprises multinationales, sur lesquelles vous faites du gros
tapage de ce temps-ci, font de l'argent au Québec, elles en font aussi
en Ontario et en Colombie-Britannique. Il y a des raisons à cela, autres
que celles que vous avez soutenues dans votre discours. Nous allons les
donner.
Au Québec, vous avez six millions d'acres de terre qui se
partagent entre presque 60, 000 producteurs. Six millions et demi ou à
peu près. Dans les provincesde l'Ouest, les trois provinces ensemble ne
dépassent pas beaucoup plus 125, 000 producteurs. Ceux-là
ensemble ont plus de 70 millions d'acres. Si vous ramenez les revenus agricoles
au Québec à l'acre, vous allez constater que les revenus au
Québec sont plus élevés à l'acre que ceux des
autres provinces du pays, peut-être à l'exclusion de l'Ontario et
de la Colombie-Britannique. En Ontario, ils ont le double d'acres en culture
que nous. Ils ont le double des producteurs que nous, mais les revenus
agricoles ne sont pas le double de ceux du Quebec, il y a 30% à peu
près de différence entre les revenus nets des producteurs
québécois et les revenus nets des producteurs ontariens. Les
producteurs onta-riens ont une gamme de production de fruits que nous n'avons
pas au Québec. Ce sont les secteurs les plus payants dans le domaine
agricole. Ils ont également un climat qui les avantage, sur le plan des
céréales, ce que le Québec n'a pas, ici,
présentement. Nous sommes obligés d'acheter les
céréales, alors qu'ils les produisent chez eux. Nous sommes
autosuffisants à peu près à 55% dans les
céréales, à 60% au maximum, eux le sont, en Ontario,
à 85% ou 90%. C'est là la différence.
Le député d'Huntingdon le disait tantôt, grosso
modo. Il n'est pas possible, actuellement, de développer une ferme, au
Québec, qui soit rentable, en pensant à quelque chose comme 80 ou
85 acres. Il a parlé du regroupement. C'est le but du crédit
agricole. Il a parlé de l'équipement d'une ferme. C'est le but du
crédit agricole. Et pourtant, le député d'Huntingdon est
un producteur agricole. Ce n'est pas un improvisé dans le secteur
agricole, c'est un gars qui connaît son domaine, puisqu' il y a fait sa
vie. Il a très bien vécu le député d'Huntingdon,
parce qu'il a de l'initiative et qu'il dépasse les paroles. Il va dans
les actions, en tant que professionnel de l'agriculture. Cela explique beaucoup
de choses, des phénomènes comme cela.
Quand je continue à soutenir qu'il faudra qu'un certain nombre de
petits producteurs au Québec disparaissent encore, il le faudra, sinon,
nousaurons toujours une marge de revenu inférieure, notamment, à
celui de l'Ontario.
La moyenne d'acres par producteur au Québec n'a pas encore
atteint 120; c'est à peine 125 ou 130 avec les boisés. En
Ontario, cela a dépassé les 180, et dans les provinces de
l'Ouest, c'est 400 et 450 acres en moyenne. Vous ne pouvez pas comparer les
revenus avec ceux des entreprises qui sont trois fois plus grandes. Ce sont des
comparaisons qui ne tiennent pas, en soi.
Evidemment, cela cadre bien dans un discours politique, cela cadre bien
dans une philosophie qui frise parfois la démagogie, mais ce n'est pas
la réalité, ce n'est pas la vérité. Si je prends le
discours du député de-Saguenay, normalement il devrait voter
contre notre loi. Il devrait voter contre notre loi s'il est logique avec
lui-même, mais je sais qu'il ne votera pas contre. Je sais qu'il va voter
pour. Et s'il vote pour, cela veut dire qu'il appuie la politique
gouvernementale. C'est ce que cela veut dire. S'il vote contre, cela veut dire
qu'il va charrier encore une fois les producteurs; c'est ce que cela veut dire.
Tantôt ou quand on aura à voter surcette loi, il aura à
s'expliquer sur la position qu'il va prendre, les politiques gouvernementales
via les besoins des agriculteurs. S'il vote contre, il ira expliquer aux
producteurs agricoles pourquoi il a voté contre une loi comme
celle-là.
M. Lessard: Le ministre n'a pas compris quand j'ai dit que
j'allais voter pour.
M. Toupin: Le député de Beauce-Sud, je sais qu'il
s'apprête à partir, je vaisjuste lui dire un mot en passant.
M. Lessard: Le ministre est sourd tout le temps.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Toupin: Je vais juste dire un mot, en passant, au
député de Beauce-Sud.
M. Lessard: II entend ce qu'il veut bien entendre.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre!
M. Toupin: Le député de Beauce-Sud a parlé
d'un tas de choses dans son discours. C'était, cette
fois-ci, peut-être un peu plus que d'habitude. Cela peut
s'expliquer parce qu'il a moins le temps que le député de
Saguenay de préparer ses discours. Eux, de ce
côté-là, ont plus de recherchistes et le Ralliement
créditiste en a peut-être un peu moins. Il était
peut-être un peu moins articulé que d'habitude, son discours, mais
il y a une chose qu'il a affirmée et qui mérite d'être
relevée.
Quand il parle, par exemple, du beurre qui vient d'Australie et qui est
exporté au Québec et au Canada, on n'est pas les seuls, les
Québécois, à manger du beurre.
M. Roy: Pas exporté, importé.
M. Toupin: II est exporté quand je me mets dans les bottes
de ceux qui sont de ce pays, il est importé quand je me mets dans les
bottes des Québécois.
Une Voix: C'est une question de bottes.
M. Toupin: C'est une question de botté, voilà. Il
serait bien placé pour nous expliquer comment se fait un
botté.
Ce n'est pas toute la vérité. Quand on exporte, nous, des
dizaines et des centaines de millions de livres de fromage et de lait en
poudre, quel mal y a-t-il à ce qu'on accepte 20 ou 35 millions de livres
de beurre des autres pays? Quel mal y a-t-il à cela? C'est une
économie d'échanges dans laquelle on vit. On peut bien le
retirer, notre lait en poudre, du marché et on peut fairedu beurre
à la placedu lait en poudre, mais les producteurs vont recevoir $0. 60
de moins les cent livres de lait. Le député de Beauce-Sud est-il
d'accord pour qu'on diminue les revenus des producteurs agricoles? S'il est
d'accord, il faudrait aller le dire aux producteurs, pas le crier ici, à
l'Assemblée nationale, alors que personne, tout compte fait, ne nous
entend ou très peu de gens.
Quand il ira rencontrer ses agriculteurs de la Beauce, qu'il leur pose
la question. Quand il rencontrera les coopératives qui appartiennent aux
producteurs, qu'il leur demande pourquoi les producteurs, dans leurs
coopératives, ont pris l'option de faire du lait en poudre et du fromage
plutôt que de faire du beurre. C'est parce que ça payait de le
faire. C'est pour cela qu'ils l'ont fait. Si on prenait ce lait pour faire du
beurre, on ne pourrait pas le prendre pour faire du lait en poudre et le
producteur paierait la note. C'est comme cela que ça se traduit. Cela ne
veut pas dire qu'il faut importer...
M. Roy: Et les 7, 000 cultivateurs qui ont dû
abandonner?
M. Toupin:... tous les produits, cela veut dire qu'il faut faire
des échanges acceptables et tenir compte des revenus des producteurs
québécois.
M. Roy: Et les 7, 000 cultivateurs qui ont dû
abandonner?
M. Toupin: Le discours du député de Beauce-Sud est
un peu similaire à celui du député de Saguenay. S'il est
logique avec lui-même, il devrait presque, normalement, voter contre ce
projet de loi. S'il vote contre, il ira le dire aux producteurs de sa
région pourquoi il a voté contre un projet de loi comme
celui-là. S'il vote pour, il fera comme tous les députés
qui sont sérieux dans cette Chambre, il appuiera la politique
gouvernementale. Merci, M. le Président.
M. Bédard (Chicoutimi): II est parti, i I aime mieux s'en
aller.
Le Vice-Président (M. Blank): Est-ce que cette motion de
deuxième lecture du projet de loi no 2 est adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Blank): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
M. Bienvenue: Article...
Le Vice-Président (M. Blank): Est-ce qu'on la
défère à une commission?
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Oui. Je fais motion, M. le Président, pour
que ce projet de loi no 2 soit déféré à la
commission élue de l'agriculture pour y être étudié
article par article.
Le Vice-Président (M. Blank): Cette motion de
déférence est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Blank): Adopté.
M. Bienvenue: Article 5, M. le Président.
Projet de loi no 4 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Blank): Le ministre de l'Agriculture
propose la deuxième lecture du projet de loi no 4, Loi modifiant la Loi
du prêt agricole.
Le ministre de l'Agriculture.
M. Bienvenue: Je crois qu'il va être bref.
M. Toupin: M. le Président, c'est simplement une loi de
concordance avec la Société du crédit agricole
fédérale.
Le Vice-Président (M. Blank): Est-ce que cette motion de
deuxième lecture du projet de loi no 4 est adoptée?
M. Roy: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
Le Vice-Président (M. Blank): Adopté.
M. Bienvenue: Adopté. Même motion de
déférence. Si on avait fait les écritures de la commission
plénière sans aller à la troisième lecture, est-ce
que cela aurait été possible pour celui-là? Est-ce que les
Oppositions seraient d'accord.
M. Roy: M. le Président, comme il s'agit d'une loi de
concordance et qu'il est possible que l'autre loi puisse recevoir des
amendements, à un moment donné, je pense qu'il serait
prématuré, à ce moment-ci, de l'adopter.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: D'accord. La motion de déférence est
adoptée.
Le Vice-Président (M. Blank): Est-ce que cette motion de
déférence est adoptée? Adopté.
M. Bienvenue: Article 4, M. le Président, où j'ai
lieu de croire que le ministre de l'Agriculture va être encore plus
court.
Projet de loi no 3 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Blank): Le ministre de l'Agriculture
propose la deuxième lecture du projet de loi no 3, Loi modifiant la Loi
de l'amélioration des fermes.
Le ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: M. le Président, cette fois-ci, je devrai
m'allonger un peu, parce qu'il eet plus important celui-là que la Loi
modifiant la Loi du prêt agricole.
M. le Président, cette loi-ci, au fond, augmente grosso modo les
sommes mises à la disposition des producteurs dans le cadre des
prêts à court terme. Tout ce qu'on a discuté,
jusqu'à maintenant, sur la définition du producteur agricole se
retrouve également dans cette loi-ci. Au fond, les amendements à
cette loi sont concordants avec la loi première qui est la Loi du
crédit agricole, sauf que celle-ci augmente les montants mis à la
disposition des producteurs agricoles qui empruntent à des caisses
populaires ou à des banques pour financer à court ou à
moyen ternies les activités de leur entreprise. Les seules
spécifications qu'on retrouve dans cette loi, par rapport à la
dernière, c'est que ces prêts à court terme maintenant
seront disponibles pour l'achat de terre. Pour cet article d'achat de terre,
les banques et les caisses seront autorisées à prêter
jusqu'à quinze ans, plutôt que dix ans.
J'aurai également en commission parlementaire un amendement
à proposer dans le cadre de cette loi relativement au drainage
souterrain pour que nous puissions tenter d'accélérer, via le
crédit, les programmes de drainage souterrain.
Je n'ai pas à ajouter sur cette loi, parce que le premier
discours que j'ai fait contenait dans l'ensemble la philosophie, la
théorie des programmes du ministère en matière de
financement.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, j'aurais une
directive à vous demander. Est-ce qu'il nous serait permis de saluer les
jeunes hommes de douze ans du Kiwanis Little League, champions de l'Est du
Canada, qui sont dans les galeries en haut? Ils sont du comté de
Rosemont.
M. Lessard: M. le Président, on sait que le
député de Rosemont est toujours en dehors des règlements,
mais on le lui permet quand même.
M. Bellemare (Rosemont): Comme toi. M. Lucien Lessard
M. Lessard: M. le Président, si j'interviens sur ce projet
de loi, c'est d'abord pour répondre au ministre de l'Agriculture
lorsqu'il m'a répondu concernant le projet de loi du crédit
agricole. Je pourrais faire la même intervention à ce projet de
loi que celle que j'ai faite, ce matin, concernant le crédit agricole.
Je veux simplement vous démontrer comment le ministre a tenté de
fausser les faits, en particulier sur deux points précis. Je voudrais
très bien préciser ce que j'ai dit ce matin. Si j'appuie le
projet de loi no 3, ce n'est pas parce que j'appuie l'ensemble de la politique
agricole de ce ministre, parce qu'il n'y en a pas de politique agricole, ce
ministre du gouvernement actuellement. Quand le ministre a tenté de me
mettre en contradiction, tout à l'heure, concernant les revenus...
M. Bellemare (Rosemont): La pertinence du débat.
M. Lessard: Oui, c'est pertinent à l'intérieur du
débat. Voyez donc la loi, lisez donc la loi que nous avons à
étudier, à savoir le projet de loi no 3.
Quand le ministre a semblé trouver une contradiction entre ce que
j'ai dit à propos d'une diminution du revenu net de l'agriculteur
québécois, en 1974, par rapport à 1973, c'est que le
ministre n'a pas voulu comprendre; comme d'habitude, le ministre est sourd et
muet.
J'ai affirmé, c'est encore le cas, que ce projet de loi va
probablement venir aider, sur le plan individuel, les agriculteurs
québécois. Cependant, sur le plan collectif, si le ministre ne
prends aucune mesure pour faire en sorte que le revenu des agriculteurs
québécois augmente, la conséquence, c'est qu'on va arriver
encore à un endettement progressif des agriculteurs.
En effet, en 1974, le revenu net de l'agriculteur
québécois a diminué de 9%, et j'ai ajouté ceci: Si
on tient compte du taux d'augmentation du coût de la vie, qui est de 12.
4%, cela veut dire que le revenu net de l'agriculteur québécois a
diminué de 21. 4%, Je comprends que le ministre...
M. Toupin: M. le Président, ça n'a rien à
voir parce que le coût de la vie affecte le pouvoir d'achat et non pas le
revenu net.
M. Lessard: M. le Président, le coût de la vie
affecte le pouvoir d'achat...
M. Toupln: Et non pas le revenu net. M. Lessard:... et le
coût de la vie... Le Vice-Président (M. Blank): A
l'ordre!
M. Lessard:... affecte le revenu de l'agriculteur aussi. Le
ministre de l'Agriculture lui-même, dans son rapport annuel concernant le
bilan de son administration, qui n'en est pas une malheureusement, affirmait
que le revenu net de l'agriculteur québécois diminuerait
probablement, en 1975, aussi de 8% à 9%. Même si on exclut
l'augmentation du coût de la vie, cela veut dire qu'en l'espace de deux
ans, soit 1974 et 1975, le revenu net de l'agriculteur québécois
aura diminué de 18%.
M. Toupin: Ce n'est pas vrai, M. le Président.
M. Lessard: M. le Président, ou bien le ministre ne se
comprend plus, ou bien le ministre trompe la population constamment quand il
donne ses chiffres et quand il fait ses conférences de presse. C'est
ça le problème fondamental, actuellement, au Québec.
M. Toupln: 9%, c'est vrai.
M. Lessard: C'est que le ministre de l'Agriculture ne comprend
plus rien. Le ministre de l'Agriculture minimise tous les problèmes de
l'agriculture au Québec, actuellement.
Le deuxième point est celui-ci. Quand le ministre de
l'Agriculture m'a accusé de ne pas avoir dit que le revenu de
l'agriculteur du Québec avait doublé depuis 1971...
M. Toupin: C'est un fait.
M. Lessard:... je dis que je n'ai pas affirmé ça.
J'aurais menti à l'Assemblée nationalesi j'avais affirmé
ça. Et celui qui l'affirme ment effrontément à
l'Assemblée nationale. Mais ce que le ministre aurait dû dire,
c'est que j'ai donné, ce matin, exactement si le ministre n'a pas
compris, je devrais lui répéter, mais qu'il lise le journal des
Débats de temps en temps quels étaient les revenus de
l'agriculteur québécois par rapport aux agriculteurs canadiens,
quels étaient les revenus, pour les années 1971, 1972, 1973 et
1974. Le ministre n'a qu'à faire une petite soustraction et il va
s'apercevoir que cela n'a pas doublé. Le revenu de l'agriculteur
québécois n'a pas doublé. Depuis 1971, le revenu de
l'agriculteur québécois a augmenté seulement de 89%,
c'est-à-dire pas de 89%, mais de 49%.
M. Toupin: Bon!
M. Lessard: De 49%. Il est passé de $4, 999, en 1971,
à $7, 444, en 1974, et non pas à $9, 000 comme l'a dit le
ministre de l'Agriculture.
M. Toupln: En 1973, c'est quelque $8, 000.
M. Lessard: Ce sont les chiffres que nous pouvons obtenir de
l'Union des producteurs agricoles du Québec. Cependant, quand le
ministre parle, de façon absolue, de l'augmentation du revenu de
l'agriculteur québécois, il faut comparer avec l'augmentation des
revenus dans d'autres provinces canadiennes.
En 1971, on était au moins avant les provinces maritimes.
L'agriculteur québécois se situait au moins avant ceux des
provinces maritimes. Mais là l'agriculteur québécois se
situe à la queue de la confédération, comme c'est tout le
temps le cas. Et je vois que le ministre confirme ce que j'affirme.
M. Toupin: Seulement pour une année.
M. Lessard: Et le ministre est satisfait. Et le ministre est
heureux. Et le ministre est content. Il faut dire que le ministre se satisfait
de pas grand-chose.
On sait que le ministre a même menacé de
démissionner parce qu'il n'avait pas assez de budget et il n'a rien
fait. C'est qu'il passe de plus en plus pour le dindon de la farce ou le mouton
de la famille.
M. le Président, le revenu de l'agriculteur canadien, pendant la
même période, augmentait de 185%. C'est la situation, quoi que
puisse en dire le ministre. Je sais le ministre a raison et je
l'ai dit ce matin...
M. Toupin: Pas les producteurs canadiens.
M. Lessard: Voulez-vous on va tout citer? En Ontario,
augmentation, de 1971 à 1974, de 228% c'est encore plus grave
par rapport à l'agriculteur québécois. Je sais
qu'il y a toujours eu une marge enre l'agriculteur de l'Ontario et
l'agriculteur de la Colombie-Britannique, mais cette marge, maintenant, devient
de plus en plus importante, de plus en plus grave. Et cela, le ministre de
l'Agriculture n'en a pas conscience; cela, le ministre de l'Agriculture nous
dit que ce n'est pas grave. On va être dans le trou, les agriculteurs
québécois vont être en faillite, il va en rester juste 25,
000, et le ministre de l'Agriculture va nous dire: Ce sont là les lois
du marché. Tant mieux si on n'a que 25, 000 agriculteurs
québécois. Ils vont pouvoir se partager une plus grande
superficie de la terre. C'est !a réaction continuelle du ministre de
l'Agriculture.
C'est vrai, M. le Président, que je reviens constamment avec ces
choses à l'Assemblée nationale. C'est vrai que depuis 1971, et
particulièrement depuis 1973, au moment où on m'a confié
la responsabilité de ce ministère, j'ai
répété au ministre de l'Agriculture des choses que j'ai eu
l'occasion de répéter ce matin, mais la différence, par
exemple et cela, le ministre de l'Agriculture n'en a pas parlé
c'est que, maintenant, les propos que je tiens depuis 1973 sont
confirmés par une étude du gouvernement fédéral.
Cela, le ministre n'en a pas parlé. La commission Plumptre, le ministre
n'en a pas parlé. Le ministre ne m'a pas répondu sur les
affirmations ou sur les conclusions du rapport de la
commission Plumptre concernant justement l'agriculture
québécoise.
M. Toupin: Je vais vous en dire un mot tantôt.
M. Lessard: Le ministre n'a pas dit un mot. Un "marché
ouvert". Quand je dis que le Québec est la poubelle de l'Amérique
du Nord, le ministre n'en a pas parlé. La commission Plumptre dit, je le
répète encore pour le ministre: "Marché ouvert
livré à toutes les concurrences et les dumpings, tant
étrangers que des autres provinces. Le Québec, s'il n'est pas
protégé par une politique provinciale au moins
énergique ne peut développer une agriculture
économiquement rentable qui favoriserait son expansion. "
La commission Plumptre continue et souligne abondamment ce fait: "Une
des conséquences de cette situation, conséquence qu'on a tendance
à négliger quand on examine la hausse des prix de l'alimentation,
est que la majoration des revenus agricoles permet d'accroître les
investissements et donc d'améliorer la productivité du secteur
agricole canadien. "
Or, chez nous, il n'y a pas de majoration de revenu; je parle de revenu
net. Le revenu de l'agriculteur québécois a diminué depuis
deux ans je le répète de 40% et le ministre a
encore le front de venir dire aux agriculteurs: Augmentez votre
productivité. Quand, M. le Président, on tente de me reprocher,
ici, à l'Assemblée nationale, de ne pas être un
agriculteur, il y a une chose que je dis au ministre. C'est que depuis deux
ans, moi, je ne les ai pas laissés de côté, les
agriculteurs. Je suis allé les voir et je passe encore le front haut.
Mais le ministre, maintenant, n'est plus capable de passer parmi les
agriculteurs le front haut. D'ailleurs, les agriculteurs ont compris
l'irresponsabilité et l'incapacité du ministre de l'Agriculture
actuel; les agriculteurs ont compris que ce ministre ne pouvait plus rien faire
et les agriculteurs, maintenant, s'adressent au premier ministre parce qu'ils
ne peuvent recevoirde réponse satisfaisante du ministre de
l'Agriculture. Les agriculteurs ont compris autre chose, aussi. Ils ont compris
que ce gouvernement ne prenait pas ses responsabilités en ce qui
concerne l'agriculture québécoise.
Je demande encore une fois, malgré le fait, M. le
Président, que ce projet de loi no 3 permette une augmentation des
crédits aux agriculteurs et que ce projet de loi me paraisse
nécessaire parce qu'il vient simplement compenser pour l'augmentation
des coûts...
Il est tout à fait normal que l'on conforme nos lois à la
situation économique. Ce que je dis au ministre de l'Agriculture, c'est
que, s'il n'établit pas de politique générale de
contrôle des marchés, de stabilisation des revenus; s'il
n'établit pas des politiques pour assurer aux agriculteurs
québécois des revenus q ui seront stables, qui seront en fonction
de leurs coûts de production, le ministre ne fera que permettre aux
agriculteurs de s'endetter de plus en plus. Les agricuIteurs
québécois auront de moins en moins de revenus pour payer leur
endettement.
Si le ministre me dit que mes chiffres sont des chiffres lancés
en l'air, qui ne correspondent pas à la réalité, je
l'invite, encore une fois, ce ministre de l'Agriculture, â lire les
rapports de l'Union des producteurs agricoles, lors de leur congrès
annuel. Il faudrait que le ministre sorte de sa tour d'ivoire. Lui qui fut,
pendant longtemps, employé de l'Union des producteurs agricoles, il
faudrait qu'il sorte de sa tour d'ivoire. Il faudrait au moins, qu'il commence
à avoir des doutes dans son esprit. Le ministre agit comme s'il n'y
avait que lui qui avait le pas, qui avait la vérité. Le ministre,
lorsqu'il nous parle de l'augmentation du revenu de l'agriculteur
québécois, va à rencontre de toutes les affirmations des
experts de l'Union des producteurs agricoles.
A ce sujet, en terminant, le ministre devrait lire de nouveau le
mémoire qui lui a été présenté, qui a
même été présenté au conseil des ministres,
le 19 juin 1974. Ce mémoire avait pour sujet l'importance que l'on doit
accorder à l'agriculture au Québec. J'ai utilisé, dans mon
intervention de ce matin, certaines affirmations de ce mémoire. C'est
curieux, le ministre se sert de l'Assemblée nationale pour essayer de
contester des chiffres qui lui sont présentés par les
agriculteurs, mais, lorsqu'il en rencontre, à Sainte-Foy par exemple,
300 en face de lui, le ministre n'a pas le courage de les contester alors. Le
ministre n'a pas le courage de contester les chiffres qui sont
avancés.
M. le Président, j'arrête sur cela, car, quoi que l'on
puisse dire depuis 1970, ce ministre a décidé d'agir comme une
autruche, de se cacher la tête dans le sable et de ne rien comprendre.
Pendant ce temps, les agriculteurs sont obligés de descendre dans la rue
pour essayer d'alerter l'opinion publique sur leurs problèmes et
essayer, justement, de se battre pour pouvoir faire reconnaître leurs
revendications. Durant ce temps, le ministre de l'Agriculture continue son
petit jeu; il minimise tous les problèmes. Pour lui, il n'y a plus de
problèmes. Annuellement, il vient nous dire que le revenu annuel, net,
de l'agriculteur diminue constamment, mais, par ailleurs, à
l'Assemblée nationale il nous dit: L'agriculture va bien au
Québec.
Dans ces circonstances, nous disons: Ou le ministre est ignorant, ou il
est insouciant, ou il est irresponsable; choisissez entre les trois.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: Ce n'était pas dans mon intention d'intervenir sur
le projet de loi no 3, car je croyais avoir été suffisamment
clair dans mon intervention de deuxième lecture du projet de loi no 2.
Je me suis rendu compte, une fois de plus, que le ministre n'avait pas voulu
comprendre, parce que l'on peut quand même présumer qu'il est un
homme intelligent, M. le Président. Dire qu'il n'a pas compris, c'est
peut-être dire beaucoup. Mais je pourrais dire, sans crainte de me
tromper, au moins en étant très généreux à
son endroit, que le ministre n'a pas voulu comprendre. Il a même
été jusqu'à dire que, si nous votions en faveur de son
projet de loi, c'était parce que nous étions en faveur des
politiques agricoles de son ministère. M. le Président,
j'inviterais le
ministre à regarder les dispositions de l'article 120 du
règlement. M. le Président, voter pour le projet de loi qui
modifie la Loi du crédit agricole n'est pas un référendum
sur les politiques globales du ministère de l'Agriculture.
A moins que le ministre n'ait compris et qu'il soit moins
dépourvu d'intelligence qu'on veut bien lui en donner, il y a quand
même des limites pour faire dire n'importe quoi au texte et pour
interpréter une situation de façon à camoufler la
réalité. Ce que le ministre veut faire, en se promenant dans le
Québec, actuellement, c'est tenter de créer des illusions. C'est
pourquoi je dis que le ministre de l'Agriculture, à l'heure actuelle,
est un marchand d'illusions vis-à-vis des agriculteurs du Québec.
D'ailleurs, on peut donner un exemple d'illusion. Nous avions tous l'illusion
que les inspecteurs de son ministère faisaient leur travail dans
l'application du règlement concernant l'inspection des viandes, mais on
a eu la preuve que c'était une illusion que nous avions. Je pense que
cela a été dit assez largement et
répété.
M. Toupin: Je n'irais pas trop loin là-dessus!
M. Roy: Je n'ai pas à intervenir là-dessus. Il y a
également de l'illusion dans d'autres domaines. Le ministre dit qu'il y
a de plus en plus de fermes rentables au Québec et qu'il y a de moins en
moins de fermes non rentables. On les assassine, les fermes non rentables, au
lieu de les rendre rentables. C'est cela que l'on fait au ministère de
l'Agriculture.
Un article qui n'est pourtant pas récent, datant du 20 novembre
1973, disait: En quinze mois, 7, 000 agriculteurs du Québec ont
quitté leur ferme. Je l'ai mentionné au ministre tout à
l'heure, je n'ai jamais dit qu'on ne devait pas faire en sorte de trouver des
débouchés pour la production laitière, le lait en poudre
et le fromage. Au contraire, j'ai dit que, actuellement, il y a une
déficience au niveau de la production agricole au Québec, qu'il y
a de la place pour ces agriculteurs et que ces agriculteurs ont besoin de
l'aide gouvernementale pour être en mesure de rendre leur exploitation
rentable. C'est cette aide gouvernementale qui n'existe pas parce qu'il n'y a
pas de politique agricole actuellement au Québec de façon
à protéger les petits et les moyens agriculteurs
québécois.
M. le Président, on a dit que le nombre des agriculteurs dans
cette province était ainsi passé de 52, 000 à 45, 000 et
que ce mouvement ne faisait que s'amplifier. Cela, c'était en 1973. Nous
savons que maintenant, au Québec, il y a à peu près 36,
000 ou 37, 000 agriculteurs et que ce nombre diminue d'année en
année.
Si on fait une projection à partir des réalisations
gouvernementales depuis les cinq dernières années, qu'on regarde
les résultats que nous avons jusqu'à présent et qu'on
maintient cette projection pour les cinq prochaines années, où
allons-nous nous retrouver dans le domaine de l'agriculture dans cinq ans?
