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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mardi 23 août 1977 - Vol. 19 N° 98

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

M. Richard (président): A l'ordre, mesdames et messieurs!

Présence dans les galeries du député sénégalais Christian Valentin

Le Président: Je voudrais ce matin signaler...

Une Voix: L'absence des ministres!

Le Président: ... oui, l'absence des ministres et la présence dans les galeries d'un bon ami du Québec, que le leader parlementaire de l'Opposition et moi-même connaissons de façon particulière, en l'occurrence le député du Sénégal, Christian Valentin.

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de motions non annoncées. Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. Période de questions orales.

M. le chef de l'Opposition officielle.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Présence des ministres à l'Assemblée nationale

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, une question de privilège. Je regrette d'avoir à revenir ce matin sur une question que j'ai eu l'occasion de soulever au cours de cette session. Nous ne sommes pas vendredi matin; nous sommes mardi matin et c'est de la volonté même du gouvernement que nous siégeons ce matin, à dix heures. Nous avons une absence plus que remarquable et remarquée de ministres ce matin. Nous n'avons ici en Chambre ni le premier ministre, ni le ministre des Finances, ni le ministre des Affaires intergouvernementales, ni le ministre de l'Education, ni le ministre d'Etat au développement culturel et à peu près aucun ministre de ministères à vocation économique et on nous demande de participer à une période de questions.

M. Johnson: Pardon.

M. Garon: Hé! Hé! Hé!

M. Levesque (Bonaventure): Voilà la situation d'un gouvernement complètement improvisé.

M. Brochu: M. le Président, sur la question de...

M. Burns: Le chef de l'Opposition a fait son "show", il a fait son petit spectacle. Peut-on maintenant, M. le Président, passer aux affaires courantes à l'endroit où nous étions, c'est-à-dire à la période des questions?

M. Brochu: M. le Président, question de privilège également.

M. Garon: Question de privilège.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: II est clairement prévu à notre règlement qu'il existe une période où les députés de cette Chambre ont le loisir de poser des questions aux ministres, mais encore faudrait-il à ce moment-là que les ministres soient présents, ce qui n'est pas le cas ce matin.

J'en compte onze ou douze avec l'arrivée du premier ministre maintenant.

M. O'Neill: Essaie-la ta question!

M. Brochu: C'est complètement déplorable et on n'accepte pas cette situation. Je pense que c'est se jouer de la démocratie et du parlementarisme comme tel. M. le Président, je vous demanderais s'il ne serait pas possible, étant donné qu'on n'a pas de ministres en Chambre et à peu près pas de ministres de ministères à vocation économique, à cause de l'urgence de certaines questions, de reporter la période des questions à 15 heures cet après-midi.

M. Duhaime: Quinze ministres.

Le Président:... faire leur entrée en Chambre. M. le chef de l'Opposition officielle, période des questions.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Juge en chef des Sessions de la paix à Montréal

M. Lalonde: M. le Président, en l'absence du ministre de la Justice et étant donné l'importance et la gravité de la question, je vais poser la question au premier ministre ou au leader du gouvernement. Il s'agit d'une nouvelle publiée ce matin à propos de l'enquête sur le juge en chef, M. Fabien, à Montréal. D'après la nouvelle, le rapport qui serait entre les mains du ministre de la Justice depuis plusieurs jours blanchirait le juge en chef qui irait d'ailleurs réintégrer ses fonctions de juge comme tel, c'est-à-dire d'agir comme juge sur le banc.

Je voudrais demander au leader du gouvernement ou au premier ministre si c'est exact, et dans l'affirmative, quelles dispositions, quelles démarches le gouvernement entend-il prendre à l'encontre de ceux ou de celui qui l'aurait dénoncé?

M. Lévesque (Taillon): Au moment où j'ai vu, il y a quelques jours, le ministre de la Justice, il m'a dit effectivement qu'il devait incessamment, c'est-à-dire dans les tout prochains jours, à ce moment-là, recevoir un rapport sur ce cas du juge en chef Fabien. Je suis obligé de prendre avis de la question pour le reste de la question du député de Marguerite-Bourgeoys, et aussitôt — peut-être même aujourd'hui — que le ministre de la Justice sera de retour, on avisera l'Opposition au besoin.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Question supplémentaire, M. le Président. Le premier ministre pourrait-il, et je le fais de façon très positive, persuader ou enfin pousser sur le ministre de la Justice pour qu'une décision soit prise le plus tôt possible dans cette affaire qui perdure et qui est très mauvaise pour l'administration de la Justice?

M. Lévesque (Taillon): Le gouvernement est aussi conscient que le député de Marguerite-Bourgeoys que ce n'est pas particulièrement sain cette ambiguïté qui flotte; alors le plus vite possible, d'accord.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Ma question s'adresse au ministre des Transports. Je ne veux pas interrompre la lecture de son journal.

M. Lessard: ...à l'écoute.

M. Forget: C'est tout à fait par hasard. Je m'excuse auprès du ministre.

M. Lalonde: Vous l'avez peut-être réveillé.

Transport en commun sur l'île de Montréal

M. Forget: Depuis plusieurs mois, le ministre des Transports nous promet, pour une date qui est constamment reculée, des conclusions du gouvernement et ses conclusions à lui quant aux questions du transport en commun sur l'île de Montréal. Je pense en particulier au dossier du métro. Etant donné que le ministre a abondamment exposé son point de vue relativement au site de Namur et à la nature de la décision qui a été prise, avec laquelle il n'était pas d'accord, étant donné que ce site n'est évidemment pas un site qui peut servir de terminus au prolongement de la ligne no 2, je crois, qu'est-ce qui empêche le ministre et le gouvernement d'en venir à des conclusions tout de suite? Il faudra bien donner un terminus à cette ligne-là. On pourrait annoncer dès maintenant et mettre en marche le mécanisme de prolongement du métro au-delà du boulevard métropolitain, comme il a été rumeur que ce serait fait de toute façon. Pourquoi retarder indéfiniment une décision dont tout le monde sait d'avance qu'elle devra être prise un jour ou l'autre?

M. Lessard: M. le Président, nous avons déjà levé le moratoire sur la construction ou la terminaison des travaux du métro de Montréal jusqu'à Namur. En ce qui concerne le site comme tel de Namur — je pense que tout le monde en est conscient — pour justifier la ligne du métro, surtout déconcentrer la circulation sur le boulevard métropolitain, nous devrons aller au-delà du boulevard métropolitain. Cependant, en ce qui concerne le site terminal, j'ai indiqué que nous devrions recevoir le rapport du comité des transports de la région métropolitaine d'ici la fin d'août. J'ai parlé du mois de juillet, mi-août. Normalement, ce rapport serait pratiquement terminé. Il y a eu une dernière réunion des responsables la semaine dernière. Le sous-ministre est actuellement à Montréal pour essayer de voir de quelle façon devrait se terminer les conclusions du rapport.

Suite à cela, nous étudierons le rapport au ministère des Transports et nous prendrons les décisions qui s'imposeront à la suite des recommandations qui nous seront données, en tenant compte de l'ensemble des budgets du Québec pour le développement du transport en commun. Il est certain que si nous décidons, comme c'est notre programme comme parti et comme gouvernement du Québec, d'investir plus considérablement dans le transport en commun, nous devrons pour autant réduire la construction d'autoroutes dans les secteurs urbains.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Question supplémentaire. Je comprends qu'on nous renvoie encore à ce fameux rapport, mais en supposant que la promesse qu'on a faite au ministre que ce serait prêt d'ici la fin d'août soit tenue, le ministre peut-il en retour, maintenant qu'il a eu le temps de mettre de l'ordre dans ses papiers, nous assurer que dans un délai d'un mois, ou au plus tard à la reprise des travaux de l'Assemblée nationale, une décision sera prise relativement au prolongement de la ligne no 2? Je ne lui demande pas de prendre des décisions relativement à toutes les extensions possibles à la ligne no 5, etc. On comprend que ce sont des décisions qui n'ont pas besoin d'être prises immédiatement, mais il faudra quand même prolonger cette fichue ligne si on veut, un jour, qu'elle puisse fonctionner. Plus on retarde, plus l'utilité des travaux qui ont déjà été faits va être mis en doute. Est-ce que vers la mi-octobre au plus tard, le ministre peut s'engager à ce qu'il y aura une décision du gouvernement dans ce dossier?

M. Lessard: Normalement, vers la mi-octobre, il devrait y avoir une décision, parce que je pense que j'ai déjà reconnu le principe, à savoir que le terminal ne s'arrêterait pas à Namur, mais pourrait aller vers Du Collège ou, en fait, selon les recommandations qui nous seront faites. Mais ce que je pense qui est accepté par le ministre des Affaires municipales, comme par le ministre des Transports, c'est que la logique même impose le prolongement du métro de la ligne no 2 au-delà du boulevard Métropolitain, afin justement de dimi-

nuer la pression de la circulation, particulièrement à l'échangeur Décarie. Le fait de rester à(Namur augmenterait encore ce taux de circulation qui est absolument extrêmement exorbitant, actuellement.

Le Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Est-ce que le ministre des Transports pourrait nous dire si le rapport qu'il recevra, qu'il déposera peut-être à l'Assemblée nationale ou au moins dont il fera rapport à l'Assemblée nationale comprendra également le transport en commun pour la partie est de la région de Montréal, à l'est de l'île de Montréal vers des comtés comme le comté du ministre des Finances?

M. Lessard: Nous avons déjà un rapport en fait concernant la région sud de Montréal.

Le comité des transports de la région métropolitaine — on dit bien de la région métropolitaine — nous fera des recommandations sur l'ensemble du transport en commun, de façon intégrée, de la région métropolitaine. J'ai demandé qu'on établisse au moins des échéanciers, parce que ce sera certainement des investissements qui pourront s'étendre sur une période de dix à quinze ans. Nous aurons des échéanciers et des priorités qui seront déterminées. Le ministère des Transports, comme le Conseil des ministres, aura à étudier ces priorités et, par la suite, nous ferons connaître l'échéancier du gouvernement en tenant compte de l'ensemble des budgets que nous pourrons investir dans ce secteur.

M. Lavoie: Une dernière question additionnelle au ministre des Transports...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: ... relativement à ces projets ou à l'étude qui se fait sur le transport suburbain dans la région de Montréal, particulièrement en ce qui concerne le transport rapide entre Montréal et Mirabel. Le ministre peut-il nous assurer que ce rapport sera définitivement déposé d'ici à la fin du mois relativement à ce projet depuis si longtemps attendu entre Montréal, Laval, Sainte-Thérèse, en se dirigeant vers Saint-Jérôme et Mirabel? Les parlementaires, avant des vacances prévues d'ici quinze jours ou trois semaines, voudraient bien avoir l'assurance que ce rapport sera déposé dans les meilleurs délais.

M. Lessard: L'assurance de le faire dans les meilleurs délais, je vous la donne.

M. Lavoie: Cette semaine?

M. Lessard: Non, non, dans les meilleurs délais. Actuellement, nous sommes tout près d'avoir le rapport. On a décortiqué l'ensemble des recommandations. Je ne sais pas quand la session devrait se terminer, mais je présume que, si la ses- sion devait se terminer d'ici trois semaines, vous aurez une copie du rapport avant de partir pour vos vacances.

M. Lavoie: Si elle se termine d'ici quinze jours?

M. Lessard: Je pourrais, si vous voulez, en prendre avis. Le sous-ministre est actuellement à Montréal pour compléter, avec le comité des transports de la région métropolitaine, l'ensemble des recommandations. Je pourrais peut-être, demain, vous donner plus de détails a ce sujet. Je sais que c'est la dernière réunion du comité avant de s'engager définitivement dans les recommandations. J'ai déjà reçu deux rapports très techniques qui ont été déposés à mon bureau. J'attends le rapport concernant les recommandations qui me seront faites.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

Programme de relance économique

M. Biron: Ma question s'adresse au premier ministre. Elle concerne la lutte au chômage et la reprise des investissements au Québec.

A la suite de la conférence de St. Andrews, où les premiers ministres ont réclamé l'intervention du gouvernement Trudeau en matière de lutte au chômage, le premier ministre, sans dévoiler ce qui se disait à huis clos, peut-il quand même nous préciser ce que Québec a suggéré aux autres provinces comme moyen de pression auprès du gouvernement fédéral, et deuxièmement, ce qu'il a peut-être suggéré comme mesure concrète, que peuvent faire à la fois le gouvernement canadien et les gouvernements des provinces pour la lutte au chômage?

M. Lévesque (Taillon): Nous ne sommes pas entrés dans des choses spécifiques. Je l'ai dit hier et je pense que tout le monde le sait, ces conférences, qui ont un côté semi-mondain et qui s'arrangent depuis une vingtaine d'années pour ne pas le perdre, ne consacrent en réalité que quelques heures à l'étude des questions. Alors, il y a eu à peu près quatre heures d'études, la première journée, sur la situation économique, ce qui n'a pas permis de commencer à dresser des plans stratégiques d'action concrète. Chaque gouvernement a pu en invoquer, on a invoqué certaines des choses qu'on a faites ici, certaines des intentions qu'on peut avoir pour l'avenir, mais sans que cela prenne la forme systématique d'une offensive en règle et qui aurait été calibrée vis-à-vis du gouvernement fédéral. Le chef de l'Opposition aura peut-être remarqué qu'une des choses qui nous semblait, à l'unanimité, être une première intervention fédérale qui serait extraordinairement valable dans les circonstances actuelles est une chose qui, justement, ne dépend que du fédéral surtout en période possiblement préélectorale, c'est-à-dire de nouvelles mesures budgétaires qui donneraient un soulagement fiscal à l'ensemble

des contribuables et non pas simplement aux compagnies, aux entreprises, comme le dernier budget Macdonald a prétendu le faire. Cela donne au chef de l'Union Nationale une indication du fait qu'il fallait aborder cela "at large", comme on dit en anglais, sans prétendre, en quatre heures, une fois le tour d'horizon fait, commencer à calibrer des interventions ou plutôt des mesures détaillées sur lesquelles tout le monde aurait pu s'entendre, sauf certaines choses générales, pour autant qu'il s'agit du fédéral, des choses qu'il peut faire lui-même s'il se "grouille" le plus vite possible.

M. Biron: Question additionnelle au premier ministre. Est-ce que le premier ministre, à la faveur de l'intersession ou un peu plus tard à l'automne, entend faire une tournée pancanadienne, comme il avait l'habitude de le faire au cours des années passées, pour vanter les vertus de la production, sinon de la productivité, du Québec et inviter les investisseurs canadiens à reprendre leurs investissements au Québec ou s'il croit que la seule visite à New York est suffisante pour faire revenir les investisseurs au Québec?

Une Voix: Pauvre niaiseux.

M. Lévesque (Taillon): Sans prétendre la définir dans le même sens que le chef de l'Union Nationale, il permettra qu'on diverge peut-être un peu sur la question des approches.

Je dois au moins à une ou deux reprises d'ici la fin de l'année aller hors frontières, ailleurs au Canada.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: J'aurais une question additionnelle au ministre d'Etat au développement économique. Peut-être que le premier ministre peut y répondre. Quand le livre vert qui a été promis par le ministre d'Etat au développement économique sur l'économie du Québec sera-t-il publié? Est-ce qu'il contiendra véritablement l'inventaire des problèmes et l'élaboration d'une stratégie de développement et des solutions concrètes qu'on peut apporter pour la relance économique du Québec?

Je recommence, M. le premier ministre. J'avais une question additionnelle au ministre d'Etat au développement économique. Etant donné qu'il n'est pas là j'ai voulu vous la poser à vous. Est-ce que vous pourriez nous dire quand le livre vert qui a été promis par le ministre d'Etat au développement économique sur l'économie du Québec sera publié? Est-ce qu'il contiendra l'inventaire des problèmes du Québec au point de vue économique et l'élaboration d'une stratégie de développement et des solutions concrètes pour la relance économique?

M. Lévesque (Taillon): Je ne sais pas s'il va contenir tout cela. Je ne sais pas exactement à quel point c'est rendu et je n'ai pas pu consulter le ministre depuis quelques jours, pour des raisons évidentes. D'ici très bientôt ce document perspec- tive — mais vert c'est plutôt une prospective au départ — ou prospective sera prêt et sera présenté.

M. Biron: Dernière question additionnelle. Est-ce que ce livre vert sera publié au cours des prochaines semaines ou s'il faudra attendre plus tard à l'automne?

M. Lévesque (Taillon): Le plus vite possible. Le Président: M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Question supplémentaire au premier ministre. M. le Président, pour toute personne qui ne se sera pas qualifiée à l'assurance-chômage, (a province devra payer 50% au titre de l'aide sociale. Est-ce que le premier ministre ne croit pas qu'il serait sage que dans l'immédiat, même si les travaux n'étaient pas de nature permanente, le gouvernement du Québec qualifie le plus de chômeurs possibles à l'assurance-chômage afin que le trésor fédéral paye 100% à l'assurance-chômage? Je mentionne un fait en particulier: II y a quelques années, dans une période creuse comme celle que nous connaissons, nous avions qualifié en vitesse 3000 personnes pour Je nettoyage des routes du Québec, et ce n'était pas du travail perdu puisqu'en période hivernale les municipalités et la province déboursaient beaucoup moins pour l'entretien des routes. Est-ce que le gouvernement ne croit pas qu'il serait sage dans l'immédiat de qualifier plusieurs milliers de personnes pour dégager les fonds de l'aide sociale du Québec?

M. Lévesque (Taillon): Je crois que le député de Charlevoix admettra que ce n'est pas une chose qu'on peut dire comme cela. Evidemment, il s'agit d'abord de fournir du travail autant que faire se peut, mais ce sera quand même, je crois, un des résultats pratiques du programme d'emploi saisonnier qui avait été mis sur pied et qui se déroule en ce moment, programme qui a été mis sur pied depuis le printemps.

Comme je l'ai déjà dit, il n'est pas exclu...

M. Levesque (Bonaventure): Où y a-t-il eu des travaux? Dans Taillon?

M. Lévesque (Taillon): Je n'ai pas pu vérifier ces derniers, mais je pense que le député de Bonaventure en verrait beaucoup plus — comme député de Taillon, je puis ajouter: hélas! — dans sa région et alentour de son coin que sur la rive sud de Montréal.

M. Levesque (Bonaventure): Oui, mais je n'en vois pas. C'est ce que les gens demandent. Ce que le député a suggéré, c'est bon...

M. Charbonneau: Vous passez votre temps à enlever vos lunettes, vous pouvez bien ne rien voir.

Une Voix: Qui a la parole?

Le Président: Je peux vous accorder une question si vous souhaitez obtenir une réponse, mais nous allons laisser le premier ministre répondre.

M. Levesque (Bonaventure): Le ministre ne croit-il pas que la question par le député...

Le Président: M. le chef de l'Opposition...

M. Levesque (Bonaventure): ... de Charlevoix...

Le Président: Oui, mais quand le premier ministre aura terminé sa réponse.

M. Lévesque (Taillon): Comme son ancien chef, le chef de l'Opposition actuelle a une drôle de vision, il est terriblement myope pour toutes les choses positives qui se passent dans le Québec, mais il est d'une presbytie extraordinaire pour tous les dangers imaginaires qu'il peut trouver à l'horizon.

Cela étant dit, oui, il est possible — je l'ai déjà dit — que quelques efforts additionnels, les plus substantiels possible soient faits d'ici une couple de mois — tant mieux si cela qualifie des gens pour l'assurance-chômage pour les raisons données par le député de Charlevoix — d'abord et avant tout pour essayer de nouveau de créer et de fournir du travail.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

Placement dans l'industrie de la construction

M. Roy: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à l'honorable ministre du Travail. D'ailleurs, je l'ai avisé de ma question.

Le printemps dernier, le ministre du Travail déposait un projet de règlement concernant le placement dans l'industrie de la construction. Pour consultation, j'aimerais demander au nouveau ministre du Travail si une décision définitive a été prise concernant ce placement. J'aimerais demander, en deuxième lieu, étant donné que dans une couple de semaines les étudiants choisiront, lors de la rentrée des classes, leurs options, surtout dans les polyvalentes, et qu'un certain nombre iront vers les options concernant les métiers de travailleurs de la construction, option charpentier, menuisier, électricien, etc., compte tenu du fait que les étudiants qui ont été diplômés au cours du mois de juin n'ont pas encore pu obtenir le fameux permis de travail pour aller sur le marché de la construction, je voudrais demander, dis-je, au ministre s'il est en mesure, ce matin, de faire le point. Est-il en mesure de nous dire explicitement si, dans le cas des étudiants finissants, des jeunes travailleurs, le problème est réglé de façon à pouvoir donner au moins de l'espoir à ceux qui choisiront ces métiers au cours de l'automne?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président, je remercie le député de Beauce-Sud de m'avoir donné avis, il y a quelques minutes, de la question qu'il allait me poser sur le placement.

D'abord, j'aimerais rectifier un élément. Le ministre du Travail qui m'a précédé n'a pas déposé de projet de règlement. Effectivement, un document avait été préparé par le ministre Couture ainsi que l'adjoint parlementaire, M. Chevrette, le député de Joliette-Montcalm. D'autre part, l'Office de la construction du Québec, en vertu de la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction devait remettre l'année dernière, au gouvernement qui nous a précédé, un projet de règlement dans la construction, projet qui fut rejeté par le Conseil des ministres sous le gouvernement précédent. J'ai eu l'occasion, depuis que je suis au ministère du Travail, de rencontrer les responsables de l'Office de la construction du Québec pour parler de l'ensemble des éléments de ce règlement de placement.

Je dois dire que cela a monopolisé une bonne partie des énergies de mon personnel au niveau du cabinet et au niveau du ministère.

L'objectif est d'en arriver à un règlement de placement où certains des principes qui devront être sauvegardés sont les suivants: d'abord et avant tout, donner une priorité aux véritables travailleurs de la construction. Quand je dis les véritables travailleurs de la construction, j'entends les gens qui en font leur vie. Deuxièmement, faire en sorte que, sur une base régionale, on puisse, dans la mesure du possible, dans la mesure où cela est viable et possible, souhaitable et souhaité par les parties, une partie de l'embauche se fasse en fonction du bassin régional desservi lors de travaux de construction. Troisièmement, faire en sorte qu'un minimum de règles d'éthique soient respectées par ceux et celles, organismes ou individus, entreprises ou sociétés d'Etat, qui font du placement; donc faire en sorte que ce règlement et ces règles soient respectés.

En ce qui concerne le problème des étudiants, j'avoue que c'est un problème un peu aberrant et qu'il faut le replacer dans la perspective suivante: les gouvernements du Québec, depuis des années... Vous m'excuserez, M. le Président, je suis un peu long; je prendrai encore une minute, si je n'abuse pas de votre temps. Vous me donnez une minute pour terminer?

Le Président: Oui.

M. Johnson: En ce qui concerne effectivement les étudiants, la situation aberrante est la suivante. De façon systématique, le gouvernement du Québec, depuis des années, forme des jeunes dans des métiers spécialisés, entre autres ceux de la construction, en ne tenant absolument pas compte du marché réel et des besoins réels en main-d'oeuvre dans ce secteur, ce qui fait qu'on arrive à une situation absurde où on forme des charpentiers-menuisiers, des monteurs en structures, des ferblantiers ou d'autres gens de certains métiers qui ne trouvent pas un débouché. Quand ils arrivent sur le marché du travail, ils sont perçus comme des ennemis malheureusement par des

hommes de 40 et 45 ans qui en font leur vie et qui doivent faire vivre leur famille.

Il faut effectivement, d'une part, faire en sorte que ceux qui sortent de nos écoles puissent s'assurer d'un certain travail et, en même temps, équilibrer cela avec le fait que des hommes qui sont dans le métier depuis longtemps entendent continuer à vivre et faire vivre leur famille de ce métier. C'est un problème assez gordien et je pense que l'Office de la construction, à ma demande — ce sont les jours qui viendront qui nous le diront — sera prêt à inclure certaines dispositions permettant un minimum d'accès pour les étudiants finissant dans les métiers spécialisés.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Question additionnelle, M. le Président. En somme, si j'en juge de par la réponse du ministre, il n'y a aucune décision de prise actuellement relativement au projet de règlement de placement dans l'industrie de la construction. J'aimerais demander au ministre, étant donné que ceux qui choisissent l'option des métiers de la construction ne sont pas les seuls à se chercher du travail et à ne pas avoir du travail garanti — c'est dans toutes les sphères et dans toutes les options de l'éducation; ils ne sont pas les seuls de ce côté — si, au moins, dans ce secteur, étant donné que des employeurs seraient prêts à les embaucher et compte tenu du fait que, dans certaines régions du Québec, et j'ai des chiffres là-dessus, nous nous dirigeons vers une pénurie de travailleurs qualifiés dans l'industrie de la construction, le ministre est prêt à donner l'assurance à cette Chambre que des dispositions particulières seront prises pour donner priorité à ceux qui ont obtenu un diplôme dans ce secteur de l'industrie de la construction, de façon que l'Office de la construction du Québec, l'OCQ, ne leur refuse pas systématiquement le fameux permis de travail. Pour ce qui a trait au permis de travail, est-ce que l'intention du nouveau gouvernement est de le maintenir ou de l'abolir, comme cela avait été dit par l'ancien gouvernement durant les dernières heures où il a été au pouvoir?

M. Johnson: L'ancien gouvernement avait dit beaucoup de choses dans les dernières heures du pouvoir. En ce qui a trait spécifiquement au problème des étudiants, je l'ai dit et je le répète, nous entendons, en collaboration avec l'Office de la construction, dont il ne faut pas oublier qu'elle est une régie autonome, effectivement obtenir, dans la mesure du possible, des représentants de l'Office de la construction, qu'on tienne compte de cette dimension des étudiants qui sortent avec un diplôme afin qu'on leur permette un certain accès. Malheureusement, je ne peux pas être plus précis pour le moment, même si, dans mon esprit, les possibilités sont très claires étant donné que le règlement et nos ententes et nos conversations avec l'Office de la construction ne sont pas encore terminées mais sont en cours de l'être.

Deuxièmement, il n'y a pas, pour le moment, de prévision précise, d'abolition du permis de travail. Cependant, en matière de placement, et c'était à l'origine le projet de l'Office de la construction et des dispositions contenues dans les embryons de projets préparés par certains députés du côté gouvernemental depuis le mois de novembre, nous entendons tenir compte du nombre d'heures travaillées dans la construction pour les fins de former des bassins de priorités, sur le plan régional comme sur le plan québécois, de façon plus large. En ce sens, le permis de travail ou l'autorisation de travailler se fera en fonction d'une série de critères dont le critère du nombre d'heures passées effectivement à ce travail dans les douze derniers mois ou dans une période de référence donnée dans le secteur de la construction.

Le Président: Le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, au ministre des Transports, la semaine dernière...

Le Président: Une question additionnelle?

M. Charbonneau: Non, principale, M. le Président.

Le Président: Alors, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre du Travail a fait mention d'un problème qui existe quant au nombre d'étudiants qui sont formés dans les métiers et les ouvertures qui leur sont offertes sur le marché du travail. Il a tenu les anciens gouvernements responsables de ceci. Je ne le chicanerai pas là-dessus, mais je voudrais qu'il dise à cette Chambre quels sont les mécanismes qu'il entend mettre en place pour pallier cette situation. Entrevoit-il, dans l'immédiat, des solutions concrètes? Sinon, le prochain gouvernement pourra en ajouter un autre à la liste de ceux qu'il vient de mentionner quant à l'inertie dans ce secteur de la formation des jeunes.

Le Président: Rapidement, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Johnson: Effectivement, le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre entend procéder à la mise sur pied de trois réalisations ou de trois objectifs à ce niveau. Il s'agit, d'une part, d'avoir une connaissance du marché en matière de main-d'oeuvre, et déjà nos fonctionnaires travaillent là-dessus depuis de nombreux mois. Il s'agit, deuxièmement, de mettre sur pied des programmes d'apprentissage pour tenir compte de la présence des métiers spécialisés et des entrepreneurs dans ce secteur. Il s'agit, finalement— et c'est probablement l'opération la plus délicate dans n'importe quelle bureaucratie — d'opérer cette jonction nécessaire entre le service de la main-d'oeuvre et la section de la formation au niveau du ministère de l'Education.

Le Président: Le député de Saint-Laurent, une question accessoire, la dernière.

M. Forget: M. le Président, le ministre a donné des indications du cheminement de sa réflexion relativement au règlement régissant le placement dans l'industrie de la construction. Il a même dit que le règlement préparé par l'Office, sous l'ancien gouvernement, n'avait pas été retenu par ce gouvernement. Est-ce qu'il peut nous dire quelle est son attitude vis-à-vis du principe du placement syndical par opposition à un placement qui serait effectué par l'Office de la construction?

M. Johnson: M. le Président, la question du placement, quand on parle de celui qui doit faire le placement, il faut tenir compte du fait que 80% de l'embauche en matière de construction, selon les chiffres qui m'ont été fournis par l'Office de la construction du Québec, sont faits par l'employeur. Quand on parle des bureaux de placement syndicaux, on parle de fait de 20% du placement dans le secteur de la construction. D'autre part, je ne crois pas qu'il y a une vertu en soi dans le placement fait par un bureau syndical, et je ne crois surtout pas qu'il y a une vertu en soi dans le placement fait par une immense machine bureaucratique qui, dans certains cas, risque d'être moins efficace.

Cependant, en pratique, c'est de savoir comment réaliser l'objectif qui veut que, premièrement, le placement réponde à des normes de justice et, deuxièmement, qu'au maximum on puisse sortir du portrait du placement ce qui constitue des éléments de menace sur la personne, de contrôle des individus et parfois même de choses aussi incroyables que le "shylocking". En ce sens, un règlement qui permet par un organisme gouvernemental de régir ou de superviser le placement qui puisse être fait par des bureaux de placement syndicaux ou de façon mixte, je pense que c'est l'amorce d'une solution. C'est au moins une solution à court terme, devrais-je dire, et possiblement l'amorce pour les années à venir d'un processus qui implique de plus en plus l'Etat à travers ces centres de main-d'oeuvre ou à travers l'Office de la construction du Québec.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, une question additionnelle au ministre du Travail.

Ce dernier a indiqué, dans ses réponses aux questions du député de Beauce-Sud, que le placement se ferait dorénavant en tenant compte des heures de travail exécutées l'année précédente. Dans le nouveau règlement, peut-il nous garantir qu'il y aura des sous-régions aux grandes régions administratives, de manière qu'un bonhomme qui a travaillé 400 heures l'année précédente ne voie pas son poste possible dans une sous-région pris par un travailleur de la construction qui viendrait de la région de Québec? Je parle d'un travailleur de la construction qui habiterait la ville de Québec; parce que lui a fait 600 heures, il aurait prio- rité sur un travailleur de la Beauce qui aurait seulement 400 heures de faites l'année précédente.

M. Johnson: M. le Président, je suis sûr que le député de Beauce-Sud n'est pas malheureux de votre allusion. Je ne veux pas passer à côté de la question du député de Montmagny-L'Islet, mais c'est une question extrêmement complexe. C'est une question fondamentale, j'en suis, mais c'est une question très technique, très complexe quand on parle de la formation de deux ou de trois bassins possiblement de travailleurs, quand on parle, d'une part, de priorité d'embauchage sur le plan régional versus priorité d'embauchage sur le plan national, ou sur un plan québécois — je m'excuse. Je me ferai un plaisir, lorsque j'aurai reçu de l'Office de la construction du Québec son projet final de placement et que j'aurai à le soumettre au Conseil des ministres pour un arrêté en conseil, de donner des explications techniques, mais je peux tout de suite assurer le député de Montmagny-L'Islet qu'il s'agit de concilier ces deux choses qui ne sont pas faciles à concilier. D'une part, c'est quoi un véritable travailleur de la construction? En d'autres termes, cet homme qui, comme source de revenus, se fie essentiellement à son travail dans le secteur de la construction, dans quelle mesure peut-on concilier ceci avec le fait qu'au niveau régional il est normal que les gens d'une région s'attendent, quand il y a un chantier de construction, à être, de façon prioritaire, embauchés sur ce chantier?

C'est ce que nous sommes en train d'articuler en ce moment avec l'Office de la construction du Québec.

Le Président: M. le député de Terrebonne. Primes d'assurance automobile

M. Fallu: Suite à une information qui, ce matin, fait la manchette d'un quotidien de Québec, j'aimerais demander au ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières si les conclusions auxquelles arrive le journaliste dans son article sont fondées.

Une Voix: Quoi?

Mme Payette: Comme j'ai compris, depuis plusieurs mois, le fonctionnement de cette Assemblée nationale, je savais bien que la question ne pouvait pas venir de l'autre côté parce que c'est une bonne nouvelle.

Une Voix: Vous avez demandé qu'on vous la pose?

Mme Payette: Certainement, il n'y a aucune honte à cela.

M. Pagé: Vous l'avez écrite vous-même, oui?

Une Voix: Si c'est vous qui l'avez écrite, elle est bien mal écrite.

Mme Payette: C'est comme cela que cela a toujours fonctionné, c'est ce que j'ai compris.

M. Pagé: C'est vous qui l'avez écrite et vous avez donné le petit billet au petit député.

Mme Payette: II s'agit, en effet, d'une excellente nouvelle. Je vois le tollé de protestations.

Une Voix: Quelle est la question? Le Président: A l'ordre!

M. Blank: Question de règlement, M. le Président.

Mme Payette: Cela vous dérange, n'est-ce pas?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Louis! Mme le ministre! M. le député de Terrebonne, pourriez-vous reformuler votre question en explicitant l'objet de la nouvelle?

M. Fallu: M. le Président, vous me comblez! M. Giasson: Souriez, Dieu vous aime!

M. Fallu: Je ne ferai quand même pas la lecture de l'article en entier, mais je peux au moins, pour nos collègues d'en face qui n'ont pas le bonheur de lire, le matin, les quotidiens — sans doute qu'ils arrivent un peu tard à la Chambre — dire qu'on nous annonce ce matin...

Une Voix: ... vos ministres.

M. Giasson: Ils sont là, ils viennent à la Chambre, eux autres.

M. Fallu: ... que l'assurance-automobile coûtera moins cher.

Mme Payette: Voilà! Merci beaucoup. Je ne m'attendais pas à une motion de félicitations ce matin, mais je pense que j'y aurais eu droit pour ma grande sagesse qui a fait, il y a quatre mois, que ne voulant pas m'exposer au tollé de protestations de l'Opposition en déclarant que les primes allaient baisser, j'ai attendu que quelqu'un d'autre le fasse, les compagnies d'assurance.

Effectivement, je suis en mesure de vous confirmer ce matin qu'il y aura une baisse des primes de l'assurance au Québec au cours de l'année qui vient, pour la première fois depuis bien longtemps, et pour une meilleure protection en plus.

Des Voix: Bravo!

M. Levesque (Bonaventure): Question additionnelle.

Le Président: Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Ma question additionnelle s'adresse au ministre. Le ministre veut-il indiquer par cette annonce que le total qu'aura à payer l'automobiliste québécois pour ses assurances, incluant ce qu'il aura à payer à l'Etat et ce qu'il aura à payer aux compagnies d'assurance privées, sera moindre?

Mme Payette: Pour presque tous les Québécois, à l'exception de ceux qui n'étaient pas assurés du tout et qui devront dorénavant s'assurer.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Le ministre des Consommateurs, Compagnies et Coopératives nous indique que l'avis des compagnies d'assurance serait que les primes de l'assurance-automobile connaîtraient une diminution.

Devant ce fait, le ministre accepte-t-il de reconnaître que si les compagnies à l'intérieur des sections de couverture qu'elles vont garder suite à l'application du nouveau régime, reconnaît-elle, dis-je, que les compagnies ont dit que cette réduction de primes était due d'abord et avant tout à une réduction du nombre d'accidents au Québec et à une diminution du coût moyen des réclamations causée par l'application des nouvelles règles de sécurité routière qui ont été mises en vigueur par le député de Charlevoix alors qu'il était ministre des Transports?

Mme Payette: M. le Président, ce n'est que partiellement vrai. Mais, même là, nous aurions lieu de nous réjouir.

M. Giasson: C'est la raison fondamentale.

Mme Payette: Mais, depuis ce matin, six compagnies d'assurance au Québec ont reconnu que la réforme proposée de l'assurance-automobile allait également faire baisser les primes.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Question additionnelle, moi aussi, M. le Président. Tenant pour acquis que les primes vont baisser cette année, est-ce que Mme le ministre, dans sa grande sagesse, peut nous assurer qu'avec ce système les primes n'augmenteront pas dans l'avenir?

Mme Payette: M. le Président, je ne peux pas répondre des primes en 1986 ou 1987. Je peux cependant vous dire que, selon le calcul des actuaires, il est probable que les primes vont continuer à baisser pendant quelques années. Si, en plus, on a l'aide des Québécois quant à la sécurité routière — j'inclus tous ceux qui sont ici et tous ceux qui sont de ce côté-ci également — je pense qu'on pourrait voir baisser les primes pendant deux, trois ou même quatre ans.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: J'aimerais demander à Mme le ministre si les calculs actuariels sont complétés relativement aux taux qui seront exigés à la suite de l'application de la loi, dans un premier temps. Deuxièmement, est-ce que Mme le ministre a l'intention de déposer ces calculs actuariels avant que nous entreprenions l'étude de ces deux projets de loi en commission parlementaire?

Mme Payette: En effet, M. le Président, je serai en mesure de déposer la table de tarification, ainsi que la table d'indemnisation dans les jours qui viennent.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Est-ce que le ministre pourrait nous dire quelles sont ces informations ou éléments nouveaux qui lui permettent d'affirmer aujourd'hui même que les primes doivent baisser, alors que très récemment et à plusieurs reprises, à l'Assemblée ici, elle ne pouvait d'aucune façon garantir qu'il y aurait une telle baisse? Quels sont ces éléments nouveaux? Est-ce le journal de ce matin ou quoi?

Mme Payette: Les éléments nouveaux sont que les compagnies d'assurance, quand elles le déclarent, sont plus crédibles que le ministre dans cette Assemblée et qu'il aurait été prématuré, il y a quatre mois, de présumer de l'attitude des compagnies d'assurance à la suite de la présentation de la réforme. Maintenant que le projet de loi 67 est déposé, projet de loi contre lequel tous les membres de l'Opposition ont d'ailleurs voté en première lecture, il semble que la réaction des compagnies d'assurance soit positive.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle, question additionnelle.

M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision que je voudrais demander au ministre pour terminer, afin que le public soit bien informé. Est-ce que le ministre est d'accord que, lorsque les compagnies d'assurance indiquent qu'il y aura une diminution des primes, elles tiennent compte du fait qu'elles ne couvriront plus les dommages corporels?

Mme Payette: Bien sûr, elles en tiennent compte, mais cela va plus loin que cela puisqu'elles envisagent une baisse des primes pour la couverture des dommages matériels.

M. Levesque (Bonaventure): Là, nous rejoignons la question du député de Montmagny-L'Islet.

Mme Payette: M. le Président, cela va plus loin que cela parce qu'il semble qu'une concurrence qui n'existait plus entre les compagnies d'assurance existe de nouveau depuis l'intervention du gouvernement dans ce dossier.

M. Levesque (Bonaventure): Alors, le ministre est d'accord pour dire que c'est bon, l'entreprise privée et la saine concurrence?

Mme Payette: A condition que cela soit très sérieusement encadré.

Le Président: Fin de la période des questions. M. le député de Gatineau.

Travaux parlementaires

Demande de retrait d'un projet de loi privé

M. Gratton: En vertu de 34, M. le Président. Au feuilleton d'aujourd'hui, en avis, à l'article e) on voit qu'il y a un projet de loi privé modifiant la charte de la ville de Gatineau, au nom de M. Alfred.

M. Burns: II va y rester longtemps à part cela.

M. Gratton: Oui, justement. Il y a une résolution du conseil municipal de la ville de Gatineau demandant de retirer temporairement ce projet de loi privé. Je me demande si on ne devrait pas tout de suite le rayer du feuilleton de peur qu'il puisse s'y glisser des erreurs plus tard.

M. Burns: En réponse au député de Gatineau, ce projet, qui apparaît effectivement à l'article e), a été retenu par moi depuis un certain temps, retenu quant à son adoption. Là-dessus je croyais qu'il fallait des consultations très précises et très spécifiques avec le ministre des Affaires municipales, chose que je n'ai pas pu faire encore au moment où je vous parle.

Le député de Papineau m'a fait des représentations à l'effet qu'il était urgent d'adopter ce projet de loi. Cependant, je peux dire, et malheureusement le ministre des Affaires municipales n'est pas ici pour le confirmer, que fort probablement certains des projets de loi que nous avons l'intention de soumettre au niveau des affaires municipales pourraient peut-être régler le problème spécifique de la ville de Gatineau. Pour le moment, il n'est pas question d'adopter ce projet de loi. D'autre part, je pense qu'il serait peut-être, avant qu'on ait eu la consultation nécessaire, prématuré de retirer le projet du feuilleton au cas où cela deviendrait nécessaire dans ce cas spécifique.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, pour éclairer davantage le leader du gouvernement, je lui ferai parvenir copie de la résolution du conseil de ville de Gatineau qui demande à l'Assemblée nationale de retirer le projet temporairement, ce qui réglera la question une fois pour toutes.

M. Burns: D'accord.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: II ne faudrait pas oublier qu'un projet de loi privé n'appartient ni aux députés ni au gouvernement. Il appartient aux pétitionnaires. Les pétitionnaires demandent qu'il soit retiré.

M. Burns: Sauf que c'est la première nouvelle que j'en ai.

M. Lavoie: Est-ce qu'on pourrait déposer ces documents?

M. Burns: Oui.

M. Lavoie: Normalement, je crois qu'il devrait être retiré du feuilleton.

M. Burns: On va aller prudemment dans ces choses. Vous nous accusez d'improviser à tout bout de champ. Il ne faudrait pas que l'Opposition se mette à improviser aussi.

M. Lavoie: Cela pourrait faire l'objet d'une directive de votre part. Il est 11 heures. Voulez-vous vous calmer, vous en avez jusqu'à minuit ce soir.

M. Burns: Non, on en a pour toute la nuit. Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je viens de faire parvenir copie de la résolution. Il serait peut-être bon qu'on la dépose pour les fins du journal des Débats.

M. Burns: M. le Président, je suis d'accord que ce document soit déposé et j'en fais le dépôt. Je prends la parole du député de Gatineau à l'effet que c'est une copie exacte et fidèle et je dépose ce document dont je viens de recevoir copie.

M. Gratton: M. le Président, je fais une demande de directive à savoir si, dans les circonstances actuelles, il n'y aurait pas lieu de rayer l'article c) du feuilleton.

M. Burns: Etes-vous capables d'attendre une journée pour cela?

M. Gratton: Oui, mais je demande au Président...

M. Burns: On va attendre.

Le Président: M. le député de Gatineau, je suis sûr que vous donneriez au moins à la présidence le temps d'en prendre connaissance.

M. Burns: M. le Président, est-ce qu'il y a d'autres questions en vertu de l'article 34? Non?

M. Brochu: Je pense que le menu est tout tracé, excepté s'il y avait des changements de dernière minute.

M. Burns: Non, il n'y a pas de changements de dernière minute.

M. Brochu: Est-ce que le leader peut nous informer de ce qu'il y a exactement au programme?

M. Burns: Non, on n'improvise pas, contrairement à ce qu'on dit.

M. Brochu: Là vous n'improvisez plus. Projets de loi nos 13 et 14

Adoption du rapport de la commission de l'agriculture

M. Burns: M. le Président, avant d'aborder l'article qui apparaît à mon nom à l'article 1, nous pourrions peut-être disposer d'un certain nombre de petites choses mais qui sont quand même importantes, et peut-être la prise en considération du rapport de la commission de l'agriculture qui a examiné les projets de loi nos 13 et 14; 13, Loi modifiant la Loi des abus préjudiciables à l'agriculture, et 14, Loi modifiant la Loi des produits laitiers et de leurs succédanés.

M. le Président, je vous demanderais donc, en conséquence, d'appeler, s'il vous plaît, l'article 20.

M. Levesque (Bonaventure): Y a-t-il eu des amendements qui ont été déposés à la suite du rapport?

M. Burns: Pardon?

M. Levesque (Bonaventure): Y a-t-il eu des amendements déposés à la suite du rapport?

M. Burns: Non, pas à la suite du rapport.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord. Adopté.

Le Président: Est-ce que ce rapport serait agréé?

Une Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Burns: Nous avons deux projets de loi privés, M. le Président, dont nous pourrions disposer en deuxième lecture. Il semble qu'après les discussions de la commission des affaires municipales tout le monde s'est rendu compte que c'était acceptable dans la forme où on la retrouve, de sorte que j'appellerais l'article 21, M. le Président.

Projet de loi no 230 Deuxième lecture

Le Président: M. le député de Vanier propose la deuxième lecture de la Loi modifiant la charte de la ville de Charlesbourg.

Une Voix: Discours.

Le Président: Est-ce que cette motion serait adoptée?

M. Goldbloom: M. le Président... Le Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Victor-C. Goldbloom

M. Goldbloom: Je voudrais prendre quelques secondes seulement, M. le Président, pour dire deux choses. D'abord je vous demanderai, tout à l'heure, de déclarer que la deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée sur division, quant à l'Opposition officielle.

Deuxièmement, je voudrais profiter de cette occasion, M. le Président, de dire que voici les deux derniers d'une série de projets de loi privés présentés par des municipalités. Dans chaque cas, ou à peu près, nous avons été appelés à examiner des articles qui demandaient, au nom de la municipalité en question, des pouvoirs exceptionnels. Nous avons dû constater, Mme le Président, que, dans bien des cas, il aurait été de beaucoup préférable que le gouvernement, qui a déjà au feuilleton un projet de loi pour modifier la Loi des cités et villes et un projet de loi pour modifier le Code municipal, procède, dans un tel projet de loi, à la modification pour toutes les municipalités de la province. Nous avons dit, à répétition, si c'est bon pour la municipalité demanderesse, cela doit être bon pour toutes les municipalités.

Mme le Président, je me suis fait harceler par les amis d'en face — pas par l'actuel ministre des Affaires municipales car il n'était pas là — parce que je faisais essentiellement cela en attendant, à l'époque. Maintenant, le rapport de la Commission de refonte des lois municipales est complet, et j'avais prévu pour l'automne dernier, Mme le Président, des séances de cette commission parlementaire pour aborder l'examen de ce rapport de la Commission de refonte des lois municipales. Je ne peux que profiter de cette occasion pour exprimer ma déception que le gouvernement ait cru bon de continuer d'accepter des projets de loi privés pour régler des problèmes qui auraient dû être réglés dans la loi générale et pendant qu'il a lui-même déposé des projets de loi pour amender les deux lois principales qui régissent l'administration des municipalités. J'exprime en même temps mon regret que le gouvernement n'ait pas convoqué la commission parlementaire pour que nous étudions, publiquement, avec les intéressés, comme témoins et comme opinants, le rapport de la Commission de refonte des lois municipales.

Or, Mme le Président, je me permets de vous rappeler que j'ai demandé que vous déclariez adopté sur division la deuxième lecture du projet de loi no 230.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Fabien Cordeau M. Cordeau: Mme le Président, au nom de l'Union Nationale, à la commission nous avons accepté le projet de loi tel que soumis et nous avons apporté notre approbation, ce que nous faisons aujourd'hui aussi. Par contre j'appuie le député de D'Arcy McGee en ce qui regarde le projet de refonte des lois municipales qui devrait nous être présenté dans quelque temps, comme l'a souligné le ministre des Affaires municipales durant l'étude de ce projet de loi.

Pour nous, nous allons approuver ce projet de loi.

Mme le Vice-Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Guy Tardif

M. Tardif: Mme le Président, effectivement, je me suis engagé en commission parlementaire à présenter dans les meilleurs délais un certain nombre des amendements demandés par les municipalités à leur charte privée, de les inscrire dans la loi générale. Cependant, la réserve du député de D'Arcy McGee, qui a été exprimée à une ou deux reprises et qu'il a faite ici générale ce matin, me surprend puisqu'on n'avait pas tout à fait le même langage en commission parlementaire.

C'est vrai que certaines dispositions, si elles sont bonnes pour certaines municipalités, peuvent l'être pour l'ensemble, mais c'est aussi vrai qu'il peut être très instructif pour le gouvernement, pour la chose publique, de ne permettre qu'à une ou deux ou trois municipalités, à l'essai, d'exercer un nouveau pouvoir afin que le gouvernement voie comment ces municipalités s'en servent avant de le généraliser à l'ensemble des villes. Ceci dit, c'est un fait qu'il y a des dispositions qui, d'ailleurs, avaient déjà été adoptées par mon prédécesseur, en quelque sorte, accordées par mon prédécesseur à deux ou trois reprises, et qu'on vient, dans ces treize commissions parlementaires ou ces treize chartes privées qui ont été adoptées, d'accorder parfois exactement un pouvoir identique à celui que mon prédécesseur avait consenti.

C'est donc, encore une fois, tout simplement aussi question de temps. Sept lois du gouvernement ont été présentées par le ministre des Affaires municipales depuis le début de la session, plus treize projets de loi privés, ce qui fait un total d'au moins vingt textes de loi qui ont été scrutés par le ministre des Affaires municipales. Je pense que c'est une question de temps pour inscrire dans la loi générale un certain nombre des dispositions qui ont été étudiées.

Mme le Vice-Président: Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 230, Loi modifiant la charte de la ville de Charlesbourg, sera-t-elle adoptée?

M. Goldbloom: Adopté sur division, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Adopté sur division.

M. Burns: D'accord. Nous pourrions peut-être, Mme le Président, également...

Mme le Vice-Président: Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Nous pourrions peut-être, Mme le Président, appeler l'article no 22, qui est également un projet de loi privé concernant la ville de Longueuil.

Projet de loi no 236 Deuxième lecture

Mme le Vice-Président: M. le député de Laprairie propose la deuxième lecture du projet de loi no 236, Loi modifiant la charte de la ville de Longueuil. Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée?

M. Goldbloom: Adopté. Mme le Vice-Président: Adopté.

Travaux parlementaires (suite)

M. Burns: Mme le Président, je donne un avis conditionnel, je dis bien conditionnel parce que je ne suis pas encore sûr de l'heure à laquelle la commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvemementales pourrait siéger demain relativement au projet de loi no 2 quant à son étude article par article. Il serait possible qu'après la période des questions, demain, nous puissions siéger. D'autre part, je ne vous cache pas que demain également j'avais l'intention, comme ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire, de rendre public le livre blanc sur la loi de la consultation populaire, c'est-à-dire sur les référendums, de sorte qu'il peut peut-être y avoir des embêtements, d'aiguillage à un moment donné, auquel cas, si le livre blanc sur les référendums était rendu public demain matin, je pense qu'il serait préférable, parce que je serais tiraillé entre deux endroits différents...

M. Lavoie: Conférences de presse.

M. Burns: Non, mais je présume qu'un texte de cette importance — en tout cas, on en jugera doit probablement attirer l'attention d'un certain nombre de gens des media d'information.

M. Lavoie: Ceux qui sont là, actuellement, entre autres.

M. Burns: Peu importe! Les journalistes seront bien représentés. C'est pour cela que je laisse cet avis sous condition, tout en vous disant qu'on tâchera de s'ajuster en se parlant entre les représentants de l'Opposition et moi-même. D'accord?

M. Lavoie: Cela relève de la déclaration que vous venez de faire. Est-ce votre intention de déférer ce livre blanc à une commission parlementaire?

M. Burns: Oui.

M. Lavoie: Suivant le processus normal.

M. Burns: Exactement.

M. Lavoie: D'accord.

M. Burns: Cela devrait normalement avoir lieu dans le courant du mois d'octobre, peut-être même à la fin de septembre. Cela dépendra des disponibilités, mais c'est carrément notre intention de le soumettre.

