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(Quatorze heures dix minutes)
Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Mme le ministre des Travaux publics.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Arrêtés en conseil autorisant
l'acquisition d'immeubles
Mme Ouellette: M. le Président, je dépose devant
l'Assemblée nationale des arrêtés en conseil autorisant
l'acquisition d immeubles.
Le Président: Documents déposés. Mme le
ministre des Consommateurs.
Rapport du ministère des Consommateurs
Mme Payette: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1976/77 du ministère des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Période des questions orales. M. le député de
Saint-Laurent.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Gisement d'amiante dans la région
d'Amos
M. Forget: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Richesses naturelles. Le ministre pourrait-il commenter des
allégations qui sont contenues dans un article publié aujourd'hui
dans le Devoir, sous la signature de M. Vastel. relativement à
l'existence dans la région d'Amos, d'un gisement d'amiante qui est la
propriété de la société Brinco et qui pourrait
être mis en exploitation si seulement un partenaire pouvait être
découvert à ladite société. Ce gisement
impliquerait un investissement de $300 millions et la création de 600
emplois dans cette région pour l'extraction de la fibre d'amiante.
Le Président: M. le ministre des Richesses naturelles.
M. Bérubé: Oui, M. le Président, je peux
répondre à cette question en évitant, toutefois, de
divulguer des résultats qui pourraient être la
propriété de l'entreprise. Effectivement, la
société Brinco a approché le gouvernement à la
recherche d'un partenaire. Nous avons fait une évaluation de la valeur
du gisement. Je peux, sans trahir de secret, dire, cependant, que les
études de rentabilité qui sont faites avec les
échantillonnages en tête de galerie, par rapport aux études
de rentabilité faites sur les échantillonnages dans les parois
latérales de galeries, conduisent à une réponse qui est
tantôt positive, tantôt négative. Le gisement
d'Abitibi-Amiante, à la lumière des résultats que nous
avons, s'avère un gisement possiblement marginal.
De plus, je dois souligner que des faillites en Australie, quant au
lancement d'un nouveau gisement, une faillite récente de United Asbestos
en Ontario, également amène cette entreprise Brinco à
être extrêmement prudente dans l'engagement de sommes
supplémentaires elle a déjà investi tout
près de $10 millions et elle demande donc au partenaire de
fournir un autre montant de $10 millions pour se rendre au moins à son
niveau avant de négocier une association quelconque.
Par conséquent, il s'agit donc de sommes importantes dans
lesquelles on peut s'engager uniquement dans la mesure où on est
véritablement capable d'évaluer le gisement, ce qui est difficile
pour l'instant.
D'autre part, la société qui a offert au gouvernement de
participer fait face à un autre problème. C'est que, n'ayant pas
d'expertise dans la mise en marché, pas plus d'ailleurs que dans le
minage d'amiante qui est une technologie extrêmement délicate,
extrêmement sophistiquée, la compagnie recherche un partenaire qui
a déjà cette expertise; elle a donc fait des approches pour un
troisième partenaire.
Pour autant que le gouvernement est concerné, ce que nous
choisissons pour l'instant c'est d'attendre l'achat d'Asbestos Corporation qui
nous donnera les équipes techniques nécessaires pour
l'évaluation du gisement et nous permettra d'évaluer si,
effectivement, celui-ci est rentable. Par conséquent, nous attendons
l'achat d'Asbestos avant de nous engager dans le projet.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, le ministre semble dire
tantôt que la société Brinco offre une participation et
tantôt qu'elle n'en offre pas. Est-ce qu'il pourrait être plus
clair, de manière qu'on sache si, effectivement, il y a une offre qui a
été faite au gouvernement pour la mise en route de cette
exploitation, moyennant une prise de participation minoritaire, ce qui ferait,
malgré tout, porter la plupart des risques sur le partenaire
majoritaire, Brinco dans ce cas-ci? Le cas échéant, si une telle
offre a été faite, qu'est-ce qui retient le ministre des
Richesses naturelles de pousser plus avant
l'exploration de cette possibilité plutôt que de remettre
aux calendes grecques la réalisation de telle ou telle
hypothèse?
Le Président: M. le ministre des Richesses naturelles.
M. Bérubé: II y a eu des négociations,
auxquelles j'ai eu à participer d'ailleurs. Les bases de ces
négociations sont relativement simples; la société ayant
investi $10 millions, elle propose au partenaire éventuel de placer $10
millions dans le développement du gisement et de partager, à ce
moment-là, à 50/50 la participation au développement du
gisement.
Donc, elle demande d'abord un investissement, de la part du partenaire,
de $10 millions sans quelle n'investisse un seul cent, de manière
à, d'une part, améliorer les possibilités de
rentabilité du gisement avant, elle, de prendre la décision si
elle va aller de l'avant.
Par conséquent, pour aller de l'avant, cela suppose une
évaluation technique du gisement et, comme cette technique
minière de l'amiante est une technique extrêmement
délicate, il nous apparaît, présentement, que seule une
compagnie minière déjà impliquée dans le domaine
est véritablement en mesure d'évaluer la valeur du gisement,
d'évaluer le type d'expériences qui doivent être conduites,
de manière à pouvoir développer ce gisement.
Par conséquent, il nous apparaîtrait excessivement
risqué pour un gouvernement d'ailleurs, c'est l'avis de la SOQUEM
de s'engager dans un projet minier d'amiante, investir des sommes
considérables avec une très forte possibilité d'erreurs,
compte tenu de la marginalité du gisement tel qu'il est.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
NI. Forget: M. le Président, je ne crois pas que le
gouvernement manifeste la même prudence dans tous ses investissements
dans le domaine de l'amiante. Il reste que le ministre se borne à
adopter une attitude défensive vis-à-vis de ce projet. Est-ce que
le ministre a pris l'initiative de faire une contreproposition à la
société Brinco? Il s'agit d'un projet très important pour
l'économie de cette région du Québec. On sait combien il y
a de fermetures de mines dans cette région. Et c'est un projet qui
créerait quelque 600 emplois permanents en Abitibi, 1000 emplois durant
la période de construction. Ne vaudrait-il pas la peine que le
gouvernement se préoccupe un peu de cette région aussi et ne soit
pas purement fasciné par des projets qu'il entretient dans d'autres
régions du Québec, projets qui ne créeront pas,
ceux-là, un seul emploi nouveau?
M. Bérubé: Votre question étant très
politique, M. le député de Saint-Laurent, je vous
répondrai également sur un ton politique. Ceci montre clairement
pourquoi le gouvernement doit acheter l'Asbestos Corporation si on veut devenir
un moteur de développement. Et si, au contraire, nous voulons gaspiller
l'argent des contribuables dans des projets qui ne seraient pas mûrs,
à ce moment nous pourrions y aller Mais le danger, à ce moment,
est beaucoup plus grand. Tandis qu'acheter une équipe experte en la
matière, c'est la meilleure garantie de ne pas gaspiller les fonds de
l'Etat.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, dans la même
région, il y a un autre gisement qui pourrait fournir une occasion au
ministre d'appliquer les beaux principes qu'il vient de nous exposer. En effet,
SOQUEM, dans la même région du Nord-Ouest du Québec, est un
partenaire à 50% dans un projet d'une mine d'or au lac Little Long, qui
semble également d'une richesse assez considérable et qui
pourrait lui aussi être développé dans un délai
assez bref. Non seulement la SOQUEM est-elle partenaire dans cette mine, mais
elle est également gérante du développement. Or, rien ne
semble se produire dans ce cas. Il semble que le gouvernement n'ait pas de
fonds à consacrer ou d'avances de fonds à consacrer à la
SOQUEM et que ce projet ne peut se réaliser...
M. Duhaime: Question de règlement, M. le
Président.
M. Forget: ... à cause de l'inertie du gouvernement.
M. Duhaime: Question de règlement.
Le Président: M. le ministre des Richesses naturelles.
M. Bérubé: Dans le cas du lac Little Long, je n'ai
nullement l'intention de révéler les moindres secrets de la
SOQUEM. Celle-ci pourra faire les annonces en temps voulu et quand elle le
jugera propice. Je vous dirai cependant que l'investissement dans une mine
d'or, c'est un investissement dans un projet minier pour lequel il existe
énormément de connaissance, y compris à SOQUEM, en ce qui
a trait au développement minier.
Par conséquent, ce n'est nullement une question de connaissances,
ce n'est non plus nullement une question de fonds, puisque nous avons fait
voter lors de la dernière session, au grand dam de l'Opposition, un
projet de loi qui nous permet justement de mettre à la disposition de
SOQUEM les fonds nécessaires pour développer le gisement.
Le Président: Dernière question, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Pourquoi ne font-ils rien? Comment le ministre peut-il
expliquer les délais dans ce dossier et surtout le désir apparent
de SOQUEM de construire une usine de traitement du minerai, alors qu'il en
existe déjà une dans le voisinage? (14 h 20)
Le Président: Le ministre des Richesses naturelles.
M. Bérubé: M. le Président, j'ai le regret
de dire que le député de Saint-Laurent parle à travers son
chapeau. Avant de développer un gisement, il faut prouver les
réserves. Cela vient d'être terminé tout récemment.
Deuxièmement, la décision concernant l'usine n'a pas
été prise.
Le Président: Question principale, M. le
député de D'Arcy McGee.
Des Voix: De la visite.
Soutien à la revue Ici Québec
M. Goldbloom: M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre. Elle concerne un sujet délicat, et je voudrais la
poser aussi sobrement que possible. Il s'agit de la revue "Ici Québec ".
Je voudrais demander au premier ministre de bien vouloir confirmer, de son
siège, qu'il n'existe aucun lien financier ou politique entre soit le
gouvernement, soit le Parti québécois et la revue en question; je
voudrais qu'il confirme en même temps qu'il n'y a pas eu, de la part du
gouvernement, ou de la part du Parti québécois, de contribution
financière à cette revue, même à ses
débuts.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Ce que je peux confirmer de mon
siège, M. le Président, c'est ma certitude absolue qu'il n'y a
pas eu de contribution, quelle qu'elle soit, de la part du gouvernement. Il a
pu arriver qu'il y ait eu des morceaux de publicité, probablement pas
enfin c'est facile à vérifier mais sûrement
pas de contribution directe. Et j'ai la certitude absolue je ne voudrais
pas m'engager de façon totale, parce qu'il peut y avoir... en tout cas,
de la part du Parti québécois dans lequel je suis membre de
l'exécutif, comme le député de D'Arcy McGee le sait
qu'il n'y a pas eu de contribution quelle qu'elle soit. De la part de certaines
instances, il y a des comtés qui ont quand même des fonds etc.,
là je ne peux pas vérifier.
Je peux le faire si le député veut en savoir davantage,
mais, au niveau central de l'organisation du parti, non.
Le Président: M. le député de D'Arcy
McGee.
M. Goldbloom: Ma question additionnelle, M. le Président,
concerne le rôle de certains membres du gouvernement en rapport avec
cette revue. Vous remarquerez, M. le Président, que je n'ai pas
parlé du fond du sujet. La liberté d'expression des auteurs devra
être défendue par eux devant le Conseil de presse ou ailleurs, le
cas échéant, mais il y a deux ministres dont la photo a paru dans
la revue comme ayant donné un appui que je ne voudrais pas
préciser; j'aimerais que la précision vienne du côté
ministériel. Il y a un troisième mi- nistre dont la photo est
parue dans la revue, célébrant avec les dirigeants de la revue le
premier anniversaire de cette publication et offrant une collaboration.
Dans les circonstances, M. le Président, les ministres,
contrairement aux auteurs des articles, ayant été élus par
la population pour représenter toute la population, ont-ils l'intention
de continuer leurs rapports avec cette revue et, si oui, de quelle
façon?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je
répète de nouveau, sans plus d'insistance, que, de mon
siège, je peux dire que ni le gouvernement, ni le parti, en tout cas au
niveau central, n'ont de liens directs ou indirects, au point de vue financier
et au point de vue de l'organisation, avec la revue.
Je dirai également, en réponse au député de
D'Arcy McGee, que ce que j'en sais je pense que les ministres
concernés pourront ajouter, s'ils le veulent, des explications
c'est nue c'est à titre personnel, comme abonnés, que certains
membres du gouvernement peuvent soutenir la revue en question, la raison
étant essentiellement celle-ci, que le député de D'Arcy
McGee doit comprendre, j'espère, qu'il arrive, depuis la disparition
d'un autre périodique qui s'appelait le Jour, que, sur le plan pur,
simple et unique de l'avenir politique du Québec et des options qui vont
s'affronter au référendum, sauf erreur, la seule et unique
publication, peu importent ses autres aspects, qui soit en ce moment, dans le
même sens sur ce plan de l'avenir politique du Québec, c'est
justement "Ici Québec".
Maintenant, sur le fond, j'aime autant le dire tout de suite, si le
député de D'Arcy McGee veut parler d'un certain article à
propos du sionisme, que malheureusement je n'ai pas lu, je lui dirai simplement
que le sionisme en soi est un mouvement politique, devenu mouvement national
aussi, qui peut être combattu comme n'importe quel mouvement politique.
Seulement, la ligne de démarcation, je l'ai dit aux journalistes ce
matin, est très délicate entre l'antisionisme et
l'antisémitisme.
Et pour ce qui est de l'antisémitisme, qui est du racisme, pour
autant que cela se présente, moi je peux vous dire devant la Chambre que
je ne ferais jamais partie d'un gouvernement, et à plus forte raison je
n'en dirigerais pas un, où il y aurait quelque relent que ce soit de
racisme. Il faut s'entendre sur le mot. Le racisme, je l'ai déjà
dit, je ne m'en fais pas une définition scientifique, mais je pense que
tout le monde sent on n'a pas besoin de comprendre des fois, on peut le
sentir tout le monde sent ce que c'est, quand on refuse d'accepter, cela
peut aller jusqu'à l'existence, mais d'accepter quelqu'un parce qu'il
est ce qu'il est, un Juif parce qu'il est Juif, un francophone parce qu'il est
francophone, etc., etc., ce genre d'attitude, ni le gouvernement ni celui qui
vous parle, M. le Président, ne l'accepteront jamais dans aucune de nos
orientations.
Le Président: M. le député de D'Arcy
McGee.
M. Goldbloom: M. le Président.
M. Laurin: M. le Président, me permettriez-vous d'ajouter
un mot, puisque mon nom a été mentionné?
Le Président: M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: Le fait que l'on se réjouisse qu'existe une
revue indépendantiste quelconque n'implique sûrement pas que l'on
soit d'accord avec l'un ou l'autre des articles qu'il contient ou avec le
contenu quel qu'il soit de cette revue. D'ailleurs, il est arrivé bien
souvent à l'époque où existait un journal
indépendantiste, soit quotidien ou hebdomadaire, que des membres du
gouvernement et votre serviteur en particulier se soient opposés
à l'une ou l'autre des thèses ou opinions défendues dans
ce quotidien ou dans cet hebdomadaire.
En ce qui me concerne, je n'ai pas lu l'article auquel se
réfère le député de D'Arcy McGee mais, s'il
ressemble vraiment à ce qu'il décrit, je puis l'assurer que je
m'en dissocie complètement. Je n'accepterai jamais quoi que ce soit qui
ressemble, de loin ou de près, à de l'antisémitisme ou
à du racisme, ce qui équivaut à un manque de respect pour
l'individu ou pour une collectivité quelle qu'elle soit. La philosophie
que j'ai toujours cultivée est celle du respect, de la tolérance,
de I'ouverture aux autres.
Bien sûr, on peut distinguer entre ces aspects philosophiques
fondamentaux et des mouvements politiques ou des prises en position, des
contestations politiques. Ce sont deux domaines absolument différents.
Mais en ce qui concerne les aspects fondamentaux reliés à la
conception que l'on peut se faire de l'homme, je peux assurer le
député de D'Arcy McGee que, si tel est le sens de l'article, je
m'en dissocie complètement.
Le Président: M. le député de D'Arcy
McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je remercie le premier
ministre et le ministre d'Etat de leurs réponses. Celle du premier
ministre m'amène à poser une dernière question
additionnelle. Le premier ministre a indiqué en quelque sorte que depuis
le décès de la publication Le Jour, c'est la revue en question
qui exprime à ses propres yeux un point de vue qui est proche de celui
du gouvernement. C'est justement là... C'est le premier ministre qui a
dit...
M. Lévesque (Taillon): ... question.
M. Goldbloom: II me semble, M. le Président, que si un
lien quelconque philosophique est établi, par suite du fait que dans
cette revue, dans l'article en question, il y a des citoyens du Québec
je ne parle pas d'un mouvement politique qui, comme dit le premier
ministre, peut être attaqué et qui doit se défendre
qui ont été attaqués et, notamment, dans les interviews
accordées par un des porte-parole de la revue, M. Chaput il y a
eu des attaques de cette nature puisque le pre- mier ministre et le
ministre d'Etat au développement culturel ont exprimé un refus de
participer à ce genre d'attaque contre des citoyens du Québec,
j'inviterais le premier ministre à repenser ce qu'il vient de dire dans
la première partie de sa deuxième réponse au sujet des
liens philosophiques qui peuvent exister par rapport à cette revue. (14
h 30)
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je pense que le
député de D'Arcy McGee commence à charrier un peu. Ce que
j'ai dit tout à l'heure, c'était très clairement je
pense que le journal des Débats le prouvera que sur un plan
spécifique qui, pour nous, est fondamental, le plan de l'orientation
politique, des options qui vont se présenter au moment du
référendum, cette publication cela adonne comme cela
est la seule qui défende la même option que nous dans ce
secteur. Cela n'a rien à voir avec l'ensemble des idées que
peuvent avoir les membres de cette revue dont nous ne sommes pas
responsables.
Si cela correspond à ce que dit le député de D'Arcy
McGee, je m'associe au député de Bourget, ministre d'Etat au
développement culturel, et sûrement à tous nos
collègues pour dire qu'on s en dissocie, mais de là à
commencer de près ou de loin à faire du contrôle de la
pensée, je pense que le député de D'Arcy McGee doit savoir
mieux que moi ce que cela a voulu dire, des choses qu'on a appelées le
maccarthysme, la culpabilité par association et des trucs comme
cela.
Le Président: M. le député de D'Arcy
McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, vous me permettrez de dire
tout simplement, sans invoquer formellement mon privilège, que ce n'est
pas du tout ce que j'ai suggéré.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
Décentralisation et aménagement du
territoire
M. Biron: M. le Président, ma question s a-dresse au
ministre d'Etat à l'aménagement du territoire. Selon mes
informations, le Conseil des ministres ou tout au moins l'équipe
interministérielle directement intéressée étudie
ces jours-ci ou a en sa possession un document de travail gouvernemental. C'est
un document qui m'a tout l'air de léventuel livre blanc sur la
décentralisation. Le ministre peut-il confirmer que ledit document de
travail déjà en circulation, en partie publié on en
a un exemple dans le Peuple-Courrier de ce jour préconise la mise
en place de conseils de comté composés de 49 membres, certains
élus par suffrage universel et d'autres par un collège
électoral, et complétés de commissions permanentes
touchant différents aspects de la vie collective locale et
régionale.
Deuxièmement, le ministre peut-il préciser
l'échéancier de consultation éventuelle et d'études
législatives subséquentes que vivra ce dossier,
ainsi que la date approximative de la publication de ce livre blanc sur
la décentralisation, compte tenu des informations contradictoires qui
ont cours à ce sujet?
Le Président: M. le ministre d'Etat à
l'aménagement du territoire.
M. Léonard: II y a effectivement un document de travail
qui ne circule pas dans le public, mais qui est au niveau d'un comité
interministériel, de même que d'un comité
ministériel, qui a été déposé au Conseil des
ministres le 14 décembre dernier, à la suite d'un mandat qui
avait été donné vers la fin de juin dernier.
Ce document de travail a fait l'objet d'un premier échange de
vues, mais il n'a fait l'objet d'aucune décision. Son étude sera
faite les 18 et 19 mars prochain au cours d'une réunion spéciale
du Conseil des ministres qui étudiera cette question parmi d'autres.
Nous verrons après ce qu'il en arrivera. Tout ce que je peux dire
maintenant, c'est que c'est un document préliminaire. C'était
là, le mandat. Il s'agissait de déposer un document
préliminaire, lequel a été déposé le 14
décembre, comme je le disais.
Je n'ai malheureusement pas lu l'article dans le journal que vous
mentionnez. En ce qui concerne les différentes hypothèses qu'il y
a là-dedans, il n'y a aucune décision qui a été
prise, mais il y a cette hypothèse que vous mentionnez. Encore une fois,
rien n'a été décidé.
Quant à l'échéancier, il va être fixé
ultérieurement, après cette étude du Conseil des
ministres. Tout le monde va reconnaître que ce document pourrait
être rejeté. Il pourrait être repris complètement.
Déjà s'il avait à être fait après son examen,
je pense qu'il y aura encore de bons bouts qui devraient être repris. Ce
que je peux dire en conclusion, c'est que c'est un document de travail qui
n'est pas terminé et qu'il n'y a aucune décision prise à
ce sujet.
M. Biron: M. le Président, j'ai une question additionnelle
à adresser au ministre là-dessus. Compte tenu de l'importance de
ce document sur la décentralisation et compte tenu des
énoncés qu'on connaît aussi, à ce jour, en
matière d'éducation, de loisirs et de projets par ailleurs
pressants, comme la réforme de la fiscalité municipale et
scolaire, le ministre ne croit-il pas, aux fins de Ja cohérence du
dossier de la décentralisation et de l'aménagement du territoire
et de son étude, que la publication du livre blanc sur la
décentralisation ne saurait tarder et devrait même
précéder toute autre étude ou dossier si pressant soit-il,
tels ceux sur l'éducation, les loisirs et la réforme municipale
qui traitent eux aussi de décentralisation pour avoir un plan d'ensemble
général?
M. Léonard: Je pense que ce n'est pas une
nécessité en soi qu'on ait au départ fixé tout ce
qu'il y aura dans le contenu d'une décentralisation gouvernementale.
Je pense que ce qui est important, c'est qu'au moins le gouvernement ait
une certaine idée du point d'arrivée de la
décentralisation. J'ai déjà eu l'occasion de mentionner,
au cours d'entrevues, que même une option qu'on pourrait prendre pourrait
changer en cours de route et qu'il ne s'agit pas d'une opération qui se
réalise dans six mois, dans un an, mais qu'au contraire c'est une
opération qui nécessairement s'échelonne sur plusieurs
années. Les expériences dans ce domaine, d'ailleurs, sont
concluantes. L'Angleterre a fait une décentralisation qu'elle a
étalée sur huit ans. Je pense qu'il faut se rendre à
l'évidence que ce n'est pas une opération simple et
instantanée.
M. Goulet: Une question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: Le député de Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Je demanderais une
directive avant de poser ma question. J'avais une question additionnelle
à la question du chef de l'Union Nationale à adresser au ministre
d'Etat à la réforme parlementaire. Je m'étais dit qu'en
son absence je la poserais au premier ministre, mais le premier ministre est
également absent. Est-ce que vous pourriez m'indiquer l'adjoint au
ministre d'Etat à la réforme parlementaire, M. le
Président? Est-ce qu'il y en a un, d'abord?
Le Président: M. le député de Bellechasse...
M. Goulet: Le premier ministre revient.
Le Président: ... s'il y en a un, ce doit être de
notoriété publique. M. le député de Huntingdon.
M. Goulet: M. le Président, étant donné que
le premier ministre arrive, vous me permettez certainement de poser ma question
supplémentaire.
Le Président: Je vais vous permettre une question
supplémentaire, même si je soupçonne que ce doit être
une autre question principale.
M. Goulet: Ah!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Goulet: M. le Président, je ne veux pas revenir, mais
étant donné que le ministre d'Etat à la réforme
parlementaire arrive, je m'adresserai à lui.
M. le Président, en question supplémentaire, toujours au
chapitre de la décentralisation et dans le même esprit de saine
administration et de planification lucide qui animait la question du chef de
l'Union Nationale, le projet du livre blanc sur la décentralisation,
dont nous avons copie, formulant les principes devant présider à
la création d'un découpage d'environ 91 comtés municipaux
et traitant du financement de ces éventuels comtés municipaux ou
conseils de comté, est-ce que le ministre s'engage, si ce n'est
déjà fait, à prendre connaissance du tout afin que ce
projet et
celui déjà connu de découpage des districts
électoraux tels qu'ils sont représentés à
l'Assemblée nationale témoignent si possible, d'une même
approche cohérente dans l'aménagement du territoire du
Québec et dans l'approche de la réforme électorale?
M. le Président, ma dernière question
supplémentaire: Entend-il faire étudier, et ce avant qu'il soit
trop tard, par le bureau de financement des partis politiques l'aspect du
financement dont traite le document de travail sur la
décentralisation?
Le Président: Le ministre d'Etat à la
réforme électorale.
M. Burns: Que j'en prenne connaissance, je prends cet engagement,
je peux vous le dire tout de suite. D'ailleurs, il y a des gens
déjà, à l'intérieur de mon cabinet, qui ont
commencé une étude assez exhaustive là-dessus.
Quant à la deuxième partie de votre question, comme vous
le savez, le Conseil consultatif du financement des partis politiques n'est que
cela, c'est-à-dire consultatif. D'autre part, comme vous le savez
également, je ne suis pas le ministre responsable de la mise en
application de cette loi. Troisièmement, le directeur
général du financement des partis politiques, Me Pierre-Olivier
Boucher, possède une autonomie absolument complète que je n'ai
pas l'intention de venir déranger par mes interventions. Si vous me
demandez, d'autre part, si je serais favorable à ce que le Conseil
consultatif du financement des partis politiques prenne connaissance de ce
problème, je vous dis oui.
Le Président: M. le député de Huntingdon.
M. Dubois: Merci, M. le Président.
M. Bellemare: Une question supplémentaire. Que viennent
faire dans cela les 91 comtés municipaux?
M. Lévesque (Taillon): De toute façon, je pense
que, depuis quelques années, tout le monde est plus conscient qu'il ne
l'a jamais été; il y a déjà eu certains
tiraillements au sujet des comtés municipaux, des conseils de
comté, mais tout le monde est conscient du fait que cette structure qui
a des générations et des générations d'existence a
repris une certaine vitalité. Il y a une hypothèse de travail. Je
voudrais souligner au député c'est le député
de Bellechasse, je crois, qui a en main la copie d'un document de travail
que là encore, comme cela arrive, on est bien obligé de le
dire, trop souvent, mais on n'y peut rien, qu'il s'agit d'un document de
travail qui est loin d'avoir été accepté. Je pense que
cela a déjà été annoncé. Je dois dire que,
même sur l'approche qui doit présider à une coordination
entre l'ensemble des choses qui concernent la protection du territoire agricole
qui a été annoncée depuis des années, cela attend,
comme devant être amorcé finalement cette année,
l'aménagement avec les schémas d'aménagement que cela
implique et les choses intermunicipales, etc. (14 h 40)
La place des conseils de comté et, éventuellement, ce
qu'on peut appeler à la fois déconcentration,
décentralisation, là-dessus et c'est un ensemble assez
massif, on l'admettra o n doit passer deux jours d'affilée, les 18
et 19 mars, en Conseil des ministres spécial pour essayer de voir plus
clairement la synthèse de tout cela, comment cela s'articule. Ce que le
député évoque est un document de travail qui a
été préparé avec beaucoup de soins, beaucoup
d'efforts par un groupe de fonctionnaires, mais qui, pour l'instant, n'est
qu'une hypothèse de travail. Et les 91 comtés là-dedans,
c'est essentiellement une façon d'envisager mais cela va demander
de la consultation, cela va demander de voir ce que cela peut donner dans le
milieu un nouveau découpage plus moderne de ce qu'on appelle
traditionnellement les conseils de comté.
Le Président: M. le député de
Huntingdon.
Revenu des producteurs de lait industriel
M. Dubois: M. le Président, face au problème aigu
que connaissent les producteurs de lait industriel au Québec, je
rappelle les éloquentes paroles du premier ministre quand il s'exclamait
durant la campagne électorale: "Nous ferons de l'agriculture une
priorité nationale ". M. le Président, je demande au ministre de
l'Agriculture ce qu'il attend pour enfin stabiliser le revenu des producteurs
de lait industriel, tel qu'il fut promis, et aussi s'il entend apporter une
aide temporaire à ceux qui produisent présentement hors
quota.
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.
M. Garon: M. le Président, le député de
Huntingdon devrait savoir que la loi de la stabilisation des revenus vise les
productions où les revenus fluctuent, où les prix fluctuent. S'il
y a un domaine où il s'agit de prix administrés, où il n'y
a pas de fluctuation, c'est le domaine du lait parce que les prix sont
fixés, et c'est une loi qui s'adresse à des productions où
les prix fluctuent. C'est pour cela que nous avons adopté, au cours de
l'été, une assurance-stabilisation dans le cas des pommes de
terre et que nous sommes sur le point d'en adopter une autre pour les naisseurs
de porcs. Dans le domaine du lait, vous savez comme moi que la politique des
quotas est une politique fédérale, et je pense qu'il est inutile
d'essayer de mêler les gens en disant que c'est une politique
provinciale. Les producteurs, eux sont au courant, si l'Union Nationale ne
l'est pas, que c'est une politique fédérale.
M. Dubois: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, je pense que le ministre
oublie le programme électoral du Parti québécois. On
spécifiait qu'un plan de stabilisation serait mis en place pour les
producteurs de lait industriel. Vous pouvez aller voir votre programme et je
pense que vous allez remarquer que vous avez promis cela...
M. Jolivet: Après l'indépendance.
M. Dubois: ... aux agriculteurs du Québec.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Dubois: M. le Président, il est évident que le
ministre met surtout l'accent sur la semence de graine indépendantiste
plutôt que sur une saine politique agricole.
Je voudrais que le ministre, enfin, nous dise s'il va mettre en oeuvre
toutes les politiques qu'il nous a annoncées, c'est-à-dire que le
parti a annoncé au moment de la campagne. Il est temps, quand
même, que vous fassiez quelque chose. J'aimerais que vous me disiez si
vous allez faire quelque chose ou non, vis-à-vis au moins des vingt
programmes agricoles que vous avez annoncés au moment de la
campagne.
M. Jolivet: Parlez-en à Saint-Hyacinthe.
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.
M. Garon: Certainement, M. le Président. Nous avons
instauré une politique du lait dans les écoles, meilleure pour la
santé des enfants. Pour la première fois depuis plusieurs
années, il y a eu une augmentation de la consommation du lait nature au
cours du dernier trimestre de 1977 qui coïncide avec l'application de la
politique du lait dans les écoles.
Des Voix: Bravo!
M. Garon: Deuxièmement, nous avons eu une politique pour
transformer les usines laitières qui faisaient du lait en poudre pour
leur faire des fromages de spécialité, comme le disait d'ailleurs
le député de Huntingdon déjà, pour qu'elles fassent
des fromages de spécialité parce qu'il y a des marchés
pour ces fromages, et on vient d'annoncer une participation gouvernementale de
$4 583 550 à Granby. En plus d'une participation de SOQUIA dans
Saint-Hyacinthe, en plus d'une participation du ministère de
l'Agriculture dans la vallée de la Matapédia et en plus d'une
autre possible qui n'est pas complétée je ne sais pas si
elle va l'être parce qu'il y a un changement de propriétaire, dans
le comté de Portneuf nous avons eu également dans le
domaine des céréales une politique de grains à la ferme.
On vient d'annoncer deux programmes. Il y aura un autre programme pour les
politiques d'entreposage dans les centres régionaux qui va être
annoncé d'ici le 1er avril. Nous avons également un comité
qui va commencer à travailler sur la stabilisation du maïs-grain,
la stabilisation des revenus du maïs-grain et nous avons un
comité...
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, je
comprends que la question était très vaste. Je vous demanderais,
malgré tout, de raccourcir votre réponse.
M. Garon: Nous avons même un comité qui travaille,
et cela répondra au leader de l'Opposition qui en parlait parce qu'on
n'a pas tout énoncé dans le discours inaugural, il aurait
été trop long...
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.
M. Garon: ... mais un comité qui travaille à la
création d'une régie des grains de provende où seront
représentés tous les interlocuteurs, sauf l'Office canadien des
provendes qui s'est retiré après la première
réunion parce qu'il n'était pas intéressé à
participer. Nous avons également dans le domaine des viandes...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale...
M. Bellemare: Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie et
du Commerce.
Le Président: M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Ma question s'adresse au ministre des
Consommateurs, Coopératives et Institutions financières...
M. Bellemare: J'avais même...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale, je crois que l'Union Nationale a déjà eu largement sa
part, j'y reviendrai tout à l'heure.
M. le député de Jacques-Cartier.
Attribution des contrats de publicité
M. Saint-Germain: M. le Président, le ministre a reconnu
mardi qu'un contrat au montant de $1,8 million pour la campagne publicitaire de
"La personne avant toute chose" avait été octroyé sans
soumission à la firme Cossette et Associés.
Une Voix: C'est effrayant!
M. Saint-Germain: Elle nous disait d'autre part, lors du
mini-débat de mardi soir, je le lis à la page 1 qui porte le
numéro R/446...
Une Voix: Question!
M. Saint-Germain: ... que le ministre n'a recommandé
aucune firme de publicité...
M. Duhaime: Question de règlement!
M. Saint-Germain: ... ni accordé un contrat de quelque
ordre qu'il soit.
Le Président: M. le député de
Jacques-Cartier, il y a une question de règlement qui est
soulevée par le député de Saint-Maurice.
M. Saint-Germain: Et elle nous explique plus loin, si vous me le
permettez, M. le Président...
Le Président: M. le député de
Saint-Maurice.
M. Duhaime: M. le Président, je vous prierais de rappeler
le règlement au député en le priant de poser une question,
et non pas de faire un débat, s'il veut avoir une réponse.
Le Président: M. le député de
Jacques-Cartier, je vous autorise, comme le règlement vous y autorise,
à faire un court préambule, mais je voudrais qu'il soit court
quand même.
M. Saint-Germain: Le ministre n'est pas dans son assiette, M. le
Président.
Le Président: A l'ordre!
M. Saint-Germain: Je lisais: "Le ministre n'a jamais
recommandé une firme de publicité ni accordé un contrat de
quelque ordre qu'il soit". Et elle continuait en disant que cette
décision avait été prise par M. De Coster et le conseil
d'administration de la régie.
Ma question est celle-ci: Est-ce une nouvelle politique de la part du
gouvernement de laisser complète et entière discrétion aux
régies et sociétés d'Etat quant à l'attribution de
tels contrats de publicité?
