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(Quinze heures six minutes)
M. Cardinal (vice-président): À l'ordre, mesdames
et messieurs!
Est-ce que je pourrais demander aux députés de regagner
leurs fauteuils s'il vous plaît?
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Lavoie: M. le Président, avez-vous des
dépôts de loi aujourd'hui?
M. Burns: Non, mais je suis prêt à faire une motion
non annoncée qui est faite en vertu de l'article 30; d'accord?
M. Lavoie: D'accord. On voudrait un peu plus de ministres en
Chambre, cela permettra l'arrivée des ministres.
M. Burns: M. le Président...
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
Motion pour faire siéger la Chambre le lundi 18
juillet
M. Burns: En vertu de l'article 30, 2e alinéa, je propose
que la Chambre se réunisse, lundi le 17, à compter de quinze
heures, selon l'horaire prévu pour le mardi et le jeudi.
Le Vice-Président: Cette motion est-elle
adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on a besoin d'un
consentement unanime?
Le Vice-Président: Non. Non... À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le député de
Beauce-Sud a bien...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Lavoie: Vote enregistré, M. le Président.
Le Vice-Président: Oui, je ne le sais pas. Que l'on
appelle les députés!
Vote sur la motion
Le Vice-Président: Avant de mettre aux voix la motion du
leader parlementaire du gouvernement, je lui demanderais de la relire pour
qu'il n'y ait aucune ambiguïté.
M. Burns: M. le Président, vous avez parfaitement raison
de me souligner cette chose-là. Je me suis rendu compte que lundi
prochain n'est pas le 17, mais bien le 18. Et, évidemment, comme, tout
le monde le sait, nous ne siégeons pas le dimanche, je vous demanderais
de bien lire ma motion pour faire siéger la Chambre à compter de
15 heures le lundi 18 juillet.
Le Vice-Président: Que ceux et celles qui sont en faveur
de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Burns, Mme Cuerrier, MM. Bédard, Laurin, Morin (Sauvé), Morin
(Louis-Hébert), Parizeau, Marois, Landry, Léonard, Tremblay,
Bérubé, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, MM. de Belleval, Joron,
Lessard, Proulx, Lazure, Léger, Tardif, Chevrette, Michaud, Marcoux,
Alfred, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Bertrand, Laplante,
Bisaillon, de Bellefeuille, Gendron, Mercier, Laberge, Lacoste, Ouellet,
Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau,
Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Gravel, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey,
Lalonde, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Larivière, Saindon,
Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron,
O'Gallagher, Ciaccia, Marchand, Gratton, Springate, Roy.
Le Vice-Président: Que ceux qui sont contre cette motion
veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Biron, Grenier, Fontaine,
Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois.
Le Vice-Président: Que ceux qui veulent s'abstenir
veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: Pour: 77 Contre: 7
Abstentions: 0
Le Vice-Président: Motion adoptée. Oui, M. le
leader parlementaire du gouvernement.
Dépôt de documents en
réponse
aux articles 19, 22 et 23
du feuilleton
M. Burns: M. le Président, hier, au cours de la
période où normalement le gouvernement répond à des
questions qui apparaissent au feuilleton, afin d'éviter des
problèmes de procédure, je n'ai pas insisté pour
déposer un certain nombre de réponses, mais peut-être que,
l'atmosphère étant meilleure aujourd'hui, je pourrais faire une
motion non annoncée pour que les articles 19), 22) et 23), qui
apparaissent au feuilleton d'hier, soient transformés en motion pour
dépôt de document. Si tel était le cas, avec le
consentement de la Chambre, je déposerais au dépôt de
documents les trois do-
cuments concernés qui visent les questions de M. Caron pour
l'article 19), de M. Raynauld pour l'article 22) et de M. Vaillancourt (Orford)
pour l'article 23).
Le Vice-Président: Ce consentement est-il
accordé?
M. le député de Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, pour un meilleur climat à
l'Assemblée nationale, je vais donner mon consentement aujourd'hui.
Le Vice-Président: Merci. M. le leader parlementaire du
gouvernement, voulez-vous procéder à vos dépôts?
M. Burns: M. le Président, je peux le faire
immédiatement avec le consentement de la Chambre.
M. Lavoie: On ne l'a pas encore accordé, mais on va
l'accorder.
Le Vice-Président: Je m'excuse, j'ai demandé si
c'était accordé.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Burns: M. le Président, à l'article 19), une
question de M. Caron qui est maintenant devenue une motion pour
dépôt de document. Le document est déposé par M.
Tremblay. Document déposé.
Le Vice-Président: Document reçu.
M. Burns: À l'article 22) devenu une motion pour
dépôt de document, c'est une question de M. Raynauld. Le document
est déposé par M. Morin (Louis-Hébert). Document
déposé.
Le Vice-Président: Document reçu.
M. Burns: À l'article 23), question de M. Vaillancourt
devenue une motion pour dépôt de document. Le document est
déposé par M. Lessard.
Le Vice-Président: Document volumineux reçu.
Nous sommes toujours aux motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles. Dépôt de
documents. M. le ministre des Finances.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Rapport du Vérificateur général
sur des contrats au parc olympique
M. Parizeau: M. le Président, permettez-moi, à
titre du président du Conseil du trésor, de déposer deux
exemplaires du rapport du Vérificateur général au Conseil
du trésor concernant l'examen de trois contrats afférents au parc
olympique de Montréal. Ce rapport porte la date du 11 juillet 1977.
Le Vice-Président: Document reçu.
Questions orales des députés.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Mémoires soumis à l'étude de la
Charte de la langue française
M. Lalonde: M. le Président, à la suite des
questions que j'ai posées hier au ministre de la Justice, j'aimerais,
cet après-midi, lui demander s'il peut nous donner l'assurance qu'aucun
de ses collaborateurs, tant à son cabinet qu'au ministère,
n'était au courant de la demande faite par des représentants de
la Sûreté du Québec au secrétariat des commissions
de leur remettre les mémoires relatifs à l'étude du projet
de loi no 1.
M. Bédard: Je puis vous donner cette assurance.
Le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.
M. Lalonde: Question additionnelle. Est-ce que le ministre a
consulté des représentants de la présidence, comme il
l'avait indiqué hier, et a-t-il des rapports à faire à
cette Chambre?
M. Bédard: J'ai effectivement communiqué avec la
présidence, en l'occurrence, le vice-président de
l'Assemblée nationale et je pense que s'il y a des choses
particulières à dire, cela revient, à ce moment-là,
à la présidence.
Le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais simplement...
M. Bédard: J'ai assuré la présidence, tel
que je l'avais fait hier, qu'il était évident que nous avions
pris des dispositions de manière que les directives émises par la
présidence de l'Assemblée nationale soient respectées
intégralement par la Sûreté du Québec.
Le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je ne sais pas si ma question
additionnelle devrait s'adresser à la présidence. Enfin, je ne
sais pas dans quelle mesure c'est permis par le règlement, la
présidence pourrait-elle nous indiquer quand elle serait en mesure de
faire rapport à cette Chambre à ce propos?
Le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, mesdames et messieurs les membres de cette
Assemblée, vous le savez, cela a été déclaré
publiquement, j'ai commencé, dès hier matin, une enquête
que j'ai appelée maison le terme est peut-être mal choisi
c'est-à-dire que j'ai convoqué à mon bureau
certaines personnes, en l'absence du président de l'Assemblée
nationale, pour, autant que possible, connaître les faits qui
s'étaient produits. Je puis assurer cette Chambre des faits suivants:
premièrement, seuls 62 mémoires ont été remis
à un représentant de la Sûreté du Québec, et
cela volontairement, sans saisie, sans procédures de pression, et ce
geste a été posé par un fonctionnaire. Comme je ne suis
pas ici pour juger un fonctionnaire, je ne désire pas mentionner le nom
de ce fonctionnaire que j'ai rencontré.
D'autre part, j'ai indiqué aussi formellement, et je le
répète devant cette Assemblée, que dès le retour de
M. le Président de l'Assemblée nationale, j'ai l'intention de lui
remettre un rapport formel sur les faits, informations et déclarations
que j'ai recueillis à ce sujet. J'indique, de plus, à cette
Assemblée, que les membres de cette Assemblée sont maîtres
des moyens qu'ils pourront, par la suite, utiliser et je me suis même
référé à l'article 81. Je pense que, pour le
moment, cela complète le tableau de cet incident qui est quand
même grave en soi pour les privilèges de cette Assemblée,
mais je suis disposé, dans la mesure du possible et dans
l'intérêt public, à répondre à d'autres
questions.
M. Ciaccia: Question additionnelle, M. le Président.
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: À la suite des questions du
député de Marguerite-Bourgeoys au ministre de la Justice. Le
ministre de la Justice se dissocie de l'action de la Sûreté du
Québec. Quand on lui a demandé s'il devait prendre des mesures
pour s'assurer qu'un tel événement n'arrive plus, il a dit qu'il
devait consulter le président de la commission, le président de
l'Assemblée nationale. Je sais que le président est autant
préoccupé...
Le Vice-Président: M. le député de
Mont-Royal, est-ce que vous pourriez en venir à une question, s'il vous
plaît?
M. Ciaccia: J'y viens. Est-ce que le ministre de la Justice peut
nous assurer, aujourd'hui, qu'il va donner les ordres immédiatement
à la Sûreté du Québec afin qu'elle remette les
mémoires qu'elle a pris, qu'elle les retourne à la commission
parlementaire, qu'elle ne s'occupe plus de l'examen des mémoires et
qu'elle cesse ces gestes d'intimidation envers les témoins qui ont
présenté des mémoires à la commission?
Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: Non, M. le Président, j'ai
indiqué, hier, que je ne cautionnais pas cette manière d'agir de
la Sûreté du Québec. Effectivement, j'ai dit qu'il fallait
qu'aucun geste ne soit posé, par qui que ce soit, qui soit de nature
à pouvoir mettre en danger les prérogatives de l'Assemblée
nationale. Également, j'ai dit qu'il était très important
que les citoyens qui veulent se faire entendre par le truchement de
mémoires, dans les commissions parlementaires, aient la conviction
qu'ils comparaissent bien devant une commission parlementaire et non pas devant
quelque autre organisme. Je peux vous dire, que, dès aujourd'hui, j'ai
communiqué avec le directeur du service de la Sûreté du
Québec étant donné l'absence du directeur de la
Sûreté du Québec pour lui demander que des faits de
cette nature ne se reproduisent pas au niveau de l'Assemblée nationale,
étant donné le danger qu'il peut y avoir d'atteindre à ses
prérogatives.
Maintenant, j'imagine que la présidence émettra certaines
directives et éclaircira cette zone grise que je mentionnais hier qui
consistait dans le fait que les mémoires avaient été remis
avant qu'ils ne soient présentés devant la commission
parlementaire. Tel que l'a dit M. le Président tout à l'heure,
les mémoires que la Sûreté du Québec a en main
présentement sont ceux qui, effectivement, ont été
entendus devant la commission parlementaire. Ce sont donc des documents publics
auxquels elle a accès comme n'importe qui.
Je pense que ce qui est important, c'est qu'une situation semblable ne
se renouvelle pas. Il ne faut quand même pas oublier, même si
certains journaux ont encore employé le mot "saisie", ont
qualifié cette démarche de la Sûreté de cette
façon, que cela a été une démarche, tel que je l'ai
dit, officielle. Après s'être identifiés, les membres de la
Sûreté sont allés tout simplement au secrétariat des
commissions, les ont demandés comme n'importe qui aurait pu le faire et
on leur a donné lesdits mémoires. Je crois qu'à partir de
ce moment, il ne faudrait pas charrier sur le reste.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Ma question n'était pas à savoir si cet
incident ne devrait pas se reproduire dans l'avenir, parce que ce n'est pas
à toutes les années, à tous les jours que nous allons
avoir un projet de loi no 101. Ma question était: Est-ce que le ministre
est prêt aujourd'hui de donner un ordre à la Sûreté
du Québec de remettre ces mémoires à l'Assemblée
nationale et à la commission parlementaire? Oui ou non?
M. Bédard: Ils sont inscrits, à l'heure actuelle,
ces mémoires, dans le journal des Débats et ils sont à la
disposition du public. Ce sont des documents publics.
M. Ciaccia: Répondez à ma question.
M. Bédard: Je vais vous dire une chose. Je n'ai pas cette
intention de demander d'une façon "symbolique" tel que le
qualifiait hier le député de Marguerite-Bourgeoys à
la Sûreté du Québec de remettre des documents qui sont
publics, à l'heure actuelle. Il y a un bout à charrier. Elle a en
main à l'heure actuelle des documents publics. J'ai bien dit hier que je
ne cautionnais pas cette manière d'agir. Mais entre déclarer cela
et charrier dans le sens de demander que la Sûreté remette des
documents qui sont publics à l'heure actuelle, je m'inscris en faux.
Il y a un bout à charrier sur un corps policier il y a
peut-être eu une erreur de démarche qui essaie de faire son
travail le plus honorablement possible.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre! J'ai donné la parole au
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: À la suite de votre réponse et avant
que des directives soient rendues par la présidence, j'aimerais savoir
s'il y aurait lieu c'est une suggestion que je vous fais que les
membres de cette Assemblée aient, par le biais d'une commission
parlementaire ou autrement, l'occasion de participer à un certain
débat. Je ne fais pas la suggestion que ce soit selon l'article 81 parce
que c'est possible que ce ne soit pas l'article indiqué, mais pour qu'on
ait l'occasion de contribuer à la préparation d'une telle
directive qui nous affecte; deuxièmement, que votre enquête porte
aussi sur les cas antérieurs. Il a été mentionné
que cela aurait pu arriver en rapport avec la loi 22; je ne pense pas que cela
cautionne le geste, le fait que ce soit arrivé en rapport avec la loi
22.
J'aimerais, M. le Président, sous forme de question, vous
demander de faire la lumière pour savoir si cela s'est aussi
passé comme cela dans le passé.
Le Vice-Président: À la première question,
j'ai mentionné tantôt, dans une réponse qui comprenait
trois volets, que je ferais tout d'abord rapport au président qui ne
revient au Québec que demain. À la deuxième question, si
on faisait enquête sur ce qui a pu se produire ou ce qui se serait
produit dans le passé, ce ne serait que du ouï-dire. Je ne sais ce
qui se passe dans cette Assemblée que depuis que j'y suis; ce qui se
passe en dehors de cette enceinte, je ne le connais pas.
Présentement pour faire un pas de plus on m'a
affirmé je ne dis pas que c'est un fait; M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, savant juriste, sait ce qu'est le
ouï-dire que cela se serait déjà produit dans le
passé.
M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): Une très courte question
additionnelle.
Pourquoi le ministre de la Justice aurait-il objection à demander
à la Sûreté du Québec de re- tourner les documents?
Est-ce parce qu'ils sont annotés ou quelque chose du genre? Y a-t-il une
raison d'État?
M. Bédard: J'ai déjà répondu à
cette question.
M. Levesque (Bonaventure): Pardon?
M. Bédard: J'ai déjà répondu à
cette question.
M. Levesque (Bonaventure): Je n'ai pas compris. Non, on n'a pas
répondu. Tout ce que le ministre... Le ministre a-t-il objection,
même s'il dit que ce sont des documents publics, je suis d'accord avec
lui, mais les documents qui sont présentement en la possession de la
Sûreté ne pourraient-ils pas être retournés là
d'où ils viennent, vu que le ministre dit qu'il se dissocie d'un tel
geste? J'imagine qu'il n'aurait pas objection à donner des instructions
pour clarifier la situation, à donner des instructions à la
Sûreté de retourner tous et chacun des documents qu'elle a ainsi,
dont elle s'est saisie, pour ne pas employer le mot, qu'elle a demandés,
qu'elle a obtenus, si vous voulez. Quelle objection le ministre de la Justice
a-t-il? Est-ce parce qu'ils sont annotés? Est-ce qu'il y a quelque
chose, est-ce qu'ils sont coupaillés, qu'est-ce qui s'est produit?
Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice. À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je prends note qu'enfin
le chef de l'Opposition et l'Opposition ont compris que c'étaient des
documents publics. Si l'Opposition désire continuer à charrier
sur ce point, elle a beau le faire, mais je répète ce que j'ai
dit tout à l'heure. Ce que vous demandez, cela équivaut pour moi
à charrier, parce qu'effectivement ce sont des documents publics qui
sont entre les mains de la Sûreté du Québec. Elle ne les a
pas obtenus sous de fausses représentations et je crois qu'il y a un
bout à essayer de dramatiser un comportement qui a été
adopté, que je n'ai pas cautionné, qui, de toute façon, a
été fait de bonne foi, par des gens qui essaient de faire
honorablement leur travail.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. Blank: Une question additionnelle.
M. Levesque (Bonaventure): C'est tout simplement en vue d'une
précision que...
Le Vice-Président: Me permettez-vous? À l'ordre,
s'il vous plaît! Comme il y a trois députés qui se sont
levés en même temps, je reconnais d'abord, comme il se doit, M. le
chef de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, tout ce que je
demande au ministre de la Justice, c'est simplement que l'on retourne ces
docu-
ments. Quelle objection a-t-il, même si on dit qu'ils sont
publics, dans le sens que le contenu était public, parce qu'il a
été livré devant la commission? Mais ce qui est
arrivé à ces documents, le traitement que l'on a donné
à ces documents pourrait peut-être devenir intéressant pour
le public, pour la commission et pour l'Assemblée nationale. Je demande
simplement, il me semble que ce n'est pas bien compliqué le
ministre se dissocie de cette opération que le ministre nous
donne l'assurance, qu'il donne l'assurance à l'Assemblée
nationale qu'il va donner des instructions de retourner ces documents, ceux
qu'elle a obtenus, la copie qui est la possession de la Sûreté
présentement. Est-ce que le ministre est prêt à faire cela,
il me semble, dans un contexte de transparence, pour renseigner
l'Assemblée nationale, pour contribuer à clore ce débat?
Pourquoi est-ce qu'il s'y refuse? A-t-il quelque chose à cacher?
Le Vice-Président: M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai absolument rien
à cacher. Tout simplement, j'ai répondu tout à l'heure. Je
considère que cette demande s'inscrit dans une attitude de charriage
qu'a adoptée l'Opposition à l'heure actuelle.
Le Vice-Président: À l'ordre! À l'ordre,
s'il vous plaît! Si vous permettez, vous savez qu'au bout de 45 minutes,
je clôturerai la période des questions. Je permets aujourd'hui
beaucoup de questions additionnelles sur ce sujet, puisque cette question
touche les privilèges des députés. Je ne voudrais pas
cependant que certains privilèges de députés soient
brimés par d'autres privilèges et qu'aucun membre des autres
partis ne puisse poser de questions. Toutes les questions posées
jusqu'à présent...
À l'ordre, M. le député de Laurier! Toutes les
questions, jusqu'à présent, ont été posées
par l'Opposition officielle. Cependant, je permettrai à M. le
député de Saint-Louis une question additionnelle.
M. Blank: Ma question est un peu dans le même sens que
celle du leader de l'Opposition. M. le ministre ne fait-il pas une distinction
entre un document et le contenu de ce document? Ces documents qui sont au
secrétariat des commissions ne peuvent pas être pris par n'importe
quelle personne de la rue. Le document n'est pas public. C'est seulement le
contenu qui l'est après qu'il a été présenté
devant la commission. Ces documents sont la propriété de
l'Assemblée nationale et seulement les députés qui
siègent à la commission ont le droit d'avoir ces documents. Ils
ne sont pas publics du tout.
M. Bédard: Je pense que M. le député n'a pas
compris mon explication tout à l'heure cela a, d'ailleurs,
été corroboré par la présidence à
l'effet que la Sûreté du Québec n'avait en main,
présentement, que les mémoires qui ont été entendus
par la commission, qui sont publics et qui seront sur les rayons de la
bibliothèque dans deux ou trois jours. Il y a un bout à avoir une
attitude ridicule.
M. Blank: C'est la distinction entre le document et le contenu.
C'est cela.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Vice-Président: Un instant! Le sujet est important,
mais quand même! J'ai reconnu M. le député de Gaspé.
Question additionnelle?
M. Le Moignan: Question principale, M. le Président.
Le Vice-Président: Si c'est une question principale, un
instant. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de
Mont-Royal, je demanderais une dernière question additionnelle sur le
sujet.
M. Ciaccia: Je vous remercie, M. le Président. Est-ce que
la raison pour laquelle le ministre ne veut pas donner l'ordre aujourd'hui
à la Sûreté du Québec en tant que corps policier
non pas parce qu'ils ont pris un document public que n'importe qui peut
prendre, mais officiellement comme Sûreté du Québec
c'est parce que lui-même a donné l'ordre de prendre ces documents
à la Sûreté du Québec?
Le Vice-Président: M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, je ne sais pas si cela
peut se traduire en question de privilège ou pas, mais je tiens à
dire au député, s'il veut mettre en doute la parole que j'ai
donnée tout à l'heure au député de
Marguerite-Bourgeoys, qu'il le fasse d'une façon honorable.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Question principale par M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Règlements relatifs à l'inscription des
élèves anglophones
M. Mackasey: Merci, M. le Président. And I am raising this
question with the hope that maybe we can continue to discuss Bill 1 across this
problem on a more friendly attitude, atmosphere. My question is addressed to
the minister of Education and is based on a letter which he sent to the school
boards pointing out to them that an order in Council was recently passed, based
on a Bill, Mr Speaker, called the Education Act, that is its title, based on
Section 16 of that particular bill, which, in its preamble, Mr President,
outlines the regulations that may be based on this particular Bill. My question
is very important, M. le Président. My question is: The eminent jurist,
the Minister of Education knows regulations cannot surpass the intent of the
law. And in his letter, M. le Président, and I ask if he would
reconsider this letter for the sake of avoiding public demonstrations that
could happen; that he reconsider this letter and those regulations in the light
of the fact that they are in anticipation of the Bill. And I can prove that
point with his own letter which says: "Les articles 6 et 7 prévoient un
processus particulier pour les élèves
dont les parents ont demandé qu'ils reçoivent
l'enseignement en anglais pour la première fois en septembre 1977 dans
votre commission scolaire.
Les formules ne sont pas arrivées à l'administration des
commissions qui cherchent à savoir l'information sur la formation des
parents. C'est complètement une autre chose. Si c'est le
règlement qui donne ce pouvoir, pourquoi le bill no 1? C'est la question
que je pose au ministre de l'Éducation. Je lui demande de prendre en
considération mes arguments et de réétudier ces
règlement qui, à mon point de vue, sont illégaux.
Le Vice-Président: M. le ministre de
l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la question du
député montre qu'il confond plusieurs choses. Il confond d'abord
la Loi de l'instruction publique, laquelle définit les pouvoirs que le
ministre peut exercer dans l'administration du réseau scolaire, et le
projet de loi no 1. Il confond également les numéros 1 et 101
selon la version qui sera étudiée, de même que la demande
d'admission, laquelle ne comporte pas de décisions, et l'inscription
elle-même, laquelle est expressément remise au 1er septembre, par
l'arrêté en conseil auquel il s'est
référé.
Le député a également fait allusion à
certaines déclarations d'intentions entendues ces jours-ci qui, pour
fracassantes, qu'elles soient, ne se matérialiseront peut-être
pas. Elles n'auront pas nécessairement toutes les conséquences
fâcheuses que pourrait souhaiter l'Opposition libérale.
Nous espérons que chacun retrouvera son sang-froid. Le
député le souhaite comme moi. Nous souhaitons que chacun retrouve
sa sérénité.
M. Lavoie: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition
officielle, sur une question de règlement. Un à la fois, s'il
vous plaît!
M. Lavoie: Le ministre de l'Éducation s'avance un peu
loin. Il est vrai qu'on reconnaît une certaine latitude au ministre dans
ses réponses mais, par contre, la manière dont il traite la
question dans sa réponse, il y a beaucoup trop d'argumentations qui
pourraient soulever un débat. Lorsque le ministre invite l'Opposition
à garder son sang-froid, etc., cela donne une ouverture à un
débat. La période des questions est pour obtenir des
renseignements. Les réponses sont là uniquement pour fournir des
renseignements et non pas être la base d'argumentation qui ouvre la porte
à des débats.
Le Vice-Président: M. le député de Laval et
leader de l'Opposition officielle, je vous remercie de l'aide que vous
m'apportez. Ce que vous venez de dire est strictement exact. Vous savez fort
bien que, fidèle au passé, je ne permettrai pas de débat
avant la période des questions.
M. Mackasey: M. le Président...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Est-ce une question de règlement?
M. Mackasey: I hope that you will accept that sort of commentary,
but I can make it as of point of regulate, if you like.
Le Vice-Président: Faites votre choix. Faites-vous une
question de règlement ou une question additionnelle?
M. Mackasey: It's my point of privilege, M. le
Président.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Faites-vous une question de règlement ou une question
additionnelle?
M. Mackasey: I am making a point of privilege.
Le Vice-Président: D'accord. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: My point of privilege,...
Le Vice-Président: Vous avez bien dit une question de fait
personnel ou de privilège. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: I am trying to speak. I have used the wrong
terminology and I apologize for that. I think you understand, M. le
Président, the parliamentary procedures more than the minister. I listen
for five minutes and this is personal. Through a lecture from the minister
suggesting that I am confused, that minister had been confused, since I came
into this house on November 15...
Le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, la première partie de votre intervention
était parfaitement conforme au règlement. M. le leader
parlementaire du gouvernement, quant à la deuxième partie de
l'intervention, n'a pas à invoquer le règlement, le
président s'est levé. Si vous invoquez que le ministre vous a
attaqué, vous ne pouvez pas, dans une même question de
privilège, l'attaquer pour que l'on tourne de question de
privilège en question de privilège. Je considère, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, que vous avez terminé
votre question de privilège, et je redonne la parole à M. le
ministre de l'Éducation. Surtout, ne répondez pas à la
question de privilège.
M. Morin (Sauvé): Seulement pour conclure, M. le
Président, en disant que, pour ma part, je me refuse, dans cette
affaire, à jeter de l'huile sur le feu. Nous voulons penser...
Des voix: II y a déjà du feu!
M. Morin (Sauvé): ... avant tout aux enfants qui risquent
de faire les frais de cette situation. C'est pourquoi nous ferons tout notre
possible pour régler l'affaire sur le plan administratif.
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, sur une question additionnelle.
M. Mackasey: Question de privilège, M. le
Président, j'ai ce droit encore, je pense. Vous avez demandé
poliment, avec raison, qu'on maintienne l'ordre dans cette Chambre. J'ai suivi
votre conseil mais, immédiatement, le ministre s'est encore levé
et a parlé des enfants quand c'est lui-même qui avait
posé... the language test on the children as his first official duty
back in this House in November, language test which he considered ordeal.
Now, I want to ask the minister a supplementary question: Does he
believe regulations should go beyond the intent of a law? Yes or no? It is my
first official question.
Le Vice-Président: M. le ministre de
l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): Encore une fois, la question du
député, comme je l'ai dit tout à l'heure dans ma
première réponse, montre qu'il n'a pas saisi la différence
entre la Loi de l'instruction publique et le projet de loi no 1.
Le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Mr Speaker, can I ask the minister if the
regulations are that broad based on section 16 which permit him to that
regulation to enquire into the educational background of parents who obtain
from those parents particular documents proving their statement? If the
regulation is that wide, why did he need bill 1 at all?
Le Vice-Président: M. le ministre, brièvement, s'il
vous plaît, si vous avez quelque chose à répondre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il est
évident que le gouvernement a un devoir de prévoyance; je l'ai
dit devant cette Chambre à plusieurs reprises. Un gouvernement qui ne
ferait pas en sorte que la rentrée scolaire qui s'annonce ne soit pas la
plus ordonnée possible et n'aurait pas le souci de faire en sorte que
les enfants anglophones qui auront le droit d'aller à l'école
anglaise puissent s'y inscrire et faire valoir leurs droits le plus tôt
possible, un tel gouvernement manquerait à ses devoirs les plus
élémentaires.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, la
période des questions a commencé à 15 h 21, aucun autre
député que des députés de votre parti n'a pu poser
de questions. Il ne s'agit pas d'un mini-débat. Je cède la parole
à M. le député de Gaspé.
Réserve de sang dans les hôpitaux
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre des Affaires sociales. Le ministre sait très bien
que plusieurs hôpitaux, en ce moment, déplorent une absence
complète dans les cueillettes de sang. Je n'ai pas l'intention
d'intervenir dans les débats qui opposent les deux parties, mais au nom
du "bon sang", est-ce que le ministre pourrait faire le point sur l'état
des réserves de sang dans les hôpitaux? C'est ma première
question, M. le ministre.
Le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
intergouvernementales? Non? M. le ministre des Affaires sociales. C'est parce
que vous vous êtes levés en même temps.
M. le ministre des Affaires sociales.
M. Lazure: Je vais essayer rapidement de résumer la
situation dans l'ensemble des hôpitaux. Ensuite, peut-être que le
député de Gaspé aimerait obtenir des renseignements
additionnels du ministre du Travail sur la partie plus technique des
négociations.
Je dois faire remarquer, au départ, qu'il ne s'agit pas
d'employés qui relèvent du ministère des Affaires
sociales. Cependant, le ministère des Affaires sociales, ayant la
responsabilité de la santé publique, suit de très
près ce dossier depuis quelques semaines et en particulier par
l'intermédiaire du sous-ministre adjoint aux relations professionnelles
dans notre ministère, M. Meloche. Nous avons, au jour le jour, des
relevés, des rapports des principaux hôpitaux pour l'ensemble du
Québec. Nous avons eu des rencontres avec les représentants de
l'Association des hôpitaux, ces derniers jours, il y en a eu encore
aujourd'hui. L'ensemble des hôpitaux, au moment où on se parle,
est en mesure d'assurer, tout au moins pour les urgences, le sang voulu pour
les transfusions. Vous le savez par les journaux, plusieurs hôpitaux ont
fait appel soit à leurs employés, soit au grand public par le
truchement des media. Donc, il se fait actuellement une cueillette de sang dans
plusieurs hôpitaux.
Nous en profitons, en même temps, pour étudier de
très près l'entente qui lie la Croix-Rouge, section du
Québec, avec le ministère des Affaires sociales et l'ensemble des
hôpitaux puisque notre ministère subventionne, à raison
d'environ $5 millions par année, les activités de la Croix-Rouge.
À ce titre, nous pensons avoir un droit de regard, étant
donné que l'ensemble des hôpitaux est approvisionné par la
Croix-Rouge. En conclusion, la situation est sérieuse. Elle est
sérieuse en ce sens que plusieurs hôpitaux ne peuvent
procéder à des opérations chirurgicales électives,
si vous voulez, mais ils peuvent procéder, pour la très vaste
majorité, aux opérations d'urgence. Nous suivons la situation de
jour en jour.
M. Le Moignan: Question additionnelle, M. le
Président.
Le Vice-Président: Additionnelle, M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Je vais suivre la suggestion du ministre, je vais
m'adresser au nouveau ministre du Travail qui est à la fois
médecin et avocat. Je crois que grâce à son sens
humanitaire il pourrait peut-être nous dire ce qu'il projette faire dans
ce conflit.
Le Vice-Président: Cessez vos compliments et posez votre
question, s'il vous plaît.
M. Le Moignan: Je pose ma question, M. le Président, et je
suis très bref. Je pense que la question...
Le Vice-Président: M. le ministre, la question n'est pas
posée.
M. Le Moignan:... est complète.
Le Vice-Président: M. le ministre du Travail, c'est la
même question.
M. Johnson: Merci quand même, M. le Président.
Effectivement, le conflit qui sévit à la Croix-Rouge, dans les
conséquences qu'il implique au niveau des hôpitaux, est
extrêmement important. Mon ministère est en relations avec le
ministre des Affaires sociales pour l'évaluation concrète de la
situation au niveau des hôpitaux. Ce bilan que vous a fait le ministre
des Affaires sociales correspond à l'évaluation faite dans son
ministère. Quant au ministère du Travail, il y a une question de
principe en jeu dans cette négociation. Le conciliateur a dû
constater malheureusement, hier, qu'il y avait une impasse à peu
près totale. C'est pour cela que, dès ce midi, j'ai donné
ordre au sous-ministre de faire en sorte que les parties soient
rencontrées demain pour voir à ce que le plus rapidement possible
on s'achemine vers une solution.
M. Roy: M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Beauce-Sud, vous avez une question additionnelle?
M. Roy: Question principale, M. le Président.
Le Vice-Président: D'accord, M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Voici, M. le Président, ma question s'adresse
à l'honorable...
Le Vice-Président: Me permettez-vous, M. le
député de Beauce-Sud...? Je voulais vous expliquer que je vous
permets cette question justement parce que, un certain jour où je vous
ai permis une autre question que celle que vous vouliez poser, vous avez
certainement eu la patience suffisante pour qu'on vous permette, au niveau de
la présidence, une question.
M. le député de Beauce-Sud, avec plaisir.
Loi sur les victimes d'amiantose et de
silicose
M. Roy: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au
ministre d'État au développement social. Est-ce qu'il est exact
qu'il y aurait eu une rencontre entre le ministre lui-même, son
ex-collègue, le ministre du Travail, avec des représentants des
trois centrales syndicales en vue d'en venir à un compromis qui aurait
été, effectivement, accepté pour corriger les
défauts, proposer des amendements qui auraient été
acceptés par le juge Robert Sauvé, président de la
Commission des accidents du travail, en vue d'amender la loi 52, la loi pour
indemniser les victimes d'amiantose et de silicose?
Le Vice-Président: M. le ministre...
M. Roy: Deuxième je m'excuse volet de ma
question, M. le Président. Est-il exact, également, que le
Conseil des ministres aurait refusé cet accord?
Le Vice-Président: M. le ministre des...
M. Marois: M. le Président, à la première
partie de la question, c'est exact qu'il y a eu des rencontres entre des
représentants syndicaux et une équipe gouvernementale dont je
faisais partie, notamment, ainsi que mon collègue, le ministre de
l'Immigration.
