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Version finale

31e législature, 1re session
(14 décembre 1976 au 23 décembre 1976)

Le vendredi 17 décembre 1976 - Vol. 18 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

M. Richard (président): A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés. Présentation de motions non annoncées.

M. le leader du gouvernement.

Motion pour faire siéger la Chambre le lundi 20 décembre

M. Burns: Je propose que la Chambre se réunisse lundi à 15 heures, aux heures prévues dans notre règlement pour les sessions du mardi et du jeudi.

M. Lavoie: Vote enregistré, M. le Président. Le Président: Qu'on appelle les députés!

Vote sur la motion

Le Président: A l'ordre, messieurs! Nous allons procéder au vote. Que ceux qui sont en faveur de la motion du leader du gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Burns, Mme Cuerrier, MM. Cardinal, Laurin, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Parizeau, Marois, Léonard, Couture, Tremblay, Duhaime, O'Neill, de Belleval, Joron, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Lazure, Léger, Garon, Tardif, Grégoire, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Alfred, Fallu, Rancourt, Bertrand, Godin, Johnson, Laplante, Guay, Mercier, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Jolivet, Bordeleau, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Levesque (Bonaventure), Lavoie, Vaillancourt (Orford), Garneau, Mailloux, Goldbloom, Raynauld, Mme Lavoie-Roux, MM. Giasson, Lamontagne, Lalonde, Blank, Caron, O'Gallagher, Picotte, Larivière, Marchand, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Bellemare, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Samson, Roy.

Le Secrétaire: Pour: 90 — Contre: 0

Le Président: Cette motion est adoptée.

Des Voix: Absentéisme! Absentéisme!

Le Président: A l'ordre, messieurs!

M. Burns: Avez-vous renvoyé Mackasey à Ottawa?

Le Président: Déclarations ministérielles. M. le ministre et député de Bourget.

Excusez. Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. Burns: Projets de loi au nom du gouvernement.

Le Président: Je m'excuse, j'ai sauté deux étapes.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Projets de loi au nom du gouvernement

Projet de loi no 82 Première lecture

M. Burns: Article a).

Le Président: Le ministre des Affaires municipales propose la première lecture de la Loi concernant le déficit olympique de la ville de Montréal et modifiant la charte de la ville de Montréal.

Le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: Ce projet de loi, dans un premier temps, oblige la ville de Montréal à assumer le financement de sa part, établie à $214 millions, du déficit olympique. Dans un second temps, il impose à la ville certaines mesures de contrôle financier similaires à celles qui sont déjà imposées à l'ensemble des municipalités du Québec.

Le Président: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

M. Lavoie: M. le Président...

Le Président: Deuxième lecture, séance subséquente.

M. le leader de l'Opposition.

M. Lavoie: Je crois que c'est le moment opportun, d'après une certaine tradition, pour demander au leader parlementaire s'il a l'intention, après la première lecture, étant donné le sujet, l'essence même du bill et l'importance de ce projet de loi pour la métropole du Canada, de convoquer les parties. Je verrais que le maire de Montréal et les membres de son opposition, du RCM puissent venir avant qu'on étudie le principe du bill en deuxième lecture et qu'on entende toutes les parties concernées sur une implication de l'ordre de $200 millions, et peut-être même le RIO. Sinon après la première lecture, j'insisterais pour qu'on les reçoive et qu'on puisse les entendre par un accroc, peut-être, à notre tradition parlementaire, mais, au moins, lors de l'étude, après, en deuxième lecture.

Je crois que cette question est trop grave; il faut qu'elle soit vidée une fois pour toutes.

M. Burns: Je reconnais la gravité de la question. A nos yeux, c'est tellement grave que nous prenons la peine de présenter un projet de loi à cet effet. Cependant, le leader de l'Opposition va comprendre qu'il s'agit là également d'un problème urgent et qu'il nous est impossible de tenir une commission parlementaire après la première lecture. Après discussion avec le ministre, je verrai s'il est possible de faire ces accrocs que mentionnait le leader de l'Opposition, du consentement des membres de la commission, pour entendre les gens peut-être après la deuxième lecture. Je n'écarte pas cette possibilité, mais, là-dessus, je dois consulter le ministre des Affaires municipales. Mais, de façon bien certaine, c'est beaucoup trop urgent, ce projet de loi, pour que nous puissions tenir des auditions avant la deuxième lecture.

M. Lavoie: Est-ce que vos consultations pourraient avoir lieu dès ce matin et qu'on puisse avoir une réponse avant midi, étant donné qu'on reconnaît qu'il y a urgence, sur le fait que ce projet de loi sera déféré à la commission pour étude dès le début de la semaine prochaine? Il y aurait lieu de le savoir aujourd'hui pour que les parties concernées puissent être avisées par le secrétariat des commissions dès aujourd'hui, pour que leurs dossiers soient prêts pour qu'on les entende dès lundi ou mardi.

M. Burns: Je vais consulter le ministre dès ce matin. Je vous le dirai avant la fin de la séance aujourd'hui.

M. Lessard: Vous n'avez pas été capables de décider, nous on va décider à votre place.

Le Président: A l'ordre!

M. Lessard: Vous n'êtes pas gênés!

Le Président:

Présentation de projets de loi au nom des députés. Déclarations ministérielles

M. le ministre d'Etat et député de Bourget.

Déclaration ministérielle

Politique linguistique du gouvernement

M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, le gouvernement a déjà annoncé son intention de procéder à une révision en profondeur de la loi 22. Cette réforme visera en particulier à faire du français la langue du travail et la langue de l'entreprise. Le gouvernement entend affirmer ainsi sa volonté ferme de franciser au plus tôt l'entreprise, de créer un mi- lieu de vie où l'on travaillera, communiquera et négociera en français, où les francophones accéderont aux plus hautes carrières, participeront aux décisions économiques qui affectent leur collectivité et feront bénéficier l'entreprise de leurs compétences et de leur connaissance du milieu.

Il lui faut, pour cela, éliminer les derniers préjugés, résistances et coutumes qui s'opposent à la pleine affirmation des francophones sur le plan économique et il entend s'y employer avec énergie.

C'est dans cette optique que le gouvernement a décidé d'abroger le règlement concernant la francisation des entreprises. Ce règlement s'inspire, en effet, d'une loi que nous devons modifier d'une façon substantielle.

Toute action entreprise dans le cadre de ce règlement actuel aurait donc dû être infléchie dès l'année prochaine dans le sens des modifications législatives à venir, ce qui risquerait d'engendrer dans le milieu des affaires, confusion et incertitude.

Ceci ne veut pas dire, toutefois, que les entreprises qui se sont engagées dans le processus de francisation doivent mettre celui-ci en veilleuse. Bien au contraire, il est dans leur intérêt et dans l'intérêt du Québec de l'accélérer et de le pousser à son maximum, car c'est précisément là l'objectif que visera le gouvernement par son projet de loi.

L'entreprise est un partenaire nécessaire, essentiel et respecté du gouvernement. Ce sera là sa meilleure contribution à la paix sociale, important facteur de productivité, à l'utilisation maximale des aptitudes des travailleurs et à la pleine réalisation de notre potentiel collectif.

Il ne fait, enfin, aucun doute que ces changements que souhaite depuis longtemps la majorité francophone ne feront qu'assurer une meilleure gestion, le progrès de l'entreprise et l'expansion de l'économie québécoise.

Quant aux autres règlements portant sur l'affichage, l'étiquetage, la publicité et les professions, ils restent, évidemment, en vigueur et doivent être appliqués.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Le geste que vient d'annoncer le ministre d'Etat au développement culturel est un geste précipité, improvisé, inspiré par l'ignorance et la hargne. Le Parti québécois vient de démolir et de détruire le résultat d'un travail extrêmement précieux où des dizaines et des centaines de Québécois avaient réussi à créer un instrument dynamique de changement en réconciliant les deux impératifs que l'on poursuivait, soit de faire, dans le milieu de l'industrie et du commerce du français une langue nécessaire tout en conservant le dynamisme économique si indispensable à notre croissance et à notre développement.

Ce qui est plus surprenant, M. le Président, c'est que l'on démolit, on détruit, sans dire, parfois, que l'on remplacera l'instrument que l'on vient de mettre de côté. C'est un geste qui créera plus d'incertitude encore dans le milieu des affai-

res, plus d'inquiétude, et c'est à demander si ce n'est pas le but du Parti québécois, justement, de créer, de maintenir un climat mauvais dans notre société, non seulement dans le domaine économique mais dans les autres secteurs, mais on parle ici du domaine économique, de maintenir un climat mauvais pour pouvoir faire passer éventuellement ses idées et atteindre ses objectifs.

Je m'inquiète de voir la façon dont le gouvernement aborde ou prépare ses dossiers. On démolit, on improvise, et, ensuite, on laisse les Québécois devant des situations d'incertitude ou d'inquiétude. Nous aurons encore plus d'insécurité dans ce secteur et il me semble encore plus évident que jamais que c'est le but que recherche le Parti québécois.

Il serait intéressant de savoir qui a été consulté par le gouvernement pour atteindre ce but. Est-ce que la Régie de la langue française, qui a été mise sur pied à même le noyau de l'ancien Office de la langue française, a été consultée? La régie est-elle d'accord? Est-ce que le milieu des affaires a été consulté? Je comprends que le premier ministre, lors d'un lunch avec le milieu des affaires, la semaine dernière, l'aurait consulté. Ce milieu est-il d'accord avec cette approche plus ou moins, enfin très improvisée du Parti québécois? Ce sont des questions auxquelles il restera à répondre et ce sont malheureusement les seules conclusions que nous pouvons tirer du geste du gouvernement.

Le Président: Le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président.

Le Président: Le député de Laval.

M. Lavoie: J'aurais une question pour le superministre de l'Education.

M. Burns: A l'ordre!

M. Lavoie: Je voulais lui demander s'il désirait exercer son droit de réplique. C'est tout ce que je voulais lui demander.

Une Voix: Non.

Le Président: A l'ordre!

Le ministre des Affaires sociales.

Vaccin contre la grippe porcine M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, soucieux de respecter une saine tradition qui veut que le ministre annonce à l'Assemblée certaines nouvelles importantes, il me fait plaisir de vous informer que nous avons pris, ce matin, la décision, au ministère des Affaires sociales, de suspendre indéfiniment la distribution et l'administration du vaccin contre la grippe porcine. Je regrette de ne pas avoir le communiqué écrit et de ne pas avoir pu, à cause du temps, vous le transmettre, mais vous l'aurez un peu plus tard. Dans ce communiqué, on vous donnera un peu plus de détails. Essentiellement, les raisons sont les suivantes. En deux mots, certaines régions du pays ou certains pays étrangers se sont rendu compte de certaines réactions de paralysie à la suite du vaccin. Alors, il est prudent de suspendre indéfiniment l'administration du vaccin. Merci.

M. Victor Goldbloom

M. Goldbloom: M. le Président, nous n'avons pas eu, comme l'a souligné en s'excusant le ministre des Affaires sociales, le texte de sa déclaration. Nous n'étions donc pas avertis de la nature de cette décision gouvernementale. Le ministre, tout à l'heure, a été avare de détails et d'explications. Il y a certaines inquiétudes qui, à un moment donné, ont été provoquées par des résultats malheureux aux Etats-Unis. Mais ces résultats malheureux n'ont pas été expliqués de façon à établir un lien précis de cause à effet entre l'administration du vaccin et les maladies et décès qui ont eu lieu.

On a vu, par la suite, le programme se poursuivre aux Etats-Unis. On a vu des hommes de marque, en commençant par le président Ford, se faire administrer lé vaccin, avec photographies, pour encourager la population à recevoir ce vaccin. Il y a peut-être l'argument que l'on n'a pas démontré la nécessité d'un programme généralisé d'administration du vaccin. Mais, M. le Président, il y a des médecins de compétence et de réputation, au Canada comme Aux Etats-Unis, qui ont étudié cet aspect de la question et qui sont venus à la conclusion suivante: le vaccin ne se conserve pas très longtemps.

Il y a aussi le problème que, d'année en année, le virus a tendance à se modifier. Qu'est-ce qu'on va faire avec tes quantités de vaccins qui ont été produites? Va-t-on tout simplement les jeter? Est-ce que ce vaccin n'a plus de valeur quelconque? M. le Président, c'est une question fort sérieuse. Est-ce que, si l'on veut conserver le vaccin pour qu'il ait une certaine valeur, l'endroit tout indiqué pour le conserver n'est pas le corps humain, s'il est démontré qu'il est sans danger? Je pense, M. le Président, que le ministre des Affaires sociales a le devoir de nous expliquer beaucoup plus clairement la motivation de cette décision. Est-ce que c'est parce que ses conseillers ont décelé un danger? Si oui, que la population le sache; sinon, pourquoi est-ce qu'on abandonne un peu à la légère un programme qui pourrait quand même protéger des gens dans une certaine mesure? Il y a des divergences de vues parmi les médecins. J'aimerais connaître le point de vue des conseillers du ministre à cet égard et, aussi, je voudrais savoir si c'est vrai, si j'ai bien compris. Je m'excuse, je n'avais pas saisi toutes les paroles prononcées par le ministre. Je voudrais savoir si c'est toujours un programme sélectif qui va se continuer en faisant administrer le vaccin aux personnes âgées et aux personnes d'âge inférieur qui

souffrent déjà de maladies respiratoires ou cardiaques. Je pense qu'il y a beaucoup de détails...

M. Burns: Je m'excuse auprès du député.

Le Président: M. le Ministre des Affaires sociales.

M. Burns: Je comprends que le ministre a parfaitement...

M. Lavoie: ... connu, je crois.

M. Burns: J'ai soulevé une question de règlement, est-ce que cela fait votre affaire, M. le Président?

M. Lavoie: Le président ne vous a pas accordé la parole.

M. Levesque (Bonaventure): Qui est président?

Le Président: Je voudrais savoir si vous voulez soulever une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Je m'excuse, je n'ai peut-être pas été assez clair. Je voulais tout simplement signaler sur cette question de règlement que c'est bien beau de soulever des questions, mais il y a une période de questions tout de suite après.

Evidemment, le ministre peut répliquer s'il y a des opinions qui ont été exprimées par le député de D'Arcy McGee. C'est bien sûr. C'est tout simplement cela que je voulais signaler.

Le Président: Je pense, M. le leader du gouvernement, que votre question de règlement était irrecevable puisqu'au sens de l'article 179 le député de D'Arcy McGee avait parfaitement le droit de soumettre des commentaires.

M. le Ministre des Affaires sociales.

M. Levesque (Bonaventure): Très bien.

M. Lazure: M. le Président, je vais essayer de répondre brièvement aux commentaires du député de D'Arcy McGee. Il ne semble pas au courant que le gouvernement des Etats-Unis a décidé, hier, de suspendre indéfiniment toute administration du vaccin, y compris pour les personnes âgées.

Un autre gouvernement, celui d'Ottawa, a peut-être précédé les voeux du député de D'Arcy McGee. Le gouvernement d'Ottawa a décidé de conseiller aux provinces de continuer l'administration de ce vaccin pour les personnes âgées. Questions orales des députés.

Le gouvernement de la province voisine, l'Ontario, a décidé, hier, aussi de cesser immédiatement toute administration du vaccin. Nos conseillers, au ministère des Affaires sociales, hier soir et ce matin, se sont réunis et m'ont conseillé fortement de suspendre indéfiniment l'administration de tout vaccin. Or, je vais m'en tenir à cela. Encore une fois, vous aurez un peu plus de détails dans la communication écrite.

M. Pagé: M. le Président, quel motif ont-ils invoqué?

Le Président: Dépôt de documents. M. le ministre de l'Education.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Documents relatifs aux tests linguistiques

M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi de déposer, en premier lieu, la lettre reçue du Protecteur du citoyen au sujet des tests linguistiques, ainsi que le rapport du comité spécial d'experts formé pour analyser la valeur des tests destinés à mettre en oeuvre la Loi sur les langues officielles.

Rapport annuel de l'Université du Québec

M. Morin (Sauvé): J'ai également l'honneur de déposer le rapport annuel de l'Université du Québec pour l'année 1975-1976, accompagné d'un recueil de statistiques pour la même année, lesquels ont déjà, à la suite d'une erreur, été distribués aux députés. De même, je dépose le schéma général de développement de l'Université du Québec pour les années 1976 à 1980.

Le Président: Rapport déposé. Le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigration.

Rapport annuel de l'Office de la construction du Québec

M. Couture: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de 1975 de l'Office de la construction du Québec.

Le Président: Rapport déposé.

Le ministre de la Fonction publique.

Rapport annuel de la Commission de la fonction publique

M. de Belleval: M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de la fonction publique du Québec pour l'année 1975.

Le Président: Rapport déposé.

M. le ministre des Affaires municipales.

Rapport annuel de la Société d'aménagement de l'Outaouais

M. Tardif: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport pour l'année 1975-76 de la Société d'aménagement de l'Outaouais.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre du Transport.

Rapport annuel de la Commission des transports

M. Lessard: M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport des activités de la Commission des transports du Québec pour l'année financière terminée le 31 mars 1976.

Le Président: Rapport déposé.

M. Lavoie: M. le Président, je ne sais quel moyen utiliser: une question de règlement, ou une question de privilège. C'est votre privilège, à vous, M. le Président. Je viens d'apprendre que le dépôt du rapport du Protecteur du citoyen aurait été fait par le vice-premier ministre, ministre de l'Education, alors que depuis que l'institution du Protecteur du citoyen existe, le rapport a toujours été déposé par le Président de l'Assemblée nationale.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, avec votre permission, il semble que le leader ait mal compris. Il ne s'agit point d'un rapport, mais de la lettre qui m'est adressée en tant que ministre de l'Education par le Protecteur du citoyen.

M. Lavoie: Je m'excuse, je croyais que c'était le rapport. D'ailleurs, sur cette question, on n'a pas à être tellement surpris, parce que...

Le Président: A l'ordre!

M. Lavoie: ... j'ai vu que le Président de l'Assemblée était l'assistant du ministre...

Le Président: A l'ordre! M. le leader de l'Opposition.

QUESTIONS DES DÉPUTÉS

Tenue du référendum

M. Levesque (Bonaventure): Ma question s'adresse à l'honorable premier ministre. Hier soir, sur les ondes de Radio-Canada, le premier ministre a indiqué que, lors d'un diner avec les premiers ministres des provinces et le premier ministre du Canada, il avait, en effet, souligné la valeur de la relève dans son parti et cela, apparemment, dans le contexte de l'échec éventuel du référendum.

Le premier ministre peut-il dire à cette Chambre, afin qu'on comprenne très bien ce qui est arrivé, ce qu'il a dit, la nature exacte des propos qu'il a alors tenus, vu qu'ils sont maintenant dans le domaine public — je n'aurais pas posé la question, évidemment, si tout cela ne s'était pas produit — et surtout dire à cette Chambre si le référendum sur l'indépendance est toujours l'élément premier et fondamental du programme de son parti? Si tel est le cas, peut-il expliquer, comme il sait si bien le faire — bien vulgariser pour qu'on comprenne bien — à cette Chambre comment le premier ministre peut-il laisser entendre, comme il l'a fait hier à la presse, qu'un échec au référendum n'engagerait pas la responsabilité de son gouvernement et que, battu au référendum, son gouvernement pourrait encore se dire le gouvernement du Québec en toute légitimité?

M. Lévesque (Taillon): Au fond, ce que se trouve à demander le chef de l'Opposition, c'est presque un rapport circonstancié sur, au moins, le climat, sinon les détails, de la petite conférence fédérale-provinciale qui vient d'avoir lieu et qui portait essentiellement sur les arrangements fiscaux. Je ne sais pas si je vais pouvoir recouper toutes ses questions. Il pourra me demander, s'il veut bien, des précisions additionnelles. Très rapidement, ce que j'aurais à dire, c'est ceci, d'abord, de façon générale. L'élément premier et fondamental des intentions politiques générales de notre parti, c'est l'indépendance politique du Québec. Le référendum intervient comme un moyen essentiel, démocratique. J'aurai peut-être l'occasion d'en parler, sans insister, d'ailleurs, mais un peu plus clairement au moment de l'intervention que je dois faire, peut-être ce matin, dans le débat sur le discours inaugural.

Donc, sur le plan de la politique générale, ce qu'on peut appeler la politique nationale du Québec, notre premier élément fondamental de programme, il est bien connu, il vise à l'indépendance, à la souveraineté politique du Québec dans l'amitié et l'association avec les autres. Le long du chemin, nous avons prévu et nous nous sommes engagés à faire un référendum.

Au cours de la conférence fédérale-provinciale, il y a eu ce dîner, que tout le monde pouvait croire intime, un dîner de travail mais aussi, comme il arrive souvent dans ces cas-là, un dîner, à certains moments, de franches discussions entre les premiers ministres des dix provinces et le premier ministre du Canada.

J'ai dit hier, et je le répète ici, en Chambre aujourd'hui, que j'ai trouvé particulièrement inqualifiable la façon dont certaines mémères politiques ou autres ont fait sortir de façon tronquée et de façon nettement arrangée une partie des propos qui se sont tenus, à un moment donné, très précisément sur les intentions du nouveau gouvernement du Québec, qui, je crois, c'était légitime, intéressaient mes interlocuteurs à ce dîner. On a eu une franche discussion; je peux même vous dire qu'elle a été assez vive et, même à l'occasion brutale, pour qu'ils comprennent bien que le gouvernement que je dirige n'a pas l'intention, d'aucune façon, d'abandonner son objectif national, et cela ils l'ont très bien compris.

Et il y a eu des propos un peu acerbes à l'occasion. Il y a une chose que je reconnaissais, moi. Je n'ai pas fait de bandes sonores pendant ce dîner; alors, je n'ai pas enregistré les propos, mais tu gardes quand même une certaine mémoire auditive. Il y a un propos que j'ai reconnu: "It is none of your goddam business". Je me souviens, cela a été prononcé le long du chemin. Cela a même été employé de diverses façons, mais tout cela s'est

résolu, je crois, dans un climat de compréhension, sinon d'accord unanime. Je vais de nouveau — et c'est la dernière fois pour cette petite intervention — employer une expression de nos amis anglophones; on a terminé cela en disant: "We agree to disagree". Je pense que tout le monde la comprend, celle-là; on s'est mis d'accord pour dire qu'on n'était pas d'accord.

A propos du référendum plus spécifiquement, j'ai eu l'occasion, pendant cette conversation, de répéter l'engagement très clair que nous avons pris, sans entrer dans les scénarios prématurément, qui est que, le long du chemin, pendant ce mandat d'un gouvernement — qui est clairement un gouvernement provincial qui, sur ce plan, a un mandat majoritaire et qui doit avoir l'attitude responsable de tout gouvernement qui a un mandat comme celui-là, c'est-à-dire d'exercer le pouvoir pendant la durée normale de quatre ans ou même légalement de cinq ans,— il y aurait un référendum, qu'on organiserait démocratiquement dans notre milieu, chez nous, avec notre Assemblée nationale les conditions de ce référendum pour qu'il soit nettement équitable et démocratique et puis qu'on en accepterait le résultat et qu'on travaillerait très fort, de tout notre coeur, pour obtenir la réponse qui correspondrait à nos intentions politiques, en permettant forcément à tout le monde, et ce sera décidé dans cette Chambre d'ailleurs, de fixer les conditions de cette consultation.

Tout cela a débouché sur la possibilité qu'on perde le référendum. A ce moment-là, je leur ai dit: Et puis, il me semble que normalement on doit continuer à exercer le pouvoir comme gouvernement provincial, si cela arrive, mais j'ai bien confiance que cela n'arrive pas. C'est à peu près la teneur des propos. Cela nous a amenés tout simplement à parler de l'avenir. Vous savez, M. le Président, que les partis au pouvoir, comme les premiers ministres, s'imaginent souvent que c'est éternel ou, en tout cas, que c'est permanent. On sait, grâce à des expériences récentes, que ce n'est jamais complètement vrai. Alors, cela nous a amenés, dans le détour de la conversation, à parler d'avenir des uns et des autres. Moi, étant après M. Trudeau quasiment le doyen de la réunion, je pense très précisément le doyen après M. Trudeau, j'ai été amené à dire,— je l'ai dit souvent, je ne suis pas prophète — que je ne me pensais pas éternel, tout le monde peut disparaître, mais que j'étais sûr — c'était une façon de les rassurer en même temps sur nos intentions — que, quoi qu'il arrive, il y avait tout ce qu'il faut de relève, peut-être bien plus qu'ailleurs, tout ce qu'il faut de relève éventuelle dans le Parti québécois pour assurer cet avenir. En gros, c'est cela.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle. Une question additionnelle?

M. Levesque (Bonaventure): Une question additionnelle, M. le Président. Si j'ai bien compris le premier ministre — je pense que c'est assez important pour qu'il me permette, à ce moment-ci, de le répéter — premièrement, lorsqu'il parle d'ob- jectif national, il ne veut pas impliquer qu'il s'agit d'un objectif national de la population du Québec, mais bien de son parti. J'ai bien compris?

Non, c'est parce qu'il y a au moins 85% de la population qui n'en veut pas du séparatisme.

J'irai plus loin que cela, il y en a dans son propre parti, dans son propre cabinet qui n'en veulent pas du séparatisme. Ils n'ont même pas applaudi, tout à l'heure.

Le Président: Je voudrais vous demander de bien vouloir formuler votre question, s'il vous plaît.

M. Levesque (Bonaventure): La question est celle-ci: Est-ce que le premier ministre, qui a donné des explications sur le cadre de ce qui s'est passé beaucoup plus que sur le fond, voudrait répondre à la question précise que j'ai posée? C'est-à-dire, sur ce qu'il croit de la légitimité d'un gouvernement qui dit avoir comme objectif fondamental la séparation du Québec et qui, à la suite de l'échec d'un référendum, et cela dans le contexte de notre tradition constitutionnelle, continuerait à assumer le pouvoir.

M. Lévesque (Taillon): Sans entrer dans toutes sortes de détails philosophiques là-dessus, je dirais d'abord ceci, en réponse à la remarque initiale du chef de l'Opposition, que c'est vrai que c'est l'objectif national pour l'instant, clair, à ce plan-là seulement et accepté à ce plan-là seulement de notre parti qui est maintenant le gouvernement du Québec, la souveraineté nationale.

Ce n'est pas vrai, d'autre part, que 85% — j'ai eu l'occasion de le dire, je n'en ferai pas un débat quant à moi — des gens du Québec ne sont pas d'accord. C'est simplement que des sondages ex-traordinairement hasardeux prétendent cela. Je ne pense pas que personne les ait étudiés et je ne crois pas qu'il y ait d'appareils de mesure...

M. Levesque (Bonaventure): On ne les a pas crus, les sondages, nous autres non plus.

M. Lévesque (Taillon): Vous auriez dû. Mais, je dirai simplement, pour ne pas en faire un débat, au chef de l'Opposition, que les sondages sur les intentions de vote, cela m'a l'air de pouvoir être des appareils de mesure assez précis. Sur les intentions nationales d'avenir de tout un peuple, j'ai l'impression que c'est un peu hasardeux. Enfin, on verra bien, éventuellement.

Pour ce qui est de la question spécifique du chef de l'Opposition, je dirai simplement ceci: Nous considérons, nous — et je crois que l'ensemble des citoyens du Québec l'a bien démontré, une pluralité, en tout cas, très claire — que nous avons un mandat de gouvernement provincial qui, lui, est indiscutable dans les limites constitutionnelles actuelles et qui exige que nous soyons le mieux possible un gouvernement efficace, un gouvernement convenable pour le Québec dans son statut provincial. Cela, c'est légalement une période de cinq ans, traditionnellement plutôt, une période de quatre ans. Ce mandat est très clair et

il implique une responsabilité à laquelle nous avons à faire face. L'objectif fondamental de notre parti pour l'avenir qui va se traduire par un référendum, enfin, dont la réalisation, nous l'espérons, va se traduire par un référendum, n'entache en rien et n'a rien à voir, que la réponse soit oui ou non, avec ce mandat que les citoyens nous ont confié et que nous avons l'intention d'assumer démocratiquement, de notre mieux, jusqu'au moment des prochaines élections.