Le Président: Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, si le député
de Jacques-Cartier s'était donné la peine de consulter les
documents que j'ai déposés, hier, en réponse à des
motions qui étaient au feuilleton, il aurait trouvé une
réponse précise à la question qu'il pose aujourd'hui. La
réponse, qui d'ailleurs a été fournie par le conseil
d'administration de la régie, est la suivante: En raison du calendrier
contraignant de l'implantation de la réforme de l'assurance automobile,
on a généralement reconnu à la régie un
régime d'exception. C'est ainsi que la loi 49 lui accordait une
procédure spéciale de nomination et de rémunération
de son personnel. La procédure d'appels d'offres ne pouvait pas, de
toute façon, être suivie; cette procédure
présuppose, d'abord, l'établissement d'un budget, ensuite la
détermination des objectifs de la campagne et, troisièmement, la
définition d'une stratégie. Comme la base de
rémunération est uniforme, le critère principal
présidant au choix de la firme est la création. Comme la
régie n'avait pas de fonctionnaires, à l'origine, et devait
créer, de toutes pièces, tous ses mécanismes, il lui
était impossible de satisfaire à la procédure
établie.
Le Président: M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: M. le Président, si je reprends les
déclarations du ministre, lors de ce débat, je lis: M. De Coster
avait déjà acquis une expérience considérable lors
de la création de la Régie des rentes. A cette époque, M.
De Coster a pressenti, tel que son travail l'exigeait, les services
d'experts-conseils dans divers domaines, dont celui des communications. C'est
à ce moment qu'entre en scène la firme Cossette et
associés qui avait pour mission de conseiller M. De Coster quant
à la mise sur pied d'un service ou d'un programme de communication. A ce
moment, la firme avait agi comme consultant.
Ma question est celle-ci: Est-ce que ce travail de consultant a
été effectué à titre gratuit ou si la firme a
été rémunérée?
Le Président: Mme le ministre.
Mme Payette: Vous connaissez des firmes de publicité, M.
le Président, qui travaillent sans être payées? (14 h
50)
Une Voix: Même pas Tremblay et associés!
Le Président: M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Puisque cette firme, à ce moment,
était consultante de M. De Coster, est-ce que la firme Cossette et
associés a conseillé à M. De Coster qu'il serait
d'intérêt public de signer avec elle-même un contrat de $1,8
million sans soumission?
Le Président: Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, la firme Cossette avait
obtenu, avec soumission, un contrat de la Commission des accidents du travail
au printemps 1977. C'est à cause de cette expertise qu'elle a
été retenue pour conseiller le président de la
régie sur l'installation d'un système de communication. Il
devenait presque j'oserais dire injuste pour les autres firmes,
n'ayant pas d'expertise dans le domaine des indemnisations de blessures
corporelles et n'ayant pas pu, depuis le début, suivre
l'évolution de ce dossier, de leur demander à la dernière
minute de soumettre des plans.
Si bien que c'est dans une continuité d'expertise que ce contrat
a été accordé à la firme Cossette.
Le Président: M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: M. le Président...
M. Saint-Germain: A l'ordre, s'il vous plaît!
Le Président: M. le député de Pointe-Claire
qui n'a pas pu poser de questions depuis longtemps et qui a deux minutes.
Négociations avec les dentistes
M. Shaw: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Affaires sociales. Il y a un an, nous avons parlé des
négociations entre l'Association des chirurgiens dentistes du
Québec et la Régie de l'assurance-maladie. Quelle est la
situation en ce moment dans ces négociations?
M. Lazure: M. le Président, je voudrais d'abord rectifier;
les négociations ne se font pas entre la régie et l'Association
des dentistes, mais bien entre le ministère des Affaires sociales et
l'Association des dentistes. Les négociations se sont poursuivies
normalement depuis environ cinq mois et à un rythme même un peu
plus accéléré que la plupart des négociations, et
ceci à notre demande.
Je répète ce que j'ai dit il y a quelques jours: Nous
avons à peu près atteint un accord complet sur les clauses
normatives, sauf sur une importance, celle par laquelle l'Association des
dentistes veut que, dans la convention, nous nous engagions à
définir les tâches des assistantes dentaires et des
hygiénistes dentaires. Nous avons répondu par écrit, le 2
novembre dernier, à cette demande. J'ai informé l'Association des
dentistes que cette responsabilité de définir les tâches de
deux corporations relevait de l'Office des professions, certainement en ce qui
a trait aux hygiénistes dentaires.
Nous sommes dans une impasse sur cette clause normative, mais les
négociations ne sont pas rompues. Deuxièmement, je puis informer
cette Chambre, M. le Président, que nous serons en mesure, dans les
jours qui viennent, de déposer l'offre pécuniaire à
l'Association des dentistes.
Le Président: M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: M. le Président, pour quelles raisons voit-on
maintenant les dentistes du Québec chercher à se
désengager du système actuel à cause de la situation des
négociations? Si ce n'est qu'à cause de la clause 1 ou de
l'article 1 dans leur contrat, pourquoi est-ce rendu à une telle
situation?
M. Lazure: M. le Président, je ne pense pas qu'il soit de
mon ressort de commenter des stratégies utilisées par une des
parties qui négocient. Je pense que ce désengagement a
déjà été utilisé par d'autres groupements
professionnels dans le passé. Je veux rassurer la population, cependant,
sur ce désengagement hypothétique, possible. Le dentiste ne peut
se désengager, à moins qu'il n'y ait eu une période de
trente jours d'écoulée après la réception par la
Régie de l'assurance-maladie de son avis de désengagement.
Or, au moment où on se parle, la Régie de
l'assurance-maladie n'a pas reçu d'avis de désengagement. Donc,
nous avons confiance qu'avec l'offre pécuniaire qui sera
déposée dans les jours qui viennent le climat des
négociations devrait s'améliorer.
Le Président: On m'a informé que le ministre des
Communications voulait répondre à une question qui a
été formulée hier, je crois.
M. le ministre des Communications.
Hausse des tarifs de Bell Canada
M. O'Neill: M. le Président, c'est pour compléter
la réponse que j'avais commencé à donner à M. le
député de Saint-Laurent, qui voulait avoir le nom des groupements
ou associations qui avaient fait appel au ministère des Communications
dans la préparation de leur requête auprès du CRTC
relativement à la demande d'augmentation tarifaire
présentée par la compagnie Bell Canada.
Alors, il y a jusqu'ici les groupements suivants qui ont fait des
demandes d'aide: l'Association des consommateurs du Canada, région du
Québec; l'Institut de promotion des intérêts du
consommateur; la Chambre de commerce de Prince-ville également
dans des associations régionales. Il y a également un citoyen
qui, à titre particulier, veut présenter un mémoire devant
le CRTC et qui a également fait appel à nos services.
Le Président: On m'a également informé
que...
M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.
M. Bellemare: En vertu de l'article 34.
Le Président: Oui, je n'ai pas terminé. On m'a
informé que M. le ministre des Transports voulait répondre
à une question qui a été posée
antérieurement.
Une Voix: Les motions non annoncées sont-elles avant
l'article 34?
M. Bellemare: C'est cela.
Voies d'accès au centre Le Bourgneuf
M. Lessard: M. le Président, hier à la demande du
député de Bellechasse, j'ai promis de déposer des
documents relatifs à la construction d'un viaduc et des voies
d'accès pour le centre commercial Le Bourgneuf. Je dois dire, M. le
Président, qu'il est exact qu'il y a eu entente. Cependant, si le
député de Bellechasse veut bien me le permettre étant
donné que toutes les formalités n'ont pas été
terminées, c'est-à-dire que les signatures ne sont pas
complètement faites puisqu'il s'agit d'entente entre la ville de
Québec, le groupe Baxter et le gouvernement du Québec, je
déposerai les documents la semaine prochaine.
Le Président: On m'a également informé que
M. le ministre... Oui?
M. Goulet: Un instant. Pour une fois que j'ai
une permission à donner en cette Chambre. Pour répondre
à ce que le ministre vient de demander, M. le Président, si vous
me le permettez, je suis prêt à accepter la demande du ministre,
mais j'aimerais bien que le ministre dépose copie du règlement
hors cour qui est intervenu dans la nuit de en tout cas avant que cela
passe en cour. Egalement la série de plans et devis du premier et du
deuxième projet.
M. Lessard: D'accord. M. Goulet: J'accepte, M. le
Président.
Question de privilège
Document relatif à la politique
québécoise de l'amiante
Le Président: Maintenant, j'ai des avis à donner
à la Chambre et je voudrais lire l'avis suivant que j'ai reçu
dans les délais requis.
M. le Président, je désire vous informer,
conformément au paragraphe 1 de l'article 49 du règlement, que
j'entends soulever avant l'appel des affaires du jour, à la
séance d'aujourd'hui, une question de privilège portant sur le
sujet suivant: L'interprétation donnée par le ministre des
Transports au document sessionnel no 37 déposé le mardi 7 mars
1978, se rapportant à une politique québécoise de
l'amiante. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes
sentiments les meilleurs. Et c'est signé par le chef de l'Opposition et
député de Bonaventure, M. Gérard-D. Levesque.
M. le chef de l'Opposition officielle, je vous invite à soulever
votre question de privilège le plus brièvement possible.
M. Gérard-D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je dois
prendre le temps nécessaire pour le faire, mais je pense que je puis le
faire assez rapidement. Le jeudi 2 mars, le ministre des Transports a
cité un document relatif à la politique de l'amiante et on me
permettra de le citer au journal des Débats, à la page 248.
"Voici, M. le Président, j'ai ici dit le ministre des Transports
un mémoire au Conseil des ministres, mémoire de M.
Jean-Gilles Massé, ministre des Richesses naturelles du Québec".
Un peu plus loin, je lis encore cette citation: "Je viens de constater que
Jean-Gilles Massé a proposé au Parti libéral du temps une
solution concernant le secteur de l'amiante". Encore un peu plus loin: "M.
Jean-Gilles Massé, mémoire présenté au Conseil des
ministres, etc..."
M. le Président, le ministre des Transports a utilisé ce
document vraisemblablement pour donner l'impression que l'ancien gouvernement
avait adopté une attitude semblable à celle du présent
gouvernement dans la question de l'amiante.
M. le Président c'est là-dessus que porte ma
question de privilège ce document n'a jamais été
endossé par M. Jean-Gilles Massé, le ministre des Richesses
naturelles de l'époque non plus que par son successeur aux Richesses
naturelles, M. Jean Cournoyer. (15 heures)
II n'a jamais été déposé en tant que tel au
Conseil des ministres et jamais le Conseil des ministres d'alors n'a eu
à approuver ou à désapprouver le contenu de ce document.
Je fais cette affirmation après avoir vérifié
auprès des anciens ministres concernés ainsi qu'après
avoir consulté toutes les personnes en autorité, les documents et
dossiers se rapportant à la question. Ma question de privilège
consiste donc à établir clairement devant cette Chambre que
l'interprétation qu'a vraisemblablement voulu donner le ministre des
Transports à ce document est absolument non fondée.
M. le Président, comme corollaire à cette question de
privilège, j'ai à vous demander une directive, à moins que
cette affirmation que je viens de faire ne soit niée ou contredite d'une
façon formelle. Tout en respectant la décision rendue par la
vice-présidence relativement au dépôt du document, je vous
demande, M. le Président, de nous donner des instructions, de nous dire
ce que nous devons faire dans les circonstances lorsque nous avons un document
qui, à sa face même, est un document non signé,
annoté, etc., et qui maintenant n'a plus aucun caractère officiel
et que ce document demeure parmi les documents officiels déposés.
Ce serait rendre hommage à la transparence, à
l'objectivité, à la réalité et la
véracité que de faire quelque chose avec ce document. Je vous
pose tout simplement cette question à la suite de ma question de
privilège et j'attends votre réponse, M. le Président.
Rapport concernant les dépenses
électorales de 1976
Le Président: M. le chef de l'Opposition, je prends votre
requête en délibéré, je vais étudier la
nature de votre requête et je rendrai une décision le plus
rapidement possible.
Je dois donner également avis à la Chambre de la lettre
suivante, et je cite: "Cher M. le Président, la présente est pour
vous indiquer mon intention de soulever aujourd'hui, à
l'Assemblée nationale, une question de privilège concernant le
rapport du directeur général des élections concernant les
dépenses électorales à l'élection de 1976
déposé, hier, à l'Assemblée nationale. Veuillez
agréer, M. le Président, l'expression de mes meilleurs
sentiments." Et c'est signé du député de Laporte, M.
Pierre Marois.
Alors, M. le député de Laporte, je vous invite à
soulever votre question de privilège.
M. Pierre Marois
M. Marois: M. le Président, le rapport du directeur
général portant sur les dépenses électorales des
partis et candidats encourues lors des élections générales
de 1976 a été déposé en cette Chambre, hier, et
aussi difficile que cela puisse être à certains égards sur
le plan humain, je pense
que je me devais, aujourd'hui, de soulever cette question de
privilège.
Aux pages 54 et 55 de ce rapport, il appert que le candidat Pierre
Marois, dans le comté de Laporte, avait droit à des
dépenses électorales permises de $21 540 et que le total des
dépenses électorales encourues s'élève à $21
664.24, soit un dépassement de $124.24.
J'ai pris connaissance de ce fait pour la première fois dans la
soirée d'hier. Mon agent officiel, à qui mon chef de cabinet
adjoint a communiqué hier soir cette découverte, l'apprenait lui
aussi pour la première fois et, après vérification de la
part de mon agent officiel, il appert que les faits sont les suivants: Au cours
de la campagne électorale de 1976, mon agent officiel surveillait, bien
sûr, les dépenses électorales, entre autres ce n'est
pas uniquement là ses fonctions de s'assurer que celles-ci
n'excèdent pas le maximum permis. A la fin de la campagne
électorale, il était convaincu, suivant ses livres comptables,
que le maximum n'avait pas été atteint. Lors de la
préparation et de la production du rapport des dépenses
électorales prévues à l'article 3.82 de la Loi
électorale, il en était encore convaincu puisqu'il a inscrit,
comme total des dépenses permises et cela ressort du rapport de
mon agent officiel la somme de $21 415.17, ce qui laissait un
écart de $124.85 pour atteindre le maximum permis de $21 540.
Après examen, au cours de la soirée d'hier et de la
matinée d'aujourd'hui, des copies des pièces justificatives
fournies avec le rapport, il appert qu'une facture d'imprimerie de $255.22, par
erreur ou inadvertance, n'a pas été comptabilisée, de
sorte que le total réel des dépenses encourues s'élevait
à $21 670.39, somme ramenée à $21 664.24, après
certaines corrections mineures effectuées par le bureau du
président général des élections.
Il semble ressortir des faits qu'il s'agit là d'une erreur
technique et humaine qui aurait pu, qui peut et qui pourrait fort bien aussi
arriver à n'importe qui. Je me permets de rappeler en terminant que j'ai
participé comme candidat du Parti québécois à
quatre élections en six ans avec le même agent officiel; il s'agit
en l'occurrence de mon frère, M. Bernard Marois. Je tiens à dire
que je considère qu'il a assumé ses fonctions, à chaque
occasion, avec la plus totale bonne foi et la plus complète
intégrité. Il a toujours eu ma plus totale confiance et, si je
devais participer éventuellement à nouveau comme candidat
à une élection, je n'hésiterais pas une seconde à
lui demander à nouveau d'assumer la tâche ingrate d'agent
officiel. En toute honnêteté, M. le Président, je crois que
je me devais de soulever cette question de privilège et de mettre ces
faits sur la table de l'Assemblée nationale.
Enquête sur l'engagement d'une secrétaire
de comté
Le Président: Merci, M. le député de
Laporte. Maintenant, je voudrais donner lecture d'une déci- sion que
j'ai prise à la suite d'une demande formulée par à
l'ordre, s'il vous plaît M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle. Le 8 décembre 1977, le leader parlementaire de
l'Opposition officielle m'a demandé de faire enquête sur les faits
suivants: une secrétaire, dans le district électoral que
représente le député de Beauce-Nord, serait entrée
en fonction en janvier 1977 et ce dernier aurait donné instruction au
service administratif de l'Assemblée nationale de payer cette
secrétaire rétroactivement à compter de la fin de novembre
1976.
Après avoir entendu les précisions et explications
données alors par le député de Beauce-Nord, j'avais pris
en délibéré la requête du leader parlementaire de
l'Opposition officielle afin de me donner le temps d'examiner s'il était
de ma juridiction de procéder à une enquête de cette
nature. Comme chef des services administratifs de l'Assemblée nationale,
j'ai, en effet, effectué une enquête auprès des
fonctionnaires qui sont responsables de la mise en application du
règlement concernant les allocations aux députés,
adopté en vertu de l'article 101b de la Loi de la
Législature.
Après avoir examiné avec eux les documents pertinents,
j'en suis venu à la conclusion que mes fonctionnaires ont suivi la
procédure régulière prévue par les articles 15 et
16 dudit règlement dans le cas de l'embauche des secrétaires de
comté du député de Beauce-Nord, et des secrétaires
de comté de tous les autres membres de cette Assemblée. Dans tous
les cas, on s'est conformé aux prescriptions de l'article 16 dudit
règlement qui spécifie que la date d'entrée en fonction du
secrétaire de district est celle mentionnée dans le document qui
constate sa nomination. Ainsi, dans le cas du député de
Beauce-Nord, le document mentionne que la secrétaire en question est
entrée en fonction le 29 novembre 1976. Mes fonctionnaires ont alors
appliqué le règlement à la lettre, n'ayant pas à
vérifier les faits puisque la réglementation ne les y autorise
pas et que la Loi de la fonction publique et les règlements et
règles adoptés sous son autorité ne s'appliquent pas au
personnel mis à la disposition des députés dans leurs
districts électoraux.
Par voie de conséquence, il n'est pas non plus de la juridiction
du président de pousser l'enquête au-delà de cette limite,
aucun droit de contrôle ne lui étant accordé à cet
égard. Le président est placé dans la même situation
que face aux déclarations assermentées que produisent les
députés quant à leurs présences et absences. Il
n'est pas de son ressort d'aller vérifier si oui ou non la
déclaration correspond aux faits. En dehors des obligations de
contrôle qui lui sont imposées par les lois et règlements,
le président n'a pas à prendre l'initiative de s'enquérir
de la véracité des faits que peut alléguer un
parlementaire, lorsque la législation ou la réglementation
constate que la simple déclaration du parlementaire est suffisante.
Même si les secrétaires des districts électoraux
échappent à la surveillance du président, je me suis
toutefois permis de recevoir un affidavit de la secrétaire du district
de Beauce-Nord, mise
en cause dans cette affaire, et voici la teneur de cet affidavit: "Je,
soussignée, Danielle Roy, étant dûment assermentée
sur les saints Evangiles, déclare ce qui suit: "1. Dans la soirée
du 15 novembre 1976, M. Adrien Ouellette, nouveau député du
comté de Beauce-Nord, m'a offert d'occuper le poste de secrétaire
de comté; "2. Suite à cette offre, j'ai donné, le ou vers
le 25 novembre 1976, une réponse affirmative à M. Adrien
Ouellette; "3. Lors de cette rencontre, il a été convenu entre M.
Ouellette et moi-même que j'entrerais en fonction, à titre de
secrétaire de comté, à partir du lundi 29 novembre 1976;
"4. Compte tenu du fait que le bureau de comté de M. Adrien Ouellette
n'a été physiquement prêt que le 10 janvier 1977, j'ai donc
été dans l'obligation, pour la période du 29 novembre 1976
au 10 janvier 1977, d'accomplir les tâches de ma fonction à mon
domicile; "5. Tous les faits mentionnés plus hauts sont vrais et
véridiques".
C'est assermenté, je le déposerai à la demande de
quiconque. (15 h 10)
Affaires du jour.
Motion pour faire siéger la commission de la
justice
M. Burns: Aux affaires du jour, M. le Président, je
voudrais faire motion pour que la commission parlementaire de la justice se
réunisse au salon rouge, immédiatement, pour poursuivre
l'étude du projet de loi no 39, Loi sur le recours collectif. Que cette
commission suspende ses travaux à 18 heures pour les reprendre à
20 heures et les terminer à 22 heures, ce soir.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
M. Bellemare: Non, je demande un vote enregistré.
Le Président: Qu'on appelle les députés.
(Suspension à 15 h 11)
(Reprise à 15 h 23)
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Avant de faire l'appel aux voix, je voudrais demander le consentement de
la Chambre pour que le chef de l'Union Nationale puisse présenter une
motion non annoncée. C'est un consentement sur la présentation en
dehors du cadre des affaires courantes.
M. Burns: Cela va, M. le Président, j'ai parlé au
chef de l'Union Nationale, il y a quelques minutes. Il m'apparaît que ce
fut malheureusement un oubli de notre part à tous... Je ne donne pas mon
consentement d'avance à la motion, mais je suis d'accord pour qu'on
puisse revenir aux motions non annoncées.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale, il y a
consentement pour la présentation.
Motion relative aux
négociations dans le domaine
de l'information
M. Biron: Merci, M. le Président.
Je voudrais faire motion que, au nom du droit du public à
l'information et au nom de l'équilibre des forces de pression et des
groupes d'intérêts au Québec, à un moment de notre
histoire où tous nos outils socio-culturels et socio-économiques
doivent être disponibles et jouer leur rôle respectif, les membres
de cette Assemblée nationale du Québec lancent un appel pressant
aux diverses parties en cause dans les conflits de travail en cours au
Montréal-Matin, au Soleil et à la Presse, les encourageant
à poursuivre les négociations et pour qu'elles en viennent, dans
un avenir vraiment prochain à un règlement juste,
équitable et réaliste pour les intéressés.
Le Président: Est-ce qu'il a consentement à ce que
cette motion soit adoptée?
M. Goldbloom: Adopté. M. Burns: Adopté, M.
le Président. Le Président: La motion est adoptée.
Travaux parlementaires
Je voudrais maintenant inviter le leader parlementaire de l'Union
Nationale à m'indiquer quel sera le sujet choisi pour le débat du
vendredi, dans dix jours.
M. Bellemare: M. le Président, tel qu'il figure au
procès-verbal de notre Chambre, le 7 mars, à la commission
permanente de l'agriculture, la question avec débat...
Le Président: Excusez-moi de vous corriger, c'est le 17
mars.
M. Bellemare: ... du député de Huntingdon au
ministre de l'Agriculture portera sur le sujet suivant: La politique
agro-alimentaire du gouvernement.
M. Burns: La question avec débat à laquelle vous
posez des questions...
M. Bellemare: M. le Président, c'est ce qui est inscrit au
feuilleton: Question avec débat... Lisez. Si vous comprenez,
arrêtez de faire le pointilleux.
Le Président: La question avec débat du ven-
dredi, 17 mars, portera sur la politique agroalimentaire et je convoque
immédiatement le ministre de l'Agriculture pour le 17 mars.
M. Burns: M. le Président, est-ce qu'on parle bien de la
même chose, de la question avec débat du vendredi?
Le Président: Avec débat pour le vendredi 17
mars.
M. Burns: J'ai beau la chercher au feuilleton, M. le
Président, j'aimerais bien cela que...
M. Levesque (Bonaventure): Page 61 d'hier.
M. Burns: ... page 61 d'hier. D'accord, M. le Président,
c'est seulement pour savoir.
M. Bellemare: Ah oui, oui!
Vote sur motion demandant de faire siéger la
commission de la justice
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Oui, je
vais maintenant faire l'appel aux voix sur la motion du leader parlementaire du
gouvernement visant à faire siéger la commission parlementaire de
la justice pour étude du projet de loi 39, Loi sur le recours collectif.
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever,
s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Burns, Cardinal, Laurin, Morin (Louis-Hébert), Pa-rizeau, Marois,
Landry, Léonard, Couture, Tremblay, Bérubé, Johnson,
O'Neill, Mme Ouellette, MM. de Belleval, Joron, Mme Payette, MM. Lessard,
Proulx, Duhaime, Lazure, Léger, Tardif, Garon, Vaugeois, Michaud,
Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Alfred, Chevrette, Martel, Fallu,
Rancourt, Mme Leblanc, MM. Grégoire, Bertrand, Laplante, Bisaillon, de
Bellefeuille, Guay, Gendron, Mercier, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron,
Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre, Lavigne, Dussault, Charbonneau,
Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet, Levesque (Bonaventure),
Lavoie, Mackasey, Vaillancourt (Orford), Lalonde, Forget, Mailloux, Goldbloom,
Saint-Germain, Raynauld, Lamontagne, Giasson, Blank, Caron, O'Gallagher,
Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Biron, Bellemare, Russell,
Goulet, Fontaine, Dubois, Cordeau, Shaw.
Le Président: Que ceux qui sont contre cette motion
veuillent bien se lever, s'il vous plaît. Que ceux et celles qui
désirent s'abstenir veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: Pour: 89 Contre: 0
Abstentions: 0
Le Président: Motion adoptée.
Travaux parlementaires (suite)
M. Burns: M. le Président, je rappelle à
l'attention des membres de l'Assemblée que demain, au salon rouge,
à 10 heures, la question avec débat, qui est
présentée par le député de Portneuf, posera le
problème de la nouvelle politique d'exploitation des clubs
privés. Nous invitons l'ensemble des membres de l'Assemblée
nationale à venir assister à ce débat demain à
compter de 10 heures, au salon rouge, tel que l'avis a été
donné déjà. C'est un simple rappel. (15 h 30)
Maintenant, M. le Président, je donne avis à la Chambre
que mardi matin, à compter de 10 h 30, la commission de la justice
poursuivra ses travaux relatifs au projet de loi no 39, Loi sur le recours
collectif. Il est possible que ces travaux soient terminés ce soir, vers
22 heures; du moins, c'est une indication que nous avons, mais, pour être
bien sûr, si jamais les travaux ne sont pas terminés, la
commission continuera ses travaux à 10 h 30, mardi.
Dans le cas où ce soir la commission aurait terminé
l'étude de ce projet de loi à ce stade-ci, l'avis deviendra
caduc.
Le Vice-Président: A moins qu'il n'y ait des questions en
vertu de l'article 34, c'est à vous, M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Burns: Est-ce qu'il y a des questions en vertu de l'article
34? Je n'en sollicite pas. Je vous demanderais d'appeler l'article 2), M. le
Président.
Projet de loi no 70 Deuxième lecture
(suite)
Le Vice-Président: D'accord. Nous reprenons le
débat sur la motion de M. le ministre des Richesses naturelles proposant
que le projet de loi 70, Loi constituant la Société nationale de
l'amiante, soit maintenant lu la deuxième fois. M. le
député de Frontenac avait demandé l'ajournement du
débat.
M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, je voudrais
céder non pas mon droit de parole, mais la priorité de mon droit
de parole au premier ministre lui-même.
Le Vice-Président: M. le premier ministre.
M. René Lévesque
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, me sentant
parfaitement incapable d'atteindre aux sommets oratoires que le
député de Frontenac a réussi à escalader
déjà au cours de ce débat, je vais être très
bref et m'en tenir essentiellement à trois points, c'est-à-dire
les questions que posent la sécurité et la santé, qui sont
quelque peu exagérées ces temps-ci je crois qu'on doit
l'admet-
tre dans certains reportages et qui sont quand même des
questions fondamentales en ce qui concerne l'amiante.
Deuxièmement, les questions qui tournent autour de la
propriété publique, du secteur public, de cette invasion que
certains redoutent, à chaque fois que cela arrive d'ailleurs, que la
propriété publique serve à l'invasion de l'ensemble
économie.
Troisièmement, ce que représente, pour autant qu'on puisse
en parler en ce moment de façon très générale,
cette transaction qui est l'acquisition de l'Asbestos Corporation. Au moment
où on est en deuxième lecture sur les principes, sur l'ensemble
de la perspective qu'ouvre le projet de loi no 70, je n'ai pas besoin
d'insister sur les raisons essentielles qui ont amené la décision
qui se trouve incorporée dans ce projet de loi.
Le Québec est encore non seulement l'un des trois, mais le plus
grand des trois producteurs d'amiante du monde avec l'Union soviétique
et l'Afrique du Sud. Il est de très loin le premier exportateur du monde
de fibre d'amiante. Il est en même temps probablement l'un des seuls
coins du monde occidental évolué et je dis bien un des
seuls, pas le seul où un secteur stratégique tout entier
de l'économie basé sur des ressources qui sont le patrimoine
d'une population est entre les mains d'exploitants qui sont venus de
l'extérieur. Il ne s'agit pas de les blâmer ni de les critiquer.
Tant mieux s'ils sont venus puisque pendant des générations on a
laissé faire. C'est quand même profondément anormal. Cela
se retrouve de moins en moins dans le monde où nous sommes, surtout
quand il s'agit de ce patrimoine des ressources épuisables dont de plus
en plus toutes les populations du monde se rendent compte qu'il faut avoir une
gestion qui soit reliée le plus près possible aux
intérêts de la population qui habite le lieu et qui, en
dernière analyse, est toujours propriétaire de ces richesses.
Etant le premier producteur et le premier exportateur de l'amiante au
monde depuis des générations, pas des années, mais des
générations, les Québécois ont accepté
qu'à peine 3% de la fibre produite cela est le maximum actuel
chaque année soient transformés chez nous au
Québec. On a accepté des conditions de santé qui, dans le
cas en particulier de la compagnie qui est visée, l'Asbestos
Corporation, sont en tout cas sinon parmi les pires, sûrement parmi les
plus négligées de tout le secteur de l'amiante vers quelque pays
qu'on se tourne.
En plus, ce régime qu'on a toléré trop longtemps
est exclusivement axé sur des racines extérieures et il nous a
également créé une sorte d'absence de "know how", comme on
dit dans le jargon moderne, une absence de connaissance, de compétence
dans un milieu qui représente la ressource où le Québec
est en première position dans le monde. Cela est intolérable. On
ne connaît pas les marchés de façon concrète.
L'ensemble de la population n'a pas participé aux recherches qui
pouvaient affecter directement sa propre santé collective. La plupart du
temps les cris d'alarme sont venus de l'étranger en ce qui concernait
même les questions comme la santé et la sécurité. Il
s'agit donc d'une situation qui est, depuis longtemps, intolérable et
qu'il fallait corriger.
Ce sont tous ces facteurs qui ont amené ce projet qui dormait sur
des tablettes de l'ancien gouvernement. Je prends ce qu'a dit le chef de
l'Opposition, tout à l'heure, comme de l'argent comptant, bien
sûr.
Il n'est peut-être pas allé jusqu'à des
décisions de l'ancien Conseil des ministres, mais pendant des
années on a été assez proche quand même, pas
tellement loin des dossiers ou des coulisses de l'Etat pour savoir que ce
projet était sur les tablettes, faisait l'objet d'études, que
même c'est allé plus loin que cela. Je laisserai au ministre
parrain du projet de loi le soin, au moment de la réplique, de dire
à quel point mais, de toute façon, cela n'a jamais abouti.
Maintenant, on l'a devant nous, c'est une politique de l'amiante, pour la
première fois, qui implique l'achat, de gré à gré,
si possible, équitable, sinon par les moyens qu'on connaît,
l'achat d'une des grandes sociétéscelle qui a le plus de
fibres sur les marchés internationaux, d'ailleurs, ce qui nous donnerait
une pénétration rapide des marchés qui implique
également les instruments, par cette Société nationale de
l'amiante, de création de l'emploi, seule ou, le plus possible, avec
d'autres. Cela amène également une concertation à laquelle
on pourra participer activement comme partie prenante avec les autres
compagnies d'amiante à partir du moment où la population
québécoise aura sa place dans ce club dont on était exclu
jusqu'ici. Et puis, il y a également toutes les dimensions recherches,
aussi bien du côté de la santé, de l'hygiène, que du
côté des applications dans les produits, où le
Québec doit également prendre la place minimale qu'il aurait
dû avoir depuis toujours, puisque chez nous à la fois les
méfaits et les bienfaits de I amiante sont plus centrés que
n'importe où dans le monde.
A propos des méfaits, on parle beaucoup de questions de
santé et de sécurité. Cela a même rebondi de
façon, à mon humble avis, hyperdra-matique dans des
émissions de télévision toutes récentes, à
partir de choses qu'on a cru percevoir dans les intentions de l'Europe des neuf
où on est allé jusqu'à évoquer ou laisser flotter
une image d'interdiction totale de l'amiante comme si, évidemment, on
arrivait au moment où l'amiante allait disparaître de
l'économie mondiale. Je pense qu'il ne faut pas charrier.
Vérification faite, à la Commission des communautés
européennes qui s'occupe évidemment de conseiller le Parlement
européen éventuellement, cela prend la forme de directives
ou de recommandations pour les neuf pays européens il y eu, c'est
vrai, une analyse qui semble non seulement sérieuse mais
sévère, comme elle doit l'être, de ce que peuvent
être les dangers de l'amiante. Il faut dire qu'en Europe, j'ai vu
et je pense que d'autres à qui c'est arrivé ont des souvenirs du
même genre des documentaires sur l'exploitation de l'amiante, et
ces derniers ont dû contribuer, comme des articles d'ailleurs, ces
dernières années, à sensibiliser
les populations concernées en Europe. Certains montraient des
conditions plus primitives dans l'ensemble surtout du côté
de la transformation, bien sûr, pas du côté de l'extraction,
il n'y en a pas en Europe que les pires qu'on connaît ici. Donc,
il y avait un énorme rattrapage, dont on a pris conscience, qui
était nécessaire en Europe, ce qui semble être en train de
se produire. Il ne faudrait pas le dramatiser exagérément comme,
je crois, on est porté à le faire dans certains milieux. Au
moins, on devrait être renseigné pour savoir jusqu'où va
cette nouvelle perspective européenne, mais pas pour arriver à
des conclusions littéralement plus que pessimistes, apocalyptiques
à propos de l'amiante. Ce qui est en train de se produire en Europe,
semble-t-il,c'est qu'avec cinq ans de retard, en particulier sur les
Etats-Unis, les Européens vont se faire entre eux les mêmes
recommandations, dans le même sens que les mesures déjà
prises dans l'ensemble des Etats américains qui peuvent être
affectés. Ni plus, ni moins. Et pour être plus spécifique,
un projet de directives dont on a pris connaissance ce qui n'est pas un
secret a dernièrement été émis en Europe par
les instances qui tournent autour de la Communauté européenne
mais qui s'adresse aux neuf pays membres. (15 h 40)
Ceci signifie que cinq ans plus tard, cinq ans après les
Etats-Unis en particulier, après la prise de conscience qui nous a
amenés nous-mêmes, à partir du ministère des
Richesses naturelles sur la lancée du rapport Beaudry, en particulier,
on est à établir des directives de plus en plus
sévères en ce qui concerne l'exposition aux dangers de l'amiante
flottant à des moments dans l'air, après tout cela, l'Europe se
met en marche dans la même direction. Le projet dont on a pris
connaissance, voici ce qu'il propose. Je le résume très
rapidement sans entrer dans tous les détails techniques. Il n'est pas
encore définitif ce projet de directives, mais voici ce qu'il propose,
ce qu'il recommande et qui semble extrêmement logique aux neuf Etats
membres de la Communauté européenne, d'interdire l'utilisation de
l'amiante, y compris celui qui est produit au Québec le blanc, si
vous voulez, ou pour être savant, le chrysotile l'interdiction
donc de cette fibre, premièrement, dans les installations d'air et de
liquide quand on ne peut pas s'assurer qu'il n'y aura pas d'émission de
fibre, soit dans l'air, soit dans le liquide concerné.