D'une part, pour être aussi exact, je dois ajouter et
préciser qu'il y a eu également des rencontres entre la
même équipe et des représentants des entreprises. Tout cela
et je pense que c'est important de le dire autour d'un
avant-projet de modifications possibles à l'actuelle loi 52 qui, comme
vous le savez, a soulevé de nombreux problèmes
d'interprétation et a donné lieu à des contestations
devant les tribunaux, concernant le cas de si ma mémoire est
bonne, je vous donne le chiffre sous réserve plus de 260
travailleurs. Je dois indiquer, à ce stade-ci, que ces rencontres
avaient essentiellement pour but de consulter les parties, d'obtenir leur point
de vue sur cet avant-projet. En ce sens, je pense qu'on ne peut absolument pas
parler de compromis entre les parties, puisqu'il ne s'agissait absolument pas
de négocier une position gouvernementale, mais plutôt d'obtenir
l'éclairage, le point de vue de chacune des parties, pour que, par la
suite, sous cet éclairage, le ministre du Travail et le gouvernement
puissent prendre une décision appropriée.
M. Roy: M. le Président, une question additionnelle.
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Est-ce que le ministre est conscient de l'urgence de la
situation, du fait que les mi-
neurs sont actuellement coincés puisqu'un certain nombre qui se
seraient vu refuser le permis de travail et le droit de travailler dans les
mines ne recevraient que 15% de l'indemnité prévue par la
Commission des accidents du travail, ce qui représente effectivement 12%
du salaire versé et qu'actuellement il y a des mineurs dont l'amiantose
a été reconnue comme étant supérieure à 15%,
qui auraient reçu des permis de mineurs sans aucune restriction et que,
d'autre part, dans le cas d'une mine, 85 mineurs, des cas d'amiantose
prouvés dont 12 reconnus, ont été rappelés par la
compagnie, ce qui les rend, en quelque sorte, inadmissibles aux
bénéfices et aux privilèges prévus par la loi 52?
Est-ce que le ministre est au courant de tout cela et est-ce que le ministre
pourrait nous dire s'il a l'intention, quand il a l'intention de prendre les
mesures qui s'imposent pour que les lois soient déposées à
l'Assemblée nationale afin qu'on puisse procéder?
Le Vice-Président: Le ministre d'État au
développement social.
M. Marois: Là-dessus, très rapidement, trois
choses, M. le Président. Si le député le permet, le cas
échéant, mon collègue, le ministre du Travail, qui est le
ministre responsable, le ministre parrain de l'éventuel projet de loi
pourra ajouter des choses, pour y apporter encore plus de précisions. Je
n'ai pas, évidemment, devant moi, vous le comprendrez, les
détails que vous avez évoqués. Je suis parfaitement
conscient et passablement bien au fait des problèmes globaux que vous
évoquez. Je sais également et je dois ajouter ceci: II y a eu,
d'après mes renseignements et sous réserve d'une confirmation ou
d'une correction par mon collègue, le ministre du Travail, des
rencontres par la suite, d'un autre type, entre les gens de la Commission des
accidents du travail et les parties concernées, c'est-à-dire la
partie syndicale et la partie patronale, pour que, pendant que tout le travail
d'analyse, de modifications possibles à la loi 52, qui a soulevé
les problèmes juridiques dont on parle, pour quand même voir,
entre-temps, s'il y avait moyen d'en arriver à des règlements qui
soient pleinement satisfaisants pour les parties. À ma connaissance
je vous donne le chiffre sous réserve, cependant sur 265
cas de travailleurs impliqués et concernés, on m'indiquait, il y
a environ quinze jours, que 235 étaient en voie de règlement ou
sur le point d'être réglés et qu'il était loin
d'être exclu que, des négociations additionnelles se poursuivant
entre les parties, à l'initiative et sous l'animation de la Commission
des accidents du travail, la même chose puisse survenir dans les plus
brefs délais en ce qui concerne les autres cas.
Maintenant, quant à la dernière partie de votre question,
concernant le dépôt d'un éventuel projet de loi, vous
comprendrez qu'à ce stade-ci, en toute honnêteté, je ne
peux vraiment pas répondre à votre question. Donc, on est
préoccupé du problème. Il y a des gestes concrets qui ont
été posés, mais il s'agit là de
l'aménagement du plan de travail des travaux de l'Assemblée
nationale, et cela, bien sûr, relève des arrangements qui sont
pris entre le ministre du Travail et le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Roy: M. le Président, question additionnelle. J'aurais
une question additionnelle.
M. Marois: M. le député, si vous permettez, en
terminant, je voudrais dire qu'en conséquence le projet de loi sera
déposé au moment jugé opportun par le ministre
responsable.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Je permets une dernière question additionnelle sur le sujet
à M. le député de Beauce-Sud. Je donnerai la parole,
immédiatement après, à quelqu'un qui attend aussi depuis
trois jours pour poser une question, M. le député d'Argenteuil,
sur une question principale.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. Le ministre pourrait-il
nous dire s'il est exact que les réticences de la partie patronale
seraient reliées au projet d'investissement dans la transformation de
l'amiante? Deuxièmement, lorsque le projet de loi sera
déposé devant l'Assemblée nationale, pouvons-nous avoir la
certitude que la Commission des accidents du travail sera appelée
à comparaître de nouveau devant la commission parlementaire afin
que nous puissions l'interroger? Plusieurs questions devraient lui être
posées, c'est d'intérêt public et c'est dans
l'intérêt des travailleurs.
Le Vice-Président: M. le ministre, brièvement, s'il
vous plaît.
M. Marois: Sur la première partie de la question,
très rapidement, non, honnêtement, je ne crois pas qu'il y ait
aucun lien. En tout cas, il n'a pas été question, dans les
rencontres auxquelles j'ai participé, de tenter de "bargainer", de jouer
sur la dimension des problèmes sociaux. Il s'agit de gens en vie qui
sont aux prises avec ces problèmes et il n'est pas question de jouer
avec cela quant à son aspect économique, quant à des plans
possibles de transformation, etc., pas du tout.
Quant à la deuxième partie de votre question, si vous
permettez, je vais laisser mon collègue, le ministre du Travail, vous
répondre.
Le Vice-Président: M. le ministre du Travail,
brièvement, parce que j'ai l'intention, à la fin de la
période des questions, de vous permettre deux autres
réponses.
M. Johnson: Oui, très brièvement. Il est bien
évident, comme vient de le dire le ministre d'État au
développement social, qu'il n'est pas question de troc entre les
intérêts économiques et une chose aussi fondamentale que la
santé des travailleurs. D'autre part, quant au dépôt du
projet de loi, comme l'a évoqué le ministre d'État au
développement social, il y a effectivement eu une bonne partie
d'entente, semble-t-il, ou un très bon pro-
grès entre les parties impliquées quant au
règlement spécifique des cas des mineurs dont nous parlons et il
en reste d'autres en suspens.
Le dépôt, après consultation avec les leaders
parlementaires, pourrait se faire lors de cette session, avant son ajournement,
mais d'une part, puisque les démarches nécessaires pour essayer
de régler le maximum des problèmes sont en cours et, d'autre
part, puisque nous ne sommes peut-être pas absolument fixés sur le
délai de cette session, vous ne m'en voudrez pas d'attendre un peu pour
annoncer le dépôt de ce projet de loi.
Le Vice-Président: M. le député
d'Argenteuil, une dernière question principale.
M. Saindon: M. le Président... M. Brochu: M. le
Président...
Le Vice-Président: Je viens de mentionner qu'il n'y aurait
plus de question additionnelle. Je surveille l'heure, je m'en tiens à la
directive de la présidence et je donne la parole, pour une
dernière question principale, à M. le député
d'Argenteuil.
Acquisition d'un terrain de la Commission de transport
de la CRO
M. Saindon: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre des Affaires municipales. Le 3 mai 1977, le journal Le Droit
rapportait une déclaration de Mme Jocelyne Ouellette, maintenant
ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement. On y disait que le
gouvernement avait acquis pour $428 500, de la CTCRO, les terrains
situés aux numéros 54, 60 et 81, rue Front, à Hull. Elle
ajoutait même que M. Caron, le président-directeur
général, n'avait pas à consulter les membres du conseil
d'administration.
Or, en examinant le document no 272, déposé le 6 juillet
1977, je constate que le gouvernement n'avait pas acquis les terrains
concernés en date du 13 juin 1977. Premièrement, la transaction
a-t-elle été effectuée depuis? Deuxièmement, si
oui, pour quel montant? Est-ce le montant spécifié par Mme
Ouellette, soit $428 500? Est-ce le montant offert par la Société
d'habitation du Québec, suivant la résolution du 12 mai 1977,
soit le montant de $460 130.83, ou est-ce le montant réclamé par
la CTCRO suivant la résolution du 26 mai 1977, soit pour la somme de
$515 000? Et, troisièmement, si la transaction n'a pas été
effectuée, qu'est-ce qui accroche?
Le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Tardif: II s'agit d'un terrain situé au coeur de Hull,
qui est abandonné par la CTCRO qui déménage ses
installations, ses garages ailleurs, et dont on veut se porter acquéreur
pour des fins d'habitation, puisque ce terrain est contigu à un projet
d'habitation de la société des HLM.
Première question: La transaction est-elle effectuée? La
réponse, c'est non, M. le Président. Pour quel montant
sera-t-elle effectuée? Il y a présentement une offre qui vise
à s'en porter acquéreur, c'est-à-dire à faire
passer de la CTCRO, dont je vous rappellerai que 50% du déficit sont
défrayés par le ministère des Transports, une partie, si
vous voulez, d'un ministère à un autre, au coût initial
d'acquisition de ce terrain, et de défalquer des subventions consenties
par le ministère des Affaires municipales en y ajoutant des
intérêts, ce qui donne en gros $428 500; c'est à peu
près le chiffre cité par le député d'Argenteuil, M.
le Président.
Le conseil d'administration de la CTCRO s'est dit d'accord avec ceci:
celui de la Communauté régionale de l'Outaouais a exprimé
des réserves. Le tout est présentement devant le Conseil du
trésor, M. le Président.
Le Vice-Président: La période des questions sera
terminée après les réponses que donnera M. le ministre du
Travail. Nous ne dépasserons jamais les 45 minutes.
M. le ministre du Travail.
Conflits de travail à Saint-Jean-Port-Joli et
à Roberval
M. Johnson: II s'agit de deux questions posées par le
député de Montmagny-L'Islet, il y a deux jours, au sujet d'un
conflit sévissant à Saint-Jean-Port-Joli et d'un autre à
Roberval. La question du député visait à savoir, dans le
cas de Toussaint et Frères, à Saint-Jean-Port-Joli, quelles
avaient été les interventions et les résultats obtenus de
ces interventions du ministère du Travail et quelle était la
situation actuelle.
Il s'agit d'un lock-out durant depuis le 12 avril où il y a dix
points en litige. Lors du mois de juin, il y eut deux rencontres du
conciliateur avec les parties, qui lui permirent de constater qu'il y avait une
impasse totale. Néanmoins, les parties ont été
reconvoquées encore tout récemment et mes fonctionnaires
m'avisent que les parties ont choisi de se prévaloir de la
période estivale pour les vacances, mais se sont entendues sur une
rencontre de façon ferme qui aurait lieu le 1er août. Quant au cas
de Gagnon et Frères, de Roberval, il s'agit d'une entreprise où
sévit depuis le 1er février une grève impliquant 163
salariés. Quatre points demeurent en litige. Le ministère par son
conciliateur a rencontré, le 20 juin, les parties et une rencontre a eu
lieu hier, qui a permis au conciliateur de déposer son rapport. On m'a
fait rapport ce midi que les parties doivent se rencontrer, dimanche le 17
prochain.
Le Vice-Président: Fin de la période des
questions.
M. Brochu: Une demande de directive.
Le Vice-Président: Pardon?
M. Brochu: Une demande de directive.
Le Vice-Président: Une demande de directive par M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Je voudrais être bien sûr que j'ai compris
tout à l'heure. Est-ce que vous avez mentionné, M. le
Président, que désormais, lorsqu'un ministre aurait à
répondre, comme vient de faire le ministre du Travail, à une
question qui avait été posée antérieurement
à une autre séance, ce temps serait pris avant la fin de la
période des questions?
Le Vice-Président: Je vais répondre. La
période des questions a commencé aujourd'hui à 15 h 21.
Elle aurait dû se terminer à 16 h 6. À 16 h 5 et un peu
plus, j'ai permis au ministre de continuer à s'exprimer.
Conformément à ce que j'ai répété à
plusieurs reprises, qu'une réponse continue quelque temps au-delà
de la période des questions, d'accord, mais je ne souhaite pas qu'il y
ait une période de réponses en plus de la période des
questions.
M. Brochu: Sur ma demande de directive, M. le
Président...
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Richmond.
M. Brochu: ...j'aimerais que vous me répondiez par un oui
ou par un non. J'aimerais savoir si désormais on établira, vu que
j'ai l'impression qu'il y a un précédent qui va se créer,
que les ministres qui auront à répondre à des questions,
comme on l'a fait ce matin, le feront à l'intérieur de la
période des questions, ne fût-ce qu'une minute. Si on
établit le précédent, il peut arriver à l'avenir
que quatre ou cinq ministres qui ont des réponses à donner le
fassent avant la fin de la période des questions, de sorte qu'on soit
encore plus brimé qu'on ne l'a été cet après-midi.
Je vous ferai remarquer que nous de l'Union Nationale, on a eu une seule
question ce matin et une seule question additionnelle. Si, en plus, on permet
aux ministres de répondre à l'intérieur de la
période des questions, cela va devenir la période des questions
de l'Opposition libérale. Et par la même occasion demain j'aurai
à...
Le Vice-Président: M. le leader, votre demande de
directive, vous le savez, vous a permis de dire ce que vous désiriez
dire. C'est surtout cela qui est important. Je vous prierais tous et chacun de
ne pas imputer à la présidence d'intentions autres que celle,
premièrement, de faire respecter les privilèges des membres de
cette Assemblée et, deuxièmement, de faire respecter le
règlement.
Jamais je n'ai mentionné, s'il y avait quatre ou cinq ministres
qui avaient des réponses à ajouter, que la période de
questions se continuerait par une période de réponses. J'ai
même affirmé exactement le contraire. Par conséquent, il
n'y a pas de précédent de créé. Je ne désire
pas qu'il en soit créé. M. le leader...
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, pour faire suite à
cette directive, seriez-vous en mesure de nous aviser si cela fait deux
jours qu'on ne parle pas, vous vous êtes rendu compte que l'Union
Nationale était assez docile on devra continuer d'endurer que
l'Opposition libérale ait un traitement de quarante minutes comme hier,
sans arrêt, aujourd'hui encore 40 minutes au total? Vous avez dit que le
député d'Argenteuil avait une question à poser depuis
trois jours. J'en ai une depuis à peu près une semaine, et
j'attends. Vous avez redonné la parole au député
d'Argenteuil. M. le Président, je vous demande une directive
là-dessus. Est-ce qu'il faut faire une chicane pour démontrer que
notre parti est un parti sérieux ou si vous allez juger par
vous-même qu'il y a suffisamment de questions additionnelles?
Le Vice-Président: Cela n'est pas considéré
comme une demande de directive. M. le leader...
M. Grenier: M. le Président, si...
Le Vice-Président: Je vous en prie, M. le
député de Mégantic-Compton. Tout s'est bien passé
jusqu'à présent. Vous savez que j'ai parlé, à
quelques reprises, de cet équilibre très délicat entre les
divers partis à cette Assemblée nationale. Hier, ou avant-hier,
j'ai dû refuser des questions des membres du parti ministériel,
principales et secondaires, j'ai dû refuser au député de
Beauce-Sud des questions principales ou accessoires. J'ai dû refuser au
député d'Argenteuil la même chose. Aujourd'hui, j'ai
tenté, malgré l'importance du premier sujet dont nous avons
traité dans cette période de questions, de restreindre
l'Opposition officielle. Je ne les ai point rappelés à l'ordre.
Je leur ai signifié qu'à eux seuls ils avaient pris toute cette
période. J'ai même interrompu le député de
Notre-Dame-de-Grâce pour accorder la parole au député de
Gaspé. Il n'y a donc pas d'intention de ne pas reconnaître un
parti reconnu. Ce que vous n'avez pas eu aujourd'hui, vous l'aurez un autre
jour et, M. le député de Mégantic-Compton, vous aurez la
parole dès demain.
M. Grenier: Excusez-moi, M. le Président. Ce
n'était pas mon intention de parler aujourd'hui puisqu'on avait le
député de Gaspé et le député de
Nicolet-Yamaska qui avaient des questions à poser. Je veux attirer votre
attention sur le point que l'Union Nationale n'a pas l'intention de continuer
ce qu'on fait ici depuis trois ou quatre jours. On n'a pas l'intention de
laisser l'équipe libérale mener le bal pendant 35 ou 40 minutes
chaque jour et de nous contenter de 5 minutes. Je voudrais demander votre
collaboration, M. le Président. C'est bien sûr qu'on n'attend pas
l'intervention du gouvernement. Ils vont regarder l'Opposition se battre. Mais,
pour vous, c'est votre rôle, je pense, selon l'entente qu'il y a eu au
sujet des 45 minutes, de faire le partage des questions additionnelles...
Le Vice-Président: M. le député de
Mégantic-Compton, votre aide est appréciée et je
retiens tout ce que vous venez de mentionner.
M. Grenier: Maintenant, M. le Président...
M. Burns: M. le Président, je ferais appel au
règlement.
M. Grenier: M. le Président...
M. Burns: Non. Quand même, je dois faire un appel au
règlement, M. le Président.
Le Vice-Président: Sur un appel au règlement, M. le
leader parlementaire.
M. Burns: II y a d'autres aspects et je vous dis tout de suite
qu'il n'est pas question de bousculer quoi que ce soit, c'est votre motion qui
sera appelée tout à l'heure. Cependant, je veux faire un appel au
règlement pour soulever la question de la recevabilité de l'avis
de motion privilégiée qui apparaît aujourd'hui au
feuilleton, à la page 9. J'invoque la recevabilité de cette
motion en vertu de l'article 59 de notre règlement afin de vous demander
de recourir aux dispositions de cet article pour mettre de côté
cet avis qui n'est pas je vous le soumets bien humblement et bien
respectueusement conforme à notre règlement. Simplement
pour faire un rappel très bref, l'article est très court,
l'article 59 se lit comme suit: "Le président peut ordonner de mettre de
côté ou de modifier un avis qu'il juge non conforme au
règlement."
Le texte en question apparaît, comme je l'ai dit, à la page
9. Je le lis. Il est inscrit au nom de M. Lavoie. "Motion
privilégiée (en vertu de l'article 68 du règlement): Que
cette Assemblée réprouve la conduite antiparlementaire et
antidémocratique du leader parlementaire du gouvernement, le
député de Maisonneuve, et du ministre d'État au
développement culturel, le député de Bourget, pour leur
participation au scénario qui a provoqué
irrégulièrement la fin des auditions sur le projet de loi no 1 et
entouré le dépôt du projet de loi no 101."
M. le Président, mon argumentation tend à prouver que
l'article 68 de notre règlement ne s'applique pas. Je vais être
très bref. Je ne veux pas empiéter sur le temps qui a
déjà été décidé, de façon
conforme. Je présume que vous allez nous annoncer cela tout à
l'heure, mais je ne veux pas empiéter. Brièvement, je voudrais
vous soumettre cette question.
M. le Président, à mon avis, rien dans le
règlement, n'oblige le leader parlementaire du gouvernement à
faire siéger une commission. D'autre part, on ne trouve pas dans le
règlement une obligation de la part de la présidence relativement
pour ces choses. La présidence a décidé un certain nombre
de choses. Entre autres, elle a décidé que le projet de loi no
101 était recevable. Il n'y avait rien qui la forçait d'accepter
ou de ne pas accepter. Les procédures, M. le Président,
visées c'est là le coeur de mon argumentation par
la motion étaient parfaitement régulières. La motion est
futile et irrecevable puisqu'on ne peut certainement pas reprocher à un
député en vertu de l'article 68...
M. Lavoie: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition
officielle, sur la question de règlement.
M. Lavoie: Je voudrais souligner tout d'abord, et faire une
suggestion peut-être en même temps, qu'actuellement, il
m'apparaît que le député de Maisonneuve, ministre
d'État à la réforme parlementaire, va au fond de la
question. Je ne permettrai pas qu'on puisse débattre cette motion. Elle
est anticipée. C'est demain que cette motion sera débattue.
M. Burns: Question de règlement.
M. Lavoie: En outre, je voudrais suggérer pour ne pas
faire perdre davantage le temps à cette Assemblée, donnant
l'occasion à l'Union Nationale de faire sa motion de blâme, que
cette question de recevabilité puisse être discutée demain,
avant que vous puissiez appeler cette motion qui est privilégiée.
Ce serait dans l'ordre que cette question de recevabilité soit
discutée lorsqu'elle sera appelée. La preuve, c'est que j'aurais
encore le droit de la retirer d'ici à demain, ce qui n'est pas mon
intention. Alors, pourquoi discuter de la recevabilité d'une question,
quand même hypothétique encore puisqu'elle n'est pas
appelée? Cela devrait être discuté avant qu'on l'appelle,
demain.
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement, brièvement s'il vous plaît.
M. Burns: Sur cette question de règlement, qui se greffe
à ma question de règlement, je veux tout simplement dire que
j'entendrais et j'entends déjà à l'avance les hauts cris
de l'Opposition, si jamais, à la dernière minute, demain, comme
je le suggère, cette motion est jugée non recevable, pour me
dire: Comment se fait-il qu'on ne sait pas quel projet de loi on va
étudier demain à la place...
M. Lavoie: On ne vous le demande pas. Vous appellerez le projet
de loi que vous voudrez au feuilleton.
M. Burns: N'importe quoi.
M. Lavoie: N'importe quoi, à votre goût.
M. Burns: Parfait.
M. le Président, je vous demande de me permettre, cependant, de
terminer ma question de règlement.
Le Vice-Président: Faites vite, s'il vous plaît! Je
ne suis pas prêt à prendre une décision, mais je suis
prêt à l'interpréter.
M. Burns: Je ne discute pas du fond de la
question. Si on doit y venir, si vous décidez que la motion est
recevable et qu'en vertu de l'article no 59 vous ne devez pas la mettre de
côté, je me plierai à votre décision, M. le
Président. Nous en débattrons le fond. Mon argumentation à
ce stade-ci, n'en déplaise au député de Laval...
M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.
Le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle,
sur une question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): Je réitère, M. le
Président, ce qu'a dit le leader de l'Opposition officielle. À ce
moment-ci de nos travaux, alors que nous avons une motion déjà
privilégiée, et celle de l'Union Nationale, alors que celle dont
il est question et qui fait l'objet de l'intervention du leader du gouvernement
n'est pas appelée, ni en question et qui est privilégiée
pour demain, je soutiens respectueusement que nous ne pouvons même pas et
que la présidence ne peut pas entendre à ce moment, un argument
comme celui-là relativement à une motion
privilégiée qui ne peut être appelée que demain,
alors que nous avons devant nous pour étude immédiate, une motion
privilégiée.
M. Burns: Puisqu'on peut m'interrompre sur une question de
règlement, je vais interrompre le chef de l'Opposition. M. le
Président, le chef de l'Opposition n'a pas lu, il ne connaît
peut-être pas l'existence de l'article 40 de notre règlement. Il
faudrait peut-être qu'il le lise. C'est en vertu de cela que je le fais
à ce moment-ci et non pas demain. M. le Président, "un
député peut, en tout temps, signaler une violation du
règlement, mais il doit le faire sans retard en se limitant
rigoureusement dans son exposé au point soulevé".
M. Levesque (Bonaventure): Quelle violation du règlement,
M. le Président? Voyons!
M. Burns: C'est, je vous le souligne respectueusement, ce que je
suis en train de faire.
Le Vice-Président: Si vous me le permettez, je
considère que le débat a duré assez longtemps et que, pour
une fois, je suis suffisamment informé. Je pense que M. le leader
parlementaire du gouvernement a invoqué le bon article. Il ne devait
évidemment pas plaider sur le fond de la motion, mais en invoquant
l'article 59, et je lis l'article 59 qui est très bref: "Le
président peut ordonner de mettre de côté ou de modifier un
avis qu'il juge non conforme au règlement".
Après tout ce que vous m'avez dit, messieurs, je vais
étudier la question et je donnerai, en conséquence, des ordres ou
je n'en donnerai pas, conformément à l'article 59, au sujet de la
motion qui paraît en appendice au nom de M. le député de
Laval. L'incident est clos.
M. Burns: Vous avez pris mon appel au règlement en
délibéré, si je comprends bien.
Le Vice-Président: C'est exact. M. Burns:
D'accord!
M. Lavoie: Un dernier éclaircissement. J'espère
qu'avant que vous donniez des ordres ou que vous ne donniez pas d'ordres au
greffier à cet effet, vous permettrez à l'Opposition ou aux
parrains de la motion d'argumenter sur la recevabilité.
Le Vice-Président: Certainement. M. le leader de
l'Opposition officielle, vous êtes un juriste, vous connaissez les
règles, vous savez que chacun des leaders a le droit de plaider devant
la présidence qui a le devoir de l'écouter. Je ne permettrai pas
qu'une seule partie plaide et que cela devienne une cause ex parte. Y a-t-il
des avis de la part du leader parlementaire du gouvernement?
M. Burns: M. le Président, non, il n'y a pas d'avis. Il y
en aurait eu dans d'autres circonstances mais il n'y en a pas. D'accord?
Motion privilégiée de M. Rodrigue Biron
sur la relance économique du Québec
Le Vice-Président: Nous passons aux affaires du jour. Aux
affaires du jour, nous avons devant nous une motion de M. le chef de l'Union
Nationale qui paraît à la page 3 de notre feuilleton, article 1,
motion privilégiée en vertu de l'article 24 du règlement.
À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que je pourrais demander qu'on
soit moins bruyant? Donc, cette motion se lit comme suit: - à l'ordre,
s'il vous plaît! - "Que, suite aux révélations
publiées notamment par le Bureau de la statistique du Québec,
cette Assemblée blâme le gouvernement d'avoir
négligé de présenter en priorité une politique
globale de relance économique et d'avoir ainsi permis que la situation
désastreuse de l'économie, qui prévaut au Québec
depuis plus d'un an, s'aggrave davantage".
Répartition du temps alloué au
débat
Le Vice-Président: Avant d'accorder la parole au
député de Lotbinière, chef de l'Union Nationale, je
désirerais rappeler les règles du jeu dans ce genre de motion
privilégiée. Les articles 24, 10, paragraphe 6, et l'article 94
s'appliquent, c'est-à-dire que normalement, à 22 h 45, si on peut
ainsi s'exprimer, le vote devrait être pris.
Conformément à l'article 10, j'ai tenu une réunion
des leaders parlementaires et même des représentants de Beauce-Sud
et de Rouyn-Noranda et j'ai été informé que M. le
député de Rouyn-Noranda ne participerait pas aux
débats.
Cette réunion a réussi et il y a une entente qui est la
suivante: Dans une enveloppe globale, réalisable à cette heure de
260 minutes.
C'est pour le journal des Débats. Ce n'est pas le Bonhomme Sept
Heures. De ces 260 minutes, les représentants des cinq partis
s'entendent pour que 105 minutes soient accordées au gouverne-
ment; 90 minutes au parti dont le chef propose la motion, à
savoir l'Union Nationale; 50 minutes au parti de l'Opposition officielle; 15
minutes au député de Beauce-Sud.
Deux autres remarques me paraissent importantes. Premièrement,
cette entente sur la distribution du temps ne crée pas plus de
précédent que les ententes antérieures. Aucun parti n'y
est privilégié et ne pourra, à l'avenir, invoquer qu'il a
obtenu 15, 50, 90 ou 105 minutes. Ce n'est donc pas une directive qui est
rendue et je veux que ceci soit au journal des Débats et qu'on puisse
s'y référer.
Deuxièmement, c'est aux partis, aux membres de chaque parti de
s'entendre. L'article 94 s'applique quand même. Les limites d'une heure
et de 20 minutes demeurent. Il faut donc tenir compte de deux choses: de
l'entente intervenue et du règlement qui subsiste. Par
conséquent, à moins qu'il n'y ait des questions, je donne
immédiatement la parole à M. le chef de l'Union Nationale.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, si, aujourd'hui, j'ai voulu
présenter cette motion privilégiée à ce moment
spécifique de nos travaux parlementaires, c'est qu'après avoir
pris connaissance, depuis déjà plusieurs mois, de nouvelles fort
mauvaises et fort désagréables concernant l'économie du
Québec, et spécialement depuis une semaine, avec des rapports qui
nous sont venus du Conseil du patronat du Québec et
spécifiquement aussi du Bureau de la statistique du Québec, nous
croyons qu'il est important de mettre de côté la
procédurite parlementaire et de passer à l'action pour
régler les vrais problèmes du Québec, pour régler
les véritables problèmes du Québec, surtout le
véritable problème du Québec: la relance
économique.
Le gouvernement du Québec a été élu le 15
novembre dernier comme un vrai gouvernement, comme un bon gouvernement
provincial. Il a créé beaucoup d'espoir chez les
Québécois. Je crois que ces espoirs seront déçus
très prochainement si nous continuons, au gouvernement du Québec,
d'agir dans le même sens que présentement. Nous croyons donc qu'il
est souverainement important, pour le gouvernement actuel, de réviser sa
façon de procéder et ses vues particulières sur l'avenir
immédiat du Québec, et d'ajuster ses décisions au
problème spécifique et particulier que nous vivons
présentement. Il ne se passe presque pas de journée sans que
n'apparaissent, dans les principaux media d'information, des nouvelles de
fermetures d'usines, d'annulation d'investissements, de départs du
Québec de professionnels et de citoyens compétents pour d'autres
provinces.
Mme le Président, je dois vous avouer que c'est avec une grande
tristesse que je prends connaissance de ces mauvaises nouvelles. Je ne voudrais
pas, ici, me faire accuser de charrier pour le simple fait de créer des
difficultés au gouvernement actuel. D'après l'engagement que j'ai
pris, lorsque j'ai été élu à l'Assemblée
nationale par les citoyens de mon comté, accompagné de dix au-
tres députés de l'Union Nationale, choisis aussi par leurs
concitoyens, d'après l'engagement que nous avons pris de servir, les
intérêts du Québec, des Québécois, des
Québécoises, avant les intérêts de notre parti, ici,
je dois respecter cet engagement et essayer par tous les moyens possibles mis
à ma disposition de faire comprendre au gouvernement du Québec
les erreurs qu'il commet, de lui suggérer des solutions
appropriées, comme nous l'avons fait d'ailleurs depuis le 15 novembre,
aux nombreux problèmes qu'il doit affronter.
Je me dois d'intervenir, souvent d'une façon difficile à
accepter pour le gouvernement, mais toujours dans le but de servir les
meilleurs intérêts de toute la population
québécoise.
Dans ce cas-ci en particulier, nous avons à faire face à
des problèmes économiques aigus, qui sont attribuables à
un très mauvais climat politique, créé peut-être
sans mauvaise volonté, mais par la façon fort malhabile du
gouvernement de remplir ses engagements de vrai gouvernement provincial, de bon
gouvernement provincial. C'est peut-être par manque d'expérience
dans l'administration, c'est peut-être par une approche trop
théorique et qui traduit peut-être de la naïveté dans
le domaine de l'économie et l'approche du gouvernement ne répond
pas aux besoins immédiats du Québec.
Nous formons, à l'heure actuelle, au gouvernement du
Québec, de nombreux comités, mais, malheureusement, au point de
vue économique, aucune décision n'est prise. On se croirait avec
le même gouvernement qu'avant le 15 novembre dernier. Tous les
problèmes sont pourtant là. Tous les problèmes sont
pourtant existants, mais toutes les décisions sont encore en suspens.
Est-ce que certaines personnes prenaient des décisions avant le 15
novembre et que ce sont toujours les mêmes personnes qui prennent les
décisions après le 15 novembre? Ou est-ce qu'on a
véritablement changé le gouvernement du Québec, le 15
novembre dernier?
Mme le Président, nous pouvons avoir à redire sur les
nouvelles véhiculées par les media d'information. Nous pouvons
critiquer les nouvelles véhiculées par les media d'information,
mais il reste que la grande majorité de ces nouvelles, au point de vue
économique, sont mauvaises et que, très rarement, on peut lire ou
entendre quelque chose de positif sur les investissements, sur
l'économie québécoise. Comme le dit si bien
déjà je l'ai entendu personnellement le premier
ministre: II n'y a pas de fumée sans feu. À voir trop de
mauvaises nouvelles, il y a certainement du bien-fondé dans ces
nouvelles qui nous viennent des media d'information. Qu'il me suffise ici de
vous citer quelques titres de journaux du Québec, au cours des
dernières semaines: Brinco, la compagnie qui a construit le barrage de
Churchill Falls, déménage ses bureaux exécutifs de
Montréal à Mississauga. Northern Telecom: le transfert du
personnel vers Toronto se poursuit toujours, et on parle d'environ 80 cadres de
l'entreprise, ordinateurs, finances, fonds de retraite, etc. Economic bad news
dogging PQ, faced with the double spectre of dwindling
investment and rising unemployment. The Parti québécois
government's economic experts are having a rough time in the National Assembly.
Problems facing the province economy which could have a profound effect on the
coming independence referendum campaign, were again pointed out in the Assembly
yesterday. In fact, Mr Tremblay, Minister of Industry, Trade and Commerce
argued: Quebec should actually count itself lucky that things are not worse,
since the province, as a whole, tends to hover around a 10% unemployment
remaining fairly stationary. Mr Tremblay declined however to offer any
suggestion of how the government plans to go about easing the plight of the
jobless either in Montreal or anywhere else across the province. Canadian slump
blamed on PQ. The uncertainty of the political climate in Quebec has affected
investments across Canada, says the president of the Toronto Board of
Trade.
One would expect that the negative effect of that uncertainty would be
greater in Quebec than elsewhere, but I am sure it has damped investment
decisions everywhere, caused more concern to people who have to make investment
decisions that it would to be the case if we were free of that doubt. Mr Gibson
said: The Parti Québécois, dedication to sovereignty for the
province is an added burden to the country, at a time when the entire North
American continent is undergoing a period of economic uncertainty.
The possibility of Québec independence, which Mr Gibbon's feels
is a genuine reason for concern leaves the future of what would remain of
Canada too much in doubt. When you have an investment environment, in which
production of the basic fundamental conditions are almost impossible, then, I
think you give an investor a real tough job. The uncertainty of the
Québec situation, the future of Canada, what it might do to us if there
were a serious problem, I think has affected investment decisions right across
Canada.
