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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mercredi 19 décembre 1979 - Vol. 21 N° 84

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures seize minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. M. le ministre de l'Education.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Rapport annuel du Conseil supérieur de l'éducation

M. Morin (Sauvé): Permettez-moi, M. le Président, de déposer le rapport annuel du Conseil supérieur de l'éducation pour l'année 1978-1979. Ce rapport est intitulé "L'Etat et les besoins de l'éducation".

Le Président: Merci. Rapport déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues. M. le député de Dubuc.

Etude du projet de loi no 78

M. Desbiens: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente du loisir, de la chasse et de la pêche, qui a siégé le 18 décembre 1979 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 78, Loi sur la sécurité dans les sports, et l'a adopté avec des amendements.

Le Président: Merci. Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Le projet de loi qui apparaît à l'article 1) du feuilleton, M. le Président, s'il vous plaît!

Projet de loi no 85 Première lecture

Le Président: M. le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières propose la première lecture du projet de loi no 85, Loi modifiant la Loi sur la Société de développement coopératif.

M. le ministre.

M. Guy Joron

M. Joron: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur la Société de développement coopératif afin de permettre, d'une part, à cette société d'acquérir des actions d'une corporation dont les objets sont d'acquérir des biens-fonds, de les gérer ou de les mettre en valeur en vue de les vendre ou de les louer à des entreprises coopératives et, d'autre part, consentir des avances à une telle corporation.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période des questions orales.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS Négociations avec les enseignants

M. Lalonde: M. le Président, on sort à peine aujourd'hui d'une grève très dure que le gouvernement a laissé traîner pendant plusieurs semaines avant d'intervenir et voilà qu'une menace, très sombre aussi, se met à planer sur la rentrée scolaire de janvier 1980. Le ministre de l'Education sait que les négociations ne sont pas terminées en ce qui concerne les enseignants. Plusieurs votes ont été pris rejetant les offres du gouvernement en vertu de la loi 62 et des menaces de grève existent, sont très réelles pour le début de l'année 1980 qui ne se passera pas, espérons-le, comme l'année 1979, c'est-à-dire paralysée par des grèves un peu partout. Est-ce que le ministre pourrait faire le point sur la situation, rassurer la population, si possible, non seulement avec des discours, mais avec des faits, et expliquer comment il s'attend que la rentrée scolaire se fasse de façon normale, compte-tenu du fait que les négociations, d'après ce qu'on dit, seraient suspendues d'ici 24 heures? (10 h 20)

Le Président: M. le ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, on comprendra qu'en pareille matière, je ne puisse donner des garanties absolues. Cependant, puisque le député de Marguerite-Bourgeoys veut des faits et non pas seulement des paroles, je puis lui appren-

dre ainsi qu'à cette Chambre que les négociations ont été bon train au niveau des enseignants des commissions scolaires, en particulier. Elles ont progressé au cours des derniers jours au point qu'hier soir, aux dernières nouvelles que j'en ai eues, on paraphait trois ou quatre chapitres de la convention collective. Il semble que ce soit la première fois que les parties négocient vraiment dans le secteur de l'enseignement. En arrivera-ton à signer rapidement et avant l'échéance de la mi-janvier l'ensemble des conventions collectives? En arrivera-t-on en particulier à régler les deux chapitres les plus difficiles, c'est-à-dire la sécurité d'emploi et la tâche? C'est une question dont je ne connais pas la réponse. Toutefois, je puis assurer le député et les membres de cette Chambre que le gouvernement et le ministère de l'Education en particulier, de même que les comités dits patronaux, font l'impossible à l'heure actuelle pour en arriver à une solution négociée. Je voudrais reconnaître publiquement le travail remarquable qu'effectue en ce moment, dans cette perspective et avec ces objectifs, M. Lucien Bouchard.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, il semble à la réponse du ministre, que les deux points les plus importants et les plus cruciaux, c'est-à-dire, la tâche et la sécurité d'emploi, ne font pas partie des quatre chapitres paraphés qu'il nousannonçait avec beaucoup de satisfaction. Il semble aussi que les enseignants des collèges n'aient pas fait l'objet de sa réponse. Est-ce que le ministre pourrait maintenant, après nous avoir annoncé quelques bonnes nouvelles, nous donner le reflet juste de la réalité et nous dire, à l'impossible auquel le gouvernement se livre, ce qu'il fait de concret pour éviter que 1980 commence comme 1979 s'est terminé, c'est-à-dire, dans le marasme.

Le Président: M. le ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, en ce qui concerne les collèges, vous savez que les offres que nous avions faites ont été acceptées aux tables de négociation par les représentants de la fédération nationale des enseignants du Québec, laquelle fédération est affiliée à la CSN.

Du côté de la FEQ, Fédération des enseignants du Québec, qui est rattachée à la CEQ, je pense qu'on peut dire qu'on n'a jamais vraiment négocié. Alors que dans un cas il y a des traditions de négociation, dans l'autre, on peut parler d'une tradition de non-négociation. Cette année n'a pas été tellement différente à cet égard des négociations dont on a fait l'expérience dans le passé.

Nous nous étions donc mis d'accord avec la Fédération nationale des enseignants du Québec, laquelle évidemment est allée faire confirmer l'acceptation de nos offres par ses membres dans les divers CEGEP. Le vote a été le suivant: 21 CEGEP en faveur, 18 CEGEP contre; cependant au niveau des votes, il y a eu une légère majorité de 148 voix, si ma mémoire est bonne, contre les offres gouvernementales sur un total de quelque 4000 voix lequel représentait à peu près la moitié des enseignants qui avaient le droit de vote, de sorte que c'est l'impasse. Une majorité de collèges en faveur, une légère majorité d'enseignants contre. Depuis lors, nous avons offert de rencontrer la FNEQ pour revoir certaines clauses qui n'étaient pas satisfaisantes du point de vue de la rédaction, et nous demeurons disponibles pour discuter de ces questions.

En ce qui concerne la sécurité d'emploi, le gouvernement a fait savoir, il y a déjà quelque temps, qu'il était prêt à en discuter les modalités comme, par exemple, la question de savoir si l'on doit calculer les 50 kilomètres à vol d'oiseau ou d'hélicoptère ou bien par la route. Nous avons fait savoir que nous étions prêts, bien sûr, à calculer cette distance par la route. Il y a donc là des possibilités de discussion et nous essayons, dans toute la mesure du possible, de donner satisfaction. Toutefois, pourrons-nous, par exemple, répondre à une autre exigence se situant celle-là, aux niveaux primaire et secondaire, qui voudrait qu'on n'exige plus de certificat du médecin, par exemple, ou d'attestation pour les absences de moins de trois jours? Je ne pense pas que le gouvernement puisse consentir quoi que ce soit au sujet d'une question comme celle-là. Nous avons déjà un problème très coûteux d'absences du lundi et du vendredi chez les enseignants, les "longues fins de semaine". Si, par hasard, il n'y avait plus d'explication à donner pour les absences de plus de trois jours, le coût actuel, qui est de l'ordre de $48 millions, je crois, pourrait augmenter encore énormément et, naturellement, le gouvernement hésite beaucoup à s'engager dans cette voie, comme on le comprendra.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, les réponses du ministre sont très longues, mais, au-delà des certificats médicaux et du kilométrage par la route, est-ce que le ministre a des choses importantes à nous dire? Par exemple, l'impossible qu'il a promis que le gouvernement ferait pour éviter la grève, qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que le gouvernement est prêt, pour assurer la rentrée de janvier dans l'ordre, à considérer une loi spéciale, comme c'est maintenant l'habitude de l'autre côté, ou bien s'il va attendre la fermeture de nos écoles et de nos CEGEP pendant plusieurs semaines avant d'intervenir en janvier ou en février?

Le Président: M. le ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, nous avons la conviction qu'il est possible, pour la première fois, de négocier vraiment une convention collective dans le domaine de l'éducation. C'est ma conviction. Nous y travaillons très ferme. En ce moment, nous négocions tous les jours, quand ce n'est pas de nuit. Nous allons continuer, dans l'espoir de réussir.

Le Président: M. le député de Gatineau.

Citation de M. Ryan dans un dépliant

M. Gratton: M. le Président, il y a deux semaines, le premier ministre prenait avis d'une question que je lui posais pour connaître les mesures qu'il entendait prendre pour rétablir les faits auprès de milliers de citoyens qui ont été trompés par au moins cinq députés péquistes qui ont colporté, dans des bulletins publiés et distribués par l'Assemblée nationale, un texte tronqué et mensonger.

On sait que, dans un éditorial qu'il signait le 23 septembre 1967, le chef de l'Opposition officielle avait fait valoir que le fédéralisme est la seule voie valable pour le Québec et que cette partie de son éditorial a été triturée de façon à lui faire dire qu'au contraire c'est la souveraineté-association qui est la seule voie. Tous ont reconnu que la diffusion de ce texte par le député de Jonquière et vice-président de l'Assemblée nationale, par le député de Saint-Jean et ex-whip en chef du Parti québécois, par le député de Crémazie et ministre des Affaires municipales aussi bien que par le député de Hull et ministre des Travaux publics, le député de Rivière-du-Loup et peut-être bien une trentaine d'autres députés a non seulement porté atteinte à la crédibilité du chef de l'Opposition, mais a surtout nettement induit en erreur des milliers de citoyens québécois.

J'aimerais donc poser les questions suivantes au premier ministre. J'ai pris la peine de les écrire pour qu'elles soient bien claires. Premièrement, le premier ministre trouve-t-il normal que, malgré les nombreuses occasions que nous leur avons fournies depuis maintenant six semaines que nous parlons de cette affaire à l'Assemblée nationale, aucun des cinq députés que j'ai nommés n'ait daigné se rétracter, sauf le député de Jonquière, qui a admis avoir été le premier à copier ce texte — ici, j'ajouterai qu'on l'a copié, mais on l'a aussi édité quelque peu pour lui faire dire ce qu'on voulait bien qu'il dise — pour avoir copié ce texte à partir d'une lettre ouverte d'un lecteur publiée dans le Montréal-Matin du 31 août 1979?

Deuxièmement, le premier ministre sait-il que le lecteur qui a signé cette lettre, M. Gérard Tassé, de Gatineau, même si le député de Jonquière a pris bien soin de spécifier qu'il ne le connaissait pas, est quand même bien connu dans les milieux péquistes de l'Outaouais pour être un ex-membre de l'exécutif du Parti québécois dans le comté de Papineau, un membre actuel de l'exécutif du Conseil des hommes d'affaires québécois de l'Outaouais, cette officine du Parti québécois, dont le président à vie, Emmanuel Marcotte, est membre de l'exécutif national du Parti québécois? (10 h 30)

Troisièmement, le premier ministre sait-il que ce même Gérard Tassé, conseiller officieux du député de Hull, organisateur du député de Papineau et collaborateur assidu aux pages consacrées à l'opinion du lecteur dans tous les journaux du Québec, n'en est pas à sa première expérience dans le domaine des faux documents? Je pourrai fournir, de façon confidentielle, au premier ministre des détails là-dessus s'il le désire.

J'en viens à ma question, M. le Président. Compte tenu de tout cela et du fait qu'il a maintenant eu six semaines d'avis pour vérifier les faits, le premier ministre pourrait-il ce matin nous dire quels gestes concrets, quelles mesures concrètes il entend prendre pour s'assurer que les députés responsables feront des rétractations en bonne et due forme auprès des milliers de citoyens qui ont été induits en erreur?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je ne vois vraiment pas, M. le Président, ce qui justifiait les applaudissements dans ce cas, parce que le discours que vous avez permis au député était une combinaison, était truffé aussi bien d'insinuations — et je vous jure que si on s'y mettait à propos de certains poteaux libéraux dans tous les coins, on pourrait avoir du plaisir toute la journée — que de mesquinerie, en passant, pour un homme particulièrement respectable qui est un homme d'affaires bien connu et membre de l'exécutif national, président local du Parti québécois, M. Marcotte de Hull. Je regrette que le député se sente obligé d'assaisonner son propos de ce genre d'intervention, à mon avis, de bas étage.

En ce qui concerne l'article du chef libéral, tout là-bas, quand il évoluait encore, quand il était au Devoir, en 1967, le travail a été fait par quelqu'un dont nous ne sommes pas responsables, pas plus — parce que ce serait lourd à porter — que les libéraux ne sont responsables de tous les calomniateurs qui se promènent régulièrement en leur nom. Je dois dire que ce qui est arrivé est regrettable, que nous l'avons regretté et, en ce qui concerne les députés — ils l'ont dit — c'était une erreur de bonne foi, ce repiquage d'un texte dans la colonne des lecteurs. Je dis à mon tour que c'est regrettable. C'est la sixième ou septième fois que le député évoque ce malheureux incident; je répète de nouveau que nous le regrettons. Quant à moi, cela devrait suffire pour cette année parce que cela va avoir fini, bientôt, de se substituer à autre chose que l'on entend depuis longtemps, en attendant, en effet, que les Québécois et ses propres collègues puissent avoir le même avantage que le premier ministre Davis et puissent évaluer les nouveaux textes du député d'Argenteuil qu'on attend avec impatience; le vieux texte de 1967, il me semble, aura fait assez de millage pour cette année.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau, dernière question.

M. Gratton: Je regrette beaucoup que le premier ministre essaie de faire bifurquer la question. Je voudrais lui demander tout simplement s'il

est conscient qu'en refusant de prendre ses responsabilités ce matin, en refusant de faire en sorte qu'il y ait des rétractations en bonne et due forme qui soient faites, il se rend complice lui aussi d'une fraude intellectuelle monumentale.

Le Président: Bon. M. le député de... A l'ordre, s'il vous plaît!... M. le député de Gatineau, j'ai toléré, ce matin, un très long préambule pour une question qui a été posée à de multiples reprises. Encore une fois, je vous signale que j'ai toléré un très long préambule. Je vous ai déjà signalé que j'étais loin d'être certain que cette question répondait aux normes édictées pas l'article 165 de notre règlement à l'occasion d'une question supplémentaire que je tolère encore, mais je vous demande de ne pas être vous-même intolérant à l'égard du règlement.

M. Gratton: M. le Président, je pensais être tout à fait respectueux du règlement en demandant au premier ministre de faire en sorte que ses députés cessent de tronquer les textes et se rétractent lorsqu'ils l'ont fait.

M. le Président, tout simplement, est-ce que je peux finir ma question, peut-être? Je voudrais simplement demander au premier ministre si nous devrons, de ce côté-ci de la Chambre, présenter une motion privilégiée d'ici la fin de cette session ou si nous devrons intenter des poursuites devant les tribunaux pour qu'il prenne ses responsabilités et fasse en sorte qu'il y ait des rétractations en bonne et due forme.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour une dernière fois, quant à moi, je répondrai au député en disant que l'incident regrettable qui a été commis au départ par quelqu'un qui prendra ses responsabilités si on veut prendre des recours en face... ce texte tronqué qui a été employé de bonne foi par un certain nombre de députés, pour la sixième ou septième fois, je dis que je le regrette. Si cela devait continuer, on pourra peut-être commencer à éplucher avec la même consistance que le député, certains des propos, par exemple, non pas d'un citoyen qui a ses responsabilités à prendre, mais qui est un simple citoyen, mais de gens, comme le député d'Argenteuil qui, le jour même de la parution du livre blanc du gouvernement, s'arrangeait, en anglais seulement, pour en fausser systématiquement le sens, et publiquement.

M. Ryan: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: J'ai déjà réfuté, dans cette Chambre, les propos qui viennent d'être tenus par le premier ministre et je n'entends pas répéter ce matin... Je les ai réfutés ici en bonne et due forme. Je profite de l'occasion pour dire que, tantôt, il y avait une autre insinuation mensongère dans ce qu'il a dit à propos de ma rencontre d'hier avec M. Davis.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question additionnelle.

M. Ryan: Laisse-le aller. Il va embarquer.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je regrette — parce qu'il s'agissait d'une question de privilège — de ne pas avoir avec moi le texte dans lequel le député d'Argenteuil trompait sciemment, mais en anglais seulement, la population.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, mettant de côté pour un instant ces échanges qui s'éloignent, jusqu'à un certain point, de la question principale et qui comportent de la part du premier ministre un manque de retenue évident, on me permettra, M. le Président, de poser la question additionnelle suivante au premier ministre. Le premier ministre, étant un journaliste, sait fort bien que lorsqu'un journal se trompe, il y a...

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, est-ce qu'il y a un discours sur une deuxième question supplémentaire?

Une Voix: Ah! Il est nerveux. M. Ryan: A l'ordre! A l'ordre!