Deuxièmement, l'interdiction dans le flocage, le
procédé qui essentiellement signifie une projection de mousse ou
de truc du genre, peinture, peut-être, aussi, où il y a de
l'amiante sur les murs ou sur les surfaces. Et puis, aussi, l'interdiction de
l'amiante dans l'isolation thermique, acoustique, ou les revêtements de
sols ou de routes, dans l'asphalte, etc., quand on ne peut pas, là
encore, s'assurer qu'il n'y aura pas d'émission de fibre en
liberté. Qu'est-ce que cela représente pour le seul marché
européen? Parce qu'il y a aussi le marché américain, il y
a les autres marchés du monde, et il y a très
spécifiquement le marché québécois.
Qu'est-ce que cela représente sur le marché
européen par rapport aux ventes courantes d'amiante? Cela
représente ceci: cela ne touche pas l'amiante-ciment qui est 64% de la
consommation européenne. Cela ne touche pas les produits où la
fibre est liée, bien mariée, au caoutchouc, au plastique, etc.,
les feutres à linoléum, toitures, joints, etc., donc, qui
représentent au moins 15% additionnels. 64% plus 15%, on est rendu
à 79%.
Cela ne touche pas à ce secteur et cela ne touche pas non plus le
matériel de friction qui représente, lui, à son tour, un
peu au-delà de 5%. Donc, on est rendu dans les 84% de cet ensemble de
production qui n'est pas touché. Par ces interdictions
recommandées, donc, à peine, 15%, et il faut espérer que
cela va aller jusque-là, si ces interdictions sont approuvées par
les Etats membres et sont appliquées, à peine 15% du
marché européen actuel seraient affectés et à peu
près la moitié de ces 15% seraient en provenance, étaient
en provenance normalement du Québec.
Alors, ceux qui dramatisent dans le sens d'interdiction à n'en
plus finir, comme si l'histoire de l'amiante venait de se terminer au moment,
comme par hasard, où le Québec décide de s'en occuper,
franchement, ils charrient, jusqu'à preuve du contraire. Et ils
charrient dans un sens dont je comprends mal l'intention, parce que c'est
tellement facile de vérifier.
Non seulement nous ne sommes pas du tout angoissés par ce genre
d'interdiction partielle, plus que partielle, touchant 15% du marché, la
partie dangereuse, mais on peut dire dès l'abord qu'on est parfaitement
d'accord, parce qu'il s'agit vraiment d'une politique de rattrapage au point de
vue des choses essentielles à la santé des gens qui ont à
manipuler, à manoeuvrer ou à travailler de proche avec l'amiante.
D'ailleurs, il faut bien dire que quand je parlais tout à l'heure de
recherche, sur deux plans de recherche, d'application qu'on doit entreprendre
ici, au Québec, et on serait le premier secteur public qui le ferait,
parce que jusqu'ici, sauf erreur, cela a toujours été
laissé à des secteurs privés ici et là, un des
plans essentiels où il s'agit de faire de la recherche et je pense que
c'est une question de dignité et même d'honneur collectif pour
nous, ce serait justement dans le sens de ces questions de la protection de la
santé humaine en ce qui concerne les applications de l'amiante, du
développement ou de modernisation de produits qui seraient de moins en
moins nocifs.
Tout cela se tient et, encore une fois, je ne vois pas très bien
pourquoi on fait, en ce moment, dans certains coins, comme une espèce de
campagne négative comme si finalement on avait peur d'entrer dans un
secteur qui est un des secteurs stratégiques de notre économie
qui attend depuis je ne sais combien d'années et que, tout à
coup, il y avait une espèce de vertige qui prenait certains milieux.
Franchement, il y a des choses qui sont factuellement très faciles
à vérifier et qui sont lâchées comme cela avec des
gonflements invraisemblables qui ne correspondent absolument pas à la
réalité.
Maintenant, un des arguments qu'on entend aussi dans le sens
négatif je comprends, si on veut, les fondements
idéologiques sur lesquels cela peut s'appuyer; mais, là encore,
il faut, tout de même, raison garder c'est tout ce qui tourne, de
près ou de loin, autour du mot "socialisme", c'est-à-dire du
développement d'un secteur public. Le mot "socialisme", c'est un mot
idéologique et, comme tous les mots idéologiques, c'est plein de
nuances. Quand c'est plein de nuances, c'est élastique. C'est toujours
le capitalisme de quelqu'un, puis le socialisme de quelqu'un d'autre. Il n'y a
pas moyen de s'arranger. Il y a seulement M. Trudeau qui peut s'arranger pour
être à l'extrême centre, comme il l'a dit
récemment.
Il s'agit de savoir comment on emploie le secteur public, plutôt
que d'employer des mots qui, en fait, sont purement des mots de propagande,
surtout quand on regarde la réalité québécoise. Il
y a des gens pour qui ce n'est jamais assez dans ce sens et il y en a pour qui
c'est toujours trop. Il s'agirait de savoir qu'est-ce qu'on veut.
A propos du secteur industriel et commercial du Québec, le
secteur de base qui permet de créer et de développer le
gâteau collectif dont on a besoin pour se payer tous nos services et pour
essayer d'améliorer, non seulement de maintenir, le niveau de vie de
notre population et sa qualité de vie de plus en plus, parce que c'est
une notion qui, de plus en plus, va être centrale, est-ce qu'on veut
absolument qu'il n'ait pas une certaine cohérence qui, dans le monde
d'aujourd'hui, dans à peu près toutes, sans exception, les
sociétés qu'on dit avancées, évoluées,
implique une mixture ou, comme on dit en anglais, un "mix" entre le public,
c'est-à-dire les "joint ventures", les choses conjointes entre deux
secteurs, le coopératif et le privé? Quelle que soit la mixture,
il y en a une dans tous les pays et, dans cette mixture, de plus en plus, on
trouve un secteur public ou parapublic qui doit être articulé et
structuré.
Le Québec n'a pas échappé à cela. On est
encore loin derrière d'autres, mais je ne vois pas pourquoi il y a des
gens qui s'énervent à propos de l'amiante, une politique aussi
logique que celle-là, aussi appelée par les faits, quand, en
fait, dans cette Chambre, il y a des gens qui ont participé à la
mise au point, plus ou moins en vrac, depuis une quinzaine d'années, du
complément de l'Hydro-Québec, à la mise au point de la
Caisse de dépôt, de la Société des alcools, de sa
modernisation et de son expansion en cours.
M. Lavoie: SIDBEC.
M. Lévesque (Taillon): J'arriverai à SIDBEC.
M. Lavoie: REXFOR.
M. Lévesque (Taillon): De la SGF, de SOQUEM, de REXFOR, de
SOQUIP, et de SIDBEC qui, je dirais, est un des cas par excellence de travail
conjoint de l'ensemble des hommes ou des femmes politiques des divers partis,
depuis les débuts. C'est au temps de M. Lesage que les pre-
mières études je faisais partie de ce gouvernement avec le
chef de l'Opposition officielle actuel quand les premières études
concernant SIDBEC, concernant ce qu'est devenue éventuellement SIDBEC,
ont été amorcées. Je me souviens, il y avait le groupe de
l'acier. On a fait des voyages littéralement d'ignorants qui allaient
essayer d'apprendre si ce n'était pas possible en dehors des environs
des Grands Lacs, au nord et au sud, si comme le dit le vieux dicton, dans le
testament d'Adam et Eve, c'était réservé aux environs des
Grands Lacs de faire de l'acier pour un marché qui en a besoin. Cela
s'est fait dans les années soixante, avant la fin du gouvernement
libéral dont je faisais partie à l'époque.
La décision qui a amené la création de SIDBEC,
c'est-à-dire l'achat de DOSCO-Québec, si l'on veut, a
été prise par le gouvernement de Daniel Johnson après les
élections de 1966. Sauf erreur, l'expansion hasardeuse, difficile de
SIDBEC a été entretenue, accentuée pendant les six
années du gouvernement qui nous a précédés. Je vais
revenir, d'ailleurs, là-dessus, mais qu'on cesse donc de prendre cet
exemple qui a été conjointement, par tous les partis d'ici, le
projet collectif de doter difficilement, laborieusement le Québec d'une
sidérurgie capable en amont on le voit avec Normines puis
en aval on le voit par des retombées ici et là, mais pas
assez nombreuses d'être une des articulations essentielles d'une
économie moderne. Il y a eu tout le reste, mais on parle toujours de
SIDBEC. On parle de SIDBEC pourquoi? Parce que, je suppose, c'est de bonne
guerre. C'est de bonne guerre même parfois de risquer de se couper le cou
psychologiquement, parce que cela peut faire du mal à un projet
gouvernemental. C'est de bonne guerre de dire que SIDBEC est dans le trou
régulièrement. On le sait.
Mais SIDBEC a récupéré Québec Steel qui s'en
allait dans le trou, après avoir été approuvée
d'une façon incohérente par l'ancien gouvernement. Elle a
récupéré une partie des travailleurs aussi qui avaient
été mis sur le pavé par suite des retombées
négatives d'un projet mal foutu depuis sa naissance. SIDBEC est
également dans une conjoncture à l'échelle internationale
ou même des sidérurgies qui ont 50 ans de racine, qui ont des
marchés captifs auxquels ils peuvent s'adresser continuellement, sont
dans un pétrin inextricable. On ne le dit pas.
On ne parle pas non plus comme si cela était interdit
des choses qui marchent dans le secteur public, qui sont rentables.
Justement, il y en a et parmi les choses rentables, à condition de ne
pas, encore une fois, faire de l'apocalypse masochiste autour de ce qui se
passe en Europe et qui n'a pas du tout les dimensions qu'on essaie de lui
donner à l'occasion... (15 h 50)
M. Forget: Je m'excuse auprès du premier ministre en
évoquant un point de règlement, à l'avantage, je pense, de
tous les membres de cette Assemblée. Comme le premier ministre, de la
même façon que tous les membres de cette Assemblée,
est limité par le temps, j'aimerais bien le ramener un peu au
débat sur l'amiante parce que nous brûlons de l'entendre sur ce
sujet. Je suis d'accord avec lui qu'il ne faudrait pas s'éterniser sur
des guerres idéologiques.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Trois rappels très rapides. Premièrement, M. le premier
ministre, en vertu de l'article 94, a une heure à sa disposition.
Deuxièmement, ne serait-ce que parce que ce ne serait qu'un
député, en vertu de l'article 100, sauf question de
privilège ou de règlement, j'aimerais bien qu'on écoute le
premier ministre.
Troisièmement, j'ai accepté la question de
règlement et je considère l'incident clos.
M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je vous remercie, M. le
Président. Je ne veux pas m'éloigner des règlements, mais
j'ai lu une partie de ce qui s'est dit dans cette Chambre et à
l'extérieur sur les articulations essentielles, les tenants et les
aboutissants de la politique qui est impliquée par le projet de loi 70.
Il faut vraiment surtout quand on sait que la deuxième lecture
est sur l'ensemble des principes et les dimensions générales d'un
projet étirer quelque peu les scrupules parlementaires bien
connus du député de Saint-Laurent pour insister sur des trucs
comme ceux-là.
Cela étant dit, M. le Président, je n'en ai pas pour
très longtemps, j'ai dit que je ne prendrais pas une heure, je vais
prendre pas mal moins que l'heure à laquelle j'aurais droit, mais je
voudrais terminer le peu de choses précises que j'avais à dire
sur le point en question. Si j'ai été amené à
être un peu agressif, on comprendra qu'il faut regarder l'histoire de
SIDBEC, en particulier, et l'espèce de côté solidaire et
conjoint que cela a représenté depuis une quinzaine
d'années, dans le Québec. Mais, tout à coup, comme une
espèce de ce qu'on appelle en anglais "red herring"
solitaire, on jette cela sur le chemin d'une politique de l'amiante; je trouve
que, franchement, le moins qu'on puisse dire c'est que ce n'est pas
équitable, et je ne veux pas en dire davantage. Mais considérons
le contexte où fonctionne SIDBEC, avec ses retombées et les
emplois que cela crée, aussi bien en amont qu'en aval, avec les
difficultés aussi et les perspectives de reprises qui, aussi bien ici
qu'internationalement, viendront sûrement, à mesure qu'il y aura
une reprise de l'acier. C'est, par définition, un produit qui va avec
les reprises et qui baisse quand il y a des stagnations. Je pense que tout le
monde le sait, cela ne prend pas un grand économiste ni une étude
spéciale du Conseil économique du Canada pour nous dire cela.
Alors, SIDBEC est prise dans une conjoncture...
M. Raynauld: ... un projet de loi pour demander des fonds pour
SIDBEC?
M. Lévesque (Taillon): Non, je le disais en hommage au
député d'Outremont, il ne faudrait pas qu'il s'en formalise.
Maintenant, dans ce cas, admettons une chose, à condition de ne
pas hyperdramatiser des choses qui ne méritent pas d'être
hyperdramatisées, qui sont au contraire des choses de santé qui
vont dans le bon sens comme ce qui se passe en Europe, comme prise de
conscience. On devrait admettre ce qui d'ailleurs est souligné
avec beaucoup d'éloquence par la lettre aux actionnaires d'Asbestos
Corporation qui a été distribuée récemment
que les probabilités de rentabilité dans le cas de l'amiante, et
très singulièrement dans le cas d'une société comme
Asbestos, sont plutôt bonnes et, pour l'avenir, prévisibles.
Alors, pourquoi combattre un projet qui, une fois analysé froidement,
s'ajouterait aux autres parce que ce sont justement des projets publics
rentables?
Vis-à-vis de ce domaine public, parapublic, industriel,
commercial, le rôle de l'Etat, les questions que, quant à moi, je
me pose sont d'une simplicité fondamentale et cela m'est
déjà arrivé: Est-ce que c'est bon, collectivement, de
faire cela?
Est-ce qu'en enlevant les mots idéologiques et toutes les
étiquettes artificielles, le résultat est quelque chose qui est
indiqué, qui peut être bon pour une région, pour un secteur
de notre économie? Deuxièmement, est-ce que dans d'autres
secteurs tels que nous les connaissons chez nous, il y a des reins assez
solides, les ressources qu'il faut pour le faire à la place de
l'Etat?
Si les réponses vont dans le sens d'une décision comme
celle que représente la loi 70, je ne vois pas pourquoi on en ferait un
drame idéologique. C'est le bon sens. C'est le bon sens en Ontario quand
on y a créé l'Hydro-Ontario. C'est le bon sens à
Terre-Neuve quand on y a nationalisé CFLCO, la Churchill Falls
Corporation. C'est le bon sens en Nouvelle-Ecosse quand on y a
récupéré la sidérurgie et fait une
sidérurgie publique. C'est le bon sens dans le cas de la potasse en
Saskatchewan, parce que dans l'intérêt de la Saskatchewan
je n'ai pas à juger on a décidé que c'était
ce qu'il fallait faire et on l'a fait, et personne d'autre ne pouvait le faire
en Saskatchewan.
C'est le bon sens chez les Arabes, puis le Venezuela, puis
l'Algérie qui, après s'être fait exploiter d'une
façon absolument inqualifiable, ont décidé que s'ils
étaient obligés de payer des prix inflationnistes qui
multipliaient par trois ou par quatre le prix des tracteurs dont ils ont
besoin, ils avaient le droit de demander un prix convenable aussi mais
pour cela il fallait un contrôle pour le pétrole qu'ils
produisent et qui est souvent leur seule ressource. C'est, à travers le
monde, une chose normale; je ne vois pas pourquoi cela deviendrait subitement
anormal au Québec.
Maintenant, cette opération normale qu'est-ce qu'elle va
coûter? Je n'ai pas la réponse et personne ne l'a en ce moment. Il
y a une chose que je sais, par exemple, c'est que cela ne peut pas coûter
et cela ne coûtera pas des prix invraisemblables comme ceux qu'on a fait
flotter ici et là.
Je sais très bien que par exemple les quelque $100 millions ou
$150 millions de plus que, par une erreur de calcul qui peut arriver à
tout le monde, le chef de l'Opposition a fabriqués l'autre
jour, cela n'arrivera pas. Ce sont des erreurs de calcul qui peuvent
arriver à tout le monde quand... Le service de recherche peut avoir ses
déficiences...
Une Voix:... assurance.
Le Vice-Président: A l'ordre!
M. Lavoie: Est-ce que le premier ministre me permettrait une
question?
Le Vice-Président: A l'ordre!
M. Lévesque (Taillon): Oui, mais probablement il n'y aura
pas de réponse.
M. Lavoie: Vous dites que $150 millions ou $160 millions c'est
exagéré. Est-ce que vous vous rappelez les propos du ministre de
l'énergie qui a reconnu en Chambre que l'action valait aux livres $60?
Voulez-vous multiplier $60 par 2,8 millions d'actions.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais
parler des actions. Il n'y a qu'une chose que je disais. Je n'ai pas
parlé d'un prix de $100 millions, $150 millions; j'ai dit que je ne
donnerais pas de prix. Simplement, l'erreur de $100 millions ou de $150
millions additionnels à n'importe quel prix hypothétique que
semble avoir faite l'autre jour le chef de l'Opposition, j'admets que
c'était une erreur de calcul, mais c'était malheureux, parce que
cela gonglait des chiffres. L'Actualité, revue pour laquelle j'ai
beaucoup de respect, qui est pleine d'information, a fait une petite facture
l'autre jour qui était quand même invraisemblable, caricaturale et
qui aurait pu être, il me semble, vérifiée un peu mieux
avant d'être publiée. C'était un article du mois de mars
où on dit: "Est-ce que le Québec achète un citron?" A
propos de l'Asbestos Corporation et qui est précédé d'une
facture hypothétique, une grosse facture, mais avec peut-être un
petit calcul de rien. Je vous dis petit calcul sans allusions; il y a des
calculs pas suffisants et qui nous mènent cela à $375 millions
d'une claque, n'en parlons plus. Cela reste, cette image et cela veut dire des
actions à $45. Cela a déjà été
calculé par l'auteur de l'article. Nous, on est encore en train de faire
des évaluations sur tous les plans avec l'autre partie concernée,
mais enfin, là c'était réglé. Alors, des actions
à $45. Tout le monde peut jouer sur le prix des actions.
Il y avait également $25 millions qu'il fallait prévoir
pour les amiantosés, comme si en fait il n'y avait pas des lois et des
règlements qui, Dieu le sait, ont encore besoin d'être, comment
est-ce que je dirais, civilisés davantage mais qui existent pour ces
choses-là; puis $80 millions sous deux thèmes, sous deux chefs,
pour des déménagements de quartiers, des combats contre la
pollution, etc., parce qu'on sait, le ministre des Richesses naturelles l'a
dit, qu'il y a pas mal de choses à corriger, autour et alentour de
l'Asbestos Corporation, et ce sera un devoir strictement de dignité
élémentaire de le faire; enfin $135 millions encore sous deux
chefs pour des nouvelles usines.
Tout cela savamment calculé donne $375 millions. Je veux bien.
Seulement, quand l'évaluation finale cela avant que le
député de Laval, leader parlementaire de l'Opposition, pose la
question sera finale, qu'elle aura été terminée,
qu'elle sera prête, que les négociations s'engageront, il est
évident que ces contraintes et ces servitudes pourront être
escomptées. Je pense que l'abc du bon sens dit que s'il y a de la
vétusté à remplacer, usine comprise, il faudra l'escompter
aussi dans le prix. On ne paiera pas pour les passifs dont on hérite.
Cela ne se fait nulle part dans le monde. (16 heures)
II y a une chose qu'il faudra aussi calculer, et on en mentionne
très peu, c'est l'ampleur et la solidité des réserves,
parce que dans n'importe quelle transaction qui touche des opérations
minières, les réserves sont un des facteurs essentiels. Quand
tout cela aura été évalué, il y aura un prix
à négocier. Il y a une chose qu'il faut dire, c'est que de toute
façon, quelles que soient les fluctuations, qui sont d'ailleurs devenues
assez minimes depuis quelque temps, en Bourse, la cote des actions n'a pas et
n'aura, en aucune façon, de liens avec le prix qui sera
négocié. Ce n'est jamais en fonction de la cote des actions. Tous
ceux qui connaissent les marchés, et en particulier les compagnies
impliquées, parce qu'elles connaissent cela un peu, tous ceux qui
connaissent les marchés savent cela depuis longtemps. J'ai
déjà participé à des opérations du
même genre, d'ailleurs certains des gonflements artificiels me rappellent
de joyeux souvenirs qu'on entend actuellement. Dans le temps où on
évaluait facilement, il y avait un monsieur de Milwaukee qui est
arrivé et qui disait que cela coûterait $800 millions. D'autres
ont monté cela à un milliard, après tout pourquoi ne pas
arrondir les chiffres. Quand, en 1962, cela a fini par se régler on
était rendu à un milliard et demi. Finalement on a payé
$604 millions au lieu de 600 millions, une terrible erreur, ce qui avait
été calculé.
Je pense qu'avec le même soin, la même compétence
technique, les équipes du gouvernement qui ont formé le
comité qui a présidé à la mise au point de la
politique de l'amiante, savent également à peu près
à quel niveau se situerait le prix négocié. A moins
d'être complètement tombé sur la tête, ce n'est pas
une chose qu'on commence à expliquer au moment où les
négociations ne sont pas encore entamées.
Tout compris, et je termine là-dessus, je peux laisser quelques
fils qui pendent, et je suis sûr que ces messieurs de l'Opposition
je vois le député d'Outremont qui prend des notes
assidûment en profiteront, mais il reste que le
tableau-synthèse que j'essaie de faire, je le fais de mon mieux, comme
Québécois, dans l'intérêt de la population
québécoise, parce qu'il s'agit là on peut chiquer
la guenille sur n'importe quel détail, surtout ceux qu'on ne connait pas
d'une des politiques économiques les plus importantes que nous
aurons à
réaliser ces années-ci. Elle se trouve là, dans le
projet de loi 70. C'est une des politiques économiques dont
l'évidence saute aux yeux depuis des années, pour ne pas dire des
générations, et qui pourtant n'a pas trouvé, depuis des
années, le sens de la direction et le sens de la décision qu'il
aurait fallu au niveau de l'Etat. C'est une politique qui, au moins pour une de
nos grandes régions, à cheval sur Bois-Francs et Estrie, et pour
toute I économie du Québec, est à la fois pleine de
perspectives nouvelles, je crois, de rentabilité et de
développement et d'auto-développement, c'est-à-dire, de
dignité collective. C'est une politique, par conséquent, avec
tous mes collègues, à commencer par le ministre des Richesses
naturelles, parrain du projet de loi, dont je suis très fier qu'on
arrive enfin à commencer à réaliser avec la loi 70.
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle, est-ce une question de...
M. Lavoie: Avant d'exercer mon droit de parole, ce que je compte
faire immédiatement, est-ce que le premier ministre me permettrait une
dernière question sur ses propos, où il n'a pas été
tout à fait clair, ou suffisamment clair?
M. Lévesque (Taillon): Oui.
M. Lavoie: II a dit que son gouvernement tentait actuellement
d'acheter de gré à gré, dans les meilleures conditions
possible, mais que si cela ne fonctionnait pas, pour une raison ou pour une
autre, il y aurait d'autres moyens, est-ce que cela veut dire
étatisation ou est-ce que vous n'auriez pas des difficultés dans
le cas d'étatisation?
Le Vice-Président: Cela prend une permission très
spéciale, M. le premier ministre parce que...
M. Lévesque (Taillon): Si j'ai le consentement, je vais
répondre. Il n'y a pas de mystère là.
M. Lavoie: Si l'opinant consent...
M. Lévesque (Taillon): L'idée de base est qu'on va
poursuivre et qu'on a très bon espoir de réaliser, c'est un achat
de gré à gré dans des conditions équitables et qui
pourraient d'ici X mois être en voie de se réaliser. Sinon, on
n'attendra pas les calendes grecques, ni l'an 2000, il y a la voie de
l'expropriation qui est ouverte à tous les gouvernements, tous les
Parlements démocratiques et par laquelle, s'il le fallait, on
procéderait. On a très bon espoir qu'on ne sera pas obligé
d'aller jusque-là. Cela me permet de terminer en m'excusant
auprès du député de Laval, parce que c'était un peu
impromptu, mon intervention, malgré que je sois bien content d'avoir eu
l'occasion de la faire.
Je dois m'excuser. Ce n'est pas parce que je ne veux pas entendre son
discours, mais c'est parce que je suis "poigné ".
Le Vice-Président: M. le député de Laval,
exercez-vous votre droit de parole?
M. Jean-Noël Lavoie
M. Lavoie: Oui. Je suis très heureux, M. le
Président, par cet accident, de pouvoir intervenir après le
premier ministre sur ce projet de loi parce que, hier soir, j'avais
l'impression, lorsque le député de Frontenac a demandé
l'ajournement du débat, que j'aurais à répondre ou
à intervenir après le député de Frontenac.
Justement, le discours que je voudrais prononcer sur ce projet de loi se
prête tout à fait à venir en réponse ou en
réplique aux propos qu'a tenus le premier ministre, en mettant de
côté la première partie de son discours où il a
parlé plutôt du côté symbolique, nationaliste de
l'exploitation ou de l'étatisation d'une mine d'amiante. Je vais laisser
cela de côté. Mon approche sera plutôt économique.
Elle touchera plutôt la manière, que je considère non
sérieuse, que le gouvernement a empruntée pour tenter de faire
l'acquisition d'une certaine mine.
Le but de ce projet de loi est de constituer la Société
nationale de l'amiante. Mon opinion, mon humble avis, c'est que, pour le
gouvernement du Québec, qu'il soit péquiste, libéral,
Union Nationale ou autre le moment est venu, en 1978, d'exercer un
contrôle rigoureux de la croissance du secteur public, ici au
Québec. Il est temps, après les expériences vécues
depuis les vingt dernières années, de mettre un frein à la
création d'organismes paragouvernementaux: commissions, régies,
offices, conseils, comités, bureaux, instituts et sociétés
d'Etat de toutes sortes. Il y en a trop au Québec. L'Etat est
omniprésent et le citoyen québécois devient
exacerbé dans le dédale technocratique et bureaucratique qui
existe dans notre société. Il va falloir arrêter cette
tendance qui a déjà placé certains pays européens,
la France en particulier, dans la situation où on ne trouve plus de
moteurs assez puissants pour faire bouger la carrosserie étatique.
L'Etat est rendu partout. Je pourrai vous citer tout à l'heure
l'expérience française, mais je veux revenir, d'une
manière particulière, au projet de loi que nous avons devant
nous, le projet de loi no 70. Quels sont les buts de ce projet de loi? En plus
devoir à la constitution et à l'organisation de la
Société nationale de l'amiante, la société a pour
objet la recherche. Quant à la recherche, nous n'avons pas besoin de ce
projet de loi. D'ailleurs, la semaine dernière, à une question
d'un député de l'Opposition, le ministre des Richesses naturelles
a déposé un document disant qu'il y a actuellement un programme
de recherche à l'Université de Sherbrooke qui a un budget
d'au-delà $500 000 dans le domaine de l'amiante.
Pour continuer les recherches dans ce domaine, on n'a pas besoin de ce
projet de loi. Déjà, ce mécanisme de la recherche est en
marche à l'Université de Sherbrooke. (16 h 10)
Deuxième vocation de cette société, le
développement et l'exploitation je mets cela de côté
des gisements d'amiante. On parle de la mise en marché de la
production; on n'a pas besoin d'un projet de loi 70 pour cela. Par un orga-
nisme, par un bureau du ministère, on peut tout à fait,
par les moyens que nous avons, promouvoir la mise en marché de cette
production.
Quant aux activités industrielles, manufacturières ou
commerciales reliées à la transformation de la fibre d'amiante et
l'aide à la promotion, je dirais que ce n'est pas par le moyen de
l'étatisation ou de l'achat d'une mine qu'on peut mettre en marche,
faciliter la transformation manufacturière ou autres de la fibre
d'amiante; nous avons d'autres moyens que cela. Nous avons la SDI, la
Société générale de financement. Si on veut
créer des emplois, il y a d'autres canaux que celui d'exproprier une
mine. Je vois parfaitement l'Etat du Québec participer à la
promotion, à l'encouragement du développement manufacturier et
industriel en trouvant des partenaires dans le domaine de l'entreprise libre,
en leur avançant des fonds, soit une contribution indirecte par la SDI
ou la Société générale de financement, une
participation minoritaire de l'Etat tout en laissant le management c'est
important dans l'exploitation à l'entreprise libre. L'Etat n'a
aucune compétence dans l'exploitation d'entreprises, dans les affaires,
il n'a aucune expérience, et tout ce qu'il touche devient un fiasco.
L'Etat pourrait, par des influx, des avances de capitaux à des
sociétés mixtes, en participation avec l'entreprise libre, en
laissant le management à l'entreprise privée, encourager la
transformation de la fibre d'amiante dans le domaine industriel et
manufacturier. Nous avons déjà ces outils, nous n'avons pas
besoin de la loi 70. En ce qui nous concerne, on ne voit pas du tout l'Etat
rentrer en concurrence avec l'entreprise libre dans l'exploitation de gisements
d'amiante. Je n'irai pas dans tous les aléas et dans tous les risques de
concurrence, de pollution, de danger que ce produit de l'amiante devienne
je ne suis pas un expert refusé aux Etats-Unis ou au
Québec à cause du danger qu'il représente. Je n'ai pas
l'expertise pour me prononcer sur cela mais je dis que, quand l'Etat se lance
en concurrence avec l'entreprise libre, on creuse des gouffres sans fond. Ce
n'est pas le rôle de l'Etat de devenir homme d'affaires. Nous avons
l'expérience de SIDBEC où, au début, l'investissement
était de $60 millions et, aujourd'hui, nous sommes rendus à $800
millions et on ne voit pas le jour où cela deviendra rentable.
Même si le premier ministre a dit que la sidérurgie a de la
difficulté dans le monde entier actuellement, il y a trois ou quatre ans
elle n'en avait pas.
Et avec notre SIDBEC, ici, ce qu'on voyait continuellement,
c'étaient des déficits. Et il faudrait vérifier et aller
au fond des choses dans d'autres entreprises où l'Etat est venu en
concurrence avec l'entreprise libre, et j'aimerais connaître le fond de
l'histoire, autant dans REXFOR que dans Cabano et la Société des
traversiers. C'est sûr, on parle de l'Hydro-Québec, de la
Régie des alcools. Je vous ai dit que l'Etat ne peut pas entrer en
concurrence avec l'entreprise libre, mais l'Hydro-Québec n'est pas en
concurrence avec l'entreprise libre, c'est un monopole d'Etat. Lorsqu'on parle
de la Régie des alcools, il n'y a pas de concurrence, cela devient un
autre monopole de l'Etat; personne d'autre n'a le droit de vendre de la boisson
ou de l'électricité au Québec.
Voulez-vous un exemple? Je pense que cela devrait vous influencer. Je
vois mon ami, le député de Sainte-Marie...
Je lisais par accident il y a quelques jours la Revue des parlementaires
de langue française, dernière édition, octobre 1977. A la
page 31, il y a un article sur le rôle des sociétés dans le
développement économique par un M. P. Decheix. C'est une
conférence qui a eu lieu à Abidjan. Je sais qu'il y a beaucoup de
ministres du gouvernement actuel qui aiment visiter l'Afrique en mission
officielle. Cela s'est passé à Abidjan où il y a eu,
justement, une conférence sur le rôle des sociétés
d'Etat dans le développement économique.
Je lis ici, à la page 32: "II a été reconnu que
l'Etat doit intervenir pour satisfaire des besoins vitaux quand les
sociétés privées ne le font pas. Mais cette action de
l'Etat homme d'affaire n'a pas suscité que des éloges". Ici, je
vais vous citer quelques lignes qui ont leur poids, M. le Président,
à la même page, justement sur les sociétés d'Etat en
France. Le bilan est lourd. "En France, les subventions aux entreprises
publiques équivalent à la moitié de l'impôt sur le
revenu ou aux deux tiers des impôts payés par les entreprises
privées ". Avez-vous pensé à une chose? Cela devient
déloyal et malhonnête lorsqu'on crée des
sociétés d'Etat qui entrent dans le domaine de l'entreprise libre
ou de l'économie de marché, lorsqu'en France, pour faire
fonctionner ces sociétés d'Etat, les subventions annuelles
à ces sociétés d'Etat équivalent à la
moitié de l'impôt sur le revenu. La moitié. Ou les deux
tiers de l'impôt payé par les entreprises privées.
Les entreprises privées qui sont en compétition avec les
entreprises d'Etat paient de l'impôt sur le revenu, ce que les
entreprises publiques ne paient pas, et les deux tiers des impôts
payés par les entreprises privées servent à subventionner,
à renflouer les entreprises d'Etat. C'est malhonnête et c'est
déloyal.
M. Burns: La France est la cinquième puissance
industrielle du monde.
M. Lavoie: M. le Président, je dis que ce n'est pas le
rôle de l'Etat de devenir un homme d'affaires.
Je voudrais aborder le deuxième point de mon propos, M. le
Président, sur la position inconcevable, incroyable dans laquelle le
gouvernement actuel s'est placé pour faire l'acquisition de cette mine.
Une situation impossible. La seule raison de cela, on le sait et vous le savez
très bien, M. le Président, c'est que l'amiante au Québec,
à la suite de plusieurs campagnes électorales, est devenu un
sujet de symbole, d'émotivité, de nationalisme, de
sentimentalité. Vous n'avez rien inventé. Celui qui vous parle a
passé par les mêmes expériences. Je me rappelle, quand
j'étais candidat défait lorsque M. Duplessis était au
pouvoir en 1956, que nous, députés un peu contestataires de
l'époque, avons chiâlé, avons fait tous nos discours,
sur toutes les tribunes politiques, sur le fer de l'Ungava qui
était devenu un peu, justement, comme l'amiante aujourd'hui, un symbole,
un sujet de nationalisme et de sentimentalité. On disait: Toutes nos
richesses naturelles s'en vont aux Etats-Unis. Et tous nos discours
étaient comme cela. C'était comme les vôtres aujourd'hui
avec l'amiante. Ne vous en faites pas.