C'est là qu'est le point.
Je vois notre ministre de l'agriculture se réjouir de la
disparition des petites fermes, des moyennes fermes, des petits agriculteurs du
Québec pour en faire des assistés sociaux, des gens qui vivent
à la charge de la société et qui contribuent à
cette pyramide de taxation gouvernementale, par l'accroissement des budgets.
Les gens ne peuvent plus vivre par eux-mêmes, alors que nous avons, au
Québec, un potentiel qui est inexploité et qui devrait être
exploité parce que cela serait rentable pour le Québec, cela
permettrait au Québec de s'autosuffire davantage, de se libérer
des conditions et des contingences qui nous arrivent du marché
international.
Cela, nous le répétons au ministre. Je m'excuse
d'être obligé de revenir à la charge encore sur ce point,
mais le ministre n'a pas encore compris, lui, en 1975, que c'est la situation
dans laquelle se trouvent un grand nombre de petits producteurs agricoles au
Québec. Or, ces petits producteurs agricoles sont justement ceux qui,
par la croissance de leur entreprise, à cause de leur travail,
après un certain nombre d'années iraient acheter les grosses
exploitations agricoles dont il fait mention lui-même et qu'il se
glorifie de vouloir créer au Québec.
Je dis que les grosses exploitations agricoles qu'on est en train de
faire au Québec contribuent à déposséder les
Québécois de leur agriculture. On est en train de livrer
l'agriculture aux professionnels, aux hommes d'affaires et aux industriels.
On est en train de préparer le Québec à de grandes
sociétés ou de grands complexes agroalimentaires qui seront
possédés, contrôlés, administrés par du
capital étranger. Et il arrivera au Québec ce qui est
arrivé ailleurs. J'avertis le ministre tout de suite: Dans dix ans, dans
douze ans, dans quinze ans c'est assez vite passé, on aura
peut-être l'occasion de revenir sur ces propos dans dix ou quinze
ans, il y aura quelqu'un qui sera obligé de se lever au Québec et
de préconiser une réforme agraire. Ce ne serait pas nouveau, nous
en entendons parler à toutes les semaines. Dans certains pays, on est
obligé de faire une réforme agraire parce qu'on a
découvert que l'agriculture nationale est entre les mains des
multinationales, que l'agriculture n'était plus entre les mainsde la
population.
Là, on fait la révolution et on fait des réformes
agraires. C'est ce qu'on tente de faire pour régler la question dans ces
pays pour permettre aux paysans, aux habitants de ces pays d'être les
maîtres d'oeuvre de leur politique; on accélère le
mouvement inverse, actuellement, au Québec. C'est ce qui est grave !
C'est ce qui est sérieux! C'est ce qui va causer tantôt des
préjudices extrêmement graves et extrêmement sérieux
à l'endroit non seulement des agriculteurs du Québec, de
l'économie rurale, mais à l'endroit de toute l'économie
agricole du Québec.
Des gens se donnent la peine d'écrire dans un journal agricole,
en page éditoriale, et je cite à l'intention du ministre le
journal Le Meunier, avril 1975: "L'agriculture prise en otage". M. le
Président, ce sont quand même des gens qui connaissent le milieu!
"Au cours des dernières semaines, l'économie agricole du
Québec a tracé son sillon sur l'arête d'un
précipice. Déjà affectée par six grèves
consécutives qui avaient réduit au minimum les réserves de
provende et perturbé leur transport sur la ferme, l'in-
dustrie de l'élevage vient de vivre une nouvelle épreuve
dont les conséquences demeurent incalculables". Et on dit, plus loin
dans l'article: "A tel point que, dans certaines régions, dont celle de
Québec en particulier, la situation a frôlé le
désastre". Et j'ajouterai la région de la Beauce et la
région de la Chaudière, qui ont été
particulièrement affectées par ces grèves.
Nous avons proposé une motion à l'Assemblée
nationale pour demander la création d'un office québécois
de grains de provende. Le ministre a dit non. Mais les gens qui vont emprunter,
en vertu de la Loi de l'amélioration des fermes, vont emprunter pour
acheter des troupeaux, pour faire l'élevage de bovins de boucherie, pour
continuer dans l'industrie laitière. Ils vont acheter des
équipements pour leur ferme, pour tâcher de produire davantage et
mieux, pour permettre l'élevage et le développement de leur
troupeau, de façon à satisfaire les besoins de l'alimentation au
Québec, au niveau des bovins de boucherie, au niveau des marchés
de l'alimentation.
Les agriculteurs, on se propose, par la loi actuellement
déposée devant l'Assemblée nationale, de les faire
bénéficier de rabais d'intérêt, de facilités
de crédit qui leur permettraient d'agrandir leur troupeau, d'augmenter
leur outillage et de faire en sorte que leurs investissements se
répartissent sur un certain nombre d'années. Verront-ils par
ricochet, à cause de l'absence d'autres politiques, la porte du
marché se fermer? Seront-ils livrés à l'exploitation
honteuse par certaines grandes sociétés, dont les
sociétés multinationales, les trusts et les cartels? C'est le
point. Je le dis et le répète encore une fois au ministre. La Loi
modifiant la Loi de l'amélioration des fermes, la loi no 3, est une loi
qui favorise les prêts agricoles, c'est-à-dire qu'elle permet aux
agriculteurs d'emprunter davantage et de bénéficier des avantages
que leur procurait la Loi de l'amélioration des fermes. Je le dis
à l'attention du ministre, pour qu'il n'y ait pas de méprise. La
loi n'a rien de mauvais en soi, malgré qu'on ouvre une porte et que la
porte soit fermée ailleurs. Le fait de voter cette loi n'est pas pour
l'Opposition un appui des politiques gouvernementales en matière
agricole.
Je regarde le ministre sourire et cela me décourage. Quand je
vois le ministre actuel de l'Agriculture responsable de la situation dans
laquelle se trouvent les agriculteurs du Québec, pour les consommateurs
du Québec...
M. Toupin: Arrêtez de pleurer!
M. Roy: II n'a rien fait. J'irais me cacher, si j'étais
à la place du ministre de l'Agriculture, au lieu de me promener dans la
province comme un marchand de bonheur, un marchand d'illusion. J'irais me
cacher, si j'étais à la place du ministre de l'Agriculture!
Si j'étais à la place du premier ministre de la province,
cela ferait longtemps que j'aurais remplacé le ministre actuel de
l'Agriculture parce qu'avec lui comme avec certains de ses collègues,
malgré qu'il y ait de ses collègues pour qui j'ai beaucoup
d'estime...
Le Président suppléant (M. Gratton): La
pertinence.
M. Roy: Oui, M. le Président, je suis sur le projet de loi
3. Je ne parle pas de la couleur de votre veston, M. le Président. Je
comprends que cela pourrait être désagréable pour certains
de nos collègues. Mais, quand même, j'aimerais dire à
l'attention de l'honorable ministre que si nous appuyons son projet de loi, ce
n'est pas parce que nous appuyons les politiques actuelles du ministère
de l'Agriculture. On n'a même pas l'avantage de les appuyer, ces
politiques, parce qu'il n'y en a pas.
Le Président suppléant (M. Gratton): Est-ce qu'il y
a d'autres députés qui veulent prendre la parole avant que le
ministre ne donne la réplique?
M. Normand Toupin
M. Toupin: M. le Président, très rapidement. Le
député de Saguenay, comme toujours, s'emporte et utilise des
termes qui font souvent... J'espère, en tout cas, qu'il le regrette
après.
Il y a un autre terme qu'il a employé aujourd'hui, et il en a
employé un autre il n'y a pas longtemps: Menteur, c'est ceci et c'est
cela. Ce sont des termes qui, personnellement, n'ont pas besoin de passer dans
ma bouche pour me défouler. Je peux me défouler ailleurs que dans
des choses comme ça. ll me paraît, à moi, qu'on doit
être capable, à l'intérieur de cette Assemblée, de
trouver des gars, des députés qui ont assez d'éthique pour
utiliser des mots qui, au moins, ne choquent pas l'oreille.
Le député de Beauce-Sud m'accusait tantôt de rire.
J'aime mieux rire que de toujours avoir l'air de pleurer, cela je vous le dis
bien franchement.
Les 40% dont vous parliez, je vais juste apporter une précision
là-dessus. Vous présumez que les revenus agricoles vont diminuer
en 1975. Vous ne le savez pas et moi non plus.
M. Lessard: Vous l'avez confirmé.
M. Toupin: Je n'ai rien confirmé, on m'a posé la
question: Comment cela se comportera en 1975? Si les conditions du
marché ne changent pas, cela va demeurer ce que c'est. Mais si les
conditions du marché changent, on verra ce que cela donnera à la
fin de l'année. Alors je ne pense pas qu'on puisse affirmer ça.
C'est simplement ce que j'ai voulu dire. Ce sont des affirmations
gratuites.
On peut l'émettre sous forme d'hypothèse. Je n'ai rien
contre ça. Mais l'affirmer et tenter de laisser croire aux gens qu'il y
a des diminutions de 40%, c'est non seulement chercher à faire de la
politique mais, je le répète, c'est proche de la
démagogie, si cela n'en est pas. On n'a pas le droit de charrier les
gens comme ça. Les. gens qui nous écoutent, j'espère
qu'ils nous prennent au sérieux. J'espère que les gens qui
écoutent le député de Saguenay le prennent au
sérieux dans ses déclarations. J'espère en tout cas.
Lorsqu'il a soutenu tantôt qu'il va appuyer le projet de loi, bien
tant mieux. Moi, je vais le dire aux
gens, que le député de Saguenay a appuyé mon projet
de loi. Mais s'il ne l'appuie pas, je vais le dire aux gens aussi, qu'il n'a
pas appuyé mon projet de loi. Je vais le dire. Mais s'il l'appuie, je
vais informer le public que même si le député de Saguenay
ne comprend pas trop l'agriculture, au moins il appuie les politiques
gouvernementales. C'est déjà un acquis.
M. Lessard: Ne dites pas ça!
M. Toupin: Une politique gouvernementale, M. le Président.
Cela en est au moins une, une politique gouvernementale. Le
député de Beauce-Sud, je suis convaincu que dans tout ce qu'il a
dit à la fin, c'est probablement un peu la fatigue qui l'a
emporté, mais, habituellement il...
M. Roy: M. le Président, je tiens à dire au
ministre...
M. Toupin:... est plus...
M. Roy:... que ce n'est pas une question de fatigue, c'est une
question de privilège, M. le Président.
Des Voix: Ah!
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre! A
l'ordre! C'est quoi la question de privilège?
M. Roy: Je suis capable de remplir mes fonctions et de faire mon
devoir ici à l'Assemblée nationale. Ce n'est pas une question de
fatigue parce que les propos que j'ai tenus...
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre!
M. Roy:... je peux les répéter devant lui, avec lui
dans n'importe quelle assemblée publique.
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre! Ce
n'est pas une question de privilège et vous le savez fort bien.
M. Roy:...
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre,
s'il vous plaît!
L'honorable ministre de l'Agriculture.
M. Toupin: M. le Président, qu'y a-t-il de fâchant
de se faire dire qu'on est fatigué? Cela m'arrive souvent d'être
fatigué, mais la seule différence entre lui et moi, c'est que
lorsque je suis fatigué, je me repose. C'est la seule différence
qu'il y a.
Probablement que ses propos ont dépassé un peu sa
pensée. D'ailleurs, c'est un peu son habitude...
M. Roy: Je m'excuse, c'est faux.
Le Président suppléant (M. Gratton): Je rappelle le
député de Beauce-Sud à l'ordre.
M. Toupin: M. le Président, je ne veux pas faire
fâcher le député de Beauce-Sud, mais je dis que, ce
temps-ci, il est possible qu'il soit un peu fatigué. Sa
déclaration d'hier ou d'avant-hier disait qu'il faudrait regrouper toute
l'Opposition autour du Parti québécois. Il a déjà
dit le contraire il n'y a pas tellement longtemps.
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Toupin: M. le Président, je n'irai pas plus loin.
M. Roy:... un débat là-dessus.
Le Président suppléant (M. Gratton): A l'ordre!
M. Toupin: Je n'irai pas plus loin que cela, M. le
Président.
M. Roy: Ah bon!
M. Toupin: C'est simplement pour dire que cela arrive parfois
lorsqu'il est fatigué qu'il dise des choses qui dépassent sa
pensée et c'est normal quand on est fatigué.
Alors, je prends le discours du député de Beauce-Sud comme
étant un discours sérieux, bien sûr, si je me mets dans ses
souliers, mais quant à moi, je considère qu'il en a
déjà fait de meilleurs.
M. Lessard: Article 96.
Le Président suppléant (M. Gratton): L'honorable
député de Saguenay sur une question de règlement.
M. Lessard: Je n'ai jamais accusé le ministre de
l'Agriculture d'être un menteur. Je suis assuré que vous m'auriez
fait retirer mes paroles, si j'avais affirmé une telle chose. J'ai dit
que, si j'avais affirmé que le revenu de l'agriculteur
québécois a doublé depuis 1971, j'aurais été
un menteur. Celui qui affirme une telle chose, en vertu des chiffres, ne dit
pas la vérité, puis que ce n'est pas le cas.
Le Président suppléant (M. Gratton): Est-ce que la
motion de deuxième lecture du projet de loi no 3, Loi modifiant la Loi
de l'amélioration des fermes est adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Président suppléant (M. Gratton):
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Je fais motion, M. le Président, pour que ce
projet de loi no 3 soit déféré à la commission
parlementaire de l'agriculture pour y être étudié, article
par article.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
est-elle adoptée? Adopté.
M. Bienvenue: Article 18).
Projet de loi no 5 Deuxième lecture
Le Président suppléant (M. Gratton): Le ministre de
l'Agriculture propose la deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi
modifiant la Loi favorisant la mise en valeur des exploitations agricoles.
Le ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: Le lieutenant-gouverneur de la province a pris
connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à la
Chambre.
M. le Président, ce projet de loi est concordant avec les deux
autres. L'avantage que le gouvernement a actuellement dans bien des domaines,
c'est qu'il a des politiques qui sont cohérentes. On a pris quatre lois
pour préparer une politique de financement; elle est, par
conséquent, totale. Elle est globale, puis elle touche tout le secteur.
C'est une loi qui porte plus particulièrement sur les subventions
à être versées aux agriculteurs. Nous avons adopté
cette loi aux nouvelles corporations, aux nouvelles coopératives, etc.,
de telle sorte que, si cinq jeunes décidaient, demain matin, de former
une corporation, ils pourraient recevoir jusqu'à $20, 000 de subvention
pour développer une entreprise. Très souvent, le
député de Beauce-Sud parie des petites fermes. Bien, si cinq de
ces petites fermes, demain matin, se groupaient et si les fermiers ont moins de
40 ans, ils pourront recevoir $20, 000 de subvention pour développer
cette entreprise. Le but de ce projet de loi, c'est de subventionner
l'établissement sur les fermes et ainsi remplacer ceux qui partent et
également prendre les fermes les plus rentables qu'on constitue en vertu
des autres lois et les exploiter. C'étaient seulement les quelques
propos que je voulais tenir.
Le Président suppléant (M. Gratton): Le
député de Saguenay.
M. Lessard: M. le Président, je constate que le ministre
de l'Agriculture n'est pas docile vis-à-vis de son leader parlementaire;
il crée toujours un climat pour nous faire intervenir.
M. le Président, comme il s'agit d'une loi de concordance, soit
le projet de loi no 5, je réserve mes commentaires lors de la discussion
de l'article 1 en commission parlementaire.
Le Président suppléant (M. Gratton): La motion de
deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi favorisant
la mise en valeur des exploitations agricoles, sera-t-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Président suppléant (M. Gratton):
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Je fais motion, M. le Président, pour que
cet autre projet de loi que nous venons d'adopter en deuxième lecture,
le projet de loi no 5, soit déféré à la commission
parlementaire de l'agriculture, pour y être étudié article
par article.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
est-elle adoptée.
Des Voix: Adopté.
Le Président suppléant (M. Gratton):
Adopté.
M. Bienvenue: Article 10), M. le Président.
Projet de loi no 22
Deuxième lecture
Le Président suppléant (M. Gratton): Le ministre de
l'Agriculture propose la deuxième lecture du projet de loi no 22, Loi
constituant la Société québécoise d'initiative
agro-alimentaire.
Le ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: Le lieutenant-gouverneur de la province a pris
connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à la
Chambre.
M. le Président, il s'agit, cette fois-ci, d'une loi nouvelle
dans le ministère de l'Agriculture. Il ne s'agit pas d'un amendement et
il ne s'agit pas, non plus, de remplacer une loi qui existait
déjà, après l'avoir refondue ou rédigée
à nouveau. C'est une loi totalement nouvelle.
Lorsque nous avons travaillé, en 1972/73, sur ce qu'on a convenu
d'appeler, ce qui est encore vrai, un programme intégré de
développement de l'agriculture au Québec, nous avons rendu public
un document que nous avons appelé Esquisses sur l'agro-alimentaire au
Québec. Dans ce document, nous pariions de l'organisation des
fermes.
Comme on le disait auparavant, sur les autres projets de loi que nous
avons discutés aujourd'hui, la ferme constitue le noyau de base de toute
l'agriculture québécoise et de l'agriculture également
dans les autres pays du monde.
Alors, dans ce document d'esquisses agroalimentaires, nous avions
prévu une politique de financement renouvelée pour l'organisation
des fermes au Québec, d'où les quatre projets de loi que nous
avons discutés au cours de l'après-midi.
Celui-ci est un prolongement. Il est, bien sûr, intéressant
de les rendre plus rentables, de les faire produire davantage. Mais il faut que
les produitsqui viennent de ces fermes se rendent jusque sur la table du
consommateur. Pourque ces produits de la
ferme puissent se rendre sur la table du consommateur, ils doivent
passer par différentes entreprises. Ils doivent suivre un cheminement.
Ce cheminement se définit en au moins trois secteurs: le premier est
celui de la transformation du produit; le second, c'est celui de l'entreposage
et le troisième, c'est celui de la distribution des denrées
alimentaires. Il existe, bien sûr, au Québec une structure de
transformation des produits agricoles, qui est bien développée.
Il en existe une aussi au niveau des transports et de l'entreposage qui se
développent de plus en plus. Quant au troisième secteur, celui de
la distribution, je pense qu'il est, parmi les trois, le mieux organisé
sur le plan de la structure et sur le plan également de
l'économie.
Alors, ce projet de loi vise essentiellement des initiatives nouvelles.
Il devra autoriser la constitution d'une corporation, laquelle aura la
responsabilité d'administrer des capitaux qui serviront soit à
mettre en place des industries nouvelles, soit à consolider le secteur
industriel déjà en place. L'expérience que nous avons
vécue dans le secteur laitier nous a démontré qu'il
était non seulement utile, mais nécessaire que nous ayons des
politiques d'aide, tant économiques que techniques, pour
développer le secteur de la transformation des produits agricoles.
Dans le secteur laitier, il est présentement évident que
la province de Québec est, sans aucun doute, la mieux organisée,
sur le plan de la transformation des produits laitiers, de tout le Canada.
Donc, ces expériences devront se retrouver dans d'autres
domaines. Nous allons bientôt attaquer un domaine qui est très
populaire, celui des abattoirs. Il en existe plusieurs qui sont petits. Il nous
faudra donc les regrouper. Des programmes particuliers devront être
offerts à ces propriétaires de petits abattoirs. Une
société, comme celle que propose le projet de loi no 22, a
précisément pour objectif d'aider ces petites entreprises
à devenir plus grandes, à devenir plus efficaces et à
répondre, par conséquent, aux besoins du marché, aux
besoins du secteur des transports, de la conservation et de la distribution des
denrées alimentaires.
Il y a également, au niveau du Québec et au niveau du
Canada, des éléments nouveaux de consommation qui se font sentir.
Par exemple, les produits congelés, les produits préparés,
etc., prennent de plus en plus d'importance dans le choix que font les
consommateurs des aliments qu'ils doivent consommer. Il n'existe pas au
Québec et très peu, d'ailleurs au Canada d'entreprises qui,
présentement, transforment, empaquettent et mettent en marché des
produits préparés, c'est-à-dire prêts à
manger, ou congelés pour pouvoir être transportés et
mangés un peu plus tard. C'est-à-dire qu'on peut se passer des
activités de cuisine dans une maison pour ces aliments qui sont
préparés d'avance.
Or, une société comme celle-là, parce qu'elle a un
caractère d'initiative, pourra entreprendre de tels projets, chercher
des partenaires, travailler avec eux sur le plan de l'investissement, soit 40%,
50% ou 30%, selon les disponibilités monétaires de ceux qui
voudront bien se joindre à nous, et mettre sur pied des entreprises
nouvelles qui correspondent à des besoins nouveaux des consommateurs,
qui viennent aussi répondre à des exigences nouvelles de
l'agriculture moderne.
De plus en plus, l'agriculteur se donne des moyens techniques, efficaces
et raffinés.
Si on prend seulement les entrepôts que le gouvernement,
d'ailleurs, a contribué à faire construire dans la région
de Montréal, concernant la conservation à l'état frais des
carottes, des pommes, des salades, etc., cela démontre que le producteur
est également, lui aussi, préoccupé d'être à
la pointe de la technique moderne pour la conservation des produits. Mais ces
produits, étant conservés sur la ferme, doivent trouver preneur
dans une entreprise de transformation et, très souvent, il n'est pas
possible de vendre tous ces produits à l'état frais. Il faut
parfois les faire passer par l'entreprise de transformation pour qu'ils
puissent rejoindre la table des consommateurs.
Ce projet de loi, cette société aura pour fonction aussi
de tenter de régler ce problème de nouvelles entreprises
nécessaires pour le développement de l'agriculture.
Le troisième volet sur lequel une telle loi aura des effets
bienfaisants est celui de la commercialisation. Bien sûr, il existe au
Québec des mécanismes de commercialisation. Les producteurs s'en
sont donnés par l'intermédiaire de plans conjoints, d'agences de
vente et de coopératives. D'ailleurs, une des plus grandes entreprises
de transformation des produits alimentaires au Québec, celle qui fait le
chiffre d'affaires le plus élevé dans le domaine de la
transformation, je pense que c'est une coopérative, la
Coopérative fédérée qui, avec ses
coopératives affiliées, notamment la Coopérative de
Granby, dépasse les $200 millions ou les $250 millions de chiffre
d'affaires au Québec. Mais ces mécanismes de commercialisation ne
sont pas suffisants présentement. Un certain nombre d'activités
commerciales pourraient être amorcées par des producteurs,
individuellement, par des groupes de producteurs ou par le ministère
lui-même, notamment pour les marchés internationaux et aussi, bien
sûr, un certain nombre de marchés locaux qui, présentement,
ne sont pas rejoints par les systèmes de commercialisation qui existent
dans les circonstances actuelles.
Cet aspect commercial des activités de la société
pourra aussi toucher au chapitre des approvisionnements de ce qu'on appelle les
intrants en agriculture. Là, je réponds à l'argumentation
qu'apportait tantôt le député de Beauce-Sud, m'accusant
d'avoir évité de trouver une solution acceptable à un
problème de commercialisation des provendes en votant contre la motion
qui voulait que nous instaurions au Québec un office des grains de
provende.
J'ai dit, au moment de l'argumentation que j'ai apportée, que le
gouvernement avait déjà une politique d'arrêtée dans
ce secteur. Cette politique se retrouve dans le secteur commercial de la
société d'initiative agro-alimentaire. Cette
société pourra acheter des grains si elle le désire. Elle
pourra en acheter en collaboration avec les groupes de pro-
ducteurs; elle pourra, si elle le désire, les entreposer et
pourra, par la suite, les distribuer ou aux producteurs ou aux meuneries. Elle
aura les pouvoirs de le faire.
Des problèmes comme ceux avec lesquels on a été aux
prises il n'y a pas tellement longtemps pourraient trouver une partie de leur
solution dans des initiatives de cette nature que pourra prendre cette
société. Bien sûr, on disait tantôt qu'il est
possible que la crise des provendes, notamment la grève, ait eu des
effets néfastes sur le plan de l'économie agricole. C'est
possible, les preuves ne sont pas encore faites. Mais si, toutefois, à
l'analyse du comportement de l'économie pour l'année 1975, il
s'avérait que de telles grèves nuisent vraiment à
l'économie de l'agriculture, c'est certain qu'il faudra changer, dans
l'avenir, une partie tout au moins des activités commerciales de ce
secteur, celle de l'entreposage, pour ne pas être limité à
un seul endroit d'entreposage, c'est-à-dire les quais, le bord de l'eau.
Il faudra trouver d'autres moyens, à l'extérieur, pour
éviter que des grèves de débardeurs puissent affecter les
intrants dont les agriculteurs ont besoin pour alimenter leur
bétail.
On avait dit, M. le Président, au cours de cette crise les
journaux en ont parlé abondamment, les producteurs également; un
certain nombre d'entre eux, tout au moins, ont fait des déclarations
là-dessus que le secteur agricole était pris avec des
problèmes sérieux, que les cochons se mangeaient les pattes les
uns les autres, etc. M. le Président, après vérification,
tout cela s'est avéré inexact. Il n'y eut presque aucune de ces
choses qui se soient produites sur les fermes au Québec.
Je n'ai pas encore rencontré de producteur agricole qui m'ait dit
qu'il ait manqué de céréales pour alimenter son
bétail et pourtant la crise est déjà passée. Au
pire de la crise, même si on le disait, je n'en ai pas rencontré
de ces producteurs qui m'ont dit qu'ils avaient manqué de
céréales. Or, cette société pourra, si elle le
désire, prendre des initiatives dans ce secteur. Elle pourra
également, au niveau de la commercialisation, entrer en contact avec des
pays qui, présentement, ont besoin de denrées alimentaires et
tenter, avec eux, d'établir des programmes à long terme.
Un des problèmes de la commercialisation sur le plan
international ou de l'exportation des produits agricoles, c'est de trouver des
pays qui sont prêts à signer des contrats à long terme.
Trouver des pays qui sont prêts à signer des contrats pour une
quantité donnée, pour une année donnée, cela est
facile; nous avons tenté l'expérience avec le Japon, nous avons
vécu une expérience avec Cuba. Mais cela n'a pas donné
satisfaction aux politiques à long terme de développement de la
commercialisation sur le plan international des produits de l'agriculture. Une
société comme celle-là pourra prendre l'initiative de
signer des contrats avec des pays importateurs et pourra également
signer des contrats avec les producteurs qui voudront s'engager à long
terme dans une production donnée, qui correspond à un
marché donné; que ce soit un marché local ou
international.
Comme vous voyez, M. le Président, cette loi offre une gamme
assez grande de possibilités. Evidemment, elle ne pourra pas, dès
l'automne ou dès l'an prochain, réaliser toutes ces
activités. Mais, à long terme, elle pourra conclure ces types
d'ententes, elle pourra prendre ce type d'initiatives et pourra, par
conséquent, avoir un effet bienfaisant, bénéfique, sur le
développement de l'économie agricole. Cela fait d'ailleurs suite
aux lois que nous venons d'adopter en deuxième lecture, en principe tout
au moins. Le développement de la ferme doit se poursuivre dans le
développement de la transformation des produits; il doit se poursuivre
dans l'exportation et la commercialisation des produits. C'est une politique
logique en soi; nous finançons d'abord les activités de
l'industrie primaire et nous mettons à la disposition du secteur
secondaire des moyens additionnels pour répondre aux
améliorations, au développement du secteur primaire.
M. le Président, cette loi, dont nous parlons déjà
depuis quelque temps, qui se discute présentement en deuxième
lecture, j'espère que nous pourrons l'adopter au cours de la
présente session pour que nous puissions, dans les plus brefs
délais, répond re à des problèmes aussi importants
que ceux de l'exportation des produits et aussi importants que celui du
regroupement de cet ensemble de petits abattoirs qui existent au Québec
présentement. Ils doivent nécessairement, pour devenir rentables,
correspondre à la nouvelle réglementation et, pour être
concurrentiels, ils devront nécessairement se regrouper et devenir ainsi
plus efficaces. Merci, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Gratton): L'honorable
député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. Lessard: M. le Président, je dois dire que le chiffre
22 aura été notoire au Québec. Nous voici encore avec un
projet de loi et ce n'est pas parce que je n'aime pas le ministre
dont les principes généraux sont excellents, très beaux,
mais qui, à l'intérieur, ne nous présente à peu
près rien. Un peu comme dans la loi 22, notoirement connue, où on
avait un grand principe général, la langue française
devenait la langue officielle, mais, dans tous les autres articles, on
l'annulait.
Il s'agit là, M. le Président, d'un projet de loi pour
lequel nous devrons voter, parce que nous sommes pour le principe d'une loi
constituant une société québécoise d'initiative
agro-alimentaire. Mais, il s'agit, encore une fois, d'une loi d'image, de
façade, de trompe-l'oeil.
