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(Dix heures neuf minutes)
M. Richard (président): A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Présence dans les galeries du
député sénégalais Christian Valentin
Le Président: Je voudrais ce matin signaler...
Une Voix: L'absence des ministres!
Le Président: ... oui, l'absence des ministres et la
présence dans les galeries d'un bon ami du Québec, que le leader
parlementaire de l'Opposition et moi-même connaissons de façon
particulière, en l'occurrence le député du
Sénégal, Christian Valentin.
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées. Présentation
de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles. Dépôt de
documents. Période de questions orales.
M. le chef de l'Opposition officielle.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Présence des ministres à
l'Assemblée nationale
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, une question
de privilège. Je regrette d'avoir à revenir ce matin sur une
question que j'ai eu l'occasion de soulever au cours de cette session. Nous ne
sommes pas vendredi matin; nous sommes mardi matin et c'est de la
volonté même du gouvernement que nous siégeons ce matin,
à dix heures. Nous avons une absence plus que remarquable et
remarquée de ministres ce matin. Nous n'avons ici en Chambre ni le
premier ministre, ni le ministre des Finances, ni le ministre des Affaires
intergouvernementales, ni le ministre de l'Education, ni le ministre d'Etat au
développement culturel et à peu près aucun ministre de
ministères à vocation économique et on nous demande de
participer à une période de questions.
M. Johnson: Pardon.
M. Garon: Hé! Hé! Hé!
M. Levesque (Bonaventure): Voilà la situation d'un
gouvernement complètement improvisé.
M. Brochu: M. le Président, sur la question de...
M. Burns: Le chef de l'Opposition a fait son "show", il a fait
son petit spectacle. Peut-on maintenant, M. le Président, passer aux
affaires courantes à l'endroit où nous étions,
c'est-à-dire à la période des questions?
M. Brochu: M. le Président, question de privilège
également.
M. Garon: Question de privilège.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Brochu: II est clairement prévu à notre
règlement qu'il existe une période où les
députés de cette Chambre ont le loisir de poser des questions aux
ministres, mais encore faudrait-il à ce moment-là que les
ministres soient présents, ce qui n'est pas le cas ce matin.
J'en compte onze ou douze avec l'arrivée du premier ministre
maintenant.
M. O'Neill: Essaie-la ta question!
M. Brochu: C'est complètement déplorable et on
n'accepte pas cette situation. Je pense que c'est se jouer de la
démocratie et du parlementarisme comme tel. M. le Président, je
vous demanderais s'il ne serait pas possible, étant donné qu'on
n'a pas de ministres en Chambre et à peu près pas de ministres de
ministères à vocation économique, à cause de
l'urgence de certaines questions, de reporter la période des questions
à 15 heures cet après-midi.
M. Duhaime: Quinze ministres.
Le Président:... faire leur entrée en Chambre. M.
le chef de l'Opposition officielle, période des questions.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Juge en chef des Sessions de la paix à
Montréal
M. Lalonde: M. le Président, en l'absence du ministre de
la Justice et étant donné l'importance et la gravité de la
question, je vais poser la question au premier ministre ou au leader du
gouvernement. Il s'agit d'une nouvelle publiée ce matin à propos
de l'enquête sur le juge en chef, M. Fabien, à Montréal.
D'après la nouvelle, le rapport qui serait entre les mains du ministre
de la Justice depuis plusieurs jours blanchirait le juge en chef qui irait
d'ailleurs réintégrer ses fonctions de juge comme tel,
c'est-à-dire d'agir comme juge sur le banc.
Je voudrais demander au leader du gouvernement ou au premier ministre si
c'est exact, et dans l'affirmative, quelles dispositions, quelles
démarches le gouvernement entend-il prendre à l'encontre de ceux
ou de celui qui l'aurait dénoncé?
M. Lévesque (Taillon): Au moment où j'ai vu, il y a
quelques jours, le ministre de la Justice, il m'a dit effectivement qu'il
devait incessamment, c'est-à-dire dans les tout prochains jours,
à ce moment-là, recevoir un rapport sur ce cas du juge en chef
Fabien. Je suis obligé de prendre avis de la question pour le reste de
la question du député de Marguerite-Bourgeoys, et aussitôt
peut-être même aujourd'hui que le ministre de la
Justice sera de retour, on avisera l'Opposition au besoin.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Question supplémentaire, M. le
Président. Le premier ministre pourrait-il, et je le fais de
façon très positive, persuader ou enfin pousser sur le ministre
de la Justice pour qu'une décision soit prise le plus tôt possible
dans cette affaire qui perdure et qui est très mauvaise pour
l'administration de la Justice?
M. Lévesque (Taillon): Le gouvernement est aussi conscient
que le député de Marguerite-Bourgeoys que ce n'est pas
particulièrement sain cette ambiguïté qui flotte; alors le
plus vite possible, d'accord.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Ma question s'adresse au ministre des Transports. Je
ne veux pas interrompre la lecture de son journal.
M. Lessard: ...à l'écoute.
M. Forget: C'est tout à fait par hasard. Je m'excuse
auprès du ministre.
M. Lalonde: Vous l'avez peut-être
réveillé.
Transport en commun sur l'île de
Montréal
M. Forget: Depuis plusieurs mois, le ministre des Transports nous
promet, pour une date qui est constamment reculée, des conclusions du
gouvernement et ses conclusions à lui quant aux questions du transport
en commun sur l'île de Montréal. Je pense en particulier au
dossier du métro. Etant donné que le ministre a abondamment
exposé son point de vue relativement au site de Namur et à la
nature de la décision qui a été prise, avec laquelle il
n'était pas d'accord, étant donné que ce site n'est
évidemment pas un site qui peut servir de terminus au prolongement de la
ligne no 2, je crois, qu'est-ce qui empêche le ministre et le
gouvernement d'en venir à des conclusions tout de suite? Il faudra bien
donner un terminus à cette ligne-là. On pourrait annoncer
dès maintenant et mettre en marche le mécanisme de prolongement
du métro au-delà du boulevard métropolitain, comme il a
été rumeur que ce serait fait de toute façon. Pourquoi
retarder indéfiniment une décision dont tout le monde sait
d'avance qu'elle devra être prise un jour ou l'autre?
M. Lessard: M. le Président, nous avons déjà
levé le moratoire sur la construction ou la terminaison des travaux du
métro de Montréal jusqu'à Namur. En ce qui concerne le
site comme tel de Namur je pense que tout le monde en est conscient
pour justifier la ligne du métro, surtout déconcentrer la
circulation sur le boulevard métropolitain, nous devrons aller
au-delà du boulevard métropolitain. Cependant, en ce qui concerne
le site terminal, j'ai indiqué que nous devrions recevoir le rapport du
comité des transports de la région métropolitaine d'ici la
fin d'août. J'ai parlé du mois de juillet, mi-août.
Normalement, ce rapport serait pratiquement terminé. Il y a eu une
dernière réunion des responsables la semaine dernière. Le
sous-ministre est actuellement à Montréal pour essayer de voir de
quelle façon devrait se terminer les conclusions du rapport.
Suite à cela, nous étudierons le rapport au
ministère des Transports et nous prendrons les décisions qui
s'imposeront à la suite des recommandations qui nous seront
données, en tenant compte de l'ensemble des budgets du Québec
pour le développement du transport en commun. Il est certain que si nous
décidons, comme c'est notre programme comme parti et comme gouvernement
du Québec, d'investir plus considérablement dans le transport en
commun, nous devrons pour autant réduire la construction d'autoroutes
dans les secteurs urbains.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Question supplémentaire. Je comprends qu'on
nous renvoie encore à ce fameux rapport, mais en supposant que la
promesse qu'on a faite au ministre que ce serait prêt d'ici la fin
d'août soit tenue, le ministre peut-il en retour, maintenant qu'il a eu
le temps de mettre de l'ordre dans ses papiers, nous assurer que dans un
délai d'un mois, ou au plus tard à la reprise des travaux de
l'Assemblée nationale, une décision sera prise relativement au
prolongement de la ligne no 2? Je ne lui demande pas de prendre des
décisions relativement à toutes les extensions possibles à
la ligne no 5, etc. On comprend que ce sont des décisions qui n'ont pas
besoin d'être prises immédiatement, mais il faudra quand
même prolonger cette fichue ligne si on veut, un jour, qu'elle puisse
fonctionner. Plus on retarde, plus l'utilité des travaux qui ont
déjà été faits va être mis en doute. Est-ce
que vers la mi-octobre au plus tard, le ministre peut s'engager à ce
qu'il y aura une décision du gouvernement dans ce dossier?
M. Lessard: Normalement, vers la mi-octobre, il devrait y avoir
une décision, parce que je pense que j'ai déjà reconnu le
principe, à savoir que le terminal ne s'arrêterait pas à
Namur, mais pourrait aller vers Du Collège ou, en fait, selon les
recommandations qui nous seront faites. Mais ce que je pense qui est
accepté par le ministre des Affaires municipales, comme par le ministre
des Transports, c'est que la logique même impose le prolongement du
métro de la ligne no 2 au-delà du boulevard Métropolitain,
afin justement de dimi-
nuer la pression de la circulation, particulièrement à
l'échangeur Décarie. Le fait de rester à(Namur
augmenterait encore ce taux de circulation qui est absolument extrêmement
exorbitant, actuellement.
Le Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Garneau: Est-ce que le ministre des Transports pourrait nous
dire si le rapport qu'il recevra, qu'il déposera peut-être
à l'Assemblée nationale ou au moins dont il fera rapport à
l'Assemblée nationale comprendra également le transport en commun
pour la partie est de la région de Montréal, à l'est de
l'île de Montréal vers des comtés comme le comté du
ministre des Finances?
M. Lessard: Nous avons déjà un rapport en fait
concernant la région sud de Montréal.
Le comité des transports de la région
métropolitaine on dit bien de la région
métropolitaine nous fera des recommandations sur l'ensemble du
transport en commun, de façon intégrée, de la
région métropolitaine. J'ai demandé qu'on établisse
au moins des échéanciers, parce que ce sera certainement des
investissements qui pourront s'étendre sur une période de dix
à quinze ans. Nous aurons des échéanciers et des
priorités qui seront déterminées. Le ministère des
Transports, comme le Conseil des ministres, aura à étudier ces
priorités et, par la suite, nous ferons connaître
l'échéancier du gouvernement en tenant compte de l'ensemble des
budgets que nous pourrons investir dans ce secteur.
M. Lavoie: Une dernière question additionnelle au ministre
des Transports...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: ... relativement à ces projets ou à
l'étude qui se fait sur le transport suburbain dans la région de
Montréal, particulièrement en ce qui concerne le transport rapide
entre Montréal et Mirabel. Le ministre peut-il nous assurer que ce
rapport sera définitivement déposé d'ici à la fin
du mois relativement à ce projet depuis si longtemps attendu entre
Montréal, Laval, Sainte-Thérèse, en se dirigeant vers
Saint-Jérôme et Mirabel? Les parlementaires, avant des vacances
prévues d'ici quinze jours ou trois semaines, voudraient bien avoir
l'assurance que ce rapport sera déposé dans les meilleurs
délais.
M. Lessard: L'assurance de le faire dans les meilleurs
délais, je vous la donne.
M. Lavoie: Cette semaine?
M. Lessard: Non, non, dans les meilleurs délais.
Actuellement, nous sommes tout près d'avoir le rapport. On a
décortiqué l'ensemble des recommandations. Je ne sais pas quand
la session devrait se terminer, mais je présume que, si la ses- sion
devait se terminer d'ici trois semaines, vous aurez une copie du rapport avant
de partir pour vos vacances.
M. Lavoie: Si elle se termine d'ici quinze jours?
M. Lessard: Je pourrais, si vous voulez, en prendre avis. Le
sous-ministre est actuellement à Montréal pour compléter,
avec le comité des transports de la région métropolitaine,
l'ensemble des recommandations. Je pourrais peut-être, demain, vous
donner plus de détails a ce sujet. Je sais que c'est la dernière
réunion du comité avant de s'engager définitivement dans
les recommandations. J'ai déjà reçu deux rapports
très techniques qui ont été déposés à
mon bureau. J'attends le rapport concernant les recommandations qui me seront
faites.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
Programme de relance économique
M. Biron: Ma question s'adresse au premier ministre. Elle
concerne la lutte au chômage et la reprise des investissements au
Québec.
A la suite de la conférence de St. Andrews, où les
premiers ministres ont réclamé l'intervention du gouvernement
Trudeau en matière de lutte au chômage, le premier ministre, sans
dévoiler ce qui se disait à huis clos, peut-il quand même
nous préciser ce que Québec a suggéré aux autres
provinces comme moyen de pression auprès du gouvernement
fédéral, et deuxièmement, ce qu'il a peut-être
suggéré comme mesure concrète, que peuvent faire à
la fois le gouvernement canadien et les gouvernements des provinces pour la
lutte au chômage?
M. Lévesque (Taillon): Nous ne sommes pas entrés
dans des choses spécifiques. Je l'ai dit hier et je pense que tout le
monde le sait, ces conférences, qui ont un côté
semi-mondain et qui s'arrangent depuis une vingtaine d'années pour ne
pas le perdre, ne consacrent en réalité que quelques heures
à l'étude des questions. Alors, il y a eu à peu
près quatre heures d'études, la première journée,
sur la situation économique, ce qui n'a pas permis de commencer à
dresser des plans stratégiques d'action concrète. Chaque
gouvernement a pu en invoquer, on a invoqué certaines des choses qu'on a
faites ici, certaines des intentions qu'on peut avoir pour l'avenir, mais sans
que cela prenne la forme systématique d'une offensive en règle et
qui aurait été calibrée vis-à-vis du gouvernement
fédéral. Le chef de l'Opposition aura peut-être
remarqué qu'une des choses qui nous semblait, à
l'unanimité, être une première intervention
fédérale qui serait extraordinairement valable dans les
circonstances actuelles est une chose qui, justement, ne dépend que du
fédéral surtout en période possiblement
préélectorale, c'est-à-dire de nouvelles mesures
budgétaires qui donneraient un soulagement fiscal à
l'ensemble
des contribuables et non pas simplement aux compagnies, aux entreprises,
comme le dernier budget Macdonald a prétendu le faire. Cela donne au
chef de l'Union Nationale une indication du fait qu'il fallait aborder cela "at
large", comme on dit en anglais, sans prétendre, en quatre heures, une
fois le tour d'horizon fait, commencer à calibrer des interventions ou
plutôt des mesures détaillées sur lesquelles tout le monde
aurait pu s'entendre, sauf certaines choses générales, pour
autant qu'il s'agit du fédéral, des choses qu'il peut faire
lui-même s'il se "grouille" le plus vite possible.
M. Biron: Question additionnelle au premier ministre. Est-ce que
le premier ministre, à la faveur de l'intersession ou un peu plus tard
à l'automne, entend faire une tournée pancanadienne, comme il
avait l'habitude de le faire au cours des années passées, pour
vanter les vertus de la production, sinon de la productivité, du
Québec et inviter les investisseurs canadiens à reprendre leurs
investissements au Québec ou s'il croit que la seule visite à New
York est suffisante pour faire revenir les investisseurs au Québec?
Une Voix: Pauvre niaiseux.
M. Lévesque (Taillon): Sans prétendre la
définir dans le même sens que le chef de l'Union Nationale, il
permettra qu'on diverge peut-être un peu sur la question des
approches.
Je dois au moins à une ou deux reprises d'ici la fin de
l'année aller hors frontières, ailleurs au Canada.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Biron: J'aurais une question additionnelle au ministre d'Etat
au développement économique. Peut-être que le premier
ministre peut y répondre. Quand le livre vert qui a été
promis par le ministre d'Etat au développement économique sur
l'économie du Québec sera-t-il publié? Est-ce qu'il
contiendra véritablement l'inventaire des problèmes et
l'élaboration d'une stratégie de développement et des
solutions concrètes qu'on peut apporter pour la relance
économique du Québec?
Je recommence, M. le premier ministre. J'avais une question
additionnelle au ministre d'Etat au développement économique.
Etant donné qu'il n'est pas là j'ai voulu vous la poser à
vous. Est-ce que vous pourriez nous dire quand le livre vert qui a
été promis par le ministre d'Etat au développement
économique sur l'économie du Québec sera publié?
Est-ce qu'il contiendra l'inventaire des problèmes du Québec au
point de vue économique et l'élaboration d'une stratégie
de développement et des solutions concrètes pour la relance
économique?
M. Lévesque (Taillon): Je ne sais pas s'il va contenir
tout cela. Je ne sais pas exactement à quel point c'est rendu et je n'ai
pas pu consulter le ministre depuis quelques jours, pour des raisons
évidentes. D'ici très bientôt ce document perspec- tive
mais vert c'est plutôt une prospective au départ ou
prospective sera prêt et sera présenté.
M. Biron: Dernière question additionnelle. Est-ce que ce
livre vert sera publié au cours des prochaines semaines ou s'il faudra
attendre plus tard à l'automne?
M. Lévesque (Taillon): Le plus vite possible. Le
Président: M. le député de Charlevoix.
M. Mailloux: Question supplémentaire au premier ministre.
M. le Président, pour toute personne qui ne se sera pas qualifiée
à l'assurance-chômage, (a province devra payer 50% au titre de
l'aide sociale. Est-ce que le premier ministre ne croit pas qu'il serait sage
que dans l'immédiat, même si les travaux n'étaient pas de
nature permanente, le gouvernement du Québec qualifie le plus de
chômeurs possibles à l'assurance-chômage afin que le
trésor fédéral paye 100% à
l'assurance-chômage? Je mentionne un fait en particulier: II y a quelques
années, dans une période creuse comme celle que nous connaissons,
nous avions qualifié en vitesse 3000 personnes pour Je nettoyage des
routes du Québec, et ce n'était pas du travail perdu puisqu'en
période hivernale les municipalités et la province
déboursaient beaucoup moins pour l'entretien des routes. Est-ce que le
gouvernement ne croit pas qu'il serait sage dans l'immédiat de qualifier
plusieurs milliers de personnes pour dégager les fonds de l'aide sociale
du Québec?
M. Lévesque (Taillon): Je crois que le
député de Charlevoix admettra que ce n'est pas une chose qu'on
peut dire comme cela. Evidemment, il s'agit d'abord de fournir du travail
autant que faire se peut, mais ce sera quand même, je crois, un des
résultats pratiques du programme d'emploi saisonnier qui avait
été mis sur pied et qui se déroule en ce moment, programme
qui a été mis sur pied depuis le printemps.
Comme je l'ai déjà dit, il n'est pas exclu...
M. Levesque (Bonaventure): Où y a-t-il eu des travaux?
Dans Taillon?
M. Lévesque (Taillon): Je n'ai pas pu vérifier ces
derniers, mais je pense que le député de Bonaventure en verrait
beaucoup plus comme député de Taillon, je puis ajouter:
hélas! dans sa région et alentour de son coin que sur la
rive sud de Montréal.
M. Levesque (Bonaventure): Oui, mais je n'en vois pas. C'est ce
que les gens demandent. Ce que le député a suggéré,
c'est bon...
M. Charbonneau: Vous passez votre temps à enlever vos
lunettes, vous pouvez bien ne rien voir.
Une Voix: Qui a la parole?
Le Président: Je peux vous accorder une question si vous
souhaitez obtenir une réponse, mais nous allons laisser le premier
ministre répondre.
M. Levesque (Bonaventure): Le ministre ne croit-il pas que la
question par le député...
Le Président: M. le chef de l'Opposition...
M. Levesque (Bonaventure): ... de Charlevoix...
Le Président: Oui, mais quand le premier ministre aura
terminé sa réponse.
M. Lévesque (Taillon): Comme son ancien chef, le chef de
l'Opposition actuelle a une drôle de vision, il est terriblement myope
pour toutes les choses positives qui se passent dans le Québec, mais il
est d'une presbytie extraordinaire pour tous les dangers imaginaires qu'il peut
trouver à l'horizon.
Cela étant dit, oui, il est possible je l'ai
déjà dit que quelques efforts additionnels, les plus
substantiels possible soient faits d'ici une couple de mois tant mieux
si cela qualifie des gens pour l'assurance-chômage pour les raisons
données par le député de Charlevoix d'abord et
avant tout pour essayer de nouveau de créer et de fournir du
travail.
Le Président: M. le député de
Beauce-Sud.
Placement dans l'industrie de la construction
M. Roy: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
à l'honorable ministre du Travail. D'ailleurs, je l'ai avisé de
ma question.
Le printemps dernier, le ministre du Travail déposait un projet
de règlement concernant le placement dans l'industrie de la
construction. Pour consultation, j'aimerais demander au nouveau ministre du
Travail si une décision définitive a été prise
concernant ce placement. J'aimerais demander, en deuxième lieu,
étant donné que dans une couple de semaines les étudiants
choisiront, lors de la rentrée des classes, leurs options, surtout dans
les polyvalentes, et qu'un certain nombre iront vers les options concernant les
métiers de travailleurs de la construction, option charpentier,
menuisier, électricien, etc., compte tenu du fait que les
étudiants qui ont été diplômés au cours du
mois de juin n'ont pas encore pu obtenir le fameux permis de travail pour aller
sur le marché de la construction, je voudrais demander, dis-je, au
ministre s'il est en mesure, ce matin, de faire le point. Est-il en mesure de
nous dire explicitement si, dans le cas des étudiants finissants, des
jeunes travailleurs, le problème est réglé de façon
à pouvoir donner au moins de l'espoir à ceux qui choisiront ces
métiers au cours de l'automne?
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Johnson: M. le Président, je remercie le
député de Beauce-Sud de m'avoir donné avis, il y a
quelques minutes, de la question qu'il allait me poser sur le placement.
D'abord, j'aimerais rectifier un élément. Le ministre du
Travail qui m'a précédé n'a pas déposé de
projet de règlement. Effectivement, un document avait été
préparé par le ministre Couture ainsi que l'adjoint
parlementaire, M. Chevrette, le député de Joliette-Montcalm.
D'autre part, l'Office de la construction du Québec, en vertu de la Loi
sur les relations de travail dans l'industrie de la construction devait
remettre l'année dernière, au gouvernement qui nous a
précédé, un projet de règlement dans la
construction, projet qui fut rejeté par le Conseil des ministres sous le
gouvernement précédent. J'ai eu l'occasion, depuis que je suis au
ministère du Travail, de rencontrer les responsables de l'Office de la
construction du Québec pour parler de l'ensemble des
éléments de ce règlement de placement.
Je dois dire que cela a monopolisé une bonne partie des
énergies de mon personnel au niveau du cabinet et au niveau du
ministère.
L'objectif est d'en arriver à un règlement de placement
où certains des principes qui devront être sauvegardés sont
les suivants: d'abord et avant tout, donner une priorité aux
véritables travailleurs de la construction. Quand je dis les
véritables travailleurs de la construction, j'entends les gens qui en
font leur vie. Deuxièmement, faire en sorte que, sur une base
régionale, on puisse, dans la mesure du possible, dans la mesure
où cela est viable et possible, souhaitable et souhaité par les
parties, une partie de l'embauche se fasse en fonction du bassin
régional desservi lors de travaux de construction. Troisièmement,
faire en sorte qu'un minimum de règles d'éthique soient
respectées par ceux et celles, organismes ou individus, entreprises ou
sociétés d'Etat, qui font du placement; donc faire en sorte que
ce règlement et ces règles soient respectés.
En ce qui concerne le problème des étudiants, j'avoue que
c'est un problème un peu aberrant et qu'il faut le replacer dans la
perspective suivante: les gouvernements du Québec, depuis des
années... Vous m'excuserez, M. le Président, je suis un peu long;
je prendrai encore une minute, si je n'abuse pas de votre temps. Vous me donnez
une minute pour terminer?
Le Président: Oui.
M. Johnson: En ce qui concerne effectivement les
étudiants, la situation aberrante est la suivante. De façon
systématique, le gouvernement du Québec, depuis des
années, forme des jeunes dans des métiers
spécialisés, entre autres ceux de la construction, en ne tenant
absolument pas compte du marché réel et des besoins réels
en main-d'oeuvre dans ce secteur, ce qui fait qu'on arrive à une
situation absurde où on forme des charpentiers-menuisiers, des monteurs
en structures, des ferblantiers ou d'autres gens de certains métiers qui
ne trouvent pas un débouché. Quand ils arrivent sur le
marché du travail, ils sont perçus comme des ennemis
malheureusement par des
hommes de 40 et 45 ans qui en font leur vie et qui doivent faire vivre
leur famille.
Il faut effectivement, d'une part, faire en sorte que ceux qui sortent
de nos écoles puissent s'assurer d'un certain travail et, en même
temps, équilibrer cela avec le fait que des hommes qui sont dans le
métier depuis longtemps entendent continuer à vivre et faire
vivre leur famille de ce métier. C'est un problème assez gordien
et je pense que l'Office de la construction, à ma demande ce sont
les jours qui viendront qui nous le diront sera prêt à
inclure certaines dispositions permettant un minimum d'accès pour les
étudiants finissant dans les métiers
spécialisés.
Le Président: M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Question additionnelle, M. le Président. En somme,
si j'en juge de par la réponse du ministre, il n'y a aucune
décision de prise actuellement relativement au projet de
règlement de placement dans l'industrie de la construction. J'aimerais
demander au ministre, étant donné que ceux qui choisissent
l'option des métiers de la construction ne sont pas les seuls à
se chercher du travail et à ne pas avoir du travail garanti c'est
dans toutes les sphères et dans toutes les options de
l'éducation; ils ne sont pas les seuls de ce côté
si, au moins, dans ce secteur, étant donné que des employeurs
seraient prêts à les embaucher et compte tenu du fait que, dans
certaines régions du Québec, et j'ai des chiffres
là-dessus, nous nous dirigeons vers une pénurie de travailleurs
qualifiés dans l'industrie de la construction, le ministre est
prêt à donner l'assurance à cette Chambre que des
dispositions particulières seront prises pour donner priorité
à ceux qui ont obtenu un diplôme dans ce secteur de l'industrie de
la construction, de façon que l'Office de la construction du
Québec, l'OCQ, ne leur refuse pas systématiquement le fameux
permis de travail. Pour ce qui a trait au permis de travail, est-ce que
l'intention du nouveau gouvernement est de le maintenir ou de l'abolir, comme
cela avait été dit par l'ancien gouvernement durant les
dernières heures où il a été au pouvoir?
M. Johnson: L'ancien gouvernement avait dit beaucoup de choses
dans les dernières heures du pouvoir. En ce qui a trait
spécifiquement au problème des étudiants, je l'ai dit et
je le répète, nous entendons, en collaboration avec l'Office de
la construction, dont il ne faut pas oublier qu'elle est une régie
autonome, effectivement obtenir, dans la mesure du possible, des
représentants de l'Office de la construction, qu'on tienne compte de
cette dimension des étudiants qui sortent avec un diplôme afin
qu'on leur permette un certain accès. Malheureusement, je ne peux pas
être plus précis pour le moment, même si, dans mon esprit,
les possibilités sont très claires étant donné que
le règlement et nos ententes et nos conversations avec l'Office de la
construction ne sont pas encore terminées mais sont en cours de
l'être.
Deuxièmement, il n'y a pas, pour le moment, de prévision
précise, d'abolition du permis de travail. Cependant, en matière
de placement, et c'était à l'origine le projet de l'Office de la
construction et des dispositions contenues dans les embryons de projets
préparés par certains députés du côté
gouvernemental depuis le mois de novembre, nous entendons tenir compte du
nombre d'heures travaillées dans la construction pour les fins de former
des bassins de priorités, sur le plan régional comme sur le plan
québécois, de façon plus large. En ce sens, le permis de
travail ou l'autorisation de travailler se fera en fonction d'une série
de critères dont le critère du nombre d'heures passées
effectivement à ce travail dans les douze derniers mois ou dans une
période de référence donnée dans le secteur de la
construction.
Le Président: Le député de
Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, au ministre des
Transports, la semaine dernière...
Le Président: Une question additionnelle?
M. Charbonneau: Non, principale, M. le Président.
Le Président: Alors, Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre du Travail a
fait mention d'un problème qui existe quant au nombre d'étudiants
qui sont formés dans les métiers et les ouvertures qui leur sont
offertes sur le marché du travail. Il a tenu les anciens gouvernements
responsables de ceci. Je ne le chicanerai pas là-dessus, mais je
voudrais qu'il dise à cette Chambre quels sont les mécanismes
qu'il entend mettre en place pour pallier cette situation. Entrevoit-il, dans
l'immédiat, des solutions concrètes? Sinon, le prochain
gouvernement pourra en ajouter un autre à la liste de ceux qu'il vient
de mentionner quant à l'inertie dans ce secteur de la formation des
jeunes.
Le Président: Rapidement, s'il vous plaît, M. le
ministre.
M. Johnson: Effectivement, le ministère du Travail et de
la Main-d'Oeuvre entend procéder à la mise sur pied de trois
réalisations ou de trois objectifs à ce niveau. Il s'agit, d'une
part, d'avoir une connaissance du marché en matière de
main-d'oeuvre, et déjà nos fonctionnaires travaillent
là-dessus depuis de nombreux mois. Il s'agit, deuxièmement, de
mettre sur pied des programmes d'apprentissage pour tenir compte de la
présence des métiers spécialisés et des
entrepreneurs dans ce secteur. Il s'agit, finalement et c'est
probablement l'opération la plus délicate dans n'importe quelle
bureaucratie d'opérer cette jonction nécessaire entre le
service de la main-d'oeuvre et la section de la formation au niveau du
ministère de l'Education.
Le Président: Le député de Saint-Laurent,
une question accessoire, la dernière.
M. Forget: M. le Président, le ministre a donné des
indications du cheminement de sa réflexion relativement au
règlement régissant le placement dans l'industrie de la
construction. Il a même dit que le règlement préparé
par l'Office, sous l'ancien gouvernement, n'avait pas été retenu
par ce gouvernement. Est-ce qu'il peut nous dire quelle est son attitude
vis-à-vis du principe du placement syndical par opposition à un
placement qui serait effectué par l'Office de la construction?
M. Johnson: M. le Président, la question du placement,
quand on parle de celui qui doit faire le placement, il faut tenir compte du
fait que 80% de l'embauche en matière de construction, selon les
chiffres qui m'ont été fournis par l'Office de la construction du
Québec, sont faits par l'employeur. Quand on parle des bureaux de
placement syndicaux, on parle de fait de 20% du placement dans le secteur de la
construction. D'autre part, je ne crois pas qu'il y a une vertu en soi dans le
placement fait par un bureau syndical, et je ne crois surtout pas qu'il y a une
vertu en soi dans le placement fait par une immense machine bureaucratique qui,
dans certains cas, risque d'être moins efficace.
Cependant, en pratique, c'est de savoir comment réaliser
l'objectif qui veut que, premièrement, le placement réponde
à des normes de justice et, deuxièmement, qu'au maximum on puisse
sortir du portrait du placement ce qui constitue des éléments de
menace sur la personne, de contrôle des individus et parfois même
de choses aussi incroyables que le "shylocking". En ce sens, un
règlement qui permet par un organisme gouvernemental de régir ou
de superviser le placement qui puisse être fait par des bureaux de
placement syndicaux ou de façon mixte, je pense que c'est l'amorce d'une
solution. C'est au moins une solution à court terme, devrais-je dire, et
possiblement l'amorce pour les années à venir d'un processus qui
implique de plus en plus l'Etat à travers ces centres de main-d'oeuvre
ou à travers l'Office de la construction du Québec.
Le Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, une question additionnelle au
ministre du Travail.
Ce dernier a indiqué, dans ses réponses aux questions du
député de Beauce-Sud, que le placement se ferait
dorénavant en tenant compte des heures de travail
exécutées l'année précédente. Dans le
nouveau règlement, peut-il nous garantir qu'il y aura des
sous-régions aux grandes régions administratives, de
manière qu'un bonhomme qui a travaillé 400 heures l'année
précédente ne voie pas son poste possible dans une
sous-région pris par un travailleur de la construction qui viendrait de
la région de Québec? Je parle d'un travailleur de la construction
qui habiterait la ville de Québec; parce que lui a fait 600 heures, il
aurait prio- rité sur un travailleur de la Beauce qui aurait seulement
400 heures de faites l'année précédente.
M. Johnson: M. le Président, je suis sûr que le
député de Beauce-Sud n'est pas malheureux de votre allusion. Je
ne veux pas passer à côté de la question du
député de Montmagny-L'Islet, mais c'est une question
extrêmement complexe. C'est une question fondamentale, j'en suis, mais
c'est une question très technique, très complexe quand on parle
de la formation de deux ou de trois bassins possiblement de travailleurs, quand
on parle, d'une part, de priorité d'embauchage sur le plan
régional versus priorité d'embauchage sur le plan national, ou
sur un plan québécois je m'excuse. Je me ferai un plaisir,
lorsque j'aurai reçu de l'Office de la construction du Québec son
projet final de placement et que j'aurai à le soumettre au Conseil des
ministres pour un arrêté en conseil, de donner des explications
techniques, mais je peux tout de suite assurer le député de
Montmagny-L'Islet qu'il s'agit de concilier ces deux choses qui ne sont pas
faciles à concilier. D'une part, c'est quoi un véritable
travailleur de la construction? En d'autres termes, cet homme qui, comme source
de revenus, se fie essentiellement à son travail dans le secteur de la
construction, dans quelle mesure peut-on concilier ceci avec le fait qu'au
niveau régional il est normal que les gens d'une région
s'attendent, quand il y a un chantier de construction, à être, de
façon prioritaire, embauchés sur ce chantier?
C'est ce que nous sommes en train d'articuler en ce moment avec l'Office
de la construction du Québec.
Le Président: M. le député de Terrebonne.
Primes d'assurance automobile
M. Fallu: Suite à une information qui, ce matin, fait la
manchette d'un quotidien de Québec, j'aimerais demander au ministre des
Consommateurs, Coopératives et Institutions financières si les
conclusions auxquelles arrive le journaliste dans son article sont
fondées.
Une Voix: Quoi?
Mme Payette: Comme j'ai compris, depuis plusieurs mois, le
fonctionnement de cette Assemblée nationale, je savais bien que la
question ne pouvait pas venir de l'autre côté parce que c'est une
bonne nouvelle.
Une Voix: Vous avez demandé qu'on vous la pose?
Mme Payette: Certainement, il n'y a aucune honte à
cela.
M. Pagé: Vous l'avez écrite vous-même,
oui?
Une Voix: Si c'est vous qui l'avez écrite, elle est bien
mal écrite.
Mme Payette: C'est comme cela que cela a toujours
fonctionné, c'est ce que j'ai compris.
M. Pagé: C'est vous qui l'avez écrite et vous avez
donné le petit billet au petit député.
Mme Payette: II s'agit, en effet, d'une excellente nouvelle. Je
vois le tollé de protestations.
Une Voix: Quelle est la question? Le Président: A
l'ordre!
M. Blank: Question de règlement, M. le
Président.
Mme Payette: Cela vous dérange, n'est-ce pas?
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Saint-Louis! Mme le ministre! M. le
député de Terrebonne, pourriez-vous reformuler votre question en
explicitant l'objet de la nouvelle?
M. Fallu: M. le Président, vous me comblez! M. Giasson:
Souriez, Dieu vous aime!
M. Fallu: Je ne ferai quand même pas la lecture de
l'article en entier, mais je peux au moins, pour nos collègues d'en face
qui n'ont pas le bonheur de lire, le matin, les quotidiens sans doute
qu'ils arrivent un peu tard à la Chambre dire qu'on nous annonce
ce matin...
Une Voix: ... vos ministres.
M. Giasson: Ils sont là, ils viennent à la Chambre,
eux autres.
M. Fallu: ... que l'assurance-automobile coûtera moins
cher.
Mme Payette: Voilà! Merci beaucoup. Je ne m'attendais pas
à une motion de félicitations ce matin, mais je pense que j'y
aurais eu droit pour ma grande sagesse qui a fait, il y a quatre mois, que ne
voulant pas m'exposer au tollé de protestations de l'Opposition en
déclarant que les primes allaient baisser, j'ai attendu que quelqu'un
d'autre le fasse, les compagnies d'assurance.
Effectivement, je suis en mesure de vous confirmer ce matin qu'il y aura
une baisse des primes de l'assurance au Québec au cours de
l'année qui vient, pour la première fois depuis bien longtemps,
et pour une meilleure protection en plus.
Des Voix: Bravo!
M. Levesque (Bonaventure): Question additionnelle.
Le Président: Question additionnelle, M. le chef de
l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): Ma question additionnelle s'adresse au
ministre. Le ministre veut-il indiquer par cette annonce que le total qu'aura
à payer l'automobiliste québécois pour ses assurances,
incluant ce qu'il aura à payer à l'Etat et ce qu'il aura à
payer aux compagnies d'assurance privées, sera moindre?
Mme Payette: Pour presque tous les Québécois,
à l'exception de ceux qui n'étaient pas assurés du tout et
qui devront dorénavant s'assurer.
Le Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Le ministre des Consommateurs, Compagnies et
Coopératives nous indique que l'avis des compagnies d'assurance serait
que les primes de l'assurance-automobile connaîtraient une
diminution.
Devant ce fait, le ministre accepte-t-il de reconnaître que si les
compagnies à l'intérieur des sections de couverture qu'elles vont
garder suite à l'application du nouveau régime,
reconnaît-elle, dis-je, que les compagnies ont dit que cette
réduction de primes était due d'abord et avant tout à une
réduction du nombre d'accidents au Québec et à une
diminution du coût moyen des réclamations causée par
l'application des nouvelles règles de sécurité
routière qui ont été mises en vigueur par le
député de Charlevoix alors qu'il était ministre des
Transports?
Mme Payette: M. le Président, ce n'est que partiellement
vrai. Mais, même là, nous aurions lieu de nous réjouir.
M. Giasson: C'est la raison fondamentale.
Mme Payette: Mais, depuis ce matin, six compagnies d'assurance au
Québec ont reconnu que la réforme proposée de
l'assurance-automobile allait également faire baisser les primes.
Le Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Question additionnelle, moi aussi, M. le
Président. Tenant pour acquis que les primes vont baisser cette
année, est-ce que Mme le ministre, dans sa grande sagesse, peut nous
assurer qu'avec ce système les primes n'augmenteront pas dans
l'avenir?
Mme Payette: M. le Président, je ne peux pas
répondre des primes en 1986 ou 1987. Je peux cependant vous dire que,
selon le calcul des actuaires, il est probable que les primes vont continuer
à baisser pendant quelques années. Si, en plus, on a l'aide des
Québécois quant à la sécurité
routière j'inclus tous ceux qui sont ici et tous ceux qui sont de
ce côté-ci également je pense qu'on pourrait voir
baisser les primes pendant deux, trois ou même quatre ans.
Le Président: M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: J'aimerais demander à Mme le ministre si les
calculs actuariels sont complétés relativement aux taux qui
seront exigés à la suite de l'application de la loi, dans un
premier temps. Deuxièmement, est-ce que Mme le ministre a l'intention de
déposer ces calculs actuariels avant que nous entreprenions
l'étude de ces deux projets de loi en commission parlementaire?
Mme Payette: En effet, M. le Président, je serai en mesure
de déposer la table de tarification, ainsi que la table d'indemnisation
dans les jours qui viennent.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre pourrait nous dire quelles sont
ces informations ou éléments nouveaux qui lui permettent
d'affirmer aujourd'hui même que les primes doivent baisser, alors que
très récemment et à plusieurs reprises, à
l'Assemblée ici, elle ne pouvait d'aucune façon garantir qu'il y
aurait une telle baisse? Quels sont ces éléments nouveaux? Est-ce
le journal de ce matin ou quoi?
Mme Payette: Les éléments nouveaux sont que les
compagnies d'assurance, quand elles le déclarent, sont plus
crédibles que le ministre dans cette Assemblée et qu'il aurait
été prématuré, il y a quatre mois, de
présumer de l'attitude des compagnies d'assurance à la suite de
la présentation de la réforme. Maintenant que le projet de loi 67
est déposé, projet de loi contre lequel tous les membres de
l'Opposition ont d'ailleurs voté en première lecture, il semble
que la réaction des compagnies d'assurance soit positive.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle,
question additionnelle.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision que je
voudrais demander au ministre pour terminer, afin que le public soit bien
informé. Est-ce que le ministre est d'accord que, lorsque les compagnies
d'assurance indiquent qu'il y aura une diminution des primes, elles tiennent
compte du fait qu'elles ne couvriront plus les dommages corporels?
Mme Payette: Bien sûr, elles en tiennent compte, mais cela
va plus loin que cela puisqu'elles envisagent une baisse des primes pour la
couverture des dommages matériels.
M. Levesque (Bonaventure): Là, nous rejoignons la question
du député de Montmagny-L'Islet.
Mme Payette: M. le Président, cela va plus loin que cela
parce qu'il semble qu'une concurrence qui n'existait plus entre les compagnies
d'assurance existe de nouveau depuis l'intervention du gouvernement dans ce
dossier.
M. Levesque (Bonaventure): Alors, le ministre est d'accord pour
dire que c'est bon, l'entreprise privée et la saine concurrence?
Mme Payette: A condition que cela soit très
sérieusement encadré.
Le Président: Fin de la période des questions. M.
le député de Gatineau.
Travaux parlementaires
Demande de retrait d'un projet de loi
privé
M. Gratton: En vertu de 34, M. le Président. Au feuilleton
d'aujourd'hui, en avis, à l'article e) on voit qu'il y a un projet de
loi privé modifiant la charte de la ville de Gatineau, au nom de M.
Alfred.
M. Burns: II va y rester longtemps à part cela.
M. Gratton: Oui, justement. Il y a une résolution du
conseil municipal de la ville de Gatineau demandant de retirer temporairement
ce projet de loi privé. Je me demande si on ne devrait pas tout de suite
le rayer du feuilleton de peur qu'il puisse s'y glisser des erreurs plus
tard.
M. Burns: En réponse au député de Gatineau,
ce projet, qui apparaît effectivement à l'article e), a
été retenu par moi depuis un certain temps, retenu quant à
son adoption. Là-dessus je croyais qu'il fallait des consultations
très précises et très spécifiques avec le ministre
des Affaires municipales, chose que je n'ai pas pu faire encore au moment
où je vous parle.
Le député de Papineau m'a fait des représentations
à l'effet qu'il était urgent d'adopter ce projet de loi.
Cependant, je peux dire, et malheureusement le ministre des Affaires
municipales n'est pas ici pour le confirmer, que fort probablement certains des
projets de loi que nous avons l'intention de soumettre au niveau des affaires
municipales pourraient peut-être régler le problème
spécifique de la ville de Gatineau. Pour le moment, il n'est pas
question d'adopter ce projet de loi. D'autre part, je pense qu'il serait
peut-être, avant qu'on ait eu la consultation nécessaire,
prématuré de retirer le projet du feuilleton au cas où
cela deviendrait nécessaire dans ce cas spécifique.
Le Président: M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, pour éclairer
davantage le leader du gouvernement, je lui ferai parvenir copie de la
résolution du conseil de ville de Gatineau qui demande à
l'Assemblée nationale de retirer le projet temporairement, ce qui
réglera la question une fois pour toutes.
M. Burns: D'accord.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: II ne faudrait pas oublier qu'un projet de loi
privé n'appartient ni aux députés ni au gouvernement. Il
appartient aux pétitionnaires. Les pétitionnaires demandent qu'il
soit retiré.
M. Burns: Sauf que c'est la première nouvelle que j'en
ai.
M. Lavoie: Est-ce qu'on pourrait déposer ces
documents?
M. Burns: Oui.
M. Lavoie: Normalement, je crois qu'il devrait être
retiré du feuilleton.
M. Burns: On va aller prudemment dans ces choses. Vous nous
accusez d'improviser à tout bout de champ. Il ne faudrait pas que
l'Opposition se mette à improviser aussi.
M. Lavoie: Cela pourrait faire l'objet d'une directive de votre
part. Il est 11 heures. Voulez-vous vous calmer, vous en avez jusqu'à
minuit ce soir.
M. Burns: Non, on en a pour toute la nuit. Le Président:
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je viens de faire parvenir
copie de la résolution. Il serait peut-être bon qu'on la
dépose pour les fins du journal des Débats.
M. Burns: M. le Président, je suis d'accord que ce
document soit déposé et j'en fais le dépôt. Je
prends la parole du député de Gatineau à l'effet que c'est
une copie exacte et fidèle et je dépose ce document dont je viens
de recevoir copie.
M. Gratton: M. le Président, je fais une demande de
directive à savoir si, dans les circonstances actuelles, il n'y aurait
pas lieu de rayer l'article c) du feuilleton.
M. Burns: Etes-vous capables d'attendre une journée pour
cela?
M. Gratton: Oui, mais je demande au Président...
M. Burns: On va attendre.
Le Président: M. le député de Gatineau, je
suis sûr que vous donneriez au moins à la présidence le
temps d'en prendre connaissance.
M. Burns: M. le Président, est-ce qu'il y a d'autres
questions en vertu de l'article 34? Non?
M. Brochu: Je pense que le menu est tout tracé,
excepté s'il y avait des changements de dernière minute.
M. Burns: Non, il n'y a pas de changements de dernière
minute.
M. Brochu: Est-ce que le leader peut nous informer de ce qu'il y
a exactement au programme?
M. Burns: Non, on n'improvise pas, contrairement à ce
qu'on dit.
M. Brochu: Là vous n'improvisez plus. Projets de loi nos
13 et 14
Adoption du rapport de la commission de
l'agriculture
M. Burns: M. le Président, avant d'aborder l'article qui
apparaît à mon nom à l'article 1, nous pourrions
peut-être disposer d'un certain nombre de petites choses mais qui sont
quand même importantes, et peut-être la prise en
considération du rapport de la commission de l'agriculture qui a
examiné les projets de loi nos 13 et 14; 13, Loi modifiant la Loi des
abus préjudiciables à l'agriculture, et 14, Loi modifiant la Loi
des produits laitiers et de leurs succédanés.
M. le Président, je vous demanderais donc, en conséquence,
d'appeler, s'il vous plaît, l'article 20.
M. Levesque (Bonaventure): Y a-t-il eu des amendements qui ont
été déposés à la suite du rapport?
M. Burns: Pardon?
M. Levesque (Bonaventure): Y a-t-il eu des amendements
déposés à la suite du rapport?
M. Burns: Non, pas à la suite du rapport.
M. Levesque (Bonaventure): D'accord. Adopté.
Le Président: Est-ce que ce rapport serait
agréé?
Une Voix: Adopté. Le Président: Adopté.
M. Burns: Nous avons deux projets de loi privés, M. le
Président, dont nous pourrions disposer en deuxième lecture. Il
semble qu'après les discussions de la commission des affaires
municipales tout le monde s'est rendu compte que c'était acceptable dans
la forme où on la retrouve, de sorte que j'appellerais l'article 21, M.
le Président.
Projet de loi no 230 Deuxième lecture
Le Président: M. le député de Vanier propose
la deuxième lecture de la Loi modifiant la charte de la ville de
Charlesbourg.
Une Voix: Discours.
Le Président: Est-ce que cette motion serait
adoptée?
M. Goldbloom: M. le Président... Le Président:
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Victor-C. Goldbloom
M. Goldbloom: Je voudrais prendre quelques secondes seulement, M.
le Président, pour dire deux choses. D'abord je vous demanderai, tout
à l'heure, de déclarer que la deuxième lecture de ce
projet de loi est adoptée sur division, quant à l'Opposition
officielle.
Deuxièmement, je voudrais profiter de cette occasion, M. le
Président, de dire que voici les deux derniers d'une série de
projets de loi privés présentés par des
municipalités. Dans chaque cas, ou à peu près, nous avons
été appelés à examiner des articles qui
demandaient, au nom de la municipalité en question, des pouvoirs
exceptionnels. Nous avons dû constater, Mme le Président, que,
dans bien des cas, il aurait été de beaucoup
préférable que le gouvernement, qui a déjà au
feuilleton un projet de loi pour modifier la Loi des cités et villes et
un projet de loi pour modifier le Code municipal, procède, dans un tel
projet de loi, à la modification pour toutes les municipalités de
la province. Nous avons dit, à répétition, si c'est bon
pour la municipalité demanderesse, cela doit être bon pour toutes
les municipalités.
Mme le Président, je me suis fait harceler par les amis d'en face
pas par l'actuel ministre des Affaires municipales car il n'était
pas là parce que je faisais essentiellement cela en attendant,
à l'époque. Maintenant, le rapport de la Commission de refonte
des lois municipales est complet, et j'avais prévu pour l'automne
dernier, Mme le Président, des séances de cette commission
parlementaire pour aborder l'examen de ce rapport de la Commission de refonte
des lois municipales. Je ne peux que profiter de cette occasion pour exprimer
ma déception que le gouvernement ait cru bon de continuer d'accepter des
projets de loi privés pour régler des problèmes qui
auraient dû être réglés dans la loi
générale et pendant qu'il a lui-même déposé
des projets de loi pour amender les deux lois principales qui régissent
l'administration des municipalités. J'exprime en même temps mon
regret que le gouvernement n'ait pas convoqué la commission
parlementaire pour que nous étudions, publiquement, avec les
intéressés, comme témoins et comme opinants, le rapport de
la Commission de refonte des lois municipales.
Or, Mme le Président, je me permets de vous rappeler que j'ai
demandé que vous déclariez adopté sur division la
deuxième lecture du projet de loi no 230.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Fabien Cordeau M. Cordeau: Mme le Président, au nom de
l'Union Nationale, à la commission nous avons accepté le projet
de loi tel que soumis et nous avons apporté notre approbation, ce que
nous faisons aujourd'hui aussi. Par contre j'appuie le député de
D'Arcy McGee en ce qui regarde le projet de refonte des lois municipales qui
devrait nous être présenté dans quelque temps, comme l'a
souligné le ministre des Affaires municipales durant l'étude de
ce projet de loi.
Pour nous, nous allons approuver ce projet de loi.
Mme le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Guy Tardif
M. Tardif: Mme le Président, effectivement, je me suis
engagé en commission parlementaire à présenter dans les
meilleurs délais un certain nombre des amendements demandés par
les municipalités à leur charte privée, de les inscrire
dans la loi générale. Cependant, la réserve du
député de D'Arcy McGee, qui a été exprimée
à une ou deux reprises et qu'il a faite ici générale ce
matin, me surprend puisqu'on n'avait pas tout à fait le même
langage en commission parlementaire.
C'est vrai que certaines dispositions, si elles sont bonnes pour
certaines municipalités, peuvent l'être pour l'ensemble, mais
c'est aussi vrai qu'il peut être très instructif pour le
gouvernement, pour la chose publique, de ne permettre qu'à une ou deux
ou trois municipalités, à l'essai, d'exercer un nouveau pouvoir
afin que le gouvernement voie comment ces municipalités s'en servent
avant de le généraliser à l'ensemble des villes. Ceci dit,
c'est un fait qu'il y a des dispositions qui, d'ailleurs, avaient
déjà été adoptées par mon
prédécesseur, en quelque sorte, accordées par mon
prédécesseur à deux ou trois reprises, et qu'on vient,
dans ces treize commissions parlementaires ou ces treize chartes privées
qui ont été adoptées, d'accorder parfois exactement un
pouvoir identique à celui que mon prédécesseur avait
consenti.
C'est donc, encore une fois, tout simplement aussi question de temps.
Sept lois du gouvernement ont été présentées par le
ministre des Affaires municipales depuis le début de la session, plus
treize projets de loi privés, ce qui fait un total d'au moins vingt
textes de loi qui ont été scrutés par le ministre des
Affaires municipales. Je pense que c'est une question de temps pour inscrire
dans la loi générale un certain nombre des dispositions qui ont
été étudiées.
Mme le Vice-Président: Cette motion de deuxième
lecture du projet de loi no 230, Loi modifiant la charte de la ville de
Charlesbourg, sera-t-elle adoptée?
M. Goldbloom: Adopté sur division, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: Adopté sur division.
M. Burns: D'accord. Nous pourrions peut-être, Mme le
Président, également...
Mme le Vice-Président: Troisième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente. M. le leader du
gouvernement.
M. Burns: Nous pourrions peut-être, Mme le
Président, appeler l'article no 22, qui est également un projet
de loi privé concernant la ville de Longueuil.
Projet de loi no 236 Deuxième lecture
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laprairie propose la deuxième lecture du projet de loi no 236, Loi
modifiant la charte de la ville de Longueuil. Cette motion de deuxième
lecture sera-t-elle adoptée?
M. Goldbloom: Adopté. Mme le Vice-Président:
Adopté.
Travaux parlementaires (suite)
M. Burns: Mme le Président, je donne un avis conditionnel,
je dis bien conditionnel parce que je ne suis pas encore sûr de l'heure
à laquelle la commission de la présidence du conseil, de la
constitution et des affaires intergouvemementales pourrait siéger demain
relativement au projet de loi no 2 quant à son étude article par
article. Il serait possible qu'après la période des questions,
demain, nous puissions siéger. D'autre part, je ne vous cache pas que
demain également j'avais l'intention, comme ministre d'Etat à la
réforme électorale et parlementaire, de rendre public le livre
blanc sur la loi de la consultation populaire, c'est-à-dire sur les
référendums, de sorte qu'il peut peut-être y avoir des
embêtements, d'aiguillage à un moment donné, auquel cas, si
le livre blanc sur les référendums était rendu public
demain matin, je pense qu'il serait préférable, parce que je
serais tiraillé entre deux endroits différents...
M. Lavoie: Conférences de presse.
M. Burns: Non, mais je présume qu'un texte de cette
importance en tout cas, on en jugera doit probablement attirer
l'attention d'un certain nombre de gens des media d'information.
M. Lavoie: Ceux qui sont là, actuellement, entre
autres.
M. Burns: Peu importe! Les journalistes seront bien
représentés. C'est pour cela que je laisse cet avis sous
condition, tout en vous disant qu'on tâchera de s'ajuster en se parlant
entre les représentants de l'Opposition et moi-même. D'accord?
