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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mardi 13 décembre 1977 - Vol. 19 N° 131

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

M. Richard (président): A l'ordre, mesdames et messieurs

Déclarations ministérielles. M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Je veux d'abord m'excuser auprès des partis de l'Opposition parce que je sais qu'ils aiment avoir le texte une heure avant et ils l'ont eu moins d'une heure avant. Je peux la faire demain, si vous voulez, cela vous fera 24 heures d'avance. Avec le changement d'horaire, j'ai été pris un peu au dépourvu.

Depuis un an, à titre de ministre de l'Agriculture, je n'ai pas raté une seule occasion d'exprh mer la volonté de mon ministère de doter le Québec d'un secteur...

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement. Je m'excuse auprès du ministre. Le ministre de l'Agriculture vient de nous faire parvenir à l'instant une copie de la déclaration ministérielle qu'il est en train de nous lire. Ce n'est pas une fois rendus à 10 h 15 qu'une telle copie doit nous être livrée en vertu de notre règlement. Je ne sais pas si cela a une telle urgence que cela ne peut attendre à demain ou même à cet après-midi, si on le voulait.

M. Garon: D'habitude, quand cela concerne le développement économique, vous aimez en entendre parler.

M. Burns: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): On va respecter le règlement et, sur le fond, on pourra en parler.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: ... je serais d'avis, pour respecter les récriminations du chef de l'Opposition, que nous pourrions peut-être, du consentement de la Chambre, remettre cette déclaration ministérielle à l'ouverture de la Chambre à 15 heures cet après-midi.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord.

M. Burns: Si j'avais le consentement, j'ai consulté le ministre de l'Agriculture et il serait d'accord pour livrer cette déclaration ministérielle à ce moment; cela permettrait aux critiques officiels dans ce domaine, du côté de l'Opposition, d'en prendre sérieusement connaissance. D'accord?

M. Bellemare: Aucune objection.

M. Levesque (Bonaventure): Avec un embargo?

M. Burns: Avec un embargo.

M. Samson: M. le Président, sur la question du consentement, est-ce qu'on pourrait, en même temps, inclure une copie pour les députés de Rouyn-Noranda et de Beauce-Sud et nous permettre aussi de répliquer s'il y a lieu? On verra ce qui sera dit.

M. Burns: A ce moment-là, cela ne m'appartient plus. Cela va prendre le consentement de la Chambre.

M. Samson: Cela va prendre un autre consentement, mais j'aime bien le demander d'avance aussi. Etes-vous d'accord?

Des Voix: Oui.

M. Samson: Bon, merci.

Le Président: Du consentement de la Chambre, la déclaration ministérielle de M. le ministre de l'Agriculture aura lieu cet après-midi à 15 heures.

Dépôt de documents.

M. le ministre des Communications.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Protocole en matière de communication

M. O'Neill: Avec le consentement des membres de cette Assemblée, j'aimerais déposer une copie d'une lettre adressée au ministre fédéral des Communications, Mme Jeanne Sauvé, à la suite des deux derniers jugements rendus par la Cour suprême en matière de cablôdistribution. A cette lettre est joint un projet de protocole en matière de communication qui a été également soumis à l'attention de Mme Sauvé.

Le Président: Document déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Projet de loi privé no 216

M. Burns: M. le Président, j'ai voulu faire une brève consultation auprès de membres de l'Opposition; malheureusement, à ce moment-là, le député de Rouyn-Noranda et le député de Beauce-Sud n'étaient pas en Chambre, alors, je n'ai pas pu le faire. J'aurais un rapport du greffier en loi concernant un éventuel projet de loi no 216; c'est un projet de loi privé qui s'appellera Loi concernant la Société de réassurance des mutuelles-incendie du Québec. Il y aurait, du moins on me l'a fait valoir, une certaine urgence de déposer le projet de loi, pour que les membres de l'Opposition

puissent en prendre connaissance et voir si, à l'intérieur de nos travaux il serait possible éventuellement d'adopter le projet de loi. Si ce n'est pas possible, à ce moment-là, c'est un projet de loi privé, on en disposera comme tel. Si j'avais le consentement de tout le monde, je vous dirais d'abord, à ce stade-ci, que le greffier en loi a examiné les règles de pratique par rapport à ce projet de loi, et que le projet de loi est conforme à l'avis et que l'avis est suffisant. Cependant, le projet de loi ayant été déposé au secrétariat des commissions après le jour de l'ouverture de la session et seulement trois avis ayant été publiés dans un journal français, il y aurait lieu, M. le Président, de suspendre la règle de pratique à cet égard; du moins, c'est ce que me dit le greffier en loi, et sur ce, je fais motion pour que les règles de pratique soient suspendues relativement à ce projet de loi.

M. Roy: D'accord.

M. Bellemare: M. le Président, il s'agit, je pense, d'un projet de loi privé, qui concerne une institution canadienne-française qui est au bord d'un cataclysme extraordinaire, je donnerais donc mon consentement.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté. Le Président: Adopté.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, article g), s'il vous plaît.

Projet de loi no 89 Première lecture

Le Président: M. le ministre des Communications propose la première lecture du projet de loi no 89 qui est la Loi concernant la Compagnie de téléphone Continental Ltée.

M. le ministre des Communications.

M. Louis O'Neill

M. O'Neill: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de transférer à Télébec Ltée les biens meubles et immeubles des compagnies Téléphone Dorchester Inc. et Le Téléphone rural de Beauceville Limitée et de La Compagnie de téléphone Continental Ltée. A compter de ce transfert, Télé-bec Ltée doit exploiter et administrer le service public de téléphone dispensé par ces compagnies, selon les règles et conditions déterminées par la Régie des services publics. Les indemnités à être versées par Télébec Ltée à ces compagnies, en raison de ce transfert, sont déterminées par un conseil d'arbitrage selon les mécanismes prévus au projet de loi. Les employés des compagnies dont les biens sont transférés deviendront les employés de Télébec Ltée.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Président: Deuxième lecture prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. Burns: M. le Président, ce projet de loi auquel je faisais référence dans le rapport du greffier en loi porte le numéro 216. Normalement il devrait être présenté par le député de Joliette. Malheureusement, on me dit qu'il est retardé à cause d'un petit accident d'automobile, sans gravité. Peut-être que quelqu'un d'autre, au nom... Oui, il est assuré, du moins je l'espère.

M. Marchand: II est chanceux que cela lui arrive avant que la loi soit votée!

Projet de loi no 216 Première lecture

Le Président: M. le député de Laprairie, au nom de M. le député de Joliette-Montcalm, propose la première lecture du projet de loi no 216, la Loi concernant la Société de réassurance des mutuelles-incendie du Québec. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

M. Lavoie: II faudrait le déférer à une commission quelconque.

Motion de renvoi à la commission des consommateurs

M. Burns: Je m'excuse, oui. M. le Président, je propose que ce projet de loi no 216 soit déféré à la Commission des consommateurs, coopératives et institutions financières.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté. Le Président: Adopté.

Période de questions orales.

M. le chef de l'Opposition officielle

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Les écoles et l'indépendance du Québec

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ma question, en l'absence du ministre de l'Education, s'adresse au premier ministre. On m'informe, M. le Président, que la Société nationale des Québécois aurait lancé un concours dans l'est du Québec, en particulier, et que ce concours s'adresserait aux élèves du secondaire, et qu'il aurait reçu l'approbation, la collaboration des commissions scolaires des Monts, de la Vallée, du Grand Portage et attendrait une autre approbation de la part de la commission scolaire du Bas-Saint-Laurent.

Ce concours consiste apparemment à préparer un travail dont la question, qui fait l'objet de cette étude, serait "Pourquoi je dis oui à l'indépendance." Je pose la question au premier ministre à savoir s'il est d'accord que dans nos écoles on accepte qu'un tel concours ait lieu, particulièrement dans le contexte politique que l'on connaît?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Cela me semble partir d'un bon naturel, M. le Président. Je dois prendre avis de la question parce que c'est la première nouvelle que j'en ai. Je vais consulter le ministre de l'Education. S'il y a quoi que ce soit de plus concret ou de plus spécifique qu'on peut ajouter comme explication, en réponse à la question du chef de l'Opposition, on le fera le plus vite possible. Franchement, je n'ai pas d'autre information.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, une fois que le premier ministre aura reçu les informations, j'espère qu'il pourra en faire part à la Chambre dans les meilleurs délais. Ensuite, il pourra demander à son ministre de l'Education, si l'information est correcte, s'il va agir avec ce cas de la même façon qu'il a agi avec la pochette "Ô Canada" qu'il a voulu retirer de la circulation et qu'il a défendu aux commissions scolaires de se procurer.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

M. Pagé: Question principale, M. le Président. Qui reconnaissez-vous le premier?

Le Président: M. le député de Gatineau. M. Pagé: Vous m'aviez reconnu.

M. Gratton: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre également. Le premier ministre pourrait-il également prendre avis d'un fait qui s'est produit le 8 décembre alors qu'à la collation des diplômes, cérémonie qui s'est tenue le 8 décembre à l'Université Laval...

Le Président: M. le député de Gatineau, je pense que cela ne constitue pas...

M. Gratton: C'est tout à fait accessoire à la question principale.

M. Pagé: C'est du même cru.

M. Gratton: Le ministre de l'Education était invité à y prononcer une allocution. Le programme initial, imprimé sur papier de qualité approprié, indiquait bien qu'on devait terminer la cérémonie par le chant "Ô Canada". Suite à des pressions faites, on ne sait où, mais on devine un peu, un deuxième programme a dû être imprimé de toute urgence en rayant les seuls mots "Ô Canada".

M. Bertrand: Hors du sujet. Ce n'est pas accessoire, M. le Président.

M. Gratton: Le premier ministre pourrait-il s'informer auprès...

M. Bertrand: Ce n'est pas accessoire. M. Pagé: Cela fait mal. M. Bertrand: Ce n'est pas accessoire. Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Je demande donc au premier ministre s'il voudrait bien s'informer auprès du ministre de l'Education pour savoir si c'est à la suite de ces représentations ou des représentations de quelqu'un de son ministère qu'on a dû réimprimer le programme. D'ailleurs, pour sa bonne information, je lui ferai parvenir copie du texte original aussi bien que du texte corrigé et, également, je voudrais demander au premier ministre...

M. Burns: M. le Président.

M. Gratton: Je termine, M. le Président.

M. Burns: II faudrait quand même qu'on observe un minimum de règles en ce qui concerne...

M. Gratton: Je demanderais tout simplement au premier ministre, à ce moment-ci, s'il trouve normal que de tels gestes soient posés avant même la tenue du référendum.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Pour ce qui est de la dernière partie de la question, tenant compte du fait qu'on va prendre les renseignements requis par les députés et par le chef de l'Opposition, tenant compte de cela, sur la dernière partie de la question, je dirai non seulement que c'est normal, mais que, dans certains milieux, y compris des mi-

lieux aussi autonomes que les universités, on commence spontanément à contrer une certaine propagande qui s'organise de tous bords et de tous côtés, actuellement, du côté fédéraliste; cela me paraît parfaitement normal.

M. Levesque (Bonaventure): II y a une question, M. le Président, qui dépasse même une question de privilège. C'est la question de savoir si ce gouvernement va continuer ce lavage de cerveaux, particulièrement chez la jeunesse québécoise. Nous en avons assez!

M. O'Neill: Ce n'est pas possible, que c'est triste, on n'en a qu'un!

M. Lévesque (Taillon): II ne s'agit pas de lavage de cerveaux, il s'agit de cerveaux qui s'éveillent un peu partout dans le Québec.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Gratton: Je vous remercie encore une fois. Qu'est-ce qu'il a, lui?

Accessibilité aux territoires de chasse et pêche

M. Pagé: M. le Président, depuis quelques années, les gouvernements qui ont précédé le gouvernement actuel ont mis de l'avant différentes mesures et différents programmes pour favoriser l'accessibilité du territoire au chapitre de la chasse et de la pêche. On se rappellera les sociétés de gestion qui ont été mises de l'avant par le précédent gouvernement. J'en arrive à une question que j'adresse ce matin au ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, à la suite d'une déclaration que celui-ci faisait récemment, à savoir que les baux consentis aux associations de chasse et de pêche, aux clubs privés, ne seraient pas renouvelés à l'échéance prévue pour le mois de mars prochain. Ma question a évidemment plusieurs volets, et vous me comprendrez, parce qu'en raison de la suspension du règlement, je ne peux me prévaloir de l'article 174 de notre règlement qui me permettrait — si la réponse du ministre n'était pas complète — de soulever un mini-débat pour ce soir.

M. le Président, j'aimerais savoir du ministre s'il entend proposer aux Québécois un nouveau mode de gestion. Est-ce qu'il y a une nouvelle structure? J'aimerais qu'il informe cette Chambre de la teneur de ce nouveau mode de gestion. Est-ce que ce seront des sociétés de gestion? Est-ce que ce seront des sociétés d'aménagement? Est-ce qu'encore il entend se prévaloir des associations de chasse et pêche? Ou est-ce que le territoire sur lequel les clubs ont juridiction actuellement sera placé sous la juridiction de parcs ou de réserves?

Dans un deuxième temps, M. le Président, j'aimerais savoir du ministre... M. le Président, le ministre semble écrire, on va lui laisser tout le temps qu'il faut. Il est en train de digérer son festin de l'autre jour. Cela ralentit l'activité. Il n'est pas dans son assiette ce matin... M. le Président, le deuxième volet de la question: Qui aura la responsabilité de la conservation et de l'aménagement du territoire?

Troisième volet de la question: Quelles sont les garanties que le ministre a obtenues du Conseil du trésor pour que le ministère puisse assumer la surveillance du territoire, l'utilisation des ressources fauniques et halieutiques, l'aménagement du territoire, l'entretien des routes et l'ensemencement?

Le Président: M. le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

Une Voix: Fermez les volets.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais simplement répéter ce que j'ai eu l'occasion de déclarer il y a maintenant quelques jours suite à une question qui m'avait été posée par le député de Johnson, si ma mémoire est bonne: J'ai la ferme intention de ne pas procéder au renouvellement des baux de location, des baux exclusifs de chasse et pêche qui viennent à expiration le dernier jour de mars 1978. M. le Président, il reste 1164 de ces baux en vigueur et 1000 de ceux-là viennent à expiration en mars prochain. Je n'ai pas l'intention de retenir ce qui a été essayé dans le passé au chapitre des sociétés d'aménagement ou des sociétés de gestion. Non plus l'intention que, par le biais de parcs ou de réserves, le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche agrandisse son champ d'action en termes de "pourvoirie ". J'ai plutôt, M. le Président, l'intention de travailler avec les associations de chasse et pêche au niveau des zones d'aménagement et de conservation qu'on appelle dans notre jargon des ZAC. C'est en collaboration avec ces interlocuteurs au niveau de chacune des régions et des sous-régions du Québec que nous serons en mesure de procéder à des plans d'aménagement et à une gestion rationnelle de la faune aussi bien que de sa conservation.

Pour ce qui est d'une des questions — je ne me souviens pas quel volet — mais, à partir de la prochaine saison, le ministère prendra à sa charge également toute la protection de la faune sur tout le territoire du Québec.

Pour ce qui est du Conseil du trésor, je dois ajouter que cela devrait normalement procéder, il y a des recommandations qui ont été faites et, dans les meilleurs délais, je pourrai informer mon collègue du résultat de ces discussions, mais il ne semble pas y avoir de problème.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, cela m'amène évidemment à une question additionnelle. Le ministre n'a pas été très clair dans la réponse qu'il

nous fournit ce matin. Est-ce à dire que tout le territoire du Québec qui est actuellement placé sous la juridiction d'associations de chasse et pêche, de clubs privés, sera placé au lendemain du 31 mars sous une nouvelle juridiction, à partir de ce qu'il a énoncé ce matin, soit des organismes, des groupes comme les associations de chasse et pêche, effectivement, dans un premier temps?

Dans un deuxième temps, le ministre nous dit: Le Conseil du trésor mettra à la disposition du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, les sommes requises pour la protection de la faune. Est-ce que, dans cette démarche, le ministère aura les fonds nécessaires pour assurer l'utilisation des ressources, l'aménagement du territoire — on sait que cela coûte cher, le ministre par surcroît doit le savoir — est-oe que le Conseil du trésor donnera les montants suffisants au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche pour assumer cette responsabilité? Il y a des gens qui se posent des questions actuellement, suite à la déclaration du ministre et ils sont en droit d'avoir des réponses.

M. le Président, une fois que celui-ci aura fourni les réponses aux questions que je formule, j'aurais d'autres questions à lui poser.

Le Président: M. le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. Duhaime: M. le Président, je pense avoir été très clair. Les territoires qui sont actuellement sous baux de location portent sur une étendue de 16 000 milles carrés. Ces territoires seront ouverts au public et il n'y aura plus au Québec qu'un seul club; c'est le Québec avec deux exceptions, les pourvoiries du gouvernement par rapport aux parcs et les réserves et les pourvoiries commerciales avec ou sans droit exclusif.

Lorsque je dis que ces territoires passeront sous la juridiction d'associations de chasse et pêche, il est bien certain que ce n'est pas pour recommencer une nouvelle exclusivité, le principe étant posé qu'il s'agit d'une accessibilité pour tous.

Maintenant, au sixième volet de votre question, je voudrais dire que nous sommes à réviser la tarification des permis de chasse et de pêche. Nous sommes également à mettre au point la décision qui fera en sorte que les utilisateurs deviendront obligatoirement membres d'une association. Vous avez ce matin des préoccupations en termes de budget, mais les dépenses additionnelles encourues seront assumées par les utilisateurs.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: J'aimerais que le ministre nous confirme ce matin s'il y aura des territoires qui seront libres, c'est-à-dire que n'importe qui pourra aller y pêcher de son propre gré. C'est le premier volet de ma question supplémentaire.

M. Duhaime: Oui.

M. Pagé: Est-ce que les propriétaires d'immeubles, sur ces territoires... Le ministre a parlé il y a quelque temps de baux de villégiature; est-ce qu'il faisait référence au bail accordé par le ministère des Terres et Forêts prévoyant qu'un détenteur de droit comme celui-là aurait un acre sous sa juridiction? Est-ce que le ministre a aussi tenu compte des centaines d'emplois qui seront affectés par la nouvelle politique? Est-ce que les gens qui travaillent actuellement dans ces clubs privés peuvent s'attendre à travailler pour le ministère ou à avoir un emploi dans la nouvelle structure mise de l'avant par le ministre, même si cela implique que le territoire est libre pour tout le monde, qu'il n'y a pas de surveillance et qu'il y a plus ou moins de conservation?

Le Président: M. le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. Duhaime: Je veux corriger la dernière phrase qui me paraît un peu audacieuse.

M. Pagé: On reparlera de cela. On pourra en reparler et vider la question.

M. Duhaime: Vous dites qu'il n'y aura pas de surveillance. Je viens de vous dire que la protection sera assumée par le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Je voudrais ajouter que les propriétaires d'immeubles, de camps, de hangars, de quais, de chaloupes et d'autres installations attenantes et utiles pourront conserver ces biens en toute propriété. Avec le ministère des Terres et Forêts, un bail de location de terrain pourra se négocier; plutôt d'entretenir ce que tout le monde convient maintenant d'appeler cette espèce d'incertitude d'année en année, depuis 1962 à peu près...

M. Pagé: ... avec les sociétés de gestion et les sociétés d'aménagement. Demandez au député de Saguenay.

M. Duhaime:... les baux de location de terrain porteront sur neuf ans.

Deuxièmement, pour ce qui est des emplois dont se préoccupe le député de Portneuf — et je lui en sais gré — il est bien certain que beaucoup de clubs conserveront ce que j'appelle non pas des gardiens, mais des hommes à tout faire. Ils les conserveront à leur emploi pour faire l'entretien des bâtisses, pour peinturer les chaloupes, pour ouvrir les pistes, pour aménager les berges, les plages, etc. Il n'est pas question, pour le moment, que ces gens qui travaillent en forêt, pour le si petit nombre que pourraient affecter ces décisions, puissent intégrer le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, mais je laisse la porte ouverte là-dessus, on pourra regarder.

M. Pagé: Une dernière question additionnelle, M. le Président, qui sera très brève.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: A la lumière des informations que nous fournit le ministre ce matin, ce que le gouvernement s'apprête à faire, ça n'a pas de bon sens! Le ministre ne croit-il pas qu'il serait opportun d'avoir une commission parlementaire dans les plus brefs délais pour qu'on puisse vraiment vider tous les aspects de la question et répondre ainsi aux questions que des centaines et des milliers de Québécois se posent actuellement?

M. Duhaime: Je suis heureux d'entendre, M. le Président, qu'enfin les clubs privés se sont trouvé un avocat...

M. Pagé: Vous l'avez vu dans votre comté en fin de semaine, avec l'Association de chasse et pêche de la Mauricie.

Le Président: A l'ordre! A l'ordre, M. le député de Portneuf.

M. Duhaime: ... et un plaideur et je pense que c'est pour cela que, pendant six ans de temps, avec votre attitude depuis six ans et depuis quinze ans...

M. Pagé: Répondez donc à la question, vous l'avez vu en fin de semaine dans votre comté.

M. Duhaime: ... que ce dossier est resté en suspens et il n'est pas question, M. le Président, de mettre sur pied une commission parlementaire. Nous profitons de la saison où tout est calme en forêt, tout est blanc, pour arrêter ces politiques et les mettre en vigueur...

M. Pagé: ... être arrogant comme cela!

M. Duhaime: ... et je vous conseillerais de rejoindre le lobby des clubs privés qui, suivant Madeleine de Verchères, a entrepris la grande tournée du Québec pour tirer un peu à gauche et à droite.

M. Pagé: ... dans votre comté en fin de semaine, les gens ne sont pas contents.

M. Duhaime: II n'est pas question d'une commission parlementaire là-dedans.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Une question additionnelle, M. le Président. La nouvelle dont nous fait part le ministre ce matin en est une grosse, une grosse bouchée dans le développement qui se fait dans le secteur. De toute façon, on sera en mesure de prendre connaissance des implications et de ce que nous avons obtenu au cours du mois de mars. Est-ce que j'ai bien compris que sur environ 1000 camps, il y en a 1000 qui seront mis à la disposition du public? C'est ce que vous avez dit.

M. Duhaime: Je m'excuse, M. le Président, mais, à moins que la langue ne m'ait fourchée et que mon ouïe ne l'ait entendu, je n'ai pas parlé de camps, je n'ai jamais parlé de camps...

M. Grenier: Cessez donc de faire de l'arrogance, répondez donc aux questions pour une fois.

M. Duhaime:... j'ai parlé des baux. Je n'ai pas parlé d'un camp. C'est quoi, votre question?

M. Grenier: Est-ce que les baux dont vous parlez, il y en a plus de 1000... Vous avez dit, au début de votre réponse, qu'il y en a 1000 qui seront mis à la disposition du public, répartis au public, est-ce que c'est préparé au point que les gens qui sont propriétaires de terrain... Cela devient public, les personnes qui sont propriétaires de terrain, il leur arrive quoi, ceux qui ont des achats dans le secteur des terres et forêts? Qu'est-ce qui arrive du personnel? Cela semble être assez confus, et les personnes qui veulent vendre? Il faut savoir que, si j'ai une maison sur un terrain privé, elle a une certaine valeur, mais, si elle vient en bordure d'une route numérotée qui devient une autoroute, elle n'a plus la même valeur. Les personnes qui ont des propriétés sur des clubs privés ou des lacs privés pourront-elles les vendre au gouvernement, et avec quelle perte?

M. Duhaime: Voyons! M. le Président, je vais reprendre mon explication plus lentement. D'abord, il y a une chose qu'il faut établir; les immeubles qui sont sur des terrains ne sont pas sur des terrains privés, mais sont sur des terres publiques qui appartiennent à la couronne...

M. Grenier: Ils l'ont acheté.

M. Bellemare: Sauf s'ils ont acheté le terrain de la couronne.

M. Duhaime: Bien oui!

M. Grenier: II y en a, vous le savez.

M. Duhaime: II y en a un. Il y en a un.

M. Grenier: S'il n'y en a qu'un, il lui arrive quoi?

M. Duhaime: Bien oui, voulez-vous qu'on vous réponde?

Des Voix: A l'ordre!

M. Duhaime: On n'est pas pour établir une politique parce qu'il y a un club privé qui est propriétaire du fonds de terrain. Ce que je dis, c'est que ceux qui sont propriétaires d'immeubles, de bâtisses, de quais, etc., pourront continuer sur place l'exploitation, en faire la chasse, la pêche; la seule chose, c'est qu'ils ne jouiront plus de droits exclusifs. Cela veut dire également que le ministère n'entend acheter aucune de ces installations; mon but n'est pas de sortir des Québécois et des Québécoises de la forêt, c'est tout le contraire, c'est

de faire en sorte qu'un plus grand nombre puisse avoir accès à cette ressource dont ils ont été privés.

Le Président: M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Une question supplémentaire sur la réponse que vient de donner le ministre du Tourisme. Je sais que la plupart des baux sont sur des terrains publics; ce sont des baux consentis par tous les gouvernements antérieurs, conditionnellement, où les constructions étaient mises en place pour des fins soit de chasse, soit de pêche.

Il y en a où les deux options sont possibles; d'autres où ce n'est que la chasse ou la pêche. Le ministre vient de répondre que, quant à l'expropriation possible, il n'y en aura pas. Le détenteur d'un bail pourra continuer de bénéficier de l'usufruit de l'installation qu'il a mise en place.

M. le Président, je pense que c'est de la spoliation, parce qu'il ressort que... Pas besoin de rire, je n'en ai pas de bail. Il ressort que, quand le gouvernement a permis de telles constructions moyennant des baux, c'était conditionnel à ce que, s'il y avait un évincement, on lui en paie normalement la valeur.

M. Duhaime: Question de privilège, M. le Président.

M. Mailloux: Quand on dit que tout le public sera sur le même lac, c'est le...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mégantic-Compton, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. Duhaime: Vous regarderez dans le dictionnaire ce que veut dire spoliation avant d'en parler. Vous allez me dire qu'on est en train de faire de la spoliation. Vous êtes malade! Au contraire, on est en train de dire aux gens, qui ont des milliers de dollars d'investis en forêt, qu'ils vont pouvoir continuer de jouir de ces biens. C'est exactement le contraire. La seule chose, c'est que ce ne sera pas un usage exclusif.

M. Grenier: ... c'est bien gardé.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Duhaime: II me semble que c'est clair.

M. Roy: Question additionnelle, M. le Président, sur le même sujet, très courte.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. Ma question...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Richmond.

Programme d'isolation des maisons

M. Brochu: Ma question s'adresse, M. le Président, au ministre délégué à l'énergie. On sait qu'il y a quelque temps il y a eu entente entre le fédéral et les dix provinces concernant le programme d'isolation des maisons. Il restait à établir, je pense, le contenu québécois de ce qu'allait être le programme éventuel d'isolation des maisons. Est-ce que le ministre serait en mesure aujourd'hui de fournir à cette Chambre quelques indications sur le contenu du programme au Québec en ce qui concerne l'isolation des maisons, dans ses grandes lignes? Où en est rendu le dossier en ce qui concerne l'établissement de ces normes?

M. Joron: M. le Président, d'abord distinguons deux choses. Il y a un programme fédéral, vous le savez, qui s'applique aujourd'hui dans toutes les provinces, qui est en vigueur depuis le premier septembre. L'Alberta et le Québec n'avaient pas été déclarés admissibles par le gouvernement fédéral parce que l'on contestait certaines conditions de juridiction provinciale liées à l'admissibilité à ce programme. Les provinces ont par la suite formé un front commun pour demander au gouvernement fédéral de retirer toute condition préalable. Le gouvernement fédéral l'a accepté rendant ainsi tout le monde admissible.

Au moment où on se parle, le programme fédéral est disponible aux citoyens québécois propriétaires de maisons jusqu'à trois étages, construites avant 1921. Ils peuvent se prévaloir, au moment où on se parle, de ce programme. Ils peuvent même, selon ce qu'a déclaré le gouvernement fédéral hier, ou avant hier, s'ils ont fait des achats de matériaux d'isolation couverts par le programme fédéral, depuis que le programme fédéral est entré en vigueur le premier septembre, y revenir et se les faire rembourser.

A toutes fins utiles, le programme fédéral aura donc été en fonctionnement rétroactivement comme partout ailleurs au Canada. Ce programme, comme on l'a dit à l'époque, ne couvre d'abord que l'achat des matériaux isolants. On rembourse une partie des frais pouvant aller jusqu'aux deux tiers de l'achat de certains matériaux isolants et ne dépassant pas un maximum de $350, lesquels $350 sont imposables. Il ne couvre pas des choses comme les doubles fenêtres, les doubles portes, les coupe-froid, les ci et les ça. Il ne couvre pas les frais de la main-d'oeuvre. Nous avons jugé le programme insuffisant comme tel. C'est pourquoi on aurait souhaité demander le transfert de ces sommes d'argent et faire nous-mêmes un programme global pour lequel on aurait été le seul maître d'oeuvre. D'autres provinces partageaient notre avis là-dessus. Le gouvernement fédéral a préféré garder son programme à lui et dire aux provinces que, si elles voulaient faire des programmes complémentaires et même plus vastes, cela était libre à elles.

Le Québec a décidé de faire cela mais on n'est pas, à ce moment-ci, prêt à annoncer les modali-

tés finales de ce programme. Il sera disponible dès les premiers mois de l'année 1978. Il sera annoncé en temps et lieu avec toutes les modalités.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: J'ai une courte question supplémentaire. Si je comprends bien les propos du ministre, la province est en train d'étudier son programme à elle. Quel est le bureau qui fait ces études? Est-ce que ce sont des bureaux de l'extérieur? Est-ce que ce sont des fonctionnaires de la province? Sur quoi se base-t-on pour établir des normes? Est-ce qu'on va travailler de la même façon que le fait le fédéral ou va-t-on avoir des normes qui seront comparables à celles utilisées par d'autres pays voisins?

M. Joron: Vous m'avez demandé quel était le bureau qui nous fournissait les études pour nous aider à préparer notre programme. C'est le bureau d'économie d'énergie qui existe maintenant depuis presque un an. C'est une des directions de la Direction générale de l'énergie. C'est donc au niveau des fonctionnaires du gouvernement du Québec. C'est le bureau d'économie d'énergie qui est le maître d'oeuvre de ce programme et qui est à l'articuler.

Est-ce que les critères seront les mêmes que le programme fédéral? Dans ce sens, nous sommes à discuter à l'heure actuelle avec le gouvernement fédéral, par exemple, de la réciprocité d'admissibilité. Si un propriétaire se qualifie pour le programme fédéral, il sera automatiquement qualifié pour le programme québécois et vice versa. On est en train d'étudier cela. On a également suggéré au gouvernement fédéral d'apporter une modification quant à la date de la première année du programme si ce sont seulement les maisons construites avant 1921... On voudrait un peu plus de souplesse. A cet égard, le gouvernement fédéral a indiqué qu'il était prêt à faire des accommodements. D'autre provinces ont les mêmes problèmes parce qu'en 1921, de l'Atlantique au Pacifique, les parcs de logements n'étaient pas les mêmes dans les différentes régions. Cela pose des difficultés. Il est possible que ce soit changé. Au moment où le programme québécois sera annoncé, on aura la réponse finale sur cette question.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: M. le Président, je pense que cela est assez important. Actuellement, dans toute cette étude, il y a peut-être une chose qui se propage et qui n'est pas correcte. Si on traîne cette étude pendant trois ans... Le fléau actuel, ce sont les constructions qui se font, lesquelles viennent d'un ordre qui n'existe pas ou à peine. Il est inexistant. C'est là l'importance. Pour les constructions qui sont déjà faites, tâchons de trouver des normes déjà établies qui soient valables, et non pas celles utilisées par le fédéral qui équivalent à rien et à moins que rien. Je suis d'accord avec le ministre lorsqu'il les a refusées.

M. Joron: M. le Président, je comprends le sens...

Le Président: M. le député de Vanier.

M. Joron: M. le Président, puis-je répondre à la question supplémentaire, si vous me le permettez?

Je comprends le sens de votre question. Elle n'a pas rapport au programme d'isolation comme tel. Vous vous demandez si le Québec va établir, dans son Code du bâtiment qui relève du ministère du Travail, des normes d'isolation plus sévères pour les constructions nouvelles. Oui, on est en train d'étudier cela justement en collaboration avec le ministère du Travail.

Le Président: M. le député de Vanier.

Déménagement de compagnies de navigation

M. Bertrand: Merci, M. le Président. J'aurais aimé posé ma question la semaine dernière au ministre des Transports, mais les aléas de la Chambre m'en ont empêché. M. le Président, tout le monde sait que dans le domaine des aéroports, des ports, des voies ferrées, le Québec n'est, c'est le moins qu'on puisse dire, pas tellement favorisé par le fédéralisme rentable. Dans cet ordre d'idées, j'aimerais que le ministre des Transports puisse commenter aujourd'hui la décision qui a été prise par le directeur du port de Montréal il y a quelques jours afin de déplacer la seule compagnie québécoise d'arrimage, la compagnie Logis-tec, pour faire de la place à la compagnie Federal and Commerce Navigation et aussi pour créer de la place dans le port de Montréal pour la compagnie CP Navigation qui devra, pour ce faire, quitter le port de Québec.

Or, comme on le sait, la CP Navigation était la seule compagnie à fournir des services de conteneurs dans le port de Québec; avec son départ, c'est une bonne partie de l'économie québécoise qui se trouve affectée.

J'aimerais demander au ministre, dans les circonstances, après avoir mis sur pied un comité qui devait étudier ce dossier, s'il est en mesure aujourd'hui de nous dire s'il a encore l'intention de poursuivre ses démarches pour amener la compagnie CP Navigation à revenir sur sa décision ou si, pour lui, c'est une chose faite et qu'à toutes fins pratiques, le dossier est considéré comme fermé?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: M. le Président, à la suite de la nouvelle qui a paru dans le journal Le Devoir concernant une certaine modification au port de Montréal, j'ai communiqué avec le directeur du port de Montréal et on m'a donné, en fait, de façon assez laconique, un certain nombre de renseignements selon lesquels il s'agirait tout simplement d'une rationalisation des espaces du port de Montréal.

J'ai communiqué, par la suite, avec Logistec, qui m'a indiqué que, selon les renseignements disponibles il ne s'agissait pas d'enlever complètement toutes les gares qui étaient à sa disposition. Le président de Logistec m'a même indiqué que, dans les circonstances, il ne voyait pas l'utilité de l'intervention du ministère des Transports. Cependant, en ce qui concerne CP Navigation, il s'agit d'une décision d'une compagnie, en fait, en relation avec la politique portuaire du gouvernement fédéral. Nous savons très bien que nous n'avons aucun pouvoir en ce qui concerne la planification de la politique portuaire du gouvernement fédéral. Ceci va être probablement pire encore si le gouvernement fédéral fait adopter par la Chambre des communes sa loi C-6 qui concentre tout le contrôle des ports sous la juridiction du gouvernement fédéral sans tenir aucun compte des intérêts du Québec. Que voulez-vous? Il va falloir, comme Québécois, que ce soit dans le secteur des aéroports ou dans le secteur maritime, qu'on prenne conscience, comme nous du gouvernement, en avons pris conscience, qu'on ne peut pas à la fois être un Etat colonial et un Etat indépendant.

Cependant, au ministère des Transports, en collaboration avec la Chambre de commerce de la région de Québec et en collaboration avec les députés, nous suivons de très près ce dossier. Nous n'avons pas de décision officielle de CP Navigation mais, comme je l'ai indiqué à maintes reprises, nous avons l'intention — comme nous l'avons fait pour Cast — d'utiliser tous les moyens économiques ou tout le poids économique que nous pouvons avoir comme gouvernement du Québec pour faire en sorte que les compagnies maritimes demeurent dans le territoire du Québec et ne se dirigent pas vers l'Est, à cause d'une politique discriminatoire touchant les coûts du transport ferroviaire des Maritimes vers le Québec. Nous avons donc l'intention d'utiliser tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter que ces compagnies maritimes se dirigent vers l'Est, que ce soit en direction de Montréal, soit ensuite vers Halifax.

Encore une fois, on ne peut pas être à la fois Etat colonisé et Etat indépendant.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

Déménagement de Standard Paper Box

M. Goulet: M. le Président, surtout en tenant compte de la deuxième partie de la question du député de Vanier, si on tient compte que CP Navigation employait tout près de 150 personnes dans la région de Québec, j'aimerais ajouter à cela un autre déménagement d'usine, celui de Standard Paper Box. Ma question, je pense, devra attirer l'attention de tout le monde, surtout des autorités gouvernementales, car les effets sociaux de déménagements de telles usines sont très graves. J'aimerais donc savoir si le ministre des Affaires sociales a fait pression auprès de ses collègues au développement économique — toujours dans le cas de CP Navigation et d'autres compa- gnies—soit au ministère de l'Industrie et du Commerce ou encore du ministère des Transports, afin d'empêcher ces déménagements.

Le Président: M. le député de Bellechasse, je vous souligne qu'il ne s'agit pas là d'une question additionnelle. Nonobstant cela, étant donné que le temps nous le permet, je vais permettre au ministre des Affaires sociales de répondre.

M. Lazure: II est évident que, comme tous les autres députés ministériels, nous regrettons ces déménagements, ces dislocations qui ont souvent des effets sociaux, comme le député le dit, mais, évidemment, je fais confiance au titulaire du ministère concerné pour minimiser le plus possible les effets négatifs de tels déménagements.

M. Goulet: Je m'excuse, je n'avais pas mon écouteur. Est-ce que vous m'avez dit que ma question était une question principale?

Le Président: Oui, principale.

M. Goulet: Donc, vous m'en permettrez une additionnelle.

Le Président: Pour une fois, oui, pour une question.

M. Goulet: M. le Président, vous m'avez coupé; si je m'adressais au ministre des Affaires sociales, c'est parce qu'il faut tenir compte que, dans le cas de ces déménagements d'usines, les conditions matérielles des travailleurs licenciés sont inadéquates et les conséquences psychologiques et sociales sont encore plus graves, M. le Président, je n'en veux pas du tout à mes collègues de la région de Montréal, mais vous comprendrez que charité bien ordonnée commence par soi-même. Ma question s'adresse au ministre des Communications, au ministre de la Fonction publique, au ministre des Affaires intergouvemementales, qui est absent, au ministre de l'Agriculture. M. le Président, une chance que vous êtes président parce que ma question s'adresserait à vous également.

Quand ces quatre ministres vont-ils faire des pressions? Dans la région de Québec, il y a déménagement de trois usines, et je les nomme: Standard Paper Box, McCallum Transport, 60 employés, et CP Navigation, 150, dans l'espace de trois semaines, quand allez-vous faire pression afin que dans la région de Québec, au moins, on sauve les meubles?

M. Burns: M. le Président, je pense que la réponse est donnée.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Goulet: Aucun ministre de la région de Québec n'ose se lever. Quand est-ce qu'ils vont faire pression pour au moins sauver les meubles dans la région de Québec? Cela part à coups de 100.

Le Président: M. le député de Bellechasse, s'il vous plaît!

M. le député de Saint-Laurent.

Conflit dans les ateliers pour déficients mentaux

M. Forget: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Elle est relative aux difficultés de relations entre les syndicats et la direction des ateliers de l'Association pour les déficients mentaux de Montréal. Il y a un peu plus d'un an, ce syndicat obtenait son accréditation et déposait un projet de convention collective. Il n'y a pas eu, depuis, de négociations. Je voudrais savoir du ministre des Affaires sociales s'il a donné des instructions pour que l'intégration des employés qui travaillent dans les différents ateliers protégés pour déficients mentaux ou autres à travers le Québec se fasse et que, le cas échéant, des conventions collectives soient négociées en suivant le patron déterminé lors de la récente ronde de négociations dans le secteur parapublic.

Deuxièmement, a-t-il donné des instructions pour que cessent ou soient renversées les décisions relatives aux mises à pied pour activités syndicales qui ont été effectuées dans cet atelier, au nombre de six, plus une annulation de poste, et pour mettre fin à l'engagement de personnel qui se fait pour combler les postes ainsi vacants?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, j'ai effectivement donné instruction à notre direction des relations de travail dirigée par le sous-ministre adjoint, M. Meloche, pour que ce conflit soit réglé le plus tôt possible. Si le député de Saint-Laurent le permet, je vais prendre avis et je pourrai faire un état de la question plus détaillé demain ou après-demain.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Question additionnelle, M. le Président, très brièvement. Dans les crédits de son ministère pour l'année, on retrouve des fonds suffisants pour assurer l'intégration de tous les employés des ateliers protégés à l'intérieur des normes salariales prévues pour le réseau et les conventions collectives du réseau. Comment se fait-il que l'on se retrouve, en fin d'année, devant une situation comme celle-là? Comment se fait-il que des instructions ne soient pas parvenues en temps utile pour que cette difficulté qui dure depuis un an et qui a mené même à des arrestations des syndiqués en question ait pu être évitée?

M. Lazure: M. le Président, les instructions sont données depuis longtemps. C'est un problème de relations de travail qui est fort complexe, comme c'est souvent le cas. Je vais prendre avis de la question et donner une réponse beaucoup plus détaillée demain ou après-demain.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

Règlement relatif aux chauffeurs de taxi

M. Samson: M. le Président, j'avais une question pour l'honorable ministre des Transports, mais je pense qu'il vient de sortir. A moins qu'il soit... Très bien. Je viens de l'apercevoir, M. le Président. Il était debout près du premier ministre. Je ne le voyais pas.

Ma question au ministre des Transports concerne l'arrêté en conseil 2330-77 du 13 juillet dernier; c'est un arrêté en conseil qui modifie le règlement 6k, concernant le taxi. Pour la bonne compréhension de la question, M. le Président, cet amendement adopté le 13 juillet ajoutait le paragraphe qui est numéroté 6.33.1, qui dit ceci: "Tout propriétaire ou chauffeur en service en attente sur un poste de stationnement doit demeurer assis à l'intérieur de son véhicule, à moins qu'il ne vienne en aide aux requérants du service ou ne transporte des bagages." Voici la question que je veux poser au ministre des Transports. Est-ce l'intention du ministre des Transports de revoir ce règlement, compte tenu d'une certaine conclusion qui a découlé de l'application de ce règlement?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: Oui, M. le Président. Un certain nombre de chauffeurs de taxi pensaient qu'ils devaient demeurer assis à l'intérieur de leur automobile pendant toute la période où ils attendaient, par exemple, d'avoir accès au pont de débarquement, ce qui n'était pas l'esprit du règlement. Dans ce sens, ce que nous avions voulu éviter, c'est une sollicitation trop intensive qu'on connaît dans certains aéroports achalandés comme Dor-val, Mirabel, l'aéroport de Québec; certainement pas l'aéroport de Rouyn-Noranda ni non plus ceux de certaines régions.

Nous allons corriger cela, le règlement est prêt. On devait corriger aussi certaines autres choses en ce qui concerne le règlement 6. Normalement, cela devrait être déposé et présenté au Conseil des ministres dans les plus brefs délais, de telle façon qu'on précisera que le conducteur devra être à l'intérieur de son automobile lorsqu'il attendra, lorsqu'il sera devant le pont de débarquement, si vous voulez.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, question supplémentaire au ministre des Transports. Compte tenu du fait que le ministre a l'intention d'amender ce règlement pour donner satisfaction aux chauffeurs de taxi, est-ce qu'on peut compter que d'ici à ce que le règlement soit amendé, personne ne sera dérangé et qu'ils pourront travailler dans le sens du nouveau règlement annoncé?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: Certainement, je pense bien que l'esprit du règlement qu'on avait fait a déjà été compris par les agents qui ont à appliquer ce règlement. Il n'y a pas eu de problème jusqu'ici. Vous avez raison, je remercie le député de Rouyn-Noranda qui m'en avait parlé la semaine passée, mais des chauffeurs de taxi m'en avaient parlé aussi. Je ne vais quand même pas leur donner des douleurs à la colonne vertébrale. J'avais constaté que notre règlement était un peu flou. Le principe ou l'objectif du législateur en fait a été compris, il n'y aura pas de pénalités.

Le Président: Fin de la période des questions. Motions non annoncées.

Projet de loi no 60

Enregistrement des noms sur les votes en suspens. Je pense que le vote doit se prendre aujourd'hui sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 60 qui est la Loi modifiant la Loi de la taxe sur les repas et l'hôtellerie.

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

Le Président: Qu'on appelle les députés.

Vote sur la motion de deuxième lecture

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

Je vous rappelle qu'en vertu du règlement sessionnel nous avons un vote reporté ce matin; il s'agit du vote sur le projet de loi no 60, Loi modifiant la Loi de la taxe sur les repas et l'hôtellerie, qui a été présenté par M. le ministre des Finances. Le débat étant terminé en deuxième lecture, je demande si cette motion de deuxième lecture sera adoptée.

Que celles et ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Burns, Mme Cuerrier, MM. Bédard, Laurin, Parizeau, Léonard, Couture, Tremblay, Bérubé, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, MM. de Belleval, Joron, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Duhaime, Lazure, Léger, Tardif, Garon, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Alfred, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Grégoire, Bertrand, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Gendron, Mercier, Laberge, Marquis, Lacoste, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet.

Le Vice-Président: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Vaillancourt (Orford), Lalonde,

Forget, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Saindon, Saint-Germain, Raynauld, Lamontagne, Giasson, Caron, O'Gallagher, Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Bellemare, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Samson, Roy.

Le Vice-Président: Abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 59 — Contre: 34 — Abstentions: 0.

Le Vice-Président: Adopté. Troisième lecture? Prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

Motion de renvoi à la commission plénière

M. Burns: M. le Président, je vais maintenant faire motion pour que, si j'ai le consentement de la Chambre, deux commissions puissent siéger en même temps que l'Assemblée nationale. Je m'excuse, je fais motion d'abord pour que le projet de loi que nous venons d'adopter, projet de loi no 60, soit déféré à la commission plénière.

Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

Travaux parlementaires

M. Burns: Je disais donc, M. le Président, avant ce léger oubli, qu'immédiatement, au salon rouge, la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières pourrait se réunir, pour poursuivre l'examen, article par article, du projet de loi 67, Loi sur l'assurance automobile. Si j'avais le consentement, M. le Président, je proposerais également qu'en même temps que l'Assemblée nationale siège, à la salle 81-A, la commission de la justice se réunisse pour examiner les projets de loi suivants: 260, Loi relative à l'Association de bienfaisance des policiers de la Communauté urbaine de Montréal; 72, Loi concernant la nomination des juges municipaux suppléants et modifiant la Loi des poursuites sommaires; 77, Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires et la Loi sur les jurés. Si j'avais ce consentement, M. le Président, je fais motion pour que ces deux commissions siègent immédiatement.

Le Vice-Président: Si vous permettez, M. le leader parlementaire du gouvernement, je comprends que vous faites une motion à deux éléments ou deux volets, si vous avez le consentement de l'Assemblée. Je demande donc s'il y a consentement. Est-ce que le consentement est accordé?

Une Voix: Après le vote.

Le Vice-Président: Alors, est-ce que cette double motion...

M. Burns: Maintenant que j'ai le consentement, je voudrais préciser les heures où ces commissions devraient siéger. La commission des consommateurs se réunira, comme je l'ai dit tout à l'heure, au salon rouge, pour toute la journée, c'est-à-dire dès maintenant avec suspension à 13 heures, pour reprendre ses travaux à 15 heures, pour les suspendre à nouveau à 18 heures et pour les reprendre à 20 heures et terminer, si nécessaire a minuit, ou si jamais le problème était réglé avant minuit, au moment où ce serait adopté.

Une Voix: Pour que le problème soit réglé, retirez-le donc.

M. Burns: Quant à la commission de la justice, elle siégera immédiatement jusqu'à 13 heures et reprendra ses travaux à 15 heures pour les terminer à 18 heures et, à la salle 81-A, la remplacera, la commission du travail, de la main-d'oeuvre relativement au projet de loi no 45, à compter de 20 heures jusqu'à minuit.

Le Vice-Président: Vous ajoutez à votre motion?

M. Burns: Oui.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion rendue triple sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Il s'agit de trois commissions?

M. Burns: Deux commissions, mais il y en a trois d'impliquées.

Le Vice-Président: II y en a trois d'impliquées, est-ce nécessaire de répéter?

M. Lavoie: Adopté.

M. Burns: Non, cela va.

Le Vice-Président: Motion adoptée.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais maintenant, puisque nous sommes rendus aux affaires du jour, d'appeler l'article 23).

Le Vice-Président: M. le député de Châteauguay nous présente le rapport de la commission des affaires municipales et de l'environnement qui a étudié les projets de loi suivants, projet de loi no 54, Loi modifiant la Loi des cités et villes, et le projet de loi no 55, Loi modifiant le Code municipal.

A l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que ce rapport sera agréé?

M. Lavoie: Un instant.

M. Bellemare: Est-ce qu'il est déposé?

Le Vice-Président: Rapport sur les lois 54 et 55, il n'y a pas d'amendements.

M. Lavoie: On ne l'a pas eu.

M. Bellemare: II y a deux rapports.

M. Lavoie: C'est l'article 23?

Le Vice-Président: C'est la prise en considération du rapport et non pas le dépôt du rapport.

M. Bellemare: Où est le rapport?

M. Burns: II a été déposé à l'Assemblée nationale, le 17 novembre. M. le Président, je tiens à signaler qu'à ma connaissance, et je me suis informé auprès du secrétaire général de l'Assemblée, il n'y a pas eu d'amendements relativement à cela. Nous sommes simplement en train de prendre en considération... C'est une étape à franchir pour nous amener à la troisième lecture de ces deux projets. Il n'y a pas eu d'amendements de proposés. S'il y a des gens qui veulent parler sur le rapport lui-même, il n'y a pas de problème.

Le Vice-Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, le leader parlementaire du gouvernement m'inquiète parce qu'il est mal renseigné ce matin. Il y a effectivement un amendement. Il a été présenté en commission parlementaire après que les diverses procédures eurent été complétées. Il était entendu avec le ministre qu'il présente, lors de la prise en considération du rapport, cet amendement qui a déjà été accepté à l'avance par l'Opposition officielle et, je crois bien, par l'Union Nationale également.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, le ministre me confirme que c'est absolument exact, ce que dit le député de D'Arcy McGee, de sorte que je vous demanderais de remettre à plus tard la prise en considération de ce rapport. A ce moment-ci, je proposerais, M. le Président, que nous en venions à l'article 5.

Projet de loi no 75

Troisième lecture

Le Vice-Président: M. le ministre des Transports propose la troisième lecture du projet de loi no 75, Loi modifiant le Code de la route.

M. le ministre des Transports.

M. Lessard: M. le Président, je n'ai pas de commentEires. Nous en avons discuté amplement. Je pense que tous les représentants de l'Opposition sont d'accord avec ce projet de loi.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de troisième lecture est adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Lavoie: M. le Président, le député de Verdun...

M. Caron: Sur division... J'ai fait une suggestion au ministre et je n'ai pas eu de nouvelles. Je voulais que, si les caisses populaires n'acceptaient pas dans certains comtés, on s'adresse aux banques à charte. Il y a des capitaux des Québécois dans les banques à charte; si réellement on veut prouver qu'on ne fait pas de patronage ou de reconnaissance, qu'on s'adresse aux autres banques. Sur division, dans mon cas.

Le Vice-Président: Le projet de loi est adopté sur division.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: Maintenant, M. le Président, je vous demanderais de passer à l'article 11. Je signale à l'Assemblée que, dans le cas où cet article ne serait pas adopté d'ici 13 heures, nous passerons à autre chose à compter de 15 heures, à la suite de la suspension. A ce moment, il s'agirait de la motion qui est inscrite à mon nom, motion en vertu de l'article 156.2.

Projet de loi no 61

Deuxième lecture

Le Vice-Président: M. le ministre des Finances propose la deuxième lecture du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur la vente en détail.

M. le ministre des Finances.

M. Lavoie: ... taxe. La taxe des petits enfants.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre des Finances, vous avez la parole malgré tout.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, le lieutenant-gouverneur a pris connaissance du projet de loi que je propose en deuxième lecture, et il en recommande l'adoption. M. le Président...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Parizeau: Nous avons déjà, dans cette Assemblée, adopté l'augmentation des allocations familiales de 27%, il y a de cela quelques mois. Nous avons abordé aujourd'hui la contrepartie de cette augmentation des allocations familiales, c'est-à-dire la suppression de l'exemption de la taxe de vente sur les vêtements d'enfants.

