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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mardi 13 mars 1979 - Vol. 21 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures et douze minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents.

M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Fonctionnement et évolution du commerce au Québec

M. Tremblay: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport du comité d'étude sur le fonctionnement et révolution du commerce au Québec.

Le Président: Rapport déposé.

Rapports de commissions élues

Dépôt de rapports de commissions élues. M. le député d'Abitibi-Ouest au nom de M. le député de Viau.

Application du règlement de placement dans l'industrie de la construction

M. Gendron: Qu'il me soit permis de dépoer le rapport de la commission élue permanente du travail et de la main-d'oeuvre qui a siégé les 20 et 21 février, aux fins d'examiner l'application du règlement de placement dans l'industrie de la construction.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période de questions orales. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

M. Lalonde: M. le Président, ma question devait s'adresser au ministre de la Justice, qui n'est pas encore arrivé. Je pourrais passer ma question à un autre.

M. Charron: M. le Président, le voilà. Le Président: Le voilà.

Infiltration de la SQ dans les syndicats

M. Lalonde: Le voilà. Ah bon! Le ministre de la Justice a affirmé la semaine dernière qu'à l'occasion de "l'opération public" de la Sûreté du Québec, il n'y avait aucune infiltration des syndicats ni aucune enquête sur les orientations ou allégeances politiques des syndiqués. En préambule, je dois dire que nous sommes, quant à moi, parfaitement d'accord pour que les services policiers soient le mieux renseignés possible. Des policiers renseignés évitent des réactions excessives lors des conflits. Toutefois, nous voulons que cela se fasse dans le respect le plus scrupuleux des libertés fondamentales. Je vais demander au ministre de la Justice s'il est d'accord avec ces méthodes qui ressemblent davantage à celles qui sont employées dans la lutte au crime organisé, premièrement. Deuxièmement, est-ce qu'il entend prendre des mesures énergiques pour dissiper complètement le climat de suspicion qui existe, ces jours-ci, dans ce milieu, et garantir que, dans notre Québec, il n'y a pas de liberté surveillée d'association, d'opinion politique et d'expression?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, tel que l'a mentionné le député de Marguerite-Bourgeoys la semaine passée dans des questions qu'il a posées — et la situation n'est pas changée, je puis vous le dire — j'avais assuré les syndicats qu'il n'y avait pas d'infiltration de membres de la Sûreté du Québec et c'est le cas. Il n'y a pas, non plus, d'écoute électronique. L'action entreprise par la Sûreté du Québec — ça, c'est bien clair pour les autorités policières — ne doit en aucune façon influencer les négociations de quelque syndicat que ce soit, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé et leur action n'a absolument rien à voir avec les allégeances politiques, de telle façon que, si, par erreur de jugement, les policiers s'informent sur les allégeances politiques, à ce moment-là, je crois que c'est tout simplement une erreur de jugement que je ne cautionne en aucune façon, et ça, la direction de la Sûreté du Québec le sait. Parce que j'ai dit et je répète: Non seulement nous n'accepterons pas des illégalités dans le travail de la Sûreté du Québec selon le mandat général qui lui est donné, mais nous n'accepterons pas, non plus, d'abus dans un exercice trop large de ce mandat général.

Qu'il y ait quelques erreurs de jugement de certains policiers, je pense que les policiers, comme n'importe quel individu, sont sujets à cela. L'important est que ces erreurs soient corrigées. Cela pourra peut-être nous inciter à corriger certaines lacunes qui pourraient exister dans l'action policière et, également, ça pourrait nous permettre d'apporter les correctifs nécessaires.

Personnellement, je dois vous dire que ce n'est jamais facile, l'évaluation de l'action policiè-

re à l'intérieur d'une société démocratique telle que nous sommes, dans le sens que je puis vous assurer que, personnellement, je crois, avec tous les dangers que ça comporte, qu'il est préférable de voir les forces policières agir ouvertement avec tous les risques d'erreurs que ça comporte que de le faire en cachette car, à ce moment-là, on n'a aucune possibilité de corriger quelque erreur que ce soit.

Si vous me le permettez, je m'excuse, M. le Président, d'être long, mais étant donné l'importance du sujet, j'ajouterais que depuis deux ans le climat social s'est amélioré et que la violence a diminué dans les conflits de travail, même s'il en reste encore de trop nombreux cas. A mon avis, cette amélioration de la situation est due essentiellement à deux facteurs, en plus de l'action gouvernementale. Premièrement, une plus grande prise de responsabilité de la part des syndicats et de leurs dirigeants. Deuxièmement, une amélioration de la qualité — je ne dis pas qu'il n'y a pas des erreurs qui peuvent se commettre — du travail de prévention de la Sûreté du Québec, même s'il peut y avoir certaines erreurs. Je suis bien d'accord, parce qu'on en a fait la suggestion, M. le Président, et je terminerai là-dessus, je veux bien que l'on précise les règles du jeu pour ce qui est des policiers, mais je pense que cela devrait s'accompagner et avoir en contrepartie un accroissement des responsabilités syndicales en vue d'assurer l'ordre, la paix et la sécurité publique. Je crois qu'un échange de vues entre ces parties, que ce soient forces policières, gouvernement et syndicats, pourrait être très fructueux. Je suis très ouvert à un tel dialogue afin qu'il y ait une meilleure action policière au niveau de la prévention tout en assurant un respect le plus parfait possible des libertés individuelles.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, dans la déclaration ministérielle du ministre, on ne retrouve que des affirmations, à savoir que les policiers ne sont pas censés faire ceci et cela. Est-ce que le ministre peut quand même prendre des mesures plus énergiques? Les journaux sont pleins d'exemples. Je vais en donner deux. André Poisson, journaliste à CHRC, rapportait qu'au mois de novembre le président du syndicat à Donohue, Normand Gagnon, a appris par un policier municipal de Clermont que la Sûreté du Québec possédait un dossier sur chaque officier du syndicat, dossier qui comprend, entre autres choses, des orientations politiques, la liste des plus militants. Est-ce que ce ne sont pas des fiches sur des personnes, premièrement qui ressemblent beaucoup au CAD que le ministre se vante d'avoir éliminé? (14 h 20)

Autre exemple, M. le Président. Dans le Devoir du 12 novembre, on lit ceci: Le ministre Bédard, responsable de la Sûreté du Québec, nous affirme qu'il n'y a aucune infiltration d'agents de la SQ dans les syndicats. Pas nécessairement, puisqu'au dire de M. Denis Haché, porte-parole de la Sûreté à Montréal, il arrive que la SQ ait pu se trouver nez à nez avec des agents de la GRC infiltrés dans les mêmes syndicats. Est-ce que le ministre attend qu'on lui apporte des preuves sur son bureau, ou bien s'il va prendre des mesures énergiques?

La Ligue des droits de l'homme a demandé une enquête, la CSN a demandé une enquête. Qu'est-ce que le ministre va faire? Autre chose que des palabres ici en Chambre à l'effet que les agents de la Sûreté peuvent faire des erreurs?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, les directives ont été données à la Sûreté du Québec à l'effet que l'"opération public", dont j'ai fait état au mois de novembre dernier, devait se faire simplement sous l'angle de l'information aux fins de prévenir des situations qui pourraient être potentiellement des situations de violence. Ils ont eu toutes ces directives d'une façon très précise, et je comprends qu'il y a certains exemples qui sont donnés par le député de Marguerite-Bourgeoys. Entre autres, on parlait d'un policier qui aurait approché un journaliste, aurait offert de payer aux fins d'avoir des informations; ce n'est pas le cas. Oui, il y a eu enquête, et il n'y a même pas eu besoin d'avoir enquête parce que le policier a été contacté, celui qui avait fait cette démarche, par le directeur de la Sûreté du Québec. Tout ce qui s'est passé c'est que le journaliste en question, M. Vennat, je crois, avait écrit un article concernant un conflit et le policier de la Sûreté du Québec l'a appelé pour lui demander la possibilité d'avoir certaines informations. Cela n'est pas allé plus loin que cela. Concernant un autre cas, le directeur... Maintenant, si vous me demandez si je suis d'accord sur le fait que des policiers, même dans la légalité, communiquent avec des journalistes pour avoir des informations, je vais vous dire que je ne suis pas d'accord. Je trouve carrément que c'est une erreur de jugement.

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous faites à part cela?

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, on est dans l'erreur de jugement à tour de bras et tout ce que le ministre fait ce sont des palabres. Est-ce que le ministre peut déposer les directives qu'il vient de mentionner dans sa réponse? Est-ce qu'il peut déposer en Chambre les directives à la Sûreté à l'effet que ce sont des erreurs de jugement et que le ministre n'est pas responsable? Deuxièmement, ces enquêtes, parce qu'il s'agit d'enquêtes, quand même — quand le ministre dit que le directeur a contacté le policier en question, c'est une enquête — est-ce que cela ne devrait pas être rendu public de sorte qu'on ne serait pas dans un climat de méfiance actuellement et de méconnaissance, peut-être, du dossier?

Le Président: M. le ministre de la Justice, brièvement, s'il vous plaît.

M. Bédard: M. le Président, ce ne sont pas des enquêtes. Je comprends que le député de Marguerite-Bourgeoys prend plaisir à employer le mot "enquête". Ce sont tout simplement des actions qui sont posées par la Sûreté du Québec dans le respect intégral de son mandat général d'assurer l'ordre, la paix et la sécurité dans son mandat général de faire un travail de prévention.

Je pense que cette information doit nécessairement porter sur les situations et les acteurs possibles. Le député de Marguerite-Bourgeoys et la population n'accepteraient pas que les policiers négligent cette fonction essentielle de leur travail qui est de faire de la prévention. Qu'on arrête de qualifier d'enquête le fait, pour un policier de la Sûreté du Québec, très ouvertement, d'aller voir certaines personnes, de les informer de certaines choses, très ouvertement. Il me semble que c'est une attitude beaucoup plus responsable que l'attitude de la Sûreté du Québec, auparavant, qui le faisait, mais en cachette.

M. Lalonde: Les directives.

M. Bédard: Concernant les directives, je suis surpris que le député de Marguerite-Bourgeoys, ancien Procureur général, me pose cette question, parce qu'il sait très bien que, concernant les opérations policières, s'il fallait qu'à chaque opération policière, on puisse être obligé, à la demande de l'Opposition, de déposer les directives données par la Sûreté du Québec, je me demande jusqu'à quel point le travail de la Sûreté du Québec pourrait être efficace.

Si vous insistez sur le dépôt des directives, je vais communiquer avec le directeur, parce que ces directives ne viennent pas du ministre de la Justice, comme vous le savez, elles sont données...

M. Lavoie: ... dit que c'est vous qui avez donné les directives.

M. Bédard:... ces directives, vous le savez très bien, ne faites donc pas l'hypocrite, vous le savez très bien, comme ancien Procureur général, ces directives...

M. Lalonde: M. le Président, question de privilège.

Le Président : Le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, c'est peut-être la centième fois qu'en réponse à des questions, le ministre de la Justice dit: L'ancien Procureur général le sait très bien. On veut savoir ce que le ministre de la Justice sait. Il ne semble pas en savoir beaucoup. Ce que je sais, moi, je le sais, ce n'est pas intéressant. C'est ce que vous savez, vous. Ce n'est pas moi, ce n'est pas ce que je sais qui est important. La question est posée, vous êtes ministre de la Justice actuellement.

Ma question de privilège est de m'élever contre le qualificatif d'hypocrite que le ministre a eu à mon endroit. Est-ce qu'il est hypocrite pour moi de poser au ministre une question que toute la population se pose actuellement? Même si j'avais la réponse, ce qui est important dans mon travail de député, actuellement — c'est là mon privilège — c'est d'obtenir une réponse claire du ministre sur ce qu'il sait, lui, pas ce que je sais, moi.

Le Président: M. le ministre, brièvement, s'il vous plaît.

M. Bédard: M. le Président, je répète ce que j'ai dit. Comme ancien Procureur général, le député de Marguerite-Bourgeoys sait très bien que, lorsqu'il s'agit d'une opération policière, ce n'est pas le ministre de la Justice qui rédige les directives qui doivent être suivies par les policiers à l'intérieur de cette opération. Le Procureur général a des ordres très spécifiques à donner, et il les a donnés, selon lesquels les policiers se doivent, dans toutes leurs opérations, de respecter la légalité et même de ne pas exagérer dans l'exercice d'un mandat très large qui leur est donné en vertu de la loi 29. C'est ce que nous avons fait.

Concernant ces directives spécifiques, je suis prêt à communiquer avec le directeur de la Sûreté du Québec et à lui indiquer la demande qui est faite. Personnellement, je n'ai absolument aucune objection à déposer même ces directives qui pourront permettre une bonne évaluation du cadre ou de la politique générale dans laquelle les policiers du Québec oeuvrent.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent. Poursuites contre l'Asbestos Corporation

M. Forget: Ma question s'adresse au ministre des Finances, M. le Président, relativement à la question longuement débattue de l'amiante. Que le ministre des Finances se rassure, je ne lui demanderai pas quel prix il a l'intention de payer pour les actions de General Dynamics. Il n'en est peut-être pas rendu là, d'ailleurs. Mais je vais lui demander, au contraire, si, comme on le prétend dans certains journaux et comme nous l'avons prétendu nous-mêmes il y a un an en commission parlementaire, il y a des poursuites auxquelles pourrait faire face la société Asbestos. Et, dans le cas où la réponse serait affirmative, à combien le ministre des Finances évalue-t-il le total de ces poursuites présentes ou possibles?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Effectivement, M. le Président, il y a eu des poursuites intentées, aux Etats-Unis surtout, à l'égard de la plupart des compagnies d'amiante, dont Asbestos. Je dois dire que ces

poursuites sont de nature très différente et n'ont pas le même degré de sérieux, selon les causes. Quant à évaluer le montant précis des poursuites contre la compagnie Asbestos, je dois dire que cela fait quand même plusieurs mois que je n'ai pas regardé ces montants. Je vais prendre avis de la question et je répondrai demain pour avoir un montant exact. Je n'aime pas citer des montants de mémoire, comme cela.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent. (14 h 30)

M. Forget: Est-il exact, M. le Président, que le ministre des Finances, dans l'approche ou la préparation de ces négociations ou la conduite peut-être, maintenant, de ces négociations avec la société General Dynamics veut obtenir de la part de cette société la prise en charge par elle, l'ancien actionnaire, de toutes les poursuites qui pourraient être dirigées pour des actes ou des produits vendus avant la date d'acquisition par le Québec. Dans ce cas-là, le ministre des Finances ne devrait-il pas avoir dès maintenant une évaluation du montant qu'il se propose d'offrir à General Dynamics pour assumer cette responsabilité-là?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Non, M. le Président, ces considérations-là ne sont pas intervenues directement dans les évaluations. Elles interviennent indirectement, bien sûr, dans l'évaluation des prix à venir de l'amiante, mais c'est par un biais indirect. Quant à certaines des poursuites intentées aux Etats-Unis, il faut bien comprendre que certaines d'entre elles mettent en cause directement General Dynamics dans le cas de certains — là, je parle de mémoire; j'ai pris avis de la question et j'aurai au besoin la possibilité de confirmer ou de contredire demain ou après-demain — contrats que General Dynamics a eus avec le gouvernement des Etats-Unis. Là, bien sûr, ce n'est pas Asbestos Corporation en tant que telle qui doit porter ces poursuites, mais c'est General Dynamics comme constructeur pour le compte du gouvernement des Etats-Unis.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, le ministre des Finances vient de dire quelque chose de très intéressant. On sait que l'écart des évaluations faites respectivement par le gouvernement ou plutôt pour le gouvernement et pour la société General Dynamics était, semble-t-il, basé largement sur une différence quant aux hypothèses de prix futurs auxquels se vendrait l'amiante. Le ministre des Finances ne vient-il pas d'ouvrir une porte de sortie dans ce dilemme qui l'oppose au propriétaire actuel en disant: Tout ceci se reflétera dans les prix plus élevés, plus ou moins élevés pour la fibre dans les années futures? Ne vient-il pas, en somme, de nous dire que, finalement, on va être justifié de payer un prix plus élevé que les $40 ou $42 en argumentant que, comme on devra faire face à des poursuites à l'avenir, il faut donc une marge de sécurité plus grande? Est-ce que ce n'est pas cette opération-là que vient de faire le ministre des Finances, de s'excuser d'avance d'avoir à payer plus cher que $40 ou $42?

Le Président: M. le ministre des Finances. M. Parizeau: Non, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond, question additionnelle.

M. Brochu: Question additionnelle au ministre des Finances, M. le Président.

Le gouvernement a-t-il pris connaissance de l'opinion émise par le Health Research Group, groupe très influent auprès des consommateurs, qui a indiqué tout récemment publiquement que la volonté du Québec de bâtir son avenir économique sur un produit mortel est irresponsable? Est-ce que le gouvernement du Québec entend riposter à cette affirmation qui a été faite par cet important groupe? De plus, j'aimerais demander également au ministre des Finances si on a évalué ou si on va évaluer maintenant l'impact éventuel de la campagne antiamiante, en quelque sorte, qui s'amorce actuellement sur le continent nord-américain sur le projet du gouvernement de se porter, à ce moment même, acquéreur d'une des mines d'amiante au Québec. Le ministre des Richesses naturelles a dû faire un pèlerinage en Europe, vu qu'il y a 50% de la production de la mine d'Asbestos Corporation qui vont là, pour essayer de minimiser ces effets. Il n'y avait pas cette crise qu'on connaît actuellement et qui s'amorce sur le continent nord-américain pour rejeter en quelque sorte les problèmes dus à la production de l'amiante et à l'utilisation des produits de l'amiante.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, je trouve cela assez amusant, dans un certain sens, que, d'une part, on dise: L'amiante est un produit dangereux. Le danger en est tel que la consommation devrait dans l'avenir tomber ou, en tout cas, être restreinte ou, en tout cas, monter moins que s'il n'y avait pas ce danger. D'autre part, on soutient que la compagnie qui vend les actions, General Dynamics, elle, entrevoit une augmentation du prix de l'amiante supérieure à tous les autres prix. Il y a manifestement quelqu'un qui se trompe là-dedans. Quant à savoir où en sont les études quant au risque industriel de l'amiante, je vous avouerai que je plaide une compétence extraordinairement restreinte dans ce domaine. Je vais plutôt passer la parole, M. le Président, si vous me le permettez, au ministre des Richesses naturelles, qui a longuement examiné la question.

Le Président: M. le ministre des Richesses naturelles, brièvement, s'il vous plaît!

M. Bérubé: C'est un sujet capital. Si vous me demandez de le traiter brièvement, l'information risque d'être à ce point tronquée qu'il ne vaut peut-être même pas la peine d'y répondre. Néanmoins, je pense qu'il faut souligner un certain nombre de choses. Il ne fait aucun doute que la fibre d'amiante est évidemment toxique pour l'être humain, dans la mesure où elle est respirée en forte concentration. Je ne voudrais pas déplaire à cette Assemblée, mais 92% de la croûte terrestre sont constitués de matières silicieuses qui se cristallisent en bonne part sous la forme fibreuse, et, par conséquent, nous respirons tous de la fibre d'amiante, que nous l'aimions ou non. Il s'agit d'une substance naturelle que l'on retrouve dans l'ensemble de la croûte terrestre.

Deuxièmement, il est connu que l'utilisation de la fibre d'amiante en forte concentration cause des maladies industrielles. Je pense que celles-ci sont bien connues. Il existe cependant certaines inconnues. En autant que l'amiantose est concernée, il est possible de faire échec à cette maladie par des teneurs en usine qui sont suffisamment basses. Cependant, il existe des inconnues au niveau d'autres maladies industrielles, je pense au cancer du poumon, je pense aux mésothéliomes. Cependant, M. le Président, ce qu'il appert, c'est qu'il n'existe finalement que très peu ou pas d'études épidémiologiques portant sur des populations exposées à de faibles concentrations, sauf deux études. L'une, toute récente, a été publiée l'automne dernier par le Dr Selikoff, l'adversaire même de l'amiante, qui a mené la campagne ici au Québec et qui a également mené la campagne en France. Le Dr Selikoff, après avoir étudié une population du New Jersey exposée à de fortes concentrations d'amiante pendant plus de 30 ans, en est arrivé à la conclusion qu'il n'observait aucune incidence de maladies industrielles au sein de cette population. Il en concluait donc qu'il fallait non pas bannir l'amiante, mais le contrôler. Voilà une information importante puisqu'elle est de la bouche même du Dr Selikoff.

Le Président: M. le ministre des Terres et Forêts, s'il vous plaît!

M. Bérubé: Des Richesses naturelles en l'occurrence, M. le Président.

Par conséquent, M. le Président, il ne faut pas nier les dangers que représente l'amiante, mais je pense qu'il faut les "relativer" aux autres dangers que représente la fibre de verre, qui sont présentement sous étude et où on constate que la laine minérale et la laine de verre présentent des symptômes, au point de vue des maladies industrielles, tout aussi dangereux que ceux de la fibre d'amiante, et, par conséquent, le polychlorure de vinyle également, dois-je dire, un autre substitut. En d'autres termes, M. le Président, c'est un problème universel qu'il ne faut pas négliger, mais qu'il ne faut pas non plus exagérer.

Le Président: Question principale de l'Union Nationale.

M. le député de Richmond, est-ce qu'il s'agit d'une question principale?

M. Brochu: C'est une...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Brochu: ... question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union nationale, s'il vous plaît.

Date du référendum

M. Bellemare: Ma question s'adresse à l'honorable premier ministre pour une des premières fois.

Nous avons appris avec une grande satisfaction la date du référendum. L'honorable premier ministre nous a laissé languir pendant deux ans et demi, quatre fois en 1977, six fois en 1978 et, lundi passé, enfin, on a trouvé la date du référendum.

M. le Président, dans un geste extraordinaire, il nous a annoncé que quatre mois après l'élection fédérale, après deux mois d'études en Chambre, parce qu'il y a 25 heures dans la loi 92 sur les référendums cela veut dire qu'on aura la date précise, probablement à la mi-mai 1980, si on se fie à la déclaration du premier ministre.

Ma question est celle-ci, M. le premier ministre. Après tant de tergiversations, après autant d'hésitation, quand on a perdu le goût du Québec et qu'on a pris le goût du pouvoir, je demande au premier ministre s'il a fini de nous envoyer un peu partout en disant qu'il y a une élection fédérale ou autre chose qui se passe pour ne pas nous donner la date précise du référendum. Est-ce que véritablement il n'a pas manqué son coup de ne pas faire le référendum après l'élection de 1976? Il y a bien des gens qui se disent cela. Le référendum à force d'être remis... M. le Président, ma question au premier ministre est celle-ci: Est-ce que le premier ministre a fini de traîner la population, l'économie, enfin tout le "kit" des affaires industrielles au Québec pour nous donner véritablement une sécurité? (14 h 40)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je ferai remarquer au député de Johnson, juste en passant, puisqu'il parle d'économie, d'incertitude, etc., qu'il y a eu une rencontre dont l'occasion était la remise du mémoire annuel du Conseil du patronat au gouvernement, il y a quelques jours seulement. Partant de là, des gens qui s'intéressent beaucoup au climat économique et qui cette année étaient dans un climat de dialogue avec nous disent très clairement qu'ils conçoivent à quel point il fallait une préparation, à quel point il fallait quand même qu'il y ait, à toutes fins utiles, des conditions favorables pour tenir un référendum qui soit valable.

M. Bellemare: Ce n'est pas ça qu'ils ont dit.

M. Lévesque (Taillon): Par conséquent, ils comprenaient très bien qu'il ait fallu un temps de préparation qui n'est pas terminé.

M. Bellemare: Ils ont dit que vous vous étiez amélioré un peu. Oui, n'allez pas trop loin.

M. Lévesque (Taillon): Pour revenir au coeur de la question de la date, je crois que probablement le leader parlementaire de l'Union Nationale parle de l'entrefilet qu'on vient de me montrer et qui dit que le gouvernement provincial compte attendre au moins quatre mois après les élections fédérales pour tenir son référendum. C'est cela?

M. Bellemare: Quatre plus deux, cela fait six.

M. Lévesque (Taillon): Ecoutez, je pense que la réponse est très simple et je vais revenir à des paramètres qu'on a déjà établis, c'est-à-dire des conditions minimales et maximales de temps. Le minimum, c'était au moins ce qu'on peut appeler l'hypothèque ou, enfin, l'échéance des élections générales fédérales. On a dit qu'on ne noierait pas un référendum dans des élections générales. Je pense que ce ne serait pas honnête pour personne. Donc, il faut que l'échéance électorale fédérale soit passée. Je pense que tout le monde sait, le dernier suspense se déroulant ces jours-ci, qu'il y a des chances que cette semaine ou enfin d'ici un certain nombre de jours, car on peut compter maintenant en jours et non pas en semaines, sûrement pas en mois, les élections fédérales soient déclenchées, ce qui nous mènerait quelque part au printemps, pas très loin de la fin du printemps.

Partant de là, on ne peut pas jeter une population dans un référendum en plein mois de juillet ou au mois d'août. Je crois que le député de Johnson admettra cela tout de suite. Par conséquent, il y a un minimum — je ne pense pas que j'aie employé quatre mois — cela ne peut pas être déclenché sûrement avant les derniers mois de 1979 au plus tôt, c'est-à-dire à l'automne de 1979. C'est le plus tôt. Le plus tard demeure ce qu'on a dit déjà, pas trop tard en 1980. Il ne s'agit pas d'étirer les choses pour le plaisir de la chose, c'est tout.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Une question supplémentaire, M. le Président. Dans le même article qu'il a sous les yeux, on dit que l'honorable premier ministre n'a pas voulu préciser s'il y aurait des élections en même temps que le référendum. Ma question est: Est-ce que le premier ministre peut me dire carrément: II n'y aura pas d'élection avant, pendant — après c'est sûr — mais avant ou pendant le référendum? Parce que j'ai peur des prochaines élections...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Pourtant il y en a d'autres qui auraient plus de raisons que vous d'avoir peur, mais enfin...

M. Levesque (Bonaventure): ... des élections partielles.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Levesque (Bonaventure): Ou générales, n'importe quand.

Le Président: M. le premier ministre. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, on comprend pourquoi, avec des systèmes nerveux aussi fragiles, ces gens-là n'ont pas pu se maintenir au gouvernement, ce n'est pas possible. Je ne profiterai pas de la porte presque totalitaire qu'ouvrait le député de Johnson en se demandant s'il y aurait des élections après le référendum. Je peux assurer la Chambre qu'il y en aura, mais je dois aussi dire que je ne comprends pas très bien d'où cela vient, les trois lignes que le journaliste a glissées dans son article. Cela dit: M. Lévesque a refusé de préciser s'il tiendrait des élections provinciales en même temps que le référendum. Je crois qu'il y a eu un malentendu quelque part. Cela fait 20 fois, cela va faire la 21e fois sinon la 99e qu'on répète que ni avec une élection générale fédérale, ni avec une élection générale provinciale, dans le régime actuel où il y a deux niveaux qui font des élections générales au Québec, ni avec l'une ni avec l'autre, on ne voulait noyer le référendum. Donc, on a pris l'engagement qu'il y aurait un référendum pendant le mandat du gouvernement, donc il n'y aura pas d'élections avant le référendum, et deuxièmement, le référendum ne sera pas noyé ou mêlé à des élections générales.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Ma dernière question, est-ce que le premier ministre a l'intention de faire ses cinq ans?

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, ce sont vraiment des choses ou des précédents qui vont contre la coutume qui sont en train de s'établir. On va évaluer tout ça en temps et lieu.

Le Président: M. le chef...

M. Bellemare: ... à Québec, avec M. Godbout, cinq ans, de 1939 à 1944.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef de l'Opposition, question additionnelle.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question additionnelle, que j'adresse d'ailleurs au premier ministre. Dans ce même journal, à la même date et dans la même page de l'Argus, parlant du référendum; est-ce que le premier ministre voudrait continuer ses précisions ou faire les corrections qui s'imposent, comme il vient de le faire dans le dernier alinéa de l'article en question? Je vois ici: Lévesque explique comment éviter un deuxième référendum. C'est le titre de l'article en question et on lit: Le premier ministre René Lévesque a exhorté les militants du Parti québécois, réunis en congrès régional à Boucher-ville, samedi, à clarifier l'option souveraineté-association — le premier ministre a toujours dit que c'était clair depuis dix ou douze ans — de façon à éviter la tenue d'un deuxième référendum sur cette question.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire ce qu'il entend par un deuxième référendum et comment les instances du Parti québécois pourraient éviter la tenue d'un deuxième référendum?

M. Lévesque (Taillon): Me demander de clarifier l'option souveraineté-association signifie très précisément ce que j'ai eu l'occasion de dire, ici à l'Assemblée nationale, respectant les privilèges du Parlement, dès le mois d'octobre de l'année passée dans une déclaration que j'ai faite à la Chambre; j'en enverrai une copie additionnelle au chef de l'Opposition s'il le veut. C'est une chose, une forme de vie interne que pratique le Parti québécois depuis qu'il est au monde. Dans un parti démocratique, il y a l'ajustement d'un programme politique; je parlais alors des militants qui sont en congrès d'une région à l'autre; ça s'en va à un congrès national du parti. Dans le programme du parti, il y a certaines imprécisions parce que, d'un congrès à l'autre, la démocratie interne et le jeu des délégations font qu'il y a des changements et, à l'occasion, ils ne sont pas toujours d'une clarté aveuglante, tout le monde le sait dans les partis démocratiques. Autant que possible, si le congrès le veut, démocratiquement, que le programme du parti soit clarifié de la façon dont on a essayé, au niveau du gouvernement, au niveau de l'Assemblée nationale aussi, de clarifier nos positions. Cela reste aux militants de décider et à un congrès démocratique.

En ce qui concerne la question du deuxième référendum, l'essentiel de ce qu'on a à dire, c'est ceci: Tenant compte des traditions démocratiques et aussi des intérêts très importants que nous avons en commun, le reste du Canada et nous, les deux sociétés, un oui clair, que non seulement nous souhaitons, mais auquel nous avons confiance, un oui clair et net à une question claire et nette...

