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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 6 décembre 1979 - Vol. 21 N° 76

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures seize minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Présence de Mme Antonine Maillet

J'ai le très grand honneur ce matin de souligner la présence dans les galeries de Mme Antonine Maillet.

Election de M. Herbert Marx

Je dois maintenant donner lecture d'une communication qui a été signifiée au secrétaire général.

Québec, le 4 décembre 1979,

M. le secrétaire général de l'Assemblée nationale,

Hôtel du gouvernement, Québec.

Cher monsieur,

Je certifie que, conformément à un bref d'élection émis le 17e jour d'octobre 1979 et adressé à Mme Florence Friedman, administrateur, président d'élection dans le district électoral de D'Arcy McGee et domiciliée au 7497, chemin Briard, Côté Saint-Luc, M. Herbert Marx, professeur de droit, a été, ainsi qu'il appert du rapport en date du 4 décembre 1979 qui se trouve dans les archives de mon bureau, élu député du collège électoral de D'Arcy McGee à l'Assemblée nationale du Québec en remplacement de M. Victor-Charles Goldbloom, médecin, démissionnaire. C'est signé du directeur général des élections, Pierre-F. Côté.

M. le chef de l'Opposition, je vous invite à aller accueillir votre nouveau député.

Des Voix: Encore.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, ainsi que vous venez de le rappeler, il y avait, le 26 novembre dernier, dans le comté de D'Arcy McGee, une élection complémentaire qui a donné lieu au résultat dont nous avons la confirmation, aujourd'hui, avec l'entrée dans cette Chambre du nouveau député de D'Arcy McGee, M. Herbert Marx, à qui je souhaite, au nom de notre groupe parlementaire, la plus chaleureuse bienvenue. (10 h 20)

M. Marx n'est pas un inconnu parmi nous, parce que nous connaissons depuis longtemps sa contribution intellectuelle à l'examen de nos problèmes collectifs. Sa réputation de juriste a, depuis longtemps, franchi les frontières de l'institution à laquelle il est attaché depuis de nombreuses années. Je rappelle toutefois deux ouvrages im- portants que nous devons au professeur Marx, en plus d'un autre dont la préparation est en train d'être complétée à l'heure actuelle.

Nous devons à M. Marx un ouvrage intitulé: "Les grands arrêts de la jurisprudence constitutionnelle au Canada" que j'ai eu l'honneur de recenser moi-même naguère, au temps que j'étais directeur du Devoir, et que mon fils, qui est maintenant étudiant à la faculté de droit, est très heureux d'utiliser presque tous les jours. On doit également à M. Marx un autre ouvrage fondamental très important intitulé "Droit et pauvreté au Québec", qui est une synthèse de toutes les mesures législatives québécoises ayant trait au problème des personnes défavorisées ou en situation de pauvreté. M. Marx n'est pas le professeur classique que l'on est habitué de se représenter. Avant d'être dans la vie de l'enseignement, il a travaillé lui-même dans une fonction où il a appris ce que c'est que de gagner son pain et d'être en contact tous les jours avec les problèmes concrets.

Il nous arrive marqué d'un signe que nous avons souvent, à juste titre, attaché à des membres des communautés minoritaires chez nous, en particulier de la communauté dont fait partie M. Marx, le travail. Je pense que c'est une vie qui a été marquée sous le signe du travail et je ne vois pas de meilleure indication, pour une personne qui entre dans la vie politique, que cette aptitude au travail dur dans les circonstances et les contextes les plus variés. M. Marx est de plus, vous aurez l'occasion de le constater, un bilingue accompli. La preuve en est que, depuis de nombreuses années, il enseigne à la faculté de droit de l'Université de Montréal où il était l'un des membres les plus respectés du corps professoral. Il fera en conséquence un très digne représentant de celui qui nous a quittés il y a quelque temps et pour qui nous avions une estime si grande, le Dr Victor Goldbloom.

M. Marx représentera dans cette enceinte une circonscription dont la composition démographique est très particulière. On trouve, dans la circonscription de D'Arcy McGee, une population qui est de langue maternelle anglaise à 68,5%, de langue maternelle française à 10,4% pour un total de 6031 dans cette catégorie et d'autres langues maternelles que le français ou l'anglais dans une proportion de 17,5%. Je pense que la composition démographique de la circonscription de D'Arcy McGee illustre très éloquemment la situation fort particulière que nous avons dans la région de Montréal. La région de Montréal, au sein de la province de Québec, forme une entité qui a des caractéristiques très particulières dont doivent tenir compte tous ceux qui oeuvrent sur la scène politique, en particulier les formations politiques et les législateurs.

Je souligne, M. le Président, que le nouveau député de D'Arcy McGee a obtenu une majorité très forte de la part, de toute évidence, de chacune des grandes composantes de la population de sa

circonscription, de la part de la population francophone — nous avons pu le constater, d'ailleurs, pendant la campagne électorale là-bas — de la part de la population de langue maternelle anglaise et aussi de la part de ces citoyens qui forment les groupes que l'on a coutume d'appeler allophones, mais qui émament d'autres cultures ou d'autres communautés linguistiques. M. Marx sera, en conséquence, très bien situé pour parler au nom de tous les citoyens du Québec, dans les situations qui requerront de sa part une intervention à ce niveau et pour parler aussi à partir du point de vue plus particulier des groupes minoritaires, dans certaines situations qui pourront le justifier de le faire.

Je veux souligner, de manière spéciale, la très forte représentation de la communauté de culture juive dans la composition de la population de D'Arcy McGee. Je n'ai pas de statistiques sous la main, mais je crois que la population juive représente, dans la circonscription de D'Arcy McGee, au moins 60% de la population totale. En conséquence, le député qui nous arrive de la circonscription de D'Arcy McGee vient aussi à l'Assemblée nationale, en plus de représenter tous les électeurs de son comté, avec un titre spécial pour agir et parler au nom de l'une des communautés québécoises pour lesquelles nous avons le plus de respect et d'attachement, la communauté juive.

I wish to say, Mr Chairman, that we, on this side of the House, are extremely pleased and honored to see Dr Marx join our ranks today as the representative for D'Arcy McGee. The population of this riding gave the new member for D'Arcy McGee an overwhelming endorsement in the by-election which took place on the 26th of November. I wish to state that we welcome Mr Marx into this House as a representative of all the cultural communities which make up the population of D'Arcy McGee, as an authentic and genuine representative of the Montreal community in this House. I hope he will have a long career among us and I wish to say to him that we are all delighted and honored to greet him, not only as the member for D'Arcy McGee, but also as a special spokesman for the Jewish community to whom all of us are so much attached and for whom we have so much respect.

Dr Marx will be a key member in our caucus, especially in view of his particular qualifications in the area of the constitution. We are headed for important developments in the months and years ahead and I am proud that our party can count on this additional resource on this side. Thank you very much, Mr Chairman.

Le Président: M. le premier ministre. M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): Très brièvement, mais très cordialement, je voudrais me joindre au chef de l'Opposition pour souhaiter la bienvenue au nouveau député de D'Arcy McGee, qui a eu le grand mérite de remporter récemment un siège parmi les plus chaudement disputés du Québec. On comprendra que je puisse un peu difficilement lui souhaiter d'avoir plus de satisfaction dans l'arène politique que dans la vie universitaire; j'ose même espérer qu'il retrouvera la nostalgie de l'université aussi vite que possible.

En attendant, je suis sûr — nous sommes sûrs de ce côté-ci — qu'il saura remplacer son prédécesseur, le Dr Goldbloom, avec la même constante dignité et aussi avec la même élégance. Quant à nous, je lui promets tout de suite que nous écouterons avec une attention très particulière les propos qu'il pourra nous tenir au nom des communautés ethniques non seulement de son comté — son comté est assez représentatif de plusieurs groupes — mais aussi de Montréal, et tout spécialement, bien sûr, comme l'a dit le chef de l'Opposition, au nom de la communauté juive de la région métropolitaine. Sans pouvoir lui souhaiter complètement bonne chance, je répète de nouveau: Bienvenue au député de D'Arcy McGee.

Le Président: M. le député de D'Arcy McGee. M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, I would like to thank my election committee and the hundreds of other volunteers for their hard work; without their effort, we would not have had the great victory that we had in D'Arcy McGee. As well, I would like to thank the electors of D'Arcy McGee for having given me their confidence. I have a clear mandate to speak on the questions of Canadian unity language rights, minority rights and the general field of civil liberties. No doubt, I shall have many occasions to present my views and those of my electors on all of these issues both in and out of the National Assembly. (10 h 30)

J'aimerais, dans les quelques minutes qu'on m'a allouées, vous livrer quelques observations sur la place au Québec de la minorité anglophone de même que des minorités ethniques. Ces minorités forment à peu près 20% de la population québécoise, il s'agit d'environ un million de personnes. Depuis des années et à travers des gouvernements différents, les minorités ne sont pas adéquatement représentées dans les grandes institutions et les grands organismes québécois, y inclus ceux des secteurs public et parapublic.

De nombreuses études, depuis des années, témoignent de la faible représentation, voire l'absence des minorités québécoises, de certaines institutions et organismes. S'il était possible, autrefois, de dire que les minorités au Québec n'étaient pas prêtes à s'intégrer, cela n'est plus vrai depuis longtemps. Le fait que les institutions et organismes ne reflètent pas davantage la composition démographique du Québec me semble tenir moins aux attitudes et désirs des minorités qu'aux attitudes et agissements de la majorité. Des membres des groupes minoritaires me disent souvent que certaines institutions et organismes québécois sont des chasses gardées de la majorité d'où

on les exclue d'une façon inconsciente ou même consciente.

Il me semble qu'à l'heure actuelle, il faut presser les minorités de s'intégrer en leur ouvrant la place qui doit être la leur au lieu de les exclure pour une raison ou une autre ou par des moyens divers.

Voici un témoignage personnel d'une institution québécoise qui intègre bien les membres des groupes minoritaires, voire les presse de s'intégrer. Je suis professeur de droit constitutionnel à la faculté de droit de l'Université de Montréal depuis 1969. A l'âge de 32 ans, j'ai décidé de poursuivre des études en droit à cette même faculté. Il va sans dire que l'immersion dans la langue et la culture françaises est totale dans cette institution. Peu avant la collation des diplômes, quelques membres de la faculté m'ont pressé d'y retourner comme professeur. Après un stage d'études supérieures en droit aux Etats-Unis, je suis donc revenu à la faculté de droit à titre de professeur.

Au début de ma carrière professorale, j'ai eu certaines difficultés linguistiques, non pas des difficultés énormes, mais des difficultés réelles. Mes collègues ont pris des mesures positives pour m'aider à surmonter ces difficultés.

En somme, la faculté m'a pressé de m'y joindre et de m'y intégrer même en dépit de mes défaillances linguistiques. Depuis mon entrée à la faculté, je n'ai jamais subi de préjudice à cause de mes origines ethniques ou religieuses ou à cause de ma langue maternelle. La question que les non-Canadiens français se posent aujourd'hui et se posaient même avant la première législation linguistique en 1974 est la suivante: Serait-il suffisant de parler français? Malheureusement, ils ont l'impression que la réponse est plutôt négative. Ils ont le sentiment que la question de la langue est employée comme excuse pour les exclure de certains secteurs de la société de la même façon qu'autrefois, on l'a employée pour exclure les Canadiens français de certains emplois. Je pense que la position des minorités au Québec est la source de beaucoup de malentendus et de beaucoup de difficultés.

En conclusion, il me semble que pour que la situation se normalise, il serait souhaitable que l'Etat prenne des initiatives claires et donne l'exemple de façon à bien montrer que tous les Québécois sont sur un pied d'égalité, pas seulement en droit, mais aussi en fait. Les minorités sont intéressées par ce qu'on fait plutôt que par ce qu'on dit. L'Université de Montréal, pour ne parler que de cette institution québécoise que je connais bien, me semble un milieu où l'on a créé un climat propice à l'intégration de tous les Québécois, abstraction faite de leur origine ou de leur langue maternelle. Une politique généralisée qui ferait en sorte qu'on presse l'intégration des non-Canadiens français dans les institutions et organismes québécois serait un des moyens de respecter le pluralisme et de faire converger les deux solitudes, sinon de les fondre en une seule.

En terminant, je voudrais dire tout l'honneur que je ressens à faire désormais partie de l'Assem- blée nationale. A mes électeurs et à mes collègues parlementaires, je veux donner l'assurance de ma plus entière collaboration dans toute la mesure de mes moyens et de mes capacités.

J'aimerais juste ajouter un mot. When I met Dr Goldbloom and I talked to him about replacing him. | only had one sentence, just a few words, to tell him and that was: You left a very big pair of boots to fill.

Le Président: Merci, M. le député de D'Arcy McGee.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents.

M. le député de Mégantic-Compton.

DÉPÔT DE DOCUMENTS Pétition relative au choix des garderies

M. Grenier: M. le Président, j'ai ici à déposer une pétition signée par 6356 contribuables du Québec. Le but de cette pétition est de faire préciser la loi et d'assurer aux parents, dans la loi no 77, le droit de pouvoir continuer d'envoyer leurs enfants dans une garderie de leur choix.

Le Président: Pétition déposée.

Dépôt de rapports de commissions élues. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

Etude du projet de loi no 43

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture et de l'alimentation, qui a siégé les 28 et 29 novembre ainsi que le 4 décembre 1979, aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 43, Loi modifiant la Loi du ministère de l'Agriculture, et l'a adopté avec des amendements. Merci.

Le Président: Merci. Rapport déposé. M. le député de Beauce-Nord.

Audition des représentants de la SGF

M. Ouellette: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer, conformément aux dispositions de notre règlement, le rapport de la commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme, qui a siégé le jeudi 29 novembre 1979, aux fins d'entendre les représentants de la Société générale de financement.

Le Président: Merci. Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

Projet de loi no 233

M. Charron: M. le Président, j'ai envie de rendre service à l'Opposition ce matin et je vais donc solliciter son consentement pour qu'un projet de loi privé inscrit au nom d'un député de l'Opposition officielle puisse être déposé et que les parties concernées puissent également être invitées à la séance de demain. Elles sont déjà prévenues et très consentantes à venir s'il y a consentement ce matin à ce que cela soit fait. C'est un projet de loi dont l'étude a déjà été entamée au mois de février dernier. Les partis — je parle des partis politiques — autour de la table, à ce moment-là, avaient constaté que le projet de loi n'était pas prêt. On avait demandé de le retravailler, ce qui a été fait. On serait maintenant prêt à venir. (10 h 40)

Le rapport du greffier en loi sur le projet de loi privé me dit que ce projet de loi, qui porte le numéro 233 et qui concerne le Club de golf Montmagny, est conforme à l'avis et que l'avis est suffisant en nombre. Toutefois, plus de six mois se sont écoulés depuis la parution des avis. Je demande, M. le Président, d'abord le consentement pour pouvoir déposer le projet de loi et, par la suite, dérogation permise pour qu'on puisse étudier ce projet de loi demain.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle?

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous sommes bien d'accord pour donner notre consentement dans un esprit de collaboration avec le gouvernement. Tout de même, M. le Président, nous ne voulons pas qu'il s'agisse d'un précédent, et la seule raison pour laquelle nous donnons notre consentement, c'est parce que l'étude est déjà entamée.

Autrement dit, il faut être très vigilant quant au droit éventuel de personnes qui voudraient se faire entendre devant la commission. Or, on sait que cette commission siégera dès demain et c'est avec une certaine réserve, mais tenant compte du fait que cette commission a déjà commencé à étudier le projet de loi, que nous souscrivons à la suggestion du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, au nom du député de Montmagny-L'Islet, je remercie le député de Bonaventure.

Le Président: Rapport déposé.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. Charron: Le projet de loi en question, M. le Président.

Projet de loi no 233 Première lecture

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet propose la première lecture du projet de loi no 233, Loi concernant le Club de golf de Montmagny Inc. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Giasson: M. le Président.

Le Président: S'agit-il de votre discours de première lecture, M. le député?

M. Giasson: Non, c'est une demande que j'ai à formuler au leader du gouvernement. Est-ce que vos conseillers légistes se sont assurés que les activités qui devaient être menées à la suite des demandes formulées aux représentants du club de golf, lorsqu'ils sont venus devant la commission parlementaire, ont été respectées cette fois-ci?

M. Charron: M. le Président, je n'ai pas examiné le projet de loi trou par trou, mais je me fie aux indications qui me sont données selon lesquelles nous pourrions procéder cette fois; autrement dit, toutes les demandes qui avaient été formulées lors de la séance du 13 février ont reçu réponse. On verra, au cours de la séance de demain...

M. Giasson: Le leader du gouvernement n'a pas bonne mémoire. S'il avait eu bonne mémoire... Il était présent lors de la commission et il savait que le problème se situait au 19e trou. Il n'avait pas besoin de s'occuper des autres trous. Premièrement, le problème venait du fait que des actions détenues par des actionnaires n'avaient pas été récupérées et ces actionnaires n'avaient pu être rejoints. Deuxièmement, il manquait une exigence...

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet, je voudrais qu'on se contente de jouer le par ce matin.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je propose que ce projet de loi soit à nouveau examiné par la commission demain, donc, qu'il soit déféré à la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Période de questions orales.

M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Approvisionnement en pétrole

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ma question s'adressait au ministre de l'Energie et des Ressources. Vu son absence...

Une Voix: Le voilà: C'est un jeune homme plein de ressources!

M. Levesque (Bonaventure): Le premier ministre du Canada, M. Joe Clark, aurait déclaré hier qu'il ne pouvait pas donner de garanties quant à l'approvisionnement en pétrole de l'Est du pays particulièrement. Dans certaines dépêches, on mentionne que le cas du Québec serait sûrement celui auquel on songerait particulièrement.

Le ministre peut-il nous dire si le gouvernement est au courant de cette incertitude d'approvisionnement en pétrole, au cours de l'hiver qui vient, et peut-il nous donner des mesures que lui ou son gouvernement a pu prendre de concert ou non avec le gouvernement fédéral pour faire face à une crise possible?

Le Président: M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: Oui, M. le Président. Dans mes réponses antérieures j'avais bien indiqué à l'Assemblée nationale que le rythme présentement de raffinage au Québec était suffisamment élevé pour faire en sorte que d'ici janvier nous ayons à peu près 40% de plus que nos réserves habituelles. Or, on me soulignait encore avant-hier que nos chiffres disponibles présentement indiquent que nous sommes toujours conformes à la planification établie, ce qui veut dire que nous ne devrions pas avoir de difficulté. J'avais cependant souligné que nous ne contrôlions pas nos sources internationales de pétrole. Vous n'êtes pas sans savoir que l'Alberta ne peut pas produire plus de pétrole qu'elle en produit présentement; au contraire, elle est obligée de réduire sa production. Ce qui nous amène possiblement des difficultés si on ne fait pas attention à nos partenaires étrangers étant donné que le Québec et particulièrement les Maritimes sont terriblement dépendants des sources internationales de pétrole.

Il est bien évident que les bonnes relations que le Canada est en train d'établir avec les pays arabes — en parlant de déménager des ambassades à Jérusalem ou ailleurs — vont contribuer à rétablir un climat de chaleur entre le Canada et ces pays. De même, les récentes déclarations de M. Clark concernant l'Iran ont évidemment contribué aussi à améliorer nos relations avec les pays arabes. D'amélioration en amélioration, la situation internationale risque de nous échapper. On n'a aucun contrôle là-dessus, mais cela fait partie du fédéralisme rentable dont on nous rabâche les oreilles assez régulièrement. L'un des problèmes, également, c'est que récemment le gouvernement fédéral a annoncé que l'on serait prêt à expédier du pétrole du Canada vers les Etats-Unis. Ce serait du pétrole qu'on n'aurait pas pour le Québec. Si on met tout dans la balance, tout ce que je peux dire, c'est que, comme gouvernement, nous avons offert notre collaboration au ministre de l'Energie, des Mines à Ottawa, pour faire en sorte qu'on puisse effectivement faire face à toute pénurie éventuelle. Je dois dire que cela prend un minimum de collaboration de la part de tous les pays. Il y a des éléments à l'intérieur du système politique actuel que nous connaissons — puis-qu'évidemment, l'Opposition est très favorable à la politique énergétique canadienne à ce fédéralisme pétrolier canadien — sur lesquels nous n'avons pas de contrôle. Si la partie fédérale commet un certain nombre d'impairs, je n'ai malheureusement pas de contrôle là-dessus. Il va falloir adresser les questions, finalement, au ministre fédéral de l'Energie et peut-être que l'Opposition pourrait démissionner en bloc et s'en aller à Ottawa.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je serais porté à ne pas poser de question supplémentaire devant les réponses que nous avons du ministre.

Il y a des citoyens québécois qui s'inquiètent, ce matin, des nouvelles au sujet des approvisionnements en pétrole du Québec, particulièrement, dans le domaine de l'huile à chauffage. Il y a des gens défavorisés, en particulier, qui pensent à cela présentement. Le ministre, lui, fait de la politique, de la petite politique, ce matin, M. le Président.

Je demande au ministre responsable de l'Energie au Québec de répondre d'une façon satisfaisante pour les gens qui nous écoutent. Qu'est-ce que le ministre et le gouvernement font présentement pour répondre à cette incertitude qui, de plus en plus, va vers une insécurité? Je demande si le ministre fait quelque chose à part faire de la politique comme il fait ce matin?

Le Président: M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: M. le Président, c'est là une des interventions les plus tristes que j'ai entendues depuis longtemps. Je vais vous dire pour quelles raisons. C'est vrai que des Québécois peuvent être menacés de manquer d'énergie. C'est vrai que des Québécois instinctivement se tournent vers le gouvernement du Québec pour avoir la réponse à leur problème. C'est naturel, parce qu'ils savent très bien qu'ils trouvent, autour de cette Assemblée, des gens qui parlent leur langue, qui ont la même culture et qui attendent de leurs élus à Québec la solution de leurs problèmes. (10 h 50)

C'est un fait, M. le Président. Mais le problème, et c'est là la tristesse — j'entends les beuglements de l'Opposition, ce qui m'empêche totalement de m'exprimer...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bérubé: Mais c'est là le problème, c'est que dans le système politique actuel le gouvernement qui contrôle le commerce extérieur, le gouvernement qui contrôle la politique pétrolière nationale, ce n'est pas le gouvernement du Québec, c'est le gouvernement fédéral. Je n'ai pas d'objection à ce que les Québécois mandatent le gouvernement du Québec pour prendre en main la politique énergétique et l'approvisionnement international de pétrole. Je n'ai absolument pas d'objection à le faire. A ce moment, si les Québécois devaient dire: Ce n'est pas le gouvernement fédéral qui doit défendre nos intérêts quand nous manquons de pétrole, mais le gouvernement du Québec, M. le Président, c'est avec plaisir que je dirai: Je suis prêt.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Brochu: Merci, M. le Président. Sur la même question, la semaine dernière justement j'ai posé des questions au ministre de l'Energie et des Ressources qui m'a répondu, à ce moment, et on s'en rappelle que le rythme de raffinage au Québec allait dans un sens passablement accéléré. Cependant, on a appris quelques jours après également, à la surprise de plusieurs Canadiens, d'un bout à l'autre du pays, qu'il y avait, au niveau de l'huile à chauffage, comme de l'essence également, uniquement pour deux jours de réserve, ce qui a été lancé comme information dans le public apparemment de la part du bureau du ministre fédéral responsable de ces sources.

Maintenant, malgré le rythme de raffinage que le ministre dit observer au Québec, quel est actuellement l'état de nos réserves d'huile à chauffage et d'essence en ce qui concerne plus particulièrement le Québec?

Le Président: M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: M. le Président, je prendrai avis de la question pour avoir un chiffre précis. Comme il s'agit évidemment d'une question qui évolue quotidiennement, c'est assez difficile, mais je pourrais répondre d'une façon générale à la question de la façon suivante. En ce qui concerne l'huile à chauffage, nous avons effectivement demandé — mais simplement par lettre, par intervention personnelle, puisque nous n'avons pas de pouvoir comme tel — à l'industrie pétrolière ou aux raffineries québécoises de bien vouloir augmenter la quantité d'huile à chauffage qu'elles produisaient avec chaque baril de pétrole, de manière qu'au moins on n'ait pas de difficulté de chauffage au Québec. C'est évidemment ce que les industriels avaient choisi de faire, étant donné les mauvaises expériences qu'ils avaient connues l'année dernière. Vous n'êtes pas sans savoir que, l'année dernière, on avait raffiné beaucoup de pétrole, on avait beaucoup d'huile à chauffage et l'Office national de l'énergie avait décidé de permettre l'exportation de cette huile à chauffage que nous avions au Québec en particulier. C'est une des causes, en partie, qui a fait que nous avons manqué d'huile à chauffage.

Cette année, évidemment, on a essayé de réagir et nous avons demandé aux compagnies de produire plus d'huile à chauffage et moins d'essence. Cela explique le sens de l'intervention de M. Hnatyshyn à Ottawa qui, évidemment, a souligné que les réserves en essence sont évidemment moins fortes que dans le cas de l'huile à chauffage. Donc, ces remarques s'appliquaient essentiellement à l'essence, et non à l'huile à chauffage, parce que tout l'effort est fait présentement pour maximiser la quantité d'huile à chauffage produite, pour s'assurer qu'on puisse passer un hiver confortable.

M. Brochu: M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Brochu: Dans un premier temps, est-ce que le ministre pourrait prendre l'engagement, vis-à-vis de l'Assemblée nationale, de rendre public le plus rapidement possible l'état justement de ces réserves? Dans un deuxième temps, j'aimerais m'assurer de l'attitude du gouvernement du Québec dans ce dossier. Est-ce que le gouvernement du Québec — même si cela relève d'une question fédérale — serait prêt à rechercher au point de départ, avec les provinces et le gouvernement fédéral, les points qui peuvent nous unir pour faire face à un problème qui est réel pour l'ensemble des citoyens, quelles que soient leur langue et leur culture, plutôt que des situations d'affrontement? Est-ce que le gouvernement du Québec serait prêt à prendre cette attitude positive, face à la population, ce matin?

Le Président: M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: Non seulement prêt, mais je dois dire que M. Hnatyshyn a communiqué avec moi il y a quelques semaines, me demandant si nous ne pouvions pas lui nommer quelqu'un qui représenterait le Québec sur ce groupe de travail fédéral. Je dois lui souligner que j'ai moi-même identifié une personne, un Québécois, qui va effectivement défendre le point de vue des consommateurs québécois à l'intérieur de cette commission. J'ai déjà donné cette réponse publiquement, je ne savais pas que c'était de la nouvelle. J'avais l'impression que ceci était su de tout le monde. Alors peut-être qu'effectivement il faut le répéter. Je ne répète peut-être pas assez.

D'une part, il y a déjà effectivement une collaboration entre le Québec et Ottawa pour tenter de faire en sorte que nos consommateurs souffrent le moins possible de toute pénurie, s'il devait y avoir pénurie. Je suis quand même optimiste.

Quant aux chiffres concernant les approvisionnements, comme nous aurons demain une question avec débat portant plus spécifiquement sur le pétrole, je pense que ce serait peut-être une occasion pour donner les chiffres sur l'approvisionnement en même temps, à moins que le député d'Outremont s'oppose à ce qu'on révèle ces données, mais cela m'étonnerait qu'il y soit vraiment opposé. Je pense qu'on pourra ajouter quelques apartés et donner des chiffres.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, question principale.

Construction d'avions de combat

M. Ryan: On apprend par le Devoir ce matin que des développements sont sur le point de survenir dans le projet d'achat de 130 avions de combat F-16 par le ministère fédéral de la Défense nationale. Apparemment, deux groupes sont en concurrence pour l'obtention de ce contrat. On nous dit qu'un des deux groupes, celui de General Dynamics et de United Technologies, aurait raffiné ses propositions de manière qu'elles contiennent plusieurs retombées intéressantes pour le Québec et, en particulier, la possibilité de construire une usine de pièces de gros moteurs à Pratt & Whitney, la possibilité de construire une fonderie de précision pour la fabrication de pièces pour une partie des moteurs des futurs avions. On dit qu'il aurait également fait des ouvertures pour l'obtention d'un marché pour la vente et la location des navires de Marine Industrie, qui sont actuellement en quête d'acheteurs.

On a également parlé de la proposition du groupe McDonnell Douglas...

M. Landry: McDonnell Douglas.

M. Ryan: Du groupe McDonnell Douglas, au sujet de laquelle le ministre, apparemment, se serait montré plus froid ou plus distant. J'aimerais que le ministre nous dise ce matin quelle est la politique que suit le gouvernement du Québec dans ce projet. Je souligne au passage que le domaine de l'avionnerie est l'un de ceux où le Québec a connu des développements très importants au cours des 30 ou 40 dernières années. Nous avons une base d'industrie très importante dans ce domaine, en particulier, avec les installations de Canadair à Cartierville, de Pratt & Whitney dans la région de Longueuil, au sujet de laquelle certains membres du gouvernement ont eu beaucoup de mal ces derniers temps, mais dont on constate qu'elle est loin d'être partie du Québec et dont je signale d'ailleurs que son personnel s'est accru d'environ 1000 unités au cours des trois ou quatre dernières années, malgré la campagne de dénigrement dont elle a souvent été la victime.

Je demande au ministre d'Etat au Développement économique ou au premier ministre ou à tout autre ministre de nous fournir des précisions en réponse à la question que j'ai posée. Quelle est la ligne de conduite du gouvernement du Québec dans cette affaire, quels sont les développements les plus récents et qu'est-ce que nous devons attendre?

Le Président: M. le ministre d'Etat au Développement économique.

M. Landry: Premièrement, le chef de l'Opposition ne sera pas surpris si je lui dis que le premier point de notre ligne de conduite est de ne tenir aucunement compte des aspects militaires de l'un ou de l'autre des deux appareils, de leur puissance de feu, de leur puissance de turbines, parce que nous ne possédons aucune espèce d'expertise en cette matière pour le moment et ce sont les chefs des états-majors qui influencent le gouvernement du Canada en cette matière. Nous sommes donc intéressés, par conséquent — et c'est le second point de notre doctrine en cette matière — par les retombées économiques. Depuis plus d'un an — d'ailleurs, ce qui ne m'a pas passionné sur le plan militaire, mais m'a passionné sur le plan économique — j'ai visité moi-même les installations de Northrup, de McDonnell Douglas, j'ai vérifié moi-même leurs connaissances des PME québécoises, ce qui n'est pas négligeable d'ailleurs, les firmes ont des dossiers sur cette question. Jusqu'à ce jour... La dernière rencontre avec le groupe auquel le député a fait allusion, c'est-à-dire General Dynamics, United Technologies, Pratt & Whitney, remonte à vendredi dernier. Jusqu'à ce jour, nos indications sont que les retombées économiques de la soumission de General Dynamics, à première vue, seraient plus intéressantes pour le Québec, d'abord parce que le motoriste serait Pratt & Whitney, deuxièmement, parce que les chances d'assemblage final, qui, semble-t-il, sont les plus fertiles en retombées et en transfert technologique, iraient vers la société Canadair. (11 heures)

Cependant, suivant les fonctionnaires fédéraux, qui ont beaucoup plus d'information que nous à ce sujet, même pour les retombées économiques, les jeux ne sont pas faits. Mais, pour résumer notre politique, comme le chef de l'Opposition l'a souligné, près de 50% de l'avionnerie canadienne, moteurs et cellules, est installée au Québec et nous serions très déçus — et tous nos efforts portent dans ce sens — si moins de 50% des retombées économiques de l'un ou l'autre des deux appareils n'étaient pas dans l'économie québécoise.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je voudrais assurer le gouvernement de l'entier concours de l'Opposition dans toute démarche qui visera à obtenir, pour le Québec, la proposition qui sera suivie des retombées économiques les plus substantielles en faveur du Québec. Je suis content de voir que le ministre a souligné l'importance que l'industrie de l'avionnerie, laquelle a été très influencée par les décisions du gouvernement fédéral, occupe dans l'économie québécoise.

Je voudrais demander au ministre, qui nous a fourni quelques précisions sur les retombées économiques, comme on peut les entrevoir actuellement, et je comprends l'état d'imprécision où se trouve sa connaissance du dossier vu que, de l'autre côté, on n'a peut-être pas tout donné, je voudrais qu'il nous dise ce qu'on a laissé entrevoir du côté du groupe McDonnell Douglas comme possibilité de retombées économiques et pourquoi le gouvernement du Québec semblerait pencher pour un côté ou l'autre. Deuxièmement, on nous dit que la décision doit se prendre dans un avenir très prochain. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, pour le gouvernement, de saisir cette Chambre du problème sous une forme dont il restera le maître? Je voudrais assurer encore une fois le gouvernement que, si l'appui de l'Opposition officielle peut être utile dans l'obtention d'une décision qui nous sera favorable au maximum, nous serons très heureux de collaborer par tous les moyens.

Le Président: M. le ministre d'Etat au Développement économique.

M. Landry: Je remercie infiniment le chef de l'Opposition pour son offre de collaboration dont le gouvernement tentera de profiter au maximum, étant donné l'importance de l'enjeu. Pour répondre spécifiquement à sa question supplémentaire, ce qui nous porte à croire que les retombées General Dynamics-United Technology seraient plus importantes, ce sont deux choses: Premièrement, parce que nous avons eu plus de contact avec Pratt & Whitney, ce qui est normal puisqu'il s'agit d'une firme oeuvrant au Québec, plus de contact, donc plus de précision sur les retombées économiques; deuxièmement, c'est un fait qui tombe sous le sens, c'est que la société McDonnell Douglas est déjà installée à Toronto, sur le territoire de l'aéroport de Malton, ce qui, même sans être expert en aéronautique, ne nous dit rien qui vaille au départ.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. le Président, il semble que la concurrence est maintenant réduite à deux avions, le F-16 et le F-18, et que les soumissions seront closes dès la fin de semaine. Est-ce que le ministre est au courant, avec l'échéancier du gouvernement fédéral, de la décision qui sera prise pour l'un ou l'autre et est-ce qu'il a l'intention de présenter son cas par écrit, formellement, au gouvernement fédéral? Si oui, quand?

Le Président: M. le ministre d'Etat au Développement économique.

M. Landry: Premièrement, sur l'échéancier, pourtant les militaires n'ont pas la réputation d'être des hommes fantaisistes, mais, cependant, c'est un des échéanciers les plus fantaisistes que je connaisse parce que déjà, quand je visitais Northrup et McDonnell, il y a plus d'un an et demi, d'après l'échéancier, la décision devait se prendre dans les semaines qui suivaient. Donc, les pronostics sont difficiles sur l'échéancier.

Quant à la présentation du cas, comme dit le député de Notre-Dame-de-Grâce, elle a été faite depuis longtemps, par oral et par écrit, au niveau des fonctionnaires comme au niveau ministériel, avec l'ancien gouvernement comme avec le présent gouvernement. Ce sujet était à l'ordre du jour lors de la dernière rencontre que nous avons eue, un certain nombre de mes collègues et moi, avec M. de Cotret. Les paramètres du Québec sont très bien connus à Ottawa et je les reprends parce que toute la population du Québec doit les connaître: 50% de l'industrie au Québec, 50% des retombées au Québec, au minimum. C'est bien connu, je pense, des fédéraux et c'est connu aussi de plus en plus de la population du Québec.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Une question additionnelle au ministre d'Etat au Développement économique. Dans tout ce projet d'investissement, il est aussi question d'un projet de construction d'une fonderie de précision dans le parc industriel de Mirabel. Est-ce que le ministre peut nous dire aujourd'hui si c est exact et quel genre de montant d'investissements on pourra avoir dans ce parc industriel avec cette fonderie de précision pour les pièces d'avion?

M. Landry: Je pense que le chef de l'Union Nationale confond un certain nombre de projets. Il y a une demi-douzaine de projets retombant directement de la construction de ce chasseur. Celui auquel il fait allusion, à mon avis, résulte d'une confusion, d'une connaissance vague qu'il a de quelques-uns de ces projets. Pour Mirabel, il ne s'agit pas d'une fonderie, M. le Président. Il s'agit plutôt d'une foreuse qui peut forer dans cinq azimuts, ce qu'on appelle dans l'industrie, un "chipmunk" qui est une pièce d'équipement absolument prodigieuse fabriquée à Cincinnati et qui pourrait desservir toute l'industrie aéronautique du Québec. C'est ce qui est prévu effectivement pour le parc industriel de Mirabel comme une des retombées. Ce n'est pas la plus importante. Il y a également dans la corbeille une fonderie, un centre de pièces et un certain nombre d'autres unités industrielles importantes.

Le Président: Question principale, M. le chef de l'Union Nationale ou...

M. Biron: En vertu de l'article 96, M. le Président...

M. Cordeau: M. le Président...

Le Président: ... M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Biron: Question de privilège, M. le Président. Je veux tout simplement dire au ministre que j'ai pris mes informations dans le journal de ce matin.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président...

M. Landry: M. le Président, je pense que la vérification qu'a faite auprès de moi le chef de l'Union Nationale est sage.

Des Voix: Ah, ah!

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

Griefs des agriculteurs

M. Cordeau: M. le Président, l'Union des producteurs agricoles tient présentement à Québec son 55e congrès annuel.

Une Voix: Bravo!

M. Cordeau: Je n'aurai peut-être pas les mêmes applaudissements lorsque j'aurai terminé mes questions.

Pendant que le plus parfait accord semble établi entre le ministre de l'Agriculture et le président sortant de l'UPA, il n'en va pas de même avec le ministre de l'Environnement et le ministre d'Etat à l'Aménagement, selon l'article paru dans le Soleil du 4 décembre, sous le titre: "Léger et Léonard, les cibles des agriculteurs au congrès de l'UPA".

Dans cet article, on peut lire que l'UPA reproche en particulier au ministre Marcel Léger d'aller plus vite que les violons en matière de protection de l'environnement, et au ministre Jacques Léonard, d'effacer, par sa Loi sur l'aménagement, les avantages que procurait la Loi du zonage agricole.

Plus loin, on peut lire que les agriculteurs sont conscients de la nécessité de protéger au maximum l'environnement, mais ils constatent qu'on veut les faire danser avant même que le violon gouvernemental soit accordé. Ils notent que les Services de protection de l'environnement exigent le respect de règlements qui ne sont pas encore adoptés, prônent des techniques qui ne sont pas encore au point — entre parenthèses, et qui ne seront pas reconnues de sitôt — et traitent tout le monde de pollueur avant même d'avoir enquêté sur les causes de la pollution.

Mes questions sont les suivantes, M. le Président. Est-il exact, M. le ministre, que vous exigez des agriculteurs qu'ils respectent des règlements qui ne sont pas encore en vigueur? Deuxième question: Que le respect de ces règlements coûterait aux producteurs agricoles québécois $250 millions pour ajuster dès maintenant leur élevage aux règlements non en vigueur de votre ministère? Finalement, M. le Président, le ministre a-t-il l'intention d'adopter des modifications à ces règlements et, dans l'affirmative, quelles sont ces modifications? Avez-vous l'intention d'apporter une aide financière aux agriculteurs qui font face à vos exigences?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, vous remarquerez que ces questions arrivent à la fin de la période des questions précédées d'un préambule qui demande beaucoup d'explications. Je vais essayer d'être le plus bref possible. Je voudrais quand même dire que le problème général qu'a soulevé le député est exact, mais il est en voie de solution. J'ai reçu une lettre dernièrement de M. Couture, président de l'UPA, qui résume un peu ce que le député vient de dire. Il faut dire tout d'abord que le problème était de trois ordres. Le premier, c'est une question de retard à donner les permis aux éleveurs de porc spécialement qui le demandaient. Je tiens à vous dire que pour 250 demandes de permis que nous avions par année, il y a quatre ans, nous en avons reçu cette année 5000. C'est pour démontrer jusqu'à quel point la demande est forte et qu'elle crée des problèmes. Je peux vous dire qu'au moment où on se parle, il n'y a maintenant aucun retard. Toute demande de permis pour l'élevage du porc et pour d'autres types d'élevage se donne en moins de trois semaines de l'arrivée des formules correctement remplies. (11 h 10)

Deuxièmement, il ne faut pas oublier une chose. Au moment où on se parle, il y a au Québec, selon les dernières statistiques, près de 3 millions de porcs. Quand on sait que pour une livre de viande, il reste 17 livres de purin, cela fait beaucoup de purin qui se dirige dans les rivières, s'il n'y a pas moyen de l'intercepter. C'est la raison pour laquelle, dans la deuxième partie de la question, ce que nous exigeons maintenant, c'est une fosse étanche. La modalité relève de celui qui demande un permis, à savoir de s'assurer qu'il y a une fosse étanche de rétention pour éviter que le purin se jette dans les rivières.

Je pense qu'il serait impensable, M. le Président, que le gouvernement dépense des milliards de dollars pour épurer les rivières sur le plan de la pollution municipale et qu'on ne fasse aucune surveillance et qu'on ferme les yeux sur la pollution agricole. De toute façon, je pense que, selon la lettre de M. Couture, président de l'UPA, on est très intéressé à protéger l'environnement du côté des agriculteurs.

Voici que la troisième question concerne le fameux règlement sur l'épuration, qui n'aurait pas été adopté. Il n'a pas été adopté parce qu'il y avait deux parties, dont l'une était facilement acceptable par les éléments qui vont subir ou accepter un règlement, c'est-à-dire la partie de la protection de l'eau. On est d'accord sur la portion du règlement concernant la protection de l'eau. Les agriculteurs, comme les citoyens, sont d'accord.

C'est sur la partie des odeurs qu'on n'est pas d'accord, le règlement qui créait des contraintes sur les distances à cause des odeurs. Là-dessus, nous avons décidé de préparer un nouveau règlement qui tiendrait compte de la protection des cours d'eau d'abord et de n'utiliser ces éléments que comme code de pratique pour la protection de l'air, c'est-à-dire des odeurs, pour éviter d'em-

pêcher des demandes de permis des citoyens qui, légitimement, sont formulées.

Concernant l'aide financière, je tiens à vous dire que j'appuie de tout coeur les mesures que le ministre de l'Agriculture essaie de faire adopter. Il y a des projets d'aide financière pour les agriculteurs qui ne relèvent pas du ministère de l'Environnement parce que notre responsabilité, c'est celle de la qualité de la vie, de la qualité de l'environnement. Dans le domaine de la production, cela relève du ministre de l'Agriculture qui a des projets qui doivent bientôt être présentés, dès qu'ils auront passé à travers la "machine à saucisses" du gouvernement, pour s'assurer que son projet de financement puisse aider les agriculteurs.

Le Président: Merci.

M. Cordeau: Question additionnelle.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le ministre, je vous remercie de vos explications, mais vous n'avez pas spécifié et vous n'avez pas donné d'explication — vous n'avez pas répondu à ma question — concernant le règlement qui impose aux cultivateurs certaines normes. Est-il en vigueur, oui ou non? J'aurais une question additionnelle, si vous me le permettez — pour aller plus vite — au ministre de l'Agriculture. Actuellement, a-t-il des programmes ou a-t-il l'intention de présenter des programmes pour aider les cultivateurs concernant les normes qu'exige le ministère de l'Environnement?

M. Léger: M. le Président, le règlement comme tel, comme je viens de le dire, n'est pas en vigueur, sauf que le ministre de l'Environnement est lié à la Loi de l'environnement dont l'article 22 dit ceci: "Tout projet susceptible de modifier l'environnement doit obtenir du directeur un certificat d'autorisation." Sur quoi allons-nous nous baser pour refuser un certificat d'autorisation ou l'accepter et émettre un permis? Il faut se baser sur quelque chose. Nous nous basons, premièrement, sur un code de pratique qui est, grosso modo, le contenu de ces règlements. Mais pour s'assurer qu'il n'y aura pas d'injustice, je pense que le député sera heureux d'apprendre que nous avons conclu une entente avec l'UPA pour que toute demande de permis d'élevage, qui serait refusée par le ministère de l'Environnement, puisse passer devant un mécanisme d'appel qui s'appelle le comité régional composé de gens du ministère de l'Environnement, de l'UPA et du ministère de l'Agriculture pour trouver, dans la région, une solution adaptée à la région, aux problèmes de l'agriculteur qui demande un permis et qu'on lui refuse sur le plan national.