Motion pour faire siéger la commission de l'éducation

M. Burns: Sur ce, Mme le Président, je fais donc motion pour que la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications se réunisse immédiatement à la salle 81-A pour étudier, article par article, le projet de loi no 101.

Mme le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Lavoie: Vote enregistré.

Mme le Vice-Président: Qu'on appelle les députés!

Vote sur la motion

Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Cette Assemblée est appelée à mettre aux voix la motion du leader parlementaire du gouvernement pour faire siéger la commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles et des communications, sur le projet de loi no 101, à partir de maintenant.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Burns, Cardinal, Laurin, Couture, Bérubé, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Duhaime, Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Marcoux, Fallu, Rancourt, Grégoire, Bertrand, Godin, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Gendron, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellet, Perron, Brassard, Gosselin, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet, Levesque (Bonaventure), Lavoie, Lalonde, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron, Picotte, Ciaccia, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Grenier, Fontaine. Brochu. Shaw. Le Moignan, Dubois, Cordeau, Roy.

Mme le Vice-Président: Contre. Abstentions.

Le Secrétaire: Pour: 78 — Contre: 0—Abstentions: 0

Mme le Vice-Président: Motion adoptée.

M. Burns: Cette commission peut donc siéger immédiatement et elle siégera, en principe, toute la journée jusqu'à 23 heures si la motion que nous nous apprêtons à appeler est adoptée.

Mme le Président, j'appellerais donc l'article 1.

M. Lavoie: Est-ce que M. Guillotin est membre de la commission?

M. Burns: M. Guillotin est membre de la commission et il s'en va directement là.

Mme le Vice-Président: Vous avez appelé l'article 1, M. le leader du gouvernement?

M. Burns: Mme le Président...

M. Lavoie: N'oubliez pas de parler pour la motion, n'est-ce pas?

M. Lalonde: Si ce n'est pas votre chef.

M. Burns: Mon intervention sera très brève.

Mme le Vice-Président: M. le leader, avez-vous appelé l'article 1?

M. Burns: Article 1, Mme le Président.

Motion visant à mettre fin aux travaux

de la commission de l'éducation

sur l'étude de la Charte

de la langue française

Mme le Vice-Président: D'accord. M. le ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire propose que conformément à l'article 156 du règlement le rapport de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications sur l'étude du projet de loi no 101, Charte de la langue française, après la deuxième lecture, soit déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977.

M. le ministre.

M. Robert Burns

M. Burns: Comme j'avais commencé à le dire, mon intervention sera très brève. J'espère qu'elle n'en sera pas moins substantielle. Nous avons eu l'occasion, au cours des jours qui ont précédé, en particulier dans la journée d'hier, de discuter de certains problèmes qui touchent à cette motion lors de la présentation de ma motion en vertu des dispositions de l'article 84 de notre règlement, mettant de côté, pour la durée et — je pense avoir été assez clair — jusqu'à l'adoption du projet de loi no 101, certaines dispositions de notre règlement.

J'avais, à l'occasion de la discussion de cette motion, allégué un certain nombre de tentatives que j'avais faites auprès de l'Opposition, tentatives qui visaient à rendre fonctionnelles et expéditives les discussions qui ont eu lieu et qui se tiennent encore à la commission parlementaire permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications. J'avais entre autres cité un projet que j'ai effectivement déposé à ce moment-là et qui est maintenant devenu un document session-nel, un projet d'étude selon un bloc ou différents blocs d'articles entre le 3 août et le 15 août. J'ai mentionné, à ce moment-là, et je réitère mon affirmation, qu'il était tout à fait dans les droits de l'Opposition de refuser une telle entente. Il est important, d'autre part, qu'on prenne connaissance de ces faits.

Cette suggestion avait été faite dès le 3 août. Le 16 août, j'ai fait une proposition analogue mais peut-être plus globale. Le document est d'ailleurs également déposé et il est aussi un document ses-sionnel qui visait à peu près les mêmes fins, mais avec des dates différentes, visant surtout l'adoption du projet de loi no 101 pour le 26 août.

Les raisons de l'adoption du projet de loi no 101 avant le 26 août sont évidentes. Il ne m'apparaît pas nécessaire d'expliciter sur ce sujet. Il m'apparaît d'autre part clair à qui veut vraiment ouvrir les yeux et à qui veut vraiment entendre qu'il serait anormal que la rentrée scolaire, à l'automne ou en septembre, se fasse dans un chaos législatif assez exceptionnel, à partir du moment où nous ne saurions pas en vertu de quelles dispositions législatives cette rentrée scolaire devrait se faire.

Encore une fois c'est bien à regret que je présente cette motion au nom du gouvernement. Soyez assurés que le gouvernement y a pensé à deux reprises et à plusieurs reprises avant de vous soumettre une motion comme celle que nous vous présentons aujourd'hui, mais c'est aussi en tenant compte du fait qu'un gouvernement précédent avait lui aussi eu recours, à deux reprises dans ce cas-là, à une motion de clôture qu'on appelle communément la guillotine, et que ce gouvernement avait eu recours à cette mesure exceptionnelle avec un dossier, j'oserais dire, beaucoup moins bon au point de vue nombre d'heures consacrées à la discussion de ce projet.

J'en avais cité l'autre jour, mais j'ai maintenant des chiffres très récents qui datent de la situation d'hier soir. J'avais dit qu'à l'époque, en 1974, lors de l'adoption du projet de loi no 22, entre le 11 juin et le 10 juillet 1974, la commission, après la première lecture, avait consacré 19 jours à l'étude des mémoires, pour une durée totale de 89 heures et 13 minutes. Cela se compare favorablement, je pense, avec la même opération qui a eu lieu cette année après le dépôt du projet de loi no 1. Entre le 7 juin et le 8 juillet, lorsque les mémoires ont été déposés, nous avons un total de 21 jours au lieu de 19, et un total de 114 heures et 5 minutes au lieu de 89 heures et 13 minutes.

La comparaison est assez favorable. Nous croyons que le gouvernement ne pourrait pas se faire accuser d'avoir bousculé ce projet si on fait cette comparaison heure par heure, jour par jour, par rapport à l'adoption du projet de loi no 22. Surtout que le projet de loi no 101 était déjà dans l'air, si je puis dire, depuis un certain nombre de mois et que tout le monde savait que ce gouvernement-ci avait l'intention de modifier de façon substantielle des dispositions de la loi 22, qu'il avait également l'intention, dès cette première session, de poser ce geste qui était également une promesse électorale que nous voulons simplement respecter.

Quant à l'étude du projet de loi article par article, notre dossier est également très favorable par rapport à la loi 22. En 1974, il y a eu des séances pour examiner le projet de loi entre le 16 juillet et le 26 juillet 1974, pour un total de 10 jours, avec une durée totale de 55 heures et 28 minutes. Cette année, nous pouvons pratiquement, au moment où je vous parle, parler du double d'heures d'étude du projet de loi article par article, et je pense que dans le courant de la journée, avec les heures que nous enregistrons actuellement, la commission ayant commencé à siéger il y a quelques minutes, cela donnera sans aucun doute à peu près le double.

Par rapport aux dix jours qui ont été consacrés à l'étude article par article du projet de loi no 22, déjà, hier soir, nous pouvions parler de 15 jours, mais, en termes d'heures, au lieu de 55 heures 28 minutes, nous en étions rendus à 96 heures 21 minutes. Sans aucun doute nous dépasserons la centaine d'heures dans la journée, de sorte que, Mme le Président, il ne nous apparaît pas prématuré de recourir à cette motion de clôture que j'avoue être tout à fait exceptionnelle et assez spéciale.

Là-dessus, je crois qu'il suffit de lire un certain nombre d'éditoriaux depuis quelque temps pour se rendre compte que c'est le désir de l'ensemble de la population de mettre fin à ce débat pour passer à autre chose, tel que nous l'a suggéré, d'ailleurs, l'Opposition à de nombreuses reprises à l'occasion de motions de blâme en vertu de l'article 24 ou encore à l'occasion de motions qui ont été formulées dans le cadre des journées de députés. Je ne prends à témoin — Mme le Président, probablement que tous les députés ont eu l'occasion de le lire — que M. Marcel Pépin, qui est éditorialiste au journal Le Soleil et qui, le jeudi 18 août— remarquez qu'on est cinq jours plus tard — nous disait dans un grand titre: "Le débat a assez duré".

Si on lit cet article — je vous fais grâce de la lecture in extenso de cet article — on se rend compte qu'on veut simplement au Québec actuellement que ce problème on le fasse vivre à la population malgré les réticences de certains groupes, malgré toutes les représentations que le député de Pointe-Claire, entre autres, et M. le député de Marguerite-Bourgeoys ont pu nous faire valoir. On veut simplement que le gouvernement prenne sa décision, la mette en application. Malgré les droits que l'Opposition possède de faire de l'obs- truction systématique à un projet de loi, on veut simplement que, de façon expéditive et rapide, on mette en application un tel projet de loi.

J'ai cité le cas de M. Pépin. Je cite également un éditorial du journal Montréal-Matin de ce matin, le mardi 23 août, simplement quelques extraits sous la signature de M. Matthias Rioux qui nous dit: "Après bientôt six mois de réflexions, de discussions publiques et de querelles, le bon sens commande de mettre fin à ce coûteux verbiage". Je pourrais citer encore plus longuement M. Matthias Rioux, mais il arrive à la même conclusion que M. Pépin.

Si on réussit à faire l'exégèse de l'éditorial de M. Ryan de ce matin, on arrive à peu près aux mêmes conclusions lorsqu'on examine quelles sont les grandes lignes de cet éditorial de M. Ryan de ce matin, sauf qu'évidemment, dans le cas de M. Ryan, c'est toujours plus compliqué. Il faut en faire vraiment une exégèse très sérieuse.

Mme le Président, malgré tout ce qu'on pourra me citer de mes anciens discours lorsque j'étais dans l'Opposition, je me sens tout à fait à l'aise de présenter cette motion au nom du gouvernement. Je n'ai acuune honte à dire que ce gouvernement-ci a décidé de faire adopter avant le mois de septembre le projet de loi no 101. Bien qu'il reconnaisse les droits que possède l'Opposition de s'opposer vigoureusement à un projet de loi, le gouvernement a quand même le droit également d'agir avec vigueur pour voir à l'adoption d'un des projets de loi qu'il considère comme très important et qui est effectivement un des projets qu'il avait décidé comme priorité de faire adopter au cours de cette première session.

C'est pourquoi, Mme le Président, je propose cette motion et je demanderais à l'Assemblée nationale de l'adopter pour favoriser l'adoption, dans les meilleurs délais, du projet de loi no 101.

Mme le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Mme le Président, il est d'usage, pour l'Opposition, de hurler au scandale lorsqu'une telle motion...

M. Burns: Déchirer son linge.

M. Lalonde: ... est présentée pour mettre fin aux débats concernant l'étude d'un projet de loi, d'autant plus qu'aujourd'hui, comme hier, le gouvernement viole carrément un engagement formel du premier ministre, il y a à peine un mois, à propos de ce genre de guillotine que l'on impose à nos débats parlementaires. J'ai lu au texte cet engagement du premier ministre, hier; je pense que d'autres députés l'ont fait, mais il ne semble pas qu'on ait compris, de l'autre côté, ce que le premier ministre disait. Je lis, à la page 2263 des Débats de l'Assemblée nationale, le 21 juillet 1977, ce que le premier ministre, député de Taillon, dit: "Parce qu'on ne bulldozera pas le Parlement, on va laisser aller la législation jusqu'à sa conclusion

normale" — le mot "normal" est un mot cher à ces députés péquistes, Mme le Président —"II n'est pas question de commencer ces procédures d'étouffement du mois de juillet ou du mois d'août qu'on a trop vues. Je me souviens d'en avoir souffert et je ne le ferai pas".

M. Garneau: Qui a dit cela?

M. Lalonde: Le premier ministre actuel qui était assis à côté du leader, il y a quelques minutes...

M. Garneau: A-t-il dit cela?

M. Lalonde: ... et qui n'a d'ailleurs pas voté sur la motion du leader, hier soir.

M. Garneau: II doit y avoir longtemps qu'il a dit cela.

M. Lalonde: II y a à peine un mois qu'il a dit cela. Le 21 juillet 1977. Les interrogations des députés sont utiles parce que je sais que les mêmes questions, les députés d'en face se les posent. Les mêmes questions que le député de Jean-Talon m'a posées. "Qui a dit cela? ça doit être un ancien premier ministre". Non, c'est le premier ministre actuel, le député de Taillon. "Oui, mais cela doit faire longtemps, il a déjà été membre de cette Chambre il y a bien des années, cela doit faire longtemps, on a oublié cela". Non, il y a quelques jours, le 21 juillet. Nous sommes le 23 août aujourd'hui, il y a à peine quelques semaines, le premier ministre disait: "Et je ne le ferai pas. Cela s'appelle le respect des droits des parlementaires". Je ne sais pas ce que les députés du Parti québécois doivent penser en entendant cela. Ils doivent dire: II a le droit de changer d'idée, le premier ministre. Oui, on a le droit de changer d'idée. Peut-être que le leader parlementaire l'a fait changer d'idée aussi parce que — si ma mémoire est bonne — le premier ministre a dit cela quand il défendait son leader parlementaire qui était sous le coup d'une motion de blâme.

Mme le Président, aucun premier ministre, aucun parlementaire n'a le droit de changer d'idée comme cela, n'a le droit, un soir, de venir dire qu'on ne le fera pas et, ensuite, appuyer son leader parlementaire qui vient de faire exactement le contraire.

Mme le Président, je ne m'imposerai pas les gestes habituels de l'Opposition officielle de scandale à l'endroit de cette motion, mais je vais quand même tenter de vous démontrer jusqu'à quel point elle est injuste en l'occurrence.

Le leader du gouvernement vient de nous faire des comparaisons avec le débat sur la loi 22. Il a oublié de nous dire, par exemple, en ce qui concerne l'étude des mémoires, que, cette année, nous avions plus de 260 mémoires contre moins de 200. Le chiffre m'échappe actuellement, je pense que c'est environ 175 mémoires pour la loi 22.

En ce qui concerne l'étude des mémoires, je pense que, proportionnellement, cela se compare, mais là où la différence est complète et renversante, c'est dans l'étude article par article.

Dans la loi 22, on avait pris 10 jours et 55 heures pour étudier un article et aborder un deuxième. Dans la loi 101, on a pris 15 jours et presque le double d'heures. Donc, le nombre de jours et d'heures où les membres de cette commission ont travaillé fut plus élevé, naturellement. Mais nous fûmes bousculés par le gouvernement et par le leader du gouvernement qui a fait siéger cette commission, à l'encontre de toute la tradition parlementaire, même le mercredi soir, le vendredi après-midi sans suspendre les règles de cette Chambre. Donc il y a eu une centaine d'heures pour n'adopter — au moment où je vous parle — probablement que le cinquième chapitre. Il restait un article au cinquième chapitre.

Nous avons étudié les chapitres I, II, III, IV et le chapitre de l'enseignement, qui est long et auquel le gentil calendrier du leader du gouvernement, dans son document sessionnel, accordait un jour, le 10 août, pour les articles 68 à 93, pas même à 83. C'était plus que la langue d'enseignement parce qu'il y avait toutes sortes de dispositions diverses, de l'article 83 à l'article 93.

Un jour! C'est ce même gouvernement qui a présenté une motion d'amendement à l'article 81a concernant les accords de réciprocité. Mais cela était censé être dans l'heure du lunch probablement. Enfin, je ne sais pas comment il aurait réussi à tasser la réciprocité qu'il s'est fait tasser à St. Andrews dans ce jour de débats mais, enfin, ce qu'il nous proposait était complètement incohérent et improvisé.

A l'encontre de ce que le gouvernement aime bien faire passer par ses rumeurs, je dois conclure qu'il n'y a pas d'opposition systématique, qu'il n'y a pas d'obstruction systématique ou ce qu'on appelle de "filibuster" à la commission parlementaire. Il y a un débat vigoureux, il y a une étude sérieuse article par article, il y a des amendements qui sont proposés. Ceux qui ont eu le bonheur de siéger avec nous se sont aperçus qu'il y a des amendements qui sont étudiés par les membres de la commission, tous rejetés ou presque, naturellement. On fait face à une fermeture, un hermétisme total de la part de ce gouvernement, qui avait pourtant promis de l'ouverture lors de ce débat.

Il n'y a pas d'opposition systématique. Le débat est long, il est vigoureux, mais nous avons adopté une quarantaine d'articles jusqu'à maintenant, et des articles importants, tous ceux sur la langue de la justice, la langue des tribunaux, la langue de la législation, la langue de l'enseignement, la langue de l'administration, et, dans ce débat, le gouvernement a tout chambardé. A la dernière minute, jeudi dernier, il nous a présenté toute une série d'amendements pour traiter les tribunaux et les services de santé de façon tout à fait différente.

Mme le Vice-Président: M. le député, je dois vous rappeler qu'il ne faut pas faire référence à la commission parlementaire parce qu'elle n'a pas déposé son rapport.

M. Lalonde: Mme le Président, je devrai me rappeler qu'il faut que je fasse référence à la commission parlementaire dans une motion pour mettre la guillotine sur la tête des membres de cette commission. Je décide de voter contre et c'est ce que je vais faire; comment voulez-vous que je convainque, que je persuade les autres membres de cette Chambre de voter à rencontre de cette motion si je ne me réfère pas à la commission parlementaire et à ses travaux?

Je comprends votre problème. Le règlement vous dit que l'Assemblée nationale ne peut pas avoir connaissance légale de ce qui se passe en bas, mais il reste que, comme hier, nous allons, je pense, pouvoir vivre avec le règlement et la nécessité que j'aurai de me référer aux travaux de cette commission.

Mme le Vice-Président: Je vous fais confiance, M. le député; j'espère que vous allez tenir compte du règlement, qui est très clair à l'article 99, paragraphe 3.

M. Lalonde: Mme le Président, il n'y a pas d'obstruction systématique à cette commission parlementaire quoiqu'en disent certains éditorialistes. Oui, j'ai lu l'éditorial de Matthias Rioux, je ne l'ai pas vu ici, autour, mais j'ai lu son éditorial, et je cite: "Les députés libéraux, en particulier, y mènent un "filibuster" intermittent". Cela, c'est nouveau. Un "filibuster" intermittent ou un "filibuster" complet, maintenant, il y a toutes sortes de "filibusters".

Je ne sais pas quand les députés auront le droit de s'opposer vigoureusement au projet de loi, sans qu'on les accuse de faire un "filibuster".

Mme le Vice-Président: Je devrai vous demander de conclure, à moins que vous ne parliez au nom de votre parti.

M. Lalonde: Je parle au nom du parti. Mme le Vice-Président: Bon.

M. Lalonde: Mme le Président, nous avons adopté une quarantaine d'articles, presque cinq chapitres. Nous avons indiqué publiquement en conférence de presse au début des travaux de cette commission qu'il y avait au moins 150 articles qui ne créaient pas de problème, que nous étions prêts à les adopter aujourd'hui si le gouvernement nous en proposait l'adoption, mais il faut quand même suivre l'ordre dans lequel le gouvernement nous propose l'adoption de ces articles, de sorte qu'il ne resterait que quelques dizaines d'articles importants, concernant la francisation des entreprises, par exemple. Tout le monde le sait, tout le monde le dit, à partir de la commission Gendron; même le ministre d'Etat, qui ne connaît pas grand-chose aux entreprises, a admis que c'est là que se joue le sort de toute politique linguistique au Québec, dans l'entreprise. On n'est pas rendu là. On n'est pas rendu là. C'est à l'article 129. C'est totalement injuste, Mme le Président, que de faire travailler cette commission parlementaire sous cette menace de guillotine qu'on a depuis quelques jours et maintenant avec cette certitude que ses travaux vont se terminer à onze heures ce soir. Comment voulez-vous qu'on travaille sérieusement alors qu'on veut passer à travers tous les articles de ce projet de loi?

Lorsque le leader du gouvernement invoque, comme tous les membres de ce gouvernement l'ont fait, la rentrée scolaire pour bâillonner cette Assemblée, bâillonner la commission parlementaire sur des articles importants qui sont hors du chapitre de la langue d'enseignement, je l'avoue, mais qui sont aussi au moins aussi importants, lorsque le leader du gouvernement invoque la rentrée scolaire, je dis qu'il fait une erreur grossière. Nous avons, depuis plusieurs mois, proposé au gouvernement de scinder le bill, justement en voyant l'improvisation et l'incohérence de ce gouvernement dans les travaux de cette Chambre. Nous l'avons averti: Scindez le bill, adoptons la langue d'enseignement, adoptons cela en priorité, et ensuite, on pourra la mettre en vigueur. Même si on n'est pas d'accord avec le contenu, au moins le gouvernement traitera la rentrée scolaire de façon juste et de façon ordonnée. Il est encore temps, Mme le Président. Que ce gouvernement et que le leader du gouvernement m'écoutent, que ce gouvernement scinde le bill aujourd'hui, qu'il apporte un nouveau projet de loi, les articles 68 à 83 étant adoptés, qu'il présente cela demain et l'Opposition officielle fera en sorte qu'il soit adopté dans la même journée, même si on vote contre.

M. Burns: Words, words, that is all I hear.

M. Lalonde: Nous allons renoncer à tous nos droits de faire un nouveau débat là-dessus et le gouvernement pourra s'en aller avec sa langue d'enseignement, une loi complète, la mettre en application et nous, de cette Assemblée, nous pourrons continuer d'étudier le projet de loi 101 en toute sérénité, peut-être même ajourner, si les députés et les ministres sont trop fatigués, même s'ils reviennent de vacances, même ajourner et revenir à l'automne et compléter l'étude, mais en toute sérénité.

Cela peut prendre plusieurs autres semaines. Oui, cela peut prendre du temps. C'est la conclusion du député de Maisonneuve tantôt. C'est une loi importante. Justement parce que c'est une loi importante, il faut prendre le temps qu'il faut pour l'étudier. Encore hier soir, après une heure de débats, le gouvernement ne voulait rien entendre. Il a suspendu le dernier article qu'on débattait à 10 h 50. Il a ouvert les yeux. Il s'est aperçu qu'il y avait un gros problème. Il y avait un gros problème...

Mme le Vice-Président: M. le député, je vous fais confiance. Je sais que vous démontrez habituellement beaucoup d'habileté dans vos interventions. Tantôt vous avez fait référence aux journaux pour parler de la commission parlementaire, ce qui me semblait acceptable, puisque les journaux sont de notoriété publique après que c'est publié.

Je vous demanderais d'être bien attentif à respecter le règlement, M. le député.

M. Lalonde: Je n'ai pas écouté la radio ce matin, Mme le Président, mais je suis sûr que devant l'incohérence et l'improvisation du gouvernement hier, à la commission parlementaire, cela devait être sur toutes les ondes.

M. Garneau: Oui, certain.

M. Lalonde: On m'assure ici, j'entends des voix qui disent que cela a sûrement été sur les ondes, Mme le Président.

Alors, en me rapportant à ces propos, apparemment tenus sur les ondes, Mme le Président, à 10 h 50 hier, après une heure de débats pour démontrer au gouvernement que la confidentialité des dossiers médicaux était mise en danger, en péril, par une disposition de ce projet de loi.

On s'est aperçu tout à coup, après avoir joué aux jurisconsultes autour de la table, qu'il y avait un problème. On a la guillotine au-dessus de la tête depuis deux jours; elle va nous tomber sur la tête à 11 heures ce soir et, hier soir, 24 heures avant, le gouvernement n'était même pas prêt à adopter ce projet de loi.

D'autres rapports de journaux, M. le Président, je peux en parler. On dit ici dans le Devoir, Michel Vastel, le mardi 23 août, aujourd'hui: "Déposés aujourd'hui par M. Laurin, série d'amendements sur la francisation des sièges sociaux". Le jour même de la guillotine, le jour même où il nous demande d'arrêter d'étudier, le ministre a le culot de venir nous déposer des amendements dans un secteur extrêmement important pour lequel on réclame, depuis des mois, une étude et un traitement spécial de la part du gouvernement.

Mme le Président, si vous ne trouvez pas une telle motion injuste, je l'ai dit, et ridicule un gouvernement qui ne sait même pas ce qu'il va mettre dans ce projet de loi qu'il nous force à adopter aujourd'hui, je ne sais pas comment qualifier le geste du gouvernement.

Cela a été dit dans les journaux et je vais vous le répéter d'ailleurs. On a cité M. Ryan dans son éditorial d'aujourd'hui, c'est le leader qui l'a cité. Dans son éditorial, M. Ryan dit ceci: "En même temps qu'il prétendait tendre une oreille attentive à la critique, il excommuniait généreusement au passage, par l'entremise — il parle du gouvernement — de M. Camille Laurin, de nombreuses voix qui avaient eu le malheur de prendre au sérieux les appels de celui-ci au dialogue. Il maintenait surtout, quant au fond, la position intransigeante, doctrinaire et souvent fausse que définissait, dès le début d'avril, le livre blanc sur la langue". C'est cela qu'on a depuis trois semaines en commission parlementaire.

On dit que c'est de l'obstruction systématique; je dis que c'est l'obstruction du gouvernement qui n'a pas été en commission parlementaire de bonne foi. Je pense que le gouvernement a démontré une mauvaise foi flagrante dans ce débat. Tous ceux qui ont été témoins l'ont vu. Aucun amendement même s'il ne touchait que la forme n'était reçu. Aucune ouverture, aucun dialogue n'a été reçu à cette commission parlementaire. Je vois ici des députés qui ont vécu cette expérience que je ne qualifierai pas; je vois qu'ils partagent comme moi le sentiment d'avoir été pris simplement en otages. On a joué avec nous autres, on a fait une parodie de la démocratie avec cette commission. Tout ce qu'on voulait, c'était faire l'exercice pour la galerie, mais on n'était pas, de la part du gouvernement, décidé à aller discuter d'un projet de loi avec les représentants de 60% de la population pour le changer, l'améliorer ou, enfin, pour en discuter ouvertement.

On a fait une parodie de cette commission parlementaire et, ensuite, je comprends qu'on veuille y mettre fin, parce que cela commence à paraître. A chacune de ses décisions, le gouvernement, lorsqu'il s'en tient à une orthodoxie rigide — souvent, ce sont des décisions qui semblent mineures à un article bien déterminé — lorsqu'il fait preuve d'une rigidité comme celle qu'on a vue à la commission parlementaire, s'isole de la population.

Naturellement, il pense avoir la vérité absolue. Il a fait un livre blanc qui n'en est pas un; c'est strictement un recueil noir, le plus noir possible de la situation. C'est un tableau qu'on a voulu le plus sombre, le plus alarmant possible pour commencer à faire le lavage des cerveaux, à cuisiner l'opinion publique. Ensuite, on est arrivé avec un projet de loi. Cela me rappelle une autre comparaison que le leader du gouvernement vient de faire entre les deux débats, celui de la loi 22 et le débat actuel.

Il a dit: Pour la loi 22, on a eu deux clôtures, actuellement, on n'en a qu'une. Sûrement, pour la loi 22, il y a eu deux clôtures; maintenant, on a eu un retrait de loi et une clôture. Pour qui le leader prend-il les membres de cette Assemblée? Pense-t-il que nous allons être dupes? Non seulement il aurait dû avoir le courage, lors des débats de la première série de séances de la commission parlementaire, d'y mettre fin par la clôture, mais non, il a pris ce petit subterfuge qui a mis tous les travaux de cette Assemblée dans le chaos le plus total.

Après ce livre blanc, après le projet de loi no 1, après le retrait du projet de loi no 1, l'introduction, en plein mois de juillet, d'un nouveau projet de loi, à ce moment-là, ce n'est plus le projet de loi no 1, on recommence à zéro. Puisque cela vaut la peine de retirer le projet de loi no 1 et de présenter le projet de loi no 101, on doit, nous, comprendre que le débat a commencé en juillet. Cela ne fait qu'un mois à peine, quelques semaines que nous avons ce débat en Chambre. C'est faux de dire que le débat a commencé avec le projet de loi no 1 puisqu'on l'a retiré. Le gouvernement avait-il raison de retirer le projet de loi no 1? S'il avait raison, c'est un nouveau débat.

Et on va nous accuser d'avoir fait de l'obstruction systématique quand, après cinq ou six semaines de débats sur un projet aussi important on a déjà traversé la deuxième lecture, on a déjà accepté presque cinq chapitres, une quarantaine d'articles et nous avons indiqué qu'on pourrait ac-

cepter, demain matin ou même tantôt, si le gouvernement en propose l'adoption, plus de 140 ou 150 autres articles et il ne resterait que quelques dizaines d'articles à discuter, mais des articles importants pour la francisation des entreprises, et on va dire qu'on fait de l'obstruction systématique? Je dis que le gouvernement est malhonnête intellectuellement, complètement malhonnête d'ainsi, à cause de son incohérence, de son improvisation, de son refus de régler le problème scolaire comme il doit être réglé, c'est-à-dire séparément, nous forcer, nous bousculer, bousculer nos droits d'étudier article par article ce projet de loi qui, je vous le dis, Mme le Président, au cas où vous ne le sauriez pas, est mal écrit. C'est un mauvais projet de loi, ne serait-ce que dans la rédaction juridique. Quotidiennement, toutes les heures, on soulève des objections et le gouvernement, qui semble meilleur dans la rédaction de romans que dans la rédaction de lois, s'aperçoit, après une heure ou une heure et demie de débats, quand on a commencé à leur ouvrir tranquillement les oreilles — et c'est long, il n'y a pas d'ouverture — qu'il y a peut-être quelque chose là. Il faut trouver une petite brèche, chez les sept ou huit députés. Tout à coup, il y a un oeil qui s'ouvre, une tête qui se relève, quelqu'un qui semble commencer à comprendre. Là, il faut marteler nos arguments constamment et, parfois, on a une petite ouverture. Ce projet de loi est mal fait, Mme le Président, croyez-moi.

Mme le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous allez devoir conclure.

M. Lamontagne: II est tellement bon! On est si peu nombreux ici qu'on pourrait l'écouter encore.

Mme le Vice-Président: Vous avez environ une minute pour conclure, M. le député.

M. Lalonde: Mme le Président, je ne veux pas mettre en doute votre décision, mais je pensais avoir commencé à 11 h 35.

Mme le Vice-Président: 11 h 35, voilà. M. Lalonde: II est midi.

Mme le Vice-Président: Je vous demande pardon. Vous avez six minutes.

M. Lamontagne: Moins les interruptions, il reste dix minutes.

Mme le Vice-Président: Vous avez absolument raison, vous avez six minutes, M. le député.

M. Lalonde: Ce n'est pas que je veuille prolonger le débat, mais je vois ici de nouveaux députés, des députés qui n'ont pas connu ce genre de manoeuvre du gouvernement, ils sont de bonne foi. Je n'en nommerai pas, j'en regarde. Ils sont de bonne foi et je sais que, de bonne foi, ils veulent améliorer nos institutions démocratiques, ils veulent que cela fonctionne et ils se posent des ques- tions. Ils se posent des questions surtout si, parmi eux, certains ont participé aux débats de la commission parlementaire et s'ils ont vu jusqu'à quel point cela a été difficile pour l'Opposition de faire valoir son point de vue. Avec une présidence en or, heureusement qu'on l'avait!

Mme le Vice-Président: M. le député, je m'attends à ce que certains députés soulèvent des questions de règlement.

M. Lalonde: Je sais que la présidence est indivisible, Mme le Président, et je ne voudrais pas profiter de l'absence du député de Prévost pour dire à son endroit les quelques mots de reconnaissance que j'ai.

Mais je pense que l'occasion m'est quand même offerte et que c'est fait. Donc, avec une présidence qui était, je pense, magnifique...

Mme le Vice-Président: ... dans les journaux. Alors, vous pouvez y aller, M. le député.

M. Lalonde: ... digne, vigoureuse et — je ne veux pas que mes propos soient interprétés négativement pour quiconque d'autre — une présidence qui nous a permis, malgré la fermeture totale, l'hermétisme complet du gouvernement, de survivre à ce débat.

Alors, je voudrais que ces députés qui sont nouveaux fassent un geste démocratique, qu'ils s'aperçoivent que le gouvernement s'est trompé, s'est trompé dans son organisation des travaux de cette Chambre et qu'il est pris dans un cul-de-sac, qu'il est obligé de mettre la clôture sur un projet de loi contre lequel il n'a pas à mettre de clôture, c'est-à-dire qu'il voudrait mettre la clôture seulement sur la langue d'enseignement. Mais que ces députés fassent valoir cela au caucus et à leur gouvernement pour qu'on puisse se rendre à l'article 219.

Je sais, Mme le Président, que vous allez me rappeler à l'ordre. Mais je ne peux pas m'empêcher, lorsque j'ai cette clôture-là au-dessus de la tête pour ce soir, de me souvenir que jeudi soir dernier on avait encore des amendements griffonnés sur des bouts de papier de la part du gouvernement. Les articles 23, 24, 25. Je ne peux pas m'empècher...

M. Bisaillon: A l'ordre!

Mme le Vice-Président: Vous avez raison, M. le député.

M. Lalonde: ... de me souvenir qu'hier encore...

M. Bisaillon: A l'ordre!

M. Lalonde: ... à deux reprises le gouvernement a été obligé de changer d'idée. La radio en a parlé.

Mme le Vice-Président: M. le député.

M. Lalonde: Je ne peux pas m'empêcher de lire ici dans cet article du Devoir que le gouvernement a d'autres amendements pour les sièges sociaux. C'est complètement ridicule. C'est rire du monde que de mettre une clôture à une commission parlementaire qui n'est même pas prête à adopter un proejt de loi. C'est un gouvernement qui ne sait même pas ce qu'il va mettre dedans. C'est injuste. Oui, injuste pour les Québécois qui voudraient qu'une fois pour toutes — contrairement à ce que le Parti québécois a fait en 1974 — un projet de loi sur la langue soit examiné de fond en comble par leurs élus. C'est totalement injuste pour les Québécois parce que je sais, je suis convaincu que ce projet de loi contient des dispositions qui ne fonctionneront pas. C'est mal écrit, c'est mal pensé, c'est mal conçu. C'est injuste, c'est ridicule et je vous dis que ce genre de décisions quotidiennes — on en a pris tous les jours des décisions comme celles-là — hermétiques, doctrinaires, intransigeantes, des décisions comme celles que le gouvernement nous propose de prendre aujourd'hui isolent ce gouvernement de plus en plus, quotidiennement, de la population. A chacune de ces décisions, et le gouvernement doit en être conscient...

M. Burns: Ce n'est pas cela qui nous énerve le plus de ce temps-là. Vous êtes pas mal plus nerveux que nous là-dessus.

M. Lalonde: ... les Québécois se posent des questions sur le gouvernement qu'ils ont élu. Je fais appel au gouvernement pour avoir une ouverture plus grande parce que d'ici aux prochaines élections il faut quand même qu'il gouverne, mais le genre de gouvernement qu'on a en commission parlementaire est un gouvernement qui va se retrouver tout seul dans le coin bientôt.

M. Burns: Cela fait longtemps que vous n'avez pas vu le peuple de près.

Mme le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Mme le Président, je vous informe que je ferai une intervention au nom du parti.

M. Lavoie: Quel parti?

M. Grenier: Le parti qui est en Chambre ici. Famille qui prie, famille unie. Regardez comme on a du monde.

Mme le Vice-Président: M. le député, cette fois je prends bonne note de l'heure à laquelle vous avez commencé.

M. Grenier: Je vous entends mal, pourriez-vous répéter, Mme le Président ?

Mme le Vice-Président: Je disais que cette fois-ci je prends bonne note de l'heure et je m'organise pour que ce soit lisible pour ne pas vous interrompre avant le moment où vous aurez terminé.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: Merci, Mme le Président. L'intervention d'aujourd'hui sur la motion de clôture faite par un membre de l'Union Nationale ne vient pas, bien sûr, dire les valeurs ou les failles de la loi. Nous aurons une autre occasion de le faire. Je veux uniquement vous parler de cette motion de clôture.

Inutile de vous le dire, on ne se cachera pas les mots, tout le monde savait, c'était prévu, que le rouleau compresseur devait nous tomber dessus un jour ou l'autre et on sentait que cela devait se produire avant la fin du mois d'août.

Ce qui surprend, c'est d'entendre les déclarations. Je ne les citerai pas, on les a tous présentes à la mémoire. Elles n'ont pas été faites il y a deux ans. Elles ont été faites il y a moins d'un mois, par des membres de l'équipe ministérielle. Ce qui se passe dans la réalité, les largesses dont nous a parlé le premier ministre ici relativement à la loi 101 et ce qui nous arrive aujourd'hui avec cette motion de clôture et ce qui s'est passé pendant l'étude de la loi témoigne que ce qu'il y a eu à cette commission avec cette motion de clôture qui nous arrive, c'était loin d'être de la largesse.

On aurait aimé aujourd'hui, en tant qu'Union Nationale, pouvoir continuer l'étude de ce projet de loi pour tenter de faire fléchir le gouvernement sur certains aspects. Vous auriez été presque scandalisée, vous connaissant comme je vous connais, Mme le Président, de voir les discussions qui se sont produites à la commission sur ces largesses du gouvernement qui sont produites et que nous aimerions corriger si le gouvernement voulait bien nous permettre de continuer l'étude qu'on est en train de clore aujourd'hui.

Ces amendements que nous avons apportés ici et qui ont rendu, j'imagine, service au gouvernement de même qu'à l'Opposition officielle et aux media d'information, à cause de leur publication avant le début de l'étude du projet de loi, ont rendu service à pas mal de monde. Je pense que c'est faire une opposition constructive, une opposition capable de suggérer des choses au gouvernement.

Nous avons fait des amendements que nous aurions aimé continuer à étudier plus loin qu'aujourd'hui. L'Union Nationale n'est pas pressée. Elle n'était pas pressée dans l'étude de ce projet de loi et je pense qu'on ne pourra pas nous accuser d'avoir fait de l'obstruction. La position que nous occupons dans cette Chambre, soit la troisième, venant après le gouvernement et l'Opposition officielle, nous permet d'intervenir en troisième lieu. Inutile de vous dire qu'on fait éplucher nos recommandations, nos suggestions, nos propositions, mais c'est acquis d'avance.

Nous aurions aimé, Mme le Président, pouvoir continuer de faire ces propositions, si minimes soient-elles; même si parfois elles sont prises par le gouvernement ou prises par l'Opposition officielle, nous aurions aimé continuer de les faire. Les amendements que nous avons apportés, que ce soit l'amendement secondaire, l'amendement légal, l'amendement à l'article 25 ou l'amendement

à l'article 77, sont des amendements qui étaient beaucoup plus humains que légaux. C'est cette sorte d'amendements que nous voulions continuer d'apporter au cours de l'étude de cette loi.

Je comprends mal que le gouvernement ait décidé de mettre la hache dans l'étude de la loi. On pourrait peut-être, comme certains journalistes qu'on a cités tout à l'heure, prétendre qu'il y avait de l'obstruction momentanée. C'est possible, mais je pense qu'étant donné le lot d'articles, le lot de titres de chapitres qui ont été étudiés, il y a eu pas mal de bonne foi de la part de l'Opposition.

Je dois vous dire, Mme le Président, qu'il y a eu amélioration considérable sur ce qu'était l'Opposition à la loi 22. Je peux témoigner de ma personne. J'ai suivi les débats de la Chambre. Il y a eu amélioration considérable de l'Opposition, en ce qui nous concerne faisant des suggestions au gouvernement et ne mettant pas uniquement du sable dans l'engrenage, des bois dans les roues.

On a proposé au gouvernement des choses qui pouvaient lui rendre service en rendant service à la population du Québec. Cela a été notre façon d'intervenir dans le débat qui se continue en bas jusqu'à 11 heures ce soir. Mme le Président, je demande au gouvernement de surseoir à sa décision de clôturer les débats ce soir, de surseoir sur une loi aussi importante que la loi 101 et de nous donner le temps de continuer.

L'Union Nationale n'est pas allée en vacances, Mme le Président. On n'a pas joué à la chaise musicale en bas; on ne s'est pas remplacé d'une semaine à l'autre. Il y a eu de la continuité de la part de l'Union Nationale sur les deux sièges que nous occupions à la commission sur le projet de loi 101. On ne s'est pas tanné d'étudier. Ce n'est pas nous qui avons apporté un projet de loi au mois de juillet, mais on est prêt à sacrifier nos vacances, l'été est passé, pour continuer à l'étudier, ce projet de loi 101. Il y a des failles dans ce projet de loi et il y en a de considérables. Ce ne sont pas seulement des failles sur le plan législatif, à cause de mauvais mots ou de mots mal utilisés. Il y a des failles et on passera pas mal de temps à le corriger une fois qu'il sera voté.

On aurait voulu continuer de participer à ces débats. Vous avez noté, depuis la reprise de la session et pendant l'étude du projet de loi 101, la présence continuelle de toute l'équipe de l'Union Nationale, sauf pour notre député de Johnson qui est malade. Vous avez noté la présence complète des députés de l'Union Nationale ici et l'intérêt qui a été manifesté. Je peux vous dire...

M. Burns: II y a le député de Pointe-Claire qui s'absente parfois.

M. Shaw: Question de privilège, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Sur une question de privilège, M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Je peux constater qu'aucun député n'a travaillé plus en Chambre que moi, même pas vous.

M. Grenier: Mme le Président, le leader parlementaire continue les tactiques qu'il a apprises pendant qu'il était dans l'Opposition — il ne s'est pas encore recyclé, il ne sait pas qu'il est au pouvoir — de couper les discours des personnes quand cela devient trop critique. Je ne lui en fais pas reproche: c'est entendu que cela prend un certain temps à se recycler. L'an prochain, cela ira pas mal mieux; il réalisera qu'il est même ministre à deux secteurs.

M. Burns: M. le député, puis-je vous poser une question?

M. Grenier: Oui, cela me fait plaisir, pourvu que ce ne soient pas des crocs-en-jambe; je vous connais trop.

Mme le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton, vous acceptez la question?

M. Grenier: Oui, mais que ce ne soit pas pris sur mon temps.

M. Burns: Seriez-vous bien déçu, M. le député, si je retirais ma motion?

M. Grenier: Mme le Président, je vais vous dire que nous de l'Union Nationale — et je vous livre un petit secret; j'aurais envie de ne pas vous le dire fort pour éviter que tout le monde ne comprenne — on a demandé à nos députés — j'exclus le député de Gaspé, mais il y a des pères de famille qui ont des enfants — s'ils étaient prêts à sacrifier les vacances d'été avec leur famille. Je peux vous dire que je les ai sacrifiées. L'école recommence la semaine prochaine et je n'ai pas pris de vacances et je n'en prendrai pas. A partir de maintenant, le plus dur est passé. Au mois de septembre, on peut siéger; c'est pourquoi je demande au gouvernement de surseoir à la motion. Je vous dis que je suis prêt si on voulait continuer et collaborer non pas à sens unique, alors que le gouvernement n'accepte à peu près pas les propositions qu'on fait. Il faudrait que le gouvernement accepte nos propositions de temps en temps. C'est déprimant en bas, madame. Vous ne le saviez pas, n'est-ce pas? Etes-vous contente de l'apprendre? C'est déprimant de travailler en bas. Rien n'avance, le gouvernement n'accepte rien. Il a accepté deux motions — je vous le dis, cela va vous édifier — qui venaient de l'Opposition et, encore, il les a transformées pour qu'elles viennent du gouvernement. Il y en a une qui est très large. Je vous le dis parce que cela avance les débats et que cela nous permettrait de retarder la clôture. Ce furent des pas importants. Hier soir, on a permis à l'hôpital juif de Montréal, en plus de s'appeler l'Hôpital général des Juifs, si vous voulez, de pouvoir mettre en anglais, en bas entre guillemets, "General Jewish Hospital". Il a permis cela hier soir, une largesse dont parlait le premier ministre.

M. O'Neill: C'est bon! C'est généreux.

M. Burns: Vous voyez qu'on est prêt à accepter des amendements. L'esprit ouvert, c'est cela.

M. Grenier: II y a trois jours, il a fait bien mieux que cela, Mme le Président. C'est ce qui nous permet de continuer les débats pour que la clôture n'arrive pas.

Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. Grenier: Mme le Président, je vous parle d'amendements qui sont arrivés et qui nous permettent de pouvoir continuer les débats. A l'article 25 et à l'article 77...

Mme le Vice-Président: M. le député, vous savez fort bien que je suis tenue de vous rappeler à l'ordre à ce moment-ci. On peut toujours essayer.

M. Grenier: Merci, Mme le Président. Je sais que je n'ai pas le droit de parler des articles du projet de loi, c'est bien évident. C'est l'objet de la deuxième lecture, ce n'est même pas l'objet de la troisième lecture. Mais comme je voudrais illustrer par des exemples, il faut quand même que je prenne mes exemples à la commission. Je ne peux quand même pas prendre des exemples au sujet de l'organisation politique dans mon comté.

Il faut quand même que je prenne mes exemples à la commission, je ne peux quand même pas prendre des exemples si je fais de l'organisation politique dans mon comté. Je vous donne un exemple et tout de suite je reviens, mais cela va vous donner des lumières suffisantes pour permettre peut-être à une bonne partie de l'équipe ministérielle de voter avec nous.

On a proposé un amendement, Mme le Président, et celui-là est accepté par le gouvernement, c'est certainement la largesse dont parlait le premier ministre: les immigrants qui vont arriver au Québec handicapés, les sourds-muets vont pouvoir parler anglais. Elle est bonne, hein? C'est un amendement cela, c'est une largesse du gouvernement, les sourds-muets vont avoir le droit de parler anglais, et c'est sérieux cela, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député, vous savez bien que je dois vous rappeler à l'ordre.

M. O'Neill: C'est bon!

M. Grenier: Comme vous voyez, c'est important de continuer les débats, on réussit des amendements fort importants.

M. Goulet: 26 heures de travail.

M. Grenier: Cela a été renversé et même le gouvernement avait peur parce que ces gens votent, ils n'ont pas pu être contre cela. Si ces gens n'avaient pas voté, il serait arrivé le même sort qu'aux juges anglophones, Mme le Président, et il faudrait la débattre encore si la commission continue, si on ne nous impose pas la clôture.

Mme le Vice-Président: M. le député, je dois vous rappeler à la pertinence du débat.

M. Grenier: Mme le Président, il faut vous dire quand même que le débat qui se mène en bas présentement est un débat à sens unique, et on aimerait quand même en faire prendre connaissance par les media. Les media ne sont pas nombreux, ils vont lire mon intervention. Les journalistes sont larges et ce sont — d'après ce que je connais d'eux — de bons professionnels du milieu et des gens fort compréhensifs qui sont prêts à pardonner pas mal de choses au gouvernement, parce que le gouvernement commence. On sait que dans une course comme celle qu'entreprend le gouvernement, une course supposément de quatre ans, il y a une espèce de "sprint" au départ. Les journalistes, les gens des media d'information sont prêts à donner une chance au gouvernement, et on le voit aussi. Je suis d'accord avec cela, qu'on donne une chance à un gouvernement qui commence son mandat.

Je suis d'accord même qu'on accepte certaines erreurs d'un gouvernement qui commence, et à plus fortes raisons d'un gouvernement dont la composition est faite à presque 90% de gens qui n'ont pas siégé en Chambre. Ce n'est pas un défaut, cela. On n'a pas reproché au gouvernement de faire certaines erreurs, cela va avec cela. Mais copier les erreurs de l'ancien gouvernement, je ne pardonne pas cela. Il n'a 'pas le droit de faire cela, Mme le Président. Il l'a trop dit à la population. Bonnet blanc et blanc bonnet. Il a trop dit qu'il y aurait du changement. Quand je voyais tout à l'heure analyser, par le leader parlementaire, le nombre d'heures, c'était la course à la montre, il fallait absolument dépasser en heures ce que l'ancien gouvernement avait fait avec la loi 22. Mais ce n'est pas cela qu'il a dit à la population.

Ce gouvernement a vendu à la population qu'il y aurait des changements en profondeur quand on aurait changé le gouvernement. J'y crois encore. Je veux lui rappeler de temps en temps qu'il nous a dit cela, c'est la salade qu'il nous a vendue. Mais quand on parle de motion de clôture, cela ressemble à l'ancien gouvernement. Pourquoi la motion de clôture est-elle là, ce matin? On a collaboré, Mme le Président, vous n'avez pas été témoin des débats. C'est moi qui ai proposé, au nom de l'Union Nationale, de sauter des chapitres et d'en arriver à la loi de la langue de l'enseignement pour permettre la rentrée scolaire à Montréal. Cela, c'est de la collaboration que j'appelle, en français. On est sauté à l'article pour permettre la rentrée scolaire planifiée. Cela a été accepté par le gouvernement et par l'Opposition officielle.

On a également proposé hier soir d'adopter la francisation des entreprises, sentant la guillotine qui nous arrivait. C'est de la collaboration. On vous demande ce matin de remettre l'article. Pour répondre au leader, oui, on serait contents, nous, de l'Union Nationale, de continuer d'étudier ce projet de loi 101, d'adopter les mesures en question.

Je ne comprends pas cette course à la montre. Par réglementation, on peut régler la partie difficile à Montréal pour la rentrée scolaire. Je ne comprends pas que cela presse tant de passer la loi. C'est bien sûr qu'on a hâte que cela finisse. On a vu l'exemple de la loi 63 d'un gouvernement qui s'est fait battre, et j'étais de ceux-là. On a vu la loi 22, par le gouvernement qui s'est fait battre, il y a deux lois qui sont arrivées à la toute fin d'un mandat. Et là, on adopte au début d'un mandat pour faire oublier l'odieux qu'il y avait dans une loi comme celle-là. C'est comme cela qu'on arrive avec une guillotine, il faut en finir parce qu'on sait que le public en a assez, comme l'a dit tout à l'heure le leader parlementaire. Il en a assez de les entendre parler de la langue et il dit: Qu'on passe à d'autres choses, qu'on passe à des projets de loi à portée économique.

Si vous aviez entendu, Mme le Président, le ministre d'Etat au développement culturel qui a passé la moitié de son temps à nous affubler d'épi-thètes et il n'a été capable de rien sortir. Si on avait passé moins de temps à affubler l'Opposition de tous les titres, tous les qualificatifs, on aurait pas mal plus d'articles de votés.

J'ai été témoin, Mme le Président, que le premier ministre nous a dit qu'il n'y aurait pas de "bulldozage", mais c'est du "burnsdozage" qu'on a cette année. Cela a changé pas mal, mais cela revient à la même chose. On ne peut plus continuer d'étudier notre loi ce soir. Il y aurait de la bonification à apporter à cette loi. Il y aurait des changements qu'on pourrait apporter. On n'en sera pas capable parce qu'on manquera de temps. Cela a été difficile parce que le gouvernement s'est acharné. Les motions qu'on a apportées, les amendements qu'on apportait étaient des amendements, à mon sens, sérieux, à plusieurs reprises. Dans cela, il y avait des irrecevables, des non-recevables, il y avait des reçues-rejetées, des prématurées et des caduques. C'est ce que nous avons fait de ce livre-là.

Le blâme n'est pas rejeté sur la présidence, je le dis encore une fois, Mme le Président, nous avons un président, en bas, qui remplit son rôle de président, qui protège l'Assemblée nationale et de façon particulière l'Opposition. On doit lui rendre hommage. Je pense que si on change d'étage c'est la même chose ici dans cette Chambre, ce qui se passe. Peu importe qui représente la présidence, c'est ce qui se passe à la commission sur la loi 101. De ce côté-là, il n'y a aucune difficulté et vous l'avez compris.