La Presse: Les titres des banques sont gênés par les
incertitudes du Québec. La concentration géographique des
activités de la BCN et de la Banque provinciale au Québec a
toujours créé un préjugé défavorable contre
elles. Le fait que l'ensemble des titres bancaires soient actuellement
sous-évalués a amené les spécialistes d'une maison
de courtage à émettre l'idée que
l'éventualité d'un changement politique radical au Québec
est l'élément majeur qui empêche un rebond boursier de ces
titres. Les députés sont impuissants vis-à-vis des
problèmes économiques dans L'Estrie. L'Estrie est devenue, en
effet, depuis plusieurs mois, le carrefour des difficultés
économiques de la province et du pays, principalement dans les secteurs
du textile, des pâtes et papiers et de la chaussure. Depuis le
début de l'année, au moins vingt petites, moyennes et grandes
entreprises ont fermé leurs portes, vendu leurs intérêts ou
diminué leur personnel, causant ainsi la mise à pied de plus de
2500 travailleurs.
M. Marchand: Mme le Président, je m'excuse auprès
du chef de l'Union Nationale; ses propos sont tellement intéressants
qu'on devrait au moins avoir quorum pour l'écouter.
Mme le Vice-Président: Nous allons vérifier le
quorum.
Il y a quorum, M. le député.
M. le chef de l'Union Nationale, vous avez la parole.
M. Biron: Victimes d'une régression qui touche la plupart
des régions canadiennes, les Cantons de l'Est sont actuellement aux
prises avec des problèmes sérieux. Le chômage atteint
même, à certains endroits, 25% des travailleurs et 26% à
Mégantic-Compton.
À Québec, dans les corridors du Parlement, les
députés de cette région tentent de trouver des solutions
miracles. Certains, comme le député unioniste de Richmond, M.
Yvon Brochu, suivent la situation de très près en rencontrant les
représentants des compagnies et ceux des syndicats. 75 entreprises ont
été victimes d'une fermeture en 18 mois; 9014 travailleurs mis
à pied depuis janvier 1976. Depuis le 1er avril 1977, au moins 10 autres
entreprises ont fermé leurs portes, pour un total de 1975 autres emplois
perdus. Le nombre d'entreprises fermées en 1976 s'est
élevé à 31, alors que 44 entreprises ont
déjà fermé depuis le début de l'année en
cours. Les entreprises fermées se retrouveraient principalement dans les
secteurs du textile, de la chaussure et du bois.
Les emplois, et non l'indépendance, sont le grand problème
du milieu rural. Deux journalistes du Montréal Star on fait part de leur
enquête effectuée dans les milieux ruraux de la province de
Québec et en sont venus à la conclusion suivante: que les
emplois, dans ces régions, ne constituent que le seul problème
des populations. À l'heure actuelle, plus du quart des jeunes de moins
de 25 ans sont sans travail. Les cloches de l'avertissement sonnent de partout,
mais les hommes politiques ne savent quoi faire.
Plusieurs des régions rurales ont élu des
députés péquistes; toutefois, interrogés, la
plupart des contribuables ont déclaré qu'ils n'ont pas
voté pour l'indépendance du Québec, mais bien pour se
débarrasser d'un gouvernement libéral sans direction
compétente, trop éloigné du peuple et, dans certains cas,
assez corrompu. Plusieurs usines de papier journal vont fermer, 274 000
chômeurs. J'en ai trop, de titres! Beaucoup plus de jeunes chômeurs
au Québec.
Une voix: Une chance que vous avez les journaux!
M. Biron: Une chance! Une chance que les journaux nous avisent,
mais on le sait quand même. En plus, il y a mes nombreuses rencontres
avec le monde des affaires depuis plusieurs mois et en particulier au cours des
dernières semaines. Le monde des affaires du Québec, le monde du
travail du Québec, le monde de la finance du Québec, le monde de
l'agriculture du Québec, les jeunes et les gens de l'enseignement au
Québec, les employés du secteur public et le monde des pro-
fessionnels, tous ces gens s'inquiètent de la situation
économique du Québec. Tous ces gens craignent pour l'avenir au
Québec, à l'heure actuelle.
Encore une fois, je ne veux pas charrier de mauvaises nouvelles, mais,
si j'ai voulu intervenir aujourd'hui, c'est pour appuyer ce que je dis au
gouvernement depuis le 15 novembre dernier pour que le gouvernement,
finalement, s'attaque sérieusement et accorde la priorité au
premier problème du Québec: La relance économique et le
sous emploi, ces chômeurs que nous avons partout.
Pourtant, à cause du sommet économique de la Malbaie, j'ai
cru, un bout de temps, que le gouvernement avait décidé de
surseoir à certains de ces projets sociaux ou politiques pour s'attaquer
aux véritables problèmes majeurs de l'heure, soit ceux concernant
la réalité économique. Malheureusement, depuis ces
quelques jours passés dans l'euphorie du moment, nous avons dû
faire face à la triste réalité et reconnaître,
encore une fois, que les décisions qui seraient susceptibles de
créer un environnement politique et social sain et harmonieux pour les
investisseurs et qui pourraient éventuellement créer de
très nombreux emplois au Québec ne viennent pas et que,
finalement, rien ne se fait pour corriger ces problèmes. Nous croyons
que le sommet économique de la Malbaie, faute de prendre de judicieuses
décisions par la suite, n'aura été qu'une grandiose
démonstration de relations publiques qui auraient permis, bien
sûr, à des chefs d'entreprises, à des chefs ouvriers et
à des hommes politiques de fraterniser et de discuter ensemble. Mais,
finalement, le sommet économique de la Malbaie n'aura aucune autre suite
concrète et positive.
Je ne veux pas ici tomber dans l'habitude de mes collègues de
l'Opposition, membres du Parti libéral du Québec, pour qui la
mauvaise situation, la mauvaise gestion du Québec et tous les
problèmes et tous les maux ont commencé avec le 15 novembre
dernier. Non, Mme le Président. Les problèmes économiques
auxquels le gouvernement doit faire face présentement sont apparus au
Québec bien avant le 15 novembre 1976. C'est d'ailleurs pour cette
raison précise et bien spécifique que plus de 65% de la
population québécoise a voté contre le gouvernement
libéral de M. Bourassa.
Qu'on se souvienne de la situation, avant le 15 novembre dernier: climat
économique malsain, climat social pourri, climat politique stagnant,
mauvaise administration de la province, indécision chronique de la part
du gouvernement, pressions politiques de toutes sortes des organismes publics
ou parapublics. Voilà quelques-uns des malaises qui frappaient le
Québec avant le 15 novembre 1976. Voilà pourquoi les citoyens du
Québec avaient raison et grandement raison de retourner chez eux
beaucoup de membres de l'ancien gouvernement, et d'envoyer dans l'Opposition
pour une très longue période de temps les quelques autres qui ont
pu survivre au jugement de la population québécoise.
Non, Mme le Président, je ne veux pas charger le gouvernement
actuel de tous les malaises présents du Québec car le
présent gouvernement a hérité d'un dossier très
lourd qui était une hypothèque très élevée
et qui aurait donné un haut-le-coeur à beaucoup d'administrateurs
chevronnés. Le présent gouvernement s'est attaqué à
la tâche avec fougue et honnêteté mais, nous le constatons
aujourd'hui, avec aussi un manque flagrant d'expérience de
l'administration, un bagage immense de théories, mais que personne
n'avait jamais appliquées et avec aussi, malheureusement, de grandes
lacunes dans son programme, spécialement en ce qui concerne l'avenir
politique, social et économique du Québec.
Et sous prétexte qu'il y avait beaucoup de mauvais avant le 15
novembre dernier, on a voulu tout changer. Je pourrais vous nommer quelques
ministres en particulier qui ont tout voulu changer depuis le 15 novembre et,
malheureusement ou heureusement, dans notre population, il y a une
résistance normale au changement et nul ne peut aller plus vite que la
vitesse à laquelle la population peut aller. Les changements trop
rapides apportent de l'insécurité. Malheureusement, on a
élaboré un tas de théories au niveau du gouvernement du
Québec, mais aucun changement véritable, profond pour la relance
économique ne s'est fait sentir. Aucune décision précise
pour la relance économique n'a été prise, depuis le 15
novembre dernier. Nous attendons toujours des annonces de décisions
à portée économique qui pourraient véritablement
aider la situation au Québec.
Le chômage à l'heure actuelle. La situation du
chômage au Québec n'est certainement pas la meilleure au pays. Je
veux bien croire que le taux élevé de chômage a
été hérité de l'administration libérale,
mais nous ne pouvons plus nous permettre, au Québec, de faire des voeux
pieux ou de former des comités qui étudieront les causes du
chômage ou encore remplacer, de façon chronique, nos travailleurs
du domaine industriel ou de la production par des travailleurs dans le domaine
gouvernemental.
Nous ne pouvons plus nous permettre d'augmenter le nombre
d'employés au service du gouvernement en diminuant de façon de
plus en plus dangereuse les employés du secteur productif qui sont, en
fait, et en réalité, les seuls moteurs de l'économie d'un
pays. Il ne s'agit plus aujourd'hui de savoir si le chômage va baisser de
0,1% parce que des milliers de travailleurs québécois sont
expatriés dans d'autres provinces ou d'autres pays. Il s'agit de
dépenser tous nos efforts et toutes nos énergies à
créer des emplois durables pour ces Québécois qui arrivent
sur le marché du travail ou qui y sont déjà.
Le départ des cerveaux pour d'autres provinces du pays, en
particulier, nous causent des torts irréparables. Surtout si nous
imaginons le coût de la formation de tous ces hommes, de toutes ces
femmes, que nous formons à coups de milliers et de dizaines de milliers
de dollars, dans nos écoles, nos collèges, nos universités
et qui, une fois formés, croient devoir aller travailler dans d'autres
provinces de notre pays afin d'avoir une certaine
sécurité, afin d'avoir une plus grande
sécurité que s'ils demeuraient ici au Québec, dans notre
province, dans leur province.
J'ai ici, Mme le Président, des statistiques sur le
chômage, au cours des quatre dernières années. Nous voyons
que le chômage a commencé à augmenter au Québec,
comme au Canada d'ailleurs, mais spécialement au Québec, depuis
1974, alors qu'en juin 1974 nous avions 6,3% de chômage; juin 1975, 8,3%;
1976, 9,2%; juin 1977, 9,6%. C'est donc dire que le chômage, bien
sûr, a commencé à augmenter avant le 15 novembre dernier,
mais le chômage a continué à augmenter depuis ce temps. Il
ne s'agit pas ici de blâmer un gouvernement ou l'autre, mais il s'agit de
collaborer tous ensemble pour régler ces véritables
problèmes. Et ce qui est le pire, dans ces chiffres de chômage,
c'est que beaucoup de nos jeunes sont en chômage. 25% de nos jeunes qui
sortent des écoles, des universités, n'ont pas d'emploi à
l'heure actuelle. Ce sont des gens qui arriveront sur le marché du
travail et qui, après six mois, un an, un an et demi, deux ans à
la recherche d'un emploi, n'en trouvant pas, critiqueront la
société. Nous ferons peut-être des révolutionnaires
de ces jeunes si nous ne nous occupons pas, aujourd'hui, de créer des
emplois pour ces jeunes qui sortent des universités, des cégeps,
des polyvalentes, des écoles un peu partout, de ces jeunes qui veulent
travailler, mais qui, malheureusement, ne trouvent pas d'emploi autour
d'eux.
Il y a une façon d'imaginer aussi ce qui se passe dans le domaine
économique. C'est par la valeur des projets de construction.
J'étais habitué, avant d'être un politicien, de surveiller
de très près l'argent investi dans le domaine de la construction.
J'ai ici un rapport qui nous dit que dans la région de la
Communauté urbaine de Montréal en particulier, qui a toujours
été le moteur économique du Québec,
vis-à-vis de cette grande région de la Communauté urbaine
de Montréal, pour la construction en particulier, dans le domaine
domiciliaire en 1976, nous avions $125 millions de permis de construction, en
1977, $82 millions. Une baisse de 35% dans le domaine des maisons simples ou
détachées, ou attachées, dans le domaine des appartements.
Dans le domaine de la construction commerciale, nous avions $76 millions pour
baisser à $34 millions, donc une baisse de 55%. Cela comporte les
motels, les hôtels, les restaurants, les garages, les immeubles...
M. Tremblay: Puis-je vous poser une question? Est-ce que cela
couvre l'ensemble de 1977 ou si vous comparez 1976 et 1977?
M. Biron: Six mois de 1976 et six mois de 1977, plus un mois.
M. Tremblay: Vous comparez les deux années.
M. Biron: M. le ministre, je veux comparer une période de
temps de mois à mois parce que je le compare...
M. Tremblay: 1976 et 1977.
M. Biron: Excusez-moi, M. le ministre. C'est du début de
1976 à venir jusqu'à maintenant et du début de 1977
à venir jusqu'à maintenant pour la même période de
mois dans l'année.
En construction industrielle et c'est là que cela me fait mal au
coeur. C'est là que je trouve que c'est triste pour le Québec. En
1976, nous étions déjà très bas à
Montréal, avec $37 millions d'investissements dans cette construction.
C'était déjà beaucoup plus bas que la normale. En 1977,
nous baissons à $9.7 millions, une baisse, une diminution de 74%.
Dans le domaine institutionnel, nous avions $44 millions. C'était
déjà très bas. Nous avons $23 millions, encore plus bas,
une baisse de 46%. Et dans le domaine du génie civil, $102 millions
à $46 millions, une baisse de 55%.
C'est dire que dans la seule région de la communauté
urbaine de Montréal, si nous comparons les six premiers mois de 1976
avec les six premiers mois de 1977, nous avons une baisse, dans les permis de
construction émis, de 50%. Ce n'est certainement pas ce qui augure bien
pour l'avenir. Encore là, je ne veux pas en faire une critique
négative, mais je veux me servir de ces chiffres pour suggérer au
gouvernement, à la fin de cet exposé, certaines décisions
que nous devrions prendre afin de relancer l'industrie de la construction,
l'industrie de la construction industrielle, l'industrie de la construction
domiciliaire et commerciale, de même que le domaine de la construction
dans le génie civil. C'est quelque chose de positif que je veux qu'il
sorte de cet exposé, cet après-midi.
Dans le domaine social, nous sommes totalement d'accord sur de nouvelles
lois sociales à condition d'avoir les moyens de se les payer. Je me
souviens d'une remarque d'un vieux cultivateur de Lotbinière qui m'a
été faite il y a quelques mois et qui était celle-ci. Ceux
qui vivent aux dépens de la population ne peuvent jamais recevoir plus
que ce que cette population reçoit elle-même.
C'est une leçon simple, mais c'est un message clair, net et
précis pour ceux qui veulent toujours créer des monstres
administratifs de plus en plus incontrôlables. Nous ne pouvons donc nous
permettre de faire payer les programmes sociaux seulement par un petit groupe
de la population québécoise et souvent à son
détriment.
Bien sûr, l'avènement au pouvoir, le 15 novembre, d'un
parti voué à l'indépendance du Québec n'a
certainement pas assaini le climat politique qui existait auparavant, mais
quand même nous devons constater que depuis 1971, absolument rien
d'important n'a été fait dans les négociations avec les
autres provinces canadiennes ni avec le gouvernement canadien pour trouver une
solution aux problèmes constitutionnels du Québec et du
Canada.
Pourtant, à compter de 1944 jusqu'en 1970, tous les premiers
ministres du Québec, sans exception, Maurice Duplessis, Paul
Sauvé, Antonio Barrette, Jean Lesage, Daniel Johnson et Jean-
Jacques Bertrand ont travaillé de façon ardue et sans
relâche dans ces négociations pour renouveler la constitution
canadienne et faire en sorte qu'elle réponde aux véritables
besoins d'un pays moderne, discipliné et décentralisé.
Nous avions énormément avancé au cours de ces
années. Le fait d'être ici nous prouve que ces négociations
ont fait avancer l'avenir du Canada. Malheureusement, de 1971 à 1976 ou
1977, nous n'avons rien fait. Que ce soit de la part du premier ministre
libéral du Québec, que ce soit de la part du premier ministre
libéral du Canada, il semble bien que les deux n'ont pu s'élever
au-dessus de leur personnalité respective et n'ont pu s'entendre pour
répondre aux besoins réels de leurs concitoyens. Pourtant, toutes
les provinces canadiennes veulent des améliorations. Pourtant, avant le
15 novembre comme après le 15 novembre, des gens, dans les autres
provinces canadiennes, ont aussi bonne foi que les gens du Québec. Il ne
manque que la volonté d'en venir à une entente ou un consensus
général.
Je veux discuter de deux rapports majeurs que j'ai mentionnés au
début, qui nous ont été donnés dernièrement
et dont on devrait se servir comme indication de la stagnation
économique du Québec. Indication qui nous vient du Conseil du
patronat du Québec et du bureau de la statistique du Québec.
Le Conseil du patronat du Québec est l'organisme patronal le plus
important au Québec. C'est un organisme sérieux et valable qui
regroupe toutes les entreprises et tous les chefs d'entreprise
intéressés et actifs dans le développement
économique de notre province. Les membres du Conseil du patronat du
Québec ne sont certainement pas intéressés à une
crise économique au Québec puisqu'il va de leurs
intérêts de maintenir un bon climat économique. Les membres
du Conseil du patronat du Québec n'ont aucun avantage à faire et
à voir se détériorer davantage et plus largement le climat
politique, social et économique du Québec. Ces gens n'ont pas
d'assistance sociale. Ils n'ont que leur survie dans le domaine
économique. Ils sont peut-être les plus dégagés pour
faire les recommandations nécessaires au gouvernement pour prendre des
décisions du point de vue économique.
Lorsque cet organisme indique au gouvernement qu'il y a danger
réel de continuer la politique actuelle, il me semble que le
gouvernement devrait sérieusement étudier les commentaires et les
recommandations de cet organisme. Il ne sert à rien de vouloir essayer
de jouer le jeu de l'autruche et de ne pas regarder la réalité en
face lorsque les problèmes au Québec sont aussi importants. Les
indications fournies par le Conseil du patronat du Québec nous obligent
et obligent le gouvernement à réviser ses positions afin de
créer un climat économique favorable au Québec.
Je veux citer une partie d'un éditorial du Devoir qui traitait
justement de l'enquête du Conseil du patronat du Québec. C'est M.
Ryan qui disait que M. René Lévesque aurait
préféré que le Devoir cache en page intérieure les
résultats d'un son- dage réalisé par le Conseil du
patronal du Québec.
Il a même daigné citer en exemple à ce sujet le
comportement de la Gazette, plus habituée, selon lui, à traiter
la nouvelle économique. Mais outre que les propos des hommes politiques
ont rarement influencé la manière dont les journaux
indépendants accomplissent leur travail, ceux que M. Lévesque a
tenus hier indiquent de sa part une tendance dangereuse à faire le jeu
de l'autruche, c'est-à-dire, à se planter la tête dans le
sable au lieu de regarder la réalité en face.
Dans l'enquête du Conseil du patronat, ce qui importe, en effet,
ce ne sont pas d'abord les chiffres, toujours discutables et approximatifs
lorsqu'il s'agit d'un sondage de ce genre, qu'elle apporte sur le mouvement des
investissements privés. Encore qu'on ait tout lieu de croire que les
données recueillies à ce sujet sont en deçà et non
au-delà de la réalité. Ce sont bien davantage les
indications qu'elle fournit sur l'attitude des milieux patronaux à ce
moment-ci. Or, ces milieux patronaux, à l'heure actuelle, nourrissent
des sujets d'inquiétude dont plusieurs ne sauraient laisser
indifférentes les autorités provinciales et l'opinion publique
québécoise.
Par-delà les chiffres, l'apport des entreprises à la bonne
marche de la société se traduit par des valeurs encore plus
importantes. Nos lois actuelles se prêtent très facilement
à des classements dichotomiques qui permettent de ranger, par exemple,
tous les travailleurs admissibles à la syndicalisation dans le camp des
opprimés et des exploités, et tout ce qu'il reste,
c'est-à-dire souvent les éléments patronaux, dans la
rocaille des exploiteurs. Mais c'est là une manière fausse,
artificielle, souvent très injuste de classer les gens.
Quoi qu'on en dise, le patronat, dans toute société, forme
un réservoir de leadership, d'expertise et d'expérience
absolument indispensable à la marche de l'économie et, partant,
au maintien d'une stabilité minimale. On peut s'interroger à
l'infini sur le mode de désignation des patrons, sur la qualité
qu'il faut exiger d'eux, sur leur statut juridique, etc. On doit même
protéger la société contre les abus auxquels leurs
pouvoirs les exposent. En dernière analyse, ils sont néanmoins un
rouage vital de toute société libre. Ceux qui prétendent
les éliminer aspirent, le plus souvent, sans s'en apercevoir, à
les remplacer. Et, dans cette étude du Conseil du patronat, on nous
citait quelques chiffres sur ce que pensent 112 entreprises
considérées qui ont répondu et qui embauchent au
Québec 186 000 employés. À la question sur
l'évaluation faite de la situation actuelle au Québec, 64% nous
répondent que les conditions économiques sont mauvaises; 36%,
passables et 0%, bonnes. Le climat social: 44% nous disent que le climat social
est mauvais; 51%, passable, et 5%, le climat social est bon.
Quant au contexte politique, 71% nous disent: contexte politique
mauvais; 26%, passable, et 3%, un bon contexte politique. Un peu plus loin,
lorsqu'on leur demande de comparer le climat pour l'entreprise au Québec
à celui qui prévaut ailleurs
au Canada, il est vu par 1% des répondants comme meilleur au
Québec que ce qui prévaut ailleurs au Canada, par 11% comme
semblable et par 88% comme moins bon que ce qui prévaut au Canada. Or,
les cinq facteurs considérés comme les plus critiques par le
Conseil du patronat, quant à l'influence négative qu'ils ont sur
l'activité économique actuelle du Québec, sont, le premier
facteur, la conjoncture économique en général; le
deuxième facteur, et tout près, ce sont les politiques du
gouvernement provincial; le troisième facteur, la politique linguistique
du Québec; le quatrième facteur, l'inflation, et le
cinquième facteur, la législation et la réglementation du
gouvernement provincial. C'est dire que trois des cinq facteurs les plus
importants qui sont vus comme une influence négative sont directement du
domaine du gouvernement provincial et peuvent se corriger assez facilement par
des décisions du gouvernement du Québec.
Bien sûr, le gouvernement pourra dire que l'étude du
Conseil du patronat du Québec n'était pas scientifique. Nous
sommes d'accord et même les auteurs sont d'accord. Mais, quand
même, cette étude nous indique une tendance importante à
l'insécurité chez les chefs d'entreprises du Québec, chez
ceux qui, justement, peuvent investir des sommes d'argent considérables
immédiatement et répondre à ce besoin de création
d'emplois chez nous.
Lorsque le Conseil du patronat nous avise que $600 millions ne seront
pas investis au Québec, cette année, à cause du climat
politique, c'est une indication qui mérite d'être prise au
sérieux et, pour sûr, des redressements importants s'imposent.
Le gouvernement québécois rêve d'une
société de concertation, et nous sommes d'accord. Mais, dans
cette société de concertation, il doit y avoir une place
indispensable pour un patronat à la fois rentable et respecté, et
c'est totalement impossible de rejeter du revers de la main cette
société de concertation, le Conseil du patronat. Chaque fois
qu'un groupe important de cette société veut faire
connaître ses opinions, si ces opinions diffèrent de celles du
gouvernement, le gouvernement les rejette du revers de la main sans même
les prendre au sérieux.
Je crois qu'il est important de se servir de ces chiffres pour
l'indication qu'ils nous donnent. Il ne sert à rien de vouloir dire que
ces chiffres ne sont pas réalistes, il s'agit de les prendre comme une
indication et de prendre des décisions pour ce que nous ferons demain
pour corriger cet état de fait réel qui existe au
Québec.
Une autre indication du malaise économique des entreprises, c'est
le chiffre des exportations de produits québécois. En 1976, 30%
de la production québécoise était expédiée
à l'extérieur du Québec, alors que ce chiffre, pour les
premiers mois de 1977, est maintenant de 23%. C'est une autre indication d'un
malaise immense concernant les produits québécois et, à
cet effet, Mme le Président, j'avais suggéré au
gouvernement, à l'occasion de ma réponse au discours inaugural,
la création d'une société de mise en marché des
produits du Québec pour l'étranger; cette société,
si on avait accepté sa formation, serait déjà à
l'oeuvre pour augmenter les expéditions québécoises hors
Québec et pour corriger cette très mauvaise situation que nous
connaissons présentement.
Bien sûr, il existe au ministère de l'Industrie et du
Commerce, une certaine aide aux industries pour l'exportation, mais, comme je
l'ai déjà dit à plusieurs reprises, cette aide est trop
compliquée pour la plupart de nos petites et moyennes entreprises et
nous ne pouvons déboucher sur rien de concret. Il s'agit de mettre en
marche un système, une société très simples,
grâce auxquels les grandes entreprises vont faire participer les petites
entreprises à l'exportation des produits du Québec.
Voilà maintenant que le Bureau de la statistique du Québec
nous informe cette semaine que le ralentissement de l'économie
québécoise en 1977 touchera la plupart des secteurs de
l'activité économique. C'est bien sûr, encore une fois,
avec d'autres statistiques que le gouvernement pourrait essayer de
détruire les chiffres produits par ses propres services. Le même
ministère nous produit des statistiques qui nous disent aujourd'hui que
l'économie au Québec va mal, que l'économie ralentit au
Québec. Le même ministère nous a produit les comptes
économiques; parce que les comptes économiques plaisaient au
gouvernement, c'étaient de bons chiffres; parce que les
prévisions économiques ne plaisent pas, ce sont des mauvais
chiffres. Il faudrait au moins savoir juger réellement de la
portée et de la qualité des chiffres qui sont fournis par les
services gouvernementaux. Mais, pour ceux qui ne sont pas aveugles, du point de
vue économique, ou qui ne sont pas naïfs au point de ne pas voir
les vrais problèmes, les prévisions économiques du BSQ
sont malheureusement bien exactes.
Encore une fois, Mme le Président, au lieu de dépenser les
énergies du gouvernement à prouver que le rapport du BSQ n'est
pas exact, nous devrions consacrer nos qualités et nos énergies
à résoudre les problèmes qui apparaissent fondamentaux
dans ce rapport économique fort bien préparé, à mon
point de vue. J'ai moi-même, depuis plusieurs semaines, rencontré
un très grand nombre d'hommes d'affaires québécois,
beaucoup de cultivateurs et beaucoup de travailleurs un peu partout à
travers le Québec et tous sont inquiets de l'avenir immédiat du
Québec, si le gouvernement ne donne pas véritablement un coup de
barre à-son orientation. J'encourage le ministre de l'Industrie et du
Commerce ou d'autres ministres à aller eux-mêmes rencontrer les
hommes d'affaires, les travailleurs, les cultivateurs, les professionnels et
à s'informer auprès d'eux de ce qu'ils pensent de l'état
de l'économie québécoise à l'heure actuelle.
Suivez mon expérience et vous reviendrez ici au Québec et
à Québec avec la volonté ferme de prendre des
décisions pour corriger cette mauvaise situation qui existe à
l'heure actuelle. Il ne s'agit pas ici de vouloir suggérer au
gouvernement de tout nationaliser sous prétexte que la nationalisation
guérira tous les problèmes et que nous pourrons engager beaucoup
plus de travailleurs
québécois. Au contraire, l'expérience de cette
nationalisation au Québec, à moins d'être dans un
marché captif, est vraiment désastreuse et, justement cette
semaine, nous avons pu analyser le dossier de SIDBEC et ainsi réaliser
que les emplois créés chez SIDBEC coûtent environ $10 000
par année aux contribuables québécois.
Nous nous élevons donc contre toute autre politique de
nationalisation sous prétexte de créer des emplois puisque ce
sera plutôt de créer des emplois d'entreprises qui vivront de
l'aide sociale du gouvernement du Québec. Le présent gouvernement
québécois avait la confiance de la population le 16 novembre
1976, et nous, de l'Union Nationale, nous l'avions compris. Nous étions
prêts à collaborer avec ce gouvernement, à compter du 16
novembre au matin, afin de répondre aux besoins urgents du Québec
et de la population, et je crois que nous l'avons prouvé depuis cette
date. Mais, quelques mois plus tard, les Québécois perdent de
plus en plus la confiance qu'ils avaient dans ce présent
gouvernement.
Nous atteignons maintenant le seuil de la non-crédibilité,
à un point tel que, si la situation économique ne change pas
d'ici quelques mois de façon très importante, le point de
non-retour pour ce qui est de la crédibilité du gouvernement sera
atteint et jamais plus les Québécois ne pourront faire confiance
au présent gouvernement du Québec. Ce qui est pire, c'est
qu'avant le 15 novembre l'actuel gouvernement québécois a
créé de très nombreux espoirs de vrai gouvernement, de bon
gouvernement provincial, de gouvernement qui pouvait prendre des
décisions et bien administrer le Québec, corriger la situation
économique malsaine qui existait sous l'ancien gouvernement. Mais ce qui
est pire, justement, c'est que ces espoirs créés chez beaucoup de
Québécois sont maintenant déçus et seront
déçus à un tel point que beaucoup de nos jeunes
Québécois n'auront peut-être plus jamais confiance à
un parti politique.
Il faut donc que le gouvernement du Québec soit très
honnête, à l'heure actuelle, qu'il réalise les torts
considérables causés à l'économie et prenne des
décisions importantes pour répondre au mandat clair de vrai bon
gouvernement provincial qu'il a reçu le 15 novembre dernier.
Bien sûr, nous pourrions dire que ce serait excellent pour l'Union
Nationale si le gouvernement actuel atteignait un point de non-retour
rapidement. Mais, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, dans cette
Chambre et à l'extérieur, j'ai été élu pour
servir les intérêts de tous les Québécois et
Québécoises sans exception et pour faire passer les
intérêts du Québec avant les intérêts de mon
parti. Voilà pourquoi j'essaie, par tous les moyens possibles, d'aider
le présent gouvernement à donner au Québec une bonne
administration, car, de l'avis de nombreux gestionnaires et administrateurs
compétents, si nous allions vivre encore deux ou trois ans sous ce
régime indécis et inactif au point de vue économique, les
Québécois auraient à en payer la note pour au moins une
génération.
Afin de continuer le style positif qui a toujours marqué l'Union
Nationale depuis notre élection, je veux ici faire des suggestions
claires et précises au gouvernement du Québec afin de
créer ce climat politique sain, ce climat économique favorable
aux investissements et à la création d'emplois au Québec.
Quelques suggestions concrètes pour créer un climat politique
sain. Première suggestion: surseoir à la mention ou à
l'idée de l'indépendance du Québec pour une période
de trois ans et en aviser la population québécoise. Surseoir pour
une période de trois ans, cela signifie qu'on dit maintenant: On donne
au Québec un vrai, un bon gouvernement provincial, ce pourquoi nous
avons été élus, et, dans trois ans, nous reparlerons de
l'indépendance du Québec.
Deuxième suggestion: corriger la Charte de la langue
française pour en faire une véritable charte linguistique du
Québec où tous les Québécois, sans exception, en
grande majorité, se reconnaîtront, laquelle charte linguistique
pourra motiver nos concitoyens à une meilleure participation à la
vie politique québécoise.
Troisième suggestion pour corriger le climat politique:
collaborer comme un vrai bon gouvernement provincial avec les autres
gouvernements des provinces canadiennes et le gouvernement canadien à
trouver une formule de fédéralisme renouvelé qui sera
offerte comme choix possible au peuple du Québec lorsque le temps du
référendum, à la fin du présent mandat normal du
gouvernement, viendra. Je ne dis pas de mettre de côté
l'idée du référendum; je dis tout simplement de surseoir
à cette idée et de collaborer pour trouver une formule de
fédéralisme renouvelé qui sera offerte, comme la formule
de souveraineté-association, à la fin du mandat normal du
présent gouvernement.
Quatrièmement, annoncer la formation d'un conseil du
référendum apolitique j'ai déjà fait cette
suggestion, mais j'y reviens composé de gens qui ne peuvent
être soupçonnés de partisanerie politique, lequel conseil
aura comme mandat de voir à l'organisation du référendum
et de voir aussi à poser la ou les questions appropriées,
claires, nettes et précises. Ce sont quatre suggestions que je fais
aujourd'hui au gouvernement afin de créer un climat politique sain au
Québec.
Deuxième climat à corriger, c'est le climat
économique. Créer un climat économique favorable. Bien
sûr, je compte que le ministre d'État au développement
économique publiera son livre vert sur les orientations
économiques du Québec le plus rapidement possible. Il nous avait
parlé de l'automne. Le plus tôt sera le mieux pour les
investisseurs qui pourront finalement savoir dans quelle direction le
gouvernement veut aller. J'espère qu'à l'intérieur de ce
livre vert sur l'orientation économique nous aurons un chapitre
spécifique sur le domaine du tourisme en particulier, qui est une
industrie très importante au Québec et qui relève, je
crois du ministre d'État au développement économique. Ce
serait important de considérer le tourisme comme une des bonnes
industries du Québec.
Surtout, j'espère qu'on aura un chapitre complet sur
l'orientation de l'industrie minière au Québec et, en
particulier, spécifiquement sur le domaine de l'amiante.
J'ai aussi des suggestions concrètes, comme j'en ai faites pour
le climat politique, quant au climat économique. Premièrement,
pour créer un climat économique sain, l'indexation des
impôts des particuliers rétroactivement au 1er avril 1977, et ce
afin d'augmenter le pouvoir d'achat des particuliers, des
Québécois et d'ajouter immédiatement, par les effets
multiplicateurs, une somme, que j'ai calculée d'environ $200 millions,
qui pourrait être injectée immédiatement dans
l'économie québécoise. C'est important, pour les
Québécois qui travaillent, de voir l'indexation de leur
impôt; c'est d'ailleurs dans le programme du Parti
québécois. Il serait facile de prendre la décision
aujourd'hui pour stimuler l'économie du Québec, d'autant plus que
$50 millions ou $60 millions pourraient probablement revenir indirectement au
Trésor québécois.
Deuxième suggestion, un rabais d'impôt à toute
entreprise du Québec, un rabais allant jusqu'à 75% des
impôts dus pour les années 1977, 1978 et 1979, à la
condition du réinvestissement de la totalité des profits de ces
entreprises au Québec, les profits avant impôt, bien sûr.