M. Levesque (Bonaventure): A quelle question?

M. Lévesque (Taillon): ... au référendum permettrait à cause de ces traditions démocratiques des deux côtés, et à cause des répétitions qui se font sans arrêt, sauf chez ceux qui aimeraient bien garder le plus trembleur possible le citoyen québécois — que ce soit la commission Pépin-Ro-barts, que ce soit le premier ministre fédéral lui-même, que ce soit le discours du trône fédéral — qu'une option démocratique, claire, du Québec soit respectée. Il n'y aurait besoin ni de deuxième référendum, ni de pèlerinages à n'en plus finir. Le poids d'un oui démocratique du Québec suffira pour changer les choses. C'est cela qu'on veut.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, dernière question additionnelle.

Le Président: Dernière question, M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, le premier ministre vient de parler d'une réponse claire, nette d'un oui à la question posée. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si cette question sera aussi claire et nette que l'indépendance du Québec, oui ou non, comme l'a suggéré le mouvement de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): La question, M. le Président, sera claire, nette. Elle ne sera pas stu-pide ni simpliste et les citoyens la reconnaîtront telle quelle.

M. Levesque (Bonaventure): Ce serait stupide de demander aux gens s'ils veulent se séparer du reste du Canada! Ce serait stupide de demander si oui ou non on veut l'indépendance du Québec! (14 h 50)

Le Président: A l'ordre!

M. Lévesque (Taillon): M. le Président... Le Président: M. le député de Sainte-Marie. M. Lévesque (Taillon): Ah!

Le Président: Je m'excuse, M. le premier ministre, il n'y a pas eu de question, je crois.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je voudrais simplement...

M. Lavoie: Si c'est terminé ce côté-ci, c'est terminé de l'autre côté également.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Sainte-Marie.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est une question de privilège ou quasiment. Je crois que les interprétations du leader de l'Opposition officielle ne sont quand même pas nécessairement le mot final. Je me levais en croyant que la

dernière clameur du député de Bonaventure était un appel à une réponse. Mais je crois qu'en effet je peux m'en passer.

Mais j'aimerais quand même que quand on se lève pour répondre... J'essaie de répondre de mon mieux à ce que je crois percevoir possiblement d'interrogatif dans les interventions du député de Bonaventure. S'il n'a rien d'interrogatif et qu'il considère qu'il a eu sa réponse, je n'insiste pas.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de privilège.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, on a refusé — et vous l'avez refusé selon le règlement, j'imagine — que l'on puisse continuer ces questions et obtenir des réponses, mais, à ce moment-ci, je dis que rien ne me fait plus plaisir et ne fait plus plaisir à la population du Québec que nous puissions essayer de vider cette question et d'avoir des réponses précises du premier ministre.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle, je demande votre collaboration. Je ne crois pas qu'il s'agit là d'une véritable question de privilège. Je pense que toutes les formations politiques ont exprimé le désir, unanimement, qu'un plus grand nombre de questions puissent être formulées durant cette période assez privilégiée de l'exercice de la démocratie au Québec. C'est pour cette raison que je vais donner la parole à M. le député de Sainte-Marie.

Utilisation d'interprètes en cour

M. Bisaillon: M. le Président, ma question s'adresse au ministre d'Etat au développement culturel. Les journaux de vendredi dernier nous faisaient part d'une décision de la Cour d'appel concernant l'utilisation d'interprètes pour des témoins en cour. Le noeud de l'affaire, rapidement. Le juge reconnaît dans sa décision qu'un anglophone qui témoigne a besoin d'un interprète, mais que le francophone, pour écouter son témoignage, ne doit pas requérir les services d'un interprète pour lui traduire ce qui se dit en anglais. Il me semble, à la lecture de ce qu'on disait dans les journaux, qu'effectivement cela correspond à la lettre de la loi 101, mais que cela ne correspond pas, en tout cas à mon sens, à l'esprit de la loi 101 qui veut, au moins au niveau judiciaire, traiter les citoyens sur un pied d'égalité. Ma question au ministre, c'est: Est-ce que le ministre confirme cette interprétation et qu'est-ce qu'il entend faire face à cette décision de la Cour d'appel?

Le Président: La deuxième partie de votre question est peut-être acceptable, mais, quant à la première, il s'agit manifestement d'une demande d'opinion juridique, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: J'avais compris que le ministre aurait pu me dire que c'était une demande d'opinion juridique.

Le Président: M. le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Laurin: M. le Président, je remercie beaucoup le député de Sainte-Marie de sa question dont il m'a prévenu quelques instants avant le début de la séance.

J'ai suivi avec le plus grand intérêt ces procédures judiciaires, ainsi que le premier jugement et le deuxième jugement de la Cour d'appel, surtout en référence à la loi 101, évidemment. Il est bien évident que le législateur, lorsqu'il adopte une loi, entend adopter plutôt des principes et ne va pas jusqu'à expliciter des modalités d'application d'un principe.

Il est non moins évident que la loi 101 est bâtie sur un certain nombre de principes. Le premier, c'est que le français est maintenant la seule langue officielle du Québec, ce qui veut dire, en termes pratiques, la débilinguisation institutionnelle du Québec, c'est-à-dire que le Québec devra être désormais aussi français que l'Ontario est anglais.

Un autre principe fondamental, qui découle du premier, c'est que chaque consommateur de produits ou de services a le droit d'être servi en français, si on applique cela évidemment aux cours de justice, cela veut dire qu'il a le droit de parler en français et de comprendre les réponses qui lui sont données.

Un autre des principes, cependant, c'est que nous avons voulu respecter une pratique basée sur une sorte de respect des droits individuels. Vous aurez bien remarqué, tout le monde a remarqué que dans le chapitre sur la législation et la justice, on ne fait pas référence aux individus. On ne fait référence qu'aux personnes morales. Autant on fait obligation aux personnes morales de s'adresser en français aux cours de justice, autant on ne mentionne pas les individus, ce qui veut dire que les individus, comme témoins ou comme questionneurs, ont le droit d'utiliser la langue de leur choix. C'est la raison, d'ailleurs, pour laquelle, étant donné que la loi ne mentionne rien à ce chapitre, l'administration de la justice, elle, veut intervenir pour continuer le respect des usages.

Une dernière remarque: II faut remarquer également qu'étant donné que la loi est muette sur le sujet, nous sommes obligés, comme le juge l'a fait, de nous référer à l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui impose aux seuls Québécois un bilinguisme qui n'est plus de mise avec révolution nationale du Québec. C'est une des raisons, d'ailleurs, pour lesquelles nous considérons que dans la souveraineté, il n'y aura plus besoin d'article 133, et que cet article est caduc et désuet.

M. Bisaillon: Question additionnelle.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Une dernière question additionnelle, mais je l'adresserai, cette fois, au ministre de la Justice. Est-ce que, dans les circonstances, le ministre de la Justice entend faire quelque chose pour apporter une assistance à un citoyen francophone qui serait en état de déséquilibre par rapport au citoyen anglophone devant les tribunaux? Au-delà de la loi, est-ce que le ministre de la Justice est prêt à apporter une assistance à ces citoyens francophones?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Je vais étudier la situation. Le plus que je puis dire, pour le moment, c'est que c'est, de la part de la Cour d'appel, l'interprétation qu'elle fait de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, article que la commission Pépin-Robarts a recommandé d'abroger.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

Frais juridiques imposés à des camionneurs

M. Giasson: Merci, M. le Président. J'aurais une question à l'adresse du ministre des Transports.

Le ministre des Transports est au courant que, dans la région administrative 03, la Corporation du poste d'affectation a adopté des règlements qui permettent de charger à chacun des camionneurs couverts par ce poste des frais juridiques pour ce poste d'affectation.

Selon les informations que j'ai obtenues, il s'agirait là d'une pratique qui est tout à fait particulière au poste d'affectation 03.

J'aimerais savoir du ministre ce que le comité de surveillance qui a été créé par lui afin de suivre de près toutes les règles des postes d'affectation a pu lui indiquer à l'effet qu'un tel poste doive ou puisse se permettre de charger à chacun des camionneurs membres du poste... On sait que, dans la Corporation du poste d'affectation 03, il y a environ 1200 camionneurs. Comment se fait-il qu'on doive exiger de chacun des camionneurs un montant de $150 par année uniquement pour assumer des frais juridiques lorsqu'on sait que cette corporation possède déjà son budget annuel d'environ $115 000 qui avait été prévu au début de la dernière année et à l'intérieur desquels $115 000 il y avait déjà un montant de $12 000 prévu pour les frais juridiques qui pouvaient naître au cours de l'année?

Quel est l'avis du comité de surveillance à l'endroit de ce poste d'affection qui aurait indiqué au ministre un phénomène de telle envergure, c'est-à-dire de frais aussi élevés à chacun des camionneurs de cette région?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: Merci, M. le Président. D'abord, disons que cette question est actuellement sub judice puisque vous savez qu'il y a eu une injonc- tion qui a été demandée par des dissidents du poste d'affectation 03. Cette injonction a été refusée cependant, mais il reste que la cause doit être plaidée devant d'autres tribunaux que le ministre de la Justice ou un avocat connaît beaucoup mieux que moi.

Cependant, nous suivons de près quand même ce dossier, et ça fait suite à une question que me posait la semaine dernière le député de Rouyn-Noranda.

Ce soir, à 5 heures plus particulièrement, je rencontre un groupe de camionneurs pour discuter de tout ce problème et voir si, juridiquement, il y a lieu pour les postes d'affectation d'exiger, je dirais, de façon particulière, la somme de $150 de tous les camionneurs membres d'un poste d'affectation afin que cette somme de $150 par camionneur soit versée à une firme d'avocats qui sont en même temps conseillers juridiques pour une association bien connue. (15 heures)

M. le Président, nous regardons cela actuellement. J'ai reçu ce matin copie d'une lettre qui a été envoyée au député de Rouyn-Noranda, dans laquelle la firme concernée indique, pour le poste d'affectation no 3, qu'elle ne peut accepter d'être représentante de ce poste, tel que le demandait la résolution concernée.

Je rencontrerai les camionneurs ce soir. On va discuter du problème, mais il s'agit là d'un problème qui est actuellement sub judice.

Le Président: Alors, fin de la période des questions.

M. Giasson: Une courte additionnelle.

Le Président: Toute brève, M. le député de Montmagny-L'Islet, pour essayer de vider la question.

M. Giasson: J'aimerais d'abord savoir du ministre quels sont les commentaires du comité de surveillance qui a été créé spécialement pour examiner toutes les décisions et les façons de fonctionner de ces postes d'affectation. Quel est l'avis du comité de surveillance dans un tel cas?

M. Lessard: M. le Président...

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Lessard: ... vous comprenez que, étant donné que c'est une question qui est sub judice, il me serait quand même difficile actuellement de donner un avis juridique, d'autant plus que je ne suis pas avocat et que la cause est actuellement ou doit être plaidée devant les tribunaux.

M. Bellemare: Je voudrais...

Le Président: Fin de la période des questions.

M. Bellemare: M. le Président, je voudrais vous faire remarquer une chose. Je ne me plains pas, mais nous avons eu une seule question et une

sous-question. Comme parti, on avait préparé une question au sujet des infirmières et on n'a pas été capable de la poser. On avait fait toute une étude sur la question des infirmières qui sont ici aujourd'hui.

Le Président: Très juste, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, sauf que je vous rappelle que précisément parce qu'elles sont en commission parlementaire, l'occasion vous sera peut-être donnée de formuler les questions en commission parlementaire. Vous savez mieux que quiconque, vous, le doyen de l'Assemblée nationale, que pour une journée précise, il est très difficile à la présidence d'accorder les questions rigoureusement au prorata de votre représentation. Demain j'essaierai de me reprendre, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Je vous ferais simplement remarquer que ma question principale a été partagée presque entièrement avec le Parti libéral.

Le Président: A l'ordre! Nous en sommes maintenant aux motions non annoncées.

M. Charron: Avant, M. le Président, s'il y avait consentement, le ministre des Affaires sociales a un complément de réponse à donner à une question posée par le député de L'Acadie.

M. Bellemare: Pas tout de suite, pas tout de suite.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

Négociations sur les services essentiels

M. Lazure: M. le Président, il s'agit de la question posée par le député de L'Acadie, la semaine dernière, concernant les services essentiels. J'avais pris l'engagement de donner plus de détails aujourd'hui et il me fait plaisir d'informer cette Assemblée qu'environ 70% de toutes les unités syndicales qui sont impliquées soit dans les conventions collectives échues depuis six mois ou dans celles qui vont expirer dans six mois ont ou bien conclu une entente avec la partie patronale ou bien sont en train de négocier. Il me fait plaisir de déposer un relevé complet en date du 12 mars sur l'état des négociations des services essentiels dans le réseau des affaires sociales.

Le Président: Nous en sommes aux motions non annoncées.

Mme le député des Iles-de-la-Madeleine.

Mme Leblanc-Bantey: M. le Président, en cette journée de fièvre semi-printanière qui semble animer les membres de cette Chambre, qu'il me soit permis de soumettre à leur approbation la motion suivante: L'Assemblée nationale du Québec, consciente de l'apport économique que procure aux Madelinots la chasse au loup-marin dans le golfe Saint-Laurent, dénonce toute ingérence de quelque nature qu'elle soit visant à empêcher ces activités, déplore la violence que risque d'engendrer une telle ingérence et reconnaît au chasseur le droit de poursuivre ses activités traditionnelles dans le respect des lois.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la présentation de cette motion?

Une Voix: Non, non.

Le Président: Je regrette, Mme le député des Iles-de-la-Madeleine, il n'y a pas consentement à la présentation. Nous en sommes...

M. Levesque (Bonaventure): Un instant...

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): Oui, mais on n'a pas d'indication...

Le Président: S'il vous plaît! Vous connaissez les règles du jeu en la matière.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de privilège. Je suis bien prêt à accepter de suivre le règlement, mais, tout de même, il y a apparemment, du côté gouvernemental, des questions qui se posent; il y a, du côté de l'Opposition, des questions qui se posent. On veut savoir si réellement il y a eu des objections à ce que la motion du député soit discutée.

M. Bellemare: Le président s'est prononcé parce qu'il a eu l'intuition que c'était non.

M. Lessard: Je soulève une question de privilège, M. le Président.

Le Président: Je n'ai pas eu l'intuition, M. le chef de l'Opposition officielle. La règle, en droit parlementaire, c'est que dès que le président entend des non, à moins que ce soit contesté, il est obligé de dire, et j'ai entendu très nettement le non...

Des Voix: II n'y a pas eu de non. Le Président: Nous en sommes... M. Charron: M. le Président...

Le Président: Nous en sommes à l'enregistrement des noms sur les votes en suspens et aux avis à la Chambre.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président...

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je pense qu'il est imponant que je vous pose une question et que je vous demande des directives

parce qu'il semble y avoir un certain flottement, M. le Président, à la suite de la décision que vous venez de rendre, à savoir que vous, vous avez entendu un non. M. le Président, aujourd'hui, disons que nous allons vous faire confiance, vous avez entendu un non, le député de Johnson s'est révélé être finalement celui qui avait dit non, etc. Mais, M. le Président, je voudrais qu'à l'avenir vous puissiez statuer sur cela de façon que nous puissions savoir si réellement il y a eu un non, parce que, M. le Président, nous ne sommes pas satisfaits de cette procédure. Elle n'est pas claire. Est-ce que vous pourriez y penser, peut-être quelques heures ou quelques jours et nous dire à l'avenir de quelle façon nous allons savoir nous s'il y a eu consentement ou non?

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: ... je pense que c'est sur votre invitation et à la réunion des leaders dernièrement qu'il était question que les motions non annoncées seraient réservées uniquement à vous avec une annonce préalable de quelque dix ou quinze minutes. Nous n'en avons jamais entendu parler, nous n'avons jamais pris conscience de cette motion non annoncée et c'est vous qui nous avez dirigés de ce côté pour que les motions non annoncées soient complètement éliminées de la Chambre. C'est vous qui nous avez demandé cela. Je pense qu'on suit votre directive, surtout celle que les leaders avec le leader du gouvernement nous ont tracée. Nous nous sommes soumis à cette directive et nous la suivons.

M. Charron: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, je voudrais vous signaler qu'en la matière je pense que les trois leaders parlementaires avaient exprimé devoir réduire le nombre de motions non annoncées. Mais autant que je sache, et je n'ai ni à le déplorer ni à m'en réjouir, il n'y a eu aucune décision intervenue à cet égard.

M. le leader parlementaire du gouvernement...

M. Charron: C'est exact, M. le Président. Je ne voudrais pas que la réunion sereine que nous avons eue la semaine dernière, mon ami Greenpeace, de Johnson, était présent également à cette réunion... Je crois que nous n'avons pas ensemble assisté à la même réunion.

M. Bellemare: ... à celle-là j'y étais. Là, je suis ailleurs.

M. Charron: Je n'avais jamais pensé voir le député de Johnson devenir "peace and love" comme cela à un seul moment.

M. Bellemare: ... une motion non annoncée que vous avez refusée pour l'équipe du Canada, l'autre jour, ce n'est pas mieux.

M. Charron: Que je sache, M. le Président, elle n'a pas été refusée, elle a été adoptée.

Des Voix: Non.

M. Charron: Je parle de la semaine dernière quand le député de Mégantic-Compton... L'autre, vous savez pourquoi elle a été refusée.

Des Voix: Ah, ah!

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

Avis à la Chambre

M. Charron: Ce que j'aime surtout, M. le Président, c'est quand ils font semblant de ne pas le savoir. (15 h 10)

M. le Président, je voudrais faire motion pour que demain matin, en même temps que la Chambre se réunira aux fins de poursuivre son travail sur le discours inaugural, se réunisse à la salle 91-A la commission de la justice pour continuer d'étudier les projets de réforme du droit de la famille et qu'à la salle 81-A se réunisse la commission des affaires municipales sur le projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement.

Je fais motion également — ce sera la même motion — pour que se réunisse immédiatement et ce soir aux heures régulières de la Chambre, au salon rouge, la commission des corporations professionnelles, qui a déjà entamé son travail ce matin sur la question de la délégation des actes médicaux et infirmiers et qu'à la salle 81-A la commission de la justice se réunisse sur la réforme du droit de la famille.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lalonde: M. le Président, seulement sur le choix des salles. Ce matin à la commission de la justice on avait un nombre d'invités tel qu'à 81-A presque toutes les places étaient occupées. Si vous nous envoyez demain matin à 91, à moins que le salon rouge soit pris autrement, est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir une salle un peu plus...

M. Charron: En effet, M. le Président, je dois dire au député de Marguerite-Bourgeoys que je me suis surpris moi-même à voir que le salon rouge n'était pas utilisé demain matin. Il y a sans doute une raison. Si jamais il n'y en a pas et qu'on peut effectivement inviter les gens de la commission de la justice au salon rouge demain matin, j'en donnerai avis au cours des travaux de la journée.

Voilà, M. le Président, aussitôt dit, aussitôt fait. Demain matin, le salon rouge est occupé — j'en donne avis également à la Chambre — par la clinique annuelle de la Croix rouge...

Le Président: La Croix rouge.

M. Charron: ... pour le prélèvement de sang. J'invite tous les députés...

Une Voix: Où?

Le Président: Au salon rouge.

M. Charron: ... j'invite tous les amateurs de beigne également à se rendre au salon rouge demain matin.

Le Président: II y a tout le personnel pour commencer aujourd'hui.

M. Charron: La motion reste telle quelle.

M. Bellemare: En vertu des dispositions de l'article 34...

Le Président: Est-ce que la motion sera adoptée?

M. Bellemare: Oui. M. Lavoie: Adopté.

Le Président: En vertu des dispositions de l'article 34, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Je voudrais savoir de l'honorable leader du gouvernement, si c'est possible, s'il va y avoir plusieurs ministres absents de la Chambre demain à l'occasion du sommet économique de Montebello. Quels sont les ministres qui vont faire le yo-yo en haut et en bas? Est-ce qu'on pourrait nous donner les noms? On a ici une liste d'une quinzaine de ministres qui doivent être absents de la Chambre. L'honorable leader nous avait dit: Nous allons vous avertir d'avance parce que ce ne seront pas les 15 mentionnés là qui seront absents. Pour préparer nos questions de demain après-midi, il serait utile de connaître le nom de ceux qui seront absents.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Oui, il y a cinq ministres qui participeront, à cause de leurs fonctions, à la totalité du sommet économique; ils seront donc absents demain et jeudi. Dans la journée de demain et dans la journée de jeudi, trois autres s'ajouteront aux cinq absents; donc huit ministres à la fois. Les cinq sont: le premier ministre, le ministre d'Etat au développement économique, le ministre d'Etat au développement social, le ministre de l'Industrie et du Commerce et le ministre du Travail. A l'occasion, les ministres du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, des Transports, des Terres et Forêts et des Richesses naturelles, des Coopératives et Institutions financières — si sa santé le lui permet — de l'Education et le ministre d'Etat au développement culturel devraient, à l'une ou l'autre des journées, être absents également de la Chambre.

Fidèle à ce que j'avais dit à la Chambre la semaine dernière, j'ai invité à nouveau, au Conseil des ministres ce matin — lequel s'est réuni exceptionnellement — tous les autres à être présents. J'invite donc l'Opposition, qui sans doute collabore à la tenue de ce sommet économique, à plutôt préparer ses questions pour les poser à d'autres ministres que ceux que je viens de mentionner pour ne pas nous mettre dans la situation de simplement accuser réception des questions.

M. Bellemare: Si je comprends bien, ce sont neuf ministres sur les quinze qui étaient sur la liste qui nous a été remise. C'est seulement neuf sur quinze qui seront absents tel qu'on nous l'a signalé cet après-midi.

M. Charron: Oui, c'est ce que j'avais dit au député, M. le Président, la semaine dernière. Le député a entre les mains — c'est moi qui la lui ai remise — la liste des ministres qui sont invités. Le ministre des Finances, par exemple, y sera vendredi, plusieurs d'entre nous y seront vendredi, mais ça n'affecte en rien les travaux parlementaires.

Le Président: M. le député de Laprairie.

M. Michaud: Merci, M. le Président. Est-ce que le leader parlementaire pourrait nous informer s'il a réservé une soirée du mois de mars ou du mois d'avril pour le discours sur le budget?

M. Charron: Oui, M. le Président, le mardi 27 mars.

M. Bellemare: Normalement, les estimations budgétaires viennent une semaine avant?

M. Charron: Normalement, elles devraient venir quelques jours auparavant, mais on a des problèmes d'impression; c'est ce que j'avais dit aux députés. Cela viendra au plus tard en même temps, mais ce que nous essayons d'obtenir, c'est que ce soit quelques jours auparavant, évidemment.

Le Président: Aux affaires du jour, M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Article 1), M. le Président.

Le Président: J'appelle maintenant la reprise du débat sur le message inaugural et sur les motions de censure qui ont été formulées. La parole appartient, aujourd'hui, à M. le député de Shefford.

M. Verreault: Merci, M. le Président. Jamais un discours inaugural présenté par un premier ministre...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charron: Avec mes excuses au député de Shefford; j'ai oublié de faire mention que, à l'instant même, il avait été convenu entre les partis que

la sous-commission de l'Assemblée nationale, qui est mandatée sur la question des sociétés d'Etat et du contrôle que l'Assemblée pourrait y avoir, c'est-à-dire un représentant par parti, pourrait se réunir dès cet après-midi à la salle 101-B. Cela va? Tout le monde a été averti, je crois; je veux simplement le rappeler. Avec mes excuses, M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, je vous signale que c'est peut-être un représentant par parti, mais sans président pour cet après-midi, parce que...

M. Charron: II s'agit uniquement d'une séance de travail convenue entre les partis politiques, M. le Président.

Débat sur le message inaugural

Le Président: Très bien. Alors, avec nos excuses, M. le député de Shefford; vous avez maintenant la parole.

M. Richard Verreault

M. Verreault: Très bien, M. le Président.

Je disais tout à l'heure que jamais on n'aura entendu un discours inaugural présenté en cette Chambre par un premier ministre qui aura fait autant d'unanimité négative dans tous les milieux. Premièrement, ce discours inaugural présenté la semaine dernière par le premier ministre, tous et chacun l'ont déclaré comme étant un discours inaugural à saveur préréférendaire et référendaire et un discours qui précède un budget rempli de voeux pieux. Cette unanimité, nous la rencontrons chez les syndicats qui l'ont qualifié de réchauffé. Nous rencontrons également cette unanimité chez les patrons qui l'ont qualifié de sans valeur et ridicule. Les éditorialistes, les éditoriaux, les media d'information l'ont surnommé le supermarché préréférendaire, et les Oppositions dans cette Chambre l'ont qualifié de plusieurs épithètes que je ne répéterai pas, parce que ce discours manque d'une totale sincérité.

M. le Président, cette unanimité va même au-delà de toutes les Oppositions et de toutes ces gens. Nous l'avons même dénotée chez les membres ministériels du gouvernement péquiste. La semaine dernière, nous avons eu l'avantage d'entendre les députés de Drummond et de Verchères qui, pendant la période qui leur était allouée — les 30 minutes — n'ont fait que nous parler d'égal à égal en ignorant complètement le contenu même du discours inaugural. Aucun député ministériel ne s'est levé pour vanter les grands mérites de ce discours inaugural, ce qui veut dire, en somme, que tous les Québécois, tous les membres de cette Assemblée sont d'accord sur le fait que ce discours est un discours préréférendaire et à saveur référendaire. (15 h 20)

De toute façon, pour faire un bref résumé, dans le discours inaugural, on a voulu une chose: faire plaisir à tout le monde. On est six millions. Il faut se parler. Et on a voulu faire plaisir aux six millions d'individus ou aux six millions de Québécois dans cette province. En effet, on a voulu faire plaisir aux agriculteurs parce que, d'une part, tel que le mentionne le discours inaugural, nous allons inclure les agriculteurs dans le programme OSE, et nous allons présenter au cours de cette session des lois dont une aura une relation avec les banques de sol, et la seconde aura pour effet d'empêcher la mainmise des non-résidents sur les terres agricoles du Québec.

Tous savent que l'Opposition libérale, lors de l'étude de la loi 90 sur la protection du territoire agricole, a fait maintes et maintes représentations pour faire en sorte que ces deux lois qu'on se propose de présenter soient présentées dans les plus brefs délais possible. On ne peut pas faire la protection du territoire agricole sans ces deux projets de loi.

Donc, on a voulu faire plaisir aux agriculteurs en leur présentant ce sur quoi nous, les libéraux, avons insisté depuis des mois et des mois. On a également voulu faire plaisir aux jeunes travailleurs puisqu'on va inclure dans le futur programme OSE une somme d'environ $20 millions pour essayer de créer des emplois parmi les jeunes travailleurs de 18 à 25 ans. Vous savez, il est facile de comprendre que les jeunes travailleurs de 18 à 25 ans, c'est lourd quand ils ne travaillent pas. On sait pertinemment que l'oisiveté est la mère de tous les vices. Evidemment, on est quand même loin, dans le discours inaugural, de détecter les fameuses promesses du Parti québécois qui promettait aux finissants, aux jeunes travailleurs des emplois à ne plus finir et toutes sortes de choses. M. le Président, vous savez que nous aurons une quantité considérable de jeunes travailleurs qui seront même des professionnels dès les mois de mai et juin prochains. Ces jeunes étudiants seront sans travail et c'est vraiment malheureux.

M. le Président, on a voulu également passer le suçon aux employés de la construction. Dans le discours inaugural, on n'est pas encore fixé. On parle d'injecter de $100 millions à $150 millions et on parle d'une accélération dans la construction. Je ne crois pas que les Québécois soient naïfs à ce point, parce que cela fait trois ans qu'on entend la même rengaine, cela fait trois ans qu'on parle d'accélérer. Je prends à témoin les gens de mon comté, le comté de Shefford. Cela fait trois ans qu'on leur parle d'habitation à loyer modique. Cela fait trois ans qu'on leur parle de centres d'accueil. Cela fait trois ans qu'on n'a rien. A tous les ans, c'est la même chose. L'an passé, ce qui est le plus fantastique, le premier ministre, pour stimuler l'économie au Québec, avait proposé de stimuler l'économie et la construction en construisant et en ouvrant des magasins de la Régie des alcools. C'est le genre de stimulation économique que le gouvernement actuel est capable de nous proposer.

En plus, il a fait plaisir aux industriels parce qu'on parle de faire une certaine promotion aux exportations afin de promouvoir, dans le contexte actuel, tous les produits québécois à l'étranger.

On a également voulu faire plaisir aux petits commerçants. Il y en a 15 000; ce n'est pas une quantité négligeable. On a l'intention de protéger ceux qui ont des franchises, tel que le discours inaugural l'indique. On n'a pas oublié les coopératives. Pour les coopératives, on a l'intention de leur accorder plus de capital de risque, mais tout récemment nous avons voté une loi, la loi 116, qui entrave fort étrangement les coopératives agricoles au Québec.

Dans le domaine touristique, parce que c'est la seconde industrie importante au Québec, on a l'intention de créer un régime de crédit. On n'a pas oublié les pêcheurs. Nous avons l'intention d'élargir les subventions. Les forestiers, c'est encore une quantité qu'il ne faut pas oublier. Nous allons créer un fonds forestier.

Maintenant, il fallait quand même penser aux artistes parce que parfois c'est intéressant de les avoir de son côté. Dans le domaine culturel, si on le prend dans son ensemble général, on a l'intention de fonder une société de développement des industries culturelles. La trouvaille du siècle! De plus, on a l'intention de présenter une loi sur l'industrie du livre. On a pensé également aux hommes de science, aux spécialistes de la recherche et du développement scientifique; on leur promet un autre livre vert pour le printemps prochain.