Les journaux sont prêts, Mme le Président, à pardonner pas mal de choses au gouvernement, à passer l'éponge sur les erreurs qui peuvent être faites, ils sont capables de passer l'éponge sur des déclarations du premier ministre qui dit: On va être large. On va être humain. On n'a pas les deux pieds dans le ciment. Ce sont les paroles du premier ministre. J'aimerais, Mme le Président, qu'on prolonge l'étude de la loi 101 et qu'on vienne voir ce que c'est que d'avoir les deux pieds dans le ciment. Ce n'est peut-être pas dans le ciment, mais le ministre d'Etat au développement culturel les a dans le plâtre et cela ne bouge pas plus quand on est serré là-dedans. Il n'y a rien de sérieux qui est accepté qui vient de l'Opposition. Je pense que, si on laissait porter, dans le public, l'étude de la loi 101, cela deviendrait gênant pour le gouvernement. Là, on serait peut-être obligé d'accepter des amendements.

Mme le Président, en ce gouvernement j'ai pas mal d'espoir encore, je dois vous le dire. M. le député de Saint-Jean est en mesure de témoigner de ma sincérité. C'est un gouvernement en qui j'ai pas mal d'espoir et à qui on veut donner des chances aussi, ne pas mettre de sable dans l'engrenage encore une fois, avec lequel on veut collaborer quand c'est possible. Je pense que jusqu'à maintenant nous en avons fait la preuve. Par l'appui que nous avons donné, parfois même sans réserve, mais on voudrait que le gouvernement réponde. On ne collaborera pas à sens unique, ce n'est pas vrai. On voudrait que le gouvernement réponde parfois à nos demandes. La demande qu'on fait ce matin c'est de continuer l'étude de la loi 101 en commission. Je demanderais au leader de revenir sur sa décision et permettre l'étude en commission. Est-ce que cela décevra des gens? Je pense que les premiers qui seraient déçus ce sont peut-être les ministériels qui vont être obligés de continuer les vacances à la chaise musicale, mais cela ne nous dérange pas, on est présents. Quand on est un gouvernement et qu'on décide de présenter des lois comme cela, on pourrait décider aussi d'être à l'ouvrage. On a signalé cela quelquefois et on fait des gorges chaudes de l'autre côté. Oui, on doit être à l'ouvrage quand on propose des lois de ce genre-là. On doit être ici en Chambre et endosser les lois. Je n'accepte pas, Mme le Président, qu'on vote en troisième lecture cette loi cette semaine alors qu'il manque cinq ou six députés ministériels et cinq ou six ministres. Je n'accepte pas cela comme Opposition. C'est cela qui va se produire. Qu'on appelle à Ogunquit et qu'on fasse venir le monde. En troisième lecture, les gens doivent s'impliquer du côté du gouvernement. Ils doivent voter cette loi et ils doivent être là. Nous serons ici, nous. Elle est trop importante. Surtout eux, Mme le Président, du gouvernement péquiste, doivent être ici pour voter leur loi.

Ils devraient être ici aussi pour nous aider à apporter des amendements qui vont correspondre davantage à la réalité québécoise. Avec cette motion de clôture qui nous arrive, quand j'entends — j'aimerais qu'on continue de le redire, cela va finir par sonner faux — qu'enfin on donne une loi qui correspond aux Québécois, qui correspond à une majorité, il faudrait commencer par déterminer la majorité là où elle se situe. Avec le projet de loi que nous avons là, je n'aime pas mieux les Anglais que les Français. Ce qu'on veut, c'est une loi pour les Québécois et non pas une loi qui ressemble à la France. Vous avez été témoin, je l'ai rappelé à la commission, comment cela a été surprenant, lors du voyage qu'on a fait aux frais de la reine, de voir les différences qu'il pouvait y avoir dans un pays aussi français que la France. On peut bien se servir d'exemple qui viennent de là, si cela peut nous aider; on peut bien se

servir de l'Angleterre, mais on n'est pas une population anglaise, on n'est pas une population française. On est une population québécoise. Je veux qu'on garde notre identité. C'est à cette image que doit ressembler le projet de loi no 101, l'image des Québécois. C'est cela qu'on veut amener, la bonification de la loi, la faire ressembler davantage à la collectivité québécoise.

Il y aura toujours des gens des deux côtés de la Chambre qui aimeraient que notre projet de loi tienne compte davantage de l'élément anglophone qui a composé le Québec. Et un autre élément qui voudrait qu'on tienne compte de la majorité francophone qui compose le Québec. Mais il y aura toujours des gens entre deux, par exemple, capables de penser que cette communauté est composée de deux groupes et qu'on doit tenir compte de cela.

L'étude du projet de loi no 101 doit continuer pour tenir compte de la réalité québécoise davantage et permettre — comme le disait le député de Saint-Laurent, je pense, dans un excellent discours qu'il a fait en Chambre et que j'ai eu le plaisir de relire — aux députés qui n'ont plus de contact avec leur population, depuis plus d'un mois... Mme le Président, c'est gênant, je dois vous dire qu'à cause de la rapidité des travaux qui se font ici, je pense que je n'ai pas rencontré deux électeurs de mon comté depuis deux mois. Cela est gênant, un aveu comme cela. Puis continuez de nous dire qu'on fait d'excellents députés! Non, pas comme cela. Le député est ici pour rendre compte d'une réalité, celle de son comté. Actuellement, je ne sais pas de quelle couleur sont les gens de mon comté, face au projet de loi no 101. J'aurais aimé continuer d'avoir une journée ou deux par semaine pour aller prendre le pouls dans mon comté, auprès de mes électeurs et revenir ici. On a l'air des poissons dans un aquarium, on a toujours le même oxygène ici. On finit pas penser que ce qu'on pense, c'est cela la réalité québécoise. C'est faux, il faut retourner dans notre comté, retourner aux sources de temps en temps pour savoir ce que pensent nos électeurs. On n'a plus l'autorisation depuis que...

M. Michaud: Samedi et dimanche, c'est disponible.

M. Grenier: On était en Chambre, le samedi, si vous ne le saviez pas vous. Je vais vous dire cela.

M. Michaud: Le dimanche.

M. Grenier: Le dimanche on est avec notre famille pendant à peu près les trois heures qu'il nous reste avant de s'en venir à Québec le dimanche soir — cela ne vous est pas arrivé à vous — pour être ici à 10 heures le lundi matin. Vous apprendrez cela. Je me suis battu contre cela en Chambre, j'ai toujours voté contre cela. Je vais vous dire une autre petite chose, Mme le Président, c'est une intervention de trop celle-là. J'étais revenu pour voter contre cette motion, puis c'est nous autres de l'Opposition qui avons fait quorum en bas, le lundi 8 août. Il est peut-être bon que vous le sachiez.

C'est pour cela, Mme le Président, que je voudrais qu'on continue. Le sérieux en bas depuis la motion de guillotine qui est arrivée, il est fait par ce côté-ci de la table, pas par l'autre côté dans les présences.

Mme le Vice-Président: M. le député...

M. Grenier: Je m'excuse, c'est la réalité, il manquait la semaine passée quatre députés du gouvernement...

Mme le Vice-Président: M. le député, je dois vous rappeler à l'ordre, vous le savez fort bien, M. le député.

M. Grenier: Mme le Président, je termine là-dessus. Les gens qui me connaissent en face et ceux qui me connaissent ici, savent que je me colle à la réalité autant que je le peux, et à la vérité aussi. Je voudrais bien qu'on arrête de prêcher la vertu et pratiquer le vice. Je veux qu'on arrête des deux côtés de la Chambre de dire une chose et faire l'autre. Prenez donc la parole sur ce projet de loi, si vous voulez parler au lieu de ce que vous faites là. Quand j'entends quelqu'un du gouvernement venir nous dire qu'ils vont être larges, qu'ils vont être humains, et qu'on ne voit rien d'aussi restrictif que ce qu'on subit en bas, je voudrais bien qu'on arrête de dire une chose puis de faire l'autre. Et que cela se fasse des deux côtés de la Chambre, une fois pour toutes.

Est-ce que j'irai un jour de ce côté? C'est possible. Mais je veux vous dire une chose, et je veux que vous preniez une note, ce matin, Mme le Président. Si je ne continue pas d'être celui qui vous parle aujourd'hui, je veux que vous me le reprochiez, parce que vous serez peut-être là, vous encore. Je veux que vous me le reprochiez, à ce moment. Je voudrais bien que les gens soient plus honnêtes quand ils sont en Chambre et qu'ils arrêtent de dire une chose d'un côté et le contraire de l'autre bord.

La motion de clôture de ce matin n'est pas plus drôle faite par le gouvernement du Parti québécois que faite par l'ancienne équipe. Elle n'est pas plus drôle; elle l'est encore moins parce que les gens ont pensé qu'ils changeraient des choses et ils ont rêvé en couleur. Plus ça change, plus c'est pareil! C'est ce qui arrive dans bien d'autres secteurs dont je n'ai pas le droit de parler ce matin, parce que cela ne fait pas partie de la motion.

Plus ça change, plus c'est pareil! C'est ce qui nous déçoit et c'est ce que je rappelle au gouvernement ce matin. Je lui demande de se replacer sur la "track". Il sait ce que cela veut dire. Je lui demande aussi de revenir à la confiance qu'on a mise en eux, en chacun d'eux. Que les députés ministériels qui sont ici le disent aux membres du cabinet de revenir aux politiques préconisées par ce gouvernement. Encore une fois, je dirai oui à ce monde, à ceux qui peuvent le faire.

Un rôle d'Opposition, c'est intéressant. Cela

ne me fait rien de siéger dans l'Opposition si on réussit à aiguillonner le gouvernement à faire des choses en vue du mieux-être des Québécois. Cela ne me fait rien de siéger dans l'Opposition. Cela ne me fait rien de préparer un livre bleu pour bonifier une loi, mais qu'on donne aux Québécois ce qu'ils demandent, qu'on réponde à leurs exigences. Qu'on y réponde par un gouvernement du Parti québécois, de l'Union Nationale ou du Parti libéral, je m'en fous, mais qu'on leur donne ce qu'ils veulent avoir! Qu'on ne biaise pas! Je demande au gouvernement de ne pas biaiser. Ce n'est pas correct, ce qu'on fait ce matin. Ce n'est pas correct, cette motion de clôture. Ce n'est pas ce qu'on avait dit et ce n'est pas cela que les gens croyaient non plus. Qu'on laisse aller les choses. C'est tannant, parfois, d'écouter l'Opposition: cela peut sembler du "filibuster", mais qu'on laisse aller les choses, qu'on épuise le sujet. On arrivera avec d'autres amendements qui seront peut-être bien valables. Il s'en fait, du côté de l'Opposition libérale, des amendements sérieux; il faut avoir été là pour le comprendre. Il s'en fait de l'Union Nationale aussi, des amendements sérieux.

Je demanderais en terminant, Mme le Président, puisque vous allez vous lever, au gouvernement de comprendre le sens de mon intervention. C'est vrai, ce matin, quant à cette motion, mais c'est aussi vrai dans d'autres secteurs dont je ne peux pas parler, encore une fois. Je demande au gouvernement de réfléchir sérieusement, de s'arranger pour avoir notre appui. Il va l'avoir, de ce côté-ci de la Chambre, quand il va faire des choses qui correspondent à notre réalité. Cela ne correspond pas à un besoin; c'est une formule usée, dépassée et désavouée des deux côtés de la Chambre, la motion de clôture. Qu'elle soit faite par un ministre ou par l'autre, c'est désavoué et c'est périmé. Personne ne veut en entendre parler. C'est brimer un droit de parole dont on abuse parfois, mais le jeu de la démocratie, c'est cela.

Je vous prierais, Mme le Président, de faire savoir à notre leader du gouvernement que nous lui demandons de surseoir à sa décision. Vous continuerez alors d'être édifiée — puisque la présidence est quand même une — de la participation de l'équipe de l'Opposition tant libérale que de l'Union Nationale; notre présence, notre participation en bas est toujours positive. Je voudrais qu'on permette à cette commission de continuer de siéger. Cet appel, je le fais au nom de notre parti, mais soyez assurés qu'il correspond à la partie de la population que nous représentons ici et qui s'est opposée au gouvernement lors de l'élection. C'est ceux-là que nous tentons de représenter ici afin de faire valoir leurs volontés.

Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Jacques-Cartier.

M. Noël Saint-Germain

M. Saint-Germain: Je dois vous dire, personnellement, que je suis énormément déçu de cette motion que nous avons à étudier aujourd'hui.

Cette motion est présentée par un gouvernement qui s'aperçoit qu'il a commis des erreurs fondamentales et qui se sent obligé de revenir à des priorités qui sont plus en relation avec les besoins du Québec d'aujourd'hui. Tôt ce printemps, le gouvernement a établi ses priorités. Le gouvernement nouvellement élu, sans expérience de la chose publique, qui sortait d'une élection qu'il avait gagnée en flattant et en passionnant à la limite les sentiments nationalistes du Québec, s'est senti obligé, en tout début d'année, de modifier profondément la loi linguistique en application dans cette province.

Il aurait été sage, et c'est sans doute ce que des hommes d'expérience auraient fait, il aurait été sage, dis-je, pour ce gouvernement, d'observer l'application de la loi 22, de se familiariser avec les champs d'activité où une loi linguistique doit nécessairement s'appliquer par l'entremise de la régie. Le ministre des Affaires culturelles aurait pu se rendre compte d'une façon pratique de l'évolution de la loi 22, des réactions qu'elle suscitait, positives ou négatives, il aurait pu se familiariser avec le monde des affaires, de la finance, des sciences, des universités, des hôpitaux, des services sociaux et ainsi de suite, et cette expérience du nouveau gouvernement se serait nécessairement reflétée lorsqu'on aurait voulu modifier la loi linguistique.

Ce laps de temps et cette expérience acquise auraient pu servir aussi au ministre de l'Education qui acceptait des responsabilités nouvelles. Il aurait pu, avec le temps, et en fait, étudier la situation scolaire, la situation de la langue à ce niveau.

Mais comme je le disais, le gouvernement avait fait son lit. Il avait établi ses priorités et il croyait nécessairement que c'était là le voeu de la province et que c'était le problème le plus important auquel faisaient face les citoyens du Québec. Dans son inexpérience, il n'avait pas prévu la situation du chômage aujourd'hui. Il n'avait pas prévu nos difficultés dans nos relations de travail qui sont d'une importance fondamentale. Il n'avait pas prévu de services aux personnes âgées. Il n'avait pas prévu les difficultés qu'on a actuellement au niveau des universités du Québec et à l'Université du Québec entre autres. Il n'avait pas prévu la réticence des investisseurs. Il n'avait pas prévu la situation économique qui se détériorait en Amérique en général...

Mme le Vice-Président: M. le député, il ne m'apparaît pas évident à l'heure actuelle que vous parlez sur la motion. Peut-être avez-vous l'intention de le faire? J'espère que vous allez le faire très bientôt.

M. Saint-Germain: Certainement, madame. Je crois que je suis en plein dans le sujet car si le gouvernement propose cette motion, c'est que le gouvernement s'aperçoit que la province de Québec est actuellement fatiguée d'entendre parler de langue. Les citoyens du Québec qui ont des difficultés actuellement et qui font face à des problèmes importants sont fatigués d'entendre parler de la langue.

M. Goulet: Mme le Président, j'invoque le règlement.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse sur la question de règlement.

M. Goulet: Je ne sais pas si, avec la nouvelle motion d'hier, les règlements sont changés, mais au moment où je vous parle nous n'avons pas quorum.

Mme le Vice-Président: Nous allons vérifier immédiatement le quorum, M. le député. Un moment. Voulez-vous compter les députés? A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Je disais que sous la pression de l'opinion publique, le gouvernement sent pertinemment qu'il est obligé de mettre fin à ce débat pour faire face aux problèmes plus urgents et auxquels a à faire face le citoyen ordinaire du Québec. Ce gouvernement aurait facilement pu, après s'être donné quelques mois d'observation, s'apercevoir que si, pour la rentrée des écoles au mois de septembre, il était important de modifier le chapitre de l'éducation relativement au projet de loi 22, il aurait eu tout le temps voulu.

La preuve en est faite puisqu'on a déjà étudié ce chapitre article par article au niveau de la commission. Il aurait pu facilement modifier notre loi linguistique de façon à faire disparaître les tests que la population ne voulait plus accepter, et je dis bien la population en général, comme ceux qui sont responsables dans le domaine de l'éducation.

Le gouvernement aurait pu facilement limiter ses études au point de vue linguistique à ce chapitre très particulier, et ceci se serait fait sans difficultés, sans embourber les travaux de cette Chambre. Cela aurait donné amplement le temps au gouvernement d'étudier les lois dont on a un urgent besoin et de faire face aux problèmes réels du Québec en ce moment. Malheureusement, il a voulu prendre le champs d'activité en entier. Par son inexpérience, il est arrivé avec une loi excessivement complexe, excessivement autoritaire qui va demander énormément de fonctionnaires, d'argent dans son application, qui va créer de terribles injustices, qui crée un climat lourd dans cette province, un climat qui est au détriment de la bonne évolution des choses au Québec.

Les citoyens sont fatigués, Mme le Président, d'entendre parler de langue. Nous voilà avec le bâillon. Quel sera le résultat de ce bâillon? Le résultat sera que la loi, dont des chapitres entiers n'ont pas été étudiés article par article, sera appliquée comme telle. Chaque député, comme la population d'ailleurs, sait pertinemment qu'il y a des articles qui devraient être longuement discutés dans cette loi, des articles qui devraient être modifiés d'une façon substantielle. Tout ceci, à cause de la complexité de la loi qui a au-delà de 200 articles, demande du temps.

Si le gouvernement est honnête, si le gouvernement veut bien qu'on cesse en cette Chambre de parler de langue, et ceci à la demande de la population, pourquoi ne scinde-t-il pas le projet de loi? Pourquoi n'accepterions-nous pas, dans un nouveau projet de loi ou dans un projet de loi scindé, le chapitre de l'éducation? Après ceci, on aurait tout le temps en commission pour étudier le projet article par article.

Si on finissait cet automne ou tard cet automne ou même si on finissait au printemps, quels en seraient les inconvénients?

Mme le Vice-Président: Je me vois tenue à vous inviter à conclure, M. le député.

M. Saint-Germain: On pourrait étudier au niveau de la commission pendant plusieurs mois sans inconvénient pour les travaux de cette Chambre, et on pourrait en toute tranquillité étudier ce projet article par article. Je crois que c'est une nécessité, dans l'intérêt de tous les citoyens du Québec, qu'on ait l'occasion d'aller au fond des choses, Mme le Président.

J'espère bien que le gouvernement, y pensant une deuxième fois, retirera cette motion et qu'on pourra, dans l'intérêt des citoyens du Québec, continuer à étudier cette législation comme elle doit l'être. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, Mme le Président. Avec votre permission je discuterai très brièvement la motion qui est devant nous.

Il est vrai que les députés, je dirais même la plupart des députés, tel que mentionné dans certains journaux de ce matin, rêvent de vacances, Mme le Président. Je les comprends et je suis de ceux-là. Après avoir fourni 80 à 90 heures de travail par semaine — je pense que c'est à peu près la somme de travail que fournit un député, possiblement un ministre en fournit-il encore davantage — c'est normal que tout le monde rêve de vacances, que ce soit de ce côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté.

Il est également vrai, Mme le Président, qu'il y a quelque temps que tout le monde discute de ce projet de loi, soit le projet de loi 101, et que même plusieurs ont hâte d'arrêter d'en parler. Mais ce n'est pas là une raison pour "bulldozer" les travaux et adopter une loi imparfaite.

Si nous sommes rendus à la fin du mois d'août et que les travaux ne sont pas rendus là où l'espérait le leader du gouvernement, ce n'est pas, Mme le Président, seulement la faute de l'Opposition. D'abord, nous avons eu très tardivement le projet de loi no 1 qui a été présenté au mois de juillet — très tard dans la session — puis il y a eu une réimpression, et cela n'est pas la faute de l'Opposition. Nous, de l'Union Nationale, Mme le Président, avons présenté une critique très objective sur le projet de loi 101. Nous avons présenté notre livre bleu afin que tout le monde sache à quelle enseigne nous nous logeons. Nous avons

fait, d'après moi, un travail très objectif, un travail que même l'honorable premier ministre et l'honorable ministre d'Etat au développement culturel ont qualifié de très valable, très pertinent et très objectif. Même les libéraux, Mme le Président, se sont inspirés de cette oeuvre pour définir leur politique et apporter des arguments lors du débat en commission.

Nous, de l'Union Nationale, Mme le Président, nous ne sommes pas pour la clôture prématurée de ce débat car, à notre avis, il y a encore trop de chapitres très importants sur lesquels nous n'avons pas pu faire valoir nos idées. Hier encore, le député de Mégantic-Compton a demandé, au début des travaux de la commission, de sauter au chapitre de la langue des entreprises parce qu'il prévoyait ne pas avoir le temps d'en parler. Nous avons demandé cela, Mme le Président, parce que, à notre avis, ce chapitre doit être débattu, et nous, de l'Union Nationale, aurions aimé faire valoir nos idées sur ce chapitre très important. Encore là, nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement n'a pas jugé bon d'appuyer notre proposition.

Si les débats n'ont pas avancé, Mme le Président, au rythme désiré par le leader du gouvernement, à qui la faute? Beaucoup plus, d'après moi, aux membres du gouvernement qu'aux membres de l'Opposition. Le gouvernement n'était pas prêt à présenter ce projet de loi. Le gouvernement a refusé et refuse encore systématiquement tout amendement parce qu'il pense avoir à lui seul la vérité. Il faut aller en commission comme observateur pour voir ce qui s'y passe.

Il y a également, Mme le Président, les promesses répétées d'un homme influent dans le gouvernement actuel. Promesses maintes fois répétées et encore tout dernièrement par cet homme soi-disant crédible. Promesses selon lesquelles le gouvernement n'emploierait pas la guillotine. Promesses selon lesquelles le gouvernement accordera tout le temps voulu pour l'étude d'un projet aussi important que l'est le projet de loi no 101.

Ces promesses, Mme le Président, ont été faites par un homme qui s'appelle René Lévesque, honorable premier ministre du Québec. C'est pourquoi je dis que ces promesses étaient supposément crédibles et l'homme également. Les membres du Parti québécois, en commission parlementaire, ont perdu et ont fait perdre autant de temps que n'importe quel membre de l'Opposition, en discutant sur toutes sortes de peccadilles. Encore hier, on a discuté sur du lettrage. C'était rapporté dans les journaux.

Je cite: "Est-ce que le lettrage sur le cadre de la porte est plus important que le lettrage dans la porte et des choses comme celles-là?"

Mme le Vice-Président: M. le député!

M. Goulet: Je reviens, je sais que je vous parle du travail à la commission, mais c'était simplement pour vous faire voir que le temps perdu en commission n'est pas perdu seulement par les membres de l'Opposition, mais beaucoup plus par les membres du gouvernement. Nous, de l'Union Nationale, avons étudié le projet de loi article par article. Nous aurions aimé et nous étions prêts également à discuter ce projet de loi article par article, même jusqu'à Noël s'il le fallait, de façon à pouvoir offrir à chaque Québécois le meilleur projet de loi qu'il ait jamais eu; pas le quart d'un projet de loi, mais un vrai projet de loi qui recueillerait l'assentiment de tout le monde, de façon qu'on n'ait pas à y revenir dans deux ou trois ans. Il y a eu les projets 63, 22, 101 et, en adoptant cette loi à la vapeur, en ne prenant pas le temps de discuter article par article et d'apporter les amendements de façon à répondre aux besoins de chaque Québécois, nous devrons, l'an prochain, dans deux ou trois ans, passer encore deux ou trois mois sur un projet de loi pour essayer d'amender, de rappeler ou de remplacer cette loi imparfaite que sera la loi 101.

Je demande donc au ministre de retirer sa motion et de laisser les intéressés faire leur travail dans l'objectivité et dans la sérénité, et cela pour le bien de tous les Québécois.

Mme le Vice-Président: Cette motion du leader parlementaire du gouvernement sera-t-elle adoptée?

M. Burns: Adopté.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Mme le Président, sûrement que le débat n'est pas fini, sans réplique surtout. Il est bien évident que cette motion du député de Maisonneuve, leader du gouvernement, est l'aboutissement tout à fait normal de la stratégie qu'a adoptée le gouvernement pour l'adoption de son programme législatif depuis le 8 mars dernier. Si on se réfère aux notes de présentation du règlement de l'Assemblée nationale, on se rend compte que les auteurs du règlement ont voulu, en adoptant ce règlement, l'assujettir "à la réalité de l'Assemblée pour qu'il fasse de celle-ci un Parlement moderne, efficace, qui permettra à la majorité de faire adopter sa législation — c'est ce dont il est question ce matin — à l'Opposition de s'exprimer en toute liberté — c'est ce que nous tentons de faire — à l'opinion publique de se manifester et à tous les députés de remplir pleinement leur rôle de législateurs".

Mme le Président, le leader du gouvernement en a fait état ce matin et hier, lors de la présentation de sa motion de fin de session, il n'y a rien d'inédit, il n'y a rien de bien original dans la présentation de cette motion mettant fin aux délibérations de la commission parlementaire qui étudie présentement le projet de loi no 101, Charte de la langue française. Mais je soutiens que ce gouvernement, pendant la campagne électorale, depuis l'élection du 15 novembre, en cette Chambre et à l'extérieur de la Chambre, à toutes les occasions

qui lui ont été fournies, ce gouvernement s'est dit un gouvernement transparent. On a même confié au député de Maisonneuve un mandat spécial de procéder à la réforme parlementaire...

M. Burns: Ce n'est pas un gouvernement, c'est un aquarium, tellement c'est transparent.

M. Gratton: C'est tellement transparent qu'on se demande de quel côté de la Chambre sont les poissons dans cet aquarium, Mme le Président. Cette motion dite de guillotine ou de clôture, traditionnellement, ne doit être présentée que dans des cas extrêmes où on a épuisé toutes les autres voies pour un gouvernement de faire adopter sa législation. Mme le Président, combien de façons autres que cette motion dite de guillotine le gouvernement aurait-il pu employer pour en arriver à l'objectif qu'il s'est fixé, soit de faire adopter son projet de loi sur la langue? L'Opposition en avait suggéré une, dès le début des travaux en commission parlementaire, soit de scinder le projet de loi de façon que les dispositions qui sont urgentes, à la veille de la rentrée scolaire, c'est-à-dire les dispositions de la loi qui touchent la langue d'enseignement fassent l'objet d'un projet de loi séparé, que l'Assemblée nationale aurait pu étudier et voter avant la rentrée scolaire.

C'est d'ailleurs tellement vrai, Mme le Président, qu'au moment où on se parle, la commission parlementaire a déjà terminé l'étude des articles qui touchent la langue de l'enseignement. Le député de Marguerite-Bourgeoys, porte-parole du parti à cette commission, a indiqué, ce matin, que, même aujourd'hui, si le gouvernement décidait de se rendre à ce voeu de l'Opposition de scinder le projet de loi, nous nous engagerions immédiatement à faire en sorte que la partie qui touche la langue de l'enseignement soit adoptée immédiatement.

Mais, je n'ai pas l'illusion que le gouvernement se rendra à cette invitation que lui fait l'Opposition. Il est bien évident que le gouvernement, depuis le 8 mars, s'est embourbé dans sa stratégie, stratégie des plus incohérentes. On a vu un projet de loi déposé, retiré — vous vous rappelez sûrement la trouvaille du siècle — on a vu le leader du gouvernement présenter la semaine dernière une motion dite de fin de session, dont les résultats sont tout à fait nuls puisque, comme je l'indiquais hier, on se retrouve aujourd'hui devant une autre motion, celle-là de clôture, qui était réellement la seule utile pour atteindre les fins du gouvernement.

Si c'est là la façon qu'entend prendre le gouvernement pour réformer nos coutumes parlementaires, cela augure très mal. On dit que les travaux de cette Assemblée ne sont pas efficaces, que le Parlement québécois n'est pas un Parlement moderne; certains députés, dont le député de Dorion, s'interrogent sur la validité de leur présence en cette Chambre.

Mme Payette: Je continue à m'interroger. M. Gratton: Pardon?

Mme Payette: Je continue à m'interroger. Une Voix: Surtout en vous écoutant. M. Gratton: Je ne vous entends pas.

M. Burns: C'est vous autres qui êtes le sujet de ses interrogations.

M. Gratton: D'ailleurs, nous aussi on s'interroge sur la sagesse de certains députés ministériels qui, depuis le 8 mars, n'ont pas ouvert la bouche en cette Chambre, qui n'ont pas dit un traître mot pour appuyer un projet de loi quelconque.

Mme le Vice-Président: Je rappellerais que parfois, à la suite des interventions, un député s'éloigne de son sujet. Je demanderais à chacun de garder l'ordre dans cette Chambre.

M. le député de Gatineau.

M. Burns: Mme le Président, il est mal pris, il ne sait pas quoi dire, c'est pour cela qu'on lui donne un peu de...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lamontagne: Mme le Président, rappelez-les à l'ordre par leur nom respectif. Quand c'est le leader du gouvernement...

Mme le Vice-Président: C'est déjà fait, M. le député de Roberval.

M. le député de Roberval, je vous demanderais un peu plus de délicatesse dans vos interventions. A l'ordre, M. le ministre. J'avais déjà rappelé M. le ministre à l'ordre.

M. le député, je n'admets pas ce que vous me dites maintenant. J'espère qu'à l'avenir vous penserez un peu plus...

M. Lamontagne: Question de règlement, Mme le Président. Lorsque vous maintenez que vous avez rappelé un ministre à l'ordre en rappelant tout le monde, ce n'est pas...

Mme le Vice-Président: M. le député de Roberval! M. le député de Roberval, je vous ai dit tantôt que j'avais rappelé le ministre à l'ordre. Je vous demande de me faire confiance quand je vous le dis. Si vous n'avez pas entendu, il faudrait quand même avoir un peu plus de décence dans cette Assemblée.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Mme le Président, je constate qu'il est 13 heures, puis-je proposer la suspension de nos travaux?

Mme le Vice-Président: Cette Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

Reprise de la séance à 15 h 6

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Reprise du débat sur la motion du leader parlementaire du gouvernement. M. le député de Gatineau avait la parole. Il vous reste environ une minute et demie, M. le député. Alors, je vous indique, comme d'habitude, que c'est le moment de conclure ou à peu près.

M. Gratton: Merci, Mme le Président. Je disais donc, ce matin, qu'il ne faut pas se surprendre que cette motion de clôture vienne paralyser en quelque sorte les travaux de l'Assemblée nationale, compte tenu de la décision qu'avait prise le gouvernement d'employer la stratégie qu'il a utilisée. En terminant, je dirai simplement que, comme hier au moment du débat sur la motion dite de fin de session, le premier ministre, qui avait pris des engagements très formels à deux occasions, soit le 21 juillet en cette Chambre et le 25 juillet dans une entrevue dans le journal La Presse, de ne pas imposer la clôture, de ne pas avoir recours à ces motions traditionnelles de fin de session, n'a pas daigné intervenir sur la motion que l'Assemblée nationale a adoptée hier et n'a pas pris part au vote hier soir sur cette même motion. Il ne semble pas que le premier ministre prendra la parole au cours du débat sur cette motion de clôture et fort probablement, ce soir, lorsque le vote sera appelé sur cette motion odieuse, le premier ministre verra à être bien enfermé dans son "bunker" de la Grande-Allée...

Une Voix: En vacances.

M. Gratton: ... laissant à d'autres le soin de porter l'odieux de cette décision de son gouvernement.

Mme le Vice-Président: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Frederic Shaw

M. Shaw: Merci, Mme le Président. First of all, I would like to take this opportunity to support my colleague, the member from Mégantic-Compton and my colleague, the member from Gaspé, for the diligent work that they have done with the commission studying all the provisions of bill 101. To suggest that these men who have put so much efforts to be at every single one of the meetings, to have worked diligently to prepare the motions of amendment that should have been given the consideration they deserved by the parti ministériel, their attendance was not simply one of passiveness but one of positive intervention providing that types of recommendations that would have made, and could have made Bill 101 an acceptable piece of legislation not only for the supporters of the Parti québécois but for all Quebecers including those of English expression and those of our ethnic communities who also consider our province, Quebec, as our part of Canada.

But Madam President, we now have the guillotine and we have it after less than one quarter of the articles of Bill 101 have adequately been given the consideration that they deserve for a piece of legislation which is unique perhaps in the world, a charter that is supposedly there to entrench the rights of people. But there is not time enough to give the consideration to this legislation that it deserves. Madam President, we, early, made the recommendation, as did our colleagues in the Liberal Party, to pass those sections involving section 69 and the entry to schools this fall. But the government would not do that. The government, the so-called "vrai gouvernement", committed to the principles of democracy, the so-called government that makes these pronouncements, that we will never interfere with the normal democratic process of l'Assemblée nationale du Québec.

This is a façade, Madam President. They were committed to justice and to the rights of minority groups living in this province. Madam President, we see the reality of the façade. We see that this piece of legislation is not there for our perusal and our consideration, for our examination and our criticism. It is there just to be read and to be swallowed.

Madam President, the reality is that if we do not get legislation from concensus, if we do not get legislation that examines the reality and puts it into perspective and is acceptable by all the people, it will go to court. That is the reality. And if this piece of legislation goes to court, perhaps that is where it should be. Perhaps a test for Canada is not on Thursday or Friday when the third reading of this bill is passed, but then. What do the courts of this land recognize in this legislation of the right of this House. That may be the real test.

For that reason may be the government is anxious to force this test. In other words, here we are, the representatives of the people, elected to put the input required to properly examine a piece of legislation, cut short, Madam President, when it most counts, when the legislation itself is being modified, as of this day, and when the government is not prepared, not prepared to give it a serious and positive consideration it deserves. Madam President, the government must accept the consequences of its policy. The government must accept the fact that, representing only 40% of the population, it is imposing legislation not considering the wishes of 60% of the population. For that matter. Madam President, it is not considering its posture in our Canadian society, the reality of the will of all Canadians. I know how they feel, how they wish to make french "Le visage du Québec", french the language of Quebec, but without coercion, without repression, without respect for the reality that there are people in this province that speak English and will continue to speak English and demand that this right be continued and enclosed in this legislation.

Madam President, we are living with the reality of a government of confrontation, a government

that is not one of consensus but one of confrontation and intimidation, but we can live with confrontation, because confrontation will result in confrontation. If that is the wish of this government, then this is what it will get. If, on the other hand, the government wishes to be respectful, the government wishes to look for its proper mandate, the one it went to the people with, saying: We want to be a real government, a responsive government, a listening government representing the will of the people, then we would have supported them, Madam President. We have not been listened to, we have not had our points of view respected ant the number of amendments that have been taken with any seriousness at all of this legislation is pathetic.

Madam President, it is my privilege to sit as one of the seven English-speaking members of the Province of Quebec in this Legislature and to represent 20% of the people in this province whose primary functional language is English.

I am proud, also, to be a Quebecer, and to be in "un milieu français". I like it this way, I love it this way, but I also know that for the rights of the children of that side of the House, as much as for the rights of my children and my colleagues who are English-speaking, it is necessary that legislation and the Legislature must be responsive to the will of the people, must listen to their wishes, must recognize its responsibility to react positively and not with coercion and not with confrontation. Thank you, Madam President.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Gérard-D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, c'est le devoir de l'Opposition de protester le plus vigoureusement possible contre cette procédure exceptionnelle qui amène le gouvernement à mettre de côté le processus normal d'adoption des lois en usant de sa majorité ministérielle pour forcer l'adoption d'un projet de loi fortement contesté. Je ne nie pas, évidemment, la légalité du recours à la guillotine. Ce recours est prévu par nos règlements et le gouvernement a aujourd'hui décidé de l'appliquer malgré, dois-je le rappeler, Mme le Président, les hauts cris poussés jadis par l'Opposition péquiste contre toute mesure semblable.

Ce que je conteste, c'est le fait que le gouvernement utilise cette procédure d'exception sur une question aussi fondamentale que celle de l'avenir, et de l'avenir linguistique, en particulier du Québec, alors que l'Opposition a procédé normalement, sans "filibuster", avec tout le sérieux, l'objectivité et le sens des responsabilités qu'exige l'étude d'un projet de loi aussi important contrairement à l'attitude complètement négative affichée par l'Opposition péquiste qui, en 1974, avait dirigé un réel "filibuster", un "filibuster" en règle contre le projet de loi no 22.

Je sais autant que n'importe qui que le processus parlementaire peut, à l'occasion, connaître ses longueurs et ses excès. Je suis, cependant, de ceux qui croient fermement en la valeur intrinsèque des discussions parlementaires. En effet, en dépit du ton et de la tournure que prend parfois le débat parlementaire, il reste que ce débat est absolument essentiel à la bonne gouverne d'une société démocratique. C'est, en effet, un droit fondamental de notre démocratie que celui de manifester sa dissidence à l'égard d'une mesure gouvernementale. Dans l'étude des projets de loi 1 et 101, c'est ce que nous avons fait avec toute la sincérité et toute l'ardeur dont nous étions capables. Nous ne l'avons pas fait parce que c'était notre rôle premier d'Opposition de nous opposer; nous l'avons fait parce qu'une partie importante de la population québécoise voyait ses droits considérablement réduits par le caractère excessif et injuste de la législation gouvernementale. Malgré cette opposition parlementaire, malgré une opposition extra-parlementaire et malgré, je vous le rappelle, Mme le Président, l'engagement solennel du premier ministre, pris le 21 juillet dernier, qu'on ne bousculerait pas l'Opposition et qu'on pourrait procéder normalement, malgré tout cela, le gouvernement décide aujourd'hui de forcer l'adoption de son projet de loi. Nous devons lui dire clairement qu'il commet ainsi une grave erreur et qu'il devrait être le premier à se rappeler les enseignements du passé encore pourtant très récents.

Le Québec a acquis maintenant une certaine expérience, plus ou moins heureuse d'ailleurs, dans le domaine de la législation linguistique. Malgré les meilleures intentions du monde qui pouvaient animer les auteurs du projet de loi 63 et du projet de loi 22, malgré toutes les mesures de prudence que les gouvernements passés ont mis à appliquer ces lois délicates, il s'est cependant trouvé des choses dans ces lois qui ont occasionné des situations particulièrement difficiles.

Le projet de loi no 101 entrera en vigueur sans que l'Assemblée nationale ait eu l'occasion d'étudier des chapitres entiers de cette importante législation. Il me semble que le gouvernement, qui s'est refusé à apporter au projet de loi quelque changement significatif que ce soit sur le fond, aurait dû avoir la prudence élémentaire de permettre au processus parlementaire de se dérouler dans des conditions normales et jusqu'à terme.

En effet, dans les chapitres qui ont pu être étudiés en commission parlementaire, l'Opposition officielle a apporté une contribution que je n'hésite pas à qualifier de positive, puisque, a plus d'une reprise, sur des amendements qu'elle proposait, le gouvernement ou certains membres de la majorité ministérielle ont été parfois ébranlés par la pertinence des observations que nous leur faisions. Ils savent maintenant, même s'ils ont rejeté nos propositions, au moins, que leurs positions ne sont pas aussi sûres et aussi solides qu'ils pouvaient bien le croire.

J'ai la conviction, Mme le Président, que le ministre qui sera chargé de l'application de la loi se rappellera, au moment où il mettra en place l'appareil administratif nécessaire à la mise en oeuvre de la loi, aura en tête certaines remarques que l'Opposition lui aura faites, au niveau de la

commission parlementaire. Il pourra ainsi être beaucoup plus prudent et conscient de la portée de ses décisions qu'il n'aurait été si la commission parlementaire n'avait pas examiné ces éléments du projet de loi. Peut-être des erreurs seront-elles ainsi évitées.

Malheureusement, à peine une quarantaine ou quarante-sept des quelque 219 articles du projet de loi ont été ainsi soumis à l'épreuve de la discussion parlementaire. Tout le reste y échappe par la décision arbitraire du gouvernement de mettre fin aux séances de la commission parlementaire sur l'éducation. Le ministre aura maintenant à mettre en application une loi qui, de toute évidence, n'aura pas atteint sa pleine maturité en ce sens qu'elle n'aura pas fait l'objet d'une discussion suffisamment détaillée pour lui permettre de cerner les difficultés et les embûches que comportera la mise en oeuvre de ces parties du projet de loi no 101. Le danger est alors grand que des erreurs de jugement soient commises, et ces erreurs, ce sera le gouvernement qui en portera le blâme.

Mme le Président, on sait que si la loi 22 a été à ce point contestée, c'est essentiellement ou presque exclusivement à cause de la fameuse question des tests linguistiques. Je suis convaincu que si l'Opposition d'alors avait fait son devoir et avait eu une attitude positive, elle aurait pu contribuer à éviter certaines de ces erreurs. Je ne veux pas être prophète de malheur pour le gouvernement, mais je veux tout de même dire aujourd'hui ma crainte de voir des problèmes analogues se poser dans un prochain avenir. Surtout que, fondamentalement, le projet de loi no 101 demeure à son titre une loi excessive, injuste et arbitraire. La preuve en étant faite, dans la mesure où ce gouvernement a accepté de soumettre les droits des Canadiens qui viendront s'installer au Québec aux aléas d'une rencontre des premiers ministres à qui l'on a soumis à la toute dernière minute les propositions de réciprocité en matière de langue d'enseignement, j'ai eu l'occasion de dénoncer cette façon que le gouvernement avait de déterminer les droits des individus. Nous entrevoyons déjà tous la conséquence non seulement politique et économique que cette situation comportera, mais également la conséquence humaine qu'elle entraînera.

Le premier ministre s'est rendu aux arguments de son ministre d'Etat au développement culturel au sujet de la clause Québec; c'est là le début des problèmes que connaîtra le gouvernement dans l'application d'une législation linguistique aussi injuste et aussi excessive que le projet de loi no 101.

En somme, je veux simplement, aujourd'hui, dire au gouvernement qu'en mettant fin à la discussion en commission parlementaire du projet de loi no 101 il se cause à lui-même un tort considérable. Mais ce qui nous préoccupe aujourd'hui — je le dis en terminant, Mme le Président — ce sont bien davantage les dangers qu'il fait ainsi courir à l'ensemble de la collectivité québécoise, qui aura à vivre avec une loi éminemment contestable au plan des principes et qui n'aura même pas eu la chance d'atteindre sa maturité puisque le gouvernement aura choisi d'empêcher le processus parlementaire de jouer pleinement le rôle qui est le sien. Je termine avec ceci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle, j'allais vous inviter à conclure le plus rapidement possible, votre temps est presque terminé.

M. Levesque (Bonaventure): Je vous remercie, Mme le Président. C'est dommage que nous soyons ainsi limités, mais, que voulez-vous, c'est le règlement et vous avez raison de l'invoquer, Mme le Président.

Je voudrais que le gouvernement se rappelle qu'il y a toujours un prix à payer lorsqu'on choisit de mettre de côté le processus démocratique, surtout alors que ce processus s'exerçait au niveau de la commission parlementaire d'une façon tellement plus responsable que cela n'a été le cas lors de l'étude de la loi 22 lorsque, par entêtement partisan, les gens du Parti québécois ont empêché eux-mêmes la commission parlementaire de fonctionner. D'autant plus que nous avions nous-mêmes proposé de scinder le projet de loi afin de permettre que le chapitre sur la langue d'enseignement soit adopté immédiatement pour assurer une rentrée scolaire mieux organisée. Ceci nous aurait permis, dans le calme, la sérénité et le sens des responsabilités, de poursuivre l'étude de ce projet de loi, particulièrement dans les chapitres qui comportent des conséquences économiques et d'autres conséquences sur le climat social, conséquences extrêmement importantes. Nous aurions pu essayer d'améliorer et de bonifier la loi d'une façon raisonnable et de la façon positive avec laquelle le débat était engagé.

Dommage! Nous avons cette guillotine, nous protestons, c'est tout ce que nous pouvons faire au moment actuel. C'est dommage que nous en soyons rendus là alors que nous avions apporté une contribution si positive à l'étude de ce projet de loi.

Mme le Vice-Président: M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Etant membre de cette Assemblée depuis 1973, c'est-à-dire depuis bientôt quatre ans, je dois vous dire immédiatement que j'ai vécu, dans le passé, d'autres motions qu'on a qualifiées de guillotines à l'Assemblée nationale.

Malheureusement, Mme le Président, je dois vous mentionner aussi — et le chef de l'Opposition actuelle qui dans le temps où nous étions au pouvoir était le leader parlementaire pourra corroborer ce que je vais vous dire — que j'étais un de ceux, dans l'ancien gouvernement, qui se sentaient profondément gênés lorsque le gouvernement d'alors utilisait ces articles de notre règlement pour bâillonner l'Opposition. Mais je n'aurais jamais cru, comme député, même si je suis pré-

sentemeni dans l'Opposition, que le parti au pouvoir, présentement le Parti québécois, aurait eu le culot d'apporter une telle motion, et ceci pour plusieurs raisons. Je pense que vous n'étiez pas des nôtres en 1974 et en 1976 lorsque ces motions ont été utilisées, mais connaissant votre largesse de vues, je suis certain que vous avez jeté un coup d'oeil au journal des Débats et vous vous êtes rendu compte jusqu'à quel point les députés de l'Opposition d'alors gueulaient — c'est le mot — contre ces motions pour mettre le bâillon. C'est une des raisons pour lesquelles je n'aurais jamais cru qu'un gouvernement démocrate, un bon gouvernement comme il se plaît à le dire, aurait apporté une mesure semblable à l'Assemblée nationale.

Une deuxième raison encore plus forte que la première, c'est la parole du premier ministre. Comme membre de cette Assemblée nationale, je dois vous dire que le premier ministre m'a profondément déçu. Parce qu'il n'y a pas tellement longtemps, le premier ministre disait à qui voulait l'entendre: A l'Assemblée nationale on ne mettra pas le bâillon aux députés, ni à l'Opposition, ni à qui que ce soit. Cela prendra un mois, deux mois; il a même parlé de se rendre jusqu'aux vacances des Fêtes, c'est-à-dire à Noël — à ce que je sache, il n'y a pas de neige encore — et, à la fin du mois d'août, même avec l'engagement formel du premier ministre selon lequel il n'y aurait pas de mesure de bâillon à l'Assemblée nationale, on nous arrive avec une motion semblable. Cela veut dire que comme membre de cette auguste Assemblée, si je ne peux plus prendre la parole du premier ministre du Québec, je me demande bien de quelle façon je serai capable de convaincre mes électeurs et dire qu'on peut avoir confiance non seulement au premier ministre, mais au gouvernement du Québec. Je trouve cela profondément lamentable que ce premier ministre qui est présentement ici uniquement pour la période de questions... Je comprends qu'il a des obligations, mais je me rappelle du temps où il siégeait et où c'était M. Bourassa qui était le premier ministre à qui on reprochait de n'être jamais présent à l'Assemblée nationale. On lui reprochait cela. Et pourtant on ne voit pas le premier ministre tellement souvent. On le voit à la période de questions, on le voit aux votes, et après cela, il disparaît.

M. Burns: Voyons donc!

M. Picotte: II me semble que le premier ministre...

M. Burns: Mme le Président, j'invoque le règlement. Question de privilège. Vous avez actuellement le premier ministre le plus présent à l'Assemblée nationale. Vous faites des reproches parce que, de temps en temps, il s'absente pour s'occuper des affaires du Québec. Je n'accepte pas cela. Votre ancien chef — heureusement pour vous que c'est votre ancien chef — n'était jamais ici en Chambre. Actuellement nous avons, je pense, le premier ministre le plus présent à l'Assemblée nationale.

M. Gratton: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau sur la question de règlement.

M. Gratton: Je ferai remarquer au leader du gouvernement qu'il est un fait, c'est que le premier ministre a été absent toute la journée hier, au moment où on a débattu la motion dite de fin de session, et qu'il est encore absent.

Mme le Vice-Président: M. le député, à l'ordre!

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.

Mme le Vice-Président: Je ferais simplement remarquer que M. le leader du gouvernement aurait pu invoquer sa question de privilège, mais, quant à la seconde partie, je ne considère pas que c'est une question de privilège. Vous auriez pu arrêter au milieu probablement.

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, sur la question de règlement.

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Cela fait suite à ce que vous venez de dire, Mme le Président, soit que, dans la seconde partie de son intervention, le leader du gouvernement avait "fauté". Il a cependant affirmé des choses que je ne puis pas laisser passer. De quelle façon me suggérez-vous de corriger ce qu'il a dit au sujet de l'ancien premier ministre?

M. Burns: Au feuilleton.

M. Levesque (Bonaventure): Au feuilleton, c'est comme cela. Mme le Président, il a causé une injustice envers l'ancien premier ministre qui était toujours ici pour les débats importants et significatifs.

M. Burns: Jamais ce n'est arrivé.

M. Levesque (Bonaventure): Je lui rappellerai que dans le projet de loi...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, messieurs! M. le ministre, M. le chef de l'Opposition. Je pense que j'ai suffisamment rappelé cette Assemblée à l'ordre. Je pense que les vacances s'en viennent. Les gens se chamaillent. J'ai laissé continuer un peu les interventions. Vous vous êtes passablement dit ce que vous aviez envie de dire. Je vous ferai remarquer que vos remarques ne sont pas enregistrées au journal des Débats parce que j'étais debout. Je pense que les uns et les autres, vous avez l'intention que nous en terminions bientôt. Je vous demanderais l'ordre dans cette Assemblée pour

permettre au député qui a maintenant la parole de terminer son intervention.

M. le député de Maskinongé.

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, je veux simplement dire que je vais coopérer, que je vais répondre affirmativement à votre intervention. J'espère que le leader du gouvernement en fera autant. Mais je voudrais vous dire mon inquiétude parce que vous avez mentionné que ce que nous avons dit ne passerait pas au journal des Débats. J'espère que ce n'est pas seulement ce que le leader du gouvernement a dit qui va être au...

Mme le Vice-Président: Non, M. le chef de l'Opposition officielle, vous vous étiez levé sur la question de règlement et vous aviez à peu près terminé la question de règlement.

M. Burns: Mme le Président, je m'excuse auprès de vous, d'abord, pour avoir créé cette espèce de perturbation de nos travaux.

Mme le Vice-Président: Cette diversion.

M. Burns: Je m'excuse également auprès du député de Maskinongé. Je vous promets, Mme le Président, surtout après la façon gentille dont vous nous l'avez demandé, de ne plus intervenir d'ici à la fin du débat.

Mme le Vice-Président: M. le député de Maskinongé. Je retiens votre intervention, M. le leader.

M. Picotte: Mme le Président, j'espère que vous n'avez pas tenu compte des interventions de mes collègues. Je voudrais simplement rappeler à mon bon ami, le député de Maisonneuve, que, s'il a bien écouté mon exposé — je ne veux pas provoquer de débat — j'avais bien dit que je comprends qu'un premier ministre, avec les occupations qu'un chef de gouvernement puisse avoir, ne soit pas toujours présent à l'Assemblée nationale. Je suis complètement d'accord, Mais...

Mme le Vice-Président: Sur la motion maintenant, M. le député.

M. Picotte: ... j'aurais cru, Mme le Président, et je reviens à mon idée première — une chance que j'ai de la suite dans les idées après tout ce qui s'est passé — que le premier ministre, s'étant engagé formellement à ne pas bâillonner les élus du peuple, j'aurais aimé, même s'il n'est pas d'accord — il y a des députés du côté ministériel qui se lèvent pour dire à leur ministre qu'ils ne sont pas d'accord, bien heureux de savoir que, dans ce parti, on est censé respecter le droit de parole de tout le monde — cela pourrait arriver au premier ministre de ne pas être d'accord avec cette loi, j'aurais aimé qu'il soit présent hier et aujourd'hui pour se lever dix minutes, comme nous, et dire simplement qu'il n'est pas d'accord avec les mesures qu'on emploie pour bâillonner l'Opposition.