M. Garneau: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Une question additionnelle. Le premier ministre pourrait-il indiquer à cette Chambre comment il peut faire la jonction de deux idées — celle qu'un gouvernement qui présente un projet de loi de fond, dans une Assemblée nationale ou à la Chambre des communes, et qui est battu par une pluralité de députés qui, en fait, ne composent qu'une partie très infime de la population du Québec, un tel gouvernement qui se fait défaire à l'Assemblée nationale, il est de tradition qu'il démissionne; le lieutenant-gouverneur appelle une autre personne ou il y a un déclenchement d'élections — comment peut-il faire la jonction entre cette tradition qui existe au Québec et qui a existé, je pense, dans toutes les juridictions à caractère parlementaire de type britannique, comment peut-il faire la jonction entre cette tradition et le fait qu'une population entière, rejetant une option fondamentale d'un parti, puisse conserver à ce parti la légitimité du pouvoir?

M. Lévesque (Taillon): Parce que je crois tout simplement — et on aura l'occasion d'en reparler souvent, j'ai bien l'impression, au cours des deux ou trois prochaines années, en tout cas — que nous interprétons un peu mieux que le député de Jean-Talon ou le chef de l'Opposition la substance même et le sens fondamental des institutions parlementaires britanniques d'origine dans lesquelles nous sommes et qui disent qu'un gouvernement doit quitter le pouvoir — sauf erreur, je ne suis pas constitutionnaliste, ni expert en droit public, on me corrigera si je fais des erreurs de détail — mais que le gouvernement ne peut perdre le pouvoir, sauf quand il perd la confiance de la Chambre, sauf au moment prévu des élections, au moment annoncé, peu importent les suspenses ou alors à la limite légale de son mandat.

Un référendum qui fait appel à l'ensemble des citoyens n'affecte pas la légitimité du pouvoir parlementaire et, par conséquent, exécutif aussi, du parti qui est au pouvoir.

Je ne vois pas du tout quelle confusion on peut faire. Je donne un exemple, si on me le permet. Je donne un exemple et cela se termine là pour aujourd'hui parce que je ne vois pas pourquoi on essaierait de "picocher" de ce côté. Au fond, c'est clair.

Si M. Wilson — je donne un exemple très ré- cent — en Angleterre, avait perdu — Dieu sait d'ailleurs que cela a pris un bon bout de temps avant qu'il ajuste ses attitudes — son gouvernement, le référendum à propos de l'appartenance au marché commun ou de l'exit, l'"opting out" du marché commun, je ne crois pas que personne ait jamais évoqué la possibilité qu'à cause d'une réponse négative il soit obligé de démissionner comme gouvernement.

M. Garneau: M. le Président, une question additionnelle.

Le Président: Dernière question accessoire à ce sujet.

M. Garneau: C'est un sujet extrêmement important. Je considère qu'il y va presque de notre vie démocratique. Le premier ministre... Ai-je dit un sacrilège?

Une Voix: II rit de la démocratie. Le Président: A l'ordre, messieurs!

M. Garneau: L'interprétation que donne le premier ministre de la responsabilité ministérielle et la distinction casuistique qu'il fait en la responsabilité face à la Chambre et la population... Il donne l'exemple de M. Wilson qui malheureusement pour nous et heureusement pour son exemple a gagné le référendum. Mais je pourrais donner l'exemple, également, de ce qui s'est produit dans un autre pays, en France.

Le Président: Pourriez-vous formuler votre question, s'il vous plaît?

M. Garneau: Est-ce que le premier ministre ne pourra pas considérer l'exemple donné par le général de Gaulle lorsqu'il a engagé l'avenir de son gouvernement, ce qui était différent dans le cas de M. Wilson où son propre parti était divisé sur cette question? Ne peut-il pas considérer que, lorsqu'il s'agit d'une ligne de parti et que le gouvernement et le parti s'engagent, il y a une distinction fondamentale entre ce type de situation et celle qui existait dans le cas de M. Wilson?

M. Lévesque (Taillon): Enfin, on pourra considérer toutes ces hypothèses. Je remercie, entre-temps, l'Opposition de nous aider à amorcer, je crois, d'une façon qui peut devenir très féconde très rapidement, le débat fondamental dont il est question.

Propriétaires de boisés privés

M. Giasson: M. le Président, ma question s'adresse au ministre responsable du dossier des Terres et Forêts. Nous savons tous que, dans plusieurs régions du Québec, des centaines, pour ne pas dire des milliers, de petits producteurs de bois, propriétaires de boisés privés, sont aux prises avec la mévente de leurs produits. Ce qui est

plus tragique—vous me permettez, M. le Président, de le signaler — c'est que plusieurs de ces petits producteurs ont déjà vécu une année difficile parce que beaucoup d'entre eux sont des producteurs laitiers et on sait quelles furent les conséquences de la politique de la Commission canadienne du lait vis-à-vis des producteurs du lait.

Je voudrais savoir du ministre responsable quelles sont les mesures immédiates qu'il entend prendre afin de permettre à ces propriétaires de boisés privés, à ces petits producteurs d'écouler, au cours des prochaines semaines, ce bois qui, s'il ne quitte pas les régions où il a été exploité, n'aura plus aucune valeur puisque les usines de pâtes et papiers ne voudront plus l'accepter. Il s'agit d'un problème qui n'est pas hypothétique, qui est d'une actualité cuisante et qui nécessite une décision rapide.

M. Bérubé: Je remercie M. le député de son intérêt pour la cause des petits producteurs de bois; c'est une situation réelle. Présentement, nous travaillons à un programme pour la distribution, la répartition de la matière ligneuse et, dès que nous aurons une politique clairement définie, je me ferai un devoir de vous la soumettre.

M. Giasson: Question additionnelle, M. le Président.

Je comprends que le ministre est bien animé de l'intention de mettre sur pied un programme d'allocation des bois aux usines de pâtes et papiers. J'en suis à 100%, mais j'aimerais qu'il réponde à ma question dans le sens de mesures immédiates et pratiques. Entend-il intervenir auprès de certaines usines de pâtes et papiers? Entend-il demander à REXFOR de suspendre provisoirement ses expéditions de bois coupé sur les forêts publiques afin de permettre, par entente avec les offices de producteurs de bois ou les syndicats, aux petits producteurs d'écouler le bois qui va se perdre définitivement, quitte à demander à REXFOR d'entreprendre ses expéditions aux usines après l'entrée du bois des petits propriétaires?

Le Président: M. le ministre des Terres et Forêts.

M. Bérubé: Ma réponse était suffisamment explicite. Il n'y a pas de mesures immédiates puisque nous avons l'habitude de réfléchir avant d'agir.

M. Levesque (Bonaventure): ... réponse à rien.

M. Goulet: M. le Président, cela s'adresse au ministre de l'Agriculture. M. le ministre, entendez-vous faire quelque chose concernant le monopole que détient l'UPA sur la commercialisation du bois?

Des Voix: II ne le sait pas.

M. Garon: II s'agit là de questions à l'étude.

M. Lavoie: Vous allez faire un cours classique de huit ans au moins, vous.

Le Président: M. le député de Lotbinière.

Entente avec les Cris de la baie James

M. Biron: Ma question s'adresse au premier ministre. Devant l'affirmation récente du ministre fédéral des Affaires indiennes, M. Warren Allmand, à l'effet qu'une nouvelle disposition législative était devenue nécessaire puisque certains avantages octroyés aux Cris, en vertu de l'entente de la baie James, ne sont pas prévus dans la loi actuelle des Indiens, le premier ministre et son gouvernement sont-ils déjà à l'étude de l'implication pour le Québec de ce nouveau texte de loi fédéral que M. Allmand doit déposer au début de l'année 1977?

M. Lévesque (Taillon): Je pense que la question aurait pu s'adresser et, même là, aurait demandé une certaine étude additionnelle, plutôt au ministre des Richesses naturelles. M. le Président, en réponse au député de Lotbinière, tout ce que je peux vous dire est que toutes les implications de cette entente, qu'elles soient fédérales-provinciales dans le contexte actuel ou qu'elles soient aussi budgétaires, sont non seulement à l'étude, mais sont en voie de réalisation de la part du gouvernement québécois. En ce qui concerne l'attitude du gouvernement fédéral, on admettra qu'on attende qu'elle se dessine un peu plus clairement pour avoir à se prononcer là-dessus.

M. Biron: J'ai une question additionnelle là-dessus. Elle s'adresse encore au premier ministre parce que c'est une question très urgente, je pense, concernant plus précisément le gouvernement du Québec. Je veux savoir s'il va accepter sans réserve la cession de 1274 milles carrés de terrain au fédéral — c'est ce que les nouvelles nous donnaient à entendre dernièrement — conformément au terme de l'entente sur les revendications territoriales de la baie James.

M. Bellemare: Qui appartiennent au Québec.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je crois que le député de Lotbinière se trouve à véhiculer, de bonne foi sans doute, un adjectif et des mots qui ont été employés surtout dans les titres des journaux à propos de cela. Je ne sais pas s'il y avait là l'indication d'une certaine mauvaise volonté de la part de M. Allmand, j'espère que non, parce que cela ne correspond pas à la vérité. Il est prévu dans l'entente, je crois, qu'il y aura la cession non pas de la propriété — parce que la propriété absolue du territoire québécois demeure québécoise — mais la cession administrative de certaines enclaves dans le Nord, ce qui était prévu dans l'entente. Automatiquement, elles tomberaient, dans certains cas, sous le régime, si vous voulez, de la Loi des Indiens, c'est-à-dire devien-

draient des réserves. A ce moment, s'il s'agit de cessions administratives, malheureusement, dans le contexte actuel, les populations autochtones sont encore régies par cette loi fédérale. S'il s'agit de la propriété, ce qui impliquerait le mot "cession", il n'est pas question de cela du tout.

M. Biron: Dernière question additionnelle là-dessus, M. le Président, très brève. Elle s'adresse peut-être au ministre d'Etat responsable de l'aménagement du territoire et concerne le même sujet. Je voudrais savoir s'il y a déjà un dossier préparé dans cette affaire et qui va garantir quand même au Québec ses droits miniers et autres dans cette région de la baie James.

M. Levesque (Bonaventure): Où est-il?

M. Bellemare: Où est-il le super?

M. Levesque (Bonaventure): II n'est pas là.

Une Voix: II ne le sait pas.

M. Bellemare: Le super!

Une Voix: II connaît cela comme le ministre de l'Agriculture.

M. Léonard: Je n'ai pas en main ce dossier de la baie James.

M. Samson: M. le Président...

M. Léonard: Je prends avis de la question, présentement.

Propriétaires de petits abattoirs

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre de l'Agriculture. Hier, le député de Beauce-Sud lui posait une question en ce qui concerne les petits abattoirs. Pour ma part, je voudrais lui poser la question suivante. Le 28 mai 1976, le ministre de l'Agriculture avait donné un sursis aux propriétaires de petits abattoirs pour dire s'ils voulaient fermer leurs établissements ou continuer leurs opérations. Le ministre a-t-il l'intention de prolonger ce sursis, étant donné que le sursis finit le 31 décembre 1976?

M. Garon: J'ai répondu hier au député de Beauce-Sud que je ferais une déclaration ministérielle au début de la semaine prochaine à ce sujet.

M. Vaillancourt (Orford): Comme question supplémentaire, est-ce que la déclaration ministérielle va se faire avant la fin de l'année, c'est-à-dire durant la présente session?

M. Garon: C'est évident qu'elle va se faire avant la fin de cette année. J'ai dit que je la ferais au début de la semaine prochaine et je pense que la semaine prochaine finit avant la fin de l'année.

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président...

Le Président: Dernière question additionnelle du député d'Orford.

M. Vaillancourt (Orford): Cela veut-il dire que le ministre de l'Agriculture n'accordera pas de sursis et que tous les petits abattoirs, à partir du 1er janvier, devront fermer leurs portes?

M. Garon: Je ferai une déclaration au début de la semaine prochaine. Si ce que vous dites était vrai, je n'aurais pas besoin de faire une déclaration.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

Centrales hydroélectriques de l'Alcan

M. Samson: M. le Président, je voudrais adresser ma question au premier ministre. Suite aux nouvelles parues selon lesquelles la CSN réclame la nationalisation des centrales hydroélectriques de l'Alcan, le premier ministre peut-il nous dire si son gouvernement est en mesure, aujourd'hui, devant cette Chambre, de nous informer si c'est l'intention du gouvernement de nationaliser les pouvoirs hydroélectriques de l'Alcan?

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dois rappeler au député de Rouyn-Noranda qu'il y a maintenant un ministre délégué à l'énergie en la personne du député de Mille-Iles. Si le député n'y voit pas d'inconvénient, je demanderais au ministre délégué à l'énergie de répondre à sa question.

M. Joron: M. le Président, pour répondre à la question du député de Rouyn-Noranda, cela ne fait pas partie des intentions immédiates du gouvernement; par contre, nous étudions présentement la question des redevances qui doivent être payées par les utilisateurs privés, pour l'utilisation de l'eau, pour des fins de génération de pouvoir hydraulique. Nous sommes en train de regarder cela. Le député de Rouyn-Noranda doit savoir que ces redevances sont demeurées inchangées depuis 1946. Il me semblerait sans que l'on puisse annoncer dès aujourd'hui notre politique définitive à ce sujet, que ce dossier doive certainement être revu dans un bref avenir.

M. Samson: M. le Président, question additionnelle. Le ministre peut-il me dire si, dans l'étude de ce dossier, sont prises en considération les déclarations publiques faites par les représentants de l'Alcan, que s'il y a effectivement nationalisation, ils sont prêts à quitter le Québec, dans un premier temps, et est-ce que... Je ne vois pas pourquoi on rit de cela. M. le Président, j'ai l'impression qu'on n'aurait pas intérêt à ce que ces gens quittent le Québec. Le ministre peut-il me dire également si, lorsqu'il m'a répondu tantôt que ce n'était pas l'intention du gouvernement, dans l'immédiat, on doit sous-entendre que, dans

l'étude de ce dossier, on prévoit la possibilité de la nationalisation?

M. Joron: II ne faut jamais écarter quelque possibilité que ce soit. On ne peut pas engager l'avenir pour l'éternité, cela est évident. Pour répondre à la première partie de votre question additionnelle, oui, j'ai pris connaissance aussi des déclarations de la direction de l'Alcan, mais vous les interprétez de façon erronée. Ces gens n'ont pas dit qu'ils déménageraient du Québec.

Ils ont dit que, si les redevances devenaient trop coûteuses, là, ils pourraient remettre en cause leurs programmes d'immobilisation au Québec. C'est bien différent. Il faudrait que le député se rappelle que c'est une façon... Je comprends qu'on procède de cette façon. C'est leur "bargaining power". Le nôtre, là-dedans, c'est le suivant. La raison principale pour laquelle l'Alcan est installée au Saguenay-Lac-Saint-Jean et heureuse d'y être, c'est parce que, dans le coût de la fabrication de l'aluminium, vous savez que le coût de l'énergie est un des facteurs les plus importants. Il n'y a pas un lieu au monde, aujourd'hui, où l'électricité coûte meilleur marché, pour les fabricants d'aluminium, qu'au Québec. En d'autres mots, ce que je veux dire, c'est que le gros bout du bâton, ne vous inquiétez pas, c'est quand même le Québec qui le possède.

M. Samson: M. le Président, je pose la question de privilège.

Le Président: M. le député...

M. Samson: Le ministre a laissé sous-entendre que j'avais mal interprété ou que j'avais mal cité les propos qui ont été tenus publiquement. Pour l'information du ministre et pour rétablir les faits, je cite un journal de ce matin: "Les porte-parole de la compagnie ont déjà fait savoir, par suite de cette requête, que l'Alcan pourrait quitter le Québec si le gouvernement lui enlevait son énergie électrique". Je pense que c'est différent.

M. Léger: Continuez à rire, vous allez comprendre.

M. Samson: Cela fait référence, pour ceux qui ont la rigolade facile, à la nationalisation des centrales hydroélectriques de l'Alcan. Peut-être que vous rirez moins tantôt si vous n'êtes pas prudents. Je dis qu'il est normal qu'on prenne les questions, même venant de l'Opposition, en considération et sérieusement en considération, et qu'on donne des réponses, qu'on dise aux Québécois si on a l'intention, oui ou non, de nationaliser ces centrales hydroélectriques.

Le Président: Le député de Laurier.

M. Marchand: Une question additionnelle.

Le Président: II n'y aura plus de question ad- ditionnelle là-dessus, M. le député de Laurier, parce que le temps presse.

M. Garneau: De quel droit, M. le Président, je ne pourrais pas poser une question? Il y a eu seulement une question principale et j'ai une question extrêmement importante dans le cadre de ce que le ministre a déclaré. Je ne vois pas comment on peut dire comme cela qu'il n'y a plus de question additionnelle.

M. Lavoie: Sur la question de règlement, avant que vous ne rendiez votre décision, dans le passé, au moins sur une question principale de l'importance de celle qui est posée par le député de Rouyn-Noranda, à plusieurs reprises, il y a eu des questions supplémentaires, non pas uniquement par celui qui avait posé la question principale, mais par les autres partis qui pouvaient y greffer une question additionnelle. Je pense bien que cela a été reconnu et c'est arrivé à plusieurs reprises. Je verrais, personnellement, d'un très mauvais oeil que vous refusiez une ou peut-être deux questions supplémentaires à d'autres députés, qu'ils soient de l'Union Nationale ou du Parti libéral, sur une question aussi importante.

M. Bellemare: M. le Président, en parlant de question de règlement, nous avons commencé la séance ce matin à 10 h 20 à cause de certains retards. Cela fait plusieurs fois que cela se répète depuis le commencement de la session. Les questions ont commencé à 10 h 59, parce qu'il y a eu, d'abord, la déclaration ministérielle qui a été très longue. Il y a eu les dépôts de documents. Donc, en vertu de la tradition, notre demi-heure n'est pas épuisée, tel que le veulent nos règlements. Je vous soumets très humblement que nous avons droit à cette demi-heure particulière de questions. Quand le gouvernement nous retarde de vingt minutes, qu'il y a une déclaration ministérielle qui dure presque vingt autres minutes et les dépôts de documents et qu'on commence les questions à 10 h 59, tel que je l'ai noté, on arrive à 10 h 20, il doit nous rester au moins encore 24 minutes. Je pense qu'on aurait droit, et je soumets humblement à vo-tre considération ces détails qui sont très importants, on devrait permettre à nos députés de pouvoir poser au moins une question. On avait droit à deux questions ce matin. On a seulement une question par le chef et on a une autre question très importante par un de nos députés. J'aimerais bien que ce député puisse aussi se faire entendre.

Le Président: Je vais profiter de l'occasion pour préciser comment j'entends régir la période des questions orales. Tout d'abord, je voudrais préciser à M. le député de Johnson que la période de questions a commencé, suivant le secrétaire adjoint et suivant moi-même, à 10 h 47 précisément, de telle sorte que, normalement, elle serait terminée.

Je sais, M. le député de Johnson, que vous avez, depuis longtemps, des litiges avec le secrétaire adjoint au sujet de l'heure du début des questions.

M. Bellemare: II protège le trône, lui.

Le Président: M. le député de Johnson, je vous rappelle que de même qu'il vous arrive de ne pas voir le Président, de même vous arrive-t-il de ne pas voir l'heure.

Vous avez mentionné, tout à l'heure, M. le député de Johnson, que vous aviez droit à deux questions. Je voudrais préciser la politique que j'entends suivre. Je verrai si, à l'usage, elle doit être prolongée, en ce qui concerne la période des questions. Je permettrai toujours, au départ, deux questions à l'Opposition officielle, ensuite, une question au parti de l'Union Nationale. Par la suite, quant à la quatrième question, je verrai à qui elle doit être accordée, suivant les membres de cette Assemblée que je pourrai reconnaître. Je voudrais tout de suite rectifier votre affirmation voulant que vous ayez droit à deux questions.

En ce qui concerne les questions additionnelles, je pense que mon prédécesseur avait fait bien attention — cela est important et j'entends suivre la même politique — de ne pas trop permettre de questions additionnelles, de telle sorte que cela puisse empêcher les membres de cette Assemblée de poser des questions principales. On pourrait s'éterniser sur des questions accessoires et ne jamais pouvoir formuler de questions principales. C'est pourquoi, d'ailleurs, j'ai donné la parole à M. le député de Laurier. Je vais lui donner la parole et ainsi terminer la période de questions.

M. Bellemare: M. le Président, je me permets, simplement par déférence pour votre décision, de vous dire qu'il avait été entendu que nous aurions droit à deux questions pour protéger notre groupe. Je vous rappellerai que vous-même, sans faire aucune indiscrétion...

M. Lavoie: A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre! Question de règlement, M. le Président. Je crois qu'il n'appartient pas au député de Johnson de critiquer la décision du Président.

M. Bellemare: Non, non.

M. Lavoie: Je crois que c'est même indécent.

M. Bellemare: II faudrait rappeler à l'honorable leader de l'Opposition comment, tout à l'heure, il a manqué son coup; mais je ne veux pas tourner le fer dans la plaie.

M. le Président, si vous décidez qu'on a droit à une question, je me soumettrai, mais j'espère que vous allez me reconnaître avant les autres pour la quatrième. En tout cas! Je voudrais vous rappeler, M. le Président, qu'il avait peut-être été entendu entre nous, lors d'une visite que vous m'avez aimablement faite, que vous pensiez, vu l'importance...

Des Voix: Ah, ah!

M. Bellemare: Oui, lors de l'étude des règlements, ici, en public, il avait été peut-être entendu que nous...

M. Burns: A l'ordre, M. le Président, à l'ordre! M. le Président, j'invoque le règlement. Votre décision est rendue, M. le Président, et je vous demande de la maintenir. En ce qui concerne la majorité, nous la respectons. Nous avons entendu l'Opposition officielle dire qu'on la respectait et qu'on s'y soumettait; je ne vois pas pourquoi un parti déciderait de ne pas s'y soumettre.

Le Président: M. le député de Johnson, une dernière fois, je maintiens ma décision. Je vous rappelle, d'une part, que quand je suis allé vous rendre visite, il aurait fallu que vous mentionniez que je n'étais pas Président.

D'autre part, je répète que je maintiens ma décision.

M. Marchand: M. le Président...

Le Président: M. le député de Laurier.

M. Bellemare: En ne s'occupant pas des autres, c'est cela qui arrive. On prend toute la place des autres. On se souviendra de cela.

Des Voix: A l'ordre!

Avenir des installations olympiques

M. Marchand: M. le Président, ma question s'adresse au ministre tuteur ou pupille... au ministre responsable du dossier olympique.

Dans sa décision de rejeter le maire Jean Drapeau, le député de Saint-Jacques, l'honorable ministre, a-t-il consulté les autres membres du RIO?

M. Charron: J'espère que l'attention que porte l'Opposition à ce dossier n'est pas symbolisée par le député qui pose la question.

Je voudrais expliquer rapidement la décision prise relativement à ce dossier. J'ai refusé la suggestion de la ville de Montréal, savoir que le maire de Montréal soit le délégué de la ville au comité chargé d'étudier l'avenir des installations olympiques, pour deux raisons: la première, parce que le maire de Montréal s'est fait, depuis l'origine, le promoteur, le principal vendeur et le principal prophète d'une des hypothèses de parachèvement des installations olympiques que le comité sera chargé d'étudier.

Mais les quatre autres membres de ce comité n'ont été en aucun temps liés à l'une des hypothèses que nous devrons étudier. J'avais recruté ces personnes à cause de cette impartialité, à cause de cette neutralité qu'elles pourront manifester devant chacune des hypothèses, et le maire de Montréal ne me paraissait pas convenable dans le cadre de neutralité et d'impartialité que l'on voulait.

La deuxième raison pour laquelle j'ai refusé cette suggestion, c'est qu'il me paraissait évident — et j'ai tenu à le répéter — que la solution que ce comité devra recommander au Conseil des ministres, par l'entremise de celui qui vous parle, M. le Président, devra être une solution socialement justifiable et économiquement raisonnable.

Et quand on parle d'un corridor aussi étroit qu'une solution socialement justifiable et économiquement raisonnable, je pense que le maire de Montréal est depuis longtemps disqualifié.

M. Marchand: Une question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Une dernière question additionnelle.

M. Marchand: Est-ce que le ministre n'aurait pas dû, dans sa décision, respecter tout de même les élus du peuple de la ville de Montréal, qui avaient choisi le maire de Montréal pour les représenter, ou est-ce que le ministre ne donne pas justement un signe que le nouveau ministre désire écarter tous ceux qui sont de pensée différente de ses opinions politiques à lui?

M. Charron: Nullement, M. le Président. D'abord, je tiens à dire que je n'avais pas demandé à la ville de Montréal de me déléguer quelqu'un. J'avais demandé de me faire une suggestion, parce qu'il était important que la décision pour la formation de ce comité, vu la nécessité de l'impartialité et de la neutralité, soit celle du ministre responsable de ce dossier. La deuxième raison est, je n'ai pas du tout l'intention d'écarter quelque hypothèse que ce soit, y compris celle qu'incarne le maire de Montréal. Le comité, lorsqu'il sera formé, sera heureux de recevoir, j'espère, non seulement une opinion écrite de la part de la ville de Montréal, qui est directement intéressée dans l'avenir des installations olympiques, à cause des revenus qui en découleront pour elle et à cause de son intérêt premier dans le développement du parc olympique, mais j'espère même aussi — et je le dis bien clairement — que le maire de Montréal acceptera de venir rencontrer le comité, lors d'une de nos séances, pour nous parler de son hypothèse à lui, alors qu'aucun des membres de ce comité, à ce moment, ne sera lié à une autre hypothèse en particulier.

Le Président: Avant de clore la période de questions, j'ai été informé par M. le ministre de l'Industrie et du Commerce qu'il aimerait répondre à une question qui a été posée antérieurement. Je laisse la parole à M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

Hausse du salaire minimum

M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. Le député de Lotbinière posait mercredi passé une question intéressante, à savoir si le salaire minimum affectait les entreprises multinationales. Il aurait été fastidieux de dresser une liste exhaustive de tous les noms des sociétés multinationales et de leur implication dans le salaire minimum, mais j'ai quand même fait le tour de la question et je pense que nous pouvons présenter la question de façon satisfaisante pour les membres de l'Assemblée.

Les sociétés multinationales — ici je parle de sociétés internationales — sont impliquées de deux façons par le salaire minimum: directement et indirectement. Au plan direct, il faut se rappeler qu'au Québec parmi les salariés au taux minimum, il y en a 57% dans les deux secteurs suivants: commerce de détail et hôtellerie. Or, ce sont deux secteurs où il existe plusieurs multinationales qui oeuvrent au Québec.

Par contre, il faut se rappeler que les grandes sociétés, comprennent souvent des syndicats et que certains hôtels et certains restaurants ont avec leurs employés, des conventions collectives dont les règlements sont supérieurs au salaire minimum. D'autre part, les grandes sociétés font souvent de la sous-traitance. Par conséquent, même si, dans leurs conventions collectives, elles ne sont pas soumises au salaire minimum, il est possible que, dans leurs travaux de sous-traitance, elles emploient du personnel qui est, lui, soumis au salaire minimum.

Maintenant, en ce qui concerne l'implication indirecte, il existe des conventions collectives de sociétés multinationales qui règlent parfois leurs salaires sur le salaire minimum, soit par un montant fixe supplémentaire ou par un pourcentage.

De cette façon, le salaire minimum se trouve à les affecter indirectement, puisque leurs règles de détermination des salaires se trouvent à être reliées au salaire minimum. Merci.

Le Président: C'est la fin de la période des questions.