M. Lavoie: Cela relève de la déclaration que vous
venez de faire. Est-ce votre intention de déférer ce livre blanc
à une commission parlementaire?
M. Burns: Oui.
M. Lavoie: Suivant le processus normal.
M. Burns: Exactement.
M. Lavoie: D'accord.
M. Burns: Cela devrait normalement avoir lieu dans le courant du
mois d'octobre, peut-être même à la fin de septembre. Cela
dépendra des disponibilités, mais c'est carrément notre
intention de le soumettre.
Motion pour faire siéger la commission de
l'éducation
M. Burns: Sur ce, Mme le Président, je fais donc motion
pour que la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications se réunisse immédiatement à la salle 81-A
pour étudier, article par article, le projet de loi no 101.
Mme le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle
adoptée?
M. Lavoie: Vote enregistré.
Mme le Vice-Président: Qu'on appelle les
députés!
Vote sur la motion
Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Cette Assemblée est appelée à mettre aux voix la
motion du leader parlementaire du gouvernement pour faire siéger la
commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications, sur le projet de loi no 101, à partir de maintenant.
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Burns, Cardinal, Laurin, Couture, Bérubé, Johnson, O'Neill, Mme
Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Duhaime,
Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Marcoux, Fallu, Rancourt,
Grégoire, Bertrand, Godin, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay,
Gendron, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellet, Perron, Brassard, Gosselin,
Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril,
Bordeleau, Boucher, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon,
Jolivet, Levesque (Bonaventure), Lavoie, Lalonde, Garneau, Mailloux, Goldbloom,
Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron,
Picotte, Ciaccia, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Grenier,
Fontaine. Brochu. Shaw. Le Moignan, Dubois, Cordeau, Roy.
Mme le Vice-Président: Contre. Abstentions.
Le Secrétaire: Pour: 78 Contre: 0Abstentions:
0
Mme le Vice-Président: Motion adoptée.
M. Burns: Cette commission peut donc siéger
immédiatement et elle siégera, en principe, toute la
journée jusqu'à 23 heures si la motion que nous nous
apprêtons à appeler est adoptée.
Mme le Président, j'appellerais donc l'article 1.
M. Lavoie: Est-ce que M. Guillotin est membre de la
commission?
M. Burns: M. Guillotin est membre de la commission et il s'en va
directement là.
Mme le Vice-Président: Vous avez appelé l'article
1, M. le leader du gouvernement?
M. Burns: Mme le Président...
M. Lavoie: N'oubliez pas de parler pour la motion, n'est-ce
pas?
M. Lalonde: Si ce n'est pas votre chef.
M. Burns: Mon intervention sera très brève.
Mme le Vice-Président: M. le leader, avez-vous
appelé l'article 1?
M. Burns: Article 1, Mme le Président.
Motion visant à mettre fin aux travaux
de la commission de l'éducation
sur l'étude de la Charte
de la langue française
Mme le Vice-Président: D'accord. M. le ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire propose que
conformément à l'article 156 du règlement le rapport de la
commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications sur l'étude du projet de loi no 101, Charte de la langue
française, après la deuxième lecture, soit
déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires
du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses
travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977.
M. le ministre.
M. Robert Burns
M. Burns: Comme j'avais commencé à le dire, mon
intervention sera très brève. J'espère qu'elle n'en sera
pas moins substantielle. Nous avons eu l'occasion, au cours des jours qui ont
précédé, en particulier dans la journée d'hier, de
discuter de certains problèmes qui touchent à cette motion lors
de la présentation de ma motion en vertu des dispositions de l'article
84 de notre règlement, mettant de côté, pour la
durée et je pense avoir été assez clair
jusqu'à l'adoption du projet de loi no 101, certaines dispositions de
notre règlement.
J'avais, à l'occasion de la discussion de cette motion,
allégué un certain nombre de tentatives que j'avais faites
auprès de l'Opposition, tentatives qui visaient à rendre
fonctionnelles et expéditives les discussions qui ont eu lieu et qui se
tiennent encore à la commission parlementaire permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications. J'avais
entre autres cité un projet que j'ai effectivement déposé
à ce moment-là et qui est maintenant devenu un document
session-nel, un projet d'étude selon un bloc ou différents blocs
d'articles entre le 3 août et le 15 août. J'ai mentionné,
à ce moment-là, et je réitère mon affirmation,
qu'il était tout à fait dans les droits de l'Opposition de
refuser une telle entente. Il est important, d'autre part, qu'on prenne
connaissance de ces faits.
Cette suggestion avait été faite dès le 3
août. Le 16 août, j'ai fait une proposition analogue mais
peut-être plus globale. Le document est d'ailleurs également
déposé et il est aussi un document ses-sionnel qui visait
à peu près les mêmes fins, mais avec des dates
différentes, visant surtout l'adoption du projet de loi no 101 pour le
26 août.
Les raisons de l'adoption du projet de loi no 101 avant le 26 août
sont évidentes. Il ne m'apparaît pas nécessaire
d'expliciter sur ce sujet. Il m'apparaît d'autre part clair à qui
veut vraiment ouvrir les yeux et à qui veut vraiment entendre qu'il
serait anormal que la rentrée scolaire, à l'automne ou en
septembre, se fasse dans un chaos législatif assez exceptionnel,
à partir du moment où nous ne saurions pas en vertu de quelles
dispositions législatives cette rentrée scolaire devrait se
faire.
Encore une fois c'est bien à regret que je présente cette
motion au nom du gouvernement. Soyez assurés que le gouvernement y a
pensé à deux reprises et à plusieurs reprises avant de
vous soumettre une motion comme celle que nous vous présentons
aujourd'hui, mais c'est aussi en tenant compte du fait qu'un gouvernement
précédent avait lui aussi eu recours, à deux reprises dans
ce cas-là, à une motion de clôture qu'on appelle
communément la guillotine, et que ce gouvernement avait eu recours
à cette mesure exceptionnelle avec un dossier, j'oserais dire, beaucoup
moins bon au point de vue nombre d'heures consacrées à la
discussion de ce projet.
J'en avais cité l'autre jour, mais j'ai maintenant des chiffres
très récents qui datent de la situation d'hier soir. J'avais dit
qu'à l'époque, en 1974, lors de l'adoption du projet de loi no
22, entre le 11 juin et le 10 juillet 1974, la commission, après la
première lecture, avait consacré 19 jours à l'étude
des mémoires, pour une durée totale de 89 heures et 13 minutes.
Cela se compare favorablement, je pense, avec la même opération
qui a eu lieu cette année après le dépôt du projet
de loi no 1. Entre le 7 juin et le 8 juillet, lorsque les mémoires ont
été déposés, nous avons un total de 21 jours au
lieu de 19, et un total de 114 heures et 5 minutes au lieu de 89 heures et 13
minutes.
La comparaison est assez favorable. Nous croyons que le gouvernement ne
pourrait pas se faire accuser d'avoir bousculé ce projet si on fait
cette comparaison heure par heure, jour par jour, par rapport à
l'adoption du projet de loi no 22. Surtout que le projet de loi no 101
était déjà dans l'air, si je puis dire, depuis un certain
nombre de mois et que tout le monde savait que ce gouvernement-ci avait
l'intention de modifier de façon substantielle des dispositions de la
loi 22, qu'il avait également l'intention, dès cette
première session, de poser ce geste qui était également
une promesse électorale que nous voulons simplement respecter.
Quant à l'étude du projet de loi article par article,
notre dossier est également très favorable par rapport à
la loi 22. En 1974, il y a eu des séances pour examiner le projet de loi
entre le 16 juillet et le 26 juillet 1974, pour un total de 10 jours, avec une
durée totale de 55 heures et 28 minutes. Cette année, nous
pouvons pratiquement, au moment où je vous parle, parler du double
d'heures d'étude du projet de loi article par article, et je pense que
dans le courant de la journée, avec les heures que nous enregistrons
actuellement, la commission ayant commencé à siéger il y a
quelques minutes, cela donnera sans aucun doute à peu près le
double.
Par rapport aux dix jours qui ont été consacrés
à l'étude article par article du projet de loi no 22,
déjà, hier soir, nous pouvions parler de 15 jours, mais, en
termes d'heures, au lieu de 55 heures 28 minutes, nous en étions rendus
à 96 heures 21 minutes. Sans aucun doute nous dépasserons la
centaine d'heures dans la journée, de sorte que, Mme le
Président, il ne nous apparaît pas prématuré de
recourir à cette motion de clôture que j'avoue être tout
à fait exceptionnelle et assez spéciale.
Là-dessus, je crois qu'il suffit de lire un certain nombre
d'éditoriaux depuis quelque temps pour se rendre compte que c'est le
désir de l'ensemble de la population de mettre fin à ce
débat pour passer à autre chose, tel que nous l'a
suggéré, d'ailleurs, l'Opposition à de nombreuses reprises
à l'occasion de motions de blâme en vertu de l'article 24 ou
encore à l'occasion de motions qui ont été
formulées dans le cadre des journées de députés. Je
ne prends à témoin Mme le Président, probablement
que tous les députés ont eu l'occasion de le lire que M.
Marcel Pépin, qui est éditorialiste au journal Le Soleil et qui,
le jeudi 18 août remarquez qu'on est cinq jours plus tard
nous disait dans un grand titre: "Le débat a assez duré".
Si on lit cet article je vous fais grâce de la lecture in
extenso de cet article on se rend compte qu'on veut simplement au
Québec actuellement que ce problème on le fasse vivre à la
population malgré les réticences de certains groupes,
malgré toutes les représentations que le député de
Pointe-Claire, entre autres, et M. le député de
Marguerite-Bourgeoys ont pu nous faire valoir. On veut simplement que le
gouvernement prenne sa décision, la mette en application. Malgré
les droits que l'Opposition possède de faire de l'obs- truction
systématique à un projet de loi, on veut simplement que, de
façon expéditive et rapide, on mette en application un tel projet
de loi.
J'ai cité le cas de M. Pépin. Je cite également un
éditorial du journal Montréal-Matin de ce matin, le mardi 23
août, simplement quelques extraits sous la signature de M. Matthias Rioux
qui nous dit: "Après bientôt six mois de réflexions, de
discussions publiques et de querelles, le bon sens commande de mettre fin
à ce coûteux verbiage". Je pourrais citer encore plus longuement
M. Matthias Rioux, mais il arrive à la même conclusion que M.
Pépin.
Si on réussit à faire l'exégèse de
l'éditorial de M. Ryan de ce matin, on arrive à peu près
aux mêmes conclusions lorsqu'on examine quelles sont les grandes lignes
de cet éditorial de M. Ryan de ce matin, sauf qu'évidemment, dans
le cas de M. Ryan, c'est toujours plus compliqué. Il faut en faire
vraiment une exégèse très sérieuse.
Mme le Président, malgré tout ce qu'on pourra me citer de
mes anciens discours lorsque j'étais dans l'Opposition, je me sens tout
à fait à l'aise de présenter cette motion au nom du
gouvernement. Je n'ai acuune honte à dire que ce gouvernement-ci a
décidé de faire adopter avant le mois de septembre le projet de
loi no 101. Bien qu'il reconnaisse les droits que possède l'Opposition
de s'opposer vigoureusement à un projet de loi, le gouvernement a quand
même le droit également d'agir avec vigueur pour voir à
l'adoption d'un des projets de loi qu'il considère comme très
important et qui est effectivement un des projets qu'il avait
décidé comme priorité de faire adopter au cours de cette
première session.
C'est pourquoi, Mme le Président, je propose cette motion et je
demanderais à l'Assemblée nationale de l'adopter pour favoriser
l'adoption, dans les meilleurs délais, du projet de loi no 101.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: Mme le Président, il est d'usage, pour
l'Opposition, de hurler au scandale lorsqu'une telle motion...
M. Burns: Déchirer son linge.
M. Lalonde: ... est présentée pour mettre fin aux
débats concernant l'étude d'un projet de loi, d'autant plus
qu'aujourd'hui, comme hier, le gouvernement viole carrément un
engagement formel du premier ministre, il y a à peine un mois, à
propos de ce genre de guillotine que l'on impose à nos débats
parlementaires. J'ai lu au texte cet engagement du premier ministre, hier; je
pense que d'autres députés l'ont fait, mais il ne semble pas
qu'on ait compris, de l'autre côté, ce que le premier ministre
disait. Je lis, à la page 2263 des Débats de l'Assemblée
nationale, le 21 juillet 1977, ce que le premier ministre, député
de Taillon, dit: "Parce qu'on ne bulldozera pas le Parlement, on va laisser
aller la législation jusqu'à sa conclusion
normale" le mot "normal" est un mot cher à ces
députés péquistes, Mme le Président "II n'est
pas question de commencer ces procédures d'étouffement du mois de
juillet ou du mois d'août qu'on a trop vues. Je me souviens d'en avoir
souffert et je ne le ferai pas".
M. Garneau: Qui a dit cela?
M. Lalonde: Le premier ministre actuel qui était assis
à côté du leader, il y a quelques minutes...
M. Garneau: A-t-il dit cela?
M. Lalonde: ... et qui n'a d'ailleurs pas voté sur la
motion du leader, hier soir.
M. Garneau: II doit y avoir longtemps qu'il a dit cela.
M. Lalonde: II y a à peine un mois qu'il a dit cela. Le 21
juillet 1977. Les interrogations des députés sont utiles parce
que je sais que les mêmes questions, les députés d'en face
se les posent. Les mêmes questions que le député de
Jean-Talon m'a posées. "Qui a dit cela? ça doit être un
ancien premier ministre". Non, c'est le premier ministre actuel, le
député de Taillon. "Oui, mais cela doit faire longtemps, il a
déjà été membre de cette Chambre il y a bien des
années, cela doit faire longtemps, on a oublié cela". Non, il y a
quelques jours, le 21 juillet. Nous sommes le 23 août aujourd'hui, il y a
à peine quelques semaines, le premier ministre disait: "Et je ne le
ferai pas. Cela s'appelle le respect des droits des parlementaires". Je ne sais
pas ce que les députés du Parti québécois doivent
penser en entendant cela. Ils doivent dire: II a le droit de changer
d'idée, le premier ministre. Oui, on a le droit de changer
d'idée. Peut-être que le leader parlementaire l'a fait changer
d'idée aussi parce que si ma mémoire est bonne le
premier ministre a dit cela quand il défendait son leader parlementaire
qui était sous le coup d'une motion de blâme.
Mme le Président, aucun premier ministre, aucun parlementaire n'a
le droit de changer d'idée comme cela, n'a le droit, un soir, de venir
dire qu'on ne le fera pas et, ensuite, appuyer son leader parlementaire qui
vient de faire exactement le contraire.
Mme le Président, je ne m'imposerai pas les gestes habituels de
l'Opposition officielle de scandale à l'endroit de cette motion, mais je
vais quand même tenter de vous démontrer jusqu'à quel point
elle est injuste en l'occurrence.
Le leader du gouvernement vient de nous faire des comparaisons avec le
débat sur la loi 22. Il a oublié de nous dire, par exemple, en ce
qui concerne l'étude des mémoires, que, cette année, nous
avions plus de 260 mémoires contre moins de 200. Le chiffre
m'échappe actuellement, je pense que c'est environ 175 mémoires
pour la loi 22.
En ce qui concerne l'étude des mémoires, je pense que,
proportionnellement, cela se compare, mais là où la
différence est complète et renversante, c'est dans l'étude
article par article.
Dans la loi 22, on avait pris 10 jours et 55 heures pour étudier
un article et aborder un deuxième. Dans la loi 101, on a pris 15 jours
et presque le double d'heures. Donc, le nombre de jours et d'heures où
les membres de cette commission ont travaillé fut plus
élevé, naturellement. Mais nous fûmes bousculés par
le gouvernement et par le leader du gouvernement qui a fait siéger cette
commission, à l'encontre de toute la tradition parlementaire, même
le mercredi soir, le vendredi après-midi sans suspendre les
règles de cette Chambre. Donc il y a eu une centaine d'heures pour
n'adopter au moment où je vous parle probablement que le
cinquième chapitre. Il restait un article au cinquième
chapitre.
Nous avons étudié les chapitres I, II, III, IV et le
chapitre de l'enseignement, qui est long et auquel le gentil calendrier du
leader du gouvernement, dans son document sessionnel, accordait un jour, le 10
août, pour les articles 68 à 93, pas même à 83.
C'était plus que la langue d'enseignement parce qu'il y avait toutes
sortes de dispositions diverses, de l'article 83 à l'article 93.
Un jour! C'est ce même gouvernement qui a présenté
une motion d'amendement à l'article 81a concernant les accords de
réciprocité. Mais cela était censé être dans
l'heure du lunch probablement. Enfin, je ne sais pas comment il aurait
réussi à tasser la réciprocité qu'il s'est fait
tasser à St. Andrews dans ce jour de débats mais, enfin, ce qu'il
nous proposait était complètement incohérent et
improvisé.
A l'encontre de ce que le gouvernement aime bien faire passer par ses
rumeurs, je dois conclure qu'il n'y a pas d'opposition systématique,
qu'il n'y a pas d'obstruction systématique ou ce qu'on appelle de
"filibuster" à la commission parlementaire. Il y a un débat
vigoureux, il y a une étude sérieuse article par article, il y a
des amendements qui sont proposés. Ceux qui ont eu le bonheur de
siéger avec nous se sont aperçus qu'il y a des amendements qui
sont étudiés par les membres de la commission, tous
rejetés ou presque, naturellement. On fait face à une fermeture,
un hermétisme total de la part de ce gouvernement, qui avait pourtant
promis de l'ouverture lors de ce débat.
Il n'y a pas d'opposition systématique. Le débat est long,
il est vigoureux, mais nous avons adopté une quarantaine d'articles
jusqu'à maintenant, et des articles importants, tous ceux sur la langue
de la justice, la langue des tribunaux, la langue de la législation, la
langue de l'enseignement, la langue de l'administration, et, dans ce
débat, le gouvernement a tout chambardé. A la dernière
minute, jeudi dernier, il nous a présenté toute une série
d'amendements pour traiter les tribunaux et les services de santé de
façon tout à fait différente.
Mme le Vice-Président: M. le député, je dois
vous rappeler qu'il ne faut pas faire référence à la
commission parlementaire parce qu'elle n'a pas déposé son
rapport.
M. Lalonde: Mme le Président, je devrai me rappeler qu'il
faut que je fasse référence à la commission parlementaire
dans une motion pour mettre la guillotine sur la tête des membres de
cette commission. Je décide de voter contre et c'est ce que je vais
faire; comment voulez-vous que je convainque, que je persuade les autres
membres de cette Chambre de voter à rencontre de cette motion si je ne
me réfère pas à la commission parlementaire et à
ses travaux?
Je comprends votre problème. Le règlement vous dit que
l'Assemblée nationale ne peut pas avoir connaissance légale de ce
qui se passe en bas, mais il reste que, comme hier, nous allons, je pense,
pouvoir vivre avec le règlement et la nécessité que
j'aurai de me référer aux travaux de cette commission.
Mme le Vice-Président: Je vous fais confiance, M. le
député; j'espère que vous allez tenir compte du
règlement, qui est très clair à l'article 99, paragraphe
3.
M. Lalonde: Mme le Président, il n'y a pas d'obstruction
systématique à cette commission parlementaire quoiqu'en disent
certains éditorialistes. Oui, j'ai lu l'éditorial de Matthias
Rioux, je ne l'ai pas vu ici, autour, mais j'ai lu son éditorial, et je
cite: "Les députés libéraux, en particulier, y
mènent un "filibuster" intermittent". Cela, c'est nouveau. Un
"filibuster" intermittent ou un "filibuster" complet, maintenant, il y a toutes
sortes de "filibusters".
Je ne sais pas quand les députés auront le droit de
s'opposer vigoureusement au projet de loi, sans qu'on les accuse de faire un
"filibuster".
Mme le Vice-Président: Je devrai vous demander de
conclure, à moins que vous ne parliez au nom de votre parti.
M. Lalonde: Je parle au nom du parti. Mme le
Vice-Président: Bon.
M. Lalonde: Mme le Président, nous avons adopté une
quarantaine d'articles, presque cinq chapitres. Nous avons indiqué
publiquement en conférence de presse au début des travaux de
cette commission qu'il y avait au moins 150 articles qui ne créaient pas
de problème, que nous étions prêts à les adopter
aujourd'hui si le gouvernement nous en proposait l'adoption, mais il faut quand
même suivre l'ordre dans lequel le gouvernement nous propose l'adoption
de ces articles, de sorte qu'il ne resterait que quelques dizaines d'articles
importants, concernant la francisation des entreprises, par exemple. Tout le
monde le sait, tout le monde le dit, à partir de la commission Gendron;
même le ministre d'Etat, qui ne connaît pas grand-chose aux
entreprises, a admis que c'est là que se joue le sort de toute politique
linguistique au Québec, dans l'entreprise. On n'est pas rendu là.
On n'est pas rendu là. C'est à l'article 129. C'est totalement
injuste, Mme le Président, que de faire travailler cette commission
parlementaire sous cette menace de guillotine qu'on a depuis quelques jours et
maintenant avec cette certitude que ses travaux vont se terminer à onze
heures ce soir. Comment voulez-vous qu'on travaille sérieusement alors
qu'on veut passer à travers tous les articles de ce projet de loi?
Lorsque le leader du gouvernement invoque, comme tous les membres de ce
gouvernement l'ont fait, la rentrée scolaire pour bâillonner cette
Assemblée, bâillonner la commission parlementaire sur des articles
importants qui sont hors du chapitre de la langue d'enseignement, je l'avoue,
mais qui sont aussi au moins aussi importants, lorsque le leader du
gouvernement invoque la rentrée scolaire, je dis qu'il fait une erreur
grossière. Nous avons, depuis plusieurs mois, proposé au
gouvernement de scinder le bill, justement en voyant l'improvisation et
l'incohérence de ce gouvernement dans les travaux de cette Chambre. Nous
l'avons averti: Scindez le bill, adoptons la langue d'enseignement, adoptons
cela en priorité, et ensuite, on pourra la mettre en vigueur. Même
si on n'est pas d'accord avec le contenu, au moins le gouvernement traitera la
rentrée scolaire de façon juste et de façon
ordonnée. Il est encore temps, Mme le Président. Que ce
gouvernement et que le leader du gouvernement m'écoutent, que ce
gouvernement scinde le bill aujourd'hui, qu'il apporte un nouveau projet de
loi, les articles 68 à 83 étant adoptés, qu'il
présente cela demain et l'Opposition officielle fera en sorte qu'il soit
adopté dans la même journée, même si on vote
contre.
M. Burns: Words, words, that is all I hear.
M. Lalonde: Nous allons renoncer à tous nos droits de
faire un nouveau débat là-dessus et le gouvernement pourra s'en
aller avec sa langue d'enseignement, une loi complète, la mettre en
application et nous, de cette Assemblée, nous pourrons continuer
d'étudier le projet de loi 101 en toute sérénité,
peut-être même ajourner, si les députés et les
ministres sont trop fatigués, même s'ils reviennent de vacances,
même ajourner et revenir à l'automne et compléter
l'étude, mais en toute sérénité.
Cela peut prendre plusieurs autres semaines. Oui, cela peut prendre du
temps. C'est la conclusion du député de Maisonneuve tantôt.
C'est une loi importante. Justement parce que c'est une loi importante, il faut
prendre le temps qu'il faut pour l'étudier. Encore hier soir,
après une heure de débats, le gouvernement ne voulait rien
entendre. Il a suspendu le dernier article qu'on débattait à 10 h
50. Il a ouvert les yeux. Il s'est aperçu qu'il y avait un gros
problème. Il y avait un gros problème...
Mme le Vice-Président: M. le député, je vous
fais confiance. Je sais que vous démontrez habituellement beaucoup
d'habileté dans vos interventions. Tantôt vous avez fait
référence aux journaux pour parler de la commission
parlementaire, ce qui me semblait acceptable, puisque les journaux sont de
notoriété publique après que c'est publié.
Je vous demanderais d'être bien attentif à respecter le
règlement, M. le député.
M. Lalonde: Je n'ai pas écouté la radio ce matin,
Mme le Président, mais je suis sûr que devant l'incohérence
et l'improvisation du gouvernement hier, à la commission parlementaire,
cela devait être sur toutes les ondes.
M. Garneau: Oui, certain.
M. Lalonde: On m'assure ici, j'entends des voix qui disent que
cela a sûrement été sur les ondes, Mme le
Président.
Alors, en me rapportant à ces propos, apparemment tenus sur les
ondes, Mme le Président, à 10 h 50 hier, après une heure
de débats pour démontrer au gouvernement que la
confidentialité des dossiers médicaux était mise en
danger, en péril, par une disposition de ce projet de loi.
On s'est aperçu tout à coup, après avoir
joué aux jurisconsultes autour de la table, qu'il y avait un
problème. On a la guillotine au-dessus de la tête depuis deux
jours; elle va nous tomber sur la tête à 11 heures ce soir et,
hier soir, 24 heures avant, le gouvernement n'était même pas
prêt à adopter ce projet de loi.
D'autres rapports de journaux, M. le Président, je peux en
parler. On dit ici dans le Devoir, Michel Vastel, le mardi 23 août,
aujourd'hui: "Déposés aujourd'hui par M. Laurin, série
d'amendements sur la francisation des sièges sociaux". Le jour
même de la guillotine, le jour même où il nous demande
d'arrêter d'étudier, le ministre a le culot de venir nous
déposer des amendements dans un secteur extrêmement important pour
lequel on réclame, depuis des mois, une étude et un traitement
spécial de la part du gouvernement.
Mme le Président, si vous ne trouvez pas une telle motion
injuste, je l'ai dit, et ridicule un gouvernement qui ne sait même pas ce
qu'il va mettre dans ce projet de loi qu'il nous force à adopter
aujourd'hui, je ne sais pas comment qualifier le geste du gouvernement.
Cela a été dit dans les journaux et je vais vous le
répéter d'ailleurs. On a cité M. Ryan dans son
éditorial d'aujourd'hui, c'est le leader qui l'a cité. Dans son
éditorial, M. Ryan dit ceci: "En même temps qu'il
prétendait tendre une oreille attentive à la critique, il
excommuniait généreusement au passage, par l'entremise il
parle du gouvernement de M. Camille Laurin, de nombreuses voix qui
avaient eu le malheur de prendre au sérieux les appels de celui-ci au
dialogue. Il maintenait surtout, quant au fond, la position intransigeante,
doctrinaire et souvent fausse que définissait, dès le
début d'avril, le livre blanc sur la langue". C'est cela qu'on a depuis
trois semaines en commission parlementaire.
On dit que c'est de l'obstruction systématique; je dis que c'est
l'obstruction du gouvernement qui n'a pas été en commission
parlementaire de bonne foi. Je pense que le gouvernement a
démontré une mauvaise foi flagrante dans ce débat. Tous
ceux qui ont été témoins l'ont vu. Aucun amendement
même s'il ne touchait que la forme n'était reçu. Aucune
ouverture, aucun dialogue n'a été reçu à cette
commission parlementaire. Je vois ici des députés qui ont
vécu cette expérience que je ne qualifierai pas; je vois qu'ils
partagent comme moi le sentiment d'avoir été pris simplement en
otages. On a joué avec nous autres, on a fait une parodie de la
démocratie avec cette commission. Tout ce qu'on voulait, c'était
faire l'exercice pour la galerie, mais on n'était pas, de la part du
gouvernement, décidé à aller discuter d'un projet de loi
avec les représentants de 60% de la population pour le changer,
l'améliorer ou, enfin, pour en discuter ouvertement.
On a fait une parodie de cette commission parlementaire et, ensuite, je
comprends qu'on veuille y mettre fin, parce que cela commence à
paraître. A chacune de ses décisions, le gouvernement, lorsqu'il
s'en tient à une orthodoxie rigide souvent, ce sont des
décisions qui semblent mineures à un article bien
déterminé lorsqu'il fait preuve d'une rigidité
comme celle qu'on a vue à la commission parlementaire, s'isole de la
population.
Naturellement, il pense avoir la vérité absolue. Il a fait
un livre blanc qui n'en est pas un; c'est strictement un recueil noir, le plus
noir possible de la situation. C'est un tableau qu'on a voulu le plus sombre,
le plus alarmant possible pour commencer à faire le lavage des cerveaux,
à cuisiner l'opinion publique. Ensuite, on est arrivé avec un
projet de loi. Cela me rappelle une autre comparaison que le leader du
gouvernement vient de faire entre les deux débats, celui de la loi 22 et
le débat actuel.
Il a dit: Pour la loi 22, on a eu deux clôtures, actuellement, on
n'en a qu'une. Sûrement, pour la loi 22, il y a eu deux clôtures;
maintenant, on a eu un retrait de loi et une clôture. Pour qui le leader
prend-il les membres de cette Assemblée? Pense-t-il que nous allons
être dupes? Non seulement il aurait dû avoir le courage, lors des
débats de la première série de séances de la
commission parlementaire, d'y mettre fin par la clôture, mais non, il a
pris ce petit subterfuge qui a mis tous les travaux de cette Assemblée
dans le chaos le plus total.
Après ce livre blanc, après le projet de loi no 1,
après le retrait du projet de loi no 1, l'introduction, en plein mois de
juillet, d'un nouveau projet de loi, à ce moment-là, ce n'est
plus le projet de loi no 1, on recommence à zéro. Puisque cela
vaut la peine de retirer le projet de loi no 1 et de présenter le projet
de loi no 101, on doit, nous, comprendre que le débat a commencé
en juillet. Cela ne fait qu'un mois à peine, quelques semaines que nous
avons ce débat en Chambre. C'est faux de dire que le débat a
commencé avec le projet de loi no 1 puisqu'on l'a retiré. Le
gouvernement avait-il raison de retirer le projet de loi no 1? S'il avait
raison, c'est un nouveau débat.
Et on va nous accuser d'avoir fait de l'obstruction systématique
quand, après cinq ou six semaines de débats sur un projet aussi
important on a déjà traversé la deuxième lecture,
on a déjà accepté presque cinq chapitres, une quarantaine
d'articles et nous avons indiqué qu'on pourrait ac-
cepter, demain matin ou même tantôt, si le gouvernement en
propose l'adoption, plus de 140 ou 150 autres articles et il ne resterait que
quelques dizaines d'articles à discuter, mais des articles importants
pour la francisation des entreprises, et on va dire qu'on fait de l'obstruction
systématique? Je dis que le gouvernement est malhonnête
intellectuellement, complètement malhonnête d'ainsi, à
cause de son incohérence, de son improvisation, de son refus de
régler le problème scolaire comme il doit être
réglé, c'est-à-dire séparément, nous forcer,
nous bousculer, bousculer nos droits d'étudier article par article ce
projet de loi qui, je vous le dis, Mme le Président, au cas où
vous ne le sauriez pas, est mal écrit. C'est un mauvais projet de loi,
ne serait-ce que dans la rédaction juridique. Quotidiennement, toutes
les heures, on soulève des objections et le gouvernement, qui semble
meilleur dans la rédaction de romans que dans la rédaction de
lois, s'aperçoit, après une heure ou une heure et demie de
débats, quand on a commencé à leur ouvrir tranquillement
les oreilles et c'est long, il n'y a pas d'ouverture qu'il y a
peut-être quelque chose là. Il faut trouver une petite
brèche, chez les sept ou huit députés. Tout à coup,
il y a un oeil qui s'ouvre, une tête qui se relève, quelqu'un qui
semble commencer à comprendre. Là, il faut marteler nos arguments
constamment et, parfois, on a une petite ouverture. Ce projet de loi est mal
fait, Mme le Président, croyez-moi.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous allez devoir conclure.
M. Lamontagne: II est tellement bon! On est si peu nombreux ici
qu'on pourrait l'écouter encore.
Mme le Vice-Président: Vous avez environ une minute pour
conclure, M. le député.
M. Lalonde: Mme le Président, je ne veux pas mettre en
doute votre décision, mais je pensais avoir commencé à 11
h 35.
Mme le Vice-Président: 11 h 35, voilà. M.
Lalonde: II est midi.
Mme le Vice-Président: Je vous demande pardon. Vous avez
six minutes.
M. Lamontagne: Moins les interruptions, il reste dix minutes.
Mme le Vice-Président: Vous avez absolument raison, vous
avez six minutes, M. le député.
M. Lalonde: Ce n'est pas que je veuille prolonger le
débat, mais je vois ici de nouveaux députés, des
députés qui n'ont pas connu ce genre de manoeuvre du
gouvernement, ils sont de bonne foi. Je n'en nommerai pas, j'en regarde. Ils
sont de bonne foi et je sais que, de bonne foi, ils veulent améliorer
nos institutions démocratiques, ils veulent que cela fonctionne et ils
se posent des ques- tions. Ils se posent des questions surtout si, parmi eux,
certains ont participé aux débats de la commission parlementaire
et s'ils ont vu jusqu'à quel point cela a été difficile
pour l'Opposition de faire valoir son point de vue. Avec une présidence
en or, heureusement qu'on l'avait!
Mme le Vice-Président: M. le député, je
m'attends à ce que certains députés soulèvent des
questions de règlement.
M. Lalonde: Je sais que la présidence est indivisible, Mme
le Président, et je ne voudrais pas profiter de l'absence du
député de Prévost pour dire à son endroit les
quelques mots de reconnaissance que j'ai.
Mais je pense que l'occasion m'est quand même offerte et que c'est
fait. Donc, avec une présidence qui était, je pense,
magnifique...
Mme le Vice-Président: ... dans les journaux. Alors, vous
pouvez y aller, M. le député.
M. Lalonde: ... digne, vigoureuse et je ne veux pas que
mes propos soient interprétés négativement pour quiconque
d'autre une présidence qui nous a permis, malgré la
fermeture totale, l'hermétisme complet du gouvernement, de survivre
à ce débat.
Alors, je voudrais que ces députés qui sont nouveaux
fassent un geste démocratique, qu'ils s'aperçoivent que le
gouvernement s'est trompé, s'est trompé dans son organisation des
travaux de cette Chambre et qu'il est pris dans un cul-de-sac, qu'il est
obligé de mettre la clôture sur un projet de loi contre lequel il
n'a pas à mettre de clôture, c'est-à-dire qu'il voudrait
mettre la clôture seulement sur la langue d'enseignement. Mais que ces
députés fassent valoir cela au caucus et à leur
gouvernement pour qu'on puisse se rendre à l'article 219.
Je sais, Mme le Président, que vous allez me rappeler à
l'ordre. Mais je ne peux pas m'empêcher, lorsque j'ai cette
clôture-là au-dessus de la tête pour ce soir, de me souvenir
que jeudi soir dernier on avait encore des amendements griffonnés sur
des bouts de papier de la part du gouvernement. Les articles 23, 24, 25. Je ne
peux pas m'empècher...
M. Bisaillon: A l'ordre!
Mme le Vice-Président: Vous avez raison, M. le
député.
M. Lalonde: ... de me souvenir qu'hier encore...
M. Bisaillon: A l'ordre!
M. Lalonde: ... à deux reprises le gouvernement a
été obligé de changer d'idée. La radio en a
parlé.
Mme le Vice-Président: M. le député.
M. Lalonde: Je ne peux pas m'empêcher de lire ici dans cet
article du Devoir que le gouvernement a d'autres amendements pour les
sièges sociaux. C'est complètement ridicule. C'est rire du monde
que de mettre une clôture à une commission parlementaire qui n'est
même pas prête à adopter un proejt de loi. C'est un
gouvernement qui ne sait même pas ce qu'il va mettre dedans. C'est
injuste. Oui, injuste pour les Québécois qui voudraient qu'une
fois pour toutes contrairement à ce que le Parti
québécois a fait en 1974 un projet de loi sur la langue
soit examiné de fond en comble par leurs élus. C'est totalement
injuste pour les Québécois parce que je sais, je suis convaincu
que ce projet de loi contient des dispositions qui ne fonctionneront pas. C'est
mal écrit, c'est mal pensé, c'est mal conçu. C'est
injuste, c'est ridicule et je vous dis que ce genre de décisions
quotidiennes on en a pris tous les jours des décisions comme
celles-là hermétiques, doctrinaires, intransigeantes, des
décisions comme celles que le gouvernement nous propose de prendre
aujourd'hui isolent ce gouvernement de plus en plus, quotidiennement, de la
population. A chacune de ces décisions, et le gouvernement doit en
être conscient...
M. Burns: Ce n'est pas cela qui nous énerve le plus de ce
temps-là. Vous êtes pas mal plus nerveux que nous
là-dessus.
M. Lalonde: ... les Québécois se posent des
questions sur le gouvernement qu'ils ont élu. Je fais appel au
gouvernement pour avoir une ouverture plus grande parce que d'ici aux
prochaines élections il faut quand même qu'il gouverne, mais le
genre de gouvernement qu'on a en commission parlementaire est un gouvernement
qui va se retrouver tout seul dans le coin bientôt.
M. Burns: Cela fait longtemps que vous n'avez pas vu le peuple de
près.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Mme le Président, je vous informe que je ferai
une intervention au nom du parti.
M. Lavoie: Quel parti?
M. Grenier: Le parti qui est en Chambre ici. Famille qui prie,
famille unie. Regardez comme on a du monde.
Mme le Vice-Président: M. le député, cette
fois je prends bonne note de l'heure à laquelle vous avez
commencé.
M. Grenier: Je vous entends mal, pourriez-vous
répéter, Mme le Président ?
Mme le Vice-Président: Je disais que cette fois-ci je
prends bonne note de l'heure et je m'organise pour que ce soit lisible pour ne
pas vous interrompre avant le moment où vous aurez terminé.
M. Fernand Grenier
M. Grenier: Merci, Mme le Président. L'intervention
d'aujourd'hui sur la motion de clôture faite par un membre de l'Union
Nationale ne vient pas, bien sûr, dire les valeurs ou les failles de la
loi. Nous aurons une autre occasion de le faire. Je veux uniquement vous parler
de cette motion de clôture.
Inutile de vous le dire, on ne se cachera pas les mots, tout le monde
savait, c'était prévu, que le rouleau compresseur devait nous
tomber dessus un jour ou l'autre et on sentait que cela devait se produire
avant la fin du mois d'août.
Ce qui surprend, c'est d'entendre les déclarations. Je ne les
citerai pas, on les a tous présentes à la mémoire. Elles
n'ont pas été faites il y a deux ans. Elles ont été
faites il y a moins d'un mois, par des membres de l'équipe
ministérielle. Ce qui se passe dans la réalité, les
largesses dont nous a parlé le premier ministre ici relativement
à la loi 101 et ce qui nous arrive aujourd'hui avec cette motion de
clôture et ce qui s'est passé pendant l'étude de la loi
témoigne que ce qu'il y a eu à cette commission avec cette motion
de clôture qui nous arrive, c'était loin d'être de la
largesse.
On aurait aimé aujourd'hui, en tant qu'Union Nationale, pouvoir
continuer l'étude de ce projet de loi pour tenter de faire
fléchir le gouvernement sur certains aspects. Vous auriez
été presque scandalisée, vous connaissant comme je vous
connais, Mme le Président, de voir les discussions qui se sont produites
à la commission sur ces largesses du gouvernement qui sont produites et
que nous aimerions corriger si le gouvernement voulait bien nous permettre de
continuer l'étude qu'on est en train de clore aujourd'hui.
Ces amendements que nous avons apportés ici et qui ont rendu,
j'imagine, service au gouvernement de même qu'à l'Opposition
officielle et aux media d'information, à cause de leur publication avant
le début de l'étude du projet de loi, ont rendu service à
pas mal de monde. Je pense que c'est faire une opposition constructive, une
opposition capable de suggérer des choses au gouvernement.
Nous avons fait des amendements que nous aurions aimé continuer
à étudier plus loin qu'aujourd'hui. L'Union Nationale n'est pas
pressée. Elle n'était pas pressée dans l'étude de
ce projet de loi et je pense qu'on ne pourra pas nous accuser d'avoir fait de
l'obstruction. La position que nous occupons dans cette Chambre, soit la
troisième, venant après le gouvernement et l'Opposition
officielle, nous permet d'intervenir en troisième lieu. Inutile de vous
dire qu'on fait éplucher nos recommandations, nos suggestions, nos
propositions, mais c'est acquis d'avance.
Nous aurions aimé, Mme le Président, pouvoir continuer de
faire ces propositions, si minimes soient-elles; même si parfois elles
sont prises par le gouvernement ou prises par l'Opposition officielle, nous
aurions aimé continuer de les faire. Les amendements que nous avons
apportés, que ce soit l'amendement secondaire, l'amendement
légal, l'amendement à l'article 25 ou l'amendement
à l'article 77, sont des amendements qui étaient beaucoup
plus humains que légaux. C'est cette sorte d'amendements que nous
voulions continuer d'apporter au cours de l'étude de cette loi.
Je comprends mal que le gouvernement ait décidé de mettre
la hache dans l'étude de la loi. On pourrait peut-être, comme
certains journalistes qu'on a cités tout à l'heure,
prétendre qu'il y avait de l'obstruction momentanée. C'est
possible, mais je pense qu'étant donné le lot d'articles, le lot
de titres de chapitres qui ont été étudiés, il y a
eu pas mal de bonne foi de la part de l'Opposition.
Je dois vous dire, Mme le Président, qu'il y a eu
amélioration considérable sur ce qu'était l'Opposition
à la loi 22. Je peux témoigner de ma personne. J'ai suivi les
débats de la Chambre. Il y a eu amélioration considérable
de l'Opposition, en ce qui nous concerne faisant des suggestions au
gouvernement et ne mettant pas uniquement du sable dans l'engrenage, des bois
dans les roues.
On a proposé au gouvernement des choses qui pouvaient lui rendre
service en rendant service à la population du Québec. Cela a
été notre façon d'intervenir dans le débat qui se
continue en bas jusqu'à 11 heures ce soir. Mme le Président, je
demande au gouvernement de surseoir à sa décision de
clôturer les débats ce soir, de surseoir sur une loi aussi
importante que la loi 101 et de nous donner le temps de continuer.
L'Union Nationale n'est pas allée en vacances, Mme le
Président. On n'a pas joué à la chaise musicale en bas; on
ne s'est pas remplacé d'une semaine à l'autre. Il y a eu de la
continuité de la part de l'Union Nationale sur les deux sièges
que nous occupions à la commission sur le projet de loi 101. On ne s'est
pas tanné d'étudier. Ce n'est pas nous qui avons apporté
un projet de loi au mois de juillet, mais on est prêt à sacrifier
nos vacances, l'été est passé, pour continuer à
l'étudier, ce projet de loi 101. Il y a des failles dans ce projet de
loi et il y en a de considérables. Ce ne sont pas seulement des failles
sur le plan législatif, à cause de mauvais mots ou de mots mal
utilisés. Il y a des failles et on passera pas mal de temps à le
corriger une fois qu'il sera voté.
On aurait voulu continuer de participer à ces débats. Vous
avez noté, depuis la reprise de la session et pendant l'étude du
projet de loi 101, la présence continuelle de toute l'équipe de
l'Union Nationale, sauf pour notre député de Johnson qui est
malade. Vous avez noté la présence complète des
députés de l'Union Nationale ici et l'intérêt qui a
été manifesté. Je peux vous dire...
M. Burns: II y a le député de Pointe-Claire qui
s'absente parfois.
M. Shaw: Question de privilège, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
privilège, M. le député de Pointe-Claire.
M. Shaw: Je peux constater qu'aucun député n'a
travaillé plus en Chambre que moi, même pas vous.
M. Grenier: Mme le Président, le leader parlementaire
continue les tactiques qu'il a apprises pendant qu'il était dans
l'Opposition il ne s'est pas encore recyclé, il ne sait pas qu'il
est au pouvoir de couper les discours des personnes quand cela devient
trop critique. Je ne lui en fais pas reproche: c'est entendu que cela prend un
certain temps à se recycler. L'an prochain, cela ira pas mal mieux; il
réalisera qu'il est même ministre à deux secteurs.
M. Burns: M. le député, puis-je vous poser une
question?
M. Grenier: Oui, cela me fait plaisir, pourvu que ce ne soient
pas des crocs-en-jambe; je vous connais trop.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mégantic-Compton, vous acceptez la question?
M. Grenier: Oui, mais que ce ne soit pas pris sur mon temps.
M. Burns: Seriez-vous bien déçu, M. le
député, si je retirais ma motion?
M. Grenier: Mme le Président, je vais vous dire que nous
de l'Union Nationale et je vous livre un petit secret; j'aurais envie de
ne pas vous le dire fort pour éviter que tout le monde ne comprenne
on a demandé à nos députés j'exclus
le député de Gaspé, mais il y a des pères de
famille qui ont des enfants s'ils étaient prêts à
sacrifier les vacances d'été avec leur famille. Je peux vous dire
que je les ai sacrifiées. L'école recommence la semaine prochaine
et je n'ai pas pris de vacances et je n'en prendrai pas. A partir de
maintenant, le plus dur est passé. Au mois de septembre, on peut
siéger; c'est pourquoi je demande au gouvernement de surseoir à
la motion. Je vous dis que je suis prêt si on voulait continuer et
collaborer non pas à sens unique, alors que le gouvernement n'accepte
à peu près pas les propositions qu'on fait. Il faudrait que le
gouvernement accepte nos propositions de temps en temps. C'est déprimant
en bas, madame. Vous ne le saviez pas, n'est-ce pas? Etes-vous contente de
l'apprendre? C'est déprimant de travailler en bas. Rien n'avance, le
gouvernement n'accepte rien. Il a accepté deux motions je vous le
dis, cela va vous édifier qui venaient de l'Opposition et,
encore, il les a transformées pour qu'elles viennent du gouvernement. Il
y en a une qui est très large. Je vous le dis parce que cela avance les
débats et que cela nous permettrait de retarder la clôture. Ce
furent des pas importants. Hier soir, on a permis à l'hôpital juif
de Montréal, en plus de s'appeler l'Hôpital général
des Juifs, si vous voulez, de pouvoir mettre en anglais, en bas entre
guillemets, "General Jewish Hospital". Il a permis cela hier soir, une largesse
dont parlait le premier ministre.
M. O'Neill: C'est bon! C'est généreux.
M. Burns: Vous voyez qu'on est prêt à accepter des
amendements. L'esprit ouvert, c'est cela.
M. Grenier: II y a trois jours, il a fait bien mieux que cela,
Mme le Président. C'est ce qui nous permet de continuer les
débats pour que la clôture n'arrive pas.
Mme le Vice-Président: A l'ordre!
M. Grenier: Mme le Président, je vous parle d'amendements
qui sont arrivés et qui nous permettent de pouvoir continuer les
débats. A l'article 25 et à l'article 77...
Mme le Vice-Président: M. le député, vous
savez fort bien que je suis tenue de vous rappeler à l'ordre à ce
moment-ci. On peut toujours essayer.
M. Grenier: Merci, Mme le Président. Je sais que je n'ai
pas le droit de parler des articles du projet de loi, c'est bien
évident. C'est l'objet de la deuxième lecture, ce n'est
même pas l'objet de la troisième lecture. Mais comme je voudrais
illustrer par des exemples, il faut quand même que je prenne mes exemples
à la commission. Je ne peux quand même pas prendre des exemples au
sujet de l'organisation politique dans mon comté.
Il faut quand même que je prenne mes exemples à la
commission, je ne peux quand même pas prendre des exemples si je fais de
l'organisation politique dans mon comté. Je vous donne un exemple et
tout de suite je reviens, mais cela va vous donner des lumières
suffisantes pour permettre peut-être à une bonne partie de
l'équipe ministérielle de voter avec nous.
On a proposé un amendement, Mme le Président, et
celui-là est accepté par le gouvernement, c'est certainement la
largesse dont parlait le premier ministre: les immigrants qui vont arriver au
Québec handicapés, les sourds-muets vont pouvoir parler anglais.
Elle est bonne, hein? C'est un amendement cela, c'est une largesse du
gouvernement, les sourds-muets vont avoir le droit de parler anglais, et c'est
sérieux cela, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le député, vous
savez bien que je dois vous rappeler à l'ordre.
M. O'Neill: C'est bon!
M. Grenier: Comme vous voyez, c'est important de continuer les
débats, on réussit des amendements fort importants.
M. Goulet: 26 heures de travail.
M. Grenier: Cela a été renversé et
même le gouvernement avait peur parce que ces gens votent, ils n'ont pas
pu être contre cela. Si ces gens n'avaient pas voté, il serait
arrivé le même sort qu'aux juges anglophones, Mme le
Président, et il faudrait la débattre encore si la commission
continue, si on ne nous impose pas la clôture.
Mme le Vice-Président: M. le député, je dois
vous rappeler à la pertinence du débat.
M. Grenier: Mme le Président, il faut vous dire quand
même que le débat qui se mène en bas présentement
est un débat à sens unique, et on aimerait quand même en
faire prendre connaissance par les media. Les media ne sont pas nombreux, ils
vont lire mon intervention. Les journalistes sont larges et ce sont
d'après ce que je connais d'eux de bons professionnels du milieu
et des gens fort compréhensifs qui sont prêts à pardonner
pas mal de choses au gouvernement, parce que le gouvernement commence. On sait
que dans une course comme celle qu'entreprend le gouvernement, une course
supposément de quatre ans, il y a une espèce de "sprint" au
départ. Les journalistes, les gens des media d'information sont
prêts à donner une chance au gouvernement, et on le voit aussi. Je
suis d'accord avec cela, qu'on donne une chance à un gouvernement qui
commence son mandat.
Je suis d'accord même qu'on accepte certaines erreurs d'un
gouvernement qui commence, et à plus fortes raisons d'un gouvernement
dont la composition est faite à presque 90% de gens qui n'ont pas
siégé en Chambre. Ce n'est pas un défaut, cela. On n'a pas
reproché au gouvernement de faire certaines erreurs, cela va avec cela.
Mais copier les erreurs de l'ancien gouvernement, je ne pardonne pas cela. Il
n'a 'pas le droit de faire cela, Mme le Président. Il l'a trop dit
à la population. Bonnet blanc et blanc bonnet. Il a trop dit qu'il y
aurait du changement. Quand je voyais tout à l'heure analyser, par le
leader parlementaire, le nombre d'heures, c'était la course à la
montre, il fallait absolument dépasser en heures ce que l'ancien
gouvernement avait fait avec la loi 22. Mais ce n'est pas cela qu'il a dit
à la population.
Ce gouvernement a vendu à la population qu'il y aurait des
changements en profondeur quand on aurait changé le gouvernement. J'y
crois encore. Je veux lui rappeler de temps en temps qu'il nous a dit cela,
c'est la salade qu'il nous a vendue. Mais quand on parle de motion de
clôture, cela ressemble à l'ancien gouvernement. Pourquoi la
motion de clôture est-elle là, ce matin? On a collaboré,
Mme le Président, vous n'avez pas été témoin des
débats. C'est moi qui ai proposé, au nom de l'Union Nationale, de
sauter des chapitres et d'en arriver à la loi de la langue de
l'enseignement pour permettre la rentrée scolaire à
Montréal. Cela, c'est de la collaboration que j'appelle, en
français. On est sauté à l'article pour permettre la
rentrée scolaire planifiée. Cela a été
accepté par le gouvernement et par l'Opposition officielle.
On a également proposé hier soir d'adopter la francisation
des entreprises, sentant la guillotine qui nous arrivait. C'est de la
collaboration. On vous demande ce matin de remettre l'article. Pour
répondre au leader, oui, on serait contents, nous, de l'Union Nationale,
de continuer d'étudier ce projet de loi 101, d'adopter les mesures en
question.
Je ne comprends pas cette course à la montre. Par
réglementation, on peut régler la partie difficile à
Montréal pour la rentrée scolaire. Je ne comprends pas que cela
presse tant de passer la loi. C'est bien sûr qu'on a hâte que cela
finisse. On a vu l'exemple de la loi 63 d'un gouvernement qui s'est fait
battre, et j'étais de ceux-là. On a vu la loi 22, par le
gouvernement qui s'est fait battre, il y a deux lois qui sont arrivées
à la toute fin d'un mandat. Et là, on adopte au début d'un
mandat pour faire oublier l'odieux qu'il y avait dans une loi comme
celle-là. C'est comme cela qu'on arrive avec une guillotine, il faut en
finir parce qu'on sait que le public en a assez, comme l'a dit tout à
l'heure le leader parlementaire. Il en a assez de les entendre parler de la
langue et il dit: Qu'on passe à d'autres choses, qu'on passe à
des projets de loi à portée économique.
Si vous aviez entendu, Mme le Président, le ministre d'Etat au
développement culturel qui a passé la moitié de son temps
à nous affubler d'épi-thètes et il n'a été
capable de rien sortir. Si on avait passé moins de temps à
affubler l'Opposition de tous les titres, tous les qualificatifs, on aurait pas
mal plus d'articles de votés.
J'ai été témoin, Mme le Président, que le
premier ministre nous a dit qu'il n'y aurait pas de "bulldozage", mais c'est du
"burnsdozage" qu'on a cette année. Cela a changé pas mal, mais
cela revient à la même chose. On ne peut plus continuer
d'étudier notre loi ce soir. Il y aurait de la bonification à
apporter à cette loi. Il y aurait des changements qu'on pourrait
apporter. On n'en sera pas capable parce qu'on manquera de temps. Cela a
été difficile parce que le gouvernement s'est acharné. Les
motions qu'on a apportées, les amendements qu'on apportait
étaient des amendements, à mon sens, sérieux, à
plusieurs reprises. Dans cela, il y avait des irrecevables, des non-recevables,
il y avait des reçues-rejetées, des prématurées et
des caduques. C'est ce que nous avons fait de ce livre-là.