Alors, rabais d'impôt pour toutes les entreprises du Québec, et
permission d'amortissement accéléré pour toute entreprise,
petite, moyenne ou grande, allant jusqu'à 150% des investissements faits
avant le 31 décembre 1978 pour encourager les entreprises à
investir rapidement au Québec. Le but pour lequel j'ai mis trois ans un
peu partout, c'est que je connais beaucoup d'entreprises qui vont
peut-être prendre le risque de payer leurs investissements et de tout
faire dans l'espace de trois ans, mais, au moins, on aura de très
nombreux Québécois qui pourront travailler. Après, on
décidera, dans trois ans, ce que, au Québec, on veut faire. Ma
philosophie se base sur trois ans de calme politique, trois ans d'expansion
économique.
Une autre suggestion que j'ai à faire est une
déductibilité spéciale des impôts des particuliers
pour les employés de petites et moyennes entreprises, dans ce
cas-là, dans lesquelles 25% du capital-actions seront détenus par
les travailleurs actifs de l'entreprise, pour encourager les travailleurs
à participer à la vie économique de leur entreprise. Au
moins, il y a de bonnes suggestions, M. le ministre.
M. Landry: C'est dans un esprit positif.
M. Biron: Une autre suggestion positive: remboursement aux PME de
toute augmentation du salaire minimum, décrétée par le
gouvernement québécois, du 1er juillet 1977 jusqu'au 1er juillet
1980. Je m'explique rapidement. Le salaire minimum est une mesure sociale qui
doit être payée par toute la population et non pas seulement par
un secteur d'activité de l'économie. Si nous voulons augmenter le
salaire minimum, nous pourrions éventuellement l'augmenter
peut-être jusqu'à $5 ou $6 l'heure facilement à condition
que cette mesure sociale soit payée véritablement par tous les
Québécois. C'est dans ce but particulier que je dis remboursement
aux PME de toute augmentation de salaire minimum, car je considère que
les grandes entreprises, les nationales et les multinationales, paient pour
presque toutes ces entreprises en haut du salaire minimum. Je ne connais pas
d'entreprise nationale ou multinationale qui paie le salaire minimum à
l'heure actuelle. Ce seraient les entreprises québécoises qui en
profiteraient, mais ce serait aussi une augmentation de "incentive" pour ces
entreprises afin de produire davantage et d'engager beaucoup plus de
Québécois et de Québécoises.
Finalement, une aide ou un subside tout à fait spécial aux
agriculteurs ou aux coopératives d'agriculteurs pour la
commercialisation et la production de leurs produits agricoles et, en
particulier, une aide tout à fait spéciale dans le secteur de
Montréal, où, maintenant, c'est un secteur désigné,
pour la construction d'entrepôts et d'usines servant à la
déshydratation et à la congélation des produits agricoles.
On sait qu'au Québec on se spécialise dans l'importation de 40%
à 50% de nos produits agricoles; on pourrait facilement en produire
beaucoup plus au Québec à la condition d'avoir ici des
entrepôts et des usines de déshydratation et de congélation
pour pouvoir produire, dans l'espace de trois ou quatre mois qu'est
l'été québécois, et pouvoir vendre ces produits sur
une période de douze mois.
Ma dernière suggestion concerne l'habitation. J'ai traité,
tout à l'heure, de l'habitation, j'ai dit que nous étions en
retard, à Montréal. C'est vrai et depuis plusieurs
années.
J'ai des chiffres, en particulier, vis-à-vis des habitations
à loyer modique. Au cours des dernières années, nous avons
eu des demandes au gouvernement du Québec, pour 11 600 logements en
1975, 9700 en 1976 et 11 400 en 1977. De ces demandes, alors que de 1969
à 1974, nous octroyions au Québec 3500 logements en moyenne, on
nous a dit ce matin qu'en 1974 on avait permis 2000 logements et en 1975 nous
n'avions donné la permission que pour 113 logements, en 1976, à
cause de problèmes à la Société d'habitation nous
n'avons pas donné de permission de construire d'unités de
logement.
Alors, nous sommes véritablement en retard et cela ne
dépend pas du gouvernement actuel, je le comprends, mais quand
même il faut prendre des décisions pour l'avenir là-dessus.
On est véritablement en retard dans ces demandes de construction et dans
ces constructions d'habitations à loyer modique. Je crois que le
gouvernement devrait décider de mettre un programme en marche pour la
construction de 10 000 unités de logement à loyer modique
c'est ce qu'on nous demande par année pendant trois ans, afin de
répondre aux demandes qui sont faites chaque année. Ainsi,
beaucoup de petites municipalités pourraient avoir leurs logements,
leurs habitations à loyer modique. C'est sûr que ce sera un
coût à la longue pour le gouvernement, mais au moins dans
l'im-
médiat, nous pourrons relancer l'économie par l'industrie
de la construction au Québec.
En plus il faudrait avoir un projet aussi pour aider l'autre
construction, parce qu'on a besoin au Québec, à mon point de vue,
de 65 000 unités de logement par année et il faudrait pour cela,
permettre la déductibilité de l'amortissement et aller
jusqu'à 10% par année pour les résidences multiples. C'est
déjà permis pour certaines résidences multiples, mais il
faudrait inclure d'autres résidences multiples, pour les investisseurs,
pour les professionnels, les médecins ou avocats ou autres qui veulent
investir dans la construction d'habitations multiples. Il faudrait qu'ils
puissent déduire cet amortissement du revenu annuel de leur profession,
pour une période de cinq ans, et surtout étendre la garantie que
la Loi d'exception de l'impôt sur la dépréciation des
constructions permet présentement.
On a une loi qui va jusqu'en décembre 1977. Il faudrait donner la
garantie aux constructeurs qu'elle puisse être prolongée jusqu'en
décembre 1979. Si on attend à la fin de décembre, on va
bloquer tous les projets qui sont sur les tables de construction de la part de
nos constructeurs. Ce serait bon d'aviser immédiatement que nous voulons
étendre cette loi d'exception d'impôt pour la construction, pour
les constructeurs du Québec, pour faciliter aussi les modalités
d'emprunt et de garantie de prêts de tous ceux qui veulent emprunter de
la Société d'habitation du Québec et divulguer davantage
cette loi d'exception de l'impôt vis-à-vis des hommes d'affaires.
Beaucoup d'hommes d'affaires malheureusement ne savent pas qu'ils peuvent
profiter de cette loi d'exception d'impôt, par la construction de maisons
d'habitation, de blocs d'appartements, comme on les appelle
communément.
Assistance mensuelle pour payer les déficits d'exploitation des
résidences multiples. Déjà la Société
centrale d'hypothèques et de logement a un programme là-dessus.
On donnait $100 autrefois, on a baissé à $75 et on m'avise, tout
dernièrement, aussi que la Société centrale
d'hypothèques et de logement ne veut plus donner de garantie de
prêt, alors il y aura certainement des négociations, au lieu de
lever les bras en l'air puis de dire: On ne peut rien faire, on peut dire: Au
moins le ministre va négocier. Le responsable de la
Société d'habitation du Québec peut facilement
négocier avec la Société centrale d'hypothèques et
de logement, pour continuer ces garanties de prêts, autrement l'industrie
de la construction, avec les nouvelles que nous avons dernièrement de la
Société centrale d'hypothèques et de logement, va
arrêter complètement.
Puis, pourtant, au Québec, nous avons la Société
d'habitation du Québec qui peut continuer à garantir des
prêts aux constructeurs d'habitations. Il faut bien sûr aussi
réviser l'aide accrue à la construction d'égouts et
d'aqueducs municipaux; parce qu'on a changé dernièrement ces lois
et nous devrions revenir à une aide pour les constructeurs
vis-à-vis des égouts et des aqueducs municipaux.
Voilà, Mme le Président, quelques-unes des recommandations
que j'ai voulu faire au gouvernement du Québec, en toute ouverture
d'esprit, en insistant fortement pour que ces recommandations ne soient pas
acceptées à la pièce, mais bien dans leur ensemble,
puisqu'elles forment des conditions essentielles pour créer cet
environnement qui favorisera la relance économique. Si rien n'est fait
rapidement, la situation va continuer de se détériorer à
un point tel que le climat politique deviendra dangereux au Québec. La
vie économique du Québec d'aujourd'hui peut se comparer à
une locomotive qui allait à pleine vapeur il y a une dizaine
d'années, mais qui a commencé à ralentir depuis
déjà plusieurs années et qui malheureusement a des
tendances à vouloir s'arrêter complètement.
Ce sera véritablement très difficile et très long
de reprendre notre vitesse de croisière normale. Il faut arrêter
de mettre des "plasters" un peu partout, il faut arrêter de rêver
en couleurs, il faut arrêter de trouver des excuses, il ne faut plus
poser des gestes timides et incohérents, mais il faut un plan
d'ensemble, vigoureux, pour la relance économique, il faut un plan
d'action, il faut des décisions.
Nous croyons qu'un peuple économiquement fort peu beaucoup mieux
défendre son identité et s'épanouir politiquement. Ici, je
fais appel au ministre pour que, dans toutes ses déclarations, dans
toutes ses actions, il y ait davantage de prudence, de cohérence et que
ses actions, ses déclarations témoignent véritablement de
son véritable souci de la portée économique, pour le
Québec, des actions du gouvernement du Québec.
Devant l'image peu rassurante mais constructive, je pense, que je viens
de faire de la situation économique, devant le désarroi
économique actuel, je réclame du gouvernement qu'il pose
dès maintenant les gestes qui s'imposent pour corriger la situation
économique du Québec. Il presse que ce gouvernement, élu
pour être un vrai bon gouvernement provincial, pour corriger les
problèmes qui existaient avant le 15 novembre et Dieu sait qu'ils
étaient nombreux révise l'ensemble de ses politiques
fiscales contenues dans le budget de façon à permettre aux
individus une meilleure disponibilité de dépenses et aux
entreprises des facilités accrues d'investissement.
Nous avons absolument et rapidement besoin d'une relance
économique convenable et immédiate. Je propose, à la suite
de mon discours, que par suite de la révélation publiée
notamment par le Bureau de la statistique du Québec, cette
Assemblée blâme le gouvernement d'avoir négligé de
présenter en priorité une politique globale de relance
économique et d'avoir ainsi permis que la situation désastreuse
de l'économie qui prévaut au Québec depuis plus d'un an
s'aggrave davantage. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Rodrigue Tremblay
M. Tremblay: Mme le Président, il me fait plaisir
d'intervenir sur la motion du chef de l'Union
Nationale concernant ce qu'il appelle la situation économique qui
prévaut au Québec depuis un an et sur la priorité d'une
politique globale de relance économique.
Cette motion soulève des questions de faits et des questions de
principe dont la logique, je l'espère, n'échappe point au chef de
l'Union Nationale, puisque la mise en oeuvre d'une telle politique
économique globale par le gouvernement du Québec exigerait que ce
gouvernement ne soit pas un simple gouvernement provincial, donc tronqué
et dépendant, mais un véritable gouvernement national doté
de tous les attributs et pouvoirs d'un gouvernement national. Si le chef de
l'Union Nationale et les autres membres de l'Opposition se mettaient d'accord
sur cette nécessité, ce débat n'aurait pas
été inutile. En cela, il serait sans doute secondé par le
député de Rouyn-Noranda qui je vois qu'il est absent
aujourd'hui a déjà proposé que le Québec
rapatrie d'Ottawa toute sa fiscalité, toute sa politique commerciale,
toute sa politique monétaire et toute sa politique d'immigration. En un
mot, que le gouvernement du Québec soit le gouvernement d'un État
souverain.
J'aurais préféré, Mme le Président, pour ma
part, que le débat d'aujourd'hui soit plus concret et moins
théorique et politique. En fait, j'aurais préféré
que cette Chambre, au lieu de s'éterniser sur les débats mis
à l'ordre du jour par des motions dilatoires, étudie en
deuxième lecture mon projet de loi no 48 qui vise, justement, à
établir une politique de relance industrielle pour nos 6000 petites et
moyennes entreprises et une politique de développement industriel
régional.
Mme le Président, 6000 entreprises du Québec attendent que
ce projet de loi soit adopté par l'Assemblée nationale pour se
constituer des fonds d'investissement afin de pouvoir accélérer
leur expansion et rendre l'économie du Québec plus dynamique.
Je ne nie pas l'utilité d'un débat comme celui
d'aujourd'hui. Je dis cependant qu'il serait plus logique d'approuver les
projets de loi du gouvernement pour la relance industrielle, plutôt que
de discuter la prétendue inexistence de ces programmes.
Le motion du chef de l'Union Nationale fait grand état de
prétendues révélations que le Bureau de la statistique du
Québec aurait publiées dans son dernier bulletin
prévisionnel. Or, en réalité, ce bulletin ne fait que
réorganiser des renseignements statistiques déjà connus,
de sorte que les séries statistiques publiées ne contiennent rien
de nouveau, si ce ne sont les mises à jour des projections
déjà diffusées dans le passé.
Il est donc faux de dire, Mme le Président, que le gouvernement
considère les Comptes économiques comme étant de la bonne
statistique et les prévisions du Bureau de la statistique comme
étant de la mauvaise statistique. Il s'agit, effectivement, de deux
publications officielles que le gouvernement entérine parce que ce sont
des publications sérieuses.
Il faut, cependant, une acrobatie intellectuelle bien tortueuse pour
voir dans ce bulletin, une quelconque détérioration de la
situation économique relative du Québec. D'autant plus que la
dernière enquête de Statistique Canada sur le chômage, pour
le mois de juin, indique que le Québec est l'une des rares
régions au Canada où le chômage a tendance à se
résorber.
La motion du chef de l'Union Nationale fait état d'une situation
qui prévaudrait depuis plus d'un an. Je sais gré au chef de
l'Union Nationale d'avoir pris soin de ne pas insinuer que la situation
économique aurait pu s'être détériorée depuis
novembre dernier car il sait pertinemment qu'il n'en est rien.
La véritable hausse du taux de chômage au Québec
s'est produite, en effet, de juin à octobre de l'an dernier, quand le
taux désaisonnalisé est passé brusquement de 8% en juin
à 10,1% en octobre. Le déclenchement des élections par le
gouvernement précédent ne fut sans doute pas étranger
à cette hausse subite du taux de chômage.
Depuis, par contre, le taux de chômage au Québec a eu
légèrement tendance à baisser tandis qu'il continuait de
s'accroître dans l'ensemble du Canada. Le taux de chômage dans
l'ensemble du Canada est, en effet, passé de 7,3% en novembre 1976
à 8% en juin de cette année, tandis que le taux de chômage
au Québec s'abaissait à 9,7% aussi en juin de cette
année.
Pourrais-je rappeler et souligner aux membres de cette Assemblée
qu'il s'est créé 103 000 nouveaux emplois au Québec depuis
novembre dernier, ce qui représente, même sur une base
désaisonnalisée, 41 000 nouveaux emplois? De juin à
octobre de l'année dernière, cependant, l'emploi s'est
abaissé au Québec de 73 000, ou de 26 000 sur une base
désaisonnalisée. Je pense que ces chiffres illustrent vraiment
que les problèmes auxquels fait allusion la motion du chef de l'Union
Nationale se sont vraiment produits l'an dernier, mais ne se sont certainement
pas accélérés depuis que le gouvernement est au
pouvoir.
Mme le Président, il serait, cependant, incongru et injuste de
faire porter à l'ancien gouvernement la responsabilité de la
montée subite du chômage l'an dernier. Il est vrai qu'à la
fin du feu d'artifice des dépenses olympiques, l'an dernier, il y a eu
une rechute de l'activité économique et que cette fin des
activités de construction olympique y est pour quelque chose. En effet,
les projets grandioses créent une prospérité qui est
toujours artificielle et qui, inévitablement, s'éteint comme un
feu de paille lorsque le projet est terminé.
En réalité, cependant, si on considère que ces
pertes d'emplois se sont concentrées surtout dans des secteurs comme
ceux du textile, du vêtement, de la chaussure et du meuble, secteurs qui
sont inondés par les importations, force nous est de regarder un peu
plus loin que le seul gouvernement du Québec, d'étudier et
d'analyser les politiques fédérales en matière
économique.
Le gouvernement fédéral a adopté, il y a quelques
années, des politiques que je qualifierais d'irresponsables afin de
faire disparaître ces secteurs traditionnels au Québec, en s'en
servant pour faire de l'aide étrangère, en abaissant les tarifs
et les contingentements.
M. Marchand: Question de règlement, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier.
M. Marchand: Pourrais-je vous faire remarquer qu'il n'y a pas
quorum?
Mme le Vice-Président: Un instant, quand vous avez
demandé tantôt s'il y avait quorum, il y avait amplement quorum.
Nous allons vérifier immédiatement, M. le député de
Laurier.
M. Marchand: Je m'excuse, Madame, il n'y avait pas quorum. Il y
avait 25 personnes à l'Assemblée nationale lorsque je l'ai
demandé. Il y en a 28 actuellement.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier, nous vérifions immédiatement.
M. Marchand: Vous n'avez pas de remarques à faire...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier, je vous demanderais d'être un peu plus poli, s'il vous
plaît! Nous avons quorum. M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.
À l'ordre, M. le député de Laprairie!
M. Tremblay: Mme le Président, avant d'être
interrompu, je faisais allusion à la cause principale des
problèmes d'emploi dans le secteur manufacturier au Québec, cause
qui est rattachée, à mon avis, à la politique commerciale
que poursuit depuis quelques années le gouvernement
fédéral et qui met en péril des secteurs importants de
notre activité manufacturière au Québec, soit ceux du
textile, du vêtement, de la chaussure et du meuble. Ce sont en effet les
secteurs où, l'an dernier, le Québec a subi des pertes d'emplois
importantes en plus du ralentissement consécutif à la fin des
travaux olympiques. Nous avons là les deux causes principales du
ralentissement économique qui s'est produit l'an dernier et qui s'est
poursuivi cette année.
Or, le gouvernement fédéral a adopté dans ces
domaines, au cours des années passées, des politiques qui
visaient à faire disparaître ces secteurs sans proposer des
politiques de manière à les remplacer, de manière à
ne pas laisser le taux de chômage s'accroître à des niveaux
intolérables. Le gouvernement fédéral s'est servi de ces
secteurs par des abaissements tarifaires et par des abaissements de
contingentement, de manière à faire de l'aide
étrangère et à encourager l'entrée des importations
au Canada dans ces secteurs, contrairement à ce que faisaient, à
la même époque, des pays comme les États-Unis et des
groupements économiques comme celui du marché commun
européen.
Aujourd'hui, le Québec paie les conséquences de cette
irresponsabilité et de cette négligence du gouvernement
fédéral. Tous les députés ont reçu il y a
quelques mois, Mme le Président, un document de 200 pages sur
l'industrie québécoise du textile préparé par mon
ministère. Pour que la politique fédérale du textile
profite davantage aux producteurs québécois, nous avons alors
formulé six recommandations précises de manière à
redonner à ces producteurs une part importante du marché
canadien.
J'ai personnellement rencontré mon homologue
fédéral à ce sujet et j'attends encore des mesures
précises du gouvernement fédéral dans ce secteur. Je n'ai
pas besoin de rappeler que le Québec ne contrôle pas
l'entrée des produits sur son territoire et que, comme gouvernement
provincial, nous ne pouvons que faire des pressions en espérant que nous
soyons entendus et écoutés avant que notre secteur du textile
s'effondre totalement. Voilà la vraie tragédie, Mme le
Président.
Tant que le gouvernement du Québec n'aura pas voix au chapitre
dans l'élaboration de ces politiques commerciales vitales pour la
prospérité industrielle du Québec, le Québec et son
gouvernement continueront d'être dépendants et vulnérables
des politiques néfastes des autres. Si c'est contre cet état de
choses déplorable de dépendance que le chef de l'Union Nationale
en a, je suis certain que tous les membres de cette Assemblée feront
l'unanimité pour que des gestes soient posés afin de changer une
situation politique de fait qui dessert le Québec.
En terminant, Mme le Président, j'aurais pu rappeler combien les
politiques économiques globales de stabilisation du gouvernement
fédéral sont rarement adaptées aux besoins de
l'économie québécoise. Les études disponibles sur
ce sujet démontrent que, dans le passé, ces politiques ont
desservi l'économie québécoise six fois sur dix,
principalement parce que le cycle conjoncturel de l'économie ontarienne,
sur laquelle le gouvernement fédéral fonde ses politiques de
stabilisation, diffère souvent du cycle propre à
l'économie québécoise.
En effet, c'est l'éternel et insoluble problème des
économistes fédéraux, de concilier l'optimum national
"coast to coast" et la maximisation des économies régionales,
comme celle du Québec, avec les politiques fiscales et les politiques
monétaires et les politiques de taux de change. Une étude
publiée par l'OPDQ, sous la direction du professeur Yves Rabeau, a
nettement mis en évidence ce problème puisqu'à neuf
reprises, au cours de la période de quinze ans s'étendant de 1955
à 1969, les besoins de la conjoncture québécoise
différaient des besoins de l'ensemble de l'économie canadienne.
Or, seules les politiques globales du gouvernement fédéral ont
été appliquées avec le résultat que
l'économie québécoise a été laissée
pour compte.
En conclusion, Mme le Président, le chef de l'Union Nationale et
d'autres membres de l'Opposition sont prompts à lire les statistiques et
à dramatiser certaines manchettes à sensation. Il leur reste, par
contre, pour la pertinence des travaux de cette Assemblée et pour la
défense des intérêts du Québec, à comprendre
la toile de fond historique où se débat l'économie
québécoise. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Raymond Garneau
M. Garneau: Mme le Président, la motion
présentée par le chef reconnu de l'Union Nationale, du parti
reconnu de l'Union Nationale, traduit certainement une préoccupation de
plusieurs députés de cette Chambre, mais, pour peu que nous en
sortions, traduit certainement le climat d'incertitude et d'inquiétude
qui existe dans l'ensemble de la population du Québec et en particulier
dans le milieu des affaires. Ce qui surprend de la motion du chef de l'Union
Nationale, c'est qu'elle soit présentée justement par ce parti
politique, qui, au cours des années où il a eu à
administrer les affaires publiques québécoises, de 1966 à
1970, n'a laissé aucun record qui puisse, aujourd'hui, l'amener à
blâmer qui que ce soit du côté de la gérance de
l'économie. Il n'y a rien de plus semblable que la gérance de
l'économie dans les dernières années de l'Union Nationale
et celle des premières années du Parti québécois;
le PQ et l'Union Nationale, quant à moi, c'est du pareil au
même.
En fait, on se rappelle facilement quelle était la situation
économique qui prévalait au printemps de 1970 lorsque nous ont
quittés ces messieurs de l'Union Nationale, qui sont rapides,
aujourd'hui, pour faire des blâmes et lancer des suggestions. Quelle
était donc cette situation de l'économie et des finances
publiques?
M. Biron: On n'était pas là, nous.
M. Garneau: Non justement, mais, Mme le Président, c'est
bien facile pour un parti politique de se réclamer d'un nom, mais de
rejeter les précédents. Mme le Président, quelle
était cette situation de l'économie du Québec en 1970, du
temps de ce parti de l'Union Nationale auquel font référence
souvent nos honorables amis de la gauche et auquel se réfère
souvent le chef de l'Union Nationale; il l'a fait, justement, dans son
exposé tout à l'heure. Quelle était la situation de
l'économie? Quelle était la situation de la caisse? Quelle
était la situation de l'emploi? Quelle était la situation des
taux d'intérêts payés sur le marché? On va analyser
cela ensemble et je pense que vous allez constater que votre parti est dans de
bien mauvais draps pour donner des leçons même aux
péquistes qui se sont placés dans un bourbier incroyable, ce qui
aura pour les travailleurs québécois des conséquences
considérables.
Le gouvernement actuel, dans le cadre de l'administration de
l'économie, se conduit exactement comme s'était conduit le parti
de l'Union Nationale de 1966 à 1970. Comme je le disais, le PQ et
l'Union Nationale, c'est presque du pareil au même. D'ailleurs, plusieurs
des membres ont changé de parti et se sentent aussi à l'aise
à un endroit qu'à l'autre. Je vois le sourire du
député de Richelieu et probablement je pourrais reconnaître
le sourire du député de Prévost. En fait, un certain
nombre d'entre eux, se sentent aussi à l'aise d'un côté
comme de l'autre. Le député de Saint-Jean aussi. Mon doux, le
député de Taillon, lui, cela fait longtemps qu'il est parti. Il a
sauté tout un laps de temps. Il aurait dû revenir aux politiques
économiques du gouvernement dont il faisait partie.
Dans le fond, quand je dis que PQ et Union Nationale, c'est du pareil au
même, égalité ou indépendance, séparation ou
association, appelez cela comme vous voulez, c'est du pareil au même, et
les effets sur l'économie sont identiques. On n'a qu'à voir ce
qui se passe.
Quand on regarde la politique linguistique, le projet de loi no 85
rejeté, et la loi 63 de l'Union Nationale, le projet de loi no 1 du PQ
rejeté, et le projet de loi 101, qui n'est que du pareil au même,
confusion totale dans l'économie. Ce qui fait, Mme le Président,
que la situation économique qu'avait léguée l'Union
Nationale, en 1970, ressemble beaucoup à celle qui existe
présentement. Nous avons une loi 22 qui est dans les Statuts du
Québec. Nous avons le projet de loi no 1 qui est encore inscrit au
feuilleton. Nous avons le projet de loi no 101 qui est à l'ordre du jour
et, en plus de cela, pour "matcher" véritablement avec
l'incongruité des politiques de l'Union Nationale, le PQ édicte
des règlements d'inscription à l'école en vertu d'une
autre loi qui est la Loi de l'instruction publique. Une chatte y perdrait ses
petits et dans ce nid, personne ne veut entrer pour faire des
investissements.
M. le Président, dans la gérance de l'économie, les
parallèles qui pourraient être faits entre l'administration
péquiste actuelle et celle de l'Union Nationale sont nombreux, et ces
parallèles sont presque surprenants. Dans le domaine financier, par
exemple, sur la fin du régime de l'Union Nationale, à cause de
l'indécision en termes de politique constitutionnelle et de
l'indécision en termes de politique linguistique, ce qui n'a
guère changé avec aujourd'hui, du côté de ce parti,
si on regarde dans le domaine financier, l'écart entre les taux
d'intérêt payés par le Québec et ceux payés
par le gouvernement de l'Ontario avait atteint 1% de différence, alors
que cette différence était de 0,25% lorsque l'Union Nationale est
arrivée au pouvoir en 1966. L'administration libérale, en 1970,
avait non seulement hérité d'une situation économique
difficile dans laquelle l'Union Nationale avait plongé l'économie
du Québec, mais elle était également aux prises avec une
situation de caisse extrêmement serrée.
Mme le Président, cela a été ma première
préoccupation, lorsque j'ai assumé les fonctions de ministre des
Finances, de voir comment fonctionnaient les marges de crédit qui
étaient occupées à 100% par l'ancienne administration qui
avait dû déclencher vous vous en rappelez des
élections avant même de présenter un budget. Ce sont ces
messieurs aujourd'hui qui viennent faire des recommandations et des
suggestions, c'est à n'y rien comprendre. Les marges de crédit
étaient utilisées au maximum. Il fallait la nouvelle
administration pour convaincre les investisseurs d'acheter des obligations du
Québec et,
en même temps, les convaincre de venir investir dans l'industrie
parce que ces messieurs de l'Union Nationale, avec leur politique linguistique
extrêmement confuse, comme celle du gouvernement péquiste actuel,
avec égalité ou indépendance comme, aujourd'hui,
souveraineté-association, le mélange était tel que la part
des investissements manufacturiers du Québec, dans l'ensemble de
l'économie canadienne, était baissée à 19%
seulement des investissements manufacturiers canadiens faits au Québec
durant le temps et les dernières années de l'Union Nationale. En
1976, lorsque nous avons quitté l'administration, cette part des
investissements avait remonté à 27% en 1974, 26% en 1975. Quant
à l'écart dans les taux d'intérêts payés,
nous avions réussi à le ramener là où les gens de
l'Union Nationale l'avaient pris en 1970, c'est-à-dire à
0,25%.
Nous laissions à la nouvelle administration une caisse contenant
$205 millions de placements à court terme, sans compter les $210
millions des marges de crédit qui n'étaient pas utilisés
du tout, sans compter que l'Hydro-Québec avait en caisse $1,1 milliard
d'argent prêt à investir sans être obligée d'aller
une seule fois sur le marché financier. Et en plus de ce $1,1 milliard,
l'Hydro-Québec n'avait aucun cent d'utilisé dans sa marge de
crédit de $125 millions. Il y a une jolie différence entre
l'héritage que le PQ a pris le 15 novembre et celui que l'Union
Nationale nous avait laissé.
C'est pourquoi cela me surprenait d'entendre le chef de l'Union
Nationale, qui se réclame tellement de ses prédécesseurs,
faire la leçon. On reviendra tout à l'heure sur les suggestions
qu'il a faites et qui font preuve d'une méconnaissance de
l'activité économique dans au moins 50% de ses suggestions.
Les investissements manufacturiers, comme je l'ai dit, qui comptaient
seulement 19% sur la fin du régime de l'Union Nationale, et qui ont
atteint 27% en 1974, dans l'ensemble sous l'administration libérale,
l'économie du Québec avait atteint, de 1970 à 1975, en
particulier, des performances qui, pour la plupart des années, ont
dépassé les performances de la moyenne canadienne. Quand
j'entends les propos de l'actuel ministre de l'Industrie et du Commerce, qui
nous disait, tout à l'heure, que de telle date à telle date il y
avait eu 103 000 nouveaux emplois de créés, je vais reprendre
l'expression du député de Rouyn-Noranda pour lui répondre
qu'il y a certainement des Québécois qui travaillent et qui ne le
savent pas.
Le PQ et l'Union Nationale, en politique économique, c'est du
pareil au même. Gérer l'économie du Québec, c'est un
peu comme conduire un paquebot. Le paquebot a sa force motrice, sa
compétence technique, a sa connaissance de la mer, etc.; il y a donc des
possibilités qui sont données, au capitaine de ce navire, de
prendre des décisions. Il y a également des
événements sur lesquels il a peu d'influence, ce sont les
événements extérieurs. Je devrais dire que durant les
derniers mois et c'est vrai que sur la fin de 1976, en particulier,
à partir du mois de juin il y a eu des difficultés. On
peut certainement constater que l'augmentation catastrophique du prix du
pétrole, par exemple, en 1973/74 avait amené une croissance des
coûts complètement déraisonnée, et cela dans tous
les pays industrialisés. Je ne veux pas en faire le reproche
plutôt au gouvernement actuel, qu'au gouvernement
précédent, à celui de l'Ontario ou à celui des
États-Unis; ce problème a probablement été
mondial.
Ce prix du pétrole, qui a augmenté d'une façon
catastrophique, aurait produit au Québec des effets beaucoup plus
considérables n'eût été son appartenance au Canada
et des politiques canadiennes dans le soutien du prix du pétrole qui a
permis à notre économie d'absorber, petit à petit, les
coûts que cette crise pétrolière avait engendrés
à travers le monde. Plusieurs projets gouvernementaux, comme ceux du
secteur privé, ont vu leur coût grimper en flèche; au
Québec, des relations de travail politisées à
l'extrême et exploitées par un parti politique qui voulait prendre
le pouvoir à tout prix ont créé un climat social
néfaste pour l'économie québécoise.
Depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste, la
situation économique du Québec est véritablement à
la débandade. Si on regarde l'évolution de l'emploi, le ministre
de l'Industrie et du Commerce a cité des chiffres, tout à
l'heure, et il parle toujours en termes désaisonnalisés comme
s'il pouvait y avoir nécessairement des travailleurs
désaisonnalisés.
Une voix: Les deux!
M. Garneau: S'il veut prendre les deux, Mme le
Président... M. le Président... Avec le changement de sexe
à la présidence, on a de la misère à s'habituer. Je
m'en excuse, M. le député.
Si on regarde la création d'emplois, au mois de janvier 1977,
comparé au mois de janvier 1976, il s'est créé 8000 "jobs"
au Québec en janvier 1977. En janvier 1976, par rapport à
l'année précédente, le ministre de l'Industrie et du
Commerce a oublié de dire qu'il s'en est créé 78 000 au
lieu de 8000, soit dix fois plus. Le ministre de l'Industrie et du Commerce
aurait dû citer ces chiffres qui paraissent aux documents de son propre
ministère, documents publics qui sont distribués à qui les
demande.
En février 1977, 6000 jobs sous l'administration péquiste;
en février 1976, si vous lisez bien, M. le ministre, à la page 6,
vous l'avez sans doute devant vous, c'est 68 000 jobs qui sont
créés. Encore dix fois plus. En mars 1977, 8000 jobs de
créés; en mars 1976, 61 000 jobs de créés. En avril
1977, 3000 jobs; en avril 1976, 60 000 jobs. En mai, et c'est là, Mme le
Président, qu'il y a seulement un avantage de quelques milliers, 28 000
à 33 000. Cela se comprend, après le marasme des mois de janvier,
février, mars et avril, que le mois de mai corrige un peu. Je n'ai pas
les chiffres détaillés pour le mois de juin, mais dans l'ensemble
ce qu'on nous dit, et ce sont là les chiffres qui ont été
publiés, c'est que pour les six premiers mois, la moyenne de jobs
créés au Québec sous l'administration péquiste est
de 12 000 et, sous l'administra-
tion précédente, en 1976, malgré les
difficultés que nous avons connues, c'était 51 000 jobs.
C'est là, Mme le Président, je pense, la différence
d'une gérance de l'économie entre des gens qui veulent collaborer
avec les différents paliers de gouvernement et le secteur privé,
pour créer au Québec une situation économique qui soit
favorable pour les travailleurs québécois.
En septembre 1976, l'écart des taux d'intérêt sur
les marchés, avant que nous laissions le pouvoir, pour les titres
québécois comparés à ceux de l'Ontario,
était encore à moins d'un quart de 1%, après avoir
été pendant plusieurs mois au pair avec ces mêmes
titres.
En février, quelques mois après, cet écart
était, sur le marché canadien, de 81 points de base, tout
près de 1% et, sur les marchés américains, l'écart
était passé de .22, de moins de un quart de 1% à 1,6% en
février 1977 puis, aujourd'hui, malgré le fait qu'aucune
émission d'obligations à long terme n'ait été
lancée sur ces marchés il n'y a pas eu d'émission
à long terme de lancée sur les marchés américains;
il n'y en a pas eu à long terme non plus sur les marchés
canadiens, sauf celles qui ont été négociées avec
la caisse de dépôt et, à ce moment-là, ce n'est pas
sur les marchés véritables où l'offre et la demande jouent
régulièrement on est tout près de 60 points de base
entre les taux payés par le Québec et ceux payés par
l'Ontario.
