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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 20 février 1979 - Vol. 20 N° 105

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures douze minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

M. le leader parlementaire du gouvernement, au nom de M. le ministre d'Etat au développement culturel.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Rapport de la Commission de surveillance de la langue française

M. Charron: M. le Président, au nom du député de Bourget, je voudrais déposer le rapport de la Commission de surveillance de la langue française; rapport annuel pour l'année 1977/78.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre de l'Education.

L'école québécoise

M. Morin (Sauvé): M. le Président, après deux ans d'efforts et de consultations, permettez-moi de déposer l'énoncé de politique et le plan d'action du gouvernement à l'endroit de l'école québécoise.

Le Président: Document déposé.

M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

Lettres relatives à la Société pour l'expansion des exportations

M. Tremblay: M. le Président, comme je l'avais promis il y a quelques jours, il me fait plaisir de déposer deux lettres, soit une lettre que j'ai reçue le 28 décembre 1978 du président de la Société pour l'expansion des exportations et une lettre que j'ai expédiée au président en date du 2 février 1979.

Le Président: Documents déposés.

Dépôt de rapports de commissions élues. M. le député de Beauce-Nord.

Rapport de la commission ayant étudié le projet de loi no 116

M. Ouellette: M. le Président, conformément aux dispositions de notre règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture qui a siégé les 13, 14, 15, 16, 19 et 20 février 1979, aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 116, intitulé: Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.

Les articles 1, 2 et 3, paragraphes a), b) et c), sous-paragraphes j) et k), ont été adoptés avec amendements, selon le cas.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période des questions orales.

M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS Dossier constitutionnel

M. Lavoie: M. le Président, j'aurais une question à l'endroit du premier ministre. J'espère que ma question — et surtout la réponse du premier ministre — pourra faire avancer le problème ou le dossier constitutionnel.

A titre de préambule, M. le Président, je voudrais citer brièvement deux déclarations antérieures du premier ministre. Dans la première, celle du 16 mars 1977, le premier ministre s'exprimait comme suit en cette Chambre: "C'est l'objectif: indépendance, souveraineté. Cela ne sert à rien de "chinoiser" sur les mots; H y a des nuances juridiques, il peut y avoir des nuances politiques. Quant à nous — c'est alternativement qu'on emploie les deux termes — ils signifient la même chose." Le 10 octobre 1978, lors d'une déclaration expresse, d'une déclaration ministérielle en cette Chambre, le premier ministre atténuait quelque peu sa première déclaration et disait à ce moment — je cite l'esprit du premier ministre; j'espère m'en éloigner le moins possible — "II n'est pas question dans notre esprit et c'est le gouvernement qui s'exprime ainsi — d'obtenir d'abord la souveraineté et de négocier l'association par la suite." En somme, c'était, on se le rappelle, la politique du trait d'union où souveraineté et association devront se réaliser sans rupture et concurremment.

En fin de semaine, lors d'un conseil national, la position du Parti québécois, qui est appuyée, à ma connaissance, par le premier ministre, revient, peut-être par souci de transparence, à une souveraineté pleine et entière où l'association n'est plus considérée comme absolument indispensable à la souveraineté. En somme, il n'y a plus de politique du trait d'union. Ma question est la suivante et je crois que la population est en droit, en vue du référendum, d'obtenir une réponse la plus claire et la plus précise possible: Est-ce que vous recon-

naissez, M. le premier ministre, que le Parti libéral du Québec avait raison de prétendre que, même à la suite de votre déclaration ministérielle rassurante du 10 octobre 1978, l'objectif de votre gouvernement, l'objectif fondamental était et demeure l'indépendance et la séparation pure et simple du Québec du reste du Canada?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vous ferai remarquer — je pense que cela le rassurera — que le député de Laval, dans, certainement, sa très sincère confusion...

M. Lavoie: II n'est pas le seul.

M. Lévesque (Taillon): Non, il n'est pas le seul. Vous avez, aujourd'hui, dans un journal qui publie à Montréal et à Québec, autour d'une chronique qui est toute débordante de certitudes plus absolues les unes que les autres, trois expressions. A Montréal, on dit: "Le PQ devra faire la souveraineté." En première page du journal du Québec: "Le PQ devra faire la séparation" — ce sont les informations qu'on m'a rapportées — et à l'intérieur: "Le PQ devra faire l'indépendance." Pas besoin de vous dire que la confusion, quand on veut l'entretenir, c'est curieux comme cela flotte.

En ce qui concerne ces documents du Parti québécois qui, grâce à une fuite, permettent de faire — probablement jamais deux sans trois — trois articles par bribes — notre ami de la galerie de la presse et du Devoir me fait signe que deux suffiront — ces bribes un peu éparses, avec ces titres accrocheurs qui pourraient donner l'impression qu'on redécouvre le monde, encore une fois, quand on se donne la peine de regarder un peu, sont strictement dans la même ligne, que d'autres comprennent très bien, qui s'appelle la souveraineté-association avec laquelle nous, de ce côté-ci de la Chambre, allons vers un référendum qui sera probablement combattu par nos amis, à la condition qu'ils finissent par se démêler. Il y a des gens qui comprennent très bien ce qu'est la souveraineté-association.

Une commission fédérale, nommée par un gouvernement fédéral libéral, vient de publier un supplément, le fameux rapport de la commission Pépin-Robarts: "Définir pour choisir". C'est vrai que ça aide parfois, pour choisir, de définir comme il faut. C'est curieux que eux, quand vient le moment de définir la souveraineté-association sur les options fédérales... (14 h 20)

Si on me permet, M. le Président, juste pour voir les parallèles, voici ce qu'on doit définir en ce moment: Statu quo, page 90; Décentralisation majeure, page 90; Centralisation majeure, page 91 ; Provincialisation des institutions, page 91 ; Fédéralisme asymétrique, page 92; Fédéralisme renouvelé, page 93; Fédéralisme reconstitué —c'est le petit dernier de la famiIle — page 94. On attend toujours la lumière pour "souveraineté-association", deux pa- ges extraordinairement honnêtes et bien tapées —et je rends hommage, ici, aux définisseurs — mais heureusement, ils n'ont pas eu à se perdre dans 25 définitions.il n'y en a qu'une; ils l'ont trouvée. Il n'y en a qu'une, à la page 85, pour le député de Laval et pour d'autres qui ne s'y retrouvent pas.

J'ajouterais, sans vouloir du tout, et Dieu sait, dire quoi que ce soit de déplaisant pour notre ami de Laval, cette réponse de l'ancien ministre libéral fédéral, Jean-Luc Pépin, qui a présidé avec l'ancien premier ministre conservateur de l'Ontario — tous deux de méchants séparatistes — John Robarts, à la préparation de ce rapport. Quand il l'a rendu public et qu'il fut appelé à donner quelques commentaires, en réponse à des questions, il a dit ceci: M. Pépin a indiqué, au moment où il rendait public un nouveau document préparé par la commission, soit un dictionnaire politique, qu'il s'agit, au propos de la souveraineté-association, d'un concept "bien connu", et que ceux qui soutiennent qu'ils ne savent pas ce que cela veut dire ont été en voyage en Floride pendant un certain temps!

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: M. le Président, je ferais remarquer au premier ministre qu'il n'a pas répondu, ni de près, ni de loin, à ma question... ni de près... Et d'ailleurs, M. le Président, ma question supplémentaire est la suivante: Est-ce que vous reconnaissez que le Parti libéral du Québec avait raison de prétendre que, même suite à votre déclaration ministérielle rassurante du 10 octobre 1978, votre objectif fondamental était et demeure l'indépendance et la séparation pure et simple du Québec du reste du Canada? Il s'agit de ma question supplémentaire, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre. M. Lavoie: Oui ou non?

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense qu'il demeure encore parmi les droits fondamentaux de tous les députés, y compris celui qui vous parle, de répondre à une question aussi clairement que possible, mais dans les termes qu'on choisit nous-mêmes. On n'a pas à se les faire dicter par le leader de l'Opposition officielle. D'accord? Bien, il me semble. Maintenant, en attendant, bien sûr, que le Parti libéral obtienne de son chef et unique penseur les obscures clartés qu'on attend toujours sur le fédéralisme renouvelé, certaines sont révélées...

M. Lavoie: M. le Président, question... Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Une Voix: Faites-le donc venir en Chambre notre chef, gang de peureux.

M. Lavoie: J'en fais une question de règlement, M. le Président.

Une Voix: Vous riez de vos farces comme la semaine passée.

M. Lavoie: Ecoutez, est-ce qu'on... Une Voix: ... conte.

M. Lavoie: Ce n'est pas un conte, ce sont des questions.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Est-ce que je peux prétendre, M. le Président, comme député de l'Opposition en cette Chambre, avoir le droit de poser des questions et d'obtenir des réponses? Est-ce que le premier ministre a le droit, en réponse à ma question, de me poser une question? C'est cela que je vous demande. Ma question est claire: voulez-vous apporter une réponse qui soit la plus claire possible? Si vous ne voulez pas nous la donner, donnez-la donc à la population du Québec.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, en attendant, donc — parce que, après tout, il y a un parallélisme — que des choses qui sont d'abord révélées par d'autres fuites du côté libéral, désavouées le lendemain et remises en chantier, encore une fois, par les puissants esprits qui préparent cela, nous donnent un fédéralisme asymétrique ou reconstitué qui pourrait plaire à tout le monde, je dis simplement ceci, M. le Président. Cela devrait rassurer tous nos collègues de la Chambre et je m'engage à en envoyer un exemplaire au député de Laval.

Au lieu des bribes inévitablement incomplètes, des fois un peu distordues par les titres qui peuvent paraître dans les journaux, dès cette semaine, l'ensemble qui est constitué et qui est un document de parti, bien entendu — on s'en va à un congrès national de notre parti à la fin du printemps — l'ensemble de ces propositions émanant du conseil exécutif du Parti québécois, précédé de considérants et coiffé par un court texte — je tiens à le dire parce que les journaux en ont parlé — dont M. Pierre Vadeboncoeur, l'écrivain québécois bien connu, a accepté de faire la rédaction, non pas en vue de donner ses opinions personnelles mais plutôt pour refléter la demande qui lui avait été faite par le parti de nous donner un coup de main, ce qui est normal pour un bénévole, tout cela, évidemment, a été remanié en partie, au moins conformément aux responsabilités des dirigeants du parti.

Il y aura ce texte, ses considérants et ses propositions qui vont, à notre congrès national, démocratique, au mois de mai, être envoyés aux premières régions, parce qu'on a des congrès régionaux dans le parti à partir de la fin de février. Donc, cette semaine, il sera publié officiellement. Enfin, il y aura une publication plus officielle dès la semaine prochaine. S'il y en a que cela intéresse de voir à quel point, depuis douze ans, le Parti québécois, tout en approfondissant sans arrêt sa pensée, est resté absolument clair non pas sur des choses asymétriques, renouvelées, remâchées, rebaptisées, mais sur la souveraineté-association, les copies sont disponibles.

M. Lavoie: Une dernière question. Encore une fois, M. le Président, je ne m'attendais pas à avoir en réponse la déontologie du processus difficile du Conseil national du Parti québécois et du premier ministre, l'évolution de la considération des différentes options du Parti québécois. Je vous ferai remarquer, M. le Président, que je n'ai pas eu de réponse à ma question et, au lieu de faire perdre le temps de la Chambre, je n'ai plus de question additionnelle.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Dommages causés au chantier de LG 2

M. Lalonde: M. le Président, le 21 mars 1974, la violence éclatait sur le chantier de construction de la baie James, dans ce qu'il a été convenu d'appeler le saccage de la baie James, causant des dommages considérables et forçant la fermeture du chantier pour une période de 57 jours. Par suite de ces actes, la Société d'énergie de la baie James prenait, le 24 février 1976, une action en dommages-intérêts au montant d'environ $32 millions contre un certain nombre de syndicats et d'individus. Le procès a débuté devant la Cour supérieure à Montréal le 15 janvier 1979, il y a quelques semaines. Or, on apprenait, il y a quelques semaines, que la Société d'énergie de la baie James envisageait de régler la réclamation de $32 millions pour la modique somme d'environ $125 000. La semaine dernière, j'ai posé des questions au ministre de la Justice, M. le Président, et vous vous souvenez que ses réponses ont fait état d'une ignorance évidente de ce dossier.

Aujourd'hui, je veux poser mes questions au premier ministre. Premièrement, est-il exact qu'un tel règlement est envisagé? Deuxièmement, est-il exact que c'est dans le bureau du premier ministre, en présence du premier ministre ou d'un de ses représentants, qu'une partie de cette négociation de règlement a eu lieu? Enfin, dans l'affirmative, en vertu de quel principe la SEBJ renonce-telle ou est-elle prête à renoncer à une réclamation de $32 millions pour moins de 0,4%? Est-ce en vertu du préjugé favorable envers les travailleurs ou en fonction d'une évaluation objective des droits et des intérêts de la population dans cette réclamation?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, il y avait trois questions du député. Premièrement, il est exact qu'il est question d'un règlement. C'est même, paraît-il, pour ce que j'en sais, assez avancé. Deuxièmement, ce n'est pas du tout, ni de près, ni de loin, dans le bureau du premier

ministre que le règlement ou partie du règlement a eu lieu. Mais il y a eu une consultation au bureau du premier ministre, oui, avec des gens du conseil d'administration de l'Hydro et de la Société d'énergie de la baie James. Je crois qu'en toute bonne foi, parce qu'il s'agit de quelque chose de très important qui concerne une propriété publique, le député permettra que je donne l'arrière-plan. (14 h 30)

A la suite du saccage dont tout le monde, hélas, se souvient, il y a eu une poursuite d'intentée, autour du mois de février 1976, en dommages-intérêts, au montant de $32 millions. Cette décision de poursuivre avait été prise par les autorités de l'Hydro-Québec, après consultation — je vous le fais remarquer — avec le premier ministre du temps, M. Bourassa, vers la fin de 1975. Cette consultation, de même que la décision de poursuivre, étaient absolument normales. Personne n'avait rien à redire là-dessus. Après tout, la responsabilité gouvernementale, au nom des citoyens, existe aussi au niveau politique. La décision appartient quand même forcément à ceux qui ont été chargés d'administrer ces biens publics, y compris pour des poursuites ou pour quoi que ce soit. Il reste cependant que la consultation — des rapports normaux, civilisés entre des instances avec de telles responsabilités — est normale et c'est ce qui avait été fait en 1975 avec le premier ministre de l'époque.

En janvier de cette année, c'est-à-dire il y a quelques semaines, si je suis bien informé, la Société d'énergie de la baie James a reçu des offres de règlement de la part de certains des défendeurs et, ce qui est assez normal, de nouveau, elle a voulu savoir le sentiment de celui qui vous parle là-dessus.

Mon sentiment a été très clair, la décision appartient forcément à l'Hydro-Québec et à son conseil d'administration qui coiffe toute l'opération chantier, énergie, etc., et, bien sûr, à la Société d'énergie de la baie James elle-même, qui est là comme partie.

Tout en étant bien clair là-dessus, et le demeurant encore aujourd'hui, mon sentiment — et je leur ai donné, comme ils le demandaient — est éminemment favorable à un règlement. Les modalités, je ne veux pas les connaître, jusqu'au jour où on les connaîtra tous. Ce n'est sûrement pas à mon bureau de commencer à dire que ce sera tant, etc. Ce n'est pas de notre affaire. Mais l'idée, le principe du règlement, oui.

Si on me le permet, je voudrais dire rapidement pourquoi. Je réfère tout le monde à la seule enquête — sauf erreur — qui a été faite, d'une façon globale, sur ce saccage de la baie James, et qu'on trouve aux pages 68 et 69 — dont je vais citer un bref extrait — du rapport de la commission Cliche. Je pense qu'il est important, pour l'équité, d'écouter ces deux paragraphes: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé. Il ne s'agit aucunement d'une réaction de masse, mais bien d'une opération montée par un noyau de mécréants, dirigés par Duhamel, on s'en souvient, pour montrer une fois pour toutes qui était le maître ou le "boss" à la baie James. L'impression nette que nous tirons — je cite toujours — de l'interrogatoire des témoins du saccage est que les travailleurs ont été de simples spectateurs et même des victimes des actes insensés posés par un Duhamel en délire."

C'est à ce genre de catastrophe que devait fatalement aboutir l'irresponsabilité des aventuriers sans scrupules qui avaient fait main basse sur le contrôle des principaux locaux syndicaux des chantiers de la FTQ-Construction. Puisqu'on demande les résultats de la consultation que j'ai eu avec les gens qui m'ont demandé mon opinion, en partant de ça et de quelques autres faits, il me semble — c'est le sentiment que j'en ai — qu'il serait injuste de faire payer par l'ensemble des travailleurs qui sont membres des syndicats défendeurs, les syndicats québécois, qui peuvent être tenus techniquement et juridiquement responsables — d'ailleurs ils l'admettent — des montants importants pour lesquels ils ne sont franchement pas responsables. Ils ne sont tellement pas responsables qu'en fait ça se passe remarquablement très bien à la baie James maintenant; on sait que, à l'automne 1979, des mois avant les dates prévues, les premiers groupes générateurs vont être mis en service à LG 2. Ce qui veut dire que, depuis ces événements, la productivité s'est accrue sur le chantier et qu'il y a vraiment un climat remarquablement meilleur que jamais auparavant.

J'ajouterais, tenant compte du rapport Cliche, que trois des cinq individus défendeurs, y compris celui qui a été nommé dans le rapport, ont déjà été condamnés au criminel ou sont présentement devant les tribunaux. Quant aux deux autres, si on s'imagine qu'ils pourraient payer les montants éventuels du jugement, on est optimiste.

Il y a évidemment l'implication — je termine là-dessus — du syndicat américain, qui, lui, est solvable, parce que les syndicats québécois ne sont pas solvables. Il semble que sa responsabilité soit, le moins qu'on puisse dire, aléatoire; de toute façon s'il y avait un jugement, les recouvrements seraient longs et compliqués, je pense que ce n est pas difficile à comprendre. Ce qui semble encore plus important, parce qu'il y a quand même quelque chose qui est moralement difficile à défendre à certains points de vue, ç'est que l'implication — il y avait un décrochage à peu près complet de la centrale syndicale américaine — réelle des Américains est inexistante dans ces événements. C'est leur faire porter une chose où vraiment, ni de près ni de loin, ils n'ont eu quoi que ce soit à faire.

Finalement, le coût de la cause, si elle continue, est le suivant, au bas mot, d'après ceux qui nous ont donné leur opinion. Pour obtenir un jugement ça coûterait à peu près $2 millions ou $3 millions, si on inclut les frais de la Société d'énergie et même ceux de l'aide juridique du gouvernement qui, pour certains défendeurs, serait obligée de se substituer aux procédures normales où on paie des avocats, parce qu'ils n'ont pas les moyens.

Tout ça résume le sentiment que j'ai donné aux gens qui voulaient l'avoir; je ne parle même pas du climat social et de la nécessité d'un bon climat sur des chantiers lointains, mais les raisons sont là. A partir de là la décision de règlement appartient à la Société d'énergie de la baie James, mais comme elle l'avait fait en 1975, au moment de poursuivre, en consultant elle a eu l'opinion du premier ministre d'aujourd'hui, s'il s'agit d'un règlement éventuel.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, après cette longue réponse du premier ministre, je l'en remercie. Il a fait une déclaration d'insolvabilité au sujet des syndicats québécois; ça a dû être un lapsus, il a dû vouloir dire que les syndicats n'avaient peut-être pas les moyens de payer une réclamation de $32 millions.

Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent, et c'est là en fait l'ingérence du premier ministre dans cette décision — que je déplore dans sa déclaration aujourd'hui — est-ce qu'il ne serait pas plus prudent, dis-je, de se reposer sur un jugement de la Cour supérieure ou un jugement d'un tribunal pour déterminer la responsabilité, parce qu'en voulant favoriser un groupe de travailleurs on enlève à l'ensemble de la population, qui comprend tous les travailleurs, syndiqués ou non, les droits qu'elle a dans cette réclamation? S'il y a un syndicat qui est solvable, pour employer l'expression du premier ministre, pourquoi ne pas attendre le jugement de cour et ensuite tenter d'aller chercher ce qui est notre dû à toute la population, là-dedans? Est-ce que ce ne serait pas plus sage comme décision de premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Ecoutez, sur la question de sagesse, sur l'opportunité éventuelle des décisions, je répète ce que j'ai dit: C'est à la Société d'énergie de la baie James, au conseil d'administration qui la coiffe aussi, de prendre les décisions. S'il y a un règlement qui est négocié —je sais qu'il y a eu des approches, je l'ai dit dès le début de l'année 1979 — la décision, ni de près ni de loin, le bureau du premier ministre ne pèse dessus. On a demandé notre sentiment et en toute conscience, je ne répéterai pas tout ce que j'ai dit y compris sur la responsabilité plus qu'aléatoire des Américains là-dedans, en fait inexistante à toutes fins utiles, j'ai donné mon sentiment. La décision appartient à ceux qui administrent l'entreprise, y compris les modalités d'un règlement, les questions de responsabilités, etc. Cela ne nous regarde pas, c'est leur droit.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Est-ce que le premier ministre va au moins nous donner l'assurance que le ministre de la Justice n'a pas pu nous donner la semaine dernière, à savoir que la Société d'énergie de la baie James va s'appuyer sur un avis juridique quant à la responsabilité? Les avis juridiques du premier ministre ici, cela ne pèse pas fort. Quand il a parlé de la responsabilité à peu près inexistante, vous m'excuserez de ne pas la prendre. Est-ce que cela ne serait pas plus juste que la Société d'énergie de la baie James fasse reposer sa décision sur un avis juridique, à savoir la responsabilité de ce syndicat américain, en particulier, et aussi des autres, parce que c'est l'argent de la population?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, inutile d'ajouter que ce que j'ai dit tout à l'heure, c'était après avoir été passablement mis au courant des avis juridiques assez nombreux qui ont été accumulées autour et alentour de cette question-là. Je voudrais quand même que le député ne soit pas injuste pour le ministre de la Justice qui n'est pas ici aujourd'hui, parce qu'il n'avait pas à connaître cette affaire. (14 h 40)

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

Retrait d'un appui relatif au projet de loi no 116

M. Biron: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Je veux m'adresser à lui aujourd'hui en tant que chef de gouvernement. Le télégramme suivant est daté du samedi 17 février et a été envoyé au ministre de l'Agriculture: "M. le ministre, à la lumière des récents événements et à la suite des pressions de plus en plus forte de ses membres, la Coopérative agricole de Qranby désire vous informer qu'elle retire son appui aux articles 1, 3, 5 et 6 du projet de loi 116, ainsi qu'aux modifications proposées, et qu'elle entend alerter le monde agricole et coopératif des dangers que présentent leur adoption. Devant l'ambiguïté de ces articles, nous ne pouvons souscrire à l'adoption du projet de loi 116 dans son intégralité. L'absence totale d'un consensus social sur la portée et l'application du projet justifie à elle seule qu'il soit scindé et commande la tenue d'une commission parlementaire sur le problème du lait..." Avec un autre paragraphe dans le même sens, cela se termine en disant: "Enfin, nous réitérons les propos tenus dans nos communications en date des 13 et 21 décembre 1978.", et c'est signé: "La Coopérative agricole de Granby, par Michel Lemire, président."

Ma question au premier ministre, c'est, en tant que chef d'un gouvernement qui se veut responsable, d'un gouvernement qui se veut à l'écoute des gens, d'un gouvernement qui veut agir avec transparence, a-t-il été informé de l'existence de ce télégramme et, deuxièmement, entend-il se rendre à la demande du président de la Coopérative agricole de Granby?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Premièrement, oui, j'ai été mis au courant de l'arrivée de ce télégramme par le ministre de l'Agriculture qui m'a également expliqué assez longuement les raisons pour lesquelles, deuxièmement — parce que c'est la deuxième question au chef de l'Union Nationale — avec tout le respect qu'on doit aux dirigeants de la Coopérative de Granby, on ne croyait pas indiqué de se rendre à leur demande.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Ma question s'adresse encore au premier ministre. La Coopérative agricole de Granby est la plus importante coopérative dans le domaine agricole au Québec, autant au point de vue du nombre d'agriculteurs qu'au point de vue du volume de production. Lorsque le président de cette importante coopérative et le monde agricole lui demandent de tenir une commission parlementaire pour écouter ce qu'ils ont à dire, le premier ministre ne trouve-t-il pas incompréhensible de la leur refuser, d'autant plus que c'est une institution économique québécoise — ce n'est pas la Sun Life, la Coopérative de Granby, cela appartient à des Québécois — et qu'ils demandent à être entendus?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je ferai remarquer au chef de l'Union Nationale que le projet de loi 116 est devant l'Assemblée nationale depuis plusieurs jours, au moins, avant Noël, en fait, depuis la fin de novembre. Un télégramme arrivant presque à la veille du moment où un ordre de la Chambre nous prescrit de terminer — on a tous accepté cet ordre à l'unanimité — aujourd'hui même, la troisième lecture, le complément de la loi 116, est évidemment — et je le comprends — un moyen de pression ultime de gens qui peuvent avoir leurs objections. Ce n'est pas parce qu'ils sont Québécois plutôt que la Sun Life qu'on va toujours avoir l'unanimité; ce n'est vraiment pas tout à fait conforme à ce qui se vit dans le monde courant. Puisqu'ils ne sont pas d'accord sur certains points alors que d'autres l'appuient, autrement dit puisqu'il n'y a pas d'unanimité, est-ce que le gouvernement doit toujours attendre qu'il y ait unanimité pour fonctionner? Ce serait le chaos créateur, c'est le moins qu'on puisse dire.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Une question additionnelle adressée au premier ministre. Je veux bien croire que le télégramme a été expédié samedi, mais je vais lui lire la copie d'un autre télégramme qui a été expédié le 21 décembre 1978, encore au ministre de l'Agriculture, et qui disait ceci: "Vu l'urgence de régler, dans l'intérêt des producteurs agricoles du Québec, le problème soulevé par le récent jugement de la Cour suprême du Canada, nous désirons appuyer le projet de loi 116 uniquement en ce qui concerne les articles 2, 4, 7 et 8 et nous vous prions d'en assurer l'adoption avant la fin de la présente session. En ce qui a trait aux autres articles dudit projet, nous vous prions instamment de les retirer afin d'en permettre une discussion plus éclairée à la prochaine session." C'est signé: Le conseil d'administration de la Coopérative agricole de Granby, Michel Lemire, président.

Ce télégramme ne date pas d'hier ou d'avant-hier; il date du 21 décembre. Le premier ministre était conscient de la demande du président de la Coopérative agricole de Granby. Je lui demande, encore une fois, s'il veut entendre en commission parlementaire le président de la plus importante coopérative agricole du Québec.

M. Lévesque (Taillon): Non, M. le Président, pour la bonne et simple raison que c'est l'Union Nationale, entre autres, et le député de Beauce-Sud qui ont amené plus activement que n'importe qui le prolongement du débat sur la loi 116 qui a duré — on vient d'en avoir un rapport au début de la séance — des jours et des jours jusqu'à ce matin inclusivement.

Pendant ces jours, ceux qui le voulaient, non seulement à coups de télégrammes, mais très évidemment aussi à coups de rencontres et de résumés des arguments du côté de l'Union Nationale comme des autres opposants à certaines parties de la loi, ont eu amplement le temps de vérifier toutes les oppositions, de même que le ministre de l'Agriculture. Il nous semble, quant à nous, que le débat est terminé. La Chambre a donné l'ordre que le projet de loi soit... c'est évident que l'unanimité n'est pas là, mais c'est sûr aussi qu'il fallait agir selon notre jugement. On portera les conséquences, comme gouvernement, de notre jugement, comme c'est le cas dans tout domaine démocratique, je pense.

Le Président: Le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Une question additionnelle, M. le Président. En parlant de vérifier les arguments, depuis le 16 décembre 1978, le ministre de l'Agriculture n'a pas rencontré le président de la Coopérative agricole de Granby — il nous a dit cela ce matin, en commission parlementaire; j'ai les transcriptions devant moi — alors que le 21 décembre, il recevait un important télégramme du président de la Coopérative agricole de Granby. Je vais demander au ministre de l'Agriculture pourquoi il n'a pas fait état à la Chambre de ce télégramme. Depuis deux semaines que nous étudions le projet de loi. Pourquoi ne pas avoir informé l'opinion publique, la Chambre, au moins, les représentants à l'Assemblée nationale et la commission parlementaire, de l'existence de ce télégramme? Qui le ministre a-t-il à protéger en voulant passer le projet de loi 116 coûte que coûte, et pour quelle raison veut-il passer le projet de loi 116 coûte que coûte?

Une Voix: Les agriculteurs...

Le Président: Le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: M. le Président, j'ai reçu un télégramme le 13 décembre de la Coopérative fédérée et de la Coopérative de Granby et il se lisait comme suit: Prenons connaissance du projet de loi 116. Stop. Recevons beaucoup de demandes d'informations de coopératives agricoles concernées par la loi de mise en marché. Stop. Bon...

M. Biron: Ce n'est pas cela que j'ai demandé au ministre. J'ai demandé: le télégramme du 21 décembre...

M. Garon: Attendez un peu. Bien oui...

M. Biron: J'ai posé une question sur le télégramme du 21 décembre, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, il ne faudrait pas trop s'écarter du sujet, s'il vous plaît!

M. Garon: Alors "impossible mesurer portée certains amendements suggérés. Stop. Vous demandons entrevue aux fins de discuter projet de loi avant passation en deuxème lecture."

M. Biron: Question de règlement, M. le Président. Ce n'est pas cela que j'ai demandé au ministre. J'ai demandé pourquoi... M. le Président, une question de règlement...

Le Président: Le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Le ministre ne répond pas à ma question. J'ai demandé: Pourquoi ne pas avoir informé la Chambre?

Le Président: Le chef de l'Union Nationale. M. le chef de l'Union Nationale, je pense que si on permet une certaine latitude pour formuler les questions, on peut permettre également une certaine latitude pour y répondre, en l'abrégeant le plus possible, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Garon: Alors, suite à ce télégramme, le 16 décembre, un samedi, parce que...

Une Voix: Laissez-le donc répondre.

M. Garon: Voulez-vous attendre? On n'est pas dans l'Union Nationale. Vous pouvez faire vos foires ensemble, mais laissez donc l'Assemblée nationale tranquille!

Le 16 décembre, parce que les gens de la coopérative pouvaient difficilement me rencontrer avant le mardi suivant, et sachant qu'on était à la fin des débats de la Chambre, à la fin de la session, j'ai demandé qu'on ait une rencontre auparavant. On s'est entendu finalement pour le samedi, à 16 heures. J'ai rencontré, le samedi, de 16 heures à 19 heures, des gens de tout le mouvement coopératif, incluant les gens de la Coopérative de Granby et de la Coopérative fédérée. J'ai envoyé, et c'était notre entente, le texte écrit des amendements que je proposerais dès l'ouverture, à la première occasion, pour modifier le projet de loi 116. Après cela, j'ai reçu un autre télégramme de la Coopérative fédérée...

M. Biron: M. le Président, c'est sur une question additionnelle.

M. Garon: Laissez-moi finir.

M. Biron: Ce n'est pas cela que j'ai demandé au ministre. Ce n'est pas cela que j'ai demandé au ministre, M. le Président.

M. Garon: Bien oui!

M. Biron: Pourquoi a-t-il caché l'existence du télégramme du 21 décembre à la Chambre? C'est cela que je lui ai demandé.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Le 18 décembre, je recevais le télégramme suivant...

M. Biron: Question de règlement, ce n'est pas cela que j'ai demandé. Je voudrais que le ministre réponde à ma question.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, s'il vous plaît!

M. Garon: Le télégramme du 18 décembre de la Coopérative se lisait comme suit: "Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom des coopératives agricoles concernées, est d'accord avec le projet de loi 116 tel que soumis à notre attention lundi matin le 18 décembre — stop — Coopérative fédérée réaffirme qu'elle n'a jamais, ni de près ni de loin, adhéré ou donné son appui au mouvement des producteurs dissidents." (14 h 50)

Vous parlez d'un télégramme du 21 décembre auquel on m'a référé en fin de semaine, que je n'avais pas vu. Le 21 décembre, vous le savez comme moi, c'était le début du congé de la fonction publique, les gens s'en allaient. Les télégrammes, on ne les reçoit pas à mon ministère mais dans un autre ministère, et ce qui est arrivé, c'est que le télégramme du 21, je ne l'ai pas eu. Je l'ai eu ce matin, pour dire la vérité.

M. Grenier: Cela fait deux semaines que vous trompez la Chambre et la commission. Vous le savez à part cela.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. Grenier: Démissionnez. Bluffeur!

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton, s'il vous plaît, pour donner une chance à vos collègues.

M. Garon: A tel point que, quand on est venu me remettre cette copie de télégramme ce matin, on pensait que j'avais reçu ce télégramme en fin de semaine de la Coopérative de Granby, qu'en passant je n'ai pas reçu. Celui que j'ai reçu, c'est celui que vous m'avez donné hier, le chef de l'Union Nationale, parce que vous l'avez reçu avant moi.

Je trouve cela curieux, d'ailleurs, comme façon de procéder. Comme façon de vivre, je trouve cela curieux. Prière de remettre immédiatement à Rodrigue Biron...

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture. M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président.

M. Biron: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Je vais essayer de revenir à l'Union Nationale mais, toute la semaine dernière, j'ai promis une question à M. le député de Beauce-Sud et à M. le député de Rimouski.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Biron: Le ministre a induit la Chambre en erreur.

Impôt des travailleurs autonomes

M. Roy: Merci, M. le Président. J'aurais bien des questions à poser relativement à la loi 116; j'aimerais tout de même poser une question à l'honorable ministre des Finances en ce qui concerne les dépenses admissibles pour fins d'impôt de la part des travailleurs autonomes. L'Association des assureurs-vie vient de publier une lettre ouverte reprochant à l'actuel ministre des Finances de ne pas avoir tenu compte des représentations qui ont été faites dans son mémoire du mois d'avril 1978 et qui a été également suivi d'une rencontre, trois mois plus tard, au cours de laquelle deux solutions, deux propositions avaient été retenues, soit celle, premièrement, d'augmenter le plafon de $7500 des dépenses — je me réfère toujours au document, M. le Président — et, deuxièmement, de reconnaître une partie des frais d'intérêts sur l'achat de l'automobile. Plus tard, le cabinet du ministre des Finances ainsi que d'autres ministres auraient promis des amendements à la loi 65. On se rappellera que la loi 65 a été adoptée à la toute fin de la session, M. le Président.

J'aimerais demander à l'honorable ministre des Finances si c'est son intention de donner suite aux revendications qui sont faites à l'heure actuelle et de revoir ce dossier le plus rapidement possible.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, j'ai effectivement rencontré le groupe dont fait état le député de

Beauce-Sud, et je dois dire d'ailleurs plusieurs autres groupes qui étaient intéressés par la même question. C'est un dossier qui a été longuement examiné. Dans mon esprit, maintenant, après avoir fait faire passablement d'études dans ce domaine, je pense que beaucoup des attaques auxquelles cette question a donné lieu ne sont pas vraiment fondées. Il y a cependant, possiblement, des ajustements que l'on peut envisager, peut-être pour l'avenir, mais on comprendra, M. le Président, que ce n'est pas à quelques semaines du discours du budget que je pourrais faire des commentaires sur la question.

Nous verrons, au moment du discours du budget, s'il y a lieu de modifier certaines choses ou simplement de maintenir le statu quo. Je dois dire cependant, encore une fois — c'est la seule chose que je reprendrais dans le discours du député de Beauce-Sud — que quand je rencontre des groupes comme ceux-là, qui me font des représentations — et Dieu sait s'il y en a — sur les divers aspects des impôts, je pense qu'il n'est pas correct de dire que telle ou telle mesure a été retenue, et, forcément, je ne m'engage jamais devant des groupes quand je les rencontre.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud, dernière question.

M. Roy: Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre reconnaît quand même qu'il y a, de ce côté, une injustice? Si on considère qu'au niveau de la fonction publique et de la fonction parapublique, les dépenses sont remboursées; si on considère que dans l'industrie de la construction également, lorsqu'un certain nombre de milles sont dépassés par les travailleurs, il y a effectivement des dispositions très claires dans le décret de la construction et que de plus en plus de travailleurs salariés font rembourser les dépenses inhérentes à leur fonction, est-ce que le ministre reconnaît que pour les travailleurs autonomes, à l'heure actuelle, il y a une injustice sérieuse, qu'il convient de souligner? C'est pourquoi je veux attirer l'attention du ministre et lui demander si, effectivement, son ministère a l'intention d'apporter des correctifs pour corriger cette injustice. Et demander quand le ministre serait prêt à nous annoncer quelque chose.

M. Parizeau: M. le Président, la principale injustice, je pense, du système que nous avons connu jusqu'à maintenant, c'est que justement les salariés, en tant que salariés, n'avaient pas, pour les dépenses liées directement à leur déplacement de chez eux à leur lieu de travail, quelque allocation que ce soit. Alors qu'au contraire, pour beaucoup de travailleurs autonomes, on ne tenait pas compte suffisamment du fait que s'ils ne se servaient pas de leur auto pour gagner leur vie, de toute façon ils auraient une auto et des frais fixes qui seraient reliés à l'achat de cette auto.

Ce que nous avons fait, à l'occasion du dernier discours du budget, remettait, je pense, au contraire, un peu d'équité sociale dans le système.

Quant à savoir si toutes les dispositions qui ont été prises ont toutes la même valeur et doivent toutes être retenues comme elles l'ont été, ou si certaines améliorations ne peuvent pas être apportées au système, encore une fois, M. le Président, on me permettra d'attendre au prochain discours du budget.

Le Président: M. le député de Laprairie.

Projet d'expansion de Pratt & Whitney

M. Michaud: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au premier ministre ou au ministre d'Etat au développement économique.

J'ai entendu dire ce matin que Pratt & Whitney de Longueuil aurait l'intention de déménager une partie de ses ingénieurs unilingues anglais vers Toronto. Est-ce que le ministre a été avisé de cela ou est-ce simplement un ballon de nos amis d'en face?

Le Président: M. le ministre d'Etat au développement économique.

M. Landry: M. le Président, comme mes deux "questionneurs" de l'Opposition officielle ne sont pas là aujourd'hui et qu'ils brillent pas leur absence, il est important que le pouvoir secrète lui-même ce genre de questions, parce qu'on a des réponses très claires qui viennent précisément...

Une Voix: Ils ont des adversaires encore de l'autre bord.

M. Landry: Comme vous dites! ... de la société Pratt & Whitney Aircraft, dans un communiqué émis le 20 février. Je vais en lire quelques paragraphes, le plus brièvement possible; ils sont significatifs. "Pratt & Whitney désire faire une mise au point pour dissiper certaines rumeurs relatives à un projet d'expansion possible en dehors du Québec." Alors, cela donne déjà le ton." Pratt & Whitney Aircraft du Canada n'a pas l'intention de quitter le Québec. La compagnie est présentement engagée dans une phase d'expansion touchant toutes ses activités, particulièrement son activité d'ingénierie. Dans le but d'accélérer la croissance de son service d'ingénierie, la compagnie est à étudier la possibilité d'établir en Ontario un satellite à son service de recherche et de développement. Ceci afin de profiter d'un réservoir additionnel d'ingénieurs qualifiés. Aucune décision n'a cependant encore été prise. "Si ce projet devait se matérialiser, l'activité principale de recherche se poursuivrait quand même au Québec au rythme actuel et avec des effectifs, sensiblement inchangés." Par conséquent, il n'y a pas de perte d'emplois pour le Québec. "Si l'expansion du service d'ingénierie avait lieu en Ontario, un nombre limité d'ingénieurs — ce sont ceux auxquels le député fait allusion — s'y verraient transférés. Nous pré- voyons, par ailleurs, que le nombre d'ingénieurs affectés au Québec demeurerait à peu près au niveau actuel." En d'autres termes, certains s'en vont, mais on réembauche ici.