Le Président: M. le leader parlementaire, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je posais ma question additionnelle avec la plus grande sérénité qui contraste, évidemment, avec l'humeur du premier ministre. M. le Président, je demande ceci au premier ministre, qui est un journaliste de carrière et qui sait ce qui arrive lorsqu'il y a une erreur, même de bonne foi, comme il le prétend. Le premier ministre, ne croit-il pas qu'à l'occasion du prochain envoi sans adresse de chacun de ses ministres et députés qui ont ainsi tronqué la vérité, de bonne foi, comme l'a dit le premier ministre et je suis prêt à accepter sa parole, il devrait demander à chacun de ses ministres et à chacun de ses députés, dès le prochain envoi sans adresse — ce serait un minimum — de réparer au moins partiellement le tort ainsi fait et de s'engager collectivement et individuellement à faire paraître dans ces envois une correction adéquate au moins à ce qui s'est passé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais prendre avis de la question en examinant la

possibilité, dans un texte qu'on pourrait faire circuler, de mettre non seulement peut-être la rectification que demande le député de Bonaventure — parce que, après tout, si cela ne suffit pas après six fois ici en Chambre, peut-être que ce serait utile — mais en même temps d'illustrer, par une bonne série de citations, ce que représente la consistance de la pensée libérale et de son chef actuel.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

Politique d'achat de produits québécois

M. Goulet: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commerce. Il est bien connu que ce gouvernement, dès son arrivée au pouvoir, et cela à grand renfort de publicité très bien orchestrée, a affirmé à plusieurs reprises qu'il voulait faire de sa politique d'achat chez nous, d'achat de produits québécois, la pierre d'assise de sa fameuse politique de développement économique. C'était, à ce moment-là, supposément, la découverte du siècle. Or, j'ai été fortement surpris de lire, et cela à l'instar de mes collègues en cette Chambre, les affirmations du ministre de l'Industrie et du Commerce, à savoir que la politique d'achat du gouvernement n'avait pas, jusqu'ici, donné les résultats escomptés. (10 h 40)

Dans un premier temps, M. le Président, je voudrais demander au ministre dans quel secteur d'activité précisément la politique d'achat du gouvernement a été un échec et, dans la mesure du possible, si le ministre peut nous identifier les causes ou les vraies raisons de cet échec.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Duhaime: M. le Président, je pense que ce n'est pas une grande surprise d'admettre tout simplement une réalité. J'ai eu l'occasion de répondre à une question en conférence de presse l'autre jour et j'ai dit tout simplement que mon évaluation du dossier était que je n'étais pas satisfait des retombées quant à la politique d'achat et que j'avais l'intention d'y apporter des resserrements.

Vous me demandez quelles en sont les raisons. Je vais en donner seulement une pour l'instant. Pour tout le réseau des affaires sociales, par exemple, et le réseau de l'éducation, la politique d'achat du gouvernement n'est pas contraignante, elle est faite sur une base incitative et elle donne, à notre point de vue, de faibles résultats, quoique je n'aie pas en main ce matin les chiffres à l'appui pour pouvoir illustrer mon dire. Ce que j'ai l'intention de faire — c'est ce que nous étudions actuellement au ministère comme possibilité — c'est de recommander au gouvernement d'étendre la contrainte de la politique d'achat non seulement au réseau des affaires sociales, mais au réseau de l'éducation. Ces deux réseaux achètent pour plusieurs centaines de millions, sinon des mil- liards de dollars par année, et je pense qu'il y aurait lieu, M. le Président, de se servir d'abord, avant de laisser des biens et des services être acheminés au Québec à partir d'ailleurs alors que nos entreprises pourraient très certainement fournir les mêmes biens et les mêmes services à des prix concurrentiels.

M. Goulet: Question supplémentaire, M. le Président.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Le ministre de l'Industrie et du Commerce a déclaré également qu'il pourrait probablement — il vient de le dire — songer à modifier la politique d'achat du gouvernement de manière à rendre celle-ci obligatoire pour les commissions scolaires et les corporations municipales. Cette déclaration a été secondée par son collègue, le parrain de la politique d'achat, M. Bernard Landry. Il semble d'accord avec la position de M. Duhaime et, je le cite: "II y a deux ans, on avait invité les réseaux du gouvernement, les commissions scolaires et les municipalités, à l'utiliser. Or, il semble qu'on ne s'est pas rendu à notre invitation; il faudrait peut-être penser à d'autres moyens qu'une simple invitation." Fin de la citation.

M. le Président, j'aimerais savoir du ministre d'Etat au Développement économique... Il n'est pas ici, je continuerai de m'adresser à son collègue de l'Industrie et du Commerce, j'aimerais que le ministre nous apporte des précisions sur ce qu'il entend par l'application de règles coercitives dans ce domaine, particulièrement dans le domaine de notre activité économique, et également au niveau — il arrive — des commissions scolaires et des municipalités quant à obliger ces deux organismes à pratiquer cette politique d'achat. Je termine ma question en demandant, dans un deuxième volet, au ministre ce qui suit: II sait fort bien que ces deux organismes sont des gouvernements locaux et j'aimerais savoir s'il a discuté de cette suggestion avec ces deux paliers de gouvernement et quelle a été leur réaction?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Duhaime: M. le Président, il est exact qu'il a été évoqué, lors de cette conférence de presse, la possibilité, je dis bien, que la politique d'achat pourrait éventuellement atteindre le réseau des affaires municipales et des affaires scolaires. Mais, entre évoquer une telle chose et la faire, je pense qu'il y a encore passablement d'échanges à avoir. Ce que nous avions essentiellement en tête, ce sont les cas où des programmes sont subventionnés à 90% ou à 100% à l'endroit d'une corporation scolaire ou d'une corporation municipale. Il nous apparaît logique que le gouvernement puisse exiger que sa politique d'achat soit respectée. Maintenant, il faut bien lire ces propos à la lumière des dispositions de la loi 57 quant à la réforme de

la fiscalité municipale qui, d'une part, accordant son autonomie aux municipalités, enlève d'autant la marge de manoeuvre discrétionnaire et arbitraire que le gouvernement avait traditionnellement à l'endroit des municipalités. Je pourrais en dire autant au sujet des corporations scolaires.

Bref, M. le Président, nous pourrons agir rapidement, je pense, dans les réseaux qui sont du ressort du gouvernement, c'est-à-dire, l'éducation et les affaires sociales et dès les premières semaines de 1980, j'ai l'intention de m'atteler à ce travail en collaboration, bien sûr, avec mon collègue, le ministre d'Etat au Développement économique, afin de faire de nouvelles propositions au gouvernement.

Le Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Si vous me permettez, M. le Président, si j'ai bien compris le ministre, il aimerait ou il entend obliger les commissions scolaires et les municipalités à se prévaloir de cette politique d'achat chez nous lorsqu'il s'agit de budgets subventionnés. Je veux savoir, concernant l'autonomie des municipalités et aussi des commissions scolaires, même s'il ne leur en reste pas beaucoup depuis que ce gouvernement est là, s'il entend également obliger ces deux organismes pour ce qui est des autres achats qui ne sont pas subventionnés concernant tout le budget de ces municipalités, en autant, bien sûr, que c'est possible, en autant que les produits sont disponibles chez nous.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Duhaime: Bien sûr, M. le Président, que nous allons inciter très fortement les corporations municipales et les commissions scolaires aussi bien locales que régionales à suivre les grandes lignes de la politique d'achat. Je pense également que ces corps constitués sont des organismes autonomes et cela reste d'abord et avant tout leur décision à l'intérieur de leur marge budgétaire.

M. Raynauld: M. le Président...

Le Président: M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: ... c'est un fait que le gouvernement en début de mandat avait fait de la politique d'achat une pièce extrêmement importante, sinon l'essentiel, de sa politique économique. Il l'a annoncé avec des fanfares et des trompettes. Je voudrais lui demander: Est-ce que cela ne vaudrait pas un rapport qui pourrait être soumis à cette Chambre, un rapport sur l'application de cette politique? Cela fait trois ans qu'on en a parlé. Il n'y a jamais eu un rapport de fait sur ce qui se passe en ce qui concerne la politique d'achat. Est-ce que cela ne serait, pas le temps que le gouvernement dépose de l'information sur ce sujet?

Le Président: M. le ministre d'Etat au Développement économique.

M. Landry: Je pense qu'on a déjà répondu il y a longtemps au député d'Outremont sur cette question. Il n'est pas sans savoir qu'à Genève, lors de la dernière ronde de négociations, le Tokyo Round, les achats des gouvernements étaient compris dans l'appareil général de désarmement protectionniste. Le gouvernement du Canada sans trop de consultation est entré, comme c'était son droit et son devoir de le faire, dans cette négociation. Avant de publier quelque rapport détaillé — le député d'Outremont a raison qu'un rapport de portée générale donnant les résultats, qui sont bons en gros, concernant la politique des achats pourrait être utile pour tout le monde — avant de donner un rapport détaillé, il faudrait absolument que toutes les retombées du Tokyo Round soient analysées. Nous ne voulons pas, d'aucune manière, mettre le gouvernement du Canada d'une façon abusive dans l'embarras plus qu'il ne le faut. Quand c'est le temps de le mettre dans l'embarras pour des raisons de fond, on le fait et vous nous reprochez de le faire trop souvent. Quand il s'agit des intérêts commerciaux à discuter avec les autres peuples, que nous aurons peut-être nous-mêmes à discuter directement avant longtemps, nous ne voulons pas transgresser par avance les règles du GATT. Quant à un rapport général, mes collègues de l'Industrie et du Commerce de même que des Approvisionnements pourront très bien considérer d'en produire un à cette Chambre au cours de 1980.

Le Président: M. le député de Pointe-Claire.

Signalisation sur le transport de matières dangereuses

M. Shaw: Mr President, I would like to address this question to the minister of Transport. With the unfortunate accident in Mississauga, Canadians are becoming very aware of the implicite dangers in transporting dangerous materials. While that accident took place on a train, we know that as much or perhaps more dangerous materials are being transported in trucks, especially in the province of Québec. This danger is implicit and even greater when it involves tunnels, such as the Ville-Marie tunnel in Montréal and the Louis-Hip-polyte-Lafontaine tunnel. Now in the interest of safety, disregarding the fact that the Supreme Court judgment says that all regulations must be both in English and French, in the interest of safety, would the minister tell the House, how soon he is going to remove the unilingual sign prohibiting the transport of dangerous material through tunnels? (10 h 50)

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, la question que me pose le député de Pointe-Claire ne touche pas vraiment au domaine du transport comme tel. Je croyais que, ce matin, il voulait me poser une question sur la mise en application du nouveau plan de transport de la région de Montréal qui devrait l'intéresser au plus haut point. D'après ce

que je peux voir, il est plus intéressé à l'arrêt-stop ou aux choses semblables ce matin.

M. Shaw: Question de règlement, M. le Président.

M. de Belleval: Quoi qu'il en soit, c'est le ministre d'Etat au Développement culturel qui est responsable de l'application de la politique linguistique du gouvernement. Or, je lui demande de répondre à cette question, s'il vous plaît.

Le Président: M. le ministre d'Etat...

M. Shaw: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: I asked a very simple question about a policy of the Ministry of Transports. He is responsible for the signs on the highways of this province and he is already digressing. Is he afraid to answer a simple question concerning highway safety and the transport of dangerous materials?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, je pense que le député de Pointe-Claire...

M. Shaw: M. le Président, chaque fois que je pose une question sur la sécurité — un aspect très valable dans cette province — on me dit que même si ce n'est pas comme cela en Ontario, il ne faut pas qu'on respecte les demandes de sécurité ici, au Québec.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, le député de Pointe-Claire me pose une question sur l'application de la politique linguistique du gouvernement, sur l'application de la Charte de la langue française en ce qui concerne l'affichage sur les autoroutes. Comme tel, je suis responsable de l'affichage, mais la langue de l'affichage découle de l'application de la loi 101. C'est le ministre d'Etat au Développement culturel qui est responsable de l'application de la loi 101. Il me semble que c'est simple, M. le Président.

Une Voix: M. le Président. Le Président: M. le député de Terrebonne.

Métro de la région nord de Montréal

M. Fallu: Ma question s'adresse au ministre des Transports, mais cette fois sur le plan de l'équipement du transport des voyageurs dans la région de Montréal.

La question n'est pas plantée, parce que le piquet s'en vient... C'est très beau un petit milliard de dollars dans la région de Montréal, sauf que ma question va porter surtout sur un de ces aspects. On a des métros, on a les trains de banlieue, on a également des métros de banlieue. Je remarque que, dans son plan d'équipement, le métro de banlieue prévu pour la région nord, qu'on appelait habituellement le TRRAMM ou le REM, Montréal-Mirabel, devra s'arrêter à Laval, c'est-à-dire qu'il n'y aura que deux stations, Concorde et Vimont. J'aimerais savoir de la part du ministre — parce que chez nous, c'est une déception assez considérable — pourquoi ce métro va-t-il s'arrêter à Vimont et non pas monter pour le moins jusqu'à Rosemère ou Sainte-Thérèse.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: C'est une très bonne question, M. le Président. Elle va intéresser d'autant plus nos amis d'en face qui nous parlent toujours du fédéralisme rentable et qui, dans cette question particulière, pourront faire des pressions importantes au cours des jours prochains vis-à-vis de leurs amis du Parti libéral fédéral, avec le vieux chef qui a décidé de revenir d'ailleurs, qu'ils connaissent bien, ils pourront peut-être obtenir de ce Parti libéral fédéral des engagements quant à l'avenir de l'aéroport de Mirabel. Ce point est relié directement à la question que pose le député de Terrebonne, en ce qui concerne la prolongation possible du métro régional qui se rendra à Laval, mais qui pourra être prolongé jusqu'à Mirabel conformément aux plans qui ont été d'ailleurs établis par le ministère des Transports, mais qui dépendent pour leur réalisation économique de la décision du gouvernement fédéral quant à l'avenir de l'aéroport de Mirabel.

Dans ce dossier, comme dans ceux de l'usine d'eau lourde de Laprade, de la Place Guy-Favreau, du centre des données fiscales de Jonquière, de la rénovation des ports et des quais du Québec, des gros dossiers comme des petits...

La semaine passée, j'étais à Montmagny et on avait aussi ce problème: Le gouvernement fédéral se traîne les pieds pour réparer, par exemple, les quais, les débarcadères de l'Ile-aux-Grues et de Montmagny. Des petits dossiers et des gros dossiers. On est les otages du gouvernement fédéral dans ce domaine du fédéralisme non rentable. Le cas de Mirabel est le plus gros. Je ne vois pas pourquoi l'Opposition rit. C'est un des dossiers les plus importants pour l'avenir économique de Montréal. Depuis dix ans que ce dossier est en panne à cause de l'incompétence de vos propres amis du fédéral!

Le Président: M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: Question additionnelle, s'il vous plaît. Etant donné, si je comprends bien, que ce n'est pas pour demain la veille, est-ce que le gouvernement du Québec pourrait, seul, faire au moins une petite part là-dedans? Je vais préciser laquelle. Il arrive que les petites gens chez nous ont reçu des avis de réserve pour l'emprise du métro. Est-ce qu'on pourrait entre-temps, nous

seuls au Québec, pour le moins acheter ces terrains pour que les gens ne restent pas mal pris avec ces avis de réserve sur le dos pendant plusieurs années?

Deuxième question. Puisqu'il y aura une station à Vimont, il faudra donc que le grand satellite de Sainte-Thérèse, c'est-à-dire 60 000 personnes — c'est, en fait, un satellite plus qu'une banlieue — se rabatte sur le métro de Vimont. Est-ce qu'on pourrait alors établir au moins deux des quatre voies prévues de l'autoroute 19 jusqu'à la 440 pour avoir une meilleure liaison routière avec la station Vimont?

M. Blank: Commencez par les deux bouts. Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: J'aime mieux faire débloquer des travaux par tous les bouts possibles que d'être bouché par vous savez quoi, M. le député de Saint-Louis! Mais, M. le Président, revenons à nos moutons, revenons à un sujet important que le député de Saint-Louis a interrompu par ses blagues habituelles. Pour ma part, j'ai confiance qu'un jour le dossier de Mirabel débloquera; s'il ne débloque pas grâce au gouvernement fédéral, il débloquera quand nous aurons toutes les compétences en matière de transport, ce qui ne saurait tarder. Nous avons obtenu que la municipalité de Sainte-Thérèse conserve, réserve des terrains pour l'emplacement de la future gare du transport régional qui desservira un jour Sainte-Thérèse et éventuellement Mirabel.

Je suis disposé, comme ministre des Transports, à faire l'acquisition de ce terrain, plutôt que de simplement le réserver, de façon justement à démontrer notre confiance dans l'avenir de cette région et dans l'avenir du développement aéroportuaire de Montréal. C'est, d'ailleurs, ce que nous avons fait cette semaine, quand nous avons annoncé le plan d'équipement de transport de la région de Montréal. Malgré les promesses répétées du gouvernement fédéral d'aider le gouvernement du Québec à rénover les trains de banlieue, nous avons quand même décidé d'agir, parce que, si on attend après le Père Noël fédéral, on n'obtiendra jamais rien et les Québécois demeurent des otages des circonférences fédérales-provinciales!

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Cordeau: Pardon?

Le Président: Est-ce qu'il s'agit d'une question additionnelle?

M. Cordeau: Non, d'une question principale, mais très importante.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Dernièrement, nous apprenions...

M. Lavoie: M. le Président, question de règlement.

Le Président: M. le député de Laval.

M. Lavoie: La question principale a été posée par un député ministériel sur un sujet, le transport en commun, qui concerne la région nord de Montréal, qui concerne sans aucun doute le député de Terrebonne, mais qui concerne également les comtés de Laval, Fabre et Mille-Iles. Je crois qu'il serait tout à fait normal qu'on ait au moins une petite question additionnelle sur le sujet étant donné que le ministre n'a même pas répondu au député de Terrebonne.

M. de Belleval: Question de privilège, M. le Président. (11 heures)

Le Président: M. le ministre des Transports. M. le député de Laval, si vous n'avez pas d'objection, je comprends qu'il ne reste que quatre minutes pour la période de questions. Ce matin, l'Union Nationale n'a eu droit qu'à une très brève question. Or, le député de Saint-Hyacinthe, que je vois rarement insister autant pour obtenir une question, m'indique qu'il a une question très importante à formuler. Alors, je pense... Mais il y a déjà eu des questions qui ont été posées en rapport avec ce sujet.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président...