Qu'est-ce qui est arrivé? Il faut reconnaître, à
certains moments, nos erreurs. En 1960, le gouvernement Lesage est élu
et il prend légèrement son temps. Il y a des études
sérieuses qui se font; et cela a pris six ou huit ans avant que SIDBEC
soit formée et qu'on tente de créer ici une sidérurgie
intégrée pour développer notre minerai de fer. Ce n'est
pas parce qu'on a fait ces erreurs dans le temps... Je me demande si SIDBEC
était à refaire, s'il y en a plusieurs dans cette Chambre qui
seraient consentants, connaissant les investissements qu'on a mis dans cela
pour créer environ 3000 ou 4000 emplois. On est rendu à $800
millions. Je pense qu'autant les gens de l'Union Nationale qui votaient la loi
de SIDBEC en 1968, autant les libéraux étaient unanimes,
justement, à ce moment, pour l'adoption de cette loi, on y penserait
deux fois. (16 h 20)
Mais nous avons une situation identique actuellement. J'arrive à
la position où le gouvernement s'est placé au mois d'octobre
1977, le 21 octobre.
Sans aucune étude sérieuse, alors que les actions
d'Asbestos se cotaient aux alentours de $21 ou $22, il décide et
annonce, sans aucune étude sérieuse tout à l'heure
je ferai un parallèle avec l'expérience de 1962, lorsque
l'Hydro-Québec a été nationalisée d'acheter
coûte que coûte à n'importe quel prix. Je dis que le
gouvernement aurait dû faire son lit autrement. S'il était
décidé à acheter coûte que coûte, s'il voulait
en prendre la responsabilité au mois d'octobre 1977, après des
études qu'il aurait dû faire, il aurait dû, comme en 1962,
faire une offre sérieuse aux actionnaires d'Asbestos; même si
l'action était cotée à $21 ou $22, le gouvernement aurait
pu faire une offre, soit de $35, soit de $40 ou soit de $45 l'action, si ces
études qu'il aurait dû faire avaient prouvé cela.
Dès le lendemain, il aurait dû annoncer, en prenant la
responsabilité de son geste, arrêter le marché boursier,
pour empêcher justement le jeu de la Bourse qui s'est produit depuis ce
temps et dire: Nous offrons dans l'hypothèse de $45 et si ce n'est pas
accepté, nous étatisons. Cela n'aurait pas permis justement cette
nervosité du marché que nous connaissons depuis le mois
d'octobre. Mais par contre, ce n'est pas cela que le gouvernement a fait. Et
aujourd'hui, ce stock boursier qui cotait à $22 ou $23 est monté
à $38 au moment où je vous parle. Il y a deux ou trois jours, il
était à $39, ce qui a fait quand même, appelez cela un coup
de Bourse ou des spéculations ou une plus-value, aux actionnaires
d'Asbestos une somme de l'ordre de $50 millions.
Le gouvernement, à cause de son geste irréfléchi,
non sérieux, n'a pas le droit, soit de faire gagner ou faire perdre de
l'argent. Parce que dans cet énervement, depuis le mois d'octobre, il y
a des citoyens du Québec ou d'ailleurs qui ont fait de l'argent en
spéculant et il y en a d'autres qui en ont perdu. Si le gouvernement
vient à décider d'acheter, prenons un exemple, à $50, $55
ou $60 chiffres avancés par le ministre de l'énergie, il y a
à peine quelques jours, mais ceux qui l'ont vendu à $35 ou
à $38 ou à $32, il y a deux ou trois mois, ne seront pas bien
fiers du comportement du gouvernement.
Ce qui m'a surpris le plus, il y a quelques jours, c'est lorsque le
ministre de l'énergie est revenu à la charge, pour participer une
deuxième fois à cet événement, à cette
excitation du marché boursier.
Combien me reste-il de temps, M. le Président?
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): M. le député de Laval, vous avez
commencé à 16 h 5.
M. Lavoie: Je disais donc que le ministre de l'énergie a
participé à cela, dans ses propos, à la page 266 et
à la page 267, lorsqu'il a reconnu lui-même que la valeur aux
livres des actions d'Asbestos était de $60. C'est la déclaration
qu'il a faite à la Chambre. Comment le gouvernement s'est-il
placé?
Cela me fait penser, lors d'une expropriation, lorsqu'un
exproprié dit: Je demande $100 000. Le gouvernement offre $60 000, mais
que l'évaluateur du gouvernement dit: Ecoutez, à mon avis
il le fait publiquement dans un rapport cela vaut $120 000. Dans quel
état sera le gouvernement lorsqu'il ira devant un tribunal d'arbitrage,
lorsqu'un ministre de la couronne reconnaît à cette
Assemblée que l'action vaut $60 alors que les chiffres que nous avons,
c'est qu'aux livres la valeur de l'action d'Asbestos est de $48?
Je ne sais pas si j'aurai l'occasion, à un autre moment, d'y
revenir, de faire un parallèle. Je ne sais pas si mes collègues
d'en face me donneraient le consentement pour faire un court parallèle
en vue d'éclairer cette Chambre sur la manière dont le
gouvernement avait procédé en 1962, lors de la nationalisation de
l'électricité. Si vous me donniez quelques minutes, je
pourrais... Est-ce que j'ai le consentement, M. le Président?
M. Duhaime: II y a consentement, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): De toute façon, il restait encore quelques
minutes au député de Laval.
M. Lavoie: En 1962, le gouvernement auquel faisait partie
d'ailleurs le premier ministre actuel, avait fait une étude
sérieuse sur les valeurs de la compagnie Shawinigan, de la compagnie
Quebec Power et de la compagnie d'électricité Gatineau.
Parmi toutes les études qu'il a rassemblées a ce moment,
il y avait dès le 15 mai 1962, plus de six mois avant la décision
définitive du gouvernement de se porter acquéreur des actions de
sept socié-
tés privées, un rapport de M. Jacques Parizeau, le
ministre des Finances actuel. M. Parizeau, dans son rapport, suggérait
au gouvernement de payer $27 pour l'action de Shawinigan Water & Power,
soit $3 ou 12% de plus que la moyenne des cours maxima et minima cotés
en Bourse entre le 1er janvier et le 27 avril 1962. M. Parizeau recommandait
$35 pour l'action de Gatineau Power, soit 11% de plus que le cours du
marché. M. Parizeau recommandait $36 pour Québec Power, ce qui
représentait 12% de plus que le cours du marché.
Le 19 novembre 1962, six mois après avoir eu les études en
main, le gouvernement annonce son intention de nationaliser onze compagnies
privées dont les trois ci-dessus. A ce moment, les actions cotaient
à $25 pour la première, $31 pour la deuxième et $30 pour
la troisième. Le 28 décembre 1962, après la fermeture de
la Bourse, le gouvernement décide de faire des offres fermes et
définitives aux actionnaires des sept compagnies et il offre aux
porteurs d'actions ordinaires $30 pour l'action de la Shawinigan, $37 pour
l'action de Quebec Power et $35 pour l'action de la Gatineau. A la
clôture de la Bourse, à ce moment-là, c'était $25
1/8 pour la première, $31 3/8 pour la deuxième et $27 1/2 pour la
troisième. On sait que, par la suite, le gouvernement est devenu
acquéreur, les propriétaires et les détenteurs d'actions
ayant accepté l'offre du gouvernement.
Ce qu'il est intéressant de noter, c'est que le prix de l'action
de la Shawinigan a été payé 17% plus cher que le cours de
cette action au jour de l'annonce de la décision de principe de
nationaliser l'électricité. Dans le cas présent, si le
gouvernement est forcé, de gré à gré ou par
nationalisation, d'acheter, par hypothèse, à $50, cela fera une
différence de 123% avec le moment de l'annonce de la politique de
l'amiante du gouvernement.
Je dis donc, en terminant, M. le Président... J'aurais beaucoup
plus de choses à dire. J'aurais aimé, et je crois que cela aurait
été utile pour la Chambre, connaître la manière dont
le gouvernement de 1962 avait procédé, alors que M. Parizeau
était conseiller au gouvernement et alors que le premier ministre actuel
était ministre des Richesses naturelles. L'achat s'est fait pour $600
millions, avec un décalage d'à peine 10%, 15% ou 17% entre les
valeurs des compagnies expropriées sur le marché boursier et le
prix payé, alors qu'aujourd'hui on risque un décalage
d'au-delà de 100% avec la cote du marché lorsque la politique de
l'amiante du gouvernement a été annoncée.
J'ai l'impression que le gouvernement s'est placé dans une
position impossible et que, même si sa loi est adoptée contre la
volonté de l'Opposition, contre la volonté même de la
population du Québec, j'ai des forts doutes que le gouvernement actuel
puisse aller jusqu'au bout de son opération. De toute façon, s'il
va jusqu'au bout de son opération, soit la négociation qui
prendra encore quelques mois, la mise en place de cette société
et tout, j'ai l'impression qu'il n'y aura pas création d'emplois
concrets, avant de très nombreux mois. Je serais tout à fait
surpris que le gouvernement se soit placé dans une position pour
compléter cette transaction d'une manière convenable et
raisonnable.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): M. le député de Nicolet-Yamaska.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Il me fait
également plaisir, cet après-midi, de prendre la parole sur ce
projet de loi no 70. Je ne m'attendais pas à parler après le
premier ministre du Québec et je ne prétends pas pouvoir lui
répondre convenablement, mais j'apporterai mon humble contribution
à ce débat, M. le Président. (16 h 30)
Dans un élan qu'on prétend nationaliste, les quelques
députés du Parti québécois qui se lèvent
pour prendre la parole sur le projet de loi 70 nous font souvent miroiter un
avenir brillant pour l'industrie de l'amiante au Québec. Le
député de Terrebonne, qui a pris la parole avant moi, s'est
déjà pris pour un Arabe québécois de l'amiante. Le
premier ministre y a fait allusion également tout à l'heure, mais
j'ai bien peur que le député de Terrebonne et les autres
députés du Parti québécois s'aperçoivent
bien vite qu'ils sont victimes d'un mirage, car il appert, des articles de
journaux et différentes recherches qui ont été
effectuées dans le domaine, que le Québec est en train d'acheter
une minoune. C'est le secrétaire du comté de M. le
député de Frontenac qui a dit, et on le rapporte dans la revue
L'actualité: Le Québec achète une minoune. C'est une
citation de M. François Samson, secrétaire de M. Gilles
Grégoire, député de Frontenac, qui parle des installations
d'Asbestos Corporation.
M. Grégoire: J'ai rectifié cela l'autre jour. Ce
n'était pas mon secrétaire, mais un étudiant qui est venu
travailler pendant l'été à mon bureau dans le cadre des
emplois d'étudiants.
M. Fontaine: Je m'excuse, M. le député, je n'avais
pas compris votre rectification, mais de toute façon je partage...
M. Grégoire: Vous agissez comme...
M. Fontaine: ... cette opinion de M. François Samson,
parce que le gouvernement du Québec est en train d'acheter ce qu'on a
dit dans l'article, un citron. Depuis que le gouvernement du Québec a
annoncé son intention d'acheter cette industrie de gré à
gré, il m'apparaît assez évident que l'industrie en
question a cessé ou a dû cesser de faire toute réparation
ou tout entretien que ce soit à ses installations, car elle sait fort
bien que d'une façon ou d'une autre elle sera achetée à
peu près au même prix. Je pense que c'est la même situation
qui se répète et cela avait été la même chose
dans le cas de l'Hydro-Québec, lorsque le gouvernement avait
annoncé son intention de nationaliser les compagnies
d'électricité. Les compagnies qui
savent qu'elles vont être achetées par le gouvernement
cessent de faire des réparations et de l'entretien à leurs
usines. Dans le cas qui nous occupe, même cette compagnie avait
pratiquement cessé de le faire avant que le gouvernement l'annonce. Les
partenaires d'Asbestos Corporation, au sein de l'Association des mines
d'amiante du Québec, sont en brouille avec elle à cause de sa
négligence à moderniser ses installations de Thet-ford. On voit
bien que le gouvernement du Québec est en train de se faire passer un
sapin, est peut-être en train aussi d'en passer un aux
Québécois.
Dans le même document, M. le Président, on nous rapporte un
sondage qui a été fait par CROP. Ce sondage a été
fait auprès de 1500 personnes qui ont répondu aux questions qui
leur étaient posées par téléphone et dans ce
sondage il y avait 500 personnes qui venaient de la région de Thet-ford
et d'Asbestos ou des environs.
Or, si on fait l'analyse de ce sondage rapidement, dans la
première question on disait: Laisser l'amiante à l'initiative des
compagnies? Dans tout le Québec 9,5% étaient en faveur de cette
solution et, dans la région de l'amiante, 21,2%. Une autre question:
Subventionner les compagnies? Au Québec, 49,3% étaient en faveur
de cette solution et, dans la région de l'amiante, 42,6%.
Si on fait l'addition des deux questions, laisser cela à
l'initiative des compagnies et subventionner les compagnies, on
s'aperçoit que 58,8% des gens au Québec sont en faveur de l'une
ou l'autre de ces deux solutions ou des deux en même temps et, dans la
région de l'amiante, cela grimpe à 63,8%. Les autres questions
posées étaient: Nationaliser quelques compagnies? 9,5%, au
Québec, étaient en faveur de cette solution et 8,8%, dans la
région de l'amiante. Nationaliser toutes les compagnies? 18% au
Québec, 14,7% dans la région de l'amiante.
Autres solutions: 2,3% au Québec et, dans la région de
l'amiante, 3,1%. Qui refusent de répondre: 11,4% au Québec et
9,5% dans la région de l'amiante. Si on fait l'addition, M. le
Président, de toutes les autres questions, ainsi que de ceux qui
préconisent d'autres solutions ou ceux qui refusent de répondre,
on s'aperçoit qu'au Québec 41,2% seraient pour la nationalisation
ou de nationaliser quelques compagnies, et dans la région de l'amiante,
36,1%.
M. le Président, on s'aperçoit donc que dans la
région de l'amiante il y a 63,8% de gens qui sont pour laisser les
compagnies comme elles sont actuellement ou les subventionner, alors que pour
la nationalisation il n'y en a que 36,1%, et j'inclus là-dedans "autres
solutions" et ceux qui ont refusé de répondre. Je suis
généreux. On s'aperçoit donc qu'il y a 10% de
différence dans les deux cas. Au Québec entier il y a 58,8% qui
sont pour laisser l'initiative aux compagnies et 41,2% qui sont pour la
nationalisation, donc environ 8% de différence en faveur de la libre
entreprise.
M. le Président, pour un gouvernement qui se veut à
l'écoute de la population, un gouvernement qui veut être un
gouvernement de la base, je vous dis que c'est le temps d'écouter la
base sur cette question parce que les gens qui ont répondu à ce
sondage ont dit au gouvernement quelle voie suivre. J'espère que le
gouvernement, le premier ministre en tête, a pu prendre connaissance de
ce sondage qui fait que la population du Québec n'est pas du tout pour
cette loi 70, principalement dans la région concernée où
on voit que 63,8% de la population est contre toute forme de
nationalisation.
Dans le même article, M. le Président, il est
également intéressant de noter, en réponse à ce que
le premier ministre nous disait tout à l'heure quant au fait que
l'amiante est toujours populaire en Europe, ce qu'on nous dit à la page
29 de cette revue L'Actualité: Est-il encore temps? Les grands
consommateurs d'amiante sont l'URSS, les Etats-Unis, l'Europe et le Japon. En
URSS on se suffit amplement. On exporte même de plus en plus vers
l'Europe à moindre coût que nous, évidemment. Les
Soviétiques nous concurrencent aujourd'hui grâce à la
technologie que la Johns-Manville leur a vendue à la suite de ses
opérations québécoises.
Le gros marché de l'amiante est le marché occidental, mais
voilà, la psychose de l'amiante cancérigène se
répand. General Electric fait paraître des annonces pour ses
grille-pain: "toaster asbestos free". Le Parlement européen et ce
n'est pas n'importe qui réuni à Strasbourg en
décembre dernier a décidé de bannir l'amiante qui tue et
de lui trouver d'ici dix ans des substituts. Des groupes de consommateurs
français ont lancé, dans le numéro d'octobre 1976 de la
revue Que choisir, une campagne de boycottage contre les viniculteurs qui se
servent de filtres d'amiante.
M. le Président, on s'aperçoit qu'il y a toutes sortes de
groupes de pression qui font des campagnes publicitaires contre l'amiante en
Europe. Il faut véritablement, avant de se lancer dans cette aventure de
l'amiante, se poser la question: Est-il encore temps? Est-on en train
d'embarquer les Québécois dans un bateau qui va sombrer sous peu?
Il faut se poser la question avant de pouvoir réaliser ce projet.
D'autre part, dans le même article, on nous dit que les trois
produits sur lesquels le Québec peut fonder sa transformation sont des
garnitures de freins, les plaques d'amiante-ciment et les endos de
linoléum. Or, M. le Président, pour ce qui est des garnitures de
freins, on nous annonce aujourd'hui dans le journal Le Devoir que le plus gros
fabricant de freins condamne l'amiante. C'est donc dire que le Québec,
une fois qu'il aura fait l'acquisition de l'Asbestos Corporation et qu'il
voudra transformer au Québec les produits de l'amiante devra se tourner
seulement vers deux produits seulement, soit les plaques d'amiante-ciment et
les endos de linoléum. (16 h 40)
Le Québec, avant même de faire l'acquisition de cette
corporation, s'aperçoit que le plus gros fabricant de freins condamne
l'amiante. On nous explique dans l'article que les automobiles des
années quatre-vingt seront équipées avec une nouvelle
garniture de freins au carbone plutôt qu'à
l'amiante. Le substitut est déjà prêt. Il est
couramment utilisé sur les Boeing 747. Ces avantages sont de trois
ordres. Les garnitures au carbone sont plus résistantes à la
chaleur. Elles requièrent moins d'entretien. Elles réduisent de
50% le poids des freins. Pour un Boeing 747, la garniture au carbone signifie
une économie de 1300 livres, soit le poids de cinq ou six passagers avec
leurs bagages. Autant dire qu'il n'y aura plus d'amiante dans les freins des
avions. Il n'y en aura probablement plus, dans les années quatre-vingt,
dans les freins d'automobile.
On s'aperçoit que le gouvernement du Québec nous annonce
qu'il veut nous embarquer dans une aventure qui n'est pas réalisable
dans un monde économiquement rentable. Ce que nous reprochons au Parti
québécois et au gouvernement, c'est de toujours vouloir agir
avant de penser. Il ne s'agit pas, pour un gouvernement, d'agir à tout
prix, mais d'agir comme des administrateurs compétents. On décide
d'agir sans regarder plus loin que le bout de son nez. C'est ce que la
population du Québec reproche actuellement au gouvernement.
On en a eu l'exemple dans l'assurance automobile alors que le
gouvernement a agi sur un coup de tête, sans tenir compte des opinions
des gens concernés qui lui démontraient que son projet
n'était pas réaliste. On voit aujourd'hui et on verra encore
mieux dans les mois et les années à venir dans quel bateau le
ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions
financières et le gouvernement ont embarqué les
Québécois.
En assurance automobile, on a présenté aux
Québécois un projet de loi sans en connaître les
coûts. C'est le même sapin qu'on tente de passer à la
population du Québec avec ce projet de loi farfelu qu'est la
nationalisation d'une partie de l'industrie de l'amiante.
M. le Président, manque de planification, improvisation,
incompétence sont les épithètes les plus souvent
employées par la population du Québec pour qualifier le
gouvernement actuel. C'est un chèque en blanc que les gens d'en face
nous demandent de leur donner aujourd'hui. On ne connaît pas les
coûts de cette nouvelle aventure. S'il y en a de l'autre
côté qui connaissent ces coûts, je les invite à se
lever immédiatement pour nous les faire connaître. On sera
très intéressé de connaître les coûts de
l'achat d'Asbestos Corporation.
On aura à faire face à la construction d'une nouvelle
usine à cause de la désuétude de celle qui existe. Quels
seront les coûts de cette nouvelle construction? Est-ce qu'on a fait des
études et des recherches là-dessus? Si on se fie aux estimations
qui nous avaient été données pour la rénovation de
cette belle Assemblée, alors qu'on nous disait que cela devait
coûter $600 000 et on en est arrivé avec un coût de $800
000, il faut faire attention. Il faut se poser des questions.
Quant aux sociétés d'Etat que les gouvernements ont
créées, elles ne nous donnent pas tellement d'exemples quant
à leur rentabilité. On a parlé tout à l'heure de
SIDBEC. Je ne voudrais pas reprendre tout ce que l'on a dit, mais je voudrais
tout simplement vous rapporter un passage du rapport qui nous était
fourni par l'Office de planification et de développement du
Québec, les sociétés d'Etats et les objectifs
économiques du Québec. C'est un rapport qui nous a
été présenté la semaine dernière à
l'Assemblée nationale, si je ne me trompe. Il a été
rédigé en mars 1977. A la page 88 on nous dit: ... M. le
Président, le ministre des Consommateurs, Coopératives et
Institutions financières a qualifié, hier, les gens de cette
vénérable Assemblée comme étant des bandes
d'étudiants en récréation, je pense que du
côté du gouvernement il y a peut-être une bande de
professeurs en récréation.
M. Duhaime: A l'ordre, soyez sérieux!
M. Fontaine: Je cite, M. le Président. "Au niveau de la
rentabilité, la situation est moins reluisante. SIDBEC a
enregistré des pertes cumulatives de $51 millions entre 1969 et 1976 et
le président s'attend que l'entreprise perde encore $34.5 millions avant
de franchir le seuil de rentabilité ". Et on continue: "Etant
donné la surproduction de I acier et l'affaissement des prix dans la
conjoncture mondiale actuelle, étant donné aussi que SIDBEC ne
fonctionne, en ce moment, qu'à une partie de sa capacité, il
semble probable que la rentabilité se fera d'autant plus attendre".
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): M. le député de Lac-Saint-Jean, s'il vous
plaît, si vous voulez poser...
M. Brassard: Pourriez-vous aussi lire la fin de la page 89 et la
page 90 en haut? C'est très intéressant.
M. Fontaine: Le député qui vient de prendre la
parole aura sûrement l'occasion de lire son petit bout. Alors, quand il
voudra se lever pour parler, il pourra le lire.
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Brassard: Comme on en est à ce rapport, analysons-le
comme il faut!
M. Fontaine: M. le Président, j'affirme que, de plus, dans
le domaine de l'amiante, la société d'Etat aura à faire
face à la concurrence privée. On verra bien, à ce
moment-là, qui, de l'industrie privée ou de la
société publique, est la plus rentable.
Le gouvernement du Parti québécois veut nous embarquer
dans un bateau. Il ne créera presque pas d'emplois
supplémentaires et il ne réussira sûrement pas à
récupérer les quelques milliers d'emplois que le parti
ministériel a fait perdre depuis un an et demi.
Merci, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Vaillancourt,
Jonquière): M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, il me fait plaisir de
participer modestement à ce débat. J'avais mentionné, lors
de la motion de report proposée par un député de l'Union
Nationale, qu'il serait important, quand même, de signaler, lors de la
discussion en deuxième lecture sur le projet de loi 70, l'importance
pour nous, les Québécois, d'agir dans ce secteur. II avait quand
même été mentionné par plusieurs, contrairement
à des prétentions de l'Opposition, que c'est probablement un des
dossiers les plus prêts actuellement, au Québec, pour une
intervention sur le plan énergétique. Non seulement les
études ont démontré que l'amiante actuellement, au
Québec, est une richesse très importante, primordiale, mais on
pourrait citer une multitude de chiffres; j'aurais l'occasion de le faire
tantôt.
Je pense qu'on a des indications de marché pour être en
mesure d'y aller à fond de train et le plus rapidement possible parce
que le dossier est prêt et qu'il est devenu nécessaire que les
Québécois aient une présence plus active et plus dynamique
dans ce secteur. Essentiellement, on a dit énormément de choses.
Entre autres, on a mentionné à plusieurs reprises que les
richesses naturelles appartiennent aux Québécois, dont qu'il
serait normal que ces gens aient plus de présence dans le secteur. On a
dit même à quelques reprises que notre objectif était fort
louable. J'ai entendu cela par des membres de l'Opposition, sauf qu'on nous
dit: Ce n'est pas au niveau de l'objectif qu'il y a des problèmes.
Là où cela ne va pas, là où vous n'êtes pas
corrects, c'est au niveau du moyen que vous avez choisi pour atteindre ces
objectifs.
Je pense, quand même, qu'il serait important de faire un
léger retour sur les objectifs visés par la création de la
Société nationale de l'amiante. J'ai l'impression que certains
les ont oubliés. Or, un court rappel au niveau des objectifs tels
qu'indiqués dans le projet de loi 70. On dit, premièrement, qu'on
voudrait transformer au Québec toute la fibre qui peut être
traitée de façon rentable. Alors, plusieurs moyens sont
suggérés pour y arriver; on en discutera tantôt. On a dit
également c'est un deuxième objectif qu'il y aurait
lieu de canaliser le savoir-faire et l'expertise de l'industrie existante au
plus grand profit de la collectivité québécoise en
bâtissant l'avenir sur ce qui existe. On a également parlé
d'assurer une présence québécoise immédiate dans
tous les stades industriels du secteur de l'amiante et non pas au niveau
uniquement de l'extraction et, là, on a énoncé la
politique. On pourra y revenir tantôt.
Je dis que, pour parler convenablement du projet d'amiante, il faut
peut-être regarder des choses. Il est clair qu'actuellement plusieurs
études nous parlent des dangers que l'amiante constitue, par exemple
l'étude du marché européen, mais d'autres études
nous disent que, par une recherche accrue, par une diversité des
marchés, certains types d'utilisation de l'amiante ne
représentent absolument aucun inconvénient. Il serait
peut-être bon de regarder les propriétés par-
ticulières que l'amiante possède. On dit: II possède quand
même des priorités très importantes.
De plus, la mise en place d'une recherche dynamique peut redonner toute
sa vitalité à l'amiante. (16 h 50)
Aussi, l'amiante possède encore des avantages comparatifs sur des
substituts qu'on n'a même pas encore découverts et que, bien
sûr, la technologie permettra peut-être dans l'avenir d'apporter
comme substituts à l'amiante existant actuellement. Tout le monde
connaît ses propriétés particulières au niveau, par
exemple, de sa résistance à la haute température. Sa
résistance à la tension. Sa résistance aux attaques
chimiques et biologiques. Ces quelques caractéristiques ne font pas de
l'amiante un produit irremplaçable, bien sûr, mais il est certain
que l'amiante ajoute une dimension qualitative importante au produit dans
lequel il est incorporé, qu'on ne peut absolument pas
négliger.
C'est dans ce sens que la recherche doit s'accentuer. La recherche
servira la politique québécoise de transformation sous deux
angles. Elle contribuera à diminuer l'émission de fibre d'amiante
et à trouver de nouveaux produits. Quant aux émissions de fibre,
les efforts mis à les réduire le plus possible au niveau de
l'amiante et à les évaluer au niveau des substituts
revaloriseront doublement l'amiante en ce sens qu'ils permettront à
l'amiante de répondre aux normes et d'avoir une meilleure image que ces
substituts proposés. Et on pourrait donner d'autres constatations sur
les éventuelles conclusions de recherche.
M. le Président, essentiellement, si je veux manifester mon
entier accord pour ce projet de loi, c'est pour les raisons suivantes:
Dernièrement, en Ontario et dans quelques autres endroits, il y a eu
plusieurs faillites d'usines dans ce secteur. Entre autres, la United Asbestos,
par exemple, qui a dû fermer ses portes suite à de mauvaises
évaluations qui ont été faites du potentiel de son
gisement. Et il est important également aussi de souligner les
énormes difficultés de traitement et les centaines de
qualités de fibre. Tout cela veut dire que, lorsque tu décides de
t'embarquer dans l'exploitation ou l'extraction d'un gisement, il faut que tu
aies le personnel technique; il faut que tu aies la compétence technique
pour t'assurer que tu ne verses dans de la dépense de fonds publics
inutiles qui n'auront que des résultats négatifs.
Donc, cela veut dire en conclusion qu'il faut, quand on développe
de nouveaux gisements, utiliser des méthodes sûres, des
méthodes certaines et une technologie à point. C'est d'autant
plus vrai que c'est réclamé actuellement par certaines
compagnies, qu'il y ait une recherche assez poussée, qu'il y ait des
spécialistes qui puissent éventuellement être des
consultants pour le gouvernement pour s assurer que dorénavant on
minimise le plus possible les effets de la découverte de nouveaux
gisements. On a dit que le gouvernement du Québec achète un
citron, le gouvernement du Québec achète une minoune; sans
conclure, ce ne sont pas mes prétentions, mais il se peut que
sous certains angles cela soit tout à fait exact. Je pense qu'il y a
d'autres façons de regarder cela. On achète peut-être une
usine où les conditions de santé des travailleurs sont dans un
état absolument lamentable; cela a été reconnu par
l'ensemble des membres du parti ministériel, on est conscient de cela.
C'est peut-être une des raisons, si on se place sous un autre angle, pour
lesquelles il est urgent de récupérer cela pour au moins placer
ces travailleurs dans des conditions plus convenables.
Mais il y a d'autres façons de regarder ce qu'on achète.
Ce qu'on achète, je pense, c'est une mine qui, actuellement, a fait ses
preuves au niveau, par exemple, de la qualité de l'amiante; qui a fait
ses preuves au niveau des limites presque illimitées
d'éventuellement épuiser le gisement; qui a fait ses preuves dans
la découverte des marchés mondiaux, internationaux, parce qu'au
niveau de l'amiante Thetford Mines a énormément d'expertise sur
une largeur de marché très très vaste. Je pense que ce
sont des choses qu'on achète, en achetant Asbestos et en créant
la Société nationale de l'amiante.
J'avais mentionné, à un moment donné, que dans ma
région il existe deux gisements fort importants. Il y a un gisement qui
s'appelle Abitibi-Amiante qui a été découvert en 1969, au
tout début, mais plus particulièrement concrétisé
à partir de 1972. C'est tellement sérieux qu'à la
période de questions de cet après-midi le député de
Saint-Laurent, M. Forget, a posé quelques questions au ministre des
Richesses naturelles à ce sujet en mentionnant que cela semblait
être un gisement très intéressant qui créerait
éventuellement des emplois pour environ 650 travailleurs. Je pense que
c'est une donnée importante et capitale.
Maintenant, qu'est-ce qui ne marche pas, qu'est-ce qui bloque? Il faut
quand même mentionner cela aussi dans les questions du
député de Saint-Laurent. Il disait: Comment se fait-il que cela
ne va pas plus avant ce dossier? Une des raisons, c'est que l'investisseur
principal ou la compagnie principale qui détient les parts importantes
du gisement actuellement, la compagnie Brinco, a déjà
déclaré dans des discussions avec qui de droit au gouvernement
qu'actuellement elle prétend qu'elle a fait sa part. Elle a mis environ
$10 millions dans la recherche. Il y aurait lieu d'avoir un partenaire
investisseur qui pourrait lui conférer cette compétence technique
pour pousser plus à fond les évaluations de marché,
à savoir: Est-ce qu'on y va ou on n'y va pas?
En créant la Société nationale de l'amiante, en
nationalisant pas à outrance dans l'ensemble du Québec, mais en
ayant un secteur témoin actif et dynamique, je pense que nous pourrions
être cette compétence technique et éventuellement
être en mesure de regarder conjointement avec Brinco quelles seraient les
possibilités concrètes de donner une réalisation du
gis». Tient, au niveau de la Société Abitibi-Amiante. Parce
que quand on dit que cette entreprise et cela est le partenaire
principal actuellement prévoit employer 650 personnes une fois la
mine en production, on dit que ce sera le plus important employeur minier de la
région de l'Abitibi-Témiscamingue, si on excepte Noranda. Les
salaires seront probablement équivalents à ceux payés dans
l'industrie de l'amiante. Sur cette base, on peut prévoir que la masse
salariale payée par Abitibi-Amiante dépassera le seuil des $10
millions annuellement. Ceci n'inclut pas la participation de l'entreprise au
programme de bénéfices sociaux obligatoires. On ne peut pas rater
cela. On ne pourra pas se permettre pendant des années ce qu'on nous a
dit dans la motion de report: Etudiez davantage, regardez cela et attendez un
peu. Cela ne presse pas, il y a quand même énormément
d'autres priorités. On est conscient que la situation de l'emploi est
difficile. Justement, dans notre cas, concrètement, si on mettait en
chantier la réalisation du gisement, je pense que cela aurait un effet
concret pour l'immédiat sur la réduction du chômage.
Quand on a vérifié potentiellement la qualité du
gisement et qu'une série d'études en témoignent je
vais vous citer tantôt quelques chiffres sur les projections de
marché iusauaux années quatre-vingt-cinq il me semble
qu'on a ce qu'il nous faut pour prendre acte et, le plus rapidement possible,
permettre que cette compagnie se développe.
Si on regarde juste un peu, si vous me permettez, les retombées
économiques pour un éventuel investissement comme cela dans la
région, on dit: Le Québec retirera un total d'environ $150
millions en droits miniers et en impôts corporatifs. Je parle seulement
du gisement chez nous, l'Abitibi-Amiante. Je pourrais vous parler d'un autre
qui est tout près, la McAdam au nord de Chibougamau. On vous donnera les
chiffres tantôt sur les réserves, sur la prospection, sur la
longévité, vous allez être intéressés. Je
pense que cela aurait un impact important. Le transport de l'amiante de la mine
jusqu'à la ligne de chemin de fer d'Amos devrait rapporter un total de
$20 millions à $30 millions aux camionneurs. Là, on est rendu
à $150 millions d'impôt, de droits miniers, $20 millions à
$30 millions aux camionneurs, plus les coûts directs de salaires dont on
n'en a pas parlé tantôt. Le volume des achats de locaux de
l'entreprise pour le secteur Amos-Val-d'Or n'a pas été
quantifié, mais serait sûrement un apport considérable.
Considérant que les mines de la région de Val-d'Or, de
Malartic et de Joutel emploient présentement environ 1500 personnes, ce
projet augmentera l'emploi minier de plus de 40%. Considérant que le
chômage chez nous est quand même passablement élevé,
je pense que c'est un projet qu'on ne peut pas minimiser et qu'il y aurait lieu
de le réaliser concrètement.
J'ajoute juste quelques phrases. Toujours sur ce même projet, on
mentionne: Nous estimons le projet suffisamment attrayant pour qu'un
investisseur sérieux s'y intéresse. Ce n'est pas François
Gendron qui dit cela, ce n'est pas le député d'Abitibi-Ouest qui
mentionne cela. C'est l'investisseur principal qui a déjà
déboursé $10 millions
dans le projet qui dit: Nous estimons que le projet présente
suffisamment d'attrait pour qu'un investisseur sérieux s'y
intéresse.