M. Lavoie: Cela va bien! Vous n'êtes pas tellement exigeant.

M. Landry: Ecoutez, vous allez voir que, dans la fin du communiqué, il y a des choses beaucoup plus positives que le simple fait que ce soit inchangé, mais c'est inchangé. "Le service d'ingénierie au Québec compte à peu près 900 personnes, ce qui en fait le plus important groupe de recherche et de développement du secteur aéronautique canadien." Et, en plus, la compagnie, qui a investi $7,5 millions au Québec l'an dernier, en investit $14 millions en 1979. (15 heures)

Le Président: Fin de la période des questions. A moins d'un consentement unanime, je ne peux pas continuer la période des questions.

M. Garon: Question de privilège.

M. Lavoie: Question de règlement, M. le Président, est-ce qu'on pourrait suggérer qu'après la fin de la présente session il puisse y avoir une rencontre entre la présidence et les leaders parlementaires des différents partis pour qu'il y ait une amélioration à la période de questions. Aujourd'hui, nous avons eu deux questions uniquement, l'Union Nationale une seule, une du député de Beauce-Sud et une du côté ministériel, dans trois quarts d'heure. Je crois que ce n'est pas raisonnable et je crois que la responsabilité nous incombe à nous tous de rendre cette période de questions plus vivante, plus efficace. M. le Président, je vois votre sourire, mais cela fait plusieurs fois qu'on soulève cette question et je crois que c'est une de vos responsabilités de la rendre plus profitable au service de nos concitoyens. C'est inconcevable que dans 45 minutes il n'y ait que quatre ou cinq questions. Je pense que ce n'est pas l'expérience qu'on a vécue dans le passé, M. le Président.

Le Président: A ce sujet, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, il me fait plaisir de vous signaler que, suivant les statistiques des six dernières années, c'est rigoureusement le même nombre de questions, en moyenne, durant les six dernières années. Je vous ai déjà fait parvenir des statistiques à ce sujet, c'est rigoureusement exact.

M. Lavoie: Je ne voudrais pas partir un débat que vous semblez vouloir amorcer, M. le Président, mais je vous ferai remarquer qu'auparavant c'était une demi-heure, la période des questions. Si c'est le même nombre qu'en 45 minutes, il n'y a pas d'amélioration.

Le Président: Sans vouloir mettre un terme au débat, M. le leader parlementaire de l'Opposition

officielle, je voudrais vous signaler que la moyenne des six dernières années pour la période des questions a été de 46 minutes. M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président.

M. Lavoie: M. le Président, sur une question de règlement, dans le respect de nos institutions parlementaire, je reconnais que vous avez le dernier mot.

Le Président: Merci.

M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président, sur une question de règlement également. J'aimerais vous rappeler, M. le Président, que la prolongation de la présente session que constituent les quelques jours pendant lesquels la Chambre se réunit actuellement vise essentillement, de la part du gouvernement, à étudier et à tenter de faire adopter son projet de loi no 116. Or, aujourd'hui, durant cette période de questions, l'Union Nationale qui, comme vous le savez, mène toujours la lutte contre ce projet de loi, n'a pu avoir qu'une seule question durant toute la période de questions et s'est vue refuser quelques questions additionnelles à la suite des deux ou trois autres.

M. le Président, je vous demande de considérer ce point de vue, compte tenu du fait que vous avez convoqué la session de façon particulière là-dessus, alors que la commission parlementaire n'a pas fini d'étudier le projet de loi actuel. C'est le droit de l'Opposition de se faire entendre...

M. Jolivet: Allez-y! Allez-y en commission!

M. Brochu: ... et de faire valoir les droits des coopérants en cette matière, de faire la lumière sur cette question.

M. Charron: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron:... j'ai l'impression que je n'ai pas vécu la même période de questions que ceux qui viennent de s'exprimer. Je me suis même attardé à remarquer pendant un moment que c'était calme, qu'il y avait un échange. Je pense que n'importe qui pouvait entendre et c'était peut-être un modèle de période des questions. Je crois plutôt que ce que nos amis n'ont pas aimé, c'est la qualité des réponses.

Le Président: Nous en sommes aux motions non annoncées.

M. Goulet: M. le Président, je vous demande une directive.

Le Président: Nous en sommes aux motions non annoncées.

M. Goulet: Je vous demande une directive, M. le Président.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: J'aimerais savoir comment on peut procéder, en vertu de notre règlement, à la suite de la salade que nous a servie le ministre de l'Agriculture, salade à haute teneur de vinaigre, pour demander la démission d'un ministre.

Le Président: Nous en sommes aux motions non annoncées.

M. Brochu: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Le ministre a été interrompu dans une réponse par laquelle il a induit la Chambre en erreur tout à l'heure, lorsqu'il a mentionné qu'il était anormal que le chef de l'Union Nationale, comme le député de Beauce-Sud reçoivent un télégramme dernièrement de la Coopérative agricole de Granby indiquant sa dissension par rapport au projet de loi et son opposition vis-à-vis de certains articles du projet de loi. Le télégramme en question, pour bien situer les faits dans leur vrai contexte, dit ceci. Le ministre aurait dû lire également ce qu'il a écrit sur le télégramme. "Copie d'un télex envoyée ce jour au ministre de l'Agriculture du Québec, M. Jean Garon." Le ministre trouve curieux de ne pas recevoir ce télégramme de fin de semaine qui lui est adressé; ce n'est pas étonnant du tout puisqu'il n'a pas reçu celui qui lui a été envoyé il y a deux mois par la Coopérative de Granby signifiant son opposition au projet de loi. Il l'a avoué lui-même tout à l'heure.

M. Garon: M. le Président, j'allais justement soulever une question de privilège pour pouvoir terminer ma réponse.

M. Goulet: Vous nous en ferez part au mois de juin.

M. Garon: De fait, la seule copie que j'ai à ce moment-ci, c'est la copie que m'a remise le chef de l'Union Nationale hier.

M. Grenier: Changez de personnel.

M. Garon: Je ne sais pas si on m'a envoyé la copie du télex par la poste, mais je ne l'ai pas encore eue. J'ai demandé à mon cabinet de vérifier régulièrement, au cours de la journée d'hier; on a vérifié ce matin encore et je ne l'ai pas eue. C'est inscrit que le télégramme a été envoyé au chef de l'Union Nationale actuellement en congrès chez vous, à l'hôtel Hilton, et qu'une copie d'un télex est envoyée ce jour au ministre de l'Agriculture du Québec, M. Jean Garon. Je ne l'ai pas encore eue, croyez-le ou non. Je ne sais pas

s'il m'a été envoyé par la poste ou non, mais j'ai fait vérifier à l'endroit où arrivent les télex et je ne l'ai pas encore reçu. Je ne l'ai pas reçu chez moi, je ne l'ai pas reçu non plus à mon bureau de comté.

M. Brochu: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Etant donné que la Chambre est spécifiquement convoquée pour l'étude de la loi 116, ainsi que la commission parlementaire, comment se fait-il qu'un ministre dise ne pas recevoir les télégrammes qui vont à l'encontre de sa position, refuse de les rendre publics...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Nous en sommes maintenant à l'enregistrement des noms sur les votes en suspens. Je crois qu'il n'y en a pas.

Question de privilège relative aux syndicats agricoles

Je voudrais maintenant donner lecture à l'Assemblée d'un avis qui m'a été signifié ainsi: Le 20 février 1979. M. le Président, en conformité avec les dispositions de l'article 49 de notre règlement, je vous avise que je désire soulever une question de privilège suite à un article paru dans le quotidien Le Soleil de vendredi dernier, et ce avant l'appel des affaires du jour. Vous remerciant à l'avance de votre bonne collaboration, je vous prie d'agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments distingués, et c'est signé de Fabien Roy, député de Beauce-Sud.

M. le député de Beauce-Sud, brièvement, s'il vous plaît!

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président. Si j'ai voulu soulever cette question de privilège, c'est à la suite d'un article paru, comme je l'ai dit dans ma lettre, vendredi dernier dans le journal Le Soleil et qui a pour titre: "Roy dénonce les syndicats agricoles". J'ai lu l'article. Un peu plus loin — le moins que je puisse dire c'est que le titre est très radical — on dit que "le chef du PNP, M. Fabien Roy, et le député péquiste de Joliette-Montcalm, M. Chevrette, "ont échangé" de vives réparties". Et que le ton a monté "lorsque M. Roy a manifesté ses inquiétudes vis-à-vis des syndicats agricoles."

M. le Président, manifester des inquiétudes vis-à-vis des syndicats agricoles et dénoncer les syndicats agricoles, ce sont deux choses. J'ai bien voulu relire les propos que j'avais tenus en me référant à la transcription du journal des Débats, à la page 1613-2. Voici ce que j'ai dit à ce moment-là: "Les plans conjoints ont besoin de pouvoirs pour être efficaces. Tout le monde admet cela. Il y a des pouvoirs prévus dans la loi 36, mais il y a une question que nous devons nous poser tous ensemble. Jusqu'où doit-on accorder des pouvoirs, jusqu'où doit-on en accorder? Est-ce qu'on doit accorder des pouvoirs tels que cela pourrait permettre de façon très légale d'aller contrôler l'agriculteur chez lui sur sa ferme? C'est là qu'est la question, M. le Président. C'est une question qui est fondamentale, c'est une question de fond. Est-ce qu'on doit donner ces pouvoirs à des organismes constitués, même si ce sont des agriculteurs qui sont membres? Quand les agriculteurs sont membres d'un organisme, c'est une délégation de pouvoirs qu'on fait à l'organisme. On sait très bien, M. le Président, qu'à ce niveau-là, lorsqu'on donne des pouvoirs aussi étendus que ceux-là, il y a toujours quelqu'un quelque part qui, par la force des choses, avec le temps, finit par accaparer ces pouvoirs et par exercer en quelque sorte un contrôle, une domination sur ceux dont il a le mandat de surveiller les intérêts, ce sont des choses qui sont arrivées ailleurs. Il y a eu bien des lois spéciales présentées à l'Assemblée nationale justement contre ces abus de pouvoir et ces abus de réglementation dans le passé. Je ne voudrais pas que la classe agricole du Québec soit victime de la même situation".

Or, M. le Président, il y a une nuance très claire entre poser des réserves sur l'étendue des pouvoirs qu'on accorde à des organismes et dénoncer les organismes comme tels. Lorsque j'aurai des dénonciations à faire, j'entends me prévaloir de mon droit de parole à l'Assemblée nationale et parler en termes suffisamment clairs pour être bien compris de tout le monde. Encore une fois, il n'a jamais été question pour moi de dénoncer les syndicats agricoles. Je n'ai jamais eu l'intention de le faire. Je n'ai aucune raison de le faire, non plus. (15 h 10)

Le Président: Merci, M. le député de Beauce-Sud.

Demande de débat d'urgence concernant les produits pétroliers

Je voudrais également donner lecture d'une requête qui m'a été signifiée dans le délai requis. "Le 20 février 1979, M. le Président, conformément à l'article 78 de notre règlement, je désire vous informer qu'avant l'appel des affaires du jour de la séance d'aujourd'hui j'ai l'intention de proposer que soit tenu un débat pour discuter une affaire importante de la compétence de l'Assemblée et dont l'étude s'impose d'urgence, à savoir la situation extrêmement grave causée par l'impossibilité pour les distributeurs indépendants de pétrole d'assurer à leur nombreuse clientèle un approvisionnement normal et suffisant en produits pétroliers. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs". Et c'est signé du député de Mont-Royal, John Ciaccia. M. le député de Mont-Royal, veuillez présenter votre motion le plus brièvement possible.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Il s'agit de discuter la question des quotas, des contingentements qui ont été imposés aux distributeurs indépendants par les compagnies pétrolières majeures. Premièrement, c'est une question qui est très urgente. Cela affecte 825 marchands indépendants. Non seulement cela affecte ces marchands, mais aussi les consommateurs qui se chiffrent approximativement par 50% du marché pétrolier, par exemple, dans la région de Québec. Cela affectera un grand nombre de consommateurs dans l'est de Montréal, qui n'ont pas le luxe de se chauffer à l'électricité. Ils doivent dépendre de ces marchands indépendants. Si les quotas ont été imposés, évidemment, c'est parce qu'il y a une pénurie.

Il s'agit — c'est important — d'essayer de discuter des causes de cette pénurie, de déterminer s'il y aura assez de produits pour finir l'hiver ou si la population sera appelée à faire certains sacrifices afin de ne pas manquer de ces produits. Il n'y a pas d'autres moyens de discuter, tel que notre article 78 le requiert. Je crois que c'est la dernière journée de la présente session. Si on ne discute pas de ce sujet ici, nous n'aurions pas d'autres moyens, à l'Assemblée nationale, avant la nouvelle session. A ce moment-là, cela pourrait être trop tard.

C'est de compétence législative de l'Assemblée nationale, M. le Président. Premièrement, le chapitre 33 des lois de 1971 stipule que le gouvernement a certains pouvoirs de réglementation quant à la manutention, la rétention et l'approvisionnement de certains pétroles. Il a le droit de requérir l'inventaire. Même si la loi n'a pas été mise en application, le ministre se donne tous ces pouvoirs dans le livre blanc. Si on lit la page 66 du livre blanc, on voit que le ministre veut s'assurer de l'approvisionnement, en territoire québécois, et de la sécurité de l'approvisionnement de ces produits. Ce n'est pas de la compétence exclusive de l'Assemblée nationale, mais c'est certainement de sa compétence. Si on veut relier cela à la compétence législative, on pourrait demander, M. le Président, quelle compétence législative le ministre fédéral de l'Energie, des Mines et des Ressources, M. Gillespie, avait vis-à-vis de Exxon.

Une Voix: Une compagnie américaine.

M. Ciaccia: Une compagnie américaine multinationale. C'était un pouvoir moral. Il a exercé un pouvoir moral vis-à-vis de cette compagnie et c'est de la même façon que le ministre pourrait agir aujourd'hui vis-à-vis des compagnies multinationales, vis-à-vis des majeurs, pour s'assurer que les produits soient disponibles aux marchands indépendants. Quant à la responsabilité administrative, M. le Président, il y a certainement une responsabilité du gouvernement et du ministre non seulement pour augmenter les tarifs de l'Hydro-Qué-bec — ce n'est pas la seule responsabilité que le gouvernement ou le ministre a — mais également pour nous assurer la sécurité d'approvisionnement. Que fait-il pour cela? Dans son livre blanc, il est clair qu'il était pour présenter des lois, qu'il était pour prévoir cet approvisionnement. Il semble qu'il ne l'ait pas fait puisque le problème existe aujourd'hui avec ces marchands indépendants. Alors, c'est une responsabilité principale du gouvernement et nous voulons savoir ce que le ministre fait vis-à-vis du fédéral, vis-à-vis des sources d'énergie qui existent dans l'Ouest canadien.

Tenant compte de cette responsabilité administrative, une lettre a été envoyée par l'Association des marchands indépendants, le 25 décembre dernier, mettant en garde le gouvernement quant à une pénurie possible et demandant une certaine protection, une analyse et une aide du gouvernement. M. le Président, on m'informe que la seule chose que le gouvernement a faite suite à cette lettre, c'est d'en accuser réception le 15 février, sans s'impliquer, sans indiquer à ces marchands exactement le rôle que le gouvernement entendait jouer. Alors, c'est important que nous discutions de cela.

En conclusion, M. le Président, il est urgent pour les marchands concernés, il est urgent pour les consommateurs affectés — si une pénurie existe, c'est toute la population qui va en souffrir — de discuter — s'il y a une telle pénurie, si les quotas affectent seulement les indépendants — pourquoi ils n'affectent pas les gros distributeurs. Il faut savoir tout cela pour savoir quelles mesures doivent être prises. C'est important, nous sommes au milieu de février, le chauffage est un droit fondamental, je dirais, c'est plus qu'une nécessité, c'est un droit que chaque citoyen a. Si nous n'avons pas les ressources nécessaires, la marchandise nécessaire, il va y avoir des difficultés et des conséquences assez sérieuses. Je crois que c'est urgent que nous en discutions dans ces termes, M. le Président.

Décision du président

Le Président: Merci, M. le député de Mont-Royal. Je crois qu'il s'agit là d'un modèle de présentation de motion pour débat d'urgence. Je vous avoue qu'à première vue il semblerait qu'on puisse accueillir favorablement peut-être cette requête pour un débat d'urgence. Sauf que nous sommes dans des circonstances très spéciales puisque nous sommes en présence d'un ordre de la Chambre. Et, en vertu de cet ordre, la priorité, l'urgence, c'est le projet de loi qu'on doit étudier puisque c'est la Chambre elle-même qui en a décidé la semaine dernière. Je ne pourrais pas, il me semble, déroger à cet ordre de la Chambre sans un consentement unanime de la Chambre. C'est pour cette unique raison, en m'appuyant aussi sur l'article 3, paragraphe 4, qui dit que "la procédure de l'Assemblée nationale du Québec est réglée par des ordres spéciaux adoptés par l'Assemblée et dont l'effet est limité aux matières pour lesquelles ils sont votés.

M. Lavoie: Est-ce que je pourrais poser une question?

Le Président: Une seconde. A cause de l'ordre qui a été donné par la Chambre de procéder d'abord à l'adoption du projet de loi, permettez-moi de lire le procès-verbal de l'Assemblée nationale: Du consentement unanime de l'Assemblée et sur la motion du leader parlementaire du gouvernement, il est ordonné que l'Assemblée se réunisse mardi prochain à compter de 14 heures, que le rapport de la commission permanente de l'agriculture sur le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, soit déposé à la période des affaires courantes et que la prise en considération de ce rapport et la troisième lecture dudit projet de loi ait eu lieu au cours de cette même séance. L'urgence, il m'apparaît qu'elle est là. M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: J'ai bien suivi l'ordre de cette Assemblée qui nous dit de siéger aujourd'hui jusqu'à l'heure normale de la fin de la séance, qui est 22 heures, 10 heures ce soir. En vertu de l'article 78, ce débat peut se tenir fort bien d'ici à 18 heures et, de 20 heures à 22 heures, on pourrait procéder à l'ordre de la Chambre, à la prise en considération du rapport et à la troisième lecture. Cela ne va pas du tout à l'encontre de l'ordre de cette Assemblée. Exactement, comme le dit mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, l'ordre de la Chambre n'est pas exclusif. Rien n'empêche que ce débat pourrait se tenir.

Le Président: Oui, mais, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, si vous voulez bien écouter mes propos, je vous rejoins, sauf sur un point, c'est que la priorité doit être accordée à l'ordre de la Chambre. Je n'exclus pas qu'une fois l'ordre de la Chambre exécuté, on puisse tenir un débat d'urgence, suivant la requête de M. le député de Mont-Royal. Je n'exclus pas cela, mais la priorité, la première urgence a été fixée par l'Assemblée nationale. Je n'exclus pas que, cet ordre ayant été exécuté, on puisse par la suite discuter du débat d'urgence réclamé par M. le député de Mont-Royal.

M. le député de Richmond. (15 h 20)

M. Brochu: M. le Président, sur la même question, si vous me permettez, j'aimerais vous demander une directive sur la décision que vous allez rendre. Vous avez parlé de l'état d'urgence dans lequel se trouve actuellement l'Assemblée nationale, liée qu'elle serait par la motion qui a été acceptée à la fin de nos travaux la semaine dernière et qui dit essentiellement ceci: Que soit déposé le rapport de la commission de l'agriculture à la période des affaires courantes et que la prise en considération de ce rapport et la troisième lecture dudit projet de loi aient lieu au cours de cette même séance. M. le Président, je vous rappellerai les termes de l'entente que nous avons eue. il ne s'agissait pas, à ce moment, de l'urgence d'adopter le projet de loi, mais d'une entente visant simplement à permettre qu'au cours de la même séance, ce qui est contraire à nos règlements, nous puissions et adopter le rapport et commencer la discussion en troisième lecture du projet de loi no 116.

Donc, il ne s'agissait pas d'une urgence de l'adoption du projet de loi, mais de passer outre à une règle de l'Assemblée qui dit que le rapport doit être déposé une journée et qu'il doit y avoir une autre journée avant qu'on passe à la troisième lecture. Ce n'est donc pas une question d'urgence, mais simplement de sauter une étape pour commencer la troisième lecture au cours de la journée d'aujourd'hui et la finir lorsque ce sera terminé.

Le Président: Trèst bien, M. le député de Richmond, mais je vous rappelle qu'il y a un ordre qui a été donné par l'Assemblée et que cet ordre doit être respecté. C'est ce qu'on est en train de faire.

M. le ministre délégué à l'énergie.

M. Joron: Si vous le permettez, M. le Président, j'aurais volontiers souscrit à ce que ce débat se tienne et cela répondrait peut-être à une partie de l'inquiétude du député de Mont-Royal. Il y aurait peut-être une confusion quant au temps, parce que le ministre de l'Industrie et du Commerce et moi-même devons justement un peu plus tard cet après-midi, au même moment où siégerait la Chambre, rencontrer les représentants de toutes les raffineries du Québec pour essayer d'arbitrer entre eux et l'Association des détaillants que nous avons rencontrée ce matin. La pression morale que le député de Mont-Royal nous invitait à faire tout à l'heure, c'est justement ce qu'on va aller faire dans quelques heures.

M. Blank: M. le Président...

Le Président: M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le Président, les paroles du ministre délégué à l'énergie prouvent qu'on a encore plus besoin d'avoir de débat d'urgence. Lui, il va avoir l'appui non seulement moral, mais explicite de la Chambre pour rencontrer ces gens.

M. Joron: Je le tiens pour acquis, M. le député de Saint-Louis.

Le Président: Nous en sommes aux affaires du jour.

M. le leader parlementaire.

Travaux parlementaires

M. Lavoie: Avant de passer aux affaires du jour, M. le Président, j'aurais une directive à vous demander, qui fait suite — je pense que vous devez éclairer notre lanterne — aux propos que vous avez tenus en réponse à la question du député de Richmond. Je crois que c'est important

que je lise l'ordre de l'Assemblée du 15 février; il n'est pas très long: II est ordonné que l'Assemblée se réunisse mardi prochain à compter de 14 heures, que le rapport de la commission permanente de l'agriculture sur le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, soit déposé à la période des affaires courantes et que la prise en considération de ce rapport et la troisième lecture dudit projet de loi aient lieu au cours de cette même séance. Ma demande de directive est la suivante: Est-ce que cet ordre constitue effectivement un ordre précis, direct de cette Assemblée pour que cette Assemblée doive terminer avant 22 heures ce soir, obligatoirement, la considération du rapport et la troisième lecture? En somme, il s'agirait d'un ordre de clôture disant que vous mettrez aux voix, avant 22 heures ce soir, et le rapport et la troisième lecture. Est-ce cela, votre interprétation? C'est la directive que je me sens obligé de vous demander, parce que ce sera nécessaire pour ordonner nos travaux, nos interventions, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Sur le même point, M. le Président, je suis content que le député de Laval soulève cette question que je viens d'aborder à travers mon autre question de règlement. On se rappellera les termes de l'entente et on me l'a confirmée, tout à l'heure aussi. L'entente qui est intervenue, la semaine dernière, concernant le projet de loi no 116, c'est de passer outre au règlement de la Chambre en permettant au cours de la même séance, de passer de l'étape du rapport au début de l'étude en troisième lecture, donc des discours de troisième lecture de tous les membres de l'Assemblée nationale qui voudront faire part de leurs commentaires à la Chambre sur ce sujet. C'est donc de passer outre à une partie du règlement. Cela visait essentiellement cela.

Dans notre esprit — j'en ai eu la confirmation tout à l'heure — il ne s'agissait pas d'un règlement de clôture absolue pour 22 heures. Au contraire, c'était simplement pour paser outre au règlement tel qu'il existe actuellement. En ce qui nous concerne, nous avons des opinants qui veulent s'exprimer sur le rapport et également sur la troisième lecture, ce qui est tout à fait normal.

Le Président: Vous m'avez un peu devancé, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle et M. le député de Richmond, puisque je voulais justement convoquer une conférence des leaders sur le partage du temps à la suite de cet ordre de la Chambre. A mon humble avis, cela doit être adopté à l'intérieur de la séance d'aujourd'hui et c'est ce que l'ordre de la Chambre dit assez clairement, il me semble. En conséquence, je voudrais convoquer, à votre convenance — je pense qu'il faudrait le faire le plus rapidement possible — une conférence des leaders pour s'entendre sur le partage du temps.

M. Charron: M. le Président, est-ce que je peux m'exprimer aussi sur cette question?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Je pense que nos deux collègues, du Parti libéral et de l'Union Nationale, ont manifesté qu'ils comprenaient très bien, effectivement, le sens de la motion puisqu'ils y ont souscrit. Le texte que le député de Laval a cité est intégralement celui sur lequel j'ai reçu l'unanimité de l'Assemblée puisque je l'ai en brouillon. M. le secrétaire général n'a fait que le retranscrire. Lorsqu'on dit que c'est au cours de la même séance que la troisième lecture doit avoir lieu, cela veut dire que les députés peuvent bien discuter de la prise en considération du rapport jusque vers 21 h 45 ce soir, comme chacun en a le droit, mais que vous, M. le Président, en vertu de l'ordre de la Chambre, vous devrez tantôt, lorsqu'on se réunira, organiser le temps en fonction de deux votes, l'un à 21 h 45 et l'autre à 21 h 55.

Ou alors, on peut disposer assez rapidement du rapport et plutôt intervenir sur la troisième lecture. On en parlera. Mais il est certain, en vertu de l'ordre de la Chambre — cela ne prendrait qu'une majorité maintenant pour le renverser et il n'y en aura pas — que ces deux étapes doivent avoir lieu aujourd'hui, avant 22 heures ce soir.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Sur la même question, je ne voudrais pas être désagréable à l'endroit du leader du gouvernement, mais vous comprendrez très bien que l'Union Nationale, avec le combat qu'elle mène, n'aurait jamais donné son consentement volontaire au bâillon sur un projet de loi comme celui-là. On a simplement accepté qu'après le nombre d'heures passées en commission parlementaire on puisse déposer le rapport. La loi n'est même pas adoptée en commission; c'est afin qu'on puisse déposer le rapport.

M. Charron: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Brochu: M. le Président, je n'ai pas terminé mes propos.

M. Charron: J'invoque le règlement parce que la question va à l'encontre du règlement. J'invoque le règlement. Le député de Richmond est peut-être réchauffé de son congrès de fin de semaine. Je pense bien avoir lu très clairement cette motion, la semaine dernière; je l'ai relue quand le député de Beauce-Sud a accepté de se joindre à nous pour faire l'unanimité. Je pense que tous les gens ici savaient ce qu'ils faisaient lorsqu'ils ont voté pour cette motion.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Ceci nous indique clairement que lorsqu'il y aura d'autres ententes et d'autres discussions avec le gouvernement, il va falloir l'écrire en double et le souligner en double. Il va falloir s'entendre. Il ne faudrait pas s'enfarger dans les mots. Je ne pense pas qu'il y ait aucun parti politique en cette Chambre, ne fut-ce que le Parti libéral qui approuve la loi, qui accepterait un bâillon volontaire sur un projet de loi auquel il s'oppose. Cela n'est pas logique, cela n'a pas de sens.

Ce qu'on a dit, c'était clair. On accepte de mettre fin à toutes les questions qu'on avait à poser en commission parlementaire, et auxquelles on n'a pas eu toutes les réponses d'ailleurs puisque la loi n'a pas toute été étudiée...

M. Charron: Voyons donc!

M. Brochu: ... que la Chambre adopte le rapport et qu'on passe dans la même séance — ce qui est contraire à notre règlement, encore là, et on vous l'a concédé — à l'étude de la troisième lecture au cours de la même séance. C'est ce que nous avons accepté et j'aimerais que ce soit ce que le gouvernement respecte actuellement; sinon, ce sera une forme de bâillon sur le projet de loi no 116 et on n'acceptera pas cela. Ce n'est pas possible!

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une demande de directive. Vu l'interprétation et le statut un peu spécial, est-ce qu'un mini-débat serait non pas bienvenu, mais avenu, ce soir? Est-ce qu'il serait permissible à la fin de la séance?

Le Président: Oui. En vertu du règlement, je réponds oui immédiatement. C'est toujours permis à la fin d'une séance.

M. Lavoie: Si c'est l'interprétation qui semble se dégager, je me dois de constater qu'en à peine deux ans de pouvoir ce sera la quatrième clôture que nous vivons, que le Parlement vivra: sur la loi 101, sur la loi 67, la Société d'amiante...

M. Charron: ... question de privilège suivante, M. le Président.

M. Lavoie:... et aujourd'hui, c'est la quatrième clôture-bâillon que ce Parlement connaîtra. (15 h 30)

M. Charron: Avec la question de privilège suivante, M. le Président. On admettra que c'est peut-être mettre fin à un débat sur un projet de loi par entente, mais entente unanime de l'Assemblée, et que, s'il y a clôture actuellement, il n'y aurait pas eu clôture si chacun des députés n'y avait pas consenti. Là, je vais la faire la question de privilège pour que le député de Richmond n'emporte pas tous les marbres de son côté. L'entente est intervenue lorsque, après discussion avec le chef de l'Union Nationale, nous avons estimé que le temps pour l'étude du projet de loi, jusqu'à 12 h 30 aujourd'hui, en commission parlementaire, serait suffisant. J'ai dit au chef de l'Union Nationale: Je suis prêt à le concéder jusqu'à mardi prochain, mais seriez-vous d'accord que, cette étape une fois finie, nous fassions la prise en considération et la troisième lecture mardi, pour finir la session? C'est bien la proposition que je lui ai faite. Une fois rendu en Chambre, je l'ai convertie en ordre de la Chambre, que j'ai lu et expliqué trois fois. Le député de Beauce-Sud a dit en premier qu'il ne voulait pas se joindre à nous, et lorsqu'il l'a fait par la suite c'est parce qu'il avait bien compris ce que j'avais exprimé. Qu'on ne me dise pas que j'impose le bâillon! Nous l'avons tous choisi. Il n'y a pas une majorité qui a décidé de l'imposer à l'Opposition. Vous avez voté pour!

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Une question de privilège, un peu semblable à celle soulevée par le leader parlementaire du gouvernement. Cet ordre de la Chambre peut faire l'objet de plusieurs interprétations; d'ailleurs, c'est la raison pour laquelle je vous ai demandé une directive. Ce n'est pas aussi limpide que cela. L'interprétation qu'on pourrait facilement y donner c'est qu'on mettait fin aux travaux de la commission parlementaire ce matin pour qu'il y ait dépôt du rapport aujourd'hui, considération du rapport. Cela peut fort bien se faire aujourd'hui en respectant le droit de parole des députés, que ce soit de l'Union Nationale, du député de Beauce-Sud ou d'autres.

M. Charron: Et troisième lecture!

M. Lavoie: On pourrait fort bien entreprendre la considération et gagner une étape, la troisième lecture aujourd'hui qui, normalement, se fait à une autre journée que la considération du rapport. C'est ce que veut dire l'ordre. Considération du rapport aujourd'hui et troisième lecture. Une fois rendus à Québec, nous n'avons aucune objection à ce que cette session continue demain matin à 10 heures, pour respecter le droit de parole, et terminer la troisième lecture. Cette interprétation est aussi valable. Sinon, c'est la clôture.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: La motion qui a été adoptée à l'unanimité de l'Assemblée dit: De même que la troisième lecture du projet de loi ait lieu au cours de la même séance. Il n'y a troisième lecture que lorsqu'il y a vote. L'ordre de la Chambre n'est pas que le débat en troisième lecture s'entame lors de cette même séance. La troisième lecture ne vient pas lorsque vous appelez la troisième lecture,

mais quand le secrétaire général vous fait part du vote de troisième lecture. C'est à ce moment-là qu'on dit qu'une loi a été lue une troisième fois. L'ordre de la Chambre dit que la troisième lecture, c'est-à-dire le vote après un débat en troisième lecture, doit avoir lieu au cours de la même séance.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, je ne veux pas revenir sur les propos qu'on a tenus la semaine dernière, je pense que le leader de l'Opposition officielle a bien exprimé l'opinion qui a alors été retenue. Si la Chambre avait été convoquée aujourd'hui, normalement, et que nous n'ayons pas terminé les travaux de la commission parlementaire, et que le rapport n'ait pas été déposé devant l'Assemblée nationale, il ne pourrait pas y avoir prise en considération du rapport aujourd'hui. Ce que nous avons convenu — et ce que j'ai compris — c'est que la commission parlementaire de l'agriculture dépose son rapport au début de la séance de mardi pour qu'on puisse entreprendre, immédiatement à la fin des affaires du jour, la prise en considération du rapport. Nous avions une heure après le dépôt du rapport pour faire parvenir nos propositions d'amendements, les différents partis politiques, les différents députés qui ont des amendements à proposer, et qu'au cours de la même séance, si on a terminé la prise en considération du rapport, on fasse abstraction du règlement qui veut que la troisième lecture soit commencée au cours de la séance subséquente, qu'on puisse le faire au cours de la même séance. Une fois qu'on a terminé l'étude du rapport, qu'on procède à l'étude de la troisième lecture du projet de loi. C'est ce que j'ai compris, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond, je voudrais mettre un terme à ce débat. Il n'y a aucun doute, dans mon esprit, à lire le texte qui est devant moi, qui est devant vous au procès-verbal, à lire le texte qui dit: Et que la troisième lecture dudit projet de loi ait lieu au cours de cette même séance. Il est clair qu'on a consenti à une clôture volontaire pour aujourd'hui avec ce texte-là. Il n'y a pas moyen de le lire autrement!

M. Blank: M. le Président, une directive... Le Président: M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Qu'arrive-t-il si, à 22 heures ce soir, on n'a pas fini la prise en considération du rapport? Est-ce qu'on n'a pas le débat de troisième lecture?

Le Président: C'est pourquoi, M. le député de Saint-Louis, j'ai dit que la présidence devait organiser une conférence des leaders pour faire le partage du temps. Sinon, c'est un non-sens.

M. Brochu: M. le Président...

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: ... sur une question de directive également. J'aimerais revenir sur les propos du député de Saint-Louis puisqu'il a entièrement raison. M. le Président, si l'étude du rapport devait nous conduire à une demi-heure de l'ajournement de nos travaux ce soir, comment la Chambre pourrait-elle à ce moment-là, élément démocratique par excellence, exercer justement la démocratie et permettre même l'étude un tant soit peu logique de la troisième lecture du projet de loi 116? M. le Président, en tant que gardien de la bonne marche de nos travaux, de l'économie, de l'esprit et de la lettre de notre règlement, je fais appel à votre jugement dans le cas présent pour éviter que l'appareil même de la démocratie qu'est l'Assemblée nationale ne se retrouve devant un cul-de-sac dans sa propre organisation, dans ses propres travaux. Je vous rappelle tout simplement en terminant que ce que le député de Beauce-Sud a compris, ce que le leader de l'Opposition officielle a compris et ce que j'ai compris, en tant que représentant de l'Union Nationale, on vient de vous dire que c'est la même chose. C'était de sauter une étape. Alors, s'il y a quelque chose qui ne va pas, M. le Président, qu'on convoque de nouveau les leaders et qu'on s'entende là-dessus, mais qu'on n'amoche pas le bon fonctionnement des travaux de la Chambre en passant outre à l'esprit de l'entente même qu'il y a eu entre les leaders.

Le Président: M. le député de Richmond, je vous réfère à l'alinéa 6 de l'article 10 de notre règlement. Suivant le texte qu'il y a au procès-verbal — le texte que j'ai devant moi — il y a eu consentement à restreindre les débats. C'est ce que le texte nous dit. C'est un débat restreint au sens de l'alinéa 6 de l'article 10. C'est pourquoi il appartient à la présidence de convoquer les leaders pour faire le partage du temps.

M. Brochu: Question de directive, M. le Président, si vous me le permettez. On sait que les mots embêtent les hommes, et il semble que dans la situation présente ce soit le cas. Non pas parce qu'il y a mauvaise volonté de part et d'autre, mais qu'on se retrouve, toute l'Opposition, disant que nous avons donné notre accord à sauter une étape et que le leader du gouvernement, seul de son côté, dit à ce moment-là: On a le droit d'adopter la troisième lecture, M. le Président. Dans ce cas, M. le Président, je vous demande une directive. Qu'est-ce qui doit être fait, étant donné que ceux mêmes qui ont assisté à l'entente vous disent aujourd'hui, à vous-même qui occupez le fauteuil, que l'esprit de ce qu'on a accepté, c'était simplement de sauter une étape? Est-ce que cela se peut, M. le Président — et c'est là le sens de ma directive — qu'à cause du brouhaha de la fin de journée l'autre jour, le libellé de cette motion ne réponde pas exactement, comme on vient de vous le dire, à l'esprit de l'entente qu'il y avait eu? C'est là-dessus que je vous demande la directive. Etant donné que les partis de l'Opposition sont unanimes à vous dire que la motion dans son libellé, si c'est l'interprétation que vous lui donnez, ne répond pas à l'entente qu'il y a eu, que doit-on

faire maintenant, M. le Président? Je m'adresse à vous pour avoir une directive.

M. Burns: Question de règlement.

Le Président: M. le ministre d'Etat à la réforme électorale.

M. Burns: M. le Président, j'ai, avec le leader, participé un peu et de façon vraiment très minoritaire à cette entente et je me rappelle... Si on veut changer d'opinion aujourd'hui du côté de l'Union Nationale...

Des Voix: Oh!

M. Burns: ... qu'on nous le dise.

M. Biron: M. le Président, question de privilège.

M. Burns: II n'y a pas de question de privilège là-dessus, M. le Président, s'il vous plaît!

Le Président: M. le chef de...

M. Burns: M. le Président, je n'ai pas attaqué le député. Il n'y a pas de question de privilège.

M. Biron: M. le Président, question de privilège.

Le Président: Bon! M. le chef de l'Union Nationale, je doute qu'il y ait matière à privilège. Je vais vous reconnaître immédiatement après que M. le ministre d'Etat à la réforme électorale aura terminé son intervention sur une question de règlement.

M. Burns: M. le Président, j'allais dire tout simplement et de façon très calme, avant que le député de Lotbinière se mette à s'énerver à ce sujet-là...

M. Grenier: A l'ordre!

M. Burns: ... je dis tout simplement, M. le Président, que nous avons, je pense, et j'ai été témoin de cela, eu une entente préalable à l'ordre de la Chambre. (15 h 40)

Aujourd'hui, on nous pose la question à savoir si l'ordre de la Chambre est l'entente. Mais ce sont des gens qui ont voté pour. Peut-être qu'ils ne savent pas ce qu'ils font quand ils sont en Chambre. C'est leur problème à eux. Je vous dis carrément, M. le Président, que cet ordre est là; il doit rester là et il doit être maintenu. Je ne vois pas pourquoi actuellement on viendrait nous dire: Ce n'est pas tout à fait ce qu'on avait voulu voter. Le secrétaire général de la Chambre et vous-même, M. le Président, en êtes témoins. Ces décisions-là ont été adoptées. Qu'est-ce que vous voulez? Il faut maintenant les suivre. C'est pour cela que c'est un ordre de la Chambre. Il ne faut pas les changer, M. le Président.

M. Biron: Question de règlement.

M. Mailloux: M. le Président...

Le Président: M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: ... c'est simplement une suggestion que je voudrais faire au leader parlementaire du gouvernement. Ne serait-il pas possible, étant donné que la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre a accepté d'entendre plusieurs parties, cinq ou six...

M. Lavoie: Faites-là, la motion.

M. Mailloux: ... d'avoir au moins la motion pour nous permettre de siéger?

M. Charron: Je ne demande pas mieux, M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Je ne demande pas mieux, sauf que je viens d'être informé, au moment où j'allais presque le souhaiter tout à l'heure, que le député d'Anjou et ministre du Travail, qui est aussi médecin comme chacun le sait, vient de quitter cette enceinte avec un constable de la force de sécurité de l'Assemblée, qui a été victime d'un malaise cardiaque. Cela arrive dans la vie d'un médecin également. Il l'a accompagné à l'hôpital et il doit revenir dans quelques minutes pour reprendre les travaux de la commission. Autrement, j'aurais obtempéré pour qu'on commence tout de suite, mais on ne m'a pas encore signalé qu'il était revenu.

Une Voix: Non, il n'est pas revenu.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Sur la question de règlement du ministre d'Etat à la réforme parlementaire et électorale, je veux lui dire que l'Union Nationale n'a pas changé d'idée. Ce que nous avons discuté la semaine dernière, c'est exactement ce que le député de Richmond a dit tout à l'heure. Je vous demanderais de dire la vérité et de ne pas charrier pour rien.