Deuxièmement, je dois vous dire que concernant l'aide sur le plan technique, nous avons fait une étude pour trouver une façon de réutiliser l'engrais animal que nous avons avec le purin par le procédé Fuchs, qui a maintenant une année et demie d'expérience, et je peux vous dire que ce sera probablement la solution pour l'avenir parce que les expériences du procédé Fuchs démontrent que cela pourra fonctionner au Québec et que les préoccupations qu'on avait à cause du climat s'estompent avec le succès de la première année d'utilisation de ce procédé.

Le Président: M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, dans la Presse de lundi de cette semaine, le 3 décembre, on pouvait lire un article...

M. Goulet: M. le Président.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

M. Charbonneau: Voyons!

Le Président: Qu'est-ce qui se passe?

M. Goulet: Je vous demande une directive. Je ne veux pas être désagréable à cette Chambre mais, ce matin, l'Union Nationale n'a eu qu'une question principale avec une question additionnelle seulement. Il me semble que ce n'est pas trop demander d'en avoir une deuxième additionnelle sur notre première question.

Le Président: M. le député de Bellechasse, j'ai noté que, depuis un certain temps, le nombre de questions avait sensiblement diminué à l'Assemblée Nationale. J'ai tenté cette semaine d'augmenter un peu le nombre de questions qui sont posées. Je vous signale qu'il est vrai que le député de Saint-Hyacinthe n'a posé qu'une question principale, mais c'était une question à très multiples volets, M. le député de Bellechasse. D'autre part, le chef de l'Union Nationale a également eu droit à des questions, de même que le leader parlementaire de l'Union Nationale. Alors, je pense que vos propos étaient à tout le moins inexacts.

M. le député de Verchères.

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Le ministre de l'Environnement, dans sa réponse de tout à l'heure, a fait allusion à une entente qu'il avait conclue avec l'UPA Est-ce qu'il pourrait la déposer?

M. Léger: Je n'ai pas dit que nous avions conclu une entente, j'ai dit qu'il y a une entente venant de l'offre que nous avions faite à l'UPA et de la lettre que j'ai reçue de M. Couture me disant...

Le Président: M. le ministre de l'Environnement! M. le député de Nicolet-Yamaska, je vous

signale au passage qu'il n'y avait pas là matière à une question de règlement et que c'est du temps de la période de questions qui s'est écoulé en vain, je pense.

M. le député de Verchères.

Surproduction de pommes de terre

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Comme je le disais tantôt, dans la Presse de lundi, on pouvait voir un article qui était malheureusement un peu camouflé dans le cahier C 12 qui s'intitulait "La surproduction sature le marché. Les producteurs de patates du Québec perdront $10 millions". C'est peut-être comique, M. le député, mais si vous aviez des producteurs de patates dans votre comté, ce serait peut-être moins drôle. Les producteurs de Saint-Amable, dans le comté de Verchères, vont s'en souvenir en tout cas. M. le Président, permettez-moi un bref préambule pour situer le ministre de l'Agriculture. L'article disait: Très avantageuse pour le consommateur, la surproduction actuelle de pommes de terre dans l'Est du Canada et particulièrement au Québec cause de sérieux problèmes financiers aux 1500 producteurs québécois qui doivent écouler leur récolte au-dessous du coût de production. La perte résultant de cette situation représente environ $10 millions pour le Québec cette année. On dit que la surface cultivée en pommes de terre a augmenté de façon significative dans la plupart des provinces productrices, notamment de 11% au Québec, si bien qu'avec 450 000 tonnes produites cette année, le Québec se retrouve avec une récolte de 38% supérieure à celle de l'an dernier.

On parle ici du marché saturé. On dit: "Toutefois, comme il y a hausse de production également au Nouveau-Brunswick et à l'Ile-du-Prince-Edouard, deux provinces dont le transport de pommes de terre vers le Québec est subventionné par le gouvernement fédéral, le marché se trouve saturé. Pis encore, les conditions de récolte dans ces deux provinces n'ayant pas été propices, les producteurs ont mis sur le marché une partie de leur récolte qui était habituellement conservée dans des entrepôts jusqu'en mai." Le secrétaire de l'Association des producteurs de pommes de terre du Québec, M. Antoine Locas, considère, selon lui, que la situation est grave actuellement. Un consommateur de Québec paie moins cher les pommes de terre du Nouveau-Brunswick que celles produites dans les environs de la même ville." Je voudrais demander au ministre de l'Agriculture si, d'abord, il est au courant de cette situation? Deuxièmement, est-ce que le ministère de l'Agriculture du Québec prévoit intervenir d'une façon quelconque pour aider les producteurs québécois, notamment ceux de Saint-Amable, dans le comté de Verchères? Troisièmement, est-ce qu'il trouve normal que les consommateurs montréalais paient actuellement moins cher les patates du Nouveau-Brunswick que les patates de Saint-Amable, à quinze milles de Montréal?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture. (11 h 20)

M. Garon: M. le Président, il y a deux aspects à la question. Premier aspect, normalement, les producteurs de la province de Québec seraient avantagés dans le commerce des pommes de terre, mais comme ont mentionné le député de Verchères et l'article qu'il citait, le gouvernement fédéral subventionne le transport des pommes de terre des Maritimes vers le Québec, à tel point qu'une poche de pommes de terre qui vient de Grand Falls au Nouveau-Brunswick, c'est quand même 250 milles à peu près de Québec, 200 milles, coûte moins cher à venir sur le marché du Québec qu'une poche de pommes de terre qui vient de Saint-Raymond de Portneuf tout près d'ici, tout près de Québec.

Une Voix: Sainte-Catherine.

M. Garon: Si on tient compte de la manutention et du transport, au ministère de l'Agriculture, on calcule que, sur $0.96, le gouvernement fédéral rembourse $0.56 pour le transport. Récemment — $0.56 sur $0.96 — l'an dernier, des hauts fonctionnaires, du gouvernement fédéral mentionnaient que la subvention fédérale sur le transport des Maritimes va augmenter encore, ce qui veut dire que, depuis que cette subvention est accordée par le gouvernement fédéral, la production de pommes de terre a diminué considérablement dans le bas de Québec; la région du Bas-Saint-Laurent, par exemple, a été très "maganée" par cette mesure fédérale et la production s'approche de plus en plus de Montréal. Autrement, ces gens ne peuvent pas concurrencer. Concernant les prix du marché, le gouvernement du Québec a fait ce qu'il a pu depuis 1977 puisque nous avons mis sur pied l'assurance-stabilisation des revenus des producteurs de pommes de terre et ceux qui sont assurés peuvent recevoir une compensation pour faire face aux coûts de production plus la moyenne de salaire de l'ouvrier spécialisé, à condition d'avoir adhéré au régime d'assurance-stabilisation des revenus des producteurs de pommes de terre du Québec. Je n'ai pas les chiffres pour l'an dernier, mais je peux dire que, la première année, il y a une centaine de producteurs qui y ont adhéré et qui ont fait $1 200 000, soit une moyenne d'à peu près $12 000 chacun, pour la stabilisation des revenus des producteurs de pommes de terre.

Le Président: M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais signaler au ministre que, selon le secrétaire de l'Association des producteurs de pommes de terre du Québec, cette situation amènera la disparition de plusieurs producteurs ne pouvant faire face à leurs obligations financières, même si 45% d'entre eux sont couverts pas l'assurance-stabilisation. Etant donné qu'une bonne partie de cette situation des producteurs québécois est causée par l'impossibilité pour eux de concurrencer les producteurs des Maritimes, notamment, à cause des subventions fédérales, est-ce qu'il est dans l'intention du ministère de l'Agriculture du Québec et

du gouvernement du Québec de demander au gouvernement fédéral de faire sa part pour compenser actuellement les problèmes financiers des producteurs de pommes de terre du Québec pour que ces gens ne tombent pas en faillite, pour que ces gens ne soient pas obligés de quitter la production des pommes de terre, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: A plusieurs occasions, M. le Président, on a parlé de cette question avec les gens du gouvernement fédéral, excepté que le gouvernement fédéral veut, par des mesures, maintenir la production de pommes de terre dans les Maritimes et aider la production de pommes de terre dans les Maritimes, à tel point qu'en 1977, alors que le prix des pommes de terre avait été très bas, le gouvernement fédéral a versé des avances d'allocations aux Maritimes pour une stabilisation des prix, ce qui paie beaucoup moins que les revenus, avant d'annoncer sa mesure pour l'ensemble des provinces du Canada, pour mieux concurrencer les gens du Québec. Les producteurs de pommes de terre auront l'occasion d'étudier la question le printemps prochain et de dire s'ils aiment continuer à voir le fédéral, à même nos impôts, financer, subventionner le transport des Maritimes où si c'est mieux que tous leurs impôts viennent au Québec pour aider à développer la production de pommes de terre et encourager leur production.

Le Président: M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Dernière question additionnelle qui est peut-être en même temps une incitation au ministre de l'Agriculture. Je comprends sa réponse, mais je voudrais l'inciter, au nom des producteurs de pommes de terre du Québec, notamment ceux du comté de Verchères, non seulement d'adresser des blâmes comme il vient de le faire au gouvernement fédéral, mais de poser des mesures concrètes, des gestes concrets et de protester énergiquement et d'une façon, si possible, officielle...

Le Président: M. le député de Verchères, votre question.

M. Charbonneau: ... auprès du gouvernement fédéral sur cette situation.

Le Président: M. le député de Gatineau. M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Je peux répondre, M. le Président? Au gouvernement fédéral, on dit d'une façon régulière: Ces mesures discriminatoires, je sais que l'Opposition en rit toujours, surtout le député de Johnson, on dirait qu'il n'y a pas de producteurs agricoles dans son comté; chaque fois qu'il y a une question sur l'agriculture, il en rit...

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, s'il vous plaît.

M. Garon: En termes de farceurs, je pense bien que la population a l'occasion de faire son évaluation.

C'est constant, je passerais mon temps à écrire, à téléphoner ou à télégraphier à Ottawa. On a passé quasiment l'année à faire cela. Cela a été fait dans le cas du port de Montréal où il payait $3 de plus à Vancouver après quatre jours de grève; après six mois à Montréal, cela a été dans tous les domaines, ce sont les politiques discriminatoires du gouvernement fédéral dans le domaine agricole. C'est clair.

Une Voix: ...

M. Garon: Voyons donc, vous n'avez rien fait dans le régime.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. Garon: Dans le domaine des patates... M. O'Neill: Les colonisés sont toujours là.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, puis-je vous demander de tirer les conclusions rapidement, s'il vous plaît?

M. O'Neill: Cela ne les intéresse pas quand c'est le Québec.

M. Garon: M. le Président...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Quand le fédéral "magane" les cultivateurs du Québec, l'Opposition trouve cela drôle. Le chef libéral en tête.

M. Ryan: Question de privilège.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: On s'amuse du spectacle de théâtre qui est fourni par le ministre. C'est tout. Le reste, on l'examine à son mérite. Parlez donc de la question et cela va aller bien plus vite.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture. M. O'Neill: ... au service d'Ottawa.

M. Garon: La question est simple. Le gouvernement du Québec a établi l'assurance-stabilisa-tion pour compenser les prix du marché avec les coûts de production. Le régime d'assurance-stabilisation québécois est un bon programme, très généreux et tous les cultivateurs l'admettent. Mais on n'est pas capable d'empêcher le gouvernement fédéral de verser des subventions sur le transport des pommes de terre qui viennent des Maritimes, pour rapprocher les producteurs des Maritimes, plus proche de Montréal ou de Québec, que les producteurs du Québec qui sont situés tout près de Québec ou de Montréal... Qu'est-ceque vous-voulez, je ne suis pas capable d'empêcher le gouver-

nement fédéral, selon la politique actuelle, de prendre nos sommes d'argent pour les donner aux gens des Maritimes pour concurrencer nos cultivateurs québécois. Si vous avez quelque chose à dire, M. le chef libéral, dites donc ce que vous voulez faire face à cela.

Le Président: M. le député de Gatineau. M. Gratton: M. le Président.

Le Président: ... pour une très brève question, M. le député de Gatineau.

Financement du transport en commun

M. Gratton: Je m'y attendais, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Transports. Hier, en conférence de presse, le ministre des Affaires municipales et celui des Transports, par le dépôt de ce document sur le financement des communautés urbaines et régionales et du transport en commun, nous ont dévoilé la nouvelle politique de financement du transport en commun en particulier.

Il va sans dire, M. le Président, que cette nouvelle politique du financement du transport en commun aura un impact sur le développement du réseau routier, en particulier, du développement autoroutier. J'aimerais donc demander au ministre si les sommes additionnelles qui seront consacrées dorénavant au développement du transport en commun auront quelque impact sur les échéanciers quant à la construction des grandes autoroutes du Québec, notamment la A-50 entre Buckingham-Mirabel pour rejoindre la A-13, l'autoroute de la Beauce bien entendu et l'autoroute de mon collègue de Portneuf, la A-40 entre Donna-cona et Trois-Rivières et toutes les autres.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, nous avons effectivement, hier, dévoilé une nouvelle politique d'aide et d'encouragement au transport en commun, conformément à un consensus que l'on croit déceler, en tout cas, nous, dans la population — sinon dans le Parti libéral — à savoir que nos priorités durant les prochaines années doivent aller du côté des transports en commun en milieu urbain plutôt que du côté du développement des autoroutes.

S'il y a une concurrence du point de vue des crédits, c'est certainement entre le développement routier en milieu urbain et en milieu péri-urbain par rapport au développement des infrastructures de transport en commun. (11 h 30)

Quant à la politique de transport en commun que nous avons dévoilée hier, outre le fait qu'elle permettra une diminution du coût du transport en commun pour les usagers réguliers de ce système de transport, outre le fait que cette politique permettra d'améliorer aussi la gestion des systè- mes de transport en commun, même de faire en sorte que les coûts...

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'il pourrait répondre à la question, M. le Président?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, non seulement l'Opposition choisit-elle les questions, mais en plus elle veut choisir les réponses!

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marchand: Parlez-nous donc de votre voyage à...

M. de Belleval: Outre donc le fait que cette politique permettra une gestion plus efficace de nos systèmes de transport en commun, elle améliorera aussi, je pense, l'autonomie des municipalités en cette matière, elle renforcera cette autonomie et permettra de meilleurs choix sur le plan des communautés locales.

Par ailleurs, en ce qui concerne notre programme de construction d'autoroutes en dehors des milieux urbains, celui-ci se poursuivra tel que prévu, mais il est entendu qu'il est sujet aux disponibilités financières, budgétaires comme tous les autres projets, comme tous les autres budgets gouvernementaux.

Le Président: Fin de la période des questions.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Fin de la période des questions.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: ... j'essaierai de vous reconnaître demain.

M. Gratton: Question de règlement.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je conviens que la question devrait être courte, c'est la dernière, je conviens aussi que je n'aurais peut-être pas droit à une question additionnelle si, tout au moins, j'avais eu une réponse à la première, mais je n'ai même pas eu de réponse à ma première question, M. le Président. Me permettriez-vous au moins de la répéter?

Le Président: M. le député de Gatineau, je vous reconnaîtrai demain pour que vous formuliez votre question.

M. Gratton: Toujours demain, M. le Président! Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: Le député de Gatineau est en train d'induire cette Chambre en erreur en disant que je n'ai pas répondu à sa question. J'ai répondu à sa question en disant que notre programme de construction de réseaux d'autoroutes en dehors des milieux urbains — c'est la question qu'il me posait — se poursuivra tel que prévu, sujet aux disponibilités budgétaires comme tous les autres postes de dépenses gouvernementaux. Il n'y a pas de concurrence spécifique entre notre programme de développement du transport en commun et notre programme de développement d'autoroutes, pas plus qu'il n'y en a entre ce programme de développement du transport en commun et d'autres programmes gouvernementaux dans d'autres ministères.

Le Président: Très bien.

Motions non annoncées.

Motions non annoncées

Félicitations à Dalpé et Frères

M. Marchand: M. le Président... Le Président: M. le député de Laurier.

M. Gratton: J'ai mon voyage, mais je n'ai pas mon autoroute!

M. Marchand: ... je voudrais faire une motion non annoncée à l'effet de féliciter la compagnie Dalpé et Frères de Verchères qui, à la Winter Fair de Toronto, en compétition avec 26 participants canadiens, s'est classée grande championne dans la catégorie des fromages fins. Avec votre permission, M. le Président, je voudrais signaler que sur les cinq gagnants, quatre participants étaient du Québec et il me fait plaisir de nommer Dalpé et Frères, Agropur, Lactancia et la Crémerie Saint-Gérard de la ville de Saint-Gérard-Magella.

Le Président: Y a-t-il consentement à la présentation de la motion?

Est-ce que la motion sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Des Voix: Est-elle débattable?

Le Président: M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, je voudrais proposer une motion non annoncée qui se lit comme suit: Que cette Chambre prie notre gouvernement provincial d'intervenir immédiatement auprès des autorités fédérales pour que nos provisions d'huile à chauffage pour cet hiver 1980 soient assurées pour tous les Québécois et que copie de cette motion non annoncée soit envoyée immédiatement aux autorités fédérales.

Le Président: Y a-t-il consentement à la présentation de cette motion? M. le député de Johnson, il n'y a pas consentement à la présentation de la motion.

M. Bellemare: Le vrai visage!

Le Président: Nous en sommes maintenant à l'enregistrement des noms sur les votes en suspens. Il y a un vote en suspens alors, je demande qu'on appelle les députés.

Suspension à 11 h 35

Reprise à 11 h 43

Mise aux voix de la deuxième lecture du projet de loi no 57

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

J'appelle maintenant la mise aux voix de la motion de M. le ministre des Affaires municipales proposant que le projet de loi no 57, Loi sur la fiscalité municipale et modifiant certaines dispositions législatives, soit maintenant lu la deuxième fois.

Que ceux et celles qui sont pour cette motion de deuxième lecture veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mmes Cuerrier et Payette, MM. Laurin, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Parizeau, Landry, Léonard, Vaugeois, Bérubé, Mme Ouellette, MM. Vaillancourt (Jonquière), Gendron, Joron, de Belleval, Johnson, Chevrette, Lazure, Léger, Tardif, O'Neill, Paquette, Gagnon, Marcoux, Rancourt, Bertrand, Fallu, Michaud, Laberge, Guay, Lefebvre, Laplante, Mme LeBlanc Bantey, MM. de Bellefeuille, Dussault, Alfred, Marquis, Ouellette, Jolivet, Brassard, Godin, Mercier, Boucher, Beauséjour, Desbiens, Bordeleau, Charbonneau, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Lacoste.

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), Saint-Germain, Caron, Vaillancourt (Orford), Forget, Lavoie, Mailloux, Lalonde, Blank, O'Gallagher, Picotte, Mme Lavoie-Roux, MM. Ray-nauld, Lamontagne, Giasson, Rivest, Mme Chaput-Rolland, MM. Lalande, Mathieu, Dubois, Scowen, Marchand, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Marx, Biron, Brochu, Grenier, Goulet, Fontaine, Bellemare, Cordeau, Le Moignan.

Le Président: Que ceux et celles qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 51 — Contre: 36 — Abstentions: 0

Le Président: Motion adoptée. M. Charron: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Je voudrais proposer que ce projet de loi soit maintenant déféré à la commission des affaires municipales.

Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Une Voix: Oui.

Le Président: Adopté, M. le leader parlementaire du gouvernement. Aux avis à la Chambre.

Avis à la Chambre

M. Charron: Le menu de la journée, M. le Président, est connu. Les deux projets de loi au nom du ministre des Affaires sociales et celui au nom du ministre des Affaires municipales, qui apparaissent au feuilleton se trouveront à faire notre journée de travail. Je propose et je fais motion pour que, cet après-midi, à 15 heures seulement — pas ce matin — pour quelques minutes, semble-t-il — mais il faut le faire — la commission de l'agriculure et de l'alimentation se réunisse pour mettre fin à l'étude article par article du projet de loi no 41.

Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Une Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Charron: Je propose, M. le Président, d'appeler le projet de loi apparaissant à l'article 24 du feuilleton.

Le Président: Auparavant, je vais reconnaître M. le député de Gatineau pour une question en vertu de l'article 34.

M. Gratton: C'est en vertu de l'article 34, M. le Président, mais je ne suis pas sûr que ce soit une question conforme à l'article 34. Je vous demande de m'arrêter aussitôt que je dépasserai la portée dudit article. Les députés de Saint-Jean et de Rivière-du-Loup portent de trois à cinq le nombre de ceux qui ont utilisé le texte que l'on connaît dans leur envoi sans adresse. Je voudrais demander au leader du gouvernement de bien vouloir en aviser le premier ministre qui a pris avis de la question que je lui ai posée mardi.

Le Président: Ce n'était pas une question suivant les dispositions de l'article 34.

M. Charron: M. le Président, ce n'était pas une question en vertu de l'article 34 parce que, si, en vertu de l'article 34, on fait de moi le messager pour l'ensemble du gouvernement, je pense que ce ne sont pas les dispositions que prévoit notre règlement.

M. Gratton: M. le Président, je m'en excuse...

Projet de loi no 77 Deuxième lecture

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! J'appelle maintenant la deuxième lecture du projet de loi no 77, Loi sur les services de garde à l'enfance. Je cède la parole à M. le ministre des Affaires sociales.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Mme la Présidente, selon le message habituel, je dois d'abord vous informer que le lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et qu'il en recommande l'étude à cette Assemblée.

C'est avec une certaine émotion, Mme la Présidente, que j'amorce ce matin la discussion sur le projet de loi no 77, Loi sur les services de garde à l'enfance, une certaine émotion parce que c'est une première au Québec. Pour la première fois, nous aurons un cadre légal législatif. Nous aurons une loi qui permettra de mieux organiser les services de garde à l'enfance. Le Parti québécois, dans son programme, accorde une importance considérable au développement, non seulement de garderies, mais de services de garde de toutes sortes et ce gouvernement-ci s'était engagé, dans le discours inaugural, à présenter durant cette session un projet de loi qui, en plus de créer de nouveaux types de services de garde, en plus de multiplier les différentes sortes de services de garde pour enfant, verra aussi à créer un office qui sera chargé de coordonner tous ces services de garde. (11 h 50)

Donc, le discours inaugural avait laissé entrevoir ce projet de loi. Le gouvernement aussi avait créé, il y a un an et demi, un comité interministériel qui a fait rapport. A la suite de ce rapport, en octobre 1978, le gouvernement s'engageait à accorder une grande priorité, au cours des trois prochaines années, au développement des services de garde. C'est à ce moment-là que le gouvernement s'est engagé à ajouter une somme de $10 millions par année, durant trois ans, pour faire en sorte que le Québec fasse le rattrapage considérable que nous avons à faire dans ce domaine.

Nous avons, l'été passé, présenté un avant-projet de loi. En commission parlementaire, nous avons entendu 27 groupes venant de différents milieux, de différentes régions du Québec. Le projet de loi no 77 que nous déposons aujourd'hui est, par conséquent, le fruit de multiples consultations. Ce projet de loi correspond aussi aux voeux du Conseil du statut de la femme qui, dans le rapport Egalité et Indépendance nous dit ce qui suit: "Les services de garde d'enfants sont au premier rang des revendications de la majorité des associations féminines du Québec. Comme il s'agit de services de nature collective, l'Etat ne doit pas se dérober aux obligations qui lui incombent. Il est urgent de mettre sur pied, au Québec — c'est toujours le Conseil du statut de la femme qui parle — des réseaux de services de garde d'enfants. Ces services devront être diversifiés et facilement accessibles. Ils' devraient aussi répondre à la fois aux besoins quantitatifs et qualitatifs."

Il y a deux objectifs fondamentaux dans ce projet de loi et dans la philosophie du gouvernement. D'abord, aider la femme, la mère d'un jeune enfant, qui désire travailler, à exercer ce droit au travail, mais en même temps, aider aussi la femme, qu'elle travaille au foyer ou à l'extérieur du foyer, à exercer un autre droit qui est aussi fondamental que le droit au travail, c'est-à-dire le droit aux loisirs. Par conséquent, en diversifiant, en offrant différentes sortes de services de garde, garde régulière, garde occasionnelle, garde familiale, garde en garderie, nous aidons et nous voulons réaliser ce double objectif, celui de faciliter l'exercice de ces deux droits de la femme, son droit au travail et son droit aux loisirs.

Le deuxième grand objectif touche, cette fois-ci, non pas la mère, non pas la femme, mais l'enfant. Ce projet de loi établit clairement le droit du jeune enfant à un service de garde de qualité. Ces deux objectifs, autant du côté de la mère que du côté de l'enfant, nous voulons les réaliser le plus rapidement possible. Nous voulons les réaliser en nous basant sur quelques principes fondamentaux qui ressortent de ce projet de loi.

Le premier principe, c'est la participation des parents. Les parents sont d'abord et avant tout les gens responsables du genre de garde que leur enfant doit recevoir. Donc, la participation des parents, de différentes façons: participation financière, selon les revenus du ménage. Donc, il ne s'agit pas d'un réseau universel gratuit, payé entièrement par les fonds de l'Etat. Il s'agit d'un réseau où la participation financière est mixte: d'une part, le gouvernement, selon les revenus de la famille, d'autre part, la famille.

Le deuxième principe: la participation des parents à l'organisation, à la gestion et à la direction d'une garderie ou d'un service de garde. D'où, dans le projet de loi, un aspect fort important qui veut que dans les garderies coopératives ou à but non lucratif, le conseil d'administration soit composé majoritairement de parents. Dans d'autres structures où le service de garde peut être sous la juridiction d'une municipalité ou d'une commission scolaire, cette participation des parents se fera par le biais d'un comité consultatif de parents, un peu à la façon d'un comité de parents dans une école. Donc, premier principe, participation au maximum des parents qui sont les premiers intéressés.

Deuxième principe, la liberté de choix pour les parents. Jusqu'ici, les gouvernements antérieurs s'en tenaient, quant à la participation financière de l'Etat, à un seul type de service de garde, c'est-à-dire la garderie et surtout la garderie en quartier, en région et, parfois, la garderie en milieu de travail. Avec les nouvelles sortes de services de garde que nous offrons dans ce projet de loi, service de garde en milieu familial, service de garde en milieu scolaire, service de garde en halte-garderie, nous offrons un éventail, une variété de services de garde comme les parents n'en ont jamais eu dans le passé. Le parent décidera, avec la subvention directe qu'il ou qu'elle reçoit du gouvernement selon son revenu, à quel type de service de garde il ou elle voudra confier son enfant.

Troisième principe fondamental: l'accès aux services. Vous savez, Mme la Présidente, ce gouvernement-ci a fait un effort considérable au plan financier depuis trois ans. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en novembre 1976, le budget du service des garderies au ministère des Affaires sociales était de $3 500 000. Trois ans plus tard, ce même budget est passé à $22 500 000. Il s'agit non seulement d'y mettre les budgets voulus, mais aussi de rendre accessibles à tous les parents du Québec qui en ont besoin, dont les enfants en ont besoin, ces services de garde. Donc, il faut les multiplier autant dans leur variété que dans leur nombre.

Voilà les trois principes fondamentaux: participation des parents, liberté de choix et accès aux services. Pour qui tous ces services de garde? Actuellement, nous comptons au Québec environ 500 000 enfants de cinq ans et moins et de ces 500 000 enfants, nous en comptons environ 150 000 dont le parent, s'il n'y en a qu'un, ou les deux parents lorsqu'il y en a deux, travaillent à l'extérieur de la maison. Donc, environ 150 000 enfants de moins de cinq ans qui ont besoin d'une certaine forme de garde. Une autre façon aussi de décrire les besoins urgents qui sont de plus en plus nombreux dans notre société au fur et à mesure que la femme entre sur le marché du travail — je mentionne en passant que 40% des femmes sont sur le marché du travail et plus particulièrement, une femme sur trois qui a un jeune enfant de deux à cinq ans est actuellement au travail hors du foyer. La situation actuelle, quoique améliorée depuis quelques années, est encore nettement insuffisante quant au nombre de places. Nous avons actuellement 366 garderies au Québec qui peuvent recevoir 16 500 enfants. (12 heures)

Par voie de comparaison, si on regarde chez nos voisins de l'Ontario, on y occupe actuellement 60 000 places de garderie pour une population d'environ 8 200 000; si on voulait du jour au

lendemain rattraper le niveau de l'Ontario, il faudrait plus que doubler immédiatement le nombre de places en garderie; pour arriver au même niveau que l'Ontario, il faudrait avoir tout près de 45 000 places en garderie ou en service de garde. La même disproportion se retrouve dans d'autres provinces, notamment en Alberta et en Colombie-Britannique. Je pense que nous devons rendre hommage aux pionnières qui ont cru à ce genre de service et qui se sont dépensées sans compter malgré toutes les difficultés et souvent malgré le manque d'intérêt des gouvernements passés. Nous devons rendre hommage à ces pionnières. On connaît peu l'histoire des garderies. Je me permets d'en parler deux minutes.

Les cinq premières garderies au Québec ont été créées en 1858, Mme la Présidente, par les religieuses Soeurs Grises.

Une Voix: A Québec ou à Montréal ?

M. Lazure: On a eu après une longue période de piétinement et on se retrouve dans les années soixante avec un certain nombre de garderies, surtout dans la région de Montréal, du genre coopérative. On se retrouve, un peu plus tard, vers soixante-cinq, tout à coup, avec la création assez subite d'un certain nombre de garderies financées par les projets PIL de triste mémoire — projets financés par de l'argent fédéral — parce que ces garderies qui répondaient à un besoin urgent surtout dans la ville de Montréal ont créé des attentes, des espoirs, ont donné momentanément des services pendant six mois, un an et, tout à coup, le gouvernement fédéral, comme il le fait encore dans un grand nombre de projets au Québec, annonce aux parents: Nous n'avons plus d'argent, votre projet est terminé.

Il faut reconnaître que le gouvernement de l'époque, au début des années 1970, a fait son possible pour ramasser, pour maintenir un certain nombre de ces garderies et c'est ce qui a donné lieu à la naissance d'un service de garderies au ministère des Affaires sociales autour de 1973 et 1974.

Mme la Présidente, je ne veux pas non plus manquer cette occasion qui est quand même assez rare dans la vie ministérielle de présenter un projet qui est une première au Québec, dans un domaine aussi important que les services de garde à l'enfance, je ne veux pas manquer cette occasion pour rendre hommage à certains employés de l'hôpital Rivière-des-Prairies qui, dès 1971, ont mis sur pied, avec la collaboration de la direction à l'époque, la première garderie en milieu de travail. Le même hommage s'adresse aussi aux employés et à la direction de l'hôpital Louis-H. Lafontaine. Ces deux hôpitaux ont été pendant plusieurs années les seuls dans le domaine parapublic à offrir à leurs employés féminins des services de garde. Mme la Présidente, toujours dans le domaine des premières, je me permets de citer une partie d'un communiqué venant de Drummondville, de la compagnie Celanese, puisqu'il s'agit de la première garderie mise sur pied par une entre- prise privée au Québec, qui est bien connue, et qui émet le communiqué suivant, le 30 novembre. J'en cite quelques courts extraits: "M. Saint-Roch, directeur de la fabrication, a annoncé aujourd'hui que l'usine de la société Celanese à Drummondville avait pris les dispositions nécessaires en vue d'offrir des locaux destinés à abriter une garderie pour les enfants de Drummondville." Commentant la décision de la société, M. Saint-Roch a précisé qu'à sa connaissance, Celanese était la première société québécoise à répondre à ce besoin croissant des citoyens. Je cite M. Saint-Roch: "Nous avons eu un certain nombre de discussions avec M. Michel Clair, député de Drummond, et avec les responsables de la garderie qui s'appelle "Sur une patte", qui se chargeront de l'exploitation du centre, et nous sommes particulièrement fiers de participer à une telle entreprise sociale."

Moi, je me permets de féliciter les autorités de cette compagnie qui, par ce geste très social, très humanitaire, vont rendre d'immenses services aux jeunes enfants de la région de Drummondville.

Des Voix: Bravo! Bravo!

M. Lazure: Comment allons-nous améliorer les services de garde? D'abord, une des principales caractéristiques du projet de loi, je l'ai dit tantôt, c'est d'offrir une variété beaucoup plus grande de sortes de gardes. Je les énumère rapidement, quitte à y revenir un peu plus tard en détail: la garderie de quartier, nous la connaissons bien; deuxièmement, la garderie en milieu de travail, exemple la garderie de la Celanese qui, non seulement, entre parenthèses, sera accessible aux enfants des employés de la compagnie, mais aussi aux enfants du quartier; troisièmement, il s'agit d'un nouveau type de garde, la garderie en milieu familial; quatrièmement, la garderie en milieu scolaire ainsi que la garde en milieu scolaire, et, finalement, la halte-garderie.

Ces différents types de services de garde, le projet de loi prévoit qu'ils seront coordonnés, qu'ils seront supervisés, animés par un office des services de garde. Pourquoi un office? D'abord, les services de garde, quant au plan des ministères, ne sont pas actuellement une responsabilité seulement du ministère des Affaires sociales, ne doivent pas être une responsabilité seulement des Affaires sociales. Les services de garde doivent aussi concerner, doivent aussi intéresser le ministère de l'Education et intéressent le ministère de l'Education de plus en plus; doivent aussi intéresser le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre quant aux normes de sécurité pour les enfants; doivent aussi intéresser le ministère des Affaires municipales et enfin, le ministère d'Etat à la Condition féminine. Or, quand un service touche autant de ministères, un office qui va employer 20 ou 25 personnes; il est commode d'avoir une structure plus neutre qui pourra faire le lien, la liaison, la coordination entre les différents ministères impliqués.

Deuxièmement, cet office, selon le texte du projet de loi, devra obligatoirement avoir une

représentation régionale, c'est-à-dire que le conseil d'administration de cet office devra recevoir des représentants ou des représentantes de toutes les régions du Québec, en plus d'être composé majoritairement de parents.

Mme la Présidente, parmi les moyens que nous voulons prendre pour en arriver à cette multiplication des services de garde, il y a d'abord la formule habituelle qui a été une formule pionnière, la formule de la coopérative, et aussi la formule, qui est la plus courante actuellement, celle d'un groupe de parents qui ont ensemble le même objectif de mettre sur pied une garderie, entrent en contact avec le ministère des Affaires sociales, obtiennent une charte à but non lucratif, mettent sur pied un conseil d'administration composé majoritairement de parents. C'est le modèle, si vous voulez, le plus fréquent, le plus commun. Ces modèles demeurent, mais nous ajoutons aussi, précisément parce que les besoins sont immenses, précisément parce que nous voulons laisser aux parents le choix de décider de la sorte de service de garde, nous ajoutons d'autres moyens, la municipalité.

Le texte de loi va permettre aux municipalités qui le désirent de mettre sur pied des garderies, de devenir une agence de garde en milieu familial. Cette municipalité, quand elle le fera, et nous savons que plusieurs municipalités sont intéressées de le faire, devra cependant créer un comité consultatif de parents. (12 h 10)

Autre nouveau moyen, la commission scolaire. Nous avons entendu, en commission parlementaire, la CECM, la Commission scolaire catholique de Montréal, et aussi le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Ces commissions scolaires fort importantes nous ont assurés qu'elles étaient intéressées à mettre sur pied de plus en plus de la garde en milieu scolaire pour quelques heures par jour, pour des jeunes enfants du niveau primaire ou du niveau maternel, dont la mère travaille jusqu'à 17 heures ou 18 heures. Ces services se développent de plus en plus. Ces commissions scolaires sont aussi intéressées à mettre sur pied de véritables garderies qui serviront d'abord et avant tout pour les jeunes enfants du personnel scolaire. Ces garderies pourront être aussi accessibles aux enfants du voisinage lorsqu'il y aura de la place.

Je suis content de voir que la députée de L'Acadie est ici pour participer à ce débat qui s'amorce, mais je suis un peu déçu de voir que du côté de l'Opposition officielle, on ne compte personne d'autres sur les banquettes. Du côté de l'Union Nationale, on ne compte qu'un député, Mme la Présidente.

Mme Lavoie-Roux: Question de privilège, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de privilège, Mme la députée. A l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, mes collègues se sont absentés parce qu'on reçoit le nouveau député qui s'est joint à nous, et ils vont revenir dès que ce sera terminé.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Cordeau: Mme la Présidente, j'étais à mon siège lorsque le ministre a mentionné qu'il n'y avait personne.

M. Lazure: C'est ce que j'ai dit, je déplorais qu'il n'y ait en tout devant moi — je sais compter jusqu'à trois — que trois députés des partis d'Opposition, alors que nous discutons de projet de loi qui touche au moins 500 000 personnes. Bon, je continue.

Avec les nouveaux moyens, avec les nouveaux outils que ce projet de loi va pouvoir donner aux parents des jeunes enfants, qu'il va pouvoir donner au gouvernement aussi, nous introduisons non seulement la municipalité, la commission scolaire, mais aussi la garderie privée à but lucratif. Le député de Mégantic-Compton a déposé, pas plus tard que ce matin, une pétition de la part d'un certain nombre de parents.

Dans le projet de loi, tel que déposé, il y a un article, l'article 6, qui prévoit que des permis pourront être émis à des garderies à but lucratif. Nous avons décidé de retrancher cet article 6, non pas pour fermer la porte qui avait été ouverte aux garderies à but lucratif, mais pour l'ouvrir davantage. Je m'explique. Nous aurons, lors du débat en deuxième lecture, des modifications à apporter. Cette Assemblée doit savoir tout de suite que nous avons l'intention de modifier l'article 6 de façon que des permis puissent être émis par l'office et non pas par le ministre. Par l'office, selon les mêmes conditions qui prévaudront pour les garderies à but non lucratif, à l'exception d'une chose. Nous voulons — c'est notre souci depuis le début — éviter que, dans les garderies privées à but lucratif, on fasse de la commercialisation à outrance. En d'autres termes, nous voulons éviter ce que nous avons déploré dans d'autres secteurs d'activité sociale depuis quelques années, notamment chez les personnes âgées où il y a eu et où il y a encore un peu, malheureusement, d'exploitation par des intérêts privés, par des maisons d'accueil privées.

Nous voulons, dans le cas des garderies privées à but lucratif, être aussi sévères, mais pas plus plus sévères, que pour les garderies à but non lucratif. Nous voulons, en même temps, empêcher que des entreprises privées, comme nous en voyons actuellement en Ontario, dans l'Ouest du Canada et aux Etats-Unis, se développent comme des espèces de McDonald's des garderies au Québec.

Ce n'est pas une crainte théorique. Je pourrais vous citer — et je le ferai peut-être en deuxième lecture ou lors de la discussion article par article — des rapports récents d'une enquête en Ontario, l'an passé, où on a eu à déplorer cette prolifération — ça pousse comme des champignons — cette multiplication de garderies à but lucratif, d'allure très commerciale, où la qualité

des soins aux jeunes enfants laisse à désirer. Cela constitue un problème sérieux en Ontario et en Al-berta actuellement.

Nous voulons — soyons bien clairs — avoir autant d'ouverture vis-à-vis de l'infirmière d'un certain âge, l'institutrice d'un certain âge, qui veut ouvrir une garderie à but lucratif, comme cela existe souvent, avec un revenu modeste, dans sa garderie à but lucratif. Nous voulons leur faciliter les choses. Nous voulons sortir de l'espèce de carcan qui avait été imposé par mon prédécesseur, le député de Saint-Laurent actuel, alors qu'il était ministre des Affaires sociales, en 1974, qui interdisait l'émission de permis à des garderies à but lucratif, si bien que depuis 1974, aucun permis n'a été émis à une garderie à but lucratif.

Si nous ouvrons cette porte, c'est non seulement parce que nous croyons que la majorité des garderies à but lucratif actuelle — il y en a environ 85 sur 365 garderies au total — sont de bonnes garderies, mais nous croyons aussi que certaines régions du Québec, selon les mentalités de la région, désirent qu'on permette à ces individus de mettre sur pied un tel service qui correspond à des intérêts et qui correspond à des coutumes régionales ou locales. Nous voulons aussi, en ouvrant cette porte qui était fermée depuis cinq ans, augmenter le choix du parent.

J'arrive au financement. J'ai dit tantôt que le budget au ministère des Affaires sociales, en ce qui touche les services de garde, était passé en trois ans de $3 500 000 à $22 500 000. Comment ces sommes sont-elles dépensées? Brièvement, le financement se fait de trois façons: il y a d'abord une allocation qui est versée directement au parent, selon ses revenus; deuxièmement, il y a une allocation de démarrage qui est versée à chaque nouvelle garderie, avec un maximum de $30 000; troisièmement, il y aura aussi, à partir d'avril prochain, dans quelques mois, une troisième subvention qui va permettre aux garderies de renouveler leur équipement, de renouveler leur mobilier. Cette subvention consistera en un versement, à chaque jour, de $2 par place à chaque garderie, ce qui équivaut, pour une garderie moyenne de 30 places, à une subvention d'environ $12 000 à $14 000 qui servira de fonds de roulement à la garderie.

De façon bien concrète, ces subventions qui, actuellement, vont directement aux parents sont touchées par au-delà des deux tiers de tous les parents qui ont des enfants en garderie, les 16 000 enfants en garderie. Par exemple: une mère seule, une famille monoparentale, avec un jeune enfant qui fréquente la garderie, cette mère travaille et gagne $150 par semaine; elle a droit, selon notre système actuel de subvention, à une subvention de $7.50 par jour pour une place en garderie qui coûte $10 par jour. Donc, cette mère gagnant $150 par semaine n'a à payer que $2.50 par jour pour la garde permanente, à la journée, de son enfant. (12 h 20)

Un autre exemple: Un couple, deux parents, deux enfants, le couple moyen, si vous voulez, quant à la grosseur de la famille. Les deux parents travaillent. Un enfant est en garderie. Les deux parents gagnent chacun $150, donc $300 par semaine, environ $15 000 de revenu annuel ou un peu plus. Ce couple reçoit actuellement dans notre système une subvention de $2 par jour. Il doit, par conséquent, payer $8 par jour pour la garderie et, évidemment, chaque couple, chaque ménage voit sa subvention baissée selon que son revenu augmente. Il s'agit toujours de la famille de deux adultes, deux enfants.

Notre système de subventions commence à s'appliquer aux ménages de deux enfants, deux adultes qui gagnent $17 000 et moins. Donc, Mme la Présidente, par ce budget annuel de $22 500 000, nous finançons principalement les milliers de parents, de ménages dont les enfants sont actuellement en garderie, mais nous finançons aussi, dans une bonne partie, les garderies elles-mêmes. Nous avons l'intention, dorénavant, de financer aussi la garde dans le milieu familial.

Cette garde en milieu familial est probablement l'une des plus vieilles sortes de garde au monde. Elle existe depuis toujours. Les deux parents travaillent. Les parents trouvent une voisine ou une belle-soeur qui, pour un certain montant chaque jour, garde le jeune enfant ou, encore, le garde d'une façon occasionnelle si la mère veut prendre une journée de congé.

Ce qu'il y a de nouveau dans ce projet de loi, c'est que, pour la première fois, le gouvernement pourra donner des subventions aux parents qui placent leur enfant en garde familiale. La personne qui désire faire de la garde en milieu familial, la dame qui veut garder des enfants et s'inscrire à une agence de garde en milieu familial aura des déductions de son impôt jusqu'à environ un tiers de toutes les dépenses occasionnées pour sa maison au cours de l'année.

Autrement dit, l'impôt prévoira que les dépenses qui seront particulières pour la garde de quatre enfants — c'est le maximum pour une personne seule, quatre enfants, cela peut aller jusqu'à neuf enfants s'il y a deux adultes — l'impôt prévoira que toutes les dépenses d'entretien de la maison, de chauffage de la maison pourront être exemptées pour un tiers puisque ces dépenses auront été occasionnées par la garde en milieu familial.

En d'autres termes, tout le monde sait qu'un certain nombre de personnes qui font de la garde de jeunes enfants oublient très souvent de déclarer ces revenus à l'impôt. Nous voulons évidemment que les personnes qui, volontairement — personne ne sera obligé — que les femmes, en particulier — et les hommes seront les bienvenus, s'ils sont jugés aptes à la garde de jeunes enfants — que les volontaires pour cette garde de jeunes enfants ne soient pas pénalisés en étant honnêtes et en déclarant leur revenu. C'est pourquoi nous allons faire ces aménagements fiscaux qui vont rendre intéressante cette garde payée en milieu familial.