C'est tout simplement cela que je voulais dire. Je ne voulais pas créer de débat diffamatoire et faire faire des crises cardiaques à qui que ce soit. Je voulais simplement apporter cette idée, c'est tout, Mme le Président.

Malheureusement, je comprends que, en 1974, lors de l'étude du projet de loi 22, le gouvernement d'alors — mon propre gouvernement — avait utilisé des mesures semblables pour le bâillon. Mais, Mme le Président, ce qui était différent en 1974 c'est que, lors de l'étude du projet de loi 22, pendant 55 heures, ce n'est pas peu dire, l'Opposition d'alors, les six péquistes avaient discuté seulement une ligne du projet de loi, la seule langue officielle au Québec. Une ligne pendant 55 heures. Ces gens disaient à qui voulait les entendre que cela pouvait durer des mois, qu'ils resteraient toujours sur le même article et qu'ils provoquaient justement le gouvernement à mettre le bâillon. La situation est différente en 1977. Nos valeureux compagnons, les quatre députés de l'Opposition officielle se sont rendus à la commission parlementaire pour étudier le projet de loi 101 et déjà, après une soixantaine d'heures d'étude, au-dessus de 40 articles sont adoptés. On a dit à ce bon et ce vrai gouvernement...

M. Duhaime: C'est 120 heures.

M. Picotte: Si le député de Saint-Maurice, ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, veut se lever pour faire un discours, le temps sera libre après moi, il me reste quelques minutes. Vous pourrez vous lever et dire tout ce que vous aurez à dire, d'ailleurs ce sera l'une des premières fois que je vous entendrai. Cela me fera tellement plaisir, étant deux gars de la Mauricie, j'aimerais entendre votre belle voix, M. le député de Saint-Maurice...

Mme le Vice-Président: M. le député de Maskinongé, sans vous faire perdre le fil, je vous dirai qu'il faudrait conclure le plus rapidement possible maintenant.

M. Picotte: On m'a interrompu Mme le Président.

Mme le Vice-Président: De toute façon, je vous ai laissé un peu plus de temps quand même, mais je vous demanderais de conclure.

M. Picotte: Très bien. En terminant, Mme le Président, je dois vous dire que la situation est bien différente. On a montré, du côté de l'Opposition officielle, de la collaboration, on a même offert à ce bon et ce vrai gouvernement d'adopter tout de suite ce qui s'est passé au point de vue de l'éducation pour ne pas perturber la rentrée scolaire qui s'en vient bientôt. Malheureusement, tout cela a été rejeté du revers de la main, Mme le Président. Je suis bien d'accord que le leader parlementaire du gouvernement copie l'ancien gouvernement, mais apporter la mesure de bâillon aux membres de cette Assemblée nationale, je trouve que c'est un plagiat malhabile de sa part.

A l'avenir, si je ne peux plus croire en la parole du premier ministre, parce que lui-même a déclaré qu'il n'y aurait pas de bâillon, Mme le Président, j'espère bien que le leader parlementaire, dans sa grande sagesse, nous apportera des réformes pour que ces mesures ne soient plus amenées à cette Assemblée nationale et qu'on puisse discuter avec sérénité en prenant tout le temps qu'il faut pour légiférer pour le mieux-être de tous les Québécois. Je pense que c'est votre intention et la mienne aussi. Merci, Mme le Président.

M. Burns: Entièrement d'accord.

Mme le Vice-Président: M. le député, de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Merci, Mme le Président. Le leader parlementaire a inscrit au feuilleton une motion conformément à l'article 156 du règlement pour demander aujourd'hui même, à la commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles et des communications, de faire rapport dès demain sur le projet de loi 101 alors que les travaux ne faisaient que débuter, ne faisaient que s'amorcer. Je me demande ce que cela vient faire avec l'ouverture d'esprit que nous avait promis le premier ministre lors de son discours inaugural.

On se rappellera que le premier ministre, dans son discours, avait dit qu'il voulait faire preuve d'ouverture d'esprit à l'égard des communautés tant francophones qu'anglophones du Québec pour pouvoir étudier le projet de loi 1, à ce moment-là, en son entier et que tous ceux qui voudraient s'exprimer sur ce projet de loi pourraient le faire à leur guise.

Le gouvernement du Parti québécois a-t-il fait et fait-il actuellement preuve d'ouverture d'esprit depuis le début de l'étude de la Charte de la langue française? On se rappellera que sur le projet de loi 1, qui était également appelé Charte de la langue française... on avait voulu convoquer en commission parlementaire une quantité d'organismes incroyable qui devait venir faire des représentations. Mais, malgré cet appel qu'on avait fait, on a voulu, à un moment donné, dire: On en a assez entendu, on arrête cela et on retourne à l'Assemblée nationale.

Or, ce qui est arrivé à l'Assemblée nationale, c'est qu'on n'a tout simplement pas rappelé le projet de loi 1, mais on en a fabriqué un autre semblable, le projet de loi 101. Mme le Président, ce que je veux vous dire, c'est que je pense qu'on a monté une espèce de show à la population pour lui dire: Envoyez-nous vos mémoires, on va vous entendre, on va laisser tout le monde s'exprimer, mais, lorsqu'est venu le temps de l'appliquer concrètement, on ne l'a pas fait. On a fait un tour de passe-passe pour apporter le projet de loi 101 à l'Assemblée nationale et on a, à nouveau, refusé d'entendre les mémoires qui restaient en commission parlementaire. On a également refusé d'accepter la plupart des amendements qui étaient proposés tant par l'Opposition officielle que par l'Union Nationale, qui avait préparé un livre bleu qui soumettait une quantité assez invraisemblable d'amendements qui étaient justifiés.

Egalement, Mme le Président, on a commencé à étudier ce projet de loi et on n'en est pas rendu aux chapitres les plus importants. Je veux bien croire qu'on a étudié le chapitre de la langue d'enseignement, qui est peut-être le chapitre le plus important du projet de loi, mais il y a quand même d'autres chapitres qui sont tout aussi importants, entre autres ceux de la langue de travail et de la langue des affaires, qui ne seront sans doute pas étudiés à la commission parlementaire.

Je pense que si on pouvait aujourd'hui faire une offre au leader du gouvernement et lui dire: Laissez à la commission le temps d'étudier ces chapitres si importants de la langue de travail, de la langue des affaires qui, d'ailleurs, sont inclus dans le programme du Parti québécois. Je pense qu'on pourrait être d'accord, à ce moment-là, avec la motion de clôture que le leader du gouvernement pourrait apporter alors qu'on aurait fini d'étudier ces chapitres qui sont si importants. Mais dans l'état actuel des travaux, je ne pense pas qu'on puisse être d'accord avec la motion du leader du gouvernement actuellement.

Il y a également d'autres chapitres du projet de loi qui ont été étudiés, bien sûr, mais qui ont été escamotés à cause de l'épée de Damoclès qui était suspendue au-dessus de la tête des membres de la commission parce qu'ils savaient fort bien que tôt ou tard cette motion de clôture serait apportée puisqu'on en avait parlé dans les journaux. Il y a eu des conférences de presse qui ont été données par le leader du gouvernement avertissant les membres de la commission qu'ils seraient un jour ou l'autre appelés à venir faire rapport à l'Assemblée nationale sans avoir terminé leurs travaux. Je donne comme exemple à ce sujet la langue de la justice et de la législation qui a été étudiée, mais très rapidement, Mme le Président...

Mme le Vice-Président: Vous comme moi, nous ne sommes pas au courant de ce qui s'est passé à la commission parlementaire, parce que la commission n'a pas fait son rapport. Je vous demanderais d'être bien attentif à respecter l'article 99.3 de notre règlement qui vous demande de ne pas faire référence "aux opérations et aux délibérations" de la commission. Ce matin, je pense que les journaux doivent s'être bien vendus parce qu'il y a des intervenants qui ont parlé de ce qu'ils avaient lu dans les journaux. Je pense, M. le député qu'il faut quand même être bien attentif à respecter le règlement. D'accord?

M. Fontaine: Mme le Président, je faisais référence aux conférences de presse qui ont été données à plusieurs reprises par le leader du gouvernement et je pense que c'était public. Je ne faisais pas référence à la commission parlementaire mais bien aux conférences de presse qui ont été données par le leader du gouvernement. Et si le leader du gouvernement a jugé bon d'aviser la popula-

tion qu'il y aurait une guillotine, qu'il y aurait un "bulldozage" qui serait fait à la fin de la session, je pense que nous, en tant que parlementaires, nous avons le droit d'en parler ici, à la Chambre. Je ne fais pas référence aux travaux de la commission plus que le leader du gouvernement ne l'a fait.

Pourquoi donc, Mme le Président, cette motion de clôture à cette époque de l'année? Quel est l'intérêt de cette motion de clôture? L'été est terminé, les députés ministériels qui ont voulu prendre des vacances en ont pris, nous n'en avons pas pris. On a travaillé tout l'été et on est prêt à continuer maintenant que l'automne est arrivé. Il n'y a plus rien qui nous presse. On est prêt à continuer à étudier tranquillement ce projet de loi sans presser personne, pour laisser à tout le monde la chance de s'exprimer et peut-être d'apporter des amendements qui pourraient aider la population du Québec. On va nous dire que le fait d'adopter ce projet de loi immédiatement va favoriser une rentrée scolaire dans le calme, dans l'ordre, mais, Mme le Président, je vous rappellerai que l'Union nationale avait proposé une motion d'amendement qui aurait permis cette rentrée scolaire dans le calme et dans l'ordre.

On disait dans notre amendement: "Nonobstant l'article 69, peuvent recevoir l'enseignement en anglais pour l'année scolaire 1977/78 les enfants qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, étaient déjà inscrits dans une commission scolaire ou une institution dispensant l'enseignement en anglais, selon les normes d'inscription en vigueur avant cette date." Mme le Président, si le gouvernement avait bien voulu accepter cet amendement, on aurait pu continuer à étudier ce projet de loi dans le calme, la rentrée scolaire se serait faite dans le calme et tout le monde aurait été satisfait. Mais non, le gouvernement n'a pas voulu accepter cet amendement proposé par l'Union Nationale, comme d'ailleurs la plupart des autres amendements qui ont été soumis par le livre bleu et également par le parti de l'Opposition officielle. Les parlementaires sont prêts à garder leur patience, ils sont toujours patients et ils sont également convaincus que si la commission parlementaire pouvait continuer à siéger, ils réussiraient peut-être, tant bien que mal, à convaincre le gouvernement d'apporter certaines modifications qui pourraient bonifier cette loi et en favoriser une étude plus complète.

Mme le Président, je dois vous dire que nous ne pouvons être d'accord sur cette motion du leader du gouvernement parce que nous pensons qu'elle brime les droits des parlementaires. Le parlementaire c'est celui qui s'exprime librement dans une Assemblée nationale et où il peut émettre ses idées comme il le veut et selon le règlement. En suspendant les règles d'application de ce règlement, je pense qu'on brime les parlementaires de cette Assemblée. De ce fait, Mme le Président, je conclus en vous disant que nous, de l'Union Nationale — et sûrement l'Opposition officielle — nous ne pourrons être en faveur de cette motion.

Mme le Vice-Président: M. le député de Westmount.

M. Springate: Merci, Mme le Président. Il y a quelqu'un qui jappe déjà.

M. Gratton: Ils ne jappent pas, ils jacassent. M. George Springate

M. Springate: Mme le Président, le 1er avril, ce gouvernement a déposé un livre blanc sur l'avenir de la langue française au Québec.

A cette époque, le gouvernement a demandé aux Québécois de soumettre leurs idées, leurs suggestions et leurs critiques relativement à ce livre blanc. Vingt-six jours plus tard, sans avoir pris en considération les suggestions données dans les différents milieux de notre province concernant le livre blanc, ce gouvernement a déposé le projet de loi no 1. Un peu plus tard, il a demandé à des citoyens de cette province de venir devant une commission de l'Assemblée nationale pour faire valoir leurs idées, leurs suggestions relativement au projet de loi no 1. Seulement 62 personnes ont eu l'occasion de présenter leur mémoire sur 265 et, lors de la trouvaille du siècle, nous avons vu que la commission qui étudiait le projet de loi no 1 a terminé ses travaux. Quelques jours plus tard, en cette Chambre, nous avons vu le projet de loi no 101. Le projet de loi no 101 a été étudié en deuxième lecture et, maintenant, il est étudié article par article en commission.

Je sais, Mme le Président, que je ne peux pas parler de ce qui s'est passé en commission. Mais je peux vous dire, d'après les remarques qui ont été présentées en cette Chambre, ce matin, par le député de Marguerite-Bourgeoys, que, de notre côté, nous avons encore des représentations à faire, des amendements à apporter. Jusqu'à ce jour, nous pouvons dire que le gouvernement ne nous a pas écoutés, comme il n'a pas écouté les gens qui sont venus devant lui en commission parlementaire lors de l'étude du projet de loi no 1.

Qu'est-ce que c'est maintenant? Maintenant, c'est la guillotine, "bulldozer", si vous voulez l'avoir en anglais ou, comme nous l'avons vu dans l'Argus, de ce matin "the steam-roller Burns style". Autrement dit, Mme le Président, ce gouvernement, encore une autre fois, refuse de nous écouter, refuse de nous entendre. Comme je l'ai dit en deuxième lecture, quand c'est le temps de faire valoir nos idées, à ce moment, zip, le ministre se bouche les oreilles et ne nous écoute plus.

Mme le Président, le 21 juillet, le premier ministre de notre province disait: "L'Opposition ne s'est pas fait enlever ses mercredis, on n'a pas modifié les heures normales de session en vertu de la traditionnelle motion qui vient ordinairement bien plus vite que cela, motion qui vise essentiellement, et tout le monde le sait, à exténuer l'Opposition et à essayer de charrier et de "bulldozer" des fins de session ou des veilles d'ajournement. Il n'a pas été question d'enlever à l'Opposition le droit de présenter des motions de blâme en vertu de l'article 34". Le premier ministre continue, à la page 2261 du journal des Débats: "Donc, nulle part il n'a été question de brimer — d'une façon qu'on puisse appeler un comportement habituel

loin de là, c'est exactement l'inverse —les droits parlementaires et démocratiques fondamentaux de l'Opposition et des Oppositions à l'Assemblée nationale".

Oui, c'est vrai? Qu'arrive-t-il aujourd'hui? Le premier ministre a continué, à la page 2263: "Là-dessus, je voudrais en profiter, justement, parce que la première session d'un gouvernement, qui dure et qui s'éternise au mois de juillet, qui s'en va vers le mois d'août et qui, sait-on jamais, jusqu'au mois de septembre, depuis le mois de mars.

Cette première session... Parce qu'on ne "bulldozera" pas le Parlement, on va laisser aller la législation jusqu'à sa conclusion normale. Il n'est pas question de commencer ces procédures d'étouffement du mois de juillet ou du mois d'août qu'on a trop vues. Je me souviens d'en avoir souffert et je ne le ferai pas. Cela s'appelle le respect des droits des parlementaires."

Aujourd'hui, le premier ministre ne respecte-t-il plus les droits des parlementaires à l'Assemblée nationale?

Une Voix: II se cache.

M. Springate: C'est vrai, il se cache. C'est justement ça, il se cache. Nous ne l'avons pas vu en deuxième lecture, en Chambre, on ne l'a pas vu; quand cela a été le temps de voter, il était en vacances. Lors d'une motion présentée par le député de Verdun, une motion pour faire retarder l'étude du bill 101, le premier ministre n'a pas parlé, il n'a pas voté, il était encore en vacances. Nous autres, on était ici, par exemple. Lors des discussions sur la motion de fin de session, le premier ministre ne s'est pas prononcé, il n'a pas voté hier. Aujourd'hui, il ne parle pas. Ce soir, où va-t-il être?

M. Duhaime: Vous auriez dû en prendre, des vacances.

Une Voix: II est toujours en vacances.

M. Springate: Sera-t-il ici ou s'il sera encore dans le Maine, en vacances?

Une Voix: J'ai le goût du Maine!

M. Springate: Ce n'est pas comme le ministre du Tourisme aimerait, que le premier ministre se promène au Québec, bien non!

Mme le Vice-Président: M. le député, puis-je vous rappeler de parler sur la motion, s'il vous plaît? Je vous ai laissé aller, un bout de temps, mais...

M. Springate: Mme le Président, j'essaie de parler sur la motion.

Mme le Vice-Président: Bon, allez-y et faites encore mieux.

M. le député de Westmount.

M. Springate: Merci, Mme le Président. Je sais que je suis difficile, parfois, vous devez me rappeler à l'ordre, mais j'essaie toujours de suivre vos conseils. Maintenant, nous avons cette guillotine, ce bulldozer, pour employer les mots de notre honorable premier ministre. Je vois quelques ministres qui ne sont pas en vacances, qui sont actuellement devant moi et je me demande s'ils vont parler de cette guillotine lors de leur fameux blitz au mois de septembre. Je me demande s'ils vont le faire "or if, Mrs Speaker...

Une Voix: ...

M. Springate: Another rumble from the peanut gallery!

Mme Payette: ... pas cela dans Westmount.

M. Springate: I am wondering if these paragons of virtue, and that is what they a're, I would like to talk about democracy PQ style on their famous blitz. Are they going to say how the members of the Opposition, and constructive Opposition, bringing amendments that should be put into the law, are presented there at the commission, they were not listen to? How the leader of this government, who calls himself a democrate, who is hobbling in now because he realizes that his democratic procedures have been wounded to bring about this dastardly act to end fruitful discussion — and I better use that word carefully when I am talking about the PQ "fruitful discussion" — on a very important law called bill 101.

Je ne veux pas abuser de mon temps...

Une Voix: Consentement unanime.

M. Springate: Consentement unanime? Je suis prêt.

M. Duhaime: Consentement pour cinq secondes.

Mme le Vice-Président: Vous allez devoir conclure, M. le député.

M. Springate: Merci, Mme le Président.

J'accepte mal, même, je ne peux pas accepter le fait que le leader du gouvernement ait introduit cette motion de guillotine, surtout lui qui a toujours dit qu'il était un démocrate, qui a toujours dit que, si jamais il y en avait un dans cette salle qui respectait le droit des parlementaires, c'était bien lui.

Il faut dire que le gouvernement péquiste a baissé dans mon estime avec cette motion de guillotine. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Mme le député de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Mme le Président, j'aurais vraiment souhaité ne pas avoir à intervenir sur une

motion de clôture si tôt dans cette Assemblée nationale. C'est mon premier mandat. Je suis ici depuis à peine huit mois et déjà nous faisons face à cette motion de clôture qui m'apparaît particulièrement sérieuse parce qu'elle porte sur le projet de loi 101, un projet de loi qui est important. Il l'est non seulement quant au statut officiel qu'il reconnaît à la langue française — ce qui était d'ailleurs fait par la loi 22 — mais surtout à cause des répercussions qu'il va avoir sur le réseau des relations sociales qui existent à l'intérieur du Québec et qui vont être modifiées trop souvent pas pour le mieux, à cause du trop grand nombre d'articles restrictifs et tracassiers que l'on retrouve à l'intérieur de cette loi.

Depuis quelques jours, le gouvernement sent évidemment le besoin de justifier la raison de cette motion de clôture. On fait valoir — et je pense que c'est de bonne guerre de la part du gouvernement — qu'on a passé X nombre d'heures à la première commission parlementaire qui a entendu des mémoires et X nombre d'heures à la deuxième commission parlementaire qui a étudié la loi article par article. Mais ce qu'on semble oublier, c'est que, dans le cas de la loi 22, celle-ci contenait 123 articles. Dans le cas de la loi 101, elle en contient 213. De plus, il s'agit d'un deuxième projet de loi et on sait fort bien qu'il a apporté plusieurs éléments nouveaux, quelques-uns qui amélioraient la loi, mais d'autres qui avaient des conséquences, à notre point de vue, très sérieuses sur ce qu'éventuellement le Québec aura à vivre. Je n'en mentionne que quelques-unes. Par exemple l'article 129, l'article 88, l'article 41, sont tous des articles que nous n'avons pas eu le temps d'examiner. Quand le gouvernement nous a envoyés à cette deuxième commission parlementaire, nous sentions fort bien qu'il avait un seul objectif à atteindre, c'était l'échéance scolaire. C'était vraiment là l'impératif le plus urgent pour le gouvernement. Et on pouvait prévoir que déjà cet objectif atteint, c'est-à-dire qu'après avoir passé à travers les articles touchant la langue d'enseignement, le reste aurait plus ou moins d'importance et que ce qui comptait c'était, après l'adoption du chapitre de la langue d'enseignement, qu'on puisse en finir avec le reste.

Pourtant, il faut regretter très profondément que nous n'ayons pas encore abordé la langue de travail, nous n'avons pas abordé la question de la francisation des entreprises. D'autres de mes collègues ont fait valoir avant moi, et probablement de façon plus éloquente, quelles vont être les répercussions au plan économique, par exemple, d'un chapitre touchant la francisation des entreprises qui ne tient pas compte de la réalité. Trop souvent, le projet de loi présente des articles qui sont davantage basés sur des appréhensions non fondées.

Quand on ne se base pas sur la réalite, mais bien davantage sur des appréhensions qui n'existent vraiment pas, cela produit des formulations d'articles qui sont vraiment injustifiés et tracassiers au point où on peut se demander dans quelle mesure la loi pourra être appliquée d'une façon convenable. Il faut avoir étudié un certain nombre de ces articles pour réaliser que le gouvernement devra faire face à des difficultés et des contraintes dans l'application de cette loi.

Evidemment beaucoup ont fait des gorges chaudes et ont indiqué que l'Opposition faisait un "filibuster" plus ou moins systématique. Je vous ferai remarquer, Mme le Président, que c'est avec beaucoup de conscience que nous avons étudié le chapitre des droits fondamentaux, ce qui fut assez facile, et ensuite le chapitre de la langue d'enseignement.

Nous partons d'une philosophie différente, ce qui a fait que l'étude de ce chapitre a été assez longue. Je pense que personne ne pourrait retracer dans cette étude des indications de "filibuster". Je sais que vous allez vous lever pour dire que je ne suis pas dans la pertinence du sujet, d'accord, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Mme le député de l'Acadie, je sais que vous avez été très assidue à la commission parlementaire, qu'il vous est très difficile de ne pas vous référez comme telle aux travaux de la commission. Je vous demanderais de tenter de vous en tenir à la pertinence du débat.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que si je pouvais me référer — et je suis d'accord avec vous, Mme le Président, je ne conteste pas votre décision — aux travaux de la commission, il y aurait peut-être moyen ici de faire valoir certains arguments qui auraient plus de valeur que si je m'en tiens à la pertinence qui est de dire au gouvernement: Vous nous mettez la guillotine. Vous nous mettez la chaise électrique, etc. Je pense que ceci, tout le monde le sait. C'est peut-être pour cela que j'ai tendance à m'écarter de ce qu'on appelle la pertinence du sujet.

Je voudrais quand même inviter le gouvernement à réfléchir sur le geste qu'il va poser ce soir. Evidemment, j'entendais une réflexion de l'autre côté de la Chambre pendant que mon collègue parlait à l'effet que la population réclame cette guillotine. Qu'on ne soit pas si certain de cela. Pour ma part, je comprends que le gouvernement fasse cette sorte de projection. Ce n'est pas la population qui réclame la guillotine; c'est le gouvernement qui se sent coupable que dans l'organisation de ses travaux parlementaires il n'ait pas prévu suffisamment de temps pour qu'on puisse faire l'étude au complet de ce projet de loi et vraiment mettre à la disposition de la population un projet de loi qui non seulement réponde aux besoins des gens, mais également amène une participation et une collaboration de tous les groupes qui forment la société québécoise.

Je réalise fort bien que le gouvernement se sente de plus en plus gêné dans la position où il se trouve. Nous sommes rendus à la fin d'août. Des chapitres importants n'ont pas encore été touchés, et il se demande, devant les critiques sur la lenteur des travaux parlementaires, ce qu'il devrait faire.

Mme le Président, je voudrais dire, en terminant, qu'on a assisté à deux scénarios identiques. Un premier scénario lors de la commission parle-

mentaire sur l'audition des mémoires, durant lequel le ministre d'Etat au développement culturel et les membres de la commission du côté gouvernemental ont totalement et complètement presque toujours tenté de diminuer les représentations qui étaient faites.

Aujourd'hui, quand on nous expose à la guillotine, le scénario de la deuxième commission parlementaire est identique au premier. C'est dans ce sens que le gouvernement est fermé, qu'il est hermétique. De toute façon le gouvernement déciderait-il de continuer le travail de cette commission parlementaire que les résultats sur les modifications qu'on pourrait apporter à la loi seraient sans doute minimes.

Je veux ici déplorer d'une part le bâillon qu'on nous impose et d'autre part le peu de sens de responsabilités du gouvernement. Je pense qu'il pourrait difficilement contredire ceci. Il a quand même vu les efforts de l'Opposition, qui ont été extrêmement pénibles, apporter des améliorations mineures, il faut bien l'admettre, à la loi, puis ouvrir les yeux du gouvernement sur certains manques de concordance qui existaient à l'intérieur de la loi, sur certains aspects de discrimination qui pouvaient exister à l'intérieur de la loi.

Je pense qu'éventuellement grâce à nos efforts — je le souhaite — on tentera d'appliquer la loi peut-être avec un peu plus d'humanité, de souplesse et de compréhension. Cela aura peut-être été, finalement, le résultat des nombreux efforts que moi-même et mes collègues avons fournis tout au long de ces deux commissions parlementaires.

Je peux simplement formuler deux choses, évidemment un blâme à l'égard du gouvernement qui choisit de procéder de cette façon et, deuxièmement, un souhait qu'à l'avenir la planification du gouvernement soit telle que, quand des projets de loi de cette importance arrivent devant la Chambre, on ne soit pas soumis à des impératifs qui ne tiennent vraiment pas compte du bien de l'ensemble de la population, mais qui sont à court terme et trop politiques dans le sens partisan du gouvernement. Merci, Mme le Président.

M. Dubois: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, Mme le Président. Je désire, moi aussi, faire quelques commentaires sur l'arrêt forcé que vient d'imposer le leader du gouvernement aux travaux de la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications.

Le bâillon que prévoit l'article 156 devient, dans son application, un geste que je me dois de qualifier de regrettable précisément à cause des répercussions irréparables qu'aura cette motion de clôture sur notre peuple vu qu'un grand nombre d'articles ne seront jamais étudiés, ni évalués à leur juste mérite.

Mes collègues, les députés de Mégantic-Compton et de Gaspé, ont accompli un travail énorme en commission. Ils ont apporté une très importante contribution jusqu'à présent, mais voilà que l'impossible arrive: le rouleau compresseur, la rupture des travaux, le geste le plus indécent que l'on puisse voir se produire dans une Assemblée qui se veut démocratique.

Le leader du gouvernement a essayé de justifier sa position radicale en comparant les heures accordées à cette commission à celles qu'un gouvernement précédent avait concédées lors de l'étude d'une loi un peu semblable. Mme le Président, n'est-ce pas une façon complètement irresponsable d'évaluer une loi aussi importante? L'Union Nationale a démontré, sans l'ombre d'un doute, toute l'importance qu'elle attache à ce projet de loi, lequel met en cause l'avenir même du Québec et de tous ses éléments. Nous en avons démontré l'importance en apportant une foule d'amendements des plus réalistes et des plus positifs.

Aujourd'hui, il est immensément déplorable que nous ne puissions pas faire valoir nos points de vue et nos suggestions toujours positives sur une foule d'articles qui seront adoptés à la vapeur. Il est bien évident que ce gouvernement se croit en possession de la vérité. Il est aussi très surprenant, quand on prend la peine de reculer et de comparer l'attitude des mêmes personnes lorsqu'elles étaient dans l'Opposition, de voir que ce qui était noir dans le temps est tout à coup devenu blanc.

Mme le Président, bousculer un dossier aussi sérieux est en soi très grave de conséquences et caractérise vraiment un gouvernement dictatorial, peu soucieux de l'opinion publique et de l'avenir du peuple qu'il doit bien gouverner. La démocratie que le gouvernement prônait au moment où il était dans l'Opposition fait place à une administration radicale, très peu commune. Nos coutumes et nos droits ont perdu tout leur sens propre. La guillotine et la matraque sont devenues des outils d'usage courant chez les gens du gouvernement.

Mme le Président, ce geste mérite d'être sévèrement jugé. Cette pratique antidémocratique porte un dur coup à nos coutumes et principalement aux aspirations légitimes de tout parlementaire désireux de bien servir la population qu'il représente.

Mme le Président, ayant fait savoir mon désaccord total sur les procédures employées par le gouvernement, je termine en indiquant ma grande déception et aussi celle de tous les Québécois. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: Mme le Président, un opinant à ma gauche disait tantôt que la raison d'être de cette motion de clôture est une rentrée scolaire paisible, s'il est possible que ce soit vrai. On pour-

rait penser qu'il est également possible que l'économie du Québec, dont on connaît l'état lamentable, continue de se désagréger, et ce n'est sûrement pas le projet de loi 101 qui donnera le coup de barre nécessaire à la relance économique.

J'imagine que la motion de clôture qui est en discussion ne surprend personne ici, dans le Québec, si on analyse le comportement gouvernemental à la commission de l'éducation et des affaires culturelles. Malgré les tentatives sans cesse renouvelées de l'Opposition officielle et des autres oppositions de chercher à faire bénéficier le projet de loi 101, à le bonifier, c'est toujours par une fin de non-recevoir que les parlementaires ministériels ont refusé toutes ces suggestions.

Face à une telle arrogance, une telle suffisance de gens qui se croient en possession tranquille de la vérité, je lève mon chapeau à l'endroit des collègues de notre formation politique et des autres formations qui, sous les injures des ministériels, ont, durant ces interminables séances, tenté de faire valoir le point de vue de ceux que nous représentons et qui sont majoritaires au Québec. Il suffirait, je pense, d'analyser l'expérience en la matière du député de L'Acadie, qui vient de me précéder, dont la compétence, la pondération, la destinaient à faire mettre en lumière les failles du projet de loi 101. On ne peut douter, non plus, de l'à-propos des suggestions du député de Marguerite-Bourgeoys qui, alors qu'il oeuvrait pour la francisation des entreprises sans mesures coercitives, avait fait progresser le français à pas de géant durant les années qui viennent de s'écouler.

Que vaut la tentative louable de prodiguer des conseils, des amendements à des gens qui sont en possession tranquille de la vérité, de leur vérité bien à eux? Ils s'apercevront d'ailleurs très vite que cette vérité tranquille, elle est plutôt partagée par ceux, dans la réalité de tous les jours, qui n'en connaissent pas le premier mot. Les gens de chez nous qui sont parmi les premiers habitants du Québec, qui sont des unilingues français, disent de ceux-là: Des rêveurs qui ne sont en aucune façon collés à la réalité économique du quotidien. Cette motion de clôture que nous avions apportée nous-mêmes, lors de l'étude du projet de loi 22, on se rappellera que l'Opposition d'alors avait, pendant des jours et des jours, sur l'article 1 qui voulait simplement faire du français la langue officielle du Québec, fait une obstruction systématique qui n'avait pour but que de faire une opposition sans arrêt au projet de loi 22. Cela n'a été, en aucune façon, l'attitude que nos collègues ont adoptée durant l'étude du projet de loi 101. Ils ont tenté de raisonner le gouvernement sur l'à-propos des amendements qu'il aurait été nécessaire d'apporter afin de rendre acceptable à une majorité de Québécois ce projet de loi sur la langue.

On sait de quelle façon cavalière on a repoussé tous ces arguments. Mme le Président, on a oublié que le Québec a vécu et devra continuer à vivre, dans le continent nord-américain, dans une mer de parlant anglais avec qui, qu'on le veuille ou pas, on devra continuer à communiquer. Il y a deux ou trois ans, j'avais été estomaqué, lors d'un voyage d'étude des systèmes de transport dans la ville lumière de Paris, de constater qu'en visitant l'aéroport d'Orly, dans la ville qui devrait être, j'imagine, La Mecque du français, de constater, dis-je, qu'une forte partie du travail des ateliers de réparation avait comme langue d'usage l'anglais, vu les manuels disponibles d'une langue universelle, manuels dont la complémentarité était à nulle autre pareille. Ici, on se gargarise en disant que seul le français aura le pas dans le Québec.

Mme le Président, depuis quinze ans, j'ai vu deux gouvernements chuter lamentablement sur des projets de loi d'ordre linguistique, et j'ai vu deux gouvernements, le gouvernement Bertrand, le gouvernement Bourassa, être aussi arrogants que l'actuel gouvernement en pensant qu'avec son projet de loi linguistique il réglerait l'ensemble des problèmes du Québec. J'ai connu cette arrogance à deux occasions déjà, certains de mes collègues l'ont connue aussi.

Mme le Président, je termine en disant que, quand nous avons voté ces deux projets de loi, nous avions indiqué le chemin que nous avons parcouru par la suite et qui a vu chuter ces deux gouvernements. Votez votre bill 101, votez votre motion de clôture, votre lit est fait. Ne vous en faites pas, jamais deux dans trois, vous irez dans la même direction.

M. Duhaime: Même dans le comté de Charlevoix.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le député!

M. Mailloux: Vous irez là.

M. Lamontagne: Mme le Président, sur une question de privilège.

Mme le Vice-Président: Sur ce qui vient de se passer, tout de suite?

M. Lamontagne: C'est effectivement la première occasion que j'ai, depuis 12 h 55, alors que je viens de recevoir à l'instant la copie du journal des Débats, de souligner ce qui, malheureusement, s'est passé quelques minutes avant la suspension des débats. Je pense que ceci mérite d'être clarifié autant pour le journal des Débats que pour la présidence, que je respecte profondément, et également pour moi, Mme le Président. Vous me permettrez de signaler la phrase qui apparaît, que j'ai dite dans le journal des Débats, et la réponse de la présidence. "M. Lamontagne: Mme le Président, rappelez-les à l'ordre par leur nom respectif. Quand c'est le leader du gouvernement... "Mme le Vice-Président: ... M. le député de Roberval, je vous demanderais un peu plus de délicatesse..."

Il ne m'est pas apparu, Mme le Président, que mes mots étaient indélicats et en même temps vous avez parlé de décence. J'apprécierais, Mme

le Président, que vous relisiez vous-même le journal des Débats pour bien clarifier — parce que je l'ai en main — si vous aviez rappelé à l'ordre le leader du gouvernement. Je pense que vous avez la réponse ici.

M. Burns: Ce n'est pas une question de privilège.

M. Lamontagne: C'est une question de privilège où on...

M. Burns: Voyons donc! Lisez votre règlement, ce n'est pas comme cela qu'on fait cela, voyons donc!

M. Lamontagne: Mme le Président, s'il vous plaît, je pense que c'est justement dans une telle circonstance qu'on peut le faire. Je venais de le souligner avant qu'il arrive. A la minute où il arrive, il veut prendre le crachoir tout de suite, comme il le fait souvent. Je signale que c'est le premier instant que j'ai de le porter à votre attention, avec toute la déférence que je vous dois, Mme le Président. Mais c'est indiqué dans le journal des Débats; je le signale, je pense que c'est normal, comme parlementaire. Cela me donne, pour le moins, raison.

M. Burns: Utilisez donc les procédures qui sont prévues dans le règlement et n'achalez pas la présidence avec cela.

Mme le Vice-Président: M. le député de Roberval, je vous dis simplement que je relirai le journal des Débats et nous verrons.

M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. En commission parlementaire, l'Opposition officielle a tenté d'apporter des recommandations, des suggestions et des amendements, dans un esprit positif, au sujet du projet de loi 101. Nous avons réalisé les conséquences de ce projet de loi pour tous les Québécois, et l'esprit dans lequel nous avons apporté les amendements et nos discussions étaient pour améliorer le projet de loi une fois que cela aurait été accepté à cette Assemblée nationale. Nous avons cru que c'était notre obligation et notre devoir d'essayer d'en discuter dans une atmosphère dans laquelle nous pourrions améliorer le projet et minimiser les conséquences négatives possibles sur tous les Québécois.

Mme le Président, je dois vous avouer que je suis fatigué de parler de la langue, je suis fatigué d'assister à cette commission parlementaire. Nous avons une intransigeance, une inflexibilité du gouvernement, nous avons eu un blocage systématique à n'importe quelle recommandation que nous aurions pu apporter. Les ministériels se sont plus à s'opposer systématiquement même à la recevabilité de chacune des motions d'amendement que nous apportions aux articles du projet de loi.

Je devrais dire que je voudrais continuer l'étude du projet de loi, que je devrais être contre la motion de clôture que le gouvernement essaie de nous imposer, mais je dois être honnête avec les membres de cette Assemblée, cette commission est futile, absolument futile. Je vous donne deux exemples. Il y a eu seulement un amendement qui a été accepté par le gouvernement sur la question des handicapés, et cela a pris beaucoup de temps avant que le gouvernement l'accepte. Cela aurait été honteux que ce soit éliminé et pas inclus dans le projet de loi original, ni dans le projet de loi no 1, ni dans le projet de loi no 101. Quand il s'agit, Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député de Mont-Royal, je vous demanderais de parler sur la motion comme telle.

M. Ciaccia: Je parle sur la motion, je veux vous montrer combien il est inutile de continuer avec la commission parlementaire. Je dis que cette motion est le premier geste honnête que ce gouvernement a posé vis-à-vis du projet de loi. Nous avons été soumis à une guillotine quotidienne à la commission parlementaire. Tous les jours on nous bloquait, on nous insultait. Vous n'avez qu'à lire le journal des Débats de la commission pour voir les abus personnels envers chaque membre, résultant des remarques du ministre d'Etat...

Mme le Vice-Président: M. le député, avant que quelqu'un d'autre ne soulève une question de règlement, je vais devoir vous rappeler à l'ordre. Bien sûr, vous avez participé à la commission parlementaire, et comme je le disais à Mme le député de L'Acadie tantôt, il est fort difficile pour un député qui a été fortement concerné par les problèmes de ne pas faire référence aux délibérations comme telles de la commission parlementaire. Je vous demanderais quand même d'être bien attentif à respecter l'article 99,3 de notre règlement. La commission n'a pas encore fait rapport.

M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: J'ai eu l'occasion, même si j'ai dû m'absenter à plusieurs reprises, aujourd'hui, de suivre, avec l'instrument que nous avons dans nos bureaux, certains commentaires et certaines interventions que vous avez jugé à propos de faire à l'occasion d'interventions de députés de l'Opposition, des différentes oppositions, où vous interprétez d'une manière très stricte l'article 99 — je ne sais pas quel paragraphe — qui ne permet pas, dans une interprétation vraiment littérale, de se référer aux travaux d'une commission. Je me permettrais quand même de différer d'opinion un peu avec vous sur cette question. Tout en respectant votre opinion...

M. Burns: Voyons donc! Il n'y a pas d'appel d'une décision de la présidence.

M. Lavoie: Je voudrais faire une remarque, j'ai l'intention d'intervenir dans ce débat.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Lavoie: Je veux vous dire que je veux parler sur la question...

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: C'est clair.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition officielle, voulez-vous me laisser faire mon intervention et voir ensuite dans quel sens elle va?

M. Lavoie: Je veux parler sur la question de règlement.

Mme le Vice-Président: Voulez-vous, vous allez me laisser faire mon intervention? J'allais dire, M. le leader de l'Opposition officielle, que je ne prenais pas votre intervention comme un appel de ma décision, mais que je prends votre intervention maintenant comme une question de règlement sur l'intervention de M. le député de Mont-Royal.

Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Merci, Mme le Président, Excusez-moi, vous comprenez, avec les heures que nous avons actuellement.

M. Burns: Vous lirez 99.5.

M. Lavoie: ... on peut se permettre... on est sans doute un peu fatigué après 98 jours de session continue. Je m'excuse d'avoir élevé le ton un peu trop fort.

Mme le Vice-Président: Sur votre question de règlement, M. le leader.

M. Lavoie: Je dois vous dire que cette interprétation, je la considère, à mon humble avis, un peu trop stricte. Pourquoi? A cause du libellé de la motion même qui est devant la Chambre, que je ne répéterai pas, mais qui donne ordre à la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications de faire rapport dans un certain délai, et parce que cette commission ne semble pas avoir, à la discrétion ou selon la décision du leader du gouvernement, le temps, d'ici une certaine date, d'étudier les 219 articles du projet de loi.

Non seulement il ne devrait pas être défendu de référer, à l'occasion, sans en faire le procès, à la commission, mais c'est même essentiel pour éclairer les collègues de cette Assemblée qui auront à voter sur cette motion en bonne connaissance de cause. Pourquoi donner ordre à la commission de faire rapport ce soir à onze heures ou demain avant les affaires du jour? Il faut bien que les députés soient renseignés, encore plus ceux qui n'étaient pas membres de cette commission. Ils ont à décider, eux, en dehors de toute li- gne de parti, même si on connaît notre système parlementaire où il y a parfois des votes de parti. Il y a des députés qui siègent et qui ne font pas partie de groupes politiques nombreux qui auront à décider, selon cette motion, si la Chambre doit donner ou ne pas donner à la commission de faire rapport dans un délai très strict.

C'est tout à fait normal. On ne pourrait pas débattre cette motion sans parler de ce qui s'est passé en commission, sans savoir à quel article ils sont rendus en commission, quels sont les chapitres ou les autres articles qu'il reste encore à étudier. Un député peut être intéressé à la langue de la législation; il faut quand même qu'il sache s'ils y sont rendus en bas, à la langue de la législation. C'est la raison pour laquelle je diffère un peu d'opinion avec vous quant à votre interprétation trop stricte du règlement. Je crois qu'il est impossible de participer au débat sans se référer aux travaux de la commission.

Pour terminer, je pourrais vous souligner que j'ai vécu personnellement trois, quatre ou cinq motions de clôture.

M. Proulx: Ah bien!

M. Lavoie: Certainement! Sur le salaire des juges, sur la loi 22, sur la division territoriale, sur l'augmentation du salaire des députés. Ils retirent toujours les chèques bien indexés! On a eu un "filibuster" hypocrite, à ce moment-là. Non seulement ils perçoivent ces chèques, mais l'indexation aussi.

Des Voix: A l'ordre!

M. Lavoie: Je reviens. Je pourrais vous citer cinq ou six exemples où le Parti...

M. Burns: A l'ordre!

M. Lavoie: ... québécois, lors de ces débats de clôture, a fait le procès de A à Z des commissions. C'est cela.

M. Burns: Allons donc!

Mme le Vice-Président: M. le leader, je vois le sens de votre intervention et je comprends fort bien que, quand un député a à voter sur une motion, il faut qu'il soit bien éclairé. J'aimerais quand même faire une petite mise au point. Certains intervenants, ce matin, ont été fort habiles en parlant de ce qui s'était dit dans les journaux par rapport aux commissions, en disant: Dans les journaux, on a dit qu'un certain nombre d'articles ont été adoptés. Je crois sincèrement n'avoir pas été aussi stricte que vous le dites; enfin, c'est une question d'appréciation. Pour autant que faire se pouvait, j'ai laissé les intervenants s'exprimer. Ce que j'ai tenté davantage de faire, c'est qu'on exprime moins son opinion personnelle par rapport à la façon dont les travaux se sont déroulés.

Je vais redemander à cette Assemblée, aux prochains intervenants, autant que possible, d'être attentifs à cet article que je suis tenue de faire

respecter, l'article 99.3 de notre règlement. Je fais confiance aux députés; je suis sûre qu'ils trouveront moyen de faire leur intervention tout en respectant le règlement.

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. On peut se demander pourquoi le gouvernement nous impose cette guillotine. C'est parce qu'il est évident que le public commence à s'apercevoir, comme les membres de la commission, que ce projet de loi no 101 n'est pas un projet pour favoriser le français au Québec ni les intérêts des francophones; c'est un projet de loi qui efface du visage du Québec l'anglais et les Anglais. C'est évidemment pour cette raison que cette motion de guillotine est présentée.

C'est parce que c'est une loi où les droits des minorités sont inexistants. La façon dont cette commission a procédé semble vouloir provoquer les communautés linguistiques au Québec, les communautés avec lesquelles on devrait s'entendre. C'est le devoir du gouvernement de les unir plutôt que de créer des divisions. On veut imposer la clôture quand le gouvernement n'a même pas fini de présenter tous ses amendements à la loi. Nous n'avons même pas eu le loisir de discuter des amendements en commission parlementaire. On s'est fait dire que, même demain, il y aurait d'autres amendements. Quelle est l'honnêteté de la guillotine, de refuser de discuter un projet de loi quand le gouvernement, quotidiennement, toutes les semaines, nous amène de nouveaux amendements et qu'il n'a même pas fini de nous apporter des amendements? Si vous aviez été à cette commission, Mme le Président, vous auriez compris qu'on veut même sacrifier les services médicaux aux intérêts de la langue. On ne veut même pas reconnaître la confidentialité des dossiers médicaux. C'est parce que toutes ces choses commencent à être connues du public, que le public commence à comprendre le vrai but de cette commission qu'on veut y mettre fin.

Il y a des principes fondamentaux qui n'ont pas encore été étudiés en commission parlementaire sur ce projet de loi. Même si nous sommes fatigués, même si les heures sont longues, nous avons encore une responsabilité envers le public, même si personnellement je préférerais arrêter d'en discuter et passer à quelque chose de plus important, comme l'économie ou d'autres sujets. Il est tellement important, il contient tellement de principes fondamentaux qui vont affecter toute la population pour des années à venir que c'est la responsabilité du gouvernement d'insister et de voir à ce qu'on puisse discuter le reste de ce projet de loi.

Je peux vous assurer que nous n'avons pas fait de "filibuster" en commission parlementaire. C'est faux. Ceux qui essaient de donner l'impression que nous faisions des "filibusters ", c'est absolument faux. Naturellement, quand le gouvernement refusait systématiquement de discuter avec nous, il fallait essayer de défendre notre point de vue. Il fallait, pour les intérêts de tout le monde, il fallait essayer de faire ressortir les principes de chaque article de cette loi. Il est évident que, même dans la rédaction de ce projet de loi — c'est cela qui commence à être évident pour le public — il y a une incohérence, il y a des contradictions. Pour ces raisons, nous avons le devoir et la responsabilité de continuer à en discuter afin de faire les amendements qui s'imposent, non pour porter atteinte au but de la loi. Nous sommes en accord avec le but de la loi si c'est vraiment de promouvoir le français au Québec. Mais nous avons l'obligation de nous assurer que les modalités de chaque article de cette loi n'iront pas à l'encontre et ne seront pas contradictoires au vrai but de cette loi. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, Mme le Président. Pour la nième fois depuis environ une semaine, nous sommes encore obligés d'intervenir dans un débat de procédure puisque, effectivement, depuis mardi dernier, nous avons à peine travaillé une heure sur la législation. Pourtant, nous avons été élus et nous sommes payés pour légiférer. C'est pour cela que la population nous a élus, a élu des députés dans chacun des comtés de la province et s'est choisi un gouvernement. En ce 98e jour de session, ce qui n'a jamais été égalé dans les annales politiques du Québec, durant la première partie de la session, je trouve extrêmement malheureux que nous en soyons une deuxième fois de suite à une deuxième motion de procédure pour la suspension des règles de la Chambre et pour imposer le bâillon aux membres de l'Assemblée nationale.

Je sais que mes propos ne réussiront pas à convaincre le gouvernement. Je sais que le gouvernement a fait son lit. Mais j'aimerais quand même lui dire qu'il a fait son lit dans le mauvais lit.

Mme le Président, j'ai regardé les journaux de ce matin. On ne peut pas me reprocher de ne pas me rappeler certains débats de la commission parlementaire des derniers jours, je n'ai malheureusement pu y assister, étant occupé à d'autres fonctions. Mais les journaux de ce matin nous disent ceci, et je vais illustrer que le gouvernement fait son lit dans le mauvais lit.

Les journaux de ce matin nous apprennent une série d'amendements sur la francisation des sièges sociaux déposés aujourd'hui par M. Laurin. Article à la une, dans le journal Le Devoir. Je suis membre de l'Assemblée nationale du Québec, concerné par le projet de loi 101, je serai appelé à voter, je suis appelé à me prononcer sur la motion qui est actuellement devant nous et je ne les connais pas les amendements que le gouvernement apporte sur la loi 101.

Dans les mêmes journaux, et je cite le Devoir, je pourrais citer les autres quotidiens: "Péquistes et libéraux refusent d'engager un débat sur la langue des entreprises". Le gouvernement s'est donné comme objectif la francisation des entre-

prises. On ne pourra pas en parler, Mme le Président. Nous avons été élus par la population justement pour décider ces choses.

Si j'ai appuyé le gouvernement lors de la deuxième lecture du projet de loi 101, je l'avais appuyé avec réserve. J'avais dit à ce moment que j'avais de sérieuses réserves sur tout le chapitre concernant les entreprises québécoises, la réglementation qui en découlerait et les obligations qu'on leur ferait et particulièrement à celles possédées, dirigées par des Québécois francophones.

M. Gratton: Mme le Président, question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je vous ferai remarquer que nous n'avons pas présentement quorum et qu'effectivement on a la présence de six, un grand total de six députés du Parti québécois, Mme le Président.

M. Duhaime: Je vous demanderais de bien vouloir vérifier si nous avons quorum avant de faire une telle affirmation. Il faudrait le vérifier.

M. Gratton: Si vous saviez compter vous verriez que...

Mme le Vice-Président: Nous allons vérifier le quorum immédiatement. Nous avons maintenant quorum.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je disais donc, Mme le Président, que le gouvernement n'est pas prêt à faire voter la loi 101 devant l'Assemblée nationale. Qu'on ne vienne pas me dire que c'est de l'obstruction systématique de la part de l'Opposition, puisque hier, Mme le Président, le ministre parrain du projet de loi a annoncé lui-même qu'il avait toute une série d'amendements à déposer aujourd'hui même concernant la francisation des entreprises et des sièges sociaux.

C'est donc dire, Mme le Président, que le gouvernement a encore énormément et aurait encore énormément d'autres amendements à nous apporter sur ce projet de loi. Mme le Président, les députés qui m'ont précédé ont dit que le gouvernement était en train de commettre la même erreur que les gouvernements précédents. Dans un débat aussi important que celui de la question linguistique le gouvernement fait la même erreur que les gouvernements précédents, il oublie que cette loi n'aura de valeur et ne sera applicable qu'à partir du moment où on pourra faire un certain consensus. Je ne dirais pas un consensus certain, mais un certain concensus qui est à la base même de l'acceptation de cette loi par les entreprises, par les personnes qui sont concernées dans tout le territoire du Québec.

Le gouvernement lui-même nous donne l'image d'un gouvernement qui n'est pas prêt. Je ne lui fais pas le reproche de ne pas être prêt, mais je lui fais le reproche d'imposer le bâillon à l'Assemblée nationale et d'obliger les députés à se prononcer sur ce projet de loi alors que lui-même, le gouvernement, aurait encore des amendements à proposer et alors même que nous l'avons avisé que, concernant le débat sur la langue des entreprises et sur les sièges sociaux, nous aurions plusieurs amendements à apporter et bien des choses à dire de ce côté.

Mme le Président, je n'ai pas la prétention, mais j'ai la certitude que je ne pourrai pas convaincre le gouvernement. Cela ne me surprend pas du tout. J'aimerais quand même lui rappeler ceci: II va falloir que le gouvernement se donne une autre image que celle qu'il a actuellement auprès de la population du Québec parce que j'ai la nette impression qu'il oublie qu'il a été élu le 15 novembre dernier pour gouverner et administrer le Québec et qu'il y a d'autres problèmes dans le Québec que celui de la langue.