Le Président: Maintenant, en vertu des dispositions de l'article 123... M. le député de Richmond, s'il vous plaît! M. le député de Richmond, je vous ai dit que le texte parle par lui-même et il dit que la troisième lecture doit avoir lieu au cours de la séance d'aujourd'hui. C'est cela que le texte dit. En vertu des dispositions de l'article 123, alinéa 6, M. le député de Richmond, en conséquence, je vais convoquer les leaders parlementaires pour organiser le débat. Maintenant, je voudrais savoir des leaders s'ils souhaitent commencer le débat immédiatement, quitte à ce que la conférence ait lieu durant le débat. Alors, M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Oui, M. le Président. A votre demande, je dis qu'en ce qui me concerne oui, je me rendrai tout de suite, quand mon collègue de l'Agriculture aura entrepris de présenter les amendements qu'il veut soumettre à l'Assemblée au moment de la prise en considération du rapport, à la réunion que vous convoquez.

Je voudrais donner quelques avis, M. le Président, certains concernant même la prochaine session, pour que chacun puisse les inscrire à son agenda. D'abord, le mardi 13 mars, il y aura une réunion de la commission des corporations professionnelles pour étudier le projet de règlement concernant les actes médicaux autorisés et les actes infirmiers autorisés. On se souvient que cette question a été soulevée à l'Assemblée la semaine dernière, je crois. Le ministre des Affaires sociales et celui de l'Education, en même temps responsable du Code des professions, ont répondu. Nous croyons opportun de nous rendre à cette demande qui a été formulée et c'est pour le 13 mars que la réunion sera convoquée sur invitation, c'est-à-dire que ce sont les ordres professionnels directement concernés — évidemment, ce n'est pas une commission omnibus — qui y seront invités...

Une Voix: Ainsi que les associations d'hôpitaux.

M. Charron: ... ainsi que les associations d'hôpitaux. Enfin, on communiquera la liste aux différents porte-parole de l'Opposition sur la commission. M. le Président, le mercredi 14 mars, commenceront — je le dis tout de suite pour que chacun puisse organiser son travail en conséquence — à la salle 81-A les auditions de mémoires sur le projet de loi 126, Loi sur les normes de travail, ce qu'on appelle les conditions minimales de travail. Quelques mémoires sont déjà entrés; la date limite est le 1er mars. Donc, on ne peut pas savoir combien il y en aura, mais disons qu'avec ceux qui sont déjà entrés on est certain d'au moins une journée de travail. La toute première aura lieu le 14 mars prochain.

Demain matin, plus près de nous, la commission du travail et de la main-d'oeuvre poursuivra le travail entamé sur les règlements de placement dans la construction, de même que cet après-midi elle doit le faire et ce soir aussi, à moins qu'on ait convenu ce matin, en commission, qu'on ne siégeait pas ce soir. En tout cas, je fais la motion — la commission sera libre elle-même de décider s'il est opportun de siéger ce soir ou de se contenter de la séance de demain matin, ce sera à elle de décider — sous réserve du retard de quelques minutes du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, pour que la commission du travail et de la main-d'oeuvre se réunisse immédiatement au salon rouge, jusqu'à 18 heures et, ce soir, de 20 heures à 22 heures, si elle le souhaite.

Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. Roy: M. le Président, juste un point sur la convocation des commissions, si on me permet.

Le Vice-Président: Un instant! Oui, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Est-ce que la commission parlementaire des engagements financiers est prévue pour la fin de février, selon la tradition?

Le Vice-Président: En vertu de l'article 34?

M. Charron: Malheureusement non, M. le Président. Il y aura plutôt deux jours en mars. Il est impossible, pour toutes sortes de raisons — j'ai presque envie de dire de cuisine — de convoquer cette commission pour la dernière semaine de février; on fera plutôt deux jours en mars. On consultera les députés pour choisir le meilleur temps pour le faire.

M. le Président...

Le Vice-Président: Oui, M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: ... je ne sais plus à quel article c'est, au feuilleton. Je vous invite à appeler la prise en considération du rapport de la commission de l'agriculture.

Prise en considération du rapport

de la commission ayant étudié le projet

de loi no 116

Le Vice-Président: D'accord, M. le leader parlementaire du gouvernement. Sauf qu'il y a un petit problème, il n'y a pas encore eu de réunion des leaders parlementaires. De toute façon, j'appelle la prise en considération du rapport de la commission élue permanente de l'agriculture sur le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Est-ce que M. le ministre...

M. Garon: M. le Président, en vertu de l'article 23, je voudrais faire différentes motions d'amendement au projet de loi no 116. Dois-je les lire toutes ensemble ou...

Le Vice-Président: Un instant! C'est en vertu de l'article 123. Est-ce qu'ils ont été déposés auprès du secrétaire général?

M. Garon: Ils l'ont été, M. le Président.

Le Vice-Président: Bon, d'accord. Alors, vous pouvez procéder.

M. Jean Garon

M. Garon: Les motions d'amendement au projet de loi no 116, puisque nous n'avons pu terminer l'étude article par article, malgré les nombreuses heures que nous y avons consacrées. A la

suite de nombreuses motions dilatoires, nous avons pu étudier les articles 1, 2, 3 paragraphes a), b) et c) qui ajoutent les paragraphes j) et k) au paragraphe i) de l'article 67. Nous avions commencé à peine, pas vraiment, la discussion sur le paragraphe 1) qui reste 1) dans le cadre de l'article 3 du paragraphe c).

Comme je n'ai pu présenter ces amendements à la commission parlementaire, je vais les présenter immédiatement. Je fais motion pour que l'article 3, paragraphe c) du projet de loi no 116, soit amendé de la façon suivante: Paragraphe 1), à la troisième ligne après le mot "et", retirer aux troisième et quatrième lignes les mots "prévoir que l'office peut s'en porter acquéreur en tout ou en partie, en disposer et", à la cinquième ligne, après le mot "qui", retirer le mot "en", à la cinquième ligne, après le mot "résulte", insérer les mots "de la disposition de ces surplus". C'est un peu ennuyant comme discours. (15 h 50)

Le Vice-Président: Je vous écoute avec beaucoup d'intérêt.

M. Garon: Ce travail, normalement, est fait en commission parlementaire et permettra peut-être à la population qui écoute la télévision de voir les amendements qui sont faits lors du travail en commission parlementaire. M. le Président, je fais également motion pour que l'article 5 du projet de loi no 116 soit amendé de la façon suivante: Paragraphe c), aux première et deuxième lignes, retirer les mots suivants: "autoriser l'office de producteurs, aux fins d'imposer et de percevoir des contributions, à". A la troisième ligne, après le mot "groupes", retirer le mot "à". A la neuvième ligne, après le mot "contribution" remplacer la virgule et le mot "et" par "et," le cas échéant,".

M. le Président, je fais motion pour que l'article 6 du projet de loi no 116 soit retranché entièrement. Avec les guillemets, oui... Articles 7 et 8. M. le Président, je fais motion pour que les articles 7 et 8 du projet de loi no 116 soient renumérotés de la façon suivante: L'article 7 devient l'article 6 et l'article 8 devient l'article 7. M. le Président, ce sont les amendements que je voulais présenter en commission parlementaire, mais que je n'ai pas pu présenter et qui ont fait l'objet de discussions avec les représentants des associations coopératives agricoles que j'ai rencontrés au cours du mois de décembre. Les principales coopératives étaient représentées ou en représentaient d'autres. Quand je parle de coopératives, j'ai rencontré la Coopérative fédérée, donc j'ai rencontré au fond la fédération des coopératives qui représente les autres. Du moins, je suis en droit de le penser. De la même façon, quand je rencontre la direction de l'UPA, l'Union des producteurs agricoles, soit le conseil général ou l'exécutif, je suis en droit de penser qu'ils parlent au nom de leurs membres.

Autrement, il n'y a plus rien qui fonctionne. Si je rencontre des gens, on discute, on en arrive à des conclusions. Et je dois penser que les gens qui sont en autorité, élus dans des mouvements parlent au nom de leurs membres. C'est ce que j'ai pensé, M. le Président, c'est ce que je fais toujours. J'ai 20 minutes, je pense.

Le Vice-Président: Vous en avez même plus que cela. Vous avez 30 minutes.

M. Garon: 30 minutes. M. le Président, j'ai dit à plusieurs reprises...

Le Vice-Président: Vous auriez peut-être une heure, mais vous n'avez pas demandé de directive.

M. Garon: Bon, tant que les leaders parlementaires qui se rencontrent n'ont pas épuisé leurs discussions pour savoir la répartition du temps, je suis en toute légalité de le prendre.

Le Vice-Président: Nous sommes dans une situation spéciale.

M. Garon: Cela ne fera que compenser pour le temps où j'ai écouté docilement et patiemment en commission parlementaire les motions dilatoires qui n'avaient pour effet que de retarder le débat. M. le Président, donc, j'ai dit qu'il y avait eu un jugement de la Cour suprême. En fait, il y a eu plus d'un jugement, mais un principal. Il y a eu deux jugements en 1977 concernant les ressources naturelles et qui ont à voir avec les produits agricoles qui sont une ressource naturelle, et un autre jugement en 1978, au mois de janvier, qui modifie. La Cour suprême dit — je l'ai exprimé à plusieurs reprises — délicatement au fond qu'elle change sa façon de voir tout ce problème. Suite à ce jugement, il arrive un vide juridique où, à ce moment, il nous faut adopter un projet de loi pour combler le vide laissé par la Cour suprême. Cela a été l'objet du bill 116.

J'ai dit également, quand j'en ai eu l'occasion, qu'il y avait aussi dans ce projet de loi no 116 quelques dispositions pour éviter ou enlever les ambiguïtés qui amenaient, dans la Loi de la régie des marchés agricoles, de nombreux procès et qu'il était opportun que ces ambiguïtés soient corrigées pour que les cultivateurs ou les producteurs agricoles, pour faire valoir leurs droits, n'aient pas toujours à aller devant les tribunaux, mais sachent exactement à quoi s'en tenir parce que les lois sont claires. Cela a été le but du projet de loi no 116.

Il y a eu l'article 2 du projet de loi no 116. L'article 2, au fond, veut réserver le terme "offices de producteurs" à des organismes qui ont été constitués en tant qu'offices de producteurs par la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. C'est du droit nouveau. Il y a également la moitié d'un paragraphe de l'article 3, qui en compte cinq. J'avais dit que j'aurais l'occasion d'expliquer ces choses en commission parlementaire lorsque nous en ferions l'étude. Ce que j'ai fait d'ailleurs, M. le Président, lorsque nous sommes arrivés à ces articles. Pourquoi? Parce qu'il y avait des ambiguïtés, parce qu'il y avait des cas où les producteurs respectent les règlements, respectent

la loi, respectent les quotas et respectent tout, mais doivent endurer quelques minorités dissidentes qui ne veulent pas les respecter et qu'à ce moment c'est onéreux pour l'ensemble des producteurs, les 80%, 90% et même 95% des producteurs qui respectent les règles. A ce moment, des surplus de dépenses, des coûts de procès, des dépenses inutiles sont occasionnés par ces gens qui ne veulent pas respecter la loi. Or, je pense qu'il est nécessaire, dans une société civilisée où les gens se donnent des lois et des règlements pour fonctionner selon certaines façons, que ces lois puissent prévoir, avoir les pouvoirs pour que ces dispositions des lois et des règlements soient respectées. C'est ce qu'on retrouve dans ces dispositions qui clarifient ces ambiguïtés.

Je suis content que le projet de loi no 116 ait été déposé. A la suite de son dépôt, j'ai eu un télégramme de la Coopérative fédérée, de la Coopérative de Granby, le 13 décembre. Immédiatement, j'ai demandé, aussitôt après en avoir pris connaissance... Vous comprendrez que, quand on siégeait au mois de décembre en commission parlementaire de 10 heures à minuit tous les soirs, quand la commission se terminait à minuit et qu'avec les gens de mon cabinet et les fonctionnaires nous travaillions jusqu'à 3 et 4 heures du matin pour préparer les amendements pour le lendemain, nous n'avions pas le temps de faire beaucoup de rencontres. Tout le monde sait que, pendant tout le mois de décembre, nous avons été en commission parlementaire. J'ai demandé, à ce moment, aux gens de mon cabinet de trouver immédiatement une date pour que je puisse rencontrer le mouvement coopératif. Il avait été question du 18 ou du 19. Mais comme cela m'était impossible, à cause de la commission parlementaire, j'ai plutôt suggéré que ce soit le samedi, ce qui a été accepté immédiatement par le mouvement coopératif. J'ai rencontré le mouvement coopératif le 16 décembre de 4 heures de l'après-midi à 7 heures du soir. Pendant trois heures, nous avons discuté de ces questions qui avaient causé — j'ai lu le télégramme tout à l'heure — une certaine appréhension à la Coopérative fédérée, qui l'exprimait dans son télégramme, au nom des autres, et à la Coopérative de Granby. Nous avions convenu, à ce moment, que je ferais parvenir au président de la Coopérative fédérée la copie du texte des amendements que j'avais l'intention de présenter lors de l'étude article par article ou même à la deuxième lecture, pour que les partis de l'Opposition puissent en prendre connaissance. (16 heures)

Immédiatement, la même journée, le 18 j'ai reçu un télégramme de la Coopérative fédérée de Québec qui dit: "La Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom des coopératives agricoles concernées, est d'accord avec le bill 116 tel que soumis à notre attention le lundi matin, 18 décembre." C'était le texte des amendements qu'ils voyaient à ce moment-là. "La Coopérative fédérée réaffirme qu'elle n'a jamais, ni de près, ni de loin, adhéré ou donné son appui au mouvement des producteurs dissidents". C'est ce que j'ai reçu à ce moment-là.

Nous avons continué l'étude au mois de décembre. L'Opposition a refusé d'adopter la loi le 21 et, le 22, il y avait un Conseil des ministres auquel j'ai assisté. La fonction publique, je pense, avait terminé ses travaux le 21, ce qui explique sans doute pourquoi le télégramme de la Coopérative de Granby du 21 décembre, je ne l'ai pas reçu. Croyez-le ou non, dans la nuit du 22 au 23, je suis parti dans la famille de ma femme pour les vacances de Noël parce qu'après quatre mois d'automne, je pensais que ce serait bien. Comme je le fais habituellement aux Fêtes, je suis allé dans la famille de ma femme pour les vacances des Fêtes.

M. Grenier: Votre belle-mère était-elle de bonne humeur?

M. Biron: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Je voudrais tout simplement faire parvenir au ministre une copie du télégramme qui lui a été adressé le 21 décembre par la Coopérative de Granby, M. Michel Lemire, président. Je voudrais qu'il puisse le lire pendant son allocution.

Le Vice-Président: C'est une question de règlement. De toute façon, je vais permettre que ce message se fasse. Nous sommes dans une drôle de situation. On ne sait pas de quel temps disposeront le parti ministériel et les autres partis. Le ministre tient le coup et tient le temps! On verra après ce qui arrivera.

M. le ministre.

M. Garon: Là, j'ai le temps. Vous savez comment cela se passe la plupart du temps pour un projet de loi. Une prise en considération comme cela, c'est quasiment une jouissance dans ma situation. Habituellement, en deuxième lecture, je fais mon discours et, après, j'entends dix, quinze et vingt députés qui parlent contre. A ce moment-là, si les députés du parti gouvernemental du Parti québécois, parlent aussi longtemps que l'Opposition, les débats vont s'éterniser. Donc, il arrive souvent que le ministre présente son projet, parle vingt minutes, une demi-heure ou une heure pour l'expliquer et, après cela, pendant des heures, des journées, sinon des semaines, c'est l'Opposition qui parle et qui raconte toutes sortes de menteries.

M. Fontaine: Là, c'est vous qui les racontez!

M. Garon: Les gens qui sont chez eux se disent: C'est quoi, exactement, le projet? Souvent, ils disent: Cela n'a pas de bon sens. C'est évident que si ce que l'Opposition dit était vrai, cela n'aurait pas de bon sens.

M. Giasson: M. le Président...

Le Vice-Président: Sur une question de règlement, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: ... j'arrête immédiatement le ministre. Il vient d'accuser l'Opposition d'avoir raconté toutes sortes de menteries tout au long des débats de la loi 116. Je proteste.

Le Vice-Président: M. le député de Montmagny-L'Islet. Un instant. Bon. Souvent, la décision qui est rendue en cette Assemblée veut qu'on ne puisse pas attaquer les privilèges d'un député, mais il est sûr que c'est la règle du jeu qu'on attaque les autres partis.

M. le député de Mégantic-Compton sur une question de règlement.

M. Grenier: Ma maîtresse d'école, en première année, m'a appris qu'un groupe, c'était au moins deux personnes. Le député du Parti libéral est seul.

Le Vice-Président: Un président ne devrait peut-être pas dire cela, mais je comprends que c'est moi qui tiens le temps de l'Assemblée nationale pendant qu'il y a une réunion des leaders parlementaires. Je vous demanderais quand même de conserver une certaine dignité parce qu'on nous observe et on nous écoute.

M. le ministre.

M. Garon: Je ne parlais pas de la loi 116 en particulier; je parlais de ce qui se passe en général. Les députés de l'Opposition font des discours et, si les députés ministériels font des discours, un après l'autre, pour rétablir les faits à chacun des discours des députés de l'Opposition, à ce moment-là les débats de la Chambre vont durer éternellement et il y aura très peu de projets de loi d'adoptés. Ainsi, le gouvernement est dans la situation suivante: écouter chacun des discours de l'Opposition sans dire un mot.

Alors, les gens, dans le public, se disent — surtout depuis qu'on a la télédiffusion, parce qu'il y avait beaucoup moins de discours de l'Opposition avant la télédiffusion des débats: Qu'est-ce qui se passe? On entend seulement les gens de l'Opposition. On m'a même dit qu'avec mon projet de loi, quand arrive le discours du ministre, arrivé à la fin, il doit attendre et écouter patiemment tout ce qui est dit, même ce qui est faux. Apparemment, on m'a dit que tous les discours avaient passé à la télévision et qu'à minuit on avait fermé, juste avant le discours de M. le député de Gaspé, de l'Union Nationale, et le mien. Les gens ont entendu tous les discours de l'Opposition sauf le discours qu'ils auraient dû entendre parce que c'est celui qui disait la vérité!

Alors, on peut dire qu'il y a énormément d'inquiétudes qui peuvent être créées par les discours de l'Opposition. Je vous donne un exemple concret. Quand je me promène dans les campagnes, les gens me parlent de la Loi sur la protection du territoire agricole. Le député de Johnson, par exemple, a dit: Les gens ne pourront plus faire leur testament, parce qu'ils ne pourront pas faire ce qu'ils veulent dans leur testament.

Le Vice-Président: A l'ordre! Vous parlez du projet de loi 90!

M. Garon: Oui. Alors, c'était faux. C'était faux parce que le testament est exclu de la loi. Mais je reviens au projet de loi 116. C'était simplement pour expliquer le fonctionnement de la Chambre. Je pense que c'est bon que quelqu'un le fasse. Comme je vous le dis, je suis un peu dans une position privilégiée aujourd'hui. Cela n'arrive jamais. Habituellement, il faut que j'endure l'Opposition et aujourd'hui c'est elle qui doit m'endurer! Alors, le 16 décembre, je rencontre le mouvement coopératif. On s'entend sur les amendements. Le 18 décembre, télégramme de la Coopérative fédérée appuyant la loi. Ensuite, nous finissons la session, vous savez dans quel brouhaha. La loi 116 n'est pas adoptée et je vais prendre mes vacances des Fêtes dans |a famille de ma femme.

Quand je reviens, on me donne un article du journal Le Coopérateur agricole du mois de janvier 1979, volume 8, no 1, à la page 30 où on dit que, effectivement, la rencontre qui avait été projetée avec le ministre par les mouvements coopératifs eut lieu à Québec le samedi 16 décembre. C'est la revue du mouvement coopératif qui le dit. "M. Garon est accompagné pour l'occasion de son sous-ministre, M. Ferdinand Ouellet, de son secrétaire, M. Maurice Tremblay, ainsi que de Me Marcel Trudeau, qui avait contribué à la rédaction du projet discuté. La délégation de la coopérative agricole était composée de représentants de la Coopérative fédérée, de la Coopérative agricole de Granby, de la Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent, de la Coopérative laitière du Sud de Québec, de la Coopérative agricole de la Côté sud, de la Coopérative agricole régionale de Papineau, de l'Association coopérative laitière du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Chaîne coopérative du Saguenay et de leur procureur, Me Guy Gagnon. Cette rencontre, d'une durée de trois heures — de 4 heures à 7 heures — s'avéra très fructueuse. "Après étude et discussion, M. Garon acceptait d'apporter au projet de loi la majorité des modifications suggérées par la délégation coopérative ". Ce n'est pas moi qui écris cela, c'est le Coopérateur agricole. "Le lundi suivant, soit le 18 décembre, après qu'on lui eut soumis le texte révisé du projet de loi, la Coopérative fédérée faisait savoir par télégramme adressé au ministre, avec copie au premier ministre et aux chefs des partis de l'Opposition, qu'elle était d'accord avec le projet de loi tel que révisé. L'UPA avait également fait savoir qu'elle acceptait les amendements proposés au premier projet. Enfin, le 21 décembre, la fédérée réitérait à M. Garon et au premier ministre son accord avec le projet amendé et exprimait la demande qu'il soit adopté le jour même, avant la fin de la session de Noël, ce qui, malheureusement, ne fut pas le cas. Dans tous ses contacts avec l'Etat, la Coopérative fédérée affirmait et réaffirmait qu'elle n'avait jamais, ni de près ni de loin,

adhéré ni donné son appui au mouvement d'un groupe de producteurs dissidents qui, en guise de protestation contre le même projet de loi, avaient chahuté, le 18 décembre, devant l'édifice principal du Parlement et quittèrent plusieurs assemblées de producteurs dans différentes régions de la province. " Messieurs, c'était l'état de la situation. (16 h 10)

En fin de semaine, j'ai eu un appel téléphonique au cours duquel on me disait que les gens de la Coopérative de Granby n'étaient pas d'accord et qu'ils s'étaient réunis tard dans la nuit de vendredi à samedi et qu'ils m'adresseraient possiblement — le message ne disait pas si c'était sûr — un télégramme au cours de la fin de semaine. Lundi, vous comprenez que j'ai appelé mon cabinet et j'ai demandé de m'aviser aussitôt que je recevrais un télégramme pour pouvoir le lire et l'analyser. Tout ce que j'ai eu, c'est que, le lundi après-midi, le chef de l'Union Nationale m'a remis copie d'un télégramme qu'il avait reçu — il avait pensé que j'avais reçu le mien aussi — copie d'un télégramme, parce qu'à ce moment-là je lui disais que je n'avais rien reçu, daté du 17 février 1978 et qui commence comme ceci: "Prière de remettre immédiatement à M. Rodrigue Biron, chef du parti de l'Union Nationale actuellement en congrès chez vous." Donc, il a reçu le télégramme à son congrès, ce qui a dû bien l'arranger d'ailleurs. C'était marqué dans la ligne suivante...

M. Grenier: ... la vérité les gens du congrès. Tu es content?

M. Garon: Le paragraphe suivant dit: "Copie d'un télex envoyée ce jour au ministre de l'Agriculture du Québec, M. Jean Garon." J'ai fait vérifier à l'endroit où on reçoit les télégrammes et je n'ai pas encore reçu le télégramme, à moins que je l'aie reçu cet après-midi puisque j'ai quitté mon bureau ce midi et je ne l'avais pas encore reçu. Je suis allé à mon bureau ce matin et j'ai demandé si on avait reçu un télégramme de la Coopérative de Granby au cours de la fin de semaine et on n'en avait pas reçu. Possiblement que le télex — et je ne mets pas en doute du tout la bonne foi des gens — a été envoyé par la poste.

En tout cas, je ne sais pas ce qui arrivera. Peut-être que je le verrai dans les prochains jours. J'avais tout simplement eu l'occasion de parler au premier ministre au cours de la journée de samedi au conseil national du Parti québécois où je lui avais fait état de ce que j'avais entendu dire au sujet de la Coopérative de Granby. C'est pourquoi M. le premier ministre vous a dit tout à l'heure qu'il m'avait parlé au sujet de cette question. J'ai reçu d'autres télégrammes — je peux vous le dire — un autre télégramme également d'une coopérative qui a tenu une assemblée générale samedi. Extrait du procès-verbal de l'assemblée générale de la Coopérative des producteurs de lait de Montréal qui donne son appui à 100% à la loi 116. J'ai toujours dit — et je n'en ai fait rigueur à personne — qu'il y avait des divisions, qu'il y avait des gens qui non pas sur la loi 116, 116 étant l'occasion... Il y a eu des divisions chaque fois que la loi de la Régie des marchés agricoles a été modifiée.

En 1962, une refonte a été dirigée par le premier ministre du Québec du temps, M. Jean Lesage, qui était avocat et qui avait dû lui-même diriger les délibérations. Il y a eu des commissions parlementaires. C'était une refonte complète de la loi. Il y a eu des groupes syndicaux et coopératifs qui sont venus se faire entendre. Ceux qui ont vécu ce moment-là vous diront que M. Lesage — on me l'a raconté, je n'ai pas vécu ces moments-là — a dû même ajourner l'Assemblée nationale pour pouvoir aller présider les travaux de la commission parlementaire, le ministre de l'Agriculture du temps n'étant pas avocat. Il se trouvait dans des problèmes juridiques concernant cette loi. Le premier ministre lui-même, en 1962, avait dirigé les travaux de la commission parlementaire de l'agriculture. Les gens qui ont comparu à ce moment-là ont eu des débats; que ce soient des syndicats ou des coopératives agricoles, ils ont divergé d'opinion. Il y a eu des discussions concernant l'article 2 dont tout le monde parle depuis 1962 et, à ce moment-là, le troisième paragraphe de l'article 2 de la loi de la Régie des marchés agricoles a sauté. Depuis ce temps, à chaque fois que la loi de la Régie des marchés agricoles est amendée, il y a des gens qui demandent de rétablir le troisième paragraphe de l'article 2 parce qu'à ce moment-là le mouvement coopératif, apparemment — c'est ce qu'on a dit en commission parlementaire — disait que, sans cet article, c'était la fin du mouvement coopératif dans le secteur agricole. Tout le monde peut constater que depuis 1962, cela a été une montée fulgurante du mouvement coopératif...

Une Voix: Grâce au Parti libéral.

M. Garon: ... grâce aux coopérateurs dynamiques qui croient en leur mouvement et au mouvement coopératif. Puisqu'on parle de coopératives, je suis tombé dans un domaine que je connais puisque j'ai été le premier professeur de droit à donner un cours de trois crédits de 45 heures sur le droit des coopératives dès 1972.

M. Grenier: J'ai rencontré un de vos étudiants...

M. Fontaine: J'ai pris ces cours-là. J'ai été obligé de les suivre moi-même, M. le Président.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Par ailleurs, quand je regarde le député de Nicolet-Yamaska, je constate que mes cours n'ont pas toujours été bien suivis.

M. Fontaine: Ils étaient très mal compris.

M. Garon: Mais j'avais l'habitude, à la fin de mes cours, quand ils n'avaient pas de questions à poser, de demander à mes étudiants: "Est-ce que

c'est parce que vous avez très bien compris ou parce que vous avez si peu compris que vous n'êtes même pas capables de poser de questions?" J'ai l'impression que le député de Nicolet-Yamaska était plutôt dans la deuxième catégorie. Je peux dire que tous ceux qui me connaissent savent à quel point, depuis toujours, j'ai été un promoteur des coopératives. Par l'établissement de cours sur les coopératives, je peux dire qu'aujourd'hui même, depuis 1973, les étudiants en droit — cela est nouveau parce que, avant, c'était une lacune que les étudiants ne puissent connaître les lois qui régissent les coopératives — sont susceptibles, aux examens du Barreau, d'être interrogés sur le droit des coopératives. Ce qui peut assurer un service ' considérable aux coopératives dans les régions parce qu'on sait qu'auparavant c'était une lacune parce que les avocats n'étaient pas familiers avec cette législation.

Quand on dit que le ministre de l'Agriculture veut la mort des coopératives, vous comprenez que j'ai envie de rigoler. La façon dont les coopératives sont traitées depuis deux ans — je ne dis pas qu'elles étaient maltraitées auparavant — prouve le contraire. Tout ce qui me retient actuellement ici m'empêche justement d'aller inaugurer des coopératives que nous avons aidées au cours de l'année dernière à progresser et à se moderniser.

M. Grenier: Venez rouvrir Tricofil...

M. Garon: Tricofil n'est pas ma responsabilité. Je ne peux pas en parler.

M. Grenier: C'est vrai.

M. Garon: Ce sont les coopératives agricoles ou des coopératives de transformation de produits agricoles qui sont sous ma responsabilité. Il est évident que la disparition du troisième paragraphe de l'article 2 n'a pas eu pour effet de tuer le mouvement coopératif. Evidemment, à ce moment-là, le mouvement syndical et le mouvement coopératif ont toujours craint de faire interpréter l'article 2, de sorte que l'article 2 n'a jamais été interprété par les tribunaux. On aime mieux — je pense que c'est une certaine sagesse — négocier des arrangements entre les deux parties plutôt que faire interpréter l'article 2, ce qui pourrait déterminer telle ou telle chose en faveur de l'une ou l'autre des parties.

Je pense que la loi 116 ne vient pas — non seulement je le pense — trancher entre les coopératives et les syndicats. Il est évident que, dans un domaine comme le mouvement coopératif et le mouvement syndical, avec la force qu'ils ont actuellement au Québec, les solutions qui peuvent être apportées doivent être en grande partie des solutions négociées, ou du moins négociées jusqu'à l'extrême limite. C'est en l'absence de toute solution, après une négociation poussée à l'extrême limite, que d'autres instances doivent prendre des décisions. Je ne dis pas qu'il ne devrait pas y avoir, à un moment donné, une prise des décisions à un niveau ou l'autre, mais c'est à l'extrême limite. Actuellement, dans la loi sur le syndicalisme agricole et dans la loi sur les coopératives, soit coopératives agricoles, associations coopératives ou syndicats coopératifs, pour les coopératives qui ont été formées en vertu de cette loi, il existe tous les éléments pour permettre aux producteurs de faire leur choix et de discuter des possibilités d'arrangement entre les deux instances. (16 h 20)

Je pense qu'il est mauvais de vouloir, de part et d'autre, dire: C'est moi qui serai là et toi tu n'y seras plus, ou: C'est toi qui vas être là et moi je n'y serai plus. Dans ce secteur, il va falloir qu'il y ait des responsabilités partagées. Les coopératives jouent un rôle essentiel et nécessaire et le syndicalisme agricole joue également un rôle essentiel et nécessaire. Il n'est pas nécessaire que les deux fassent la même chose au même moment. A ce moment-là, il faut une répartition des pouvoirs, une répartition des attributions entre les deux mouvements.

Quand je regarde cela, ce sont les mêmes agriculteurs, au fond, qui sont dans les coopératives et dans les syndicats. L'agriculteur fait partie d'une coopérative et fait aussi partie d'un syndicat; la plupart des agriculteurs qui font partie d'un syndicat font aussi partie d'une coopérative. Dans certaines régions, d'après les rapports que j'ai, le mariage est assez bon; dans d'autres, le mariage est un peu en montagnes russes, il y a des hauts et des bas. Mais je pense qu'il y a des choix à faire à un moment donné et je pense que les producteurs souhaitent que les deux instances puissent s'entendre concernant la répartition des attributions entre chacune.

Mais ce n'était pas le rôle du projet de loi no 116, malgré ceux qui ont voulu le dire. D'ailleurs, je ne pense pas que le mouvement coopératif, à aucun moment, l'ait prétendu; simplement, il y a eu des craintes quant à l'interprétation de certains articles et cela a été le but de la rencontre du 16 décembre. Le projet de loi no 116 ne venait pas régler cette question, ne venait pas trancher entre les deux, ne venait pas décider qui devait jouer tel et tel rôle, soit les coopératives ou le mouvement syndical; il venait régler un problème légal qui a été causé en grande partie par des décisions de la Cour suprême rendues tant en 1977 qu'en 1978, mais surtout en 1978.

Aussi, je pense que c'est un bon projet de loi; on le verra à l'usage, évidemment. Je suis certain qu'il y a des agriculteurs actuellement qui sont inquiets par tout ce qui a été dit. Il y a des députés, qui se disent toujours de bonne foi et un peu la conscience de tout le monde, qui ont véhiculé, à un moment donné, qu'on dirait au cultivateur à quel moment faire ses semences. Je pense que ces députés ne pouvaient pas dire ces choses de bonne foi. Il est évident qu'on ne dira pas à tel agriculteur de faire des semences à telle ou telle date, sauf exceptionnellement pour les légumes de conserve où les producteurs eux-mêmes, dans un plan négocié avec l'entreprise, s'astreignent à

certaines conditions pour que les légumes n'arrivent pas tous la même journée à l'usine.

Mais, de façon générale, le projet de loi n'a pas pour but ces choses. Le projet de loi a pour but, esentiellement, une mise en marché ordonnée et aussi il vient combler le vide laissé par la Cour suprême. Sans le projet de loi no 116, les plans nationaux qui existaient n'auraient pas pu continuer à fonctionner. En effet, les engagements qui étaient pris par les différentes parties, soit dans le plan national du lait, dans le plan national du dindon, dans le plan national des oeufs et, éventuellement — puisque Québec l'a demandé longuement — dans le plan national du poulet — finalement, un an et quatre mois après la première signature du Québec, en septembre 1977, le gouvernement fédéral a accepté, en décembre 1978, d'accorder le plan national du poulet.

Sans la loi 116, à toutes fins utiles, le Québec serait incapable de signer des engagements dans le plan national du poulet s'il n'avait pas les pouvoirs pour mettre en oeuvre ces plans nationaux revendiqués par tous les producteurs.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, je m'excuse d'interrompre l'intervention, sauf que vous n'êtes probablement pas au courant des décisions qui ont été prises au cours de la conférence des leaders, et je vous avise, pour que vous n'en soyez pas surpris, que la majorité ministérielle, sur la prise en considération du rapport, n'a droit qu'à 45 minutes, suivant l'entente intervenue. Vous parlez déjà depuis 30 minutes. Je vous signale qu'il ne reste plus beaucoup de temps pour votre formation politique.

M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Je voudrais laisser l'occasion de s'exprimer à d'autres députés qui ont travaillé fortement en commission parlementaire, M. le Président. Je pense au député de Beauce-Nord, qui a travaillé considérablement, en commission parlementaire, sur cette loi. Je pense au député de Joliette-Montcalm, qui a travaillé beaucoup sur la loi. Je pense au député de Kamouraska-Témiscouata. Je pense également au député d'Iberville, au député de Champlain, parce qu'il a une vaste expérience dans le domaine des oeufs, étant lui-même un producteur d'oeufs. Le député de Saint-François également, qui est adjoint parlementaire. Je le gardais pour la fin, comme dessert, parce que le député de Saint-François a donné un cours, à un moment donné, sur le fonctionnement des plans conjoints au chef de l'Union Nationale qui ne savait même pas ce que c'était du lait de surplus.

M. Biron: Je sais ce que c'est que des surplus de lait.

M. Garon: Je ne voudrais pas m'étemiser davan-tage, M. le Président. Il y a aussi le député de Lac-Saint-Jean, je ne le nommais pas et je l'ai juste devant moi, qui a travaillé également sur le projet de loi. Le député d'Arthabaska y avait travaillé auparavant, mais n'a pas pu assister à la commission parlementaire parce qu'il est malade actuellement, il est à l'hôpital, mais il avait travaillé à sa préparation. Les députés du Parti québécois, du gouvernement ont travaillé fortement, à la commission parlementaire, et je voudrais leur donner l'occasion de dire un mot. C'est pourquoi je ne prendrai pas plus du temps qui m'est alloué, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet, avant de vous céder la parole, j'aimerais faire état de l'entente intervenue à la conférence des leaders. Il y aura deux étapes. Jusqu'à 18 heures, c'est-à-dire, de 16 heures à 18 heures, c'est le débat sur la prise en considération du rapport de la commission, et à 20 heures, ce sera le débat de troisième lecture jusqu'à 22 heures. Maintenant, je signale que pour la prise en considération du rapport, la majorité ministérielle, il lui est alloué 45 minutes. Le Parti libéral, 30 minutes. L'Union Nationale, 35 minutes. M. le député de Beauce-Sud, 10 minutes. Ce qui fait un total de 120 minutes. Pour le débat de troisième lecture, la majorité ministérielle, il lui est alloué 30 minutes. L'Opposition officielle, 25 minutes. L'Union Nationale, 25 minutes. Le député de Rouyn-Noranda, 5 minutes. Le député de Beauce-Sud, 5 minutes.

Je vous signale que le vote, vous pourrez me corriger, MM. les leaders, si je commets quelque inexactitude, il a été entendu qu'il y aura un vote à 17 h 55 à peu près sur la prise en considération du rapport, et vers 21 h 45, le vote de troisième lecture.

Avis de mini-débats

Maintenant, je dois vous donner lecture de deux avis qui me sont parvenus: Québec, le 20 février 1979. M. le Président, conformément à l'article 174 de notre règlement, je désire vous aviser que je ne suis pas satisfait de la réponse que m'a donnée le ministre de l'Agriculture à une question que je lui posais aujourd'hui au cours de la période des questions concernant la teneur d'un télégramme qui lui a été envoyé par la Coopérative de Granby, le 21 décembre 1978. Je désire donc soulever ce problème de nouveau au cours d'un mini-débat en vue d'obtenir des renseignements additionnels sur cette question. Je vous remercie de votre collaboration habituelle et vous prie de croire, M. le Président, en l'assurance de mes sentiments les meilleurs. C'est signé par le chef de l'Union Nationale, député de Lotbinière, Rodrigue Biron. (16 h 30)

Je dois vous signaler tout de suite que je l'ai reçu après. J'aurais dû le lire dans l'ordre inverse. Le premier avis qui m'est parvenu est celui-ci.

Le 20 février 1979, M. le Président, à la séance d'aujourd'hui j'ai posé au premier ministre une question portant sur le sujet suivant: Le règlement éventuel de la réclamation de $32 millions de la Société d'énergie de la baie James, suite au saccage de LG 2, en mars 1974. Puisque je ne suis pas satisfait de la réponse donnée, je désire me

prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs. C'est signé du député de Marguerite-Bourgeoys, Fer-nand Lalonde.

Je donne donc avis que, conformément à l'article 174 de notre règlement, après le vote de troisième lecture, ce soir, nous aurons ces deux mini-débats dans l'ordre suivant. D'abord le minidébat réclamé par le député de Marguerite-Bourgeoys et ensuite le mini-débat réclamé par le chef de l'Union Nationale.

Je vous indique tout de suite que la présidence, suivant le règlement intervenu, interviendra d'office et d'autorité pour réduire au prorata le temps alloué à chaque formation politique si on devait se rendre compte que les questions de règlement ont grugé trop de temps. Comme il ne semble pas y en avoir, cela va très bien. M. le ministre de l'Agriculture, vous êtes déjà prévenu. Je préviens M. le premier ministre en conséquence.

M. le député de Montmagny-L'Islet, je vous donne maintenant la parole.

Prise en considération du rapport (suite)

M. Garon: Question de règlement, M. le Président. A l'article 123, paragraphe 6, il est dit: Le président organise le débat au cours duquel a lieu la prise en considération du rapport et des amendements proposés. La règle voulant qu'un député ne parle qu'une fois ne s'applique pas au proposeur du projet de loi. Est-ce que les 45 minutes sont comprises? Est-ce que l'article 6 de l'article 123 comprend mes 45 minutes ou c'est pour l'ensemble des droits de parole? Il y a des droits de réplique.

Le Président: Je vous réponds tout de suite, c'est pour l'ensemble des droits de parole de la formation politique à laquelle vous appartenez. C'est pourquoi j'ai cru utile et sage de me lever tout à l'heure pour vous prévenir.