Jamais depuis 1970, soit depuis les débuts de notre
présence à l'Assemblée nationale comme Opposition, a-t-on
présenté un projet de loi aussi peu consistant. Jamais on ne nous
a présenté un projet de loi créant une
société d'Etat et dans lequel on propose des objectifs aussi
vagues et imprécis que ceux qui sont mentionnés à
l'article 3 a) et 3 b) du projet de loi no 22.
On est pour la vertu, tout le monde est pour la vertu. On est pour une
société qui aura pour objet "de favoriser l'implantation, la
modernisation, l'ex-
pansion, le développement, la consolidation ou le regroupement
des industries du secteur alimentaire. " On n'a rien oublié
là-dedans. On est pour tout cela. Nous sommes d'accord avec le ministre
à ce sujet. Nous sommes d'accord pour que cette société
puisse participer ou intervenir dans la production, la transformation, le
conditionnement et la commercialisation de tout produit relié au secteur
agricole ou alimentaire ou aux pêcheries commerciales. On a même
compris les pêcheries commerciales, on n'a rien oublié.
On est pour tout cela. On est pour que les Québécois aient
de plus en plus une part importante à l'intérieur de l'industrie
agro-alimentaire. On est pour qu'une société
québécoise puisse s'insérer à l'intérieurde
ce secteur, mais, M. le Président, on est pour une loi qui va avoir de
l'épine dorsale. On est pour une loi qui va nous préciser quels
sont les moyens que prendra cette société pour appliquer ces
objectifs, pour concrétiser ces objectifs.
Le mandat de la Société québécoise
d'initiative agro-alimentaire est très vaste et très large. Mais
quand on regarde le projet de loi, parexemple, on se demande de quelle
façon on va concrétiser ces objectifs, de quelle façon on
va concrétiser ce mandat. On sait d'ailleurs que ce projet de loi est
l'enfant chéri du ministre de l'Agriculture. On sait d'ailleurs qu'il y
a eu une lutte très importante à l'intérieur du conseil
des ministres, et particulièrement avec le ministre de l'Industrie et du
Commerce, avant de présenter ce projet de loi. On sait que le ministre
de l'Industrie et du Commerce était très jaloux de conserver ses
prérogatives, de conserver ses pouvoirs dans l'administration de la
Société de développement industriel.
J'ai l'impression que, si le ministre de l'Agriculture nous a
présenté aujourd'hui ce projet de loi, c'était pour
essayer de corriger l'image du ministre de l'Agriculture. Mais ce n'est pas
tout de présenter une loi qui a des grands principes
généraux, il faut prévoir des moyens pour
concrétiser ces principes. Jamais, depuis 1970, on ne nous a
présenté un projet de loi où, après avoir
exposé les buts d'une société, on ne nous propose aucun
pouvoir, aucun moyen mis à la disposition de la société
pour atteindre ces objectifs. J'ai beau chercher entre les lignes pour savoir
par quel moyen cette société d'initiative agro-alimentaire
pourrait développer, favoriser une meilleure intégration de
l'industrie en aval et en amont de l'agriculture, je ne trouve rien. C'est cela
qui est malheureux.
J'aurais été heureux, cet après-midi, d'appuyer
fermement un projet de loi qui nous aurait été
présenté par le ministre de l'Agriculture et qui nous aurait
démontré que le ministre de l'Agriculture a l'intention,
véritablement, de permettre à cette société de
s'intégrer dans le secteur agro-alimentaire. On sait que les
Québécois ne contrôlent que 30% de ce secteur, selon,
justement, les dires du ministre de l'Industrie et du Commerce. Pourtant c'est
un secteur où on a le marché. Le marché est
québécois. Le marché, c'est six millions de
Québécois qui mangent et qui achètent pour manger. On a le
marché. Pourtant, on ne contrôle que 30% du secteur agro-
alimentaire. Il était donc extrêmement important qu'on nous
présente un projet de loi qui soit efficace, un projet de loi qui soit
dynamique, un projet de loi qui aurait compris des moyens énergiques
pour concrétiser les grands objectifs généraux qui sont
précisés là-dedans.
No us sommes pour la vertu. Nous sommes pour tout cela, mais quels
seront les moyens que nous prendrons pour concrétiser ces objectifs? Le
ministre de l'Agriculture ne nous le dit pas. Nous ne l'apprenons pas par la
lecture de son projet de loi. Quels seront les pouvoirs concrets de cette
société? Quels seront ses moyens d'intervention? Est-ce que ce
seront des prêts à taux réduits, dans certains cas, comme
c'est précisé dans la loi de la Société de
développement industriel? Si oui, dans quels cas? Est-ce que ce seront
des subventions versées aux entreprises, aux coopératives, aux
producteurs ou aux agriculteurs? Est-ce que ce seront des achats de
capital-actions? Nous allons le voir tout à l'heure.
M. Toupin: Oui.
M. Lessard: Dans l'article 17, on limite passablement la
société... Est-ce que ce sera l'exploitation d'une banque ou d'un
pool de grains de provende destiné à stabiliser les prix de cet
intrant, le plus coûteux et le plus instable? Est-ce que cette
société pourra créer cet organisme pour assurer une
stabilisation des coûts des intrants, qui, pour les agriculteurs, sont
des coûts assez considérables? Est-ce que ce sera par la
création de coopératives de transformation dans le domaine du
boeuf, de la volaille, de la pomme de terre, ou autrement? Est-ce que ce sera
la participation ou l'initiative à la transformation d'un réseau
de commercialisation au détail ou en gros des produits de notre
agriculture? On ne le sait pas. Il n'y a rien de précis dans la loi.
Pourtant, avant de présenter ce projet de loi, si le ministre avait
analysé la loi de la Société de développement
industriel, il aurait constaté qu'on accordait ces pouvoirs de
façon très explicite.
Non seulement ce projet de loi ne définit pas ces moyens, ou ces
pouvoirs de la société, comme c'est le cas des autres
sociétés d'Etat qu'on a créées, mais encore
pousse-t-on le ridicule jusqu'à spécifier, de façon
très nette cette fois, les moyens d'intervention qui seront
refusés comme pouvoir de plein droit à la société.
Ceci nous paraît véritablement un manque de confiance du
gouvernement envers le ministre de l'Agriculture et la société
québécoise d'initiative agro-alimentaire. La
société ne pourra, "sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur
en conseil d'habitude, dans une loi semblable, on dit que la
société pourra, "avec" l'autorisation du lieutenant-gouverneur en
conseil, mais là, c'est limitatif la société ne
pourra, dis-je sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil,
acquérir des actions ou des biens d'entreprises poursuivant les
mêmes fins ou des fins similaires. "
Le ministre vient de me dire, tout à l'heure, qu'elle pourra
acquérir des actions, mais elle ne pourra acquérir des actions
sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil. La
société ne
pourra, "sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil,
contracter un emprunt qui porte à plus de $500, 000 le total des sommes
empruntées par elle et non encore remboursées. "
C'est toujours limitatif, ce n'est pas une loi positive, ce n'est pas
une loi où on sent une confiance du gouvernement envers le ministre et
envers cette société.
On sent une méfiance constante du gouvernement vis-à-vis
de son ministre, vis-à-vis de cette société dans cette
loi. La société ne pourra, sans l'autorisation du
lieutenant-gouverneuren conseil, acquérir des immeubles ou en disposer.
D'habitude on dit: La société pourra, avec l'autorisation du
lieutenant-gouverneur, acquérir des immeubles ou en disposer.
On précise aussi qu'à l'intérieur d'une limite
particulière la société a plein droit d'agir. Là,
la société n'a presque pas de pouvoird'agirsans l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil. Si ce n'est pas une mise en tutelle de la
société par le gouvernement, je ne sais pas ce que c'est.
La société ne pourra, sans l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil, prendre des engagements financiers
au-delà des limites fixées par règlement du
lieutenant-gouverneur en conseil, lequel règlement doit avoir
été publié dans la Gazette officielle du Québec. En
tout cas, cela au moins, on va faire un règlement et la
société va pouvoir agir à l'intérieur de ce
règlement et elle ne peut pas dépasser le règlement. C'est
tout à fait normal.
M. Toupin: C'est cela qui va se faire.
M. Lessard: La société ne pourra, sans
l'autorisation du lieutenant-gouverneuren conseil, adopter des
règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et de sa régie
interne.
M. Toupin: Seul le lieutenant-gouverneur en conseil peut passer
des règlements.
M. Bums: A l'ordre!
M. Lessard: Le ministre dit qu'il va y avoir des
règlements, mais ce n'est pas ce que la loi dit. La loi dit, en ce qui
concerne les actions, que la société ne pourra acquérir
des actions ou des biens d'entreprises poursuivant les mêmes fins ou des
fins similaires. On ne dit pas que la société ne pourra pas,
au-delà des règlements, acquérir des actions. C'est bien
clair, onexclut les règlements et la société ne pourra pas
acquérir des actions.
Ceci m'amène à ma troisième remarque. Jamais un
projet de loi n'aura démontré avec autant de clarté la
méfiance et même la non-confiance du conseil des ministres
à l'égard d'un de ses membres, en l'occurrence ici le ministre de
l'Agriculture. Non seulement le projet de loi, après avoir passé
sous silence les pouvoirs de la société, précise-t-il les
pouvoirs qu'elle n'a pas, mais encore impose-t-on des conditions de
fonctionnement tout à fait inhabituelles, des conditions d'autant plus
exceptionnelles qu'on les retrouve dans le texte même du projet de loi,
telles que l'obligation légale, selon la loi, de soumettre un budget
d'investissement et de fonctionnement trois mois avant le début de
l'année financière.
Si je pouvais vous le souligner à l'article 14: Le conseil
d'administration de cette société devra, au moins trois mois
avant le début de chaque année financière, préparer
un budget d'investissement et un budget de fonctionnement et les soumettre pour
approbation au ministre de l'Agriculture. Le budget est sans effet tant que le
ministre de l'Agriculture ne l'a pas approuvé. Si ce n'est pas de la
tutelle, je me demande ce que c'est.
Les directives du ministre portant sur les objectifs et l'orientation de
la société doivent être soumises au lieutenant-gouverneur
en conseil pour approbation. Disons qu'il est important que l'on
détermine un cadre général à l'intérieur
duquel doit fonctionner un organisme d'Etat. Il ne faut pas qu'un organisme
d'Etat devienne un Etat dans l'Etat comme c'est malheureusement souvent le cas
pour Hydro-Québec ou autre organisme semblable. Cependant, il faut
accorder, pour permettre un fonctionnement efficace, un minimum de confiance
à une société ou à une entreprise. Si ce n'est une
quasi-tutelle, c'est un manque de confiance. Ceci aurait-il été
imposé par le ministre des Finances ou par le ministre de l'Industrie et
du Commerce, qui veut sauvegarder les prérogatives de la
Société de développement industriel?
On se rappelle que, lorsque nous avons discuté du rapport du
vérificateur général, le ministre des Finances
n'était pas particulièrement heureux du fait que la Régie
des marchés agricoles avait fait des règlements qui n'avaient pas
été soumis au lieutenant-gouverneur.
Le ministre des Finances avait démontré une certaine
méfiance vis-à-vis du ministre de l'Agriculture, à ce
moment-là. Est-ce que cela ne se concrétiserait pas dans ce
projet de loi?
On a tout simplement l'impression et c'est malheureux que
ce que le ministre de l'Agriculture nous présente, c'est un projet de
loi publicitaire, c'est un projet de loi bâclé rapidement pour
sauver l'image du ministre qui a été passablement ternie depuis
quelques semaines. Tout à l'heure, on aura l'occasiond'endiscuter. C'est
un projet de loi qu'on a permis au ministre de présenter en lui disant,
probablement: Si cela peut donner l'impression que des problèmes seront
résolus, qu'il s'agisse des abattoirs qui font le commerce de la viande
avariée ou encore des grains de provende, on va te permettre de
présenter un projet de loi, mais il ne faudrait pas s'attendre à
ce qu'on donne trop de pouvoirs à cette société.
M. le Président, c'est exactement ce qu'on constate.
Malgré le fait que ce projet de loi énonce un très grand
nombre de principes généraux sur lesquels nous devons être
d'accord, nous constatons par ailleurs que ce projet de loi est très
limitatif, que ce projet de loi ne prévoit pas de moyens concrets pour
réaliser ces objectifs généraux.
Le ministre de l'Agriculture est pour la vertu et nous aussi. On va
être obligé de voter pour un tel projet de loi. Mais nous disons
qu'il s'agit, encore une fois, d'un projet de loi pour sauver la face du
ministre
de l'Agriculture, d'un projet de loi qui ne veut que protéger
l'image de ce gouvernement, d'un projet de loi de façade, d'un projet de
loi trornpe-l'oeil. J'aurais aimé, parce que nous avions, à
plusieurs reprises, demandé l'établissement d'une telle
société, j'aurais aimé dire, pour une fois, au ministre de
l'Agriculture qu'il avait enfin un excellent projet de loi, qu'il avait un
projet de loi qui allait permettre aux Québécois, comme
collectivité québécoise, de s'intég rerà
l'intérieur d'un secteur où on est absent, malheureusement, d'un
secteur où l'on contrôle le marché, mais d'un secteur
où on ne représente, où on n'existe que pour 30% dans
l'économie agro-alimentaire québécoise.
Encore une fois, je dois dire au ministre qu'il a manqué son
coup. Je dois dire au ministre que cette loi représente exactement ce
qu'il est au conseil des ministres, c'est-à-dire un ministre très
faible, un ministre qui est dans l'impuissance de pouvoir obtenir des
crédits, des budgets satisfaisants, un ministre pour qui on a de la
méfiance, en qui on a perdu confiance. Je trouve que c'est malheureux,
non seulement pour les producteurs québécois, pour les
agriculteurs québécois, mais cela va être malheureux pour
l'ensemble de l'économie québécoisequi, normalement,
aurait besoin d'un tel projet de loi, les objectifs généraux
qu'on trace à l'article 3 de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: M. le Président, ce projet de loi no 22, Loi
constituant la Société québécoise d'initiative
agroalimentaire vient s'ajouter...
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre!
M. Roy: Le député ferait peut-être aussi bien
de retourner dans le petit appartement où il n'y a pas de numéro
à la porte.
M. Marchand: M. le Président, je voudrais dire au
député que j'étais aux institutions financières
tout l'après-midi.
M. Roy:... au lieu de revenir interrompre ses collègues.
M. le Président, est-ce que j'ai la parole?
Le Vice-Président (M. Blank): Oui.
M. Roy: Est-ce qu'on peut vous demander de rappeler nos
collègues à l'ordre?
Le Vlce-Présldent(M. Blank): J'ai rappelée l'ordre.
C'était tranquille jusqu'à ce que vous commenciez à parler
d'affaires personnelles.
M. Roy: M. le Président, j'ai l'intention de
continuer.
Le Vice-Président (M. Blank): Vous aurez des
réponses.
M. Roy: S'ils veulent intervenir dans le débat,
qu'ilsfassent comme nous, comme mon collègue de Saguenay et
moi-même avons fait, qu'ils demandent la parole et ils auront le droit
d'intervenir. C'est cela, M. le Président, je vous demande une
directive.
Le Vice-Président (M. Blank): Si vous ne faites pas
d'attaque personnelle, vous n'aurez pas de réponse.
M. Roy: Est-ce que je peux intervenir tranquille?
M. le Président, je ne fais pas d'attaque personnelle, mais je ne
me laisserai pas marcher sur les pieds par des gens qui passent leur ternps
à intervenir pour essayer de prolonger nos travaux parlementaires.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, s'il vous
plaît!
A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Roy: Oui!
M. Marchand: Est-ce qu'il y a une autorité...
M. Roy: II y en a qui commencent à se cacher.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je demande au député de Laurier, s'il vous
plaît...
M. Lessard: Vous pouvez en expulser des députés
libéraux aussi.
Le Vice-Président (M. Blank): Cela arrivera. Le
député de Beauce-Sud sur le bill 22.
M. Roy: M. le Président, sur le bill 22, je disais que le
ministre de l'Agriculture veut se donner, lui aussi, par l'entremise du projet
de loi no 22, un organisme que d'autres ministères se sont donné
pour accomplir leur mandat. Comme ils nous l'ont répété
à quelques occasions je me réfère à leurs
propos c'est pour être capables de mieux jouer leur
rôle.
Or, il ne fait aucun doute que la fondation de cette
société québécoise d'initiative agroalimentaire est
le pendant de REXFOR, pour le ministère des Terres et Forêts, le
pendant de SOQUEM et de SOQUIP pour le ministère des Richesses
naturelles, le pendant de la SDI et de la SGF pour le ministère de
l'Industrie et du Commerce, le pendant, en quelque sorte, de SIDBEC dans le cas
du ministère des Finances. Elle vient s'ajouter à huit organismes
qui sont déjà sous la juridiction du ministre de
l'Agriculture.
Parmi ces organismes, il y a l'Office du crédit agricole du
Québec, la Raffinerie de sucre du Québec, la Régie de
l'assurance-récolte, la Régie des marchés agricoles du
Québec, le comité consultatif de la Régie de
l'assurance-récolte, le comité consultatif de la Régie des
marchés agricoles, le comité de surveillance des étalons
cela, je ne m'adresse à personne le comité de
recherche agricole.
Il s'agit du neuvième organisme sous la juridic-
tion du ministre de l'Agriculture. Si je me réfère aux
notes explicatives contenues dans ce projet de loi, on dit que la
société a pour objet "de favoriser l'implantation, la
modernisation, l'expansion, le développement, la consolidation ou le
regroupement des industries du secteur alimentaire; b), de participer ou
d'intervenir dans la production, la transformation, le conditionnement et la
commercialisation de tout produit relié au secteur agricole ou
alimentaire ou aux pêcheries commerciales. "
Ce projet de loi donne au gouvernement le d roit de tout faire, ainsi
que la permission de ne rien faire, parce qu'il n'y a rien d'obligatoire dans
ce projet de loi. La permission de tout faire, mais aucune obligation de faire
quelque chose. Grand projet de loi-cadre, aux multiples espoirs, mais on peut
déjà s'attendre à de bien grandes déceptions. Si on
se réfère aux autres organismes gouvernementaux qui existent dans
les autres ministères, on doit dire que la majorité d'entre eux
n'a pas rendu les services, actuellement, que le Québec et les
Québécois auraient été en droit d'attendre de ces
organismes.
Administration déficitaire, officiers nommés par
favoritisme politique pour placer les amis du régime, tolérance
à l'endroit de certaines décisions d'ordre administratif,
inefficacité, absence de rendement, etc.; c'est la
caractéristique qu'on retrouve dans à peu près toutes les
sociétés paragouvernementales. Dans le domaine agricole,
actuellement, le ministre n'a pas de programme particulier à offrir,
mais il se donne un grand cadre dans lequel il pourra tout faire, intervenir
dans tous les domaines.
On sait qu'actuellement la tendance du gouvernement est d'utiliser les
sociétés para gouvernementales pour éliminer les petites
entreprises, éliminer les entreprises possédées et
dirigées par les Québécois", de façon à
créer, comme on dit, une certaine concurrence aux grandes
sociétés multinationales, alors qu'en réalité on
conclut des accords avec les sociétés multinationales.
Ceci est la garantie de succès des sociétés
multinationales parce que les sociétés paragouvernementales
dirigés et administrées par le Québec, à cause
justement de toute cette dépendance que nous avons vis-à-vis du
grand capital extérieur et vis-à-vis des grandes
sociétés multinationales font qu'on accroît notre
dépendance en dépossédant nos Québécois de
leurs moyens, de leurs industries et de leurs entreprises.
M. le Président, je suisen train de me demander, à ce
moment-ci, si, demain, le gouvernement provincial ne sera pas propriétai
re de grandes usines laitières. Je suis en train de me le demander. Le
ministre me fait signe que oui. Cela veut dire qu'il peut aller là, le
ministre: Etre propriétaire, au Québec, de grandes usines
laitières, sociétés d'Etat. Le ministre, demain matin,
peut décider, à un moment donné...
Le Vice-Président (M. Blank): S'il vous plaît, le
groupe, en arrière, des cultivateurs de... Je ne veux pas nommer les
comtés mais, s'il vous plaît, donnez une chance au
député de Beauce-Sud de finir son discours.
Le député de Beauce-Sud.
M. Lacroix: Les habitants de la ville.
M. Roy: Le député des Iles-de-la-Madeleine a
raison, M. le Président.
Je disais donc que le ministre, demain matin, pourra décider de
se porter acquéreur d'abattoirs au Québec. Pas de se porter
acquéreur des trusts, non, non. On ne dérangera pas les gros, les
grandes sociétés multinationales. Elles ont une quiétude
absolue, elles ont une tranquilité totale et le ministre, nous savons
qu'il ne les dérangera pas. Mais, par exemple, on va faire en sorte de
concurrencer et d'éliminer la petite entre prise possédée
et dirigée par des Québécois, pour la remplacer par une
société d'Etat qu'on appellera la Société
québécoise d'initiative agro-alimentaire, ce qui veut dire
beaucoup de choses, comme je le disais tout à l'heure.
M. le Président...
M. Lessard: M. le Président, je soulève une
question de règlement. Depuis le début de l'intervention du
député de Beauce-Sud, on crie un peu partout et on parle un peu
partout en cette Chambre. Je pense que le député de Beauce-Sud,
comme n'importe quel autre député, a le droit de s'exprimer, et,
comme président de l'Assemblée nationale, vous avez le devoir, en
vertu de l'article 10, je pense, de faire appliquer les règlements non
seulement vis-à-vis des députés de l'Opposition mais
vis-à-vis aussi de vos collègues, députés
libéraux.
Je vous rappelle, M. le Président, l'article 26 du
règlement où on dit: "Pendant le cours des séances, les
députés prennent la place qui leur a été
désignée par le président, demeurent assis et gardent le
silence, a moins d'avoir obtenu la parole, et il s doivent éviter tout
ce qui est de nature à nuire à l'expression d'autrui et au bon
fonctionnement de l'Assemblée".
Est-ce qu'il va falloir crier à l'Assemblée nationale pour
se faire entendre? M. le Président, vous savez que cela crée,
parfois, un climat malsain quand vous ne faites pas appliquer le
règlement. Je vous invite à être un peu plus
sévère, parce que je constate que, malheureusement, lorsque
vousoccupezle fauteuil, on se permet, d'un doté de la Chambre, de crier
et de créer une situation absolument malsaine, pour nous empêcher
d'exposer, en fait, à l'Assemblée nationale, certaines
idées.
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, sur ce rappel au
règlement, je vous inviterais, avant de continuer mon intervention,
à faire une mise au point à l'Assemblée nationale et
à inviter les collègues du côté ministériel
à l'ordre. Je pense que le député de Saguenay a
été très clair. Je vous le demande. Je vous l'ai
demandé au début et vous n'avez pas été
écouté, M. le Président. Je vous demande d'intervenir.
Le Vice-Président (M. Blank): J'ai déjà fait
des demandes deux fois.
M. Roy: Je vous demande d'intervenir auprès des
collègues.
Le Vice-Président (M. Blank): Je n'ai pas besoin des
leçons du député de Beauce-Sud pour diriger la Chambre.
J'ai déjà fait mon devoir et je ferai mon devoir. Si vous voulez
continuer votre discours, continuez-le.
M. Roy: Je constate, M. le Président, que si vous
êtes intervenu, vous avez très peu d'autorité. Je le
regrette, M. le Président. Je le regrette...
Une Voix: La preuve est là.
M. Roy: La preuve... Ecoutez encore!
M. Dufour:... taire, toi.
Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre! Ce sont vos
remarques qui suscitent ces débats.
M. Lacroix: M. le Président, j'ai l'impression que de
l'autre côté, on prêche la vertu mais on pratiq ue le
vice!
Le Vice-Président (M. Blank): Le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, je reviens encore sur ce point,
surce projet de loi no 22, pourdire encore une fois je m'excuse de me
répéter que le gouvernement se donne les pouvoirs de tout
faire avec l'obligation de ne rien faire, avec aucune obligation de faire
quelque chose. M. le Président, on va créer encore une certaine
illusion dans le monde agricole, on va créer encore une certaine
illusion vis-à-vis des Québécois, vis-à-vis des
consommateurs québécois.
Le gouvernement va avoir un outil et nous ne savons pas du tout à
l'heure actuelle dans quel secteur particulier, dans quel domaine il va
l'employer et quelle est la situation que le gouvernement veut corriger. On se
crée une grande société, une grande entreprise dans
laquelle on va placer les amis du régime. Je sais que cela
déplaît à mes collègues lorsque je dis ces choses,
mais c'est vrai, on n'a qu'à regarder ailleurs. On va continuer à
placer les amis d u régime, on va faire en sorte encore que ces
sociétés manquent d'efficacité sur le plan administratif,
on facturera les déficits aux Québécois. Les millions
oui je dis bien les millions qu'on va aller investir dans cette
société, on va se dépêcher d'aller les emprunter sur
le marché de New York, aux Etats-Unis pour créer une servitude
encore davantage vis-à-vis d'une dépendance américaine. La
dépendance américaine comme telle.
Vous avez pu le constater, M. le Président, il y a tellement de
respect, on est tellement intéressé au mieux-être des
Québécois, on est tellement intéressé à ce
que le Québec se gouverne par lui-même qu'on applaudit même
lorsqu'on dit que le gouvernement provincial va être encore réduit
à aller emprunter de l'argent chez les Américains sous
prétexte de nous donner des structures administratives pour être
en mesure d'être les maîtres d'oeuvre de nos politiques en ce qui a
trait au domaine agro-alimentaire.
M. le Président, si le gouvernement était venu devant
l'Assemblée nationale avec un projet de loi précis dans un
domaine particulier de l'agro-alimentaire, avec un programme d'expansion, voire
même de consolidation qui aurait permis au Québec de se doter
d'une bonne infrastructure pour être en mesure d'aller offrir les
produits du Québec sur le marché international, dans un secteuren
particulier, un secteur pilote, avant de se lancer dans tous les domaines, on
pourrait se réjouir de ce projet de loi. Mais le discours que le
ministre a fait lors de son intervention de deuxième lecture a
été aussi vague que possible, a à peu près tout
couvert sans rien couvrir en particulier, pour dire: Le gouvernement a un outil
entre les mains qui va nous permettre de faire beaucoup.
M. le Président, on constate qu'un pays comme la France doit
à son agriculture et à son industrie alimentaire d'être le
troisième exportateur mondial. On se rend compte de ces faits, de cette
réalité et on se rend compte de toutes les possibilités
qu'il va pour trouver des marchés dans le domaine agroalimentaire, des
marchés internationaux. Mais on voit que le gouvernement du
Québec se limite, tente de contingenter la production pour satisfaire
les besoins locaux. Lorsque nous avons le bonheur de faire de l'exportation
dans un autre domaine, on permet tout de suite l'importation d'autres produits
qui viennent, en quelque sorte, annuler ce qu'on pourrait considérer
comme étant un surplus commercial, une balance commerciale favorable sur
le plan international, même sur le plan extraprovincial. M. le
Président, nous sommes loin d'en être là.
De toute façon, le gouvernement demande aujourd'hui à
l'Assemblée nationale de lui donner les moyens d'agir. Le gouvernement
demande à l'Assemblée nationale aujourd'hui d'être en
mesure de disposer de structures juridiques qui lui permettent d'intervenir. Je
n'aime pas les sociétés d'Etat, je ne les aime pas plus
aujourd'hui que jel es aimais hier. Je n'ai pas plus confiance aux
sociétés d'Etat aujourd'hui que j'en avais confiance hier et je
ne crois pas que demain j'aurai confiance aux sociétés d'Etat.
Mais, M. le Président, on ne nous accusera pas d'empêcher le
gouvernement de se donner un outil pour faire quelque chose. Je tiens à
avertir le ministre que nous allons la surveiller cette société
d'initiative agro-alimentaire québécoise. Je tiens à dire
au ministre ceci: Le ministre veut-il se donner une structure dans le but
d'éliminer les petites entreprises québécoises, dans le
but de favoriser une concentration pour faire de grosses patentes au
Québec, de façon à les éloigner davantage du point
de production et, par le fait même, d'éloigner le consommateur des
sources d'approvisionnement?
On fait faire de grands détours aux produits agro-alimentaires
dans le Québec avant qu'ils puissent atteindre la table du
consommateurquébécois. Je dis au ministre que si c'est son
intention de créer des sociétés dans le but de faire
disparaître des sociétés québécoises, des
sociétés qui sont la propriété de
québécois, la propriété de Canadiens
français, dans le but de traiter avec les grandes sociétés
multinationales et de leur garantir des approvisionnements sûrs pour leur
mise en marché à eux, comme REXFOR le fait actuellement avec les
compagnies papetières, M. le Président, ce n'est pas
un secret je me sers de cela à titre d'exemple
comme REXFOR l'a fait, dis-je, avec certaines compagnies papetières,
alors que la Société REXFOR est exemptée de droits de
coupe pour être capable d'offrir plus d'avantages aux grandes
sociétés internationales, sociétés multinationales
qui travaillent au Québec...