Si le gouvernement a fait l'erreur de monopoliser l'opinion publique, de monopoliser l'attention des membres de la Chambre sur l'adoption de ce projet de loi, au cours de cette présente session, cela fut le choix même de ce gouvernement, ce fut sa responsabilité. Comme je n'ai pas l'intention ni la prétention — j'aurais bien l'intention, mais je n'ai pas la prétention — de pouvoir convaincre le gouvernement et que je l'ai mis en garde à plusieurs reprises, je lui dirai ceci: Continuez comme vous êtes parti, vous êtes dans la bonne voie pour aller à la même place que les gouvernements qui vous ont précédé et peut-être plus rapidement que vous ne le pensez. Actuellement, nous avons la loi no 1, nous avons la loi 101, et j'ai l'impression que lorsque la loi sera appelée devant l'Assemblée nationale, compte tenu de tous les amendements qu'on va y retrouver, ce sera la loi 201...

M. Springate: Loi 401...

M. Roy: ... et, comme le dit l'honorable député de Westmount, déjà les francophones de Montréal appellent la loi 101, la loi 401 parce que c'est la voie directe qui conduit les entreprises du Québec vers Toronto et vers l'Ontario.

Le gouvernement, Mme le Président — et je terminerai là-dessus — veut construire de beaux réseaux d'aqueduc, c'est une comparaison que je fais, mais il oublie de trouver des sources et surtout il oublie de protéger ces sources. Mme le Président, les conséquences de cet état de choses sont extrêmement sérieuses et extrêmement préjudiciables à l'avenir du Québec et à la mission même que le Parti québécois s'était donnée lorsqu'il a pris le pouvoir au Québec.

Mme le Vice-Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Bryce Mackasey

M. Mackasey: Merci, Mme le Président. Cela ne me surprend naturellement pas que nous soyons ici pour discuter de la motion pour impo-

ser la clôture, la guillotine — comme vous l'appelez — parce que jamais, à ma connaissance, on ne s'est rendu au mois d'août avec trois projets de loi, les projets 2, 45, 101, trois projets de loi majeurs sans en avoir adopté un quand il reste une semaine. Il faut dire, Mme le Président, que si on manque de temps pour discuter en profondeur du projet de loi 101, c'est parce qu'on a gaspillé deux semaines avec le projet de loi 1 en commission à cause du manque de compétence de la part du gouvernement. Maintenant, parce que le gouvernement a mal compris le processus parlementaire avec le projet de loi 1 dont on héritait avant la commission, il nie à l'Opposition l'occasion de discuter le projet de loi 101 qui — tout le monde le sait et certainement le gouvernement — aura les conséquences terribles sur l'économie de notre province. La preuve que le gouvernement comprend cela naturellement c'est que tous les jours, depuis une semaine, il arrive devant la commission, et bientôt ce sera devant la Chambre, avec des amendements à la douzaine.

Attendez, Mme le Président, quand un ministre va être obligé de venir avec les règlements, là cela va changer, par exemple. Et attendez que nous ayons adopté ces règlements; il faudra des milliers de fonctionnaires pour faire respecter ces règlements par les centaines d'entreprises que l'on retrouve à Montréal.

Mme le Président, cela ne m'étonne pas du tout que l'étude du projet de loi 101 prenne fin par la guillotine. Comme le député de Beauce-Sud l'a souligné, ce sera une grande journée quand la population passera le gouvernement péquiste à la guillotine.

Madam President, I want to swing over to the other language which bill 101 will not deny, for no other reason of course that that right flours from the Constitution. Otherwise, I am sure it too would be denied, in the same way as the language rights which have existed for so long in this province flowed from section 93 of the Constitution evolved from a confessional system to a more practical system but nevertheless evolved because the foundation of that educational system in this particular province is founded, in the Constitution of Canada and not in any provincial right.

We can only describe bill 101 which closure will bring to an end, and a very fitting end for an infamous bill that will go down in history with the Manitoba Act against the minorities in that province. A bill that is discriminatory in every way, shape and form against the business community, against the minority, against the majority in denying them the freedom of their rights which were always fundamental and synonymous with this beautiful part of this county.

It is fitting in a way that a bill that is so undemocratic, which trample on the individual rights of people should be brought to a sorry end by an unparliamentarian act as the guillotine. And it is tragic, in a way, because, avec des amendements bien fondés, il aurait été possible de donner au moins quelque validité au projet de loi 101. Les amendements qui sont déjà devant la commission auraient pu, au moins, améliorer un peu le projet de loi 101.

Pourquoi le projet de loi 101 au lieu du projet no 1? C'est très simple. Un amendement a éliminé la clause 172 où le ministre a essayé, au nom de la collectivité, d'éliminer complètement les droits fondamentaux des citoyens de cette province, y compris'leur langue et leur culture.

In order not to lose time in this period, I say in my words my sadness — I say this sincerely — that 10, 20 or 30 years from now, we will look back on this period in Quebec history as a tragic period, when a minority within a minority, a minority within the government, a minority within the cabinet, in their attempt to convert a multicultural, pluralistic society, Quebec, into an unilingual one culture society has virtually destroyed the economy of the province, and if it were not for the strong friendship between the French-speaking and English-speaking people of this province which would subscribe despite bill 101 and despite this government, we could have driven a wedge between the English and French, which would have been unfortunate. This is why so many of us have restricted our words, have hidden their emotions, have bridled their tongue rather than say what we think that this infamous bill will go down in history with the Manitoba Act, the Ontario regulations which suppressed the fundamental rights of the French-speaking minority in Manitoba and perhaps postponed the day when the unity would have been a fact by 50 years. Bill 101 is stamped by the same error of discrimination. It is tragic that it could happen in an unlike society in the year 1977.

I accept the guillotine because the sooner this historic act which is a blot on the history of Quebec which is know for its tolerance, as soon as this historic act is brought to a death to something almost ironic, as is the guillotine that has to be used in conjunction with this bill, because this bill needs to be killed and there is no more traditional way and no more fundamental way than doing it by guillotine.

And I expected ministers over there who have know some cases for 20 years must feel sorry, must feel sad, must feel ashamed, must feel concerned, worried that they are, in fact... No, maybe not that minister who has been sitting in the sun for the last three weeks, but certainly any minister must be concerned about the Canada clause and the Quebec clause, and what happened in St. Andrews. Because when I heard on the radio an hour ago people in Ontario say: Why should we allow French-speaking people going to Ontario to go to our school when the English people from Ontario cannot necessarily go into the schools in Quebec? That is bad, that is negative, and it is the type of feeling and philosophy that we do not want to see spread in this country, but it is happening.

And if it happened it will set back the progress that the minorities are finally making and should have made fifteen hundred years ago. It will set it back if rednecks and reactionaries and the rest of

the country say: A use of an excuse. We are not allowing French-speaking Canadians to go in school in Ontario or in Alberta or British Columbia or New Brunswick because after all the huge speaking people in this province cannot go in the English-speaking system in Quebec. This is something that nobody expected, it is the type of significant flow from any law that is based on, Mme le Président, the concept of collectivity and put aside individual rights. But we come along with la guillotine, or closure which under normal circumstances is understandable in a parliamentary system. If Mme le Président, the honourable gentleman look at his watch over there, he has three months to gather his parts together, for four months we have been here, and know about to say he stands up. But no matter how eloquent our poet laureate he is he can never explain, he can never justify, he can never associate himself with a bill which is discriminatory, a bill, and he should understand, that is prepared to step on the rights of individuals in the name of collectivity to be brought in from a party who quite properly have always stand up for the rights of individuals. We say the power corrupts. A perfect example, Mme le Président, of corruption of a party in power. PQ first official act is to bring in a piece of legislation that denied the individual rights of the citizens of this province. This is some heritage and it is coming to a proper end through guillotine. There is now more appropriate ways, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Victor-C. Goldbloom

M. Goldbloom: Mme le Président, j'ai fait quelque chose, cet après-midi et je me demande si le député de Maisonneuve a pris le soin de le faire. J'ai cherché, dans le dictionnaire, la définition du mot "transparence". On y trouve quoi, Mme le Président? "Qualité de ce qui laisse paraître la réalité toute entière, qualité de ce qui est transparent — évidemment — mais "transparent": se dit des corps qui se laissent traverser par la lumière".

Mme le Président, depuis un certain temps, le gouvernement se laisse facilement traverser par la lumière parce que les sièges sont vides.

Au sens figuratif, "transparent", "dont le"...

M. Burns: Ce n'est pas votre meilleure. Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. Blank: Une question de règlement. On a toutes sortes de promesses du côté gouvernemental. Promesse du premier ministre, cet après-midi, on a une promesse du député de Maisonneuve qui a dit qu'il n'interviendrait pas jusqu'à la fin, jusqu'à la réplique. Cela fait trois ou quatre fois qu'il intervient dans le discours du député de D'Arcy McGee.

M. Burns: J'avais promis de ne pas intervenir,

Mme le Président, pendant le discours du député, mais je n'ai pas dit pour les autres députés.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! J'espère, M. le député de D'Arcy McGee, qu'on va vous laisser faire votre intervention dans l'ordre. M. le député.

M. Goldbloom: Merci, Mme le Président. Une dernière définition au sens figuratif: "transparent": "dont le sens caché se laisse pénétrer aisément".

Mme le Président, il y a, de toute évidence, un sens caché à cette motion de clôture qui est présentée par le gouvernement.

Le sens caché est que le dialogue invoqué si souvent par ce gouvernement, invoqué parce qu'il était pour écouter tout le monde, parce qu'il était pour partager avec l'Opposition la responsabilité de la bonne rédaction des lois, qu'il était disposé à bonifier tout ce qu'il pouvait pondre comme législation. Tout cela s'en va à l'eau avec le genre de motion que nous avons maintenant à débattre.

Ce n'est pas la première fois qu'un gouvernement...

M. Springate: Mme le Président, une question de règlement. Est-ce qu'il y a quorum actuellement? Je m'excuse.

Mme le Vice-Président: II me paraît qu'il y aurait quorum actuellement, mais je vais quand même demander qu'on compte les députés.

J'espère que vous n'aviez pas simplement l'intention d'arrêter l'intervenant, M. le député.

M. le député de D'Arcy McGee.

M. Duhaime: Quand il y a une commission qui siège, je ne vois pas pourquoi... Cela fait trois fois qu'on interrompt le discours du député pour le quorum.

Mme le Vice-Président: S'il vous plaît, à l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

Je pensais que l'incident était clos, M. le ministre.

M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, Mme le Président, le ministre n'est pas tout à fait seul, il a son aumônier avec lui.

Mme le Président, ce n'est pas le premier gouvernement de l'histoire du Québec qui a présenté une motion de clôture, encore moins le premier à présenter une motion dite de fin de session, mais c'est quand même le premier à s'être vanté auparavant qu'il ne le ferait pas. Je ne répéterai pas les paroles qui se trouvent au journal des Débats. Mais voici un gouvernement qui se vantait de toutes sortes de choses et notamment de la démocratie. C'est lui qui arrive maintenant avec une motion de clôture.

Mme le Président, je comprends la difficulté, que vous avez soulignée à plusieurs reprises, de parler d'une motion de clôture qui affecte le travail d'une commission parlementaire sans parler du

travail de cette commission parlementaire. Je vous soumets respectueusement la considération, d'autres l'ont fait, je crois, que les media d'information ont quand même rapporté largement ce qui se passe et s'est passé à cette commission parlementaire. Aussi, les transcriptions sont disponibles à qui veut les consulter.

Je me limite à parler de deux choses. Premièrement, que le gouvernement, en présentant cette motion de clôture, invoque l'argument que l'Opposition a eu largement le temps et largement les occasions de présenter ses amendements, de les faire étudier par la commission parlementaire. Mme le Président, si vous regardez la transcription des déabts depuis plusieurs jours, vous verrez que ce sont des amendements présentés par le gouvernement qui occupent le temps de cette commission parlementaire.

Ce gouvernement fait travailler la commission parlementaire pour corriger son tir parce que son tir a été fautif au départ. Je vous évite une longue considération sur le grand truc, trouvaille du siècle, du changement du projet de loi no 1 pour le projet de loi no 101. Aujourd'hui, ayant depuis plusieurs jours consécutifs fait travailler la commission parlementaire sur ses propres amendements, le gouvernement arrive et dit: L'Opposition n'a pas à se plaindre, elle a eu tout le temps voulu de présenter les siens.

Ce n'est pas exactement de la transparence.

M y a dans cela un sens caché. Ce que le gouvernement cache, c'est une volonté de mettre fin à un processus démocratique pour lequel il a exprimé, surtout pendant que ses ténors étaient dans l'Opposition, le plus grand et le plus profond respect.

Deuxièmement, nous avons pu constater, ici même en Chambre, le jeu de mots utilisé par le gouvernement. A un moment donné, sans l'avoir fait dans le projet de loi no 1, il a visé, par le projet de loi no 101, les institutions hospitalières et les établissements de services sociaux. Il y a eu des protestations, notamment parce que les intéressés, n'ayant pas été visés par le projet de loi no 1, n'avaient pas préparé de mémoire, n'avaient pas eu l'occasion de comparaître et de discuter avec l'Opposition leurs préoccupations devant les exigences de la loi. Le gouvernement les a rencontrés privément par la suite, mais l'Opposition a été privée de cette occasion, de cette possibilité de dialoguer avec eux.

Par la suite, le gouvernement a dit: Non, on ne traitera pas les hôpitaux comme des établissements commerciaux. Tout le monde intéressé par cette question importante a poussé un soupir et a dit: Très bien, le gouvernement a finalement compris la raison et a accepté de ne pas aller trop loin. Or, nous avons dû constater que ce n'était qu'un jeu de mots, que les hôpitaux n'allaient plus être affectés par le chapitre du projet de loi qui concerne les entreprises, le monde des affaires, mais qu'ils étaient insérés dans le chapitre sur l'administration publique.

Devant de tels petits jeux, des enfantillages au lieu de procédures parlementaires normales, nous devons dire à ce gouvernement que sa motion de clôture est mal inspirée et arrive à un mauvais moment dans le déroulement des travaux de cette Assemblée nationale.

Il n'y a qu'une seule raison pour appliquer une clôture, une guillotine — je constate que vous m'indiquez, Mme le Président, qu'il ne me reste que quelques secondes, je respecterai votre directive à cet égard — il n'y a qu'une seule raison...

Mme le Vice-Président: C'est cela, M. le député.

M. Goldbloom: ... de vouloir mettre fin aux débats, et c'est la rentrée scolaire. On aurait pu — l'Opposition officielle l'a suggéré — séparer le projet de loi en deux parties et régler le problème de la rentrée scolaire.

Pour terminer, je dis tout simplement que le jeu du parlementarisme est un vrai dialogue entre les représentants du peuple. Il y a, d'un côté, ceux qui ont la majorité des sièges et, de l'autre côté, ceux qui ont la minorité des sièges, mais ce sont tous des porte-parole du Québec et des Québécois. Quand on coupe ce dialogue, qui doit être constructif, et quand on impose une clôture, c'est un triste commentaire sur le niveau auquel s'abaisse, entre les mains de ce gouvernement, le parlementarisme québécois.

Mme le Vice-Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. Samson: Mme le Président, nous arrivons encore aujourd'hui avec une motion qui n'est pas — pour utiliser des mots bien connus — la trouvaille du siècle! Une motion de clôture, une motion qu'on appelle communément la guillotine. Elle nous est présentée par un parti qui a fait la promesse solennelle, à maintes reprises, de ne jamais avoir recours à ce genre de motion.

La semaine dernière, nous avions une autre motion qui visait à faire siéger la Chambre possiblement 24 heures par jour pour mettre fin aux débats. C'était là une motion que je qualifie d'odieuse. Cette motion a été adoptée hier seulement et voilà qu'aujourd'hui on revient avec une autre. C'est la première fois, à ma connaissance, qu'on a, à un jour d'intervalle, une motion pour faire siéger la Chambre à des heures impossibles et une autre motion de clôture pour mettre fin à une commission.

La semaine dernière, je me suis référé, pour démontrer le ridicule de la situation, à des propos tenus par les membres du gouvernement, les purs, ceux-là qui n'utiliseraient jamais ce genre de motion. J'ai utilisé un discours fait en 1974 par le proposeur de la motion. Et ce discours, il était inscrit au journal des Débats, page 1263, du 25 juin 1974. J'y retrouve une motion semblable à celle d'aujourd'hui, exactement, avec cette différence que la motion de clôture était venue le 26 juillet 1974, c'est-à-dire un mois et un jour après la première motion. Voyez l'évolution, la différence!

M. Springate: Mme le Président, je crois qu'on n'a pas quorum encore. Il y a seulement deux ministres présents sur 26.

Mme le Vice-Président: II nous manque effectivement un député. Avons-nous quorum? Voulez-vous compter, s'il vous plaît? Voilà.

M. Gratton: Une directive.

Mme le Vice-Président: Nous avons maintenant quorum; nous ne l'avions pas malheureusement.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Question de règlement. Ce serait pour vous demander si les députés qui sont en train de fumer, accoudés à la fenêtre en arrière, sont comptés dans le quorum ou s'ils sont ici simplement comme observateurs.

Mme le Vice-Président: C'est peut-être ce qu'il faudrait vérifier, M. le député.

M. Gratton: II me semble que le règlement, à l'article 100, exige bien qu'il faut qu'on soit assis à notre siège. Mais c'est important, cher monsieur.

Mme le Vice-Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Gratton: Vous êtes payés pour siéger, pas pour fumer en arrière.

M. Samson: Mme le Président, je soumets à votre attention qu'aujourd'hui on fait face à une motion de clôture qui nous est amenée par les purs, ceux-là qui ont fait la promesse solennelle, n'est-ce pas, qu'on n'aurait jamais, sous leur règne, à faire face à ce genre de motion. Comme, la dernière fois, j'ai cité le proposeur de la motion, je vais encore être fidèle à ce qu'il a déjà dit; je m'en inspire et je vais le citer encore une fois sur le genre de motion qu'il nous présente aujourd'hui. Je cite M. Robert Burns. Je pense qu'on va reconnaître son nom; c'est bien là au journal des Débats, page 2158, M. le Président — puisqu'on a changé de président — daté du vendredi 26 juillet 1974. Ecoutez ce qu'il disait dans ce temps-là sur le même genre de motion que celle d'aujourd'hui. L'autre jour, j'ai cité l'autre motion; je cite celle d'aujourd'hui. Il disait: "M. le Président, le 26 juillet 1974, à mon avis, passera à l'histoire comme une journée noire du parlementarisme québécois, comme une journée noire pour la nation québécoise, comme une journée noire pour le respect de nos institutions et pour le respect des Québécois." Mon doux Seigneur, qu'ils ont donc oublié vite les jours noirs de ce temps-là! Je continue, M. le Président. C'est la deuxième fois en moins de quelques jours que l'on a ce genre de motion, je vous le fais remarquer, et écoutez ce que disait le député de Maisonneuve: "C'est la deuxième fois en moins de deux mois, (c'était effrayant!)— puisque le projet de loi no 22 a été déposé en première lecture, tout à fait par hasard, le 22 mai, je crois, ou le 21, en tout cas près du 22 mai — qu'on nous impose une motion de clôture, qu'on appelle aussi la guillotine, le bâillon ou tout simplement l'imposition d'une décision de la majorité à l'Opposition."

C'est ce qu'il disait, le 26 juillet 1974.

Et il continuait en disant: "L'Opposition, je tiens à le dire, n'est pas seulement les huit députés de l'Opposition, les six membres de l'Opposition officielle et les deux députés du Parti crédi-tiste. L'Opposition, on commence à la voir chez le peuple". Il continuait, à la suite de quelques inter-cades de la part de certains députés ministériels: "On commence à la voir également un peu partout dans le Québec. C'est ce qui me permet de dire que je ne peux interpréter cette motion de bâillon, de guillotine, la deuxième en si peu de temps de la part de ce gouvernement numériquement très majoritaire, que comme l'expression de sa peur de faire face à la population québécoise".

Il continuait plus loin: "On va le dire, on va le redire et on ne le répétera jamais assez, il y a 45% de la population au Québec qui ont voté contre ce gouvernement. Nous nous sentons une obligation de représenter au moins ces 45% de l'opinion publique. Ces 45% de la population, si on les faisait se traduire en opinions sur le projet de loi 22, je suis certain qu'on en arriverait — je n'ose pas avancer de chiffres de crainte qu'on me dise que je fais de la démagogie — je suis sûr qu'on en arriverait à une proportion infiniment supérieure à ces 45%".

M. le Président, transposez ce que le leader parlementaire du gouvernement disait il y a trois ans, qui était alors dans l'Opposition, transposez cela à aujourd'hui et vous n'aurez qu'une seule chose à changer à son argumentation, c'est qu'aujourd'hui ce n'est pas 45% de la population qui est contre le gouvernement, mais 59%, donc la majorité absolue qui est contre le gouvernement.

M. le Président, il continuait en disant ceci:

Une Voix: Cela doit être dur.

M. Samson: M. le Président, je vous souligne que le député de Duplessis, s'il avait le courage qu'un député doit avoir en cette Chambre, se lèverait pour parler là-dessus. Il se lèverait sur toutes les motions, sur tous les discours, sur tout ce qui concerne un député élu par la population.

M. Springate: C'est vrai.

M. Samson: Mais comme la majorité de ceux qui siègent à ma gauche, il ne se lève pas trop souvent.

M. Gratton: C'est un observateur.

M. Samson: Pour empêcher un député de l'Opposition de parler, vous l'entendez gueuler à ma gauche. Vous a-t-il demandé le droit de parole, M. le Président. Est-ce qu'il vous a demandé le droit de parole?

Le Président suppléant (M. Marcoux): Je ne l'ai pas entendu.

M. Gratton: II n'a pas le droit de parler, c'est un observateur.

M. Samson: Ouvrez-vous les oreilles parce qu'il commence à me les agacer pas mal, M. le Président, et je continue parce que cela leur fait mal. Quand cela fait mal on essaie de nous empêcher de parler.

Regardez ce que disait votre leader parlementaire, il y a trois ans. Il disait: "C'est cela que j'appelle la journée noire du parlementarisme au Québec. Je pense qu'il n'y a aucun gouvernement qui a utilisé, dans un même projet de loi, deux fois le bâillon". Imaginez-vous si c'était terrible dans ce temps. Il disait en 1974: II n'y a jamais un gouvernement qui a utilisé deux fois le bâillon sur la même loi. S'il n'y en avait jamais eu un avant 1974, je peux vous dire, messieurs du gouvernement, qu'à partir d'aujourd'hui cela fait deux gouvernements qui imposent le bâillon sur le même projet de loi, avec cette différence qu'en 1974, il trouvait cela affreux parce qu'on avait eu le bâillon deux fois en dedans de deux mois. Aujourd'hui il ne trouve pas cela affreux de présenter lui-même le bâillon deux fois en dedans de quelques jours, en dedans de 24 heures, M. le Président.

M. Springate: 24 heures.

M. Samson: C'est la différence, alors qu'il y a tellement d'autres sortes de problèmes qui auraient pu être réglés si ce gouvernement avait voulu s'enlever les deux pieds de la même bottine au lieu de provoquer l'Opposition sur un seul genre de projet de loi...

M. Gratton:... bottines à part cela.

M. Samson: ... au lieu de tenter d'amener toute l'opinion publique à penser la même chose. Pendant qu'on pensait à la langue, M. le Président, et pendant que ce gouvernement nous a obligés à penser à la langue, les chômeurs pensaient peut-être moins qu'ils étaient chômeurs, les assistés sociaux pensaient peut-être moins qu'ils étaient des assistés sociaux. Ceux qui manquent du strict nécessaire dans la province de Québec pouvaient peut-être y penser moins parce que toute la publicité convergeait vers ce même et unique projet de loi 1 qui s'est traduit en 101 par la suite. Toute la publicité nous cassait les oreilles tous les soirs. Et aujourd'hui on va imposer le bâillon à ce que j'appelle...

Le Président suppléant (M. Marcoux): J'inviterai le député de Rouyn-Noranda à conclure; j'ajoute un peu de temps, compte tenu du fait que vous avez été distrait. Deux minutes.

M. Gratton: Consentement unanime, M. le Président.

M. Samson: M. le Président, j'ai le consentement unanime des membres à ma droite...

M. Perron: Non.

M. Samson: Cela me fait plaisir, M. le Président, de savoir que c'est encore le PQ qui refuse le consentement. Il me fait aussi plaisir de vous le dire, que ce soit marqué dans le journal des Débats, parce que dans quelques années on relèvera cela...

M. O'Neill: On vous endure, n'abusez pas.

M. Samson: ... et on dira: Chaque fois qu'un député se levait pour défendre les droits légitimes de ses concitoyens, chaque fois qu'il avait besoin de quelques minutes de plus, le Parti québécois est arrivé souvent pour refuser son consentement. Ne vous cassez pas la tête, vous en aurez peut-être besoin du consentement d'ici la fin de ces quelques jours de débat, vous aurez peut-être besoin du consentement unanime. On se le rappellera, M. le Président, on se le rappellera à ce moment, ce n'est pas fini cette affaire. Les journées noires du parlementarisme, ce n'est pas en 1974 qu'on les avait, ce n'était que grisâtre en ce temps là comparativement à ce qu'on connaît aujourd'hui. Aujourd'hui c'est noir pour vrai et cela semble vouloir rester pas mal dans la noirceur.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Verdun.

M. Lucien Caron

M. Caron: M. le Président, j'ai un peu hésité à me lever, pour donner la chance aux députés pé-quistes de prendre la parole. S'il y en a qui veulent la prendre, je leur permettrai de le faire avant que je ne le fasse moi-même...

M. Springate: Des observateurs.

M. Samson: Des observateurs là-bas?

M. Caron: II ne semble pas...

M. Lamontagne: Des observateurs payés. Un instant, nous allons vérifier.

M. Samson: Inscrivez cela au journal des Débats, M. le Président. Il n'y a pas un péquiste qui ose se lever.

M. Caron: ... mais je voulais être bien certain que vous ne vouliez pas prendre la parole avant moi.

M. Grégoire: ... choses sérieuses. Cela, ça ne vaut pas la peine.

M. Caron: Le gouvernement que nous avons en face de nous, du moins ce qu'il en reste, parce qu'il y en a plusieurs qui sont partis en vacances...

M. Springate: II n'y a personne devant nous.

M. Caron: Je dis donc que ce qu'il reste de ce gouvernement est pris d'une maladie qu'on peut

qualifier d'incurable, cela s'appelle la maladie de la guillotine. Ce gouvernement est tellement pris par cette maladie que même le premier ministre, en juillet 1977, à une conférence de presse, a mis un peu d'huile sur la guillotine en essayant de faire croire à la population que son bon gouvernement ne serait jamais atteint de cette maladie, que jamais son bon gouvernement ne permettrait de bâillonner les députés de l'Opposition, mais cette incurable maladie les a frappés; comme dirait la fable de La Fontaine, ils en étaient tous atteints.

Si on laissait ce gouvernement continuer sans dire un mot, on lui rendrait un mauvais service. Par des conversations privées, on se rend compte que certains députés péquistes ne sont pas d'accord avec un tel procédé antidémocratique. Ces quelques vestiges démocratiques n'osent pas parler contre cette motion car ils ont peur que la guillotine les atteigne eux-mêmes parce que, dans ce parti, quand on n'est pas d'accord, on se fait trancher la tête. On devient silencieux. Je mentionnerai le cas du député de Vanier, Jean-François Bertrand, qui à l'occasion de la fête du 1er juillet, s'est opposé à son parti. Depuis le 1er juillet, on n'en entend plus parler. C'est regrettable.

M. Springate: II n'est même plus ici maintenant.

M. Caron: C'est cela, c'est dommage, j'aurais aimé qu'il soit ici pour lui dire la même chose; on ne parle pas, c'est effrayant, on ne parle pas.

M. Michaud: II est en commission parlementaire.

M. Brassard: C'est cela.

M. Caron: Lorsque ce projet de loi a été déposé, on a entendu plusieurs députés du Parti québécois dire ouvertement qu'ils s'opposeraient à certains articles du projet de loi mais, depuis, le grand silence. On leur a imposé la ligne du parti. Comme d'habitude les députés de ce parti, pour une raison ou pour une autre, ont dit à l'extérieur ce qu'ils pensaient et à l'intérieur du Parlement, se sont contentés de voter selon la ligne du parti.

Lorsque le gouvernement a présenté cette motion, il a mis en cause un principe. Ce n'est pas seulement pour faire adopter le projet de loi 101 avant le début des classes, mais c'est surtout parce que ce gouvernement a honte d'avoir abusé de l'Opposition parce que ce gouvernement regrette de ne pas avoir accepté la proposition du chef de l'Opposition officielle, à savoir de scinder le projet de loi 101.

Si on avait écouté le chef de l'Opposition, on n'aurait pas été atteint de la maladie de la guillotine. Ce jeune gouvernement n'a pas voulu écouter un homme d'une grande expérience, le chef de l'Opposition. Aujourd'hui, le gouvernement d'en face est malade, il doit être malade, il doit motiver sa maladie. C'est pourquoi même le député de Sa- guenay, hier, s'est senti dans l'obligation de motiver sa maladie. Malheureusement pour lui, malheureusement pour le député de Bourget, malheureusement pour le député de Maisonneuve, malheureusement pour l'ensemble de ce gouvernement, le peuple ne sera pas complice d'une telle motion.

Par l'intermédiaire des Oppositions qui représentent 60% ou 59% de la population, les Québécois disent non à cette mesure parce qu'ils veulent que le projet de loi 101 continue à être bonifié par le travail des représentants du Parti libéral et des membres des autres partis de l'Opposition à la commission parlementaire, notamment Mme le député de L'Acadie, MM. les députés de Marguerite-Bourgeoys, de Mont-Royal, de D'Arcy McGee, de Notre-Dame-de-Grâce, de Jacques-Cartier et autres. Ces députés ont essayé de bonifier la loi mais le député de Bourget a refusé de les entendre. Aujourd'hui, il est incapable de continuer à justifier ce refus. C'est pourquoi il a chargé le député de Maisonneuve des basses oeuvres, de couper la tête de l'Opposition officielle par la guillotine.

En terminant, je tiens à vous dire, M. le Président, que je suis scandalisé. Oui, je suis scandalisé. Cela peut faire rire certaines personnes.

M. O'Neill: Non, on ne rit pas, c'est grave!

M. Caron: J'ai vécu cela, moi aussi, sur les banquettes d'en arrière, entendre nos bons amis d'en face dire que ce qu'on faisait... Ce n'est pas croyable à quel point, avec l'expérience que j'ai vécue depuis 1970, je suis scandalisé du montant que les députés gagnent dans cette Chambre pour ne pas en faire plus. Ils ont dit: C'est fini, on ne fera pas cela, nous autres! M. le député de Rouyn-Noranda l'a dit tout à l'heure, il a vécu cela lui aussi. Je trouve cela bien effrayant! Pour adopter une ioi, déposer, faire débattre et faire voter par l'Assemblée nationale consécutivement deux motions, celle d'hier restriction des débats et celle d'aujourd'hui, la guillotine. M. le Président, c'est la première fois dans l'histoire de ce Parlement qu'un gouvernement, face à l'Opposition, prouve sa faiblesse, parce que sentir le besoin de présenter ces motions pour faire adopter un projet de loi, c'est signe, sans aucun doute, je ne dirai pas de lâcheté, mais sûrement de faiblesse. Je ne puis me faire complice de cette faiblesse. C'est pourquoi je voterai contre cette motion. Merci, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Fabien Cordeau

M. Cordeau: M. le Président, la motion qui est devant cette Assemblée, telle que présentée par le leader du gouvernement, nous prouve encore une fois que ce gouvernement fait fi d'une des prérogatives de l'Opposition qui est d'étudier consciencieusement tous les projets de loi que veut bien lui présenter le gouvernement.

Comment voulez-vous que l'on donne notre appui à un projet de loi qui n'aura pas passé par tous les mécanismes que prévoient les règlements de l'Assemblée nationale du Québec et qui stipulent que la commission doit tenir une audition publique, doit étudier le projet de loi article par article et faire rapport?

M. le Président, si la commission n'a pas eu le temps d'étudier le projet de loi article par article, logiquement cette Assemblée ne devrait pas accepter un tel projet de loi, étant donné qu'une des conditions premières n'a pas été remplie. Ce qui me surprend, M. le Président, c'est l'attitude présente de ce gouvernement et, pour vous le démontrer, je vais vous citer une partie de l'éditorial du Devoir de ce matin, signé de son directeur, M. Claude Ryan.

M. Perron: II est très bon Ryan aussi, c'est un bon libéral.

M. Cordeau: Quand cela fait leur affaire, ils l'acceptent. "Après s'être juré, lorsqu'ils séjournaient dans l'Opposition, de ne jamais recourir à certaines méthodes autoritaires qu'il reprochaient alors au gouvernement Bourassa, il est plutôt ironique de constater que neuf mois à peine après leur arrivée au pouvoir les stratèges péquistes se voient contraints d'invoquer à leur tour une clôture jugée irrecevable il n'y a pas si longtemps. Ici comme en plusieurs autres domaines, le gouvernement Lé-vesque découvre les contraintes imprévues du pouvoir. Il prouve une fois de plus que l'on peut avoir la vertu facile dans l'Opposition, mais qu'une fois au pouvoir on doit agir avec les moyens du bord, lesquels, vu la très grande latitude laissée par notre régime aux partis d'Opposition, doivent parfois être brutaux. D'un point de vue technique, le gouvernement a raison d'agir comme le laissent entrevoir les deux motions dont était saisie hier l'Assemblée nationale. D'un point de vue plus large, il commet toutefois la même erreur que commit en 1974 le gouvernement Bourassa lors de l'adoption de la loi 22. Dans plusieurs secteurs d'activité visés par le projet de loi 101, il risque aussi d'infliger au Québec des contraintes législatives ou réglementaires adoptées à la vapeur, sans le tamisage approfondi auquel on eût été en droit de s'attendre. "Lors de l'adoption de la loi 22 en 1974, le gouvernement Bourassa avait commis l'erreur d'oublier que le parti ministériel, quelle que soit sa majorité, ne saurait constituer à lui seul tout le Québec. Sûr de sa force, il avait fermé l'oreille à plusieurs suggestions constructives qui lui venaient de l'Opposition ou de l'extérieur de l'Assemblée nationale. Enfin, au bout d'un certain temps, il avait imposé le bâillon à l'Assemblée, croyant ainsi tourner une page importante, mais ouvrant à son insu une blessure béante au flanc du parti majoritaire. "A peu de différences près, le même scénario se reproduit aujourd'hui. Ce qui est grave, ce n'est pas que le gouvernement se voie obligé d'invo- quer la clôture pour faire adopter son projet de loi. L'Assemblée étant formée de députés qui restent humains, le danger d'un abus des procédures de la part des groupes d'Opposition n'est jamais exclu. Pour faire face à une telle situation, les règlements parlementaires prévoient avec raison la possibilité de recours draconiens comme ceux qui viennent d'être invoqués par le gouvernement. Le mal n'est donc ni dans l'existence, ni dans l'invocation du règlement de clôture. Il est plutôt dans le fait que, pour une deuxième fois consécutive, à propos d'une question aussi fondamentale que la question linguistique, un gouvernement québécois se croit suffisamment en possession de la vérité pour estimer devoir lever le nez sur des solutions qui traduiraient un large accord de tous les partis responsables autour de certains objectifs minimaux".

Une Voix: C'est un nouveau député, Ryan?

M. Cordeau: Mme le Président, si j'ai cité M. Claude Ryan, c'est que je désirais que soit inscrite au journal des Débats cette partie de cet éditorial.

M. Brassard: Ah bon!

M. Bisaillon: On ne s'en serait pas douté.

M. Cordeau : Je vais répéter ce qu'un autre a dit, est-ce qu'ils sont tous dans leur niche pour grogner comme cela?

M. Brochu: Surtout de la part de l'ancien président qui vient d'occuper le fauteuil de la présidence. Il serait beaucoup plus de rigueur d'observer le silence et le règlement.

Mme le Vice-Président: Je vais devoir vous rappeler à l'ordre, messieurs, aussi bien des deux côtés. Je pense que le leader de votre parti voulait probablement défendre votre droit de parole, M. le député de Saint-Hyacinthe, sauf qu'il le faisait assis.

M. le député de Gatineau sur une question...

M. Gratton: Premièrement, est-ce qu'on pourrait demander au député de Montmagny-L'Islet...

Mme le Vice-Président: M. le député. M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: C'est parce que c'est le député de Montmagny-L'Islet qui dérangeait tout le monde dans la "pool room". Il a compris, il s'en revient de son côté.

Mme le Vice-Président: Je pense que vous vouliez agacer votre collègue.

M. Gratton: Non.

Mme le Vice-Président: Surtout pas. M. le député de Saint-Hyacinthe, c'est vous qui avez la parole.

M. Gratton: ... des communications de l'avoir réveillé. Vous pouvez retourner à votre sommeil.

Mme le Vice-Président: Je vais devoir vous rap-peler à l'ordre, cette fois-ci, M. le député de Gatineau. N'en mettez pas trop, je vais devoir vous rappeler à l'ordre, autrement.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, Mme le Président.

M. Brassard: Vous parlez en votre nom, là?

M. Cordeau: Pardon? M. le député de Lac-Saint-Jean voulait avoir son nom dans le journal des Débats. Il vient de dire un mot.

Voulez-vous rappeler votre meute?

Mme le Vice-Président: Après cette mise au point, M. le député de Saint-Hyacinthe, allez-y donc de votre intervention.

M. Cordeau: Cette citation décrit tellement bien les faits actuels, soit ceux qui se sont passés à la commission parlementaire, d'une part, et qui se déroulent actuellement dans cette Assemblée, d'autre part.

Il est bien entendu que nous appuyons le gouvernement concernant plusieurs énoncés de principe contenus dans ce projet de loi. Par contre, nous aurions aimé que le gouvernement se montre un plus réceptif aux suggestions vraiment positives qu'a présentées l'Opposition. Mais l'intransigeance du ministre, parrain de ce projet de loi, a complètement empêché l'Opposition de remplir son rôle. Par contre, ce gouvernement aura à répondre à toute la population de son arrogance et de son manque de réalisme.

Quant à nous, nous avons accompli notre devoir. J'espère que c'est la dernière fois que cette guillotine opérera et que, dorénavant, les gouvernements en place sauront agir avec prévoyance et discemement.

Le Président suppléant (M. Marcoux): II vous reste deux minutes pour conclure... J'ai ajouté les deux minutes, parce que je pense qu'on vous a enlevé à peu près ce temps.

M. Cordeau: J'en ai assez, de temps. M. Brochu: Pensez-vous, M. le Président.

M. Lavoie: C'est au moment où vous l'avez interrompu vous-même, alors que vous occupiez votre fauteuil.

M. Brochu: Je m'excuse auprès de mon collègue. Sur la question de règlement, j'aimerais vous féliciter, M. le Président, parce que depuis que vous occupez le fauteuil, le député de Rimouski est beaucoup plus sérieux en cette Chambre, il n'est pas intervenu pour interrompre le député de Saint-Hyacinthe. Je vous félicite de votre beau travail.

Le Président suppléant (M. Marcoux): J'accepte avec humour cette remarque du leader adjoint de l'Union Natinale.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau : M. le Président, ce qui me surprend le plus, c'est la volte-face du premier ministre suite à son engagement lequel est inscrit au journal des Débats à la page 2263 du 21 juillet 1977. Je suis à me demander ce que vaut l'engagement ou la parole donnée d'un homme qui occupe une si haute fonction.

Je suis porté à croire qu'il a dû faire une retraite stratégique devant l'attaque des membres de son caucus. Pour toutes ces raisons et bien d'autres, je ne pourrai appuyer cette motion intitulée "le rouleau compresseur".

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Shefford.

M. Richard Verreault

M. Verreault: Merci, M. le Président. C'est à croire qu'il n'y a qu'une seule chose dans cette Chambre qui semble importante, le projet de loi no 101 ou, si vous le voulez, la Charte de la langue française. Ce matin, le leader du gouvernement a inscrit au feuilleton, à l'article 1, une motion des plus antidémocratiques qui ordonne à la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications étudiant présentement le projet de loi no 101 que soit déposé à l'Assemblée nationale le rapport de ladite commission, demain le 24, avant les affaires du jour, et que cette commission mette fin aux travaux aujourd'hui même à 23 heures.

Le leader est sûrement égaré et se croit encore dans l'Opposition. Il oublie qu'il est le leader du gouvernement. Cela n'a pas de sens, il ne pense plus comme autrefois. Je veux bien croire que le promoteur de cette motion est fatigué, qu'il a travaillé très fort ces derniers temps. Tout de même, s'il est fatigué, il devrait faire comme tous les autres ministres et députés ministériels, prendre des vacances. J'écoutais, ce matin, le leader du gouvernement lorsqu'il a fait son discours. Il expliquait aux membres de cette Assemblée pourquoi nous devrions tous voter en faveur de sa motion. Je n'y ai constaté que du charriage.

J'écoutais, hier, le ministre des Transports, relativement à une autre motion semblable du leader obligeant les parlementaires d'accélérer les travaux de fin de session. Le ministre des Transports manquait tout autant d'arguments que son ministère manque d'argent de ce temps-ci. Il était ridicule en essayant de faire gober à cette Assemblée que la motion d'hier et celle d'aujourd'hui ont plus d'importance que celles présentées par son parti alors que nous étions au pouvoir.

Messieurs d'en face, ayez donc un infime soupçon d'objectivité!

Une Voix: Mesdames aussi.

M. Verreault: Ni le Parti libéral ni le Parti québécois n'a eu et n'a de raison majeure de recourir à des motions semblables pour obliger les membres de cette Assemblée à adopter en vitesse des lois qui nécessiteront éventuellement des amen-

dements et des retouches, faute de prendre le temps nécessaire pour les améliorer.

Le leader du gouvernement a fait l'étalage de statistiques démontrant la grande générosité de son parti envers les membres minoritaires de l'Opposition. Le leader n'a pas eu, à ce moment, la franchise transparente qu'il a d'habitude. Il sait très bien que, si cette tolérance a été accordée à l'Opposition, c'est que cette tolérance l'a très bien servi et a permis à son gouvernement d'adopter des lois qui avaient une valeur plus grande à la fin qu'à leur origine. Enfin, au lieu d'adopter bêtement des lois provenant d'un gouvernement improvisé et irresponsable, l'Opposition, par son travail infatigable et inlassable, recommandait au parti péquiste, qui dirige les destinées du Québec, des amendements de grande valeur qui redonnaient à ces projets de loi mal préparés un sens positif et bonifiait, par l'apport d'amendements provenant de l'Opposition, encore une fois, le contenu original de plusieurs d'entre eux.

Nul besoin n'est de vous rappeler la réimpression du projet de loi no 1 remplacé par le 101; nul besoin n'est de rappeler la réimpression du projet de loi 2 qui a dû être revu et repensé; nul besoin n'est de parler du projet de loi no 31 qui pénalise honteusement les municipalités du Québec, laissant supporter à ces dernières l'odieux d'un gouvernement qui a vraiment peur d'assumer ses responsabilités et qui, plus encore, n'est pas capable de respecter ses promesses électorales ainsi que toutes celles contenues dans son programme. Oui, ce programme qui a permis au Parti québécois de prendre, sous de fausses représentations, le pouvoir au Québec.

Mme le Président, comment les Québécois peuvent-ils avoir encore confiance en un tel gouvernement, en un tel premier ministre? M. le Président, Mme le Président, excusez-moi, vous savez, c'est comme le gouvernement, on change tellement souvent, parfois c'est madame, parfois c'est monsieur, alors je m'en excuse, madame.

Mme le Vice-Président: Je trouve que la raison pour laquelle vous vous excusez n'est pas la bonne, mais je prends très bien vos excuses, M. le député.

M. Verreault: Alors, ça va, madame, merci. Oui, Mme le Président, on a un premier ministre qui change de parole aussi souvent qu'il fume ses cigarettes. Les 41% des Québécois qui ont accordé leur confiance à ce gouvernement parce qu'ils croyaient que ce gouvernement péquiste les sauverait de tous les maux laissés par l'ancien gouvernement ont vite perdu leurs illusions et leur confiance pendant les neuf derniers mois d'administration de ce gouvernement.

Le premier ministre a dit et répété qu'aucune motion de fin de session ni aucune motion de clôture ne serait présentée par son gouvernement. En effet, un gouvernement, un nouveau gouvernement avec un nouveau style — et je vous dirais, Mme le Président, mon oeil, pour ne pas dire autre chose — nouveau style dans la prière, nouveau style dans les clôtures extérieures, intérieures, nouveau style dans la manière de taper des mains et, enfin, nouveau style dans plusieurs domaines sans importance. J'ai hâte de voir son nouveau style dans les questions économiques, dans les questions d'emploi, dans l'aide aux étudiants, dans l'aide aux agriculteurs, dans l'aide financière aux municipalités et dans d'autres domaines importants et majeurs. Non. On ne veut plus que l'on travaille en cette Chambre. On veut faire taire l'Opposition. Cependant, nous de l'Opposition sommes prêts à siéger jusqu'à Noël s'il le faut, et cela pour le bénéfice et l'intérêt de tous les Québécois.

La motion du député de Maisonneuve n'a pas de sens. Il a été lui-même défenseur des droits de l'Opposition alors que l'ancien gouvernement imposait de telles motions. Le leader disait ce matin que l'Opposition faisait de l'obstruction systématique lors de la commission parlementaire étudiant le projet de loi 101 article par article, et citait les articles de MM. Pépin et Rioux. Rien ne sert d'ajouter des commentaires à ce sujet. Vous comprendrez sans doute ce que je veux dire. Le Parti libéral, ainsi que l'Union Nationale, a contribué autant que possible à l'accélération des travaux en cette Chambre et en cette commission, et cette collaboration a permis au gouvernement de passer pour un peu plus intelligent que ce qu'il semble être. L'Opposition n'a pas agi comme l'a fait l'Opposition péquiste lors du projet de loi 22. Les gens de l'Opposition d'alors, les péquistes pour les nommer ainsi, ont mis dix jours à gueuler sur le premier article. Mme le Président, en mettant fin à la commission qui étudie le projet de loi 101, nous camouflons un nuage bien sombre, nous nuisons à la démocratie parlementaire et, surtout, le gouvernement se prive des sages suggestions de l'Opposition officielle.

Il est impossible, dans un laps de temps aussi court, de continuer à étudier en commission les articles restants de cette loi. Je ne suis pas le seul à douter de la transparence de ce nouveau gouvernement. Je suis davantage convaincu que ce gouvernement n'est pas un vrai gouvernement et qu'il n'est pas en mesure de diriger les destinées économiques, sociales et autres de la province de Québec.

Ce gouvernement est sur le point d'épuiser son répertoire de rengaines, après l'ancien gouvernement, le fédéral, les provinces, les Anglais. Il lui faudra bien qu'il se dise et nous démontre qu'il est là pour prendre ses responsabilités, qu'il est là pour bien diriger. Le gouvernement nous apportera les solutions qu'il avait dans Le bon vieux temps. Ils les mettront en pratique, les sortiront des tablettes poussiéreuses, et tout cela dans le meilleur intérêt de la population québécoise.

Il reste encore tant d'articles à étudier en commission. Nous sommes prêts à accorder notre concours, et cela en toutes circonstances, mais non à des motions comme celles présentées par le leader du gouvernement. Donc, Mme le Président, nous de l'Opposition redoublerons nos efforts et notre collaboration à tous les travaux parlementai-

res. C'est pourquoi je dois vous signaler que je voterai contre cette motion.

Mme le Vice-Président: M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, Mme le Président. On a discuté, échangé aujourd'hui sur la motion présentée par le leader du gouvernement inscrite à l'article no 1 de notre feuilleton, motion qui m'a particulièrement surpris lorsque j'ai pris connaissance de son inscription à notre feuilleton. Je tenterai de vous dire en quelques mots pourquoi j'ai été surpris du dépôt d'une telle motion.

Mme le Président, au lendemain de l'élection d'un gouvernement on est légitimement porté à émettre personnellement pour soi-même des commentaires, des considérations, des opinions sur ce que sera éventuellement le gouvernement qui vient d'être élu. C'est effectivement ce que j'ai fait quelques jours après l'élection. J'ai eu l'occasion de m'interroger personnellement, de faire des prospections, savoir comment cela irait avec cette nouvelle équipe, particulièrement pour l'avoir vu agir pendant trois ans lorsque j'étais membre de cette Assemblée, à l'époque où le gouvernement d'aujourd'hui formait l'Opposition officielle.

Je dirais, Mme le Président, que l'élection de tout nouveau gouvernement fait naître des espoirs et c'est légitime parce qu'une majorité, même si elle n'est que d'environ 40% dans leur cas, a fait en sorte que l'équipe à laquelle elle a donné leur appui forme le nouveau gouvernement. C'est particulier dans le cas du gouvernement du Parti québécois parce qu'on se rappellera comment ce parti politique, comment cette équipe, lorsqu'elle formait l'Opposition, avait suscité de nombreux espoirs chez les Québécois, chez tous ceux qui étaient intéressés par l'activité parlementaire ici.

Je me rappelle les nombreux discours que j'ai eu à entendre et où on retrouvait presque tout le temps les mots "participation" et "démocratie". Quelques jours après cette élection, le 26 novembre, le premier ministre annonçait la formation de son gouvernement. Il annonçait à grand renfort de publicité — c'était bien pompeux, vous vous le rappelez certainement — la nomination d'un ministre d'Etat à la réforme parlementaire.

Je me disais, moi, Mme le Président: Ces gens, pendant trois ans, ont été virulents, continuellement, de façon régulière, de façon soutenue, ils ont toujours parlé pour et au nom de la démocratie, pour et au nom de la participation, pour et au nom de l'élargissement du cadre législatif pour que les députés puissent vraiment participer aux débats et toujours contre des motions de cette nature. Je me suis dit: Probablement que c'en est fini des motions de fin de session.

Probablement que c'est chose du passé. C'est ce que je formulais, c'est ce que j'espérais. Inutile de vous dire que j'ai été drôlement déçu. D'autant plus que je me rappelais les nombreux discours qui avaient été formulés lors de la présentation de motions analogues, que ce soit par mon honorable collègue de Saguenay, qui est maintenant ministre des Transports, que ce soit par le député de Maisonneuve lui-même, le député de Sauvé.

Mme le Président, je suis certain que vous n'avez pas lu, vous n'en avez pas eu l'occasion et je vous comprends, vous êtes trop occupée et, à cette période, vous étiez occupée à des vacations autres que celle de siéger comme député. Si vous aviez entendu ces remarques, Mme le Président, c'étaient toujours des journées de deuil parlementaire, c'était toujours la grande noirceur législative. Je vous fais grâce de reprendre le journal des Débats — je le pourrais — et relire le savant discours, entre autres, du député de Sauvé. Vous ne me croiriez pas. Vous vous lèveriez, Mme le Président, j'en suis convaincu, et vous diriez: M. le député de Portneuf, même si le règlement ne le prévoit pas, je vous prie de déposer ce document. Je suis presque assuré que vous diriez cela parce que cela n'avait pas de bon sens et je ne veux pas reprendre ces textes, Mme le Président, parce que vous allez dire: C'est du pareil au même. Ce n'est pas cela. Ce serait certainement bien facile. Je ne le ferai pas.

Je me limiterai à vous dire, dans le cadre du débat sur cette motion, qu'on est d'autant plus surpris que, lors de la présentation du projet de loi 1, lors de la présentation du livre blanc — pour commencer — on avait fait état que les gens seraient consultés et qu'il y aurait une participation. Que les gens seraient invités à venir faire part de leurs commentaires. Ce fut le cas après le dépôt du projet de loi no 1. On a convoqué les organismes, on n'en avait pas entendu la moitié, Mme le Président, qu'on a dit: C'est fini, on a assez entendu, on a assez écouté, on retire le projet de loi.