Il est évident que cette mesure a provoqué beaucoup de discussions et n'a pas été toujours aussi bien comprise que je l'aurais souhaité. Il est évident que chaque fois que l'on modifie la fiscalité, même en s'assurant que le contribuable ne sera d'aucune espèce de façon globalement taxé par ce changement — puisqu'on lui remet le montant ainsi obtenu — l'opération est malaisée, compliquée et difficile à faire comprendre.

Néanmoins, c'est un problème qui traînait depuis plusieurs années. A plusieurs reprises, on avait soulevé la question de la légalité même de cette exemption et de la définition qu'on donnait d'un enfant, non pas dans la loi, mais dans les règlements qui s'y appliquaient.

L'Association des consommateurs du Canada, par exemple, soutenait depuis quelque temps que l'administration de l'exemption présentait des caractères de légalité douteuse. D'autre part, on était en face, sur le plan administratif, d'un problème non pas de fraude mais d'application inéquitable de cette taxe. J'ai déjà eu l'occasion d'en parler. Il est clair qu'à partir du moment où l'exemption portait sur des pointures et non pas sur des âges, on se trouvait finalement à frapper une clientèle que l'on ne connaissait pas. Certains enfants ayant grandi trop vite payaient la taxe. Certains adultes de petite taille ne la payaient pas. Le résultat est que, sur le plan de l'administration de cette taxe dans les magasins, des quantités de discussions, de difficultés, de réclamations duraient depuis plusieurs années.

A ce sujet, pour bien indiquer qu'il ne s'agit pas d'un problème nouveau, je voudrais lire un passage d'une lettre qu'un de mes prédécesseurs, M. Quenneville, ministre du Revenu, écrivait à son collègue, Mme Bacon, ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, qui avait fait des représentations auprès de lui sur deux ou trois questions qui concernaient son ministère, mais singulièrement celle, justement, des vêtements d'enfants.

Vous comprendrez, M. le Président, que je ne cherche pas à utiliser cette lettre à des fins de querelle. Au contraire, à bien des égards elle explique un certain nombre de difficultés d'une façon tout à fait sereine. L'extrait de cette lettre du 19 août 1976 que je vais lire est le paragraphe suivant: "Quant à l'exemption sur les vêtements d'enfants, elle suscite depuis toujours beaucoup de commentaires. Sans vouloir éviter le sujet, je me contenterai de vous confier qu'à ce jour mon ministère n'a pas encore trouvé la solution qui permettrait de satisfaire à la fois le contribuable et la province. Les consommateurs défendent leur point de vue, mais oublient que l'administration d'une telle exemption n'est pas sans causer de problèmes. Qu'il me suffise de mentionner les possibilités d'évasion fiscale que permet un tel programme d'exemption, problème que ne réglerait pas leur suggestion d'accorder l'exemption

sur présentation de la carte d'assurance-maladie. Quoi qu'il en soit, mon ministère est très au fait de ce problème et sera plus que satisfait le jour où il trouvera une solution qui conviendra à tous les intéressés. Permettez-moi aussi d'ajouter que la prétention de l'association basée sur l'interprétation de la loi qu'en font ses conseillers juridiques voulant que cette exemption s'adresse à toutes les personnes de 18 ans ou moins m'apparaît mal fondée en droit. Je ne conteste pas leur voeu de voir cette exemption s'appliquer ainsi, mais je ne partage pas leur avis que les fonctionnaires de mon ministère en font une interprétation erronée. Par ailleurs, une modification à cette exemption suppose un changement de politique fiscale dont l'élaboration incombe à notre collègue, le ministre des Finances, etc."

C'est donc un problème qui traîne depuis longtemps, qui dure...

M. Garneau: Je m'excuse auprès du ministre des Finances; j'aimerais savoir s'il n'aurait pas d'objection, suivant notre règlement, à déposer la lettre.

M. Parizeau: Mais bien sûr, M. le Président. Je dépose ici, à la fois la lettre du ministre Quenneville et la première lettre qu'il avait reçue de Mme Bacon.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Document déposé.

M. Parizeau: Dans ces conditions, il a été décidé de faire en sorte que les vêtements d'enfants soient taxés au même titre que tous les autres vêtements et de la même façon, qu'on échappe à ces problèmes de caractère administratif et de l'application de la loi, qu'on évite ces querelles de caractère juridique qui traînaient depuis un certain temps, étant bien entendu que l'argent ainsi amassé ne servirait pas au trésor public, mais serait redistribué en allocations familiales dollar pour dollar et intégralement.

Il est évident que, dans la mesure où l'on respecte la structure de nos allocations familiales au Québec et qu'on les augmentait de 27%, tel que ces allocations existaient alors, on se trouvait ainsi à favoriser jusqu'à un certain point les gens à bas revenu et les familles nombreuses et, cependant, à défavoriser les familles d'un enfant et celles ayant des revenus élevés. Ceci était une conséquence de la mesure qui a été prise et elle a été acceptée telle quelle, en somme, comme une forme de redistribution légère. Il ne faut quand même pas se faire des illusions sur le résultat ultime, mais, enfin, il y a un élément de redistribution intéressant qui existe dans cette mesure.

Je vous avouerai que, quand la mesure est sortie, elle a donné lieu, dans certains journaux, à des commentaires ou à des présentations qui me sont apparus, à bien des égards, outrés, exagérés et qui ont probablement, d'ailleurs, déclenché ces protestations que nous avons connues pendant quelque temps. Je pense, par exemple, à ces journaux qui ont publié des photos de familles nom- breuses avec beaucoup de petits enfants comme étant les victimes de cette mesure, alors que, justement, c'étaient les familles nombreuses qui en tiraient l'essentiel du bénéfice.

J'en prendrai à témoin deux cas qui me paraissent très révélateurs: le premier du Star du 13 avril où le titre se lisait ainsi: "Shoe tax puts pinch on dad", avec, évidemment, photos, n'est-ce pas, idoines. Il s'agit d'une famille de huit enfants et on lit en première page du Star ce qui suit: "The cancellation of the sales tax exemption on children's clothing is another pain in the wallet." Ce n'est qu'après avoir tourné la page, en arrivant à la fin de l'article, que l'on se rend compte que la mère de famille en question a beaucoup mieux compris que le journaliste de quoi il s'agit. Il faut arriver tout à fait au bout de l'article pour le voir. La dame dit: "We would have to buy about $1600 in clothes and shoes to pay that much tax, and I do not think we spend that much". Elle avait compris que cela allait lui rapporter de l'argent, ses allocations familiales par rapport à la taxe qu'elle paierait. Mais, encore une fois, cela ne se reflète ni dans le titre, ni dans le reste de l'analyse et ce n'est qu'à la fin qu'on se rend compte que, si le journaliste n'a pas très bien compris, la mère de famille, elle, sait compter.

On en a vu d'autres. Je pense ici à un article de la Presse du lendemain, le 14 avril, toujours avec beaucoup de petits enfants dans une photo, et le titre, qui est encore meilleur, se lit comme suit: "Encore des budgets où ce sont les petits qui écoperont." Là, l'analyse, en un certain sens, est encore plus drôle ou plus pénible, comme on le voudra. Un père de famille qui, dit-on, gagne $7000 par an et a sept enfants achèterait — et c'est cela qui fait très mal du point de vue de la taxe — pour $300 de vêtements de sport seulement par année et par enfant.

Cela fait de la bonne copie journalistique, mais j'aimerais qu'on m'explique comment on peut acheter $2100 de vêtements de sport seulement avec un salaire de $7000. C'est avec des choses comme celles-là que l'on a réussi, évidemment, à changer le sens de l'opération et à provoquer le genre de réactions que nous avons connues. Le fait est que si l'on cherche à voir ce que l'allocation familiale remplace de taxes et donc permet comme achat, par enfant, on arrive à des chiffres qui, bien sûr, ne sont pas élevés pour un enfant, mais croissent rapidement.

Il est clair que l'allocation familiale payée permet la compensation de la taxe jusqu'à des achats de $160 par an. Mais quand on est à quatre enfants, l'allocation familiale remplace la taxe jusqu'à concurrence d'achats de presque $1000 par an. Et quant aux photos de familles nombreuses dont les journaux faisaient état, sept, huit ou neuf enfants, il faut arriver à des achats de $2200, $2600 de vêtements, comme limite, pour ce qui a trait au remplacement de la taxe par les allocations familiales. Je souhaiterais déposer ce tableau, parce que, pour ceux qui s'intéressent à la question que nous discutons, il s'agit de renseignements, à mon sens, utiles.

Nous avons suivi attentivement au cours des

derniers mois la perception de cette taxe pour voir dans quelle mesure, effectivement, elle rapportait davantage ou moins que les $32 millions qui avaient été affectés aux allocations familiales. Dans la mesure, et je l'avais indiqué, où le produit de cette taxe serait supérieur au montant prévu de $32 millions, il était entendu que l'excédent serait redistribué à nouveau comme autre augmentation des allocations familiales. Tel, cependant, n'a pas été le cas. On se rend compte maintenant, après cinq ou six mois, que l'assiette de la taxe avait été surestimée, et que, d'autre part, les taxes de vente au détail pour l'ensemble des ventes au détail pour Québec, cette année, rapportent moins que prévu, ainsi que je l'ai déjà indiqué à l'occasion de la publication du deuxième état trimestriel sur le budget.

La combinaison de ces deux facteurs fait que la dernière projection est un revenu, pour l'année 1977/78, de l'ordre de $26 millions. On distribue donc $32 millions en allocations familiales et on récupère $26 millions en impôt. Dans ce sens, il faut convenir que le consommateur aurait été avantagé encore plus qu'on le pensait par la mesure qui a été prise et qu'un gain net pour le consommateur et pour le contribuable est apparu.

Je ne dis pas que, comme ministre du Revenu, je suis ravi de voir une taxe ramasser moins que ce que j'avais prévu, mais enfin, c'est un avantage indéniable pour le contribuable.

Le député de Jean-Talon m'avait demandé si j'étais disposé à déposer les modes ou les estimations du produit de cette taxe. Je lui avais indiqué, au moment où il avait exprimé cette demande, que j'accepterais volontiers justement à l'occasion de la discussion en deuxième lecture du bill de présenter ces estimations. Vous constaterez, Mme le Président, qu'elles commencent le 14 juin et que les dernières estimations sont en date d'octobre. Plutôt que de présenter simplement la dernière estimation ou la dernière méthode utilisée, je préfère que ceux qui s'intéressent à cette question puissent avoir l'ensemble du document. Je le dépose donc aujourd'hui.

Voila, Mme le Président, ce que j'avais à dire dans un premier temps sur cette opération. Je propose donc l'adoption en deuxième lecture du projet de loi 61. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député d'Outremont.

M. Marchand: Debout pour les taxes.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marcoux: Mesures sociales. M. Marchand: Ah oui, mesures sociales! Mme le Vice-Président: Messieurs, à l'ordre! Une Voix: Vous, cela ne vous affecte pas.

M. Raynauld: Mme le Président, je pense que nous aurons l'occasion...

Mme le Vice-Président: Messieurs, je vous demanderais—je ne voudrais pas nommer les intervenants, vous n'avez pas demandé la parole. C'est le député d'Outremont qui a la parole, je vous demanderais de vous en tenir au règlement.

M. André Raynauld

M. Raynauld: Mme le Président, je voudrais essayer de montrer que ce projet de loi doit être rejeté. Je vais m'attacher dans un premier temps à montrer les principales caractéristiques de ce projet de loi, pour ensuite montrer les principales lacunes.

Si je laisse de côté une clause de clarification, le projet de loi no 61, peut-être à la surprise de plusieurs, ne porte pas seulement sur la taxe des vêtements pour enfants, mais porte également sur les maisons mobiles. J'en dirai seulement quelques mots mais, pour être complet, je pense qu'il faut ajouter cela.

Désormais, en vertu du projet de loi, les maisons mobiles neuves seront exemptées de la taxe de vente pour 50% du prix et les maisons mobiles usagées seront exemptées de 100%. Sur les maisons mobiles usagées, la raison qui est donnée dans le discours du budget du ministre des Finances, c'est que 90%, de toute façon, ne sont pas taxées parce qu'elles sont vendues à titre de biens immobiliers, c'est-à-dire avec le terrain et, par conséquent, la taxe aura déjà été versée une première fois.

En ce qui concerne les maisons mobiles neuves, on convient que sur une maison conventionnelle on paie une taxe qui, en fait, porte seulement sur les matériaux de construction. Comme on estime par ailleurs que dans une maison mobile ces matériaux de construction représentent à peu près 50% du prix de vente, on estime donc que, sur ces maisons neuves, on devrait ne demander qu'une taxe de vente portant sur 50% de ce prix de vente. Ce serait donc, en ce qui concerne les maisons neuves, par souci d'équité qu'on introduirait ces changements, eu égard aux transactions et par rapport aux maisons conventionnelles.

Je dirai là-dessus, sans m'étendre bien longuement, que ces modifications ne sont pas d'une importance majeure, puisque le trésor renonce, en vertu de ces clauses, à environ $3 millions par année. Mais les raisons non plus ne sont pas très convaincantes. Les maisons usagées, par exemple, ce n'est pas très convaincant de les exempter, quand on dit que la taxe aurait été payée une première fois, lorsque l'on sait que, sur les automobiles usagées, on paie une taxe de vente. Sans doute, la taxe de vente a déjà été payée une première fois. Donc, la raison invoquée ne me paraît pas très bonne.

En ce qui concerne les maisons neuves, il y a un problème, il me semble, d'interprétation. Le ministre n'a pas dit si les manufacturiers de mai-

sons mobiles paieraient la taxe à l'avenir sur les matériaux de construction, puisqu'en vertu d'un arrêté en conseil, 2210, si ma mémoire est bonne, si mes informations sont bonnes, les manufacturiers de maisons mobiles étaient exemptés jusqu'à maintenant de cette taxe sur les matériaux de construction. J'ai l'impression, puisqu'on n'en a pas parlé, qu'il n'y a pas de changement de ce côté. Il me semble que là il pourrait y avoir un hiatus, compte tenu de l'amendement qui est proposé par le ministre.

Dans ce cas des maisons neuves, l'argument d'équité ne tient pas non plus, à mon avis; en réalité, on avantage les maisons mobiles au détriment des maisons conventionnelles. Cet argument est très discutable. On pourrait vouloir décourager ce genre d'habitation et, sans en imputer la faute aux manufacturiers, ce type d'habitation, par beaucoup, est considéré comme une véritable pollution de l'environnement. Peut-être qu'avant de le favoriser davantage on aurait pu chercher à imposer des normes un peu plus sévères sur la qualité de l'habitat et en particulier sur les terrains, sur les rues. Je ne pense pas que favoriser ces maisons mobiles par une réduction de la taxe de vente soit vraiment un avantage bien marqué.

J'ajouterai en outre que ces maisons mobiles bénéficient déjà, suivant mes informations, d'un impôt foncier particulièrement favorable, quand il n'est pas supprimé entièrement. Par conséquent, en ce qui concerne les maisons mobiles et toujours par rapport à cet argument d'équité, je pense qu'il n'était pas du tout évident qu'il fallait subventionner et encourager davantage la construction et la vente de maisons mobiles.

En réalité, on pourrait penser qu'il s'agit là plutôt d'une subvention déguisée aux constructeurs ou aux fabricants, mais je ne pense pas qu'il en soit ainsi puisque cette réduction de taxe s'applique également aux maisons importées. Au cas où on l'aurait fait pour favoriser les manufacturiers de maisons mobiles au Québec, je suggère fortement au ministre des Finances qu'il songe à des subventions directes plutôt que de manipuler les taxes de vente à cet effet.

Il s'agit donc là, à mon avis, d'une mesure de générosité douteuse en vertu, si on en croit le discours du ministre des Finances, d'un souci d'équité. Je pense qu'il y a de plus grandes causes de justice à défendre que celle-là. Celle dont on vient de parler, la taxe sur la publicité électronique, était peut-être un cas où il était plus opportun de parler d'équité que le cas que nous étudions présentement.

J'en arrive maintenant à la taxe sur les vêtements et les chaussures pour enfants. Alors que dans l'autre partie du projet de loi on privilégie la maison mobile, dans ce cas-ci on supprime une exemption de la taxe de vente sur les vêtements et les chaussures pour enfants. Cette suppression de l'exemption, à mon avis, est carrément rétrograde 3t beaucoup plus importante, évidemment, que la première modification puisqu'elle rapportera, suivant les dires du ministre ce matin, $26 millions, lorsqu'il s'agissait, par ailleurs, d'environ $3 millions.

Cette fois, je reconnaîtrai aussi que les soucis du ministre ont pu être réels, qu'il a pu effectivement penser que cette exemption devait être supprimée par souci d'une meilleure efficacité, par souci administratif. Je comprends aussi, d'après ce qu'il a dit ce matin, qu'il pouvait y avoir des problèmes juridiques. J'avouerai que sur ces plans-là, à la fois administratifs et juridiques, je pense que les raisons qu'il apporte ne résistent pas à une seconde analyse pour des raisons très simples, des raisons qui sont que jusqu'à maintenant on a quand même été capable d'administrer cette loi au Québec avec des exemptions.

Je voudrais ajouter que dans toutes les autres provinces du Canada on a trouvé des moyens de résoudre les difficultés administratives, s'il en était, tout en respectant cette exemption.

Je mentionnerai, par exemple, qu'à Terre-Neuve, suivant le dernier rapport sur les principales taxes au Canada pour l'année 1977, on exempte complètement le vêtement et la chaussure. Dans le cas de l'Ile-du-Prince-Edouard, on exempte complètement le vêtement. En Nouvelle-Ecosse, on exempte complètement le vêtement et la chaussure. Au Nouveau-Brunswick, on exempte complètement le vêtement et la chaussure. En Ontario, on parle de la chaussure de moins de $30, qui est complètement exemptée; ensuite, les vêtements d'enfants sont exemptés et, enfin, on mentionne les vêtements et chaussures usagés d'une valeur inférieure à $50 qui sont également exemptés. Si on va au Manitoba, les vêtements et les chaussures d'enfants sont exemptés. Si on va en Colombie-Britannique, les vêtements d'enfants et les chaussures sont également exemptés.

Par conséquent, s'il était vrai que la principale raison pour supprimer cette exemption était une raison d'efficacité, une raison administrative, il me semble que d'autres provinces auraient fait face aux mêmes difficultés. Encore là, dans la mesure où cette difficulté est réelle, je vois que dans certaines provinces on a exempté complètement le champ du vêtement et de la chaussure plutôt que de faire la distinction entre enfants et adultes.

Par conséquent, il y avait d'autres façons de résoudre ce problème d'efficacité, s'il y en avait un. Je suis bien obligé de constater que, dans la plupart des provinces du Canada, nous avons cette distinction ou, en tout cas, ce traitement particulier et, par conséquent, je ne pense pas que les difficultés administratives soient vraiment à l'origine de la difficulté.

On a parlé de problèmes juridiques. S'il se pose un problème juridique au Québec, il se pose sûrement un problème juridique dans les autres provinces aussi et il ne semble pas que cela ait amené les autres gouvernements à modifier ou, comme le Québec, à supprimer cette exemption sur les vêtements et les chaussures pour enfants. Donc, j'ai bien l'impression que cet argument d'efficacité et cet argument de droit ne résistent pas. Qu'est-ce que le gouvernement a décidé de faire pour le faire accepter? Il a décidé d'utiliser un stratagème qui est celui des allocations familiales. Le seul argument qu'il a en faveur de cette

augmentation de taxe, c'est que le ministre dit: Nous allons vous remettre le produit de la taxe.

Or, et ceci est très important, je pense que le ministre ne donne pas les informations complètes à cette Assemblée lorsqu'il s'en tient à comparer tout simplement le montant global de la taxe perçue, d'un côté, et le montant global des allocations familiales versées. Pourquoi? Pour plusieurs raisons. La première, c'est que cette exemption qui est enlevée, en fait cette taxe, est régressive. Le montant de cette taxe additionnelle par enfant est de $12 et, lorsqu'on applique ces $12 de taxe additionnelle par enfant à un revenu de $5000 à $7000, il est évident que la proportion de cette taxe est beaucoup plus élevée pour des revenus de $5000 à $7000 qu'elle ne peut l'être pour des revenus beaucoup supérieurs.

En effet, ce montant de la taxe va être de $12 pour des revenus de $5000 à $7000; il va être de $26 pour un revenu de $25 000 et plus. Par conséquent, les riches vont payer $1 par $1000 de revenus et les plus pauvres vont payer $5 par $1000 de revenus. Donc, le fardeau est cinq fois plus lourd sur les bas revenus que sur les hauts revenus. Cela est une question d'incidence de cette taxe, c'est une question d'équité et de justice qui n'apparaît pas lorsqu'on compare simplement les agrégats, lorsqu'on compare le montant global plutôt que les montants particuliers tels qu'ils sont payés par tranche de revenus.

Donc, c'est une taxe régressive, cinq fois plus régressive sur les revenus plus bas que sur les revenus plus élevés. Bien sûr, on pourrait dire comme le ministre hier, à propos de la taxe sur la publicité auprès des media électroniques, qu'on ne taxe pas les gens, mais qu'on taxe les ondes. Vous vous rappelez, hier, il a fait cette grande déclaration: On ne taxait pas du monde, on taxait des ondes, puis ce n'était pas discriminatoire. Ici, peut-être qu'il va dire la même chose: On ne taxe pas des enfants, on ne taxe pas des familles; on taxe des vêtements, comme si c'étaient les vêtements qui payaient les impôts. Hier, on a eu droit à cette ineptie absolument extraordinaire que ce n'étaient pas des agents économiques qui portaient le fardeau des taxes, mais que c'était quelque chose comme des ondes électroniques.

Ici, on a un peu la même chose. Lorsqu'on s'en tient aux agrégats, on cache, et peut-être délibérément, l'incidence de cet impôt additionnel. J'irai plus loin, le stratagème de remettre des allocations familiales en échange du produit de cet impôt, c'est un marché de dupes. C'est un marché de dupes parce que, quand on tient compte des deux ensemble, et de l'allocation familiale et de la taxe, les effets redistributifs sont considérables. Je vais essayer de montrer ici que 90% des familles avec enfants perdent au change, 90% des familles avec enfants perdent dans ce marché qu'on ne peut pas qualifier autrement que de marché de dupes.

On peut bien dire que le ministre pourrait vouloir imposer une taxe parce que c'est son droit, mais lorsqu'il achète l'adhésion de la population, s'il est capable de l'acheter, sous de fausses représentations prétendument sociales, soi-disant humanitaires, je pense qu'en ce qui me concerne c'est une couleuvre qu'on ne me fera pas avaler.

On donne, dans le discours du budget, un tableau, le tableau 3 de la page 17, où on examine l'impact de la combinaison de l'impôt et du paiement d'allocations familiales par tranche de revenus. Je voudrais dire ici qu'on peut montrer avec un tableau comme celui-là qu'à partir d'un certain niveau de revenu, il y a des gens qui vont bénéficier du fait qu'ils vont recevoir des allocations familiales, autrement dit, que les allocations familiales vont excéder le paiement ou la somme payée sous forme de taxes additionnelles. On peut faire cela.

Ce qu'il manque dans le tableau, ce sont les pondérations. Combien y a-t-il de gens dans chacune de ces catégories? Combien de personnes? Le tableau ne le dit pas. Il ne révèle pas le nombre de familles impliquées. En plus, il limite l'exemple aux familles de deux et de quatre enfants. J'ai donc pris la peine d'examiner quel était le nombre de personnes impliquées dans chacune de ces catégories, et ensuite, de compléter le tableau en ajoutant les familles avec un enfant, trois enfants, quatre enfants et plus. Qu'est-ce qu'on y trouve? On y trouve que, pour les familles avec un enfant, elles perdent quel que soit le niveau de revenu. Elles perdent au change, puisque même dans la classe de revenu indiqué au tableau, la taxe potentielle par enfant est de $12 et le paiement des allocations familiales par enfant est de $13. Le paiement additionnel d'allocations familiales étant de $13, je dirais, au mieux, dans cette catégorie de $5000 à $7000, que personne ne perd ou ne gagne, et de toutes les catégories supérieures, ces familles perdent.

Or, combien y a-t-il de familles avec un enfant? Parmi l'ensemble des familles avec un enfant, c'est 40%. Au point de départ, 40% de toutes les familles avec enfants perdent au change, perdent dans ce marché d'allocations familiales par rapport à l'augmentation de la taxe de vente sur les vêtements pour enfants. On est rendu déjà à 40%.

Si on ajoute ensuite les familles avec deux enfants. Ces familles avec deux enfants perdent à partir d'un revenu de $7000 et plus. C'est 90% des familles avec deux enfants, qui perdent dans ce marché. Ces familles de deux enfants représentent 38.7% de toutes les familles avec enfants. On a donc, encore ici, 35% des familles de deux enfants qui perdent. 40% qui étaient des familles à un enfant, 35% de familles de deux enfants, on est déjà rendu à 75% de toutes les familles qui perdent dans ce marché.

On en arrive ensuite aux familles de trois enfants, qui ne sont pas indiquées au tableau. Ces familles perdent à partir d'un revenu de $9000. C'est 81% des familles qui perdent. Les familles de trois enfants représentant 16% de toutes les familles avec enfants, 81% de 16% donne 13%, donc 13% de toutes les familles qui perdent. On est rendu, de 75% avec les familles de un et de deux enfants, à 88% de toutes les familles qui perdent.

Enfin, on a les familles de quatre enfants et plus. Ils perdent à partir d'un revenu de $15 000 et

plus. Ce montant de $15 000 et plus, c'est 39% des familles de quatre enfants, mais les familles de quatre enfants et plus ne représentent que 5.5% de toutes les familles. Il y a peu de familles de quatre enfants et plus. Quand le ministre dit les familles nombreuses bénéficient de l'opération, je dirais oui. Elles bénéficient en partie d'abord, mais il y en a seulement 5% de ces familles. Par conséquent, si j'applique les 38% qui perdent, de $15 000 et plus, et que je tiens compte de la pondération du 5.5%, cela me donne 2% de l'ensemble des familles qui perdent également. Au total, je suis donc rendu à 90% de toutes les familles.

Donc 90% de toutes les familles qui perdent au change, l'incidence de ces impôts et de paiements d'allocations familiales ne peut pas être laissée de côté en faveur simplement d'agrégats où le ministre pourra se vanter de remettre à la population $32 millions lorsqu'il en perçoit seulement $26 millions. C'est là une affirmation qui prête à confusion, qui induit les gens en erreur. Il devrait la compléter.

Je dirai donc, en résumé, Mme le Président, que...

Mme le Vice-Président: Voulez-vous nous dire si vous parlez au nom du chef du parti ou...

M. Raynauld: Je parle au nom du parti. De toute façon je termine.

Mme le Vice-Président: J'allais vous demander de conclure, mais vous pouvez continuer.

M. Raynauld: Dans tous les cas je pourrais continuer, mais je vais conclure quand même. Je dirai donc, en résumé, que ce programme d'imposer une taxe sur les vêtements d'enfants est un programme injuste. Il pénalise les familles avec enfants alors que par ailleurs on s'évertue, par le programme des allocations familiales, à réduire le fardeau financier de ces mêmes familles. Je pense donc qu'il faudra se brancher un jour sur ce sujet. Il faudra peut-être commencer par examiner si les déclarations du premier ministre, à propos de sa nouvelle revanche des berceaux, sont fondées, ce dont je doute beaucoup. S'il n'y a pas de revanche des berceaux, il faudra peut-être avoir des politiques familiales au Québec qui permettraient une reprise de natalité pas seulement en fonction de l'indépendance du Québec, mais une véritable reprise de natalité au Québec. Ce n'est pas avec ce genre de loi, qui enlève les exemptions de taxe sur les vêtements pour enfants, ce qui augmente le fardeau financier des familles avec enfants, qu'on va résoudre ce problème. Au contraire, au total, si je tiens compte du fait que 90%...

M. Lamontagne: Excusez, mais le feu est pris.

Mme le Vice-Président: Je m'excuse. Je ne voulais pas arrêter le député d'Outremont. M. le député, je devrai vous demander de vous retirer si vous avez l'intention de fumer.

Une Voix: Quel député?

Mme le Vice-Président: M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Mme le Président, je voulais donc dire que ce n'est pas avec des mesures d'origine bêtement administrative qui vont à l'encontre des objectifs beaucoup plus importants de soutien des familles que nous allons corriger les problèmes démographiques que nous avons au Québec. Au contraire, je dis que cette décision du ministre des Finances est une mesure qui contribue à alourdir encore davantage le fardeau fiscal des familles. Ceci va à l'encontre des objectifs que nous poursuivons.

Mme le Vice-Président: Je tiens à m'excuser auprès du député d'Outremont d'avoir dû l'interrompre, mais devant les signes de protestation j'ai dû le faire.

M. Garneau: Cela aurait été préférable si vous aviez dit qu'il s'agissait des députés du Parti québécois.

Mme le Vice-Président: D'un député du Parti québécois, bien sûr. C'est M. le député de Frontenac.

M. Garneau: Très bien, très bien.

Mme le Vice-Président: J'espère, M. le député de Jean-Talon, que vous êtes très content que je fasse observer le règlement.

Une Voix: II n'y a pas de fumée sans feu.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Mme le Président, j'ai cru, un moment, à voir la fumée monter du bureau du député de Frontenac, qu'il brûlait du désir de nous dire ce qu'il pense réellement de ce projet de loi que nous propose d'adopter en deuxième lecture le ministre des Finances. Mais, semble-t-il, dans le cas du député de Frontenac comme probablement de tous les députés ministériels qui se sont fait dire, au cours de leur tournée en septembre, ce que la population pensait réellement de ce projet de loi, ils resteront complètement muets comme c'est leur habitude au moment de l'adoption d'un projet de loi qui ne recueille pas l'appui de la population.

M. Pagé: Exactement.

M. Gratton: Au lieu de beugler, levez-vous donc et dites donc ce que vous avez à dire sur le projet de loi.

M. Grégoire: Qui beugle, là?

M. Gratton: Mme le Président, le ministre des Finances, dans son discours de présentation, fai-

sait allusion à la difficulté de compréhension de certaines gens sur les raisons profondes qui inspirent cette décision d'abolir l'exemption de la taxe de vente sur les vêtements et chaussures pour enfants. Il faisait allusion à la difficulté qu'ont certaines gens de comprendre pourquoi il a senti la nécessité et le besoin de nous apporter une telle modification à la taxe de vente.

Je vais tâcher de m'exprimer aussi clairement que possible, de façon que le ministre des Finances comprenne bien que dans certaines régions du Québec, il s'agit là d'une loi, d'une mesure inqualifiable. C'est déjà assez grave — on le réalisait à écouter le député d'Outremont tantôt — pour l'ensemble du Québec que d'abolir l'exemption de la taxe de vente sur les vêtements et chaussures pour enfants, mais c'est encore pire dans une région frontalière comme l'Outaouais. Lorsque, au moment du débat sur le discours du budget, on a fait allusion aux conséquences que pourrait avoir cette mesure dans une région frontalière comme l'Outaouais, on parlait, bien entendu, de ce qu'on prévoyait. On extrapolait un peu sur ce qui se produirait à la suite de l'adoption de cette mesure. Aujourd'hui, en décembre 1977, on n'extrapole plus, on fait face à des faits; pas seulement à des déclarations de personnes qui oeuvrent dans le domaine, mais à la fermeture d'un magasin, par exemple. Cela, on ne peut le nier, ce sont des faits. Je vois que le ministre des Finances va quitter. Je lui demanderai simplement de retenir que dans l'Outaouais, cela fait mal, cette loi, cette abolition de l'exemption de la taxe, parce que non seulement les gens sont appelés à payer une taxe de 8% là où ils n'avaient pas l'habitude de la payer, mais cela prive aussi les municipalités, la population toute entière de l'Outaouais de revenus autres que ceux qui proviennent de la taxe de vente de 8%.

Je vous énumérerai quelques noms de personnes qui se spécialisent dans la vente d'articles, de vêtements et de chaussures pour enfants dans l'Outaouais, à partir d'un article d'un journal quotidien d'Ottawa, daté du 25 novembre dernier. Ce n'est pas il y a trois ans, cela. M. Hervé Saint-Amour, qui est propriétaire de la boutique des Petits lutins, à Hull, a fermé les portes de son magasin pour la seule et unique raison qu'il n'y a plus personne qui va acheter là, c'est aussi simple que cela. Mme Esmeralda Perera, propriétaire de la Boutique Açores, de Hull, également...

M. Lessard: Ils n'habillent plus leurs enfants depuis ce temps!

M. Gratton: Ont-ils quelque chose à dire, eux autres?

Mme le Président: M. le ministre.

M. Lessard: J'étais en train de me dire: Le monde n'habille plus ses enfants.

Mme le Vice-Président: M. le ministre des Transports et M. le député de Charlevoix, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lessard: Je n'ai rien dit, on vous écoute.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je disais donc, Mme le Président, que Mme Perera, qui est propriétaire de la Boutique Açores, à Hull, dit très clairement — ce n'est pas à moi qu'elle l'a dit, elle l'a dit aux journalistes, cela a été publié dans le journal — qu'effectivement la seule façon dont elle s'en tire présentement, c'est qu'elle se spécialise dans la vente de vêtements spéciaux pour enfants, comme pour les mariages, pour les baptêmes et ce genre de choses.

Je n'ai pas besoin de vous expliquer bien longtemps, Mme le Président — je l'expliquerais bien au ministre des Finances mais il est parti, cela ne fait pas son affaire d'entendre ces choses — que si, du côté de l'Outaouais québécois, il y a une taxe de vente de 8% sur ces articles, et si, à cinq minutes en automobile, du côté ontarien, il n'y a pas de taxe de vente sur les vêtements pour enfants, c'est bien entendu que les Québécois de l'Outaouais, qui ne sont pas plus bêtes que d'autres, vont faire leurs achats en Ontario. Non seulement ils vont faire leurs achats de vêtements pour enfants en Ontario, mais une fois qu'ils y sont rendus, il y a lieu de supposer qu'ils font d'autres achats qui échappent encore à l'imposition de la taxe de vente de 8%, qui ne revient pas aux municipalités de l'Outaouais, par l'entremise de la ristourne de 2% sur la taxe de vente, mais cela, ce n'est pas important.

Que M. Eugène Desmarais, propriétaire du Paradis des jeunes, à Gatineau, dise qu'il essaie de faire des ventes, qu'il réduit les prix pour essayer de faire concurrence aux magasins d'Ottawa et qu'il ne réussit pas, cela importe peu.

M. Grégoire: C'est de la faute à Ottawa.

M. Gratton: La solution à tout cela, Mme le Président, c'est, bien entendu, l'indépendance, parce que là on va y voir aux intérêts des Québécois de l'Outaouais. On va mettre une barrière et on ne pourra plus y aller, en Ontario. Donc, on va payer plus cher, mais on va être fier; on va être des vrais Québécois à ce moment.

M. Verreault: Ils font venir des assiettes de l'Ontario.

M. Gratton: Cela va nous coûter un petit peu plus cher. M. DesMarais dit: Québec oublie l'Outaouais. Il a raison.

M. Lessard: Ce n'est pas le ministre, cela?

M. Gratton: Lorsque le ministre des Finances a pensé à abolir l'exemption de la taxe de 8%, il n'a sûrement pas pensé bien longtemps aux régions frontalières. Cela a bien l'air que le ministre des Travaux publics, député de Hull, qui, elle, devrait être au courant de la situation, n'a pas perdu bien du temps à se sensibiliser aux problèmes non

plus, pas plus qu'elle ne l'a fait dans bien d'autres domaines, Mme le Président. Parce qu'elle, ce qui l'intéresse, c'est l'intégrité du territoire, parce que la pauvre petite fille a été chassée d'un parc fédéral à l'âge de huit ans.

M. Bisaillon: A l'ordre!

M. Gratton: Elle est traumatisée par cela, Mme le Président.

Une Voix: Ah oui!

M. Gratton: Sa "job" de député, par exemple, c'est de représenter les intérêts des gens de l'Outaouais, des Québécois de l'Outaouais; ce n'est pas d'accepter des décisions aussi injustes du ministre des Finances vis-à-vis d'une population qui, elle aussi, a droit d'être traitée d'égal à égal. M. Saint-Amour, maintenant qu'il a fermé son magasin, sera-t-il un peu plus enclin à dire oui au référendum? Je ne le pense pas.

Une Voix: J'espère.

M. Gratton: Du côté du Parti québécois, on parle des grosses compagnies et des multinationales. Ce n'est pas aux grandes chaînes de magasins qu'on a fait du tort avec cette abolition de l'exemption, Mme le Président, parce qu'eux sont assez diversifiés pour pouvoir faire face à cette situation. De toute façon, les gens qui magasinent dans les grands magasins peuvent toujours, au moment où ils passent devant l'étalage de vêtements pour enfants, acheter un article ou deux. Mais dans le cas des grosses familles, en particulier, la mère de famille, au cours des Fêtes, par exemple, peut vouloir donner en cadeau des vêtements ou des chaussures pour enfants. S'il y en a cinq ou six à habiller, Mme le Président, ne pensez-vous pas que cette femme ira automatiquement à Ottawa pour faire ses achats?

Ce n'est pas moi qui le dis. Ce n'est pas de la rhétorique, Mme le Président. Ce sont les propriétaires, les exploitants de magasins spécialisés dans la vente de vêtements et de chaussures pour enfants du côté québécois de l'Outaouais qui nous le disent. Leur chiffre d'affaires est tombé de 75% dans certains cas. Dans le cas de la Boutique des petits lutins, c'est fermé. Cela n'existe plus. Qu'est-ce qu'on fait du côté ministériel? On trouve cela drôle. Ce n'est pas un problème, Mme le Président. C'est bien évident que ce n'est peut-être pas un problème aussi grave dans la région de Montréal ou dans la région de la ville de Québec. C'est déjà assez grave de payer 8%. On essaie d'abrier cela en disant: On a augmenté les allocations familiales.

Vous vous rappellerez, par exemple, Mme le Président, que, lorsque le ministre des Affaires sociales, à peu près à ce temps-ci l'an dernier, à grand renfort de publicité, a annoncé qu'on augmenterait les allocations familiales, il ne nous avait pas annoncé en même temps qu'on abolirait l'exemption de la taxe de vente sur les vêtements et les chaussures pour enfants. On a fait un gros "show" avec l'augmentation des allocations familiales, mais c'est seulement au moment du discours du budget qu'on a appris qu'effectivement une bonne partie de cette augmentation servirait à payer une taxe de 8% qu'on n'avait pas à payer avant.

Les députés ministériels vont rester muets, j'en suis convaincu. On n'en entendra pas un, à moins qu'il n'y en ait un de service qui soit assez masochiste pour essayer de trouver quelque chose de bon dans ce projet de loi. On n'en trouvera pas un qui va se lever et qui va dire à partir de quelles considérations il va voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi, Mme le Président. Je suis passé par là à titre de député ministériel et, au moment où on nous demandait de voter des lois qui ne répondaient pas aux intérêts de la population qu'on représentait, cela m'est arrivé, à l'occasion, Mme le Président, de le dire publiquement et de sortir de l'Assemblée nationale au moment où on enregistrait les votes.

D'ailleurs, il semble qu'il y en a déjà plusieurs du côté ministériel qui l'ont déjà fait parce qu'ils sont à peine une vingtaine ici, ce matin.

M. Garon: Vous avez dû sortir souvent.

M. Gratton: Mme le Président, s'il m'était donné par notre règlement de pouvoir proposer qu'on prenne un vote libre sur la deuxième lecture de ce projet de loi, je serais très curieux de savoir combien les députés, collègues du ministre des Finances, les "back-benchers" voteraient à l'appui de cette motion de deuxième lecture.

Mais je trouve une chose encore plus grave, Mme le Président. On peut bien, du côté ministériel, de la part de députés de la région de Montréal ou de la région de Québec, rester muet et accepter la décision du ministre sans mot dire. Je trouve cela inacceptable de la part de certains en particulier. J'ai mentionné le député de Hull, ministre des Travaux publics, je mentionne également le député de Papineau qui est très au fait de la situation particulière de l'Outaouais — il est absent, bien entendu, aujourd'hui — qui auraient dû faire comprendre au ministre des Finances qu'on a déjà, selon la Société d'aménagement de l'Outaouais, plus de $30 millions d'achats faits par des Québécois qui échappent à la taxe de 8%, parce que ce sont des achats qui vont se faire en Ontario. Cela représente $6 millions en revenu sur la ristourne de 2% que les municipalités de l'Outaouais québécois n'ont pas, à cause de ces achats faits en Ontario.

L'exemption qu'on vient d'abolir sur la taxe de vente pour les vêtements et chaussures pour enfants ne vient que rendre encore plus grave cette situation. Puisque, comme je l'ai déjà expliqué, les gens vont acheter des vêtements pour enfants du côté ontarien, mais reviennent souvent l'automobile pleine d'autres articles qui, eux aussi, échappent à la perception de la taxe de vente de 8%, quoi qu'en pensent les fonctionnaires du ministère du Revenu.

Il y a un autre député en cette Chambre, tout au moins, de qui on aurait attendu des commen-

taires sur cette question, afin de sensibiliser le ministre des Finances. C'est le ministre responsable de la protection des consommateurs. S'il y en a une qui, au cours de ces heures passées à la télévision, se faisait le champion des gagne-petit, des petits salariés, c'est bien elle. Bien entendu, on sait que ce ministre est occupé ailleurs par un autre projet de loi qui, lui aussi, semble faire l'unanimité, c'est-à-dire que tout le monde s'y oppose. On se serait attendu que ces membres du Parti québécois, ces membres du gouvernement actuel sensibilisent au moins le ministre des Finances aux problèmes particuliers des régions frontalières.

A ce titre, je m'explique mal que l'ensemble des députés ministériels—c'est un défi que je lance aux députés d'arrière-ban qui sont ici en train de lire leurs journaux, de faire leurs mots croisés ou leurs mots mystères — ne se lèvent pas durant ce débat, si la règle du bâillon n'existe pas au caucus du Parti québécois.

M. Pagé: Les mots mystères, c'est trop difficile pour eux.

M. Gratton: Qu'ils se lèvent durant le débat de deuxième lecture et qu'ils nous disent un peu ce que les gens de leur comté leur ont dit depuis septembre au sujet de cette taxe. Qu'ils expliquent au ministre des Finances que ce n'est pas simplement son désir de ne pas être populaire qu'il ne s'inquiète pas, il ne l'est pas chez nous et ne le sera jamais. On a l'impression que chez le ministre des Finances, c'est une espèce de gloire qu'il se fait d'aller à rebours de l'opinion publique. Dans le cas de l'Outaouais, ce n'est pas de l'opinion publique qu'on parle, mais de l'intérêt public.

Motion de report à vingt ans

Mme le Président, quant à moi, je pense qu'il y a lieu pour le ministre des Finances, tout au moins, de considérer la possibilité d'exempter les régions frontalières de l'application de ce projet de loi, et de façon à donner une deuxième chance au député de Hull, au député de Papineau de remplir leur rôle de député, de défendre les intérêts des contribuables de leur comté, j'aimerais vous faire la motion suivante: Que la motion en discussion soit amendée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans vingt ans".

M. Pagé: Mme le Président, me reconnaissez-vous?

Une Voix: On te reconnaît, nous autres!

M. Grégoire: Question de règlement. Pour-riez-vous relire la motion? Nous avons mal entendu à cause du micro. Je me demande si cet amendement est dans l'ordre.

M. Pagé: Est-ce que le député de Frontenac veut dire qu'il était trop occupé à ses mots croisés?

M. Grégoire: Non, ne vous inquiétez pas, il n'y en a pas, ici.

M. Pagé: Non? M. Grégoire: Non.

Mme le Vice-Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme le Président, sur la motion...

M. Grégoire: Mme le Président, je voudrais soulever une question de privilège.

M. Pagé: Le président est debout.

Mme le Vice-Président: M. le député de Frontenac...

M. Pagé: Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: ... sur une question de privilège.

M. Grégoire: Le député de Portneuf peut lancer toutes sortes de choses comme cela: Etiez-vous occupé aux mots croisés? Si vous voulez venir voir ici, il n'y en a pas. Si vous voulez mettre votre siège "au jeu" pour savoir s'il y en a ici, je mettrai le mien. Je mettrai le mien en même temps, vous allez voir qu'il n'y en a pas ici!

M. Marchand: Osez! Osez!

Mme le Vice-Président: Bon. Sur cette mise au point...

M. Grégoire: Avant de parler à travers votre chapeau, commencez par réfléchir!

M. Pagé: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député...

M. Gratton: Vous avez le feu au derrière, ce matin!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, messieurs!

Sur cette mise au point, les députés refusant d'admettre les observations de certains autres députés qu'ils font des mots croisés, je vais vous relire cette motion du député de Gatineau. "Que la motion en discussion soit amendée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans vingt ans".

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme le Président.

Une Voix: ... avant vingt ans, c'est bon signe!

M. Pagé: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: Un moment, s'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Duhaime: Oui, Mme le Président, La première chose que je devrais dire, en invoquant le règlement pour que vous déclariez cette proposition irrecevable, ce serait de dire que c'est à peu près à la hauteur du sérieux qu'on reconnaît au député qui se fait le parrain de cette motion.

M. Lavoie: Vous n'avez pas le droit...

M. Picotte: Vous n'en avez jamais eu, vous autres.

M. Duhaime: Deuxièmement, je me demande si c'est conforme à notre règlement qu'on puisse introduire une motion voulant remplacer le mot "maintenant" par les mots "dans vingt ans".

M. Pagé: Question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le député de Portneuf.

M. Grégoire: Une question de règlement, il ne peut pas y en avoir deux en même temps.

M. Pagé: Mme le Président, question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le député de Portneuf, sur une question de règlement?

M. Pagé: Oui.

Mme le Vice-Président: Allez donc! Je l'attendais, d'ailleurs.

M. Pagé: Mme le Président, je suis convaincu que, si je ne l'avais pas soulevée, vous l'auriez soulevée vous-même. La motion a été jugée rece-vable, vous l'avez acceptée et vous m'avez reconnu pour discuter sur la motion.

Mme le Vice-Président: Voilà.

M. Pagé: Cela implique que vous l'avez reçue, qu'elle est recevable pour la présidence et que le député de Saint-Maurice doit se limiter, s'il veut le faire, à intervenir sur la motion, chose qu'on m'incite à faire.

M. Lessard: Sur la question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: Je pense bien qu'avant de décider si cette motion est recevable ou pas il faut regarder le règlement. C'est une motion qui est assez nouvelle puisque, normalement, les motions qui se présentent sont soit pour six mois ou trois mois. Ceci se base sur l'article 70 du règlement qui dit qu'un amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants: retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres. Il est irrecevable...

M. Pagé: Question de règlement, Mme le Président.

M. Lessard: ... si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé et il en est de même d'un sous-amendement par rapport à un amendement.

Cette motion, qui nous est présentée et qui veut retarder à vingt ans le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, a directement comme objectif d'écarter la question principale. On peut écarter la question principale pour trois mois ou six mois...

M. Marchand: Dans vingt ans!

M. Lessard: ... mais, pour une période de vingt ans, c'est directement écarter la question principale de telle façon que nous ne pourrons pas prendre de décision.

C'est quand même la première fois, jamais nous n'avons utilisé six mois, trois mois. Je vous invite...

M. Pagé: Les Québécois n'en veulent pas de cette loi-là.

M. Lessard: ... à analyser sérieusement cette motion, parce que les conséquences en sont extrêmement importantes.

M. Lavoie: Mme le Président, sur la question de règlement...

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition officielle, sur la question de règlement.

M. Lavoie: ... je ne vois aucune objection. D'ailleurs l'article 121 est tout à fait respecté: "Un seul amendement est possible à la motion de deuxième lecture. Il ne peut viser qu'à la retarder... " Retarder à trois mois, six mois, un an, deux ans, cinq ans, dix ans, quinze ans, vingt ans; en l'occurrence, vingt ans.

Je pense que vous avez eu l'occasion, dans vos recherches, de voir que cette motion, justement, depuis qu'elle existe dans notre droit parlementaire britannique, a pour but de faire en sorte que le projet de loi n'ait plus d'effet. Cela en a toujours été l'esprit. D'ailleurs, vous regarderez Beauchesne, vous regarderez Bourinot. Son but était de faire sauter le délai à la fin. Cela allait plus loin que la fin de la session. Cela a toujours été son but. C'est une manière pour l'Opposition de dire qu'elle est contre le projet de loi, et on sait qu'à la fin d'une session les projets de loi et tout le feuilleton sautent, tous les projets de loi n'ont plus d'effet. Il faut qu'on recommence la procédure de première lecture, de deuxième lecture, avec une exception de droit nouveau dans notre règlement où le leader du gouvernement peut les réinscrire à l'étape où ils sont, au début d'une session nouvelle. Mais le but, et je me rappelle bien avoir regardé les auteurs à cet effet...

M. Burns: Je peux vous dire qu'il ne sera plus ici dans vingt ans, le leader.

M. Lavoie: ... c'était une manière pour l'Opposition de dire qu'elle était carrément contre un projet de loi. D'ailleurs, rien que par analogie, je vais vous lire une note à l'article 557, troisièmement, à la page 163 de notre ancien règlement: "Si la session n'est pas finie quand expire le terme dit, le bill est réinscrit au feuilleton sans autre ordre de la Chambre". Cela veut dire que si le délai était d'un mois et que la session n'était pas terminée au bout d'un mois, le secrétaire général serait obligé de le réinscrire à ce moment-là, comme c'est arrivé pour un projet de loi du député de Maisonneuve, leader parlementaire dans le temps.

M. Burns: La session n'est pas finie.

M. Lavoie: Oui, c'est arrivé sur un projet de loi, le bill de la formule Rand...

M. Burns: Oui.

M. Lavoie: ... lorsque le ministre du Travail du temps avait dit trois mois. Cela a été fait au printemps et effectivement, au mois de septembre, cela a été réinscrit à la date convenue. Mais je vous dis que le but justement, la tradition... D'ailleurs...

M. Burns: Mais c'est la même session... Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. Lavoie: ... si vous n'êtes pas tout à fait sûre de votre décision, Mme le Président, au cas où vous ne le seriez pas, je vous demanderais peut-être de suspendre et de rendre votre décision plus tard, parce qu'il est bien clair qu'à l'origine le but de cette motion était justement de s'arranger pour que la lecture ait lieu dans une autre session, pour que le projet de loi tombe. C'est un des pouvoirs et un des privilèges qu'a l'Opposition. C'est limité à une certaine motion. On ne pourrait pas en faire trois ou quatre et cela exprime carrément l'intention de l'Opposition d'être contre ce projet de loi. Si le ministre des Transports dit que c'est la première fois qu'on fait une telle motion, exactement, cela s'applique au projet de loi qui est présenté; c'est la première fois qu'on taxe spécifiquement les vêtements d'enfants également.

Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement sur la question de règlement.

M. Burns: Sur la question de règlement, Mme le Président, je suis d'accord avec la suggestion du ministre des Transports et celle du leader de l'Opposition pour que vous preniez en délibéré la recevabilité de cette motion. Il n'y a pas de problème là-dessus, on ne fera pas de difficultés, sauf que j'aimerais que vous preniez en considération les brèves remarques que j'ai à faire sur la recevabilité de cette motion. Il y a un vieux principe de droit qui est tellement courant qu'il n'a pas besoin d'être écrit, bien qu'il soit écrit dans le Code civil, mais c'est un vieux principe qui est généra- lement reconnu qui dit qu'on ne peut pas faire indirectement ce que l'on n'a pas le droit de faire directement.

C'est un bon vieux principe, c'est solide, on marche sur un terrain bien solide lorsqu'on se tient là-dessus. Or, nous avons dans notre règlement un article qui s'appelle l'article 70 qui nous dit ceci: "Un amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants: retrancher, ajouter, etc."

Jusque-là la motion est recevable. Elle retranche et elle ajoute. Il n'y a aucun problème là. Mais c'est bien important de continuer à lire l'article 70. "Il est irrecevable (cet amendement) si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé et il en est de même d'un sous-amendement, etc."

Mme le Président, je vous demande simplement et logiquement si le fait de reporter à 20 ans l'examen du projet de loi ou la deuxième lecture de ce projet de loi n'a pas pour effet d'écarter l'objet principal. Qu'on nous dise six mois, Mme le Président, je n'ai pas d'objection. Dans six mois, il y a de gros risques que la majorité des membres de l'Assemblée nationale soit encore ici pour en discuter, si jamais cet amendement était adopté. Mais dans 20 ans, Mme le Président, faisons le tour pour savoir qui va être ici encore...

Une Voix: M. Bellemare.