Mme la Présidente, nous utilisons aussi une partie de notre budget en versant des sommes au ministère de l'Education pour aider les parents

qui, avec la collaboration d'une commission scolaire, d'un comité d'école, offrent des services de garde à l'heure du midi ou en fin d'après-midi.

Cette année, nous versons au ministère de l'Education $700 000. L'an prochain, au mois d'avril, nous verserons $1 700 000 de façon que les commissions scolaires puissent, de plus en plus, offrir aux jeunes enfants du niveau primaire ou de la maternelle des services de garde après les heures d'école lorsque les parents travaillent.

Enfin, toujours dans le financement, les haltes-garderies qui, jusqu'à ce jour, ne sont même pas obligées de demander un permis — je parle de haltes-garderies qui, de façon régulière, tous les jours, reçoivent des enfants pour quelques heures par jour; je ne parle pas de haltes-garderies qui sont mises sur pied à l'occasion d'un congrès; il est bien évident qu'il s'agit de haltes-garderies qui sont là de façon permanente — ces haltes-garderies, lorsqu'elles sont à but non lucratif, seront admissibles aux subventions de démarrage, que ce soit dans une ville ou dans une région rurale ou semi-rurale.

C'est là, Mme la Présidente, un aspect intéressant de ce projet de loi qui va permettre à la femme qui est au foyer, qui décide que son travail est au foyer — c'est un choix tout à fait libre de la femme, de la mère — la création de haltes-garderies et aussi de mini-garderies à partir de dix enfants va permettre à cette jeune mère de se donner un certain nombre de loisirs. J'ai parlé tantôt du droit au travail et du droit aux loisirs. Je pense qu'avec toute cette variété de services de garde qui sont maintenant avancés dans ce projet de loi, nous faciliterons, infiniment plus que les gouvernements l'ont fait dans le passé, à toutes ces jeunes mères du Québec, qui veulent travailler en dehors du foyer, qui veulent rester au foyer, mais se procurer des loisirs de temps à autre, l'exercice de ces deux droits fondamentaux.

Mme la Présidente, en terminant, je rappelle les trois principes fondamentaux qui sont contenus dans ce projet de loi. Premièrement, la participation des parents, participation autant financière que psychologique, affective et émotive, c'est-à-dire participation à la direction, à la gestion d'un service de garde. C'est leur affaire, ils sont, d'abord et avant tout, les individus les plus concernés. Donc, participation assurée. Deuxièmement, le libre choix de tout un éventail de services de garde. Finalement, en multipliant ces services de garde grâce au budget considérable que ce gouvernement-ci accorde aux services de garde, en multipliant ces budgets, nous offrirons de plus en plus des services de garde qui sont accessibles à toute la population. Merci.

La Vice-Présidente: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme la Présidente. Je n'avais pas l'intention de commencer la discussion de ce projet de loi avec des revendications.

Tout à l'heure, le ministre des Affaires sociales remarquait qu'il y avait peu de gens sur les banquettes de l'Opposition. Je voudrais, une fois de plus, pour ma part, déplorer que la ministre d'Etat à la Condition féminine soit absente. Elle a été absente tout au long des commissions parlementaires, même si elle se dit le porte-parole des femmes en cette matière. Aujourd'hui, elle est encore absente. Ce n'était pas mon intention de le souligner, mais, comme le ministre des Affaires sociales s'est permis de juger de l'absence de mes collègues, je pense que je puis faire cette remarque.

Mme la Présidente, nous sommes appelés aujourd'hui à discuter de la deuxième lecture du projet de loi no 77 sur les services de garde à l'enfance. C'est un projet de loi qui ne peut laisser personne indifférent, que l'on soit pour ou contre d'une façon absolue ou que, d'une façon plus nuancée, on veuille examiner tous les aspects d'une loi qui, d'une part, se veut une réponse à des besoins de la société moderne et qui, d'autre part, exercera également une influence sur l'évolution des comportements sociaux des citoyens du Québec.

Cette ambivalence, voire l'opposition dans certains milieux au développement généralisé des garderies, on la retrouve citée dans le rapport sur la petite enfance du comité interministériel auquel le ministre des Affaires sociales faisait allusion tout à l'heure. (12 h 30)

On peut y lire que des facteurs culturels, tels que les opinions sur le rôle de la mère de jeunes bébés ou les préférences quant au mode de garde, influencent quantitativement et qualitativement la demande en services de garde. Les résultats d'un sondage sur les besoins de garde d'enfants indiquent que plus des trois quarts des femmes qui ont répondu à une enquête, en 1978, croient que le rôle d'une femme qui a au moins un jeune enfant est de rester à la maison et de s'occuper de son foyer. Cette opinion varie selon l'âge: 74% chez les 18 à 24 ans; 92% chez les 45 à 54 ans, et, selon la scolarité, 86% pour les diplômées du primaire et 66% pour celles du collège ou d'une université. Le rapport ajoute: Cette opinion se lie aussi à celle ne trouvant pas bon de faire garder régulièrement un bébé d'un an.

A la lecture de ce rapport, Mme la Présidente, il semblerait que le développement de services de garde qui, chez une bonne partie de la population, en particulier chez les femmes évidemment, rencontre une adhésion, répond à des désirs et apparaît totalement justifié; par contre, chez une autre partie de la population parmi laquelle se recrutement en majorité des hommes, d'après ce sondage du moins, à l'égard des enfants de zéro à deux ans ou de zéro à trois ans, on est certainement plus réticent à l'idée d'un réseau de garderie généralisé. D'ailleurs, ces commentaires ou ces observations que l'on retrouve dans le rapport du comité interministériel ont été confirmés par certains commentaires de différentes associations qui ont déposé des rapports au

comité interministériel sur les services de garde à ce moment-là.

Certains manifestaient clairement l'absence de consensus sur le rôle de la femme et la garde des enfants. Ainsi, le Cercle des fermières rejetait l'option du travail des mères de jeunes enfants, alors que les Organismes familiaux associés du Québec étaient plus nuancés. Ils reconnaissaient la nécessité de services de garde mais défendaient aussi la liberté de choix des femmes. Par ailleurs, d'autres regroupements féminins revendiquaient un réseau universel gratuit de services de garde et, finalement, 24 associations dont l'AFEAS et la Fédération des femmes du Québec réunies en colloque sur les services de garde en septembre 1976 recommandaient l'élaboration d'une politique globale en matière de services de garde au Québec.

Je ne voudrais pas, par ce rappel de données que l'on retrouve dans le rapport du comité interministériel, que l'on croit que moi-même ou l'Opposition officielle ait des réticences quant au développement de services de garde appropriés au Québec. Si je présente ces faits, c'est simplement pour souligner qu'il s'agit d'une question qui est encore assez fortement discutée dans notre société selon les milieux d'où l'on vient, selon des facteurs socioculturels et diverses autres variantes. Mais, il faut quand même le signaler, il n'y a pas encore un consensus général. Ce qui ne veut pas dire que l'Etat ne doive pas reconnaître qu'il a des responsabilités qu'il doit assumer à l'égard du développement de services de garde appropriés pour les enfants et les femmes du Québec qui veulent s'en prévaloir.

Le gouvernement du Québec — il faut bien le reconnaître — a d'ailleurs été plus lent que certains autres milieux à reconnaître ses responsabilités dans ce domaine. Je pense qu'il faut invoquer des raisons socioculturelles et peut-être même des raisons économiques si on se compare particulièrement à l'Ontario. Compte tenu du grand nombre d'enfants par famille, les femmes du Québec sont allées sur le marché du travail, sauf pendant la Seconde Guerre, plus tardivement, ou d'une façon plus généralisée, que les femmes de l'Ontario.

Depuis déjà, je dirais, les sept ou huit dernières années, on peut constater maintenant une tendance qui va dans le même sens que celle de l'Ontario et si le nombre des femmes au travail au Québec n'a pas encore rejoint celui des femmes en Ontario, il s'en rapproche beaucoup.

Il est évident que cette arrivée rapide des femmes sur le marché du travail, c'est par nécessité dans certains cas, parce que, comme le ministre des Affaires sociales le soulignait tout à l'heure, il y a un grand nombre de femmes, un pourcentage assez élevé de femmes qui proviennent de familles monoparentales et qui sont sur le marché du travail par nécessité. Dans d'autres cas, c'est pour aller chercher un salaire d'appoint et je voudrais ici ne pas créer l'impression, comme je l'ai fait ailleurs, qu'il s'agissait d'un salaire d'enfant gâté; dans bien des cas, c'est un salaire qui est néces- saire pour assurer une meilleure qualité de vie à la famille. Finalement, les femmes vont sur le marché du travail pour une question de choix personnel à la suite de la scolarisation et de la professionna-lisation accrue de ces dernières.

Il est évident que cet accroissement du nombre de femmes au travail est irréversible et déjà, dans les statistiques que j'invoquais tout à l'heure, on peut noter une différence assez grande, selon les catégories d'âge, quant à l'adhésion plus facile à des services de garde. Il ne fait pas de doute dans notre esprit que, tout en conservant à la famille, à la femme en particulier, la responsabilité première de l'éducation des enfants en bas âge, il faut également que l'Etat assume ses responsabilités à l'égard du développement des services de garde.

En ce qui touche le projet de loi qui est devant nous, ces remarques préliminaires étant faites, Mme la Présidente, je dois vous dire que nous entretenons des réserves sérieuses à plusieurs égards. Dans les minutes qui me sont allouées, j'aborderai successivement, d'abord, ce qui est l'objet même du projet de loi, la création d'un office, parce qu'il est évident que le ministre des Affaires sociales nous a dit: Nous partons de certains principes, la possibilité pour la femme de choisir d'aller travailler et également d'avoir des loisirs. Là-dessus, je pense que nous sommes d'accord, mais il ne faut pas oublier que l'essentiel de ce projet de loi est la mise sur pied d'un office. Il est assez étonnant que cette structure ou superstructure que le gouvernemet a retenue, c'est-à-dire la création d'un office, soit finalement le choix sur lequel s'arrête le gouvernement. Peut-être ne faut-il pas s'en surprendre; il a une fois de plus succombé à ce désir de créer une autre superstructure, un cadre administratif sans vraiment trop se préoccuper, en dépit des bonnes intentions exprimées par le ministre, d'améliorer la qualité véritable des services de garderie.

Quand on regarde, Mme la Présidente, le rapport du comité interministériel sur la petite enfance, jamais, dans les suggestions faites, il n'est question de la création d'un office. On hésite entre diverses formules. Par exemple, on discute des avantages et désavantages de la création d'un ministère de l'enfance, ce qui est immédiatement écarté pour des raisons que je peux assez facilement comprendre puisque, ce moment, il aurait empiété et causé des bouleversements considérables au ministère de l'Education. Mais un autre modèle qui semble être celui que le comité interministériel favoriserait est celui de confier au ministère de l'Education du Québec la mise sur pied ou la coordination de tous ces services de garderie. (12 h 40)

On y fait part également des avantages et des désavantages. Les avantages sont qu'il existe un réseau scolaire dans l'ensemble du Québec, qu'il existe un réseau d'équipements qui est devenu de plus en plus libéré et qu'actuellement, si on songeait à des services intégrés pour la petite enfance, on pourrait assurer une continuité au plan des responsabilités. Les désavantages, quand on les

examine de près et qui sont évoqués, sont surtout des désavantages au plan financier, dans le sens qu'on craint que la pression qui s'exercerait pour une gratuité au niveau des services de garderie, deviendrait plus forte, compte tenu que le système scolaire est gratuit, et on évoque les mêmes arguments pour le transport.

Néanmoins, je pense qu'il ressort de ce comité que ceci était la formule que l'on favorisait. Il y avait également une autre formule, un autre modèle qui était proposé. On y diviserait entre le ministère des Affaires sociales et le ministère de l'Education les responsabilités des services de garde. Au niveau de la coordination, pour le cas du ministère des Affaires sociales, la municipalité agirait comme élément de coordination et de planification. Dans les deux cas, on retrouve un réseau, dans l'ensemble du Québec, même dans les régions rurales, vous avez également des municipalités.

Je m'étonne que le gouvernement n'ait pas songé à explorer davantage l'une ou l'autre de ces avenues. Je le comprends jusqu'à un certain point. C'est que nous sommes présentement, comme je l'expliquais dans mes remarques préliminaires, à un stade de l'évolution des mentalités d'une façon générale quant à la mise en place de services de garderie. Il se pourrait fort bien que, d'ici pas très longtemps, pour assurer une meilleure coordination des ressources, pour une utilisation plus rationnelle des équipements, et surtout empêcher cette sorte de chevauchement de services, particulièrement pour les enfants de quatre à six ans, où on retrouve des structures ou des services du côté de l'Education et des services du côté du ministère des Affaires sociales, on réalise que, finalement, c'est vers cette formule qu'on s'oriente dans le sens de donner au ministère de l'Education, éventuellement, les services de garde.

Mais on n'a qu'à se rappeler que le ministre a fait tout à l'heure grand état de tous les millions, $6 millions, $10 millions, $20 millions que l'on met, et il me semble important à ce moment-ci pour le gouvernement de présenter un projet de loi qui officialise, somme toute, et peut-être davantage au plan électoral qu'au plan de la qualité des services la façon de créer — vous n'avez pas à protester, c'est exactement cela — dans l'opinion publique l'impression que l'on donne beaucoup de services.

D'ailleurs, ceci n'est pas une opinion personnelle, bien au contraire. Le ministre des Affaires sociales se souviendra que plusieurs organismes ont critiqué la façon dont le ministère des Affaires sociales faisait sa publicité en ce qui touche les services de garde. Il ne s'agit que de rappeler, par exemple, que, successivement, on annonce, à coup de conférences de presse, les mêmes crédits; le regroupement des garderies l'a fort bien exprimé.

J'ai également ici devant moi un autre témoignage du regroupement des garderies de la région 6-C qui dit: "Nous avons pris connaissance des communiqués émanant de votre ministère dans lesquels vous nous annoncez les politiques financières de 1979/80. L'annonce de ce budget nous paraît un geste politique habile laissant croire au grand public que le gouvernement s'occupe enfin des services de garde. Cependant, à l'analyse et après consultations auprès de gens du milieu, nous constatons qu'il s'agit là d'une publicité trompeuse qu'il nous faut dénoncer". Je pense qu'on ne peut pas douter du sérieux de ce regroupement de garderies de la région 6-C et, d'ailleurs, le ministre reconnaissait que c'était un groupe qui travaillait très sérieusement. On ajoutait: "Bien que les montants de ce budget soient une nette amélioration sur les sommes précédentes, notre désaccord vient du fait que ce budget ne s'appuie sur aucune planification et que, pour le public en général, le fait que le gouvernement dit injecter des sommes impressionnantes aux services de garde peut sembler une preuve de son intérêt pour la question, mais, pour les garderies qui, elles, ont à vivre avec ces politiques, la réalité est tout autre. " C'est pour cela que, d'une part, je pense que le gouvernement, en décidant d'instituer un office, a agi d'une façon prématurée, a mis sur place un superstructure dont les coûts pourraient être utilisés plus utilement dans une période de transition, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas décidé là où finalement devraient reposer les responsabilités pour les services de garde... On utilise des fonds considérables.

Si on regarde d'abord ce que sera la structure de l'office, compte tenu de ses responsabilités, on peut facilement, en examinant ses responsabilités, voir que, d'ici un an, un nombre assez impressionnant de cadres y seront rattachés et que, finalement, ces services, pour lesquels il s'agit ensuite d'établir des normes, d'établir une réglementation assez considérable, ceci aurait pu tout aussi bien, dans cette période, continuer de se faire par la division des services de garderie qui sont situés à l'intérieur du ministère des Affaires sociales, sans compter qu'encore là on aurait été en meilleure position pour établir la jonction, si on veut, ou la collaboration entre les deux ministères principalement touchés. Mais le gouvernement continue dans sa tradition, il met un autre organisme sur pied; évidemment, c'est un des plus considérables, il y aura 17 membres dans cet organisme; le gouvernement en nommera treize et même les quatre autres seront des fonctionnaires nommés évidemment par le gouvernement.

Le ministre veut nous faire croire qu'à partir de cet office les problèmes quotidiens, vécus profondément par les garderies, compte tenu des ressources limitées qu'elles ont, seront résolus. Je pense que l'argent serait beaucoup mieux investi directement dans les garderies que dans une autre superstructure qui, finalement, permettra au gouvernement de récupérer les plus contestataires qu'on pourra nommer au conseil d'administration ou encore de nommer certains privilégiés du gouvernement.

M. Lazure: Est-ce que je pourrais poser une question au député de L'Acadie?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Est-ce que le député de L'Acadie...

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela compte sur mon temps, M. le Président?

M. Lazure: Non, non, consentement, consentement.

Est-ce que le député de L'Acadie se rend compte que, sur les 29 mémoires que nous avons eus en commission parlementaire, 27 étaient en faveur de la création d'un office de services de garde?

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense que le ministre a presque deviné ce que j'allais dire. Je savais fort bien que le ministre des Affaires sociales — qui aurait pu d'ailleurs le dire dans sa réplique — allait me rétorquer cela. Il est vrai que la majorité des organismes qui se sont présentés en commission parlementaire ne se sont pas opposés à la création de l'office en soi, mais si vous examinez attentivement le contenu, chacun dit: Est-ce qu'il s'agira d'une très grande centralisation? Est-ce qu'on va faire du contrôle? Est-ce que ça ne vise pas surtout du contrôle plutôt que du support? Il faudra assurer des mécanismes de consultation très bien structurés avec les instances locales. Ecoutez, peut-être qu'on accepte et qu'on n'a pas fait de contestation, sauf dans deux ou trois cas quant au coût, quant au fonctionnement de l'office. Mais le fait demeure qu'aussitôt l'office mis en place on pose des questions extrêmement importantes quant à ses coûts, quant à son articulation avec les autorités locales et immédiatement aussi vous accordez à l'office le droit de décentraliser dans les régions. (12 h 50)

Alors, je pense qu'on aurait pu continuer pour le moment de fonctionner avec ce qui existe à l'intérieur du ministère des Affaires sociales, quitte à étendre les responsabilités si les besoins s'en faisaient sentir et, ensuite, si le ministre le désirait, former un comité consultatif. Je pense qu'à ce moment-là il aurait pu entendre les personnes tout aussi bien. Mais le ministre, ou le gouvernement, préfère de beaucoup cette superstructure qui est d'ailleurs dans les politiques habituelles du gouvernement.

M. le Président, si on avait voulu utiliser d'autres structures que celles du MAS, pourquoi ne pas remettre, par exemple, au CRSSS la responsabilité de faire la planification des services de garde? On fait appel aux municipalités, on fait appel aux commissions scolaires. Il y avait une foule d'autres organismes déjà en place. On n'était pas obligé de créer cette structure parallèle qui, encore une fois, je le dis, va diminuer les ressources qui, normalement, devraient aller à l'amélioration de la qualité des services de garderies plutôt qu'aux superstructures.

Je voudrais également dire quelques mots sur les différents types de garderie ou de services de garde qui seront offerts à la population. Je dois dire, en ce qui touche les haltes-garderies et une façon générale, et à la diversité des services de garde qui seront offerts, je dois reconnaître et cela me fait plaisir de le faire, parce que je l'ai souvent sollicité à l'occasion de commissions parlementaires — féliciter le gouvernement d'élargir cet éventail de services qui répondra certainement mieux à des besoins variés des familles et ce, particulièrement dans le cas des haltes-garderies qui n'avaient aucune espèce de statut officiel, si on peut dire.

En ce qui a trait aux services de garde en milieu familial, plusieurs réserves s'imposent. D'ailleurs, à ce moment-ci, je ne crois pas que le ministre se lève pour m'interrompre et me dire: II y a peu d'organismes qui n'ont pas été d'accord avec cette formule de garde en milieu familial. Les objections nombreuses et principales qui ont été faites à l'endroit de cette formule, sont d'abord: II est important cependant au point de départ, de bien établir la différence entre ce nouveau genre de service de garde et ce à quoi faisait allusion le ministre quand il a dit: Depuis des générations, on utilise la garde en milieu familial. Il y a une différence entre celle qu'on prévoit dans le projet de loi, où vous retrouverez quatre enfants ou neuf enfants, et celle qu'on identifie plus facilement à la garde chez un parent, un ami ou un voisin. Essayer dedireque les deux sont la même chose c'est créer la confusion. Il faut être très clair, pour que le public comprenne qu'il s'agit de deux choses bien différentes et que souvent, la relation qui existe entre un parent qui fait garder son enfant chez la voisine qu'il connaît ou chez le parent ou la parente qu'il estime, c'est fort différent d'un service de garde familial tel qu'on le prévoit ici.

Malgré cela, Mme la Présidente, il faut reconnaître que dans les régions isolées — également dans le cas des enfants de zéro à deux ans qui requièrent des services de garde — cette formule, peut être utile autant qu'elle ne soit pas généralisée et qu'elle ne soit pas un frein — on sait que le gouvernement aime mettre des freins — au développement du réseau des garderies. Ceci a été exprimé — je pense que là-dessus, le ministre me le concédera — par la majorité des organismes qui se sont présentés.

Il ne faut pas oublier d'ailleurs que, parmi les autres objections qui ont été faites à ce type de garderie, c'est d'abord la question de la surveillance, la question du choix des personnes et, sans aucun doute, elles devront être reconnues par une agence de garde qui est définie dans le projet de loi. Mais on peut se demander très sérieusement si toutes ces personnes, qui pourront réclamer le titre d'agence de garde, pourront remplir toutes les fonctions que la loi dit qu'elles devront remplir, entre autres, apporter l'appui technique et professionnel, faire de l'information, etc. Il reste qu'il y a des questions très sérieuses à se poser quant à la qualité qu'on pourra assurer, si jamais on généralise ce type de service de garde, et quant à la stabilité que ce type de service de garde pourra assurer. Qu'arrive-t-il des enfants lorsqu'une femme qui garde des enfants tombe malade? Il faudra au moins penser à des moyens

de remplacement ou à d'autres solutions pour dépanner dans des circonstances comme celle-là.

On fait aussi état, dans la littérature, de certaines difficultés que peut représenter, pour l'enfant, un échec en garde familiale. Dans une garderie où il y a plus d'enfants, la difficulté est moins grande. Je pense que là-dessus le ministre sera d'accord. Quand on est dans un milieu plus restreint — le même problème peut se retrouver dans un foyer d'accueil — les effets d'un échec en garde familiale sont quand même plus sérieux que ceux d'un échec qui peut survenir en garderie ordinaire alors qu'un membre du personnel démissionne ou doit quitter.

Il y a un autre aspect du service de garde en milieu familial. Cela concerne les taux qu'on va payer. Ici, on entre dans un problème assez complexe. D'une part, on dit — le ministre l'a expliqué tout à l'heure — que les femmes seront rémunérées $5 par jour. Et peut-être $1 de plus, M. le ministre? Les parents paieront $1 aussi ou strictement...

M. Lazure: Les parents paieront $1 aussi, oui.

Mme Lavoie-Roux: Ce qui veut dire $6 par jour par enfant et il y a quatre enfants. Quand on fait le calcul total de ceci, vous vous retrouvez avec des femmes qui seront payées, compte tenu du nombre d'heures où elles devront se dévouer auprès des enfants, et qui travailleront à des conditions en bas du salaire minimum.

M. Lazure: Question de privilège. Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Si vous me le permettez, juste pour ne pas induire la Chambre en erreur. Ce n'est pas exact, Mme la Présidente. Le projet de loi permet aux femmes qui feront de la garderie en milieu familial, comme pour les autres types de garderie, d'exiger le montant total qu'elles voudront bien exiger. Donc, la femme en question pourra exiger $10 par jour ou $9 par jour, comme cela se fait actuellement. Cela continuera d'être permis. Ce qu'on dit, c'est que la subvention maximale allant au parent qui place son enfant sera de $5 par jour, selon les revenus.

La Vice-Présidente: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'à ce moment-là... Ce n'est peut-être pas le genre d'échange habituel, mais c'est de bonne foi que j'ai accepté la remarque du ministre. Je voudrais également savoir si, dans le cas où les familles ne pourraient pas payer, vous allez avoir à ce moment-là une échelle qui va être la même que celle qu'on applique aux garderies.

M. Lazure: Exactement.

Mme Lavoie-Roux: Ceci reste à voir, puisque c'est à l'application qu'on le verra.

L'autre problème qui est soulevé à l'égard de la garde en milieu familial est la concurrence que ceci va créer pour les familles d'accueil — je n'ai pas terminé, Mme la Présidente, je n'ai utilisé que la moitié de mon temps — ceci est extrêmement important. J'aimerais simplement lire ce que les Centres de services sociaux ont fait valoir à cet égard et c'est d'ailleurs une difficulté qui a été soulevée par d'autres. Aux familles d'accueil qui reçoivent des enfants à temps plein, des enfants de zéro à quatre ans, à partir du 1er janvier, on accorde une indemnité de $4 85 par jour alors que, déjà, pour l'enfant qui sera gardé, disons, de 7 heures à 18 heures, ou de huit à dix heures par jour, on accorde, au point de départ, $5 par jour; à ce moment-là, les revenus ne seront plus comparables et les familles d'accueil seront nettement défavorisées par rapport aux familles qui recevront des enfants pour la garde. Ceci est extrêmement important à un moment — le ministre sera d'accord avec moi — où il est de plus en plus difficile de recruter des families d'accueil (13 heures)

C'est ce que le Conseil des services sociaux nous soulignait, en disant: "il est vrai que la compensation payée aux familles d'accueil n'est pas un revenu au sens de la Loi de l'impôt, contrairement à la famille de garde qui devra les déclarer. Malgré cela, nous nous interrogeons sur la différence de traitement. Nous ne croyons pas que la solution soit de diminuer le montant que doit recevoir une personne responsable de services de garde en milieu familial, loin de là. Cependant, l'Association des centres de services sociaux se demande quelies seront les implications de la situation actuelle sur les familles d'accueil, sur leur motivation. Quel sera l'impact sur le recrutement de nouvelles familles d'accueil? il serait sans doute temps de réviser notre conception du rôle des familles d'accueil et de reconnaître toutes les dimensions de leur engagement.

Voici la question que je pose au gouvernement: Est-il prêt à réexaminer toutes les dimensions de l'engagement des familles d'accueil? Une seconde. Je n'ai pas fini, je reviens après... Je continuerai là-dessus, si les gens veulent suspendre la séance maintenant, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

Suspension de la séance à 13 h 2

Reprise de la séance à 15 h 7

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames, messieurs, veuillez vous asssoir. II s'agit maintenant de la reprise du débat sur la motion de M. le ministre des Affaires sociales, proposant que soit maintenant lu, la deuxième fois, le projet de loi no 77, Loi sur les services de garde.

Mme la députée de L'Acadie avait la parole.

Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme la Présidente. Après deux heures de repos, on peut reprendre le débat avec beaucoup de sérénité. D'ailleurs, elle fut toujours là, même avant l'heure du lunch.

Quand nous nous sommes quittés à 13 heures, j'avais commencé à aborder le problème de la garde en milieu familial. J'avais fait valoir certains avantages, certains désavantages. Il faut quand même mettre le gouvernement en garde contre des difficultés qui sont réelles. Je voudrais simplement résumer, à ce moment-ci, les principaux écueils qui sont celui du problème de la surveillance de la qualité des services de la garde en milieu familial, les risques d'instabilité plus grande que dans une garderie régulière, ensuite, la concurrence qui devient presque inacceptable maintenant, depuis que le ministre des Affaires sociales nous a dit qu'on pourrait même recevoir, en garderie familiale, des montants qui iraient jusqu'à $9 ou $10 selon le barème officiel. Alors, cela devient une concurrence inacceptable pour les foyers d'accueil. J'imagine que le ministre devra se pencher là-dessus, sinon on risque, sans vouloir être alarmiste, de trouver un plus grand nombre d'enfants en institution qu'on ne le souhaiterait.

Egalement, le dernier écueil que plusieurs ont signalé, c'est cette mise en garde, voulant que si un accent trop grand est mis sur le développement des services de garde en milieu familial, on mette un frein au développement du réseau de garderies de jour, ce qui devrait quand même être la formule d'accueil la plus généralisée pour les enfants d'âge préscolaire. (15 h 10)

Je voudrais maintenant dire quelques mots de la garderie en milieu scolaire et je regrette que le ministre de l'Education ne soit pas revenu parce qu'il aurait peut-être été intéressé.

M. Marcoux: Je peux informer Mme la députée qu'il va participer à nos travaux en fin d'après-midi.

Mme Lavoie-Roux: Bon. De toute façon...

M. Marcoux: Je vous ferai remarquer qu'il était là ce matin.

Mme Lavoie-Roux: ... ce n'était pas d'une façon agressive que je le disais, il n'est pas obligé d'être là tout le temps, n'est-ce pas?

Des Voix: On comprend ça.

Le Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre!

M. Chevrette: Vous faites bien ça!

La Vice-Présidente: A l'ordre!

M. Chevrette: Continuez comme ça, ça va bien!

La Vice-Présidente: M. le député de Rimouski, s'il vous plaît!

Mme la députée de L'Acadie.

M. Chevrette: Je voulais faire mon petit Forget!

Mme Lavoie-Roux: Si je veux attirer l'attention des deux ministres sur le problème des garderies en milieu scolaire, ce n'est pas que nous soyons contre le principe de la garde en milieu scolaire, après les heures de classe, ou même contre l'ouverture par les commissions scolaires de garderies, comme le nouveau projet de loi le prévoit, c'est même souhaitable, mais à la condition que les programmes soient définis avec les instances locales. Je pourrais donner au ministre de l'Education un exemple très probant de la difficulté avec laquelle la décentralisation dont il nous parle vers les commissions scolaires ou vers les écoles se fait, si bien que ce que le ministère de l'Education a prévu, parce que l'argent vient des Affaires sociales et est remis à l'Education qui le remet aux commissions scolaires, c'est un programme tout fait. C'est parti du ministère de l'Education avec directives, règlements, etc., si bien que c'est une confusion et une utilisation vraiment irrationnelle et irresponsable. Je le dis très sérieusement au ministre des Affaires sociales. Je veux profiter de l'occasion pour attirer son attention.

Les sommes prévues sont uniquement pour de l'équipement. On sait déjà que les écoles, d'une façon générale — du moins les écoles de construction assez récente, qui peuvent quand même renouveler leur équipement parce qu'elles ont des ressources, on le sait fort bien, plus grandes que les garderies — utilisent cet argent... Là, je ne dis pas que ce sont les directions d'école ou que ce sont les commissions scolaires, mais il y a des projets de soumis, par exemple, pour les services de garde après l'école, pour acheter un téléviseur, pour acheter un four à poterie, à la condition que l'an prochain on ne change pas d'intérêt artisanal. D'ailleurs, il s'agit toujours d'enfants de 5 ans à 12 ans. Je pourrais citer d'autres exemples comme celui-là pour dire que, parce que tout à coup on a de l'argent et que le programme ne s'est pas fait avec les autorités locales mais, à partir d'en haut, à partir de la centralisation d'un ministère, on se retrouve devant ces incongruités qui, je pense, ne sont pas tolérables.

Je pense également — je l'ai déjà signalé au ministre des Affaires sociales — qu'il n'est pas suffisant de donner de l'argent pour la garde parascolaire uniquement pour de l'équipement; il y a vraiment des problèmes d'alimentation qui viennent se greffer après le heures de classe, il y a des problèmes de ressources des parents qui ne peuvent pas payer, et c'est peut-être un plus grand nombre de parents que ceux que l'on catégorise d'une façon un peu absolue dans les milieux défavorisés. Si bien que, s'il n'y a pas une partie de l'argent qui sert à couvrir les frais de garde, il y a peu de chance que les services de garde en milieu scolaire se développent d'une façon rationnelle.

Le ministre des Affaires sociales pourra peut-être dire: Bien, maintenant, on offre des services

de garderie en dehors des heures de classe et même les journées de congés pédagogiques, je pense que cela ne correspondra pas vraiment à de tels services dans la réalité.

Je voudrais dire un mot des garderies privées. Le ministre, ce matin, a quand même laissé voir une certaine ouverture, mais je dois vous dire que je demeure encore très sceptique et je ne suis pas certaine que si même il dit qu'il va modifier l'article 6, tout ce qu'il enlèvera ce sera "de l'avis du ministre des Affaires sociales". Est-ce qu'on gardera l'intérêt public? A ce moment-là, je pense que, même pour les garderies existantes, si on examine les deux articles 95 et 6 — ce sera la seule référence à des articles que je ferai, Mme la Présidente— il se pourrait fort bien qu'au moment du renouvellement d'une garderie privée présentement existante, on puisse, en vertu de l'article 6, lui refuser son renouvellement, compte tenu que, peut-être, à ce moment-là, ça ne correspond plus à l'intérêt public.

Et qui déterminera l'intérêt public? Je sais que c'est une formule que le ministre a utilisée à l'égard des centres d'accueil. Je ne connais pas quelle utilisation on en a faite et si elle s'est avérée pratique. Je voudrais, de toute façon, dire au ministre des Affaires sociales — et lui-même, je pense, a tenu des propos dans le même sens ce matin — que, historiquement, les garderies privées ont joué un rôle important; ce sont des pionnières dans le domaine des services de garde.

Il y en a eu d'excellentes, il y en a encore d'excellentes et on devrait, au nom du principe du choix des parents dont le ministre parlait ce matin, qu'il a situé dans un éventail de types de services les conserver. Ce principe on pourrait aussi le situer dans ce choix que les parents peuvent vouloir faire d'une garderie à but lucratif ou non lucratif. Je suis d'accord avec lui pour le tempérament qu'il met pour l'émission d'un seul permis par garderie, pour les raisons de non-commercialisation qu'il a évoquées ce matin.

Je voudrais dire un mot, Mme la Présidente, au sujet des conditions de travail et des conditions physiques dans lesquelles les garderies fonctionnent présentement. On a eu beaucoup de représentations d'un très grand nombre d'organismes, non seulement de techniciennes de garderies, mais également de familles impliquées dans les garderies, d'organismes intéressés à la question des garderies qui nous ont d'abord parlé des conditions difficiles, des salaires extrêmement bas que reçoivent les travailleuses des garderies, si bien qu'on peut faire le parallèle, dans le fond entre les ressources des garderies et l'évolution difficile des garderies. Je suis sûre que Mme la ministre déléguée à la Condition féminine sera d'accord avec moi. Il y a un parallèle à établir entre les difficultés que l'évolution des garderies a connues et les difficultés que les femmes ont connues quant à leur émancipation et à leur acquisition d'une certaine indépendance dans tous les domaines

Mme la Présidente, ce matin, le ministre a beaucoup fait état de tous les millions qu'il verse si libéralement depuis trois ans. J'aimerais qu'il nous dise de quelle façon ceci se traduit, d'abord, quant à l'augmentation du nombre de places et quant au calcul qui pourrait être fait si on tient compte du taux d'inflation et du nombre de places développées. Comment ceci se traduit-il dans les faits? Y a-t-il une augmentation véritable de la qualité des services en garderie et, finalement, une véritable augmentation de l'argent mis à la disposition des services de garde? Le ministre fait toujours état de $3 millions en 1976/77. J'aimerais savoir, à ce moment-ci, — parce qu'il met tellement d'appui sur les $3 millions alors que le dernier budget du gouvernement précédent pour les services de garde était de $4 200 000; — qu'il nous parle aujourd'hui des $22 millions, s'il prévoit que ces $22 millions seront dépensés dans l'année courante. On sait fort bien qu'un des problèmes des garderies, à cause des difficultés d'organisation et des initiatives souvent très difficiles que les parents sont obligés de prendre pour les mettre sur pied, que les montants mis à leur disposition à ces fins ne sont pas utilisés durant une année budgétaire.

Mme la Présidente, il y a d'autres remarques que je pourrais faire quant à l'abondante réglementation, quant à l'accord de subventions par une réglementation provenant de l'office. Là-dessus, on peut se poser des questions, à savoir si l'office décide, par règlement, d'accorder des subventions qui demeurent quand même l'argent des contribuables et qui échappent à tout contrôle, à toutes fins utiles de la part de ceux qui sont véritablement responsables de la dépense des fonds publics. (15 h 20)

II y a d'autres articles et d'autres points que je pourrais soulever. Nous le ferons au moment de l'étude article par article en commission parlementaire dans l'espoir d'améliorer ce projet de loi.

Je voudrais, en terminant, Mme la Présidente, dire que l'Opposition officielle votera contre ce projet de loi, dont l'objectif principal est d'instituer un office des services de garde qui, à notre point de vue, n'est pas une réponse adéquate aux problèmes fondamentaux auxquels font face les garderies. Ce sont, d'abord et avant tout, des problèmes de ressources sur le plan matériel et sur le plan du personnel.

Aux demandes d'une politique intégrée de services d'accueil à la petite enfance, le gouvernement nous répond par l'ajout d'un nouvel organisme gouvernemental, un office avec tous les coûts que cela comporte et qui aura beaucoup de difficultés à coordonner les ressources déjà fort mal intégrées entre le ministère de l'Education du Québec et le ministère des Affaires sociales. Est-ce qu'on n'a jamais pensé de répondre pourquoi la maternelle à temps plein est mauvaise pour les enfants de cinq ans, mais que la garderie à temps plein est bonne pour eux? On a, au niveau des enfants de quatre ans, une variété de services selon qu'on relève du ministère de l'Education ou du ministère des Affaires sociales. Vous avez même les enfants qui se promènent ou, enfin, qui sont dans les écoles de neuf heures à 15 heures. De 15 heures à 18 heures, ils s'en retournent dans une

garderie. Il n'y a vraiment pas de continuité dans le type de services qu'on donne aux enfants. Les services parascolaires ou la garderie parascolaire pourront répondre à ceci en partie. Mais je pense qu'on doit songer de plus en plus à s'acheminer vers une politique qui assurera une continuité de services aux enfants quant aux personnes qui s'en occupent et quant aux institutions qu'ils fréquentent. L'office n'est pas, à mon point de vue, une politique; c'est strictement une structure. Dans ce sens-là, il ne répond pas du tout à un objectif d'une politique intégrée de services à la petite enfance.

Cet office est le dernier-né — ça fait plusieurs que vous voyez — de la prolifération des organismes gouvernementaux. Il fut une époque où on créait — en tout cas, vu de loin, c'est l'impression que j'avais — quand il y avait des problèmes un peu plus aigus, des comités, des commissions d'enquête pour résoudre les points chauds. Aujourd'hui, on multiplie les offices ou on multiplie les régies. C'est là que les problèmes vont se résoudre, où le gouvernement va se mettre à l'abri des contestations du public. Il y aura toujours ce tampon entre lui et les citoyens qu'il doit représenter.

Je ne veux pas dire que, dans certains cas, les offices ne sont pas nécessaires. Le ministre se rappellera que dans le cas de l'Office des handicapés, parce qu'il s'agissait d'une population ou d'une clientèle tout à fait différente dont les problèmes recouvraient une foule de ministères, je lui ai donné le plus d'appui possible. Je pense qu'il doit s'en souvenir. Mais, dans d'autres cas, ils ne sont pas nécessaires et, dans le cas présent, nous avons un exemple probant d'un cas où la création d'une superstructure gouvernementale avec les coûts qu'elle implique n'est pas nécessaire.

Le ministre, dans sa réplique, voudra sans doute nous reprocher que nous nous opposions à la mise en marche de cet éventail de services de garde, que nous nous opposions à la participation des parents. Ces services existent déjà puisque le ministre a envoyé des communiqués de presse dans lesquels il disait que, cette année, tant d'argent a été consacré aux services de garde en milieu familial, tant d'argent aux services de garde en milieu scolaire, tant d'argent aux garderies, etc. Alors, ils existent déjà. Il n'est pas nécessaire de créer un office pour les mettre en existence. Il en va de même pour la participation des parents. Il ne faut pas oublier que ce principe de la participation des parents dans les activités des garderies a été retenu par l'ancien gouvernement et a présidé le développement des garderies existantes.

Il existe déjà au sein du ministère des Affaires sociales une unité administrative responsable des garderies. Si on la juge trop centralisée, qu'on remette alors véritablement les responsabilités au niveau local par le truchement des organismes existants mais qu'on ne crée pas un autre organisme gouvernemental qui sera aussi centralisé et probablement, à certains égards, beaucoup moins responsable. Ce sont d'ailleurs des inquiétudes que plusieurs organismes ont exprimées. Si le ministre voulait, par ailleurs, s'assurer d'un conseil consultatif pour tout ce domaine des soins de garde pour la jeune enfance, nous ne nous y opposerions pas, bien au contraire. L'office, c'est le feu d'artifice pour la population.

Pourtant, ce que cette dernière réclame, ce n'est pas un feu d'artifice, c'est qu'on consacre, et ceci non seulement pour ce problème particulier que nous examinons aujourd'hui, mais pour un grand nombre de domaines où le gouvernement a dans les dernières années multiplié les structures bureaucratiques, ce que la population réclame, c'est que plus d'argent soit mis à la disposition des usagers et que moins soit mis dans les structures administratives. C'est d'ailleurs l'appel constant de tous ceux qui oeuvrent dans les garderies avec beaucoup de dynamisme, de dévouement depuis des années. C'est aussi le désir des parents qui utilisent les services de garde que les ressources financières servent le plus possible à améliorer la qualité des services dans les milieux auxquels ils confient leurs jeunes enfants.

Le ministre peut faire état des millions qu'il dépense. Ce ne sont pas les siens, ni ceux du gouvernement, ce sont ceux des contribuables. Comme plusieurs l'ont dit en commission parlementaire, il ne s'agit pas d'augmenter le nombre de services mal organisés, mais d'améliorer la qualité des services actuels. Le ministre voudra sans doute évoquer que les foudres des femmes du Québec retomberont sur l'Opposition qui aurait dit non à son projet de loi historique, la création d'un office de garderies.

Mais qu'on ne nous fasse pas rire, Mme la Présidente. Non seulement les femmes, mais aussi les familles du Québec veulent surtout la plus grande qualité possible de services quand elles confient leurs jeunes enfants à d'autres, que ces services soient stables et qu'à cette fin, celles qui y travaillent aient des conditions au moins un peu comparables à celles des autres travailleurs.

Il ne faut pas oublier que, dans une proportion de près de 98%, ce sont des femmes qui oeuvrent à l'intérieur des garderies. C'est peut-être cela aussi une façon fort positive de se préoccuper de la condition des femmes, Mme la Présidente.

De plus, il ne faut pas oublier qu'actuellement, quand on examine les normes de fonctionnement quant au ratio, quant à l'espace physique qui est mis à la disposition des enfants, également quant aux salaires qui sont payés, nous ne figurons pas en tête de liste à l'intérieur des provinces canadiennes; malheureusement, nous sommes un peu trop au bas de la liste, selon mon jugement. Mme la Présidente, je termine ici mes propos et je pense que nous attendrons en troisième lecture pour voir ce qui se passera. Je doute fort que le ministre renonce à son office. C'est un office dont il a décidé d'une façon improvisée, à cause de pressions qui étaient sur lui, mais c'est un office qui ne répond pas aux vrais problèmes et qui est strictement un exercice bureaucratique. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: Mme la Présidente, j'aimerais, au tout début, vous dire que je parlerai au nom de mon parti. C'est donc dire que j'utiliserai le temps qui m'est alloué, à savoir une heure ou à peu près, période allouée à une formation politique pour se faire entendre sur un projet de loi.

Je n'ai pas besoin de vous dire qu'il est important, je pense, d'exprimer largement l'opinion de notre formation politique, comme on l'a fait du côté du gouvernement, comme on l'a fait du côté de l'Opposition officielle, puisque c'est pour moi un projet de loi qui est important.

Je voudrais d'abord, au tout début, féliciter, remercier le ministre de nous avoir permis de discuter de ce projet de loi qui s'imposait déjà depuis plusieurs années, de nous avoir permis d'amener sur la place publique cet avant-projet de loi d'abord, d'avoir reçu largement les associations et tous ceux et celles qui s'intéressent au système de garde dans le Québec. D'abord, je veux le remercier d'avoir eu une commission parlementaire et d'avoir ouverts très larges les volets pour permettre aux gens de venir s'exprimer et aussi lui dire combien nous apprécions qu'on établisse de façon définitive les garderies publiques, les garderies qu'on appelle sans but lucratif, les garderies populaires comme on les appelle plus communément, puisque nous sommes d'accord pour dire qu'il était temps qu'on en arrive à établir au Québec des garderies populaires afin de rendre service à l'ensemble de notre société québécoise.