M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Julien Giasson

M. Giasson: M. le Président, au moment où nous devons prendre en considération le rapport de la commission parlementaire de l'agriculture relative à ces débats menés sur le projet de loi no 116, il me vient à l'esprit ceci. Je siège en cette Assemblée depuis bientôt neuf ans, et je ne me rappelle pas qu'un projet de loi comptant si peu d'articles ait pu retenir aussi longuement en commission parlementaire les députés de cette Assemblée. J'ai participé à de nombreux débats, il nous est arrivé souventefois en commission parlementaire, les députés de l'Assemblée, de devoir multiplier les séances, mais habituellement cela se produisait sur des projets de loi fort importants. Ils étaient importants non seulement dans les principes qu'ils comportaient, mais surtout pour le nombre d'articles qu'il y avait à l'intérieur de ces projets de loi.

Or, voici que nous avons un projet de loi qui compte tout au plus huit articles et qui a été diminué à sept articles, suite aux amendements déposés par le ministre, et nous avons dû siéger dans une multitude de séances répétées. Nous avons eu des débats même en décembre, mais c'est surtout au cours des derniers jours et même des dernières semaines que ce débat s'est prolongé pour étudier ce projet de loi article par article.

En dépit de toutes ces séances, au moment où le rapport est déposé devant l'Assemblée il nous faut constater que nous avons vraiment adopté, lors du débat de la commission parlementaire, deux articles et nous avons mené la discussion sur un troisième qui n'a pu être adopté dans sa totalité.

Lorsqu'on se remémore cette situation, on ne peut faire autrement que de se poser la question: Qu'y a-t-il de si fondamental, de si grave ou de si important derrière une loi telle que la loi 116 qui, comme je le disais il y a un instant, compte huit articles et a fait que notre commission parlementaire, après des heures et des heures de travail, ne soit pas parvenue à passer à travers de chacun de ces articles?

Pour ma part, j'ai tenté de comprendre. Au départ, le principe de la loi même a été nettement exposé par le ministre de l'Agriculture lors de son discours de deuxième lecture. Il nous a déclaré qu'essentiellement le principe que sous-entendait cette loi était celui d'apporter un correctif à un vice constitutionnel qui avait été établi à la suite d'un examen de certaines dispositions d'une loi fédérale par la Cour suprême. Lorsque le ministre a commenté la loi en deuxième lecture, il nous a dit que, somme toute, la loi était là pour corriger ce vice constitutionnel et surtout pour permettre de valider des décisions qui avaient été rendues en vertu de lois fédérales, et ça depuis l'existence de quelques plans nationaux de mise en marché au pays.

Les députés de cette Assemblée qui ont eu à prendre la parole et à faire valoir des opinions sur la loi 116 ont à peu près tous reconnu qu'ils étaient assez facilement d'accord sur l'objectif de base ou le principe déclaré par le ministre, soit apporter les correctifs nécessaires à la suite du jugement de la Cour suprême. Il semble bien que le débat et toutes les difficultés que nous avons connues, tant en deuxième lecture qu'en commission parlementaire, reposaient sur un autre objectif de la loi, objectif qui avait comme fin fondamentale d'apporter quelques modifications à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles au Québec.

Il est sûr que si on s'était limité à vouloir corriger le vice constitutionnel, il y a belle lurette que nos débats seraient terminés. Je pense que le ministre va le reconnaître et va le concéder. Tout ce qui a constitué les débats, que je qualifierais d'interminables, s'est accroché à cette partie de la loi qui apporte quelques modifications à la loi de mise en marché. J'ai tenté, au cours de différentes discussions que j'ai eues avec des producteurs agricoles, donc des gens pour qui la loi est votée, de découvrir quels étaient véritablement les motifs pour lesquels un grand nombre de producteurs de

ma région désiraient que la loi soit adoptée, soit votée; j'ai tenté de comprendre également les appréhensions que quelques autres producteurs de ma région avaient à l'endroit de cette loi.

Je n'ai constaté, chez les producteurs laitiers, les producteurs de lait de chez nous, aucune objection à l'adoption de la loi dans sa teneur même; j'ai senti un peu de résistance ou de crainte de la part d'un groupe de producteurs en particulier, soit les producteurs de porc de mon comté, qui ont de grandes et sérieuses réserves. Je les comprends. Il s'agit de producteurs de porc pour qui on a décidé, coûte que coûte, qu'il devrait y avoir un plan conjoint, sans aller chercher le consensus minimal que représente la tenue d'un référendum qui accorderait un minimum de votes, d'ailleurs prévu à l'intérieur de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. De ce côté, je peux comprendre la réaction des producteurs de porc de ma région parce que le gouvernement du Québec, à la demande de certains producteurs, à la demande d'organismes qui les représentent, a proposé au ministre de l'Agriculture de décréter d'autorité un plan conjoint dans une production donnée au moment où on n'avait aucune certitude que la majorité des producteurs touchés dans cette spécialité était d'accord avec une mise en marché des plans conjoints et tout ce qui peut en découler par la suite, soit l'administration, l'établissement éventuel de quotas, l'agence de commercialisation, enfin, le processus normal qu'on retrouve lorsqu'un plan conjoint est constitué. (16 h 40)

Au-delà des producteurs de ma région, je n'ai pas entendu d'objections, je n'ai pas entendu de commentaires vraiment défavorables à l'ensemble du contenu de la loi 116. Quelle ne fut pas ma surprise, tout récemment, de prendre connaissance, Mme le Président, d'une lettre adressée au ministre de l'Agriculture par la Coopérative fédérée de Québec! Cette lettre, qui est datée du 16 décembre, compte quatorze feuilles. Elle a été adressée par la Coopérative fédérée au ministre le 16 décembre, soit quelques jours avant l'ajournement de nos travaux pour les Fêtes. Après l'avoir lue et relue attentivement, je me suis posé la question: Est-ce vraiment la position de la Coopérative fédérée qu'on retrouve dans ce document? Parce que c'était une analyse très sévère du contenu de la loi 116, surtout une étude très sévère des conséquences qu'aurait l'application des articles 1, 3 et 5 du projet de loi 116. Il était même question que l'adoption de ces articles à l'intérieur de la loi 116 pouvait mettre en danger la survie des coopératives agricoles au Québec.

Si vous me le permettez, je vais vous en lire un passage où la Fédérée dit ceci: "Nous revenons devant vous aujourd'hui pour vous souligner les dangers graves que comportent pour les sociétés coopératives et pour tous les producteurs, membres ou non des coopératives, les dispositions des articles 1, 3 et 5 du projet de loi no 116 et pour vous demander non seulement de retirer ces amendements, mais de rétablir dans la Loi de mise en marché des produits agricoles les dispositions qui protégeront les associations de producteurs constitués en coopératives et empêcheront désormais toute intervention dans les relations entre les membres usagers et leur coopérative par le biais des plans conjoints". Et ce qui suit dans la lettre de la Fédérée au ministre va à peu près dans le même sens.

Je vous ai dit que je fus fort surpris de prendre connaissance du document puisque, à l'époque, le ministre nous indiquait que le mouvement coopératif au Québec était passablement d'accord avec les dispositions contenues dans la loi 116. Le ministre nous apprend ensuite qu'après l'envoi de cette lettre une rencontre entre le ministre de l'Agriculture, la Fédérée et certaines coopératives du Québec avait permis de revoir l'ensemble du contenu de la loi 116 et de déterminer quels amendements le ministre apporterait à la loi afin de satisfaire à des exigences minimales de la Fédérée ou encore de ses coopératives affiliées. Lorsque le ministre nous dit qu'il y a eu entente suite à cette rencontre, je veux bien le croire, mais cette approbation de la loi 116 suite aux amendements constitue presque une volte-face complète et totale par rapport aux commentaires que la Fédérée avait faits dans sa lettre du 16 décembre.

Or, après, on découvre également qu'une autre coopérative au Québec, la Coopérative agricole de Granby, a beaucoup de réserves sur la loi 116 en ce qui a trait aux mêmes articles qui étaient cités dans la lettre du 16 décembre de la Fédérée. Quant à moi, j'ai tenté encore de comprendre cette réserve très forte qu'avait la Coopérative de Granby quant aux dispositions de la loi 116. J'avouerai que je ne comprends pas très bien. Il faudrait que j'aie des explications beaucoup plus poussées pour comprendre les dangers que peuvent comporter pour la Coopérative agricole de Granby les pouvoirs qu'on ajoute à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles par les articles mentionnés.

Mais, à tout événement, si on croit fondamentalement au fonctionnement de plans conjoints qui auraient comme fonction principale d'atteindre les fins pour lesquelles ils sont constitués, d'atteindre également les fins que recherchait le législateur lorsque cette loi a été votée et surtout amendée en 1962 et 1974, si on veut sincèrement que nos plans conjoints touchent des productions pour lesquelles il y a eu des ententes au plan national, soit la création d'offices de commercialisation canadiens, ou encore des plans conjoints qui n'ont pas encore débouché sur des ententes des provinces pour la création d'un plan national.

Pour ma part, il m'apparaît qu'on doit faire en sorte que les pouvoirs de la Loi sur la mise en marché soient assez grands, suffisamment forts pour permettre véritablement un plan conjoint et lui faire atteindre les buts pour lesquels il a été constitué. Je ne crois pas en un plan conjoint en agriculture qui n'aurait pas de pouvoir minimal ou de pouvoir suffisant, ni à la possibilité qu'un tel organisme puisse vraiment aider les cultivateurs dans leur recherche de structures de prix, dans

leur recherche d'un système de commercialisation qui pourrait leur garantir la stabilité dans leur production agricole, et surtout faire en sorte que le prix stable qu'on veut maintenir à l'intérieur de la mise en marché d'un produit soit toujours en accord avec les coûts de production à la ferme, coûts de production qui peuvent être modifiés à différentes périodes de l'année.

Il est évident que si les pouvoirs nouveaux que la loi 116 ajoute à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles étaient utilisés de façon fort abusive par des personnes qui ont fonction d'administrer les offices de producteurs qui surveillent l'opération des plans conjoints, j'aurais des réserves. Mais, en général, les personnes qui administrent les offices de producteurs sont d'abord des producteurs agricoles directement concernés dans la production en cause. Ce sont des gens qui sont en poste à la suite d'une élection de l'assemblée générale de producteurs. Je crois qu'on doit faire confiance à des producteurs agricoles dans une production donnée. Ils ont le jugement ou le bon sens de désigner ou de nommer, lors de l'assemblée générale, des personnes qui sont vraiment représentatives du milieu, des gens qui ont fait leurs preuves, d'abord comme producteurs, et qui ont prouvé, au-delà de cela, des capacités, un potentiel ou un jugement qui permettent à ces gens de prendre les bonnes décisions, quels que soient les événements qui pourraient se produire tout au long de l'administration d'un plan conjoint.

A partir de cette croyance, de cette foi que j'ai dans les producteurs d'être capables de désigner des représentants au niveau de leurs offices, des gens de bon sens, des gens qui sont capables de faire la part des choses que, même avec des pouvoirs, il m'apparaît qu'il faudra toujours que ceux qui ont à administrer ces plans usent de jugement et soient capables d'un bon équilibre pour ne pas vouloir utiliser pleinement l'ensemble ou la totalité des pouvoirs quand ce n'est pas nécessaire de le faire. A observer les plans conjoints qui ont fonctionné chez nous, j'ai eu peut-être l'occasion de voir de plus près certains plans conjoints que d'autres, d'accord, je le concède, mais lorsque je revois, après quelques années, ces plans conjoints... Oui? Vous avez quelque chose à dire?

Une Voix: Vous avez un intérêt dans les plans conjoints.

M. Giasson: J'ai un intérêt de petit producteur qui n'est même pas totalement propriétaire d'une ferme, qui est co-propriétaire d'une ferme. Mais cela me permet au moins de découvrir ce qu'est un plan conjoint, comment cela a fonctionné, et de découvrir comment cela devrait fonctionner, de découvrir comment des gens ont pu profiter du système au maximum, par des structures et des équilibres de prix qu'ont amenés un ou des plans conjoints. Au-delà de cela, vouloir presser le citron au maximum, c'est-à-dire profiter encore davantage lorsqu'ils ont fait des productions, par un dépassement du quota ou en organisant toutes sortes de déséquilibres, cela s'est fait sans, souvent, que ces gens-là aient eu à subir des pénalités. D'accord, les petits producteurs ont été soumis à des pénalités et, souvent, ils ont subi leurs pénalités. Mais très souvent, ceux qui n'ont pas accepté ou qui n'ont pas subi les pénalités qui étaient prévues dans le système des plans conjoints, ce n'étaient pas des petits producteurs. C'étaient souvent ceux qui avaient le plus de volume de quotas, donc, qui étaient en mesure de profiter le plus largement possible du plan conjoint qui avait été constitué. (16 h 50)

Pour ma part, Mme le Président, j'aurais bien aimé que notre commission parlementaire puisse mener le débat sur tous les articles de la loi 116, mais nous n'avons pas touché aux deux articles qui fondamentalement permettent de corriger le vice constitutionnel qui était la raison de la venue de la loi 116. Effectivement, nous pouvions apporter les correctifs recherchés par l'article 4 et l'article 7 de la loi, telle que déposée par le ministre. Pourquoi? Parce que la Cour suprême, dans son jugement, a réitéré les principes de la délégation des pouvoirs entre le Parlement et les Législatures provinciales. Cette cour a décrété, à plusieurs reprises, que la délégation de pouvoirs d'une Législature à l'autre est inconstitutionnelle, mais que la délégation par le Parlement ou vice versa d'une autorité administrative à une commission ou à un office commercial est, elle, permise. C'est le juge Laskin qui le déclare à la page 22 du jugement de la Cour suprême.

C'est donc dire que le Parlement du Canada peut déléguer à la Régie des marchés agricoles du Québec les pouvoirs fédéraux sur le commerce interprovincial et international des produits agricoles. C'est pourquoi la Cour suprême a déclaré valides le paragraphe 1 de l'article 2, de même que le sous-paragraphe b) du paragraphe 2 en disant que le Parlement fédéral ne pouvait pas déléguer un pouvoir qu'il n'avait pas, c'est-à-dire le contrôle de la mise en marché des produits agricoles à l'intérieur d'une province. Le fédéral a le pouvoir de légiférer pour ce qui a trait à la mise en marché, à la commercialisation de produits qui sont destinés au commerce interprovincial ou international, mais ne peut le faire au plan constitutionnel vis-à-vis des pouvoirs de mise en marché des produits agricoles à l'intérieur d'une province puisqu'il s'agit là d'une juridiction essentiellement provinciale.

Dans son jugement, le juge Pigeon déclare à la page 3 qu'il serait très facile pour les législateurs d'adopter une loi pour guérir la situation créée par le jugement de la Cour suprême. C'est de là qu'est apparue, à l'Assemblée nationale du Québec, la loi 116 comme sont apparues au niveau d'autres Législatures au Canada, soit des provinces qui ont décidé de corriger le vice en ce qui les concernait, des lois qui permettaient d'atteindre les mêmes objectifs et les mêmes fins que la loi 116 ici au Québec.

C'est pourquoi, contrairement à ce que nous avait dit le ministre de l'Agriculture hier en com-

mission parlementaire, que c'était l'article 5 qui venait essentiellement apporter...

M. Fontaine: Question de règlement, Mme la Présidente. Je m'excuse auprès de mon collègue.

Mme le Vice-Président: Sur une question de règlement, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Etant donné qu'il y a une commission parlementaire actuellement, le quorum est de 20 et nous ne sommes que quinze à l'Assemblée nationale.

Mme le Vice-Président: Nous vérifions immédiatement, M. le député. Je crois, effectivement, que nous n'avons pas quorum. Y a-t-il des gens qui tiennent des conférences aux alentours de l'Assemblée nationale? Cela va?

Une Voix: Non.

Mme le Vice-Président: Cela va, nous avons maintenant quorum.

M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, Mme le Président. Je signalais donc que le ministre de l'Agriculture nous avait indiqué en commission parlementaire que les pouvoirs nécessaires à corriger le vice constitutionnel, tel qu'établi par le jugement de la Cour suprême, nous les retrouvions à l'article 5 de la loi. Je continue de soutenir que le correctif nécessaire, nous le retrouvons dans les dispositions des articles 4 et 7. L'article 7 a pour fin, dans sa teneur, de régulariser ou de rendre correctes toutes les opérations menées en vertu d'une loi fédérale parce qu'il déclare que les décisions rendues, on doit présumer qu'elles ont été rendues en vertu des dispositions de la loi de la mise en marché du Québec pour ce qui a trait à des produits agricoles qui avaient été commercialisés à l'intérieur du Québec, soit intraprovincialement.

Mais pour ce qui est des pouvoirs nécessaires dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles du Québec, de manière à valider ou légaliser des décisions semblables qui seraient rendues par la Législature fédérale, là où il y a des offices de commercialisation, c'est assurément par les dispositions de l'article 4 du projet de loi no 116 qu'on peut garantir dans l'avenir que des opérations similaires et des décisions rendues en vertu de lois fédérales seront effectives, parce que l'article 4 du projet de loi no 116 non seulement indique une délégation de pouvoirs dans un sens mais mène l'opération, de par sa teneur, de manière bilatérale. C'est-à-dire que l'article 4 du projet de loi no 116 vient confirmer que des offices provinciaux de mise en marché du Québec pourraient recevoir une délégation de pouvoirs venant d'offices ou d'agences de commercialisation d'autres provinces ou même de la Législature fédérale, comme on pourrait permettre à des organismes, agences de commercialisation, offices de producteurs ou plans conjoints d'autres provinces d'uti- liser également les mêmes pouvoirs, puisque l'article 4 du projet de loi no 116 est fort précis là-dessus.

M. le Président, je ne voudrais pas poursuivre plus longuement mes commentaires sur l'acceptation du rapport de la commission mais, comme je vous l'ai dit, nous aurions eu avantage à poursuivre ou compléter le débat sur chacun des articles. Je crois que si le ministre de l'Agriculture avait accepté, dès décembre, de tenir quelques séances de la commission parlementaire de l'agriculture pour recevoir les groupes touchés par les dispositions de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, nous aurions peut-être déjà terminé nos travaux et nos débats puisque, j'en suis certain, cela aurait permis à l'ensemble des députés de mieux comprendre tous les mécanismes de fonctionnement des plans conjoints et mieux saisir la réglementation qui est en vigueur et acceptée par les assemblées de producteurs ou encore par l'exécutif des offices. Nous aurions découvert les motifs pour lesquels la Régie des marchés agricoles donnait son approbation à des réglementations proposées et la refusait vis-à-vis d'autres réglementations.

Je crois qu'un jour ou l'autre, il faudra tenir ce débat de fond sur toute l'expérience qu'ont connue les plans conjoints au Québec depuis leur création. Ce sera à partir de ce jour que l'ensemble des députés sera en mesure d'évaluer vraiment les objectifs fondamentaux poursuivis par les plans conjoints et qu'on sera plus en mesure de comprendre également les dispositions nouvelles qu'on ajoute à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, telles que nous les présente le projet de loi no 116. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Mme la Présidente, sur ce projet de loi no 116 en particulier, et à cause du projet de loi no 116, j'accuse le ministre de l'Agriculture d'être un traître, un traître aux producteurs agricoles du Québec, un traître aux coopératives agricoles du Québec, d'avoir trahi les producteurs agricoles, trahi les coopératives agricoles du Québec avec le projet de loi no 116. Plus que cela, je l'accuse d'avoir menti à l'Assemblée nationale, à la population du Québec, aux producteurs agricoles et aux coopératives agricoles du Québec en disant que toutes les coopératives étaient d'accord avec son projet de loi, lorsqu'on sait aujourd'hui que la plus importante des coopératives au Québec, la Coopérative agricole de Granby, la plus importante au point de vue du nombre de producteurs, la plus importante au point de vue du pouvoir et de la capacité de production, était contre le projet de loi no 116 tel que présenté par le ministre de l'Agriculture.

Mme la Présidente, l'Union Nationale s'est élevée, depuis le 21 décembre, et même au cours de la dernière semaine de décembre, contre le

projet de loi no 116 parce qu'il pénalise les petits producteurs agricoles et les coopératives agricoles du Québec. L'Union Nationale n'a pas craint, seule avec le député de Beauce-Sud, de faire face au ministre de l'Agriculture, de dire la vérité et de faire la lumière sur les agissements du ministre de l'Agriculture, sur ses trahisons à l'égard des producteurs agricoles et à l'égard des coopératives agricoles du Québec. ( 17 heures)

Mme la Présidente, nous avons même présenté en commission parlementaire, à l'occasion de l'étude de l'article 1 du projet de loi no 116, un amendement. Ce même amendement, Mme la Présidente, nous l'avons présenté ici au cours de l'étude de ce rapport. Cet amendement vise tout simplement à protéger les coopératives agricoles du Québec. C'est ce que cela vise. L'amendement dit ceci: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative." L'Union Nationale ne craint pas de s'affirmer carrément en faveur des coopératives agricoles du Québec et en faveur des producteurs, en faveur de la protection des producteurs agricoles du Québec.

Cet amendement a été présenté en commission parlementaire. L'Union Nationale et le député de Beauce-Sud ont voté pour cet amendement pour protéger les coopératives agricoles du Québec. Les représentants du Parti québécois, avec les prostitués du Parti libéral, ont voté contre cet amendement en faveur des coopératives. Mme la Présidente, lorsqu'on parle de consensus social du côté du Parti québécois, on a eu un exemple encore aujourd'hui alors que les syndiqués de la construction sont venus manifester. La semaine dernière, c'étaient les patrons de la construction qui manifestaient. On a eu des manifestations à partir des producteurs agricoles. On a eu des manifestations par télégrammes à partir des coopératives agricoles. Les manifestations dans le monde agricole au Québec continueront et continueront longtemps à cause de l'adoption du projet de loi no 116 présenté par le ministre de l'Agriculture et par le Parti québécois, appuyé par le Parti libéral du Québec.

Mme la Présidente, dans l'étude de ce rapport, surtout avec les amendements déposés, il faut se poser une question. Si les coopératives agricoles du Québec sont contre le projet de loi no 116 et particulièrement la plus importante de toutes nos coopératives agricoles du Québec, la Coopérative de Granby; si les producteurs agricoles, les petits producteurs agricoles sont contre le projet de loi no 116, il faut se poser une question: A qui cela profite-t-il? Qu'est-ce qu'il a reçu, le ministre? Qu'est-ce qu'il a donné pour imposer une loi aussi injuste aux producteurs agricoles du Québec? Mme la Présidente, on a découvert au cours de l'étude de ce projet de loi beaucoup de cachettes que le ministre avait faites à l'endroit de l'Assemblée nationale, des producteurs agricoles, des coopératives et de la population du Québec tout entière. Une première cachette, cela a été le mémoire de la Coopérative fédérée de Québec, le 16 décembre dernier. Le député de Montmagny-L'Islet, tout à l'heure, en a lu quelques paragraphes. Je lui avais remis personnellement une copie de ce mémoire pour l'informer de ce qui se passait dans le monde agricole. Je vous lis un autre paragraphe, Mme la Présidente. La Coopérative fédérée, le 16 décembre, disait: "Contrairement aux dispositions de l'article 2a proposé dans le projet de loi, il ne s'agit plus d'un pouvoir de réglementation de la production agricole; il s'agit du pouvoir d'attribuer la production à qui l'office des producteurs veut bien et de la retirer à qui il veut bien également." La Coopérative fédérée de Québec continue: "Un pouvoir de prohibition n'est pas un pouvoir de réglementation. Il s'agit du pouvoir d'empêcher un producteur agricole d'exercer sa profession. Il va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives agricoles au Québec." Mémoire de la Coopérative fédérée, le 16 décembre dernier. Lorsque j'accuse le ministre d'avoir menti à l'Assemblée nationale et à la population du Québec, aux producteurs agricoles, je l'accuse d'avoir caché un tel mémoire de la Coopérative fédérée. Il aurait pu informer les membres de cette Chambre, les producteurs agricoles et toute la population du Québec.

Un peu plus tard, Mme la Présidente, une autre cachette du ministre de l'Agriculture. Le 13 décembre, il a reçu un télégramme venant de la Coopérative agricole de Granby et signé par son président, M. Michel Lemire. Je vous lis trois paragraphes du télégramme, adressé à Jean Garon, ministre de l'Agriculture. "La Coopérative agricole de Granby désire vous manifester son plus profond désaccord et sa plus grande appréhension devant le projet de loi no 116 visant à modifier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles telle que déposée à l'Assemblée nationale. Nous ne pouvons accepter ce projet dans sa teneur actuelle. La Coopérative agricole de Granby considère que le projet de loi no 116 dans sa formulation actuelle risque d'entraver d'une manière directe l'autonomie de l'organisation coopérative de la mise en marché des produits agricoles au Québec et d'entraîner à brève échéance la mort de la coopération en matière agricole. Le projet de loi no 116 risque de détruire la coopération dans un secteur clé de notre économie, là où elle a toujours fait preuve d'audace et joue un rôle prépondérant en dotant les producteurs québécois des outils nécessaires à leur développement et à la croissance du Québec."

La Coopérative de Granby, dans son télégramme, Mme la Présidente, dit ceci: Reconnaître aux seuls offices de producteurs le pouvoir absolu de contrôler intégralement tous les aspects de la production et de la mise en marché des produits agricoles équivaudrait à créer de grands trusts syndicaux agricoles, provoquant ainsi la disparition des coopératives agricoles". C'est la Coopérative de Granby qui a dit cela au ministre, le 13 décembre dernier.

Pourquoi le ministre de l'Agriculture a-t-il caché la vérité aux producteurs agricoles, à la population du Québec et à l'Assemblée nationale? Mme la Présidente, une autre cachette du ministre de l'Agriculture. Le 21 décembre, un télégramme...

M. Bisaillon: Vous en oubliez un, le 16 décembre.

M. Biron: Le 16 décembre...

M. Bisaillon: Ne mentez pas, dites tout, il y en a eu un autre, il y a eu une rencontre, parlez-en.

M. Biron: Le ministre a lu le télégramme qu'il a reçu le 16 décembre.

Mme la Présidente, je vais vous lire maintenant celui du 21 décembre; un autre télégramme dont le ministre n'a pas fait part à l'Assemblée nationale, et je vais vous le lire.

M. Bellemare: ... Attendez celui d'hier.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Ah, oui! quand cela ne fait plus votre affaire.

M. Biron: Le 21 décembre, le ministre de l'Agriculture a reçu ceci: "M. le ministre, vu l'urgence de régler, dans l'intérêt des producteurs agricoles du Québec, le problème soulevé par le récent jugement de la Cour suprême du Canada, nous désirons appuyer le projet de loi no 116 uniquement en ce qui concerne les articles 2, 4, 7 et 8, et vous prions d'en assurer l'adoption avant la fin de la présente session. En ce qui a trait aux autres articles, c'est-à-dire, 1, 3, 5 et 7, dudit document, nous vous prions instamment de les retirer afin d'en permettre une discussion plus éclairée à la prochaine session. C'est signé: Le conseil d'administration de la Coopérative agricole de Granby, M. Michel Lemire, président". 50% des coopératives agricoles, le 21 décembre, et le ministre a caché ce télégramme à l'Assemblée nationale. Si le ministre vient nous dire qu'il n'a pas reçu ce télégramme et qu'il ne l'a reçu qu'il y a quelques jours, je lui dirai que cela fait la preuve de son incompétence, et il serait grand temps qu'il change les technocrates de son ministère. Si cela prend deux mois à envoyer un télégramme pour rejoindre le ministre de l'Agriculture, il est grand temps qu'on change les technocrates du ministre ou qu'on change le ministre de l'Agriculture lui-même.

La quatrième cachette du ministre de l'Agriculture, Mme la Présidente. Le 17 février dernier, samedi dernier, un télégramme lui était adressé, encore une fois. Et là on voit encore l'incompétence du ministre ou l'incompétence de ses technocrates, encore une fois il va falloir que vous changiez les technocrates du ministère de l'Agriculture ou le ministre, si cela ne fonctionne pas.

Mais, au moins, on doit informer la population du Québec. L'Union Nationale, consciente de ses responsabilités, informe la population du Québec sur ce qui se passe dans le domaine agricole, informe les producteurs agricoles sur ce qui se passe dans leur domaine.

Le télégramme adressé encore au ministre de l'Agriculture dit ceci: "A la lumière des récents événements — celui-là est récent, il est du 17 février dernier, cela ne fait pas longtemps...

M. Bisaillon: Pour faire tout le portrait, informez-vous de celui du 18 décembre.

M. Biron: ... il y a trois jours, Mme la Présidente. Un télégramme au ministre de l'Agriculture, il pourra bouger un peu, dit ceci: "A la lumière des récents événements, et à la suite des pressions de plus en plus fortes de ses membres, la Coopérative agricole de Granby désire vous informer qu'elle retire son appui aux articles 1, 3, 5 et 6 du projet de loi no 116 ainsi qu'aux modifications proposées, et qu'elle entend alerter le monde agricole et coopératif des dangers que présente leur adoption". C'est la Coopérative de Granby qui parle au ministre de l'Agriculture, qui veut alerter le monde agricole et le monde coopératif des dangers que présente le projet de loi no 116.

La Coopérative de Granby fait son devoir. Le ministre de l'Agriculture continue à cacher la vérité à la population du Québec et spécialement aux producteurs agricoles du Québec. Mme la Présidente, l'Union Nationale aussi va faire son devoir vis-à-vis des producteurs agricoles. Si le ministre ne veut pas les informer, l'Union Nationale tiendra des réunions dans tous les comtés du Québec, s'il le faut, pour informer nos producteurs agricoles de ce qu'est le projet de loi no 116 d'un bout à l'autre. Je vous inviterai, Mme la Présidente, je peux inviter le ministre de l'Agriculture et il va se faire tirer des tomates et des pintes de lait de la part des producteurs agricoles du Québec.

Mme la Présidente, le télégramme envoyé au ministre dit ceci: "L'absence totale d'un consensus social sur la portée et l'application du projet de loi justifie à elle seule qu'il soit scindé et commande la tenue d'une commission parlementaire sur le problème du lait au Québec. Seule une disposition législative expresse assurant que la loi n'a pas pour effet de restreindre les obligations d'un producteur envers sa coopérative nous convaincrait que les intentions du ministre sont véritablement celles de protéger les intérêts de tous les producteurs agricoles du Québec". C'est la Coopérative de Granby qui parle. Pour donner une chance au ministre de se prononcer sur ce que demande la Coopérative de Granby, une disposition législative expresse assurant que la loi n'a pas pour effet de restreindre les obligations d'un producteur envers sa coopérative, Mme la Présidente, nous avons déposé un amendement qui se lit ainsi. Le Parti québécois, les péquistes qui se vantent auront à voter tout à l'heure là-dessus. (17 h 10)

L'amendement dit ceci: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative." A la suite de la demande du président de la Coopérative agricole de Granby, l'Union Nationale a représenté son amendement; on verra ce que les députés du Parti québécois et le ministre péquiste de l'Agriculture vont faire. On verra si ses intentions sont véritables ou hypocrites vis-à-vis des producteurs agricoles du Québec.

M. Lemire termine son télégramme en disant: "Enfin, nous réitérons les propos tenus dans nos communications en date des 13 et 21 décembre 1978." Je vous en ai parlé. C'est signé: La Coopérative agricole de Granby, par Michel Lemire, président. Le ministre nous a dit que les coopératives avaient accepté. Avec tous ces documents, on voit que la plus importante de toutes les coopératives agricoles du Québec demande au Parti québécois, en date du 17 février, d'ajouter au projet de loi no 116 une disposition législative qui va convaincre les coopératives que les intentions du ministre sont véritablement celles de protéger les intérêts de tous les producteurs agricoles du Québec. On verra si le ministre se rendra aux arguments de la plus importante coopérative agricole du Québec.

Cet amendement que nous vous représentons maintenant pour étude devant l'Assemblée nationale a malheureusement été battu par les péquistes, alliés à leurs amis du Parti libéral. Les ordres sont probablement venus d'en haut, du Parti libéral, pour appuyer le Parti québécois comme on a donné les ordres, le 12 novembre 1976, d'appuyer le Parti québécois, comme on en a donné d'appuyer le Parti québécois contre les coopératives agricoles du Québec et contre les petits producteurs agricoles. On verra les agissements du chef du Parti libéral. Il faudra, un jour ou l'autre, qu'il montre son vrai visage; s'il veut se coller définitivement au Parti québécois, on le verra.

Il y en a d'autres, outre ceux de la coopération, qui sont contre le projet de loi. Il y en a d'autres que les petits producteurs agricoles. Il y a beaucoup de petits producteurs agricoles et il y a même des membres du Parti québécois — l'association "PQuiou" de Brome-Missisquoi — qui, dans la Voix de l'Est, demandent même le retrait du projet de loi no 116. L'Association du Parti québécois de Brome-Missisquoi...

M. Bisaillon: Cela déteint! Le vieux chef a parlé.

M. Biron: ... demande le retrait de la loi 116. Elle va tellement loin qu'elle demande l'abolition des plans conjoints. L'Union Nationale, elle, veut conserver les plans conjoints parce que c'est bon pour les producteurs agricoles. On ne demande pas leur abolition. Le Parti québécois de Brome-Missisquoi demande l'abolition des plans conjoints; c'était la semaine dernière dans la Voix de l'Est. Je pense que ce serait le temps de mettre au pas vos gars pour dire: Vous allez protéger les coopératives agricoles...

M. Bisaillon: Dictateur! Dictateur!

M. Biron: ... vous allez protéger les producteurs agricoles et vous allez conserver les plans conjoints au Québec.

Il y a aussi des syndicats de base de l'UPA qui se prononcent contre le bill 116. J'ai reçu un télégramme qui dit ceci, je vous le lis. "Lors de la tenue de l'assemblée générale annuelle du Syndicat UPA de base de la Rivière-Noire, le 15 février 1979 — il n'y a pas longtemps — il a été résolu, à la grande majorité de 99,75%, de manifester notre désaccord à l'adoption du projet de loi 116. Les producteurs agricoles ont aussi réclamé à l'unanimité la liberté d'association syndicale et le droit de payer une cotisation au syndicat de leur choix. Les producteurs vous félicitent et remercient pour la lutte que vous menez au Parlement en vous opposant au projet de loi 116. Des télégrammes de contestation au projet de loi 116 ont aussi été envoyés par ce même syndicat à M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture, ainsi qu'au premier ministre de la province, M. René Lévesque." C'est signé: Le Syndicat de base de l'UPA de la Rivière-Noire, par Bernard Bédard.

C'est intéressant de voir qu'on est en train de faire un consensus de tout le monde contre ce projet de loi, sauf le ministre de l'Agriculture. Encore une fois, je vous demande: Quelle petite clique le ministre de l'Agriculture veut-il protéger? Il a certainement quelqu'un à protéger, il a quelque chose à protéger ou il a vendu les producteurs agricoles pour d'autres choses et ça, on va le trouver avec le temps. On dira la vérité aux producteurs agricoles. C'est sûr que le ministre de l'Agriculture a décidé d'affronter les vrais agriculteurs et leurs coopératives en présentant un tel projet de loi et surtout en s'entêtant à continuer avec le projet de loi alors que des coopératives lui demandent de le retirer ou au moins de le scinder, d'en passer une partie et, pour l'autre partie, d'essayer de l'éclaircir en réunissant une commission parlementaire sur tous les problèmes agricoles.

Nous aussi, de l'Union Nationale, nous lui avons dit, tout de suite au début: La section pour régler l'affaire de la Cour suprême, on va vous passer cela, cela va prendre une demi-journée et cela va être fini. L'affaire de la Cour suprême ce n'est pas long, cela va passer rapidement, on ne se battra pas contre cela. Mais lorsqu'on veut enlever des droits de produire aux producteurs agricoles, lorsqu'on veut détruire les coopératives agricoles du Québec, l'Union Nationale se bat et va continuer à se battre contre cela.

Mme la Présidente, les conflits dans le domaine du lait n'existent pas depuis aujourd'hui. C'est vrai que cela existait avant la loi 116 et je pense bien que cela va continuer d'exister, peut-être encore plus. Je vous lis ce que le ministre de l'Agriculture, M. Jean Garon, disait, le 25 avril

1978, à l'Assemblée nationale: L'agriculteur fait présentement face à deux instruments qu'il s'est donnés: le syndicalisme et la coopération. Il aime les deux, mais il ne peut pas les faire fonctionner au maximum en même temps dans une production. Il doit faire un certain choix entre les deux ou une répartition des pouvoirs entre les deux. Le ministre n'a pas fait la répartition des pouvoirs, c'est difficile à faire. Le choix a été retardé au Québec depuis 20 ans; il ne s'est jamais fait. On en arrive à un moment où les deux lutteurs sont très forts. S'ils ne font pas ce choix, ils vont se briser l'un et l'autre. Je pense qu'ils sont obligés de faire un choix. C'est un choix difficile, mais nécessaire. Dans le projet de loi 116, le ministre de l'Agriculture a carrément fait son choix contre le monde de la coopération au Québec. C'est cela, la loi 116. Il faudra le savoir et le dire à toute la population du Québec.

J'aurais espéré que le ministre ait recherché un meilleur équilibre entre le syndicalisme agricole et la coopération. J'aurais espéré que le ministre ait scindé son projet de loi, fait adopter la partie pour boucher les trous causés par le jugement de la Cour suprême, en ayant l'autre partie en commission parlementaire, pour écouter le monde agricole, les coopératives, l'UPA, les syndicats de producteurs, les fédérations de producteurs, tout ce monde-là, les producteurs indépendants, écouter tout ce monde et ensuite les aider à faire un meilleur choix, ou diviser complètement les pouvoirs de l'un et les pouvoirs de l'autre. Où commence et où finit le syndicalisme agricole? Où commence et où finit la coopération? Il y aurait eu moyen de faire cela facilement en l'espace de quelques mois. Au contraire, le ministre a carrément pris parti contre les coopératives agricoles du Québec.

J'en ai parlé au cours de la période des questions des dernières semaines, j'en ai parlé à l'Assemblée nationale, j'en ai parlé en commission parlementaire. L'affrontement est tellement grand que la Fédération des producteurs de lait a créé une coopérative fantôme pour concurrencer les autres coopératives. C'est la Régie des marchés agricoles qui l'a dit elle-même. On a parlé de toute une enquête qui a été faite sur la coopérative fantôme où on a dit: II s'agissait donc, évidemment, de trouver ou créer un organisme qui pourrait, légalement, remplacer la fédération pour atteindre les buts de cette dernière. On cherchait la concurrence contre le monde agricole. C'est sans doute en ce sens que les procureurs de la Coopérative des producteurs de lait de Montréal disaient lors d'une enquête que la société coopérative québécoise ne constitue qu'un écran — une coopérative fantôme — devant les actions de la fédération, d'autant plus que cette coopérative ne pouvait rien faire d'important sans avoir l'approbation de la fédération. C'est la Régie des marchés agricoles, le tribunal agricole au Québec, qui disait cela dans son enquête. Un peu plus loin, la Régie des marchés agricoles disait ceci: Après examen des témoignages et des documents, la régie croit que l'utilisation des sommes perçues en vertu du règlement imposant une contribution pour fins de publicité, de promotion et de développement des marchés, en vue de l'établissement d'une troisième force ou de prêts ou subsides à la Société coopérative québécoise — lire la coopérative fantôme — n'est justifiée ni sur le plan légal ni sur celui de son opportunité. La régie considère que l'utilisation de la majeure partie de ces contributions n'est pas conforme aux dispositions de la loi, ni à celles du plan conjoint que la fédération est chargée d'appliquer. C'est la régie qui parle là-dessus. Elle ajoute: Même si ces activités étaient permises par la loi, elle ne peut considérer qu'il s'agit, dans le présent cas, d'une utilisation des contributions qui soit d'intérêt général pour les producteurs de lait ou de l'industrie ni d'une action qu'il appartient à l'office des producteurs de poser.