M. Burns: ... si cela va être encore le même genre de gouvernement, si on ne sera pas dans une république québécoise à ce moment-là. Je vous pose des questions comme celles-là. C'est à ce point que je veux dire que nous sommes en train de décider pour même après la présente Législature. A ce moment-là, on pourrait techniquement dire: Cette Législature-ci ne légiférera pas et elle va soumettre cela à une éventuelle Législature qui sera quoi, je ne le sais pas. Donc, à mon avis, l'effet même de cette proposition d'amendement est d'écarter la motion en discussion. C'est pourquoi je vous dis, Mme le Président, qu'il s'agit là de faire indirectement ce que l'article 70 nous dit que directement nous n'avons pas le droit de faire. Dans ce sens, je trouve absolument irrecevable la motion d'amendement.

Je vous répète que je suis d'accord que vous la preniez en délibéré, quitte à nous rendre votre décision plus tard, soit au cours de la journée ou demain, ou quoi que ce soit. Cela ne devrait pas, d'autre part, si vous prenez en délibéré cette motion, limiter le droit de parole des gens. Je pense bien que tout le monde va continuer à parler en deuxième lecture, tant que cet amendement ne sera pas jugé irrecevable.

M. Lavoie: C'est normal d'avoir une décision. M. Lamontagne: Mme le Président...

M. Burns: On est rendu à 12 h 40; je vous ai mentionné ce matin que je n'avais pas l'intention cet après-midi, à compter de 15 heures, de revenir

avec ce projet, mais de revenir avec la motion de clôture, de sorte que Mme le Président aura bien le temps de penser à la question et de délibérer pour nous donner une raison éventuellement, à moins que, Mme le Président, vous ne soyez en mesure de nous donner la réponse immédiatement. C'est à votre goût.

Mme le Vice-Président: M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: Mme le Président, une brève intervention, d'abord, sur les paroles qu'a prononcées le ministre du Tourisme. Peut-être a-t-il dépassé sa pensée lorsqu'il a dit qu'il s'agissait d'un amendement qui n'est pas sérieux. Je pense que le leader du gouvernement, qui a déjà siégé dans l'Opposition, comprend mieux le rôle d'un parti d'Opposition face à une loi à laquelle il s'oppose complètement. S'il vous propose, Mme le Président...

M. Burns: A ce moment-là, vous votez contre. C'est cela, votre droit.

Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. Lamcntagne: Voyons, Mme le Président. Nous nous référons, pour un projet de loi de deuxième lecture, à un article, l'article 121 qui prévoit un seul amendement possible. Je pense que, dans l'esprit d'un parti de l'Opposition qui est entièrement contre un tel projet de loi, il ne peut pas soumettre un amendement où il propose de retarder le projet de loi de un mois ou deux mois; cela n'exprime pas clairement sa pensée.

Je comprends, Mme le Président, qu'il s'agit d'un amendement qui, à mon avis, est apporté pour la première fois. Je pense qu'il exprime clairement l'opinion d'un parti politique. C'est ce qui est important. On n'entend pas même proposer un amendement de deux mois, six mois. Il n'y a pas d'élection prévue d'ici quelques mois. Vous pouvez représenter ce projet de loi. On veut que l'opinion publique, par votre intermédiaire...

M. Burns: II va y avoir des élections d'ici 20 ans, par exemple.

M. Lamontagne: Vous en ferez quand vous voudrez et on va être prêts. Ne vous inquiétez pas de cela. Je suis bien plus inquiet pour vous autres de ce temps-ci.

M. Burns: D'ici 20 ans, il va y en avoir. Etes-vous bien d'accord qu'il va y en avoir?

M. Lamontagne: Mme le Président, allez-vous la fermer, cette grande gueule-là?

M. Burns: Mon Dieu! Il est choqué noir.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, je vous ferai remarquer que j'ai déjà donné la parole à M. le député de Roberval. M. le député, je vous demanderais de terminer rapidement.

M. Lamontagne: Mme le Président, je comprends très bien votre rôle. J'espère qu'à l'occasion, pas tout le temps, je vous comprends également, lorsque le leader du gouvernement — cela a été le cas hier soir — interrompt continuellement, rappelez-le à l'ordre comme vous le faites rapidement pour nous.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, messieurs!

M. Lamontagne: Mme le Président, votre rôle comme président ou vice-président de l'Assemblée nationale est de protéger les droits de l'Opposition. Or, l'Opposition, dans un tel projet de loi, a choisi un amendement qui exprime clairement ce qu'elle entend. Elle ne veut pas de ce projet de loi et elle entend le retarder. C'est nous qui définissons te retard que nous voulons apporter à...

Mme le Vice-Président: M. le député de Roberval, je dois vous arrêter parce que vous touchez au fond de la question. Je vous entendais sur la question de règlement. Vous pourrez toujours intervenir, si cet amendement est accepté ou retenu, sur le fond de la question.

M. Goulet: Point de règlement.

Mme le Vice-Président: Ce que je veux dire maintenant, c'est qu'il ne m'appartient pas de déterminer, comme bien souvent les gens le disent dans cette Assemblée, que cette motion puisse être dilatoire ou pas. Je sais qu'habituellement ces motions de report sont considérées comme des motions dilatoires, c'est-à-dire que les gens les apprécient de cette façon. Que les termes en soient farfelus, aux yeux de certains, cela ne change pas le fait que cette motion d'amendement est une motion prévue dans les termes de notre règlement. Il faudra peut-être estimer les termes dans lesquels cette motion d'amendement est présentée. Pour me rendre à toutes les considérations de ceux qui sont intervenus sur la question de règlement, aussi bien les membres de l'Opposition officielle comme ceux du gouvernement, je vais prendre cette motion en délibéré.

M. Goulet: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Mme le Président, ce qui s'est dit pour ou contre la recevabilité de la motion, j'en suis, et ce n'est pas dans mon intention de faire ici un débat de procédure, loin de là. Mme le Président, en vertu de l'article 43, si vous me le permettez on va le lire ensemble, "Le président se prononce sur les questions de règlement au moment où il le juge à propos et il peut demander des directives à l'Assemblée ou la laisser se prononcer."

Deuxièmement, "Lorsque le président rend sa décision, il indique ce qui la justifie et il n'est pas permis de critiquer ni de revenir sur la question décidée."

Tantôt, dans cette Chambre, vous l'avez peut-être fait rapidement, mais vous aviez reconnu la proposition recevable et vous aviez même accordé la parole au député de Portneuf suite à quoi le député...

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le député de Bellechasse.

M. Goulet:... de Saint-Maurice s'est levé et il a parlé sur la recevabilité de la motion, mais à ce moment vous aviez déjà donné votre accord, Mme le Président.

M. Lessard: Mme le Président...

M. Goulet: Ecoutez, on lira la transcription...

M. Burns: Question de règlement. Il faudrait peut-être rappeler simplement au député de Bellechasse qu'il n'y a pas d'appel de vos décisions à l'Assemblée nationale. Vous avez décidé — c'est une décision; vous venez de nous donner une décision intérimaire — de prendre en délibéré la recevabilité. Alors je ne vois pas pourquoi il plaide en appel.

M. Goulet: Mme le Président, si je me suis levé...

Mme le Vice-Président: Je vous rappelle à l'ordre, M. le député. Il apparaît que cette motion d'amendement n'était pas reçue puisque aussi bien l'Opposition officielle que le parti ministériel sont intervenus sur cette question de règlement à propos de cette question d'amendement. Alors, c'est évident, puisque les gens sont intervenus dessus et que, si ma décision avait été prise, ils ne l'auraient pas fait.

M. Burns: Sur la motion principale, M. le Président.

Mme le Vice-Président: Sur la motion principale.

Motion d'ajournement du débat

M. Burns: Je propose l'ajournement du débat.

M. Lavoie: Un instant, une petite seconde, ce n'est pas vous qui avez le droit de parole sur la motion principale.

M. Burns: J'ai demandé la parole sur la motion principale.

M. Lavoie: C'est le député de Portneuf qui, je crois, avait le droit de parole.

Mme le Vice-Président: M. le député de Portneuf avait été reconnu sur une question de règlement.

M. Pagé: Non! Mme le Président, si vous me le permettez...

M. Lessard: Mme le Président, question de règlement. Le député de Portneuf a été reconnu et vous êtes venue lui donner la parole sur la question d'amendement, c'est-à-dire renvoi à 20 ans. Or, je me suis levé pour dire: Question de règlement. Par la suite, j'ai décidé de céder ma place au leader parlementaire adjoint, qui est intervenu sur la question de règlement pour éviter que le député de Portneuf ne parle sur une question de règlement qu'on jugeait irrecevable. Après que le leader adjoint fut intervenu sur la question de règlement, je suis moi-même intervenu sur la question de règlement pour expliquer qu'elle était irrecevable. Donc, puisque vous la prenez en délibéré, nous sommes maintenant à la motion principale.

M. Gratton: Mme le Président.

M. Lavoie: On va régler tout cela, on ne veut pas de chicane.

Mme le Vice-Président: Alors, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: On pourrait tendre un piège au leader du gouvernement, ce n'est pas notre intention. D'accord? Si vous le voulez, pour régulariser les choses, il avait été convenu qu'on ajournerait à midi; mettez donc l'ajournement du débat dans le procès-verbal soit au nom du député de...

M. Gratton: Mme le Président, si on me le permet...

M. Burns: C'est parce que j'ai sérieusement l'intention d'intervenir en deuxième lecture sur ce projet de sorte que je propose l'ajournement du débat, à moins que le député n'ait pas terminé son droit de parole.

M. Gratton: Justement.

M. Burns: Là, je m'excuse, je croyais qu'il avait terminé.

M. Gratton: C'est ce que j'allais dire: Si vous alliez, cet après-midi, déclarer la motion que j'ai faite irrecevable, à ce moment-là, mon temps n'étant pas écoulé, je pourrais facilement continuer de faire mon intervention en deuxième lecture. Je propose donc l'ajournement du débat.

M. Burns: Je comprends...

Mme le Vice-Président: Non. De toute façon,

Il faudrait peut-être vérifier au journal des Débats, à propos de la façon dont j'ai donné le droit de parole tantôt. J'ai l'impression que j'avais donné le droit de parole au député de Portneuf sur la question de règlement. Quant à M. le député de Gatineau, il a terminé son intervention; j'allais lui rappeler qu'il devait conclure; il devait terminer à 12h 31 et il avait déjà terminé.

M. Gratton: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je veux bien accepter, Mme le Président, qu'il était 12 h 31, je n'ai pas regardé l'heure, mais vous avez l'habitude de nous avertir et nous permettre de conclure. Alors, tout ce que je veux faire en proposant l'ajournement du débat, c'est simplement d'avoir le droit de conclure après que vous aurez rendu votre décision; c'est aussi simple que cela.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau, vous étiez déjà assis, je pense que vous n'avez pas à intervenir sur cette question de règlement.

M. Burns: Mme le Président.

M. Gratton: Mme le Président, question de règlement.

Mme le Vice-Président: Je vous dis, M. le député de Gatineau, que vous n'avez pas à intervenir sur cette question de règlement. Vous étiez déjà assis, considérant que votre droit de parole était terminé.

M. Gratton: Question de privilège, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Sur une question de privilège, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Pourrais-je vous signaler très respectueusement, Mme le Président, que je peux intervenir sur n'importe quelle question de règlement, à quelque moment que ce soit, là où je considère qu'il y a violation de nos règlements? C'est en vertu de cette possibilité que je l'ai fait, Mme le Président, et je vous inviterais à relire le journal des Débats de façon qu'on ne soit pas trois à avoir proposé la motion d'ajournement au moment où on reprendra nos travaux cet après-midi.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau, je vous ferai remarquer que j'avais déjà entendu votre question de règlement, et la réponse était déjà donnée à cette question de règlement que vous aviez soulevée. C'est pourquoi, je pense que vous n'aviez plus à intervenir sur la même question de règlement.

M. Lavoie: J'aurais une directive à vous demander, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Pour le procès-verbal, lorsqu'il sera 13 heures, à quel nom va être inscrit l'ajournement du débat? C'est à vous de le décider. On ne peut pas laisser un débat en suspens comme cela, surtout si c'est dans l'intention du leader du gouvernement d'entreprendre d'autres travaux cet après-midi. Cela veut dire qu'on peut reprendre ce débat soit ce soir, soit demain, mais il faut qu'au procès-verbal il y ait un nom d'accroché à la fin de ce débat. A qui allez-vous donner la parole lors de la reprise du débat sur cette motion? C'est la directive que je vous demande.

Mme le Vice-Président: Vu que M. le député de Gatineau avait terminé son intervention, que la motion est prise en délibéré, je pense qu'il appartient au leader parlementaire de demander l'ajournement du débat.

M. Lavoie: Non, ce n'est pas comme cela...

M. Pagé: Vous m'aviez reconnu, Mme le Président. J'étais prêt à parler.

Mme le Vice-Président: Sur une question de règlement, M. le député de Portneuf.

M. Burns: Mme le Président, sur la question de règlement. Je vous ai demandé la parole. Vous me l'avez accordée. Je pense que vous m'avez reconnu et, à ce moment, j'ai le droit, lorsque j'ai la parole, je crois, comme n'importe qui d'ailleurs à l'Assemblée nationale, de proposer l'ajournement du débat. Si on n'est pas d'accord pour ajourner le débat, qu'on vote contre, Mme le Président. Mais je pense que vous m'avez reconnu comme ayant droit de parole. Et je vous dis bien franchement que j'ai l'intention d'intervenir relativement à ce projet de loi.

Mme le Vice-Président: Cette motion d'ajournement du débat...

M. Lavoie: J'aurais une question, Mme le Président. Est-ce que vous aviez reconnu le député de Portneuf avant le leader parlementaire du gouvernement?

Mme le Vice-Président: Ce que je vous dis depuis tantôt, c'est que le droit de parole du député de Gatineau étant terminé, la motion d'amendement du député de Gatineau étant prise en délibéré, M. le leader parlementaire du gouvernement me demande l'ajournement du débat.

M. le leader parlementaire.

M. Pagé: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: Vote enregistré, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Qu'on appelle les députés.

M. Burns: Mme le Président, en vertu de notre règlement, je vous demande de remettre ce vote à plus tard.

M. Lavoie: Vous ne vouiez pas reprendre cette question aujourd'hui?

M. Burns: Non.

M. Lavoie: A quelle heure voulez-vous la reprendre?

M. Burns: Au moment des affaires courantes de demain.

Mme le Vice-Président: Ce vote sera pris au moment des affaires oourantes demain, juste avant les affaires du jour.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Lavoie: Question de règlement, Mme le Président. Rien qu'une directive. Je ne sais pas, c'est du droit nouveau et je demanderais vos lumières.

Peut-on demander l'ajournement du débat, qui est demandé à 12 h 55, au moment où on doit suspendre nos travaux à 13 heures? En vertu de nos règlements, on doit suspendre les travaux et non pas les ajourner. Normalement, s'il n'y a pas de motion — d'ailleurs, la décision n'est pas rendue sur la motion, cela veut dire qu'il n'y a pas de motion — en vertu des règlements actuels, on suspend les travaux à 13 heures et, en vertu de la motion qui nous régit actuellement, le débat est suspendu jusqu'à 15 heures cet après-midi.

La décision ne sera pas rendue avant demain. Cela veut dire que le débat n'est pas ajourné. La Chambre ne s'est pas prononcée sur l'ajournement du débat, Mme le Président. Cela veut dire que, malheureusement, on devra reprendre ce débat à 15 heures cet après-midi.

M. Burns: Mme le Président, au contraire.

M. Lavoie: La Chambre n'a pas décidé d'ajourner le débat.

M. Burns: II y a un vote enregistré demandé; donc, la fin...

M. Lavoie: Vous présumez du vote?

M. Burns: Oui, je peux présumer du vote. Je peux vous dire ce qu'il va être.

M. Lavoie: Pouvez-vous présumer que la Chambre ne voudra pas ajourner le débat?

M. Burns: Si la Chambre ne veut pas ajourner le débat, notre règlement fait qu'on reprendra immédiatement après le vote.

M. Lavoie: On ne peut pas entreprendre d'autres travaux.

M. Burns: Maintenant, étant donné qu'il n'est pas encore 13 heures, je propose la suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

M. Lavoie: J'ai demandé une directive à la présidence. Nous ne sommes pas à 13 heures; j'aimerais bien avoir les lumières et les directives de la présidence.

Mme le Vice-Président: II y a déjà une motion proposant la suspension des travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi. Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: II n'y a pas de motion pour cela, Mme le Président. Je vous ai demandé une directive.

Mme le Vice-Président: Parce qu'il n'est pas encore l'heure de suspendre.

M. Lavoie: Montrez-moi dans le règlement l'endroit où il y a une motion pour suspendre le débat. Donnez-moi l'article, si vous voulez, où on a une motion pour suspendre le débat. Cela n'existe pas, Mme le Président.

M. Burns: Ce n'est pas nécessaire, voyons donc!

Vous êtes de mauvaise foi comme je n'en ai pas jamais vu. C'est incroyable de la part d'un ancien président de l'Assemblée nationale.

M. Gratton: A votre place, je ne parlerais pas de...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, messieursl Je suspendrai donc d'autorité les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

M. Lavoie: Quels travaux allons-nous prendre à 15 heures?

(Suspension de la séance à 12 h 55)

Reprise de la séance à 15 h 7

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Conformément au consentement unanime qui a été donné ce matin, j'inviterais M. le ministre de l'Agriculture à faire sa déclaration ministérielle.

M. le ministre de l'Agriculture.

Déclaration ministérielle

Participation de SOQUIA au capital-actions de Culinar

M. Jean Garon

M. Garon: Ma déclaration ministérielle est relative à l'offre d'acquisition d'une participation minoritaire par SOQUIA au capital-actions de Culinar Inc. Depuis un an, à titre de ministre de l'Agriculture, je n'ai pas raté une occasion d'exprimer la volonté de mon ministère de travailler à développer au Québec le secteur de la transformation et de la distribution des produits alimentaires qui soit à la fois bien structuré, efficace et rentable. Il s'agit là d'une condition essentielle au développement d'un secteur de la production agricole qui soit fort et stable. Cette préoccupation pour le développement de l'agro-alimentaire s'est concrétisée en mai dernier par l'émission d'une lettre-directive qui a enfin précisé le rôle que jouera dorénavant la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires.

Vous me permettrez sans doute, M. le Président, de résumer brièvement ce document que j'ai alors déposé. Ce document soulignait que les effectifs fondamentaux de SOQUIA sont, premièrement, de créer de nouveaux débouchés pour les produits agricoles du Québec par le biais d'initiatives au niveau de la transformation et de la distribution de produits alimentaires; deuxièmement, assurer le maintien ou le retour d'entreprises de ces deux grands secteurs de notre économie agricole sous le contrôle de Québécois. La poursuite de ces objectifs nous a incités à réagir rapidement lorsque mon confrère, ministre d'Etat au développement économique, et moi-même nous avons pris connaissance, par la voie des journaux, que la Corporation de développement du Canada venait de soumettre aux institutions du Mouvement des caisses populaires Desjardins une offre d'achat de leurs actions ordinaires dans Culinar Inc. Devant la crainte que le contrôle de cette compagnie bien québécoise glisse entre les mains d'entreprises dont le siège social est situé à l'extérieur du Québec et en collaboration avec mon confrère, le ministre d'Etat au développement économique, j'ai soumis au Conseil des ministres une proposition, celle de faire intervenir la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires dans ce dossier.

L'analyse de ce dossier nous a permis de constater que la compagnie Culinar Inc., avec ses trois filiales: Vachon Inc., Produits Diamant Ltée et Biscuits Lido Ltée, pouvait devenir un fer de lance du développement du secteur québécois de l'agro-alimentaire. Voilà pourquoi nous avons au- torisé SOQUIA à soumettre une offre d'achat à la Société d'investissement Desjardins qui sera bientôt détentrice d'un bloc important du capital-actions de Culinar Inc.

Cette offre d'achat porte sur toutes les actions ordinaires de Culinar Inc. excédant 51% du capital-actions qui auront été acquises par la Société d'investissement Desjardins aux termes de l'offre qu'elle a soumise aux actionnaires vendredi dernier. La société cédera ses actions à SOQUIA au prix qu'elle les aura payées, soit $5.50 chacune.

L'offre précise que la Société d'investissement Desjardins devra céder à SOQUIA au moins 15% et au plus 49% du capital-actions de Culinar Inc. L'offre s'applique également aux débentures séries A et B de Culinar Inc, qui seront acquises à leur valeur nominale, plus l'intérêt couru. La part de SOQUIA pour les débentures s'établira au prorata des actions ordinaires qu'elle pourra acheter.

Cette opération financière représente pour SOQUIA des déboursés pouvant atteindre $12,5 millions. C'est sans contredit, M. le Président, la plus importante transaction effectuée par cette jeune entreprise gouvernementale spécialisée dans le développement agro-alimentaire. Mon confrère, le ministre d'Etat au développement économique, et moi-même nous sommes fiers d'en informer l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le député de Maskinongé. M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, le ministre de l'Agriculture vient de faire une déclaration relativement à l'offre d'acquisition d'une participation minoritaire au capital-actions de Culinar Inc. Vous me permettrez sans doute, M. le Président, de rappeler aux membres de cette Assemblée nationale certains gestes du gouvernement libéral précédent qui expliquent mieux la déclaration ministérielle d'aujourd'hui. Suite à la présentation en novembre 1971 au Conseil des ministres d'un plan directeur dans lequel la philosophie et les grandes orientations de la politique agricole québécoise étaient définies, suite à une large consultation régionale effectuée au début de 1972 auprès des responsables régionaux du ministère de l'Agriculture et suite à un effort de réflexion sur la problématique de l'ensemble du système agro-alimentaire québécois en 1973, le ministre de l'Agriculture du temps. M. Normand Toupin, déposait en août 1974 un document intitulé "Vers un plan de développement intégré", et le gouvernement Bourassa, le 26 juin 1975, faisait adopter la loi 22, loi qui créait la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires.

La lettre directive de mai 1977 du gouvernement actuel n'a été que le prolongement logique de ces gestes. L'acquisition par SOQUIA, de la Société d'investissement Desjardins, d'actions ordinaires entraînant des déboursés de tout près de $12,5 millions, comme le cite la déclaration ministérielle, ne répond aucunement aux objectifs fondamentaux que vient de rappeler le ministre. C'est, premièrement, de créer de nouveaux débouchés

pour les produits agricoles du Québec et, deuxièmement, d'assurer le maintien ou le retour d'entreprises des secteurs de la transformation et de la distribution de produits alimentaires.

Quels sont les nouveaux débouchés qui sont créés pour les produits agricoles du Québec dans cette transaction? Est-ce que la Corporation de développement du Canada, société de la couronne, propriété des Canadiens et donc par surcroît des Québécois, doit être considérée comme étant une entreprise étrangère, pour assurer le maintien ou le retour d'entreprises des secteurs de la transformation et la distribution de produits alimentaires?

La position du gouvernement actuel, M. le Président, de considérer la Corporation de développement du Canada comme une entreprise étrangère ne fait pas partie de la politique de développement agro-alimentaire du présent gouvernement, mais bien de sa stratégie politique bien orchestrée, qui veut laisser croire à la population et, particulièrement dans le cas qui nous occupe présentement, aux agriculteurs du Québec que tout ce qui vient du fédéral est mauvais pour le Québec.

Le ministre dit dans sa déclaration, M. le Président: L'analyse de ce dossier nous a permis de constater que la compagnie Culinar Inc., avec ses trois filiales: Vachon Inc., Produits Diamant Ltée et Biscuits Lido Ltée, pouvait devenir un fer de lance du développement du secteur québécois de l'agro-alimentaire.

M. le ministre, l'analyse du dossier nous démontre-t-elle que toute cette transaction était nécessaire et obligatoire et que c'était le moyen idéal pour constituer le fer de lance de la nouvelle politique agro-alimentaire? Pour s'en assurer, M. le Président, le ministre devrait déposer le dossier de Culinar Inc. et l'analyse qu'il en a faite.

Voici un domaine où le gouvernement a peut-être, encore une fois, agi en amateur. Quels sont les investissements nécessaires que le gouvernement du Québec devra faire pour rentabiliser à long terme le groupe Culinar Inc.? Une des raisons que la SDI avait de vendre une partie du capital-actions étant justement qu'elle n'avait pas les capitaux nécessaires pour réinvestir les sommes nécessaires à une diversification de sa production, le Québec s'est-il engagé à fournir ces capitaux?

Ces $12,5 millions ne créent aucun nouveau débouché et ne créent aucun nouvel emploi; ils ne constituent non plus nullement une nouvelle initiative au niveau de la transformation des produits agricoles et n'ont pas pour effet direct de maintenir sous contrôle québécois les entreprises menacées de mainmise étrangère, puisque la Société d'investissement Desjardins a décidé d'en garder le contrôle majoritaire.

Avant de dire que c'est le fer de lance du développement du secteur québécois de l'agro-alimentaire le ministre ne devrait-il pas nous donner sa politique générale de développement du secteur agro-alimentaire, de même que sa stratégie et le rôle qu'il entend faire jouer aux différents agents économiques de ce secteur, en particulier aux agriculteurs du Québec?

M. le ministre, n'y aurait-il pas eu lieu d'atten-tre les résultats du sommet agro-alimentaire que vous nous annoncez depuis un an? A quand la participation de SOQUIA dans la transformation, premièrement, des produits laitiers, deuxièmement, des produits de conserverie et, troisièmement, des fruits et des légumes? A toutes fins utiles, M. le Président, pour les agriculteurs du Québec, cela ne change strictement rien, c'est-à-dire que cette société sera obligée d'aller s'alimenter à l'extérieur du Québec en farine, en cacao et en sucre. A toutes fins utiles cela ne change aucunement le portrait et ne vient rien donner aux agriculteurs du Québec.

En terminant, M. le ministre, la Coopérative de la Mitis, dont je vous ai déjà parlé en Chambre, n'a besoin que de $18 000 pour se maintenir et répondre ainsi aux objectifs de votre lettre-directive de mai 1977.

Le Vice-Président: M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Dans la déclaration ministérielle, le ministre de l'Agriculture affirme que cette acquisition est essentielle pour le développement du secteur agricole au Québec. Je crois qu'il y a un certain manque d'ingéniosité de la part du ministre puisqu'il y a d'autres firmes québécoises, par exemple celles qui oeuvrent dans la vente de produits alimentaires, qui auraient pu être aidées par le MAQ afin de prendre peut-être possession de cette compagnie ou d'acheter les actions majoritaires provenant du mouvement Desjardins.

Je crois que l'on souhaite tous que nos industries québécoises demeurent chez nous. C'est le voeu que je veux formuler ici aujourd'hui. Je me pose quand même des questions sur les raisons qui poussent le mouvement Desjardins à se départir de ses actions ou d'une partie de ses actions dans Culinar Inc, une firme qui générait en 1976 $3,9 millions de profits sur une valeur aux livres de $13 millions. Je crois qu'il y a des questions à se poser au niveau de la prise de position des caisses Desjardins ou du mouvement Desjardins. J'aimerais qu'on ait des précisions du ministre sur cette question.

J'aimerais savoir aussi s'il y a eu des études de rentabilité à long terme sur cette industrie. J'ai ouï-dire que l'équipement existant dans cette industrie du comté de Beauce a beaucoup vieilli et aura besoin de remplacement bientôt. J'ai pu remarquer dans un texte d'un journal qu'il faudrait peut-être injecter $30 millions à $50 millions dans l'avenir pour rentabiliser cette industrie et la rendre à la fine pointe.

Je ne sais pas si le ministre a aussi fait des études sur l'assurance de marchés à long terme pour cette firme. C'est une autre question que l'on doit se poser. J'aimerais aussi que le ministre

nous dise à quels investissements nouveaux, à court terme, SOQUIA devrait participer pour arriver à garder toute l'ampleur que cette compagnie connaît dans le Québec et aussi à garder ses exportations vers certains Etats américains et vers l'Ontario en particulier.

J'aimerais que le ministre nous dise aussi si cette acquisition où on va peut-être injecter $12,5 millions va nous apporter un seul nouvel emploi au Québec. Sur cela, je me pose encore des questions.

Je me demande ce qu'il y a de si mauvais à ce que $28,5 millions d'argent canadien, peu importe d'où ils viennent, arrivent au Québec, parce que je pense que les $12,5 millions qu'on pourrait peut-être investir, ou le maximum qu'on y investirait pourrait être placé ailleurs. J'ai déjà fait remarquer au ministre de l'Agriculture qu'il y a des secteurs où on a besoin d'injection d'argent qui pourraient créer des emplois, et j'ai parlé de congélation rapide, j'ai parlé de déshydratation, j'ai parlé de conservation, j'ai parlé de mise en marché, j'ai parlé d'entreposage, j'ai parlé de bien des choses au ministre, mais $12,5 millions, on va peut-être mettre ce montant dans une industrie qui fonctionne très bien et où on ne créera pas un seul emploi. Je me pose encore des questions sur la valeur du geste posé par le ministre de l'Agriculture.

Quand on regarde les résultats de SIDBEC, de la SGF où nos capitaux ne rapportent pas grand-chose présentement, on peut voir que l'intervention gouvernementale dans une compagnie privée ne peut peut-être pas porter beaucoup de fruits, c'est fort possible. Avant de critiquer davantage cette déclaration du ministre, je pense qu'il y aurait lieu que tous les membres de l'Opposition soient bien plus informés sur les intentions précises de SOQUIA, à savoir d'aller vers un investissement de $12,5 millions où ces capitaux n'amèneront aucun emploi au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

M. Roy: M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, juste un instant. Je pourrais probablement vous accorder la parole. Cependant, je voudrais brièvement éclaircir une situation. Ce matin, vous avez demandé que copie vous soit remise de la déclaration ministérielle; deuxièmement, il y a eu consentement de tous pour que cette déclaration ministérielle soit donnée à 15 heures cet après-midi; troisièmement, en vertu de l'article 179, paragraphe 2, seuls les partis reconnus peuvent critiquer ou commenter une déclaration ministérielle; mais si j'ai le consentement de cette Assemblée, je vous donne très volontiers la parole. Consentement accordé.

M. Burns: M. le Président, je crois que le député de Beauce-Sud a reçu copie de la déclaration ministérielle et, en même temps, c'était, sans nécessairement créer de précédent, un consentement de notre part à ce que le député puisse intervenir.

Le Vice-Président: C'est pourquoi j'ai voulu rétablir les faits. C'est avec plaisir que je donne la parole au député de Beauce-Sud. Oui.

M. Marchand: M. le Président, est-ce qu'il faut le consentement unanime?

M. Burns: Oui et tout le monde l'a donné.

M. Marchand: Non, je demande si cela prend le consentement unanime.

Le Vice-Président: Oui, en vertu de l'article 179, paragraphe 2.

M. Marchand: Alors, M. le Président, même si le député de Beauce-Sud a refusé au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre de parler pour les travailleurs de Montréal à la fin de la grève, je vais lui donner mon consentement.

Le Vice-Président: D'accord. M. le député de Beauce-Sud. Merci, M. le député de Laurier.

M. Roy: M. le Président, je reconnais et je prends bonne note de la grande collaboration du député de Laurier.

M. Marchand: J'espère que vous en ferez autant la prochaine fois.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je ne me souviens pas d'avoir empêché le député de Laurier d'intervenir en cette Assemblée.

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, sur la pertinence du débat.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président, quelques courts commentaires.

Après avoir pris connaissance de la déclaration ministérielle du ministre, je pense qu'il y a plusieurs questions auxquelles on n'a pas répondu et auxquelles mes collègues de l'Opposition viennent de se référer. Est-ce que réellement cette industrie est en train de passer entre les mains des entreprises étrangères? C'est la première question qu'on doit se poser. Est-ce qu'effectivement le mouvement Desjardins avait consenti à laisser aller une partie de son capital-actions dont on fait référence ici à des entreprises étrangères? Je ne sache pas qu'il y ait eu un consentement. C'est pourquoi je suis en train de me demander sérieusement si on n'est pas tout simplement en face d'une décision politique qui a pour but objet de lancer de la poudre aux yeux de la population.

Lorsque la loi de SOQUIA a été adoptée à l'Assemblée nationale, il avait été bien clairement établi que c'était en vue de stimuler, de développer, de participer à la création de nouvelles entre-

prises, de développer le secteur agro-alimentaire. Ce qu'on nous propose aujourd'hui, c'est tout simplement d'acheter une partie du capital-actions de trois entreprises qui, selon les informations que je possède, vont très bien au Québec; il n'y a pas de problème majeur et leurs dirigeants n'étaient pas intéressés à faire passer la majorité des actions entre les mains des étrangers. Lorsqu'il a été question, effectivement, de l'achat par Beatrice Foods aux Etats-Unis, on se rappellera l'intervention du mouvement Desjardins pour faire en sorte que cela reste une propriété du Québec, une propriété des Québécois.

M. le Président, on sait que SOQUIA a des difficultés à démarrer. On sait que les initiatives et le bilan ne sont pas extraordinaires. Alors, il est évident qu'avant la fin de l'année permettre une réalisation de cette nature redore le blason de SOQUIA. Le ministre a ajouté à la fin de sa déclaration un sentiment nationaliste. Je suis en train de m'interroger très sérieusement, M. le Président; doit-on pousser le nationalisme québécois jusqu'à faire en sorte que l'Etat devra devenir propriétaire des entreprises de production de biens et de services. Le nationalisme québécois est-il devenu un synonyme d'étatisme pour plusieurs? Si c'est ceia, M. le Président, permettez-moi d'être inquiet et de m'interroger sur la prétendue libération qu'on veut offrir aux citoyens du Québec.

Je pense qu'il y a quand même des limites à prendre des vessies pour des lanternes. En ce qui me concerne, M. le Président, connaissant très bien le cas, puisque c'est ma région qui est concernée de façon plus particulière, je pense que le ministre devrait en dire beaucoup plus; le ministre devrait mettre plus de cartes sur table et nous faire part exactement de la situation telle qu'elle s'est présentée de façon que nous puissions en être informés.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Lavoie: M. le ministre va-t-il exercer son droit de réplique?

Le Vice-Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, on est au stade simplement d'une offre de participation à une entreprise. Il y a de grosses chances que cela ne coûte pas $12,5 millions d'abord.

M. Picotte: Pas trop sûr.

M. Garon: Mais il fallait tout simplement faire une offre équitable à tous les actionnaires et également aux actionnaires minoritaires s'ils voulaient vendre leurs actions. On entend différents sons de cloche ici. Cela ne m'étonne pas. Le Parti libéral dit qu'on aurait pu attendre. On ne nous a pas élus pour attendre, mais pour prendre des décisions.

M. Picotte: Elles ne sont pas toutes au cou des vaches, les cloches.

M. Garon: Le député de l'Union Nationale se demande si l'entreprise va mal ou si elle va bien. Le député de Beauce-Sud dit que cela va bien. Evidemment, à ce stade-ci il s'agit de voir quelle participation il va y avoir et quel pourcentage des actionnaires vont vendre leurs actions, ce qu'on ne sait pas, puisqu'il s'agit simplement d'une offre de participation. Quelle sera la participation de SOQUIA? Est-ce que ce sera 15%, 20%? Nous ne le savons pas, à ce moment-ci. Il faudra attendre de voir, à la suite de l'offre de la Société d'investissement Desjardins combien d'actionnaires voudront vendre leurs actions. Mais il est certain qu'une entreprise comme Culinar peut être utilisée. C'est une entreprise avec laquelle SOQUIA peut travailler, de même que la Société d'investissement Desjardins, pour faire un développement économique dans des secteurs où, jusqu'ici, nous n'avons pas été très présents.

C'est évident — je ne rentrerai pas dans les détails aujourd'hui — que SOQUIA n'entre pas dans Culinar pour que cela reste stationnaire. Au contraire, c'est parce qu'il y a des projets de développement et qu'on a l'intention d'y participer. Pour cela, il ne faut pas participer seulement à des petites entreprises. Il faut aussi pouvoir faire jouer à Culinar le rôle qu'une entreprise comme elle peut jouer, une entreprise qui a 30 000 points de vente en Amérique du Nord. Ce n'est pas une "bi-nerie", c'est une entreprise qui peut jouer un rôle encore plus considérable. Pourquoi ne prend-on pas le contrôle? Parce que, justement, on ne pense pas en termes d'étatisation et de nationalisation. C'est pour cela que, dans la lettre de directive de SOQUIA, il est mentionné qu'elle doit uniquement, de façon exceptionnelle, prendre une participation majoritaire, mais qu'elle doit plutôt avoir une participation minoritaire. 49% est un maximum qui ne sera sans doute pas atteint. La participation sera beaucoup plus autour de 20% ou 25%.

M. Picotte: Cela prouve que vous agissez en amateurs; c'est cela qu'on vous a mentionné tantôt, vous êtes des amateurs.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! J'ai entendu d'autres sons que des sons de cloche.

Ce n'est pas ce que j'ai entendu. Je demanderais quand même au député de terminer ses démonstrations qui ne sont pas tellement parlementaires. Je vais donner la parole à M. le leader parlementaire du gouvernement pour que nous puissions poursuivre nos travaux.

M. Burns: Nous avions accepté, à la demande d'un certain nombre de députés de l'Opposition, de retarder le début des travaux des commissions pour terminer la déclaration ministérielle et les différentes réponses. Je vous mentionne, cependant, que la motion qui a été adoptée ce matin prévoyait que ces commissions pouvaient siéger à compter

de 15 heures. Alors, je donne avis à la Chambre que, maintenant que nous avons respecté la demande qui nous avait été faite, ces deux commissions, soit celle de la justice, à la salle 81-A, et celle des consommateurs, coopératives et institutions financières, au salon rouge, vont reprendre leurs travaux. J'en donne avis immédiatement; c'est par entente avec les partis de l'Opposition que nous avons retardé le début de ces commissions. J'espère qu'on ne nous le reprochera pas. Maintenant, nous reprenons nos travaux, M. le Président, et je vous demanderais d'appeler l'article 1).

Le Vice-Président: Oui.

M. Lavoie: Avec la permission du leader du gouvernement, j'aurais une question de règlement à soulever...

Le Vice-Président: Oui.

M. Lavoie: ... qui se terminerait par une directive ou une décision de votre part, M. le Président.

Le Vice-Président: Oui, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Avant le déjeuner aujourd'hui, nous discutions du projet de loi no... Je ne me rappelle pas le numéro, c'était sur la taxe de vente.

Le Vice-Président: Le projet de loi no 61.

Projet de loi no 61 (suite)

M. Lavoie: Le projet de loi no 61. Je n'irai pas dans les détails de ce qui s'est passé durant les 20 dernières minutes, mais tenons pour acquis que le député de Vaudreuil-Soulanges, qui occupait le fauteuil à ce moment-là, a accordé la parole au leader parlementaire du gouvernement sur la deuxième lecture du projet de loi no 61, prenant en délibéré une motion d'amendement du député de Gatineau. Il était 12 h 45 environ et le leader du gouvernement, après avoir obtenu la parole, a demandé l'ajournement du débat sur la deuxième lecture ou sur la motion d'amendement dans le cas où elle serait acceptée.

J'ai demandé un vote enregistré sur cette question. En vertu des règlements sessionnels que nous avons adoptés il n'y a pas tellement longtemps, il est de la liberté du leader du gouvernement de demander à la présidence de remettre ce vote enregistré à plus tard dans la journée, durant la même séance, ou au plus tard le lendemain avant d'entreprendre les affaires du jour. Je crois que c'est la première fois que ce nouveau règlement sessionnel est éprouvé; il appellera une décision de votre part qui fera jurisprudence. Je dis que, tant que cette motion d'ajournement du débat n'est pas décidée, d'une manière positive ou négative, du fait que la décision est remise à demain — l'objet de la motion, c'est l'ajournement du débat — la Chambre ne s'étant pas prononcée ni d'une manière positive ni d'une manière négative, il n'y a pas d'ajournement du débat. Cette décision est remise à demain. Etant donné qu'en vertu de notre règlement actuel les travaux sont suspendus à 13 heures et doivent reprendre à 15 heures, s'il n'y a pas ajournement du débat cela voudrait dire que le député de Maisonneuve devra prendre la parole et faire son intervention sur la deuxième lecture de la loi 61.

A ce moment-là il pourra demander l'ajournement du débat, mais pour qu'il y ait ajournement effectif du débat, il faut que la Chambre se prononce. On sait que dans notre tradition parlementaire, il n'y a pas d'autre façon pour la Chambre de se prononcer sauf à des cas de consentement unanime, c'est par des motions. Pour décider d'une motion, il faut que la Chambre s'exprime d'une manière positive ou négative. C'est sûr qu'on n'a pas le droit de présumer — même si le leader du gouvernement dit qu'on est majoritaire et demain, la décision de la Chambre va être majoritaire parce qu'on est majoritaire en Chambre — du résultat du vote; autrement, avec un tel précédent, s'il y avait un vote retardé sur la deuxième lecture, remis au lendemain, avec ce principe on pourrait commencer l'étude en commission, en présumant que demain le gouvernement ou la majorité va se prononcer.

Je termine en disant que la Chambre n'a pas décidé cette motion, elle est toujours en suspens tant qu'elle ne se prononcera pas demain et si la Chambre ne s'est pas prononcée, le débat n'est pas ajourné.

Si votre décision est dans un sens contraire, M. le Président, je vais vous demander si cette motion est adoptée. Est-ce qu'elle a été adoptée? C'est non, parce que j'ai demandé un vote enregistré. Et si votre décision est dans ce sens, je vais vous demander le résultat du vote, M. le Président, pour être sûr que c'est dans un sens positif que cette motion a été acceptée.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement sur la question de règlement.

M. Burns: Oui, dans un but de faciliter les travaux de la Chambre, parce que ce n'est pas mon rôle à moi de compliquer les travaux de la Chambre, mon rôle à moi c'est plutôt d'essayer de les faciliter, si on veut tenir immédiatement le vote enregistré, je suis d'accord qu'il ait lieu immédiatement. Je retire ma demande à l'effet que l'enregistrement du vote ait lieu demain.

Le Vice-Président: Si vous permettez, oui, M. le député...

M. Pagé: M. le Président, j'ai une directive à vous demander moi aussi.

Le Vice-Président: Attendez un peu, il y en a déjà une là. Enfin, je vais écouter quand même.

M. Pagé: II semble y avoir consentement sur la première.

Le Vice-Président: Je vais plutôt me prononcer sur la règle d'anticipation, n'est-ce pas, M. le député de Laval?

M. Pagé: M. le Président, j'aimerais que vous m'informiez des dispositions que la présidence entend prendre en ce qui regarde la personne ou le parlementaire qui aura le droit d'intervenir lorsque nous reprendrons le débat sur ce projet de loi. On se rappellera, M. le Président...

M. Burns: Encore une fois, pour aider les travaux de la Chambre, je voudrais céder mon droit de parole au député de Portneuf.

M. Pagé: Ce n'est pas à vous, c'est à moi. M. Burns: Non, non, mais...

M. Pagé: Ce n'est pas à vous, c'était à moi, je m'excuse, je m'apprêtais à le démontrer.

M. Burns: ... la présidence m'avait reconnu. Si vous voulez...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Sur les deux questions, les membres de cette Assemblée m'ont beaucoup aidé, je ne suis pas obligé d'invoquer tous les auteurs. Je constate que, d'une part, en vertu de l'article 85, M. le leader parlementaire du gouvernement a retiré sa motion de ce matin et que nous devons procéder immédiatement au vote enregistré si on le désire. A la demande du député de Portneuf, il faudrait souligner que je ne suis pas une Cour d'appel.

J'ai déjà mentionné, il y a un an, que je ne suis pas et je ne serai jamais un juge de la Cour suprême. Cela a été interprété de différentes façons. Je voudrais simplement dire, pour activer les travaux de cette Assemblée, que je reconnaîtrai M. le député de Portneuf lorsque reprendra le débat sur la question qui était devant cette Assemblée ce matin.

M. Lavoie: Dans ce cas, c'est le député de Portneuf qui demande l'ajournement du débat.

Le Vice-Président: D'accord. Je reconnais, pour les fins d'écritures... Oui, M. le député de Portneuf?

M. Pagé: Si vous me permettez, une dernière question.

Une Voix: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président: Je peux en prendre, mais un à la fois.

M. Pagé: Est-ce que vous me reconnaissez à la suite du consentement accordé par le leader du gouvernement ou si vous me donnez la parole à la suite d'une lecture du journal des Débats, à la page 6820. où il apparaît hors de tout doute que c'est moi qui avais la parole et non pas le leader du gouvernement? Parfait, on se comprend.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf, j'ai pris cette précaution, j'ai la transcription du journal des Débats de cet avant-midi. Lorsque cet article sera appelé, je vous reconnaîtrai comme étant celui qui a demandé l'ajournement du débat.

M. Gratton: Sur la même question, M. le Président.

M. Burns: ... on l'aime.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Vous savez sans doute que c'est moi qui ai formulé la motion d'amendement qui a été prise en délibéré quant à sa recevabilité.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Allez!

M. Gratton: Ai-je toute l'attention du leader du gouvernement, M. le Président? J'ai fait cette motion d'amendement, M. le Président, dont la recevabilité a été contestée pendant quelque 45 minutes, mais je voudrais attirer votre attention au ruban 6824, à la page 2, alors que le vice-président, député de Vaudreuil-Soulanges, a indiqué: "Quant à M. le député de Gatineau, il a terminé son intervention; j'allais lui rappeler qu'il devait conclure; il devait terminer à 12 h 31 et il avait déjà terminé."

Ma question, M. le Président, provient du fait qu'en vérifiant le journal des Débats j'ai constaté qu'effectivement je n'ai pu terminer plus tard que 12 h 25, et c'est le ruban — je ne me souviens pas trop de quel numéro — 6820. On s'aperçoit qu'effectivement c'est le député de Portneuf qui venait d'être reconnu après que j'avais formulé ma motion d'amendement.

Je demande une directive, M. le Président. Compte tenu que j'ai fait une motion d'amendement dont la recevabilité n'a pas encore été jugée, compte tenu qu'il me restait quelque cinq minutes à parler sur la motion de fond de deuxième lecture, advenant le cas où la maison d'amendement serait jugée irrecevable — et je ne demande pas qu'on en décide présentement — à ce moment-là il me semble que c'est à moi que reviendrait la parole pour que je puisse épuiser les cinq minutes de droit de parole qu'il me restait en deuxième lecture.

Je ne vous demande pas de statuer tout de suite que ce sera le cas, mais je voudrais qu'on y pense du côté de la présidence.

Le Vice-Président: Non seulement on y pensera, mais je rappellerai à M. le député de Gatineau un usage, puis-je dire, immémorial en cette Chambre, c'est que, lorsqu'un député termine son exposé par une motion, l'on admet généralement en toute saine logique qu'il a terminé ses remar-

ques sur la motion principale et qu'il y a une motion d'amendement.

Donc nous passons à un nouveau chapitre qui est la motion d'amendement. Cependant, M. le député de Gatineau, votre question est posée de façon tellement gentille que je ne me permettrai pas cet après-midi de rendre immédiatement une directive qui vous brimerait dans vos droits. Je vous dis simplement que je retiens votre question. Je ne la prends pas en délibéré. Je la considère comme une question hypothétique. Quand nous arriverons à ce pont, comme disent les Anglais, nous allons le franchir et alors la décision sera rendue. Est-ce que cela vous convient?

M. Gratton: Certainement, M. le Président, et puis-je vous féliciter pour ce jugement de Salomon?

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais d'appeler les députés pour le vote.

Le Vice-Président: Qu'on appelle les députés.

Vote sur la motion d'ajournement du débat

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, du consentement de cette Chambre, je mets aux voix cette motion d'ajournement du débat sur le projet de loi 61.

M. Lavoie: Proposée par qui?

Le Vice-Président: Par le leader parlementaire du gouvernement. Que celles et ceux qui sont en faveur de cette motion daignent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Burns, Bédard, Laurin, Couture, Bérubé, O'Neill, Mme Payette, MM. Proulx, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Grégoire, Bertrand, Godin, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Gendron, Mercier, La-berge, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Bordeleau, Boucher, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Jolivet.

Le Vice-Président: Contre la motion?

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Vaillancourt (Orford), Lalonde, Forget, Mailloux, Goldbloom, Saindon, Saint-Germain, Lamontagne, Giasson, Blank, Caron, O'Gallagher, Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Samson, Roy.

Le Vice-Président: Abstentions? A l'ordre, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 43 — Contre: 32 — Abstentions: 0

Le Vice-Président: Cette motion est adoptée. A l'ordre, s'il vous plaît. Bon.

M. Burns: Du moment que je gagne, cela ne me dérange pas.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, s'il vous plaît! La décision est rendue par cette Assemblée.

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais maintenant d'appeler l'article 1.

Motion de clôture de l'étude

en commission du projet

de loi no 67

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement fait motion: Que conformément à l'article 156 du règlement, le rapport de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières sur l'étude après la deuxième lecture du projet de loi no 67, Loi sur l'assurance automobile, soit déposé à l'Assemblée avant les affaires du jour, le 16 décembre 1977".

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Roy: M. le Président, est-ce que je pourrais vous demander une directive?

Le Vice-Président: Oui, un instant. M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Comme les membres de la commission parlementaire chargés d'étudier ce projet de loi ont reçu un mandat de l'Assemblée de discuter ce projet de loi en commission parlementaire et que pendant ce temps, on impose une motion... c'est-à-dire, on propose une motion à l'Assemblée nationale — je ne dirai pas on impose — pour limiter le mandat de ceux qui ont reçu un mandat effectivement de travailler en commission parlementaire, ma question est la suivante: N'y aurait-il pas lieu, ne serait-il pas pertinent de suspendre la commission parlementaire pour cet après-midi de façon que les membres de la commission parlementaire puissent être à l'Assemblée nationale et être en mesure de rapporter un peu à l'Assemblée nationale les objections ou les raisons qu'ils pourraient manifester à l'encontre...

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, c'est une très bonne tactique ou stratégie, mais malheureusement, selon nos règles parlementaires, je dois, d'une part, rappeler que je ne puis anticiper le résultat du vote sur la motion de M. le leader parlementaire du gouvernement. Deuxièmement, je ne puis aller contre la motion qui a

été adoptée ce matin à savoir que cette commission siège. Troisièmement, je dois rappeler les événements encore tout récents indiquant que certaines commissions siégeant se sont vues interrompre leurs travaux à la suite d'une motion exactement en vertu de l'article 156, alinéa 2.

Ce n'est donc pas un précédent. Malgré tout le désir que j'aurais de vous satisfaire, je dois vous rendre comme directive que je ne puis accéder à votre demande et que la commission doit commencer à siéger et que nous devons débattre la motion.

M. Lavoie: M. le Président, sur cette même question, très brièvement.

Le Vice-Président: Oui, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: J'abonde dans le sens du député de Beauce-Sud. D'ailleurs, vous qui êtes notaire, qui connaissez très bien votre Code civil et tout, ne trouvez-vous pas normal que, pendant qu'on met fin au mandat, les mandataires puissent discuter avec le mandant pourquoi on met fin à ce mandat? Est-ce que vous accepteriez une motion — étant donné qu'il y a eu une décision de la Chambre ce matin demandant à cette commission de siéger — de l'Assemblée pour suspendre cet ordre de la Chambre? Si le député de Beauce-Sud voulait faire une motion pour que l'Assemblée suspende les travaux de la commission pour cet après-midi, pour permettre justement aux personnes qui font partie de cette commission d'au moins intervenir durant l'après-midi, quitte à ce qu'elle puisse continuer ses travaux ce soir, est-ce qu'il y aurait consentement? Je sollicite le consentement du leader parlementaire du gouvernement; s'il n'y a pas de tel consentement, je crois qu'une motion à cet effet serait bienvenue. La Chambre pourrait en décider.

M. Brochu: M. le Président, sur cette question, l'Assemblée étant maîtresse de ses délibérations elle peut prendre des décisions. J'invoque à ce stade-ci non pas le règlement comme tel, mais peut-être la règle de bon sens selon laquelle nos collègues qui sont responsables de cette question sur la Loi sur l'assurance automobile en commission parlementaire puissent être présents ici pour discuter de cette motion qui mettra fin éventuellement aux travaux de cette même commission parlementaire. Je demanderais un consentement unanime pour ne pas faire siéger cette commission parlementaire pendant nos délibérations ici. Est-ce qu'on ne pourrait pas procéder de cette façon en demandant simplement le consentement unanime de la part du leader du gouvernement et de la part...

M. Levesque (Bonaventure): II y a deux commissions qui siègent.

M. Brochu: II y a déjà deux commissions qui siègent.

Le Vice-Président: Si vous me permettez... M. Burns: ... Chambre.