Je ne conteste pas le fait que certaines grandes sociétés
ont quand même des possibilités et des ressources à leur
disposition et qu'elles ont des moyens techniques de façon à
pouvoir produire des produits de qualité à des prix avantageux
dans certains cas, mais lorsque cela devient des cartel s, nous avons des
objections et lorsque ces sociétés multinationales et ces grandes
sociétés sont encouragées par des sociétés
d'Etat qui deviennent leurs pendants, je dis que nous ne marchons pas dans ce
domaine. C'est la crainte que j'exprime à ce moment-ci que cette
société d'initiative agroalimentaire ne soit qu'une illusion pour
le Québec et les Québécois et qu'elle serve de paravent ou
d'intermédiaire entre les producteurs pour tâcher d'offrir une
meilleure garantie d'approvisionnement aux grandes sociétés
d'alimentation qui sont dépendantes des grandes sociétés
multinationales.
De toute façon, M. le Président, l'avenir nous
démontrera si nous avons raison ou non. Je serais heureux, en ce qui me
concerne, de me tromper dans les propos que j'ai tenus aujourd'hui et dans les
craintes que j'ai voulu porter à l'attention du ministre. Je serais le
premier heureux de me tromper et de constater que cette société
peut fai re quelque chose de vraiment positif, qu'elle est là non pas
pour aider les multinationales, mais pour permettre a nos
Québécois, à nos entreprises québécoises de
jouer leur rôle, d'être plus dynamiques et d'être capables de
se développer dans le Québec. Je pense que c'est de cette
façon que nous pouvons réussir à atteind re un
véritable équilibre économique, être les
maîtres d'oeuvre de nos politiques économiques et être les
maîtres d'oeuvre dans nos grandes polibiques, tout court.
Le Vice-Président (M. Blank): Y a-t-il d'autres opinants?
Le ministre va exercer son droit de réplique.
Le ministre.
M. Normand Toupin
M. Toupin: Oui, M. le Président. Je voudrais seulement
pendant quelques minutes apporter certaines précisions sur ce qui fut
dit dans les discours, notamment ceux du député de Saguenay et du
député de Beauce-Sud. Je voudrais d'abord dire, au départ,
que cela fait déjà près d'un an et demi, je pense, que je
parle d'une telle initiative dans la province de Québec. Il a fallu que
j'en discute avec mes collègues, ce qui est tout à fait normal;
il a fallu aussi que j'en discute avec les principales industries
intéressées avant de connaître leur point de vue et ainsi
rédiger un projet de loi qui soit conforme au moins aux
intérêts et aux opinions de ceux qui sont dans le secteur de
l'agro-alimentaire.
J'ai retardé, avant de déposer cette loi en pre-
mière lecture, à cause de ces contacts, mais combien de fois ne
m'a-t-on pas dit dans cette Assemblée, à l'occasion de discours
sur d'autres projets de loi: Qu'est-ceque le ministre de l'Agriculture attend
pour déposer sa loi? Qu'est-ce que le ministre de l'Agriculture attend
pour nous dire si c'est vrai ou pas qu'il y aura une société
d'initiative agro-alimentaire? J'entends encore le député de
Saguenay dire: "Le ministre dit cela pour faire de la publicité, le
ministre dit cela pour essayer de démontrer qu'il a des idées
dans le secteur agricole".
Aujourd'hui, cette loi est déposée en première
lecture, on la discute en deuxième lecture et on dit: Pas bonne, ce
n'est plus bon cette loi, on devrait en penser une autre, etc. Or, M. le
Président, cette loi, telle q u'elle est rédigée, est
générale, parce que nous avons voulu nous donner la
possibilité de travailler dans tous les champs d'activité et non
pas nous limiter. Par exemple, on aurait pu inclure dans la loi, au chapitre
des activités commerciales, que la société se limitera
d'une part aux grains de provendes et, d'autre part, à l'industrie
avicole. On aurait pu écrire cela dans la loi. Là, je me serais
imposé des limites qui m'auraient empêché de régler
un problème qui se serait posé dans le secteur laitier, mais on
n'a pas fixé de limites dans cette loi. On l'a faite le plus large
possible pour que nous puissions agir sur tous les secteurs et dans tous les
domaines, tant de la transformation que de la distribution, que de la
commercialisation des produits de l'agriculture.
C'est pour cela que nous l'avons mis large comme cela. Bien sûr,
le député de Saguenay a critiqué notamment les articles 14
et 17 de cette loi. C'est une politique gouvernementale maintenant que de
contrôler les activités des organisations
pa-ragouvernementales.
Il me paraît d'une importance vitale que nous soyons, nous, au
conseil des ministres, en mesure de déterminer des objectifs à
une société que nous créons. Les articles14 et 17 disent
seulement cela. Ils disent que le lieutenant-gouverneur en conseil devra,
obligatoirement, pas pourra, mais devra obligatoirement approuver tout
programme d'investissement, mais ces programmes seront préparés
par la société. Et si elle ne prépare pas des programmes
qui correspondent aux objectifs du gouvernement, le lieutenant-gouverneur en
conseil pourra les changer. Il pourra, par la suite, les imposer à la
société et lui dire que c'est dans ce secteur que le gouvernement
veut agir, que c'est tel type d'initiatives que le gouvernement veut prendre.
Ce n'est pas de la tutelle, c'est de l'administration prévoyante. Ce
n'est pas de la tutelle pour un gouvernement que de décider ce que ses
filiales feront avec les capitaux d'ailleurs que lui-même lui a
donnés, ou lui a donné l'occasion d'avoir. C'est simplement une
politique rationnelle d'administration et d'intervention.
Lorsque nous avons discuté, il n'y a pas longtemps, des
amendements à la Loi de la Régie des marchés agricoles du
Québec, nous avons profité de l'occasion pour mettre dans la loi
les dispositions similaires à celles que nous retrouvonsdanscelle-ci, de
telle sorte que le lieutenant-gouverneuren conseil peut renverser n'importe
quand une décision que prendra la Régie des marchés
agricoles du Québec.
Ainsi, il est capable d'administrer ses politiques. C'est important,
dans les sociétés comme celle-là, au niveau d'une
politique générale du gouvernement, que nous ayons un mot
à dire, tout au moins dans les grandes orientations que doit prendre la
société.
Le gouvernement n'ira pas se mettre le nez dans les filiales de la
société. Si la société décide, demain matin,
de devenir partenaire, avec une entreprise, dans le domaine des produits
congelés, le lieutenant-gouverneur en conseil n'ira pas dire au
président de cette corporation comment faire sa mise en marché,
comment organiser ses politiques d'achat, absolument pas. Ces filiales seront
autonomes, et elles agiront en vertu des lois actuelles, mais les grandes
orientations seront dictées par le gouvernement.
Le député de Beauce-Sud parlait un peu des multinationales
et des petites entreprises. Sur les multinationales, je suis porté
à avoir un peu ses appréhensions. Il est évident que
plusieurs petites entreprises québécoises, actuellement dans le
domaine de l'agro-alimentaire, passent trop souvent aux mains des
multinationales. Quand la compagnie Québec Poultry est venue, je ne
dirai pas sur le bord de la faillite, mais a rencontré certaines
difficultés, il y avait des possibilités qu'une multinationale
puisse acheter cette entreprise. J'ai pris contact avec les entreprises
québécoises et je leur ai demandé de se mettre ensemble
pour acheter la compagnie Quebec Poultry, pour qu'elle demeure entre les mains
des Canadiensfrançais. La Coopérative
fédérée a décidé de se porter
acquéreur de cette entreprise. Si la Société d'initiative
agro-alimentaire avait existé à ce moment, et si la
Fédérée n'eut pas été capable de l'acheter,
nous serions intervenus pour conserver cette entreprise chez nous, qui touche
des producteurs agricoles et des consommateurs québécois.
Dans le domaine du lait, la création de Québec-Lait a fait
qu'on a regroupé une dizaine de petites entreprises laitières
qui, jour après jour, passaient entre les mains des multinationales.
Nous avons créé un complexe valable, capable de concurrencer.
C'est sain, dans une province comme la nôtre, qu'il y ait de la
concurrence. Il est évident que la société aura l'oeil
ouvert sur les transactions possibles de petites entreprises
québécoises, via des multinationales.
Ce qu'elle va chercher à faire surtout, c'est de les regrouper,
c'est de mettre ensemble quatre ou cinq petites entreprises, en faire un ou
deux qui soient rentables. J'apporte l'exemple du secteur des conserveries. Il
existe au Québec six ou sept petites conserveries, alors qu'on pourrait
en avoir peut-être trois, mais mieux structurées et beaucoup plus
polyvalentes. Il est nécessaire que nous ayons des conserveries au
Québec, si nous voulons développer nos productions
maraîchères. Je disais tantôt: On n'est pas capable de
vendre tous les produits maraîchers à l'état frais. Il
faut, par conséquent, les transformer et la transformation oblige
l'implantation d'usinesde transformation. Ce sera là le rôle de
cette entreprise.
Je suis persuadé que cette société rendra
d'énormes services à l'ensemble de l'agriculture
québécoise. C'est un aspect important de la politique du
gouvernement en matière de développement agricole et en
matière de développement de l'agro-alimentaire. Je sais fort bien
que le député de Saguenay ainsi que le député de
Beauce-Sud voteront en faveur de cette loi. Pour une deuxième fois, ils
appuieront un deuxième programme du gouvernement, peut-être un
troisième cet après-midi. Cela sera presque toute la politique
agricole du gouvernement qui sera approuvée par les
députés de l'Opposition en cette matière.
Il est normal, bien sûr, que le député de Saguenay
et le député de Beauce-Sud essaient de trouver des faiblesses
dans ces lois. Mais je ne soutiens pas que ces lois sont complètes. Ce
sont des lois nouvelles qui mériteront dans le temps, à
l'expérience, à l'application, d'être amendées,
renforcées pour en arriver à leur donner une meilleure structure
et, par conséquent, une meilleure performance.
Merci, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
de l'honorable ministre de l'Agriculture que le projet de loi no 22, Loi
constituant la Société québécoise d'initiative
agro-alimentaire, soit lu pour la deuxième fois est-elle adoptée?
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce bill.
Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Je fais motion pour que ce projet de loi soit
déféré à la commission parlementaire de
l'agriculture pour y être étudié article par article.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
est-elle adoptée? Adopté.
M. Bienvenue: Article no 15).
Projet de loi no 39 Deuxième lecture
Le Président suppléant (M. Gratton): L'honorable
ministre de l'Agriculture propose la deuxième lecture du projet de loi
no 39, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments.
L'honorable ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: M. le Président, je ne vodurais pas prendre
trop de temps sur ce projet de loi. Je serais plutôt porté
à utiliser à la fin mon droit de réplique; tout
dépend de ce que diront mes collègues de l'Opposition.
Je voudrais simplement soutenir que ce problème des viandes
impropres à la consommation qui aété découvert
récemment par la Commission d'enquête sur le crime organisé
m'a obligé à réviser de fond en comble les politiques et
les programmes que nous avions dans ce secteur.
Je n'ai pas attendu que la Commission d'enquête sur le crime
organisé fasse son rapport final avant de poser des gestes. La
santé du public étant mise en cause, il me paraissait urgent et
important de poser des gestes dans l'immédiat. Les gestes que nous avons
posés et les décisions que nous avons prises sont
déjà connus du public. J'ai annoncé la semaine
dernière que de nouveaux règlements seront mis en vigueur
incessamment. Dans ces règlements, il sera interdit à toute
personne qui ne détient pas un permis de transformer desviandes au
Québec et de les abattre plus particulièrement. Par
conséquent, toute personne qui aura à oeuvrer dans ce secteur
dans l'avenir devra obtenir l'autorisation du ministère de l'Agriculture
ainsi que ceux qui seront appelés à commercialiser les viandes
impropres à la consommation: les animaux morts ou malades pour lesquels
iI existe des marchés, bien sur, et qui rapportent un minimum de revenu
aux agriculteurs. Je dis bien un minimum car c'est vraiment infime en termes de
revenu, mais cela répond à un besoin de notre
société actuellement, notamment en matière de fertilisants
et en matière d'aliments pour les petits animaux.
Ces derniers seront tenus de se procurer un permis et toute personne,
qui travaillera pour ces entreprises qui détiendront un permis, devra
nous faire parvenir son nom et son adresse et les activités auxquelles
elle sera rattachée. Ainsi, on pourra suivre toutes les personnes qui,
dans l'avenir, auront la responsabilité de cueillir, d'entreposer, de
détruire ou de transformer par la suite, pour des fins
spécifiques, des viandes impropres à la consommation.
Je termine par ceci, M. le Président. La décision du
ministère de l'Agriculture là-dessus est ferme. Elle est
définitive. Toute personne, dans l'avenir, qui prendra le risque de
mettre des viandes impropres à la consommation sur le marché,
sera tenue de payer des amendes fortes. Si ces amendes ne sont pas
payées, je n'hésiterai pas à demander au ministre de la
Justice d'appliquer la Loi sur les poursuites sommaires, qui va jusqu'à
l'emprisonnement.
Le Président suppléant (M. Gratton): Le
député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. Lessard: M. le Président, le ministre revient
après près de onze mois avec certaines modifications
mineuresà la loi qui avait été présentée au
mois de juillet dernier. C'était la loi 31 qui s'intitulait Loi sur les
produits agricoles et les aliments.
Le ministre nous propose certaines modifications dans le projet de loi
no 39. Je dis que ce sont des modifications mineures par rapport à
l'ensemble de la loi, mais elles sont quand même assez importantes. La
modification, je pense qui est importante là-dedans, concerne les
amendes. En effet, dans l'ancienne loi, la loi 31 adoptée et
sanctionnée le 31 juillet 1974, on prévoyait, pour une
première infraction, une amende d'au moins $25 et d'au plus $500, dans
le cas d'un individu, et d'au moins $50 et d'au plus $1, 000, dans le cas d'une
corporation; pour toute récidive dans les deux ans, une amende de $3,
000, dans le cas d'un individu, et de $5, 000, dans le cas d'une corporation.
On constate maintenant, après des profits considérables qu'ont
dû faire certaines compagnies, que ces amendes étaient absolument
insuffisantes. Le projet de loi no 39 vient corriger un peu cette situation, en
haussant les amendes de façon assez importante, puisque, pour une
première infraction, l'amende prévue sera d'au moins $1, 000 et
d'au plus $5, 000 et, à défaut de paiement de l'amende et des
frais, et, pour toute récidive dans les deux ans, d'une amende d'au
moins $3, 000 et d'au plus $10, 000.
Mais je souligne, M. le Président, qu'à l'exception de
cette modification importante dans le projet de loi il n'y a pas tellement de
différence entre le projet de loi no 31, adopté en juillet
dernier, et le projet de loi qui nous est présenté actuellement
par le ministre de l'Agriculture. La question fondamentale qui se pose
actuellement, étant donné la situation que nous connaissons, est
la suivante: Comment se fait-il que le ministre de l'Agriculture ait pris onze
mois avant de nous présenter et de mettre en application son projet de
loi? Non seulement onze mois, mais le projet de loi n'est pas encore en
application.
Je vous dis immédiatement, M. le Président, que je serai
très prudent dans mon intervention et je m'abstiendrai, comme le stipule
notre règlement, à l'article 99, de faire référence
à la Commission d'enquête sur le crime organisé, puisque
cet article m'interdit de parler d'un problème qui relève d'une
enquête d'une commission judiciaire et dont la discussion peut nuire
à un ou plusieurs individus. C'est quand même important de bien
préciser que l'intervention est interditesi ça peut nuireà
un ou plusieurs individus; cela ne m'empêche pas, quand même, de
parler de la Commission d'enquête sur le crime organisé. Je m'en
tiendrai donc aux déclarations du ministre et à sa conduite
politique, en ce qui concerne la non-application de la loi actuelle sur les
produits agricoles et les aliments, et sur l'opportunité qu'il a
maintenant de la modifier.
Depuis quelques semaines, nous avons posé plusieurs questions au
ministre de l'Agriculture concernant le commerce de la viande avariée.
Le ministre a toujours tenté de laisser entendre qu'il n'avait pas les
moyens nécessaires d'agir. Le ministre nous a toujours dit qu'il
attendait des preuves concrètes.
Malgré ses dénégations de vierge offensée,
le ministre connaissait bien la situation. Or, le ministre n'a rien fait pour
la régler. Le ministre a prétendu qu'il n'avait pas les pouvoirs
nécessaires pour agir. Or, le ministre avait tous les moyens pour
empêcher le commerce de la viande avariée et il n'a rien fait.
Pourquoi?
Quant au projet de loi actuel, rien ne nous assure qu'il ne
connaîtra pas le même sort que les autresqui l'ont
précédé. Jusqu'à présent, le ministre et ses
inspecteurs n'ont pas fait leur travail et n'ont pas appliqué la loi.
Feront-ils respecter le nouveau projet de loi? Et pour combien de temps?
Premier point, le ministre connaissait la situation. A moins
d'être sourd comme un pot et aveugle comme une taupe, en plus
d'être amnésique, le mi-
nistre était au courant de la situation. Ces histoires de
charognards existent depuis longtemps au Québec. Elles sont connuesde
tout le monde, dans lesmilieux ruraux et dans le commerce de la viande. Et le
ministre de l'Agriculture nous dit qu'il n'en a pas été saisi.
Pourtant, dans la Presse du 30 mai 1975, on lit ce qui suit:
"L'ex-présidente et actuelle secrétaire de l'Association de la
protection des consommateurs de Trois-Rivières, Mme Jacques Valentine,
déclarait, au cours d'une conversation téléphonique, que
son organisme avait mené, dès juillet 1973, une enquête sur
le commerce de la viande. Elle signale que cinq ans de pression auprès
du ministre de l'Agriculture n'ont pas changé la situation. On a
présenté, dit-elle, des mémoires, des résolutions.
On possède même un dossier rempli de coupures de journaux faisant
état de saisies de viande dans les environs. Mais cela restait
là, cela recommençait quand même. On n'obtenait jamais de
réponse. Mme Valentine ajoute même qu'après trois entrevues
avec le ministre Toupin, au cours desquelles il offrait sa collaboration, ce
dernier aurait fait état des difficultés rencontrées au
sein du cabinet des ministres pour faire approuver un projet de loi visant
à rendre obligatoire l'inspection gouvernementale dans tous les
abattoirs. "Mme Valentine soutient que M. Toupin déclarait que six ou
huit ministres s'opposaient à cette loi. "
Plus que ça, le 21 août 1973, selon une
dépêche de la Presse canadienne, qui s'intitulecomme suit "le
ministre de l'Agriculture aurait déclaré: "La charogne, cela va
finir. " En effet, en provenance du Cap-de-la-Madeleine, nous lisons ceci en ce
qui concerne cette information publiée dans le Journal de Québec,
du 21 août 1973: "Le ministre de l'Agriculture du Québec, M.
Normand Toupin, a déclaré, hier, dans une interview à son
bureau du Cap-de-la-Madeleine, qu'il semble bien que le problème de la
viande impropre à la consommation sera réglé demain, lors
de la réunion du conseil des ministresdu gouvernement Bourassa. "Il a
ajouté qu'une nouvelle réglementation était prête et
qu'elle donnera au gouvernement du Québec le moyen d'exercer une
complète autorité sur la qualité des animaux allant aux
abattoirs et également sur la qualité de la viande que l'on
vendra. " Journal de Québec, 21 août 1973. Ceci, M. le
Président, en 1973.
Le 23 mai dernier, le ministre déclarait qu'il avait
commencé à avoir des doutes il y a trois ou quatre mois, selon la
Presse du 24 mai 1975. Pourtant, le ministre avait été averti
bien avant et lui-même avait dit qu'il allait régler le
problème du commerce de la charogne.
Le 27 avril 1973, un article du journal La Presse titrait en gros:
"Trois gangs écoulent 25 tonnes de viande avariée par semaine".
Tout continue comme avant; le ministre n'est jamais intervenu.
Le 31 octobre 1974, en première page de la Tribune, on faisait
état d'une déclaration choc de M. Guy Gauvin, qui est
président du Syndicat des producteurs de boeuf de L'Estrie, directeur
national des producteurs de boeuf du Canada, vice-président de
l'Association des races pures du Québec, président de
l'Association charolaisedu Québec, représentant pour l'Est du
Canada de l'Association charolaise canadienne. Le journal disait ceci:
"Poursuivant son analyse, M. Gauvin a dit qu'il fallait maintenant, compte tenu
de la situation actuelle, que le grand public apprenne certaines choses qui lui
étaient cachées, jusqu'à maintenant, que les gens en place
toléraient. Une de ces choses est l'emprise exercée par la
pègre montréalaise sur la manipulation, à quelque
degré que ce soit, de toute la viande qui passe par la
métropole".
Voilà, M. le Président, une déclaration d'un homme
responsable. Le ministre, naturellement, n'a pas entendu parler de cette
déclaration. llyaquelquesjours, M. Jules Pépin,
présidentdu conseil d'administration de la firme Jean Demers Inc., qui
exploite un abattoir de chevaux et une conserverie d'aliments pour chiens et
chats, a déclaré qu'à plusieurs reprises, au cours des
années, il s'était plaint aux représentants
gouvernementaux de tous les paliers que les récupérateurs
d'animaux morts ou malades qui l'approvisionnaient ne lui fournissaient que les
mauvaises parties de viande. Il a souvent fait part aux autorités
concernés de ses doutes quant à l'utilisation des belles parties
d'animaux qu'il n'arrivait pas à se procurer. Selon le témoin,
chaque fois qu'il a fait des représentations auprès des services
gouvernementaux, il abénéficié un temps d'un accroissement
important de son approvisionnement, mais, par la suite, rien ne se faisait.
Le ministre de l'Agriculture nous dit qu'il n'était pas au
courant.
Le 5 mai 1967, dans un débat avec le ministre de la Justice
d'alors, M. Jean-Jacques Bertrand, M. Claude Wagner lui rappelait
jusqu'à quel point la pègre s'est infiltrée à
l'Expo. "Un membre connu de la pègre opère un racket de
protection dans la viande". Je cite textuellement M. Wagner: "II s'appelle,
selon mes renseignements, William O'Bront et il aurait la concession de la
viande à l'Expo".
Le ministre n'a qu'à vérifier. Le tout en resta là
et le monde entier goûta à la charogne "made in Québec". Le
ministre n'en a pas entendu parler.
Le 1er mars 1962, M. Gilles Constantineau, en première page du
Nouveau Journal, écrivait: "Les producteurs laitiers de la rive sud et
des Cantons de l'Est n'hésite pas à livrer leurs vaches mortes ou
malades au marché de la consommation de Montréal, dans des
conditions épouvantablement écoeurantes, 25 à 30 tonnes
par semaine". Le ministre n'en a pas entendu parler.
L'Association des consommateurs de l'époque répliquait:
"Nous savons que de la viande d'animaux morts de tuberculose ou d'autres
maladies, ou morts noyés ou des suites d'un accident, est mise en vente
grâce à des systèmes illégaux de distribution dans
le Québec".
Cela a été publié dans le Nouveau Journal, le 13
janvier 1962. Le ministre n'en a pas entendu parler.
C'est encore en 1962 que dans une résolution prophétique,
l'Union des ouvriers de salaison déclaraient ceci: "Les ouvriers de
salaisons n'ont pas confiance du tout dans le genre d'inspection que font les
gouvernements des provinces dans le domaine de l'alimentation et surtout dans
le traitement des viandes. Un représentant syndical a même
ajouté
qu'il ne mangeait jamais de sous-produits de la viande qui ne portaient
pas le sceau fédéral tant il se méfiait de la
qualité et de l'hygiène de ces produits fabriqués souvent
dans des endroits malpropres et au mépris de toute propreté
élémentaire. " Le Nouveau Journal, 30 novembre 1962. Le ministre
n'en a pas entendu parler.
De régime rouge en régime bleu ou de bleu en rouge, rien n
'a changé depuis 1969, et les Québécois ont toujours
mangé de la charogne. Ou plutôt, si, il y a quelque chose de
changé. En 1962, le Québec était encore exportateur de
charogne vers l'Ontario et les Etats-Unis; maintenant que les contrôles
se sont resserrés partout, sauf ici, le Québec est devenu
importateur de charogne. Soyons sérieux.
Malgré toutes ces dénégations de politiciens pris
au prège et qui ne convainquent personne, le ministre était
très certainement au courant de la situation. Tout comme il ne disait
pas la vérité lors-qu'en commission récemment, il nous
déclarait, suite à une question que j'avais posée à
ce moment-là, que la Federal Packing, c'était "Approuvé
Canada". Mensonge caractérisé ou simple erreur? Une erreur est
difficilement acceptable ou concevable quand on sait que la Federal Packing
produisait à elle seule plus de 50% de toutes les viandes de charcuterie
produites sous surveillance provinciale. Si le ministre l'ignorait, depuis cinq
ans qu'il occupe son poste, on peut se poser des questions sur sa
compétence. De toute façon, comme l'a titré justement
l'éditorial de la Presse du 30 mai: "M. Toupin dit n'importe quoi. "
C'est que le premier ministre détient sur ses collègues. Le
premier ministre dit n'importe quoi et ses ministres disent aussi n'importe
quoi.
Le ministre avait tous les pouvoirs pour agir. Chaque fois que l'actuel
ministre de l'Agriculture est pris les culottes baissées et c'est
fréquent de ce temps-ci il est toujours en attente de quelque
nouvelle loi ou de quelque réglementation qui viendra tout régler
sur le papier. Or, nous avons affirmé et nous continuerons d'affirmer
que le ministre avait tous les pouvoirs nécessaires, et les autres
ministres de l'Agriculture qui l'ont précédé
également. Seulement, il ne semble pas qu'il y ait songé, qu'il
ait songé à les faire appliquer. Je n'ai pas besoin de reprendre
l'intervention que j'ai faite en commission parlementaire lors de la discussion
des crédits. Il y avait même plus que cela. Il y avait une loi
concernant l'hygiène publique, qu'on appelle Loi de l'hygiène
publique, chapitre 161 des Statuts refondus du Québec 1964, loi qui n'a
jamais été appliquée, M. le Président, et qui
permettait au ministre de la Santé d'avoir un contrôle sur la
viande avariée.
Mais que pouvons-nous attendre d'un gouvernement lui-même
avarié? Comme l'a fait remarquer l'Association des consommateurs du
Canada, section Québec: "II est inacceptable qu'un gouvernement et son
ministre de l'Agriculture n'assument pas leurs responsabilités. Une loi
existe, qui n'est pas appliquée. "Les règlements qui y sont
rattachés sont galvaudés au plus grand mépris de la
santé desQuébécois. " Journal Le Jour, 6 juin 1975.
Les déclarations optimistes que nous servent actuellement le
ministre de l'Agriculture et le premier ministre n'ont rien de différent
de celles qu'on a servies aux consommateurs en 1962, en 1967 et en 1973.
"Fiez-vous à votre boucher", dit le ministre, faute de pouvoir vous fier
à votre ministre, devrait-il ajouter. Et M. Bourassa d'affirmer: "Nous
prenons toutes les mesures, y compris les plus énergiques, pour nous
assurer que la population q uébécoise est bien
protégée". 25 mai 1975, déclaration de M. Bourassa
à l'Assemblée nationale. Comme le disait le Dr Couturier en 1962
écoutez ça: "Nous prenons toutes les mesures pour
protéger la santé du public. Le gouvernement fait l'impossible
pour empêcher le commerce de la viande gâtée. "
Publié dans le Nouveau Journal.
Quelle assurance les Québécois peuvent-ils avoir que la
loi qui nous est présentée aujourd'hui sera appliquée
alors que toutes les précédentes ne l'ont pas été?
Nous savons fort bien, comme l'Association des consommateurs l'a aussi fait
remarquer, le risque d'oeuvrer au sein du Parti libéral, qui a beaucoup
d'intérêts à protéger avant ceux des
consommateurs.
D'autant plus, s'il n'y avait pas eu le coup du gouvernement
fédéral via l'enquête sur le crime organisé,
l'intervention à Federal Packing, il n'y aurait pas eu de projet de loi
no 39. Les règlements resteraient sur les tablettes, comme c'est le cas
depuis 1970 et comme cela a été particulièrement le cas
depuis juillet 1974.