M. de Belleval: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: Je m'excuse, mais le député de Terrebonne avait posé une question à double volet et j'ai oublié de répondre à la deuxième partie de la question du député de Terrebonne. C'est mon privilège de répondre aux questions, j'espère, quand vous posez des questions?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Pour me conformer... M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît! Pour me conformer à la règle que j'applique normalement et pour permettre au député de Saint-Hyacinthe d'avoir sa question, vous reviendrez avec un complément de réponse tout à l'heure.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

Indexation des prestations d'aide sociale

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Dernièrement, nous apprenions que la Commission des accidents du travail, soit la CAT, indexera au 1er janvier de 9% les prestations que reçoivent actuellement les accidentés du travail. Ce matin, je veux

me faire l'interprète de tous les bénéficiaires du bien-être social qui, eux aussi, ont à faire face à l'inflation, au coût de plus en plus élevé de la nourriture et également du chauffage.

Je voudrais demander au ministre des Affaires sociales si le gouvernement a pris la décision d'indexer les prestations du bien-être social au 1er janvier prochain et, si oui, a-t-il l'intention de suivre l'exemple de la CAT et d'indexer l'aide sociale à 9%?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, je serais très heureux de pouvoir annoncer ce matin que le gouvernement a pris la décision d'indexer l'aide sociale. Cependant, je dois dire au député de Saint-Hyacinthe que c'est à l'ordre du jour de la réunion du Conseil des ministres d'aujourd'hui, laquelle doit commencer à 13 heures ce midi. Je serai évidemment des plus heureux, dans l'hypothèse où le Conseil des ministres déciderait aujourd'hui d'indexer cette aide sociale, de pouvoir donner un complément de réponse demain au député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président...

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: ... étant donné que cette question intéresse au plus haut point une bonne partie de la population du Québec, je vous demande s'il serait possible au ministre des Affaires sociales de faire connaître à cette Chambre, dès que la décision sera prise, votre complément de réponse, aujourd'hui même, avant de faire votre conférence de presse.

Une Voix: II est temps qu'on parte en vacances!

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Le député de Saint-Hyacinthe devient un peu acerbe. Ecoutez, M. le Président, pour répondre bien clairement à cette question, je suis prêt à informer cette Chambre aussitôt que la décision du Conseil des ministres aura été prise.

Le Président: M. le ministre des Transports, si vous voulez apporter un complément de réponse?

Métro de la région nord de Montréal (suite)

M. de Belleval: Oui, M. le Président. Vous aurez noté que, tout à l'heure, le député de Laval protestait parce qu'il n'avait pu poser lui-même une question supplémentaire, compte tenu de l'intérêt qu'il porte à ce dossier du transport en commun de la région de Montréal et compte tenu que son propre comté est affecté par ces problè- mes. Je remarque cependant que ce n'est pas lui qui, ce matin, pose des questions sur ce dossier, mais le député de Terrebonne.

Tantôt, pendant que j'étais en train de répondre, il essayait de ridiculiser les réponses que je donnais. Pour compléter la réponse au député de Terrebonne en ce qui concerne la possibilité d'améliorer les liaisons entre Sainte-Thérèse et Laval en particulier, et le reste de la région de Montréal, il va sans dire que, dans le cours de l'élaboration des plans quinquennaux du ministère des Transports, cette question particulière, qui ne relève pas comme telle du dossier du transport en commun de la région métropolitaine de Montréal, pourra être étudiée et des améliorations seront apportées dès le printemps prochain par l'ouverture d'un nouveau pont dans l'axe de l'autoroute 19 entre Bois-des-Filion et la municipalité de Laval.

Le Président: M. le député de Laval.

M. Lavoie: Question additionnelle, M. le Président. Nous avons eu l'occasion de poser plusieurs questions au prédécesseur du ministre actuel des Transports, le député de Saguenay, depuis trois ans, près de trois ans et demi sur cette question. Le ministre est sans doute au courant que les plans étaient faits et que les terrains étaient déjà réservés avant le 15 novembre 1976. Les plans étaient tracés. Les terrains étaient réservés. Il y avait des réserves comme l'a mentionné le député de Terrebonne. Cela fait trois ans et demi qu'on vous demande quand les travaux vont commencer. Le ministre pourrait-il prendre un engagement devant cette Chambre d'arrêter de tourner en rond depuis trois ans et demi et de nous dire quand les travaux vont commencer sur ces multitudes de projets qui sont lancés en l'air à quelques mois d'élections générales?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, le député de Laval ne s'embarrasse pas de contradictions. D'une part, il vient de me reprocher, dans la fin de sa question, de prendre une décision sur ces dossiers qui étaient en marche depuis six ans et, d'un autre côté, il me reproche le fait qu'il a fallu six ans pour élaborer les dossiers. Je pense qu'il faudrait qu'il se fasse une idée. A-t-on trop tardé ou si on agit trop vite maintenant? Je tiens à dire, M. le Président, qu'en ce qui nous concerne, il n'est pas question d'élections générales à court terme, malgré les faux espoirs du député de Laval.

Le Président: Fin de la période des questions. A l'ordre, s'il vous plaît! Motion non annoncée.

M. de Belleval: Puis-je terminer ma réponse?

Le Président: Excusez-moi. M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: L'Opposition pose des questions et au lieu d'écouter calmement les réponses

elle "s'esbaudit" comme un poulailler, M. le Président. Le plan que j'ai annoncé avant-hier, effectivement, à Montréal prévoit une réalisation des travaux sur une période de cinq à sept ans, M. le Président.

Le Président: Motion non annoncée. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Johnson.

Démission de M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: M. le Président, l'article 33 de la Loi de la Législature stipule qu'un député élu peut, de vive voix, démissionner de son siège dans l'Assemblée nationale. C'est aujourd'hui la voie que j'ai choisie et comme doyen, je vais laisser un document officiel et me servir de la devise de l'Ordre des notaires: Verba volant, scripta manent, les paroles s'envolent, mais les écrits demeurent. Je sollicite donc un consentement unanime pour la dernière fois. C'est avec beaucoup de regret et d'émotion qu'après plus de trente ans, je me vois forcé, à cause des circonstances que vous connaissez tous, de démissionner officiellement comme député de l'Union Nationale pour la circonscription, le siège électoral de Johnson.

En tout premier lieu, M. le Président, hommage et vive reconnaissance à mon épouse, Blanche, qui a toujours été ma meilleure collaboratrice durant ces longues années d'absence de mon foyer, et l'assurance de mon indéfectible attachement. A mes électeurs de Champlain et particulièrement ceux de Johnson, mes sincères remerciements de m'avoir fait ce que je suis et permis de jouer un rôle important au sein de la politique provinciale depuis 1944.

A vous, M. le Président et à vos deux excellents collaborateurs, vice-présidents, merci pour certaines circonstances, aimablement tolérées, d'hypothéquer nos règlements de la Chambre. A l'honorable premier ministre qui subit présentement les affres des dépressions normales et exigeantes de la rançon de la gloire, mes voeux de courage et de grande fidélité pour la défense des droits autonomistes de tous les Québécois. A l'honorable chef de l'Opposition, de la santé et aussi le grand respect du parlementarisme tel qu'il en fait preuve depuis son arrivée dans cette Chambre pour faire valoir véritablement notre option fédéraliste.

A mon parti de l'Union Nationale, que je ne quitte pas, la prudence dans les alliances projetées. Notre fondateur, l'honorable Maurice Duplessis, avait toujours dit et répété que l'Union Nationale était et devait toujours rester un parti strictement provincial avec des amis et non pas des maîtres à Ottawa.

A tous mes collègues de cette Chambre, un merci des mieux sentis pour l'amitié et la générosité de sentiment si souvent manifestées qui me permettent aujourd'hui de quitter cette enceinte avec beaucoup de sérénité, sans rancune et sans vengeance contre qui que ce soit.

Au personnel de l'Assemblée nationale, un bien bon souvenir pour les nombreux services rendus très discrètement.

Aux media d'information, quels qu'ils soient, et tout particulièrement pour certains journalistes amis, nos mercis les meilleurs.

A mon personnel de soutien, le mot le plus sincère et le plus court: merci pour l'immense travail accompli.

M. Duplessis disait souvent: Entre le passé où sont nos souvenirs et l'avenir où sont nos espoirs, il y a le présent où sont nos devoirs. Ce serait peut-être pour moi un impérieux devoir de rester, mais je crois nécessaire de retourner à mon foyer.

J'ai donné le meilleur de moi-même pour servir ma province, mon comté, mon parti et particulièrement le peuple québécois. Je suis heureux, M. le Président, de vous dire combien je suis fier de ma carrière. Aux jeunes qui anticipent de faire de la politique, je leur dis: Bienvenue! Vous verrez là un sentiment très noble qui vous grandira dans l'opinion publique. Napoléon 1er disait un jour: II y a dans des combats certaines défaites, certains reculs qui sont de grandes victoires.

Je sollicite donc de la part de l'honorable premier ministre l'émission du décret de convocation des électeurs en vue d'une élection partielle dans le plus bref délai possible, afin de ne pas laisser mon comté orphelin.

Adieu! Au revoir! Mission accomplie!

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, la décision du député de Johnson, aujourd'hui, fait en sorte que nous participons, nous les membres de cette Assemblée nationale, à tourner une page d'histoire dans les annales parlementaires du Québec. Le député de Johnson, à mon point de vue, était devenu un symbole pour nous, à l'Assemblée nationale, et pour nous, de l'Union Nationale en particulier.

Je regrette personnellement cette décision du député de Johnson, quoique je la comprenne. Je l'ai connu, bien sûr, avant que je ne sois en politique, mais surtout depuis que je suis en politique, en cette Assemblée, alors que nous, les membres de cette Assemblée, et même les citoyens du Québec, par la télédiffusion des débats, l'avons connu comme un parlementaire fougueux, spectaculaire, mais un excellent parlementaire et un excellent législateur. Je me souviens en particulier lorsque l'une des premières fois que je discutais avec lui des règlements de l'Assemblée nationale et de tout ce qui s'y passait, il m'a dit, et il nous a dit à plusieurs reprises qu'il avait appris ses règlements à l'école de Duplessis, lorsqu'il est arrivé comme jeune député. M. Duplessis lui avait dit: Maurice, tu vas acheter un crayon, un papier, un cahier brouillon et tu vas noter tous les passages du règlement, les articles du règlement et les décisions. C'est de cette façon qu'il a appris le règlement. Il nous a demandé — à nous, en tout cas — de l'apprendre le mieux possible.

II a été le whip de son parti, ministre de l'Industrie et du Commerce, ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre au sein du cabinet de M. Johnson. Avant, il avait été ministre d'Etat au sein du cabinet de M. Sauvé.

M. le Président, la décision du député de Johnson nous touche aujourd'hui. Elle nous déçoit, bien sûr. Nous aurions aimé le garder avec nous, mais je vous rappelle que, déjà, en 1970, après 26 ans de services au nom de son Québec, de son Assemblée nationale ou de son Assemblée législative, à l'époque, ou de ses concitoyens, il avait dû remettre sa démission à son premier ministre d'alors, M. Bertrand, pour raisons de santé. En 1974, l'Union Nationale a fait appel à ses services dans des moments très difficiles pour notre parti. On se souvient tous de la campagne électorale, d'août 1974 dans Johnson, alors que, sous le fameux slogan "II faut battre les rouges", Maurice Bellemare a été réélu député de l'Union Nationale. A ma demande aussi, en 1976, M. le Président, il a accepté de servir encore son parti, sa province, même si, à l'époque, il m'avait dit que sa santé était déjà chancelante. Aujourd'hui, je comprends, bien sûr, ses raisons.

Tout le long de ces années au cours desquelles on a pu travailler ensemble — bien sûr, à quelques reprises, nous n'avons pas eu les mêmes opinions ou les mêmes perceptions des problèmes, mais je pense que toujours ou presque toujours on a réussi à se comprendre. Je veux le remercier bien sincèrement, au nom de l'Union Nationale, pour les services qu'il a rendus à sa province, à son parti. Je veux remercier aussi d'une façon toute particulière Mme Bellemare qui a dû se sacrifier pour laisser son homme se dévouer pour ses concitoyens, ceux de son comté, ceux de sa province et ceux de l'Union Nationale. Je souhaite au député de Johnson, ou à l'ex-député de Johnson maintenant, un repos bien mérité.

Le Président: M. le premier ministre. M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je voudrais assurer dès le début le député de Johnson que je prends avis de son opinion pour les semaines ou les mois qui viennent et aussi de l'opinion de Napoléon 1er. Je ne sais pas s'il y avait un lien entre le comté de Johnson et Napoléon 1er, mais, en tout cas, on va évaluer cela le mieux possible, tout en n'oubliant Das, non plus, le conseil de La Fontaine "Rien ne sert de courir, il faut partir à point". Là-dessus, très cordialement, je tiens, comme tout le monde, j'en suis sûr à saluer avec une certaine mélancolie — on ne peut pas s'en empêcher — le député de Johnson, notre doyen qui, jusqu'à la fin de son dernier mandat — il en a donné la preuve sans arrêt — a été un homme attachant à qui on ne peut pas garder rancune non plus, même si on a eu des accrochages à l'occasion. Il y a tellement de bonhomie derrière le côté soupe au lait de M. Bellemare qu'on ne peut lui tenir rigueur de rien.

Mais je voudrais surtout rendre hommage à une chose qui m'avait frappé dès le début, quand je suis arrivé ici pour la première fois, c'est l'acharnement au travail qu'il a, je pense, sans cesse démontré. C'est un des aspects de sa personnalité que j'ai connu quand j'étais responsable du domaine minier au temps de M. Lesage et qu'on avait à refaire, vers 1964 ou 1965, à la fois la Loi des mines et la Loi sur les droits miniers qui, ni l'une ni l'autre n'étaient un cadeau, c'étaient des lois extraordinairement techniques, avec accumulation d'articles très compliqués. Je me souviens que le député de Champlain, au nom de son parti, à peu près sans support, sans intendance, avait suivi, article par article, chaque phase de ce projet de loi et c'est lui qui, plus que n'importe qui, nous avait talonnés systématiquement d'un bout à l'autre de ce travail. Cela m'avait impressionné et cela m'impressionne encore comme certaines choses qu'a faites, le long du chemin, le député de Champlain, le député de Johnson. Les vieilles habitudes reviennent!

Nous savons qu'il y a des circonstances, dont le député a dit sur un ton sibyllin que nous les connaissons tous, qui ont pu contribuer à son départ, ce départ que sa forme splendide rend presque prématuré. Le chef de l'Union Nationale n'a pas tellement éclairci le mystère de son côté sur ces circonstances. On aurait aimé en savoir davantage. M. Bellemare préfère partir avec son secret. Il doit en réserver la primeur aux lecteurs de ses mémoires, un de ces jours. Ce sera sûrement un ouvrage réfléchi et intéressant, si l'auteur garde le sens des mots dont il vient de faire preuve en nous disant de continuer à défendre fermement les droits autonomistes du Québec — de ça, je peux l'assurer et même davantage — alors qu'il s'est contenté — c'est cela le sens des mots — sans plus, de recommander à l'Opposition officielle de faire valoir l'option fédéraliste que nous connaîtrons, nous aussi, d'ailleurs, quand elle aura reçu l'endossement final du premier ministre de l'Ontario et d'autres, sans doute, pendant le temps des Fêtes. Je comprends, dans les circonstances, que le député de Johnson se soit retenu pudiquement de parler même d'autonomie en ce qui concerne les libéraux. (11 h 20)

Bref, au moment de ce départ du député de Johnson, qui, j'en suis sûr, partira d'ici avec des amis, c'est sûr, et pas des maîtres à Québec, je suis heureux de lui souhaiter ainsi qu'à son épouse, toute sa famille, Joyeux Noël, par anticipation, mais à peine, et pour l'année qui vient et beaucoup d'autres années, la bonne santé, beaucoup de succès, beaucoup de bonheur, et de réussir dans toutes les entreprises privées où il pourra encore employer sa vitalité proverbiale.

Le Président: M. le chef de l'Opposition. M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, mon collègue le député de Bonaventure voudrait sans doute ajouter son témoignage au sujet de l'apport extraordinaire

de M. Bellemare à la vie parlementaire du Québec, mais je m'en voudrais de ne pas signaler, en ce qui me touche, que j'ai suivi depuis de très nombreuses années la carrière politique de celui qui prend aujourd'hui sa retraite et que j'ai toujours considéré que sa carrière avait été l'une des plus pittoresques, des plus sympathiques et des plus fructueuses de notre histoire politique. Je me souviens qu'au temps où l'Union Nationale avait été appelée pour la dernière fois à former un gouvernement, M. Bellemare, grâce à ses qualités de coeur extraordinaires, avait réussi à concilier un double mandat. Si mes souvenirs sont exacts, M. Johnson l'avait nommé en même temps ministre du Travail et ministre de l'Industrie et du Commerce.

En tout cas, il a excellé dans les deux secteurs au sein d'un gouvernement qui avait été un peu comme le gouvernement actuel élu à sa propre surprise et qui avait dû, par conséquent, prendre des décisions dont il ne pouvait pas mesurer toutes les implications.

C'est surtout comme parlementaire que nous retiendrons le souvenir de M. Bellemare. Il a été un parlementaire extraordinaire, j'ai pu le mesurer moi-même dans cette Chambre. Il prenait des libertés que vous n'auriez jamais permises à des novices, M. le Président, mais il les prenait des fois avec assez de liberté par rapport à la lettre des règlements qu'il connaissait très bien, mais je pense que vous compreniez — et nous vous approuvions de tout coeur en cela — qu'il ne s'éloignait jamais de l'esprit véritable de l'institution parlementaire.