Le Vice-Président: J'en suis rendu à trois questions devant moi. D'abord est-ce que l'on peut modifier un ordre de la Chambre au cours d'une même séance? Deuxièmement, est-ce qu'il y aurait consentement, ce serait plus facile, pour que les gens qui sont à la commission reviennent à cette Assemblée? Troisièmement, c'est la question de M. le député de Beauce-Sud qui a été reprise par M. le député de Laval, est-ce qu'il est normal que la commission siège pendant que nous débattons une motion de clôture?

A la troisième question, je réponds oui, cela s'est fait fréquemment. A la deuxième question, ce n'est pas à moi de répondre, je sais qu'à l'Assemblée cela s'est fait fréquemment. Je ne sais pas ce qui se passe en commission, mais je me souviens fort bien, s'il vous plaît! d'avoir présidé à une commission — M. le député de Marguerite-Bourgeoys le sait — où pendant trois jours, ou au moins toute une journée, nous avons siégé avec cette motion au-dessus de notre tête. Je n'ai pas à juger.

A la troisième question, c'est oui. A la deuxième question, cela appartient à la Chambre. Quant à la première question, je demanderais en vertu de quel article l'on ferait motion.

M. Roy: M. le Président, l'invitation qui a été faite par le leader parlementaire de l'Opposition, je pense que je ne peux pas la faire ici à l'Assemblée nationale, malgré que n'importe quel membre de la commission puisse la faire en commission parlementaire, en vertu de l'article 157 du règlement.

M. le Président, pour éviter de la procédure ou de la procédurite, ce qui est toujours désagréable, je n'aimerais pas qu'on nous place dans l'obligation, immédiatement au début des travaux de la commission parlementaire, de présenter une telle motion — parce qu'elle sera sûrement présentée — pour qu'on puisse être à l'Assemblée nationale et discuter de ce qui entoure la motion de guillotine qu'on nous présente. Nous sommes concernés comme membres de la commission parlementaire.

Solliciter le gros bon sens, un consentement unanime de la Chambre, serait tout simplement normal dans les circonstances. Je serais même prêt à protéger les arrières, les à-côtés et les avants du leader du gouvernement en disant qu'on est prêt à accepter que ce ne soit pas considéré comme étant un précédent.

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, je vous remercie. Vous avez raison d'invoquer l'article 157, mais cet article, à l'alinéa 2 plus particulièrement, ne peut être invoqué qu'en commission parlementaire et non pas dans cette Assemblée.

Je demande, pour satisfaire les requêtes du député de Laval, du leader parlementaire de l'Op-

position officielle et du député de Beauce-Sud, s'il y a consentement pour que l'ordre de la Chambre soit rescindé.

M. Lavoie: Oui. M. Burns: Non. Des Voix: Oh!

Le Vice-Président: Vous avez la réponse. M. le leader parlementaire du gouvernement, j'ai appelé l'article 1.

M. Grenier: Ils se font étouffer et ils ne savent pas par qui, c'est étrange!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Burns: Comme je l'ai mentionné à l'occasion d'une autre motion, ce n'est jamais — mon collègue le chef de l'Opposition est sûrement de mon avis à ce sujet — facile pour le leader du gouvernement d'amener une motion de clôture. Appelons-la par son nom et ne nous gênons pas de l'appeler comme telle. Je n'ai pas l'intention de vous faire brailler. J'ai l'intention, cependant, de faire fonctionner normalement les travaux de la Chambre et de permettre à un gouvernement qui a un certain nombre de politiques pour lesquelles il a été élu de les appliquer dans des délais normaux. C'est ce que ça veut dire!

M. Lavoie: 41% des votes!

M. Marchand: 41% des votes pour faire la séparation du Québec.

M. Burns: C'est pourquoi...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre!

M. le leader parlementaire, à l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs les députés, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous avons eu aujourd'hui suffisamment de problèmes, et nous devons terminer cette journée à minuit. Tellement peu, si vous voulez, mais enfin, certains, sinon des problèmes certains. Je vous demanderais, s'il vous plaît... Est-ce qu'on pourrait cesser les amitiés particulières en cette Chambre pour permettre à M. le leader parlementaire d'exposer ses motifs en vertu de l'article 156.2?

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Nous voulons assurer le ministre leader parlementaire du gouvernement de notre collaboration la plus positive relativement à l'attention que nous porterons au discours qu'il veut prononcer, mais il va falloir ce- pendant que vous admettiez, M. le Président, parce que je sais que vous êtes humain, qu'aux toutes premières paroles du leader du gouvernement il y a eu ce genre de réactions qui étaient tout à fait normales et naturelles de la part de l'Opposition officielle et des autres partis de l'Opposition devant une attitude prise par le leader du gouvernement.

M. Burns: Ce n'est pas une question de règlement, c'est une question...

M. Levesque (Bonaventure): ... alors qu'il déchirait ses vêtements, lui, du moment qu'il y avait une motion de ce genre.

Des Voix: A l'ordre! A l'ordre!

M. Levesque (Bonaventure): C'est la deuxième fois...

Le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle, ne quittez pas. M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle a mentionné que j'étais suffisamment humain pour comprendre. Non, je suis suffisamment parlementaire pour comprendre la réaction et je demanderais qu'elle cesse immédiatement pour que l'on puisse entendre M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, si on ne m'interrompt pas, cela va être très court. Remarquez que c'est peut-être, parce qu'on veut faire perdre le temps de la Chambre de l'autre côté, une invitation à me faire interrompre en disant cela, mais je vous dis que je vais, à compter de maintenant, résister à toute tentative de la part de l'Opposition de me faire allonger mon intervention.

Je pense bien qu'entre personnes qui comprennent la situation on sait fort bien que le gouvernement a décidé... C'est parfaitement son droit et, s'il se trompe — je l'ai dit d'ailleurs, M. le Président, lorsque nous avons proposé une procédure semblable relativement au projet de loi no 101, la Charte de la langue française — c'est parfaitement le droit du gouvernement de se tromper. Mais c'est parfaitement le droit, d'autre part, de ce gouvernement de décider de mettre en application un certain nombre de ses politiques et, entre autres, le projet de loi sur l'assurance automobile est une des promesses électorales de ce gouvernement.

M. Lalonde: Cela coûte cher.

Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, je m'excuse au nom des collègues de cette Assemblée. Je vous en prie, vous aurez le droit de parole, chacun votre tour, en vertu de l'article 94. Attendez votre tour. M. le leader parlementaire, je m'excuse vraiment de vous interrompre, mais je ne pense pas que vous puissiez vous exprimer dans des conditions semblables.

M. Burns: J'attendrai, M. le Président, quand on se mettra à hurler de l'autre côté; alors, vous n'aurez pas besoin de vous lever. M. le Président, je dis donc qu'en saine démocratie il est parfaitement normal, pour un gouvernement qui a été élu selon un certain nombre de promesses électorales — je le dis de façon non péjorative, mais plutôt de façon objective — de dire, maintenant que nous sommes au pouvoir: Voici une de nos réalisations. Nous avons promis de tenter de trouver une solution à l'assurance automobile, la voici. Ce n'est peut-être pas la meilleure, en ce qui concerne l'ensemble de... Ce n'est peut-être pas la meilleure en ce qui concerne... Voulez-vous continuer à faire vos singeries? Ce n'est peut-être pas la meilleure en ce qui concerne... certaines options, mais, en ce qui nous concerne, c'est la meilleure, M. le Président.

Il nous en manque deux. En ce qui nous concerne, M. le Président, c'est la meilleure. Cette solution que nous considérons la meilleure, nous croyons qu'elle doit être adoptée dans des délais normaux. Il y a beaucoup de gens qui semblent vouloir me dire: Ah! vous bousculez le projet de loi, vous avez décidé de le faire adopter dans des délais qui sont absolument inacceptables. M. le Président, j'ai un certain nombre de statistiques que je veux livrer à l'attention de nos amis à l'Assemblée nationale. Je tiens à dire au départ — c'est la raison même de cette motion de clôture que nous soumettons aujourd'hui en vertu de l'article 156 — que ce projet de loi no 67 doit être mis en vigueur dans les plus brefs délais possible, pour la simple raison que le projet doit être en application au plus tard le 1er mars 1978. Deuxièmement, il ne serait pas normal que les consommateurs — parce que ce sont des consommateurs, ne nous trompons pas — visés par le projet de loi ne sachent pas, dès le début de l'année 1978, quel sera le coût des plaques, quel sera le coût qui va être ajouté à l'achat de leur permis pour payer, justement, l'application de ce projet d'assurance.

Je voudrais, M. le Président, vous me permettrez, quelques instants, simplement pour soutenir les raisons pour lesquelles je présente aujourd'hui cette motion de clôture. Je voudrais vous donner simplement quelques statistiques que j'ai rapidement réunies et qui nous disent ceci: Les travaux en commission, après la première lecture, ont commencé le 27 septembre 1977. Je vous prie, M. le Président, de noter que nous sommes le 13 décembre 1977. La fin des auditions publiques, après la première lecture, a eu lieu le 27 octobre 1977. Il y a eu, relativement à ces auditions, un nombre assez considérable de séances. Je vous cite les dates, M. le Président: le 27 septembre, les 11, 12, 13, 14, 19, 20, 25, 26 et 27 octobre 1977, soit dix jours d'audition.

Il y a eu 23 organismes ou individus qui sont venus, soit des organismes ou des individus, mais il y a eu 23 interventions à ce niveau. Le total des heures siégées à ce stade des procédures: 45 heures et neuf minutes.

M. Lalonde: La blague.

M. Burns: C'est tout. Ce n'est rien, mais en termes parlementaires, 45 heures et neuf minutes c'est énorme, M. le Président. Je vous prends à témoin, vous qui avez cette expérience parlementaire.

Par la suite, nous avons commencé en commission, après la deuxième lecture, le 16 novembre 1977. Je vous rappelle que nous sommes le 13 décembre 1977. Il y a eu des séances les 16, 22, 29, 30 novembre 1977, les 1er, 6, 7, 8, 9, 12 décembre 1977, soit un total encore une fois de 10 jours. On pourrait ajouter la séance de ce matin qui a duré à peu près une heure et demie, pour un total de 35 heures et huit minutes jusqu'à maintenant. On ajoute l'heure et demie de ce matin, on peut ajouter également, probablement les quatre ou cinq heures qui vont continuer à s'écouler aujourd'hui, probablement les quatre ou cinq heures demain et probablement les quatre ou cinq heures jeudi. On peut s'imaginer qu'on est rendu à environ 45 heures de débat sur un projet de loi qui est clairement et carrément, dans l'opinion de tout le monde, une politique gouvernementale. Un gouvernement responsable n'a pas le droit, M. le Président, de dire tout simplement: L'Opposition n'aime pas cela, alors on va se plier. On ne se pliera pas!

M. Blank: C'est la population, non pas l'Opposition.

M. Burns: La population nous dira que nous avons tort lors des prochaines élections si nous avons, comme effectivement elle vous l'a dit, à vous, messieurs les membres de l'Opposition officielle...

M. Gratton: Si elle pouvait donc le dire avant!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader parlementaire du gouvernement, je comprends que vous provoquez... M. le député de Saint-Louis, je puis vous inviter à me remplacer ici. Vous le faites si bien. Cela vous empêchera d'interrompre l'opinant.

M. Burns: M. le Président, je veux bien croire que c'est aujourd'hui le 13, mais ne nous souhaitez pas de tel malheur. Cela n'a pas de bon sens.

M. Blank: A l'ordre!

M. Burns: M. le Président, je suis prêt à remettre à nos amis d'en face une copie de ces dates, que j'ai fait préparer. Vous les avez déjà. On vous les a remis. Pas si mal.

M. Lamontagne: On les a. On ne les interprète pas de la même façon...

M. Burns: M. le Président, je dis donc qu'à ce stade-ci il est normal que nous mettions fin à nos travaux en commission parlementaire dans un délai normal. Mes dernières informations, du moins celles qui remontent à hier soir, je n'ai pas le rapport de ce matin, nous amènent à croire qu'il y

avait environ une dizaine d'articles qui étaient adoptés, do sorte qu'il est normal de croire que dans un délai raisonnable il ne sera pas possible de faire adopter le projet de loi no 67.

D'autre part, il est normal de croire que le gouvernement, comme je le disais tout à l'heure, avait décidé de faire siéger cette commission le plus facilement possible.

D'ailleurs, vous n'avez qu'à regarder les dates des séances de cette commission. Elle a siégé en priorité par rapport à beaucoup d'autres commissions. Je le dis en tant que leader parlementaire parce que j'ai été l'objet — si le chef de l'Opposition était ici, il pourrait vous le confirmer — d'énormes pressions d'autres ministres qui voulaient voir leur projet de loi voté. J'ai été obligé d'accorder la priorité au projet de loi no 67. Pour l'ensemble de nos travaux et pour l'adoption de ce projet de loi, à cause des raisons que je viens de mentionner, à cause des raisons que le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, à de nombreuses reprises, a mentionnées, il est important que nous adoptions dès aujourd'hui cette motion que je propose à la suite d'une tentative d'entente telle que prévue en vertu de l'article 156, premier alinéa, dont j'ai fait rapport jeudi dernier comme étant infructueuse. Il m'apparaît maintenant, M. le Président, bien malheureusement, que ce soit la seule solution pour en arriver à quelque chose de positif relativement à l'assurance automobile. Encore une fois, je le dis, il est dans l'intention du gouvernement de faire adopter, dans les meilleurs délais possible, ce projet de loi de sorte qu'il nous apparaît qu'il faut mettre un terme aux travaux de la commission pour qu'elle fasse rapport à la Chambre dès le 16 décembre, c'est-à-dire dès vendredi.

Le Vice-Président: M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Burns: Je n'ai pas besoin d'applaudissements car je sais où je m'en vais.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! La parole est à M. le député de Jacques-Cartier.

M. Noël Saint-Germain

M. Saint-Germain: M. le Président, l'Opposition officielle est la première à admettre que, dans un système démocratique comme le nôtre, le gouvernement a le droit de légiférer, d'établir ses programmes, ses lois et de voir à ce que ses lois soient proprement étudiées par l'Assemblée nationale et votées pour qu'elles deviennent effectives. Il y a déjà longtemps que l'on sait cela, M. le Président.

Mais pour que le Parlement puisse travailler d'une façon logique, selon ses traditions et selon ses règlements, il faut nécessairement que les travaux de la Chambre soient organisés d'une façon logique selon nos traditions et avec une certaine coordination qui permette à chacun des membres de cette Assemblée de prendre part au débat s'il le désire. Ce membre, pour prendre part au débat d'une façon positive, doit avoir les études et les documents pertinents. Il appartenait donc, M. le Président, au leader parlementaire du gouvernement, en coopération avec le ministre responsable de cette loi, de coordonner les travaux de façon que les membres de cette Assemblée et l'Opposition libérale en particulier...

M. Blank: Question de règlement. Sur une motion vraiment importante, comme le dit le leader du gouvernement, je voudrais noter qu'il y a seulement sept députés ministériels. Il n'y a pas quorum.

Le Président suppléant (M. Michaud): Nous allons vérifier le quorum.

Nous avons quorum, monsieur, continuez.

M. Goulet: Nous avons maintenant quorum. M. Blank: Nous avons maintenant quorum.

M. Saint-Germain: Je disais, M. le Président, que le leader parlementaire devait coordonner et planifier les travaux de la Chambre de façon que tous les membres de cette Assemblée puissent travailler efficacement.

J'ai écouté avec attention les statistiques énumérées par le leader parlementaire du gouvernement. Personnellement, je ne vous donnerai pas des statistiques, mais des faits tels qu'on les a vécus et tels qu'ils sont inscrits au journal des Débats.

Premièrement, il y a eu, en date du 15 avril de cette année, présentation du livre bleu.

Mais lors de la présentation du livre bleu, M. le Président, n'y était attaché aucun document, aucune annexe qui pouvait permettre à l'Opposition de comprendre et de savoir comment le gouvernement était arrivé, comment le ministre était arrivé à établir les chiffres qui y étaient contenus. Lorsqu'on parle d'assurance, comment voulez-vous étudier d'une façon logique, d'une façon positive une police d'assurance quand vous ne connaissez ni les coûts que la police comporte, ni la prime que vous payez, ni les coûts d'indemnisation.

Les assurances sont basées sur des études actuarielles, tous les assureurs savent cela, tous les citoyens savent cela. Il est impossible d'étudier une police d'assurance — je fais ici une relation entre la loi et une police d'assurance — si on n'a pas les études actuarielles et les hypothèses qui sous-tendent cette police. Impossibilité pour les assureurs de mettre une telle police sur le marché, comme impossibilité pour les gens de savoir réellement ce qu'ils achètent, s'ils veulent bien acheter cette police d'assurance.

Comme je le disais bien, c'était le livre bleu où les coûts d'indemnisation — quel que soit le genre d'incapacité — et les coûts de la prime n'étaient pas

définis ou, du moins, prouvés par des statistiques ou des hypothèses qu'on devait posséder absolument dans l'Opposition pour travailler d'une façon logique. Dès lors, je me souviens très bien qu'à la commission parlementaire qui étudiait les crédits du ministère, j'ai essayé en vain, pendant des heures, d'argumenter afin que le ministre nous remette les explications et les documents relatifs à ce livre bleu. Nous ne les avons jamais eus.

Deuxième fait qui est arrivé: la tournée provinciale du ministre qui s'est passée au début de mai. On sait pertinemment que cette tournée provinciale a été beaucoup plus une tournée de vente à haute pression qu'elle n'a servi aux citoyens pour exprimer leur opinion. Cela a été beaucoup plus un monologue qu'un dialogue. Cela a été une tournée de vente comme on en a rarement vu dans le Québec. Le ministre, à un moment donné, s'est fait courtier d'assurances pour vendre une police unique dans le Québec. C'est un courtier, à mon avis, bien inefficace, parce qu'il ne faut tout de même pas prendre les Québécois pour des gens qui ne savent pas lire entre les lignes. On s'aperçoit vite, lorsque quelqu'un a une marchandise à vendre, qu'il est confiant que cette marchandise a une valeur, ou lorsque ce même vendeur veut vendre quelque chose sous pression, qu'il faut que cela se fasse vite parce qu'il ne faut pas que les gens comprennent trop la situation avant de signer le contrat, et on a vu tous...

M. Jolivet: Tous les gens.

M. Saint-Germain: ... les gens qui oeuvrent dans le Québec au niveau de l'assurance, que ce soient les assureurs, les avocats, les experts en sinistres, les courtiers, aller faire leurs représentations. On a vu comment les journaux ont décrit l'accueil que le ministre a fait à tous ces gens d'expérience qui oeuvrent dans le milieu aujourd'hui, on a vu aussi l'accueil que le ministre a fait à tous les citoyens qui ne disaient pas comme elle. Pour être entendu et écouté, il fallait nécessairement être du même avis ou, du moins, pratiquemment. De plus, des méchantes langues ont dit que la grande majorité des invités étaient sélectionnés.

Je laisse à chacun la liberté d'estimer jusqu'à quel point cette tournée provinciale du ministre a réellement aidé la population à comprendre cette loi. C'est le 19 août de cette année qu'est arrivé le dépôt, en Chambre, du projet de loi, c'est-à-dire la première lecture. L'audition des mémoires a commencé après les vacances d'été, c'est-à-dire le 27 septembre.

Nous avons étudié et écouté les représentations qu'on a eues. Il s'agissait de mémoires très bien structurés, très bien étudiés, très bien présentés. Ces mémoires ont réellement aidé beaucoup les députés membres de la commission et tous ceux en cette Chambre qui étaient intéressés à réellement connaître et comprendre le projet de loi qu'on nous présentait. Il n'y a aucun doute qu'à travers le Parlement la population a appris aussi beaucoup relativement à ce projet de loi. Après avoir étudié les mémoires, la deuxième lecture nous est arrivée le 28 octobre. On a vu au feuilleton apparaître une motion pour que ce projet de loi soit étudié article par article au niveau de la commission et cet article est apparu au feuilleton le 10 novembre 1977. C'est la date où la motion est apparue au feuilleton.

Les séances de la commission ont commencé le 15 novembre, un mardi, M. le Président. Je vous avoue bien humblement, et je ne le regrette pas, que nous avions décidé de ne pas commencer l'étude de cette loi article par article avant que le ministre nous ait donné les documents et les études pertinentes, documents et études que nous avions exigés d'elle pendant des semaines et je ne sais pas dans combien de déclarations. On nous a présenté, à un moment donné, un document que j'ai devant moi ici, en date du mois d'avril 1977. Il faut croire que ce document, qui date du mois d'avril, était le document que possédait le ministère ou le ministre dans le temps lorsqu'elle est partie en tournée.

Ce document en date du mois d'avril nous a été remis à la fin d'octobre ou au commencement de novembre, si je ne m'abuse. On a trouvé dans ce document des généralités telles qu'après avoir demandé à nos conseillers, à certains actuaires de nous faire une étude de ce document ils nous ont dit qu'il y avait tellement de généralités, que ce document était tellement peu structuré qu'il était bien difficile d'avoir une image brève des coûts des indemnisations aussi bien que des primes qui allaient être inhérentes à la loi.

Nous supposons, M. le Président, que c'était la seule étude que le ministre avait lors de sa tournée à travers le Québec. Si c'était cela, c'était bien peu pour soutenir une loi aussi importante. De toute façon, les doutes qu'on avait relativement à ce document ont été prouvés. Je vais vous expliquer de quelle façon. Ce document a été rédigé par les actuaires ou par l'actuaire du ministère. Après, on a fait appel a des actuaires de l'extérieur pour faire une nouvelle étude du projet de loi. Voilà que les actuaires de l'extérieur, qui sont responsables du document qu'on nous a remis par la suite, qui était, lui, beaucoup plus valable et beaucoup plus explicite, s'étaient simplement partiellement basés sur le premier document.

Nous avons vu là la confirmation du résultat des analyses qu'ont faites nos conseillers lorsqu'ils nous ont dit qu'il leur était impossible de voir clair dans la situation en basant leur étude exclusivement sur le premier document. Vous trouverez au niveau du journal des Débats, M. le Président, si vous voulez bien vérifier, la confirmation de ce que je vous dis dans les déclarations du ministre.

Comme je vous le disais, nous n'avons pas voulu commencer à étudier ce projet de loi article par article sans avoir ces documents. Le commencement des travaux s'est fait au niveau de la commission le 15 novembre. Ce n'est même pas un mois. Et le 15 novembre, nous avons siégé le soir, le mercredi nous avons siégé la journée et là se sont achevés les travaux de cette semaine-là.

Ces travaux se sont limités, pour l'Opposition, à exiger du ministre et à essayer de prouver au ministre qu'il nous était impossible d'aborder le premier article du projet de loi sans avoir les documents voulus.

Le ministre a accepté et, dans une déclaration solennelle à la commission, il nous a dit: Mardi prochain, vous aurez les documents. On a dit: Alléluia, entendu, on étudiera le premier article. Nous voilà rendus au mardi 22 novembre. Cela ne fait pas un siècle, on est rendu au mardi 22 novembre. Ce matin-là, les documents ne sont pas encore disponibles. Vous pourrez vérifier tout cela au journal des Débats, c'est écrit en toutes lettres. Inutile de vous dire que cette journée du mardi a été perdue et le gouvernement l'a compris je suppose, parce qu'on nous a ramenés à la commission, le 29 novembre. Alors, entre le 22 et le 29 novembre, il n'y a eu aucun travail qui s'est fait au niveau de la commission.

Entre-temps, on nous a remis ce document qui nous donnait des explications sur le coût du régime, sur le coût des indemnisations et les explications et les données qui s'imposaient au niveau de la tarification. Nous avons commencé nos travaux réguliers le mardi 29 novembre. C'est alors que nous avons commencé. Si on calcule que nous sommes aujourd'hui le 13, c'est le temps dont l'Opposition a disposé pour faire l'étude de ce projet de loi, article par article.

Le 29 novembre, nous avons travaillé le matin et le soir, c'était le mardi, le mercredi nous avons travaillé le matin, le 1er décembre nous avons travaillé le mardi soir, le 6 décembre le matin, le 7 décembre encore le matin du mercredi, le 8 décembre, la journée du jeudi et le 9 décembre nous avons travaillé le matin, hier et aujourd'hui, et nous étudions actuellement cet après-midi, l'article 12.

En plus, il faut que je vous fasse remarquer que les articles les plus importants du projet de loi étaient dans les premiers. Si vous prenez le projet de loi, vous trouverez aux articles 3, 4 et 5 surtout, réellement la matière qu'il y a dans le projet de loi, ce qu'il y a d'important. On établit là l'étatisation, on enlève là le droit de recours et on établit le principe du "no fault". Qu'on ait passé deux ou trois jours à étudier ces articles, cela me semble absolument normal pour une Opposition responsable. Entre cela, nous avons pu passer une journée en commission, soit le 6 décembre et c'est la seule journée pendant toute l'année où nous avons pu entrer en contact avec les actuaires et le président de la Régie de l'assurance automobile.

Ceci, non pas dans la soirée, mais le matin et l'après-midi. Durant cet après-midi, nous avons été obligés, selon le règlement, de donner un consentement au gouvernement pour que trois commissions puissent siéger. Tout ce que je vous dis est au journal des Débats.

Si le gouvernement nous donnait quinze jours de plus, je suis assuré qu'on pourrait pratiquement terminer l'étude du projet de loi pour la bonne raison que jusqu'à l'article 74, c'est là, au point de vue de l'Opposition, que sont les difficul- tés réelles. C'est surtout au début de la loi, comme je vous le disais tout à l'heure. Il ne faudrait tout de même pas penser que la moyenne de temps que nous avons mise pour l'étude de chaque article serait celle qui serait prise pour étudier, article par article, le reste du projet de loi. D'ailleurs, dans le premier article, il y avait toutes les définitions; il y en avait pratiquement une trentaine que nous avons dû étudier une par une. Certaines avaient une grande importance et nous avons pris un certain laps de temps.

Si le gouvernement, aujourd'hui, nous amène le bâillon, ce n'est certainement pas parce que l'Opposition a voulu bâillonner les travaux de la commission; c'est impossible, on n'a pu le faire dans le temps dont on a disposé. La raison, c'est une raison politique. Si on doit étudier ce projet de loi, et s'il faut qu'il soit terminé avant Noël, c'est une priorité du gouvernement. C'est une promesse électorale et le leader parlementaire ne s'est pas gêné pour le dire. Cela n'a rien à voir avec l'intérêt public. Que cette loi soit en vigueur un mois ou deux après, qu'est-ce que cela va changer, si on peut prendre ce mois pour bonifier cette loi qui a réellement besoin de l'être?

Il y a dans certains des articles des droits qui sont remis à la régie, des obligations remises à la régie avec une discrétion pour la régie. On est un peu estomaqué de voir jusqu'à quel point la régie va avoir une liberté d'action pour appliquer cette loi. Je vous ferai remarquer, en plus, que nous n'avons pas, à cette date, les règlements. Ce matin même le ministre a déclaré, à la commission, que les règlements n'étaient pas prêts. Une chose est évidente, on ne peut certainement pas appliquer cette loi si les règlements ne sont pas prêts. On pourrait au moins étudier cette loi pendant qu'on termine les règlements, cela me semble être absolument évident. Ce n'est certainement pas le ministre qui va établir les règlements, ce sont les fonctionnaires et ils seront approuvés par le ministre.

Pendant que les fonctionnaires travaillent dans leur bureau, pendant que le président de la régie voit à l'organisation interne de la régie, rien ne nous empêche, à la commission, de continuer tout bonnement nos travaux. Même si on nous met le bâillon et si la semaine prochaine tout est terminé au sujet de la loi, les règlements ne sont pas finis; qu'est-ce qu'on va faire? On va attendre que les règlements soient terminés. Réellement, c'est impardonnable qu'on ait obligé l'Opposition à étudier cette loi sans que les règlements soient déposés, pour les raisons que j'ai mentionnées, pour la liberté d'action qu'on donne à la régie dans ses décisions et tout ceci sans droit de recours pour les citoyens devant les tribunaux. Si on avait réellement voulu faire un "filibuster", on aurait pu faire exactement ce que le Parti québécois faisait lorsqu'il était dans l'Opposition, c'est-à-dire vous faire passer des semaines sur le premier article d'un projet de loi en disant: Nous ne continuons pas si nous n'avons pas les règlements. Dans cette loi, il est évident que la loi et les règlements font un et nous n'avons pas encore les rè-

glements d'une loi aussi complexe que le projet de loi no 67.

Il est regrettable qu'on mette le bâillon sur ce projet de loi.

Nous avons étudié, comme je vous le disais, douze articles du bill. On a même réussi à faire accepter certains amendements par le gouvernement. On a réussi ce matin, à mon avis, à faire accepter un amendement très important pour la protection des mineurs. Je suis assuré que les députés du gouvernement, comme le ministre, apprennent au fur et à mesure du développement des travaux ce que cette législation contient réellement. C'est un bill qui établit une régie d'Etat; c'est un bill qui établit un monopole, c'est un bill qui veut tout standardiser, qui rend les citoyens tout à fait anonymes. Il y a tellement de facteurs, d'impondérables là-dedans, qu'il est impossible de standardiser tout cela sans causer des préjudices graves à certains citoyens ou à certaines victimes. Impossible.

A chaque article, lorsqu'on s'y met et qu'on y pense, qu'on écoute les uns ou les autres prendre la parole sur ces articles, on découvre des choses qu'on n'avait pas encore découvertes à première vue et qu'on n'avait même pas découvertes après avoir étudié le projet de loi comme on l'a fait depuis des mois. Je suis assuré que le ministre a appris. Les députés, on n'en parle pas, eux en ont appris un voyage. Je me demande ce qui va arriver si on prend cette brique d'amendements. Je ne vous l'avais pas mentionné, cela ne fait pas une éternité qu'on a ces amendements-là, cela ne fait pas une éternité. Si on accepte en bloc tout ce qu'il y a là-dedans, il va y avoir des monstruosités qui vont apparaître et le gouvernement va être obligé de revenir devant la Chambre pour faire modifier des articles qui ont déjà été amendés.

C'est de l'irresponsabilité grave, M. le Président, et ce sont les citoyens du Québec qui vont en payer la note. Même au point de vue politique, quel est le tort que le gouvernement se ferait en remettant au début de janvier l'étude de ce bill en commission parlementaire? Mais qui est-ce qui leur en voudrait? Les citoyens ne verraient-ils pas cela comme un signe de sagesse, comme un signe de respect pour les institutions parlementaires? On accuse ce gouvernement d'être autoritaire et dictatorial. Il y aurait peut-être là un élément qui prouverait à la population qu'il est démocratique et qu'il respecte les institutions. On n'a pas besoin d'avoir peur de cela, cela ne se fera pas, assurément, mais il n'y a rien qui empêcherait le gouvernement de le faire. Pour quelles raisons ne siègerait-on pas au début de janvier là-dessus? Je suis bien prêt, moi, absolument bien prêt, et je suis certain que ce serait dans l'intérêt de la population et même du gouvernement de le faire.

On vous en voudra et vous vous en voudrez à vous-mêmes, quand cette législation sera loi et que, petit à petit, ressortiront les énormités qu'il y a là-dedans. Vous verrez que j'avais raison, que l'Opposition avait raison. Pensez pour un moment que, quelle que soit la philosophie des membres de l'Opposition, nous sommes unanimement contre la loi. Le Barreau est contre la loi, les assureurs sont contre la loi...

M. Burns: On s'en doutait.

M. Saint-Germain: Je ne répéterai pas les qualificatifs que votre ministre a donnés au Barreau, aux assureurs et aux courtiers, parce que faire des jugements globaux comme elle l'a fait, c'est indigne pour une personne en autorité. Vous rendrez des comptes à ces gens-là un jour parce que ce sont des citoyens du Québec à part entière. Ils vont voter un jour et ils vont avoir bien des moyens de vous rendre les humiliations que vous leur avez fait subir de façon injuste, absolument injuste.

La population, les sondages Gallup l'ont prouvé, est contre la loi. Même vos propres partisans sont contre la loi, parce que vos propres partisans, vous leur avez promis une étatisation globale. Votre projet de loi ne correspond même pas à vos promesses électorales. Vous aurez des comptes à rendre même à vos partisans, surtout les plus radicaux et les plus socialistes. Ils ne sont pas de bonne humeur, eux.

M. Burns: C'est effrayant. Ah! c'est effrayant cela.

M. Saint-Germain: Ils voudraient que ce soit l'étatisation totale et ils ne sont pas gênés pour venir en commission et vous le dire.

M. Burns: Bien oui!

M. Saint-Germain: Mais qui est-ce qui reste pour défendre votre projet de loi? Qui? Le ministre.

M. Burns: Le gouvernement au complet est solidaire de ce projet de loi. C'est pour cela qu'il présente sa motion.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Beauce-Sud, est-ce que vous voulez que je retienne ce temps sur celui où vous aurez à parler? M. le député de Jacques-Cartier, j'espère que ce sera dans l'ordre.

M. Burns: Une minute.

M. Saint-Germain: Sur ce projet de loi, vous vous entêtez. Vous voulez montrer que c'est vous autres, le patron, indépendamment de la démocratie, indépendamment des institutions parlementaires, indépendamment de l'Opposition, indépendamment des droits des courtiers, des assureurs indépendamment de la population. Vous allez payer pour. Faites-les vos petits dictateurs. Vous avez beau jeu. Nos institutions permettent même de le faire avec la motion que vous nous présentez. Vous paierez pour, mais, malheureusement, en même temps que vous paierez pour, la population paiera pour aussi.

M. Burns: Vous devriez voter pour alors. Depuis le temps que vous nous dites qu'on achève comme gouvernement, votez pour et ce sera réglé.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, à l'ordre! M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président. Si on veut jouer à cela, cela se joue à deux. Le leader du gouvernement le sait fort bien. Si le ministre n'est pas ici pour défendre son projet de loi, ce n'est pas à lui de le faire en empêchant mon collègue de faire son intervention.

Le Vice-Président: D'accord. M. le député de Joliette-Montcalm, s'il vous plaît! Il reste une minute à M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: C'est une loi, M. le Président, contre les pauvres. L'assisté social, le type qui est sur l'assurance-chômage, ils vont tous payer la même prime. Le gars qui gagne $18 000 par année, lui aussi va payer la même prime. Quand il va être indemnisé, il va avoir le double des autres, parfois plus que le double. Cela, c'est une loi sociale! A part cela, ceux qui ne sont pas pauvres, on veut les rendre pauvres, parce qu'on dit à $18 000 vous n'allez pas plus loin. On va vous donner 90% de $18 000 maximum, 90% net.

En plus de cela, on va vous enlever votre régime de rentes et votre pension de vieillesse parce que vous savez que, dans le Québec, si on a un peu de succès, il faut taxer ces gars-là. Ils n'ont pas droit à notre sympathie. C'est une loi antisociale. Je n'ai jamais vu, dans notre législation, des lois prétendument sociales qui faisaient payer au pauvre le même prix qu'à ceux qui sont plus fortunés et qui donnaient des revenus aux pauvres plus bas qu'à ceux qui sont plus riches. Je n'ai jamais vu cela.

M. le Président, j'aurais voulu aborder d'autres points de vue, mais puisque le temps...

M. Burns: II a dépassé son temps, M. le Président; cela se terminait à 16 h 49.

M. Saint-Germain: ... ne me permet pas, je laisserai volontiers à mes collègues le soin de prendre la parole.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! C'est sûr que M. le député devait finir à 16 h 49. Il ne faudrait pas prendre deux minutes pour dire qu'il a dépassé son temps d'une minute.

M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. Samson: M. le Président, je regrette énormément qu'encore une fois aujourd'hui on en soit rendu devant une motion de bâillon qui a, dans le passé, été dénoncée violemment, vivement par l'actuel parti au pouvoir. Bien sûr, j'ai écouté avec attention les propos de mon collègue, le leader du gouvernement. J'ai même fait demander, à la suite de son offre, les statistiques qu'il nous a lues. Je constate, comme lui, qu'il y a plusieurs heures de travail sur ce projet de loi qui est encore en commission parlementaire.

M. le Président, ce que je trouve le plus inacceptable... Je suis assez bien placé pour le dire parce que je n'ai pas fait partie à Québec d'aucun gouvernement.

Je n'ai pas eu à voter en faveur de l'imposition d'un bâillon. Depuis 1970, cela va faire bientôt huit ans, nous avons et j'ai toujours voté contre l'imposition d'un bâillon quel que soit le gouvernement.

Or, je suis bien placé parce qu'on ne peut pas me renvoyer la balle comme le leader du gouvernement tentait de l'envoyer à l'ancien gouvernement. Un bâillon, c'est toujours un bâillon, M. le Président.

Je me rappelle parce que j'écoutais souvent, lorsqu'ils étaient dans l'Opposition, les honorables membres du Parti québécois, qu'à l'ouverture de la première session en 1973, si ma mémoire est fidèle, je crois que c'était le 21 novembre 1973, l'honorable chef de l'Opposition officielle du temps, qui est aujourd'hui ministre de l'Education, avait fait une recherche extraordinaire pour pondre un discours. Il allait chercher des auteurs qui lui permettaient de faire son discours en défendant la démocratie — il avait raison, M. le Président — sous prétexte que c'est le respect qu'ont les gouvernements de l'Opposition qui font qu'on reconnaisse si ce gouvernement est démocratique ou non. C'est là la valve de sécurité de toute société démocratique. Le respect de l'Opposition qui, en cette Chambre, représente actuellement, sur ce projet de loi particulier, parce que les positions sont très bien connues, 60% de la population. D'autant plus que les sondages qui ont eu lieu concernant le projet de loi no 67 viennent confirmer que, dans la population, il y a encore plus de 60% qui ne sont pas satisfaits de ce que le ministre nous propose.

M. le Président, on a un ministre des Consommateurs dont le rôle est de protéger le consommateur contre les abus de ceux qui lui vendent de la marchandise. Je demande donc, M. le Président: A qui devrons-nous nous adresser pour protéger le consommateur contre les abus du ministre des Consommateurs? A qui devrons-nous adresser? Nous avons devant nous une proposition et on doit en tenir compte. C'est pour cette raison que je considère que le bâillon est très mal venu sur un sujet comme celui-là. On nous dira que cela presse. Il faut sortir cela vite car cela presse. Sous l'actuel gouvernement, tout presse, M. le Président. Cela pressait pour le bill 2, à la fin d'août. Cela pressait tellement qu'il ne l'a pas encore promulgué, M. le Président. Cela pressait. Cela presse tellement qu'après l'avoir fait voter en troisième lecture, je ne suis pas sûr qu'il va le mettre en application. Cela presse toujours sous l'actuel gouvernement. Je voudrais qu'on prenne conscience de ceci. Par le bâillon, le "bulldozer" gouvernemental, bien sûr, c'est légal.

M. le Président, quand l'honorable leader du gouvernement nous dit que son gouvernement a fait une promesse électorale et que ce qu'il fait

maintenant est légal, bien sûr que c'est légal. Mais combien avons-nous de choses légales qui sont en même temps immorales? Combien en avons-nous? Je dis que là vous allez en avoir une de plus.

M. le Président, l'honorable député de Jacques-Cartier a touché la bonne note tantôt. Nous savons tous que, dans notre société, c'est le petit salarié, c'est la personne à faible revenu qui, tous les ans, vers la fin de février, va faire des heures d'attente dans les différents bureaux d'émission de plaques du Québec parce qu'on n'a pas eu le moyen, avant cette date, de ramasser les $40 ou $50 pour acheter ses plaques de l'année.

Cela dure depuis longtemps. On ne comprend pas ceci dans ce gouvernement: S'il y a autant de monde dont la difficulté est telle qu'on ne peut pas ramasser suffisamment d'argent pour acheter ses plaques à la toute dernière minute, comment pourra-t-on ramasser $100 de plus que ce qu'on ne pouvait pas ramasser pour la dernière minute?

C'est vers cela qu'on s'en va. Le gouvernement ne comprend pas et il ne veut pas comprendre parce qu'il est tellement au-dessus de cela, au-dessus de la population; il est dans les grandes sphères intellectuelles où les nuages sont des plus nébuleux, mais il n'a pas les pieds sur la terre. Il a peut-être des antennes, mais il n'est pas "groundé". Il ne comprend pas la situation, il ne comprend pas que nous aurons — si on le laisse passer et si on ne prend pas le temps qu'il faut pour corriger ce projet de loi — un projet de loi qui va défavoriser la classe laborieuse, les couches sociales les plus démunies de notre société, c'est un projet de loi qui va rendre obligatoire le paiement comptant, parce que le gouvernement ne fera pas de mensualités comme les assureurs sont habitués d'en faire, eux, pour leur clientèle, pour lui donner une chance de payer ses assurances. Pour le gouvernement, cela va être comptant, la plaque et l'assurance pour les dommages corporels en même temps.

Mais, M. le Président, il y a encore plus que cela, il va falloir produire en plus — là, cela devient obligatoire — la police d'assurance pour responsabilités matérielles envers autrui en même temps qu'on va payer comptant l'assurance gouvernementale. Donc, si le gouvernement oblige tout le monde à être payé comptant, comment pourrait-on obliger les courtiers d'assurances, à l'avenir, à faire des mensualités pour la partie de la police d'assurance qui sera rendue obligatoire? Pour eux aussi, ce sera légitime de demander d'être payé comptant.

Je dis que l'on défavorise les couches sociales les plus démunies de notre société. En plus de cela, pour les nouveaux députés qui ne voient que le programme électoral préparé par la "gang" d'intellectuels du Parti québécois, qui ne voient que cela, mais qui ne voient pas la réalité, je me permets de souligner à ces nouveaux députés du Parti québécois— il y en a pas mal de nouveaux, sur 71 il n'y en avait que 6 avant. —

M. Mailloux: Des occasionnels.

M. Samson: Oui, des occasionnels, justement, M. le Président, on me souffle cela à l'oreille.

M. Chevrette: II y a bien des hommes politiques...

M. Samson: On a tellement raison de dire que c'est occasionnel, mais je le dis...

M. Chevrette: Vous aviez d'excellentes politiques là-dessus.

M. Samson: ... pour le député de Joliette-Montcalm, qui est bien placé pour comprendre ce que je veux dire là.

M. Jolivet: Nous sommes tous des occasionnels.

M. Samson: La Commission des accidents du travail qui sera l'organisme appelé à régler les réclamations d'assurance, c'est bien connu de tout le monde et du député de Joliette-Montcalm que cette Commission n'est pas l'organisme le plus rapide de la province de Québec. Ils ne gagneront pas tous à la Commission des accidents du travail. Plusieurs députés pourront faire part de leur expérience là-dessus, on a des dossiers en main qui traînent depuis des mois, des années; j'en ai un en particulier en tête dont je suis encore obligé de m'occuper après environ huit ans. C'est comme cela qu'on traite les dossiers à la Commission des accidents du travail du Québec et c'est comme cela qu'on va traiter les assurés en fonction du nouveau régime d'assurance automobile du Québec, sous prétexte...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Samson: Je m'excuse, M. le Président, vous vouliez me dire quelque chose?

Le Vice-Président: Oui, vous avez déjà dépassé votre temps.

M. Marchand: Consentement unanime!

M. Samson: J'ai le consentement des deux côtés, M. le Président?

Le Vice-Président: M. le député de Rouyn-Noranda, malgré tout l'intérêt que j'ai à vous entendre, je n'ai pas entendu un consentement unanime émerger de cette Assemblée. Je vous prierais de conclure, s'il vous plaît.

M. Samson: M. le Président, je vous remercie. Vous avez fait ce que vous deviez faire. Je remercie mes collègues qui m'ont offert leur consentement.

Une Voix: Continuez lentement.

M. Samson: Je termine en notant que c'est le leader du gouvernement qui a refusé son consen-

tement. M. le Président, malgré tout ce que le leader du gouvernement veut faire présentement et malgré sa mauvaise humeur, je vais faire contre mauvaise fortune bon coeur. Je vais lui dire que si on ne m'a pas compris dans ce que j'ai dit là, de toute façon, cela ne donne rien de continuer. C'est parce qu'ils sont bouchés d'un bout à l'autre.

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud dans les mêmes limites, s'il vous plaît.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président. Je n'aurais pas cru devoir intervenir sur cette motion de bâillon même si je me suis privé d'intervenir sur la motion de fin de session. On est tellement habitué d'intervenir sur des motions de fin de session qu'hier j'ai tout simplement décidé de laisser tomber en espérant que le gouvernement se raviserait et qu'il n'oserait pas poursuivre son odieux projet — je dis bien son odieux projet — de présenter une motion de bâillon devant l'Assemblée nationale en plus d'une motion de fin de session.

Ce n'est qu'à deux reprises que j'ai vu depuis 1970 à notre Assemblée nationale des motions de ce genre.

Il y en a eu une qui avait à peu près reçu le consentement unanime de la Chambre parce qu'elle était réclamée de la part de la population du Québec. Si je me rappelle bien, c'était pendant la grève du Front commun qui s'étendait sur tout le territoire du Québec. La seule autre fois où j'ai vu une motion de bâillon de ce genre, c'est au moment de l'étude de la loi 22. Je me rappellerai, M. le Président, les hauts cris et les références à tous les scandales imaginables dont le gouvernement avait fait preuve à l'époque pour accuser l'ancien gouvernement.

Mais avant d'aller plus loin, M. le Président, j'aimerais quand même faire un bref résumé des travaux de cette commission parlementaire pour expliquer qu'il n'y a pas lieu de présenter ce genre de motion.

La deuxième lecture a été faite à l'Assemblée nationale le 10 novembre. La commission parlementaire pour l'étude article par article a été convoquée pour le mercredi 16 novembre, à 10 heures du matin. Or, la commission a dû être ajournée par le leader adjoint du gouvernement lui-même parce que Mme le ministre et le gouvernement n'étaient pas en mesure de fournir aux membres de la commission parlementaire les documents et les informations pertinents dont ils avaient besoin pour faire une étude objective de ce projet de loi. Est-ce que c'est la faute de l'Opposition?

Des Voix: Non.

M. Roy: Le jeudi 7 novembre, nous n'avons pas siégé. La semaine suivante, le mardi 22 novembre, motion d'ajournement présentée par le député de Rosemont. Pas une motion par l'Opposition; une motion proposée par le député de Ro- semont parce que le gouvernement n'était pas en mesure de fournir à la commission parlementaire les documents qu'elle avait demandés. Est-ce que c'est la faute de l'Opposition?

Des Voix: Non.

M. Roy: Le mercredi 29 novembre, nous avons repris nos travaux. Le 29 novembre, cela ne fait pas tellement longtemps. Nous avons siégé de 10 h 30 à 12 h 30, mais de 15 h 30 à 16 heures, pour des raisons que j'ignore, le gouvernement n'a pas reconvoqué la commission parlementaire. Nous aurions eu deux heures et demie pour discuter, de 15 h 30 à 18 heures. Deux heures et trente minutes pour discuter de ce projet de loi. Est-ce que c'est la faute de l'Opposition si le gouvernement n'a pas reconvoqué la commission parlementaire?

Des Voix: Non.

M. Roy: Le mercredi 30 novembre, même chose, après la période des questions à l'Assemblée nationale, on n'a pas reconvoqué la commission parlementaire des consommateurs, coopératives et institutions financières pour l'étude du très important projet de loi 67. Est-ce que c'est encore de la faute de l'Opposition?

Des Voix: Non. M. Burns: Oui.

M. Roy: Le jeudi 1er décembre, même scénario. Et on accuse encore l'Opposition. Ce matin, nous avons réussi, M. le Président, à avoir un amendement, le premier amendement proposé par l'Opposition.

Après deux heures de discussion, on a fini par accepter le point de vue de l'Opposition, parce que justement l'Opposition arrivait avec un amendement pertinent.

M. Burns: Est-ce la faute du gouvernement? Des Voix: Oui.

M. Roy: Oui, c'est la faute du gouvernement si cela a pris deux heures.

M. le Président, le gouvernement tente d'établir un record de vitesse dans une période où il faudrait faire attention aux accidents.

Une Voix: Comme le Titanic.

M. Roy: Le Titanic a voulu établir un record de vitesse. Les passagers étaient solidaires comme les députés du côté gouvernemental. Qu'est-il arrivé? C'est devenu une épave. On veut bien empêcher des gens de se noyer, on veut bien empêcher des gens d'aller à l'abattoir, mais, à l'heure actuelle, on semble vouloir y aller malgré la volonté de l'Opposition et malgré la volonté de la population du Québec. M. le Président, quand est-ce qu'un gouvernement présente ce genre de motion

bâillon? "Quand pouvons-nous invoquer ce genre de motion?" Le Parlement l'invoque lorsqu'il est "dans une impasse". C'est signé Claude Charron, député de Saint-Jacques, le 11 juillet 1974.

C'est curieux, quand même, de voir nos illustres collègues représentants d'un gouvernement qui voulait apporter du nouveau au Québec et qui était conscient que le gouvernement précédent avait été jugé sévèrement par la population à cause de son attitude arrogante vis-à-vis des Québécois, à cause de son attitude arrogante à l'Assemblée nationale.

Je cite encore le député de Saint-Jacques: "Cette motion constitue une limite au droit de parole et à la liberté d'expression dans une société comme la nôtre. S'il est un endroit où la liberté de parole est protégée, par le règlement, c'est bien à l'Assemblée nationale. S'il est un endroit où chacun doit avoir la liberté de s'exprimer comme il le veut, si on veut que cette société tienne, que le consensus social, qui est à sa base, demeure fondé et réel, c'est ici que ça doit se passer. Tous les règlements prévoient quand même cette possibilité, un jour, dans une situation grave et urgente, d'utiliser une motion de clôture, comme le fait ce matin le député de Bonaventure", qui est aujourd'hui le chef de l'Opposition officielle. C'est curieux comme on peut dire des choses quand on est dans l'Opposition et comme on peut changer d'opinion lorsqu'on est au pouvoir.

Pour la bonne marche de nos travaux en commission parlementaire, pour l'information des membres, tant du côté gouvernemental que de l'Opposition, j'ai demandé hier à Mme le ministre si elle était prête à déposer la réglementation telle qu'elle a été si souvent réclamée par les gens du Parti québécois au moment où ils étaient dans l'Opposition. J'ai fait bloc à plus d'une reprise avec eux, parce que c'était une demande justifiée, une demande normale que des législateurs puissent être au courant d'une réglementation, lorsqu'une loi comporte un immense pouvoir de réglementation. Mme le ministre s'est prêtée de bonne grâce à cette demande. Elle a dit: Je vais m'enquérir auprès des gens de la Régie de l'assurance automobile et, demain matin, je serai en mesure de vous faire part du résultat des travaux et de voir si je serai en mesure de vous faire parvenir une copie des règlements. Voici ce que Mme le ministre a répondu ce matin aux membres de la commission parlementaire: "M. le Président, je me suis, en effet, informée auprès de la régie et je dois, hélas, informer les membres de cette commission qu'il n'est pas prévu que les règlements soient prêts avant vendredi de cette semaine". Est-ce la faute de l'Opposition si le gouvernement n'est pas prêt?

M. Burns: Oui.

M. Roy: Nous assistons à une farce monumentale, à une duperie épouvantable à l'endroit de la population. Je ne trouve qu'une seule explication — je terminerai là-dessus — c'est qu'effectivement le gouvernement est dans une impasse et a besoin d'argent. Son premier souci, ce n'est pas de faire en sorte de mieux indemniser et de protéger les victimes d'accidents d'automobiles au Québec, et de travailler dans l'intérêt des Québécois, des propriétaires de véhicules automobiles. Ce qui intéresse le gouvernement, c'est la masse d'argent, parce qu'il en a besoin, parce que cet argent sera dans la Caisse de dépôt et placement. Il y a effectivement $285 millions, selon ce qu'on nous a dit en commission parlementaire, qui vont être disponibles à la Caisse de dépôt et placement pour permettre au gouvernement de se financer, parce qu'il y a des problèmes de finance.

C'est la seule justification qui peut pousser un gouvernement, qui se veut à l'écoute de la population, à recourir à une mesure aussi mal faite, aussi mal préparée, avec autant d'amendements. Le gouvernement a lui-même présenté 60 amendements au projet de loi et la population du Québec n'est pas informée.

On a fait dire à Mme le ministre hier, à la commission parlementaire, que les passagers d'une automobile propriété d'un Québécois, immatriculée au Québec, auront la possibilité de poursuivre leurs concitoyens du Québec dans le cas d'un accident outre-frontières, ce qui obligera les assurés à garder une couverture pour responsabilité publique, pour les dommages corporels. Mme le ministre a copié sa loi sur celle de la Nouvelle-Zélande. Elle devrait revoir sa géographie, elle devrait revoir le globe terrestre pour se rendre compte que le Québec n'est pas comparable à la Nouvelle-Zélande, à moins qu'on ne décide d'y installer un rideau pour empêcher les gens de circuler outre-frontières.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Après les quelques remarques qui viennent d'être faites par les premiers intervenants, je pense qu'il est inutile de revoir en détail les faits, sauf quelques-uns qui méritent d'être soulignés. En effet, le leader du gouvernement, dans ses arguments, en a mentionné trois. Premièrement, ce projet de loi doit être mis en application le 1er mars 1978. Il n'a pas dit pourquoi, il n'a pas invoqué de motif, il n'a pas invoqué l'urgence nationale, il n'a pas fait la démonstration que la décision, qui a été prise au cénacle suprême de ce gouvernement, doive justifier de bousculer tous nos processus démocratiques pour l'adoption d'une loi qui va affecter des millions de Québécois. Cet argument, à mon sens, est tout à fait fallacieux et doit être rejeté.