M. le Président, on n'a même pas oublié les séparatistes, les indépendantistes... C'est tellement difficile à prononcer, je vais le dire: les arriérés. On leur offre même les cadres d'une association économique au cours de cette session.

Vous savez, les femmes, on en parle dans le budget; elles représentent un peu plus de 50% de la population québécoise. Le premier ministre nous a dit: Nous allons porter une attention tout à fait particulière et spéciale au rapport qui nous a été présenté en cette Chambre, qui porte le nom "Egalité et indépendance". M. le Président, vous savez fort bien que si ce rapport avait été titré de manière différente, s'il n'avait pas porté le titre "Egalité et indépendance", le Parti québécois, le gouvernement, ainsi que son premier ministre ne se seraient sûrement pas bâdré avec ce rapport. Ce qui est le plus amusant, c'est que pour un discours inaugural tel qu'il nous est présenté, le gouvernement actuel se porte au secours de la veuve et de l'orphelin. On n'a pas voulu oublier les petits salariés; nous allons leur accorder un supplément du revenu. On va commencer d'abord avec les couples avec enfants et nous allons continuer avec les familles monoparentales.

Il y a une autre catégorie qu'on rencontre dans le discours inaugural. On parle des personnes âgées. On a l'intention d'accorder des subventions aux clubs de l'âge d'or. Pourtant, si on avait mieux connu les problèmes des personnes âgées au Québec, on aurait eu à proposer des choses beaucoup plus intéressantes et importantes que ce qu'on trouve actuellement dans le discours inaugural.

Pour les jeunes, les étudiants, en plus des $20 millions qu'on doit injecter dans le programme OSE, on décide que si cela ne marche pas, on allongera d'un an les études, de façon à les garder plus longtemps à l'école; ainsi, pendant un an de plus, on aura la paix! On n'a pas oublié les parents, parce qu'il ne faut oublier personne dans un discours inaugural, surtout à saveur préréférendaire. On va les consulter, M. le Président, de certaine manière, dit-on dans le discours inaugural, et on va leur faire jouer un rôle. Cela, c'est du réchauffé, parce que depuis trois ans, dans le discours inaugural, on a toujours la même intention de faire jouer un rôle aux parents, et ce sont toujours les derniers, les plus ignorés.

On n'a pas oublié les professionnels, non, ni les dentistes, parce qu'on a l'intention de donner la gratuité dentaire aux adolescents jusqu'à l'âge de 14 ans, bien que le programme du Parti québécois prévoyait à l'époque que les soins dentaires se donneraient jusqu'à l'âge de 18 ans.

On n'a pas oublié les handicapés, non, non. On va accorder une allocation aux handicapés, de sorte que les parents les gardent plus longtemps à la maison. Mais, M. le Président, quand on parle de handicapés, on oublie complètement que pour revaloriser cette catégorie de gens, il ne faut pas les garder à la maison en fournissant des allocations aux parents, mais les occuper soit par des loisirs ou par un travail. Il y a un problème énorme dans le domaine des handicapés; les ateliers protégés fonctionnent moins que bien, plutôt mal, et au niveau des loisirs pour cette catégorie de personnes qui sont des Québécois à part entière — il ne faut pas l'oublier — le discours inaugural ne prévoit absolument rien.

En ce qui concerne les professeurs et les commissions scolaires, on a l'intention de donner un meilleur enseignement, une meilleure qualité d'enseignement. On a l'intention aussi d'inventer une école plus insérée dans le milieu. Si on consulte le domaine scolaire, on dira: Ecoutez, c'est de la foutaise parce que cela ne veut absolument rien dire.

On n'a pas oublié Radio-Québec, M. le Président, ni les téléspectateurs, parce qu'on a besoin de continuer la propagande préréférendaire; on a l'intention de multiplier les communiqués, les messages télévisés, etc. On va donner une nouvelle orientation à Radio-Québec, ce qui signifie, en d'autres mots, faire une mainmise du Parti québécois et du gouvernement pour mieux contrôler Radio-Québec et pour faire une meilleure propagande. (15 h 30)

On a encore les fonctionnaires; il ne faut pas les oublier, il y en a encore quelque 100 000. Face aux négociations, on leur fait du chantage: Vous, messieurs, vous devez vous serrer la ceinture. Nous les ministres, nous nous sommes largement graissés, nous avons eu de bonnes augmentations. Maintenant, il faut que les budgets soient proportionnels. Il faut couper les dépenses du gouvernement. Mais il ne faut jamais couper la publicité, la propagande que fait ce gouvernement. Les locataires, on ne les a pas oubliés. On

va présenter une loi instituant la Régie du logement, un autre organisme qui sera sous la tutelle du gouvernement, une autre ingérence. Mais quand va-t-on, M. le Président, s'occuper également, en plus du petit locataire, des petits propriétaires qui sont actuellement surtaxés? Les consommateurs — nous sommes six millions au Québec — le discours inaugural y fait allusion; on va leur offrir la Loi sur les biens immobiliers.

Les sportifs, il y en a quelques-uns encore. Le slogan dit: Un esprit sain dans un corps sain. Cette fois-ci, nous allons leur offrir un livre blanc sur les loisirs. Donc, ils se feront du muscle tout en lisant le livre blanc. On parle également des naturalistes parce qu'on a l'intention de créer un véritable ministère de l'environnement, ce qui veut dire, en d'autres mots, M. le Président, que le ministre actuel est un incompétent. La preuve, sûrement, nous l'aurons bientôt par une démission ou encore une mutation du ministre actuel à un autre ministère. On a même pensé, M. le Président, aux Anglais, aux minorités. Nous avons l'intention de faire un mini-sommet pour les minorités; en somme, un mini-suçon aux milieux anglais et aux minorités. Aux municipalités, on va offrir une salade formidable. Nous allons leur donner une loi qui est attendue depuis bientôt deux ans et demi, la loi sur l'aménagement et l'urbanisme et je n'ai aucun doute que ce sera le ministre de l'Agriculture qui sera le parrain de cette loi, tel que nous l'avons vu pour le projet de loi 90.

En plus, on leur promet une réforme de la fiscalité et nous allons voir bientôt la naissance des comités de quartier et une réforme électorale municipale. Cela, M. le Président, en résumé, c'est le gros suçon, mais défense de croquer dedans. Juste un petit coup de langue, pas plus, pas moins. Tout cela, M. le Président, ce sont de vrais bons voeux, des voeux de Noël, des voeux de Pâques, des voeux de Bonne Année et des bons voeux pieux, surtout. Tout cela, M. le Président, pour vendre un impossible oui. Tout cela pour endormir les Québécois et vendre la pilule référendaire. Tout compte fait, M. le Président, si on fait un calcul, le discours inaugural contient environ 73 mesures. Dans le domaine économique, on en retrouve quinze. En ce qui concerne la qualité de vie des personnes, on en retrouve 51. Quand on parle des institutions démocratiques, on en rencontre 7. Cela fait un total de 73. Quand on fait un bilan extravagant, M. le Président, on se ramasse avec six nouvelles sociétés d'Etat qui seront tout autant déficitaires que toutes les autres que nous avons actuellement. Le seul avantage que nous aurons avec ces sociétés d'Etat sera de créer des postes intéressants, des emplois pour les petits amis. Pourtant, on en a créé quelques-uns depuis deux ans et demi. Cela n'a pas été suffisant. Il reste probablement encore des petits amis du parti. Tous ces postes vont être créés avec l'argent des Québécois.

Dans le discours inaugural, on ne rencontre aucune des mesures innovatrices qu'on rencon- trait à l'époque dans le programme du Parti québécois. En somme, c'est la même salade, les mêmes mesures qu'on a vues en 1977, en 1978 et qu'on représente avec des changements de mots, de termes, de vocabulaire en 1979. En somme, c'est un discours à répétition. Si on avait lu le discours de 1977, cela aurait donné exactement la même chose. Je comprends, d'une part, que les "back-benchers" péquistes soient tant silencieux sur le discours inaugural.

Cela fait déjà deux ans et demi près que j'écoute les interventions qui sont faites de l'autre côté, les interventions de votre droite, M. le Président, je dois quand même affirmer que le gouvernement s'ajuste aux époques actuelles. C'est cela, il s'ajuste en changeant les termes et en les maquillant, et tout cela en fonction de la vaste cam-page référendaire et préréférendaire. La nouvelle formule du Parti québécois et du gouvernement actuel est la suivante, M. le Président, si vous ne la savez pas: Changeons les termes qui ont une saveur méchante et disgracieuse, comme patronage et favoritisme; appelons cela plutôt promotion ou bénévolat — le premier ministre nous disait cela le mois passé — et compétence égal à égal. Ajoutons six nouvelles sociétés d'Etat plus des commissions de toutes sortes, des comités d'étude et un paquet de choses semblables. Nommons les petits amis du parti et des ex-candidats pour éviter de prendre les responsabilités. Utilisons les termes "ordinateur, loto étudiante et fichier". On sait que les ordinateurs sont programmés par le gouvernement, et quand on connaît le gouvernement on sait de quelle manière la programmation se fait.

Faisons disparaître les méchantes caisses occultes, M. le Président. Vendons de la publicité aux personnes morales, aux compagnies, aux fournisseurs du gouvernement sous la noble représentation de bénévolat. Accusons les fédéraux d'à peu près tous les maux de la terre, et cela, à tout prix. Vendons par des slogans une fausse publicité, l'indépendance politique et économique, mettons-y une forte dose de fierté et de nationalisme. Faisons de la publicité avec l'argent des Québécois. Accordons des contrats à coups de millions aux petits amis, comme cela se fait depuis quelques années, sous la protection d'un fichier. Inondons la télévision et les journaux à coups de millions, toujours sur le dos des Québécois. Négligeons de créer des emplois, ayons plus de grèves, plus de chômage, ne faisons pas face aux vrais problèmes, laissons quitter les sièges sociaux, les employés cadres de ces industries, les professionnels, exemple, le Dr Gendron, les investisseurs, soyons de plus en plus ambigus. D'abord, parlons de l'indépendance — cela fait dix ans qu'on l'entend — et évitons d'en parler parce que c'est dangereux pour gagner une élection, appelons cela plutôt une souveraineté et ajoutons donc association. Mais, n'oublions pas le trait d'union, parce qu'il est indispensable. Laissons tomber l'association parce qu'elle est presque impossible, limitons-nous à l'indépendance et enfin essayons de vendre égal à égal.

En attendant le référendum, endormons la population du Québec par de la publicité tapageuse, des slogans, de la propagande. Présentons-lui des discours inauguraux bien gonflants, passons-lui le suçon, et peut-être que le gouvernement pé-quiste va rester au pouvoir pendant cinq ans. Pendant ce temps, les Québécois seront toujours dans l'incertitude face à l'avenir, à leur avenir, seront toujours dans l'ambiguïté sur des questions d'option nationale et constitutionnelle. Les Québécois auront toujours de ce gouvernement de faux programmes, de fausses promesses électorales, auront toujours des mesures soi-disant nouvelles mais réchauffées, mais sans résultat, auront toujours des discours répétitifs, et on les a depuis 1977, mais beaucoup de slogans par exemple et de la publicité séparatiste.

Le meilleur exemple de cette publicité c'est le fameux programme OSE, Opération solidarité économique. M. le Président, dans le discours inaugural, on offre actuellement d'injecter $20 millions de plus. Vous savez que le programme OSE, c'est un ramassis de programmes qu'on retrouvait un peu partout dans tous les ministères et on essaie de vendre la salade que c'est un programme tout à fait nouveau. Le programme OSE n'est rien de plus qu'un programme de publicité référendaire à coups de millions. OSE est un programme de propagande. Le seul mérite qu'on peut lui donner, c'est peut-être d'avoir maintenu quelques emplois existants. Jamais OSE n'a créé, comme le prétend le Parti québécois, de nouveaux emplois. Le programme OSE est même, dans son ensemble, une confusion totale pour le gouvernement qui l'a présenté parce qu'il n'est même pas en mesure d'établir le nombre d'emplois soi-disant nouveaux, il n'est pas en mesure d'établir l'efficacité même de ce programme. (15 h 40)

En somme, tous ignorent les résultats soi-disant favorables de ce programme. Comme je le mentionnais, OSE est un programme de propagande conçu par le Parti québécois à ses fins séparatistes. Les thèmes qu'on veut y véhiculer, c'est l'autosuffisance et l'autodétermination. Le Parti québécois n'est pas assez imbécile pour ne pas réaliser que les Québécois se sentent très insécures dans le domaine économique; c'est pourquoi le Parti québécois, le gouvernement actuel fait tant de campagnes publicitaires dans tous les domaines, y compris dans le programme OSE, à coups de millions sur le dos et avec l'argent des Québécois. Il ne suffit que de suivre les journaux, les media d'information, les media parlés et écrits pour le constater.

Pourquoi tant de publicité pour si peu de résultats dans le cas d'un programme comme OSE qui ne donne absolument rien aux Québécois? Ce que veut le Parti québécois, c'est faire croire que le Québec peut être indépendant économiquement. C'est vraiment alarmant de constater de quelle façon on dépense les deniers des Québécois pour cette campagne publicitaire et de voir ce que coûtent aux Québécois les "blitz" organisés par ce gouvernement et effectués par les députés et ministres.

Les Québécois, à 80%, ont choisi et vont choisir majoritairement le Québec et le Canada. Pour cette raison — et je suis peut-être le premier — nous allons oser à notre manière dénoncer cette publicité préréférendaire faite sur le dos des Québécois. Le Parti québécois veut monopoliser ce sentiment que tous les Québécois ont, un sentiment de fierté et de nationalisme; il veut également monopoliser la fierté de tous les Québécois d'avoir un drapeau. Ils osent même insinuer que, pour avoir cette fierté, il faut être membre du Parti québécois. J'ai cette fierté, et ce sentiment n'appartient pas simplement aux gens de votre droite, M. le Président, et aux séparatistes, il appartient à tous les Québécois sans distinction. Nous sommes tous des Québécois et des Canadiens à part entière, y compris même les minorités anglaise et ethnique. Nous sommes tous, et pas seulement les membres du Parti québécois, des Québécois fiers de vivre au Québec. Je suis moi-même fier d'être Québécois et je ne vous mentirai pas, M. le Président, en vous avouant et en vous répétant que je suis fier d'être Canadien.

Le Parti libéral a choisi le Québec et le Canada. Si vous l'avez remarqué, M. le Président, vous avez peut-être constaté depuis très longtemps déjà que cette position a été inchangeable. L'option que nous avons prise n'a pas été modifiée d'un point depuis ses débuts. Cette position est constante, elle est la plus sûre. Nous avons choisi le Québec et le Canada et nous n'avons pas l'intention de changer d'idée. Le Parti québécois nous propose une aventure alors que le Parti libéral du Québec, qui est déjà prêt pour le référendum, est prêt à faire cette campagne. Posez-la cette question, claire et précise et vous verrez que les Québécois, leur choix étant fait, répondront rapidement un oui général au Québec et au Canada.

M. le Président, la seule préoccupation du gouvernement actuel, c'est le référendum. Pour obtenir un oui, dans les circonstances le reste ne semble pas important. Pour le PQ, le gouvernement québécois, à défaut de bonne administration, à défaut d'une politique réelle et efficace, à défaut d'idées nouvelles et créatrices et à défaut de travailler dans l'intérêt des Québécois, veut étirer son mandat pour vendre sa salade. Pour cela, il est prêt à prendre tous les moyens.

M. le Président, le premier ministre, dans son discours inaugural, a fait preuve de l'incapacité d'être un bon gouvernement. Son contenu le prouve. On aurait dû lire, dans le discours inaugural: priorité au chômage, aux grèves, aux perceptions d'impôts abusives sur le dos des petits salariés; on aurait dû lire aussi: priorité à l'exode des sièges sociaux, aux étudiants sans emploi, au malaise économique; on aurait dû lire également: priorité au référendum. Les questions socio-économiques, ce n'est pas important. Ce qui est important c'est le référendum.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, je vous demanderais de bien vouloir conclure!

M. Verreault: M. le Président, il me reste peut-être deux minutes encore, et c'est le temps qui m'est nécessaire pour conclure.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): 15 h 47.

M. Verreault: Deux minutes et demie, vous m'avez interrompu, M. le Président.

Alors, si le référendum est une priorité, qu'on le fasse ce référendum, qu'on pose la question claire et précise et qu'on déclenche également, dans les comtés d'Argenteuil et de Jean-Talon, ces élections que nous attendons. Nous voulons connaître le pouls des Québécois, afin de prouver au gouvernement actuel qu'il n'est pas là pour longtemps, et ça, je vous le jure, M. le Président.

Dans le message inaugural, nous avons été inondés de promesses de toutes sortes. Pourtant, on veut donner l'impression aux Québécois que tout va bien, alors qu'on sait que ça va mal. Simplement pour citer quelques faits, nous avions, aujourd'hui, les infirmières qui sont venues manifester. Il y a la grève de la CTCUQ ici, il y a les traversiers, les autobus. Il y a 5000 travailleurs en grève. Le chômage augmente sans cesse. Actuellement, M. le Président, les taux d'électricité sont à la hausse et, dans les quatre ans qu'aura probablement fait ce gouvernement, nous aurons vu une hausse, dans le domaine de l'électricité, d'environ 70%. Mais où sont les fameuses solutions?

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Shefford, malheureusement je dois vous demander de bien vouloir conclure, votre temps est déjà expiré.

M. Verreault: M. le Président, est-ce que je peux quand même prendre au moins une demi-minute, pour conclure?

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il y a consentement de la Chambre.

M. Verreault: M. le Président, de toute façon j'en aurais eu pour presque une heure moi aussi. Je vous avoue franchement que le discours inaugural a été très peu éloquent; j'ai hâte de voir les députés d'arrière-ban vanter tous ses mérites, comme on le prétend. Je vous assure que les Québécois sont écoeurés d'entendre parler du référendum, ils veulent l'avoir le plus tôt possible. Ils veulent répondre: On choisit le Québec et le Canada. Ils veulent, après avoir choisi le Québec et le Canada, entendre parler du pain et du beurre, du travail, des emplois.

M. le Président, les jeunes travailleurs ont également des problèmes et ces choses doivent se régler dans les plus brefs délais possible. Les gens veulent savoir où ils s'en vont. Comme l'a dit mon chef parlementaire, le député de Bonaventure, cette session s'annonce très dure pour le gouvernement. Je vous garantis, M. le Président, que votre travail, vous allez le mériter.

De toute façon, juste un mot sur la mo- tion — parce que je pense qu'il est bon de la rappeler — de mon chef parlementaire. M. le Président, quant à la motion qui a été proposée à savoir "que cette Assemblée adresse un blâme sévère au gouvernement pour son manque de franchise, de droiture et de clarté sur tout ce qui concerne son option indépendantiste et déplore vivement que la présente obsession référendaire du gouvernement fasse passer au second rang la solution des problèmes économiques et sociaux des Québécois", vous comprendrez que j'appuierai cette motion de censure de mon collègue de Bonaventure. (16 h 50)

M. Goulet: M. le Président...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: ... il y a eu entente entre les partis de cette Chambre de façon qu'on puisse laisser parler le député de Pointe-Claire parce qu'il doit se rendre à la commission parlementaire des affaires sociales. Avec votre permission et à la suite de cette entente, j'aimerais que vous le reconnaissiez pour, immédiatement après, revenir au rôle en me reconnaissant.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): Reconnaître le député de... ?

M. Goulet: Pointe-Claire.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord.

M. Bellemare: Mais le député de Bellechasse conserve son droit de parole.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): Si c'est une entende entre les partis, je vais la respecter.

M. Goulet: C'est une entente avec le leader adjoint du gouvernement, du Parti québécois, et avec le whip du Parti libéral.

M. Gendron: Je veux seulement ajouter, M. le Président, que c'est tout à fait exact, pour autant qu'on s'assure que la rotation se continue après M. Shaw, tel qu'on l'aurait fait s'il n'y avait pas eu cette demande. Après l'intervenant de l'Union Nationale, ce sera l'intervenant du parti ministériel.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord.

M. le député de Pointe-Claire.

M. William Frederic Shaw

M. Shaw: M. le Président, merci. Pour commencer, quelques mots en français pour essayer d'expliquer mon rôle dans cette réplique au discours inaugural de M. le premier ministre de notre

province. Il disait que c'était l'année de l'économie et on vit une histoire totalement différente. Il dit que ce sera l'année de la réforme parlementaire. Nous avons franchement vu quelques améliorations qui sont venues de ce gouvernement, mais j'ai hâte de voir si le gouvernement va continuer dans le même tracé vers des améliorations qui peuvent être considérées comme des avantages pour tous les Québécois, même après que ce gouvernement aura connu sa défaite à la prochaine élection. Malgré tout, pour la population du Québec, c'est entendu que cette année, c'est l'année du référendum, mais, de jour en jour, c'est plus évident que ce référendum ne viendra pas cette année. Il est fort probable que cela ne viendra jamais parce que le gouvernement va prendre tous les avantages pour faire changer la question pour éviter le défi d'aller vers la population du Québec pour demander précisément le mandat de la population pour continuer dans la même veine ou changer de veine vers la réalité du Canada. Et c'est le voeu des Québécois d'être canadiens autant que québécois. Mais il ne semble pas, M. le Président, que ce gouvernement soit prêt à poser cette question à la population. On le voit. Les tracés sont clairs. Un jour, c'est l'association qu'il faut arranger avant. Un autre jour, on formule le voeu d'une négociation avec le reste du Canada. C'est une petite gageure que je peux faire qu'avant la prochaine élection un référendum avec une question claire et nette ne sera jamais fait par ce gouvernement, même avec la promesse électorale qu'il a faite avant.

Mr President, this government, through its Premier, gave to the people this year's version of the inaugural address. It spoke of the year of the economy. It spoke of the year of parliamentary reform. It was also supposed to be the year of the referendum but each year seems to be a different year of the referendum. We are those who immediately after the election said: We want that referendum right now so the people of Québec can speak to it. But it did not come. And last year: At least, let us try and turn around the economy. Let us solve this referendum problem. Let us get the question out. But it did not come.

This year, more excuses are being invented. More excuses, Mr President, because the reality is that this government is afraid to ask a question on the referendum. It is afraid to go to the people of Québec and let them pronounce their feelings towards their future in Confederation. I was disappointed that this year I had to travel outside our country to go to the U.S. of A. to speak to journalists and explain to them that, when our Premier stands up before an international audience or before an audience and speaks as if he has the support of the people of the province of Québec, he is not speaking to the truth. We spent a great deal of time and energy and money making sure that every single journalist, who was in that hall listening to the Premier at this particular visit, every journalist was aware of not what we had to say, but what every major newspaper in Canada was speaking as to the performance, to the validity of the position that this Premier of ours had been taking. It always disappoints me because, fundamentally, he is my Premier, he represents me as the leader of my province. And fortunately, he only represents 41% of the population because he chooses to act that way. He chooses to represent himself as speaking as if it is not when and if, but now?

Mr President, when this government is prepared to accept the mandate that it gave to the people of Québec to go to them with a clear question on their constitutional preference, I will respect them for having met that mandate, but every indicator is showing me that this government is skating in every direction to avoid a commitment because as long as this problem is not solved, along with other problems, all of the suggestions of improvement in the economy of our province are just wasted words. We seek, Mr President, to improve the economy and let us speak to it.

Let us talk about the OSE program. Yes, it is a program to spend government money on public works. If we examine what happened in the city of Montréal last year, we had a fifty plus percent reduction in residential construction. We had more than a 50% reduction in commercial construction. We had more than a 50% reduction in industrial construction. We had a growth of available space for rent which was five and a half times that which was available when this government came to power. We had a continuation, in spite of reports by the government's minister of Economic Development that only six head offices had left the city, the province of Québec. We have a report in black and white by the mobility report that demonstrates that a net 38 000 Quebecers left this province last year, their jobs, their expertise, their contribution to the life style of Quebecers, their work in the community, their taxes which are used to pay for this program OSE because OSE is simply tax dollars being spent and tax dollars must come from taxpayers. This government is pretending to expand jobs, to create more employment by using government money which it must generate from the working section of this population to create this artificial government based expansion in construction. So, we see two areas of construction that have incrased: institutional construction by 500%, engineering construction by over 300%. This create very few jobs, Mr President. (16 heures)

For example, last year, although Montréal was, in March 1977, Canada's largest city, we rank fourth in Canada in construction. Mr President, the largest city ranks fourth. And if we subtract from that construction, government spending, it ranks tenth. Mr President, this government is going to change the economy, improve the economy of the province of Québec! It is going to do it by expanding its activity in OSE, to agriculture. What a beautiful sentiment, Mr President, that we are going to do something for our farmers. We have done a great deal for them

this year, we have introduced bill 90 which has frozen their property and now makes it only exchangeable through a "régie d'Etat". And we have controlled all the cooperatives which makes it almost impossible for the farmers to act in their own interest, within their own cooperatives. And we are also saying, Mr President, that this funding, this magnificent source of funding will be the saving of Quebeckers!

I had a call yesterday from a very anxious executive of a Québec based multinational corporation and his information was — and it was my intention today to ask a question to the Minister of Finance about this — that the government of Québec intends to interfere with private pension plans and the placement of those monies. Imagine, Mr President, that they are concerned that this is liable to happen. After all, they do see the interventionist activities of this government. They see, for example, how they went into automobile insurance, which is pretended to be a great success. I hope you are not one of the 8000 people who never made a claim last year because they did not understand that they could. I hope you are not one of the 1600 people who's claims are being help up because of a lack of communication between the Régie de l'assurance automobile and the victims of the accidents. And I hope that you are not a victim and have to go through the tragedy that these people go through and find out in the end that the amount of money that you will receive as an indemnity is just slightly higher than the minimum wage with this great open insurance program that this government claimed so much success in.

Mr President, agriculture: As I said, the farmers are going to be aided by the OSE program and the students. The students are going to be aided as well with $20 million of new funding, also tax money, because you cannot find them jobs. We know that this year three out of four students who will graduate from our universities and CEGEP will have great difficulty to find employment. But, the government is now going to involve itself in new enterprises of spending; we are going to acquire Asbestos Corporation and we are going to flex our muscles by pretending that we will nationalize Asbestos Corporation if they do not come to term with what this government feels is a just price.

Again I challenge this government, Mr President, to come up with what of which they are speaking because Asbestos Corporation is not going to back off. If this government passes legislation to expropriate, we will go to court as anybody who is being expropriated would do and legislation alone will not bring Asbestos Corporation into the hands of this government. Only when it is prepared to understand that it, like any other acquire of property, must pay the price that it participated in generating in order to acquire will such a property be acquired.

But, it is suggested that the government will do it at all cost and what cost, Mr President! At what cost? When just today, the whispers are talking in the background that the next step will be

Iron Ore. Is this the direction? Is this the image that this province is trying to project throughout the investment world? Because that is the image, Mr President, that is being generated.

Tourism, what a tragedy! When I look out over this beautiful city of Québec which is, without question, one of the most desirable resort cities in all of North America, when we speak to the managers and directors of the hotels here, the story they tell us is quite clear that the tourist is not coming and it is not only because of legislation concerning conventions. The individual tourist is not coming in spite of a major drop in the value of the Canadian dollar, he is not coming because he does not feel welcome. They do not feel welcome, Mr President, not at all. And when we see major drops in the number of tourists that are coming to this province, if we do not begin to realize that they are not coming because they do not feel welcome, if we do not realize that, we will not reverse the negative direction that tourism is taking in this province.

Do you remember, Mr President, when we used to have the large signs in the province of Québec, "Hospitalité is spoken here"? That was a beautiful sign to see and I was proud, as a Quebecer, to see it on the posters. But "la loi 101" n'accepte jamais que "Hospitalité is spoken here" soit lisible sur les rues du Québec. But until this province is prepared to understand that part of enticing visitors to come to this province is an image of welcome, "un climat d'accueil", until we understand that the attitude and the image of this province does not attract tourists, it blocks them from coming. Until we understand that, Mr President, this tourist industry will continue to fall and Quebec's no 2 industry will continue to suffer gravely.

What of our famous Hydro-Québec! You know, we have one of the greatest resources in the world and the minister of Energy fortunately is in this room, because I have never had a chance to speak to this particular area. In a period when other fuel costs are levelling off in relation to all other costs, in a period when we, in the province of Québec, are in the progress of gaining access to thousands of megawatthours in progression over the next five years, where is the conversion program? I ask that minister right now: What is he doing about the conversion program that is necessary to make that power that will be produced in James Bay get into the households of Québec? What is a conversion program? That is the program that promotes people in their individual energy use to convert to electricity.

Price is number 1 and price is the reason why the conversion program was given a sock in the nose when we introduced increases of 70% over the next four years. Instead of people planning, because that is what it takes... It is fine to have 5000 megawatts...

M. Joron: The increase for oil and gas...

M. Bellemare: M. le Président, je pense qu'en vertu de l'article 100, le ministre devrait...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre! M. le député... S'il vous plaît, à l'ordre! M. le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, M. le député de Johnson, s'il vous plaît! A l'ordre, M. le député de Saint-Maurice! Les gens de la Mauricie, s'il vous plaît! M. le député de Johnson, M. le député de Saint-Maurice! (16 h 10)

M. Shaw: Merci, M. le Président, et je remercie tous mes collègues qui voient ce qui se passe. Le ministre délégué à l'énergie, nous avons touché un nerf.

We are not prepared to do the conversion in this province and it is necessary to bring that hydroelectric power that it is being generated in James Bay into the household of Quebecers as soon as possible. The only way that this will come about is with massive conversion programs, and I am not even sure that the minister knows what the word is.

I see, for example, active conversion activity by the Quebec Natural Gas Company who are working today and every day to convince Quebecers to buy equipment that will use their product to heat their homes, to move their industry in our own province with this fantastic potential in hydroelectric power. We will probably not use ten out of twelve turbines, ten out of twelve turbines that will come on line in October 1979 and I will invite, later on, the minister of Energy to explain to me how we now have potential to export the power of two of the twelve turbines and, one day, I hope that the minister of Energy will call a parliamentary commission to investigate how serious the problem, not of production, production is going fine, it is a way ahead of schedule. It is fine to have production, but when you do not generate transportation and marketing of this product, you are creating a waste. That is incredible!