Le blâme n'est pas rejeté sur la présidence, je le
dis encore une fois, Mme le Président, nous avons un président,
en bas, qui remplit son rôle de président, qui protège
l'Assemblée nationale et de façon particulière
l'Opposition. On doit lui rendre hommage. Je pense que si on change
d'étage c'est la même chose ici dans cette Chambre, ce qui se
passe. Peu importe qui représente la présidence, c'est ce qui se
passe à la commission sur la loi 101. De ce côté-là,
il n'y a aucune difficulté et vous l'avez compris.
Les journaux sont prêts, Mme le Président, à
pardonner pas mal de choses au gouvernement, à passer l'éponge
sur les erreurs qui peuvent être faites, ils sont capables de passer
l'éponge sur des déclarations du premier ministre qui dit: On va
être large. On va être humain. On n'a pas les deux pieds dans le
ciment. Ce sont les paroles du premier ministre. J'aimerais, Mme le
Président, qu'on prolonge l'étude de la loi 101 et qu'on vienne
voir ce que c'est que d'avoir les deux pieds dans le ciment. Ce n'est
peut-être pas dans le ciment, mais le ministre d'Etat au
développement culturel les a dans le plâtre et cela ne bouge pas
plus quand on est serré là-dedans. Il n'y a rien de
sérieux qui est accepté qui vient de l'Opposition. Je pense que,
si on laissait porter, dans le public, l'étude de la loi 101, cela
deviendrait gênant pour le gouvernement. Là, on serait
peut-être obligé d'accepter des amendements.
Mme le Président, en ce gouvernement j'ai pas mal d'espoir
encore, je dois vous le dire. M. le député de Saint-Jean est en
mesure de témoigner de ma sincérité. C'est un gouvernement
en qui j'ai pas mal d'espoir et à qui on veut donner des chances aussi,
ne pas mettre de sable dans l'engrenage encore une fois, avec lequel on veut
collaborer quand c'est possible. Je pense que jusqu'à maintenant nous en
avons fait la preuve. Par l'appui que nous avons donné, parfois
même sans réserve, mais on voudrait que le gouvernement
réponde. On ne collaborera pas à sens unique, ce n'est pas vrai.
On voudrait que le gouvernement réponde parfois à nos demandes.
La demande qu'on fait ce matin c'est de continuer l'étude de la loi 101
en commission. Je demanderais au leader de revenir sur sa décision et
permettre l'étude en commission. Est-ce que cela décevra des
gens? Je pense que les premiers qui seraient déçus ce sont
peut-être les ministériels qui vont être obligés de
continuer les vacances à la chaise musicale, mais cela ne nous
dérange pas, on est présents. Quand on est un gouvernement et
qu'on décide de présenter des lois comme cela, on pourrait
décider aussi d'être à l'ouvrage. On a signalé cela
quelquefois et on fait des gorges chaudes de l'autre côté. Oui, on
doit être à l'ouvrage quand on propose des lois de ce
genre-là. On doit être ici en Chambre et endosser les lois. Je
n'accepte pas, Mme le Président, qu'on vote en troisième lecture
cette loi cette semaine alors qu'il manque cinq ou six députés
ministériels et cinq ou six ministres. Je n'accepte pas cela comme
Opposition. C'est cela qui va se produire. Qu'on appelle à Ogunquit et
qu'on fasse venir le monde. En troisième lecture, les gens doivent
s'impliquer du côté du gouvernement. Ils doivent voter cette loi
et ils doivent être là. Nous serons ici, nous. Elle est trop
importante. Surtout eux, Mme le Président, du gouvernement
péquiste, doivent être ici pour voter leur loi.
Ils devraient être ici aussi pour nous aider à apporter des
amendements qui vont correspondre davantage à la réalité
québécoise. Avec cette motion de clôture qui nous arrive,
quand j'entends j'aimerais qu'on continue de le redire, cela va finir
par sonner faux qu'enfin on donne une loi qui correspond aux
Québécois, qui correspond à une majorité, il
faudrait commencer par déterminer la majorité là où
elle se situe. Avec le projet de loi que nous avons là, je n'aime pas
mieux les Anglais que les Français. Ce qu'on veut, c'est une loi pour
les Québécois et non pas une loi qui ressemble à la
France. Vous avez été témoin, je l'ai rappelé
à la commission, comment cela a été surprenant, lors du
voyage qu'on a fait aux frais de la reine, de voir les différences qu'il
pouvait y avoir dans un pays aussi français que la France. On peut bien
se servir d'exemple qui viennent de là, si cela peut nous aider; on peut
bien se
servir de l'Angleterre, mais on n'est pas une population anglaise, on
n'est pas une population française. On est une population
québécoise. Je veux qu'on garde notre identité. C'est
à cette image que doit ressembler le projet de loi no 101, l'image des
Québécois. C'est cela qu'on veut amener, la bonification de la
loi, la faire ressembler davantage à la collectivité
québécoise.
Il y aura toujours des gens des deux côtés de la Chambre
qui aimeraient que notre projet de loi tienne compte davantage de
l'élément anglophone qui a composé le Québec. Et un
autre élément qui voudrait qu'on tienne compte de la
majorité francophone qui compose le Québec. Mais il y aura
toujours des gens entre deux, par exemple, capables de penser que cette
communauté est composée de deux groupes et qu'on doit tenir
compte de cela.
L'étude du projet de loi no 101 doit continuer pour tenir compte
de la réalité québécoise davantage et permettre
comme le disait le député de Saint-Laurent, je pense, dans
un excellent discours qu'il a fait en Chambre et que j'ai eu le plaisir de
relire aux députés qui n'ont plus de contact avec leur
population, depuis plus d'un mois... Mme le Président, c'est
gênant, je dois vous dire qu'à cause de la rapidité des
travaux qui se font ici, je pense que je n'ai pas rencontré deux
électeurs de mon comté depuis deux mois. Cela est gênant,
un aveu comme cela. Puis continuez de nous dire qu'on fait d'excellents
députés! Non, pas comme cela. Le député est ici
pour rendre compte d'une réalité, celle de son comté.
Actuellement, je ne sais pas de quelle couleur sont les gens de mon
comté, face au projet de loi no 101. J'aurais aimé continuer
d'avoir une journée ou deux par semaine pour aller prendre le pouls dans
mon comté, auprès de mes électeurs et revenir ici. On a
l'air des poissons dans un aquarium, on a toujours le même oxygène
ici. On finit pas penser que ce qu'on pense, c'est cela la
réalité québécoise. C'est faux, il faut retourner
dans notre comté, retourner aux sources de temps en temps pour savoir ce
que pensent nos électeurs. On n'a plus l'autorisation depuis que...
M. Michaud: Samedi et dimanche, c'est disponible.
M. Grenier: On était en Chambre, le samedi, si vous ne le
saviez pas vous. Je vais vous dire cela.
M. Michaud: Le dimanche.
M. Grenier: Le dimanche on est avec notre famille pendant
à peu près les trois heures qu'il nous reste avant de s'en venir
à Québec le dimanche soir cela ne vous est pas
arrivé à vous pour être ici à 10 heures le
lundi matin. Vous apprendrez cela. Je me suis battu contre cela en Chambre,
j'ai toujours voté contre cela. Je vais vous dire une autre petite
chose, Mme le Président, c'est une intervention de trop celle-là.
J'étais revenu pour voter contre cette motion, puis c'est nous autres de
l'Opposition qui avons fait quorum en bas, le lundi 8 août. Il est
peut-être bon que vous le sachiez.
C'est pour cela, Mme le Président, que je voudrais qu'on
continue. Le sérieux en bas depuis la motion de guillotine qui est
arrivée, il est fait par ce côté-ci de la table, pas par
l'autre côté dans les présences.
Mme le Vice-Président: M. le député...
M. Grenier: Je m'excuse, c'est la réalité, il
manquait la semaine passée quatre députés du
gouvernement...
Mme le Vice-Président: M. le député, je dois
vous rappeler à l'ordre, vous le savez fort bien, M. le
député.
M. Grenier: Mme le Président, je termine là-dessus.
Les gens qui me connaissent en face et ceux qui me connaissent ici, savent que
je me colle à la réalité autant que je le peux, et
à la vérité aussi. Je voudrais bien qu'on arrête de
prêcher la vertu et pratiquer le vice. Je veux qu'on arrête des
deux côtés de la Chambre de dire une chose et faire l'autre.
Prenez donc la parole sur ce projet de loi, si vous voulez parler au lieu de ce
que vous faites là. Quand j'entends quelqu'un du gouvernement venir nous
dire qu'ils vont être larges, qu'ils vont être humains, et qu'on ne
voit rien d'aussi restrictif que ce qu'on subit en bas, je voudrais bien qu'on
arrête de dire une chose puis de faire l'autre. Et que cela se fasse des
deux côtés de la Chambre, une fois pour toutes.
Est-ce que j'irai un jour de ce côté? C'est possible. Mais
je veux vous dire une chose, et je veux que vous preniez une note, ce matin,
Mme le Président. Si je ne continue pas d'être celui qui vous
parle aujourd'hui, je veux que vous me le reprochiez, parce que vous serez
peut-être là, vous encore. Je veux que vous me le reprochiez,
à ce moment. Je voudrais bien que les gens soient plus honnêtes
quand ils sont en Chambre et qu'ils arrêtent de dire une chose d'un
côté et le contraire de l'autre bord.
La motion de clôture de ce matin n'est pas plus drôle faite
par le gouvernement du Parti québécois que faite par l'ancienne
équipe. Elle n'est pas plus drôle; elle l'est encore moins parce
que les gens ont pensé qu'ils changeraient des choses et ils ont
rêvé en couleur. Plus ça change, plus c'est pareil! C'est
ce qui arrive dans bien d'autres secteurs dont je n'ai pas le droit de parler
ce matin, parce que cela ne fait pas partie de la motion.
Plus ça change, plus c'est pareil! C'est ce qui nous
déçoit et c'est ce que je rappelle au gouvernement ce matin. Je
lui demande de se replacer sur la "track". Il sait ce que cela veut dire. Je
lui demande aussi de revenir à la confiance qu'on a mise en eux, en
chacun d'eux. Que les députés ministériels qui sont ici le
disent aux membres du cabinet de revenir aux politiques
préconisées par ce gouvernement. Encore une fois, je dirai oui
à ce monde, à ceux qui peuvent le faire.
Un rôle d'Opposition, c'est intéressant. Cela
ne me fait rien de siéger dans l'Opposition si on réussit
à aiguillonner le gouvernement à faire des choses en vue du
mieux-être des Québécois. Cela ne me fait rien de
siéger dans l'Opposition. Cela ne me fait rien de préparer un
livre bleu pour bonifier une loi, mais qu'on donne aux Québécois
ce qu'ils demandent, qu'on réponde à leurs exigences. Qu'on y
réponde par un gouvernement du Parti québécois, de l'Union
Nationale ou du Parti libéral, je m'en fous, mais qu'on leur donne ce
qu'ils veulent avoir! Qu'on ne biaise pas! Je demande au gouvernement de ne pas
biaiser. Ce n'est pas correct, ce qu'on fait ce matin. Ce n'est pas correct,
cette motion de clôture. Ce n'est pas ce qu'on avait dit et ce n'est pas
cela que les gens croyaient non plus. Qu'on laisse aller les choses. C'est
tannant, parfois, d'écouter l'Opposition: cela peut sembler du
"filibuster", mais qu'on laisse aller les choses, qu'on épuise le sujet.
On arrivera avec d'autres amendements qui seront peut-être bien valables.
Il s'en fait, du côté de l'Opposition libérale, des
amendements sérieux; il faut avoir été là pour le
comprendre. Il s'en fait de l'Union Nationale aussi, des amendements
sérieux.
Je demanderais en terminant, Mme le Président, puisque vous allez
vous lever, au gouvernement de comprendre le sens de mon intervention. C'est
vrai, ce matin, quant à cette motion, mais c'est aussi vrai dans
d'autres secteurs dont je ne peux pas parler, encore une fois. Je demande au
gouvernement de réfléchir sérieusement, de s'arranger pour
avoir notre appui. Il va l'avoir, de ce côté-ci de la Chambre,
quand il va faire des choses qui correspondent à notre
réalité. Cela ne correspond pas à un besoin; c'est une
formule usée, dépassée et désavouée des deux
côtés de la Chambre, la motion de clôture. Qu'elle soit
faite par un ministre ou par l'autre, c'est désavoué et c'est
périmé. Personne ne veut en entendre parler. C'est brimer un
droit de parole dont on abuse parfois, mais le jeu de la démocratie,
c'est cela.
Je vous prierais, Mme le Président, de faire savoir à
notre leader du gouvernement que nous lui demandons de surseoir à sa
décision. Vous continuerez alors d'être édifiée
puisque la présidence est quand même une de la
participation de l'équipe de l'Opposition tant libérale que de
l'Union Nationale; notre présence, notre participation en bas est
toujours positive. Je voudrais qu'on permette à cette commission de
continuer de siéger. Cet appel, je le fais au nom de notre parti, mais
soyez assurés qu'il correspond à la partie de la population que
nous représentons ici et qui s'est opposée au gouvernement lors
de l'élection. C'est ceux-là que nous tentons de
représenter ici afin de faire valoir leurs volontés.
Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Noël Saint-Germain
M. Saint-Germain: Je dois vous dire, personnellement, que je suis
énormément déçu de cette motion que nous avons
à étudier aujourd'hui.
Cette motion est présentée par un gouvernement qui
s'aperçoit qu'il a commis des erreurs fondamentales et qui se sent
obligé de revenir à des priorités qui sont plus en
relation avec les besoins du Québec d'aujourd'hui. Tôt ce
printemps, le gouvernement a établi ses priorités. Le
gouvernement nouvellement élu, sans expérience de la chose
publique, qui sortait d'une élection qu'il avait gagnée en
flattant et en passionnant à la limite les sentiments nationalistes du
Québec, s'est senti obligé, en tout début d'année,
de modifier profondément la loi linguistique en application dans cette
province.
Il aurait été sage, et c'est sans doute ce que des hommes
d'expérience auraient fait, il aurait été sage, dis-je,
pour ce gouvernement, d'observer l'application de la loi 22, de se familiariser
avec les champs d'activité où une loi linguistique doit
nécessairement s'appliquer par l'entremise de la régie. Le
ministre des Affaires culturelles aurait pu se rendre compte d'une façon
pratique de l'évolution de la loi 22, des réactions qu'elle
suscitait, positives ou négatives, il aurait pu se familiariser avec le
monde des affaires, de la finance, des sciences, des universités, des
hôpitaux, des services sociaux et ainsi de suite, et cette
expérience du nouveau gouvernement se serait nécessairement
reflétée lorsqu'on aurait voulu modifier la loi linguistique.
Ce laps de temps et cette expérience acquise auraient pu servir
aussi au ministre de l'Education qui acceptait des responsabilités
nouvelles. Il aurait pu, avec le temps, et en fait, étudier la situation
scolaire, la situation de la langue à ce niveau.
Mais comme je le disais, le gouvernement avait fait son lit. Il avait
établi ses priorités et il croyait nécessairement que
c'était là le voeu de la province et que c'était le
problème le plus important auquel faisaient face les citoyens du
Québec. Dans son inexpérience, il n'avait pas prévu la
situation du chômage aujourd'hui. Il n'avait pas prévu nos
difficultés dans nos relations de travail qui sont d'une importance
fondamentale. Il n'avait pas prévu de services aux personnes
âgées. Il n'avait pas prévu les difficultés qu'on a
actuellement au niveau des universités du Québec et à
l'Université du Québec entre autres. Il n'avait pas prévu
la réticence des investisseurs. Il n'avait pas prévu la situation
économique qui se détériorait en Amérique en
général...
Mme le Vice-Président: M. le député, il ne
m'apparaît pas évident à l'heure actuelle que vous parlez
sur la motion. Peut-être avez-vous l'intention de le faire?
J'espère que vous allez le faire très bientôt.
M. Saint-Germain: Certainement, madame. Je crois que je suis en
plein dans le sujet car si le gouvernement propose cette motion, c'est que le
gouvernement s'aperçoit que la province de Québec est
actuellement fatiguée d'entendre parler de langue. Les citoyens du
Québec qui ont des difficultés actuellement et qui font face
à des problèmes importants sont fatigués d'entendre parler
de la langue.
M. Goulet: Mme le Président, j'invoque le
règlement.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse sur la question de règlement.
M. Goulet: Je ne sais pas si, avec la nouvelle motion d'hier, les
règlements sont changés, mais au moment où je vous parle
nous n'avons pas quorum.
Mme le Vice-Président: Nous allons vérifier
immédiatement le quorum, M. le député. Un moment.
Voulez-vous compter les députés? A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Je disais que sous la pression de l'opinion
publique, le gouvernement sent pertinemment qu'il est obligé de mettre
fin à ce débat pour faire face aux problèmes plus urgents
et auxquels a à faire face le citoyen ordinaire du Québec. Ce
gouvernement aurait facilement pu, après s'être donné
quelques mois d'observation, s'apercevoir que si, pour la rentrée des
écoles au mois de septembre, il était important de modifier le
chapitre de l'éducation relativement au projet de loi 22, il aurait eu
tout le temps voulu.
La preuve en est faite puisqu'on a déjà
étudié ce chapitre article par article au niveau de la
commission. Il aurait pu facilement modifier notre loi linguistique de
façon à faire disparaître les tests que la population ne
voulait plus accepter, et je dis bien la population en général,
comme ceux qui sont responsables dans le domaine de l'éducation.
Le gouvernement aurait pu facilement limiter ses études au point
de vue linguistique à ce chapitre très particulier, et ceci se
serait fait sans difficultés, sans embourber les travaux de cette
Chambre. Cela aurait donné amplement le temps au gouvernement
d'étudier les lois dont on a un urgent besoin et de faire face aux
problèmes réels du Québec en ce moment. Malheureusement,
il a voulu prendre le champs d'activité en entier. Par son
inexpérience, il est arrivé avec une loi excessivement complexe,
excessivement autoritaire qui va demander énormément de
fonctionnaires, d'argent dans son application, qui va créer de terribles
injustices, qui crée un climat lourd dans cette province, un climat qui
est au détriment de la bonne évolution des choses au
Québec.
Les citoyens sont fatigués, Mme le Président, d'entendre
parler de langue. Nous voilà avec le bâillon. Quel sera le
résultat de ce bâillon? Le résultat sera que la loi, dont
des chapitres entiers n'ont pas été étudiés article
par article, sera appliquée comme telle. Chaque député,
comme la population d'ailleurs, sait pertinemment qu'il y a des articles qui
devraient être longuement discutés dans cette loi, des articles
qui devraient être modifiés d'une façon substantielle. Tout
ceci, à cause de la complexité de la loi qui a au-delà de
200 articles, demande du temps.
Si le gouvernement est honnête, si le gouvernement veut bien qu'on
cesse en cette Chambre de parler de langue, et ceci à la demande de la
population, pourquoi ne scinde-t-il pas le projet de loi? Pourquoi
n'accepterions-nous pas, dans un nouveau projet de loi ou dans un projet de loi
scindé, le chapitre de l'éducation? Après ceci, on aurait
tout le temps en commission pour étudier le projet article par
article.
Si on finissait cet automne ou tard cet automne ou même si on
finissait au printemps, quels en seraient les inconvénients?
Mme le Vice-Président: Je me vois tenue à vous
inviter à conclure, M. le député.
M. Saint-Germain: On pourrait étudier au niveau de la
commission pendant plusieurs mois sans inconvénient pour les travaux de
cette Chambre, et on pourrait en toute tranquillité étudier ce
projet article par article. Je crois que c'est une nécessité,
dans l'intérêt de tous les citoyens du Québec, qu'on ait
l'occasion d'aller au fond des choses, Mme le Président.
J'espère bien que le gouvernement, y pensant une deuxième
fois, retirera cette motion et qu'on pourra, dans l'intérêt des
citoyens du Québec, continuer à étudier cette
législation comme elle doit l'être. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, Mme le Président. Avec votre permission
je discuterai très brièvement la motion qui est devant nous.
Il est vrai que les députés, je dirais même la
plupart des députés, tel que mentionné dans certains
journaux de ce matin, rêvent de vacances, Mme le Président. Je les
comprends et je suis de ceux-là. Après avoir fourni 80 à
90 heures de travail par semaine je pense que c'est à peu
près la somme de travail que fournit un député,
possiblement un ministre en fournit-il encore davantage c'est normal que
tout le monde rêve de vacances, que ce soit de ce côté-ci de
la Chambre ou de l'autre côté.
Il est également vrai, Mme le Président, qu'il y a quelque
temps que tout le monde discute de ce projet de loi, soit le projet de loi 101,
et que même plusieurs ont hâte d'arrêter d'en parler. Mais ce
n'est pas là une raison pour "bulldozer" les travaux et adopter une loi
imparfaite.
Si nous sommes rendus à la fin du mois d'août et que les
travaux ne sont pas rendus là où l'espérait le leader du
gouvernement, ce n'est pas, Mme le Président, seulement la faute de
l'Opposition. D'abord, nous avons eu très tardivement le projet de loi
no 1 qui a été présenté au mois de juillet
très tard dans la session puis il y a eu une réimpression,
et cela n'est pas la faute de l'Opposition. Nous, de l'Union Nationale, Mme le
Président, avons présenté une critique très
objective sur le projet de loi 101. Nous avons présenté notre
livre bleu afin que tout le monde sache à quelle enseigne nous nous
logeons. Nous avons
fait, d'après moi, un travail très objectif, un travail
que même l'honorable premier ministre et l'honorable ministre d'Etat au
développement culturel ont qualifié de très valable,
très pertinent et très objectif. Même les libéraux,
Mme le Président, se sont inspirés de cette oeuvre pour
définir leur politique et apporter des arguments lors du débat en
commission.
Nous, de l'Union Nationale, Mme le Président, nous ne sommes pas
pour la clôture prématurée de ce débat car, à
notre avis, il y a encore trop de chapitres très importants sur lesquels
nous n'avons pas pu faire valoir nos idées. Hier encore, le
député de Mégantic-Compton a demandé, au
début des travaux de la commission, de sauter au chapitre de la langue
des entreprises parce qu'il prévoyait ne pas avoir le temps d'en parler.
Nous avons demandé cela, Mme le Président, parce que, à
notre avis, ce chapitre doit être débattu, et nous, de l'Union
Nationale, aurions aimé faire valoir nos idées sur ce chapitre
très important. Encore là, nous ne comprenons pas pourquoi le
gouvernement n'a pas jugé bon d'appuyer notre proposition.
Si les débats n'ont pas avancé, Mme le Président,
au rythme désiré par le leader du gouvernement, à qui la
faute? Beaucoup plus, d'après moi, aux membres du gouvernement qu'aux
membres de l'Opposition. Le gouvernement n'était pas prêt à
présenter ce projet de loi. Le gouvernement a refusé et refuse
encore systématiquement tout amendement parce qu'il pense avoir à
lui seul la vérité. Il faut aller en commission comme observateur
pour voir ce qui s'y passe.
Il y a également, Mme le Président, les promesses
répétées d'un homme influent dans le gouvernement actuel.
Promesses maintes fois répétées et encore tout
dernièrement par cet homme soi-disant crédible. Promesses selon
lesquelles le gouvernement n'emploierait pas la guillotine. Promesses selon
lesquelles le gouvernement accordera tout le temps voulu pour l'étude
d'un projet aussi important que l'est le projet de loi no 101.
Ces promesses, Mme le Président, ont été faites par
un homme qui s'appelle René Lévesque, honorable premier ministre
du Québec. C'est pourquoi je dis que ces promesses étaient
supposément crédibles et l'homme également. Les membres du
Parti québécois, en commission parlementaire, ont perdu et ont
fait perdre autant de temps que n'importe quel membre de l'Opposition, en
discutant sur toutes sortes de peccadilles. Encore hier, on a discuté
sur du lettrage. C'était rapporté dans les journaux.
Je cite: "Est-ce que le lettrage sur le cadre de la porte est plus
important que le lettrage dans la porte et des choses comme
celles-là?"
Mme le Vice-Président: M. le député!
M. Goulet: Je reviens, je sais que je vous parle du travail
à la commission, mais c'était simplement pour vous faire voir que
le temps perdu en commission n'est pas perdu seulement par les membres de
l'Opposition, mais beaucoup plus par les membres du gouvernement. Nous, de
l'Union Nationale, avons étudié le projet de loi article par
article. Nous aurions aimé et nous étions prêts
également à discuter ce projet de loi article par article,
même jusqu'à Noël s'il le fallait, de façon à
pouvoir offrir à chaque Québécois le meilleur projet de
loi qu'il ait jamais eu; pas le quart d'un projet de loi, mais un vrai projet
de loi qui recueillerait l'assentiment de tout le monde, de façon qu'on
n'ait pas à y revenir dans deux ou trois ans. Il y a eu les projets 63,
22, 101 et, en adoptant cette loi à la vapeur, en ne prenant pas le
temps de discuter article par article et d'apporter les amendements de
façon à répondre aux besoins de chaque
Québécois, nous devrons, l'an prochain, dans deux ou trois ans,
passer encore deux ou trois mois sur un projet de loi pour essayer d'amender,
de rappeler ou de remplacer cette loi imparfaite que sera la loi 101.
Je demande donc au ministre de retirer sa motion et de laisser les
intéressés faire leur travail dans l'objectivité et dans
la sérénité, et cela pour le bien de tous les
Québécois.
Mme le Vice-Président: Cette motion du leader
parlementaire du gouvernement sera-t-elle adoptée?
M. Burns: Adopté.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Mme le Président, sûrement que le
débat n'est pas fini, sans réplique surtout. Il est bien
évident que cette motion du député de Maisonneuve, leader
du gouvernement, est l'aboutissement tout à fait normal de la
stratégie qu'a adoptée le gouvernement pour l'adoption de son
programme législatif depuis le 8 mars dernier. Si on se
réfère aux notes de présentation du règlement de
l'Assemblée nationale, on se rend compte que les auteurs du
règlement ont voulu, en adoptant ce règlement, l'assujettir
"à la réalité de l'Assemblée pour qu'il fasse de
celle-ci un Parlement moderne, efficace, qui permettra à la
majorité de faire adopter sa législation c'est ce dont il
est question ce matin à l'Opposition de s'exprimer en toute
liberté c'est ce que nous tentons de faire à
l'opinion publique de se manifester et à tous les députés
de remplir pleinement leur rôle de législateurs".
Mme le Président, le leader du gouvernement en a fait état
ce matin et hier, lors de la présentation de sa motion de fin de
session, il n'y a rien d'inédit, il n'y a rien de bien original dans la
présentation de cette motion mettant fin aux délibérations
de la commission parlementaire qui étudie présentement le projet
de loi no 101, Charte de la langue française. Mais je soutiens que ce
gouvernement, pendant la campagne électorale, depuis l'élection
du 15 novembre, en cette Chambre et à l'extérieur de la Chambre,
à toutes les occasions
qui lui ont été fournies, ce gouvernement s'est dit un
gouvernement transparent. On a même confié au député
de Maisonneuve un mandat spécial de procéder à la
réforme parlementaire...
M. Burns: Ce n'est pas un gouvernement, c'est un aquarium,
tellement c'est transparent.
M. Gratton: C'est tellement transparent qu'on se demande de quel
côté de la Chambre sont les poissons dans cet aquarium, Mme le
Président. Cette motion dite de guillotine ou de clôture,
traditionnellement, ne doit être présentée que dans des cas
extrêmes où on a épuisé toutes les autres voies pour
un gouvernement de faire adopter sa législation. Mme le
Président, combien de façons autres que cette motion dite de
guillotine le gouvernement aurait-il pu employer pour en arriver à
l'objectif qu'il s'est fixé, soit de faire adopter son projet de loi sur
la langue? L'Opposition en avait suggéré une, dès le
début des travaux en commission parlementaire, soit de scinder le projet
de loi de façon que les dispositions qui sont urgentes, à la
veille de la rentrée scolaire, c'est-à-dire les dispositions de
la loi qui touchent la langue d'enseignement fassent l'objet d'un projet de loi
séparé, que l'Assemblée nationale aurait pu étudier
et voter avant la rentrée scolaire.
C'est d'ailleurs tellement vrai, Mme le Président, qu'au moment
où on se parle, la commission parlementaire a déjà
terminé l'étude des articles qui touchent la langue de
l'enseignement. Le député de Marguerite-Bourgeoys, porte-parole
du parti à cette commission, a indiqué, ce matin, que, même
aujourd'hui, si le gouvernement décidait de se rendre à ce voeu
de l'Opposition de scinder le projet de loi, nous nous engagerions
immédiatement à faire en sorte que la partie qui touche la langue
de l'enseignement soit adoptée immédiatement.
Mais, je n'ai pas l'illusion que le gouvernement se rendra à
cette invitation que lui fait l'Opposition. Il est bien évident que le
gouvernement, depuis le 8 mars, s'est embourbé dans sa stratégie,
stratégie des plus incohérentes. On a vu un projet de loi
déposé, retiré vous vous rappelez sûrement la
trouvaille du siècle on a vu le leader du gouvernement
présenter la semaine dernière une motion dite de fin de session,
dont les résultats sont tout à fait nuls puisque, comme je
l'indiquais hier, on se retrouve aujourd'hui devant une autre motion,
celle-là de clôture, qui était réellement la seule
utile pour atteindre les fins du gouvernement.
Si c'est là la façon qu'entend prendre le gouvernement
pour réformer nos coutumes parlementaires, cela augure très mal.
On dit que les travaux de cette Assemblée ne sont pas efficaces, que le
Parlement québécois n'est pas un Parlement moderne; certains
députés, dont le député de Dorion, s'interrogent
sur la validité de leur présence en cette Chambre.
Mme Payette: Je continue à m'interroger. M. Gratton:
Pardon?
Mme Payette: Je continue à m'interroger. Une Voix:
Surtout en vous écoutant. M. Gratton: Je ne vous entends
pas.
M. Burns: C'est vous autres qui êtes le sujet de ses
interrogations.
M. Gratton: D'ailleurs, nous aussi on s'interroge sur la sagesse
de certains députés ministériels qui, depuis le 8 mars,
n'ont pas ouvert la bouche en cette Chambre, qui n'ont pas dit un traître
mot pour appuyer un projet de loi quelconque.
Mme le Vice-Président: Je rappellerais que parfois,
à la suite des interventions, un député s'éloigne
de son sujet. Je demanderais à chacun de garder l'ordre dans cette
Chambre.
M. le député de Gatineau.
M. Burns: Mme le Président, il est mal pris, il ne sait
pas quoi dire, c'est pour cela qu'on lui donne un peu de...
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lamontagne: Mme le Président, rappelez-les à
l'ordre par leur nom respectif. Quand c'est le leader du gouvernement...
Mme le Vice-Président: C'est déjà fait, M.
le député de Roberval.
M. le député de Roberval, je vous demanderais un peu plus
de délicatesse dans vos interventions. A l'ordre, M. le ministre.
J'avais déjà rappelé M. le ministre à l'ordre.
M. le député, je n'admets pas ce que vous me dites
maintenant. J'espère qu'à l'avenir vous penserez un peu
plus...
M. Lamontagne: Question de règlement, Mme le
Président. Lorsque vous maintenez que vous avez rappelé un
ministre à l'ordre en rappelant tout le monde, ce n'est pas...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Roberval! M. le député de Roberval, je vous ai dit tantôt
que j'avais rappelé le ministre à l'ordre. Je vous demande de me
faire confiance quand je vous le dis. Si vous n'avez pas entendu, il faudrait
quand même avoir un peu plus de décence dans cette
Assemblée.
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Mme le Président, je constate qu'il est 13
heures, puis-je proposer la suspension de nos travaux?
Mme le Vice-Président: Cette Assemblée suspend ses
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
Reprise de la séance à 15 h 6
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous
plaît!
Reprise du débat sur la motion du leader parlementaire du
gouvernement. M. le député de Gatineau avait la parole. Il vous
reste environ une minute et demie, M. le député. Alors, je vous
indique, comme d'habitude, que c'est le moment de conclure ou à peu
près.
M. Gratton: Merci, Mme le Président. Je disais donc, ce
matin, qu'il ne faut pas se surprendre que cette motion de clôture vienne
paralyser en quelque sorte les travaux de l'Assemblée nationale, compte
tenu de la décision qu'avait prise le gouvernement d'employer la
stratégie qu'il a utilisée. En terminant, je dirai simplement
que, comme hier au moment du débat sur la motion dite de fin de session,
le premier ministre, qui avait pris des engagements très formels
à deux occasions, soit le 21 juillet en cette Chambre et le 25 juillet
dans une entrevue dans le journal La Presse, de ne pas imposer la
clôture, de ne pas avoir recours à ces motions traditionnelles de
fin de session, n'a pas daigné intervenir sur la motion que
l'Assemblée nationale a adoptée hier et n'a pas pris part au vote
hier soir sur cette même motion. Il ne semble pas que le premier ministre
prendra la parole au cours du débat sur cette motion de clôture et
fort probablement, ce soir, lorsque le vote sera appelé sur cette motion
odieuse, le premier ministre verra à être bien enfermé dans
son "bunker" de la Grande-Allée...
Une Voix: En vacances.
M. Gratton: ... laissant à d'autres le soin de porter
l'odieux de cette décision de son gouvernement.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Pointe-Claire.
M. William Frederic Shaw
M. Shaw: Merci, Mme le Président. First of all, I would
like to take this opportunity to support my colleague, the member from
Mégantic-Compton and my colleague, the member from Gaspé, for the
diligent work that they have done with the commission studying all the
provisions of bill 101. To suggest that these men who have put so much efforts
to be at every single one of the meetings, to have worked diligently to prepare
the motions of amendment that should have been given the consideration they
deserved by the parti ministériel, their attendance was not simply one
of passiveness but one of positive intervention providing that types of
recommendations that would have made, and could have made Bill 101 an
acceptable piece of legislation not only for the supporters of the Parti
québécois but for all Quebecers including those of English
expression and those of our ethnic communities who also consider our province,
Quebec, as our part of Canada.
But Madam President, we now have the guillotine and we have it after
less than one quarter of the articles of Bill 101 have adequately been given
the consideration that they deserve for a piece of legislation which is unique
perhaps in the world, a charter that is supposedly there to entrench the rights
of people. But there is not time enough to give the consideration to this
legislation that it deserves. Madam President, we, early, made the
recommendation, as did our colleagues in the Liberal Party, to pass those
sections involving section 69 and the entry to schools this fall. But the
government would not do that. The government, the so-called "vrai
gouvernement", committed to the principles of democracy, the so-called
government that makes these pronouncements, that we will never interfere with
the normal democratic process of l'Assemblée nationale du
Québec.
This is a façade, Madam President. They were committed to justice
and to the rights of minority groups living in this province. Madam President,
we see the reality of the façade. We see that this piece of legislation
is not there for our perusal and our consideration, for our examination and our
criticism. It is there just to be read and to be swallowed.
Madam President, the reality is that if we do not get legislation from
concensus, if we do not get legislation that examines the reality and puts it
into perspective and is acceptable by all the people, it will go to court. That
is the reality. And if this piece of legislation goes to court, perhaps that is
where it should be. Perhaps a test for Canada is not on Thursday or Friday when
the third reading of this bill is passed, but then. What do the courts of this
land recognize in this legislation of the right of this House. That may be the
real test.
For that reason may be the government is anxious to force this test. In
other words, here we are, the representatives of the people, elected to put the
input required to properly examine a piece of legislation, cut short, Madam
President, when it most counts, when the legislation itself is being modified,
as of this day, and when the government is not prepared, not prepared to give
it a serious and positive consideration it deserves. Madam President, the
government must accept the consequences of its policy. The government must
accept the fact that, representing only 40% of the population, it is imposing
legislation not considering the wishes of 60% of the population. For that
matter. Madam President, it is not considering its posture in our Canadian
society, the reality of the will of all Canadians. I know how they feel, how
they wish to make french "Le visage du Québec", french the language of
Quebec, but without coercion, without repression, without respect for the
reality that there are people in this province that speak English and will
continue to speak English and demand that this right be continued and enclosed
in this legislation.
Madam President, we are living with the reality of a government of
confrontation, a government
that is not one of consensus but one of confrontation and intimidation,
but we can live with confrontation, because confrontation will result in
confrontation. If that is the wish of this government, then this is what it
will get. If, on the other hand, the government wishes to be respectful, the
government wishes to look for its proper mandate, the one it went to the people
with, saying: We want to be a real government, a responsive government, a
listening government representing the will of the people, then we would have
supported them, Madam President. We have not been listened to, we have not had
our points of view respected ant the number of amendments that have been taken
with any seriousness at all of this legislation is pathetic.
Madam President, it is my privilege to sit as one of the seven
English-speaking members of the Province of Quebec in this Legislature and to
represent 20% of the people in this province whose primary functional language
is English.
I am proud, also, to be a Quebecer, and to be in "un milieu
français". I like it this way, I love it this way, but I also know that
for the rights of the children of that side of the House, as much as for the
rights of my children and my colleagues who are English-speaking, it is
necessary that legislation and the Legislature must be responsive to the will
of the people, must listen to their wishes, must recognize its responsibility
to react positively and not with coercion and not with confrontation. Thank
you, Madam President.
Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition
officielle.
M. Gérard-D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, c'est le
devoir de l'Opposition de protester le plus vigoureusement possible contre
cette procédure exceptionnelle qui amène le gouvernement à
mettre de côté le processus normal d'adoption des lois en usant de
sa majorité ministérielle pour forcer l'adoption d'un projet de
loi fortement contesté. Je ne nie pas, évidemment, la
légalité du recours à la guillotine. Ce recours est
prévu par nos règlements et le gouvernement a aujourd'hui
décidé de l'appliquer malgré, dois-je le rappeler, Mme le
Président, les hauts cris poussés jadis par l'Opposition
péquiste contre toute mesure semblable.
Ce que je conteste, c'est le fait que le gouvernement utilise cette
procédure d'exception sur une question aussi fondamentale que celle de
l'avenir, et de l'avenir linguistique, en particulier du Québec, alors
que l'Opposition a procédé normalement, sans "filibuster", avec
tout le sérieux, l'objectivité et le sens des
responsabilités qu'exige l'étude d'un projet de loi aussi
important contrairement à l'attitude complètement négative
affichée par l'Opposition péquiste qui, en 1974, avait
dirigé un réel "filibuster", un "filibuster" en règle
contre le projet de loi no 22.
Je sais autant que n'importe qui que le processus parlementaire peut,
à l'occasion, connaître ses longueurs et ses excès. Je
suis, cependant, de ceux qui croient fermement en la valeur intrinsèque
des discussions parlementaires. En effet, en dépit du ton et de la
tournure que prend parfois le débat parlementaire, il reste que ce
débat est absolument essentiel à la bonne gouverne d'une
société démocratique. C'est, en effet, un droit
fondamental de notre démocratie que celui de manifester sa dissidence
à l'égard d'une mesure gouvernementale. Dans l'étude des
projets de loi 1 et 101, c'est ce que nous avons fait avec toute la
sincérité et toute l'ardeur dont nous étions capables.
Nous ne l'avons pas fait parce que c'était notre rôle premier
d'Opposition de nous opposer; nous l'avons fait parce qu'une partie importante
de la population québécoise voyait ses droits
considérablement réduits par le caractère excessif et
injuste de la législation gouvernementale. Malgré cette
opposition parlementaire, malgré une opposition extra-parlementaire et
malgré, je vous le rappelle, Mme le Président, l'engagement
solennel du premier ministre, pris le 21 juillet dernier, qu'on ne bousculerait
pas l'Opposition et qu'on pourrait procéder normalement, malgré
tout cela, le gouvernement décide aujourd'hui de forcer l'adoption de
son projet de loi. Nous devons lui dire clairement qu'il commet ainsi une grave
erreur et qu'il devrait être le premier à se rappeler les
enseignements du passé encore pourtant très récents.
Le Québec a acquis maintenant une certaine expérience,
plus ou moins heureuse d'ailleurs, dans le domaine de la législation
linguistique. Malgré les meilleures intentions du monde qui pouvaient
animer les auteurs du projet de loi 63 et du projet de loi 22, malgré
toutes les mesures de prudence que les gouvernements passés ont mis
à appliquer ces lois délicates, il s'est cependant trouvé
des choses dans ces lois qui ont occasionné des situations
particulièrement difficiles.
Le projet de loi no 101 entrera en vigueur sans que l'Assemblée
nationale ait eu l'occasion d'étudier des chapitres entiers de cette
importante législation. Il me semble que le gouvernement, qui s'est
refusé à apporter au projet de loi quelque changement
significatif que ce soit sur le fond, aurait dû avoir la prudence
élémentaire de permettre au processus parlementaire de se
dérouler dans des conditions normales et jusqu'à terme.
En effet, dans les chapitres qui ont pu être étudiés
en commission parlementaire, l'Opposition officielle a apporté une
contribution que je n'hésite pas à qualifier de positive,
puisque, a plus d'une reprise, sur des amendements qu'elle proposait, le
gouvernement ou certains membres de la majorité ministérielle ont
été parfois ébranlés par la pertinence des
observations que nous leur faisions. Ils savent maintenant, même s'ils
ont rejeté nos propositions, au moins, que leurs positions ne sont pas
aussi sûres et aussi solides qu'ils pouvaient bien le croire.
J'ai la conviction, Mme le Président, que le ministre qui sera
chargé de l'application de la loi se rappellera, au moment où il
mettra en place l'appareil administratif nécessaire à la mise en
oeuvre de la loi, aura en tête certaines remarques que l'Opposition lui
aura faites, au niveau de la
commission parlementaire. Il pourra ainsi être beaucoup plus
prudent et conscient de la portée de ses décisions qu'il n'aurait
été si la commission parlementaire n'avait pas examiné ces
éléments du projet de loi. Peut-être des erreurs
seront-elles ainsi évitées.
Malheureusement, à peine une quarantaine ou quarante-sept des
quelque 219 articles du projet de loi ont été ainsi soumis
à l'épreuve de la discussion parlementaire. Tout le reste y
échappe par la décision arbitraire du gouvernement de mettre fin
aux séances de la commission parlementaire sur l'éducation. Le
ministre aura maintenant à mettre en application une loi qui, de toute
évidence, n'aura pas atteint sa pleine maturité en ce sens
qu'elle n'aura pas fait l'objet d'une discussion suffisamment
détaillée pour lui permettre de cerner les difficultés et
les embûches que comportera la mise en oeuvre de ces parties du projet de
loi no 101. Le danger est alors grand que des erreurs de jugement soient
commises, et ces erreurs, ce sera le gouvernement qui en portera le
blâme.
Mme le Président, on sait que si la loi 22 a été
à ce point contestée, c'est essentiellement ou presque
exclusivement à cause de la fameuse question des tests linguistiques. Je
suis convaincu que si l'Opposition d'alors avait fait son devoir et avait eu
une attitude positive, elle aurait pu contribuer à éviter
certaines de ces erreurs. Je ne veux pas être prophète de malheur
pour le gouvernement, mais je veux tout de même dire aujourd'hui ma
crainte de voir des problèmes analogues se poser dans un prochain
avenir. Surtout que, fondamentalement, le projet de loi no 101 demeure à
son titre une loi excessive, injuste et arbitraire. La preuve en étant
faite, dans la mesure où ce gouvernement a accepté de soumettre
les droits des Canadiens qui viendront s'installer au Québec aux
aléas d'une rencontre des premiers ministres à qui l'on a soumis
à la toute dernière minute les propositions de
réciprocité en matière de langue d'enseignement, j'ai eu
l'occasion de dénoncer cette façon que le gouvernement avait de
déterminer les droits des individus. Nous entrevoyons déjà
tous la conséquence non seulement politique et économique que
cette situation comportera, mais également la conséquence humaine
qu'elle entraînera.
Le premier ministre s'est rendu aux arguments de son ministre d'Etat au
développement culturel au sujet de la clause Québec; c'est
là le début des problèmes que connaîtra le
gouvernement dans l'application d'une législation linguistique aussi
injuste et aussi excessive que le projet de loi no 101.
En somme, je veux simplement, aujourd'hui, dire au gouvernement qu'en
mettant fin à la discussion en commission parlementaire du projet de loi
no 101 il se cause à lui-même un tort considérable. Mais ce
qui nous préoccupe aujourd'hui je le dis en terminant, Mme le
Président ce sont bien davantage les dangers qu'il fait ainsi
courir à l'ensemble de la collectivité québécoise,
qui aura à vivre avec une loi éminemment contestable au plan des
principes et qui n'aura même pas eu la chance d'atteindre sa
maturité puisque le gouvernement aura choisi d'empêcher le
processus parlementaire de jouer pleinement le rôle qui est le sien. Je
termine avec ceci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition
officielle, j'allais vous inviter à conclure le plus rapidement
possible, votre temps est presque terminé.
M. Levesque (Bonaventure): Je vous remercie, Mme le
Président. C'est dommage que nous soyons ainsi limités, mais, que
voulez-vous, c'est le règlement et vous avez raison de l'invoquer, Mme
le Président.
Je voudrais que le gouvernement se rappelle qu'il y a toujours un prix
à payer lorsqu'on choisit de mettre de côté le processus
démocratique, surtout alors que ce processus s'exerçait au niveau
de la commission parlementaire d'une façon tellement plus responsable
que cela n'a été le cas lors de l'étude de la loi 22
lorsque, par entêtement partisan, les gens du Parti
québécois ont empêché eux-mêmes la commission
parlementaire de fonctionner. D'autant plus que nous avions nous-mêmes
proposé de scinder le projet de loi afin de permettre que le chapitre
sur la langue d'enseignement soit adopté immédiatement pour
assurer une rentrée scolaire mieux organisée. Ceci nous aurait
permis, dans le calme, la sérénité et le sens des
responsabilités, de poursuivre l'étude de ce projet de loi,
particulièrement dans les chapitres qui comportent des
conséquences économiques et d'autres conséquences sur le
climat social, conséquences extrêmement importantes. Nous aurions
pu essayer d'améliorer et de bonifier la loi d'une façon
raisonnable et de la façon positive avec laquelle le débat
était engagé.
Dommage! Nous avons cette guillotine, nous protestons, c'est tout ce que
nous pouvons faire au moment actuel. C'est dommage que nous en soyons rendus
là alors que nous avions apporté une contribution si positive
à l'étude de ce projet de loi.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Maskinongé.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Etant membre de cette Assemblée depuis 1973,
c'est-à-dire depuis bientôt quatre ans, je dois vous dire
immédiatement que j'ai vécu, dans le passé, d'autres
motions qu'on a qualifiées de guillotines à l'Assemblée
nationale.
Malheureusement, Mme le Président, je dois vous mentionner aussi
et le chef de l'Opposition actuelle qui dans le temps où nous
étions au pouvoir était le leader parlementaire pourra corroborer
ce que je vais vous dire que j'étais un de ceux, dans l'ancien
gouvernement, qui se sentaient profondément gênés lorsque
le gouvernement d'alors utilisait ces articles de notre règlement pour
bâillonner l'Opposition. Mais je n'aurais jamais cru, comme
député, même si je suis pré-
sentemeni dans l'Opposition, que le parti au pouvoir,
présentement le Parti québécois, aurait eu le culot
d'apporter une telle motion, et ceci pour plusieurs raisons. Je pense que vous
n'étiez pas des nôtres en 1974 et en 1976 lorsque ces motions ont
été utilisées, mais connaissant votre largesse de vues, je
suis certain que vous avez jeté un coup d'oeil au journal des
Débats et vous vous êtes rendu compte jusqu'à quel point
les députés de l'Opposition d'alors gueulaient c'est le
mot contre ces motions pour mettre le bâillon. C'est une des
raisons pour lesquelles je n'aurais jamais cru qu'un gouvernement
démocrate, un bon gouvernement comme il se plaît à le dire,
aurait apporté une mesure semblable à l'Assemblée
nationale.
Une deuxième raison encore plus forte que la première,
c'est la parole du premier ministre. Comme membre de cette Assemblée
nationale, je dois vous dire que le premier ministre m'a profondément
déçu. Parce qu'il n'y a pas tellement longtemps, le premier
ministre disait à qui voulait l'entendre: A l'Assemblée nationale
on ne mettra pas le bâillon aux députés, ni à
l'Opposition, ni à qui que ce soit. Cela prendra un mois, deux mois; il
a même parlé de se rendre jusqu'aux vacances des Fêtes,
c'est-à-dire à Noël à ce que je sache, il n'y
a pas de neige encore et, à la fin du mois d'août,
même avec l'engagement formel du premier ministre selon lequel il n'y
aurait pas de mesure de bâillon à l'Assemblée nationale, on
nous arrive avec une motion semblable. Cela veut dire que comme membre de cette
auguste Assemblée, si je ne peux plus prendre la parole du premier
ministre du Québec, je me demande bien de quelle façon je serai
capable de convaincre mes électeurs et dire qu'on peut avoir confiance
non seulement au premier ministre, mais au gouvernement du Québec. Je
trouve cela profondément lamentable que ce premier ministre qui est
présentement ici uniquement pour la période de questions... Je
comprends qu'il a des obligations, mais je me rappelle du temps où il
siégeait et où c'était M. Bourassa qui était le
premier ministre à qui on reprochait de n'être jamais
présent à l'Assemblée nationale. On lui reprochait cela.
Et pourtant on ne voit pas le premier ministre tellement souvent. On le voit
à la période de questions, on le voit aux votes, et après
cela, il disparaît.
M. Burns: Voyons donc!
M. Picotte: II me semble que le premier ministre...
M. Burns: Mme le Président, j'invoque le règlement.
Question de privilège. Vous avez actuellement le premier ministre le
plus présent à l'Assemblée nationale. Vous faites des
reproches parce que, de temps en temps, il s'absente pour s'occuper des
affaires du Québec. Je n'accepte pas cela. Votre ancien chef
heureusement pour vous que c'est votre ancien chef n'était jamais
ici en Chambre. Actuellement nous avons, je pense, le premier ministre le plus
présent à l'Assemblée nationale.
M. Gratton: Question de règlement, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau sur la question de règlement.
M. Gratton: Je ferai remarquer au leader du gouvernement qu'il
est un fait, c'est que le premier ministre a été absent toute la
journée hier, au moment où on a débattu la motion dite de
fin de session, et qu'il est encore absent.
Mme le Vice-Président: M. le député,
à l'ordre!
M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.
Mme le Vice-Président: Je ferais simplement remarquer que
M. le leader du gouvernement aurait pu invoquer sa question de
privilège, mais, quant à la seconde partie, je ne
considère pas que c'est une question de privilège. Vous auriez pu
arrêter au milieu probablement.
M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, sur la
question de règlement.
Mme le Vice-Président: Sur la question de
règlement, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): Cela fait suite à ce que vous
venez de dire, Mme le Président, soit que, dans la seconde partie de son
intervention, le leader du gouvernement avait "fauté". Il a cependant
affirmé des choses que je ne puis pas laisser passer. De quelle
façon me suggérez-vous de corriger ce qu'il a dit au sujet de
l'ancien premier ministre?
M. Burns: Au feuilleton.
M. Levesque (Bonaventure): Au feuilleton, c'est comme cela. Mme
le Président, il a causé une injustice envers l'ancien premier
ministre qui était toujours ici pour les débats importants et
significatifs.
M. Burns: Jamais ce n'est arrivé.
M. Levesque (Bonaventure): Je lui rappellerai que dans le projet
de loi...
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre, messieurs! M. le ministre, M. le chef de l'Opposition. Je pense que
j'ai suffisamment rappelé cette Assemblée à l'ordre. Je
pense que les vacances s'en viennent. Les gens se chamaillent. J'ai
laissé continuer un peu les interventions. Vous vous êtes
passablement dit ce que vous aviez envie de dire. Je vous ferai remarquer que
vos remarques ne sont pas enregistrées au journal des Débats
parce que j'étais debout. Je pense que les uns et les autres, vous avez
l'intention que nous en terminions bientôt. Je vous demanderais l'ordre
dans cette Assemblée pour
permettre au député qui a maintenant la parole de terminer
son intervention.
M. le député de Maskinongé.
M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, je veux
simplement dire que je vais coopérer, que je vais répondre
affirmativement à votre intervention. J'espère que le leader du
gouvernement en fera autant. Mais je voudrais vous dire mon inquiétude
parce que vous avez mentionné que ce que nous avons dit ne passerait pas
au journal des Débats. J'espère que ce n'est pas seulement ce que
le leader du gouvernement a dit qui va être au...
Mme le Vice-Président: Non, M. le chef de l'Opposition
officielle, vous vous étiez levé sur la question de
règlement et vous aviez à peu près terminé la
question de règlement.
M. Burns: Mme le Président, je m'excuse auprès de
vous, d'abord, pour avoir créé cette espèce de
perturbation de nos travaux.
Mme le Vice-Président: Cette diversion.
M. Burns: Je m'excuse également auprès du
député de Maskinongé. Je vous promets, Mme le
Président, surtout après la façon gentille dont vous nous
l'avez demandé, de ne plus intervenir d'ici à la fin du
débat.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Maskinongé. Je retiens votre intervention, M. le leader.
M. Picotte: Mme le Président, j'espère que vous
n'avez pas tenu compte des interventions de mes collègues. Je voudrais
simplement rappeler à mon bon ami, le député de
Maisonneuve, que, s'il a bien écouté mon exposé je
ne veux pas provoquer de débat j'avais bien dit que je comprends
qu'un premier ministre, avec les occupations qu'un chef de gouvernement puisse
avoir, ne soit pas toujours présent à l'Assemblée
nationale. Je suis complètement d'accord, Mais...
Mme le Vice-Président: Sur la motion maintenant, M. le
député.