La Presse d'hier nous annonçait que le nombre de chômeurs
à Montréal avait battu tous les records précédents
et son titre s'appuyait sur les statistiques régionales publiées
par le Bureau de la statistique du Canada sur le chômage au mois de juin
1977. Le taux de chômage à Montréal était
passé de 6,4% en juin 1976 à 9,2% en juin 1977. L'article, sous
la signature de Jean Poulin, indique que la faiblesse du marché de la
main-d'oeuvre au Québec touche tout le secteur secondaire et que
l'industrie manufacturière et celle de la construction sont celles qui
étaient les plus frappées. L'auteur de cet article indique que
l'industrie manufacturière au Québec, au lieu d'avoir
créé des emplois, en avait perdu 27 000 depuis quelques mois.
D'un autre côté, l'étude faite par le Conseil du
patronat fait état de $600 millions d'investissements qui ont
été annulés ou suspendus en 1977 à cause du
régime péquiste. M. Claude Ryan, dans un éditorial du 4
juillet, fait part également de son inquiétude concernant le
glissement de l'économie. Pourtant, ce même M. Ryan demandait aux
Québécois de voter pour le gouvernement PQ aux dernières
élections. Mon Dieu, comme il a l'air à se repentir!
La Presse du 21 mai, sous la signature de M. Alain Dubuc, publie un
article dont le titre indique que 1000 ingénieurs
québécois sont sans travail, et cela à cause de baisses
dans les investissements, 1000 ingénieurs québécois. Les
journaux de fin de semaine rapportent à pleine page également le
nombre incroyable d'usines qui ont dû fermer leurs portes depuis quelques
mois.
Quand j'entends les représentants du PQ mettre la faute sur le
gouvernement fédéral, quand on sait que les industries les plus
durement frappées sont les industries du textile et de la chaussure, des
industries qui fournissent beaucoup plus que la part de la population
québécoise dans le marché canadien! Et on vient nous dire,
en même temps qu'on dit que c'est la faute du gouvernement
fédéral, qu'il faut se séparer du reste du Canada! D'un
côté, en même temps, on nous dit qu'on va avoir une union
monétaire; donc, on ne pourra pas changer grand-chose. Si on veut
changer des choses, cela veut dire qu'on va demander aux autres provinces
canadiennes de venir encourager l'industrie de la chaussure et du textile au
Québec, de payer plus cher que ce qu'ils auraient à payer en
important ces produits d'autres pays. C'est de l'inconséquence la plus
totale de la part du ministre de l'Industrie et du Commerce, de la part du
premier ministre également, dans les remarques qu'ils faisaient par
rapport au gouvernement fédéral.
Que le gouvernement fédéral ait des
responsabilités, j'en conviens. Ce n'est certainement pas moi qui vais
empêcher le ministre de l'Industrie et du Commerce de faire des pressions
pour que des contingentements soient apportés, soient appliqués
pour protéger certaines industries pendant des périodes
transitoires. Mais il appartient au ministre de l'Industrie et du Commerce de
mettre à la disposition de ces entreprises les sommes d'argent
nécessaires pour les aider à se réorganiser, à se
regrouper et à passer à travers la période difficile que
nous connaissons. Mais comment voulez-vous que le gouvernement
fédéral ait quelque confiance en ce gouvernement péquiste
actuel puisque, d'une main, il demande au gouvernement fédéral de
faire en sorte que l'ensemble des Canadiens des autres provinces paient plus
cher leurs chaussures et leurs textiles et, en même temps, ce même
gouvernement dit: On va se séparer du reste du Canada? Je comprends
l'attitude des citoyens des autres provinces canadiennes et j'imagine les
pressions qu'ils peuvent faire sur leur gouvernement fédéral
devant une attitude aussi inconséquente et irresponsable de ce
gouvernement.
M. le Président, je pourrais énumérer une
très longue liste d'articles de journaux faisant état de
déplacements de services vers l'extérieur du Québec,
amenant des pertes d'emplois chez nous. Et cela, depuis le début de
1977. Tout cela indique bien que, sous le gouvernement actuel, la
gérance de l'économie est non seulement mal faite, mais, à
cause du climat d'incertitude et d'insécurité engendré par
la politique séparatiste du gouvernement actuel, et aussi à la
suite des déclarations que faisait le ministre des Finances...
Imaginez-vous, ce n'est pas le ministre de l'Immigration qui vient raconter
cela. On aurait pu comprendre cela. Mais le ministre des Finances du
Québec s'en va dire à Toronto, aux membres du Conseil
économique de l'Ontario, qu'une fois la séparation faite,
c'était l'intention de ce gouvernement de créer une nouvelle
monnaie. Après cela, on se demande comment il se fait que les
investissements... Même les francophones québécois ne
veulent pas investir à long terme.
J'entendais tout à l'heure le chef de l'Union Nationale plonger
encore dans cette incongruité et ce manque de cohérence dans les
politiques.
Naïvement, le chef de l'Union Nationale recommande au gouvernement
de suspendre pendant trois ans l'idée de la séparation du
Québec. Ce n'est pas parce qu'on va la suspendre pendant trois ans que
les hommes d'affaires vont dire: Oui, c'est un climat stable au Québec.
Il n'y aura pas de changement de monnaie. Il n'y aura pas de changement de
barrières tarifaires. Il n'y aura pas de changement de politique
fiscale, au Québec différente de celle des autres provinces
canadiennes. On n'investit pas pour trois ans. Le chef de l'Union Nationale
devrait savoir cela. Avec sa naïveté extrême, on a
l'impression d'entendre parler quelqu'un qui sort de la cuisse de Jupiter. Il
faut fouiller un peu plus pour regarder l'inconséquence de ce parti de
l'Union Nationale qui, d'une main, veut régler le problème
économique et de l'autre, encourage le gouvernement à maintenir
ce climat qui est le plus malsain qui puisse exister.
Mme le Président, le ministre des Finances s'en va dire à
Toronto, pas devant des gens de Saint-Clin-Clin ou dans un petit groupe de
partisans, mais devant les membres du Conseil...
M. Chevrette: Saint-Clin-Clin...
M. Garneau: ...économique de l'Ontario, que son
gouvernement allait créer une nouvelle monnaie. Mme le
Président...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Jean-Talon, je dois suspendre le débat, maintenant, parce que j'ai un
avis à donner à cette Assemblée.
M. Garneau: Je demande la suspension du débat, madame.
Demande de mini-débat
Inscription des élèves
anglophones
Mme le Vice-Président: J'ai reçu dans les
délais requis un avis de M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce à l'effet de soulever un débat, en
vertu de l'article 174, ce soir. La lettre dit: À la séance
d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre de l'Éducation la question
suivante: Le ministre est-il disposé à réétudier
les règlements émis aux commissaires d'école, basés
sur l'article 16 de la Loi de l'instruction publique, car c'est mon opinion que
ce règlement surpasse l'intention de la loi même et c'est
émis en anticipation du projet de loi no 101. Puisque je ne suis pas
satisfait de la réponse donnée, je désire me
prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement.
Veuillez agréer, M. le Président, mes sentiments les
meilleurs.
Bryce Mackasey, Notre-Dame-de-Grâce.
M. Gratton: Mme le Président, est-ce que cela veut dire
que ce mini-débat aura lieu après le vote sur la motion
présentement en discussion ou avant?
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau, le mini-débat aura lieu, comme à l'habitude, en vertu
de l'article 174, à 23 heures ce soir.
M. Shaw: Mme le Président, est-ce que le
député de Jean-Talon a demandé la suspension du
débat?
Mme le Vice-Président: C'est cela. Cette Assemblée
suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
Reprise de la séance à 20 h 12
Mme le Vice-Président: À l'ordre, mesdames et
messieurs.
M. le député de Jean-Talon.
Motion de M. Biron (suite) M. Raymond Garneau
M. Garneau: Mme le Président, au moment de la suspension
de nos travaux, à 18 heures, je soulignais que la gérance de
l'économie, sous un gouvernement de l'Union Nationale, se
comparaît, presque point pour point, avec la gérance de
l'économie sous une administration péquiste. Tout à
l'heure, j'écoutais le ministre de l'Industrie et du Commerce parler de
chômage et j'ai profité de la suspension de nos travaux, à
la période du dîner, pour vérifier comment, par quelle
acrobatie il en était venu à dire qu'il s'était
créé, au Québec, 103 000 nouveaux emplois depuis
l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement.
Mme le Président, je ne sais pas si le ministre de l'Industrie et
du Commerce se rend compte de la gymnastique qu'il a faite pour en arriver
à une telle conclusion. Je ne sais trop si je dois l'attribuer à
un enthousiasme par trop partisan d'un ministre qui veut défendre,
coûte que coûte, la gérance de l'économie par son
gouvernement, mais je suis obligé de constater que la seule façon
d'en arriver à tenter de démontrer qu'il s'était
créé 103 000 emplois au Québec, ce serait de comparer les
chiffres bruts de novembre 1976 avec le mois de juin 1977.
Mme le Président, je ne connais pas d'économiste digne de
ce nom qui puisse, honnêtement, faire de telles comparaisons. C'est un
peu comme comparer des poires avec des prunes. Comparer la situation de
l'emploi sans tenir compte des variations saisonnières entre le mois de
novembre et le mois de juin, Mme le Président, c'est réellement
faire preuve d'un manque de discipline intellectuelle, pour ne pas dire plus.
Quand je prends ces chiffres sur la base désaisonnalisée,
là, quand même, il y a une rationalité un peu plus grande.
Mais encore, pour en arriver aux chiffres qu'il donne, il doit faire la
comparaison entre novembre 1976 en chiffres désaisonnalisés et
juin 1977 en chiffres désaisonnalisés.
Mais comme il est difficile de croire que le mois de novembre ait pu
être influencé de quelque façon que ce soit par le
gouvernement péquiste, de même que le mois de décembre,
étant donné qu'il venait tout juste d'arriver au pouvoir et que
l'on compare l'emploi en termes désaisonnalisés du mois de
janvier au mois de juin, on s'aperçoit qu'il y a une variation dans
l'emploi de 3000 avec ce gouvernement du Parti québécois.
Mme le Président, de 1968, 1969, 1970, la baisse de
l'économie sous l'Union Nationale avait été marquante. Il
serait facile de faire la comparaison avec les années qui ont suivi et
il est également facile de faire cette comparaison, même de
l'année 1976 avec l'administration actuelle, et même pour les
derniers mois de l'année 1976. C'est avec une certaine hésitation
que j'ai décidé d'intervenir dans ce débat, parce que je
me demandais toujours quelle mouche avait piqué l'Union Nationale pour
faire cette motion. Même si fondamentalement, nous sommes d'accord sur le
malaise qu'il y a dans l'économie, force nous était de constater
qu'il était surprenant que ce soit l'Union Nationale qui, depuis le
début de cette session, ne passe pas de semaine sans louanger le
gouvernement. On se demandait quelle mouche avait piqué l'Union
Nationale pour faire cette motion. C'est à se demander si les faiseurs
d'images du nouveau chef de l'Union Nationale ne se sont pas rendu compte que
vouloir lui indiquer de coucher continuellement dans le même lit que le
PQ sur le plan linguistique, maintenant, et sur le plan constitutionnel avec
l'égalité ou l'indépendance, ne finirait pas par
créer des problèmes politiques à ce chef qui aspire
à remplacer le premier ministre actuel.
Mme le Président, l'Union Nationale est mal placée pour
faire la leçon sur le plan économique. Le total des
investissements privés et publics au Québec ne
représentait plus en 1969, dernière année complète
de l'administration de l'Union Nationale, que 15% de l'ensemble des
investissements. Un vrai désastre! En 1974, cinq ans plus tard, les
investissements étaient passés de $3,4 milliards à $7,4
milliards après quatre ans d'administration libérale. Au chapitre
des investissements dans le secteur manufacturier, je l'ai indiqué tout
à l'heure, encore là, l'Union Nationale avait conduit l'industrie
secondaire du Québec, dans un marasme. Il fallait le redresser et cela
s'est fait. Le revenu personnel par Québécois est passé de
88% du niveau canadien en 1969 à 91% en 1975/76. En 1969, avec l'Union
Nationale, sur 100 chômeurs au Canada, il y en avait 41 qui
étaient des Québécois. C'est pourquoi, je disais qu'il
était difficile pour moi de comprendre comment l'Union Nationale pouvait
faire des recommandations et des blâmes à quelque gouvernement que
ce soit en termes de gérance d'économie.
En 1967 et 1969, en trois ans de gouvernement de l'Union Nationale, on a
créé 52 000 emplois, une moyenne de 17 300 par année. De
1970 à 1974, le gouvernement libéral a créé 283 000
emplois contre 52 000 par l'Union Nationale. Le déclenchement de la
crise la plus profonde et la plus grande que l'on ait connue depuis les
années trente devait interrompre un effort de redressement qui avait
été entrepris, et tout le monde sait quelles ont
été les conséquences sur l'économie de la crise du
pétrole. Depuis 1974, aucune économie n'a été
épargnée par cette montée en flèche des prix du
pétrole qui a frappé presque toutes les économies des pays
industrialisés. Depuis la prise . du pouvoir par le gouvernement actuel,
et notamment depuis le début de l'année, on constate que
l'économie québécoise se détériore, et plus
rapidement que celle de l'ensemble canadien.
En ce qui concerne l'évolution de la situation économique
depuis plus d'un an, il suffit de
comparer celle des principaux indicateurs mensuels dont on dispose au
cours des premiers mois de cette année avec des périodes
correspondantes des années précédentes. On constate que si
l'économie du Québec évoluait parallèlement, voire
même se comportait relativement mieux que celle de l'ensemble canadien
l'an dernier, ce n'est plus le cas aujourd'hui.
En ce qui concerne l'emploi, par exemple, le nombre de travailleurs
employés au Québec en juin 1975 représentait 26,5% de
l'emploi total du Canada; en juin 1976, il représentait 26,9%; il y a
donc une amélioration de la situation. En juin 1977, nous sommes
redescendus à 25%.
En ce qui concerne le chômage, on note qu'en juin 1975 le nombre
de chômeurs au Québec représentait 33%. J'ai dit, tout
à l'heure, que sous l'Union Nationale cela avait
représenté 41%, en 1969; en 1975, cela représentait 33%;
en 1976, c'était tombé à 29,9% et cette année,
c'est remonté à 31,8%
Comparons toujours, à titre d'exemple, la valeur des permis de
bâtir. Si on considère l'ensemble des différents types de
construction, on constate que pour les quatre premiers mois de l'année
en cours on ne dispose pas des chiffres après le mois d'avril
la valeur des permis de bâtir dans la province de Québec a
diminué de $80 millions par rapport à la période
correspondante de 1976. Cette diminution est faible, il est vrai, mais elle est
de un peu plus de 1%. Il y a lieu de noter que l'an dernier la valeur des
permis de bâtir avait progressé de 43,7% par rapport à
1975, de telle sorte que la part du Québec, dans la valeur totale des
permis de bâtir au Canada, était demeurée aux environs de
23% ou 24%. Qu'on ne vienne pas me dire que cela dépend de la
construction sur les chantiers olympiques. Pour avoir été en
mesure de tenir les Jeux olympiques en 1976, les permis de travaux avaient
été donnés bien avant le début de 1976.
Comparons maintenant comme dernier exemple, les statistiques des
faillites commerciales. En 1975, il y a eu en moyenne 66 faillites par mois au
Québec, 37% de l'ensemble canadien. Pour l'année 1976, cette
moyenne représentait 73 mensuellement et 33,8% de l'ensemble canadien.
Pour les premiers mois de 1977, par contre, la moyenne mensuelle a
augmenté de moitié par rapport à l'an dernier. Il y a eu
116 faillites en moyenne par mois, au Québec, depuis le début de
l'année, et elles représentent maintenant 38% du total
canadien.
On pourrait, sans aucun doute, faire état d'autres indices, comme
nous l'avons déjà fait à maintes reprises au cours des
dernières semaines. Ils tendent à montrer que, si la situation
économique du Québec n'était guère florissante l'an
dernier, elle ne l'était ni plus ni moins que dans le reste du Canada,
alors que, depuis le début de cette année, on constate, de jour
en jour, de semaine en semaine et de mois en mois, que ce glissement, qu'un
glissement se fait, de plus en plus profond, de plus en plus sérieux et
que les indicateurs économiques se dissocient de l'allure
générale de ceux de l'ensemble canadien.
Face à cette situation, le gouvernement libéral de l'an
dernier, voyant cette situation économique un peu dangereuse, avait pris
des positions extrêmement importantes, en lançant des projets
comme ceux de Fire Lake, en commençant les projets de
Saint-Félicien, en présentant également un budget
déficitaire qui avait pour but de relancer l'économie. Mme le
Président, on a beau nous blâmer aujourd'hui, mais, pour ces gens
qui se gargarisent de social-démocratie, qui parlent de mesures
sociales, je leur dirai que la première mesure sociale, la
concrétisation la plus évidente d'une social-démocratie,
c'est peut-être de prendre des mesures pour créer de l'emploi au
Québec, parce que, quand les gens ne travaillent pas, on ne peut pas
parler de mesures sociales dans quelque autre domaine que ce soit.
Mme le Président, le chef de l'Union Nationale a fait un certain
nombre de comparaisons que je ne veux pas reprendre ici, mais je voudrais dire
tout simplement et répéter que sa motion me surprend
énormément. L'Union Nationale et le Parti québécois
ont des politiques semblables sous plus d'un aspect. J'ai fait l'exposé
tout à l'heure, sur le plan économique des résultats
qu'elles ont donnés. Le texte de la motion accuse le gouvernement
d'avoir négligé de prendre ou de présenter en
priorité une politique globale de relance économique, mais, si ce
gouvernement avait présenté en priorité une politique
globale de relance économique, il aurait dû le faire au
début de son mandat.
Or, comment se fait-il que l'Union Nationale n'ait pas encore compris
que la priorité de ce gouvernement, c'est de légiférer et
d'administrer en fonction d'une fin unique qui est celle de la
séparation du Québec du reste du Canada? Comment se fait-il
qu'après avoir assisté à autant de séances de
l'Assemblée nationale, à autant de périodes de questions,
comment se fait-il que l'Union Nationale n'ait pas compris que les questions
économiques ne constituent des préoccupations pour ce
gouvernement que dans la mesure où elles servent les fins, les seules
fins que ce parti politique recherche, c'est-à-dire
l'indépendance du Québec et la séparation du Québec
du reste du Canada?
Enfin, M. le Président, pourquoi parle-t-on de politique globale
plutôt que de mesures concrètes? Politique globale, cela ne veut
pas dire grand-chose, si ce n'est pas traduit dans des projets de loi et dans
des gestions budgétaires appropriées. Ce gouvernement nous a dit
à maintes occasions qu'il était pour l'intervention de
l'État quand c'était payant, pour l'intervention du secteur
privé quand c'était payant, pour l'intervention du secteur
coopératif quand c'était payant, contre l'intervention de
l'État quand ce n'était pas payant, contre l'intervention du
secteur privé quand ce n'était pas payant et contre
l'intervention des coopératives quand ce n'était pas payant.
C'est là la politique du gouvernement. Chaque fois qu'on lui pose des
questions, c'est à peu près le genre de réponses qu'on
a.
Enfin, M. le Président, l'économie n'a jamais
été la principale source d'inspiration des gestes de ce
gouvernement. On n'a qu'à regarder le feuille-
ton pour s'en rendre compte et à relire le budget du ministre des
Finances. J'imagine fort aisément le ministre des Finances actuel et le
premier ministre se rencontrant en prenant un café, croisant les doigts
en espérant que la situation économique ne tourne pas trop au
vinaigre. Mais, à part ces bons souhaits, nous recherchons encore des
mesures concrètes qui pourraient redresser la situation.
On va prendre un seul exemple. Les ententes avec le gouvernement
fédéral pour favoriser le développement économique
régional. Il y a déjà maintenant plusieurs semaines,
quelques semaines tout au moins, que ces ententes sont signées. On s'est
fait dire, lors de l'analyse des crédits des différents budgets,
de la part du ministre des Transports, de la part des autres ministres, qu'il
n'y avait pas dans le budget de leurs ministères les crédits
nécessaires pour réaliser des ententes et que, si des ententes
étaient signées, il faudrait avoir des budgets
supplémentaires. Nous sommes maintenant rendus à la mi-juillet,
il n'y a pas de budget supplémentaire d'annoncé et je me demande
comment les travaux qui sont nécessaires pour combattre le chômage
qui se fait de plus en plus important pourront commencer à moins que,
par une magie quelconque, ou par une astuce quelconque, le Conseil du
trésor et le président du Conseil du trésor, ou son
vice-président, aient décidé de bloquer des travaux qui
avaient commencé dans le budget québécois lui-même
pour financer des ententes, de telle sorte que cela devient bonnet blanc, blanc
bonnet et les ententes ne créent aucune "job" de plus, on remplace tout
simplement des crédits qui devaient servir à construire une route
pour les appliquer à une autre route. Je vois le ministre des Finances
sourire et je me rends compte que c'est probablement là la technique
qu'il emploie, de telle sorte que, finalement, les ententes
fédérales-provinciales n'auront pas créé de "jobs"
additionnelles si ce n'est que contribuer à financer les
activités du gouvernement et, par le fait même, ne pas
créer d'emplois, comme je viens de le dire, dans différentes
régions du Québec.
D'ores et déjà, on peut être assuré que si
jamais on donnait suite aux ententes fédérales-provinciales par
quelque tour de magie comme les membres de l'équipe d'en face nous en
ont donné la preuve avec le bill 1, ce ne sera certainement pas pour
montrer une collaboration avec le gouvernement fédéral, ni pour
créer des emplois, mais plutôt on utilisera ces ententes pour se
tirer d'un pétrin dans lequel les gens du gouvernement du Parti
québécois se sont eux-mêmes placés face au milieu
financier et au milieu économique.
M. Parizeau: Question de privilège, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le ministre, sur une question de
privilège.
M. Parizeau: Mme le Président, il me semblerait un peu
abusif qu'on interprète un sourire soit comme une politique
économique, soit comme une politique budgétaire.
M. Garneau: Mme le Président, quand les
Québécois n'ont rien d'autre à se mettre sous la dent, ils
sont prêts à s'accrocher à n'importe quoi, ne fût-ce
qu'un sourire du ministre des Finances qui ne semble pas vouloir prendre
d'autres mesures. La seule chose qu'il sait faire pour soulager le malheur des
Québécois et des chômeurs, c'est sourire lorsqu'on parle de
choses aussi sérieuses que des centaines de milliers de travailleurs qui
sont à la recherche d'un emploi.
Mme le Président, quoi qu'il en soit des motifs qui ont
amené le chef de l'Union Nationale à présenter cette
motion de blâme, il n'en reste pas moins vrai que la situation
économique du Québec est lamentable et que rien n'est fait pour
remédier à cet état de choses.
Il faudrait, de toute urgence, que le gouvernement mette un terme
à l'insécurité et à l'incertitude engendrées
par l'hypothèque de la séparation du Québec. Le
gouvernement se doit au plus tôt de tenir ce référendum
qu'il a pourtant promis. Mme le Président, la situation
économique est à ce point sérieuse que nous constatons de
plus en plus que des Québécois songent à quitter cette
province pour aller s'établir ailleurs. Parmi ces gens, il n'y a pas
uniquement des anglophones. Il y a également des francophones. C'est ce
qu'il est pénible de voir. Premièrement, le gouvernement doit
tenir ce référendum. Deuxièmement, le gouvernement du
Québec doit présenter un budget spécial qui mettrait
immédiatement en branle les ententes
fédérales-provinciales de développement économique
régional. Troisièmement, le budget spécial devrait
clairement indiquer la politique du gouvernement face aux nationalisations
d'entreprises. La question de l'amiante n'est pas réglée. La
nationalisation de Bell Canada qui est inscrite dans le programme du Parti
québécois n'est pas réglée. Il faut, pour clarifier
l'atmosphère, que le gouvernement du Parti québécois, dans
un document aussi officiel que le budget, prenne position sur ces questions. Le
budget spécial qui devrait être présenté devrait
également rassurer les entrepreneurs et les travailleurs en assurant par
des mesures concrètes une reprise économique...
M. Marcoux: Question de règlement, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
règlement, M. le député de Rimouski.
M. Marcoux: Je voudrais rectifier un fait. Il n'est pas vrai que
la nationalisation de Bell Canada soit dans le programme du Parti
québécois.
Mme le Vice-Président: M. le député, vous
n'aviez pas à invoquer une question de règlement à ce
sujet. M. le député de Jean-Talon.
M. Garneau: Non seulement il n'avait pas à invoquer une
question de règlement mais il devrait, plutôt que lire son
règlement, lire le programme du Parti québécois. Si je
l'avais ici, je lui donnerais le point, l'article et le sous-article où
c'est indiqué.
Un budget spécial devrait également rassurer les
travailleurs québécois et les entrepreneurs en proposant des
mesures fiscales et des mesures budgétaires propres à relancer
l'économie. Donc, il faut clarifier l'atmosphère du
référendum, lever l'embargo et l'hypothèque que
constituent également les nationalisations d'entreprises qui
inquiètent de plus en plus les investisseurs, tant francophones
qu'anglophones, parce que personne n'est désireux de risquer des
capitaux qui ne rapporteraient pas des dividendes au moins raisonnables et
comparables à ceux qu'on peut avoir en achetant tout simplement des
obligations du gouvernement fédéral. Il faut, de toute
nécessité, qu'un budget spécial soit
présenté pour mettre en branle des travaux qui seront
susceptibles de créer de l'emploi.
En terminant, Mme le Président, malgré toutes les
appréhensions et les motifs qui ont incité le chef de l'Union
Nationale à présenter une telle motion, il n'en demeure pas moins
que la situation économique du Québec est extrêmement
grave. Peu importe le libellé qu'il a utilisé, il reste que
l'Opposition officielle doit s'associer à cette motion pour bien faire
réfléchir le gouvernement sur l'importance qu'il y a de prendre
des mesures maintenant pour assurer la relance économique et donner aux
travailleurs québécois l'emploi qu'ils recherchent.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Shaw: Come on!
M. Brassard: Mme le Président, je voudrais dire, tout
d'abord, que le député de Jean-Talon devrait relire plus
attentivement...
M. Brochu: Je m'excuse infiniment auprès du
député. Nous avons un petit problème technique. On avait
prévu que le député de Pointe-Claire.
Mme le Vice-Président: Brièvement, M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Oui. Je voudrais demander s'il était possible
d'obtenir l'unanimité de la Chambre. Le député de
Pointe-Claire avait un avion à prendre tout à l'heure, et on
avait prévu qu'il pourrait faire son intervention immédiatement
après celle du Parti libéral. S'il n'y avait pas d'objection, il
nous fera plaisir d'entendre, après, le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: D'accord, Mme le Président. M. Brochu:
Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Pointe-Claire, avec la permission du député du Lac-Saint-Jean et
la mienne.
M. William Frederic Shaw M. Shaw: Merci à mon
collègue, le leader ad- joint de l'Union Nationale. Mme President, when
I was first elected, I will remember that day very significantly as long as I
live. I have gone down to a reception that was being held at our offices and I
thought: My God, what has happened? 51% of the French-speaking Quebeckers of
this province had voted to support a government that had a commitment to the
dissolution of our country. So, I took a holiday, Mme President, because it was
that important to me to think again what the situation was to reflect upon what
my role would be in this situation.
My first thoughts were that, on surface, there were some qualified
people involved: The minister of Municipal Affairs, the minister of Social
Affairs, the minister of Finance, the minister of Economic Affairs, the
minister responsible for the Social Services. All had good credentials. And we
needed to clear the air. The time had come, we had this continuous threat of
the Parti québécois hanging over our head, they were going to
come to power, and finally they were in power. And I could still remember that
Aislin cartoon that said: Take a valium. But it did not take long for the theme
of this government to establish itself. And I remember again, Mme President,
when Mr Lévesque gave his speech to the U.S. bankers in New York that
seemed to set the theme of this government, that there was not that immediate
commitment to good government. But that separation, take it or leave it, was
going to occur.
I remember meeting a banker on my holiday, during that particular
holiday, and he said: I heard your Premier's speech in New York and the
consensus of the bankers was such that I guess we are going to have a split in
your country. And I said: Oh, I would not buy that, I do not accept that at
all. He said: Well. And, unfortunately, the bankers feel that and they really
reckon that if it does happen the Canadian dollar will be worth $0.60 and the
Quebec dollar worth a quarter.
Let us look at the history of the growth of nationalism with its result
of concern for business. We had the bomb scare in 1960, and the kidnapping in
1969, the War Measures Act and there was a sort of a period of concern amongst
the business community and there began a period of exodus.
And, with the Bourassa's first victory in 1970, these seemed to be a
kind of accommodation by business, but it was not very solid because of the
effect of a strong showing by the Parti québécois at that
election. But the Bourassa's second victory in 1973, was effective indeed, and
yet there was an overwhelming demonstration, 102 out of 110 seats given to the
party, the Liberal Party, supposedly federalist, supposedly concerned about all
people and this overwhelming victory reassured the business and we saw
investments. And I saw this particularly in my community which does reflect the
middle income anglophone community where property values went up 50% in six
months and stayed there firmly.
New investment was coming in and the great potential of Québec
was showing itself. Then, bill 22 and the tragedy of bill 22 was not that it
was a
bill presented by a government with the commitment to pass this sort of
legislation, but it was a bill passed by a government who had always
demonstrated the semblance of representing the interest of all the people.
The tragedy was that for the beginning few months, nobody recognized the
reality. And there was a slow turning down, but slowly but surely, the realism
came and the exodus was accelerated. And so, three years later, we see so many
things that had happened. Before this, it happens so many anglophones were
sending their children, using the vehicle of bill 63, to the French school
system, as I did with my own children. The French immersion program began
flourishing and the business community was expanding the use of French in every
area and there was a real period of "rapprochement". But the first signs of
authoritarianism came with article 6 presented by the minister of Education of
that time, Mr Guy St. Pierre. Why is article 6 important? Because the mobile
community was affected. The family moving in from Toronto to do business in a
head office in Montreal, with their children in grade 10, not having adequate
French teaching in Ontario, had to demonstrate a working knowledge of French in
order to graduate from grade 11. Effect was negative. And the effect, for
example, of bill 22 on the civil administration, when the city of Pointe-Claire
was supposed to write to the town of Kirkland in French; our hospital centers
like the Lakeshore General Hospital having to write to the Montreal General
Hospital in French; the social services having to do the same.
The recognition of the English-speaking fact in the province of
Québec was lost, not on November the 15th, but a year or two previous to
that. How many times have I heard, prior to November the 15th, that there are
too many English-speaking radio stations in Montreal. For some reasons, there
was a presumption it was very difficult to turn that channel one step over.
There were too many French-speaking Canadians in English-speaking education.
There was a kind of reality and discrimination became accepted practice,
because it was not after November the 15th, that we had 99,4% of the civil
service who were French Canadian. It was before that. The closure of English
services like Marian Hall happened before November the 15th. The police
services, the MUC and la Sûreté du Québec being close to
English-speaking candidates happened before November the 15th.
The attitude of business was that the social and political climate of
Quebec was not conducive to investment. As well the administration of the
province was ridiculous.
There was the Olympic fiasco and the James Bay project and the scandal
of the underfunding of a pension plan; this happened before November 15th. And
the Social Affairs, with 82 CLSC being founded at the cost of $30 millions with
fifteen providing services. And labour relations, in the concept of
confrontation, happened before the 15 of November. And the emergence of the
powerful no attempt labor unions who seem to forget their responsibility in the
triangle of relationship in a society. And the strikes in the public sector, in
the hospitals, in the schools, in police services and in the fire departments.
One would have to believe that the Bourassa regime was the worst management and
administration this province has ever seen! And they left a legacy of fiscal
mismanagement leaving debt service and capital repayment costs at almost
unmanageable levels and I sympathise with him, the minister of Finance, with
the problem that he inherited. And so not withstanding the commitment to
separation and independence or sovereignty-association which ever somatic
appreciation is given, it is understandable that the Quebec electorate should
reject the Bourassa Liberals that they had so strongly supported, 102 out of
110 seats, and promising to set aside their commitment to separate until after
a referendum, the Parti québécois could seduced these voters to
elect them on November 15th with the promise of good Government. But let us
look at the reality.
The reality is that all activity has been set aside for two bills. Bill
2 on party financing which gives the government the power which literally could
destroy the democratic process. It gives the government the power to
investigate without access the higher Courts, they could set up abuses, they
could destroy the democratic process. If we can read into this legislation this
potential, we are not reading a legislation as we should. We have bill 1 or
bill 101 and it is confrontation and we are confronting; the confrontation is
becoming more and more imminent and the resistance is inevitable. So, while
this government fiddles, our homes are burning. Let us look at our four primary
manufacturing industries which are in serious problems. Like the clothing
industry, and the shoe industry, and the textile industry, and the furniture
industry.
The Premier blames the Federal Government for inadequate tariff
protection. We have night tariffs protecting these industries, but we also have
the highest production costs in North America in these four industries. We have
the highest minimum wage, we have militant intransigent unions and we have low
productivity.
Raising tariffs to protect underproductive overpaid workers is asking
the consumer to support waste, laziness and greed. The government should be
promoting competitive productivity instead of subsidizing inefficiency.
And look at our steel industry, the tragedy of Quebec Steel asking small
or low guaranties to stay afloat, while SIDBEC-DOSCO operates at an incredible
continuing loss and gets a capital injection to continue this mismanagement of
$125 millions.
Mme President, this pattern was not started on November the 15th, but it
certainly is being continued to-day.
Look at the comedy of Tricofil, where the government is showing its
gross inaptitude by
continuing to support mismanagement, poor marketing, just to support a
concept of autogestion, which is a dismal failure. And look at the pulp and
paper industry, Domtar at Donnacona and East Angus, where militant labour
demands and unhealthy political climate are causing closures or cutbacks.
Look at our research companies, like Alcan, who are moving to Ontario,
and the research plant of Smith, Kline and French is closing in my riding.
Others will imminently close because of repressive legislation.