Là j'aimerais faire une référence au
député de Lotbinière, le chef de l'Union Nationale, qui
mentionnait dans son discours qu'il trouvait dommage qu'on veuille créer
la Société nationale de l'amiante parce qu'en fait on veut
essayer de remplacer le dynamisme du secteur privé. Imaginez qu'on veut
se substituer au dynamisme du secteur privé! Le député de
Fabre n'avait pas tout à fait la même opinion hier quand il nous
parlait, pour les dernières années, de l'espèce de
mollesse, de l'absence de dynamisme du secteur privé. Je dis: On en a
besoin du secteur privé. Il n'est pas question du tout de vouloir
retirer du secteur économique québécois le secteur
privé, sauf que dans certains secteurs, quand un secteur privé
depuis des années vient nous voir et dit:
Ecoutez, je ne vais pas plus loin. C'est la situation qui se passe
actuellement dans le gisement Abitibi-Amiante, on va se croiser les bras et on
va continuer à dire: Ecoutez, "gang" de nationalistes, continuez de
faire confiance au secteur privé; on va même nous accuser de
vouloir remplacer le dynamisme du secteur public, alors que c'est
eux-mêmes qui font appel à nous et qui nous disent: Donnez-nous un
coup de pouce, on a fait notre part et on voudrait que vous fassiez la
vôtre. C'est ce qu'on nous demande dans le gisement. (17 heures)
Alors, ce projet offre en plus une méthode peu coûteuse,
pour le Québec, d'être présent dans l'industrie de
l'amiante. Ce n'est pas moi qui dis cela, je me reporte à une analyse
qui a été faite par les personnes concernées;
l'équité requise étant de l'ordre... Ce sont des chiffres,
ce n'est peut-être pas le moment de parler directement des chiffres, mais
on conclut en disant que ce serait un projet où tous les
spécialistes de l'amiante prévoient un marché favorisant
les producteurs pour les cinq prochaines années et probablement jusqu'en
1985. Même les estimations les plus conservatrices ne prévoient
pas que l'offre dépasse la demande. En termes bien simples, on
prévoit que, jusqu'en 1985, pour le genre de fibre et pour le genre de
produit que l'on pourrait réaliser avec ce qu'il y a dans le gisement
d'amiante, on ne prévoit pas que l'offre dépasse la demande.
Il ressort de cela qu'une compagnie entrant en production vers 1981
pourra, très probablement, disposer de quatre à cinq
années prospères, parce que l'évaluation de
longévité du gisement est portée de 14 à 20 ans
pour ce qui est de l'Abi-tibi Asbestos, avec des réserves de 120
millions de tonnes, avec une teneur de 3% de fibre transférable
les groupes de fibre sont de 4t à 7, je ne suis pas un
spécialiste mais il semble que l'avantage de cette fibre, qui
n'est peut-être pas la plus intéressante, c'est qu'elle permet de
diversifier le marché plutôt qu'être uniquement dans un
secteur de ce qu'on appelle la longue fibre, qui permet de faire des choses
beaucoup plus restreintes que les autres fibres.
Longévité: quatorze ans. On prévoit une en-
trée en production comme je l'ai mentionné vers
1981 ou 1982, si jamais on se décide; c'est bien sûr que c'est
marqué là-dedans, mais si on ne se décide pas, ils l'ont
dit même l'an passé... M. Pouliot est venu dans ma région
pour annoncer cela en disant: On est prêt, sauf que, actuellement, on
cherche un partenaire investisseur et on n'en a pas. A un moment donné,
on nous fait une offre bien concrète en disant, comme je vous l'ai
cité tantôt... il prétend que ce projet pourrait être
un attrait suffisamment intéressant pour le gouvernement du
Québec lui-même.
Nombre d'emplois créés: 600 à 700. Je ne veux pas
être plus long sur ce gisement, mais je vous dis que chez nous c'est
important et les gens de la région trouvent que ce projet parce
que, comme je vous l'ai mentionné, on en parle depuis 1971 et 1972, plus
concrètement si jamais on avait une chance de lui donner des
suites concrètes et sérieuses, il faudrait le faire et ne pas
attendre des années encore. Je pense que le projet de loi 70 qui est
devant cette Chambre pour étude présentement, permettrait
éventuellement de concrétiser cette chose parce que, en
créant la Société nationale de l'amiante, on va chercher
du personnel technique, on va chercher des compétences qui peuvent
être d'excellents conseillers dans la façon d'exploiter un
gisement. Ecoutez, sur les marchés, ils ont fait leurs preuves; je ne
pense tout de même pas qu'on puisse nier cela...
Une Voix: Cela ne veut pas dire qu'ils vont rester là.
M. Gendron: Non, mais je pense que c'est du personnel qui peut
très bien nous rendre d'excellents services dans ce sens. En accentuant
la recherche également, on pourrait arriver avec des conclusions assez
intéressantes et éviter ce qui est arrivé à United
Asbestos et ce qui peut éventuellement arriver à d'autres, soit
plonger rapidement, uniquement dans l'extraction de minerai sans avoir pris
toutes les garanties parce que, comme on l'a mentionné et comme M.
Lévesque l'a mentionné dans son exposé, tout à
l'heure, c'est clair qu'on a créé une psychose autour de
l'amiante et c'est clair que l'amiante représente des dangers. Il faut
être assez honnête pour l'admettre, l'amiante présente
certains dangers. Parce qu'on a une richesse absolument fondamentale, il n'y
aurait pas lieu de dire, en même temps; Oui, on est conscient qu'il
présente des dangers; il faut faire attention et les minimiser. Il y a
peut-être lieu justement d'accentuer la recherche pour être
certains de minimiser ces effets négatifs de l'amiante. Comme on a
réussi cela, à ma connaissance, à peu près dans
tous les autres secteurs vitaux de l'économie, dans des produits
fondamentaux, dans nos richesses de base, j'ai l'impression qu'on ne dit pas
qu'on met une croix ou un X sur nos richesses fondamentales, qu'on laisse cela
là et qu'on regarde autre chose; non, on dit: Comment ferait-on pour
corriger les faiblesses de nos richesses, si elles en ont, et comment peut-on
s'assurer qu'elles répondent encore à des conditions de
marché?
Pour ce qui est des indications du marché, comme je l'ai
mentionné, jusqu'en 1985, on prévoit que la capacité de
production à l'échelle mondiale atteindra 6,4 millions de tonnes
en 1985. Ils répartissent la production. Tout cela pour nous dire, que
d'ici 1985, la plupart des compétences dans le secteur nous disent: II
n'y a pas de problèmes. Il y a place pour d'autres gisements et il y a
de la place surtout dans des secteurs de transformation qu'on n'a pas
exploités actuellement. Ce n'est pas tout d'avoir ce qu'on pourrait
appeler la ressource, mais il va falloir faire quelque chose avec chez nous. Il
semble que c'est assez, de constamment extirper nos richesses naturelles du
sol, d'exporter cela à l'étranger et de racheter cela sous
d'autres formes de marché. On aurait la chance éventuellement de
faire plus dans le secteur de la transformation, mais, pour faire quelque chose
dans le secteur de la transformation, cela nous prend de la présence
à nous. Cela nous prend nos propres consultants, cela nous prend un
secteur témoin et on a expliqué cela. C'est ce qui s'appelle
être membre d'un club et avoir accès à tout ce qui se
discute dans le secteur de l'amiante.
M. le Président, je ne serai pas plus long et, pour ces raisons,
je dirai que je pense qu'on devrait appuyer sans réserve le projet
créant enfin la Société nationale de l'amiante.
Le Vice-Président: M. le député d'Orford.
M. Georges Vaillancourt
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, la
création d'une société d'Etat de l'amiante que le
gouvernement veut réaliser par le projet de loi 70, Loi constituant la
Société nationale de l'amiante, ne rencontre pas l'assentiment
des Québécois et ceci a été prouvé par un
sondage, réalisé en août 1977, par CROP indiquant
clairement que seulement 20% des personnes interrogées dans l'ensemble
du Québec favoriseraient la nationalisation de toutes les compagnies,
alors que plus de 58% des répondants estiment que le gouvernement
devrait laisser l'initiative du développement de cette industrie aux
compagnies privées ou leur accorder des subventions pour
développer le secteur manufacturier. Plus de 51% de l'ensemble des
Québécois estiment que les compagnies dépensent beaucoup
d'argent pour favoriser le développement de l'industrie du
Québec, alors que 26,6% croient le contraire. Quant aux
répondants de la région même de l'amiante, la population
est encore beaucoup plus faible, puisque 14,7% favoriseraient la
nationalisation de toutes les compagnies, alors que plus de 63% des
répondants estiment que le gouvernement devrait laisser l'initiative du
développement de cette industrie aux compagnies privées.
M. le Président, plus de 80% de la population habitant dans les
localités minières considèrent les compagnies d'amiante
comme d'assez bons ou de très bons employeurs; 69,9% contre 21,7%
estiment qu'elles contribuent grandement à la croissance
économique du Québec. Plus de 58% de la population estiment, en
effet, que les compagnies dépensent beaucoup d'argent pour favoriser le
développement de l'industrie au Québec, alors que 28% croient le
contraire.
M. le Président, le gouvernement nous dit que la nationalisation
de l'Asbestos Corporation augmenterait les emplois considérablement,
mais à quel coût. Selon le rapport SORES phases I et II. une
augmentation substantielle du secteur manufacturier de l'amiante au
Québec exige que l'on y fasse un usage considérablement accru des
produits d'amiante soit pour les travaux publics, les travaux d'urbanisation,
les édifices publics, etc.
Par ailleurs, il est clair qu'une expansion optimale au Québec du
secteur manufacturier de l'amiante nécessitera l'injection d'importants
capitaux de risque, tout en ayant un impact relativement peu important sur la
création d'emplois, en raison de la technologie utilisée dans les
usines de transformation. (17 h 20)
La phase I du rapport SORES a pris quatorze produits qui ont
été étudiés à l'usine.
A l'issue de l'étude, cinq produits seulement ont
été retenus pour une étude plus précise parce
qu'ils semblaient présenter des perspectives très
intéressantes au niveau de la transformation. Il s'agissait, en ce qui
concerne l'amiante-ciment, des tuyaux et des plaques polies. En ce qui concerne
le papier-amiante, de l'endos de linoléum et feutre à toiture et
aussi des garnitures de friction, des "brake linings" comme on dit ici en bon
Canadien. Dans la phase II du rapport SORES, ces cinq produits ont fait l'objet
d'une analyse en profondeur. Il en ressort que les possibilités
d'expansion des secteurs manufacturiers de I amiante au Québec
porteraient essentiellement sur trois types de produits, soit les endos de
linoléum, les garnitures de friction moulées, les plaques polies
d'amiante-ciment.
M. le Président, à l'heure actuelle, seules les garnitures
de friction font l'objet d'une fabrication au Québec. Comme le
mentionnait mon collègue tout à l'heure, on vient d'apprendre que
l'un des plus gros producteurs de freins au monde envisage d'abandonner
l'utilisation de l'amiante dans les années quatre-vingt.
M. le Président, quant aux plaques polies, très peu
répandues en Europe pour le recouvrement des murs extérieurs, il
s'agit d'un produit méconnu en Amérique, mais dont le
marché potentiel est très important. Les autres produits, le
tuyau d'amiante-ciment, le papier à toiture en amiante, qui avaient
été retenus dans l'issus de la phase I de l'étude du
rapport SORES, n'ont pas été jugés viable après
étude approfondie.
M. le Président, pour les trois produits viables, les
investissements requis seraient de l'ordre de S60 millions, et le projet, en
plein rendement, entraînerait, en trois ou quatre ans, la création
de 400 emplois. A l'heure actuelle l'industrie primaire de la transformation de
l'amiante, soit 8 industries, utilise 43 520 tonnes de fibres, soit 3,4% de la
pro-
duction québécoise d'amiante, qui emploie environ 1600
personnes. Le projet de SORES représenterait, avec 400 emplois, une
augmentation de 25% de l'emploi actuel du secteur de la transformation de
l'amiante.
M. le Président, l'impact du projet SORES, au point de vue
économique, soit une usine d'endos à linoléum, c'est un
investissement de $28 millions qui créerait 60 emplois et qui
nécessiterait 30 000 tonnes de fibres d'amiante par année.
L'usine de plaques polies d'amiante de ciment prendrait de $5 millions à
$10 millions d'investissements, créerait une centaine d'emplois pour une
consommation de 2000 tonnes de fibres d'amiante par année.
Une nouvelle usine de garnitures de friction moulées c'est un
investissement d'environ $25 millions qui créerait environ 225 emplois
pour une consommation annuelle de 2500 tonnes de fibres par année. Au
total, c'est donc environ 40 000 tonnes de fibres que ces nouveaux produits
utiliseraient. On doublerait la quantité d'amiante actuellement
transformée au Québec, ce qui atteindrait, par conséquent,
environ 7% de la production québécoise de fibre d'amiante.
Quant aux projets non retenus, M. le Président, compte tenu des
conditions actuelles du marché, usine de tuyaux d'amiante-ciment et
usine de papier à toiture, il faudrait investir $36 millions. Les
emplois créés atteindraient environ 220 et la consommation de
fibre serait de 30 000 tonnes annuellement.
En admettant que ces projets pourraient devenir réalisables
à moyen terme, l'objectif raisonnable d'une plus grande transformation
de l'amiante au Québec est de 600 à 700 emplois de plus
qu'actuellement, soit 2300 au total; 70 000 tonnes de fibre de plus, soit 110
000 tonnes au total, ou 9% de la production de fibre au Québec.
Des investissements de l'ordre de près de $150 millions pour
l'emploi. Sur cette base, les objectifs du gouvernement de transformer 20% de
l'amiante québécois exigeraient des montants d'environ $300
millions pour les investissements. Le nombre d'emplois nouveaux correspondants
serait d'environ 2000. En ajoutant les $200 millions du coût
d'acquisition de toutes les actions de l'Asbestos Corporation et si le
gouvernement était le maître d'oeuvre de tous ces projets, cela
ferait $500 millions pour 2000 emplois. Est-ce que cela n'est pas excessif, M.
le Président?
Il y a d'autres choix que le gouvernement peut prendre car tout
gouvernement peut, afin de maximiser les revenus tirés d'une richesse
naturelle quelconque, intervenir par des moyens classiques tels que
fiscalité, taxe à l'exportation, modification du régime
d'impôt minier, incitation des intérêts privés
québécois à acheter des sociétés
minières, etc.
Il y a aussi les moyens indirects tels que le remplacement du
régime d'impôt minier par un système de redevance au
pourcentage du prix de vente. Les redevances pourraient être
utilisées comme un moyen de persuasion. Le gouvernement peut aussi voter
une loi pour imposer aux compagnies privées un certain pourcentage de
transformation faite ici au Québec.
Il le peut aussi par le moyen de permis et de taxe à
l'exportation par une double structure de prix. Cette mesure est efficace dans
le cas où les mécanismes du marché jouent normalement.
J'admets qu'il y a un problème constitutionnel car la taxe à
l'exportation est de juridiction fédérale.
On peut augmenter la consommation de l'amiante au Québec et au
Canada par plusieurs moyens. Par l'utilisation de l'amiante-ciment dans les
édifices gouvernementaux, dans les édifices subventionnés
par le gouvernement, une meilleure connaissance du matériau par les
architectes, une plus grande agressivité des compagnies d'amiante, une
existence...
Une Voix: Pourquoi ne lavez-vous pas fait?
M. Vaillancourt (Orford): ... de fonctionnaires experts dans le
domaine de l'amiante, une législation minière et fiscale,
etc.
Une telle orientation était d'ailleurs recommandée en 1974
par l'actuel ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Rodrigue Tremblay
je regrette qu'il ne soit pas ici alors qu'il trouvait
évident que des mesures ad hoc de stimulation et d'encouragement direct
à la transformation seraient davantage appropriées qu'une
nationalisation.
L'avenir nous dira si la nationalisation de l'amiante par le
gouvernement actuel est le meilleur moyen d'assurer l'essor de l'industrie de
l'amiante pour le plus grand bénéfice des
Québécois.
En terminant, M. le Président, nous sommes d'accord pour qu'il y
ait augmentation de la transformation de l'amiante au Québec. Nous
sommes aussi d'accord pour que tout soit mis en oeuvre pour la protection de la
santé des ouvriers de l'amiante, mais que le tout se passe par les voies
normales, soit par l'entreprise privée.
Le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, M. le Président. Vous me permettrez, M.
le Président, d'émettre quelques commentaires, en deuxième
lecture, sur le projet de loi no 70. Il est vrai que, à la suite des
nombreuses interventions que nous avons eues, d'un côté de la
Chambre comme de l'autre, plusieurs choses ont été dites. Vous me
permettrez d'en rappeler quelques-unes.
Oui à la transformation de l'amiante, et non à
l'acquisition du contrôle d'une entreprise existante. Voilà, en
somme, la façon de voir les choses de la part de l'Union Nationale et de
celle du député de Bellechasse. (17 h 20)
Autant nous souscrivons à l'objectif de voir l'industrie de la
transformation de l'amiante prendre au Québec des proportions plus
importantes que celles que nous avons vues dans le passé et à
celui de voir l'Etat y jouer un rôle, au besoin, ou au sein d'une
société mixte, autant l'Union Nationale
ne peut souscrire et signer un chèque de quelque montant que ce
soit au gouvernement pour des moyens, d'après moi, excessifs, imprudents
et non encore justifiés que représente le projet de loi 70.
Notre parti partage les objectifs pour un niveau plus poussé de
l'industrialisation de l'amiante et la création d'emplois dans ce
secteur, mais je suis en désaccord sur la méthode mise de l'avant
par le gouvernement, à savoir l'acquisition du contrôle d'une
entreprise existante, même de gré à gré, devenue,
semble-t-il, beaucoup plus difficile et plus onéreuse que prévue,
soit le contrôle de la société Asbestos. Dans le contexte
économique actuel, on comprend mal pourquoi le gouvernement a choisi
d'utiliser les fonds publics pour l'achat de cette société au
lieu de les affecter au développement immédiat du secteur de
transformation.
On aurait pu négocier ou légiférer de façon
à s'assurer de l'approvisionnement nécessaire à
l'exploitation de ces éventuelles usines de transformation. Si les
membres de l'Assemblée nationale et les membres du gouvernement sont
capables de légiférer dans le but d'étatiser une compagnie
d'amiante, il me semble qu'on aurait pu, une fois rendu à la limite,
légiférer également pour obliger cette compagnie à
nous vendre une partie de sa matière première ou, encore, pour
obliger une compagnie à transformer une partie de cette matière
première chez nous, et ainsi, créer des emplois.
Si on est capable en tant que gouvernement, d'adopter une loi pour dire
à la compagnie: Tu nous vends, on veut bien négocier de
gré à gré le prix des actions, et l'obliger à nous
vendre, il me semble qu'on aurait pu et qu'on devrait être capable de
légiférer de façon à obliger cette compagnie
à nous vendre une partie de son produit que nous voulons transformer ou,
encore, on pourrait l'obliger à transformer une partie de ce produit
chez nous. D'après moi, le ministre me fait signe que non... lorsqu'on
est rendu à la limite d'adopter une loi pour étatiser, acheter
une compagnie...
Une Voix: On n'adopte pas de loi!
M. Goulet: M. le Président, j'imagine que le
député de Frontenac aura également ses 20 minutes, je lui
demanderais, si possible, de respecter l'article 100.
M. Bérubé: L'article 122 de la constitution ne vous
permet pas de le faire, M. le député.
M. Goulet: Si on est capable de changer une loi pour obliger une
compagnie à nous vendre, il me semble qu'on aurait été
capable également d'adopter une loi pour obliger cette compagnie
à transformer ou négocier avec elle.
M. Bérubé: L'article 122 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique l'interdit.
Le Président suppléant (M. de Bellefeuille): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Goulet: Je pense que le ministre de la Fonction publique avait
quelque chose à dire, M. le Président, je ne sais pas s'il
voulait parler du viaduc sur le boulevard Laurentien. Est-ce ce que vous
vouliez dire? Je vais vous laisser mon droit de parole. Est-ce là-dessus
que vous vouliez parler?
Mme Payette: La pertinence du débat!
M. Goulet: Ce n'est pas moi qui ai interrompu, Mme le ministre
des Consommateurs, c'est votre collègue.
Une Voix: Et des vieux!
M. Goulet: Puis-je continuer, M. le Président?
Le Président suppléant (M. de Bellefeuille):
Allez-y, M. le député de Bellechasse.
M. Goulet: Je reproche au gouvernement...
Le Président suppléant (M. de Bellefeuille):
Je demanderais un peu de discipline, s'il vous plaît, pour qu'on
entende.
M. Goulet: M. le Président, lorsque le ministre parle de
choses sensées, je vous dis que, depuis un an et demi que je suis assis
de ce côté-ci de la Chambre, j'en ai entendu des vertes et des pas
mûres et des insensées. Une chance que ce n'est pas tout le monde
de l'autre côté. Il y a certaines personnes, il faut
l'avouer...
Le Président suppléant (M. de Bellefeuille): Y
aurait-il possibilité d'aller à la pertinence du débat,
s'il vous plaît, M. le député de Bellechasse?
M. Goulet: J'y vais, M. le Président, mais c'est le
ministre qui me fait prendre le côté et c'est lui qui aimerait que
je parle de choses sensées. Quand cela fait un an et demi qu'on entend
en cette Chambre des choses insensées qui nous viennent des gens d'en
face, à un moment donné, on est pris pour glisser. Je disais
donc, M. le Président, que je reproche ah! le ministre veut nous
parler de sa tuque au gouvernement d'avoir trop peu fait au niveau du
mécanisme de la réglementation des redevances, des mesures
fiscales et de la réquisition d'un pourcentage de la production, avant
d'en arriver à la position excessive mise de l'avant par le
gouvernement, à savoir la nationalisation d'un secteur témoin
dans l'industrie de l'amiante.
Somme toute, M. le Président, le projet de loi 70 nous invite
à donner un chèque en blanc au gouvernement. On va beaucoup plus
loin même que l'objectif visé. On parle d'exploitation de
gisements d'amiante, de mandat pour permettre toute activité
industrielle, manufacturière ou même commerciale reliée
directement ou indirectement à la transformation de l'amiante. On parle
également d'un fonds social de $250 millions. C'est ce qui est
prévu, mais j'imagine qu'une fois
rendu au fait, comme dans d'autres domaines, cela aura certainement
doublé. $250 millions pour l'acquisition possible d'entreprises
poursuivant les mêmes fins. On dit même que le ministre des
Richesses naturelles pourrait émettre des directives, rien d'autre, rien
de moins, tout simplement sur une simple idée du ministre, sur les
objectifs et l'orientation que la société pourrait se donner. M.
le Président, c'est extrêmement dangereux.
Pour toutes ces raisons, vous comprendrez qu'à moins que le
ministre ne revienne sur sa décision, je voterai contre ce projet de loi
en deuxième lecture, tout en favorisant, rappelons-le, la transformation
sur place des fibres d'amiante et, conséquemment, la création
réelle d'emplois durables. Je pense qu'il est temps que le gouvernement
arrête de vouloir satisfaire les exigences de son programme politique,
pour ne pas dire des promesses politiques, au détriment des
véritables besoins et des priorités des Québécois.
Il me semble que les $250 millions prévus, par les temps qui courent,
pourraient être beaucoup plus utiles dans d'autres domaines qu'ils ne le
seront dans le domaine de l'amiante; $250 millions pour ne créer aucun
emploi. Après avoir tant prêché la concertation, il est
temps que le gouvernement la pratique dans un dossier comme celui de
l'amiante.
Plusieurs raisons nous invitent à douter un peu de ce projet.
Suite à une émission de TV. Nous n'avons peut-être pas tous
la compétence de l'honorable député de Frontenac en
matière d'amiante. On pourra vous rappeler également la
compétence et un certain rapport qu'avait fourni l'honorable ministre de
l'Industrie et du Commerce sur l'amiante. On pourra en parler de ce rapport
également. Je ne sais pas s'il s'était assis sur le même
siège que l'honorable député de Frontenac, mais dans le
rapport qu'avait déjà fourni celui qui maintenant détient
le poste très important de ministre de l'Industrie et du Commerce, ses
données et la conclusion n'étaient pas tout à fait la
même chose que les conclusions de l'énoncé du
député de Frontenac.
M. le Président, si ces gens, en face, ayant supposément
les mêmes objectifs, peuvent se contredire, c'est parce que
l'unanimité, même de ce côté de la Chambre, n'est pas
faite sur l'amiante. Suite à une émission de TV et à
certains articles de journalistes, il semblerait que pour certains
débouchés qu'on avait prévus pour l'amiante que nous
aimerions bien transformer au Québec, les chiffres ne seront pas tout
à fait les mêmes. (17 h 30)
II y a la Communauté économique européenne, M. le
Président, qui dit: Ecoutez, avant même d'être
exploité, le marché européen que pourrait viser une
société québécoise de l'amiante et là
je vous reporte à un article dans le Devoir risque d'être
fermé à ce produit à qui on découvre chaque jour
d'autres propriétés cancérigènes. Un tableau assez
pessimiste que nous a dressé, qu'on a pu voir à une certaine
émission de télévision, l'émission
Télémag.
Il est vrai qu'en France, en 1976, la consommation de l'amiante est
passée à 130 000 tonnes après avoir été de
140 000 et de 150 000. Je pose la question.de combien sera la consommation de
l'amiante, en Europe, en 1980 ou en 1985? Est-ce que l'investissement du
Québec, à ce moment, sera aussi avantageux qu'on le croit?
Egalement, celui qui m'a précédé, le député
de Orford, en a fait mention, juste pour donner un exemple pour appuyer nos
dires, le plus gros... Je pense que le ministre de l'Agriculture a quelque
chose à nous dire.
M. Garon: Le député d'Orford est parti. Il est
absent.
M. Goulet: II est parti, il suit l'exemple des ministres.
M. Proulx: II y a huit ministres en Chambre, M. le
député. Je m'excuse, M. le Président, c'est important. Le
quorum est assuré d'une façon permanente, il y a plus de huit
ministres en Chambre, M. le député.
M. Garon: II y a plus de ministres en Chambre qu'il n'y a de
députés du Parti libéral, de l'Union Nationale, du
crédit social, du PNP ensemble.
M. Goulet: M. le Président...
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît, M. le député de Saint-Jean.
M. Garon: En plus, on vous écoute avec un très
grand intérêt.
M. Goulet: Je viens de m'apercevoir que...
M. Proulx: Je n'accepterai jamais de telles remarques
malveillantes.
M. Goulet: Je viens de m'apercevoir d'abord d'une chose, que le
whip en chef du gouvernement parlait et, M. le Président, je viens de
m'apercevoir d'une deuxième chose; lorsque j'ai dit que le
député d'Orford suivait l'exemple des ministres, il faudrait se
rappeler certains mercredis matin. Vous relirez le journal des Débats,
vous verrez combien de fois l'Opposition a eu à demander le quorum.
M. Duhaime: J'invoque une question de privilège, M. le
Président. Je suis en mesure de compter de mon siège que
l'Opposition officielle est représentée par deux
députés, que l'Union Nationale est représentée par
deux députés.
M. Goulet: Ce n'est pas une question de privilège.
M. Duhaime: Que, du côté des banquettes
ministérielles, il y a exactement neuf ministres et que le quorum est
assuré.
M. Goulet: J'invoque le règlement, ce n'est pas une
question de privilège. Le ministre du Tou-
risme, de la Chasse et de la Pêche sait qu'à chaque jour on
doit invoquer dans cette Chambre le quorum. Il n'a pas à se péter
les bretelles cet après-midi parce qu'il y a quelques ministres en
Chambre, parce que, régulièrement, on remarque leur absence.
M. Duhaime: Je ne porte pas de bretelles.
Le Président suppléant (M. Laplante): Le pertinence
du débat, s'il vous plaît, M. le député de
Bellechasse. A l'ordre, M. le député de Saint-Jean! C'est
assez.
M. Proulx: Pardon?
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît! Le député de Bellechasse.
M. Proulx: Le quorum est 20 et nous sommes plus de 35, M. le
Président.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le whip du
gouvernement.
M. le député de Bellechasse.
M. Proulx: C'est ici mon travail.
M. Goulet: M. le whip... Est-ce que le whip en chef qui parle
peut me laisser conclure?
Le Président suppléant (M. Laplante): Vous voulez
revenir, s'il vous plaît, à la pertinence du débat, M. le
député de Bellechasse?
M. Goulet: Je ne savais pas qu'il parlait, cela fait un an et
demi et c'est la première fois que je l'entends parler.
M. Proulx: J'ai fait un discours important en
décembre.
M. Goulet: Pour conclure.
M. Proulx: Question de privilège. J'ai fait le 22
décembre un discours important qui a choqué fortement
l'Opposition.
M. Goulet: Est-ce qu'il a dit un discours? Je n'avais pas mon
écouteur.
Le Président suppléant (M. Laplante): Vous voulez
revenir à la pertinence du débat?
M. Goulet: Un discours dans un an et demi, la moyenne n'est pas
mal.
Je conclus. Après avoir tant prêché la concertation
et si peu la pratiquer dans un dossier comme celui de l'amiante, voilà
le paradoxe dans lequel le gouvernement actuel veut nous conduire.
Je vous le répète, l'étatisation de la
société Asbestos, M. le Président, n'est pas une
priorité. Si le gouvernement veut savoir où sont les
priorités, il serait bon qu'il consulte son ministre de l'Industrie et
du Commerce dans un rapport qu'il a déjà fourni concernant
l'amiante. Le ministre de l'Industrie et du Commerce dira au ministre des
Richesses naturelles qu'il fait un faux pas et que ce n'est pas du tout le
temps d'étatiser les compagnies d'amiante.
Voilà, M. le Président, ce que j'avais à dire sur
ce dossier.
M. Duhaime: M. le Président, est-ce que vous voudriez
appeler le vote sur cette motion de deuxième lecture?
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Le gouvernement du Québec nous demande
d'approuver l'achat d'une usine désuète et d'une mine avec
l'argent du public. Après avoir enlevé les symboles et le
verbiage de ce projet de loi 70, c'est ce que nous sommes appelés
à faire.
Notre devoir, M. le Président, est de juger si le gouvernement
fait bien, si nous devons nous embarquer dans un genre d'entreprise, dans un
genre d'aventure similaire.
Je serais d'accord pour dire qu'on ne peut pas juger un tel achat, une
telle entreprise, une telle démarche de la même façon qu'un
acheteur privé pourrait évaluer un achat similaire.
C'est-à-dire qu'on ne peut pas seulement évaluer les profits, ce
n'est pas seulement le "bottom line", la rentabilité de l'entreprise que
nous devons regarder. En plus de la rentabilité fiscale, nous devons
l'équilibrer si je peux utiliser une phrase du vocabulaire du
Parti québécois avec la rentabilité sociale. Alors,
il faudrait regarder les deux.
Pour le moment, je mettrai de côté la question de la
nationalisation, le pour et le contre. Tenons pour acquis, pour le moment, que
si les bénéfices réels pour le peuple du Québec le
justifiaient, ce serait une bonne démarche pour le gouvernement
d'acheter cette entreprise en dépit de la question de la
nationalisation.
Mais, M. le Président, dans le cas de l'Asbes-tos Corporation, je
soutiens que ce n'est pas le cas. Je soutiens que le gouvernement va gaspiller
l'argent du peuple seulement pour des avantages sociaux, même en
évaluant tous ces avantages et ceux de rentabilité fiscale, si on
considère tous les choix. De plus, je considère que le
gouvernement n'a pas pris en considération, n'a pas
étudié, n'a pas porté à notre attention les besoins
réels de l'économie du Québec pour l'avenir.
M. Picotte: M. le Président, est-ce que je pourrais vous
demander une directive, s'il vous plaît? Serait-il possible de demander
au whip du gouvernement de ne plus vanter le quorum puisque, depuis ce
temps-là, on a perdu onze députés du Parti
québécois?
Une Voix: On a quorum.
M. Picotte: On a quorum, mais ne vous vantez pas, on en a perdu
onze.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Mont-Royal, continuez s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
M. Picotte: Vous avez mal compris. M. le ministre, je n'ai pas
dit qu'on n'avait pas quorum, j'ai dit de ne pas le vanter, on en a onze de
moins depuis que la vantardise a été faite, tantôt.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Maskinongé, à l'ordre!
M. Duhaime: Avec une course au leadership comme celle-là,
vous n'avez pas grand-chance de passer votre homme.
M. Proulx: M. le Président, question de règlement.
Est-ce que le député pourrait laisser son collègue
s'exprimer, s'il vous plaît?
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Mont-Royal.
M. Picotte: C'est avec plaisir, je sais que cela ne changera
rien, vous ne comprendrez pas plus.
M. Ciaccia: C'est pire qu'une maternelle!
M. le Président, de plus je disais que le gouvernement n'a pas
examiné les besoins réels de l'économie du Québec
pour l'avenir. Notre économie est en train de changer ses structures et
les structures industrielles, pour l'avenir, doivent être
réexaminées. Ce n'est pas en nationalisant une industrie ou en
investissant dans la compagnie Asbestos que nous allons remédier aux
problèmes qui existent dans notre économie. Ce peut être un
palliatif temporaire, mais cela n'attaque pas les problèmes réels
de notre économie.
Nulle part on ne voit le gouvernement qui examine et qui nous donne un
programme pour atteindre les objectifs et résoudre les problèmes
que notre économie subit maintenant. Alors, en promouvant ce projet de
loi de l'achat de cette compagnie, de l'achat de cette usine, de la
façon qu'il le fait, je dirais que c'est une décision
irresponsable du gouvernement. (17 h 40)
Voyons la rentabilité fiscale. On a dit qu'il faudrait regarder
deux aspects, la rentabilité fiscale et la rentabilité sociale,
même si je veux utiliser les termes et les objectifs du gouvernement
même, examiner les raisons du gouvernement pour lesquelles il a introduit
ce projet de loi.
Durant le débat, mes collègues et d'autres de la Chambre
ont démontré que la façon dont cet achat se produit, ou se
produira, est un quasi-désastre au niveau financier.
Premièrement, à cause de l'incompétence avec laquelle le
gouvernement a procédé. On annonce qu'on va nationaliser, qu'on
va acheter et, naturellement, les actions augmentent d'une façon
artificielle, à cause de l'annonce du gouvernement d'acquérir
cette compagnie. Deuxièmement, c'est un désastre financier,
à cause de la nature même de la compagnie, de la nature même
de l'industrie.
Quant à la première raison, l'incompétence du
gouvernement, je n'ai pas besoin de rappeler à la Chambre, tous les
faits que mes collègues ont soulignés pour expliquer pourquoi les
actions ont augmenté. On ne nous a pas montré les études
du marché pour l'avenir. Où sont-elles ces études? Des
études approfondies, pour démontrer que c'était une
entreprise qu'il valait vraiment la peine d'acheter et d'acquérir par le
gouvernement.
On ne nous a pas donné les projections du bilan de l'avenir
considérant le marché, considérant les coûts
additionnels pour faire fonctionner la compagnie sur une base modèle.