M. Picotte: ... j'aurais cru, Mme le Président, et je
reviens à mon idée première une chance que j'ai de
la suite dans les idées après tout ce qui s'est passé
que le premier ministre, s'étant engagé formellement
à ne pas bâillonner les élus du peuple, j'aurais
aimé, même s'il n'est pas d'accord il y a des
députés du côté ministériel qui se
lèvent pour dire à leur ministre qu'ils ne sont pas d'accord,
bien heureux de savoir que, dans ce parti, on est censé respecter le
droit de parole de tout le monde cela pourrait arriver au premier
ministre de ne pas être d'accord avec cette loi, j'aurais aimé
qu'il soit présent hier et aujourd'hui pour se lever dix minutes, comme
nous, et dire simplement qu'il n'est pas d'accord avec les mesures qu'on
emploie pour bâillonner l'Opposition.
C'est tout simplement cela que je voulais dire. Je ne voulais pas
créer de débat diffamatoire et faire faire des crises cardiaques
à qui que ce soit. Je voulais simplement apporter cette idée,
c'est tout, Mme le Président.
Malheureusement, je comprends que, en 1974, lors de l'étude du
projet de loi 22, le gouvernement d'alors mon propre gouvernement
avait utilisé des mesures semblables pour le bâillon. Mais, Mme le
Président, ce qui était différent en 1974 c'est que, lors
de l'étude du projet de loi 22, pendant 55 heures, ce n'est pas peu
dire, l'Opposition d'alors, les six péquistes avaient discuté
seulement une ligne du projet de loi, la seule langue officielle au
Québec. Une ligne pendant 55 heures. Ces gens disaient à qui
voulait les entendre que cela pouvait durer des mois, qu'ils resteraient
toujours sur le même article et qu'ils provoquaient justement le
gouvernement à mettre le bâillon. La situation est
différente en 1977. Nos valeureux compagnons, les quatre
députés de l'Opposition officielle se sont rendus à la
commission parlementaire pour étudier le projet de loi 101 et
déjà, après une soixantaine d'heures d'étude,
au-dessus de 40 articles sont adoptés. On a dit à ce bon et ce
vrai gouvernement...
M. Duhaime: C'est 120 heures.
M. Picotte: Si le député de Saint-Maurice, ministre
du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, veut se lever pour faire un
discours, le temps sera libre après moi, il me reste quelques minutes.
Vous pourrez vous lever et dire tout ce que vous aurez à dire,
d'ailleurs ce sera l'une des premières fois que je vous entendrai. Cela
me fera tellement plaisir, étant deux gars de la Mauricie, j'aimerais
entendre votre belle voix, M. le député de Saint-Maurice...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Maskinongé, sans vous faire perdre le fil, je vous dirai qu'il faudrait
conclure le plus rapidement possible maintenant.
M. Picotte: On m'a interrompu Mme le Président.
Mme le Vice-Président: De toute façon, je vous ai
laissé un peu plus de temps quand même, mais je vous demanderais
de conclure.
M. Picotte: Très bien. En terminant, Mme le
Président, je dois vous dire que la situation est bien
différente. On a montré, du côté de l'Opposition
officielle, de la collaboration, on a même offert à ce bon et ce
vrai gouvernement d'adopter tout de suite ce qui s'est passé au point de
vue de l'éducation pour ne pas perturber la rentrée scolaire qui
s'en vient bientôt. Malheureusement, tout cela a été
rejeté du revers de la main, Mme le Président. Je suis bien
d'accord que le leader parlementaire du gouvernement copie l'ancien
gouvernement, mais apporter la mesure de bâillon aux membres de cette
Assemblée nationale, je trouve que c'est un plagiat malhabile de sa
part.
A l'avenir, si je ne peux plus croire en la parole du premier ministre,
parce que lui-même a déclaré qu'il n'y aurait pas de
bâillon, Mme le Président, j'espère bien que le leader
parlementaire, dans sa grande sagesse, nous apportera des réformes pour
que ces mesures ne soient plus amenées à cette Assemblée
nationale et qu'on puisse discuter avec sérénité en
prenant tout le temps qu'il faut pour légiférer pour le
mieux-être de tous les Québécois. Je pense que c'est votre
intention et la mienne aussi. Merci, Mme le Président.
M. Burns: Entièrement d'accord.
Mme le Vice-Président: M. le député, de
Nicolet-Yamaska.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, Mme le Président. Le leader
parlementaire a inscrit au feuilleton une motion conformément à
l'article 156 du règlement pour demander aujourd'hui même,
à la commission parlementaire de l'éducation, des affaires
culturelles et des communications, de faire rapport dès demain sur le
projet de loi 101 alors que les travaux ne faisaient que débuter, ne
faisaient que s'amorcer. Je me demande ce que cela vient faire avec l'ouverture
d'esprit que nous avait promis le premier ministre lors de son discours
inaugural.
On se rappellera que le premier ministre, dans son discours, avait dit
qu'il voulait faire preuve d'ouverture d'esprit à l'égard des
communautés tant francophones qu'anglophones du Québec pour
pouvoir étudier le projet de loi 1, à ce moment-là, en son
entier et que tous ceux qui voudraient s'exprimer sur ce projet de loi
pourraient le faire à leur guise.
Le gouvernement du Parti québécois a-t-il fait et fait-il
actuellement preuve d'ouverture d'esprit depuis le début de
l'étude de la Charte de la langue française? On se rappellera que
sur le projet de loi 1, qui était également appelé Charte
de la langue française... on avait voulu convoquer en commission
parlementaire une quantité d'organismes incroyable qui devait venir
faire des représentations. Mais, malgré cet appel qu'on avait
fait, on a voulu, à un moment donné, dire: On en a assez entendu,
on arrête cela et on retourne à l'Assemblée nationale.
Or, ce qui est arrivé à l'Assemblée nationale,
c'est qu'on n'a tout simplement pas rappelé le projet de loi 1, mais on
en a fabriqué un autre semblable, le projet de loi 101. Mme le
Président, ce que je veux vous dire, c'est que je pense qu'on a
monté une espèce de show à la population pour lui dire:
Envoyez-nous vos mémoires, on va vous entendre, on va laisser tout le
monde s'exprimer, mais, lorsqu'est venu le temps de l'appliquer
concrètement, on ne l'a pas fait. On a fait un tour de passe-passe pour
apporter le projet de loi 101 à l'Assemblée nationale et on a,
à nouveau, refusé d'entendre les mémoires qui restaient en
commission parlementaire. On a également refusé d'accepter la
plupart des amendements qui étaient proposés tant par
l'Opposition officielle que par l'Union Nationale, qui avait
préparé un livre bleu qui soumettait une quantité assez
invraisemblable d'amendements qui étaient justifiés.
Egalement, Mme le Président, on a commencé à
étudier ce projet de loi et on n'en est pas rendu aux chapitres les plus
importants. Je veux bien croire qu'on a étudié le chapitre de la
langue d'enseignement, qui est peut-être le chapitre le plus important du
projet de loi, mais il y a quand même d'autres chapitres qui sont tout
aussi importants, entre autres ceux de la langue de travail et de la langue des
affaires, qui ne seront sans doute pas étudiés à la
commission parlementaire.
Je pense que si on pouvait aujourd'hui faire une offre au leader du
gouvernement et lui dire: Laissez à la commission le temps
d'étudier ces chapitres si importants de la langue de travail, de la
langue des affaires qui, d'ailleurs, sont inclus dans le programme du Parti
québécois. Je pense qu'on pourrait être d'accord, à
ce moment-là, avec la motion de clôture que le leader du
gouvernement pourrait apporter alors qu'on aurait fini d'étudier ces
chapitres qui sont si importants. Mais dans l'état actuel des travaux,
je ne pense pas qu'on puisse être d'accord avec la motion du leader du
gouvernement actuellement.
Il y a également d'autres chapitres du projet de loi qui ont
été étudiés, bien sûr, mais qui ont
été escamotés à cause de l'épée de
Damoclès qui était suspendue au-dessus de la tête des
membres de la commission parce qu'ils savaient fort bien que tôt ou tard
cette motion de clôture serait apportée puisqu'on en avait
parlé dans les journaux. Il y a eu des conférences de presse qui
ont été données par le leader du gouvernement avertissant
les membres de la commission qu'ils seraient un jour ou l'autre appelés
à venir faire rapport à l'Assemblée nationale sans avoir
terminé leurs travaux. Je donne comme exemple à ce sujet la
langue de la justice et de la législation qui a été
étudiée, mais très rapidement, Mme le
Président...
Mme le Vice-Président: Vous comme moi, nous ne sommes pas
au courant de ce qui s'est passé à la commission parlementaire,
parce que la commission n'a pas fait son rapport. Je vous demanderais
d'être bien attentif à respecter l'article 99.3 de notre
règlement qui vous demande de ne pas faire référence "aux
opérations et aux délibérations" de la commission. Ce
matin, je pense que les journaux doivent s'être bien vendus parce qu'il y
a des intervenants qui ont parlé de ce qu'ils avaient lu dans les
journaux. Je pense, M. le député qu'il faut quand même
être bien attentif à respecter le règlement. D'accord?
M. Fontaine: Mme le Président, je faisais
référence aux conférences de presse qui ont
été données à plusieurs reprises par le leader du
gouvernement et je pense que c'était public. Je ne faisais pas
référence à la commission parlementaire mais bien aux
conférences de presse qui ont été données par le
leader du gouvernement. Et si le leader du gouvernement a jugé bon
d'aviser la popula-
tion qu'il y aurait une guillotine, qu'il y aurait un "bulldozage" qui
serait fait à la fin de la session, je pense que nous, en tant que
parlementaires, nous avons le droit d'en parler ici, à la Chambre. Je ne
fais pas référence aux travaux de la commission plus que le
leader du gouvernement ne l'a fait.
Pourquoi donc, Mme le Président, cette motion de clôture
à cette époque de l'année? Quel est l'intérêt
de cette motion de clôture? L'été est terminé, les
députés ministériels qui ont voulu prendre des vacances en
ont pris, nous n'en avons pas pris. On a travaillé tout
l'été et on est prêt à continuer maintenant que
l'automne est arrivé. Il n'y a plus rien qui nous presse. On est
prêt à continuer à étudier tranquillement ce projet
de loi sans presser personne, pour laisser à tout le monde la chance de
s'exprimer et peut-être d'apporter des amendements qui pourraient aider
la population du Québec. On va nous dire que le fait d'adopter ce projet
de loi immédiatement va favoriser une rentrée scolaire dans le
calme, dans l'ordre, mais, Mme le Président, je vous rappellerai que
l'Union nationale avait proposé une motion d'amendement qui aurait
permis cette rentrée scolaire dans le calme et dans l'ordre.
On disait dans notre amendement: "Nonobstant l'article 69, peuvent
recevoir l'enseignement en anglais pour l'année scolaire 1977/78 les
enfants qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente
loi, étaient déjà inscrits dans une commission scolaire ou
une institution dispensant l'enseignement en anglais, selon les normes
d'inscription en vigueur avant cette date." Mme le Président, si le
gouvernement avait bien voulu accepter cet amendement, on aurait pu continuer
à étudier ce projet de loi dans le calme, la rentrée
scolaire se serait faite dans le calme et tout le monde aurait
été satisfait. Mais non, le gouvernement n'a pas voulu accepter
cet amendement proposé par l'Union Nationale, comme d'ailleurs la
plupart des autres amendements qui ont été soumis par le livre
bleu et également par le parti de l'Opposition officielle. Les
parlementaires sont prêts à garder leur patience, ils sont
toujours patients et ils sont également convaincus que si la commission
parlementaire pouvait continuer à siéger, ils réussiraient
peut-être, tant bien que mal, à convaincre le gouvernement
d'apporter certaines modifications qui pourraient bonifier cette loi et en
favoriser une étude plus complète.
Mme le Président, je dois vous dire que nous ne pouvons
être d'accord sur cette motion du leader du gouvernement parce que nous
pensons qu'elle brime les droits des parlementaires. Le parlementaire c'est
celui qui s'exprime librement dans une Assemblée nationale et où
il peut émettre ses idées comme il le veut et selon le
règlement. En suspendant les règles d'application de ce
règlement, je pense qu'on brime les parlementaires de cette
Assemblée. De ce fait, Mme le Président, je conclus en vous
disant que nous, de l'Union Nationale et sûrement l'Opposition
officielle nous ne pourrons être en faveur de cette motion.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Westmount.
M. Springate: Merci, Mme le Président. Il y a quelqu'un
qui jappe déjà.
M. Gratton: Ils ne jappent pas, ils jacassent. M. George
Springate
M. Springate: Mme le Président, le 1er avril, ce
gouvernement a déposé un livre blanc sur l'avenir de la langue
française au Québec.
A cette époque, le gouvernement a demandé aux
Québécois de soumettre leurs idées, leurs suggestions et
leurs critiques relativement à ce livre blanc. Vingt-six jours plus
tard, sans avoir pris en considération les suggestions données
dans les différents milieux de notre province concernant le livre blanc,
ce gouvernement a déposé le projet de loi no 1. Un peu plus tard,
il a demandé à des citoyens de cette province de venir devant une
commission de l'Assemblée nationale pour faire valoir leurs
idées, leurs suggestions relativement au projet de loi no 1. Seulement
62 personnes ont eu l'occasion de présenter leur mémoire sur 265
et, lors de la trouvaille du siècle, nous avons vu que la commission qui
étudiait le projet de loi no 1 a terminé ses travaux. Quelques
jours plus tard, en cette Chambre, nous avons vu le projet de loi no 101. Le
projet de loi no 101 a été étudié en
deuxième lecture et, maintenant, il est étudié article par
article en commission.
Je sais, Mme le Président, que je ne peux pas parler de ce qui
s'est passé en commission. Mais je peux vous dire, d'après les
remarques qui ont été présentées en cette Chambre,
ce matin, par le député de Marguerite-Bourgeoys, que, de notre
côté, nous avons encore des représentations à faire,
des amendements à apporter. Jusqu'à ce jour, nous pouvons dire
que le gouvernement ne nous a pas écoutés, comme il n'a pas
écouté les gens qui sont venus devant lui en commission
parlementaire lors de l'étude du projet de loi no 1.
Qu'est-ce que c'est maintenant? Maintenant, c'est la guillotine,
"bulldozer", si vous voulez l'avoir en anglais ou, comme nous l'avons vu dans
l'Argus, de ce matin "the steam-roller Burns style". Autrement dit, Mme le
Président, ce gouvernement, encore une autre fois, refuse de nous
écouter, refuse de nous entendre. Comme je l'ai dit en deuxième
lecture, quand c'est le temps de faire valoir nos idées, à ce
moment, zip, le ministre se bouche les oreilles et ne nous écoute
plus.
Mme le Président, le 21 juillet, le premier ministre de notre
province disait: "L'Opposition ne s'est pas fait enlever ses mercredis, on n'a
pas modifié les heures normales de session en vertu de la traditionnelle
motion qui vient ordinairement bien plus vite que cela, motion qui vise
essentiellement, et tout le monde le sait, à exténuer
l'Opposition et à essayer de charrier et de "bulldozer" des fins de
session ou des veilles d'ajournement. Il n'a pas été question
d'enlever à l'Opposition le droit de présenter des motions de
blâme en vertu de l'article 34". Le premier ministre continue, à
la page 2261 du journal des Débats: "Donc, nulle part il n'a
été question de brimer d'une façon qu'on puisse
appeler un comportement habituel
loin de là, c'est exactement l'inverse les droits
parlementaires et démocratiques fondamentaux de l'Opposition et des
Oppositions à l'Assemblée nationale".
Oui, c'est vrai? Qu'arrive-t-il aujourd'hui? Le premier ministre a
continué, à la page 2263: "Là-dessus, je voudrais en
profiter, justement, parce que la première session d'un gouvernement,
qui dure et qui s'éternise au mois de juillet, qui s'en va vers le mois
d'août et qui, sait-on jamais, jusqu'au mois de septembre, depuis le mois
de mars.
Cette première session... Parce qu'on ne "bulldozera" pas le
Parlement, on va laisser aller la législation jusqu'à sa
conclusion normale. Il n'est pas question de commencer ces procédures
d'étouffement du mois de juillet ou du mois d'août qu'on a trop
vues. Je me souviens d'en avoir souffert et je ne le ferai pas. Cela s'appelle
le respect des droits des parlementaires."
Aujourd'hui, le premier ministre ne respecte-t-il plus les droits des
parlementaires à l'Assemblée nationale?
Une Voix: II se cache.
M. Springate: C'est vrai, il se cache. C'est justement ça,
il se cache. Nous ne l'avons pas vu en deuxième lecture, en Chambre, on
ne l'a pas vu; quand cela a été le temps de voter, il
était en vacances. Lors d'une motion présentée par le
député de Verdun, une motion pour faire retarder l'étude
du bill 101, le premier ministre n'a pas parlé, il n'a pas voté,
il était encore en vacances. Nous autres, on était ici, par
exemple. Lors des discussions sur la motion de fin de session, le premier
ministre ne s'est pas prononcé, il n'a pas voté hier.
Aujourd'hui, il ne parle pas. Ce soir, où va-t-il être?
M. Duhaime: Vous auriez dû en prendre, des vacances.
Une Voix: II est toujours en vacances.
M. Springate: Sera-t-il ici ou s'il sera encore dans le Maine, en
vacances?
Une Voix: J'ai le goût du Maine!
M. Springate: Ce n'est pas comme le ministre du Tourisme
aimerait, que le premier ministre se promène au Québec, bien
non!
Mme le Vice-Président: M. le député, puis-je
vous rappeler de parler sur la motion, s'il vous plaît? Je vous ai
laissé aller, un bout de temps, mais...
M. Springate: Mme le Président, j'essaie de parler sur la
motion.
Mme le Vice-Président: Bon, allez-y et faites encore
mieux.
M. le député de Westmount.
M. Springate: Merci, Mme le Président. Je sais que je suis
difficile, parfois, vous devez me rappeler à l'ordre, mais j'essaie
toujours de suivre vos conseils. Maintenant, nous avons cette guillotine, ce
bulldozer, pour employer les mots de notre honorable premier ministre. Je vois
quelques ministres qui ne sont pas en vacances, qui sont actuellement devant
moi et je me demande s'ils vont parler de cette guillotine lors de leur fameux
blitz au mois de septembre. Je me demande s'ils vont le faire "or if, Mrs
Speaker...
Une Voix: ...
M. Springate: Another rumble from the peanut gallery!
Mme Payette: ... pas cela dans Westmount.
M. Springate: I am wondering if these paragons of virtue, and
that is what they a're, I would like to talk about democracy PQ style on their
famous blitz. Are they going to say how the members of the Opposition, and
constructive Opposition, bringing amendments that should be put into the law,
are presented there at the commission, they were not listen to? How the leader
of this government, who calls himself a democrate, who is hobbling in now
because he realizes that his democratic procedures have been wounded to bring
about this dastardly act to end fruitful discussion and I better use
that word carefully when I am talking about the PQ "fruitful discussion"
on a very important law called bill 101.
Je ne veux pas abuser de mon temps...
Une Voix: Consentement unanime.
M. Springate: Consentement unanime? Je suis prêt.
M. Duhaime: Consentement pour cinq secondes.
Mme le Vice-Président: Vous allez devoir conclure, M. le
député.
M. Springate: Merci, Mme le Président.
J'accepte mal, même, je ne peux pas accepter le fait que le leader
du gouvernement ait introduit cette motion de guillotine, surtout lui qui a
toujours dit qu'il était un démocrate, qui a toujours dit que, si
jamais il y en avait un dans cette salle qui respectait le droit des
parlementaires, c'était bien lui.
Il faut dire que le gouvernement péquiste a baissé dans
mon estime avec cette motion de guillotine. Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Mme le député de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Mme le Président, j'aurais vraiment
souhaité ne pas avoir à intervenir sur une
motion de clôture si tôt dans cette Assemblée
nationale. C'est mon premier mandat. Je suis ici depuis à peine huit
mois et déjà nous faisons face à cette motion de
clôture qui m'apparaît particulièrement sérieuse
parce qu'elle porte sur le projet de loi 101, un projet de loi qui est
important. Il l'est non seulement quant au statut officiel qu'il
reconnaît à la langue française ce qui était
d'ailleurs fait par la loi 22 mais surtout à cause des
répercussions qu'il va avoir sur le réseau des relations sociales
qui existent à l'intérieur du Québec et qui vont
être modifiées trop souvent pas pour le mieux, à cause du
trop grand nombre d'articles restrictifs et tracassiers que l'on retrouve
à l'intérieur de cette loi.
Depuis quelques jours, le gouvernement sent évidemment le besoin
de justifier la raison de cette motion de clôture. On fait valoir
et je pense que c'est de bonne guerre de la part du gouvernement qu'on a
passé X nombre d'heures à la première commission
parlementaire qui a entendu des mémoires et X nombre d'heures à
la deuxième commission parlementaire qui a étudié la loi
article par article. Mais ce qu'on semble oublier, c'est que, dans le cas de la
loi 22, celle-ci contenait 123 articles. Dans le cas de la loi 101, elle en
contient 213. De plus, il s'agit d'un deuxième projet de loi et on sait
fort bien qu'il a apporté plusieurs éléments nouveaux,
quelques-uns qui amélioraient la loi, mais d'autres qui avaient des
conséquences, à notre point de vue, très sérieuses
sur ce qu'éventuellement le Québec aura à vivre. Je n'en
mentionne que quelques-unes. Par exemple l'article 129, l'article 88, l'article
41, sont tous des articles que nous n'avons pas eu le temps d'examiner. Quand
le gouvernement nous a envoyés à cette deuxième commission
parlementaire, nous sentions fort bien qu'il avait un seul objectif à
atteindre, c'était l'échéance scolaire. C'était
vraiment là l'impératif le plus urgent pour le gouvernement. Et
on pouvait prévoir que déjà cet objectif atteint,
c'est-à-dire qu'après avoir passé à travers les
articles touchant la langue d'enseignement, le reste aurait plus ou moins
d'importance et que ce qui comptait c'était, après l'adoption du
chapitre de la langue d'enseignement, qu'on puisse en finir avec le reste.
Pourtant, il faut regretter très profondément que nous
n'ayons pas encore abordé la langue de travail, nous n'avons pas
abordé la question de la francisation des entreprises. D'autres de mes
collègues ont fait valoir avant moi, et probablement de façon
plus éloquente, quelles vont être les répercussions au plan
économique, par exemple, d'un chapitre touchant la francisation des
entreprises qui ne tient pas compte de la réalité. Trop souvent,
le projet de loi présente des articles qui sont davantage basés
sur des appréhensions non fondées.
Quand on ne se base pas sur la réalite, mais bien davantage sur
des appréhensions qui n'existent vraiment pas, cela produit des
formulations d'articles qui sont vraiment injustifiés et tracassiers au
point où on peut se demander dans quelle mesure la loi pourra être
appliquée d'une façon convenable. Il faut avoir
étudié un certain nombre de ces articles pour réaliser que
le gouvernement devra faire face à des difficultés et des
contraintes dans l'application de cette loi.
Evidemment beaucoup ont fait des gorges chaudes et ont indiqué
que l'Opposition faisait un "filibuster" plus ou moins systématique. Je
vous ferai remarquer, Mme le Président, que c'est avec beaucoup de
conscience que nous avons étudié le chapitre des droits
fondamentaux, ce qui fut assez facile, et ensuite le chapitre de la langue
d'enseignement.
Nous partons d'une philosophie différente, ce qui a fait que
l'étude de ce chapitre a été assez longue. Je pense que
personne ne pourrait retracer dans cette étude des indications de
"filibuster". Je sais que vous allez vous lever pour dire que je ne suis pas
dans la pertinence du sujet, d'accord, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Mme le député de
l'Acadie, je sais que vous avez été très assidue à
la commission parlementaire, qu'il vous est très difficile de ne pas
vous référez comme telle aux travaux de la commission. Je vous
demanderais de tenter de vous en tenir à la pertinence du
débat.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que si je pouvais me
référer et je suis d'accord avec vous, Mme le
Président, je ne conteste pas votre décision aux travaux
de la commission, il y aurait peut-être moyen ici de faire valoir
certains arguments qui auraient plus de valeur que si je m'en tiens à la
pertinence qui est de dire au gouvernement: Vous nous mettez la guillotine.
Vous nous mettez la chaise électrique, etc. Je pense que ceci, tout le
monde le sait. C'est peut-être pour cela que j'ai tendance à
m'écarter de ce qu'on appelle la pertinence du sujet.
Je voudrais quand même inviter le gouvernement à
réfléchir sur le geste qu'il va poser ce soir. Evidemment,
j'entendais une réflexion de l'autre côté de la Chambre
pendant que mon collègue parlait à l'effet que la population
réclame cette guillotine. Qu'on ne soit pas si certain de cela. Pour ma
part, je comprends que le gouvernement fasse cette sorte de projection. Ce
n'est pas la population qui réclame la guillotine; c'est le gouvernement
qui se sent coupable que dans l'organisation de ses travaux parlementaires il
n'ait pas prévu suffisamment de temps pour qu'on puisse faire
l'étude au complet de ce projet de loi et vraiment mettre à la
disposition de la population un projet de loi qui non seulement réponde
aux besoins des gens, mais également amène une participation et
une collaboration de tous les groupes qui forment la société
québécoise.
Je réalise fort bien que le gouvernement se sente de plus en plus
gêné dans la position où il se trouve. Nous sommes rendus
à la fin d'août. Des chapitres importants n'ont pas encore
été touchés, et il se demande, devant les critiques sur la
lenteur des travaux parlementaires, ce qu'il devrait faire.
Mme le Président, je voudrais dire, en terminant, qu'on a
assisté à deux scénarios identiques. Un premier
scénario lors de la commission parle-
mentaire sur l'audition des mémoires, durant lequel le ministre
d'Etat au développement culturel et les membres de la commission du
côté gouvernemental ont totalement et complètement presque
toujours tenté de diminuer les représentations qui étaient
faites.
Aujourd'hui, quand on nous expose à la guillotine, le
scénario de la deuxième commission parlementaire est identique au
premier. C'est dans ce sens que le gouvernement est fermé, qu'il est
hermétique. De toute façon le gouvernement déciderait-il
de continuer le travail de cette commission parlementaire que les
résultats sur les modifications qu'on pourrait apporter à la loi
seraient sans doute minimes.
Je veux ici déplorer d'une part le bâillon qu'on nous
impose et d'autre part le peu de sens de responsabilités du
gouvernement. Je pense qu'il pourrait difficilement contredire ceci. Il a quand
même vu les efforts de l'Opposition, qui ont été
extrêmement pénibles, apporter des améliorations mineures,
il faut bien l'admettre, à la loi, puis ouvrir les yeux du gouvernement
sur certains manques de concordance qui existaient à l'intérieur
de la loi, sur certains aspects de discrimination qui pouvaient exister
à l'intérieur de la loi.
Je pense qu'éventuellement grâce à nos efforts
je le souhaite on tentera d'appliquer la loi peut-être avec
un peu plus d'humanité, de souplesse et de compréhension. Cela
aura peut-être été, finalement, le résultat des
nombreux efforts que moi-même et mes collègues avons fournis tout
au long de ces deux commissions parlementaires.
Je peux simplement formuler deux choses, évidemment un
blâme à l'égard du gouvernement qui choisit de
procéder de cette façon et, deuxièmement, un souhait
qu'à l'avenir la planification du gouvernement soit telle que, quand des
projets de loi de cette importance arrivent devant la Chambre, on ne soit pas
soumis à des impératifs qui ne tiennent vraiment pas compte du
bien de l'ensemble de la population, mais qui sont à court terme et trop
politiques dans le sens partisan du gouvernement. Merci, Mme le
Président.
M. Dubois: Mme le Président...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, Mme le Président. Je désire, moi
aussi, faire quelques commentaires sur l'arrêt forcé que vient
d'imposer le leader du gouvernement aux travaux de la commission de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications.
Le bâillon que prévoit l'article 156 devient, dans son
application, un geste que je me dois de qualifier de regrettable
précisément à cause des répercussions
irréparables qu'aura cette motion de clôture sur notre peuple vu
qu'un grand nombre d'articles ne seront jamais étudiés, ni
évalués à leur juste mérite.
Mes collègues, les députés de
Mégantic-Compton et de Gaspé, ont accompli un travail
énorme en commission. Ils ont apporté une très importante
contribution jusqu'à présent, mais voilà que l'impossible
arrive: le rouleau compresseur, la rupture des travaux, le geste le plus
indécent que l'on puisse voir se produire dans une Assemblée qui
se veut démocratique.
Le leader du gouvernement a essayé de justifier sa position
radicale en comparant les heures accordées à cette commission
à celles qu'un gouvernement précédent avait
concédées lors de l'étude d'une loi un peu semblable. Mme
le Président, n'est-ce pas une façon complètement
irresponsable d'évaluer une loi aussi importante? L'Union Nationale a
démontré, sans l'ombre d'un doute, toute l'importance qu'elle
attache à ce projet de loi, lequel met en cause l'avenir même du
Québec et de tous ses éléments. Nous en avons
démontré l'importance en apportant une foule d'amendements des
plus réalistes et des plus positifs.
Aujourd'hui, il est immensément déplorable que nous ne
puissions pas faire valoir nos points de vue et nos suggestions toujours
positives sur une foule d'articles qui seront adoptés à la
vapeur. Il est bien évident que ce gouvernement se croit en possession
de la vérité. Il est aussi très surprenant, quand on prend
la peine de reculer et de comparer l'attitude des mêmes personnes
lorsqu'elles étaient dans l'Opposition, de voir que ce qui était
noir dans le temps est tout à coup devenu blanc.
Mme le Président, bousculer un dossier aussi sérieux est
en soi très grave de conséquences et caractérise vraiment
un gouvernement dictatorial, peu soucieux de l'opinion publique et de l'avenir
du peuple qu'il doit bien gouverner. La démocratie que le gouvernement
prônait au moment où il était dans l'Opposition fait place
à une administration radicale, très peu commune. Nos coutumes et
nos droits ont perdu tout leur sens propre. La guillotine et la matraque sont
devenues des outils d'usage courant chez les gens du gouvernement.
Mme le Président, ce geste mérite d'être
sévèrement jugé. Cette pratique antidémocratique
porte un dur coup à nos coutumes et principalement aux aspirations
légitimes de tout parlementaire désireux de bien servir la
population qu'il représente.
Mme le Président, ayant fait savoir mon désaccord total
sur les procédures employées par le gouvernement, je termine en
indiquant ma grande déception et aussi celle de tous les
Québécois. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Charlevoix.
M. Raymond Mailloux
M. Mailloux: Mme le Président, un opinant à ma
gauche disait tantôt que la raison d'être de cette motion de
clôture est une rentrée scolaire paisible, s'il est possible que
ce soit vrai. On pour-
rait penser qu'il est également possible que l'économie du
Québec, dont on connaît l'état lamentable, continue de se
désagréger, et ce n'est sûrement pas le projet de loi 101
qui donnera le coup de barre nécessaire à la relance
économique.
J'imagine que la motion de clôture qui est en discussion ne
surprend personne ici, dans le Québec, si on analyse le comportement
gouvernemental à la commission de l'éducation et des affaires
culturelles. Malgré les tentatives sans cesse renouvelées de
l'Opposition officielle et des autres oppositions de chercher à faire
bénéficier le projet de loi 101, à le bonifier, c'est
toujours par une fin de non-recevoir que les parlementaires ministériels
ont refusé toutes ces suggestions.
Face à une telle arrogance, une telle suffisance de gens qui se
croient en possession tranquille de la vérité, je lève mon
chapeau à l'endroit des collègues de notre formation politique et
des autres formations qui, sous les injures des ministériels, ont,
durant ces interminables séances, tenté de faire valoir le point
de vue de ceux que nous représentons et qui sont majoritaires au
Québec. Il suffirait, je pense, d'analyser l'expérience en la
matière du député de L'Acadie, qui vient de me
précéder, dont la compétence, la pondération, la
destinaient à faire mettre en lumière les failles du projet de
loi 101. On ne peut douter, non plus, de l'à-propos des suggestions du
député de Marguerite-Bourgeoys qui, alors qu'il oeuvrait pour la
francisation des entreprises sans mesures coercitives, avait fait progresser le
français à pas de géant durant les années qui
viennent de s'écouler.
Que vaut la tentative louable de prodiguer des conseils, des amendements
à des gens qui sont en possession tranquille de la vérité,
de leur vérité bien à eux? Ils s'apercevront d'ailleurs
très vite que cette vérité tranquille, elle est
plutôt partagée par ceux, dans la réalité de tous
les jours, qui n'en connaissent pas le premier mot. Les gens de chez nous qui
sont parmi les premiers habitants du Québec, qui sont des unilingues
français, disent de ceux-là: Des rêveurs qui ne sont en
aucune façon collés à la réalité
économique du quotidien. Cette motion de clôture que nous avions
apportée nous-mêmes, lors de l'étude du projet de loi 22,
on se rappellera que l'Opposition d'alors avait, pendant des jours et des
jours, sur l'article 1 qui voulait simplement faire du français la
langue officielle du Québec, fait une obstruction systématique
qui n'avait pour but que de faire une opposition sans arrêt au projet de
loi 22. Cela n'a été, en aucune façon, l'attitude que nos
collègues ont adoptée durant l'étude du projet de loi 101.
Ils ont tenté de raisonner le gouvernement sur l'à-propos des
amendements qu'il aurait été nécessaire d'apporter afin de
rendre acceptable à une majorité de Québécois ce
projet de loi sur la langue.
On sait de quelle façon cavalière on a repoussé
tous ces arguments. Mme le Président, on a oublié que le
Québec a vécu et devra continuer à vivre, dans le
continent nord-américain, dans une mer de parlant anglais avec qui,
qu'on le veuille ou pas, on devra continuer à communiquer. Il y a deux
ou trois ans, j'avais été estomaqué, lors d'un voyage
d'étude des systèmes de transport dans la ville lumière de
Paris, de constater qu'en visitant l'aéroport d'Orly, dans la ville qui
devrait être, j'imagine, La Mecque du français, de constater,
dis-je, qu'une forte partie du travail des ateliers de réparation avait
comme langue d'usage l'anglais, vu les manuels disponibles d'une langue
universelle, manuels dont la complémentarité était
à nulle autre pareille. Ici, on se gargarise en disant que seul le
français aura le pas dans le Québec.
Mme le Président, depuis quinze ans, j'ai vu deux gouvernements
chuter lamentablement sur des projets de loi d'ordre linguistique, et j'ai vu
deux gouvernements, le gouvernement Bertrand, le gouvernement Bourassa,
être aussi arrogants que l'actuel gouvernement en pensant qu'avec son
projet de loi linguistique il réglerait l'ensemble des problèmes
du Québec. J'ai connu cette arrogance à deux occasions
déjà, certains de mes collègues l'ont connue aussi.
Mme le Président, je termine en disant que, quand nous avons
voté ces deux projets de loi, nous avions indiqué le chemin que
nous avons parcouru par la suite et qui a vu chuter ces deux gouvernements.
Votez votre bill 101, votez votre motion de clôture, votre lit est fait.
Ne vous en faites pas, jamais deux dans trois, vous irez dans la même
direction.
M. Duhaime: Même dans le comté de Charlevoix.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le
député!
M. Mailloux: Vous irez là.
M. Lamontagne: Mme le Président, sur une question de
privilège.
Mme le Vice-Président: Sur ce qui vient de se passer, tout
de suite?
M. Lamontagne: C'est effectivement la première occasion
que j'ai, depuis 12 h 55, alors que je viens de recevoir à l'instant la
copie du journal des Débats, de souligner ce qui, malheureusement, s'est
passé quelques minutes avant la suspension des débats. Je pense
que ceci mérite d'être clarifié autant pour le journal des
Débats que pour la présidence, que je respecte
profondément, et également pour moi, Mme le Président.
Vous me permettrez de signaler la phrase qui apparaît, que j'ai dite dans
le journal des Débats, et la réponse de la présidence. "M.
Lamontagne: Mme le Président, rappelez-les à l'ordre par leur nom
respectif. Quand c'est le leader du gouvernement... "Mme le
Vice-Président: ... M. le député de Roberval, je vous
demanderais un peu plus de délicatesse..."
Il ne m'est pas apparu, Mme le Président, que mes mots
étaient indélicats et en même temps vous avez parlé
de décence. J'apprécierais, Mme
le Président, que vous relisiez vous-même le journal des
Débats pour bien clarifier parce que je l'ai en main si
vous aviez rappelé à l'ordre le leader du gouvernement. Je pense
que vous avez la réponse ici.
M. Burns: Ce n'est pas une question de privilège.
M. Lamontagne: C'est une question de privilège où
on...
M. Burns: Voyons donc! Lisez votre règlement, ce n'est pas
comme cela qu'on fait cela, voyons donc!
M. Lamontagne: Mme le Président, s'il vous plaît, je
pense que c'est justement dans une telle circonstance qu'on peut le faire. Je
venais de le souligner avant qu'il arrive. A la minute où il arrive, il
veut prendre le crachoir tout de suite, comme il le fait souvent. Je signale
que c'est le premier instant que j'ai de le porter à votre attention,
avec toute la déférence que je vous dois, Mme le
Président. Mais c'est indiqué dans le journal des Débats;
je le signale, je pense que c'est normal, comme parlementaire. Cela me donne,
pour le moins, raison.
M. Burns: Utilisez donc les procédures qui sont
prévues dans le règlement et n'achalez pas la présidence
avec cela.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Roberval, je vous dis simplement que je relirai le journal des Débats et
nous verrons.
M. le député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. En commission
parlementaire, l'Opposition officielle a tenté d'apporter des
recommandations, des suggestions et des amendements, dans un esprit positif, au
sujet du projet de loi 101. Nous avons réalisé les
conséquences de ce projet de loi pour tous les Québécois,
et l'esprit dans lequel nous avons apporté les amendements et nos
discussions étaient pour améliorer le projet de loi une fois que
cela aurait été accepté à cette Assemblée
nationale. Nous avons cru que c'était notre obligation et notre devoir
d'essayer d'en discuter dans une atmosphère dans laquelle nous pourrions
améliorer le projet et minimiser les conséquences
négatives possibles sur tous les Québécois.
Mme le Président, je dois vous avouer que je suis fatigué
de parler de la langue, je suis fatigué d'assister à cette
commission parlementaire. Nous avons une intransigeance, une
inflexibilité du gouvernement, nous avons eu un blocage
systématique à n'importe quelle recommandation que nous aurions
pu apporter. Les ministériels se sont plus à s'opposer
systématiquement même à la recevabilité de chacune
des motions d'amendement que nous apportions aux articles du projet de loi.
Je devrais dire que je voudrais continuer l'étude du projet de
loi, que je devrais être contre la motion de clôture que le
gouvernement essaie de nous imposer, mais je dois être honnête avec
les membres de cette Assemblée, cette commission est futile, absolument
futile. Je vous donne deux exemples. Il y a eu seulement un amendement qui a
été accepté par le gouvernement sur la question des
handicapés, et cela a pris beaucoup de temps avant que le gouvernement
l'accepte. Cela aurait été honteux que ce soit
éliminé et pas inclus dans le projet de loi original, ni dans le
projet de loi no 1, ni dans le projet de loi no 101. Quand il s'agit, Mme le
Président...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mont-Royal, je vous demanderais de parler sur la motion comme telle.
M. Ciaccia: Je parle sur la motion, je veux vous montrer combien
il est inutile de continuer avec la commission parlementaire. Je dis que cette
motion est le premier geste honnête que ce gouvernement a posé
vis-à-vis du projet de loi. Nous avons été soumis à
une guillotine quotidienne à la commission parlementaire. Tous les jours
on nous bloquait, on nous insultait. Vous n'avez qu'à lire le journal
des Débats de la commission pour voir les abus personnels envers chaque
membre, résultant des remarques du ministre d'Etat...
Mme le Vice-Président: M. le député, avant
que quelqu'un d'autre ne soulève une question de règlement, je
vais devoir vous rappeler à l'ordre. Bien sûr, vous avez
participé à la commission parlementaire, et comme je le disais
à Mme le député de L'Acadie tantôt, il est fort
difficile pour un député qui a été fortement
concerné par les problèmes de ne pas faire
référence aux délibérations comme telles de la
commission parlementaire. Je vous demanderais quand même d'être
bien attentif à respecter l'article 99,3 de notre règlement. La
commission n'a pas encore fait rapport.
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Lavoie: J'ai eu l'occasion, même si j'ai dû
m'absenter à plusieurs reprises, aujourd'hui, de suivre, avec
l'instrument que nous avons dans nos bureaux, certains commentaires et
certaines interventions que vous avez jugé à propos de faire
à l'occasion d'interventions de députés de l'Opposition,
des différentes oppositions, où vous interprétez d'une
manière très stricte l'article 99 je ne sais pas quel
paragraphe qui ne permet pas, dans une interprétation vraiment
littérale, de se référer aux travaux d'une commission. Je
me permettrais quand même de différer d'opinion un peu avec vous
sur cette question. Tout en respectant votre opinion...
M. Burns: Voyons donc! Il n'y a pas d'appel d'une décision
de la présidence.
M. Lavoie: Je voudrais faire une remarque, j'ai l'intention
d'intervenir dans ce débat.
Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lavoie: Je veux vous dire que je veux parler sur la
question...
Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: C'est clair.
Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition
officielle, voulez-vous me laisser faire mon intervention et voir ensuite dans
quel sens elle va?
M. Lavoie: Je veux parler sur la question de
règlement.
Mme le Vice-Président: Voulez-vous, vous allez me laisser
faire mon intervention? J'allais dire, M. le leader de l'Opposition officielle,
que je ne prenais pas votre intervention comme un appel de ma décision,
mais que je prends votre intervention maintenant comme une question de
règlement sur l'intervention de M. le député de
Mont-Royal.
Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: Merci, Mme le Président, Excusez-moi, vous
comprenez, avec les heures que nous avons actuellement.
M. Burns: Vous lirez 99.5.
M. Lavoie: ... on peut se permettre... on est sans doute un peu
fatigué après 98 jours de session continue. Je m'excuse d'avoir
élevé le ton un peu trop fort.
Mme le Vice-Président: Sur votre question de
règlement, M. le leader.
M. Lavoie: Je dois vous dire que cette interprétation, je
la considère, à mon humble avis, un peu trop stricte. Pourquoi? A
cause du libellé de la motion même qui est devant la Chambre, que
je ne répéterai pas, mais qui donne ordre à la commission
de l'éducation, des affaires culturelles et des communications de faire
rapport dans un certain délai, et parce que cette commission ne semble
pas avoir, à la discrétion ou selon la décision du leader
du gouvernement, le temps, d'ici une certaine date, d'étudier les 219
articles du projet de loi.
Non seulement il ne devrait pas être défendu de
référer, à l'occasion, sans en faire le procès,
à la commission, mais c'est même essentiel pour éclairer
les collègues de cette Assemblée qui auront à voter sur
cette motion en bonne connaissance de cause. Pourquoi donner ordre à la
commission de faire rapport ce soir à onze heures ou demain avant les
affaires du jour? Il faut bien que les députés soient
renseignés, encore plus ceux qui n'étaient pas membres de cette
commission. Ils ont à décider, eux, en dehors de toute li- gne de
parti, même si on connaît notre système parlementaire
où il y a parfois des votes de parti. Il y a des députés
qui siègent et qui ne font pas partie de groupes politiques nombreux qui
auront à décider, selon cette motion, si la Chambre doit donner
ou ne pas donner à la commission de faire rapport dans un délai
très strict.
C'est tout à fait normal. On ne pourrait pas débattre
cette motion sans parler de ce qui s'est passé en commission, sans
savoir à quel article ils sont rendus en commission, quels sont les
chapitres ou les autres articles qu'il reste encore à étudier. Un
député peut être intéressé à la langue
de la législation; il faut quand même qu'il sache s'ils y sont
rendus en bas, à la langue de la législation. C'est la raison
pour laquelle je diffère un peu d'opinion avec vous quant à votre
interprétation trop stricte du règlement. Je crois qu'il est
impossible de participer au débat sans se référer aux
travaux de la commission.
Pour terminer, je pourrais vous souligner que j'ai vécu
personnellement trois, quatre ou cinq motions de clôture.
M. Proulx: Ah bien!
M. Lavoie: Certainement! Sur le salaire des juges, sur la loi 22,
sur la division territoriale, sur l'augmentation du salaire des
députés. Ils retirent toujours les chèques bien
indexés! On a eu un "filibuster" hypocrite, à ce
moment-là. Non seulement ils perçoivent ces chèques, mais
l'indexation aussi.
Des Voix: A l'ordre!
M. Lavoie: Je reviens. Je pourrais vous citer cinq ou six
exemples où le Parti...
M. Burns: A l'ordre!
M. Lavoie: ... québécois, lors de ces débats
de clôture, a fait le procès de A à Z des commissions.
C'est cela.
M. Burns: Allons donc!
Mme le Vice-Président: M. le leader, je vois le sens de
votre intervention et je comprends fort bien que, quand un député
a à voter sur une motion, il faut qu'il soit bien éclairé.
J'aimerais quand même faire une petite mise au point. Certains
intervenants, ce matin, ont été fort habiles en parlant de ce qui
s'était dit dans les journaux par rapport aux commissions, en disant:
Dans les journaux, on a dit qu'un certain nombre d'articles ont
été adoptés. Je crois sincèrement n'avoir pas
été aussi stricte que vous le dites; enfin, c'est une question
d'appréciation. Pour autant que faire se pouvait, j'ai laissé les
intervenants s'exprimer. Ce que j'ai tenté davantage de faire, c'est
qu'on exprime moins son opinion personnelle par rapport à la
façon dont les travaux se sont déroulés.
Je vais redemander à cette Assemblée, aux prochains
intervenants, autant que possible, d'être attentifs à cet article
que je suis tenue de faire
respecter, l'article 99.3 de notre règlement. Je fais confiance
aux députés; je suis sûre qu'ils trouveront moyen de faire
leur intervention tout en respectant le règlement.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. On peut se demander
pourquoi le gouvernement nous impose cette guillotine. C'est parce qu'il est
évident que le public commence à s'apercevoir, comme les membres
de la commission, que ce projet de loi no 101 n'est pas un projet pour
favoriser le français au Québec ni les intérêts des
francophones; c'est un projet de loi qui efface du visage du Québec
l'anglais et les Anglais. C'est évidemment pour cette raison que cette
motion de guillotine est présentée.
C'est parce que c'est une loi où les droits des minorités
sont inexistants. La façon dont cette commission a procédé
semble vouloir provoquer les communautés linguistiques au Québec,
les communautés avec lesquelles on devrait s'entendre. C'est le devoir
du gouvernement de les unir plutôt que de créer des divisions. On
veut imposer la clôture quand le gouvernement n'a même pas fini de
présenter tous ses amendements à la loi. Nous n'avons même
pas eu le loisir de discuter des amendements en commission parlementaire. On
s'est fait dire que, même demain, il y aurait d'autres amendements.
Quelle est l'honnêteté de la guillotine, de refuser de discuter un
projet de loi quand le gouvernement, quotidiennement, toutes les semaines, nous
amène de nouveaux amendements et qu'il n'a même pas fini de nous
apporter des amendements? Si vous aviez été à cette
commission, Mme le Président, vous auriez compris qu'on veut même
sacrifier les services médicaux aux intérêts de la langue.
On ne veut même pas reconnaître la confidentialité des
dossiers médicaux. C'est parce que toutes ces choses commencent à
être connues du public, que le public commence à comprendre le
vrai but de cette commission qu'on veut y mettre fin.
Il y a des principes fondamentaux qui n'ont pas encore été
étudiés en commission parlementaire sur ce projet de loi.
Même si nous sommes fatigués, même si les heures sont
longues, nous avons encore une responsabilité envers le public,
même si personnellement je préférerais arrêter d'en
discuter et passer à quelque chose de plus important, comme
l'économie ou d'autres sujets. Il est tellement important, il contient
tellement de principes fondamentaux qui vont affecter toute la population pour
des années à venir que c'est la responsabilité du
gouvernement d'insister et de voir à ce qu'on puisse discuter le reste
de ce projet de loi.
Je peux vous assurer que nous n'avons pas fait de "filibuster" en
commission parlementaire. C'est faux. Ceux qui essaient de donner l'impression
que nous faisions des "filibusters ", c'est absolument faux. Naturellement,
quand le gouvernement refusait systématiquement de discuter avec nous,
il fallait essayer de défendre notre point de vue. Il fallait, pour les
intérêts de tout le monde, il fallait essayer de faire ressortir
les principes de chaque article de cette loi. Il est évident que,
même dans la rédaction de ce projet de loi c'est cela qui
commence à être évident pour le public il y a une
incohérence, il y a des contradictions. Pour ces raisons, nous avons le
devoir et la responsabilité de continuer à en discuter afin de
faire les amendements qui s'imposent, non pour porter atteinte au but de la
loi. Nous sommes en accord avec le but de la loi si c'est vraiment de
promouvoir le français au Québec. Mais nous avons l'obligation de
nous assurer que les modalités de chaque article de cette loi n'iront
pas à l'encontre et ne seront pas contradictoires au vrai but de cette
loi. Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: Merci, Mme le Président. Pour la nième fois
depuis environ une semaine, nous sommes encore obligés d'intervenir dans
un débat de procédure puisque, effectivement, depuis mardi
dernier, nous avons à peine travaillé une heure sur la
législation. Pourtant, nous avons été élus et nous
sommes payés pour légiférer. C'est pour cela que la
population nous a élus, a élu des députés dans
chacun des comtés de la province et s'est choisi un gouvernement. En ce
98e jour de session, ce qui n'a jamais été égalé
dans les annales politiques du Québec, durant la première partie
de la session, je trouve extrêmement malheureux que nous en soyons une
deuxième fois de suite à une deuxième motion de
procédure pour la suspension des règles de la Chambre et pour
imposer le bâillon aux membres de l'Assemblée nationale.
Je sais que mes propos ne réussiront pas à convaincre le
gouvernement. Je sais que le gouvernement a fait son lit. Mais j'aimerais quand
même lui dire qu'il a fait son lit dans le mauvais lit.
Mme le Président, j'ai regardé les journaux de ce matin.
On ne peut pas me reprocher de ne pas me rappeler certains débats de la
commission parlementaire des derniers jours, je n'ai malheureusement pu y
assister, étant occupé à d'autres fonctions. Mais les
journaux de ce matin nous disent ceci, et je vais illustrer que le gouvernement
fait son lit dans le mauvais lit.
Les journaux de ce matin nous apprennent une série d'amendements
sur la francisation des sièges sociaux déposés aujourd'hui
par M. Laurin. Article à la une, dans le journal Le Devoir. Je suis
membre de l'Assemblée nationale du Québec, concerné par le
projet de loi 101, je serai appelé à voter, je suis appelé
à me prononcer sur la motion qui est actuellement devant nous et je ne
les connais pas les amendements que le gouvernement apporte sur la loi 101.
Dans les mêmes journaux, et je cite le Devoir, je pourrais citer
les autres quotidiens: "Péquistes et libéraux refusent d'engager
un débat sur la langue des entreprises". Le gouvernement s'est
donné comme objectif la francisation des entre-
prises. On ne pourra pas en parler, Mme le Président. Nous avons
été élus par la population justement pour décider
ces choses.
Si j'ai appuyé le gouvernement lors de la deuxième lecture
du projet de loi 101, je l'avais appuyé avec réserve. J'avais dit
à ce moment que j'avais de sérieuses réserves sur tout le
chapitre concernant les entreprises québécoises, la
réglementation qui en découlerait et les obligations qu'on leur
ferait et particulièrement à celles possédées,
dirigées par des Québécois francophones.
M. Gratton: Mme le Président, question de
règlement.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: Je vous ferai remarquer que nous n'avons pas
présentement quorum et qu'effectivement on a la présence de six,
un grand total de six députés du Parti québécois,
Mme le Président.
M. Duhaime: Je vous demanderais de bien vouloir vérifier
si nous avons quorum avant de faire une telle affirmation. Il faudrait le
vérifier.
M. Gratton: Si vous saviez compter vous verriez que...
Mme le Vice-Président: Nous allons vérifier le
quorum immédiatement. Nous avons maintenant quorum.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Roy: Je disais donc, Mme le Président, que le
gouvernement n'est pas prêt à faire voter la loi 101 devant
l'Assemblée nationale. Qu'on ne vienne pas me dire que c'est de
l'obstruction systématique de la part de l'Opposition, puisque hier, Mme
le Président, le ministre parrain du projet de loi a annoncé
lui-même qu'il avait toute une série d'amendements à
déposer aujourd'hui même concernant la francisation des
entreprises et des sièges sociaux.
C'est donc dire, Mme le Président, que le gouvernement a encore
énormément et aurait encore énormément d'autres
amendements à nous apporter sur ce projet de loi. Mme le
Président, les députés qui m'ont
précédé ont dit que le gouvernement était en train
de commettre la même erreur que les gouvernements
précédents. Dans un débat aussi important que celui de la
question linguistique le gouvernement fait la même erreur que les
gouvernements précédents, il oublie que cette loi n'aura de
valeur et ne sera applicable qu'à partir du moment où on pourra
faire un certain consensus. Je ne dirais pas un consensus certain, mais un
certain concensus qui est à la base même de l'acceptation de cette
loi par les entreprises, par les personnes qui sont concernées dans tout
le territoire du Québec.
Le gouvernement lui-même nous donne l'image d'un gouvernement qui
n'est pas prêt. Je ne lui fais pas le reproche de ne pas être
prêt, mais je lui fais le reproche d'imposer le bâillon à
l'Assemblée nationale et d'obliger les députés à se
prononcer sur ce projet de loi alors que lui-même, le gouvernement,
aurait encore des amendements à proposer et alors même que nous
l'avons avisé que, concernant le débat sur la langue des
entreprises et sur les sièges sociaux, nous aurions plusieurs
amendements à apporter et bien des choses à dire de ce
côté.