Le jugement de la Régie des marchés agricoles est très dur. Pourquoi le ministre a-t-il encouragé justement cette coopérative fantôme à continuer de fonctionner? Il l'a encouragée à tel point que la coopérative fantôme et la Fédération des producteurs de lait nature sont accusées d'un détournement de fonds, d'après le jugement de la régie, toujours, Mme la Présidente, de $1 200 000 qu'elles ont pris dans un fonds qui appartenait aux producteurs agricoles. Cela a été détourné à d'autres fins. C'est la régie elle-même qui a parlé, qui a dit: C'est un détournement de fonds, c'est illégal ce que vous avez fait, remboursez. (17 h 20)

Au lieu de dire: La régie s'est déclarée contre cela, remboursez et cela va être fini, on va recommencer à zéro, on va nettoyer la place. Le ministre de l'Agriculture a fait un prêt de $900 000 à la coopérative fantôme afin qu'elle continue de faire concurrence aux vraies coopératives agricoles du Québec. Le ministre de l'Agriculture a donc sanctionné un geste illégal, un détournement de fonds, tel que décrit par la Régie des marchés agricoles du Québec.

On est en droit de se poser des questions. A qui profite la loi 116? Qu'y a-t-il en dessous de cela? Qui est en dessous de cela? Qu'arrive-t-il là-dessus? On est en droit de se poser des questions. On est allé tellement loin dans cette guerre contre les coopératives agricoles que la Coopérative de Granby a cru devoir poser un geste quasi illégal il n'y a pas tellement longtemps, le 1er février. C'est une décision qui a été prise par la base de la coopérative agricole, une décision de l'assemblée générale du 5 janvier: "La coopérative doit cesser la retenue de $0.025 pour le plan conjoint administré par la Fédération des producteurs de lait industriel". La Régie des marchés agricoles avait demandé de retenir $0.025 pour l'administration de la Fédération des producteurs de lait et la coopérative a dit: Ce n'est pas possible. Ce n'est pas vi-vable. On ne peut pas continuer à concurrencer comme cela, contre la fédération, une coopérative fantôme accusée de détournement de fonds et aidée par le ministre. On ne peut pas continuer comme cela. Ils ont arrêté, justement. Ils ont posé un geste quasi illégal en arrêtant de percevoir $0.025

les 100 livres de lait. Le ministre de l'Agriculture a forcé une coopérative agricole du Québec à poser un geste quasi illégal. Il faudrait savoir ce qu'il fera quand la coopérative sera accusée de quelque chose. Il faudrait au moins voir là.

La coopérative va même plus loin: "La Coopérative fédérée poursuit la Fédération des producteurs de lait". C'est la guerre entre le syndicalisme agricole et le monde de la coopération à l'heure actuelle. C'était dans Le Devoir du jeudi 15 février. Cela ne fait pas longtemps, Mme la Présidente. On dit: "La Coopérative fédérée accuse la Fédération des producteurs de lait de l'UPA d'avoir provoqué dès le mois d'août 1977 une requête pour la constitution de la société coopérative fantôme pour s'en faire un paravent et un prête-nom". On dit même un peu plus loin: "Selon la Coopérative fédérée, la Fédération des producteurs de lait de l'UPA aurait, en mars 1978, versé illégalement $837 700 à même les fonds du plan conjoint et, en mai de la même année, cette somme aurait atteint $986 160 provenant des fonds détournés." C'est inquiétant, Mme la Présidente...

M. Garon: Oui.

M. Biron: Le Devoir du 15 février... lorsqu'on voit la Coopérative fédérée, n'ayant pas l'appui du ministre de l'Agriculture, être obligée d'aller à la Cour supérieure du Québec pour obtenir justice. Il y a une limite à cela, Mme la Présidente.

M. Garon: Un instant!

M. Biron: Justement, le projet de loi 116 change toutes les choses et pénalise les coopératives agricoles. Tout à l'heure, avec l'amendement proposé par l'Union Nationale, demandé par la Coopérative de Granby pour protéger les coopératives agricoles, il faudrait qu'une fois pour toutes le ministre se prononce là-dessus.

Mme la Présidente, dans le projet de loi 116 en particulier, vous savez qu'on parle même d'interdire la production, d'interdire la mise en marché; on parle de la suspension ou de la réduction définitive ou temporaire des quotas. Le droit de produire pour un producteur agricole doit être sacré. On ne parle pas d'augmenter ses quotas. On ne parle pas de protéger ses quotas pour qu'il puisse continuer à en avoir pour augmenter son revenu, sa capacité de travailler et sa capacité de produire. Dans le projet de loi, on donne la permission de couper ses quotas. On ne devrait pas donner la permission de couper les quotas. On devrait donner la permission de les augmenter intégralement, mais non pas de faire du marché noir de quotas comme cela se fait présentement. C'est quelque chose de clair, cela.

Vous verrez, quand la vérité se saura, tout le marché noir qu'il y a eu sur les quotas de lait à travers le Québec; on a pénalisé des petits producteurs agricoles pour aider des gros producteurs agricoles. On a donné 450 000 livres de lait à l'un, 500 000 à l'autre. Quand cela se saura dans le monde agricole, vous aurez une colère qui va monter partout dans le monde agricole. L'Union Nationale fera des réunions partout à travers le Québec. On informera les producteurs agricoles, M. le ministre, de la vérité justement sur ce marché noir. Même si vous ne voulez pas faire une enquête et une commission parlementaire sur le problème du lait, vous serez obligé de la faire. Les producteurs agricoles vous forceront à faire la lumière justement sur ce qui pénalise les producteurs agricoles au Québec et sur ce qui pénalise leurs coopératives à l'heure actuelle. On verra clair tout à l'heure. On saura quelle petite clique en profite, à qui profite le projet de loi 116 et qui vous essayez de protéger en adoptant le projet de loi 116. Mme la Présidente, on verra clair là-dessus dans le monde agricole et vous verrez tout à l'heure ce que cela fera.

Plus que cela, dans le projet de loi 116, on dit: On peut couper vos quotas et tout cela. On peut vous les enlever en partie si vous passez à côté d'un règlement. Je l'ai montré en deuxième lecture. Je vais vous le montrer de nouveau. Ce sont les règlements dans le domaine des oeufs.

Dans le domaine du lait, il y en a encore plus épais que cela, Mme la Présidente. Les gens vont devoir apprendre ce que sont tous les règlements. S'ils passent à côté de cela, ils peuvent perdre leurs quotas, ils peuvent se faire couper leurs quotas de production. Le ministre dit non, mais c'est marqué dans la loi. Si le ministre ne veut pas leur faire couper les quotas de production, qu'il l'enlève de la loi. Si c'est marqué dans la loi, un jour un technocrate péquiste ira quelque part et coupera les quotas de production des producteurs agricoles.

M. Bellemare: Très bien.

M. Biron: II y en a assez de technocrates péquistes qui se promènent autour pour faire des problèmes et des casse-tête. Il y a une limite à cela. Vous vouiez parler des payes de beurrerie de nos producteurs agricoles, des payes de lait; j'en ai des payes de lait des producteurs agricoles. Justement, des producteurs agricoles viennent me voir chaque semaine, concernant des payes de lait coupées. On donne légalement la permission de couper ces payes et même de retenir les montants de coupures des pénalités imposées. Des payes de lait, je vais vous en donner, Mme la Présidente. Il y en a une ici: $599, il reste $80 net; $1083, il reste $79; $1779, il reste $507; $2039, il reste $677; un autre de $1870, il reste $545; $1819, il reste $107; $1533, il reste $270. Je pourrais vous en apporter des piles, Mme la Présidente, de payes de lait de coupées.

M. Bellemare: Ce sont des preuves.

M. Biron: Avec le projet de loi 116, on légalise tout cela et on dit: On va continuer à pénaliser les petits producteurs et on va continuer à aider une petite clique, quelque part. Je veux savoir qui est cette clique, qui le ministre veut protéger, qui le ministre veut aider en adoptant le projet de loi 116.

On dit cela, mais les producteurs agricoles vont s'en souvenir de ce que le ministre de l'Agriculture leur fait actuellement. La traîtrise du ministre de l'Agriculture envers les producteurs agricoles, traître aux producteurs agricoles, traître aux coopératives agricoles du Québec, c'est cela que le projet de loi 116 veut dire, Mme la Présidente.

M. Bellemare: Très bien.

M. Biron: Mme la Présidente, si on ne faisait que pénaliser les producteurs agricoles — on disait que cela profiterait aux consommateurs — on comprendrait peut-être le ministre de vouloir obtenir des votes dans les villes au lieu d'en obtenir dans les campagnes. Mais ce n'est pas cela. Cela ne profite pas aux consommateurs, Mme la Présidente. L'Association des consommateurs du Canada, section de Québec, a présenté un mémoire à la Régie des marchés agricoles au mois d'août 1976. On trouve dans le mémoire ce que l'Association de protection des consommateurs dit, en parlant des quotas de production: "Peut-être que nous comprenons mal le jargon légal des auteurs des plans de mise en marché, mais nous avons l'impression, à la suite de l'expérience acquise dans le domaine de la publicité fallacieuse, qu'il s'agit vraiment de fausse représentation des coûts possibles échéant aux producteurs". C'est une fausse représentation et les coûts, c'est le producteur qui paye. C'est ce que l'Association de protection des consommateurs dit. Un peu plus loin, on dit ceci : "Ce n'est pas par pure philanthropie que nous sommes préoccupés des frais payés par les producteurs; ces frais nous retomberont tous sur le dos au moment de l'achat du produit. Le consommateur aura à payer des frais quelque part. Le producteur agricole est pénalisé, le consommateur est pénalisé aussi".

Mme la Présidente, c'est pour cela que l'Union Nationale s'est opposée au projet de loi 116. C'est pour cela que l'Union Nationale continuera à parcourir le Québec pour s'opposer au projet de loi 116. C'est pour cela que, cet après-midi, j'ai accusé le ministre de l'Agriculture d'être un traître envers les producteurs agricoles, et je le redis. J'ai accusé le ministre de l'Agriculture de trahir les coopératives agricoles du Québec et je le redis. Je serais même prêt à revenir sur mes mots si, tout à l'heure, lorsqu'on va voter la motion présentée par l'Union Nationale pour la protection des coopératives agricoles du Québec... La motion dit ceci: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative. "Cette motion est demandée par la Coopérative agricole de Granby, qui est la plus importante coopérative au Québec. Si le ministre de l'Agriculture change son idée et vote pour, je serai peut-être prêt à retirer ce que j'ai dit. Mais si le ministre de l'Agriculture vote contre une telle motion d'amendement pour améliorer la loi 116, une telle motion demandée par les coopératives agricoles du Québec, je devrai continuer à accuser le ministre de l'Agriculture de traîtrise vis-à-vis des producteurs agricoles, vis-à-vis des coopératives du Québec.

Mme la Présidente, je veux terminer là-dessus, mais je m'aperçois, par exemple, que dans le monde agricole, à travers le Québec, à la fois les producteurs et les coopératives et les syndicats de base de l'UPA, le ministre n'a plus la confiance des producteurs agricoles. Un ministre de l'Agriculture qui n'a plus la confiance des producteurs agricoles, un ministre de l'Agriculture qui n'a plus la confiance des coopératives agricoles, un ministre de l'Agriculture qui est en train de perdre la confiance des syndicats de base de l'UPA n'a qu'une chose à faire: démissionner rapidement et nettoyer la place. (17 h 30)

Mme la Présidente, nous devons terminer cette session sur ce projet de loi no 116 mais je vous avise qu'en recommençant la prochaine session nous demanderons la démission du ministre de l'Agriculture justement parce qu'il na plus la confiance des producteurs agricoles, il n'a plus la confiance des coopératives agricoles et il est en train de perdre la confiance des membres et des officiers des syndicats de base de l'UPA à travers le Québec.

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, Mme la Présidente. Je n'ai que dix minutes, évidemment, je devrai me restreindre et, pour employer un terme très cher à l'honorable ministre de l'Agriculture, je devrai me contingenter. La commission parlementaire qui a terminé ses travaux ce matin a été très utile, quoi qu'en pense l'honorable ministre, extrêmement utile parce qu'elle a permis de jeter un peu de lumière, pas toute la lumière, sur le dossier de l'agriculture au Québec. Ce n'est pas souvent, à l'Assemblée nationale, que nous avons l'occasion — des occasions privilégiées — d'aborder cette question pour prendre nos responsabilités et, par nos interventions et nos recommandations, forcer le gouvernement à prendre les bonnes décisions quand c'est le temps d'en prendre.

On a tenté de crier au grand scandale. Imaginez-vous, cinq jours, la commission parlementaire de l'agriculture a siégé cinq jours; quelle perte de temps, quelle perte de temps! Cinq jours pour parler des problèmes agricoles au Québec. Une perte de temps épouvantable, c'est tout comme si nous avions déséquilibré le budget de la province, c'est tout comme si le ministre des Finances avait énormément de difficulté à se retrouver pour présenter son futur budget. Cinq jours pour discuter des problèmes agricoles et on s'est fait accuser de tous les maux et de tous les péchés d'Israël.

M. Garon: Des motions dilatoires.

M. Roy: Oui, il y en a eu des motions dilatoires parce qu'une motion, d'abord, est toujours dilatoire; même quand elle vient du ministre, elle est dilatoire parce qu'elle entraîne automatiquement une discussion. Nous ne vivons quand même pas dans un régime dictatorial.

M. Garon: ... un amendement.

M. Roy: Je n'ai pas interrompu le ministre, Mme la Présidente, tout à l'heure. Je n'ai pas interrompu le ministre et je n'ai que dix minutes.

M. Garon: Dix minutes de trop.

M. Roy: Mme la Présidente, le ministre considère que c'est dix minutes de trop. Il vient d'avoir un certificat d'infaillibilité. Le ministre parle, c'est la vérité, il a la connaissance et la science. Il connaît tout, notre honorable ministre de l'Agriculture. On verra demain, on verra après-demain, on verra la semaine prochaine, on verra dans six mois si notre ministre de l'Agriculture est aussi connaissant qu'il le prétend lui-même. Je vais le laisser à sa suffisance pour revenir sur la question qui nous occupe à l'heure actuelle.

Le ministre, à l'Assemblée nationale, nous a dit: Le projet de loi no 116 est une loi de concordance, uniquement de la concordance. On a entendu cela tout le long du mois de décembre. Lorsqu'on est arrivés à la commission parlementaire, il y avait des petits éléments dans la loi qui visaient à corriger certaines petites ambiguïtés. On a proposé des motions d'amendement; le président de la commission parlementaire s'est senti obligé de les refuser tellement on remettait en cause un des principes du projet de loi no 116. Quand il nous a dit: De la concordance et corriger certaines petites ambiguïtés, l'honorable ministre de l'Agriculture a induit la Chambre en erreur, a induit ses collègues en erreur, a induit la commission parlementaire en erreur, a induit les agriculteurs et la population du Québec en erreur. Aussi, lorsqu'il nous a parlé de ce grand consensus qu'il y avait avec le monde de la coopération. Le ministre nous apprend qu'après deux mois que des télégrammes ont été envoyés il ne les a même pas reçus. Je lui suggérerais de regarder un peu ce qui se passe autour de lui parce qu'un ministre de l'Agriculture n'a pas le droit de ne pas être informé de ce qui se passe dans son secteur. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas quelque part.

Nous avons posé la question. J'en ai profité personnellement pour poser la question au conseiller juridique du ministre pour voir si l'article 1 et, notamment et particulièrement, l'article 3 étaient des articles essentiels pour combler le vide juridique créé par le jugement de la Cour suprême.

Qu'est-ce que le conseiller juridique du ministre nous a dit? Non, ce n'est pas essentiel. On pourra vérifier dans le journal des Débats. C'est écrit dans le journal des Débats à deux reprises, lorsque j'ai posé la question sur l'article 1 et lorsque j'ai posé la question sur l'article 3. Il a ajouté cependant: C'est utile. Mais ce qu'on n'a pas pu savoir du ministre — non, non — il nous a dit que c'était utile...

Une Voix: Arrêtez donc de mentir!

M. Roy: Utile, M. le Président. Utile, c'est le terme qui a été employé. Mais, Mme le Président, on n'a pas pu savoir, quand il a ajouté le mot "utile" et j'ai posé la question pour la première fois: Pour qui cela a-t-il été utile? C'est cela qu'on ne sait pas. Il y a d'autres choses qui auraient dû être dites à cette commission parlementaire. Nous aurions eu bien des questions à poser, notamment en ce qui a trait à l'application des dispositions de l'article 3. J'aimerais bien savoir, Mme le Président, pour quelle raison — le ministre dira: C'est avant moi, c'est dans le temps de l'autre ministre de l'Agriculture — on a coupé les quotas des producteurs agricoles du Québec de 20% alors que le fédéral avait recommandé 15% et qu'effectivement les statistiques de la commission canadienne du lait nous donnent 13%.

M. Garon: Question de privilège. Mme le Vice-Président: Question...

M. Roy: Question de privilège, je demanderai que ce soit quand même exclu de mon temps de parole.

Mme le Vice-Président: Sur une question de privilège...

M. Roy: Est-ce que ce sera exclu, Mme le Président, de mon temps de parole, cette question de privilège?

Mme le Vice-Président: M. le ministre, vous vous levez sur une question de privilège. Vous pouvez le faire. Je vous demanderai d'abréger parce que nous ne pouvons pas l'enlever sur le temps du député qui intervient. Rapidement, s'il vous plaît, M. le ministre, à moins que vous ne décidiez d'intervenir au moment de votre réplique.

M. Garon: Le député de Beauce-Sud n'a pas dit la vérité sur ce qui s'est dit en commission parlementaire lorsqu'il a demandé sur un article si c'était fondamental et essentiel et que le conseiller juridique lui a répondu que c'était "utile et nécessaire". Il a omis de mentionner qu'il avait dit aussi "nécessaire".

Mme le Vice-Président: M. le ministre, est-ce que je peux vous demander d'attendre que ce soit le temps de votre intervention, s'il vous plaît?

M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Mme le Président, vous enlèverez ce temps de parole sur l'intervention du ministre. Il a quand même un petit droit de réplique. Mme le Président, quand le ministre, qui essaie encore de mêler les cartes aujourd'hui, tente de dire que c'est nécessaire, ce n'est pas nécessaire pour combler le vide juridique créé par le jugement de la Cour suprême. Ce n'est pas à ce niveau que c'est nécessaire. C'est la distinction que le ministre n'a jamais voulu faire. Le ministre essaie

encore, par ses ambiguïtés, de mêler tout le monde et de tromper tout le monde. Nous avons déjà eu dans le passé à dénoncer à plusieurs reprises les immenses pouvoirs qu'on accorde par nos lois, des délégations de pouvoir qu'on accorde pour la réglementation. Mais jusqu'à maintenant, et je terminerai là-dessus, nous avons accordé des pouvoirs de réglementation pour faire de la réglementation. C'est la première fois, depuis que je siège à l'Assemblée nationale, qu'on donne des pouvoirs de réglementation pour aller jusqu'à faire des règlements pour faire de l'interdiction.

Là on touche du droit nouveau. Aujourd'hui, on met des dispositions dans nos lois agricoles qui visent à donner le pouvoir à quelqu'un, quelque part, de faire de l'interdiction, d'interdire de produire. Est-ce que cela veut dire que demain il y aura des dispositions dans nos lois de travail dans lesquelles on interdira à des gens de travailler, où il y aura l'interdiction de travailler? Il y a des questions qu'il va falloir se poser. Je comprends que dans la chaleur du débat, étant donné qu'il s'est dit énormément de choses, il y a énormément de personnes, surtout dans le monde agricole, qui ont été très inquiètes parce qu'on a laissé planer le doute que si la loi 116 n'était pas votée, cela en était fini des plans conjoints dans la province, qu'il n'y aurait plus de plans conjoints dans la province. On a laissé planer ce doute dans la population, Mme le Président.

On a même tenté de faire croire aux députés qui osaient poser des questions, qui osaient avoir des objections sur le projet de loi no 116 qu'ils s'acoquinaient à ceux que le ministre considère comme des brebis galeuses. On a tenté par toutes sortes de moyens d'intimider les députés qui se posent des questions là-dessus. Mais le ministre en a profité de façon très habile, Mme le Président. Il y avait un vide de créé au niveau du jugement de la Cour suprême, un vide juridique à combler, dis-je, à cause du jugement de la Cour suprême, et le ministre a voulu en profiter évidemment pour faire d'une pierre deux coups. Il a voulu en profiter pour étendre les pouvoirs des offices de mise en marché et accorder des pouvoirs qui, encore une fois, vont beaucoup trop loin. (17 h 40)

La preuve que nous avions raison, c'est que le ministre a accepté un amendement, à la dernière minute, hier, disant qu'on ne permettrait plus aux offices de producteurs de suspendre les quotas, d'annuler les quotas, de réduire temporairement les quotas, mais qu'en vertu d'un amendement que le ministre a apporté, qui nous donne raison, ce pouvoir serait maintenant accordé à l'office.

Une Voix: Où cela?

M. Roy: Dans l'amendement que le ministre a proposé hier à l'article j).

M. Garon: Vous n'avez même pas parlé de cela.

Mme le Vice-Président: M. le député de

Beauce-Sud, vous devez conclure, votre temps est déjà écoulé.

M. Roy: Je termine, Mme la Présidente, en disant que nous avions de sérieuses raisons de nous poser des questions; nous en avons encore, parce qu'il aurait fallu encore quelques jours pour discuter de cette question.

M. Ouellette: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député d'Orford.

M. Ouellette: Mme le Président, j'ai demandé le droit de parole.

M. Vaillancourt (Orford): Mme le Président, je pense que vous m'avez reconnu le premier.

Mme le Vice-Président: J'ai déjà reconnu le député. Je m'excuse, je ne vous ai pas vu, M. le député. Je vous donnerai la parole immédiatement après M. le député d'Orford.

M. le député d'Orford.

M. Ouellette: Mme le Président, question de privilège.

Mme le Vice-Président: S'il vous plaît, vous savez que ce débat est un débat limité et que je dois m'en tenir au temps sur lequel vous vous êtes entendus. Je vous ferai remarquer que je ne dépasserai pas ce temps, mais, s'il vous plaît, donnez-nous l'occasion d'en arriver à la fin de ce débat, comme vous l'avez décidé.

M. Ouellette: A ce moment-ci, j'ai une demande de directive, Mme le Président. Vous avez vous-même déclaré que le temps était limité pour chacun des partis. Le débat doit se terminer dans quinze minutes. Si je ne me prévaux pas de mon droit de parole de dix minutes, auquel j'ai droit, et que vous laissez la parole à un député du Parti libéral, vous aurez accordé au Parti libéral plus de temps qu'au parti ministériel.

Mme le Vice-Président: Nous sommes en train de gruger sur le temps. M. le député d'Orford n'a pas droit à plus de quatre minutes.

M. le député.

M. Bellemare: Je pense qu'il avait été conclu: 45 minutes, "PQuiou ", 30 minutes, libéral et l'Union Nationale, 35 minutes; donc, il nous reste 5 minutes.

Mme le Vice-Président: S'il vous plaît, M. le leader de l'Union Nationale!

M. Vaillancourt (Orford): Mme la Présidente, il est vrai que nous sommes beaucoup plus contingentés que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles mais, tout de même, je vais essayer...

Mme le Vice-Président: C'est l'Assemblée nationale qui en a décidé. M. le député. Allez donc!

M. Georges Vaillancourt

M. Vaillancourt (Orford): Je suis d'accord avec ce qui a été décidé par nos leaders, mais je vais essayer d'exposer les quelques remarques que je veux faire sur la recevabilité du rapport de l'étude du projet de loi no 116. Mme la Présidente, nous avons siégé en commission parlementaire cinq jours qui nous ont paru assez courts, car vous savez que, surtout lorsque nous étudions un projet de loi comme le projet de loi no 116 qui amende la Loi sur la mise en marché, beaucoup d'arguments et beaucoup d'inquiétudes sont soulevés de la part de toutes les personnes intéressées, premièrement les producteurs.

Le bill 116, comme tout le monde l'a constaté, contient plusieurs articles qui augmentent les pouvoirs des offices de mise en marché et, en même temps, permettent de rendre conforme le jugement de la Cour suprême du Canada.

En ce qui me concerne, j'aurais dû me douter qu'étudier une loi et des amendements à la Loi de mise en marché demande beaucoup de temps et bien des jours pour débattre un problème aussi important. J'ai vécu d'autres commissions parlementaires, d'autres études, d'autres projets de loi. En 1962, j'ai fait partie d'une commission parlementaire où nous avons discuté pendant plusieurs jours, je pourrais même dire plusieurs semaines; en 1967, il y a eu d'autres amendements à la Loi de mise en marché, et en 1972 aussi. Nous n'étions pas pressés par le temps, nous n'étions pas contingentés, comme le dit le projet de loi, nous avions tout le temps nécessaire pour étudier le projet de loi en commission parlementaire, article par article.

Malheureusement, cette fois-ci, une motion de clôture a été acceptée à l'unanimité, la semaine dernière; nous avons dû respecter cette décision et suspendre l'étude du projet de loi à 12 h 30 aujourd'hui. Il est regrettable qu'il n'y ait pas eu plus de temps nous permettant d'étudier les articles 4 et 6 sur lesquels j'aurais aimé poser plusieurs questions au ministre afin d'éclairer ma lanterne en ce qui concerne ces deux articles. Etant donné que le ministre aura à parler sur la troisième lecture, j'espère qu'il nous apportera tous les éclaircissements que nous aurions voulu avoir lors de l'étude du projet de loi no 116 en commission parlementaire.

J'espère, M. le ministre — Mme le Président me fait signe que mon temps est fini — que ce soir, lors de la troisième lecture, vous allez nous apporter les éclaircissements nécessaires. Je vais vous poser la question immédiatement: J'aimerais savoir si les producteurs dissidents auront à payer des amendes rétroactives. Est-ce que votre loi sera rétroactive, en un mot?

M. Bellemare: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: II vous reste trois minutes, très exactement. M. le député de Beauce-Nord viendra ensuite.

M. le député.

M. Ouellette: Mme le Président...

M. Bellemare:... d'après le temps que le chef de l'Union Nationale a pris, il nous resterait six minutes.

Mme le Vice-Président: M. le député, c'est...

M. Bellemare: Maintenant, je suis prêt à en prendre trois, peut-être quatre pour finir.

Mme le Vice-Président: Allez!

M. Bellemare: Je ne voudrais pas...

Mme le Vice-Président: M. le député, rapidement. Moins de trois minutes, maintenant.

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: Nous faisons face à la dégringolade du ministre de l'Agriculture. Il y a eu dimanche, dans la région chez nous, des élections à l'UPA. Le résultat, dans Saint-Hyacinthe, est qu'ils sont tous battus à cause du ministre. Tous! Vos acolytes, qui étaient près de vous, ont tous été battus. Ils ont mordu la poussière.

Dans Saint-Théodore, dans mon comté, les gens de l'UPA ont tous été battus. Voilà un des résultats de votre loi 116! Ce n'est que le commencement dans la province, vous allez en voir d'autres qui vont réagir. Le ministre a menti à la Chambre, il a trompé la Chambre sciemment quand il a dit, lors de son intervention: J'ai l'appui de la Coopérative fédérée, j'ai l'appui de la Coopérative de Granby. Vous avez entendu la lecture du télégramme daté du 18 février de la Coopérative de Granby qui dit: Non. Celui du 21 décembre et celui du 18 février. Avez-vous entendu hennir le ministre? Il rit comme une jument qui va accoucher. Le ministre nous a trompés en disant que la Coopérative de Granby et la Fédérée avaient accepté, après qu'il les eut rencontrées, de changer leur opinion. C'est faux. Le 18 février, nous avons reçu un autre télégramme de la Coopérative de Granby qui dit que le ministre a menti. Ils sont contre le projet de loi 116 et ils donnent les raisons qu'a citées le chef de l'Union Nationale tout à l'heure. Il va peut-être nous dire que ce n'est pas vrai, venir essayer de nous tromper, mais l'Union Nationale a proposé que rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative, avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative.

C'est un amendement que nous devrions voter à l'unanimité pour empêcher ce que la loi 116 va produire dans le domaine agricole. Cela va être la chicane entre les producteurs et entre les syndi-

cats et particulièrement entre les coopératives. Vous allez voir ce qui va se produire. Ils ont subventionné une coopérative fantôme pour $900 000 de prêts quand la Régie des marchés agricoles s'était prononcée en disant que c'était illégal d'avoir fait ce qu'ils ont fait au point de vue de la publicité. Ils sont passés en dehors de cela et le ministre a accordé $900 000 de prêt à une coopérative fantôme. Où va-t-on? Je demande, comme le chef de l'Union Nationale l'a demandé tout à l'heure, la démission du ministre devant un tel geste. Il y a des ministres à Ottawa qui ont démissionné pour bien moins que cela.

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Nord.

M. Adrien Ouellette

M. Ouellette: Mme le Président, j'ai écouté tout à l'heure avec beaucoup d'attention le discours qu'a prononcé le chef de l'Union Nationale et j'ai retenu, bien sûr, un certain nombre de choses, dont une en particulier qui me plaît beaucoup. C'est que j'ai constaté que l'Union Nationale avait vraiment évolué. Si, dans les années quarante, elle avait acquis une réputation de passeuse de télégraphes, voici maintenant qu'elle l'a remplacée par celle de passeuse de télégrammes! Vous savez, en dix minutes, c'est assez difficile de passer à travers non seulement les sons incongrus qu'émettent les gens de l'Union Nationale, mais aussi à travers l'historique ou le cheminement pénible qu'a connu la loi 116 depuis son dépôt à l'Assemblée nationale. J'ai eu ce que j'appellerais bien honnêtement le privilège de participer à la commission parlementaire et, au cours des quelques semaines qu'a duré cette commission, j'ai essayé de comprendre le cheminement de l'Union Nationale à travers ce débat qu'elle a voulu elle-même de plus en plus pénible. J'ai constaté certaines choses.

D'abord, l'Union Nationale a essayé, dans un premier temps, de remettre en question de façon fort subtile le principe même des plans conjoints. Oh! Elle dira: C'est faux. Ce n'est pas si faux que cela. En somme, elle a voulu que les plans conjoints soient complètement démunis, si possible, de tous les pouvoirs qui lui reviennent de droit, même par l'ancienne loi 12 que la loi 116 tente de colmater. Ce qu'aurait voulu l'Union Nationale par rapport aux plans conjoints, ça aurait été de les transformer en une espèce de plans conjoints décoratifs dont on accroche le certificat dans le salon de chacun des producteurs qui en fait partie, mais des plans conjoints où personne n'a aucun pouvoir, sauf celui de se regarder le nombril et de pleurer sur le sort qui l'attend à la suite de la perte de ces pouvoirs.

Voyant qu'on lui avait fermé les portes — le ministre de l'Agriculture a été épatant à ce niveau, il me semble — on s'est empressé d'ouvrir une deuxième porte parce qu'on s'est rendu compte qu'on allait de cette façon perdre littéralement la face. La deuxième tentative a été d'essayer de faire croire à la population du Québec, en parti- culier aux membres participants des plans conjoints, que la loi 116 apportait une avalanche de droits nouveaux qui allaient en quelque sorte faire ce que Mme Gilberte Côté-Mercier décrivait comme étant de l'agriculture de type communiste. La discussion a duré un certain temps là-dessus. On s'est aperçu finalement qu'à peu près personne ne pouvait affirmer catégoriquement que la loi 116 contenait de tels droits nouveaux. Là, encore, on leur a fermé la porte et, je pense, de façon magistrale.

Dans un troisième temps, voyant encore une fois qu'elle n'avait pas réussi à récupérer la face qu'elle avait perdue dans sa première étape, l'Union Nationale a essayé de mettre en lumière les problèmes réels — je les reconnais — qui existent entre le monde syndical agricole et le mouvement coopératif. L'Union Nationale a essayé de forcer le ministre à convoquer une commission parlementaire au cours de laquelle, disait-elle, on aurait l'occasion d'entendre les différents intervenants qui vivent des problèmes. Cependant, ce que l'Union Nationale ne disait pas, c'est que cela n'a rien à voir avec la loi 116...

Une Voix: C'est cela.

M. Ouellette: ... pas plus qu'il ne peut être question d'amener l'Office des autoroutes pour régler ses problèmes dans la loi 116, pas plus on va essayer de régler les problèmes qui peuvent persister entre, d'une part, le syndicalisme agricole et, d'autre part, le mouvement coopératif. Ce n'est ni le temps ni le lieu. Vous avez essayé de berner la population, mais cela n'a pas collé. Il fallait donc une porte de sortie.

La dernière tentative de l'Union Nationale pour essayer de sauver la face ou de mêler tout le monde, on l'a vécue pas plus tard que cet après-midi même en cette même Assemblée nationale alors qu'on a vu un certain nombre d'intervenants de l'Union Nationale se lever et essayer d'expliquer au président, qui a été, heureusement, catégorique ayant les documents en main, qu'elle n'avait pas très bien saisi la portée de ce pourquoi elle avait voté antérieurement, à savoir que le débat sur la loi 116 devait se terminer dès ce soir à 22 heures.

On a essayé, on a charrié, on a fait perdre le temps, ce qui fait que mon temps est pratiquement écoulé et que je n'ai même pas pu aborder ce dont je voulais vous parler. Mais je reviens sur le premier point qui concerne les pouvoirs qu'on doit donner ou ne pas donner aux plans conjoints. Je réfère les gens intéressés à savoir ce qu'est un plan conjoint, puisque je n'ai pas le temps de l'expliquer, aux propos que tenait le député de Montmagny-L'Islet en commission parlementaire, propos dans lesquels il a décrit de façon impeccable ce qu'est un plan conjoint.

Une Voix: Une nouvelle alliance?

M. Ouellette: Non, je ne crois pas que M. le député de Montmagny-L'Islet soit plus péquiste qu'il ne le faut, quoique je n'aurais pas d'objec-

tion. Je pense que lui, Libéral qu'il est, comme nous les Péquistes, il a compris. C'est important. Bref, M. le Président, avant que vous m'invitiez à conclure, car moi, je sais respecter le temps des autres, je vais conclure en rappelant à toute la population du Québec que ce débat n'a été qu'un tremplin, une espèce de plaque tournante ou une "trampoline" dont l'Union Nationale a essayé de se servir pour créer des problèmes à notre populaire ministre de l'Agriculture, visant à faire croire qu'il n'était peut-être pas si bon qu'on le croyait. Je pense que l'année qui vient, à la suite de l'acceptation de cette loi 116, démontrera que vous avez échoué. Je vous le souhaite. Merci, M. le Président.

Le Président: Maintenant, conformément à l'entente intervenue, je demande qu'on appelle les députés pour procéder à la mise aux voix des amendements. Y a-t-il consentement? L'Union Nationale insiste-t-elle pour un vote enregistré?

Une Voix: Oui, vote.

Le Président: Qu'on appelle les députés. Suspension à 17 h 57

Reprise à 18 h 6

Mise aux voix des amendements

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des amendements proposés par M. le ministre de l'Agriculture, après quoi nous pourrons procéder à la mise aux voix de l'amendement proposé par M. le chef de l'Union Nationale. Est-ce que l'Assemblée souhaite...

M. Bellemare: M. le Président, nous aimerions que vous le lisiez dans chacun des cas.

Le Président: Voilà, c'est ce que j'allais dire, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale. Le premier amendement proposé par M. le ministre de l'Agriculture est un amendement à l'article 3, paragraphe c): "M. le Président, je fais motion pour que l'article 3, paragraphe c), du projet de loi no 116 soit amendé de la façon suivante: paragraphe 1), à la troisième ligne, après le mot "et", retirer, à la troisième et à la quatrième ligne, les mots "prévoir que l'office peut s'en porter acquéreur en tout ou en partie, en disposer et"; à la cinquième ligne, après le mot "qui", retirer le mot "en"; à la cinquième ligne, après le mot "résulte", insérer les mots "de la disposition de ces surplus". Voilà le premier amendement.

Le second amendement...

M. Bellemare: Je vous demanderais, M. le Président, de bien vouloir faire le vote sur celui-là et vous ferez la lecture sur l'autre après.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, j'ai dit tout à l'heure qu'il y aurait deux votes; l'un sur tous les amendements proposés par M. le ministre de l'Agriculture... Alors, à l'article 5: "M. le Président, je fais motion pour que l'article 5 du projet de loi no 116 soit amendé de la façon suivante: paragraphe c), à la première et à la deuxième lignes, retirer les mots suivants "autoriser l'office de producteurs, aux fins d'imposer et de percevoir des contributions à"; à la troisième ligne, après le mot "groupe", retirer le mot "à"; à la neuvième ligne, après le mot "contribution", remplacer "et" par "et le cas échéant". Le dernier amendement... Non, ce n'est pas le dernier. L'article 6, maintenant: "M. le Président, je fais motion pour que l'article 6 du projet de loi no 116 soit retranché". Maintenant: "M. le Président, je fais motion pour que les articles 7 et 8 du projet de loi no 116 soient renumérotés de la façon suivante: l'article 7 devient l'article 6 et l'article 8 devient l'article 7".

Que ceux et celles qui sont en faveur de ces amendements proposés par M. le ministre de l'Agriculture veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Cardinal, Burns, Morin (Louis-Hébert), Landry...

Des Voix: Adopté.

Le Président: A l'ordre! Un instant, M. le secrétaire. Est-ce que ces amendements seront adoptés?

Des Voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Maintenant, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement proposé par M. le chef de l'Union Nationale, qui se lit ainsi: Que l'article 1 du projet de loi no 116 soit modifié en ajoutant, à la fin de l'article 2a, les mots suivants: Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative. Que ceux et celles qui sont pour cet amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît! (18 h 10)

Le Secrétaire adjoint: MM. Biron, Bellemare, Grenier, Goulet, Fontaine, Brochu, Dubois, Cordeau, Roy, Verreault.

Le Président: Que ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Cardinal, Burns, Morin (Louis-Hébert), Landry, Bérubé, Mme Ouellette, Mme Cuerrier, MM. Johnson, Proulx, Duhaime, Garon, Martel, Marcoux, Chevrette, Bertrand, Michaud, Rancourt, Laberge, Grégoire, Guay, Lefebvre, Laplante, Bisaillon, Mercier, Alfred, Marquis, Gagnon, Ouellette, Perron, Clair, Brassard, Godin, Dussault, Boucher, Beauséjour, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Lacoste, Jolivet, Lavoie, Vaillancourt (Orford), Mail-

loux, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Picotte, Pagé.

Le Président: Que ceux et celles qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever! Aucun dissident.

Le Secrétaire adjoint: Pour: 10 — Contre : 49 — Abstentions: 0

Le Président: L'amendement est rejeté.

Mise aux voix du rapport

Je mets maintenant aux voix l'adoption du rapport avec les amendements, tels qu'adoptés précédemment et proposés par le ministre de l'Agriculture.

Est-ce que ce rapport avec les amendements sera adopté?

M. Lavoie: Sur division.

Le Président: Adopté sur division.

M. Charron: M. le Président, je voudrais immédiatement, puisque la fin de la séance de ce soir ne nous permettra pas — les circonstances ne s'y prêtant pas puisque nous serons en présence royale — d'être aussi intimes dans notre cuisine, modifier un avis que j'ai donné cet après-midi, après consultation de l'Opposition et de mon collègue du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Il s'agit d'avancer d'une semaine l'avis que j'ai donné quant aux auditions des mémoires sur le projet de loi no 126. Ce sera donc non pas le mercredi 14, mais plutôt le mercredi 7, éventuellement le jeudi 8, et, si besoin en est, la matinée du vendredi 9. Officiellement pour les 7 et 8 mars, concernant la réunion de la commission du travail et de la main-d'oeuvre, je prie donc le secrétaire général, M. le Président, de modifier cet avis.

D'autre part, on m'informe que la même commission a décidé de reprendre ses travaux immédiatement et de les prolonger, selon une entente à la table même de la commission, comme j'avais indiqué qu'elle pouvait le faire cet après-midi. J'en invite donc les membres à retourner au travail immédiatement, comme ils l'ont souhaité eux-mêmes.

Quant à nous, M. le Président, nous allons, à 8 h 15 très précisément, nous retrouver ici puisque nous fonctionnons à l'intérieur d'une enveloppe limitée dont le partage a été annoncé par vous-même. Le vote doit se prendre à 9 h 45 ce soir. Je propose la suspension jusqu'à 8 h 15, M. le Président.

Le Président: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15.

Suspension de la séance à 18 h 14

Reprise de la séance à 20 h 19

Le Président: A l'ordre! Veuillez vous asseoir.