M. Pagé: Une question de règlement. J'avais posé une question cette semaine au ministre du Tourisme qui s'est engagé à formuler la réponse avant la fin de la semaine. Est-ce que celui-ci pourrait suivre le bon exemple qui lui est donné par le ministre de l'Industrie et du Commerce et me répondre?

M. Duhaime: Si j'avais bien compris, la question du député de Portneuf visait à savoir s'il y avait des incidences économiques de la hausse du salaire minimum pour les employés de l'hôtellerie. En fait, j'aurais peut-être eu besoin de quelques heures, mais je puis vous répondre maintenant qu'après en avoir discuté, en portant ce salaire à $2.65 dans l'hôtellerie, il est évident que c'est un point très marginal. En effet, si vous prenez Montréal, à l'heure actuelle, le coefficient d'occupation des grands hôtels de Montréal est aux alentours de 50%, 45% et même 40% dans certains cas. Ce bas taux d'occupation n'est en aucune manière relié au salaire minimum décrété ou antérieur. Il est beaucoup plus relié, et ce malgré la tenue des Jeux olympiques en 1976, au haut taux de taxe locative qui affecte les grands hôtels de Montréal.

Là-dessus, soyez assuré que j'ai rencontré dès hier des gens en autorité qui sont intéressés et que nous allons, au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, envisager des formules pour faire en sorte de contrer cette espèce de descente qui pourrait faire de Montréal une ville hors marché pour les grands congrès.

Le Président: Affaires du jour.

M. Burns: Aux affaires du jour, j'appellerai d'abord l'article 2). Je rappelle, pour les autres députés qui seraient intéressés à savoir ce qu'on va faire cet après-midi, que nous suspendrons la séance, tel que l'ordre en a été donné hier, à 12 h 30 pour reprendre à 14 h 15. Si, à ce moment-là, l'article 2), c'est-à-dire la reprise du débat sur le message inaugural et les motions de censure qui s'y relient sont terminées, si on en a disposé, nous entreprendrons l'article 1), c'est-à-dire la commission plénière pour l'étude des crédits.

J'en donne avis à tous les membres qui seraient intéressés à suivre exactement la progression des travaux aujourd'hui. Nous finirons, si possible, avant 17 heures, sinon à 17 heures cet après-midi au plus tard. M. le Président, l'article 2).

Reprise du débat sur le message inaugural

Le Président: Reprise du débat sur le message inaugural.

M. le premier ministre.

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): Je suis — inutile de vous le dire — très heureux et très fier de m'adres-ser pour la première fois, de façon semi-solennelle, au nom du nouveau gouvernement, à cette Assemblée nationale où le récent scrutin m'a permis, enfin, avec tant d'autres qui sont nouveaux ici — moi, cela renouvelle un morceau de ma vie — de rentrer au moment où, personnellement, j'étais sur le point de ne plus y compter.

Cela me rappelle que je voudrais commencer en remerciant du fond du coeur les électeurs du comté de Taillon qui m'ont fait cette confiance et souligner aussi que ce résultat était beaucoup moins le fruit de mon travail que de celui de centaines de militants et de bénévoles de notre parti qui ont travaillé d'arrache-pied jusqu'au 15 novembre.

Comme pour tous les autres, à la suite de ce résultat — j'ai eu l'occasion de le dire au moment où se déroulait l'assermentation du nouveau Conseil des ministres — je considère qu'autant qu'il est humainement possible, un de mes premiers devoirs demeure, quand même, d'essayer d'être un bon député, même dans ce tue-monde, d'ailleurs passablement inattendu cette année, comme le rappelait le chef de l'Opposition, qu'est le poste que je dois occuper maintenant.

Malgré cela, je voudrais essayer de réussir de mon mieux — je pense que nous sommes tous remplis des mêmes intentions — au moment où ce sera possible d'être un bon député.

J'ai toujours remarqué d'ailleurs, et je le dis pour les nouveaux qui n'ont jamais connu cela encore, durant les années où j'ai siégé antérieurement comme député, que c'est dans cette partie du rôle politique — en tout cas à titre personnel, c'est ce que j'ai ressenti — qu'on a souvent, plus qu'ailleurs, l'impression de faire des choses qui sont concrètes et utiles. Vous savez, il est important — il y a des gens qui diront que c'est plus important et ils ont peut-être raison — de participer, par les travaux de l'Assemblée nationale, à l'élaboration des lois, des budgets. Il y en a qui diront aussi que c'est plus important de participer au travail du Conseil exécutif, c'est-à-dire de veiller à l'application des décisions du Parlement et à l'administration des fonds publics.

C'est peut-être vrai. S'il s'agit simplement de la satisfaction personnelle que l'on peut avoir à jouer un rôle politique, officiellement, il me semble que c'est en aidant, au niveau des comtés, à régler des cas humains, très précis, très tangibles et, pour ainsi dire, de servir modestement, mais souvent d'une façon que l'on ressent, dans la même journée, de protecteur du citoyen, jusqu'à un certain point, dans le coin qui nous a fait l'honneur de nous élire.

Cela dit et, autant que possible, cela fait, à l'occasion, exige donc d'être membre, d'abord, de cette Assemblée que l'on appelle nationale. Nationale est un mot sonore. Je me souviens du moment où il a été inscrit dans la Loi de la Législature, je crois. C'est un mot sonore et logique pour désigner le Parlement d'un peuple. Comme celui, d'ailleurs, d'Etat. Je suis sûr que le chef de l'Opposition, un autre survivant, comme moi, des années soixante, s'en souvient. C'est un peu comme celui d'Etat que l'on avait mit à la mode au moment de cette période que l'on a appelée la révolution tranquille. L'Assemblée nationale de l'Etat du Québec.

Derrière les mots il y a une sorte de nostalgie collective. Je pense que tout le monde l'admettra. Il est bon que les mots expriment ce genre de nostalgie en attendant parce qu'il ne serait pas bon, à mon avis et à l'avis du gouvernement au pouvoir depuis trois semaines maintenant, que pendant trop longtemps la réalité politique ne corresponde pas adéquatement aux mots que l'on a voulu employer pour exprimer une certaine nostalgie collective. C'est une façon très simple, en partant des mots que nous employons tous les jours, d'exprimer le but que poursuit fondamentalement le Parti québécois, au plan national, le but suprême que doit poursuivre et que poursuivra maintenant le gouvernement qui vient d'être élu. C'est-à-dire, justement, de donner tout son sens, le plus complet, le plus entier, à cet adjectif de "nationale" qui qualifie déjà notre Assemblée parlementaire.

Je crois que si l'on veut parler de valoriser ou de revaloriser l'institution parlementaire — et Dieu sait que l'on s'est gargarisé souvent, et non sans résultats, à certains points de vue, avec cette expression — si l'on veut vraiment valoriser ou revaloriser le Parlement, cela doit passer d'abord ou, si l'on préfère, cela doit passer enfin par ce contenu du mot "national" qui, même en désignant notre Parlement, n'est pas tout à fait adéquat, en ce moment.

Cela passe aussi, évidemment, par beaucoup de réformes qui ont trop tardé dans bien des cas, des réformes concernant le fonctionnement de

l'institution parlementaire. Nous l'avons tous souligné trop rapidement, mais je dois dire que nous sommes conscients, de ce côté de la Chambre, du travail assez remarquable, même extraordinaire à certains points de vue, que l'ancien président de la Chambre, le leader parlementaire d'aujourd'hui, député de Laval, a effectué ces dernières années. Je crois que les députés du Parti québécois en étaient conscients et ont su lui rendre hommage à ce point de vue. Je suis sûr aussi que le nouveau président de la Chambre, avec les intentions qu'il nous a exprimées, la formation dont il dispose, pourra enchaîner sur ces développements qui étaient très heureux et qui étaient un aspect de la revalorisation nécessaire du Parlement.

Mais, dans cette perspective, il y a aussi des choses qui touchent l'exercice de ces pouvoirs comme Parlement. Celui, entre autres par exemple, d'être placé dans la position de vraiment savoir ce qui se passe dans l'ensemble de l'administration publique. Là-dessus, on a pas mal de rattrapage à faire. Il y a aussi des choses directement reliées à ce qu'on peut appeler non seulement l'image, mais l'intégrité réelle du Parlement et qui concerne la vie des partis, leur représentativité, leur intégrité comme formations politiques, la qualité de leur vie démocratique interne.

A ce point de vue, nous arrivons au gouvernement avec des vues extrêmement précises qui sont bien connues et qui expliquent, pour une grande part, la création, parmi les ministères d'Etat, de celui qu'occupera désormais, qu'occupe maintenant le leader parlementaire, c'est-à-dire ministre d'Etat à la réforme parlementaire, parce qu'il y a tout un ensemble sur lequel on aura tous à travailler. La réforme parlementaire, quant à nous, comprend aussi, comme une de ses dimensions essentielles, la réforme électorale qui, je crois que tout le monde l'admettra, n'a jamais été complétée. Cela fait partie de nos priorités. Je crois qu'elles sont logiques et nécessaires.

Ce qui m'amène, en parlant de réforme électorale, à commenter très brièvement, cela ne demande pas de commentaires détaillés, le résultat des élections qui se sont déroulées il y a tout juste un mois. Je me permettrai d'abord de noter, ce que tout le monde admettra, que le résultat de ce scrutin nous a donné, quand même, peu importent les déceptions ou les satisfactions des uns ou des autres, globalement, une Assemblée nationale qui est beaucoup mieux équilibrée en fonction de la volonté populaire que le Parlement auquel elle succède. C'est beaucoup plus représentatif, je crois, de la véritable volonté populaire que le résultat de 1973.

Cela me permet de souligner en passant que, dans cette représentativité améliorée, se trouve une présence beaucoup plus substantielle et, je crois, extrêmement justifiée de l'Union Nationale qui représente quand même une tendance permanente dans notre société comme dans n'importe quelle autre, c'est-à-dire la tendance foncièrement conservatrice — je crois que le mot n'a rien d'offensant, c'est une réalité — qui a des racines aussi profondes chez nous qu'ailleurs et qui, à cause de sa présence très concrète dans la population et dans les esprits, méritait ce retour en force ou en demi-force, peu importe, que dirige maintenant le député de Lotbinière en qui je crois, en toute équité. Il faut dire que son coup d'essai a été un coup de maître.

Evidemment, en dépit de ce que je viens de dire, cette représentativité parlementaire, telle qu'illustrée par les résultats du 15 novembre, est loin d'être parfaite. Il est évident qu'elle ne le sera jamais complètement. Ce n'est pas possible de trouver une adéquation absolue entre la volonté populaire et les résultats arithmétiques qui s'inscrivent au Parlement dans les 110 ou 112 sièges, peu importe. Ce ne sera jamais parfait même si certaines réformes, que là aussi nous gardons l'intention d'effectuer, permettent et permettront sûrement d'améliorer encore les choses et la situation sur ce plan. Un plan, d'ailleurs, comme sur tant d'autres — et là je généralise mes remarques, mais je crois que là aussi la plupart des gens, peut-être pas tout le monde, mais la plupart des gens l'admettront— un plan, celui des élections, où le dernier scrutin a été le signe, quant à nous, éclatant d'une maturité politique sans précédent. Elle était là, mais elle s'est révélée comme jamais dans l'ensemble de la population québécoise.

Je crois qu'il est évident qu'il y avait, après une demi-douzaine d'années de l'autre gouvernement, dans tous les domaines, ou à peu près, un besoin de plus en plus grand, une espèce d'appétit très visible de changement et de renouveau, aussi bien dans le secteur de l'administration des affaires publiques que dans la place que le peuple québécois doit occuper dans sa propre vie économique, dans sa propre société à tous les points de vue et aussi, dans le régime politique, dont ce peuple fait partie jusqu'à nouvel ordre.

Contre ce besoin et cet appétit de plus en plus grand se dressaient, comme toujours — et c'est normal quand il s'agit de changement — et bien exploité de nouveau, comme toujours, toutes les ressources d'une propagande politique admirablement organisée qui se servait évidemment et qui s'est servie encore du conditionnement héréditaire, de génération en génération, à un certain statu quo. Cette fois, une partie suffisante de la population pour que cela compte dans les résultats s'est dressée, dans un sursaut que je trouve extraordinaire — je l'ai déjà dit, je crois que même si on n'est pas d'accord, on peut en être très fier — contre cela; elle a dit non à tout cela qui était employé encore une fois, au fond, contre elle. Cette population québécoise — je crois que le moteur de ce sursaut était surtout la fierté et la confiance en soi retrouvées — nous a mis majoritairement de ce côté-ci de la Chambre, non pas comme la cause de ce qui est arrivé, mais bien plutôt comme le résultat. C'est un résultat dont il ne sera pas facile d'être digne, on le sait, parce que cela charrie beaucoup d'espoir. On n'a pas essayé de le gonfler avec des illusions, mais l'espoir était quand même là et cela en véhicule beaucoup. Notre devoir à nous — et on espère bien, chaque fois qu'on sera d'accord, avoir la coopéra-

tion de tous les partis, de tous les députés dans cette Chambre — c'est de ne pas transformer cet espoir en désillusion.

Evidemment, la vraie réalisation d'une partie de ces espoirs, au moins, ce n'est pas pendant cette mini-session que nous avons en ce moment qu'on la verra se dessiner clairement. Ces jours-ci, il s'agit concrètement, et à peu près exclusivement, en ce qui concerne le travail tangible que l'Assemblée nationale a à accomplir, de faire face à certaines urgences. Il y a des urgences budgétaires, bien entendu — je n'apprendrai rien à l'ancien gouvernement qui maintenant forme nos vis-à-vis, en particulier au député de Jean-Talon — auxquelles quelque élu qui fût sorti des élections du mois dernier aurait eu à faire face.

Il y a aussi des urgences législatives qui répondent et qui doivent répondre avant la fin de l'année à des besoins qui sont là, chez beaucoup de groupes de citoyens, et qui exigent une action du Parlement. Tout cela, nous avons systématiquement évité d'y ajouter quoi que ce soit pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté ou qu'il n'y ait pas, si vous le voulez, de tiraillement à ce point de vue, tout cela, dis-je, fait clairement partie de la succession que nous ont léguée nos amis d'en face.

Il y aura aussi, bien sûr, dans deux cas, en tout cas, des amendements à des lois fondamentales comme celle de l'Exécutif et celle de la Législature — pour des raisons qui découlent à l'évidence du résultat des élections — en ce qui concerne le parti de l'Union Nationale et en ce qui concerne — je voudrais insister très rapidement là-dessus, pendant deux ou trois minutes — la nouvelle structure de fonctionnement du Conseil exécutif. On y reviendra, bien sûr, dans le détail au moment de la discussion des amendements à la loi.

Dans le cas du Conseil exécutif, particulièrement, il va s'agir, pour l'Assemblée nationale, si elle le veut, de ratifier quelques changements importants et à notre avis prometteurs. C'est à l'usage ou, comme le dirait le député de Rouyn-Noranda, je pense, à l'usure qu'on verra, en tout cas... Il s'agit de changements qui, dans la structure et le fonctionnement du cabinet, par l'arrivée en particulier d'un groupe de 5 ministres d'Etat reliés à deux ou trois autres de leurs collègues, y compris votre serviteur, M. le Président, dans un comité des priorités, devraient permettre, quant à nous, d'augmenter l'efficacité et la cohérence de l'action gouvernementale. On n'invente pas le monde, c'est une formule qui a été testée ailleurs. Il ne s'agit pas d'un "inner cabinet"— on l'a déjà dit — comme on les a faits en Grande-Bretagne, c'est-à-dire d'un cabinet où il y a deux niveaux de décision qui sont inégaux. Il s'agit essentiellement de ministres qui sont tous ministres à titre égal, même salarialement, mais de ministres dont certains sont chargés de ce qu'on peut appeler la coordination à laquelle, souvent, n'ont pas le temps de s'adonner les ministres départementaux qui ont un poids énorme à porter de budget, d'effectifs, d'administration.

Il s'agit de ministres qui, à l'intérieur du cabinet, avec le même pouvoir de décision que les autres, auront à travailler à la coordination — dans la société complexe où nous sommes, presque tout a besoin d'être coordonné, si on veut aboutir clairement à des décisions et éventuellement à des réalisations — et aussi à mâcher des priorités, des urgences qui là aussi peuvent être extrêmement complexes. Il n'y a presque plus rien aujourd'hui qui peut s'appeler, à l'état pur, social, culturel, économique. Presque tout intervient sur presque tout. Il est impossible — on l'avait d'ailleurs déjà noté dans les gouvernements précédents avec des comités interministériels plus ou moins permanents, plus ou moins ad hoc — de penser qu'on peut répondre aux besoins de la société en gardant les ministères comme des compartiments séparés. Ils ont toujours cette tendance. Il est normal, au niveau de la décision politique et non pas seulement au niveau des fonctionnaires, qu'il y ait une partie du Conseil exécutif, des ministres qui soient chargés d'actionner ces décisions interdépartementales, de piloter des projets qui affectent plusieurs secteurs. Autrement dit, on pourrait dire que, dans la société de plus en plus complexe, avec ses besoins de plus en plus extraordinairement interreliés auxquels tout gouvernement aura à faire face — il n'y a rien qui soit complet en soi, il faut absolument qu'il y ait des coordonnateurs — on pourrait dire que là, dans la structure du gouvernement jusqu'à un certain point, comme on peut le dire ailleurs, il peut y avoir de la souveraineté départementale, à condition que ce soit dans l'interdépendance.

Il faut, et on croit que c'est nécessaire pour l'efficacité, pour la cohérence de l'action, qu'il y ait un certain nombre de personnes politiques, et non pas simplement administratives qui pilotent cette coordination, cette mastication des priorités, ce qui ne les rend ni plus ni moins ministres dans le contexte que nous envisageons que les autres, au moment en tout cas décisionnel qu'ils partagent avec leurs collègues départementaux. Bien sûr, cela demande beaucoup de solidarité. C'est une formule qu'on met à l'essai en en connaissant les risques. Cela va demander un sens de l'équipe qui, je crois, n'a jamais été demandé à aucun gouvernement. Je crois aussi, que c'est ce qu'ont bien compris nos amis d'en face; cela ne leur a pas pris de temps à comprendre cela, parce que j'ai remarqué que leur instinct jugulaire qu'ils essaient de retrouver, les pousse déjà à essayer de trouver des failles, à voir s'il n'y aurait pas moyen de trouver l'occasion de voir s'il ne serait pas possible de créer de la bisbille. A mon humble avis, ils pourront toujours chercher, parce que nous sommes profondément convaincus que la fonction que représente la création de ces ministères d'Etat est absolument essentielle pour un gouvernement moderne; qu'elle puisse s'amender en cours de route, qu'elle puisse sûrement s'améliorer, on n'en doute pas, mais qu'elle réponde à un besoin de tout gouvernement de notre époque, quel qu'il soit, dans quelque contexte que ce soit, je crois que cela non plus on ne commencera pas à en

douter, à cause de certains "picossages" de l'Opposition.

Je dirais la même chose concernant un autre changement sur lequel je vais passer rapidement, mais que je voudrais souligner, un autre changement qui est en fait tout simplement un retour, à mon humble avis, au bon sens et à une certaine conception de la démocratie. Je veux parler de ce début d'une politique d'information, un début très modeste, en tout cas, d'information permanente, si je puis dire, pour les citoyens, par le truchement des media d'information, sur les gestes et les décisions du Conseil exécutif. On a toujours dit — et je crois que c'est plus que le moment de le pratiquer après avoir vécu six années gouvernementales assez opaques, assez difficiles à percevoir par le public et l'ensemble des citoyens du Québec — qu'à notre avis, il fallait que le gouvernement, au sens en particulier de l'administration publique, soit d'une transparence maximum, qui ose continuellement exposer ses décisions et les exposer sans délai. Cela prend la forme, pour le moment, c'est une forme très préliminaire, si on veut, très modeste, je le répète, de conférences de presse très rapides, qui suivent et qui suivront désormais, sauf exception imprévisible, les réunions du Conseil des ministres; avec certains de mes collègues, je vais les tenir régulièrement, et pour ceux qui ne s'en souviennent pas, je rappellerai que c'était la tradition établie au temps de gouvernements comme ceux de M. Lesage, de M. Johnson et jusqu'à un certain point celui de M. Bertrand. Puis l'habitude s'en est perdue, pour des raisons que nous connaissons.

Nous avons tenu à retrouver cette tradition afin de dire strictement, au plan de l'Exécutif, c'est-à-dire de ce groupe de fonctionnaires que nous sommes, en tant que ministres, et qui sont chargés d'administrer, de dire, aussi vite que possible quand c'est clair, ce que nous faisons, quand c'est décidé, et ce que nous avons l'intention de faire strictement sur ce plan.

A notre époque, et peut-être singulièrement dans le contexte québécois, je crois que c'est la seule façon normale de procéder. Je soulignerai aussi qu'il n'y a rien là-dedans —il n'y a rien là, comme on dit familièrement — et pas même en temps de session parlementaire, qui puisse contribuer à une ignorance, encore moins à des brimades des droits et des privilèges législatifs de la Chambre, sauf, bien entendu, que, chaque fois que ce sera indiqué, en temps de session, bien sûr, même si ce n'est pas obligatoire, c'est bien l'intention du gouvernement de mettre l'Assemblée nationale au courant, et en premier lieu chaque fois que ce sera possible, de décisions importantes dans le domaine administratif aussi ou dans le domaine exécutif. Je donnerai simplement comme exemple une ou deux déclarations ministérielles. La première a été celle du vice-premier ministre et ministre de l'Education; il y a eu celle du ministre d'Etat au développement culturel; il y en aura d'autres qui indiquent déjà cette intention de ne pas faire exprès pour retarder l'information de la Chambre, au contraire, de la privilégier cha- que fois que ce sera possible, mais dans un domaine où ni la loi ni la coutume ne rend cela obligatoire. Je crois qu'il y avait, dans certaines discussions qui ont suivi les questions, hier en particulier, une confusion sûrement involontaire, mais une confusion entre les deux plans.

Quant à l'avenir, la seule chose qu'on peut dire, c'est qu'il va venir vite. On s'en aperçoit déjà. Dans l'immédiat, on répète souvent, depuis quelques jours — j'ai bien l'impression qu'on va continuer à le répéter chaque fois que l'occasion s'en présentera — chez nos amis d'en face, que cet avenir se profile dans une espèce de nuage d'incertitude. C'est vrai. Seulement, je crois que, sur certains points, on admettra — sur certains points extrêmement importants, essentiels — que c'est peut-être moins vrai qu'avant le 15 novembre.

Je veux répéter ici ce que j'ai eu l'occasion de dire brièvement en réponse a une question. Je veux répéter ceci: Pendant tout le mois qui a précédé le jour du scrutin, cela a été mon rôle — je pense que c'est normal — de faire beaucoup de tournées qui m'ont permis de voir, dans toutes les régions du Québec, ce qu'on peut percevoir trop rapidement, mais quand même assez clairement pour l'essentiel, de l'état de l'opinion publique, de l'opinion des citoyens face aux affaires publiques, au gouvernement, au Parlement, à l'administration de leur argent et de leurs lois. Depuis, j'ai eu des rencontres, et mes collègues, maintenant, en ont eu aussi, avec des milieux représentatifs de ce que pourrait être l'inquiétude dont parle l'Opposition, aussi bien des milieux économiques que des milieux sociaux, du Québec et même de l'étranger.

Je répète ce que j'ai dit et je le répète avec l'absolue certitude de dire la vérité. L'inquiétude est toujours là, dans le sens de l'incertitude, oui, mais une chose est certaine, c'est qu'il y a un espoir — on espère le justifier — dans tous ces milieux dont je parle et dans l'opinion publique, sur lequel ils ne comptaient plus en ce qui concerne deux zones d'incertitude, qui étaient devenues des inquiétudes criantes au Québec et même à l'étranger, en ce qui concernait l'état collectif de nos affaires; il s'agit de la qualité de l'administration publique ou, si on préfère, du bon sens de l'administration publique du côté des priorités, du côté des choix qu'il faut faire dans toute société, du côté de l'absolue nécessité, dans le contexte que nous traversons ces années-ci, d'éviter, autant que possible, les gaspillages, de ne pas se jeter tête première et ensuite, littéralement, se noyer financièrement ou budgétairement dans des éléphants blancs, de travailler d'arrache-pied, d'abord et avant tout, sur des besoins criants qui sont concrets et des besoins sur lesquels, je dois dire, on a accumulé depuis quelques années des records négatifs qui étaient probablement sans précédent, qu'il s'agisse des besoins de logement, qu'il s'agisse, par exemple, de santé agricole, qu'il s'agisse de besoins de développement, le mieux possible équilibrés interrégionalement, parce que le Québec est grand, sa population est dispersée. De tout ce côté, sur tout ce plan, si vous préférez, qui peut s'appeler administratif, gouverne-

mental, non seulement au jour le jour, mais dans la perspective des années qui passent, je crois qu'il y a moins d'incertitude — c'est à nous de justifier cette diminution — depuis le 15 novembre, qu'il y en avait avant cette date. Cela nous a été souligné et je crois que la même chose peut s'appliquer aussi au climat social.

On avait un climat social qui était fait presque, on peut dire, de façon endémique, d'affrontements qui devenaient inextricables, de conflits qui pourrissaient sur pied pendant des mois et des mois dans le secteur public et aussi dans le secteur privé. Je ne mets pas toute la responsabilité de cela, loin de là, sur le gouvernement qui nous a précédés, et on ne l'a jamais fait d'ailleurs; mais il y a une chose certaine, c'est que le gouvernement qui nous a précédés avait sa large part de responsabilité. En ce qui concerne le secteur public, il avait, quant à nous, une responsabilité première, parce qu'il était à la fois l'interlocuteur et éventuellement celui qui a le bâton dans ce domaine. Je crois qu'à ce point de vue, il y a déjà une confiance qui règne, ici comme à l'extérieur — en tout cas, il n'y aurait pas moyen d'avoir pire comme résultat — il y a un espoir renouvelé de nettoyer le climat et d'obtenir, dans la justice, puis dans la clarté aussi, dans la compréhension des partis, ce qu'on appelle la paix sociale.

Maintenant, cela ne change pas le fait que, même si on réussit, si peu que ce soit, mais le plus vite possible, si on réussit en premier lieu, comme une tâche essentielle, à dissiper ces deux zones d'incertitude qui étaient au centre du climat québécois, à lever ces deux hypothèques, même si on réussit cela, il va demeurer quand même, pendant un certain temps, une autre grande incertitude, à plus long terme, et celle-là, elle concerne le statut politique du peuple québécois. Là-dessus, il ne faudrait tout de même pas oublier, quand on parle avec insistance, comme l'a fait entre autres le chef de l'Opposition, un peu le député de Lotbinière et d'autres, il ne faudrait pas oublier, dis-je, quand on parle de cette incertitude spécifique et très grande, que cela fait tout de même deux siècles, en fin de compte, que ce peuple québécois, que nous sommes, vit dans une incertitude collective, quant à son avenir, et même à l'occasion, et c'est vrai singulièrement depuis une quinzaine d'années, ou depuis la Deuxième Guerre mondiale, une incertitude collective quant à sa capacité même de continuer dans le contexte où il se trouve.

Ce n'est pas pour rien qu'on a fait dans notre vocabulaire un mot clé du mot survivance. Il n'y a pas beaucoup de peuples dans le monde, de peuples constitués, substantiels, qui ont une identité bien connue, bien définie, je n'en connais pas d'autres, moi, en tout cas, il n'y en a sûrement pas beaucoup de peuples dans le monde, qui ont fait un mot central dans leur vocabulaire, d'un mot qui est comme une demi-vie, parce que, survivre, cela veut dire s'accrocher à la vie fondamentalement, cela veut dire: Est-ce qu'on est capable de passer à travers encore pendant une génération ou deux générations?