Je voudrais aussi remercier tous ces gens qui oeuvrent dans ce secteur des garderies: les religieuses et religieux du Québec qui oeuvrent dans notre milieu depuis 1858, soit depuis plus de cent ans, qui ont bâti un système qui est envié par pas mal de monde, la Chambre des notaires, le Barreau du Québec, autant de personnes qui ont donné de leur temps, les clubs sociaux dits clubs de service. Je pense aux clubs Rotaryraux Lions, aux Optimistes, des clubs qui ont oeuvré, qui ont fait énormément de travail dans le développement de garderies au Québec. (15 h 30)

Je voudrais signaler d'une façon bien particulière — ces gens sont ici dans les galeries aujourd'hui — l'Association des propriétaires de garderies du Québec, des gens qui sont ici et qui ont suivi les débats depuis le dépôt de l'avant-projet de loi. Ces gens ont oeuvré au Québec, se sont associés aux religieux et religieuses de 1850 et ont monté notre système de garderies au Québec, ont fait que ce système de garderies dit privé fait l'envie de pas mal de gens, de pas mal de provinces et a obligé, à la suite des succès rapportés par ce milieu, les gouvernements à se pencher sur ce problème, que ce soit les anciens gouvernements ou celui qu'on a formé, celui qui a été formé par l'Opposition officielle ou l'actuel gouvernement.

Ce projet de loi, de toute façon, était sur les tablettes depuis bon nombre d'années et aurait dû paraître en Chambre avant aujourd'hui. Mais je voudrais que ces gens, l'exécutif provincial qui est ici, soient remerciés pour avoir travaillé, avoir oeuvré et avoir bâti au Québec ce système, encore une fois, qui fait l'envie de pas mal de monde et qui a peut-être forcé le gouvernement à présenter son projet de loi.

Quand on parle de garderies privées, et c'est ainsi que je le distinguerai pendant mon intervention, je fais appel, à ce moment, à l'Association des propriétaires de garderies du Québec. Quand je parlerai de garderies publiques, ce sont les garderies dites populaires. J'aurai l'occasion de revenir sur cette définition au cours de mon intervention.

C'est après de nombreuses discussions qu'enfin nous arrivons à la deuxième lecture du projet de loi instituant l'office de garde de l'enfance au Québec. Il y a longtemps que le dossier des garderies chemine dans notre province. Il faut retourner au cours des années soixante-dix pour retrouver une croissance fulgurante de ce phénomène.

Les fameux PIL sont des projets que je dénonce aussi dans ce secteur, puisque j'en ai vécu plusieurs dans ma circonscription étant directeur de centre d'accueil. J'ai vécu cette levée de boucliers qu'il y a eue à un moment donné, ces sommes d'argent du fédéral qui sont arrivées au Québec pour des PIL, pour des garderies qui venaient oeuvrer pendant six, huit mois ou même pas une année. On créait ainsi des appétits, des goûts qu'on ne pouvait plus combler. C'est à dénoncer et j'espère qu'on ne répétera plus cela. Il semble bien que le nouveau gouvernement d'Ottawa veuille mettre fin à cette sorte de projets d'initiatives locales qui ne valaient vraiment pas la peine d'être institués, surtout quand on oeuvrait dans ce milieu.

En 1974, en instaurant le plan Bacon, le gouvernement libéral s'engageait à soumettre une loi-cadre sur les garderies. En 1976, c'était au tour du Parti québécois, dans un enthousiasme pré-électoral, à promettre un réseau de garderies universel et gratuit. Trois ans plus tard, le gouvernement péquiste accouche d'un avant-projet de loi sur les garderies aucunement universelles et surtout pas gratuites. Il serait difficile d'être en désaccord avec le principe d'un tel projet de loi. En effet, le besoin en ce domaine est criant. L'Union Nationale reconnaît la nécessité de l'implantation des garderies tant en milieu scolaire qu'en milieu familial. Vous allez me permettre, Mme la Présidente, de rappeler la position de mon parti relativement à cette question.

Reconsidérons la philosophie qui prévaut au Tribunal de la jeunesse Cette philosophie consiste à assurer à l'enfant un milieu sain et stable, c'est-à-dire un milieu qui ne dépersonnalise ni ne désoriente l'enfant; bref, un milieu qui s'apparente le plus au milieu familial. Ainsi, toutes les lois sur les garderies devraient tenir compte le plus possible de l'élément naturel dans lequel est baigné l'enfant, c'est-à-dire la famille. C'est une première

priorité. Tenant compte de ce principe, l'Union Nationale perçoit les priorités en matière de garderies dans l'ordre suivant.

La garderie en milieu familial. L'Union Nationale favorise d'une façon primordiale ce mode de gardiennage, compte tenu des exigences fondamentales de l'enfant. Deuxièmement, les garderies privées et la halte-garderie. Je reviendrai sur ces deux types de garderie dans quelques instants. Les garderies sans but lucratif et les garderies dites populaires. Revenons maintenant aux garderies privées, dites à but lucratif. Pendant l'auditon des mémoires sur i'avant-projet de loi, le ministre des Affaires sociales a voulu nous faire croire que le mot "lucratif" venait du grec; c'est une erreur puisqu'il vient du latin, du mot "lucrativus".

M. Lazure: Je n'ai jamais dit ça!

M. Grenier: Vous n'aurez qu'à vérifier. Cela signifie "qui procure un gain".

M. Marchand: Les deux. M. Lazure: Les deux.

M. Grenier: Peut-être les deux, mais principalement du mot "lucravitus". Les garderies privées à but lucratif procurent donc un gain à ceux qui les exploitent. Comment se traduit ce gain de façon concrète? Il fait vivre employés et patron; il pourvoit à la création et à l'expansion de la garderie; bref, il permet l'autonomie financière de l'établissement. Soit dit en passant, la garderie populaire, bien que se définissant à but non lucratif, est en réalité un établissement également à but lucratif si on se réfère à la définition du Petit Robert. En effet, les employés de la garderie populaire retireront un gain de leur travail, ce sera leur salaire. Cependant, leurs employeurs, ne résidant pas dans le bureau contigu de la garderie mais bien dans les machines gouvernementales, devront faire pèlerinage sur pèlerinage à Québec pour résoudre soit un problème de tuyaux gelés, soit un problème d'indexation de salaire.

Franchement, si le ministre des Affaires sociales veut des garderies vraiment à but non lucratif, il devra engager des bénévoles, il sera plus sûr d'atteindre son but. Voilà maintenant qu'à l'article 6... On nous a dit ce matin qu'il y avait des réserves et qu'on retirait cet article pour le remplacer par l'office. Le ministre se réservait à ce moment-là le droit de donner lui-même le permis; il le donne maintenant à un office.

Cet office, en fait, c'est se donner plus de monde pour dire non. C'est pour que le ministre ne porte pas l'onéreux de dire non; c'est l'office qui l'aura dit. C'est la création de l'office qui le prévoit. Sans aucun doute que cet office sera composé... J'ai bien peur qu'on n'y reconnaisse pas bien des gens de l'Union Nationale et j'ai bien l'impression que les critères premiers seront d'abord d'oeuvrer dans ce parti, afin de faire partie de cet office qu'on voudra créer.

J'aimerais savoir de ce ministre ce qu'il a contre l'initiative privée. Le ministre ne peut justi- fier ce pouvoir discrétionnaire qu'il s'octroie en se basant sur le fait que ce genre de garderie est malfamé, mal entretenu et de la pire espèce. Des cas scandaleux d'enfants maltraités et mal gardés ont été signalés autant chez les garderies populaires que chez les garderie privées. A quoi rime tout cela? Quand on aborde la définition d'une politique familiale, le ministre se dresse en invoquant la notion qui lui est si chère, celle du pluralisme, afin d'esquiver la question. Je dis au ministre que c'est le temps de sortir ses grands principes entourant le pluralisme, en renonçant à son pouvoir discrétionnaire dans la délivrance des futurs permis de garderie privée.

Je vais rappeler ici le deuxième alinéa de l'article 2 que je considère comme un énoncé de principe du ministre: "Une personne ou une famille a le droit de choisir le service de garde qui lui convient le mieux." C'est le principe de l'article 2. Je ne suis pas contre les garderies populaires, je l'ai dit au tout début, en milieu scolaire ou autre. Seulement, nous ne voulons pas qu'un mode de garde soit bafoué tout simplement parce qu'il ne sied pas au ministre ou aux gens qui l'entourent. Je pense que le système privé n'a pas nécessairement la faveur du gouvernement actuel.

Déjà, en 1976, on craignait pour nos écoles privées. Le ministre de l'Education a dû mettre de l'eau dans son vin, compte tenu de nombreuses protestations, et maintenir l'école privée moyennant un principe de complémentarité déterminé par les commissions scolaires. Ici, je voudrais féliciter le ministre de l'Education — cela ne nous arrive pas souvent de le faire — qui ne s'est pas gêné pour mettre de côté une partie du programme du Parti québécois qui avait pour mission, comme on le dit ici, de réduire progressivement les subventions de l'Etat aux écoles privées non intégrées sur une période de cinq années. Il ne s'est pas gêné pour le mettre de côté et dire à son caucus: Ce n'est pas là mon intention; on va faire certaines transformations. Je dois l'en féliciter puisqu'il accepte assez volontairement des recommandations qui ont été celles de l'Union Nationale. J'ai l'impression que ce ministre, si jamais il veut faire partie de notre formation politique, serait un bon ministre de l'Education sous l'Union Nationale. Mais, il devra passer par ie purgatoire un bout de temps, parce qu'il est passé dans les limbes péquistes pendant trois ans; cela lui prendrait une bonne purge, je pense, avant. Il reste quand même avec une philosophie fort acceptable, ce ministre qui s'accroche à plusieurs traditions du Québec et qui est peut-être un des plus conservateurs de ce gouvernement.

Je voudrais que le ministre des Affaires sociales — ici, je fais appel à sa bonne volnté et j'ai eu l'occasion de travailler avec lui, je pense que c'est un ministre d'excellente, de bonne volonté; il veut faire beaucoup de bonnes choses, mais, et c'est là que ça se gâte...

Une Voix: II n'est pas conservateur, lui.

M. Grenier: ... il est mal conseillé. Très mal conseillé.

Une Voix: Par qui? Une Voix:Des noms!

M. Grenier: Quand il revient de la commission parlementaire où il est fort conciliant avec les partis d'Opposition, il retombe dans la fosse aux lions qui est son caucus et là, il n'est pas sorti du bois quand il arrive là. Aussi, quand il retombe dans son milieu, avec ses fonctionnaires qui, eux, ont ce projet de loi sur les tablettes depuis un bout de temps et ont l'intention de le passer...

Des Voix: Ce sont des rouges!

M. Grenier: Ah! sans aucun doute, et qui ont l'intention, peu importe le ministre, de passer le projet de loi. Je pense que le projet de loi que nous étudions dans le moment n'est pas une initiative de l'actuel gouvernement, c'est une continuité. (15 h 40)

Le ministre et son entourage, dirais-je, ce sont des libéraux pressés, tout simplement. Ils acceptent cette doctrine qui traînait sur les tablettes depuis quelque temps. En 1979, le ministre des Affaires sociales nous plonge dans un même dilemme, cette fois-ci, concernant les garderies privées, celles qu'on a vécues dans le secteur des écoles.

Du principe de complémentarité du ministre de l'Education, nous passons au principe de l'intérêt public du ministre des Affaires sociales. Ces beaux principes énoncés par ces deux ministres visent, somme toute, à décourager l'initiative privée, à la confiner dans la marginalité.

Pourtant, les maisons d'enseignement et les garderies privées plus que centenaires ont fait leurs preuves et les résultats plus que positifs en témoignent dans l'un ou l'autre des secteurs. Je demande donc instamment au ministre des Affaires sociales de retirer son épée de Damoclès d'au-dessus de la tête des garderies privées à but lucratif en renonçant aux pouvoirs discrétionnaires ou en renonçant à l'office qu'il veut créer, et qu'il retire tout simplement la deuxième partie de l'article 6, l'alinéa 2 de l'article 6, ce qui serait beaucoup plus simple.

Les haltes-garderies. Ce projet de loi fait état d'un autre genre de garderies que pourraient utiliser la grande majorité des femmes et des hommes aussi. Mme la Présidente, vous m'avez parlé à bon escient pendant le café de ce midi, vous qui êtes tout dernièrement devenue grand-mère pour la première fois. Je veux vous en féliciter en passant.

Vous m'avez signalé à l'heure du lunch combien ce projet de loi devait aussi intéresser les hommes puisque, de plus en plus, depuis une décennie, nous vivons cette entrée des femmes sur le marché du travail au Québec. Nous constaterons éventuellement qu'il se trouve plusieurs hommes dans ces familles monoparentales. On constatera sans aucun doute dans quelque temps qu'il y a peut-être autant d'hommes qui s'intéressent à la garderie, au système de gardiennage qu'il peut y avoir de femmes qui s'y intéressent.

Je pense, quand nous parlons d'aider à régler ce problème de la majorité des femmes, que cela pourrait éventuellement devenir — si ce n'est une majorité — un nombre d'hommes qui seront aussi intéressés au problème. Il s'agit, bien sûr, de la halte-garderie, à laquelle le ministre concède peu d'importance dans le projet de loi et dans ses subventions. Au Québec, 75% des femmes ne sont pas sur le marché du travail et une grande partie de ce pourcentage élèvent leurs enfants.

Je répète que ce projet de loi sur les garderies est injuste pour ces 75% de femmes. En effet, les mères de famille auraient pu voir dans la halte-garderie une solution à leurs problèmes d'accaparement. Hélas! ce projet de loi ne trouve pas prioritaire ce genre de garderie. Le ministre d'Etat à la Condition féminine devrait bien écouter ce que j'ai à dire et laisser de côté, pendant quelques instants, ses préoccupations référendaires.

J'en profite pour parler ici de la majorité silencieuse des Québécoises, c'est-à-dire de 75% des femmes qui sont classées, ironiquement, comme inactives, dit-on, parce qu'elles ne sont pas sur le marché du travail. Sous prétexte que la femme au foyer est docile et moins revendicatrice que les 25% de ses concitoyennes qui travaillent hors du foyer, le gouvernement actuel a complètement oublié cette couche de la population féminine dans ses mesures sociales.

Vous allez me permettre une courte parenthèse pour illustrer cette lacune du gouvernement actuel. Prenons ces $240 d'allocation avec laquelle le ministre des Affaires sociales se gargarise. Je parle de la récente indemnisation que touchent les travailleuses qui s'absentent pour un congé de maternité. Par cette allocation, discriminatoire à mon sens, le ministre du Travail dévalorise la mère de famille qui élève ses enfants. Ainsi, une mère au foyer qui devient enceinte de nouveau n'a pas droit à cette prime de $240.

Le gouvernement dit implicitement aux femmes au foyer qu'elles ne sont pas des femmes à part entière parce qu'il ne reconnaît pas leur travail de mère de famille. Pourquoi ce présent gouvernement s'acharne-t-il à faire sentir, par toutes sortes de manières, à la mère à la maison qu'elle est moins bonne que celle qui est sur le marché du travail?

Je ne peux que me réjouir des mesures sociales qui améliorent le sort de 25% des femmes du Québec. Cependant, je ne crois pas faire abus de langage en affirmant que le système de garderies que l'on va implanter est discriminatoire pour la grande majorité des femmes du Québec. Qu'en est-il de la subvention destinée à la mère qui, de façon sporadique, doit laisser son enfant à la halte-garderie? J'aimerais que le ministre nous l'explique.

Pourquoi le gouvernement ne reconnaît-il pas le travail qu'accomplit une femme qui élève ses enfants? Sur le plan économique, voici l'absurde de la situation. Avec cette politique de gardiennage, on paiera un salaire à une dame qui gardera trois enfants étrangers, alors qu'il n'y aura aucun pécule de versé à une autre dame qui gardera trois enfants qui lui appartiennent.

II me semble que nous nous orientons vers de nouvelles frustrations pour la mère au foyer. Je pense que le rapprochement est facile à faire avec ce projet de loi que nous discuterons peut-être cette nuit ou ce soir, ce projet de loi qui vient compenser les familles qui ont un handicapé, stabiliser et permettre à une famille qui a un handicapé de recevoir des sommes à peu près équivalentes à celle qu'une famille étrangère pourrait avoir en gardant chez elle un enfant handicapé. Je pense qu'il y a ici un bon bout de chemin à faire par le ministre puisqu'on s'enlise dans la même situation que celle qui prévalait dans le secteur des enfants handicapés.

Peut-être la situation changera-t-elle avec la nomination de la nouvelle ministre d'Etat à la Condition féminine, mais permettez-moi d'en douter. La femme au foyer n'est pas un capital rentable pour le PQ. C'est la raison pour laquelle elle est laissée pour compte par ce gouvernement du Parti québécois. La récente nomination d'un ministre d'Etat à la Condition féminine arrive justement en période préréférendaire, alors qu'on se plaint que 75% des femmes, c'est-à-dire les femmes au foyer, sont très réticentes à la souveraineté-association. Sans équivoque, le gouvernement a mandaté le nouveau ministre d'Etat à la Condition féminine d'aller chercher des oui chez cette clientèle un peu plus conservatrice.

Cette perspective n'est guère réjouissante pour les 75% des Québécoises sur lesquelles l'intérêt du ministre sera porté. Nous sommes au début de la saison de la distribution des "candies" préréférendaires et ces pauvres femmes indécises, celles-là qui restent au foyer, ça relève de l'exploitation politique dont les femmes, j'espère, ne seront pas dupes.

Je m'en voudrais de ne pas souligner aujourd'hui, en cette Chambre, l'absence d'une politique familiale au Québec sur laquelle viendrait prendre place l'éventuelle loi sur les services de garde à l'enfance. Le 16 novembre dernier, je débattais avec le ministre la question suivante: la définition d'une politique familiale. La preuve en est faite au Québec. Nous avons, selon l'expression du député de Rimouski, une politique familiale de type "Steinberg". Notre gouvernement est une distributrice publique à palliatifs. Le fil conducteur dans tout ce travail à la pièce reste introuvable. A vrai dire, le ministre des Affaires sociales ne s'est pas souvent commis au dossier de la famille. Une de ces rares fois que le ministre a parlé sur la famille, c'était au colloque du Conseil des affaires sociales de la famille, tenu le 17 février dernier. Depuis, il ne cesse de nous recuisiner le même discours dans lequel il avance des non-sens nébuleux comme stopper le vieillissement de notre population en modifiant l'évolution démographique.

Bref, le ministre est complètement perdu quand on lui parle de politique familiale et la preuve en a été faite le 16 novembre dernier alors que les questions sont restées sans réponse.

Durant cette question avec débat, un autre fait est aussi ressorti. Je parle de la politique d'avortement criminel pratiqué dans les cliniques privées à but lucratif, au vu et au su du ministre. Le ministre a dit clairement — je cite le ministre — en parlant de lui-même: "... est parfaitement au courant de l'existence de plusieurs cliniques du genre." Il est donc honteux qu'un ministre se conduise de la sorte, fasse mine de rien quand des citoyens passent outre à la loi.

M. Lazure: Mme la Présidente. Une Voix: C'est une loi fédérale.

M. Grenier: Mais cela fait bien mal au ministre...

M. Lazure: Question de privilège.

M. Grenier: ... quand on parle de ces choses-là.

M. Lazure: Question de privilège. Une Voix: C'est une loi fédérale.

M. Grenier: Oui, c'est une loi fédérale et je vais vous dire pourquoi c'est une loi fédérale...

La Vice-Présidente: Sur une question... A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: ... que le ministre devrait appliquer dans la province.

M. Lazure: Question de privilège, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de privilège, M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Je pense que le député de Mégantic-Compton, qui était bien parti en lançant des fleurs au ministre des Affaires sociales, s'éloigne beaucoup du débat, de la pertinence du débat, en parlant des cliniques d'avortement. Non seulement il s'éloigne de la pertinence du débat, mais il induit la Chambre en erreur. Il induit la Chambre en erreur quand il parle d'avortement criminel dans les cliniques de planification dont notre ministère a connaissance. Je voudrais, Mme la Présidente, rectifier les avancés un peu confus du député de Mégantic-Compton qui peuvent faire croire à la population que le gouvernement approuve des avortements criminels, ce qui n'est pas le cas.

M. Fontaine: Question de règlement.

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fontaine: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de règlement, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Vous avez sans doute été à même de constater, comme tous les autres membres de l'Assemblée nationale, qu'il ne s'agissait pas là d'une question de privilège, mais d'une question d'opinion du ministre.

M. Grenier: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: C'est votre opinion, M. le député.

M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Le ministre a fait son intervention au milieu de mon discours. C'est son droit de le faire, bien sûr, pour permettre aux téléspectateurs de voir un autre point de vue, sauf qu'il ne m'empêchera pas de dire ce que j'ai à dire. Avec texte à l'appui, je lui dirai tout à l'heure de quoi je parle. Le ministre est déjà au courant puisque je lui ai déjà signalé cela au cours d'une commission parlementaire. Il n'y a rien de plus propre au sujet que nous discutons actuellement. Quand j'entends l'ancien ministre des Affaires culturelles me dire que c'est une loi fédérale, je dis que la justice doit être administrée au Québec. C'est de cela que je vais parler. (15 h 50)

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton, la Loi sur les services de garde à l'enfance.

M. Grenier: Merci, Mme la Présidente. Il est donc honteux qu'un ministre se conduise de la sorte, fasse mine qu'il n'y a rien quand les citoyens passent outre à la loi. Le ministre ne peut pas dire qu'il faut corriger la situation en donnant plus de prise aux 20 cliniques de planification récemment installées au Québec, car l'avortement sur demande constitue un crime partout au Canada et demeure un crime même pratiqué dans les 20 centres québécois créés à cette fin. Ce comportement du ministre face à ces cliniques d'avortement sur demande...

La Vice-Présidente: M. le député, est-ce que ce que vous dites maintenant vous amène à la pertinence du débat?

M. Grenier: Mme la Présidente, je pense que pour faire un tout de ce dont je parle en ce moment, je me dois de dénoncer cet aspect puisque, comme on me le signale ici...

La Vice-Présidente: M. le député, nous parlons de services de garde.

M. Grenier: ... s'il n'y a pas d'enfants qui viennent au monde, pourquoi instituer des services de garde? Je vous rappelle ici une déclaration du ministre à la Condition féminine qui disait, le 26 octobre 1979, sur ce point précis de l'avortement: Les gouvernements et le corps médical ne pourront jouer les autruches encore très longtemps et que toutes les régions du Québec ont besoin d'un système d'interruption...

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton, à moins que vos propos ne vous amènent à la pertinence, je vois très mal maintenant que vous parliez du sujet que vous avez abordé. Nous sommes à étudier le projet de loi sur les services de garde à l'enfance. Je vous demanderais d'être attentif à la pertinence.

M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je pense qu'il n'y a rien de plus précis que ce que j'étais en train d'énoncer ici pour nous amener à ce que le gouvernement qui établira sa politique de garde au Québec... Quand on aura à garder des enfants en haltes-garderies, en garderies dites populaires, des garderies dites à but lucratif ou à but non lucratif, je pense qu'il faudra que cela fasse partie d'un tout, d'une politique familiale qu'on est sur le point d'élaborer ici au Québec, comme on l'a signalé à la commission parlementaire. Je pense que tout cela se tient. Il est inutile de vouloir dire qu'on institue un service de garde au Québec si on ne veut pas aborder le sujet dans son entier. Pour moi, le sujet dans son entier, c'est la politique familiale, c'est l'institution qu'on est en train de faire dans les hôpitaux de services d'avortement aux personnes qui en ont besoin, mais c'est aussi de dénoncer à l'occasion... Si, dans mon discours d'aujourd'hui, je ne peux pas me permettre de dénoncer des systèmes qui perdurent ici au Québec, avec ou sans l'appui du ministre, je me demande où je peux le faire. Ce que je veux dénoncer ici, c'est cette feuille de chou qui traîne ici, que j'ai dénoncée au ministre pendant la commission parlementaire et qui dit qu'un deuxième service offert par les centres de santé est celui de l'interruption volontaire des grossesses.

La Vice-Présidente: M. le député!

M. Grenier: Nous pratiquons des interruptions jusqu'à douze semaines après quoi nous faisons des références...

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton, l'article 120 du règlement dit que les propos de l'intervenant sur un discours de deuxième lecture doivent s'en tenir à la portée d'un projet de loi, à sa valeur intrinsèque, aux principes fondamentaux du projet de loi... mais, le projet de loi comme tel, M. le député. Vous le savez aussi bien que moi et je vous demanderais de vous en tenir vraiment à la pertinence du débat actuel.

M. Grenier: Je sais que c'est un sujet litigieux ce dont je viens de vous parler. Je continuerai bien sûr mon discours...

La Vice-Présidente: M. le député, vous aurez d'autres occasions d'intervenir.

M. Grenier: ... sur les garderies. Je parlerai des garderies.

La Vice-Présidente: D'accord.

M. Grenier: Mais pour vous parler des garderies, je vous parlerai des ministres qui ont l'air à être contre. Il faudra que je vous le dise. Quand on voit le ministre à la Condition féminine qui se promène dans la province actuellement et qui nous déclare: "C'est le temps que la femme marche en ligne droite", je lui dirai que la femme comme l'homme, si on veut continuer à garder notre Québec comme il a été, devront aussi éviter certains écueils et qu'il y a des traditions qui méritent d'être conservées et on n'a pas le droit, qu'on soit un homme ou une femme, d'être une espèce de rouleau compresseur qui passe sur nos traditions. C'est cela que je dénonce aujourd'hui. Bien sûr qu'il y a des préjugés sur lesquels on doit passer, mais je demanderai au ministre à la Condition féminine de rectifier ses paroles et de cesser de dire aux dames du Québec que la femme doit marcher en ligne droite. C'est faux. Pas la femme plus que l'homme. Il y a des écueils à éviter et ces traditions et ces coutumes doivent être respectées.

La Vice-Présidente: La loi 77, M. le député, s'il vous plaît!

M. Grenier: Quand Mme la ministre à la Condition féminine dit à tout le monde: II faut l'avortement sur demande, je dis non, tant que cela ne sera pas rectifié par la loi. Ceci étant fait, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: La loi 77, M. le député, s'il vous plaît.

Une Voix: Question de privilège.

M. Grenier: Ce n'est pas vous que j'attaque, c'est votre ministre. Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: ... c'est dommage que ce gouvernement n'aime pas entendre des propos qu'on devrait entendre depuis longtemps et on ne trouve jamais que c'est la bonne occasion. Il y a des choses qui doivent se dire. Il y a des choses qu'on peut corriger ensemble aussi. Cela en est une.

La Vice-Présidente: Mais ce n'est pas le moment, M. le député.

M. Grenier: Je pense que le moment était assez choisi. Quand on parle des garderies au Québec et qu'on veut essayer de trouver des moyens pour avoir des enfants dans les garderies, je me demande quand est-ce qu'on va parler de cela? On ne peut pas dire que la situation sociale au Québec est des plus roses. Avec notre gouvernement distributeur de mesures sociales, on se retrouve avec des situations comme celle-ci. Le printemps dernier, le ministre des Affaires sociales présentait un projet de loi venant amender la loi existante sur l'adoption. Il s'agit de la loi 13. On l'a adoptée à la commission parlementaire. Ce projet de loi venait couper court aux entremetteurs louches de bébés et cela a été accueilli par mon parti, vous vous en souvenez. Nous avons voté pour l'acceptation de cette loi, vous vous en souvenez. Cependant, dans son enthousiasme de centralisateur, le ministre des Affaires sociales s'est permis d'enlever à la mère naturelle le droit de choisir l'intermédiaire qui effectuera le délicat placement lors de l'adoption, tout cela pour satisfaire les files d'attente des Conseils de services sociaux qui réclament des bébés.

Le ministre a donc jugé qu'il était injuste et discriminatoire de ne pas satisfaire ces files d'attente. Selon lui, une file d'attente passe avant la liberté d'une mère naturelle de confier son enfant à qui elle veut afin qu'il soit adopté. Nous nous sommes opposés. On a apporté des amendements à ce moment, Mme la Présidente, et cet amendement a été défait avec l'appui du Parti libéral. J'aimerais que le ministre réponde à cela, quand je parle de garderies privées, comme j'ai eu l'occasion de vous en dire un mot et que je continuerai, je pense que, là aussi, il y avait un secteur privé intéressant et que le gouvernement devrait réfléchir davantage sur ce fait qui était encore une de nos traditions, une de nos coutumes dans ces services de placement qui étaient alimentés bien sûr par des curés, bien sûr, par des notaires et bien sûr par des avocats. Mais cette jeune fille qui était enceinte, cependant, faisait confiance à son médecin et faisait confiance à quelqu'un autour d'elle qui la connaissait mieux pour son placement. Maintenant, est-ce que cela ne sera pas une raison de plus pour que cette jeune fille, malgré tous les moyens de contraception qu'on peut avoir, cette fille qui se trouve enceinte, cette nouvelle mère qui déciderait de se faire avorter, est-ce que cela ne serait pas un autre moyen encore, avec le système qu'on est en train d'introduire dans les garderies, à savoir que c'est limité et c'est une raison de l'envoyer dans une garderie qui sera amorcée, une garderie dite populaire...

La Vice-Présidente: Est-ce que vos propos vous amènent au sujet d'aujourd'hui, M. le député de Mégantic-Compton?

M. Grenier: Pardon? Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: A l'ordre. Je vous fais confiance, M. le député.

M. Grenier: ... si je ne peux pas...

La Vice-Présidente: Allez donc.

M. Grenier: Je pense que c'est une raison suffisante quand on pense au système d'adoption qu'on a transformé. On a créé une commission qui s'occupe de cela et qui est maintenant chargée par l'Etat de faire cette société d'adoption. Je pense que cela change pas mal de choses cela aussi. Dans le système des garderies, c'est la même histoire. Je ne dirai pas cette coupure, je ne serai pas brutal à ce point, mais cette transforma-

tion qu'on apporte — je l'ai dit au début — je suis d'accord qu'on permette ce système de garderies dites populaires. Mais je ne suis pas d'accord quand on veut couper court avec cette tradition des garderies privées qu'on a eues ici au Québec. C'est là-dessus que je dis au ministre que s'il ne nous assure pas aujourd'hui ou en commission parlementaire que ces garderies privées pourront continuer à fonctionner et s'agrandir aussi, en avoir d'autres garderies privées dans le Québec, s'il ne nous donne pas cette assurance, nous voterons contre la loi, c'est bien évident. C'est un but recherché, c'est un objectif de notre parti politique que de donner raison, que de donner une chance au secteur privé de se développer, à l'initiative privée dans le Québec.

C'est vrai dans les écoles, c'est vrai dans les foyers pour personnes âgées et cela devra continuer d'être vrai dans les garderies. Maintenant, on sait jusqu'à quel point a dû se battre le ministre de l'Education pour essayer de prolonger l'ancien système et permettre de laisser vivre le secteur privé des écoles. On sait, par exemple, avec les difficultés qu'on peut causer dans le secteur privé, les foyers pour personnes âgées, on constate que très peu de permis — le ministre m'en donnera la liste, s'il le désire — ont été émis à des foyers privés. (16 heures)

Comment concevez-vous, comment serait-il possible qu'avec la commission que le ministre veut mettre en marche, que des gens viennent décréter tout à coup qu'il y a place pour la création d'un nouveau foyer à caractère privé? Ce ne sera pas plus vrai avec la commission qu'on est en train de mettre au monde, l'office, cela ne sera pas plus vrai que cela ne l'est avec les commissions scolaires pour reconnaître qu'il y a place pour une école privée. Cela ne se produira pas, cela n'arrivera pas. C'est donc dire qu'on amène à une mort lente, mais à une mort certaine, ce secteur des garderies privées du Québec. Nous allons nous y opposer, nous de l'Union Nationale, tant et aussi longtemps que le ministre ne nous donnera pas l'assurance que ces gens pourront continuer d'oeuvrer dans leur milieu. Si on avait des choses à reprocher à ces gens du secteur privé, mais jamais, en commission, on me l'a dit tout à l'heure, on me l'a crié, jamais on n'a rien reproché au secteur privé. Il y a eu des plaintes comme il s'en passe partout, comme il va en avoir dans le secteur public.

J'écoutais, hier, un député du Parti québécois qui dénonçait une maison, un foyer public pour personnes âgées, il y en aura dans tous les secteurs, il y en aura dans le secteur privé et il y en aura dans le secteur public. Mais qu'on nomme une commission qui va décréter, qui va décider, avec le ministre qui va se cacher en arrière de son office ou de sa commission, pour dire non au secteur privé, moi, je dis non à cela. Pourquoi n'aurait-on pas là-dedans, comme au Barreau du Québec, à la Chambre des notaires, un droit d'autocritique? Pourquoi ne permettrait-on pas à ce groupe de gens qui ont bâti au Québec ce système que nous connaissons et auquel nous n'avons rien à reprocher, absolument rien, le droit de faire leur autocritique? Pourquoi ne serait-ce pas eux qui pourraient décider si les garderies sont bonnes ou non? S'il y en a dans leur secteur qui ne sont pas correctes, ils recommanderont la fermeture d'une ou l'autre de leurs garderies. Pourquoi ce ne serait pas eux qui feraient leur autocritique? Je pense que ces gens, sont assez adultes pour se permettre cela. Pourquoi cela ne serait-il pas vrai pour eux? Pourquoi est-ce le gouvernement qui va venir décider que c'est assez et qu'il ferme cela? On trouve des termes, à ce moment, dans le public, pour jeter l'aspect péjoratif sur le secteur privé. On appelle cela des garderies à but lucratif, des exploiteurs. A côté, le gouvernement a ses garderies populaires. Ce n'est pas comme cela qu'on va rendre justice à ce monde qui a bâti le système des garderies privées au Québec.

Je les appellerai à l'avenir les garderies privées et les garderies publiques. Cela, c'est rendre justice aux gens qui ont oeuvré dans le secteur. Devant cette envie du gouvernement, il faudrait leur raconter l'histoire de la petite poule rouge — elle n'avait pas une belle couleur, mais c'était une poule — qui fait l'envie de pas mal de gens qui ont monté des systèmes comme on en connaît un ici, dans le système des garderies privées.

Je pense que le danger que nous avons, c'est que, dans ce milieu, que ce soit dans les écoles privées, que ce soit dans les foyers ou les garderies, le gouvernement ne peut pas se permettre de continuer d'émettre des permis. On ne l'a pas fait ailleurs, pourquoi cela deviendrait-il vrai dans les garderies? On ne le fait pas dans les écoles, on ne le fait pas dans les foyers et on va nous faire accroire aujourd'hui que, soudainement, on s'est trouvé une vocation de secteur privé. Voyons donc! Il ne faut quand même pas nous prendre pour des poires. On sait ce qui se passe, on l'a vu, on l'a vécu, l'autre histoire, avant, quand on a retiré toutes ces autorités dans les sociétés d'adoption, comme je vous le disais tout à l'heure, qui faisaient un bon travail. Encore en commission, il y a des gens qui sont venus nous dire: Quand on a besoin de références, à la nouvelle commission, pour la société d'adoption, c'est le monde qui travaillait là-dedans qu'on va voir, tant cela allait bien. C'est étrange...

M. Lazure: Question de privilège, Mme la Présidente. J'ai été fort patient depuis quelques minutes. Je veux, au nom de la vérité...

La Vice-Présidente: M. le ministre, un moment, s'il vous plaît! Je vous entendrai sur votre question de privilège. Je veux quand même vous faire remarquer que vous disposez d'un droit de réplique de 20 minutes à la fin du débat et que vous pourriez intervenir à ce moment, à moins que vous ne vous leviez vraiment sur une question de privilège.

M. Lazure: Mme la Présidente, c'est sur une question de privilège, parce que le député de

Mégantic-Compton est depuis quelques minutes en train d'imputer des motifs au gouvernement et à celui qui pilote ce projet de loi. Il est en train d'induire la Chambre en erreur lorsqu'il prétend que notre projet de loi ne permet pas l'émission de permis privés.

M. Fontaine: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le ministre, il me paraît maintenant que vos propos, à moins que vous ne soyez vous-même attaqué personnellement, pourraient se retrouver à l'intérieur de votre droit de réplique.

M. le député de Nicolet-Yamaska, vous m'aviez interpellée?

M. Fontaine: Oui, madame. Auriez-vous l'amabilité de nous lire l'artice qui concerne les questions de privilège ici, à l'Assemblée nationale, pour que le ministre comprenne bien ce qu'est une question de privilège?

La Vice-Présidente: M. le député de Nicolet-Yamaska, je pense que le ministre peut le faire lui-même, il doit d'ailleurs avoir son règlement. De toute façon, tant que je n'ai pas entendu une question de privilège, je ne peux pas savoir de quoi il s'agit.

M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Bertrand: Oui, c'est relativement à l'interprétation qui est faite des questions de privilège. Il me semble que le règlement est très spécifique à cet effet. Quand un député constate que vient de se produire un événement qui induit la Chambre en erreur et qu'il convient de rétablir les faits, c'est la responsabilité d'un parlementaire de le faire à ce moment-là. Ce que le ministre voulait invoquer comme question de règlement, c'est la chose suivante. Il disait: Si on laisse continuer ainsi... Vous avez dit: II a un droit de réplique. C'est vrai, mais si on laisse le débat se poursuivre jusqu'à la fin en attendant le droit de réplique du ministre, il y a des risques que la Chambre et toute la population soient induites en erreur et les faits doivent être rétablis immédiatement. C'est ce que le ministre veut faire, Mme la Présidente, pour indiquer que la loi dit une chose et que le député de Mégantic-Compton dit tout à fait autre chose relativement à l'allocation de permis de garderies privées. C'est ce qui s'appelle rétablir les faits. Je pense que le ministre, conformément au règlement, peut à ce moment-ci rétablir les faits.

M. Fontaine: Une question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: J'entendrai une question de règlement à la fois.

M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: De façon très polie, je voudrais simplement vous dire qu'une question de privilège en vertu de notre règlement, est une violation des droits de l'Assemblée ou d'un de ses membres. Il y a des questions d'interprétation. A un moment donné, on pense avoir raison et l'autre pense aussi avoir raison. Ce n'est pas cela, une question de privilège.

La Vice-Présidente: Je ne vous le fais pas dire, M. le député!

M. Fontaine: Une question de privilège, c'est quand on est attaqué personnellement en tant que membre de l'Assemblée nationale. Si le ministre a été attaqué personnellement, il peut soulever une question de privilège, mais, jusqu'à présent...

La Vice-Présidente: A l'ordre!

M. Fontaine: ... ce n'est qu'une question d'opinion. S'il n'est pas du même avis que le député de Mégantic-Compton, il pourra, dans son droit de réplique, s'expliquer à ce sujet.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Mme la Présidente, le ministre est attaqué dans la mesure où le député de Mégantic-Compton prétend, dans son intervention, que le projet de loi ferme la porte aux garderies privées. Le député de Mégantic-Compton essaie d'induire la Chambre en erreur quand il dit cela.

La Vice-Présidente: M. le député de Mégantic-Compton, vous avez la parole. Entre-temps, je demanderais aux députés de lire l'article 49 du règlement de même que l'article 96.

M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Merci, madame. C'est dommage d'interrompre ainsi mon intervention par des questions de règlement et de privilège. J'ai pourtant laissé parler tout le monde bien tranquillement, et le ministre et les députés de l'Opposition, et je m'attendais qu'on me réserve le même accueil sympathique que celui qu'on a réservé à la députée de L'Acadie et au ministre. Mais non, c'est rarement que ça m'arrive et c'est dommage! On finit par en prendre l'habitude; que voulez-vous, il faut vivre avec cela.

J'aimerais, au cours de l'étude que nous allons faire du projet de loi, entendre les députés du côté ministériel. Ce n'est pas tout le monde qui partage cette option. Il y a des députés du côté ministériel qui ont été vus par l'Association des garderies privées; je ne les nommerai pas ici, ils connaissent leurs responsabilités. Il y a des gens qui sont venus me rencontrer et je me suis déplacé pour aller voir l'exécutif à Montréal, pour voir comment on administrait, comment ça allait dans les garderies dites privées. Des gens sont venus me rencontrer. Ils travaillent très habilement et très correctement également. Ils sont venus, ils ont vu des députés ministériels et ils ont vu des députés de l'Opposition. C'est une option qu'on choisit. D'autres choisissent de se faire défendre

par le gouvernement et ils sont parfois désappointés; il y en a qui décident de se faire défendre par des partis de l'Opposition; c'est peut-être un meilleur choix parce que, quand on choisit des députés ministériels, il y a des risques qu'ils ne se lèvent pas et on voit nos amendements rester sur le papier qu'on a écrit.

J'ai voulu être le porte-parole ici de gens qui ont quelque chose à dire sur ce projet de loi. Nous avons ici un projet de loi qui, à mon sens, est assez radical et qui amène des changements importants. Cela ne se voit pas, ça ne se mesure pas en disant: d'ici 24 heures ou d'ici 24 mois. On sait fort bien, par exemple, qu'on crée des difficultés. Que le ministre me dise, qu'il m'assure — si le ministre de l'Education était ici, je lui poserais la question — qu'il est sur le point d'ouvrir une quinzaine d'écoles privées au Québec, qu'il m'assure de cela. Que le ministre des Affaires sociales m'assure qu'il est prêt à ouvrir dans mon comté, à Saint-Isidore-d'Auckland, les foyers privés qu'on demande d'ouvrir. Qu'il m'assure de cela, pour les personnes âgées, et je vais le croire pour les garderies privées. (16 h 10)

Quand le ministre de l'Education m'aura assuré qu'il y aura une quinzaine d'écoles privées qui sont à la veille d'ouvrir, que le ministre des Affaires sociales m'aura assuré qu'il y a une quinzaine de foyers privés qui sont prêts à ouvrir dans le Québec, et je le croirai.

M. Lazure: Du marchandage.

M. Grenier: Non, ce n'est pas du marchandage. J'entends le ministre me dire "du marchandage". Faut-il être effrayant pour dire une chose comme cela? Ce n'est pas du marchandage...

Une Voix: C'est du chantage.

M. Grenier: ... et ce n'est pas du chantage, rien de tout cela. C'est d'avoir un engagement d'un ministre qui veut se camoufler derrière un office pour dire non. C'est ce qui nous attend dans la loi. A cela, nous, de l'Union Nationale, dirons non. Est-ce clair?

J'ai dit, au début, que j'étais favorable et que notre formation politique est favorable aux garderies dites populaires actuellement, les garderies publiques. Mais qu'on est aussi favorable aux garderies privées qui n'ont jamais exploité la population, qui ont donné d'excellents services à la population. Il y a des gens, loin de chez nous, dans la région de Montréal qui devraient s'exprimer ici, qui vivent dans des comtés où ils ont mis leurs enfants en garde pendant qu'ils ont élevé leur famille, et c'était dans le secteur privé. C'est important, cela aussi, quand on confie nos enfants à quelqu'un; il y a un secteur qui est là, il y a des gens qui oeuvrent là-dedans depuis quinze ans, depuis 20 ans, les mêmes personnes. Si je confie mon enfant à quelqu'un, j'aimerai qu'il y ait une continuité là-dedans; je ne le garde pas le matin dans une maison et le lendemain dans une autre. On est assuré d'une continuité là-dedans.

Mais qu'est-ce qu'il y a de mauvais? Pourquoi tant s'acharner à ne pas vouloir prendre des moyens pour ne pas renouveler les permis de ces gens? Qu'est-ce qu'il y a de mauvais? Que le ministre nous le dise! Pourquoi copier ces systèmes qui viennent de pays européens, qui viennent de partout? Pourquoi ne resterions-nous pas ce que nous sommes ici, au Québec? Les gens du Parti québécois, ceux de l'Union Nationale et de l'Opposition officielle veulent demeurer ce qu'ils sont. On est des Québécois, on n'est pas comme les autres. Il faut le sortir, Mme la Présidente. On est allés ensemble voir les Français, vous vous en souvenez, et le député de Marguerite-Bourgeoys; on était en train de déjeûner et vous étiez toute étonnée de constater que, dans un restaurant de Paris, le petit hôtel Saint-Honoré — pour ne pas lui faire de renommée — le matin, on a été servis par un "waiter" qui ne parlait pas le français, il ne parlait que l'anglais. On avait été surpris de tout cela. Vous vous en souvenez? On a voyagé et on a appris des choses.