Je pense qu'il était dans cette Chambre un grand représentant de l'esprit du parlementarisme et, chaque fois — je l'ai remarqué avec plaisir — que des accrocs étaient faits à l'esprit de l'institution, il était toujours là pour défendre l'institution. Quand lui-même faisait des accrocs au règlement, nous savions que l'esprit n'était jamais menacé. M. Bellemare a donné, dans notre histoire politique récente, l'exemple d'un homme qui est arrivé à force de travail, d'efforts personnels, d'étude, de lectures, à occuper une place très importante dans la vie politique, sans qu'il ait pu bénéficier dans son temps, peut-être, de tous les avantages qui sont donnés à la jeune génération aujourd'hui.

J'espère que cette tradition de celui qui part de peu de choses, sinon des valeurs fondamentales solides, et qui peut faire une grande contribution aux affaires communes, continuera longtemps dans notre société. J'appréciais au temps où j'étais moi-même journaliste la solide documentation sur laquelle s'appuyaient toujours les interventions du député de Champlain, et je pense qu'en cela, bien avant l'époque où nous disposons de moyens documentaires extrêmement élaborés, il a donné un exemple aux parlementaires qui seront appelés à le suivre.

Je voudrais souligner aussi, ayant eu M. Bellemare comme adversaire, surtout au premier stade de ma vie parlementaire, que j'ai trouvé en lui un adversaire franc et sincère dont j'admirais surtout la fidélité à son propre idéal et à sa propre tradition. Au temps où son ancien chef était décrié de manière générale dans l'opinion publique et surtout par les commentateurs dont j'étais, M. Bellemare — je pense à l'exemple de son ancien chef, Daniel Johnson — a toujours gardé une grande fidélité à l'image de celui sous lequel il avait servi et cela, je l'ai bien apprécié. Je ne partageais pas son opinion à plusieurs égards, mais j'appréciais la fidélité et la loyauté de celui qui, ayant servi sous ce chef, continuait à le défendre une fois qu'il n'était plus là.

M. Bellemare, nous l'avons vu par sa déclaration de ce matin, a réalisé de manière impeccable dans sa propre expérience ce double idéal qui caractérise la véritable option des Québécois d'orientation fédéraliste, c'est-à-dire qu'il a été d'abord un Québécois à 100%... Je ne sais pas si le ministre d'Etat au Développement culturel le rangerait parmi ceux qui souffrent de dérèglements psychoaffectifs, mais il a trouvé, à travers des manifestations de santé mentale plutôt éclatantes, au cours de toute sa carrière, le moyen d'être un Québécois à 100% — personne ne l'a jamais soupçonné d'aller chercher ses ordres ou ses directives à Ottawa ou ailleurs — mais, en même temps, de demeurer profondément attaché au pays canadien, ce qui ne l'a pas empêché de s'épanouir et de fournir une contribution remarquable à la vie publique. Je veux assurer le député démissionnaire, étant donné l'honneur qu'il m'a fait de me confier, en somme, le mandat de continuer à défendre l'option fédéraliste dans cette Chambre, que je continuerai à le faire en (n'enorgueillissant de l'appui moral qu'il a semblé vouloir me donner à cette fin.

A M. Bellemare, j'offre mes voeux à la fois profondément sincères et émus de santé, de bonheur et de rayonnement continu dans la vie privée vers laquelle il retourne, mais qui n'empêchera pas qu'on se souvienne longtemps de la place exceptionnelle qu'il a occupée dans la vie politique chez nous.

Aux électeurs de Johnson, je souhaite qu'on leur donne le plus tôt possible la chance d'élire un nouveau député. Je souhaite, en particulier, que cette chance leur soit donnée avant l'échéance référendaire. L'esprit de notre nouvelle loi 9 prescrit — même si la lettre ne doit pas s'appliquer tout de suite — qu'un comté doit demeurer privé le moins longtemps possible de représentation dans cette Chambre. J'ose, par conséquent, souhaiter que les électeurs de Johnson aient la chance, dans les plus brefs délais, d'être de nouveau représentés dans cette Chambre.

Quant au député démissionnaire, il m'a fait l'honneur de me rappeler à plusieurs reprises que lors de l'élection complémentaire qui a permis son élection dans Johnson, je lui avais accordé, au temps où j'étais journaliste, un modeste appui dont il m'a toujours été reconnaissant. Je voudrais lui dire, comme tout le monde sait qu'il est un homme de coeur, que, s'il veut nous payer une partie de cette dette lors de la campagne qui viendra dans Johnson, il sera le bienvenu dans nos rangs.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, il est, bien sûr, en politique des choses par-dessus lesquelles nous devons passer et je pense que les deux ou trois dernières semaines que nous avons vécues ensemble dans l'Union Nationale avec le député de Johnson ne doivent pas ternir les quatorze années que nous avons vécues dans ce même parti.

M. Bellemare, puisque vous nous permettez de l'appeler par son nom aujourd'hui, j'ai eu l'occasion de le connaître en 1966 et j'ai vite découvert que c'était un homme qui connaissait l'organisation d'un parti politique et qui savait, jusque dans le bout des ongles, ce qu'étaient les tactiques politiques.

M. Bellemare a été également mon maître pour ce qui est des règlements ici en Chambre. Il a été mon professeur pour ce qui est des règlements ici en Chambre et il m'a appris aussi, il m'a prêché l'apostolat de la présence en Chambre, et aux commissions parlementaires. M. Bellemare, même si on le reconnaissait dans la liste des députés comme un "brakeman", était quand même un homme qui savait manier l'humour d'une façon assez remarquable pendant les années qu'il a passées ici. Même si on dit que c'est un champ qui doit appartenir aux intellectuels, il savait manier l'humour d'une façon assez particulière.

A l'occasion des campagnes électorales, sou-ventefois, il participait au choix des candidats et il nous revint un soir, après avoir été couvrir une convention, et nous dit: On a découvert dans le comté de Frontenac, alors que personne ne savait qui était pour être candidat, un beau grand jeune homme. Tout le monde a appris après que c'était Marc Bergeron, de Thetford, un homme de cinq pieds et quelque chose. Il savait entretenir la Chambre. C'était la personne qui savait se soumettre aux exigences du premier ministre du temps, M. Johnson, alors que, souventefois, il faut bien l'avouer, à l'occasion, on manquait de projets de loi. Je me rappellerai longtemps, comme jeune député sur le fauteuil qui est occupé par l'actuel député de Frontenac, qu'il nous avait entretenus pendant deux heures du bateau Marie-Carole qui s'était échoué en haute mer depuis au moins "100 ans". Il avait pu entretenir la Chambre pendant au moins deux heures sur la beauté du bateau Marie-Carole que pas beaucoup de gens de notre génération avaient connu. (11 h 30)

M. Bellemare a également été pour moi un homme qui m'a marqué à l'esprit de parti. A l'adoption du projet de loi no 63, cela a été une période extrêmement difficile pour moi dans cette Chambre. Il m'avait dit: Mon jeune Grenier, tu vas apprendre que la politique du parti c'est plus important que la politique personnelle d'un homme. Je devais me rallier, bien sûr, à cette difficulté que nous vivions temporairement. A l'occasion du projet de loi no 25, alors que j'étais un enseignant nouvellement arrivé en Chambre et que nous forcions, par une loi, les enseignants à rentrer au travail, c'est encore lui qui m'avait appris que la politique, même si on est un professeur, demande qu'on néglige son métier, car la politique du député a priorité sur la fonction du professeur.

Il m'a appris aussi, lors de la campagne de 1969, alors que j'étais un supporter de M. Cardinal, avec l'actuel ministre du Travail, M. Johnson, nous nous étions promenés en province et, passablement déçus, en revenant — comme c'est le résultat d'un congrès, il faut bien l'accepter — c'est encore lui qui m'avait dit: Un homme qui se révolte peut être populaire une journée, mais c'est le précipice qui l'attend le lendemain.

Bien sûr, ce fut une école rude, une école difficile, mais j'ai eu aussi des moments fort agréables de négociation alors que nous avons dû négocier pendant les années soixante-quinze — aors que j'avais été élu président du parti la même journée qu'il avait été élu chef par intérim — M. Bellemare et moi, le ralliement avec l'ancien ministre libéral M. Choquette et M. Roy, le ralliement de ces forces, semblait-il à ce moment-là, qui était susceptible de nous aider, le ralliement ensuite du Parti créditiste du Québec et, enfin, ce congrès de Montréal qui était une espèce de nouvelle fondation de notre formation politique.

Je voudrais aussi dire combien je l'ai apprécié, là où j'ai vécu une vie plus intense avec le député de Johnson, à son élection de 1974 alors que nous revenions du Saguenay-Lac-Saint-Jean et que nous avions appris par les ondes la démission du député Boutin. C'est à ce moment-là qu'il avait trouvé, sur le chemin du retour, les thèmes. On voulait engager des faiseurs d'image, parce que tous les partis politiques veulent des faiseurs d'image au moment d'une élection. M. Bellemare avait trouvé ses deux thèmes. Il disait à ce moment-là: "L'accusé Boutin" et "II faut battre les rouges". Pour cela, on n'a pas besoin de "fai-seux" d'image pour gagner nos élections; les deux thèmes de la campagne étaient trouvés. J'ai découvert que c'était un homme qui, comme il se plaisait à le dire, avait fait son cours à l'université du trottoir et qui comprenait facilement le pouls de la population. Aux côtés du député de Johnson, M. Bellemare, pendant tant d'années et de façon passablement intime, j'ai appris beaucoup, ce qui me permet aujourd'hui d'être, je pense, un actif au moins égal à la force que je peux donner à mon parti. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: M. le ministre du Travail. M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, très brièvement, je voudrais dire à celui qu'on a appelé ou que la presse a appelé le lion, tantôt le renard et sûrement évidemment notre doyen, je voudrais dire à M. Bellemare, simplement, que je salue celui qui a été uni par un long lien d'affection à ma famille. Même au nom de ma famille, dans la mesure où il a représenté l'ancien comté de Bagot, qui s'appel-

le maintenant le comté de Johnson, je veux saluer le doyen de cette Assemblée que j'ai toujours respecté par l'expérience qu'il nous traduisait même si, à l'occasion, il a pu se servir de cette expérience pour montrer que l'expérience elle-même du Parlement permet parfois de faire détour au règlement.

Je voudrais de plus saluer l'ancien ministre du Travail à qui je voudrais dire que j'ai eu l'impression, surtout depuis quelques mois, de vivre des choses qu'il a déjà vécues. En terminant, puisqu'il a décidé de retourner dans ses terres, je souhaite qu'il conserve cette qualité fondamentale d'être un bleu, ce qui est une qualité, mais aussi que si jamais cette qualité devait être diluée, le discernement dont il a fait preuve dans ce parlement l'amène évidemment à ne pas accepter les invitations que les rouges lui font.

La Vice-Présidente: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Shaw

M. Shaw: Madam President, it is always with sadness that we see a man of quality and of commitment leave this House and his career to retire or to go into private business.

It was very sad when Mr Raymond Garneau left this House. It was very sad when Mr Robert Burns left this House. And now, the dean of this House, the dean of the parliamentarians of this House, the man who literally has taught me what this system is all about, the député de Johnson, Mr Maurice Bellemare, is leaving.

I have known Mr Bellemare for ten years, especially well for the last four years. I feel that he knows sincerely that I have always deeply respected him and his commitment to his French Canadian community and to Canada as a whole. Mr Bellemare has not been understood by English-speaking Quebecers. Mr Bellemare perhaps represents what is one of the basic problems we have in this country and that is that a man can be deeply committed to his language and his culture and the survival of this language and this culture within a country, deeply committed to the autonomy of areas of responsibility of a province within the nation of Canada, and still be respectful of the people and its institutions. I felt this deeply from the very moment that I met Mr Bellemare; I feel it today and it is with sadness that I see him leaving our House.

For this reason, I felt, Mr President, that a few words of English should be made representing the respect that we all feel for this commitment. And I hope that now he can spend some time with his wife Blanche, he can enjoy watching our "chicanes" from the outside, on television, and he can begin to realize some privacy and some pleasure in his home.

M. le Président, j'ai eu l'honneur de connaître M. le député de Johnson et c'est avec tristesse que j'appuie la motion de sa démission. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Saint-Maurice. M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, bien brièvement, je voudrais saluer en notre doyen un de mes concitoyens de Saint-Jean-des-Piles et je pense que c'est reconnaître que c'est un soldat, c'est un guerrier panaché qui s'en va, c'est un baroudeur de tous les instants, avec sa façon et sa manière que plusieurs, encore aujourd'hui, évoquent avec nostalgie. Il a siégé ici, à l'Assemblée nationale, pendant 33 ans, tantôt comme député dans l'Opposition, avec le gouvernement, tantôt leader du gouvernement en Chambre, ministre à plusieurs reprises et, en particulier, au ministère de l'Industrie et du Commerce, il a été maire de son village. Il ne pourra jamais dire qu'il a été maire de sa ville, cependant.

Je voudrais saluer un collègue qui met fin à une longue et exemplaire carrière publique. Je crois que, désormais, vous aurez droit à la tranquillité, au calme et, très certainement que vous retiendrez le conseil de l'honorable premier ministre et écrirez sans aucun doute vos mémoires. Peut-être aussi profiterez-vous des heures de loisir pour vous livrer à un de vos sports favoris, la pêche, la chasse; je pense que vous l'avez bien mérité.

Je voudrais, au nom de tous les gens de mon village, vous transmettre l'invitation que nous serons très heureux de vous accueillir dans nos montagnes près de la rivière Saint-Maurice, dans un endroit que vous aimez et que vous connaissez pour y avoir vécu longuement, jusqu'à présent, avec toute votre famille. (11 h 40)

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président...

Le Président: M. le député de Vanier.

M. Bertrand: ... en tant que député "pee wee" de cette Assemblée nationale, pour reprendre une expression qui était devenue chère au député de Johnson, je voudrais dire à notre vétéran ou, pour prendre une expression toujours utilisée dans le langage du hockey, notre "old timer" de l'Assemblée nationale, à quel point tout de même, quand on est un jeune député, je pense qu'on retire de l'expérience vécue du député de Johnson des enseignements et des enrichissements pour ce qui est de nos propres expériences de jeune génération. Je voudrais lui dire que, indépendamment de ces frictions que nous avons pu avoir à l'occasion, je pense qu'un peu comme dans un match de football, — le député de Westmount sait de quoi je parle — où, très souvent, vous devez parce que la politique est comme cela — avoir des contacts fréquents qui sont durs, il est important aussi que ces gens-là sachent se donner la main quand il s'agit de se relever tous ensemble et quand il s'agit surtout de voir au-delà des lignes de parti, au-delà des orientations personnelles, l'amitié et l'attachement qu'on doit se porter entre collègues qui, dans le fond, veulent tous travailler ensemble à servir le bien commun.

Je voudrais dire au député de Johnson, à l'instar de mon collègue, le député d'Anjou, que, moi aussi, je reconnais chez lui une qualité. Il a toujours été un vrai bleu durant toute sa vie et je pense que, de ce côté aussi, il y en a qui sont demeurés profondément des bleus, parce que j'ai toujours défini un bleu, quant à moi, comme un être profondément attaché à sa patrie, le Québec. Je pense que tous les bleus ont gardé cette définition, quelle que soit la formation politique à laquelle ils appartiennent aujourd'hui.

Je ne sais pas comment le député de Johnson fera pour trouver du repos en dehors de la politique. J'avais tellement l'impression qu'il y trouvait du plaisir que, pour lui, cela en était devenu presque une occasion de se reposer fréquemment de certaines maladies qui le clouaient sur des lits d'hôpital. J'espère tout de même qu'il trouvera cette sérénité qui lui permettra d'écrire des mémoires dans lesquels nous retrouverons évidemment toute la vérité, seulement la vérité, rien que la vérité. J'étais un peu inquiet, en me levant tout à l'heure. Connaissant le député de Johnson et connaissant sa tendance très facile à revenir à ses péchés passés, à savoir la politique, je me demandais si, finalement, ce n'était pas une façon aujourd'hui de déguiser une sortie pour revenir encore plus fort un jour, mais j'ai compris qu'il ne reviendrait pas quand je ne l'ai pas entendu prononcer, comme l'avait fait le chef de l'Opposition à une certaine époque, le mot "irrévocable". Puisqu'il n'a pas dit que sa décision était irrévocable, je pense que c'est effectivement une décision qui est finale. M. le Président, je voudrais, en terminant, simplement remercier le député de Johnson d'avoir été associé à ma famille personnelle et le remercier, au nom de ma famille, pour tout ce qu'il a fait et simplement lui dire tout l'attachement que nous continuerons de lui porter éternellement.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ce n'est pas facile de trouver les mots appropriés, malgré tous les efforts que nous faisons de part et d'autre depuis déjà plusieurs minutes pour transmettre les sentiments véritables et profonds qui nous animent tous dans un moment comme celui-ci. Et je dis bien "à un moment comme celui-ci", parce que je pense bien que nous n'avons pas vécu, du moins ceux qui sont dans cette enceinte, des moments comme celui-ci où nous avons à rendre hommage à un collègue qui nous a précédés tous ici et qui a consacré plus de 30 ans de sa vie aux travaux de cette Assemblée, aux travaux d'un député, aux travaux d'un serviteur de l'Etat.

Non, ce n'est pas sans émotion non plus que nous assistons à ce départ, surtout d'un homme qui a tant donné à sa province, qui a tant donné à son parti, un homme qui a donné aussi autre chose, comme le soulignait le premier ministre, l'exemple d'un acharnement au travail, l'exemple de la discipline, l'exemple de la loyauté, l'exemple de la fidélité. Ce sont là des qualités que l'on se plaît quelquefois à attribuer un peu à gauche et à droite, mais jamais peut-on les attribuer avec autant de justesse qu'à celui à qui on les dirige aujourd'hui.