And look at the pharmaceutical industry. This province has 67% of the
pharmaceutical industry of this country and we should be now negotiating with
the federal government to repeal section C-45 which takes away the protection
of these companies to compete in the international market by not protecting
their research products.
And we should recognize our depressed equity. The Quebec stock prices
are depressed, making financing difficult or impossible for our small
businesses in this province and our larger ones as well. And think of the
depressed cost of our housing and real estate, and its effects on our entire
value of equity in this country and think of businesses that are selling if
possible at extremely depressed prices and look at the exodus of expertise.
Seventy percent of our anglophone university graduates are leaving the province
and 20% of the francophone university graduates are also leaving. It is a
tragic waste of the most vital resource of any society, its trained people.
I am reminded of the Collins cartoon, in the Montreal Gazette, where the
minister of Cultural Development is examining a patient with a broken leg and
skull and saying: Open your mouth and say: Ah!
Surely this is a comical tragedy. Comical, because it is the charade of
democracy, in the way that Assembly is pretending to function, and in the way
that the Parliamentary commission on bill 1 made a farce of the hearings, and
tragic because of the policy of confrontation, because there is such effort to
enforce things which should not be enforced, to provoque resistance which will
occur and it is tragic, because we have such a great province, with such great
potential, with such great resources and with such great people.
The government must respect and accept its responsibility to stop the
confrontation and lead the people to provide the social and political stability
that must precede the reversal of all these trends, the exodus of businesses
and commerce, the exodus of expertise, the drop of investment, the depression
of equity, the climbing unemployment, the increased tension and the individual
anxiety.
This was the promise of this government to the people, good, clean,
efficient government. This promise has not been kept and the people are aware
they have been cheated and, I respectfully submit, Madam President, that we
look carefully at the recommendations of the chief of the Union Nationale
Party, made positively and constructively, and I implore the government to
recognize their importance and to meet their promise. Madam President, I have
to support very firmly the motion of the chief of my party this evening. Thank
you very much.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Mme le Président, je voudrais tout d'abord
vous faire remarquer que non seulement le député de Jean-Talon
fait toujours des critiques négatives, mais on vient de se rendre compte
qu'il a le fâcheux défaut de ne pas savoir lire. Il n'est nulle
part fait mention dans le programme du Parti québécois de la
nationalisation de Bell Canada. Je voudrais quand même le dire au
début.
Il y a une expression qui revient souvent, je pourrais même dire
toujours, dans les propos que tient le chef de l'Union Nationale. C'est presque
une sorte d'idée fixe. C'est celle de bon gouvernement. Le gouvernement
actuel, répète-t-il sans relâche, doit être un bon
gouvernement. Il a été élu pour être un bon
gouvernement. Il doit être un bon gouvernement provincial. Chaque fois
que le chef de l'Union Nationale parle, il utilise immanquablement cette
expression clé dans son vocabulaire: un bon gouvernement provincial.
Remarquez, cependant, que le chef de l'Union Nationale insiste toujours et
presque uniquement sur ce qu'on pourrait appeler le concept de bonté du
gouvernement et qu'il s'efforce toujours de souligner et de dégager les
traits caractéristiques d'un bon gouvernement sans jamais c'est
là un phénomène assez étrange mettre
l'accent sur le caractère provincial de ce bon gouvernement. Cependant,
on devine très bien, à travers ses propos, que, si le
gouvernement est bon, c'est d'abord et avant tout parce qu'il est provincial et
que, si un jour il cessait d'être provincial, cela ne fait pas l'ombre
d'un doute que, pour le chef de l'Union Nationale, il cesserait aussi
immédiatement d'être bon.
Or, Mme le Président, si on veut porter un bon jugement sur la
situation québécoise, il faut nécessairement analyser,
étudier sous tous ses aspects le caractère provincial de ce
gouvernement. Il faut, de toute nécessité, intégrer dans
notre analyse le fait capital que le Québec est une province faisant
partie d'une des fédérations les plus centralisées et les
plus centralisatrices qui soient. Le gouvernement de cette province, donc, ne
dispose que de certains pouvoirs et ne détient que certains leviers, en
particulier dans le domaine économique.
Ne pas tenir compte de ce phénomène fondamental, c'est
faire une mauvaise analyse ou, en tout cas, c'est faire une analyse
incomplète et tronquée de la situation. Je dirais même que
c'est ne pas comprendre cette situation. C'est malheureusement je dis
malheureusement parce que j'aurais cru que l'Union Nationale, respectant en
cela sa longue et glorieuse tradition autonomiste, en aurait
été capable ce que le chef de l'Union Nationale a fait:
une mauvaise analyse. Car, enfin, comment voulez-vous qu'un gouvernement
provincial puisse élaborer et appliquer ce qu'il appelle une politique
globale de relance économique, alors que tout le monde sait, ou devrait
savoir, que les grands leviers économiques, que les grands pouvoirs sont
fédéraux, appartiennent au gouvernement
fédéral?
Le chef de l'Union Nationale le sait sûrement très bien et
son parti aussi qui fut longtemps défenseur de l'autonomie et de notre
butin. Pourquoi l'ignore-t-il dans son analyse et dans ses propos? Pourquoi
n'en tient-il pas compte?
Il sait d'ailleurs, le ministre de l'Industrie et du Commerce le
disait cet après-midi fort bien que le gouvernement
québécois, par exemple, doit assister, impuissant, à la
mort lente de l'industrie textile et de celle de la chaussure, parce que le
gouvernement fédéral applique une politique douanière,
aberrante et scandaleuse. Il sait fort bien aussi que le gouvernement
québécois n'a rien à dire ni rien à voir dans
l'élaboration de la politique monétaire à ce sujet,
dans son discours de clôture, le ministre des Finances en a très
bien parlé aussi politique très souvent nuisible à
nos exportations. En tout cas, le chef de l'Union Nationale devrait le savoir.
Il devrait savoir aussi que le gouvernement ne peut contrôler en
très grande partie nos institutions financières.
Comment, devant un gouvernement à qui il manque autant de moyens
et de pouvoirs, particulièrement dans le domaine économique, le
chef de l'Union Nationale peut-il sérieusement parler de politique
globale de relance économique? Tout au plus peut-on parler de politique
partielle ou d'élément d'une politique économique? C'est,
d'ailleurs, ce que le gouvernement est en train de mettre en place et
d'appliquer.
Enfin, il faut bien le constater, c'est le gouvernement
fédéral qui dispose non seulement des pouvoirs, mais d'une
véritable marge de manoeuvre financière au Canada. À ce
sujet, je voudrais citer un court paragraphe d'un document qui a servi de
document de travail au sommet économique de la Malbaie où on lit
ceci: "Le gouvernement fédéral, depuis cinq ans, a pu
réduire les impôts pour un montant évalué à
$4 milliards, tout en lançant de nouveaux programmes de dépenses
dont le coût est couramment estimé à $5 milliards. Cela
fait une marge de manoeuvre de $9 milliards par rapport à des revenus
totaux de $35,3 milliards. Au contraire, les gouvernements provinciaux et
locaux du Canada, pendant ce temps, n'ont pu lancer de nouveaux programmes de
dépenses. Ils ont dû, par ailleurs, alourdir le fardeau fiscal de
plus de $700 millions". C'est cela la situation. C'est cette partie de la
situation que le chef de l'Union Nationale néglige et oublie. J'avoue,
Mme le Président, que cela me déçoit beaucoup de sa part,
mais que je le comprends aussi, c'est qu'il a tellement peur de la
souveraineté et de l'indépendance qu'il en oublie les
méfaits réels du fédéralisme.
Il faudrait aussi souligner que l'un des principaux responsables de la
situation actuelle, c'est l'entreprise privée elle-même, dont il
vante fort souvent les mérites en oubliant, cependant, les carences
visibles de cette entreprise privée. Bien sûr, les gouvernements
sont responsables de la situation économique. Celui qui nous a
précédé, surtout. Mais l'entreprise privée,
négligeante, insouciante, sans vision, est aussi responsable. Je
voudrais donner comme exemple l'industrie des pâtes et papiers, qui est
un des fondements économiques de ma région, qui est une industrie
vieillie, paresseuse et dont la technologie n'est plus compétitive. Les
usines au Québec ont plus de 30 ans. Les entreprises faisant preuve de
négligence n'ont pas prévu d'investissements de modernisation ni
d'investissements de remplacement.
Il faut dire que le gouvernement précédent connaissait
cette situation, mais il n'a rien fait pour la corriger. L'entreprise
privée, dont le chef de l'Union Nationale vante les mérites, par
conséquent, est aussi responsable de cette situation. J'aurais
aimé qu'il regarde d'un oeil plus critique les idées et les
opinions du Conseil du patronat, entre autres.
Je ne voudrais pas terminer, cependant, sans quand même
féliciter le chef de l'Union Nationale même si je vais
voter contre sa motion de s'être efforcé de faire, à
la fin de son discours, des propositions, des recommandations, des suggestions
positives. Je ne veux pas dire par là que je suis d'accord avec ses
suggestions ou ses recommandations, je n'ai pas l'intention non plus de les
analyser, mais, enfin, il s'est efforcé de faire des recommandations
positives. Il a fait un effort louable.
Il a joué un véritable rôle d'opposition, un
rôle positif, ce dont est évidemment incapable l'Opposition dite
officielle par la voix de celui qui a parlé, le député de
Jean-Talon, qui s'est contenté, comme d'habitude, de nous servir un
ragoût fort indigeste de statistiques.
Voilà ce que je voulais dire au sujet de cette motion et des
propos du chef de l'Union Nationale. C'est d'abord qu'il n'intègre pas,
dans son analyse, le fait que le Québec soit une province et qu'il ne
voie pas, non plus, les carences de l'entreprise privée.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Si je comprends bien, Mme le Président, il
reste au Parti libéral quelque dix minutes que je tâcherai
d'employer à bon escient.
Mme le Vice-Président: C'est ce que j'allais justement
vous faire remarquer, M. le député.
M. Gratton: Mme le Président, je vous dirai tout de suite
que, comme le député de Jean-Talon, j'ai l'intention d'appuyer
cette motion du chef de l'Union Nationale pour la simple et unique raison
que, comme les députés de l'Union Nationale, je
considère qu'il est de mise de blâmer le gouvernement d'avoir
négligé de présenter en priorité une politique
globale de relance économique et d'avoir ainsi permis que la situation
désastreuse de l'économie s'aggrave davantage. Mais, Mme le
Président, je ne pourrais passer sous silence les nombreuses
contradictions dans l'argumentation du chef de l'Union Nationale qui, cet
après-midi, nous a servi une collection d'articles de journaux qui, en
grande majorité, démontraient que les fuites de capitaux, les
investissements qui retardent, le chômage que cela occasionne sont les
effets, surtout, d'une incertitude qui émane de cette situation
vis-à-vis du problème constitutionnel et, en fait,
vis-à-vis de l'option constitutionnelle du gouvernement qui change
à toutes les deux semaines sinon à tous les deux jours.
Et je ne peux concevoir que le chef de l'Union Nationale présente
une motion comme celle-ci et qu'hier, au moment du débat sur la motion
du député de Laval, afin de demander au gouvernement de tenir le
référendum d'ici un an, il s'opposait à cette motion, et
qu'aujourd'hui, il répète qu'il faut surseoir pour au moins trois
ans à la tenue de ce référendum et, en fait, à
toute discussion concernant le statut constitutionnel du Québec. Comme
si surseoir ou ne pas en parler éliminait la situation qui existe dans
les faits. Les faits sont que si les investisseurs refusent de venir engager
des sommes au Québec, pas tous, mais si certains refusent, si certaines
personnes retirent des capitaux du Québec, ce n'est peut-être pas
$9 millions dans l'Outaouais, mais c'est sûrement plusieurs centaines de
milliers de dollars, et peut-être même plusieurs millions. Je
connais personnellement des gens à qui on voudrait bien faire comprendre
qu'il n'y a pas lieu de retirer les capitaux mais qui, pour des raisons qui
sont bien personnelles, le font quand même. C'est un fait.
Et que le chef de l'Union Nationale refuse de faire face à cette
situation en nous baragouinant toutes sortes d'argumentations, des suggestions
afin de surseoir, d'une part, à la discussion sur l'indépendance
et, d'autre part, de créer un comité pour préparer le
référendum, où est la logique dans tout cela?
Forcément, je suis déçu que le député de
Pointe-Claire ne soit pas là, parce que je voudrais lui demander ce
qu'il fait dans ce parti, lui, le député de Pointe-Claire.
J'imagine qu'il n'a rien compris à la situation. Il n'a pas
compris qu'au moment de l'élection du 15 novembre dernier l'Union
Nationale proclamait qu'elle abolirait la loi 22, qu'elle reconnaîtrait
deux langues officielles au Québec. Elle disait cela dans sa
publicité anglaise, bien entendu. En français, on parlait
d'autres choses, mais en anglais, on parlait de deux langues officielles au
Québec. En français, on parlait de la prédominence du
français. À un moment donné, après
l'élection, on a pris position, dans un congres quelconque: la
liberté de choix, cela n'existait plus.
Je voudrais bien savoir où se trouverait le député
de Pointe-Claire, s'il avait dit qu'il ne défendrait pas le principe de
la liberté de choix durant la campagne du 15 novembre. Il ne serait
sûrement pas député dans cette Chambre. Mme le
Président, encore aujourd'hui, le député de Pointe-Claire
vient nous faire des grands exposés. Il ne réalise même pas
qu'il est dans un parti qui, en 1970, s'est retrouvé entre les deux
chaises proverbiales: écarquillé entre le Parti
québécois qui, au moins, avait, à ce moment,
l'honnêteté de dire qu'il était pour l'indépendance,
et le Parti libéral qui disait, ce qu'il dit encore aujourd'hui, qu'on
veut demeurer Canadiens au Québec. L'Union Nationale s'est
retrouvée écarquillée entre ces deux chaises.
M. Grenier: Mme le Président, est-ce que le
député...
M. Gratton: Je n'ai pas le temps, vous reviendrez après,
aussitôt que j'aurai fini.
M. Grenier: Mais ce n'est pas pris sur votre temps.
M. Gratton: Oui, c'est pris sur... Est-ce que ce sera pris sur
mon temps si je réponds à la question du
député?
Mme le Vice-Président: La question est refusée.
M. Grenier: Je m'excuse.
M. Gratton: Est-ce que cela va être pris sur son temps
à lui ou sur le mien si je réponds à sa question?
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau, c'est bien sûr que si vous acceptez une question, le temps sera
pris sur le vôtre. Acceptez-vous la question?
M. Gratton: Je l'accepterai immédiatement quand j'aurai
fini parce que j'ai peur que vous coupiez sur mon temps.
Mme le Vice-Président: Si vous avez terminé, M. le
député de Gatineau, vous n'aurez plus l'occasion de l'accepter.
La question est refusée. M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Mme le Président, ils se sont retrouvés
entre deux chaises. En 1973, ils ne s'étaient pas ajustés, ils
ont disparu complètement. Et, aujourd'hui, ils viennent nous servir des
salades comme cette motion en tentant de blâmer tout le monde, sauf eux,
alors qu'en fait, Mme le Président, sait-on réellement ce que
l'Union Nationale représente sur le plan constitutionnel? Est-ce qu'elle
est retournée à sa thèse de
l'égalité-indépendance comme en 1970 avec les Beaulieu,
les Marcel Masse qui parlaient d'une séparation en 1974? Est-ce qu'elle
a fait comme le Parti québécois qui lui, est rendu à
l'autonomie de Duplessis?
C'est fou comme cela, la politique au Québec, Mme le
Président. Le Parti québécois en 1970 et
en 1973, nous parlait de l'indépendance. Pas de séparation
et pas de souveraineté-association. C'était
l'indépendance. Aujourd'hui, il nous parle de
souveraineté-association. C'est l'autonomie pour le député
de Louis-Hébert. Tout à coup, c'est le grand
fédéralisme d'avant le 15 novembre. Là, ils ne savent pas
trop si on ne devrait pas considérer cela, la
souveraineté-association. Mais, de toute façon, il ne faudrait
surtout pas demander à la population de se prononcer tout de suite parce
qu'eux autres, ils ne sont pas prêts à proposer quelque solution
que ce soit.
Les autres, ils veulent essayer de ménager la chèvre et le
chou comme ils l'ont fait avant l'élection de 1975. Essayer
d'élire des députés, sous de fausses
représentations et ensuite nous administrer la province comme ils l'ont
si bien fait entre 1966 et 1970. Avec les résultats qu'on connaît,
Mme le Président.
Je vais voter pour la motion du chef de l'Opposition. C'est aussi
bête que cela, Mme le Président. On en est rendu là au
Québec. Le député du Lac-Saint-Jean qui félicitait
tantôt le chef de l'Union Nationale d'avoir été constructif
et tout cela, lui il va voter contre la motion. Et moi qui critique, qui trouve
complètement aberrante la position de l'Union Nationale, je vais voter
pour. C'est cela la politique de ce temps-là, Mme le
Président.
C'est aussi fou que cela, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau...
M. Gratton: Mme le Président, je ne m'attarderai pas plus
longtemps, puisqu'il ne me reste pas de temps, sur un parti moribond qui sera
jugé par la population en temps et lieu.
Mme le Vice-Président: Vous avez compris que je vous
demandais de conclure, M. le député.
M. Gratton: Oui. Je suis en train de conclure. Je voudrais
simplement dire au ministre de l'Industrie et du Commerce, qui nous reprochait
aujourd'hui, aux députés de l'Opposition, de présenter des
motions qu'il appelle dilatoires plutôt que d'étudier le projet de
loi no 48, qu'il ne relève pas de l'Opposition de décider de
l'ordre de l'étude des projets de loi et que, si son gouvernement a
décidé de passer son temps à parler de la langue, ce n'est
pas à nous de décider qu'on doit étudier le projet de loi
no 48.
Vous nous avez amené un projet de loi no 31, sur les affaires
municipales, nous l'avons étudié et nous n'avons pas fini de
l'étudier, à part cela. Amenez votre législation, mais
arrêtez de nous casser les pieds avec la langue et avec les patarafes et
les espèces de "show" du financement des partis politiques, si vous
n'êtes pas prêts à adopter les lois qui vont
réellement relever l'économie.
Je répondrai au député de Lac-Saint-Jean je
n'aime donc pas cela être pressé comme cela; je vais faire cela
très rapidement qui contestait l'affirmation du
député de Jean-Talon concernant la nationalisation de Bell
Canada. Je cite le programme du Parti québécois, à la page
12; cela s'intitule: "Le programme, l'action politique, les statuts et
règlements, édition 1975, du Parti québécois". Vous
connaissez cela, de ce côté-là, à la page 12...
Mme le Vice-Président: M. le député
Gatineau, j'espère que c'est votre conclusion et qu'elle sera
courte.
M. Gratton: Je mets quinze secondes.
Mme le Vice-Président: Votre temps est déjà
écoulé. Rapidement.
M. Gratton: À la page 12, sous ce titre: "En
conséquence, un gouvernement du Parti québécois s'engage
à: 4. Réorganiser le domaine des communications: a) en
créant une société des communications par le regroupement,
sous contrôle majoritairement public, des divers réseaux de
télécommunication, aux fins d'acheminer à travers tout le
territoire et vers l'étranger le téléphone, le
télégraphe, l'image et les données électroniques
par la location de ces services aux entreprises." C'est le Parti
québécois qui le dit, ce n'est pas moi. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Drummond.
M. Michel Clair
M. Clair: Mme le Président, je trouve
particulièrement amusante cette situation dans laquelle l'Union
Nationale et le Parti libéral ne savent plus trop si oui et si non ils
sont pour ou contre leurs propres motions, et pour quelle raison.
Mme le Président, quant à moi, je voterai contre cette
motion, et je vous indique immédiatement quatre raisons qui tiennent
elles-mêmes à la présentation, au contenu de la motion. Si
on regarde le texte d'un peu plus près, on voit que le chef de l'Union
Nationale désire que l'Assemblée nationale blâme le
gouvernement d'avoir négligé de présenter une politique
globale de relance économique. On lit bien "de présenter".
À mon sens, quand on voit cette course, qu'on pourrait appeler "course
de démolition", à laquelle les partis de l'Opposition nous
forcent depuis quelques jours, on comprend peut-être les idées
qu'il y a derrière ce mot "présenter".
En effet, le chef de l'Union Nationale ne nous parle pas de mettre en
pratique, de préparer une politique de relance économique, mais
bien de présenter. Serait-ce pour mieux retarder les travaux de
l'Assemblée nationale? J'espère que ce n'est pas cela et que
c'est simplement à cause d'une mauvaise interprétation de ma part
du mot "présenter", ou d'un mauvais choix de mot par le chef de l'Union
Nationale.
Deuxièmement, Mme le Président, le chef de l'Union
Nationale nous parle de la situation désastreuse de l'économie au
Québec qui prévaut, dit-il,
depuis plus d'un an. Je pense que c'est important, en effet, de noter
que ce n'est pas d'hier que la situation économique au Québec
s'est détériorée. Ce n'est pas d'hier et, dans ce sens, je
pense que les mots "un an" du chef de l'Union Nationale auraient dû
être remplacés par "six ans" et peut-être même plus,
tel que le proposait le député de Jean-Talon, qui nous disait
tantôt que c'était avant qu'il soit au pouvoir que la mauvaise
situation économique prévalait au Québec.
Somme toute, quand le chef de l'Union Nationale nous parle de situation
économique mauvaise, désastreuse au Québec, je pense que
sa motion aurait dû être présentée, en fait, non pas
pour blâmer le gouvernement, mais pour blâmer l'ancien
gouvernement.
Comme le chef de l'Union Nationale l'a dit lui-même: Les
difficultés économiques du Québec ne datent pas
d'hier...
M. Burns: Vous n'êtes pas nombreux, M. le
député de Saint-Louis!
M. Clair: Le chef de l'Union Nationale a perçu...
M. Blank: Qui est à côté de vous?
M. Clair:... que le Parti libéral, qui a gouverné
le Québec au cours des six dernières années, en portait
plus que sa part.
Troisièmement, je relève les mots "relance
économique" de la motion du chef de l'Union Nationale. Parler de relance
économique au Québec, cela fait bien aujourd'hui; ce qui fait
moins bien, c'est peut-être de parler, tant pour l'Union Nationale que
pour le Parti libéral qui ont gouverné le Québec pendant
tant d'années, de l'absence de politique de développement
économique chronique qu'a connue le Québec depuis des
décennies. L'absence de planification économique, je pense que
c'est drôlement plus important que la relance économique dans le
cadre actuel du système politique, du système
fédéral canadien.
En effet, ce n'est pas d'hier que de nombreux domaines auraient eu
besoin d'être structurés, auraient eu besoin de planification. On
a vu l'Union Nationale faire beaucoup de cas de la situation de l'agriculture
lorsqu'une motion du député de Montmagny-L'Islet avait
été présentée dans cette Chambre. Est-il
nécessaire de noter que les problèmes de l'agriculture au
Québec ne sont pas d'hier? Il est souverainement irresponsable, de la
part d'un parti comme le Parti libéral, qui a gouverné le
Québec au cours des six dernières années, de venir
blâmer le gouvernement actuel, après seulement huit mois
d'exercice du pouvoir, de tous les maux en matière d'agriculture. Cette
attitude du Parti libéral, cette attitude en Chambre est bien
représentative de l'attitude même des organisations et des
associations de comté.
En effet, j'ai dû rappeler il y a quelque temps au
député qui occupait ma banquette, l'ex-député
libéral de Drummond, qui me blâmait d'avoir assisté,
inactif, au massacre de l'agriculture depuis les six derniers mois, qu'il y a
moins de deux ans il avait eu besoin de la protection de la Sûreté
du Québec pour empêcher les agriculteurs d'aller lui engraisser et
lui labourer son parterre. Je pense qu'on est encore loin de cela et les
agriculteurs savent ce qu'on a fait depuis six mois, depuis huit mois, pour
l'agriculture.
Un autre domaine économique important, le tourisme. Pour une
fois, on a, enfin, un ministre du Tourisme qui a compris que le
développement du tourisme ne se ferait pas seulement par des ballounes,
mais que cela se ferait régionalement, s'il était possible au
Québec, de mettre les régions touristiques en valeur. Le meilleur
signe de cela n'est-il dans les statistiques les plus simples qui ont
été publiées sur nos records, au point de vue touristique,
l'an dernier. En effet, on était rendu tellement pauvre, tellement
à cours de moyens, tellement sans idée sur le
développement touristique au Québec que même la balloune
olympique de l'an dernier, qui était censée amener mer et monde
au Québec, a fait en sorte que la ville de Montréal, au point de
vue touristique, a connu une baisse fantastique de ses revenus à ce
chapitre.
Un autre domaine qui était là bien avant hier, le domaine
de l'amiante. Ce n'est pas d'hier qu'il y a des mines d'amiante, ce n'est pas
depuis le 15 novembre que l'amiante est soudainement apparue quelque part dans
les Cantons de l'Est. L'amiante était là il y a des
siècles. L'Union Nationale aurait pu faire quelque chose, le Parti
libéral aurait pu faire quelque chose. Pourtant, alors que ces
mêmes partis viennent nous blâmer de ne pas avoir de programme de
relance économique, eux, leur acte de contrition, cela fait longtemps
qu'ils ne l'ont pas fait, j'ai l'impression!
On est en train les ministres concernés en ont
déjà fait état de préciser cette politique
de développement de l'amiante. Même chose pour le papier. Les
moulins qui datent de 1896, ils étaient là avant le 15 novembre.
Qu'est-ce que l'Union Nationale, qu'est-ce que le Parti libéral ont fait
pour essayer de fouetter un tout petit peu l'entreprise privée dans ces
cas-là?
C'est certain, Mme le Président, qu'avec des gouvernements qui
étaient négligents, qui ne se préoccupaient pas de ces
situations-là, le domaine des pâtes et papiers s'est
détérioré, avec la connivence, avec la complicité
de l'Union Nationale et du Parti libéral. On pourrait parler des petites
et moyennes entreprises, Mme le Président. Les petites et moyennes
entreprises ne sont pas nées le 15 novembre, elles non plus. Elles
étaient là, les petites et moyennes entreprises, bien avant le 15
novembre. Je pense que, si le chef de l'Union Nationale s'intéressait
à la politique du temps où l'Union Nationale était au
pouvoir et s'y intéressait du temps où le Parti libéral
était au pouvoir, il devrait savoir qu'on en a beaucoup parié,
mais qu'on a bien peu fait pour les petites et moyennes entreprises.
M. le Président, une autre dimension de la motion du chef de
l'Union Nationale, celle qui nous parle de politiques globales, elle aussi est
un petit peu embrouillée, un petit peu ténébreuse.
Quand
le chef de l'Union Nationale parle aussi souvent qu'il le fait d'un bon
gouvernement, un peu comme le soulignait je ne veux pas revenir plus
longuement que cela sur ce sujet le député de
Lac-Saint-Jean tantôt, je pense que le chef de l'Union Nationale oublie
que, si on est un bon gouvernement, on ne peut toutefois pas être
beaucoup plus qu'un bon gouvernement provincial. Pour ajouter à ce que
mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, disait
tantôt, non seulement a-t-on besoin d'un bon gouvernement provincial,
mais on aurait besoin, pour le temps où on y est encore, d'un bon
gouvernement fédéral. On n'en parle pas beaucoup de
celui-là, ces temps-ci. Un bon gouvernement fédéral
devrait, lui aussi, se préoccuper de relance économique et de
politiques globales de relance économique et de développement
économique.
Qu'est-ce qu'a fait le gouvernement fédéral pour relancer
l'économie sans délai, à court terme? Je pense, M. le
Président, qu'on retrouve beaucoup trop de mesures irresponsables dans
ces domaines qui ne sont que de la poudre aux yeux. Parmi les mesures à
court terme pour combattre le chômage, on retrouve toute la série
des Jeunesse Canada Travail, des Perspectives Jeunesse, Horizons nouveaux, etc.
Il y a beaucoup de bon dans ces projets, M. le Président, mais il y a
également un énorme cataplasme qu'on pose sur le problème
du chômage au Québec. Il y a également une politique qui
vise beaucoup plus à couper l'herbe sous le pied du gouvernement du
Québec dans un nombre croissant de domaines dont le principal
actuellement est peut-être les affaires sociales, à faire perdre
au gouvernement provincial l'initiative dans un grand nombre de domaines.
Le gouvernement fédéral semble beaucoup plus
préoccupé par Unité Canada, Destinée-Canada et
toute cette garde-robe, que de prendre des mesures visant à combattre
à court terme le chômage. Il y a un domaine qui me tient
particulièrement à coeur, M. le Président, et vous le
savez, parce que je suis représentant d'une région, d'un district
électoral où 45% environ des travailleurs y oeuvrent, c'est
l'industrie du textile.
Si vraiment le gouvernement fédéral était
empressé, lui aussi, d'être un bon gouvernement, cela en est un
domaine, M. le Président, où il agirait sans délai pour
mettre un terme à cette politique absolument discriminatoire à
l'égard du Québec, dans le domaine des quotas d'importation des
vêtements et du textile tant primaire que secondaire.
C'est la même chose qui prévaut dans le secteur de la
chaussure. On laisse entrer sans aucune mesure forte à l'égard
des importations tout ce qui peut nous venir de n'importe quel pays en
matière de textile. Le gouvernement du Québec a pris ses
responsabilités dans le domaine du textile. À preuve un document
que je vous exhibe, qui s'intitule "L'industrie québécoise du
textile", qui a été publié au début de cette
année et à l'occasion duquel le ministre de l'Industrie et du
Commerce a fait une quinzaine de suggestions au gouverne- ment
fédéral dans le but, à court terme, de protéger les
emplois des travailleurs du textile.
Je vous cite une page, qui est peut-être un peu longue, mais
combien éloquente sur la situation du textile, qui est tirée de
cette étude: "L'analyse des importations canadiennes peut s'effectuer en
fonction des pays pour une vision globale et en fonction des produits pour une
plus grande précision.".
En ce qui concerne les pays, on constate qu'en chiffres absolus la plus
grande part des importations canadiennes de vêtements provient des pays
à bas coût de production, soit $262 millions, en 1974, contre $193
000 812 venant des pays développés. Toutefois, au cours des trois
années 1972, 1973 et 1974, les importations en provenance des pays
développés ont augmenté de 71%, alors que celles provenant
des pays sous-développés augmentaient de 43%". Mme le
Président, ce n'est tout de même pas le Parti
québécois qui était au pouvoir à ce
moment-là, et j'aimerais bien savoir ce qu'ont fait les gens du Parti
libéral au gouvernement provincial à cette époque pour
mieux protéger l'industrie du textile. Rien. On a fait le mort. C'est
pour cela que l'industrie du textile connaît des difficultés qui
vont grandissant.
En terminant, je voudrais simplement retenir deux
éléments, deux propositions que j'aimerais faire en particulier
à l'Union Nationale. Le sens de la motion, on le voit, est inacceptable,
d'une part, parce qu'une politique globale n'est pas possible dans le cadre
politique actuel, et d'autre part, la relance n'est pas tout. Il faut
également avoir une politique de développement industriel, il y a
eu des mesures concrètes de proposées qui sont
présentement sur la table de cette Assemblée. Je parle du projet
de loi 48 intitulé Loi sur le fonds de relance industrielle, et le
projet de loi 44 intitulé Loi sur une société de
développement coopératif.
Si vraiment l'Union Nationale et le Parti libéral sont
sérieux quand ils nous parlent d'améliorer le sort
économique du Québec, je pense qu'ils devraient consentir sans
délai à un moratoire sur la présentation d'autres projets
de loi, et consentir rapidement à ce qu'on appelle les écritures
pour ces deux projets de loi dont on ne peut contester le bien-fondé. On
peut ne pas être d'accord sur des virgules ou des détails de ces
projets de loi. Mais, fondamentalement, l'Union Nationale et le Parti
libéral ne peuvent contester le bien-fondé de ces projets de loi.
Et si vraiment ils sont sérieux quand ils veulent l'amélioration
de la situation économique au Québec, ils devraient permettre au
gouvernement d'adopter sans délai ces projets de loi. Merci, Mme le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
règlement, Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Mme le Président, il est peut-être
trop tard. Je voulais poser une question au député parce qu'il
parlait encore et vous ne
m'avez pas entendue. Selon l'article 99, il est trop tard.
Mme le Vice-Président: Je regrette, Mme le
député. Quand le député est déjà
assis, c'est dire qu'il a déjà terminé son intervention;
il aurait fallu la poser avant. Je regrette.
Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Alors, s'il n'y a plus
d'intervention...
M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Mme le Président, je vous demanderais de
fermer la fenêtre là-bas, il y a un courant d'air. Et j'ai
remarqué que le courant d'air était de ce
côté-ci.
Mme le Vice-Président: Je vous demanderais, M. le
député, de vous en tenir à la pertinence du
débat.
M. Chevrette: Vous avez bien raison, Mme le Président. Je
voudrais tout d'abord souligner, moi aussi, que le chef de l'Union Nationale a
au moins tenté un effort, dans ce sens qu'il a essayé de faire
des recommandations, plus ou moins, bien sûr, adaptées aux
circonstances et en ignorant ou en ne comprenant pas toujours les positions
prises par le Parti québécois ou le parti ministériel.
Depuis le début des travaux de cette Chambre, il faut remarquer
que nous avons assisté à plusieurs débats sur ce genre de
motion de blâme. Chaque fois, je vais le dire même si c'est
flatteur pour l'Union Nationale, il y a au moins eu un essai, une tentative,
souvent maladroite, mais au moins un "essai d'essayer" de construire, alors que
directement à sa droite, je dois vraiment souligner que ce fût
constamment des reproches, des réflexions du genre de celles-ci: "Rien
ne va plus au Québec depuis le 15 novembre. C'est le chaos social. C'est
la sempiternelle incertitude".
M. Gratton: C'est parce que nous sommes francs.
M. Chevrette: L'incertitude, Mme le Président, que de fois
avons-nous entendu ce mot en cette Chambre! Il est vrai que c'est vraiment
incertain pour l'avenir du PLQ au Québec. On a vraiment à
continuer, comme on l'a fait, à réaliser graduellement notre
programme et à continuer à vouloir faire adopter difficilement,
devant une barrière de procéduriers, nos politiques sur les plans
social et économique et, graduellement, la majorité des
Québécois et la très forte majorité des
Québécois comprendra qu'il était fort heureux
l'événement qui s'est produit le 15 novembre dernier.