Deuxièmement, les consommateurs doivent connaître le coût avant que le régime soit appliqué, c'est-à-dire avant le 1er mars 1978. Donc, avant Noël, il faudrait leur faire le cadeau de Noël de leur dire combien va coûter leur plaque d'immatriculation, entre autres.

Je vous ferai remarquer qu'une des raisons de l'impasse, que le député de Beauce-Sud mention-

nait tantôt, dans laquelle le gouvernement se trouve et qui ne laisse au leader du gouvernement que le choix d'appliquer cette motion de clôture, ce sont justement les coûts. Voyez la coïncidence. On a dit que la commission parlementaire avait été convoquée le 15 ou le 16 novembre; le 16, elle a été ajournée par le leader adjoint du gouvernement lui-même. Le gouvernement décide de ne pas convoquer cette commission avant le 22 novembre. On fait de même — c'est encore ajourné — du 22 au 29. A deux reprises, le gouvernement a reconnu le bien-fondé des prétentions de l'Opposition à l'effet qu'on ne pouvait pas étudier valablement ce projet de loi sans avoir les études qui le sous-tendent. Donc, le 29, on se retrouve en commission parlementaire et on commence à étudier le projet de loi avec la promesse du ministre de mettre à la disposition de la commission les experts nécessaires pour comprendre les implications financières.

C'est le 6 décembre seulement que les membres de la commission parlementaire ont le loisir d'interroger des experts, y compris l'actuaire du gouvernement. Le 6 décembre, nous avons démasqué des coûts cachés dans ce projet de loi, des coûts qui n'ont pas été annoncés lors de la grande tournée de Mme le ministre, des coûts qui ne sont pas compris dans les documents qu'elle a déposés. Je vais vous donner ces coûts: de l'assurance-maladie, on cache $10 millions; des rentes d'invalidité de la Régie des rentes du Québec, $7,4 millions; des rentes de retraite et pension de vieillesse, $2,5 millions, de la Commission des accidents du travail et de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, $2,8 millions; des rentes de survivant de la Régie des rentes du Québec, $29,5 millions; de la taxe sur les carburants à $0.01 le gallon, $21,5 millions.

Ajoutez à cela les 2% sur les primes qui sont des taxes actuellement perçues par le gouvernement et qui ne seront pas perçues après, environ $7,6 millions, nous arrivons à $85 millions de coûts cachés là-dessus.

Une Voix: $86,3 millions.

M. Lalonde: On me dit $86,3 millions, et on en trouve chaque jour, M. le Président; on en a encore trouvé hier soir, lorsqu'on étudié le cas des non-résidents qui arriveraient ici. Il faudrait encore avoir d'autres polices d'assurance pour se prémunir contre toutes sortes d'éventualités qui viendraient du fait qu'on a choisi un régime artificiel qui ne repose que sur la commodité. Alors, voyez la coïncidence, le 6 décembre on démasque $80 millions et le 9 décembre le leader annonce clôture. Tout de suite, il faut arrêter la commission parlementaire, on trouve trop de choses. C'est cela l'impasse dans laquelle se trouve le gouvernement. On commence à montrer aux Québécois que le cadeau de Noël, ce n'est pas vrai, que cela va coûter plus cher. L'autre raison, la troisième, j'y viens, et la seule qui est vraie, c'est une promesse électorale et encore là le gouvernement est prêt à faire payer n'importe quel prix aux Québécois pour remplir une promesse électorale. Je trouve cela malhonnête, M. le Président.

On a un gouvernement d'apprentis sorciers et on en a encore une preuve. On a vu cela à plusieurs des décisions de ce gouvernement et en voilà encore une. On veut tout simplement bâillonner la commission parlementaire, parce que celle-ci est en train de démasquer le gouvernement et de révéler les véritables coûts de ce projet de loi. M. le Président, à quoi doit-on cette impasse? On la doit à l'incompétence, on la doit à l'inanité du gouvernement, et en particulier du ministre. Dans les 45 heures qu'on aura consacrées à l'étude, des heures et des heures sont dues à l'incapacité du ministre de répondre à nos questions. A chaque fois qu'on pose une question, il faut se retourner vers un fonctionnaire, amener un autre fonctionnaire pour répondre; le ministre ne connaît pas son projet de loi, et je l'accuse ici. C'est malheureux qu'elle ne soit pas là. Si elle nous avait écoutés, si elle avait écouté le député de Beauce-Sud, elle pourrait être assise et on pourrait l'accuser, en sa présence, de ne pas connaître son projet de loi, d'avoir entraîné la commission parlementaire à étudier dans le chaos, dans l'improvisation, dans l'incompétence, dans le manque de préparation. C'est ce qu'on paye actuellement, M. le Président, avec cette motion de clôture. C'est malheureux, parce que ce sont les millions de Québécois qui vont avoir à payer cela. Les députés qui nous écoutent vont devoir répondre devant leurs électeurs bientôt à des questions très difficiles.

Comment se fait-il que cela me coûte plus cher? Vous nous avez dit que cela coûterait moins cher. Comment cela se fait-il? Laissez donc la commission parlementaire continuer ses travaux et on pourrait vous aider à répondre à ces questions et à corriger le projet de loi. Comment cela se fait-il que les plus démunis vont devoir payer aussi cher que les autres et recevoir moins du régime? Mais c'est une injustice sociale aberrante pour un gouvernement qui se targue d'être voué à la justice sociale. On a beau faire des parades, on a beau faire des tournées, les gens ne sont pas des caves quand même, ce sont eux qui vont payer pour cela. Je trouve cela absolument malhonnête, c'est une grosse farce du leader du gouvernement de mettre sa crédibilité au bout de cette motion, et cela me surprend. Généralement quand le gouvernement est pris dans une situation d'urgence et qu'il doive mettre fin à des travaux, je comprends, c'est sa responsabilité, il en prend la responsabilité; mais que le leader, sans connaître tous ces détails ait mis son nom au bout de cette motion, cela me surprend et cela me chagrine beaucoup.

M. Burns: Je suis bien content d'entendre cela.

M. Lalonde: Quand on n'a plus d'arguments que la dictature de la majorité, M. le Président, on recourt au bâillon et on sait que la seule raison pour laquelle on fait ce recours à ce bâillon, c'est de remplir une promesse électorale. Un autre cas;

au tout début j'ai demandé la production des règlements. Le ministre a dit: Quand ils seront prêts. Mais voyez-vous l'arrogance épouvantable du ministre, qui ce matin, apparemment—je n'y étais pas, j'étais à la commission parlementaire de la justice — les a promis pour vendredi, alors qu'elle sait très bien que c'est justement la date où la commission devra faire rapport à cette Chambre?

Mais, M. le Président, rire du monde comme cela, cela se paye un jour.

Cela va se payer beaucoup plus vite qu'on ne pense, quand on sait que 56% de la population est contre ce projet de loi, selon le dernier sondage de Radio-Canada, et cela malgré toutes les parades et toutes les tournées du ministre. Quand on sait cela, M. le Président, je pense que le gouvernement prend des risques énormes. Je pense que c'est notre devoir, nous de l'Opposition, de le mettre en garde contre de tels risques.

M. le Président, le projet de loi aurait dû être réimprimé. Voici encore une raison, ceux qui ont participé aux travaux de la commission parlementaire le savent. A chaque article, jusqu'à maintenant, ou presque, il y a un amendement qui souvent est un amendement majeur. On est rendu à l'article 12 ou 13... Un amendement du gouvernement, pas de nous... On en a, on va en apporter, mais c'est le gouvernement qui a complètement changé sa loi.

Savez-vous, M. le Président, que dans les articles 200 on a changé complètement, après la deuxième lecture, la loi de la régie qui vient à peine d'être adoptée il y a quelques mois ici? On change complètement la loi de la régie au niveau même des principes.

M. le Président, il y a quand même des limites de vouloir cacher la vérité à la population. Je pense que c'est un des cas, peut-être rares, mais un des cas où l'Opposition et même les députés ministériels, s'ils savaient de quoi ils parlent, devraient se soulever avec vigueur contre...

M. Burns: Je vous prie d'inviter le député à conclure. Il a terminé son temps.

M. Lalonde: Oui, M. le Président, je vais conclure. Je comprends que cela fait mal.

M. Burns: II y a des règlements et ils doivent être suivis.

M. Lalonde: Quand on fait le pharisien, comme le fait actuellement le député de Maisonneuve, on a hâte que cela finisse.

M. Burns: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. Lalonde: Quand on agit en sépulcre blanchi comme ce gouvernement le fait actuellement, on a hâte de finir.

Le Président suppléant (M. Marcoux): J'inviterais le député de Marguerite-Bourgeoys à conclure.

M. Lalonde: Oui, M. le Président. Quand on fait le pharisien comme le leader du gouvernement et quand on agit en sépulcre blanchi, on a hâte que cela finisse.

M. Burns: J'invoque le règlement. Le député n'a même plus le droit de parler. C'est terminé.

M. Lalonde: Mais ce n'est pas fini. Mon temps est peut-être terminé, mais vous n'avez pas terminé avec nous.

M. O'Neill: A l'ordre!

M. Burns: II a dépassé ses dix minutes.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Sur une question de règlement, M. le leader parlementaire.

M. Burns: Je vous dis simplement que le député a dépassé son temps de parole. J'étais gentil avec lui, je lui disais, par votre entremise, M. le Président, qu'il était peut-être temps qu'il conclue. A ce moment, M. le Président, si on veut commencer à se lancer des injures...

Le Président suppléant (M. Marcoux): La parole est au député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vais conclure, M. le Président. Je vois que c'est vous qui êtes le Président. Vous le faites avec beaucoup d'autorité, malgré les tentatives du leader d'agir comme président. C'est donc avec l'appui large et généralisé de la population que l'Opposition officielle et celui qui vous parle en particulier vont s'opposer radicalement à ce geste antidémocratique, irresponsable, du gouvernement de mettre fin, dans quelques jours, à l'étude de ce projet de loi.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: M. le Président, je ne comprends plus rien. Je ne sais pas si vous comprenez quelque chose. On arrive de la commission parlementaire qui siège au salon rouge, où il y a une motion qui a été présentée par le député de Beauce-Sud pour demander l'ajournement des travaux pour prendre part au présent débat. Parmi les députés ministériels, le député de Jonquière prend la parole pour dire qu'il ne veut pas accepter cette motion et nous lance la phrase suivante: M. le Président, nous allons les forcer à étudier ce projet de loi. D'un côté, M. le Président, dans l'autre Chambre, on nous dit qu'on va nous forcer à étudier le projet de loi, et ici on est en train d'étudier une motion pour nous forcer à ne plus en parler.

M. le Président, vous êtes sans doute situé dans un dilemme, et vous pouvez être sûr que les membres de la commission parlementaire sont très mal placés pour continuer à étudier l'article 12 qu'ils sont en train d'étudier de l'autre côté.

M. le Président, la motion qu'on nous présente, on s'y attendait depuis longtemps. Si on peut vous rappeler un peu l'historique de l'étude du projet de loi...

M. Burns: Vous l'attendiez depuis longtemps? Vous la demandiez depuis longtemps.

M. Fontaine: Le leader du gouvernement n'a sûrement pas assisté aux travaux de la commission parlementaire, parce que les travaux qui se sont effectués depuis le début de la commission ont été des travaux sérieux. Vous pouvez être sûr que depuis...

M. Burns: Parfait, cela.

M. Fontaine: ... que le ministre a consenti...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader parlementaire du gouvernement, vous n'aviez pas la parole. M. le député, je vous rappellerai, que, comme le leader parlementaire l'a fait hier, vous frisez l'abîme. Je n'ai point reçu le rapport de ce qui se passe à la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières.

M. Fontaine: II ne faudrait pas que vous l'ignoriez, M. le Président, parce que c'est important, ce qui se passe là-bas. M. le Président, je voudrais vous rappeler que, depuis que le ministre a consenti à déposer les chiffres qu'on lui demandait, la commission parlementaire étudie les articles du projet de loi et cela fonctionne à bon train. Je peux vous le dire. Si on n'avait pas perdu ces deux semaines au début de l'étude des travaux, si le ministre avait immédiatement consenti à déposer les documents qu'on lui demandait et que l'Opposition réclamait à grands cris depuis fort longtemps, vous pouvez être sûr, M. le Président, qu'on ne serait pas rendu à l'article 12. On n'aurait peut-être pas fini d'étudier le projet de loi, mais on serait sûrement rendu aux alentours de l'article 100 ou 150.

M. le Président, toute cette affaire a débuté par une tournée itinérante du ministre qui a voulu aller s'informer du système d'assurance au Québec. Elle a voulu prendre des informations en faisant une tournée itinérante à travers tout le Québec. Lorsqu'elle est revenue de cette tournée, le ministre a rédigé un livre bleu qu'elle nous a présenté à l'Assemblée nationale.

Une Voix: Une belle couleur!

M. Fontaine: On arrive ensuite avec une loi qui est supposément basée sur ce livre bleu et à laquelle actuellement on n'apporte que des changements mineurs, mais des changements qui se situent presque à tous les articles du projet de loi. On nous a déposé une pile d'amendements au projet de loi, qu'on a reliés pour nous en faire une plaquette d'à peu près deux pouces d'épaisseur et qu'on doit étudier en commission parlementaire.

Sur le fond, il n'y a pas grand-chose de changé, sauf peut-être sur le mode de financement. Le ministre nous a toujours dit qu'elle ne recourrait jamais à la taxation sur l'essence. Par contre, lorsqu'elle a déposé ces documents, on s'est aperçu que le ministre allait chercher $20 millions au bureau du ministre des Finances et que ces $20 millions étaient pris à même la taxe sur l'essence des véhicules automobiles.

Une Voix: $21,5 millions.

M. Fontaine: C'est exact, $21,5 millions. On s'aperçoit que le ministre ne change pas d'idée sur le fond de son projet de loi, mais, par contre, elle s'aperçoit qu'elle est obligée de le modifier quant au mode de financement.

M. le Président, je vous répète que si nous n'avions pas perdu deux semaines au début des travaux de la commission lorsque le ministre refusait de nous déposer les documents que nous lui demandions, nous serions sûrement beaucoup plus avancés que nous ne le sommes actuellement dans l'étude de ce projet de loi.

Malheureusement, le ministre et les ministériels sont très mal préparés pour l'étude de ce projet de loi et plus particulièrement lorsque nous sommes obligés d'étudier les articles où il y a une réglementation qui doit suivre. Vous pouvez être assuré qu'il y a plusieurs articles qui doivent être suivis d'une réglementation. Chaque fois qu'on demande au ministre de déposer cette réglementation pour que nous puissions en prendre connaissance — même dans la réglementation, on modifie les définitions qui sont données dans l'article 1 du projet de loi — on ne veut pas nous donner les règlements qui seront adoptés au Conseil des ministres.

M. le Président, je me demande où est le sérieux là-dedans. D'un côté, on demande aux législateurs d'adopter des définitions et, d'un autre côté, dans un règlement, on va permettre au ministre de changer ces définitions pour en donner d'autres. C'est un principe que l'on doit rejeter en tant que législateurs.

Il y a également une autre question, M. le Président, qu'il faut se poser. C'est un principe fondamental. Doit-on adopter, M. le Président, à tout prix ce projet de loi pour au moins respecter à moitié une promesse électorale ou doit-on continuer à étudier ce projet de loi jusqu'à la fin pour que nous en fassions connaître au public toutes les implications.

Je pense que c'est un principe sur lequel on doit se pencher. Avec le présent projet de loi qui nous est présenté, on nous propose un régime à demi étatique, alors que pendant la période électorale on avait, à grand renfort de publicité, dit devant toute la population du Québec qu'on étatiserait tout simplement les compagnies d'assurance. Par contre, on nous présente un projet de loi où c'est une demi-étatisation. On se demande si on doit, à toutes fins utiles, étudier sans faute ce projet de loi pour l'adopter immédiatement, même s'il ne respecte qu'à moitié les promesses électorales,

ou bien si on ne devrait pas plutôt continuer de l'étudier à fond pour que le public du Québec soit bien informé quant à cette loi qui va toucher 3 millions de personnes au Québec.

Bien sûr, M. le Président, c'est long, cela prend du temps. Mais cela prend du temps également à faire comprendre aux députés ministériels ce que nous voulons leur proposer. Cet avant-midi, pour vous donner un exemple, on a discuté pendant environ deux heures pour enfin réussir à convaincre les députés ministériels d'adopter un amendement à l'article 10.

Le Vice-Président: M. le député, à l'ordre, s'il vous plaît! Je vous ai laissé aller assez loin jusqu'à présent, je vous prierais de ne pas remplir le rôle du rapporteur de la commission parlementaire.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je n'ai pas l'intention de remplir ce rôle, parce que le rapporteur viendra trop tôt pour rapporter ce qui se passe à la commission parlementaire.

Le Vice-Président: Là, vous êtes sur le sujet, continuez, cela va bien!

M. Fontaine: M. le Président, le ministre et les députés ministériels ne font que commencer à comprendre. Si vous nous laissez continuer, on pourrait sans doute les convaincre, probablement dans un avenir rapproché, de retirer leur projet de loi parce qu'ils seraient obligés de se rendre compte qu'il a été fait à la hâte et qu'il est mal préparé. Pourquoi tant de hâte puisque c'est un projet de loi fort important qui va toucher le portefeuille de près de trois millions de Québécois? Il aurait valu la peine d'étudier en détail ce projet de loi jusqu'aux derniers articles.

Et je me pose également une autre question, à savoir si le leader du gouvernement a l'intention de ramener le projet de loi 67 en deuxième lecture. A la lecture des amendements déposés par le ministre et, entre autres, à l'article 201, on a pu s'apercevoir...

M. Burns: M. le Président, question de règlement, je m'excuse auprès du député.

M. Fontaine: Oui.

M. Burns: C'est dans votre intérêt que je soulève une question de règlement.

Le Vice-Président: Oui, d'accord!

M. Burns: M. le Président, le député parle-t-il au nom de son parti? Oui. D'accord.

Le Vice-Président: Vous avez encore du temps.

Une Voix: Encore une heure.

M. Fontaine: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Non, pas une heure, je m'excuse.

Une Voix: Une demi-heure!

Le Vice-Président: Vous lirez l'article 94, paragraphe 2.

Une Voix: Cela allait bien, M. le Président, encore 19 minutes.

Le Vice-Président: M. le député de Nicolet-Yamaska, au nom de votre parti.

M. Fontaine: Merci. Je disais donc que je me posais la question à savoir si le leader du gouvernement avait l'intention de ramener le projet de loi en deuxième lecture. Vous comprendrez qu'à la lecture du projet de loi 67, tel qu'amendé par le ministre, on propose d'ajouter des articles au projet de loi et, entre autres, il y a l'article 201 qui propose que le législateur permette à la régie d'acheter des actions de toute corporation constituée pour pratiquer les assurances en dommage.

Or, en deuxième lecture, nous n'avons pas adopté ce principe qui est fort important, que je sache. Alors, j'ai l'impression que, si le leader du gouvernement voulait respecter la tradition parlementaire à savoir qu'en deuxième lecture, on adopte le principe d'un projet de loi, il devrait, plutôt que de proposer une motion de clôture pour terminer les travaux en deuxième lecture, ramener le projet de loi en deuxième lecture...

Une Voix: Très bien!

M. Fontaine: ... pour que nous recommencions en deuxième lecture puisqu'on ajoute dans le projet de loi.

Une Voix: Ce n'est plus le même projet.

M. Fontaine: M. le Président, nous nous attendions à ce dépôt de motion de guillotine. Tout au long de la préparation du projet de loi, de sa discussion en commission parlementaire, lors de l'audition des mémoires et de la discussion article par article, M. le Président, le ministre, je le dis et j'aurais aimé qu'elle soit ici, a manifesté une ignorance totale de son dossier malheureusement. A chaque fois qu'on pose des questions à l'honorable ministre sur des sujets importants, des principes du projet de loi, c'est toujours un conseiller technique qui nous répond.

C'est peut-être important de le noter puisque, lorsqu'on lit les débats de la commission parlementaire, tous ces témoignages apparaissent au nom du ministre. Je pense que c'est là une manifestation de l'ignorance du dossier de la part du ministre. Le ministre a également manifesté sa ferme volonté de ne rien modifier au projet de loi. Je veux vous rapporter le fait que le projet de loi no 67 est presque en totalité la reproduction du rapport Desjardins qui avait été préparé par l'ancien gouvernement et que l'ancien gouvernement avait rejeté, avait jeté à la poubelle. On est allé le rechercher et on l'a ressorti. On nous présente cela comme étant...

M. Lamontagne:... à la poubelle, nous autres.

M. Fontaine: ... le projet de loi du gouvernement. On a fait des consultations un peu partout au Québec pour dire qu'on accepterait des modifications et des suggestions que les gens viendraient faire. Et on nous ressort un vieux projet de loi de la poubelle pour nous dire que c'est le projet de loi du gouvernement! M. le Président, cela démontre tout simplement une ferme volonté du gouvernement, du ministre et des ministériels de ne rien modifier en aucun cas, en quoi que ce soit, le projet de loi 67. De ce côté, je me demande, M. le Président, ce qu'on a fait en commission parlementaire.

Somme toute, le ministre démontre sa volonté de faire fi de toute démocratie. Elle n'a jamais voulu écouter, n'écoute pas encore et n'écoutera probablement jamais. Nous ne sommes donc pas surpris du tout de cette présente motion qui est devant l'Assemblée nationale. Elle ne confirme que ce que j'ai maintes fois dénoncé en commission, M. le Président; ce travail en commission n'est qu'une parodie de la démocratie. Ce n'estqu'un jeu et le moyen que l'on utilise aujourd'hui, c'est la technique législative permettant de légaliser la volonté du gouvernement de ne pas écouter les arguments de l'Opposition sur ce projet de loi. M. le Président, ce n'est pas uniquement la volonté des partis d'Opposition d'amender ce projet de loi. Non, M. le Président, c'est la population du Québec toute entière, tous les citoyens, les Québécois, les Québécoises qui veulent que ce projet de loi subisse des amendements et des amendements majeurs. On a vu dans des sondages qui sont sortis, il y a quelques semaines, que près de 60% de la population du Québec étaient contre ce projet de loi qui était présenté, malgré toute la publicité que le gouvernement et que le ministre font à la télévision régulièrement.

On s'est aperçu, M. le Président, que les Québécois et les Québécoises sont contre ce projet de loi. Si le gouvernement actuel du Québec veut se dire démocratique, qu'il retire tout simplement son projet de loi et qu'il ne vienne pas nous faire des motions de clôture pour nous empêcher, à tout le moins, de l'étudier. Un amendement, M. le Président, un seul en des journées de travail. Un seul amendement a été adopté en commission parlementaire par le gouvernement et, encore là, c'est un amendement qu'on peut considérer comme mineur. Nous sommes rendus à étudier l'article 12 et combien d'autres amendements y aurait-il à apporter à ce projet de loi?

Nous n'avons même pas eu l'occasion d'étudier le quart de ce projet de loi. Des erreurs grossières seront ainsi acceptées par la volonté du gouvernement de ne pas aller jusqu'au bout avec l'étude article par article.

Le gouvernement craint de plus en plus la preuve que l'Opposition lui soumet, jour après jour, à savoir que son projet est foncièrement mauvais et majoritairement rejeté par la population du Québec.

Le gouvernement, tant en commission parlementaire qu'ici à l'Assemblée nationale, s'aperçoit, M. le Président, que l'Opposition est en train de lui faire la preuve que ce projet de loi est mauvais et il veut, par la motion de guillotine, nous empêcher de continuer à lui démontrer que ce projet de loi est mauvais.

Je veux souligner ici que c'est devenu une habitude chez le présent gouvernement de fonctionner ainsi lors de l'étude de projets de loi importants. Autant lorsque le gouvernement a présenté un projet de loi qui prenait les Québécois aux tripes, disait-on, autant lorsqu'il présente un projet de loi qui prend les Québécois au portefeuille cette fois-ci, il est dans l'obligation de mettre fin aux débats normaux et démocratiques de ces projets de loi. Ce genre de procédure est dangereux. Il nous mène droit à l'Etat totalitaire et fait fi de la démocratie parlementaire.

Posons-nous des questions sur l'avenir de nos libertés collectives et individuelles. C'est le temps de le faire et c'est important. Nous avons besoin de temps pour étudier le projet de loi no 67, car c'est notre rôle de législateur. Je vous demande d'intercéder auprès du leader du gouvernement pour lui demander tout simplement de retirer sa motion de clôture. Je n'accepte pas que le gouvernement bouscule le processus législatif, particulièrement pour hâter l'adoption d'un projet de loi aussi mal préparé. En conséquence, nous de l'Union Nationale, nous voterons contre la motion de clôture.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! ... A l'ordre, s'il vous plaît!... M. le whip, à l'ordre! M. le whip du gouvernement, pour les fins du journal des Débats.

M. Burns: En guise de réplique... Le Vice-Président: Non. M. Burns: D'accord.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, je donne la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Bryce Mackasey

M. Mackasey: Merci, M. le Président. J'ai à peine dix minutes à ma disposition si je me rappelle bien les règlements. Ce n'est pas mon intention de parler de la compétence ou du manque de compétence du ministre en commission, parce que je ne suis pas membre de la commission. Je vais défendre le ministre en disant que si elle trouve souvent nécessaire de discuter avec ses fonctionnaires pour répondre aux questions, c'est normal. C'est exactement le rôle de ses techniciens. Je veux plutôt parler de la tendance de ce gouvernement, à chaque occasion possible, de nier les droits des individus et nos droits collectifs au Québec. Cette tendance, depuis un an, me rend plus inquiet même que le projet de loi no 67. Ce n'est pas la première occasion, depuis le commencement de la session, que nous sommes encore en face d'une motion de clôture.

J'ai un peu d'expérience dans une autre arène, si vous voulez, et je peux vous dire qu'une motion de clôture est une motion qu'un gouvernement responsable n'emploie pas souvent. Par exemple, c'est la seule manière qu'a le gouvernement de se protéger contre les "filibusters" d'une Opposition, qui peuvent être faits parfois avec seulement cinq, six, sept ou vingt députés, si vous voulez.

J'ai remarqué au début que le leader du gouvernement, en donnant les raisons de cette motion de clôture, n'a pas du tout parlé d'une tendance de notre part, de l'Opposition, à retarder le travail de la commission. Il a plutôt parlé d'une responsabilité que le parti au pouvoir avait envers les militants de ce parti; une tout autre chose. Je suis franchement craintif à la pensée que, chaque fois que le gouvernement se sentira obligé de remplir une promesse faite à ses militants, nous aurons une motion de clôture toutes les semaines. Finalement, nous n'aurons plus à siéger en Chambre parce que le rôle de l'Opposition sera minimisé et réduit à rien du tout.

Mr President, because of the short time, I want to make a few valid points, that it is obvious to me that this government, through relative experience or inexperience, is firmly wedded to the course that it will impose its views on the National Assembly, whether the Opposition likes it or not, and this is the first step towards a dictatorship. This is unfortunate, Mr President, le leader a souligné la responsabilité du gouvernement; il existe aussi une responsabilité de la part de l'Opposition. La responsabilité de l'Opposition, à ce moment-ci, c'est d'empêcher un projet de loi, le projet de loi no 67, d'être adopté par cette Chambre sans amendement fondamental ou majeur, au nom des citoyens de la province de Québec.

Si on n'empêche pas l'adoption du projet de loi no 67 par tous les moyens à notre disposition, on peut dire que nous ne faisons pas notre travail comme Opposition responsable dans cette Chambre.

Mr President, in fifteen years, that I have sat in an Assembly, on one side or the other, as a back-bencher or as a minister, it is the first time I am uneasy, faced with a government, that is determined to impose its will on the majority when it is evident that the majority of the people of the province are against its particular law.

La semaine passée, M. le Président, quelqu'un est venu me voir à mon bureau, au nom de 150 chauffeurs de taxi. Cela ne m'est jamais arrivé auparavant, parce que les chauffeurs de taxi sont très indépendants, mais celui-ci m'a posé une question: Combien vont nous coûter nos plaques? Combien cela va-t-il nous coûter pour l'assurance? Puis, je n'étais pas capable de répondre. J'ai été obligé d'expliquer à ces hommes qui ne gagnent pas beaucoup d'argent maintenant à cause du haut niveau de chômage à Montréal — il manque de touristes et les fuites de capitaux, etc. font en sorte que ceux qui travaillent sur les taxis, à Montréal, ont assez de difficulté maintenant à gagner leur vie, sans devoir mettre de l'argent de côté pour l'assurance l'année prochaine — que même le ministre ne savait pas du tout combien coûterait ce projet de loi.

Mr President, every evening in the newspapers, in the letters to the editor, somebody speaks out against this bill. The Bar, who tries to be neutral and apolitical, has spoken out and pleaded with every member in this house for a free vote, because the Bar understands that bill 67, which is based on false actuarial figures, based on the level of accidents last year which were the lowest in ten years maybe, an aberration, that based on this particular actuarial figure, this policy will cost a fortune to the taxpayers of this province, including those who, for one reason or another, do not have an automobile.

And what is more important, Mr President, we are being asked, through closure, the most dictatorial antidemocratic method available to the government, to bring a bill out of a committee, to rush it into the Assembly, to rush it through a third reading, in order to have a Christmas present for the members of the government. On one hand, I hope they succeed, because their defeat at the next election will be that much greater. But, as a responsible member elected to do what is best for the people of my community, I have the obligation to plead with the leader of the government, to show some responsibility and give us enough time at least to improve the bill by reasonable discussion of amendments, so that at least the people of the province of Quebec wherever they live, will have a bill that will at least be less discriminatory.

I have only five minutes left, Mr President, and I want to say also to the leader of the government, for whom I have some respect, that I support the argument raised by the member from Nicolet-Yamaska.

In all my years I have never seen a minister attempt to amend a bill by imposing, introducing a clause in another bill, not even at second reading, but bootlegging it in the commission in the hope that we will not appreciate that what the government is up to is not simply introducing automobile insurance in the field of automobile, but by, M. le Président, l'article 201, dire à tous les courtiers, à toutes les compagnies: Si vous ne cessez pas de vous opposer au projet de loi 67, we will nationalize your business. C'est exactement ce qu'ils disent, in section 201. It is to create fear in private industries, that if you oppose bill 67 through section 201 of a bill in which 40 hours have been passed, if you oppose that bill too democratically, too vigourously, too openly, if you speak to the members of the commission, if you lobby the members of the National Assembly, we will nationalize your business because we are big brothers and we are a government that has little or no respect for human rights, for individual freedom, for collective freedom, for private enterprise. We are a governement that is

committed to a policy of nationalizing the whole industry.

M. le Président, in conclusion, I am convinced, en conclusion, that the purpose...

Le Vice-Président: S'il vous plaît!

M. Mackasey: Je vous respecte, M. le Président. En terminant, je veux dire à tous les députés, des deux côtés de la Chambre, que l'article 201 est là pour nous dire que le but du gouvernement ce n'est pas de nationaliser seulement l'assurance automobile, but it is their purpose over the next year and a half, by utilizing article 201, to nationalize the whole insurance industry, whether it is life insurance, fire insurance, automobile insurance. And, as the House leader said, that is the promise that is included in the policy of the PQ government, nationalization of the whole industry. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président: Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: M. le Président, vous me permettrez, pendant quelques minutes de dire quelques mots sur cette motion qui me semble inopportune, qui ne devrait pas exister dans le contexte actuel. Le rôle que je voudrais jouer c'est de vous faire comprendre et aussi au leader parlementaire par votre entremise, que c'est inopportun, qu'il n'aurait pas dû apporter cette motion dans le moment.

Actuellement, M. le Président, nous avons une motion de clôture qui équivaut à un bâillon. On veut procéder rapidement à l'adoption d'une loi qui est inopportune, qui ne presse pas tant que cela, même si on veut l'invoquer. Il n'est pas nécessaire qu'elle soit en application pour le premier janvier. D'abord elle ne le sera pas. C'est impossible. Pour le premier mars, il sera beaucoup trop tard. Le dommage sera fait. Il n'y aurait pas de dommage de fait si on pouvait la retarder et la mettre simplement en application l'an prochain.

Si on avait voulu réellement l'avoir en application pour le premier janvier, on aurait pu l'appeler en deuxième lecture au mois d'août après son dépôt. On aurait pu laisser siéger la commission durant le mois de septembre. On aurait pu accélérer les travaux de cette commission pour avoir cette loi votée à temps pour la clôture de cette session. Mais non. On n'a pas procédé en deuxième lecture. On a attendu que la session recommence au mois d'octobre. On a, après cela, marché à pas de tortue. Comme l'a expliqué le député de Nicolet-Yamaska et d'autres députés qui ont parlé avant moi, le gouvernement a pris tous les moyens pour retarder les travaux de cette commission. Donc, le gouvernement a pris tous les moyens pour retarder les travaux de cette commission. Donc, le gouvernement prend des moyens qui sont inopportuns. Il ne devrait pas s'habituer à procéder de cette façon. Tout à l'heure le chef de l'Opposition officielle disait que depuis un an, cela faisait deux fois qu'on avait le bâillon. C'est en quatre mois, M. le Président, qu'on a eu deux bâillons. Auparavant, cela a existé deux fois en quinze ans. Une fois au fédéral et une fois ici au provincial.

M. Burns: Ah oui!

M. Russell: On a vu des motions de clôture, mais pas un bâillon comme celui-là. Là c'est une loi qu'on veut bloquer, qu'on veut adopter rapidement, et on n'est pas prêt. On l'a souligné tout à l'heure.

M. Burns: On l'a vécu, pour notre information, dans les sept dernières années, huit fois.

Le Vice-Président: A l'ordre, M. le leader parlementaire du gouvernement, s'il vous plaît!

M. Russell: M. le Président, le leader parlementaire aurait dû, cet après-midi, lorsqu'il a présenté sa motion, énumérer tout ces bâillons qu'il a subis. On pourrait lui rappeler toutes les répliques qu'il a utilisées à l'encontre de ces supposés bâillons qu'il y a eu dans ce temps-là. On va être pas mal plus calmes et plus doux. On veut simplement dire au leader parlementaire qu'il prenne donc les mêmes moyens pour faire adopter le bill que ceux qu'il a pris pour faire adopter le bill 2, qu'ils soient conformes à des normes raisonnables. D'abord ce bill 67 actuellement, tout le monde est contre et on a raison d'être contre. On va dire que les avocats sont contre parce que cela peut faire mal à leur revenu. Les avocats sont contre parce qu'ils sont intéressés. J'espère que les camionneurs ne sont pas contre. Est-ce parce qu'ils sont intéressés?

Ils ne savent pas que cela va coûter peut-être $125 ou $150 de plus par année pour s'assurer. Les cultivateurs sont contre, ceux qui connaissent la loi et qui en ont entendu parler. Certains de mes commettants à qui on en a parlé disent qu'ils sont pour la loi, mais ils ne la connaissent pas. Quand ils vont la connaître à fond, comme le député de Yamaska, et les autres députés qui ont siégé à la commission, ils vont être contre. Mais, là, ils vont y goûter. Vous allez voir que cela va crier dans toute la province. Plutôt que de prendre des moyens plus conformes à des normes habituelles pour imposer ce nouveau système dans une province, on bouleverse tout.

On est rendu avec un gouvernement qui a le monopole de la vérité et cela, c'est extrêmement dangereux, parce que c'est tout près, à la porte de la dictature. Comme le disait un collègue: Ce n'est peut-être pas mauvais, la dictature, pour autant qu'on en fasse partie. Mais la population n'en fait pas partie; c'est elle qui va payer la facture tout à l'heure. M. le Président, j'aimerais avoir encore quelques minutes; il est 18 heures. Si vous me mettez le bâillon encore ici, je serai obligé de me conformer au règlement.

M. Brassard: La dictature du temps!

M. Russell: Si vous insistez, je serai obligé de revenir et de compléter mon exposé.

Le Vice-Président: M. le député de Brome-Missisquoi, demandez-vous la suspension du débat?

M. Burns: M. le Président, je suggérerais que nous consentions à ce que le député de Brome-Missisquoi termine, même si on dépasse 18 heures.

M. Russell: J'en ai pour deux ou trois minutes.

Le Vice-Président: Y a-t-il consentement? Un instant, s'il vous plaît! D'accord.

M. Russell: C'est inopportun et tout le monde est contre. Les cultivateurs sont contre, les compagnies de transport sont contre, les ouvriers ne sont pas pour. Les agents d'assurances, ceux qui en vendent et qui connaissent la population, viennent nous rencontrer pour nous expliquer que cette manière d'agir, actuellement, n'est pas bonne et que cela va coûter une fortune à la province. On a énuméré quelques chiffres tout à l'heure. Je les ai tous ici. Ce serait trop long de les énumérer, mais simplement je voudrais vous dire ceci: Le leader parlementaire ne devrait pas se presser pour bousculer le gouvernement. Il devrait suggérer à son ministre et à son gouvernement de prendre leur temps, de laisser passer cette session et de revenir à l'autre session avec cette loi. On pourra, au moins, l'étudier à fond et éviter beaucoup d'erreurs qui vont se faire en bousculant la situation.

M. le Président, je termine en vous disant tout simplement que, malheureusement, j'aurais aimé voter pour cette loi qui apportait certains correctifs à certains malaises qui existent dans la province. Mais de la façon dont on me bouscule et de la façon dont on s'y prend pour le faire, je regrette, je ne pourrai appuyer le gouvernement dans cette manière d'agir.

M. Burns: Avant que nous...

M. Springate: M. le Président, je demande la suspension de ce débat.

Le Vice-Président: D'accord. Accordé. M. Burns: M. le Président.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, nous reprendrons évidemment à 20 heures. Je signale tout simplement un rappel. A la salle 81-A, la commission de la justice a terminé ses travaux. C'est au moins une commission qui fonctionne bien. On peut s'en flatter. Tout le monde, d'ailleurs. Elle sera remplacée par la commission du travail et de la main-d'oeuvre — selon la motion de ce matin — qui siégera à compter de 20 heures. Avis aux intéressés.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, messieurs, les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures. La parole sera à M. le député de Westmount.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

Reprise de la séance à 20 h 10

Le Vice-Président: A l'ordre, messieurs! La parole est à M. le député de Westmount.

M. George Springate

M. Springate: M. le Président, le leader parlementaire du gouvernement nous a dit cet après-midi que beaucoup d'heures avaient été consacrées à ce projet de loi. Il nous a dit que dès le 27 septembre, et pendant dix jours ensuite, 23 groupes ont été entendus par la commission parlementaire. A cette commission, ils ont dépassé presque 45 heures d'étude à entendre les groupes présenter des mémoires sur le projet de loi no 67.

Depuis le 16 novembre, d'après les notes du leader parlementaire du gouvernement et pendant dix jours par la suite, pour un total de 35 heures, une commission parlementaire étudie article par article le projet de loi no 67. Ensuite, il nous a dit qu'après un peu plus de 80 heures d'étude sur un tel projet c'est le temps normal de mettre fin à des débats. Mais il nous a dit aussi que seulement dix articles ont été adoptés par les membres de la commission. Si on attend, après les délais normaux, nous ne pourrions pas adopter le projet de loi no 67 avant Noël. Comme cela, il a demandé que le rapporteur de cette commission fasse rapport en cette Chambre, soit avant ou le 16 décembre.

Le député de Jacques-Cartier a fait un historique du projet de loi no 67 aussi. Il nous a dit, cet après-midi, que le 15 avril le gouvernement a déposé un livre bleu sur l'assurance automobile. Ensuite, nous avons vu Mme le ministre partir dans une tournée provinciale pour vendre son projet, pour entendre des groupes qui n'étaient pas satisfaits ou qui voulaient faire des représentations, une tournée provinciale qui, quant à moi, n'a pas porté fruit and, as we say in English, Mr Speaker, was nothing more than a pre-argument.

Ensuite, le 19 août, nous avons vu le projet de loi présenté ici en Chambre lors de la première lecture. Est-ce qu'avec 80 heures d'étude d'un projet de loi, soit en Chambre ou en commission, nous avons réellement étudié à fond les propositions qui ont été faites par le gouvernement? Est-ce que toute la population a été consultée? Je dis bien toute la population, parce que c'est vrai, les ministres ont fait une tournée dans la province de Québec vers le mois de septembre.

Je dois dire merci au ministre des Communications qui nous a remis cette semaine deux volumes titrés "Tournée ministérielle, décembre 1977". Je me demande si les ministres ont parlé du bill 67 à tous les Québécois. Je tourne la page: 06 région de Montréal. Il y a une liste de ministres: MM. Marois, Duhaime, Landry, Joron, Lazure. Mais je ne vois pas Mme Payette. Elle n'a pas consulté les gens de Montréal. J'ai fait une liste des comtés visités par les ministres: L'Assomption, Berthier, Chambly, Châteauguay. Je ne vois pas un seul comté représenté ici en cette Chambre par quelqu'un de mon parti. Pas un ministre n'a visité Verdun, Robert Baldwin, Notre-Dame-de-Grâce, Mont-Royal, L'Acadie, Saint-Louis, Saint-Laurent, Marguerite-Bourgeoys, D'Arcy McGee, Jacques-Cartier, Outremont et mon comté, le comté de Westmount.

M. Charbonneau: Cela va venir.

M. Dussault: Cela va venir.

M. Guay: Cela s'en vient, en janvier.

M. Springate: Oui, ça s'en vient! Une fois que l'Etat a décidé quelque chose, là on va dire aux petits Québécois ce qu'ils doivent faire. C'est ça, leur consultation! Ils sont bien "smart", bien brillants pour consulter après. Il n'y en a pas un qui est représenté en cette Chambre par un membre de l'Opposition de l'île de Montréal. Là, vous savez pourquoi nous, de notre côté, demandons d'avoir le droit de nous exprimer en commission parlementaire. Ceux du côté ministériel n'ont pas consulté les gens que nous représentons ici à l'Assemblée nationale, ils ne l'ont pas fait. C'est pour cela que nous prenons notre temps en commission parlementaire, c'est pour cela qu'une fois rendus à l'étude article par article nous présentons nos vues et nos suggestions.

On peut parler longtemps du bill 67, mais il faut aussi parler du principe. La vraie question, c'est celle-ci: Est-ce que le Parti québécois, qui prétend être démocratique, est réellement un parti démocratique? La réponse est non. Ils le savent...

M. Charbonneau: Voyons donc!

M. Springate: Ils le savent. Ils sont là et ils disent: Non, non! Oui, c'est vrai!

Nous avons vu le bill 1. Si je ne me trompe pas, M. le Président, le bill 1 est encore au feuilleton. Nous avons vu le petit jeu qu'ils ont essayé de faire, du patinage; ils n'ont pas réussi. Après cela, nous avons vu sur le bill 101 — peut-être qu'on va appeler celui-là le bill 167, je l'ignore — un autre bâillon et, aujourd'hui, le leader du gouvernement nous présente un autre bâillon. Autrement dit, M. le Président, en quatre mois et on peut dire depuis treize mois, sur les deux bills majeurs, si vous voulez, the two masterpieces of this government, they were obliged to use closure to bring in their masterpieces. The inhability of this government to present, pass and have enacted their laws, and they have the majority, si je ne me trompe pas, 71 à 37. Ils ne sont pas capables, ils n'ont pas les moyens, fin de session, bâillon. Cela, c'est le jeu, si vous voulez, M. le Président, d'un parti qui s'appelle démocratique. Oh, I remember those songs of government. Oh do I remember them when we were the government, only they could tell the thruth, only they knew what they were doing, only they had all the answers. Only they, mais une fois rendus au gouvernement, qu'est-ce qu'ils font? Vous le savez comme moi, M. le Président. Maintenant, c'est devenu une tradition pour le gouvernement, le bâillon. C'est une tradition.

M. Brassard: La camisole.

M. Springate: Le député de Saint-Jean rit. Il sait comme moi que c'est leur coutume, leur tradition. Les gens de mon comté, des comtés que l'Opposition représente sont obligés de venir nous voir. Ils demandent à nos membres qui siègent à l'Assemblée nationale ou à la commission de bien les représenter et de bien faire valoir leurs points de vue. C'est pour cela qu'à l'étude article par article, c'est justement ce que nous faisons. Aujourd'hui, le député de Jacques-Cartier vous a dit, M. le Président, qu'au lieu de nous bâillonner on nous donne seulement quinze jours de plus. Quinze jours, ce n'est pas beaucoup et, dans deux semaines, vous verrez que ce bill sera adopté de façon normale, au cours des travaux normaux de cette Chambre. Bien non. Il y a plusieurs questions qui se posent: Combien cela va-t-il coûter? Est-ce que nous allons être assurés si on se promène dans le Maine, à New York, etc.? Il y a bien des questions.

Bien, quelque chose me fait peur parce que je vois ce gouvernement agir, c'est toujours de la même façon. Il dit qu'il est démocratique et, dans le pratique, il ne l'est pas. M. le Président, vous le savez autant que moi. Je sais que cela vous fait mal, vous qui défendez les droits de tout le monde, je sais que cela vous fait mal. Mais, it is just one, in a parade of many steps, that is leading this government to something that is called a dictatorship that they all want so desperately; they all are trying to grab with any reason, in anyway that they can. And it is truly on the whip; they say no. Ils savent que j'ai raison, ils le savent.

M. le Président, le leader du gouvernement veut que le rapporteur fasse rapport avant ou le 16 décembre. In English, we call it the guillotine. En français, c'est le bâillon. You can say it in English, you can say it in French, it is a guillotine, it is the same thing. What I am saying is this, Mr Speaker, whether you say it in English, whether you say it in French, it all means one very sad, very disappointing, very hard wrenching and it is this, Mr Speaker, and once again this government has shown, and what they say, and what they do, has absolutely nothing to do with the truth or with reason. Mr Speaker, I close on these words: Democracy is not alive and well in Quebec; with the Parti québécois, it is exceptionally sick. Thank you, Mr Speaker."

Le Vice-Président: Le journal des Débats n'a pas enregistré mon "please" de tantôt mais quand même, M. le député de Jonquière, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas une...

M. Claude Vaillancourt M. Vaillancourt: M. le Président... Le Vice-Président: Mme le député d'Acadie.

M. Vaillancourt: ... je n'ai absolument aucune hésitation à venir parler en faveur de la motion du leader du gouvernement car, malgré les propos du député de Westmount, je suis absolument convaincu que le leader du gouvernement n'aurait jamais présenté une telle motion s'il s'était rendu compte, au fil des mois, que cette même Opposition voulait étudier ce projet de loi. J'ai été à même de constater, depuis plusieurs mois, et depuis quelques jours surtout, que l'Opposition ne veut pas, ne voulait pas et n'a jamais voulu étudier en profondeur le projet de loi no 67 puisque, dès le début, c'est-à-dire dès le dépôt du livre bleu, elle avait dénoncé ses couleurs, elle avait annoncé ses intentions et elle rejetait tous les principes fondamentaux contenus dans le projet de loi no 67.

M. le Président, l'Opposition officielle, l'Opposition de l'Union Nationale et le député de Beauce-Sud, malgré leurs cris d'aujourd'hui, malgré leurs pleurs, n'ont jamais voulu accepter les principes du projet de loi no 67. Avant même d'entreprendre l'étude de l'article premier du projet de loi no 67, nous avons assisté à une foule de motions préliminaires. Je vous assure, M. le Président, que, n'eût été d'une décision extrêmement sage de la présidence, nous serions encore, ce 13 décembre 1977, en train de discuter et de débattre des motions préliminaires.

M. le Président, au cours de ces travaux, l'Opposition a régulièrement essayé, et ce, malgré nos règlements, de détourner les principes du projet de loi, de présenter des motions toutes déclarées et jugées irrecevables afin de contourner les principes du projet de loi.

M. le Président, je dois vous avouer, vous répéter que cette attitude ne m'a aucunement surpris puisque, dès le mois d'avril dernier, l'Opposition officielle et l'Opposition reconnue annonçaient déjà qu'elles étaient en désaccord total avec le contenu du projet de loi no 67.

M. le Président, que peut faire un gouvernement démocratique lorsqu'il se rend compte que l'Opposition ne veut pas étudier un projet de loi? Est-ce qu'un gouvernement peut imposer à l'Opposition l'étude d'un projet de loi? Le temps, les mois, les semaines nous ont démontré que cette Opposition, les amis d'en face en général, ne voulait pas étudier ce projet de loi.

M. Picotte: Ce n'est pas sûr. Ce n'est pas sûr.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le leader du gouvernement ne fait que répondre à l'une de leurs attentes.

Le Vice-Président: Je m'excuse, M. le député. M. le député de Maskinongé, s'il vous plaît, et tous les autres.

M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je disais, M. le Président, que cette motion était attendue par l'Opposition. Elle devait même être souhaitée par l'Opposition, elle qui a toujours démontré qu'elle ne voulait pas étudier le projet de loi no 67. Vous devriez être d'accord. Vous devriez voter pour ce

projet de loi et la motion puisque c'est l'attitude que vous avez démontrée depuis le mois d'avril 1977.

M. le Président, on parle d'assurance automobile depuis huit mois. Dès le mois de mai 1977, la commission parlementaire itinérante était rejetée par l'Opposition, mais dès le mois de mai 1977 on parlait d'assurance automobile au Québec au cours d'une tournée ministérielle dans les douze principales villes du Québec.

M. le Président, en plus de la tournée ministérielle où des centaines de Québécois ont pu se faire entendre, en plus de cela, commission parlementaire après la première lecture, 23 mémoires présentés, 23 mémoires entendus, mission accomplie; deuxième lecture, commission parlementaire, étude article par article. Je pense que les statistiques ont été fournies cet après-midi à l'Assemblée nationale pour démontrer qu'actuellement nous avons passé au-delà de 80 heures à étudier le projet de loi no 67 et, pourtant, nous ne sommes rendus qu'à l'article 17 de ce même projet de loi.

L'Opposition a eu toutes les chances...

M. Lavoie: Question de privilège, Mme le Président. Avez-vous dit que nous sommes rendus à 80 heures d'étude en commission, après la deuxième lecture? C'est combien, après la deuxième lecture, article par article?

M. Vaillancourt (Jonquière): C'était 35 heures hier.

M. Lavoie: Ah! 35!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Laurier. M. le député, c'est toujours vous qui avez la parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est moi qui ai la parole, Mme le Président? J'en doutais fortement, cela doit faire mal à l'Opposition.

Mme le Vice-Président: Vous aviez déjà répondu à une question, M. le député, et j'en concluais que vous aviez accepté la question.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mme le Président, c'était une question de privilège. Je pense que l'Opposition a eu toutes les chances d'étudier ce projet de loi. Elle l'a rejeté, et tout à l'heure j'entendais le député de Westmount larmoyer, quasiment supplier le gouvernement; elle est prête, ce soir, à étudier le projet de loi no 67.

La question que j'ai à vous poser est la suivante: Pourquoi n'avez-vous pas profité de toutes les chances que vous avez eues d'étudier en profondeur le projet de loi no 67? L'Opposition a rejeté toutes ces chances. Aujourd'hui, elle supplie; aujourd'hui, elle réclame; aujourd'hui, elle demande. On dit qu'en droit personne ne peut invoquer sa propre turpitude et je pense que l'Opposition a été tout simplement l'artisane de son propre malheur. Merci, Mme le Président.

Des Voix: Bravo!

Mme le Vice-Président: M. le député de Gaspé.

M. Marchand: Superbe, mes frères. M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: Merci beaucoup. Merci, Mme le Président, et merci aussi à Mme le député de L'Acadie qui a bien voulu, non pas me céder, mais me laisser passer le premier.

Mme Lavoie-Roux: C'est un plaisir, M. le député.

M. Le Moignan: Je trouve que c'est très aimable de votre part. Mme le Président, évidemment, le député de Westmount m'a étourdi un peu les tympans, mais le député de Jonquière m'a permis de me replacer un peu avec cette longue glose où il a taxé l'Opposition de tous les péchés qui peuvent se rattacher à cette Loi sur l'assurance automobile. Mme le Président, le 15 novembre dernier, au soir de cette formidable victoire du PQ, j'ai pensé à un célèbre vers. Cela fait longtemps que je n'ai pas cité de vers en cette Chambre. J'étais seul, tard dans la nuit — et c'est indiqué, madame — et j'ai pensé: "Le soleil s'est levé, retirez-vous, étoiles". Or, les étoiles, c'était le Parti libéral et le soleil, c'était, évidemment, le gouvernement du Parti québécois.