La Vice-Présidente: Parlez donc des services de garde, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: C'était comme cela. Pourquoi, ici, ne resterait-on pas ce qu'on est? On est venu au monde avec des gens du secteur de l'initiative privée ici et on a grandi avec cela; cela a fait notre affaire et on a fait ce qu'on est actuellement et on aimerait continuer à être cela. C'est une société qui est différente de la nôtre. On n'est pas des Français, on n'est pas des Anglais, on n'est pas des Ontariens; on est des Québécois et on vit de façon différente et on veut sauvegarder ces coutumes.

Pourquoi le gouvernement s'acharne-t-il tant à vouloir bousculer nos coutumes? Je me trouve correct comme j'ai été bâti et il y en a bien d'autres qui me trouvent correct, en tout cas. Pourquoi voudrait-on transformer cela? On s'accroche à vouloir détruire les écoles privées, les foyers privés et maintenant les garderies privées. Pourquoi ces renversements? Je ne comprends pas et s'il est un gouvernement qui devrait ne pas vouloir cela, c'est le gouvernement du Parti québécois. Ce sont surtout eux qui devraient s'accrocher à nos traditions, surtout ces gens. Je ne comprends pas que cela vienne de ce côté du gouvernement. Je ne comprends pas cela! Cela pourrait être proposé par un gouvernement autre que celui-ci, l'Union Nationale ou le Parti libéral, et ça pourrait être en tout cas un peu plus compréhensible.

Mais ces gens se disent être de la racine et de la côte d'Adam du Québécois, si vous voulez, et ils viennent nous proposer ce projet de loi aujourd'hui; c'est incompréhensible! C'est le monde à l'envers! Ce serait venu d'ici et ç'aurait été acceptable.

J'aimerais que le ministre se lève d'un geste spontané et dise aux gens qui sont dans les galeries: On a confiance en vous. On a confiance en vous et on vous le dit. Vous allez être protégés par la loi et on aimerait continuer ce qu'on est.

Le ministre lui-même, Mme la Présidente, ses enfants sont dans une garderie privée. Avez-vous votre voyage? Le ministre lui-même...

M. Lazure: Mme la Présidente... Une Voix: Là, c'est une question de privilège. M. Grenier: Là, c'en est une.

M. Lazure: ... là, est-ce une question de privilège? Bon, d'accord. Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le ministre, vous prenez du temps sur celui de M. le député de Mégantic-Compton mais...

M. Lazure: Je suis sûr qu'il est d'accord.

La Vice-Présidente:... il semble que ce soit à son invitation.

M. Lazure: Je suis sûr qu'il consent.

La Vice-Présidente: II semble que ce soit à son invitation, M. le ministre.

M. Lazure: Mme la Présidente, c'est un des rares moments de vérité au cours de l'allocution du député de Mégantic-Compton. Il est vrai que j'ai un fils de trois ans, pour être bien précis. Je dois dire que le procédé du député de Mégantic-Compton est d'une qualité douteuse, mais puisqu'il en fait état publiquement, je vais répondre publiquement. Il est vrai que j'ai un fils de trois ans qui fréquente une des deux seules garderies dans ma ville de Saint-Bruno; les deux se trouvent à être des garderies à but lucratif, chez Maman Tonton, pour être très précis. Bon! Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le ministre, même si M. le député de Mégantic-Compton vous invite à prendre une partie de son temps, je vais quand même devoir vous ramener à la pertinence, si nécessaire.

M. Lazure: Je reviens à la pertinence, Mme la Présidente. Je ne donne pas l'adresse exacte de la garderie. Nos amis d'en haut, de l'Association des garderies privées, l'ont sûrement donnée au député de Mégantic-Compton. Mme la Présidente, je profite de. cette question de privilège pour, encore une fois — vous me permettrez de finir ma phrase, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: Oui, mais ce n'est pas une question de privilège.

M. Lazure: ... vous dire que le député de Mégantic-Compton induit la Chambre en erreur lorsqu'il essaie de faire croire que nous sommes contre les garderies privées. Au contraire. Le projet de loi, à l'article 6 — et j'ai dit ce matin que l'article 6 était modifié pour ouvrir la porte encore plus grande aux garderies privées à but lucratif...

Mme Lavoie-Roux: ... M. le ministre.

La Vice-Présidente: Je voudrais simplement rappeler à cette Assemblée qu'un des membres de l'Assemblée peut toujours demander à l'intervenant de poser une question ou de donner des explications sur un discours qu'il a déjà prononcé, en vertu de l'article 96 de notre règlement.

Une Voix: ...

La Vice-Présidente: Mais il peut demander la permission, M. le député. C'est M. le député de Mégantic-Compton qui le lui a offert. M. le député de Mégantic-Compton, à l'ordre!

M. Lazure: Mme la Présidente, le député-La Vice-Présidente: A l'ordre! M. Lazure: ... a assuré les représentants...

La Vice-Présidente: M. le ministre, s'il vous plaît! M. le ministre, s'il vous plaît! M. le ministre!

Mme Lavoie-Roux: ...

La Vice-Présidente: Je suis debout, Mme la députée. Ne vous inquiétez pas. Je suis debout et tous les propos ne sont même pas enregistrés. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Mme la Présidente, le ministre devrait saisir la distinction entre une question et une question oratoire. Quand on discute, quand on pose des questions dans un discours, on fait état d'un homme qui parle bien ordinairement et le ministre doit comprendre que c'est dans son droit de réplique qu'il devra me répondre, non pas instantanément comme il vient de le faire. Il aura son droit de réplique pour le faire et j'aimerais, dans son droit de réplique, qu'il nous dise s'il aime la garderie Marie Tonton — une garderie privée — si elle est bonne, s'il la trouve correcte, cette garderie. Dans votre droit de réplique, j'aimerais que vous nous le disiez. Il y a des gens qui sont ici témoins, qui oeuvrent là-dedans. Si elle n'est pas correcte, ils aimeraient y apporter des correctifs. J'en suis convaincu. Ils aimeraient savoir aussi...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Grenier: Maintenant que la direction de la garderie Marie Tonton s'est entendue nommer, elle aimerait savoir si le ministre a l'intention de continuer de lui laisser son permis pour oeuvrer dans la région.

M. le Président, je voudrais que le ministre nous dise plus clairement dans son discours de

réplique son intention face aux garderies privées. Le reste du projet de loi — je l'ai dit au ministre — il était temps qu'il vienne. Nous sommes pour cette loi sur les garderies. Nous sommes d'accord avec le principe de cette loi, mais il y a une chose qui accroche, ce fil conducteur qu'on reconnaît chez le gouvernement, qui est de vouloir tout passer par l'Etat. Ce n'est pas le nôtre. Le nôtre, celui de l'Union Nationale, c'est de passer par l'initiative privée et le jour où vous allez vous accrocher à une philosophie comme celle-là, nous voterons contre, même si le projet de loi amène des choses excellentes. On ne peut pas permettre que l'Etat, qu'un gouvernement comme le vôtre puisse venir encore diminuer l'initiative privée au Québec. On y a pourtant donné des coups de barre assez forts depuis quelque temps, il me semble qu'on devrait permettre, dans le projet de loi — pas dans les règlements, on se méfie de cela... Il y a des lois qu'on a adoptées ici en Chambre et si on avait connu les règlements, jamais on ne les aurait adoptées parce que les règlements sont venus à peu près contredire les lois. Que le ministre nous dise dans son projet de loi qu'il va protéger le secteur privé de la garderie au Québec. Cessez donc de croasser! Laisser donc parler le grand monde, les PQ en face de moi!

Mme la Présidente, le projet de loi no 77 est un projet de loi dicté par un besoin devenu criant et qui, hélas, devra faire partie du travail à la pièce auquel s'adonne ce gouvernement. Bien que ce projet de loi vienne combler un besoin légitime, il n'en reste pas moins qu'il porte atteinte à l'initiative privée — je l'ai dit — et à la liberté de choix des gens du mode de garderie que nous avons au Québec, en empêchant l'expansion dans le moment, en rendant difficile l'expansion du secteur privé, quand on ne l'interdit pas tout simplement en le privant de permis. La loi n'est pas assez précise. (16 h 20)

Je voudrais terminer mon intervention en réitérant ma position, qui se résume à ce cliché bien connu, "Vivre et laisser vivre". Si les types de garderies populaires, privées, à but lucratif, en milieu scolaire, les haltes-garderies, etc., ont le droit d'exister au Québec, je ne vois pas pourquoi les garderies privées non subventionnées n'auraient pas le même droit puisque, déjà, on a un méchant coup de barre quand on sait ce qui va arriver aux garderies non subventionnées. Les garderies populaires font le tour avec la bénédiction du gouvernement, avec les subventions qu'elles auront. Vous avez compris, comme moi, que le recrutement sera assez difficile, comme on le vit dans le secteur des écoles privées, par exemple, même avec des subventions qui se totalisent à près de 80%, les difficultés qu'on peut avoir, les difficultés qu'on peut créer dans ce milieu. Nous aurons les mêmes difficultés. Pourquoi leur en donner davantage en les inquiétant sur le renouvellement du permis, par exemple, sur l'à-peu-près-pas possibilité de donner un permis neuf à des gens qui veulent oeuvrer dans ce secteur?

J'aimerais que le ministre biffe tout simplement le deuxième paragraphe de l'article 6. Ce serait bien plus simple, s'il le rédigeait comme cela, à savoir qu'il laisse à l'initiative privée la possibilité d'investir son argent, son temps et ses idées. Ces gens ont fait la preuve qu'ils pouvaient bâtir quelque chose de potable au Québec, d'intéressant au Québec.

Que je sache, nous vivons toujours dans une société libre. Je pense que personne ne comprendrait aujourd'hui que le ministre ne donne pas clairement dans le projet de loi place au secteur privé. Je donnais une conférence de presse tout à l'heure à l'Association des propriétaires de garderies du Québec. Dans la conférence, on relit ce qui suit: "A la lecture du texte de la loi no 77, vous avez sans doute constaté qu'il n'est aucunement question des garderies privées. Dans son discours de deuxième lecture, le ministre Lazure nous réconforte en disant qu'il nous entrouve la porte; entrouvert, ce n'est pas large et c'est dangereux qu'on se fasse péter la porte sur les doigts. Il n'a pas expliqué la façon dont il va agréer notre association dans le projet de loi. "D'autre part, nous restons dans l'expectative quant aux mesures qu'il compte prendre afin d'avoir la soi-disant prolifération des garderies à but lucratif." Il n'y a jamais eu un danger, je pense bien, du genre "Steinberg". "Il veut que nous accréditions, en tant qu'association reconnue, les futures garderies à but lucratif. Nous sommes bien prêts à coopérer. D'ailleurs dans notre code d'éthique, l'Association des propriétaires de garderies est très sérieuse dans le choix de ses nouveaux membres."

Je réitère au ministre, en terminant, que s'il laissait à l'Association des propriétaires de garderies du Québec le soin de s'autocritiquer, le soin de recommander au ministre des garderies qu'elle juge correctes, qui répondent aux normes prescrites par le gouvernement et qui permettraient aussi — s'il voulait poser un geste envers des personnes qui sont en faveur du développement du secteur privé — des allocations à ces garderies, les gens seront libres ensuite. Actuellement, est-ce qu'on propose une liberté aux gens? Il y a des garderies à but lucratif qui, on le sait, n'ont pas fait d'argent et dont les gens n'ont eu que de quoi vivre mais ont donné d'excellents services aux gens. On les met sur une "track" et on dit: Vous autres, à partir de là, vous devrez en concurrencer d'autres qui seront subventionnées. Si vous voulez me dire que l'on va bien vivre dans ce milieu d'ici une dizaine d'années, si on est encore ici, tous les deux, M. le ministre, on se reparlera.

Je pense que, de ce secteur, il n'en restera pas un grand nombre, organisées comme elles le sont actuellement. On ne vous en demande pas tant que cela. Aujourd'hui, on vous demande seulement la permission de laisser oeuvrer ces gens-là. Avec la difficulté que vous leur posez dans le projet de loi, il n'y en a pas beaucoup parmi ces gens qui trouveront à vendre leur garderie. Il n'y en a pas beaucoup, quand on sait qu'on aura mis à côté une concurrence avec laquelle ils ne

pourront plus rivaliser. Ce qu'ils vous demandent, c'est de leur permettre de vivre dans ce milieu et de continuer de rendre service à la société, comme ils l'ont fait. Ceux qui ont vécu dans la région de Montréal, d'une façon plus particulière, dans la ville de Sherbrooke, la région que je représente, sont pas mal satisfaits du travail qui a été fait par ces gens. J'espère que des gens de votre parti viendront vous livrer le fond de leur pensée et viendront vous dire, d'ici la fin de la journée, qu'ils croient aussi au développement dans le secteur privé. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Rosemont. M. Gilbert Paquette

M. Paquette: Mme la Présidente, mes collègues du côté ministériel étaient incrédules quand je leur ai dit que je m'attendais à un numéro du député de Mégantic-Compton. C'était vraiment un numéro, Mme la Présidente. On a tout passé là-dedans, c'était le rouleau compresseur sur nos traditions. On a trouvé le moyen de parler de l'avortement, de l'endroit où le ministre plaçait ses enfants en garderie. On nous a dit qu'on allait réduire l'initiative privée. Un peu plus, je m'attendais à ce qu'on nous parle de "bolchévisation", comme l'a fait l'ancien leader de l'Union Nationale concernant un autre projet de loi hier. Mais le député de Mégantic-Compton a modéré ses excès.

Mme la Présidente, je vais simplement parler de cette question des garderies privées ou publiques. Je pense que le député de Mégantic-Compton fait exprès pour entretenir la confusion là-dessus. Il n'y a aucune garderie publique au Québec actuellement et ce projet de loi n'en crée aucune également. Il y a des garderies à but lucratif, il y a des garderies privées à but non lucratif et il y a quelques garderies privées coopératives. Quand on parle de réduire l'initiative privée, elle est derrière toutes et chacune de ces garderies. Vous pensez que les 300 garderies à but non lucratif qui existent actuellement — il y en a une soixantaine à but lucratif — se sont mises sur pied toutes seules? Ce sont des hommes et des femmes qui, à un moment donné, ont pris l'initiative de mettre sur pied une garderie. On sait tous les efforts qu'ils y ont consentis. Si ce n'est pas de l'initiative privée, je ne sais pas ce que c'est. La seule différence — parce que ce sont des gens qui ont pris leurs responsabilités, qui ont pris leurs affaires en main — est qu'ils ont un conseil d'administration où les parents sont représentés majoritairement et qu'elles ne fonctionnent pas sur la base du profit. C'est la seule différence.

Quand le député de Mégantic-Compton parle de couper avec nos traditions, il me fait rire parce que, s'il y a dans cette loi certains freins en ce qui concerne le développement des garderies à but non lucratif, il y a quand même, pour la première fois depuis 1974, un assouplissement à la politique adoptée sous l'ancien gouvernement libéral. Le ministre l'a dit très clairement tantôt et j'ai l'impression que le député de Mégantic-Compton a fait exprès pour ne pas l'entendre, pour ne pas être obligé de changer son discours. Les garderies privées à but lucratif pourront obtenir des permis. Mais il y a des limitations à cela. Ces garderies à but lucratif n'auront pas droit aux subventions gouvernementales. Je pense que c'est normal.

Comparez avec ce qui se passe dans le système de l'enseignement. Il y a des écoles privées qui ont des subventions de la part de l'Etat, mais ce sont toutes des écoles à but non lucratif; c'est une des conditions pour émettre des subventions. On ne donne aucune subvention à des écoles privées à but lucratif. On en donne seulement à des écoles à but non lucratif. Alors, la loi dit exactement la même chose, sauf qu'elle va même plus loin: Les parents vont être subventionnés. Evidemment, il n'y aura pas de subventions d'équipement, d'aménagement, de départ parce qu'on veut privilégier, à bon droit, le développement des garderies à but non lucratif, parce qu'on pense que les parents auront plus leur mot à dire dans ces garderies.

Je pense qu'il y a un assouplissement par rapport à la situation actuelle dans cette loi. Alors, je ne comprends pas le numéro que nous a fait le député de Mégantic-Compton. S'il y a des limitations, si on veut privilégier les garderies à but non lucratif et qu'on restreint les garderies à but lucratif à un seul permis, c'est qu'on ne voudrait pas justement qu'il se passe quelque chose de contraire à nos traditions, comme cela s'est passé aux Etats-Unis où on a vu des multinationales investir dans le développement des garderies, les compagnies Singer, General Electric, Westing-house, qui se sont mises à acquérir des locaux et à les louer à des concessionnaires, un peu comme une chaîne de garages Texaco ou Shell où on loue aux concessionnaires. Je regrette, mais les enfants ne sont pas des automobiles. Cela serait contraire à nos traditions. Cette loi vise justement à empêcher que cela ne se produise au Québec. Même les gens des garderies à but non lucratif nous ont dit: On veut être responsable de nos propres garderies. On veut continuer à avoir notre responsabilité; on veut que les parents continuent à gérer les garderies à but non lucratif; on ne voudrait pas avoir un réseau public où l'Etat a le mot déterminant. Je m'excuse, mais que la bureaucratie soit publique ou qu'elle vienne des multinationales sous forme d'une chaîne avec concessionnaires, vous allez admettre que, dans un cas comme dans l'autre, ce n'est pas très conforme à nos traditions. Je pense que ce projet de loi respecte entièrement nos traditions, surtout l'initiative privée des personnes qui ont créé des garderies, que ce soit à but lucratif ou non. (16 h 30)

Mme la Présidente, quant à ce projet de loi, on nous dit: Vous n'avez pas de politique. Il n'y a pas de politique dans le développement des garderies. Ce n'est pas une politique, bien sûr, qui est élaborée dans tous les détails. Loin de là, c'est vrai. Il y a quand même des orientations fondamentales qui sont affirmées pour la première fois par un gouvernement, dans un projet de loi. La

première de celles-là, c'est justement la diversité des services, reconnaître que les gens ont des besoins divers et qu'il nous faut plus de garderies de quartier, plus de garderies en usine ou au bureau, plus de garderies en milieu scolaire, qu'il nous faut des haltes-garderies, qu'il nous faut améliorer les services de garde en milieu familial.

On reconnaît en quelque sorte le droit de l'enfant à avoir accès, peu importe la situation de ses parents, à des services de garde. Là, je voudrais simplement faire une petite parenthèse, je pense que si on allait à l'excès contraire que nous propose le député de Mégantic-Compton, on se mettrait à subventionner les garderies à but lucratif et qu'on appuierait le développement des garderies à but lucratif. Je pense que pour celles de ces garderies qui jouent un rôle utile actuellement, il ne faudrait pas qu'elles soient accessibles seulement aux mieux nantis non plus. Il faudrait que tout le monde ait accès aux services de garde. Tout le monde, quelle que soit sa situation financière et quelle que soit sa situation dans son milieu en région. Dans les milieux ruraux, je pense que tout le monde va être d'accord là-dessus, on a peut-être des services de garde en milieu familial qui sont peut-être mieux adaptés sans qu'il faille exclure les garderies de quartier ou les garderies de paroisse, les garderies municipales. Dans les villes, c'est probablement la forme de garderies de quartier ou en usine ou en milieu de travail qui est le mieux adapté. C'est reconnaître donc qu'on a besoin de services diversifiés.

Deuxièmement, c'est affirmer le principe que, dans la gestion des garderies, la place fondamentale doit être aux parents. Je pense que c'est assuré dans les garderies à but non lucratif et dans les garderies à but lucratif. Je pense que dans le projet de loi, je ne suis pas sûr que cela y est actuellement, mais il faudrait demander à ces garderies de mettre sur pied un comité consultatif de parents. Je pense que c'est prévu dans la loi. En tout cas, c'est une chose normale. Place aux parents aussi dans les services de garde en milieu familial et les agences de garde en milieu familial. Maintenant, on a mis beaucoup d'accent sur l'Office des services de garde aux enfants. La critique du Parti libéral justifie son opposition à ce projet de loi là-dessus. Je vais revenir à cela tantôt. C'est comme dire que l'on va mettre sur pied un office et cela n'aura aucun impact sur la qualité des services. Si on met sur pied un office, c'est parce que cet office va préciser le cadre de politique qui est dans la loi, qu'il va avoir des projets, qu'il va donc pousser dans le dos du gouvernement, dans le dos de tout le monde avec les agents impliqués dans le milieu et qu'il va donc contribuer au développement encore plus rapide des services de garderie. Ce n'est pas simplement une structure qu'on met sur papier. C'est un outil de concertation, de participation, de planification, de stimulation du développement des garderies.

Cela va nécessairement entraîner un financement accru. Cela, la meilleure preuve, on peut voir que déjà, même sans office, le financement aux garderies s'est accru énormément. Avec un office, on peut s'attendre qu'il y ait accélération de l'augmentation des budgets.

Mme la Présidente, je pense que vous êtes sans doute au courant qu'en 1980 les subventions aux garderies de toutes sortes vont passer à $32 500 000 alors qu'elles étaient de $3 500 000 quand on est arrivé au gouvernement, en 1976. Le budget a été multiplié par dix, Mme la Présidente, et on nous dit: On passe à côté de la question, on veut simplement mettre sur pied des structures. Ce ne sont pas des structures $32 500 000. Il y a, comme par le passé, une aide aux parents.

Il y a aussi une part au financement des parents, évidemment. J'ai été très sensible aux mémoires des gens qui oeuvrent dans le domaine des garderies et qui nous disent: On a besoin de moyens, on a besoin de services techniques, on a besoin d'aide financière et ce que vous faites, ce n'est pas suffisant. C'est bien évident que ce n'est pas suffisant. Mme la députée de L Acadie était d'accord sur cela aussi à la commission parlementaire. Elle nous disait: Ce n'est pas suffisant, mais elle convenait, elle aussi, que l'Etat du Québec ne pouvait pas mettre l'année prochaine $1 milliard dans le développement des garderies. Je vois qu'elle opine, elle est d'accord sur cela. On ne peut pas remplir tous les besoins d'un seul coup.

Je comprends mal la position du Parti libéral. On nous a parlé d'abord, au début de i'intervention de Mme la députée de L'Acadie, on a fait l'historique, il y avait des réticences dans la population à un réseau de garderies généralisé pour les zéro à deux ans. Tout le monde est d'accord sur cela. Il y avait des organismes qui étaient contre le travail de la femme, d'autres qui étaient pour; on disait qu'il fallait à travers cela laisser à la femme la liberté de choisir. On est tous d'accord là-dessus, il faut laisser à la femme la liberté de choisir. Je me demandais, en l'écoutant, si elle n'était pas en train de justifier l'inaction des gouvernements précédents dans ce domaine, parce que la liberté de choisir de la femme, cela fait longtemps qu'elle aurait dû être reconnue. Cela fait longtemps qu'il y a des femmes sur le marché du travail. La meilleure preuve, c'est que ce n'est sûrement pas pour rien que les Soeurs Grises, en 1858, ont mis sur pied cinq garderies, les cinq premières garderies au Québec. Ce n'étaient pas particulièrement des gens, j'imagine, qui voulaient favoriser le travail de la femme, mais ils voyaient un besoin. Le besoin n'est pas d'hier. Il a fallu attendre en 1979 pour avoir un projet de loi qui, sans régler tous les problèmes, a une politique qui est encore insuffisante sur le plan financier, mais qui nous fait faire un pas de géant dans la bonne direction. Pourquoi avoir attendu en 1979 pour avoir un tel projet de loi?

Ensuite, Mme la députée de L'Acadie nous a parlé de diverses questions qu'on peut très bien régler après la deuxième lecture et qui ne justifient pas un vote négatif sur ce projet de loi. Par exemple, la question des familles d'accueil par rapport à la garde en milieu familial, la question des règlements de l'office, il y a toutes sortes de questions comme cela de détails. Elles peuvent

être réglées justement après la deuxième lecture. Sur quoi s'appuie le refus de Mme la députée de L'Acadie et du Parti libéral de ce projet de loi? On nous dit: Vous n'améliorez pas les services vous mettez sur pied seulement une structure. Cela va être très coûteux. Première chose, ce ne sera pas coûteux cet office. Il y aura quelques membres là-dessus, bien sûr, qui vont s'occuper de promouvoir le développement des services de garderie, mais, essentiellement, il y a déjà des fonctionnaires au ministère des Affaires sociales et ailleurs qui vont trouver en quelque sorte un chapeau qui va leur permettre de coordonner leurs efforts. Cela ne coûtera certainement pas une fortune.

On nous dit: Cela va nous donner une mauvaise coordination. Je ne vois pas comment un office qui regrouperait justement des représentants des divers ministères impliqués et qui se verrait donner un mandat par cette Assemblée, par ce projet de loi, ne pourrait pas mieux coordonner qu'avant. Avant, il y avait des responsabilités diffuses d'un ministère à l'autre, comment un tel office regroupant des représentants de ces divers ministères et, en plus, des gens du milieu pourrait-il réduire la coordination? Au contraire, cela va l'augmenter.

On nous dit: Le gouvernement veut avoir cet office pour être à l'abri des contestations du public. Mme la Présidente, il n'y a jamais aucun office qui a empêché le gouvernement d'être blâmé de quoi que ce soit. Quand il y a une grève des transports qui relève de la Communauté urbaine de Montréal, qui est un autre niveau de gouvernement, on blâme le gouvernement provincial. Imaginez-vous, si cela va mal dans les services de garde, c'est bien sûr qu'on va s'adresser au gouvernement.

On nous dit: La participation des parents existe déjà, les services existent déjà. Oui, mais s'il n'y a pas un organisme dont c'est la seule préoccupation et qui a suffisamment de crédibilité, qui peut contribuer au développement, qui peut accélérer le développement des garderies, celles qui existent déjà vont continuer à exister, mais il n'y en aura pas d'autres et on n'étendra pas les services.

On n'améliorera pas la participation des parents. On nous dit: On aurait dû mettre l'argent dans les garderies plutôt que dans la création d'un office. Je pense avoir répondu à cela tantôt. C'est un office qui est quand même très peu coûteux. Sur un budget de $32 500 000, ce serait étonnant qu'il y ait plus que quelques dizaines de milliers de dollars investis là-dedans. Je pense que c'est l'outil qui manquait au gouvernement.

On dit que cela n'améliorera pas les services. Au contraire, je ne vois pas comment Mme la députée de L'Acadie pourrait nous dire que cela va nuire aux services. J'aimerais entendre sa solution, son alternative. Elle nous dit: II y a déjà une division au ministère. Est-ce qu'on est mieux de laisser la responsabilité première du développement du service de garde à une division d'un ministère ou si on n'est pas mieux d'avoir un office où seront représentés les milieux scolaire, municipal, les parents des garderies, le personnel des garderies? Est-ce qu'on n'a pas de meilleures garanties comme ça que la population va respecter la volonté des intervenants et des bénéficiaires des services, surtout si on y met une représentation régionale où tous les coins du Québec seront représentés, surtout si cet office va devoir, comme c'est l'intention très ferme du gouvernement, se décentraliser en régions et faire en sorte que les services de garde de différents types pourront exister dans une région et se coordonner? Où est la solution de rechange du Parti libéral?

Je vous avoue que j'ai été très surpris de la position de la députée de L'Acadie. J'ai suivi toutes les séances de la commission qui a reçu les mémoires sur ce projet de loi et je vous avoue que ça n'allait pas du tout dans cette direction. Que s'est-il passé au caucus du Parti libéral? Que s'est-il passé?

Une Voix: That is the question!

M. Paquette: Je pense que la députée de L'Acadie était très prompte pour attaquer la ministre de la Condition féminine, qui n'est pas ici aujourd'hui et qui n'était pas à la commission parlementaire, c'est vrai, mais vous remarquerez, Mme la Présidente, que Mme Payette n'était peut-être pas à nos travaux, mais elle a atteint son objectif de faire en sorte que les budgets soient multipliés par dix dans le domaine des garderies et qu'on ait une loi qui contribue au développement de nos garderies au Québec.

Mme la députée de L'Acadie, elle, était à toutes ces séances et elle n'a même pas réussi à convaincre son propre parti d'appuyer ce développement alors qu'elle est parfaitement d'accord pour dire que c'est un pas de fait dans la bonne direction.

M. Bertrand: Elle est désavouée par le caucus.

M. Paquette: Je comprends la solidarité de parti, je comprends qu'elle est obligée de défendre une position avec laquelle elle n'est pas d'accord, mais je vous avoue que c'est extrêmement décevant, cette position.

Une Voix: Elle a été désavouée par son caucus.

M. Paquette: Mme la Présidente, je termine... Mme Lavoie-Roux: Question de privilège.

La Vice-Présidente: Je veux bien vous entendre, Mme la députée, mais de votre siège.

Sur une question de privilège, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie de votre indulgence. Le député de Rosemont vient de dire que je défends une position de mon parti avec laquelle je ne suis pas d'accord. Je dois vous dire que je suis totalement d'accord avec la position de mon parti.

Des Voix: Oh, oh!

M. Paquette: Mme la Présidente, je dois conclure que ce n'est pas la députée de L'Acadie qui a convaincu ses collègues de promouvoir le développement des garderies, mais ce sont ses collègues qui l'ont convaincue de ne rien faire.

Une Voix: C'est cela.

M. Paquette: Quand on regarde les positions que Mme la députée de L'Acadie a prises cet été, ses positions à la commission parlementaire devant tous les mémoires, cela n'allait pas du tout...

La Vice-Présidente: A l'ordre!

M. Paquette: ... dans cette direction.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, question de privilège. J'aimerais que le député de Rosemont, avant d'affirmer des contradictions entre ma position d'aujourd'hui et celle lors des commissions parlementaires, relise les débats des commissions parlementaires et il verra qu'il n'y a aucune contradiction. Bien au contraire, je travaille dans le même sens: l'amélioration!

La Vice-Présidente: M. le député, vous allez devoir conclure.

M. Paquette: Je conclus. Je pense que les critiques du Parti libéral portent seulement sur des questions de détail qui peuvent être réglées après la deuxième lecture. La seule objection qu'on nous a amenée était la constitution d'un office. Je vous avoue que c'est curieux de justifier une position de refus en deuxième lecture pour des raisons comme celle-là.

Je pense que ce projet de loi va contribuer énormément au développement des garderies. Il va favoriser la participation des parents; il va offrir des subventions accrues de démarrage, des subventions accrues pour l'aménagement et l'équipement. Parce que ce qui a déjà été fait par le ministère, cela va nécessairement s'accentuer quand nous allons avoir un Office des services de garde dont ce sera la responsabilité première de développer, au Québec, un réseau de garderies géré par les parents, non par l'Etat, et appuyé par l'Etat de façon que les femmes, et les hommes aussi, les familles, puissent se réaliser en étant certains que leurs enfants auront des services adéquats pour leur propre promotion intellectuelle et pour leur meilleur avenir dans la vie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de règlement, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Sur une question de règlement, j'aimerais vous faire remarquer que, même attaqué comme je l'ai été par le député de Rosemont, j'ai choisi de ne pas répondre et de ne pas me lever. Peut-être parce que j'habite une maison de verre, je n'aime lancer de pierre à personne, mais j'ai compris et j'aimerais que vous remarquiez que je n'interviens pas pendant les discours du parti gouvernemental et j'aimerais bien qu'on me rende la pareille à l'occasion.

La Vice-Présidente: M. le député de Saint-Laurent.

M. Claude Forget

M. Forget: Mme la Présidente, ce projet de loi que le gouvernement présente comme étant un instrument essentiel pour le développement de services de garde à l'enfance est à peu près tout sauf cela. C'est avoir une bien faible estime de l'intelligence de nos concitoyens que de leur faire croire que tout ce qui a empêché un développement plus rapide des services de garde à l'enfance tient à quelques problèmes d'administration que l'on va résoudre en créant un office, au niveau gouvernemental, pour l'organisation et le financement de garderies qui, le gouvernement l'admet d'ailleurs lui-même, devraient provenir d'initiatives du milieu.

Effectivement, il n'y a pas à chercher midi à quatorze heures dans des réformes administratives, tant et aussi longtemps que le problème fondamental auquel on fait face depuis le début, les garderies et leur développement, n'est pas attaqué de front, que la question n'est pas posée publiquement et le débat public engagé sur cette question de fond.

La question de fond, à laquelle je vais faire allusion moi-même, tourne, selon qu'elle est résolue d'une façon ou d'une autre, sur des ressources additionnelles, des ressources financières additionnelles, pas un plus grand nombre de bureaucrates à Québec, mais sur des ressources financières additionnelles qui seraient attribuées aux familles et aux garderies elles-mêmes pour permettre leur développement.

Il y a une croisée des chemins devant laquelle le gouvernement se trouve, mais devant laquelle il refuse de faire un choix clair. La croisée des chemins est constituée par deux options possibles. L'une de ces options consiste à continuer tout simplement la politique adoptée il y a déjà quelques années et qui se caractérise de la façon suivante, assez simplement: il s'agit d'un effort pour aider financièrement des familles dont le revenu global, le revenu familial des deux conjoints — lorsqu'il y a deux conjoints — se situe en bas de la moyenne. C'est donc un effort pour donner à ceux qui sont financièrement défavorisés, quoique ce terme touche des familles qui sont tout juste au-dessus de la moyenne, donc pas vraiment des familles défavorisées dans le sens fort du mot, mais, de toute manière, avec cette réserve, ce programme et cette option consistent à aider essentiellement, financièrement, des gens qui n'ont pas l'argent nécessaire pour se procurer les services de garde, par l'engagement de domestique ou de gardienne à la maison, ainsi de suite, ou en assumant en totalité le coût des garderies privées ou publiques, peu importe. C'est une option. (16 h 50)

C'est l'option qui a été retenue à l'origine en 1974 et qui a été continuée sans changement substantiel, sans changement de fond par le gouvernement actuel. Si on regarde les sommes qui ont été attribuées pour l'aide aux familles depuis 1977 avec le nouveau gouvernement, on a tout juste ajusté à la hausse le niveau des subventions données aux familles pour tenir compte de la hausse générale des prix à la consommation. C'est une indexation à laquelle nous avons assisté, mais pas davantage. Donc, la conception originale de 1974 se maintient. C'est une aide à des familles dont le revenu global se situe en dessous de la moyenne des revenus familiaux au Québec. Tant que nous gardons un programme d'aide aux services de garde, ce caractère redistributif de soutien de revenu de certaines familles, nous ne connaîtrons pas de développement beaucoup plus spectaculaire que ceux auxquels nous avons assisté depuis quelques années.

D'ailleurs, en dépit des annonces que le gouvernement fait et selon lesquelles les montants donnés et dépensés pour les garderies doublent d'année en année, on devrait se trouver, après trois ans de développement, devant 80 000 places de garderies, parce qu'il y en avait entre 10 000 et 12 000 au moment où le nouveau gouvernement a pris ses responsabilités et si on doublait en trois ans, on serait à 20 000 la première année, 40 000 la deuxième années et 80 000 maintenant. Mais on est bien loin de cela, comme on le sait. On en est à 16 000, 17 000 peut-être au grand maximum.

Une Voix: 16 000.

M. Forget: 16 000, effectivement, me dit-on. Donc, il n'y a pas eu un développement spectaculaire. Cela s'explique assez bien parce que, encore une fois, l'option qui a été retenue jusqu'à maintenant, c'est d'aider sélectivement certaines familles dont le revenu se situe en dessus de la moyenne.

Mais le problème pourrait recevoir une autre solution. Si le gouvernement avait décidé de développer coûte que coûte des services de garde pour l'ensemble de la population, il aurait dû opter différemment pour une autre vision des services de garde, une vision qui les rendrait véritablement accessibles à un coût minime ou même nul, non seulement aux familles défavorisées sur le plan des revenus, mais même aux familles qui ont des revenus moyens.

Il faut se rendre compte, M. le Président, que lorsqu'on parle d'un revenu familial moyen de $20 000 et que l'on envisage la situation de familles où les deux conjoints travaillent — c'est ordinairement la clientèle qui est visée par les services de garde — on a une situation où des gens travaillent avec un revenu individuel, en moyenne de $10 000 chacun. Ce sont donc des revenus relativement faibles, selon les standards de l'époque, et il est bien clair que l'on ne s'adresse pas à la classe moyenne. On ne s'adresse pas à l'immense majorité des gens pour qui, véritablement, le problème se pose de choisir, dans le cas des épouses, par exemple, d'aller travailler ou non lorsqu'il y a des enfants dans une famille. Un programme qui se limite à aider financièrement des familles relativement défavorisées sur le plan des revenus sera voué à être modeste, puisqu'il ne s'adresse pas à cette masse considérable de familles dont les revenus moyens — parce que deux personnes travaillent dans la même famille — les situent carrément au-dessus de la moyenne, par définition.

Dans ce contexte et dans le contexte d'une telle option, si le gouvernement avait voulu la considérer, nous serions donc amenés à adopter une loi, non pas pour créer une structure gouvernementale, mais pour libéraliser, élargir considérablement les barèmes d'appui financier. Ceci correspondrait à une notion en vertu de laquelle notre société accepterait de faire assumer par l'ensemble des citoyens les coûts inhérents au maintien pour les jeunes couples qui ont ce choix à faire, d'un mode de vie qui leur permettrait de bénéficier tous les deux des possibilités de réalisation sur le plan professionnel, de gains sur le marché du travail, tout en étant en mesure, à cause de services de garde pratiquement gratuits, d'élever une famille sans devoir sacrifier en quoi que ce soit ce mode de vie et cette façon de faire qui devient, pour les jeunes couples, encore une fois, un choix de plus en plus attrayant, une attente de plus en plus généralisée.

Tant et aussi longtemps que le gouvernement et que l'ensemble de la société — parce qu'il ne s'agit pas seulement d'une option gouvernementale — n'aura pas pris cette décision majeure d'aider, par ses ressources, les familles à réaliser cette difficile équation entre l'activité économique, l'activité professionnelle pour les deux conjoints et les charges familiales qu'ils assument parce qu'ils ont de jeunes enfants; donc, tant que la société n'aura pas décidé d'assumer, en totalité, ce fardeau, on peut bien se gargariser de mots, on peut bien faire des communiqués de presse tous les ans du côté gouvernemental pour dire qu'on va tout faire pour développer les garderies, mais nous serons au point neutre, il n'y aura pas de développement significatif. Encore une fois, en refusant de prendre cette option, on décide implicitement, qu'on le veuille ou on, que nous nous adressons seulement à un segment relativement limité de la population. C'est ce qui est fait maintenant et on sait ce que cela donne.

Il est fort possible, M. le Président, que cette option plus large de services de garderie véritablement ouverts à tous, indépendamment des considérations de revenus — dans ce cas-ci, indépendamment du fait que des gens ont des revenus fort supérieurs à la moyenne — la société, un jour, décide de la prendre. Mais ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui le gouvernement du Parti québécois, en dépit de toutes ses déclarations de principe sur le sujet, n'est pas disposé à poser cette question, à soulever ce débat et à le trancher, certainement, encore moins.

Ce qu'il nous propose, c'est un "second-best", c'est un pis-aller en quelque sorte. Ne pou-

vant rien faire de fondamental pour le développement des services de garde, il se résout à adopter des mesures qui sont du "window-dressing", des mesures tout simplement pour la galerie, pour pouvoir dire qu'il a créé des structures en essayant de faire croire qu'en créant des structures il a résolu un problème fondamental, alors que tous ceux qui sont familiers avec le développement de ces services savent très bien que là n'est pas le problème de fond.

Une société comme la nôtre, qui se pose des questions sur le plan de sa capacité de se perpétuer même, de perpétuer le nombre de citoyens qui composent actuellement le Québec puisque la chute de la natalité a commencé à poser ce problème, va, tôt ou tard, devoir faire face à une question comme celle-là. Mais, encore une fois, ce n'est pas aujourd'hui que nous allons la trancher. Je tenais, cependant, à souligner qu'il y a là un problème fondamental à côté duquel le projet de loi no 77 passe complètement, en l'ignorant en totalité.

J'aimerais, M. le Président, aborder un deuxième sujet dans les quelques minutes qu'il me reste, le sujet des garderies privées. Le ministre, dans son discours, s'est réfugié derrière les précédents et derrière les politiques qui ont été inaugurées à ce sujet en 1974 par le ministère des Affaires sociales que j'avais l'honneur de diriger à l'époque. Mais il serait incorrect de laisser les membres de l'Assemblée avec l'impression qui a été créée en voulant imputer la responsabilité de cette politique de restriction vis-à-vis des établissements privés à une décision remontant seulement à 1974. Effectivement — et cela pourra intéresser les membres de l'Union Nationale — la politique relative aux établissements privés à but lucratif a été inaugurée sous le ministre Jean-Paul Cloutier, le ministre qui faisait partie du gouvernement de l'Union Nationale en 1967. Cela a été fait à une époque où des problèmes sérieux s'étaient posés dans la gestion et le contrôle, y compris le contrôle financier, de certains établissements, tels que des centres d'accueil privés à but lucratif.

Dans le contexte de 1974, alors que le programme de garderies a été inauguré, nous connaissions au Québec une période d'optimisme que les faits et les événements subséquents ont largement démenti. Cet optimisme était basé sur le fait que les établissements publics pourraient relever ce défi de donner des services de qualité et de répondre véritablement aux besoins de leur clientèle par l'addition, dans leur conseil d'administration, de représentants des usagers, par l'application des principes de démocratie de participation. (17 heures)

On a depuis, avec l'expérience, développé là-dessus des opinions de toutes sortes mais, de mon côté, je n'ai pas hésité, depuis quelques années, à dire que cet optimisme à l'effet que les établissements publics pourraient relever tous les défis, donner une qualité supérieure et répondre à tous les besoins à cause de leur structure même, cela s'est révélé seulement cela, de l'optimisme et un jugement largement naïf d'ailleurs dans un grand nombre de cas. Non pas que les établissements publics doivent être jugés avec une sévérité uniforme quant à l'ensemble de leurs réalisations mais on a bien dû constater que les établissements publics, en dépit des nouvelles formules de gestion et de participation, éprouvaient à l'occasion des difficultés tout aussi sérieuses que les établissements privés à assumer pleinement leur rôle et à satisfaire leur clientèle.

C'est la raison qui nous amène aujourd'hui à réviser cette position prise dans le passé et à désirer que la porte soit ouverte beaucoup plus largement, de fait, sans aucune restriction, à l'existence et au développement, non pas seulement au maintien du statu quo mais au développement d'initiatives privées dans le secteur et tout particulièrement dans le secteur des services de garde pour enfants. Effectivement, l'expérience des quelques dernières années dans ce secteur en particulier démontre que certaines garderies publiques et même certaines garderies dites populaires ont suscité, dans leur fonctionnement, des problèmes encore plus sérieux qu'un certain nombre de garderies privées et que, de ce côté, il n'y a pas de formule miracle. Il est, au contraire, important de donner à la population et aux parents des choix significatifs entre différentes formules, différents modes d'organisation et aussi différentes conceptions du rôle de la garderie et de la qualité des services qu'elle peut offrir à sa clientèle.

En effet, le véritable choix des parents, il est illusoire de penser qu'il peut reposer sur une structure de participation. D'abord, la clientèle à laquelle on s'adresse, qui est formée de familles dont les deux conjoints travaillent, ou le seul parent dans le cas de familles monoparentales, est précisément cette catégorie de parents qui a le moins le temps de consacrer des soirées ou des week-ends à participer à des conseils d'administration ou à des comités consultatifs de parents. Ces gens sont pris dans l'étau de plusieurs responsabilités qu'ils doivent assumer en même temps, responsabilités de travail, responsabilités de s'occuper, malgré tout, d'un foyer et d'une famille. Je vois mal comment on peut, de façon réaliste, supposer qu'ils pourront contrôler les activités, le recrutement, la qualité des services d'une garderie ou de n'importe quelle autre institution, avec des heures de loisir si sévèrement grugées par les responsabilités qu'ils ont déjà. C'est donc beaucoup plus au niveau du choix entre des garderies répondant à des perceptions, à des images différentes de leur rôle que peut s'exercer un véritable contrôle sur le genre de services qui sont donnés à leurs enfants. Dans ce contexte, il me semble que le ministre a tout intérêt à ouvrir le plus largement possible la porte qui est prévue par la loi et à ne pas restreindre à un seul 'type ou même à quelques-uns de ceux qui existent déjà les possibilités qui s'offrent dans le domaine, d'autant plus qu'un enfant sur quatre qui bénéficie actuellement de services de garderie le fait dans le cadre de ces garderies privées et ceci, dans les milieux urbains où il y a des choix. Il ne semble donc pas nécessaire de fermer la porte et

de dire aux parents qu'ils se sont trompés là-dessus en affirmant, dans le même souffle, qu'on veut leur donner un plus grand rôle et un plus grand mot à dire dans l'ensemble du phénomène.