Mr President, Hydro-Québec requires a parliamentary commission to question seriously its management especially as it concerns its policy of pricing and its conversion program to get Quebecers into electric usage over the next five years. The economy is a disaster! The exodus is continuing. There are major industries that are planning on leaving and this government continues to not understand what the disease is.

Three things are really happening. The first is polarization. Polarization because everybody in Canada is beginning to say what the question used to be: What does Québec want? And now, they are saying: We had it up to here with Québec, we do not want to hear another word with Québec, do not talk to me about negotiating with Québec because they are insatiable. They will never accept anything that anybody else is going to go, they are going on their track; when they fall off the end of the road, maybe they will come back! This is polarization. It is so serious that it is very possible that for the first time in the history of this country, the electoral results at the federal level will be on language lines and there is one group that is primarily responsible for the direction that this is taking and that is the image and the action of this premier and his government.

The second thing that always follows this kind of activity is exodus. And the exodus is not restricted to Anglophones. I have spoken to the exodus before and I will speak to it again because this is a prime symptom of the very serious disease that is happening in this province.

But the third and the most important is that we are going to a selected role economy. A selected role economy is when you do what other people want you to do rather than doing what you want to do yourself. This was the role of the Republic of Ireland after its separation. This is the role right now, except with major advances that may happen, to Mexico. The reason why French-speaking people living in the province of Québec have the highest standard of living of any French-speaking community in the world is because they have been attached in close network with North America.

This government is cutting all those ties and we are now into selected role economy. We have already lost the money in banking center, it has moved from Montréal to Toronto. It was there, it is there now and it was not natural trip, it was pushed there by nationalism and negative language legislation. "La Bourse de Montréal", the Montréal Stock Exchange is threatened with actual closure. It used to be the center of all stock exchanges in Canada. Montréal used to be the center of the insurance industry in Canada; it no longer is.

I know the gentleman who have studied economics from the sense of products that are in the ground or products that are made in a factory, who do not understand that the expertise industries are as vital. As a matter of fact, the largest single employers in this country are the expertise industries and that has always been the "vache à lait" of the Québec economy, which this government and nationalism have been destroying.

We have other areas of economy that are very important: the pharmaceutical industry, the electronics industry. Lets look at the electronics industry. We had Canadian Marconi, Canadian Aviation Electric. We have Aviation Electric which is just about to announce its move. These companies, with Sperry Gyroscope, are all but gone now. We have the aviation industry which is still strong in Montréal, but do not misunderstand it, it is threatened with Canadair, with Air Canada maintenance bases and with Canadian Pratt and Whitney all suffering the problems that are associated with restriction to its mobile work force which will have to leave if the current situation continues, because nobody can operate expertise services without access to expertise personnel wherever they may need to get them. As long as we create a negative environment for people to come to, they will not come. I have often heard that people who say they have freedom of choice will never come back to Québec. I say to you that

the freedom of choice is vital to Quebec's recovering because Italian will not come. You do not need to worry about them going to school, but also they will not losing their expertise, they will not be participating in the construction industry. The Greek will not come and other ethnic peoples will not come and we will continue to have massive exodus from this province.

Freedom of choice is now symbolic. No one will believe that Québec has changed until we have not made a small change. We have made the big change. No one will believe that Québec is a stable, responsible society, as long as there is any form of language legislation, as long as there is only one set of blinders that says that this is a French society and that if you want to come here you speak French. They will not come.

M. Grégoire: You can speak English.

M. Shaw: II am speaking English because I am insisting. We are here, we are still on excess of one million people, we have been suffering and our community is suffering when the Blacklock Report shows — and in all evidence supporting that — that four out of five of our children are leaving the province because there is no future for them here. Do not take pride in that. Do not feel that you have generated some positive effect when you accept that, especially when the Blacklock Report showed that over 60% of the children that were leaving spoke through in French. It is an environment in Québec that is not a question of language; it is a question of social climate, a willingness to accept one another.

When I see what is happening with "Office de la langue française" and those young girls who have gone to take those language tests after spending thousand of dollars and many months to acquire an adequate knowledge only to be refused by a fanatic who happens to run that programm, by the name of Major, who continues to hold an office in "l'Office de la langue française", if I were a French Canadian, I would be deeply insulted to be associated with. (16 h 20)

As long as that is continuing, you cannot speak to say: Well, why do you not speak French? Why do you not join us? I am saying: We are prepared to join you, when you are prepared to accept us. You seek the equality, but you are not prepared to give it.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Pointe-Claire, voulez-vous conclure, s'il vous plaît?

M. Shaw: Mr President, I am very pleased to...

M. Verreault: Un instant, s'il vous plait! Je m'excuse auprès de mon collègue; je voudrais vous faire remarquer, M. le Président, que, depuis le début de l'intervention de mon collègue de Pointe-Claire, nous n'avons jamais eu le quorum. Alors, je l'exige.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! Je vous ferai remarquer que, en vertu du règlement, le président n'est pas obligé, même s'il constate l'absence de quorum, de le soulever d'office et qu'il appartient aux députés de le faire. M. le député de Pointe-Claire, je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît!

M. Shaw: Merci, M. le Président. Je veux terminer en disant que la question de l'avenir du Québec est dans les mains des Québécois qui, de jour en jour, commencent à savoir que la direction vers le nationalisme est négative et "contrepro-ductive". A un moment donné, bientôt, si vous leur donnez l'avantage de démontrer leur appui pour le Canada, ils vont aussi appuyer le fait que nous voulons changer l'image du Québec que ce gouvernement a projetée non seulement dans le reste du Canada, mais partout au monde, une image d'une société fermée qu'il faut faire changer. Si, M. le Président, le premier ministre a accepté véritablement sa responsabilité comme le représentant de ma province, il doit commencer un programme dans cette direction. Merci, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, M. le Président. A chaque année, à pareille date, au début de mars, nous avons dans cette Chambre le discours inaugural et également la réplique à ce discours par les membres de l'Opposition, ainsi que les membres du gouvernement. C'est le moment choisi par le gouvernement pour faire connaître ses intentions à la population du Québec. Le gouvernement veut ainsi créer de l'espoir et, bien souvent, crée également des déceptions. Cette année, le discours est volumineux; cela a été souligné par plusieurs collègues de cette Chambre. Donc, lorsque nous avons lu le discours pour la première fois, il semblait y avoir beaucoup d'espoirs. Après avoir épluché ce discours page par page, nous nous apercevons qu'il laisse de très grands vides et de très gros points d'interrogation.

On parle de beaucoup de choses, bien sûr, on vise beaucoup de personnes, beaucoup de groupes de la société. Il semble y avoir beaucoup d'intentions dans ce discours, mais, comme l'an passé et comme il y a deux ans, M. le Président, on revient avec des intentions qui avaient été annoncées l'an passé et il y a deux ans. On parle également du futur. Je vous donnerai des exemples lors de mon intervention, vous prouvant que, dans ce discours, on retrouve beaucoup de choses qu'on avait promises l'an passé et la première année où les gens d'en face ont formé le gouvernement du Québec.

Mais, avant, M. le Président, j'aimerais vous souligner que, personnellement, étant donné que

c'est le troisième discours inaugural auquel j'ai l'occasion de répondre, je suis d'avis que le discours inaugural devrait être suivi immédiatement du discours du budget pour qu'ensuite on puisse se prononcer objectivement sur les intentions annoncées par le gouvernement. Quand on négocie un contrat, quand on négocie un achat, M. le Président, il me semble que c'est normal que nous en connaissions immédiatement le prix.

Si on pouvait immédiatement se prononcer sur le discours du budget, je pense que le débat serait beaucoup plus objectif et que cela économiserait énormément de temps à cette Chambre. En tant que membre de l'Opposition, je veux participer à ce débat parce que je suis bien conscient que le devoir d'un député de l'Opposition est de souligner objectivement à la population du Québec les lacunes qu'il y a dans ce discours, dans les intentions du gouvernement, ce qui a été oublié pour le bien-être des Québécois et, surtout dans mon cas, pour les gens du comté de Bellechasse-Dorchester que j'ai l'honneur de représenter.

Je tenterai, au cours de ces 30 minutes, de suggérer des améliorations qui pourraient apporter quelque chose pour le bien-être des citoyens de tout le Québec. Bien sûr, on parle d'économie et on dit encore qu'on veut être un bon et un vrai gouvernement. En 1977, la priorité semblait être l'économie. En 1978, le discours inaugural nous disait que la priorité serait l'économie, et en 1979, on nous revient encore une fois en nous disant que la priorité sera l'économie. J'espère que, cette fois, ce sera vrai. Le gouvernement avait pourtant promis d'être un bon et vrai gouvernement. On peut vouloir le laisser croire. Peut-être a-t-on raison dans certains domaines, mais dans d'autres, je ne suis pas si certain que cela. Faudra-t-il rappeler ce que les gens du Parti québécois réclamaient au gouvernement au temps où ils étaient de ce côté-ci de la Chambre, donc, dans l'Opposition? Cela a-t-il changé? Oui, cela a changé. C'est vrai. Je pense que cela a même empiré. Le chômage est encore très élevé au Québec; précisément dans le comté que je représente, nous frôlons les 20% ou 20,1% et on va même à 30% dans certaines régions. Dans le temps de l'Union Nationale, de 1966 à 1970 lorsque le taux de chômage atteignait 7%, 7,8%, 8%, 8,5% — c'était le plus haut — on criait au scandale. Maintenant, on frôle une moyenne provinciale de 12% et on semble dire que c'est tout à fait normal.

Les sièges sociaux, également. S'il avait fallu dans le temps qu'un siège social déménage du Québec vers une autre province, cela aurait été un "coup de gorge", comme on le dit chez nous. Cela aurait été un scandale public. Fermetures d'usines. Il faut se rapeler certaines grèves qu'il y avait à ce moment-là. Nous avons discuté, la semaine dernière, d'un catalogue de grèves et cela semble tout à fait normal. Les jeunes sans emploi. Les finissants sans emploi. On parle et on a toujours parlé de bureaucratie et de technocratie. J'y reviendrai tout à l'heure. Vous verrez ce que certaines personnes pensent de cette bureaucratie et de cette technocratie. Mauvais choix de priorités du gouvernement. Encore là, je tenterai de suggérer au gouvernement certaines améiiorations de ce côté-là. L'étatisation est devenue la marque de commerce de ce gouvernement. Les dépenses honteuses dans le domaine de la publicité. Cela a été souligné par plusieurs de mes collègues. Egalement, les dépenses inadmissibles que peuvent faire les sociétés d'Etat au Québec.

Parlons un peu de l'entreprise privée, si vous le voulez bien, M. le Président. Qu'a fait ce gouvernement pour l'entreprise privée? Pourtant, elle est un très bon agent économique. Elle n'a à peu près plus confiance au gouvernement qui nous dirige actuellement. Il y a un certain climat d'incertitude. Je vous l'ai dit tout à l'heure. Chaque fois que l'on parle d'étatisation, on crée de la concurrence de l'Etat vers l'entreprise privée. Un carcan bureaucratique. Je peux vous donner certains exemples. Je ne parlerai pas des très grosses compagnies. Je n'ai pas vécu dans les très grosses compagnies, mais je vous parlerai de petits commerces, tels ceux qu'on retrouve dans le comté de Bellechasse. C'est formules par-dessus formules, rapports par-dessus rapports. C'est rendu que cela nous prendrait une secrétaire à temps plein seulement pour remplir les formules, et un comptable à temps plein seulement pour remplir les rapports et ce, pour une petite entreprise de deux, trois ou quatre employés. On perd son temps à servir ces messieurs. Cela arrive chez nous à l'improviste. Les gens s'asseoient à notre bureau. Il faut servir ces messieurs, les inspecteurs. Quand ce n'est pas celui du salaire minimum, c'est celui du comité paritaire. Quand ce n'est pas celui de l'assurance-chômage, c'est celui de l'impôt provincial ou de l'impôt fédéral. Quand ce n'est pas celui de la taxe de vente, c'est celui sur l'essence, la protection du consommateur, la taxe à la fabrication. Des "bras-seux" de papier. Savez-vous comment le député de Brome-Missisquoi les appelle? Des "faiseux". C'est un terme qui résume à peu près ce qu'on peut penser de cette bureaucratie et de cette technocratie. (16 h 30)

Ce que je trouve curieux, c'est quand quelqu'un veut lancer une petite "business", un petit commerce, une petite entreprise manufacturière, on n'est pas capable de voir la figure d'une de ces personnes-là. A la minute que la "business" ou que le petit commerce est lancé et que cela semble aller assez bien, régulièrement on les voit arriver et ils viennent nous dire comment s'y prendre. Maintenant que cela va bien, qu'on a lancé son affaire, on les voit arriver. Pourquoi le gouvernement n'enverrait-il pas ces gens-là dans les petites entreprises lorsqu'on en a besoin, lorsqu'on commence, lorsqu'on a de la misère? Quand cela va bien, qu'il laisse donc aller. Comme le député de Beauce-Sud le disait, si vous ne venez pas nous aider, ne venez donc pas nous nuire. Je pense que c'est une amélioration. On en a parlé d'à peu près tous les gouvernements qui se sont succédé. Dans le discours inaugural, je ne vois rien qui puisse améliorer cette situation.

La technocratie n'a pas changé. Il n'y a rien dans le discours inaugural et il faudrait absolument qu'un jour ou l'autre on s'asseoie pour

étudier véritablement cette question. Ce n'est absolument pas vivable dans les petites entreprises, surtout les entreprises de deux, trois, cinq ou — si vous le voulez — en deçà de dix employés.

Beaucoup de gens viennent nous voir, dans nos bureaux de comté, avec de très beaux projets, des salariés qui ont une idée en tête et qui voudraient qu'elle se concrétise. Naturellement, ils n'ont pas des dossiers bien préparés comme on voudrait avoir dans certains ministères. A mon avis, la plupart de ces gens qui viennent ont des idées réalistes et réalisables. Ces gens-là font quelques appels téléphoniques à Québec, des appels interurbains. Vous vous rappelez, M. le Président, que chez nous, dans certaines paroisses, il y a quatre ou cinq abonnés sur la même ligne téléphonique; c'est extrêmement difficile d'avoir des relations avec Québec par le biais du téléphone. Ces gens-là prennent une, deux ou trois journées de leur temps pour venir à Québec cogner à certaines portes des ministères. Je peux vous dire que, lorsqu'ils ont fait cela une fois ou deux, ils sont assez écoeurés — vous me passerez l'expression — qu'ils ne veulent plus rien savoir. Ils prennent le projet, le mettent à la poubelle ou dans le fond du tiroir et le projet dort là.

Il me semble que, si on pouvait avoir un homme une fois pour toutes — genre ombudsman — quand on voudrait avoir quelque chose du gouvernement, on pourrait rencontrer ce type-là qui pourrait nous orienter de façon qu'on n'ait pas 25, 30 ou 40 personnes à rencontrer. Qu'on ait une personne, mais que cette personne puisse véritablement nous donner la place, l'adresse, le bon numéro de téléphone où il faut s'adresser.

Le gouvernement a un tas de beaux programmes. Le ministre Tremblay, le ministre de l'Industrie et du Commerce, a déposé un livre, la semaine dernière, très bien fait. Mais ce qui est le plus curieux, c'est quand on arrive avec un programme, avec une idée et que vient le temps de passer dans le trou de l'entonnoir, il y a toujours quelque chose qui accroche et cela ne passe pas.

Je prendrai le temps, M. le Président, de citer un exemple qui s'est produit à mon bureau la semaine dernière, pour illustrer concrètement ce que je veux dire. Je vous cite une lettre datée du 2 mars 1979. "Je désire faire appel à ton aide pour un projet que nous avons grandement à coeur. Il s'agit d'un parc municipal. L'année dernière, nous avons pu obtenir un projet Canada au travail pour débroussailler et nettoyer le terrain et aussi fabriquer des tables à pique-nique. Il reste, cependant, une partie importante du travail à effectuer et c'est le nettoyage des deux étangs qui sont juste en avant du parc". C'est quelqu'un d'une municipalité de mon comté qui m'écrivait en date du 2 mars. "Maintenant, il nous faudrait avoir des espaces verts où les gens pourraient venir se reposer et pêcher. Ne pourrait-on pas trouver un programme gouvernemental provincial qui nous aiderait à compléter ce merveilleux projet? Je te prie d'accepter nos salutations".

M. le Président, j'ai personnellement pris en main ce dossier et je vais vous dire les démarches que j'ai faites à ce sujet seulement pour imager concrètement ce que je veux vous dire. Etant donné que cela parlait d'affaires municipales, j'ai appelé au ministère des Affaires municipales. On m'a référé au directeur des programmes. On m'a dit que le directeur des programmes serait là vendredi. Donc, j'ai rappelé vendredi. Le directeur des programmes m'a référé au ministère des Richesses naturelles. Le ministère des Richesses naturelles m'a référé au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports.

Une Voix: Comme d'habitude.

M. Goulet: Le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports m'a référé au service du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Il y a deux services au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Alors, on m'a référé une autre fois au service de la pisciculture. Je n'avais pas d'appels interurbains à faire, M. le Président. Lorsque nous sommes dans nos bureaux, nous n'avons que cinq chiffres à composer. Mais imaginez monsieur un tel, comme le chef de l'Union Nationale l'appelle — Jean-Baptiste — qui est dans le comté et qui veut appeler à Québec; il y a trois ou quatre abonnés sur la même ligne.

Une Voix: Le gouvernement...

M. Goulet: Le service de la pisciculture m'a transféré au ministère des Transports parce qu'on pensait que cela pouvait servir de halte routière. Le ministère des Transports — je ne charge pas; ce que je vous dis est vérifiable; pour ceux qui voudront le vérifier, les démarches ont été faites la semaine dernière — m'a référé au ministère des Richesses naturelles. Le ministère des Richesses naturelles m'a ramené une autre fois au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

Une Voix: Incompétent ministre.

M. Goulet: J'ai finalement parlé au ministre du Tourisme ici, à l'Assemblée nationale, sur le parquet. Il m'a dit: Envoyez-moi donc une copie de la lettre. J'ai continué quand même mes démarches, parce qu'on m'avait dit qu'aux Affaires municipales il y avait une entente fédérale-provinciales pour les parcs urbains. Donc, je me suis adressé là et, M. le Président, on m'a référé au programme OSE. Au programme OSE, on m'a dit: Le gars sera ici lundi.

M. le Président, pour ce cas, un petit cas bien simple — dans nos bureaux de comté il en arrive peut-être quinze ou vingt par semaine, soit par lettres ou par rencontres que l'on fait avec des gens — il y a douze endroits différents où j'ai téléphoné et où j'ai fait des démarches. Je n'ai pas fini. C'est 23 appels téléphoniques, parce que souvent le monsieur est absent, il ne peut pas nous répondre, il est en conférence. Imaginez-vous, M. le Président, Jean-Baptiste qui demeure dans le comté de Bellechasse qui, lui, appelle et fait des interurbains régulièrement à cause de cela; rendu

au dixième ou douzième appel, il prend son projet et le met à la poubelle.

Lorsque je parle de technocratie et de bureaucratie, je pense que cela fait très bien image. J'aurais un autre exemple également. Un dossier très d'actualité. Quelqu'un qui avait inventé une fournaise pour brûler les huiles usées, dossier d'actualité parce qu'on parle d'économie d'énergie de ce temps-ci, on parle de la protection de l'environnement. J'ai procédé à peu près selon le même processus, j'ai contacté bien du monde et je n'ai pas eu de nouvelles.

Un autre exemple, également, une filature, chez nous, qui a brûlé. J'ai posé des questions ici en Chambre. La filature a brûlé au mois de mars, 35 emplois, appel par-dessus appel pour se faire dire que le 25 juillet au matin on aurait un inspecteur qui viendrait voir cela. Cela faisait longtemps que les dirigeants de la filature avaient décidé de ne plus reconstruire parce que ces gens avaient déjà perdu les contrats des gens qui s'approvisionnaient là. Imaginez-vous, de mars à juillet! Il aurait fallu qu'on délègue immédiatement quelqu'un pour conserver au moins ces 35 emplois. Cela a été la même chose, la perte d'une autre industrie qu'on appelle chez nous les Industries Bellechasse, manufacture de skis de fond. Cela a pris tellement de temps que quand on s'est décidé, il était trop tard; il y avait eu une vente à l'enchère effectuée dans cet établissement.

Il y a de beaux programmes, M. le Président. C'est vrai qu'il y a de beaux programmes. Mais pour des milieux à faible densité de population, ces programmes ne collent absolument pas à la réalité; il y aurait une amélioration concrète à amener de ce côté. On parle de relance économique. Le programme OSE, savez-vous comment j'appelle cela, moi? Opération systématique d'enve-loppage, M. le Président. Et l'enveloppage, je vais vous dire ce qu'ils ont fait avec: c'est de la propagande péquiste éhontée. On a pris à peu près tous les anciens programmes existants qui avaient été annoncés d'abord dans le discours inaugural; on en a reparlé une deuxième fois au cours du discours du budget, le ministre a fait sa petite tournée, sa petite déclaration pour annoncer son programme, et là, on ramasse tout cela et on dit: Voilà le programme OSE. C'est la quatrième fois.

Pour le programme OSE, je vais vous parler concrètement de ce qui s'est passé dans le comté. Je n'irai pas à peu près, je vais prendre exactement les chiffres qu'on nous a donnés dans ce fameux livre — très beau d'ailleurs, très belle couleur de lettrage, vous avez remarqué — où on disait: Dans Bellechasse, on a créé environ 100 emplois. Un bon dimanche après-midi, je me suis mis à analyser ce volume. Les emplois agricoles: 138; bien oui, mais pas des emplois permanents, des emplois peut-être pour quinze jours, trois semaines. Je comprends cela, je félicite le gouvernement, mais qu'on ne vienne pas nous dire que ce sont des emplois permanents. Les emplois soutenus: exemple, on a travaillé pour réparer un édifice municipal, 1,8 homme pendant cinq se- maines. Ce n'est pas un emploi permanent. Merci beaucoup pour ce que vous avez fait, mais ne venez pas me dire que ce sont des emplois permanents. Il y a des emplois également qui étaient moitié-moitié, des programmes avec le fédéral et le provincial.

En résumé, il y a eu $276 900 000 au niveau de la province de mis dans ce programme. Mais attention! Le gouvernement du Québec a fourni $100 000 000, ce qui veut dire 36% de ce montant. L'autre montant, ou le reste, si vous voulez, a été fourni par le fédéral et par l'entreprise privée. Dans mon comté, je me suis mis à analyser cela. Sur les 300 emplois environ qu'on avait soi-disant créés ou soutenus, semaines-homme, mois-homme, une fois que cela a été décortiqué, on a créé véritablement, honnêtement, 65 emplois pour un an. C'est ce qu'on a créé. Merci beaucoup, mais c'est 65 emplois pour un an et non pas 300 ou 400 emplois. (16 h 40)

Au même moment, M. le Président, dans le comté, par la fermeture de deux industries, parce que les gens du gouvernement ne s'en sont pas occupés, nous avons perdu 115 emplois permanents. Le bilan négatif du programme OSE dans le comté de Bellechasse-Dorchester est environ à 55%. Au niveau des investissements, je n'irai pas loin. Il y a des députés ici qui nous ont montré certaines lacunes. A la page 10, soit la première page pour le comté de Bellechasse, on dit ici: Bellechasse, expansion de l'entreprise pour l'augmentation de la production, $200 000. Prise en charge d'une partie des intérêts. Merci au nom de cette entreprise. Dans la colonne suivante, il est inscrit capital-actions, $100 000. Je dis bravo! J'appelle le président de l'entreprise: Tu es chanceux, un capital-actions de $100 000. Pas $100 000, il dit; ils ont pris une action de $100. J'appelle au ministère et je m'informe. On me rappelle pour confirmer qu'effectivement il y avait eu une erreur. Cela commençait bien, M. le Président. Une erreur de $100 000 en partant.

Je ne suis pas allé aux autres pages, mais plusieurs députés de cette Chambre ont soulevé des points, à savoir qu'en dépit de ce qui était annoncé dans ce programme on n'a véritablement pas mis toutes ces sommes au service de la population, parce qu'il y a l'entreprise privée qui en a fourni et le gouvernement fédéral. Il faudrait le dire. Alors, merci pour les $100 millions que vous avez mis, mais pas $276 millions. C'est pour cela que je disais, M. le Président, que c'est une opération systématique d'enveloppage. Vous avez compris pourquoi. C'est beau d'essayer de créer des emplois, mais, avant de commencer à créer des emplois, commencez donc par essayer de garder ceux que nous avons actuellement. Cela serait déjà beaucoup. Vous en avez créé 65 dans le comté et, au même moment, on en a perdu 115.

Commencez donc par nous sortir des programmes réels, réalistes de façon qu'on puisse au moins garder ce qu'on a actuellement. On ne vous en demande pas plus, pour l'instant. Vous créez un emploi, vous en perdez deux. M. le Président,

le programme OSE dans le comté de Bellechasse, avec chiffres à l'appui, je peux affirmer qu'il a été négatif. J'espère de tout coeur que le gouvernement va se reprendre avec le prochain budget.

Les sociétés d'Etat, on parle d'un meilleur contrôle. Ecoutez, l'Union Nationale a au moins servi à ouvrir les yeux des gens d'en face. Cela fait deux ans que notre chef, le député de Lotbinière, et les députés se battent dans cette Chambre pour dire au gouvernement: Dans les sociétés d'Etat, il se passe des choses anormales, voyez-y. On a exigé une commission parlementaire. Bravo d'avoir répondu à la demande de l'Union Nationale. Il faut faire attention. Ce qu'on reproche aux sociétés d'Etat, nous, c'est qu'elles sont subventionnées à coups de millions avec l'argent de l'entreprise privée bien souvent qui, elle, est rentable et paie des impôts et des taxes. On finance, on subventionne à coups de millions la société d'Etat pour venir faire concurrence à l'entreprise privée. On a eu le fameux dossier Davie Shipbuilding, Marine Industrie; j'espère, M. le Président, que cela ne se représentera plus, ces choses.

On parle d'un livre sur l'économie. Bravo! Ce n'est pas nouveau pour l'Union Nationale. Cela fait trois ans, encore là, qu'on le réclame. Alors que vous sortiez des livres de toutes les couleurs, nous on demandait des livres sur l'économie. Egalement, nous avons déposé un document en novembre 1977: Le défi no 1 des Québécois, la relance économique. C'était une priorité pour l'Union Nationale et ce sera encore une priorité pour l'année 1979. Ce n'est pas nouveau chez nous. Les produits québécois à l'étranger. En mars 1977, le chef de l'Union Nationale proposait une société de mise en marché des produits québécois. Ce n'est pas nouveau. Encore là, merci beaucoup de répondre à nos suggestions. Nous avons hâte de voir comment vous allez y répondre, mais, au moins, les intentions semblent là dans le discours inaugural. Bravo d'avoir répondu encore à la demande du chef de l'Union Nationale.

J'aimerais, M. le Président, parler des foyers d'hébergement. Naturellement, je n'aurai pas le temps, mais je peux vous dire que la liste d'attente dans nos comtés jugée prioritaire par le ministère des Affaires sociales se situe environ à dix par foyer d'hébergement. Nous avons un hôpital pour malades chroniques et, en juillet, lorsque je suis allé au ministère des Affaires sociales, cet hôpital comptait 78 lits et la liste d'attente jugée prioritaire par le ministère des Affaires sociales était de 80. Si tout le monde était mort durant la nuit, le lendemain matin, il aurait manqué encore deux places. Cela nous prend des foyers d'hébergement dans le comté et le ministre s'évertue à nous dire que, pour la région 03, il n'y aura à peu près pas de foyers d'hébergement parce qu'on dépasse de beaucoup la norme. Quand même, parce que nous avons une faible densité de population, il y a encore une liste d'attente, M. le Président. C'est tout à fait aberrant qu'on prenne une personne qui a vécu 65, 70 ans de sa vie dans un village et que, rendue au soir de sa vie, pour récompenser cette personne, on doit la transférer 15 ou 20 milles plus loin. M. le Président, c'est pire que si on prenait cette personne et qu'on l'envoyait à Montréal ou à Québec. Lorsqu'on la sort de son village, ce n'est absolument pas ce qu'il faut pour récompenser cette personne, pour remédier à son état de santé.

La voirie: 1100 milles de route dans le comté de Bellechasse-Dorchester, 250 milles en asphalte, en béton bitumineux. Il y a un rattrapage urgent à faire. La population est prête à participer. Nous avons des dossiers prouvant au ministère des Transports que la population est prête à participer et à céder gratuitement son terrain. Nous demandons au ministère des Transports de baisser ses normes, d'intéresser les municipalités à participer. Elles sont prêtes à participer. Nous voulons une route carrossable. Qu'on baisse les normes; entre une ligne droite et une courbe à 90 degrés, il y a peut-être moyen de faire une courbe à 45 degrés et les gens seraient satisfaits de cela. Nous demandons au ministère des Transports d'inciter la population à y participer et, chez nous, la population est prête à participer afin qu'on ait ce rattrapage.

M. Verreault: M. le Président, question de règlement. Il y a à peine une dizaine de péquistes dans cette Chambre, est-ce que nous pourrions demander le quorum?

M. Goulet: M. le Président, le placement dans la construction...

Une Voix: Levez-vous donc pour parler!

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, puis-je compter sur votre collaboration pour que votre collègue, le député de Bellechasse, puisse terminer son intervention?

M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président.

Sur le placement dans la construction, encore là, j'ai fait des suggestions. C'est la même chose que pour le placement étudiant, les programmes ont toujours été pensés pour les villes. Pour des régions comme chez nous, à faible densité de population, les programmes ne s'appliquent absolument pas. Et dans le placement de la construction et dans le placement étudiant, nous sommes pénalisés.