Et, cela est devenu particulièrement grave, chacun ne vit pas cela tous les jours; cela ne nous empêche pas de dormir un par un, mais collectivement, pour les esprits qui sont éveillés à la réalité d'ensemble du Québec, elle est devenue particulièrement grave, cette incertitude, depuis les lendemains de la Deuxième Guerre mondiale et singulièrement depuis une quinzaine d'années, depuis qu'on a pris conscience de l'effet conjugué de phénomènes comme la dénatalité, par exemple, de notre société et de l'assimilation des immigrants qui viennent chez nous et que le contexte lui même — ce n'est pas notre faute, ce n'est pas leur faute, c'est notre faute, si on ne change pas cela, par exemple — amène à s'assimiler contre nous, dans des régions aussi essentielles pour notre vie collective que la grande région métropolitaine de Montréal et tout ce qu'on peut appeler l'Ouest du Québec.

Chez les esprits qui en sont conscients, chez ceux surtout que leur travail ou leurs préoccupations amènent à se pencher sur des problèmes comme cela, cela nous a amenés non seulement à l'incertitude, mais à quelque chose qui ressemble à une sorte d'angoisse existentielle pour une collectivité.

Il n'y a pas de peuple que je connaisse, qui ait la substance et la cohérence du peuple québécois dans le monde d'aujourd'hui, qui soit obligé de passer par des choses comme cela indéfiniment. C'est cela qui a donné depuis une vingtaine d'années ces moments d'éveil, de sursauts successifs, de remises en question qu'on a plus ou moins englobés sous le terme de révolution tranquille. C'est cela qui a suscité aussi chez nous, en partie, et autour de nous dans le pays dont nous faisons partie, des deux côtés, un peu partout, la fameuse-question, la question non seulement débattue, mais rebattue a n'en plus finir et qui se pose toujours comme ceci: "What does Québec want?" "What does Québec want?" Au fond, ce que nous proposons avec un objectif qui est bien connu, c'est qu'on finisse par y répondre et que, comme tout peuple qui se respecte, on finisse par se définir nous-mêmes notre avenir et le genre de statut politique dans lequel nous voulons vivre. Pour nous, il s'agit de l'indépendance, c'est très clair. Le chef de l'Opposition s'est amusé à parler d'étapisme feutré en visant le député de Louis-Hébert, mais en visant aussi les engagements, évidemment, que nous avons pris pendant la campagne électorale. En effet, cette indépendance à laquelle nous croyons comme un objectif non seulement fondamental, mais indispensable pour la collectivité québécoise, dans les années qui viennent, nous voulons — et nous nous sommes engagés à ce que ce soit comme cela — qu'elle passe par une consultation démocratique, c'est-à-dire le référendum, c'est-à-dire un vote très clair. En effet, il ne peut pas être autrement que clair, puisqu'il s'agit d'une question à laquelle on répond oui ou non.

Un référendum, une consultation démocratique où tous auront leur mot à dire, où tous ceux qui seront reconnus comme des interlocuteurs

pour le pour ou pour le contre auront également les mêmes droits, les mêmes privilèges dans la préparation de cette consultation. Quant à nous, cela ne représente pas du tout de l'étapisme feutré, mais représente plutôt une façon démocratique, fondamentalement démocratique d'arriver à une décision aussi importante que celle-là.

Si le référendum est une chose qui est dans nos moeurs au niveau municipal quand il s'agit de projets importants, je ne vois pas en quoi cela ne serait pas encore plus indispensable quand il s'agit de l'avenir de toute la collectivité.

Le chef de l'Opposition, de son côté, a réitéré que, dans cette perspective et pour aussi loin que l'avenir puisse se dessiner, apparemment, lui et son parti vont demeurer fédéralistes. Ils ne seront pas seuls à l'être. Il y en a d'autres, en d'autres lieux; il y en d'autres dans cette Chambre. J'ai trouvé un peu curieux à ce point de vue là le silence, au moment de son discours sur le message inaugural et de l'ouverture d'une nouvelle session, en même temps que d'un nouveau Parlement, qui me semble avoir marqué d'un bout à l'autre l'intervention du chef de l'Opposition sur le genre de fédéralisme dans lequel il aimerait vivre. Parce qu'il ne suffit pas de dire qu'on est fédéraliste; c'est un système extrêmement complexe, le fédéralisme, qui a beaucoup d'aspect et qui concrètement présente partout où il est employé du pour et du contre. Je voudrais bien savoir un jour, puisqu'il s'agit d'un débat fondamental qui va se poursuivre, quel genre de fédéralisme nos amis d'en face voudraient substituer à l'indépendance dans la perspective de l'avenir.

Ce fédéralisme a toujours été affublé politiquement, surtout ces dernières années, de toutes sortes d'adjectifs qui se renouvellent continuellement: rentable, renouvelé, enfin, j'en passe, mais je pense que tout le monde en a d'autres à la mémoire, coopératif.

M. Laurin: Pendable.

M. Lévesque (Taillon): Pendable? Non, celui-là... Mais, il y a un seul adjectif qui semble permanent dans l'esprit de nos amis libéraux et d'autres; c'est fédéralisme additionné de ce que j'appellerais l'adjectif — probablement il résume tout le reste — inconditionnel, c'est-à-dire finalement un fédéralisme qui serait sans issue, parce qu'on s'enlève — même dans une espèce de conception fédéraliste traditionnelle — avec cette espèce d'in-conditionnalité, presque tout le "bargaining power" sur lequel on devrait compter, même dans ce régime.

J'aurais aimé — et j'espère qu'un de ces jours on se reprendra — que le chef de l'Opposition et d'autres qui véhiculent le fédéralisme auquel ils ont droit, comme opinion, nous disent, par exemple, en partant de l'expérience de ces derniers jours, ces dernières semaines, celle des ministres des Finances comme celle de l'autre conférence qui a suivi, comment se réconcilie leur fédéralisme avec ce genre de maquis permanent dans lequel finalement, et je crois que lorsqu'on fait l'addition d'année en année, c'est toujours vrai, en fin de compte, le Québec est toujours perdant.

On aimerait que nos amis d'en face, le chef de l'Opposition et d'autres, qui voudraient si vite nous demander à nous, après trois semaines, de tout préciser, même des mécaniques pour l'avenir, nous fassent part du fruit de leurs espérances et de leurs réflexions sur ce bon vieux sujet, ce bon vieux régime qu'ils ont si fidèlement pratiqué et qu'ils continuent encore de considérer comme le nec plus ultra de l'organisation politique.

Il nous faut, quant à nous, nous donner à nous-mêmes, comme peuple, tous les moyens de nous développer, qui nous appartiennent comme peuple. Non pas par hostilité contre les autres, contre personne, ni au Québec, ni à l'extérieur, au contraire, en amitié avec les autres, à commencer par l'amitié avec ceux qui nous entourent, mais une amitié qui ne signifie plus cette espèce de tolérance de la dépendance.

Nous croyons que le peuple québécois est assez grand garçon pour y arriver librement, calmement, après un débat qui a des chances — il me semble qu'il s'amorce dans ce sens — non seulement ici au Parlement, mais dans l'ensemble de notre société, d'être serein, d'être fécond et, en particulier, d'être bien informé, de plus en plus, à mesure que le temps passera et que le débat se développera, d'être bien informé de lui-même, ce peuple, de toutes ses ressources et aussi de tout son potentiel que l'on lui a trop caché.

Je suis sûr que la période d'incertitude, le long du chemin, que nous aurons à traverser, parce que c'est normal dans toute période de transition — c'est vrai ici comme cela a toujours été vrai partout où il y a eu des transitions — je suis sûr que cette période d'incertitude elle-même sera chargée d'espoir. Elle est une période qui mène, quant à nous, en tout cas — et c'est à cela que nous travaillerons de tout notre coeur — à un régime qui répond aux conditions essentielles non seulement de l'avenir, mais de la continuité d'une société nationale. Dans cette perspective, je peux vous dire que nous espérons, M. le Président, que les partis de l'Opposition en viendront à assumer, eux aussi, d'abord, l'inévitabilité de cette incertitude transitoire, et assumer aussi, peu à peu, l'espoir historique qui accompagne cette transition.

En attendant, aussi bien sur le plan économique que sur le plan social ou culturel, dans les limites assez vites atteintes — et ça, l'Opposition est aussi au courant que nous pouvons l'être, nous, maintenant — d'un gouvernement provincial, ce que nous proposons d'accomplir, sur ces plans divers de la société, c'est bien connu.

En général, la perspective est claire, nous ne l'avons pas cachée, et même de façon particulière bien des projets concrets sont déjà, dans les attitudes officielles, écrites, démocratiquement votées et qui ont été traduites dans le programme du Parti québécois qui, pas plus avant les élections que maintenant, n'a rien de caché.

Ce programme est toujours disponible et nos amis d'en face, comme tous les citoyens du Québec, peuvent le consulter. Le gouvernement actuel

a été élu à partir de ce programme. Il ne s'agit pas évidemment de prétendre qu'on va le réaliser mot à mot dans chaque détail parce que le Parti québécois et ses militants sont aussi conscients que quiconque que la réalité évolue et qu'il faut s'ajuster en cours de route. Les articulations essentielles sont les choses que nous avons à respecter. Là-dessus, je suis sûr que la vigilance de nos amis d'en face aussi bien que celle de nos propres membres dans le parti que nous avons formé, fait grandir depuis une dizaine d'années tous ensemble, nous empêchera de nous écarter de cette orientation générale. Il est évident aussi que ce qui peut être fait là-dedans ne se fera pas du jour au lendemain. Particulièrement, si on songe qu'une bonne partie du programme que nous avons dessiné — et c'est là que réside une certaine ambiguïté, on en est conscient — ne pourrait pas s'appliquer de toute façon, sauf dans le contexte d'indépendance auquel nous aspirons. Tout ce qui peut, entre-temps, être réalisé ou amorcé, en tout cas, le plus vite possible le sera aussi complètement et aussi efficacement que nous le pourrons. A cela j'ajoute qu'à plus court terme, nous avons pris aussi, durant la dernière campagne électorale, un certain nombre d'engagements concrets. Des engagements aussi précis qu'un parti d'Opposition peut les dessiner avec, toujours, une marge d'erreur possible. Nous avons pris, donc, un certain nombre d'engagements concrets que nous avons pesés de notre mieux et dont on verra la réalisation s'effectuer dès la prochaine session qui sera, en fait, la première session dont notre gouvernement sera vraiment responsable. Je les évoque très succinctement et sans entrer dans le détail, ces engagements, un peu pour les renouveler ici officiellement à l'Assemblée nationale qui, désormais, aura la responsabilité de les juger, de les discuter et, nous en sommes confiants, le cas échéant, de les mettre en vigueur.

Sur le plan politique, par exemple, la chose concrète à court terme, qui viendra bientôt, est l'abolition une fois pour toutes du système traditionnel de financement des partis par des caisses électorales coulissières et qui enfoncent toujours cette partie essentielle de l'action politique dans une espèce de mystère qui est profondément malsain. Je crois bien que, sûrement, le chef de l'Opposition et d'autres de son parti seront d'accord puisque là, non seulement nous voulons obtenir un des premiers engagements de principe de notre parti à nous, mais nous voulons aussi reprendre, pour la réaliser, une promesse de l'ancien gouvernement qui avait été solennellement évoquée à plusieurs reprises depuis 1970.

Sur le plan économique, nous voulons, avec les contraintes budgétaires que nous connaissons en ce moment, essayer en grattant les fonds de tiroirs, comme il a déjà été dit, en essayant aussi de nous gratter la cervelle et en comptant sur les idées qui peuvent venir aussi bien d'en face que tout autour de nous, par tous les moyens possibles relancer l'agriculture du Québec ou, en tout cas, l'empêcher de s'enfoncer trop profondément dans la stagnation qui la menace de plus en plus actuellement. Cela vient des politiques fédérales. On va les combattre de notre mieux.

On va essayer d'amener, dans le régime actuel — puisque nous y sommes encore — le gouvernement fédéral à comprendre qu'il est en train de faire un mal avec ses politiques, un mal qui peut devenir mortel à l'ensemble de l'agriculture québécoise, surtout dans le domaine laitier sur lequel repose, pour l'essentiel, comme un pilier fondamental, notre agriculture d'aujourd'hui. On voudrait trouver, le plus vite possible, en coopération avec tout le monde, les moyens, les mécanismes non pas de cataplasme... Je me suis fait dire, dès le lendemain des élections, par les représentants des agriculteurs: Ce ne sont pas des cataplasmes qu'on veut, ce ne sont pas des bouche-trous. Ce qu'on veut, ce sont des lois et de l'administration qui nous permettent, parce qu'on est des gens fiers, les agriculteurs, et on ne tient pas à devenir les pupilles — pour reprendre un terme qu'aime beaucoup l'Opposition ces temps-ci en parlant de nous — on n'a pas envie de devenir les pupilles permanents d'une espèce d'administration de bouche-trous. Ce qu'on veut, c'est avoir des lois, une administration et les budgets, forcément, de soutien qui permettent à des agriculteurs modernes non seulement de durer, de se développer, mais aussi d'assurer l'avenir de leurs enfants. Une des choses qui est particulièrement intéressante dans le domaine agricole, c'est la difficulté d'avoir de la relève, d'assurer l'avenir pour la prochaine génération. Avec le poids des investissements qui sont exigés des agriculteurs aujourd'hui, il est devenu presque surhumain, pour un jeune, même s'il hérite d'une ferme familiale, de s'installer et d'organiser son agriculture. Pour nous, peut-être particulièrement parce que nous sommes un gouvernement indépendantiste, c'est fondamental, l'avenir de l'agriculture parce qu'il s'agit, quant à nous, de tout un pays où il y a du sol partout qui nous appartient. Aussi bien la qualité de notre société que sa rentabilité dépendent d'abord de choses fondamentales comme la capacité de nous nourrir nous-mêmes autant que notre climat nous le permet. C'est un engagement qu'il s'agirait de définir concrètement, le plus vite possible, et de réaliser, d'aider au maximum à la relance, aussi permanente que possible, de notre classe agricole.

Aussi, par tous les moyens dont on pourra disposer, de stimuler également — en tout cas, commençant par la maintenir, parce qu'elle aussi est en danger— notre petite et moyenne entreprise, qu'elle soit coopérative — on sait le penchant et je crois qu'il est normal, c'est dans le domaine coopératif qu'il y a certaines des réalisations dont nous pouvons effectivement être le plus fiers, nous les Québécois — ou qu'elle soit privée, la PME, comme on le dit, de trouver d'employer tous les moyens disponibles pour l'aider. Cela va nous aider à sortir, en partie au moins, d'une sorte d'obsession qui, finalement, nous a coûté assez cher. Une obsession qui n'était pas voulue, qui était, je crois, une absence de politique ou de compréhension de la réalité économique du Qué-

bec actuel. Cette obsession de l'étranger... L'étranger, personne ne prétend l'exclure du développement du Québec pourvu qu'il nous respecte et pourvu qu'il y trouve son avantage, mais nous aussi, d'abord et avant tout. On est dans un monde où ces choses-là, ces échanges, ces investissements, tout cela sont essentiels à peu près à tous les peuples. Il n'est pas question de les exclure, mais il est question de revenir au bon sens fondamental qui dit que le progrès économique comme les autres, c'est d'abord nous qui allons le faire chez-nous. Si ce n'est pas nous d'abord, on sera toujours plus ou moins les objets manipulés des autres.

Or, il y a une chose qui est remarquable et qu'on a oubliée un peu dans les attitudes du gouvernement précédent.

Voici: Lorsqu'il s'agit d'emplois — et Dieu sait qu'on a parlé d'emplois dans le vocabulaire courant, publicitaire aussi, du gouvernement qui nous a précédés — il ne faudrait pas oublier que plus de la moitié des emplois qui sont créés chaque année au Québec proviennent non pas des multinationales, non pas des investissements étrangers, mais bel et bien — et dans certaines régions, il n'y en aurait pas d'autres, s'il n'y avait pas cela — des petites et des moyennes entreprises québécoises qui fonctionnent dans toutes les régions à l'échelle de notre territoire. Plus de la moitié des emplois créés viennent de là.

Cela explique que, dès le début, sans même commencer à faire de l'académisme là-dessus et sans reprendre des études qui étudiaient des études qui ont été faites d'année en année depuis longtemps, dès le début, c'est le ministre d'Etat au développement économique qui en est chargé, on a décidé de mettre en marche, avec les limites que cela comportera, avec les tranches forcément restreintes qu'on pourra employer au début, de mettre en marche une politique d'achat préférentielle de biens et de services du gouvernement et de ses émanations, des institutions, une expérience qui a déjà d'ailleurs dix ans d'âge à l'Hydro-Québec.

Je me souviens d'avoir participé au début de l'expérience d'achat chez nous, si on veut, de l'Hydro-Québec, d'avoir connu les premières difficultés, d'avoir vu que cela pouvait quand même donner des résultats concrets. Maintenant, il s'agit d'étendre cela en l'adaptant à l'ensemble des achats gouvernementaux année après année. Les premiers mois ne donneront peut-être pas tous les résultats — sûrement pas — qu'on peut escompter pour l'avenir, mais, chose certaine, c'est que si on ne s'y met pas et si on continue à étudier, on n'y arrivera jamais. Il faut commencer à s'y mettre, et le plus vite possible, à cause de l'hiver auquel on fait face, en prenant la chance de faire des erreurs, mais en se disant que ce qui sera gagné sera gagné, et on va apprendre en cours de route.

Sur le plan social, très rapidement, ce qui sous-tend les engagements que nous avons pris, c'est l'obsession que le parti a développée, qu'il a mise dans son programme et qu'il veut maintenir, d'essayer d'arriver comme d'autres y sont parvenus sans jamais atteindre la perfection, mais mieux que nous, d'essayer d'arriver, d'étape en étape et le mieux possible, à une société qui soit vraiment une société d'égalité des chances.

C'est ce qui explique particulièrement l'urgence— le ministre du Travail et tous mes collègues en sont conscients — qu'on a mise pendant la campagne électorale et qu'on veut mettre dans notre action aussi, sur le plan social, en ce qui concerne la santé et la sécurité des travailleurs québécois.

On a dit à plusieurs reprises pendant la campagne électorale, et il faut que cela se traduise dans la réalité, qu'autant le gouvernement actuel va demeurer aussi préoccupé que n'importe quel autre de la prospérité et de la rentabilité économique, autant il considère qu'on doit placer, non pas pour la détruire, cette rentabilité, mais pour lui donner, si vous voulez sa dignité et sa respectabilité, on doit placer au-dessus du rendement économique la dignité et la sécurité des hommes et des femmes qui travaillent dans l'économie.

D'autant plus — je l'ai dit souvent et c'est vrai — que, dans certains secteurs, le capital ne vient pas de chez nous. Même l'équipement vient d'ailleurs. La seule chose qu'on ait, comme participation dans certains secteurs de notre économie, jusqu'à nouvel ordre, ce sont les gens qui y travaillent et qui, eux, sont de chez nous. Je considère comme une chose absolument inacceptable, et à certains points de vue scandaleuse, la façon dont a été négligé, ces dernières années, cet aspect absolument essentiel d'une société civilisée.

Plus concrètement, aussi, on a pris des engagements à court terme, qu'il va falloir réaliser à court terme, en ce qui concerne la santé, surtout les besoins urgents dans le milieu des personnes âgées, chez les jeunes et dans les régions isolées ou excentriques du Québec. Egalement, on va essayer de faire face — l'ancien gouvernement avait essayé, in extremis, d'ajuster une solution qui, quant à nous, n'était pas une bonne solution; on va voir si on peut l'améliorer, on croit que oui — à cette urgence de plus en plus criante qui traîne sur les tablettes depuis quelques années, on l'admettra, dans le domaine de l'assurance-automobile.

Enfin, sur le plan culturel, on s'est engagé — je n'entre pas dans le détail, cela commence déjà à se développer de façon transitoire — à réviser ou à remplacer, au besoin, la politique linguistique qui a été présentée par l'ancien gouvernement — de façon générale, pour ne pas anticiper, je dirais cela comme ceci — de façon à assurer dans le présent, autant que possible, et encore plus pour l'avenir, la sécurité et l'avancement de la langue française au Québec ou, comme l'a dit un vieil auteur, si on le préfère, la défense et l'illustration, mais concrète, de la langue française au Québec, parce que c'est la langue d'une majorité nationale pour qui cela fait partie de son identité même. Cela va sans dire, mais on est dans un contexte où, parfois, il faut le dire. En même temps — et ce n'est pas facile, mais ce n'est pas non plus la quadrature du cercle, si on y met assez

de bonne foi et de générosité des deux côtés — qu'on doit faire cela, il faudra trouver le moyen d'assurer aussi les droits que nous reconnaissons — et que nous voulons maintenir — à nos concitoyens anglophones au Québec.

Cela ne se fera pas facilement. La solution ne sera jamais parfaite parce qu'il s'agit de trouver le point de jonction enre les droits d'une majorité et ceux que nous reconnaissons à une minorité.

Dans cela il y a toujours une zone grise sur laquelle on discutera ou peut-être même à l'occasion on se tiraillera. Mais, en y mettant le plus de clarté puis le plus de bonne foi possible, on croit que même là il y a moyen d'y atteindre. En tout cas, pour tout résumer, c'est dans tous ces domaines où il y a tout cela qui peut venir rapidement et il y a combien d'autres choses qui peuvent venir pendant les années qui viennent. Quand on aura fini, le mieux possible, tout le travail des années qui viennent, il y en aura encore sans arrêt aussi loin qu'on puisse voir dans l'avenir parce qu'on est dans un genre de monde où c'est rendu peut-être à un point où presque la seule stabilité sur laquelle on puisse compter, c'est la stabilité du changement.

Dans un contexte comme celui-là, voici ce que je crois qu'il faut exiger des gouvernements. Cela pourrait se développer longuement. J'ai essayé, et on a essayé ensemble de ce côté-ci, de le résumer en trois adjectifs, trois adjectifs qui font, peuvent paraître, même prétentieux et qu'on ne réussira jamais à réaliser vraiment dans la réalité, à réaliser vraiment dans l'action, mais qui sont, si on veut, au moins un idéal dont on peut s'approcher le mieux possible. C'est que dans un contexte mouvant et complexe comme celui de notre époque et singulièrement au Québec, après les expériences vécues, ce qu'on exige du gouvernement — cela s'applique aussi au Parlement, je crois, mutatis mutandis — c'est que ces institutions fonctionnent de manière aussi intègre, aussi efficace et aussi humaine que possible.

Alors, je pense qu'on peut demander en terminant, avec confiance, à tous les députés des deux côtés de la Chambre ou des trois côtés, si on veut, de nous aider par leur vigilance, et le cas échéant par toutes leurs critiques, à mettre le contenu qu'il faut — et qui n'est pas toujours facile à définir surtout dans le quotidien — dans ces trois adjectifs exigeants, mais en même temps nécessaires, qui représentent, je crois, le résumé le meilleur qu'on puisse donner de ce que les citoyens attendent de nous.

M. Garneau: M. le Président, je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président: Merci, M. le député de Jean-Talon. La séance est suspendue jusqu'à 14 h 15.

M. Burns: Avec votre permission.

Le Vice-Président: Si l'Assemblée est consentante, j'accorde la permission au leader parlementaire ministériel.

M. Burns: Je serai très bref. Après les consultations que nous avons eues, le ministre des Affaires municipales et moi-même, nous avons pensé également, pour la même raison que je vous ai mentionnée ce matin, c'est-à-dire l'aspect urgent de ce projet de loi, l'aspect urgent d'y trouver une solution... Le fait que la ville de Montréal aurait pu elle-même nous empêcher de légiférer dans ce domaine, c'est-à-dire les principaux intéressés, nous avons pensé qu'il n'était pas possible d'inviter, lors de l'étude du projet de loi article par article en commission, des personnes autres que les députés membres de cette commission à s'exprimer.

M. Garneau: Puis-je poser une question au leader parlementaire sur les travaux de la Chambre? Quand le leader parlementaire parle de l'urgence de l'adoption de ce projet de loi, sur quoi s'appuie-t-il, pourquoi ne pourrait-il pas être adopté au mois de février?

M. Burns: Sauf erreur, je crois que ce projet de loi doit être adopté avant le 31 décembre.

M. Garneau: Je ne connais pas de raisons pour lesquelles le projet de loi doit être adopté avant le 31 décembre, à moins que le premier ministre veuille nous en indiquer.

M. Lévesque (Taillon): Je pense que le député de Jean-Talon pose une question, dans son cas, particulièrement inutile, parce qu'il ne pouvait pas ne pas être au courant des implications financières, des implications de crédit, même fondamentales, qui sont attachées à cette date ou à cette échéance.

M. Garneau: Oui, mais il n'y a rien qui empêche de...

Le Vice-Président: A l'ordre! M. le député de Jean-Talon.

M. Lavoie: Je trouve cela quand même un peu cavalier et anormal de ne pas entendre, non pas uniquement le maire de Montréal, mais l'Opposition du maire de Montréal, le RCM, qui a peut-être des arguments à apporter. Je vois un anachronisme dans votre manière ou vos promesses d'administrer à ciel ouvert. Vous ne voulez pas entendre les parties impliquées.

M. Burns: Cela va être à ciel ouvert, cela va être dans une commission parlementaire ou n'importe qui pourra être là.

Le Vice-Président: A l'ordre! Mesdames, messieurs, à l'ordre!

J'ai permis une question par le chef de l'Opposition ou le leader de l'Opposition ou le leader parlementaire du gouvernement. La réponse a été donnée. Aucun débat ne peut être tenu au sujet de cette réponse. Je répète que la séance est suspendue jusqu'à quatorze heures quinze.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

Reprise de la séance à 14 h 30

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je soulève une question de privilège. Ce matin, on nous a rapporté que le greffier adjoint avait écrit 10 h 47 en se fiant à l'horloge. On vient justement, M. le Président, avant de commencer, d'avancer l'horloge de sept minutes, parce qu'elle était en retard. D'après ma montre — je ne voudrais pas être attaqué dans mon intégrité pour avoir trompé la Chambre sciemment — je voudrais dire que c'était bien à 10 h 59 que la période des questions avait commencé.

Cela dit, je pense qu'on en tiendra note. Quand j'ai vu l'horloger en chef de la province venir remettre l'horloge à l'heure, c'était peut-être pour rappeler aussi au gouvernement qu'il était en retard de plusieurs minutes au début.

Le Vice-Président: A l'ordre, M. le député de Johnson! D'après les informations que possède la présidence, l'horloger en chef du Québec n'a touché qu'à l'aiguille des heures et non pas à celle des minutes. Par conséquent, la question de privilège du député de Johnson est acceptée. Je pense que l'incident est clos et que nous pouvons procéder.

A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Jean-Talon.

M. Raymond Garneau

M. Garneau: M. le Président, comme c'est la coutume, j'aimerais prendre les premiers instants de mes remarques pour offrir au président et à ses adjoints mes félicitations pour leur élection et leur offrir mes voeux dans l'accomplissement de cette tâche qui est certainement difficile et délicate.

Je voudrais également, au début de mon intervention, remercier très sincèrement les électeurs du comté de Jean-Talon pour la confiance qu'ils m'ont renouvelée pour la troisième fois et pour l'occasion qu'ils m'offrent à nouveau de les servir et de servir l'ensemble des citoyens du Québec. Je les remercie de cette marque de confiance et les assure à l'avance de mon entier dévouement à la cause du comté de Jean-Talon et aux intérêts de l'ensemble des Québécois.

Je voudrais également rendre hommage à celui qui, pendant près de sept ans, a dirigé les destinées du Parti libéral et, pendant près de six ans et demi, celle du gouvernement du Québec. Dans le contexte difficile où il a assumé ses responsabilités, M. Robert Bourassa a attaché un soin bien particulier à rétablir une certaine paix sociale qui était si fragile à la fin de la dernière décennie. Qu'on se rappelle les bombes qui éclataient à tout bout de champ à Montréal, les manifestations violentes dont nous étions souvent témoins et qui, portées et grossies sur le plan international par les media, causaient un tort considérable au Québec.