Relativement au mécanisme de financement des garderies privées, je suis content d'entendre que le gouvernement n'a pas l'intention d'avoir des règles différentes relativement à l'aide donnée aux familles selon le lieu de fréquentation des enfants, qu'il soit privé ou sans but lucratif. Je pense qu'il y aurait également un effort qui devrait être fait pour s'assurer que les règles de remboursement permettent aux garderies à but lucratif qui, elles, ne recevront pas de subvention de démarrage et de subvention d'équipement, de récupérer, en quelque sorte, les mises de fonds qu'elles doivent faire. Autrement, c'est permettre les garderies dites à but lucratif mais à condition qu'elles fassent cadeau d'une installation que le gouvernement lui-même estime à plusieurs milliers de dollars. Ce ne serait donc pas réaliste.

La même chose vaut pour la partie des subventions données aux enfants, qui seraient versées désormais directement à la garderie et non plus par le biais des versements effectués aux familles. Cette partie, ces $2, je crois, que le ministère a l'intention de verser directement font partie effectivement de la contribution de l'Etat aux services fournis à l'enfant et il ne devrait y avoir aucune discrimination à cet égard.

M. le Président, je pense que mon temps est expiré. Je vous remercie, mais j'inviterais le ministre à donner suite aux remarques qu'il a faites tout à l'heure, à savoir de libéraliser certaines dispositions de la loi, en particulier l'article 4 et l'article 6. Je pense que de ce côté, un certain nombre des réserves que nous formulons seraient dissipées, mais pas certainement celles qui ont trait à la formation de l'office parce que nous allons revoir là, par l'ensemble des responsabilités qu'on confie à l'office, responsabilité d'information, de formation, etc., de recherche, de statistiques, autant de postes de cadres très richement rémunérés, qui vont absorber des ressources financières considérables qu'il serait mieux de consacrer à généraliser l'accès financier aux garderies plutôt qu'à créer de nouvelles structures gouvernementales. Merci.

Le Vice-Président: Mme la députée des Iles-de-la-Madeleine.

Mme Denise LeBlanc-Bantey

Mme LeBlanc-Bantey: M. le Président, il m'est vraiment très agréable de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi no 77 concernant les services de garde à l'enfance. Je suis d'autant plus heureuse d'intervenir que le projet de loi que nous étudions sera d'une certaine façon, comme d'autres gestes que le gouvernement a posés, la consécration de l'intérêt qu'a porté le Québec à cette Année internationale de l'enfant.

D'autre part, la présentation de ce projet de loi constitue un autre pas dans la démache que nous avons amorcée pour reconnaître aux Québécoises l'égalité et l'indépendance, comme l'avait brillamment exposé le Conseil du statut de la femme. La politique des services de garde constitue, on s'en doute bien, un des jalons importants de la politique globale de la condition féminine. Depuis qu'elles existent, M. le Président, les associations féminines ont placé au plus haut point de leurs priorités l'organisation et le développement des services de garde d'enfants. Il y a en effet une corrélation évidente à faire entre le droit pour la femme de poursuivre une carrière ou de s'assumer socialement et le besoin qu'elle a, d'autre part, de partager la responsabilité exclusive qui lui a été faite jusqu'ici de la garde des enfants, car il y a une injustice profonde à considérer que les enfants doivent être le lot exclusif de femmes et que l'Etat n'a pas d'obligations à l'égard de l'assistance à cette tâche dont on doit reconnaître qu'elle est collective.

Le moins que l'on puisse dire — d'autres l'ont souligné avant moi — c'est que les besoins sont énormes. On estime qu'il y a un demi-million d'enfants de zéro à cinq ans qui ont besoin d'être gardés d'une façon ou d'une autre. Même si les besoins de garde semblent être plus pressants pour les deux parents qui travaillent à l'extérieur du foyer, il ne faut pas non plus oublier le droit qu'ont les femmes au foyer, si elles ont choisi de demeurer à la maison, de s'aérer de temps à autre de leurs responsabilités. Donc, d'une façon ou d'une autre, nous faisons face, qu'on veuille bien l'admettre ou non, à une nécessité sociale à laquelle nous n'avons pas le droit de nous dérober.

Il y a cependant, il faut bien le reconnaître, une certaine confusion qui s'était implantée dans le milieu quand on parlait des services de garde ou de services de garderie. On en est arrivé à la conclusion dans ces milieux que prôner un régime universel de garderies, c'était saupoudrer à la grandeur du Québec des services identiques qui se présentaient sous forme de garderies classiques, stéréotypées et uniformes. Depuis ces derniers mois, des nuances importantes ont été apportées à cette conception et la commission parlementaire qui s'est penchée sur cette question a fait ressortir toute l'importance d'universaliser les réseaux de garde et en même temps de les diversifier, ce qui est, il faut bien l'avouer, une condition essentielle à l'implantation de garderies dans tous les milieux du Québec. Cela, le gouvernement l'a compris et tout le monde s'entend là-dessus; on ne peut pas toujours régler de la même façon les besoins de garde dans un quartier urbain du centre-ville de Montréal que dans une région rurale, à la campagne, où les gens sont plus éloignés et où les besoins aussi souvent sont différents. (17 h 10)

Donc, cette diversité qui avait été un des éléments centraux des recommandations du Conseil du statut de la femme, je crois honnêtement, et si je ne le croyais pas, ma solidarité féminine m'empêcherait de le dire ici aujourd'hui et même ma solidarité envers le parti n'y serait pour rien, que ce

projet de loi relève adéquatement les lacunes et les difficultés que posait le problème de mettre sur pied un service de garde qui soit à l'image des besoins réels des Québécoises.

Il est donc très heureux de constater qu'en cette période où on a tendance à niveler les mesures et les programmes — étant députée d'une région éloignée, j'en sais quelque chose — que le ministre des Affaires sociales ait donné suite à ces recommandations essentielles en ce qui concerne les services de garde.

D'ailleurs, Mme Claire Bonenfant, dans une interview qu'elle donnait dans le Devoir, soulignait elle-même que, du côté social, cela va bien. Et je pense qu'elle n'est pas une femme reconnue — oui, Mme Bonenfant est la présidente du Conseil du statut de la femme — mais je ne crois pas qu 'elle soit reconnue comme une personne qui a envie de donner raison au gouvernement à n'importe quel prix. Je crois que Mme Bonenfant, depuis qu'elle occupe le poste que l'on sait, a mérité une place d'honneur quant à la liberté de parole et d'esprit qu'elle a toujours tenu à afficher depuis le moment où elle occupe le poste. Mme Bonenfant dit donc: Du côté des affaires sociales, cela va bien. Parmi les dossiers bien engagés, elle mentionne celui des garderies. Avec la création de l'Office des services de garde, on a fait, pour la première fois, un pas dans le sens de la planification.

Tout en se disant heureux de reconnaître le principe d'une subvention directe aux garderies, le conseil est toutefois d'avis que la subvention proposée de $2 par jour est trop faible. Elle continue: "II est évident que personne n'a dit que le projet de loi était parfait et qu'il répondait à l'ensemble de tous les besoins." Mais Mme Bonenfant admet elle-même que c'est un effort de planification qui est méritoire et c'est ce à quoi visait le gouvernement.

M. le Président — c'est drôle, j'aime cela, quand je dis "Mme le Président", je trouve que cela indique qu'il y a un changement de situation, alors, je m'excuse, mais il aurait été inimaginable de dire, il y a dix ans: "Mme le Président" — M. le Président...

M. Ouellette: ...

Mme LeBlanc-Bantey: M. le député de Beauce-Sud, pardon, de Beauce-Nord.

Je viens de commettre un impair encore plus grave.

M. le Président, c'est donc dans cette diversité qu'est le mérite de ce projet de loi. Quoi qu'en disent ses détracteurs, tout ce qu'on a dû entendre aujourd'hui, et malgré qu'il y ait sans doute des lacunes que nous sommes prêts à reconnaître, c'est un projet de loi qui a suffisamment de souplesse pour répondre à beaucoup de besoins ponctuels, autant aux besoins des femmes qui travaillent comme aux besoins des femmes qui sentent le besoin, de temps à autre, de se payer une demi-journée de vacances pour se relaxer, même si elles travaillent au foyer.

Bien sûr, l'Opposition officielle, dans les critiques qu'elle a apportées, a parlé de structures, d'office de garde, d'autres ont parlé de la disparition des garderies privées, etc., mais la vraie raison du refus de l'Opposition officielle de reconnaître le mérite qu'a le ministre des Affaires sociales de nous soumettre un tel projet de loi, ce refus, il est politique. L'Opposition officielle sait fort bien, elle a dû faire des sondages là-dessus, que ce n'est pas encore très populaire de parler d'offrir des services de garde ou aux femmes au travail ou aux femmes au foyer. Elle a dû l'entendre, j'allais dire — c'est mal — nos amis d'en face, des expressions du genre: Une femme qui travaille, elle a les moyens de se payer une garderie. Si elle veut travailler, qu'elle travaille, mais qu'elle se débrouille avec ses problèmes, ou d'autres types de réflexion. On n'est pas pour commencer à payer des après-midi de congé aux femmes qui sont à la maison. Elles ont si peu de chose à faire, elles peuvent se détendre.

On a entendu ces remarques, je les entends régulièrement. Ils savent bien, nos amis d'en face, que la mentalité au Québec n'est pas encore toute prête, la mentalité n'est pas encore faite de laisser à la femme du Québec le droit de s'aérer de temps à autre de son foyer, le droit de choisir autre chose, le droit de s'impliquer dans un travail, le droit de participer socialement à l'amélioration de la société.

Le député de Mégantic-Compton, à cet égard, a été peut-être le plus honnête quand il a dit: Arrêtez de bousculer toutes les traditions. Il faut nous laisser le temps de changer petit à petit. C'est un peu le sens de ce qu'il a dit. Les traditions, il y a quarante ans ou il y a trente ans ou il y a vingt ans, n'étaient pas les mêmes que celles d'aujourd'hui, les traditions aussi ont évolué. Il y a quarante ans, il y a vingt ans, les femmes pensaient que, pour être reconnues sur le plan social, il fallait d'abord et avant tout faire des enfants; c'est dans ce contexte que ma mère a eu vingt enfants. Je rends hommage à ma mère aujourd'hui d'avoir eu le courage de faire vingt enfants, sauf que moi, sa fille, je ne pense pas qu'aujourd'hui les femmes ont le goût ni même les possibilités de mettre au monde vingt enfants et de les élever dans le contexte d'aujourd'hui.

Une Voix: Etes-vous la dernière?

Mme Leblanc-Bantey: Je suis la treizième, pour ceux que ça intéresse. Les traditions ont changé. Aujoud'hui, moi, la fille de la femme qui a eu vingt enfants, je travaille. J'ai un bébé et je n'en aurai pas vingt. J'arrive même difficilement, avec seulement un enfant, à concilier le travail en politique et le travail à la maison pour prendre soin de ce même bébé. Les traditions et le mentalités veulent que, si j'arrive en retard à une réunion, je serais presque gênée de dire: Je m'excuse, j'arrive en retard parce que le bébé a la grippe. Je sais fort bien que, si je ne me le fais pas répondre, c'est souvent ce qu'on va penser: C'est ce que ça donne, des femmes en politique; ça arrive en retard parce que ça a des bébés et ça n'a pas le temps de s'en occuper; ça ne fait pas son travail comme ça devrait le faire!

Ce projet de loi, justement vise à permettre aux femmes qui veulent aller sur le marché du travail, qui veulent contribuer, pas nécessairement parce qu'elles le veulent, aux projets de la société, mais parce qu'elles n'ont pas le choix financièrement de le faire sans que ça devienne un cauchemar, sans qu'elles aient à assumer, jour après jour, deux emplois, celui du travail et celui de la maison. Même si ce projet de loi n'est pas parfait, je trouve indécent que l'Opposition officielle ne reconnaisse pas le mérite que le gouvernement a d'entreprendre cette démarche qui était nécessaire depuis très longtemps et qui a été très longtemps revendiquée.

Je le répète, l'attitude de nos amis d'en face, c'est de l'hypocrisie; ils ont peur de se faire accuser d'avoir aidé le gouvernement à dépenser de l'argent dans des garderies alors que, comme le député de Mégantic-Compton le disait, il y a des foyers, il y a ceci et cela. Promettez-nous que vous allez faire ça et on va vous faire confiance.

Il y aura toujours mille et une priorités pour un gouvernement. Si le gouvernement ne décide pas lui-même de permettre à la femme d'aujourd'hui de s'épanouir dans une société qui est aussi la sienne, de lui donner les moyens de le faire... Il y aura toujours d'autres priorités. Si le gouvernement ne décide pas que c'est une priorité, ça n'en sera jamais une. C'est évident qu'on est conscient qu'on a besoin de HLM pour les personnes âgées et qu'on a besoin d'autres choses, mais, à un moment donné, il faut faire des choix. Je crois qu'il était grand temps que le gouvernement du Québec fasse aussi des choix, non seulement pour les femmes du Québec, mais aussi pour les hommes parce que les enfants — on a tendance à l'oublier — n'appartiennent pas seulement aux femmes du Québec, ils appartiennent aussi aux hommes et à la société en général.

Je répète que l'attitude de nos amis d'en face, c'est de l'hypocrisie. Ils sont d'ailleurs très conscients, malgré les lacunes qu'il pourrait y avoir dans ce projet de loi, qu'au-delà des termes et de la réglementation, ce projet de loi est efficace. Ils savent que, d'ici peu de temps, les Québécoises sauront l'utiliser à son maximum. Ils savent aussi que ce projet de loi répond aux besoins et aux droits de la femme d'aujourd'hui de participer à la vie sociale non seulement sur une base de travail régulier, mais aussi aux activités culturelles, aux activités sociales, ce qui permet aussi à la femme qui veut vivre sa maternité de trouver peut-être des sources d'épanouissement complémentaires ailleurs. (17 h 20)

M. le Président, j'ajouterai que la libération de la femme, indépendamment du terme un peu péjoratif qu'on en a fait, pour le gouvernement du Parti québécois, ce n'est pas seulement un slogan. La vraie libération des femmes, nous voulons la rendre possible par des gestes concrets, par des gestes réels. Ce projet de loi indique donc qu'au-delà des attitudes et des comportements traditionnels, il est possible de s'adapter aux mentalités de la vie moderne.

Parmi les mentalités de la vie moderne, n'en déplaise à ceux qui pourraient y voir des menaces, il y a celle de plus en plus incrustée de la femme qui, tout en acceptant ce rôle de la maternité, veut tout aussi façonner le genre de société dans laquelle devront vivre ses enfants. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Robert-Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. My remarks will not be very long. However, I would like to make some points concerning the principles in this bill. The minister spoke this morning much for and about the principles contained in his bill 77 on day-care centers.

The principles enumerated by the minister appear, at face value, to be very lofty and noble ideals which you will permit me to enumerate. The minister said that the philosophy motivting his bill is an attempt to serve women and children of this province. Firstly, help for the women: the women at home, the women at work and the women at play. Secondly, to insure the right of children to quality service.

The other principles enumerated by the minister were, firstly, parental participation in the financing and management of the day-care centers; secondly, liberty of choice, freedom of choice. Imagine! Coming from this government, it sounds rather strange. Freedom of choice of either family day-care centers, cooperative day-care centers, day-care centers at schools, at the municipality or even short or the "haltes-garderies". Thirdly, access to service; that is, financial contributions on the part of the government to the individual or to the day-care centers themselves.

Mr President, we of the Opposition have no quarrel with these very noble principles. If this bill reflected these very noble principles, we would endorse it immediately. However, after studying this bill and listening to the minister this morning, I find that the real motives and principles this bill serves are mostly of a political and bureaucratic nature. Why do I find them political and bureaucratic? Because the direct results of the enactment of this law will result in two things: a) will result in the creation of "l'Office des services de garde à l'enfance". That is the number one principle of this bill. The second result and principle of this bill is a much publicized budget or give away of $22 500 000 to the public, which does more to serve the government or the Parti québécois than it gives tangible money in the pockets of the underprivileged of this province.

The office created by this bill — in fact, it is all of chapter 3 — will contain 17 members of which 13 and the president will be named by the government. The four others will be public servants named by the ministère des Affaires sociales, the ministère de l'Education, the

ministère des Affaires municipales and the ministère de la Condition féminine. The president and his staff will be on a permanent basis and the members of the office will be paid a daily rate plus expenses. The responsibilities of this office, that is regulation, inspection, verification are all spelled out in this bill and those responsibilities are so vast that we can be assured that an inordinate percentage of the budget allocated to this worthy cause will be sacrificed to bureaucracie.

Mr President, the structure itself will consume an unnecessary large amount of the budget which should be paid of allocated to the public and the public that is justifiably in need of this aid. This government has at the moment and in the past much too great a tendency to capitulate to the bureaucrats instead of finding other means within society in general and within its institutions to regulate, control, verify or inspect services offered to the public. Why is it always necessary to create more and more bureaucratic machinery, entirely unnecessary that gobble so much of the tax dollar? Why is it always necessary to have a job creation program tacked on to every bill that comes before this Assembly, job creation in the public sector?

But back to the principles. Mr President, I would like to raise two principles, not principles in the bill itself but principles that shine by their very absence. Firstly, why has private enterprise been completely eradicated from any place in this bill? Why has there been such a presumption of poor service on the part of private enterprise while it was private enterprise itself that was the founder of day-care centers in this province. They are the ones that set the tone and the regulations that are being imitated today. Secondly, the other principle that shines by its very absence in this bill; whatever happened to individual responsibility on the part of those offering services to the public or providing services to the public such as day-care centers to the public and whatever happened to parental responsibility on he part of those seeking services? The policy of this governement has been constant in this regard, that is a presumption that private enterprise has no morals and that individuals are unable to exercice their rights and responsibilities. The principle of "la collectivité" that knows what is best for the individual is the motto of this government.

The public, I think, is becoming more and more aware of the great fallacy of this motto. We have just been through strikes in the public sector where all rights have been given to the "collectivité" but none of the responsibilities... When we put our faith in individual rights, we know that individuals can be made responsible. Strikes in the public sector, no matter what laws were passed by this government recently or by the previous government, regarding censure of those groups of syndicated workers who have broken the law, they were never held responsible, because it is impossible to hold "la collectivité" responsible. (17 h 30)

In the case of day-care centers and in the case of any kind of service provided to the public, private entreprise and profit motivation add some competition. In that way, private day-care centers, even private schools provide better service to the public in the long-run, more efficient service and better quality.

As in the case of our professions, Mr President, which have been regulated, inspected and policed by the professionnal associations themselves without cost to the public, they have been carrying out this responsibility since their very formation, over one hundred years ago in some case. Why is it not possible to institute an association of day-care centers for those operating in that field, as in the case of any profession? This association would, at their own cost, carry out the very same duties of regulation, inspection and policing, if necessary, of day-care centers, including the private ones which, I repeat, Mr President, will add some competition to the field, resulting in better and more efficient service to the public.

For these reasons, Mr President, I will have to agree with the deputy from L'Acadie that the false principle of this bill is not worthy of our support. The false principle of this bill is one that creates bureaucracy at the cost of the taxpayer. Thank you very much.

Le Vice-Président: M. le député de Sherbrooke.

M. Gédard Gosselin

M. Gosselin: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi no 57 pour dire jusqu'à quel point...

Une Voix: 77.

M. Gosselin: 77, je m'excuse, on discutait hier du projet de loi no 57. Je voudrais dire comment la démarche que le gouvernement entreprend actuellement est importante. C'est la reconnaissance d'un besoin de plus en plus pressant au sein de notre collectivité dans l'évolution de notre société, au cours des dernières décennies notamment, du fait que les conditions ont changé, alors qu'il y a quelques années, 80% des femmes étaient de dociles mères au foyer. On avait des familles nombreuses au Québec. Mme LeBlanc-Bantey a parlé d'une famille de plus de vingt enfants. Je pense que c'est aussi un élément de fierté que de dire que les familles québécoises d'antan ont formé la génération d'aujourd'hui. Ce n'est pas une honte de dire que les temps ont changé et que les nouvelles générations vivent des problèmes différents. Par le fait que 40% des femmes sont maintenant sur le marché du travail, cela nous oblige à la reconnaissance d'un facteur de réalité concret qui fait que les problèmes de garde se vivent tout autrement, méritent d'être reconnus et de faire l'objet de politiques gouvernementales cohérentes.

II était plus que temps qu'on s'attache à reconnaître et qu'on identifie clairement dans une loi les divers services de garde qui font partie des besoins que les citoyens vivent depuis quelques années et qui méritent d'être promus et financés. Depuis le plan Bacon, les politiques étaient tellement déficientes qu'il fallait agir. Nous avons agi. En dedans de quelques décennies se sont créées au Québec des garderies, d'abord des garderies privées qui ont une tradition beaucoup plus ancienne, mais depuis une décennie, particulièrement, des groupes volontaires, souvent, ont fondé dans les quartiers, dans les villages, dans les villes, des garderies financées par les ressources d'occasion qui se présentaient et, depuis quelques années à peine, on a connu une expansion très considérable des services de garde notamment par les garderies à but non lucratif. C'est dire tout le besoin qui est là et toute la pression qui existe pour que ces services soient encore étendus et reconnus par l'Etat.

C'est dans cette démarche que le gouvernement du Québec, par le rapport du comité interministériel sur les services de garde en octobre 1978, rendait public tout un ensemble de perspectives et ouvrait une discussion franche dans la population du Québec quant à l'instauration d'une véritable politique de garde. Pour la première fois, on reconnaissait vraiment qu'il y avait une variété de besoins selon les régions, selon les situations des femmes, des mères de famille, et qu'il fallait reconnaître non pas un modèle, mais plusieurs. C'est ainsi que le rapport du comité interministériel parlait abondamment de la nécessité des haltes-garderies et de la nécessité aussi de reconnaître, particulièrement dans des régions désavantagées, les services de garde en milieu familial.

Or, ce que le projet de loi actuel vient faire, c'est identifier vraiment les divers types de services de garde déjà utilisés par la population et que, comme gouvernement responsable, nous décidons de promouvoir et d'harmoniser dans une véritable politique des services de garde. Cette loi était attendue et elle correspond à des besoins maintes fois exprimés. Qu'est-ce que le gouvernement reconnaît maintenant par la loi 77? Il reconnaît la nécessité d'une loi-cadre créant un office et reconnaissant les divers types de services devant exister, les garderies à but non lucratif, les haltes-garderies, les jardins d'enfants, les services de garde en milieu familial qui correspondent à la panoplie des utilisations et des services déjà démarrés dans de nombreux endroits. Le gouvernement affirme clairement aussi la reconnaissance des garderies privées.

Il n'est pas inutile de rappeler encore une fois que depuis 1974, le développement des garderies privées était, à toutes fins utiles, figé au Québec. Je considère que c'est là un des progrès importants du projet de loi 77 qui n'a pas été sans controverses et sans discussions viriles que la reconnaissance pleine et entière du développement des garderies privées. Toutes ces formes de garde reconnues dans la loi devront correspondre à des critères de qualité et devront associer les parents. (17 h 40)

Ce que le projet de loi confirme aussi, c'est la reconnaissance des parents comme premiers agents d'éducation, comme premiers intervenants quant à l'organisation de ces services, quant à la supervision et quant au contrôle. Cela doit être marqué par rapport aux diverses formules qui sont postulées.

Je voudrais reprendre un autre élément du discours du ministre, quand il a parlé, au niveau des principes, du droit de la femme au travail — on sait que 40% des femmes québécoises qui ont un enfant de moins de cinq ans actuellement sont sur le marché du travail — mais aussi du droit aux loisirs. Je pense que ce sont là les deux principes qui doivent nous inspirer dans l'examen de ce projet de loi et je voudrais revenir un peu sur ces deux droits, notamment sur le droit aux loisirs. Le fait que des femmes québécoises décident d'aller sur le marché du travail, de mener une vie professionnelle, d'avoir des enfants et d'être aidées, pour ce faire, au niveau des facilités normales qu'une société civilisée doit offrir, c'est un fait de civilisation. Cela fait partie des progrès d'une société évoluée. L'Etat a encore bien des devoirs à remplir pour permettre aux femmes ce plein accès au marché du travail.

L'affirmation de ce droit, par ailleurs, ne devrait pas nous aveugler; il nous faut reconnaître que, toujours et de tout temps, les femmes sont aussi des mères et souvent des éducatrices au foyer, n'ayant pas accès au marché du travail ou préférant dans le temps qui correspond à l'éducation des enfants jusqu'à l'âge de dix, douze ans à peu près, être des mères à temps plein, sept jours par semaine. Cela correspond à la réalité de la majorité des Québécoises actuellement. Je pense qu'un projet de loi comme celui-ci sur les services de garde doit considérer ce groupe de femmes québécoises. La panoplie des services offerts par la loi aux haltes-garderies, aux garderies de plein jour, aux jardins d'enfants et aux services de garde en milieu familial fournit aux femmes qui sont au travail des services de garde de qualité et en quantité, mais aussi on reconnaît nouvellement le droit des mères de famille, des éducatrices au foyer d'avoir accès aux mêmes types de services.

Je voudrais vous citer ici, M. le Président, une lettre que j'ai reçue en fin de semaine d'un groupe de femmes de Sherbrooke parce que j'ai eu l'occasion de distribuer en quantité, tant au regroupement des garderies privées qu'au regroupement des garderies sans but lucratif, qu'à quelques garderies d'entraide qui fonctionnent déjà à Sherbrooke le projet de loi no 77 pour le soumettre à leur examen et leur demander de faire valoir leur point de vue, leurs premières réactions sur ce projet de loi déposé jeudi dernier.

J'ai ici une lettre de témoignage quant à ce que j'affirmais tout à l'heure, le droit aux loisirs des femmes éducatrices au foyer, que je voudrais vous lire. Elle m'est adressée. "M. le député, nous aimerions que vous transmettiez au ministre des Affaires sociales, au ministre de l'Education et au ministre d'Etat à la Condition féminine ce qui suit: Nous avons été heureuses cette semaine d'apprendre le dépôt de la Loi sur les garderies. Nous vou-

Ions attirer votre attention sur une contradiction. Comment la femme à la maison peut-elle se prévaloir du droit aux études, aux loisirs, à la participation, si elle ne peut compter sur un service de garde adapté à ses heures irrégulières et accessible à son budget? Chez nous, à Sherbrooke, les femmes croient à leur mini-halte-garderie. C'est une garderie non officielle, qui existe depuis six ans, qui a été fondée dans le quartier par l'entraide que les mères, que les femmes se sont donnée pour faire l'alternance des heures de garde tous les après-midi de la semaine et qui permettait de libérer l'une et l'autre au moins une ou deux après-midi par semaine. C'est parti sans financement aucun du gouvernement ou de personne d'autre. Il y a six ans, nous avions fait des démarches afin de nous officialiser, mais nous avions trouvé les règlements et les normes trop bureaucratiques et, effectivement, les modèles de financement qui étaient apportés à ce moment n'étaient pas dans le sens de la reconnaissance de ce type de haltes-garderies, qui sont, pour les éducatrices au foyer, dans les quartiers populaires. "Nous espérons que nous rencontrerons moins de bureaucratie dans l'application de cette loi. Notre halte-garderie est gérée par nous, les parents usagers, ce qui nous permet un fonctionnement simple et efficace. Nous ne sommes des concurrents d'aucune autre garderie privée ou sans but lucratif qui existe pour des femmes au travail et nous ne répondons pas aux mêmes besoins qu'elles. Notre halte-garderie a cependant permis à des femmes au foyer de suivre des cours, de s'impliquer dans la vie de leur quartier, de participer à un loisir, d'aller sans inquiétude à un rendez-vous, de prendre quelques heures pour elles-mêmes afin de s'aérer, tout cela pour se sentir bien dans leur peau et pour avoir le droit de participer socialement, comme toutes les autres femmes, et de pouvoir se libérer au moins quelques heures dans les sept jours à temps plein qui correspondent aux tâches des ménagères au foyer. "Il est important que l'Etat s'occupe de ces femmes au foyer qu'on oublie trop facilement. Nous pensons qu'une journée de garde gratuite par semaine serait, de la part du gouvernement, un début pour une meilleure santé mentale de toutes les femmes québécoises. Nous croyons que nous avons une expérience pertinente et nous voulons être consultées sur les types de mini-haltes-garderies comme la nôtre qui pourraient se multiplier et répondre ainsi aux besoins d'un grand nombre de mères au foyer. "Nous n'avons pas déposé de mémoire lors de l'avant-projet de loi, mais nous aimerions être consultées dans les étapes futures d'élaboration des formules de financement qui pourraient être présentées, dans l'espoir que le pas en avant de cette loi sera aussi un pas franchi dans le sens des garanties de développement pour les mini-garderies." C'est signé par Ginette Noël-Duhaime, Marie-Christine Champoux et Cécile Vachon. Elles sont du comité responsable de la halte-garderie les Mille-Pattes.

Je pense que ce témoignage méritait d'être évoqué parce que plusieurs Québécois ont l'impression que le gouvernement n'a pas assez — pas seulement le nôtre, les autres gouvernements qui nous ont précédés aussi — porté attention aux ménagères, aux femmes au foyer, et c'est vrai. C'est vrai, c'est le groupe de citoyens abandonnés au Québec. Je voudrais que le projet de loi no 77 consacre la reconnaissance des droits de ces femmes-là et de toutes les femmes, quant au droit au travail et au droit aux loisirs. Cela m'amène à certaines recommandations pour l'avenir quant au rôle que l'Office des services de garde aura à remplir.

L'Office des services de garde devrait se préoccuper, à un même degré et en y mettant même une certaine priorité, d'atteindre, de rejoindre et d'offrir des services aux femmes à la maison pour les libérer, tout autant que les femmes au travail. Cela peut vouloir dire mettre sur pied dans les quartiers, dans les grands centres urbains, des mini-haltes-garderies comme celle qui existe à Sherbrooke et dont je citais le témoignage tout à l'heure, dans les villages, le samedi après-midi, pendant qu'on fait du magasinage ou les jours de semaine. Je pense que cet objectif est vraiment une priorité.

Evidemment, le projet de loi ne parle pas de cela, le projet de loi étale les diverses formules que comportera le développement des services de garde. Je dis, comme député ministériel soucieux que notre politique rejoigne toutes les femmes, que c'est un objectif qui est à réaliser et dont devrait se préoccuper l'office dès le départ. (17 h 50)

On a aussi parlé de bureaucratie. Je ne suis pas très ferré en anglais, mais j'ai quand même remarqué certaines expressions du député de Robert Baldwin tout à l'heure qui parlait de "bureaucracy", de bureaucratie. Nous sommes tous, tant que nous sommes, du gouvernement et des oppositions contre la bureaucratie excessive. Moi, le premier. Je ne vous cacherai pas que le premier examen du projet de loi no 77 m'a fait me poser beaucoup de questions. Oui! Il a donné lieu à de bons échanges entre...

Une Voix: II a eu de bonnes réponses.

M. Gosselin: ... les députés ministériels et il donnera lieu à de bons échanges en commission parlementaire tout à l'heure. Je trouve personnellement que — et je pense que ce point de vue est partagé par la majorité des élus — la bureaucratie se fait de plus en plus envahissante dans le quotidien, dans la vie de tout le monde, quand on regarde la réglementation. Au nom du progrès, on en arrive, à un moment donné, à des régimes enrégimentés, réglés dans tous les secteurs.

Je constate que les Oppositions m'applaudissent; il y a aussi des applaudissements du côté ministériel. Nous sommes tous d'accord là-dessus, il ne doit pas y avoir de grande bureaucratie envahissante qui s'étend indéfiniment et sans cran

d'arrêt dans tous les domaines. A cet égard, les réserves que je pouvais avoir quant à l'expression de la volonté gouvernementale d'agir dans le domaine des services de garde étaient: Qu'est-ce qu'on va mettre en place? Est-ce que ce sera une grosse bureaucratie dont on n'aura pas le contrôle?

Je n'ai pas toutes les réponses; je me pose encore des questions. Je me dis: II va falloir y travailler pour pas mal plus loin que seulement les services de garde et l'office qu'on a mis au monde; il va falloir y travailler par rapport à l'ensemble des sociétés d'Etat et à l'ensemble des régies et des offices qu'on a mis au monde et qu'on met au monde.

Cela tient à la question de tout le contrôle qu'on a sur la bureaucratie. Ce que je veux juste dire là-dessus, c'est que je recommande, en tout cas que je veux exprimer comme député que, dans le domaine des services à l'enfance, on n'aille pas trop loin, de grâce, dans les réglementations de tous ordres. Je lisais le projet de loi et j'aurai des points à soulever à l'intérieur de la discussion article par article. Je pense que dans le domaine des services de garde, il faut être souple. Je pense que les parents sont les meilleurs garants à travers l'implication qui leur est assurée par le projet de loi, du contrôle effectif de la qualité des soins. Il ne faut pas trop entrer dans tous les détails, il ne faut pas exiger trop par rapport à la délivrance de quelque permis que ce soit pour la halte-garderie de chez nous qui va tenter de s'officialiser demain matin et qui, pour les quelques aménagements qu'il y aura à faire dans les locaux, défoncer un mur ou peinturer, devra obtenir un permis de l'office. Je trouverais cela exagéré.

Je trouve que ce projet de loi va être un test, à savoir de réussir vraiment à avoir une loi bien dosée, qui établit une structure utile et importante et qui, à la fois, respecte l'humain et ne réglemente pas tout ou, en tout cas, accorde une grande marge de manoeuvre aux premiers usagers, aux premiers responsables qui sont les parents.

J'aurais eu beaucoup de choses à dire, évidemment, mais je veux encore une fois rappeler l'importance de ce projet de loi, insister sur le fait qu'un des premiers mandats que l'office devrait avoir à coeur de réaliser c'est d'atteindre toutes les femmes québécoises qui ont des enfants de moins de cinq ans et de consacrer une partie importante de ses priorités aux femmes au foyer.

Je voudrais ajouter un autre élément. Actuellement, il y a une très grande disproportion de ressources dans l'affectation des sommes pour les services de garde, selon les régions. Montréal, par exemple, avec 56% de toute la population du Québec, occupe 79% des places de garde financées au Québec. Cela veut dire que dans les régions comme la Gaspésie, l'Abitibi, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, la Beauce, les ressources sont loin d'être équivalentes aux besoins. Je pense qu'un autre des mandats de l'office devrait être d'établir une forme de plan de développement des services de garde dans toutes les régions du Québec correspondant aux populations qui sont là, de façon à permettre une équité plus véritable dans le développement des services de garde pour toute la population du Québec. Je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Compte tenu de l'heure, est-ce qu'on pourrait demander l'ajournement du débat?

Mme Lavoie-Roux: La suspension.

Le Vice-Président: La suspension du débat. Y a-t-il consentement, vu l'heure, pour que les travaux de l'Assemblée soient suspendus jusqu'à 20 heures? Je vous donnerai la parole à 20 heures, M. le député de Beauce-Sud. Les travaux de l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 56

Reprise de la séance à 20 h 3

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Veuillez vous asseoir.

Je pense que tout le monde aura compris.

M. le député de Beauce-Sud, à vous la parole.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord faire quelques remarques brèves sur ce sujet qui m'intéresse beaucoup. Je voudrais, avant de l'oublier, en profiter pour féliciter et remercier, au nom de la population, les personnes, organismes et fédérations qui oeuvrent dans le domaine des garderies tant dans mon comté de Beauce-Sud qu'au niveau de la province de Québec. Je crois que ces gens rendent un important service à la collectivité et, dans bien des cas, ils ont fait oeuvre de pionniers. Ils se sont débrouillés pour établir des garderies, pour rendre des services à la population avec des moyens quelquefois très modestes, mais qui rendent des services non pas modestes, mais de très grands services.

M. le Président, à la lecture du projet de loi, il y a une chose qui m'a un peu étonné, mais je crois savoir, puisque certaines rumeurs circulent, qu'il pourrait y avoir des modifications. Alors, je ne vais pas faire une étude très profonde. Je voudrais seulement signaler le fait, d'après les articles 4, 5 et 6, qu'un permis ne pourrait pas être émis à un organisme à but lucratif ou à une personne pour son compte personnel. En effet à l'article 4, on dit ceci: "Un permis de service de garde en garderie ne peut être délivré qu'à une association coopérative, une corporation sans but lucratif — je saute une partie de l'article — une corporation municipale ou à une commission scolaire". Maintenant, à

l'article 6, au deuxième alinéa, on laisse un peu la porte ouverte à une corporation à but lucratif. Ceci dépendrait du ministre: Si le ministre est d'avis que l'intérêt public l'exige.

Je me demande pourquoi tant restreindre l'octroi de permis aux groupes à but lucratif. D'abord, la preuve est faite que, pour que le groupe à but lucratif se maintienne, il faut qu'il donne un bon service. Ensuite, il coûte beaucoup moins cher à l'Etat. Tout le monde sait cela. Ensuite, le service sera sûrement plus efficace.

Je ne crois pas ici, dans ce domaine, que le fait de favoriser le secteur public — appelons cela comme ça — quoique les corporations à but non lucratif ne fassent pas légalement partie du secteur public mais, à tout événement, le fait de soustraire les permis au secteur privé, à des corporations à but lucratif, je crois que c'est un acharnement inutile de l'Etat contre des personnes qui peuvent donner un excellent service en ce domaine qui a l'avantage de coûter beaucoup moins cher à l'Etat.

D'après les statistiques — je n'ai pas les chiffres exacts — je crois que depuis 1974, le nombre de permis détenus par des organismes a but lucratif a baissé d'au-delà de cent. Je n'ai pas le nombre précis mais je crois savoir cela. Evidemment, c'est un choix de l'Etat; c'est un choix du gouvernement. Je ne dis pas que le gouvernement n'a pas le droit de faire ces choix; c'est bien sûr, le gouvernement a le droit, mais il me semble que c'est un acharnement inutile à rencontre de l'entreprise privée. Quand j'ai vu qu'on créait encore un office... Vous savez que je suis un peu allergique à la création des offices, à la création des régies.

Cette semaine, je pense qu'on a eu quatre ou cinq projets de loi dans lesquels on créait une régie. Cinq ou six? On a eu celui d'aujourd'hui, le projet de loi 77, le projet de loi 75 sur les grains, le projet de loi 78, Loi sur la sécurité dans les sports, Loi sur la représentation électorale quoiqu'il y avait déjà une commission qui n'avait pas tout à fait les mêmes pouvoirs et qui n'était pas permanente. Je trouve déplorable de gonfler ainsi la bureaucratie. Je trouve que ce n'est pas dans l'intérêt du public. Le gouvernement a choisi de privilégier ce système au détriment du secteur privé. On ne me fera pas croire que c'est parce que cela coûte moins cher. On ne me fera pas croire que c'est parce que cela va donner un meilleur service. Mais, si on y songe pendant quelques instants, on veut développer les petites et les moyennes entreprises.

Je connais les propriétaires de petites corporations qui exploitent des garderies à but lucratif. Ces gens, d'abord, donnent un très bon service. Ensuite, le salaire, disons, qui leur reste à la fin de l'année, une fois que les impôts sont payés, est, dans bien des cas, inférieur à celui qu'ils recevraient s'ils étaient salariés d'une garderie comme celles que l'on veut instaurer. Si on veut en avoir, si on veut que notre réseau public vive, il ne faut pas oublier que cela nous prend des contribuables et cela ne nous prend pas seulement des individus aux crochets de la société, M. le Président. Quand je vois cette floraison de régies, de commissions, automatiquement je me sens allergique à cela. (20 h 10)

On parle beaucoup du miracle beauceron, M. le Président. On en a parlé pendant la campagne électorale. Le candidat du Parti québécois dans Prévost disait qu'il voulait faire de Prévost la Beauce des Laurentides. Le député de Hull, ministre des Travaux publics, dit qu'elle veut faire de l'Outaouais une nouvelle Beauce. M. le Président, je n'ai rien contre. Au contraire, cela m'honore grandement, mais si on veut s'arroger le dynamisme des Beaucerons, je vous dirai une chose, M. le Président: Les Beaucerons, s'ils ont eu ce dynamisme, c'est parce qu'ils n'avaient pas de régies et de commissions et de tout ce que vous voudrez, de patentes semblables qui amènent seulement de la tracasserie et des paperasses, des formules à remplir. Vous savez, dans toutes les petites et moyennes entreprises, c'est rendu, M. le Président, que cela prend une employée — normalement on engage une secrétaire — seulement pour remplir les formules du gouvernement.

Evidemment, pas vous, M. le Président, mais le gouvernement est bien content qu'ainsi se créent des emplois. Je comprend. Je crois que ce sont des tracasseries inutiles dans bien des cas. Il pourrait y avoir des contrôles d'autres manières qui soulageraient et qui n'enlèveraient pas aux promoteurs l'ambition qu'ils ont de créer de nouvelles entreprises.

Je ne veux pas trop discourir là-dessus, mais je veux vous dire qu'à mon sens, la constitution d'un office dans le cas présent ne constitue pas une réponse aux besoins des promoteurs et des exploitants de garderies. Ils ont besoin de matériel et de personnel, de meilleurs locaux, de meilleurs équipements. On constate que dans les garderies les gens sont peu payés, que ce soit à but lucratif ou à but non lucratif. Pour la durée des heures de travail qu'ils sont obligés de mettre là-dedans, les gens qui y travaillent sont peu payés. Cela amène une instabilité.

Au lieu d'investir de l'argent dans la création d'un office, on devrait prendre les mêmes sommes et les investir dans de meilleurs services aux usagers des garderies.

En conclusion, je ne crois pas, à mon humble avis, que, dans le moment, la création d'un office soit justifié. Je dis cependant oui avec plaisir à l'aide et au développement des garderies existantes et à la création de nouvelles gaderies. J'espère, comme la rumeur en a circulé, que le ministre voudra bien changer les articles 4, 6 et 95 afin que cette loi permette d'avoir des corporations à but lucratif qui puissent exploiter des garderies. Je vous dis que, dans mon comté, ce serait un gand besoin. J'espère que tout ceci se fera dans le but d'adopter une politique familiale plus globale à l'intérieur de notre société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Merci. M. le député de Sauvé et ministre de l'Education.

M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): M. le Président, de façon très succincte, je voudrais dire tout l'intérêt que présente ce projet de loi pour l'éducation, et en particulier pour les commissions scolaires, lesquelles se voient habilitées, à certaines conditions, à ouvrir des garderies pour leur personnel et à organiser également ce qu'on appelle la garde des enfants en milieu scolaire.

Mon collègue, le ministre des Affaires sociales, ayant expliqué par le menu le contenu de ce projet de loi, je puis me permettre de n'insister que sur les aspects qui intéressent les commissions scolaires. Le projet de loi permet enfin de répondre à des besoins très réels et croissants dans notre milieu. De plus en plus — on l'a rappelé à maintes reprises dans cette Assemblée — les conjoints travaillent. Je pourrais, à cet égard, souligner le fait que, dans le monde de l'enseignement, par exemple, très nombreux sont les enseignants dont le conjoint est lui aussi dans l'enseignement. De fait, un sondage récent a permis d'établir que la moitié des enseignants ont un conjoint qui enseigne également. C'est dire que nous sommes témoins d'une évolution sociale extrêmement rapide et, que celle-ci plaise ou non, je pense que nous devons répondre à ce nouveau besoin social.

Deux sortes de dispositions intéressent les commissions scolaires dans le projet de loi. En premier lieu, il y a la garde en milieu scolaire. Cette garde est organisée par les commissions scolaires dans chaque école et elle est destinée aux élèves, à l'heure du midi par exemple, ou encore le soir, après la classe, quand les enfants ne peuvent rentrer chez eux, les parents étant encore au travail. Cela existe déjà, on le sait, dans certains secteurs de l'enseignement et notamment dans quelques écoles. Mais il était temps que les commissions scolaires organisent ce type de garde de façon beaucoup plus répandue que ce n'est le cas à l'heure actuelle.