Mme le Président, je n'ai pas la prétention, mais j'ai la
certitude que je ne pourrai pas convaincre le gouvernement. Cela ne me surprend
pas du tout. J'aimerais quand même lui rappeler ceci: II va falloir que
le gouvernement se donne une autre image que celle qu'il a actuellement
auprès de la population du Québec parce que j'ai la nette
impression qu'il oublie qu'il a été élu le 15 novembre
dernier pour gouverner et administrer le Québec et qu'il y a d'autres
problèmes dans le Québec que celui de la langue.
Si le gouvernement a fait l'erreur de monopoliser l'opinion publique, de
monopoliser l'attention des membres de la Chambre sur l'adoption de ce projet
de loi, au cours de cette présente session, cela fut le choix même
de ce gouvernement, ce fut sa responsabilité. Comme je n'ai pas
l'intention ni la prétention j'aurais bien l'intention, mais je
n'ai pas la prétention de pouvoir convaincre le gouvernement et
que je l'ai mis en garde à plusieurs reprises, je lui dirai ceci:
Continuez comme vous êtes parti, vous êtes dans la bonne voie pour
aller à la même place que les gouvernements qui vous ont
précédé et peut-être plus rapidement que vous ne le
pensez. Actuellement, nous avons la loi no 1, nous avons la loi 101, et j'ai
l'impression que lorsque la loi sera appelée devant l'Assemblée
nationale, compte tenu de tous les amendements qu'on va y retrouver, ce sera la
loi 201...
M. Springate: Loi 401...
M. Roy: ... et, comme le dit l'honorable député de
Westmount, déjà les francophones de Montréal appellent la
loi 101, la loi 401 parce que c'est la voie directe qui conduit les entreprises
du Québec vers Toronto et vers l'Ontario.
Le gouvernement, Mme le Président et je terminerai
là-dessus veut construire de beaux réseaux d'aqueduc,
c'est une comparaison que je fais, mais il oublie de trouver des sources et
surtout il oublie de protéger ces sources. Mme le Président, les
conséquences de cet état de choses sont extrêmement
sérieuses et extrêmement préjudiciables à l'avenir
du Québec et à la mission même que le Parti
québécois s'était donnée lorsqu'il a pris le
pouvoir au Québec.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Bryce Mackasey
M. Mackasey: Merci, Mme le Président. Cela ne me surprend
naturellement pas que nous soyons ici pour discuter de la motion pour impo-
ser la clôture, la guillotine comme vous l'appelez
parce que jamais, à ma connaissance, on ne s'est rendu au mois
d'août avec trois projets de loi, les projets 2, 45, 101, trois projets
de loi majeurs sans en avoir adopté un quand il reste une semaine. Il
faut dire, Mme le Président, que si on manque de temps pour discuter en
profondeur du projet de loi 101, c'est parce qu'on a gaspillé deux
semaines avec le projet de loi 1 en commission à cause du manque de
compétence de la part du gouvernement. Maintenant, parce que le
gouvernement a mal compris le processus parlementaire avec le projet de loi 1
dont on héritait avant la commission, il nie à l'Opposition
l'occasion de discuter le projet de loi 101 qui tout le monde le sait et
certainement le gouvernement aura les conséquences terribles sur
l'économie de notre province. La preuve que le gouvernement comprend
cela naturellement c'est que tous les jours, depuis une semaine, il arrive
devant la commission, et bientôt ce sera devant la Chambre, avec des
amendements à la douzaine.
Attendez, Mme le Président, quand un ministre va être
obligé de venir avec les règlements, là cela va changer,
par exemple. Et attendez que nous ayons adopté ces règlements; il
faudra des milliers de fonctionnaires pour faire respecter ces
règlements par les centaines d'entreprises que l'on retrouve à
Montréal.
Mme le Président, cela ne m'étonne pas du tout que
l'étude du projet de loi 101 prenne fin par la guillotine. Comme le
député de Beauce-Sud l'a souligné, ce sera une grande
journée quand la population passera le gouvernement péquiste
à la guillotine.
Madam President, I want to swing over to the other language which bill
101 will not deny, for no other reason of course that that right flours from
the Constitution. Otherwise, I am sure it too would be denied, in the same way
as the language rights which have existed for so long in this province flowed
from section 93 of the Constitution evolved from a confessional system to a
more practical system but nevertheless evolved because the foundation of that
educational system in this particular province is founded, in the Constitution
of Canada and not in any provincial right.
We can only describe bill 101 which closure will bring to an end, and a
very fitting end for an infamous bill that will go down in history with the
Manitoba Act against the minorities in that province. A bill that is
discriminatory in every way, shape and form against the business community,
against the minority, against the majority in denying them the freedom of their
rights which were always fundamental and synonymous with this beautiful part of
this county.
It is fitting in a way that a bill that is so undemocratic, which
trample on the individual rights of people should be brought to a sorry end by
an unparliamentarian act as the guillotine. And it is tragic, in a way,
because, avec des amendements bien fondés, il aurait été
possible de donner au moins quelque validité au projet de loi 101. Les
amendements qui sont déjà devant la commission auraient pu, au
moins, améliorer un peu le projet de loi 101.
Pourquoi le projet de loi 101 au lieu du projet no 1? C'est très
simple. Un amendement a éliminé la clause 172 où le
ministre a essayé, au nom de la collectivité, d'éliminer
complètement les droits fondamentaux des citoyens de cette province, y
compris'leur langue et leur culture.
In order not to lose time in this period, I say in my words my sadness
I say this sincerely that 10, 20 or 30 years from now, we will
look back on this period in Quebec history as a tragic period, when a minority
within a minority, a minority within the government, a minority within the
cabinet, in their attempt to convert a multicultural, pluralistic society,
Quebec, into an unilingual one culture society has virtually destroyed the
economy of the province, and if it were not for the strong friendship between
the French-speaking and English-speaking people of this province which would
subscribe despite bill 101 and despite this government, we could have driven a
wedge between the English and French, which would have been unfortunate. This
is why so many of us have restricted our words, have hidden their emotions,
have bridled their tongue rather than say what we think that this infamous bill
will go down in history with the Manitoba Act, the Ontario regulations which
suppressed the fundamental rights of the French-speaking minority in Manitoba
and perhaps postponed the day when the unity would have been a fact by 50
years. Bill 101 is stamped by the same error of discrimination. It is tragic
that it could happen in an unlike society in the year 1977.
I accept the guillotine because the sooner this historic act which is a
blot on the history of Quebec which is know for its tolerance, as soon as this
historic act is brought to a death to something almost ironic, as is the
guillotine that has to be used in conjunction with this bill, because this bill
needs to be killed and there is no more traditional way and no more fundamental
way than doing it by guillotine.
And I expected ministers over there who have know some cases for 20
years must feel sorry, must feel sad, must feel ashamed, must feel concerned,
worried that they are, in fact... No, maybe not that minister who has been
sitting in the sun for the last three weeks, but certainly any minister must be
concerned about the Canada clause and the Quebec clause, and what happened in
St. Andrews. Because when I heard on the radio an hour ago people in Ontario
say: Why should we allow French-speaking people going to Ontario to go to our
school when the English people from Ontario cannot necessarily go into the
schools in Quebec? That is bad, that is negative, and it is the type of feeling
and philosophy that we do not want to see spread in this country, but it is
happening.
And if it happened it will set back the progress that the minorities are
finally making and should have made fifteen hundred years ago. It will set it
back if rednecks and reactionaries and the rest of
the country say: A use of an excuse. We are not allowing French-speaking
Canadians to go in school in Ontario or in Alberta or British Columbia or New
Brunswick because after all the huge speaking people in this province cannot go
in the English-speaking system in Quebec. This is something that nobody
expected, it is the type of significant flow from any law that is based on, Mme
le Président, the concept of collectivity and put aside individual
rights. But we come along with la guillotine, or closure which under normal
circumstances is understandable in a parliamentary system. If Mme le
Président, the honourable gentleman look at his watch over there, he has
three months to gather his parts together, for four months we have been here,
and know about to say he stands up. But no matter how eloquent our poet
laureate he is he can never explain, he can never justify, he can never
associate himself with a bill which is discriminatory, a bill, and he should
understand, that is prepared to step on the rights of individuals in the name
of collectivity to be brought in from a party who quite properly have always
stand up for the rights of individuals. We say the power corrupts. A perfect
example, Mme le Président, of corruption of a party in power. PQ first
official act is to bring in a piece of legislation that denied the individual
rights of the citizens of this province. This is some heritage and it is coming
to a proper end through guillotine. There is now more appropriate ways, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Victor-C. Goldbloom
M. Goldbloom: Mme le Président, j'ai fait quelque chose,
cet après-midi et je me demande si le député de
Maisonneuve a pris le soin de le faire. J'ai cherché, dans le
dictionnaire, la définition du mot "transparence". On y trouve quoi, Mme
le Président? "Qualité de ce qui laisse paraître la
réalité toute entière, qualité de ce qui est
transparent évidemment mais "transparent": se dit des
corps qui se laissent traverser par la lumière".
Mme le Président, depuis un certain temps, le gouvernement se
laisse facilement traverser par la lumière parce que les sièges
sont vides.
Au sens figuratif, "transparent", "dont le"...
M. Burns: Ce n'est pas votre meilleure. Mme le
Vice-Président: A l'ordre!
M. Blank: Une question de règlement. On a toutes sortes de
promesses du côté gouvernemental. Promesse du premier ministre,
cet après-midi, on a une promesse du député de Maisonneuve
qui a dit qu'il n'interviendrait pas jusqu'à la fin, jusqu'à la
réplique. Cela fait trois ou quatre fois qu'il intervient dans le
discours du député de D'Arcy McGee.
M. Burns: J'avais promis de ne pas intervenir,
Mme le Président, pendant le discours du député,
mais je n'ai pas dit pour les autres députés.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
J'espère, M. le député de D'Arcy McGee, qu'on va vous
laisser faire votre intervention dans l'ordre. M. le député.
M. Goldbloom: Merci, Mme le Président. Une dernière
définition au sens figuratif: "transparent": "dont le sens caché
se laisse pénétrer aisément".
Mme le Président, il y a, de toute évidence, un sens
caché à cette motion de clôture qui est
présentée par le gouvernement.
Le sens caché est que le dialogue invoqué si souvent par
ce gouvernement, invoqué parce qu'il était pour écouter
tout le monde, parce qu'il était pour partager avec l'Opposition la
responsabilité de la bonne rédaction des lois, qu'il était
disposé à bonifier tout ce qu'il pouvait pondre comme
législation. Tout cela s'en va à l'eau avec le genre de motion
que nous avons maintenant à débattre.
Ce n'est pas la première fois qu'un gouvernement...
M. Springate: Mme le Président, une question de
règlement. Est-ce qu'il y a quorum actuellement? Je m'excuse.
Mme le Vice-Président: II me paraît qu'il y aurait
quorum actuellement, mais je vais quand même demander qu'on compte les
députés.
J'espère que vous n'aviez pas simplement l'intention
d'arrêter l'intervenant, M. le député.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Duhaime: Quand il y a une commission qui siège, je ne
vois pas pourquoi... Cela fait trois fois qu'on interrompt le discours du
député pour le quorum.
Mme le Vice-Président: S'il vous plaît, à
l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!
Je pensais que l'incident était clos, M. le ministre.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, Mme le Président, le ministre n'est
pas tout à fait seul, il a son aumônier avec lui.
Mme le Président, ce n'est pas le premier gouvernement de
l'histoire du Québec qui a présenté une motion de
clôture, encore moins le premier à présenter une motion
dite de fin de session, mais c'est quand même le premier à
s'être vanté auparavant qu'il ne le ferait pas. Je ne
répéterai pas les paroles qui se trouvent au journal des
Débats. Mais voici un gouvernement qui se vantait de toutes sortes de
choses et notamment de la démocratie. C'est lui qui arrive maintenant
avec une motion de clôture.
Mme le Président, je comprends la difficulté, que vous
avez soulignée à plusieurs reprises, de parler d'une motion de
clôture qui affecte le travail d'une commission parlementaire sans parler
du
travail de cette commission parlementaire. Je vous soumets
respectueusement la considération, d'autres l'ont fait, je crois, que
les media d'information ont quand même rapporté largement ce qui
se passe et s'est passé à cette commission parlementaire. Aussi,
les transcriptions sont disponibles à qui veut les consulter.
Je me limite à parler de deux choses. Premièrement, que le
gouvernement, en présentant cette motion de clôture, invoque
l'argument que l'Opposition a eu largement le temps et largement les occasions
de présenter ses amendements, de les faire étudier par la
commission parlementaire. Mme le Président, si vous regardez la
transcription des déabts depuis plusieurs jours, vous verrez que ce sont
des amendements présentés par le gouvernement qui occupent le
temps de cette commission parlementaire.
Ce gouvernement fait travailler la commission parlementaire pour
corriger son tir parce que son tir a été fautif au départ.
Je vous évite une longue considération sur le grand truc,
trouvaille du siècle, du changement du projet de loi no 1 pour le projet
de loi no 101. Aujourd'hui, ayant depuis plusieurs jours consécutifs
fait travailler la commission parlementaire sur ses propres amendements, le
gouvernement arrive et dit: L'Opposition n'a pas à se plaindre, elle a
eu tout le temps voulu de présenter les siens.
Ce n'est pas exactement de la transparence.
M y a dans cela un sens caché. Ce que le gouvernement cache,
c'est une volonté de mettre fin à un processus
démocratique pour lequel il a exprimé, surtout pendant que ses
ténors étaient dans l'Opposition, le plus grand et le plus
profond respect.
Deuxièmement, nous avons pu constater, ici même en Chambre,
le jeu de mots utilisé par le gouvernement. A un moment donné,
sans l'avoir fait dans le projet de loi no 1, il a visé, par le projet
de loi no 101, les institutions hospitalières et les
établissements de services sociaux. Il y a eu des protestations,
notamment parce que les intéressés, n'ayant pas été
visés par le projet de loi no 1, n'avaient pas préparé de
mémoire, n'avaient pas eu l'occasion de comparaître et de discuter
avec l'Opposition leurs préoccupations devant les exigences de la loi.
Le gouvernement les a rencontrés privément par la suite, mais
l'Opposition a été privée de cette occasion, de cette
possibilité de dialoguer avec eux.
Par la suite, le gouvernement a dit: Non, on ne traitera pas les
hôpitaux comme des établissements commerciaux. Tout le monde
intéressé par cette question importante a poussé un soupir
et a dit: Très bien, le gouvernement a finalement compris la raison et a
accepté de ne pas aller trop loin. Or, nous avons dû constater que
ce n'était qu'un jeu de mots, que les hôpitaux n'allaient plus
être affectés par le chapitre du projet de loi qui concerne les
entreprises, le monde des affaires, mais qu'ils étaient
insérés dans le chapitre sur l'administration publique.
Devant de tels petits jeux, des enfantillages au lieu de
procédures parlementaires normales, nous devons dire à ce
gouvernement que sa motion de clôture est mal inspirée et arrive
à un mauvais moment dans le déroulement des travaux de cette
Assemblée nationale.
Il n'y a qu'une seule raison pour appliquer une clôture, une
guillotine je constate que vous m'indiquez, Mme le Président,
qu'il ne me reste que quelques secondes, je respecterai votre directive
à cet égard il n'y a qu'une seule raison...
Mme le Vice-Président: C'est cela, M. le
député.
M. Goldbloom: ... de vouloir mettre fin aux débats, et
c'est la rentrée scolaire. On aurait pu l'Opposition officielle
l'a suggéré séparer le projet de loi en deux
parties et régler le problème de la rentrée scolaire.
Pour terminer, je dis tout simplement que le jeu du parlementarisme est
un vrai dialogue entre les représentants du peuple. Il y a, d'un
côté, ceux qui ont la majorité des sièges et, de
l'autre côté, ceux qui ont la minorité des sièges,
mais ce sont tous des porte-parole du Québec et des
Québécois. Quand on coupe ce dialogue, qui doit être
constructif, et quand on impose une clôture, c'est un triste commentaire
sur le niveau auquel s'abaisse, entre les mains de ce gouvernement, le
parlementarisme québécois.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: Mme le Président, nous arrivons encore
aujourd'hui avec une motion qui n'est pas pour utiliser des mots bien
connus la trouvaille du siècle! Une motion de clôture, une
motion qu'on appelle communément la guillotine. Elle nous est
présentée par un parti qui a fait la promesse solennelle,
à maintes reprises, de ne jamais avoir recours à ce genre de
motion.
La semaine dernière, nous avions une autre motion qui visait
à faire siéger la Chambre possiblement 24 heures par jour pour
mettre fin aux débats. C'était là une motion que je
qualifie d'odieuse. Cette motion a été adoptée hier
seulement et voilà qu'aujourd'hui on revient avec une autre. C'est la
première fois, à ma connaissance, qu'on a, à un jour
d'intervalle, une motion pour faire siéger la Chambre à des
heures impossibles et une autre motion de clôture pour mettre fin
à une commission.
La semaine dernière, je me suis référé, pour
démontrer le ridicule de la situation, à des propos tenus par les
membres du gouvernement, les purs, ceux-là qui n'utiliseraient jamais ce
genre de motion. J'ai utilisé un discours fait en 1974 par le proposeur
de la motion. Et ce discours, il était inscrit au journal des
Débats, page 1263, du 25 juin 1974. J'y retrouve une motion semblable
à celle d'aujourd'hui, exactement, avec cette différence que la
motion de clôture était venue le 26 juillet 1974,
c'est-à-dire un mois et un jour après la première motion.
Voyez l'évolution, la différence!
M. Springate: Mme le Président, je crois qu'on n'a pas
quorum encore. Il y a seulement deux ministres présents sur 26.
Mme le Vice-Président: II nous manque effectivement un
député. Avons-nous quorum? Voulez-vous compter, s'il vous
plaît? Voilà.
M. Gratton: Une directive.
Mme le Vice-Président: Nous avons maintenant quorum; nous
ne l'avions pas malheureusement.
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Question de règlement. Ce serait pour vous
demander si les députés qui sont en train de fumer,
accoudés à la fenêtre en arrière, sont
comptés dans le quorum ou s'ils sont ici simplement comme
observateurs.
Mme le Vice-Président: C'est peut-être ce qu'il
faudrait vérifier, M. le député.
M. Gratton: II me semble que le règlement, à
l'article 100, exige bien qu'il faut qu'on soit assis à notre
siège. Mais c'est important, cher monsieur.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Gratton: Vous êtes payés pour siéger, pas
pour fumer en arrière.
M. Samson: Mme le Président, je soumets à votre
attention qu'aujourd'hui on fait face à une motion de clôture qui
nous est amenée par les purs, ceux-là qui ont fait la promesse
solennelle, n'est-ce pas, qu'on n'aurait jamais, sous leur règne,
à faire face à ce genre de motion. Comme, la dernière
fois, j'ai cité le proposeur de la motion, je vais encore être
fidèle à ce qu'il a déjà dit; je m'en inspire et je
vais le citer encore une fois sur le genre de motion qu'il nous présente
aujourd'hui. Je cite M. Robert Burns. Je pense qu'on va reconnaître son
nom; c'est bien là au journal des Débats, page 2158, M. le
Président puisqu'on a changé de président
daté du vendredi 26 juillet 1974. Ecoutez ce qu'il disait dans ce
temps-là sur le même genre de motion que celle d'aujourd'hui.
L'autre jour, j'ai cité l'autre motion; je cite celle d'aujourd'hui. Il
disait: "M. le Président, le 26 juillet 1974, à mon avis, passera
à l'histoire comme une journée noire du parlementarisme
québécois, comme une journée noire pour la nation
québécoise, comme une journée noire pour le respect de nos
institutions et pour le respect des Québécois." Mon doux
Seigneur, qu'ils ont donc oublié vite les jours noirs de ce
temps-là! Je continue, M. le Président. C'est la deuxième
fois en moins de quelques jours que l'on a ce genre de motion, je vous le fais
remarquer, et écoutez ce que disait le député de
Maisonneuve: "C'est la deuxième fois en moins de deux mois,
(c'était effrayant!) puisque le projet de loi no 22 a
été déposé en première lecture, tout
à fait par hasard, le 22 mai, je crois, ou le 21, en tout cas
près du 22 mai qu'on nous impose une motion de clôture,
qu'on appelle aussi la guillotine, le bâillon ou tout simplement
l'imposition d'une décision de la majorité à
l'Opposition."
C'est ce qu'il disait, le 26 juillet 1974.
Et il continuait en disant: "L'Opposition, je tiens à le dire,
n'est pas seulement les huit députés de l'Opposition, les six
membres de l'Opposition officielle et les deux députés du Parti
crédi-tiste. L'Opposition, on commence à la voir chez le peuple".
Il continuait, à la suite de quelques inter-cades de la part de certains
députés ministériels: "On commence à la voir
également un peu partout dans le Québec. C'est ce qui me permet
de dire que je ne peux interpréter cette motion de bâillon, de
guillotine, la deuxième en si peu de temps de la part de ce gouvernement
numériquement très majoritaire, que comme l'expression de sa peur
de faire face à la population québécoise".
Il continuait plus loin: "On va le dire, on va le redire et on ne le
répétera jamais assez, il y a 45% de la population au
Québec qui ont voté contre ce gouvernement. Nous nous sentons une
obligation de représenter au moins ces 45% de l'opinion publique. Ces
45% de la population, si on les faisait se traduire en opinions sur le projet
de loi 22, je suis certain qu'on en arriverait je n'ose pas avancer de
chiffres de crainte qu'on me dise que je fais de la démagogie je
suis sûr qu'on en arriverait à une proportion infiniment
supérieure à ces 45%".
M. le Président, transposez ce que le leader parlementaire du
gouvernement disait il y a trois ans, qui était alors dans l'Opposition,
transposez cela à aujourd'hui et vous n'aurez qu'une seule chose
à changer à son argumentation, c'est qu'aujourd'hui ce n'est pas
45% de la population qui est contre le gouvernement, mais 59%, donc la
majorité absolue qui est contre le gouvernement.
M. le Président, il continuait en disant ceci:
Une Voix: Cela doit être dur.
M. Samson: M. le Président, je vous souligne que le
député de Duplessis, s'il avait le courage qu'un
député doit avoir en cette Chambre, se lèverait pour
parler là-dessus. Il se lèverait sur toutes les motions, sur tous
les discours, sur tout ce qui concerne un député élu par
la population.
M. Springate: C'est vrai.
M. Samson: Mais comme la majorité de ceux qui
siègent à ma gauche, il ne se lève pas trop souvent.
M. Gratton: C'est un observateur.
M. Samson: Pour empêcher un député de
l'Opposition de parler, vous l'entendez gueuler à ma gauche. Vous a-t-il
demandé le droit de parole, M. le Président. Est-ce qu'il vous a
demandé le droit de parole?
Le Président suppléant (M. Marcoux): Je ne l'ai pas
entendu.
M. Gratton: II n'a pas le droit de parler, c'est un
observateur.
M. Samson: Ouvrez-vous les oreilles parce qu'il commence à
me les agacer pas mal, M. le Président, et je continue parce que cela
leur fait mal. Quand cela fait mal on essaie de nous empêcher de
parler.
Regardez ce que disait votre leader parlementaire, il y a trois ans. Il
disait: "C'est cela que j'appelle la journée noire du parlementarisme au
Québec. Je pense qu'il n'y a aucun gouvernement qui a utilisé,
dans un même projet de loi, deux fois le bâillon". Imaginez-vous si
c'était terrible dans ce temps. Il disait en 1974: II n'y a jamais un
gouvernement qui a utilisé deux fois le bâillon sur la même
loi. S'il n'y en avait jamais eu un avant 1974, je peux vous dire, messieurs du
gouvernement, qu'à partir d'aujourd'hui cela fait deux gouvernements qui
imposent le bâillon sur le même projet de loi, avec cette
différence qu'en 1974, il trouvait cela affreux parce qu'on avait eu le
bâillon deux fois en dedans de deux mois. Aujourd'hui il ne trouve pas
cela affreux de présenter lui-même le bâillon deux fois en
dedans de quelques jours, en dedans de 24 heures, M. le Président.
M. Springate: 24 heures.
M. Samson: C'est la différence, alors qu'il y a tellement
d'autres sortes de problèmes qui auraient pu être
réglés si ce gouvernement avait voulu s'enlever les deux pieds de
la même bottine au lieu de provoquer l'Opposition sur un seul genre de
projet de loi...
M. Gratton:... bottines à part cela.
M. Samson: ... au lieu de tenter d'amener toute l'opinion
publique à penser la même chose. Pendant qu'on pensait à la
langue, M. le Président, et pendant que ce gouvernement nous a
obligés à penser à la langue, les chômeurs pensaient
peut-être moins qu'ils étaient chômeurs, les assistés
sociaux pensaient peut-être moins qu'ils étaient des
assistés sociaux. Ceux qui manquent du strict nécessaire dans la
province de Québec pouvaient peut-être y penser moins parce que
toute la publicité convergeait vers ce même et unique projet de
loi 1 qui s'est traduit en 101 par la suite. Toute la publicité nous
cassait les oreilles tous les soirs. Et aujourd'hui on va imposer le
bâillon à ce que j'appelle...
Le Président suppléant (M. Marcoux): J'inviterai le
député de Rouyn-Noranda à conclure; j'ajoute un peu de
temps, compte tenu du fait que vous avez été distrait. Deux
minutes.
M. Gratton: Consentement unanime, M. le Président.
M. Samson: M. le Président, j'ai le consentement unanime
des membres à ma droite...
M. Perron: Non.
M. Samson: Cela me fait plaisir, M. le Président, de
savoir que c'est encore le PQ qui refuse le consentement. Il me fait aussi
plaisir de vous le dire, que ce soit marqué dans le journal des
Débats, parce que dans quelques années on relèvera
cela...
M. O'Neill: On vous endure, n'abusez pas.
M. Samson: ... et on dira: Chaque fois qu'un député
se levait pour défendre les droits légitimes de ses concitoyens,
chaque fois qu'il avait besoin de quelques minutes de plus, le Parti
québécois est arrivé souvent pour refuser son
consentement. Ne vous cassez pas la tête, vous en aurez peut-être
besoin du consentement d'ici la fin de ces quelques jours de débat, vous
aurez peut-être besoin du consentement unanime. On se le rappellera, M.
le Président, on se le rappellera à ce moment, ce n'est pas fini
cette affaire. Les journées noires du parlementarisme, ce n'est pas en
1974 qu'on les avait, ce n'était que grisâtre en ce temps
là comparativement à ce qu'on connaît aujourd'hui.
Aujourd'hui c'est noir pour vrai et cela semble vouloir rester pas mal dans la
noirceur.
Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le
député de Verdun.
M. Lucien Caron
M. Caron: M. le Président, j'ai un peu
hésité à me lever, pour donner la chance aux
députés pé-quistes de prendre la parole. S'il y en a qui
veulent la prendre, je leur permettrai de le faire avant que je ne le fasse
moi-même...
M. Springate: Des observateurs.
M. Samson: Des observateurs là-bas?
M. Caron: II ne semble pas...
M. Lamontagne: Des observateurs payés. Un instant, nous
allons vérifier.
M. Samson: Inscrivez cela au journal des Débats, M. le
Président. Il n'y a pas un péquiste qui ose se lever.
M. Caron: ... mais je voulais être bien certain que vous ne
vouliez pas prendre la parole avant moi.
M. Grégoire: ... choses sérieuses. Cela, ça
ne vaut pas la peine.
M. Caron: Le gouvernement que nous avons en face de nous, du
moins ce qu'il en reste, parce qu'il y en a plusieurs qui sont partis en
vacances...
M. Springate: II n'y a personne devant nous.
M. Caron: Je dis donc que ce qu'il reste de ce gouvernement est
pris d'une maladie qu'on peut
qualifier d'incurable, cela s'appelle la maladie de la guillotine. Ce
gouvernement est tellement pris par cette maladie que même le premier
ministre, en juillet 1977, à une conférence de presse, a mis un
peu d'huile sur la guillotine en essayant de faire croire à la
population que son bon gouvernement ne serait jamais atteint de cette maladie,
que jamais son bon gouvernement ne permettrait de bâillonner les
députés de l'Opposition, mais cette incurable maladie les a
frappés; comme dirait la fable de La Fontaine, ils en étaient
tous atteints.
Si on laissait ce gouvernement continuer sans dire un mot, on lui
rendrait un mauvais service. Par des conversations privées, on se rend
compte que certains députés péquistes ne sont pas d'accord
avec un tel procédé antidémocratique. Ces quelques
vestiges démocratiques n'osent pas parler contre cette motion car ils
ont peur que la guillotine les atteigne eux-mêmes parce que, dans ce
parti, quand on n'est pas d'accord, on se fait trancher la tête. On
devient silencieux. Je mentionnerai le cas du député de Vanier,
Jean-François Bertrand, qui à l'occasion de la fête du 1er
juillet, s'est opposé à son parti. Depuis le 1er juillet, on n'en
entend plus parler. C'est regrettable.
M. Springate: II n'est même plus ici maintenant.
M. Caron: C'est cela, c'est dommage, j'aurais aimé qu'il
soit ici pour lui dire la même chose; on ne parle pas, c'est effrayant,
on ne parle pas.
M. Michaud: II est en commission parlementaire.
M. Brassard: C'est cela.
M. Caron: Lorsque ce projet de loi a été
déposé, on a entendu plusieurs députés du Parti
québécois dire ouvertement qu'ils s'opposeraient à
certains articles du projet de loi mais, depuis, le grand silence. On leur a
imposé la ligne du parti. Comme d'habitude les députés de
ce parti, pour une raison ou pour une autre, ont dit à
l'extérieur ce qu'ils pensaient et à l'intérieur du
Parlement, se sont contentés de voter selon la ligne du parti.
Lorsque le gouvernement a présenté cette motion, il a mis
en cause un principe. Ce n'est pas seulement pour faire adopter le projet de
loi 101 avant le début des classes, mais c'est surtout parce que ce
gouvernement a honte d'avoir abusé de l'Opposition parce que ce
gouvernement regrette de ne pas avoir accepté la proposition du chef de
l'Opposition officielle, à savoir de scinder le projet de loi 101.
Si on avait écouté le chef de l'Opposition, on n'aurait
pas été atteint de la maladie de la guillotine. Ce jeune
gouvernement n'a pas voulu écouter un homme d'une grande
expérience, le chef de l'Opposition. Aujourd'hui, le gouvernement d'en
face est malade, il doit être malade, il doit motiver sa maladie. C'est
pourquoi même le député de Sa- guenay, hier, s'est senti
dans l'obligation de motiver sa maladie. Malheureusement pour lui,
malheureusement pour le député de Bourget, malheureusement pour
le député de Maisonneuve, malheureusement pour l'ensemble de ce
gouvernement, le peuple ne sera pas complice d'une telle motion.
Par l'intermédiaire des Oppositions qui représentent 60%
ou 59% de la population, les Québécois disent non à cette
mesure parce qu'ils veulent que le projet de loi 101 continue à
être bonifié par le travail des représentants du Parti
libéral et des membres des autres partis de l'Opposition à la
commission parlementaire, notamment Mme le député de L'Acadie,
MM. les députés de Marguerite-Bourgeoys, de Mont-Royal, de D'Arcy
McGee, de Notre-Dame-de-Grâce, de Jacques-Cartier et autres. Ces
députés ont essayé de bonifier la loi mais le
député de Bourget a refusé de les entendre. Aujourd'hui,
il est incapable de continuer à justifier ce refus. C'est pourquoi il a
chargé le député de Maisonneuve des basses oeuvres, de
couper la tête de l'Opposition officielle par la guillotine.
En terminant, je tiens à vous dire, M. le Président, que
je suis scandalisé. Oui, je suis scandalisé. Cela peut faire rire
certaines personnes.
M. O'Neill: Non, on ne rit pas, c'est grave!
M. Caron: J'ai vécu cela, moi aussi, sur les banquettes
d'en arrière, entendre nos bons amis d'en face dire que ce qu'on
faisait... Ce n'est pas croyable à quel point, avec l'expérience
que j'ai vécue depuis 1970, je suis scandalisé du montant que les
députés gagnent dans cette Chambre pour ne pas en faire plus. Ils
ont dit: C'est fini, on ne fera pas cela, nous autres! M. le
député de Rouyn-Noranda l'a dit tout à l'heure, il a
vécu cela lui aussi. Je trouve cela bien effrayant! Pour adopter une
ioi, déposer, faire débattre et faire voter par
l'Assemblée nationale consécutivement deux motions, celle d'hier
restriction des débats et celle d'aujourd'hui, la guillotine. M. le
Président, c'est la première fois dans l'histoire de ce Parlement
qu'un gouvernement, face à l'Opposition, prouve sa faiblesse, parce que
sentir le besoin de présenter ces motions pour faire adopter un projet
de loi, c'est signe, sans aucun doute, je ne dirai pas de lâcheté,
mais sûrement de faiblesse. Je ne puis me faire complice de cette
faiblesse. C'est pourquoi je voterai contre cette motion. Merci, M. le
Président.
Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Fabien Cordeau
M. Cordeau: M. le Président, la motion qui est devant
cette Assemblée, telle que présentée par le leader du
gouvernement, nous prouve encore une fois que ce gouvernement fait fi d'une des
prérogatives de l'Opposition qui est d'étudier consciencieusement
tous les projets de loi que veut bien lui présenter le gouvernement.
Comment voulez-vous que l'on donne notre appui à un projet de loi
qui n'aura pas passé par tous les mécanismes que prévoient
les règlements de l'Assemblée nationale du Québec et qui
stipulent que la commission doit tenir une audition publique, doit
étudier le projet de loi article par article et faire rapport?
M. le Président, si la commission n'a pas eu le temps
d'étudier le projet de loi article par article, logiquement cette
Assemblée ne devrait pas accepter un tel projet de loi, étant
donné qu'une des conditions premières n'a pas été
remplie. Ce qui me surprend, M. le Président, c'est l'attitude
présente de ce gouvernement et, pour vous le démontrer, je vais
vous citer une partie de l'éditorial du Devoir de ce matin, signé
de son directeur, M. Claude Ryan.
M. Perron: II est très bon Ryan aussi, c'est un bon
libéral.
M. Cordeau: Quand cela fait leur affaire, ils l'acceptent.
"Après s'être juré, lorsqu'ils séjournaient dans
l'Opposition, de ne jamais recourir à certaines méthodes
autoritaires qu'il reprochaient alors au gouvernement Bourassa, il est
plutôt ironique de constater que neuf mois à peine après
leur arrivée au pouvoir les stratèges péquistes se voient
contraints d'invoquer à leur tour une clôture jugée
irrecevable il n'y a pas si longtemps. Ici comme en plusieurs autres domaines,
le gouvernement Lé-vesque découvre les contraintes
imprévues du pouvoir. Il prouve une fois de plus que l'on peut avoir la
vertu facile dans l'Opposition, mais qu'une fois au pouvoir on doit agir avec
les moyens du bord, lesquels, vu la très grande latitude laissée
par notre régime aux partis d'Opposition, doivent parfois être
brutaux. D'un point de vue technique, le gouvernement a raison d'agir comme le
laissent entrevoir les deux motions dont était saisie hier
l'Assemblée nationale. D'un point de vue plus large, il commet toutefois
la même erreur que commit en 1974 le gouvernement Bourassa lors de
l'adoption de la loi 22. Dans plusieurs secteurs d'activité visés
par le projet de loi 101, il risque aussi d'infliger au Québec des
contraintes législatives ou réglementaires adoptées
à la vapeur, sans le tamisage approfondi auquel on eût
été en droit de s'attendre. "Lors de l'adoption de la loi 22 en
1974, le gouvernement Bourassa avait commis l'erreur d'oublier que le parti
ministériel, quelle que soit sa majorité, ne saurait constituer
à lui seul tout le Québec. Sûr de sa force, il avait
fermé l'oreille à plusieurs suggestions constructives qui lui
venaient de l'Opposition ou de l'extérieur de l'Assemblée
nationale. Enfin, au bout d'un certain temps, il avait imposé le
bâillon à l'Assemblée, croyant ainsi tourner une page
importante, mais ouvrant à son insu une blessure béante au flanc
du parti majoritaire. "A peu de différences près, le même
scénario se reproduit aujourd'hui. Ce qui est grave, ce n'est pas que le
gouvernement se voie obligé d'invo- quer la clôture pour faire
adopter son projet de loi. L'Assemblée étant formée de
députés qui restent humains, le danger d'un abus des
procédures de la part des groupes d'Opposition n'est jamais exclu. Pour
faire face à une telle situation, les règlements parlementaires
prévoient avec raison la possibilité de recours draconiens comme
ceux qui viennent d'être invoqués par le gouvernement. Le mal
n'est donc ni dans l'existence, ni dans l'invocation du règlement de
clôture. Il est plutôt dans le fait que, pour une deuxième
fois consécutive, à propos d'une question aussi fondamentale que
la question linguistique, un gouvernement québécois se croit
suffisamment en possession de la vérité pour estimer devoir lever
le nez sur des solutions qui traduiraient un large accord de tous les partis
responsables autour de certains objectifs minimaux".
Une Voix: C'est un nouveau député, Ryan?
M. Cordeau: Mme le Président, si j'ai cité M.
Claude Ryan, c'est que je désirais que soit inscrite au journal des
Débats cette partie de cet éditorial.
M. Brassard: Ah bon!
M. Bisaillon: On ne s'en serait pas douté.
M. Cordeau : Je vais répéter ce qu'un autre a dit,
est-ce qu'ils sont tous dans leur niche pour grogner comme cela?
M. Brochu: Surtout de la part de l'ancien président qui
vient d'occuper le fauteuil de la présidence. Il serait beaucoup plus de
rigueur d'observer le silence et le règlement.
Mme le Vice-Président: Je vais devoir vous rappeler
à l'ordre, messieurs, aussi bien des deux côtés. Je pense
que le leader de votre parti voulait probablement défendre votre droit
de parole, M. le député de Saint-Hyacinthe, sauf qu'il le faisait
assis.
M. le député de Gatineau sur une question...
M. Gratton: Premièrement, est-ce qu'on pourrait demander
au député de Montmagny-L'Islet...
Mme le Vice-Président: M. le député. M. le
député de Gatineau, sur une question de règlement.
M. Gratton: C'est parce que c'est le député de
Montmagny-L'Islet qui dérangeait tout le monde dans la "pool room". Il a
compris, il s'en revient de son côté.
Mme le Vice-Président: Je pense que vous vouliez agacer
votre collègue.
M. Gratton: Non.
Mme le Vice-Président: Surtout pas. M. le
député de Saint-Hyacinthe, c'est vous qui avez la parole.
M. Gratton: ... des communications de l'avoir
réveillé. Vous pouvez retourner à votre sommeil.
Mme le Vice-Président: Je vais devoir vous rap-peler
à l'ordre, cette fois-ci, M. le député de Gatineau. N'en
mettez pas trop, je vais devoir vous rappeler à l'ordre, autrement.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, Mme le Président.
M. Brassard: Vous parlez en votre nom, là?
M. Cordeau: Pardon? M. le député de Lac-Saint-Jean
voulait avoir son nom dans le journal des Débats. Il vient de dire un
mot.
Voulez-vous rappeler votre meute?
Mme le Vice-Président: Après cette mise au point,
M. le député de Saint-Hyacinthe, allez-y donc de votre
intervention.
M. Cordeau: Cette citation décrit tellement bien les faits
actuels, soit ceux qui se sont passés à la commission
parlementaire, d'une part, et qui se déroulent actuellement dans cette
Assemblée, d'autre part.
Il est bien entendu que nous appuyons le gouvernement concernant
plusieurs énoncés de principe contenus dans ce projet de loi. Par
contre, nous aurions aimé que le gouvernement se montre un plus
réceptif aux suggestions vraiment positives qu'a
présentées l'Opposition. Mais l'intransigeance du ministre,
parrain de ce projet de loi, a complètement empêché
l'Opposition de remplir son rôle. Par contre, ce gouvernement aura
à répondre à toute la population de son arrogance et de
son manque de réalisme.
Quant à nous, nous avons accompli notre devoir. J'espère
que c'est la dernière fois que cette guillotine opérera et que,
dorénavant, les gouvernements en place sauront agir avec
prévoyance et discemement.
Le Président suppléant (M. Marcoux): II vous reste
deux minutes pour conclure... J'ai ajouté les deux minutes, parce que je
pense qu'on vous a enlevé à peu près ce temps.
M. Cordeau: J'en ai assez, de temps. M. Brochu: Pensez-vous, M.
le Président.
M. Lavoie: C'est au moment où vous l'avez interrompu
vous-même, alors que vous occupiez votre fauteuil.
M. Brochu: Je m'excuse auprès de mon collègue. Sur
la question de règlement, j'aimerais vous féliciter, M. le
Président, parce que depuis que vous occupez le fauteuil, le
député de Rimouski est beaucoup plus sérieux en cette
Chambre, il n'est pas intervenu pour interrompre le député de
Saint-Hyacinthe. Je vous félicite de votre beau travail.
Le Président suppléant (M. Marcoux): J'accepte avec
humour cette remarque du leader adjoint de l'Union Natinale.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau : M. le Président, ce qui me surprend le plus,
c'est la volte-face du premier ministre suite à son engagement lequel
est inscrit au journal des Débats à la page 2263 du 21 juillet
1977. Je suis à me demander ce que vaut l'engagement ou la parole
donnée d'un homme qui occupe une si haute fonction.
Je suis porté à croire qu'il a dû faire une retraite
stratégique devant l'attaque des membres de son caucus. Pour toutes ces
raisons et bien d'autres, je ne pourrai appuyer cette motion intitulée
"le rouleau compresseur".
Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le
député de Shefford.
M. Richard Verreault
M. Verreault: Merci, M. le Président. C'est à
croire qu'il n'y a qu'une seule chose dans cette Chambre qui semble importante,
le projet de loi no 101 ou, si vous le voulez, la Charte de la langue
française. Ce matin, le leader du gouvernement a inscrit au feuilleton,
à l'article 1, une motion des plus antidémocratiques qui ordonne
à la commission permanente de l'éducation, des affaires
culturelles et des communications étudiant présentement le projet
de loi no 101 que soit déposé à l'Assemblée
nationale le rapport de ladite commission, demain le 24, avant les affaires du
jour, et que cette commission mette fin aux travaux aujourd'hui même
à 23 heures.
Le leader est sûrement égaré et se croit encore dans
l'Opposition. Il oublie qu'il est le leader du gouvernement. Cela n'a pas de
sens, il ne pense plus comme autrefois. Je veux bien croire que le promoteur de
cette motion est fatigué, qu'il a travaillé très fort ces
derniers temps. Tout de même, s'il est fatigué, il devrait faire
comme tous les autres ministres et députés ministériels,
prendre des vacances. J'écoutais, ce matin, le leader du gouvernement
lorsqu'il a fait son discours. Il expliquait aux membres de cette
Assemblée pourquoi nous devrions tous voter en faveur de sa motion. Je
n'y ai constaté que du charriage.
J'écoutais, hier, le ministre des Transports, relativement
à une autre motion semblable du leader obligeant les parlementaires
d'accélérer les travaux de fin de session. Le ministre des
Transports manquait tout autant d'arguments que son ministère manque
d'argent de ce temps-ci. Il était ridicule en essayant de faire gober
à cette Assemblée que la motion d'hier et celle d'aujourd'hui ont
plus d'importance que celles présentées par son parti alors que
nous étions au pouvoir.
Messieurs d'en face, ayez donc un infime soupçon
d'objectivité!
Une Voix: Mesdames aussi.
M. Verreault: Ni le Parti libéral ni le Parti
québécois n'a eu et n'a de raison majeure de recourir à
des motions semblables pour obliger les membres de cette Assemblée
à adopter en vitesse des lois qui nécessiteront
éventuellement des amen-
dements et des retouches, faute de prendre le temps nécessaire
pour les améliorer.
Le leader du gouvernement a fait l'étalage de statistiques
démontrant la grande générosité de son parti envers
les membres minoritaires de l'Opposition. Le leader n'a pas eu, à ce
moment, la franchise transparente qu'il a d'habitude. Il sait très bien
que, si cette tolérance a été accordée à
l'Opposition, c'est que cette tolérance l'a très bien servi et a
permis à son gouvernement d'adopter des lois qui avaient une valeur plus
grande à la fin qu'à leur origine. Enfin, au lieu d'adopter
bêtement des lois provenant d'un gouvernement improvisé et
irresponsable, l'Opposition, par son travail infatigable et inlassable,
recommandait au parti péquiste, qui dirige les destinées du
Québec, des amendements de grande valeur qui redonnaient à ces
projets de loi mal préparés un sens positif et bonifiait, par
l'apport d'amendements provenant de l'Opposition, encore une fois, le contenu
original de plusieurs d'entre eux.
Nul besoin n'est de vous rappeler la réimpression du projet de
loi no 1 remplacé par le 101; nul besoin n'est de rappeler la
réimpression du projet de loi 2 qui a dû être revu et
repensé; nul besoin n'est de parler du projet de loi no 31 qui
pénalise honteusement les municipalités du Québec,
laissant supporter à ces dernières l'odieux d'un gouvernement qui
a vraiment peur d'assumer ses responsabilités et qui, plus encore, n'est
pas capable de respecter ses promesses électorales ainsi que toutes
celles contenues dans son programme. Oui, ce programme qui a permis au Parti
québécois de prendre, sous de fausses représentations, le
pouvoir au Québec.
Mme le Président, comment les Québécois peuvent-ils
avoir encore confiance en un tel gouvernement, en un tel premier ministre? M.
le Président, Mme le Président, excusez-moi, vous savez, c'est
comme le gouvernement, on change tellement souvent, parfois c'est madame,
parfois c'est monsieur, alors je m'en excuse, madame.
Mme le Vice-Président: Je trouve que la raison pour
laquelle vous vous excusez n'est pas la bonne, mais je prends très bien
vos excuses, M. le député.
M. Verreault: Alors, ça va, madame, merci. Oui, Mme le
Président, on a un premier ministre qui change de parole aussi souvent
qu'il fume ses cigarettes. Les 41% des Québécois qui ont
accordé leur confiance à ce gouvernement parce qu'ils croyaient
que ce gouvernement péquiste les sauverait de tous les maux
laissés par l'ancien gouvernement ont vite perdu leurs illusions et leur
confiance pendant les neuf derniers mois d'administration de ce
gouvernement.
Le premier ministre a dit et répété qu'aucune
motion de fin de session ni aucune motion de clôture ne serait
présentée par son gouvernement. En effet, un gouvernement, un
nouveau gouvernement avec un nouveau style et je vous dirais, Mme le
Président, mon oeil, pour ne pas dire autre chose nouveau style
dans la prière, nouveau style dans les clôtures
extérieures, intérieures, nouveau style dans la manière de
taper des mains et, enfin, nouveau style dans plusieurs domaines sans
importance. J'ai hâte de voir son nouveau style dans les questions
économiques, dans les questions d'emploi, dans l'aide aux
étudiants, dans l'aide aux agriculteurs, dans l'aide financière
aux municipalités et dans d'autres domaines importants et majeurs. Non.
On ne veut plus que l'on travaille en cette Chambre. On veut faire taire
l'Opposition. Cependant, nous de l'Opposition sommes prêts à
siéger jusqu'à Noël s'il le faut, et cela pour le
bénéfice et l'intérêt de tous les
Québécois.
La motion du député de Maisonneuve n'a pas de sens. Il a
été lui-même défenseur des droits de l'Opposition
alors que l'ancien gouvernement imposait de telles motions. Le leader disait ce
matin que l'Opposition faisait de l'obstruction systématique lors de la
commission parlementaire étudiant le projet de loi 101 article par
article, et citait les articles de MM. Pépin et Rioux. Rien ne sert
d'ajouter des commentaires à ce sujet. Vous comprendrez sans doute ce
que je veux dire. Le Parti libéral, ainsi que l'Union Nationale, a
contribué autant que possible à l'accélération des
travaux en cette Chambre et en cette commission, et cette collaboration a
permis au gouvernement de passer pour un peu plus intelligent que ce qu'il
semble être. L'Opposition n'a pas agi comme l'a fait l'Opposition
péquiste lors du projet de loi 22. Les gens de l'Opposition d'alors, les
péquistes pour les nommer ainsi, ont mis dix jours à gueuler sur
le premier article. Mme le Président, en mettant fin à la
commission qui étudie le projet de loi 101, nous camouflons un nuage
bien sombre, nous nuisons à la démocratie parlementaire et,
surtout, le gouvernement se prive des sages suggestions de l'Opposition
officielle.
Il est impossible, dans un laps de temps aussi court, de continuer
à étudier en commission les articles restants de cette loi. Je ne
suis pas le seul à douter de la transparence de ce nouveau gouvernement.
Je suis davantage convaincu que ce gouvernement n'est pas un vrai gouvernement
et qu'il n'est pas en mesure de diriger les destinées
économiques, sociales et autres de la province de Québec.
Ce gouvernement est sur le point d'épuiser son répertoire
de rengaines, après l'ancien gouvernement, le fédéral, les
provinces, les Anglais. Il lui faudra bien qu'il se dise et nous
démontre qu'il est là pour prendre ses responsabilités,
qu'il est là pour bien diriger. Le gouvernement nous apportera les
solutions qu'il avait dans Le bon vieux temps. Ils les mettront en pratique,
les sortiront des tablettes poussiéreuses, et tout cela dans le meilleur
intérêt de la population québécoise.
Il reste encore tant d'articles à étudier en commission.
Nous sommes prêts à accorder notre concours, et cela en toutes
circonstances, mais non à des motions comme celles
présentées par le leader du gouvernement. Donc, Mme le
Président, nous de l'Opposition redoublerons nos efforts et notre
collaboration à tous les travaux parlementai-
res. C'est pourquoi je dois vous signaler que je voterai contre cette
motion.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, Mme le Président. On a
discuté, échangé aujourd'hui sur la motion
présentée par le leader du gouvernement inscrite à
l'article no 1 de notre feuilleton, motion qui m'a particulièrement
surpris lorsque j'ai pris connaissance de son inscription à notre
feuilleton. Je tenterai de vous dire en quelques mots pourquoi j'ai
été surpris du dépôt d'une telle motion.
Mme le Président, au lendemain de l'élection d'un
gouvernement on est légitimement porté à émettre
personnellement pour soi-même des commentaires, des
considérations, des opinions sur ce que sera éventuellement le
gouvernement qui vient d'être élu. C'est effectivement ce que j'ai
fait quelques jours après l'élection. J'ai eu l'occasion de
m'interroger personnellement, de faire des prospections, savoir comment cela
irait avec cette nouvelle équipe, particulièrement pour l'avoir
vu agir pendant trois ans lorsque j'étais membre de cette
Assemblée, à l'époque où le gouvernement
d'aujourd'hui formait l'Opposition officielle.
Je dirais, Mme le Président, que l'élection de tout
nouveau gouvernement fait naître des espoirs et c'est légitime
parce qu'une majorité, même si elle n'est que d'environ 40% dans
leur cas, a fait en sorte que l'équipe à laquelle elle a
donné leur appui forme le nouveau gouvernement. C'est particulier dans
le cas du gouvernement du Parti québécois parce qu'on se
rappellera comment ce parti politique, comment cette équipe, lorsqu'elle
formait l'Opposition, avait suscité de nombreux espoirs chez les
Québécois, chez tous ceux qui étaient
intéressés par l'activité parlementaire ici.
Je me rappelle les nombreux discours que j'ai eu à entendre et
où on retrouvait presque tout le temps les mots "participation" et
"démocratie". Quelques jours après cette élection, le 26
novembre, le premier ministre annonçait la formation de son
gouvernement. Il annonçait à grand renfort de publicité
c'était bien pompeux, vous vous le rappelez certainement
la nomination d'un ministre d'Etat à la réforme
parlementaire.
Je me disais, moi, Mme le Président: Ces gens, pendant trois ans,
ont été virulents, continuellement, de façon
régulière, de façon soutenue, ils ont toujours
parlé pour et au nom de la démocratie, pour et au nom de la
participation, pour et au nom de l'élargissement du cadre
législatif pour que les députés puissent vraiment
participer aux débats et toujours contre des motions de cette nature. Je
me suis dit: Probablement que c'en est fini des motions de fin de session.
Probablement que c'est chose du passé. C'est ce que je formulais,
c'est ce que j'espérais. Inutile de vous dire que j'ai été
drôlement déçu. D'autant plus que je me rappelais les
nombreux discours qui avaient été formulés lors de la
présentation de motions analogues, que ce soit par mon honorable
collègue de Saguenay, qui est maintenant ministre des Transports, que ce
soit par le député de Maisonneuve lui-même, le
député de Sauvé.
Mme le Président, je suis certain que vous n'avez pas lu, vous
n'en avez pas eu l'occasion et je vous comprends, vous êtes trop
occupée et, à cette période, vous étiez
occupée à des vacations autres que celle de siéger comme
député. Si vous aviez entendu ces remarques, Mme le
Président, c'étaient toujours des journées de deuil
parlementaire, c'était toujours la grande noirceur législative.
Je vous fais grâce de reprendre le journal des Débats je le
pourrais et relire le savant discours, entre autres, du
député de Sauvé. Vous ne me croiriez pas. Vous vous
lèveriez, Mme le Président, j'en suis convaincu, et vous diriez:
M. le député de Portneuf, même si le règlement ne le
prévoit pas, je vous prie de déposer ce document. Je suis presque
assuré que vous diriez cela parce que cela n'avait pas de bon sens et je
ne veux pas reprendre ces textes, Mme le Président, parce que vous allez
dire: C'est du pareil au même. Ce n'est pas cela. Ce serait certainement
bien facile. Je ne le ferai pas.
Je me limiterai à vous dire, dans le cadre du débat sur
cette motion, qu'on est d'autant plus surpris que, lors de la
présentation du projet de loi 1, lors de la présentation du livre
blanc pour commencer on avait fait état que les gens
seraient consultés et qu'il y aurait une participation. Que les gens
seraient invités à venir faire part de leurs commentaires. Ce fut
le cas après le dépôt du projet de loi no 1. On a
convoqué les organismes, on n'en avait pas entendu la moitié, Mme
le Président, qu'on a dit: C'est fini, on a assez entendu, on a assez
écouté, on retire le projet de loi.