Conformément à l'entente conclue cet après-midi, ce soir nous allons procéder au débat de troisième lecture. Il a été entendu que la majorité ministérielle disposerait de 30 minutes, l'Opposition officielle de 25 minutes, l'Union Nationale de 25 minutes également et le député de Beauce-Sud de 5 minutes, de même que le député de Rouyn-Noranda. Vers 21 h 45, nous devrions être en mesure de procéder à la mise aux voix de la troisième lecture du projet de loi no 116.

M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Dois-je comprendre que dans les 30 minutes qui ont été convenues sont comprises les 10 minutes de réplique de l'honorable ministre? (20 h 20)

Le Président: En effet, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, la réplique du ministre de l'Agriculture est comprise à l'intérieur de cette enveloppe.

M. Bellemare: II ne faut pas qu'il y ait une fin de session comme il y en a eu une le 21.

Le Président: C'est ce que j'essaie d'éviter, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Je reste ce soir pour surveiller.

Le Président: Je vous remercie de m'assurer ainsi de votre collaboration pour le reste de la soirée. Je voudrais signaler que, d'autorité, si on devait arriver à 21 h 45 et que je prévoyais que la séance va prendre fin avant que les formations politiques aient épuisé leur temps, la présidence réduira le temps alloué aux diverses formations politiques au prorata du temps écoulé.

M. le ministre de l'Agriculture, vous avez droit de parole sur le débat de troisième lecture.

Projet de loi no 116

Troisième lecture

M. Jean Garon

M. Garon: Je serai très bref, puisque je veux donner l'occasion aux députés du Parti québécois, qui n'en ont pas eu le loisir en deuxième lecture, de pouvoir s'exprimer sur cette loi. Ils ont fait un travail formidable en commission parlementaire. Je vais parler deux ou trois minutes et je garderai plutôt mes commentaires pour la réplique, en conclusion.

C'est avec beaucoup de satisfaction que nous arrivons aujourd'hui à la troisième lecture, nous avons décidé de présenter ce projet de loi parce qu'il était nécessaire, parce que nous n'avions pas le choix, de le présenter suite au jugement de la Cour suprême. En même temps, nous en avons

profité pour clarifier certaines ambiguïtés qui amenaient des conflits juridiques inutiles. Je pense que ce projet de loi va être bénéfique à l'ensemble des agriculteurs du Québec. Il n'a pas pour but de régler des problèmes, entre les coopératives et les syndicats, qui existaient depuis des années — ces problèmes pourront être réglés plus tard — problèmes qui étaient antérieurs au dépôt de la loi 116. Tout le monde le sait, d'ailleurs, dans le monde agricole, et ceux qui essaient de dire le contraire montrent tout simplement qu'ils ne connaissent pas le secteur.

Alors, M. le Président, je suis particulièrement heureux que nous en arrivions à la fin de ce débat, ce soir, et que la loi 116 puisse entrer en vigueur. Les plans conjoints pourront fonctionner normalement, non pas en brimant les droits de qui que ce soit, comme on l'a dit dans l'Opposition, mais plutôt en respectant les droits des gens qui veulent qu'il y ait une mise en marché organisée au Québec et que les lois permettent de faire respecter cette mise en marché ordonnée.

S'il y a, au cours de l'application de ces plans, des inexactitudes, des erreurs, ou encore même des choses qui sont faites et qui ne devraient pas être faites, la Régie des marchés agricoles est là pour entendre toutes les plaintes des agriculteurs. Ceci n'est pas onéreux puisqu'une simple lettre formulant une requête d'un agriculteur à la Régie des marchés agricoles peut faire une plainte et déclencher le mécanisme de la Régie des marchés agricoles pour la protection de chacun des agriculteurs du Québec. C'est pourquoi ceux qui pensent qu'il y a des choses qui ne sont pas correctes dans les plans conjoints, la Régie des marchés agricoles est là pour les protéger. Mais quand les gens se sont prononcés, d'une façon majoritaire, très fortement en faveur de plans conjoints, qu'ils ont adopté des règlements, je pense que ces plans conjoints doivent fonctionner. La loi est également nécessaire pour des plans nationaux, dans le domaine du lait, du dindon, des oeufs, et le prochain plan qui va être négocié au cours de l'année 1979, puisque l'entente a été signée par le gouvernement fédéral à la fin de décembre 1978, dans le poulet, et ceci sera, je pense, à l'avantage des agriculteurs.

Je termine — je ne veux pas seulement le dire mais le faire — pour que les députés du Parti québécois puissent aussi dire un mot sur ce projet.

Le Vice-Président: M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, je vous mentionne immédiatement que je n'utiliserai pas, moi non plus, tout le temps qui est alloué à ma formation politique pour discuter de ce projet de loi puisque le député de Shefford, mon bon collègue de Shefford — dans le Parti libéral il y a le droit à la dissidence — a mentionné le désir de s'adresser à cette Chambre au sujet du projet de loi 116. Vous me permettrez de lui laisser une dizaine de minutes au moins pour tâcher d'expliquer la position qu'il défend lui-même.

M. le Président, pour ma part, je suis un peu content de ce que les agriculteurs du Québec, les dirigeants de l'UPA au Québec et, enfin, une bonne partie de la population du Québec ont pu constater dans le débat que nous avons eu cet après-midi ici même à l'Assemblée nationale.

Et, quand je parle du débat, je veux surtout parler de la période des questions au cours de laquelle le chef de l'Union Nationale s'est adressé au ministre de l'Agriculture dans le but d'essayer de clarifier certaines choses. Cela permet à la population du Québec de constater ce qui se passe dans un Parlement lorsque les élus du peuple étudient certaines lois que je qualifie d'importantes, certaines lois majeures telles que la loi 116 que nous avons étudiée depuis le 16 ou le 17 décembre. Elle peut constater jusqu'à quel point des réponses, des sons de cloche différents peuvent soulever des points d'interrogation dans l'esprit de ceux qui représentent non seulement des agriculteurs à l'intérieur d'un comté comme le mien, mais également des consommateurs et certaines personnes qui ne sont pas tout à fait d'accord avec la loi 116. Un peu plus tard durant mon boniment, j'aurai l'occasion de préciser ce que je viens de mentionner. Nous l'avons demandé à maintes reprises et au risque de me répéter: Pourquoi la loi 116? Tout le monde sait que le projet de loi 116 a été apporté par le ministre de l'Agriculture à cette Chambre dans le but de légaliser un jugement de la Cour suprême qui date d'un peu plus d'un an, c'est-à-dire du mois de janvier 1978. Loin de...

Je voudrais être bien clair dans les propos que je vais tenir. Je voudrais être bien clair. Loin de moi l'idée de vouloir blâmer l'UPA, c'est-à-dire l'idée de blâmer les dissidents à l'intérieur du Québec qui contestent ces mêmes dirigeants. Je voudrais tout simplement mentionner ceci, M. le Président. La loi 116, qui est nécessaire depuis le jugement de la Cour suprême du Canada, aurait très bien pu être appelée devant les élus du peuple au mois d'avril ou mai 1978, parce que le jugement était déjà rendu.

C'est vrai que d'autres provinces canadiennes ne s'étaient pas prononcées. Mais je pense que le gouvernement du Québec, qui se dit toujours innovateur, aurait peut-être pu, à ce moment-là, non pas attendre ce que d'autres provinces canadiennes décideraient face au jugement de la Cour suprême, mais le ministre de l'Agriculture lui-même aurait pu amener cette loi le plus rapidement possible, c'est-à-dire il y a environ un an. Si elle est si bénéfique pour les agriculteurs du Québec, elle aurait dû être votée il y a un an. Cela était possible. Si je vous dis cela, c'est parce que je pense que cela a une incidence particulière. Tout d'abord, dois-je vous dire que, du 15 novembre 1976 à janvier 1978, les mesures, les lois que le ministre de l'Agriculture a apportées en cette Chambre étaient vraiment très minces. Il n'y en a pas eu beaucoup, M. le Président. Cela faisait

pitié. C'est vrai qu'à ce moment-là le ministre faisait son apprentissage en agriculture; je le concède. Il fallait qu'il connaisse un peu le domaine agricole. Il fallait qu'il étudie ce qu'est l'agriculture. Il fallait également qu'il prenne connaissance à l'intérieur de son ministère, de toutes sortes de plans qui existaient, que le gouvernement libéral avait préparés auparavant et que d'autres gouvernements antérieurs — parce que l'agriculture n'est pas né le 15 novembre 1976 — avaient préparés. C'est vrai que le ministre avait tout cela à apprendre, mais c'est aussi vrai qu'il aurait pu apporter cette loi bien plus tôt. (20 h 30)

II a une certaine stratégie, vous savez, notre ministre de l'Agriculture au Québec. Je ne dirai pas qu'il a l'esprit machiavélique, mais il savait — il voulait du moins et c'était une période dure à traverser au Conseil des ministres amener le projet de loi no 90 et, aujourd'hui, on connaît la loi 90, Loi sur la protection du territoire agricole — que c'était bien difficile, à un moment donné, de donner un bon coup de coude à son collègue de l'aménagement et de lui faire perdre un peu la face devant le Conseil des ministres. Il savait qu'il y avait bien des choses à tasser. A ce moment-là, il s'est dit: Je vais prendre le risque de retarder le projet de loi no 116 et, en même temps que la loi du zonage agricole, on va apporter le projet de loi no 116.

Pourquoi y a-t-il tant de dissidents au sujet de ce projet de loi no 116? On entend parfois le ministre de l'Agriculture railler l'ancien premier ministre du Québec, feu l'honorable Maurice Duplessis, qui avait d'ailleurs des talents particuliers, on doit le reconnaître, mais je pense que le ministre a appris vite qu'il fallait peut-être qu'il divise pour mieux régner. C'est vrai qu'il y avait des dissidents avant le projet de loi no 116, j'en conviens, mais je ne suis pas certain qu'il y en avait autant, puisqu'on parle d'environ 3000 dissidents et peut-être que je suis conservateur en disant 3000, avant la présentation du projet de loi no 116. Mais on a profité de cette circonstance, de façon bien stratégique, pour tâcher d'apporter ces mesures et cela a eu l'effet qu'on a tout simplement mis littéralement le diable — c'est ce que cela veut dire, c'est le bon français — à l'intérieur de l'UPA. Cela, l'UPA n'en est coupable d'aucune façon. Je veux être bien clair là-dessus. Elle a été dupe, possiblement, du ministre de l'Agriculture qui ne connaissait pas trop trop le domaine, mais qui a pensé à des plans pour en arriver à la situation qu'on connaît aujourd'hui.

Cela m'inquiète, M. le Président, qu'il y avait au moins 3000 dissidents, au moment même où je vous parle, à l'intérieur de l'UPA. Ce n'est pas l'UPA qui l'a provoqué, ce ne sont pas ses dirigeants non plus, parce que j'ai confiance aux dirigeants de l'UPA. Ce ne sont pas ses dirigeants; ils sont dupes du ministre de l'Agriculture, c'est la réalité. On a apporté ces mesures par exprès et le projet de loi no 116, qui est bénéfique pour les agriculteurs, aurait dû être voté il y a plus d'un an.

On fait croire, à ce moment, aux agriculteurs que c'est bénéfique, on apporte cela que c'est pour eux et qu'on travaille pour eux autres. C'est cela qu'on vient leur dire, M. le Président. Je pense que la vérité n'est pas tout à fait là. Mais quand même, quand cette loi 116 est arrivée, qu'est-ce que nous avons demandé au ministre? Cela a été demandé par l'Opposition officielle. Cela a été demandé par l'Union Nationale. Cela a été demandé aussi, je crois, par le député de Beauce-Sud. On a dit: Ecoutez, vous avez une situation de fait, vous devez légaliser, rendre légal ce que la Cour suprême a mentionné qui devait devenir légal. Pourquoi, à ce moment, n'avoir pas tout simplement présenté l'article 7? Dans ce temps-là, c'était l'article 7, dans le projet de loi. On a dit, M. le Président, au ministre, et les autres Oppositions aussi l'ont mentionné: Apportez-nous l'article 7 et dans l'espace d'un rien de temps, votre loi va être adoptée.

On a dit cela vers le 19 ou 20 décembre. On était prêt à l'adopter dans la même journée. C'était de la collaboration de la part de tout le monde, M. le Président, mais on a pris la parole du ministre. On a pris la parole du ministre. Il m'a répondu, en particulier en tout cas, qu'après étude du contentieux du ministère de l'Agriculture, tous les articles dans la loi devaient faire un tout qui devait exister à l'intérieur de la loi. On ne pouvait pas scinder le projet de loi comme on l'avait mentionné. On est allé encore plus loin, M. le Président, à un moment donné. Nous avons demandé au ministre de l'Agriculture de faire une commission parlementaire afin d'entendre certaines personnes qui avaient des choses à dire au sujet de cette loi. Cela nous a été refusé, M. le Président. C'était le droit du ministre, d'ailleurs, de le refuser. Mais c'est pour mentionner tout simplement, pour être bien clair envers tout le monde, qu'on a fait des tentatives et qu'on a fait des demandes qui nous semblaient très logiques et qui auraient dû être acceptées.

A part la première, de scinder le projet de loi où on nous a dit: Les juristes nous mentionnent que ce n'est pas possible. Celle-là, d'accord, on n'a pas mis en doute aucunement la parole du ministre, M. le Président. On a dit: D'accord. Mais pour les autres, il me semblait que les demandes que nous avons faites, le Parti libéral, l'Union Nationale et d'autres formations politiques aussi, ces demandes nous semblaient légitimes, mais elles n'ont pas été acceptées. C'était le droit du ministre de ne pas les accepter mais cela nous semblait raisonnable. Nous avons eu le problème, et on en a parlé, des coopératives.

Je me souviens très bien d'un samedi, si ma mémoire est fidèle, qui a précédé l'ajournement des Fêtes, où, lorsqu'on a mentionné au ministre que nous avions dans nos comtés agricoles, dans nos comtés ruraux des représentations de la part des coopérateurs qui avaient extrêmement peur du projet de loi no 116. Lorsque nous sommes revenus, le ministre nous a dit: Ecoutez, il n'y a pas de problème là-dedans, il n'y a rien de grave là-dedans, j'ai rencontré les représentants des

coopératives, puis on s'est entendu. On a clarifié la situation, c'est réglé.

Pour ma part, et pour plusieurs de ma formation politique, on s'est dit: Bon, c'est réglé, ils ont eu une entente, cela fait cela de moins dans le projet de loi. On commençait déjà à être encore plus satisfait.

J'en viens à tout ce que j'ai mentionné au tout début, on a vu le jeu qui s'est produit cet après-midi, M. le Président, des télégrammes. Le ministre de l'Agriculture, cet après-midi, m'a fait extrêmement rire quand il a parlé du fameux télégramme du 21 décembre 1978, qu'il l'avait reçu hier ou avant-hier ou qu'il ne l'avait pas encore reçu.

M. Grenier: II ne l'a pas encore reçu.

M. Picotte: II ne l'a pas encore reçu. M. le Président, je vais vous rapporter un fait qui s'est passé samedi soir dernier. Entre trois soirées sociales dans mon comté, je suis passé à mon domicile pour me changer et à dix heures moins dix, samedi soir, j'ai reçu un appel téléphonique d'une dame qui travaille à l'endroit où on envoie les télégrammes, qui me mentionnait que telle compagnie — je n'ai pas peur de donner le nom de la compagnie, c'est une compagnie de mon comté, de Saint-Barnabé-Nord, Marcouiller & Frères — concernant l'huile à chauffage m'expédiait un télégramme pour tâcher de me mettre en garde contre le monopole des multinationales en ce qui concerne le problème qu'a soulevé mon collègue de Mont-Royal, cet après-midi. A dix heures moins dix le samedi soir, on est capable de rejoindre un député pour lui dire qu'il a eu un télégramme, et le ministre de l'Agriculture, de façon cavalière cet après-midi, de façon bouffonne, de façon innocente, vient essayer de faire croire aux élus du peuple qu'un télégramme qui lui a été adressé le 21 décembre 1978 ne lui est pas parvenu le 20 février 1979.

Ecoutez donc, c'est un bouffon notre ministre de l'Agriculture. Ou bien c'est un gars qui ne s'occupe pas de son affaire, ou bien c'est un gars qui n'est pas passé à son bureau au ministère depuis le 21 décembre. On n'a pas bien des solutions. Il n'y a pas grand-chose à retirer de cette • leçon. (20 h 40)

Tous les députés reçoivent des télégrammes. Au maximum trois heures après que la personne nous a adressé le télégramme, on reçoit un appel téléphonique et, 48 heures après, au maximum, la copie est à la poste et on la reçoit. J'ai seulement une secrétaire dans mon comté et mes télégrammes arrivent 48 heures après; elle me les met sous le nez. Le ministre, lui, a 7, 8, 10 personnes à son cabinet de ministre: un chef de cabinet, une secrétaire particulière, une secrétaire adjointe, deux secrétaires particuliers, un attaché de presse, j'en oublie et j'en passe. Malgré cette foule de personnes autour de lui, le télégramme ne lui est pas parvenu. Là, on joue au chat et à la souris. L'Opposition reçoit un télégramme disant qu'ils ne sont pas d'accord.

Le ministre nous a dit que vers le 20 décembre, il avait rencontré les coopératives, qu'il avait rencontré les coopérateurs et qu'ils étaient d'accord, qu'il avait conclu une entente avec eux, qu'il avait réussi à leur expliquer la loi et que c'était réglé, cette histoire. L'Opposition reçoit des télégrammes par la suite; ce n'est pas réglé. Nous sommes ici et nous sommes censés prendre l'intérêt de nos contribuables de la meilleure façon; nous sommes censés prendre les meilleures décisions possible alors que le ministre nous dit qu'il a conclu des ententes. On a un télégramme disant le contraire. Un autre télégramme nous dit qu'on annule le premier télégramme. Finalement, on sait, au moment où on va adopter la loi, à la toute dernière minute, que l'entente qui a soi-disant été conclue vers le 21 décembre n'existe plus, que les gens ne sont plus d'accord. Là, on est obligé de prendre une décision là-dessus, vite, vite, ça presse.

Même si, pour nous, l'Opposition, cela ne presse pas. On aurait même pu continuer à siéger demain dans le but d'éclaircir cet imbroglio. On aurait pu continuer demain et au moins jusqu'à jeudi soir. Nous sommes à Québec. Je comprends qu'il y en a plusieurs qui sont partis en vacances, mais laissons ceux qui sont en vacances en vacances et ceux qui sont ici pour travailler, laissons-les travailler et poursuivons! Nous n'avons rien contre cela. Malheureusement, ce n'est pas ce qui se passe.

En terminant, je dois vous dire, au nom de plusieurs de mes collègues et en mon nom, que, comme nous l'avons fait en deuxième lecture, nous allons voter aussi en troisième lecture pour le projet de loi no 116, tout en vous disant qu'il y a des erreurs d'aiguillage qui se sont glissées dans l'étude du projet de loi. Si nous votons en faveur de la loi, ce n'est pas parce que nous avons confiance au ministre, c'est parce qu'on a confiance...

M. Garon: Dans la loi.

M. Picotte: ... en l'UPA. On a confiance en ses membres parce qu'on sait qu'ils prennent leurs intérêts en main et qu'ils sauront participer aux réunions nécessaires.

M. Garon: Vous avez dit qu'ils étaient dupes du ministre, tantôt.

M. Picotte: J'espère et je souhaite ardemment, pour nos agriculteurs du Québec et pour tous ceux qui seront touchés par cette loi 116, que la loi soit aussi bénéfique que nous le voulons, que nous le désirons et que le ministre l'a mentionné.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. En cette étape de la troisième lecture, je dirai dès le début que notre bon ministre de l'Agriculture, notre

charlatan, vient de forcer sa drogue du projet de loi 116 chez les agriculteurs et dans le monde agricole au Québec. Il a forcé cette drogue sans consulter et sans rencontrer le monde agricole en plus, chose aberrante. Le ministre s'est constamment caché derrière son projet de loi. Il n'a jamais voulu, en commission parlementaire, ni rencontrer ces gens-là, ni répondre à leur demande de régler les problèmes qui existent au niveau des coopératives et au niveau des syndicats.

Le ministre vient également de semer des graines d'anarchie dans le monde agricole, le tout renchaussé par les libéraux, égarés, perdus, complètement affolés. Un vote contre et tout le monde vote pour, un parle contre et va voter pour; il n'y a plus rien à comprendre dans ce monde-là! J'imagine que la main de Dieu a...

M. Alfred: A fait son oeuvre.

M. Dubois: ... fait son oeuvre. Certainement, c'est la bonne parole, a fait son oeuvre; c'est très bien dit, puisque tout le monde est perdu. En tout cas, le séparatiste, Claude Ryan, a donné son ordre formel et je pense que tout le monde va voter pour le projet de loi, à l'exception du courageux député de Shefford.

M. le Président, ils sont affolés, tellement perdus, ces libéraux, qu'ils ont voté contre l'amendement de l'Union Nationale visant à protéger les coopératives au Québec, visant à protéger la transformation que ces coopératives-là font et la mise en marché qu'elles font. C'est à n'y rien comprendre! De toute façon, il y a du monde perdu à l'Assemblée nationale et les libéraux ne sont pas à la veille de reprendre la bonne voie. Mais, enfin, avec M. Ryan, on peut comprendre cela.!

Nous avons tous — je pense que le ministre aussi devrait en être conscient — que le monde coopératif au Québec fait une grande partie du contrôle au niveau de la transformation, de la mise en marché et de la production, dans le domaine laitier spécialement. Nous, de l'Union Nationale, nous voulons protéger cette grosse partie de notre économie que sont les coopératives au Québec. Nous n'avons jamais demandé la destruction ni d'un syndicat, ni d'une coopérative, mais nous voulons qu'une harmonie existe et je pense qu'il y a lieu que cette harmonie existe. Mais le ministre ne semble pas la désirer. Je pense qu'on peut dénoncer le fait que le ministre de l'Agriculture ne réponde pas aux besoins des vrais agriculteurs et de la base agricole au Québec. Je comprends bien les députés du Parti québécois qui ont été muets et passablement insouciants vis-à-vis du projet de loi 116. Je comprends qu'ils ne peuvent pas parler contre leur ministre et contre les positions qu'il prend. Mais il aurait peut-être été logique que les députés libéraux puissent se prononcer d'une façon rationnelle sur le projet de loi. Mais, il n'y en a plus, il en reste seulement deux en Chambre. Un pour, un contre! Je pense que c'est le présage de ce qui restera des libéraux dans quelques années. Un pour et un contre!

M. Verreault: II y a trop de députés.

M. Dubois: J'aimerais dire à la population que dans les grands moments, l'Union Nationale est là, a toujours été là et sera toujours là. Nous l'avons prouvé depuis le début des débats sur le projet de loi 116. Nous serons toujours là...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dubois: ... quand il s'agira de l'avenir agricole au Québec. Non seulement en agriculture, nous l'avons prouvé en économie, d'ailleurs. A plusieurs reprises, le chef de l'Union Nationale a eu des motions de débats sur l'économie québécoise. Je pense que nous avons reçu l'approbation de la majorité des Québécois avec nos positions, et vous pouvez être sûrs d'une chose, c'est que, de plus en plus, les Québécois reconnaîtront dans l'Union Nationale la seule formation politique qui peut vraiment les représenter, qui peut vraiment les comprendre et qui est aussi à la portée des gens du Québec, chose que vous ne comprenez pas.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dubois: M. le Président...

M. Garon: Le chef n'est même pas là!

M. Dubois: ... il est intolérable, inacceptable... Une Voix: Le vôtre non plus!

M. Dubois: ... que le ministre trompe si honteusement les agriculteurs du Québec comme il l'a fait dans ce dossier du projet de loi 116. Il n'a jamais arrêté de nous tromper, nous, en Chambre, et de tromper l'agriculteur. Il disait ne pas avoir en main certains télégrammes, mais finalement, nous les avions ici. On peut ne rien comprendre, mais on peut douter fortement du ministre de l'Agriculture, de sa parole, et je pense que les agriculteurs n'accepteront plus cela. Ils ne sont pas dupes et vous le savez, M. le ministre. Vous avez d'ailleurs eu des preuves ce soir qu'ils ne sont pas dupes. J'ai entendu des commentaires qui ne sont pas tellement flatteurs à l'endroit du ministre. Je n'oserais même pas les répéter ici, quoiqu'il ne serait pas antiparlementaire de le faire puisque ce ne sont pas mes paroles. J'aurais même le goût de les sortir. Mais de toute façon, M. le Président, cela ne ferait pas avancer le débat. (20 h 50)

Je pense que le ministre de l'Agriculture doit présentement regretter tous les gestes qu'il a posés au niveau du projet de loi 116. Il doit aussi regretter de ne pas avoir accepté notre proposition du début à l'effet de reconnaître l'élément coopératif au Québec. A deux reprises, des milliers d'agriculteurs québécois ont manifesté ici, des agriculteurs qui sont venus à Québec. Ils n'étaient pas payés pour venir ici. Ils venaient à

leurs propres frais manifester à Québec contre le projet de loi 116. Le ministre s'en est foutu éperdument; il n'a même pas voulu les rencontrer, ces agriculteurs. Il a plutôt préféré rencontrer quelques dirigeants de l'UPA qui, eux, ne viennent pas à leurs frais ici à Québec.

M. le Président, j'aimerais aussi faire un parallèle entre le projet de loi 116 et notre beau programme OSE. On dit aux Québécois: Osez! Produisez! Soyez compétitifs! Soyez motivés! Mais le projet de loi 116 enlève toute motivation aux producteurs du Québec. On peut leur enlever leur quotas de production. On peut prohiber leur production. On peut restreindre leur production.

Une Voix: Allez-y!

M. Dubois: On peut pratiquement les déposséder. Cela peut aller jusque-là. Si ce projet de loi est exercé d'une façon coercitive, on peut déposséder certains agriculteurs du Québec et vous le savez. Mais vous avez peut-être changé d'attitude depuis le début de votre terme. Au tout début, vous étiez même contre les plans conjoints qui ne recevaient pas l'assentiment de la majorité de la population agricole, mais le Conseil des ministres a su bien vite vous faire changer d'idée. Au niveau du plan conjoint sur le porc, si je me rappelle bien, au tout début, le ministre n'était pas d'accord pour qu'un plan conjoint sur le porc soit sanctionné sans un référendum positif, mais le Conseil des ministres vous a dit: On respecte la demande du syndicat agricole. Alors, c'est ce que vous avez fait, M. le ministre. Vous allez le regretter plus tard.

M. Grenier: Imposition. Transparence. Une Voix: Oui, mais Ryan est d'accord. M. Grenier: Vains mots!

M. Dubois: M. le Président, j'ai fait état du programme OSE. On dit aux Québécois: Produisez, osez mais, une fois que vous osez, on peut couper votre production, vos quotas de production. Cela peut faire tomber l'agriculture à un point tel que les agriculteurs se demanderont si cela vaut vraiment la peine de produire ou de ne pas produire. De plus, vous avez présenté un projet de loi 90 qui ouvre un grand territoire à l'agriculture. Vous avez présenté un projet de loi 99 qui crée la banque de terres de l'Etat. Vous avez présenté un projet de loi 100 qui apporte des subsides ou des aides financières meilleures aux jeunes agriculteurs. Vous présentez le projet de loi 116 qui contrôle la production. Alors, on voit les quatre points cardinaux de l'agriculture; c'est évident. Avec le contrôle abusif, socialiste, au bout de la ligne, qui est la loi 116. Alors, un contrôle absolu du ministre dans le domaine de l'agriculture et du syndicat. C'est ce qui arrive, c'est évident et cela crève les yeux.

M. le Président, il faudrait que je laisse un petit peu de temps à mon collègue de Nicolet-

Yamaska; je pense que c'est très important. Le député de Saint-Hyacinthe avait eu une fin de discours que j'ai bien aimée il n'y a pas longtemps, mais malheureusement je pense que je l'ai perdue.

M. Garon: Vous perdez vos discours.

M. Dubois: Non, je l'ai. Le député de Saint-Hyacinthe a mentionné, quand il a parlé en deuxième lecture du projet de loi 116, que celui-ci sera l'épave du Parti québécois. Le premier ministre a dit cet après-midi qu'il en subira les conséquences mais, quand il a dit qu'il les subira toutes, il n'a jamais mesuré toutes les conséquences impliquées dans le projet de loi 116.

M. Garon: Qui a dit cela?

M. Dubois: Le premier ministre a dit cela cet après-midi. Il subira les conséquences du projet de loi 116 et je souhaite bonne chance au premier ministre parce que les conséquences pourraient être vraiment grandes.

M. le Président, je vous remercie infiniment de m'avoir permis de parler en troisième lecture du projet de loi.

Le Vice-Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. Samson: Merci, M. le Président. Très brièvement, je souligne à votre attention que je n'ai pas eu l'occasion malheureusement — je m'en excuse auprès du ministre de l'Agriculture — de participer aux discussions sur ce projet de loi jusqu'à ce jour. Il y avait, bien sûr, des raisons qui m'ont empêché de le faire et je n'ai pas à en faire le détail ici.

M. le Président, dans les quelques minutes que j'ai à ma disposition, je n'ai que le temps de donner quelques arguments qui sont essentiellement ceux qui ont été développés au cours de ces débats, d'après les rapports dont j'ai pu prendre connaissance. Nous nous retrouvons sûrement, avec la position gouvernementale, devant un signe d'imprudence de la part du gouvernement. En effet, je n'ai aucunement l'intention de faire des personnalités. J'ai tout simplement l'intention de parler du projet de loi, de ses conséquences et surtout de ce qui a été vécu au cours de ces discussions par les uns et par les autres. Je retiens que le gouvernement n'a pas suffisamment tenu compte des manifestations de désaccord qui ont eu lieu à l'endroit d'une grande partie de son projet de loi. Bien qu'il y ait peut-être eu accord partiel, il y avait suffisamment de discorde quant à l'application de ce projet, qui deviendra une loi bientôt, pour que, à mon sens, le gouvernement ait eu à tenir compte de ces dissidences.

L'insatisfaction, pour une bonne proportion des agriculteurs qui sont concernés par ce projet de loi, a été assez claire. Il me semble que le

moins que le gouvernement aurait pu faire aurait été sûrement de les écouter plus et de tenter de trouver la meilleure des solutions.

Actuellement, nous nous trouvons devant une position qui est absolument — évidemment voulue par le Parti québécois — imposée par lui, à savoir que tous ceux qui ne sont pas d'accord avec le Parti québécois subissent les foudres du ministre de l'Agriculture, ou du gouvernement, si on veut mieux s'exprimer, parce que c'est là une action du gouvernement. Je pense que c'est là un signe d'intolérance de la part du gouvernement, intolérance qui, finalement, risque beaucoup de faire voir ce projet de loi appliqué dans une discorde épouvantable, dans l'insatisfaction extraordinaire qui aura été créée par l'application de ce projet de loi et, finalement, avec une division profonde du monde agricole.

Je n'ai à faire le procès — je n'ai pas l'intention de le faire non plus — ni d'un syndicat agricole, ni d'un autre groupe. Ce n'est pas mon intention. Mais je constate qu'il y a insatisfaction, au point où cette division qui est apparue risque d'aller en s'accentuant. Ceux qui, d'une part, peut-être, bénéficieront de ce projet de loi et ceux qui, d'autre part, auront à le subir et qui subiront en même temps des pertes, ce sont ces gens que nous devons servir. Les députés, les fonctionnaires, les personnes ressources du gouvernement, qui ont pondu une partie de ce projet de loi ou encore ce qui se retrouve dans la philosophie derrière ce projet de loi, n'en subiront pas les conséquences. Je me demande quand, du côté gouvernemental, on va enfin reconnaître que les lois faites dans ce Parlement doivent être faites pour le bien de l'ensemble de la population concernée; la population en général mais la population concernée aussi. Je pense que cela n'a pas l'air d'être pour maintenant. Il y a là-dessus des expériences malheureuses qui ont été vécues avec différents projets de loi. Quand le gouvernement finit par décider de se brancher de façon définitive, il le fait généralement avec une arrogance qui est susceptible de se propager dans l'application des lois par la suite. C'est ce qui est malheureux, M. le Président.

Nous relançons, avec ce projet de loi — pas nous parce que je ne veux pas m'associer à cela — l'espèce d'inquiétude, qui a existé pendant longtemps et qui existe encore, de toute cette histoire de quotas, de contingentements qui font que les uns peuvent vivre et que les autres ne peuvent pas, qui font que les agriculteurs eux-mêmes sont ceux qui viennent nous voir généralement et nous demandent de plaider en leur faveur parce qu'on en arrive à se faire contrôler: contrôle du marché, contrôle de la production et, demain, on contrôlera encore plus loin. (21 heures)

Si j'interprète bien les signes que vous faites, M. le Président, cela veut dire que le temps est déjà écoulé. J'avais raison de vous dire au début que, dans le peu de temps qu'on a à notre disposition, on ne peut pas préparer une argumentation qui fait le tour de l'ensemble des problèmes.

Mais qu'importe, cela m'a quand même permis de vous dire en quelques mots pourquoi je ne pourrai pas voter pour ce genre de loi en troisième lecture.

Le Vice-Président: Merci, M. le député de Rouyn-Noranda.

M. le député de Beauce-Sud, vous aussi vous avez cinq minutes. C'est l'entente.

M. Fabien Roy

M. Roy: Je n'ai que cinq minutes en vertu de l'entente et je vais la respecter. M. le Président, je pense bien qu'il faut dire que c'est la dernière intervention qu'on a l'occasion de faire sur ce projet de loi puisque la troisième lecture constitue l'étape finale avant l'adoption de la loi. Je ne dirai pas avant la sanction de la loi parce qu'on ne sait pas quand la loi effectivement entrera en vigueur, puisque, selon le dernier article de la loi, il faudra une proclamation pour que la loi entre en vigueur. Il en faudra deux puisque le ministre a parlé de deux étapes distinctes. M. le Président, je pense bien qu'à ce moment-ci il faut convenir que les jeux sont faits; comme diraient certains, les dés sont pipés. Nous avons eu quelques amendements cet après-midi qui nous ont été proposés par le ministre, amendements que nous n'aurions pas eus si nous avions voté à la hâte tel que le gouvernement nous l'a demandé au mois de décembre dernier.

Cela me fait dire que, si la loi avait été retardée encore d'une semaine ou quinze jours, probablement que le ministre en serait venu finalement à comprendre quelque chose. De toute façon, ces petits amendements qui ont été adoptés sont quand même des amendements assez importants qui nous donnent raison de nous être opposés à l'adoption rapide de la loi. M. le Président, le ministre actuel de l'Agriculture aura sûrement des problèmes avec la classe agricole au cours des prochaines semaines et au cours des prochains mois. Je serais tenté de dire que le ministre de l'Agriculture est en train de s'identifier comme le ministre des contradictions. On a voté une loi l'automne dernier, la loi 90, pour protéger le territoire agricole au Québec. Il y a eu beaucoup de débats à l'Assemblée nationale. La commission parlementaire a siégé extrêmement longtemps et, aujourd'hui, on vote la loi 116 pour tâcher de donner des pouvoirs d'interdire la production agricole.

M. le Président, c'est à se demander si demain on ne verra pas quelque part au Québec sur une ferme deux panneaux. Un panneau sur lequel sera indiqué: Terre agricole protégée en vertu de la loi 90 et un autre panneau à côté: Interdiction de produire en vertu de la loi 116. On pourrait peut-être le peinturer en rouge, ce panneau, étant donné que le Parti libéral est d'accord. Même, je pense que l'ayatollah Ryany est d'accord. On pourrait le peinturer en rouge, le panneau. Je dirai au ministre que de tels écartèlements risquent d'être douloureux à la longue. Il y a des limites à se moquer de la classe agricole au Québec. Ce

sont des choses qu'on a eu à déplorer souven-tefois dans le passé que nos gouvernements ne sont pas assez sérieux lorsqu'il s'agit de défendre et de promouvoir les intérêts de la classe agricole et de travailler à l'économie rurale. J'aimerais que le ministre me dise, s'il a l'occasion de le faire ce soir, en quoi la loi 116 va améliorer l'économie agricole au Québec. J'aimerais que le ministre nous le dise.

Il y a des problèmes. Les problèmes ne sont pas soudains chez la classe agricole. C'est la raison pour laquelle on a demandé une commission parlementaire. Ce n'est pas une simple demande que nous faisons. Une commission parlementaire s'impose pour qu'on prenne le temps de recevoir, d'inviter les organismes concernés, intéressés à se faire entendre à venir expliquer les problèmes devant les parlementaires. On permet à toutes les autres classes de la société de venir se faire entendre en commission parlementaire et lorsqu'il s'agit de l'agriculture, c'est extrêmement difficile sur ces questions. On a fait des accords et il y a eu une commission parlementaire sur la loi 90. C'était limité exclusivement à la loi 90.

Mme la Présidente, je constate que vous me faites signe qu'il ne reste qu'une minute. Comme une loi est censée améliorer les choses, comme une loi est censée voir à l'ensemble de l'économie dans un secteur particulier et comme une loi agricole importante devrait voir à l'amélioration de l'économie agricole, donc, par voie de conséquence, à l'amélioration du sort des agriculteurs eux-mêmes — je parle des agriculteurs eux-mêmes, Mme le Président — je ne verrais pas pour quelle raison nous aurions aujourd'hui à appuyer un projet de loi semblable.

C'est la raison pour laquelle, compte tenu de ce qu'il contient de nouveau, bien que je serais d'accord sur les autres articles qui concernent le vide créé par le jugement de la Cour suprême, mais compte tenu de tout ce qu'il contient d'autre, ce projet de loi, je me verrai dans l'obligation — et c'est mon devoir — de voter contre ce projet de loi.

Mme le Vice-Président: M. le député de Joliette-Montcalm

M. Chevrette: Mme le Président, je croyais assister à une argumentation contre le projet de loi et je m'aperçois que le plus fort de l'argumentation de l'Opposition, jusqu'à maintenant, tourne autour du refus d'avoir accepté une commission parlementaire, tourne autour de toutes sortes de sujets, toutes sortes de diversions, mais elle n'attaque jamais le fond. Quelque-uns, par-ci par-là, osent s'aventurer et montrent leurs vraies couleurs. C'est ce que je vais essayer quand même de démontrer.

Ce projet de loi, Mme le Président, peut sembler très complexe, mais il faut croire que cela se comprend par du monde, parce qu'hier soir, moi j'ai rencontré 125 agriculteurs, des jeunes agriculteurs, tout jeunes, dans une salle. On a expliqué ce que c'était le projet de loi no 116. Il y avait un notaire qui est venu l'expliquer, il y avait un gars de l'UPA, il y avait un gars qui n'était pas d'accord sur les plans conjoints qui est venu l'expliquer. On a parlé à ces gens. Ils ont compris tout de suite qu'il s'agissait là, fort simplement, de clarifier une situation, de légaliser ce que la Cour suprême nous demandait, à toutes fins utiles, de faire.

Mme le Président, cependant, il n'y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre. Il faut absolument, quand on n'est pas étoffé sur le fond de l'argumentation pour réfuter un projet de loi, chercher des faux-fuyants. Il faut chercher toutes sortes de motifs autres que ceux qu'on a vraiment. Ils ont eu peur de dire avec qui ils s'étaient acoquinés, ils ont eu peur vraiment de dire qui ils défendaient dans ce projet de loi, ils ont essayé de faire dévier le débat sur un sujet aussi peu pertinent que celui du conflit possible de l'UPA avec le mouvement coopératif. Mais dans le fin fond, ce qu'ils ne voulaient pas et qu'ils n'ont pas osé dire, tout au cours des débats, c'est qu'ils n'ont jamais voulu affirmer catégoriquement qu'ils n'avaient pas confiance aux agriculteurs qu'ils les prenaient pour des nonos, qu'ils croyaient que les agriculteurs n'étaient pas assez intelligents pour se voter des plans conjoints avec une réglementation qui corresponde exactement à ce qu'ils veulent. C'est ça qu'ils n'ont pas dit et qu'ils auraient dû dire. C'est exactement cela le projet de loi. Quand on se gargarise de la confiance des agriculteurs, on dit: On a confiance dans la classe agricole, on veut défendre les petits. Le chef de l'Union Nationale a même dit: Cela n'a pas d'allure de défendre la production. Il est acoquiné avec des gars qui signent des contrats d'intégration et qui dit ceci, dans un contrat d'intégration, Mme le Président: Nonobstant toute disposition contraire ici stipulée, le propriétaire pourra retarder pendant un délai raisonnable le début de tout élevage. Ce n'est pas grave, c'est fait par des dissidents, par des intégrateurs. Cela, par exemple, on ne le dit pas. On est prêt à laisser faire ces gens.