De même, il convenait de permettre aux commissions scolaires d'organiser des garderies proprement dites à l'intention des enfants de leur personnel et compléter les groupes en accueillant les enfants du voisinage. Toutefois, ces garderies sont avant tout destinées aux enfants du personnel de l'école, qu'il s'agisse du personnel enseignant, du personnel de soutien ou des professionnels non enseignants. Désirant répondre à ce besoin, le ministère des Affaires sociales avait pensé faire une obligation aux commissions scolaires d'organiser cette garde d'âge scolaire ainsi que les garderies dont j'ai parlé il y a un instant.

Mais les commissions scolaires, si elles sont favorables à leur propre intervention dans ce domaine, n'entendaient pas être forcées d'organiser ces garderies. Elles sont venues le dire en commission parlementaire et le gouvernement, sensible à leurs arguments et notamment à ceux du Conseil scolaire de l'île de Montréal, a décidé d'en rendre la création facultative.

Les commissions scolaires, je crois, ont ac- cueilli avec grande satisfaction la décision du gouvernement et elles vont pouvoir se prévaloir de cette nouvelle possibilité, d'autant plus qu'elles-mêmes et les parents sont admissibles à toutes les subventions que mon collègue, le ministre des Affaires sociales, a mentionnées dans son exposé de ce matin. Pour ce qui est de la garde en milieu scolaire, vous savez que, cette année, une somme de $700 000 a été distribuée dans les écoles de toutes les régions et que, l'an prochain, on a prévu un montant de $1 700 000 pour aider à équiper les garderies, les commissions scolaires.

Pour ce qui est de ces garderies, j'entends les garderies en milieu scolaire, s'appliquera le même régime que pour les autres garderies, c'est-à-dire que les parents seront admissibles aux subventions, selon leurs moyens, comme les autres. De plus, le ministère des Affaires sociales a prévu des subventions de démarrage qui sont d'un maximum de $30 000, de même que des subventions à l'équipement.

Je voudrais inviter très vivement les commissions scolaires à se prévaloir des possibilités qui leur sont offertes par ce projet de loi. C'est un régime fort avantageux et, je désire inviter également les parents, qui auront un rôle à jouer dans ces garderies comme dans toutes les autres et les comités d'école à s'intéresser de très près à l'organisation de ces garderies et de la garde en milieu scolaire. Je vous remercie, M. le Président. (20 h 20)

M. Le Moignan: M. le Président...

Le Vice-Président: M. le député de Gaspé.

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: Après la très brillante, très éloquente et non moins pertinente intervention de mon brillant collègue de Mégantic-Compton...

Des Voix: Wow!

M. Le Moignan: ... je devrais, M. Le Moignan, me terrer dans ma tanière et aller poursuivre ma méditation, mais j'éprouve tout de même certains petits scrupules et très brièvement, je voudrais aborder quelques points qui n'ont peut-être pas été soulignés aujourd'hui au cours des différentes interventions. J'ai bien écouté le ministre ce matin et il nous a dit qu'il était prêt à ouvrir — même si un certain journal parle d'entrebâillement ou d'entrouvrir une porte — et qu'il était prêt aussi à modifier l'article 6, si ma mémoire est bonne. Je veux bien faire confiance aux intentions du ministre et je voudrais que cela se traduise en gestes concrets et que dans les amendements qu'il va apporter, qu'il vienne répondre à nos différentes interrogations. Le ministre a mentionné une certaine politique du type Steinberg, MacDonald, je crois, quand il a mentionné les garderies à but lucratif. D'un certain côté, le ministre semble ouvrir la porte aux garderies à but lucratif et d'un autre côté, on a l'impression qu'il semble vouloir en empêcher la prolifération.

Depuis 1974, il n'y a pas tellement eu de prolifération dans le domaine parce qu'il n'y a pas eu un seul nouveau permis qui fut donné depuis cette époque. En 1974, je crois qu'il y avait 225 garderies privées. Aujourd'hui, nous n'en comptons que 125. J'aurai l'occasion d'y revenir un peu plus loin quand j'aborderai certaines statistiques qui ont été déposées aujourd'hui même. Je ne comprends pas du tout les inquiétudes du ministre quand il fait des comparaisons avec les garderies du Québec et celles de l'Ontario et des Etats-Unis. Il y a peut-être eu des abus dans ce système, mais je ne crois pas qu'au Québec, on ait dépassé les bornes permises.

Je crois qu'au Québec on a très bien respecté les normes et, s'il y a eu des expériences malheureuses ailleurs, ceci ne doit pas constituer un argument de poids pour empêcher l'ouverture de nouvelles garderies, ici dans la province de Québec. Les garderies actuelles sont pleines à déborder, nos garderies débordent, en somme, regorgent de marmaille. Il y a tellement de demandes que dans les coins surtout les plus éloignés, il y a un besoin urgent d'ouvrir des garderies; dans la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, il y en a actuellement très peu.

Le ministre nous a donné des chiffres. J'ai présentement les documents officiels du ministère. Je ne sais pas du tout — je n'ai pas noté les chiffres du ministre ce matin — si cela concorde, mais après compilation, il y aurait actuellement au Québec 433 garderies qui sont exploitées avec des permis. De ce nombre, il y en aurait 308 sans but lucratif, des garderies communautaires, comme on peut les appeler également. Il y a 125 garderies qui sont à but lucratif.

Si on regarde en termes de pourcentage, il y a 29% de garderies privées, c'est-à-dire de garderies à but lucratif. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles, au conseil d'administration, il semblerait tout à fait normal qu'il ait au moins un représentant qui irait défendre leurs droits à l'office puisque, pour 29% de la population, il me semble qu'il n'y ait personne de prévu, alors que, pour les autres garderies populaires, il y aurait au moins un ou deux représentants. Or cette dernière catégorie de garderies n'ont qu'environ 25% ou 26% de la clientèle.

M. le Président, c'est en regardant ces chiffres... On connaît le rôle joué par les garderies privées, celles qui donnent un excellent service. On sait que présentement les foyers de vieillards, les hôpitaux, les garderies, tout ce qui est privé est une économie d'argent pour l'Etat. Le ministre est très conscient lui-même de cela. J'aimerais que le ministre, tout à l'heure, dans sa réplique, nous clarifie ce qu'il entend par des garderies à but lucratif et des garderies à but non lucratif. Il me semble que cela n'est pas tellement clair parce qu'une garderie privée n'est pas nécessairement un organisme où on peut accumuler des millions de dollars. On sait ce que cela peut coûter aujourd'hui, quand on connaît les difficultés qu'elles ont à surmonter. Je crois que dans les amendements apportés au projet de loi, étant donné que les parents ont le droit de choisir, qu'une famille a le droit de choisir le service de garde qui lui convient et que, d'un autre côté, un enfant a le droit de recevoir aussi les services dans la garderie que les parents ont choisie pour lui... A ce moment, si on considère ces choses-là, on s'aperçoit, en fin de compte, que, sur 433 garderies, il y en a tout de même 125 à but lucratif qui représentent presque 30% de la clientèle. De ce nombre, 51 garderies sont membres de l'Association des propriétaires de garderie du Québec.

On sait qu'il y a 18 700 places dans les garderies au Québec actuellement et que, dans les garderies privées, il y a de la place pour 4625 enfants. Autrement dit, en chiffres plus précis, c'est environ 27% de la clientèle qui vont dans les garderies privées.

Je demanderais au ministre, quand on discutera des articles 4 ou 5... Quand on parle d'associations coopératives, de corporations sans but lucratif, de corporations municipales, qu'on ajoute et qu'on insère aussi, à ce moment-là, les corporations à but lucratif, les corporations privées.

M. le Président, c'étaient les quelques remarques que je voulais ajouter à la suite de celles du député de Mégantic-Compton. Je vous remercie.

Le Président: Merci, M. le député de Gaspé. M. le ministre des Affaires sociales.

M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, je veux d'abord remercier tous mes collègues de cette Assemblée qui sont intervenus dans ce débat, particulièrement mon collègue de l'Education et aussi les collègues du parti ministériel qui ont proposé de façon très constructive certains ajustements, certains amendements au projet de loi. Quant aux collègues des partis de l'Opposition, je note surtout que le député de Mégantic-Compton s'est trouvé embarrassé parce que son discours, de toute évidence, avait été préparé il y a quelque temps; il a eu du mal à tenir compte de mon propre discours cet après-midi qui apportait des amendements au projet de loi, plus particulièrement un amendement. Je vais tout de suite m'attaquer à ce grand malentendu qui a été maintenu en bonne partie par mon ami, le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: II n'y a pas de questions de privilège ou de règlement à ce moment-ci. Une directive pour commencer.

M. Lazure: II n'est pas mon ami?

Le Président: Je note avec satisfaction, M. le député de Mégantic-Compton, que vous êtes sûr et certain qu'il n'y a pas matière à question de privilège, ni de règlement et que vous demandez une directive. Puis-je vous suggérer d'attendre la fin de l'intervention de M. le ministre des Affaires sociales. Après quoi, je serai disposé à répondre à votre demande de directive. (20 h 30)

M. Lazure: M. le Président, de façon plus sérieuse, si vous voulez, l'article 6, dans le projet de loi tel qu'il a été déposé — je le répète une troisième fois — sera aboli lorsque nous étudierons ce projet de loi article par article, de façon que les permis qui seront émis aux garderies à but lucratif se joignent à la série des organismes qui sont contenus à l'article 4 du projet de loi. A l'article 4 du projet de loi, on énumère une série d'organismes qui peuvent recevoir un permis de garderie. Nous ajouterons — ce sera le cinquième type d'organismes, à la page 5 du projet de loi — personnes ou organismes à but lucratif, que ce soit pour la garderie à proprement parler ou encore pour le jardin d'enfants.

Je répète cependant que, dans les règlements, nous prévoirons une disposition pour empêcher que des propriétaires de garderies privées à but lucratif se développent au Québec des chaînes de garderies, comme nous en avons vu aux Etats-Unis et en Ontario depuis quelques années. Dans ces chaînes de garderies, on s'est rendu compte que très souvent l'objectif du profit était tellement fort que le soin ou la garde des enfants, en souffrait, que ce soit par la mauvaise qualité des aliments, de la nourriture, que ce soit par la diminution du nombre d'employés dans ces garderies.

Par le fait même, M. le Président, j'escompte bien que mon collègue de Mégantic-Compton votera en faveur du principe de ce projet de loi puisque la seule réticence qu'il avait se raccrochait à cette disposition un peu particulière que nous avions présentée dans le projet initial. Je le remercie à l'avance de son appui.

M. le Président, il ne s'agit pas d'un projet de loi qui est parfait, loin de là. Nous avons pris la précaution de présenter au cours de l'été un avant-projet de loi. Nous avons rencontré plusieurs groupes, plusieurs individus. L'avant-projet de loi a été modifié et même ce texte final, officiel du projet de loi va être modifié encore au cours de la discussion article par article. Je pense que ce gouvernement-ci fait preuve — et je regrette que le député de Saint-Laurent, ah! il est ici; il n'est pas à son siège, mais il est ici — le gouvernement actuel fait preuve, M. le Président, d'une ouverture d'esprit, d'une souplesse par rapport aux différentes sortes de services de garde que nous voulons mettre à la disposition de la population.

Je rappelle au député de Saint-Laurent que c'est à l'époque où il était ministre des Affaires sociales qu'une directive interne, au ministère, a interdit l'émission de permis à des garderies à but lucratif, en 1974. Tout à coup...

M. Forget: Est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. Lazure: Non. Après, si vous voulez.

Le Président: Si je comprends bien, M. le député de Saint-Laurent, après l'intervention de M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, le député de Saint-Laurent a connu son chemin de Damas. Il a été soudain éclairé. Nous, ce qui nous concerne, ce n'est pas un dogme. Le gouvernement du Parti québécois n'est pas accroché de façon rigide à une théorie ou à un dogme. Il nous a paru de plus en plus clair qu'une large portion de la population voulait pouvoir choisir le type de garderie où le parent ou les parents enverraient leur enfant. C'est pourquoi nous renversons, en somme, une directive du député de Saint-Laurent, alors qu'il était ministre des Affaires sociales, et une directive qui a eu pour effet de créer une certaine mentalité qui a voulu et qui veut encore — et ce n'est pas nous qui avons inventé cette mentalité — que la garderie à but lucratif est par définition quelque chose à éviter à tout prix. Nous récoltons un peu les mauvais fruits d'une telle politique, M. le Président.

La deuxième remarque porte sur l'intervention de la députée de L'Acadie. La députée de L'Acadie a fait valoir qu'en ce qui touche la garde en milieu familial, pour la première fois, le gouvernement va fournir aux parents qui placent leur jeune enfant en garde familiale le même type de subvention que si le parent plaçait l'enfant en garderie. C'est une des grandes innovations de ce projet de loi.

La députée de L'Acadie a fait valoir l'argument que la somme de $6 que la personne qui fait de la garde familiale va recevoir constitue une certaine injustice vis-à-vis des parents nourriciers, les parents de familles d'accueil qui ne reçoivent que $4.85 pour de très jeunes enfants, les enfants de moins de cinq ans. Il y a un léger problème. Il faut d'abord dire que parmi les milliers d'enfants qui sont en famille d'accueil, seulement 8%, c'est-à-dire 1000 enfants environ ont moins de cinq ans. Par conséquent, pour tous les autres enfants qui sont placés en foyer nourricier, en famille d'accueil, leurs parents nourriciers reçoivent, non pas $4.85, mais $5.85 et plus, selon l'âge de l'enfant.

De plus, pour l'enfant en foyer nourricier, les parents nourriciers reçoivent 365 jours par année l'allocation quotidienne de $4.85 ou $5.85, ce qui fait que pour un enfant de moins de cinq ans, les parents nourriciers reçoivent un total de $1800 par année, alors que dans le cas d'une garde familiale, vous avez 240, 250 jours de garde par année, le total est estimé à environ $1450 par année. Depuis plusieurs années, des milliers d'enfants sont placés en garde familiale. Nous n'inventons pas la garde familiale. Ce que nous inventons, c'est d'offrir aux parents, en leur donnant la même subvention que s'ils plaçaient l'enfant en garderie, c'est d'offrir aux parents un choix dans le type de soins de garde. Depuis tout le temps que durent les services de garde en milieu familial, jamais ce type de garde n'a nui au recrutement de parents nourriciers.

Je pense que le problème qui, en apparence, peut avoir un certain fondement, quand on l'analyse de près, je ne crois pas que ce montant de $6, qui est versé sous forme de subvention maximale aux personnes qui font de la garde en milieu familial, entre en concurrence déloyale avec les allocations aux foyers nourriciers.

Le dernier point que je veux traiter est le plus important. Les porte-parole du Parti libéral, aussi bien que ceux du parti de l'Union Nationale ont

protesté contre la création d'un office des services de garde. A tel point que le député de L'Acadie, le porte-parole du Parti libéral nous a annoncé qu'elle allait voter contre le principe de ce projet de loi tout simplement parce que ce projet de loi prévoit la formation d'un office, et sous prétexte que cet office deviendra une machine bureaucratique trop centralisée, déshumanisée. Sa solution de rechange, la députée de L'Acadie, c'est de dire: Développez plutôt à l'intérieur du ministère, à l'intérieur du service des garderies, développez des effectifs plus nombreux s'il le faut, et à ce moment, vous n'avez pas besoin de développer une structure. (20 h 40)

Je m'étonne que les partis de l'Opposition se réfugient derrière un prétexte aussi mince. Depuis quand un office, une régie ou une commission est-il plus bureaucratique, si tel est le cas, qu'un ministère? Depuis quand un office des services de garde, qui embauchera de 20 à 25 personnes, dont une douzaine sont déjà des employés du ministère qui seront transférés, depuis quand un organisme avec un budget aussi restreint devient-il plus bureaucratique, plus déshumanisant qu'un ministère qui a au moins 4000 employés à son service?

Je pense qu'on a exagéré et qu'on se sert de ce prétexte de la création de l'office pour émettre une opposition qui est mal expliquée par la députée de L'Acadie. Ce projet de loi, en créant l'office, assure une représentation régionale. Toutes les régions du Québec, obligatoirement, seront représentées dans cet office des services de garde. Les parents, de façon majoritaire, vont constituer les 13 membres votants de cet office. Depuis quand un petit organisme avec 20 ou 25 employés, dirigé par un groupe majoritaire de parents venant de toutes les régions du Québec, deviendra-t-il plus bureaucratique qu'un ministère de 4000 employés?

Je pense qu'on est à court d'arguments de l'autre côté de la Chambre. Je répète que 27 des 29 groupes qui nous ont présenté des mémoires en commission parlementaire ont approuvé la création de l'office. Je répète que le Conseil du statut de la femme a approuvé la création de l'office. Le député de Saint-Laurent prétend que rien n'a été changé depuis 1976, que tout ce que le nouveau gouvernement a fait, c'est à toutes fins utiles indexer les dépenses dans les services de garde et qu'il n'y a vraiment rien là! Pour l'information du député de Saint-Laurent, alors qu'il était ministre des Affaires sociales, on comptait moins de 10 000 places en garderie. A ce moment-là, seulement 28% des places en garderie étaient subventionnées par les fonds du gouvernement. Actuellement, nous comptons 16 500 places en garderie et plus de 50% — c'est ça l'important — des places sont actuellement subventionnées par les fonds de l'Etat. Cette espèce de mythe qu'on a voulu créer d'un office qui allait devenir un monstre, qui allait enrégimenter tous les jeunes enfants de moins de 5 ans dans le Québec, cette espèce de mythe, je pense qu'il est facilement démasquable.

Si nous avons cru bon créer l'office, c'est précisément parce qu'il faut qu'il y ait un petit groupe à l'intérieur de ce gouvernement dont l'unique préoccupation est de susciter la création de places en services de garde le plus rapidement possible pour pouvoir rattraper le temps perdu par les gouvernements précédents.

Je conclus, M. le Président. Ce projet de loi, nous allons continuer de l'améliorer au cours de la discussion en deuxième lecture, article par article; ce projet de loi a quand même la valeur fondamentale de consacrer une fois pour toutes ce qu'aucun gouvernement n'a voulu faire dans le passé, de consacrer le droit au travail pour la femme, le droit aux loisirs pour la femme, droits qui restent théoriques et tout à fait futiles s'ils ne sont pas accompagnés par la mise sur pied de services de garde.

Deuxièmement, ce projet de loi consacre le droit du jeune enfant à un service de garde de qualité. Nous offrons pour la première fois un choix multiple aux parents: cinq sortes de services de garde seront accessibles aux parents.

Ce projet de loi est caractérisé par une grande souplesse, une grande ouverture d'esprit, ce qui est tout à fait contraire à l'état d'esprit qui existait sous l'ancien gouvernement où on a fait une religion de la garderie avec conseil d'administration contrôlé majoritairement par des parents et sans but lucratif. Nous ouvrons aux commissions scolaires, nous ouvrons aux municipalités, nous ouvrons aux garderies à but lucratif. C'est un symptôme de la transparence de ce gouvernement, M. le Président.

Je veux conclure en rendant hommage aux fonctionnaires du ministère qui, depuis quelques années, travaillent avec le gouvernement, avec le ministre, pour préparer ce projet de loi. Je veux rendre hommage aussi à toutes les travailleuses des garderies parce que, dans 99,5% des garderies du Québec, il n'y a pas de travailleurs. J'ajouterai, sans fausse modestie, que, lorsque j'ai eu l'occasion de mettre sur pied, même si ce n'était pas permis par le ministère des Affaires sociales à l'époque, une garderie à l'hôpital Rivière-des-Prairies, je me suis empressé de recruter un moniteur pour que les jeunes enfants à la garderie de l'hôpital Rivière-des-Prairies soient exposés aux avantages pédagogiques émanant du sexe masculin et du sexe féminim. Merci.

Le Président: Merci, M. le ministre des Affaires sociales.

M. le député de Saint-Laurent.

M. Lazure: Non, non.

M. Forget: Oui, le ministre m'avait permis de lui poser une question.

M. Lazure: Non, je m'excuse. On a mal compris mon geste, mon intervention. Quand j'ai dit après, cela voulait dire après la session.

M. Forget: C'est très courageux de la part du ministre, M. le Président. On le reconnaît bien là.

Une Voix: Vous n'impressionnez pas beaucoup vos collègues.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Je demande maintenant si la motion de deuxième lecture du projet de loi no 77, Loi sur les services de garde à l'enfance, sera adopté?

Des Voix: Adopté sur division.

Une Voix: A l'unanimité.

M. Bertrand: M. le Président...

Le Président: Adopté sur division, M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Non, non, non.

M. Bertrand: M. le Président, nous demandons...

Des Voix: Vote, vote!

Une Voix: Nous voulons connaître les visages de ce monde-là.

M. Bertrand: M. le Président, vous entendez la demande générale du côté ministériel pour avoir un vote enregistré.

Une Voix: On veut savoir qui est contre.

Le Président: Qu'on appelle les... M. le leader adjoint du gouvernement, exprimez-vous.

M. Bertrand: M. le Président, simplement pour permettre au règlement de suivre son cours, nous demandons un vote enregistré, mais nous demandons aussi que ce vote soit reporté à la séance de demain, après les affaires courantes.

Le Président: En conséquence, le vote sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 77 aura lieu demain, 7 décembre, au moment de l'enregistrement des noms sur les votes en suspens.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Si vous me le permettiez, je pense que le député de Mégantic-Compton aurait aimé dire un mot relativement à ce projet de loi.

M. Grenier: Je m'excuse, M. le Président, j'ai eu une rencontre avec le leader adjoint, mais j'ai choisi de faire mon intervention au moment de la troisième lecture, puisqu'il y aura un vote qui se fera après l'étude article par article. Je dois informer le ministre que ce qu'il nous a donné relativement aux articles 4 et 5 va certainement modifier plus que sensiblement notre attitude.

Une Voix: Bravo!

M. Lamontagne: M. le Président, j'apprécierais que mon collègue de Saint-Laurent ait le même privilège qui vient d'être accordé au député de Mégantic-Compton. Cela ne se joue pas à deux, ça se joue avec tout le monde. Je pense que c'est du "fair play" parce qu'il aurait l'occasion de dire quelque chose au ministre.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je demanderais...

M. Lamontagne: M. le Président, en vertu de quel principe ou de quel droit le leader adjoint donne-t-il des privilèges seul? (20 h 50)

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, gardez votre bonne humeur. M. le député de Roberval, vous aussi. Le député de Saint-Laurent a demandé, conformément au règlement, s'il pouvait formuler une question à M. le ministre des Affaires sociales, lequel, conformément au règlement, a dit qu'il pourrait poser une question, mais, si j'ai bien entendu, après la session. Le député de Mégantic-Compton ne s'est pas levé pour invoquer les mêmes dispositions du règlement. Il a tout simplement fait un commentaire. Il fallait bien que je l'entende. Je comprends bien que, normalement, il n'aurait pas dû se lever pour faire ce commentaire qui ne devait pas être fait à ce moment-ci, mais il a été fait.

M. Lamontagne: Une directive, M. le Président.

M. Forget: M. le Président, je pourrais invoquer l'article 96.

Le Président: M. le député de Roberval, puis-je donner la parole à M. le député de Saint-Laurent?

M. Lamontagne: Oui. Le Président: Merci.

M. Forget: Merci, M. le Président. Si je comprends bien votre allusion à ma demande de question qui a été refusée par le ministre, je pourrais cependant corriger certains faits en vertu de l'article 96.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, conformément à la tradition de tolérance de cette Assemblée, même si vous êtes un peu tardif pour invoquer l'article 96, je vous autorise à le faire.

M. Forget: Merci. M. le Président, le ministre a, dans ses remarques, voulu créer l'impression d'une ouverture d'esprit absolument louable de la part de son gouvernement relativement aux établissements privés. Il a dressé entre cette attitude d'ouverture d'esprit et celle qui a été adoptée par

le gouvernement précédent un contraste qui est contraire aux faits. Je pense qu'il devrait admettre que, même s'il a prétendu continuer une politique établie par son prédécesseur, il demeure que, pendant la période du gouvernement actuel, depuis le début de janvier 1977, on a quand même assisté à une diminution considérable du nombre de garderies privées à but lucratif. On m'informait aujourd'hui que de 235 qu'elles étaient à la fin de 1976, elles ne sont plus que 125 aujourd'hui. Cette diminution fait un très grand contraste avec la très grande réputation d'ouverture d'esprit dont a voulu se vanter le ministre. Cette réduction n'est pas due à l'action autonome des établissements en question, mais à une stratégie de la part des fonctionnaires du ministère qui auraient harcelé les garderies privées durant toute cette période présumément à l'invitation du ministre, de manière à les amener à abandonner leur permis.

Des Voix: Ah!

M. Forget: C'était une correction...

M. Lazure: M. le Président...

M. Bertrand: M. le Président, pour maintenir...

Des Voix: II n'a pas posé de question.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: ... un excellent climat dans cette Chambre, je fais amende honorable auprès du député de Roberval si j'ai peut-être fait un écart au règlement en ouvrant une porte au député de Mégantic-Compton. Je pense que maintenant, nous venons de faire un à un.

M. Lamontagne: Je suis satisfait de la largesse du président.

Le Président: Je vous rends grâce, M. le député de Roberval.

M. Bertrand: Continuons notre excellente collaboration qui nous a quand même permis de savoir que l'Union Nationale voterait pour le projet de loi en deuxième lecture. J'appellerai, sur ce, M. le Président, l'article 23 du feuilleton d'aujourd'hui.

Projet de loi no 76 Deuxième lecture

Le Président: J'appelle maintenant le projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi sur les allocations familiales concernant les enfants handicapés. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, puis-je vous demander de ne pas abuser de la complaisance de la présidence?

Je vous cède la parole sur cette motion de deuxième lecture, M. le ministre des Affaires sociales.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Selon la formule consacrée, le lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi 76 et il en recommande l'étude par cette Assemblée.

Ce projet de loi, M. le Président, devrait recevoir l'adhésion des partis de l'Opposition. Ce projet de loi, qui amende la loi actuelle sur les allocations familiales, a pour simple et unique objectif d'allouer dorénavant, à partir du 1er janvier 1980, une somme de $60 par mois, une allocation familiale supplémentaire de $60 par mois à tous les parents qui gardent à domicile un enfant handicapé.

M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que je me fais le porte-parole du gouvernement du Parti québécois pour présenter ce projet de loi. A titre de psychiatre d'enfants, j'ai eu l'occasion, durant plusieurs années de pratique, de voir des familles, des parents qui désiraient garder à domicile leur enfant handicapé mental ou handicapé physique et qui, très souvent, à cause de contraintes financières, de revenus insuffisants, se voyaient obligés de placer un tel enfant soit dans une institution, soit dans un foyer nourricier.

M. le Président, je n'ai pas besoin d'insister auprès de cette Chambre pour faire valoir que le climat par excellence, le milieu par excellence où un enfant handicapé ou non handicapé doit grandir, c'est dans le climat familial. Parfois, nos amis de l'Opposition nous reprochent de ne pas avoir de politique familiale. Il y a plusieurs façons d'avoir une politique familiale. Une façon qui est très facile, c'est d'en parler beaucoup. Une autre façon, c'est de procéder par des gestes concrets qui viennent en aide à la famille. Le maintien de l'intégrité, le maintien de l'unité d'une famille, en incluant l'enfant handicapé plutôt que la brisure d'une famille en plaçant l'enfant handicapé dans une institution, c'est un geste bien concret qui vient aider la famille, et qui s'ajoute à toute une série de mesures que le présent gouvernement a adoptées depuis trois ans.

Par exemple, le présent gouvernement dépense, cette année, $47 millions pour l'aide à domicile, principalement pour le maintien à domicile des personnes âgées et des personnes handicapées. Encore une fois, ce montant est considérablement plus élevé que ce que le gouvernement libéral dépensait en 1976, c'est-à-dire $23 millions. De plus, la loi dont nous avons parlé tout à l'heure, le projet de loi sur les services de garde à l'enfance prévoit aussi qu'une famille qui fait de la garde en milieu familial ou une garderie qui accepte un enfant handicapé se voit octroyer une subvention spéciale de manière à ce que le plus grand nombre d'enfants handicapés possible soient intégrés à des garderies régulières et, par conséquent, cela aide à maintenir l'enfant handicapé à domicile.

Pourquoi donner cette allocation familiale supplémentaire de $60? M. le Président, il est bien évident que, pour ceux qui connaissent le moindrement les problèmes qui entourent la garde à domicile d'un enfant gravement handicapé, plu-

sieurs dépenses additionnelles sont encourues par les parents. Par exemple, il est plus difficile d'obtenir les services d'une gardienne occasionnelle lorsqu'une famille a un enfant gravement handicapé à domicile. Il y a aussi des médicaments qui sont parfois très coûteux pour certains types de handicaps. Il y a aussi des appareils spéciaux que plusieurs enfants handicapés physiques doivent porter et qui doivent être renouvelés. Enfin, plusieurs dépenses, que ce soit l'ameublement, l'aménagement de la maison, le renouvellement des vêtements, sont beaucoup plus élevées quand il s'agit d'un enfant gravement handicapé qui, souvent, n'est pas complètement maître de son propre comportement et qui demande une surveillance particulière. (21 heures)

M. le Président, cette allocation familiale supplémentaire de $60 par mois, qui était réclamée depuis plusieurs années par bon nombre de parents, sera distribuée à 16 000 familles au Québec à partir du 1er janvier 1980; elle sera ajoutée au chèque régulier d'allocations familiales du Québec. Qu'il soit bien clair, M. le Président, qu'il ne s'agit pas là de prendre de l'argent dans le trésor québeccois pour avantager ces familles aux dépens de certains services qui ont besoin d'être développés, certains services aux handicapés physiques et mentaux qui coûtent cette année au gouvernement, aux contribuables, plus de $200 millions. L'augmentation des crédits pour les services aux personnes handicapées va continuer. Nous avons, par la loi no 9, prévu plusieurs dispositions qui améliorent le sort des personnes handicapées au Québec, qu'il s'agisse de transport, qu'il s'agisse d'accès à des immeubles publics ou qu'il s'agisse, comme cette mesure le veut, de subventions financières particulières.

En conclusion, j'espère que les partis de l'Opposition vont se joindre au gouvernement pour adopter rapidement cette mesure. C'est une mesure qui se veut un encouragement aux parents qui gardent à domicile, malgré beaucoup de difficultés financières ou psychologiques, un enfant handicapé. Favoriser le maintien à domicile de l'enfant handicapé jusqu'à 18 ans veut aussi dire que, dans certains cas, les parents voudront ramener de l'institution ou ramener du foyer nourricier un enfant handicapé qui était déjà en placement depuis quelques années.

M. le Président, voilà une autre mesure du gouvernement du Parti québécois qui manifeste notre intérêt prioritaire pour le sort des personnes défavorisées dans notre société et, plus particulièrement, pour les personnes handicapées. Merci.

Le Vice-Président: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il nous fait plaisir, à titre d'Opposition officielle, de concourir à l'adoption la plus rapide possible de ce projet de loi. Je ne donnerai pas les détails que le ministre a déjà lus, mais il reste quand même que le rôle de l'Opposition est d'être le porte-parole des personnes qui ne sont pas à l'Assemblée nationale et qui représentent une partie importante de la population.

Je voudrais prendre ces quelques minutes non pas pour discuter du contenu du projet de loi qui est très simple, mais pour faire part de représentations qui nous sont parvenues de la part de l'Association du Québec pour les déficients mentaux. Ils mentionnent plusieurs inquiétudes. Ils ont même, je pense, envoyé une lettre au premier ministre disant leur désaccord au sujet de ce projet de loi. Ceci ne veut pas dire que je pense qu'il ne faille pas procéder avec ce projet de loi, au contraire, et je dirai pourquoi, mais il reste quand même que ceci est une excellente occasion de montrer que même si des efforts sont faits — en l'occurrence, ce sont certainement des efforts qui sont faits d'une façon positives pour les handicapés — il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. La question principale que l'Association du Québec pour les déficients mentaux se posait était la crainte que l'argent qui était rendu disponible aux fins d'augmenter les allocations familiales ne pourrait pas être appliqué à d'autres fins qu'ils jugeaient davantage prioritaires. Dans cette lettre qu'ils ont même adressée au premier ministre, ils expriment des inquiétudes très sérieuses quant à la qualité ou aux ressources en services qui sont présentement mises à leur disposition. Le ministre nous a rassurés et je pense que c'était probablement son intention quand il a ajouté à la fin: Ceci ne veut pas dire que nous couperons ailleurs pour accorder les allocations familiales. Il a répondu à cette inquiétude du groupe.

Je voudrais quand même faire connaître à l'Assemblée nationale les représentations de ces groupes qui constituent une partie importante de la population que l'on considère comme étant des personnes handicapées. Ils disent: "Si on examine la situation des familles qui gardent un enfant handicapé, on découvre rapidement que leurs besoins sont, de prime abord, en termes de services dont la plupart sont fort peu développés ou inexistants". Les familles ont besoin de services de support essentiels au maintien à domicile — je pense que cette augmentation de l'allocation familiale pourra, au moins en partie, répondre à cette inquiétude — Des besoins demeurent quant aux soins à domicile, de l'intervention, de la stimulation précoce, des services spécialisés, de l'accessibilité aux services génériques, de programmes d'éducation intégrée, de programmes de loisirs intégrés. D'ailleurs, le dernier mémoire de cette association portait surtout sur les besoins dans le domaine de l'éducation où on trouvait que les programmes n'étaient pas à point et que peut-être on n'avait pas eu le temps d'y accorder toute l'attention nécessaire.

M. le Président, ce que je veux dire, c'est que même si la loi 9 a été adoptée depuis, si je ne m'abuse, au moins un an et demi, on réalise fort bien que l'office qui, pourtant ne ménage pas ses efforts, sent que les ressources sont limitées. On

avait eu cette expression d'opinion par la présidente de l'office, le printemps dernier, à l'étude des crédits. Elle souhaitait que les choses puissent avancer plus rapidement et que des ressources plus considérables soient mises à la disposition des personnes handicapées pour justement combler ces besoins et ces carences dont l'association pour les déficients mentaux fait état.

Ils se sont inquiétés aussi, et je peux les comprendre dans une certaine mesure, parce que cette disposition risque que leurs enfants soient une fois de plus catégorisés. On les comprend, ils sont très sensibles à ceci. Dans le projet de loi, on dit qu'il faudra définir l'expression "enfant handicapé"; cela ne leur semblait pas, non plus, quelque chose de souhaitable compte tenu qu'un enfant n'est pas nécessairement handicapé d'une façon permanente et qu'il peut, dans certains cas, ne plus répondre aux critères de cette catégorie. On se retrouve devant un dilemme, à savoir: Est-ce que ces lois, finalement, ne catégorisent pas un peu trop les enfants et n'hypothèquent pas, jusqu'à un certain point, leur avenir?

M. le Président, ce sont des remarques d'ordre général qui sont souvent soulevées au cours des débats et même de débats que nous avons eus au moment de l'adoption de la loi 9. Je voulais simplement utiliser cette occasion, puisque ces représentations ont été faites par l'association à propos de ce projet de loi, pour les faire connaître au public et rappeler au ministre que, pour autant que l'Opposition officielle est touchée, il peut employer toutes les ressources que l'Etat peut mettre à leur disposition, au service des personnes handicapées, qu'ils soient des enfants ou des adultes; il a notre entier appui là-dessus.

Je me contenterai uniquement, M. le Président, de dire, comme je l'ai annoncé au départ, que nous sommes d'accord. Les familles des enfants handicapés ont affaire à des problèmes particuliers qui exigent souvent des ressources supplémentaires. Je pense que le projet de loi répond à ceci, du moins en partie; en tout cas, il améliore la situation telle qu'elle existe présentement. Nous sommes un peu perplexes, par contre, de savoir que c'est une régie qui va déterminer qui seront les enfants appartenant à cette catégorie d'enfants handicapés pouvant se prévaloir des dispositions de ce projet de loi. (21 h 10)

N'y aurait-il pas lieu — mais on pourra en discuter au moment de l'étude article par article que nous sommes prêts à faire ce soir, comme je l'ai dit tout à l'heure — que cette définition soit incluse dans le projet de loi plutôt que de la laisser un peu plus vague et peut-être moins bien définie et plus sujette à des modifications si c'est une régie qui doit intervenir pour établir la définition des handicapés. Ce sera, en fait, la seule remarque de fond sur laquelle peut-être le ministre nous apportera des réponses tout à l'heure, au moment de l'étude article par article. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, très brièvement puisque ce projet de loi qui est présenté par le ministre aujourd'hui et qu'on a devant nous ce soir ne fera pas, bien sûr, l'objet de nombreux griefs, puisqu'il correspond à un souhait qui a été exprimé. Je ne pense pas être le seul à prétendre qu'on avait besoin de ce projet de loi, puisque le Parti libéral l'a dit également, comme on l'avait dit et comme le Parti québécois le reconnaît. Ce n'est pas un projet de loi à grand capital politique et je pense qu'on aurait mauvaise grâce à dire que seule l'Union Nationale requérait l'adoption de cette loi.

J'avais déploré, lors de l'étude de la loi 13, que l'on subventionne l'adoption d'enfants handicapés, tandis que les parents qui gardaient leurs propres enfants handicapés n'avaient aucune aide financière venant de l'extérieur. Le ministre a dû avouer la lacune et voilà que nous retrouvons maintenant devant nous ce projet de loi.

On ne s'opposera pas, bien sûr, aux $60 qui se donnent mensuellement pour aider les parents qui sont dans le besoin. J'aimerais cependant que le ministre nous dise tout à l'heure, dans sa réplique, un peu ce qu'il entend comme définition d'un handicap d'enfant. Cela manque; je pense que le ministre pourra nous donner un peu plus d'éclaircissements sur ce qu'est un handicap d'enfant, un handicap permanent ou un handicap passager, comme il s'en trouve.

J'aimerais également qu'il nous dise — cette question avait été soulevée, je pense, au moment de l'étude de la loi 13 — si la Loi sur les services de garde à l'enfance, que nous allons voter en deuxième lecture demain, ouvrira assez largement les portes de ces garderies pour permettre l'entrée de ces enfants handicapés dans les garderies. Je vois que le député de Sherbrooke est auprès du ministre. Nous avons vécu, dans la région de l'Estrie, d'une façon particulière, le problème des malades chroniques dans les hôpitaux de la région de Sherbrooke. Problème qui n'est pas encore réglé, à savoir si on devrait localiser ces malades dans un seul hôpital ou les répartir également dans les quatre centres hospitaliers de la ville de Sherbrooke. On arrive là avec une sorte de malades que pas beaucoup de gens veulent avoir dans leur institution. On me rapporte, je ne l'ai pas vécu personnellement, que du côté des garderies, cela pourrait être le même problème, à savoir que des enfants handicapés ont des difficultés à trouver asile, soit de façon permanente, sauf dans les familles d'accueil, ou soit de façon occasionnelle.

J'ai ici une requête qui me vient d'un groupe de parents d'enfants handicapés, l'Association de parents d'enfants handicapés de Saint-Hyacinthe que mon collègue le député de Saint-Hyacinthe, M. Cordeau qui est ici, m'a transmise parce qu'on ne voulait pas intervenir deux députés pour accélérer le débat. Il m'a demandé de porter à l'attention du ministre cette requête de parents qui aimeraient que, dans ces haltes-garderies, les parents d'enfants handicapés puissent trouver place pour

leurs enfants, pour permettre aux mères de famille, comme on l'a dit cet après-midi — c'était décrit par certains autres députés — à l'occasion, un parent, d'y loger son enfant pendant quelques jours, sur semaine ou quelques heures au moins pendant une journée.

J'aimerais que le ministre, dans sa réplique, nous dise s'il a l'intention d'ouvrir ces garderies aux handicapés ou s'il a un autre objectif pour venir en aide aux parents d'enfants handicapés pour répondre à la requête de ces signataires qui viennent de Saint-Hyacinthe et répondre aussi aux besoins qui se font de plus en plus pressants dans notre communauté.

Je pense que ce projet de loi arrive à point et je suis prêt, comme on me l'a signalé, à ce qu'on passe immédiatement à son adoption sans passer par la commission parlementaire. Je vous remercie, M. le Président.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Mme la Présidente, très rapidement, je vais commercer par répondre au dernier commentaire soulevé par le député de Mégantic-Compton. Malgré que la députée de L'Acadie nous reproche parfois de tenir trop de conférences de presse pour annoncer les politiques concernant les services de garde, je vois qu'il y a encore certaines politiques qui sont mal connues. Depuis au-delà d'un an, il est non seulement possible d'admettre un enfant handicapé dans une garderie, mais nous incitons les garderies à admettre jusqu'à 20% du nombre total d'enfants dans une garderie, que 20% des places soient réservées aux enfants handicapés. A ce moment-là, nous payons une subvention additionnelle de $2500 par année pour chaque enfant handicapé; ce qui veut dire qu'une garderie de trente enfants qui se conformerait à cet encouragement et qui remplirait ce besoin qui existe, recevrait, pour cinq ou six enfants handicapés, environ $14 000 ou $15 000, ce qui permettrait à la garderie d'engager une personne additionnelle et d'offrir un service vraiment intégré à l'ensemble des enfants du quartier.

Deuxièmement, la députée de L'Acadie a fait état, tantôt, de certaines réserves que l'Association du Québec des déficients mentaux a exprimées vis-à-vis de ce projet de loi croyant ou craignant que ces sommes d'argent, ces $11 millions par année que cette nouvelle politique va coûter aux contribuables, soient enlevées au service à l'adresse des enfants handicapés. J'ai bien dit tantôt, dans mon allocation, qu'il n'était pas du tout question de réduire, de quelque façon que ce soit, les crédits déjà prévus pour les services aux enfants handicapés. Je pense qu'il faut dissiper une espèce de confusion. Parfois, les parents d'enfants handicapés surtout, dans certaines régions, s'imaginent qu'il s'agit simplement de voter quelques millions de dollars pour que, du jour au lendemain, on ait les services spécialisés dans toutes les régions du Québec. Dieu sait pourtant que ce n'est pas possible et ce n'est pas strictement une question d'argent. Même si on avait tous les crédits voulus, il est extrêmement difficile de trouver des enseignants spécialisés ou d'autres professionnels spécialisés pour se rendre dans certaines régions du Québec comme la Côte-Nord, la Gaspésie et l'Abitibi. Par conséquent, je peux rassurer non seulement la députée de L'Acadie mais aussi l'Association du Québec pour Ia déficients mentaux que cette allocation de $60 par mois pour les parents qui gardent un enfant handicapé ne va diminuer en rien la croissance de nos crédits vis-à-vis des services aux enfants handicapés.

Finalement, on dit avec une certaine hésitation: Cette allocation devra quand même être rattachée à une certaine définition de ce qu'est un enfant handicapé. Bien sûr, et cela va catégoriser les enfants. Que je sache, les gens ne protestent pas parce qu'un accidenté du travail veut avoir sa prestation, sa réclamation, sa compensation comme il se doit; les gens ne protestent pas parce qu'il est catégorisé pour un certain temps "accidenté du travail". Je pense qu'il ne faut quand même pas exagérer les inconvénients d'une appellation comme celle-là. Qu'on le veuille ou non, l'enfant qui est gravement handicapé mentalement ou physiquement, tout le monde dans son entourage s'en rend compte.

La définition va tenir compte — je l'ai dit à plusieurs reprises — de la gravité du handicap physique ou mental, handicap moteur, handicap de la vue, de l'ouïe et handicap du développement mental, déficient mental grave ou moyen. Il ne s'agit pas d'inclure les déficients mentaux légers qui sont intégrés dans les écoles du voisinage. Finalement, la procédure sera très simple. La Régie des rentes va accepter le certificat de tout médecin habilité par la Corporation des médecins qui attestera que l'enfant de moins de 18 ans souffre de handicap grave avec une certaine description, évidemment, de ce handicap. (20 h 20)

La Régie des rentes a la réputation d'être un organisme non pas bureaucratisé à outrance mais un organisme qui donne un excellent service. Je remercie en passant les autorités de la Régie des rentes qui ont accepté avec bienveillance de nous fournir ce service. Les formulaires à l'adresse des parents des enfants handicapés seront disponibles à tous les bureaux de la Régie des rentes, à tous les bureaux de l'aide sociale, à tous les CLSC, les Centres locaux de services communautaires, à tous les hôpitaux. Il y aura une diffusion très large de ces formulaires qui seront le plus simples possible.