Les seules conclusions qu'on peut tirer en examinant la façon dans
laquelle le gouvernement procède, c'est qu'on a l'impression que la
compagnie General Dynamics est très désireuse d'acquérir
les actions d'Asbestos Corporation. Ce n'est pas une manière dont nous
pouvons être fiers, la façon dont le gouvernement a
procédé; ce n'est pas un bon exemple et c'est une manière
que je pourrais dire un peu amateur de dépenser les deniers publics.
De plus, la nature même de l'industrie de l'amiante. C'est une
autre raison pour laquelle le gouvernement pourrait procéder d'une autre
façon pour arriver à ses objectifs. On le sait tous que l'amiante
est considéré comme une substance dangereuse, un produit
dangereux. Il y a beaucoup de recherches aux Etats-Unis et en Europe, où
sont nos marchés principaux, pour essayer de trouver un remplacement
pour ce produit et, malgré cela, le gouvernement veut acquérir
cette compagnie, cette usine, à un prix qui, sur le marché, a
augmenté d'une façon déraisonnable.
La nature même du produit va amener un déclin, une
réduction dans la demande. Il y a beaucoup de mes collègues qui
ont apporté des statistiques. Nous voyons déjà qu'il y a
une tendance vers l'utilisation d'autres substances, d'autres produits,
où cela est possible, pour remplacer le produit de l'amiante. Alors,
déjà le marché est en déclin.
Quant à la question de la transformation, il y a aussi des
contraintes de distance, d'utilisation et de règlements de gouvernements
dans d'autres pays. Le gouvernement ne nous a pas donné ces
études; il ne les a pas portées à notre attention. La
deuxième raison, c'est que la nature même de l'industrie, de la
compagnie nous porte à dire que ce n'est pas avantageux pour nous
d'acquérir cette usine.
M. le Président, le gouvernement a le devoir d'informer le
public. C'est trop facile de se fier sur nos richesses naturelles pour apporter
des richesses matérielles à la province sans donner les vraies
contraintes. Par exemple, le gouvernement nous dit, sur la question de
l'hydroélectricité: Nous avons l'énergie
électrique, alors nous pouvons nous fier sur tous ces produits, sur
toute cette richesse pour rencontrer les besoins que la population aura. Ils ne
nous disent pas l'autre côté de la médaille. Ils ne nous
disent pas les contraintes, les aspects négatifs. Nous faisons face au
même phénomène où on nous montre seulement un
côté de la médaille d'une façon symbolique, pas tout
à fait réaliste.
M. le Président, si on considère les aspects financiers,
le bilan financier, si on se limite seulement à cet aspect, le
gouvernement n'a pas démontré que l'achat de cette compagnie sera
dans l'intérêt du Québec et même les études et
les tendances au déclin du marché de ce produit nous montrent
l'inverse. Si nous faisons l'équilibre entre la rentabilité
fiscale et la rentabilité sociale, nous allons voir qu'il n'y a pas
assez d'avantages pour nous d'acquérir cette compagnie.
Regardons un moment la rentabilité sociale. Pour juger de la
rentabilité sociale, nous devons regarder deux éléments.
Premièrement, il y a l'élément de l'amélioration
des conditions de travail pour les ouvriers de cette industrie.
Deuxièmement, il y a la création de quelque 25 000 emplois je
crois, dans l'industrie de la transformation. C'est le chiffre que le ministre
des Richesses naturelles a employé Quant à la première
raison, l'amélioration des conditions de travail, ce n'est pas
nécessaire, inutile de le dire, d'acquérir la compagnie pour
l'obliger à améliorer les conditions de travail afin qu'il n'y
ait plus les mêmes problèmes que nous avons vus dans le
passé.
Je pourrais même demander au ministre de l'environnement si,
premièrement, il a imposé certaines contraintes ou obligations
à la compagnie pour répondre à certaines normes minimales
pour assurer que les injustices ou les difficultés du passé
soient corrigées. S'il les a imposées, à quel coût
cela va être pour la compagnie? C'est un élément qui doit
être analysé par le gouvernement s'il va acquérir cette
compagnie. Au niveau de l'amélioration des conditions de travail, je
dirais que c'est absolument inutile d'essayer d'acquérir la compagnie
pour avoir cet avantage social. La responsabilité sociale de la
compagnie est là. Il s'agit, pour le gouvernement, de l'imposer et de
s'assurer que la compagnie se conforme aux normes minimales.
Deuxièmement, il y a la question dont on parle beaucoup, soit la
transformation. D'autres études, d'autres intervenants ont
démontré que, pour augmenter la transformation de ce produit au
Québec, il n'est pas nécessaire d'acquérir l'usine et la
mine d'Asbestos Corporation. Il y a d'autres façons de le faire. Il y
aurait des réglementations. La province a le droit, comme ils le font en
Ontario dans d'autres industries, d'imposer une certaine taxe pour s'assurer
qu'un minimum du produit de l'amiante soit transformé au Québec.
(17 h 50)
Si le gouvernement a ce pouvoir, on peut se demander pourquoi
acquérir une compagnie pour obliger une transformation.
Premièrement, nous avons la demande qui est en déclin.
Deuxièmement, nous avons d'autres moyens d'obliger que la transformation
de ces produits se fasse au Québec. Cela ne nécessiterait pas cet
investissement de tant de fonds du public.
A un autre niveau, si on compare la performance des
sociétés d'Etat avec celle des sociétés
privées, nous voyons qu'il n'y a quasiment pas de comparaisons à
faire. Nous en voyons des exemples non seulement au Québec, mais dans
d'au- tres endroits. A moins que ce soit une société comme
l'Hydro-Québec où il y a un monopole, où il y a des
raisons tout à fait spécifiques, où la façon par
laquelle la nationalisation a eu lieu était totalement
différente, le gouvernement devrait être plus prudent en
créant une autre société d'Etat quand il y a d'autres
moyens, des lois déjà existantes, des incitations qui pourraient
encourager la transformation du produit au Québec.
Si on regarde la rentabilité sociale et fiscale, on en vient
à une seule conclusion. Ce n'est pas dans l'intérêt du
Québec de dépenser tout ce montant d'argent provenant des fonds
publics pour le genre de bénéfice que le gouvernement
espère en tirer.
Si on regarde la question des besoins industriels du Québec pour
l'avenir, c'est un problème que le gouvernement ne semble pas avoir
attaqué, pas avoir étudié. Il ne semble pas avoir de
programme pour répondre à ces besoins. Par exemple, nous savons
que beaucoup d'industries au Québec sont appelées à
disparaître à cause de la concurrence mondiale parce que les
coûts de production vont être moindres dans d'autres pays du
tiers-monde, parce qu'il y aura différentes structures industrielles qui
vont s'implanter dans d'autres endroits.
Il faudrait que le gouvernement s'attaque à ce problème,
c'est vraiment le vrai défi auquel le gouvernement aura à faire
face. Ce n'est pas seulement une mesure intérimaire de l'achat d'une
compagnie dans une industrie qu'on pourrait qualifier de discutable. Ce serait
un plus grand défi que de voir à nos priorités
économiques, d'avoir une planification du gouvernement pour nous
préparer à la transition, à un autre genre d'industrie qui
ne sera pas menacée par la concurrence des pays du tiers-monde où
le coût de production, le niveau de vie est plus bas, où on peut
nous fournir ces produits d'une façon que nous ne pouvons pas
concurrencer.
M. le Président, je crois que le gouvernement a le devoir de
montrer un leadership dans ce processus de recherche et d'incitation pour
chercher, pour trouver les différentes structures nécessaires
à notre économie afin de faire vraiment face à nos
problèmes
J'ai clairement l'impression que le geste du gouvernement par le projet
de loi 70, en se portant acquéreur de la compagnie d'amiante, c'est un
investissement qui aurait dû être fait dans le passé. C'est
dans le passé que certains gestes auraient dû être
posés par le gouvernement.
Le Président: Puis-je vous demander de conclure, M. le
député de Mont-Royal?
M. Ciaccia: M. le Président, en conclusion, je vais dire
que le geste du gouvernement, le projet de loi 70, c'est un investissement
digne du passé.
J'aurais aimé que ce gouvernement, qui se dit soucieux de
l'avenir des Québécois, nous donne plutôt un programme
économique qui aurait démontré qu'ils sont plutôt
intéressés à investir dans l'économie de l'avenir
et dans les entreprises de
l'avenir et non pas dans les entreprises et les injustices du
passé.
M. Gérard Gosselin
M. Gosselin: M. le Président, vous me permettrez
d'intervenir quelques instants à peine dans ce long...
Le Président: M. le député de Sherbrooke,
vous avez la parole.
M. Gosselin: ... et fastidieux débat, permettez-moi de le
dire, qui donne lieu à toutes sortes de formes d'étalage depuis
déjà plus de deux semaines, alors que depuis des années
nous aurions dû agir. Les populations des Cantons de l'Est, de la
région de l'Estrie et de l'Amiante attendent avec impatience de tous les
gouvernements qui se sont succédé, ont plaidé au cours des
années, par la voix de leurs corps intermédiaires, à tous
les ans, à chaque visite ministérielle qui a été
effectuée dans les régions, pour l'implication gouvernementale
ferme dans le dossier de l'amiante; allant jusqu'à la nationalisation.
Voilà que notre gouvernement a décidé de procéder.
Cela fait près d'un an et demi que nous sommes au pouvoir. Il n'est pas
trop tôt pour donner suite à cet engagement.
Pour nous, dans la région de l'Estrie, l'amiante
représente à certains égards la seule alternative de
développement sérieuse. A l'heure où notre industrie
secondaire est en déclin. Pour nous, l'amiante, c'est plus qu'un
symbole. C'est une chance fondamentale d'assurer un développement
continu et d'éviter l'exode de nos travailleurs. La loi 70 est donc
vivement attendue. La loi 70, après toutes les consultations que j'ai pu
faire, les rencontres que j'ai pu avoir, d'une part, avec les chercheurs du
milieu, mais aussi avec les gens qui, depuis quelques années, oeuvrent
dans le secteur de la transformation de l'amiante, et j'aimerais signaler,
à cet égard, la compagnie Amiante de Sherbrooke, qui fabrique des
textiles d'amiante, chez tous les intervenants du milieu donc, je
considère que le projet de loi no 70 fait actuellement consensus.
On s'attendait, depuis longtemps, à une intervention
gouvernementale. Le gouvernement a ex- pliqué pourquoi il intervenait
avec la nationalisation ou l'achat de l'Asbestos Corporation. Les gens ont
compris. Il est important que nous puissions agir dans les meilleurs
délais. Simultanément, nous sommes prêts. Nous avons en
place les structures de recherche depuis déjà plusieurs
années. Principalement, je voudrais signaler le fait que notre
faculté de médecine, notre centre de recherche universitaire, sur
cette question délicate de la santé au travail, commence à
travailler très ferme pour déjouer finalement tous les arguments
contraires à la fibre d'amiante, à l'industrialisation de
l'amiante qui sont cause de la mauvaise réputation que l'amiante a pu
avoir dans certains milieux. Ces recherches donnent déjà des
résultats intéressants. Si vous me permettez une
prédiction, c'est que notre milieu, la région de l'Estrie,
Sherbrooke principalement, devrait devenir dans les prochaines années,
avec la politique ferme que le gouvernement s'apprête à adopter,
un lieu pilote où des chercheurs des Etats-Unis et même
d'Allemagne viendront s'inspirer pour moderniser la transformation de
l'amiante, pour puiser des idées sur les nouveaux produits qu'on
s'apprête, par la politique prospective que le gouvernement a entreprise,
à lancer sur le marché. (18 heures)
C'est un plan laborieux. Il faut le commencer immédiatement.
J'espère fermement pour la région de l'Estrie qu'on aura une
action concertée des divers ministères concernés,
Transports, Industrie et Commerce, Richesses naturelles, en vue de vraiment
libérer dans un milieu comme le nôtre, parce que nous nous sentons
un titre de propriété sur l'amiante, l'argent et le dynamisme
nécessaires à un véritable développement
d'entreprises secondaires dans le secteur névralgique de l'amiante.
Merci.
M. Clair: Je propose l'ajournement du débat.
Le Président: M. le député de Drummond.
L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 heures ou 20 h 15, M.
le leader?
M. Burns: 20 heures. Le Président: Jusqu'à
20 heures. (Suspension de la séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 7
Le Vice-Président: A l'ordre, messieurs! M. le
député de Drummond avait demandé la suspension du
débat, et je le reconnais.
M. Michel Clair
M. Clair: Merci, M. le Président. La première
question qu'on se pose dans le débat sur l'amiante c'est bel et bien
celle-ci: Quel est le but poursuivi par le gouvernement du Québec? De
façon générale, je pense que le but est accepté et
compris par tous, c'est simplement de transformer au Québec la fibre qui
peut être traitée de façon rentable. Là où on
ne s'entend pas, cependant, avec les partis d'Opposition dans cette Chambre,
c'est sur les moyens à utiliser pour atteindre ce but.
Le premier moyen utilisé pour atteindre le but en vertu du projet
de loi no 70 c'est celui de la création de la Société
nationale de l'amiante pour investir seul ou conjointement dans la
transformation aussi bien que dans l'extraction de l'amiante. Le
deuxième moyen, vous le connaissez, c'est la création d'un centre
de recherche et de développement chargé de faire la recherche
pour de nouveaux produits et également de l'aspect santé et
sécurité au travail dans le secteur de l'extraction aussi bien
que de la transformation de l'amiante. Le troisième moyen proposé
par le gouvernement actuel c'est celui de l'achat d'une mine pour assurer une
présence immédiate à tous les stades industriels du
secteur de l'amiante, la conséquence logique étant l'achat de
l'Asbestos Corporation, comme d'autres avant moi l'ont déjà
démontré.
Face à ces propositions, à ces trois principes, ces trois
moyens, quelle est l'attitude de l'Opposition dans le présent
débat? Elle pourrait se résumer en trois mots: On est contre les
moyens utilisés. Rien de plus, M. le Président. Quelle est la
suggestion concrète, quelles sont les suggestions concrètes
qu'ont faites les partis d'Opposition au cours de ce débat? Aucune, M.
le Président, à l'exception peut-être du chef de l'Union
Nationale qui nous a proposé une taxe qui rapporterait, selon lui, de
$10 millions à $13 millions. Je constate effectivement, comme mes
collègues me le font remarquer, qu'aucun membre de l'Union Nationale
n'est présent; ce serait un compliment pour eux parce que, finalement,
c'est vrai, il y a seulement l'Union Nationale qui a osé avancer une
suggestion concrète. On a dit qu'on était contre, on a
dénigré les sociétés d'Etat, de la première
à la dernière, mais une suggestion concrète, aucune,
à l'exception de celle du chef de l'Union Nationale qui propose une
taxe.
Je m'attendais à ce qu'il propose peut-être qu'on loue les
mines d'amiante cela ferait moins mal aux entreprises privées
mais ce n'est pas ce qu'il a proposé. Il a proposé une
taxe. Comme il n'a pas précisé, on peut regarder deux genres de
taxes qui ont été analysées par le Conseil régional
de développement de l'Estrie qui, encore une fois, a constitué un
comité qui a présenté un rapport, lequel rapport est
signé par l'Association de l'Union Nationale du comté de
Richmond. Le leader parlementaire du Parti libéral serait sûrement
intéressé à savoir que l'Association libérale du
comté de Richmond est également signataire du document en
question. (20 h 10)
Qu'est-ce qu'on y dit concernant la possibilité dont nous a
parlé le chef de l'Union Nationale: taxe à la production et
subvention à la transformation? On y lit ce qui suit: "Taxer la
production et subventionner les entreprises de transformation ne constituerait
rien de plus qu'une variation sur un thème déjà connu.
Cette politique existe déjà en pratique. Le Québec
perçoit des droits miniers qui constituent une forme de taxe sur la
production et tout nouvel établissement industriel dans la
transformation de l'amiante est assuré de jouir de subventions
gouvernementales. Il est douteux qu'une variation dans l'intensité de
ces mesures puisse modifier la situation de façon
appréciable."
Voyons maintenant la possibilité d'une taxe à
l'exportation, ce que cela donne. On y dit: "Là encore, toutefois, bien
que les effets d'une telle taxe à l'exportation puissent être
bénéfiques, ce type d'intervention demeure très passif, et
il n'est pas acquis au départ que l'on puisse fixer des tarifs
réalistes puisque les connaissances concernant les prix
véritables et les marchés dans le domaine de l'amiante nous
échapperaient toujours."
Encore une fois, tout ce que l'Opposition a fait dans ce débat,
c'est dénigrer les sociétés d'Etat qu'elle a
généralement bien souvent elle-même mises en place, et par
conséquent diminuer collectivement les Québécois et
diminuer de façon générale les initiatives
gouvernementales dans la reprise en main de leurs affaires par les
Québécois. Tout ce qu'on nous dit c'est: On est contre, on court
un risque immense, on court un risque de fous, on va se casser la gueule. Comme
si on n'avait jamais couru de risques au Québec, comme si on n'avait pas
non seulement le droit mais le devoir de calculer et de courir des risques.
C'est ce que je pense qu'on fait dans ce cas-ci.
M. Lavoie: Est-ce que le député de Drummond me
permettrait une question, bien gentiment?
M. Clair: Je voudrais utiliser tout mon temps pour mon
allocution. A la fin, si vous le permettez.
Bien sûr qu'il y a un risque dans le domaine de l'amiante.
Pourquoi? Simplement parce que dans toute action, il y a toujours un
risque.
Un risque cependant qu'on a calculé et que les partis de
l'Opposition, du temps qu'ils étaient au pouvoir, ont participé
également à calculer par toutes sortes d'études que nous a
exhibées le député de Vanier. Quand on veut une vraie
garantie, on fait ce que M. Bourassa nous proposait. On ne fait rien.
L'inaction. Voilà une garantie.
M. le Président, dans le domaine de l'amiante, contrairement
également à ce que le Parti libéral et l'Union Nationale
nous ont suggéré, notre atti-
tude n'en est pas une de vengeance. Elle ne vise pas les
multinationales. Elle ne mise qu'un but. soit celui de reprendre en main l'une
de nos richesses naturelles. Cette politique, je l'affirme, elle est polie,
ferme, tranquille, patiente. Elle est à l'image de notre peuple.
Nous n'avons ni peur, ni de complexe de notre passé, de notre
présent et de notre avenir, comme d'autres en cette Chambre; parce que
d'autres en cette Chambre ont peur de leur passé, de leur
présent, de leur avenir. Est-ce que ce n'est pas avoir peur de son
passé quand on regarde l'attitude du chef de l'Opposition officielle,
par rapport à son ancien collègue, le ministre des Richesses
naturelles? Le leader parlementaire de l'Opposition et le chef de l'Opposition
également tentent de faire mettre de côté la
possibilité que du temps du Parti libéral, où il
était au pouvoir, on a eu des idées semblables à celles
que le parti au pouvoir actuellement... On renie son passé, on en a
peur. Est-ce qu'on peut interpréter autrement le fait que le
député de Johnson et le député de Nicolet-Yamaska,
quand le député de Vanier leur cite la quantité
d'études qui ont été faites sur le sujet, aient peur du
passé, renient la valeur de ces études, et disent qu'on doit tout
recommencer, qu'on devrait continuer à étudier? Est-ce qu'on n'a
pas peur du passé, M. le Président, quand on voit les
colères du député de Johnson, quand on parle des mines de
fer de la Côte-Nord et de tout le dossier de SIDBEC?
Est-ce que ce serait vrai que ces partis, qui ont gouverné
pendant tant d'années le Québec l'ont fait, tenaillés par
la peur pendant tout le temps, n'ont jamais couru de risques calculés,de
décisions, de jugements qu'ils devaient porter sur des situations? Non,
ce n'est pas vrai, M. le Président. Ces gens ont couru des risques
calculés, eux aussi. La seule raison pour laquelle ils attaquent
aujourd'hui comme ils le font, ils dénigrent comme ils le font les
sociétés d'Etat, ce n'est que pour un but, celui de retarder
l'accès à la souveraineté du Québec. Ils savent que
la souveraineté du Québec, finalement, c'est la reprise en main
des Québécois de leurs intérêts et de leurs
richesses naturelles.
Ce n'est pas tout, M. le Président. Ils n'ont pas seulement peur
du passé, ils ont peur du présent. Que de mépris n'a-t-on
pas exprimés pendant ce débat envers les sociétés
d'Etat, la malheureuse SIDBEC! Le député de Huntingdon nous a dit
que SIDBEC était un monstre. Je pourrais donner rapidement quelques
citations. Par exemple, le chef de l'Union Nationale a dit: "On a eu l'exemple,
l'an dernier, M. le Président, de la société SIDBEC,
entreprise d'Etat administrée par des gens qui pensent bien
administrer". Un autre intervenant nous dit: "L'initiative gouvernementale
n'est finalement que du socialisme, du communisme". On nous parle des
échecs de SIDBEC. On essaie de dire que SIDBEC a complètement
manqué à son mandat. Est-ce vrai, M. le Président, que
SIDBEC est un monstre, comme l'ont affirmé d'autres
députés en cette Chambre? On a parlé de citrons. On a dit
que REXFOR, SOGEFOR, SOQUIP, SOQUEM et les autres entreprises de l'Etat ont
manqué leur but. On a tout dit, M. le Président, dans ce
débat pour dénigrer les sociétés d'Etat. On a dit
qu'elles étaient inefficaces, coûteuses, non rentables. On a
jeté tous les blâmes sur les sociétés d'Etat.
Est-il vrai, M. le Président, que les administrateurs de SIDBEC,
de SOGEFOR, de SOQUEM, de REXFOR et de toutes les sociétés d'Etat
sont des mauvais gestionnaires, sont des irresponsables, des gaspilleurs, des
pas bons, que les travailleurs de SIDBEC, encore une fois, et des autres
entreprises étatiques sont des travailleurs incompétents,
surpayés? Est-ce qu'on devrait vendre SIDBEC aux étrangers, aux
Ontariens comme d'autres ont fait de leurs fonderies au Québec? Est-ce
vrai que toute cette amorce, comme l'a dit un député de cette
Chambre, d'entreprises socialistes a été une erreur, que les gens
du marketing de ces entreprises sont des incompétents qui ont
manqué à leur mandat? Non, M. le Président.
M. Russell: Je veux simplement soulever un point d'ordre, M. le
Président.
Le Vice-Président: A l'ordre! Un instant.
M. Russell: J'aimerais que vous portiez attention au terrain sur
lequel le député nous entraîne. Peut-être que
quelqu'un de l'Opposition sera obligé de lui répondre sur le
même terrain. J'aimerais qu'on ait le même privilège.
Le Vice-Président: M. le député de
Drummond.
M. Clair: M. le Président, à toutes ces questions
qu'on peut se poser à partir du dénigrement qu'ont fait les
partis de l'Opposition à l'égard des sociétés
d'Etat, je réponds: Non, ce n'est pas vrai que les
sociétés d'Etat ont toutes manqué à leurs buts et
objectifs.
La première chose dont on doit tenir compte dans
l'évaluation du mandat de la réussite des sociétés
d'Etat, c'est non pas, comme dans le cas d'une PME, du rendement sur le
capital, mais c'est plutôt, comme l'a dit une étude des Hautes
études commerciales de l'Université de Montréal, de ce qui
suit la citation est comprise dans le document qui a été
publié par l'OPDQ concernant les sociétés d'Etat et les
objectifs économiques du Québec.
On y lit ce qui suit: "La gestion de l'entreprise publique ne peut
s'apprécier dans le cadre de la comptabilité traditionnelle, qui
débouche sur la notion de rentabilité du capital, mais
plutôt en termes d'analyse du coûts bénéfices, en
tenant compte des bénéfices qu'on pourrait appeler marginaux,
dans un sens différent de celui qu'on entend
généralement".
D'ailleurs, c'est l'ancien ministre des Finances, le
député de Jean-Talon qui disait, le 18 juillet 1974, au moment
où il défendait un projet de loi sur SIDBEC, et je cite: "En
conclusion, M. le Président, je soumets que le gouvernement a pris la
bonne décision en favorisant l'expansion de SIDBEC. Nous mettons nos
théories en pratique et
démontrons notre désir très ferme de favoriser la
transformation au Québec de nos ressources naturelles. SOQUEM, SOQUIP,
REXFOR, l'Hydro-Québec et d'autres jouent déjà un
rôle stratégique dans des secteurs déterminés ". (20
h 20)
M. le Président, c'est l'ancien ministre qui nous dit que les
sociétés d'Etat n'ont pas toutes manqué à leur
mandat. Alors, je réponds non à la question de savoir si elles
ont toutes manqué à leur mandat. Cependant, on peut se demander
si d'autres, par ailleurs, n'ont pas manqué à leurs obligations.
Je voudrais vous citer un extrait du journal la Gazette, du 13 décembre
1973, concernant le monstre SIDBEC dont nous parlait le député de
Huntingdon. On y lit ce qui suit: "Selon certains observateurs, le gouvernement
on est en 1973 a créé des difficultés
additionnelles pour SIDBEC en fournissant de l'aide financière à
ses concurrents. Ainsi, le gouvernement a participé
financièrement à l'établissement d'une nouvelle usine de
Stelco, à Contrecoeur, et à la construction d'installations
manufacturières de la Québec Steel, à Longueuil. Dans ce
dernier cas, les subsides fédéraux et provinciaux ont
assuré près de la moitié des coûts de construction
de l'usine. Si ces allégations s'avèrent fondées, le
gouvernement devrait s'efforcer de donner une plus grande cohérence
à ses interventions économiques mais, surtout, au niveau des
subventions aux entreprises". Les pas bons, M. le Président, ils ne nous
disent pas, là-dedans, que ce sont les administrateurs de SIDBEC, les
administrateurs des sociétés d'Etat, ils nous disent que c'est le
gouvernement de l'époque.
Prenons un deuxième exemple, SOQUIP, dans le même rapport
publié par l'OPDQ. On y lit, à la page 136: "En conclusion, la
SOQUIP est un bon exemple d'une société dont le
développement a été compromis par l'incohérence des
politiques-gouvernementales et par le manque de concertation entre l'Etat et la
société. Dans le cas de la création d'un secteur
témoin, par exemple, il n'y a pas eu, depuis cinq ans, de concordance
entre les objectifs déclarés et la volonté effective du
gouvernement. Lors des négociations avec l'Arabie Saoudite sur la
question de la construction d'un port en eaux profondes, la SOQUIP n'a
même pas été consultée par le gouvernement".
M. le Président, à la question de savoir si ce sont les
sociétés d'Etat qui étaient des mauvais gestionnaires ou
si ce n'était pas plutôt les gouvernements qui devaient
présider à la prise des grandes décisions, on peut
répondre: Non, M. le Président. Ce ne sont pas les
administrateurs de SIDBEC et des autres sociétés d'Etat qui
étaient les pas bons. C'était le Parti libéral qui
gouvernait le Québec à cette époque. J'ajouterai un
dernier point sur ce sujet. Quand j'entends le député de
Huntingdon dire que SIDBEC est un monstre, je pense que les
sociétés d'Etat sont les enfants des partis, des gouvernements
qui les ont créées. Je me pose la question quant à savoir
si, le bébé étant un monstre, le père qui
était là à ce moment ne devait pas être monstrueux
un petit peu lui aussi.
M. le Président, je pense avoir démontré que
l'attitude des partis de l'Opposition dans ce dossier est une attitude de peur
du passé, de peur du présent; ce qui est encore plus grave, c'est
qu'ils ont même peur de l'avenir alors que ce n'est même pas eux
qui ont à l'assumer actuellement comme gouvernement. Que n'a-t-on pas
entendu de ces prophètes de malheur, M. le Président! Combien de
sombres prédictions nous a-t-on faites? On nous a dit qu'on perdrait nos
élections. On a projeté tant et plus du côté de
l'Opposition notre incapacité dans la projection justement de l'avenir
la Société nationale de l'amiante. On a diminué tous les
administrateurs qui iront administrer demain la Société nationale
de l'amiante en disant, comme l'a fait le chef de l'Opposition: Cela va
être juste une couple de candidats péquistes qui ont manqué
leurs élections. Cela va être truffé de péquistes,
cela va être une gang de pas bons.
On cherche à démobiliser les travailleurs. On a
lancé 56 sortilèges contre l'avenir de la Société
nationale de l'amiante. On a peur de l'avenir du côté de
l'Opposition. Est-il vrai que les Québécois, si on se fie
à ces affirmations, ne pourront jamais être propriétaires
de leurs mines d'amiante; que ces terres, ces mines qui pourraient être
les nôtres, ne le seront jamais que pour nous porter malheur, M. le
Président? Est-il vrai qu'on pourra louer, taxer, emprunter, supplier,
menacer, mais qu'on ne pourra jamais acheter nos terres, jamais devenir
propriétaires de nos richesses naturelles? Est-il vrai que la fibre
d'amiante qu'on a dans notre sol québécois ne sera jamais assez
longue, assez rare, que le filon ne sera jamais assez important, le
marché assez sûr, pour qu'on n'ose jamais s'impliquer directement,
collectivement dans la transformation de l'amiante?
Est-il vrai, M. le Président, que les administrateurs, nos
chercheurs québécois ne bâtiront le secteur de
transformation de l'amiante qu'on voudrait tous tant voir naître, qu'ils
gâcheront tout alors que nous aurons payé sans hargne le juste
prix et, de plus, un lourd tribut en sacrifices et en humiliations de toutes
sortes?
Est-ce vrai que ceux qui dirigeront SONAM, le centre de recherche, le
bureau de l'amiante seront tous complexés, qu'ils auront tous le
complexe de l'incapable, du colonisé, de l'incompétent qu'ont
cultivé chez nous les colonisateurs et nos dominateurs, qu'ils
accumuleront gaffe par-dessus gaffe, erreur par-dessus erreur, pour finir par
aller en faillite ou encore avoir à se donner aux Américains ou
aux étrangers? Est-ce vrai que les Québécois auront
toujours peur? Non, M. le Président. Les Québécois, aussi
bien que les mineurs de l'amiante, n'ont plus peur. Les craintes de
l'impuissance, nous les avons toutes eues. Nous avons dormi avec toutes les
peurs du colonisé. Nous avons fait tous les cauchemars
préparés par d'autres, tous les cauchemars du locataire qui a
peur de se faire expulser de sa propre maison.
Non, les Québécois n'ont pas peur de l'avenir. Ils sont
prêts. Ils sont capables d'acheter leurs mines d'amiante. Ils sont
capables de les gérer, de les développer, de transformer
l'amiante, de s'associer avec les multinationales. Je suis convaincu
qu'ils sont capables, en un mot, de faire naître le secteur de
transformation que tous les Québécois attendent.
M. le Président, je terminerai sur ces mots: L'amiante nous
appartient.
Le Vice-Président: M. le député de Verdun.
M. Caron: M. le Président...
M. Lavoie: Ma question, je pourrais vous la poser: N'est-il pas
vrai que ce n'est pas la première fois que les Canadiens français
courent des risques? Ils en ont couru un le 15 novembre et vous voyez dans quel
pétrin on est actuellement.
C'est là ma question.
M. Clair: M. le Président, je voudrais juste rappeler au
leader du Parti libéral que ce qu'ils nous proposaient, eux, c'est vrai
que c'était une garantie, c'était la garantie de l'inaction.
Des Voix: Bravo!
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Verdun, vous disposez de vingt minutes à compter
du moment présent.
M. Lucien Caron
M. Caron: M. le Président, je vous remercie de me donner
l'occasion de m'adresser aux membres de cette Chambre sur le projet de loi no
70, un projet de loi qui met en cause un des secteurs industriels les plus
importants du Québec.
Vous me connaissez, je n'ai pas l'habitude de mâcher mes mots.
Quand le gouvernement pose des gestes positifs pour le Québec, je
n'hésite pas à l'encourager, mais, aujourd'hui, il est de mon
devoir de supplier le gouvernement de ne pas se lancer dans l'aventure avec un
projet de loi dont on peut déjà imaginer les conséquences
graves s'il est adopté. Car, disons-le, cette Société
nationale de l'amiante, c est une aventure de plus que le gouvernement s'offre
au même titre que l'assurance automobile. C'est l'aventure d'un
gouvernement interventionniste, d'un gouvernement qui veut mettre l'Etat
partout, d'un gouvernement qui va à l'encontre de l'opinion publique,
car, c'est clair, un sondage l'a même prouvé l'automne dernier,
64% des gens de la région de l'amiante estiment que le gouvernement
devrait laisser l'initiative du développement de cette industrie aux
compagnies privées.
Pour qui se prend donc le gouvernement pé-quiste pour trahir les
voeux de ceux-là mêmes qui sont les premiers concernés par
le développement de leur région? Pour qui le gouvernement est-il
si désireux de perdre toute crédibilité auprès de
la population? Il devrait songer plus sérieusement à sa baisse de
popularité et au dernier sondage que son parti a fait en janvier et en
février qui donne les libéraux en avant à 43% contre 41%
pour le Parti québécois. Oui, c'est vrai et souvent je le dis: Je
ne vous haïs pas, les gars d'en face. Je vous le dis parce que j'ai
vécu cela, moi aussi.
M. Jolivet: "Filibuster ".
M. Caron: Un gars qui se fait écouter par certains
ministres qui avaient la vérité, même votre ministre
diplômé de l'université, c'est bien important. Et
j'écoutais parce qu'on disait...
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît, M. le député de Verdun, revenez à
la pertinence du débat, s'il vous plaît! (20 h 30)
M. Caron: Je veux y revenir, mais avant, c'est très
important, je veux rendre service à mes bons amis d'en face. Je l'ai
fait, M. le Président, dans le passé et je ne les haïs pas,
ces gars-là. C'est pour cela que je veux encore les aider. Vous
êtes dans le " poolroom ' comme moi je l'ai été de 1966
à 1970.
Le Président suppléant (M. Laplante):
Voulez-vous revenir, s'il vous plaît, à la pertinence du
débat, M. le député de Verdun?
M. Caron: M. le Président, je veux leur rendre service
encore, mais, de jour en jour, cela diminue. Je l'ai dit l'an passé, au
moment où j'intervenais; je vous disais que votre cote descendait et on
l'a vu en fin de semaine. Cela a l'air que cela va continuer.
Alors, tâchez de convaincre vos ministres d'être prudents.
Je parle en tant qu'homme d'affaires, un gars qui a les deux pieds sur la
terre. Vous autres, les gars du "poolroom", vous avez les pieds sur la terre.
Mais des fois, les grands penseurs en avant...
Le Président suppléant (M. Laplante): S'il vous
plaît!
M. Caron: Alors, M. le Président, je disais: C'est
l'aventure d'un gouvernement interventionniste, d'un gouvernement qui veut
mettre l'Etat partout, d'un gouvernement qui va à l'encontre de
l'opinion publique, car, c'est clair, un sondage l'a même prouvé
l'automne dernier je vous le disais tout à l'heure 64% des
gens de l'amiante...