M. le Président, vous savez que dans la vie parlementaire, on essaie toujours d'avoir un langage correct. Les gens qui sont un peu plus intellectuels essaient d'utiliser le verbe le plus pur, le terme le plus juste. Maurice Bellemare, quelquefois, n'a pas toujours le mot exact du Larousse ou du Petit Robert, mais il est souvent mieux compris que bien d'autres. Personne ne comprend pas Maurice Bellemare. Cela est important. A un moment donné, on dit: Bellemare, c'est peut-être un peu dépassé, c'est un peu folkorique, c'est un symbole comme dirait quelqu'un. Je dirais: C'est l'âme québécoise, c'est peut-être le gars le plus près de l'âme québécoise parce que c'est le gars, lorsqu'il nous parle, qu'on comprend.

Une Voix: C'est vrai.

M. Levesque (Bonaventure): Maurice Bellemare, c'est l'esprit de travail. C'est aussi la magnanimité. J'ai vécu sa magnanimité. Je n'ai pas envie de prolonger en rappelant toutes les anecdotes, mais je n'oublierai jamais lorsque, en 1966, nous avons été déplacés momentanément du pouvoir et que l'Union Nationale arrivait au lendemain de l'élection du 5 juin. Cela faisait quelques années que, avec le premier ministre d'aujourd'hui qui était ministre des Richesses naturelles, M. Bona Arsenault qui était ministre des Terres et Forêts et notre premier ministre, M. Jean Lesage, nous essayions de réaliser quelque chose d'important dans le comté de Bonaventure: l'établissement d'une usine importante à New Richmond. L'inauguration avait lieu le 17 juin 1966. Le plus gros investissement de l'Est du Québec, etc.. Maurice Bellemare était celui appelé à me succéder comme ministre de l'Industrie et du Commerce. J'avais demandé à M. Lesage: N'y aurait-il pas moyen de remettre les pouvoirs le 17 au soir? M. Lesage m'avait dit: Non, le sens du devoir... Alors, ce fut le 16. Je parlais de Maurice Bellemare et de sa magnanimité. M. Johnson était dans le coup. Ni M. Johnson ni M. Bellemare, qui avaient été invités à l'inauguration, n'ont accepté l'invitation. Maurice a envoyé un petit télégramme et Daniel Johnson également, mais Maurice a ajouté un coup de téléphone au tout début de la cérémonie et il a dit: "On ne voulait pas t'enlever cela". C'est la magnanimité de Maurice Bellemare.

C'est la même chose que je retrouvais l'année suivante, après avoir été quatre ans ministre tuteur de l'Expo. Maurice Bellemare est devenu ministre tuteur de l'Expo. Quatre années, de 1962 à 1966, pour la préparer et, ensuite, nous autres dehors. Maurice et Daniel Johnson, les deux, lorsque l'Expo a été inaugurée, ont dit: Tu vas être là, Gérard; c'est ta place. Cela est encore de la magnanimité. Je veux la souligner aujourd'hui.

Une Voix: Ce n'est pas comme aujourd'hui. (11 h 50)

M. Levesque (Bonaventure): Evidemment, je ne veux pas refléter cela sur aujourd'hui. On aura d'autres occasions. On a déjà eu récemment des occasions de le voir.

M. le Président, je voudrais, avant de terminer, simplement dire que Maurice Bellemare, je le connais depuis bien des années. Je me rappelle quand je suis arrivé ici, j'étais encore de ce côté-ci. J'y suis venu trois fois. Je me rappelle qu'il était assis à peu près où le député de Rosemont l'est. C'était le whip du parti. A la veille de Noël, on pense aux chants de Noël et cela me fait penser que dans ce temps, il était alto un petit peu. Il avait peut-être été soprano avant que j'arrive, mais cela, c'était avant d'être ténor. Il a été ténor de l'autre côté, parce qu'au moment où il était alto, il y en avait toute une série de ténors en avant, les Duplessis, les Paul Sauvé, les Onésime Gagnon, les Antoine Rivard — ils étaient tous là — les Laurent Barré, les Antonio Elie et tout le monde. Cela avait l'air pas mal pesant quand je suis arrivé ici.

Maurice était assis à l'arrière. Il était alto. Mais, à un moment donné, il est venu en avant et là, il était leader du gouvernement, il était ministre de l'Industrie et du Commerce, il était ministre du Travail et il était ténor. Mais, quelques années après, en 1974, il était soliste. Il était bon comme soliste. Il y en a qui ont pensé faire une nouvelle chorale. Maurice, évidemment, avec les années, sa voix a mué. Il est devenu une basse dont les accents quelquefois sont remplis de nostalgie, mais une basse dont les échos resteront longtemps dans cette Assemblée qui ne sera jamais pareille sans Maurice Bellemare.

M. le Président, je voudrais, en terminant, assurer encore une fois ce Maurice Bellemare, de notre plus grand respect, de notre admiration véritable même si, lorsqu'en me tournant vers lui, je me rappelle qu'il avait des mots comme "battre les rouges". Maurice permettra sans doute à un rouge — un rouge depuis longtemps à part cela — de lui rendre cet hommage mais, en même temps, de lui rappeler, parce que cela va arriver bientôt, qu'il va être assis devant son bureau sans feuilleton, simplement devant une feuille blanche, peut-être sous un ciel gris, broyant, je ne l'espère pas, du noir, possiblement ayant les bleus. Permettrait-il à un rouge de lui suggérer une petite teinte de ce rouge qui lui ferait peut-être voir la vie en rose.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, le meilleur moyen de rendre hommage au parlementarisme — je crois que je touche une corde sensible de l'ex-député de Johnson — c'est de faire de cette Assemblée une assemblée productive et respectable. Il comprend donc, ayant vécu ce que je vis, que mon souhait est qu'on se remette au travail rapidement, puisque nous sommes en période de fin de session.

Je veux quand même, en ajoutant à ce que mon collaborateur, le leader de l'Opposition officielle, vient d'offrir. Je voudrais exprimer, au nom de tous les collègues que je peux sentir autour de moi, à l'ex-député de Johnson mes meilleurs souhaits.

Quand je suis arrivé ici, M. le Président — je vais évoquer seulement un souvenir; j'ai moins d'années que le député de Bonaventure — je me suis imposé une règle de tutoyer ceux qui me tutoyaient et de vouvoyer ceux qui me vouvoyaient, même s'il y a un écart d'âge assez sensible avec certains des parlementaires, cela dans le but d'avoir un statut d'égalité avec tout le monde. Un des cas les plus difficiles qui m'aient été donnés, c'est quand, en 1974, le comté de Johnson nous a envoyé celui qui nous quitte aujourd'hui. Là, je sentais disproportionnée ma règle dans les circonstances face au doyen, mais j'ai quand même tenu bon, M. le Président, et je pense que cela a non seulement porté fruit dans un sens, mais cela nous a conduits à une relation que la petite équipe de l'Opposition, dans la mer rouge de l'époque, nous permettait de développer jusqu'au plan d'avoir une amitié. C'est à un ami que je souhaite maintenant une très heureuse retraite. Bonne chance, Maurice, merci.

M. le Président

Le Président: M. Maurice Bellemare, je dois d'abord prendre acte de votre démission que vous m'avez signifiée en vertu de deux articles de la Loi de la Législature. Vous avez utilisé les deux articles, c'est-à-dire l'article 33 et l'article 35 pour démissionner oralement et par écrit. Vous m'avez déjà fait valoir à plusieurs reprises que, dans un collège électoral, un doyen avait des privilèges. C'est notre conviction à tous que, comme doyen, vous avez eu des privilèges et je dirais même certaines attentions particulières. Parce que vous êtes le doyen, je voudrais, au nom de tous mes collègues de l'Assemblée nationale, créer un précédent et vous accorder une dernière attention particulière.

En effet, si vous avez réussi à faire installer une statue pour l'homme que vous avez tant admiré, il me semble que cela vous vaut bien une médaille. J'ai donc le plaisir de vous remettre, au nom de vos collègues et en mon nom personnel, la médaille d'argent de l'Assemblée nationale, l'argent qui symbolise sensiblement vos noces d'argent comme parlementaire. Des deux côtés de la médaille, vous retrouverez les symboles de deux institutions pour lesquelles vous avez toujours eu la plus haute considération; à l'endroit, le parlement du Québec et, au revers, la présidence de cette Assemblée personnifiée par son premier président, M. Panet.

Peut-être, M. Bellemare, auriez-vous préféré être le premier décoré d'une légion d'honneur québécoise. Malheureusement, la légion d'honneur est toujours au feuilleton. Peut-être avez-vous reçu au cours de votre carrière politique une

médaille comme celle-ci, mais, comme vous disiez si souvent et si bien: "Trop fort ne casse pas." De toute façon, M. Bellemare, je vous prie d'accepter ce témoignage que les membres de cette Assemblée veulent rendre à ce doyen qui, pour s'enlever toute tentation d'un retour possible au Parlement, a démissionné doublement en vertu de deux articles de la Loi de la Législature.

M. Maurice Bellemare, pour une dernière fois. (12 heures)

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: Je n'ai pas besoin de vous dire l'émotion profonde que je ressens devant ce témoignage éloquent que vous venez tous de me rendre.

A vous, M. le Président, le premier, merci du plus profond de mon coeur de cette marque inestimable du respect que j'ai toujours porté au parlementarisme et à cet esprit qui doit nous guider dans cette Chambre comme de véritables et de bons législateurs.

A l'honorable premier ministre, qui a voulu être un peu pointilleux, je rappellerai un souvenir très émouvant. Il siégeait à la place où est assis le député de Maskinongé, parce qu'il y avait eu une rupture de ban avec son parti dans le temps. Je m'étais levé sur un point un peu particulier pour le molester très sévèrement. A un moment donné, j'ai dû dépasser un peu les bornes, il prend son livre et il dit: "Que le diable vous emporte" et il prend la porte et se sauve.

J'ai réussi au moins une fois dans ma vie à faire sortir le premier ministre de la Chambre. Il est revenu à des sentiments plus nobles, plus gracieux, je pense, parce qu'il m'a voué une amitié très sincère, malgré qu'il n'aimait pas que je l'appelle le "PQuiou", mais d'autres aussi. Dans le temps, c'était un peu au début.

Au député de Lotbinière, qui a eu l'amabilité de me faire des voeux, merci. Cela ne réglera peut-être pas tous les enjambages, en tous les cas, une chose certaine, c'est que l'expression de ses bons sentiments ennoblit le poste qu'il occupe temporairement.

Au chef du Parti libéral, le député d'Argenteuil, je dirai qu'il a contribué à ma victoire dans Johnson, parce qu'après avoir écrit cet éditorial fameux du 26 août 1974, nous l'avons fait publier à grand renfort de publicité, nous en avons sorti, je pense, 10 000 copies, et avec l'en-tête "II faut battre les rouges, d'après M. Ryan". Cela a fait un effet extraordinaire.

Une Voix: Est-ce que cela peut servir encore? Une Voix:L'avez-vous encore?

M. Bellemare: Oui, je l'ai encore. Je vais le publier dans mon livre. D'ailleurs, je promets un chapitre particulier à certains d'entre vous. Il y aura dans mon livre un chapitre spécial pour l'Union Nationale, c'est bien entendu, dans lequel je vais raconter bien des péripéties, particulièrement en ce qui regarde la caisse électorale. On avait des gens, dans le temps, qui nous disaient qu'on était riche à millions, qu'on avait déposé cela en Suisse. C'était archifaux.

J'ai vécu intensément avec M. Duplessis, parce qu'il a été mon maître, mon promoteur, mais j'ai vécu intensément avec M. Johnson, encore plus proche, parce que c'était mon frère. Je n'ai pas besoin de vous dire que quand M. Johnson a été exposé dans cette Chambre, j'en ai réellement pleuré d'amertume de voir disparaître un si grand homme, qui nous aurait fait énormément de bien.

Je ne veux pas faire de politique ce matin, parce que mon rôle est terminé irrévocablement, comme dirait si bien le chef de l'Opposition, mais je pense que, dans le livre que je suis en train d'écrire, il va y avoir des choses qui vont intéresser énormément tous les parlementaires, car il y a une foule considérable d'anecdotes qui n'ont jamais été contées du temps de M. Duplessis, du temps de M. Johnson, du temps de M. Bertrand et du temps de M. Sauvé qui vont être relatées, à part de mes propres expériences.

Je pense remercier le député de Mégantic-Compton, mon ancien whip, qui a été un peu bavard sur certaines choses qui se sont passées entre nous, et qui reste un homme que j'admire, même s'il nous a livré un combat foudroyant au bill no 63. J'ai été obligé de l'attacher par la patte en arrière pour le garder dans le parti, parce qu'à ce moment, on en avait perdu deux, M. Jérôme Proulx et le député de Rouyn-Noranda, M. Flamand. Dans la nuit, à 2 heures du matin, le député de Mégantic-Compton était quasiment sur le bord de s'en aller lui aussi. Je l'ai pris dans le coin...

M. Marx: Vous lui avez fait un mauvais parti.

M. Bellemare: Je lui ai dit: "Take it or leave it!" Prends-le ou va-t'en! Il m'a regardé et il n'avait pas l'air heureux de cela. D'un autre côté, sa loyauté et sa fidélité au parti, dans l'alignement que j'ai connu, a été véritablement caractéristique.

Je veux dire aussi merci à l'honorable député d'Anjou. J'ai aimé son père comme un frère, j'ai fait son élection partielle, je l'ai gagnée et je me souviens des longues nuits qu'il m'a fait passer. C'était un siroteux! C'était un homme qui ne prenait presque pas d'alcool, mais il en prenait un petit peu dans un grand verre. Pour vider ce grand verre, cela prenait des heures, ça allait jusqu'à 4 heures ou 5 heures du matin. Il me disait: Maurice, on l'a! On va l'avoir, tu vas voir! Et il l'a eu, on l'a eu!

Quand M. Levesque est arrivé ici, dans cette Chambre, l'honorable leader parlementaire de l'Opposition officielle, M. Duplessis m'a dit quelque chose que j'ai retenu et que j'ai cité dans mon livre, d'ailleurs: Méfie-toi du député de Bonaventure, c'est un enjôleur! L'honorable député de Bonaventure était un enjôleur. Vous avez vu aujourd'hui encore comme il ne s'est pas beaucoup amélioré!

Merci au député de Vanier. Je l'ai moi-même rencontré ce matin avant la séance pour que je puisse partir en paix avec lui et avec tous les autres, mais que je puisse partir en paix. Cela a

peut-être été celui, mon vis-à-vis, sur lequel j'ai peut-être un peu plus pesé sur le "piton". Il comprendra que dans le déroulement des séances, il est déjà arrivé des incidents malheureux, mais en tous les cas...

Le député de Bonaventure m'a dit de voter... pas de voter, mais d'avoir une allégeance un peu libérale pour devenir rose et éviter le bleu. Le bleu, ça ne m'intéresse pas. L'Union Nationale m'intéresse comme parti provincial, comme parti strictement provincial, mais le bleu ne m'intéresse pas. Je ne dis pas que le rouge... Je n'ai pas blasphémé contre les libéraux, mais pour ne pas blasphémer, j'avais employé un slogan qui a fait bien du bien et a creusé des sillons.

Le leader parlementaire du gouvernement a été très heureux dans ses phrases et je le remercie. Je l'ai connu quand il est arrivé. Oh! M. le Président, quel fringuant! Quel homme épouvantable! C'était une espèce de boumerang! Dieu sait... Je vous inviterais à relire certains discours qu'il a faits dans cette Chambre dans le journal des Débats. Il a déjà abimé un ministre du Travail assez que j'ai été obligé de me lever, après son intervention, pour lui dire: Ecoutez, mon cher député, soyez plus parlementaire, ménagez vos expressions. Vous êtes un jeune "pee wee", vous êtes en train de nous prouver que vous manquez de limite. Le député, après, est venu me voir pour me dire: Tu penses que je suis allé un peu trop loin? Je lui ai répondu: Pas seulement un peu trop loin, trop loin! Il s'est bien amendé depuis ce temps. C'est un exemple pour les jeunes. Vous voyez aujourd'hui un leader qui n'a pas trente ans, qui est le leader d'un gouvernement, qui a des difficultés inouies mais qui, de par sa formation et son travail, fait que les séances se poursuivent selon le rôle parlementaire et qui donne un exemple frappant de ce que peut devenir un jeune. Honneur et gloire à vous! Je pense que vous méritez qu'on vous le dise, ce matin.

Je souhaite, en terminant, n'avoir oublié personne. Quant à l'honorable député de Pointe-Claire, je n'ai pas besoin de vous dire combien je l'estime, c'est mon dentiste! C'est toujours avec un oeil serein, sans peur ni reproche, que j'entre dans son immense cabinet de travail... comme dentiste.

M. le Président, je vous remercie de l'insigne honneur que tous m'ont fait, par votre voix, en me gratifiant de ce souvenir irremplaçable. C'est une carrière qui se termine, c'est une page de l'histoire qui se tourne, comme le disait le député de Lotbinière, c'est la fin d'une époque, mais je le fais avec beaucoup de sérénité, je quitte cette Assemblée en remerciant encore du plus profond de mon coeur tous mes collègues qui m'ont permis d'être ce que je suis. Adieu, au revoir et, comme je l'ai dit dans mon discours, mission accomplie! (12 h 10)

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

L'enregistrement des noms sur les votes en suspens; il n'y a pas de vote en suspens aujourd'hui. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader parlementaire du gouvernement, honneur et gloire à vous aux affaires du jour.