Un autre projet de loi: 101. Celui-là, déférence
à la commission parlementaire, étude article par article. On n'a
pas commencé qu'on a taxé l'Opposition officielle de faire un
"filibuster". Je vous ferai remarquer, Mme le Président, qu'on a
près d'une cinquantaine d'articles d'adoptés. Je vous ferai
remarquer pour y avoir participé seulement une journée
chose très curieuse, que le gouvernement s'est toujours
opposé à accepter quelque amendement que ce soit qui était
proposé par les membres de l'Opposition. Et Dieu sait, Mme le
Président entre autres la journée où j'ai eu
l'occasion de siéger qu'il y a eu des amendements qui
étaient quand même mineurs, qui, normalement, auraient dû
être reçus de bon gré, des remarques judicieuses sur la
langue de la Justice et de l'administration. On a fait fi de tout cela. On est
à même de constater que les membres de la commission
étaient un peu désemparés, mais on a quand même fait
fi des remarques des gens qui étaient expérimentés, entre
autres, des avocats, membres de la commission parlementaire et qui
siégeaient pour et au nom de l'Opposition officielle.
De plus, ce qui témoigne et qui fait preuve que le gouvernement
ne devrait pas présenter une motion comme celle-là, encore
aujourd'hui, Mme le Président, au moment où on se parle, les
infor-
mations sont en ce sens qu'il y aurait encore des amendements qui
seraient déposés ou qui auraient été
déposés il y a quelques minutes par le gouvernement dans
l'étude du projet de loi, et la motion vient nous dire que les travaux
doivent se terminer ce soir, à 23 heures, et le rapport fait demain. Ce
n'est absolument pas acceptable. Quels sont les motifs que peut rechercher le
gouvernement? J'en vois deux. Le premier motif, c'est le motif des vacances.
D'accord que c'est la fin de l'été, d'accord qu'on est ici depuis
le 8 mars et, comme le député de Beauce-Sud le disait tout
à l'heure, on est en train d'établir un nouveau record à
l'Assemblée. D'accord que plusieurs parlementaires sont fatigués;
je n'en doute pas parce qu'on est à même de constater qu'il n'y en
a pas un du Parti québécois qui veut se lever et nous dire pour
quel motif on devrait être pour, il n'y en a pas. J'aurais aimé,
j'aurais souhaité, j'apprécierais entre autres que mon
collègue, mon bon voisin de Chauveau, le ministre des Affaires
culturelles, profite du temps qui lui est alloué pour venir nous dire:
M. le député de Portneuf, je ne suis pas d'accord avec vous et
les motifs pour lesquels nous appuyons la motion sont ceux-ci...
Une Voix: II faudrait que l'abbé Dion soit là pour
écrire un texte!
M. Pagé: La même chose pour le député
de Saint-Henri, le ministre de l'Immigration. Je suis convaincu qu'il pourrait
venir nous dire de façon sereine, de façon calme: On est pour
cette motion pour tel et tel autre motif. Mais non, il n'en est pas question.
Le premier motif que je vois, c'est de se dépêcher
d'accélérer la fin des travaux pour qu'on puisse prendre des
vacances, et encore là, pourquoi avoir ce motif? La très grande
majorité des ministres, jusqu'à maintenant, ont pris leurs
vacances, les députés aussi de façon rotative,
c'était 15 ou 16 par semaine. Peut-être que, dans leur
réponse, les députés ministériels pourront me
confirmer cela. Leurs vacances sont prises, ils ont eu l'occasion de
bénéficier des beaux jours de l'été. Si ce
n'était pas au Québec, c'était à l'extérieur
parce que plusieurs d'entre eux, au grand désarroi du ministre du
Tourisme, sont allés se promener à l'extérieur. Ce n'est
pas ce motif.
L'autre motif, c'est la rentrée des classes. C'est un motif qui
est tout à fait légitime auquel, d'ailleurs, le chef de
l'Opposition officielle a souscrit. Notre proposition se voulait très
positive, on a dit: Scindez votre projet de loi, nous sommes disposés
à accepter la phase des trois lectures, une nouvelle loi qui pourrait
être spécifique sur toute la question de l'enseignement
étant donné qu'elle a été étudiée en
commission parlementaire. On a voulu apporter notre contribution. Encore une
fois, on s'est fait dire: Non. Nul besoin de vous dire que, pour tous ces
motifs, je suis contre le dépôt de cette motion, mais je ne
formule qu'un voeu. On ne le sait pas, peut-être que le gouvernement va
retirer sa motion parce qu'il n'y en a pas encore qui ont eu l'occasion de
parler, comme je le disais tantôt. Mais, même si le gouvernement
vote pour la motion, j'espère que les remarques des
députés de l'Opposition, parce qu'ils auront été
les seuls à parler, somme toute, auront au moins contribué
à sensibiliser le gouvernement sur cet épineux problème
des fins de session. Je conclus, Mme le Président...
Mme le Vice-Président: C'est cela. Je voulais simplement
vous rappeler qu'il vous reste tout au plus une minute et je vous demanderais
de conclure.
M. Pagé: Tout au plus une minute. Bon. Ce que je disais,
Mme le Président, c'était ceci. J'espère que
l'intervention des députés de l'Opposition face à cette
motion, même si elle ne fait pas changer la position du gouvernement,
pourra au moins contribuer à sensibiliser ce gouvernement aux
problèmes que comportent les fins de session. J'espère
qu'à la lueur de la nomination d'un nouveau ministre d'Etat à la
réforme parlementaire -c'est personnellement que je l'espère
des motions comme celles-là n'apparaîtront pas à
notre feuilleton. On a déjà parlé de la possibilité
de sessions à date fixe, on a parlé de la possibilité de
différents amendements ou modifications à notre système
parlementaire. Je formule le voeu, bien respectueusement, Mme le
Président, que l'honorable leader du gouvernement continue à
travailler de façon acharnée là-dessus, de façon
très forte et que, dans le plus bref délai et si possible pour la
prochaine session, il ne nous amène pas des motions comme
celles-là. Il sera, je l'espère, exempt de subir l'odieux qu'il
subit actuellement.
M. Burns: Je vous le promets.
M. Pagé: Vous le promettez formellement, de votre
fauteuil. C'est bien.
M. Burns: Oui, formellement, de mon siège. M. Marchand:
Le premier ministre avait...
M. Pagé: L'Opposition aura au moins contribué
à faire en sorte que le ministre se prononce.
Mme le Président, pour tous ces motifs, nous serons contre la
motion. Comme je vous le disais tantôt, j'apprécierais que les
savants collègues qui forment le gouvernement puissent venir nous dire
quels sont les motifs pour lesquels vous avez le droit, vous savez, de
parler, entre autres les députés d'arrière-ban qui ne
parlent pas souvent, vous pouvez parler, vous avez le même revenu que
nous, vous représentez des électeurs on devrait être
pour et quels sont les motifs pour lesquels ils sont pour cette motion. Je
serais bien heureux de les entendre.
Mme le Président, je vous remercie beaucoup.
M. Burns: C'est fini.
Mme le Vice-Président: II est 18 heures, M. le
député de Jacques-Cartier... M. le député de
Jacques-Cartier a déjà parlé. C'est M. le
député de Robert-Baldwin.
M. O'Gallagher: Je voudrais demander la suspension de nos travaux
jusqu'à ce soir 20 heures.
Mme le Vice-Président: D'accord, c'est vous qui aurez la
parole à la reprise du débat. Il est 18 heures. Cette
assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 10
Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Sur la motion du leader parlementaire du gouvernement, M. le
député de Robert Baldwin avait la parole.
M. Marchand: Mme le Président, est-ce que je pourrais vous
demander une directive?
Mme le Vice-Président: Faites toujours, M. le
député de Laurier.
M. Marchand: Puisque vous avez suspendu les travaux à 6
heures et que vous les avez commandés pour 8 heures, je signale qu'il
est 8 h 11 et je vous demanderais qui vous avez attendu puisque le parti de
l'Opposition officielle était présent à l'Assemblée
nationale. Vous avez attendu les membres du parti séparatiste pour
ouvrir l'Assemblée, ce soir.
M. Bisaillon: Ce n'est pas une directive. En quoi ce serait une
directive? J'aimerais cela le savoir.
M. Perron: Le député de Laurier a l'intention de
charrier tout le reste de l'année.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le
député! A l'ordre!
M. Ouellet: II n'a même pas son permis de transport en
vrac.
Mme le Vice-Président: Je vais quand même rendre la
justice. Ce ne sera pas une directive, ce sera simplement un commentaire. Quand
je suis entrée à l'Assemblée quelques secondes avant huit
heures, il y avait déjà cinq députés du parti de
l'Opposition officielle qui étaient là. Est-ce que cela vous fait
plaisir, M. le député de Laurier?
M. Marchand: Merci, madame.
Mme le Vice-Président: Le plaisir est pour moi.
M. le député de Robert Baldwin.
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: Merci, Mme le Président. Je vais commencer
mes remarques sur la motion du leader du gouvernement qui vise à
"clôturer" l'Assemblée nationale par un bref résumé
de tout le scénario politique que nous avons vécu ensemble, ici,
depuis le 1er avril. On a eu, d'abord, le 1er avril, le livre blanc; ensuite,
le projet de loi no 1, suivi de la commission parlementaire pour entendre le
public et où on a entendu seulement 60 mémoires sur les 260 qui
ont été envoyés au gouvernement.
On a mis aux oubliettes 200 mémoires, préparés par
des citoyens qui se sont donné de la peine
et ont fait des dépenses pour apporter des critiques objectives
et positives sur ce projet de loi. Tous ces mémoires sont allés
au panier. Le gouvernement ne voulait pas écouter la population. On a eu
ensuite le truc politique, la trouvaille du siècle, l'introduction du
projet de loi no 101 pour bâillonner le projet de loi no 1.
Après cela, on s'est fait enterrer par une pile de statistiques
et de pronostics préparés par des démographes
engagés par le ministre d'Etat au développement culturel;
après cela, la commission parlementaire pour l'étude article par
article où les représentants du gouvernement ont refusé
d'écouter le gros bon sens de l'Opposition. Maintenant, la
guillotine!
Notre bon gouvernement transparent vient, par cette dernière
motion de clôture, de mettre ses cartes sur la table, après tout
ce scénario du livre blanc, du bill no 1, de la commission
parlementaire, du public où seulement 60 des 260 mémoires ont
été entendus, le bâillon de la commission par la
substitution au bill 101 et finalement le bâillon du bill 101. C'est
vraiment évident que les extrémistes, dans ce gouvernement
arrogant, abusent de leurs pouvoirs, de la confiance du peuple et de la
démocratie. Il est bien évident pour la population que le projet
de loi est tellement excessif, punitif et coercitif que le gouvernement est
obligé de se servir de moyens draconiens pour lui donner force de loi
par la porte d'en arrière.
Dans tout ce scénario, où est notre premier ministre? Dans
ce malheureux scénario, il est tiraillé, de ses propres mots; il
a honte de s'asseoir à son fauteuil pendant la présentation du
projet de loi no 101, il a trop honte même pour se montrer aux nombreuses
commissions sur les bills 1 et 101.
Où est-il ce premier ministre? Il est sur les plages du Maine
pendant qu'on se fait passer un sapin.
M. Burns: Allons donc!
M. O'Gallagher: Sur les plages du Maine ou caché dans le
"bunker" de l'autre côté de la rue pendant que ses ministres
posent des gestes qui vont certainement causer des divisions entre les
différentes communautés qui forment la population du
Québec. Rappelons-nous, Mme le Président, les paroles du premier
ministre sur cette motion de clôture, paroles qu'il a prononcées
dans cette Chambre le 21 juillet 1977. Cela a déjà
été dit aujourd'hui, mais cela mérite d'être
répété. Je cite le premier ministre, dans le journal des
Débats du 21 juillet: "L'Opposition ne s'est pas fait enlever ses
mercredis, on n'a pas modifié les heures normales de session en vertu de
la traditionnelle motion qui vient ordinairement bien plus vite que cela,
motion qui vise essentiellement, et tout le monde le sait, à
exténuer l'Opposition et à essayer de charrier et de "bulldozer"
des fins de session ou des veilles d'ajournement. Il n'a pas été
question d'enlever à l'Opposition le droit de présenter des
motions de blâme en vertu de l'article 34". Je continue: "Donc, nulle
part il n'a été question de brimer d'une façon
qu'on puisse appeler un comportement habituel, loin de là, c'est
exactement l'inverse les droits parlementaires et démocratiques,
fondamentaux de l'Opposition", etc. Plus loin dans le même discours:
"Là-dessus, je voudrais en profiter, justement, parce que la
première session d'un gouvernement, qui dure et qui s'éternise au
mois de juillet, qui s'en va vers le mois d'août et qui, sait-on
jamais...
M. Burns: Cela va continuer en septembre.
M. O'Gallagher: Cette première session... parce qu'on ne
"bulldozera" pas le Parlement..." Imaginez-vous donc! Les mots de notre premier
ministre.
Un vrai gouvernement ouvert et honnête. En quelques jours, nous
avons une suspension des règles de la Chambre et une motion de
clôture sur un projet de loi qui fera l'objet de procédures
judiciaires éventuelles surtout à cause de son esprit de
vengeance.
In a way, I don't think the government had much of a choice, Madam
President, because this kind of a law can only be imposed by closure, a law
that has to be modified, will have to be modified, will be challenged in the
courts and will be challenged by the Commission des droits de la personne.
En terminant, Mme le Président, je voudrais seulement dire que
cette motion de clôture que fait à sa première session le
Parti québécois aura le même résultat que la motion
de clôture dans le cas du projet de loi 22 en 1974. La population ne
pardonnera pas à la prochaine élection. Merci.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier.
M. André Marchand
M. Marchand: Mme le Président, c'est à l'instar de
toute la population du Québec que je me sens obligé de m'adresser
à vous pour vous parler quelques instants sur la motion du
député de Maisonneuve, motion qui se lit comme suit: "Que
conformément à l'article 156 du règlement, le rapport de
la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications sur l'étude du projet de loi 101, "Charte de la langue
française", après la deuxième lecture soit
déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires
du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses
travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977". C'est une motion, Mme
le Président, qui sûrement parle de la commission
parlementaire...
Mme le Président, je me lève pour vous parler de cette
motion du député de Maisonneuve, un des députés
séparatistes qui avaient le plus dénoncé ces motions comme
ses collègues séparatistes de l'Opposition du temps.
Est-ce que ceux qui sont ici pourraient se lever et dire ce qu'ils
pensent? En effet, Mme le Président, je suis fatigué,
tanné, écoeuré, comme la population du Québec,
d'entendre parler de la
question linguistique. Devant la défaite totale de ce parti au
pouvoir, de ce bon gouvernement, devant le fait économique
désastreux que l'on connaît au Québec, devant la fuite des
capitaux que l'on connaît au Québec, devant la fuite des "jobs"
pour nos travailleurs, Mme le Président...
M. Perron: Des emplois.
M. Marchand: Cela vous fatigue des "jobs". Créez-en donc
et arrêtez donc de crier et levez-vous pour dire ce que vous avez
à dire.
M. Perron: II est choqué.
M. Marchand: Vous êtes trop lâches pour vous
lever.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marchand: Vous êtes comme des coquerel-les, à la
minute que quelqu'un parle et qu'il dit quelque chose qui a de l'allure, vous
vous sauvez. D'habitude, vous avez de la misère à faire le quorum
ici, à l'Assemblée nationale.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier, je vous rappellerais à l'ordre, s'il vous plaît! Je
demanderais aux députés de laisser parler l'intervenant. Il est
bien sûr que les digressions sont faciles quand on est provoqué.
Je vous demanderais, M. le député de Duplessis, de laisser
l'intervenant faire son discours.
M. le député de Laurier.
M. Burns: II n'est pas fin. Il n'est pas gentil.
Mme le Vice-Président: Sur la motion, M. le
député de Laurier.
M. Marchand: Mme le Président, en écoutant le
député de Maisonneuve, je me souviens très bien de sa
gentillesse et je vais essayer de l'imiter. Ce ne sera pas une chose facile
d'aller aussi loin qu'il allait lorsqu'il était de ce côté
de l'Assemblée nationale.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laurier, je dois vous rappeler à la pertinence du débat.
M. Marchand: Mme le Président, je vous dis que, devant la
fuite des "jobs" pour nos concitoyens du Québec, devant les lacunes sans
précédent du placement étudiant pour cet été
1977 et pendant que nos valeureux députés de l'Opposition
officielle travaillent d'arrache-pied à essayer de bonifier cette loi
101 qui nous mène justement à la loi 401,
Montréal-Toronto, le premier ministre a fait des déclarations de
bon petit premier ministre.
Je pense, Mme le Président, que je dois vous citer le
député de Taillon, journal des Débats, le 21 juillet 1977:
"...parce qu'on ne "bulldozera" pas le Parlement, on va laisser aller la
législation jusqu'à sa conclusion normale." Et un peu plus bas,
il continue: "II n'est pas question de commencer ces procédures
d'étouffement du mois de juillet et du mois d'août qu'on a trop
vues. Je me souviens d'en avoir souffert et je ne le ferai pas." Je viens de
citer le premier ministre actuel de la province de Québec, ce bon petit
premier ministre. Nous l'avons vu à St. Andrews et la population a
comparé les photos des journaux de ce bon petit premier ministre en
manches courtes alors que tous les autres premiers ministres étaient
habillés convenablement et représentaient leur province.
M. O'Neill: II n'est pas gentil!
M. Burns: Vraiment, il n'est pas fin!
M. Marchand: Mme le Président, je ne suis peut-être
pas fin, mais il y a certaines vérités qui doivent être
dites et c'est unique dans les annales de la province de Québec, dans
les annales des Parlements. On essaie d'adopter une loi 101, la loi de la
langue officielle au Québec, qui avait été adoptée
par l'ancien gouvernement, d'ailleurs, et à ce moment-là, on
combattait pour dire: La seule langue officielle! Et aujourd'hui, nommez-moi
donc le gouvernement qui a eu le courage de dire: La seule langue officielle au
Québec! Il n'a pas le courage de faire ce qu'il prônait lorsqu'il
était de ce côté-ci de la Chambre. Pendant ce temps, le
premier ministre se promène dans le Maine avec sept de ses ministres au
lieu d'être ici. Il n'a pas le courage d'aller une seule fois en
commission parlementaire et n'est pas en Chambre pour voter sur le projet de
loi 101.
En effet, pendant qu'à la commission parlementaire nos
députés de l'Opposition, nos valeureux députés
vous me le faites dire et cela me fait plaisir de rendre un hommage tout
particulier à ces gars travaillaient très fort à
essayer de bonifier ce projet de loi, le premier ministre se prélasse
sur les plages du Maine et s'en va à St. Andrews. C'est important de
s'en aller à St. Andrews.
J'étais bien fier qu'il y aille, mais j'aurais aimé qu'il
fasse comme il faut. Au lieu d'aller là-bas, en manches courtes, il
aurait pu arriver comme il au-raît dû arriver ici à
l'Assemblée nationale, lorsque vous avez été élus
le 15 novembre, avec des projets de loi sur l'économie et non pas sur la
langue; c'était fait par le Parti libéral. Il aurait dû
arriver ici avec des projets de loi sur l'économie pour faire travailler
nos travailleurs du Québec et non pas les laisser chômer comme ils
le font actuellement. On ferme les usines, on transporte les capitaux en
Ontario, dans le Maine, aux Etats-Unis, à Miami, partout. Cela aurait
peut-être fait une petite différence. C'est une chose que vous
autres vous ne connaissez pas, parce que vous n'avez peut-être jamais
rien administré dans votre vie. Il serait à peu près temps
que vous commenciez et il serait peut-être temps que le...
M. Boucher: ... voler.
M. Marchand: ... premier ministre commence à administrer
quelque chose dans sa vie.
M. Gendron: Mme le Président, sur la motion, autant que
possible.
Mme le Vice-Président: Vous êtes bien
éloquent, mais vous seriez peut-être mieux de revenir à la
motion. En tout cas, que cela me paraisse plus évident que vous parliez
sur la motion.
M. Marchand: Mme le Président, en revenant sur la motion,
je sais qu'en commission parlementaire il s'est discuté de beaucoup de
choses. Ce n'est pas fini, plusieurs articles ont été
sautés et seront négligés. Des mémoires ont
été déposées en commission parlementaire, mais on a
empêché environ une centaine de mémoires d'être
présentés.
Une Voix: 204.
M. Marchand: 204, cela ne s'est jamais vu, Mme le
Président, c'est encore un précédent que ce bon petit
gouvernement fait avec un bon petit premier ministre. Vous avez vu la
caricature du journal, hier matin; elle était drôle un peu, mais
cela représentait bien ce qu'est le gouvernement actuellement, des
petits poils et des hommes qui s'en vont discuter de choses
sérieuses.
M. Burns: II n'est pas fin.
M. O'Neill: II est pittoresque, par exemple. Il n'est pas fin,
mais il est pittoresque.
M. Marchand: Vous avez déjà été
tellement fin que cela me fait plaisir de vous répondre, M. le
député de Maisonneuve, et vous le savez d'ailleurs.
M. O'Neill: II est même amusant. M. Burns: Soyez
donc gentil un peu.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le
député! M. le député de Laurier, je dois vous
rappeler que vous devez terminer dans quelques secondes, une demi-minute
à peu près.
M. Marchand: Je terminerai dans quelques secondes, Mme le
Président. Avec votre beau sourire, il me fait plaisir de vous souhaiter
la meilleure des nuits et un beau bonsoir et merci de m'avoir
écouté, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: J'aimerais mieux que vous parliez
sur la motion, M. le député.
M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.
M. Jean-Noël Lavoie
M. Lavoie: Mme le Président, encore une fois, je me sens
le coeur peiné de voir mon collègue d'en face,
député de Maisonneuve, ministre d'Etat à la réforme
parlementaire, avoir à présenter une telle motion de
clôture, communément appelée guillotine, en plus de la
motion de fin de session dont le vote a été pris hier.
Cela veut dire que dans l'espace de 72 heures, nous avons eu deux
couperets qui sont tombés sur la tête du Parlement. Ce que je
regrette de la part du leader parlementaire du gouvernement, c'est que je me
rends compte aujourd'hui et c'est peut-être malheureux
qu'il n'a pas encore atteint sa période de recyclage. On a l'impression
qu'il est encore dans l'Opposition, lui qui, depuis huit mois, près d'un
an même, s'est affublé du titre pompeux de ministre de la
réforme parlementaire. Vous savez vous étiez là
comme vice-présidente, tous nos collègues sont les mêmes
qui sont ici depuis près de huit ou neuf mois ce nouveau titre
c'était une primeur. On n'a jamais eu de ministre superministre ministre
d'Etat à la réforme parlementaire. C'est la première
fois.
M. Marchand: C'est un grand bonhomme.
M. Lavoie: Ce superministre, avec cette primeur, nous a
bourré les oreilles, depuis le début, d'un calendrier sessionnel,
de dates sessionnelles. C'était au mois de décembre 1976, lors
d'une mini-session. En mars il nous a promis que le 24 juin on serait tous
retournés chez nous. Le calendrier scolaire, c'est vers le 24 juin et la
rentrée des classes, normalement, c'est à peu près dans
une semaine. Mais on est toujours ici. Il nous a promis, dans un mandat qui
vient de l'Exécutif d'ailleurs, je vais parler sur la motion du
manque de planification et je veux déceler où se trouve la
responsabilité du fouillis législatif dans lequel nous sommes
actuellement et je relie justement le fouillis de ce prétendu
mandat qui vient de l'Exécutif, de l'autre côté de la rue,
sur la Grande-Allée, où on a voulu revaloriser le rôle du
député... Les députés, en ce qui me concerne, il y
en a plus à votre droite qu'à votre gauche. Je serai curieux,
dès que le temps va nous le permettre, après la session, de faire
un relevé des députés ministériels qui ont
participé aux débats de fond sur le projet de loi no 2, sur le
projet de loi no 101, sur le projet de loi no 48, sur le peu de projets de loi
qu'on a étudiés depuis six mois qu'on siège. Cela va
être curieux de voir combien il y a eu de participation du
côté ministériel dans le fameux mandat de la revalorisation
du rôle de député par le premier superministre de la
réforme parlementaire, une primeur au Québec.
Troisième objet de son mandat: respect de l'Opposition,
revalorisation de l'Opposition. C'est nous de ce côté-ci. On a
deux couteaux dans la même semaine qui tombent, deux bâillons,
suspension des règles. On peut siéger, c'est voté depuis
hier, comme on dit cela doit être en vertu de la loi 22
"around the clock". On peut siéger 24 heures par jour, "around the
clock". Maintenant, nous allons devoir voter d'ici quelques instants sur la
motion voulant que la commission sur le projet de loi no 101 termine ses
travaux à 11 heures ce soir, fasse rapport, et ce sera la
troisième lecture à la vapeur.
Il y a six mois que nous siégeons, un record,
une autre primeur, 98e journée de session aujourd'hui. Ensemble,
si vous voulez, nous allons essayer je n'ai pas le temps de faire le
bilan de cette fameuse session... Un nouveau gouvernement qui apportait comme
une planche de salut au Québec.
Le Québec était sauvé, tout le monde parlerait
français et il n'y aurait plus de chômage. Dans l'agriculture, on
réglait cela; il n'y avait plus de problèmes pour les
agriculteurs. Le 15 novembre, il n'y avait plus de problèmes au
Québec; tout le monde changeait et s'en allait dans l'au-delà.
C'était cela, le 15 novembre. Qu'est-ce que nous avons comme bilan
législatif? 29 bills publics et 17 bills privés. Ce sont les lois
qui, après 100 jours de session, sont votées.
J'ai vécu une prétendue période de déblocage
comme eux en ont promis une au peuple québécois le 15 novembre.
J'ai vécu la session de 1960, le début de la révolution
tranquille où j'ai siégé pour la première fois ici,
au Québec. Entre le 10 novembre 1960 et le 10 juin 1961, en sept mois
dont trois semaines d'intersession entre le 22 décembre et le 10 janvier
1961, il s'est adopté au Québec, sans clôture, sans motion
de fin de session cela n'existait même pas dans notre
règlement 188 lois dont 95 lois publiques, comparativement
à 29 aujourd'hui, et 93 lois privées comparativement à 17
aujourd'hui. Et pas des lois de moindre importance. Mes dix minutes ne me
permettent pas de vous donner la nomenclature des lois, mais je vais vous en
énumérer quelques-unes.
La Loi du contrôle budgétaire qui est encore en vigueur au
Conseil du trésor; la Loi du Conseil d'orientation économique du
Québec; une loi instituant un nouveau ministère, le
ministère des Affaires fédérales-provinciales; une loi
instituant un nouveau ministère, le ministère des Affaires
culturelles. C'est daté de 1960, à votre meilleure époque,
à l'époque du "Chrétien et les élections"; la loi
instituant une commission royale d'enquête sur l'enseignement, la
commission Parent; la loi concernant la gratuité de l'enseignement et la
fréquentation scolaire obligatoire. Toujours dans la même session,
la loi conférant aux parents, le droit de vote aux élections
scolaires; je me dépêche. Loi instituant un autre
ministère, le ministère du Revenu qui n'existait pas; une Loi
instituant même le premier ministre actuel, la loi instituant le
ministère des Richesses naturelles, dont le premier ministre a
été le premier titulaire.
M. Lamontagne: Cela n'a pas été notre
meilleure!
M. Lavoie: Loi constituant l'Office des autoroutes du
Québec. J'en saute, je saute une quinzaine de lois. Dans la même
session, sans guillotine et sans clôture, mais avec un peu plus de
planification: Loi pour assurer l'indemnisation des victimes d'accidents
d'automobile, 1960.
Mme Payette: II était temps qu'on s'en occupe.
M. Lavoie: Loi instituant l'assurance-hospitalisation, dans la
même session, sans guillotine et sans suspension des règles.
Mme Payette: Cela a-t-il été préparé
par l'Opposition?
M. Lavoie: Loi concernant la Régie des alcools du
Québec, 66 pages, cette loi, avec 300 ou 400 articles. C'est dans la
même session. Ce gouvernement d'en face, le grand sauveur du
Québec, n'a aucune mesure économique, sauf la loi 48 pour les
petites et moyennes entreprises. C'est ce gouvernement, élu sous de
fausses représentations, qui se présente devant la population en
disant qu'il va régler tous les problèmes au Québec avec
29 lois publiques et 17 lois privées, avec une suspension des
règles et une motion de fin de session qui nous fait siéger 24
heures par jour, avec une guillotine qui n'existait même pas à
l'époque.
Le grand coupable n'est pas l'Opposition; c'est le gouvernement qui nous
fait perdre du temps en inscrivant au feuilleton des motions comme celle qu'on
a débattu lundi, entre autres, et qui n'était même pas
nécessaire sur le projet de loi no 101. Vous imaginez que le
gouvernement, en 1960, avait une Opposition nombreuse; il y avait 50
députés au pouvoir et 40 députés dans
l'Opposition.
Mme Payette: Quel parti?
M. Lavoie: C'était le Parti libéral, j'en suis fier
et c'est à cause de cela que je suis encore libéral et que je
resterai libéral!
Des Voix: Oh!
M. Lavoie: II me reste combien de temps? Une minute?
Mme le Vice-Président: M. le leader, vous devez
conclure.
M. Burns: II y a des gens, comme cela, qui n'évoluent
pas.
M. Lavoie: Si on arrête de m'interrompre, Mme le
Président...
M. Burns: II y a des gens, comme cela, qui n'évoluent
pas.
Mme Payette: Cela faisait une belle fin cependant.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous
plaît!
Comment voulez-vous que le leader de l'Opposition officielle puisse
intervenir si on ne tient pas l'ordre plus que maintenant dans cette
Assemblée? Je vous demanderais de respecter le droit de parole.
M. Lavoie: Je dis, pour terminer, que cette guillotine
n'était pas nécessaire, que le gouvernement aurait dû
accepter notre suggestion de diviser le projet de loi pour la rentrée
scolaire, les huit, neuf ou dix articles qu'il y a dans la loi 101. Encore
là, cela aurait dû être une loi spéciale relevant du
ministère de l'Education, ce serait réglé. Cela a
été étudié en commission, il y aurait une
rentrée normale des classes au mois de septembre. Mais les 200 articles
qui regardent la Charte de la langue française, la langue du travail, la
langue de l'administration, la langue de la législation, la langue de la
justice, je ne suis pas scandalisé. Pour les Canadiens français
du Québec, c'est une loi qui ne devrait pas être
étudiée dans trois mois, six mois, neuf mois...
M. Burns: Fini.
M. Lavoie: Et surtout pas dans un mois. Je vous donne comme
exemple la loi 65, Loi sur les services de santé et les services
sociaux, une loi importante mais encore moins importante que la loi 101, a
été étudiée du 8 juillet 1971 au 24 décembre
1971, sans guillotine, sans clôture. Une dernière loi, la loi 250,
le Code des professions, très important, qui avait beaucoup
d'implications mais encore moins que la loi 101 qui a une implication sur tout
un peuple, qui a été commencé en 1971, a été
étudié en 1972 et a été adopté le 6 juillet
1973, sans guillotine et normalement. Je vous dis qu'il ne devrait pas y avoir
de guillotine pour une loi aussi importante, avec autant d'implications pour
tout un peuple, le peuple québécois, 6 millions de personnes. Il
n'y aurait pas de scandale à étudier cette loi durant un an et on
pourrait trouver vraiment un consensus québécois pour un meilleur
ordre, l'unité du Québec. Je vous remercie, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: Mme le Président, en tant que parlementaire avec
un peu d'expérience dans cette Chambre, j'ai toujours pensé et
j'ai toujours cru qu'on devait appliquer des motions de clôture, des
motions de fin de session quand c'est absolument nécessaire, quand il y
a une raison fondamentale pour poser un geste semblable. Normalement, une
motion de fin de session s'applique pour que les députés prennent
un peu de repos, un peu de vacances, et quand on doit adopter des lois d'une
certaine importance. Mais ici, ces deux motions, celle d'hier et celle
d'aujourd'hui, sont toutes basées non sur des lois importantes, mais sur
une loi en particulier. Je dois dire que c'est vraiment contre toute tradition
parlementaire qu'on fasse une motion de fin de session pour une loi. Ce
débat de deux jours qu'on a sur cette motion est un gaspillage de temps
complet. Et le gouvernement vient ici aujourd'hui avec une motion de
clôture en disant qu'on doit sauver du temps. Ils ont gaspillé le
temps jusqu'à maintenant. A part le gaspillage de temps que le
député de Laval a décrit, on est ici depuis le mois de
novembre, on n'a adopté presque aucune loi, mais sur les détails,
les motions inutiles, les actions ridicules, je pense que la fameuse affaire du
bill 1, bill 101 était un gaspillage de temps. La suspension des
règles de procédure, hier et avant-hier, était un autre
gaspillage de temps. On aurait pu employer tout ce temps pour étudier le
projet de loi 101 en commission, comme on doit l'étudier. Comme d'autres
orateurs l'ont dit, c'est une des lois les plus importantes de ce
régime, et peut-être au Québec. On a essayé de nous
"bulldozer", de passer cette loi à la vapeur.
Franchement, la seule raison qu'on peut avoir pour demander une motion
de clôture, de guillotine, c'est qu'il y a vraiment un "filibuster"
organisé, vraiment réel qui a empêché le
gouvernement de travailler. Quand je dis travailler, cela veut dire
étudier la loi article par article avec les amendements qui viennent du
gouvernement ou de l'Opposition. Mais qu'est-ce qu'on a vraiment ici? Y a-t-il
vraiment "filibuster"?
S'il y en a un c'est le côté gouvernemental qui le fait. Si
on avait le droit, selon le règlement, de faire une motion de
clôture, ce serait l'Opposition qui devrait le faire pour arrêter
le gouvernement de faire un "filibuster".
J'ai passé seulement une journée comme membre de cette
commission en remplacement d'un de nos quatre membres, qui ont fait un travail
magnifique. J'ai vu dans ces journées que ce n'étaient pas nous
qui faisions un "filibuster". On a présenté des amendements
logiques, de bon sens. On n'a pas eu de réponse sur le fond de nos
amendements, mais de grands discours propagandistes de toutes sortes du
côté gouvernemental.
J'ai fait un petit relevé des gens des deux côtés
qui ont parlé. Savez-vous, Mme le Président, que le
côté gouvernemental a pris presque 40% du temps alloué
à cette commission en parlant? Est-ce que c'est un "filibuster" quand
l'Opposition prend seulement 60% du temps pour passer une centaine d'articles
comme on l'a fait? Est-ce un vrai "filibuster"? Non, Mme le Président,
c'est une vraie étude d'une loi comme il doit se faire dans un
Parlement. C'est la raison d'un Parlement. Comme j'ai déjà dit,
le mot Parlement veut dire parler. On doit parler, on doit savoir ce sur quoi
on doit voter, quels sont les effets d'une loi.
La vraie raison de la clôture aujourd'hui c'est qu'on arrive
à des articles très importants dans lesquels l'avenir du
Québec est en jeu. Le gouvernement a peur de discuter de ces articles et
de leurs conséquences en public. C'est la raison pour la guillotine
aujourd'hui. On ne veut pas discuter les effets de la section du travail, des
sièges sociaux, des entreprises. On ne veut pas discuter en public parce
qu'on a peur. L'Opposition va montrer le vrai visage du gouvernement. On va
montrer quels seront les effets néfastes de ces sections. Le
gouvernement veut le cacher. C'est la raison de la clôture aujourd'hui.
Il n'y en a aucune autre.
La seule raison qu'ils ont donnée à ce jour c'est le
retour en classe des enfants au mois de septembre. Il y a deux choses que le
gouvernement peut faire. L'une est très logique. On a déjà
discuté des articles sur l'éducation. Faites une loi
spéciale pour la section de l'éducation. On est prêt
à la voter. Les enfants pourront entrer à l'école. Sinon,
si on veut voir la grande charte de la langue française avec tout dans
la même charte, on doit faire comme le premier ministre a dit, on doit
siéger ici jusqu'à Noël. L'été est fini. On
n'a rien à perdre. On est prêt à siéger
jusqu'à Noël pour étudier cette loi article par article. Le
public doit savoir ce qui se passe ici.
Pendant ce temps, la loi 22 est là encore. Le ministre de
l'Education, au mois de décembre, était fier d'annoncer qu'il
suivait les règles de la loi 22 pour protéger la langue
française, pour protéger la collectivité
française.On peut le faire encore cette année. Quel est le grand
danger? Peut-être que 50 enfants iraient dans une école ou une
autre et ils n'auraient pas le droit d'y être. Est-ce que l'avenir du
Québec vaut ces 50 enfants? C'est ce qui est en jeu ici. On passe une
loi à 100 milles à l'heure en fermant les yeux parce que c'est ce
qui arrivera demain, avec le rapport. Le gouvernement va apporter des
amendements. Même le gouvernement a des amendements, et pas seulement
l'Opposition. Le gouvernement a admis que le projet de loi n'est pas bon. Il
doit y avoir des changements.
Le gouvernement arrivera demain avec des amendements. On n'a pas le
temps de les étudier. Les députés de l'Opposition ont dix
minutes pour parler sur tous les amendements. On aura tout le livre bleu de
l'Union Nationale, les quelque 100 amendements du Parti libéral et
peut-être une centaine d'amendements du gouvernement, qui est prêt
à admettre qu'il y a des lacunes dans cette loi. La réimpression,
toutes les études, le livre blanc, le projet de loi 1, la
réimpression, 101, et il reste encore des lacunes. Pourquoi? Parce qu'il
y a des gens qui l'ont étudié. La meilleure place pour
étudier une loi semblable article par article c'est en commission
parlementaire où les gens qui sont préparés, en pleine
connaissance de cause, peuvent plaider d'un côté ou de l'autre
pour essayer de convaincre le gouvernement où il fait erreur.
Je n'ai jamais vu un projet de loi semblable, d'une telle importance
où le gouvernement n'a pas accepté une recommandation de
l'Opposition.
Pas une, il ne veut pas. Quelle était la raison pour la
commission parlementaire? Seulement pour faire le show. Il a déjà
décidé ce qu'il veut faire et la motion de clôture est une
autre affaire, cela fait partie du spectacle. Il veut faire un spectacle pour
les gens de cette province pour essayer de faire oublier les vrais
problèmes. Comme le député de Laurier l'a dit, les vrais
problèmes ne sont pas la langue. Les vrais problèmes sont la
question des jobs, c'est ce que nos Québécois appellent des
emplois, des jobs. Ce sont là nos besoins. C'est du camouflage que ce
projet de loi 101. Même le gouvernement veut les camoufler par toutes
sortes de moyens, des motions de fin de session, des motions de clôture.
Pour ces raisons, Mme le Président, je trouve incroyable qu'à ce
stade-ci, avec un projet de loi d'une telle importance, on essaye
d'arrêter les débats. Pour ma part, j'ai honte de ce Parlement qui
fait cela.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Roberval.
M. Robert Lamontagne
M. Lamontagne: Mme le Président, en relisant le
début de l'article 156, qu'on invoque par la présente motion, les
premières lignes mentionnent: "Lorsqu'une commission a
étudié un projet de loi pendant une période de temps
correspondant à l'importance ou à la longueur du projet de loi,
le leader du gouvernement peut, sans avis, proposer, etc."
D'abord, il s'agit évidemment, comme tout le monde le
conçoit, d'une mesure très exceptionnelle employée par le
leader du gouvernement et, qui plus est, pour un projet de loi dont ce
gouvernement, au point de vue de l'importance, a voulu presque imprégner
son premier mandat. Ce projet de loi portait antérieurement le
numéro 1. Je pense qu'en donnant au projet de loi sur la Charte de la
langue française au Québec le numéro 1, le gouvernement a
voulu témoigner publiquement de toute l'importance qu'il attachait
à ce projet de loi. Ce qui fait qu'on est extrêmement surpris de
voir que le leader du gouvernement se sert de l'article 156 pour décider
que l'importance de ce projet de loi n'est plus aujourd'hui ce qu'elle
était il y a quelques mois à peine.
Il faut se rappeler, Mme le Président, tout ce qu'on a pu
entendre de la bouche même de tous les députés et ministres
du Parti québécois, évidemment pas ici à
l'Assemblée nationale car, d'un commun accord, assez
incompréhensible, ils ont décidé de ne plus parler du
tout, mais à l'extérieur de la Chambre. Tout le monde disait: La
langue française, c'est fort important. En même temps on a
assisté et je pense que c'est fondamental de le rappeler, pour
ceux qui sont plus ou moins familiers avec les règlements de
l'Assemblée nationale à la première lecture. Je
porte à votre attention, Mme le Président, le fait que dans la
population, la première lecture, qui équivaut tout simplement au
dépôt d'un projet de loi, est souvent traduite par les media comme
une chose fort importante, alors que, comme on le sait, les parlementaires sont
appelés à voter une lecture alors qu'il n'ont pas en main un
projet de loi. Nous avons eu le projet de loi no 1. Je pense que c'est bon de
le rappeler. Nous avons régulièrement des visiteurs et je vais
profiter de la présence de plusieurs d'entre eux, ce soir, pour dire que
le projet de loi no 1, le gouvernement, malgré toutes les études
comme le leader de l'Opposition officielle le mentionnait tout à
l'heure alors qu'on prétendait avoir toute la
vérité, après quelques semaines à peine de
réflexion, on a décidé de ne plus en parler et de se
lancer sur le projet de loi 101. Qu'est-il arrivé sur le projet de loi
101? On
l'a étudié en deuxième lecture et, par la suite, il
a été transmis en commission parlementaire. Là, le 2
août, nous avons adopté en deuxième lecture le projet de
loi no 101. Le leader du gouvernement, à l'occasion de rencontres
privées, mais ayant déposé par la suite publiquement un
document, a demandé à toutes les Oppositions d'adopter en dix
jours en commission parlementaire, un projet de loi extrêmement important
je pense que tout le monde en convient pour l'avenir des
Québécois.
On a mentionné je pense que cela mérite
d'être noté que nous n'aurions, à ce
moment-là, qu'une journée pour étudier à la fois la
langue de l'enseignement et d'autres articles, et également, parce qu'il
y a eu un amendement à cet article, la proposition de
réciprocité avec les autres provinces canadiennes.
Je pense que, dès ce moment, le gouvernement actuel avait
décidé que plusieurs chapitres du projet de loi 101 ne seraient
pas étudiés. C'est impossible que, fort de son expérience,
le leader du gouvernement ait pu penser un instant que le projet de loi le plus
important de son gouvernement serait adopté dans une période de
dix jours, alors qu'on connaît toute l'émotivité et que
l'on retrouve toutes les tendances à l'occasion de l'étude d'un
projet de loi sur la langue ou même sur la religion, parce que
peut-être en aurons-nous un un jour ou l'autre.
Malgré cela, pour bien s'assurer, dès ce moment, que le
projet de loi serait adopté à la vapeur, il a demandé
à ses représentants en commission parlementaire de ne pas
permettre à tous les députés de s'exprimer en commission
parlementaire. Il n'y a pas beaucoup de monde qui sait cela au Québec,
et même ceux qui nous visitent, que des parlementaires n'ont pas eu le
droit de s'exprimer en commission parlementaire, sauf en passant par le nombre
qui était déterminé pour chacun des partis. Dans le Parti
libéral que je représente, 4 députés seulement sur
26 avaient le droit, au cours d'une journée, de s'exprimer et, si un de
nos membres n'était pas présent, il n'avait jamais le droit de se
faire remplacer. Je rappelle à votre bonne attention, Mme le
Président, qu'à l'occasion de la loi 22 tous les parlementaires
de l'Assemblée nationale avaient eu le droit, et rapidement, de
s'exprimer. Dès ce moment, on avait donc décidé que ce
projet de loi, malgré son importance, n'était pas assez important
pour être discuté par tous les parlementaires.
Arrive-t-il souvent que les lois ne sont pas étudiées
article par article? J'ai ici cela n'a pas pris un chariot pour le
transporter le résultat de huit mois de travaux à
l'Assemblée nationale. Je vous dis que les projets de loi ne sont pas
épais, c'est le cas de le dire. Pourtant, le premier, c'est le projet de
loi no 3. C'est curieux, tout de même! On a le projet no 3, les projets
nos 4, 5, 6, 7, sauf les projets de loi nos 1 et 2. Ce n'est pas pour rien
qu'ils ne sont pas adoptés, Mme le Président. Ce n'est pas la
faute de l'Opposition. On les a tous adoptés, ces projets de loi. Il y a
eu le projet de loi 1, le projet de loi 101, les modifica- tions. Au moment
où nous nous parlons, nous sommes informés par les media que le
ministre responsable de ce projet de loi va déposer demain une
série d'amendements. Seulement cette raison ne permettrait pas d'avoir
une telle motion, parce que ce ne sont pas les Oppositions qui ont fait de
l'obstruction. Le gouvernement, même après cette motion de
guillotine, a présenté de nouveaux amendements et n'a même
pas la décence de les présenter en commission parlementaire. Le
ministre aurait pu au moins les présenter à ceux qui ont
accepté d'être membres de cette commission depuis plusieurs mois;
il va les présenter sous forme d'amendements.
Comme whip du Parti libéral, je tiens à dire de mon
siège c'est fort important de le mentionner que lorsque le
premier ministre du Québec, le 21 juillet dernier, a mentionné
que ce projet de loi fort important, malgré ses tiraillements
personnels, serait étudié même jusqu'à Noël,
nous avons formé et c'est moi qui l'ai formée une
équipe extrêmement présente, compétente, susceptible
d'apporter aux débats en commission parlementaire des
éléments positifs. Egalement, je pense que tous ceux qui ont
participé aux travaux en commission parlementaire sont en mesure de
rendre hommage à cette équipe que nous avons fournie à
cette commission. Notre équipe a travaillé avec une ardeur
vraiment remarquable pour présenter tous les amendements que nous
pensions susceptibles d'être d'abord recevables et débattus et de
nature à bonifier ce projet de loi.
Je pense, Mme le Président, pour cette équipe qui a
donné son coeur, son temps et son temps familial au cours de ces
derniers mois, c'est dur pour cette équipe de savoir qu'alors qu'ils
avaient annoncé qu'ils étaient disposés à accepter
sans discussion plus de 150 articles, leur travail va finir par une motion de
clôture.
Je pense, effectivement, comme on l'a dit plus tôt, que ce n'est
pas la trouvaille du siècle, et surtout ce n'est pas rendre hommage aux
parlementaires. Je l'ai dit hier et je le répète aujourd'hui, vu
que mon temps est terminé, c'est une autre journée noire du
parlementarisme québécois.
Mme le Vice-Président: Le ministre exercera-t-il son droit
de réplique?
M. Robert Burns
M. Burns: Mme le Président, en réplique, j'ai bien
peu de choses à dire. Je pense que tout a été dit. Je
n'aurais qu'à répéter mon discours pour convaincre ou
tenter de convaincre nos collègues d'en face. Je suis convaincu que je
ne pourrais pas y arriver.
Je suis, d'autre part, convaincu que, même en
répétant la présentation que j'ai faite de la motion en
vertu de l'article 156, je ne réussirais pas à obtenir
l'adhésion de l'Opposition.
Je suis cependant toujours, à ce moment-ci, à 21 h 2,
d'accord que c'est la décision la plus sage que nous avons prise que
d'introduire une motion pour mettre de côté les règles de
l'Assemblée na-
tionale, du moins certaines règles de l'Assemblée
nationale, et d'imposer cette motion de clôture pour assurer une
rentrée scolaire... Est-ce que vous avez un pointillé autour de
la gorge? On pourra le faire.
M. Lavoie: Oui, M. le "hatchet man".
M. Burns: C'est cela, voilà, sauf qu'on le fait gentiment
et lentement. C'est plus "jouissif". Tout cela pour dire, Mme le
Président, que je n'ai véritablement pas de réplique
à faire, sinon de demander à nos collègues de
l'Assemblée nationale je sais bien que l'Opposition officielle et
non officielle ne se ralliera pas à cette demande que je fais de
se rendre compte qu'il est essentiel que la rentrée scolaire se fasse
dans l'ordre, dès l'automne, dès le début de septembre.
Pour cela, il faut avoir l'adoption claire, précise de dispositions
législatives, et l'une de celles-là s'appelle le projet de loi no
101.
Des Voix: Adopté.
Mme le Vice-Président: Cette motion du leader
parlementaire du gouvernement sera-t-elle adoptée?
M. Lavoie: Vote enregistré, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Qu'on appelle les
députés!
Vote sur la motion
Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et
messieurs!
M. Lavoie: J'aurais une proposition à faire au leader du
gouvernement. Nous n'aurions pas d'objection à remettre ce vote à
demain matin alors que le premier ministre désirerait peut-être se
prononcer sur cette motion de guillotine, parce qu'il n'a pris part à
aucun vote sur les motions de suspension des règles, même de
deuxième lecture. On aimerait que le premier ministre puisse voter
après son engagement solennel de ne pas imposer la guillotine.
M. Burns: Mme le Président, permettez-moi, s'il vous
plaît, malgré ce cadeau de Grecs ou de Turcs.
M. Proulx: De Grecs. Timeo Danaos et dona ferentes.
M. Burns: C'est cela. Malgré ce cadeau de Grecs qui m'est
offert, Mme le Président, je tiens à rassurer la Chambre,
rassurer nos collègues d'en face que le premier ministre a
été consulté sur l'utilisation de la motion que j'ai
présentée et que le premier ministre s'est dit tout à fait
d'accord sur l'utilisation de cette procédure.
M. Blank: Dites-lui qu'il vienne voter.
M. Lavoie: II n'est jamais ici.
Mme le Vice-Président: A l'ordre! Je vous ferai remarquer
que, nonobstant les offres du leader de l'Opposition officielle et la
réponse du leader parlementaire du gouvernement, le vote était
déjà appelé.
M. Lavoie: Pourriez-vous lire la motion?
Mme le Vice-Président: Sûrement, M. le leader de
l'Opposition officielle.
C'est le moment de la mise aux voix de la motion du leader parlementaire
du gouvernement. Cette motion se lit comme suit: "Que conformément
à l'article 156 du règlement, le rapport de la commission
permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des
communications sur l'étude du projet de loi no 101, Charte de la langue
française, après la deuxième lecture soit
déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires
du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses
travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977."
Que ceux et celles qui sont en faveur de la motion du leader du
gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Burns...
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre! Je vous demande votre collaboration. Quand le vote est
déjà commencé, il est de tradition dans cette Chambre
qu'on le fasse en silence.
Voulez-vous continuer le vote, M. le secrétaire adjoint?
Le Secrétaire adjoint: ... Laurin, Couture, Johnson,
O'Neill, Mme Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Proulx, Duhaime,
Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière),
Marcoux, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Bertrand, Godin,
Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Gendron, Laberge, Marquis, Lacoste,
Ouellet, Perron, Brassard, Clair, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau,
Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet.
Mme le Vice-Président: Que ceux qui sont contre veuillent
bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie,
Mackasey, Lalonde, Forget, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Larivière,
Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamonta-gne, Giasson, Blank,
O'Gallagher, Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Verreault, Springate,
Grenier, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Roy.
Mme le Vice-Président: Abstentions?
Le Secrétaire: Pour: 48 Contre: 30
Abstentions: 0
Mme le Vice-Président: La motion est adoptée.
A l'ordre, s'il vous plaît!
Vous vouliez intervenir, M. le député de Beauce-Sud?
M. Roy: Oui, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Si nous pouvons obtenir la
collaboration de cette Assemblée, peut-être pourrez-vous faire
votre intervention, M. le député.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Roy: Une question de privilège en vertu de l'article
96...
M. Burns: Ah bon!
M. Roy: ...qui dit: "Le député qui prend la parole
pour donner des explications sur le discours qu'il a déjà
prononcé ne peut le faire que lorsque le discours qui les provoque est
terminé". Il y a un intervenant qui m'a cité cet
après-midi ou ce soir à l'Assemblée nationale et, comme je
n'étais pas ici lors de cette intervention, j'aimerais qu'on me permette
de soulever une question de privilège.
M. Burns: Mme le Président, je pense que le
député devrait faire cela demain en donnant avis à la
présidence, selon les dispositions de notre règlement.
M. Roy: Non. Ce n'est pas sur une chose qui s'est passée
en dehors de la Chambre. Cela vient de se passer ici à
l'Assemblée nationale et cela éviterait toute cette
procédure inutile et additionnelle. Alors, qu'on me donne trente
secondes et je pourrai faire la mise au point qui s'impose.
M. Burns: D'accord. De consentement.
M. Roy: C'est le député de
Notre-Dame-de-Grâce...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Beauce-Sud, un moment, s'il vous plaît. Je pense qu'effectivement vous
devriez donner un avis demain matin, mais, s'il y avait consentement...
Des Voix: Consentement.
Mme le Vice-Président: Laissez-moi terminer, s'il vous
plaît.
Je comprends qu'il y aurait consentement unanime de cette
Assemblée. Alors, M. le député de Beauce-Sud.
M. Brochu: Consentement.
M. Roy: Merci, Mme le Président. Le député
de Notre-Dame-de-Grâce a cité une partie de mon discours qu'il a
interprétée comme suit: "Comme le député de
Beauce-Sud l'a souligné, ce sera une grande journée quand la
population passera le gouvernement péquiste à la guillotine".
Cela figure à la page R/4731, page 2, du journal des Débats. Ce
que j'ai dit, Mme le Président, et je ne ferai pas de commentaires,
c'est que je n'avais pas la prétention de convaincre le gouvernement,
mais que je l'avais mis en garde à plusieurs reprises. J'ai dit:
"Continuez comme vous êtes parti, vous êtes dans la bonne voie pour
aller à la même place que les gouvernements qui vous ont
précédé et peut-être plus rapidement que vous ne le
pensez".