Une Voix: Cela a déjà été dit.
M. Chevrette: Vous vous êtes trompé de paragraphe
là; lisez deux paragraphes plus bas.
M. Caron: M. le Président...
Le Président suppléant (M. Laplante): S'il vous
plaît!
M. Lamontagne: Je pense que le jeune député de
Joliette n'a pas de leçons à donner au député de
Verdun.
M. Chevrette: Je peux t'en donner une, toi.
M. Lamontagne: D'abord, prenez votre siège, vous
êtes déjà intervenu et laissez le député de
Verdun intervenir.
M. Chevrette: Si je n'en ai pas à donner, lui non
plus.
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît, M. le député de Joliette. A l'ordre!
M. Chevrette: Surtout pas de vous. N'enlevez pas vos verres, je
vous vois.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Verdun.
M. Caron: M. le Président, je disais: Le gouvernement
est-il si désireux sérieux de perdre toute
crédibilité auprès de la population? Il devrait songer
plus sérieusement à sa baisse de popularité et c'est
très important. Comme je vous l'ai dit, j'ai vécu cela. Vous vous
laissez influencer. Ne vous laissez pas influencer, les "back-benchers". Ils
feront encore plus mal si vous laissez passer ce projet de loi. Que
dévoilent ces chiffres, sinon un mécontentement
généralisé contre les aventures successives du Parti
québécois dont la création de la Société
nationale de l'amiante est une autre preuve.
Je veux poser plusieurs questions au gouvernement aujourd'hui et je lui
demande de bien les noter car les Québécois vous noteront
bientôt sur le tableau noir. Combien coûtera cette nouvelle
aventure du Parti québécois? Quel sera le nouveau poids financier
que le Parti québécois fera peser sur les contribuables du
Québec? Avant de voter un tel projet de loi, il faut que le peuple en
sache bien le prix. Il est étrange que le ministre se soit refusé
jusqu'ici de donner le coût de cette intervention de l'Etat dans le
secteur de l'amiante. Il est également bizarre que l'on ne connaisse pas
encore le prix qu'est prêt à payer le gouvernement pour l'achat de
54,6% des actions détenues par la General Dynamic dans Asbestos
Corporation? Que le ministre nous avoue aujourd'hui, s'il en a le courage, que
le prix d'acquisition d'Asbestos Corporation sera de plus de $200 millions?
Qu'il nous dise qu'il sera obligé de payer plus de $100 l'action et
vraisemblablement près de $150 l'action, si la surenchère
continue! Qu'il dise la vérité sur les investissements futurs qui
nécessiteront que l'Etat québécois investisse pas moins de
$300 millions dans cette aventure pour atteindre ses objectifs de
transformation de l'amiante au Québec!
Voilà donc un beau lapin de $500 millions que le gouvernement
péquiste veut offrir aux Québécois pour Pâques.
C'est bientôt. Il faut réagir, à cela, et vite.
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît! Vous n'avez qu'à écouter, vous allez
comprendre!
M. Caron: L'Opposition officielle met en garde le gouvernement.
Il y a moyen de développer notre secteur de l'amiante sans que le
Québec prenne le contrôle d'Asbestos Corporation. Il n'est pas
nécessaire que le gouvernement péquiste s'érige une fois
de plus en entrepreneur pour développer l'amiante. Au lieu de consacrer
des sommes importantes en se faisant producteur d'amiante brut, le gouvernement
ne devrait-il pas plutôt s'impliquer dans la transformation de l'amiante,
avec le concours des compagnies privées?
Ce serait, à mon avis, commencer sur un bon pied. Et sans perdre
la tête aussi, ne serait-il pas mieux d'associer les capitaux publics aux
capitaux privés pour créer une société de
transformation de l'amiante qui effectuerait les recherches commerciales et qui
produirait...
M. de Belleval: M. le Président...
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Charlesbourg, vous voulez le laisser parler, s'il vous
plaît!
M. Caron: J'espère que vous contrôlez votre
Assemblée, M. le Président.
M. Lamontagne: J'ai toujours pensé que vous ne devriez pas
être président.
Le Président suppléant (M. Laplante): Je la
contrôle très bien, M. le député de Verdun.
M. Caron: Quand les autres ont parlé avant mon tour, je
les ai laissés parler. J'espère qu'on va me donner la chance de
dire au ministre et à ses collègues... Riez, c'est drôle.
Profitez-en mes amis, c'est vite passé. M. le Président, je vois
le ministre qui a un beau sourire. Il n'a pas vécu cela. Il est
arrivé dans un comté. Cela s'est fait parce qu'il y avait un vent
de changement dans le temps.
M. Chevrette: Hors du sujet.
M. Caron: Peut-être quinze jours, on se fait élire
et tout de suite on est nommé ministre. Il peut rire. Quand il vivra,
comme d'autres qui ont passé ici, des moments difficiles pour se faire
élire, il trouvera cela moins drôle le ministre, dans le temps.
Vous trouverez cela moins drôle. Riez. Vous allez vous ennuyer de cela,
une voiture, un chauffeur, toute la patente, la haute finance à certains
moments pour leur faire plaisir, enfin, profitez-en.
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Caron: II y aurait donc là, M. le Président,
pour une mise de fonds publics, une création d'emplois
intéressante, ce qui n'est pas le cas avec la politique actuelle.
Qu'attend le gouvernement péquiste je dis bien péquiste
pour nous avouer que les possibilités d'emplois nouveaux
résultant de son projet sont loin d'être impressionnantes?
Même à long terme, M. le Président, on serait très
loin du millier d'emplois nouveaux que le gouvernement tente de faire miroiter
aux yeux de la population. Il semble que cela pourrait être long. Le
ministre lui-même le laissait voir en octo-
bre dernier dans une déclaration au Devoir où il
mentionnait qu'on ne pourrait en dix ans transformer qu'environ 10% à
12% de la fibre d'amiante extraite au Québec.
M. le Président, qu'on me comprenne bien. Notre acharnement
contre le projet gouvernemental n'empêche pas notre volonté de
trouver des solutions justes et réalistes pour le développement
du secteur de l'amiante. D'abord, l'Opposition officielle est sensible aux
problèmes des 6500 travailleurs de l'amiante du Québec et
principalement de la salubrité de leurs lieux de travail. Les compagnies
minières et le gouvernement doivent accélérer leur
coopération pour améliorer, assainir les lieux de travail des
mineurs.
Le gouvernement doit également prendre conscience qu'il est
lié au contexte socio-économique de l'Amérique du Nord et
qu'il doit travailler avec le secteur privé pour le développement
du Québec et non pas... (20 h 40)
M. Jolivet: ... discours du budget.
M. Lamontagne: M. le Président, j'ai une directive
à vous demander. Avez-vous l'impression de remplir vos fonctions bien
fidèlement?
Le Président suppléant (M. Laplante): J'ai
l'impression de bien remplir mes fonctions.
M. Caron: ... et non pas...
Le Président suppléant (M. Laplante): Je
demanderais aux députés qui ne sont pas à leur
siège, d'aller occuper leur siège, s'il vous plaît, pour le
bon ordre de l'Assemblée nationale.
M. Lamontagne: La partisanerie, laissez-la de côté.
De toute façon, le député de Jonquière devrait
être là.
M. Lavoie: ... député de Jonquière.
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Lavoie: Soyez donc moins partisan!
M. Lamontagne: Quant à moi, le député de
Jonquière devrait aller présider.
Le Président suppléant (M. Laplante): A l'ordre,
s'il vous plaît! Si le député de Roberval a des remarques
à faire...
M. Lamontagne: Je ne partage pas l'opinion...
Le Président suppléant (M. Laplante): Si le
député de Roberval a des remarques à faire...
M. Lamontagne: J'ai bien confiance au député de
Jonquière.
Le Président suppléant (M. Laplante): Si le
député de Roberval a des remarques à faire, il sait
à qui s'adresser pour les faire. M. le député de Verdun,
s'il vous plaît.
M. Lamontagne: Rappelez à l'ordre vos collègues qui
ne respectent pas le droit de parole.
Le Président suppléant (M. Laplante): Je vous
rappelle à l'ordre, vous-même, M. le député de
Roberval. M. le député de Verdun.
M. Lamontagne: La partisanerie, c'est cela. Ce n'est jamais sur
ce fauteuil.
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Verdun.
M. Caron: M. le Président, cela ne me dérange pas
qu'il soit partisan ou non. Je serai encore ici, dans cette Chambre, à
la prochaine élection. Peut-être parmi eux, cela aura
été juste un petit voyage bien court.
Une Voix: Un "trip".
M. Caron: Oui, un petit "trip".
M. Jolivet: Ryan, qu'en faites-vous?
M. Caron: Ne vous inquiétez pas. Le choix que j'ai
décidé est un très bon choix.
Je disais donc, M. le Président, et non pas le reléguer
aux oubliettes et ainsi générer un climat de
démoralisation et d'incertitude chez les acteurs privés de notre
développement.
Ceci veut donc dire que le gouvernement doit poser des choix politiques
et économiques réalistes. Nous ne sommes pas à Cuba, nous
sommes au Québec, pour ceux qui l'auraient oublié.
Qu'espère le Québec en présentant ce projet de loi? Il
fait tout pour que le cartel de l'amiante consente des efforts massifs pour
aller ouvrir des mines ailleurs de façon à diversifier ses
sources d'approvisionnement. On serait alors dans de beaux draps et le
gouvernement porterait le blâme odieux du chômage qui en
résulterait. Il y a pourtant des solutions réalistes au
développement de notre amiante. J'en cite ici quelques exemples qui
pourraient être retenus. Abandonner le régime d'impôt minier
pour le remplacer par un système de "royautés "en pourcentage du
prix des ventes. Passer une loi pour imposer un certain pourcentage de
transformation sur place.
M. Bérubé: L'article 122 de la constitution vous
l'interdit.
M. Caron: Augmenter la consommation de l'amiante au Québec
et au Canada en utilisant de l'amiante-ciment dans la construction des
édifices publics.
M. de Belleval: Pourquoi ne lavez-vous pas fait?
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Charlesbourg, s'il vous plaît, un peu de
coopération.
M. Caron: II faut, en quelque sorte, stimuler et encourager, par
des mesures réalistes, le développement du secteur de l'amiante
au lieu de tout bousculer et d'entraîner un climat de panique
auprès des compagnies et aussi des travailleurs de l'amiante.
En conclusion, les contribuables québécois ne veulent pas
payer $500 millions pour la réalisation d'un beau rêve
péquiste qui, comme l'assurance automobile, suscitera la
réprobation de tout le monde. Les contribuables québécois
veulent plutôt que le gouvernement reste à sa place, stimule les
compagnies privées pour qu'ils accentuent le développement minier
en accord avec les intérêts québécois.
Les contribuables québécois font confiance au secteur
privé qui est en meilleure position pour favoriser la création de
nouveaux emplois, améliorer la productivité et contribuer
à la relance de l'économie dans le secteur de l'amiante.
Que le Parti québécois garde son éléphant
blanc dans ses tiroirs!
Une Voix: C'est la même chose. M. Charron: Les
Olympiques!
M. Caron: Le peuple a assez de digérer, pour le moment,
l'assurance automobile. Quand on se promène, je vous dis que les plaques
de cette année, on n'en voit pas énormément. Je ne sais
pas ce que le ministre des Transports va faire à la fin du mois. Il va
certainement être obligé de donner encore un autre mois pour se
donner une chance, pour essayer de se faire du capital politique.
Les taxes sur les vêtements d'enfant, les $40 millions de contrats
de recherche donnés "sous le bras " à des petits amis du parti.
Vous avez appris cela vite. On voit cela aux engagements financiers, oui. Cela
fait mal, par exemple. Dans les comtés, je vous assure que les gens
voient cela et, ne vous en faites pas, on va avoir hâte à la
prochaine!
Alors, le gouvernement a décidé de plonger tête
baissée dans ce secteur de l'amiante sans plan de développement
précis pour cette industrie. Le gouvernement plonge dans un grand lac
où il ne sait pas nager, mais ceux qui feront les frais de son aventure,
ceux qu'on jette à l'eau, hélas, ce sont les contribuables
québécois qui risquent de payer la note à la fin. C'est
pourquoi l'Opposition officielle se battra jusqu'au bout contre cette aventure
de la société péquiste de l'amiante. L'Opposition
dénoncera le manque de préparation, l'incrédulité
du gouvernement; elle fera la preuve que le développement du secteur de
l'amiante n'a pas besoin de l'Etat pour prendre son essor. Merci, M. le
Président.
Le Président suppléant (M. Laplante): Est-ce qu'on
appelle le vote sur la deuxième lecture? M. le député de
Maskinongé.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, nous sommes en train
d'étudier le projet de loi 70 créant la Société
nationale de l'amiante et comme plusieurs membres de cette Chambre...
Le Président suppléant (M. Laplante): Dès le
début, j'aimerais avoir l'ordre dans cette Chambre pour que le
député de Maskinongé puisse prononcer le discours de vingt
minutes qu'il a à prononcer. S'il y en a parmi vous qui sont
intéressés à prononcer un discours additionnel, je suis
prêt à prendre les présences. S'il vous plaît, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Et comme plusieurs membres de cette Chambre, je
m'interroge à savoir quelle était l'urgence d'étudier un
tel projet de loi, tout en admettant de suspendre les règles de la
Chambre qui disent qu'après le discours inaugural nous devons pendant
une période donnée, étudier et discuter ce discours
inaugural. Je suis d'accord qu'il s'agit là d'une entente dont nous
avons convenu avant la période d'ajournement des Fêtes, entente
qui, même si nous y avons concouru, nous de l'Opposition, nous laissait
croire que le gouvernement, durant cette période pourrait, à tout
le moins, évaluer les implications de ce projet de loi et donner non
seulement aux membres de l'Opposition, mais à tous les membres de cette
Chambre, de cette Assemblée nationale, des chiffres nous permettant
d'être en mesure d'évaluer plus adéquatement...
Le Président suppléant (M. Laplante): Je
demanderais au député de Roberval, s'il vous plaît, et aux
autres députés de garder leur place afin d'entendre le
député de Maskinongé. (20 h 50)
M. Picotte: ... l'impact de ce projet de loi que nous
présente le gouvernement. Je m'excuse, M. le Président,
tantôt, le député de Drummond a mentionné que tous,
au Québec, avaient hâte de voir naître le complexe de
l'amiante au Québec.
Pourtant j'ai entendu un honorable collègue de l'Opposition, de
l'Union Nationale, le député de Saint-Hyacinthe, qui a, à
la suite de certains chiffres, de certains sondages, mentionné que,
même dans la région de l'amiante, plusieurs personnes
étaient non seulement très sceptiques, mais s'opposaient à
cette nationalisation et à ce projet de loi 70. Cela M. le
Président, laisse beaucoup de doutes sur l'affirmation du
député de Drummond. Je m'excuse du terme que je vais employer
mais, comme membre de cette Assemblée nationale, je puis tout simplement
vous dire que je suis parfois et le terme n'est pas fort et je m'en
excuse avant de le dire très écoeuré de l'attitude
de certains membres du gouvernement.
Il s'agit de regarder ce qui se passe, M. le Président. A toutes
les occasions qu'un député de l'Opposition se lève pour
prendre la parole, avant même qu'on sache ce qu'il a à dire,
déjà on commence à le ridiculiser. Il s'agit de regarder
ce qui se passe dans les journaux présentement; il s'agit de lire le
Devoir de ce matin, où tout le monde n'est pas d'accord avec cette
nationalisation, pour que déjà les membres du gouvernement
trouvent que c'est cave ce qui a été dit par tel ou
tel journaliste. Un député se lève en cette
Assemblée et, pour toutes sortes de raisons, prend un texte bien
écrit, le lit et, à cause de l'arrogance de certains messieurs
d'en face, se trompe de ligne parce qu'on l'interrompt continuellement. On ne
sait même pas vivre, les gens d'en face, on rit de lui, on le ridiculise
parce qu'il s'est trompé.
C'est cela qu'est le gouvernement présentement.
Le Président suppléant (M. Laplante): Est-ce qu'il
y aurait possibilité de revenir à la pertinence du débat,
s'il vous plaît?
M. Picotte: J'arrive, M. le Président. Mais je vous dis
exactement ce qui se passe en cette Chambre et cela touche l'amiante. Ah oui!
continuez d'applaudir. Levez-vous et chantez, je vais vous écouter. Vous
ne chanterez pas longtemps, messieurs. Le monde, ils ne sont pas tous des caves
au Québec. Il n'y a pas seulement vous autres qui savez lire. Il n'y a
pas seulement vous autres qui avez la vérité. Il y a des gens
dans l'Opposition qui représentent une partie de la population. Si vous
ne savez pas les respecter, les gens vont vous le dire à la prochaine
élection. Vous allez l'apprendre bien plus vite que vous le pensez.
M. le Président, c'est bien regrettable, l'arrogance des gens
d'en face. Faites tous vos beaux discours, faites les vedettes, si vous voulez,
le remaniement ministériel, ce n'est pas pour bientôt, votre tour
ne viendra pas tout de suite; les gens qui avaient à être
nommés ont été nommés. Le député de
Trois-Rivières a été nommé dans le vaste
remaniement ministériel dont nous a parlé le premier ministre; un
seul nouveau venu, et c'est pour l'empêcher de parler sur la
revalorisation du rôle du député. Lui va se tenir
tranquille, on l'a nommé ministre. Les autres, continuez d'être
"backbenchers". C'est cela la vérité. Je comprends le
député de Frontenac, qui lui est en faveur; d'ailleurs, je le
respecte. J'ai bien hâte de l'entendre et j'aurais aimé
qu'à la place du premier ministre ce soit lui qui ait le discours d'une
heure parce qu'il aurait eu des choses à nous révéler, des
choses intéressantes.
Malheureusement, nous serons obligés, mon cher
député de Frontenac, de vous écouter uniquement 20
minutes. Nous allons vous manquer pour au moins la valeur du temps, une
quarantaine de minutes. M. le Président, on a mentionné on
a fait un "show", d'ailleurs, à travers tout cela lors de la
motion du député de Richmond, que le qouvernement du
Québec était tanné d'avoir rapport par-dessus rapport,
étude par-dessus étude. On en a sorti, on en a empilé, il
y en avait de caché dessous trois ou quatre banquettes de
"back-benchers", on en a sorti au fur et à mesure.
Malgré les nombreux rapports, à moins que toutes les
personnes qui ont passé à l'Assemblée nationale, depuis
une dizaine d'années, soient toutes des sous-douées, des
insignifiants, des gens qui n'ont pas fait d'études supérieures,
y compris ceux qui étaient dans l'ancien gouvernement de
M. Jean Lesage et qui occupent aujourd'hui des positions importantes,
telle la position de premier ministre de la province de Québec, à
moins que ces gens aient tous été des caves, si on a
décidé de retarder, de ne pas procéder à cette
nationalisation, j'imagine qu'il devait y avoir des choses
impondérables, il devait y avoir des calculs qu'on ne connaissait pas.
Il devait y avoir sûrement...
M. Baril: Lesquels?
M. Picotte: M. le député d'Arthabaska, si vous
voulez intervenir, même si cela ne concerne pas l'agriculture,
lâchez la colonne, allez-vous-en sur le poteau de votre chaise et
intervenez.
Le Vice-Président: A l'ordrel Le fauteuil du
président est peut-être devenu un fauteuil de style James Bond, je
ne sais pas, mais M. le député de Maskinongé, si vous
voulez... A l'ordre! Ce n'est pas à vous de rappeler les
députés à l'ordre. Je vous prie de vous en tenir à
la pertinence du débat.
M. Picotte: M. le Président, c'est exact que ce n'est pas
à moi de rappeler les députés à l'ordre, mais quand
même j'ai été interpellé et je pense que,
placé juste en face, j'ai pu le voir. Je m'excuse, de côté,
vous ne pouviez pas le voir. Je l'imagine, en tout cas.
M. le Président, il y a tellement de personnes à
Québec qui ont travaillé dans ce dossier. Il y a tellement de
personnes qui ont étudié ce dossier. Comme je vous le mentionnais
tantôt, ce ne sont certainement pas tous des imbéciles. Si cela ne
s'est pas fait jusqu'à ce jour, c'est parce qu'il y avait quand
même des interrogations au sujet de ce dossier.
Aujourd'hui, nous l'avons lu dans les journaux. On pourrait aussi
confronter certaines personnes en autorité qui pourraient le mentionner;
on commence même, au moment où on en discute plus
sérieusement, à s'inquiéter et à se poser des
questions, même au niveau des fonctionnaires, concernant ce projet de
loi. Je pense que, malgré tout ce qui se passe, il faudrait ne pas
demander un siècle, mais simplement d'ici quelques mois, pouvoir y
réfléchir encore davantage, parce qu'il s'agit d'un
investissement majeur.
J'ai des collègues dans l'Opposition qui ont parlé de
certaines sociétés d'Etat. On a fait état de SIDBEC. On a
parlé de SOQUIP. On a parlé de REXFOR. On a parlé d'une
foule de sociétés d'Etat. Quand on se promène le
moindrement à travers la province de Québec, quand on discute le
moindrement avec nos électeurs, avec les Québécois moyens,
je dois vous dire, malheureusement, que les Québécois sont
tannés des tracasseries gouvernementales. Que les
Québécois trouvent déjà que c'est trop
exagéré l'intervention de l'Etat dans tous les domaines, dans
tous les dossiers. On a eu beau faire des distinctions, tantôt, quand on
a parlé de SIDBEC, c'est vrai, mais il y a quand même une triste
réalité que tous les Québécois savent et qui
renouvelle la mémoire à chaque élu du
peuple, à tous les ans, c'est que SIDBEC vient malheureusement
chercher des millions à même les taxes des citoyens pour combler
des déficits. (21 heures)
Ne me demandez pas qui l'a créée. C'est l'Union Nationale
qui l'a créée, de bonne foi, comme vous autres probablement, qui
voulez créer de bonne foi la Société nationale de
l'amiante. Mais on essaie de vous prévenir que cela va coûter des
millions aux Québécois. C'est ce qu'on veut vous dire. On n'est
pas contre et on n'essaie pas de chiâler pour rien. On essaie de vous
dire: Regardez ce que vous avez créé, mais regardez ce qui a
été fait auparavant. Le monde n'a pas commencé à
exister le 15 novembre 1976, messieurs, voyons donc! Soyez donc
réalistes, retombez donc les deux pieds sur terre. C'est clair.
On ne vous dit pas tout simplement que c'est pourri et que ce n'est pas
bon. On vous dit: Messieurs, réfléchissez davantage. On vous dit:
SIDBEC est une société d'Etat et elle vient chercher, elle vient
gruger des millions, à tous les ans, à même les taxes des
Québécois. Prenez donc garde avant de plonger tête
première dans des projets semblables à ceux-là. C'est ce
qu'on vous dit, pas autre chose.
Ne nous traitez pas de caves et d'imbéciles. De toute
façon, si vous le pensez, vous traitez alors la population
d'imbécile car, aux dernières élections, elle a
jugé qu'on pouvait la représenter adéquatement. Si c'est
ce que vous voulez dire à ma population, qu'elle a été
imbécile de me choisir, dites-le messieurs, cela va bien, continuez, je
vais doubler ma majorité la prochaine fois.
Messieurs, ce qu'on vous dit tout simplement, c'est ceci: Avant de
créer... peut-être que le troupeau d'éléphants
blancs dont parlait le ministre des sports, quand il a été
nommé ministre, au sujet du stade olympique ce n'était
peut-être pas tout à fait un troupeau, mais cela a l'air qu'il
veut compléter son troupeau avec cette Société nationale
de l'amiante peut-être que cela va compléter le troupeau.
Peut-être que, dans quelques années, le projet de la
Société nationale de l'amiante va s'avérer encore plus
coûteux, plus grave et pire que celui du stade olympique à
Montréal. Avec vos prévisions budgétaires, si on compare
cela, on en reparlera tantôt du troupeau d'éléphants
blancs.
M. le Président, le ministre, s'il est malheureux, d'accord on
est prêt; vous savez, c'est un projet qui aiguise le nationalisme des
Québécois, qui touche au coeur directement; c'est un projet qui
peut faire brailler bien du monde. Mais, ce que j'aurais aimé davantage,
c'est que le ministre, après le délai qu'il a eu du 23
décembre à il y a quelques jours, au moment où on a
commencé à étudier ce projet de loi, nous apporte
directement des chiffres. Je ne blâme pas le ministre des Richesses
naturelles de ne pas nous en présenter. Le premier ministre
lui-même, dans son allocution, cet après-midi, a mentionné
que, malheureusement, il n'avait aucun chiffre, qu'on ne pouvait pas faire de
prévisions, mais qu'il fallait quand même faire confiance.
J'aurais quand même aimé qu'on ait des chiffres. J'aurais
aimé quand même, M. le Président, qu'on ait des
prévisions. J'aurais aimé quand même qu'on nous dise qu'il
va y avoir des créations d'emplois dans ces quelques centaines de
millions payés à même les taxes des Québécois
qu'on va injecter dans cette Société nationale de l'amiante.
Malheureusement, M. le Président, ce n'est pas le cas. Tout le
monde en conviendra, en cette Chambre, il existe, alentour de cette industrie,
de nombreux problèmes. Nous avons parlé, depuis quelques
années déjà, des problèmes de santé des
travailleurs. Nous savons, et le premier ministre l'a admis cet
après-midi, que la compagnie, les usines que nous voulons je
n'emploierai pas le mot "exproprier" acheter, nous, du gouvernement du
Québec, pour les Québécois, nous savons, dis-je, que ce
sont des usines vétustes dont le vieillissement n'est plus à
démontrer à qui que ce soit. Nous savons aussi... apparemment,
les vieux, M. le ministre, ont de la barbe...
Le Vice-Président: A l'ordre!
M. Picotte: Est-ce le ministre qui m'a parlé, M. le
Président?
Le Vice-Président: Non, il ne vous a pas parlé. La
pertinence du débat, s'il vous plaît!
M. Picotte: II parle tout seul? Ah, je comprends pourquoi il ne
peut pas me donner de chiffres! Nous savons que le gouvernement du
Québec en achetant il y en a qui ont parlé de citrons, il
y en a d'autres qui ont parlé de "minounes" ...
M. Jolivet: De pamplemousses!
M. Picotte: ... deviendra propriétaire de ces
installations. Il deviendra aussi employeur et il devra automatiquement, comme
gouvernement, être un employeur modèle. Autrement dit, en langage
populaire que tout le monde comprend, il devra prendre une "minoune" et en
faire une Cadillac. A ce moment-là, c'est tout un projet! Qu'est-ce que
cela va coûter prendre une "minoune" pour la convertir en Cadillac? Je ne
le sais pas, les spécialistes ne le savent pas, le ministre ne le sait
pas, le premier ministre il l'a dit cet après-midi ne le
sait pas et le gouvernement non plus. Donc, un gros point d'interrogation pour
les Québécois. Mais nous savons quand même une chose, et
tous les Québécois savent au moins cela, ce sera payé
à même les taxes des Québécois. Tout cela pour
être plus nationalistes, pour être moins colonisés et
surtout pour être moins frustrés pour certains individus, parce
que ce n'est pas tout le monde au Québec qui est frustré. Ne vous
en faites pas. Il y a seulement ceux qui prétendent avoir
été colonisés qui sont frustrés. Et ce n'est pas
tout le monde qui est dans cette catégorie. Donc, je vous l'ai
mentionné tantôt, le gouvernement du Québec devra agir en
employeur modèle et, à ce moment-là, le coût
égale un point d'interrogation.
M. le Président, si j'essaie de résister à cette
nationalisation de l'amiante, ce n'est pas nécessai-
rement et pas seulement parce que je suis membre de l'Opposition, mais
parce que, vivant dans un milieu économiquement faible, vivant dans un
milieu qui a de sérieux problèmes présentement au point de
vue de l'emploi, vivant dans un milieu où un fort pourcentage de gens
sont en chômage et vivent à même les prestations d'aide
sociale, sachant que la situation économique au Québec est des
plus précaires, j'hésite, comme représentant du peuple qui
paie des taxes au gouvernement du Québec...
Le Vice-Président: Excusez-moi. Je vous prierais, M. le
député de Maskinongé, de conclure. Le temps est
déjà dépassé.
M. Picotte: C'est malheureux qu'on ne puisse pas y revenir.
Le Vice-Président: Moi-même, je trouve cela
très malheureux!
M. Picotte: Vous avez raison. Mon exposé était
tellement bon, M. le Président, qu'il y a quelques individus qui ont
parlé sans que vous en ayez eu connaissance et je ne vous blâme
pas!
En terminant, comme je vous l'ai mentionné tantôt,
étant issu d'un milieu économiquement faible, au moment
même où je vous parle en 1978, j'hésite, comme
représentant du peuple, comme représentant des individus qui
paient des taxes au gouvernement du Québec, à ce qu'on investisse
$200 millions, $300 millions, $400 millions parce qu'on ne sait pas
encore le coût tout en sachant que cela ne créera, pour
l'instant, aucun emploi. J'hésite à ce qu'on utilise les taxes
des Québécois pour nationaliser et s'en aller vers un rêve
où on n'est pas certain d'avoir du rendement.
Soyez assuré qu'en ce qui me concerne ma collaboration à
ce débat n'en fut pas une partisane, mais que je l'ai faite tout
simplement pour tâcher de soumettre à cette Chambre les nombreuses
interrogations que je me posais à ce sujet. J'espère que cela a
pu éclairer certains membres de cette Chambre. (21 h 10)
Le Vice-Président: M. le député de
Charlevoix.
M. Raymond Mailloux
M. Mailloux: M. le Président, cet après-midi, comme
chacun des membres de cette Chambre, j'ai écouté attentivement le
discours du premier ministre expliquant les raisons que son gouvernement a
d'intervenir dans un secteur d'activité où il est
propriétaire de la richesse naturelle non renouvelable. Les exploitants,
a-t-il dit, n'ont pas fait le nécessaire pour que les nôtres
soient présents dans la transformation ou pour profiter des
retombées qu'on pouvait en retirer. C'est un secteur d'activité
où, également, chacun le reconnaît, les conditions de
salubrité n'ont pas été non plus toujours des plus
satisfaisantes.
M. le Président, ayant eu à écouter et à
voir à l'oeuvre depuis 1962 le chef du gouvernement, j'ai
remarqué qu'il a livré son message, non pas dans le style
enflammé qu'en pareilles circonstances il avait l'habitude d'employer,
mais en se voulant le plus modéré qu'il soit. Un tel langage
pourrait davantage être de mise de la part de ceux du côté
gouvernemental qui possèdent les renseignements qui peuvent être
livrés pour l'information du grand public et de la Chambre, à
propos d'une loi qui, si elle est adoptée, engagera le Québec et
pour très longtemps. Un tel langage, dis-je, serait de nature à
fournir un meilleur éclairage à ceux qui seront appelés
à payer la note, et c'est leur droit strict de savoir.
M. le Président, le premier ministre a fait état des
bruits amplifiés quant aux restrictions imposées par les pays de
la communauté européenne ou du marché commun, et je pense
qu'il n'a pas dit que seule la fibre bleue était prohibée. Il a
dit, si ma mémoire est fidèle, que cela concernait toute fibre;
cependant, cela concernait moins de 15% de ce qui peut être voué
à la transformation, si j'ai bien compris son message.
Je ne sache pas, cependant, qu'il ait le moindrement indiqué de
quelle façon la société d'Etat pourrait espérer
concurrencer un tant soit peu, dans un marché européen, des
multinationales déjà établies, bien ancrées.
Comment permettre une pénétration de cedit marché
européen? Comment savoir si ce n'est qu'avoir de vagues espoirs et de
possibles affinités avec des collectivités dont la culture peut
nous rapprocher, mais qui n'ont jamais levé le petit doigt pour aider le
Québec sur le plan économique?
Je ne voudrais pas être méchant, mais la chanson "Au temps
des colonies" lui va comme un gant: Des idées, mais pas d'argent. Le
premier ministre a invité les Oppositions, a même insisté
pour qu'aucune référence ne soit faite à l'endroit de
SIDBEC-DOSCO. Encore là, c'est une matière première qui
est nôtre, personne ne nie que l'acier sera toujours en demande. I! a dit
que ce n'est pas tant la société d'Etat, si elle a eu des
difficultés, c'est qu'à l'échelle mondiale on a connu des
périodes de récession. Donc qu'elle doit en subir les effets.
M. le Président, je constate que, même s'il y a eu des
périodes de progression, les mêmes effets se faisaient sentir
à chaque année, où il y avait déficit. Je vous
avouerai que la demande du premier ministre de ne pas faire
référence à SIDBEC-DOSCO ne m'a pas tellement
impressionné. Je vous avouerai que le premier ministre devrait fouiller
très attentivement toutes les phases depuis l'achat de SIDBEC-DOSCO s'il
désire savoir. Avant que le Québec plonge, qu'il sache s'il a les
moyens financiers de mettre la main sur une compagnie peut-être
détestable, mais dont personne dans le Québec ne peut donner une
approximation de la fin de l'aventure, si nationaliste soit-elle.
M. le Président, SIDBEC-DOSCO, présentée par
l'Union Nationale et appuyée, si ma mémoire est fidèle,
par les parlementaires du temps dont j'étais, n'est pas une ombre au
tableau du débat
présent. Cette sidérurgie est un ensemble d'étapes
que le Québec a dû franchir dans un marché abondant,
où le Québec pouvait davantage commander que sur le marché
de l'amiante parce que acheteur lui-même et acheteur important soit
directement, soit par le biais de ses créatures municipales, scolaires,
des sociétés d'Etat telles l'Hydro-Québec, la
Société d'énergie de la baie James et autres.
Personne ne reproche à l'Union Nationale et à ceux qui lui
ont succédé à la gouverne du Québec d'avoir
dû faire face aux étapes nombreuses qui devraient permettre
d'atteindre le seuil de la rentabilité souhaitée. J'ai
été un de ceux qui ont écouté les raisons qui
motivaient la société, année après année,
à se présenter et devant le Conseil des ministres et devant celui
de la trésorerie pour tenter de justifier la mise de fonds
supplémentaire.
Je vous avouerai que peut-être trop terre à terre je suis,
au cours de ces années, devenu de plus en plus perplexe quant à
la capacité pour une société d'Etat qui n'est pas un
monopole de pouvoir concurrencer sans une aide constante de l'Etat ses
concurrents de l'entreprise privée.
M. Bérubé: Me permettez-vous une question, M. le
député? Vous avez une excellente société d'Etat qui
travaille dans votre comté de Charlevoix. Elle fait le plaisir des gens
de Clermont. C'est la société Donohue. Vous savez que son taux de
rentabilité est l'un des plus élevés des compagnies de
pâtes et papiers au Québec et que c'est une société
d'Etat.