Avis à la Chambre

M. Lalonde: ... le temps des honneurs, est-ce que je peux poser une question en vertu de l'article 34?

M. Charron: Bien sûr.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On nous a avisés que c'était l'intention du gouvernement de faire siéger la commission parlementaire de l'éducation sur le projet de loi no 71 cet après-midi. Peut-être ignore-t-il que le ministre de l'Education, ainsi que les représentants de l'Opposition, siègent à la commission municipale pour adopter les articles dans le projet de loi no 57 qui intéressent le monde de l'éducation. Est-ce qu'il pourrait nous donner la chance de terminer l'adoption de ces articles avant de nous déplacer pour aller à la commission de l'éducation?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je dois vous dire très franchement et honnêtement que mon programme de la journée subit de très profondes modifications. Je m'attendais que le projet de loi no 17 — on me dit qu'une quarantaine d'articles demeurent à être adoptés — aurait pu être terminé; maintenant, je dois y renoncer pour ce moment-ci et plutôt prévoir qu'ils vont se réunir cet après-midi. Je proposerais plutôt, immédiatement, si vous le permettez, M. le Président — je viens de faire une brève consultation — en vue d'établir un programme cohérent où certaines demandes de travail pourraient être incluses comme celle que vient de formuler le député, pour aujourd'hui, que la Chambre suspende ses travaux jusqu'à 14 heures; autrement dit, qu'on aille au lunch immédiatement et qu'on accepte de prendre l'heure qui nous resterait pour l'ajouter à la séance de cet après-midi. Dès 14 heures, lorsque nous nous réunirons ici, nous serons en mesure d'indiquer les commissions parlementaires à venir et le menu du jour qu'il va me falloir recuisiner avec celui que j'ai appelé mon collaborateur, le député de Richmond, tout à l'heure.

Le Président: M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Cela veut dire que les demandes en vertu de l'article 34, on pourra les faire à 14 heures?

M. Charron: Vous êtes peut-être mieux de les faire tout de suite si cela doit avoir un effet sur l'organisation des travaux.

M. Raynauld: Très bien. Merci, M. le Président. Il s'agit de la commission parlementaire sur la SGF et Pétromont. On sait qu'en vertu de la loi de la SGF, il doit y avoir un débat sur une directive

qui a été donnée. Ce débat, je ne sais plus s'il pourra avoir lieu, mais c'est un débat qui est nécessaire. Je voudrais savoir si, dans le programme que prépare le leader du gouvernement, ce débat est prévu et si on aura un temps raisonnable pour le faire puisque, si c'est un débat sur une directive qui a été donnée, il me semble qu'il faudrait prévoir une période de temps convenable.

M. Charron: M. le Président, je vais répondre d'une manière affirmative au député d'Outremont. La commission de l'industrie et du commerce doit, de toute façon, d'ici l'ajournement de la session, se réunir à nouveau pour étudier article par article le projet de loi sur SIDBEC. Nous profiterons probablement du fait qu'elle est réunie pour lui demander, dans un second mandat, de mettre fin à la séance — c'est-à-dire ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce avait demandé — ce que j'avais accepté, parce que cela me semblait légitime comme demande. Les autorités de la SGF ayant été entendues dans une précédente séance, le député demandait quelques minutes, me disant même: une séance seulement, pour faire le point entre députés, par la suite, sur le mandat en question. Ce qui fait que, dans ce sens, on pourra donner un mandat double à la commission de l'industrie et du commerce lorsqu'elle se réunira.

Le Président: M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: M. le Président, en vertu de l'article 34, je voudrais demander au leader du gouvernement s'il a l'intention d'apporter le projet de loi privé inscrit à l'article h) de notre feuilleton, parce que ce projet de loi est d'une extrême importance puisqu'il touche des investissements de l'ordre de $300 millions. J'aimerais que les membres de cette Chambre soient sensibilisés à ce sujet.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: D'accord, je vérifie cette question pendant l'heure du lunch. Je pourrai ensuite fournir la réponse au député.

Le Président: M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: En vertu de l'article 34, je rappelle au leader au gouvernement que, la semaine dernière, je lui posais une question au sujet des questions posées au feuilleton auxquelles on tarde à répondre. Certaines de ces questions s'adressaient au ministre de l'Agriculture et n'étaient pas trop longues à répondre, une dizaine de lignes. Malheureusement, cela fait déjà deux mois et on n'a pas de réponse. Comme la session va se terminer bientôt, j'aimerais savoir si on a l'intention de donner des réponses avant la fin de la session ou s'il faudra revenir après les Fêtes avec les mêmes sujets.

M. Charron: Je prends avis de la question, M. le Président. Je vérifierai. Oui, quoi?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: M. le Président, je vais donner plusieurs réponses demain, mais je vous ferai remarquer qu'il y a des questions au feuilleton qui ont des pages de longueur. On demande des détails sur des procédures.

M. Picotte: Dix lignes.

M. Garon: Non, ce n'est pas dix lignes. Regardez, ce sont des pages de longueur. La plupart ont été posées à la fin de novembre, le 27 novembre, et il y aura des réponses données demain qui sont en train d'être dactylographiées. Je les ai vues hier.

M. Charron: Pourrais-je proposer, M. le Président, la suspension jusqu'à 14 heures?

Le Président: La motion sera-t-elle adoptée? Une Voix: Adopté.

Le Président: Adopté. L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.

Suspension de la séance à 12 h 22

Reprise de la séance à 14 h 8

La Vice-Présidente: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Conformément à l'engagement que j'ai pris lors de la suspension des travaux, je voudrais donner maintenant l'indication suivante. Cet après-midi, l'Assemblée s'adonnera successivement à la prise en considération du rapport sur le projet de loi 74, à la deuxième lecture du projet de loi 65 et du projet de loi 68, au nom du ministre du Revenu, ainsi qu'à leur adoption en commission plénière, par la suite, à la deuxième lecture du projet de loi 66 qui est à mon nom, ainsi que la commission plénière, et la commission plénière du projet de loi 72 sur l'énergie et les ressources.

Je m'en tiens donc au programme tel qu'annoncé hier et que connaissait déjà l'Opposition. Ce qui est modifié, c'est le travail des commissions parlementaires que j'avais annoncées hier.

Cet après-midi, je voudrais faire motion pour que siègent immédiatement, et jusqu'à 18 heures, la commission des affaires municipales sur le projet de loi 57, la commission du travail et de la main-d'oeuvre sur le projet de loi 17.

Je fais motion également pour que, ce soir, de 20 heures à 24 heures — ou plutôt, je devrais en donner avis, puisque la Chambre ne siégera pas ce soir — siègent trois commissions parlementai-

res, soit cette des affaires municipales, comme toujours, celle de l'éducation, pour le projet de loi 71, à la salle 81-A, et celle de l'agriculture, pour les projets de loi 75 et 54, qui ont été déférés hier à la salle 91-A. (14 h 10)

Le menu que j'ai indiqué pour l'Assemblée, après consultation auprès de l'Opposition, me permet de croire très légitimement, à cause du caractère peu contesté de ces lois, que nous pouvons achever ce travail vers 18 heures, ce qui me permettra de convoquer trois commissions parlementaires et de donner un souffle à l'Assemblée, après les séances qu'elle vient de connaître.

Je donne tout de suite avis que, demain matin, de dix heures à treize heures, trois commissions parlementaires se réuniront, soit, au salon rouge, celle des affaires municipales, pour le projet de loi 57, à la salle 81-A, la commission de l'éducation pour le projet de loi 71 et à la salle 91-A, la commission de la justice sur les projets de loi 48 et 52 qui lui ont été déférés vendredi dernier. La Chambre ne se réunira qu'à quinze heures, au moment où auront lieu les déclarations ministérielles attendues et la période de questions, demain après-midi.

De même, je dois indiquer, Mme la Présidente, qu'un consentement a été accordé par l'Opposition à ce que la commission de l'industrie et du commerce entame à tout le moins cet après-midi son travail sur le double mandat qui est le sien, de mettre un point final à sa discussion sur le nouveau mandat de la SGF et l'étude article par article du projet de loi de SIDBEC. Je consens, en échange du consentement que j'ai reçu, dans un échange de bons procédés, que cette commission n'entame son travail que lorsque nous aurons disposé des lois fiscales ici, puisque le député d'Outremont est le porte-parole de son parti en cette matière et qu'il est aussi le représentant à la commission. Je donne avis que, dès que les lois fiscales seront terminées — cela ne devrait pas tarder, puisque ce seront les premières à être appelées tout à l'heure — la commission de l'industrie et du commerce se réunira à la salle 91 pour faire son travail, comme je viens de l'indiquer.

Je vous prierais donc, Mme la Présidente — j'ai perdu mes numéros du feuilleton — d'appeler d'abord la prise en considération..

La Vice-Présidente: D'abord la motion, M. le leader.

M. Charron: Ah oui! De mettre aux voix mes motions, je m'excuse, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: La motion, la partie de l'intervention du leader parlementaire du gouvernement qui considère les séances de commissions parlementaires est-elle adoptée?

M. Lalonde: Excusez-moi, Mme la Présidente. J'aurais seulement une question. On a déjà entamé l'étude article par article du projet de loi 71.

Dans l'hypothèse où les quatre heures de ce soir suffiraient pour l'adoption de tous ces articles, le leader changerait-il ses avis pour ce qui concerne les commissions parlementaires de demain matin, 10 heures?

M. Charron: Volontiers, si j'en avais l'assurance, Mme la Présidente.

M. Lalonde: Je ne peux pas en donner l'assurance, mais on a quand même plusieurs articles d'adoptés et j'imagine qu'après quatre heures, on aurait... Enfin, dans l'hypothèse où ce serait fait.

M. Charron: Non, si c'était fini ce soir, je ne vois pas ce que je pourrais faire d'autre demain matin. Il n'y aurait que deux commissions à ce moment-là qui se réuniraient plutôt que trois. Tant mieux, cela donnera à d'autres personnes le temps de prendre leur souffle.

La Vice-Présidente: La motion est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Motion adoptée.

M. Charron: Je vous prierais, Mme la Présidente, d'appeler la prise en considération du rapport...

M. Marchand: En vertu de l'article 34, je voudrais demander au leader parlementaire si la commission des engagements financiers siégera en janvier. Si je pose la question aujourd'hui, c'est peut-être pour vous donner le temps, d'ici jeudi ou vendredi, de consulter et de nous donner la réponse voulue.

M. Charron: Mme la Présidente, la tradition, chacun le sait, veut que cette commission se réunisse le dernier jeudi, à tout le moins dans la dernière semaine du mois. J'ai appris, il y a quelques heures, je pense que c'est hier, que, précisément en ce moment, le ministre responsable n'est pas disponible. Il faudrait donc s'attendre que ce soit plutôt dans la première semaine de février, mais j'en donnerai l'indication avant l'ajournement de l'Assemblée.

La Vice-Présidente: M. le député de Richmond et leader de l'Union Nationale.

M. Brochu: Mme la Présidente, une question concernant le dépôt d'un projet de loi qui a été fait tout dernièrement, le projet de loi 85, concernant la Loi modifiant la Loi sur la société de développement coopératif. Est-ce l'intention du gouvernement de l'appeler avant la fin de la session, en deuxième et troisième lecture pour lui faire franchir les étapes de l'adoption, quitte à avoir le consentement unanime?

M. Charron: Si j'avais l'assurance que ce projet de loi ne mettait pas en péril d'autres lois déjà avancées, du fait que les députés décideraient de leur accorder du temps, bien volontiers; mais j'ai mis toutes les réserves d'abord à terminer le programme déjà entamé depuis plusieurs semaines avant de nous lancer dans une autre loi. Je ne l'écarte pas. Je pose simplement cette condition.

M. Shaw: Mme la Présidente, relativement à 34, vous savez qu'avec le dépôt des projets de loi 17 et 71, avec les règlements, vous avez le consentement unanime pour que les procédures puissent être complétées avant la fin de la session. Est-ce que vous n'avez pas eu une conversation avec le leader pour que mon consentement soit accordé?

M. Charron: Je sais, mais je ne croyais pas avoir encore atteint ce point. Je n'écarte pas le plaisir que j'aurai à discuter avec le député de Pointe-Claire, mais je crois que je ne suis pas encore rendu à cette période réjouissante.

M. Levesque (Bonaventure): Mon collègue d'Outremont me fait remarquer qu'il est possible que le projet de loi 71, et cela, d'après les indications... Oui?

M. Charron: Après la SGF.

M. Levesque (Bonaventure): Oui, demain matin.

M. Charron: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on pourrait s'entendre pour cela d'ici la fin de l'après-midi, parce que...

M. Charron: Si j'avais l'assurance de mon excellent ami, de mon collaborateur — c'est le député de l'Opposition qui siège à la commission de l'éducation, je pense qu'il le dit lui-même, il doit parler en connaissance de cause — qu'advenant qu'à minuit ce soir, ils n'ont pas terminé le projet de loi 71, mais que celui-ci, pour permettre à son collègue d'avoir ce qu'il veut, acceptait de prolonger quelque peu — donc le projet de loi 71 serait terminé ce soir — je donnerais avis que la commission de l'industrie et commerce se réunisse demain matin, à la place de celle de l'éducation que j'ai annoncée tout à l'heure.

La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Merci, madame. Je ne sais pas si... Evidemment, on prend des courts-circuits de temps en temps, en fin de session. Est-ce qu'on ne pourrait pas, conditionnellement à cette éventualité, l'annoncer tout simplement? Autrement dit, si la salle est libre demain matin, la commission de l'industrie et du commerce pourrait siéger.

La Vice-Présidente: Un avis conditionnel, M. le leader?

M. Charron: D'accord, un avis conditionnel. Je modifie donc l'avis que j'ai donné tout à l'heure. Je m'attends que le projet de loi 71 soit terminé ce soir, en lisant entre les lignes de ce que vient de dire le député de Bonaventure. Je donne donc avis que demain, plutôt que la commission de l'éducation que j'ai indiquée tout à l'heure sur le projet de loi 71, ce soit la commission de l'industrie et du commerce sur le nouveau mandat de la Société générale de financement.

La Vice-Présidente: Est-ce que vous disiez que, si, à ce moment-là, 71 n'était pas terminé, ce serait 71?

M. Charron: Non, il va être terminé, madame; il va être terminé.

M. Levesque (Bonaventure): On pourrait faire les annonces immédiatement pour 71.

La Vice-Présidente: Bon! Alors, M. le leader...

M. Charron: Les collègues, membres de la commission de l'industrie et du commerce, ne sont pas pour rester en "stand-by" ici jusqu'à minuit pour voir si 71 finit ou ne finit pas. Ils vont faire ça?

M. Levesque (Bonaventure): Ils vont téléphoner.

M. Charron: Ils vont téléphoner et vous voulez que moi, à minuit ce soir, je téléphone à tout le monde aussi pour le leur dire? Cela ne me tente pas beaucoup.

Une Voix: Cela n'a pas de bon sens.

M. Charron: Soyons pratiques. On essaie de rendre service.

M. Brochu: Mme la Présidente, ce serait plus clair d'établir les positions de façon définitive pour savoir à quoi s'en tenir. Si j'ai compris le sens de l'intervention du député de Marguerite-Bourgeoys et les propos du leader du gouvernement, c'était l'intention arrêtée de l'Opposition officielle, je pense, de mettre fin aux travaux ce soir.

M. Levesque (Bonaventure): La seule réserve que j'avais concernait justement le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Brochu: En ce qui nous concerne, Mme la Présidente, je suis prêt à ce qu'on fasse le nécessaire pour terminer ce soir, de sorte qu'on puisse enclencher demain matin la commission sur la SGF.

M. Charron: Je maintiens l'avis que c'est la commission de l'industrie et du commerce qui se

réunit demain, madame, parce que j'ai confiance en la bonne volonté de tout le monde.

La Vice-Présidente: Alors, M. le...

M. Levesque (Bonaventure): Un instant...

La Vice-Présidente: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): ... Mme la Présidente, si vous le permettez! Le leader du gouvernement a mentionné la pétrochimie, je crois, ou la SGF, mais je pense bien que ce sera l'une ou l'autre, parce que, si SIDBEC n'était pas terminée, on pourrait continuer sur SIDBEC. C'est la même commission, d'ailleurs.

M. Charron: Ah oui! d'accord.

La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire du gouvernement, vous appeliez la prise en considération d'un rapport. Il s'agit de quelle commission, s'il vous plaît!

M. Charron: Du rapport de la commission sur le projet de loi no 74, madame, les affaires municipales.

Prise en considération du rapport

de la commission ayant étudié

le projet de loi no 74

La Vice-Présidente: Prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires municipales qui a étudié le projet de loi no 74, Loi modifiant le Code municipal et la Loi sur les cités et villes concernant les ententes intermunicipales. Alors, il y avait un amendement de M. le député de Laval?

M. Tardif: Mme la Présidente, j'aurais aussi... La Vice-Présidente: M. le ministre.

M. Tardif: ... deux ou trois petits amendements techniques. Peut-être pourrais-je laisser le député de Laval nous présenter son amendement. Moi, j'ajouterai ceux que je désire apporter et qui seront purement de forme. (14 h 20)

La Vice-Présidente: II y aurait des amendements de M. le ministre des Affaires municipales, mais des amendements de forme seulement.