Comme je l'ai dit, M. Bourassa a voulu atta-

cher un soin bien particulier à éviter les politiques d'affrontement pour rechercher, par la voie du consensus, des solutions de compromis acceptables. Nous pouvons dire qu'il a répondu aux exigences que lui posaient les dossiers de l'histoire et qu'il a réussi à rétablir ce climat de confiance qui a permis un développement économique très important, lequel a pu financer des programmes sociaux fort remarquables. Permettez-moi d'en citer quelques-uns: l'assurance-maladie, les médicaments aux personnes âgées bénéficiant du supplément de revenu garanti, les soins dentaires aux enfants de moins de 10 ans, l'aide juridique, les allocations familiales triplées et non taxées par le Québec, l'aide accrue aux victimes de certaines maladies industrielles, une loi d'aide sociale remodelée, les prestations accrues et indexées, une politique fiscale à l'avantage des petits contribuables. Toutes ces mesures à caractère social ont pu être financées par une économie québécoise qui connaissait en 1972, particulièrement en 1973/74 et même en 1975, un taux de croissance élevé et même à plus d'un chapitre, un taux de croissance plus élevé que la moyenne canadienne ou que le taux des pays industrialisés.

Si on veut imputer à M. Bourassa, comme certains ont tenté de le faire, tous les aspects négatifs de la vie québécoise, je crois qu'il serait également honnête de lui imputer quelques-uns des mérites qui peuvent être imputés à celui qui a dirigé le Québec pour ce qui est des aspects positifs.

Je veux également rendre hommage à Mme Bourassa qui, par son courage et sa ténacité, a su accepter la difficile tâche d'être l'épouse d'un premier ministre. Son rôle a été d'autant plus difficile qu'elle avait, aux yeux de certains, l'immense handicap d'être issue d'une famille de bâtisseurs du Québec, d'une des familles canadiennes-françaises qui ont réussi à construire un des rares empires industriels et financiers contrôlés presque en entier par des Québécois, des Canadiens français authentiques.

Mme Bourassa, une femme d'une grande simplicité et d'une grande dignité, a su, malgré les injustices et les écarts de langage à son endroit et à celui de sa famille, remplir ses responsabilités d'épouse, de mère de famille et de première dame du Québec, d'une façon qui a fait l'admiration de plusieurs.

Au nom des députés et des membres du Parti libéral du Québec et de tous ceux qui ont une grandeur d'âme capable de les élever au-dessus de la basse partisanerie, je veux rendre hommage à Andrée Bourassa pour son courage et sa dignité dans l'accomplissement de ses fonctions de première dame du Québec entre le 29 avril 1970 et le 15 novembre 1976.

Nous sortons d'une élection qui, pour plusieurs, fut une surprise. Mes conversations avec des collègues de cette Chambre m'ont porté à croire, M. le Président, que la surprise était aussi grande à votre droite qu'à votre gauche. Surprise ou pas, les Québécois sont allés aux urnes et ils ont élu ou défait des candidats. Je crois trop aux valeurs fondamentales de la démocratie pour critiquer le résultat des élections. J'accepte avec humilité le verdict de l'électorat. La démocratie, la vraie, s'exerce dans la liberté de pensée et d'initiative de chacun des citoyens électeurs. Dans le respect des lois et des règlements, la démocratie place au premier rang des préoccupations collectives le respect des droits de l'individu, droit à sa langue, droit à sa religion, droit à la libre expression de ses opinions, mais aussi de ses initiatives individuelles. A chaque fois qu'une démocratie tente, pour quelque motif que ce soit, de limiter les droits fondamentaux de certains de ses citoyens, dès lors s'installent les injustices qui provoquent des réactions vigoureuses. Si une démocratie n'accepte pas de reconnaître cette réalité et qu'elle utilise la force du nombre pour mater les droits reconnus comme fondamentaux par la tradition et l'histoire, nous sommes peut-être à la porte d'autres sortes de réactions.

Beaucoup d'électeurs québécois ont placé au premier rang de leurs préoccupations, au cours de la récente campagne électorale, la réalité du chapitre V de la loi 22. Consciemment ou non, distinc-tivementou non, l'exercice démocratique du 15 novembre 1976 nous transmet un message qui nous indique, me semble-t-il, que la lumière jaune s'est allumée pour porter à la réflexion collective un sujet qui touche fondamentalement et émotivement un nombre important de citoyens et qu'une solution acceptable devra faire preuve de tolérance, d'ouverture d'esprit de chacun des Québécois.

La démocratie, pour la vivre véritablement et pleinement, doit offrir à ses membres la liberté d'initiative et d'entreprise.

Pour grandir et s'épanouir, la démocratie ne peut enterrer ses membres sous le joug d'une technocratie écrasante et désincarnée que ne manque pas de produire une présence étatique à outrance qui place, comme vertu centrale du développement économique et social, l'étatisation de toutes les fonctions importantes de notre vie économique. Pour moi, la survie de notre démocratie est aussi reliée à la liberté d'entreprise qu'au respect des droits des individus. L'un ne va pas sans l'autre, et vice versa. Ces deux valeurs sont comme les deux mains d'un individu. L'efficacité humaine est joliment handicapée lorsqu'une de ces mains lui est amputée. Au respect des droits individuels et à la liberté d'entreprise s'incorpore, me semble-t-il, la reconnaissance d'une rémunération de l'effort et du risque et la reconnaissance des compétences qui s'exercent en réponse à un choix librement exprimé par les citoyens, à la condition, évidemment, que la société, démocratiquement, offre et favorise l'égalité des chances à tous et à chacun de ceux qui veulent fournir les efforts de promouvoir leurs talents et leur esprit d'initiative.

M. le Président, je voudrais consacrer également quelques minutes de mes propos au comté qui m'a renouvelé sa confiance et aussi à la région de Québec. On me permettra de souligner certains des problèmes auxquels devront s'attarder nos réflexions au cours des prochaines semaines et des

prochains mois. Je pense particulièrement aux personnes âgées.

Je voudrais profiter de mes propos sur le discours inaugural pour suggérer au ministre responsable de la Société d'habitation et peut-être aussi à celui qui est responsable des Affaires sociales d'analyser sérieusement la possibilité qu'il y aurait de tirer profit d'une situation qui est fort désagréable, j'en conviens, en tentant de rentabiliser au mieux une situation qui s'est produite récemment dans la région de Québec où une entreprise appartenant à des francophones semble avoir rencontré des difficultés financières. Je parle du Parc Samuel-Holland. Il y a là une entreprise qui a investi des capitaux et qui, pour des raisons que je ne veux pas reprendre ici, s'est vue acculée à la faillite parce qu'une chaîne d'hôtels, semble-t-il, a retiré un consentement qui avait été donné de venir s'établir à Québec. Nous avons là un immeuble dont la structure est complétée, dont l'organisation est conçue en fonction d'une exploitation à partir de chambres et de services communs. Je me demande s'il n'y aurait pas possibilité que la Société d'habitation du Québec, en collaboration avec le ministère des Affaires sociales, envisage sérieusement de racheter de la faillite au moins la partie de l'immeuble qui devait servir d'hôtel pour la transformer en centre d'accueil ouvert aux personnes âgées que j'appellerais non autonomes et qui ont besoin de soins prolongés, ce que nous appelons des malades chroniques.

Nous avons senti depuis quelque temps, et j'en ai fait état durant la lutte électorale, jusqu'à quel point le problème des personnes âgées se plaçait au centre des priorités d'à peu près tous les partis politiques. Et nous avons là la chance, je crois, de concrétiser rapidement, et peut-être à des coûts plus bas que ne le serait l'établissement d'un nouvel immeuble, de répondre à un besoin pressant de la population pour ce genre d'habitations pour les personnes âgées.

Je voudrais également souligner à l'attention du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche l'importance du dossier dont il a fait écho ce matin et qui est relié à la taxation foncière des entreprises hôtelières. La région métropolitaine de Québec et bien d'autres régions vivent et ont comme principale entreprise l'industrie touristique. A Québec et dans la région de Montréal aussi, nous avons constaté, au cours des dernières années, jusqu'à quel point les taxes foncières sur des immeubles neufs qui viennent d'être construits étaient un fardeau financier énorme pour les chaînes d'hôtels et plaçaient leur concurrence dans une situation fort précaire face au réseau hôtelier nord-américain et particulièrement de la Nouvelle-Angleterre, de l'Etat de New York et de la région métropolitaine de Toronto où le prix des chambres était plus bas que celui que pouvaient offrir aux congressistes des grandes chaînes d'hôtels installées au Québec, en particulier à cause de la taxe foncière et également à cause du salaire minimum.

J'ai été surpris de constater comment la direction des chaînes d'hôtels avait changé rapidement de point de vue. Est-ce que c'est le nouveau gouvernement qui l'a fait changer de point de vue aussi rapidement? Je me rappelle avec quel acharnement ces chaînes d'hôtels avaient combattu des augmentations trop rapides du salaire minimum, soumettant les effets que cette augmentation avait non seulement sur les employés qui travaillaient au salaire minimum et qui pouvaient bénéficier dans certains cas de certains pourboires, mais également l'effet qu'il y avait sur l'ensemble des conventions collectives signées à l'intérieur de ces grandes chaînes d'hôtels, étant donné que, si l'employé de premier niveau a une augmentation de 10%, 15% ou 20%, évidemment, l'employé supérieur qui le supervise doit également bénéficier d'une augmentation de traitement. C'est la pyramide évidemment qui doit être rehaussée dans chacun de ces points et on m'avait souvent exprimé les dangers qu'il y avait lorsqu'on comparaît l'état du salaire minimum au Québec avec celui de l'Ontario pour ce qui est de l'industrie touristique.

Je voudrais également suggérer au gouvernement et au ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, et également peut-être au ministre des Finances, d'analyser un dossier qui était en branle et qui, évidemment, n'avait pas franchi toutes les étapes, mais j'aimerais bien qu'ils puissent continuer à l'analyser.

Peut-être que la suggestion n'est pas acceptable. Je ne veux pas la placer comme étant une valeur fondamentale, mais n'y aurait-il pas possibilité d'analyser les ouvertures ou les voies que proposerait, par exemple, une diminution ou une remise en proportion du montant de la taxe de vente perçue sur les chambres d'hôtel. Une des raisons pour laquelle nous n'avions pas agi antérieurement, c'est que nous n'avions pas trouvé de formule qui aurait pu donner justice aux grands et aux petits hôtels. De telle sorte qu'il nous fallait traiter, je crois — c'est le désir de tous les gouvernements — sur un même pied l'ensemble des concurrents dans le domaine de l'industrie touristique.

Je me demande si l'approche, par le biais d'une remise d'une partie de la taxe perçue sur la location des chambres, ne serait pas une voie à explorer pour diminuer le fardeau, placer ces entreprises touristiques dans une meilleure situation de concurrence et également assurer un équilibre entre les grands et les petits hôtels, étant donné que leurs chiffres d'affaires et l'ampleur de leurs immeubles et de leurs taxes foncières sont certainement étroitement reliés au nombre de chambres qu'ils louent et au montant des taxes perçues à ce chapitre.

Evidemment, je voudrais également attirer l'attention du gouvernement au niveau du développement industriel de la région de Québec et espérer que les engagements qui avaient été pris au niveau de la Société Inter-Port puissent être continués, si possible, augmentés. J'espère que cet organisme qui, pour une fois, régionalisera véritablement les efforts de promotion industrielle dans la région de Québec, que cet organisme qui a

peut-être souffert pendant trop longtemps de crédits additionnels, que cet organisme, qui a véritablement vu le jour au cours du printemps dernier, puisse avoir les fonds nécessaires pour remplir véritablement sa tâche.

Je voudrais consacrer la dernière partie de mes remarques à l'intervention que nous a livrée le premier ministre, ce matin. Je dois dire que ses propos m'ont déçu et ont déçu plusieurs des députés autour de moi. J'imagine bien que les membres du gouvernement apprendront rapidement qu'en cette Chambre l'Opposition et le gouvernement sont rarement d'accord. Mais, dans le cas du premier discours du premier ministre, nous nous attendions véritablement à une autre sorte d'intervention.

Je dois dire qu'il a déçu beaucoup de députés autour de moi, eux, surtout, qui ont à la mémoire — tout frais à la mémoire — les propos que tenaient les membres de ce parti lorsqu'ils siégeaient à notre place dans l'Opposition. Ces gens avaient solution à tout durant la campagne électorale, M. le Président. Je suis sûr que, abandonnant l'impartialité de votre fauteuil, vous deviez également avoir quelques réponses à certains problèmes qui vous étaient soumis.

Faisant abstraction de votre impartialité, M. le Président, par votre entremise, je voudrais m'adresser aux membres du gouvernement et aux députés qui, dans les différents comtés, ont eu des réponses à tout durant la campagne électorale, réponses au chômage, réponses au niveau de la taxation — il fallait indexer à tout prix la table de l'impôt — réponses à la promotion du français, réponses aux problèmes agricoles, réponses qui puisaient inmanquablement leur source dans les mots "on est capable". Combien de fois avons-nous entendu, de l'ancien gouvernement, les membres de l'Opposition nous déballer comme ça, sur le coin de la table, des solutions à tous les problèmes en disant: On est capables!

Je suis déçu, aujourd'hui, du discours et de l'intervention du premier ministre, parce qu'une fois au pouvoir, ce parti politique, qui avait si facilement réponse à tout, n'a, en fait, réponse à rien. Ce qui me déçoit le plus, c'est que la source d'inspiration qui, dans l'Opposition, faisait jaillir à pleins poumons des solutions qui semblaient s'inspirer d'un élément positif qu'on pouvait sentir dans ces mots que je viens de dire, "on est capables", ce qui m'a déçu, c'est que le dynamisme choc des discours de l'Opposition a transporté sa source d'approvisionnement dans la mollesse d'une nostalgie qui me rappelle et qui me rappelait, ce matin, en écoutant le premier ministre, celle de Thomas Morus.

J'ai été déçu que la source d'inspiration à laquelle entend s'abreuver ce gouvernement soit celle de la nostalgie, nostalgie qui est une bien mauvaise conseillère de l'action concrète. Je dis, M. le Président, que le premier devoir des vrais Québécois, c'est de combattre la tentation de la nostalgie que nous a proposée le premier ministre du Parti québécois ce matin.

Je ne veux pas être de ceux qui bâtissent l'avenir en s'appuyant sur ce qu'aurait dû être le passé. Le Parti libéral du Québec continuera de s'inspirer de la réalité, de l'histoire et des leçons tirées de l'évolution des sociétés modernes développées pour offrir à ses concitoyens un schéma d'avenir qui s'inscrit en continuité avec la réalité historique, et cela dans l'atteinte de nos objectifs.

Dans le fond, nos objectifs, les objectifs des membres de cette Chambre, à quelque parti qu'ils appartiennent, peuvent se ressembler d'une drôle de façon. En fait, on peut résumer presque tout ça en disant que nos objectifs à tous, dans cette Chambre, les 110 députés — 109 pour le moment, M. le Président — c'est d'assurer le mieux-être des Québécois et de garantir l'existence et la promotion de la culture française chez nous. Je n'avais cependant jamais réalisé autant que ce matin jusqu'à quel point il y avait une divergence profonde entre l'inspiration de l'action et les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre nos objectifs.

Je ne veux pas bâtir l'avenir du Québec sur des valeurs nostalgiques. Quand je vois que ce que nous proposent nos amis d'en face est, en quelque sorte, une forme de Québec où les structures juridiques s'apparentent à celles de l'Acte d'Union, je réponds: Nous ne vivons plus en 1841.

Je dis à mes amis d'en face: Relisez l'histoire. Voyez les raisons qui ont amené la création de la fédération canadienne. Comparez cette évolution avec celle des grands courants de pensée contemporaine et vous conclurez que notre avenir culturel ne peut pas s'appuyer sur des formules dépassées.

Le nationalisme, à mon sens, est une valeur de droit qui ne colle plus aux structures modernes des Etats développés. J'invite les membres de cette Chambre, qui en auraient l'opportunité, de relire les discours des hommes politiques qui ont précédé la création et la formation de la fédération canadienne et, en particulier, des francophones qui ont défendu cette option. Qu'ils relisent le discours, par exemple, de Georges-Etienne Cartier, qu'il prononçait à Saint-Hyacinthe dans les années qui ont précédé la création de la passation de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Ils verront jusqu'à quel point ils pouvaient mettre en lumière les dangers, les inconvénients et surtout les limites que constituait le genre de structure politique à laquelle s'apparente l'option que nous propose le Parti québécois.

L'option canadienne du Parti libéral certes demande comme valeur motrice autre chose que la nostalgie qu'évoquait le premier ministre. Elle réclame le courage, la ténacité, la connaissance précise de nos capacités, mais aussi, il faut bien l'admettre, la limite de nos possibilités.

Nous sommes et serons toujours entourés de 250 millions à 300 millions de parlant anglais. Nous sommes géographiquement situés sur un coin de terre qui est riche en promesses, mais qui aussi est exigeant en termes de concurrence. Ce qui m'effraie, quand j'entends le premier ministre parler sur le ton doucereux, comme il l'a fait ce matin, c'est qu'il cache consciemment ou non des réalités bien concrètes et il apprendra vite que le

prolongement de son discours électoral, le 15 novembre dernier, ne pourra guère dépasser l'étape de cette mini-session.

Il a parlé comme un chef de l'Opposition pourrait le faire devant un groupe de dames de la bonne Sainte-Anne. Je l'entendais parler, par exemple, d'agriculture qu'il fallait développer, des petites et moyennes entreprises qu'il fallait créer, tout cela dans le contexte qu'il avait précédemment décrit comme celui d'un Québec ouvert sur le monde.

L'esprit de son discours était certes exaltant, mais la lettre bien inquiétante, car elle est chargée de contradictions dont il réalisera vite la limite.

M. le Président, parlant d'agriculture, on constate, par exemple, que le Québec produit 40% du lait industriel au Canada, qu'il a besoin pour assurer son développement agricole de marchés internationaux qui ne s'obtiennent pas sans qu'il y ait une contrepartie.

En d'autres mots, nous ne pouvons pas penser pouvoir vendre sur le marché international nos produits agricoles, nos surplus de production agricole sans même, en même temps, admettre l'ouverture de nos propres marchés aux productions qui viennent de l'extérieur.

Quand je constate, par exemple, que, dans d'autres productions, nous avons besoin — dans les productions sans sol en particulier — d'approvisionnement en grain, nous avons besoin de sources d'approvisionnement dans l'Ouest Canadien, également pour le boeuf, quand je constate que de simples problèmes comme ceux des oeufs et des poulets, par exemple, ont créé tout un remue-ménage dans l'économie agricole québécoise et canadienne, je ne peux m'empêcher de considérer, comme étant des voeux pieux, les propos que tenait le premier ministre ce matin.

Lorsqu'il parlait du développement de la petite et de la moyenne entreprise, là aussi j'étais inquiet d'entendre et d'apprécier la candeur de ses propos. Vous savez, c'est vrai qu'il parlait de 50% des nouveaux emplois créés par la petite et la moyenne entreprise. Je pense qu'il était conservateur, parce que c'est probablement plus que cela.

Mais la petite et la moyenne entreprise gravitent autour d'ensembles industriels beaucoup plus complexes et développés.

Si on va dans le Lac-Saint-Jean, par exemple, et qu'on fait l'hypothèse que l'Alcan disparaisse demain matin, je me demande, M. le Président, ce qu'il adviendrait des petites et moyennes entreprises qui gravitent autour de ce géant industriel. Si on va sur la Côte-Nord, c'est la même chose, à Baie-Comeau, avec Québec North Shore, avec la compagnie d'aluminium qu'il y a là; si on va vers Sept-Iles, c'est la même chose. Dans un comté que connaît bien le député de Bonaventure, avant que n'existe l'entreprise fabriquant du carton ondulé à New Richmond, combien y avait-il de petites et moyennes entreprises? Considérons maintenant combien il peut y en avoir. Nous avons besoin certes de développer la petite et la moyenne entreprise, mais nous avons également besoin d'investissements importants pour assurer à cette petite et moyenne entreprise la possibilité de se développer.

Quand on regarde également les marchés, il faut bien admettre que là aussi c'est une question de "give and take" pour employer un terme bien courant. Nous ne pouvons pas protéger indéfiniment nos marchés et penser que nos entreprises moyennes ou plus grandes auront accès aux marchés étrangers sans aucune difficulté. J'entendais, durant la campagne électorale, à une tribune où il me précédait, le député de Gouin parler, comme mesure de développement industriel, de la création d'une zone franche de droits dans la région de l'aéroport de Mirabel. Une zone, disait-il, où il n'y aurait aucun impôt de perçu, aucune taxe de perçue sur les établissements qui auraient feu et lieu à cet endroit. J'essayais d'analyser cette proposition qu'on pourrait calculer d'intéressante dans d'autres milieux mais qui, provenant d'un membre de ce gouvernement, ne pouvait faire autrement que me scandaliser. J'ai entendu en cette Chambre les députés de l'Opposition du temps, les députés du Parti québécois, critiquer le gouvernement parce qu'il avait fait un prêt sans intérêt de quelque $20 millions pour l'établissement d'une usine sur la très Basse-Côte-Nord pour utiliser une essence forestière qui, de toute façon, si elle n'était pas utilisée, allait s'évanouir par le vieillissement. Maintenant je regarde toutes les accusations de corruption, d'attachement aux grandes entreprises, aux grands consortiums financiers dont on a été affublé. Et quand j'entendais le député de Gouin proposer, dans une région fortement industrialisée qui est celle de Montréal, d'exempter d'impôt de toute nature les établissements qui iraient s'y établir, qui auraient feu et lieu dans le parc industriel environnant l'aéroport de Mirabel, je ne pouvais faire autrement que me scandaliser et me dire: Qu'est-ce qui se passe? Est-ce moi qui deviens subitement sourd ou est-ce que ce sont les gens qui aujourd'hui sont en face de nous qui changent de chemise comme la température change?

J'aurais bien d'autres exemples à donner pour indiquer à ce gouvernement jusqu'à quel point est près la limite de son action dans cette aventure qui nous propose non seulement la création et la séparation du Québec du reste du Canada sur le plan économique dans un premier temps pour une association éventuelle si possible par la suite, mais jusqu'à quel point il y a une limite dans l'établissement et la modification des règles du jeu d'une économie que, au demeurant, on veut conserver ouverte sur le monde. Avec une population de 6 millions, une économie qui compte quelque $50 milliards de produit national brut, nous ne pouvons pas nous permettre de modifier les règles du jeu au point où, comme je le disais dans d'autres lieux, on pourrait siffler un hors jeu à la ligne bleue pour une partie et un hors jeu à la ligne rouge pour une autre partie du milieu des affaires.

Je crois qu'il faut se rendre à l'évidence qu'il y a loin, bien souvent, entre les voeux pieux et la réalité. Je ne fais pas plus grief que cela pour l'instant au gouvernement de ne pas avoir proposé de

mesures concrètes, mais je reviens sur ce grand thème que j'ai voulu développer dans les quelques minutes qui m'ont été consacrées. Je veux laisser le temps à mes collègues qui veulent intervenir. Nous ne pourrons pas bâtir l'avenir du Québec et développer la francophonie québécoise au Québec et sur le plan international en s'appuyant uniquement sur la nostalgie des mots.

J'ai personnellement souscrit à bien des choses. Lorsque le gouvernement rappelait l'utilisation de mots qui avaient été mis en lumière durant les années soixante, je peux dire que, pour mon humble part, j'ai contribué à ce vocabulaire puisque c'était un temps où une de mes responsabilités était de faire le dur travail de préparation de textes de discours pour les hommes politiques.

J'ai utilisé ce terme, mais jamais je n'avais pensé qu'il pouvait comporter la nostalgie qu'a voulu lui donner le premier ministre ce matin. Je l'ai utilisé et je l'ai proposé à ceux pour qui je travaillais. En aucun cas, il ne m'avait inspiré cette réflexion. Au contraire, pour moi, le terme "Etat du Québec" signifiait la réalité des choses, signifiait la réalité de l'histoire, lorsqu'un groupe de citoyens canadiens réunis dans des provinces différentes avaient décidé de s'associer dans une fédération canadienne. Pour moi, je dis et je répète que l'utilisation de ces mots ne traduisait pas une nostalgie, mais une réalité concrète de ce que devait être le Canada, de ce que devait être le Québec à l'intérieur du Canada. Je suis certain que mes collègues de ce côté de la Chambre, mes collègues de l'Opposition, ont utilisé et utiliseront encore ce terme, mais voudront lui donner son sens véritable, son sens historique pour conserver au Québec l'autonomie dont il a besoin pour faire face à ses obligations et à son statut spécial à l'intérieur du Canada, mais aussi pour s'associer à cet ensemble canadien qui constitue pour nous une garantie de notre développement économique. Pour ce faire, on doit laisser à l'ensemble canadien suffisamment d'autonomie également sur ce plan et suffisamment de force pour remplir une des principales responsabilités qui m'apparaissent être celles du gouvernement canadien, soit celle de la répartition de la richesse, soit celle de permettre à toutes les régions du Canada de bénéficier d'un niveau de vie comparable, par l'intermédiaire et l'entremise d'un niveau de revenu également comparable à celui de la moyenne canadienne.

Voilà la fin de mes propos, M. le Président. J'espère que cette mini-session se terminera et que se termineront également les discours dou-ceureux qu'on nous a servis ce matin, parce qu'à partir du mois de février prochain je crois que ce seront des réponses que l'Opposition exigera et non pas des voeux pieux.

Le Vice-Président: Le député de Westmount. M. George Springate

M. Springate: M. le Président, mes premières remarques dans cette nouvelle session sont pour vous féliciter de votre élection à la présidence de l'Assemblée nationale. Vous êtes le gardien des droits des parlementaires du Québec et le premier responsable de la sauvegarde et de la promotion de l'autorité de l'Assemblée nationale elle-même. Je vous assure que je vous accorderai à vous et à vos adjoints ma pleine et entière collaboration. Malheureusement, je ne peux pas en dire autant pour le gouvernement, un gouvernement qui cherche à détruire mon pays. Je suis contre la séparation. Je vais lutter fort et de toutes mes forces pour combattre ceux qui prônent la séparation. Je vous promets que le référendum no 1, le référendum no 2, le référendum no 3...

Une Voix: Alouette!

M. Springate: ...seront rejetés par la population du Québec. Mon devoir, comme membre de l'Opposition, est d'appuyer le gouvernement lorsque les lois qu'il propose sont bonnes et égales pour tous les Québécois et de critiquer et d'essayer d'amender les lois qui laissent à désirer. Quelquefois, le gouvernement en face de moi me fait peur. Je ne suis pas le seul qui ai peur. L'incertitude face à l'avenir du Québec et du Canada fait peur aux investisseurs. Tout le monde se trouve sur le "stand by". Nous allons attendre, nous allons voir. Pourquoi investir maintenant? Nous allons attendre et voir si les séparatistes gagnent le référendum. Tout le monde attend, les petites et les moyennes entreprises, les investisseurs, les multinationales, les Québécois. Qu'est-ce qui va arriver de notre économie, d'ici le ou les référendums?

Comme je l'ai mentionné, je ne suis pas le seul à avoir peur.

Un séparatiste, un M. Santerre, l'ex-président de l'association du Parti québécois de Saint-Louis et membre du parti séparatiste depuis sa fondation, est nerveux. Mercredi, dans un discours prononcé dans le comté de Westmount, mon comté, il a dit: I am a little nervous. I did not expect things to move that fast. Il a continué: He refers to the new PQ government's plan to increase the minimum wage to $3 an hour without fear of economic effects, developing the Mirabel area, increase family allowances, set up on an automobile insurance plan and provide free dental care for children, etc., etc.

M. Santerre n'a pas accepté le fait que le salaire minimum soit augmenté à $3 l'heure. Même le ministre s'est prononcé contre un tel programme. C'est vrai, M. le Président, que le ministre s'est rallié, lors d'une réunion du Conseil des ministres, mais cela n'efface pas le fait que le ministre en question était contre.