Mais, quand nous arrivons un an plus tard, quand nous regardons ce même soleil qui nous éblouissait ce soir-là, on s'aperçoit qu'il est un peu obscurci. C'est un soleil d'hiver, un soleil qui ressemble à la température que nous connaissons dans le moment. Vous voulez me ramener au débat, madame; je vois que vous me regardez et j'y reviens. Si nous voulons parler, justement, de l'assurance automobile, quand le ministre a fait cette tournée dans la province, elle a essayé d'éclairer les gens et elle est allée dans plusieurs villes. Depuis la tournée du ministre, avec toute la publicité qui a encadré cette tournée, non seulement la population, mais même les députés de cette Chambre, ceux qui ont siégé en commission ne sont guère plus avancés qu'ils ne l'étaient il y a huit mois. A ce moment-là, on n'avait aucune tarification. On ne connaissait rien des indemnisations. Quand on regarde le livre bleu et qu'on compare avec le projet de loi no 67, quand on voit les centaines de questions qui ont été posées... Je suis allé trois ou quatre fois à la commission, juste assez pour me dire qu'à chaque fois des douzaines de questions sont demeurées sans réponse. Là, on va nous bousculer. On va nous forcer à voter une loi.

On va nous forcer à voter une loi à la vapeur et nous aurons étudié peut-être 30 articles au maximum. C'est donc dire qu'il va en rester presque 200. Encore là, qu'est-ce que la population attend du gouvernement actuel? Si on a blâmé tout à l'heure l'Opposition qui refusait d'étudier ce projet

de loi, cela fait huit mois que nous sommes dans la brume, cela fait huit mois que nous demandons des explications ici même en cette Chambre en deuxième lecture. Nous avons posé de nombreuses questions au ministre, et le ministre n'en a jamais fait allusion. Il n'a apporté absolument rien à nos doutes, à nos inquiétudes.

C'est encore la même chose qui se produit là-bas, au salon rouge. Quand on va nous forcer à voter vendredi, ce sera très difficile pour nous, sans vouloir faire de basse politique, en essayant d'être le plus honnête possible, de répondre à nos commettants qui vont nous poser des questions sur ce projet de loi. Mais c'est un projet de loi qui concerne des millions de Québécois, ce n'est pas simplement un petit projet de loi qui concerne une localité, ce sont tous les citoyens de la province de Québec qui vont avoir à payer cette loi. Les citoyens, justement, ne savent pas ce qui les attend. On sait qu'il y a un certain principe, les gens nous disent des fois: Laissez donc le gouvernement se débrouiller avec son projet de loi. Vous êtes fous dans l'Opposition, n'apportez donc pas d'amendements. Le gouvernement a retenu un amendement jusqu'à ce jour, à moins de me tromper, un seul amendement.

Mais nous ne sommes pas là tout de même pour approuver. Si l'Opposition ne fait pas de récrimination, n'apporte pas d'amendements, plus tard, on pourrait dire: Ah! si j'avais su, si j'avais su, j'aurais protesté. Mais c'est justement pour cette raison que l'Opposition veut protester, même si le gouvernement est sourd. Là au moins, dans un an, dans deux ans, peut-être, quand on aura vu les implications, la réalité de ce projet de loi, on pourra dire: L'Opposition, qu'elle soit officielle ou non officielle, c'est bien secondaire, a au moins lancé le S.O.S. L'Opposition aura prévenu le gouvernement.

C'est très regrettable, le député de Westmount vient de le dire, il y a eu deux lois importantes, la loi 101 qui a été bousculée, qui a été précipitée, qui a été adoptée à la vapeur après trois longs mois de commission où encore là le gouvernement aurait pu de temps à autre accepter un amendement. Le gouvernement devrait apprendre à écouter l'Opposition. Si le gouvernement acceptait un amendement de temps à autre, l'Opposition serait peut-être portée à travailleur un peu plus vite. C'est cela, vous nous paralysez, vous nous empêchez d'avancer et ensuite vous venez nous blâmer de prendre ce temps précieux des commissions.

Mme le Président, une loi où le public n'est pas renseigné, une loi où même les députés ministériels ne sont pas plus renseignés que ceux de l'Opposition, ce n'est pas parce que nous sommes tous lents de "comprenure". Il y en a quelques-uns qui comprennent chez nous et les plus intelligents n'ont pas encore compris grand-chose...

M. Marcoux: II y en a.

M. Le Moignan:... à part les autres en face qui comprennent très bien, ceux qui ont la lumière.

Nous n'avons pas cette lumière et ils refusent de nous la communiquer.

Maintenant, si nous regardons ce gaspillage de temps, ce n'est pas un gaspillage de temps, je pense qu'il y a des principes là-dedans, et si on veut simplement sauver une promesse électorale, si on essaie d'imposer une loi avant la fin de l'année 1977, cela paraît bien dans les journaux.

Il y a au moins deux ou trois promesses qui ont été remplies, mais ce n'est pas le but, l'art de gouverner. Gouverner, c'est surtout prévoir, c'est penser aux conséquences de ses actes. Je considère qu'à ce moment-ci c'est gênant pour nous et c'est surtout gênant pour le gouvernement. Quand on va voter cette loi, quand on va nous l'imposer, le vendredi 16 décembre, les gens vont dire: Comment cela se fait-il? C'est une loi dont on a étudié à peu près 40 articles sur 200. Comment les députés, en toute conscience peuvent-ils imposer un tel projet de loi?

C'est contre cette précipitation que nous voulons réagir. Quand nous avons demandé, il y a quelque temps, de reporter à six mois ce projet de loi, ce n'était pas pour perdre du temps, c'était pour donner au gouvernement le temps de s'asseoir, le temps de penser sa loi, le temps d'organiser la régie, le temps d'entrer en contact avec les médecins, les garagistes, les hôpitaux, les courtiers d'assurances, les compagnies d'assurances. Il y a des douzaines de points d'interrogation qui ne sont pas encore réglés. C'est pour cela que ce travail se continue ce soir. On peut peut-être dire: On est en train de tuer le temps, là-bas. Ceux qui sont ici sont sérieux, nous sommes tous sérieux et c'est ce qui nous fait de la peine. Quand on clôture une année remplie de promesses, on réalise qu'il y a trop de fiasco dans tout cela, qu'il y a trop de précipitation et j'aimerais bien que les ministériels le réalisent.

Je sais parfaitement bien que nous pouvons parler, nous aussi, toute la semaine, cela ne changera rien dans les idées du ministre, cela ne changera rien chez le leader du gouvernement, qui a une idée fixe. Ils ont beaucoup d'idées fixes et les idées des autres ne valent rien. Je souhaite tout de même qu'ils s'ouvrent les yeux avant qu'il ne soit trop tard. Nous allons continuer notre rôle, notre travail; nous n'avons pas envie d'abandonner la tâche, parce que les citoyens du Québec vont nous le reprocher un jour. C'est dans cet esprit que nous allons continuer la bataille. Merci.

Mme le Vice-Président: Mme le député de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme le Président. En moins de quatre mois, ce Parlement aura fait le tour du chapeau en ce qui touche l'imposition du bâillon aux travaux parlementaires. Personne n'a oublié la façon très peu élégante dont le gouvernement s'est servi pour mettre fin aux auditions sur le projet de loi no 1, un geste si peu élégant que même le premier ministre a dû le désavouer

en disant qu'il ne s'agissait pas de la trouvaille du siècle. Quelques semaines plus tard, suivant la motion de clôture mettant fin aux travaux de la commission sur le projet de loi no 101. A ce moment, le leader du gouvernement invoquait la nécessité de l'adoption de la loi avant le 26 août à cause de la rentrée scolaire. Aujourd'hui, environ trois mois plus tard, on invoque encore des raisons d'échéancier, soit la date fatidique du 1er mars, pour imposer la motion de clôture aux travaux de la commission sur le projet de loi no 67.

Au mois d'août, à l'occasion de la discussion de cette motion de clôture, de l'imposition de ce bâillon, je formulais deux observations. La première, évidemment, était un blâme au gouvernement, que je répète aujourd'hui, qui par cette procédure exceptionnelle mettait de côté le processus normal d'adoption des lois en utilisant sa majorité pour faire adopter un projet de loi. Je ne nie pas le fait que les règles de cette Assemblée permettent d'utiliser le bâillon.

Ma deuxième observation était à l'effet de demander au gouvernement de planifier à l'avenir ses projets de loi de telle sorte que leur adoption ne soit pas soumise à des impératifs qui tiennent davantage compte des intérêts à court terme d'un parti politique qui se trouve temporairement au pouvoir, mais qui tiennent bien davantage compte des intérêts à long terme de l'ensemble de la population.

Avec la motion de clôture qui est présentement devant nous, d'une part le gouvernement force par sa majorité l'adoption d'un projet de loi qui est fortement contesté dans la population. Je pense que d'autres l'ont signalé avant moi et l'on sait que le gouvernement nous arrive parfois triomphant quand les sondages lui sont favorables.

Cette fois les sondages sur le projet de loi 67, le gouvernement devra bien l'admettre, ne lui étaient pas favorables et il semble que ce projet de loi soit contesté par la population.

D'autre part, le gouvernement choisit d'utiliser une procédure exceptionnelle qui lui est sans doute permise, comme je le disais plus haut, par les règlements de la Chambre, mais qui néanmoins met sérieusement en doute le processus démocratique de notre Parlement quand il est utilisé aussi fréquemment et sans raison suffisante.

Mme le Président, je le répète, c'est trois fois dans trois mois. Moi qui avais vu cela de loin dans le passé, je ne pensais pas que je serais dans le bain aussi rapidement et aussi intensément. Je crois qu'il n'y a pas de raisons suffisantes d'avoir recours à ce moment-ci à une telle mesure. Le député de Beauce-Sud nous a décrit, je pense, avec fidélité le déroulement des séances qui ont été tenues sur ce projet de loi et le député de Jonquière a simplement confirmé ceci avec moins de détails.

Il y a eu 23 mémoires qui ont été entendus — quelle belle chose! — à la commission parlementaire. Sur le projet de loi 9, nous en avons entendu 25 et cela n'a pas semblé être un tour de force, loin de là, si bien que même aujourd'hui on en a privément entendu un autre qui n'avait pas réussi à se rendre à temps pour la commission parlementaire. Quant aux 35 heures dont il nous parle pour l'étude d'un projet de loi qui contient 192 articles, je vous avouerai, Mme le Président, que ce n'est pas un abus, et je pense que personne n'a infirmé les affirmations du député de Beauce-Sud, à savoir que dans la plupart des cas, ou très souvent, c'étaient des membres du gouvernement qui eux-mêmes ajournaient la séance et mettaient fin temporairement aux travaux pour diverses raisons, entre autres les demandes qui leur étaient faites par les partis d'Opposition de déposer les documents pertinents, afin de permettre une étude sérieuse du projet de loi.

Je vous ferai remarquer que, par exemple, dans le cas du projet de loi no 9, il se peut qu'on passe 35 heures à l'étudier, mais je pense que ce ministre — cela ne veut pas dire que je serai d'accord avec tous les amendements qu'il fera, qu'il ne présentera que de bons amendements — a le souci de faire adopter un projet de loi qui soit bon et qui soit vraiment à l'avantage et serve les intérêts de la population qui est concernée par ledit projet de loi.

J'ai vraiment l'impression que, dans le projet de loi 67, le ministre n'a pas le même souci. Les demandes qui ont été faites pour le dépôt des documents m'apparaissent tout à fait pertinentes. Les demandes qui sont faites quant au dépôt des règlements, compte tenu des montants qui maintenant apparaissent beaucoup plus élevés que ceux qui avaient d'abord été dévoilés par les actuaires du gouvernement ou par le gouvernement lui-même, nous font penser qu'il ne s'agit pas là, de la part des partis de l'Opposition, de demandes irréfléchies ou frivoles.

Je sais que le gouvernement veut l'assurance obligatoire pour tous les citoyens du Québec. Je pense que c'est un objectif que tout le monde partage en cette Chambre, mais pourquoi, si c'est là un premier principe qu'on veut faire adopter, ne pas l'avoir fait d'abord adopter et ensuite prendre le temps suffisant, avant que la loi soit éventuellement adoptée... Je pense qu'il y a des principes qui sont bons dans ce projet de loi et auxquels l'Opposition souscrit, mais à ce moment-ci, on va adopter un projet de loi qui aura été à peine amendé et on ne se sera pas soucié de le rendre le meilleur possible.

Je pense qu'il ne s'agit pas uniquement, pour un gouvernement, de faire adopter des projets de loi. Il doit être tout aussi soucieux de faire adopter de bons projets de loi. Je pense qu'on ne peut arrêter après le douzième article. On me dit que les premiers articles étaient évidemment beaucoup plus complexes que peut-être un grand nombre d'autres qui vont suivre et que, même si les douze premiers articles semblent avoir pris passablement de temps, il ne faut pas, par un calcul mathématique, en déduire la même chose pour ceux qui restent. Je pense que le gouvernement ne se soucie pas suffisamment de poursuivre jusqu'au bout cette étude du projet de loi. Même si, à la fin, les Oppositions votaient contre le projet de loi, si au moins on avait réussi à l'améliorer, à le rendre

plus acceptable et d'une qualité qui serve mieux la population, je pense que c'est un objectif sur lequel on pourrait tous se rejoindre.

Qu'arrivera-t-il des amendements que les Oppositions n'auront même pas eu le temps de déposer ou de discuter? Sans doute, on les déposera avec le rapport de la commission, comme on l'a fait dans le cas de la loi 101. Mais on sait ce que cela veut dire. C'est une formalité et je ne sache pas, sauf pour un amendement de concordance et une faute de grammaire — c'était aussi fort important — qu'on ait retenu aucun des quelque 100 amendements qui avaient été déposés avec le rapport de la commission. Je crains fort que le même sort n'arrive à ce projet de loi. On aura beau accuser les Oppositions de faire de l'obstruction, enfin employer tous les termes que l'on utilise couramment du côté du gouvernement pour justifier son comportement, il reste néanmoins qu'on prend le côté du gouvernement pour justifier son comportement, il reste néanmoins qu'on prend le risque, et seul le gouvernement en portera la responsabilité, d'adopter à la hâte un projet de loi sans tenir compte d'amendements qui pourraient l'améliorer grandement et qui, à long terme, seraient à l'avantage de la population.

Mme le Président, en terminant, je veux redire mon désaccord sur la motion de clôture qui est présentement devant la Chambre quant au projet de loi no 67. Evidemment, cette motion sera adoptée; c'est la loi du plus fort, la loi du plus grand nombre, mais ce n'est pas nécessairement la règle de la sagesse. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, Mme le Président, vous me permettrez sans doute de loger à l'intérieur de cette discussion quelques commentaires pertinents à la motion de clôture concernant le projet de loi no 67 sur l'assurance automobile. Mme le Président, si j'étais masochiste, je dirais aux gens d'en face: Dépêchez-vous, adoptez ce mauvais projet de loi. Je vous dirais de vous dépêcher de l'adopter, sachant fort bien que la majorité de la population n'en veut pas et que la majorité de la population tiendra rancune au gouvernement d'avoir adopté un tel projet de loi sans, au préalable, avoir donné toute l'opportunité à la commission de l'améliorer.

Est-ce que ce projet de loi a besoin d'améliorations? Bien oui. Seulement après une petite tournée de Mme le ministre et suite à l'étude en deuxième lecture, Mme le ministre a cru bon d'apporter des douzaines et des douzaines d'amendements. Si seulement après quelques discours en deuxième lecture les partis d'Opposition et les gens qui sont venus présenter des mémoires à la commission ont convaincu Mme le ministre d'apporter de nombreux amendements, c'est que ce projet de loi avait été présenté à la hâte et qu'il ne répondait pas à l'aspiration des Québécois.

Mme le Président, si Mme le ministre avait daigné les écouter en commission pendant encore deux ou trois semaines, les partis d'Opposition l'auraient certainement convaincue d'amender son projet de loi ou, encore, tout simplement de le retirer. Après avoir visité personnellement plusieurs régions du Québec et après avoir été présent régulièrement dans mon comté, tout cela en écoutant bien objectivement, je suis convaincu et je suis en mesure de dire que la majorité des Québécois ne veut pas de ce projet de loi tel que présenté et qu'elle ne sera pas heureuse s'il est adopté tel quel.

Je ne comprends pas et la population ne comprend pas pourquoi Mme le ministre ne veut rien modifier et qu'elle semble vouloir faire fi de la démocratie qu'on devrait trouver actuellement au Québec. Or, le député de Jonquière n'est pas tout à fait juste lorsqu'il affirme que l'Opposition n'a pas voulu étudier ce projet de loi. L'Opposition a attendu longtemps — il faut se le rappeler — les documents exigés, documents qui ont tardé à venir du ministre, Dieu sait si cela a pris du temps avant que le ministre apporte ses documents en commission. Ce n'est pas tout à fait la faute de l'Opposition, car le député de Jonquière sait fort bien que Mme le ministre n'était pas prête à défendre son projet de loi et qu'elle n'était pas prête à répondre aux questions de l'Opposition. Cela fait 35 heures que nous discutons ce projet de loi en commission. C'est vrai, Mme le Président, mais après avoir obtenu les documents que l'Opposition a exigés du ministre, j'aimerais savoir combien d'heures, sur ces 35 heures, se sont écoulées après que nous avons eu les documents et après que nous avons pu discuter objectivement avec les renseignements nécessaires.

Comment le ministre peut-elle affirmer être en possession de toute la vérité quand, après seulement quelques jours, l'Opposition a déjà démontré à ce même ministre que ce dernier s'était trompé de quelque $80 millions sur un total de $350 millions. On avait oublié $10 millions qui sont portés à l'assurance maladie, $7,5 millions pour les rentes d'invalidité du Régime de rentes du Québec, $2,5 millions pour les rentes de retraite et pension de vieillesse, pour la Commission des accidents du travail, tout près de $3 millions, et ainsi de suite, pour un total de $86,3 millions. Imaginez-vous, $86 millions sur une possibilité de $350 millions. Qu'est-ce que cela sera dans six mois? Qu'est-ce que cela sera dans un an? Et qu'est-ce que cela sera dans deux ans si seulement après quelques jours de commission parlementaire déjà l'Opposition a pu prouver à Mme le ministre qu'elle s'était trompée d'au-delà de 25% quant au coût de ce projet de loi.

Comment Mme le ministre peut-elle affirmer avoir vu juste à 100% quant à l'application et au résultat de ce projet de loi? Mme le Président, vous me permettrez d'en douter, parce que si seulement après quelques jours, comme je le disais, en commission parlementaire, on a pu déceler une marge d'au moins 25% d'erreur, qu'est-ce que cela sera quant à l'application de ce projet de loi?

Quand on parle de la Commission des accidents du travail pour prendre charge de l'indemnisation, encore là je me pose de sérieuses questions quant à l'efficacité. Faut-il avoir déjà travaillé quelques dossiers visant la Commission des accidents du travail pour se convaincre que cela ne sera certainement pas plus rapide que les tribunaux. J'ai des cas J'en ai un ici devant moi datant de 1960 qui est encore en litige et qui n'a pas encore été réglé concernant la Commission des accidents du travail. Dix-huit ans, pouvez-vous trouver cela devant les tribunaux? Je ne charrie pas, je parle d'un cas qui est arrivé à mon bureau lundi en provenance de mon comté. Un cas qui a passé 18 ans devant la Commission des accidents du travail et qui n'a pas encore été réglé. On parle d'efficacité et on veut donner à cette commission l'administration de l'indemnisation. Mais, Mme le Président, quant à l'efficacité il y aura besoin d'y avoir des changements parce qu'on est en mesure de se poser des questions.

Ce n'est pas uniquement la volonté des partis d'Opposition d'amender ce projet de loi. Non. C'est toute la population. Ce sont plusieurs Québécois qui espèrent que ce projet de loi subisse des amendements majeurs pour ne pas dire espérer que ce projet de loi soit retiré de la circulation.

Ce genre de procédure de la part du gouvernement d'amener une motion de clôture, Mme le Président, est fort dangereux. Il nous mène même tout droit à l'Etat totalitaire et fait fi de la démocratie parlementaire. Je n'accepte pas que le gouvernement bouscule le processus législatif particulièrement pour hâter l'adoption d'un projet de loi aussi mal préparé. Mme le Président, le député de Saint-Jacques, et maintenant ministre délégué au Haut-Commissariat, aux loisirs et aux sports, avait parfaitement raison quand il affirmait dans cette Chambre qu'un gouvernement qui se sert du bâillon, qu'un gouvernement qui se sert de la guillotine est un gouvernement qui est dans l'impasse. Pour toutes ces raisons, je voterai contre la motion de clôture.

Mme le Vice-Président: M. le député de Verdun.

M. Lucien Caron

M. Caron: Mme le Président, je ne peux pas faire autrement que de me lever et d'essayer de parler pendant quelques instants sur la motion de bâillon que le gouvernement nous impose le 13 décembre 1977. Vous ne savez pas à quel point je peux être déçu. Etant dans cette Chambre depuis 1970, j'ai été assis juste à vos côtés, j'ai été assis sur d'autres banquettes, et j'ai entendu mes bons amis d'en face...

M. Guay: ... il se succède.

M. Caron: ... le leader du gouvernement et d'autres qui ne sont pas ici ce soir, ou le ministre délégué à l'énergie que je pourrais citer. Mais cela a adonné que je suis tombé sur un autre pour me faire claquer les oreilles continuellement au sujet de la motion de clôture. Ces gens d'en face, nos bon amis — Oui, vous pouvez bien rire — nous disaient: Nous autres, au pouvoir, jamais on ne fera cela. Cela ne fait pas tout à fait un an et un mois et cela fait trois fois, quatre fois...? C'est la raison pour laquelle je suis extrêmement déçu. Je voudrais vous lire seulement quelques paragraphes du journal des Débats, session 1974, volume 15, page 2141. Je citerai quelques paragraphes du député de Saint-Jacques, aujourd'hui ministre dans le cabinet Lévesque, qui devrait, il me semble, essayer de convaincre ses collègues. Je pense que les membres de cette Chambre vont être bien intéressés de l'entendre. Le président du temps, M. Lamontagne, notre whip aujourd'hui, avait donné la parole au député de Saint-Jacques, M. Charron, et je cite: "M. le Président, c'est la deuxième fois, en très peu de semaines, que j'ai l'occasion d'intervenir sur cette procédure exceptionnelle dont se réclame, ce matin, le gouvernement dans la motion présentée par le leader du gouvernement. Vous me permettrez, M. le Président — en vous rappelant que c'est la deuxième fois en peu de semaines — de commencer par vous faire remarquer que le ton désinvolte, badin, amusé et peu soucieux que vient de prendre le leader du gouvernement lui est probablement donné par l'habitude qui commence à se prendre, du côté du gouvernement, d'utiliser cette procédure exceptionnelle que, dans tout autre Parlement, on ne se résigne à utiliser qu'avec beaucoup d'hésitation. Ici, c'est devenu une habitude, une pratique gouvernementale. Les 102 peureux — il nous disait cela, à nous autres...

M. Verreault: Ce sont les 71 niaiseux.

M. Caron: II y en a 71 probablement, il en manque pas mal, il n'y a que quelques ministres. "Les 102 peureux qui se sont camouflés, mercredi soir dernier...

M. Burns: les 102 peureux!

M. Caron: Je lis, Mme le Président, à la page 2141: "...ne sont forts qu'ici et, encore, ils ne sont forts qu'ici lorsqu'ils se permettent d'utiliser une procédure exceptionnelle à chaque fois que l'occasion ou les besoins de vacances de ces messieurs commencent à se justifier".

Une Voix: II n'a pas dit cela! M. Gratton: Regarde donc cela!

M. Caron: Nous sommes prêts, nous autres, à revenir entre Noël et le Jour de l'An ou en janvier, cela ne nous dérange pas.

M. Burns: Tout est réglé! C'est fait. Pas de problème.

M. Caron: Je vais lire seulement un autre petit paragraphe, Mme le Président, et je cite: "II n'y a

pas un Parlement au monde—surtout pas un de régime britannique, comme celui dans lequel nous vivons — où cette procédure exceptionnelle est utilisée avec autant de fréquence et présentée avec autant de nonchalance et de manque d'intérêt, comme vient de le faire le leader du gouvernement, et cela qualifie déjà, par le simple ton, le respect que ce gouvernement a eu à l'égard de l'Opposition."

Mme le Président, je ne continuerai pas, mais je voulais juste demander au leader du gouvernement, mon bon ami, le député de Maisonneuve, qui se rappelle bien... Oui, mon bon ami. Je suis certain qu'il accepte que je dise cela. Vous nous avez cassé les oreilles; vous vous êtes fait... je ne dirai pas le mot que je viens d'entendre, mais, franchement...

M. Burns: On vous cassait les oreilles bien mieux que vous ne le faites.

M. Caron: M. le leader du gouvernement, je viens de vivre une élection et je peux vous dire que je vous rends service, ce soir. Le député de Verdun, actuellement, vous rend service, si vous voulez.

Parce que je vous considère encore comme des amis. Tous les membres de cette Chambre, pour moi, sont des amis et j'essaie de vous rendre service. J'ai fait environ 2000 portes et qu'est-ce que les gens me disaient? Une forte moyenne des portes me disait, Mme le Président: — c'est bon que je dise cela pour leur rendre service — On est déçu du gouvernement actuel. On est déçu, oui. On vous rend service l'Opposition officielle, l'Union Nationale, le député de Beauce-Sud qui a fait une très bonne intervention qu'on doit respecter. Je pense que c'est un homme qui est extrêmement pratique dans cette Chambre. C'est le type qui essaie d'aider le petit.

Vous savez à quel point on va attaquer le petit dans ce projet de loi. C'est encore le petit qui a besoin d'être aidé. Quand vous vous êtes fait élire, le 15 novembre dernier, le petit, on devait en prendre soin. Je vois le ministre, des Affaires sociales, en face de nous. Quand indexera-t-il les montants que les assistés sociaux reçoivent tous les mois?

M. Lazure: Ce ne sera pas long, cela s'en vient.

M. Caron: Mme le Président, je veux revenir au projet de loi. Je voulais juste le dire en passant. Oui, j'étais pour revenir...

M. Burns: La pertinence... Oui, mais vous étiez comme parti loin.

M. Caron:... mais c'était pour vous dire à quel point, le petit, vous n'y pensez pas. C'est en cela que j'essaie de vous rendre service ce soir.

M. Burns: Oui.

M. Carcn: J'essaie de vous rendre service. Es- sayez donc de le reporter en janvier ou en février, ce projet de loi, pour qu'il soit parfait. Vous-même vous l'avez dit, M. le leader dans votre exposé que ce n'était pas parfait, que c'était loin d'être parfait ou à peu près ces paroles. Si ce n'est pas parfait, si on peut faire mieux, je pense que c'est votre devoir, et nous sommes prêts à revenir entre Noël et le Jour de l'An, si vous voulez, on en janvier. Retardez les plaques d'immatriculation et vous donnerez à la population un projet de loi que la population mérite. Mme le Président, vous savez que la Commission des accidents du travail va s'en occuper. Je peux vous dire qu'il faut que cela s'améliore encore la Commission des accidents du travail. D'autres l'ont dit, ainsi que moi-même, qui nous occupons des gens de mon comté et d'autres comtés. Il y a certaines personnes qui s'en occupent de plus en moins. Ayant des fonctions supérieures, aux miennes, elles n'ont peut-être pas le temps voulu, mais par contre je prends le temps voulu pour m'occuper de la population.

M. Burns: De plus en moins.

M. Caron: Vous savez, quand on retourne cinq ou six ans en arrière, pour des gens qui ont eu des accidents et qui doivent faire des réclamations à la Commission des accidents du travail, ce n'est pas un cadeau. C'est entendu que quand le gouvernement prend quelque chose... Riez, venez dans les hôpitaux. Je vois le ministre des Affaires sociales... Venez faire un petit tour à l'Hôpital de Verdun au Centre hospitalier de Verdun, vous allez voir les gens qui sont dans les corridors. Mme le Président, on peut trouver cela drôle ce soir, mais c'est cela qui arrivera dans deux ou trois ans d'ici.

M. Burns: M. le député de Verdun. Mme le Président, question de règlement.

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le leader parlementaire du gouvernement. Un moment, s'il vous plaît.

M. Caron: Je sais qu'il ne me reste plus de temps, mais en conclusion, Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député...

M. Caron: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: Je regrette, M. le député de Verdun; il y là une question de règlement qui est soulevée par M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: Mme le Président, cela va être très bref. Je ne veux pas prendre le temps précieux du député de Verdun; je veux simplement lui demander comment il peut se faire que quelqu'un s'occupe "de plus en moins" d'un problème, à moins qu'on ne puisse trouver "de moins en pas" d'un problème.

M. Gratton: Mme le Président, une question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, je désire vous rappeler qu'il faut demander la permission à l'intervenant pour lui poser une question. Si M. le député de Verdun... Je n'ai pas terminé. M. le député de Verdun, je vous demande... M. le leader du gouvernement a manifesté l'intention de vous poser une question. Je vous ferai remarquer, M. le député de Verdun, qu'il vous reste tout au plus un quart de minute pour terminer. C'est à vous de décider si vous répondrez à la question et, à ce moment, il ne vous restera plus de temps pour faire votre conclusion. C'est à vous de déterminer le choix que vous voulez faire.

M. le député de Verdun.

M. Gratton: Mme le Président, sur une question de règlement.

Mme le Vice-Président: Mme le Président, il est très évident que le leader du gouvernement est le premier à savoir que sa question n'était pas une question de règlement et qu'effectivement il n'entendait pas, non plus, poser une question au député de Verdun, puisqu'il connaît très bien le règlement et qu'il lui aurait demandé la permission avant de poser la question.

M. Burns: Je peux la demander après, si vous voulez.

M. Gratton: Effectivement, le leader du gouvernement s'amuse ce soir, comme ses collègues de l'autre côté. C'est son droit de s'amuser, mais je vous demanderais d'exiger du leader du gouvernement surtout la plus grande rigueur quant aux interventions qu'il fera au cours des interventions de nos collègues.

M. Caron: Mme le Président, pour autant que je suis concerné...

Mme le Vice-Président: J'en conclus, M. le député de Verdun, que vous considérez que toutes ces questions n'ont plus leur raison d'être, puisque les mises au point ont déjà été faites. Concluez rapidement, M. le député; vous en avez pour moins d'une minute.

M. Caron: Mme le Président, j'en aurais tellement à dire. Naturellement, en dix minutes, on ne peut pas dire tout ce qu'on veut dire...

M. Burns: Bien non! C'est effrayant!

M. Caron: ... quand on voit nos collègues d'en face. Mais je peux vous dire que, dans la tournée des ministériels, je n'ai vu personne se présenter dans le beau comté de Verdun, parce que j'aurais pu, avec les lacunes qu'il y a dans le comté, rendre service au ministre et essayer de remédier à la situation.

Mme le Président, je vous remercie.

M. Burns: Eventuellement, on va s'en occuper.

Mme le Vice-Président: M. le député de Montmagny-L' Islet.

M. Julien Giasson

M. Giasson: Mme le Président, la vie parlementaire réserve parfois des surprises et quelquefois même des déceptions à ceux qui la vivent. Effectivement, je participe aux travaux de cette Assemblée depuis bientôt huit ans. Durant ce temps, il m'a été donné d'assister à des situations drôles parfois, même cocasses à certaines heures. J'ai été témoin de certaines volte-face aussi, mais je me dois de déclarer à cette Assemblée que la plus grande déception que j'aie connue à ce jour, dans ma vie politique, a été celle de voir le député de Maisonneuve, leader du gouvernement, se faire le parrain de la motion qui fait l'objet de nos présents débats.

S'il est un homme dans cette Assemblée qui, au cours de ses six années de vie dans l'Opposition, a bien voulu se faire le défenseur des droits les plus sacrés et les plus fondamentaux de l'Opposition, c'est bien le député de Maisonneuve.

Je ne puis croire encore qu'il ait accepté d'être la parrain de la motion qu'on nous a présentée. Si vraiment cet homme est sincère en présentant cette motion à l'Assemblée, il était fichtrement sépulcre blanchi lorsque, au nom de l'Opposition à l'époque, il se faisait le défenseur des droits fondamentaux de l'Opposition. Je ne sais pas à quel moment le député de Maisonneuve était sincère, je me pose encore la question: Est-ce au moment où il parraine la motion qui fait l'objet de notre débat ou si c'était lors de nombreuses interventions dans le passé alors qu'il voulait vraiment, au nom de l'Opposition à l'époque, défendre ce qui lui semblait être les droits absolus de l'Opposition officielle, entre autres celui de laisser tout le temps nécessaire à l'Opposition pour fouiller au maximum la loi présentée dans le temps, pour tenter d'y apporter des amendements qui auraient pu être valables? Effectivement, il y a eu, à cette époque, des amendements présentés par l'Opposition du temps qui ont été acceptés et qui contribuaient à améliorer les lois de cette Assemblée.

Lorsque j'ai dit que je vis présentement la plus grande déception que j'aie connue, c'est une réalité. Le projet de loi, sur lequel cette motion est appelée, est-il une loi secondaire? Non, c'est une loi importante selon la volonté même du gouvernement qui est devant nous. C'est une loi qui vient réaliser l'un des grands éléments du programme de ce parti depuis quelques années, c'est une loi qui retrouve son importance parce qu'elle modifie en profondeur les habitudes d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles, elle soutient des principes tout à fait nouveaux dans ce champ de l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile par rapport à la longue tradition que nous connaissons dans le monde de l'assurance non seulement au Québec, mais dans le monde.

Cette loi est importante et le gouvernement le sait. Elle est importante tant par les principes qu'elle sous-tend que par la réglementation qui devra en découler à la suite de l'adoption possible

de tous les articles que nous retrouvons dans le projet de loi. S'il est une loi, parmi d'autres, sur laquelle on ne devrait pas restreindre les droits de l'Opposition de soutenir un véritable débat, d'apporter des suggestions capitales au gouvernement, en vue de modifier ou d'amender certains articles, c'est bien la loi 67. On a tenté de nous laisser croire qu'il s'agit d'une loi dont nous connaissons les dispositions depuis avril dernier. J'ai entendu à maintes reprises les gens d'en face nous dire qu'il s'agit d'une loi qui est connue par l'Opposition comme par les membres du gouvernement depuis le mois d'avril. Il est important de préciser les faits. Effectivement, le gouvernement a donné une très bonne indication, en avril dernier, par le dépôt du livre bleu.

Le livre bleu a permis aux députés de cette Assemblée comme au public qui a pu en prendre connaissance de voir là une indication de la volonté gouvernementale de faire siens les grands principes modifiant les concepts d'indemnisation des victimes en matière de blessures corporelles. Nous n'avions pas le menu législatif en main, en avril dernier. Avant de déboucher sur un texte législatif, le ministre a cru bon de tenir des réunions en province, de recevoir des mémoires, d'entendre des témoignages et de dialoguer avec les intéressés qui venaient à ces réunions, à ces assemblées. Là encore, il s'agissait toujours du livre bleu et non pas du texte législatif.

Ce n'est qu'en août dernier, à la fin du mois, qu'il a été possible de prendre connaissance d'un premier texte qui a été déposé dans cette Assemblée en première lecture.

Mais qu'en était-il exactement, M. le Président? Ce texte n'avait pas atteint le niveau d'une loi qui était véritablement rodée ou prête puisque, depuis le dépôt du texte qui a fait l'objet du vote de première lecture, un très grand nombre d'amendements ont été déposés par le ministre.

Mais, au-delà de ce dépôt de première lecture avant l'ajournement de nos travaux à l'été, ce n'est que le 28 octobre dernier que les députés de cette Assemblée ont eu la possibilité, après un débat de quelques heures, de procéder au vote de deuxième lecture. Et là encore à ce moment, 28 octobre 1977, les principaux amendements que le ministre des Consommateurs avait à déposer n'étaient pas connus des députés de cette Assemblée. Ce n'est que quelques jours après avoir commencé en commission l'étude article par article de ce projet de loi, soit le 15 novembre dernier — cela ne fait pas deux mois ni trois mois, le 15 novembre dernier — qu'il a été possible d'obtenir copie d'amendements que le ministre voulait apporter à un très grand nombre d'articles de ce projet de loi.

Mais, même au-delà du dépôt de ces amendements que le ministre voulait apporter, il manquait encore une dimension fondamentale qui devait être portée à la connaissance de tous les députés de cette Assemblée et non seulement des députés de l'Opposition. Le financement du régime proposé par le gouvernement avait été conçu à partir d'hypothèses, de conjonctures qui n'étaient pas connues, non seulement de l'Opposition, mais des députés ministériels de cette Assemblée.

Il a fallu réclamer maintes et maintes fois, du ministre des Consommateurs, le dépôt de ce document qui était essentiel, afin que les députés membres de la commission parlementaire puissent juger du bien-fondé des prévisions que le ministre donnait sur un coût possible du régime, un coût possible de $345 millions. C'était très important de connaître ces données actuarielles, de juger de l'extrapollation qu'avait utilisée la firme d'actuaires qui avait voulu guider le gouvernement. Le principe même d'indemnisation par un système de rentes annuelles indexées au coût de la vie nécessitait, hors de tout doute, que nous ayons de l'information à partir des hypothèses sur lesquelles s'étaient basés les actuaires pour en arriver à un coût approximatif de $345 millions.

Et même là, en dépit de cette générosité apparente que le gouvernement veut laisser croire, nous n'avons pu avoir à notre commission parlementaire, les témoins qu'une journée. Il s'agit de l'un des actuaires qui avaient travaillé au programme et à l'évaluation des coûts et du financement de ce régime et du directeur de la régie. Ce n'est qu'une petite journée. Nous n'avons même pu avoir avec nous en soirée ces deux intervenants, soit l'actuaire M. Binet ainsi que le directeur de la régie, M. De Coster. Ainsi, au moment où on a indiqué que les témoins ne pouvaient pas revenir devant la commission en soirée, venir travailler avec nous, un grand nombre d'interrogations et de faits qui devaient être portés à la connaissance des membres de la commission parlementaire n'étaient pas connus.

Mme le Président, très sincèrement, si on avait donné à l'Opposition comme aux ministériels — quelques secondes pour terminer — la possibilité de continuer l'étude article par article sur une période de quinze jours seulement, je crois que la commission parlementaire aurait véritablement progressé. Nous aurions pu ainsi avoir un projet de loi — qui sera voté éventuellement, puisque c'est là la volonté ferme du gouvernement — encore mieux structuré, mieux articulé et qui aurait pu permettre aux députés, comme à beaucoup de membres du public, de le faire connaître aux usagers de ce régime, soit les futures victimes de l'automobile. Merci, Mme le Président.

M. Burns: Mme le Président, la question de règlement que je voulais soulever n'a plus d'objet, étant donné que le député a terminé, parce que je signalais que ses dix minutes étaient écoulées.

Mme le Vice-Président: M. le député de Jeanne-Mance et, ensuite, M. le député d'Outremont.

M. Henri Laberge

M. Laberge: Mme le Président, je me ferais des reproches de ne pas intervenir dans ce débat

parce que j'ai suivi toutes les délibérations de la commission et il est important pour moi, comme pour tous les membres du gouvernement, de donner aux Québécois un régime d'assurance automobile ou d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles plus humain qu'il ne l'a jamais été. A notre point de vue, coupable ou non coupable, responsable ou non responsable, dans un accident d'automobile, une victime est toujours une victime. C'est la raison pour laquelle nous avons opté pour le principe de l'indemnisation sans égard à la responsabilité.

Pourtant, Mme le Président, après avoir adopté le principe de l'indemnisation sans égard à la responsabilité, en deuxième lecture, ici, en Chambre, ce que nous avons essuyé en commission parlementaire—je ne suis pas le rapporteur de la commission, je n'ai pas à vous faire rapport — au tout début de cette commission, c'est un barrage systématique de l'Opposition pour nous faire dévier du principe qui était déjà adopté. C'était inacceptable. Nous avons perdu les deux premières semaines pendant lesquelles on aurait pu siéger, c'est-à-dire entre le 16 et le 29 novembre, alors que l'Opposition a tout simplement apporté des motions, soit pour reporter le projet de loi, soit pour rendre inopérante la régie qui avait été créée par un autre projet de loi, au mois d'août, la loi 49. On voulait lui enlever toute raison d'exister ou on voulait tout simplement rétablir, par des motions plus ou moins claires mais qui étaient faciles à lire, le principe de la responsabilité dans tout accident, ce qui veut dire qu'on détruisait le principe du "no fault" qu'on avait déjà adopté. C'était inacceptable et cela nous a fait perdre deux semaines de débats qui auraient été possibles.

Je voudrais faire une petite digression pour dire que je voulais, et je le veux encore, rendre hommage au député de Montmagny-L'Islet qui, depuis qu'il a siégé à la commission parlementaire, a permis à cette commission de travailler dans l'ordre parce que ses interventions ont toujours été propres. Mais cela n'a pas été le cas de tous les membres de l'Opposition. Je pense vouloir être un bon parlementaire et accepter que l'Opposition ait son rôle à jouer, mais il y a des rôles qui sont joués intelligemment et d'autres qui le sont moins parfois. Cela n'a pas été le cas de tous les membres de l'Opposition; je ne ferai pas le procès de toute le monde.

M. Goulet: Une question de règlement. M. Laberge: Je n'ai visé personne, encore.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse, sur la question de règlement.

M. Goulet: Mme le Président, je ne veux pas être désagréable vis-à-vis du député de Jeanne-Mance, mais cet après-midi, lorsque mon collègue de Nicolet-Yamaska a, à quelques reprises, parlé des travaux de la commission, à deux reprises celui qui occupait le siège du président l'a rappelé à l'ordre. Cela fait quatre à cinq minutes que le député de Jeanne-Mance a commencé à parler sur la motion et il ne fait que parler des travaux de la commission. Je ne vois pas la différence. Est-ce qu'il y a deux poids, deux mesures en cette Chambre, Mme le Président? C'est la question de règlement que je voulais soulever.

Encore une fois, sans être désagréable vis-à-vis du député de Jeanne-Mance, les propos qu'il tient actuellement et les propos que mon collègue de Nicolet-Yamaska tenait, Mme le Président, sont dans le même sens. Parce qu'il les a tenus à peu près quelques secondes on l'a rappelé à l'ordre, cela fait de trois à cinq minutes que le député de Jeanne-Mance parle des travaux de la commission et vous n'avez pas encore daigné le rappeler à l'ordre.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse, je crois en effet que vous avez été tolérant. Je pensais bien que cette question de règlement serait soulevée. Comme moi, probablement, au début de l'intervention, vous avez cru que M. le député en venait à parler de cette motion que nous discutons présentement. Je dois vous rappeler, M. le député, que nous parlons sur une motion du leader du gouvernement et qu'en effet, vous n'avez pas à nous parler des travaux à la commission parlementaire puisque le rapport n'est pas encore déposé à l'Assemblée nationale.

M. le député de Jeanne-Mance.

M. Laberge: Excusez-moi, Mme le Président, d'avoir dévié un peu. C'était peut-être une façon d'en arriver à ma conclusion puisque je ne veux pas abuser trop longtemps du temps de cette Chambre.

J'ai simplement fait la constatation que, depuis que le leader parlementaire a laissé entendre que cette motion pouvait être présentée en Chambre, c'est curieux, le bandeau qui était sur ses yeux jusqu'à ce moment lui étant tombé sur la bouche, il semble que l'Opposition a commencé à voir clair. Cet après-midi, en l'espace de deux heures, on a fait plus de travaux qu'en l'espace de deux semaines auparavant.

Mme le Vice-Président: M. le député, je devrai, encore une fois, vous rappeler à l'ordre.

M. Laberge: Je ne donnerai pas de détails sur ce qui s'est passé en commission, mais c'est simplement pour vous dire que, si cette motion était arrivée il y a deux semaines, je crois que nous pourrions apporter en Chambre vendredi un rapport complet et que le projet de loi aurait été étudié au complet. La seule chose que je déplore, c'est que cette motion ne soit pas venue deux semaines plus tôt. Cela aurait permis à l'Opposition de faire tout son travail plutôt que de fonctionner continuellement par motions dilatoires. C'est pourquoi j'appuie la motion du leader de l'Opposition. J'espère que, d'ici vendredi, nous pourrons en commission continuer à travailler et vous faire rapport ici, vendredi.

Mme le Vice-Président: J'imagine, M. le député de Jeanne-Mance, que vous avez fait un lapsus parce que c'est le leader du gouvernement qui a fait la proposition.

M. Laberge: Merci. Je voulais faire la correction.

Mme le Vice-Président: M. le député d'Outremont.

M. André Raynauld

M. Raynauld: Mme le Président, je voudrais indiquer que la motion que nous débattons ce soir est sans fondement. J'aurais bien aimé que ce que le député de Jeanne-Mance vient de dire ait quelque fond de vérité, quand il nous a dit que nous faisions un barrage. Je dois dire que, pour la plupart d'entre nous, nous ne faisions pas le poids. Alors, il était difficile de faire le barrage dont il a parlé.

La motion est sans fondement parce que d'abord — on l'a déjà dit — on a discuté en commission parlementaire environ deux semaines, environ 35 heures. Le débat, à mon avis, était, d'une part, utile et, d'autre part, il a été imcomplet. Nous n'avons pas pu soulever les questions que nous aurions voulu discuter, qui étaient des discussions fondamentales et d'une grande importance.

En effet, je pense que ce projet de loi s'inspire d'abord d'une philosophie que nous combattons. Parce que ce projet de loi est important et qu'il s'inspire d'une telle philosophie, je pense qu'il était également désirable qu'on donne l'occasion aux députés de l'Opposition, en fait à l'ensemble de l'Assemblée nationale d'en discuter et d'en approfondir tous les aspects. Un de ces premiers principes, c'est évidemment l'établissement d'une régie publique. Je pense qu'il s'agit d'une question importante. Ce n'est pas une question secondaire ou d'opportunisme de la part du gouvernement. Il y a un principe de fond qui est impliqué dans l'établissement de cette régie. Il s'agit d'une régie qui établit un monopole d'Etat. Au cours des travaux en commission parlementaire, il n'a pas été possible, par manque de temps, d'approfondir les implications de l'établissement d'une telle régie.

J'ajouterai même que, parmi les amendements qui ont été déposés il y a à peine trois semaines par le gouvernement, on retrouve un article comme celui-ci, qui est l'article 201, où la régie "avec l'autorisation du gouvernement peut acquérir et détenir des actions de toute corporation constituée pour pratiquer les assurances de dommages". On apporte un amendement comme celui-là. Nous n'avons pas eu le temps d'en discuter. Pourtant, un tel article ouvre la porte à des nationalisations en série, à des prises de participation auprès des assureurs dans les entreprises d'assurances privées. Encore une fois, nous n'avons même pas eu le temps de discuter d'un principe aussi fondamental d'un amendement qui était apporté à une autre loi que celle que nous étudions.

On établit donc comme premier principe une régie publique. J'ai dit que cette régie s'inspirait de principes et d'une philosophie sociale que nous combattons et qui nous est présentée par le gouvernement comme une politique visant à protéger les faibles, à protéger le grand nombre contre des minorités, ce à quoi nous nous opposons fermement parce qu'il ne s'agit pas de cela.

Si nous voulons protéger les faibles, si nous voulons protéger les gens démunis, nous pouvons le faire de façon directe soit par des subventions ou par les politiques sociales du soutien du revenu. Mais ce n'est pas en intervenant sur des marchés, en créant des régies publiques qui établissent des prix artificiels pour tout le monde et qui s'inscrivent dans une tendance à créer une société de plus en plus bureaucratique, une société de plus en plus dirigée, enrégimentée et autoritaire que nous allons rendre service aux pauvres et aux démunis.

Le deuxième principe impliqué dans ce projet de loi, c'est celui, évidemment, de l'assurance et du paiement d'indemnités sans égard à la responsabilité. Nous avons déjà manifesté notre accord sur ce principe fondamental. Mais nous avons eu une longue discussion que nous n'avons pas pu terminer. Nous avons proposé des amendements qui auraient été utiles au gouvernement et sûrement utiles à la population de recourir aux tribunaux lorsqu'il s'agissait de conflit entre les décisions que la régie va prendre sur les indemnités à verser, et un de ces amendements a été refusé. Nous avons également voulu proposer des amendements qui auraient maintenu le principe de responsabilité au-delà du régime de base des indemnités prévues; or, cet argument a été jugé irrecevable par le président. Encore une fois, nous n'avions pas le temps de discuter de ces problèmes de fond. Nous n'avons pas eu le temps, non plus, de discuter, par exemple, de tout un ensemble de problèmes reliés à la tarification qui, dans le projet de loi gouvernemental, impliquent des subventions d'un groupe à un autre groupe qui sont absolument arbitraires et injustes pour les gens.

On n'a même pas pu se rendre à la discussion de ce problème. On n'a pas pu, non plus, sauf incidemment, discuter du financement et du coût de ce régime d'assurance. Mais on a eu l'occasion, quand même, de faire ressortir environ $40 millions qui ne font pas partie de l'estimation faite par le gouvernement du coût de ce régime public, c'est-à-dire $10 millions qui seront, en fait, payés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec et qui, jusqu'à maintenant, sont recouvrés de la part des assureurs privés. On a trouvé $21 millions qui vont être, en fait, payés par le trésor sous forme d'une diminution de ses revenus reliée à la taxe sur l'essence et, enfin, environ $10 millions de plus qui sont un manque à gagner relatif à la taxe sur les primes d'assurance qui ne seront plus payés par les assureurs privés, et $40 millions de plus qui ne sont pas exigés des assurés, parce que

les indemnités sont réduites à cause de l'existence d'autres programmes gouvernementaux comme celui, par exemple, de la Commission des accidents du travail et, là, vous savez que...

M. Burns: Mme le Président, j'invoque le règlement. Nous parlons actuellement d'une motion en vertu de l'article 156. Peut-être que le député d'Outremont a toutes sortes de bons discours dans sa poche, mais, Mme le Président, je vous demanderais de le prier de garder ses bons discours dans sa poche pour les moments appropriés, ce n'est pas le moment de le faire. Actuellement, nous discutons tout simplement du fait d'utiliser les dispositions de l'article 156, c'est tout, pas plus.

M. Raynauld: Mme le Président, si vous me le permettez...

Mme le Vice-Président: M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: ... je répondrai au leader du gouvernement que j'essaie de trouver des raisons pour justifier la position que nous prenons sur la motion de clôture. On va quand même permettre d'essayer de donner des raisons...

M. Burns: Cela veut dire que vous avez des difficultés à trouver des raisons pour justifier votre position, c'est cela?

M. Raynauld: Non, plutôt que de vous attaquer et plutôt que de vous dire, à vous, à quel point vous manquez de respect pour cette Assemblée, j'essaie de donner des arguments positifs pour montrer que si le débat avait continué on aurait eu un meilleur projet de loi. Je pense que c'est tout à fait dans l'ordre, Mme le Président.

Ensuite, je voulais simplement ajouter que sur ce plan, en ce qui concerne, par exemple, le financement et le coût du régime, nous sommes justement, ce soir, à discuter de l'article 18 où il est établi que la Commission des accidents du travail va être le premier payeur et que la Régie de l'assurance automobile va être le dernier payeur avec le résultat que ce ne sera pas exigé de la Régie de l'assurance automobile.

Il y a des accidents d'automobiles qui vont être payés par la Commission des accidents du travail et il y en a pour $3 millions. Je dis: On aurait eu avantage à continuer de discuter et peut-être que cela nous aurait avantagé.

M. Burns: Question de règlement.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Encore une fois, le député d'Outremont, je ne fais pas d'argumentation, discute du mérite du projet de loi et je pense que ce n'est pas le moment de le faire.

M. Gratton: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Sur la même question de règlement, je pense, M. le député de Gatineau, de toute façon que cette même question de règlement a été soulevée souventefois ce soir. Je devrai...

M. Gratton: Vous pourriez quand même entendre ce que j'ai à dire avant de juger de ce que je veux dire. Je ne sais pas, je me pose la question.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau, alors je vais vous poser une question. Est-ce que vous intervenez sur cette même question de règlement?

M. Gratton: Oui, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Alors, je vous dis que je suis suffisamment renseignée sur cette question de règlement pour ne pas être obligée d'en entendre une nouvelle. Ce que je dis maintenant...