M. le député de Laval, sur votre motion d'amendement.

M. Lavoie: Mme la Présidente, lorsque la commission des affaires municipales a siégé pour étudier article par article le projet de loi no 74, Loi modifiant le Code municipal et la Loi des cités et villes concernant les ententes intermunicipales, le ministre responsable du projet de loi a apporté un amendement se lisant comme suit: "L'article 413 de la Loi des cités et villes est modifié par l'addition, à la fin, du paragraphe suivant: 32, "Pour ordonner des travaux d'endiguement dans le but de protéger en tout ou en partie la municipalité contre les inondations, permettant aux municipalités de faire des ententes entre elles pour bâtir de tels travaux et en somme, protéger le territoire de ces municipalités contre les inondations".

Je crois que cet amendement est bien fondé et procurera aux municipalités un outil additionnel pour s'entendre entre elles et avec les municipalités voisines pour ériger de tels travaux. Par contre, j'ai eu des représentations pour une ville du comté de Deux-Montagnes entre autres, je crois que c'est la ville de Sainte-Marthe-sur-le-Lac, qui avait un projet de loi privé en préparation. Il avait d'ailleurs été soumis ici aux légistes, mais la Chambre n'a pas encore été saisie de ce projet de loi. Je ne sais pas si on le sera à la reprise de la session, mais tout ce que je demande au ministre, c'est si l'amendement qu'il apporte met fin à des procédures judiciaires. Je ne pense pas que ce soit le rôle du... Dans le cas de Sainte-Marthe-sur-le-Lac, la municipalité a procédé à certaines expropriations et certains travaux possiblement, dans le but de faire des digues.

C'est très bien, mais il faut que la municipalité ait ses droits. Il y a un citoyen de cette municipalité qui a pris des procédures légales à la Cour supérieure contestant le droit à la municipalité d'exproprier et de faire ces travaux, ce droit n'étant pas prévu dans la Loi des cités et villes. Je voudrais avoir l'assurance aujourd'hui que l'amendement que le ministre apporte à la Loi des cités et villes ne met pas fin ou ne s'ingère pas dans les procédures, dans les instances judiciaires en cour parce que ce ne serait pas sain, je crois, pour le Parlement de voter des lois avec un effet rétroactif et que le législatif s'ingère dans le judiciaire. Il faut que ces procès se déroulent normalement, que les tribunaux se prononcent, que les villes, comme Sainte-Marthe entre autres, aient ce droit à l'avenir, maintenant, comme d'autres municipalités. Laval, entre autres, pourrait le faire même si elle n'en a pas besoin, parce que l'île Jésus ne forme qu'un territoire, et je crois que c'est très bien que les municipalités puissent avoir ce pouvoir. La seule réserve que j'ai à la suite de l'amendement proposé par le ministre, c'est que je ne voudrais pas que cet amendement ait un effet rétroactif et puisse permettre une ingérence du législatif dans le judiciaire. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé un amendement au rapport qui se lit comme suit: Que cette disposition — l'amendement du ministre qui donne justement ces pouvoirs aux municipalités, et j'ajoute — n'affecte pas les causes pendantes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi. J'aimerais avoir cette assurance du ministre des Affaires municipales. C'est le but de mon amendement.

La Vice-Présidente: Sur la motion d'amendement, M. le ministre.

M. Tardif: Mme la Présidente, je voudrais rassurer immédiatement le député de Laval et les

autres membres de cette Chambre et dire que l'article 13 de la loi, telle qu'elle a été adoptée en deuxième lecture et lors de l'étude article par article, dit bien que cette loi entre en vigueur le jour de sa sanction, ce qui implique qu'il n'y a aucun effet rétroactif à cette loi. C'est vrai, Mme la Présidente, que j'ai déclaré en commission parlementaire et en deuxième lecture, sur le principe de cette loi, qu'elle visait à nous éviter, dans toute la mesure du possible, d'avoir à sanctionner des projets de loi privés, de faire en sorte, dis-je, qu'une loi-cadre vienne permettre aux municipalités de signer entre elles des ententes pour les fins de leur compétence en matière de protection, d'endiguement contre les inondations. Le but très net et très clair, c'est de permettre à des municipalités de s'entendre.

Deuxièmement, Mme la Présidente, de s'entendre dans un nouveau cadre légal à partir de l'entrée en vigueur de la loi, aujourd'hui, si elle est sanctionnée aujourd'hui, ou demain, si elle l'est demain, ou le 1er janvier si elle l'est à cette date. Donc, aucun effet rétroactif. Si bien que, tout en comprenant le sens de la question du député de Laval et tout en connaissant d'ailleurs le dossier puisqu'en effet, c'est vrai qu'une des municipalités dans cette région du lac des Deux Montagnes a fait une requête pour un bill privé justement pour essayer de régler par le biais d'une loi spéciale son problème, je dis: Nous n'allons pas rétroactivement régler les problèmes de cette nature.

Nous allons tout simplement permettre, à l'avenir, qu'une loi-cadre existe pour permettre des ententes et laisser les tribunaux s'occuper de tout cas de contentieux qui pourrait exister entre deux municipalités ou entre des citoyens et municipalités avant l'entrée en vigueur de cete loi. De l'avis de nos légistes à qui j'ai soumis le problème justement à la suite de l'amendement du député de Laval que j'avais eu il y a quelques jours déjà, ceux-ci sont unanimes à dire: Si la loi 74 avait comporté un article déclaratoire à savoir que cette loi avait effet rétroactivement ou qu'elle aurait dû, dans le cas d'une loi existante, interpréter de telle manière depuis telle date, ceci aurait pu avoir pour effet de venir interférer avec le processus judiciaire.

Ce n'est aucunement le cas ici. On prévoit pour l'avenir que les causes pendantes suivent leur cours normal et de ce point de vue, on m'assure que sans ajouter un iota au projet de loi no 74, l'objectif visé par le député de Laval est atteint.

Mme la Présidente, à mon tour on me permettra d'apporter trois courts amendements purement de forme, qui sont beaucoup plus des problèmes de...

La Vice-Présidente: Si vous le permettez, nous pourrions peut-être voter sur la motion d'amendement immédiatement et voir ensuite. Cette motion du député de Laval...

M. Lavoie: Si le ministre m'assure que ses légistes lui donnent l'assurance que ce projet de loi n'a aucun effet rétroactif, que les tribunaux vident la question, qu'ils rendent le jugement suivant leur compétence et que les municipalités, à partir de l'adoption de la présente loi, auront le pouvoir seules d'ériger des digues pour protéger les citoyens contre les inondations ou autres, ou de signer des ententes avec leurs voisines, je suis d'accord. Avec cette assurance du ministre, je retire ma motion d'amendement. (14 h 30)

La Vice-Présidente: II y a retrait.

M. le ministre.

M. Tardif: Mme la Présidente, je remercie le député de Laval.

La Vice-Présidente: M. le ministre, s'il vous plaît! Je me dois de demander si nous avons le consentement unanime à la présentation des amendements de M. le ministre.

M. Lavoie: Ecoutez, nous allons offrir notre collaboration au ministre, mais, avant de donner notre consentement, je voudrais bien qu'on prenne connaissance des amendements.

La Vice-Présidente: M. le ministre, allez-y donc!

M. Tardif: Mme la Présidente, je propose une modification à l'article O qui vise à corriger une erreur purement technique, attendu que la section devrait être numérotée, en chiffres romains, XVIA au lieu de XVIIA. Donc, il y a un I, en chiffres romains, de trop. La section devrait être numérotée... Je pourrais le faire formellement comme cela devrait être. "Que l'article O du projet de loi 74 adopté par la commission soit modifié de façon à remplacer les mots "section XVIIA" par les mots "section XVIA". D'accord?

M. Lavoie: Vous approuvez en vrac, Mme la Présidente.

M. Tardif: La deuxième, Mme la Présidente, consiste à modifier le rapport de la commission permanente des affaires municipales qui a étudié article par article le projet de loi 74, dans le sens suivant: "Que l'article 492ay du Code municipal, édicté par l'article 1 du projet de loi et adopté avec modifications par la commission, soit de nouveau modifié par le remplacement, dans la première ligne, de "25, 26 et 27" par les chiffres "22 à 27, 85 et 86.

Dans cet amendement, Mme la Présidente, qui est apporté à l'article 1, je demande — il y a substantiellement la même chose à l'article 3 — que le rapport de la commission permanente des affaires municipales qui a étudié article par article le projet de loi 74 soit modifié pour dire que l'article 468.50 de la Loi des cités et villes édicté par l'article 3 du projet de loi et adopté après remplacement par la commission soit modifié par le remplacement, au début du paragraphe 3 des articles 25, 26 et 27 par 22 à 27, 85 et 86; enfin.

Mme la Présidente, que l'article 10 du projet de loi 74 soit modifié par le remplacement, dans l'avant-dernière ligne de l'article 36 proposé, du mot "évaluation" par le mot "évacuation".

On parlait, Mme la Présidente, de l'évaluation des eaux usées, c'est une coquille; on aurait dû pouvoir lire l'évacuation.

La Vice-Présidente: Consentement à la présentation des motions d'amendement.

M. Lavoie: Nous allons donner notre consentement, mais il faudrait considérer que c'est une procédure un peu exceptionnelle qu'on fait actuellement. Vous savez, notre règlement dit bien que, si on a des amendements à apporter au rapport, il faut que cela se fasse la journée où le rapport est déposé. J'assure le ministre de notre consentement, du moins au nom de l'Opposition officielle. C'est là justement — je dois le souligner — le danger d'adopter de la législation à la vapeur et de la législation bâclée à la fin d'une session.

On a l'expérience actuellement, Mme la Présidente, du projet de loi 74 qui a treize articles seulement. Vous voyez, on est obligé de demander le consentement de la Chambre pour amender le rapport, parce que cela a peut-être été adopté un peu à la vapeur en commission, les numéros ne sont pas les bons, la concordance n'est pas bonne, ainsi que les sous-paragraphes.

Je me demande ce qui va arriver avec un projet de loi que la commission des affaires municipales étudie présentement, le projet de loi no 57 sur la fiscalité municipale, où il y a au-delà de 540 articles et où, jusqu'à maintenant, nous sommes rendus, j'imagine, à près de 150 amendements. Le projet de loi, je vous garantis que celui qui peut le comprendre au moment où je vous parle, qu'on lui dise honneur et gloire, parce que c'est quasiment impossible de s'y retrouver. Vous savez, lorsqu'un projet de loi très technique fait référence à deux articles antérieurs et trois articles postérieurs et que les deux articles antérieurs et les trois articles postérieurs ont déjà subi des amendements en cours de route, je souhaite bonne chance au ministre, à tous les légistes et au secrétariat des commissions qui devront, lorsque nous aurons terminé l'étude de ce projet de loi en commission, des 500 articles avec au-delà de 150 amendements, des articles suspendus et des articles renumérotés, en saisir la Chambre peut-être demain, à l'étape du rapport et de la troisième lecture. C'est un projet de loi qui affecte tous les citoyens au Québec, toutes les commissions scolaires et toutes les municipalités, cela va être du propre. Je souhaite bonne chance à tout le monde. Je donne mon consentement en ce qui concerne le projet de loi 74.

La Vice-Présidente: Consentement à ce que les amendements soient proposés. Seront-ils adoptés? Adopté. Le rapport sera-t-il adopté? Adopté.

M. Charron: Troisième lecture?

M. Lavoie: Consentement.

Troisième lecture

La Vice-Présidente: Consentement à ce que la troisième lecture soit faite immédiatement. La proposition de troisième lecture du projet de loi sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. Charron: Mme la Présidente, j'invite nos collègues de Crémazie et de Laval à reprendre l'important travail duquel nous les avons retirés pour quelques minutes.

M. Lavoie: Notre loge, avec billet de saison, est réservée.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler... Je regrette, madame, je n'ai plus mon feuilleton. Ce sont les projets de loi au nom du ministre du Revenu. Je n'ai pas le numéro au feuilleton.

Projet de loi no 65 Deuxième lecture

La Vice-Présidente: Les projets de loi 65 et 68, je les retrouve, M. le leader. M. le ministre du Revenu propose que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de loi no 65, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants.

M. le ministre.

M. Michel Clair

M. Clair: Mme la Présidente, le projet de loi no 65, dont je propose aujourd'hui l'adoption en deuxième lecture apporte certains amendements à la Loi concernant la taxe sur les carburants. Malgré la nature brûlante de ce sujet, qui est en grande partie responsable du déclenchement d'élections générales au Canada, vous pourrez constater que la modestie, malgré leur utilité, de ces amendements, ne devrait pas entraîner le Québec dans des élections générales.

Cette loi, entrée en vigueur en juillet 1973, réglemente l'utilisation du mazout non taxable ou taxable à taux réduit. La pratique nous a démontré qu'il subsistait dans la loi certaines lacunes et certaines imprécisions que le présent projet de loi entend corriger.

Le projet de loi no 65 a donc pour premier but d'éclaircir la loi existante, d'abord par des définitions. Comme vous le savez, le problème principal auquel ont à faire face les administrateurs d'une taxe sur les carburants est celui de la similitude entre le mazout taxé servant au moteur diesel et le mazout non taxé utilisé comme huile à chauffage. La coloration de celui-ci n'a pas mis fin aux fraudes qui, dans le passé, ont coûté des millions de dollars aux contribuables québécois, parce que les tribunaux avaient tendance à définir le mazout coloré comme du mazout contenant un pourcentage précis de colorant, tel qu'établi par règlement. La nouvelle définition que je propose

prévoira donc, pour éviter le mélange des mazouts, puisque la manutention des deux sortes de mazouts doit être séparée, qu'il suffit d'une quantité quelconque de colorant pour faire du mazout du mazout coloré au sens de la loi.

La définition d'un poste d'essence a elle aussi été corrigée, afin d'en exclure des postes en vrac qui stockent et vendent aussi bien du mazout coloré que des carburants imposables, ce qui est interdit aux stations-service. (14 h 40)

Enfin, l'article 5 de la loi a été modifié afin de le rendre plus précis. Plutôt que de prévoir le remboursement de la taxe sur l'essence qui a servi — disait l'ancien texte — au fonctionnement de machinerie agricole employée exclusivement pour des travaux d'agriculture, on rembourserait, si le projet de loi est adopté, la taxe sur l'essence qui a servi au fonctionnement de machine agricole, mais seulement pendant que cette machinerie était employée pour des travaux d'agriculture. C'est donc dire que l'agriculteur pourra utiliser une de ces machines seulement de temps à autre à des fins agricoles et bénéficier, pendant le temps précis où elle sert à ces fins, du remboursement de la taxe sur le carburant. C'est donc un élément de souplesse qu'on introduit.

D'autre part, des difficultés d'application dues à la complexité de la technologie et certains problèmes pouvant se poser dans des cas d'éloignement ou d'isolation m'ont amené à proposer un pouvoir réglementaire d'exempter certains carburants dans des circonstances bien spécifiques; par exemple, lorsqu'il est techniquement impossible d'éviter une infraction. Si, par exemple, un tracteur diesel alimenté en mazout coloré par un agriculteur est vendu à un entrepreneur, il peut être techniquement impossible de le vider complètement et l'entrepreneur ainsi commettrait une infraction pendant un certain temps.

D'autre part, suivant en cela à l'expérience des années écoulées depuis 1973, le projet de loi no 65 apporte diverses précisions sur le stockage, la possession et la manutention du mazout coloré. Il décrit, de façon plus détaillée et précise, les infractions découlant de la loi, leurs conséquences pour le propriétaire et le locataire d'un véhicule automobile. Il crée une échelle de peine qui baisse la première peine minimale, alors que les peines minimales suivantes sont augmentées pour les récidivistes. De plus, des modifications sont apportées aux règles de preuve afin de rendre la procédure moins coûteuse.

Enfin, l'article 53 de la loi est amendé afin d'étendre aux vendeurs en gros la compensation pour les pertes par évaporation accordée actuellement aux vendeurs au détail seulement. On comprendra tous, Mme la Présidente, qu'il s'agit ici d'un élément de discrimination que nous voulons faire disparaître à l'égard des vendeurs en gros.

Je terminerai, Mme la Présidente, en soulignant que cette loi a pour but d'assouplir l'administration de la Loi concernant la taxe sur les carburants, d'en faciliter l'interprétation par ceux qui ont droit à l'exemption ou au taux réduit de taxe et, enfin, de contrôler de façon plus efficace l'usage illégal du mazout. A l'occasion de ce projet de loi, je voudrais une fois de plus réaffirmer que le domaine de la taxe sur les carburants est traditionnellement réservé aux provinces, étroitement lié à leur pouvoir exclusif en matière de voirie et de transport routier. Le Québec occupe ce champ de taxation depuis 1924 — ce n'est pas d'hier — et nous ne cesserons pas de nous élever contre tout envahissement par le pouvoir fédéral de ce champ de taxation. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député d'Outremont.

M. André Raynauld

M. Raynauld: Mme la Présidente, je voudrais d'abord saluer le nouveau ministre du Revenu, qui a l'occasion, pour la première fois, de présenter un projet de loi à cette Assemblée. Je constate avec lui que le projet de loi est modeste, et comme c'est lui-même qui a voulu faire un rapport entre la modestie de son projet de loi et la sienne, je dirai que cette modestie contraste avec celle de son prédécesseur.

En effet, il s'agit d'un projet de loi d'ordre administratif et je suis bien d'accord avec lui qu'il n'y a pas lieu de craindre de grands tremblements ni de changements importants sur la scène politique avec ce projet de loi.

Il faudrait essayer de le comprendre, peut-être. Très brièvement, il me semble que, pour comprendre la portée de ce projet de loi, il faut savoir deux choses. La première c'est que la loi actuelle permet à certains utilisateurs d'essence de se faire rembourser la taxe de vente que nous payons sur l'essence, taxe de vente qui était et qui est de $0.19 le gallon, ou de $0.042 le litre d'essence. Il s'agit essentiellement, parmi ces utilisateurs qui peuvent se faire rembourser leur taxe de vente, des agriculteurs, des pêcheurs, lorsqu'ils exercent leur métier. Donc, parce que certaines catégories d'utilisateurs peuvent se faire rembourser la taxe de vente, on est obligé de prévoir un traitement spécial et de voir à ce que ce remboursement ne soit versé que pour les fins pour lesquelles elle a été accordée.