M. Mailloux: M. le Président, je voudrais faire remarquer
à l'aimable ministre des Richesses naturelles, que je sais d'ailleurs
surchargé par deux ministères importants, qu'en fait la
société Donohue Brothers n'est pas une société
d'Etat. Donohue Brothers était une société privée
dans laquelle le gouvernement a investi, une compagnie dont le "know how "
était tel qu'elle pouvait permettre au gouvernement d'espérer des
profits. C'est ce qui est arrivé. Ce n'est pas une société
d'Etat.
M. Bérubé: Comme l'Asbestos.
M. Mailloux: Un instant. C'est une société dans
laquelle vous avez des actions à 49% ou 51%. Quand vous avez
participé à une mise de fonds dans cette société,
elle faisait déjà des profits abondants. C'est une
société que je connais d'ailleurs depuis très longtemps,
dont la vocation sociale et économique est très bien
acceptée dans Charlevoix. Elle a participé à tous les
mouvements possibles. De toute façon, je ne sache pas que ce soit une
société d'Etat telle la sidérurgie ou
l'électricité, d'aucune façon. M. le Président,
j'excuse le ministre des Richesses naturelles qui est un charmant garçon
d'avoir interrompu mon exposé. Cela ne me dérange pas tellement
parce que je suis toujours mauvais quand je lis un document que j'ai
préparé à bâtons rompus.
Le Président suppléant (M. Boucher): M. le
député de Charlevoix, si j'ai bien compris vous aviez
accepté la question et la réponse a été
donnée.
M. Mailloux: D'un si charmant garçon, oui.
M. le Président, une réflexion qui ne vient pas de moi et
que j'ai entendue souventefois lors de ces rencontres où SIDBEC-DOSCO
avait à rencontrer le gouvernement caricature très bien la
situation à laquelle le gouvernement fait face dans sa tentative
d'acheter l'Asbestos. J'ajoute, même si on élimine l'imprudence
inqualifiable du ministre de l'Energie dont le témoignage servira
peut-être un jour devant une cour de justice si la transaction ne
s'effectuait pas de gré à gré, et même là
cette réflexion si vous versez un prix équitable aux deux
parties, de très hauts fonctionnaires et non des moindres diront, quand
vous serez fixé et je souligne ce qui suit: "Quand vous serez
fixés et que vous aurez un prix à payer, cela, c'est le prix de
la queue du chat." (21 h 20)
Le ministre de la Fonction publique, cette réflexion, il la
connaît au Conseil du trésor, il est passé par là.
Chaque fois qu'on présente un projet d'une société d'Etat
à vocation populaire comme Samoco, Cabano et tout ce que vous voudrez,
j'ai toujours entendu dire: La queue du dragon, la queue du chat.
La sidérurgie qui devait coûter de $55 millions à
$60 millions, ce prix, c'était celui de la queue du chat, non encore
viable, cela coûte $800 millions et on n'a pas encore vu les yeux du
chat.
Allez vers le bunker, de l'autre bord, ou vers un président d'une
banque bien connu dans la province qui est un ex-secrétaire du Conseil
du trésor; eux, ils en ont vu arriver des chats dont on leur
présentait la queue. Ils attendent toujours la tête. Et cela, sans
malice à l'endroit de ceux qui faisaient une telle réflexion pour
des actions posées par des précédents gouvernements.
D'ailleurs, je ne me réfère pas à l'achat éventuel
de l'Asbestos Corporation dans lequel je ne voudrais pas les impliquer,
d'ailleurs.
Le premier ministre a informé la Chambre que son gouvernement
connaissait les éléments susceptibles d'établir les
coûts d'une transaction possible, transformation de l'usine, construction
nouvelle, déménagement d'une infime partie de la population,
indemnisation des employés, etc., coûts auxquels il faudra ajouter
les sommes requises pour transformer les produits qu'on désirera. C'est
déjà beaucoup d'argent qui se fait d'ailleurs de plus en plus
rare dans le Québec, dans le Canada et dans les pays
industrialisés.
De plus, on n'a que des espoirs de voir plus d'emplois
créés, et je ne voudrais pas aller dans ce sens. On n'a
pénétré aucun marché et, pourtant, bien poliment,
comme lors de l'achat de SIDBEC, de DOSCO, on n'est et on ne sera
propriétaire que de la queue du chat. Je doute fort que ce gouvernement
voie ce que d'autres nomment la tête ou les yeux du chat.
Et pourtant, je suis surpris qu'un membre de l'exécutif
l'actuel ministre des Finances, si ma mémoire est fidèle,
conseiller spécial au moment
où le gouvernement a transigé la nationalisation de
l'électricité que ce conseiller financier auprès de
M. Lesage, en 1962, évitant alors toute surenchère en Bourse d'un
dossier bien étudié, tel que le disait le premier ministre, cet
après-midi, aujourd'hui, n'ait pas pris les précautions les plus
élémentaires qui s'imposaient et dont on parlait lors de
l'élection de 1962.
Il n'y a aucune relation possible entre le bien-fondé de cette
nationalisation et le but poursuivi par le projet de loi 70. En 1962,
c'était un monopole que créait le gouvernement, aucune
concurrence possible, et on plaçait entre les mains du Québec un
levier de commande dont il peut se servir davantage aujourd'hui, dans les pays
voisin des Etats-Unis, en Ontario et ailleurs. Le projet de loi 70 n'apportera
aucun monopole; la société, si elle est créée,
deviendra un concurrent des sociétés dont le "know-how" est en
avance et, pour concurrencer, il nous faudra sans les attendre, éponger
sans cesse des déficits.
Le premier ministre a passé sous un silence surprenant un article
intitulé "Le plus gros fabricant de freins condamne l'amiante".
Il a passé de manière surprenante sur cet article qui
paraissait à larges traits dans le Devoir d'aujourd'hui. Le gouvernement
dira que c'est un avancé savamment orchestré dont je ne prends
pas la véracité à mon compte, d'ailleurs, vu mes faibles
moyens, mais qui rejoint une vérité que chacun connaît,
soit réduire le poids de tout véhicule, avion, automobile, etc.
Si les avantages indiqués sont réels, le gouvernement ne peut,
dans l'étude du dossier, ignorer de tels avertissements s'il
désire transformer davantage. M. le Président, si le
marché des freins, important dans le passé, devient difficile
d'accès, pourquoi parle-t-on si peu du marché possible de tuyaux
d'amiante-ciment?
Si c'est un secteur visé, ce que je crois, que penser de la
difficile concurrence qui sera apportée aux fabricants de tuyaux de
béton déjà au bord du précipice devant la
concurrence très forte de ceux en aluminium qui prenaient davantage de
place sur le marché? M. le Président, j'ai été un
peu surpris de lire la préface d'un texte qui nous est envoyé,
intitulé "Tuyaux de béton, un produit signé Québec,
qui dit ceci: "Entrée en matière: La décision du
gouvernement québécois concernant l'acquisition des actifs de la
compagnie Asbestos Corporation donne un ton résolument réaliste
au programme d'action économique élaboré par un
comité spécial mis sur pied par le Conseil des ministres." On
semble appuyer. "Même si elle n'a pas été
commanditée par le gouvernement du Québec, l'étude sur les
possibilités de fabrication de produits d'amiante,
exécutée par SORES, demeure cependant très
révélatrice. Tout indique qu'il y a place pour le
développement d'une industrie de transformation de l'amiante au
Québec; reste, bien sûr, le problème de la cohabitation
avec les autres industries... La question est de savoir s'il y a lieu pour le
Québec de susciter la création d'une usine de fabrication de
tuyaux d'amiante en raison de la structure particulièrement bien
établie de l'industrie du tuyau de béton et de l'idéologie
même du gouvernement en matière de développement de
l'industrie secondaire; l'encouragement à la petite et à la
moyenne entreprise et la décentralisation industrielle".
M. le Président, on constate que les fabricants de tuyaux de
béton encensent le gouvernement, et d'un autre côté,
mentionnent quand même la difficile concurrence que laisse supposer
l'arrivée des tuyaux d'amiante-ciment. Il ne faut pas avoir
été longtemps à la charge du ministère des
Transports pour savoir dans quelle position précaire l'ensemble de ces
industries a été placée dans les dernières
années au cours desquelles il a même fallu modifier certaines
normes. Au moment où le gouvernement soumet à l'attention de la
Chambre l'achat éventuel d'Asbestos Corporation et s'apprête
à faire face à la concurrence d'autres géants de
l'amiante, dans une aventure dont personne d'ailleurs ne connaît le
coût final, malgré toute la prudence dont voudra s'entourer le
ministre des Richesses naturelles je le lui concède, je pense
qu'il tâchera d'être prudent une curieuse contradiction
apparaît dans la conduite de ce gouvernement et je m'explique. Il n'y a
pas tellement de temps, quelques semaines, c'est le chef du gouvernement qui,
traitant des vérités économiques, faisait la
réflexion suivante dans le débat General Motors versus
Bombardier: "Quand on est un nain, on n'a qu'à se coucher ". J'en suis
resté estomaqué. Une vérité économique qui
faisait que le gouvernement avait à trancher entre une industrie bien
québécoise et un monopole à qui l'on consacrait pour
toujours la fabrication d'autobus sur le marché
québécois.
M. le Président, d'une telle réflexion, il est vrai que je
suis demeuré tout à fait estomaqué. La chance qu'on
pouvait alors offrir à un fabricant québécois, avec si peu
de risques, on a oublié de la saisir et, pourtant, c'était dans
un secteur connu et possédant un marché assez abondant.
Dans le débat actuel, le premier ministre et le gouvernement
auraient-ils déjà oublié les vérités
économiques dont ils nous parlaient alors, dont on se servait pour
repousser un fabricant dont le "know how" était également bien
connu? (21 h 30)
M. le Président, on a demandé pourquoi le
précédent gouvernement n'avait pas agi dans ce difficile dossier
de l'amiante. La question a été posée à plusieurs
reprises. Pourquoi toutes les études avaient-elles été
repoussées? Pourquoi avaient-elles été mises sur les
tablettes à l'exemple de beaucoup d'autres dans le Québec?
Peut-être pourrais-je vous soumettre qu'à l'exemple de beaucoup
d'autres dans le Québec les vérités économiques
dont votre chef parlait étaient telles alors et sont telles aujourd'hui
qu'il valait mieux, dans le temps, faire un aveu d'impuissance et parfois
éviter une catastrophe, d'ailleurs, que je ne souhaite pas.
On a demandé aux membres de l'Opposition d'être très
prudents dans ce dossier. Je sais qu'un secteur vital de l'économie du
Québec est entre les mains de monopoles étrangers qui s'en sont
servi de manière souventefois détestable pour
l'ensemble des Québécois. Personne, de ceux qui sont le
moindrement sérieux du côté de l'Opposition, n'accepte ce
point de vue.
Si, dans les années qui viennent de s'écouler, les
gouvernements on pourra dire ce qu'on voudra des gouvernements de
l'Union Nationale ou du Parti libéral n'ont pas trouvé,
dans des conditions économiques meilleures que celles qu'on
connaît aujourd'hui, le moyen d'agir, de placer un secteur témoin
dans le dossier de l'amiante, c'est peut-être que, quand on est
allé à fond dans le dossier, on s'est aperçu que ce serait
un achat qui nous donnerait la queue du chat, mais que le gouvernement ne
pourrait jamais acheter le corps et la tête. C'est peut-être pour
cela que les gouvernements précédents ont été
prudents. Et peut-être que leur nationalisme était aussi
éveillé qu'il l'est aujourd'hui, malgré qu'il est moins
extériorisé. De toute façon, le gouvernement a
décidé de son lit. C'est son droit de tenter de présenter
un tel projet de loi en Chambre. J'espère qu'il prendra toutes les
précautions qui s'imposent. Mais dans ce type de dossier, les
précautions qu'on avait connues lors de l'achat de
l'électricité, où ce fut calculé à quelques
millions près, avec toutes les précautions prises en Bourse, ce
sont des précautions qui n'ont pas été prises dans le
dossier actuel. Je regrette, avec le peu de renseignements qui sont à
notre disposition, il m'est impossible de voter pour le projet de loi no
70.
Le Président suppléant (M. Boucher): M. le
député du Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, je pense qu'il nous faut
faire ressortir... J'ai le droit de parole, M. le député de
Brome-Missisquoi. Le président me l'a accordé.
Je pense qu'il y a une chose qu'on n'a pas fait suffisamment ressortir,
au cours de ce débat, sur le projet de loi no 70. C'est qu'entre nous,
du côté ministériel, du côté gouvernemental,
et ceux de l'Opposition, il y a quand même des points sur lesquels on est
parfaitement d'accord. C'est regrettable que mes collègues du
côté gouvernemental n'aient pas fait ressortir les terrains
d'entente, les points d'accord entre les gens d'en face, ceux de l'Opposition,
et nous.
Il faudrait, je pense, le faire avant que se termine ce débat.
Nous sommes d'accord quand les gens de l'Opposition affirment qu'il faut
établir une politique de recherche dans le secteur de l'amiante afin de
trouver de nouvelles utilisations, de nouveaux produits. Je considère
qu'il s'agit là d'excellents conseils. Nous sommes d'accord avec ceux de
l'Opposition quand ils formulent de pareilles recommandations.
Pourquoi n'ont-ils rien fait dans ce domaine lorsqu'ils étaient
au pouvoir? Lorsque le Parti libéral était au pouvoir, pendant
six ans, pourquoi n'a-t-il rien fait dans le secteur de la recherche sur
l'amiante? Pourquoi l'Union Nationale n'a-t-elle rien fait lorsqu'elle
était au pouvoir de 1966 à 1970 pour appliquer les excellentes
recommandations qu'elle nous fait présentement?
Dans le domaine de la transformation, nous sommes d'accord avec les gens
de l'Opposition, que ce soit de l'Union Nationale ou du Parti libéral.
Oui, nous sommes d'accord avec eux lorsqu'ils nous disent qu'il faut davantage
transformer sur place cette ressource naturelle. Ils ont parfaitement raison.
Cela créerait plus d'emplois, ils ont raison de le dire. Cela
stimulerait l'économie. Transformer cette ressource davantage, cela
aurait des retombées économiques bénéfiques sur
toute une région. Nous sommes entièrement d'accord avec eux. Il
faut souligner que nous sommes d'accord avec eux lorsqu'ils nous font ces
recommandations, lorsqu'ils nous donnent ces conseils excellents.
Pourquoi n'ont-ils rien fait lorsqu'ils étaient au pouvoir?
Lorsque le Parti libéral était au pouvoir, pendant six ans;
l'Union Nationale, pendant quatre ans. Pourquoi n'ont-ils rien fait pour
transformer davantage l'amiante chez nous?
Nous sommes d'accord avec eux lorsque le député de Verdun
dit qu'il faut augmenter la consommation intérieure des produits de
l'amiante chez nous. Nous sommes entièrement d'accord avec lui. Pourquoi
le Parti libéral n'a-t-il rien fait dans ce domaine lorsqu'il
était au pouvoir, lorsqu'il détenait le pouvoir? Nous
reconnaissons comme intéressante la proposition du député
de Verdun de voter une loi pour imposer un pourcentage de transformation sur
place aux compagnies. C'est une proposition intéressante. Pourquoi
n'ont-ils rien fait dans ce sens lorsqu'ils étaient au pouvoir? Comment
expliquer leur impuissance, leur incapacité?
Il fallait quand même le faire ressortir au cours de ce
débat. Nous sommes donc d'accord sur bien des points avec nos amis de
l'Opposition, avec nos collègues de l'Opposition. Là où
nous divergeons d'opinion, là où nous ne sommes pas d'accord,
évidemment, c'est lorsqu'il s'agit de choisir les instruments de
développement, les instruments, les moyens pour atteindre ces objectifs
fort louables. A ce sujet, depuis que ce projet de loi est devant
l'Assemblée, on assiste à une véritable levée en
masse, unanime du côté de l'Opposition, pour dénoncer avec
virulence le rôle de l'Etat dans l'économie; pour dénoncer
l'intervention de l'Etat dans l'économie et, en particulier, dans le
secteur de l'amiante. On assiste, depuis quelque temps, depuis que ce projet de
loi est à l'étude, à une entreprise vraiment
désolante, déplorable de la part de l'Opposition, à une
entreprise de dénigrement des sociétés d'Etat. Les gens de
l'Opposition n'ont pas cessé, depuis le début de l'étude
de ce projet de loi, de dénigrer les sociétés d'Etat, de
cracher sur les sociétés d'Etat. Pourtant, celle que nous voulons
créer, la Société nationale de l'amiante, s'inscrit dans
un mouvement qui date du début des années soixante, un mouvement
de mise en place de sociétés d'Etat afin de mieux
développer l'économie québécoise. Ce mouvement de
mise en place de sociétés d'Etat s'inspire d'une philosophie qui
veut que l'Etat, chez nous, dans le
contexte que l'on connaît, soit un instrument de
développement économique, soit utilisé comme un instrument
de développement économique. (21 h 40)
C'est l'ancien premier ministre Jean Lesage, actuel président de
la commission du référendum du Parti libéral, un homme
éminent, toujours influent au sein du Parti libéral, c'est Jean
Lesage qui affirmait en juin 1961, que le seul puissant moyen que nous
possédons, c'est l'Etat du Québec, si nous refusions de nous
servir de notre Etat, par crainte ou par préjugé, nous nous
priverions alors de ce qui est peut-être l'unique recours qui nous reste
pour survivre comme minorité.
C'est M. Jean Lesage qui affirmait cela. C'est d'ailleurs lui qui a, en
quelque sorte, présidé à la naissance de plusieurs
sociétés d'Etat au cours des années soixante, et il disait
qu'on ne devait pas refuser de se servir de notre Etat par crainte ou par
préjugé. Par crainte, je ne pense pas qu'il soit
nécessaire de discourir beaucoup là-dessus, puisque cette
crainte, cette peur transpire dans tous les propos tenus par les membres de
l'Opposition, depuis le début de ce débat sur le projet de loi
70. Par préjugé aussi, et il y en a des tenaces, que l'on
retrouve du côté de l'Opposition. Le préjugé le plus
tenace est celui qui veut qu'une société d'Etat ne soit pas
rentable, ni efficace. Que ce soit nécessairement un fiasco. C'est le
député de Laval qui prétendait cela encore cet
après-midi. Que toute société d'Etat conduit
nécessairement à un fiasco, dans le domaine économique. Ce
préjugé est tout à fait faux et ne correspond en aucune
façon à la réalité, puisque la
réalité est tout autre. Qu'il suffise de considérer
certaines de nos sociétés d'Etat pour s'en convaincre. En
particulier, prenons le cas de la SGF, la Société
générale de financement, qui a été mise en place
par les libéraux au début des années soixante. Depuis
1973, depuis la réorganisation de 1973 qui a été
effectuée par le gouvernement libéral du temps, la
Société générale de financement va, selon le
rapport qu'on a reçu tout récemment, très bien. Elle
s'avère un instrument rentable de développement
économique.
C'est le cas, pourrait-on dire même, de SIDBEC, qui, il est vrai,
accumule des déficits, mais il faut considérer le cas de SIDBEC
en tenant compte des objectifs qu'on a assignés à cette
société. Dans le même rapport cité, je pense, par le
député de Nicolet, cet après-midi il a
oublié deux paragraphes qui m'apparaissaient importants, je lui avais
demandé de les lire, mais il n'a pas tenu compte de ma recommandation,
je vais les lire ce soir à propos de SIDBEC, c'est vrai que
SIDBEC est déficitaire depuis sa formation, mais on peut lire dans ce
rapport le jugement suivant sur SIDBEC: "De toute façon, le gouvernement
québécois a répété à plusieurs
reprises qu'il était prêt à absorber les pertes de SIDBEC
étant donné que celle-ci avait été
créée dans d'autres buts que la rentabilité. Guy
Saint-Pierre ce n'est pas un péquiste entre autres notait
en 1973 que les buts de la société étaient de rendre
l'acier disponible à de meilleurs prix, d'augmenter la valeur
ajoutée au niveau manufacturier, d'attirer au Québec les
compagnies consommatrices d'acier et que pour toutes ces raisons il
n'était pas essentiel que SIDBEC atteigne le même degré de
rentabilité que les autres aciéries. Et on soulignait que l'un
des objectifs de SIDBEC avait été atteint qui consistait à
réduire l'écart entre le prix de l'acier en Ontario et le prix de
l'acier au Québec.
On avait réduit cet écart de $12. Donc, si l'on
considère l'ensemble des objectifs assignés à SIDBEC, on
peut dire qu'ils ont été atteints et que cette
société d'Etat a joué le rôle qu'on voulait lui
faire jouer.
Les sociétés d'Etat sont donc, à mon avis, des
outils essentiels de développement, des instruments essentiels de
développement. Je voudrais souligner une contradiction qui est flagrante
du côté de l'Opposition et de ceux qui sont intervenus du
côté de l'Opposition. D'un côté, dans leurs discours,
ils dénigrent les sociétés d'Etat. Ils crachent sur les
sociétés d'Etat. D'un autre côté, à tout
moment, ils demandent au gouvernement de faire intervenir les
sociétés d'Etat pour régler des problèmes concrets,
économiques qu'ils rencontrent et qu'ils connaissent dans leur
comté ou dans leur région. Encore aujourd'hui même, un
député demandait au ministre des Richesses naturelles de faire
intervenir SOQUEM, une société d'Etat, pour exploiter le gisement
de Silver Stack. On pressait le gouvernement de faire intervenir SOQUEM pour
exploiter un gisement.
Dans plusieurs circonscriptions au Québec, entre autres je pense
ne pas me tromper en disant dans la circonscription de Brome-Missisquoi, il y a
des problèmes de scieries. Les députés pressent le
gouvernement de faire intervenir REXFOR; c'est une société
d'Etat. Quand il y a des problèmes dans un comté, dans une
région, inévitablement les députés de l'Opposition
demandent au gouvernement de faire intervenir une société d'Etat
pour régler le problème économique qu'ils connaissent dans
leur région ou dans leur comté. Et quand, dans un comté,
l'Etat intervient par l'intermédiaire d'une société d'Etat
pour régler un problème économique, l'Etat intervient par
l'intermédiaire d'une société d'Etat pour régler un
problème économique, les députés de l'Opposition
sont toujours extrêmement satisfaits et ne manquent pas de l'exprimer.
Quand REXFOR est intervenue pour participer au sauvetage de Tembec au
Témiscamingue, les députés de la région
étaient évidemment extrêmement satisfaits.
Quand la SGF, par l'intermédiaire de la Dono-hue, a
participé à la mise en place d'une usine de pâtes à
Saint-Félicien, au coût de $300 millions, c'est un projet
considérable l'Etat intervient directement, par la SGF, dans un
tel projet le député de Roberval, qui est directement
touché, était évidemment extrêmement satisfait de
cette intervention de l'Etat. Il est d'autant plus satisfait qu'on peut dire
que sa réélection est, en partie du moins, due à ce projet
de $300 millions à Saint-Félicien.
Le député de Roberval est extrêmement satisfait
quand l'Etat investit dans sa circonscription. Il y a donc là une
contradiction qui m'apparaît inac-
ceptable. D'un côté, dans les discours, dans leurs propos,
les députés de l'Opposition dénigrent les
sociétés d'Etat. Ils crachent sur les sociétés
d'Etat. Quand il y a un problème, la première chose qu'ils font,
c'est de réclamer de l'Etat qu'une société intervienne
pour résoudre un problème économique. Il serait temps que
les gens de l'Opposition se soucient quelque peu de la concordance entre leurs
propos et leur comportement.
Quant à nous, nous avons décidé d'être
logiques et cohérents. Nous l'avons d'ailleurs toujours
été. Il s'agit de relever le journal des Débats; lorsque
le gouvernement libéral, de 1970 à 1976, a présenté
des projets de loi pour soutenir les sociétés d'Etat, le Parti
québécois, alors l'Opposition, a toujours appuyé et
soutenu ces projets de lois.
Nous avons décidé, une fois au pouvoir, de demeurer
logiques et cohérents. Nous croyons, en ce qui concerne le secteur de
l'amiante, qu'une intervention de l'Etat s'impose d'urgence. Nous croyons que
cette intervention est essentielle. C'est pourquoi nous avons
présenté et nous allons adopter le projet de loi no 70 qui
créé la Société nationale de l'amiante. (21 h
50)
Je suis convaincu que, lorsque cette Société nationale de
l'amiante existera, on verra très rapidement les députés
de l'Opposition demander au gouvernement de faire en sorte que la
Société nationale de l'amiante intervienne dans leur
circonscription pour régler des problèmes économiques
graves. Je suis convaincu que cela ne tardera pas. C'est pourquoi il nous faut
adopter rapidement ce projet de loi no 70 pour mettre rapidement en place la
Société nationale de l'amiante. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Armand Russell
M. Russell: M. le Président, vous me permettrez par votre
entremise de soulever quelques points en ce qui concerne la loi en discussion
actuellement. Je voudrais d'abord dire que le ministre, en présentant ce
projet de loi, l'a fait d'une façon très timide. Il a
soulevé d'abord à peu près tous les cancers que le
problème de l'amiante pouvait représenter. Malheureusement, je ne
sais pas si le temps lui a manqué mais, dans le discours qu'il a fait,
il n'a pu trouver d'autre solution que de dire que la seule serait de
nationaliser la société d'amiante dont il est question.
M. le Président, je sais qu'il y a eu des positions qui ont
été prises à l'occasion des élections. Nous savons,
comme tout le monde, qu'il y a certains problèmes qui existent dans ce
domaine.
Actuellement, il ne s'agit pas d'une société de la nature
de celles qu'on a voulu représenter: l'Hydro-Québec, la
Régie des alcools, SOQUEM et les autres. On a parlé tout à
l'heure de certains problèmes qui existaient dans des scieries. Dans le
comté de Brome-Missisquoi, il n'existe pas de problèmes en ce qui
concerne les scieries, c'est plutôt dans le comté de Berthier que
les problèmes existent et dans d'autres comtés. Donc, REXFOR est
intervenue ailleurs et remplira simplement son rôle d'intervenant,
à ce moment-là. C'est la raison pour laquelle elle a
été créée, non pas pour nationaliser des
sociétés mais pour coopérer à maintenir un
équilibre valable dans le domaine du bois ou des terres et
forêts.
J'ai écouté le député qui a
tâché de laisser croire à cette Chambre que tous les
membres de l'Opposition, ici, ont dénigré les
sociétés d'Etat; que tous les journalistes qui ont écrit
dans les journaux ont dénigré les sociétés d'Etat.
Le ministre lui-même a passé des remarques en disant que
c'était complètement injuste, les remarques qu'on avait
relevées.
M. le Président, il aurait été facile, à mon
sens, pour le ministre, lorsqu'il a fait son exposé, peut-être de
prendre son heure, si c'était nécessaire, pour présenter
à la Chambre cette loi en disant: Voici les problèmes et les
solutions bien étalés afin que les membres de cette Chambre
soient bien informés pour savoir que, demain, lorsqu'on aura
nationalisé cette société, elle va pouvoir fonctionner
différemment de SIDBEC dont nous l'avons vécu, on pourrait
en parler longtemps, aussi bien que d'autres on connaît les
problèmes. C'est pour cette raison qu'on soulève ces points; on
ne voudrait pas que le même problème se présente avec
l'Asbestos. Lorsqu'on va nationaliser cette mine, c'est la matière
première, c'est vrai, mais qu'est-ce qu'on fera des marchés? La
société qu'on va nationaliser, c'est une société
étrangère qui a des intérêts ailleurs, qui est
à l'intérieur du Marché commun, où on trouve une
grosse partie du marché de l'amiante, et si on veut regarder cela avec
beaucoup de réalisme je demande au ministre de réviser un
peu sa positionon va s'apercevoir que dans quelques années le
Marché commun sera servi par d'autres pays que le Canada et le
Québec, chose que je ne voudrais pas voir arriver. Je
préférerais qu'on laisse ces gens qui ont des
intérêts ici continuer à laisser leur argent ici. S'ils
sont obligés de fermer, là, qu'on ait une société
qui garantira une survie à ces mines qui exploitent nos richesses
naturelles.
Mais, actuellement, il y a un danger et je pense que ces gens seraient
heureux qu'on leur donne, on parle de $150 millions, $200 millions; on le saura
demain.
Quand on a fait la nationalisation de l'électricité en
1962, le premier ministre se le rappelle lorsqu'il était sur les
"haustings" politiques, qu'il expliquait avec la baguette, qu'il exposait tous
les chiffres et que les coûts baisseraient. Vous savez ce qui est
arrivé depuis ce temps. Combien cela a-t-il coûté? Et
aujourd'hui, on est obligé de remettre aux étrangers le capital
et les intérêts. On a pris l'argent et on les a payés et
ils sont allés l'investir ailleurs. C'est exactement ce qu'on va faire
dans ce cas-ci.
On va leur donner leur argent et ils vont aller l'investir ailleurs pour
servir le marché qui représente de meilleurs
intérêts pour eux actuellement. Et vous connaissez le malaise qui
existe actuelle-
ment dans le domaine de l'exportation et de l'importation. C'est beau de
brandir, devant la population du Québec, le drapeau nationaliste. Mais,
il faut quand même brandir le drapeau du réalisme. Lorsqu'on parle
de transformer sur place, je suis d'accord; et quand on parle de faire la
recherche sur place, je suis d'accord. Oui, mercredi soir, on pourra regarder,
on pourra en parler aussi... Des acteurs, on en connaît et on en voit
devant nous des acteurs actuellement. Ce ne sont pas les faits.
M. Jolivet: M. le Président, la pertinence.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! La
pertinence du débat.
M. Russell: M. le Président, je disais ceci. Tout le monde
est d'accord sur le fait d'améliorer la situation dans le domaine de
l'amiante et je serais heureux que le ministre se limite à la recherche
et crée une société pour participer au
développement des mines d'amiante avec les sociétés
privées, comme le font d'autres sociétés d'Etat. Non pas
de payer cette société qui a des capitaux d'investis
actuellement, mais les investir ailleurs pour ne faire qu'augmenter notre
compétition. Quand on regarde le marché étranger, soyons
réalistes. Est-ce que le marché a augmenté malgré
les nouveaux débouchés qu'on a trouvés depuis deux ans,
trois ans? Non. Il est resté le même qu'il était, et
même, il se rapetisse un peu malgré qu'on fasse de la recherche,
oui.
Regardons-le objectivement et vous allez voir dans quelques
années que la Russie s'en vient et que les Russes en ont des surplus,
eux et ils vont embarquer sur les marchés du Japon et le Marché
commun. Et nous, les Québécois, allons rester avec notre
marché américain. Quand on parle de transformation sur place, il
faut tenir compte des coûts de transport; il faut tenir compte des frais
de douane qui vont être exigés pour un produit fini. Est-ce qu'on
pourra servir le marché américain d'une façon
économique, d'une façon rentable? Une autre question: Est-ce
qu'on prétend que les autres mines qui produisent, qui ont des usines de
transformation à l'intérieur des Etats-Unis vont nous laisser
faire? Je pense qu'il faudrait être un peu plus réaliste. Il y en
a une mine qu'on va fermer, qu'on est obligé de fermer... Pardon? C'est
effrayant comme on est brave. C'est effrayant comme on a été
brave avec SIDBEC.
Je me rappelle SIDBEC. J'ai vécu SIDBEC. A ce moment, on y est
allé avec beaucoup de timidité.
M. Jolivet: Est-ce que cela va passer à la
télévision mercredi soir?
M. Russell: Pardon?
Le Vice-Président: A l'ordre!
M. Russell: Peut être. Ce serait peut-être bon que le
député y soit à la télévision aussi ; cela
ferait au moins une belle photo.
M. le Président, je dis ceci: On s'embarque sur un terrain
très glissant. Je préviens le ministre de faire attention
à ne pas aller trop vite. Je sais qu'il le fait avec beaucoup
d'objectivité. Il n'est pas trop sûr de lui-même; il le dit,
d'ailleurs, qu'il le fait avec beaucoup de timidité. Il a beaucoup de
fierté, c'est évident. C'est un geste passionnant de dire aux
gens: On va avoir notre amiante, il nous appartient. On connaît les
problèmes internes, on les a vécus, ces problèmes. On sait
que d'autres gouvernements les ont examinés avec beaucoup
d'objectivité. Ils avaient d'autres préoccupations; ils n'ont pas
osé embarquer sur ce terrain pour des raisons valables. Aujourd'hui, on
va venir devant nous et, parce qu'on veut prévenir le gouvernement du
danger qui existe, d'une façon très objective, on nous dit qu'on
veut dénigrer toutes les sociétés d'Etat.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Je
m'excuse. M. le député de Brome-Missisquoi, s'il vous
plaît. Il y a deux solutions: ou bien il y a consentement pour que vous
continuiez au-delà de 22 heures et c'est l'unanimité. Il vous
reste, à ce moment-là, dix minutes.
M. Burns: Consentement. Une Voix: Non.
Le Vice-Président: II n'y a pas consentement. Ou bien vous
demandez l'ajournement du débat, s'il vous plaît, ou je serai
obligé de le faire d'office.
Je n'ai pas le consentement.
M. Russell: M. le Président, je vois que les gens semblent
fatigués; je vais leur demander... (22 heures)
Le Vice-Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! M. le député de Brome-Missisquoi. A l'ordre, s'il
vous plaît! Messieurs les leaders, s'il vous plaît! M. le
député de Brome-Missisquoi, je vous suggérerais de
demander l'ajournement du débat et il vous restera dix minutes
mardi.
M. Russell: M. le Président, je vous demande l'ajournement
du débat.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader
parlementaire. A l'ordre! M. le leader parlementaire, à l'ordre! M. le
leader parlementaire du gouvernement.
M. Burns: M. le Président, je rappelle que demain la
commission du tourisme, de la chasse et de la pêche se réunira
à la suite de la question avec débat de la part du
député de Portneuf.
Je n'ai pas encore reçu d'avis, à moins que quelqu'un
d'autre soit... On me dit qu'apparemment la commission de la justice aurait
terminé ses travaux. S'il y a consentement et si le baîllon n'est
pas imposé par l'Opposition à la commission parlementaire de la
justice...
M. Levesque (Bonaventure): Vous me faites rire, vous!
M. Burns: Si tel était le cas, l'avis que j'ai
donné cet après-midi, comme je l'ai mentionné, deviendrait
caduc à compter de mardi matin. M. le Président, nos travaux
reprendront mardi après-midi, de sorte que je propose l'ajournement de
nos travaux à mardi, 14 heures.
Le Vice-Président: C'est évidemment adopté.
Les travaux de l'Assemblée sont ajournés à mardi, 14
heures.
(Fin de la séance à 22 h 2)