M. Lavoie: Bravo!
M. Mackasey: Mme le Président...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Burns: II n'y a pas de débat là-dessus. M.
Mackasey: Une question de règlement.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous
plaît!
Je ferai simplement une remarque, et si M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce demande la parole ensuite, il verra s'il doit
intervenir. Je pense que quand, dans cette Assemblée, on demande
à rétablir des faits et qu'on les rétablisse, il ne doit
pas y avoir de débats après. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je vous fais confiance et je vous demande maintenant
si vous avez toujours l'intention d'intervenir et à quel propos?
M. Mackasey: Mme le Président, c'est très simple.
Je prends en considération les paroles du député de
Beauce-Sud, l'interprétation de ses remarques, cet après-midi. On
sait par expérience que le député de Beauce-Sud a beaucoup
plus d'intégrité et de sagesse que les membres du
gouvernement.
M. Burns: Merci.
Mme le Vice-Président: Je n'aurais pas dû permettre
cette intervention. M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Burns: Mme le Président, il me fait plaisir, et nos
collègues connaissant mes origines syndicales comprendront qu'il me fait
très plaisir, comme leader du gouvernement, d'appeler l'article 15.
M. Lavoie: Je ferai remarquer, en vertu du règlement, que
les propos qu'a tenus le leader du gouvernement le privent maintenant de son
droit de parole sur la motion de deuxième lecture parce qu'il s'est
prononcé sur le fond.
M. Burns: Exactement, et je n'ai pas l'intention de parler en
deuxième lecture.
M. Lavoie: Comme d'habitude, vous ne parlerez pas.
Projet de loi no 45 Deuxième lecture
Mme le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre propose la deuxième lecture du projet de loi no 45, Loi
modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Burns: Mme le Président.
Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
J'espère, M. le leader, que vous ne voulez pas de nouveau vous prononcer
sur le fond de la question.
M. Burns: Avant que le ministre n'entreprenne le débat sur
le projet de loi no 45, je rappelle à nos collègues que la
commission de l'éducation continue ses travaux pendant encore quelques
heures. Je signale à nos collègues qu'il est temps de reprendre
les travaux à la commission.
Mme le Vice-Président: Quelques secondes pour permettre
à chacun de reprendre sa place après le départ des
députés pour la commission parlementaire. M. le ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: Mme le Président, sérieusement si c'est
possible. Depuis quelques années, on assiste, à travers le monde,
à une détérioration profonde du climat social, une
détérioration des valeurs et du bien-être de diverses
sociétés.
Devant cette constatation, il faut alors faire un choix. Ou bien faire
porter l'odieux de cette situation sur un gouvernement, sur un Etat, sur une
province ou sur un parti; ou encore décider résolument de
gouverner pour le bien public. Dans ce cas, il s'agit de regarder la situation
bien en face et de tenter de bonne foi d'apporter des solutions.
Le projet de loi 45, intitulé Loi modifiant le Code du travail et
la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, que nous abordons
ce soir en deuxième lecture, se veut le fruit d'une telle attitude.
Que l'économie mondiale soit mal en point, je ne pense pas qu'il
soit besoin, ici, d'en faire la preuve. N'avons-nous tous pas à l'esprit
les difficultés considérables que traversent la plupart des pays
occidentaux depuis une dizaine d'années? Que l'économie
nord-américaine soit elle aussi également plutôt malade, il
n'y a pas à en douter, on n'a qu'à jeter un coup d'oeil à
l'occasion sur le Wall Street Journal ou à écouter des courtiers
de Bay Street pour s'en convaincre.
Que l'économie canadienne, plus particulièrement,
connaisse des difficultés, cela est absolument indiscutable et que ces
difficultés se répercutent encore plus particulièrement
chez nous, au Québec, comme nous le rappellent sans cesse nos
collègues de l'Opposition, cela va de soi. Que le climat social soit un
peu partout perturbé, cela ne fait non plus de doute dans nos esprits.
Souvenons-nous tout de suite de tout ce qu'a pu engendrer une simple panne
d'électricité dans la ville de New York.
Que la violence envahisse nos vies et que les citoyens se sentent de
moins en moins dans l'obligation de respecter les lois, que tous et chacun
d'entre nous aient la sensation de faire du surplace jusqu'à bout de
souffle, voilà ce dont nous avons souvent l'occasion de prendre
conscience avec un peu plus d'effroi, de jour en jour.
Je crois, Mme le Président, que, dans un contexte semblable, il
appartient à un gouvernement d'offrir à la population un projet
collectif qui soit porteur d'espoir, qui soit porteur de paix, un projet
capable de refaire le tissu social si usé par des heurts venus de toutes
parts. Le devoir d'un gouvernement c'est de discerner l'avenir et de proposer,
sans hésitation, de nouvelles avenues.
Mme le Président, les salariés du Québec
représentent l'immense majorité de notre population et c'est
à ce titre que leur sort doit d'abord et avant tout préoccuper ce
gouvernement. Ce sont, madame, en effet, ces salariés du Québec
qui paient le plus de taxes qui doivent attendre le plus longtemps pour ajuster
leur salaire à la hausse des prix. Ce sont ces mêmes
salariés, toujours, qui sont le plus péniblement coincés
à l'intérieur de l'inexorable triangle des revenus fixes, des
paiements à faire et des prix qui montent. Ce sont également ces
mêmes salariés qui ont été si souvent laissés
pour compte par les gouvernements. Pourtant, pensons-y, chaque année
l'immense majorité d'entre eux manifeste ce calme, cette
sérénité et ce sérieux pour renégocier et
renouveler, sans problème, des centaines et des centaines de conventions
collectives, par l'intermédiaire de leur association ou de leur
syndicat.
Ce n'est qu'une infime partie de ces négociations qui
dégénèrent en conflits. Toutefois, notre Code du travail
est, en apparence, pour le moins, surtout destiné à
réglementer les cas où se produisent de tels accrochages. Force
nous est donc de constater que le Code du travail est un outil qui a besoin
d'être un peu rafraîchi, et c'est pourquoi le gouvernement a
l'intention de procéder à une refonte de l'ensemble du droit du
travail.
Cependant, en attendant cette réforme qui ne pourra se faire sans
les études, la planification et la prudence nécessaires, il
semble impérieux, aux yeux de ce gouvernement, de corriger certaines
situations, de pallier certaines lacunes et de mettre à l'essai un
équilibre nouveau des forces entre les parties par l'instauration de
l'affirmation précise de l'égalité de ces parties.
Le déséquilibre systématique des parties ne peut
qu'engendrer la frustration, la cristallisation des préjugés et
la violence, que celle-ci soit ouverte ou qu'elle soit larvée. Le
gouvernement du Québec a donc décidé d'intervenir pour,
entre autres, instaurer l'égalité en considérant que les
salariés québécois répondraient avec
responsabilité
et bonne foi à cet ajustement de l'équilibre des
forces.
C'est pourquoi, dans ce projet de loi, le domaine de
l'accréditation est amélioré et rajusté. Dans le
but de désamorcer la situation de crise qui entoure la plupart du temps
la période d'adhésion syndicale pour fins d'accréditation,
le projet de loi propose qu'un vote secret d'allégeance syndicale soit
tenu dès que 35% des salariés de l'unité visée
auront accepté d'adhérer à une association.
Cette mesure fera s'estomper cette période de tension que vivent
les salariés lors d'une campagne de recrutement syndical. En effet,
n'étant plus coincé entre le syndicat et le patron, souvent
menacé par l'un comme par l'autre, le salarié sera
désormais respecté par les deux parties puisque son vote
exprimé secrètement pourra sanctionner toute attitude injuste
à son égard. Cette mesure va dans le sens du respect des
salariés.
Par des amendements d'une nature un peu plus technique, on a
également facilité l'accréditation en simplifiant la
procédure d'enquête, en accroissant les pouvoirs de
l'enquêteur et en permettant au commissaire du travail de rendre
certaines décisions sur la foi du rapport de ses enquêteurs. Ces
mesures vont dans le sens de l'efficacité.
A titre de mesures préventives, le ministre du Travail pourra
désormais charger un conseil d'arbitrage de déterminer le contenu
d'une première convention collective pour une période d'un an. Le
ministre prendra de telles dispositions parce qu'il aura constaté que
l'intervention du conciliateur a été infructueuse et que les
négociations pour cette première convention collective auront
mené à une grève ou à un lock-out dont on ne pourra
entrevoir le règlement dans un délai raisonnable, et ce en tenant
compte de la bonne foi de l'une et l'autre des parties. Cette mesure, Mme le
Président, va dans le sens d'une conception préventive en
matière de relations de travail.
Ce projet contient également des dispositions pour revaloriser le
mécanisme de la conciliation. Ainsi, on établit de nouvelles
règles quant au délai de grève ou de lock-out, dissociant
ainsi ce délai du processus de la conciliation lui-même. En effet,
le droit de grève ou de lock-out sera acquis automatiquement 90 jours
après l'expiration d'une convention collective ou encore après la
réception de l'avis de négociation par le ministre, ou encore
après l'obtention de l'accréditation, s'il s'agit d'une
première convention collective.
Cette mesure va dans le sens également de l'efficacité et
va dans le sens de cette conviction qu'a le ministre du Travail que le service
de conciliation du ministère doit d'abord et avant tout être
à la disposition réelle des parties et non pas servir de
déclencheur ou de chronomètre pour des grèves ou des
lock-out.
Il pourra également y avoir conciliation volontaire sur demande
de l'une des parties à n'importe quel moment de la négociation,
ce qui pourra, dans certains cas, éliminer des délais artificiels
et éviter, dans d'autres cas, que ne soit atteint l'état de
crise, sauvant ainsi à tous un temps précieux. Le ministre pourra
également, désormais, dési- gner un conciliateur dans un
conflit qui s'éternise sans attendre la demande de l'une ou l'autre des
parties.
Cette mesure, Mme le Président, va dans le sens également
de la prévention.
De plus, l'article 68 introduit une autre mesure de prévention en
amendant la loi même du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre et en permettant au ministre de désigner en tout temps une
personne qui pourra travailler à favoriser le maintien ou
l'établissement de bonnes relations entre l'employeur et ses
salariés. Cette mesure, qui va donc dans le sens de la
prévention, pourra permettre tout au moins d'anticiper certaines crises
si ce n'est d'en désamorcer les causes mêmes.
Le précompte des cotisations syndicales devient obligatoire pour
tous les salariés compris dans une unité de négociation
représentée par un syndicat. Cette mesure a pour but de
répartir entre tous les travailleurs d'une unité les coûts
du maintien de cette même unité dont tous profitent.
Nous avons également inclus un amendement interdisant l'emploi
des briseurs de grèves pour remplacer un salarié qui exerce son
droit à la grève ou qui est sous le coup d'un lock-out. Cet
amendement interdit également le recours aux services d'un
salarié membre de l'unité de négociation en grève
et en lock-out dans l'entreprise visée par le conflit ou dans une autre
entreprise appartenant à l'employeur. Cet amendement, normalement,
devrait contribuer à éliminer l'une des causes de pourrissement
de certains conflits et l'une des sources de frustration et de violence les
plus apparentes lors des arrêts de travail.
Le projet de loi reconnaît également à tout
salarié ayant été en grève ou ayant subi un
lock-out le droit de retrouver son emploi de préférence à
toute autre personne. Le commissaire général du travail verra
à l'application de cette mesure qui n'est d'ailleurs que le prolongement
logique du code existant.
En effet, puisque le Code du travail accorde le droit à la
grève, n'est-il pas normal que ce droit soit assorti de la protection de
l'emploi pour lequel il a été utilisé? Il serait
inconcevable que l'on puisse aussi facilement faire échec à ce
qui a toujours été, je crois, la volonté du
législateur.
Ce projet veut imprimer, madame, une nouvelle dimension aux relations de
travail au Québec. L'idée directrice du projet de loi 45 n'est
absolument pas de donner plus à l'une des parties en défavorisant
automatiquement l'autre, mais bel et bien de faire disparaître, du mieux
que nous le pouvons, avec les instruments que nous avons, dans les relations
entre salariés et patrons, les éléments les plus
susceptibles de provoquer des conflits et des tensions.
Nous devons nous placer dans une évolution historique. L'histoire
démontre que le respect des droits des salariés ne va qu'en
augmentant. C'est vers l'avant qu'il faut se tourner, vers la
créativité, vers la technologie et vers des techniques de gestion
mieux élaborées et plus modernes. Derrière nous, un
milliard d'êtres humains au moins dans le Tiers-Monde acceptent de
travailler pour quel-
ques dollars par semaine et dans des conditions absolument atroces,
parce que ce type de travail et ce type de rémunération sont
préférables à la famine. Il faut cesser de croire que
c'est en rognant sur les conditions élémentaires que nous
parviendrons à une meilleure position concurrentielle envers, entre
autres, le secteur manufacturier du Tiers-Monde.
La productivité dans un Etat moderne ne peut dépendre que
largement de la satisfaction de ceux qui en forment l'élément
essentiel, c'est-à-dire les salariés. Comment peut-on concevoir
qu'un salarié accepte d'être productif, d'être motivé
et de participer à la relance économique du Québec quand
il constate que certaines personnes mènent des luttes pour
présenter le salaire minimum comme un objectif à atteindre,
plutôt que de le présenter pour ce qu'il est, c'est-à-dire
un minimum décent?
Peut-on se surprendre qu'un père de deux enfants, salarié,
à $126 par semaine, se sente dissocié de la marche en avant du
Québec? Pourra-t-il, pour une somme si dérisoire,
améliorer sa productivité, se sentant, tout de go,
entraîné dans un élan collectif de relance
économique du Québec?
C'est dans cette perspective, madame, de partage d'une volonté
commune de tous les Québécois que se situe le projet de loi no
45.
Les dirigeants d'entreprise du Québec doivent comprendre qu'ils
ont à assumer cette relance économique. Ils doivent savoir que le
gouvernement du Québec les appuie en ce sens et qu'il compte sur eux.
C'est l'exemple de l'excellence que doit donner l'ensemble du patronat en
matière économique s'il veut motiver les salariés à
entreprendre une lutte pour la productivité. Cette recherche de
productivité doit être la préoccupation de tous les
Québécois.
C'est un appel que ce gouvernement lance à tous les
Québécois, salariés comme employeurs, pour que les
énergies s'emploient désormais non plus à se
déchirer mais plutôt à travailler pour le mieux-être
de l'ensemble de la population québécoise.
Le projet de loi no 45 est un appel à tous les agents de travail
pour qu'ils acceptent que s'implante chez nous un meilleur climat social qui
rejaillira sur tous. C'est nous tous qui en retirerons les
bénéfices. C'est pour cela, Mme le Président, que
j'espère que ce projet de loi fera naître dans cette Chambre la
conviction de tous ses membres que nous appartenons à une
communauté dont le progrès social est relié à sa
capacité de voir des objectifs communs à tous les
Québécois se dégager dans le secteur des relations de
travail. Je vous remercie.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Claude Forget
M. Forget: Le ministre du Travail a démontré, Mme
le Président, beaucoup d'habileté lorsqu'il a
dévoilé, le 29 juillet dernier, moins d'un mois après sa
nomination, le projet de loi no 45 élaboré par son
prédécesseur. L'explication qu'il en a donnée alors
reposait entièrement sur les faits d'une telle modification au Code du
travail sur la paix sociale, c'est-à-dire sur l'harmonie dont le
Québec a très certainement grand besoin. Dans sa
conférence de presse, comme dans les communiqués qui
accompagnaient la publication du projet de loi et ce soir encore, le ministre
s'est plus discrètement abstenu de décrire les avantages de cette
initiative sur le bien-être des travailleurs. Avec raison, je crois, le
ministre s'en est remis à ce sujet aux témoignages des centrales
syndicales qui n'ont pas manqué d'applaudir le geste gouvernemental. Par
cette présentation discrète, le ministre du Travail et le
gouvernement peuvent se donner l'air de faire plaisir à tout le monde.
Au grand public on offre la promesse d'un climat social amélioré,
susceptible de favoriser la productivité dont le ministre vient de nous
parler d'une façon fort naïve, c'est-à-dire la
prospérité générale.
En laissant la parole aux syndicats, quant au reste, on peut, sans
inquiéter le grand public, laisser croire aux travailleurs, qui, pour la
plupart, malheureusement, ne liront probablement pas le projet de loi, que ces
réformes les avantagent et, d'autre part, en feignant de ne pas entendre
les protestations des patrons qui, eux, malheureusement pour eux
peut-être, ont déjà lu le projet de loi, on donne enfin
l'impression que ces arguments qu'ils invoquent ne sont que des
jérémiades trop souvent entendues et inspirées par un
indécrottable conservatisme.
Ces habiles calculs du ministre créent un problème pour
l'Opposition. Comment s'opposer à un projet de loi si merveilleux qui
promet, sans effort, de faire progresser la société
québécoise sur la voie de la justice et de la paix sociale?
Cependant, ne serait-il pas prudent de se taire et d'attendre pour
dénoncer, le moment venu, le naufrage de ces beaux espoirs?
C'est peut-être là ce que des politiciens ayant l'oeil
rivé sur des sondages préféreraient faire; pourtant, nous
ne voulons pas nous arrêter à de pareilles considérations.
Le grand public, aussi bien que les travailleurs eux-mêmes doivent
être avertis du caractère illusoire ou même trompeur des
promesses que le gouvernement leur fait. Il vaut la peine d'affronter le
scepticisme avec lequel nos critiques du projet de loi seront peut-être
accueillies certainement de l'autre côté pour nous
mériter l'estime future de nos auditeurs lorsque, dans l'avenir, nos
prédictions se révéleront exactes. D'ailleurs, observons
la précipitation que met le gouvernement à faire adopter le plus
tôt possible, dans les conditions que l'on sait et que nous venons de
vivre, la deuxième lecture de ce projet de loi. Observons
l'entêtement qu'il met à repousser toute suggestion d'un
débat en présence et avec la participation des parties
intéressées. Tout cela démontre assez clairement que le
gouvernement lui-même est conscient des graves imperfections de ce projet
de loi et de sa propre incapacité de le défendre de
manière convaincante s'il fallait que la lumière soit faite sur
chacun de ses défauts.
Cet entêtement pousse le Parti libéral, quant à
lui, à faire une opposition à ce projet de loi d'une
manière peut-être plus sévère que cela n'aurait
été le cas si le gouvernement avait manifesté une plus
grande ouverture d'esprit. J'aborderai les motifs de notre opposition à
ce projet de loi de la façon suivante. En premier lieu, suivant en cela
le ministre, j'essaierai de démontrer que les modifications
proposées au Code du travail n'apporteront guère
d'amélioration dans l'efficacité avec laquelle les
problèmes soulevés par les relations entre patrons et ouvriers
sont posés. En d'autres termes, l'adoption de ce projet de loi est, dans
l'ensemble, assez indifférente en regard de l'objectif unanimement
souhaité d'une paix sociale mieux assurée.
En deuxième lieu, nous examinerons l'effet de ce projet de loi
sur le sort du travailleur, nous nous demanderons de quelle façon le
bien-être, la liberté et la dignité des travailleurs seront
affectés par le projet de loi no 45. Que ce projet soit efficace ou non
pour procurer au Québec une plus grande mesure de
sérénité dans les relations patronales-ouvrières,
il n'est pas négligeable de savoir si cette paix relative serait obtenue
en favorisant ou en défavorisant les intérêts des
travailleurs comme êtres humains, comme citoyens et comme individus.
Malheureusement, à ce chapitre, nous croyons que le projet de loi no 45
ne se contente pas d'être inefficace, il est positivement nocif.
En premier lieu, donc, examinons de quelle manière le projet de
loi no 45 pourra affecter l'efficacité avec laquelle sont
réglés les conflits de travail au Québec. Nous vivons dans
un régime économique où les conditions de travail sont
déterminées par des contrats entre les patrons et leurs
employés. Dans un tel régime contractuel, il faut présumer
de la bonne foi des parties. En effet, la paix sociale ne peut exister lorsque
tout dépend d'ententes, à moins que, de façon
générale et coutumière, les parties n'acceptent de jouer
franc jeu et de respecter la parole donnée. Il est naturel que des
exceptions se produisent, évidemment, à cette règle
générale, mais il est indispensable que les règles de
droit, les règles du droit du travail, qui régissent les
relations de travail, soient formulées pour faciliter et officialiser ce
qui est normal et coutumier, c'est-à-dire cette bonne foi que l'on doit
présumer, plutôt que ce qui est aberrant et exceptionnel,
c'est-à-dire la mauvaise foi, la défiance et les calculs de
stratégie.
Par exemple, notre Code du travail prévoit depuis longtemps que
les parties doivent négocier avec diligence et bonne foi; cependant, le
législateur a sagement omis de préciser ce en quoi consiste la
bonne foi. La raison en est simple, ou bien la bonne foi existe et une telle
définition est inutile, ou bien elle n'existe pas et toute
définition précise ne servirait qu'à fournir des
prétextes à des querelles additionnelles. En dépit d'un si
heureux exemple de retenue, notre législation du travail contient un
nombre considérable, avant même ce projet de loi no 45, de
dispositions détaillées, de procédures complexes qui, sous
le prétexte, d'ailleurs fort honorable, de protéger l'exercice de
certains droits, fournissent elles-mêmes l'occasion de tendre de
multiples pièges dans lesquels se font prendre la bonne foi et la paix
sociale.
Le projet de loi 45, dans ce contexte, modifie parfois de façon
très sensible tous les aspects ou si l'on veut toutes les phases
successives que traversent les relations de travail: l'accréditation, la
négociation d'une première convention collective, la
procédure de conciliation, l'arbitrage des griefs, la
réintégration d'emploi après un conflit de travail.
En ne m'attachant qu'à ces rubriques, qui constituent les aspects
que le ministre qualifie de techniques du projet de loi, mon intention est
d'illustrer pourquoi le parrain du projet de loi est mal fondé de
prétendre que ces modifications vont favoriser la paix sociale. Je
parlerai plus loin des autres aspects plus politiques du projet de loi, soit le
précompte des cotisations syndicales et l'interdiction des briseurs de
grève.
A mon avis, notre régime de relations de travail, que j'ai
qualifié de contractuel, et c'est bien ce qu'il est, doit être
basé sur la prémisse constituée je le dis encore
une fois de la bonne foi des parties qui se font face et doit
obéir par conséquent aux règles de prudence suivantes.
En premier lieu, il doit éviter le plus possible de rendre
l'exercice du droit de contracter des parties conditionnel au respect de
procédures complexes. La multiplication des procédures permet
autrement à une partie de livrer à l'autre une guerre des nerfs,
de façon à la mettre en échec sans nécessairement
vider le fond du débat qui les oppose l'une à l'autre.
En deuxième lieu, notre droit du travail doit éviter tout
ce qui conduirait à une interprétation littérale et
légaliste des textes de conventions collectives aux dépens du
sens commun et de l'équité. Une telle interprétation rend
interminable la négociation de conventions collectives et, comme le
ministre le sait, c'est une expérience qui va en croissant de plus en
plus au Québec, cette longueur constamment allongée de la
négociation, une telle interprétation, dis-je, rend interminable
la négociation d'ententes et génère, malgré la
peine qu'on y a prise, des malentendus constamment renouvelés dans la
période qui suit la négociation. Cela injecte dans les relations
de travail un esprit tatillon, un esprit légaliste dont nous faisons les
frais, tant dans la phase de négociation que dans la phase
d'application.
En troisième lieu, il faut éviter dans le Code du travail
de donner ouverture à la perte, par les parties, de leur sens des
responsabilités en laissant la porte trop ouverte à une
intervention discrétionnaire du ministre du Travail. Si le droit du
travail doit, dans certains cas très rares et sans aucun doute de
tels cas existent permettre l'intervention de tiers, et en particulier
l'intervention du ministre, ces interventions doivent être
prévisibles, elles doivent être soumises à des conditions
déterminées et strictement circonscrites dans ses
conséquences. Autrement, cette possibilité devient
elle-même un enjeu des négociations ou un élément de
stratégie pour l'une ou l'autre des parties.
Si, donc, ces trois prescriptions se présentent sous un aspect
négatif, c'est-à-dire éviter le légalisme,
éviter les procédures, éviter l'intervention arbitraire du
ministre, si ces prescriptions se présentent sous un aspect
négatif, c'est qu'il y a à cela une raison fondamentale que j'ai
déjà soulignée, c'est-à-dire que ces règles
de droit doivent s'appliquer à un régime qui repose sur l'entente
des parties et qui, à la limite, pourrait même fonctionner en
l'absence complète de Code du travail. C'est d'ailleurs, entre
parenthèses, Mme le Président, un phénomène
remarquable qu'un des pays occidentaux où les relations de travail se
sont développées de la façon peut-être la plus
harmonieuse n'a, effectivement, aucun Code du travail. Je pense à
l'Allemagne de l'Ouest, ses règles de droit dans ce domaine, d'ailleurs
fort peu nombreuses, s'étant élaborées durant la
période d'après-guerre à la lumière de certaines
décisions de jurisprudence.
L'existence même d'un Code du travail peut être un obstacle
plutôt qu'une assistance à la solution des conflits de travail.
Malheureusement, je me tourne maintenant du côté du projet de loi,
et malheureusement pour une autre raison, parce que le ministre suit en cela
une longue tradition et des efforts législatifs déjà
esquissés dans le passé, je pense, entre parenthèses, au
projet de loi déposé à l'Assemblée nationale en
1974 par notre collègue le ministre Cournoyer, ministre du Travail de
l'époque, il semble que cet effort nouveau que constitue le projet de
loi 45 vient enfreindre presque sans exception chacune des prescriptions que
j'énonçais tout à l'heure, chacune de ces règles de
prudence énoncées précédemment.
Les nouvelles règles de reconnaissance syndicale, par exemple,
multiplient les occasions d'enquêtes et d'appels d'un palier
hiérarchique à un autre et précisent de façon
détaillée les critères devant être utilisés
pour le décompte des membres d'un syndicat, ainsi que les motifs de
révision des décisions d'un commissaire du travail. Il est clair
que ce qui est gagné en précision dans certains cas peut
être plus que compensé, dans d'autres cas, par de nouvelles
occasions offertes aux plaideurs. Je puis assurer le ministre que, lorsque des
occasions sont données aux plaideurs, quelqu'un se sert de ces occasions
et de façon parfois très fréquente.
La négociation d'une première convention collective peut,
dans des circonstances laissées à une évaluation
subjective du ministre en vertu de la rédaction du projet 45, lier la
responsabilité du ministre dans cette décision qu'il doit rendre
quant à l'opportunité de décréter un arbitrage
obligatoire. Un tel arbitrage, s'il pouvait être admis à la limite
pour dénouer une impasse, n'est, malgré tout, aucunement
circonscrit dans le projet de loi, sauf quant à la durée de la
convention qu'il instaure; il n'est aucunement circonscrit dans son champ
d'application, c'est-à-dire qu'il peut constituer une première
base de conditions de travail que l'une ou l'autre partie passera des
années par la suite à démanteler ou à
défaire. L'objection qu'on pourra nous faire qu'il s'agit d'un conseil
d'arbitrage où sont représentées les deux parties n'est
pas une objection qui, à mes yeux, a une force suffisante à cet
égard.
La renégociation d'une convention collective pourrait
désormais s'effectuer sans le recours forcé et pratiquement
rituel à la conciliation, contrairement a l'exigence actuelle du Code du
travail. Mme le Président, il s'agit là, peut-être, de la
seule innovation dite technique du projet de loi qui soit carrément une
amélioration et qui, par sa nature même, illustre justement la
direction qu'il faudrait prendre dans notre droit du travail, celle d'une
moindre complication, d'un moins grand nombre d'exigences sine qua non dans le
déroulement des négociations. Le projet prévoit
également une discrétion quant à l'obligation pour le
conciliateur de faire rapport. Cette discrétion, quoiqu'elle soit
malheureusement à l'usage du ministre, constitue malgré tout un
élément de souplesse de bon aloi, car elle peut sans aucun doute
favoriser un règlement.
Nous en venons à l'arbitrage des griefs. L'arbitrage des griefs
qui découle, en cours d'application, d'une convention collective fait
l'objet dans ce projet de loi d'une quinzaine d'articles nouveaux du Code du
travail. Je dois dire, Mme le Président, que le légalisme
triomphe ici en maître. Non seulement les arbitres se voient-ils
conférer l'immunité à l'instar des juges, mais sont-ils
astreints à des règles de procédure strictement
définies. Ces dernières donnent ouverture à autant de
motifs de contestation judiciaire des sentences arbitrales.
En outre et c'est là le plus sérieux un
article nouveau, qui serait l'article 88 i) du Code du travail remanié,
fait aux arbitres l'obligation de trancher les litiges à partir de la
seule preuve recueillie à l'enquête et selon les règles de
droit. Ceci est une citation littérale de l'article
suggéré. L'effet d'une telle disposition sur la
négociation et l'interprétation de conventions collectives ne
peut être que néfaste. Elle ne fera le bonheur que des avocats
spécialisés en droit du travail. Elle fera le malheur de tous les
autres, Mme le Président.
Pris dans leur ensemble, donc, ces divers amendements dit techniques
sont fort décevants. Ils ne reflètent aucune orientation commune,
sauf la préoccupation des détails. Dans leur application, il est
à craindre qu'ils ne soient encore plus décevants. En effet,
proposés depuis longtemps comme une étape nécessaire
à l'amélioration de la qualité des relations de travail au
Québec, il ne serait pas du tout étonnant qu'ils donnent lieu
à des difficultés absolument inédites. Ce qui est plus
grave, en plongeant notre régime de négociations collectives dans
un bourbier de plus en plus procédurier et légaliste, leur
insuccès créera une désillusion pas du tout souhaitable
quant à la possibilité même d'améliorer les
choses.
Je n'ajoute rien, Mme le Président, quant à l'inscription,
dans le code, de l'obligation pour un employeur de reprendre un travailleur
syndiqué à la suite d'un conflit de travail. Cette règle
qui va de soi est d'ailleurs présente dans notre droit du travail, non
pas à titre de disposition du code mais à
titre de précédent judiciaire qui a été de
nombreuses fois, invoqué et appliqué. C'est donc, non pas un
amendement de substance, c'est la réécriture ou la transcription
d'une règle de droit qui existe déjà.
Cependant, le danger que je viens de souligner d'une procédure de
plus en plus complexe, d'un légalisme, de plus en plus répandu
dans notre droit du travail est d'autant plus grand que des arrêts
récents de nos tribunaux supérieurs ont, depuis peu, mis en doute
l'ensemble du droit administratif québécois. Comme on le sait, la
juridiction et surtout le caractère final des juridictions du Tribunal
des transports, du Tribunal des professions et, ce qui est directement
pertinent a notre propos, du Tribunal du travail ont été mis en
doute et sont l'objet de contestations toujours pendantes devant les cours de
justice.
Or, le projet de loi 45 n'offre aucune contribution à
l'éclairage et à l'éclaircissement de ce débat. Ce
qui est certain sur le plan de la juridiction du Tribunal du travail, c'est que
rien n'est certain et que ce doute même va peser lourdement sur un
système qui se veut de plus en plus légaliste et
procédurier.
Le gouvernement, enfin, présente l'article 97a que le projet 45
introduirait dans le Code du travail comme une contribution
particulièrement importante, selon le ministre, à la diminution
de la violence dans les conflits de travail. Il s'agit de l'interdiction qui
serait faite aux employeurs d'engager des briseurs de grève ou "scabs",
selon le vocable qui sera bientôt illégal. Malheureusement, cette
prétention est exagérée et même entièrement
erronée. Au contraire, cette disposition, dans son fond, ainsi qu'en
raison de la manière dont elle a été introduite par le
gouvernement, va probablement contribuer à aviver et à durcir les
oppositions entre patrons et syndicats.
Pour le grand public et...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent. Je vais devoir vous demander de conclure, à moins que
vous n'interveniez au nom de votre parti.
M. Forget: C'est ce que je fais, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Alors, je vous demanderais en
même temps de bien vous en tenir aux principes du projet de loi, M. le
député.
M. Forget: Oui, Mme le Président. Pour le grand public et
certains syndiqués, l'attrait que présente l'interdiction des
briseurs de grève semble reposer sur une association d'idées
entre briseurs de grève et casseurs de jambes, dont on a malheureusement
trop entendu parler dans certains conflits. La violence nous répugne
instinctivement et il semble aller de soi d'interdire tout ce qui peut,
à l'occasion d'une grève, permettre à des employeurs
d'engager ces anciens lutteurs ou ces repris de justice dont le but
présumé serait de perturber les lignes de piquetage, d'intimider
les gré- vistes et généralement de gêner l'action
syndicale légitime par des actes de violence physique ou par la menace
de violence physique.
Cependant, il s'agit d'une méprise, car la prohibition
adressée aux briseurs de grève n'a pas du tout pour objet
l'élimination des fiers-à-bras. Il est d'ailleurs étonnant
que le ministre du Travail, si peu de temps après les
événements de la Robin Hood Flour Mills, n'ait rien à
proposer, tel, par exemple, un code d'éthique pour faire évoluer,
dans un sens non violent, la pratique du piquetage et les mesures de
sécurité qui l'accompagnent. Les briseurs ne sont pas des
fiers-à-bras, ce sont des travailleurs payés par le patron pour
exécuter le travail que se refusent à faire d'autres travailleurs
en grève. Il peut s'agir de travailleurs non membres du syndicat en
grève mais déjà à l'emploi du même employeur.
Il peut s'agir de personnes employées depuis le début des
négociations ou de la grève. Dans tous les cas, il s'agit de
personnes payées pour exécuter une tâche de production et
non pas pour intimider les grévistes.
Ceci étant dit, il faudrait savoir dans combien de cas l'emploi
de briseurs de grève va constituer la source d'une
détérioration notable des relations de travail et, surtout, dans
combien de cas cette aggravation a conduit l'une des parties ou les deux
à recourir à la violence.
Le ministre pourrait nous donner ce renseignement, mais il semble bien
qu'il ne constituerait pas un argument très fort à l'appui de son
projet de loi. Plusieurs personnes approuveraient, cependant, une disposition
"antiscabs", telle que celle qu'on retrouve au projet de loi 45, tout en
acceptant la validité des arguments précédents,
c'est-à-dire de cette distinction entre fiers-à-bras et briseurs
de grève, conscientes que l'emploi des briseurs de grève
n'implique ou n'entraîne presque jamais, à 2% ou 3% près
dans les conflits de travail selon certains renseignements qui nous sont
disponibles directement ou indirectement, un recours à la
violence. Pour ces personnes, cependant, qui seraient, malgré tout,
favorables à une disposition telle que celle que contient le projet de
loi, l'interdiction des briseurs de grève rendrait la grève,
selon eux, plus efficace, et ils espéreraient, en conséquence,
que les conflits de travail en seraient abrégés.
Pour comprendre le danger d'un pareil raisonnement, il est
nécessaire de sortir du contexte étroit des conflits de travail
pour considérer le contexte économique dans lequel se situent ces
conflits. La grève, c'est la guerre économique, mais cela ne peut
pas être la guerre totale, et son but n'est précisément pas
la destruction de l'adversaire. Or, même du point de vue de
l'employé syndiqué, une grève à 100% efficace ne
contitue pas nécessairement un meilleur instrument; tout comme l'arme
atomique dans certains conflits localisés, son caractère trop
destructeur pourrait nuire à son utilité.
En effet, une grève pleinement efficace qui paralyse
complètement et sans rémission l'employeur signifie, dans un
délai d'autant plus court que l'entreprise est petite, la mort de
l'entreprise
et, par conséquent, une perte pour la société plus
grande encore que le gain anticipé par les travailleurs. Une entreprise,
en effet, vit de crédits reçus et de crédits
donnés. L'interruption des ventes ou des livraisons
déséquilibre rapidement cette délicate situation des frais
fixes qui courent même en l'absence de toute production et constitue un
fardeau permanent qui grèvera pendant des mois et bientôt pendant
des années le bilan de l'entreprise, gênant sa modernisation et
son développement ou, à la limite, précipitant sa
liquidation.
Il existe pourtant des pratiques, chez l'employeur, qui débordent
une interprétation raisonnable du droit à la grève pour
les syndiqués. Il en est ainsi de l'utilisation d'un personnel de
briseurs de grève professionnels fournis le plus souvent par des agences
privées de placement disposant d'un réservoir de main-d'oeuvre
occasionnelle utilisé surtout à ces fins. Il s'agit là
d'une pratique qui a été interdite par quelque 24 Etats
américains dont, entre autres, le Michigan, le New Jersey, le
Massachusetts et la Pennsylvanie, et une province canadienne, soit la
Colombie-Britannique.
La définition utilisée au Michigan se rapproche d'ailleurs
de celle utilisée dans la plupart des autres Etats et est la suivante:
"A person who customarily and repeatedly offers himself for employment in the
place of employees involved in a strike or a lock-out". Il est cependant
remarquable qu'aucun gouvernement en Amérique du Nord ou en Europe
occidentale ne soit allé aussi loin que le propose le gouvernement du
Parti québécois à l'article 97a relativement aux briseurs
de grève. Même la convention internationale du travail ne
contient, à ce sujet, aucune disposition. Il ne s'agit certainement pas
d'un oubli mais plutôt d'une conséquence, d'une conception plus
modérée des conflits de travail en vertu de laquelle la
grève ne joue pas le rôle de solution finale du capitalisme.
Le gouvernement peut-il vraiment, simplement par l'adoption d'un texte
de quelques lignes, bouleverser l'équilibre des forces en
présence sur le marché du travail? Ni les entreprises, ni les
syndicats ne tirent de la loi leur force et leur poids dans l'économie.
Le Code du travail fournit seulement le cadre dans lequel et par lequel
s'expriment ces forces et ces influences. Si l'article 97a était
adopté dans son état actuel, il faut donc supposer que le
patronat chercherait à restaurer à son avantage
l'équilibre provisoirement perturbé.
Mme le Vice-Président: M. le député, je vais
devoir vous rappeler qu'il ne faut pas faire allusion au contenu comme tel du
projet de loi, mais bien au principe.
M. Forget: Je parle des principes, Mme le Président. Il
nous a souvent été donné d'observer que la cohésion
du patronat québécois laissait encore beaucoup à
désirer. Par exemple, lors du dernier sommet économique de la
Malbaie, en mai dernier, les participants du côté patronal ont
exprimé avec beaucoup d'individualisme des points de vue parfois
divergents et, par-delà les incohérences, au demeurant peu
nombreuses, ils ont démontré, face aux syndicats, un degré
beaucoup moins avancé d'organisation et de cohésion. Un effet
prévisible d'une prohibition des briseurs de grève, tel que
l'entend le gouvernement, face aux menaces qu'elle fait reposer sur la survie
même de la petite et moyenne entreprise, tout particulièrement,
est de fournir un stimulant à l'émergence d'une cohésion
patronale renouvelée et renforcée; des stratégies
d'entraide et d'appui aux entreprises frappées par des grèves
peuvent être imaginées sans aucune difficulté. Ce qui est
difficile à concevoir, c'est comment une plus grande paix sociale
pourrait résulter de cette polarisation accrue des forces sur le
marché du travail.
M. Marcoux: Est-ce que le député de St-Laurent me
permettrait une question?
M. Forget: Après. Quoi qu'il en soit des retombées
futures d'une telle loi quant aux relations de travail, on peut se demander
pourquoi le gouvernement a choisi de mettre en péril, de façon si
brutale, ses propres relations avec les milieux économiques.
Après avoir pris l'initiative de convoquer, en mai, un sommet
économique, pour amorcer une concertation sur les grands
problèmes qui impliquent autant le patronat, les syndicats que le
gouvernement, après avoir annoncé par la bouche du premier
ministre lui-même une loi contre les briseurs de grève
inspirée des lois analogues citées plus haut, comment expliquer
cette radicalisation subite qui détruit l'atmosphère de bonne foi
qu'on a mis tant de soin à cultiver et qui met en péril la
recherche d'une concertation consultative sur les grands objectifs
économiques et sociaux entre tous les agents économiques?
Je laisse à d'autres, Mme le Président, le soin
d'expliquer ce revirement par une possible rivalité entre une aile
radicale et une aile modérée au sein du parti ministériel.
Peut-être s'agit-il de l'effet d'une mise en demeure discrète mais
ferme de la part d'organisations syndicales qui ont trop appuyé ce parti
pour attendre indéfiniment la monnaie d'échange. Quelle que soit
la raison, le ministre nous doit des explications pour nous aider à
comprendre à la fois le revirement qui s'est produit entre mai et
juillet ainsi que le refus opposé par le gouvernement depuis le
dépôt du projet 45 à toute forme de consultation publique
par la voie d'une commission parlementaire auprès des organisations
syndicales et patronales, et cela avant la deuxième lecture.
Comme je l'indiquais au début, le ministre a fait l'éloge
du projet 45 par la promesse d'une paix sociale retrouvée. Nous avons
fait l'examen des éléments de ce projet qui pourraient
prétendre avoir cet effet, soit les modifications dites techniques aux
mécanismes de reconnaissance de négociation et d'arbitrage, d'une
part, et l'interdiction des briseurs de grève, d'autre part. Rien dans
tout cela ne permet d'être optimiste. Rien ne permet de dire que, dans
l'ensemble, les affrontements et les frustrations auxquels le ministre a fait
allusion et qui accompagnent les conflits de travail
seront diminués. L'abus des procédures, le
légalisme, le pouvoir discrétionnaire du ministre donneront, dans
l'ensemble, encore plus de prise à la tentation toujours présente
des partis à faire de la stratégie. Une modification radicale des
règles du jeu prenant la forme d'une interdiction sans
précédent et sans parallèle, par son extrémisme,
des briseurs de grève va susciter un rajustement des attitudes et un
durcissement de la position patronale dont les travailleurs et la paix sociale
feront les frais.
J'en viens, Mme le Président, au deuxième aspect de mon
exposé de deuxième lecture, c'est-à-dire à cette
interrogation du départ sur les effets de ce projet de loi quant
à une amélioration possible du sort des travailleurs. A
défaut, en effet, de produire une société plus
harmonieuse, le gouvernement peut-il valablement prétendre contribuer,
par le projet de loi 45, à une société plus juste? Les
travailleurs seront-ils mieux défendus, plus forts?
Bénéficieront-ils d'un sort meilleur grâce à cette
action législative?
Le gouvernement a réussi dans une certaine mesure à faire
croire que le soi-disant préjugé favorable aux travailleurs qu'il
prétend avoir se manifeste avec éclat par le projet de loi no 45
et aussi tout particulièrement en ce qui concerne la reconnaissance ou
ce qu'on appelle communément l'accréditation syndicale, les
règles nouvelles à ce sujet étant censées favoriser
une syndicalisation accrue.
En outre, l'imposition du précompte de la cotisation syndicale,
décrite souvent par erreur comme la formule Rand, est
présumément destinée à augmenter la force des
travailleurs face aux patrons. Ces prétentions du gouvernement doivent
être évaluées avec soin et avec un sens critique aigu. Si
cela est fait, nous devons constater qu'il s'agit pour les travailleurs
beaucoup plus de gains symboliques que de progrès réels. Les
modifications envisagées permettent de créer l'illusion du
changement ou encore, dans les cas où ce changement est réel, de
confondre l'objectif valable de l'amélioration de la condition des
travailleurs avec un objectif bureaucratique qui n'a rien de commun avec le
premier, l'accroissement du pouvoir des états-majors syndicaux non pas
surtout face aux patrons, mais plutôt face à leurs propres
membres.
Considérons, en premier lieu, l'augmentation du nombre de
travailleurs syndiqués. Disons tout de suite que c'est là un
objectif auquel peut facilement souscrire le Parti libéral. Les
relations de travail dans un régime où les conditions de travail
sont déterminées contractuellement supposent, pour bien
fonctionner, que le plus grand nombre possible de travailleurs soient
représentés par des organisations syndicales. Il est vrai que le
nombre de travailleurs syndiqués au Québec est inférieur
à ce qu'il pourrait et à ce qu'il devrait être.
Interrogeons-nous, cependant, sur les causes du plafonnement atteint
depuis plusieurs années dans le taux de syndicalisation. Certaines
entreprises sont très petites, même si collectivement elles
regroupent de nombreux travailleurs. Les en- treprises de services, les
commerces de détail, l'assurance, les services financiers en
général constituent ces secteurs qui fournissent d'innombrables
exemples des difficultés de la syndicalisation. La tâche
d'organisation syndicale de ces travailleurs est immense et, sur un plan
très concret, elle est non rentable pour les syndicats. Certaines
occupations, telles celles remplies par les professionnels et celles des
employés de bureau, sont peu propices, pour des raisons sociologiques
complexes, à l'émergence d'un esprit de corps nécessaire
à la syndicalisation. Certains emplois souvent occupés surtout
par des jeunes ou par des femmes connaissent un taux de roulement si
élevé que l'organisation syndicale repart continuellement
à zéro.
A moins d'une orientation entièrement nouvelle, des principes qui
sous-tendent notre droit du travail, il est futile de s'attendre à une
augmentation sensible du taux de syndicalisation. D'ailleurs, il est, à
l'heure actuelle, à un niveau sensiblement inchangé depuis vingt
ans pour ce qui est de l'ensemble du Canada, et à peine supérieur
au Québec à ce qu'il était il y a quinze ans.
Le projet de loi no 45, qui ne s'adresse à aucun des facteurs que
je viens d'énumérer comme étant les causes qui expliquent
le plafonnement actuel du pourcentage de travailleurs syndiqués, n'aura
donc pas d'effets sensibles sur le taux de syndicalisation. L'abaissement
à 35% du pourcentage des travailleurs d'une unité de
négociation qui peuvent faire la demande initiale de reconnaissance
syndicale ne change pas pour autant la nécessité d'obtenir par un
vote secret plus de 50% d'adhérents.
L'exemple des pays européens souvent cité dans ce
contexte, puisqu'on compare notre taux de syndicalisation au taux
observé dans ces pays, illustre d'ailleurs admirablement la nature des
options qu'il faudrait faire ou au moins examiner, mais que le gouvernement
s'est abstenu de faire. Les syndicats européens n'ont pas
nécessairement besoin de l'appui de 50% des travailleurs, tel que nous
le calculons ici, dans une unité de négociation, puisque le droit
du travail de ces pays permet le pluralisme syndical même au sein d'une
même unité de négociation. En outre, l'accréditation
ou la négociation sectorielle constitue une pratique courante dans ces
pays, alors qu'elle n'existe ici qu'à l'état d'exception et
qu'elle ne pourrait pas, d'ailleurs, exister de façon plus
générale sans qu'on revoie de fond en comble tous les principes
de notre Code du travail.
Ces caractéristiques, pluralisme syndical et application
sectorielle du régime des relations de travail, ne pourraient, en effet,
être adaptées au Québec en tenant compte seulement de leurs
effets sur le taux de syndicalisation.
C'est sur la structure des organisations patronales, c'est sur les
modalités de négociation de conventions collectives, c'est sur
les modalités d'affiliation des syndicats locaux aux centrales qu'il
faudrait faire porter ce réexamen. On ne peut pas, en
conséquence, espérer une modification significative du Code du
travail qui constitue un
tout interdépendant en changeant, dans ce Code du travail, un
seul élément comme le fait le projet de loi no 45.
L'objectif déclaré par le gouvernement est valable, mais
le moyen pris pour le réaliser ne l'est pas. Ici comme ailleurs,
cependant, l'exposé des motifs ne constitue pas le principe
incarné dans ce projet de loi no 45. Ce qui en constitue le principe, au
contraire, c'est l'option politique qui a présidé au choix des
moyens. Ce que le gouvernement fait, ce n'est pas de rendre plus facile
l'obtention de la reconnaissance syndicale elle-même, mais plutôt
de rendre plus facile l'obtention d'une enquête d'un
commissaire-enquêteur pour vérifier la présence ou
l'absence d'un appui majoritaire de la part des travailleurs. La distinction
est de taille.
L'imposition légale de la formule Rand, un autre
élément important de ce projet de loi, illustre très bien
que le préjugé favorable à l'égard des
travailleurs, qu'entretient supposément le ministre du Travail, consiste
surtout en une attitude d'extrême partialité en faveur des
structures syndicales plutôt qu'envers les travailleurs comme tels. En
effet, le prélèvement obligatoire et irrévocable de la
cotisation syndicale à la source n'augmente en rien le pouvoir du
travailleur vis-à-vis de son employeur, mais il modifie, au
désavantage du syndiqué individuel, la relation entre le syndicat
et ses membres. La question est de savoir si la loi ne fait ainsi
qu'entériner une situation de fait déjà acquise par la
plupart des syndicats et n'a aucune importance. Si presque tous les syndicats
ont pu, sans l'aide de la loi, obtenir par la négociation cet avantage,
l'utilité de la loi est d'autant réduite. Et
l'impossibilité dans laquelle seront désormais placés les
syndiqués, qui veulent contester l'orientation et le leadership syndical
par le moyen extrêmement efficace de la suspension des cotisations,
consiste à mettre inconditionnellement la force de la loi au service de
l'establishment syndical.
Tout en conférant à la cotisation syndicale le
caractère d'un impôt, le gouvernement ne prend aucune des
précautions élémentaires pour assurer que ce pouvoir de
taxer, qu'il donne à un groupe privé, ne fera pas l'objet d'abus.
Premièrement, les syndicats, contrairement aux corporations publiques de
toute nature, ne sont pas tenus de déposer annuellement un bilan
financier de leurs activités. Deuxièmement, le caractère
obligatoire de la cotisation syndicale s'attache à toute somme qu'un
exécutif syndical pourrait choisir de prélever pour quelque fin
que ce soit, même totalement étrangère à la raison
d'être d'un syndicat. Etant donné le caractère
idéologique de l'orientation de certains syndicats, ce financement peut
être utilisé pour ce qu'on voudra appeler l'éducation,
c'est-à-dire l'action politique, l'appui à des groupes
étrangers, peut-être, dans leur composition ou leurs
intérêts à l'unité de négociation. Il aurait
été facile d'exiger une comptabilité précise des
fonds et de lier la cotisation syndicale proprement dite aux fonctions
syndicales, engagement d'agents d'affaires et de conseillers techniques pour la
négociation de conventions collectives, les procédures de grief
et la constitution de fonds de grève. Ce qui plus est, cette
disposition, liée à la formule
Rand, fera qu'on obligera même ceux qui ne sont pas membres du
syndicat mais qui sont tenus d'y contribuer à contribuer
financièrement au soutien d'activités qui n'ont rien à
voir avec les objectifs purement syndicaux.
Troisièmement, la loi ne prévoit aucune règle
d'éthique dans l'utilisation des fonds syndicaux; en particulier, aucune
exigence n'est formulée quant au placement des fonds de grève et
rien n'interdit des soi-disant avances à des responsables syndicaux. Le
gouvernement fera mine de s'être acquitté de son devoir face aux
travailleurs en invoquant les nouvelles règles dites de
démocratie syndicale qu'il a insérées dans le projet de
loi no 45, c'est-à-dire des exigences relativement au vote secret,
exigences qui se retrouveront, comme on le sait, seulement dans les
règlements et non pas dans la loi elle-même.
Cependant, il est déjà reconnu, par les observateurs
impartiaux, que ces exigences prétendues de la loi ne sont que des voeux
pieux.
Loin d'en faire des exigences légales, en effet, le gouvernement
se borne à créer pour les syndicats une obligation de faire des
règles quelconques ayant pour effet de rendre nécessaire le vote
au scrutin secret dans certains cas, selon des modalités laissées
à leur seule discrétion. Du même souffle, le gouvernement
s'enlève, par un autre amendement, tout moyen de contrôler
l'application de cette nouvelle obligation syndicale. En effet, comme il s'agit
de règlements internes des syndicats, seuls les membres d'un syndicat
négligent ou délinquant pourront s'en plaindre. D'autre part, il
élimine l'obligation actuelle du dépôt, auprès du
ministère du Travail, des statuts et règlements d'un syndicat et
leurs modifications. S'il veut donc les modifier en conformité avec les
nouvelles prescriptions légales, il devra instituer une enquête
spéciale plutôt que d'en faire un examen méthodique et
régulier.
L'intention gouvernementale de tout faire pour renforcer le corporatisme
syndical aux dépens des travailleurs se manifeste concrètement en
de nombreux endroits du projet 45, en plus de se révéler par des
omissions dont je pourrai parler plus loin. Un autre exemple d'un geste
précis pour enlever aux travailleurs un droit qu'ils possèdent
consiste à la modification de l'article 88 qui a pour effet de priver le
travailleur individuel de son recours à la procédure de grief.
Désormais, le travailleur devra s'en remettre à son syndicat pour
soulever un grief en vertu de sa convention collective. Il s'agit là
d'un instrument de discipline syndicale très efficace. Gare au
travailleur qui se sera exprimé un peu trop librement à
l'encontre des opinions de son etablishment syndical, gare à celui qui
aura soulevé l'irrégularité d'une procédure de vote
ou qui ira contester un accroissement du fardeau parafiscal que veut
décréter son syndicat. Le gouvernement offre au syndicat par cet
amendement, un moyen précieux pour faire régner à
l'intérieur du syndicat le "law and order" décidé par la
hiérarchie syndicale.
Autre aspect du projet 45. Le chapitre consacré à la
négociation d'une première convention collective dans une
unité de négociation permet
de mesurer l'incohérence des initiatives gouvernementales
lorsqu'il s'agit d'améliorer le sort des travailleurs. Ce chapitre
nouveau du code du travail permettrait au ministre, et dans les faits à
sa discrétion, de mettre de côté les mécanismes de
négociation pour imposer aux parties un arbitrage obligatoire. La
sentence arbitrale ainsi imposée tient lieu de convention collective
pour un an et devient le point de départ des négociations qui
doivent alors s'engager à nouveau entre les parties. Les centrales
syndicales ne se sont guère exprimées sur cette innovation.