Le développement touristique. Nous avons chez nous de très beaux sites naturels. On préfère plutôt fabriquer des sites. Qu'est-ce qu'on attend pour mettre en évidence des sites naturels tels que ceux des comtés de Bellechasse et Dorchester? Serait-ce parce que ces dossiers se défendent mal politiquement? Si c'est la simple raison, il faudrait le dire.

En agriculture, on a adopté toutes sortes de lois. On veut vraiment défendre le petit agriculteur. Nous demandons, au niveau des quotas laitiers,

que l'agriculteur ait au moins un minimum de 300 000 livres de lait. C'est un minimum qu'on demande. On demande également que lorsque des quotas sont vendus, ils soient vendus à l'intérieur de la région. On demandera également une enquête sur les quotas. C'est tout à fait inconcevable qu'au moment où les quotas des gens de Bellechasse étaient coupés, ceux du niveau du Québec se maintenaient. Il y a même des gens qui ont vu leur quota augmenter pendant que, chez nous, des petits agriculteurs voyaient leur quota diminuer. Il y a eu un marché noir de quotas et on demandera une enquête, au cours de l'année, sur ce qui s'est passé.

J'aimerais prendre deux secondes pour parler de l'environnement. C'est peut-être couvrir très rapidement à peu près tous les ministères, mais nous sommes poignés, chez nous, avec tous ces ministères. Le premier ministre a dit, dans le discours inaugural, que l'environnement était là pour encadrer et non pour paralyser. Si le premier ministre a senti le besoin d'en parler dans le discours inaugural, c'est important. Arrêtez donc de tout paralyser! C'est rendu que, chez nous, il y a certaines municipalités où, prochainement, cela va coûter plus cher de taxe de vidanges que cela coûte de taxe foncière. C'est tout à fait aberrant, on voit des microbes partout, de l'autre côté. Arrêtez donc un peu de charrier avec cela! Prenez donc le temps qu'il faut. Il y a déjà eu des agriculteurs chez nous et ce n'est pas parce qu'il y avait un tas de fumier à un moment donné que tout le monde est mort de cela. Arrêtez donc de voir des microbes partout. Prenez votre temps.

Naturellement, j'aimerais faire certaines suggestions en terminant. Je demande aux gens d'en face d'étudier des programmes de façon que les Québécois puissent vivre selon leurs moyens; limitez les dépenses. On est rendu que le transport scolaire au Québec coûte aussi cher que tout le budget du ministère de l'Industrie et du Commerce. Vous ne me ferez pas croire que c'est raisonnable. Il faudrait choisir les priorités, ce qui est utile, ce qui est nécessaire et enlever le superflu, comme, par exemple les fameux programmes de publicité.

M. Verreault: C'est ça!

M. Goulet: Décentralisons. C'est beau de parler de la décentralisation. On l'a fait au niveau des pêches et je félicite le ministre de l'Industrie et du Commerce. Qu'on arrête de décentraliser seulement les fonctionnaires et qu'on décentralise ceux qui peuvent prendre des décisions. C'est cela qu'on veut. (16 h 50)

II vient des fonctionnaires, ils se retournent et disent: On ne peut pas prendre des décisions, la décision va se prendre à Québec. Ce qu'on veut chez nous, c'est qu'on nous envoie des gens qui sont capables de prendre des décisions. Cela serait de la vraie décentralisation.

M. le Président, naturellement, avec cette année de l'économie, je pense que, hors de tout doute, vous savez, vous, qu'à l'Union Nationale c'est une priorité. C'est une priorité chez nous l'économie, une très grande priorité. Or, on demande au gouvernement d'abolir cette fameuse publicité et je vais vous dire quoi faire avec cette publicité. Juste un exemple; au mois de décembre, il y a eu $3 millions de publicité donnée par le gouvernement.

Une Voix: C'est écoeurant.

M. Goulet: Savez-vous ce qu'on aurait pu faire avec $3 millions de publicité dans un comté rural tel que celui que j'ai l'honneur de représenter, avec $3 millions de publicité tout à fait farfelue? On aurait pu construire 100 logements à prix modique, c'est-à-dire dix paroisses auraient pu avoir chacune un HLM de dix logements. On aurait pu construire de 20 milles à 30 milles de nouvelles routes. On aurait pu construire d'un à trois réseaux d'égout et d'aqueduc. On aurait pu multiplier par 125 le budget des loisirs. On aurait pu multiplier par 50 le budget des chemins à vocation agricole et ainsi de suite. Je pourrais en énumérer pendant encore une heure. Alors, priorité aux HLM, priorité à la voirie, priorité au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, priorité aux chemins à vocation agricole, priorité aux jeunes qui sortent de l'école et qui n'ont absolument pas de travail, l'aide aux finissants, les foyers d'hébergement également, je l'ai mentionné tout à l'heure.

M. le Président, vous me permettrez, il me reste certainement deux ou trois minutes, j'aimerais savoir combien il me reste.

Le Président: M. le député de Bellechasse. M. Goulet: Oui.

Le Président: A vrai dire, ce serait déjà terminé. Je vous demande de tirer les conclusions.

M. Goulet: De consentement, M. le Président, deux minutes.

Le Président: Je vous demanderais de tirer les conclusions.

M. Goulet: Vous êtes bien aimable.

On a parlé de documents constitutionnels; des gens de l'autre côté, je les ai entendus la semaine dernière, ont dit que l'Union Nationale n'avait pas de position constitutionnelle. Je vous demande d'arrêter de charrier un peu. Vous n'êtes pas sincères lorsque vous dites cela. On a été le premier parti politique à formuler une position constitutionnelle, en novembre 1977, en novembre 1978. Au congrès d'orientation, les gens ont dit: Voici notre programme constitutionnel. M. le Président, il y a des gens qui ont vu clair, il y a des journalistes qui ont vu clair. J'ai ici un article d'un journaliste, et je terminerai en citant ce journaliste, M. Jean-Pierre Lemieux, de la Tribune de la presse ici: "Mais tentons de présenter de façon brève

d'abord la position entérinée lors du congrès d'orientation de l'Union Nationale, ensuite la position du Parti libéral et du Parti québécois. A noter que pour les textes péquistes et libéraux, il s'agit de documents de travail sur lesquels les membres ne se sont pas prononcés encore, c'est encore à l'étude. L'Union Nationale a réaffirmé son droit à l'autodétermination du Québec". C'est clair, c'est précis. Cela peut ne pas faire l'affaire de certaines personnes dans cette Chambre, mais quand même l'Union Nationale s'est prononcée là-dessus et de façon non équivoque. Nous choisissons de reprendre le combat de l'égalité à l'intérieur du Canada.

M. le Président, lorsqu'on parle du Parti libéral, on dit: C'est un document de travail ne contenant donc pas de position précise. Et lorsqu'on parle du Parti québécois, on dit: II y a quelques jours, c'était au tour de l'exécutif du Parti québécois de présenter un document d'égal à égal qu sera soumis au congrès de mai. Nous avons une position constitutionnelle qui répond à 80% au rapport Pépin-Robarts. Nous n'avons pas attendu le rapport Pépin-Robarts pour formuler nos recommandations.

Je termine vraiment en disant...

M. Bérubé: Une question de règlement, M. le Président, j'ai l'impression que vous avez avisé le député que son temps était écoulé.

Le Président: M. le député de...

M. Goulet: M. le Président, je termine vraiment en disant que nous n'avions pas besoin de la commission Pépin-Robarts pour formuler notre rapport, nous l'avons formulé.

Le Président: Merci, M. le député de Bellechasse.

Comme je ne sais pas si vous interviendrez en tant que ministre des Terres et Forêts ou ministre des Richesses naturelles, je vais m'adresser au député de Matane. Vous avez la parole.

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Effectivement, c'est peut-être...

M. Goulet: Question de règlement, M. le Président. Le député de Matane a été tellement gentil avec moi que j'invoque le quorum, parce qu'il a certainement un bon discours à nous faire et nous n'avons pas 20 députés dans cette Chambre.

Le Président: Qu'on appelle les députés, puisqu'il n'y a pas quorum.

Il y a maintenant quorum.

M. le député de Matane, je vous redonne la parole.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: C'est certainement, M. le Président, le titre qui me fait le plus chaud au coeur que vous me décernez en m'appelant le député de Matane. Effectivement, c'est à ce titre que je parlerai.

Je parlerai avec fierté du message inaugural, dans la mesure où, devant le nombre de mesures que le gouvernement annonçait, on ne pouvait qu'être impressionné. Non pas que, comme ministre, je n'aie pas eu entre les mains à peu près chacun des dossiers dont on a fait mention dans le discours inaugural. Mais, M. le Président, comme pas un notre premier ministre a réussi à y donner une ligne de force, une orientation qui montre l'unité qui prévaut dans la préparation des politiques gouvernementales.

Je voudrais en souligner un certain nombre. D'abord, ce programme de création d'emplois pour les jeunes. C'est un problème urgent, M. le Président; c'est un problème urgent parce que nous sommes dans une situation un peu particulière, au Québec, en ce moment. Il y a 27% de la population, au Québec, entre 15 ans et 24 ans; cela se compare avec 20% aux Etats-Unis et 16% en France. Nous avons un nombre anormalement élevé de jeunes au Québec qui arrivent sur le marché du travail. C'est une des principales raisons pour lesquelles, en dépit du fait que nous avons un dossier remarquable de création d'emplois, nous n'arrivons pas à créer suffisamment d'emplois pour les jeunes qui arrivent sur le marché du travail, parce que la situation est anormale. Il était donc nécessaire, pour le gouvernement, de présenter un tel programme de création d'emplois pour les jeunes.

Mais on peut parler aussi de ces emplois communautaires, ces emplois communautaires dont on a bénéficié à l'échelle de tout le Québec. Qu'est-ce que ce programme de création d'emplois communautaires? C'est un programme bien simple.

Tantôt, le député de Bellechasse se demandait: Quand le gouvernement vient-il au secours de ceux qui essaient de bâtir des entreprises? Justement, en écoutant le député de Bellechasse, malheureusement, j'ai dû regretter son ignorance. En effet, il s'est plaint de ne pas trouver la bonne porte face à des demandes de ses commettants. Evidemment, il n'a qu'à s'en prendre à lui-même. Cependant je vais lui conseiller une porte. Lorsqu'il ne sait pas où s'adresser au gouvernement — puisqu'il n'a pas fait ses gammes — il s'adresse à Communications-Québec qui va le renseigner. C'est le but de cet organisme.

M. Goulet: Arrêter la farcel

M. Bérubé: Donc, le député de Bellechasse pourrait certainement orienter ses commettants justement du côté de ce programme de création d'emplois communautaires, parce que ce qu'on veut faire avec la création d'emplois communautaires, c'est permettre à des Québécois qui ont rêvé de faire démarrer des entreprises de faire travailler des gens de leur village, de leur municipalité, de se mettre ensemble et de créer des emplois. Ce programme a servi, M. le Président, dans un grand nombre d'endroits au Québec. Je pourrais en mentionner dans mon comté; je pourrais mentionner la scierie de l'Esprit-Saint; je

pourrais mentionner un poste de radio qui s'est créé dans Gaspé, et je pourrais encore en mentionner un grand nombre. Ce sont des projets communautaires de Québécois comme vous et moi qui, grâce à l'aide de ce programme, ont pu faire démarrer leur entreprise. Voilà une réponse à la question du député de Bellechasse. Malheureusement, il semble fort peu au courant. (17 heures)

On pourrait souligner aussi les nouveaux programmes d'aide que le gouvernement annonce; tantôt un programme d'aide à l'entreprise innovatrice parce que c'est vrai, M. le Président, que nous devons mettre l'accent sur un nouveau type d'entreprise. Nous avons de vieilles industries. L'industrie du textile, par exemple, est une vieille industrie et il faut faire place à une industrie beaucoup plus moderne, beaucoup plus agressive, beaucoup plus dynamique qui vende de nouveaux produits. On peut penser à toute l'ère des ordinateurs, des communications où le génie québécois peut innover et créer de nouvelles entreprises. On a besoin d'un programme comme celui-là. Il a été reçu avec énormément de succès et j'étais certainement le premier à l'appuyer pour qu'il soit reconduit. Un programme de relance des pêches maritimes. Nos pêches étaient en voie de disparition. En l'espace de deux ans, à Saint-Joachim-de-Tourelle où il n'y avait à peu près pas de pêcheurs — il y avait une dizaine de barques — aujourd'hui, il y a 65 hommes et femmes de Saint-Joachim-de-Tourelle, un petit village sur la côte, qui vivent de la pêche en mer et dans leur usine de transformation qui s'est créée grâce à une aide du programme OSE.

On pourrait parler du programme de silos et de séchoirs. C'est important, M. le Président, parce que l'Opposition ne le reconnaît pas, mais nous achetons au Québec pour $1 milliard de boeuf par année et on n'en produit même pas pour $200 millions. On l'achète à l'extérieur. Mais, pour faire l'élevage du boeuf, il nous faut des moulées, il nous faut des grains de provende. Il faut donc donner une chance aux Québécois de pouvoir se lancer dans cette culture. De là ce très gros programme de construction de silos et de séchoirs. Evidemment, il s'agit là de programmes d'aide, d'incitation à l'entreprise privée, si chère au député de Bellechasse et au député de Lotbinière.

Il y a également, cependant, l'action directe du gouvernement lorsque le gouvernement prend quelque chose en main parce que l'entreprise privée ne le fait pas. Je pense à la société d'exportation annoncée dans le discours inaugural. Je pense également à ce programme pour constituer du capital de risque parce que le capital de risque manque au Québec. Il ne manque pas seulement au Québec. Il manque dans toute l'Amérique aujourd'hui. On ne trouve plus d'argent pour financer la recherche scientifique. C'est un capital de risque. On ne trouve plus d'argent pour financer l'exploration. C'est un capital de risque. C'est un problème commun à l'Amérique. Cependant, nous devons l'aborder de front au Québec et c'est ce que nous faisons.

Evidemment, tous ces programmes s'ajoutent à d'autres programmes gouvernementaux dans le domaine de l'industrie forestière, dans le domaine de l'industrie minière. On ne réalise pas assez qu'au Québec nous avons depuis deux ans le record pour le niveau d'exploration; 23% de l'exploration en surface s'est faite au Québec; 31% de l'exploration en profondeur s'est faite au Québec. Savez-vous quel est le pourcentage que représente notre industrie minière dans l'ensemble canadien? 9,7%, M. le Président. C'est un record absolument spectaculaire et nous avons doublé toutes les autres provinces du Canada. Evidemment, le député de Bellechasse n'est pas au courant, mais on excuse son ignorance. Oui, M. le Président, c'est avec fierté que je souligne certains éléments de ce discours inaugural, mais également avec une certaine crainte...

Des Voix: Ah!

M. Bérubé:... devant la confiance que mettent les Québécois dans leur gouvernement.

Des Voix: Ah, ah!

M. Bérubé: En fait, les Québécois ont toujours le regard tourné vers leur gouvernement à Québec et, hélas, il faut dire que le Québécois n'a pas oublié ses origines françaises. Il a gardé son esprit critique. Il a gardé la langue mordante. On n'a qu'à suivre, d'ailleurs, les débats de cette Assemblée et à les comparer avec l'ennui mortel qui prévaut à Ottawa. Malheur, malheureusement, au gouvernement qui l'oublierait trop vite. Les libéraux l'ont connu, il n'y a pas tellement longtemps. Qui aime bien châtie bien, dit le proverbe et le Québécois aime bien son gouvernement. D'ailleurs, c'est intéressant de voir comment les Québécois réagissent à une question simple: Lorsqu'on parle de votre gouvernement, auquel pensez-vous d'abord? Voilà le type de question qui est revenue à plusieurs reprises dans des sondages d'opinion, dont un, récent, que j'ai noté, en avril 1977; c'était le sondage de SORECOM. Eh bien, quelle est la réponse à cette question? 33% disent Canada, 51% disent Québec. Cela veut dire 61% des répondants qui instinctivement, quand on leur demande: Quel est votre gouvernement? disent Québec. Et c'est normal.

M. Guay: M. le Président, question de règlement. Je m'excuse auprès de mon collègue de Matane. Mais le député de Shefford n'est pas à son siège. Il interrompt constamment le ministre. Lorsqu'il a parlé tantôt, on l'a laissé dire...

Des Voix: A l'ordre!

M. Guay: ... toutes les insanités qu'il a voulu dire sans l'interrompre. Est-ce qu'il pourrait avoir la même courtoisie pour le discours du ministre qui est beaucoup plus étoffé que celui qu'il a fait tantôt?

Une Voix: Tu n'étais pas là tout à l'heure...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Je m'excuse...

M. Bérubé: Et je pourrais dire...

Le Président: M. le député de Shefford, s'il vous plaît! Je pense que je n'ai pas eu trop souvent à vous faire de reproches. Je pense que vous allez m'apporter votre collaboration.

M. O'Neill: Un peu de décence.

M. Bérubé: En effet, M. le Président, sondage après sondage, depuis des années, on a pu constater que le Québécois restait fier de son gouvernement et se tournait instinctivement vers son gouvernement pour la solution de ses problèmes. Mais il hérite aussi d'une longue tradition coloniale. Pendant des siècles, on a payé au Québec tous les impôts imaginables que les rois voulaient bien exiger de nous. En échange, on attendait — Bah! — une certaine protection contre les invasions et, sans doute, quelques faveurs. On n'attendait pas grand-chose de notre roi. C'est sans doute pour cela qu'on est passé du roi de France au roi d'Angleterre, au roi du Canada et à la reine du Canada sans même s'en apercevoir. Mais, par contre, de nos curés, de nos maires de paroisse, de nos élus à Québec, on attendait la réponse à nos problèmes. En fait, le Québécois est un bon arbitre. Il n'hésite pas à retirer les frappeurs au fur et à mesure qu'ils se présentent au marbre, mais il ne comprend pas pourquoi ils sont tous retirés sur trois prises. Le Québécois reçoit son chèque d'assurance-chômage d'Ottawa le coeur ému, mais il blâme Bourassa de ne pas avoir créé 100 000 jobs.

Quel gouvernement, en fait, va oser affronter la colère de ses concitoyens en leur disant que les véritables instruments de développement économique ont été confiés entre les mains du gouvernement fédéral en vertu de la constitution? Quel gouvernement québécois osera affirmer son échec? C'est là le problème. Qui contrôle le crédit? Qui peut stimuler les dépenses créatrices d'emplois? Qui contrôle le commerce extérieur? Est-ce que c'est Québec? Est-ce que c'est le Canada? En fait, nous réclamons les moyens de nous développer, les moyens de nourrir nos enfants et on nous le refuse. En fait, on dit qu'on ne saurait pas les utiliser à bon escient.

Nos adversaires nous accusent de vouloir la souveraineté, de vouloir nous administrer nous-mêmes, de vouloir contrôler ce qui est à nous...

Une Voix: ...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): A l'ordre!

M. Bérubé: Heureusement, tranquillement, ils viennent à nous, M. le Président; ils viennent à nous. Récemment, le plus virulent critique du Parti québécois, M. Charles Perrault, l'ex-président du Conseil du patronat, a réclamé le contrôle de nos exportations pour le Québec. Oui, exactement, M. Charles Perrault. Lui aussi s'émeut du chômage au Québec. Il s'émeut de ne pas avoir l'amiante transformé au Québec. Lui aussi voudrait voir les Québécois travailler ici. Pourquoi acheter une mine? Cela ne créerait aucun emploi. On ferait mieux d'investir dans la transformation. Là, il a découvert la solution miraculeuse: on va taxer la fibre exportée qui n'est pas transformée au Québec. Cela ne coûte rien, cela rapporte même au gouvernement et cela va inciter les compagnies à transformer. Elégant. D'ailleurs il le soulignait. C'était "L'amiante, Perrault suggère de taxer la fibre brute". Il sait, ce M. Perrault, que la Cour suprême vient de condamner la Saskatchewan pour avoir voulu faire la même chose. Cela faisait déjà au moins une demi-douzaine de fois d'ailleurs que la Cour suprême se prononçait. Il sait que ce pouvoir appartient à Ottawa. Néanmoins, il veut que le Québec aille le chercher pour contrôler son développement.

Une Voix: ...

M. Bérubé: Oui. En fait, Charles Perrault est un péquiste qui s'ignore. Vous ne le saviez pas. Oui, il est pour la souveraineté, mais il est contre la souveraineté-association. Il doit donc être contre l'association. C'est un séparatiste. (17 h 10)

Je dois vous dire, M. le Président, que j'ai entendu le même genre d'argument du député de Lotbinière; c'est extrêmement fréquent de constater que les Québécois ont l'impression que leur gouvernement a tel, tel ettel pouvoir, alors qu'en fait il ne les a pas. Par conséquent, quand cela va mal et qu'ils voudraient de l'action, ils blâment leur gouvernement, c'est normal. Justement, ce que le gouvernement du Parti québécois propose, c'est de mettre fin à cette espèce de mélange, de méli-mélo qui fait que les Québécois ne savent jamais à qui s'adresser quand cela va mal.

Parce que les Québécois ne sont quand même pas fous. On sait que, quand on laisse nos pouvoirs entre les mains d'Ottawa, on en retire des miettes. Récemment, à partir des chiffres publiés par Statistique Canada, les fonctionnaires de l'OPDQ se sont amusés à calculer, province par province, combien Ottawa dépensait en salaires, en biens et services, en subventions, en investissements, calculer tout ce que Ottawa dépense dans chaque province. Après cela, ils ont divisé par le nombre d'habitants et ils ont dit: On va regarder ce que cela donne. D'après vous, M. le Président, qui remporte la palme?

Une Voix: L'Ontario.

M. Bérubé: Vous allez me dire: C'est l'Ontario. C'est évident parce que c'est la province la plus riche. C'est normal! Non, quand même, il faut reconnaître qu'Ottawa a un sens de l'équité, et on dit: On va s'intéresser aux provinces pauves. En fait, c'est la Nouvelle-Ecosse, avec $959 par habitant. C'est pour la période de 1961 à 1974. La deu-

xième normalement, puisque les Maritimes sont pauvres, ce serait l'Ile-du-Prince-Edouard, tout le monde est d'accord. Sans doute Terre-Neuve. Je ne ferai pas de blague raciste ici mais on peut se demander: Est-ce que Terre-Neuve ne devrait pas, elle aussi, comme province, bénéficier des mannes du fédéral? Mais non, malheureusement, ils ne sont pas dans les premiers, dans les têtes de liste. C'est le Nouveau-Brunswick qui est troisième, avec $521.

Nous nous dirigeons vers le Québec. Certainement que nous allons y goûter. Nous y goûtons certainement puisque à vive allure nous passons par-dessus le Québec pour atterrir au Manitoba; $509. Cependant, le gouvernement fédéral s'en est rendu compte et il revient donc vers le Québec. Il arrête en Ontario à $497. On n'entend toujours pas parler du Québec. Mais comme nous avons ignoré depuis le début l'Ouest et que ceux-ci font entendre leurs cris et menacent de se réparer, il faut maintenant dépenser en Colombie-Britannique et on passe à la Colombie-Britannique; c'est $446. Il faut évidemment revenir puisque aller plus loin ce serait l'océan; on revient en Saskatchewan, à $384; à l'Alberta, cette province si pauvre avec son pétrole, son blé et son boeuf, à $383. Finalement, évidemment, Terre-Neuve, qu'il ne fallait pas oublier, $347. Mais, plus niaiseux encore, le Québec avec $289. Nous sommes les derniers pour les investissements par habitant du gouvernement fédéral dans notre économie.

Comme le concluait la commission Pépin-Robarts. Evidemment, l'Opposition officielle s'est élevée contre ces chiffres. Le député d'Outremont nous a blâmés sévèrement. Première critique: Vous exprimez le tout en dollar constant. O drame! En dollar constant, c'est compliqué. Imaginez, en dollar constant! Parce que, évidemment, l'argent en 1961 valait pas mal plus cher que l'argent d'aujourd'hui. Alors on a ramené cela en argent de 1977.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Shefford, je vous rappelle à l'ordre. Si vous voulez avoir le droit de parole, je vous demanderais en premier lieu de vous rendre à votre siège. M. le député de Shefford, pour la deuxième fois, je vous rappelle à l'ordre. Je vous rappelle à l'ordre pour une dernière fois. D'accord?

M. Bérubé: Merci, M. le Président. En fait, M. Raynauld, le député d'Outremont, ne veut pas que l'on insiste trop sur ces chiffres. En fait, quand on se fait voler en 1900, cela paraît moins que si on se fait voler en 1980 parce que, à l'époque, une livre de beurre valait juste $0.10; aujourd'hui, elle en vaut $1.50. Alors on préfère garder les chiffes de 1900. Mais, en pratique, se faire voler $1 million quand une livre de beurre vaut $0.10, c'est la même chose que se faire voler $10 millions quand la livre de beurre vaut $1. C'est ce que l'OPDQ a fait. Mais là, c'est scandaleux! Voyez-vous...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): M. le député de Shefford, vous êtes expulsé de cette Chambre. M. le sergent d'armes, veuillez expulser le député de Shefford de cette Chambre.

M. Verreault: Plutôt que d'écouter ces conne-ries je préfère sortir.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): Bon, allez-y.

M. Verreault: Merci, M. le Président.

M. Bérubé: Donc, M. le Président, le saint patron du député d'Outremont a dû lui dire: Ce n'est pas bien de mettre le vol en évidence. Cela pourrait ternir la réputation du voleur. Cela pourrait aider les séparatistes.

Deuxième argument choc du député d'Outremont: Vous ne tenez pas compte des dernières années. Effectivement, l'étude s'est terminée en 1974 faute de chiffres. Malheureusement, en fin de semaine dernière, ayant les chiffres à notre disposition, nous avons complété l'étude. Ce n'est plus $16 milliards que nous perdons, c'est $18 milliards. Cela va mieux. C'est de plus en plus payant. Plus on étudie, plus c'est payant. En fait, je ne cacherai pas que depuis un an ou deux il y a amélioration. Certainement qu'il y a amélioration. L'ancien gouvernement avait réussi à négocier, en six ans de pouvoir, pour $340 millions d'ententes fédérales-provinciales. L'actuel gouvernement en a négocié pour $1 milliard en deux ans. Evidemment, la peur est mauvaise conseillère, me direz-vous, mais cela aide quand il s'agit de faire respecter nos droits.

Evidemment, le député d'Outremont va utiliser son dernier argument massue. On paie moins d'impôts à Ottawa, les Québécois, parce qu'on est plus pauvre. C'est donc normal qu'on retire moins. Comment cela se fait-il que la Nouvelle-Ecosse en retire plus que tout le monde? Justement parce qu'elle est pauvre. Là, voyez-vous, c'est le concept de justice, d'équité caractéristique du gouvernement fédéral. En fait, en 1961, on payait autant d'impôts que le reste du Canada, en moyenne. En 1978, c'est vrai, on paie moins. On ne paie que 21% des impôts canadiens alors qu'on représente 25% à 26% de la population. C'est vrai. Evidemment, à force de nous appauvrir, on paie de moins en moins d'impôts. C'est vrai. Décidément, M. le Président, j'arrive mal à comprendre la logique derrière l'argumentation du député d'Outremont. C'est tellement vrai que les Québécois n'attendent plus rien d'Ottawa, que j'ai écouté un certain nombre de discours en réponse au discours de M. Lévesque, et qu'est-ce que j'ai observé? Mon collègue de la Gaspésie, le député de Gaspé, a demandé essentiellement dans son discours: Mais qu'est-ce que le gouvernement attend pour lancer cette usine de pâtes et papiers dans la vallée de la Matapédia?

Qu'est-ce que le gouvernement attend pour faire démarrer le projet du sel des Iles-de-la-Madeleine? Qu'est-ce que le gouvernement attend pour lancer le projet de bicarbonate de soude? Ce qu'il n'a pas souligné, c'est que tous ces projets étaient parrainés par le gouvernement du Québec, par nos ministères et par nos sociétés d'Etat. Il n'a pas une seule fois souligné un projet qui serait parrainé par le gouvernement fédéral et qu'il faudrait lancer au plus vite. Il me semble — le ministre délégué à l'énergie pourra sans doute le confirmer — qu'il y avait au moins un projet industriel au Québec sur les bords du Saint-Laurent qui devait fabriquer de l'eau lourde. C'était le seul projet du fédéral au Québec. Celui-là, il est dans les boules à mites. Mais le gouvernement fédéral n'a pas tout mis dans les boules à mites. Il y a un magnifique complexe pétrochimique en construction à Sarnia. C'est Pétrosar. $600 millions, merci au ministre de l'Industrie et du Commerce. C'est le gouvernement fédéral.

Evidemment, nous aussi on en a un qui va démarrer. Mais là, c'est la SGF, la Société générale de financement. C'est à nous. Voyez-vous, on paie nos taxes une fois à Ottawa, et là ils se développent, et on les repaie une autre fois à Québec pour pouvoir se développer, nous.

On va parler d'exploration minière. Oui, nous contrôlons la plus grande entreprise minière au Canada, la Texas Gulf and Sulfur. Vous ne saviez pas cela. $1,4 milliard d'actif, on est en train de construire un "smelter" à environ 100 milles de celui de Noranda, qui va entraîner la fermeture de celui de Noranda en 1982. Cela va aider à notre chômage. C'est une autre réalisation du fédéralisme rentable. (17 h 20)

Une Voix: Et avec nos impôts.

M. Bérubé: Et avec nos impôts. Et, évidemment, pendant ce temps, cette société qui est vouée à l'intérêt du Canada, donc du Québec, entreprend des travaux d'exploration massifs; plusieurs millions de dollars, près de $5 millions au Canada, $30 000 au Québec, pas $30 000 millions, $30 000. Si vous voulez comparer avec SOQUEM qui est une société d'Etat bien à nous, celle-là, financée avec nos taxes, avec des actifs de $15 millions, c'est 100 fois moins, on dépense $7 millions en exploration au Québec, parce qu'on ne va pas dépenser notre argent, nous, en Ontario ou ailleurs, c'est normal.