M. Grenier: Dites-le donc avec qui on est acoquiné. Nommez-les.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Je vous en donnerai une petite preuve pour finir, M. le député de Mégantic-Compton.

Mme le Président, cela c'est dans les contrats et cela se fait quotidiennement, ces affaires. On ne se scandalise pas de voir que des agriculteurs deviennent, à toutes fins utiles, des salariés sur leur ferme, dépendant complètement de l'intégrateur. On ne se scandalise pas de cela, on n'a pas peur du tout de cela, on encourage cela.

Moi, personnellement, Mme le Président, je pense qu'il y a une question de philosophie. Accepte-t-on la classe agricole de type familial, oui ou non? Accepte-t-on que ces gens puissent se donner des armes devant la concentration de plus en plus grande des acheteurs? Est-ce qu'ils ont le droit de se donner des moyens légaux, reconnus

par les lois du Québec pour négocier des prix raisonnables, pour ne pas se laisser acheter par des gros uniquement? (21 h 10)

C'est ce que ça dit, ça sous-tend toute la loi. Il n'y a pas de danger qu'on en parle, on aime mieux faire miroiter des pseudo-chicanes entre l'UPA et le mouvement coopératif. Dites-le donc, montrez donc vos vraies couleurs! Dans un premier temps, vous reprochez au ministre de ne pas avoir présenté sa loi assez vite; ce soir, vous lui dites qu'il adopte la loi à la sauvette. Il n'y a aucun argument cohérent. De tout ce qu'on a entendu en commission parlementaire, on pourrait vous sortir des incohérences pendant des heures et des heures. Le public a besoin de savoir que le gouvernement du Québec a pris ses responsabilités à la suite du jugement de la Cour suprême. On a voulu donner aux Québécois des moyens légaux de se faire justice eux-mêmes, démocratiquement, en assemblée. Je fais assez confiance aux cultivateurs québécois et aux producteurs de mon comté qui auront à se prononcer sur d'éventuels plans conjoints pour savoir qu'ils se donneront les règlements correspondant exactement aux objectifs qu'ils recherchent. C'est faire confiance aux agriculteurs de leur offrir cette occasion.

Ne venez pas dire que vous faites confiance aux agriculteurs quand vous osez leur refuser un moyen légal de s'en donner. Vous ne voulez même pas que l'Etat leur offre l'occasion d'agir démocratiquement au sein de leurs propres groupes concernés. Montrez donc vos vraies couleurs! Montrez-les donc! Que le dernier intervenant de l'Union Nationale nous dise donc pourquoi, fondamentalement, vous êtes contre. Vous n'êtes pas contre l'UPA, mais vous craignez le mouvement syndical. Vous craignez jusqu'où cela peut aller. Voilà le genre de phrase qui dénote l'esprit qui anime ces gens; ils ont peur de dire vraiment qu'ils sont contre parce que cela pourrait empêcher des groupes de cultivateurs, moyens et petits, de se rassembler pour faire face à la concurrence.

En démocratie, quand on perd, on se rallie. Il me semble que, quand, démocratiquement, 90% des agriculteurs se votent des plans conjoints, les 10% qui ont voté contre doivent se rallier démocratiquement. C'est ce que dit la loi. Mais ne vous mouillez pas, faites bien attention. Essayez de faire miroiter que vous êtes pour la classe agricole, que vous la défendez au bout. Mais allez voir les jeunes, allez voir ce qui arrivera le jour où il y aura une surproduction dans certains secteurs. Qu'est-ce que les gens auront comme arme si on ne leur fournit pas un cadre légal pour se donner des moyens de survivre? Je connais des intégrateurs qui ont bien plus le souci de vendre leur moulée et des médicaments aux propriétaires de ferme que de se soucier des mises en marché et des prix. C'est ce qu'on appelle l'intégration en agriculture et il faudra s'en parler plus longtemps et l'expliquer aux cultivateurs, ce qu'est l'intégration en agriculture, parce qu'il est vrai qu'ils disparaissent de la mappe. Ils deviennent, à toutes fins utiles, de petits salariés sur leur propre ferme et ils n'ont aucun contrôle. On va même jusqu'à retarder leur propre production.

Je vais permettre à un collègue de parler, je vais conclure en vous disant que si on se permet de traiter le ministre de l'Agriculture de traître parce qu'il contribue, par une loi, à créer un cadre légal permettant aux individus de s'en servir à bon escient, quand ils voudront, je pense qu'il y a des formations politiques dans cette Chambre — il y en a au moins une — qui veulent maintenir un régime d'étrangleur de petits.

M. Goulet: Question de règlement, Mme le Président. Je n'ai pas voulu interrompre le député dans son discours, mais est-ce que le député de Joliette-Montcalm me permettrait une courte question? C'est mon droit.

M. Chevrette: Sur le temps de l'Union Nationale, oui.

M. Goulet: Certainement. Oui, madame. Mme le Vice-Président: M. le député... M. Goulet: Madame, deux minutes.

Mme le Vice-Président: ... de Joliette-Montcalm me dit qu'il n'accepte pas de question à moins qu'elle ne soit prise sur le temps de l'Union Nationale.

M. Chevrette: Question et réponse.

M. Goulet: Une très courte question. Le député de Joliette-Montcalm a parlé de démocratie. Je trouve curieux qu'il ne nous ait pas parlé du plan conjoint sur le porc.

M. Chevrette: Le plan conjoint sur le porc, je pourrais vous en parler pendant une demi-heure! Il serait peut-être bon de rappeler au député de Bellechasse que le plan conjoint sur le porc...

M. Goulet: Cela fait votre affaire.

M. Chevrette: Est-ce que je peux continuer?

M. Goulet: Non, on a la réponse. Non, non, madame.

M. Chevrette: Mme le Président, on m'a posé une question.

Mme le Vice-Président: M. le député de Joliette-Montcalm, il y a une question et on n'a pas besoin de réponse. Je vous demanderais... Parce que le temps serait pris sur celui de l'Union Nationale et il me dit qu'il n'a pas besoin de réponse. Voilà.

M. Chevrette: Question de directive, Mme le Président, s'il vous plaît!

Mme le Vice-Président: D'autres intervenants? M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Le député de Bellechasse s'est relevé. Il a posé une question en vous assurant que cela serait pris sur son propre temps. On ne me donne même pas le temps de répondre. Cela est une manoeuvre dilatoire. Vous ne devriez même pas permettre cela. S'il m'a posé une question, j'aurais pu avoir la chance de lui dire qu'il y a eu, démocratiquement, deux fois des votes majoritaires dans le domaine du porc!

Des Voix: C'est faux! C'est faux!

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Le temps file. Y a-t-il d'autres intervenants, je n'ai encore vu personne se lever?

M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Je vais tout d'abord commencer par vous dire que, ce soir, je suis extrêmement fier du travail effectué par tous les députés de l'Union Nationale sur le projet de loi 116 parce que nous avons formé une équipe réellement homogène et nous nous sommes battus avec tous les moyens que les règlementsde l'Assemblée nationale nous permettent. C'est grâce à l'Union Nationale si, au moins une fois depuis l'accession au pouvoir du Parti québécois, on a pu, pendant quelques jours, parler des problèmes agricoles du Québec. Si le ministre de l'Agriculture avait voulu accepter la demande répétée des députés de l'Union Nationale, à savoir de convoquer une commission parlementaire pour entendre les intervenants du monde agricole, je pense qu'on y aurait gagné encore beaucoup plus qu'avec le débat que nous avons tenu sur le projet de loi 116.

Le ministre de l'Agriculture, tout au cours des discussions à l'Assemblée nationale, nous avait dit: Nous présentons le projet de loi 116 tout simplement pour combler un vide juridique créé par un jugement de la Cour suprême du Canada et pour clarifier certains articles. Mais le ministre lui-même a avoué, en commission parlementaire, hier et aujourd'hui, qu'il y au au moins deux éléments nouveaux dans la loi qui n'y étaient pas. C'est l'article 1 qui dit — et je pense que c'est important que les producteurs agricoles du Québec sachent exactement ce que le ministre de l'Agriculture a ajouté dans la loi de la régie des marchés agricoles de plus que ce qui était dans le chapitre 36 de 1974 que " la présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial..." Alors, on va réglementer la production. Et l'article 3, au paragraphe a) surtout dit: "... contingenter la production, contingenter la mise en marché" — pour ceux qui savent ce qu'est la mise en marché, cela veut dire également, si on se réfère à la définition qu'il y a dans la loi, qu'on pourra contingenter la transformation, le transport, etc. — "en fixer le temps et le lieu et les prohiber..." Alors, on pourra fixer le temps et le lieu de la production et de la mise en marché et prohiber en même temps la production et la mise en marché. On ajoute également un autre paragraphe très important. Celui-là, je pense que les agriculteurs, les producteurs agricoles du Québec doivent le retenir, ainsi que les consommateurs, parce que cela a une incidence sur le prix que les consommateurs vont devoir payer les produits agricoles. Je voudrais vous souligner, Mme le Président, ce qu'on ajoute de très important: "... prévoir les conditions d'annulation, de suspension ou de réduction temporaire ou définitive, par la régie, du contingent d'un producteur en raison de la violation par lui de la présente loi, d'un plan conjoint, d'une ordonnance, d'un règlement, d'une convention dûment homologuée ou d'une décision arbitrale à condition que ce producteur ait eu préalablement l'occasion d'être entendu par la Régie".

Mme le Président, le producteur agricole et le consommateur doivent être au courant que le ministre a admis lui-même que ces pouvoirs sont des pouvoirs additionnels qui sont donnés dans la loi aux offices de producteurs. Je pense que c'est là que le producteur agricole est le plus fondamentalement touché. (21 h 20)

Le ministre de l'Agriculture a fait son lit. Il a dit qu'il était à un moment donné favorable au mouvement coopératif et également favorable au mouvement syndical. Il a même dit cet après-midi: Le mouvement coopératif et le mouvement syndical sont essentiels et nécessaires. Je suis d'accord avec le ministre de l'Agriculture sur cet énoncé, mais je trouve bien curieux que le projet de loi 116 qu'il nous présente aille exactement à l'encontre de ce que le ministre prêche dans ses paroles. Dans les actes, c'est exactement le contraire, puisque le projet de loi 116 privilégie d'une façon exceptionnelle le mouvement syndical, le syndicalisme, à l'encontre des droits des coopératives qui étaient reconnus dans la loi de 1956 de la Régie des marchés agricoles et qui ont été enlevés en 1963 par le Parti libéral du Québec.

Mme la Présidente, le Parti québécois, par l'entremise de son ministre de l'Agriculture, a fait son choix. Il demande aux producteurs agricoles de privilégier le syndicalisme et de faire disparaître les coopératives dans un avenir plus ou moins rapproché et ce, malgré la vive opposition du mouvement coopératif. Je pense que les télégrammes dont nous avons fait état à plusieurs reprises tant en commission parlementaire qu'à l'Assemblée nationale prouvent bien qu'une bonne partie du mouvement coopératif, si ce n'est tout le mouvement, est en complet désaccord avec l'adoption de cette loi. C'était également le sens de la motion de l'Union Nationale que nous avons présentée en commission parlementaire et à l'Assemblée nationale lors de l'étude du rapport parce qu'on voulait faire ajouter ce droit, on voulait faire respecter ce droit du mouvement coopératif dans la loi en disant: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative."

Mme la Présidente, l'Union Nationale s'est battue pour ces principes et ce n'est pas le député

de Joliette-Montcalm avec les petites insinuations qu'il a voulu faire dans son discours qui va nous faire changer d'idée. Nous nous sommes battus pour ce à quoi nous avons cru, c'est-à-dire la protection du producteur. Nous avons résisté le 21 décembre 1978 pour ne pas adopter immédiatement cette loi malgré que certains dirigeants de l'UPA ou des offices de producteurs ou des fédérations se promenaient à travers la province pour dire si le projet de loi 116 n'est pas adopté immédiatement, c'est la fin des plans conjoints. Si le projet de loi 116 n'est pas adopté immédiatement, le fédéral va couper les subsides. On a également résisté aux pressions de ces gens qui venaient nous voir dans nos bureaux. On a résisté parce qu'on croyait que le producteur agricole n'était plus protégé par la loi 116. Je suis fier de vous dire aujourd'hui que nous avons résisté à ces pressions et que nous avons réussi, du mieux que nous le pouvions, à faire la lumière sur ce qui se passait dans le monde agricole actuellement. Si c'était seulement cela, la contribution de l'Union Nationale cette année, faire la lumière sur ce qui se passe dans le monde agricole, sur les conflits qui existent, sur les différends qui existent, je pense que ce serait déjà un apport considérable. Nous nous sommes battus, l'Union Nationale, le député de Beauce-Sud avec nous et, parfois, le député de Shefford et je pense que nous avons bien fait de le faire. Je suis fier aujourd'hui de vous le répéter. Il y a bien le Parti libéral qui n'a peut-être pas joué tout à fait son rôle d'Opposition...

M. Goulet: II ne l'a pas joué.

M. Fontaine: ... mais cela, on le comprend...

M. Goulet: II ne l'a pas joué du tout.

M. Fontaine: ... parce qu'ils veulent s'associer avec le Parti québécois.

Des Voix: Ah!

M. Fontaine: Cela me fait rire, Mme la Présidente. J'entendais hier soir à la télévision le chef du Parti libéral...

Une Voix: Qui ça?

M. Fontaine: ... Claude Ryan, qui disait: L'Union Nationale est de connivence avec le PQ.

Une Voix: Ah, ah!

M. Fontaine: Je me suis mis à rire en entendant cela. Je me suis dit: C'est vrai qu'il n'est pas à l'Assemblée nationale, ce gars-là. Cela fait trois semaines que ses députés parlent pour le Parti québécois. Même en commission parlementaire, le député de Montmagny-L'Islet, quand le ministre était mal pris, c'est lui qui venait le déprendre. Imaginez-vous!

M. Goulet: Le 15 novembre, il lui avait demandé de voter...

M. Fontaine: Mme la Présidente, je suis fier de la lutte que nous avons menée et je vais vous citer l'opinion d'un producteur agricole du Québec qui a paru dans "La terre de chez nous", le 15 février 1979. Je pense que cela va résumer l'opinion de la grande majorité des producteurs agricoles du Québec qui travaillent dans le champ et qui comprennent la situation. Le producteur en question, M. Jean-Charles Marcil, de Carignan — je ne sais pas dans quel comté, mais le député qui est là...

Une Voix: Chambly.

M. Fontaine: ... va devoir prendre cela en considération.

M. Goulet: II ne le sait pas lui non plus.

M. Fontaine: II dit ceci: "Je me prononce contre la loi actuelle parce que cela brime mes droits, ma liberté et je ne veux pas perdre le goût de cultiver ni le goût de la terre". Je pense que cela résume notre opinion à nous également. "Si cela continue dans la même direction, on va venir me dire quoi cultiver, quand cultiver, comment cultiver et à qui vendre mes produits. Là, je pense qu'on dépasse vraiment les bornes".

M. Goulet: Exactement la loi 116.

M. Fontaine: II ajoutait: "Au Québec, on aime bien dire: la personne avant toute chose, mais depuis le 9 novembre dernier on devrait dire personne avant toute chose".

Une Voix: Très bien.

M. Fontaine: Mme la Présidente, le projet de loi 116 est contesté actuellement dans le public et je pense qu'il va continuer à l'être. Vous pouvez être assurée que l'Union Nationale va continuer sa lutte pour expliquer ce projet de loi dans les milieux agricoles, non pas pour mettre de la bisbille, mais pour bien le faire comprendre aux producteurs agricoles qui se sont fait berner par le ministre de l'Agriculture, par le Parti québécois. Ce sont les raisons pour lesquelles les députés de l'Union Nationale qui ont pris la parole cet après-midi sur l'étude du rapport de la commission ont demandé la démission du ministre parce qu'il a été malhonnête envers les producteurs agricoles du Québec. Moi aussi, Mme la Présidente, je réitère cette demande. S'il lui reste encore un peu de coeur au ventre, qu'il donne donc sa démission et qu'il donne sa place à un homme qui prendra véritablement les intérêts du producteur agricole du Québec. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Mme le Président, avant de débuter, j'aimerais vous demander combien de temps il reste à notre formation.

Mme le Vice-Président: II reste 18 minutes, M. le député.

M. Marcel Gagnon

M. Gagnon: 18 minutes. Alors, si on veut donner un droit de réplique normal à notre ministre, je ne parlerai pas trop longtemps. Je voudrais tout simplement vous dire que, moi aussi, je suis fier d'être rendu en troisième lecture de la loi 116, pas tout à fait pour les mêmes raisons que l'Union Nationale. Ayant travaillé dans le milieu agricole depuis longtemps, ayant vu naître le syndicalisme agricole, ayant travaillé à l'élaboration, à la mise en place de plans conjoints, je suis très heureux de voir qu'aujourd'hui une loi qui est attendue par la classe agricole depuis longtemps, par le syndicalisme agricole vient enfin de dire quels seront les pouvoirs, dans l'avenir, du syndicalisme agricole.

Trop longtemps, une minorité au Québec, un petit groupe, ceux qu'on appelle les dissidents, est venu faire la pluie et le beau temps à l'intérieur des plans conjoints. J'en sais quelque chose pour avoir été administrateur d'un plan conjoint. Je sais la quantité d'efforts qui ont été dépensés par les producteurs, par l'UPA, et qui ont été contrés et neutralisés par un petit groupe de gens qui servaient leur intérêt, qui servaient les intérêts de quelques personnes qu'ils protégeaient au détriment de la collectivité agricole. (21 h 30)

La loi 116 vient clarifier des points obscurs, comme disait le ministre. Ces points obscurs ont fait la joie de ces dissidents et surtout de leurs avocats, ont permis dans le passé quantité de causes devant les tribunaux, ont permis de neutraliser complètement le travail amorcé, le travail bien fait par le syndicalisme agricole, en dehors de combler le vide juridique dont on a parlé à plusieurs reprises. Je suis très heureux de voir que le projet de loi no 116 vient donner des pouvoirs et, comme mon collègue de Joliette-Montcalm, je fais suffisamment confiance à la classe agricole pour savoir qu'elle saura se servir de ses pouvoirs.

Un plan conjoint sans pouvoirs, c'est ce que l'Union Nationale espérerait pour la classe agricole. Avec le peu de confiance qu'ils font à la classe agricole, c'est ce qu'ils espéreraient. C'est un peu comme — le député de Beauce-Nord le disait — le père de famille qui ferait cadeau à son fils de 21 ans d'une automobile et, sous prétexte que c'est trop dangereux de se promener avec, ne lui permettrait pas de prendre les clés mais d'avoir tout simplement l'automobile, pour être capable de dire: J'ai été généreux, je t'ai donné une automobile, mais tu ne pourras jamais t'en servir. C'est exactement ce que l'Union Nationale aurait vouIu. A l'intérieur des plans conjoints, lorsqu'on a vu la quantité d'amendements qu'ils ont tenté de faire passer dans le projet de loi no 116, c'est de pouvoir dire à la classe agricole: Nous sommes avec vous, nous sommes pour le syndicalisme agricole mais vous ne pourrez rien faire dans l'avenir. Vous n'aurez aucun pouvoir à l'intérieur.

Cela me déçoit un peu. Cet après-midi, je parlais avec quelqu'un en dehors de l'Assemblée nationale et on tentait d'analyser la position de l'Union

Nationale dans ce débat. Quelqu'un m'a dit: Ce sont des gens qui ne sont pas sincères, plus ou moins honnêtes.

M. Grenier: C'est un autre PQ qui a dit cela.

M. Gagnon: Un autre m'a dit: Ils sont peut-être sincères mais superbement incompétents. Je leur donne le bénéfice du doute, je crois qu'ils sont sincères mais ils sont superbement incompétents. La classe agricole saura les juger. Je vous remercie beaucoup.

Mme le Vice-Président: Une minute. M. le député de Richmond.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: Oui, merci, Mme la Présidente. Très brièvement, au nom de l'Union Nationale, je veux indiquer simplement que ce qu'on a voulu au cours du débat c'est faire la lumière sur toute la question, étant donné les objections nombreuses qui venaient de la base des producteurs agricoles, tant les groupes que ceux du monde de la coopération dans le domaine agricole également. Ce qu'on doit retenir de l'ensemble de ce qui s'est passé au cours des discussions et de ce qui apparaît maintenant dans la province de Québec, c'est qu'il y a quelque chose de pas correct qui doit être mis à jour là-dedans; si on pouvait avoir encore la commission parlementaire, ces gens pourraient être entendus, au lieu de faire la sourde oreille comme le gouvernement fait actuellement. C'est simplement ce qu'on a voulu. On a rencontré d'autres producteurs aujourd'hui, des gens de l'UPA — j'en ai rencontré en bas ici — ces gens commencent à se poser des questions. Ce qu'on a essentiellement voulu, c'est faire la lumière sur une question qui apparaît maintenant, après autant d'heures de débat, pas plus claire qu'au début sauf qu'il y a beaucoup plus d'opposition que dans ce temps.

Je demande au gouvernement de reconsidérer sa position dans ce sens. Ce ne sont pas seulement les dissidents, ce ne sont pas seulement les membres des coopératives agricoles, ce n'est pas seulement la Coopérative agricole de Granby qui est contre le projet de loi, ce sont des dirigeants de l'UPA. En terminant, Mme la Présidente, je vous cite ici un télégramme reçu d'un président de l'UPAd'un comté et qui dit qu'il s'oppose au projet de loi no 116 et àce que le ministre fait actuellement. Je pense que c'est clair, net et précis et c'est la position que l'Union Nationale a voulu défendre, de faire la lumière pour que soit corrigé un projet de loi aussi injuste pour l'ensemble des producteurs du Québec...

Mme le Vice-Président: M. le député...

M. Brochu:... comme du monde de la coopération.

Mme le Vice-Président: M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Mme la Présidente, quand on écoute les députés de l'Union Nationale, on pourrait s'imaginer qu'il n'existe au Québec que des producteurs agricoles qui s'opposent au projet de loi no 116. Je voudrais participer à la valse des télégrammes; j'ai reçu des télégrammes moi aussi, ce n'est pas uniquement l'Union Nationale qui en a reçu. Je voudrais citer un télégramme que j'ai reçu récemment: "Cent délégués des institutions syndicales et coopératives agricoles de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean — syndicales et coopératives, parce que chez nous, contrairement à ce qui se passe peut-être dans certaines régions du Québec, l'entente règne entre le monde coopératif agricole et le monde syndical agricole — et représentant tous les producteurs agricoles du Saguenay-Lac-Saint-Jean réunis en assemblée consultative à Alma sous l'égide de la Fédération de l'UPA se sont prononcés unanimement en faveur du projet de loi 116 sur la mise en marché des produits agricoles. Un recul de 20 ans dans le domaine de la mise en marché ne sera pas accepté. Au contraire, les producteurs développeront davantage la coopérative et étendront les plans conjoints à toutes les productions dans les plus brefs délais. Les producteurs agricoles du Saguenay-Lac-Saint-Jean sont disposés à se rendre dans les galeries de l'Assemblée nationale et à prendre des attitudes plus convaincantes encore si nécessaire. Car à aucun prix on n'acceptera de se faire priver ou amputer d'une partie de nos outils de promotion économique". Bertrand Tremblay, président, Fédération de l'UPA du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

M. Grenier: Le beau-frère du candidat PQ à la dernière élection.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! M. Brassard: Le beau-frère de qui?

M. Grenier: Du candidat PQ à la dernière élection.

M. Brassard: II est dans mon comté. Ce n'est absolument pas mon beau-frère.

M. Grenier: Vous vérifierez. Pas le vôtre.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: Le candidat péquiste, à la dernière élection. C'était moi.

M. Grenier: Je ne parle pas du député. Je parle du candidat qui l'a précédé. En 1970. Vous vérifierez, c'est dans votre propre comté. C'est un bijoutier d'Alma.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! C'est la première fois ce soir qu'on interrompt vraiment un des députés dans son intervention. S'il vous plaît! A l'ordre, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Mme la Présidente, on a une preuve que l'Union Nationale ne suit pas beaucoup révolution du monde agricole au Québec. Le frère de l'ancien candidat péquiste de 1973 et de 1970, M. Xavier Fortin, est l'ancien président régional de l'UPA. Il ne l'est plus. C'est Bertrand Tremblay qui est maintenant président de l'UPA.

M. Grenier: Ce n'est pas de lui que je parle, vous le savez.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Mégantic-Compton!

M. Brassard: Ceci pour dire, Mme la Présidente, que les producteurs agricoles de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean veulent que l'Assemblée nationale adopte le plus rapidement possible le projet de loi no 116. C'est beau de dire qu'il y a des producteurs agricoles qui sont contre l'adoption du projet de loi, mais il faut dire aussi de temps à autre qu'il y en a — et ils sont majoritaires — qui veulent rapidement l'adoption du projet de loi 116 parce que ne pas voter ce projet de loi, Mme la Présidente, cela signifierait la disparition des plans conjoints au Québec et cela signifierait un recul — on dit de 20 ans dans le télégramme — de 30 ans pour l'agriculture québécoise. Je comprends, Mme la Présidente, que l'Union Nationale a tendance à regarder naturellement et de façon légitime vers le passé. C'est normal, c'est là que se trouvent, que se situent ses heures de gloire. Ce n'est pas dans le présent et encore moins dans l'avenir que se situeront ses heures de gloire.

Mais un gouvernement soucieux de progrès agricole et soucieux d'assurer l'avenir de l'agriculture au Québec ne peut pas se permettre de suivre le cheminement de l'Union Nationale et de sombrer avec elle dans un passé révolu et poussiéreux.

M. Grenier: Prenez votre gloire quand elle passe. Elle ne durera pas.

Mme le Vice-Président: M. le député de Shefford.

M. Verreault: Mme le Président, j'ai le regret de vous faire remarquer que le temps qui était alloué au Parti québécois est maintenant écoulé.

Mme le Vice-Président: Non.

M. Verreault: Non? Il leur reste combien de temps, madame.

Mme le Vice-Président: M. le député, ce qui vous regarde, c'est le temps qui vous reste à vous. Vous avez cinq minutes. Pour que cette Assem-

blée soit bien informée, il reste treize minutes au parti ministériel et il reste cinq minutes au député de l'Opposition officielle.

M. Richard Verreault

M. Verreault: Merci, Mme le Président. Il arrive quand même une chose. Je constate que quelquefois il m'arrive de perdre patience et de dire des choses qui dépassent ma pensée. Je suis quand même fier de constater que je ne suis pas le seul. (21 h 40)

Mme le Président, en troisième lecture, nous sommes au troisième acte, à l'acte final de ce genre de mélodrame tragi-comique. Le ministre me dira que le début de mon intervention semble ambigu et je répondrai que c'est le reflet du projet de loi no 116 dans toute son ambiguïté.

J'ai participé au débat du projet de loi no 116 depuis ses débuts et cela dure depuis près de deux mois maintenant. Les gens d'en face diront: Tiens, le député libéral de Shefford, le dissident du caucus libéral se lève pour faire niaiser les gens. Je suis fier d'être dans le Parti libéral, parce que je considère que le Parti libéral, dans cette discussion qui a été fort importante, a été un des partis les plus démocratiques. Chacun de ses membres a été capable de se prononcer dans le sens qui était le plus favorable aux agriculteurs de sa région. De part et d'autre, sans attaquer ni l'un ni l'autre des partis, il n'en arrive pas moins, Mme le Président, que, du côté ministériel, on a essayé de faire un genre de politicaillerie. Je ne voudrais pas blâmer l'Union Nationale lorsqu'elle accusait par bouts le Parti libéral de donner son appui. Il arrive que dans le Parti libéral la première et la seule préoccupation que nous avons, ce sont les électeurs et, dans le cas du projet de loi no 116, ce sont particulièrement les producteurs.

Ma dissidence au sein du Parti libéral est fort logique et fort compréhensible parce qu'en plus, peut-être, d'être le seul qui votera en troisième lecture contre le projet de loi no 116 je me sais fort quand même de l'appui de mes producteurs dans la région que je représente, le comté de Shefford, de ceux de la région des Cantons de l'Est, de la rive sud de Montréal et de tous les coopérateurs, de tous les sociétaires de la Coopérative de Granby, ce qui représente plus d'une quarantaine de comtés dans toute cette région et peut-être même plus que cela. Je me sais fort encore de l'appui de plusieurs producteurs qui se sentent dans leur for intérieur, dans leur conscience touchés et lésés par le projet de loi no 116.

Etre tous d'accord sur un projet de loi n'est pas toujours un remède efficace. Je l'ai mentionné en commission parlementaire hier au ministre de l'Agriculture. L'option que j'ai prise sur le projet de loi no 116 est personnelle. Mon caucus m'a autorisé à prendre cette position parce que mes électeurs comptaient les premiers et je me sens fort de l'appui de beaucoup de monde derrière moi. Dans le contexte, le ministre avec le projet de loi no 116 a voulu prescrire un médicament avant d'avoir même posé un diagnostic. Je suis fort de l'appui de mes collègues également...

Mme le Vice-Président: Je voudrais vous rappeler que nous en sommes à la troisième lecture du projet de loi sur la mise en marché des produits agricoles.

M. Verreault: C'est exactement ce que j'essaie de vous faire comprendre, Mme le Président. Le caucus en question a présenté par le porte-parole du Parti libéral des arguments et a émis des réserves en grand nombre. La motion de mon collègue de Maskinongé a été refusée lorsqu'on a demandé la suspension en deuxième lecture pour entendre les parties intéressées. Mon collègue de Montmagny-L'Islet a demandé que le projet de loi soit scindé. Aucune de ces demandes faites par mes collègues du Parti libéral autant que par ceux de l'Union Nationale, du PNP ou des Démocrates n'a été acceptée.

Dans les circonstances, je voterai contre le projet de loi en troisième lecture et je suis fier, quand même, d'être membre du Parti libéral.

Mme le Vice-Président: M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Mme le Président, je voudrais simplement dire que j'ai reçu également des télégrammes d'approbation et seulement des télégrammes d'approbation des cultivateurs du comté de Frontenac et j'en ai reçu plusieurs également du comté de Lotbinière.

Mme le Vice-Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Grenier: Déposez-les, ceux de Lotbinière.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Jean Garon

M. Garon: Mme le Président, on a assisté, au cours de ce débat, à une bataille de coqs, le parti de l'Union Nationale traitant le Parti libéral de club ferme du Parti québécois parce que dans le passé le Parti libéral traitait l'Union Nationale de club ferme du Parti québécois. Je dirai, comme tous les bons clubs de hockey: Le Parti québécois a plusieurs clubs fermes!

J'ai entendu le député de Rouyn-Noranda parler peu sur le fond; j'ai remarqué surtout qu'il a vu arriver la fin de ses 5 minutes avec soulagement.

J'ai entendu le député de Beauce-Sud. Attention! Comme d'habitude, il a dit: Faites attention, c'est dangereux! Il m'a dit cela lors du débat sur les petits abattoirs: Attention! Les gens dans ce secteur semblent contents. Chaque fois, le député de Beauce-Sud dit: Attention! On a l'impression à ce moment-là de ne plus pouvoir rien faire. Il n'y a plus rien à faire sauf rester dans un coin et dire: C'est dangereux, ne bougeons pas!

Nous avons décidé non pas d'avoir comme slogan politique, comme l'Union Nationale aux dernières élections: c'est le temps de décider, nous n'avons pas besoin de le dire parce que nous le faisons. C'est le temps de décider. Il y a un tas de problèmes dans le domaine agricole et il ne faut pas entretenir des chicanes inutiles. Pendant des années, l'Union Nationale, par exemple, a décidé de faire de la politique avec l'agriculture. Nous avons décidé, au lieu de faire de la politique avec l'agriculture, de faire des politiques agricoles C'est différent.

Des Voix: Bravo!

M. Garon: Les gens, pendant 20 ans, ont connu quoi? Ils ont connu des petites politiques des heures de "bull", des petites politiques d'inspecteurs, des petites "jobs", des petites "jobbi-nes", des petites niaiseries. Dans le domaine agricole, il est temps qu'on ait des politiques agricoles de développement économique. Nous avons eu, en 1978, comme résultat, que les politiques du Parti québécois commencent à montrer ce qu'elles peuvent donner. Nous sommes la deuxième province qui a eu la plus haute augmentation de revenus au Canada. C'est un record pour le Québec car nous étions toujours les derniers ou les avant-derniers. Quand on était avant-dernier, c'était parce que Terre-Neuve était avant nous. Nous sommes maintenant les deuxièmes au Canada, au point de vue de l'augmentation des revenus. En même temps, c'est au Québec que l'augmentation des prix des aliments a été la plus faible. Comme succès, mes amis, on ne peut pas faire mieux que cela!

Des Voix: Bravo!

M. Garon: Les secteurs où les prix sont les plus stables sont les secteurs où il y a des plans conjoints: le secteur du lait, le secteur de la volaille, le secteur des oeufs qui n'a à peu près pas changé de prix depuis trois ou quatre ans. Quels sont les secteurs variables? Le boeuf, où il n'y a aucun contrôle. Quels sont les secteurs qui ont coûté le plus cher aux consommateurs et qui ont le moins rapporté aux producteurs? Les secteurs où il n'y a aucune mise en marché ordonnée des produits. Que cela se fasse avec des plans conjoints, avec la collaboration des coopératives, tout cela peut se faire ensemble, mais c'est parce qu'il n'y avait aucune organisation de la mise en marché.

La bataille qu'il y a eu au cours de ce débat a été essentiellement faite par des petits politiciens qui veulent maintenir la division dans l'agriculture pour essayer de tirer leur épingle du jeu. Il y a un éditorialiste qui a vu clair. Dans la Presse de samedi dernier, M. Yvan Guay que je ne connais pas a dit: "Pourquoi repolitiser l'agriculture? L'agitation parlementaire soulevée par l'Union Nationale est donc beaucoup moins motivée par la défense de l'agriculture que par la recherche d'appuis électoraux dans les comtés ruraux qui furent jadis les châteaux forts de ce parti. Dans les belles années de l'ère duplessiste, l'agriculture n'était pas prospère, mais elle était politisée. Les politiciens actuels de l'Union Nationale sont comme des archers démunis qui font flèches de tout bois". Je pense que nous avons là exactement leur portrait.

Le député de Maskinongé a parlé pour dire quoi? Qu'on aurait dû adopter la loi plus tôt. Comme compliment, on ne peut pas faire beaucoup mieux. Au fond, on aurait dû adopter la loi plus tôt. On a voulu réfléchir sur ces problèmes, qui sont complexes, à la suite du jugement de la Cour suprême parce que c'était un jugement complexe. (21 h 50)

D'ailleurs, c'est tellement vrai qu'on m'a rapporté — ce n'est pas encore officiel, je ne voudrais pas dire cela comme une certitude — que, possiblement, l'Ontario devrait amender le projet de loi qui a été fait en 1978 parce qu'il y manque encore des éléments. Nous avons voulu aller plus lentement, avec plus de travail au point de vue juridique, parce que nous voulions être certains de ce que nous apportions.

J'ai eu droit, au cours de ce débat, à bien des insultes. On m'a traité de tous les noms, mais je vais vous dire, M. le Président, j'ai eu un plaisir malin, j'ai même joui, un certain temps, d'entendre ces épithètes. Je me rappelle toujours quand, étant étudiant, je faisais du porte-à-porte pour vendre des brosses Fuller, pour payer mes études; c'est en arrière des portes que le chien jappait le plus fort; vous regardiez quasiment en l'air pour voir arriver un monstre, et vous étiez obligé de vous pencher pour voir un petit Chihuahua. Je dirai avec un grand écrivain, M. Chesterton, que, moi, c'est moralement que j'ai mes élégances!

J'ai entendu l'Union Nationale dire que les coopératives disparaîtraient. Ecoutez. Demain va arriver, la loi va être adoptée ce soir, sanctionnée par partie dans les jours qui vont venir, mais on va regarder pour voir si les coopératives disparaissaient. Parce que, là, vous avez fait une prédiction, M. le député de Beauce-Sud, l'Union Nationale, les coopératives vont disparaître! Cela me faisait penser à avant le 15 novembre, quand la terre allait s'entrouvrir, les eaux sortir des rivières, les lacs déborder, les maisons "s'écrapoutir". Rien ne s'est passé. Vous avez souhaité le même désastre pour dire que les coopératives disparaîtraient. Je vous dis qu'à partir de demain matin je surveille pour voir si les coopératives vont disparaître. Je dois vous dire en passant que je dois aller inaugurer des agrandissements à l'Ile-Verte, à la coopérative de Rivière-du-Loup que j'ai voulu maintenir dans la région pour ne pas qu'elle devienne trop grosse, qu'il y en ait une chez les gens de Rivière-du-Loup pour qu'elle soit dans une seule amalgamation. Je dois aussi aller dans le comté de Matapédia en inaugurer une autre. Je dois également aller dans l'Abitibi pour des travaux, dans différents endroits. Parce que j'apprends que le Conseil du trésor va accepter bientôt certaines propositions. Je vais me promener un

peu partout pour participer au développement des coopératives. Je vais vous dire bien franchement, j'ai l'habitude d'entendre les gens de l'Union Nationale et leurs suppôts faire l'attaque habituelle de trop aider les coopératives. A un moment donné, je vous dis: Où suis-je exactement? Est-ce qu'on aide trop les coopératives ou pas assez? Je lisais un article dans une revue, il n'y a pas très longtemps; j'avais l'impression d'être décrit plutôt comme un homme conservateur. Je me tourne de bord et j'en vois d'autres qui m'accusent de vouloir faire une agriculture communiste. Je ne comprends plus. Je me dis qu'il y a quelque chose qui ne va pas.

M. Verreault: M. le Président...

M. Garon: Ce que nous avons voulu faire...

Le Président: M. le député de Shefford, sur une question de règlement.

M. Verreault: Combien de temps reste-t-il au ministre, encore?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, vous avez deux minutes pour tirer vos conclusions.

M. Garon: Alors, M. le Président, essentiellement, je savais que le projet de loi 116 serait un projet très facile ou un projet de loi très difficile, mais qu'il n'y aurait pas de milieu. Un projet très facile parce que les gens comprendraient qu'il était nécessaire et qu'il y aurait une adoption rapide par tous les partis, ou bien difficile parce qu'il y aurait les mêmes débats qu'il y a eu antérieurement chaque fois qu'on a ouvert la Loi de la Régie des marchés agricoles. Il y a eu un grand débat, en 1962, par exemple, je l'ai dit aujourd'hui, lorsque le premier ministe du temps, M. Lesage, a reformulé la loi de la Régie des marchés agricoles. Il avait entendu tout le monde et on lui avait dit que, s'il enlevait la troisième partie de l'article 2, les coopératives disparaîtraient. L'article 3, qui est devenu l'article 2 à cette occasion-là, lors de la refonte. J'ai l'impression que, depuis 1962, le mouvement coopératif...

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, puis-je vous inviter à tirer vos conclusions, s'il vous plaît!

M. Garon: Je termine là-dessus. Le mouvement coopératif, au contraire, a grandi à tel point qu'aujourd'hui, dans le secteur laitier, il occupe 85% du marché du lait dans le domaine industriel et plus de 50% pour le lait nature grâce à la volonté et au dynamisme des coopératives et des producteurs agricoles qui ont voulu développer leurs coopératives en même temps que leurs syndicats. Je vous remercie, M. le Président.

Des Voix: Bravo!

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! J'appelle maintenant la mise aux voix de la motion de troisième lecture de la Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Cette motion de troisième lecture sera-t-elle adoptée?

M. Biron: Non. Vote enregistré.

Le Président: Vote enregistré, M. le chef de l'Union Nationale? Qu'on appelle les députés.