En terminant, je veux remercier les deux partis d'Opposition pour l'appui qu'ils apportent à ce projet de loi. Merci.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion de M. le ministre des Affaires sociales proposant que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de loi no 76...

M. Bertrand: Mme la Présidente, question de règlement.

M. Lavoie: La présidente est debout. M. Bertrand: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: ... si le député de Laval veut garder son calme...

La Vice-Présidente: M. le leader, voulez-vous vous adresser à moi, s'il vous plaît.

M. Bertrand: Oui. Mme la Présidente, si le député de Laval veut garder son calme, si je me lève, c'est pour protéger les droits de la députée de L'Acadie qui aimerait poser une question au ministre des Affaires sociales, qui serait prêt à y répondre. Mme la Présidente, loin de moi de vouloir vous empêcher de jouer votre rôle; je voulais simplement qu'avant que vous appeliez le vote, Mme la députée de L'Acadie puisse poser sa question.

La Vice-Présidente: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, si vous me le permettez, il y a juste une confusion qui semble exister. Je pense que l'inquiétude des parents des déficients mentaux n'était pas nécessairement que ceci diminuerait l'argent qui serait utilisé pour des fins de services, mais que peut-être un montant supplémentaire d'argent qui ne serait pas versé pour des allocations familiales pourrait être utilisé pour le développement plus rapide de services. Je pense que vous avez répondu à cela. C'est quand même, je pense, la signification de ce que les parents disaient.

J'aimerais demander au ministre pourquoi il trouve difficile que la définition soit dans la loi même, puisque, quand même, vous en avez donné un certain nombre, que ce soient des déficients profonds, que ce soient des déficients moyens, que ce soit le cas des enfants qui souffrent d'un handicap auditif ou d'un handicap moteur sérieux. Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'énumérer cette liste qui permettrait, je pense, beaucoup moins de contestation puisque ce serait dans la loi?

Voici l'autre question que je voudrais poser au ministre: Quel sera le droit d'appel? Est-ce que ce sera la Commission des affaires sociales si un parent n'est pas accepté et juge que son enfant devrait être accepté et être admissible à ces allocations supplémentaires?

M. Lazure: Mme la Présidente, il y aura une procédure d'appel, justement, à la Commission des affaires sociales. Deuxièmement, nous avions envisagé à l'origine d'inclure dans le projet de loi les définitions des différents types de handicaps mais cela nous a paru assez complexe et aussi un peu trop rigide comme formule. Il est plus facile évidemment d'amender des règlements que d'amender un projet de loi.

Je vous donne comme exemple certains handicaps comme ceux de la vue ou de l'ouïe. Certains de ces handicaps peuvent être mesurés de façon assez précise par des pourcentages; dans le cas des problèmes de surdité, en mesurant les décibels et, dans le cas des problèmes de la vue, en mesurant la dioptrie. Ces définitions qui sont acceptées par le monde scientifique, de façon générale en ce qui touche la vue et l'ouïe, en tout cas, sont quand même assez complexes mais ne portent pas à contestation. Nous avons pensé qu'il était trop compliqué d'inclure cela dans un projet de loi et que cela nous liait les mains.

Il faut quand même se rendre compte qu'il n'y a pas beaucoup de provinces au Canada ou d'Etats aux Etats-Unis qui ont ce genre d'allocations familiales additionnelles pour les enfants handicapés à domicile. Nous avons essayé de trouver des comparaisons ou des modèles dans d'autres endroits et il est extrêmement difficile d'en trouver. Nous pensons qu'il sera plus facile, au bout d'un an ou de deux ans, de modifier le règlement quant aux définitions que de se figer de façon un peu trop rigide dans un projet de loi.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, une dernière remarque. Je voudrais simplement rappeler au ministre que, dans le cas de la loi 101, on a, à l'intérieur de la loi — et peut-être que le ministre de l'Education pourra le confirmer — établi des catégories d'enfants qui souffraient de troubles d'apprentissage sérieux. Enfin, si le ministre croit que c'est plus sage... Mais je pense que ce serait préférable que ce soit dans la loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette motion de M. le ministre des Affaires sociales proposant que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi sur les allocations familiales concernant les enfants handicapés, est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Mme la Présidente, il y a de ces jours où la vie parlementaire a quelque chose d'enthousiasmant et je voudrais remercier immédiatement mes collègues de l'Opposition d'acepter que nous puissions immédiatement procéder à la troisième lecture de ce projet de loi.

La Vice-Présidente: Allez-vous me faire une motion pour la commission parlementaire?

M. Bertrand: Merci, Mme la Présidente. C'est quelque chose qui manquait à mon expérience parlementaire. Je fais motion pour que nous puissions immédiatement procéder aux écritures en commission plénière relativement à l'étude article par article du projet de loi.

Une Voix: M. Blondin n'est pas là.

M. Bertrand: M. Blondin n'est pas là? Est-il nécessaire que M. Blondin soit là? lis ont assez d'expérience, je pense, pour compenser pour l'absence de M. Blondin.

La Vice-Présidente: Y aurait-il consentement à ce que nous passions aux écritures quant à ce projet de loi?

Des Voix: Consentement. M. Lavoie: Que se passe-t-il?

Commission plénière

La Vice-Présidente: Rapport de la commission plénière.

Des Voix: Adopté.

M. Lavoie: II vient de perdre sa "job".

Troisième lecture

La Vice-Présidente: Adopté. Troisième lecture? Adopté.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: C'est réglé, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente: Oui.

M. Bertrand: Bon!

La Vice-Présidente: Vous appelez un autre...

M. Bertrand: Merci beaucoup. Mme la Présidente, j'appelle, pour terminer la journée, le projet de loi inscrit au nom des Affaires municipales à l'article 18 du feuilleton d'aujourd'hui.

Des Voix: Adopté.

Projet de loi no 74 Deuxième lecture

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires municipales propose maintenant que le projet de loi no 74, Loi modifiant le Code municipal et la Loi sur les cités et villes concernant les ententes intermunicipales, soit maintenant lu pour la deuxième fois.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Guay Tardif

M. Tardif: Mme la Présidente, le projet de loi 74 que nous avons devant nous est un projet de loi-cadre visant à permettre à deux ou plusieurs municipalités de s'associer entre elles pour conclure des ententes visant à la mise en commun de services intéressant leurs populations respectives.

L'accroissement de la population urbaine, de même que l'évolution des mentalités mettent les municipalités dans l'obligation d'offrir à leur population une gamme de services de plus en plus nombreux et de plus en plus élaborés. Cependant, bien des municipalités, à cause d'une trop faible population, d'un manque de ressources financières ou techniques ou encore à cause d'un certain isolement géographique, sont bien souvent incapables d'offrir tous ces services. Ce n'est pas leur faire injure de dire cela puisque très peu de citoyens savent que, sur les 1600 municipalités que nous avons au Québec, au-delà de 800, soit plus de 50%, ont moins de 1000 âmes de population. (21 h 30)

Evidemment, ceci implique qu'il est à peu près impensable pour la plupart d'entre elles de se doter de tous les services dont elles pourraient avoir besoin, alors qu'elles pourraient très bien s'associer avec une autre pour se donner ces services.

Mme la Présidente, le projet de loi no 74 vise justement à permettre ce genre d'entente, de mise en commun de services, permettant soit d'offrir un plus grand nombre de services, soit encore d'offrir des services de meilleure qualité et à meilleur coût. En principe, ce projet de loi devrait permettre de mettre en commun certains investissements de base et ainsi diminuer la responsabilité financière de chacune des municipalités contractantes. Ce projet de loi devrait également permettre d'atteindre un niveau de services supérieur grâce à un niveau d'investissement que les municipalités ne pourraient pas se permettre individuellement. Cela pourrait, dans d'autres cas, dans le cas d'une municipalité qui se sera déjà dotée, par exemple, d'une infrastructure, d'une aréna, lui permettre d'atteindre plus rapidement un niveau d'utilisation suffisant pour rentabiliser des équipements qu'elle trouve parfois trop onéreux une fois qu'elle en a fait l'acquisition. Ce projet de loi permet évidemment de minimiser les coûts unitaires des services grâce à un niveau de production plus élevé qui peut, à la limite, impliquer des économies d'échelle.

On me dira qu'il existe déjà sur le territoire québécois une série d'ententes liant le monde municipal et c'est vrai. Il en existe des centaines, Mme la Présidente. Par exemple, en matière de protection contre les incendies, on compte présentement au Québec 190 services d'incendie communs desservant 448 municipalités. De plus, environ 300 municipalités sont impliquées, d'une façon ou d'une autre, dans un réseau d'aqueduc commun. Par ailleurs, s'il existe présentement très peu d'ententes dans le domaine de la gestion des déchets solides, de même que dans le domaine de l'épuration, les programmes annoncés par mon collègue, le ministre de l'Environnement, et les amendements que nous avons apportés l'année dernière au Code municipal et à la Loi des cités et villes permettant aux municipalités de s'entendre pour la gestion commune d'un dépotoir ou d'un endroit de disposition des déchets, peuvent laisser

présager des demandes de plus en plus nombreuses pour ces fins-là.

En 1977, Mme la Présidente, ces ententes représentaient, pour les municipalités pourvoyeuses de services, une somme d'environ $40 millions, ce qui peut sembler très modeste eu égard à l'ensemble du budget des municipalités. Cependant, quand on considère que dans le domaine, notamment, de la fourniture de l'eau qui accapare 40% de ces sommes parce qu'on fournit l'eau selon le volume consommé, soit encore parce qu'une ou des municipalités parties à une entente doivent assumer une part du service de la dette, ceci implique qu'environ 70% des $40 millions sont consacrés à des ententes liées à la fourniture de l'eau.

Je tiens à souligner également que de telles ententes n'existent pas que dans les petites municipalités rurales que j'ai décrites tantôt. On sait, par exemple, que dans les milieux très urbanisés comme le territoire de la Communauté urbaine de Montréal, la ville de Montréal fournit l'eau à toutes les villes à l'est du boulevard Décarie par le biais d'ententes et ce, même si la ville de Montréal et les autres font partie d'une entité supramunicipale qu'on appelle la communauté urbaine.

Donc, l'appartenance à un organisme communautaire ne dispense pas ou n'empêche pas des municipalités de s'unir entre elles pour des fins semblables et on en a un exemple, encore une fois, en milieu très urbanisé comme l'Île-de-Montréal.

On me dira: Mais s'il existe un aussi grand nombre d'ententes présentement, pourquoi apporter une loi-cadre visant à régir ces ententes? Evidemment, Mme la Présidente, si on apporte une loi, c'est qu'il y a des problèmes. Ces problèmes viennent, non pas tellement lorsqu'il s'agit d'ententes de services, mais lorsqu'il s'agit de faire des investissements et problèmes que, de tout temps, le législateur a réglés d'une façon qui était celle des projets de loi privés. Encore au cours de cette session, au mois de juin dernier, l'Assemblée nationale a approuvé le projet de loi 257 et je lis: Loi constituant la régie d'exploitation de la centrale de traitement d'eau Chambly, Marieville, Richelieu. Donc, la constitution d'une régie intermunicipale permettant à ces trois villes de s'unir pour répondre à ce besoin. J'ai présentement des demandes d'autres municipalités pour les mêmes fins. Certaines ont presque atteint le seuil — je dirais — de préparation d'un projet de loi alors que d'autres sont vraiment à l'état de problème aigu et de négociation entre les municipalités.

J'ai, par exemple, en ce moment, à mon bureau, le dossier de la municipalité de Sainte-Julie et celui de Varennes. Sainte-Julie, municipalité dans le comté de Chambly alors que Varennes est dans le comté de Verchères, Sainte-Julie achète présentement son eau potable de Varennes. Sainte-Julie ne possède pas d'usine de filtration. Varennes en possède une dont la capacité est à peu près appropriée à ses besoins, municipalité qui a à peu près 8000 habitants mais, par ailleurs, un parc industriel important. Sainte-Julie a 13 000 habi- tants, plus ou moins, mais elle est strictement résidentielle. La ville de Varennes, avec son usine de filtration, fournit présentement l'eau à Sainte-Julie. Dans les deux cas, on a manqué d'eau au cours des dernières années. A deux reprises, le ministère des Affaires municipales a dû venir en aide pour augmenter les capacités de l'usine de Varennes, le raccord, la construction d'un réservoir et même la construction d'un lien entre ce réseau et celui de ce qu'on appelle l'AIBR, c'est-à-dire l'Aqueduc intermunicipal du Bas-Richelieu.

Le problème d'agrandissement de l'usine se pose présentement. On comprendra certainement que la ville de Varennes ne veuille pas grever son pouvoir d'emprunt pour agrandir son usine aux seules fins de desservir la population de Sainte-Julie même si, de son côté, elle risque aussi de se trouver, à plus ou moins brève échéance, devant des besoins causés non pas tellement par l'expansion de son secteur résidentiel mais bien de son secteur industriel. Quant à Sainte-Julie, elle ne peut pas participer financièrement à l'agrandissement de l'usine; elle ne le veut pas si elle ne peut pas obtenir des garanties d'approvisionnement et de gestion des équipements. Si elle participe aux coûts d'immobilisation et de fonctionnement, elle veut évidemment avoir son mot à dire. (21 h 40)

Je pourrais citer des cas identiques dans la région de Québec, les municipalités de Saint-Nicolas, Charny, Bernières. Pour revenir dans la région de Montréal, les cas, dont me parlera sans doute mon collègue, de Mascouche, Terrebonne, La Chesnaye qui sont dans la même situation. Sur la rive sud le cas de Longueuil, Saint-Hubert, Saint-Lambert, Boucherville et Saint-Bruno. Encore sur la rive sud, Beloeil, McMasterville, Mont-Saint-Hilaire, Otterburn-Park, ainsi de suite.

On a même un nouveau type de problème. Mme la Présidente, je voudrais profiter de l'occasion pour informer immédiatement cette Chambre que je compte apporter un papillon au projet de loi no 74 lors de l'étude article par article pour permettre aux municipalités de conclure un type d'entente parce qu'à l'heure actuelle, la loi 74, c'est une loi-cadre pour permettre aux municipalités de conclure des ententes sur des sujets de leur compétence. Or, Mme la Présidente, je vais devoir apporter un papillon, du consentement évidemment de cette Chambre, pour permettre aux municipalités de conclure des ententes sur un domaine qui n'est pas encore de leur compétence à strictement parler, mais qui pose un problème. C'est celui — je pense que le député de Laval sera peut-être sensible à cela — des inondations, de la protection contre les inondations en période de crue au printemps lorsque deux ou plusieurs municipalités veulent s'unir pour construire un barrage, une digue.

Il est bien évident que, sans s'en aller dans la construction de polders comme en Hollande, il serait tout à fait inutile qu'une municipalité, je pense entre autres à Sainte-Marthe-sur-le-Lac, fassent un barrage sur le bord du lac des Deux Montagnes pour se protéger contre les inondations si Pointe-

Calumet, à côté, et l'autre ne collaborent pas, parce qu'on aurait un beau barrage juste sur la ligne des eaux devant la municipalité et il y aurait des infiltrations d'ailleurs. Je pense que non seulement c'est un domaine qui peut se prêter à ce type d'entente dans cette loi-cadre, mais encore faudrait-il que les municipalités aient cette compétence de bâtir de telles digues.

Mme la Présidente, c'est mon intention, la demande m'ayant été faite, de prévoir de tels cas dans cette loi 74. Je pourrais, je l'ai mentionné, multiplier les exemples; ce n'est pas mon intention, mais s'il y a des ententes qui pouvaient se conclure, quelles sont les difficultés qui se présentaient? Ces difficultés sont diverses. Il n'y avait pas tellement de problèmes s'il s'agissait strictement d'une prestation de service ou d'une délégation de compétence. Mais dès qu'il s'agissait de bâtir, de faire des dépenses capitales, il fallait que les deux ou trois ou quatre municipalités contractantes, comme il n'y avait pas...

Il y avait bien des comités intermunicipaux, mais comme ces comités n'avaient pas de personnalité juridique distincte des municipalités dont ils émanaient, ces comités intermunicipaux ne pouvaient pas acheter, acquérir, vendre, engager du personnel. Chaque geste devait être entériné par chacune des municipalités. Il fallait des choses aussi aberrantes que quatre résolutions de quatre conseils différents pour approuver l'embauche d'un gérant. Quatre résolutions de quatre conseils pour acheter la tonne et demie de chlore que cela prenait pour chlorer l'eau, etc. Il est bien évident, Mme la Présidente, que cela n'avait pas d'allure, outre les questions de budgets. Lorsqu'une municipalité avait atteint, par exemple, sa cote d'à peu près 10%, 12% d'endettement, elle n'était pas intéressée à s'endetter pour fournir de l'eau aux autres. A ce moment, les problèmes traînaient.

Le projet de loi no 74 vise à résoudre ces problèmes et, entre autres, on a retenu comme solution les éléments suivants. Premièrement, Mme la Présidente, c'est que ces ententes sont libres et volontaires, exception faite des ordonnances qui auraient pu être rendues par, entre autres, les SPE, les Services de protection de l'environnement. Deuxièmement, elles ne s'appliquent qu'au cas où un organisme supramunicipal ne remplit pas déjà cette fonction. Par exemple, les communautés urbaines, les conseils de comté, etc. Troisièmement, elle sera, cette régie, c'est la troisième possibilité — la prestation de services, on l'a vue, la délégation aussi — une régie intermunicipale unifonctionnelle, c'est-à-dire pour des fins précises. Il ne s'agit pas d'une corporation tous azimuts.

Mme la Présidente, il est bien important de le souligner, ne siégeront à cette régie que les élus des municipalités membres; donc, pas de non-élus sur cet organisme. Sa responsabilité unique permet aux citoyens de faire la relation immédiate entre le rôle qu'elle accomplit et les dépenses, etc. Cette loi-cadre, avec le papillon que j'apporterai, est quand même assez souple pour permettre une très grande diversité d'ententes. Elle favorise une identification claire de la part de chaque municipalité en termes de tarifs d'emprunts et de coûts, et surtout elle prévoit la signature de protocoles d'entente permettant des ajustements ou des mécanismes d'évolution, de transition ou encore de terminaison d'ententes entre les municipalités contractantes.

Je pense que l'aspect carrément novateur de ce projet, c'est celui de la création des régies intermunicipales. Cette formule vient faciliter juridiquement les choses; elle vient éviter une série de "bills" privés. Elle ne veut pas inciter à la création d'organismes intermunicipaux; c'est toujours une décision locale. Elle n'oblige pas les centaines d'ententes existantes à se mouler dans la nouvelle loi. Cela reste volontaire. Elle veut, encore une fois, faciliter aux municipalités l'exercice de leurs compétences.

Des Voix: Bravo!

M. Tardif: Je comprends l'enthousiasme de mes collègues face à ce projet de loi qui vise à résoudre tous les problèmes dans leur comté, mais on me permettra une demi-minute encore pour dire qu'il s'agit de perfectionner le Code municipal et la Loi des cités et villes, de façon que les municipalités du Québec, tout en conservant leur autonomie, leur souveraineté, puissent conclure entre elles, avec leurs voisines, des ententes en toute association libre et volontaire.

Une Voix: D'égal à égal.

M. Tardif: Et d'égal à égal, voilà! Ententes qui sont non seulement nécessaires eu égard aux circonstances, mais même, tout simplement, mutuellement intéressantes au sens plein du terme.

Des Voix: Bravo! Bravo!

La Vice-Présidente: M. le député de Laval.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: Mme la Présidente, je dois féliciter le ministre. Vraiment, il se surpasse, il est d'une sympathie communicante lorsqu'il présente des projets de loi d'administration courante, lorsqu'il agit vraiment en bon père de famille pour les municipalités, lorsqu'il ne bouleverse pas trop, lorsqu'il ne chambarde pas trop. J'imagine que ce projet de loi a fait l'objet de consultations avec les municipalités, tout va bien. Je ne sais pas, cette Chambre, ce soir est unanime à l'applaudir. Ce sera réciproque d'un côté ou de l'autre, parce que nous serons d'accord avec lui pour l'adoption d'un projet de loi d'administration courante.

Lorsqu'il dit qu'il veut innover tout cela, je lui donne son mérite. C'est un projet de loi qui bonifie, qui simplifie, qui améliore le processus qui existait déjà, autant dans le dans le Code municipal que dans la Loi des cités et villes pour permettre — cela existait déjà depuis plusieurs années — aux municipalités régis par le Code

municipal ou aux cités et villes régies par la Loi des cités et villes de mettre en commun leurs ressources pour procurer aux citoyens à meilleur compte, au meilleur coût possible des services que ces contribuables sont en droit d'exiger. Cela existait dans l'article 412a du Code municipal et l'article 468 de la Loi des cités et villes pour permettre aux municipalités l'exécution de travaux communs, à l'avantage commun d'une ou de plusieurs municipalités, ou pour l'organisation et l'administration de services (incendie, police ou autres) ou pour l'exercice de toute autre fonction qu'elles estiment, ces municipalités, avantageux d'exercer en commun. Ce qu'il y a de vraiment nouveau et ce pourquoi je félicite le ministre, c'est l'institution de régies intermunicipales. (21 h 50)

Mme la Présidente, vous allez trouver surprenant que j'appuie la formation de cette régie, mais nous croyons que la tendance actuelle, accélérée peut-être par le gouvernement d'en face, fait qu'il y a actuellement une prolifération de régies, de bureaux, de commissions, d'offices, etc., d'organismes paragouvernementaux. En somme, comme le disait mon collègue de Beauce-Sud, on est rendu — j'ai bien aimé son expression — à de l'obésité dans la machine gouvernementale. Le ministre doit être félicité en l'occurrence parce qu'il a simplifié cette régie. Il l'a dit tout à l'heure, c'est une régie toute simple, formée uniquement d'élus des conseils municipaux, qui n'alourdit pas la dépense parce que ces élus municipaux, les conseillers municipaux ou les maires qui feront partie de cette régie intermunicipale n'occasionneront pas de dépenses additionnelles parce que c'est prévu dans la loi qu'ils n'auront pas de rémunération additionnelle. C'est bon parce que cela va valoriser en même temps certains échevins municipaux. Souvent, on le sait, dans les municipalités, c'est le maire qui est en évidence, alors que là, certains échevins municipaux qui ont l'expérience, les qualifications et tout pourront être actifs dans ces régies intermunicipales, ils pourront apporter une contribution valable à leurs concitoyens; au lieu de rester dans un rôle effacé de conseillers municipaux, ils pourront être actifs dans ces régies.

Ce seront des régies simples, qui n'auront pas des budgets énormes. Je m'attends que le secrétaire de la régie, en général, sera le gérant ou le secrétaire-trésorier de la municipalité. C'est bien. D'ailleurs, ce mécanisme existait, mais il n'était pas clarifié, simplifié comme cela se trouve dans la loi actuelle. Mon collègue de Robert Baldwin me disait justement que des ententes existent à cet effet qui sont tout à fait bénéfiques entre Dollard-des-Ormeaux et Pierrefonds. J'ai connu ces ententes il y a plusieurs années, avant la création de la ville de Laval. Cela existait, mais c'était plus laborieux qu'actuellement, entre les municipalités pour les services de déversement des eaux usées ou pour l'aqueduc. Une municipalité faisait une usine de filtration et desservait les autres. Chomedey desservait Laval-des-Rapides ou Sainte-Dorothée. Nécessairement, la municipalité qui était près d'une rivière, où les eaux les moins polluées possible pouvaient se diriger, devait recevoir les canalisations de deux ou trois villes voisines qui n'avaient pas accès à ces rives. Cela existait, mais cela a évolué. Il y avait des ententes, mais c'était toujours plus laborieux.

Aujourd'hui, avec cette régie intermunicipale, cela va simplifier les choses. C'est peut-être la première fois que je vois le gouvernement d'en face s'améliorer. Je ne sais pas si c'est à la suite du résultat des dernières élections partielles, mais c'est la première fois que je vois qu'il simplifie l'administration publique. C'est la première fois et je l'en félicite! Les leçons vous servent. D'ailleurs, le premier ministre l'a dit après les élections partielles: C'est très dur, cette leçon, et je crois que cela va nous permettre de faire le point et de nous améliorer. C'est déjà un premier pas, cette loi où on simplifie l'administration publique. D'ailleurs, je suis le premier à en féliciter le gouvernement.

Un autre point où on simplifie l'administration publique, ce sont les anciennes ententes qu'il y avait entre les municipalités qui devaient recevoir les approbations autant du ministre que de la Commission municipale. Je félicite le ministre d'éliminer cette approbation pour la création d'une régie et l'approbation de ces ententes. J'ai confiance au ministre pour qu'il élimine dans ce cas-là la Commission municipale et qu'on laisse au ministre le droit de décréter l'existence de telle régie.

J'ai fini...

Une Voix: II a fini de féliciter.

M. Lavoie: Mme la Présidente, en ce qui concerne les fleurs, c'est terminé. Le pot va suivre.

Une Voix: Trop, c'est trop!

M. Lavoie: En commission, j'aurai des questions, nous aurons des questions à poser au ministre sur des droits très élargis qu'il accorde — il pourra nous l'expliquer— sur le droit d'expropriation d'une telle régie jusqu'à une étendue de 50 kilomètres. Mais c'est un point assez contradictoire dans ce projet de loi, un principe très contradictoire. Je pose — d'ailleurs, ça devient pratiquement un principe — un point où il est reconnu que les municipalités, lorsqu'elles veulent s'aventurer dans des dépenses importantes, doivent soumettre à leurs contribuables, à leurs électeurs, cet emprunt par le processus du référendum. En vertu de ce projet de loi, on met de côté le référendum, totalement. On l'élimine. Il y a un principe ou un mécanisme assez bizarre dans ce projet de loi, que si une municipalité — dans le régime actuel, avant l'adoption de ce projet de loi — voulait se bâtir un aréna de $2 millions; elle doit soumettre le règlement d'emprunt à ses contribuables sous la forme d'un référendum, alors que dans le mécanisme prévu dans le projet de loi qu'on étudie actuellement, elle peut s'entendre avec la municipalité voisine pour bâtir la même aréna. Les deux

conseils municipaux, des deux villes concernées, n'auraient plus à soumettre aux électeurs l'approbation de la dépense.

Il est prévu dans le projet de loi que la régie, pour exécuter des travaux en commun, peut faire un règlement décrétant ces travaux, les soumettre aux deux conseils ou trois conseils municipaux concernés qui approuvent, tout simplement, le règlement et la dépense; là, le secrétaire de la régie doit aviser dans les journaux ou avertir les contribuables, et les contribuables, pour se plaindre n'ont qu'à adresser leur opposition au ministre et à la Commission municipale, qui décident et peuvent approuver cette dépense importante, sans aucun recours référendaire des contribuables.

Là où le ministre, à l'occasion, est inconséquent, c'est qu'aujourd'hui même il a émis un communiqué sur le projet de loi no 57, où il pose une douzaine de questions au Parti libéral parce que M. le ministre n'accepte pas que l'Opposition endosse aveuglément ou humblement, ou religieusement, son projet de loi no 57. Le ministre — vous savez, l'Opposition est de trop et on devrait accepter le projet de loi 57 sur la fiscalité municipale — est offusqué.

M. Tardif: Mme la Présidente, je m'excuse. Est-ce que le député de Laval nous dit qu'il est prêt à répondre aux douze questions qui sont là par un oui ou par un non?

M. Lavoie: Mme la Présidente, je reviens à l'exercice du ministre, aujourd'hui, un exercice de secondaire II qu'il nous a envoyé, qui veut que l'on réponde oui ou non à douze questions, où je disais que, dans le projet de loi qu'on étudie actuellement, on élimine le droit des citoyens de s'opposer à un emprunt par la voie d'un référendum. (22 heures)

Justement, dans le document qu'il nous envoie — je ne sais pas si c'est à la troisième ou à la quatrième question, je cite le ministre dans son communiqué de presse — il y a un grand principe où il dit qu'une des questions qu'il nous pose sur la loi 57... Je lis le communiqué de presse du ministre: "Le Parti libéral est-il pour le fait que les citoyens puissent se prononcer sur les dépenses inadmissibles des commissions scolaires par le moyen d'un référendum? Les municipalités, elles, doivent aller en référendum par un mécanisme obligatoire prévu par la loi lorsqu'elles font des règlements d'emprunt et des règlements de zonage, et c'est là une des parties les plus dynamiques de la vie démocratique locale." "Les plus dynamiques de la vie démocratique locale" et par la loi 74 qu'il nous présente actuellement, les villes peuvent faire une petite entente avec les voisins, faire des dépenses pour quelque fin que ce soit, services, travaux, etc., engager les municipalités à des dépenses importantes en contournant le recours et le droit des citoyens de s'occuper par le mécanisme du référendum que le ministre qualifie de mécanisme le plus dynamique de notre vie démocratique.

Mme la Présidente, je vous dis que, dans son ensemble, le projet de loi est valable. Nous allons voter pour le principe de ce projet de loi. Le ministre aura à répondre à nos questions. Nous collaborerons avec lui pour améliorer son projet de loi. Encore une chose qui me plaît, Mme la Présidente, c'est que ce projet de loi nous donne l'exemple que lorsque des communautés, des populations voisines peuvent mettre en commun leurs ressources sans perdre leurs juridictions, confiant à un autre organisme d'autre compétences au meilleur service de leurs concitoyens, des grands territoires, des grands services, les ressources... Je me ressens, je me retrouve, Mme la Présidente et cela me fait plaisir, avec un projet de loi de cette sorte, je me retrouve très confortable dans notre Canada, Mme la Présidente.

Des Voix: Ah!

La Vice-Présidente: M. le député de Saint-Hyacinthe. A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député.

M. Fabien Cordeau

M. Cordeau: Mme la Présidente, le calme étant revenu, il me fait plaisir d'apporter ma collaboration à l'étude de ce projet de loi no 74, Loi modifiant le Code municipal et la Loi sur les cités et villes concernant les ententes intermunicipales. Je me souviens encore qu'au mois de juin dernier, nous avons dû étudier un projet de loi qui avait été présenté par les municipalités de Chambly et Marieville concernant une entente. Nous avions dû, étant donné que c'était à la fin de la session, étudier ce projet de loi dans un après-midi, première et deuxième lectures, commission parlementaire, et revenir ici à l'Assemblée pour la troisième lecture. Je crois que nous avions créé un précédent avec un projet de loi semblable à l'Assemblée nationale. A ce moment, le ministre avait constaté cetta anomalie et avait promis d'apporter des amendements au Code municipale et à la Loi des cités et villes. Je crois que le projet de loi qu'il nous présente actuellement vient corriger cette lacune en accordant aux corporations municipales et aux cités et villes le pouvoir de faire des ententes entre elles et, si besoin est, de créer une régie afin de mieux administrer leurs affaires communes et de répondre aux besoins de leurs citoyens.

Tantôt, le député de Laval mentionnait que l'Union des municipalités avait probablement été consultée. Probablement qu'elle a été consultée, mais, cet après-midi, il y en avait à l'Union des municipalités qui n'étaient pas informés. Nous avons dû leur envoyer le projet de loi, car ils ne l'avaient pas.

Mme la Présidente, cette mise au point faite, j'aimerais poser une question au ministre en ce qui regarde le papillon qu'il va nous présenter en commission parlementaire concernant les ententes sur des sujets qui ne relèvent pas directement de la compétence des municipalités. Il nous a don-

né comme exemple les Inondations qui touchent un certain territoire. J'aimerais demander au ministre si des municipalités, qui érigent un mur de soutènement pour protéger leur territoire, vont pouvoir avoir recours à l'aide gouvernementale concernant les eaux, car je crois que maintenant cette direction relève du ministère de l'Environnement.

Voilà, Mme la Présidente, les quelques commentaires que je voulais faire. En ce qui nous regarde, nous de l'Union Nationale, nous appuyons ce projet de loi.

M. Fallu: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le député de Terrebonne.

M. Elie Fallu

M. Fallu: ... en attendant la réplique du ministre, j'aimerais ajouter un petit mot...

Des Voix: Ouvre ton micro. On ne comprend pas.

M. Fallu: ... très bref et rappeler à tous mes collègues que, depuis le 8 mars 1979, à l'article a), figure toujours en mon nom un projet de loi concernant la municipalité de la paroisse de Saint-Louis-de-Terrebonne. Depuis lors, n'importe quel jour, le leader aurait pu affirmer en cette Chambre; Le projet est conforme à l'avis, les avis sont suffisants en nombre et le projet a été déposé avant l'ouverture de la session. C'est la troisième fois, Mme la Présidente, qu'il m'arrive de déposer de tels projets de loi et d'avoir à les retirer. Je dois remercier le ministre parce que, chaque fois, par le biais d'amendements à la Loi des cités et villes et au Code municipal, on vient répondre à la demande d'une ou l'autre de ces municipalités. Ce fut le cas, notamment, d'une façon assez célèbre, des lois nos 54 et 55 qui nous ont permis de construire des CLSC par le biais de nos municipalités. Saint-Louis-de-Terrebonne notamment l'a fait, Sainte-Thérèse s'apprête à le faire; le bail a été signé il y a à peine une quinzaine de jours. Aujourd'hui, on vient répondre à l'une de ces demandes que les députés ont à transporter ici en cette Assemblée régulièrement.

Mme la Présidente, je veux vous assurer: Je ne donne pas avis que je retire du feuilleton l'article a). Je préfère, en l'occurrence, en souvenir de ce projet de loi no 74 que nous allons adopter d'ici quelques jours, pour garder mémoire au feuilleton que nous avons fait une bonne action ensemble pour le bien de nos municipalités, le laisser mourir au feuilleton jusqu'à la fin de la session.

Une Voix: Très bien.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Guy Tardif

M. Tardif: Mme la Présidente, très très très brièvement, je peux en assurer le leader. Je ne suivrai pas, évidemment, l'espèce de voie dans laquelle m'a presque invité, c'est le cas de le dire, le député de Laval concernant le projet de loi no 57. Je pense qu'on aura l'occasion d'en parler et de demander des réponses, ses réponses à lui et les réponses des autres membres de l'Opposition, en commission parlementaire et en troisième lecture. Il nous expliquera pourquoi il a voté contre une loi qui procurait à la ville de Laval $9 300 000, par exemple. Il nous expliquera cela.

M. Lavoie: Est-ce que le ministre pourrait me permettre une question?

M. Tardif: Volontiers! (22 h 10)

M. Lavoie: Ecoutez! Vous promettez à tout le monde. Vous promettez à Laval $9 300 000. J'ai parlé au maire, cet après-midi. Si vous voulez me donner un chèque tout de suite de $8 millions, on va l'accepter. On va régler l'affaire. La ville de Laval m'a dit qu'avec la réforme fiscale, non seulement elle gagne $9 300 000 mais il lui manque près de $10 millions.

M. Tardif: Mme la Présidente...

M. Lamontagne: Mme la Présidente, le ministre a l'occasion d'économiser $1 300 000...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! Je ne dirai pas que vous avez fait de fausses représentations, M. le député de Laval. A l'ordre, M. le député de Saint-Louis! M. le député! M. le député de Joliette-Montcalm, s'il vous plaît! M. le député de Laval avait demandé à poser une question mais M. le député de Roberval se levait et je ne sais pas pour quelle raison vous vous leviez. Est-ce que c'était une question de règlement ou si vous aviez demandé la parole ou bien si vous aviez pensé le faire. M. le ministre des Affaires municipales, si nous parvenons à rétablir un peu d'ordre...

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: Je comprends que nos travaux peuvent se terminer incessamment. Je n'irai pas dans cette voie. Mais, Mme la Présidente, il reste un fait que si j'avais $8 millions, $9 millions ou $10 millions à donner, ce n'est pas au député de Laval que je donnerais ce montant, même s'il a déjà été maire de cette municipalité, c'est, évidemment, aux autorités actuelles et, je l'espère, à la population de Laval parce que je veux surtout que cela n'aille pas uniquement dans les coffres de la municipalité mais aussi dans les goussets des contribuables.

Le député de Laval a, par ailleurs, posé une question fort intéressante concernant les référendums dans le milieu municipal suite à ces ques-

tions de régie. Je pense que sa suggestion doit être examinée soigneusement. La raison pour laquelle cela n'a pas été mis comme tel dedans, sans être totalement exclu comme il a pu le penser, c'est que, d'une part, cette procédure décrite à l'article 412 ressemble en tout point à la procédure d'annexion. Lorsqu'il y a une requête en fusion, que deux municipalités veulent se fusionner ou l'une annexer le territoire d'une autre, une procédure similaire est suivie, les bans sont publiés — si on peut parler ainsi — le ministre des Affaires municipales demande à la commission de faire enquête, elle entend les parties. Dès lors qu'elle a fait enquête, celle-ci peut faire rapport au ministre pour qu'il soumette un projet d'arrêté en conseil ou, encore, elle peut demander aux villes concernées de tenir une consultation populaire. Donc, ce n'est pas totalement exclu; par similitude, le même processus est prévu. On pourra l'indiquer plus clairement.

Deuxièmement, bon nombre de ces cas sont des cas d'aqueduc, qui bien souvent, font suite à une ordonnance des SPE. Or, quand il y a une ordonnance des Services de protection de l'environnement, il n'y a pas de consultation dans ce cas. On doit faire tel geste pour se procurer de l'eau.

Troisièmement, Mme la Présidente, cela semblait moins requis parce que si on se met à trois pour faire une aréna, on n'aurait peut-être plus besoin d'emprunter. On pourra peut-être payer surtout avec la réforme fiscale, avec les recettes courantes. Le député de Laval a posé une question: Pourquoi le pouvoir d'exproprier à 50 kilomètres? C'est une raison bien simple, Mme la Présidente, c'est qu'il y a des municipalités au Québec —même si on regarde du haut du ciel et qu'il y a beaucoup de lacs — dont la prise d'eau est très loin. C'est la raison pour laquelle il peut sembler requis de permettre à une ou des municipalités d'exproprier très loin pour aller chercher leur eau et l'amener.

Le député de Saint-Hyacinthe, par ailleurs, a posé une question concernant les inondations —je l'ai suivi au moniteur d'en arrière — demandant si cette loi allait prévoir des subventions pour aider dans les cas d'inondations. Non, ce n'est pas une loi de subsides, Mme la Présidente. C'est une loi-cadre permettant à deux ou plusieurs municipalités de s'entendre et si des programmes d'aide à la prévention des inondations sont prévus par le ministère des Ressources naturelles, elles pourront utiliser ces sommes ensemble conjointement. Ce n'est pas une loi qui crée comme tel un programme d'aide à cela.

Mme la Présidente, je termine ces quelques remarques. S'il y avait d'autres questions, cela me fera plaisir, lors de l'étude article par article, de répondre aux membres de cette Chambre que je remercie de leur collaboration pour cette amélioration de notre droit municipal au Québec. Merci.

M. Cordeau: Mme la Présidente, en vertu de... 76.

La Vice-Présidente: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Peut-être que vous n'avez pas entendu correctement ma question. Lors de mon intervention, vous n'avez pas entendu correctement ma question. Je ne demandais pas si dans cette loi il y avait un programme de financement pour de tels travaux. C'était si les municipalités faisaient de tels travaux est-ce qu'elles pourraient avoir recours à des services gouvernementaux pour obtenir des subventions?

La Vice-Présidente: M. le ministre.

M. Tardif: Mme la Présidente, j'ai dit que j'avais saisi une partie de la question du député sur le moniteur derrière. Sa question revient à peu près au même. C'est que si les municipalités sont habilitées, de par cette loi, de conclure des ententes pour se protéger contre les inondations par des endiguements et cette loi va leur permettre d'exercer cette compétence parce que présentement ce n'est pas clair si elles ont ce pouvoir. On leur donne le pouvoir, mais cela ne donne pas automatiquement des subventions. S'il y a des programmes au ministère des Ressources naturelles pour aider et de fait il y a des programmes soit aux Ressources naturelles, soit à l'Environnement, pour permettre dans certains cas une aide allant jusqu'à 90% du coût de ces murs de protection contre les inondations. A quoi sert-il d'avoir des programmes gouvernementaux pour se protéger de telles choses si on n'a pas les pouvoirs voulus pour faire les digues? Voilà.

La Vice-Présidente: Cette motion du ministre des Affaires municipales proposant que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de loi no 74, Loi modifiant le Code municipal et la Loi sur les cités et villes concernant les ententes intermunicipales est-elle adoptée?

M. Lamontagne: Adopté. M. Brochu: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je voudrais proposer que ce projet de loi soit déféré à la commission parlementaire des affaires municipales.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. Charron: Avant de proposer l'ajournement de l'Assemblée jusqu'à demain matin, dix heures, comme convenu, m'en tenant toujours au menu

indiqué à chaque journée — je n'ai pas l'intention de prolonger la journée de travail — je voudrais donner un aperçu de la journée de demain.

La commission des affaires municipales qui vient d'être mandatée de ce projet de loi sera appelée à se réunir dès demain, après la période des questions, pour en faire l'étude article par article. De même que la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières qui devra recevoir plusieurs représentants intéressés à certains projets de loi privés dont cette Assemblée a déjà été saisie.

En Chambre, pendant que ces deux commissions se réuniront, si besoin est jusqu'à minuit demain soir, demain matin après la période des questions, ce sera la reprise de la question avec débat qui n'a pas eu lieu la semaine dernière pour les raisons que tout le monde connaît, entre 11 heures et 13 heures. A quinze heures, lorsque la Chambre reprendra ses travaux après l'ajournement du déjeuner, ce sera la fin du débat sur le budget supplémentaire. Le règlement de l'Assemblée fixe à huit heures le temps limite de débat sur le budget supplémentaire. Je crois qu'il y a une heure et demie ou une heure trois quarts à peu près de passée actuellement, ce qui fait que cinq heures et demie de débat "peuvent" avoir lieu; ce n'est pas obligatoire.

J'indique tout de suite, pour les députés qui seraient intéressés à connaître l'horaire, que demain, par exemple, si, à 18 heures, à l'unanimité de cette Assemblée, on était d'avis qu'en prolongeant d'une demi-heure ou d'une heure on pouvait mettre fin au débat sur le budget supplémentaire et l'adopter, personne du côté du parti ministériel ne s'y opposerait. Si, par contre, on décide de se prévaloir de tout le droit que prévoit le règlement, personne ne s'y opposera, bien sûr. Alors on suspendra jusqu'à 20 heures et on reprendra en soirée le débat sur le budget supplémentaire. Mais il n'y a rien d'autre sur le menu pour demain, Mme la Présidente.

Je vous propose donc d'ajourner la Chambre jusqu'à 10 heures demain matin.

M. Brochu: Mme la Présidente, juste un moment, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Nos travaux vont quand même passablement bon train. Pour permettre aux députés de planifier pour la semaine prochaine, est-ce que le leader du gouvernement serait en mesure de nous dire, avec ce qui s'est passé cette semaine comme travail, si lundi il y aura convocation ou non de l'Assemblée nationale ou seulement des commissions?

M. Charron: Mme la Présidente, je ne suis pas tout à fait seul à décider en cette matière. Lundi, à mon avis, il y aurait réunion de la commission des affaires municipales, comme convenu, puisque des citoyens sont convoqués, sur le projet de loi no 57; réunion de la commission des affaires sociales sur le projet de loi concernant les garderies, qui a été adopté ce soir, et, si possible, réunion de la commission de l'industrie et du commerce sur la Société générale de financement, puisqu'il semble rester quelques heures de travail à faire.

J'attends la réponse de l'Opposition officielle qu'on m'a promise pour demain matin. Si l'Opposition accepte cette troisième commission lundi, il n'y aurait pas d'Assemblée nationale. Sinon peu-être devrons-nous convoquer l'Assemblée quand même lundi après-midi. Je m'engage à fournir la réponse claire, nette et définitive, demain matin au moment des avis à la Chambre, après la période des questions.

M. Brochu: C'est parfait.

La Vice-Présidente: Cette motion d'ajournement des travaux de cette Assemblée est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Cette Assemblée ajourne ses travaux à demain, 10 heures.

Fin de la séance à 22 h 23

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