On pourrait parler de Syncrude, ce vaste complexe en construction en Alberta pour fabriquer du pétrole à partir des sables de l'Atha-basca. On pourrait parler de l'achat par Pétro-Ca-nada d'une chaîne pétrolière canadienne qui va coûter plusieurs centaines de millions. On parle de l'Asbestos Corporation, mais, quand le gouvernement fédéral achète des entreprises dans le reste du Canada, évidemment, on n'en parle pas. En fait, la constitution nous a laissé deux outils: les subventions à l'entreprise privée, disons-le honnêtement, et nos sociétés d'Etat. C'est-à-dire qu'on peut soit subventionner l'entreprise privée pour qu'elle vienne chez nous faire du développement ou bien se relever les manches et le faire nous-mêmes. Mais l'entreprise privée nous a laissé tomber depuis déjà un bon nombre d'années.

Je regarde les chiffres de 1966 et je constate que la part que les compagnies canadiennes faisaient avec leurs entreprises au Québec, c'était 27% de leurs profits. C'était autant que la population du Québec, c'était normal, mais dès 1966 elles ne réinvestissaient que 22,5% au Québec. On gagne beaucoup d'argent au Québec, mais on ne réinvestit pas trop. Evidemment, si on ne réinvestit pas pendant dix ou vingt ans, l'effet se fait sentir. Aujourd'hui, la part des bénéfices faite au Québec par les entreprises canadiennes est baissée à 23%. C'est normal. En fait, nous avons nos sociétés d'Etat. Si on n'avait pas SIDBEC pour se lancer dans l'acier, pour développer le gisement de SIDBEC-Normines, c'est combien de milliers de travailleurs qui ne travailleraient pas au Québec cette année? Si on n'avait pas la SGF, si on n'avait pas Marine, cela ferait combien de milliers de travailleurs qui ne travailleraient pas au Québec? Si on n'avait pas eu REXFOR pour reprendre Béarn, Taschereau, pour s'impliquer dans le projet de Cabano, pour s'impliquer dans le projet de F. F. Soucy pour démarrer la scierie des Outardes, combien y aurait-il de chômeurs de plus au Québec? Evidemment, on va mettre en évidence un certain nombre d'échecs. Il y en a des échecs, c'est sûr. REXFOR fait des profits dans toutes ses opérations; ils ont un échec, Samoco. On va insister sur Samoco.

M. le Président, je terminerai en disant une chose: II ne faut pas cracher dans la main qui nous nourrit. C'est la seule main qu'on a, nos sociétés d'Etat. Une journée, on entend l'Opposition crier au chômage, prendre les derniers chiffres et accuser le gouvernement de ne rien faire et, le lendemain, on s'attaque aux sociétés d'Etat, on en mine la crédibilité, on les diminue, on cherche à réduire les Québécois. C'est cela, l'attitude de l'Opposition. Ce n'est certainement pas cela qui est inscrit dans le discours inaugural. Merci, M. le Président.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. S'il faut en croire le discours inaugural que nous a livré le premier ministre la semaine dernière, 1979 sera l'année de l'économie. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on n'est pas gêné du côté de ces gens du Parti québécois. C'est pourtant tout à fait typique de la stratégie de ce gouvernement, qui est fort simple: multiplier les paroles creuses, les promesses ronflantes, la propagande à peine déguisée pour faire en sorte que la population oublie l'absence de gestes concrets, le tout dans le seul but de conditionner la population à dire oui au référendum.

Comme le faisait remarquer le chef de l'Opposition officielle la semaine dernière, ce n'est pas la première année que le premier ministre consacre, du moins dans les paroles, à l'économie. Les années 1977 et 1978 avaient également été proclamées années consacrées à l'économie. Pourtant, nous avons connu et nous connaissons toujours des taux de chômage record, une inactivité presque complète dans le domaine de la construction, et des fuites d'emplois et d'investissements jamais encore égalées. En d'autres mots, on pourrait résumer le mot d'ordre de ce gouvernement de la façon suivante: Ecoutez ce que je dis mais, de grâce, ne regardez pas de trop près ce que je fais.

D'ailleurs, si ça va mal au Québec, selon ces messieurs, c'est la faute du fédéral et des Anglais, le ministre des Richesses naturelles vient de nous en donner une éloquente démonstration à sa façon. Je lui parlerai d'ailleurs tantôt de quelques projets très spécifiques qui concernent son ministère et sur lesquels il se traîne les pieds depuis deux ans qu'il est là. C'est la faute du fédéral et comme le disait si bien le ministre tantôt, quand le Québec sera indépendant ou souverain, on négociera une association économique avec ces mêmes ennemis jurés et tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes. En attendant, on dit à la population: Faites-nous confiance, on le mérite bien.

Je regrette, mais la population mérite mieux que cela. Si 41% des Québécois ont accordé leur vote au Parti québécois à la dernière élection, c'est qu'ils espéraient autre chose que des slogans vides de sens et des paroles creuses pour tenter de masquer la réalité. A titre d'exemple, vous en conviendrez vous-même, M. le Président, la population avait droit à ce que le gouvernement respecte ses engagements quant à la réforme électorale. Les candidats péquistes n'avaient-ils pas promis d'assainir les moeurs politiques du Québec? On a bien voté la loi 2 sur le financement des partis politiques; finies les contributions des compagnies aux partis politiques, ont clamé en choeur les gens du Parti québécois, finies les caisses occultes, renchérissait le premier ministre, lui qui a lui-même été élu trois fois à même ces caisses dites occultes.

Pendant ce temps, les associations de comté du Parti québécois fondaient des journaux et allaient vendre leurs annonces aux compagnies, aux entreprises qui, souvent, sont les mêmes qui font affaires avec le gouvernement. Lorsque le Parti libéral a soulevé la chose, le premier ministre, bien entendu, a piqué une sainte colère prétextant que si les personnes qui faisaient la sollicitation étaient des bénévoles et que si, de toute façon, les journaux étaient déficitaires, il n'y avait là rien de répréhensible. En fait, il a fallu l'insistance de l'Opposition, mais surtout le jugement sévère des éditorialistes et des observateurs québécois pour que le premier ministre annonce enfin que le gouvernement prendrait bientôt les moyens, les mesures pour faire cesser cette pratique. Avec sa transparence et sa candeur bien connues, le premier mi- nistre accusait, du même souffle, le Parti libéral d'avoir attendu trop longtemps pour dénoncer cet état de choses, comme si c'étaient les libéraux qui avaient contourné la Loi sur le financement populaire plutôt que les péquistes. Encore une fois, faites ce qu'on dit, mais ne faites pas ce qu'on fait.

Pour les présidents d'élection, même scénario. Le gouvernement forme un comité de députés péquistes qui a pour mandat de faire des recommandations sur les réformes apportées à la Loi électorale. Celui-ci recommande que, dorénavant, les présidents d'élection soient nommés par le directeur général des élections, après concours public, sans aucune intervention du pouvoir politique. (17 h 30)

Or, pendant que tous applaudissent à cette réforme proposée, le premier ministre, lui-même, remplace 40 présidents d'élection à travers la province. Lorsqu'on lui pose la question, il nous prévient qu'il en remplacera d'autres. On lui fait remarquer que les personnes nouvellement nommées sont toutes reconnues, sans exception, pour leurs allégeances au Parti québécois. Le premier ministre nous répond tout simplement: Les péquistes aussi ont le droit de vivre. Ils ont d'autant plus le droit de vivre, M. le Président, qu'ils sont beaucoup plus compétents et beaucoup plus disponibles que les personnes qu'ils remplacent. De l'avis du premier ministre! Tellement compétents et tellement disponibles que, dans le cas de Hull, on a nommé un résident de l'Ontario; dans Robert Baldwin et dans Laprairie les personnes si disponibles ont dû, à nouveau, être remplacées moins de deux mois après leur nomination. Dans Bourget, comme dans plusieurs autres comtés, on a remplacé des gens qui faisaient le travail à temps plein, c'est-à-dire dont c'était la seule source de revenus, par des amis du Parti québécois qui le font maintenant à temps partiel. Dans Champlain, c'est le représentant officiel du Parti québécois, lors du recensement de 1978, qui s'est vu nommé président d'élection, alors que, dans Lafontaine, c'est l'agent officiel, lors de deux élections, du député actuel de Lafontaine et ministre délégué à l'environnement.

Bien entendu, M. le Président, le premier ministre nous a annoncé que le directeur général des élections faisait maintenant, à la demande du gouvernement, des vérifications sur la compétence et la disponibilité des personnes qui sont maintenant nommées; ce qu'il a oublié de mentionner, c'est que ce sont toujours les péquistes, dans chaque comté, qui font les recommandations.

Dans le cas de Hull, M. le Président, le président limogé en novembre dernier, M. Cartier Mignault, qui était forcément incompétent et pas assez disponible, est demeuré en poste, bien entendu, à cause de l'imbroglio que l'on connaît. Non seulement est-il encore en poste, mais le bureau du directeur général des élections lui a même demandé et confié la tâche de donner des cours aux présidents d'élection d'autres comtés qui sont moins bien informés.

Je pense que c'est là la preuve que, en tout cas, le directeur général des élections reconnaît à M. Mignault une certaine compétence et une certaine disponibilité. On serait porté à croire, devant ces faits, qu'on se contentera de laisser M. Mignault à son poste; je le souhaite bien, sauf que, selon les informations que je possède, les péquis-tes de Hull sont toujours à la recherche d'un candidat pour remplacer M. Mignault. Je parie, M. le Président, qu'il ne faudrait pas se surprendre si, prochainement, on voyait passer un arrêté en conseil nommant un certain avocat du nom de Marchildon président d'élection du comté de Hull.

Encore là, M. le Président, le premier ministre nous suggère d'attendre la réforme globale de la Loi électorale. De cette façon, il pourra saisir l'occasion, entre-temps, de placer les amis du Parti québécois à la présidence de la plupart des comtés, avant le référendum; car seuls les péquis-tes peuvent être objectifs, compétents, disponibles, du moins assez pour satisfaire aux exigences du premier ministre.

Encore une fois, M. le Président, écoutez ce que je dis, mais ne regardez pas trop ce que je fais. Il est important que la population, d'un côté, ne soit pas privée de son représentant à l'Assemblée nationale trop longtemps, dixit le premier ministre, en juin dernier, en parlant de Notre-Dame-de-Grâce. A ce moment, il pensait pouvoir en tirer un profit pour le Parti québécois. A la suite de la cinglante défaite du Parti québécois, dans Notre-Dame-de-Grâce, dans la ville de Saint-Pierre, dans tout le comté, le premier ministre est maintenant moins pressé de déclencher des élections partielles dans les comtés de Jean-Talon et d'Argenteuil; c'est devenu moins urgent et moins important.

M. le Président, vous en conviendrez, les beaux principes qu'on prêchait en juin 1978 ont cédé la place à l'opportunisme strictement partisan du premier ministre, comme c'est le cas pour le référendum. Il cherche le moment le plus susceptible de servir les intérêts du Parti québécois. Les intérêts de la population, cela passera après, M. le Président.

L'hésitation du premier ministre, par contre, à déclencher des élections complémentaires ne devrait surprendre personne. Ce gouvernement qui gouverne à partir de sondages sait fort bien que les populations d'Argenteuil et de Jean-Talon ont un message à transmettre au Parti québécois. Le premier ministre sait que les électeurs de ces deux comtés ont hâte de pouvoir exprimer de façon tangible ce qu'ils pensent des hésitations et des tergiversations du parti au pouvoir et de son option constitutionnelle. Ils ont hâte de dire au gouvernement que, comme une majorité de Québécois fiers de l'être, ils veulent continuer à demeurer Canadiens parce qu'ils croient comme nous que le fédéralisme canadien servira mieux les vrais intérêts des Québécois. Ils ont surtout hâte d'exprimer clairement qu'ils ne sont pas dupes des stratégies référendaires — et des stratégies inspirées par Doris Lussier — de ce gouvernement qu'on retrouve en face.

En particulier dans Argenteuil, les électeurs ont hâte de démasquer l'hypocrisie du Parti québécois qui reproche au chef du Parti libéral, M. Claude Ryan, de ne pas être résident du comté, alors que près d'une douzaine des membres du cabinet de ce gouvernement sont exactement dans la même situation. Encore là, ne faites pas ce qu'on fait, faites ce qu'on dit. A titre d'exemple, mentionnons le député de Dorion et ministre des Consommateurs. Mentionnons le ministre délégué à l'énergie et député de Mille-Iles qui tous deux habitent des châteaux à l'extérieur de leur comté. Mentionnons encore le député de Fabre et ministre d'Etat au développement économique, le député de Bourget et ministre d'Etat au développement culturel, tous les gros "superministers", le député de Matane et ministre des Terres et Forêts qui m'a précédé tantôt, le député de Maisonneuve et ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire. Ce sont là des gens qui tous n'habitent pas leur comté. Et le premier ministre, lui! Non seulement le premier ministre n'habite pas le comté de Taillon qu'il représente à l'Assemblée nationale, mais saviez-vous qu'en 1970, lorsqu'il était candidat du Parti québécois dans le comté de Laurier, il n'était pas résident du comté de Laurier? En 1973, à titre de candidat du Parti québécois dans le comté de Dorion, il n'était pas non plus résident du comté de Dorion. C'est la troisième fois que le premier ministre se présente dans un comté où il n'a aucune attache, où il ne réside pas, et ce sont ces mêmes gens qui vont venir reprocher au chef du Parti libéral d'être candidat du parti dans le comté d'Argenteuil. En fait, M. le Président, qu'on soit sérieux. Le leader du gouvernement et le ministre du Travail sont allés s'époustoufler à la convention du candidat péquiste dans Argenteuil, et c'est tout ce qu'on a pu trouver à dire. Je les inviterais à faire pression sur le premier ministre pour que les élections dans Argenteuil comme dans Jean-Talon aient lieu le plus tôt possible. Ils verront bien ce que les gens d'Argenteuil et de Jean-Talon pensent de leurs beaux discours.

M. le Président, les électeurs d'Argenteuil en particulier voudraient également faire savoir au gouvernement qu'ils ne se contenteront plus de beaux discours et de promesses quant au parachèvement de l'autoroute A-50 vers Mirabel. Depuis plus de deux ans qu'il est au pouvoir, le Parti québécois n'a même pas profité des millions de dollars disponibles du gouvernement fédéral dans le cadre d'une entente fédérale-provinciale signée en 1972. J'entendais le ministre des Terres et Forêts tantôt faire de la démagogie sur les investissements du fédéral. Encore faudrait-il que lorsque le fédéral signe des ententes avec le gouvernement du Québec et que le gouvernement du Québec est maître d'oeuvre de ces travaux, le gouvernement du Québec ne prenne pas deux ans à inaugurer les travaux. (17 h 40)

Dans le comté de Jean-Talon, M. le Président, la population a hâte de dire au gouvernement ce qu'elle pense de la politisation de la fonction publique. Les fonctionnaires de carrière qui habitent

le comté, oui, n'acceptent pas que la valeur de leur travail soit mesurée à partir de leur allégeance au Parti québécois. Ils n'acceptent pas, non plus, que, dans plusieurs cas, dans plusieurs ministères, ils doivent subir les caprices partisans du personnel politique des cabinets de ministres. D'ailleurs, comment expliquer la présence dans la haute fonction publique d'un aussi grand nombre de candidats défaits du Parti québécois à la dernière élection? Les jeunes intéressés à faire carrière dans l'administration publique québécoise en sont même venus à croire qu'ils doivent posséder leur carte du Parti québécois pour pouvoir y accéder. Tout cela d'un gouvernement qui nous prêchait et qui nous prêche encore l'assainissement de l'administration gouvernementale. Ce sont là des messages, M. le Président, que les personnes des comtés de Jean-Talon et d'Argenteuil voudraient bien avoir l'occasion de passer au gouvernement et ce, le plus tôt possible.

Il ne faut pas se surprendre, comme je le disais tantôt, que le premier ministre n'ait pas encore déclenché les élections partielles dans ces deux comtés, conscient qu'il est du résultat qui l'attend. Mais, justement, il ne perd rien pour attendre. Tôt ou tard, il devra faire appel aux électeurs et je parie aujourd'hui, M. le Président, que ce sera probablement en pleine campagne fédérale, car le premier ministre est très habile; il verra là une façon de privilégier son parti. Je suis sûr qu'il n'hésitera pas à saisir l'occasion.

Mais, quelle que soit la date, une chose est certaine: les comtés de Jean-Talon et d'Argenteuil continueront de faire confiance au Parti libéral du Québec. Dans le cas du comté d'Argenteuil, ce n'est pas seulement un député que les électeurs se donneront, mais c'est aussi le prochain premier ministre du Québec. C'est-y assez fort cela, M. le Président? C'est-y assez clair? J'inviterais...

Des Voix: L'ayatollah!

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Oui. Cela vous achale? Je le répète, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Une Voix: Restez tranquilles, il n'est pas encore arrivé.

M. Gratton: Je répète, M. le Président, que...

Une Voix: L'ayatollah Ryany.

Une Voix: II va vous organiser.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Des deux côtés de la Chambre.

M. Gratton: Je dis donc, M. le Président, que le prochain député dans le comté d'Argenteuil sera également le prochain premier ministre du Québec. J'insiste pour dire que, contrairement à l'actuel premier ministre, il n'en sera pas un qui prêche une chose et qui fait le contraire. J'inviterais le premier ministre actuel à l'imiter à ce point de vue là.

Une Voix: Votez Parti québécois en 1976.

Une Voix: Ma décision est irrévocable.

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Gratton: M. le Président...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Dois-je répéter, M. le Président, ma conviction profonde que le prochain député d'Argenteuil, M. Claude Ryan, sera le prochain premier ministre du Québec. M. le Président, une autre fois peut-être?

M. le Président, pourrais-je demander autant de sévérité de votre part que celle que vous avez exercée à l'endroit du député de Shefford? Cela fait quand même cinq minutes que je suis debout et je n'ai pas eu l'occasion...

Le Président suppléant (M. Vaillancourt, Jon quière): Je pense que votre analogie, M. le député de Gatineau, est extrêmement boiteuse et que le député de Shefford, tout à l'heure, a fait des choses beaucoup plus graves que celles que sont en train de faire les députés actuellement des deux côtés ce cette Chambre. Je pense que votre comparaison n'est pas à sa place.

M. Gratton: Puis-je vous dire, M. le Président, que je ne partage pas du tout le jugement que vous faites et qu'en l'occurrence les remarques des députés d'en face m'indisposent énormément. Je vous inviterais, à titre de président de cette Assemblée, à bien vouloir faire respecter l'ordre tel qu'il est prévu dans le règlement. Merci.

M. le Président, j'ai l'habitude de profiter du débat élargi qui est celui du discours inaugural pour soulever certains des problèmes que connaît le comté que je représente à l'Assemblée nationale car je suis un de ceux qui croient que le premier devoir d'un député, c'est de faire valoir auprès du gouvernement le point de vue des gens qu'il représente. Bien entendu, ce travail se fait surtout au niveau de l'administration courante, à tous les jours. Mais il est utile que les dossiers importants d'un comté ou d'une région trouvent à l'occasion un écho à l'Assemblée nationale. Or, M. le Président, chez nous comme ailleurs, nous avons également eu droit à de nombreuses promesses du Parti québécois durant et depuis la dernière campagne électorale. Promesses qui, dans les faits, ont été suivies par des actions complètement contraires.

On a parlé de décentralisation, de remettre le plus de pouvoirs possible aux autorités locales. Mais, dans les faits, dans l'Outaouais, on a assisté à une véritable chasse aux sorcières pour tenter, par tous les moyens possibles, de discréditer les autorités locales. On a d'abord eu la mise en tutelle de la commission scolaire Outaouais-Hull, laquelle a finalement été jugée invalide par les tribunaux. L'enquête sur son administration et sur l'administration de la commission scolaire régionale de l'Outaouais, parce que la commission scolaire Outaouais-Hull et trois autres commissions scolaires de la région refusaient de se plier à une directive du ministre de l'Education qui aurait entraîné une hausse considérable des taxes pour les contribuables de l'Outaouais, s'est avérée futile aux yeux du ministre et de son collègue, député de Hull puisqu'elle ne devait révéler absolument rien d'anormal.

On a également eu l'enquête sur l'administration de la Commission de transport de la communauté régionale de l'Outaouais, enquête qui dure depuis plus d'un an mais où le gouvernement refuse toujours de rendre les conclusions publiques. C'est à se demander si le gouvernement n'est pas, là aussi, déçu de n'avoir rien trouvé de répréhensible. Nous avons assisté au limogeage du président de la Communauté régionale de l'Outaouais, M. Jean-Marie Séguin, contre la volonté unanime de tous les maires de la région. D'ailleurs, c'est à l'occasion de ce limogeage que le ministre des Affaires municipales nous avait promis une réforme globale de la Loi de la communauté régionale de l'Outaouais, réforme que nous attendons toujours mais dont on ne parle plus depuis déjà un an.

On a eu droit aussi à une dénonciation publique, de la part du ministre des Travaux publics et député de Hull, de l'administration du bureau d'enregistrement du district de Hull. Le député de Hull avait même réclamé publiquement une enquête du ministre de la Justice. Depuis plus d'un an, M. le Président, je tente sans succès de savoir du ministre de la Justice où en est rendu ce dossier. Il est évidemment difficile pour lui d'admettre que les accusations de son collègue des Travaux publics étaient encore une fois sans fondement.

Quant au développement du réseau routier régional alors que le gouvernement libéral antérieur avait amorcé sa construction dans le cadre d'une entente fédérale-provinciale signée en 1972, tout est resté en plan depuis l'élection de 1976. Il y a bien eu l'élargissement de la rue Saint-Raymond et la construction de certaines structures dans le comté de Papineau pour l'autoroute A-50. Mais pas un seul kilomètre de nouvelle route n'a été inauguré depuis plus de deux ans, dans le cadre d'une entente en vertu de laquelle le gouvernement fédéral défraie 50% des coûts, M. le Président, qui sont estimés à plus de $120 millions.

Absolument rien ne s'est fait sur l'axe McConnell-Laramée pour améliorer la circulation entre Hull et Aylmer. Absolument rien non plus sur l'autoroute A-5 dont le parachèvement constitue de l'avis de tous le seul espoir de valoriser le potentiel touristique de la région de la Haute-Gatineau. Dernièrement, M. le Président, au cours de la fameuse tournée des ministres, et le ministre des Transports et le député de Hull sont venus annoncer à grand renfort de publicité que le gouvernement péquiste entend compléter ces deux projets prochainement. M. le Président, ce serait bien le comble si on ne profitait pas du fait que le fédéral en paie la moitié pour construire et réaliser ces projets qui sont essentiels pour l'avenir de la région et qui sont reconnus comme tels par tous. Il faut croire que comme au bon vieux temps de l'Union Nationale, M. le Président, on commencera les travaux juste avant les élections; il faut bien s'en rendre compte, après avoir sorti la statue de M. Duplessis des oubliettes, on sort maintenant les mêmes méthodes électorales.

C'est le "candy" électoral. C'est la montée vers le référendum. Et si, effectivement, les projets dont je vous entretiens devaient être... (17 h 50)

M. Bellemare: Je tiens à faire une rectification en vertu de nos règlements. L'honorable député vient d'accuser l'Union Nationale d'avoir eu certaines tactiques électorales. Je pense que quand, au mois d'octobre, il y avait de la neige dans le comté de Bellechasse et qu'on faisait du sarclage à ce moment, le Parti libéral était bien plus condamnable que l'Union Nationale, M. le Président.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je ne voulais sûrement pas choquer le député de Johnson par mes propos. Je disais simplement qu'autres temps mêmes moeurs. On procède par "candy" électoral, sauf que, dans le cas du gouvernement actuel, c'est peut-être un "candy" référendaire. A tout événement, M. le Président, si tel est le cas, qu'on le tienne au plus sacrant le référendum car cela presse à plus d'un point de vue, M. le Président.

Il est un autre dossier qui revêt une importance capitale pour l'avenir économique de deux régions québécoises, soit le Témiscamingue et l'Outaouais et où le gouvernement actuel traîne également les pieds. Il s'agit du projet de la route devant relier le Témiscamingue à la Haute-Gatineau dans la région de Maniwaki. Cette route trouve son importance dans le fait qu'elle ouvrira l'accès à des ressources forestières couvrant une superficie de 1524 milles carrés, dont la qualité et l'ampleur sont tellement considérables qu'elles nécessiteront l'implantation d'un complexe forestier intégré localisé dans la Haute-Gatineau, qui nécessitera des investissements qu'on évalue à un minimum de $60 millions. A lui seul le complexe entraînerait la création directe de 400 nouveaux emplois, en plus de maintenir 200 emplois existants dans une industrie déjà en place et qu'on prévoit intégrer au complexe.

Inutile d'insister sur l'importance du projet pour une région comme la Haute-Gatineau où la main-d'oeuvre spécialisée abonde, mais où, à certaines périodes de l'année, environ 50% des travailleurs sont en chômage. Ce dossier fait l'objet d'études au ministère des Terres et Forêts et à la Société d'aménagement de l'Outaouais depuis maintenant plus de cinq ans. Une entente auxiliaire Canada-Québec signée en juin 1977 prévoit même pour sa construction une somme de $14,4 millions dont 60% payables par le gouvernement fédéral. Le maître d'oeuvre, M. le Président, est le gouvernement du Québec. Il ne s'agit donc pas de demander de faire pression sur le gouvernement fédéral, mais bien sur le gouvernement du Québec pour que les travaux commencent au plus tôt. Ils sont d'ailleurs commencés dans la région du Témiscamingue, mais malheureusement, pour des raisons qu'on ignore mais que certains devinent, rien ne s'est encore fait dans l'Outaouais.

J'invite le ministre des Terres et Forêts et le ministre d'Etat à l'aménagement à mettre fin à leurs hésitations dans ce dossier. Qu'on accepte d'abord la recommandation des experts-conseils de faire déboucher cette route dans les environs de Maniwaki et nulle part ailleurs. Ceci permettra de commencer tout de suite la préparation des plans et devis de façon que la construction soit mise en chantier dans les meilleurs délais. Il faudrait aussi que le ministère des Terres et Forêts accepte le principe de révoquer les droits des concessionnaires forestiers présentement en vigueur dans le territoire et qu'il réserve ce territoire d'approvisionnement exclusivement au futur complexe industriel forestier.

Selon les experts, cette garantie d'approvisionnement constitue un élément essentiel pour attirer les investissements nécessaires à la réalisation du complexe. Il faudrait, bien entendu, que dès cette année le ministère des Terres et Forêts réserve les budgets appropriés pour que les travaux de construction de la route forestière puissent débuter au cours de la prochaine saison estivale.

Finalement, comme les études démontrent que l'exploitation de la matière ligneuse devra être de type intégré, c'est-à-dire que tous les arbres, résineux et feuillus, devront être récoltés simultanément, le ministère devra amender les règlements actuels régissant l'exploitation des bois. J'en ai pour trente secondes, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: II est essentiel et impératif que le ministère prenne des positions définitives sur tous ces points. A mon avis, le gouvernement ferait preuve d'irresponsabilité impardonnable s'il devait hésiter encore longtemps dans ce dossier. Il y a là une occasion unique pour le gouvernement du Québec, avec la participation financière du gouvernement fédéral, de revaloriser deux régions du Québec qui en ont grandement besoin. J'invite donc tous les intéressés et surtout le ministre d'Etat à l'aménagement à éviter de poser quelque geste susceptible d'en retarder la réalisation.

Le Président: M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Compte tenu de l'heure, M. le Président, puis-je demander la suspension du débat?

Le Président: Y a-t-il consentement?

Une Voix: Nous l'accordons.

Le Président: A 20 heures ou à 20 h 15?

M. Gendron: A 20 heures.

Le Président: M. le député de Lac-Saint-Jean, à 20 heures, vous aurez le droit de parole.

L'Assemblée suspend ses travaux en conséquence jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 57

Reprise de la séance à 20 h 13

La Vice-Présidente: A l'ordre, mesdames et messieurs!

C'est le député de Lac-Saint-Jean qui avait demandé la parole, au moment de la suspension des travaux de cette Assemblée.

M. le député.

M. Marchand: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de règlement, M. le député?

M. Marchand: Je voudrais vous demander une directive, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Laurier.

M. Marchand: Je voudrais vous demander à quelle heure on avait proposé la reprise de la séance? Est-ce que c'était à 20 heures?

La Vice-Présidente: M. le député, vous savez comme moi que la suspension avait été demandée et que nous devions reprendre nos travaux à 20 heures.

M. Marchand: Alors, Mme la Présidente, je voudrais vous faire remarquer que, puisque nous avons perdu douze minutes, si vous les multipliez par 110 députés, nous avons perdu exactement 22 heures de travail.

La Vice-Présidente: Merci de vos considérations, M. le député de Laurier.

M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je constate, Mme la Présidente, que le député de Laurier est fort en calcul.

M. Marchand: J'ai additionné plus souvent que vous, dans ma vie.

La Vice-Présidente: M. le député de Laurier, puis-je vous demander, puisque nous avons déjà perdu tant de temps, de commencer immédiatement?

M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente.

On sait que le règlement de cette Chambre, lors du débat sur le message inaugural, nous permet de parler sur n'importe quel sujet; ce n'est pas, en somme, un débat restreint à un seul sujet. Malheureusement, notre règlement est souvent interprété par certains comme si parler sur n'importe quel sujet, ça voulait signifier: dire n'importe quoi, sans se soucier de la véracité de ces propos, sans se faire de scrupule à colporter menteries et demi-vérités, sans se gêner pour déformer grossièrement la pensée et les thèses d'autrui. Je dois dire que cette réflexion m'est venue, Mme la Présidente, en entendant les discours des deux chefs de l'Opposition. A les écouter, en effet, on en arrive à la conclusion que le sens du règlement, c'est de dire n'importe quoi. C'est regrettable, à mon sens, c'est même déplorable, compte tenu du poste que ces messieurs occupent.