Je dois vous avouer, M. le Président, aussi que je suis déçu. Je suis déjà déçu de ce gouvernement qui se trouve en face. Pendant sept ans, alors que j'étais "back-bencher" ministériel, j'ai écouté des discours prononcés par les membres du Parti québécois. Ils nous disaient à maintes reprises que les séparatistes étaient des hommes honnêtes, des hommes intègres et que leurs paro-

les étaient la vérité. S'ils disaient quelque chose, c'était parce que c'était vrai. Et, M. le Président, ils ont continuellement accusé notre gouvernement de manquer de fair-play, de dire une chose et d'en faire une autre. Ils disaient que le gouvernement n'était pas un gouvernement du peuple, que c'était un gouvernement qui avait deux poids et deux mesures. Mais, M. le Président, mercredi passé, le deuxième jour de cette première session, l'honorable ministre de l'Education nous a montré les vraies couleurs de ce gouvernement et du Parti québécois: contradiction et attitude flagrante. L'attitude de dire ce qu'il faut pour être élu et, une fois élu, faire ce qu'on veut.

Permettez-moi, M. le Président, de vous citer une partie d'un éditorial du Devoir du jeudi, le 16 décembre, signé par Michel Roy. "Dans ce contexte d'une révision complète de la loi 22, en particulier de son chapitre V, comment expliquer la double décision de M. Morin? "Pendant toute la campagne électorale, le Parti québécois a dénoncé avec raison les tests linguistiques que M. Lévesque tient pour "odieux". Pendant toute cette campagne, le président du Parti québécois s'est engagé à revoir cette loi dont l'application au secteur scolaire présente d'énormes obstacles, sources d'injustices. Il est même allé plus loin: les enfants de parents anglophones établis depuis peu au Québec allaient être, à toutes fins utiles, dispensés de l'obligation de fréquenter l'école française; la loi n'allait s'appliquer qu'aux "futurs" immigrants. Devant ces déclarations, les diverses communautés ethniques de Montréal avaient toutes les raisons de penser que le Parti québécois, s'il était appelé à former le gouvernement, s'efforcerait au moins de résoudre dans l'immédiat le problème des 250 enfants ayant échappé aux tests et celui des 920 dont les parents en ont refusé les résultats. Les péquistes laissaient presque entendre, en fin de campagne, qu'ils accorderaient la liberté de choix aux enfants des groupes ethniques arrivés depuis peu au Québec. A plus forte raison devaient-ils alors régulariser le cas des "victimes" du "testing". "Réponses provisoires et mesures transitoires, déclare M. Morin, mais décision qui, il faut bien le dire, trahit la confiance que les communautés ethniques ont accordée au Parti québécois.

M. le Président, Michel Roy a continué: "Mais rien n'obligeait à conclure, comme le fait M. Morin, que la loi doit être respectée et ses règlements observés. Car si les tests étaient mauvais et "odieux" pendant la campagne, ils n'ont pas cessé de l'être aujourd'hui, quelles que soient les "conditions nouvelles" dans lesquelles on voudrait les administrer. On ne comprend pas que le gouvernement, à moins qu'il ne soit poussé par ses fonctionnaires "spécialisés" du ministre de l'Education, s'acharne à perpétuer des tests que le président du PQ et M. Morin lui-même ont si justement dénoncés avant le 15 novembre."

Double talk. Promise is one thing and do another. Once in power, forget what was said and promised during the election campaign. That, Mr Speaker, unfortunately is the attitude of this Government. On the very first occasion this Government had, it went against his word. Oh yes, another minister held a press conference on that very same day and made even more promises that, in the new year, Section 5 of the official language's Act would be amended and everybody would be happy.

But minister's words no longer impress me, action does. And on Wednesday last, Mr Speaker, we saw the true Parti québécois at work. While one, a super duper jumbo minister, was out making promises to reporters, another was in this House proclaiming to all, that the task that he personally, that his leader, that his supporters claimed to be unjust and inhuman was going to be continued. A hell of a lousy way to start, gentlemen, a hell of a lousy way.

Mr Speaker, there are other things that have got now to a bad start also. The oecumenical non confessional prayer has been dropped. English, an official language of this country and the language of more than one million Quebeckers has been dropped by the clerk of the National Assembly. Naturally, I suspect, on orders from above. And the Lieutenant-Governor's inaugural speech was void of English, an insult to more than one million Quebeckers. It was not an oversight. It was planned, calculated, deliberate. Tradition, usage, customs, folk ways and morals of Quebec mean nothing to this group that is front of us. And where is this Government going? How will it treat its minorities, a sizeable majority in number that is larger than the respective population of six provinces, Newfoundland, PEI, New Brunswick, Nova Scotia, Manitoba and Saskatchewan?

Mr President, one judges a Government by how it treats its minorities. Today, after one week of a new session, of a new Government, your performance does not augur well for the future of the minorities. Double talk, contradiction, false promises, socialism, uncertainty, no respect for minorities. Add that up. Mr. Speaker and all I can say is that Quebec with this Government attitude does not have much to look forward.

Le Vice-Président: M. le député de Roberval. M. Robert Lamontagne

M. Lamontagne: M. le Président, comme vous êtes mon successeur immédiat, je voudrais d'abord vous offrir mes plus sincères félicitations et, ayant participé à votre élection, m'en féliciter moi-même et peut-être vous rappeler qu'au cours des trois dernières années et demie j'ai, avec mon collègue le député de Laval, essayé de revaloriser tant l'Assemblée nationale que toute la réforme parlementaire.

Je devrais peut-être vous rappeler également, et vous faire notre intermédiaire pour le rappeler au président de l'Assemblée nationale, que nous avions établi la coutume, au cours des dernières années, de consulter régulièrement tous les partis de l'Opposition lorsqu'il s'agissait d'annoncer ou

de préconiser des mesures qui touchaient tous les parlementaires.

Je dois vous dire que c'est avec grand étonnement et avec énormément de déception personnelle — malgré qu'une décision ait été rendue et je ne voudrais pas aujourd'hui la contester — que nous avons vu le président de l'Assemblée nationale, sans consulter les partis de l'Opposition, décider qu'un moment de réflexion n'égalait pas une prière en 1976.

J'espère qu'au cours des prochains jours ou des prochaines semaines, les deux vice-présidents et le président voudront bien reconsidérer cette interprétation qui, depuis 20 ans et 30 ans avait toujours été en usage ici, au Québec.

Le 15 novembre, évidemment, il y a eu plusieurs changements. Peut-être pour toutes sortes de raisons a-t-on voulu décider ici qu'il fallait faire vite, qu'il fallait aller au plus pressé, et, j'en conviens, on est peut-être allé aux premiers articles du règlement, mais, de grâce, M. le Président, ne faisons pas des changements pour le seul plaisir d'en faire.

On a décidé, sans nous consulter, qu'il n'y avait plus de prière à l'Assemblée nationale. Mais, mon Dieu! je ne sais pas ce que les gens en disent au Québec. On a décidé que nos bons amis et collaborateurs n'avaient plus le droit de prononcer quelques mots d'anglais, ici, à l'Assemblée nationale. Changement majeur pour l'avenir du Québec, j'en conviens, mais tellement important que, pour nous, au moins, et lorsqu'on a le respect de tous les parlementaires, la première chose dans ce respect, c'est de les consulter.

Egalement... Vous m'excuserez, M. le Président, j'en ai déjà endormi un.

Le Vice-Président: A l'ordre! Une Voix: II s'était endormi avant.

M. Lamontagne: Ceux qui ne dorment pas ne sont pas là de toute façon.

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

M. Lamontagne: Si vous voulez couper mon temps, il y a au moins M. le député de Johnson qui vient me solliciter pour que je parle plus longtemps.

Le Vice-Président: A l'ordre! Si vous permettez, le temps est présentement compté. Je pense que vous ne devriez pas vous distraire à d'autres faits qu'à ce discours.

M. Lamontagne: Mais, tout de même, il y a des changements radicaux. C'est que, maintenant, le parti ministériel n'est plus présent à l'Assemblée nationale. Et j'en vois, comme mon bon ami, le ministre, qui étaient présents, j'en conviens, régulièrement, mais il sait fort bien combien ses amis de maintenant ont dit qu'à l'Assemblée nationale, lorsqu'on siège, il faut toujours être assis à son siège. J'en sais une qui est assise là et qui l'a répété sur toute la... Je ne la vois pas. Vous le savez, M. le Président, comme elle l'a dit, qu'il fallait être présent à l'Assemblée nationale.

M. Marchand: Ils font des mots croisés.

M. Lamontagne: J'aurais aimé, cet après-midi, lui faire ce message personnel. Oui, qu'on soit ministre ou député, il faut être assis et présent, écouter tout ce qui se dit. De grâce, essayez de nous écouter et vous allez bien vous instruire. C'est important.

Ceci étant dit, je voudrais également féliciter mes collègues de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean; il y a le député de Jonquière, mais le député du Lac-Saint-Jean n'est pas là, je ne peux pas le féliciter.

Une Voix: Le député de Dorion non plus.

M. Lamontagne: Cependant, je voudrais leur rendre ce témoignage d'être maintenant avec nous et leur offrir ma meilleure collaboration pour le succès et le développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Hier, le chef de l'Opposition officielle demandait à l'honorable premier ministre ce qui était important. Pour le moment, le changement le plus important, et peut-être que le ministre des Finances pourrait faire le message à tous ceux de ses collègues qui ne sont pas ici, c'est de dissiper cette inquiétude que vous êtes en train de créer. Comme député de Roberval et de l'avis de plus en plus de Québécois face aux paroles que le premier ministre a prononcées ce matin et antérieurement, on est en train de vouloir parler presque exclusivement d'indépendance du Québec. Lorsque, pendant la campagne électorale, nous vous invitions à en parler, vous avez essayé et réussi, j'en conviens, à faire voter la population du Québec contre quelque chose. Je comprends le ministre des Finances; avec les succès qu'il a eus en 1973, on ne l'a pas entendu parler, et c'est peut-être ce qu'il y a de mieux qui ne vous est pas arrivé.

Mais cependant, j'ai mentionné pendant la campagne électorale et je le mentionne encore — je mentionne le terme que j'ai employé en prenant à témoin le député de Jonquière — cela a été une "fraude électorale", parce que vous n'avez pas parlé de votre programme. Vous n'avez pas voulu parler de ce que vous préconisez depuis le 16 novembre maintenant.

Une Voix: Le séparatisme...

M. Lamontagne: Le séparatisme! Ils veulent faire peur en nous traitant de séparatistes! Bien oui, vous en êtes des séparatistes! C'est ça... Les back-benchers...

Une Voix: ...un "poolroom"...

M. Lamontagne: M. le Président, il y a des choses très importantes à faire actuellement au

Québec, et l'honorable premier ministre devrait en premier lieu...

Une Voix: ..."poolroom"...

M. Lamontagne: ...rassurer tous les Québécois qu'il désire être un bon gouvernement. Bien sûr, je le souhaite de tout coeur, avec tous les Québécois. Mais d'abord, avant d'instaurer...

Le Vice-Président: A l'ordre!

M. Lavoie: Commencez par faire vos preuves...

Le Vice-Président: A l'ordre, M. le député de... M. Lavoie: ...vous applaudirez après.

Le Vice-Président: ...M. le leader de l'Opposition.

M. Lamontagne: Avant de parler d'indépendance et de référendum, et de canaliser toutes les énergies des Québécois et les vôtres en particulier, parlez donc de ce qui nous préoccupe réellement: La petite et la moyenne entreprise. Bien sûr, on dit: Nous lui donnons le coup de départ, nous. On en a parlé durant toute la campagne électorale. C'est le temps de l'aider. On augmente le salaire minimum. Cela aide! Vous savez, vous, l'honorable député de Jonquière...

M. Couture: Cela aide les petits salariés. Le Vice-Président: A l'ordre! Une Voix: ...dans le "poolroom"...

M. Lamontagne: Ah mon Dieu! Ce n'est pas long qu'ils perdent leur contrôle et leur sang-froid! Ce n'est pas long. Vous n'avez pas fini, vous commencez.

Mais, dans notre région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, alors que pendant la campagne électorale, on a connu une des grèves les plus sérieuses même dans toute l'histoire du Québec, une grève, évidemment, qui a influencé grandement la campagne électorale — parce que cette grève, pendant la campagne électorale, c'était la faute à Bourassa — cependant, hier, le ministre de l'Education, lui, pendant la grève de l'université — je ne voudrais pas... j'ai peine, avec ma voix, à imiter religieusement son ton — disait qu'il ne faut pas s'y ingérer. C'est à votre tour à vous y ingérer, M. le Président. C'est vous qui êtes là. Vous avez crié contre les grèves. Maintenant, réglez-les!

En terminant...

Le Vice-Président: Si le député de Roberval veut bien s'asseoir, je veux seulement dire un mot, je lui donnerai ensuite le droit de parole.

Je veux simplement rappeler au député de Roberval, comme à tout autre membre de cette Chambre, qu'il a déjà dépassé légèrement son temps. Je lui permets cependant de conclure s'il le fait brièvement.

Je rappellerai au député de Westmount que ce n'est pas de la gentillesse. C'est simplement l'impartialité de la présidence.

M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: Je termine peut-être en invitant le ministre des Richesses naturelles à venir de près suivre un dossier fort important dans le comté de Roberval, le dossier de Gagnon et Frères, dont le ministre a déjà été saisi. Je pense qu'on devrait inviter tout le monde, ceux qui sont préoccupés, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, à venir bâtir notre région un peu. C'est important.

J'espère que vos signes sont un assentiment à la demande qui vous a été faite. Je transmettrai que vous avez fait signe que oui, que vous êtes favorables à ceux qui me l'ont demandé.

C'est une courte intervention pour dire, parfois avec un peu d'ironie et, j'espère avec un peu d'humour, qu'il faut apporter des changements au Québec, depuis le 15 novembre, mais il faut qu'ils soient sérieux en même temps. Il faut qu'ils soient planifiés et qu'ils soient en fonction des véritables besoins des Québécois.

M. Burns: C'est ce que nous allons faire.

M. Lamontagne: J'espère que vous allez finir par le faire un jour, avant les prochaines élections.

M. le Président, je vous remercie et j'espère que j'aurai l'occasion de vous rencontrer à nouveau, à cette Assemblée nationale, au cours des prochains mois.

Le Vice-Président: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Frederic Shaw

M. Shaw: M. le Président, je voudrais, premièrement, vous donner quelques notes explicatives au sujet de mes interventions dans cette Chambre.

Après ces remarques, je m'adresserai à vous, toujours en anglais, pour trois raisons. Premièrement, parce que je suis un anglophone et que je représente les Québécois d'expression anglaise; deuxièmement, 84% de mes électeurs sont aussi anglophones et ils veulent que je les représente non seulement sur ce point de vue, mais aussi comme représentant du fait anglais au Québec dans le journal des Débats; troisièmement, je ne voudrais pas être mal interprété par un manque de facilité de m'exprimer avec suffisamment de clarté en français.

M. Lavoie: Très bien.

M. Shaw: Je me réserve quand même le droit de m'exprimer de temps en temps en français, quant aux questions relatives à mes électeurs francophones de mon comté, parce que je suis fier de leur appui.

Ladies and Gentlemen, I wish to address myself firstly to the character of this Assembly and to its predecessors who now fortunately have been relegated to the seats on my right.

Une Voix: Temporarily.

M. Shaw: We are here supposedly to represent our constituents in the vehicle of democracy, in Quebec, its elected Assembly. Unfortunately, democracy in this province has been abused, because its has denied one of its vital characteristics, the respect for the minority. Every democracy is measured as to its ethics and these ethics are judged by the respect it shows to its minorities and to minority rights. A Government that uses its majority to abuse a minority is without ethics and is not worthy to call itself democratic, fascist maybe, but not democratic.

You see, there are 1400 000 non-francophones in our province. There is as much an English fact in Québec as there is a "fait français" au Canada, but the consecutive Québec Governments have been bullying the minorities by abusing "du pouvoir de la collectivité".

There are earlier examples such as the unilingual road signs and deliberate franchisation of the Provincial Civil Service, but the culmination of this was in the infamous Bill 22 which declared French as the only official language in Québec and established mechanisms which eventually extend to force everyone in this province to speak French.

This was using the power of the collectivity to bully the minority. It was bad enough to pass a bill forcing four and five-year-old to take oral language tests but, after criticizing this policy during the election, the Government suggests now that the law must be upheld and bespeaks the injustice of a philosophy that the power of the collectivity can do anything.

I represent a party committed to the policy of two official languages in this province which, while respecting the need to emphasize the preeminence of the French language and culture in the province, is equally committed to respecting the rights of the minorities. The French language and culture have never been stronger in Québec and in Canada, but the ethical environment has never been sicker. Can you imagine a province wherein one fifth of its population is non-French and yet less that 1% of its Civil Service is represented by its minority? Can you imagine, although fully bilingual, an Anglophone senior policeman in Montréal, recognized as the most capable man for the job, is told he could never aspire to this position as an anglophone? This, while in our national Government, where the power of collectivity is not abused, both the Chief of the Joint Chiefs of Staffs of the Canadian Forces and the Director of the Royal Canadian Mounted Police are French Canadians.

There are thousand other examples. But while I recognize that there is injustice perpetrated on the English-speaking side to which I assure you that I will be equally critical. My job and your job is to cure the sickness of our ethnical environment and restore democracy in its real sense where the interests of the people are paramount and that the differences are respected. We can build a great Québec together through understanding and tolerance and above all respect. Respect for its institutions and its responsibility to administer for the people and respect for each other in spite of our differences and respect for those values which make our democracy so vital, such as the freedom to be different the essential brotherhood of all men and the essential quality of all people.

I have entered the field of politics because I feel sincerely that my predecessors who represented the English-speaking community in Québec have failed to express firmly enough that we, Québécois d'expression anglaise, have had enough abuse. Perhaps it is being that for some times there have been no Anglophones in the Opposition and the restriction of party discipline and party solidarity have muted those who were with the Government.

However, this election has changed it. I am committed to be positive and responsible, a critic of this Government but rest assured that every example of discrimination or abuse of any minority in this province either for my county or otherwise would be brought to the attention of this Assembly. To this end, I would like to suggest that the minister of Education reconsider his ministerial declaration and suspend testings until he has introduced the new language legislation at the next session of the Assembly. This would be in keeping with the philosophy of the Prime Minister's declarations during the election campaign, when he termed the tests odious and more, it will demonstrate that the Parti québécois, who proclaim their committment to democracy, will show that they are truly democratic rather than abuser of the power of the collectivity.

As well, the ministerial declaration concerning the language of work, made this morning, completely ignores the economic reality of Québec and is again contrary to the Prime Minister's declaration in the Montreal Gazette wherein he said he would never force anyone to speak French. What is more, the right to declare only one language official in Québec as yet not be completely tested in the courts. Therefore, it makes no sense to precipitate further exodus of business from Québec when this sort of legislation could shortly be declared ultra vires.

Furthermore, the question of the referendum has capital investments in a state of suspension. The effects of this will soon aggravate an already unacceptable level of unemployment. The people of Québec have the right to know now your intentions to this end. Be assured that I and my constituents are unquestionably Canadian as I am sure the constituents of the majority of the ridings in this House.

We would like to demonstrate this so that with the future of Confederation settled we can get on with the business of governing the province. We are blessed with one of the most advantaged

countries in the world. For some reasons, there are those who would destroy it but I assure you that there are more who would like to keep it.

Le Vice-Président: M. le député de Richmond. M. Yvon Brochu

M. Brochu: M. le Président, c'est avec beaucoup de joie et de plaisir que je me retrouve cette année à l'Assemblée nationale et que je prononce, aujourd'hui, le premier discours depuis l'élection du 15 novembre dernier.

Tout d'abord, mes premiers mots, vous me permettrez, M. le Président, seront pour remercier les citoyens du comté de Richmond qui m'ont redonné une fois de plus leur confiance cette année, que j'aime profondément et qu'il me fait plaisir de servir. Je voyais tout à l'heure mon ancien collègue, puisque j'avais siégé dans cette Chambre de 1970 à 1973, le député de Saint-Jacques, qui est maintenant ministre délégué au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports. Je me rappelais le moment où on était, à ce moment, les plus jeunes de l'Assemblée nationale. Je me rappelle également les propos que le premier ministre a tenus ce matin et qui me faisaient dire que peut-être, désormais, en voyant les plus jeunes que nous qui sont là maintenant, nous allons peut-être devoir nous résigner à dire nous aussi que nous sommes contents de cette relève qui s'en vient derrière nous et à être des députés d'un moyen âge maintenant à l'Assemblée nationale.

M. le Président, à l'instar de mon chef, j'entends être le représentant de tous les citoyens de mon comté, quelle que soit leur allégeance politique, quelle que soit l'option qu'ils ont prise lors de la dernière élection. J'entends bien d'ailleurs, tel que je l'ai annoncé publiquement à la suite de l'élection, être le député de tout le monde. Je pense que ce principe devrait être un principe directeur pour le nouveau gouvernement également qui se doit, je pense, et surtout à ce stade, d'être vraiment le gouvernement de tous les citoyens du Québec, de tous ceux qui vivent actuellement dans notre province.

M. le Président, le présent débat, si on peut l'appeler ainsi, sur le message inaugural, me porte à certaines réflexions et j'aimerais vous faire part de quelques-unes de ces réflexions. Nous avons au Québec un nouveau gouvernement, et même, si vous me passez l'expression, un gouvernement nouveau, c'est-à-dire de nouvelle forme ou de nouveau style. Quelques points qui illustrent, en fait, cette affirmation: La façon avec laquelle le choix des membres du Conseil des ministres a été rendu public; les structures internes du cabinet où la planification semble être un souci évident; les déclarations ministérielles qu'on nous a faites jusqu'à ce jour, malgré qu'elles soient parfois ambivalentes ou inégales en valeur du moins; le style en cette Chambre et à l'extérieur du premier ministre et de ceux qui forment maintenant le cabinet; enfin, évidemment, l'idéologie d'un nouveau parti politique qui forme ce gouvernement.

Oui, pour sûr, tout ceci nous amène à conclure et à reconnaître au point de départ que nous avons à faire face à un type nouveau de gouvernement et d'administration. L'avenir, et l'avenir pas trop lointain, il me semble, nous dira si, pour autant, il sera représentatif des Québécois, de leur véritable attente individuelle et collective. Par ailleurs, les citoyens de nos sociétés attendent de plus en plus, je pense, de la part de nos dirigeants et de la part de nos gouvernements. Il faut dire aussi, il faut le reconnaître, que leurs différents problèmes ont également tendance à s'amplifier.

La prise du pouvoir de façon aussi éclatante par le Parti québécois, le 15 novembre dernier, a créé chez plusieurs, je pense, l'impression qu'une ère nouvelle commençait pour le Québec, où les gens pourraient se sentir plus heureux, plus prospères, plus attentifs les uns aux autres, imbus peut-être d'un sens plus aigu de collaboration et d'une volonté plus ferme de construire le Québec. On a dû, cependant, se rendre compte, dès le lendemain matin, et j'ai l'impression que cela a été aussi le lot des ministres et du premier ministre, une fois l'euphorie de la victoire passée, on a dû se rendre compte dès le lendemain matin que les problèmes de notre société étaient demeurés exactement les mêmes que ceux de la veille, et surtout aussi que les gens non plus n'avaient pas changé tout d'un coup, mais que la bonne vieille nature humaine continue encore de pousser davantage chacun à tirer un petit peu la couverte de son côté plutôt qu'à se préoccuper des autres et du bien de l'ensemble. Après l'euphorie de la victoire, pour le gouvernement, il y a eu, je pense, la réalité.

Pour l'heure, et je pense que c'est une question d'honnêteté aussi, nous devons assurer au nouveau gouvernement notre collaboration en plaçant les intérêts du Québec au-dessus des intérêts de partis.

Nous devons également placer les intérêts de l'ensemble des Québécois — et je pense ici en particulier à ce qu'il est convenu d'appeler le citoyen ordinaire — au-dessus des intérêts de tel ou tel groupement de notre société. Nous avons un nouveau gouvernement, c'est-à-dire un nouveau type de gouvernement. Là aussi, on peut souligner quelques faits pour démontrer que cette structure est différente de ce qu'on a connu dans le passé. Simplement souligner, par exemple — et tous ceux qui ont déjà siégé en Chambre peuvent le mentionner et pourraient peut-être de façon beaucoup plus éloquente que moi le décrire — ceux qui ont siégé dans cette Chambre, dis-je, peuvent comparer. L'atmosphère déjà est changée à l'Assemblée nationale de ce que c'était par les années passées.

Les initiatives, également de type nouveau, de la part de la présidence, changent aussi la forme du Parlement que nous connaissons actuellement. J'en profite d'ailleurs, M. le Vice-Président, pour vous transmettre mes félicitations pour le poste que vous occupez et je vous prie en même temps de transmettre à la présidence mes plus sincères félicitations et vous assurer de notre collaboration la plus entière parce que vous représentez, dans

cette Chambre, l'autorité dûment constituée et nous entendons collaborer avec vous en ce sens.

Il y a également l'approche nouvelle que le leader du gouvernement en Chambre entend donner aux travaux de l'Assemblée nationale et je pense que, dès le début, on a senti aussi une volonté d'un nouveau type de leadership, si je peux m'exprimer ainsi, de la part du gouvernement en matière d'organisation des travaux.

Par ailleurs, l'important projet de réforme parlementaire, dont nous connaissons déjà les grandes lignes, atteste aussi de cette volonté de changement. Nous en discuterons d'ailleurs plus loin et nous aurons l'occasion d'expliciter la question.

Enfin, ce type nouveau de Parlement se retrouve surtout — et j'insiste un peu sur ce fait — dans la composition même de cette Assemblée nationale nouvelle. D'une part, nous avons un gouvernement majoritaire qui était hier encore un tiers parti. D'autre part, nous nous retrouvons avec une Opposition officielle qui, hier encore de son côté, avait la taille d'un gouvernement trop fort de 100 députés, qui est allé au peuple, sous prétexte d'obtenir un mandat plus clair, quel qu'en soit le paradoxe. Nous avons également...

Le Vice-Président: A l'ordre! M. le député de Johnson sait qu'on peut rire et sourire, mais qu'on ne peut pas parler pendant qu'un orateur ou un opinant parle déjà.

M. Brochu: Nous avons également dans cette description de cette nouvelle Assemblée nationale des députés comme ceux de Beauce-Sud et de Rouyn-Noranda qui, avec leur personnalité propre, font que ce Parlement est une mosaïque véritable où tous les citoyens du Québec peuvent se retrouver.

Enfin, nous avons une nouvelle Opposition avec l'Union Nationale revivifiée. Hier encore, un parti moribond, une Union Nationale qui a été fondée pour la deuxième fois par l'honorable député de Johnson avec lequel, d'ailleurs, j'ai eu l'occasion, l'honneur et le plaisir de travailler dans l'historique comté de Johnson pour redonner à l'Union Nationale son premier député à l'Assemblée, à ce moment-là. Nous avons donc cette Union Nationale qui est revivifiée, qui a été fondée pour la deuxième fois et qui a été si bien relancée par l'actuel chef du parti, le député de Lotbinière, sous la direction duquel je suis heureux de servir aujourd'hui.

C'est donc vraiment, M. le Président, un Parlement tout à fait de type nouveau que nous trouvons actuellement à l'Assemblée nationale et dorénavant, c'est là mon avis, la politique ne se fera plus de la même façon à l'Assemblée nationale qu'elle s'est faite par le passé.

Déjà les problèmes, sinon nouveaux, sont présentés de façon nouvelle, et je pense que déjà certaines autres amorces de solutions ont été faites. En ce qui nous concerne, nous avons bien l'intention de continuer, par des propositions concrètes et positives, d'apporter du nouveau dans ce sens pour suggérer des solutions véritables aux problèmes véritables qui existent.