Alors, malgré le fait que le ministre, comme à son
habitude, cherche à ne pas connaître, à ne pas donner
à ce problème la dimension politique et cherche à noyer la
charogne, il s'agit bel et bien d'un problème d'ordre politique. Les
quatre autos qui attendaient un inspecteur du ministère, à son
domicile, qui se serait fait casser les jambes et aurait fait renverser son
automobile dans le fossé, c'est de la politique, telle que l'exprimait
le secrétaire particulier, sans l'accord du ministre, M. Gilles
Biron.
Il ne semble pas que l'inspecteur ait été fortement
appuyé des autorités. En tout cas, le ministre a tout au plus
reconnu avoir eu vent de certaines rumeurs sur les difficultés qu'ont pu
rencontrer ces inspecteurs. Nous n'avons jamais eu aucune plainte, disait-il,
selon la Presse du 24 mai 1975.
Le ministre de l'Agriculture s'imagine que nous allons le croire! En
guise de conclusion, j'aimerais citer un article paru dans le journal Le
Nouvelliste du 4 juin 1975, justement le journal qui couvre la région du
ministre. Se pourrait-il qu'on l'y connaisse davantage dans cette
région? Ce journal dit ceci: "A notre humble avis, et d'aucuns partagent
cette idée, il s'agit avant tout d'une affaire de patronage et de
rentabilité électorale. D'ailleurs, un ministre, de passage dans
la région, disait, à la blague, il y a deux ans: On ne peut pas
faire cela, plusieurs sont de bons libéraux et d'anciens "bleus"
convertis. Les réticences, voire les objections soulevées, tant
au sein de la députation que du cabinet, ne font que confirmer nos
dires. L'ex-présidente de l'Association des consommateurs, Mme
Valentine, a d'ailleurs obtenu ce genre de réponse de la part d'un autre
ministre qui a tenté de nier ces faits, la semaine dernière.
"Un des personnages les plus opposés à une loi avec des
dents est nul autre que le célèbre député
Louis-Plilippe Lacroix, organisateur d'élections de premier ordre. On
n'a qu'à consulter les journaux de 1970 à 1974 pour constater les
embûches dont a été victime le ministre Toupin, et
l'opposition du député Lacroix, ci-devant whip en chef du parti.
A ce sujet, un informateur qui a fait sursauter tout le monde é-crit
encore ce journal à la Commission d'enquête sur le crime
organisé, nous dévoilait des chiffres très significatifs
sur le commerce de la charogne. Le Québec compte entre 900, 000 et un
million de têtes de bétail, et le taux de mortalité
naturelle est de l'ordre de 2. 3%.
C'est donc dire environ 20, 000 animaux qui devraient être
dirigés vers les abattoirs où l'on fabrique de la viande pour les
chiens et les chats. Cela devrait donner cinq millions de livres à ce
genre de commerce. "Or, il appert que les statistiques du gouvernement sont de
beaucoup inférieures à la réalité, en l'occurrence
en deça de deux millions de livres enregistrées dans les dossiers
du ministère de l'Agriculture. Le reste, c'est vous et moi qui l'avons
sans doute bouffé, et cette triste situation continuera tant et aussi
longtemps que le gouvernement persistera à accorder plus d'importance
à l'électoratisme qu'à la santé des
Québécois". Québec, juin 1975.
Je dis que, naturellement, nous n'avons pas le choix: nous devrons
appuyer ce projet de loi, mais nous nous demandons quel sera le sort de ce
projet de loi comme des règlements. C'est la question fondamentale.
Esf-ce que ce projet de loi subira le même sort que les autres projets de
loi qui ont déjà été présentés
à cette Assemblée nationale? Si c'est le cas, cela ne vaudrait
pas la peine de présenter un tel projet de loi. L'important, c'est
d'avoir un ministre qui prend ses responsabilités, un ministre qui n'est
pas soumis au patronage et qui ne sera pas soumis aux caisses
électorales. Merci.
M. Roy: M. le Président, puis-je proposer la suspension du
débat?
M. Bienvenue: Le député de Beauce-Sud aurait la
parole. Nous allons suspendre le débat qui va reprendre à vingt
heures quinze. Nous allons suspendre le débat pour permettre au ministre
des Travaux publics de se lever sur l'article 9).
M. Roy: Je n'ai pas proposé la suspension de la Chambre,
j'ai proposé la suspension du débat.
M. Bienvenue: Vous ne pouvez proposer l'ajournement du
débat... Je m'excuse, mais enfin, merci, M. le Secrétaire, ne
discutons pas là-dessus. Ce qui est important, plus que les mots, c'est
qu'à vingt heures quinze, le député de Beauce-Sud aura la
parole sur ce projet de loi.
Article 9), M. le Président.
Projet de loi no 7 Deuxième lecture
Le Président suppléant (M. Gratton): L'hono- rable
ministre des Travaux publics propose la deuxième lecture du projet de
loi no 7, Loi modifiant la Loi de l'expropriation.
M. Mailloux: M. le Président, je pense que le projet de
loi en question n'amène pas de grands discours en deuxième
lecture. D'ailleurs, c'est un projet de loi tellement technique et juridique
que le député de Charlevoix serait probablement profane en la
matière.
De toute façon, ayant discuté cet après-midi avec
le leader de l'Opposition, le député de Maisonneuve, de
même qu'avec les députés de Chicoutimi et de Beauce-Sud, je
voudrais proposer, si cela est accepté, l'adoption en deuxième
lecture du projet de loi qui sera déféré à une
commission élue ultérieurement pour l'étude article par
article, où on pourra discuter du projet.
M. Burns: D'accord, M. le Président. Nous sommes
prêts à adopter la deuxième lecture et nous
amènerons en commission les points de vue que nous avons sur ce projet
de loi.
M. Roy: D'accord, M. le Président. Egalement, si nous
avons des observations à faire d'une façon particulière,
qu'on nous permette de les faire d'entreprendre l'étude article par
article, en commission élue.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
de deuxième lecture est-elle adoptée?
M. Burns: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Je fais motion pour que ce projet de loi no 7 soit
déféré à la commission élue des transports
pour y être étudié ultérieurement article par
article.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
est-elle adoptée?
M. Burns: Adopté.
Le Président suppléant (M. Gratton):
Adopté.
M. Bienvenue: M. le Président, en proposant la suspension
des travaux de la Chambre jusqu'à huit heures quinze ce soir, je
rappelle, pour rassurer mon ami le député de Beauce-Sud, que nous
reprendrons immédiatement l'étude du projet de loi no 39 du
ministre de l'Agriculture. Il aura la parole et nous lui donnerons le temps de
s'exprimer.
Le Président suppléant (M. Gratton): Cette motion
de suspension des travaux est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Président suppléant (M. Gratton): Adopté.
L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à vingt heures quinze.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
Reprise de la séance à 20 h 19
Projet de loi no 39 Deuxième lecture
(suite)
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: J'apprécie toujours les applaudissements au
début, M. le Président, parce qu'à la fin, je n'en ai
jamais.
Or, M. le Président, avant l'ajournement de nos travaux...
M. Harvey (Charlesbourg): Une question de règlement.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Question de
règlement, l'honorable député de Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): Question de règlement. Etant
donné que le député de Beauce-Sud a la parole, je me
demande s'il ne représente pas en même temps le PQ, puisqu'il n'y
a aucun député PQ, aucun créditiste, aucun
député de l'Union nationale...
Une Voix: Aucune Opposition.
M. Harvey (Charlesbourg):... aucune Opposition, il est le
seul.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. Roy: Je représente l'Opposition, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. Roy: M. le Président, ces honorables collègues
n'ont qu'à prendre le soin d'être bien patients et
d'écouter ce que j'ai à dire. Je n'ai pas l'intention de
gaspiller mon temps de parole pour intervenir et faire un débat qui n'a
aucun rapport avec le présent projet de loi.
M. le Président, le projet de loi qui est actuellement à
l'étude fait suite à la dénonciation, et aux
révélations révélations, ce n'est pas peu
dire qui ont été faites par la fameuse commission
d'enquête sur le crime organisé, la CECO, qui ne nous a pas
appris, mais qui nous a permis de constater qu'encore aujourd'hui, au
Québec, il se fait un commerce de viande avariée, que tout le
monde appelle de la charogne.
On sait, M. le Président, que ce commerce s'est pratiqué
sur une haute échelle et a permis à un certain nombre d'individ
us de faire des affaires d'or. Si ces gens ont pu faire des affaires d'or,
c'est parce que les lois qui avaient été adoptées par le
Parlement de Québec n'ont pas été appliq uées, que
ceux qui avaient le mandat de faire respecter ces lois ont fermé les
yeux, que les inspecteurs ne se sont pas
souciés de faire leur devoir et que ceux qui avaient à les
diriger, ceux qui avaient a leur demander des comptes n'ont pas fait leur
devoir non plus.
M. le Président, lorsque je vois que le ministre de
l'Agriculture, qui est titulaire de ce ministère depuis cinq ans, a
toléré un tel état de choses au Québec, et que
c'est ce même ministère, aujourd'hui, qui présente une loi
devant l'Assemblée nationale, le projet de loi no 39, je me demande s'il
faut en rire ou s'il faut en pleurer.
Je l'avais dit, M. le Président, qu'ils n'applaudiraient pas
après que j'aurais commencé mon intervention.
M. le Président, comment ce ministre, actuellement, encore
titulaire du ministère de l'Agriculture, qui s'est fermé lee yeux
sur la situation, pourra-t-il faire appliquer la loi qu'il a
déposée devant l'Assemblée nationale et que nous sommes
appelés à vote ren deuxième lecture ou, du moins, que nous
serons appelés à voter en deuxième lecture ce soir? M. le
Président, je me demande sérieusement si on n'est pas encore en
train de créer une illusion aux Québécois, illusion qui a
causé un tort énorme à la population du Québec.
M. le Président, le ministre de l'Agriculture a
déclaré, en fin de semaine, que son ministère savait
depuis dix ans qu'il se faisait un commerce de viande avariée au
Québec. J'aimerais rappeler au ministre que plusieurs journaux, que je
ne nommerai pas, ont fait des rapports et des recherches, ont publié des
révélations. Dès 1943, alors que nous avions encore un
gouvernement libéral à cette époque, on peut lire ceci:
Viandes grignotées par les rats, du cheval pour du boeuf, du chat pour
du lapin. M. le Président, c'est presque antiparlementaire. Je n'ose
même plus continuer tellement c'est épouvantable parce que je
respecte les gensqui liront le journal des Débats.
C'est pour vous dire, M. le Président, qu'il est gênant de
définir, dans des termes bien français, d'expliquer la situation
dans laquelle les consommateurs du Québec ont été
placés devant ce commerce épouvantable qu'on a fait à leur
détriment et à leur insu. En 1962...
M. Côté:... en manger...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Roy: Je voudrais rappeler à mes honorables
collègues que je n'ai pas l'intention d'intervenir, comme avant le
souper, pour demander des rappels à l'ordre. Ils pourront m'enterrer
s'ils le veulent. Je les comprends, M. le Président. Malgré que
je ne sympathise pas avec eux, je comprends que c'est fatigant et que c'est
gênant pour eux.
Le gérant général de la Coopérative
fédérée déclare, dans le journal Le Devoir du 19
février 1962: "Un pourcentage effarant de viande impropre est
livrée au consommateur. " Ce n'est pas en 1975, ce n'est pas en 1971, ce
n'est pas en 1970, c'est en 1962. "Non seulement des millions de livres de
viande sont vendues au consommateur sans avoir été
inspectées mais un pourcentage effarant de viande impropre est
livrée à la consommation, a déclaré samedi le
gérant général de la division des viandes de la
Coopérative fédérée de Québec, M. Hector
Nadeau.
Cela remonte au 19 février 1962, pour rafraîchir la
mémoire de nos collègues. "L'enquête concernant la viande
impropre à la consommation l'Evénement, 21 février
1962 aucun commentaire du ministre de la Santé. Motus. Le
ministère de la Santé garde le silence et ses informations sur
l'enquête en cours concernant la viande impropre à la
consommation. Hier, le député de Saint-Sauveur, M. Francis
Boudreault, a demandé au ministre, en Chambre, si des mesures avaient
été prises pour protéger la population contre le commerce
de la viande impropre à la consommation. " C'est en 1962, M. le
Président.
Dans l'Evénement du lendemain, 22 février 1962: "Le maire
demande un rapport sur l'inspection de la viande. A la suite des
déclarations faites concernant le problème de la viande impropre
à la consommation dans la province, les autorités de la ville de
Québec ont réagi, et le maire Wilfrid Hamel a demandé un
rapport et des statistiques sur le travail des inspecteurs municipaux.
D'après les chiffres officiels, il y a à Québec exactement
250 étals de boucher, et 129 épiceries-charcuteries, y compris
les magasins à chaînes et les charcuteries elles-mêmes. Pour
accomplir le travail d'inspection, la municipalité dispose de quatre
médecins vétérinaires réguliers, de deux
médecins vétérinaires supplémentaires, de deux
inspecteurs d'étals privés, deux inspecteurs de restaurants etc.
" Je pourrais citer tout l'article, mais l'article est suffisamment
révélateur pour nous dire qu'il se faisait un commerce de viande
avariée à Québec. C'est le 22 février 1962.
Dans le Devoir du 22 février 1962, M. Nadeau, gérant
général de la division des viandes de la Coopérative
fédérée, est revenu sur la déclaration de la fin de
la semaine. Et le 22 février, nous apprenions, toujours dans le journal
l'Evénement, qu'au Québec, 1, 200, 000 livres de viande impropres
à la consommation ont été vendues en 1961.
En 1962, le journal Le Devoir publie une autre enquête dans
laquelle le ministre de la Santé déclare: "Au Québec, il
n'existe pas de cas sérieux de maladies imputables à la
consommation de la viande". Le ministre de la Santé a examiné,
dans le temps, si les gens pouvaient être malades. On n'a pas
regardé pour mettre un terme au commerce de la viande
avariée.
Dans le Nouveau Journal, le jeudi 1er mars 1962: "Des Cantons de l'Est
à la rive sud, de 25 à 30 tonnes de viande gâtée par
semaine livrées à Montréal. " Il y a à ce niveau,
toute une série de commentaires et d'articles pour démontrer
qu'en 1962 le commerce de la viande avariée était excessivement
prospère au Québec. Le 2 mars, toujours dans le journal Le
Devoir: "Le Conseil de l'industrie de la viande donnera son point de vue cet
après-midi. " Plus loin: "M. Couturier, concernant la viande pourrie
dans la province, mène une enquête strictement gouvernementale. "
Le 3 mars, on dit que l'industrie des salaisons enquête tout en
réclamant des preuves.
"Alerte au public, toujours, viande avariée", le 3 mars 1962. Les
proprios d'abattoirs réclamaient une enquête, dès 1962.
Pourquoi, M. le Président, parce qu'il y avait des gens qui
étaient propriétaires d'abattoirs, qui exploitaient un abattoir
au Québec, qui étaient des gens honnêtes, sérieux et
qui n'avaient pas pratiqué ce commerce de viande avariée. Ils
avaient toujours eu à subir énormément de
préjudices à cause de ce commerce qui se pratiquait. Je continue:
Le Devoir, le 5 mai 1962. "Pour faire échec aux gros
intérêts, les petites salaisons réclament le droit de
cité à l'estampille provinciale. " Le 3 août 1962: "Une loi
pour protéger les gens contre la viande malsaine. " Et nous nous
reportons en 1965 pour découvrir, toujours dans le journal
L'Evénement: "Saisie de 20, 000 livres de viande contaminée en
provenance des Etats-Unis. " C'est un article qui a été
signé par M. Lucien Bouchard, journaliste qui avait fait une
enquête sérieuse sur la question. Dans l'Evénement du 31
décembre: "Le maire Gilles Lamontagne exigera peut-être une
enquête en haut lieu. "
M. le Président, je pourrais continuer en 1965, 1966, 1967, 1968,
1969, 1970, 1971, 1972 et en 1974. En 1974, M. le Président, il y a une
loi qui a été votée à l'Assemblée nationale
du Québec...
M. Marchand:... parler, il ne sera plus là.
M. Roy:... loi qui a été déposée
devant la Chambre par l'actuel ministre de l'Agriculture, loi qui, comme vous
le savez, n'a jamais été appliquée. Il y a eu une
commission parlementaire pendant laquelle nous avions étudié un
projet de réglementation concernant l'inspection des viandes et la
classification de certaines catégories de viandes qui avaient
parce qu'on avait menacé de fermer les petits abattoirs, on avait
menacé de fermer des commerces honnêtes qui desservaient, c'est
là que c'est important, des régions éloignées du
Québec, qui permettaient à des agriculteurs, éleveurs de
bovins de boucherie, vendeurs de bétail, de pouvoir avoir de meilleurs
prix par l'entremise de ces petites entreprises pour être en mesure de
satisfaire les exigences du marché local. M. le Président, je
m'excuse auprès de l'honorable ministre, à moins qu'il ne
connaisse pas l'agriculture du tout, qu'il ne connaisse pas le domaine, ce dont
je doute, je dis qu'il y avait des petits commerces, répartis dans le
territoire du Québec, qui ont exercé un commerce honnête et
qui n'ont pas fait le commerce de la charogne.
Il suffit de se promener dans les régions rurales du
Québec pour découvrir que ce ne sont pas les ruraux qui ont fait
affaires avec des petits abattoirs locaux qui ont été les gens
qui ont contribué et qui ont été victimes du commerce des
viandes avariées. Vouloir reporter le problème à ce
niveau, c'est faire fausse route, c'est être totalement injuste envers
les petits propriétaires d'entreprises québécoises.
Le ministre a eu certaines difficultés à regrouper les
petits abattoirs, parce qu'on sait que, derrière cela, les trusts
veulent le regroupement des petits abattoirs. Qu'il suffise de citer la
progressivité des profits des grandes sociétés. Je le dis
au minis- tre, et je vais nommer les trois plus grandes: Canada Packers, Burns
Foods et J M Schneider. Les profits de la compagnie Canada Packers, de 1969
à 1974, sont passés de $7 millions à $19 millions. Ceux de
Burns Foods, de $1, 900, 000 à $4. 5 millions et ceux de J M Schneider,
de $1, 200, 000 à $2, 700, 000. On sait actuellement que, lorsque ces
petits abattoirs seront regroupés, il y aura certaines fusions, comme
cela s'est fait dans d'autres domaines, vis-à-vis des grandes
sociétés, des grandes entreprises qui deviendront
acquéreurs, de façon à éliminer la concurrence,
pour tâcher d'établir un monopole. Ce ne sera pas uniquement dans
ce seul secteur que nous verrons des monopoles s'installer au détriment
des consommateurs, des gens honnêtes et des petits producteurs.
Comment se fait-il qu'un gouvernement ait attendu aussi longtemps pour
agir? Comment se fait-il qu'un gouvernement ait laissé pourrir une
situation de ce genre? Comment se fait-il qu'un gouvernement procède de
façon à éliminer les gens honnêtes, sous
prétexte qu'il y a eu quelques bandits dans certains domaines?
J'ai été renversé de lire une déclaration
que le premier ministre du Québec a faite, la semaine dernière,
à un journaliste du Financial Post. Parlons de celle-là, et je
pense que vous allez en avoir assez! Le premier ministre a
déclaré: Parfois, les pouvoirs normaux de la police, des
tribunaux et des services d'inspection ne sont pas suffisants, dit-il. Il est
bien certain qu'une bonne partie des révélations faites aux
enquêtes, concernant la viande et la construction, ont été
recueillies par la police.
Présentées en cour, précise M. Bourassa, les
preuves ne sont peut-être pas suffisantes pour mener à des
condamnations, mais sous la lumière des réflecteurs, les
révélations permettent que l'action gouvernementale c'est
là que ça commence à être important soit
acceptable socialement et politiquement. Il faut créer un état de
crise pour faire accepter des lois qui camouflent une intention réelle
d'assurer plus de contrôle et plus de monopole à ceux qui en ont
déjà trop, de contrôle, et à ceux qui constituent,
en quelque sorte, le monopole de la viande contre lequel les agriculteurs du
Québec, l'automne dernier, les éleveurs de bovins en particulier,
ont dû se battre, question qui a été tempérée
par une injection de subventions de la part du ministère de
l'Agriculture, mais question qui n'est pas réglée
actuellement.
Les agriculteurs des différentes régions ont réussi
à se dépanner tant bien que mal par l'entremise de leurs petits
abattoirs, par l'entremise des petits commerces qu'il y avait dans les
différentes régions du Québec. N'eût
été cela, il y aurait un grand nombre d'agriculteurs du
Québec qui auraient été voués à la faillite
et qui auraient dû abandonner le secteur agricole. C'est un
problème. Ceci nejustifie pas, par exemple, le gouvernement de les
fermer sous prétexte que dans d'autres milieux on a pratiqué un
commerce de viande avariée. Le commerce de la viande avariée n'a
pas passé par les abattoirs parce que les animaux étaient
déjà morts. Il a passé par les charcuteries, par les
usines de transformation, par les ateliers de transformation de
la viande. Les animaux morts n'avaient pas besoin d'aller à
l'abattoir.
On voit le premier ministre du Québec déclarer: Vous
imaginez-vous quel tollé il y aurait eu si nous avions tenté de
faire adopter une telle loi avant les rapports et avant les
révélations des commissions d'enquête? Quel but poursuit le
gouvernement? C'est une question que l'on peut se poser. Avec un gouvernement
qui compte 101 députés à l'Assemblée nationale, 100
à l'exception de vous, M. le Président. 100
députés, un gouvernement qui a une force numérique comme
jamais un gouvernement du Québec n'en a eue, qu'on ne vienne pas me dire
que c'est l'Opposition qui a empêché le gouvernement actuel de
faire appliquer le) loi 31 qui a été votée l'an dernier.
Qu'on ne vienne pas me dire que c'est l'Opposition qui a empêché
le ministre de dire à ses inspecteurs: Prenez des mesures draconiennes,
prenez vos responsabilités, soyez sévères, faites-moi
rapport et nous allons poursuivre les coupables.
Depuis que ces révélations ont été faites
à l'Assemblée nationale, nous avons interrogé,
contre-interrogé le ministre de l'Agriculture, pendant au moins deux
semaines consécutives, pour lui demander quelle était l'action
qu'il entendait prendre dans l'immédiat, de façon qu'à
partir de maintenant, et c'est la question qu'on posait dans le temps, il
puisse garantir aux consommateurs du Québec que le gouvernement allait
sévir de la façon la plus draconienne et la plus directe
possible, contre ceux qui seront trouvés coupables de commerce de viande
avariée. Jamais on n'a pu faire dire cette phrase au ministre de
l'Agriculture. Jamais le ministre de l'Agriculture n'a voulu nous faire une
telle déclaration, et pourtant, tous les Québécois
attendaient cette déclaration de notre ministre de l'Agriculture.
M. le Président, dans ces nouveaux règlements,
actuellement, qui nous sont présentés, quelles sont les garanties
que le gouvernement va faire appliquer cette loi? C'est exactement la
même situation que nous retrouvons au ministère de l'Agriculture,
que nous avons trouvée au ministère du Travail et que nous
trouvons encore: laisser-aller, laisser-faire, tolérance. On laisse les
gangsters, les bandits profiter de la situation, puis on laisse gangrener une
situation de sorte que c'est tout le Québec, tous les
Québécois qui s'interrogent et qui sont inquiets.
M. le Président, le ministre va se buter à deux choses
dans l'application de son nouveau règlement. Quel est l'organisme
québécois, atelier d'abattage, charcuterie ou autre, qui va
être intéressé à utiliser l'estampille
"Québec Approved"? Je pense qu'il ne faudra pas seulement des mois, il
va falloir des années pour que l'estampille "Québec Approved"
puisse avoir une certaine crédibilité auprès des
consommateurs. Et on ne peut pas faire de reproche aux consommateurs.
Quelles sont les entreprises québécoises, aujourd'hui,
demain, dans une semaine, qui pourront faire des affaires normales avec le
sceau "Québec Approved"? J'ai eu l'occasion, en fin de semaine, de
rencontrer des gens des milieux ruraux, de ma région, qui ont
utilisé l'estampille "Québec Approved". Il y a un abattoir dans
lequel il s'est investi $200, 000, il y a quelques années, un abattoir
qui n'est pas dans mon comté, qui est fermé, à l'heure
actuelle, à cause de cela.
Dans un abattoir de mon comté, on a investi plus de $100, 000. Le
chiffre d'affaires est réduit à 40%, M. le Président, et
ces personnes propriétaires sont inquiètes. Il y a des gens qui,
n'étant pas millionnaires, devront vendre au plus viteou se contenter de
faire faillite, parce qu'ils ne pourront pas vendre à moins que le
gouvernement les achète ou les exproprie dans leur valeur
résiduelle, c'est-à-dire selon la valeur aux livres.
M. le Président, pourquoi tout cela? Parce que les gens se sont
fiés qu'avec l'estampille "Québec Approved", il y avait une
inspection des viandes valable au Québec, et que cela pouvait constituer
une marque de confiance, à l'effet que le consommateur pourrait se
retrouver, lui, dans un climat de confiance, de certitude et avec un produit de
qualité. Mais, tel n'a pas été le cas. Qui va nous dire
qu'à partir de telle date, l'utilisation de cette fameuse estampille
"Québec Approved" pourra ramener la confiance des consommateurs
québécois?
M. le Président, ce n'est un secret pour personne, et je
n'apprendrai rien à aucun de mes collègues, ici, ce soir, en
rappelant toute la publicité qui se fait, à l'heure actuelle, par
les grandes chaînes d'alimentation. Elles se vantent, elles le disent,
elles le répètent et multiplient les annonces pour dire que leur
produit est "Approuvé Canada", l'estampille du fédéral.
Comment l'épicier du coin, qui cherche à s'alimenter sur le
marché québécois, avec des institutions
québécoises qui utiliseront, demain, l'estampille "Québec
Approved", pourra-t-il reconquérir son marché?
C'est le premier obstacle il est de taille auquel le
ministre de l'Agriculture du Québec va avoir à faire face. Les
torts qu'on a causés à l'économie
québécoise, à l'économie rurale vont constituer des
pertes de dizaines et de dizaines de millions de dollars pour les industriels,
pour les cultivateurs, pour les hommes d'affaires, pour nos épiciers. Au
bénéfice de qui? Au bénéfice des grands de
l'alimentation et au bénéfice des abattoirs des grosses
compagnies qui contrôlent les abattoirs des grandes compagnies filiales
de multinationales. Cela, le gouvernement le sait, et le ministre le sait.
Toute cette situation qui ne fait que renchérir ou renforcer la
domination du Québec par les grandes sociétés, par les
grands trusts de l'alimentation ou par les grands trusts des abattoirs, ne
fait, M. le Président, que placer l'agriculteur du Québec,
l'éleveur de bovins dans une situation de servitude, dans une situation
de dépendance vis-à-vis de ces grandes personnes, parce qu'on
aura, à toutes fins pratiques, éliminé la concurrence. On
reviendra au vieux système qu'il y avait au Québec, il y a une
vingtaine d'années, alors que l'agriculteur du Québec devait
expédier ses animaux le lundi, animaux qui étaient abattus le
mardi, pesés parfois le mercredi, parce qu'il fallait les faire
refroidir ils pesaient moins classés le mercredi. On leur
envoyait un chèque le vendredi ou le samedi suivant en leur disant: Nous
avons classé vos animaux, nous avons pesé vos animaux. Ils
pèsent tant. Ils sont
classés de telle façon, et nous avons décidé
de vous donner tant. L'agriculteur n'a pas un mot à dire parce que
l'animal est abattu, débité et assez souvent,
détaillé. Combien de fois, M. le Président, des
coopératives agricoles ce que je dis, à ce moment-ci,
c'est une expérience qui a été vécue partout, et
c'est un exemple qui illustrait et qui a justifié la création de
toute une série de coopératives agricoles, il y a quelques
années se sont occupées de la vente des animaux des
cultivateurs.
M. le Président, dans ce domaine, je sais un peu de quoi je
parle, parce que j'ai eu à y travailler personnellement pendant un
certain nombre d'années. Il a fallu que, dans le domaine
coopératif, nous puissions, en quelque sorte, par le système
coopératif, remonter la pente.
Lorsque le Québec avait décidé de procéder
à l'inspection des viandes, il y avait eu une lueur d'espoir parce
qu'à ce moment-là, on avait élargi les possibilités
du marché québécois. Mais, M. le Président, tout
est à refaire, tout est à zéro, parce que le mal est fait.
Il y a beaucoup de mal de fait. La loi que nous votons ce soir n'aura que peu
de répercussion parce que les Québécois ont perdu
confiance, parce que l'estampille "Québec Approved", c'est un synonyme
de "Bourassa approved" et ce n'est pas un critère de qualité. Ce
n'est pas un critère de qualité parce que l'estampille
"Québec Approved", c'est un synonyme de "Bourassa approved", à
l'heure actuelle.