On leur permettra donc quelques commentaires et remarques sur les propos des Oppositions, à l'occasion de ce débat sur le message inaugural. Comme ces Oppositions, soit le Parti libéral ou l'Union Nationale, ne se gênent pas pour accabler le gouvernement, pour le submerger sous un flot de critiques négatives, je ferai donc cet exercice sans aucun remords, Mme la Présidente.

Le chef de l'Opposition officielle, dans son discours, dans son intervention, a beaucoup insisté sur le fait que, selon lui, le gouvernement actuel est un gouvernement d'images, un gouvernement de mythes, et il a tenté, dans sa longue intervention, de le démontrer. Or, en l'entendant, il m'est revenu à l'esprit l'histoire évangélique de la poutre et de la paille dans l'oeil. Le chef de l'Opposition scrutait avec minutie la paille dans l'oeil du voisin — dans l'oeil du gouvernement — mais il ne se rendait pas compte de la poutre qu'il y avait dans son oeil. Car s'il y a une constatation qui, à mon sens, crève les yeux et qui est l'évidence même, c'est celle-ci. Si le gouvernement, selon l'Opposition — et c'est fort discutable — est un gouvernement d'images et de mythes, il nous faut convenir que nous avons devant nous une Opposition d'images, une Opposition de mythes, une Opposition de clichés usés, une Opposition de lieux communs, de banalités, de redites, une Opposition, comme le dit mon collègue, miteuse, une Opposition de cassettes. On nous reproche et on reproche au gouvernement de véhiculer des images et des mythes. Je le répète, c'est fort discutable. Et en nous le reprochant et au moment même où on nous le reproche, on diffuse soi-même des images et des mythes. Au moment même où on nous le reproche, on radote de vieux clichés insignifiants.

Je voudrais donner un exemple, Mme la Présidente, de clichés, d'images, fausses d'ailleurs. C'est le cliché, c'est le mythe de la confusion, l'image fausse de la confusion véhiculée par l'Opposition libérale et l'Union Nationale aussi. Depuis deux ans, depuis en fait la prise du pouvoir, l'accession au pouvoir du Parti québécois, sans relâche, sans répit, l'Opposition officielle claironne partout que notre option est confuse, qu'elle est ambiguë et qu'elle est contradictoire, et le chef de l'Union Nationale n'a pas cessé de le répéter dans son intervention. Nous entretenons, disent-ils, la confusion sur notre option. Notre option est ambiguë, elle n'est pas claire.

Je dis, Mme la Présidente, depuis deux ans, depuis novembre 1976 seulement, parce que, avant 1976, avant novembre 1976, avant notre accession au pouvoir, c'est extraordinaire comme notre option était claire. C'est extraordinaire comme notre option était précise, qu'elle ne comportait pas d'ambiguïté, qu'elle ne comportait pas de confusion. Je sais d'expérience — plusieurs de mes collègues aussi — ayant vécu comme militant les élections de 1970 et de 1973 et comme candidat celles de 1976, que pendant tout ce temps et depuis, en fait, la fondation du Parti québécois en 1968 — pendant tout ce temps jusqu'en 1976, jusqu'aux élections de 1976 — jamais je n'ai entendu dire de la part d'un libéral, y compris les chefs: Votre option est confuse, votre option est ambiguë; ce n'est pas clair, précisez-la, clarifiez-la, c'est obscur. Jamais je n'ai entendu de tels propos de la part des Oppositions depuis la fondation du parti jusqu'à l'accession au pouvoir en novembre 1976. Ni en 1970, ni en 1973, ni en 1976. (20 h 20)

Au contraire, elle était étonnamment claire, notre option. Elle était tellement claire et tellement précise qu'on consacrait tout le temps, du côté de l'Opposition, à essayer de la discréditer, de la ternir, de la déformer, mais on ne perdait pas une seule minute pour nous sommer de la définir. Elle était claire. Depuis deux ans, depuis l'accession au pouvoir du Parti québécois, tout d'un coup l'Opposition a décrété que notre option était confuse, imprécise. Subitement, ce fut l'éclair de génie, la révélation d'en haut: notre option n'était pas claire.

Depuis ce grand moment, depuis cette grande découverte, depuis ce grand tournant dans l'évolution intellectuelle du Parti libéral, tellement passionnante par ailleurs, les libéraux et l'Union Nationale aussi ne cessent de propager le mythe de la confusion. Pourtant, Mme la Présidente, est-il besoin de le dire, notre option n'a pas substantiellement changé depuis 1967. Essentiellement, c'est toujours la même option désignée depuis 1967 par la même expression: souveraineté-association.

Je pourrais citer bien des documents à partir de 1967 pour démontrer qu'essentiellement notre option n'a pas changé. C'est toujours la même.

Les diverses éditions du programme du parti en 1969, celui de 1970, celui de 1972, "Option Québec 1967", le manifeste de 1972 "Quand nous serons vraiment chez nous", les diverses éditions du parti 1971, édition 1975, la déclaration du premier ministre en Chambre le 10 octobre 1978, le manifeste du conseil exécutif national paru récemment "D'égal à égal", on pourrait reprendre tous ces documents et démontrer que, substantiellement, l'option du parti n'a pas changé, est essentiellement demeurée la même.

La confusion, par conséquent, M. le député de Laurier, n'existe pas. L'ambiguïté n'existe pas, sauf dans votre esprit. La confusion n'existe que dans l'esprit de l'Opposition. Elle n'existe pas dans l'esprit des militants du parti et elle n'existe pas non plus, cette confusion, dans l'esprit des citoyens du Québec. Quand on les rencontre, car on les rencontre aussi souvent que ces messieurs et collègues de l'Opposition, quand on rencontre les citoyens du Québec et qu'on leur explique notre option, c'est étonnant comme ils sont loin de la trouver confuse, de la trouver ambiguë. Ils la trouvent très claire et plus ils la connaissent cette option — je parle des citoyens du Québec évidemment; je ne parle pas des députés de l'Opposition — plus ils y donnent leur adhésion.

Les progrès constants et réguliers de notre option illustrent ce fait; quand notre option est bien connue des citoyens, les adhésions se multiplient et les adhésions augmentent. C'est ce qui inquiète grandement, d'ailleurs, les libéraux et les Oppositions. C'est pourquoi ils s'efforcent, depuis deux ans, d'enraciner, d'essayer d'enraciner dans l'opinion publique, d'inoculer dans l'opinion publique le mythe de la confusion. C'est pourquoi, aussi, ils réclament sans cesse, depuis deux ans, la tenue immédiate du référendum, c'est parce que notre option ne cesse de progresser chez nos concitoyens québécois. L'Opposition, par conséquent, est une Opposition d'images. C'est une Opposition de clichés. C'est une Opposition de mythes, de lieux communs.

On pourrait donner bien des exemples de ces clichés que véhicule l'Opposition. Celui, par exemple, de la troisième voie, le mythe de la troisième voie, quand on sait fort bien qu'il n'y a pas de troisième voie possible et qu'il n'y en aura pas non plus et que toute l'histoire des négociations constitutionnelles est là pour le démontrer et pour illustrer l'impossibilité de cette troisième voie. Le chef du Parti libéral est également là pour le dire que la troisième voie est impossible. Du moins, il le disait autrefois, en 1967, par exemple, en commentaire au choix historique que M. Lévesque venait de faire. Claude Ryan, à l'époque, fait le commentaire suivant. Claude Ryan, le chef du Parti libéral. "On a discuté, écrit-il, jusqu'à maintenant comme s'il pouvait y avoir quatre, cinq ou six options différentes. C'était une situation commode pour ceux qui voulaient éviter de choisir clairement." Remarquez, c'est génial, c'est merveilleux. "C'était une situation commode pour ceux qui voulaient éviter de choisir clairement — c'est M. Ryan qui écrit cela.

M. Marchand: D'accord.

M. Brassard: Le député de Laurier est d'accord.

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. le député.

M. Brassard: Je continue, Mme la Présidente.

M. Marchand: Mme la Présidente, je pourrais vous dire que le député de Laurier répondra en temps et lieu.

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: J'attends avec impatience, Mme la Présidente, l'intervention brillante du député de Laurier. M. Ryan continue: "Le mérite principal de M. Lévesque, c'est de nous rappeler qu'en définitive les choix se réduiront à deux. Il n'y a pas de troisième voie, M. Ryan a bien raison.

Une Voix: Avait.

M. Brassard: Avait raison. L'unique penseur du Parti libéral qui tente présentement de cogiter à cette troisième voie et qui livrera peut-être à ses ouailles un jour le fruit de ses vastes pensées pensait ainsi il y a un peu plus de dix ans. Prétendre qu'il y a une troisième voie, Mme la Présidente, c'est berner et duper la population. L'Opposition est une Opposition d'images et de mythes, elle prétend que le gouvernement est un gouvernement d'images, ce qui est très discutable, mais c'est aussi une Opposition d'images et de mythes et de lieux communs.

J'aimerais également en citer un autre de ces clichés ou de ces mythes. Il est surtout particulier à l'Union Nationale, celui-là. C'est le cliché de l'Etat pieuvre, le cliché de l'Etat accapareur, de l'Etat cannibale mangeur d'hommes, de l'Etat inter-ventioniste, de l'Etat qui s'ingère partout, de l'Etat, comme dirait Nietzsche, le plus froid des monstres froids, de l'Etat qui procrée des sociétés d'Etat, cette engeance monstrueuse qui vit en parasite de la société. C'est le cliché préféré du chef de l'Union Nationale. (20 h 30)

Pourtant, il faut dire d'abord que cet Etat est incomplet, que c'est un demi-Etat; ce sera terrible quand ce sera un Etat tout entier. Mais il faut surtout souligner le rôle important, considérable joué par les partis d'Opposition, le Parti libéral et le parti de l'Union Nationale, dans l'accroissement de la place de l'Etat dans notre société, le rôle considérable joué par ces partis dans la mise en place des sociétés d'Etat québécoises que nous connaissons présentement. Je voudrais procéder à une brève énumération. C'est édifiant.

Prenons les états financiers des entreprises du gouvernement du Québec, simplement la table des matières. Je ne vous les citerai pas toutes, il y en a beaucoup. Enfin, en voici quelques-unes,

quelques sociétés d'Etat: la Caisse de dépôt et placement, qui a été créée par le gouvernement libéral de M. Lesage; l'Hydro-Québec, qui a été créée par le gouvernement de M. Godbout, en 1942 ou en 1943, et qui a été renforcée considérablement par le gouvernement de M. Lesage avec la nationalisation de l'électricité; l'Office de radio-télédiffusion du Québec, qui a été créé par un gouvernement de l'Union Nationale, M. le député de Bellechasse, en 1969; l'Office du crédit agricole, qui a été créé par M. Duplessis, de l'Union Nationale, est une société d'Etat; la Raffinerie de sucre du Québec, a été créée en 1943 par un gouvernement libéral mené par M. Godbout.

J'en passe quelques-unes. La Régie des rentes du Québec, sous le gouvernement de M. Lesage, du temps de la révolution tranquille. Je vois M. le député de Laurier qui acquiesce. SIDBEC et ses filiales, SIDBEC le souffre-douleur, la bête noire du chef de l'Union Nationale, a été créée en 1968 par un gouvernement de l'Union Nationale.

Des Voix: Ah!

M. Brassard: La Société de développement de la baie James a été créée par le gouvernement de M. Bourassa en 1970; la Société de développement industriel du Québec, la SDI, a été créée en 1971 par un gouvernement libéral. REXFOR a été créée par un gouvernement libéral, par M. Lesage. Pour la Société des alcools du Québec, il faut remonter loin, à la Commission des liqueurs sous M. Taschereau en 1920. Un communiste, M. Taschereau! La Société d'exploitation des loteries et courses du Québec, en 1969, a été créée par un gouvernement de l'Union Nationale.

Des Voix: Oh!

M. Brassard: La Société d'habitation du Québec, la SHQ, a été créée en 1966/67 par un gouvernement de l'Union Nationale.

Des Voix: Oh!

M. Brassard: La Société générale de financement a été créée sous le gouvernement de M. Lesage; SOQUEM, sous le gouvernement de M. Lesage; SOQUIA, sous le gouvernement de M. Bourassa; SOQUIP, Société québécoise d'initiatives pétrolières, sous le gouvernement de l'Union Nationale en 1969.

J'en ai cité 17, Mme la Présidente. Sur les 17, 11 sociétés d'Etat ont été créées par des gouvernements libéraux, soit celui de M. Lesage soit celui de M. Bourasa, et 6 — c'est pourtant la bête noire de l'Union Nationale et de son chef, les sociétés d'Etat — ont été créées par des gouvernements de l'Union Nationale, sur les 17 que j'ai citées, dont SIDBEC, ce monstre vilipendé par le chef de l'Union Nationale.

L'Opposition est une Opposition d'images, de clichés; on le voit avec ce cliché de l'Etat accapareur. En tout cas, elle n'a pas de mémoire, elle manque de perspective historique, elle oublie vite. Ils tentent, actuellement — surtout le chef de l'Union Nationale qui a passé le plus clair de son temps, en réponse au message inaugural, sur ce sujet — de faire croire à la population que le Parti québécois a inventé l'intervention de l'Etat dans l'économie et dans la société; que le Parti québécois est le concepteur et l'inventeur de la société d'Etat comme instrument d'intervention. On voit simplement, par rénumération que j'ai faite, que c'est tout à fait le contraire. L'Opposition fait de la mythologie.

Mme la Présidente, j'essaie de démontrer —un peu comme le chef de l'Opposition officielle qui a tenté de démontrer que le gouvernement était un gouvernement d'images et de mythes — que les Oppositions sont des Oppositions d'images, de mythes et de clichés. On pourrait poursuivre l'énumération; je pense, par exemple, à ce cliché qui veut que le volet association de notre option soit une invention tout à fait nouvelle, récente, qu'on a ajoutée, comme ça, très récemment pour essayer, disent-ils, de tromper la population. On pourrait, à ce moment, citer de nombreux textes, à partir de 1967, qui démontrent que le volet association a toujours fait partie de notre option, qu'il a toujours été un élément essentiel de notre option. On pourrait parler longuement de ce cliché qui est véhiculé également par l'Opposition.

Quand il s'agit de véhiculer des images, des mythes, de l'emballage, comme le disait le chef de l'Opposition officielle dans son discours, des clichés, des trucs publicitaires et des trucs de propagande, Mme la Présidente, on n'a pas de leçon à recevoir des Oppositions, absolument pas. Avant de nous lancer la pierre — le chef du Parti libéral pourrait facilement leur apprendre cet exercice — ils devraient d'abord faire leur examen de conscience. Avant de nous accuser de manquer de franchise, de manquer de droiture et de clarté, comme le dit la motion de censure du chef de l'Opposition officielle, ils devraient commencer — et le chef externe du Parti libéral, lui, l'oint du Seigneur, devrait l'admettre — par nous donner l'exemple. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, Mme la Présidente. C'est mon devoir de député dûment élu par des Québécois d'essayer de vous faire réfléchir ou de faire réfléchir mes concitoyens très sérieusement sur le passé, le présent et l'avenir de notre société, ainsi que sur les propos du premier ministre.

Depuis ma jeunesse, j'observe tout le monde autour de moi. J'ai poursuivi toutes mes études ici, dans la ville de Québec. J'ai travaillé toute ma vie dans la belle province de Québec et surtout depuis mon élection, j'ai beaucoup écouté. Ici, dans cette Assemblée et en commission parlementaire, on parle, on parle et on parle beaucoup trop sans vraiment analyser les gros problèmes qui nous affectent aujourd'hui.

Comme vous l'avez deviné, je ne suis pas un politicien professionnel. Je n'ai pas le verbe ni la plume faciles, mais j'aime beaucoup ma profession d'arpenteur et ingénieur où je me sens plus à l'aise. Tout de même, je dois être aussi franc et aussi simple et direct que possible dans mes remarques. Je constate, Mme la Présidente, que cela ne va pas bien au Québec. Personne ne pourra nier ce fait. Il est bien vrai que les fonctionnaires fonctionnent et sont payés, que les parlementaires parlent et sont payés, mais dans le vrai monde à l'extérieur de ces murs, il y a au-delà de 300 000 chômeurs. La construction subit la pire crise qu'elle n'a jamais eue. Les hommes d'affaires, les entrepreneurs, les sièges sociaux, les experts techniques quittent notre province. Le nombre de faillites commerciales n'a jamais été aussi élevé. Même nos entreprises publiques comme SIDBEC et Marine Industrie seraient en faillite si ce n'était des subventions du gouvernement qui comblent le déficit. (20 h 40)

Nous ne sommes plus une force unie. Nous sommes maintenant profondément divisés. Nous sommes de vrais Québécois, des Québécois tout court, des Canadiens, des anglophones, des francophones et même des allophones. On a même réussi à diviser nos institutions entre les bons et les méchants. Aujourd'hui, les multinationales et les banques sont des méchants, et les petites et moyennes entreprises et les caisses populaires sont les bons. Tous ces symptômes sont l'exemple le plus clair du cancer mortel qui nous frappe, et ce cancer — il faut être très franc — c'est le nationalisme exagéré. On pourrait regarder le dictionnaire Robert et lire la définition de nationalisme, à la page 1257. Nationalisme: exaltation du sentiment national, attachement passionné à la nation à laquelle on appartient, accompagné parfois de xénophobie et d'une volonté d'isolement.

Vous aimez les slogans. Les slogans pour le nationalisme, c'est la collectivité avant toute personne. Est-il nécessaire de vous rappeler les troubles en Iran même aujourd'hui? En Ouganda, en Iran, au Tchad, etc., et même la dernière guerre mondiale? Je ne puis pas comprendre comment des hommes adultes dans le monde de 1979 peuvent croire qu'il y ait de la vertu dans un nationalisme à outrance. Le nationalisme appuyé sur la religion ou sur une race a été et demeure encore aujourd'hui la cause des guerres, de la discrimination et des plus grandes misères qu'a connues le monde.

Faisons ensemble, si cela ne fait pas trop mal, une petite revue de notre histoire récente comme examen de conscience, si vous voulez. En1967, lors du centième anniversaire de notre pays, le Canada, on méritait bien cette fête qui célébrait le travail d'un siècle de gens de bonne volonté qui ont réussi à cristalliser la mosaïque du Canada. Cette fête a duré un an. L'Expo 67, c'était une fête ouverte sur le monde dont le thème était "Terre des hommes". A cette époque, on se flattait d'être un pays fort respecté. N'oublions pas que Expo 67 a été montée par tous les Canadiens. La réalisa- tion et l'exécution de ce projet ont été faites en grande partie par les Canadiens français. A cette époque, le fait français en Amérique du Nord était plus fort que jamais, comme aujourd'hui d'ailleurs. La ville de Montréal était l'envie du monde, la deuxième ville francophone au monde, mais en plus elle bénéficiait d'une population importante d'anglophones et de ses institutions.

Qui est arrivé, Mme la Présidente? Le bon vieux général de Gaulle est arrivé 200 ans en retard pour faire la reconquête de la Nouvelle-France. Celui qui n'a jamais gagné de bataille, plein de rancoeur pour les batailles perdues et plein de jalousie à l'endroit de Churchill, aurait fait la conquête de la Nouvelle-France. Il a dû constater que les Anglais n'y étaient plus, mais c'est à ce moment-là qu'on a réveillé cette bête terrible et incontrôlable qui est le nationalisme exagéré. En effet, c'était le monde à l'envers. Ces braves nationalistes et patriotes étaient drôlement absents quand les Canadiens ont sauvé la France et le général dans deux guerres mondiales.

Mme la Présidente, je ne pourrai jamais pardonner aux Québécois de ne pas avoir arrêté cette affaire dret-là, comme on dit, et de n'avoir pas dénoncé cet outrage. La seule personne qui a eu le courage, le coeur et les "guts" de répondre en pleine face à ce général a été Jean Drapeau. Il a mon admiration éternelle pour ce geste de courage. Quel affront, quelle insulte aux Canadiens, à nos ancêtres et à nos soldats! En plein milieu de notre fête du centenaire, on a déchaîné cette bête qu'est le nationalisme. Qu'est-ce qu'on a récolté quelques années plus tard? Le premier ministre du Canada, lui-même Canadien français, insulté dans les rues de Montréal. On a eu des bombes, des enlèvements et des meurtres. C'est la réalité. Vous avez peur de la réalité?

En passant, je suis fier de dire, comme la grande majorité de la population, d'ailleurs, que j'ai appuyé pleinement les actions prises par les gouvernements provincial et fédéral pour arrêter ce terrorisme. C'est déplorable de constater que certaines gens haut placés dans notre société défendent la cause de ces terroristes. Quiconque s'identifie à leur défense porte une très grande responsabilité vis-à-vis de la population. Messieurs, il y a tellement de causes nobles qui cherchent des champions!

Après cette période, ce fut relativement tranquille pour quelques années. Maintenant, semble-t-il, on a oublié les leçons du passé. Erreur de parcours, endormis par les promesses d'un bon gouvernement, aujourd'hui, nous nous retrouvons avec un gouvernement ultranationaliste en place. Ce gouvernement essaie de cacher sa nouvelle religion sous le couvert de la souveraineté-association. (20 h 50)

Dans cette nouvelle religion péquiste, le seul dieu est le pouvoir et le diable, c'est Ottawa et les Anglais. On a même des martyrs, madame: François Schrim, les frères Rose et les felquistes nouvellement arrivés qu'on va bientôt béatifier. Ce n'est pas pour rien qu'ils sont revenus. Mme la Présidente, qu'est-ce que le gouvernement essaie

de cacher sous le déguisement de la souveraineté-association? Pour l'amour de notre bien-être et celui de nos enfants ou seulement pour l'amour de nos biens physiques et de votre confort, ouvrez-vous les yeux et soyez méfiants face à cette duperie. Ne voyez-vous pas que la souveraineté-association est seulement le nationalisme à deux personnalités, à deux visages?

La souveraineté signifie l'indépendance, la séparation, le vieil esprit des patriotes de 1837 avec la tuque, la pipe et le fusil. L'association, madame, signifie le bon confrère (confédération), le businessman, le Nord-Américain, le confort du condominium en Floride. En réalité, qu'est-ce que c'est, cette affaire de deux visages ou deux personnalités? Cela ne prend pas un psychiatre pour voir que c'est tout simplement de la schizophrénie. Je ne voudrais pas prêter de la mauvaise foi à tous les péquistes, mais cela m'inquiète beaucoup que le gouvernement qui gère nos affaires soit pris dans ce conflit de personnalités. On se pose la question, madame: Est-ce que c'est le businessman nord-américain qui prend les décisions finales ou est-ce que c'est le patriote de 1837? Malheureusement, madame, et de toute évidence, c'est le patriote qui prend les décisions. Les exemples sont nombreux et je veux vous en citer seulement quelques-uns.

Par exemple, la loi 101, c'est tout de même une loi de discrimination contre les minorités. Elle a été trouvée discriminatoire en Cour supérieure et même en appel. Est-ce normal, madame, pour un peuple supposément arrivé à la maturité d'imposer des restrictions complètement ridicules à sa minorité? Qu'est-ce qu'il arriverait si le gouvernement de l'Ontario prohibait l'affichage d'annonces en français dans les villes frontalières comme Cornwall, Alexandria ou Mattawa? En éducation, c'est rendu maintenant un fait ou un décret du bon gouvernement que les enfants anglophones ou allophones sont capables d'apprendre le français à partir de l'âge de cinq ans. Cependant, les enfants francophones eux ne peuvent apprendre la langue seconde — je ne sais pas qui a marqué cela, parce que c'est un tabou, ils n'ont pas le droit d'apprendre une autre langue que le français — que beaucoup plus tard. Est-ce parce qu'ils sont moins fins ou parce qu'ils sont beaucoup plus intelligents?

Mme la Présidente, on n'a jamais su dans la province de Québec comment donner à la population ce qu'elle voulait vraiment en éducation. Les parents francophones du Québec veulent d'abord que leurs enfants soient éduqués dans leur langue maternelle, mais ils veulent aussi qu'ils apprennent l'anglais pour être capables de faire des affaires, de voyager et d'entrer en concurrence avec le reste de l'Amérique du Nord. Aucun gouvernement n'a jamais réussi à leur donner cela, avec le résultat que beaucoup de francophones ont été dirigés par leurs parents vers les écoles anglaises là où telles écoles existaient.

Entre parenthèses, Mme la Présidente, savez-vous qu'un enfant anglophone venant de l'extérieur de la province, victime d'une rupture fami- liale et qui se retrouve dans un foyer nourricier au Québec temporairement se voit interdire l'accès à l'école anglaise? J'ai eu à m'occuper d'un de ces cas. Le ministre de l'Education a personnellement refusé d'agir. Il a fallu avoir recours au Protecteur du citoyen. C'est bel et bien arrivé cette année, en 1979, nommée par ce bon gouvernement l'année de l'enfance. Mon oeil!

Le projet de loi no 96, qui veut enlever à peu près tous les pouvoirs aux commissions scolaires locales, ce n'est pas simplement de la discrimination contre les commissions scolaires anglophones, mais aussi contre toutes les commissions scolaires. On a vu, tout juste avant Noël, la loi 124 qui empêchait l'achat par des Canadiens du Nou-veau-Brunswick d'une compagnie de fiducie française installée à Montréal. Et tout dernièrement, on a vu l'affaire ridicule du fameux arrêt-stop. Qui mène la barque de l'Etat?

Mais le pire de tout cela, c'est la politique nationaliste industrielle ou économique. Aveuglé par le nationalisme dans la pensée, on a créé de grandes entreprises de la couronne: SIDBEC, Marine Industrie, etc. On voit aujourd'hui le désastre de ces décisions. Nous sommes obligés, Mme la Présidente, tous les ans, de prendre des millions de dollars pour couvrir le déficit. Ces entreprises n'ont jamais fait de profits et n'en feront probablement jamais. Qu'est-ce que nous avons aujourd'hui? On n'a pas appris par le passé, nous l'avons la SNAQ, la Société nationale de l'amiante du Québec. (21 heures)

Mme la Présidente, notre budget est déficitaire d'au-delà de $1 milliard; cela veut dire en termes communs que nous sommes dans le trou! En plus de cela, nous voulons l'acheter! En plus d'être dans le trou, on va être les seuls propriétaires de ce trou et pour longtemps. Ce raisonnement du patriote de 1837 va nous ruiner. Nous allons emprunter des centaines de millions sur les marchés japonais et allemand qu'on va payer en double considérant la dévaluation du dollar canadien et les intérêts. Pour faire quoi, au juste? Pour faire du nationalisme.

La compagnie General Dynamics est morte de rire. Pensez-vous qu'elle va réinvestir cet argent au Québec? Pas un seul job ne sera créé par cette folie. On va même se ramasser avec une usine de transformation de fibre non pas chez nous, mais en Allemagne. Nous ne pouvons même pas faire profiter une industrie de Sorel et on essaie de nous convaincre que nous allons faire de l'argent avec une usine en Allemagne. Maudit que vous êtes fous, vous autres! C'est de la folie pure!

Les travailleurs d'Asbestos, chauffés à blanc de sympathies nationalistes, sont bien prêts à vous appuyer, mais ils risquent de perdre leur job d'ici quelques années. Je suis à 100% pour la recherche, pour trouver des façons d'utiliser et de fabriquer des produits chez nous avec la fibre d'amiante, mais, de grâce, ne faites pas l'erreur monumentale de la nationalisation. Ce serait beaucoup mieux d'investir de l'argent dans nos universités en donnant des bourses d'étude permettant

de trouver des moyens pour utiliser davantage ces mêmes fibres d'amiante.

Un autre exemple de nationalisme exagéré. Aujourd'hui, au Québec, on se paie le luxe d'une nouvelle science qu'on appelle la démographie. Nous avons de grands professeurs d'université qui comptent les têtes des anglophones, des allopho-nes et des francophones au niveau des industries. Nous les avons même payés $60 000, notre argent, l'argent de tout le monde, pour nous faire dire qu'il y a beaucoup trop d'anglophones qui sont chefs d'entreprise, qu'il va falloir les enlever. Le nouveau critère au Québec, pour devenir chef d'entreprise, est d'être nationaliste. Je vous réfère au Devoir: L'écart anglais-français, une vision plus sombre. L'égalité des revenus: les francophones restent fortement défavorisés. Toute cette histoire est citée. Toutes ces affaires frôlent le racisme. Il n'y a pas beaucoup de racisme, juste un peu. C'est comme d'être juste un peu enceinte, pas beaucoup.

Tous ces "jouages" de chiffres font deux choses. Premièrement, cela fouette les pires émotions nationalistes des citoyens; deuxièmement, cela dit clairement aux anglophones, même s'ils sont bilingues, qu'ils ne sont pas bienvenus ici.

Ces études biaisées, nationalistes sont payées par l'Office de la langue française. On se demande, madame, si cet office est un instrument pour promouvoir le français comme langue de travail ou un instrument pour chasser les anglophones. C'est de la xénophobie pure et simple. Et on se demande pourquoi les sièges sociaux déménagent!

Juste deux pages, madame, ce ne sera pas long, deux minutes et je ne vous dérangerai plus.

La Vice-Présidente: M. le député...

M. O'Gallagher: Je ne vous dérange pas souvent, les "boys", juste deux minutes de plus; d'accord? Merci.

Mme la Présidente, tout dernièrement on a eu une crise à l'Université McGill. Nos grands nationalistes ont décidé de couper des subventions de recherche en médecine et de couper les fonds destinés à l'enseignement et à l'entraînement des médecins. Cela fut réglé, mais sans faire de grosses manchettes.

Depuis quand, Mme la Présidente, la recherche médicale bénéficie-t-elle seulement aux anglophones? Messieurs les universitaires, qui tombe sous le dirigisme quasi exclusif de l'Etat, je me demande si vous avez même le droit de porter ce titre d'universitaires quand cela veut dire "ouverture sur l'univers".