Un autre projet de loi: 101. Celui-là, déférence à la commission parlementaire, étude article par article. On n'a pas commencé qu'on a taxé l'Opposition officielle de faire un "filibuster". Je vous ferai remarquer, Mme le Président, qu'on a près d'une cinquantaine d'articles d'adoptés. Je vous ferai remarquer — pour y avoir participé seulement une journée — chose très curieuse, que le gouvernement s'est toujours opposé à accepter quelque amendement que ce soit qui était proposé par les membres de l'Opposition. Et Dieu sait, Mme le Président — entre autres la journée où j'ai eu l'occasion de siéger — qu'il y a eu des amendements qui étaient quand même mineurs, qui, normalement, auraient dû être reçus de bon gré, des remarques judicieuses sur la langue de la Justice et de l'administration. On a fait fi de tout cela. On est à même de constater que les membres de la commission étaient un peu désemparés, mais on a quand même fait fi des remarques des gens qui étaient expérimentés, entre autres, des avocats, membres de la commission parlementaire et qui siégeaient pour et au nom de l'Opposition officielle.

De plus, ce qui témoigne et qui fait preuve que le gouvernement ne devrait pas présenter une motion comme celle-là, encore aujourd'hui, Mme le Président, au moment où on se parle, les infor-

mations sont en ce sens qu'il y aurait encore des amendements qui seraient déposés ou qui auraient été déposés il y a quelques minutes par le gouvernement dans l'étude du projet de loi, et la motion vient nous dire que les travaux doivent se terminer ce soir, à 23 heures, et le rapport fait demain. Ce n'est absolument pas acceptable. Quels sont les motifs que peut rechercher le gouvernement? J'en vois deux. Le premier motif, c'est le motif des vacances. D'accord que c'est la fin de l'été, d'accord qu'on est ici depuis le 8 mars et, comme le député de Beauce-Sud le disait tout à l'heure, on est en train d'établir un nouveau record à l'Assemblée. D'accord que plusieurs parlementaires sont fatigués; je n'en doute pas parce qu'on est à même de constater qu'il n'y en a pas un du Parti québécois qui veut se lever et nous dire pour quel motif on devrait être pour, il n'y en a pas. J'aurais aimé, j'aurais souhaité, j'apprécierais entre autres que mon collègue, mon bon voisin de Chauveau, le ministre des Affaires culturelles, profite du temps qui lui est alloué pour venir nous dire: M. le député de Portneuf, je ne suis pas d'accord avec vous et les motifs pour lesquels nous appuyons la motion sont ceux-ci...

Une Voix: II faudrait que l'abbé Dion soit là pour écrire un texte!

M. Pagé: La même chose pour le député de Saint-Henri, le ministre de l'Immigration. Je suis convaincu qu'il pourrait venir nous dire de façon sereine, de façon calme: On est pour cette motion pour tel et tel autre motif. Mais non, il n'en est pas question. Le premier motif que je vois, c'est de se dépêcher d'accélérer la fin des travaux pour qu'on puisse prendre des vacances, et encore là, pourquoi avoir ce motif? La très grande majorité des ministres, jusqu'à maintenant, ont pris leurs vacances, les députés aussi de façon rotative, c'était 15 ou 16 par semaine. Peut-être que, dans leur réponse, les députés ministériels pourront me confirmer cela. Leurs vacances sont prises, ils ont eu l'occasion de bénéficier des beaux jours de l'été. Si ce n'était pas au Québec, c'était à l'extérieur parce que plusieurs d'entre eux, au grand désarroi du ministre du Tourisme, sont allés se promener à l'extérieur. Ce n'est pas ce motif.

L'autre motif, c'est la rentrée des classes. C'est un motif qui est tout à fait légitime auquel, d'ailleurs, le chef de l'Opposition officielle a souscrit. Notre proposition se voulait très positive, on a dit: Scindez votre projet de loi, nous sommes disposés à accepter la phase des trois lectures, une nouvelle loi qui pourrait être spécifique sur toute la question de l'enseignement étant donné qu'elle a été étudiée en commission parlementaire. On a voulu apporter notre contribution. Encore une fois, on s'est fait dire: Non. Nul besoin de vous dire que, pour tous ces motifs, je suis contre le dépôt de cette motion, mais je ne formule qu'un voeu. On ne le sait pas, peut-être que le gouvernement va retirer sa motion parce qu'il n'y en a pas encore qui ont eu l'occasion de parler, comme je le disais tantôt. Mais, même si le gouvernement vote pour la motion, j'espère que les remarques des députés de l'Opposition, parce qu'ils auront été les seuls à parler, somme toute, auront au moins contribué à sensibiliser le gouvernement sur cet épineux problème des fins de session. Je conclus, Mme le Président...

Mme le Vice-Président: C'est cela. Je voulais simplement vous rappeler qu'il vous reste tout au plus une minute et je vous demanderais de conclure.

M. Pagé: Tout au plus une minute. Bon. Ce que je disais, Mme le Président, c'était ceci. J'espère que l'intervention des députés de l'Opposition face à cette motion, même si elle ne fait pas changer la position du gouvernement, pourra au moins contribuer à sensibiliser ce gouvernement aux problèmes que comportent les fins de session. J'espère qu'à la lueur de la nomination d'un nouveau ministre d'Etat à la réforme parlementaire -c'est personnellement que je l'espère — des motions comme celles-là n'apparaîtront pas à notre feuilleton. On a déjà parlé de la possibilité de sessions à date fixe, on a parlé de la possibilité de différents amendements ou modifications à notre système parlementaire. Je formule le voeu, bien respectueusement, Mme le Président, que l'honorable leader du gouvernement continue à travailler de façon acharnée là-dessus, de façon très forte et que, dans le plus bref délai et si possible pour la prochaine session, il ne nous amène pas des motions comme celles-là. Il sera, je l'espère, exempt de subir l'odieux qu'il subit actuellement.

M. Burns: Je vous le promets.

M. Pagé: Vous le promettez formellement, de votre fauteuil. C'est bien.

M. Burns: Oui, formellement, de mon siège. M. Marchand: Le premier ministre avait...

M. Pagé: L'Opposition aura au moins contribué à faire en sorte que le ministre se prononce.

Mme le Président, pour tous ces motifs, nous serons contre la motion. Comme je vous le disais tantôt, j'apprécierais que les savants collègues qui forment le gouvernement puissent venir nous dire quels sont les motifs pour lesquels — vous avez le droit, vous savez, de parler, entre autres les députés d'arrière-ban qui ne parlent pas souvent, vous pouvez parler, vous avez le même revenu que nous, vous représentez des électeurs — on devrait être pour et quels sont les motifs pour lesquels ils sont pour cette motion. Je serais bien heureux de les entendre.

Mme le Président, je vous remercie beaucoup.

M. Burns: C'est fini.

Mme le Vice-Président: II est 18 heures, M. le député de Jacques-Cartier... M. le député de Jacques-Cartier a déjà parlé. C'est M. le député de Robert-Baldwin.

M. O'Gallagher: Je voudrais demander la suspension de nos travaux jusqu'à ce soir 20 heures.

Mme le Vice-Président: D'accord, c'est vous qui aurez la parole à la reprise du débat. Il est 18 heures. Cette assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

Reprise de la séance à 20 h 10

Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Sur la motion du leader parlementaire du gouvernement, M. le député de Robert Baldwin avait la parole.

M. Marchand: Mme le Président, est-ce que je pourrais vous demander une directive?

Mme le Vice-Président: Faites toujours, M. le député de Laurier.

M. Marchand: Puisque vous avez suspendu les travaux à 6 heures et que vous les avez commandés pour 8 heures, je signale qu'il est 8 h 11 et je vous demanderais qui vous avez attendu puisque le parti de l'Opposition officielle était présent à l'Assemblée nationale. Vous avez attendu les membres du parti séparatiste pour ouvrir l'Assemblée, ce soir.

M. Bisaillon: Ce n'est pas une directive. En quoi ce serait une directive? J'aimerais cela le savoir.

M. Perron: Le député de Laurier a l'intention de charrier tout le reste de l'année.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le député! A l'ordre!

M. Ouellet: II n'a même pas son permis de transport en vrac.

Mme le Vice-Président: Je vais quand même rendre la justice. Ce ne sera pas une directive, ce sera simplement un commentaire. Quand je suis entrée à l'Assemblée quelques secondes avant huit heures, il y avait déjà cinq députés du parti de l'Opposition officielle qui étaient là. Est-ce que cela vous fait plaisir, M. le député de Laurier?

M. Marchand: Merci, madame.

Mme le Vice-Président: Le plaisir est pour moi.

M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, Mme le Président. Je vais commencer mes remarques sur la motion du leader du gouvernement qui vise à "clôturer" l'Assemblée nationale par un bref résumé de tout le scénario politique que nous avons vécu ensemble, ici, depuis le 1er avril. On a eu, d'abord, le 1er avril, le livre blanc; ensuite, le projet de loi no 1, suivi de la commission parlementaire pour entendre le public et où on a entendu seulement 60 mémoires sur les 260 qui ont été envoyés au gouvernement.

On a mis aux oubliettes 200 mémoires, préparés par des citoyens qui se sont donné de la peine

et ont fait des dépenses pour apporter des critiques objectives et positives sur ce projet de loi. Tous ces mémoires sont allés au panier. Le gouvernement ne voulait pas écouter la population. On a eu ensuite le truc politique, la trouvaille du siècle, l'introduction du projet de loi no 101 pour bâillonner le projet de loi no 1.

Après cela, on s'est fait enterrer par une pile de statistiques et de pronostics préparés par des démographes engagés par le ministre d'Etat au développement culturel; après cela, la commission parlementaire pour l'étude article par article où les représentants du gouvernement ont refusé d'écouter le gros bon sens de l'Opposition. Maintenant, la guillotine!

Notre bon gouvernement transparent vient, par cette dernière motion de clôture, de mettre ses cartes sur la table, après tout ce scénario du livre blanc, du bill no 1, de la commission parlementaire, du public où seulement 60 des 260 mémoires ont été entendus, le bâillon de la commission par la substitution au bill 101 et finalement le bâillon du bill 101. C'est vraiment évident que les extrémistes, dans ce gouvernement arrogant, abusent de leurs pouvoirs, de la confiance du peuple et de la démocratie. Il est bien évident pour la population que le projet de loi est tellement excessif, punitif et coercitif que le gouvernement est obligé de se servir de moyens draconiens pour lui donner force de loi par la porte d'en arrière.

Dans tout ce scénario, où est notre premier ministre? Dans ce malheureux scénario, il est tiraillé, de ses propres mots; il a honte de s'asseoir à son fauteuil pendant la présentation du projet de loi no 101, il a trop honte même pour se montrer aux nombreuses commissions sur les bills 1 et 101.

Où est-il ce premier ministre? Il est sur les plages du Maine pendant qu'on se fait passer un sapin.

M. Burns: Allons donc!

M. O'Gallagher: Sur les plages du Maine ou caché dans le "bunker" de l'autre côté de la rue pendant que ses ministres posent des gestes qui vont certainement causer des divisions entre les différentes communautés qui forment la population du Québec. Rappelons-nous, Mme le Président, les paroles du premier ministre sur cette motion de clôture, paroles qu'il a prononcées dans cette Chambre le 21 juillet 1977. Cela a déjà été dit aujourd'hui, mais cela mérite d'être répété. Je cite le premier ministre, dans le journal des Débats du 21 juillet: "L'Opposition ne s'est pas fait enlever ses mercredis, on n'a pas modifié les heures normales de session en vertu de la traditionnelle motion qui vient ordinairement bien plus vite que cela, motion qui vise essentiellement, et tout le monde le sait, à exténuer l'Opposition et à essayer de charrier et de "bulldozer" des fins de session ou des veilles d'ajournement. Il n'a pas été question d'enlever à l'Opposition le droit de présenter des motions de blâme en vertu de l'article 34". Je continue: "Donc, nulle part il n'a été question de brimer — d'une façon qu'on puisse appeler un comportement habituel, loin de là, c'est exactement l'inverse — les droits parlementaires et démocratiques, fondamentaux de l'Opposition", etc. Plus loin dans le même discours: "Là-dessus, je voudrais en profiter, justement, parce que la première session d'un gouvernement, qui dure et qui s'éternise au mois de juillet, qui s'en va vers le mois d'août et qui, sait-on jamais...

M. Burns: Cela va continuer en septembre.

M. O'Gallagher: Cette première session... parce qu'on ne "bulldozera" pas le Parlement..." Imaginez-vous donc! Les mots de notre premier ministre.

Un vrai gouvernement ouvert et honnête. En quelques jours, nous avons une suspension des règles de la Chambre et une motion de clôture sur un projet de loi qui fera l'objet de procédures judiciaires éventuelles surtout à cause de son esprit de vengeance.

In a way, I don't think the government had much of a choice, Madam President, because this kind of a law can only be imposed by closure, a law that has to be modified, will have to be modified, will be challenged in the courts and will be challenged by the Commission des droits de la personne.

En terminant, Mme le Président, je voudrais seulement dire que cette motion de clôture que fait à sa première session le Parti québécois aura le même résultat que la motion de clôture dans le cas du projet de loi 22 en 1974. La population ne pardonnera pas à la prochaine élection. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Laurier.

M. André Marchand

M. Marchand: Mme le Président, c'est à l'instar de toute la population du Québec que je me sens obligé de m'adresser à vous pour vous parler quelques instants sur la motion du député de Maisonneuve, motion qui se lit comme suit: "Que conformément à l'article 156 du règlement, le rapport de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications sur l'étude du projet de loi 101, "Charte de la langue française", après la deuxième lecture soit déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977". C'est une motion, Mme le Président, qui sûrement parle de la commission parlementaire...

Mme le Président, je me lève pour vous parler de cette motion du député de Maisonneuve, un des députés séparatistes qui avaient le plus dénoncé ces motions comme ses collègues séparatistes de l'Opposition du temps.

Est-ce que ceux qui sont ici pourraient se lever et dire ce qu'ils pensent? En effet, Mme le Président, je suis fatigué, tanné, écoeuré, comme la population du Québec, d'entendre parler de la

question linguistique. Devant la défaite totale de ce parti au pouvoir, de ce bon gouvernement, devant le fait économique désastreux que l'on connaît au Québec, devant la fuite des capitaux que l'on connaît au Québec, devant la fuite des "jobs" pour nos travailleurs, Mme le Président...

M. Perron: Des emplois.

M. Marchand: Cela vous fatigue des "jobs". Créez-en donc et arrêtez donc de crier et levez-vous pour dire ce que vous avez à dire.

M. Perron: II est choqué.

M. Marchand: Vous êtes trop lâches pour vous lever.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marchand: Vous êtes comme des coquerel-les, à la minute que quelqu'un parle et qu'il dit quelque chose qui a de l'allure, vous vous sauvez. D'habitude, vous avez de la misère à faire le quorum ici, à l'Assemblée nationale.

Mme le Vice-Président: M. le député de Laurier, je vous rappellerais à l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais aux députés de laisser parler l'intervenant. Il est bien sûr que les digressions sont faciles quand on est provoqué. Je vous demanderais, M. le député de Duplessis, de laisser l'intervenant faire son discours.

M. le député de Laurier.

M. Burns: II n'est pas fin. Il n'est pas gentil.

Mme le Vice-Président: Sur la motion, M. le député de Laurier.

M. Marchand: Mme le Président, en écoutant le député de Maisonneuve, je me souviens très bien de sa gentillesse et je vais essayer de l'imiter. Ce ne sera pas une chose facile d'aller aussi loin qu'il allait lorsqu'il était de ce côté de l'Assemblée nationale.

Mme le Vice-Président: M. le député de Laurier, je dois vous rappeler à la pertinence du débat.

M. Marchand: Mme le Président, je vous dis que, devant la fuite des "jobs" pour nos concitoyens du Québec, devant les lacunes sans précédent du placement étudiant pour cet été 1977 et pendant que nos valeureux députés de l'Opposition officielle travaillent d'arrache-pied à essayer de bonifier cette loi 101 qui nous mène justement à la loi 401, Montréal-Toronto, le premier ministre a fait des déclarations de bon petit premier ministre.

Je pense, Mme le Président, que je dois vous citer le député de Taillon, journal des Débats, le 21 juillet 1977: "...parce qu'on ne "bulldozera" pas le Parlement, on va laisser aller la législation jusqu'à sa conclusion normale." Et un peu plus bas, il continue: "II n'est pas question de commencer ces procédures d'étouffement du mois de juillet et du mois d'août qu'on a trop vues. Je me souviens d'en avoir souffert et je ne le ferai pas." Je viens de citer le premier ministre actuel de la province de Québec, ce bon petit premier ministre. Nous l'avons vu à St. Andrews et la population a comparé les photos des journaux de ce bon petit premier ministre en manches courtes alors que tous les autres premiers ministres étaient habillés convenablement et représentaient leur province.

M. O'Neill: II n'est pas gentil!

M. Burns: Vraiment, il n'est pas fin!

M. Marchand: Mme le Président, je ne suis peut-être pas fin, mais il y a certaines vérités qui doivent être dites et c'est unique dans les annales de la province de Québec, dans les annales des Parlements. On essaie d'adopter une loi 101, la loi de la langue officielle au Québec, qui avait été adoptée par l'ancien gouvernement, d'ailleurs, et à ce moment-là, on combattait pour dire: La seule langue officielle! Et aujourd'hui, nommez-moi donc le gouvernement qui a eu le courage de dire: La seule langue officielle au Québec! Il n'a pas le courage de faire ce qu'il prônait lorsqu'il était de ce côté-ci de la Chambre. Pendant ce temps, le premier ministre se promène dans le Maine avec sept de ses ministres au lieu d'être ici. Il n'a pas le courage d'aller une seule fois en commission parlementaire et n'est pas en Chambre pour voter sur le projet de loi 101.

En effet, pendant qu'à la commission parlementaire nos députés de l'Opposition, nos valeureux députés — vous me le faites dire et cela me fait plaisir de rendre un hommage tout particulier à ces gars — travaillaient très fort à essayer de bonifier ce projet de loi, le premier ministre se prélasse sur les plages du Maine et s'en va à St. Andrews. C'est important de s'en aller à St. Andrews.

J'étais bien fier qu'il y aille, mais j'aurais aimé qu'il fasse comme il faut. Au lieu d'aller là-bas, en manches courtes, il aurait pu arriver comme il au-raît dû arriver ici à l'Assemblée nationale, lorsque vous avez été élus le 15 novembre, avec des projets de loi sur l'économie et non pas sur la langue; c'était fait par le Parti libéral. Il aurait dû arriver ici avec des projets de loi sur l'économie pour faire travailler nos travailleurs du Québec et non pas les laisser chômer comme ils le font actuellement. On ferme les usines, on transporte les capitaux en Ontario, dans le Maine, aux Etats-Unis, à Miami, partout. Cela aurait peut-être fait une petite différence. C'est une chose que vous autres vous ne connaissez pas, parce que vous n'avez peut-être jamais rien administré dans votre vie. Il serait à peu près temps que vous commenciez et il serait peut-être temps que le...

M. Boucher: ... voler.

M. Marchand: ... premier ministre commence à administrer quelque chose dans sa vie.

M. Gendron: Mme le Président, sur la motion, autant que possible.

Mme le Vice-Président: Vous êtes bien éloquent, mais vous seriez peut-être mieux de revenir à la motion. En tout cas, que cela me paraisse plus évident que vous parliez sur la motion.

M. Marchand: Mme le Président, en revenant sur la motion, je sais qu'en commission parlementaire il s'est discuté de beaucoup de choses. Ce n'est pas fini, plusieurs articles ont été sautés et seront négligés. Des mémoires ont été déposées en commission parlementaire, mais on a empêché environ une centaine de mémoires d'être présentés.

Une Voix: 204.

M. Marchand: 204, cela ne s'est jamais vu, Mme le Président, c'est encore un précédent que ce bon petit gouvernement fait avec un bon petit premier ministre. Vous avez vu la caricature du journal, hier matin; elle était drôle un peu, mais cela représentait bien ce qu'est le gouvernement actuellement, des petits poils et des hommes qui s'en vont discuter de choses sérieuses.

M. Burns: II n'est pas fin.

M. O'Neill: II est pittoresque, par exemple. Il n'est pas fin, mais il est pittoresque.

M. Marchand: Vous avez déjà été tellement fin que cela me fait plaisir de vous répondre, M. le député de Maisonneuve, et vous le savez d'ailleurs.

M. O'Neill: II est même amusant. M. Burns: Soyez donc gentil un peu.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, M. le député! M. le député de Laurier, je dois vous rappeler que vous devez terminer dans quelques secondes, une demi-minute à peu près.

M. Marchand: Je terminerai dans quelques secondes, Mme le Président. Avec votre beau sourire, il me fait plaisir de vous souhaiter la meilleure des nuits et un beau bonsoir et merci de m'avoir écouté, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: J'aimerais mieux que vous parliez sur la motion, M. le député.

M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: Mme le Président, encore une fois, je me sens le coeur peiné de voir mon collègue d'en face, député de Maisonneuve, ministre d'Etat à la réforme parlementaire, avoir à présenter une telle motion de clôture, communément appelée guillotine, en plus de la motion de fin de session dont le vote a été pris hier.

Cela veut dire que dans l'espace de 72 heures, nous avons eu deux couperets qui sont tombés sur la tête du Parlement. Ce que je regrette de la part du leader parlementaire du gouvernement, c'est que je me rends compte aujourd'hui — et c'est peut-être malheureux — qu'il n'a pas encore atteint sa période de recyclage. On a l'impression qu'il est encore dans l'Opposition, lui qui, depuis huit mois, près d'un an même, s'est affublé du titre pompeux de ministre de la réforme parlementaire. Vous savez — vous étiez là comme vice-présidente, tous nos collègues sont les mêmes qui sont ici depuis près de huit ou neuf mois — ce nouveau titre c'était une primeur. On n'a jamais eu de ministre superministre ministre d'Etat à la réforme parlementaire. C'est la première fois.

M. Marchand: C'est un grand bonhomme.

M. Lavoie: Ce superministre, avec cette primeur, nous a bourré les oreilles, depuis le début, d'un calendrier sessionnel, de dates sessionnelles. C'était au mois de décembre 1976, lors d'une mini-session. En mars il nous a promis que le 24 juin on serait tous retournés chez nous. Le calendrier scolaire, c'est vers le 24 juin et la rentrée des classes, normalement, c'est à peu près dans une semaine. Mais on est toujours ici. Il nous a promis, dans un mandat qui vient de l'Exécutif — d'ailleurs, je vais parler sur la motion du manque de planification et je veux déceler où se trouve la responsabilité du fouillis législatif dans lequel nous sommes actuellement — et je relie justement le fouillis de ce prétendu mandat qui vient de l'Exécutif, de l'autre côté de la rue, sur la Grande-Allée, où on a voulu revaloriser le rôle du député... Les députés, en ce qui me concerne, il y en a plus à votre droite qu'à votre gauche. Je serai curieux, dès que le temps va nous le permettre, après la session, de faire un relevé des députés ministériels qui ont participé aux débats de fond sur le projet de loi no 2, sur le projet de loi no 101, sur le projet de loi no 48, sur le peu de projets de loi qu'on a étudiés depuis six mois qu'on siège. Cela va être curieux de voir combien il y a eu de participation du côté ministériel dans le fameux mandat de la revalorisation du rôle de député par le premier superministre de la réforme parlementaire, une primeur au Québec.

Troisième objet de son mandat: respect de l'Opposition, revalorisation de l'Opposition. C'est nous de ce côté-ci. On a deux couteaux dans la même semaine qui tombent, deux bâillons, suspension des règles. On peut siéger, c'est voté depuis hier, comme on dit — cela doit être en vertu de la loi 22 — "around the clock". On peut siéger 24 heures par jour, "around the clock". Maintenant, nous allons devoir voter d'ici quelques instants sur la motion voulant que la commission sur le projet de loi no 101 termine ses travaux à 11 heures ce soir, fasse rapport, et ce sera la troisième lecture à la vapeur.

Il y a six mois que nous siégeons, un record,

une autre primeur, 98e journée de session aujourd'hui. Ensemble, si vous voulez, nous allons essayer — je n'ai pas le temps de faire le bilan de cette fameuse session... Un nouveau gouvernement qui apportait comme une planche de salut au Québec.

Le Québec était sauvé, tout le monde parlerait français et il n'y aurait plus de chômage. Dans l'agriculture, on réglait cela; il n'y avait plus de problèmes pour les agriculteurs. Le 15 novembre, il n'y avait plus de problèmes au Québec; tout le monde changeait et s'en allait dans l'au-delà. C'était cela, le 15 novembre. Qu'est-ce que nous avons comme bilan législatif? 29 bills publics et 17 bills privés. Ce sont les lois qui, après 100 jours de session, sont votées.

J'ai vécu une prétendue période de déblocage comme eux en ont promis une au peuple québécois le 15 novembre. J'ai vécu la session de 1960, le début de la révolution tranquille où j'ai siégé pour la première fois ici, au Québec. Entre le 10 novembre 1960 et le 10 juin 1961, en sept mois dont trois semaines d'intersession entre le 22 décembre et le 10 janvier 1961, il s'est adopté au Québec, sans clôture, sans motion de fin de session — cela n'existait même pas dans notre règlement — 188 lois dont 95 lois publiques, comparativement à 29 aujourd'hui, et 93 lois privées comparativement à 17 aujourd'hui. Et pas des lois de moindre importance. Mes dix minutes ne me permettent pas de vous donner la nomenclature des lois, mais je vais vous en énumérer quelques-unes.

La Loi du contrôle budgétaire qui est encore en vigueur au Conseil du trésor; la Loi du Conseil d'orientation économique du Québec; une loi instituant un nouveau ministère, le ministère des Affaires fédérales-provinciales; une loi instituant un nouveau ministère, le ministère des Affaires culturelles. C'est daté de 1960, à votre meilleure époque, à l'époque du "Chrétien et les élections"; la loi instituant une commission royale d'enquête sur l'enseignement, la commission Parent; la loi concernant la gratuité de l'enseignement et la fréquentation scolaire obligatoire. Toujours dans la même session, la loi conférant aux parents, le droit de vote aux élections scolaires; je me dépêche. Loi instituant un autre ministère, le ministère du Revenu qui n'existait pas; une Loi instituant même le premier ministre actuel, la loi instituant le ministère des Richesses naturelles, dont le premier ministre a été le premier titulaire.

M. Lamontagne: Cela n'a pas été notre meilleure!

M. Lavoie: Loi constituant l'Office des autoroutes du Québec. J'en saute, je saute une quinzaine de lois. Dans la même session, sans guillotine et sans clôture, mais avec un peu plus de planification: Loi pour assurer l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile, 1960.

Mme Payette: II était temps qu'on s'en occupe.

M. Lavoie: Loi instituant l'assurance-hospitalisation, dans la même session, sans guillotine et sans suspension des règles.

Mme Payette: Cela a-t-il été préparé par l'Opposition?

M. Lavoie: Loi concernant la Régie des alcools du Québec, 66 pages, cette loi, avec 300 ou 400 articles. C'est dans la même session. Ce gouvernement d'en face, le grand sauveur du Québec, n'a aucune mesure économique, sauf la loi 48 pour les petites et moyennes entreprises. C'est ce gouvernement, élu sous de fausses représentations, qui se présente devant la population en disant qu'il va régler tous les problèmes au Québec avec 29 lois publiques et 17 lois privées, avec une suspension des règles et une motion de fin de session qui nous fait siéger 24 heures par jour, avec une guillotine qui n'existait même pas à l'époque.

Le grand coupable n'est pas l'Opposition; c'est le gouvernement qui nous fait perdre du temps en inscrivant au feuilleton des motions comme celle qu'on a débattu lundi, entre autres, et qui n'était même pas nécessaire sur le projet de loi no 101. Vous imaginez que le gouvernement, en 1960, avait une Opposition nombreuse; il y avait 50 députés au pouvoir et 40 députés dans l'Opposition.

Mme Payette: Quel parti?

M. Lavoie: C'était le Parti libéral, j'en suis fier et c'est à cause de cela que je suis encore libéral et que je resterai libéral!

Des Voix: Oh!

M. Lavoie: II me reste combien de temps? Une minute?

Mme le Vice-Président: M. le leader, vous devez conclure.

M. Burns: II y a des gens, comme cela, qui n'évoluent pas.

M. Lavoie: Si on arrête de m'interrompre, Mme le Président...

M. Burns: II y a des gens, comme cela, qui n'évoluent pas.

Mme Payette: Cela faisait une belle fin cependant.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Comment voulez-vous que le leader de l'Opposition officielle puisse intervenir si on ne tient pas l'ordre plus que maintenant dans cette Assemblée? Je vous demanderais de respecter le droit de parole.

M. Lavoie: Je dis, pour terminer, que cette guillotine n'était pas nécessaire, que le gouvernement aurait dû accepter notre suggestion de diviser le projet de loi pour la rentrée scolaire, les huit, neuf ou dix articles qu'il y a dans la loi 101. Encore là, cela aurait dû être une loi spéciale relevant du ministère de l'Education, ce serait réglé. Cela a été étudié en commission, il y aurait une rentrée normale des classes au mois de septembre. Mais les 200 articles qui regardent la Charte de la langue française, la langue du travail, la langue de l'administration, la langue de la législation, la langue de la justice, je ne suis pas scandalisé. Pour les Canadiens français du Québec, c'est une loi qui ne devrait pas être étudiée dans trois mois, six mois, neuf mois...

M. Burns: Fini.

M. Lavoie: Et surtout pas dans un mois. Je vous donne comme exemple la loi 65, Loi sur les services de santé et les services sociaux, une loi importante mais encore moins importante que la loi 101, a été étudiée du 8 juillet 1971 au 24 décembre 1971, sans guillotine, sans clôture. Une dernière loi, la loi 250, le Code des professions, très important, qui avait beaucoup d'implications mais encore moins que la loi 101 qui a une implication sur tout un peuple, qui a été commencé en 1971, a été étudié en 1972 et a été adopté le 6 juillet 1973, sans guillotine et normalement. Je vous dis qu'il ne devrait pas y avoir de guillotine pour une loi aussi importante, avec autant d'implications pour tout un peuple, le peuple québécois, 6 millions de personnes. Il n'y aurait pas de scandale à étudier cette loi durant un an et on pourrait trouver vraiment un consensus québécois pour un meilleur ordre, l'unité du Québec. Je vous remercie, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: Mme le Président, en tant que parlementaire avec un peu d'expérience dans cette Chambre, j'ai toujours pensé et j'ai toujours cru qu'on devait appliquer des motions de clôture, des motions de fin de session quand c'est absolument nécessaire, quand il y a une raison fondamentale pour poser un geste semblable. Normalement, une motion de fin de session s'applique pour que les députés prennent un peu de repos, un peu de vacances, et quand on doit adopter des lois d'une certaine importance. Mais ici, ces deux motions, celle d'hier et celle d'aujourd'hui, sont toutes basées non sur des lois importantes, mais sur une loi en particulier. Je dois dire que c'est vraiment contre toute tradition parlementaire qu'on fasse une motion de fin de session pour une loi. Ce débat de deux jours qu'on a sur cette motion est un gaspillage de temps complet. Et le gouvernement vient ici aujourd'hui avec une motion de clôture en disant qu'on doit sauver du temps. Ils ont gaspillé le temps jusqu'à maintenant. A part le gaspillage de temps que le député de Laval a décrit, on est ici depuis le mois de novembre, on n'a adopté presque aucune loi, mais sur les détails, les motions inutiles, les actions ridicules, je pense que la fameuse affaire du bill 1, bill 101 était un gaspillage de temps. La suspension des règles de procédure, hier et avant-hier, était un autre gaspillage de temps. On aurait pu employer tout ce temps pour étudier le projet de loi 101 en commission, comme on doit l'étudier. Comme d'autres orateurs l'ont dit, c'est une des lois les plus importantes de ce régime, et peut-être au Québec. On a essayé de nous "bulldozer", de passer cette loi à la vapeur.

Franchement, la seule raison qu'on peut avoir pour demander une motion de clôture, de guillotine, c'est qu'il y a vraiment un "filibuster" organisé, vraiment réel qui a empêché le gouvernement de travailler. Quand je dis travailler, cela veut dire étudier la loi article par article avec les amendements qui viennent du gouvernement ou de l'Opposition. Mais qu'est-ce qu'on a vraiment ici? Y a-t-il vraiment "filibuster"?

S'il y en a un c'est le côté gouvernemental qui le fait. Si on avait le droit, selon le règlement, de faire une motion de clôture, ce serait l'Opposition qui devrait le faire pour arrêter le gouvernement de faire un "filibuster".

J'ai passé seulement une journée comme membre de cette commission en remplacement d'un de nos quatre membres, qui ont fait un travail magnifique. J'ai vu dans ces journées que ce n'étaient pas nous qui faisions un "filibuster". On a présenté des amendements logiques, de bon sens. On n'a pas eu de réponse sur le fond de nos amendements, mais de grands discours propagandistes de toutes sortes du côté gouvernemental.

J'ai fait un petit relevé des gens des deux côtés qui ont parlé. Savez-vous, Mme le Président, que le côté gouvernemental a pris presque 40% du temps alloué à cette commission en parlant? Est-ce que c'est un "filibuster" quand l'Opposition prend seulement 60% du temps pour passer une centaine d'articles comme on l'a fait? Est-ce un vrai "filibuster"? Non, Mme le Président, c'est une vraie étude d'une loi comme il doit se faire dans un Parlement. C'est la raison d'un Parlement. Comme j'ai déjà dit, le mot Parlement veut dire parler. On doit parler, on doit savoir ce sur quoi on doit voter, quels sont les effets d'une loi.

La vraie raison de la clôture aujourd'hui c'est qu'on arrive à des articles très importants dans lesquels l'avenir du Québec est en jeu. Le gouvernement a peur de discuter de ces articles et de leurs conséquences en public. C'est la raison pour la guillotine aujourd'hui. On ne veut pas discuter les effets de la section du travail, des sièges sociaux, des entreprises. On ne veut pas discuter en public parce qu'on a peur. L'Opposition va montrer le vrai visage du gouvernement. On va montrer quels seront les effets néfastes de ces sections. Le gouvernement veut le cacher. C'est la raison de la clôture aujourd'hui. Il n'y en a aucune autre.

La seule raison qu'ils ont donnée à ce jour c'est le retour en classe des enfants au mois de septembre. Il y a deux choses que le gouvernement peut faire. L'une est très logique. On a déjà discuté des articles sur l'éducation. Faites une loi spéciale pour la section de l'éducation. On est prêt à la voter. Les enfants pourront entrer à l'école. Sinon, si on veut voir la grande charte de la langue française avec tout dans la même charte, on doit faire comme le premier ministre a dit, on doit siéger ici jusqu'à Noël. L'été est fini. On n'a rien à perdre. On est prêt à siéger jusqu'à Noël pour étudier cette loi article par article. Le public doit savoir ce qui se passe ici.

Pendant ce temps, la loi 22 est là encore. Le ministre de l'Education, au mois de décembre, était fier d'annoncer qu'il suivait les règles de la loi 22 pour protéger la langue française, pour protéger la collectivité française.On peut le faire encore cette année. Quel est le grand danger? Peut-être que 50 enfants iraient dans une école ou une autre et ils n'auraient pas le droit d'y être. Est-ce que l'avenir du Québec vaut ces 50 enfants? C'est ce qui est en jeu ici. On passe une loi à 100 milles à l'heure en fermant les yeux parce que c'est ce qui arrivera demain, avec le rapport. Le gouvernement va apporter des amendements. Même le gouvernement a des amendements, et pas seulement l'Opposition. Le gouvernement a admis que le projet de loi n'est pas bon. Il doit y avoir des changements.

Le gouvernement arrivera demain avec des amendements. On n'a pas le temps de les étudier. Les députés de l'Opposition ont dix minutes pour parler sur tous les amendements. On aura tout le livre bleu de l'Union Nationale, les quelque 100 amendements du Parti libéral et peut-être une centaine d'amendements du gouvernement, qui est prêt à admettre qu'il y a des lacunes dans cette loi. La réimpression, toutes les études, le livre blanc, le projet de loi 1, la réimpression, 101, et il reste encore des lacunes. Pourquoi? Parce qu'il y a des gens qui l'ont étudié. La meilleure place pour étudier une loi semblable article par article c'est en commission parlementaire où les gens qui sont préparés, en pleine connaissance de cause, peuvent plaider d'un côté ou de l'autre pour essayer de convaincre le gouvernement où il fait erreur.

Je n'ai jamais vu un projet de loi semblable, d'une telle importance où le gouvernement n'a pas accepté une recommandation de l'Opposition.

Pas une, il ne veut pas. Quelle était la raison pour la commission parlementaire? Seulement pour faire le show. Il a déjà décidé ce qu'il veut faire et la motion de clôture est une autre affaire, cela fait partie du spectacle. Il veut faire un spectacle pour les gens de cette province pour essayer de faire oublier les vrais problèmes. Comme le député de Laurier l'a dit, les vrais problèmes ne sont pas la langue. Les vrais problèmes sont la question des jobs, c'est ce que nos Québécois appellent des emplois, des jobs. Ce sont là nos besoins. C'est du camouflage que ce projet de loi 101. Même le gouvernement veut les camoufler par toutes sortes de moyens, des motions de fin de session, des motions de clôture. Pour ces raisons, Mme le Président, je trouve incroyable qu'à ce stade-ci, avec un projet de loi d'une telle importance, on essaye d'arrêter les débats. Pour ma part, j'ai honte de ce Parlement qui fait cela.

Mme le Vice-Président: M. le député de Roberval.

M. Robert Lamontagne

M. Lamontagne: Mme le Président, en relisant le début de l'article 156, qu'on invoque par la présente motion, les premières lignes mentionnent: "Lorsqu'une commission a étudié un projet de loi pendant une période de temps correspondant à l'importance ou à la longueur du projet de loi, le leader du gouvernement peut, sans avis, proposer, etc."

D'abord, il s'agit évidemment, comme tout le monde le conçoit, d'une mesure très exceptionnelle employée par le leader du gouvernement et, qui plus est, pour un projet de loi dont ce gouvernement, au point de vue de l'importance, a voulu presque imprégner son premier mandat. Ce projet de loi portait antérieurement le numéro 1. Je pense qu'en donnant au projet de loi sur la Charte de la langue française au Québec le numéro 1, le gouvernement a voulu témoigner publiquement de toute l'importance qu'il attachait à ce projet de loi. Ce qui fait qu'on est extrêmement surpris de voir que le leader du gouvernement se sert de l'article 156 pour décider que l'importance de ce projet de loi n'est plus aujourd'hui ce qu'elle était il y a quelques mois à peine.

Il faut se rappeler, Mme le Président, tout ce qu'on a pu entendre de la bouche même de tous les députés et ministres du Parti québécois, évidemment pas ici à l'Assemblée nationale car, d'un commun accord, assez incompréhensible, ils ont décidé de ne plus parler du tout, mais à l'extérieur de la Chambre. Tout le monde disait: La langue française, c'est fort important. En même temps on a assisté — et je pense que c'est fondamental de le rappeler, pour ceux qui sont plus ou moins familiers avec les règlements de l'Assemblée nationale — à la première lecture. Je porte à votre attention, Mme le Président, le fait que dans la population, la première lecture, qui équivaut tout simplement au dépôt d'un projet de loi, est souvent traduite par les media comme une chose fort importante, alors que, comme on le sait, les parlementaires sont appelés à voter une lecture alors qu'il n'ont pas en main un projet de loi. Nous avons eu le projet de loi no 1. Je pense que c'est bon de le rappeler. Nous avons régulièrement des visiteurs et je vais profiter de la présence de plusieurs d'entre eux, ce soir, pour dire que le projet de loi no 1, le gouvernement, malgré toutes les études — comme le leader de l'Opposition officielle le mentionnait tout à l'heure — alors qu'on prétendait avoir toute la vérité, après quelques semaines à peine de réflexion, on a décidé de ne plus en parler et de se lancer sur le projet de loi 101. Qu'est-il arrivé sur le projet de loi 101? On

l'a étudié en deuxième lecture et, par la suite, il a été transmis en commission parlementaire. Là, le 2 août, nous avons adopté en deuxième lecture le projet de loi no 101. Le leader du gouvernement, à l'occasion de rencontres privées, mais ayant déposé par la suite publiquement un document, a demandé à toutes les Oppositions d'adopter en dix jours en commission parlementaire, un projet de loi extrêmement important — je pense que tout le monde en convient— pour l'avenir des Québécois.

On a mentionné — je pense que cela mérite d'être noté — que nous n'aurions, à ce moment-là, qu'une journée pour étudier à la fois la langue de l'enseignement et d'autres articles, et également, parce qu'il y a eu un amendement à cet article, la proposition de réciprocité avec les autres provinces canadiennes.

Je pense que, dès ce moment, le gouvernement actuel avait décidé que plusieurs chapitres du projet de loi 101 ne seraient pas étudiés. C'est impossible que, fort de son expérience, le leader du gouvernement ait pu penser un instant que le projet de loi le plus important de son gouvernement serait adopté dans une période de dix jours, alors qu'on connaît toute l'émotivité et que l'on retrouve toutes les tendances à l'occasion de l'étude d'un projet de loi sur la langue ou même sur la religion, parce que peut-être en aurons-nous un un jour ou l'autre.

Malgré cela, pour bien s'assurer, dès ce moment, que le projet de loi serait adopté à la vapeur, il a demandé à ses représentants en commission parlementaire de ne pas permettre à tous les députés de s'exprimer en commission parlementaire. Il n'y a pas beaucoup de monde qui sait cela au Québec, et même ceux qui nous visitent, que des parlementaires n'ont pas eu le droit de s'exprimer en commission parlementaire, sauf en passant par le nombre qui était déterminé pour chacun des partis. Dans le Parti libéral que je représente, 4 députés seulement sur 26 avaient le droit, au cours d'une journée, de s'exprimer et, si un de nos membres n'était pas présent, il n'avait jamais le droit de se faire remplacer. Je rappelle à votre bonne attention, Mme le Président, qu'à l'occasion de la loi 22 tous les parlementaires de l'Assemblée nationale avaient eu le droit, et rapidement, de s'exprimer. Dès ce moment, on avait donc décidé que ce projet de loi, malgré son importance, n'était pas assez important pour être discuté par tous les parlementaires.

Arrive-t-il souvent que les lois ne sont pas étudiées article par article? J'ai ici — cela n'a pas pris un chariot pour le transporter — le résultat de huit mois de travaux à l'Assemblée nationale. Je vous dis que les projets de loi ne sont pas épais, c'est le cas de le dire. Pourtant, le premier, c'est le projet de loi no 3. C'est curieux, tout de même! On a le projet no 3, les projets nos 4, 5, 6, 7, sauf les projets de loi nos 1 et 2. Ce n'est pas pour rien qu'ils ne sont pas adoptés, Mme le Président. Ce n'est pas la faute de l'Opposition. On les a tous adoptés, ces projets de loi. Il y a eu le projet de loi 1, le projet de loi 101, les modifica- tions. Au moment où nous nous parlons, nous sommes informés par les media que le ministre responsable de ce projet de loi va déposer demain une série d'amendements. Seulement cette raison ne permettrait pas d'avoir une telle motion, parce que ce ne sont pas les Oppositions qui ont fait de l'obstruction. Le gouvernement, même après cette motion de guillotine, a présenté de nouveaux amendements et n'a même pas la décence de les présenter en commission parlementaire. Le ministre aurait pu au moins les présenter à ceux qui ont accepté d'être membres de cette commission depuis plusieurs mois; il va les présenter sous forme d'amendements.

Comme whip du Parti libéral, je tiens à dire de mon siège — c'est fort important de le mentionner — que lorsque le premier ministre du Québec, le 21 juillet dernier, a mentionné que ce projet de loi fort important, malgré ses tiraillements personnels, serait étudié même jusqu'à Noël, nous avons formé — et c'est moi qui l'ai formée — une équipe extrêmement présente, compétente, susceptible d'apporter aux débats en commission parlementaire des éléments positifs. Egalement, je pense que tous ceux qui ont participé aux travaux en commission parlementaire sont en mesure de rendre hommage à cette équipe que nous avons fournie à cette commission. Notre équipe a travaillé avec une ardeur vraiment remarquable pour présenter tous les amendements que nous pensions susceptibles d'être d'abord recevables et débattus et de nature à bonifier ce projet de loi.

Je pense, Mme le Président, pour cette équipe qui a donné son coeur, son temps et son temps familial au cours de ces derniers mois, c'est dur pour cette équipe de savoir qu'alors qu'ils avaient annoncé qu'ils étaient disposés à accepter sans discussion plus de 150 articles, leur travail va finir par une motion de clôture.

Je pense, effectivement, comme on l'a dit plus tôt, que ce n'est pas la trouvaille du siècle, et surtout ce n'est pas rendre hommage aux parlementaires. Je l'ai dit hier et je le répète aujourd'hui, vu que mon temps est terminé, c'est une autre journée noire du parlementarisme québécois.

Mme le Vice-Président: Le ministre exercera-t-il son droit de réplique?

M. Robert Burns

M. Burns: Mme le Président, en réplique, j'ai bien peu de choses à dire. Je pense que tout a été dit. Je n'aurais qu'à répéter mon discours pour convaincre ou tenter de convaincre nos collègues d'en face. Je suis convaincu que je ne pourrais pas y arriver.

Je suis, d'autre part, convaincu que, même en répétant la présentation que j'ai faite de la motion en vertu de l'article 156, je ne réussirais pas à obtenir l'adhésion de l'Opposition.

Je suis cependant toujours, à ce moment-ci, à 21 h 2, d'accord que c'est la décision la plus sage que nous avons prise que d'introduire une motion pour mettre de côté les règles de l'Assemblée na-

tionale, du moins certaines règles de l'Assemblée nationale, et d'imposer cette motion de clôture pour assurer une rentrée scolaire... Est-ce que vous avez un pointillé autour de la gorge? On pourra le faire.

M. Lavoie: Oui, M. le "hatchet man".

M. Burns: C'est cela, voilà, sauf qu'on le fait gentiment et lentement. C'est plus "jouissif". Tout cela pour dire, Mme le Président, que je n'ai véritablement pas de réplique à faire, sinon de demander à nos collègues de l'Assemblée nationale — je sais bien que l'Opposition officielle et non officielle ne se ralliera pas à cette demande que je fais — de se rendre compte qu'il est essentiel que la rentrée scolaire se fasse dans l'ordre, dès l'automne, dès le début de septembre. Pour cela, il faut avoir l'adoption claire, précise de dispositions législatives, et l'une de celles-là s'appelle le projet de loi no 101.

Des Voix: Adopté.

Mme le Vice-Président: Cette motion du leader parlementaire du gouvernement sera-t-elle adoptée?

M. Lavoie: Vote enregistré, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Qu'on appelle les députés!

Vote sur la motion

Mme le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

M. Lavoie: J'aurais une proposition à faire au leader du gouvernement. Nous n'aurions pas d'objection à remettre ce vote à demain matin alors que le premier ministre désirerait peut-être se prononcer sur cette motion de guillotine, parce qu'il n'a pris part à aucun vote sur les motions de suspension des règles, même de deuxième lecture. On aimerait que le premier ministre puisse voter après son engagement solennel de ne pas imposer la guillotine.

M. Burns: Mme le Président, permettez-moi, s'il vous plaît, malgré ce cadeau de Grecs ou de Turcs.

M. Proulx: De Grecs. Timeo Danaos et dona ferentes.

M. Burns: C'est cela. Malgré ce cadeau de Grecs qui m'est offert, Mme le Président, je tiens à rassurer la Chambre, rassurer nos collègues d'en face que le premier ministre a été consulté sur l'utilisation de la motion que j'ai présentée et que le premier ministre s'est dit tout à fait d'accord sur l'utilisation de cette procédure.

M. Blank: Dites-lui qu'il vienne voter.

M. Lavoie: II n'est jamais ici.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! Je vous ferai remarquer que, nonobstant les offres du leader de l'Opposition officielle et la réponse du leader parlementaire du gouvernement, le vote était déjà appelé.

M. Lavoie: Pourriez-vous lire la motion?

Mme le Vice-Président: Sûrement, M. le leader de l'Opposition officielle.

C'est le moment de la mise aux voix de la motion du leader parlementaire du gouvernement. Cette motion se lit comme suit: "Que conformément à l'article 156 du règlement, le rapport de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications sur l'étude du projet de loi no 101, Charte de la langue française, après la deuxième lecture soit déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires du jour le 24 août 1977, la commission devant mettre fin à ses travaux à 23 heures le mardi 23 août 1977."

Que ceux et celles qui sont en faveur de la motion du leader du gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Burns...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Je vous demande votre collaboration. Quand le vote est déjà commencé, il est de tradition dans cette Chambre qu'on le fasse en silence.

Voulez-vous continuer le vote, M. le secrétaire adjoint?

Le Secrétaire adjoint: ... Laurin, Couture, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Proulx, Duhaime, Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Bertrand, Godin, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Gendron, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellet, Perron, Brassard, Clair, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet.

Mme le Vice-Président: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Lalonde, Forget, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Larivière, Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamonta-gne, Giasson, Blank, O'Gallagher, Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Verreault, Springate, Grenier, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Roy.

Mme le Vice-Président: Abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 48 — Contre: 30 — Abstentions: 0

Mme le Vice-Président: La motion est adoptée.

A l'ordre, s'il vous plaît!

Vous vouliez intervenir, M. le député de Beauce-Sud?

M. Roy: Oui, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Si nous pouvons obtenir la collaboration de cette Assemblée, peut-être pourrez-vous faire votre intervention, M. le député.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Une question de privilège en vertu de l'article 96...

M. Burns: Ah bon!

M. Roy: ...qui dit: "Le député qui prend la parole pour donner des explications sur le discours qu'il a déjà prononcé ne peut le faire que lorsque le discours qui les provoque est terminé". Il y a un intervenant qui m'a cité cet après-midi ou ce soir à l'Assemblée nationale et, comme je n'étais pas ici lors de cette intervention, j'aimerais qu'on me permette de soulever une question de privilège.

M. Burns: Mme le Président, je pense que le député devrait faire cela demain en donnant avis à la présidence, selon les dispositions de notre règlement.

M. Roy: Non. Ce n'est pas sur une chose qui s'est passée en dehors de la Chambre. Cela vient de se passer ici à l'Assemblée nationale et cela éviterait toute cette procédure inutile et additionnelle. Alors, qu'on me donne trente secondes et je pourrai faire la mise au point qui s'impose.

M. Burns: D'accord. De consentement.

M. Roy: C'est le député de Notre-Dame-de-Grâce...

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, un moment, s'il vous plaît. Je pense qu'effectivement vous devriez donner un avis demain matin, mais, s'il y avait consentement...

Des Voix: Consentement.

Mme le Vice-Président: Laissez-moi terminer, s'il vous plaît.

Je comprends qu'il y aurait consentement unanime de cette Assemblée. Alors, M. le député de Beauce-Sud.

M. Brochu: Consentement.

M. Roy: Merci, Mme le Président. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a cité une partie de mon discours qu'il a interprétée comme suit: "Comme le député de Beauce-Sud l'a souligné, ce sera une grande journée quand la population passera le gouvernement péquiste à la guillotine". Cela figure à la page R/4731, page 2, du journal des Débats. Ce que j'ai dit, Mme le Président, et je ne ferai pas de commentaires, c'est que je n'avais pas la prétention de convaincre le gouvernement, mais que je l'avais mis en garde à plusieurs reprises. J'ai dit: "Continuez comme vous êtes parti, vous êtes dans la bonne voie pour aller à la même place que les gouvernements qui vous ont précédé et peut-être plus rapidement que vous ne le pensez".