Suspension à 21 h 56

Reprise à 22 h 4

Mise aux voix de la troisième lecture

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Bourassa, à l'ordre, s'il vous plaît! J'appelle maintenant le vote sur la motion de troisième lecture du projet de loi 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Est-ce que cette motion de troisième lecture sera adoptée?

Des Voix: Oui. Des Voix: Non. M. Bellemare: Qu'on appelle les libéraux.

Le Président: Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion de troisième lecture veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Cardinal, Bédard, Morin (Sauvé), Landry, Mme Cuerrier, MM. de Belleval, Johnson, Proulx, Duhaime, Tardif, Garon, Martel, Marcoux, Chevrette, Bertrand, Michaud, Rancourt, Laberge, Grégoire, Guay, Lefebvre, Laplante, Bisaillon, Mercier, Alfred, Marquis, Gagnon, Ouellette, Perron, Gosselin, Clair, Brassard, Dussault, Boucher, Beauséjour, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Lacoste, Jolivet, Lavoie, Vaillancourt (Orford), Lalonde, Mailloux, Lamontagne, Giasson, Picotte, Pagé.

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Biron, Bellemare, Grenier, Goulet, Fontaine, Brochu, Dubois, Cordeau, Samson, Roy, Verreault.

Le Président: Que ceux qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 49 — Contre: 11 — Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je crois que l'on peut maintenant procéder aux mini-débats que vous avez vous-même annoncés.

Mini-débats

Règlement des dommages causés par le saccage de LG 2

Le Président: Maintenant, nous devons, suivant les avis qui ont été donnés, procéder aux mini-débats et en vertu des dispositions de l'article 174 de notre règlement. Le premier, comme je l'avais annoncé cet après-midi, c'est celui réclamé par M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je relis l'avis de M. le député de Marguerite-Bourgeoys: "M. le Président, à la séance d'aujourd'hui, j'ai posé au premier ministre une question portant sur le sujet suivant: le règlement éventuel de la réclamation de $32 millions de la Société d'énergie de la baie James suite au saccage de LG 2, en mars 1974. Puisque je ne suis pas satisfait de la réponse donnée, je désire me prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs." C'est signé du député de Marguerite-Bourgeoys que j'invite à prendre la parole pour cinq minutes. Je vous rappelle les dispositions de notre règlement à cet égard, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Après cinq minutes, je devrai vous interrompre. M. le premier ministre, je vous rappelle également les dispositions de notre règlement — il est rare que le premier ministre soit convoqué à un mini-débat — après cinq minutes, je dois vous interrompre.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, cet après-midi, le premier ministre a admis que la Société d'énergie de la baie James est en train de régler une réclamation de $32 millions pour un montant qu'il dit ne pas connaître et ne pas vouloir connaître, mais que tout le monde sait être des grenailles, soit environ $120 000, c'est-à-dire à peu près quatre dixièmes de 1% de la réclamation de $32 millions. Le règlement de la réclamation de la population du Québec contre ceux qui ont saccagé notre baie James est allé jusqu'au bureau du premier ministre, il l'admet, mais il ne veut pas savoir pour combien la SEBJ est prête à régler.

Je dis que le premier ministre ne doit pas jouer l'autruche, se mettre la tête dans le sable quand la rumeur court partout que la SEBJ est prête à sacrifier une réclamation, qu'elle a elle-même évaluée à $32 millions, pour une croûte de pain. M. le Président, $125 000 pour une réclamation de $32 millions, cela ne fait même pas la moitié du chauffage du chantier pendant les 57 jours où il a été fermé par suite du saccage, chauffage qui a coûté $254 000. La déclaration du premier ministre cet après-midi équivaut à une irresponsabilité politique grave puisqu'il est prêt à régler à n'importe quel prix, au mépris des intérêts légitimes de la population qui, elle, devra être appelée à payer les dommages.

S'inspirant d'une impression exprimée par la commission Cliche sur l'absence de responsabilité des travailleurs en général, dans cette violence, le premier ministre déclare qu'il serait injuste de faire payer par les travailleurs membres des syndicats impliqués des montants importants, même si ces syndicats peuvent être tenus techniquement et juridiquement responsables. Or, jamais la commission Cliche n'a prétendu établir la responsabilité juridique et civile des actes dans le saccage de la baie James. Elle n'en avait pas les pouvoirs. Le premier ministre fait lui-même preuve d'irresponsabilité politique lorsqu'il s'interpose carrément dans le processus judiciaire normal en pardonnant d'avance de leur responsabilité juridique possible les défendeurs dans cette cause. (22 h 10)

Ce qu'il ne veut pas faire payer par un groupe de travailleurs membres de ces syndicats, défendeurs dans cette cause, le premier ministre est prêt à le faire payer par l'ensemble de tous les travailleurs québécois, contribuables, qui n'ont rien à faire avec ces événements. Sans s'ingérer dans le processus de décision de la cour dans cette cause, on peut dire que seulement deux raisons pouvaient justifier un règlement et cela encore faudrait-il que le montant soit raisonnable. La première raison serait que l'action n'est pas juridiquement fondée.

Or, le premier ministre lui-même a admis qu'il était normal que la SEBJ prenne action. La deuxième raison serait que les défendeurs n'ont pas les moyens de payer. Si quelques-uns, surtout des individus, sont dans cette situation, les autres ne le sont pas; ce n'est pas le cas des syndicats et en particulier d'un syndicat américain, que le premier ministre reconnaît être capable de payer les dommages dus à tous les Québécois. Mais ici le premier ministre fait une ingérence irresponsable dans le processus judiciaire. Il se substitue aux juges, à qui il ne donne même pas la chance de rendre jugement. Il dit publiquement, de son siège, sans aucune preuve documentaire, que la responsabilité de ce syndicat est aléatoire.

Jamais cette Assemblée n'a été témoin d'une ingérence politique aussi irresponsable d'un premier ministre dans une affaire de cour. Si le premier ministre veut réparer les dommages de son inconscience politique, il doit, avant que tout règlement n'intervienne, produire en Chambre tous les documents, opinions juridiques et autres qui répondront à nos questions. Autrement, l'ingérence du premier ministre dans cette affaire servira de dangereux précédent car sans préjuger d'un jugement qui peut intervenir dans cette affaire, M. le Président, personne dans cette Chambre ne veut écarter la règle qui fait que chacun est responsable de ses actes. Sinon, c'est l'anarchie, c'est le chaos. On a voulu dans cette Chambre, après un débat, faire du droit nouveau en matière d'assurance automobile et on a adopté un nouveau principe de droit, celui de la responsabilité sans faute.

Quant à moi, je ne veux pas, M. le Président, qu'au nom d'un soi-disant préjugé favorable pour les travailleurs, qui dans ce cas-ci ressemble davantage à une faveur politique sur le dos de la

population, je ne veux pas, dis-je, que ce précédent introduise dans notre droit et en particulier en matière de relations de travail le principe, la règle de l'irresponsabilité avec faute. L'absence de transparence du premier ministre qui favorise un règlement, n'importe quel règlement sur le dos des fonds publics ouvre la porte à toutes les spéculations quant aux véritables intentions et aux véritables objectifs du gouvernement surtout dans le contexte de négociations dans la fonction publique où il serait inadmissible que le gouvernement échange l'appui de certains milieux contre des droits de la population. Qu'on laisse la justice suivre son cours ou alors que le premier ministre justifie objectivement, documents à l'appui, pourquoi les Québécois devraient échanger une réclamation de $32 millions pour à peu près rien. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre, cinq minutes.

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): Oui, M. le Président. Je vais essayer de ne pas vous forcer à me rappeler et à l'ordre et à l'horloge. J'ai beaucoup aimé la façon dont le député a sans cesse parlé de la nécessité de ne pas s'ingérer, de ne pas se mêler de ce qui ne nous regarde pas, de ne pas se prendre pour d'autres. Pendant qu'il endossait les $32 millions comme si c'était du pain bénit, il se substituait au tribunal parce que les $32 millions sont simplement le montant d'une réclamation. Par ailleurs, il avançait avec une certitude absolument... J'aurais été convaincu si je ne savais pas qu'il sait encore moins que moi quels pourraient — et moi je ne le sais pas — être les termes, les modalités d'un règlement. Autrement dit, c'est bien facile de jouer avec des 0,4% quand on ne sait pas, ni d'un bord, ni de l'autre, ni le maximum, ni le minimum de ce qui va arriver. J'avoue humblement que je ne le sais pas moi non plus.

Ce que j'ai rappelé tout simplement cet après-midi, c'est que comme le premier ministre qui m'a précédé avait été consulté en 1975 pour savoir si on devait — et à ce moment, Dieu sait que c'était plus qu'indiqué — entamer des poursuites, de la même façon, on m'a demandé mon opinion purement et simplement, sans préjuger du tout des décisions qui appartiennent à la société d'énergie et au conseil d'administration de l'Hydro-Québec, on m'a demandé quel était mon sentiment.

Je l'ai dit mon sentiment. Je pense que cela vaut la peine, dans le peu de temps dont je dispose, de répéter cette attitude fondamentale du rapport Cliche, parce que je pense qu'il est bon que les citoyens — pas seulement les gens de l'Assemblée nationale ici — se rappellent ce qui a été dit aux pages 68 et 69 du rapport Cliche sur le seul groupe qui ait vraiment été au fond de cette histoire déplorable du saccage de la baie James. "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé. Il ne s'agit aucune- ment d'une réaction de masse, mais bien d'une opération montée par un noyau de mécréants, dirigés par Duhamel, pour montrer, une fois pour toutes, qu'il était le maître à la baie James." C'est la conclusion du rapport Cliche qui a passé assez de temps sous l'ancien gouvernement à étudier, justement, les tenants et les aboutissants du saccage de la baie James.

Partant de là, sachant aussi que les syndicats québécois qui sont intimés sont incapables de toute façon de payer des sommes le moindrement substantielles, j'ai donné mon sentiment. C'était que puisqu'un règlement a été demandé par quelques-uns des syndicats ou leurs procureurs au début de 1979, quant à moi, il me semblait meilleur, dans l'intérêt du Québec et d'une certaine paix sociale nécessaire — il ne s'agit pas de favoritisme politique, il s'agit de chantiers lointains où il est important que la paix règne — si un règlement était possible, de le soutenir, de l'appuyer, mais que c'est aux parties, à commencer par la Société d'énergie de la baie James qui est demanderesse là-dedans, de décider ce qu'elles veulent faire.

Maintenant, pour terminer, je rappellerai et j'apprendrai peut-être au député et à d'autres que, dans ce règlement qui n'est pas intervenu encore et qui, je l'espère, interviendra d'une façon satisfaisante, la Société d'énergie de la baie James a exigé — ce qui est parfaitement normal — que certains des syndicats québécois au moins, qui peuvent être juridiquement, techniquement impliqués, admettent leur responsabilité. Donc, si un règlement intervient, cette responsabilité, cette admission de responsabilité en fera partie. Si on va jusqu'à un jugement, il est évalué qu'il faudra au moins cinq mois d'audience, que cela coûterait au moins $2 millions de plus pour arriver exactement aux mêmes résultats, c'est-à-dire que c'est évident que la responsabilité serait acquise. A partir de là, le jugement déciderait, pas le député, ni votre serviteur, M. le Président, quels sont les dommages attribuables. $32 millions, c'est la somme de la demande. Je ne le sais pas et le député non plus. Une chose certaine, c'est qu'il y aurait eu $2 millions et peut-être plus de dépensés pendant cinq mois pour aboutir fondamentalement aux mêmes résultats, sauf, comme le rappelait le député, je l'ai dit moi-même, qu'il y a un syndicat américain qui est là. Mais ce syndicat américain, d'après les avis juridiques qui m'ont été expliqués longuement avant que je donne mon humble sentiment, cette responsabilité des syndicats américains est plus qu'aléatoire au point de vue juridique, d'après tous ceux qui ont été consultés. Par-dessus le marché, leur responsabilité réelle dans les faits — ils n'étaient là nulle part, ni au début, ni pendant, ni après la grève — n'existe pas. Moralement, ils n'ont rien à voir là-dedans.

En terminant, c'est vrai qu'en dernière analyse ce sont les citoyens du Québec qui ont payé pour ce saccage, mais qu'on ne vienne pas nous raconter que c'est une faveur politique à qui que ce soit sur le dos des citoyens que d'essayer de régler cette histoire. C'est vrai que les travailleurs, qui avaient été littéralement "Bulldozés", bouscu-

lés à ce moment-là par une "gang" de bandits, ont repris en main leur démocratie syndicale et qu'il y a une productivité et, dans l'ensemble, un climat social qui contraste actuellement drôlement avec le quasi-vandalisme institutionnalisé qui, je me permets de le rappeler, régnait sous l'ancien gouvernement. On a rattrapé des échéances qui semblaient compromises. On devance même de plusieurs mois la mise en service des premiers groupes de production d'électricité et cela économise, par ailleurs, à condition que le climat ne se gâte pas exprès, combien de millions de dollars aux Québécois! (20 h 20)

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: M. le Président, tout en reconnaissant les règles strictes des mini-débats, est-ce que le premier ministre me permettrait une courte question?

M. Lévesque (Taillon): Non.

M. Lavoie: Après l'autre mini-débat?

M. Lévesque (Taillon): Non.

M. Lavoie: Vous ne voulez pas?

Une Voix: Article 174.

Télégramme relatif au projet de loi no 116

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Nous en sommes maintenant au mini-débat réclamé par le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale. Je relis l'avis qui m'a été adressé. "M. le Président, conformément à l'article 174 de notre règlement, je désire vous aviser que je ne suis pas satisfait de la réponse que m'a donnée le ministre de l'Agriculture à une question que je lui posais aujourd'hui au cours de la période des questions concernant la teneur d'un télégramme qui lui a été envoyé par la Coopérative de Granby, le 21 décembre 1978. Je désire donc soulever ce problème de nouveau au cours d'un mini-débat en vue d'obtenir des renseignements additionnels sur cette question. Je vous remercie de votre collaboration habituelle et vous prie de croire, M. le Président, en l'assurance de mes sentiments les meilleurs." C'est signé du chef de l'Union Nationale, Rodrigue Biron.

Je vous rappelle les règles, cinq minutes. M. le ministre de l'Agriculture, je vous rappelle les règles; vous aurez droit à cinq minutes de réplique.

M. le chef de l'Union Nationale.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: J'ai questionné cet après-midi le premier ministre, mais particulièrement le ministre de l'Agriculture sur un télégramme qu'il a reçu le 21 décembre dernier du Conseil d'administration de la Coopérative agricole de Granby, signé par M. Michel Lemire, président. Je croyais avoir des réponses au cours des débats sur le dépôt du rapport et en troisième lecture. Malheureusement, le ministre a gardé le silence sur ce fait troublant, soit l'existence de ce télégramme. Je voudrais le questionner là-dessus en prenant ces quelques minutes qui me sont allouées par le règlement.

Auparavant, je lis le télégramme adressé à M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture. "Vu l'urgence de régler, dans l'intérêt des producteurs agricoles du Québec, le problème soulevé par le récent jugement de la Cour suprême du Canada, nous désirons appuyer le projet de loi no 116 uniquement en ce qui concerne les articles 2, 4, 7 et 8 et vous prions d'en assurer l'adoption avant la fin de la présente session. En ce qui a trait aux autres articles dudit projet, nous vous prions instamment de les retirer afin d'en permettre une discussion plus éclairée à la prochaine session. Le Conseil d'administration de la Coopérative agricole de Granby, M. Michel Lemire, président."

C'est un peu incompréhensible qu'on ne puisse avoir de réponses du ministre de l'Agriculture, d'autant plus que cela fait déjà deux mois que ce télégramme est rendu à son bureau. Il y a certainement une preuve d'incompétence quelque part, soit de la part du ministre ou de la part de ses technocrates autour de lui, d'autant plus que le ministre de l'Agriculture savait qu'on discutait à l'heure actuelle du projet de loi no 116 qui est relié directement à l'existence de ce télégramme.

Donc, le ministre de l'Agriculture aurait dû rencontrer le président de la Coopérative de Granby qui est la plus importante coopérative agricole au Québec. Mais, depuis le 16 décembre dernier, le ministre n'a pas parlé avec le président de la Coopérative agricole de Granby. Ce sont des faits très troublants, M. le Président.

Ce matin, à l'occasion de la commission parlementaire, le ministre a répondu à une de mes questions en disant, à propos du télégramme: "J'étais dans mon bureau, ce matin, et on m'a donné une copie du télégramme. La secrétaire m'a dit que ce télégramme était arrivé à un moment donné sur mon bureau, dans la journée du 21. Au cas où vous ne le sauriez pas, il faudrait peut-être que vous sachiez ceci: on a siégé toute la nuit". Un peu plus loin, le ministre disait tout simplement ce que m'a dit la secrétaire, à mon bureau, qui enregistre les papiers: La secrétaire m'a dit qu'à un moment donné elle a trouvé ce papier sur son bureau, mais je ne l'ai pas vu. C'est un des papiers les plus importants qui existe à l'heure actuelle au Québec, dans le débat sur la loi 116.

Les questions que je vais poser au ministre et auxquelles on n'a pas reçu de réponse à l'occasion du débat du dépôt du rapport ou de troisième lecture, il serait temps que le ministre dise la vérité et réponde à ces faits troublants pour le monde agricole. Depuis deux mois maintenant qu'il a reçu ce télégramme, que fait-il? Quand a-t-il reçu le télégramme à son bureau? A-t-il vérifié, dans le courant de la journée, depuis hier, qu'il y a un télégramme comme cela qui a été envoyé le 21

décembre dernier? A-t-il vérifié à son bureau qui a reçu le télégramme? Que s'est-il passé entretemps? Pourquoi n'a-t-il pas informé l'Assemblée nationale et la commission parlementaire, ainsi que le monde agricole, de l'existence de ce télégramme? Pourquoi le ministre n'a-t-il pas parlé avec le président de la Coopérative agricole de Granby, qui est la plus importante coopérative au Québec, dans le domaine agricole? N'est-ce pas faire preuve d'incompétence, de la part du ministre de l'Agriculture ou des technocrates à son cabinet, le fait de cacher l'existence d'un télégramme aussi important? N'est-ce pas avoir peur de faire la lumière sur tout le marché noir des quotas de lait, sur tout ce qui se passe dans le monde agricole? N'est-ce pas parce que le ministre a eu peur de faire la lumière sur ce point de vue, d'autant plus qu'un autre télégramme reçu dernièrement par le ministre de la part de la Coopérative agricole de Granby demandait une commission parlementaire sur tout le problème de l'industrie du lait? Le ministre n'a-t-il pas eu peur de la vérité, de dire la vérité, de faire la lumière? N'est-ce pas pour cela qu'il a caché l'existence du télégramme, d'autant plus qu'en se promenant autour et dans le parlement, depuis une semaine ou deux, beaucoup d'agriculteurs qui sont venus sont très déçus du ministre de l'Agriculture, d'autant plus qu'on leur fait des cachettes, qu'on ne leur dit pas la vérité?

Des agriculteurs m'ont dit aujourd'hui: On est déçu du ministre de l'Agriculture qui agit comme un gros bouffon, c'est un innocent, et toutes des choses comme cela. Je pense que les agriculteurs ont besoin d'avoir une réponse et c'est pour cela que j'ai demandé ce mini-débat ce soir. Le ministre manque de sérieux. Il a peu de contacts dans le domaine agricole et ce serait le temps ou jamais qu'il en ait un peu plus. La preuve, c'est que cela fait deux mois qu'il a un télégramme sur son bureau, cela fait deux mois qu'il n'a pas parlé avec le président de la plus importante coopérative agricole au Québec, la coopérative de Granby. Je veux avoir des réponses sur les questions que j'ai posées au ministre.

En terminant, M. le Président, je dis que le ministre a perdu la confiance des coopératives agricoles du Québec et M. le premier ministre, en faisant son remaniement ministériel, devra absolument remplacer le ministre de l'Agriculture étant donné qu'il a perdu toute la confiance de la plus importante coopérative agricole au Québec. Les agriculteurs du Québec méritent plus. Les agriculteurs du Québec méritent mieux que l'actuel ministre de l'Agriculture.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, votre droit de réplique.

M. Jean Garon

M. Garon: Oui. J'ai répondu un peu cet après-midi aux questions du chef de l'Union Nationale, le député de Lotbinière. Je vais essayer d'expliquer au mieux de ma connaissance ce qui s'est passé. Le 16 décembre, j'ai reçu deux télégrammes de la Coopérative fédérée et de la Coopérative de Granby, qui demandaient de me rencontrer pour discuter de la loi 116. Je les ai rencontrées le samedi 16 décembre. Le 18 décembre, je recevais un télégramme de la Coopérative fédérée au nom de toutes les coopératives disant qu'elle appuyait la loi 116 avec les nouveaux amendements que j'avais proposés. On m'a dit récemment qu'il y avait eu un autre télégramme le 21 décembre. Je dois dire qu'entre-temps j'avais lu dans le Coopé-rateur agricole un article d'une page qui racontait tout ce qui s'était passé, qui racontait que les différentes coopératives étaient dans mon bureau le 16 décembre, qu'elles disaient qu'elles m'avaient envoyé un télégramme le 18 décembre, un autre le 21 décembre, la Fédérée réitérant à M. Garon et au premier ministre son accord avec le projet amendé et exprimant la demande qu'il soit adopté le jour même, ce qui, malheureusement, ne fut pas le cas.

Le 21 décembre, nous étions au travail ici toute la journée. Le lendemain, nous avions une séance du Conseil des ministres où il fallait adopter certains règlements qui allaient avec la Loi sur la protection du territoire agricole. La fonction publique a quitté ses bureaux le 21, de sorte que le télégramme du 21 que dit m'avoir envoyé la Coopérative de Granby, je ne l'ai pas eu. Hier, j'ai demandé aux gens de mon cabinet de surveiller un télégramme de Granby qui devait arriver en fin de semaine; j'ai pensé que, ne l'ayant pas reçu en fin de semaine, il arriverait lundi ou mardi. Ce matin, avant de quitter mon bureau, je n'avais pas encore reçu le télégramme de la fin de semaine non plus. Le chef de l'Union Nationale avait eu l'avantage de le recevoir le 17 février.

C'est marqué dans ce télégramme qu'une copie du télex sera envoyé au ministre de l'Agriculture du Québec, M. Jean Garon, mais je ne l'ai pas reçu. Est-ce qu'il l'a envoyé par courrier? Je ne le sais pas. Je le recevrai, je suppose, demain ou après-demain. Je vous dis que j'ai fait vérifier, au ministère des Terres et Forêts, là ou arrivent les télégrammes qui nous sont acheminés par la suite. J'ai su qu'était arrivé — il faudrait que je vérifie plus amplement parce que, étant en commission parlementaire aujourd'hui, je n'ai pu vérifier — un télégramme le 21 décembre dans l'après-midi. Est-ce que c'est le télégramme de la Coopérative fédérée ou le télégramme de la Coopérative agricole de Granby? Je ne le sais pas. Sauf que ce matin, une secrétaire m'a remis un télégramme et m'a dit qu'elle l'avait retrouvé sur son bureau à un moment donné. Est-ce qu'elle l'a retrouvée après que je sois parti en vacances? Est-ce qu'elle l'a classé, que je ne l'ai pas vu? Je ne le sais pas. Tout ce que je peux dire tout simplement, c'est que je n'avais pas vu le télégramme. (21 h 30)

De toute façon, je veux dire que j'ai rencontré tout le mouvement coopératif le 16 décembre. Le mouvement coopératif, ce sont des grands garçons. Ce sont des gens qui dirigent de grandes affaires, avec des centaines de millions de dollars.

Après avoir discuté, alors que l'ensemble — non seulement l'ensemble — des gens m'eurent confirmé par télégramme le 18 décembre qu'ils donnaient leur accord au projet de loi, je ne peux pas me promener d'accord en désaccord, de désaccord en accord. A un moment donné, il faut prendre une décision et fonctionner. La Coopérative fédérée, qui est la fédération de toutes les coopératiives agricoles du Québec, m'a dit qu'elle appuyait le projet de loi. La Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom des coopératives agricoles concernées, est d'accord avec le projet de loi 116 tel que soumis à votre attention lundi matin, le 18 décembre.

Apparemment, j'en ai reçu un autre que je n'ai pas vu non plus le 21 décembre, selon l'article paru dans "Le coopérateur agricole" du mois de janvier 1979. Je ne disputerai personne pour cela. Je sais à quel point les gens au ministère ont fonctionné âprement et avec beaucoup d'énergie, sans compter leurs heures, pour le projet de loi sur la protection du territoire agricole. Je n'avais pas de raison de soupçonner que la Coopérative de Granby exprimerait publiquement son désaccord. Je savais bien que dans la région des Cantons de l'Est, un peu représentée par l'Union Nationale qui contribue à envenimer le débat, il y avait un peu...

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, je vous invite à tirer vos conclusions. Votre temps est écoulé.

M. Garon: Alors, je vous donne les renseignements tels que je les ai. Je pense que dans les circonstances, nous avons mené toutes les consultations. Nous avons consulté l'Union des producteurs agricoles, nous avons consulté les coopératives, nous avons eu des conseillers juridiques et, en commission parlementaire, nous avons apporté des amendements au projet de loi. Je pense que nous avons fait notre travail le plus consciencieusement possible, M. le Président.

Le Président: Merci. Je voudrais maintenant inviter les leaders des différentes formations politiques représentées à l'Assemblée nationale à venir assister à la sanction du projet de loi no 116, immédiatement.

Suspension de la séance à 22 h 33

Reprise de la séance à 22 h 42

Le Président: Veuillez vous lever, le lieutenant-gouverneur va maintenant faire son entrée.

Prorogation de la session M. le lieutenant-gouverneur

Le Lieutenant-Gouverneur: Mesdames et messieurs de l'Assemblée nationale, c'est la première fois depuis ma nomination que j'ai l'occasion de m'adresser à vous de façon officielle. Je désire en profiter pour vous donner l'assurance que je ne ménagerai aucun effort pour m'acquitter de mes fonctions avec l'intérêt, la discrétion et l'impartialité qu'imposent nos conventions constitutionnelles. Ma famille et moi avons été très heureux d'être appelés à participer plus étroitement au développement du Québec. L'accueil que nous avons reçu ici a été des plus chaleureux et j'en remercie bien sincèrement toute la population.

Au cours de la session qui s'achève, vous avez adopté des lois non seulement nombreuses, mais de grande importance pour l'avenir de plusieurs secteurs de notre collectivité. D'autres projets ont été déposés dont l'étude se poursuivra au cours de la session qui commencera bientôt. C'est donc dire que le travail que vous avez accompli a été considérable.

Depuis octobre dernier, vos débats sont maintenant télédiffusés. De cette façon, tous les citoyens sont en mesure de suivre vos travaux et de participer, d'une certaine manière, à vos discussion. Je suis certain que toute la population en retirera non seulement une meilleure appréciation du travail que vous accomplissez, mais une meilleure information sur la nature des problèmes qui se posent au Québec et les solutions qu'on tâche d'y apporter sur les plans législatif et budgétaire. Vous avez également reçu dans cette enceinte le premier ministre de la République française, qui a bien voulu témoigner des liens directs et privilégiés qui lient et lieront toujours la France et le Québec.

Nous sommes entrés, depuis quelques semaines, dans l'Année internationale de l'enfant. Que ce soit là l'occasion pour chacun de nous de se pencher sur les problèmes de la jeunesse québécoise aussi bien que de l'enfance à travers le monde. Du même coup, puisque l'enfant en est le symbole vivant, cela nous projettera vers l'avenir avec ses promesses à tenir et ses défis à relever. Vu l'importance de votre rôle en regard de cet avenir, je vous souhaite toute la lucidité, tout le désintéressement et tout l'esprit de décision qu'il continuera d'exiger.

Mesdames et messieurs de l'Assemblée nationale, en prorogeant aujourd'hui cette troisième session de la 31e Législature, je vous félicite de l'immense travail accompli et vous remercie au nom de tous les Québécois des efforts soutenus que vous avez mis dans l'accomplissement de vos importantes fonctions.

Le Président: Mesdames et messieurs, c'est la volonté du lieutenant-gouverneur du Québec que cette Législature soit prorogée et, en conséquence, cette Législature est prorogée sine die.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. le premier ministre.

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, on ne recommencera pas les cérémonies solennelles que nous avons eues, ces adieux qui ne furent qu'un au revoir, juste avant Noël. Je recommence-

rai d'autant moins que j'avais quelques petites notes, mais quelqu'un a fermé mon bureau, c'est déjà prorogé, je ne suis pas capable de-Tout simplement, je pense — le lieutenant-gouverneur vient de le souligner — qu'on a le droit d'être fier d'une session qui a été, je crois, parmi les plus productives depuis bien des années. Il y a eu entre 110 et 120 lois, pas mal tous azimuts, qui touchent à peu près tous les secteurs de façon importante: la Société de développement des industries culturelles dans son secteur, le congé de maternité où on rattrape un retard, Dieu sait, qui durait depuis trop longtemps, dans le domaine social — je donne seulement des exemples — la loi de l'aménagement qui va revenir devant nous bientôt. Dans le domaine économique —je pense qu'il faut le dire — sans compter bien d'autres mesures, il y a tout ce qui concerne l'agriculture. Je crois que cela a été dans un sens — en grande partie en tout cas — la session agricole, depuis la protection du territoire jusqu'à la loi 116 qui a fini par franchir les dernières étapes.

Je voudrais là-dessus simplement remercier tous les membres de l'équipe ministérielle sans oublier, bien sûr, tout l'entourage de fonctionnaires, d'adjoints qui nous ont permis de travailler à mettre au point cette production qui n'est pas sans précédent, mais qui est quand même parmi les plus notables que l'Assemblée nationale ait réussi à sortir.

Je voudrais remercier l'Opposition, les Oppositions qui, à l'occasion, nous ont aidé à améliorer ce travail, et aussi les cadres et les employés de l'Assemblée nationale, les équipes du journal des Débats et de la télédiffusion des débats et même ceux, comme on dit en anglais, du quatrième Etat qui nous surveillent comme des vautours là-bas.

Simplement, en terminant, parce que, après tout, il y a une espèce de cercle de famille, jusqu'à un certain point, qui finit par se développer à l'intérieur de cette espèce de collège — avec parfois un climat de pensionnat — qu'est l'Assemblée nationale, je voudrais, je pense au nom de tout le monde, déplorer ce qui est arrivé cet après-midi, le décès subit d'un monsieur de 64 ans qui aurait pris sa retraite dans quelques mois à peine. C'était un humble messager, un modeste messager qui travaillait pour nos amis de l'Union Nationale, M. Maurice Guay, qui s'est écroulé tout à coup dans le couloir de l'Assemblée nationale. En dépit des soins d'urgence qu'il a reçus, on a appris tout à l'heure qu'il était décédé. Je pense bien que c'est au nom de tout le monde qu'on peut offrir à la famille et à ses proches nos sympathies les plus vives, surtout dans un contexte aussi cruel où, quelques mois plus tard, il aurait eu droit à son repos. (22 h 50)

Là-dessus, il reste à ajouter pour tout le monde: Bonnes vacances! J'espère qu'elles seront d'autant meilleures qu'elles ont des chances d'être pas mal courtes.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: En général, on proroge une session en souhaitant un joyeux Noël. Vous en avez un devant vous pour vous dire que je ne comptais pas, mais c'est le premier ministre qui m'y invite, faire une deuxième fois ce court bilan de la session qui vient d'être prorogée. C'est sûr que je n'ai pas la même optique que le chef du gouvernement sur ce bilan de la session. Très brièvement, au point de vue constitutionnel — on l'a vu cet après-midi et je voudrais peut-être employer ses mots — nous sommes encore dans le fouillis, dans le maquis horizontal et vertical du gouvernement d'en face, asymétrique, comme vous voulez. Je ne sais pas si nous sommes tellement plus avancés. J'espère que la session, qui reprendra très prochainement, apportera un éclairage un peu plus précis, pas à nous de l'Opposition, mais autant aux députés ministériels qu'aux députés de l'Opposition. Il y a six millions de Québécois qui veulent savoir où ils vont et où le gouvernement va dans cette question constitutionnelle, tout simplement. Je demande au premier ministre, sur cette question, de faire peut-être un effort pour donner satisfaction à la population pour voir où son gouvernement veut la mener et l'amener à décider de son choix. Je crois que le fruit commence à être mûr.

Une Voix: Pas dans le sens qu'ils espèrent.

M. Lavoie: Je ne sais pas si les prunes du prunier du ministre des Finances tomberont du côté que vous penchez. Il y a des sondages et je fais confiance à la population du Québec. Je n'irai pas plus loin sur cette question-là. D'accord? Je fais beaucoup plus confiance à la population du Québec qu'au gouvernement d'en face.

Mon optique est différente quant au bilan de cette session dans le domaine économique. Je ne donnerai pas les chiffres qui se terminent par plusieurs zéros dans le domaine du chômage également. Nous n'avons pas recours à des actuaires pour vérifier la véracité de ces chiffres. Dans ce bilan de session, une loi a été importante — je la considère assez importante — la Loi sur la consultation populaire. J'ai participé avec mes collègues à ces débats où on devait, dans cette démocratie directe, consulter couramment, fréquemment la population sur les grandes décisions.

Le gouvernement aurait peut-être eu l'occasion, à deux reprises, de consulter la population, soit dans de grandes mesures comme le zonage agricole ou la loi 116 ou, très prochainement, sur l'aménagement du territoire. Si vous avez passé une loi 92, loi-cadre sur la consultation populaire, la démocratie directe, ne la laissez pas dans les tiroirs. Mettez-la en pratique. Vous en aurez peut-être l'occasion, c'est une loi qui a été adoptée durant la présente session. Si ce n'est pas uniquement un écran de fumée, mettez-la en pratique. Autrement, on commence à douter quand aura lieu le vrai référendum.

M. le Président, on m'a ouvert la porte. Que voulez-vous? On est ici pour se parler entre amis,

dans ce club qui s'appelle l'Assemblée nationale. On a nommé un superministre à la réforme électorale. On attend cette réforme. On sait qu'il y a des lacunes soit dans le choix des présidents d'élection, soit dans la loi 2. Le premier ministre a peut-être eu un lapsus lorsque, la semaine dernière, il nous a dit — c'est sans doute un lapsus — que dès la présente session, il apporterait un amendement pour corriger cette question. J'ai vérifié le journal des Débats cet après-midi. Je reconnais ce lapsus du premier ministre, mais je voudrais que dès la première session... Mais le journal des Débats nous dit "la présente session". J'espère que vous corrigerez, que vous ferez ce colmatage. J'espère que le ministre d'Etat à la réforme électorale, comme il l'a dit en fin de semaine, apportera des solutions pour les présidents d'élection. Si vous voulez suivre les vieilles pratiques ou quoi que ce soit, mal pratiquées, du changement, du limogeage des présidents d'élection, j'espère que vous apporterez un correctif à cela.

Dans la réforme parlementaire, M. le Président, et je termine sur ceci, il y a beaucoup de chemin à faire. Même avec cette prétendue réforme qu'on nous a promise il y a deux ans et demi en nommant un ministre d'Etat, la preuve est que nous nous retrouvons aujourd'hui, au mois de février, et que la session n'est pas encore terminée, alors que couramment, sauf très rares exceptions, elle se terminait à la fin de décembre. Octobre, novembre, pas de travaux parlementaires; une semaine avant Noël, 40 lois devant la Chambre. Nous offrons et nous allons apporter des contributions positives à cette réforme pour améliorer les travaux de l'Assemblée nationale.

En terminant, j'invite le premier ministre à permettre à nos concitoyens de Jean-Talon et d'Argenteuil d'être représentés à l'Assemblée nationale. Ce chef que nous avons et que nous respectons, qui a été choisi démocratiquement par un parti qui a fait ses preuves au Québec et qui vous énerve à l'occasion, offre sa collaboration, et sa place est ici, réservée, pour apporter une contribution dans toutes les grandes questions auxquelles le Québec doit faire face actuellement. J'espère que les élections seront déclenchées le plus rapidement possible.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, comme le premier ministre l'a dit tout à l'heure, je crois que les discours ont été assez longs pendant la session. Je me bornerai tout simplement à remercier mes collègues, les députés de l'Union Nationale, qui, je crois, ont prouvé qu'il y avait une place au Québec pour l'Union Nationale et que l'Union Nationale à l'Assemblée nationale pouvait faire un travail efficace. Je veux les remercier de leur sincérité, de leur dévouement, particulièrement sur trois projets précis sur lesquels on a forcé le gouvernement, dans le fond, à faire un peu plus de lumière. On aurait aimé en avoir davantage. Spécialement sur le projet de loi 116, sur le scandale de Marine Industrie et sur les sociétés d'Etat, ils ont fait un petit peu plus de lumière. J'aurais aimé encore plus de lumière et plus de transparence, mais on continuera, au cours de la prochaine session, à demander au gouvernement d'être encore plus transparent parce que la dernière session n'a certainement pas été la session de la transparence.

Maintenant, quant à définir une option constitutionnelle commandée par mon excellent ami, le leader de l'Opposition officielle, si je peux faire une suggestion au premier ministre pour définir son option constitutionnelle, c'est de ne pas demander l'aide du chef du Parti libéral, parce que vous allez être encore plus mêlé que vous ne l'êtes aujourd'hui.

M. Lavoie: II vous énerve.

M. Biron: M. le Président, je termine en me joignant au premier ministre pour offrir nos sympathies à la famille de M. Guay, qui était messager à l'étage de l'Union Nationale, qui était devenu, avec ces deux années, un bon ami de chacun de nos députés. J'offre, avec le premier ministre, mes sympathies à sa famille.

Je veux remercier aussi les media d'information, la télédiffusion des débats, tout le personnel, vous, M. le Président, le personnel de l'Assemblée nationale. Je crois qu'on peut dire que nous sommes très satisfaits de cette présente session.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Claude Charron

M. Charron: C'est à moi le dernier mot, M. le Président. Simplement pour signaler à tous, comme l'a laissé plus que vaguement entendre le premier ministre tout à l'heure, que j'espère que les quelques jours de répit qui s'annoncent seront agréables pour chacun puisqu'ils seront effectivement courts. C'est l'intention du gouvernement de reconvoquer l'Assemblée pour la session de 1979 le mardi 6 mars, à 15 heures, pour entendre à ce moment-là le discours inaugural de la session. (23 heures)

Je me joins à tous ceux qui ont souligné le caractère de travail qui a marqué cette session où je suis arrivé un peu en cours de route au poste que j'occupe maintenant mais qui, ai-je besoin de le souligner, a fait exactement le tour du calendrier puisque nous avons débuté le 21 février 1978 et que nous l'achevons une heure avant d'être à nouveau au 21 février mais, cette fois, en 1979. Les lois ont été nombreuses mais je crois que les débats ont été, en général, sains. S'il n'y a pas eu de réformes spectaculaires, il y a eu au moins un progrès très net dans l'attitude, je pense, au cours de cette session par rapport aux premières sessions de cette Législature qui étaient tout à fait marquées par le choc brutal du 15 novembre 1976.

Je crois que cette Législature trouve peu à peu son rythme de croisière. Tout en harmonie, en amitié, je pense qu'il se développe entre différents membres de l'Assemblée, à la grande satisfaction des citoyens, un rythme de production presque sans précédent. Je souhaite, pour celle qui nous réunira en mars 1979, au moins autant de qualité, sinon plus. Je voudrais indiquer ma satisfaction personnelle et celle, sans doute, des députés ministériels pour la façon dont nous achevons cette session. Je me souviens d'un vague 21 décembre 1978 où nous avions affirmé — nous avons tenu parole — que le projet de loi no 116 serait adopté avant la fin de la session.

Espérons tous que les retrouvailles du 6 mars prochain inaugureront pour l'Assemblée nationa- le, sous votre gouverne, M. le Président, une nouvelle étape dans la production à l'égard de nos concitoyens.

Le Président: Je voudrais, en terminant, en prorogeant cette session, simplement m'associer aux propos qui ont été tenus pour remercier les fonctionnaires de l'Assemblée nationale et surtout à ceux qui ont été tenus pour offrir des sympathies à la famille de cet employé de l'Assemblée nationale qui, en l'occurrence, travaillait pour l'Union Nationale.

Bonnes vacances, bon répit à tout le monde.

Fin de la séance à 23 h 3

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