La Vice-Présidente: M. le député, je vais vous demander d'abréger, s'il vous plaît!

M. O'Gallagher: Oui, ce ne sera pas long.

La Vice-Présidente: Votre temps est déjà écoulé, veuillez conclure.

M. O'Gallagher: On a déposé dans cette

Chambre, la semaine dernière, un nouveau livre vert sur la recherche scientifique. Pour citer le ministre d'Etat au développement...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. O'Gallagher: ... culturel, la recherche scientifique est maintenant devenue une partie de la culture, comme si la science, dorénavant, tombait sous le contrôle de l'Etat. Le Parti québécois accuse le gouvernement d'Ottawa d'être trop centralisateur. Quelle blague! Jamais, depuis les débuts de l'histoire de notre province avons-nous eu un gouvernement aussi centralisateur que ce gouvernement que nous avons en face.

La loi 90, la loi 116 contrôlent complètement le zonage agricole et la mise en marché des produits agricoles à partir de la capitale.

Juste encore un peu... Avez-vous peur d'en entendre plus?

La Vice-Présidente: M. le député, vous avez largement dépassé le temps qui vous était alloué. Je vous ai demandé de conclure. A moins d'avoir... Si vous me dites que vous terminez sur une demi-phrase.

M. O'Gallagher: Juste un paragraphe, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député.

M. O'Gallagher: Alors, on est rendu là avec notre nationalisme exagéré en 1979.

Je ne serai pas long, seulement 60 secondes.

La Vice-Présidente: M. le député, vous savez que nous devons avoir le consentement unanime de l'Assemblée. M. le député, je ne puis pas... S'il vous plaît! M. le député, je vous demanderais votre collaboration, vous avez déjà largement dépassé votre temps. Je vous demanderais de ne plus insister. Malheureusement, je me vois forcée de faire observer le règlement. (21 h 10)

S'il vous plaît! M. le député, je demande votre collaboration! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! M. le député, j'aimerais vous faire remarquer que je vous ai déjà dit que votre temps était écoulé et que je vous accordais une demi-minute pour terminer. Vous deviez terminer à 21 h 7. Je pense que, si je contreviens au règlement sans avoir de consentement unanime, je créerai des précédents. M. le député, je demande votre collaboration. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Je pense que vous devez maintenant vous asseoir. M. le député! M. le député, je vais devoir vous rappeler à l'ordre, malheureusement.

M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, Mme la Présidente. Après avoir bien analysé le discours inaugural du premier ministre, je dois vous dire que rien ne semble très réjouissant, ni même très rassurant pour les

citoyens du Québec. Sous le couvert de quelques promesses économiques mêlées de mesures socialisantes, le premier ministre tente de paver la voie pour son futur référendum, si jamais il y en avait un. Sinon, ce serait pour son prochain scrutin. Le premier ministre a bien essayé de plaire à tout le monde de différentes idéologies allant de gauche à droite, mais il n'a tout simplement pas réussi. Il n'a semé que la confusion dans la population et surtout il a tendu et ses politiques tendront vers une pauvreté collective qui ne pourra nous échapper au rythme où vont les choses actuelles. La première question que je me suis posée au niveau de la lecture de ce budget... Excusez, de ce discours inaugural...

Une Voix: C'est un discours dans deux mois.

M. Dubois: Je reviendrai à ce moment-là. La première question qui vient à mon esprit, c'est: Comment le Parti québécois pourra-t-il financer toutes les mesures et les bonnes intentions qu'il a annoncées dans ce discours?

Une Voix: Par une saine gestion.

M. Dubois: Une saine gestion? Ce n'est pas ce que nous avons connu depuis deux ans, certainement. Il va sans dire que, si on met en pratique...

M. Goulet: Mme la Présidente, je m'excuse auprès de mon collègue du comté de Huntingdon. Je soulève une question de règlement en vertu de l'article 100. Madame, c'est assez aberrant d'entendre ce qu'on entend actuellement. Lorsque les gens d'en face se sont levés pour prononcer un discours — le député de Lac-Saint-Jean et les autres — nous les avons écoutés et ils n'ont pas été interrompus par l'Union Nationale. Mme la Présidente, je vous demande de faire respecter l'article 100 et que ces gens-là aient à notre égard la même politesse que nous avons eue envers eux aujourd'hui.

M. Brassard: Une question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Une nouvelle question de règlement, cette fois de M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Sur la même question, je tiens à faire remarquer que le député de Bellechasse m'a interrompu deux fois pendant mon discours.

M. Goulet: C'est faux, Mme la Présidente! Sur une question de privilège...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Bellechasse, sur une question de privilège.

M. Goulet: En vertu de l'article 96, Mme la Présidente, les propos que vient de tenir le député de Lac-Saint-Jean — il a peut-être fait ceci en guise de boutade — sont complètement faux. Je n'ai pas interrompu le député de Lac-Saint-Jean au moment où il a pris la parole tout à l'heure.

La Vice-Présidente: Je suis convaincue que M. le député de Huntingdon pourra faire son intervention dans le calme.

M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, Mme la Présidente. Si tout le contenu du discours inaugural est mis en pratique, il va sans dire que le coût en sera prohibitif. Vu que le monde économique nord-américain semble de plus en plus rejeter le socialisme avancé dont fait preuve le Québec dans l'élaboration de ses mesures et de ses lois, aussi bien que dans toutes ses intentions, il y a vraiment de quoi s'inquiéter, Mme la Présidente, et s'interroger sur l'ampleur du déficit qu'on accusera dans l'exercice financier 1979/80.

C'est d'autant plus inquiétant que le discours inaugural contient un élément principal qui me semble très paradoxal puisque, d'une part, le premier ministre précise que 1979 est une année où l'économie sera prioritaire et sera au coeur des préoccupations de son gouvernement et, d'autre part, dans le même discours, le même premier ministre nous indique clairement son intention d'intervenir encore plus profondément dans la vie des Québécois. Il indique aussi, d'une façon très précise, son désir de brimer davantage et de plus en plus nos droits acquis, nos libertés individuelles, les libertés que nous avons acquises à titre de citoyens canadiens libres.

Mme la Présidente, comme preuve, le gouvernement a annoncé son intention de mobiliser l'épargne des Québécois. Je pense que c'est une mesure qui ne rassure certainement personne au Québec. On ne sait pas présentement quelle forme pourrait prendre cette mobilisation. Le montant qui sera en jeu, nous ne le savons pas plus, mais il s'agit, de toute évidence, d'un nouveau contrôle étatique et d'interventions progressives de l'Etat, et également de l'effritement graduel de la démocratie au Québec, démocratie que nos pères ont toujours maintenue avec beaucoup d'orgueil et beaucoup de fierté.

Le premier ministre a aussi annoncé un projet de loi sur les biens immobiliers afin de régir les transactions qui entourent l'achat, la vente, le financement des terrains et des maisons au Québec. N'est-ce pas là une autre menace imminente pour les gens qui désirent conserver leur liberté ici au Québec, au moins un minimum de liberté d'action? Il est évident que, du berceau au cercueil, les Québécois ne seront dorénavant que des robots assujettis à une dictature de plus en plus déshumanisante. C'est vraiment le Parti québécois à son meilleur.

J'imagine que le premier ministre aurait dû avoir appris, depuis quelques années, que nos problèmes économiques sont directement reliés à l'ingérence de plus en plus grande de l'Etat et aux nombreuses contraintes que doivent subir les Québécois. Toutes les contraintes que le premier

ministre nous a annoncées dans son discours inaugural s'ajoutent aux nombreuses mesures sanctionnées durant l'exercice 1978/79. Je pense à des mesures telles que le projet de loi 90 sur la protection du territoire agricole, mesures qui dépossèdent l'agriculteur de son droit le plus fondamental, soit celui de disposer librement de ses biens, librement de son sol. En pus, on peut concevoir que, dans cette mesure, une autre atteinte fondamentale aux droits individuels est celle qu'il n'y a aucun recours dans un tribunal de droit commun pour celui qui se sentirait lésé par les mesures du projet de loi 90. Encore une fois, une autre loi où le pouvoir exécutif se substitue au pouvoir judiciaire par le biais de sa commission de contrôle, laquelle devient, du fait même, juge et partie.

Il faudrait aussi s'interroger sur le contenu du projet de loi 116, une autre réalisation péquiste, socialiste, séparatiste.

Une Voix: Non, pas séparatiste.

M. Dubois: Je pourrais ajouter communiste.

Une Voix: Non, jamais.

M. Dubois: Cela vient de votre collègue. Le projet de loi 116 sur la mise en marché des produits agricoles peut aller jusqu'à prohiber la production. Mme la Présidente, prohiber la production: c'est une mesure de plus que le gouvernement nous a apportée durant le dernier exercice financier et qui s'ajoute à la liste que le premier ministre nous a annoncée dernièrement dans son discours inaugural. Ce projet de loi 116 qui fut sanctionné dernièrement et dont l'Union Nationale est heureuse d'avoir tenu le débat vivant pendant de nombreuses semaines... (20 h 20)

Une Voix: Cela ne tape pas fort!

M. Dubois: Bien, écoutez, tapez vous autres! Mme la Présidente, cette mesure, le projet de loi no 116, encore une fois, est une loi rétroactive qui brime un droit acquis d'un groupe qui a eu un recours collectif en Cour suprême, qui a gagné sa cause. La plus haute instance canadienne a décidé que les prélevés étaient ultra vires et le bon gouvernement du Parti québécois est arrivé avec une mesure rétroactive annulant du fait même des droits ou le gain qu'ont réalisé ces agriculteurs à la Cour suprême du Canada. Encore une fois, dans le même projet de loi, aucun recours possible devant un tribunal de droit commun. On s'aperçoit qu'il y a plusieurs lois qui ont été sanctionnées au cours de 1978-1979 dans lesquelles les Québécois n'ont aucune possibilité de se défendre contre certaines mesures. C'est ce qu'on appelle vraiment un gouvernement antidémocratique, dans la force du mot.

Dans le projet de loi no 116, il faut se souvenir du rôle de la Régie des marchés agricoles. On est habitué aux régies, aux commissions de contrôle, au lieu d'avoir un système judiciaire où un produc- teur ou un contribuable peut se prévaloir de ses droits, on ne le peut plus aujourd'hui parce que tous les projets de loi indiquent que le seul recours possible c'est devant une régie ou une commission, qui est toujours juge et partie.

Le Québec des libertés, avec l'actuel gouvernement et, je pourrais dire, avec le gouvernement qui l'a précédé, c'est devenu aujourd'hui un Québec avec une administration totalitaire, un Québec de plus en plus socialiste, un Québec qui approche souvent le communisme et qui se situe entre la Suède, présentement, et la Russie, à peu près.

Je pense que les Québécois en ont assez de se voir brimés dans leurs droits et dans leurs libertés. Je pense que tous ont appris, à l'école, que, pour vivre dans un pays libre, il fallait s'assurer de l'existence et de la conservation de trois pouvoirs principaux: le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Il fallait aussi conserver un mur étanche entre ces trois pouvoirs afin de s'assurer d'un maintien et d'un minimum de droits et de libertés. Mais, dans le contexte que l'on connaît et selon les tendances actuelles, on tente d'éliminer le judiciaire en créant des régies, des commissions ou tout autre corps formé de bureaucrates. Au lieu de spécifier tout simplement qu'il n'y a pas de droit d'appel dans les projets de loi, qu'il n'y a pas d'appel devant un tribunal de droit commun, on nomme ces régies et ces commissions et on leur donne des pouvoirs de juge et partie. C'est un danger et une menace pour notre démocratie. Il est évident que l'exécutif, présentement, contrôle le législatif et aussi bien le judiciaire a priori.

Lorsque les juges et les avocats réussissent à contourner les clauses privatives, celles qu'on appelle les clauses qui défendent les droits d'appel, et amènent les dossiers devant les tribunaux de droit commun par de savantes procédures judiciaires, à ce moment-là, le gouvernement légifère d'une façon rétroactive et annihile l'action du pouvoir judiciaire.

Donc, nous sommes à l'époque où l'exécutif contrôle et le législatif et le judiciaire. Résultat, quand un seul pouvoir contrôle l'exécutif, le législatif et le judiciaire, on nous a enseigné que l'on était dans un pays à régime totalitaire et qu'on pouvait parler de dictature pure et simple. C'est le portrait de plus en plus vrai et réaliste du Québec d'aujourd'hui sous le régime du Parti québécois. Il y a d'autres mesures, Mme la Présidente, qui s'en viennent, tel le projet de loi 99 sur la banque de terres de l'Etat. Les cultivateurs du Québec, les producteurs iront s'amuser sur les terres de l'Etat au lieu d'être propriétaires chez eux comme cela a toujours été le cas. Cela ressemble un petit peu à la Russie. C'est pour cela que je parlais tout à l'heure, Mme la Présidente, de la Suède et de la Russie, parce qu'en Russie on a cultivé pendant longtemps les terres de l'Etat et pourtant l'agriculture russe n'a pas fait fureur.

Un jour on verra sur une terre du Québec une grande pancarte divisée en quatre sections où sera marqué: Est réservé pour fins de contrôle selon les dispositions du projet de loi no 90. Dans

un autre carré, on pourra voir: Terrain de l'Etat selon le projet de loi no 99. Dans un autre: Subvention de l'Etat pour y cultiver selon les dispositions du projet de loi no 100 et, dans la quatrième section, l'on pourra voir: Culture prohibée à l'exception des bananes, du cacao, de la canne à sucre, des pistaches et du coton. Cela pourrait possiblemet arriver au Québec. Mme la Présidente, ce grand et convoité pays qu'est le Canada, convoité de tous les peuples du monde et dont le standard de vie est un des plus élevés, pays des libertés, pays fondé sur le respect de l'individu et de ses libertés, pays où le créateur et le producteur se retrouvaient, pays du citoyen motivé productif et désireux d'acquérir des biens, qu'en reste-t-il, Mme la Présidente, de ce pays?

Il s'agit d'analyser l'attitude des péquistes pour se rendre à l'évidence que tous leurs gestes décèlent un désir interrompu de séparer le Québec. Pour y arriver, la servitude et la pauvreté collectives seront et deviendront le "bag" des Québécois. On sait que tout peuple pauvre et démuni se manipule très facilement. La seule façon dont le Parti québécois pourra arriver à ses fins, c'est en appauvrissant le Québec, et il est bien parti. Il y a peut-être quand même des moyens d'agir, Mme la Présidente, au lieu de séparer le Québec. On s'aperçoit que l'Ontario, dans le même régime où l'on vit, nous, les Québécois, parvient, au niveau économique, à garder un standard très élevé. Je me demande pourquoi le Québec, dans le même régime, ne semble pas vouloir y parvenir. Il est évident qu'il y a un très grand manque de bonne volonté de la part des Québécois. Je peux vous dire que si les Québécois, les citoyens du Québec démontraient autant de nationalisme économique que les citoyens de l'Ontario peuvent en démontrer vis-à-vis de leurs manufacturiers, vis-à-vis des produits ontariens, on aurait tout à gagner ici au Québec. Mais on s'aperçoit que les Québécois, et peut-être davantage les séparatistes, passent l'été à se promener aux Etats-Unis pour aller acheter des "bargains", ce qu'ils appellent des "bargains". Je pense que si ces mêmes séparatistes avaient un esprit économique nationaliste et achetaient a priori du produit québécois, comme le font les Ontariens, notre économie irait beaucoup mieux.

Il y a un autre élément, Mme la Présidente, qui ne nous aide pas trop — parce qu'il y a beaucoup d'éléments ici qui ne nous aident pas trop — c'est qu'il est impossible d'installer une économie forte au Québec si, premièrement, les résidents du Québec n'ont pas cet esprit d'économie, cet esprit de respect pour nos produits et cet esprit d'assurance que l'on peut parvenir économiquement à accéder à une vie meilleure au Québec. (21 h 30)

Je pense que présentement on copie à peu près la ville de New York. Je pense qu'il est bien connu que la ville de New York a eu d'énormes difficultés économiques. Je pense que cela pourrait servir d'exemple au Québec, mais présentement il semble que le Québec se sert de l'exemple de la faillite de New York pour faire exactement la même chose. Ce qu'ils appellent la "new class" là-bas, les idéologistes ont su mettre en faillite la ville de New York et nos dirigeants québécois semblent vouloir suivre les traces de ces dirigeants de la ville de New York. L'erreur semble vouloir se répéter; le même scénario ici est suivi par le Parti québécois. Ils ont commencé à New York à mettre de côté les capitalistes et c'est ce que le Parti québécois fait ici au Québec. Ceux qui paient les taxes et les impôts et qui font vivre les assistés sociaux du Québec, si ce ne sont pas les capitalistes, je me demande qui c'est. Ce ne sont certainement pas les socialistes.

Il faudrait qu'il y ait plus de respect pour l'initiative privée et ce n'est pas en le freinant que le Québec arrivera quelque part, ni en suffoquant davantage notre économie par des mesures de plus en plus socialisantes que le Québec parviendra à se redresser et à prendre la place qui lui revient à l'intérieur de notre pays à tous, le Canada. Merci.

Le Président suppléant (M. Jolivet): M. le député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, mes propos porteront à peu près exclusivement sur la motion de censure présentée par le chef de l'Opposition — je déplore qu'il ne soit pas ici, ni aucun de ses collègues; il y en a deux, excusez-moi — où il proposait "que cette Assemblée adresse un blâme sévère au gouvernement pour son manque de franchise, de droiture et de clarté sur tout ce qui concerne son option indépendantiste". Je voudrais prendre ces trois balises de la franchise, de la droiture et de la clarté pour analyser un document récent du chef du Parti libéral, qui s'appelle Choisir le Québec et le Canada. Je prendrai les mêmes critères, exactement les mêmes, pour essayer de voir si la motion de censure ne devrait pas être retournée bout pour bout, comme on dit, contre cette Opposition.

Notre option à l'égard du fédéralisme elle est très claire, elle tient en une règle commerciale: satisfaction garantie ou argent remis. Nous ne sommes pas satisfaits des folies du fédéral. Depuis 110 ans et plus, les Québécois ont permis au gouvernement fédéral de percevoir ici des milliards et des milliards et des dizaines de milliards en taxe. Nous ne sommes pas satisfaits de la manière dont ces milliards ont été dépensés. Nous ne sommes pas satisfaits, par conséquent, de la manière dont le fédéralisme a fonctionné dans ce pays. On nous le décrit aujourd'hui dans les panels que nous avons avec ces collègues comme la solution idéale aux problèmes des pays contemporains. Mais il faut voir le fédéralisme tel que nous le vivons ici. S'il y avait la même quantité de chômeurs dans chacune des provinces, nous dirions: Le fédéralisme a réussi merveilleusement bien. S'il y avait le même nombre d'emplois correspondant au marché dans chacune des provinces ou une certaine harmonie, nous dirions: Le

fédéralisme a marché merveilleusement bien. Or, tous les Québécois et même les Canadiens savent très bien que, s'il y a 16% de chômage à Terre-Neuve, c'est à cause du fédéralisme; que, s'il y a historiquement au Québec entre 2,5% et 3% de chômeurs de plus qu'en Ontario, c'est à cause du fédéralisme. Nous voulons sortir justement l'essentiel de nos biens de ce système pour le ramener ici dans ce Parlement qui aura 200 ans en 1992. Notre position, elle est claire. On veut que le pouvoir de dépenser les taxes des Québécois, au lieu de s'épuiser dans des querelles de virgules, on veut que ce pouvoir soit ramené ici. Notre option, c'est celle-là.

Par ailleurs, dans la motion du chef de l'Opposition, il ne parle plus de séparatisme. C'est peut-être un produit qui se vend moins bien, même dans les milieux libéraux, même s'ils sont toujours grands consommateurs d'épouvantails à moineaux de tout acabit, venus de partout comme dernièrement le député de Saint-Laurent, après une tournée des popotes en Afrique, a ramené des épouvantails du Biafra et du Nigéria pour tenter d'empêcher les Québécois de reprendre en main leur destin, leur économie, leurs taxes; uniquement ce qui leur appartient de droit, leurs taxes et les lois, le pouvoir d'adopter les lois qu'ils veulent sur quelque sujet que ce soit.

Pourquoi faut-il prendre avec un grain de sel les accusations des libéraux à l'égard de notre droiture, de notre clarté et de notre franchise? Parce que leur projet à eux s'appelle choisir le Québec et le Canada, d'une part, choisir, par conséquent, d'être une majorité à Québec et en même temps une minorité à Ottawa, choisir de laisser Ottawa contrôler la moitié des taxes des Québécois, choisir, par conséquent, l'ambiguïté. Que dit-il, le nouveau chef libéral? Page 28. "Il faut réaménager les règles du jeu et les institutions de manière à faire tomber les inégalités et les injustices". Cela fait 100 ans qu'on dit cela. Cela veut dire quoi, réaménager les règles du jeu? Le chef libéral nous dit: Attendez un autre document à l'automne. Est-ce droit? Est-ce franc? Est-ce clair de reporter la définition précise de l'option du fédéralisme renouvelé à plus tard? Comment se fait-il qu'après dix ans de fédéralisme renouvelé, coopératif, reconstitué et même de souveraineté culturelle le Parti libéral ne sache pas encore ce qu'il veut? Comment se fait-il qu'il ne soit pas encore en mesure d'offrir aux Québécois une option claire, droite, franche et précise?

Il ne faut jamais oublier que ce parti a tenté, à l'époque où il était au pouvoir, de rapatrier certains secteurs actuellement entre les mains du fédéral, entre autres, les communications. Deux ministres libéraux s'y sont cassé les dents: MM. Denis Hardy et Jean-Paul L'Allier. Les libéraux ont tenté de rapatrier à Québec les politiques sociales; le ministre Claude Castonguay s'y est cassé les dents. Les libéraux ont tenté de rapatrier à Québec la souveraineté culturelle; M. Robert Bourassa n'a pas acquis un cent des budgets du fédéral dans le domaine des arts et lettres. Les libéraux ont tenté d'obtenir du fédéral la juste part du Québec pour ses frais de police provinciale puisque ailleurs, dans les autres provinces, le fédéral couvre ces dépenses; le ministre libéral Jérôme Choquette s'y est cassé les dents.

Pourquoi, après ces échecs répétés, après ces avortements en série, le fédéral céderait-il cette fois au nouveau parti du nouveau chef du Parti libéral? Ecoutez bien le chef des libéraux. Il dit: "II reste qu'on n'est jamais allé vraiment au fond du problème faute d'une opinion publique suffisamment éclairée dans le reste du pays". Vaste programme. Il ajoute: "On devrait poursuivre d'abord le plus consciencieusement — la conscience est importante — possible la démarche qui nous a toujours inclinés jusqu'à ce jour à chercher plutôt l'amélioration du système fédéral". Y a-t-il un Québécois aujourd'hui, dans l'ensemble du territoire, qui sait ce que les libéraux veulent signifier quand ils parlent de renouveler le fédéralisme? Nommez-moi un cas, comme disait M. Bourassa à l'époque.

Y a-t-il un Québécois aujourd'hui, où que ce soit au Québec, qui sache ce que les libéraux veulent aller récupérer à Ottawa pour renouveler le fédéralisme? Il n'y en a aucun. J'accuse les libéraux de tromper le peuple et de présenter aux Québécois un miroir aux alouettes, des faux bijoux; les bijoux de la Castafiore libérale sont faux! (21 h 40)

Mme la Présidente. M. Ryan nous répond à ces questions: On vous le dira à l'automne. Laquelle des deux options est la mieux connue des Québécois, ce soir, au moment où nous nous parlons? Je vous le demande, messieurs les libéraux. Est-ce que c'est la souveraineté-association ou le fédéralisme reconstitué, le "TV dinner" du fédéralisme de M. Ryan? Je laisse aux Québécois et aux Québécoises le soin de répondre à cette question.

Autre question, ce fédéralisme renouvelé, quand les libéraux l'auront fait connaître un jour, peut-être, aux Québécois, comment vont-ils le réaliser? Par quel moyen? Au moyen des conférences "circonférentielles", comme le disait M. Duplessis, fédérales-provinciales à onze partenaires? Le chef libéral ne se souvient-il pas des avortements répétés, des échecs en série des ministres Denis Hardy, un libéral; Jean-Paul L'Allier, un libéral; Claude Castonguay, un libéral; Robert Bourassa, souveraineté culturelle; Jérôme Choquette, de l'argent de la police?

Dans le dictionnaire, Mme la Présidente, le mot "masochiste" est ainsi défini: "Une personne qui trouve du plaisir à souffrir, qui recherche la douleur et l'humiliation." Nous avons devans nous des "masofédéralistes"! Ils n'en ont pas encore assez subi d'humiliations, de refus, d'échecs; ils n'ont pas encore assez souffert, ils aiment ça. Mais le peuple du Québec, lui, a peut-être assez souffert et peut-être que lui, il veut se sortir de ce caroussel infernal.

Ce que les libéraux proposent au peuple du Québec, ce n'est pas le fédéralisme renouvelé, c'est l'impasse renouvelée, c'est le cul-de-sac

renouvelé, c'est le guêpier renouvelé, c'est le bourbier renouvelé, c'est la "swamp" fédérale où s'enlisent, depuis un siècle, comme en des sables mouvants, les projets de société des Québécois. Leurs gouvernements qui se sont succédé et les énergies de ce peuple du Québec se sont enlisés depuis un siècle et plus.

Ce peuple du Québec a besoin d'autant plus de tous ses outils qu'il constitue une petite nation sur la face du globe. Nous ne choisissons pas le Québec et le Canada, nous choisissons le Québec; c'est clair, c'est droit, c'est franc. Nous voulons ramener ici les taxes et le pouvoir; c'est clair, c'est droit, c'est franc. Eux nous disent: Attendez à l'automne, premièrement; deuxièmement: Comment? On ne vous le dit pas. Référendum? Peut-être. Après avoir littéralement bavé sur l'idée même de référendum, voici que M. Ryan, dans un discours à Québec il y a quelques mois, laissait entendre que peut-être il aurait recours à cette méthode démocratique pour ramener ici une chose qui est encore inconnue.

Le Parti libéral tente de gagner du temps pour Ottawa; le Parti libéral tue les pénalités imposées à Ottawa. Le Parti libéral "shoot" sur la bande, comme on dit au hockey. M. Ryan tue les punitions du gouvernement fédéral, il espère que ce sera oublié avec le temps; il espère que les Québécois ne seront plus soucieux de ramener ici, enfin, ce qui leur appartient.

Nous disons: Fédéralisme égale chômage. Fédéralisme égale sous-développement du Québec. Fédéralisme égale un Québec diminué, un Québec en tutelle, un Québec chambre et pension, nourri, logé, un Québec locataire dans son propre pays.

Nous disons: Souveraineté égale la solution au chômage, le début du véritable développement économique du Québec conçu ici, pensé ici, appliqué ici par nous. Souveraineté égale un Québec adulte, un Québec propriétaire de son destin et de son avenir. La clarté, la franchise et la droiture, si chère au chef de l'Opposition officielle, où est-elle? Le peuple au fond sera notre seul juge. La clarté est-elle dans les documents promis pour l'automne ou dans un référendum à ciel ouvert où les Québécois auront enfin l'occasion de dire oui ou non à leurs propres institutions politiques, exactement comme Terre-Neuve, la nation "newfie", l'a fait en 1949? Exactement. Pas autre chose que ce Terre-Neuve a eu avec deux référendums. Ils ont gagné avec 52% des votes et ils sont devenus une province. S'il y en avait eu 52% contre, ils seraient restés un pays souverain. Il y a des précédents, au pays, du peuple qui se prononce sur ce qu'il veut, et ces précédents ont été respectés. Les Québécois savent où est la clarté, la droiture et la franchise, malgré les campagnes incessantes d'intoxication des libéraux qui, depuis deux ans, tentent ici de discréditer ce gouvernement. Je me souviens d'une intervention du leader parlementaire de l'Opposition officielle qui disait un soir: Ce gouvernement est illégitime — il s'en souvient peut-être — avec seulement 42% des votes, sans se poser de question au sujet du gouvernement Trudeau qui a 42% des votes lui aussi.

M. Alfred: 43%.

M. Godin: II mettait en question, par conséquent, la légitimité de ce gouvernement. Le pouvoir, d'après les libéraux, leur revient de droit. Ils n'ont que 35% du vote. Ils n'ont jamais été aussi bas, d'ailleurs, dans leur histoire. 35% du vote. Nous avons 42% du vote et, sur cette base parlementaire, nous allons faire un référendum permettant aux Québécois de choisir leur option ou la nôtre. Nous sommes convaincus que, comme à chaque fois où les Québécois ont eu le choix d'avoir plus de pouvoirs ou moins, ils vont choisir plus de pouvoirs. Notre option est-elle claire? Les Québécois et les Québécoises en sont les meilleurs juges. Merci.

M. Saint-Germain: Mme la Présidente, je vois que l'heure avance. J'aurais un discours d'à peu près 25 minutes ou une demi-heure. Je ne sais pas si on me donnerait la permission de débuter simplement demain à 10 heures à la reprise de nos travaux.

M. Charron: D'accord.

M. Saint-Germain: Si on accepte, je demande l'ajournement du débat, Mme la Présidente. Merci.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

M. Charron: Elle est adoptée.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Madame, je voudrais rappeler que demain matin, nous nous retrouverons ici, effectivement, à 10 heures, comme vient de le dire le député, mais qu'en même temps, deux commissions seront appelées à siéger selon la motion adoptée cet après-midi. La commission de la réforme du droit de la famille, c'est-à-dire la commission de la justice se réunira à la salle 91, tandis que la commission des affaires municipales, au sujet de la loi 107, créant la régie du logement, se réunira à la salle 81, à 10 heures demain.

Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, 10 heures.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Au moment de la reprise de la discussion sur le discours inaugural, c'est M. le député de Jacques-Cartier qui aura la parole.

Cette Assemblée ajourne ses travaux à demain, 10 heures.

Fin de la séance à 21 h 48

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