Mais fallait-il que cela aille si bien que cela avant le 15 novembre,
Mme le Président? À écouter le député de
Jean-Talon, tout allait tellement bien avant le 15 novembre, qu'on se demande
vraiment pourquoi avec 102 députés et à peine deux ans de
pouvoir on ait déclenché des élections. Cela allait
tellement bien qu'on sentait, de la part de ce gouvernement, toute la certitude
dans ses capacités d'administrer. On a déclenché des
élections avec le résultat qu'on connaît très
bien.
Je suis à me demander si vraiment leur chef du temps n'avait pas
compris que les libéraux étaient en chute libre et que, pour
pouvoir s'agripper à un autre court mandat, il fallait aller aux urnes
le plus vite possible, pour pouvoir, d'une façon assez masochiste, vivre
les derniers ébats de ce parti politique qui est relégué,
dans mon esprit, et aux yeux de plusieurs Québécois, à un
parti tout au plus reconnu.
Je voudrais souligner qu'avec des moyens financiers passablement
difficiles, on a présenté aux Québécois un budget
à la hauteur de nos moyens. D'abord avec l'objectif primordial
d'assainir et de resserrer l'administration publique pour pouvoir
présenter une image d'un gouvernement qui donne l'exemple non seulement
aux compagnies et à d'autres provinces canadiennes, mais à tous
les Québécois, cette image d'un gouvernement qui veut inciter la
population à vivre selon ses propres moyens.
Là-dessus, je dois vous dire que, déjà, c'est un
effort passablement louable. Si nous réalisons, de la façon dont
nous sommes partis, cet objectif, chose dont je ne doute même pas, nous
pourrons à l'avenir, l'an prochain ou dans deux ans, présenter
aux Québécois des budgets beaucoup plus libéraux, plus
avant-gardistes, parce qu'on aura su freiner les dépenses
exagérées, prohibitives dans toutes sortes de projets bidons,
projets ballons qui ont servi l'intérêt d'une minorité au
détriment de la collectivité québécoise.
Mme le Président, cela m'a bien fait sourire d'entendre le
député de Jean-Talon faire des comparaisons entre l'Union
Nationale et le Parti québécois. Vraiment, il est vrai, à
sa décharge, que toute comparaison cloche.
Je dois dire quand le député de Jean-Talon
soulignait qu'égalité et indépendance signifiaient la
même chose, la même idéologie que le Parti
québécois qu'il y a longtemps que je n'ai pas entendu ce
slogan de la part de l'Union Nationale: égalité ou
indépendance.
Cependant, je dois vous dire, aussi, que malgré une
idéologie qui est passablement différente entre les deux
formations politiques, je remarque, au moins de leur part, qu'il y a beaucoup
de jeunes, de nouveaux députés contrairement à
d'autres formations politiques qui sont arrivés ici avec un
désir bien profond, celui de collaborer au mieux-être de la
collectivité québécoise, au-delà des partisaneries
politiques, ce qui, à mon sens, est le rôle premier d'un
député de quelque parti politique qu'il soit.
En terminant, je dois vous dire, Mme le Président, que depuis
huit mois on devrait être habitué, on ne devrait pas être
surpris de ce qui se passe dans cette Chambre. On ne devrait pas avoir de
réactions vives d'une journée à l'autre puisque c'est la
même chose, le même scénario qui se ré-
pète. Je n'ai jamais vu autant d'efforts, autant de recherches de
la part du Parti libéral, de la part de l'Opposition officielle,
d'efforts inouïs pour trouver des statistiques, ou encore pour faire
échec à l'adoption de lois en attaquant uniquement sur la forme
et jamais sur le fond des choses.
Je souhaite que d'ici quelques semaines, au moins, on s'assoie
sérieusement et si on veut "filibuster", comme on le dit si bien, qu'on
le fasse, au moins, sur le fond des choses et non sur la forme, comme on tente
de le faire depuis huit mois.
M. Lavoie: La motion, la pertinence du débat!
Mme le Président: M. le député, je dois vous
rappeler que vous devez vous en tenir à la pertinence du
débat.
M. Chevrette: Mme le Président, je vous ferai remarquer
que si vous aviez écouté le discours du député de
Jean-Talon, vous vous seriez rendu compte que les comparaisons entre l'UN et le
PQ n'étaient pas sur le fond du débat non plus, et je pourrais
vous relever d'autres argumentations du député de Gatineau,
c'était la même affaire.
M. Gratton: Vous n'avez pas aimé cela?
M. Chevrette: Sauf que quand on est divisé sur le fond au
sein d'une formation politique, c'est bien évident qu'on cherche
à attaquer sur la forme.
Mme le Président, en terminant, je voudrais dire au chef de
l'Union Nationale de se consoler parce que, tout au moins, même si on lui
a dit qu'il était un chef qui voulait absolument remplacer le premier
ministre actuel, chose qu'il devra se résigner à attendre pendant
plusieurs années, tout au moins, il a été élu
démocratiquement au sein de son parti alors que certains petits colonels
de formation adverse cherchent délibérément à se
faire valoir sur la forme et non sur le fond. Je voterai quand même
contre la motion de l'Union Nationale en leur disant...
M. Gratton: Nommez-les ceux-là!
Mme le Vice-Président: Est-ce que je comprends, M. le
député, que vous permettez une question?
M. Chevrette: Si c'était au député de
Gatineau, je dirais oui.
M. Gratton: Ce n'est pas une question, je vous demande de nommer
les petits caporaux dont vous parlez.
M. Chevrette: Vous les connaissez tellement!
Mme le Vice-Président: M. le député, un
moment, s'il vous plaît! Je regrette, M. le député de
Gatineau, si vous voulez poser une question, veuillez vous lever et demander
à l'intervenant s'il accepte la question.
M. Gratton: Mme le Président, j'aimerais demander au
député de Joliette-Montcalm de nous donner la nomenclature de ces
petits caporaux dont il nous parlait tantôt.
M. Chevrette: Mme le Président, je m'aperçois que
le député de Gatineau a très bien appris la leçon
de son ancien chef: Nommez-moi un seul cas...
M. Blank: Nommez-les tous. Il n'y a pas un seul cas
jusqu'à maintenant!
M. Chevrette: Sûrement. Vous n'avez qu'à lire les
journaux comme moi. Au sein de votre députation, il y en a au moins
trois!
Mme le Président, je conclus en disant que, malgré
l'effort de l'Opposition reconnue pour attirer l'attention sur les
problèmes économiques, chose dont nous sommes très
conscients au gouvernement actuellement, je pense vraiment que ce ne sont pas
par des motions de blâme qu'on y arrive, mais en y allant avec des
débats de fond sur des projets de loi tels que le projet de loi
présenté par le ministre de l'Industrie et du Commerce sur la
petite et la moyenne entreprise.
M. Blank: Mettre 101, avec 2 à côté, on est
prêt pour 48.
Mme le Vice-Président: M. le député,
à l'ordre! M. le député.
M. Chevrette: Mme le Président, j'ai toujours su que
quelqu'un de visé se défend bien. Je conclus...
M. Blank: Pourquoi tu m'accuses?
M. Chevrette: ...en invitant les formations politiques adverses
à se pencher rapidement sur le projet de loi qui a été
présenté par le ministre de l'Industrie et du Commerce et
plusieurs des interrogations soulignées par le chef de l'Union Nationale
trouveront leurs réponses à l'intérieur de ce projet de
loi et, ensemble, nous pourrons peut-être construire un Québec un
peu plus propice à l'ensemble des Québécois.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Sherbrooke.
M. Gérard Gosselin
M. Gosselin: Mme le Président, j'interviens ce soir sur la
motion du député de Lotbinière qui parle de la situation
désastreuse de l'économie du Québec. Je voudrais dire que
je suis en partie d'accord avec ce verdict. Je vais expliquer pourquoi je
constate, avec le député de Lotbinière, que
l'économie du Québec est terriblement malade. Mais je vais aussi
dénoncer le blâme tendancieux et nettement malveillant, pour ne
pas dire malhonnête, à l'endroit de notre gouvernement. Je vais
expliquer aussi pourquoi notre gouvernement
ne mérite pas ce blâme et comment, de tous les
gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis
quelques décennies, ce gouvernement est le premier qui se voit vraiment
préoccupé de la réappropriation effective par les
Québécois de nos instruments de développement, tant par
son programme que par les premiers gestes politiques qui ont été
posés depuis le 15 novembre.
Ce gouvernement se préoccupe de la réappropriation par les
Québécois de leur propre économie. C'est pourquoi, nous
allons réaliser le référendum pour réunir, pour
réaliser la mise en vigueur de tous les instruments propres à un
État souverain et qui nous rendront plus aptes à engager les
grandes réformes économiques qui sont exigées pour le
Québec d'aujourd'hui et de demain. Notre économie, Mme le
Président, a tous les indices d'une économie profondément
malade, qui a, depuis toujours, été soumise au pillage de
développeurs sans conscience et souvent sans racines
québécoises, qui a été, depuis toujours,
laissée à la veulerie, abandonnée à la veulerie de
gouvernements sans véritable stratégie économique, sans
volonté réelle de développement pour le Québec
parce que soumise aux aléas d'un gouvernement étranger dont les
grandes politiques économiques ont toujours contribué à
appauvrir le Québec et les Québécois.
Je voudrais parler de ces grandes politiques économiques d'un
gouvernement central qui s'est toujours comporté vis-à-vis du
Québec comme une nation conquérante vis-à-vis d'une nation
conquise, dont la stratégie aura été sournoisement et
progressivement de maintenir et de renforcer la dépendance des
Québécois.
M. Marchand: Mme le Président, je vous demanderais
d'appeler le quorum, pour faire plaisir au député de Bourassa.
Nous sommes 25.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier, nous comptons les députés immédiatement.
Nous avons effectivement quorum, M. le député de
Laurier.
M. le député de Sherbrooke.
M. Gosselin: Je disais donc, Mme le Président, que le
gouvernement central avait maintenu vis-à-vis du Québec, dans
toutes ses politiques, une stratégie visant à consacrer la
dépendance des Québécois. Nous pourrions citer de
multiples exemples. Les grandes politiques économiques du
fédéral émanant tant du ministère de l'Industrie et
du Commerce que du ministère de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigration,
ont toujours consacré le très net désavantage du
Québec, par rapport aux autres provinces canadiennes. On pourrait citer
la situation du textile québécois, la situation de la chaussure,
du vêtement, du meuble, l'agriculture, bref les ressorts principaux de
notre économie. Ce qui aurait pu faire la force de notre industrie
secondaire a été progressivement saboté par des politiques
économiques déloyales et défavorables en regard de
l'équité de la soi-disant fédération
canadienne.
Le Québec a été traité comme une nation
soumise, a été traité avec arrogance, suffisance, a
été traité comme une nation en tutelle qu'on cherche
à empêcher de se développer véritablement, dont on
cherche à empêcher la croissance et dont on veut consacrer la
détérioration, parce que cela fait l'affaire, dans le type de
fédération canadienne, de consacrer la dépendance des
Québécois vis-à-vis du gouvernement central.
On pourrait passer à la critique toutes les grandes politiques
fédérales, parler du rôle fantoche du MEER dans nos
régions, des gonflements d'argent provisoires qui ont été
lancés par les fantaisies politiques de l'un ou l'autre gouvernement au
cours des dernières années, sans que nos gouvernements ne soient
consultés, l'argent qui a été saupoudré à
travers les programmes de création d'emplois, qui étaient dans le
fond, qui sont encore des gestes que le gouvernement central, que le
gouvernement fédéral pose pour se dédouaner aux yeux des
Québécois d'avoir laissé mourir l'économie du
Québec.
On pourrait parler des rôles néfastes des grands
ministères fédéraux de l'Agriculture, en regard de
l'agriculture québécoise, de l'Industrie et du Commerce, du
rôle néfaste des grands stratèges en politique
étrangère du gouvernement central qui, par les ententes qu'ils
ont négociées dans les accords du GATT, ont consacré la
diminution progressive du nombre d'emplois de Québécois dans les
secteurs vitaux de l'industrie secondaire.
Finalement, Mme le Président, le Québec a
été voué, dans toute son histoire à un
régime de dépendance qui aura consacré, jusqu'à ce
jour, la misère économique des nôtres. Cette misère
économique des Québécois ne date pas d'hier. Il y a encore
quelques décennies, nous étions un peuple de ruraux. Nos
richesses naturelles étaient données à vil prix à
de grands développeurs étrangers.
Il y a encore quelques décennies, nous étions sur nos
terres, dans nos campagnes, soumis à des gouvernements qui nous
traitaient un peu comme des serfs, comme des serviteurs dans un régime
digne des meilleurs temps de la féodalité. Il y a encore quelques
années, on se souvient comment nos cultivateurs, nos
Québécois des campagnes étaient soumis au petit patronage
des rangs, de ceux qui faisaient les élections tout en passant des
contrats de bulldozer ou des primes d'abattis pour faire ce qu'on appelait
à l'époque de la colonisation.
Cette situation s'est continuée et, aujourd'hui, le gouvernement
du Parti québécois est le premier gouvernement
québécois à engager véritablement un effort
continu, progressif et consistant, commencé depuis le 15 novembre, pour
réaliser la réappropriation de notre économie, pour sortir
notre peuple de cette dépendance morbide dans laquelle nos institutions
politiques nous ont maintenus. Ces efforts sont commencés et, pour peu
qu'on veuille être honnête, les gens de l'Opposition sauront que,
pour mettre en oeuvre les grandes stratégies du développement
économique qui sont exigées dans tout le champ de nos
richesses
naturelles, de l'amiante, des pâtes et papiers, on n'improvise pas
cela en quelques semaines. Déjà, des comités de travail
ont des échéanciers précis; ils oeuvrent à
définir, à présenter devant cette Chambre les politiques
économiques qui permettront la récupération de nos
richesses et le développement de nouvelles industries.
Des projets sont annoncés ou seront annoncés incessamment
du côté de la conversion du produit de l'amiante chez nous. Cela
fait dix, quinze ou vingt ans que cela traîne, ce problème.
C'était un engagement électoral du Parti québécois;
c'est un engagement ferme du gouvernement que nous représentons. Les
échéanciers sont là; cette politique sera connue
bientôt. Les gens de l'Opposition savent que ces grands correctifs de
notre économie, cette grande conversion de notre économie, nous
allons l'effectuer laborieusement dans chacun des secteurs en associant le
peuple québécois à cette grande entreprise. Cela va
prendre quelques années à se faire; les résultats, on les
connaîtra très progressivement.
Je voudrais terminer en affirmant, avec le chef de l'Union Nationale, ma
profonde préoccupation face à la misère économique
des Québécois, à la situation désastreuse de
l'économie du Québec, situation que nous connaissons et que nous
connaîtrons encore probablement au cours des prochains mois. Je voudrais
demander aux gens de l'Opposition d'être honnêtes dans leurs
critiques, de nous aider à développer les grandes
stratégies économiques à moyen terme et à long
terme, qui seront véritablement les seules qui nous permettront de
reprendre en main notre économie et de développer le
Québec pour tous les Québécois. Je voudrais demander aux
gens de l'Opposition de nous aider à faire cela et d'être
conscients que cela se fait, d'avoir l'honnêteté de le
reconnaître.
Parce qu'il faut aussi agir à court terme, parce que le taux de
chômage au Québec est intolérable, parce que l'assistance
publique au Québec s'accélère encore, augmente de mois en
mois et d'année en année dans un processus continu qui consacre
la morbidité de notre situation économique, la situation de
dépendance que nous vivons avec plus d'acuité encore en 1977 et
qu'il faudra avoir le courage de corriger collectivement, je voudrais demander
aux gens de l'Opposition de nous aider à définir, dans le court
terme, en sachant que c'est pour le court terme, toutes les mesures sociales,
économiques qui sont de nature à amenuiser les effets du
chômage alarmant que nous connaissons, à amenuiser les effets de
cette misère économique, et à nous aider à nous
soutenir fermement dans le grand effort de réappropriation de notre
économie et de nos instruments de développement que nous faisons
pour le long terme.
Je voudrais simplement terminer en signalant que le plus grand
engagement que nous avons pris et qui témoigne de la volonté de
notre gouvernement d'offrir aux Québécois de véritables
instruments de développement, la véritable chance de
développer le Québec, c'est bien le ré- férendum
dont on dit qu'il est un motif d'inquiétude constant. Le
référendum consiste justement à présenter aux
Québécois le plan d'une nation qui choisit vraiment, mais
vraiment pour la première fois de son histoire, de se donner tous les
instruments requis pour son propre développement. Le
référendum, c'est le choix des Québécois de se
rapproprier les quelque $10 milliards et plus qu'on donne annuellement à
Ottawa pour se faire saboter quotidiennement nos propres projets de
développement.
Et le référendum, c'est la première grande
étape qui pourrait consacrer le transfert et la conversion d'une
économie de désastre comme celle que nous avons connue et celle
que nous connaissons en une économie progressive vouée à
la défense et à la promotion des intérêts des
Québécois. Pour une fois, nous serons les seuls vrais
définisseurs de ce dont les Québécois ont besoin et de ce
qu'il faut faire pour développer le Québec avec toutes les
ressources du Québec et avec tous les Québécois. Je vous
remercie, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Je vous ferai remarquer, M. le
député de Richmond, que dans le temps alloué à
votre parti, il reste vingt minutes, et le temps de réplique est compris
dans ces vingt minutes. Vous êtes bien au courant.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Merci, Mme le Président. J'aimerais, à
mon tour, intervenir sur cette importante motion qu'a présentée
aujourd'hui le chef de l'Union Nationale. Selon le chef de l'Union Nationale,
la relance économique dont le Québec a tant besoin implique
à la fois et simultanément l'instauration d'un climat politique
sain et celle d'un climat économique favorable à certaines
conditions à être appliquées évidemment à
court terme.
C'est évident, Mme le Président, qu'un gouvernement qui
arrive au pouvoir doit commencer à gouverner avec les instruments qu'il
trouve au moment où il prend le pouvoir. Et à ce sujet, je pense
que le défunt gouvernement, dans sa succession, a laissé à
ses héritiers, non volontaires, des choses peu reluisantes. Ces tristes
héritiers, lorsqu'ils ont ouvert les coffres du défunt, n'ont
trouvé, dans ses volontés posthumes, que très peu de
moyens immédiats pour repartir. C'est ce qui a peut-être
expliqué la consternation des premières semaines. On n'avait pas
cru le défunt aussi malade.
D'ailleurs, si vous remarquez, Mme le Président et c'est
par souci de justice et d'équité que le chef de l'Union Nationale
l'a voulu ainsi la motion se termine en parlant du climat
désastreux de la situation économique qui prévaut au
Québec depuis plus d'un an et qui continue de s'aggraver
actuellement.
C'est justement pour avoir cette honnêteté de voir la
situation économique actuelle dans son ensemble, et non pas de l'aborder
mesquinement en des points, malheureusement, qui auraient pu être
politiques ou restreignant le présent débat, qu'on veut
être positif et qu'on veut avoir le souci de collaborer pour
améliorer la situation qui existe actuellement. C'est exact qu'avant le
15 novembre il y en avait, des fermetures d'usines. On avait une façon
très élégante de le souligner plus ou moins. Il y avait
aussi des usines qui fonctionnaient au ralenti. Il y avait des problèmes
sociaux, des problèmes économiques. Il y en avait
énormément. Il y a eu, avant le 15 novembre, de
l'indécision. Il y avait un climat économique stagnant. Il y
avait du chômage. Il y avait du chômage qui allait également
en augmentant, quelles que soient les tortures qu'on ait pu imposer aux
statistiques à ce moment-là. Pour avoir siégé dans
cette Chambre de 1970 à 1973, j'ai vu le martyre qu'on a fait subir aux
statistiques à différentes époques pour se donner bonne
bouche en disant que la situation allait bien.
Avant 1976, avant le 15 novembre, il y avait également, par
exemple, des projets importants qui auraient pu facilement être
parachevés. À titre d'exemple, je prends simplement la
région des Cantons-de-l'Est. La Transquébécoise qu'on a
demandée à grands cris depuis longtemps, qui avait
été commencée et qui aurait pu être terminée
au moment où je vous parle si on avait agi avec fermeté, au bon
moment. Le défunt gouvernement libéral s'était
penché avec tendresse sur le problème, mais sans le
régler, en faisant beaucoup de publicité et en faisant beaucoup
de voeux, mais en n'agissant pas.
Il y a eu la question de la transformation sur place des produits de
l'amiante. On en a parlé, et longtemps. Et le défunt, toujours,
s'est penché sur la question de la transformation de l'amiante. Mais
rien ne s'est fait. Parce qu'on en est au même point aujourd'hui. Et
maintenant, chose du moins très encourageante, ce sont maintenant les
entreprises qui ouvrent la porte pour offrir une collaboration et participer
à des programmes de transformation de l'amiante sur place, ici. Ce n'est
pas sous l'impulsion du défunt.
Il y avait des problèmes d'agriculture. Tant et si bien que vous
auriez dû voir, durant la dernière campagne électorale, la
réaction de nos bons amis les agriculteurs. Ils ont d'ailleurs
été clairs dans leur réponse. Il y a eu le problème
des petits abattoirs. Encore là, le gouvernement libéral s'est
penché sur la situation. Mais lorsque le gouvernement du Parti
québécois est arrivé, lorsqu'il a ouvert le dossier,
c'était exactement au même stade et les gens réclamaient
encore à grands cris un droit qu'ils avaient. J'espère que le
gouvernement actuel continuera l'intention qu'il a soulignée lors de la
dernière campagne électorale et reconnaîtra ce droit aux
petits abattoirs.
Mme le Président, le gouvernement libéral défunt
s'est penché sur les problèmes. C'est vrai. Mais il
s'était tellement bien penché, et tellement longtemps, qu'il ne
s'en est pas relevé. Il est resté penché et je pense qu'il
va rester penché encore longtemps. J'ai même été
extrêmement surpris, aujourd'hui, des propos tenus par le
député de Jean-Talon qui prenait la défense, au
début de son intervention, du parti Québécois, tout en
s'en gardant bien à la fin de son intervention. Surtout en ce jour du 14
juillet ils ont la mémoire courte qui est pourtant le jour
de l'anniversaire de leur premier ministre qu'ils ont si vite oublié,
l'honorable Robert Bourassa.
Le député de Jean-Talon, dans son intervention, n'a
parlé que brièvement de la motion en cours pour parler pendant
presque toute la durée de son temps, de l'Union Nationale. Je le
remercie de reconnaître la montée fulgurante de ce parti qui veut
avoir sa place au Québec. Il a fini en disant que la situation
économique au Québec, dans les deux derniers soupirs qui lui
restaient, était sévère et sérieuse et qu'à
cause de cela, il devait appuyer la motion du chef de l'Union Nationale. Je
m'attendais à autre chose. Parce qu'à aucun moment, durant son
intervention, il n'a reconnu la moindre part de responsabilité aux
problèmes économiques que nous avons actuellement. Je ne veux pas
dire par exemple qu'ils avaient tous les torts sur le dos. Ce n'est pas vrai.
Par contre, ils en avaient certainement un peu. Un petit peu.
À aucun moment il ne reconnut la responsabilité de
l'ancien gouvernement par rapport aux problèmes que nous avons
actuellement. Pourtant, à la fin, il a dit qu'il appuierait notre
motion. Cela m'a fait plaisir parce que j'ai osé croire que
c'était par honnêteté intellectuelle et que c'était
là un aveu public, par le vote, qu'il prenait une part de cette
responsabilité de la situation économique désastreuse dans
laquelle on se trouve actuellement.
Mme le Président, un des problèmes les plus sérieux
auxquels fait face actuellement la présente administration, c'est
l'établissement de ses priorités. Lorsque je regarde le menu
législatif qui est actuellement devant la Chambre, je peux
immédiatement me rendre compte de cette erreur qu'elle commet dès
maintenant et contre laquelle j'aimerais la mettre en garde.
Les gens sont actuellement inquiets de la situation économique.
Il ne faut pas se le cacher. Lorsqu'on regarde le menu à
l'Assemblée nationale, on voit le projet de loi sur la langue qui, j'en
conviens, est un projet de loi très important. Deuxièmement, il y
a le projet de loi sur la réforme du financement des partis politiques.
C'est un autre projet de loi très important qui, encore là, n'est
pas un projet de loi pour assurer de quelconque façon la relance
économique dont nous avons immédiatement besoin à court
terme.
Lorsque je regarde encore plus loin, il y a la question de la loi sur
l'assurance-automobile qui s'en vient, du ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières. Encore là, ce
n'est pas une mesure qui est destinée à faire un quelconque plan
de relance économique.
Le ministre de l'Industrie et du Commerce dans sa réplique
parlait cet après-midi en décrivant la motion du chef de l'Union
Nationale, à laquelle il a joint d'autres motions qui sont
peut-être à venir celles-là, de motions dilatoires. Au
contraire, nous ne voulons, en aucune façon, faire perdre le temps de la
Chambre, mais nous voulons
que le gouvernement se rende conscient qu'il y a des priorités
à établir dans le domaine économique pour apporter
immédiatement des solutions à court terme pour pallier des
problèmes et en prévenir d'autres beaucoup plus graves qui
pourraient persister dans l'avenir si on continuait à
légiférer de la façon dont on est parti en laissant de
côté, malheureusement, un domaine d'activité aussi
important que le secteur économique.
Je conviens qu'il serait important de discuter du projet de loi no 48,
nous le ferons très bientôt, Mme le Président. Le Parti
québécois avait parlé, à différentes
occasions de protéger les citoyens. Le citoyen moyen et le petit
travailleur. Malheureusement, dans le discours du budget, ce qu'on a vu, cela a
été une taxe sur le linge d'enfant.
On avait parlé de créer un système routier
adéquat. Pourtant on n'a encore vu aucune mesure précise et
immédiate. Je souligne encore la situation de la
Transquébécoise, chez nous, qui a malheureusement
été suspendue par une décision de l'actuel ministre des
Transports. Il y a d'autres secteurs aussi dans le système routier qui
demanderaient immédiatement à être corrigés. Si on
pense en termes d'industries secondaires, c'est la même chose, parce que,
chez nous, si on parle, par exemple, de la transformation d'amiante sur place,
il nous faudra avoir un système routier adéquat pour être
capable de faire face, à ce moment, à l'établissement de
ces entreprises.
C'est dans cette perspective qu'il nous faut voir les moyens
immédiats à prendre pour corriger des situations présentes
et pour prévoir soit des corrections à apporter à des
problèmes qui pourraient se présenter ou pour établir
d'avance toute l'infrastructure nécessaire à
l'établissement d'autres industries.
On avait également parlé à grands cris de la
question d'indexer les impôts. Beaucoup de citoyens comptaient
énormément sur cette mesure au Québec pour être
capables de faire face à l'augmentation du coût de la vie.
Malheureusement, elle n'est pas apparue dans le discours du budget. On ne la
voit pas poindre à l'horizon actuellement.
Dans le domaine de la transformation de l'amiante, j'entendais le
député de Sherbrooke mentionner qu'il y avait peut-être des
possibilités. J'espère que c'est vrai parce que cela fait
maintenant plusieurs mois qu'on en parle et en commission parlementaire,
j'avais insisté auprès du ministre pour qu'il fasse le point sur
la situation. Les réponses avaient été malheureusement
évasives. J'espère que de ce côté on aura des
réponses positives à court terme, surtout maintenant que les
entreprises sont prêtes à collaborer.
Dans un autre ordre d'idées, j'aimerais aussi mettre en garde le
gouvernement actuel contre ce qu'on pourrait peut-être appeler une
tendance fâcheuse et qui peut risquer d'apporter certains
inconvénients.
Je cite un article du Nouvelliste, signé de Claude Bruneau, en
date du 9 juillet 1977. "Quand le ministre Tremblay a publié ses fameux
comptes économiques, il n'a rien trouvé d'autre que de trai- ter
d'incompétents ceux qui osaient relever les failles dans l'alignement de
ces chiffres. Encore hier, le ministre Jacques-Yvan Morin, pourtant un de ceux
qui inspirent le plus confiance, traitait d'encyclique et de bulle
l'éditorial dans lequel M. Ryan critiquait une de ses
décisions.
Le dernier exploit de ce genre vient de M. René Lévesque
lui-même, mais ce n'est pas son premier. On se souvient que, lors de son
discours à New York, il avait expliqué les réactions
négatives à ces propos par des sournoiseries d'une
cinquième colonne. Avant-hier, c'était un sondage publié
par le Conseil du patronat du Québec qu'il a relancé dans cette
voie: Au Québec, ce n'est pas le climat économique qui est si
mauvais, mais ce sont les journaux qui sèment la panique! Si un sondage
est défavorable au PQ, les bons journaux sont ceux qui les passent en
douce et les mauvais sont ceux qui les traitent à la une. M.
Lévesque, qui a toujours manié comme pas un le langage
apocalyptique, est en train de développer une peur morbide des
exagérations." Fin de la citation, Mme le Président.
Et c'est ce contre quoi j'aimerais mettre le gouvernement en garde
actuellement. Il existe, qu'on le veuille ou non, des problèmes
économiques actuellement, il existe du chômage et il existe des
fermetures d'usines. Je conviens que cela n'est pas uniquement la
responsabilité de l'actuel gouvernement, mais il faudra, tôt ou
tard, voir vraiment les situations en face si on veut apporter les correctifs
qui s'imposent. On ne changera pas la réalité, on peut seulement
changer notre façon de la concevoir pour intervenir au bon moment et
apporter les correctifs nécessaires.
Il faudrait avoir cette capacité de reconnaître la
réalité et de faire front commun, non pas de lutter les uns
contre les autres, surtout pas au niveau de certains concepts
idéologiques, mais de lutter ensemble contre des problèmes qui
nous sont communs et qui vont nous causer énormément de tort si
on ne sait pas s'unir face à ces problèmes pour les
régler.
Mme le Président, en terminant, j'aimerais simplement vous
souligner que l'Union Nationale, dans sa motion, a voulu être très
positive. Le chef de l'Union Nationale a fait toute une série de
recommandations et de suggestions, comme toujours, à l'actuel
gouvernement, pour qu'il s'en serve, s'il le juge à propos la
population le jugera au bout de son mandat justement pour corriger
certaines situations. Et l'une de ses suggestions, tout d'abord, a
été celle de surseoir à l'idée
d'indépendance pour trois ans, et cela, je pense, est une condition
préalable nécessaire, surtout que le premier ministre a bel et
bien indiqué, à plusieurs occasions, que, si le premier
référendum ne passait pas, il y en aurait un deuxième, et
il y en aurait un troisième.
Mme le Président, devant l'urgence de corriger des situations
économiques, il nous faut surseoir et ne pas commencer à jouer au
référendum alors qu'on a non seulement un jeu économique
devant les yeux, mais une réalité impérieuse qui demande
une action à court terme. Les gens, Mme
le Président, sont préoccupés non pas d'abord par
la question linguistique, non pas par la question du séparatisme
d'abord, mais ils sont préoccupés, premièrement et avant
tout, par le fait d'être capables de gagner leur vie ici, au
Québec, de vivre d'une façon normale, d'avoir des conditions
économiques et sociales normales.
Mme le Président, notre motion vise à sensibiliser le
gouvernement à cette situation. Elle n'a voulu, en aucune façon,
faire perdre le temps de la Chambre et, si vous avez remarqué, de ce
côté, que ce soit durant le temps de la période des
questions ou autrement, on n'a jamais voulu s'associer au Parti libéral
pour faire de la Chambre un endroit où on met simplement du sable dans
l'engrenage du gouvernement pour l'empêcher d'agir. On a voulu être
positif et on va continuer dans ce sens. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le ministre d'État au
développement économique.
M. Bernard Landry
M. Landry: Mme le Président, vous ne serez pas surprise
que je me lève au nom du gouvernement pour inciter les membres de cette
Chambre à défaire la motion qui nous est soumise. Vous ne serez
pas surprise non plus, cependant, si je commence cet exposé en
complimentant, jusqu'à un certain point, le chef de l'Union Nationale
pour sa démarche, pour trois raisons objectives qui n'ont rien à
voir avec la sympathie, même si je ne nie pas que cette sympathie
pourrait exister.
Premièrement, je crois qu'il est bon que, dans cette Chambre, le
plus souvent possible, nos débats aillent le plus possible en profondeur
sur les problèmes de développement économique et les
problèmes économiques. Il faut que cette Chambre jette sur ces
questions, le plus souvent possible, l'éclairage le plus cru qu'il soit
possible et que, par-delà les membres de cette Assemblée, la
population du Québec qui, nous devons le déplorer, n'a pas
toujours accordé à ces questions l'importance qu'elles
méritent, la population du Québec, comme son Assemblée
nationale, réfléchisse sur son destin économique, sur les
causes de la situation dans laquelle nous nous trouvons présentement, et
sur les solutions, les vraies, qui peuvent et qui doivent y être
apportées.
Pour cela, le chef de l'Union Nationale nous a tous fourni une
excellente occasion. Il est également bon, Mme le Président, que
ce débat vienne aujourd'hui précisément, parce que, depuis
un certain nombre de mois, il s'est dit beaucoup de choses peu réalistes
sur la situation économique, beaucoup de choses peu factuelles. Et pour
certains, probablement la plupart, et je range le chef de l'Union Nationale
parmi ceux-là, pour la plupart, la chose est faite de bonne foi, car il
est vrai qu'objectivement la situation économique du Québec
et particulièrement le taux de chômage élevé
est une espèce de tragédie collective sur laquelle tout
homme de bonne foi doit se pencher.
Je veux, cependant souligner, et je pense qu'il est temps que cette
chose soit faite, que, pour plusieurs, les propos alarmistes, les soi-disant
analyses et les soi-disant sondages ne sont qu'une façon de camoufler le
"wishful thinking" profond que cette économie aille mal pour compliquer
l'aboutissement du destin vers lequel le peuple québécois se
dirige de façon inéluctable. Il ne faut pas être naïf
devant certaines analyses. Il y en a qui sont purement politiques et qui, sous
le couvert d'une certaine objectivité ou d'une pseudoscience, ne sont
que manières et moyens de retarder ce gouvernement dans son travail vers
la libération économique et la décolonisation
économique des Québécois.