M. Gratton: Est-ce que je peux vous demander une directive?

Mme le Vice-Président: J'avais commencé... M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Est-ce que je pourrais vous demander une directive?

M. Burns: Le président est debout.

Mme le Vice-Président: M. le leader, s'il vous plaît! M. le député de Gatineau, je vais d'abord répondre à cette question de règlement. Ensuite, je vous entendrai si vous avez une directive à me demander. J'ai déjà rappelé plusieurs membres de cette Assemblée à la pertinence du débat. Je vous demanderais, M. le député d'Outremont, d'être bien attentif à ce que nous voyions à chaque fois le lien entre ce que vous apportez et la motion qui est en discussion.

M. Raynauld: Mme le Président, je vais essayer de m'en tenir à la directive de la présidence. J'achève, d'ailleurs, si M. le leader du gouvernement pouvait me laisser terminer. Je voulais ajouter un dernier point que nous avons découvert à l'occasion des travaux de la commission, et je montre que ces travaux sont utiles. Il me semble que c'est pertinent?

Mme le Vice-Président: M. le député d'Outremont, je disais tantôt que, tant que la commission n'a pas remis son rapport, nous ne pouvons pas parler des travaux de la commission comme telle. Alors, si vous voulez invoquer quelque chose par rapport au projet de loi, ne faites pas référence à la commission, s'il vous plaît!

M. Raynauld: Mme le Président...

Mme Lavoie-Roux: Parle de la température. M. Raynauld: Nous avions découvert...

M. Burns: Cela magane un discours écrit, cela!

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Raynauld: Mme le Président, nous avions découvert à l'occasion du livre bleu que ce régime public substitue des rentes à des valeurs en capital pour indemniser les victimes d'accidents d'automobiles. Nous avons découvert que, pour l'année 1978, on va verser effectivement à peu près $50 millions sur les $345 millions de prévus et je crois qu'il aurait été utile de continuer à discuter du régime...

M. Burns: Une récidive. C'est un récidiviste, le député d'Outremont.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement...

Mme Lavoie-Roux:... récidiviste sur les bords.

M. Burns: Oui, mais écoutez, quand même, Mme le Président, on peut admettre ensemble qu'on a affaire à un récidiviste absolument incroyable.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, je vous demanderais de me laisser estimer si vraiment le député est pertinent ou non. A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Gatineau!

M. Raynauld: Mme le Président, merci beaucoup pour cette interprétation. Je voulais ajouter sur ce plan que, pour justifier la continuation du débat, il aurait été utile de poursuivre les...

M. Duhaime: M. le député de Richmond.

M. Raynauld: ... discussions et les échanges de vues sur un sujet qui était aussi fondamental que celui-là où on substitue encore une fois un régime de rentes — on va payer des fois sur une période de 40 ans — à un régime où on paie une valeur en capital immédiatement.

Nous avons essayé, nous essaierons encore à l'avenir de faire donner aux gens la liberté de choix entre cette valeur en capital et des rentes à verser à l'avenir. Il aurait donc été utile, si nous avions pu continuer le débat, de discuter d'une question aussi fondamentale.

Mon dernier point ne soulèvera pas de problème.

M. Burns: Votre temps est expiré, je pense. M. Gratton: II a commencé à 21 h 25. Une Voix: Moins 25.

M. Burns: A 21 h 29.

M. Raynauld: Mon dernier point, c'est celui des documents que nous avons reçus avec beaucoup de retard. Je voulais souligner que des amendements nous ont été soumis la semaine dernière par le ministre. Cela c'est pertinent.

Mme Lavoie-Roux: II vous reste deux minutes.

M. Raynauld: On a reçu des amendements la semaine dernière, nous n'avons jamais reçu la réglementation et on n'a jamais été capable de discuter à fond le problème du financement de ce régime d'assurance automobile. Pour ces raisons, je vais m'opposer à cette motion de clôture.

Mme le Vice-Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député de Richmond.

M. Bisaillon: Si vous me permettez, c'est parce que je dois retourner en bas.

Des Voix: Bravo!

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: Mme le Président, on se retrouve encore une fois avec une motion appelée dans cette Chambre motion de guillotine. Je suis évidemment d'accord sur le bien-fondé de la motion du leader du gouvernement, pour plusieurs raisons que je pourrai expliquer ultérieurement. D'abord parce que, selon l'article 156.1, l'entente qui, normalement, doit avoir lieu entre les leaders n'a pas eu lieu, et aussi à cause du fonctionnement en commission parlementaire.

Par ailleurs, si je suis d'accord sur le bien-fondé de la motion, il semble que ce soit un peu avec regret qu'à chaque fois on est amené à se prononcer sur ce genre de motion, à cause des conséquences de ces motions, qui sont tout aussi graves pour les membres de l'Opposition, même ceux qui quittent la Chambre à ce moment-ci, que pour les ministériels; conséquences aussi pour les parlementaires dans le travail qu'ils ont à faire à l'Assemblée nationale et pour lequel ils ont été élus.

Quelles peuvent être les conséquences de ce genre de motion qu'on est forcé, régulièrement, dans cette Chambre de soumettre à la discussion des membres de l'Assemblée nationale? Je pense que dans les conséquences que je vais énumérer, il y en a certaines qui, effectivement, peuvent toucher le gouvernement, mais il y en a plusieurs, par exemple, qui peuvent toucher l'Opposition. Ce n'est pas seulement le gouvernement ou l'Opposition qui sont visés par ce genre de motion, mais c'est le parlementaire dans son travail. Si vous

voulez continuer à avoir de la crédibilité dans la population, tant de l'Opposition que du côté ministériel, il faudra peut-être prendre un peu plus au sérieux ce genre de motions et leurs conséquences. Donc, peut-être qu'on peut blâmer le gouvernement de les adopter, mais il faudrait aussi blâmer l'Opposition de le forcer, d'amener le gouvernement dans un goulot d'étranglement qui fait qu'il ne peut pas faire autrement pour voter sa législation que d'en arriver à ce stade.

M. Lalonde: Vous me faites pleurer.

M. Bisaillon: Impuissance de notre système parlementaire, première conséquence. Deuxième conséquence, l'empêchement qu'auront à court terme les députés de bonifier les lois. Quel doit être notre travail comme députés en commission parlementaire? Notre travail comme députés est d'examiner la législation article par article. Dans quelle orientation doit-on faire ce travail? On doit faire ce travail pour essayer d'améliorer au meilleur de notre connaissance, individuellement, comme représentants de chacun de nos districts électoraux, comme représentants de la population qui nous a élus, la loi article par article. A quoi assiste-t-on sur chacun des projets de loi majeurs actuellement? A un empêchement systématique d'améliorer la loi par le travail des députés en commission parlementaire. Après un mois de travail, quand on est rendu à l'étude de l'article 4 ou de l'article 5, il faudrait savoir, il faudrait avoir en tête que l'objectif des députés n'est pas à ce moment d'améliorer la loi et de passer à travers pour la bonifier.

M. Lalonde: Est-ce que le député me permet une question?

M. Bisaillon: Non, je n'en permets pas, j'ai seulement dix minutes.

M. Lalonde: Vous ne permettez pas de questions. D'accord...

M. Bisaillon: Après mes dix minutes, je répondrai à la question du député.

M. Burns: Assis!

M. Bisaillon: Deuxième conséquence, dangereuse selon moi, sur le déroulement de nos travaux. On reconnaîtra qu'en commission parlementaire on a très peu de formalisme, on est très peu rigoureux sur la procédure. On réussit à s'entendre entre députés de l'Opposition et députés ministériels sur une façon plus large, plus souple de procéder. Le danger, avec le genre de travail qu'on fait actuellement en commission parlementaire — l'exemple de la commission parlementaire sur le projet de loi no 67 n'est pas unique; il y en a eu d'autres, il y en a d'autres actuellement et il y en aura d'autres si on ne change pas d'attitude — c'est qu'on sera amené tranquillement à être plus rigoureux dans notre travail, plus procé- duriers au détriment du travail qu'on a à faire comme législateurs.

Troisième conséquence, on glisse tranquillement vers un rôle de l'Opposition et un rôle du gouvernement qui est très mal compris. Le rôle de l'Opposition, dans le système parlementaire britannique, n'a jamais été, n'est pas et ne sera jamais d'empêcher le gouvernement de faire adopter sa législation. Le rôle de l'Opposition, c'est d'éclairer la population, de susciter un débat pour démontrer à la population que la législation, selon l'Opposition, est mauvaise et surtout que l'Opposition représente, dans les circonstances, une alternative meilleure. Cela se bâtit sur une période de quatre ans. L'objectif de l'Opposition, c'est d'arriver, au bout d'une Législature, à pouvoir démontrer à la population qu'elle est capable de faire un meilleur travail.

Comment peut-on prétendre, avec le genre de travail qui se fait actuellement, que l'Opposition serait capable de faire un meilleur travail quand elle n'est pas capable de démontrer qu'elle peut discuter au fond? Pour pouvoir faire une démonstration publique, pour pouvoir susciter un débat valable, il faudrait discuter au fond des problèmes. Je pense que c'est très dangereux quand l'Opposition commence tranquillement à ne plus jouer le rôle qu'elle doit jouer dans le système parlementaire britannique. Si l'Opposition ne joue pas le rôle qui lui est dévolu dans notre système parlementaire, aussi bien dire qu'on n'a plus besoin de ce genre de régime parlementaire et qu'on serait aussi bien de fonctionner dans un autre type de Parlement.

M. Lavoie: Dictature!

M. Bisaillon: En terminant, je voudrais démontrer aussi que tout le travail qui s'est fait à la commission parlementaire sur la loi 67 a été finalement, au bout de la ligne, comme dans d'autres commissions parlementaires, de la procédure. Lorsque l'Opposition, lorsque les membres de la commission parlementaire ont été placés devant l'offre de discuter le problème au fond, en sautant des articles et en attaquant le coeur du projet de loi, ce qui était initialement leur demande, on a été placé devant un refus de l'Opposition de s'attaquer au coeur du problème. On aimait mieux discuter la question de procédure par une quinzaine ou une vingtaine de motions tout simplement procédurières avant même d'attaquer...

M. Lalonde: C'est faux! C'est faux! C'est épouvantable!

M. Burns: A l'ordre!

M. Lalonde: Arrêtez de mentir!

M. Burns: A l'ordre!

M. Bisaillon: ... le fond.

M. Lalonde: C'est faux! Je vais vous poser une

question. Est-ce que le député me permet de lui poser une question?

M. Burns: Non.

M. Lalonde: Question de privilège.

M. Lavoie: La vérité a ses droits.

Le Président suppléant (M. Marcoux): A l'ordre! Je demanderais au député de Laval d'être bien calme, je veux entendre la question de privilège du député de Marguerite-Bourgeoys. Il n'a pas besoin de crier pour cela!

M. Lalonde: A titre de membre de cette Assemblée...

M. Lavoie: Un instant! Ce n'est pas vous qui allez juger des décibels de ma voix, d'accord!

M. Burns: II n'y a pas de "d'accord". Voyons donc, ça paraît que le leader de l'Opposition est nerveux!

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le leader parlementaire du gouvernement!

M. le député de Marguerite-Bourgeoys, question de privilège.

M. Lalonde: A titre de membre de cette Assemblée, qui a eu l'occasion de travailler à la commission parlementaire sur le projet de loi 67, je m'inscris en faux formellement contre plusieurs des propos qui ont été tenus par le député de Sainte-Marie tantôt, qui parlait de quatre articles qui ont été...

M. Burns: Question de règlement, M. le Président. Question de règlement, M. le Président, question de règlement.

M. Lalonde: Voulez-vous demander à ce bonhomme-là de s'asseoir, M. le Président, je suis debout sur une question de privilège.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Je vais d'abord entendre la question de privilège.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que j'ai le droit de parole?

M. Burns: Mais il faudrait quand même qu'il s'agisse d'une question de privilège.

M. Lavoie: M. le Président, il n'a pas le droit de se lever là.

Le Président suppléant (M. Marcoux): La parole est au député de Marguerite-Bourgeoys, peut-être les autres après.

M. Lalonde: M. le Président, à titre de membre de cette Assemblée, mes privilèges sont brimés lorsque je sais par exemple qu'à cette commission parlementaire on est en train d'étudier l'article 17 et que le député de Sainte-Marie parle de quatre articles, quand il dit qu'on a fait seulement des motions de procédure et pas d'amendements au fond alors qu'on a fait des dizaines et des dizaines d'amendements sur le fond. M. le Président, il y a une limite à mentir ici en cette Chambre. On a beau tromper la population, ce n'est pas ici qu'on va tromper les membres de l'Assemblée.

M. Burns: M. le Président, question de privilège. Question de privilège.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Je crois qu'il n'y avait pas là de question de privilège, il y a des faits que le député de Sainte-Marie affirme et que vous ne partagez pas.

M. Lalonde: C'est la vérité que je ne partage pas.

Le Président suppléant (M. Marcoux):... vous pourrez dans votre discours...

M. Lalonde: II est fait.

Le Président suppléant (M. Marcoux): ... ou un autre député de cette Chambre pourra rectifier ces faits s'il le juge à propos. M. le député de Sainte-Marie. Il vous reste deux minutes.

M. Bisaillon: Je vais terminer immédiatement, M. le Président, je veux simplement souligner une chose, c'est aussi le privilège du député de Marguerite-Bourgeoys de se relever à l'intérieur du cadre de son intervention pour me reprendre si je me suis trompé. J'ai voulu souligner une chose, M. le Président. Les députés de l'Opposition qui nous demandent toujours de nous lever pour qu'on dise ce qu'on a à dire, bien je me lève, moi, pour le dire ce que j'ai à dire et cela vous touche. Cela vous touche, alors prenez-le. Prenez-le quand vous êtes visés; prenez-le! Quand le chapeau fait on le met. Quant le lait est "tiré" on le boit.

M. le Président, ce que j'ai voulu souligner, c'est qu'à chaque intervention la majorité des propositions, des motions qui ont été présentées, allait à l'encontre du principe de la loi.

M. Goulet: Question de règlement. M. le Président, surtout nous de l'Union Nationale qui prêchons l'égalité, je ne peux pas comprendre qu'il y ait deux poids, deux mesures. Encore une fois, le député qui a la parole passe son temps à parler du travail qui se fait en commission; or cet après-midi, on n'avait pas le droit, pourquoi est-ce que ce soir on a le droit? Même question de règlement que tout à l'heure.

Le Président suppléant (M. Marcoux): On n'a pas plus le droit ce soir que cet après-midi. M. le député de Sainte-Marie.

M. Lalonde: Cela fait dix minutes que vous parlez de ce qui se passe en commission.

M. Bisaillon: M. le Président, je n'ai pas parlé de ce qui se fait dans le détail à la commission.

M. Lalonde: Bien oui vous avez dit qu'on n'avait pas...

M. Bisaillon: ... J'ai parlé du climat. Est-ce qu'il va se taire, cette grande flûte?

Du calme, du calme, d'abord, M. le Président, je me demande si "menterie", quand on adresse cela à un député, c'est parlementaire.

M. Lalonde: Je n'aime pas les mensonges. Arrêtez de mentir puis je vais vous laisser parler.

M. Bisaillon: On reçoit constamment des leçons de ces vieux parlementaires. Je n'ai pas entendu depuis une semaine, c'est de là que sont venus tous les propos antiparlementaires...

M. Gratton: Question de privilège. Question de privilège, M. le Président. Je ne me laisserai pas appeler vieux parlementaire par un député qui est plus vieux que moi.

M. Bisaillon: Je pensais que le député avait compris que je ne parlais pas de lui.

M. Marchand: Ce n'est pas tout à fait ce qu'il dit.

M. Bisaillon: Alors, je conclus, M. le Président, en disant que, malgré tous les regrets qu'on peut avoir à cause des conséquences désastreuses, tant pour l'Opposition que pour le parti ministériel, à cause de la situation de fait, il me semble qu'on ne peut faire autrement que d'endosser la motion qui nous est présentée par le leader du gouvernement, en souhaitant toutefois que cela nous serve de leçon d'une fois à l'autre et qu'on apprenne à améliorer notre travail à l'Assemblée nationale.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: M. le Président, j'aimerais à mon tour également apporter quelques commentaires sur cette motion qui a été présentée par le leader du gouvernement. Je rejoins au début de mes propos certaines préoccupations que vient d'exprimer le député de Sainte-Marie, lorsqu'il parle du besoin de repenser notre système parlementaire à certains égards. Parce qu'on se retrouve — à ce sujet, l'histoire est éloquente aussi et on n'a pas besoin de retourner loin dans le passé — chaque fois, lors des fins de session, dans les mêmes situations, avec les mêmes engorgements, et on utilise des dispositions qui sont dans notre règlement comme celles sur lesquelles s'est appuyé le leader du gouvernement, pour imposer la guillotine à différents projets de loi comme c'est le cas actuellement pour le projet de loi no 67.

Chaque fois que cette motion est devant la Chambre, pour ma part, j'en suis malheureux et je pense que cette préoccupation est celle de plusieurs parlementaires dans cette Chambre. Pour les citoyens à l'extérieur, qui regardent travailler les élus du peuple à l'Assemblée nationale, je pense que cela présente un curieux portrait. On a, pendant les deux derniers mois, étudié une douzaine de projets de loi et maintenant, dans les dix prochains jours, on va nous demander d'en étudier 30 et de les adopter. En plus de cela, à l'intérieur de ce menu législatif où on a des pièces aussi importantes que le projet de loi no 67, où on n'en est encore qu'au début de l'étude du projet de loi en commission parlementaire, on va nous demander de mettre fin abruptement à toutes les discussions, à toutes les analyses, à toutes les questions qui sont encore posées et qui n'ont pas reçu de réponses sur le projet de loi no 67 qui touche la population du Québec dans son ensemble, de différentes façons.

Le projet de loi no 67, M. le Président, est de grande importance et ses implications sont nombreuses. Au lieu de mettre en marche le rouleau compresseur de la fin de session avec une telle motion, on devrait au contraire avoir la préoccupation, en tant que parlementaires et surtout le gouvernement actuellement, de se donner le temps nécessaire d'étudier le projet de loi à fond et d'en faire une loi qui réponde aux besoins des citoyens du Québec et non pas à un programme d'un parti politique. Il y a une grande différence entre les deux. Le projet de loi no 67 fait plaisir à un certain nombre d'individus mais il fait surtout plaisir à ceux qui ont bâti le programme du Parti québécois. Lorsque l'on regarde dans la population la réaction de nos concitoyens, on s'aperçoit qu'il y a toute une différence entre les deux parce que eux, actuellement, sont inquiets et se posent des questions; ils veulent savoir et n'ont pas eu, à ce jour, toute l'information puisque la commission parlementaire elle-même n'a pas eu toute l'information pertinente pour se prononcer et adopter une loi qui se tienne.

M. le Président, pour situer nos travaux parlementaires, et surtout l'attitude des membres du gouvernement face à ce projet de loi, permettez-moi de me référer à un article de la Presse canadienne où on dit: Les députés ministériels ne réalisent pas la gravité du problème parce que le ministre Payette les a convaincus que les courtiers, entre autres, se tireront bien d'affaire dans le nouveau régime, de noter un porte-parole en ce qui concerne la Fédération de l'assurance automobile lors d'une entrevue. Entre-temps, l'Opposition continue son obstruction en commission parlementaire où le débat piétine depuis plusieurs jours sur les tout premiers articles du projet de loi no 67. On y apporte, en somme, les mêmes objections entendues lors d'autres discussions.

Je reviens, à cet égard, aux propos tenus par le député de Sainte-Marie, pour souligner ceci: L'Opposition, à l'Assemblée nationale, a un rôle particulier à jouer à ce niveau. Justement, dans le projet de loi no 67 de l'assurance automobile, l'Opposition se rencontre et se fait le haut-parleur et le reflet le plus exact possible des préoccupations qui sont celles de nos concitoyens et non pas celles d'un parti politique. C'est pour cela que ceux qui ont travaillé au niveau de la commission

parlementaire, comme mon collègue le député de Nicolet-Yamaska, ont travaillé avec autant d'acharnement pour éveiller le gouvernement — non pas éveiller l'opinion publique, il y a une nuance parce que l'opinion publique est éveillée — afin qu'il prenne un autre mode d'approche pour son projet de loi. En ce sens, l'Opposition a joué son rôle et elle doit continuer à le faire, surtout sur un projet de loi de cette importance.

M. le Président, il faut simplement regarder autour de soi pour réaliser quelles sont les réactions face à ce projet de loi. Dans nos bureaux, chaque semaine, surtout depuis les dernières semaines, les gens viennent se plaindre et souligner leur insatisfaction et leur inquiétude: des ouvriers, des agriculteurs, des camionneurs.

On reçoit du courrier également. Ce ne sont pas des inventions. C'est la réalité. Il faudrait être aveugle pour ne pas vouloir accepter de voir cette chose. De toute façon, si le gouvernement maintient ce rythme de vouloir passer à la vapeur un projet de loi inacceptable, comme il l'est actuellement, il aura fait son lit et il devra en rendre compte devant la population. C'est le seul moyen qu'il nous reste maintenant. Entre-temps vous ne pouvez pas reprocher à l'Opposition de prendre les moyens qui sont à l'intérieur de nos règlements justement pour sensibiliser le gouvernement et le mettre devant la réalité et la responsabilité du geste qu'il est en train de poser dans ce domaine.

Nous avons non seulement besoin de prendre plus de temps sur ce projet de loi, mais le gouvernement a besoin de réviser complètement sa politique en ce qui concerne son mode d'approche de l'assurance automobile au Québec. De plus, il est en train d'établir un système beaucoup plus complexe où on va donner, une fois de plus, malheureusement, une place de maître et de roi au fonctionnarisme qui est déjà beaucoup trop lourd et qui ne rend plus, à plusieurs égards, les services qu'on est en droit d'en attendre.

Une fois de plus, malheureusement, M. le Président, ce sont les citoyens qui vont faire les frais de cette décision d'adopter cette motion de guillotine sur un projet de loi aussi important qui n'aura pas été étudié à fond et dont on n'aura pas connu tout le contexte avant son adoption. Ce sont également les citoyens qui vont faire les frais de cet engorgement de fin de session que l'on connaît malheureusement.

Le retard n'est pas seulement dû au rôle que l'Opposition a joué pour que les travaux prennent un certain temps à évoluer au niveau de la commission parlementaire. Cela a pris deux semaines, M. le Président, avant d'obtenir certains documents à la commission parlementaire, comme l'a souligné mon collègue de Nicolet-Yamaska. Cela a pris deux semaines avant d'obtenir des documents importants qui étaient implicitement compris dans les articles de loi qu'on demandait à ces gens d'étudier. Vous voyez dans quelle position on a placé les parlementaires. Devant un projet de loi d'abord inacceptable, et ensuite dans une situation où ils ne peuvent vraiment pas travailler avec des outils normaux. Donc, le gouvernement a également sa responsabilité, et de beaucoup, dans ce piétinement.

Lorsque les documents sont, par la suite arrivés, comme on le voit puisque c'est le cas maintenant, la commission a commencé à déboucher et à avancer ses travaux d'une façon beaucoup plus normale. Cela est un indice que si le projet de loi avait été prêt — ce qui n'est pas le cas — et si le ministre avait été disposé à ce moment à le présenter d'une façon normale et à le défendre comme il faut, on aurait pu procéder à son adoption et à sa correction aussi, si le ministre avait voulu entendre...

Je me demande exactement le sens de la tournée qui a été faite par le ministre si ce n'est pour aller chercher de l'information auprès des citoyens. Ou n'est-ce pas surtout une parade, puisque depuis que la commission parlementaire a commencé ses travaux, un seul amendement a été accepté. Je me demande si le ministre l'a vraiment vu passer ou si cela n'a pas été une passe par la bande.

M. le Président, de toute façon le gouvernement en portera la responsabilité. Le ministre ne veut rien changer. Le ministre ne veut pas non plus informer la population, comme l'indique un journal de la région des Cantons-de-l'Est: "Un groupe de citoyens a invité récemment Mme Payette ou quelqu'un de son entourage à venir leur expliquer le nouveau régime d'assurance automobile — cela est même après la tournée parade du ministre — une réponse leur a été adressée expliquant que seule Mme Payette était autorisée à discuter du projet de loi, — il y a rien qu'elle, il n'y en a pas d'autres, et là elle est prise en commission — mais qu'elle ne le ferait qu'au lendemain de l'adoption." A ce moment on va venir leur dire: Vous allez vivre avec cela. Est-ce que c'est cela qu'on appelle de la consultation? Est-ce que ce n'est pas complètement à l'inverse du sens de la première tournée que le ministre avait faite?

M. le Président, je pense que d'abord et avant tout on doit dénoncer le fait que dans ce projet de loi le gouvernement va chercher des sommes d'argent dont il a absolument besoin pour l'administrer. C'est d'abord une forme de taxe déguisée. Ce n'est pas d'abord et avant tout, comme on veut le laisser entendre, une recherche de protection pour les citoyens. Cette loi, comme je l'ai indiqué, découle d'abord d'un choix politique. On voudrait faire croire maintenant que la population est aux portes du parlement et qu'elle attend avec anxiété ce projet de loi, ce qui n'est pas le cas. Le gouvernement en portera la responsabilité.

En terminant, je vous indique, M. le Président, que notre rôle à nous, c'est de le dénoncer comme une mesure illogique...

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Richmond, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

M. Brochu: M. le Président, si vous aviez suivi le déroulement de mon argumentation, vous vous

seriez aperçu que, deux phrases plus tôt j'avais dit "en terminant".

Le Président suppléant (M. Marcoux): Oui, mais je suis habitué aux propos de cette Chambre et parfois il y a des conclusions qui prennent du temps.

M. Brochu: M. le Président, vous êtes habitué aux propos de cette Chambre, mais d'un angle différent ou, plutôt, d'un autre fauteuil peut-être. Quoi qu'il en soit, je me conforme volontiers à votre directive, parce que je conçois que mon temps est terminé. Je veux, de toute façon, indiquer que le gouvernement a pris sa décision en ce qui concerne le projet de loi 67. Nous l'avons mis en garde, comme c'était notre devoir de le faire, parce que nous considérons que le projet de loi, tel que présenté, n'est pas acceptable, qu'il est illogique et que les gens ont raison d'être inquiets et insatisfaits. Cela, l'avenir nous le dira. De toute façon, le gouvernement en porte la responsabilité. En ce qui nous concerne, tout ce qu'on peut faire à ce stade-ci, c'est refuser, rejeter cette motion présentée par le leader du gouvernement pour mettre fin, avant terme, à l'étude du projet de loi no 67.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député d'Orford.

M. Georges Vaillancourt

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention plusieurs intervenants qui ont parlé de cette motion de clôture sur l'étude du projet de loi 67, Loi sur l'assurance automobile, et qui demande que le rapport de cette loi soit déposé à l'Assemblée nationale avant les affaires du jour, le 16 décembre.

M. le Président, le leader nous a soumis comme argument que cette loi doit être mise en application avant le 1er mars 1978. Pour ma part, je ne comprends pas pourquoi on est si pressé de faire adopter cette loi. On est seulement rendu au 13 décembre 1977, c'est-à-dire deux mois et demi avant le besoin de sa mise en application. Je crois qu'il n'est pas nécessaire de bousculer tout notre processus démocratique pour l'adoption de cette loi, vu, surtout, que cette loi va affecter des millions de Québécois.

Pour ma part, je crois que cette bousculade et ces arguments sont inutiles et injustifiés. Le gouvernement n'était pas prêt avec sa loi; il n'a pas fourni tous les renseignements au début de l'étude de ce projet de loi. Une partie du coût et des effets de cette loi a été déposée à la commission parlementaire seulement à la fin de novembre. J'ai bien dit une partie du coût, car on a découvert, par la suite, des coûts cachés du régime, soit vers le 6 décembre, après maintes questions des membres de l'Opposition officielle et de l'Opposition.

Mme le Président, il y a des coûts cachés dans ce projet de loi, c'est-à-dire des coûts qui n'ont pas été dévoilés dans le document que nous a dé- posé Mme le ministre qui nous donnait seulement un aperçu du coût réel et de la façon dont on allait financer le coût des dommages corporels. Après plusieurs questions des membres de la commission, on a découvert des petites cachettes, telles que, par l'entremise de divers ministères ou de régies comme celle de l'assurance-maladie, $10 millions; des rentes d'invalidité du Québec, $7,4 millions; des rentes de retraite et des pensions de vieillesse, $2,5 millions; de la Commission des accidents du travail et de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, $2,8 millions; des rentes de survivants de la régie du Québec, $29,5 millions; de la taxe sur les carburants, $21,5 millions, soit environ $0.01 le gallon. Ajoutez à cela les 2% sur les primes qui sont des taxes actuellement perçues par le gouvernement.

M. Duhaime: J'invoque le règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député d'Orford, je m'excuse, il y a une question de règlement qui est soulevée.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Duhaime: Je me demande comment faire pour vous inviter à rappeler le député qui a la parole à nous parler de l'article 156 du règlement de la Chambre, à parler sur la motion qui est devant la Chambre et non pas de nous entretenir sur le fond du projet de loi.

M. Blank: Sur la question de règlement.

M. Vaillancourt (Orford): Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Louis sur une question de règlement.

M. Blank: Dans l'argumentation du député d'Orford, il donne une des raisons pourquoi il est contre le bâillon, parce qu'il y a des faits qui n'ont pas été dévoilés en temps. Et s'il énumère ces faits, il a le droit absolu d'énumérer ces faits. C'est la base de son argument et un argument pourquoi le bâillon n'est pas prêt.

M. Verreault: Le ministre a encore les deux pieds dans son assiette.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Louis, je pense que vous ne pouvez pas présumer de ce qu'allait dire M. le député d'Orford. C'est d'ailleurs lui qui a la parole maintenant.

Je vous demanderais, M. le député, qu'il soit évident que vous êtes bien pertinent au débat.

M. Vaillancourt (Orford): Mme le Président, je pense que le leader adjoint du leader adjoint ne peut pas m'empêcher de donner les raisons pertinentes à mon argumentation pourquoi je m'oppose à la guillotine relativement à ce projet de loi. Il faut absolument que je donne les arguments pour démontrer que le ministre des Consomma-

teurs, Coopératives et Institutions financières, lorsque l'étude du projet de loi a commencé il manquait beaucoup d'arguments et beaucoup de ce que pouvait coûter l'assurance automobile. J'en étais rendu à dire, Mme le Président, que $2,8 millions des rentes des survivants de la Régie du Québec, $29,5 millions de la taxe sur le carburant, c'est-à-dire $0.01 le gallon, $21,5 millions ajoutés, Mme le Président, à cela les 2% des primes qui sont des taxes actuellement perçues par le gouvernement et qui ne seront pas perçues après, environ $7,6 millions.

Mme le Président, nous arrivons avec toutes ces sommes, à $86,3 millions. Peut-être que nous découvrirons d'autres cachettes et nous aurions peut-être découvert beaucoup d'autres cachettes si le projet de loi avait continué d'être étudié en commission parlementaire après les nombreuses questions qui auraient été posées par les membres de l'Opposition. Mme le Président, je trouve que c'est malhonnête de prendre de telles tactiques pour remplir une promesse électorale. Je trouve que c'est rire de la population du Québec en essayant de faire croire que cela va coûter moins cher que l'assurance soit administrée par une régie plutôt que par l'entreprise privée.

Mme le Président, je pense que c'est rire du monde. Je peux vous dire d'avance que le gouvernement va payer, un jour, très cher, pour les actes qu'il pose actuellement. Car on sait qu'environ 60% de la population du Québec est contre cette loi et cela a été prouvé d'après des sondages qui ont été faits, je crois, par Radio-Canada. Mme le Président, je vais conclure, car je suis convaincu que la population du Québec, comme les Oppositions, vont s'opposer à ce geste antidémocratique et irresponsable du gouvernement de mettre fin à l'étude de ce projet de loi 67. L'étude du projet de loi avançait peut-être à pas de tortue, mais nous nous apercevions depuis une couple de jours que l'étude avançait assez rapidement. D'après le député de Jacques-Cartier qui nous déclarait aujourd'hui lors de son discours que si on leur avait donné encore une quinzaine de jours, il aurait pu approfondir l'étude de ce projet de loi.

Pour toutes ces raisons, je déplore que le gouvernement ait décidé de mettre fin à l'étude de ce projet de loi. La majorité des articles n'est pas éclaircie et je pense que c'est dommage que nous approchions la période des Fêtes et que le gouvernement se voit obligé de bousculer l'étude d'un projet de loi. La continuation de l'étude de ce projet de loi aurait permis d'éclaircir tous les détails des articles.

Je tiens, avant de terminer, à féliciter les membres de l'Opposition qui ont travaillé à l'étude du projet de loi a la commission parlementaire, car j'ai eu l'occasion d'aller y assister quelque temps et de les voir essayer par tous les moyens possibles de connaître tous les détails de ce projet de loi. Malheureusement, étant donné la force et la majorité du gouvernement, on nous impose une guillotine. Je le déplore, mais nous devons nous soumettre à la majorité. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Louis.

M. Duhaime: Motion adoptée? M. Harry Blank

M. Blank: Motion pas adoptée.

Le député de Saint-Maurice parle de motion adoptée. A mon avis, tout ce scénario qu'on voit aujourd'hui c'est une affaire qui est un peu planifiée. Le gouvernement n'a pas, aujourd'hui ou la semaine passée, décidé de la clôture ou du bâillon, qu'on peut appeler; cela fait partie de la stratégie. Dès le commencement de cette affaire, il savait qu'un projet de loi comme le projet de loi no 67 ne serait jamais accepté par la population, si la population était au courant de ce qu'il y a dans ce projet de loi. Il a tout fait pour essayer d'éviter d'ouvrir, de montrer la transparence — la fameuse expression de ce gouvernement — pour avoir un peu de transparence dans ce projet de loi, comment cela va affecter la population et ce qu'il y a de bon ou de mauvais dans ce projet de loi. Pour le moment, je ne trouve rien de bon. C'est dommage. Dans 18 ans ici, au moins, de temps en temps, j'ai trouvé quelque chose de bon dans des lois mais, dans ce projet de loi, c'est difficile à trouver.

Si on voit le scénario depuis le commencement, ils ont fait une promesse électorale. La promesse électorale était de changer la méthode de l'assurance automobile dans cette province et dans le programme ils veulent nationaliser, le gouvernement va prendre le contrôle des assurances pour le bénéfice de tout le monde. Mais dans leurs études ils ont trouvé que cela ne marcherait pas, que cela n'avait pas de bon sens, et même ils font un virage contre leur promesse électorale. Il a essayé de faire une loi — je n'aime pas utiliser le mot "bâtard" ici en Chambre, mais c'est un projet de loi bâtard. Un peu de cela, un peu d'autre chose. Qu'est-il arrivé? Le ministre a fait une tournée dans la province. A-t-elle exposé ce qu'elle voulait mettre dans ce projet de loi? Non. Elle a fait créer des petites cellules de propagande dans chaque petit village ou ville où allait cette commission itinérante — pas commission itinérante mais show itinérant. Voyant chaque fois que des opposants ou des gens voulaient expliquer un autre moyen d'arriver au même but, un meilleur moyen, ils étaient toujours mis de côté et on a vu des grands shows des admirateurs de ce gouvernement qui disaient: Cela est bon. C'était, comme on dit en anglais: A mutual admiration society. Or, elle arrive ici en Chambre avec un projet de loi.

Les délais dont on parle, ce n'est que quand on a eu la deuxième lecture de ce projet de loi, après le commencement de la session du 18 octobre, et on a déféré cela à la commission seulement le 27 octobre.

Du 27 octobre jusqu'au 6 décembre, chaque fois que l'Opposition a posé une question ou demandé un fait, le ministre a refusé catégorique-

ment de répondre ou de fournir des détails ou des faits. Pourquoi? Parce qu'elle voulait créer l'impression que c'était l'Opposition qui s'opposait à ce projet de loi. Ce n'était pas l'Opposition qui s'est opposée à ce projet de loi, c'est le ministre elle-même qui s'est opposée à ce projet de loi.

Cela fait partie du grand scénario qu'on doit arriver ici un jour en disant: II est trop tard, vers la fin de la session, on a besoin de la motion de clôture, on a besoin du bâillon. Pourquoi? Parce qu'il y a quelque chose à cacher. Je suis d'accord avec le député de Sainte-Marie qui a parlé sur le rôle de l'Opposition de faire monter l'opinion publique. Pour faire monter l'opinion publique, on a besoin de faits. Le rôle de l'Opposition est de découvrir ces faits en posant des questions ou en faisant des motions d'amendement, comme l'Opposition l'a fait depuis le 27 octobre jusqu'au 6 décembre. On a demandé des détails, on a demandé qu'on dépose certains faits, le coût de ce régime. On a demandé de déposer les règlements. On veut savoir où on va parce qu'on doit démontrer au public ce qu'il y a dans ce projet de loi.

M. Gratton: Je m'excuse auprès de mon collègue de Saint-Louis, Mme le Président, mais je constate à regret que nous ne semblons pas avoir quorum.

M. Duhaime: Mme le Président, voudriez-vous vérifier?

Mme le Vice-Président: Cela ne me paraît pas évident, M. le député, mais nous allons vérifier le compte des députés.

M. Duhaime: C'est ce que j'allais vous suggérer, de vérifier si nous avons bien le quorum.

M. Gratton: On va vérifier ce que vous avez dans les fumoirs. En avez-vous beaucoup dans les fumoirs?

Mme le Vice-Président: Nous avons maintenant quorum.

M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Comme je l'ai dit, le but de ce scénario est de cacher des faits au public afin de créer une situation dans laquelle l'Opposition ne peut pas montrer au public le vrai visage de cette loi. On a utilisé ce manque de progression dans l'étude de la loi comme une raison pour appliquer la motion de clôture ou le bâillon en disant: C'est une urgence, maintenant. Où est l'urgence? Comment cela va-t-il changer un iota à l'affaire si on adopte cette loi l'année prochaine? Cela ne changerait rien. Franchement, à ce stade-ci, si nous, de l'Opposition, étions malhonnêtes, nous laisserions passer l'affaire. Je n'ai jamais rien vu qui aura autant de retombées dans le public que cette loi, d'ici un an ou deux. Il y a des choses ridicules dans cette loi. Si nous étions malhonnêtes, de ce côté-ci, partisans ou politisés, nous laisserions passer cette loi sans mener la bataille comme nous l'avons fait.

On fait cette bataille maintenant pour essayer de sauver la face de ce gouvernement. Il ne veut pas, il ne comprend pas, il est composé de naïfs. Ce sont de jeunes politiciens qui ne savent pas ce que le public veut. Ils représentent 41% de la population et même dans leur 41%, une grande partie, 60%, sont contre ce projet de loi au sujet duquel le public ne sait que quelques faits. La grande partie des faits a été cachée, ils sont encore cachés. Le député d'Orford a parlé de $80 millions qui sont cachés. On ne sait pas combien de millions encore sont cachés, mais cette affaire a été faite exprès. Depuis la première journée de ce projet de loi, au mois de mai, ce scénario était préparé, et cela jusqu'à Noël. On dit qu'on veut retarder toute l'affaire pour essayer de placer toute la responsabilité sur le gouvernement; c'était le plan, la stratégie de ce gouvernement pour arriver à ce stade-ci en disant: Oh! On a besoin de cette loi avant le 31 et on doit appliquer la motion de clôture et le bâillon. C'est la plus grande fraude envers la population du Québec. On verra cela d'ici un an. Vous verrez l'année prochaine ou dans deux ans, si vous êtes encore ici, du côté gouvernemental, que vous reviendrez avec des amendements parce que c'est une loi qui ne sera jamais acceptée par la population.

N'essayez pas de vous cacher derrière le bâillon ou la motion de clôture pour passer quelque chose en cachette! C'est ce que vous faites, c'est ce que le gouvernement fait actuellement en ne voulant pas discuter de ce projet de loi. Le ministre est arrivé avec un paquet d'amendements d'environ un pouce ou deux d'épaisseur.

Ces amendements vont être soumis en bloc quand on étudiera le rapport et le public ne sera pas au courant de ce qu'il y a dans ces amendements, ni les députés de votre côté de la Chambre ou de ce côté-ci. Il n'y a rien encore qui a été dévoilé dans cette loi. On parle des grands principes, mais les faits, les réalités, on essaie de les avoir. On en avait la moitié seulement vers le 6 décembre. Aujourd'hui, c'est le 13; cela fait cinq jours seulement que la population est au courant d'une partie de ce qu'il y a dans cette loi, seulement une partie. Maintenant, quand l'Opposition veut discuter au moins de cette partie, non, le gouvernement ne veut pas qu'on discute. Il ne veut pas qu'on pose des questions, il ne veut pas que le public soit au courant. C'est la vraie raison du bâillon. Ce n'est pas une question de procédure parlementaire parce qu'il y avait une opposition systématique ou quelque chose comme cela. Ce n'est pas cela du tout et le leader de la Chambre est au courant, mais, ce sont ses patrons qui dirigent le travail de la Chambre. Ce n'est pas le leader qui est en arrière de cela; c'est le groupe qui veut que ces lois passent en cachette, sans que le public soit au courant. Utiliser la procédure parlementaire pour des raisons antidémocratiques, je trouve, comme je vous l'ai dit, que c'est la plus grande fraude que j'aie jamais vue dans cette Chambre.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Fabien Cordeau

M. Cordeau: Plus cela change, plus c'est pareil. Ce n'est pas la première fois que cette parole est prononcée en ces murs. Encore une fois, ce gouvernement nous impose sa motion de fin de session, qui l'oblige à bousculer tout sur son passage et à nous faire adopter à la vapeur quelques projets de loi qui méritent toute notre attention, en particulier ce fameux projet de loi 67, mal conçu et tout aussi mal préparé. Comme preuve de ces dires, regardez le dépôt de la brique d'amendements présentés par le ministre responsable de ce projet de loi.

Au tout début de la présentation de sa motion, le leader du gouvernement a invoqué l'urgence de l'adoption de ce projet de loi étant donné l'engagement pris par le gouvernement durant la dernière campagne électorale. Mme le Président, cela ne fait pas sérieux, une telle argumentation, étant donné que ce n'est pas de quinze jours dont le gouvernement aurait besoin pour remplir ses promesses électorales, mais d'au moins cinq ans en siégeant d'un soleil à l'autre et six jours par semaine.

Ici, Mme le Président, j'aimerais poser une question au gouvernement. Quand remplira-t-il sa promesse faite aux municipalités de leur remettre 1% de plus sur la taxe de vente perçue? Voilà une promesse oubliée qu'il serait urgent de remplir.

M. Burns: Mme le Président...

M. Cordeau: Mme le Président, comment voulez-vous...

M. Burns: ... j'invoque le règlement.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement, je ne crois pas présumer de votre intervention en me disant que vous allez soulever une question de règlement en rapport avec la pertinence du débat. Je vous ferai remarquer, M. le député de Saint-Hyacinthe, que nous discutons de la motion en vertu de 156.2 de notre règlement.

M. Cordeau: Mme le Président, je respecte votre décision, mais étant donné que le leader du gouvernement avait fait allusion aux promesses de son gouvernement, je lui en rappellais une autre. Comment voulez-vous, Mme le Président, que nous acceptions ce projet de loi lorsque la commission chargée de l'étudier article par article n'a pas eu le temps nécessaire pour ce faire? Je puis vous assurer, Mme le Président, que l'adoption à la vapeur de ce projet de loi ne le rendra pas plus populaire auprès de la population québécoise.

Mme le Président, je me prononcerai contre cette motion et contre le projet de loi même parce qu'il va à l'encontre des besoins actuels de la population, qu'il a une petite saveur socialisante que je ne crois pas qu'une administration gouvernementale...

M. Burns: Méchant!

M. Cordeau: ... soit plus efficace que l'entreprise privée...

M. Burns: Méchant!

M. Cordeau: ... que le gouvernement n'a pas indiqué, dans les coûts d'administration de ce projet de loi, la part qui incombera à la Commission des accidents du travail en ce qui regarde l'évalu-tation concernant l'invalidité des personnes accidentées.

Voilà quelques raisons parmi tant d'autres qui m'obligent à ne pas appuyer la motion du leader de ce gouvernement qui portera, seul, l'odieux d'avoir présenté un aussi mauvais projet de loi.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Jean Noël Lavoie

M. Lavoie: Mme le Président, je voudrais très brièvement intervenir sur cette motion. On se demande comment il se fait que le gouvernement apporte, pour la deuxième fois en quatre mois, cette motion de clôture, cette motion de bâillon, cette motion qui a beaucoup de synonymes, pour mettre fin à l'étude d'un projet de loi d'au-delà de 200 articles, qui a une implication de l'ordre de $400 millions annuellement et qui affecte pratiquement tous les citoyens du Québec. Le leader parlementaire du gouvernement, lorsqu'il a présenté sa motion, tentant d'établir le bien-fondé de sa motion, disait que la commission qui avait étudié le projet de loi no 67, après la première lecture, avait siégé du 27 septembre 1977 au 27 octobre 1977, un mois, mais établissant — d'ailleurs bien honnêtement — que cette commission avait siégé dix jours, pour entendre environ 25 mémoires pendant 45 heures.

Ce même projet de loi a fait l'objet d'une étude en commission parlementaire, après la deuxième lecture, depuis le 16 novembre 1977 jusqu'à aujourd'hui, 13 décembre 1977, mais avec l'effet qu'apportera cette motion, jusqu'à une date limite du 16 décembre, ce qui fera 30 jours, ce qui représentera effectivement environ douze ou treize jours de travaux parlementaires, entre 35 ou 40 heures d'étude en commission parlementaire, après la deuxième lecture.

Il ne faut pas oublier que ce projet de loi a au-delà de 200 articles et a une implication de l'ordre que je mentionnais tout à l'heure. Du côté du gouvernement, on est surpris et même un député, comme le député de Sainte-Marie, se dit que si l'Opposition continue à faire de l'obstruction aussi forte à une étude aussi sérieuse d'un projet de loi de telle importance, il va falloir changer le système.

Des Voix: Ce n'est pas ce qu'il a dit.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: II ne faudrait pas oublier, M. le Président, que cette commission, après la deu-

xième lecture qui a été convoquée le 16 novembre, a siégé — j'ai les dates ici — le 16 novembre; la séance suivante a été le 22 novembre. Suite à la demande des députés membres de la commission, des députés de l'Opposition, de déposer le coût d'un tel régime, la tarification, le ministre responsable du projet de loi a reconnu le bien-fondé de cette demande et n'a soumis la grille de la tarification que le 24 novembre. Ce document a été déposé le 24 novembre. Le jour suivant, ou le jour où la commission a siégé après le 24 novembre a été le 29 novembre. Du 29 novembre au 13 décembre, M. le Président, cela représente à peine trois semaines.

Deux semaines environ. Dès le 29 novembre on a commencé à étudier l'article 1 du projet de loi. On se sent scandalisé, du côté du gouvernement, avec un projet de loi de la sorte et on nous impose la guillotine, le bâillon.

Ce gouvernement qui est au pouvoir depuis à peine un an a déjà, durant cette année d'administration, a imposé deux fois cet article 156 qui doit être une mesure d'exception. La preuve c'est que le gouvernement précédent, qui avait été là pendant sept ans, avait jugé à propos d'imposer cette clôture à deux reprises en sept ans. Je vais vous dire à quelles occasions. C'était avant 1973. C'était lors d'une refonte complète des districts électoraux où il y avait eu une Opposition déclarée, reconnue de l'Union Nationale à l'époque qui, peut-être à juste titre, refusait l'étude de ce changement radical des districts électoraux au Québec. Je n'ai pas ici le nombre d'heures que cette commission avait siégé, mais il était d'évidence patente et publique que l'Opposition ne voulait d'aucune façon étudier article par article le projet de loi.

La deuxième fois cela a été pour la loi 22 sur la langue, en 1974, où le parti du gouvernement actuel qui siégeait dans l'Opposition à ce moment avait buté pendant des jours, des heures et des semaines sur l'article 1. C'était un "filibuster" déclaré, ce qui n'est pas le cas actuellement. Nous avons un projet de loi d'au-delà 200 articles qui a une implication de $400 millions par année. Cela fait à peine quelques jours que ce projet de loi est en étude en commission parlementaire. Je crois qu'ils sont rendus actuellement à l'article 17, et on se scandalise de cela, M. le Président. Avec l'expérience que vous avez, vous savez qu'un Parlement, ce n'est pas un rouleau à vapeur. Ce n'est pas un rouleau compresseur. Il y a eu des lois dans le passé comme la loi 65, Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui ont eu une implication énorme. Le Parlement ne s'est pas énervé. Il ne s'est pas emballé. Cela a pris deux ans pour adopter cette loi. Tout normalement, après deux ans, avec une contribution de l'Opposition d'alors". Après deux ans, il y a eu un décantage, une étude normale, continue, et je me demande s'il n'a pas été adopté d'une manière pratiquement unanime.

Le Code des professions, cela avait une implication énorme, M. le Président. Cela a pris à peu près deux ans pour adopter ce projet de loi. On a l'impression que le gouvernement actuel croit sans doute qu'il ne sera pas là longtemps. Il s'en va au suicide. Il nous présente des projets de loi d'une telle importance et on voudrait qu'on adopte dans une semaine, dix ou quinze jours des projets de loi qui normalement devraient prendre un an, un an et demi ou deux ans. Il n'y a rien qui presse. Vous qui êtes un légiste de renommée, M. le Président, combien cela a-t-il pris de temps dans le système anglais pour façonner au 17e ou 18e siècle toute la philosophie des assurances? Cela se faisait dans les cafés ou dans les bars. Les assureurs se levaient debout sur la table pour partager un peu 5% ou 2% des risques d'assurance de la navigation à l'époque. C'est l'origine des Lloyds. Cela a pris des siècles pour façonner le régime des assurances, comme le régime des banques ou des autres. Cela a été façonné avec le temps. Ici on arrive avec un régime tout à fait nouveau et qu'on ne connaît nulle part. Connaissez-vous des compagnies d'assurances qui ont des traditions d'un ou deux siècles qui pourraient appliquer, dans une période de deux, trois ou six mois, un régime d'assurance basé sur un système hybride, en porte à faux, social et autres, sur des rentes indexées et tout?

On se pose des questions, à savoir comment sera couvert l'automobiliste québécois, le camionneur, le propriétaire de voitures de location, de taxis, le cultivateur, les propriétaires d'autobus, de motoneiges, de motocyclettes, de vélomoteurs, etc. On veut passer tout cela et on voudrait qu'on le gobe dans quinze juours ou trois semaines. On se demande comment seront couverts les ministres, entre autres, qui n'auront pas assez d'une couverture de $18 000 par année, ni vous, M. le Vice-Président, ni moi, nous n'aurons pas assez d'une telle couverture, pas plus que le secrétaire général.

M. Burns: M. le Président, je m'excuse, je ne veux pas vous surprendre, vous achevez.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, si vous le permettez, quant à être interrompu, aussi bien l'être pour vrai.

M. Lavoie: Voulez-vous demander une suspension de la séance?

Le Vice-Président: Non, en fait, il vous restait environ une minute. Même si c'était tuer le temps, le temps a passé très rapidement, mais je n'avais pas l'intention de vous interrompre.

M. Lavoie: Vous, vous saisissiez, je pense, la profondeur de mon propos.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Je vous laisse une minute, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Un bon discours!

M. Lavoie: Je voulais vous dire comment on peut transformer, changer tout ce système d'assurance qui a une tradition d'au moins un siècle ou deux. On se demande comment, même les compagnies privées, dans ce système hybride où les dommages corporels seraient couverts par un régime étatique mais où les dommages matériels... Il va falloir que les compagnies privées s'ajustent à cela. Comment seront-nous couverts lorsqu'on ira dans le Maine, en Ontario ou ailleurs, lorsqu'on prendra des gens qui font du pouce ou autrement?

Je vous dis que le gouvernement actuel a préparé ce scénario. Il veut gouverner par décrets, à l'avenir. S'il voulait livrer la marchandise qu'il a promise à la population aux dernières élections, s'il voulait indexer les impôts, il n'y aurait pas d'études aussi longues que cela. S'il voulait donner les 2% aux municipalités qui sont promis sur la taxe de vente, cela serait beaucoup plus rapide que cela, mais je vous dis qu'actuellement, le gouvernement... Je termine et je reviens au propos de la motion. Le gouvernement prépare une mauvaise Loi. Il a voulu cette clôture, il veut gouverner par décrets. Même après les amendements qu'on devra gober et adopter en bloc lundi prochain, on se réveillera avec une archi-mauvaise loi, et on sera devant la situation où même des risques ne seront pas couverts.