Donc, M. le Président, devant tout ce changement à tous les paliers, que ce soit dans la structure même du gouvernement ou dans l'Assemblée nationale, nous devons conclure que nous, les députés, qui sommes en réalité les outils de ce Parlement, nous devons, nous aussi, nous renouveler dans ces circonstances. Ce qui m'amène à dire que le type d'Opposition parlementaire que nous avons connu par le passé doit donc également se renouveler.

M. le Président, le défi auquel nous convie le gouvernement du Parti québécois est de contrer en Chambre et auprès de la population l'option souverainiste. Et sa tendance socialiste à quelques égards nous amène à être exigeants envers nous-mêmes d'abord, nous de l'Opposition, pour être ensuite très exigeants envers lui, le gouvernement. Plus jamais, Madame et Messieurs les libéraux — et ceci, mes collègues de l'Union Nationale et mon chef en tête l'ont compris et ont déjà commencé à le vivre — plus jamais, dis-je, l'Opposition en cette Chambre, si elle veut être crédible dans l'opinion publique, ne sera ou ne devra être ce qu'elle a été dans le passé, de façon générale.

Je comprends que c'est peut-être un peu inconfortable pour un gouvernement de passer du pouvoir à l'Opposition, dans un jugement aussi sévère que celui qui a été rendu. Mais il faudra, une fois l'émotion de la déception passée, réaliser ce nouveau type d'Opposition, si ce Parti libéral veut être encore, en Chambre, plus que des présences simplement de cors retentissants.

M. le Président, les moments historiques que nous vivrons ces prochains mois, ces prochaines années nous amènent, nous incitent à nous dépasser, et justement à éviter peut-être ce genre d'interventions qu'on fait à tout propos, comme viennent de faire les libéraux durant le discours que je viens de faire, mais avoir peut-être même plus de tenue à l'Assemblée nationale, pour lui donner vraiment tout le décorum et toute la noblesse à laquelle on doit s'attendre d'une assemblée délibérante.

M. le Président, nous ne sommes pas ici pour embêter le gouvernement au point de départ. Nous ne sommes pas ici pour préparer les prochaines élections ou, pour certains, comme je viens d'entendre encore un député libéral, celui de Roberval, pour préparer la venue d'un nouveau chef de parti ni, non plus, pour plaire à quelque conseil national que ce soit. Les applaudissements sont plus rares, je le comprends, M. le Président, mais quand même je me dois de le dire. Nous sommes ici, M. le Président, pour tenter de replacer le Québec sur la voie du bon sens, sur la voie de la paix sociale, sur la voie de la relance économique, dans la mesure de nos possibilités.

Il n'y a pas que le Parti québécois qui n'a pas le droit de manquer son coup, c'est tout le Parlement, à l'heure que connaît le Québec, qui n'a pas le droit de manquer son coup, c'est l'ensemble

des députés de l'Opposition et c'est également l'Union Nationale — et j'ai bonne confiance que cela ne se produira pas — qui n'a pas le droit non plus de manquer son coup. Nous avons un défi à relever et nous entendons bien le relever.

Oui, M. le Président, comme mon chef l'a mentionné à plusieurs reprises, nous constituerons, nous de l'Union Nationale, une Opposition tout aussi positive et constructive que vigilante. Dans son premier discours en cette Chambre, notre chef a multiplié les suggestions à l'endroit du gouvernement et il a parlé de la relance économique, des relations fédérales-provinciales et de plusieurs sujets de l'heure. L'Union Nationale a compris le sens du scrutin du 15 novembre dernier et déjà elle constitue l'Opposition en cette Chambre, une Opposition de type nouveau qui s'est adaptée immédiatement et qui s'apprête à définir le nouveau lien canadien qui se substituera au statu quo actuel et qui remplacera le rêve séparatiste.

M. le Président, quant à moi, je m'intéresserai de plus près à l'immense secteur des richesses naturelles et des terres et forêts, sans négliger pour autant les dossiers d'importance, que ce soit l'agriculture ou tous les autres sujets.

Je le ferai avec d'autant plus d'enthousiasme que le programme et le chef de mon parti reconnaissent au développement des ressources l'importance qui lui est due.

Le Vice-Président: A l'ordre! Je rappellerai au député de Richmond qu'il a déjà dépassé son temps. Je lui permettrais, évidemment, de terminer brièvement.

M. Brochu: M. le Président, je vous remercie et je me conforme immédiatement à votre directive en disant tout simplement que j'ai l'intention, en tant que membre de l'Opposition, de jouer pleinement, loyalement et honnêtement mon rôle en cette Chambre et que te comté de Richmond, par la voix de son député, participera pleinement au sein de l'Union Nationale à une vraie Opposition québécoise.

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames, messieurs! Comme je ne reconnais plus aucun député qui se lève et que l'entente a été respectée, je crois que je dois considérer que le débat sur le discours inaugural est terminé. Mesdames, messieurs, nous allons procéder au vote sur les motions de censure. La première de ces motions...

M. Lavoie: Vote enregistré.

Le Vice-Président: Que l'on appelle les députés!

Vote sur la motion de censure de M. Gérard D. Levesque

Le Vice-Président: Je n'ai pas eu tantôt l'occasion de lire la motion. Or, cette motion du chef de l'Opposition officielle se lit comme suit: "Que cette Assemblée regrette que le gouvernement n'ait rien fait pour dissiper le climat d'inquiétude et d'incertitude qui est absolument néfaste au bien-être des Québécois et de leurs familles."

Que ceux qui sont en faveur de cette motion de censure du chef de l'Opposition officielle veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Vaillancourt (Orford), Garneau, Mailloux, Goldbloom, Mme Lavoie-Roux, MM. Giasson, Lamontagne, Lalonde, Caron, O'Gallagher, Picotte, Marchand, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Bellemare, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Cordeau.

Le Président: Que ceux qui sont contre cette motion de censure du chef de l'Opposition officielle veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Burns, Morin (Sauvé), Parizeau, Léonard, Couture, Bérubé, Duhaime, O'Neill, de Belleval, Joron, Lessard, Proulx, Léger, Garon, Grégoire, Chevrette, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Alfred, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Godin, Desbiens, Johnson, Lapiante, Guay, Mercier, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron, Clair, Gosselin, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Jolivet, Baril, Bordeleau, Boucher, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon.

Le Vice-Président: Y a-t-il des députés qui s'abstiennent?

Le Secrétaire adjoint: Abstention, M. Roy.

Le Secrétaire: Pour: 28 — Contre: 49 — Abstention: 1

Des Voix: L'absentéisme!

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames, messieurs!

Cette motion n'est pas adoptée.

Vote sur la motion de censure de M. Rodrigue Biron

Le Vice-Président: La deuxième motion de censure, proposée par le député de Lotbinière, se lit comme suit: "Que cette Assemblée blâme le gouvernement pour ne pas avoir annoncé immédiatement des mesures concrètes pour assurer la relance économique du Québec et atténuer le degré élevé de chômage qui sévit à l'heure actuelle." Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Burns: M. le Président, je fais une suggestion à la Chambre. On pourrait peut-être faire le même vote à moins que quelqu'un veuille changer de bord.

M. Lavoie: Si le député de Beauce-Sud est d'accord, on peut prendre le même vote.

M. Roy: Même vote.

M. Burns: D'accord. Le même vote, cela va sauver du temps.

Le Vice-Président: D'un commun accord, le même vote est enregistré.

M. Levesque (Bonaventure): C'est la balance du pouvoir.

Le Vice-Président: A l'ordre! Cette deuxième motion est également rejetée.

M. le leader du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, revenant à l'article 1, je propose que vous quittiez immédiatement votre fauteuil, non pas parce qu'on ne vous aime pas, mais pour que nous devenions la commission plénière de l'Assemblée nationale des crédits.

Le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: La formation de la commission plénière?

M. Burns: Oui.

M. Lavoie: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. Levesque (Bonaventure): On pourrait peut-être demander à vos gens de rester encore un peu. Vous en avez perdu 21. J'espère que cela va pouvoir finir correctement.

M. Burns: J'espère qu'ils vous entendent. Une Voix: II faudrait initialer cela aussi après.

Etude des crédits supplémentaires Commission plénière

M. Cardinal (président de la commission plénière): A l'ordre, s'il vous plaît! Je désirerais rappeler aux membres de cette commission plénière qu'ils peuvent se prévaloir de l'article 129 du règlement indiquant que "Lorsqu'un budget supplémentaire est déposé à l'Assemblée, avant que ne commence l'étude des crédits, un représentant de chaque parti reconnu a droit à un commentaire général de quinze minutes et le ministre des Finances a un droit de réplique de même durée. La durée de ce débat fait partie du temps prévu à l'article 128". Les représentants des partis désirent-ils se prévaloir de ce privilège?

M. Garneau: M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire d'intervention, comme cela a été souvent l'habitude lors des crédits. J'aurais peut-être des questions d'ordre général au départ, mais je pense qu'il n'y a pas lieu de faire de discours à ce moment-ci.

Le Président (M. Cardinal): ...lorsqu'on appellera le premier article.

M. Roy: M. le Président, c'est un peu la même chose...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Roy: ...en ce qui me concerne, j'aurais des questions à poser à l'honorable ministre, mais ce sont des questions d'ordre général également afin d'obtenir des renseignements avant d'entreprendre, justement, l'étude article par article de ce budget supplémentaire.

Le Président (M. Cardinal): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: Je regrette, mais je ne pense pas qu'on soit obligé, qu'on soit capable de passer à côté de l'article du règlement voulant que ce ne soit réservé qu'aux partis reconnus.

Le Président (M. Cardinal): M. le leader parlementaire du gouvernement, si vous me permettez, si on prend le texte de l'article tel que rédigé, c'est un droit qui est reconnu aux partis reconnus, ils peuvent y renoncer. Si tous les partis reconnus y renoncent, nous pourrons procéder à l'appel du premier programme d'un ministère.

M. Burns: D'accord, M. le Président. Je sens, dans votre voix, une incitation d'y renoncer, j'y renonce au nom du gouvernement.

M. Bellemare: M. le Président, nous n'avons aucune objection à respecter l'article 129 pour autant où, bien entendu, on va aussi respecter l'article 160 qui est bien précis quant à la durée des discours. S'il fallait... autrement, on ne sortirait pas d'ici avant Noël.

Le Président (M. Cardinal): Je suis bien d'accord, M. le député de Johnson, puisque l'article 127 en lui-même fait référence au temps qui est prévu, vous avez raison, l'article 160 s'applique également.

M. Bellemare: C'est pour chacun des intervenants dans un budget.

Le Président (M. Cardinal): Exactement.

M. Bellemare: Ce n'est pas la même chose.

Le Président (M. Cardinal): Je suis d'accord.

M. Roy: Au sujet d'un point qui a été soulevé, je ne veux pas faire un débat de procédure à ce moment-ci, mais il est bien dit dans l'article 129 qu'un commentaire général de 15 minutes ne peut

être fait que par les représentants des partis reconnus. En ce qui me concerne, j'ai bien dit que je n'avais pas l'intention d'invoquer cet article, ou encore, de demander l'unanimité de la Chambre; mais je pense bien qu'il est de tradition à l'Assemblée nationale que n'importe quel député, lorsqu'il s'agit d'une commission plénière, puisse poser des questions avant que ce budget soit adopté...

M. Burns: Pas de problème.

M. Roy: ...que ce soit des questions d'ordre général ou d'ordre particulier concernant un poste en particulier. A ce moment-ci, j'aimerais bien qu'on se comprenne très bien de façon que les travaux puissent entrer dans l'ordre.

Le Président (M. Cardinal): Si vous me le permettez, sur les questions de règlement, il n'y a vraiment pas de problème, puisque le député de Johnson l'a rappelé, l'article 160 donne un temps déterminé à chacun des députés qui veut lui-même intervenir. C'est 20 minutes. Il ne peut le faire qu'une fois.

L'article 129 est simplement une faculté qui est accordée au représentant — au singulier — de chacun des partis reconnus — au pluriel, dans ce cas-ci — et par conséquent, il ne faut pas mêler les deux.

Comme les partis reconnus ont tous les deux renoncé à l'application de l'article 129, nous nous en tiendrons à l'application de l'article 160. Je pense que l'expérience du député de Johnson fera qu'il sera d'accord avec la présidence.

M. Bellemare: D'accord. D'ailleurs, c'est ce qu'il s'est fait depuis des années, le droit de reconnaître un opinant pour vingt minutes sur un sujet, mais pas plus. Il peut se lever deux ou trois fois, mais, quand son temps est limité, c'est vingt minutes.

Le Président (M. Cardinal): Mesdames, messieurs, les affaires culturelles, programme 1. M. le ministre des Finances.

M. Garneau: M. le Président, je ne sais pas si j'ai bien interprété ou mal interprété, mais, avant d'entreprendre chacun des ministères, j'avais compris, comme c'est la coutume, qu'on pourrait poser des questions d'ordre général non seulement sur le ministère des Affaires culturelles, mais sur l'ensemble, comme, par exemple, le ministre des Finances a donné des réponses à des questions qui lui étaient posées par la presse hier et j'aimerais bien qu'il puisse nous les redire ici, en Chambre, et confirmer si les chiffres fournis dans le journal Le Soleil d'hier, jeudi, le 18 décembre...

Le Président (M. Cardinal): Si vous me permettez, avant que vous ne posiez votre question, le député de Jean-Talon a parfaitement raison. D'après la tradition qui prévaut en cette Assemblée, il est d'usage que les députés puissent poser des questions aux ministres responsables avant de commencer véritablement le débat sur les crédits. Alors, le député de Jean-Talon est donc autorisé à poser ses questions.

M. Burns: M. le Président, est-ce que le député de Jean-Talon permettrait au ministre des Finances de faire un très court exposé, m'a-t-il dit, pour présenter l'ensemble du budget. Je pense que cela peut peut-être éviter un certain nombre de questions d'ordre général...

M. Garneau: Non.

M. Burns: ... sinon, à ce moment, on passera aux questions à caractère général.

M. Bellemare: Est-ce que cela n'est pas compris dans l'article 129?

Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Bellemare: C'est la permission qu'a le parti reconnu de prendre quinze minutes pour poser toutes les questions générales...

M. Burns: Beaucoup plus bref que ça.

M. Bellemare: Le parti au pouvoir comme le parti de l'Opposition peut le faire. C'est l'article 129 qui s'applique.

Le Président (M. Cardinal): Le député de Johnson a encore raison. Cependant, je voulais respecter cette tradition sans m'en tenir au texte même de l'article 129. C'est pourquoi, avec la permission courtoise du député de Jean-Talon, je demande au ministre des Finances de faire son bref exposé et, ensuite, le député de Jean-Talon pourra poser ses questions.

M. Parizeau: M. le Président, les crédits supplémentaires qui sont présentés à cette assemblée se montent, ainsi qu'on !'a indiqué, à $590 millions. Ils représentent, pour l'essentiel, pour la quasi-totalité, en fait, des dépenses qui avaient été approuvées par l'ancien gouvernement. Et même pour celles qui ont été approuvées de façon définitive par le nouveau gouvernement, il faut reconnaître — ceci ne se monte pas à une somme importante — que la majorité avait déjà donné lieu soit à l'engagement de programmes ou était à ce point avancée dans les programmes qu'il était difficile de reculer. Quelques-uns des éléments, un petit nombre d'éléments, cependant, ont donné lieu à de véritables décisions, si je peux m'exprimer ainsi, du nouveau gouvernement.

Elles sont peu nombreuses et j'aurai l'occasion, lors de l'étude des crédits, de les signaler au passage. Mais on peut dire que, dans l'ensemble et à toutes fins pratiques, ces crédits supplémentaires sont essentiellement le résultat de l'oeuvre de l'ancien gouvernement.

A partir de ces crédits supplémentaires, on estime maintenant que les dépenses pour le présent exercice financier s'élèveront à $10 247 000 000 et

ses revenus à $9 310 000 000. C'est donc dire que le déficit budgétaire qui, à l'occasion du discours du budget, aurait été prévu comme devamt être $630 millions, serait maintenant de $937 millions. Quant au programme d'emprunt qui avait été, au début de l'année fiscale, estimé à $986 millions, il sera maintenant de $1 331 000 000.

Sans vouloir m'étendre longuement sur la description de ces crédits, nous aurons l'occasion de les examiner un à un, je voudrais simplement mettre en lumière cependant et mettre l'accent sur un poste particulièrement important et qui est le suivant, c'est-à-dire les sommes qu'il a fallu affecter au règlement des conventions collectives, en particulier dans le domaine de l'éducation et des affaires sociales, en sus de ce qui avait été prévu dans le budget général précédent. Il s'agit d'une somme importante. A toutes fins pratiques il s'agit de $378 millions sur, encore une fois, des crédits supplémentaires de $590 millions. Donc, on peut considérer, si vous voulez, que les trois cinquièmes, à peu près, de l'ensemble des crédits supplémentaires, viennent essentiellement du règlement des conventions collectives, en particulier, encore une fois, dans le secteur de l'éducation et des affaires sociales.

Voilà, je pense, ce qu'on pouvait dire à titre d'introduction à ces crédits supplémentaires. Vous comprendrez, d'autre part, que je ne veux pas greffer là-dessus une sorte d'appréciation de la situation actuelle des finances publiques au Québec et de l'état de la dette publique. J'aurai l'occasion de présenter quelque chose d'un peu plus synthétique d'ici peu de temps, je l'espère, mais il m'est apparu qu'il n'était peut-être pas tout à fait normal, en un certain sens, de greffer quelque chose qui, nécessairement, doit avoir certaines perspectives vers l'avenir sur ce qui, à toutes fins pratiques, vous le comprendrez, est une sorte, comment dire — j'allais dire de liquidation, le mot n'est peut-être pas exact, mais enfin — la fin des crédits de l'ancienne administration. Merci, M. le Président.

M. Garneau: M. le Président, dans l'évaluation des revenus que le ministre des Finances nous indique à $9 310 000 000, les entrées de novembre doivent presque toutes être compilées maintenant. Est-ce que la tendance, au niveau de la taxe de vente, du rendement de la taxe de vente se maintient suivant les prévisions antérieures? Je constate que $9 310 000 000, c'était les prévisions que je faisais en novembre et j'avais une certaine inquiétude concernant la taxe de vente. Je me demande si les entrées de novembre se sont maintenues ou si on doit escompter une diminution additionnelle à ce chapitre.

M. Parizeau: Je vais prendre préavis de cette question. J'ai le même genre d'inquiétude à ce sujet. Les prévisions que je viens de donner sont celles du 15 décembre, mais, quant aux entrées de novembre, aux chiffres des entrées de novembre proprement dit, j'irai aux renseignements.

M. Garneau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire si, à la suite de la conférence des ministres des Finances... Vous savez, il y a eu la discussion sur les points d'impôt pour ce qui est de la garantie de recettes fiscales. Dans ces discussions que vous avez eues, celles qui étaient reliées aux deux formules qui étaient en négociation entre le fédéral et les provinces, à savoir la méthode "side by side" ou économétrique, est-ce qu'il y a eu des ententes nouvelles ou si la décision fédérale a été appliquée bon gré, mal gré?

Et au cours du présent exercice financier, y a-t-il eu des modifications quant aux entrées en provenance du gouvernement fédéral au chapitre de la garantie de recettes fiscales?

M. Parizeau: II n'y a pas eu de changements, et je comprends que pour l'année en cours, il n'y aura pas de modifications dans les entrées. Il pourrait cependant y avoir des changements pour le courant de l'année 1977/78 et je crois que les fonctionnaires sont encore au niveau des discussions à ce sujet.

M. Garneau: Merci. Une autre question, concernant toujours les relations fédérales-provinciales et la fiscalité. Au cours de la conférence qui a eu lieu récemment, on nous a annoncé que le gouvernement fédéral avait consenti 12,5 points pour les programmes à frais partagés et le programme de l'éducation postsecondaire. Le ministre pourrait-il nous dire quelle attitude il entend prendre face aux points d'impôt que nous détenons, que le Québec détient déjà dans ce qu'il est convenu d'appeler l'"opting out" au niveau de l'assurance-hospitalisation, lequel représentait 14 points, si ma mémoire m'est fidèle? Est-ce l'intention du gouvernement de négocier avec le fédéral pour maintenir ces points d'impôt en sus de ceux qui s'appliqueront normalement à "l'opting out" maintenant devenu véritable, ou s'il a l'intention d'en faire bénéficier directement les contribuables québécois?

M. Parizeau: Je pense, M. le Président, que le problème se présente d'une façon un peu différente. Ces 16 points — parce que c'est 16 points qui nous restent, après les 12,5 points — ces 16 points ont toujours été, en un certain sens, je m'excuse du jargon, des faux points, en ce sens que, quand leur rendement montait, la contribution financière du gouvernement fédéral tombait en conséquence.

Nous avons déjà donné avis au gouvernement fédéral que nous préférerions affecter ces 16 points à la contribution financière, exclusivement à la contribution financière que le gouvernement fédéral entend offrir aux provinces pour les trois grands programmes de l'assurance-santé, l'assurance-hospitalisation et le postsecondaire, de façon que, là encore, si vous me passez l'expression, on transforme ces faux points en vrais points, si bien que l'augmentation de leur rendement nous resterait.

II est loin d'être évident que le gouvernement fédéral doit satisfaire à cette demande, mais dans le document que j'ai présenté à la conférence des ministres des Finances, je l'avais explicitement demandé. Maintenant on sait qu'à Ottawa ce qu'on demande n'est pas nécessairement accordé.

M. Garneau: Je pense que le ministre des Finances va admettre avec moi — on ne peut blâmer personne d'essayer et là-dessus je ne peux pas le blâmer, j'ai fait la même chose dans le passé — que maintenant que les 12,5 points et les autres 50% seront payés par des transferts financiers, il apparaît pour le moins réaliste de penser que la demande telle qu'elle a été formulée a plus de chance d'être rejetée qu'acceptée, compte tenu du fait qu'il y aurait là une injustice, face au rendement, à moins que les corrections se fassent sur les autres paiements du transfert financier, il y aurait une injustice face aux autres provinces. Dans l'hypothèse où cette demande du ministre ne serait pas acceptée, est-ce qu'il a l'intention, quand même, de demander et de conserver ces points et de les appliquer en contrepartie des paiements de péréquation ou d'autres paiements qui sont effectués en vertu du programme canadien d'assistance publique?

M. Parizeau: Oui. Oui, M. le Président.

M. Garneau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances a compris rapidement qu'il y avait là des avantages marqués sur le plan des revenus pour la province, étant donné que le rendement du point d'impôt fédéral, le rendement du point d'impôt provincial, compte tenu de notre structure fiscale différente, est à l'avantage du ministre des Finances plus qu'à celui des contribuables? Alors, je comprends qu'il a l'intention de continuer de bénéficier de cet avantage, comme ministre des Finances.

M. Parizeau: Quant à savoir si, comme ministre des Finances, comme le dit le député de Jean-Talon, j'en profiterai et garderai cet avantage, je pense que le premier budget du gouvernement, c'est-à-dire au printemps, le révélera davantage.

M. Garneau: Dans la mesure où les points d'impôt qui ne sont pas retournés, cet avantage, peu importe la structure, à moins qu'il ramène toute la structure d'impôt au niveau du rendement et du taux de progression de celle du fédéral...

Evidemment, il y aura toujours un avantage pour le trésor public de procéder comme il le suggère, plutôt que de procéder par la remise aux contribuables sur une base directe. On pourra revenir là-dessus.

Est-ce que je comprends, par la réponse du ministre des Finances également, qu'il n'a pas l'intention de modifier les lois fiscales ou de proposer des modifications aux lois fiscales avant le prochain budget, pour tenir compte des ententes qui viennent d'avoir lieu ou de la décision qui a été prise par le gouvernement fédéral? Ce serait peut-être plus juste, en regard du financement des programmes à frais partagés.

Je reprends ma question différemment. Si la session reprenait, par exemple, le 15 ou le 20 janvier et que son discours sur le budget était quelque part à la mi-avril, il ne présenterait pas de modifications ficales pour répondre aux ententes ou aux décisions du gouvernement fédéral avant, quand même, son discours sur le budget, lequel apporterait des amendements rétroactifs au 1er janvier. Est-ce que je comprends bien?

M. Parizeau: J'aurai à faire une déclaration ministérielle au début de la semaine prochaine quant à certaines modifications d'ordre technique. Mais, quant à la question de fond que vous posez, il me semble beaucoup trop tôt pour y répondre. Advenant ce qui serait proposé par le gouvernement fédéral, advenant la nouvelle loi qui serait déposée à Ottawa, s'il y a certains ajustements à faire, il faudra bien sûr les faire.

Il reste, néanmoins, que les modifications principales quant au régime d'impôt, si tant est qu'il y en ait et qu'il y en ait de substantielles, à moins d'y être forcés, autrement passeront dans le prochain budget.

M. Garneau: Dans le programme d'emprunt le ministre a indiqué un niveau de revenus, un niveau de dépenses; je comprends qu'il escompte des crédits périmés de tout près de $350 millions. J'ai lu dans les journaux, récemment, que le Conseil du trésor avait donné des directives de coupures au niveau de plusieurs travaux, de plusieurs projets qui étaient sur les planches à dessin. J'espère qu'il pourra atteindre cet objectif de $350 millions, malgré les inconvénients que cela pourrait créer à d'autres chapitres.

Je voudrais savoir, dans son programme d'emprunt de $1,331 milliard, s'il entend aller sur les marchés financiers étrangers ou s'il pense pouvoir compléter son programme d'emprunt uniquement sur les marchés canadiens.

M. Parizeau: Cela ne me paraît pas être le genre de question à laquelle on répond à l'avance de façon très spécifique. Il va de soi que le programme d'emprunt du gouvernement, d'ici la fin de l'année, va essayer de s'appuyer essentiellement sur les marchés que le Québec a toujours connus. Il y en a d'ici, bien sûr, et il y en a à l'étranger aussi. Quant à savoir quelle forme cela prendra et à quel moment cela va tomber, là cela me paraît être vraiment tout à fait prématuré d'y répondre. Mais, il n'y a pas de raison particulière pour laquelle on considère qu'un marché est en soi préférable à un autre. On suivra les conditions à la fois sur le marché canadien, sur le marché américain et bien sûr, pourquoi pas, sur les marchés européens aussi.

M. Garneau: M. le ministre...

M. Roy: Je m'excuse, M. le Président, j'aimerais demander au ministre des Finances s'il a l'in-

tention de faire appel davantage à l'épargne québécoise en utilisant plus qu'une émission d'obligations vendues au public québécois, pour financer la province à l'avenir. On se rappellera, au cours des dernières années, qu'il n'y a eu qu'une campagne annuelle pour solliciter l'épargne québécoise dans le but de financer le gouvernement de la province. Je voudrais savoir du nouveau ministre des Finances si au cours du prochain budget il a l'intention d'aller davantage de ce côté pour éviter, évidemment, la servitude qui peut découler de trop d'emprunts qui peuvent être faits en dehors du territoire.

M. Parizeau: Je pense que c'est une question qui est importante et qui dépasse, d'ailleurs, le seul fait d'émettre des obligations d'épargne. Parce que c'est bien à cela, si je comprends bien, que le député de Beauce-Sud pensait.

Pour une province qui est encore une province, s'appuyer fortement sur des obligations d'épargne est toujours dangereux, simplement parce que le gouvernement de la province en question n'a pas accès à une banque centrale au cas où il y aurait des remboursements accélérés. La Colombie-Britannique a déjà très bien vu le danger, il y a quelques années.

Il est clair que le gouvernement de Québec, lui, pour éviter des réductions radicales ou des remboursements importants d'obligations d'épargne, a dû périodiquement, depuis quelques années, remonter ses taux d'intérêt pour faire en sorte que les gens ne s'amènent pas aux banques pour obtenir des remboursements chaque fois que les taux d'intérêt à court terme montent assez rapidement.