Il faut faire la part de ces deux approches, celle qui est de bonne foi
et celle qui fait partie des stratégies éternelles et des
tactiques mesquines pour empêcher le progrès des peuples. Il est
également bon que cette motion ait été amenée par
le chef de l'Union Nationale, car il nous a fait des suggestions. Cela fait
partie du rôle d'un parlementaire de l'Opposition d'apporter tout son
concours intellectuel à l'action du gouvernement. Je le remercie de cela
et je l'assure que la plupart de ses suggestions, journal des Débats en
main, seront l'objet de réflexions et d'analyses de la part du
gouvernement. Sauf une, cependant, et je vais le lui dire tout de suite: il
n'est pas question de surseoir, dans le programme du Parti
québécois et dans le combat des militants
québécois, ne serait-ce que pour une semaine, à
l'idée d'indépendance.
Je rappelle au chef de cette formation politique, Mme le
Président, qu'il est vraisemblable que la première fois que le
mot "indépendance" a été prononcé dans cette
Assemblée, cela a été par un des grands chefs de l'Union
Nationale, qui le disait comme membre d'une alternative qu'il faut
résoudre aujourd'hui. Il disait: Egalité ou indépendance,
et je pense que le chef actuel de l'Union Nationale est mal avisé de
vouloir nous retarder dans la poursuite démocratique, légitime et
légale du membre le plus important de cette alternative, du membre qui
représente l'avenir du Peuple québécois, le mot
"indépendance".
Cependant, je l'ai dit, Mme le Président, il faut voter contre
cette motion. Il faut voter contre cette motion, car elle a du plomb dans
l'aile sur deux points majeurs. Elle est tarée sur deux points majeurs.
Le premier de ces points, c'est le diagnostic d'aggravation, tel que le
mentionne le libellé de la motion. Dans son exposé, le chef de
l'Union Nationale a dit qu'il ne voyait que de mauvaises nouvelles. Cela ne
saurait être qu'une question de lunettes. Il n'en porte pas. Mais, c'est
sans doute une question d'humeur. Il devrait, afin d'équilibrer ses
interventions et sa pensée économique, considérer que
l'actualité québécoise sur le plan économique
charrie de bonnes nouvelles et de mauvaises nouvelles.
Selon moi, les facteurs suivants que je vais énumérer
l'emportent largement, en tout cas sur le plan conjoncturel, sur la
série de faire-part de décès qu'il a mentionnée
dans son allocution. Le fait que l'Aluminium du Canada, qui connaît
parfaite-
ment ce pays, qui, d'ailleurs, a vécu et a prospéré
par le travail et le labeur de milliers et de milliers de
Québécois d'une région particulière, ait
décidé d'y poursuivre son expansion, ce n'est sûrement pas
à cause de sympathie politique déguisée envers nous ou par
romantisme ou par fantaisie; c'est à cause de facteurs
économiques de fond. Et cela, si ce n'est pas une bonne nouvelle, je ne
sais pas ce que c'est.
Une autre grande firme qui n'a pas l'habitude d'être tendre dans
ses jugements et ses décisions d'expansion, c'est la puissante entre
toutes, General Motors, puissante à tous égards, y compris quant
à ses moyens d'analyser une situation politique et économique,
qui décide avec les travailleurs de Sainte-Thérèse de
continuer son expansion à Sainte-Thérèse, en particulier,
et vous ne l'ignorez pas sans doute, parce que c'est une des implantations de
cette compagnie qui est la plus productive en Occident. Ce n'est pas pour des
raisons fantaisistes; c'est parce que les gars du Québec qui travaillent
là travaillent bien.
Le chef de l'Union Nationale me permettra aussi de lui faire une
recommandation qui pourrait lui être utile pour ses analyses
subséquentes. C'est qu'en économie il faut toujours tenter de
serrer les phénomènes de la façon la plus scientifique
possible. Quand on a le choix entre un sondage fantaisiste et non scientifique,
il faut toujours se rabattre, s'il en est de disponible, sur l'étude la
plus scientifique et celle qui propose le plus de garanties. C'est une
précaution élémentaire pour se faire une idée sur
une situation. Or, le chef de l'Union Nationale ne peut pas ignorer que
Statistique Canada, qui, je le dis, non pas par sentimentalité ou par
sympathie encore une fois pour ce bureau, est une des meilleures institutions
de statistiques du monde, a publié les seules données valables
sur les prévisions d'investissement pour la période qui vient.
Ces prévisions d'investissement montrent que le pronostic pour le
Québec est nettement meilleur que pour les autres territoires de la
fédération canadienne. Ce sont les seules données dont je
dispose.
Le chef de l'Union Nationale peut bien, s'il le veut, faire son opinion
sur des sondages maisons, mais son opinion sera toujours affaiblie et son
argumentation sera toujours moins convaincante que lorsqu'il utilisera les
données disponibles les plus près de la
réalité.
Le chef de l'Union Nationale aussi n'est pas sans savoir il a
parlé de l'industrie de la construction que les performances du
secteur construction-habitation à Montréal, actuellement,
étonnent le reste du Canada; deux ou trois fois plus de mises en
chantier qu'à Toronto. Cela ne sert pas uniquement des fins
économiques; cela sert aussi des fins sociales. L'homme n'est pas
uniquement économique. C'est le ministre du développement
économique qui vous le dit. Il est important de construire des usines,
c'est exact. Mais quand je vois une nouvelle qui me dit qu'une ville comme
Montréal, qui a une terrible et cruelle carence de logements, est en
train d'avoir des performances fantastiques dans ce domaine, je trouve que cela
vaut la peine d'être signalé comme une bonne nouvelle. Le climat
social, dont j'ai déjà dit que le principal indicateur
était le nombre de jours/homme perdus par grèves et lock-out,
nous est exposé par les analyses suivantes, si on veut faire quelques
petites comparaisons; en 1977, au premier trimestre, trois fois moins de
jours/homme perdus par grèves et lock-out; au troisième
trimestre, sept fois moins. Ce sont des écarts significatifs qu'un
exposé objectif devrait mentionner avec les mauvaises nouvelles,
même s'il y en a.
De même pour le chômage, une salade statistique a
été sortie, mais on peut en faire une approche relativement
simple en faisant suivre le chômage de mois en mois, pendant un certain
nombre de mois.
La catastrophe, elle est bien écrite dans les chiffres et dans
les séries de statistiques, elle est survenue en juillet, août,
septembre 1976. C'est à ce moment qu'on est passé de 8,1% de taux
de chômage, à 9,8%. Cela a été le signe de la
catastrophe. Dans les six premiers mois de 1977, alors que vous parlez
d'aggravation, la moyenne de ces mois est de 9,7%, donc un point de moins. Ceci
est peut-être un artefact statistique, j'en conviens; cependant, on ne
peut pas parler d'aggravation quand il y a une stabilité peu
réjouissante, nous sommes tous d'accord, mais sur une période
d'une demi-année.
Je vous signale aussi une comparaison qu'il vaut la peine de retenir.
Vous savez que l'économie ontarienne, en Amérique du Nord, est
une des plus performantes et l'une de celles qui sont le plus en santé.
Tous les Québécois et tous les gouvernements
québécois ont eu tendance à comparer à l'Ontario.
Figurez-vous qu'actuellement, en Ontario, le chômage est à un
degré tel qu'aussi longtemps qu'on remonte dans l'histoire du Bureau de
la statistique, toutes les séries statistiques, c'est-à-dire
depuis 25 ans, il n'a jamais été atteint. C'est une conjoncture
canadienne extrêmement défavorable et je pense que personne ne le
nie.
Donc, le diagnostic, je le soumets respectueusement, était faux
dans la motion. Mais il y avait également une seconde tare et c'est
celle qui porte sur le remède. Le remède est irréaliste.
Le remède proposé et mes collègues l'ont
souligné auparavant indique une certaine méconnaissance
des mécanismes d'une grande économie industrielle. La motion
parle de politique globale. Nous serions les premiers à vouloir faire
une politique globale. L'action de notre parti, depuis dix ans et pour quelques
années à venir, consiste justement à tenter de doter le
gouvernement du Québec des instruments d'une politique globale, mais il
ne les a pas, présentement, c'est l'enfance de l'art. On ne fait pas une
politique économique globale c'est écrit dans les manuels,
même au niveau des cégeps quand on ne contrôle pas la
monnaie, quand on ne contrôle pas le crédit, quand on ne
contrôle pas l'export-import et surtout quand on a la moindre des marges
budgétaires de l'action gouvernementale, quand on sait jusqu'à
quel point les budgets des États pèsent
lourd sur le développement ou le non-développement des
économies.
Par conséquent, nous serons les premiers à nous lancer
avec enthousiasme dans une politique globale quand nous aurons un vrai
gouvernement et c'est ce que nous travaillons à faire
d'arrache-pied.
La motion a du plomb dans l'aile parce qu'elle est axée sur le
court terme, une des grandes erreurs des gouvernements
précédents, pratiquement tous, sauf exception, qui ont
tenté, à une maladie chronique et profonde, d'apporter des
remèdes de court terme. On aura beau crier, on aura beau se
désâmer et nous nous désâmons avec vous, M. le
Président on ne changera pas la réalité
économique profonde à moins d'appliquer des remèdes en
profondeur. Ces remèdes en profondeur, ce serait de la pure
démagogie de dire le contraire, demandent du temps, demandent des
études, demandent des recherches, demandent des délais de mise en
oeuvre. Se garrocher dans toutes les directions comme des chiens fous parce que
le Conseil du patronat, après un sondage, a dit ceci ou cela, serait de
l'irresponsabilité. Des actions possibles à court terme, le
ministre des Finances est allé jusqu'à la limite de leur
virtualité dans son budget et dans la marge qu'il avait. Des actions
législatives, mes collègues en ont parlé. Si on veut
qu'elles débloquent plus vite, les moyens sont connus. Mais raconter
à la population du Québec qu'il va y avoir une
amélioration marquée dans l'économie, qu'on va
guérir, dans l'espace de six mois, des maux qui datent de plus d'un
quart de siècle et qui datent d'un siècle, pour un certain nombre
d'entre eux, sur lesquels je reviendrai, ce serait malhonnête, ce serait
faire naître de faux espoirs. Ce parti, ce gouvernement n'a jamais fait
cela et il ne commencera pas à le faire ce soir, au sujet d'une motion
du chef de l'Union Nationale.
Quand même, n'allez pas, M. le Président, déduire de
mes propos une attitude fataliste. Des choses peuvent être faites, des
choses ont été faites, mais je pense que les plus importantes,
précisément parce qu'elles demandent du temps, sont à
faire. Par ces choses, j'entends précisément ces
stratégies de développement économique auxquelles nous
avons fait allusion à plusieurs reprises, que nous préparons de
concert avec les agents. Je relève quelques remarques du discours du
chef de l'Union Nationale sur le sommet économique. Encore là,
à mon avis, il a commis une erreur d'horizon. Il n'était pas
possible, sauf peut-être en ce qui concerne un certain climat social, que
parce qu'on est allé à Pointe-au-Pic avec 150 personnes, les
grands indicateurs économiques tournent vers le haut le lendemain matin,
ni six mois après. Sauf qu'à l'occasion de ce sommet nous avons
établi la confiance, le dialogue, la connaissance des individus. Nous
avons rendu possible l'élaboration, de concert avec tous les agents, de
ces stratégies qui ultimement sont les seuls remèdes qui pourront
faire quoi que ce soit pour la situation déplorable dans laquelle se
trouve, pour le chômage en particulier, l'économie du
Québec.
Déjà des équipes sont à l'oeuvre dans le
domaine de l'amiante. Chacun sait ceux qui ne le savent pas, M. le
Président, je leur dis au nom du gouvernement que nous sommes
dans l'approche finale de cette politique de l'amiante et que nous transformons
présentement, alors que nous avons un quasi-monopole occidental, 3% de
la fibre. En voilà un scandale. Alors que normalement, en stricte
rationalité économique, on devrait pouvoir se rendre à 20%
et quintupler probablement le nombre d'emplois dans le secteur, par des
politiques rationnelles...
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): Comme votre temps est presque écoulé, je
vous demanderais de conclure s'il vous plaît.
M. Landry: Merci, M. le Président. Vous me dites que mon
temps est presque écoulé, je vais...
Mme le Vice-Président: Non, je m'excuse, je pense que vous
avez eu une mauvaise information. Je vous demande pardon, j'ai donné une
mauvaise information, M. le ministre; un moment, s'il vous plaît,
veuillez vous asseoir une seconde. Je pense que j'ai mal... c'est-à-dire
que ma note là-dessus est moins lisible que je ne l'aurais cru. M. le
député a cru que vous deviez terminer maintenant, alors que je
vous demanderais de terminer à 22 h 40 s'il y avait moyen. Il manquerait
quelques minutes au parti ministériel, mais nous devons nous en tenir
quand même là, pour terminer à 22 h 45, comme le veut le
règlement. Il reste cinq minutes au parti de l'Union Nationale.
M. Landry: Mme le Président, j'apprécie hautement
votre grande générosité incomparable à celle du
président qui vous a précédée. Il voulait
interrompre.
Mme le Président, je vais quitter le domaine des
stratégies de développement, car nous en reparlerons même
avec le chef de l'Union Nationale et avec tous les députés de
cette Chambre, pour simplement insister en terminant sur un autre aspect du mal
chronique qui afflige l'économie du Québec. Ce pays a des
virtualités fantastiques. Il a été brimé dans son
développement, je l'affirme, Mme le Président, parce qu'il
était pris dans un carcan constitutionnel et que jamais cette
collectivité n'a eu les vrais instruments du développement
modernes qui sont d'abord un État à elle. C'est une des causes
profondes de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Ce pays est un pays
riche, qui a des comportements conjoncturels et structurels de pays pauvre,
mais on devrait y songer dès maintenant dans une perspective optimiste,
une perspective d'avenir. Dans le domaine de l'énergie, par exemple,
alors que tous les puits d'hydrocarbure liquide du monde seront vides, le grand
bassin de Manic 5 sera encore plein. Cela devrait inciter les
Québécois à être de plus en plus maîtres chez
eux, et de plus en plus utiliser et préparer institutionnellement, le
moment où ils auront accès à la prospérité
à laquelle leur situation géo-
graphique, leurs ressources, leurs avantages de situation leur donnent
droit.
Mme le Président, pour montrer que j'étais de bonne foi
quand j'ai complimenté le leader de l'Union Nationale, je vais poser un
geste qui consiste à laisser à l'Union Nationale le temps qu'il
me reste.
Mme le Vice-Président: Je me vois, M. le ministre, dans
l'obligation de prendre maintenant une décision très difficile
parce qu'il était bien entendu, au départ, que le temps
réparti entre les partis de cette Assemblée avait
été négocié. Et vous savez combien, pour un
débat comme celui-ci, il est difficile parfois d'établir de
quelle façon on détermine la proportion dans le temps. Je pense,
M. le ministre, que vous pourriez frustrer le parti de l'Opposition officielle
et elle aurait raison de se plaindre si vous accordiez du temps au parti de
l'Union Nationale alors que l'Opposition officielle s'en est bien tenue aux 50
minutes que nous devions lui accorder en vertu de l'entente que nous avions
prise cet après-midi entre les partis. M. le député
d'Abitibi-Ouest, sur une question de règlement?
M. Gendron: Non. C'est simplement pour vous aider à ne pas
avoir la difficulté que vous éprouvez en ce moment parce que M.
Roy, qui disposait d'une période du temps distribué a bien voulu
le prêter à qui il voulait, sans poser de problèmes.
Mme le Vice-Président: Je regrette, je vois venir votre
intervention, M. le député. Je pense qu'il faut être
très strict sur une question comme celle-ci parce que, justement, quand
l'entente est prise, il faut s'en tenir exactement à cette entente. Et
le temps qui a été réparti a été
réparti d'une façon proportionnelle. Si vous accordez à un
parti davantage qu'à un autre, il faut vraiment l'accorder à
l'autre aussi et je crois, je suis même sûre qu'il faut que chacun
des partis s'en tienne à une entente qui a été très
sérieusement négociée. Je pense que c'est la proportion
qui a été accordée à chacun des partis. Nous
arrivons d'ailleurs au moment où... Nous y arrivions de toute
façon. M. le chef de l'Union Nationale, je vous demanderais quand
même, pour la bonne marche de cette Assemblée, de vous en tenir
exactement aux cinq minutes qui vous sont allouées en vertu de
l'entente. Vous accordez la parole... M. le député de
Nicolet-Yamaska, cinq minutes exactement.
M. Fontaine: Étant donné qu'on est dans la joie,
Mme le Président...
Mme le Vice-Président: Je comprends bien, M. le chef de
l'Union Nationale, que vous n'entendez pas exercer votre droit de
réplique. C'est cela?
M. Biron: Non.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Je voudrais apporter mon petit grain de sel dans
cette discussion pour dire que nous, de l'Union Nationale, sommes absolument
d'accord pour dire que les finances du Québec étaient, le 15
novembre et bien avant le 15 novembre, en piteux état. C'est exactement
pour cette raison que nous aurions voulu que le parti au pouvoir se lance
à fond de train dans le domaine économique pour régler
tout de suite ce problème. Je me demande ce qui pressait tant pour
présenter aux Québécois la Charte de la langue
française. Je ne pense pas, que je sache, que ce soit pour cela que le
gouvernement a été élu. Ce gouvernement a
été élu pour être un bon et vrai gouvernement.
Une voix: Provincial.
M. Fontaine: Et la première préoccupation d'un bon
et vrai gouvernement, c'était de mettre du pain sur la planche des
travailleurs, des Québécois, et de mettre du pain sur la table
des Québécois. Je ne suis pas économiste, Mme le
Président...
M. Burns: Comme dans l'armée, du pain, du beurre, des
beans.
M. Fontaine: Puis-je terminer mon intervention?
M. Burns: C'est comme dans l'armée, du pain, du beurre et
des "beans".
Mme le Vice-Président: Mesdames et messieurs, je vous
demanderais quand même de respecter les cinq minutes de M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Mme le Président, le leader du gouvernement a
aussi oublié le liquide, je crois.
Je ne suis pas économiste, Mme le Président, mais il faut
quand même voir clair. Si on relève la notion du bon père
de famille du Code civil, on s'aperçoit qu'au Québec il y a au
moins 10% de chômage. Là-dessus, on ne calcule le chômage
qui est caché par les statistiques. Il y a également des
fermetures d'usines. Il y a des baisses d'investissements. Il y a un peu
partout des ralentissements dans les secteurs de l'économie et
également dans les travaux qui sont faits pour le gouvernement,
particulièrement au ministère des Transports.
Aujourd'hui, je discutais avec mon directeur régional au
ministère des Transports et il me disait qu'effectivement les travaux
dans notre région sont retardés. Il n'y a rien qui se fait.
À ce sujet, on a beau se féliciter du côté
d'en face, et dire que cela va bien partout, c'est un peu faire l'autruche.
Pourquoi ne pas le dire franchement? Il y a une certaine récession au
Québec actuellement. Il est exact que cela dépend du gouvernement
provincial, mais cela dépend aussi du gouvernement
fédéral. Le fédéral y a sa part. Le
premier ministre, M. Trudeau, se complaît à nous voir avec
nos problèmes. Peut-être que cela le rend un peu plus
populaire.
Tout cela avait commencé il y a bien au-delà d'un an, bien
avant le 15 novembre. C'est ce qu'a un peu voulu faire l'ancien gouvernement en
passant le paquet à celui qu'on a aujourd'hui. Les perspectives
économiques ne sont pas roses, bien sûr, et, selon le bureau de la
statistique du Québec il y a des ralentissements sur le marché du
travail et dans l'industrie de la construction, il y a une absence de reprise
économique, et, selon ce même bureau, l'augmentation réelle
des ventes n'est que de 2% par rapport à l'an dernier.
Cessons donc, Mme le Président, de dire que ce n'est pas mieux
ailleurs. Ce qu'il faut, c'est que cela aille ici et c'est pour cela qu'il faut
consacrer tous nos efforts, nos énergies, notre argent et notre temps au
domaine économique.
Cette situation, bien sûr, ne date pas du 15 novembre. Elle
s'était fait sentir bien avant, mais le reproche qu'on fait au
gouvernement actuel, c'est de se lancer dans des aventures intellectuelles
plutôt que de porter les coups là où c'est le plus
pressant, c'est-à-dire dans le domaine économique. Même si
tous les Québécois ne pouvaient trouver que du français
partout au Québec, s'ils n'ont pas d'emploi, s'ils n'ont rien à
se mettre sous la dent, à quoi cela servira-t-il?
Depuis le 15 novembre, le gouvernement actuel tâtonne avec les
projets de loi no 1 et no 2 mais, après huit mois de règne, il
n'a pas réussi à faire adopter un seul projet d'ordre
économique.
Le gouvernement, les ministres, les députés
ministériels surtout, devraient et auraient dû, depuis le 15
novembre, cesser de parler d'indépendance, de souveraineté et de
référendum. Les gens, le public, le peuple, les électeurs
du ministre d'État à la réforme parlementaire ont peur de
ces mots, Mme le Président.
M. Burns: Les miens sont très heureux.
M. Fontaine: D'ailleurs, on ne les a pas utilisés pendant
la dernière...
Mme le Vice-Président: M. le leader, à l'ordre,
s'il vous plaît! M. le député de Nicolet-Yamaska, veuillez
conclure, et dans une courte phrase, parce que vos cinq minutes sont à
peu près écoulées.
M. Fontaine: Merci, Mme le Président. Cessons donc ces
engueulades inutiles et stériles sur des questions hypothétiques!
Vous prenez mon temps!
Mme le Vice-Président: À l'ordre! Votre
dernière phrase, M. le député.
M. Fontaine: Mme le Président, j'ai bien envie de la
répéter, elle était bonne!
Mme le Vice-Président: Rapidement, M. le
député.
M. Fontaine: Je remercie mes confrères pour l'ovation,
mais je vais la répéter, cette phrase, elle était bonne.
Cessons ces engueulades inutiles et stériles sur des questions
hypothétiques!
Mme le Vice-Président: M. le député, je me
vois dans l'obligation de vous dire maintenant que votre temps est
écoulé. Je veux quand même reconnaître que vous avez
reçu une ovation debout. C'est maintenant le moment de faire la mise aux
voix sur la motion de M. le chef de l'Union Nationale. Nous lirons la motion au
moment du vote, si vous voulez bien. On me demande le vote enregistré.
Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion
Mme le Vice-Président: C'est maintenant la mise aux voix
sur la motion de censure de M. le chef de l'Union Nationale, motion qui se lit
comme suit: "Que, suite aux révélations publiées notamment
par le Bureau de la statistique du Québec, cette Assemblée
blâme le gouvernement d'avoir négligé de présenter
en priorité une politique globale de relance économique et
d'avoir ainsi permis que la situation désastreuse de l'économie,
qui prévaut au Québec depuis plus d'un an, s'aggrave davantage."
Que ceux et celles qui sont en faveur de la motion veuillent bien se lever,
s'il vous plaît!
Le Secrétaire-Adjoint: MM. Biron, Grenier, Fontaine,
Brochu, Le Moignan, Dubois, Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Garneau,
Goldbloom, Saindon, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron,
O'Gallagher, Marchand, Gratton, Pagé.
Mme le Vice-Président: Ceux qui sont contre.
Abstentions.
Des voix: Contre.
Mme le Vice-Président: Que ceux qui sont contre. Est-ce
que vous avez entendu, M. le leader?
M. Burns: Nous n'avons pas de mea culpa, nous, à nous
faire. Mme le Président, nous voulons voter contre. Les votes contre,
madame?
Mme le Vice-Président: Contre.
Le Secrétaire Adjoint: MM. Burns, Cardinal, Bédard,
Laurin, Morin (Sauvé), Parizeau, Marois, Landry, Léonard,
Tremblay, Bérubé, Johnson, O'Neill, Mme Payette, MM. Proulx,
Tardif, Chevrette, Michaud, Marcoux, Alfred, Martel, Fallu, Rancourt, Laplante,
Bisaillon, de Bellefeuille, Gendron, Laberge, Lacoste, Ouellet, Perron,
Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre; Lavigne, Dussault, Charbonneau,
Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Gravel, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Gagnon.
Mme le Vice-Président: Y a-t-il des abstentions?
Le Secrétaire: Pour: 21 Contre: 46 Abstentions: 0
Mme le Vice-Président: Motion rejetée. Nous allons
devoir retarder un peu l'ajournement pour aujourd'hui à cause du
débat qu'entend soulever M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Burns: Mme le Président, sur une question de
règlement, nous ne sommes pas encore rendus à 23 heures,
j'appellerais l'article... Mme le Président, vraiment on va suspendre
les débats pour ce soir, à moins que nous commencions le projet
de loi no 101 immédiatement.
Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Burns: À une autre occasion.
Mini-débat sur l'inscription des
élèves anglophones
Mme le Vice-Président: II me paraît que c'est le
moment maintenant, parce qu'il est 23 heures.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, comme cette
Assemblée en a été informée cet après-midi,
désire soulever un débat en vertu de l'article 174.
Il est bien entendu, et je le répète... À l'ordre,
s'il vous plaît! ...qu'au cours d'un mini-débat je n'accepte ni
intervention, ni question de règlement, ni question de privilège,
et que chacun des intervenants, soit en l'occurrence, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce et la réponse du
ministre de l'Éducation, devra s'en tenir strictement aux cinq minutes
qui leur sont accordées en vertu de notre règlement.
La question de M. le député de Notre-Dame-de-Grâce
est celle-ci. Je répète plutôt ce qu'il demandait:
"À la séance d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre de
l'Éducation la question suivante...
M. Pagé: Une question de règlement, Mme le
Président. C'est une question que je veux vous poser. Est-ce que le
débat, en vertu de l'article 174, est commencé.
Mme le Vice-Président: Non, monsieur. M. Pagé:
II n'est pas commencé.
Mme le Vice-Président: Non, M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Alors est-ce qu'on a quorum, Mme le
Président? Le débat n'est pas commencé.
M. Charbonneau: Question de règlement, Mme le
Président. Je pense que le député est fort malvenu
d'intervenir à ce moment-ci, alors qu'il y avait un débat de fond
très important tantôt et qu'il y avait un membre de l'Opposition
officielle présent.
Mme le Vice-Président: Nous allons compter les
députés.
M. le leader, le débat n'est pas encore commencé.
Il y a quorum, de toute façon. "À la séance
d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre de l'Éducation la question
suivante: Est-ce que le ministre est disposé à
réétudier les règlements émis aux commissaires
d'écoles basés sur l'article 16 de la Loi de l'instruction
publique, car c'est mon opinion que ce règlement surpasse l'intention de
la loi même et était émis en anticipation du projet de loi
101? Puisque je ne suis pas satisfait de la réponse donnée, je
désire me prévaloir des dispositions de l'article 174 du
règlement".
C'est maintenant que j'accorde la parole au député de
Notre-Dame-de-Grâce pour cinq minutes, très exactement. M. le
député.
M. Mackasey: Merci, Mme le Président. Aujourd'hui, j'ai
posé une question au ministre de l'Éducation sur la
validité de quelques règlements qui ont été mis en
vigueur il y a quelques semaines, basés sur l'article 16 modifié
de la Loi de l'instruction publique du Québec.
I will stay within the five minutes, Mme le Président, this is
why I will follow my text in English, for no other reason. I will first of all,
outline very briefly my description of the purpose of regulations.
Regulations are usually needed to support a bill, but not necessarily
so. I know that the honourable minister is aware of this. They do provide a
method for interpreting or defining certain sections of a bill or to clarify
the intent of a clause of that bill when necessary and to provide the
flexibility which we quite often need in a bill. If, for instance, Mme le
Président, you were to say that senior citizens may travel free on the
train certain days of the week, regulations will define what are senior
citizens and what days of the week they may travel; but definitions could, of
course, be included in the bill. But if they were not included in the bill,
there would be very difficult to amend, to change, when and if such definitions
need to be changed because they would require an amendment of the bill.
Regulations can be changed by order-in-council, which is speedy. But if those
regulations were to say that a senior citizen could travel free on the plane on
certain days of the week and bring his grandchildren with him, lot about that
may be objected, it would be out of order since the regulations go well beyond
the intent of the law.
Having established my point, I might say that the present Education Act
provides for regulations probably needed in order to obtain their objectives.
What are those objectives?
Basically, and essentially they are to provide for an ordinary orderly
administration of the public school boards, regional boards, etc. And these
regulations for instance are needed to spell out
starting dates and closing dates of the school year. Starting dates and
closing dates were included in the bill, they will be inflexible and could not
vary from year to year regardless of circumstances.
Now, Madam President, I want to get down to my point. These regulations
have a particular purpose to define the bill and the clauses of the bill, but
when there is no existing law in the statute books of this province, which
states that the educational background of parents must be made known to the
department of Education, in order to determine whether or not a child may be
enrolled in school, and there is not to my knowledge, then it stands to reason
that no regulation can be valid that requests such information that has no
relevance under the law.
And until, Madam President, present legislation is amended linking this
information as to what school a child's parent attended, how many years be
attended, what country he attended, what province, and thinks that information
up to the right of a child to attend a particular school system, then such
information must be considered as a breach of privacy and no regulations can be
promulgated to obtain information that has no relevance to any existing law
presently in the statute books of this province. And if we leave that
unchallenged, Madam President, next week regulations could be invoked or
promulgated asking such information on the marital status of parents, the
financial background of parents and other pertinent information that at the
best could be considered curiosity if not worst.
Now I agree with the minister, that the language tests of bill 22 were
odious, I agree with that, and this is frankly why the only sour note in my
introduction, Mr Minister, is to understand your logic in reimposing those
tests, which you yourself claimed as psychologically damaging for hundreds of
thousands of children, while you felt it was necessary to impose them on any
child even under the rather unusual logic that if these children had a risk of
psychological damage all children should be required to do so.
So, in conclusion, Madam President, until the minister finds a better
method of determining a child's eligibility iI me reste 30 secondes,
madame to enroll in school our children and incorporate that method in
legislation, he cannot attempt through regulations to do what the present law
does not permit. In the meantime, I would ask him if he thinks that it is
morally proper to ask responsible citizens to help him obtain information of a
confidential nature through regulations when in fact no law presently on the
statute books requires that information.
Mme le Vice-Président: M. le ministre, cinq minutes
exactement.
M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin: Mme le Président, le député de
Notre-Dame-de-Grâce fait grief au gouvernement de se montrer
prévoyant et de tenter de faciliter la reconnaissance des droits des
enfants qui se verront reconnaître le droit d'aller à
l'école anglaise. Il soutient que nous n'avions pas le droit d'adopter
un règlement à ces fins. En cela, il est le fidèle
porte-parole de certains milieux anglophones qui se laisseraient tenter par
l'idée de bafouer la loi.
Quelle duplicité, Mme le Président, que d'invoquer, contre
le gouvernement, des raisons comme la difficulté d'appliquer la loi,
alors que nous savons bien que certains veulent tout simplement refuser de
respecter la loi et ne se contenteront que d'une chose, en définitive:
le retour à la loi 63 et à la liberté de choix de la
langue d'enseignement.
Néanmoins, je répondrai aux arguments du
député comme j'ai répondu l'autre soir à ceux du
député de Mégantic-Compton. Bien sûr, le
gouvernement ne saurait appliquer un projet de loi non encore adopté par
l'Assemblée. Mais c'est la responsabilité inéluctable du
ministre de l'Éducation de s'assurer que les parents des enfants qui
auront le droit, en vertu de la charte devenue loi, d'aller à
l'école anglaise, ne soient pas pris au dépourvu et n'aient pas
le temps de réunir les papiers ou les preuves nécessaires
à la reconnaissance de leurs droits.
C'est pourquoi, près de trois mois avant la rentrée
scolaire de septembre, le gouvernement a adopté un règlement qui
permet de préparer les demandes d'admission nécessaires, sans
toutefois qu'aucune décision ne puisse intervenir quant à
l'inscription des enfants. Une telle inscription ne saurait intervenir,
évidemment, avant l'adoption de la charte.
Certaines commissions scolaires de la région de Montréal
soutiennent, comme le député, que le gouvernement n'a pas le
droit de procéder ainsi. Non seulement avons-nous le devoir de
prévoir, mais la loi de l'instruction publique nous en reconnaît
le pouvoir de façon très générale puisque l'article
16 donne au gouvernement la faculté de faire des règlements pour
l'organisation et l'administration des commissions scolaires. D'ailleurs,
certaines commissions scolaires, la CECM notamment, ont fait la même
chose dès les mois de mars et d'avril en vertu des pouvoirs
généraux qu'elles possèdent.
Que le député ait donc le courage de l'admettre. Ce qu'il
veut, c'est revenir à la loi 63. Qu'il ait la franchise de le dire, ce
que lui et ses semblables appellent de leurs voeux, c'est la liberté de
choix de la langue d'enseignement. Est-ce là l'attitude du Parti
libéral, Mme le Président? Au fait, quelle est
précisément la position de ce parti? Ses membres ne semblent pas
pouvoir s'entendre sur autre chose que de vagues compromis.
Le député de Notre-Dame-de-Grâce et sans doute
également celui de Westmount ne jurent que par le libre choix. D'autres
voudraient tout de même restreindre quelque peu l'accès à
l'école anglaise. Ils ont retenu le critère de l'appartenance
à la communauté anglophone. Qu'est-ce que cela veut dire? On nous
répond qu'il s'agit de la langue maternelle des parents ou de la langue
d'usage au foyer, mais comment vérifier de tels faits si ce n'est qu'en
faisant passer des tests précisément?
Pourquoi cet acharnement à revenir aux tests? Il a
été démontré à satiété qu'il y
a là un risque d'arbitraire pire encore que ce dont nous avons
été témoins a l'époque de la loi 22. On a fait
observer avec raison dans la presse que le critère de la langue
maternelle appliqué aux immigrants soulève des problèmes
insurmontables auxquels les débats amers des réunions
libérales n'ont pas apporté de solutions.
Mme le Président, voilà ce que nous proposent les
libéraux, somme toute: ou bien le retour à la soi-disant
liberté de choix de la langue d'enseignement ou bien le retour aux
tests. Ils ne sont même pas capables de s'entendre entre eux pour savoir
laquelle de ces calamités ils infligeraient aux Québécois
s'il leur était permis de le faire.
Quand on voit cela, Mme le Président, on comprend pourquoi les
Québécois appuient le projet de Charte de la langue
française. Après toutes les tergiversations de ces
dernières années, unionistes ou libérales, il était
temps que leur volonté profonde puisse enfin s'exprimer par la voix d'un
gouvernement qui soit enfin le leur. Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Cette Assemblée ajourne ses
travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 11)