M. le Président, c'est un premier point.
M. Mercier: Là tu es drôle, mon vieux!
M. Roy: M. le Président, je vous l'avais dit qu'on ne
m'applaudirait pas.
M. Mercier: C'est un "smart".
M. Roy: Je vous l'avais dit, M. le Président, q u'ils
n'applaudiraient pas à la fin.
M. Mercier: Péquiste avarié!
M. Roy: M. le Président, dans cette loi, on semble vouloir
augmenter les amendes, ce qui est très bien. Le ministre ne va pas assez
loin. Je dis, M. le Président, qu'en cas de récidive je
veux que le ministre en prenne note...
Une Voix: Vous avez compris, là!
M. Roy: Ils auraient intérêt, M. le
Président, nos illustres collègues, membres des I00...
M. Massicotte: Les acteurs ne sont pas tous à
Hollywood!
M. Roy:... les sans génie, le chiffre et le mot, ce n'est
pas au sens péjoratif. Tout de suite, M. le Président, ils ont
été portés à penser que c'était d'un seul
mot que je disais cela. Les I00. M. le Président, je dis à
l'honorable ministre qu'il devrait prendre des mesures.
M. Marchand: Séparatiste avarié!
M. Roy: En cas de récidive, dans le domaine d'un commerce
aussi épouvantable que celui-là, il devra y avoir des
dispositions dans la loi qui imposeront la prison. Il faut que le gouvernement
se décide à aller jusque-là. Dans le cas de
récidive, ce n'est pas assez, l'amende. Nous exigeons la prison, M. le
Président. Je vais, à l'occasion de l'étude de ce projet
de loi en commission parlementaire, article par article, proposer des
amendements dans ce sens. En cas de récidive, M. le Président, il
faut que le gouvernement se décide de mettre un terme, une fois pour
toutes: La prison pour les coupables. C'est le seul moyen. Parce que ces gens,
qui ont réalisé des millions, c'est une pinotte pour eux que de
payer $2, 000 ou $3, 000 d'amende, surtout quand on sait que les procès
prennent passablement de temps. Ils ont le temps de réaliser une fois,
deux fois, trois fois le profit.
Il faut la prison pour ces personnes. Je vais plus loin, M. le
Président. Ceux qui auront la responsabilité je parle des
inspecteurs gouvernementaux de l'application des règlements, qui
auront à prendre les mesures de façon que les
Québécois soient assurés d'avoir de la viande de
qualité, je dis que pour les inspecteurs, le gouvernement devra
être extrêmement sévère. A partir du moment où
il serait prouvé qu'un inspecteur du gouvernement, de concert avec ces
"hommes d'affaires", passerait outre à la réglementation, se
ferait complice, en se fermant les yeux, d'un commerce de viande
avariée, le gouvernement devrait avoir le courage d'imposer à ces
personnes la prison.
Vous allez me dire, M. le Président, que ce sont des mesures
radicales. C'est vrai que ce sont des mesures radicales. Mais, M. le
Président, aux grands maux, les grands remèdes.
Il faut, de toute urgence, redonner la confiance aux consommateurs du
Québec dans les produits qui seront inspectés par leur
ministère provincial de l'Agriculture. Le seul moyen pour le
gouvernement de redonner cette confiance aux consommateurs
québécois, c'est de prendre les grands moyens, les grandes
mesures, d'être extrêmement sévère dans l'application
des règlements, et d'aller jusqu'à la prison pour ces gens. Il y
a tout de même des limites à abuser d'une situation et à
exploiter de manière aussi honteuse les consommateurs de la
province.
A la lumière de tous ces événements, et pour
renforcer mon argumentation, je pourrais citer une série de
déclarations, pour dire que je ne suis pas le seul, M. le
Président, à exiger des mesures radicales de la part du
gouvernement. Il y a toute une série d'éditorialistes qui ont
écrit dans les journaux, qui se sont déclarés
indignés par ces révélations, qui ont été
renversés de l'inaction gouvernementale, et qui exigent des mesures
draconiennes et radicales.
Si cette loi, que nous voterons ce soir en deuxième lecture et
qui sera adoptée au cours des prochaines heures ou des prochains jours,
ne reçoit pas plus d'attention du gouvernement que la loi no 31
votée l'an dernier, nous aurons perdu notre temps. C'est encore le
Québec et les Québécois qui
en paieront les frais, et, cette fois, ils paieront peut-être un
prix que nous n'aurons pas les moyens de payer au niveau du commerce de la
viande dans le Québec, pour permettre aux cultivateurs
québécois de reprendre une place sur le marché qui devrait
leur appartenir. M. le Président, nous avons perdu notre temps, nous
ferons rire de nous et ce sera gênant de sortir à
l'extérieur du Québec et de dire aux gens que nous rencontrerons
que nous demeurons au Québec.
Le tort fait à la réputation du Québec, par les
révélations qui ont été faites à la
commission d'enquête sur le crime organisé, ne peut pas
s'évaluer en termes de dollars. Nous avons été la
risée de tout le continent nord-américain, de toute l'Europe; on
a parlé de nous partout, c'est un genre de publicité dont nous
aurions pu nous passer. Comment pourra-t-on, par l'entremise du
ministère de l'Industrie et du Commerce...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît! La générosité du président a des
limites. Nous ne nous entendons plus du tout et c'est assez difficile pour moi
de mettre le blâme sur les députés de l'Opposition, il n'y
en a qu'un et il parle. Alors, je demanderais la collaboration des
collègues; c'est extrêmement fatigant pour celui qui
préside et également pour celui qui parle.
M. Roy: Merci beaucoup, M. le Président, j'apprécie
vos bonnes paroles. Il y a un article, que j'aimerais citer à nos
honorables collègues, de l'éditorialiste, qui porte le nom de
Raynald Brière. Il a déclaré, dans le Nouvelliste du 6
juin 1975, ça ne fait pas tellement longtemps: "Les conséquences
de la négligence éhontée de ceux chargés de veiller
sur la qualité de la viande forcent maintenant des commerces
honnêtes à diminuer leur personnel et à enregistrer des
pertes importantes. Il est difficile de blâmer la population de se
montrer hésitante". Et il dit plus loin, dans le même article, ce
même éditorialiste: "Le plus aberrant, toutefois a
été d'apprendre que le temps supplémentaire fait par les
inspecteurs à l'emploi du gouvernement était
rémunéré par les propriétaires d'abattoirs.
A-t-on idée de faire preuve d'autant de naiveté!
Jusqu'à maintenant le ministre n'a guère impressionné par
sa litanie d'explications. Il a peut-être subi des pressions de
l'intérieur comme le note plusieurs observateurs, mais sa position qui
frise l'inertie est difficile à justifier. Le député de
Champlain a tenté, tant bien que mal, de se défendre, mais il n'a
pas été tellement convaincant. "
M. le Président, il y a un autre article d'un
éditorialiste qui est intitulé: "Les pitreries de M. Bourassa.
Nous prenons toutes les mesures, y compris les plus énergiques, pour
nous assurer que la population québécoise est bien
protégée. " Quelles mesures a-t-on prises M. le
Président?
M. Côté: Quel journaliste?
M. Roy: Non, ne déviez pas. Je pose une question
embarrassante. Certaines personnes sont injustes en reprochant aux corps
policiers de n'avoir pas sévi il y a un an, deux ans, trois ans. Enfin,
les preuves faisaient défaut et c'est précisément pour
cela que notre gouvernement a créé des commissions
d'enquête pour accumuler les faits. Comme accumulation de mensonges et de
demi-vérités, il est difficile de faire mieux. M. le
Président, il y a ici un petit billet de Charles Petit-Martinon qui a
écrit dans un journal: "II n'y a pas que la viande avariée, la
politique l'est aussi. Dans tout autre pays ce n'est pas de moi, M. le
Président, c'est de M. Charles Petit-Martinon ces ministres
incriminés auraient déjà dû donner leur
démission. " M. le Président, dans d'autres pays, il y a des
hommes publics qui ont assez de fierté, qui ont assez de dignité
et assez de valeur que lorsqu'ils se font prendre dans des situations aussi
compromettantes que celles où s'est trouvé le ministre de
l'Agriculture, je dis qu'il y a quand même, dans le monde, des gens qui
ont assez d'épine dorsale pour quitter leurs fonctions et avouer qu'ils
ont failli pour permettre à leur gouvernement de nommer un autre
titulaire de façon que la population de leur pays ne perde pas une
confiance totale en leur gouvernement. Lorsque la population a perdu confiance
en son gouvernement, qu'est-ce qui lui reste, M. le Président, pour
croire qu'il y a encore une possibilité d'avoir un régime
démocratique et d'avoir un gouvernement responsable pour
l'administrer?
M. le Président, je pourrais continuer à citer davantage
certains de ces articles. Si on me demande de les déposer, M. le
Président, certainement, je vais en faire faire 110 photocopies et je
vais les faire distribuer par les pages sur le bureau de chacun des
députés parce que je pense que ce petit document devrait servir
de réflexion à tous ceux qui actuellement se limitent,
malheureusement, à accepter, pour des raisons que j'ignore, cette
tolérance injustifiée et injustifiable du ministre titulaire de
l'Agriculture.
M. le Président, je terminerai par ces mots, pour un gouvernement
responsable, jamais on ne peut avoir pire, jamais on ne peut voir autant
d'incurie, jamais on ne peut voir autant d'irresponsabilité. Je regrette
si je suis obligé d'être dur à l'endroit de mon
collègue, le ministre de l'Agriculture, mais il y a quand même des
limites. Le Québec ne s'est pas choisi un gouvernement pour rire. Le
ministre de l'Agriculture n'a pas été nommé là pour
rire non plus. Il a des responsabilités, le ministre de l'Agriculture.
Il avait la responsabilité de l'application des lois et il avait la
responsabilité, puisqu'il a admis qu'il le savait, de prendre les
mesures qui s'imposaient et d'ordonner à son collègue, le
ministre de la Justice, de prendre les mesures draconniennes qui
s'imposaient.
Il avait la responsabilité de corriger la situation avant qu'elle
prenne l'ampleur qu'elle a prise actuellement dans le Québec et cause
des préjudices très sérieux à la population
honnête et aux personnes qui ont exploité un commerce
honnête.
Cela me dépasse de voir l'attitude du ministre de l'Agriculture.
Je dis qu'un enfant de quatre ans n'aurait pas fait pire que lui.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député d'Anjou.
M. Yves Tardif
M. Tardif: M. le Président, je reconnaîtrai au
départ que je connais pas grand-chose en matière d'agriculture,
mais je pense, comme la plupart de mes collègues libéraux ici,
que j'ai un minimum de bon sens qui me force à refuser les sophismes que
l'on a entendus depuis deux semaines de la part du député de
Saguenay et de la part du député de Beauce-Sud.
En effet, depuis deux semaines, on a entendu ces deux
députés revenir constamment à la charge sur cette question
en prétendant que le gouvernement n'avait rien fait et que s'ils avaient
été au pouvoir il va de soi que cette situation ne se serait pas
produite.
J'ai écouté avec attention, même si ce n'est pas
toujours facile, je dois l'avouer, le discours du député de
Beauce-Sud ainsi que le discours du député de Saguenay cet
après-midi. J'ai également écouté les questions
qu'ils ont posées en Chambre sur cette question au cours des deux
dernières semaines et, fondamentalement, leurs idées reviennent
à celle-ci, à savoir qu'à peu près tout le
Québec a ingurgité de façon continue au cours des
dernières années de la viande avariée;
deuxièmement, que cette situation ou l'inaction du gouvernement a
causé un tort irréparable au Québec. Je n'ai pas entendu
souvent le député de Beauce-Sud ni le député de
Saguenay mentionner des chiffres, mais je pense qu'il serait bon, à ce
moment-ci, d'en mentionner quelques-uns pour replacer dans sa juste perspective
le problème qui a été évoqué ici à
l'Assemblée nationale et dans les media depuis deux semaines.
Il se consomme environ 900 millions de livres de viande au
Québec, c'est-à-dire environ 152 livres par personne par
année. Là-dessus, selon les chiffres que j'ai consultés
brièvement, il me semble qu'il y a environ trois millions et demie de
livres de viande avariée durant une année ou si vous
préférez 0. 3% ou un tiers de 1%. C'est-à-dire que sur 152
livres consommées par année par une personne, il y a environ
d'une demi-livre a une livre de viande qui serait avariée parmi la
viande que la personne consomme au cours de l'année.
Si vous préférez mettre les chiffres d'une autre
façon, cela veut dire qu'il y a au moins 99. 7% de la viande qui est une
viande de bonne qualité au Québec. Malgré tout,
malgré ces chiffres, le député de Beauce-Sud et le
député de Saguenay ont voulu laisser croire d'une façon
systématique que la situation était grave, qu'elle était
désespérée, que c'était un problème qui
affectait tous les Québécois parce qu'il y avait beaucoup de
viande avariée au Québec.
C'est faux et je pense que les arguments utilisés par ces deux
députés manquent vraiment de corps. Evidemment, ils ont voulu
faire de la démagogie sur cette question. On ne peut peut-être pas
les blâmer parce que c'est peut-être la façon d'attaquer le
gouvernement, mais je m'attendais à ce que des gens qui sont si peu
nombreux dans l'Opposition compensent ce petit nombre par la qualité.
Malheureusement, ce n'est pas le cas.
J'aimerais poser, par votre intermédiaire, M. le
Président, une question au député de Beauce-Sud. A-t-il
entendu parler récemment d'un scandale en matière alimentaire en
Italie? Je ne sais pas s'il en a entendu parler. ll continue à lire,
probablement qu'il n'en a pas entendu parler. Je vais vous citer...
M. Roy: Puis-je répondre à la question du
député?
M. Tardif: Ah! vous pouvez y répondre.
M. Roy: Est-ce que le député a été
élu pour surveiller les intérêts des Italiens, en Italie,
ou si vous avez été élu pour surveiller les
intérêts des Québécois?
M. Tardif: J'essaie de donner un exemple mais je pense que le
député de Beauce-Sud, évidemment, ne comprendra rien. Il y
a environ une couple de semaines a éclaté un scandale en Italie
sur des pâtes alimentaires avariées. Comme vous savez, en Italie,
la cuisine est fondée en grande partie sur les pâtes alimentaires.
Il y a un scandale qui a éclaté mais j'aimerais savoir, sur les
110 députés ici, qui a entendu parler de ce scandale. Est-ce que
cela a causé un tort irréparable à l'Italie et à sa
cuisine? Est-ce que cela vous a empêché de continuer à
manger des pâtes alimentaires?
M. Roy: Ce ne sont pas les pâtes alimentaires, c'est la
viande qu'il y a dedans.
M. Tardif: De la façon que le député de
Beauce-Sud et le député de Saguenay sont intervenus au cours des
deux dernières semaines, cette question a causé un tort
irréparable et irrémédiable au Québec et on ne
pourra pas s'en tirer. C'est pour montrer, par ce petit exemple, que des choses
qui peuvent paraître importantes pour nous autres n'ont probablement
aucun retentissement à l'extérieur de l'endroit où nous
vivons.
Pourtant, l'Italie est tout de même un pays qui a une population
plus considérable que le Québec mais il n'y a à peu
près personne, y compris le député de Beauce-Sud, qui ait
entendu parler de ce scandale. Est-ce vrai que cela va causer un tort
irréparable au Québec? Je ne pense pas. Evidemment, il faut dire
que les députés de l'Opposition n'ont pas rempli leur devoir, ils
ont essayé de jeter de l'huile sur le feu. Je pense qu'ils sont
responsables en grande partie de ce tort en abusant, c'est bien le cas, de la
situation et en laissant croire, comme encore cet après-midi le
député de Saguenay qui soit dit en passant est absent ce
soir l'a laissé croire aux membres de cette Chambre en disant: II
y a un tort irréparable qui a été causé au
Québec et pendant des années les Québécois ont
ingurgité, de façon continue, de la viande avariée.
Je ne veux pas tellement prolonger mon intervention sur cette question,
mais je voulais replacer, dans une perspective un peu plus juste, cette
question qui a soulevé l'attention de la plupart des
Québécois au cours des deux dernières semaines. Le
ministre l'a dit lors de la présentation du projet de loi no 39, la loi
31 adoptée l'année dernière n'était
peut-être pas parfaite et peut-être ce projet de loi
lui-même n'est pas parfait. Mais pour les députés de
l'Opposition, et spécialement les deux que j'ai mentionnés, il
faudrait que tout soit parfait, dans tous les domaines.
Voyez-vous, quand vous êtes dans l'Opposition et que vous savez
que vous n'avez aucune chance d'être au pouvoir un jour, c'est facile de
prêcher la vertu. C'est facile de demander la perfection, c'est
également facile de prétendre qu'on est infaillible. Je ne dirai
pas que trois millions et demi de livres de viande avariée au
Québec c'est une situation qu'il faut maintenir; non, trois millions et
demi de livres de viande avariée au Québec, c'est trois millions
et demi de livres de trop, je le reconnais. Mais l'infaillibilité,
ça n'existe pas. Le député de Beauce-Sud devrait le savoir
parce que de ce temps-ci il se demande s'il va adhérer à l'Union
Nationale ou au Parti québécois. Il n'a même pas
l'infaillibilité, lui aussi, alors qu'il se pose une question
fondamentale; comment voulez-vous qu'un gouvernement, qui fait tout de
même son possible et qui réussit dans une proportion de 99. 7%
à assurer l'hygiène publique dans le domaine de la viande, puisse
également atteindre la perfection ou l'infaillibilité?
Je pense que cela n'existe pas. Je n'essaie pas de faire un plaidoyer
pro domo, un plaidoyer en faveur du ministre; non, ce n'est pas le cas. Je
pense, d'un autre côté, que l'Opposition, une fois de plus, a
failli à la tâche parce qu'elle a abusé de cette situation
et a voulu laisser croire à tout le monde qu'au Québec les gens
mangeaient constamment de la viande avariée et qu'on ne pourrait pas se
tirer de cette situation-là. J'espère qu'au cours des prochains
mois, au cours des prochaines années ces distingués membres de
l'Opposition vont faire preuve d'un peu plus de discernement, vont faire preuve
d'un peu plus de maturité. Au lieu de jeter de l'huile sur le feu, quand
une situation comme celle-ci arrive, qu'ils essaient plutôt de
suggérer des moyens concrets. Je pense que le ministre a réagi de
cette façon-là parce qu'il n'a pas attendu un an avant de
présenter un projet de loi pour modifier une loi qui a été
adoptée il y a dix mois et demi. Non, il l'a fait dès qu'il a
senti qu'il y avait quelque chose qui ne fonctionnait pas. Je pense que c'est
la raison pour laquelle on devrait être unanime pour adopter et appuyer
le projet de loi en deuxième lecture.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): La réplique du
ministre de l'Agriculture.
M. Normand Toupin
M. Toupin: M. le Président, je ne voudrais pas être
très long dans la réplique que je vais donner aux discours faits
par les partis de l'Opposition, parce que rien dans ce qu'ils ont dit,
jusqu'à maintenant, n'est nouveau. Ils ont simplement
répété ce qu'ils répètent depuis un certain
nombre de semaines, c'est-à-dire essayer de tirer de cette situation une
certaine crédibilité politique et tenter de se faire un peu de
publicité. C'est typique d'ailleurs du député de
Beauce-Sud, parce que très souvent, pour avoir une manchette, si petite
soit-elle, il est souvent forcé de faire des déclarations
contradictoires. C'est vrai dans le secteur politique et c'est vrai aussi dans
le secteur de l'administration publique en tant que, pour lui,
représentant d'une minime partie de l'Opposition. Je vais vous
démontrer, ce soir, jusqu'où le député de
Beauce-Sud est véritablement contradictoire dans tout ce qu'il affirme
ou dans tout ce qu'il dit depuis un certain nombre d'années.
Vous vous rappelez sans doute la crise des provendes qu'on a
vécue il n'y a pas tellement longtemps. Je le disais cet
après-midi et je le répète, tous les députés
de l'Opposition, y compris le député de Beauce-Sud, y compris
également le député de Saguenay, criaient sur tous les
toits: Les producteurs agricoles du Québec s'en vont vers la faillite,
des crises de cannibalisme existent dans le secteur agricole, etc.. Une fois la
crise passée, enquête faite, aucune preuve valable n'est venue
appuyer ces affirmations faites de la part de l'Opposition.
Il est vrai qu'il existe une crise de consommation de viande au
Québec. Je peux apporter des statistiques. Cela ne vaut pas seulement
pour le secteur des viandes provenant des abattoirs
Approuvé-Québec, cela vaut également pour le secteur des
viandes provenant des abattoirs Approuvé-Canada et appartenant à
des entreprises canadiennes, de même que des entreprises multinationales.
Nous sommes tous d'avis que la charcuterie, notamment, a subi, depuis deux ou
trois semaines, une diminution de consommation importante. Cela varie, selon
les secteurs de distribution, entre 10% et 30% ou 32%. Mais par ailleurs,
certains autres secteurs des viandes ont augmenté, en termes
d'alimentation. Le poulet, par exemple, a augmenté de 17%, en termes
d'alimentation, le poisson a augmenté de 30% ou 35%, en termes
d'alimentation au niveau de la consommation. C'est sûr que cela
crée des problèmes dans le secteur des viandes, mais par
ailleurs, cela améliore jusqu'à un certain point la position de
certains autres secteurs.
Mais ce qui est encore plus important dans ce problème de la
crise de consommation des viandes, ce n'est pas de tenterde faire des
statistiques sur ce qui peut diminuer en termes de consommation, par rapport
à ce qui peut augmenter. C'est d'essayer de trouver des moyens pour
rééquilibrer la situation. Nous les avons pris ces moyens. Nous
les avons pris depuis longtemps. Ce n'est pas d'hier que le gouvernement du
Québec fait des saisies de viande. Il en a fait au cours des cinq
dernières années, plus qu'au cours des années
précédentes. Il a protégé les Jeux du
Québec, je pense, à Rouyn-Noranda, en I973 où il a saisi
des dizaines et des dizaines de milliers de livres de viande avariée. Il
a fait, dans la région de la Mauricie, en I972, 1973, 1974 beaucoup de
saisies, parce qu'on nous disait de part et d'autre qu'il existait des
réseaux de vente de viande avariée au Québec.
Cet après-midi, le député de Saguenay me renotait
une responsable, dans la région de la Mauricie, des consommatrices qui
serait venue à mon bureau pour me dire qu'il existait des réseaux
de viande avariée, etc. On a également signalé des
personnes qui auraient écrit au ministère pour nous informer
qu'il existait des réseaux de viande avariée. Mais je n'ai
pas vu une personne, pas une seule personne me donner le nom de quiconque
mettait en marché des viandes avariées, absolument pas. Personne
n'a osé me donner des noms. On a simplement présumé que de
tels réseaux existaient.
Nous avions personnellement des doutes sur cette question. Je l'ai dit
et je le répète, ce n'est pas pour rien, que nous avons
commandé une commission d'enquête sur un problème comme
celui-là. On cite des chiffres de I962, de I965, mais on est les
premiers à avoir eu le courage et l'audace de mettre en place un
mécanisme, nous permettant de dépister le problème. C'est
cela qui compte dans le problème actuel.
On aurait pu dire, M. le Président, comme ceux qui nous ont
précédés, tant les gouvernements de l'Union Nationale que
les gouvernements libéraux: II n'y a pas de problème. Très
peu de viande avariée se consomme au Québec. D'ailleurs, le
député d'Anjou a donné des statistiques, tantôt, qui
sont révélatrices de cette situation, en termes de
quantité. On aurait pu faire comme ceux-là, se fermer les yeux,
tenter de convaincre la population que ce n'est pas dangereux, que la
santé du public n'est pas en cause, qu'on n'a pas de preuve de maladie
émanant de la consommation de viande avariée au Québec. On
aurait pu utiliser tous ces arguments. Probablement, M. le Président,
que la population nous aurait crus; probablement que l'Opposition, aussi,
aurait fini par nous croire, mais cela aurait été, de notre part,
non seulement maladroit, mais malhonnête. Ce n'est pas ce que nous avons
fait. Nous avons choisi la voie positive et nous avons tenté, avec les
moyens dont on disposait, de dépister le réseau. Nous avons mis
la main sur le réseau et nous avons immédiatement amendé
nos règlements et amendé aussi notre loi. Cette loi 39, M. le
Président, est fondamentale dans l'opération que nous engageons
pour nettoyer les marché de ces viandes avariées. Elle est
fondamentale.
J'espère, M. le Président, que cette fois-ci, le
député de Beauce-Sud va voter pour cette loi, parce qu'il a
voté contre la loi 31, l'an dernier...
M. Roy: J'ai dit pourquoi, M. le Président. J'y
reviendrai.
M. Toupln: Sous mille et un prétextes, il a voté
contre la loi 31, l'an dernier. Il a invoqué toutes sortes de raisons.
C'est dangereux pour les petits abattoirs, c'est dangereux pour les
transporteurs. On va se mettre le nez dans les camions. On va se mettre le nez
dans les entrepôts. On va rentrer dans les magasins, dans les
restaurants, on va brimer les libertés individuelles. C'est en vertu de
ces raisons qu'il a voté contre le projet de loi, M. le
Président, et, aujourd'hui, c'est ce même député qui
vient nous faire la leçon.
Non, M. le Président! On est plus sérieux que cela, de ce
côté-ci.
M. Picotte: Farceur public!
M. Toupin: On a adopté des lois, on est allé en
commission parlementaire, on a discuté les règle- ments en
commission parlementaire. C'est cette même Opposition, M. le
Président, qui m'a demandé, avant de passer mes règlements
sur les viandes, au Québec, de convoquer une commission parlementaire,
et je le lui ai promis. Nous avons tenu cette commission parlementaire. Cela a
retardé l'application des règlements. Cela a permis, par
ailleurs, de légères améliorations aux règlements.
Les députés de l'Opposition crient actuellement, que c'est le
gouvernenent qui est responsable de cette situation, et ils partent d'arguments
basés sur les années 1962-1965. Ils n'ont même pas
appuyé le gouvernement en 1973, lorsque ce dernier a tenté
d'apporter une solution plus valable que celle qui existait. On a voté
contre des lois qui avaient pour mission d'assainir la situation et on a
exigé du gouvernement des commissions parlementaires pour ralentir
l'action du gouvernement. Ce sont ces mêmes gens, aujourd'hui, qui
viennent nous "chanter la pomme", si je peux m'exprimer ainsi.
Je vais aller plus loin que cela, M. le Président. Le
député de Beauce-Sud, dans une partie de son discours, maintient
et soutient le statu quo. Il est encore d'accord pour qu'il y ait, au
Québec, de petits abattoirs qui fonctionnent sans inspection.
M. Roy: Pardon, M. le Président! Je ne laisserai pas dire
des choses comme cela. Je regrette, M. le Président, je n'ai pas dit
cela.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre! A
l'ordre!
M. Toupln: II est contre, M. le Président, le regroupement
des abattoirs. C'est cela, M. le Président, qui a été dit,
cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre! A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Roy: L'article 46...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Si vous pouviez me
regarder un instant! Vous savez fort bien que, tout à l'heure, le
ministre aurait pu intervenir comme vous, vous souhaitez le faire.
J'espère qu'à l'occasion, lorsqu'une parole ne fait pas votre
affaire, vous pouvez l'endurer.
M. Massicotte: Très bien!
M. Toupin: M. le Président, je continue à soutenir
que le député de Beauce-Sud, dans une partie de son discours,
veut maintenir le statu quo qu'il a soutenu lorsqu'il a voté contre le
bill 31. Sous prétexte de sauvegarder la petite entreprise au
Québec, sous prétexte de respecter les libertés
individuelles, il est prêt il l'a dit dans son discours
à laisser de côté des secteurs où il est
extrêmement important que nous ayons, présentement, une inspection
valable. Il est prêt à soutenir cette thèse, M. le
Président. Je ne comprends pas les propos que tient le
député de Beauce-Sud. Il tient les mêmes propos, en
matière d'administration qu'en matière politique.
II ne sait jamais où il va se brancher! Selon qu'il est
fatigué ou pas, cela dépend des rêves qu'il fait. S'il est
beaucoup fatigué, il rêve au Parti québécois, s'il
est moins fatigué, il rêve à l'Union Nationale! S'il est
reposé, il rêve au crédit social ! Etant donné qu'il
n'est jamais reposé, M. le Président, il ne rêve plus au
crédit social.
C'est comme cela, M. le Président, qu'on essaie de
démontrer à la population le sérieux d'une Opposition. Le
député d'Anjou avait raison tantôt: La qualité, M.
le Président, doit compenser pour le nombre. Ils sont peu, ils devraient
faire l'effort de proposer au gouvernement des solutions qui soient valables,
puisqu'ils disent qu'ils ont des solutions. Mais non, M. le Président,
ce n'est pas ce qu'on fait. On essaie de laisser croire au public que les purs
sont de ce côté et que les mauvais sont de l'autre
côté.