Je termine en disant que c'est une honte, ce n'est pas un gouvernement que nous avons devant nous, c'est un bourreau, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Victor Goldbloom

M. Goldbloom: M. le Président, s'il n'y avait pas une motion devant la Chambre, j'aurais voulu en formuler une: une motion de remerciements à l'endroit du député de Sainte-Marie pour le cours magistral qu'il nous a donné sur la théorie et la pratique du parlementarisme et sur le rôle de l'Opposition.

Ce n'est pas souvent, dans mes années dans cette Chambre, que j'ai pu entendre un cours magistral sur le parlementarisme. La seule chose, c'est que, quand on devient député, il n'y a pas d'exigence préalable d'avoir suivi des cours. C'est un peu comme devenir père ou mère, on peut le devenir sans avoir suivi des cours auparavant.

Si le député de Sainte-Marie a suivi des cours, tout ce que je peux dire, c'est qu'il n'est pas allé à la bonne école. Il aurait dû aller à l'école du député de Maisonneuve. Les députés de Sauvé, de Lafontaine, de Saguenay, de Saint-Jacques, de Chicoutimi auraient pu être des professeurs presque aussi bons, mais pas tout à fait.

Je vous dis à l'avance que je ne suis pas enthousiaste de la télédiffusion de nos débats; mais je regrette, ce soir, que nous n'ayons pas eu la télévision en cette Chambre entre 1973 et 1976 notamment et que nous n'ayons pas enregistré sur ruban magnétoscopique les débats épiques qu'il y a eu quand le gouvernement précédent a voulu se servir du règlement de la Chambre pour raccourcir certains des débats.

M. le Président, quand les péquistes étaient dans l'Opposition, aucune restriction n'était justifiée. Il fallait toujours entendre tous les intéressés. Même si la commission parlementaire n'avait pas été convoquée, il fallait revenir à la charge pour demander cette convocation. Il y avait toujours, quelque part dans l'opinion publique, des intéressés qu'il fallait entendre avant de procéder à l'adoption de la loi.

Il était toujours scandaleux de prolonger les heures de session. Il était toujours antidémocratique d'avoir recours aux mécanismes de clôture. On manquait de respect pour l'Assemblée nationale, pour la démocratie, pour les intéressés.

M. le Président, je constate aujourd'hui — et je cite un distingué collègue de cette Chambre — que nous vivons le régime des "other days, other ways".

Le Vice-Président: A l'ordre, M. le député D'Arcy McGee! Vous vous adressez à la présidence.

M. Goldbloom: M. le Président, il est vrai que chacune des formations politiques a un rôle à jouer dans cette Chambre, mais cela ne veut pas dire que nous sommes des comédiens. Nous sommes, dans une certaine mesure, des avocats. Nous avons chacun une cause à défendre et nous devons défendre cette cause pour sa valeur intrinsèque, plutôt que de toujours nous exprimer sur le plan tout à fait personnel.

D'ailleurs, dans le système parlementaire que nous avons, il y a une certaine solidarité qui est nécessaire de part et d'autre. Mais quand même, M. le Président, il ne faut pas exagérer. De deux choses l'une; si nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous réagissons contre le bâillon du gouvernement et, en ce faisant, nous essayons d'empêcher le gouvernement d'adopter de bonnes lois, c'est l'opinion publique qui va en juger; c'est nous qui allons en souffrir. Mais, par contre, M. le Président, si nous jouons bien notre rôle, ce n'est pas simplement une tentative d'obstruction sans avoir de raison valable vis-à-vis de cette même opinion publique.

M. le Président, j'exprime un sentiment personnel — parce que j'ai siégé, comme vous le savez, des deux côtés de la Chambre, comme vous — j'ai le sentiment que, quand l'opinion publique n'est pas d'accord avec un projet de loi présenté par le gouvernement, généralement, elle s'exprime, mais le gouvernement ne l'écoute pas — parce qu'il est tellement convaincu d'avoir raison — et elle parle davantage avec l'Opposition.

C'est cela que nous essayons de dire au gou-vernement, M. le Président, en refusant sa motion de bâillon. Le gouvernement veut imposer le bâillon parce qu'il a des oeillères idéologiques. Ces oeillères lui permettent de voir seulement ce qu'il veut voir. Tout ce qu'il veut voir, c'est que le gouvernement, surtout quand c'est un gouvernement péquiste, est, par définition, pur et efficace. L'entreprise privée, par la même définition, est une "gang" d'exploiteurs.

L'entreprise privée ne se préoccupe pas du bien commun, le gouvernement fait cela. L'entreprise privée ne pense qu'au profit et en faisant ce profit...

M. Burns: Pertinence du débat.

M. Goldbloom: C'est pas mal pertinent.

M. Burns: On parle d'une motion pour mettre fin aux travaux de la commission au cas où vous ne le sauriez pas.

M. Goldbloom: Je dis que c'est un gouvernement idéologique qui ne veut pas voir.

Le Vice-Président: M. le député de Laurier, à l'ordre, s'il vous plaît!

Vraiment, M. le député de D'Arcy McGee je vous écoute avec attention, mais... A l'ordre, s'il vous plaît!... J'aime mieux vous interrompre pendant deux minutes, M. le député de D'Arcy McGee pour que vous reveniez à la pertinence du débat afin que personne ne vous interrompe vraiment.

M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président...

Le Vice-Président: Je m'excuse, à l'ordre, s'il vous plaît!

Si on veut prendre la journée pour ce débat, on va la prendre sérieusement.

M. Goldbloom: M. le Président, est-ce que j'ai bien compris que vous m'avez dit qu'il me reste deux minutes.

Le Vice-Président: C'est exact. Je ne l'ai pas dit, mais vous l'avez deviné.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais vous demander comment il se fait que d'autres projets de loi qui ne sont pas minces et qui ne manquent pas d'importance ont pu suivre les procédures normalement avec une collaboration que le leader du gouvernement a reconnue lui-même. Nous avons amendé la Loi des cités et villes, le Code municipal. Nous avons traversé une brique énorme qui est la Charte de la ville de Montréal, une série d'amendements à cela et il y avait l'occasion de faire toutes sortes de débats et toutes sortes d'obstructions. Nous ne les avons pas faits. C'est bien simple, c'est parce que nous avions senti que l'opinion publique était généralement favorable à ces changements, mais pas dans ce cas-ci.

M. le Président, dans ce cas-ci, des contre-propositions ont été faites. Le gouvernement n'a pas voulu les écouter. Il y a eu des propositions de table ronde pour discuter publiquement du contenu de ce projet de loi et de la théorie qui le sous-tend. Nous avons ici un gouvernement qui, en posant le bâillon, veut insister sur son propre chambardement de la société québécoise et de son économie.

Ce n'est pas un plaidoyer que je fais pour que l'Opposition ait plus de temps; mon plaidoyer est pour que le gouvernement ait plus de temps pour réfléchir sur ce qu'il fait.

En terminant, je dis ceci. Ce gouvernement est composé d'hommes qui, quand ils siégeaient dans l'Opposition, avaient toujours raison. Ils sont au pouvoir, ils ont encore toujours raison. Mais la définition de la démocratie, c'est un régime dans lequel seule la population a toujours raison.

Je dis, par votre intermédiaire, à ce gouvernement: Avant de déclencher la guillotine, vous seriez bien inspiré de bien vérifier l'identité de la tête qui est sur le billot. C'est probablement la vôtre.

Le Vice-Président: M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je ne vous ennuierai pas longtemps. Il est inacceptable...

Une Voix: En anglais.

M. O'Gallagher: ... que le gouvernement impose le bâillon non seulement deux fois, mais trois fois dans trois mois; on a eu la trouvaille du siècle lorsqu'on a arrêté la commission parlementaire sur le projet de loi no 1. On a mis la guillotine sur la loi 101 et maintenant la guillotine sur le projet de loi no 67.

It is not acceptable, Mr President, that a law of this importance has imposed the guillotine. The importance of this law, in my opinion, is the fact of nationalization of a part of the private sector. This is done at all costs by this government, without knowing the true cost, without knowing the reglementation and without studying the amendments proposed by the minister, a brick of amendments which only confuse the government's deputies, the Opposition's deputies and the public at large. We are all confused.

We have had 35 hours of debate in a parliamentary commission. This is unacceptable after only 35 hours of debate on so important a question.

Le Barreau du Québec, le BAC, la Fédération des courtiers sont tous contre ce projet de loi.

After all, these people are the experts in insurance. They have a background of hundred of years of expertise in this field. Do you think, for one minute, that the public believes that the government political scientists are the experts? Even all the polls in the public show that 60% of the public at large are against this bill. This is quoted from a poll prepared by Radio-Canada.

Le public et l'Opposition ne sont pas convaincus que ce soit la solution. Tous, cependant, sont convaincus que le gouvernement remplace un système incomplet par un autre système incomplet après seulement 35 heures de débat.

What kind of a government have we got that imposes the guillotine three times in the last four

months? The same kind of government that has imposed restrictive taxation on a depressed hotel industry without creating any jobs; the same kind of government that imposes taxes on children's clothes and shoes on an industry that is depressed without creating any jobs. Now, we have the famous nationalization of Asbestos Corporation. Are we going to apply the guillotine in this case? Are we going to force Quebecers to pay out good money to American investors?

Without guarantee the money is going to come back and without creating any jobs. This is the kind of government that we have, the guillotine. The same government is going to spend $12,5 millions of our money to invest into Culinar without creating creating any jobs.

Qu'est-ce que les prochains quatre mois nous réservent? Encore la guillotine. Why are we in such a rush to adopt this legislation? Is it because of the arrogance of the government or the arrogance of the minister? Are you all blinded by the arrogance of the minister? Are you all so sure that she is the mother of all truth?

Mme le Président, we are obviously faced with this big political "show biz" pour la forme politique et non pas pour le principe. On passe la guillotine sur un contrat basé sur une prévision préparée par des fonctionnaires et pas sur un prix fixé par l'entreprise privée. Le public connaît la différence. Comme le disait le député de Sainte-Marie, c'est vraiment une situation désastreuse pour ce Parlement et surtout pour la province. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Matapédia.

M. Léopold Marquis

M. Marquis: Mme le Président, j'aurais souhaité prendre la parole pour la première fois dans cette Assemblée dans d'autres circonstances que celles que nous connaissons en cette fin de session. Egalement, j'avais prévu, dans une telle occasion, parler des problèmes que vivent quotidiennement les gens de mon comté, car ces problèmes sont nombreux, mais j'aurai l'occasion, je l'espère, d'y revenir au cours du mois de février prochain ou du mois de mars. Pour ce soir, cependant, pour l'ensemble de la population du Québec et particulièrement pour celle de l'Est du Québec, qui paye probablement les primes d'assurance automobile les plus élevées à l'heure actuelle, il est important que le projet de loi no 67 soit adopté le plus vite possible. Je suis donc convaincu de bien représenter les intérêts de l'immense majorité de mes électeurs en intervenant dans ce débat, afin de faire en sorte que le régime d'assurance automobile entre en vigueur, tel que prévu, le 1er mars prochain.

En effet, si le projet de loi no 67 n'est pas adopté dans les délais prévus, il s'ensuivra des préjudices graves pour des centaines et peut-être même des milliers de victimes d'accidents d'automobiles, car à chaque jour il se produit au Québec de nombreux accidents qui sont la cause de dommages corporels pour lesquels les victimes, dans le régime actuel sont malheureusement trop souvent insuffisamment indemnisées. Sans compter, Mme le Président, les centaines de milliers d'automobilistes qui actuellement ne sont couverts pas aucune police d'assurance automobile et qui représentent des risques considérables pour eux-mêmes, pour leur famille et pour la société en général.

Vous vous demandez sans doute, Mme le Président, pourquoi je suis pour qu'on mette fin dès cette semaine aux travaux de la commission parlementaire des consommateurs, coopératives et institutions financières.

C'est qu'après plusieurs semaines passées à écouter patiemment les élucubrations de certains membres de l'Opposition, je constate qu'ils ne sont aucunement intéressés à étudier sérieusement ce projet de loi, puisque, au départ, ils sont fondamentalement opposés à son adoption. Pour ce faire, ils font perdre le temps de la commission et de ses membres par des motions de toutes sortes et des amendements inutiles visant, dans plusieurs cas, à changer même les principes adoptés en deuxième lecture. Quand on sait ce que coûte une séance de commission parlementaire aux contribuables du Québec, ma plus grande crainte est de me faire reprocher d'avoir permis que ce simulacre de commission parlementaire continue pendant des semaines, voire même pendant des mois au rythme où se déroulent ses travaux, pour arriver finalement au même résultat, car, je le répète, j'ai la conviction profonde que la majorité des membres de l'Opposition — je fais quand même des exceptions — siégeant à la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières est là uniquement pour bloquer le projet de loi, pour nous empêcher d'adopter, dans des délais raisonnables, chacun des 208 articles, tel que l'Assemblée nationale nous en a donné le mandat. Même si nous venons d'adopter, il y a quelques minutes, l'article 18...

Des Voix: Bravo!

M. Marquis: ... il en reste tout près de 200. Mme le Président, depuis le début de mon mandat de député, c'est-à-dire depuis treize mois, ma plus grande déception a été et est, de plus en plus, les lenteurs inadmissibles et les pertes de temps épouvantables que je déplore comme plusieurs de mes collègues à l'occasion des séances de l'Assemblée nationale comme en commission parlementaire et, en particulier, chaque fois qu'a siégé la commission parlementaire des consommateurs, coopératives et institutions financières.

Nous n'avons pas pu terminer l'étude des crédits de ce ministère en commission parlementaire parce que quelques membres et, en particulier, le critique de l'Opposition officielle prend facilement 20, 30, 40 minutes et même davantage pour dire ce que toute personne compétente pourrait parfois résumer en moins de cinq minutes.

En terminant, Mme le Président, et pour ne pas faire ce que je reproche à certains de mes col-

lègues, c'est-à-dire d'être trop longs, je vous annonce que je voterai en faveur de la motion du leader du gouvernement afin de mettre un terme aux travaux de la commission parlementaire pour permettre ainsi aux six millions de mes compatriotes québécois de profiter le plus vite possible d'une mesure qui s'avérera l'une des plus humaines et des plus importantes qu'aura fait adopter ce gouvernement au cours de ce premier mandat. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, je n'avais pas l'intention d'intervenir à ce moment-ci. Je pense bien que la Chambre et le leader du gouvernement en particulier doivent bien connaître les réactions normales qui peuvent être les miennes à la suite du comportement du leader du gouvernement. Après avoir passé bien des années à se scandaliser des motions du leader du gouvernement qu'il avait en face de lui pendant qu'il était dans l'Opposition, aujourd'hui ce même leader du gouvernement, autrefois leader de l'Opposition officielle, ne se gêne pas pour présenter des motions qu'il condamnait avec véhémence et avec vigueur surtout lorsque l'on sait que ce gouvernement semble vouloir gouverner par décrets.

Il faut bien comprendre, Mme le Président, que nous avons dans notre règlement, une disposition pour que, dans certaines circonstances, nous puissions utiliser cette motion de clôture ou ce bâillon. Cela doit se faire avec grand soin. Cela doit être une mesure exceptionnelle et prise en dernier recours. D'ailleurs le leader de l'Opposition officielle le rappelait il y a un instant, nous l'avons fait nous-mêmes alors que nous étions accusés de tous les péchés d'Israël; nous ne l'avons fait que deux fois en sept ans et dans des circonstances très précises qu'a évoqué d'ailleurs le député de Laval lorsqu'il a parlé de la Loi sur les districts électoraux et de la loi 22.

Il est important aussi de se rappeler que, dans d'autres circonstances, nous avions à présenter des lois extrêmement importantes comme le Code des professions, la loi 25 sur les services de santé et les services sociaux; nous avons, à cause de l'importance de ces projets de loi, passé même jusqu'à deux ans à les étudier. Je songe en particulier encore à ce projet de loi sur la protection de la jeunesse qui a été discuté en Chambre et en commission parlementaire depuis trois ans. Je sais que mon prédécesseur à la Justice, qui était le député d'Outremont, M. Choquette, avait discuté en commission parlementaire avec le ministre des Affaires sociales et l'Opposition du temps. J'ai repris toute la discussion en commission parlementaire. Nous sommes encore à étudier ce projet de loi sur la protection de la jeunesse. Nous attachons beaucoup d'importance à ce projet de loi. Nous n'avons jamais jugé qu'il était essentiel de procéder à la clôture, parce que nous avons songé que de ces discussions pouvaient naître plusieurs suggestions très positives à l'avantage justement de la jeunesse.

Nous avons devant nous un projet de loi qui touche l'assurance automobile. Nous savons que c'est une expérience complètement nouvelle qu'entreprend le gouvernement. Nous pensons présentement que, si nous adoptons ce projet de loi à la vapeur alors que nous n'avons pas eu réellement le temps d'avoir les renseignements nécessaires, nous entendrons dire encore en commission parlementaire que le gouvernement n'a pas encore fourni les renseignements qu'il devait fournir. On s'attend que ces renseignements nous soient fournis vendredi, la même journée que la commission doit faire rapport. Non seulement c'est de la mauvaise législation, mais c'est de la précipitation qui ne se justifie pas. La motion qui est actuellement devant nous mérite non pas seulement d'être combattue, mais battue.

Mme le Président, nous avons découvert dans toute cette législation et cela dans les tout derniers jours, qu'il y avait des coûts cachés et que les services à la clientèle n'étaient pas assurés, garantis. Nous n'avons pas trouvé jusqu'à maintenant, dans cette législation, de quoi garantir que les objectifs qui étaient poursuivis seraient atteints. En particulier, on sait que ces objectifs touchaient le montant des primes, primes qu'on voulait voir réduites et autres objectifs, c'était de voir à une couverture plus généreuse pour l'assuré. Dans les deux cas, nous n'avons pas présentement la preuve que nous allons atteindre ces objectifs.

Il serait donc important, avant d'apporter cette motion de clôture, d'être en mesure, Mme le Président, de bien évaluer les conséquences des gestes que nous allons poser. D'autant plus qu'à la toute dernière minute, le ministre responsable de ce projet de loi a présenté toute une série d'amendements. Le député de Matapédia — il est parti — parlait tout à l'heure de principes nouveaux. Il y en a justement un principe nouveau parmi plusieurs autres qui ont été apportés dans ces amendements.

Un en particulier où l'on voit que dans l'article 201 on dit que l'article 3 de ladite loi est remplacé par le suivant: La régie peut, avec l'autorisation du gouvernement, acquérir et détenir des actions de toute corporation constituée pour pratiquer les assurances de dommages. Alors, il s'agit là d'un principe complètement nouveau sur lequel on ne s'est jamais prononcé en deuxième lecture. Il faudrait — si on veut respecter l'économie de notre règlement, l'esprit, la lettre du règlement — revenir en Chambre, rediscuter en deuxième lecture un principe aussi important que celui de permettre la nationalisation de compagnies d'assurances, etc. Tout cela, ce sont des principes nouveaux, on n'a jamais voté là-dessus. Présentement, on nous demande non pas d'en discuter — on suggère présentement une clôture pour arrêter toute discussion — en commission, mais on ne peut même pas revenir et discuter du principe en deuxième lecture. Je dis que c'est là de la précipitation qui n'est

sûrement pas justifiée et je ne puis que m'opposer avec toute la vigueur dont je suis capable contre une telle motion du leader du gouvernement.

Je comprends que le leader du gouvernement ne fait qu'exécuter une décision du cabinet; je sais que, pour lui, c'est un peu mécanique. D'un autre côté, à travers lui, je veux attaquer le gouvernement et je veux attaquer le Conseil des ministres, qui n'a pas su mettre à sa place le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. On n'a pas eu le courage de lui dire qu'elle faisait fausse route et qu'il fallait cesser et, en même temps, on n'a pas tenu compte de l'opinion publique. Comme le député de D'Arcy McGee le disait tout à l'heure, le travail que fait présentement l'Opposition, qui peut paraître de l'acharnement, n'est que simplement la traduction de l'opinion publique, vous le savez. Pendant l'heure du dîner, je rencontrais encore des gens qui me disaient: Est-ce possible que nous allons avoir, le 1er mars, une telle loi? Déjà, les coups commencent à pleuvoir sur les assurés, et on commence à voir se multiplier les inconvénients. C'est simplement rendre service au gouvernement, à ce moment-ci — ce n'est pas rendre service à la population, si on ne nous croît pas — que de lui demander de ne pas nous imposer la clôture. C'est une mesure qui n'atteindra pas les objectifs poursuivis et qui sera rejetée par la population dans son ensemble, par des milliers et milliers de citoyens, hommes et femmes du Québec. Lorsqu'ils seront confrontés avec les conséquences d'une telle loi, ils se plaindront amèrement et avec raison non seulement du gouvernement mais également du législateur qui a voulu, par précipitation, et même sous le coup d'une clôture, imposer à la population une mesure qu'elle rejette d'emblée. Je ne comprends pas le gouvernement, à l'heure actuelle; c'est pour sauver la face, c'est quoi? De toutes parts, on nous dit que ce régime proposé est bâtard, qu'il ne fait plaisir à personne, qu'il est de nature à causer les ennuis les plus graves et qui seront multiples.

Nous ne voulons pas être prophètes de malheur mais nous voulons attirer l'attention du gouvernement. J'ai déjà été, maintes fois, dans le gouvernement et j'aurais dû, à certains moments, écouter l'Opposition. Je vous le dis, à un moment donné, on est dans le quotidien et on est pris avec toutes sortes de choses qui pressent et on pense: Mon Dieu, il faut que cela se fasse! Et on a d'autres choses à faire, il faut passer cela. Non, je vous dis: Vous faites erreur, mesdames et messieurs du gouvernement. Je vous dis, avec la petite expérience que j'ai dans l'administration publique, qu'il faudrait qu'à ce moment-ci on se ressaisisse collectivement et qu'on dise: II n'y a pas lieu d'avoir une motion de clôture, c'est ce qui est le plus odieux, présentement. Motion de clôture pour la deuxième fois cette année. Est-ce qu'on va gouverner par décret? En quatre mois, deux motions de clôture, cela n'a aucun sens.

Je vois que mon temps est terminé mais je veux protester vigoureusement contre cette attitude qui est réellement inacceptable de la part d'un gouvernement démocratique.

Mme le Vice-Président: M. le député de Laurier.

M. André Marchand

M. Marchand: Mme le Président, je ne peux décevoir mes "fans" du Parti québécois, les "back-benchers" d'arrière-ban là-bas qui m'attendent depuis après le dîner afin que je leur adresse la parole. Mme le Président, je les comprends très bien parce que ces gens, même si dans une journée fatidique, il y a presque un an ou plus, n'avaient pas compris, ils ont compris que le député de Laurier avait compris le bon sens depuis longtemps. Et aujourd'hui, c'est pour cela qu'ils m'ont demandé de leur parler. Je pourrais peut-être leur parler comme un curé. Ils en ont dans leur parti, je vais leur laisser cela. Mais, Mme le Président, je regrette infiniment que le député de Mercier soit sorti au moment où j'allais adresser la parole.

Une Voix: On écoute.

M. Marchand: Alors, mon ami de Mercier m'avait demandé d'adresser la parole et j'ai décidé de le faire, peut-être spécialement pour lui, mais pas dans les mêmes termes parce que je serais peut-être antiparlementaire, Mme le Président, mais dans votre cas, je ne suis pas certain que vous ne l'accepteriez pas.

Mme le Vice-Président: Vous êtes très aimable, M. le député de Laurier, mais venez-en donc à la motion, voulez-vous?

M. Marchand: J'en suis à la motion, Mme le Président, parce que le député de Mercier, ce poète émérite qui, d'ailleurs, m'a garanti qu'il en ferait d'autres... J'espère qu'une bonne journée, il viendra consulter, de Mercier, et comme artilleur de la pensée, imprimeur, je lui donnerai des termes qui seront plus conservateurs. Pour revenir à la motion, mais que mes amis... Pardon?

Mme Leblanc: Pour en arriver à la motion, pardon.

M. Marchand: Est-ce que vous avez quelque chose à dire? Si vous avez quelque chose à dire sur la motion, Mme le député des Iles-de-la-Madeleine, j'aimerais tellement vous entendre.

Mme Leblanc: C'est tellement intéressant ce que vous dites que cela vaut la peine d'écouter.

M. Marchand: Dans ce cas, ne m'interrompez pas et si vous avez quelque chose à dire, je vais vous faire une petite recommandation. Allez à votre siège parce que vous enfreignez le règlement en ce moment.

Mme le Vice-Président: M. le député de Laurier, je vais être obligée de vous retourner cette balle et vous demander d'en venir à la motion.

M. Marchand: Avec toute la condescendance que je vous connais, Mme le Président, votre bonté, votre amabilité condescendante, je vais me plier à tout ce que vous me direz, comme je l'ai toujours fait, d'ailleurs. On me demande d'aller au fond de la question, mais je n'ai que dix minutes, je ne puis y rester.

Mme le Vice-Président: Votre temps file, M. le député de Laurier. Cette motion!

M. Marchand: Mon leader parlementaire, avec son humour naturel, son sens de l'aile parlementaire, il y a des fois qu'il veut faire sourire ces personnes qui sont en face de nous, qui ont le sourire si peu facile, mais ce soir, cela leur fait du bien quand même devant cette triste loi qu'on nous propose, alors le leader parlementaire a permis de me faire sourire et peut-être eux aussi. Je n'avais pas le goût de rire devant cette loi, Mme le Président. Le leader parlementaire, dans ses commentaires sur ces dix minutes que j'ai à donner et qui sont très courtes, car je pourrais en avoir pendant trois heures... Mme le Président, vous savez ce qu'est un leader. Cela peut être un chef de file. Mais cela peut-être un point de conduite. En imprimerie, on appelle cela un point de conduite. Un point de conduite, cela n'a pas de jugement. Je pense, très sérieusement, que dans une table de matière, et je pense que le député de Mercier va me comprendre très bien parce qu'il connaît cela... Un point de conduite, savez-vous ce que c'est, Mme le Président?

Vous écrivez page 1, introduction, puis là il y a des points de conduite, mais cela ne réfléchit pas. Un point de conduite, cela peut être le leader parlementaire actuel, puis cela peut être aussi...

M. Levesque (Kamouraska-Témiscouata):

Cela peut être le député de Laurier aussi.

M. Marchand: ... le gars qui mène quelque chose. Mais, actuellement, je pense que c'est un point de conduite, parce que, dans son discours, il nous disait — et je parle sur la motion, Mme le Président — qu'il ne remplissait qu'une promesse électorale. Mais, en regardant de plus près le "remplissage" — je ne sais pas si c'est tellement dans le vocabulaire, mais je pense que dans le vocabulaire du député de Mercier, cela va aller — de cette promesse je me demande si ce n'est pas la fosse des Québécois que l'on remplit. Lorsqu'on ne remplit des promesses que pour les remplir, on peut voir ce que ça peut donner. On confie à un ministre incompétent la tâche de remplir une promesse électorale et de fabriquer une loi à deux têtes. Une loi qu'il a pu fabriquer, penser, peser avec ce qui existe au-dessus des épaules, car si 60% de la population ont fait élire ce parti au pouvoir...

Une Voix: 40%.

M. Marchand: ... 40%, il reste quand même 60% de la population qui ont voté contre...

Une Voix: 59%.

M. Marchand: ... ce bon et beau gouvernement. Mais il y a actuellement un pourcentage plus éloquent dans la population. Et, là, je me demande quel est ce pourcentage, entre 20% et 0%, qui est pour la loi qu'on nous présente.

Mme le Vice-Président: A l'occasion de ce petit moment de silence, je peux vous dire qu'il vous reste à peu près une minute pour conclure. J'espère que cette fois...

A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marchand: Je suis assuré qu'avec une minute on ne peut pas aller au fond...

Mme le Vice-Président: ... de la question, M. le député de Laurier.

M. Marcnand: Tout simplement et vitement, je veux quand même dire qu'il est arrivé que le député de Jonquière est venu à l'Assemblée nationale en disant à la commission qu'elle devait siéger pendant que l'Assemblée nationale siégeait. J'ai vu deux autres membres de la commission, députés du parti au pouvoir, qui sont venus siéger ici et donner leur opinion sur ce même projet. Mme le Président, vous me faites des signes et vous m'énervez, c'est effrayant. Quand même, comment peuvent-ils être utiles à une commission lorsqu'ils ont le goût d'être ici pour m'entendre? Je me pose des questions. Mes "fans" du Parti québécois, j'espère qu'ils le demeureront et je suis assuré qu'à l'avenir, avec la réflexion, ils admettront et verront que le bon sens n'est pas toujours du côté du pouvoir, mais du côté de l'Opposition qui essaie de leur donner des bons conseils et de leur donner peut-être...

Mme le Vice-Président: Concluez, M. le député.

M. Marchand: Je vois le leader parlementaire qui essaie de me dire que mon temps est terminé. Oui, mon temps est terminé.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Mme le Président, mes propos seront en quelque sorte une réplique à ceux que tenait le député de Sainte-Marie au cours du débat sur cette motion.

Le député de Sainte-Marie a exprimé ses doutes sur la valeur de la présentation de cette motion dite de clôture sur un projet de loi qui touche l'assurance automobile. Le député de Sainte-Marie a parlé de trois conséquences de ce genre de motion, la première étant l'impuissance dans laquelle on place notre système parlementaire au moment où on demande à l'Assemblée nationale, au moment où le gouvernement se rend compte qu'il

doit demander à l'Assemblée nationale d'adopter une motion de clôture de façon à mettre fin à un débat qui, aux yeux du gouvernement, s'éternise.

Il a également mentionné qu'une des conséquences de cette procédure est d'empêcher l'Opposition, aussi bien que les membres de l'Assemblée nationale en général, de bonifier les lois. Comme troisième conséquence, il s'est interrogé sur la valeur du travail que fait l'Opposition au moment où, à son avis, l'Opposition se limite à faire perdre le temps de l'Assemblée nationale, tant en commission qu'ici en Chambre, et à répéter des discours qui, aux yeux des ministériels, ne mènent nulle part.

On parle souvent — et c'est particulier chez le député de Sainte-Marie — de la nécessité de faire la réforme parlementaire. Encore ce soir, à plusieurs occasions, les députés ministériels, sans doute quelque peu écoeurés, si on peut employer l'expression, des nombreux discours que les députés de l'Opposition ont fait sur cette motion, nous parlent un peu partout, ici à l'Assemblée nationale, de la nécessité de réformer notre façon de procéder, notre façon de légiférer. Comme si le seul but d'un Parlement serait de voter des lois le plus rapidement et le plus efficacement possible.

Il est sûr qu'on a tous notre conception de ce que devrait être le parlementarisme, mais c'est bien évident que cette conception varie énormément selon qu'on siège du côté du gouvernement ou du côté de l'Opposition. On n'a qu'à revoir le journal des Débats des années soixante-treize ou soixante-quatorze pour s'en rendre compte. Le principal rôle n'est sûrement pas d'atteindre des records quant au nombre de lois qu'on peut voter. Je vous citerai seulement un exemple d'un travail d'Opposition qui a semblé superflu aux nombreux députés ministériels qui l'ont subi au cours de la première partie de cette session, alors qu'on a reproché aux députés de l'Opposition de faire strictement de l'obstruction, de faire de la rhétorique, de faire perdre le temps de l'Assemblée nationale mais qui, pourtant, a eu un résultat bénéfique, qui a bonifié la législation de l'Assemblée nationale puisque, effectivement, le projet de loi qui était alors à l'étude, c'est-à-dire le projet de loi no 31, au nom du ministre des Affaires municipales, Loi autorisant les municipalités à imposer un droit sur l'immatriculation de certains véhicules automobiles, ce projet de loi, dis-je, n'est jamais revenu devant l'Assemblée nationale.

On aura beau me dire, du côté du leader du gouvernement, que cela peut venir demain ou après-demain; on ne pourra pas me charrier là-dessus, je suis convaincu qu'on reverra jamais ce projet de loi parce que justement, au moment de la deuxième lecture, les députés de l'Opposition, tant de l'Union Nationale que de l'Opposition officielle, ont essayé, avec les moyens à leur disposition — des vingt minutes à répétition — de faire comprendre au gouvernement qu'il était en train de faire une erreur sur ce projet de loi no 31. Je n'aborderai pas le fond du projet de loi. On a même convenu, du côté de l'Opposition, qu'il y avait lieu de faire la seule motion d'amendement possible en deuxième lecture, c'est-à-dire de reporter l'étude du projet de loi à cinq mois de façon à démontrer notre opposition très ferme à l'adoption du projet de loi et ainsi de sensibiliser le ministre des Affaires municipales et le gouvernement au fait qu'il s'agissait là d'un projet de loi que l'Assemblée nationale ne pouvait adopter.

J'ai relu tantôt le journal des Débats, les volumes 19, 88 et 89 datés du 8 et du 9 août, qui porte sur les débats de ces deux jours parlant strictement de la motion de report de la deuxième lecture du projet de loi no 31 a cinq mois.

J'ai noté qu'aucun député ministériel n'est intervenu, aucun, pas un seul, pas même le ministre des Affaires municipales. Je n'ai pas compté le nombre de députés de l'Opposition qui sont intervenus sur cette motion, mais j'imagine qu'il y en a eu un bon nombre puisque, depuis le 9 août, on n'en a pas réentendu parler, Mme le Président. Cela, à mon avis, c'est le rôle de l'Opposition.

Si ce soir on s'oppose vivement, si on a l'air de se répéter, de parler dans le vide — puis ce n'est pas juste l'air, j'ai la certitude que je parle dans le vide présentement — le fait demeure que c'est notre job, à nous députés de l'Opposition. Forcément, cela doit déplaire aux députés ministériels, surtout aux membres du cabinet qui se disent: II faudrait bien partir en vacances. C'est une décision politique, on a fait une promesse électorale avec cela et c'est bien de valeur, nous on marche avec cela, la population nous jugera au moment de la prochaine élection.

Bien nous aussi, et c'est le député de Sainte-Marie qui le disait, si nous devons essayer de convaincre la population que nous sommes une solution de rechange valable au gouvernement d'en face, d'ici la prochaine élection, ce n'est sûrement pas en appuyant le gouvernement à adopter des projets de loi contenant des principes sur lesquels on est absolument opposés dans les détails; de A à Z où on s'oppose fermement. Si c'est comme cela qu'on doit, nous de l'Opposition devenir une solution de rechange valable au gouvernement, là j'y perds mon latin.

Mme le Président, je vous noterai en terminant que la promesse électorale qu'a faite le Parti québécois de faire une réforme de l'assurance automobile, j'en suis. Je ne vous reprendrai pas par contre les nombreuses autres promesses dont on ne parle pas depuis un an et un mois que le parti est au pouvoir; on le fera une autre fois. Mais il faut bien se rendre compte que cette promesse, cette hâte du gouvernement de faire une réforme ou en tout cas de donner l'impression qu'on fait une réforme de l'assurance automobile, cela n'a pas commencé avec le projet de loi no 67, cela a commencé avec le projet de loi 49, projet de loi qu'on a adopté il y a à peine trois mois. Déjà, dans le projet de loi no 67, on apporte un amendement, sinon plus d'un, au projet de loi 49, projet qui créait la Régie de l'assurance automobile.

C'est un projet de loi qui pressait à la fin de la première partie de la session au mois d'août; c'était urgent. Il s'agissait, j'imagine, d'entériner une partie de la promesse électorale du Parti qué-

bécois. On l'a voté, sinon trop rapidement, en tout cas sûrement pas assez lentement pour qu'on ne soit pas obligé deux ou trois mois plus tard, par l'entremise du projet de loi 67, de proposer déjà des amendements. En fait, on doit se demander si ce n'est pas ce qu'on est en train de faire avec le projet de loi 67, en faisant rapport vendredi à l'Assemblée nationale, en permettant aux députés de proposer des amendements au moment de l'adoption du rapport. Ces amendements, s'ils viennent de l'Opposition seront rejetés du revers de la main; on n'a qu'à se rendre compte de ce qui se passe en commission parlementaire. Les amendements proposés par le gouvernement seront adoptés les deux yeux fermés par les députés ministériels et avec la majorité. C'est bien entendu que le projet de loi 67 sera exactement celui que le ministre et le cabinet ont bien voulu, mais nous de l'Opposition, on va dire: Bien oui, allez-y, cela a bien du bon sens cette affaire-là! On n'est pas d'accord sur les principes, on n'est pas d'accord sur les détails, on n'a pas fait de promesses nous de faire cela a la vapeur, n'importe comment; et puis notre job en tant que députés de l'Opposition c'est de faire en sorte que la population sache éventuellement ce qui se passe, ce qu'on est en train d'adopter.

Alors, Mme le Président, c'est tout ce que j'avais à dire. C'est bien entendu que la motion sera adoptée, la majorité ministérielle y verra, mais qu'on arrête de dire, à chaque fois, qu'on fait une motion dilatoire ou qu'on s'évertue, nous de l'Opposition, à user de notre droit de parole légitime que nous accorde le règlement pour essayer de faire changer d'idée le gouvernement. Si on n'est pas assez éloquents, si on n'est pas aussi intelligents, si on n'a pas l'intelligence que ces gens d'en face peuvent avoir, il ne faut pas nous en faire un reproche.

D'abord, je ne suis pas d'accord avec cela mais je vous dirai, Mme le Président, que, quant à moi, je n'ai pas l'intention, dans le but de partir en vacances un peu plus rapidement ou dans le but de rester plus amis avec certains députés ministériels... Vous voulez que je conclue, je conclus là-dessus, Mme le Président, en vous répétant que la réforme parlementaire que nous souhaitons tous devra faire plus que d'essayer de museler l'Opposition parce que, quels que soient les règlements, quelles que soient les motions de bâillon, de clôture qu'on adoptera, pour ma part, je suis sûr que tous mes collègues de l'Opposition ne se plieront jamais à adopter des lois sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord, et nous prendrons tous les moyens à notre disposition pour que la population soit informée.

M. Cordeau: II n'y a pas de leader.

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de gouvernement.

Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement exercera-t-il son droit de réplique?

M. Burns: Oui, Mme le Président, de façon très brève.

Mme le Vice-Président: Alors, M. le leader.

M. Robert Burns

M. Burns: Mme le Président, nous avons entendu environ 28 orateurs pour nous dire jusqu'à quel point il ne fallait pas adopter cette motion que j'ai proposée. Tous et chacun, sauf peut-être le député de Jonquière, le député de Jeanne-Mance, le député de Sainte-Marie et le député de Matapédia, se sont formalisés de cette motion. J'ai entendu des choses absolument étonnantes venant de la part de nos amis de l'Opposition officielle lorsqu'ils nous disaient que deux fois en quatre mois nous avions imposé la motion de clôture. J'ai vu, moi, pire que cela. J'ai vu, deux fois dans un même projet de loi, une motion de clôture, deux fois, relativement au projet de loi no 22. Bien oui, et il n'y a personne qui semble s'être étonné de cela. Nous autres, nous avons crié au meurtre, je vous le dis tout de suite. On a fermé la porte aux gens qui devaient intervenir devant la commission et on a fermé la porte également aux membres de l'Opposition qui, à l'époque, se tenaient là.

Mme le Président, cela m'apparaît comme une chose tout à fait normale qu'un gouvernement qui a pris un certain nombre d'engagements électoraux... Je le répète, il n'y a rien de pénible là-dedans, il n'y a rien d'indécent dans cela. Si, à un moment donné, nous ne respections pas nos engagements électoraux, on nous reprocherait de ne pas les respecter. Un de nos engagements électoraux très importants, c'est celui de l'assurance automobile et, entre autres, Mme le Président...

M. Verreault: ...

M. Burns: Cela viendra en temps et lieu. Ne vous pressez pas, il y a un certain nombre de choses...

M. Verreault: Dix ans, ce sera trop tard.

M. Burns: Je vais vous parler d'autres engagements électoraux qui sont déjà réalisés: le projet de loi sur le financement des partis politiques est déjà adopté.

M. Gratton: Question de règlement, Mme le Président.

M. Lavoie: Est-ce que la pertinence du débat existe pour le leader parlementaire du gouvernement?

M. Burns: Mme le Président, on me pose des questions de l'autre côté, alors je réponds aux députés. Entre autres, Mme le Président, un autre engagement électoral que nous avons...

M. Gratton: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Revenez à la pertinence du débat.

M. Lavoie: Pertinence du débat, Mme le Président.

Une Voix: Cela dérange.

M. Burns: Les médicaments gratuits pour les personnes de plus de 65 ans, Mme le Président, c'est un autre engagement électoral que nous avons respecté.

M. Gratton: Question de règlement. Des Voix: Bravo!

Mme le Vice-Président: Je ne voudrais pas avoir à nommer tous les députés qui interviennent actuellement. M. le leader du gouvernement, je voudrais quand même vous rappeler que vous sembliez très chatouilleux sur la pertinence du débat tantôt. Je vous demanderais...

M. Burns: Quand on se fait blâmer de respecter nos engagements électoraux, écoutez, Mme le Président, je suis obligé, au nom du gouvernement, de relever un certain nombre d'anachronismes dans l'attitude de l'Opposition officielle surtout. Je ne blâme pas l'Union Nationale parce qu'ils ont été là-dessus très corrects.

M. Gratton: Votre club ferme, ne lui faites pas mal.

M. Burns: Ils ont été très corrects dans le sens...

M. Gratton: Ils vont dire oui si vous êtes fin.

M. Burns: ... qu'ils nous ont dit carrément qu'ils n'étaient pas d'accord avec cela. Cela, je le prends. Je l'accepte.

M. Lavoie: On ne vous l'a pas assez dit, nous.

M. Burns: Mais qu'on nous dise, Mme le Président — et cela, c'est la première fois que j'entends cela — le leader du gouvernement justifie cette motion par le fait qu'il y a un certain nombre d'engagements électoraux qui sont respectés, l'un de ceux-là étant le projet de loi no 67, et qu'on nous blâme de respecter nos engagements électoraux, cela est absolument aberrant, Mme le Président. Par exemple, on va nous blâmer d'avoir permis aux personnes âgées...

M. Gratton: Mme le Président, question de règlement. Le leader du gouvernement est impertinent, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Gatineau, je vous dirai, comme je l'ai dit au leader du gouvernement cet après-midi, de me laisser déterminer si l'intervenant actuel est impertinent.

M. Burns: Je n'ai pas l'intention, Mme le Président, de mettre de côté vos directives, mais j'ai quand même l'intention de montrer jusqu'à quel point il est ridicule de la part de l'Opposition de nous présenter quelque 24 intervenants sur une motion qui signifie simplement que ce gouvernement va respecter l'un de ses engagements électoraux.

Malheureusement, dans une même année, il est absolument impossible pour le gouvernement de les respecter tous. Mais, je n'ai pas vu encore de gouvernements qui, à l'intérieur d'une même année, lorsqu'il a quelque huit engagements importants précis, se faire...

M. Gratton: Pertinence!

M. Burns:... dire par l'Opposition: Vous n'avez pas le droit de faire cela. Vous ne me ferez pas parler anglais, même si vous essayez!

Et là-dessus, Mme le Président, je ne vois pas...

M. Lavoie: Langue maternelle, renégat!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Burns: ... comment... M. Lavoie: Traitre à sa race!

Mme le Vice-Président: M. le député de Laval, s'il vous plaît!

M. Burns: ... je pourrais tenter de discuter avec les représentants de l'Opposition, étant donné qu'ils ne parlent pas sur la même longueur d'onde que nous.

M. Verreault: Cela, c'est vrai!

M. Gratton: Que Dieu en soit loué!

M. Burns: Ce n'est pas dit avec une certaine attitude altière, c'est tout simplement...

Mme Lavoie-Roux: Avec de l'arrogance!

M. Burns: Même pas avec de l'arrogance, c'est tout simplement qu'on ne parle plus le même langage.

M. Lavoie: On est des spoutniks!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: L'émetteur de Laval, pour l'instant...

M. Burns: Je pense, Mme le Président, que justement les Québécois ont constaté que, depuis un certain temps, il y avait un nouveau langage au Québec et que ce nouveau langage devait se tra-

duire par de nouvelles façons de procéder. Evidemment, nos amis d'en face — je continue de les appeler ainsi, en termes parlementaires — ne sont pas encore habitués à cela, parce que ce n'était pas du tout de cette façon qu'ils fonctionnaient.

Je me le rappelle — et on l'a cité largement — le cas du projet de loi no 22 qui a amené, éventuellement, le même genre de motion. Je me rappelle également qu'on nous a reproché...

M. Gratton: Notre projet de loi 22 ou le vôtre?

Mme Lavoie-Roux: Vous avez le vôtre, aussi, le 22.

M. Burns: Laissez faire!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Je comprends, mesdames et messieurs, qu'il se fait tard et qu'un peu de fatigue vous incite à faire des interventions qui ne sont pas tout à fait nécessaires. Je vous demanderais de contribuer, les uns et les autres, à ce que nous puissions terminer cette séance avant trop longtemps.

M. le leader.

M. Burns: Je disais donc, Mme le Président, avant qu'on m'interrompe de façon aussi gaillarde, qu'on nous a reproché notre opposition au projet de loi no 22, à l'intérieur d'à peu près toutes les interventions qui ont été faites par les députés de l'Opposition officielle. Mme le Président, il va falloir faire la différence, une fois pour toutes, entre le genre d'opposition qui se faisait lorsque nous étions dans l'Opposition...

Mme Lavoie-Roux: Vous étiez...

M. Burns: ... et le genre d'opposition qui se fait actuellement par l'Opposition officielle. Il va falloir se dire cela éventuellement clairement.

Mme le député de L'Acadie ne comprend peut-être pas ce style différent, mais...

M. Gratton: Je n'en reviens pas! Ils sont meilleurs acteurs que je pensais...

M. Burns: Parce que...

M. Gratton: L'Oscar pour le meilleur acteur, ma grand-conscience!

M. Burns: Vous voyez que ce que je dis fait mal.

M. Gratton: Cela ne fait pas mal du tout, je trouve cela drôle.

M. Burns: Vous ne l'aimiez pas cette Opposition.

M. Gratton: Là, vous commencez à sourire. Vous allez rire tantôt.

M. Burns: Je souris, parce que je vois jusqu'à quel point vous n'êtes vraiment pas en mesure de répondre à ce que je suis en train de vous dire.

Je dis, Mme le Président, simplement que, lorsque vous aviez une Opposition de six députés dans l'Opposition officielle, il était normal, à un moment donné, que ces six députés, avec la dernière goutte de leur sang, avec vraiment la dernière énergie...

Mme Lavoie-Roux: ... Canadien.

M. Burns: Que ces députés aient pu prendre tous les moyens pour bloquer un projet de loi, je trouve que c'est tout à fait normal. Maintenant on est fort de 26 députés dans l'Opposition; je trouve que vraiment on abuse du pouvoir de l'Opposition lorsqu'on bloque des projets de loi comme le projet de loi no 67. C'est la raison pour laquelle c'est important, nécessaire et c'est pourquoi nous sommes arrivés avec la motion que nous présentons aujourd'hui.

M. Roy: J'invoque le règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Une question de règlement, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Ecoutez, je ne veux pas laisser passer les propos de l'honorable leader du gouvernement à ce moment-ci — j'en fais une question de règlement ou peut-être une question de privilège aussi — lorsqu'on dit qu'on bloque le projet de loi 67. Je voudrais dire à l'honorable leader du gouvernement qu'il serait préférable pour lui de s'informer puisqu'effectivement ce soir nous avons procédé à l'adoption de plusieurs articles du projet de loi. C'était la même chose cet après-midi.

M. Burns: Pourquoi? Parce que vous avez une motion de clôture.

M. Roy: Non, ce n'est pas à cause de votre motion.

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud, votre intervention m'apparaît plus comme une mise au point que comme une question de règlement.

M. Burns: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le leader.

M. Burns: ... dans le fond je suis content de l'intervention du député de Beauce-Sud parce que tout le monde me dit depuis environ 17 h 30 ou 18 heures, tout le monde me dit: Comment se fait-il que tu ne l'as pas présenté avant, ta motion? Depuis ce temps, cela déboule en commission. Cela marche en commission. Je vois le député de Vanier, qui a été mobilisé à toutes fins utiles par cette commission et qui peut maintenant venir suivre les travaux, calmement, de l'Assemblée nationale. C'est tout à fait normal...

M. Lavoie: ... avant de se coucher.

M. Burns: ... que nous disions aux députés concernés par la commission: Vous avez, à compter de maintenant, jusqu'à jeudi soir, minuit, pour faire les débats que vous avez à faire à cette commission.

Planifiez vos travaux, parce que c'est à vous autres à planifier maintenant vos travaux. Tout le monde nous dit qu'on n'a rien planifié, je vous dis: Planifiez, Mme le Président, pas vous, mais je le dis à travers vous à l'Opposition: Planifiez vos travaux jusqu'à jeudi soir, parce que vendredi...

M. Lavoie: Planifiez votre retraite.

M. Burns: ... matin, nous aurons un rapport d'une commission parlementaire. Ce rapport sera fait relativement aux travaux de cette commission parlementaire. Si vous avez à intervenir sur l'article 152, faites-le. Si vous avez à intervenir sur l'article 122, faites-le. Si vous avez à intervenir sur l'article 29, faites-le mais choississez votre moment, parce que là maintenant, cela va se faire dans ce délai. C'est tout, Mme le Président.

M. Lavoie: Grand démocrate!

Mme le Vice-Président: Cette motion du leader du gouvernement est-elle adoptée?

M. Lavoie: Vote enregistré.

M. Burns: Mme le Président, étant donné qu'il est minuit moins deux minutes, je vous demanderais...

Mme Lavoie-Roux: Ils sont partis se coucher vos députés?

M. Burns: Pardon?

Mme Lavoie-Roux: Ils sont partis se coucher vos députés?

Mme le Vice-Président: Mme le député de L'Acadie...

M. Burns: Question de privilège, Mme le Président. Je m'excuse, Mme le député de L'Acadie, c'est à la suite d'une entente que j'allais demander... ne m'imputez pas cela, et si vous voulez un vote enregistré tout de suite, je suis prêt à le prendre, d'accord?

M. Marcoux: D'accord, vote enregistré tout de suite.

M. Burns: C'est à la suite d'une entente avec des représentants de l'Opposition. Ne faites pas de farce comme celle-là. Je vous dis tout de suite que je vais demander...

M. Gratton: Vous venez de passer 20 minutes à faire des farces dans votre réplique, ne perdez pas les pédales.

M. Lavoie: Un peu de calme!

M. Burns: Voulez-vous le vote enregistré tout de suite?

M. Lavoie: Voulez-vous vous calmer un peu!

M. Burns: Le voulez-vous tout de suite?

M. Lavoie: Voulez-vous arrêter de vous exciter!

M. Burns: Je ne m'excite pas, mais il faudrait avertir vos gens.

M. Lavoie: Mme le Président, il est vrai que ce n'est pas à la demande du gouvernement, ni de l'Opposition, mais d'un commun accord qu'il a été convenu de voter demain. Ce n'est pas nécessaire de monter dans les rideaux et de faire des singeries à cette heure-ci.

M. Burns: Bien oui, je ne ferai pas de singeries, sauf que Mme le député devrait peut-être être informée des discussions que nous avons.

Mme le Président, malgré l'intervention du député de L'Acadie, je vous demanderais, comme l'article 106 de notre règlement me le permet, de remettre le vote au cours de la période des affaires courantes demain.

Mme le Vice-Président: Le vote sur la motion du leader du gouvernement sera enregistré demain au cours des affaires courantes. Sur ce, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Un instant, Mme le Président, quel sera l'ordre des travaux pour demain, avec votre permission, après la période des questions?

Travaux parlementaires

M. Burns: Demain, après la période des questions, nous reviendrons à la troisième lecture du projet de loi concernant l'environnement, au nom du ministre délégué à l'environnement, M. Marcel Léger. Nous reprendrons le débat relativement au projet de loi no 61 inscrit au nom du ministre du Revenu. Si le temps nous le permet, nous prendrons en considération, en commission plénière, le projet de loi no 67, c'est-à-dire la Loi amendant la Loi de la Législature, inscrite à mon nom. Le projet de loi no 67.

M. Mailloux: Bien non!

M. Burns: Le projet de loi no 78, pardon. Pas le projet de loi no 67, le projet de loi no 78. Il y aura des commissions après la période des questions. Je peux vous dire immédiatement lesquelles seront appelées. Ces commissions seront les suivantes: La commission des corporations professionnelles — il y a déjà un avis qui paraît au feuilleton là-dessus — relativement au projet de loi no 25 et, évidemment, au salon rouge, la commission des consommateurs relativement au projet de loi no 67.

La commission des consommateurs devrait continuer ses travaux régulièrement toute la journée, sauf que, dans la soirée, les corporations professionnelles seront remplacées par le projet de loi no 45, c'est-à-dire par le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Mme le Vice-Président: Cette Assemblée ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 0 heure)

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