Si on veut faire appel au public, pour drainer davantage l'épargne du Québec, il ne faut pas le faire seulement par le truchement d'obligations d'épargne. Il y a d'autres véhicules à trouver. Il est clair que je pense qu'il faut essayer de les trouver. Il faut être capable d'offrir au public québécois non pas un titre comme l'obligation d'épargne, mais une série de titres, tout un éventail. Quant à l'objectif, je ne peux pas être plus d'accord... Maintenant, quant aux moyens, c'est une autre paire de manches.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Lotbinière.

M. Biron: Je veux demander au ministre des Finances s'il projette d'intervenir directement pour avoir des prêts plus substantiels de la part de la Caisse de dépôt.

M. Parizeau: La Caisse de dépôt a été créée, à l'origine, pour pouvoir satisfaire plusieurs objectifs à la fois: financer le gouvernement, l'Hydro-Québec, enfin des corps publics de niveau supérieur, si on peut dire; financer les municipalités, les commissions scolaires, les hôpitaux, les CEGEP, les universités en deuxième lieu, et, troisièmement, financer le secteur privé, soit sous forme hypothécaire, soit sous forme d'actions et d'obligations. Depuis que la Caisse de dépôt est créée, elle a, sur ces trois plans, joué un rôle important.

Je sais fort bien qu'il y a des pressions considérables pour essayer de forcer la Caisse de dépôt à orienter presque exclusivement les sommes qu'elle obtient vers le financement du gouvernement de Québec. Cela me paraîtrait abusif d'aller jusque-là, pour la raison que le rôle joué par la Caisse de dépôt non pas seulement pour le financement des entreprises d'une assez grande taille, mais même pour le financement d'entreprises moyennes est un rôle important au Québec, et, à mon sens, on aurait tort de le faire disparaître.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Est-ce que le ministre des Finances pourrait indiquer qui, dans le gouvernement, fait des pressions pour que l'ensemble des fonds soit orienté vers l'Etat uniquement, parce qu'il vient de faire référence à des pressions qui s'exercent sur la Caisse de dépôt?

M. Parizeau: Non, M. le Président, pas sur la Caisse de dépôt, sur moi. Cela ne vient pas du gouvernement. Cela vient de toute une série de gens de l'extérieur du gouvernement qui disent: Au fond, la façon simple pour le gouvernement d'obtenir davantage d'argent, c'est de faire en sorte que tous les fonds de la Caisse de dépôt aillent au gouvernement, ce qui, soit dit en passant, pour les âmes simples, est une façon facile de conclure.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Lotbinière.

M. Garneau: J'aimerais entendre le ministre des Finances...

M. Biron: Est-ce que le...

M. Garneau: Sur le même sujet?

M. Biron: Oui.

M. Garneau: D'accord. Je reviendrai après.

M. Biron: Est-ce que le ministre des Finances peut quand même nous donner une garantie morale que le gouvernement n'interviendra pas directement à la Caisse de dépôt pour faire des placements exclusivement au gouvernement du Québec?

M. Parizeau: Le président-directeur général de la Caisse de dépôt a, dans nos lois, un statut juridique qui s'apparente, à bien des égards, au statut du gouverneur de la Banque du Canada quant aux protections dont il peut disposer. Il y aurait, à mon sens, quelque chose de déshonorant pour un ministre des Finances d'essayer de tordre les bras, ou non seulement de rompre la lettre de la loi, ce qui n'est pas possible, mais même d'essayer d'en enfreindre l'esprit.

Nous avons, dans nos lois, donné un statut au directeur de la Caisse de dépôt. Je pense qu'il est parfaitement normal qu'on respecte cette loi.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Jean-Talon.

M. Garneau: M. le Président, je suis bien heureux d'entendre le ministre des Finances prendre une telle position, car j'ai connu ce genre de pressions. Je les avais surtout de la part du critique financier du Parti québécois lorsque nous étudiions les crédits du ministère des Finances dans les années passées. Je suis bien content que le ministre des Finances actuel confirme la position qui a toujours été maintenue sous divers gouvernements par les ministres des Finances, c'est-à-dire de ne pas s'ingérer dans les décisions que prend la Caisse de dépôt à l'intérieur de la loi qu'administre le conseil d'administration.

Tout à l'heure, le député de Beauce-Sud, je crois, a posé des questions sur les obligations d'épargne. Je voudrais demander au ministre des Finances quel est le montant d'obligations d'épargne — je lui ai donné avis de la question — qui était en circulation, disons aujourd'hui ou hier, la date la plus récente. D'habitude, on a des rapports presque quotidiens ou hebdomadaires là-dessus.

M. Parizeau: En date d'aujourd'hui, le montant d'obligations d'épargne du Québec en circulation est de $725 millions. Je remercie le député de Jean-Talon de m'avoir donné préavis de sa question.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Le ministre des Finances pourrait-il indiquer à cette Chambre comment il se fait qu'il y ait eu, depuis quelques mois pour tout près de $100 millions d'obligations d'épargne de rachetées par les Québécois, alors qu'il ne me paraît pas qu'il y ait eu de variation importante à la hausse des taux d'intérêt? Au contraire, les obligations d'épargne me paraissent être actuellement un placement extrêmement rentable, avec un taux d'intérêt important. Je m'aperçois que, depuis le 30 septembre, il y en a quand même pour tout près de $100 millions qui ont été rachetées.

M. Roy: Est-il exact qu'il y a pour $100 millions de moins?

M. Parizeau: Je pense qu'il y a deux phénomènes ici qui jouent. Il me semble un peu amusant, si je peux me le permettre, que le député de Jean-Talon établisse le montant à $100 millions, parce qu'il y a deux phases. Il y a une phase à l'automne où, en raison d'autres sollicitations pour les souscriptions d'obligations d'épargne, il y a toujours, comme il le sait, passablement de remboursements d'obligations d'épargne du Québec. Il y a ensuite une deuxième phase qui suit l'élection du 15 novembre, pour toutes espèces de rai- sons qui tiennent à des facteurs psychologiques dont le premier ministre parlait ce matin. Il y a eu une liquidation totale de $50,3 millions exactement, depuis le 15 novembre.

Au cours de la première quinzaine, cela a donné $29,9 millions de liquidés. La seconde quinzaine, c'est-à-dire du 1er au 16 décembre, $19 millions et, aujourd'hui alors que nous commençons une autre période, il y avait $1 million. C'est-à-dire que l'excitation allait retomber un peu. Les facteurs psychologiques dont on parlait tout à l'heure s'atténuent, enfin jusqu'à maintenant.

M. Garneau: M. le Président, j'ai indiqué $100 millions parce que cette question m'a été posée à l'occasion de ma conférence de presse, lorsque j'ai quitté le ministère des Finances. Au moment où la période électorale a commencé, c'est-à-dire au moment où les sondages d'opinion ont commencé à indiquer une forte tendance vers la thèse que prône le Parti québécois, il y avait à ce moment pour $812 millions d'obligations d'épargne en circulation. Vous m'indiquez aujourd'hui qu'il y en a pour $725 millions. C'est pourquoi je disais qu'il y en avait pour tout près de $100 millions qui ont été rachetées au cours de cette période.

Le ministre des Finances s'est référé à des tendances du passé. Evidemment, s'il fouille d'un peu plus près, il va se rendre compte que les pourcentages de rachat, comparativement aux années passées, même si on tient compte des montants, est plus élevé. Lorsque j'ai quitté le ministère, durant la période qui a précédé immédiatement l'élection, nous étions déjà rendus à 33% de plus de rachat que par les années passées. Mais je ne veux pas entrer dans les détails, parce que je trouve que plus on en parle, plus on donne crédit à cette forme d'insécurité qui existe.

Le ministre des Finances pourrait-il dire s'il a prévu d'autres emprunts auprès de la Caisse de dépôt avant le 31 décembre cette année? Celui de $75 millions a été conclu, si je comprends bien. Prévoit-il en faire d'autres avant la fin de l'exercice financier de la caisse qui est le 31 décembre?

M. Parizeau: Probablement.

M. Garneau: Le ministre parle d'exploiter tous les marchés financiers, pourrait-il indiquer à cette Chambre si la province, le Conseil exécutif a autorisé le dépôt ou la demande d'un prospectus auprès de la Security and Exchange Commission pour un emprunt sur le marché américain dans les prochains mois? D'habitude on le fait toujours avec trois ou quatre semaines d'avance. Est-ce qu'un geste de cette nature a été posé à ce jour?

M. Parizeau: Pour le gouvernement de Québec? Non.

M. Garneau: Pour l'Hydro? M. Parizeau: Non.

M. Roy: M. le Président, on a beaucoup parlé de la Caisse de dépôt tout à l'heure et le ministre des Finances nous a dit également que le gouvernement fédéral, quand on a fait une comparaison tout à l'heure, lorsqu'il faisait appel à des obligations d'épargne du Canada pouvait se servir, évidemment, de la banque centrale comme outil puisqu'elle agit comme agent financier du gouvernement, cela devient plus facile, et que le Québec ne disposait pas d'un tel outil.

J'aimerais demander à l'honorable ministre des Finances si on songe éventuellement, puisque nous sommes encore une province, du moins, pour un certain temps, à modifier le statut de la Caisse de dépôt et de placement de façon — je comprends que ce n'est pas une banque, qu'elle n'a pas les pouvoirs d'une banque centrale — qu'elle puisse jouer en partie ce rôle d'agent financier pour le gouvernement du Québec.

Je me réfère entre autres, à un exemple, c'est qu'au moment où nous sommes arrivés ici, à l'Assemblée nationale, en 1970, on se rappellera, qu'à ce moment, le gouvernement du Québec, pour transiger avec la Caisse de dépôt, passait par des agents financiers, par des courtiers. Evidemment, par la suite, à la suite de plusieurs remarques et demandes qui ont été faites ici, à l'Assemblée nationale, le gouvernement a décidé de transiger directement avec la Caisse de dépôt, ce qui a permis, évidemment, d'économiser les sommes d'argent et qui a évité de payer des commissions inutiles.

Je voudrais bien savoir, à ce moment-ci, si, au niveau de la Caisse de dépôt, étant donné ses structures actuelles et étant donné la loi qui la régit, le nouveau gouvernement songe à modifier son statut de façon à lui faire jouer un rôle plus grand ou lui permettre de servir, du moins en partie, d'agent financier pour le gouvernement de la province.

Le Président (M. Cardinal): Le ministre des Finances.

M. Parizeau: Avant de répondre au député de Beauce-Sud, je veux m'excuser auprès du député de Jean-Talon au sujet d'une réponse que je lui ai donnée. Il n'y a pas de demande auprès de la Security and Exchange Commission pour les emprunts directs de Québec ni pour l'Hydro, à l'heure actuelle, mais bien sûr, il y a l'emprunt de SIDBEC qui est garanti.

Quant à la question du député de Beauce-Sud, elle me fait un plaisir immense puisque, depuis plusieurs années, j'ai eu l'occasion d'intervenir justement sur la façon dont les rapports entre le gouvernement, d'une part, la caisse, d'autre part, et certains des groupes financiers canadiens étaient menés, organisés et structurés. Il faisait allusion aux pressions qui ont été faites à l'intérieur de cette Chambre pour amener des modifications dans la façon dont ces trois pivots sont structurés. Je l'assure qu'en dehors de cette Chambre, il y avait aussi passablement de pression, si bien qu'il va falloir examiner le rôle que la Caisse de dépôt peut jouer, j'allais dire en ligne directe avec le gouvernement, et par rapport aux milieux financiers, d'autre part. Il s'agit cependant de mécanismes qui sont assez délicats et dans lesquels il faut faire attention pour ne pas lancer des marteaux. J'ai l'intention d'en discuter avec la direction de la Caisse de dépôt et d'en discuter, d'ailleurs, avec les représentants des milieux financiers de façon que le gouvernement de Québec puisse tirer de la Caisse de dépôt, qui après tout a été faite pour cela, le maximum d'avantages possibles sur le plan des interventions sur les marchés financiers, ce qui ne veut pas dire du tout que je contredis la réponse que je donnais tout à l'heure.

Il ne s'agit pas de tirer des fonds de la Caisse de dépôt, il s'agit de faire en sorte que cet instrument qui existe serve le mieux possible les intérêts du Québec. Elle les a, je pense, très bien servis jusqu'à maintenant. N'importe quoi est perfectible. L'orientation que le député de Beauce-Sud donnait tout à l'heure, elle m'est trop familière et trop chère pour que j'aie des discussions avec lui là-dessus.

Le Président (M. Cardinal): Le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, pour l'information de beaucoup de nouveaux députés qui sont ici à l'Assemblée nationale, est-ce que le ministre des Finances pourrait nous informer si les taux d'intérêt payés par la province de Québec sont comparables avec les taux d'intérêt payés par d'autres provinces dans le pays? Sinon, est-ce qu'il pourrait trouver ces documents au cours de [a semaine prochaine?

M. Parizeau: II est clair que, depuis l'élection du 15 novembre, l'écart s'est agrandi entre le taux de rendement sur les obligations du Québec et ces obligations qui servent toujours plus ou moins de normes de référence au Canada pour l'ensemble des provinces que sont les obligations du gouvernement de l'Ontario. L'écart existant n'est cependant pas, comment dire, ahurissant, en ce sens que, quand on voit des écarts de 60 points de base, c'est-à-dire $0.60, si vous voulez, par $100, je m'excuse, plutôt soixante centièmes pour cent, lorsque cela atteint des niveaux comme ceux-là, il faut tout de même se souvenir qu'on a connu des époques au Québec où l'écart atteignait au-delà de 100 points. Il est évident que les écarts, à l'heure actuelle, se sont accrus. Je pense que, dans les semaines qui viennent, on va assister à une sorte de stabilisation. Là encore, il y a des mouvements qui, pour une part, sont psychologiques, qui ne sont pas particulièrement surprenants, qu'il fallait d'ailleurs anticiper. Je vous avouerai que, si une chose est frappante là-dedans, c'est que les milieux financiers dont on s'attendait, dans certains milieux, qu'ils paniquent, n'ont pas paniqué. Evidemment, il y a eu des reculs, des tassements, mais les écarts, encore une

fois, de taux de rendement entre les obligations du Québec et celles de l'Ontario, n'ont pas atteint les écarts maximaux qu'on a connus dans le passé.

M. Garneau: M. le Président, est-ce que l'indication que vient de donner le ministre des Finances, est-ce que c'est un lapsus ou s'il vient de nous dire indirectement que l'écart entre le Québec et l'Ontario pour les mêmes fonds est de 60 points de base? Est-ce que c'est la situation présentement?

M. Parizeau: Je donnais un exemple.

M. Garneau: Quelle est la situation précise? J'ai des chiffres antérieurs, mais je n'ai pas les rapports précis. On les reçoit d'habitude avec une semaine de retard.

M. Parizeau: M. le Président, je ne voudrais pas ici... Si la chose intéresse, je les donnerai en date d'aujourd'hui, au début de la semaine prochaine.

M. Garneau: Je l'apprécierais, M. le Président. D'accord. Ceux en date du 26 novembre, évidemment, m'apparaissent trop éloignés. C'est le seul rapport que j'ai. Le ministre des Finances a indiqué tout à l'heure qu'il voulait probablement revenir auprès de la Caisse de dépôt avant la fin de l'exercice financier de la caisse. Est-ce qu'il pourrait nous dire si le gouvernement du Québec a fait jusqu'à maintenant ou se propose de faire avant la fin de l'exercice financier des emprunts à court terme auprès de l'Hydro-Québec?

M. Parizeau: Rien n'est prévu à ce sujet pour le moment.

M. Garneau: II n'y en a pas eu de faits depuis son assermentation comme ministre des Finances.

M. Parizeau: Ah non!

M. Garneau: M. le Président, le ministre des Finances pourrait-il nous dire quelle est la marge de crédits, si elle est engagée... quel est le pourcentage de marge de crédits autorisés qui serait actuellement engagée, si tel est le cas?

M. Parizeau: Je ne pourrais pas dire, en date d'aujourd'hui, quelle proportion de la marge de crédits est engagée. Je vais prendre aussi préavis de cette question.

M. Garneau: Vous pourriez nous le fournir lundi, j'imagine, à la reprise des travaux.

M. Parizeau: Ce ne sera peut-être pas fourni par moi lundi, mais je demanderai à un de mes collègues de fournir le renseignement.

Le Président (M. Cardinal): Puis-je rappeler au député de Jean-Talon et au ministre des Finances qu'on ne connaît pas encore l'ordre de la

Chambre de lundi? Je comprends que vous demandez que le plus tôt possible une réponse soit accordée.

M. Garneau: Je tenais pour acquis que nous allions étudier les crédits, mais si tel n'est pas le cas, ce sera mardi.

Le Président (M. Cardinal): Je n'ai rien mentionné. Je disais simplement que vous teniez une chose pour acquise et je ne tiens rien pour acquis. Tout est à la discrétion de cette Assemblée.

M. Garneau: M. le Président, je n'ai pas d'autres questions à poser pour le moment.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Une dernière question, encore pour l'information des nouveaux députés ici, à cette Assemblée. Quant aux sommes d'argent qui entrent chaque jour à la Caisse de dépôt, est-ce que le ministre des Finances veut nous en informer, en moyenne, ou à la fin de l'année?

M. Parizeau: Monsieur, je ne comprends pas. Vous voulez dire le montant global?

M. Biron: Le montant global de la Caisse de dépôt, les recettes de la Caisse de dépôt pour un an.

M. Parizeau: Je n'ai pas vérifié précisément, mais c'est de l'ordre actuellement de $600 millions par année. Encore, je prendrai préavis, j'irai regarder le montant et je vous le donnerai. Prenez ce que je viens de vous dire pour une très juste approximation. Je n'ai pas vérifié depuis déjà quelque temps le montant qui entre annuellement, mais c'est de l'ordre de plusieurs centaines de millions, aux environs de $600 millions.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, le ministre nous a parlé du déficit tout à l'heure. Il nous a dit que c'était un déficit de $937 millions, soit le plus gros déficit administratif budgétaire que le Québec ait jamais connu (l'héritage de l'ancien gouvernement).

J'aimerais savoir de l'honorable ministre des Finances de quelles sommes ce déficit dépasse le montant des immobilisations qui sont prévues au budget. Parce qu'on sait très bien... je me souviens des discours de l'ex-ministre des Finances et de la tradition qui veut que le montant du déficit de la province ne doit pas dépasser le montant des immobilisations qui sont prévues dans les budgets de chaque année de façon à ne pas financer à long terme des dépenses courantes. Il semble que, cette année, le déficit dépasse largement le montant des immobilisations.

J'aimerais savoir dans quelle proportion, si ce chiffre est disponible. Si ce chiffre n'est pas disponible, M. le Président, je n'en tiens pas rigueur, car je doute qu'on puisse adopter tous ces crédits d'ici cinq heures; on pourra peut-être prendre note de ma question et y répondre à une prochaine séance.

M. Parizeau: C'est de l'ordre de $625 millions.

M. Roy: $625 millions, ce sont les immobilisations qui sont prévues?

M. Parizeau: C'est cela.

M. Roy: Ce qui veut dire que le déficit net, le déficit budgétaire et le déficit administratif, est de l'ordre de $312 millions environ. C'est cela si j'ai bien compris? Selon ma façon d'interpréter le déficit budgétaire, le déficit administratif, c'est le déficit en déduisant les immobilisations qu'on veut financer à long terme, habituellement. Le déficit administratif comme tel serait de l'ordre de $312 millions?

M. Parizeau: C'est ce qu'on appelait autrefois le déficit aux comptes ordinaires, c'est-à-dire la différence entre les revenus et les dépenses courantes.

Le Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Dans ce que le ministre des Finances vient d'indiquer, est-ce qu'il incorpore les subventions aux réseaux qui sont des subventions de nature capitale ou s'il donne uniquement les chiffres d'investissements directs des ministères, investissements effectués par eux-mêmes?

M. Parizeau: Les investissements directs seulement.

M. Garneau: Est-ce que le ministre des Finances pourrait indiquer quel est l'ordre de grandeur— j'imagine qu'il n'a probablement pas beaucoup changé; s'il a changé, son conseiller pourrait le dire — du montant prévu au niveau des dépenses capitales totales, investissements directs du gouvernement et de ses ministères et les subventions au réseau éducatif et au réseau social, pour fins de dépenses capitales? Quel serait le montant total?

Le Président: Le ministre des Finances.

M. Parizeau: On me dit que les subventions pour les constructions dans les réseaux seraient de l'ordre de $200 millions. Il resterait donc un déficit aux comptes ordinaires, même en incluant des subventions d'une centaine de millions de dollars.

Le Président: Mesdames et messieurs, si vous me le permettez, est-ce que je puis demander aux membres de cette commission plénière s'ils ont d'autres questions d'ordre général à poser?

M. Roy: C'est tout, M. le Président.

Le Président: Alors, merci. Mesdames, messieurs, la commission suspend ses travaux jusqu'à l'heure que suggérera le leader parlementaire du gouvernement et je ferai rapport au président dans quelques secondes. Merci, mesdames, messieurs.

M. Burns: ... de sortir.

M. Cardinal (président de la commission plénière): M. le Président, la commission plénière, n'ayant pas terminé l'étude des crédits supplémentaires, demande la permission de siéger de nouveau.

Le Président: Quand siégera-t-elle? M. Burns: A la prochaine séance.

Le Président: A la prochaine séance. L'Assemblée ajourne ses travaux à lundi.

Travaux parlementaires

M. Lavoie: S'il vous plaît, M. le Président, pourrais-je demander au leader du gouvernement quel serait l'ordre prévu des travaux lundi?

M. Burns: Quand vous me direz quand le budget supplémentaire va être adopté, je pourrai peut-être vous donner de meilleures indications. Ce n'est pas une menace que je fais. Il m'est difficile de le dire actuellement, à cause du fait que le ministre des Finances doit être nécessairement, dans mon esprit, libéré de l'étude des crédits supplémentaires pour que nous puissions commencer à examiner les projets de loi qui le concernent. Ce sont des projets de loi à caractère technique qui sont déjà déférés à une commission parlementaire; je pense, par exemple, à la Loi modifiant la Loi sur les impôts.

Mon intention serait d'abord et avant tout de terminer les crédits supplémentaires. Je suis à la disposition du leader de l'Opposition et des représentants des autres partis en Chambre, pour, dès lundi, à l'heure du lunch, vous donner un plan qui pourrait être suggéré. Je vous indique tout de suite, cependant, qu'après entente avec le premier ministre j'appellerai des mardi la Loi de l'exécutif, à cause du besoin d'une plus grande disponibilité du premier ministre. Après entente avec lui, j'ai prévu à toutes fins pratiques pour mardi cette loi.

Le ministre des Finances m'indique, d'autre part, que je devrai peut-être réviser la situation concernant l'examen du budget lundi.

M. le Président, à votre question, tout à l'heure, je dirai: Prochaine séance ou séances subséquentes.

M. Lavoie: ...lundi?

M. Burns: Apparemment, le ministre des Finances ne serait pas disponible lundi, ce qui voudrait dire qu'on fera de la législation. Comme j'avais prévu ça pour lundi, et comme je pensais

même qu'on terminerait avant cinq heures aujourd'hui, tout est à réviser, et je vous indiquerai, dès l'heure du lunch lundi, les projets de loi. Je peux vous indiquer déjà que les projets de loi au nom du ministre des Affaires municipales seront fort probablement les premiers à être appelés lundi.

M. Lavoie: Est-ce qu'il y a des commissions de convoquées pour lundi, d'une manière définitive?

M. Burns: Non, il n'y en a pas.

M. Lavoie: Pas encore.

M. Burns: II n'y en a pas encore.

M. Lavoie: Vous ne pouvez même pas nous dire quelle commission siégera lundi?

M. Burns: ... je ne pouvais vraiment pas planifier tant que le discours inaugural n'était pas terminé et tant que l'examen du budget n'est pas terminé.

M. Lavoie: M. le Président, je pense bien qu'il n'y a aucune insinuation de la part du leader du gouvernement... D'ailleurs, ce n'est pas notre intention— je parle pour l'Opposition officielle — d'abuser de l'étude des crédits, mais il faut considérer que nous avions droit à huit heures et que nous avons commencé il y a à peine une heure environ.

M. Burns: Je ne vous blâme pas du tout.

M. Lavoie: Bon! En ce qui nous concerne, l'Opposition officielle, si nous avions encore deux heures d'étude de crédits, je pense bien que ce serait suffisant pour approuver le budget supplémentaire. Environ une couple d'heures.

Mais, par contre, nous aimerions bien savoir quels sont les projets de loi prioritaires que nous allons étudier. Il y a des projets de loi qui sont déférés à des commissions élues, actuellement. Je pense que ce serait possible, peut-être, de déterminer aujourd'hui, non? s'il y a des commissions qui vont siéger lundi pendant que la Chambre va siéger, et lesquelles de ces commissions.

M. Burns: Lesquelles? Je ne peux pas vous le dire. Ce sera une de celles qui sont actuellement déférées, et probablement pas — cela va déjà vous donner une autre indication — celle qui concerne le ministre des Finances... Où est le feuilleton?

M. Lavoie: ... aux Affaires municipales et une...

M. Burns: II reste les Affaires municipales, et il y aurait probablement, peut-être, une deuxième lecture du projet de loi concernant les loyers.

M. Lavoie: Oui...

M. Burns: Le projet de loi... M. Lavoie: Sur la conciliation.

M. Burns: C'est cela. En fait, je vous donne deux indications. La première est que, de façon ferme, j'ai l'intention d'appeler, mardi, le projet de loi au nom du premier ministre, la Loi de l'Exécutif. Lundi, c'est cela qu'il reste à déterminer à cause de la disponibilité ou de la non-disponibilité des ministres qui ont à défendre les projets de loi.

Je signale au leader de l'Opposition, qui semble atterré par le fait que je ne sois pas capable actuellement de lui donner de façon précise le menu législatif de lundi, que c'est à sa demande que j'ai évité d'entrer dans de la législation au lieu du budget supplémentaire. J'aurais pu appeler de la législation, mais il m'a à bon droit d'ailleurs — je ne critique pas sa demande — fait valoir que certains points techniques sur le plan de la législation restaient à être vérifiés chez vous. Je vous comprends, parce que j'ai fait cela pendant six ans de temps, demander au leader du gouvernement de retarder l'étude de tel ou tel projet.

En tout cas, pour le moment, je vous demanderais d'être prêt, si on veut finir la semaine prochaine — c'est peut-être cela la recommandation que je pourrais vous faire — sur tous les projets de loi qui sont au feuilleton actuellement.

M. Bellemare: M. le Président, doit-on comprendre qu'il sera d'abord question du bill 47 du ministre des Affaires municipales, où il est question de mutations immobilières?

M. Burns: Je sais que le ministre des Affaires municipales m'a indiqué qu'il était prêt à présenter n'importe quel de ses projets de loi au moment où je le lui indiquerais.

M. Bellemare: Quant au projet de loi concernant la ville de Hull, le bill 85, je ne vois pas beaucoup de difficultés. Le projet de loi 78, celui qui prolonge et modifie la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires, c'est encore, je pense...

M. Burns: Je peux vous dire que lundi, à l'heure du lunch, je vous le dirai. Nous ne siégeons qu'à 15 heures.

M. Bellemare: Votre présomption, c'est que ce sera d'abord...

M. Burns: Les projets de loi au nom du ministre des Affaires municipales.

M. Bellemare: Ce sont les projets de loi 47 et 78.

M. Burns: C'est cela.

M. Bellemare: Mais la loi de l'Exécutif en Chambre à 15 heures.

M. Burns: C'est votre recommandation.

M. Bellemare: Je ne le sais pas, vous venez de nous dire que c'est la loi de l'Exécutif.

Une Voix: Mardi.

M. Bellemare: Oui, mardi. D'accord, mardi.

Le Président: L'Assemblée ajourne ses travaux au lundi 20 décembre à quinze heures.

(Fin de la séance à 17 h 7)

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