M. Lavoie: Bravo!

M. Mackasey: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Burns: II n'y a pas de débat là-dessus. M. Mackasey: Une question de règlement.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Je ferai simplement une remarque, et si M. le député de Notre-Dame-de-Grâce demande la parole ensuite, il verra s'il doit intervenir. Je pense que quand, dans cette Assemblée, on demande à rétablir des faits et qu'on les rétablisse, il ne doit pas y avoir de débats après. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous fais confiance et je vous demande maintenant si vous avez toujours l'intention d'intervenir et à quel propos?

M. Mackasey: Mme le Président, c'est très simple. Je prends en considération les paroles du député de Beauce-Sud, l'interprétation de ses remarques, cet après-midi. On sait par expérience que le député de Beauce-Sud a beaucoup plus d'intégrité et de sagesse que les membres du gouvernement.

M. Burns: Merci.

Mme le Vice-Président: Je n'aurais pas dû permettre cette intervention. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: Mme le Président, il me fait plaisir, et nos collègues connaissant mes origines syndicales comprendront qu'il me fait très plaisir, comme leader du gouvernement, d'appeler l'article 15.

M. Lavoie: Je ferai remarquer, en vertu du règlement, que les propos qu'a tenus le leader du gouvernement le privent maintenant de son droit de parole sur la motion de deuxième lecture parce qu'il s'est prononcé sur le fond.

M. Burns: Exactement, et je n'ai pas l'intention de parler en deuxième lecture.

M. Lavoie: Comme d'habitude, vous ne parlerez pas.

Projet de loi no 45 Deuxième lecture

Mme le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre propose la deuxième lecture du projet de loi no 45, Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Burns: Mme le Président.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! J'espère, M. le leader, que vous ne voulez pas de nouveau vous prononcer sur le fond de la question.

M. Burns: Avant que le ministre n'entreprenne le débat sur le projet de loi no 45, je rappelle à nos collègues que la commission de l'éducation continue ses travaux pendant encore quelques heures. Je signale à nos collègues qu'il est temps de reprendre les travaux à la commission.

Mme le Vice-Président: Quelques secondes pour permettre à chacun de reprendre sa place après le départ des députés pour la commission parlementaire. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: Mme le Président, sérieusement si c'est possible. Depuis quelques années, on assiste, à travers le monde, à une détérioration profonde du climat social, une détérioration des valeurs et du bien-être de diverses sociétés.

Devant cette constatation, il faut alors faire un choix. Ou bien faire porter l'odieux de cette situation sur un gouvernement, sur un Etat, sur une province ou sur un parti; ou encore décider résolument de gouverner pour le bien public. Dans ce cas, il s'agit de regarder la situation bien en face et de tenter de bonne foi d'apporter des solutions.

Le projet de loi 45, intitulé Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, que nous abordons ce soir en deuxième lecture, se veut le fruit d'une telle attitude.

Que l'économie mondiale soit mal en point, je ne pense pas qu'il soit besoin, ici, d'en faire la preuve. N'avons-nous tous pas à l'esprit les difficultés considérables que traversent la plupart des pays occidentaux depuis une dizaine d'années? Que l'économie nord-américaine soit elle aussi également plutôt malade, il n'y a pas à en douter, on n'a qu'à jeter un coup d'oeil à l'occasion sur le Wall Street Journal ou à écouter des courtiers de Bay Street pour s'en convaincre.

Que l'économie canadienne, plus particulièrement, connaisse des difficultés, cela est absolument indiscutable et que ces difficultés se répercutent encore plus particulièrement chez nous, au Québec, comme nous le rappellent sans cesse nos collègues de l'Opposition, cela va de soi. Que le climat social soit un peu partout perturbé, cela ne fait non plus de doute dans nos esprits. Souvenons-nous tout de suite de tout ce qu'a pu engendrer une simple panne d'électricité dans la ville de New York.

Que la violence envahisse nos vies et que les citoyens se sentent de moins en moins dans l'obligation de respecter les lois, que tous et chacun d'entre nous aient la sensation de faire du surplace jusqu'à bout de souffle, voilà ce dont nous avons souvent l'occasion de prendre conscience avec un peu plus d'effroi, de jour en jour.

Je crois, Mme le Président, que, dans un contexte semblable, il appartient à un gouvernement d'offrir à la population un projet collectif qui soit porteur d'espoir, qui soit porteur de paix, un projet capable de refaire le tissu social si usé par des heurts venus de toutes parts. Le devoir d'un gouvernement c'est de discerner l'avenir et de proposer, sans hésitation, de nouvelles avenues.

Mme le Président, les salariés du Québec représentent l'immense majorité de notre population et c'est à ce titre que leur sort doit d'abord et avant tout préoccuper ce gouvernement. Ce sont, madame, en effet, ces salariés du Québec qui paient le plus de taxes qui doivent attendre le plus longtemps pour ajuster leur salaire à la hausse des prix. Ce sont ces mêmes salariés, toujours, qui sont le plus péniblement coincés à l'intérieur de l'inexorable triangle des revenus fixes, des paiements à faire et des prix qui montent. Ce sont également ces mêmes salariés qui ont été si souvent laissés pour compte par les gouvernements. Pourtant, pensons-y, chaque année l'immense majorité d'entre eux manifeste ce calme, cette sérénité et ce sérieux pour renégocier et renouveler, sans problème, des centaines et des centaines de conventions collectives, par l'intermédiaire de leur association ou de leur syndicat.

Ce n'est qu'une infime partie de ces négociations qui dégénèrent en conflits. Toutefois, notre Code du travail est, en apparence, pour le moins, surtout destiné à réglementer les cas où se produisent de tels accrochages. Force nous est donc de constater que le Code du travail est un outil qui a besoin d'être un peu rafraîchi, et c'est pourquoi le gouvernement a l'intention de procéder à une refonte de l'ensemble du droit du travail.

Cependant, en attendant cette réforme qui ne pourra se faire sans les études, la planification et la prudence nécessaires, il semble impérieux, aux yeux de ce gouvernement, de corriger certaines situations, de pallier certaines lacunes et de mettre à l'essai un équilibre nouveau des forces entre les parties par l'instauration de l'affirmation précise de l'égalité de ces parties.

Le déséquilibre systématique des parties ne peut qu'engendrer la frustration, la cristallisation des préjugés et la violence, que celle-ci soit ouverte ou qu'elle soit larvée. Le gouvernement du Québec a donc décidé d'intervenir pour, entre autres, instaurer l'égalité en considérant que les salariés québécois répondraient avec responsabilité

et bonne foi à cet ajustement de l'équilibre des forces.

C'est pourquoi, dans ce projet de loi, le domaine de l'accréditation est amélioré et rajusté. Dans le but de désamorcer la situation de crise qui entoure la plupart du temps la période d'adhésion syndicale pour fins d'accréditation, le projet de loi propose qu'un vote secret d'allégeance syndicale soit tenu dès que 35% des salariés de l'unité visée auront accepté d'adhérer à une association.

Cette mesure fera s'estomper cette période de tension que vivent les salariés lors d'une campagne de recrutement syndical. En effet, n'étant plus coincé entre le syndicat et le patron, souvent menacé par l'un comme par l'autre, le salarié sera désormais respecté par les deux parties puisque son vote exprimé secrètement pourra sanctionner toute attitude injuste à son égard. Cette mesure va dans le sens du respect des salariés.

Par des amendements d'une nature un peu plus technique, on a également facilité l'accréditation en simplifiant la procédure d'enquête, en accroissant les pouvoirs de l'enquêteur et en permettant au commissaire du travail de rendre certaines décisions sur la foi du rapport de ses enquêteurs. Ces mesures vont dans le sens de l'efficacité.

A titre de mesures préventives, le ministre du Travail pourra désormais charger un conseil d'arbitrage de déterminer le contenu d'une première convention collective pour une période d'un an. Le ministre prendra de telles dispositions parce qu'il aura constaté que l'intervention du conciliateur a été infructueuse et que les négociations pour cette première convention collective auront mené à une grève ou à un lock-out dont on ne pourra entrevoir le règlement dans un délai raisonnable, et ce en tenant compte de la bonne foi de l'une et l'autre des parties. Cette mesure, Mme le Président, va dans le sens d'une conception préventive en matière de relations de travail.

Ce projet contient également des dispositions pour revaloriser le mécanisme de la conciliation. Ainsi, on établit de nouvelles règles quant au délai de grève ou de lock-out, dissociant ainsi ce délai du processus de la conciliation lui-même. En effet, le droit de grève ou de lock-out sera acquis automatiquement 90 jours après l'expiration d'une convention collective ou encore après la réception de l'avis de négociation par le ministre, ou encore après l'obtention de l'accréditation, s'il s'agit d'une première convention collective.

Cette mesure va dans le sens également de l'efficacité et va dans le sens de cette conviction qu'a le ministre du Travail que le service de conciliation du ministère doit d'abord et avant tout être à la disposition réelle des parties et non pas servir de déclencheur ou de chronomètre pour des grèves ou des lock-out.

Il pourra également y avoir conciliation volontaire sur demande de l'une des parties à n'importe quel moment de la négociation, ce qui pourra, dans certains cas, éliminer des délais artificiels et éviter, dans d'autres cas, que ne soit atteint l'état de crise, sauvant ainsi à tous un temps précieux. Le ministre pourra également, désormais, dési- gner un conciliateur dans un conflit qui s'éternise sans attendre la demande de l'une ou l'autre des parties.

Cette mesure, Mme le Président, va dans le sens également de la prévention.

De plus, l'article 68 introduit une autre mesure de prévention en amendant la loi même du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre et en permettant au ministre de désigner en tout temps une personne qui pourra travailler à favoriser le maintien ou l'établissement de bonnes relations entre l'employeur et ses salariés. Cette mesure, qui va donc dans le sens de la prévention, pourra permettre tout au moins d'anticiper certaines crises si ce n'est d'en désamorcer les causes mêmes.

Le précompte des cotisations syndicales devient obligatoire pour tous les salariés compris dans une unité de négociation représentée par un syndicat. Cette mesure a pour but de répartir entre tous les travailleurs d'une unité les coûts du maintien de cette même unité dont tous profitent.

Nous avons également inclus un amendement interdisant l'emploi des briseurs de grèves pour remplacer un salarié qui exerce son droit à la grève ou qui est sous le coup d'un lock-out. Cet amendement interdit également le recours aux services d'un salarié membre de l'unité de négociation en grève et en lock-out dans l'entreprise visée par le conflit ou dans une autre entreprise appartenant à l'employeur. Cet amendement, normalement, devrait contribuer à éliminer l'une des causes de pourrissement de certains conflits et l'une des sources de frustration et de violence les plus apparentes lors des arrêts de travail.

Le projet de loi reconnaît également à tout salarié ayant été en grève ou ayant subi un lock-out le droit de retrouver son emploi de préférence à toute autre personne. Le commissaire général du travail verra à l'application de cette mesure qui n'est d'ailleurs que le prolongement logique du code existant.

En effet, puisque le Code du travail accorde le droit à la grève, n'est-il pas normal que ce droit soit assorti de la protection de l'emploi pour lequel il a été utilisé? Il serait inconcevable que l'on puisse aussi facilement faire échec à ce qui a toujours été, je crois, la volonté du législateur.

Ce projet veut imprimer, madame, une nouvelle dimension aux relations de travail au Québec. L'idée directrice du projet de loi 45 n'est absolument pas de donner plus à l'une des parties en défavorisant automatiquement l'autre, mais bel et bien de faire disparaître, du mieux que nous le pouvons, avec les instruments que nous avons, dans les relations entre salariés et patrons, les éléments les plus susceptibles de provoquer des conflits et des tensions.

Nous devons nous placer dans une évolution historique. L'histoire démontre que le respect des droits des salariés ne va qu'en augmentant. C'est vers l'avant qu'il faut se tourner, vers la créativité, vers la technologie et vers des techniques de gestion mieux élaborées et plus modernes. Derrière nous, un milliard d'êtres humains au moins dans le Tiers-Monde acceptent de travailler pour quel-

ques dollars par semaine et dans des conditions absolument atroces, parce que ce type de travail et ce type de rémunération sont préférables à la famine. Il faut cesser de croire que c'est en rognant sur les conditions élémentaires que nous parviendrons à une meilleure position concurrentielle envers, entre autres, le secteur manufacturier du Tiers-Monde.

La productivité dans un Etat moderne ne peut dépendre que largement de la satisfaction de ceux qui en forment l'élément essentiel, c'est-à-dire les salariés. Comment peut-on concevoir qu'un salarié accepte d'être productif, d'être motivé et de participer à la relance économique du Québec quand il constate que certaines personnes mènent des luttes pour présenter le salaire minimum comme un objectif à atteindre, plutôt que de le présenter pour ce qu'il est, c'est-à-dire un minimum décent?

Peut-on se surprendre qu'un père de deux enfants, salarié, à $126 par semaine, se sente dissocié de la marche en avant du Québec? Pourra-t-il, pour une somme si dérisoire, améliorer sa productivité, se sentant, tout de go, entraîné dans un élan collectif de relance économique du Québec?

C'est dans cette perspective, madame, de partage d'une volonté commune de tous les Québécois que se situe le projet de loi no 45.

Les dirigeants d'entreprise du Québec doivent comprendre qu'ils ont à assumer cette relance économique. Ils doivent savoir que le gouvernement du Québec les appuie en ce sens et qu'il compte sur eux. C'est l'exemple de l'excellence que doit donner l'ensemble du patronat en matière économique s'il veut motiver les salariés à entreprendre une lutte pour la productivité. Cette recherche de productivité doit être la préoccupation de tous les Québécois.

C'est un appel que ce gouvernement lance à tous les Québécois, salariés comme employeurs, pour que les énergies s'emploient désormais non plus à se déchirer mais plutôt à travailler pour le mieux-être de l'ensemble de la population québécoise.

Le projet de loi no 45 est un appel à tous les agents de travail pour qu'ils acceptent que s'implante chez nous un meilleur climat social qui rejaillira sur tous. C'est nous tous qui en retirerons les bénéfices. C'est pour cela, Mme le Président, que j'espère que ce projet de loi fera naître dans cette Chambre la conviction de tous ses membres que nous appartenons à une communauté dont le progrès social est relié à sa capacité de voir des objectifs communs à tous les Québécois se dégager dans le secteur des relations de travail. Je vous remercie.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Claude Forget

M. Forget: Le ministre du Travail a démontré, Mme le Président, beaucoup d'habileté lorsqu'il a dévoilé, le 29 juillet dernier, moins d'un mois après sa nomination, le projet de loi no 45 élaboré par son prédécesseur. L'explication qu'il en a donnée alors reposait entièrement sur les faits d'une telle modification au Code du travail sur la paix sociale, c'est-à-dire sur l'harmonie dont le Québec a très certainement grand besoin. Dans sa conférence de presse, comme dans les communiqués qui accompagnaient la publication du projet de loi et ce soir encore, le ministre s'est plus discrètement abstenu de décrire les avantages de cette initiative sur le bien-être des travailleurs. Avec raison, je crois, le ministre s'en est remis à ce sujet aux témoignages des centrales syndicales qui n'ont pas manqué d'applaudir le geste gouvernemental. Par cette présentation discrète, le ministre du Travail et le gouvernement peuvent se donner l'air de faire plaisir à tout le monde. Au grand public on offre la promesse d'un climat social amélioré, susceptible de favoriser la productivité dont le ministre vient de nous parler d'une façon fort naïve, c'est-à-dire la prospérité générale.

En laissant la parole aux syndicats, quant au reste, on peut, sans inquiéter le grand public, laisser croire aux travailleurs, qui, pour la plupart, malheureusement, ne liront probablement pas le projet de loi, que ces réformes les avantagent et, d'autre part, en feignant de ne pas entendre les protestations des patrons qui, eux, malheureusement pour eux peut-être, ont déjà lu le projet de loi, on donne enfin l'impression que ces arguments qu'ils invoquent ne sont que des jérémiades trop souvent entendues et inspirées par un indécrottable conservatisme.

Ces habiles calculs du ministre créent un problème pour l'Opposition. Comment s'opposer à un projet de loi si merveilleux qui promet, sans effort, de faire progresser la société québécoise sur la voie de la justice et de la paix sociale? Cependant, ne serait-il pas prudent de se taire et d'attendre pour dénoncer, le moment venu, le naufrage de ces beaux espoirs?

C'est peut-être là ce que des politiciens ayant l'oeil rivé sur des sondages préféreraient faire; pourtant, nous ne voulons pas nous arrêter à de pareilles considérations. Le grand public, aussi bien que les travailleurs eux-mêmes doivent être avertis du caractère illusoire ou même trompeur des promesses que le gouvernement leur fait. Il vaut la peine d'affronter le scepticisme avec lequel nos critiques du projet de loi seront peut-être accueillies — certainement de l'autre côté — pour nous mériter l'estime future de nos auditeurs lorsque, dans l'avenir, nos prédictions se révéleront exactes. D'ailleurs, observons la précipitation que met le gouvernement à faire adopter le plus tôt possible, dans les conditions que l'on sait et que nous venons de vivre, la deuxième lecture de ce projet de loi. Observons l'entêtement qu'il met à repousser toute suggestion d'un débat en présence et avec la participation des parties intéressées. Tout cela démontre assez clairement que le gouvernement lui-même est conscient des graves imperfections de ce projet de loi et de sa propre incapacité de le défendre de manière convaincante s'il fallait que la lumière soit faite sur chacun de ses défauts.

Cet entêtement pousse le Parti libéral, quant à

lui, à faire une opposition à ce projet de loi d'une manière peut-être plus sévère que cela n'aurait été le cas si le gouvernement avait manifesté une plus grande ouverture d'esprit. J'aborderai les motifs de notre opposition à ce projet de loi de la façon suivante. En premier lieu, suivant en cela le ministre, j'essaierai de démontrer que les modifications proposées au Code du travail n'apporteront guère d'amélioration dans l'efficacité avec laquelle les problèmes soulevés par les relations entre patrons et ouvriers sont posés. En d'autres termes, l'adoption de ce projet de loi est, dans l'ensemble, assez indifférente en regard de l'objectif unanimement souhaité d'une paix sociale mieux assurée.

En deuxième lieu, nous examinerons l'effet de ce projet de loi sur le sort du travailleur, nous nous demanderons de quelle façon le bien-être, la liberté et la dignité des travailleurs seront affectés par le projet de loi no 45. Que ce projet soit efficace ou non pour procurer au Québec une plus grande mesure de sérénité dans les relations patronales-ouvrières, il n'est pas négligeable de savoir si cette paix relative serait obtenue en favorisant ou en défavorisant les intérêts des travailleurs comme êtres humains, comme citoyens et comme individus. Malheureusement, à ce chapitre, nous croyons que le projet de loi no 45 ne se contente pas d'être inefficace, il est positivement nocif.

En premier lieu, donc, examinons de quelle manière le projet de loi no 45 pourra affecter l'efficacité avec laquelle sont réglés les conflits de travail au Québec. Nous vivons dans un régime économique où les conditions de travail sont déterminées par des contrats entre les patrons et leurs employés. Dans un tel régime contractuel, il faut présumer de la bonne foi des parties. En effet, la paix sociale ne peut exister lorsque tout dépend d'ententes, à moins que, de façon générale et coutumière, les parties n'acceptent de jouer franc jeu et de respecter la parole donnée. Il est naturel que des exceptions se produisent, évidemment, à cette règle générale, mais il est indispensable que les règles de droit, les règles du droit du travail, qui régissent les relations de travail, soient formulées pour faciliter et officialiser ce qui est normal et coutumier, c'est-à-dire cette bonne foi que l'on doit présumer, plutôt que ce qui est aberrant et exceptionnel, c'est-à-dire la mauvaise foi, la défiance et les calculs de stratégie.

Par exemple, notre Code du travail prévoit depuis longtemps que les parties doivent négocier avec diligence et bonne foi; cependant, le législateur a sagement omis de préciser ce en quoi consiste la bonne foi. La raison en est simple, ou bien la bonne foi existe et une telle définition est inutile, ou bien elle n'existe pas et toute définition précise ne servirait qu'à fournir des prétextes à des querelles additionnelles. En dépit d'un si heureux exemple de retenue, notre législation du travail contient un nombre considérable, avant même ce projet de loi no 45, de dispositions détaillées, de procédures complexes qui, sous le prétexte, d'ailleurs fort honorable, de protéger l'exercice de certains droits, fournissent elles-mêmes l'occasion de tendre de multiples pièges dans lesquels se font prendre la bonne foi et la paix sociale.

Le projet de loi 45, dans ce contexte, modifie parfois de façon très sensible tous les aspects ou si l'on veut toutes les phases successives que traversent les relations de travail: l'accréditation, la négociation d'une première convention collective, la procédure de conciliation, l'arbitrage des griefs, la réintégration d'emploi après un conflit de travail.

En ne m'attachant qu'à ces rubriques, qui constituent les aspects que le ministre qualifie de techniques du projet de loi, mon intention est d'illustrer pourquoi le parrain du projet de loi est mal fondé de prétendre que ces modifications vont favoriser la paix sociale. Je parlerai plus loin des autres aspects plus politiques du projet de loi, soit le précompte des cotisations syndicales et l'interdiction des briseurs de grève.

A mon avis, notre régime de relations de travail, que j'ai qualifié de contractuel, et c'est bien ce qu'il est, doit être basé sur la prémisse constituée — je le dis encore une fois — de la bonne foi des parties qui se font face et doit obéir par conséquent aux règles de prudence suivantes.

En premier lieu, il doit éviter le plus possible de rendre l'exercice du droit de contracter des parties conditionnel au respect de procédures complexes. La multiplication des procédures permet autrement à une partie de livrer à l'autre une guerre des nerfs, de façon à la mettre en échec sans nécessairement vider le fond du débat qui les oppose l'une à l'autre.

En deuxième lieu, notre droit du travail doit éviter tout ce qui conduirait à une interprétation littérale et légaliste des textes de conventions collectives aux dépens du sens commun et de l'équité. Une telle interprétation rend interminable la négociation de conventions collectives et, comme le ministre le sait, c'est une expérience qui va en croissant de plus en plus au Québec, cette longueur constamment allongée de la négociation, une telle interprétation, dis-je, rend interminable la négociation d'ententes et génère, malgré la peine qu'on y a prise, des malentendus constamment renouvelés dans la période qui suit la négociation. Cela injecte dans les relations de travail un esprit tatillon, un esprit légaliste dont nous faisons les frais, tant dans la phase de négociation que dans la phase d'application.

En troisième lieu, il faut éviter dans le Code du travail de donner ouverture à la perte, par les parties, de leur sens des responsabilités en laissant la porte trop ouverte à une intervention discrétionnaire du ministre du Travail. Si le droit du travail doit, dans certains cas très rares — et sans aucun doute de tels cas existent — permettre l'intervention de tiers, et en particulier l'intervention du ministre, ces interventions doivent être prévisibles, elles doivent être soumises à des conditions déterminées et strictement circonscrites dans ses conséquences. Autrement, cette possibilité devient elle-même un enjeu des négociations ou un élément de stratégie pour l'une ou l'autre des parties.

Si, donc, ces trois prescriptions se présentent sous un aspect négatif, c'est-à-dire éviter le légalisme, éviter les procédures, éviter l'intervention arbitraire du ministre, si ces prescriptions se présentent sous un aspect négatif, c'est qu'il y a à cela une raison fondamentale que j'ai déjà soulignée, c'est-à-dire que ces règles de droit doivent s'appliquer à un régime qui repose sur l'entente des parties et qui, à la limite, pourrait même fonctionner en l'absence complète de Code du travail. C'est d'ailleurs, entre parenthèses, Mme le Président, un phénomène remarquable qu'un des pays occidentaux où les relations de travail se sont développées de la façon peut-être la plus harmonieuse n'a, effectivement, aucun Code du travail. Je pense à l'Allemagne de l'Ouest, ses règles de droit dans ce domaine, d'ailleurs fort peu nombreuses, s'étant élaborées durant la période d'après-guerre à la lumière de certaines décisions de jurisprudence.

L'existence même d'un Code du travail peut être un obstacle plutôt qu'une assistance à la solution des conflits de travail. Malheureusement, je me tourne maintenant du côté du projet de loi, et malheureusement pour une autre raison, parce que le ministre suit en cela une longue tradition et des efforts législatifs déjà esquissés dans le passé, je pense, entre parenthèses, au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale en 1974 par notre collègue le ministre Cournoyer, ministre du Travail de l'époque, il semble que cet effort nouveau que constitue le projet de loi 45 vient enfreindre presque sans exception chacune des prescriptions que j'énonçais tout à l'heure, chacune de ces règles de prudence énoncées précédemment.

Les nouvelles règles de reconnaissance syndicale, par exemple, multiplient les occasions d'enquêtes et d'appels d'un palier hiérarchique à un autre et précisent de façon détaillée les critères devant être utilisés pour le décompte des membres d'un syndicat, ainsi que les motifs de révision des décisions d'un commissaire du travail. Il est clair que ce qui est gagné en précision dans certains cas peut être plus que compensé, dans d'autres cas, par de nouvelles occasions offertes aux plaideurs. Je puis assurer le ministre que, lorsque des occasions sont données aux plaideurs, quelqu'un se sert de ces occasions et de façon parfois très fréquente.

La négociation d'une première convention collective peut, dans des circonstances laissées à une évaluation subjective du ministre en vertu de la rédaction du projet 45, lier la responsabilité du ministre dans cette décision qu'il doit rendre quant à l'opportunité de décréter un arbitrage obligatoire. Un tel arbitrage, s'il pouvait être admis à la limite pour dénouer une impasse, n'est, malgré tout, aucunement circonscrit dans le projet de loi, sauf quant à la durée de la convention qu'il instaure; il n'est aucunement circonscrit dans son champ d'application, c'est-à-dire qu'il peut constituer une première base de conditions de travail que l'une ou l'autre partie passera des années par la suite à démanteler ou à défaire. L'objection qu'on pourra nous faire qu'il s'agit d'un conseil d'arbitrage où sont représentées les deux parties n'est pas une objection qui, à mes yeux, a une force suffisante à cet égard.

La renégociation d'une convention collective pourrait désormais s'effectuer sans le recours forcé et pratiquement rituel à la conciliation, contrairement a l'exigence actuelle du Code du travail. Mme le Président, il s'agit là, peut-être, de la seule innovation dite technique du projet de loi qui soit carrément une amélioration et qui, par sa nature même, illustre justement la direction qu'il faudrait prendre dans notre droit du travail, celle d'une moindre complication, d'un moins grand nombre d'exigences sine qua non dans le déroulement des négociations. Le projet prévoit également une discrétion quant à l'obligation pour le conciliateur de faire rapport. Cette discrétion, quoiqu'elle soit malheureusement à l'usage du ministre, constitue malgré tout un élément de souplesse de bon aloi, car elle peut sans aucun doute favoriser un règlement.

Nous en venons à l'arbitrage des griefs. L'arbitrage des griefs qui découle, en cours d'application, d'une convention collective fait l'objet dans ce projet de loi d'une quinzaine d'articles nouveaux du Code du travail. Je dois dire, Mme le Président, que le légalisme triomphe ici en maître. Non seulement les arbitres se voient-ils conférer l'immunité à l'instar des juges, mais sont-ils astreints à des règles de procédure strictement définies. Ces dernières donnent ouverture à autant de motifs de contestation judiciaire des sentences arbitrales.

En outre — et c'est là le plus sérieux — un article nouveau, qui serait l'article 88 i) du Code du travail remanié, fait aux arbitres l'obligation de trancher les litiges à partir de la seule preuve recueillie à l'enquête et selon les règles de droit. Ceci est une citation littérale de l'article suggéré. L'effet d'une telle disposition sur la négociation et l'interprétation de conventions collectives ne peut être que néfaste. Elle ne fera le bonheur que des avocats spécialisés en droit du travail. Elle fera le malheur de tous les autres, Mme le Président.

Pris dans leur ensemble, donc, ces divers amendements dit techniques sont fort décevants. Ils ne reflètent aucune orientation commune, sauf la préoccupation des détails. Dans leur application, il est à craindre qu'ils ne soient encore plus décevants. En effet, proposés depuis longtemps comme une étape nécessaire à l'amélioration de la qualité des relations de travail au Québec, il ne serait pas du tout étonnant qu'ils donnent lieu à des difficultés absolument inédites. Ce qui est plus grave, en plongeant notre régime de négociations collectives dans un bourbier de plus en plus procédurier et légaliste, leur insuccès créera une désillusion pas du tout souhaitable quant à la possibilité même d'améliorer les choses.

Je n'ajoute rien, Mme le Président, quant à l'inscription, dans le code, de l'obligation pour un employeur de reprendre un travailleur syndiqué à la suite d'un conflit de travail. Cette règle qui va de soi est d'ailleurs présente dans notre droit du travail, non pas à titre de disposition du code mais à

titre de précédent judiciaire qui a été de nombreuses fois, invoqué et appliqué. C'est donc, non pas un amendement de substance, c'est la réécriture ou la transcription d'une règle de droit qui existe déjà.

Cependant, le danger que je viens de souligner d'une procédure de plus en plus complexe, d'un légalisme, de plus en plus répandu dans notre droit du travail est d'autant plus grand que des arrêts récents de nos tribunaux supérieurs ont, depuis peu, mis en doute l'ensemble du droit administratif québécois. Comme on le sait, la juridiction et surtout le caractère final des juridictions du Tribunal des transports, du Tribunal des professions et, ce qui est directement pertinent a notre propos, du Tribunal du travail ont été mis en doute et sont l'objet de contestations toujours pendantes devant les cours de justice.

Or, le projet de loi 45 n'offre aucune contribution à l'éclairage et à l'éclaircissement de ce débat. Ce qui est certain sur le plan de la juridiction du Tribunal du travail, c'est que rien n'est certain et que ce doute même va peser lourdement sur un système qui se veut de plus en plus légaliste et procédurier.

Le gouvernement, enfin, présente l'article 97a que le projet 45 introduirait dans le Code du travail comme une contribution particulièrement importante, selon le ministre, à la diminution de la violence dans les conflits de travail. Il s'agit de l'interdiction qui serait faite aux employeurs d'engager des briseurs de grève ou "scabs", selon le vocable qui sera bientôt illégal. Malheureusement, cette prétention est exagérée et même entièrement erronée. Au contraire, cette disposition, dans son fond, ainsi qu'en raison de la manière dont elle a été introduite par le gouvernement, va probablement contribuer à aviver et à durcir les oppositions entre patrons et syndicats.

Pour le grand public et...

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Laurent. Je vais devoir vous demander de conclure, à moins que vous n'interveniez au nom de votre parti.

M. Forget: C'est ce que je fais, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Alors, je vous demanderais en même temps de bien vous en tenir aux principes du projet de loi, M. le député.

M. Forget: Oui, Mme le Président. Pour le grand public et certains syndiqués, l'attrait que présente l'interdiction des briseurs de grève semble reposer sur une association d'idées entre briseurs de grève et casseurs de jambes, dont on a malheureusement trop entendu parler dans certains conflits. La violence nous répugne instinctivement et il semble aller de soi d'interdire tout ce qui peut, à l'occasion d'une grève, permettre à des employeurs d'engager ces anciens lutteurs ou ces repris de justice dont le but présumé serait de perturber les lignes de piquetage, d'intimider les gré- vistes et généralement de gêner l'action syndicale légitime par des actes de violence physique ou par la menace de violence physique.

Cependant, il s'agit d'une méprise, car la prohibition adressée aux briseurs de grève n'a pas du tout pour objet l'élimination des fiers-à-bras. Il est d'ailleurs étonnant que le ministre du Travail, si peu de temps après les événements de la Robin Hood Flour Mills, n'ait rien à proposer, tel, par exemple, un code d'éthique pour faire évoluer, dans un sens non violent, la pratique du piquetage et les mesures de sécurité qui l'accompagnent. Les briseurs ne sont pas des fiers-à-bras, ce sont des travailleurs payés par le patron pour exécuter le travail que se refusent à faire d'autres travailleurs en grève. Il peut s'agir de travailleurs non membres du syndicat en grève mais déjà à l'emploi du même employeur. Il peut s'agir de personnes employées depuis le début des négociations ou de la grève. Dans tous les cas, il s'agit de personnes payées pour exécuter une tâche de production et non pas pour intimider les grévistes.

Ceci étant dit, il faudrait savoir dans combien de cas l'emploi de briseurs de grève va constituer la source d'une détérioration notable des relations de travail et, surtout, dans combien de cas cette aggravation a conduit l'une des parties ou les deux à recourir à la violence.

Le ministre pourrait nous donner ce renseignement, mais il semble bien qu'il ne constituerait pas un argument très fort à l'appui de son projet de loi. Plusieurs personnes approuveraient, cependant, une disposition "antiscabs", telle que celle qu'on retrouve au projet de loi 45, tout en acceptant la validité des arguments précédents, c'est-à-dire de cette distinction entre fiers-à-bras et briseurs de grève, conscientes que l'emploi des briseurs de grève n'implique ou n'entraîne presque jamais, à 2% ou 3% près dans les conflits de travail — selon certains renseignements qui nous sont disponibles — directement ou indirectement, un recours à la violence. Pour ces personnes, cependant, qui seraient, malgré tout, favorables à une disposition telle que celle que contient le projet de loi, l'interdiction des briseurs de grève rendrait la grève, selon eux, plus efficace, et ils espéreraient, en conséquence, que les conflits de travail en seraient abrégés.

Pour comprendre le danger d'un pareil raisonnement, il est nécessaire de sortir du contexte étroit des conflits de travail pour considérer le contexte économique dans lequel se situent ces conflits. La grève, c'est la guerre économique, mais cela ne peut pas être la guerre totale, et son but n'est précisément pas la destruction de l'adversaire. Or, même du point de vue de l'employé syndiqué, une grève à 100% efficace ne contitue pas nécessairement un meilleur instrument; tout comme l'arme atomique dans certains conflits localisés, son caractère trop destructeur pourrait nuire à son utilité.

En effet, une grève pleinement efficace qui paralyse complètement et sans rémission l'employeur signifie, dans un délai d'autant plus court que l'entreprise est petite, la mort de l'entreprise

et, par conséquent, une perte pour la société plus grande encore que le gain anticipé par les travailleurs. Une entreprise, en effet, vit de crédits reçus et de crédits donnés. L'interruption des ventes ou des livraisons déséquilibre rapidement cette délicate situation des frais fixes qui courent même en l'absence de toute production et constitue un fardeau permanent qui grèvera pendant des mois et bientôt pendant des années le bilan de l'entreprise, gênant sa modernisation et son développement ou, à la limite, précipitant sa liquidation.

Il existe pourtant des pratiques, chez l'employeur, qui débordent une interprétation raisonnable du droit à la grève pour les syndiqués. Il en est ainsi de l'utilisation d'un personnel de briseurs de grève professionnels fournis le plus souvent par des agences privées de placement disposant d'un réservoir de main-d'oeuvre occasionnelle utilisé surtout à ces fins. Il s'agit là d'une pratique qui a été interdite par quelque 24 Etats américains dont, entre autres, le Michigan, le New Jersey, le Massachusetts et la Pennsylvanie, et une province canadienne, soit la Colombie-Britannique.

La définition utilisée au Michigan se rapproche d'ailleurs de celle utilisée dans la plupart des autres Etats et est la suivante: "A person who customarily and repeatedly offers himself for employment in the place of employees involved in a strike or a lock-out". Il est cependant remarquable qu'aucun gouvernement en Amérique du Nord ou en Europe occidentale ne soit allé aussi loin que le propose le gouvernement du Parti québécois à l'article 97a relativement aux briseurs de grève. Même la convention internationale du travail ne contient, à ce sujet, aucune disposition. Il ne s'agit certainement pas d'un oubli mais plutôt d'une conséquence, d'une conception plus modérée des conflits de travail en vertu de laquelle la grève ne joue pas le rôle de solution finale du capitalisme.

Le gouvernement peut-il vraiment, simplement par l'adoption d'un texte de quelques lignes, bouleverser l'équilibre des forces en présence sur le marché du travail? Ni les entreprises, ni les syndicats ne tirent de la loi leur force et leur poids dans l'économie. Le Code du travail fournit seulement le cadre dans lequel et par lequel s'expriment ces forces et ces influences. Si l'article 97a était adopté dans son état actuel, il faut donc supposer que le patronat chercherait à restaurer à son avantage l'équilibre provisoirement perturbé.

Mme le Vice-Président: M. le député, je vais devoir vous rappeler qu'il ne faut pas faire allusion au contenu comme tel du projet de loi, mais bien au principe.

M. Forget: Je parle des principes, Mme le Président. Il nous a souvent été donné d'observer que la cohésion du patronat québécois laissait encore beaucoup à désirer. Par exemple, lors du dernier sommet économique de la Malbaie, en mai dernier, les participants du côté patronal ont exprimé avec beaucoup d'individualisme des points de vue parfois divergents et, par-delà les incohérences, au demeurant peu nombreuses, ils ont démontré, face aux syndicats, un degré beaucoup moins avancé d'organisation et de cohésion. Un effet prévisible d'une prohibition des briseurs de grève, tel que l'entend le gouvernement, face aux menaces qu'elle fait reposer sur la survie même de la petite et moyenne entreprise, tout particulièrement, est de fournir un stimulant à l'émergence d'une cohésion patronale renouvelée et renforcée; des stratégies d'entraide et d'appui aux entreprises frappées par des grèves peuvent être imaginées sans aucune difficulté. Ce qui est difficile à concevoir, c'est comment une plus grande paix sociale pourrait résulter de cette polarisation accrue des forces sur le marché du travail.

M. Marcoux: Est-ce que le député de St-Laurent me permettrait une question?

M. Forget: Après. Quoi qu'il en soit des retombées futures d'une telle loi quant aux relations de travail, on peut se demander pourquoi le gouvernement a choisi de mettre en péril, de façon si brutale, ses propres relations avec les milieux économiques. Après avoir pris l'initiative de convoquer, en mai, un sommet économique, pour amorcer une concertation sur les grands problèmes qui impliquent autant le patronat, les syndicats que le gouvernement, après avoir annoncé par la bouche du premier ministre lui-même une loi contre les briseurs de grève inspirée des lois analogues citées plus haut, comment expliquer cette radicalisation subite qui détruit l'atmosphère de bonne foi qu'on a mis tant de soin à cultiver et qui met en péril la recherche d'une concertation consultative sur les grands objectifs économiques et sociaux entre tous les agents économiques?

Je laisse à d'autres, Mme le Président, le soin d'expliquer ce revirement par une possible rivalité entre une aile radicale et une aile modérée au sein du parti ministériel. Peut-être s'agit-il de l'effet d'une mise en demeure discrète mais ferme de la part d'organisations syndicales qui ont trop appuyé ce parti pour attendre indéfiniment la monnaie d'échange. Quelle que soit la raison, le ministre nous doit des explications pour nous aider à comprendre à la fois le revirement qui s'est produit entre mai et juillet ainsi que le refus opposé par le gouvernement depuis le dépôt du projet 45 à toute forme de consultation publique par la voie d'une commission parlementaire auprès des organisations syndicales et patronales, et cela avant la deuxième lecture.

Comme je l'indiquais au début, le ministre a fait l'éloge du projet 45 par la promesse d'une paix sociale retrouvée. Nous avons fait l'examen des éléments de ce projet qui pourraient prétendre avoir cet effet, soit les modifications dites techniques aux mécanismes de reconnaissance de négociation et d'arbitrage, d'une part, et l'interdiction des briseurs de grève, d'autre part. Rien dans tout cela ne permet d'être optimiste. Rien ne permet de dire que, dans l'ensemble, les affrontements et les frustrations auxquels le ministre a fait allusion et qui accompagnent les conflits de travail

seront diminués. L'abus des procédures, le légalisme, le pouvoir discrétionnaire du ministre donneront, dans l'ensemble, encore plus de prise à la tentation toujours présente des partis à faire de la stratégie. Une modification radicale des règles du jeu prenant la forme d'une interdiction sans précédent et sans parallèle, par son extrémisme, des briseurs de grève va susciter un rajustement des attitudes et un durcissement de la position patronale dont les travailleurs et la paix sociale feront les frais.

J'en viens, Mme le Président, au deuxième aspect de mon exposé de deuxième lecture, c'est-à-dire à cette interrogation du départ sur les effets de ce projet de loi quant à une amélioration possible du sort des travailleurs. A défaut, en effet, de produire une société plus harmonieuse, le gouvernement peut-il valablement prétendre contribuer, par le projet de loi 45, à une société plus juste? Les travailleurs seront-ils mieux défendus, plus forts? Bénéficieront-ils d'un sort meilleur grâce à cette action législative?

Le gouvernement a réussi dans une certaine mesure à faire croire que le soi-disant préjugé favorable aux travailleurs qu'il prétend avoir se manifeste avec éclat par le projet de loi no 45 et aussi tout particulièrement en ce qui concerne la reconnaissance ou ce qu'on appelle communément l'accréditation syndicale, les règles nouvelles à ce sujet étant censées favoriser une syndicalisation accrue.

En outre, l'imposition du précompte de la cotisation syndicale, décrite souvent par erreur comme la formule Rand, est présumément destinée à augmenter la force des travailleurs face aux patrons. Ces prétentions du gouvernement doivent être évaluées avec soin et avec un sens critique aigu. Si cela est fait, nous devons constater qu'il s'agit pour les travailleurs beaucoup plus de gains symboliques que de progrès réels. Les modifications envisagées permettent de créer l'illusion du changement ou encore, dans les cas où ce changement est réel, de confondre l'objectif valable de l'amélioration de la condition des travailleurs avec un objectif bureaucratique qui n'a rien de commun avec le premier, l'accroissement du pouvoir des états-majors syndicaux non pas surtout face aux patrons, mais plutôt face à leurs propres membres.

Considérons, en premier lieu, l'augmentation du nombre de travailleurs syndiqués. Disons tout de suite que c'est là un objectif auquel peut facilement souscrire le Parti libéral. Les relations de travail dans un régime où les conditions de travail sont déterminées contractuellement supposent, pour bien fonctionner, que le plus grand nombre possible de travailleurs soient représentés par des organisations syndicales. Il est vrai que le nombre de travailleurs syndiqués au Québec est inférieur à ce qu'il pourrait et à ce qu'il devrait être.

Interrogeons-nous, cependant, sur les causes du plafonnement atteint depuis plusieurs années dans le taux de syndicalisation. Certaines entreprises sont très petites, même si collectivement elles regroupent de nombreux travailleurs. Les en- treprises de services, les commerces de détail, l'assurance, les services financiers en général constituent ces secteurs qui fournissent d'innombrables exemples des difficultés de la syndicalisation. La tâche d'organisation syndicale de ces travailleurs est immense et, sur un plan très concret, elle est non rentable pour les syndicats. Certaines occupations, telles celles remplies par les professionnels et celles des employés de bureau, sont peu propices, pour des raisons sociologiques complexes, à l'émergence d'un esprit de corps nécessaire à la syndicalisation. Certains emplois souvent occupés surtout par des jeunes ou par des femmes connaissent un taux de roulement si élevé que l'organisation syndicale repart continuellement à zéro.

A moins d'une orientation entièrement nouvelle, des principes qui sous-tendent notre droit du travail, il est futile de s'attendre à une augmentation sensible du taux de syndicalisation. D'ailleurs, il est, à l'heure actuelle, à un niveau sensiblement inchangé depuis vingt ans pour ce qui est de l'ensemble du Canada, et à peine supérieur au Québec à ce qu'il était il y a quinze ans.

Le projet de loi no 45, qui ne s'adresse à aucun des facteurs que je viens d'énumérer comme étant les causes qui expliquent le plafonnement actuel du pourcentage de travailleurs syndiqués, n'aura donc pas d'effets sensibles sur le taux de syndicalisation. L'abaissement à 35% du pourcentage des travailleurs d'une unité de négociation qui peuvent faire la demande initiale de reconnaissance syndicale ne change pas pour autant la nécessité d'obtenir par un vote secret plus de 50% d'adhérents.

L'exemple des pays européens souvent cité dans ce contexte, puisqu'on compare notre taux de syndicalisation au taux observé dans ces pays, illustre d'ailleurs admirablement la nature des options qu'il faudrait faire ou au moins examiner, mais que le gouvernement s'est abstenu de faire. Les syndicats européens n'ont pas nécessairement besoin de l'appui de 50% des travailleurs, tel que nous le calculons ici, dans une unité de négociation, puisque le droit du travail de ces pays permet le pluralisme syndical même au sein d'une même unité de négociation. En outre, l'accréditation ou la négociation sectorielle constitue une pratique courante dans ces pays, alors qu'elle n'existe ici qu'à l'état d'exception et qu'elle ne pourrait pas, d'ailleurs, exister de façon plus générale sans qu'on revoie de fond en comble tous les principes de notre Code du travail.

Ces caractéristiques, pluralisme syndical et application sectorielle du régime des relations de travail, ne pourraient, en effet, être adaptées au Québec en tenant compte seulement de leurs effets sur le taux de syndicalisation.

C'est sur la structure des organisations patronales, c'est sur les modalités de négociation de conventions collectives, c'est sur les modalités d'affiliation des syndicats locaux aux centrales qu'il faudrait faire porter ce réexamen. On ne peut pas, en conséquence, espérer une modification significative du Code du travail qui constitue un

tout interdépendant en changeant, dans ce Code du travail, un seul élément comme le fait le projet de loi no 45.

L'objectif déclaré par le gouvernement est valable, mais le moyen pris pour le réaliser ne l'est pas. Ici comme ailleurs, cependant, l'exposé des motifs ne constitue pas le principe incarné dans ce projet de loi no 45. Ce qui en constitue le principe, au contraire, c'est l'option politique qui a présidé au choix des moyens. Ce que le gouvernement fait, ce n'est pas de rendre plus facile l'obtention de la reconnaissance syndicale elle-même, mais plutôt de rendre plus facile l'obtention d'une enquête d'un commissaire-enquêteur pour vérifier la présence ou l'absence d'un appui majoritaire de la part des travailleurs. La distinction est de taille.

L'imposition légale de la formule Rand, un autre élément important de ce projet de loi, illustre très bien que le préjugé favorable à l'égard des travailleurs, qu'entretient supposément le ministre du Travail, consiste surtout en une attitude d'extrême partialité en faveur des structures syndicales plutôt qu'envers les travailleurs comme tels. En effet, le prélèvement obligatoire et irrévocable de la cotisation syndicale à la source n'augmente en rien le pouvoir du travailleur vis-à-vis de son employeur, mais il modifie, au désavantage du syndiqué individuel, la relation entre le syndicat et ses membres. La question est de savoir si la loi ne fait ainsi qu'entériner une situation de fait déjà acquise par la plupart des syndicats et n'a aucune importance. Si presque tous les syndicats ont pu, sans l'aide de la loi, obtenir par la négociation cet avantage, l'utilité de la loi est d'autant réduite. Et l'impossibilité dans laquelle seront désormais placés les syndiqués, qui veulent contester l'orientation et le leadership syndical par le moyen extrêmement efficace de la suspension des cotisations, consiste à mettre inconditionnellement la force de la loi au service de l'establishment syndical.

Tout en conférant à la cotisation syndicale le caractère d'un impôt, le gouvernement ne prend aucune des précautions élémentaires pour assurer que ce pouvoir de taxer, qu'il donne à un groupe privé, ne fera pas l'objet d'abus. Premièrement, les syndicats, contrairement aux corporations publiques de toute nature, ne sont pas tenus de déposer annuellement un bilan financier de leurs activités. Deuxièmement, le caractère obligatoire de la cotisation syndicale s'attache à toute somme qu'un exécutif syndical pourrait choisir de prélever pour quelque fin que ce soit, même totalement étrangère à la raison d'être d'un syndicat. Etant donné le caractère idéologique de l'orientation de certains syndicats, ce financement peut être utilisé pour ce qu'on voudra appeler l'éducation, c'est-à-dire l'action politique, l'appui à des groupes étrangers, peut-être, dans leur composition ou leurs intérêts à l'unité de négociation. Il aurait été facile d'exiger une comptabilité précise des fonds et de lier la cotisation syndicale proprement dite aux fonctions syndicales, engagement d'agents d'affaires et de conseillers techniques pour la négociation de conventions collectives, les procédures de grief et la constitution de fonds de grève. Ce qui plus est, cette disposition, liée à la formule

Rand, fera qu'on obligera même ceux qui ne sont pas membres du syndicat mais qui sont tenus d'y contribuer à contribuer financièrement au soutien d'activités qui n'ont rien à voir avec les objectifs purement syndicaux.

Troisièmement, la loi ne prévoit aucune règle d'éthique dans l'utilisation des fonds syndicaux; en particulier, aucune exigence n'est formulée quant au placement des fonds de grève et rien n'interdit des soi-disant avances à des responsables syndicaux. Le gouvernement fera mine de s'être acquitté de son devoir face aux travailleurs en invoquant les nouvelles règles dites de démocratie syndicale qu'il a insérées dans le projet de loi no 45, c'est-à-dire des exigences relativement au vote secret, exigences qui se retrouveront, comme on le sait, seulement dans les règlements et non pas dans la loi elle-même.

Cependant, il est déjà reconnu, par les observateurs impartiaux, que ces exigences prétendues de la loi ne sont que des voeux pieux.

Loin d'en faire des exigences légales, en effet, le gouvernement se borne à créer pour les syndicats une obligation de faire des règles quelconques ayant pour effet de rendre nécessaire le vote au scrutin secret dans certains cas, selon des modalités laissées à leur seule discrétion. Du même souffle, le gouvernement s'enlève, par un autre amendement, tout moyen de contrôler l'application de cette nouvelle obligation syndicale. En effet, comme il s'agit de règlements internes des syndicats, seuls les membres d'un syndicat négligent ou délinquant pourront s'en plaindre. D'autre part, il élimine l'obligation actuelle du dépôt, auprès du ministère du Travail, des statuts et règlements d'un syndicat et leurs modifications. S'il veut donc les modifier en conformité avec les nouvelles prescriptions légales, il devra instituer une enquête spéciale plutôt que d'en faire un examen méthodique et régulier.

L'intention gouvernementale de tout faire pour renforcer le corporatisme syndical aux dépens des travailleurs se manifeste concrètement en de nombreux endroits du projet 45, en plus de se révéler par des omissions dont je pourrai parler plus loin. Un autre exemple d'un geste précis pour enlever aux travailleurs un droit qu'ils possèdent consiste à la modification de l'article 88 qui a pour effet de priver le travailleur individuel de son recours à la procédure de grief. Désormais, le travailleur devra s'en remettre à son syndicat pour soulever un grief en vertu de sa convention collective. Il s'agit là d'un instrument de discipline syndicale très efficace. Gare au travailleur qui se sera exprimé un peu trop librement à l'encontre des opinions de son etablishment syndical, gare à celui qui aura soulevé l'irrégularité d'une procédure de vote ou qui ira contester un accroissement du fardeau parafiscal que veut décréter son syndicat. Le gouvernement offre au syndicat par cet amendement, un moyen précieux pour faire régner à l'intérieur du syndicat le "law and order" décidé par la hiérarchie syndicale.