M. le Président, en I970, la population n'a pas mordu à
ces sortes de pièges. En I973, elle n'a pas mordu non plus. En I977,
elle mordra encore moins, M. le Président, Ce que la population du
Québec veut et le gouvernement actuel l'a démontré,
notamment en matière agricole c'est d'être
protégée, c'est que les agriculteurs aient des revenus
convenables, c'est que l'industrie ait sa place dans la province de
Québec au niveau de l'agro-alimentaire.
Ils ont voté, M. le Président, cet après-midi, en
principe nous dit-on, sur les lois du crédit agricole. Seulement
celle-là, pas les autres. Seulement celle-là. On est pour
celle-là, mais cela ne veut pas dire qu'on appuie la politique
gouvernementale. Un quart d'heure après, j'ai apporté un
programme pour la commercialisation, la société d'initiative
agro-alimentaire. Ils ont dit: Celle-là aussi, on vote pour, mais
seulement celle-là. On apporte celle des viandes, ce soir, et ils vont
voter pour, mais seulement celle-là. Ces trois ensemble, M. le
Président, c'est 55% de la politique gouvernementale. Ils sont pour
notre politique et ils n'ont pas le courage de le dire, M. le Président.
C'est cela leur problème.
Nous avons amendé nos règlements, M. le Président.
Nous proposons des amendements à la loi actuelle. Notre objectif, il est
net, il est clair: c'est de nettoyer le marché qui existe depuis
longtemps dans ce secteur, c'est de protéger le consommateur, c'est de
donner à la population du Québec une confiance dans ce qui se
produit comme viande au Québec, tant transformée que naturelle.
C'est notre objectif, M. le Président. Ce ne sont pas des discours
décousus et sans fondement, tels celui du député de
Beauce-Sud et celui du député de Saguenay qui vont nous
empêcher d'agir.
M. Roy: M. le Président, j'invoque l'article 96 du
règlement.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Je voudrais attirer
l'attention...
M. Roy:... pour rectifier les faits.
Le Vice-Président (M. Lamontagne):... de l'honorable
député de Beauce-Sud. S'il invoque l'article 96, c'est pour le
discours qu'il a fait ce soir et non pas sur des actions qu'il aurait
posées l'an passé ou avant.
Egalement, j'attire son attention sur une autre chose parce que j'ai
écouté également l'honorable député de
Beauce-Sud à l'occasion de son intervention et cela donnait beaucoup
d'ouvertures aux personnes auxquelles il s'adressait. Je pense que c'est du
parlementarisme que d'accepter les paroles de part et d'autre. Mais, je vous
invite à faire bien attention parce que, si je me suis levé
avant, c'est que le corridor est très étroit.
M. Roy: Je vous remercie, M. le Président. En vertu de
l'article 96, je voudrais rappeler au ministre que je n'ai jamais dit ce soir
il pourra référer au journal des Débats que
j'ai réclamé la survie et le maintien des petits abattoirs sans
inspection. Je n'ai pas parlé de cela, en aucun moment, d'aucune
façon, dans mon intervention. J'ai parlé des petits abattoirs,
c'est vrai, mais j'ai dit que le gouvernement devrait avoir plus
d'inspecteurs.
M. le Président, pour ce que j'ai déclaré sur la
loi 31, j'ai dit ce soir au ministre que la loi avait été
votée en Chambre et j'ai dit au ministre ce soir que c'était la
loi et qu'il était de sa responsabilité de la faire respecter.
C'est tout ce que j'ai dit, M. le Président.
J'ai dit autre chose, mais sur ce point, je veux être bien
précis.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Cette motion de
deuxième lecture est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi. Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. Bienvenue: Je fais motion, M. le Président, pour que ce
projet de loi no 39 soit déféré à la commission de
l'agriculture pour y être étudié article par article.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Cette motion de
déférence est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
M. Bienvenue: Article 11, M. le Président.
Projet de loi no 25
Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable ministre
des Affaires municipales et de l'environnement propose la deuxième
lecture du projet de loi no 25, Loi modifiant la Loi permettant aux
municipalités d'imposer les centres hospitaliers et les centres
d'accueil.
M. Victor Goldbloom M. Goldbloom: M. le Président,
l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce projet de
loi et il en recommande l'étude à la Chambre. Ce qui est une
autre preuve de son intelligence. Après les événements
dramatiques et colorés qui viennent de se dérouler dans cette
Chambre, et je voudrais en féliciter mon collègue de
l'Agriculture...
M. Roy: Je soulève un point de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Beauce-Sud, sur une question de règlement.
M. Roy: Nous venons de disposer d'un projet de loi, et, en vertu
de notre règlement, un interlocuteur n'a pas le droit d'intervenir sur
une chose dont la Chambre vient de disposer. Je dirai au ministre que s'il
avait quelque chose à dire sur la loi...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je suis obligé de vous...
M. Roy:... il faudra qu'il le dise.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): II faut croire que nous
n'entendons pas tout à fait les mêmes choses. J'ai bien entendu le
ministre féliciter son collègue et non pas faire
référence au projet de loi.
M. Roy: Sur quoi m'a-t-il félicité?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): C'est comme vous,
parfois, lorsque vous attaquez le gouvernement, on se demande sur quoi vous
l'attaquez, c'est la même chose.
M. Roy: M. le Président, je pense qu'il peut y avoir des
plaisanteries, mais il y en a qui dépassent vraiment les bornes. C'est
une chose que je n'accepte pas de la part de la présidence de faire des
commentaires sur les propos que tient un député, qu'il soit du
côté ministériel ou de l'autre. Il appartient à la
présidence de faire respecter le règlement; il peut être
d'accord ou non sur les propos que tient un collègue, mais il n'a pas
à faire de commentaire là-dessus. C'est une question
d'intégrité pour la présidence.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Evidemment, je
comprends vos paroles à la suite d'un peu d'humour, à cette
heure, mais vous comprendrez un collègue qui se lève après
trois mots d'un autre collègue et qu'il y a déjà une
question de règlement parce que le seul mot qu'il a dit est de
féliciter son collègue. Je maintiens qu'il y a a bus de questions
de règlement dans cette Chambre, et nous en avons eu un
témoignage vivant, une fois de plus, ce soir.
M. Toupin: Sur une question de règlement, je voudrais
apporter un commentaire.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'hono- rable ministre
de l'Agriculture, question de règlement.
M. Toupin: Cela fait deux fois aujourd'hui, M. le
Président, que le député de Beauce-Sud s'attaque à
la présidence. Cet après-midi, il a dit presque clairement qu'il
n'avait plus confiance à la présidence, et encore une fois ce
soir, il est intervenu dans le même sens. Au nom des membres de cette
Assemblée, je n'accepte pas cette façon de voir les choses. Il me
paraît évident que nous devons, ici dans cette Chambre, respecter
les décisions que prend le président. Tous les
députés doivent s'astreindre à ses décisions.
M. Roy: Sur le même point de règlement...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy:... si le ministre de l'Agriculture avait bien
écouté, j'ai dit cet après-midi que le
président...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
M. Roy:... avait de la difficulté à se faire
écouter par la Chambre, et je viens de dire que le président
n'avait pas à intervenir et à commenter les propos d'un membre de
l'Assemblée nationale. C'est une question de principe, et sur ce point,
c'est dommage, mais je ne peux pas démordre.
C'est une question de principe. Le président n'a pas à
commenter les propos que tient un membre de l'Assemblée nationale. Il
est là pour faire respecter les règlements de la Chambre.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Messieurs, vous avez
dû remarquer que j'avais eu quelque difficulté à prononcer
le mot "féliciter"; c'est parce que je ne l'entends pas souvent.
L'honorable ministre des Affaires municipales et de l'environnement.
M. Goldbloom: M. le Président, je pense bien qu'il n'y a
rien dans notre règlement qui empêche un député d'en
féliciter un autre et je pense bien qu'il n'y a rien dans notre
règlement qui empêche le député de Beauce-Sud de
changer de place avec le député de Rouyn-Noranda pour être
plus près du Parti québécois.
M. le Président, tout ce que je voulais dire, après mes
félicitations, que je crois bien méritées, à
l'endroit de mon collègue de l'Agriculture, c'est que je n'ai pas
l'intention de faire un discours en deuxième lecture, pour une bonne et
simple raison. Pour ce projet de loi et pour les deux qui suivront, le discours
de deuxième lecture a été fait le 17 avril par l'honorable
ministre des Finances. Ce que nous faisons ici ce soir, c'est de confirmer ce
que la population connaît déjà, l'intention du gouvernement
de bonifier le régime de financement municipal.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Chicoutimi.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, concernant
le projet de loi no 25, nous n'avons pas d'intervention à faire, sinon
des questions à poser lorsque nous irons en commission. Egalement...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A l'ordre,
messieurs!
M. Bédard (Chicoutimi):... sur le projet de loi no 26.
Mais, sur le projet de loi no 28, nous voudrions intervenir. Etant donné
que ces trois projets de loi couvrent un même principe, à savoir
une aide aux municipalités, que ce soit par le biais de subventions ou
par la permission de prélever certaines taxes supplementaires, que ce
soit au niveau des centres d'accueil ou au niveau de maisons d'enseignement, je
me demande, M. le Président, s'il y aurait lieu de procéder
à la deuxième lecture sur les trois de manière à
couvrir...
M. Goldbloom: M. le Président, je trouve excellente la
suggestion de l'honorable député de Chicoutimi. S'il veut, pour
sa part procéder immédiatement à son discours sur le
projet de loi no 28, nous pourrons envisager les trois ensemble et en adopter
la deuxième lecture ensemble.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, le
ministre...
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Un instant, s'il vous
plaît. Vous vous apprêtez à parler sur le projet de loi no
28. Il n'a pas été appelé. Si vous voulez l'appeler, je
crois qu'il y a...
M. Bienvenue: Est-ce que tous les membres de cette Chambre
seraient consentants à ce qu'on appelle simultanément et dans un
effort unique les projets de loi no 25, 26 et 28?
M. Bédard (Chicoutimi): C'est ce que je voulais. C'est ce
que j'avais proposé.
M. Bienvenue: Est-ce que le député de Beauce-Sud,
qui ne m'a peut-être pas entendu, mais que je veux consulter aussi,
serait d'accord que nous passions les trois projets de loi?
M. Roy: En même temps et qu'il n'y ait qu'une seule
intervention, je suis d'accord, M. le Président.
M. Bienvenue: Merci. Alors, je vous demande, M. le
Président, d'appeler les trois projets de loi.
Projets de loi nos 26 et 28 Deuxièmes
lectures
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable ministre
des Affaires municipales et de l'environnement propose la deuxième
lecture du projet de loi no 26, Loi modifiant la Loi permettant aux
municipalités d'imposer certaines maisons d'enseignement. L'honorable
ministre des Affaires municipales et de l'environnement propose la
deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi sur les subventions aux
municipalités de 15, 000 habitants ou plus. L'honorable
député de Viau.
M. Picard: M. le Président, le ministre doit faire la
lecture de la petite prière dans chacun des cas.
M. Goldbloom: M. le Président, trois fois, le
lieutenant-gouverneur nous a prié, avec insistance, d'étudier ces
projets de loi.
M. Roy: Est-ce que le ministre peut nous dire quand il a eu cette
rencontre avec le lieutenant-gouverneur?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable
député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, le
ministre des Affaires municipales vient de nous dire qu'il ne voit pas la
nécessité d'intervenir puisque l'intervention principale a
été faite par le biais du discours du budget.
Il est clairque le ministre comme l'Opposition et tous les
députés de cette Chambre ont été à
même de constater certaines augmentations de crédits à
l'intérieur du budget qui ont été affectées
à des fins municipales. Loin de nous la pensée que c'est une
mauvaise chose, mais il ne faudrait quand même pas que les maires des
municipalités, que la population et surtout que le ministre croient que
ces subventions, dont une très grande partie est conditionnelle à
des projets, des priorités et des normes nationales et non locales, il
ne faudrait pas que le ministre essaie de nous faire croire que le discours du
budget avec les augmentations qu'il comportait a réglé l'ensemble
du problème de la fiscalité.
Au contraire, je crois que ces subventions et leur augmentation sont
tout simplement l'aveu du blocage de la fiscalité locale et de
l'insuffisance majeure des sources actuelles de taxation du point de vue local.
Il est clairque ce n'est pas notre intention d'être contre ces trois
projets de loi qui annoncent des subventions aux municipalités de 15,
000 habitants et plus, qui annoncent aussi des subventions qui permettront aux
municipalités, par le biais du projet de loi no 26, d'imposer un peu
plus certaines maisons d'enseignement. Ce n'est pas notre intention
d'être contre le projet de loi no 25 non plus qui, comme vous le savez,
permettra aux municipalités d'imposer un peu plus les centres
hospitaliers et les centres d'accueil.
Cependant, il faut admettre une chose, c'est que le gouvernement n'avait
pas le choix. Il lui fallait nécessairement, dans son discours du
budget, annoncer des hausses de subventions aux municipalités et
annoncer des mesures qui étaient de nature à aider
financièrement les municipalités puisque, comme on le sait, et le
gouvernement le savait a ce moment-là, les gouvernements municipaux
étaient tout simplement au bord de la faillite. Il est clair que les
mesures qui ont été annoncées par le gouvernement,
même si elles ont un certain effet bénéfique
pour les édiles municipaux, sont loin d'assurer l'état de
santé financier des municipalités.
Nous savons très bien, et le ministre le sait aussi, que les
municipalités se voient de jour en jour confrontées avec des
responsabilités accrues. Que ce soit dans le domaine de l'environnement,
que ce soit dans le domaine des loisirs, les municipalités voient leurs
responsabilités augmenter. Je crois qu'on pourrait citer
également les responsabilités supplémentaires auxquelles
elles ont à faire face dans le domaine des services
récréatifs et communautaires dont l'augmentation entre I964 et
I974 a été de 74%.
Il en va de même d'une autre responsabilité qui
échoit aux municipalités, à savoir l'obligation de veiller
à la qualité de l'eau potable et, dans des cas encore trop
limités naturellement, de l'épuration des eaux. Il en va de
même de certaines responsabilités qu'ont les municipalités
de créer des espaces verts, d'être impliquées de plus en
plus dans la vie culturelle de leurs citoyens, d'être également,
et cela, nous le savons à travers tout le Québec, aux prises
continuellement avec le problème que constitue pour eux le transport en
commun.
Tout ce que cela représente de dépenses pour ces
municipalités et leurs citoyens fait que que les municipalités,
à l'heure actuelle, sont tiraillées entre les services importants
qu'elles doivent donner et un endettement aussi impopulaire que les hausses de
la taxe foncière, c'est-à-dire la pression d'une taxesur le
logement, bien aussi fondamental que les médicaments ou la
nourriture.
Je crois que ce n'est pas parce que le Québec n'a pas le courage
politique d'aller chercher l'argent qui lui est dû à Ottawa que
les municipalités doivent nécessairement tirer de la langue et
baisser la qualité des services qu'elles sont dans l'obligation de
donner à leurs citoyens. Je mentionnais, tout à l'heure, le taux
d'endettement des municipalités. J'ai eu l'occasion de le citer
déjà, le Bureau de la statistique du Québec est
très clair sur ce point et montre jusqu'à quel point
l'état financier des municipalités est catastrophique. Entre
autres, le Bureau de la statistique du Québec disait ceci: Entre les
années I960 et I970, les revenus et dépenses courantes du
gouvernement provincial étaient deux fois plus élevés que
ceux des municipalités, mais cet écart s'est élargi
jusqu'à six fois.
Le Bureau de la statistique continuait en disant: Alors que
l'augmentation annuelle moyenne des revenus du Québec a
été de 19. 3%, cette croissance était de 10% pour
l'ensemble des municipalités. Le Bureau de la statistique du
Québec concluait en disant que l'écart s'élargit à
tel point que le déficit des municipalités serait
multiplié par quatre entre 1973 et 1980. Ce projet de loi, s'il annonce
une certaine aide aux municipalités, ne doit pas contribuer à
endormir le ministre dans un état de béatitude, s'imaginant qu'il
a réglé une grande partie des problèmes des
municipalités. Loin de là. En plus de toutes les
responsabilités nouvelles qu'ont les municipalités, il y a
également les cadeaux de Grecs, si je peux employer l'expression, que
fait le gouvernement aux municipalités, entre autres, lorsqu'elles lui
cèdent certaines routes, lorsqu'elles lui cèdent certains chemins
et qu'il leur en impose l'entretien. Il leur annonce une certaine subvention,
mais il arrive très régulièrement et très
fréquemment que les subventions qui sont données par le
gouvernement ne couvrent pas les frais d'entretien qui sont imposés aux
municipalités, ce qui veut dire qu'au bout de la ligne, ce qui devait
être une sorte de cadeau de la part du gouvernement se solde par une
dette supplémentaire à payer par les municipalités, ce qui
les oblige, d'une certaine façon, à recourir à la taxation
de ceux qu'ils ont à administrer.
On sait jusqu'à quel point, déjà, ces citoyens sont
surtaxés. Des exemples de cadeaux de Grecs, on pourrait en apporter
plusieurs autres. Je ne veux pas être trop long, mais j'ai eu l'occasion
de visiter plusieurs conseils municipaux, tant celui de la ville de
Québec qu'en dehors de Québec, et il est clair que cette
habitude, qu'a prise le gouvernement de remettre entre les mains des
municipalités certains bouts de route ou certaines rues a pour effet
qu'on oblige encore une fois les municipalités à faire face
à des dépenses supplémentaires. Je crois, encore une fois,
que le ministre ne doit pas s'endormir sur la petite législation qu'il
présente aujourd'hui.
La situation financière des municipalités est
précaire et également leur autonomie. Cette autonomie dont elles
ont besoin pour planifier leur développement est de plus en plus
mitigée, ce qui les oblige à multiplier les pèlerinages,
les courbettes, les processions auprès du gouvernement du Québec,
afin d'obtenir des subventions pour répondre à leurs besoins.
M. le Président, je crois qu'on peut facilement dire que le
Québec des libéraux, si on se place au niveau des affaires
municipales, est un Québec à genoux, avec des
municipalités qui, continuellement, ont à venir quémander
au gouvernement du Québec des ressources financières, pour faire
face à leurs responsabilités. Le gouvernement entretient cet
état de choses je ne sais pas si c'est parce q ue c'est rentable
politiquement cette situation, puisqu'il n'a pas encore cru bon de
penser véritablement à l'autonomie des municipalités, en
libérant, par exemple, des sources de taxation qui puissent permettre
aux municipalités de planifier leur développement et de les
empêcher d'être toujours courbées devant le gouvernement du
Québec, quand ce n'est pas le gouvernement fédéral.
M. le Président, le ministre n'a pas à avoir le sourire
trop large, ce soir, puisqu'il sait très bien jusqu'à quel point
il y a une nécessité, à l'heure actuelle, d'une
réforme globale de la fiscalité municipale, jusqu'à quel
point cette réforme globale est nécessaire. Ce n'est pas
seulement l'Opposition qui le dit, c'est également la requête qui
a été faite au ministre des Affaires municipales par l'Union des
municipalités et par les conseils de comté. Je sais que, lors de
la conférence provinciale-municipale, qui a eu lieu récemment,
les municipalités ont eu l'occasion de formuler, non pas des souhaits,
mais des exigences très précises au gouvernement du
Québec, lesquelles exigences se devaient d'être satisfaites si le
gouvernement du Québec croyait vraiment à la
nécessité de l'autonomie des municipalités, si le
gouvernement du Québec croyait vraiment
à la santé nécessaire financière des
municipalités. Les gouvernements municipaux, le ministre le sait,
étant les gouvernements les plus près des gens, les plus
près de la population, les plus aptes à connaître les
besoins de cette population, ces gouvernements municipaux si je peux
employer l'expression se doivent d'être pourvus de moyens
financiers qui puissent leur permettre de remplir pleinement leurs
responsabilités. Pas seulement une responsabilité qui consiste
à essayer d'avoir les bonnes grâces du ministre, pas seulement une
sorte de responsabilité qui se concrétise par les jeux de
coulisse ou encore les jeux d'influence afin d'obtenir du gouvernement le plus
de subventions possible pour leurs administrés, mais, au contraire,
qu'ils aient affaire à un gouvernement qui attaque le problème de
fond, le problème de la réforme de la fiscalité
municipale.
D'ailleurs, les municipalités, lors du dernier congrès
dont je faisais état tout à l'heure, l'Union des conseils de
comté ont demandé au ministre des Affaires municipales,
étant donné qu'ils en voyaient l'urgence, de consentir qu'il y
ait au plus vite la formation d'une commission autonome afin d'étudier
tout le problème de la fiscalité municipale.
Il est clair que le ministre, avec le sourire, a répondu
puisqu'on peut dire qu'on a un ministre, M. le Président, qui est
marqué du signe du sourire avec beaucoup d'empressement, avec
force courbettes, avec un ton très serein aussi, aux demandes des
municipalités et des conseils de comté. Il s'est engagé
à acheminer leurs demandes au niveau du conseil des ministres. Il a fait
tout cela, M. le Président, avec le sourire, mais de là à
acheminer les demandes des municipalités et des conseils de comté
au conseil des ministres, et le fait de s'engager à défendre ces
demandes devant le conseil des ministres, ce sont deux choses, M. le
Président. Ce sont tellement deux choses que nous avons
déjà eu, il n'y a pas tellement longtemps la semaine
passée, je crois l'occasion de demander au ministre des Affaires
municipales s'il avait l'intention de donner suite à cette demande de
l'Union des municipalités pour la formation d'une commission autonome et
non pas d'une commission ministérielle, parce qu'on sait que cela tourne
toujours en rond et que cela mène souvent nulle part. Cela ne fait,
souvent, que justifier bien des retards.
Lorsque nous avons demandé au ministre s'il avait l'intention de
défendre cette demande de l'Union des municipalités, il nous a
répondu, tout simplement, qu'il allait acheminer cela vers le conseil
des ministres, sans s'engager plus qu'il ne faut.
M. le Président, je crois que le ministre sait très bien
qu'il y a, en plus des éléments dont j'ai parlé tout
à l'heure, à savoir, libérer des sources de taxation,
à savoir, la réforme, une fois pour toutes, de la
fiscalité municipale, d'autres manières aussi d'aider les
municipalités. Le ministre retarde indûment à poser des
gestes qui aideraient vraiment les municipalités à planifier leur
développement. Ce n'est pas mon intention, M. le Président, de
développerce point, mais je voudrais, entre autres, mentionner que le
ministre devrait faire preuve de beaucoup plus d'acharnement à faire
respecter les lois et les règlements sur l'environnement.
Continuellement, dans les municipalités, ces lois sont violées,
et dans ce cas comme dans bien d'autres, au niveau du gouvernement, on assiste
encore à la situation de ministres qui ne s'occupent pas de faire
respecter les règlements des lois qu'ils font adopter.
Il y a également une manière d'aider les
municipalités à planifier leur développement, de les
aider, du point de vue financier, entre autres, en édictant, au plus
vite, une loi sur la spéculation foncière. On sait jusqu'à
quel point la spéculation foncière est de nature à
gêner et, quelquefois même, M. le Président, à faire
rater complètement, faire avorter le désir qu'ont certaines
municipalités de se développer. Entre autres, on a eu l'occasion
de mentionner au ministre des Affaires municipales le cas d'un
développement, dans Québec, à savoir, Lebourg-neuf,
où il est très clairement établi que la spéculation
foncière est à ce point importante qu'elle est en train de
risquer de compromettre le développement qui est envisagé.
On a eu l'occasion, M. le Président, lors de la discussion des
crédits, de demander d'ailleurs, le ministre avait
accédé à cette demande une enquête sur la
spéculation foncière dans la région de l'Outaouais. Le
rapport devait être normalement déposé au mois de mai. Nous
n'en avons pas entendu parler, M. le Président. Il nel'est pas
encore.
Il y a d'autres manières aussi, pour le ministre des Affaires
municipales, de sortir de cet état de négligence dans lequel il
se complait, d'aider les municipalités.
Il y a entre autres, par exemple, en essayant de voir à ce que
soit adoptée, le plus vite possible je comprends qu'il y a des
études là-dessus une loi sur l'urbanisme, qui aiderait les
municipalités, encore une fois, à planifier leur
développement.
Je sais pertinemment, M. le Président, que sur la question de
l'urbanisme, il y a quand même le groupe Castonguay qui fait une
étude et qui doit remettre son rapport à l'automne, mais je
voudrais quand même soulignerque cette loi aété
annoncée à plusieurs reprises et à la fin du compte, elle
n'a jamais été votée et elle est remise de session en
session.
M. le Président, je crois que le ministre nous propose ce soir
trois lois qui ont pour effet d'aider financièrement les
municipalités. Mais, encore une fois, j'espère que ce n'est pas
avec une petite législation comme celle-là que le ministre va se
croire justifié de s'endormir paisiblement et de croire qu'il a
réglé un peu les problèmes des municipalités.
Le Président suppléant (M. Picard): Le
député de Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: M. le Président, quelques mots seulement sur les
projets de loi nos 25, 26 et 28. Je veux rassurer le ministre tout de suite en
lui disant que l'intervention ne sera pas longue puisque ce sont des choses qui
ont été discutées lors du discours du
budget. Nous avons abordé largement le problème du
financement municipal à l'occasion d'un mercredi, alors que j'avais
présenté une motion en vue de doter le Québec d'un Office
de crédit municipal pour aider les municipalités du
Québec.
J'aimerais dire, tout simplement, à l'honorable ministre qu'il ne
faudrait pas considérer que ces trois lois constituent des pièces
majeures dans les politiques gouvernementales.
Une Voix: Question de règlement!
M. Bossé: Est-ce que je pourrais demander une directive?
Je voudrais signaler la présence du député de Vanier dans
les galeries, puisqu'il est de passage.
Le Président suppléant (M. Picard): Le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Je n'ai pas compris les propos de notre collègue
de Dorion, M. le Président.
M. Bossé: M. le Président, je ne crois pas que le
député de Beauce-Sud comprenne souvent parce qu'il aurait fallu
qu'il regarde en arrière de lui.
Le Président suppléant (M. Picard): A l'ordre, s'il
vous plaît! Le député de Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, je disais donc que ces trois lois
ne doivent pas être interprétées, de la part du
gouvernement, comme étant la politique financière gouvernementale
pour venir en aide aux municipalités du Québec de façon
à pouvoir avoir le plus de souveraineté possible. S'il y a des
gouvernements qui devraient avoir le maximum de souveraineté pour
être capables d'administrer selon les besoins de leurs populations et
selon leurs désirs, c'est bien les municipalités du
Québec. Mais, M. le Président, on doit admettre à ce
moment-ci que les municipalités ont de plus en plus de
difficultés; les hausses de taxes sont considérables et beaucoup
de municipalités doivent attendre pendant des mois, voire même des
années, avant de pouvoir mener à terme des projets majeurs.
Je dis, M. le Président, que c'est un domaine où le
gouvernement devra porter une attention particulière au cours des
prochains mois, au cours de l'an prochain, de façon à
éviter que la plupart des municipalités du Québec soient
bientôt sous la tutelle gouvernementale. Parce que c'est
extrêmement inquiétant, à l'heure actuelle, pour un grand
nombre de nos municipalités du Québec, qui ont de plus en plus de
difficultés à se financer.
M. le Président, pour ce qui a trait aux projets de loi nos 25 et
26, il s'agit de la taxation. On permet aux municipalités du
Québec d'imposer une taxe à des institutions qui vivent et qui
fonctionnent par la taxation. Ce sont, en quelque sorte, deux lois qui visent
à taxer les taxes que paient les citoyens du Québec, pour
établir un soi-disant équilibre entre les municipalités
qui disposent de services dans le domaine de l'éducation ou dans le
domaine hospitalier par rapport aux autres municipalités qui n'ont pas
ces services.
Pour ce qui a trait au projet de loi no 28, M. le Président, je
n'ai pas l'intention de reprendre tous les propos que j'ai tenus l'an dernier,
mais je pense qu'ils sont encore à propos.
Je dis à l'intention du gouvernement que plusieurs comtés
du Québec ont des agglomérations qui comptent plus de 15, 000
âmes mais qui ne peuvent pas bénéficier de ces subventions.
Pourtant, les besoins sont les mêmes. Ce n'est pas parce qu'une
agglomération de 15, 000, 16, 000 ou 17, 000 âmes a deux
municipalités que les besoins sont moindres pour la population qui y
demeure. Je le dis encore une fois, je le répète à
l'intention de l'honorable ministre: II s'agit d'une loi un peu coercitive dans
ce domaine, qui a pour objet indirect de favoriser le regroupement municipal,
alors qu'il y a des endroits où ce regroupement municipal n'est pas
désiré par la population, qu'il n'est pas dans leur
intérêt qu'il soit fait. Il est malheureux que ces populations
soient pénalisées par le fait qu'elles pourraient
bénéficier d'une subvention, si la municipalité
était élargie, de $6 par tête.