S'agit-il, aux yeux du gouvernement, d'un précédent qu'une
réforme d'ensemble permettrait d'étendre à d'autres
situations d'impasse? Voilà ce qu'il faudrait connaître.
Voilà ce que les syndicats eux-mêmes seraient fort
intéressés à connaître. Mais n'est-il pas
étrange qu'après avoir donné autant de gages au
syndicalisme le gouvernement intervienne dans un domaine nouveau en mettant, en
pratique, de côté les syndicats?
La presque totalité des modifications au Code du travail que l'on
retrouve dans le projet de loi 45 fait partie de l'héritage avec lequel
s'est retrouvé le Parti québécois lorsqu'il a pris les
rênes du pouvoir à la fin de 1976. Héritage tiré
pour sa plus grande part du projet de loi 24 de la session de 1974, mais qui
fut abandonné au feuilleton après son dépôt.
Héritage aussi des promesses faites par le Parti québécois
lorsqu'il se trouvait dans l'Opposition et qu'il s'efforçait
d'aiguillonner le gouvernement libéral de l'époque dans le sens
des revendications de tel ou tel groupe, sans se croire obligé d'en
évaluer le mérite avec soin. Au demeurant, on s'aperçoit
que la seule véritable explication de l'entêtement gouvernemental
à adopter au plus tôt un tel assemblage de modifications
hétéroclites au Code du travail, c'est de poser ainsi un geste
auquel s'est refusé le gouvernement précédent. On sent,
chez les membres du gouvernement, un désir à peine
dissimulé de défendre ce projet de loi pour la seule raison que
le gouvernement Bourassa n'en voulait pas. On nous dira peut-être, sans
s'effrayer des contradictions, de l'autre côté de
l'Assemblée nationale, que ces modifications au Code du travail
étaient sur le point de refaire surface même sous le gouvernement
précédent. Je peux confirmer, à titre
d'ex-président du comité ministériel des ressources
humaines qui a précédé l'actuel comité du
développement social, que ce comité étudiait effectivement
à l'été 1976 une proposition qui ressemblait
étrangement à la plupart des éléments du projet
45.
Cependant, les objections et les difficultés que je viens de
soulever à l'égard de ce projet étaient en substance
celles qui furent soulevées alors au sein du comité, et de plus,
est-il besoin de le dire, les éléments les plus extrêmes en
étaient absents.
Enfin, Mme le Président, l'actuel ministre du Travail, le parrain
de ce projet de loi, est sur le point de lier son nom à un ensemble de
mesures qu'il n'a pas inspirées, qu'il n'a pas souhaitées et
qu'il pourrait bien regretter. Il est de notoriété pu- blique que
nos travaux parlementaires sur ce projet 45 seront probablement suspendus
après la deuxième lecture. Durant les quelques six semaines que
durera cette suspension il est à souhaiter que le ministre assume,
vis-à-vis de ce projet de loi, les responsabilités qui sont
désormais les siennes.
Peu importe la pression qu'exerceront sur lui ses fonctionnaires et ses
conseillers, peu importe l'opinion de son prédécesseur, peu
importe même la décision prise par le Conseil des ministres
à l'invitation de son prédécesseur, un ministre du Travail
digne de ce nom doit savoir résister à ces pressions, rejeter
après réflexion l'opinion d'un prédécesseur et
avoir devant le Conseil des ministres le courage de ses convictions.
M. Couture: Mme le Président, question de
privilège.
Mme le Vice-Président: M. le ministre de
l'Immigration.
M. Couture: Je soulève une question de privilège
pour dénoncer ou contredire ce qui vient d'être dit. Il n'y a eu
d'aucune façon une pression du prédécesseur du ministre du
Travail.
M. Marchand: II n'est pas question de cela. Mme le
Vice-Président: M. le député.
M. Couture: C'est une question de privilège. Le
député de Saint-Laurent laisse croire à cette Chambre que
l'actuel projet de loi 45 a été imposé à l'actuel
ministre du Travail. Je crois que je dois dénoncer cette assertion.
M. Marchand: Aussi insignifiant que quand il était
ministre du Travail.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Mme le Président, j'ai cru que l'ancien
ministre du Travail était fier de ce projet de loi et que ses opinions
sur le sujet auraient assez de poids auprès de son collègue pour
être assimilées à des pressions. S'il proteste qu'il n'en
est rien, je veux bien accepter ses explications. Il demeure que le nouveau
ministre du Travail devra assumer ses responsabilités. Le ministre du
Travail dispose de six semaines pour démontrer qu'il est un homme dont
l'influence et le jugement comptent parmi ses collègues.
Si, après la suspension de nos travaux, il revient avec le
même projet de loi, sans modifications importantes, en modeste et
fidèle exécuteur de la volonté des autres, nous saurons
quel genre d'homme le premier ministre a choisi comme ministre du Travail.
Au contraire, éclairé par ce débat de
deuxième lecture, sensibilisé par les échos et les
perturbations que ce projet évoque dans le public, il pourrait
décider de retirer ce projet de loi ou de le
présenter à nouveau après réimpression et
avec des modifications importantes. Dans un tel cas nous saurions tous,
même si les relations de travail continuent d'être un foyer
d'inquiétude et une source de difficulté, qu'il existe dans la
personne du ministre du Travail un homme résolu a s'en occuper avec
détermination et avec un sens aigu de ses responsabilités.
Enfin, Mme le Président, ce n'est pas avec un pot-pourri de
recommandations incohérentes que notre droit du travail s'assainira. Le
projet 45 n'est rien de plus que cela. La véritable réforme du
Code du travail n'existe-t-elle qu'en rêve? Merci.
M. Marcoux: Mme le Président, le député de
Saint-Laurent m'avait dit qu'il me permettrait une question. Je ne sais pas
s'il me la permet encore?
M. Forget: Volontiers, Mme le Président.
M. Marcoux: Le député de Saint-Laurent a
indiqué qu'à son sens cette loi aurait des effets négatifs
sur la petite et moyenne entreprise, entre autres à cause de la clause
qui interdit les briseurs de grève. Je voudrais savoir de sa part s'il
considère que United Aircraft, Robin Hood, Seven-Up, Firestone
constituent des petites entreprises.
M. Forget: Mme le Président, puisque je dispose encore de
quelques minutes, vous me permettrez de répondre à la question du
député un peu plus longuement.
Je crois que les exemples qu'il vient de fournir montrent
précisément la confusion qui existe au moins dans son esprit et,
je le soupçonnne, dans l'esprit d'un très grand nombre de
personnes face aux prétentions du ministre et du gouvernement quant aux
effets possibles de ce projet de loi. Lier les dispositions antibriseurs de
grève à la situation d'United Aircraft, c'est simplement se
mettre la tête dans le sable. On sait très bien qu'une entreprise
de cette nature, disposant de possibilités de production dans plus d'un
pays, connaissant les règles du jeu, pourrait très bien faire
échec à une grève en déplaçant sa
production. L'effet sur de telles entreprises d'une disposition comme celle qui
est envisagée est absolument négligeable à partir du
moment où les entreprises savent d'avance les règles auxquelles
elles devront faire face. Les petites et moyennes entreprises n'ont pas cette
facilité. C'est effectivement elles qui devront en subir le fardeau, au
prix même de leur survie dans certains cas, puisque l'arrêt total
de la production, comme on le sait très bien, dans le cas de ces
entreprises qui vivent de crédit, ne peut pas être maintenu plus
de quelques semaines.
Pour ce qui est de la Robin Hood Flour, Mme le Président, j'avais
cru faire dans mes remarques la distinction entre les briseurs de grève
et les employés de sécurité ou les soi-disant
employés de sécurité qui, dans certaines situations,
peuvent être employés pour des fins d'intimidation. Ils
appartiennent à des catégories complètement
différentes et rien, dans ce projet de loi, ne pourrait prévenir
ou empêcher les événements de la Robin
Hood, à moins qu'on ne se décide à formuler,
à l'endroit de ces casseurs de jambes, plutôt que briseurs de
grèves, et à l'endroit des services de sécurité des
règles d'éthique qui donneront au public, aux syndiqués
des règles à observer, à la fois quant au piquetage et
quant à l'exécution des tâches de protection de la
propriété au moment des conflits de travail. Mais il s'agit d'un
ordre de préoccupations qui est totalement absent des
préoccupations actuelles du ministre et totalement absent du projet de
loi 45.
Une Voix: Tu te fais planter, hein! Mme le Vice-Président:
A l'ordre!
Mme Payette: Le député de Laurier voudrait-il
reprendre son fauteuil pour prendre la parole?
M. Marchand: Je suis plus beau en arrière.
M. Couture: Acceptez-vous une autre question?
M. Forget: Oui, Mme le Président, dans la mesure où
je pourrai y répondre.
M. Couture: Croyez-vous que, s'il n'y a plus de briseurs de
grève, il y aura encore des fiers-à-bras sur les lignes de
piquetage?
Mme le Vice-Président: Je pense, M. le ministre, que vous
pourriez intervenir. D'ailleurs, la question précédente a
donné lieu à un éloignement du principe du projet de loi.
Vous aurez le loisir d'intervenir; je pense que vous pourrez le faire au moment
qui vous est alloué pour l'intervention. D'ailleurs, le temps est
écoulé pour le député.
M. le député de Richmond a demandé la parole. M. le
député.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Merci, Mme le Président.
Vous comprendrez avec moi, Mme le Président, que normalement, sur
un projet de loi concernant le monde du travail, un projet de loi aussi
important, n'eût été sa maladie et les conditions qui le
retiennent actuellement hors de cette Chambre, cela aurait été le
député de Johnson, le leader parlementaire de l'Union Nationale,
l'honorable Maurice Bellemare, qui aurait participé, au nom de l'Union
Nationale, a ce débat et qui aurait apporté sa contribution
personnelle, au nom de notre groupement, à ce débat de
deuxième lecture.
Je ne vous cacherai pas d'ailleurs, vous le savez, Mme le
Président, pour avoir travaillé avec le député de
Johnson en cette Chambre que c'est loin d'être par manque
d'intérêt si le député de Johnson n'est pas ici ce
soir et qu'au contraire le sang doit sûrement lui bouillir dans les
veines de ne pas pouvoir participer à un tel débat.
Mme Payette: C'est surtout cela sa maladie.
M. Brochu: Ce sera sûrement une partie de son retour
à la santé de pouvoir participer à des débats
prochains, Mme le ministre.
Et je voudrais souligner le fait...
Mme le Vice-Président: Veuillez discuter du projet de loi,
M. le député.
M. Brochu: Je voudrais souligner le fait que le
député de Johnson, avec son expérience, a d'ailleurs
été largement consulté par notre groupe sur le projet de
loi 45 pour l'élaboration des positions de notre parti sur la question.
Je m'adresserai donc à cette Assemblée au nom de l'Union
Nationale pour donner les grandes lignes qui nous paraissent être les
sujets, les principes que sous-tend ce projet de loi, pour indiquer quelles
sont nos positions, quelles sont les considérations et les nuances que
nous voulons apporter dans ce débat de deuxième lecture, et
également' la position d'ensemble que nous voulons tenir dans ce
débat.
C'est avec un vif intérêt que l'Union Nationale a accueilli
le projet de loi de réforme du Code du travail. Nous sommes conscients,
en ce qui nous concerne, des besoins énormes qui se font sentir dans ce
secteur de notre activité, et nous voulons, dès cette
deuxième lecture, apporter une participation active à ce
débat, comme également aux travaux de la commission parlementaire
qui sera chargée de l'étude article par article de ce projet de
loi, comme également au niveau des discussions qui auront lieu en
troisième lecture.
Bien sûr, nous aurions préféré que le
ministre nous présente, tel que promis, d'ailleurs, une réforme
complète et en profondeur du Code du travail. J'ai eu l'occasion,
d'ailleurs, d'en parler plus largement dans d'autres circonstances, dans les
jours passés, à l'occasion de la motion que l'Union Nationale a
présentée en cette Chambre pour réclamer cette
réforme globale du Code du travail et des lois concernant les droits au
travail, et j'ai eu l'occasion également d'en parler, comme d'autres de
mes collègues, dans d'autres circonstances. Nous aurions donc
préféré voir cette approche plus globale de ce
problème de la réforme du Code du travail.
Au lieu de cela, on nous présente une réforme qu'il serait
cependant inexact de qualifier de mineure. En fait, les changements
proposés auront vraiment une influence indéniable dans les
prochaines négociations collectives à l'intérieur de tout
le Québec. Qu'il me suffise, pour souligner l'importance de cette loi,
de souligner qu'à partir de l'annonce de cette pièce
législative on a assisté à de nombreuses réactions,
tant dans le public, au niveau des syndicats, au niveau des entreprises qu'au
niveau des media d'information également qui en ont fait grand
état.
Je pense que personne n'est indifférent à une pièce
de législation qui a autant d'importance et qui rejoint autant de
citoyens québécois, de quelque côté de la
clôture qu'ils se situent. C'est pour cette raison, M. le
Président, à cause des implications énormes de cette loi,
que nous nous interrogeons sur l'opportunité d'engager un tel
débat à partir de modifications partielles mais dont l'importance
ne peut être mise en doute. Le climat économique au Québec,
indépendamment d'ailleurs de la responsabilité du gouvernement,
n'est pas reluisant, et je pense que plusieurs en conviennent.
C'est pourquoi, dans la philosophie lancée lors du sommet
économique, les efforts de concertation entre les agents de
développement économique deviennent de plus en plus importants.
Nous sommes assurés, de par la conjoncture économique actuelle et
les orientations qu'on peut déjà y déceler pour les
années et les mois à venir, qu'une telle concertation pour
l'avenir deviendra de plus en plus importante, sinon absolument
nécessaire.
Nous considérons toujours que le gouvernement doit entendre
à ce sujet les différentes parties concernées par les
implications de son projet de loi, à l'intérieur d'une commission
parlementaire. J'ai d'ailleurs largement fait état de cette question
dans cette journée de députés qui nous a été
accordée dernièrement, où on a présenté une
motion visant strictement à sensibiliser le gouvernement et le nouveau
ministre à cet urgent besoin de convoquer une commission parlementaire
sur toute la question afin de faire le point immédiatement avant
d'entreprendre quelque pièce législative que ce soit en la
matière. C'était pour s'assurer, d'une part, de la collaboration,
sinon de la concertation des intéressés, pour évaluer la
situation autour d'une table commune et, à partir de cette prise de
conscience, établir vraiment une pièce de législation ou
un ensemble de pièces de législation qui s'orientent vers cette
réforme globale dont j'ai fait mention tout à l'heure.
A titre d'appui à cette argumentation, permettez-moi, M. le
Président, de citer un éditorial qui a été
écrit par Marc Laurendeau, qui dit ceci: "On se demande bien pourquoi un
gouvernement qui se dit social-démocrate et soucieux de concertation
économique avec ses principaux partenaires refuse un débat public
sur des réformes quand même majeures, au risque de se mettre
inutilement à dos le patronat québécois juste à la
veille d'un autre sommet économique prévu pour la rentrée
de septembre".
Je n'ai pas besoin de commenter davantage un texte aussi clair en soi.
Aussi, je me limiterai à ajouter cet autre paragraphe de
l'éditorial qui explique bien à ce sujet la situation. "Quand on
recherche vraiment la paix sociale par la concertation, l'attitude de bon aloi
consiste à ne pas bousculer inutilement ses principaux partenaires".
Je pense que cet énoncé de principe se passe d'un
commentaire élaboré. Si l'on recherche vraiment cette
concertation, ce travail commun autour des problèmes, au lieu de laisser
perdurer les conflits entre les individus ou les groupes, mais qu'on cherche
vraiment à rapprocher les individus pour qu'ils travaillent coude
à coude face à un problème donné, je pense que l'on
doit mettre en
application, de toutes les façons possibles, ce principe mis de
l'avant ici.
Voilà, M. le Président, pourquoi nous recommandons plus
fortement que jamais la tenue de cette commission parlementaire. Je demande ici
au ministre de réfléchir une fois de plus et de
reconsidérer encore cette décision, justement à cause du
besoin de rechercher maintenant cette concertation.
Je vous dirai d'ailleurs que plusieurs organismes, comme plusieurs
entreprises, comme de nombreux syndicats ont fait état de leur
façon de percevoir ce projet de loi, des inquiétudes parfois
qu'il suscite, des questions qu'il laisse en suspens. J'aimerais à ce
titre souligner simplement l'exemple d'une petite entreprise qui se pose, comme
plusieurs autres petites entreprises à travers le Québec, des
questions sur le dépôt de ce projet de loi no 45. Je m'en sers
pour attirer l'attention du ministre sur le besoin de reconsidérer cette
décision dans les discussions que nous avons actuellement sur le projet
de loi no 45 en deuxième lecture.
Il s'agit d'une lettre qui m'a été adressée
dernièrement, comme plusieurs autres d'ailleurs, que d'autres
collègues ont pu recevoir au sujet du projet de loi no 45. "M. le
député, "Nous avons pris connaissance du projet de loi no 45 qui
modifie substantiellement le Code du travail et la Loi du ministère du
Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le contenu de ce projet de loi et l'intention
du gouvernement de ne pas faire siéger une commission parlementaire
chargée d'entendre les revendications des parties
intéressées, nous font craindre le pire pour les petites et
moyennes entreprises auxquelles nous appartenons. Malgré les
déclarations récentes, nous demandons la convocation d'une telle
commission parlementaire pour permettre à la démocratie de se
manifester. De plus, nous croyons que le gouvernement devrait d'abord
procéder à une étude des conséquences
fâcheuses que pourrait avoir une telle loi sur les petites et moyennes
entreprises et sur les libertés individuelles des travailleurs. Nous
comptons sur votre sens profond de la démocratie et sur la
nécessité de procéder à une consultation
sérieuse de la question. Bien à vous". C'est signé George
Picken, de Picken Service, de Richmond, comté de Richmond. C'est une
petite entreprise, comme une foule d'autres à travers le Québec,
qui se pose des questions sur l'orientation actuelle que prend le ministre sur
le projet de loi no 45, qui aimerait être entendue, qui aimerait faire
part au ministre de certaines revendications fort légitimes pour
bonifier le projet de loi.
Je m'en sers comme exemple pour indiquer au ministre qu'il y en a de
nombreuses autres également comme celle-là qui demandent
justement la mise en place de cet appareil démocratique et le respect de
ces groupements, de ces individus ou de ces petites entreprises, comme, de
l'autre côté, des syndicats pour qu'on arrive à une
pièce législative qui réponde vraiment aux besoins du
monde du travail d'un Québec moderne en 1977.
A tout le moins, nous devrions être informés par le
ministre de la création d'un organisme dont la fonction principale
serait de mettre en oeuvre tout le processus de cette fameuse réforme du
Code du travail dont le parti ministériel a fortement fait état
durant la dernière campagne électorale.
Nous sommes tout à fait d'accord sur la nécessité
de légiférer sur les principaux sujets dont traite le projet de
loi no 45. Il est important, en effet, d'examiner les problèmes relatifs
à l'utilisation des briseurs de grève, à la
généralisation de la formule Rand et à la façon de
faciliter le processus d'accréditation.
En ce qui concerne la démocratisation syndicale, nous croyons au
droit du syndicalisme de percevoir des fonds chez tous ceux qui
bénéficient des avantages négociés par ses efforts.
Je pense que cela va de soi. Cependant, en toute cohérence, il faudrait
retenir l'ensemble des recommandations de la formule Rand.
Plus particulièrement dans le cadre de la démocratisation,
il serait juste d'assujettir les associations accréditées
à un contrôle sévère et à permettre à
tous les travailleurs de s'exprimer sur les questions qui les concernent
directement, soit les votes relatifs à la grève, à
l'acceptation ou au rejet des conventions collectives et les votes de retour au
travail. De toute façon, je voudrais analyser l'ensemble des principes
particuliers contenus dans le projet de loi présentement à
l'étude. Je dis "des principes particuliers" parce qu'il est
évident que le projet de loi no 45 ne touche pas un seul principe dans
son application, mais qu'il rejoint quelques principes majeurs qui existent
à l'intérieur du cadre législatif qui touche le monde du
travail.
Tout d'abord, en ce qui concerne la formule Rand, depuis le
dépôt devant cette Assemblée du projet de loi modifiant le
Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, il a été maintes fois répété
qu'il contenait, entre autres choses, l'application
généralisée de cette formule Rand. L'affirmation n'est que
partiellement vraie. Dans le projet de loi, on a retenu de la formule Rand la
recommandation assurant la sécurité syndicale pour toute
unité dûment accréditée, en obligeant un employeur
à retenir sur le salaire de chacun des membres de l'unité
représentée par une association un montant égal au
coût de la cotisation syndicale, que l'employé soit ou non membre
de cette association.
L'Union Nationale reconnaît la pertinence de cette mesure et croit
qu'étant donné que déjà 80% des employeurs
l'appliquent selon les normes des conventions collectives son application
intégrale telle que préconisée ne devrait pas, en
principe, poser de problèmes particuliers, puisque déjà
l'orientation est donnée en ce sens et est manifeste, tel que je viens
de l'indiquer. Nous nous réjouissons également de constater que
le ministre ne force plus l'employeur à congédier obligatoirement
un employé pour la seule raison qu'il ait été exclu de
l'unité d'accréditation par ses collègues
syndiqués. En fait, cette mesure ne fait, selon
les termes mêmes du ministre d'ailleurs, que mettre fin à
l'un des côtés les plus injustes de l'atelier fermé.
Nous voudrions maintenant rappeler notre désir de voir les autres
clauses contenues dans le jugement Rand. Nous croyons juste et raisonnable
d'assortir la proposition de sécurité syndicale, laquelle devient
maintenant universelle et obligatoire, des obligations contenues
également dans le célèbre jugement. La reconnaissance d'un
droit aussi important exige, à notre avis, l'imposition d'un certain
nombre d'obligations correspondantes. Je pense qu'il nous faut établir
l'équilibre en ce qui concerne les devoirs, les responsabilités
et les droits.
Un article, paru dans le journal La Presse du samedi 6 août 1977,
présentait, sous le titre "Les conditions oubliées", les
principales obligations qui font que le projet de loi n'est pas l'application
intégrale du jugement Rand.
Ainsi, aucune grève générale ou partielle ne sera
déclarée par le syndicat avant qu'un vote secret,
supervisé par un fonctionnaire du ministère du Travail, n'ait
été tenu et que tous les travailleurs, partie à cette
convention, n'aient eu la chance d'exercer leur droit de vote. Le juge Rand
recommande que le syndicat doive répudier toute grève ou
cessation de travail concertée, par un groupe ou par un certain nombre
de travailleurs, qui n'a pas été autorisée puis
déclarée par le syndicat et qu'il doive déclarer
illégale et n'engageant aucunement les membres du syndicat, tout piquet
de grève établi à l'occasion de cette grève. Le
juge Rand expliquait, lors de son jugement, la nécessité de
proposer des sanctions à tout travailleur qui participe à une
grève non autorisée ou à une suspension de travail
concertée autrement que sur l'ordre du syndicat. Ce travailleur sera
alors passible d'une amende pour chaque jour d'absence et de la perte d'un an
d'ancienneté pour une absence ininterrompue pendant une semaine.
Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le
député de Richmond, est-ce que je pourrais savoir si vous parlez
au nom du parti ou s'il s'agit d'une intervention du député de
Richmond? Dans le premier cas, vous avez droit à 40 minutes encore, et
si vous parlez en votre nom personnel il vous reste trois minutes.
M. Brochu: Comme je l'ai dit au début de mon intervention
tout à l'heure, je parle au nom de l'Union Nationale, cela me permet
donc de continuer l'intervention, de la compléter.
Il faudrait également soumettre à des sanctions un
syndicat qui déclare une grève sans recourir à
l'autorisation que lui fournissent, par un vote, les membres de l'unité
de négociation concernée. Ce syndicat sera passible de la
suspension de la retenue obligatoire des cotisations pendant deux mois et au
plus six mois dans le cas où il ne répudierait pas une
grève non autorisée. L'absence partielle de la première
obligation et totale des trois mois suivants fait dire aux critiques que le
projet de loi 45 n'est justement pas l'application du jugement Rand.
J'aimerais maintenant commenter ces recommandations et expliquer de
quelle façon nous aimerions les voir appliquer, dans un second temps de
notre exposé qui traite de la démocratie syndicale à
partir de ce qui est contenu dans le projet de loi à l'étude,
c'est-à-dire la tenue d'un vote secret dans quatre circonstances bien
définies. Et ce sujet s'attache à des principes qui sont contenus
dans le projet de loi no 45 actuellement à l'étude.
Comme je le mentionnais tout à l'heure, le projet de loi qui est
devant nous comporte plusieurs principes qui touchent au monde syndical et,
à cet égard, j'aimerais les toucher les uns à la suite des
autres, mais de façon détachée.
Tout d'abord, la question de la démocratie syndicale. Dans le
projet de loi 45, on n'a retenu, à toutes fins pratiques, que
l'application de l'obliga-tion pour le syndicat de procéder à un
scrutin secret dans les quatre cas suivants: d'abord, l'élection des
personnes occupant des fonctions de direction; deuxièmement, le
déclenchement d'une grève; troisièmement, l'acceptation ou
le rejet de la proposition de convention collective; et quatrièmement,
le choix du retour au travail.
Ces quatre circonstances de recours au vote secret sont contenues dans
l'article 19a du Code du travail, tel que modifié par le projet de loi
45.
Un principe des plus importants est contenu dans la réforme
proposée par le ministre du Travail. Le résultat d'un scrutin
sera le choix d'un vote majoritaire des membres de l'association qui y
participent. Nous avons affirmé être d'accord avec le principe du
vote secret, mais il faudrait discuter davantage le principe qui donne le droit
de vote aux seuls membres de l'association.
Pour mieux situer la problématique, examinons de plus près
certaines observations à cet égard du juge Rand pour se placer
dans cette philosophie et cette optique que j'ai mentionnées depuis
quelques instants. D'abord une citation intégrale tirée de la
Gazette du travail, de janvier 1946. C'est le juge Rand qui écrit:
L'obligation de verser des cotisations devrait tendre en toute vraisemblance
à favoriser le recrutement et, partant, à intensifier au sein du
syndicat l'intérêt et la discipline qui assurent un sens
progressif de responsabilités. On peut prétendre qu'il est
injuste d'obliger les travailleurs non syndiqués sans qu'ils aient voix
au chapitre. Plus loin le juge précise: Mais il s'agit tout simplement
de cotisations que les membres consentent à payer en retour d'avantages.
Le juge Rand précise que le syndicat ne devrait pas voir d'objection
à ce que tous les travailleurs, partie à la convention, puissent
s'exprimer lors du choix de grève.
Le contraire serait, selon le juge toujours, la preuve d'un syndicat peu
solide, et il termine en disant: Un facteur qui revêt beaucoup
d'importance pour le travailleur est le droit qui lui est garanti par les
conditions auxquelles est assujettie la retenue obligatoire des cotisations
syndicales, c'est-à-dire le droit de se prononcer sur un point qui lui
cause présentement du préjudice, c'est-à-dire la
décision de faire la grève.
Le principe, Mme le Président, de la démocra-
tisation des syndicats représente le moyen le plus simple pour
motiver un nombre de plus en plus important de travailleurs à
s'acquitter de leurs responsabilités par la participation au
syndicalisme.
Enfin, nous poussons le principe de la démocratisation jusqu'au
bout et nous exigeons que les fonds perçus selon l'application de la
formule Rand soient soumis au contrôle de tous les membres et, par le
fait même, que la provenance et l'utilisation des fonds soient rendues
publiques au moins une fois l'an, ce qui est également compris dans le
programme de l'Union Nationale, Mme le Président.
Avec la nouvelle loi apportée par le ministre responsable de la
réforme électorale, les partis politiques seront tenus et
c'est normal et souhaitable de divulger la provenance de leurs sources
de financement et leurs états financiers. Il serait tout à fait
normal, dans cette même perspective, que soient soumis également
aux mêmes exigences ceux qui sont concernés et que les fonds
perçus soient également dévoilés, mis à jour
et qu'on en fasse état au moins une fois l'an.
Dans un autre ordre d'idées, le projet de réforme du Code
du travail prévoit que les mécanismes d'élection seront
contenus dans les statuts ou règlements des associations
concernées.
Nous avons des réserves à ce chapitre. En effet, pour
assurer l'intégrité de ce processus, le ministre me
comprendra il faudrait que ces mécanismes soient contenus dans le
Code du travail ou tout au moins que ces statuts et règlements
concernant ces mécanismes soient déposés au
ministère du Travail et soumis à l'approbation du ministre, et ce
uniquement en vue d'assurer l'intégrité.
Nous appuyons également l'exigence proposée par le juge
Rand selon laquelle le vote de grève serait soumis à la
surveillance d'un représentant du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre. C'est pour cette raison que la procédure de vote doit
relever d'une loi administrée par le ministère que
représente ce fonctionnaire. Dans l'optique de ce que nous vous
proposons plus haut, il faudrait, pour assurer une véritable
démocratisation syndicale, assurer un mécanisme de surveillance
de ces fonds syndicaux. Sur ce point, d'ailleurs, la majorité des
éditorialistes s'entendent. Le processus démocratique implique,
de la part des associations de syndiqués, un rapport
détaillé sur l'utilisation des fonds qui appartiennent, via le
syndicat, aux travailleurs et doivent servir essentiellement à leur
avantage exclusif et j'insiste et ils doivent être en
mesure, à ce titre, de les contrôler. Sur ce point précis,
nous suggérons de prendre les recommandations de la commission Cliche,
reprises largement dans le projet de loi 47, sanctionné le 27 juin 1975,
aux articles 33b et 33c.
Nous dénonçons fortement l'abrogation, dans le projet de
loi 45, de l'obligation qui était faite, à l'article 39 du Code
du travail, à un syndicat de déposer annuellement chez le
commissaire général du travail tout changement dans ses statuts
et règlements. Le projet de réforme établit la
discrétion du ministre à exiger ce dépôt, et nous ne
sommes pas convaincus du bien-fondé de ce changement qu'apporte la
nouvelle loi. Je demande donc au ministre d'y réfléchir
sérieusement parce que c'est là un point qui nous apparaît
également important. J'espère que, dans la réplique qu'il
exercera, il pourra peut-être nous donner certaines indications à
ce sujet ou qu'il pourra peut-être apporter certaines modifications lors
de l'étude, article par article, du projet de loi.
Nous voudrions maintenant appliquer les remarques
générales que nous venons de livrer, Mme le Président,
à chacun des quatre cas particuliers de l'application de ce vote secret.
D'abord, l'élection des personnes occupant une fonction de direction au
sein d'une association de salariés devrait se faire au scrutin secret,
par un vote majoritaire des membres de l'association et, deuxièmement,
pourrait se faire à une réunion dûment convoquée ou,
comme c'est prévu dans le Code des professions pour l'élection
des membres du bureau d'un ordre professionnel, par courrier
recommandé.
Deuxièmement, lorsqu'on parle de déclenchement d'une
grève, ceci devrait être fait au scrutin secret, par un vote
majoritaire de tous les salariés de l'unité de négociation
ayant exercé leur droit de vote, qu'ils soient ou non membres de
l'association de salariés. Ce vote, deuxièmement, ne peut avoir
lieu avant que les salariés de l'unité de négociation
qu'ils soient ou non membres de l'association de salariés
aient été informés des dernières offres patronales,
et ce au moins 48 heures avant le début de la tenue du vote.
Troisièmement, ce vote doit se dérouler sous la
surveillance d'un représentant du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
règlement, M. le député de Jean-Talon.
M. Garneau: Mme le Président, je voudrais demander
à la présidence de rappeler à l'ordre les
députés. On a de la misère à écouter ce
qu'il dit; je crois que c'est un sujet important. Il y a trois ou quatre
caucus; on parle partout et on n'entend rien.
Mme le Vice-Président: J'allais d'ailleurs intervenir. Je
vous demanderais, messieurs, autant que faire se peut, de ne pas
déranger ceux qui ont l'intention d'écouter attentivement M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Merci beaucoup, Mme le Président, et je
remercie également mon collègue de Jean-Talon d'avoir
soulevé cette question. En ce qui concerne le déclenchement de la
grève également, le vote qui s'y rapporte sera tenu pendant une
période suffisamment longue pour que le ministère puisse affirmer
que chaque membre a eu le temps de se prévaloir de ses droits.
Cinquièmement, il est interdit à un syndicat de déclarer
une grève générale ou partielle s'il n'a pas suivi les
procédures ci-haut mentionnées et il devra répudier
toute grève ou arrêt de travail qui n'aura pas été
ainsi autorisé.
Sixièmement, enfin, si le syndicat déclare une
grève sans recourir à l'autorisation du vote des ayant droit ou
bien refuse de répudier une grève non autorisée, il commet
une infraction et est passible de suspension de la retenue obligatoire des
cotisations pendant deux mois ou au plus six mois. Des sanctions ne pourraient
être imposées à des travailleurs que lors de grèves
ou d'arrêts de travail illégaux et répudiés par
l'association qui les représente.
Maintenant, en ce qui concerne l'acceptation ou le rejet d'un projet de
convention collective, cela se fait au scrutin secret, par un vote majoritaire
de tous les salariés de l'unité de négociation qui auront
exercé leur droit de vote, qu'ils soient ou non membres de l'association
des salariés, comme je le mentionnais tout à l'heure. Ce vote
doit avoir lieu au plus tôt 48 heures après l'annonce de sa tenue,
à moins que le commissaire général du travail ne
l'autorise pour des raisons d'urgence. Idéalement, le vote devrait
être tenu sous la surveillance du représentant du ministère
du Travail et de la Main-d'Oeuvre, mais on comprendra qu'il serait impossible,
compte tenu du nombre de scrutins, d'appliquer une telle mesure.
En ce qui concerne le vote de retour au travail après une
grève, cela se fait au scrutin secret, par un vote majoritaire des
travailleurs visés par les négociations. Ce vote doit être
tenu selon les mêmes règles que le vote sur un projet de
convention collective. D'ailleurs, Mme le Président j'attire
votre attention là-dessus les mêmes remarques s'appliquent
en ce qui concerne la surveillance du vote par un fonctionnaire. Enfin, l'Union
Nationale propose au ministre d'ordonner la tenue d'un autre scrutin secret
pour la fixation du montant ou du taux de cotisation syndicale. Nous croyons
qu'entre autres choses ce vote favorisera l'adhésion d'un nombre encore
plus grand de travailleurs à l'association syndicale qui les
représente.
Maintenant, j'aimerais toucher la question de l'accréditation
comme telle, un autre principe qu'implique le projet de loi no 45 qui est en
discussion en deuxième lecture devant nous aujourd'hui.
L'objectif qui est visé par le projet de loi no 45, à ce
sujet, est de faciliter à tous les groupes de travailleurs le processus
d'association. Nous sommes d'accord sur ce principe et nous croyons que ce
droit d'association est sacré.
D'ailleurs, à l'article 20 du Code du travail, il est
prévu qu'une association de salariés qui obtient plus de 50% des
voix des salariés admissibles d'un même employeur a droit à
cette accréditation.
Il nous semble raisonnable, Mme le Président, de permettre la
tenue d'un vote sur une demande en accréditation lorsque 35% à
50% des travailleurs concernés en font la demande. De toute
façon, le droit à l'accréditation exige quand même
l'approbation de la majorité des travailleurs de l'employeur.
Il est important également de maintenir l'article 15 où
l'on précise que si un désaccord porte sur certaines personnes
visées par la requête en accréditation et que,
malgré ce fait, l'association jouit du caractère
représentatif, l'enquêteur doit accréditer celle-ci
sur-le-champ. Quand on dit que si plusieurs associations veulent
représenter un groupe de travailleurs, le choix se fait au moyen d'un
vote secret, c'est tout à fait pertinent, à notre avis.
Il faut aussi accorder le délai de trois mois entre les deux
demandes en accréditation pour une même unité de
travail.
Mme le Président, rapidement, j'aimerais toucher la question
importante de la première convention collective. Le projet de loi,
à ce chapitre, propose d'ajouter, après la section sur les
conseils d'arbitrage, une nouvelle section en rapport direct avec la
précédente et intitulée "De la première convention
collective".
L'objectif visé par ces articles nouveaux est de mettre fin le
plus tôt possible aux interminables conflits qui perdurent souvent
pendant des mois lors des négociations d'une première convention
collective. On prévoit la possibilité de recourir à
l'arbitrage dans les conflits reliés à la signature d'une
première convention collective.
Cependant, ce recours à l'arbitrage ne devra intervenir qu'en
dernier ressort, soit lorsque tous les efforts de conciliation auront
été faits et ce, de bonne foi, de part et d'autre. De plus, un
enquêteur nommé par le ministre devra faire rapport disant qu'il
conclut à l'impossibilité de régler ou la grève ou
le "lock out" dans un délai raisonnable. Alors seulement on aura recours
à l'arbitrage obligatoire.
Dans un éditorial de Vincent Prince, paru le 30 juillet 1977, ce
dernier accepte le principe de l'arbitrage obligatoire, après
conciliation, en raison de l'inexpérience dans le domaine des
négociations collectives des parties en cause. Nous approuvons
d'ailleurs l'article 81 f du Code du travail qui prévoit que la sentence
arbitrale lie les parties pour un an. Ainsi, un an après, chacun pourra
évaluer plus clairement les conséquences de ces demandes ou
estimer plus facilement les coûts de ces demandes.
Nous voudrions enfin rappeler l'objection du Conseil du patronat
à l'application de cet article. Le CPQ estime que cette mesure donne
ouverture à une intervention gouvernementale trop poussée dans le
domaine des relations de travail. L'objection est sans doute valable, mais la
durée relativement courte, soit un an, de l'application de la sentence
arbitrale écarte, à notre avis, ce risque.
Si la proposition de médiation du CPQ devait s'avérer un
échec, on reviendrait alors au point de départ, d'où la
nécessité dans ce cas exceptionnel de recourir à
l'arbitrage obligatoire.
L'expérience, à notre sens, vaut donc la peine
d'être tentée dans la mesure où elle réduit la
durée des grèves ou des arrêts de travail associés
à la négociation d'une première convention collective et
dans la mesure également où elle ne s'applique qu'à la
première année d'une première convention collective.
En ce qui concerne maintenant le calcul du délai devant conduire
à l'acquisition du droit de grève ou de lock-out, dans la
nouvelle loi le ministre du Travail vise, à ce chapitre, à
revaloriser le rôle de la conciliation dans le processus de
négociation collective. De plus, un conciliateur peut maintenant
être nommé en tout temps et non pas seulement 30 jours
après le dépôt de l'avis du début de cette
négociation. L'impact principal de cette mesure, outre de valoriser le
processus de conciliation, devrait être de permettre à la
conciliation d'intervenir en d'autres temps qu'en période de crise dans
les négociations. Ce point, je pense, est de première
importance.
L'intention du ministre est louable, mais je regrette en même
temps qu'il ne présente pas une proposition qui fasse tout ce qui est
possible pour que l'état des négociations soit le plus
avancé qui soit au moment où la convention en vigueur prend fin.
Ce point nous paraît de première importance dans la discussion qui
prévaut actuellement. Je pense que le ministre devrait agir avec
extrêmement de prudence à ce sujet, et peut-être profiter de
l'occasion qui lui est donnée pour mettre en place des mécanismes
qui permettraient de faire tous les efforts possibles avant l'arrivée de
la date d'échéance d'une convention collective. Malheureusement,
ce qui se passe trop souvent, actuellement, c'est que le gros du travail se
fait après cette date d'échéance, ce qui crée
sans que personne en soit, au point de départ, responsable ni
d'une part ni de l'autre un climat de tension où tout le monde se
sent un peu lésé en partant, parce que tout le monde part en
retard. Je pense qu'en tant que législateur on devrait j'invite
le ministre à accepter nos suggestions en ce sens avoir cette
préoccupation de prévenir, d'agir avec énormément
de prudence et de donner toute la latitude possible avant cette date
d'échéance aux parties en cause pour qu'elles puissent se
rencontrer et vider leur sac avant qu'il soit trop tard, ou avant, si vous
voulez, qu'on ait atteint ce stade des émotions qui, trop souvent, est
mis de l'avant par cette échéance, une fois qu'elle est
passée. Je pense que je n'ai pas besoin de donner
énormément d'exemples, le ministre est sûrement au courant
de ce qui se passe dans ce domaine et des situations malheureuses auxquelles
donne lieu trop souvent le fait qu'on commence à négocier ou
qu'on commence vraiment le travail valable une fois que la convention
collective est échue.
A ce moment, tous ont l'impression qu'ils ont été
lésés. Les travailleurs ont l'impression qu'ils sont
déjà en retard sur ce qu'ils vont pouvoir obtenir, et je pense
que cela commence très mal ce genre de négociation.
D'autre part, j'aimerais qu'à ce moment un médiateur ait
déjà présenté, dans le sens que je viens de dire au
ministre, un rapport sur l'existence ou non de cette bonne foi des parties dont
j'ai parlé tout à l'heure, ce qui pourrait avoir une influence
morale sur la perception publique qu'on se fait également d'un
conflit.
Si, évidemment, on met en place ces mécanisme auxquels je
fais allusion, avant, s'ils pou- vaient travailler avant la date
d'échéance d'une convention collective, et si on avait cette
possibilité d'évaluation de la bonne foi des parties, avant,
à ce moment-là, je pense que ce serait mettre toutes les chances
du côté d'un meilleur règlement des conflits parce qu'on
agirait vraiment à ciel ouvert et on donnerait toutes les chances,
justement, d'un règlement plus sûr et dans de meilleures
conditions.
Je suis donc d'accord avec l'intention d'accélérer le
processus de négociation. Bien que le sujet soit de première
importance, nous attendrons à l'étude article par article pour
expliciter notre point de vue sur ce sujet. Nous aurons d'ailleurs l'occasion
d'en discuter à fond à ce moment-là; j'aimerais beaucoup
entendre les arguments du ministre. Je vois que le ministre me fait certains
signes à ce sujet, je pense qu'il a de nombreux arguments à nous
apporter, pour ou contre, mais nous aurons l'occasion de vider cette question
parce que nous voulons vraiment que cette pièce de législation
soit apportée dans un sens le plus positif possible, conscients que nous
sommes que les ajustements au cadre des lois du travail que permet ce projet de
loi ont des conséquences énormes sur le monde du travail et que
c'est maintenant qu'on doit avoir cette préoccupation d'apporter les
meilleurs mécanismes possibles à ces négociations.
J'aimerais maintenant toucher également un autre principe qui est
dans cette loi, la question "antiscabs". Le projet de loi no 45 interdit non
seulement l'emploi de travailleurs substituts aux salariés en
grève, mais interdit également à l'employeur d'utiliser,
à l'occasion d'une grève, les services d'un salarié qui
fait partie de l'unité de négociation dans son
établissement affecté par la grève ou dans un autre de ses
établissements. Il faudrait, de toute évidence, ajouter
dès maintenant que cette mesure ne s'applique que dans les cas de
grèves légales. Je pense que c'est de première importance.
Le patronat, je le souligne au ministre, rejette d'ailleurs
catégoriquement ces dispositions. Cependant, de l'autre
côté, les éditorialistes, en grande partie, donnent leur
appui à cette mesure. Il faut bien comprendre ici que la plupart des
entreprises respectent déjà les mesures contenues dans cette
disposition du projet de loi no 45. Il serait donc dangereux, nous semble-t-il,
de légiférer en la matière s'il n'y avait pas
déjà eu des cas graves comme ceux de la Robin Hood, de i'Alcan ou
de la United Aircraft.
Il faut également souligner que cette disposition n'empêche
nullement l'employeur de tenter de faire fonctionner son usine avec le
personnel cadre ou des employés non en grève. "Il faut cependant
comme le soulignait Jean-Claude Picard dans le Devoir du 30 juillet 1977
souligner que cette disposition, si elle interdit l'emploi de briseurs
de grève, n'empêche nullement l'employeur de tenter de faire
fonctionner son usine à l'aide soit de son personnel cadre soit d'une
nouvelle division de travail des employés syndiqués qui ne sont
pas en grève, pas plus qu'elle n'empêchera un employeur de faire
appel à la police ou à des agences de sécurité pour
protéger ses im-
meubles et faciliter l'accès des cadres ou des autres
employés à l'usine".
Certains craignent qu'avec l'application de la loi les petites et
moyennes entreprises n'auront plus que deux choix, soit de fermer l'usine et
d'attendre la faillite éventuelle de l'entreprise, soit d'accepter les
demandes syndicales et de perdre sa rentabilité ou sa place dans les
différents marchés.
Cette constatation, nous apparaît-il, doit cependant être
nuancée. D'abord, la fin de l'entreprise est automatiquement suivie de
la perte d'emplois. Et cela, les syndiqués en sont tout à fait
conscients et il faut qu'ils le soient. Ensuite, de l'autre côté,
la disparition des petites et moyennes entreprises risque d'occasionner des
monopoles qui seraient mauvais socialement et syndicalement, et cela aussi les
syndicats le savent. Notons enfin que toute personne qui contrevient à
cet article est passible d'une amende de $1000 par jour. M semble donc que
cette mesure, contrairement aux appréhensions de bien des gens, pourrait
ne pas être aussi néfaste qu'on veut parfois l'affirmer, car
l'utilisation abusive de ces prescriptions risque d'entraîner non
seulement la fin des entreprises concernées, mais aussi celle de
l'emploi des travailleurs y gagnant leur pain. D'ailleurs, le recours aux
"scabs" n'existe pas actuellement dans plus de 10% des cas.
Maintenant, j'aimerais brièvement toucher la question du rappel
au travail suite à une grève ou à un lock-out. Il est
prévu au projet de loi no 45 qu'à la fin d'une grève ou
d'un lock-out tout salarié qui a fait grève ou a
été en lock-out devra être réembauché de
préférence à toute autre personne. Nous sommes d'accord
sur cette disposition de la loi. Le CPQ est également d'accord avec
cette mesure à trois conditions. Premièrement, que la
grève soit légale et nous partageons cet avis.
Deuxièmement, que le rappel ne soit pas nécessairement
immédiat ou que l'emploi soit le même. Cette mesure peut mener
à certains abus de la part des employeurs. Aussi, nous n'y souscrivons
pas à moins que, suite à une grève, l'entreprise ne change
effectivement, et de façon substantielle, son mode de
fonctionnement.
Par contre, dès qu'une grève est terminée, on doit
reprendre immédiatement tous les travailleurs touchés par un
conflit de travail. Si une entreprise doit procéder à des mises
à pied, elles ne devront pas avoir lieu au moment d'un retour au
travail. Enfin, on demande que l'employeur ait le droit d'exercer son droit de
gérance et de prendre des mesures disciplinaires à l'endroit des
salariés qui, selon son jugement, ont eu un comportement
répréhensible en cours de grève. En ces cas, les
salariés visés pourraient exercer les recours déjà
prévus à la convention collective relativement à la
procédure des griefs et d'arbitrage. Notons enfin que tout employeur qui
ne respecte pas les dispositions de cet article est passible d'une amende de
$500 par jour de retard.
Je vois, Mme le Président, que je viens par là de mettre
fin à certaines de vos préoccupations et que je viens de vous
rassurer sur l'orientation que pourrait prendre ce projet de loi. Il me fait
plaisir de le souligner. Maintenant, j'aimerais en guise de conclusion indiquer
que nous sommes à ce point pour l'implantation universelle de la formule
Rand, qui vise essentiellement à favoriser la syndicalisa-tion massive
et conséquemment l'équilibre des forces, que nous nous devons de
voter en deuxième lecture en faveur du principe que préconise le
projet de loi 45.
Nous sommes à ce point pour la démocratisation syndicale,
qui doit viser essentiellement à ce que les travailleurs, le cas
échéant, deviennent les véritables propriétaires de
leur syndicat, que nous devons voter en deuxième lecture pour ce projet
de loi. Nous sommes également à ce point, Mme le
Président, pour une accréditation rendue plus facile, afin que
les travailleurs en cette société de consommation et du style
"struggle for life" qui est le nôtre puissent regrouper et unir leurs
forces, que nous devons voter pour la deuxième lecture de ce projet de
loi no 45.
Nous sommes à ce point pour des dispositions législatives
"antiscabs", afin que cesse et que disparaisse un des facteurs qui
gâchent le plus l'ensemble du climat des relations, afin que jamais plus
nous ne vivions au Québec d'incidents à la Robin Hood, que nous
appuyons et que nous voterons en deuxième lecture en faveur des
principes qui sont contenus dans ce projet de loi 45.
Si l'Union Nationale, Mme le Président, annonce dès
maintenant qu'elle entend voter en deuxième lecture en faveur du projet
de loi 45, c'est qu'elle veut se faire solidaire d'un solide coup de barre en
matière de réforme de relations de travail, et que nous indiquons
par là que nous sommes conscients des énormes besoins qui se font
maintenant sentir et qui sont d'ailleurs pressentis depuis longtemps dans ce
domaine et auxquels on doit s'attaquer de toute urgenoe.
Pour autant, cet objectif d'assainissement de nos relations de travail
nous tient à ce point à coeur qu'il nous faudra vraiment, et
j'insiste, lors de l'étude en commission du projet de loi 45, article
par article, nous assurer que la réforme mise de l'avant se veut
vraiment en profondeur, intégrale et soucieuse de toucher à la
fois aux droits et aux obligations des travailleurs et des patrons.
C'est ainsi, Mme le Président, que nous favoriserons une
application intégrale de la formule Rand, ne nous limitant pas aux seuls
avantages qu'elle préconise, mais nous attaquant aux obligations
également qu'elle appelle dans ce souci d'équité et
d'équilibre auquel j'ai fait allusion tout à l'heure entre les
privilèges et les responsabilités, entre les droits et les
devoirs.
C'est ainsi que, dans la recherche de l'objectif de
démocratisation syndicale, nous parlerons non seulement des droits des
syndiqués, mais aussi de leurs obligations. Au total, le droit au
travail pour tous, la primauté de l'état d'être travailleur
sur l'état d'être syndiqué et, sur un autre plan, les
implications économiques du progrès social que met de l'avant le
projet de loi 45, les implications économiques, plus
particulièrement au niveau des petites et moyennes entreprises
québécoises que l'on doit préserver et aider.
Voilà des préoccupations sérieuses qui nous feront,
en commission et lors de l'étude article par article du projet de loi
45, soulever des questions et elles seront nombreuses, Mme le
Président qui nous feront émettre des réserves, qui
nous feront formuler des amendements pertinents au présent projet de
loi. Nous nous référerons toujours à ce souci de
reconnaître la réalité québécoise, les
besoins d'une économie moderne, de relations de travail normales,
saines, équilibrées et qui atteignent leur but. Si ce soir nous
disons oui au principe qui sous-tend le projet de loi 45, nous disons non a la
formulation et aux implications possibles que revêt le même projet
de loi 45.
Seule l'attitude gouvernementale et j'attire votre attention
à ce sujet, Mme le Président à compter de
maintenant, jusqu'en troisième lecture, en passant par la commission
parlementaire, nous dira si, lors de la mise aux voix du projet de loi final,
en troisième lecture, nous, de l'Union Nationale, devrons accepter
l'orientation articulée du gouvernement en la matière, ou si nous
devrons lui dire que sa version finale est une fois de plus excessive,
irréaliste et inacceptable.
Mme le Président, j'ai voulu, au nom de l'Union Nationale, donner
les grandes lignes de notre position sur la question, de cette contribution que
nous voulons apporter à un débat de toute première
importance qui, même s'il se tient à la fin de cette session, doit
recueillir, de la part de tous les parlementaires de cette Chambre, l'attention
que nécessite une réforme qui a autant de conséquences sur
notre Québec moderne. J'invite les parlementaires, comme le ministre du
Travail d'ailleurs, à tenir compte des remarques que l'Union Nationale a
voulu faire. Nous attendons, avec impatience, de voir l'attitude du ministre et
du gouvernement lors de l'étude, article par article, comme
également lors de la troisième lecture du projet de loi no
45.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Mme le Président, puis-je demander
l'ajournement de la Chambre jusqu'à demain, s'il vous plaît?
M. Burns: L'ajournement du débat, s'il vous
plaît?
Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle
adoptée?
M. Burns: Un instant, madame.
M. Mackasey: Excusez-moi, l'ajournement du débat. May I
call it eleven o'clock?
M. Burns: Sur cette motion d'ajournement du débat, Mme le
Président, je suis d'accord, je pense que tout le monde est
d'accord.
Mme le Vice-Président: Cette motion d'ajournement du
débat est adoptée. M. le leader du gouvernement.
M. Burns: Maintenant, et c'est pour cela que je ne voulais pas
que vous ajourniez la Chambre, j'avise les membres de l'Assemblée
nationale que demain après-midi, à compter de 15 heures, nous
entreprendrons l'étude, article par article, du projet de loi no 2
relativement au financement des partis politiques. Je propose donc, en
conséquence, que nous ajournions nos travaux à demain matin, 10
heures.
M. Brochu: Savez-vous à quelle salle demain? M. Burns:
Pardon?
M. Brochu: A quelle salle l'étude du projet de loi article
par article?
M. Burns: Ce sera à la salle 81, sans aucun doute.
M. Brochu: Sera-t-elle libre demain?
M. Burns: J'en donnerai avis dans le courant de la journée
de demain.
M. Brochu: La salle 81 va être libre demain?
M. Burns: Oui, elle va être libre. On m'a dit qu'on avait
terminé les travaux à la salle 81.
M. Brochu: Merci.
Une Voix: La guillotine a été adoptée.
Mme le Vice-Président: Cette motion d'ajournement des
travaux à demain, 10 heures, est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Mme le Vice-Président: Adopté. L'Assemblée
ajourne ses travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 36)