Autre aspect du projet 45. Le chapitre consacré à la négociation d'une première convention collective dans une unité de négociation permet

de mesurer l'incohérence des initiatives gouvernementales lorsqu'il s'agit d'améliorer le sort des travailleurs. Ce chapitre nouveau du code du travail permettrait au ministre, et dans les faits à sa discrétion, de mettre de côté les mécanismes de négociation pour imposer aux parties un arbitrage obligatoire. La sentence arbitrale ainsi imposée tient lieu de convention collective pour un an et devient le point de départ des négociations qui doivent alors s'engager à nouveau entre les parties. Les centrales syndicales ne se sont guère exprimées sur cette innovation. S'agit-il, aux yeux du gouvernement, d'un précédent qu'une réforme d'ensemble permettrait d'étendre à d'autres situations d'impasse? Voilà ce qu'il faudrait connaître. Voilà ce que les syndicats eux-mêmes seraient fort intéressés à connaître. Mais n'est-il pas étrange qu'après avoir donné autant de gages au syndicalisme le gouvernement intervienne dans un domaine nouveau en mettant, en pratique, de côté les syndicats?

La presque totalité des modifications au Code du travail que l'on retrouve dans le projet de loi 45 fait partie de l'héritage avec lequel s'est retrouvé le Parti québécois lorsqu'il a pris les rênes du pouvoir à la fin de 1976. Héritage tiré pour sa plus grande part du projet de loi 24 de la session de 1974, mais qui fut abandonné au feuilleton après son dépôt. Héritage aussi des promesses faites par le Parti québécois lorsqu'il se trouvait dans l'Opposition et qu'il s'efforçait d'aiguillonner le gouvernement libéral de l'époque dans le sens des revendications de tel ou tel groupe, sans se croire obligé d'en évaluer le mérite avec soin. Au demeurant, on s'aperçoit que la seule véritable explication de l'entêtement gouvernemental à adopter au plus tôt un tel assemblage de modifications hétéroclites au Code du travail, c'est de poser ainsi un geste auquel s'est refusé le gouvernement précédent. On sent, chez les membres du gouvernement, un désir à peine dissimulé de défendre ce projet de loi pour la seule raison que le gouvernement Bourassa n'en voulait pas. On nous dira peut-être, sans s'effrayer des contradictions, de l'autre côté de l'Assemblée nationale, que ces modifications au Code du travail étaient sur le point de refaire surface même sous le gouvernement précédent. Je peux confirmer, à titre d'ex-président du comité ministériel des ressources humaines qui a précédé l'actuel comité du développement social, que ce comité étudiait effectivement à l'été 1976 une proposition qui ressemblait étrangement à la plupart des éléments du projet 45.

Cependant, les objections et les difficultés que je viens de soulever à l'égard de ce projet étaient en substance celles qui furent soulevées alors au sein du comité, et de plus, est-il besoin de le dire, les éléments les plus extrêmes en étaient absents.

Enfin, Mme le Président, l'actuel ministre du Travail, le parrain de ce projet de loi, est sur le point de lier son nom à un ensemble de mesures qu'il n'a pas inspirées, qu'il n'a pas souhaitées et qu'il pourrait bien regretter. Il est de notoriété pu- blique que nos travaux parlementaires sur ce projet 45 seront probablement suspendus après la deuxième lecture. Durant les quelques six semaines que durera cette suspension il est à souhaiter que le ministre assume, vis-à-vis de ce projet de loi, les responsabilités qui sont désormais les siennes.

Peu importe la pression qu'exerceront sur lui ses fonctionnaires et ses conseillers, peu importe l'opinion de son prédécesseur, peu importe même la décision prise par le Conseil des ministres à l'invitation de son prédécesseur, un ministre du Travail digne de ce nom doit savoir résister à ces pressions, rejeter après réflexion l'opinion d'un prédécesseur et avoir devant le Conseil des ministres le courage de ses convictions.

M. Couture: Mme le Président, question de privilège.

Mme le Vice-Président: M. le ministre de l'Immigration.

M. Couture: Je soulève une question de privilège pour dénoncer ou contredire ce qui vient d'être dit. Il n'y a eu d'aucune façon une pression du prédécesseur du ministre du Travail.

M. Marchand: II n'est pas question de cela. Mme le Vice-Président: M. le député.

M. Couture: C'est une question de privilège. Le député de Saint-Laurent laisse croire à cette Chambre que l'actuel projet de loi 45 a été imposé à l'actuel ministre du Travail. Je crois que je dois dénoncer cette assertion.

M. Marchand: Aussi insignifiant que quand il était ministre du Travail.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Mme le Président, j'ai cru que l'ancien ministre du Travail était fier de ce projet de loi et que ses opinions sur le sujet auraient assez de poids auprès de son collègue pour être assimilées à des pressions. S'il proteste qu'il n'en est rien, je veux bien accepter ses explications. Il demeure que le nouveau ministre du Travail devra assumer ses responsabilités. Le ministre du Travail dispose de six semaines pour démontrer qu'il est un homme dont l'influence et le jugement comptent parmi ses collègues.

Si, après la suspension de nos travaux, il revient avec le même projet de loi, sans modifications importantes, en modeste et fidèle exécuteur de la volonté des autres, nous saurons quel genre d'homme le premier ministre a choisi comme ministre du Travail.

Au contraire, éclairé par ce débat de deuxième lecture, sensibilisé par les échos et les perturbations que ce projet évoque dans le public, il pourrait décider de retirer ce projet de loi ou de le

présenter à nouveau après réimpression et avec des modifications importantes. Dans un tel cas nous saurions tous, même si les relations de travail continuent d'être un foyer d'inquiétude et une source de difficulté, qu'il existe dans la personne du ministre du Travail un homme résolu a s'en occuper avec détermination et avec un sens aigu de ses responsabilités.

Enfin, Mme le Président, ce n'est pas avec un pot-pourri de recommandations incohérentes que notre droit du travail s'assainira. Le projet 45 n'est rien de plus que cela. La véritable réforme du Code du travail n'existe-t-elle qu'en rêve? Merci.

M. Marcoux: Mme le Président, le député de Saint-Laurent m'avait dit qu'il me permettrait une question. Je ne sais pas s'il me la permet encore?

M. Forget: Volontiers, Mme le Président.

M. Marcoux: Le député de Saint-Laurent a indiqué qu'à son sens cette loi aurait des effets négatifs sur la petite et moyenne entreprise, entre autres à cause de la clause qui interdit les briseurs de grève. Je voudrais savoir de sa part s'il considère que United Aircraft, Robin Hood, Seven-Up, Firestone constituent des petites entreprises.

M. Forget: Mme le Président, puisque je dispose encore de quelques minutes, vous me permettrez de répondre à la question du député un peu plus longuement.

Je crois que les exemples qu'il vient de fournir montrent précisément la confusion qui existe au moins dans son esprit et, je le soupçonnne, dans l'esprit d'un très grand nombre de personnes face aux prétentions du ministre et du gouvernement quant aux effets possibles de ce projet de loi. Lier les dispositions antibriseurs de grève à la situation d'United Aircraft, c'est simplement se mettre la tête dans le sable. On sait très bien qu'une entreprise de cette nature, disposant de possibilités de production dans plus d'un pays, connaissant les règles du jeu, pourrait très bien faire échec à une grève en déplaçant sa production. L'effet sur de telles entreprises d'une disposition comme celle qui est envisagée est absolument négligeable à partir du moment où les entreprises savent d'avance les règles auxquelles elles devront faire face. Les petites et moyennes entreprises n'ont pas cette facilité. C'est effectivement elles qui devront en subir le fardeau, au prix même de leur survie dans certains cas, puisque l'arrêt total de la production, comme on le sait très bien, dans le cas de ces entreprises qui vivent de crédit, ne peut pas être maintenu plus de quelques semaines.

Pour ce qui est de la Robin Hood Flour, Mme le Président, j'avais cru faire dans mes remarques la distinction entre les briseurs de grève et les employés de sécurité ou les soi-disant employés de sécurité qui, dans certaines situations, peuvent être employés pour des fins d'intimidation. Ils appartiennent à des catégories complètement différentes et rien, dans ce projet de loi, ne pourrait prévenir ou empêcher les événements de la Robin

Hood, à moins qu'on ne se décide à formuler, à l'endroit de ces casseurs de jambes, plutôt que briseurs de grèves, et à l'endroit des services de sécurité des règles d'éthique qui donneront au public, aux syndiqués des règles à observer, à la fois quant au piquetage et quant à l'exécution des tâches de protection de la propriété au moment des conflits de travail. Mais il s'agit d'un ordre de préoccupations qui est totalement absent des préoccupations actuelles du ministre et totalement absent du projet de loi 45.

Une Voix: Tu te fais planter, hein! Mme le Vice-Président: A l'ordre!

Mme Payette: Le député de Laurier voudrait-il reprendre son fauteuil pour prendre la parole?

M. Marchand: Je suis plus beau en arrière.

M. Couture: Acceptez-vous une autre question?

M. Forget: Oui, Mme le Président, dans la mesure où je pourrai y répondre.

M. Couture: Croyez-vous que, s'il n'y a plus de briseurs de grève, il y aura encore des fiers-à-bras sur les lignes de piquetage?

Mme le Vice-Président: Je pense, M. le ministre, que vous pourriez intervenir. D'ailleurs, la question précédente a donné lieu à un éloignement du principe du projet de loi. Vous aurez le loisir d'intervenir; je pense que vous pourrez le faire au moment qui vous est alloué pour l'intervention. D'ailleurs, le temps est écoulé pour le député.

M. le député de Richmond a demandé la parole. M. le député.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: Merci, Mme le Président.

Vous comprendrez avec moi, Mme le Président, que normalement, sur un projet de loi concernant le monde du travail, un projet de loi aussi important, n'eût été sa maladie et les conditions qui le retiennent actuellement hors de cette Chambre, cela aurait été le député de Johnson, le leader parlementaire de l'Union Nationale, l'honorable Maurice Bellemare, qui aurait participé, au nom de l'Union Nationale, a ce débat et qui aurait apporté sa contribution personnelle, au nom de notre groupement, à ce débat de deuxième lecture.

Je ne vous cacherai pas — d'ailleurs, vous le savez, Mme le Président, pour avoir travaillé avec le député de Johnson en cette Chambre — que c'est loin d'être par manque d'intérêt si le député de Johnson n'est pas ici ce soir et qu'au contraire le sang doit sûrement lui bouillir dans les veines de ne pas pouvoir participer à un tel débat.

Mme Payette: C'est surtout cela sa maladie.

M. Brochu: Ce sera sûrement une partie de son retour à la santé de pouvoir participer à des débats prochains, Mme le ministre.

Et je voudrais souligner le fait...

Mme le Vice-Président: Veuillez discuter du projet de loi, M. le député.

M. Brochu: Je voudrais souligner le fait que le député de Johnson, avec son expérience, a d'ailleurs été largement consulté par notre groupe sur le projet de loi 45 pour l'élaboration des positions de notre parti sur la question. Je m'adresserai donc à cette Assemblée au nom de l'Union Nationale pour donner les grandes lignes qui nous paraissent être les sujets, les principes que sous-tend ce projet de loi, pour indiquer quelles sont nos positions, quelles sont les considérations et les nuances que nous voulons apporter dans ce débat de deuxième lecture, et également' la position d'ensemble que nous voulons tenir dans ce débat.

C'est avec un vif intérêt que l'Union Nationale a accueilli le projet de loi de réforme du Code du travail. Nous sommes conscients, en ce qui nous concerne, des besoins énormes qui se font sentir dans ce secteur de notre activité, et nous voulons, dès cette deuxième lecture, apporter une participation active à ce débat, comme également aux travaux de la commission parlementaire qui sera chargée de l'étude article par article de ce projet de loi, comme également au niveau des discussions qui auront lieu en troisième lecture.

Bien sûr, nous aurions préféré que le ministre nous présente, tel que promis, d'ailleurs, une réforme complète et en profondeur du Code du travail. J'ai eu l'occasion, d'ailleurs, d'en parler plus largement dans d'autres circonstances, dans les jours passés, à l'occasion de la motion que l'Union Nationale a présentée en cette Chambre pour réclamer cette réforme globale du Code du travail et des lois concernant les droits au travail, et j'ai eu l'occasion également d'en parler, comme d'autres de mes collègues, dans d'autres circonstances. Nous aurions donc préféré voir cette approche plus globale de ce problème de la réforme du Code du travail.

Au lieu de cela, on nous présente une réforme qu'il serait cependant inexact de qualifier de mineure. En fait, les changements proposés auront vraiment une influence indéniable dans les prochaines négociations collectives à l'intérieur de tout le Québec. Qu'il me suffise, pour souligner l'importance de cette loi, de souligner qu'à partir de l'annonce de cette pièce législative on a assisté à de nombreuses réactions, tant dans le public, au niveau des syndicats, au niveau des entreprises qu'au niveau des media d'information également qui en ont fait grand état.

Je pense que personne n'est indifférent à une pièce de législation qui a autant d'importance et qui rejoint autant de citoyens québécois, de quelque côté de la clôture qu'ils se situent. C'est pour cette raison, M. le Président, à cause des implications énormes de cette loi, que nous nous interrogeons sur l'opportunité d'engager un tel débat à partir de modifications partielles mais dont l'importance ne peut être mise en doute. Le climat économique au Québec, indépendamment d'ailleurs de la responsabilité du gouvernement, n'est pas reluisant, et je pense que plusieurs en conviennent.

C'est pourquoi, dans la philosophie lancée lors du sommet économique, les efforts de concertation entre les agents de développement économique deviennent de plus en plus importants. Nous sommes assurés, de par la conjoncture économique actuelle et les orientations qu'on peut déjà y déceler pour les années et les mois à venir, qu'une telle concertation pour l'avenir deviendra de plus en plus importante, sinon absolument nécessaire.

Nous considérons toujours que le gouvernement doit entendre à ce sujet les différentes parties concernées par les implications de son projet de loi, à l'intérieur d'une commission parlementaire. J'ai d'ailleurs largement fait état de cette question dans cette journée de députés qui nous a été accordée dernièrement, où on a présenté une motion visant strictement à sensibiliser le gouvernement et le nouveau ministre à cet urgent besoin de convoquer une commission parlementaire sur toute la question afin de faire le point immédiatement avant d'entreprendre quelque pièce législative que ce soit en la matière. C'était pour s'assurer, d'une part, de la collaboration, sinon de la concertation des intéressés, pour évaluer la situation autour d'une table commune et, à partir de cette prise de conscience, établir vraiment une pièce de législation ou un ensemble de pièces de législation qui s'orientent vers cette réforme globale dont j'ai fait mention tout à l'heure.

A titre d'appui à cette argumentation, permettez-moi, M. le Président, de citer un éditorial qui a été écrit par Marc Laurendeau, qui dit ceci: "On se demande bien pourquoi un gouvernement qui se dit social-démocrate et soucieux de concertation économique avec ses principaux partenaires refuse un débat public sur des réformes quand même majeures, au risque de se mettre inutilement à dos le patronat québécois juste à la veille d'un autre sommet économique prévu pour la rentrée de septembre".

Je n'ai pas besoin de commenter davantage un texte aussi clair en soi. Aussi, je me limiterai à ajouter cet autre paragraphe de l'éditorial qui explique bien à ce sujet la situation. "Quand on recherche vraiment la paix sociale par la concertation, l'attitude de bon aloi consiste à ne pas bousculer inutilement ses principaux partenaires".

Je pense que cet énoncé de principe se passe d'un commentaire élaboré. Si l'on recherche vraiment cette concertation, ce travail commun autour des problèmes, au lieu de laisser perdurer les conflits entre les individus ou les groupes, mais qu'on cherche vraiment à rapprocher les individus pour qu'ils travaillent coude à coude face à un problème donné, je pense que l'on doit mettre en

application, de toutes les façons possibles, ce principe mis de l'avant ici.

Voilà, M. le Président, pourquoi nous recommandons plus fortement que jamais la tenue de cette commission parlementaire. Je demande ici au ministre de réfléchir une fois de plus et de reconsidérer encore cette décision, justement à cause du besoin de rechercher maintenant cette concertation.

Je vous dirai d'ailleurs que plusieurs organismes, comme plusieurs entreprises, comme de nombreux syndicats ont fait état de leur façon de percevoir ce projet de loi, des inquiétudes parfois qu'il suscite, des questions qu'il laisse en suspens. J'aimerais à ce titre souligner simplement l'exemple d'une petite entreprise qui se pose, comme plusieurs autres petites entreprises à travers le Québec, des questions sur le dépôt de ce projet de loi no 45. Je m'en sers pour attirer l'attention du ministre sur le besoin de reconsidérer cette décision dans les discussions que nous avons actuellement sur le projet de loi no 45 en deuxième lecture.

Il s'agit d'une lettre qui m'a été adressée dernièrement, comme plusieurs autres d'ailleurs, que d'autres collègues ont pu recevoir au sujet du projet de loi no 45. "M. le député, "Nous avons pris connaissance du projet de loi no 45 qui modifie substantiellement le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le contenu de ce projet de loi et l'intention du gouvernement de ne pas faire siéger une commission parlementaire chargée d'entendre les revendications des parties intéressées, nous font craindre le pire pour les petites et moyennes entreprises auxquelles nous appartenons. Malgré les déclarations récentes, nous demandons la convocation d'une telle commission parlementaire pour permettre à la démocratie de se manifester. De plus, nous croyons que le gouvernement devrait d'abord procéder à une étude des conséquences fâcheuses que pourrait avoir une telle loi sur les petites et moyennes entreprises et sur les libertés individuelles des travailleurs. Nous comptons sur votre sens profond de la démocratie et sur la nécessité de procéder à une consultation sérieuse de la question. Bien à vous". C'est signé George Picken, de Picken Service, de Richmond, comté de Richmond. C'est une petite entreprise, comme une foule d'autres à travers le Québec, qui se pose des questions sur l'orientation actuelle que prend le ministre sur le projet de loi no 45, qui aimerait être entendue, qui aimerait faire part au ministre de certaines revendications fort légitimes pour bonifier le projet de loi.

Je m'en sers comme exemple pour indiquer au ministre qu'il y en a de nombreuses autres également comme celle-là qui demandent justement la mise en place de cet appareil démocratique et le respect de ces groupements, de ces individus ou de ces petites entreprises, comme, de l'autre côté, des syndicats pour qu'on arrive à une pièce législative qui réponde vraiment aux besoins du monde du travail d'un Québec moderne en 1977.

A tout le moins, nous devrions être informés par le ministre de la création d'un organisme dont la fonction principale serait de mettre en oeuvre tout le processus de cette fameuse réforme du Code du travail dont le parti ministériel a fortement fait état durant la dernière campagne électorale.

Nous sommes tout à fait d'accord sur la nécessité de légiférer sur les principaux sujets dont traite le projet de loi no 45. Il est important, en effet, d'examiner les problèmes relatifs à l'utilisation des briseurs de grève, à la généralisation de la formule Rand et à la façon de faciliter le processus d'accréditation.

En ce qui concerne la démocratisation syndicale, nous croyons au droit du syndicalisme de percevoir des fonds chez tous ceux qui bénéficient des avantages négociés par ses efforts. Je pense que cela va de soi. Cependant, en toute cohérence, il faudrait retenir l'ensemble des recommandations de la formule Rand.

Plus particulièrement dans le cadre de la démocratisation, il serait juste d'assujettir les associations accréditées à un contrôle sévère et à permettre à tous les travailleurs de s'exprimer sur les questions qui les concernent directement, soit les votes relatifs à la grève, à l'acceptation ou au rejet des conventions collectives et les votes de retour au travail. De toute façon, je voudrais analyser l'ensemble des principes particuliers contenus dans le projet de loi présentement à l'étude. Je dis "des principes particuliers" parce qu'il est évident que le projet de loi no 45 ne touche pas un seul principe dans son application, mais qu'il rejoint quelques principes majeurs qui existent à l'intérieur du cadre législatif qui touche le monde du travail.

Tout d'abord, en ce qui concerne la formule Rand, depuis le dépôt devant cette Assemblée du projet de loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, il a été maintes fois répété qu'il contenait, entre autres choses, l'application généralisée de cette formule Rand. L'affirmation n'est que partiellement vraie. Dans le projet de loi, on a retenu de la formule Rand la recommandation assurant la sécurité syndicale pour toute unité dûment accréditée, en obligeant un employeur à retenir sur le salaire de chacun des membres de l'unité représentée par une association un montant égal au coût de la cotisation syndicale, que l'employé soit ou non membre de cette association.

L'Union Nationale reconnaît la pertinence de cette mesure et croit qu'étant donné que déjà 80% des employeurs l'appliquent selon les normes des conventions collectives son application intégrale telle que préconisée ne devrait pas, en principe, poser de problèmes particuliers, puisque déjà l'orientation est donnée en ce sens et est manifeste, tel que je viens de l'indiquer. Nous nous réjouissons également de constater que le ministre ne force plus l'employeur à congédier obligatoirement un employé pour la seule raison qu'il ait été exclu de l'unité d'accréditation par ses collègues syndiqués. En fait, cette mesure ne fait, selon

les termes mêmes du ministre d'ailleurs, que mettre fin à l'un des côtés les plus injustes de l'atelier fermé.

Nous voudrions maintenant rappeler notre désir de voir les autres clauses contenues dans le jugement Rand. Nous croyons juste et raisonnable d'assortir la proposition de sécurité syndicale, laquelle devient maintenant universelle et obligatoire, des obligations contenues également dans le célèbre jugement. La reconnaissance d'un droit aussi important exige, à notre avis, l'imposition d'un certain nombre d'obligations correspondantes. Je pense qu'il nous faut établir l'équilibre en ce qui concerne les devoirs, les responsabilités et les droits.

Un article, paru dans le journal La Presse du samedi 6 août 1977, présentait, sous le titre "Les conditions oubliées", les principales obligations qui font que le projet de loi n'est pas l'application intégrale du jugement Rand.

Ainsi, aucune grève générale ou partielle ne sera déclarée par le syndicat avant qu'un vote secret, supervisé par un fonctionnaire du ministère du Travail, n'ait été tenu et que tous les travailleurs, partie à cette convention, n'aient eu la chance d'exercer leur droit de vote. Le juge Rand recommande que le syndicat doive répudier toute grève ou cessation de travail concertée, par un groupe ou par un certain nombre de travailleurs, qui n'a pas été autorisée puis déclarée par le syndicat et qu'il doive déclarer illégale et n'engageant aucunement les membres du syndicat, tout piquet de grève établi à l'occasion de cette grève. Le juge Rand expliquait, lors de son jugement, la nécessité de proposer des sanctions à tout travailleur qui participe à une grève non autorisée ou à une suspension de travail concertée autrement que sur l'ordre du syndicat. Ce travailleur sera alors passible d'une amende pour chaque jour d'absence et de la perte d'un an d'ancienneté pour une absence ininterrompue pendant une semaine.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Richmond, est-ce que je pourrais savoir si vous parlez au nom du parti ou s'il s'agit d'une intervention du député de Richmond? Dans le premier cas, vous avez droit à 40 minutes encore, et si vous parlez en votre nom personnel il vous reste trois minutes.

M. Brochu: Comme je l'ai dit au début de mon intervention tout à l'heure, je parle au nom de l'Union Nationale, cela me permet donc de continuer l'intervention, de la compléter.

Il faudrait également soumettre à des sanctions un syndicat qui déclare une grève sans recourir à l'autorisation que lui fournissent, par un vote, les membres de l'unité de négociation concernée. Ce syndicat sera passible de la suspension de la retenue obligatoire des cotisations pendant deux mois et au plus six mois dans le cas où il ne répudierait pas une grève non autorisée. L'absence partielle de la première obligation et totale des trois mois suivants fait dire aux critiques que le projet de loi 45 n'est justement pas l'application du jugement Rand.

J'aimerais maintenant commenter ces recommandations et expliquer de quelle façon nous aimerions les voir appliquer, dans un second temps de notre exposé qui traite de la démocratie syndicale à partir de ce qui est contenu dans le projet de loi à l'étude, c'est-à-dire la tenue d'un vote secret dans quatre circonstances bien définies. Et ce sujet s'attache à des principes qui sont contenus dans le projet de loi no 45 actuellement à l'étude.

Comme je le mentionnais tout à l'heure, le projet de loi qui est devant nous comporte plusieurs principes qui touchent au monde syndical et, à cet égard, j'aimerais les toucher les uns à la suite des autres, mais de façon détachée.

Tout d'abord, la question de la démocratie syndicale. Dans le projet de loi 45, on n'a retenu, à toutes fins pratiques, que l'application de l'obliga-tion pour le syndicat de procéder à un scrutin secret dans les quatre cas suivants: d'abord, l'élection des personnes occupant des fonctions de direction; deuxièmement, le déclenchement d'une grève; troisièmement, l'acceptation ou le rejet de la proposition de convention collective; et quatrièmement, le choix du retour au travail.

Ces quatre circonstances de recours au vote secret sont contenues dans l'article 19a du Code du travail, tel que modifié par le projet de loi 45.

Un principe des plus importants est contenu dans la réforme proposée par le ministre du Travail. Le résultat d'un scrutin sera le choix d'un vote majoritaire des membres de l'association qui y participent. Nous avons affirmé être d'accord avec le principe du vote secret, mais il faudrait discuter davantage le principe qui donne le droit de vote aux seuls membres de l'association.

Pour mieux situer la problématique, examinons de plus près certaines observations à cet égard du juge Rand pour se placer dans cette philosophie et cette optique que j'ai mentionnées depuis quelques instants. D'abord une citation intégrale tirée de la Gazette du travail, de janvier 1946. C'est le juge Rand qui écrit: L'obligation de verser des cotisations devrait tendre en toute vraisemblance à favoriser le recrutement et, partant, à intensifier au sein du syndicat l'intérêt et la discipline qui assurent un sens progressif de responsabilités. On peut prétendre qu'il est injuste d'obliger les travailleurs non syndiqués sans qu'ils aient voix au chapitre. Plus loin le juge précise: Mais il s'agit tout simplement de cotisations que les membres consentent à payer en retour d'avantages. Le juge Rand précise que le syndicat ne devrait pas voir d'objection à ce que tous les travailleurs, partie à la convention, puissent s'exprimer lors du choix de grève.

Le contraire serait, selon le juge toujours, la preuve d'un syndicat peu solide, et il termine en disant: Un facteur qui revêt beaucoup d'importance pour le travailleur est le droit qui lui est garanti par les conditions auxquelles est assujettie la retenue obligatoire des cotisations syndicales, c'est-à-dire le droit de se prononcer sur un point qui lui cause présentement du préjudice, c'est-à-dire la décision de faire la grève.

Le principe, Mme le Président, de la démocra-

tisation des syndicats représente le moyen le plus simple pour motiver un nombre de plus en plus important de travailleurs à s'acquitter de leurs responsabilités par la participation au syndicalisme.

Enfin, nous poussons le principe de la démocratisation jusqu'au bout et nous exigeons que les fonds perçus selon l'application de la formule Rand soient soumis au contrôle de tous les membres et, par le fait même, que la provenance et l'utilisation des fonds soient rendues publiques au moins une fois l'an, ce qui est également compris dans le programme de l'Union Nationale, Mme le Président.

Avec la nouvelle loi apportée par le ministre responsable de la réforme électorale, les partis politiques seront tenus — et c'est normal et souhaitable — de divulger la provenance de leurs sources de financement et leurs états financiers. Il serait tout à fait normal, dans cette même perspective, que soient soumis également aux mêmes exigences ceux qui sont concernés et que les fonds perçus soient également dévoilés, mis à jour et qu'on en fasse état au moins une fois l'an.

Dans un autre ordre d'idées, le projet de réforme du Code du travail prévoit que les mécanismes d'élection seront contenus dans les statuts ou règlements des associations concernées.

Nous avons des réserves à ce chapitre. En effet, pour assurer l'intégrité de ce processus, — le ministre me comprendra — il faudrait que ces mécanismes soient contenus dans le Code du travail ou tout au moins que ces statuts et règlements concernant ces mécanismes soient déposés au ministère du Travail et soumis à l'approbation du ministre, et ce uniquement en vue d'assurer l'intégrité.

Nous appuyons également l'exigence proposée par le juge Rand selon laquelle le vote de grève serait soumis à la surveillance d'un représentant du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. C'est pour cette raison que la procédure de vote doit relever d'une loi administrée par le ministère que représente ce fonctionnaire. Dans l'optique de ce que nous vous proposons plus haut, il faudrait, pour assurer une véritable démocratisation syndicale, assurer un mécanisme de surveillance de ces fonds syndicaux. Sur ce point, d'ailleurs, la majorité des éditorialistes s'entendent. Le processus démocratique implique, de la part des associations de syndiqués, un rapport détaillé sur l'utilisation des fonds qui appartiennent, via le syndicat, aux travailleurs et doivent servir essentiellement à leur avantage exclusif — et j'insiste — et ils doivent être en mesure, à ce titre, de les contrôler. Sur ce point précis, nous suggérons de prendre les recommandations de la commission Cliche, reprises largement dans le projet de loi 47, sanctionné le 27 juin 1975, aux articles 33b et 33c.

Nous dénonçons fortement l'abrogation, dans le projet de loi 45, de l'obligation qui était faite, à l'article 39 du Code du travail, à un syndicat de déposer annuellement chez le commissaire général du travail tout changement dans ses statuts et règlements. Le projet de réforme établit la discrétion du ministre à exiger ce dépôt, et nous ne sommes pas convaincus du bien-fondé de ce changement qu'apporte la nouvelle loi. Je demande donc au ministre d'y réfléchir sérieusement parce que c'est là un point qui nous apparaît également important. J'espère que, dans la réplique qu'il exercera, il pourra peut-être nous donner certaines indications à ce sujet ou qu'il pourra peut-être apporter certaines modifications lors de l'étude, article par article, du projet de loi.

Nous voudrions maintenant appliquer les remarques générales que nous venons de livrer, Mme le Président, à chacun des quatre cas particuliers de l'application de ce vote secret. D'abord, l'élection des personnes occupant une fonction de direction au sein d'une association de salariés devrait se faire au scrutin secret, par un vote majoritaire des membres de l'association et, deuxièmement, pourrait se faire à une réunion dûment convoquée ou, comme c'est prévu dans le Code des professions pour l'élection des membres du bureau d'un ordre professionnel, par courrier recommandé.

Deuxièmement, lorsqu'on parle de déclenchement d'une grève, ceci devrait être fait au scrutin secret, par un vote majoritaire de tous les salariés de l'unité de négociation ayant exercé leur droit de vote, qu'ils soient ou non membres de l'association de salariés. Ce vote, deuxièmement, ne peut avoir lieu avant que les salariés de l'unité de négociation — qu'ils soient ou non membres de l'association de salariés — aient été informés des dernières offres patronales, et ce au moins 48 heures avant le début de la tenue du vote.

Troisièmement, ce vote doit se dérouler sous la surveillance d'un représentant du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Mme le Vice-Président: Sur une question de règlement, M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Mme le Président, je voudrais demander à la présidence de rappeler à l'ordre les députés. On a de la misère à écouter ce qu'il dit; je crois que c'est un sujet important. Il y a trois ou quatre caucus; on parle partout et on n'entend rien.

Mme le Vice-Président: J'allais d'ailleurs intervenir. Je vous demanderais, messieurs, autant que faire se peut, de ne pas déranger ceux qui ont l'intention d'écouter attentivement M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci beaucoup, Mme le Président, et je remercie également mon collègue de Jean-Talon d'avoir soulevé cette question. En ce qui concerne le déclenchement de la grève également, le vote qui s'y rapporte sera tenu pendant une période suffisamment longue pour que le ministère puisse affirmer que chaque membre a eu le temps de se prévaloir de ses droits. Cinquièmement, il est interdit à un syndicat de déclarer une grève générale ou partielle s'il n'a pas suivi les

procédures ci-haut mentionnées et il devra répudier toute grève ou arrêt de travail qui n'aura pas été ainsi autorisé.

Sixièmement, enfin, si le syndicat déclare une grève sans recourir à l'autorisation du vote des ayant droit ou bien refuse de répudier une grève non autorisée, il commet une infraction et est passible de suspension de la retenue obligatoire des cotisations pendant deux mois ou au plus six mois. Des sanctions ne pourraient être imposées à des travailleurs que lors de grèves ou d'arrêts de travail illégaux et répudiés par l'association qui les représente.

Maintenant, en ce qui concerne l'acceptation ou le rejet d'un projet de convention collective, cela se fait au scrutin secret, par un vote majoritaire de tous les salariés de l'unité de négociation qui auront exercé leur droit de vote, qu'ils soient ou non membres de l'association des salariés, comme je le mentionnais tout à l'heure. Ce vote doit avoir lieu au plus tôt 48 heures après l'annonce de sa tenue, à moins que le commissaire général du travail ne l'autorise pour des raisons d'urgence. Idéalement, le vote devrait être tenu sous la surveillance du représentant du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, mais on comprendra qu'il serait impossible, compte tenu du nombre de scrutins, d'appliquer une telle mesure.

En ce qui concerne le vote de retour au travail après une grève, cela se fait au scrutin secret, par un vote majoritaire des travailleurs visés par les négociations. Ce vote doit être tenu selon les mêmes règles que le vote sur un projet de convention collective. D'ailleurs, Mme le Président — j'attire votre attention là-dessus — les mêmes remarques s'appliquent en ce qui concerne la surveillance du vote par un fonctionnaire. Enfin, l'Union Nationale propose au ministre d'ordonner la tenue d'un autre scrutin secret pour la fixation du montant ou du taux de cotisation syndicale. Nous croyons qu'entre autres choses ce vote favorisera l'adhésion d'un nombre encore plus grand de travailleurs à l'association syndicale qui les représente.

Maintenant, j'aimerais toucher la question de l'accréditation comme telle, un autre principe qu'implique le projet de loi no 45 qui est en discussion en deuxième lecture devant nous aujourd'hui.

L'objectif qui est visé par le projet de loi no 45, à ce sujet, est de faciliter à tous les groupes de travailleurs le processus d'association. Nous sommes d'accord sur ce principe et nous croyons que ce droit d'association est sacré.

D'ailleurs, à l'article 20 du Code du travail, il est prévu qu'une association de salariés qui obtient plus de 50% des voix des salariés admissibles d'un même employeur a droit à cette accréditation.

Il nous semble raisonnable, Mme le Président, de permettre la tenue d'un vote sur une demande en accréditation lorsque 35% à 50% des travailleurs concernés en font la demande. De toute façon, le droit à l'accréditation exige quand même l'approbation de la majorité des travailleurs de l'employeur.

Il est important également de maintenir l'article 15 où l'on précise que si un désaccord porte sur certaines personnes visées par la requête en accréditation et que, malgré ce fait, l'association jouit du caractère représentatif, l'enquêteur doit accréditer celle-ci sur-le-champ. Quand on dit que si plusieurs associations veulent représenter un groupe de travailleurs, le choix se fait au moyen d'un vote secret, c'est tout à fait pertinent, à notre avis.

Il faut aussi accorder le délai de trois mois entre les deux demandes en accréditation pour une même unité de travail.

Mme le Président, rapidement, j'aimerais toucher la question importante de la première convention collective. Le projet de loi, à ce chapitre, propose d'ajouter, après la section sur les conseils d'arbitrage, une nouvelle section en rapport direct avec la précédente et intitulée "De la première convention collective".

L'objectif visé par ces articles nouveaux est de mettre fin le plus tôt possible aux interminables conflits qui perdurent souvent pendant des mois lors des négociations d'une première convention collective. On prévoit la possibilité de recourir à l'arbitrage dans les conflits reliés à la signature d'une première convention collective.

Cependant, ce recours à l'arbitrage ne devra intervenir qu'en dernier ressort, soit lorsque tous les efforts de conciliation auront été faits et ce, de bonne foi, de part et d'autre. De plus, un enquêteur nommé par le ministre devra faire rapport disant qu'il conclut à l'impossibilité de régler ou la grève ou le "lock out" dans un délai raisonnable. Alors seulement on aura recours à l'arbitrage obligatoire.

Dans un éditorial de Vincent Prince, paru le 30 juillet 1977, ce dernier accepte le principe de l'arbitrage obligatoire, après conciliation, en raison de l'inexpérience dans le domaine des négociations collectives des parties en cause. Nous approuvons d'ailleurs l'article 81 f du Code du travail qui prévoit que la sentence arbitrale lie les parties pour un an. Ainsi, un an après, chacun pourra évaluer plus clairement les conséquences de ces demandes ou estimer plus facilement les coûts de ces demandes.

Nous voudrions enfin rappeler l'objection du Conseil du patronat à l'application de cet article. Le CPQ estime que cette mesure donne ouverture à une intervention gouvernementale trop poussée dans le domaine des relations de travail. L'objection est sans doute valable, mais la durée relativement courte, soit un an, de l'application de la sentence arbitrale écarte, à notre avis, ce risque.

Si la proposition de médiation du CPQ devait s'avérer un échec, on reviendrait alors au point de départ, d'où la nécessité dans ce cas exceptionnel de recourir à l'arbitrage obligatoire.

L'expérience, à notre sens, vaut donc la peine d'être tentée dans la mesure où elle réduit la durée des grèves ou des arrêts de travail associés à la négociation d'une première convention collective et dans la mesure également où elle ne s'applique qu'à la première année d'une première convention collective.

En ce qui concerne maintenant le calcul du délai devant conduire à l'acquisition du droit de grève ou de lock-out, dans la nouvelle loi le ministre du Travail vise, à ce chapitre, à revaloriser le rôle de la conciliation dans le processus de négociation collective. De plus, un conciliateur peut maintenant être nommé en tout temps et non pas seulement 30 jours après le dépôt de l'avis du début de cette négociation. L'impact principal de cette mesure, outre de valoriser le processus de conciliation, devrait être de permettre à la conciliation d'intervenir en d'autres temps qu'en période de crise dans les négociations. Ce point, je pense, est de première importance.

L'intention du ministre est louable, mais je regrette en même temps qu'il ne présente pas une proposition qui fasse tout ce qui est possible pour que l'état des négociations soit le plus avancé qui soit au moment où la convention en vigueur prend fin. Ce point nous paraît de première importance dans la discussion qui prévaut actuellement. Je pense que le ministre devrait agir avec extrêmement de prudence à ce sujet, et peut-être profiter de l'occasion qui lui est donnée pour mettre en place des mécanismes qui permettraient de faire tous les efforts possibles avant l'arrivée de la date d'échéance d'une convention collective. Malheureusement, ce qui se passe trop souvent, actuellement, c'est que le gros du travail se fait après cette date d'échéance, ce qui crée — sans que personne en soit, au point de départ, responsable ni d'une part ni de l'autre — un climat de tension où tout le monde se sent un peu lésé en partant, parce que tout le monde part en retard. Je pense qu'en tant que législateur on devrait — j'invite le ministre à accepter nos suggestions en ce sens — avoir cette préoccupation de prévenir, d'agir avec énormément de prudence et de donner toute la latitude possible avant cette date d'échéance aux parties en cause pour qu'elles puissent se rencontrer et vider leur sac avant qu'il soit trop tard, ou avant, si vous voulez, qu'on ait atteint ce stade des émotions qui, trop souvent, est mis de l'avant par cette échéance, une fois qu'elle est passée. Je pense que je n'ai pas besoin de donner énormément d'exemples, le ministre est sûrement au courant de ce qui se passe dans ce domaine et des situations malheureuses auxquelles donne lieu trop souvent le fait qu'on commence à négocier ou qu'on commence vraiment le travail valable une fois que la convention collective est échue.

A ce moment, tous ont l'impression qu'ils ont été lésés. Les travailleurs ont l'impression qu'ils sont déjà en retard sur ce qu'ils vont pouvoir obtenir, et je pense que cela commence très mal ce genre de négociation.

D'autre part, j'aimerais qu'à ce moment un médiateur ait déjà présenté, dans le sens que je viens de dire au ministre, un rapport sur l'existence ou non de cette bonne foi des parties dont j'ai parlé tout à l'heure, ce qui pourrait avoir une influence morale sur la perception publique qu'on se fait également d'un conflit.

Si, évidemment, on met en place ces mécanisme auxquels je fais allusion, avant, s'ils pou- vaient travailler avant la date d'échéance d'une convention collective, et si on avait cette possibilité d'évaluation de la bonne foi des parties, avant, à ce moment-là, je pense que ce serait mettre toutes les chances du côté d'un meilleur règlement des conflits parce qu'on agirait vraiment à ciel ouvert et on donnerait toutes les chances, justement, d'un règlement plus sûr et dans de meilleures conditions.

Je suis donc d'accord avec l'intention d'accélérer le processus de négociation. Bien que le sujet soit de première importance, nous attendrons à l'étude article par article pour expliciter notre point de vue sur ce sujet. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en discuter à fond à ce moment-là; j'aimerais beaucoup entendre les arguments du ministre. Je vois que le ministre me fait certains signes à ce sujet, je pense qu'il a de nombreux arguments à nous apporter, pour ou contre, mais nous aurons l'occasion de vider cette question parce que nous voulons vraiment que cette pièce de législation soit apportée dans un sens le plus positif possible, conscients que nous sommes que les ajustements au cadre des lois du travail que permet ce projet de loi ont des conséquences énormes sur le monde du travail et que c'est maintenant qu'on doit avoir cette préoccupation d'apporter les meilleurs mécanismes possibles à ces négociations.

J'aimerais maintenant toucher également un autre principe qui est dans cette loi, la question "antiscabs". Le projet de loi no 45 interdit non seulement l'emploi de travailleurs substituts aux salariés en grève, mais interdit également à l'employeur d'utiliser, à l'occasion d'une grève, les services d'un salarié qui fait partie de l'unité de négociation dans son établissement affecté par la grève ou dans un autre de ses établissements. Il faudrait, de toute évidence, ajouter dès maintenant que cette mesure ne s'applique que dans les cas de grèves légales. Je pense que c'est de première importance. Le patronat, je le souligne au ministre, rejette d'ailleurs catégoriquement ces dispositions. Cependant, de l'autre côté, les éditorialistes, en grande partie, donnent leur appui à cette mesure. Il faut bien comprendre ici que la plupart des entreprises respectent déjà les mesures contenues dans cette disposition du projet de loi no 45. Il serait donc dangereux, nous semble-t-il, de légiférer en la matière s'il n'y avait pas déjà eu des cas graves comme ceux de la Robin Hood, de i'Alcan ou de la United Aircraft.

Il faut également souligner que cette disposition n'empêche nullement l'employeur de tenter de faire fonctionner son usine avec le personnel cadre ou des employés non en grève. "Il faut cependant — comme le soulignait Jean-Claude Picard dans le Devoir du 30 juillet 1977 — souligner que cette disposition, si elle interdit l'emploi de briseurs de grève, n'empêche nullement l'employeur de tenter de faire fonctionner son usine à l'aide soit de son personnel cadre soit d'une nouvelle division de travail des employés syndiqués qui ne sont pas en grève, pas plus qu'elle n'empêchera un employeur de faire appel à la police ou à des agences de sécurité pour protéger ses im-

meubles et faciliter l'accès des cadres ou des autres employés à l'usine".

Certains craignent qu'avec l'application de la loi les petites et moyennes entreprises n'auront plus que deux choix, soit de fermer l'usine et d'attendre la faillite éventuelle de l'entreprise, soit d'accepter les demandes syndicales et de perdre sa rentabilité ou sa place dans les différents marchés.

Cette constatation, nous apparaît-il, doit cependant être nuancée. D'abord, la fin de l'entreprise est automatiquement suivie de la perte d'emplois. Et cela, les syndiqués en sont tout à fait conscients et il faut qu'ils le soient. Ensuite, de l'autre côté, la disparition des petites et moyennes entreprises risque d'occasionner des monopoles qui seraient mauvais socialement et syndicalement, et cela aussi les syndicats le savent. Notons enfin que toute personne qui contrevient à cet article est passible d'une amende de $1000 par jour. M semble donc que cette mesure, contrairement aux appréhensions de bien des gens, pourrait ne pas être aussi néfaste qu'on veut parfois l'affirmer, car l'utilisation abusive de ces prescriptions risque d'entraîner non seulement la fin des entreprises concernées, mais aussi celle de l'emploi des travailleurs y gagnant leur pain. D'ailleurs, le recours aux "scabs" n'existe pas actuellement dans plus de 10% des cas.

Maintenant, j'aimerais brièvement toucher la question du rappel au travail suite à une grève ou à un lock-out. Il est prévu au projet de loi no 45 qu'à la fin d'une grève ou d'un lock-out tout salarié qui a fait grève ou a été en lock-out devra être réembauché de préférence à toute autre personne. Nous sommes d'accord sur cette disposition de la loi. Le CPQ est également d'accord avec cette mesure à trois conditions. Premièrement, que la grève soit légale et nous partageons cet avis. Deuxièmement, que le rappel ne soit pas nécessairement immédiat ou que l'emploi soit le même. Cette mesure peut mener à certains abus de la part des employeurs. Aussi, nous n'y souscrivons pas à moins que, suite à une grève, l'entreprise ne change effectivement, et de façon substantielle, son mode de fonctionnement.

Par contre, dès qu'une grève est terminée, on doit reprendre immédiatement tous les travailleurs touchés par un conflit de travail. Si une entreprise doit procéder à des mises à pied, elles ne devront pas avoir lieu au moment d'un retour au travail. Enfin, on demande que l'employeur ait le droit d'exercer son droit de gérance et de prendre des mesures disciplinaires à l'endroit des salariés qui, selon son jugement, ont eu un comportement répréhensible en cours de grève. En ces cas, les salariés visés pourraient exercer les recours déjà prévus à la convention collective relativement à la procédure des griefs et d'arbitrage. Notons enfin que tout employeur qui ne respecte pas les dispositions de cet article est passible d'une amende de $500 par jour de retard.

Je vois, Mme le Président, que je viens par là de mettre fin à certaines de vos préoccupations et que je viens de vous rassurer sur l'orientation que pourrait prendre ce projet de loi. Il me fait plaisir de le souligner. Maintenant, j'aimerais en guise de conclusion indiquer que nous sommes à ce point pour l'implantation universelle de la formule Rand, qui vise essentiellement à favoriser la syndicalisa-tion massive et conséquemment l'équilibre des forces, que nous nous devons de voter en deuxième lecture en faveur du principe que préconise le projet de loi 45.

Nous sommes à ce point pour la démocratisation syndicale, qui doit viser essentiellement à ce que les travailleurs, le cas échéant, deviennent les véritables propriétaires de leur syndicat, que nous devons voter en deuxième lecture pour ce projet de loi. Nous sommes également à ce point, Mme le Président, pour une accréditation rendue plus facile, afin que les travailleurs en cette société de consommation et du style "struggle for life" qui est le nôtre puissent regrouper et unir leurs forces, que nous devons voter pour la deuxième lecture de ce projet de loi no 45.

Nous sommes à ce point pour des dispositions législatives "antiscabs", afin que cesse et que disparaisse un des facteurs qui gâchent le plus l'ensemble du climat des relations, afin que jamais plus nous ne vivions au Québec d'incidents à la Robin Hood, que nous appuyons et que nous voterons en deuxième lecture en faveur des principes qui sont contenus dans ce projet de loi 45.

Si l'Union Nationale, Mme le Président, annonce dès maintenant qu'elle entend voter en deuxième lecture en faveur du projet de loi 45, c'est qu'elle veut se faire solidaire d'un solide coup de barre en matière de réforme de relations de travail, et que nous indiquons par là que nous sommes conscients des énormes besoins qui se font maintenant sentir et qui sont d'ailleurs pressentis depuis longtemps dans ce domaine et auxquels on doit s'attaquer de toute urgenoe.

Pour autant, cet objectif d'assainissement de nos relations de travail nous tient à ce point à coeur qu'il nous faudra vraiment, et j'insiste, lors de l'étude en commission du projet de loi 45, article par article, nous assurer que la réforme mise de l'avant se veut vraiment en profondeur, intégrale et soucieuse de toucher à la fois aux droits et aux obligations des travailleurs et des patrons.

C'est ainsi, Mme le Président, que nous favoriserons une application intégrale de la formule Rand, ne nous limitant pas aux seuls avantages qu'elle préconise, mais nous attaquant aux obligations également qu'elle appelle dans ce souci d'équité et d'équilibre auquel j'ai fait allusion tout à l'heure entre les privilèges et les responsabilités, entre les droits et les devoirs.

C'est ainsi que, dans la recherche de l'objectif de démocratisation syndicale, nous parlerons non seulement des droits des syndiqués, mais aussi de leurs obligations. Au total, le droit au travail pour tous, la primauté de l'état d'être travailleur sur l'état d'être syndiqué et, sur un autre plan, les implications économiques du progrès social que met de l'avant le projet de loi 45, les implications économiques, plus particulièrement au niveau des petites et moyennes entreprises québécoises que l'on doit préserver et aider.

Voilà des préoccupations sérieuses qui nous feront, en commission et lors de l'étude article par article du projet de loi 45, soulever des questions — et elles seront nombreuses, Mme le Président — qui nous feront émettre des réserves, qui nous feront formuler des amendements pertinents au présent projet de loi. Nous nous référerons toujours à ce souci de reconnaître la réalité québécoise, les besoins d'une économie moderne, de relations de travail normales, saines, équilibrées et qui atteignent leur but. Si ce soir nous disons oui au principe qui sous-tend le projet de loi 45, nous disons non a la formulation et aux implications possibles que revêt le même projet de loi 45.

Seule l'attitude gouvernementale — et j'attire votre attention à ce sujet, Mme le Président — à compter de maintenant, jusqu'en troisième lecture, en passant par la commission parlementaire, nous dira si, lors de la mise aux voix du projet de loi final, en troisième lecture, nous, de l'Union Nationale, devrons accepter l'orientation articulée du gouvernement en la matière, ou si nous devrons lui dire que sa version finale est une fois de plus excessive, irréaliste et inacceptable.

Mme le Président, j'ai voulu, au nom de l'Union Nationale, donner les grandes lignes de notre position sur la question, de cette contribution que nous voulons apporter à un débat de toute première importance qui, même s'il se tient à la fin de cette session, doit recueillir, de la part de tous les parlementaires de cette Chambre, l'attention que nécessite une réforme qui a autant de conséquences sur notre Québec moderne. J'invite les parlementaires, comme le ministre du Travail d'ailleurs, à tenir compte des remarques que l'Union Nationale a voulu faire. Nous attendons, avec impatience, de voir l'attitude du ministre et du gouvernement lors de l'étude, article par article, comme également lors de la troisième lecture du projet de loi no 45.

Mme le Vice-Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: Mme le Président, puis-je demander l'ajournement de la Chambre jusqu'à demain, s'il vous plaît?

M. Burns: L'ajournement du débat, s'il vous plaît?

Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Burns: Un instant, madame.

M. Mackasey: Excusez-moi, l'ajournement du débat. May I call it eleven o'clock?

M. Burns: Sur cette motion d'ajournement du débat, Mme le Président, je suis d'accord, je pense que tout le monde est d'accord.

Mme le Vice-Président: Cette motion d'ajournement du débat est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Maintenant, et c'est pour cela que je ne voulais pas que vous ajourniez la Chambre, j'avise les membres de l'Assemblée nationale que demain après-midi, à compter de 15 heures, nous entreprendrons l'étude, article par article, du projet de loi no 2 relativement au financement des partis politiques. Je propose donc, en conséquence, que nous ajournions nos travaux à demain matin, 10 heures.

M. Brochu: Savez-vous à quelle salle demain? M. Burns: Pardon?

M. Brochu: A quelle salle l'étude du projet de loi article par article?

M. Burns: Ce sera à la salle 81, sans aucun doute.

M. Brochu: Sera-t-elle libre demain?

M. Burns: J'en donnerai avis dans le courant de la journée de demain.

M. Brochu: La salle 81 va être libre demain?

M. Burns: Oui, elle va être libre. On m'a dit qu'on avait terminé les travaux à la salle 81.

M. Brochu: Merci.

Une Voix: La guillotine a été adoptée.

Mme le Vice-Président: Cette motion d'ajournement des travaux à demain, 10 heures, est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

Mme le Vice-Président: Adopté. L'Assemblée ajourne ses travaux à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 36)

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