M. le Président, pour ce qui a trait aux comtés de
Beauce-Sud, de Beauce-Nord, de Montmagny-L' Islet, de Bellechasse, de
Montmorency, et je passe plusieurs comtés il n'y a pas d'argent
prévu dans le projet de loi présenté par l'honorable
ministre. Je sais que j'ai l'appui de mes collègues de ce
côté-là. Je dis même que si ces projets de loi sont
bons pour les municipalités qui peuvent en bénéficier, il
ne faudrait pas les interpréter comme étant la politique de
financement municipale du gouvernement provincial. Le gouvernement devra aller
plus loin dans ce domaine. Le règlement m'interdit de revenir sur la
motion que nous avons discutée l'autre jour, mais il va falloir que le
gouvernement fasse preuve de plus d'imagination pour permettre aux
municipalités du Québec d'être vraiment plus efficaces,
d'être à la hauteur de la situation et d'offrir davantage à
leurs citoyens.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): La réplique,
pour les trois projets de loi du ministre des Affaires municipales et de
l'environnement.
M. Victor Goldbloom
M. Goldbloom: M. le Président, je serai très bref,
mais je voudrais tout de même relever certains commentaires de nos deux
collègues péquistes. L'honorable député de
Chicoutimi a fait allusion à des subventions conditionnelles, mais si
nous présentons trois projets de loi, c'est pour, effectivement, rendre
ces subventions statutaires en vertu d'une loi. Il n'y a rien de conditionnel
là-dedans.
M. Bédard (Chicoutimi): Je vous ai parlé de celles
qui demeurent conditionnelles et qui sont encore beaucoup trop nombreuses.
M. Goldbloom: II y en a qui demeurent conditionnelles,
mais...
M. Bédard (Chicoutimi): Qui sont l'objet de patronage,
c'est de cela que je vous ai parlé.
M. Goldbloom: Mais, M. le Président, quand on a 80% des
municipalités du Québec qui ont moins de 1, 000 de population, il
n'est pas possible de les rendre autosuffisantes et de les faire vivre avec des
subventions statutaires. Il faut garder des fonds pour pouvoir utiliser cet
argent là où on en a besoin.
M. Bédard (Chicoutimi): Vous distribuez des chèques
aux députés pour qu'ils les remettent à leur conseil
municipal.
M. Goldbloom: Nos deux collègues ont, tous les deux,
parlé des municipalités qui seraient, selon eux, au bord de la
faillite. Je reconnais que la nature humaine étant ce qu'elle est, quel
que soit le niveau de taxe dans une municipalité, à peu
près tout le monde dit: On est pris à la gorge, on est
surtaxé, impossible pour nous de payer un cent de plus. Mais lorsque
l'on analye la situation financière des municipalités selon des
barèmes uniformes, on trouve qu'elle se situe sur un éventail
assez large et qu'il y a des gens qui se plaignent d'être surtaxés
qui ne paient pas la moitié de ce que paient ceux qui sont vraiment
surtaxés.
Alors, cette idée que l'on ne doit pas laisser répandre,
voulant que les municipalités sont sur le bord de la faillite, est une
idée qu'il faut examiner de façon objective. Quand on l'examine,
on trouve que oui, on paie des taxes qui sont élevées, qui sont
lourdes, et même, dans de rares cas, exagérées.
Mais quand même, c'est un équilibre raisonnable que l'on
doit chercher entre l'effort local et l'effort collectif qui se traduit par
l'attribution de subventions. Je pense que c'est le député de
Chicoutimi qui a indiqué que le déficit des municipalités
doublerait entre I973 et I980...
M. Bédard (Chicoutimi): Ce n'est pas le
député de Chicoutimi, c'est le Bureau de la statistique du
Québec.
M. Goldbloom: D'accord, mais quand même...
M. Bédard (Chicoutimi): Si vous voulez faire une sortie
contre le Bureau de la statistique du Québec, vous pouvez y aller.
M. Goldbloom: Mais, M. le Président, il faut une mise au
point. La loi exige un budget équilibré. Ce n'est pas le
déficit qui peut doubler, c'est la dette possiblement, mais pas le
déficit. La dette, c'est autre chose. Il y a des investissements que
nous faisons aujourd'hui pour les générations futures et nous ne
sommes pas obligés de tout payer nous-mêmes. Cela est normal. Si
nous implantons dans des municipalités des équipements qui
doivent être utiles pour 40, 50 ou 75 ans, on n'est pas obligé de
tout payer aujourd'hui. Le fait d'imposer un certain fardeau de dettes est une
chose absolument normale et désirable.
Enfin, M. le Président, on parle pour la nième fois des
pèlerinages et de façon péjorative. Je ne trouve pas
mauvais que des municipalités viennent voir le ministre des Affaires
municipales ou les autres ministres. J'ai dit à répétition
que j'aurais honte si une municipalité devait venir plusieurs fois pour
le même dossier; mais qu'une municipalité vienne saisir le
ministre des particularités de son problème, je trouve que c'est
normal et souhaitable. Je me dirige vers les municipalités pour les
visiter chez elles. Quand on parle de courbettes, M. le Président, je
dis tout simplement en terminant: Quand on reçoit des amis, on ne leur
fait pas faire des courbettes.
Le Vice-Président (M. La montagne): Ces motions de
deuxièmes lectures sont-elles adoptées?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxièmes lectures de ces
projets de loi. Second readings of these bills.
M. Bienvenue: M. le Président, tout en priant nos
collègues de rester avec nous encore quelques minutes, je vous prierais,
avec beaucoup de respect, de quitter le fauteuil pour que nous siégions
en commission plénière. Je comprends que le député
de Chicoutimi aura quelques courtes questions à poser au ministre des
Affaires municipales relativement aux bills no 25, 26 et 28.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'honorable leader
adjoint du gouvernement propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la
Chambre se forme en commission plénière pour l'étude
article par article des projets de loi 25, 26 et 28. Cette motion est-elle
adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Adopté.
Commission plénière
Le Président (M. Pilote): Article I du projet de loi no
25.
M. Bédard (Chicoutimi): Une seconde, s'il vous
plaît. Au projet de loi no 25, je n'ai pas de question à
poser.
Le Président (M. Pilote): Alors l'article I est
adopté? L'article 2 est adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): Article 3, adopté?
Article 4, adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): Le projet de loi no 26. Article
I.
M. Bédard (Chicoutimi): Au projet de loi no 26, article
2.
Le Présider* (M. Pilote): Est-ce que cela veut dire que
l'article I est adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Une seconde, M. le
Président. Au niveau de ce projet, c'est plutôt une question que
je voudrais poser au ministre. La loi parle de la possibilité pour les
municipalités de taxer plus certaines maisons d'enseignement. J'imagine
qu'il s'agit, puisque rénumération n'en est pas faite dans la
loi, des CEGEP, des universités. Est-ce que dans l'esprit du ministre il
peut y avoir d'autres taxations possibles?
M. Goldbloom: Evidemment, la définition est
déjà faite dans la loi. Pour aller plus loin, il faudrait
réaménager le budget de la province pour effectuer un transfert
additionnel du ministère de l'Education vers les municipalités.
Ce n'est pas immédiatement l'intention du gouvernement de le faire. Ce
n'est pas une porte qui est fermée. Il est possible que l'on examine
l'opportunité d'élargir ce champ, mais, pour l'instant, le champ
demeure ce qu'il est et les montants sont augmentés.
M. Bédard (Chicoutimi): Je voudrais savoir du ministre si
la taxation, dont il est question dans la loi, vise les collèges
privés d'enseignement également. Si elle visait seulement les
collèges publics, à ce moment, il y aurait quand même une
situation que je voudrais bien que le ministre m'explique, une situation
beaucoup plus favorisée pour les institutions d'enseignement
privé, par rapport aux institutions publiques.
M. Goldbloom: La question du député de Chicoutimi
est un peu particulière. S'il me permet quelques secondes de
consultation, j'aimerais les prendre avant de lui répondre.
M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre comprendra que le but
de ma question est de savoir s'il y a un régime de faveur
institué d'une certaine façon en faveur des collèges
privés, par rapport au secteur public.
M. Goldbloom: Je pense que la réponse se trouve dans la
loi qui est modifiée par le projet qui est devant nous. C'est le
chapitre 51 des lois de I97I. Le premier article définit l'expression
"maison d'enseignement", et cela, de la façon suivante, je ne fais pas
lecture de tout l'article, mais je veux simplement résumer: "Une
université, un collège d'enseignement général et
professionnel au sens de la loi créant ces institutions, et tout autre
établissement dispensant l'enseignement au niveau collégial ou
universitaire que désigne le lieutenant-gouverneur en conseil. "
A ma connaissance, le lieutenant-gouverneur en conseil n'a pas
désigné d'institutions privées pour les soumettre à
l'application de la loi.
M. Bédard (Chicoutimi): Dans l'esprit du minis- tre,
est-ce que cela ne crée pas une sorte de situation plus favorable pour
les institutions privées, par rapport aux institutions publiques,
puisque les institutions privées n'étant pas visées par ce
projet de loi, il n'y a rien qui nous assure que le même mode de taxation
leur sera imposé?
M. Goldbloom: Je comprends l'argumentation du
député de Chicoutimi. Il est vrai que cela peut sembler
créer un avantage aux institutions privées. Quand même, je
dois souligner que c'est, en fin de compte, le gouvernement qui effectue le
transfert. Si l'on assujettissait les institutions privées à
l'application de la loi, on serait obligé de leur donner une
compensation, ce que l'on peut faire facilement dans le cas des CEGEP, puisque
la contribution du gouvernement est annuelle, mais dans le cas des institutions
privées, il faudrait une compensation directe, qui n'est pas
prévue présentement. Ce n'est pas une question de donner un
avantage à l'un ou l'autre des deux réseaux.
M. Bédard (Chicoutimi): Mais, le ministre admettra qu'au
bout de la ligne, lorsqu'on fait le compte, il y a quand même une
tendance, à moins qu'elle ne soit corrigée, à favoriser
plus le secteur privé que le secteur public. Cette situation peut
exister.
M. Goldbloom: Je ne le crois pas, M. le Président, parce
que l'institution privée ne paie pas les taxes en question.
L'institution publique est l'objet d'un transfert de fonds et la
différence est nulle parce que l'argent passe par l'intermédiaire
du CEGEP, par exemple, pour être versé dans les coffres de la
municipalité pour que la municipalité ne soit pas
pénalisée. Le CEGEP n'est ni gagnant ni perdant.
M. Bédard (Chicoutimi): Enfin, on aura l'occasion d'y
revenir. Je voulais avoir des éclaircissements du ministre. Alors, je
n'ai pas d'autre question sur ce projet de loi.
Le Président (M. Pilote): Article I, adopté?
L'honorable député d'Argenteuil.
M. Salndon: J'aurais une question à poser au ministre des
Affaires municipales. Est-ce que ce projet de loi touche les écoles
polyvalentes et les régionales? Il faut se rappeler qu'au dernier
changement de la loi de nombreuses municipalités avaient fait leur
budget sur l'ancienne loi et lorsque les derniers amendements sont
arrivés plusieurs municipalités se sont retrouvées avec un
déficit budgétaire. Je me demande si votre projet de loi va
rajuster les évaluations et les taxes des polyvalentes et des
régionales.
M. Goldbloom: M. le Président, je dois répondre
à mon collègue d'Argenteuil que le projet de loi que nous
étudions présentement n'effectue pas ce redressement qu'il
souhaite. Par contre, c'est cette année que nous avons baissé le
taux normalisé de la taxe scolaire de $1. 25 à $1. 05 à
l'avantage des municipalités. C'est notre désir de compenser
certaines
pertes subies par les municipalités. On a fait mention de la
remise de route, on a fait mention du fait que certaines institutions ne sont
pas imposables et que les municipalités ont été les
perdantes dans cela. Reconnaissant cette situation, on a voulu compenser par un
transfert effectué par une modification du taux normalisé de la
taxe scolaire.
Le gouvernement n'a pas, jusqu'à maintenant, voulu englober dans
l'application de cette loi les institutions de niveau secondaire. Mais, comme
je l'ai dit au député de Chicoutimi tout à l'heure, je
n'exclus pas la possibilité que le gouvernement se penche sur cette
question. Je ne peux aller plus loin pour le moment. Je suis conscient du fait
que des municipalités ont perdu des revenus importants à cause
des ajustements que nous avons faits dans l'assiette de taxation.
M. Bédard (Chicoutimi): Lorsque le ministre parle de la
normalisation des rôles d'évaluation concernant la taxe scolaire,
j'espère que le ministre admettra avec moi que ce qui avait
été annoncé, si on regarde l'année qui vient de
finir, comme une diminution de $0. 15 je crois, de la part du ministre
des Finances, étant donné qu'il y a eu la normalisation des
rôles d'évaluation que cela a représenté au
bout de la ligne une augmentation de taxe entre $43 millions et $50 millions et
cela de l'aveu même des commissions scolaires.
M. Goldbloom: L'honorable député...
M. Bédard (Chicoutimi): Si vous me permettez, M. le
Président. Lorsque, dans le budget, on a annoncé une baisse de
$0. 20 de l'impôt scolaire, une grande partie de cette baisse n'avait
pour fonction que de compenser pour une augmentation qui avait eu lieu
l'année dernière.
M. Goldbloom: L'honorable député de Chicoutimi a
raison, s'il parle du passé, mais pas s'il parle de cette année.
C'est-à-dire que dans le passé il est vrai que la baisse qui
était plutôt lente $0. 05 à la fois a
été compensée par des augmentations des dépenses
dites inadmissibles et aussi par des ajustements au rôle
d'évaluation lui-même.
Cette année, nous avons mis un plafond sur l'augmentation de
l'évaluation, un plafond de 10% d'augmentation, et nous avons
baissé de $0. 20 le taux normalisé. L'effet de cette mesure sera
de baisser d'au moins $40 millions la masse monétaire perçue par
les commissions scolaires. Cela ramènera cette masse au niveau d'il y a
deux ans. Entre-temps, puisque les dépenses des commissions scolaires
sont à la hausse, comme celles de tout le monde, la compensation qui se
trouve dans le budget du ministère de l'Education est presque le double
du montant que j'ai indiqué. C'est-à-dire que les commissions
scolaires recevront plus, les municipalités recevront plus aussi, dans
la mesure qu'elles profiteront de la baisse pour augmenter leur perception et
le gouvernement comblera la différence. La masse monétaire
perçue par les commissions scolaires devra baisser d'au moins $40
millions par rapport à 1974/75.
Le Président (M. Pilote): Article 1, adopté.
Article 2, adopté. Article 3, adopté.
M. Bédard (Chicoutimi): Une seconde, M. le
Président. Où en êtes-vous, au projet de loi no 26?
Le Président (M. Pilote): Le projet de loi no 26, vous
m'avez dit que c'était adopté.
Projet de loi no 28, Loi sur les subventions aux municipalités de
15, 000 habitants et plus. Article 1.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, article 1,
adopté. Au niveau de cet article, je voudrais simplement fournir une
explication au ministre qui a parlé tout à l'heure des
déficits des municipalités et s'est référé
au service de la dette, disant qu'il fallait faire la différence. Il est
évident que nous savons faire la différence entre les deux, mais
je voudrais simplement informer le ministre que le Bureau de la statistique,
concernant le sujet sur lequel je lui ai cité certains chiffres qui
montraient jusqu'à quel point les municipalités étaient
dans une situation financière difficile, concernant le service de la
dette, prétendait que celui-ci continuerait de ronger 26% des
dépenses municipales, soit $70 par habitant, trois fois le montant des
sommes d'argent dépensées pour les services
récréatifs et culturels. Il prétendait que pour les six
années de 1964 à 1970, le service de la dette municipal avait
augmenté de 81%.
M. Goldbloom: M. le Président, le député de
Chicoutimi se rachète en précisant qu'il parle de dette et pas de
déficit.
M. Bédard: Je ne me rachète pas, je veux simplement
vous préciser cela.
M. Goldbloom: Justement, il est clair que les investissements
à long terme qui sont faits, les immobilisations qui sont faites
augmentent le service de la dette, mais je voudrais souligner que la Commission
municipale du Québec a, entre autres responsabilités, celle de
surveiller l'endettement des municipalités et qu'elle nous avertit si,
dans un cas particulier, le service de la dette commence à
représenter une proportion trop importante du budget de la
municipalité. Cela nous préoccupe. Il y a un montant raisonnable
que l'on peut porter comme dette à long terme et cela à cause du
phénomène que j'ai indiqué, que les immobilisations valent
pour les générations futures. Il ne faut pas cependant que cela
soit exagéré. Je suis pleinement d'accord avec le
député de Chicoutimi là-dessus. C'est pour cela que nous
avons la Commission municipale du Québec dont c'est la
responsabilité d'être chien de garde en ce qui concerne
l'endettement des municipalités et de nous avertir d'allumer la
lumière rouge si le service de la dette devient exagéré
dans une municipalité donnée.
M. Bédard (Chicoutimi): Je veux simplement souligner que
le ministre m'avait bien mal compris s'il a pensé que je voulais me
racheter en lui citant ces chiffres. Au contraire, je voulais lui prouver
jusqu'à quel point le service de la dette constituait une partie
beaucoup trop importante. Les revenus des municipalités sont
englobés par le service de la dette. A ce moment, cela prouvait
jusqu'àquel point, sur cet aspect bien particulier, les
municipalités étaient en situation difficile.
M. le Président, sur le projet de loi 28, article I,
adopté?
Le Président (M. Pilote): L'honorable député
d'Argenteuil avait une question.
M. Salndon: M. le Président, c'est une question au
ministre, touchant les subventions en compensation aux municipalités de
15, 000 de population ou plus. Ce que j'aimerais savoir, c'est sur quel
recensement ces chiffres se basent. Depuis quelques années, depuis le
dernier recensement, certaines municipalités ont vu leur population
augmenter assez rapidement; notamment, à Lachute, la population augmente
assez rapidement. Si on se fie au dernier recensement, ces chiffres ne
révèlent pas du tout la population actuelle.
A ce moment, il y a certaines municipalités qui peuvent,
peut-être, ne pas recevoir des compensations auxquelles elles auraient
droit.
M. Goldbloom: La population de Lachute n'a pas connu de chute.
Bon!
M. le Président, jusqu'à cette année, nous avons
dû nous fier aux chiffres fédéraux, chiffres quinquennaux
du recensement, et nous avons été frappés par le
développement rapide de certaines municipalités dans les
périodes de cinq ans entre les recensements fédéraux. Nous
n'avions pas de mécanisme valable, jusqu'à cette année,
pour déterminer nous-mêmes le vrai chiffre de population. Nous
avons constaté un certain enthousiasme de la part des
municipalités, en fournissant leurs propres chiffres. Pour cette raison,
nous avons consulté notre Bureau de la statistique et nous avons
développé, avec lui, un mécanisme qui se reflète
dans les annexes au discours du budget. Ainsi, dorénavant, au lieu de
prendre le chiffre du recensement fédéral de 1971, nous prendrons
le chiffre déterminé par une courbe établie par notre
Bureau de la statistique, un chiffre, donc, réaliste, par rapport au
développement d'une municipalité. Dorénavant, cela
s'appliquera à toutes les subventions données par rapport
à la population sauf, jusqu'à maintenant, dans le cas de la
redistribution de la taxe de vente. Cette loi n'a pas été
changée jusqu'à maintenant.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président...
Le Président (M. Pilote): L'article I est adopté.
Article 2.
M. Bédard (Chicoutimi): A l'article 2, il s'agit du
recensement, M. le Président. Je suis bien heureux que le ministre ait
décidé de laisser tomber ce qui existait auparavant, à
savoir le fait de se fier au recensement fédéral de tous les cinq
ans. Cela répond, d'ailleurs, à une suggestion qu'avait faite,
à maintes reprises, le Parti québécois. Il est clair que
nous sommes d'accord sur cette...
M. Goldbloom: La paternité universelle.
M. Bédard (Chicoutimi):... ouverture d'esprit du ministre,
qui n'est que justice, remarquez. Mais je voudrais savoir s'il va y avoir une
certaine flexibilité concernant l'évaluation du nombre de la
population. Est-ce que le Bureau de la statistique ou le ministère aura
une politique assez flexible pour accepter, par exemple, certaines projections,
en tenant compte des tendances passées au niveau de l'augmentation de la
population, pour, en se basant sur ces projections passées, trouver le
moyen de payer la municipalité? S'il y a lieu, que la
municipalité rembourse, si c'est le cas, les sommes qui auraient pu
être payées en trop.
Je voudrais savoir également s'il va y avoir une certaine
flexibilité qui permettrait au ministère d'aider, d'une
façon peut-être toute particulière, certaines
municipalités qui sont en état de croissance subite dans le sens
qu'il y a des projets qui, tout à coup, se développent ou
s'installent dans ces municipalités. Par exemple, je pense à la
région de l'Outaouais, la rive nord, la rive sud de Montréal.
Egalement il y a des municipalités qui ont certains projets
spéciaux de développement, qui font qu'on peut d'avance
prévoir que la population va certainement augmenter. Des cas comme, par
exemple, Mata-garni, des projets comme Mirabel ou encore certains projets qui
peuvent se faire dans des municipalités comme Port-Cartier.
Je voudrais savoir quelle sera la flexibilité du Bureau de la
statistique ou encore du ministère et du ministre sur ces deux points
précis.
M. Goldbloom: M. le Président, l'honorable
député comprendra que je ne suis pas moi-même statisticien
professionnel et donc, ce sera une réponse de profane que je lui
donnerai. Je choisirai un mot différent, cependant. Au lieu de
flexibilité, je dirai sensibilité. Il est évident que le
recensement fédéral n'est pas sensible aux changements de
population. On est obligé...
M. Bédard (Chicoutimi):... caractère du
ministre.
M. Goldbloom:... de vivre pendant cinq années avec un
chiffre qui est rigide. Nous voulons que notre système soit sensible aux
changements de population. Dans quelle mesure? Il faudrait un statisticien pour
le dire. Mais c'est notre but.
Le deuxième point soulevé par l'honorable
député est, en quelque sorte, l'appréciation des tendances
futures. Je trouve un peu de difficulté à envisager un
développement et payer ce développement à l'avance, mais
s'il a effectivement lieu, on va le payer. Nous voudrons justement que pour
chaque municipalité, nous développions une courbe d'augmentation
de sa population et que cette courbe soit aussi réaliste que possible,
et que la courbe s'ajuste annuellement au lieu d'être obligés
d'attendre cinq ans pour apporter des ajustements
aux chiffres. Je pense que c'est un progrès important que nous
réalisons.
Le Président (M. Pilote): L'article 2 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): L'article 3 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): L'article 4 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): L'article 5 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): L'article 6 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
Le Président (M. Pilote): L'article 7 est-il
adopté?
M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.
M. Goldbloom: M. le Président, vous me permettrez un bref
commentaire à la fin. L'honorable député de Chicoutimi m'a
fait l'honneur de parler de mon sourire. J'ai une confession à vous
faire, M. le Président. Je suis un ministre faible et ma faiblesse,
c'est de sourire même à l'Opposition.
M. Bédard (Chicoutimi):... d'avoir la lucidié de
vous voir des faiblesses ailleurs.
M. Pilote (président de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneurde faire
rapport que votre commission plénière a siégé et a
adopté les articles des projets de loi nos 25, 26 et 28 sans
amendements.
M. Bienvenue: Pas de troisième lecture?
M. Bédard (Chicoutimi): Non, M. le Président.
M. Bienvenue: M. le Président, comme il n'est que 10
heures 31, je me demande si nous pourrions appeler l'article n), loi du
ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives, loi intitulée Loi sur la protection des acheteurs
de maisons neuves et de terrains? Cela ne devrait pas être très
long, M. le Président. On me dit qu'il y a environ 200 articles
seulement.
M. Tetley: Correction, M. le Président. C'est 400.
M. Bienvenue: Alors, on ne l'appellera pas ce soir. M. le
Président, si vous me le permettez, au cours de cette journée, la
Chambre a adopté en deuxième lecture dix projets de loi, et trois
commissions parlementaires ont terminé leurs travaux avant l'ajournement
du souper. Je remercie tous les membres de cette Chambre qui étaient
avec nous, sans oublier ceux de l'Opposition. Cette collaboration intelligente
et efficace me fait dire que lorsqu'il nous arrive parfois de mettre un peu de
côté la partisanerie pour promouvoir l'esprit de
législateur, ce sont les résultats que nous pouvons atteindre et
dont cette Chambre a raison de se réjouir.
Avant de proposer l'ajournement de la Chambre, je veux rappeler que
mardi matin, à compter de 10 heures 45, au salon rouge, la commission du
travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration se réunira pour
étudier, article par article, le projet de loi no 33, Loi sur la
qualification professionnelle des entrepreneurs de construction. A la
même heure, soit à 10 heures 45, à la salle 81 -A, la
commission de l'agriculture se réunira pour étudier, article par
article, les projets de loi no 2, 3, 4, 5, 22 et 29.
A la salle 91-A, toujours à 10 heures 45, la commission de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications se
réunira pour étudier, article par article, le projet de loi de
député no 91, Loi du Collège régional du
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Mardi, après les affaires courantes, soit vers 16 heures,
à la salle 81-A, la commission des affaires municipales se
réunira pour l'étude des projets de loi privés suivants:
190, 191 et 195.
Enfin, en Chambre, la législation prévue n'est pas
nécessairement dans l'ordre que j'indique, mais ce seront les projets de
loi qui n'ont pas été adoptés en deuxième lecture
aujourd'hui.
Il s'agit des projets de loi no 32, c'est-à-dire les projets de
loi 32 et 34; le projet de loi no 19, Loi modifiant la loi sur les
impôts; le projet de loi no 6, Loi sur la protection des acheteurs de
maisons neuves et de terrains, cette loi de 400 articles, comme l'a
indiqué le ministre, ici en Chambre; le projet de loi no 34, je viens de
le dire; le projet de loi no 88, Loi modifiant la Loi de la protection de la
santé publique et, enfin, le projet de loi no 27, Loi modifiant la Loi
des établissements industriels et commerciaux.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais
une remarque à faire concernant les projets de loi qui viennent
d'être annoncés. J'avais donné mon accord pourque nous
procédions mardi après-midi avec une loi qui concerne la
région du Haut-Saguenay, à savoir une loi portant sur certains
amendements qui sont apportés à la charte de la ville de
Jonquière. Je ne sais pas si le leader adjoint se le rappelle. Je
m'aperçois que mardi matin on nous place l'étude du projet de loi
no 91 concernant la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, ce qui veut dire
deux projets qui concernent directement notre région. Je pense que le
ministre sera d'accord avec moi pour enlever celui de mardi matin afin de
procéder...
M. Bienvenue: Nous serons d'accord pour que
le député de Chicoutimi n'ait pas à être
à deux endroits en même temps. D'accord? C'est bien jusqu'à
maintenant, ce que je dis? A ce sujet, comme la commission qui étudiera
le projet de loi no 91, Loi du collège régional du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, se réunit le matin à 10 h 45 et que
l'autre commission qui étudiera la projet de loi no 195, Loi de la ville
de Jonquière, se réunit l'après-midi après les
affaires du jour, si on se comprend bien, l'une sera le matin et l'autre
l'après-midi. On manoeuvrera de telle sorte que le député
de Chicoutimi puisse participer pleinement.
M. Bédard (Chicoutimi): Je sais très bien que le
projet de loi no 91 ne sera pas réglé dans la matinée.
J'imagine que je peux m'attendre du gouvernement que, dans l'après-midi,
si on procède sur l'autre, on laissera faire le projet de loi no 91.
M. Bienvenue: Je viens d'indiquer que nous manoeuverons de
façon que le député de Chicoutimi n'ait pas à
être à deux endroits au même instant. D'accord?
M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre en
rappelant à nouveau ces trois commissions qui siégeront à
10 h 45, mardi matin. Je propose l'ajournement de la Chambre à mardi
après-midi, à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): Avant de demander si
cette motion est adoptée, puis-je vous inviter à venir discuter
plus amplement de cette journée fort chargée, à mes
bureaux, après l'adoption? Cette motion est-elle adoptée?
M. Burns: A quel endroit?
Le Vice-Président (M. Lamontagne): A 114-B. Cette motion
est-elle adoptée?
M. Burns: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lamontagne): L'Assemblée
ajourne ses travaux à mardi, 15 heures.
(Fin de la séance à 22 h 37)