Il faut savoir, en deuxième lieu, qu'en ce qui concerne le mazout pour les moteurs diesel, il existe une exemption au paiement de cette même taxe. Il ne s'agit pas d'un remboursement, mais d'une exemption. On voit tout de suite qu'à ce moment-là les difficultés administratives doivent être beaucoup plus considérables en ce deuxième cas que dans le premier puisque, dans le premier cas, comme on se fait rembourser, il faut fournir un papier à l'administration indiquant les objets et les raisons pour lesquelles la demande de remboursement est faite. Dans le cas de l'exemption, les mêmes utilisateurs, essentiellement les agriculteurs et les pêcheurs, n'ont pas à payer la taxe au départ. Donc, ils sont exemptés de cette même taxe.

Mais cette taxe sur le mazout n'est pas identique non plus à la taxe sur l'essence. Celle-ci est une taxe de $0.055 le litre, par conséquent, il y a encore une différence de ce côté et parce qu'on a adopté la méthode de l'exemption, évidemment, cela donne lieu assez facilement à des abus puisqu'on peut invoquer toutes sortes de raisons plus ou moins admissibles et, bien souvent, le vendeur à qui cette exemption est demandée ne peut pas savoir exactement si elle est admissible ou non aux termes de la loi. Par conséquent, je pense qu'il y a des problèmes administratifs qui se posent avec l'application de ces règles ou de ces privilèges fiscaux que l'on donne à certaines catégories d'utilisateurs, comme les agriculteurs et les pêcheurs, et qu'on a à revenir périodiquement et proposer des amendements qui viennent préciser et, à mon avis, circonscrire l'utilisation de ces articles d'exception au paiement de la taxe de vente sur le carburant.

Le ministre a dit qu'il s'agissait essentiellement d'apporter de la souplesse et peut-être, à ce moment, d'élargir l'applicabilité de ces exemptions, de ces ristournes de taxe, en particulier, pour les administrateurs. Je ne suis pas sûr du tout que ce soit propre à favoriser davantage les agriculteurs ou les pêcheurs, je n'en suis pas sûr, dans le sens que, dans la loi actuelle, il s'agit d'une machinerie bien identifiée, qu'on appelle une machinerie agricole. Sur cette machinerie agricole, on dit: II n'y a pas de paiement, en tout cas, il n'y a pas de taxe sur l'essence qui est imposée. Maintenant, on dit: C'est lorsque cette machinerie va servir à des fins agricoles qu'on exemptera l'utilisateur du paiement de la taxe. Encore une fois, j'ai l'impression que cela vient circonscrire l'accessibilité à ce privilège fiscal plutôt que de l'élargir.

Je voudrais mentionner un deuxième point en ce qui concerne ce projet de loi, qui est tout aussi technique que le premier, mais que le ministre n'a pas mentionné du tout. Il s'agit d'un changement assez important qui est apporté au régime des infractions et des amendes. Lorsqu'on viendra étudier le projet de loi article par article, Mme la Présidente, j'ai l'intention de soulever des questions assez nombreuses sur cet aspect du changement, sur cet aspect des amendements au projet de loi parce que, suivant l'interprétation que j'ai pu en faire, cette modification introduit une présomption de culpabilité de personnes qui peuvent être absolument ignorantes de l'utilisation présumément erronée et illégale des privilèges fiscaux qui sont prévus dans le projet de loi. Il y a une présomption de culpabilité qui est non seulement incompatible à toutes nos lois et à notre régime juridique, mais qui représente également, potentiellement, des injustices très sérieuses. (14 h 50)

Lorsque quelqu'un ignore, même s'il est propriétaire d'un véhicule, l'utilisation qu'on fait de son véhicule, s'il s'agit même — et cela va plus loin — d'un locataire qui utilise un véhicule et qui peut le faire utiliser par un conducteur, il peut ignorer l'utilisation exacte à laquelle est placé ce véhicule, le propriétaire, en vertu des amendements qui sont proposés, et le locataire lui-même, sont présumés coupables, sont présumés être au courant de ce qui se passe. Cet aspect des amendements méritera un examen assez attentif au cours de l'étude article par article.

Mme la Présidente, nous n'avons pas l'intention de faire une opposition de principe à ce projet de loi. Par conséquent, je veux déclarer dès maintenant, au nom de ma formation politique, que nous voterons en faveur de ce projet de loi, sous réserve de l'étude que nous ferons article par article, un peu plus tard. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez, pendant quelques minutes seulement, de dire quelques mots sur ce projet de loi. D'abord, nous sommes d'accord avec ce projet de loi, pour une raison bien simple. Il s'agit simplement de corriger certains points administratifs qui apportent certains embêtements, non pas au gouvernement, mais souvent à ceux qui en sont affectés; comme le disait le député d'Outremont, l'application est souvent pas trop facile, mais c'est toujours celui qui est impliqué, même de loin, qui semble souffrir. Celui qui fait sa réclamation, s'il ne peut pas bien faire sa preuve, est obligé d'attendre après ses remboursements, de même qu'à l'inverse. S'il s'agit d'exemptions, le jeu est peut-être différent. Il y a un point, qui a été soulevé par le député d'Outremont, que je voulais appuyer. C'est que la preuve retombe encore sur celui qui sera pris en possession des essences qu'on présume qu'il n'aurait pas le droit d'avoir, sans déterminer d'avance s'il en fait lui-même l'utilisation. Ce sont des choses que nous pourrions discuter tout à l'heure en commission parlementaire, pour éviter de m'étendre sur le sujet.

Nous voulons appuyer ce projet de loi pour faire en sorte que ceux qui sont affectés, le petit, celui qui a droit à des remboursements, voient leurs remboursements accélérés et ne soient pas pénalisés et, à l'inverse, on ne voudrait pas que ceux qui ont droit à des exemptions soit pénalisés. Si ce projet de loi a pour effet de soulager ces gens-là, nous sommes totalement d'accord et c'est la façon dont je comprends ce texte de loi là.

Mme la Présidente, sans faire de filibuster, comme l'a fait le ministre en déposant ce projet de loi, je vais conclure immédiatement et nous aurons la discussion en commission parlementaire.

La Vice-Présidente: M. le ministre.

M. Michel Clair

M. Clair: Mme la Présidente, je voudrais simplement relever un point au niveau de ma réplique pour ce qui concerne les présomptions dont ont fait état mes deux collègues. Je pense qu'on sera

à même d'y répondre au niveau de l'étude en commission plénière. Je voudrais simplement corriger une fausse impression qu'a pu laisser le député d'Outremont qui, m'interprétant, si j'ai bien compris, disait que j'avais seulement dit, somme toute, que ce projet de loi n'apportait que de la souplesse. Loin de moi cette affirmation-là. Il y a des éléments de souplesse qui sont apportés. C'est le cas, notamment, au niveau du mazout pour les agriculteurs et pour les pêcheurs. Il y a des cas où, effectivement, on limite davantage, on circonscrit davantage le privilège qui est conféré par ce projet de loi. Par exemple, au niveau du mazout coloré, autrefois, les tribunaux ont interprété qu'il fallait une quantité précise de coloration dans le mazout pour que, techniquement, il y ait infraction. Maintenant, on dira une quantité quelconque. C'est bien sûr que la souplesse qu'on apporte, c'est en faveur du ministère du Revenu et non pas en faveur de l'utilisateur ou du fraudeur.

Cependant, en ce qui concerne les pêcheurs et les agriculteurs, la machinerie agricole visée demeure exactement la même. Auparavant, cette machinerie devait servir exclusivement à des fins agricoles. Dorénavant, il suffira que cette machinerie-là serve, au moment où elle utilise le mazout en question, à des fins agricoles. Prenons, par exemple, le cas d'un agriculteur qui irait louer un tracteur chez un concessionnaire Massey-Fergu-son de son village, lequel tracteur, habituellement, sert à des fins commerciales. C'est à l'époque des semences. Le fermier a besoin d'un tracteur. Il va le louer. Sous l'empire de la loi telle qu'elle existe actuellement, il pourrait se retrouver responsable d'une infraction parce que ce tracteur-là ne servirait pas exclusivement à des fins agricoles. Maintenant, à compter du moment où le tracteur de ferme va travailler effectivement à des fins agricoles, il va pouvoir bénéficier du privilège en cause. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette motion de M. le ministre du Revenu proposant la deuxième lecture du projet de loi 65, Loi sur les carburants, est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Charron: Madame, avant de proposer que ce projet de loi soit déféré en commission plénière ici même, tout à l'heure, puisqu'il y en a un autre à l'ordre du jour, peut-être pourrions-nous faire dans les deux cas la deuxième lecture tout de suite, et procéder à un projet après l'autre ensuite en commission plénière? Je proposerais d'appeler le projet de loi 68, madame.

Projet de loi no 68 Deuxième lecture

La Vice-Présidente: M. le ministre du Revenu propose que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de loi no 68, Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et la Loi concernant la taxe sur les carburants. M. le ministre du Revenu.

M. Michel Clair

M. Clair: Mme la Présidente, le projet de loi no 68 a pour principal objet d'exempter de la taxe de vente les aéronefs exploités en vertu d'un permis de service aérien commercial délivré dans le cadre de la Loi sur l'aéronautique, leurs pièces composantes, ainsi que les pièces qui servent à l'entretien ou à la réparation de tout aéronef, et également d'uniformiser le taux de la taxe sur le carburant d'aviation à $0.013 le litre de $0.007 le litre qu'il est présentement. L'imposition d'une taxe de vente de 8% sur les aéronefs et leurs pièces a eu un impact certain sur l'industrie aéronautique du Québec et sur l'activité des transporteurs aériens québécois.

Comme le disait le ministre des Transports le 21 novembre dernier, en réponse à une question du député de Rouyn-Noranda, le gouvernement a étudié le problème et il est aujourd'hui en mesure d'y apporter une solution conforme aux voeux de l'Association des transporteurs aériens du Québec. C'est face aux transporteurs ontariens que nos transporteurs québécois subissaient la plus grande déficience concurrentielle. En effet, les transporteurs aériens qui ne paient, pour la plupart, aucune taxe de vente peuvent opérer exclusivement au Québec, mais éviter de payer la taxe sur l'équipement utilisé.

De ce fait, des entreprises de l'extérieur peuvent exécuter des travaux au Québec pendant de brèves périodes avec un avantage concurrentiel par rapport aux entreprises québécoises, puisqu'elles n'ont pas, dans le prix de leurs services, à récupérer de taxes, contrairement aux entreprises du Québec qui doivent payer la taxe lors de l'achat de leurs aéronefs. Cette situation touche particulièrement les petites et moyennes entreprises qui fournissent des services aériens de toute nature. De plus, la taxe imposée sur les pièces composantes des aéronefs, ainsi que sur les pièces utilisées à leur entretien ou à leur réparation incitent de façon marquée les propriétaires d'aéronefs du Québec à faire faire l'entretien et la réparation de leurs appareils à l'extérieur du Québec, là où ils ne seront assujettis à aucune taxe de vente.

C'est ainsi que de grands transporteurs aériens québécois font faire l'entretien de leurs appareils les plus importants dans des endroits aussi surprenants qu'en Israël. J'ai la conviction que l'exemption de taxe que prévoit ce projet de loi aura des effets bénéfiques sur l'industrie aéronautique du Québec et aidera grandement les entreprises de transport aérien de chez nous et, en particulier, les petites et moyennes entreprises. (15 heures)

Je précise, Mme la Présidente, que cette exemption vise la vente et la location d'aéronefs exploités en vertu d'un permis d'exploitation du service aérien commercial, délivré en vertu de la Loi sur l'aéronautique du Canada. Ces permis

couvrent les activités suivantes: le transport des personnes ou des marchandises, l'affrètement, les aéroclubs, l'épandage et la dispersion de produits, la construction, la surveillance aérienne, l'inspection, la reconnaissance, la publicité et la photographie aériennes, l'entraînement au vol, y compris les excursions, les démonstrations d'acrobatie aérienne et le saut en parachute.

Comme vous pouvez le constater, un grand nombre d'aéronefs seront sujets à cette exemption. Seuls les aéronefs utilisés à des fins personnelles demeureront imposables. Les pièces composantes des aéronefs exploités en vertu d'un permis décrit, tel que je viens de le faire, seront également exemptées. Enfin, toutes les pièces nécessaires à l'entretien ou à la réparation d'un aéronef, de quelque type qu'il soit, seront aussi exemptées de la taxe de vente. Cette mesure est un encouragement important au développement de l'industrie de l'aéronautique au Québec.

Evidemment, ces nouvelles dispositions d'exemption se traduiront par une perte de revenu pour le Québec. Le ministère des Finances a établi le manque à gagner à environ $1 500 000 à l'égard des ventes d'aéronefs et à environ $10 millions en ce qui concerne la vente de pièces composantes, pour la première année de cette exemption. C'est pour combler une partie de ce manque à gagner qu'il a aussi été décidé par le gouvernement de porter la taxe sur l'essence servant à la propulsion des aéronefs à un taux unique de $0.013 le litre. En effet, le taux était fixé à $0.007 le litre depuis 1968, lorsque le carburant sert à effectuer des essais de moteur ou à la propulsion d'un aéronef pour fins commerciales ou d'affaires en général, alors que le carburant servant à la propulsion d'un avion de plaisance est taxé, lui, à $0.042 le litre. Le contrôle, vous le devinez, Mme la Présidente, était quasi impossible à effectuer.

J'ai jugé utile, dans les circonstances, l'imposition d'un taux unique. Cette mesure plaira sans doute aux propriétaires d'avions de plaisance qui bénéficient ainsi d'une réduction de leurs taxes qui, nous l'espérons, perdront cette tendance qu'ils ont aujourd'hui à acheter le carburant hors du Québec, là où il est moins taxé.

J'ajouterai enfin à ce sujet que l'Ontario a, en avril dernier, doublé le taux de la taxe sur le carburant d'aviation en le faisant passer de $0.0066 le litre à $0.0132 le litre. L'augmentation prévue dans ce projet de loi-ci rapportera environ $6 500 000 pour la première année de sa mise en vigueur selon les calculs du ministère des Finances. D'autre part, j'ai distribué, quelques minutes avant mon discours de deuxième lecture, des amendements qui s'ajoutent au projet de loi no 68 tel que déposé en première lecture. J'en ai remis un exemplaire au député d'Outremont de même qu'à mon collègue le député de Brome-Missisquoi. Ces amendements concernent trois sujets. Je passerai rapidement sur ces amendements dont le but est de clarifier certaines dispositions contenues dans nos lois, notamment, dans la Loi de l'impôt sur la vente en détail.

C'est ainsi que nous voulons y modifier la définition de "bien mobilier" afin d'inclure expressément le service d'éclairage et la définition de droit incorporel afin qu'aucun doute ne subsiste sur la légalité de l'assujettissement des services de téléphone et d'éclairage à la taxe de vente en détail. D'autre part, les définitions de "prix de vente" et de "prix d'achat", qui sont les notions sur lesquelles est calculée la taxe de vente au détail, seraient aussi amendées afin d'en exclure, de façon définitive, les frais de finance et d'intérêt. Leur inclusion, en effet, créait dans un premier temps des difficultés d'application et entraînait une discrimination face aux consommateurs, souvent les moins riches, qui font appel au service de financement de leur vendeur, parce qu'ils ne détiennent pas de carte de crédit.

Enfin, dans plusieurs lois, sera insérée une disposition relative à la rétroaction des règlements, si cela est nécessaire, au 1er janvier de l'année durant laquelle ils sont adoptés. En effet, la plupart des lois ou règlements découlant d'un discours sur le budget sont sanctionnés ou adoptés après que des mesures qui y sont contenues eurent pris effet.

Cela a été, notamment, le cas lors du discours sur le budget de 1976, alors que l'entrée en vigueur des règlements découlant d'une loi a été postérieure, de sorte qu'on s'est trouvé face à un vide juridique qui a bénéficié à des réclamants. On en profite pour corriger cette anomalie dans nos lois. Ces modifications auront, en outre, l'avantage d'uniformiser le pouvoir réglementaire de toutes les lois relatives aux taxes à la consommation.

Pour terminer, Mme la Présidente, j'aimerais de nouveau insister sur l'impact qu'aura ce projet de loi sur notre industrie aéronautique et sur nos transporteurs aériens qui pourront, beaucoup mieux qu'avant, faire face à la concurrence des provinces voisines. L'économie du Québec, en général, s'en ressentira, nous l'espérons, parce que les propriétaires d'aéronefs répareront et entretiendront leurs appareils au Québec. Ils achèteront les pièces dont ils ont besoin au Québec et cela représente des sommes considérables pour chaque appareil chaque année. L'achat d'un appareil sera rentabilisé plus vite pour les petits transporteurs, les écoles de pilotage vivront plus facilement, des emplois pourront être créés. C'est pour cela, Mme la Présidente, que je propose l'adoption en deuxième lecture du projet de loi. Merci.

La Vice-Présidente: M. le député d'Outremont.

M. André Raynauld

M. Raynauld: Merci, Mme la Présidente. Nous allons également voter en faveur de l'adoption du projet de loi no 68 en deuxième lecture. En effet, ce projet de loi propose en premier lieu d'exempter de la taxe de vente de 8% les avions commerciaux, de même que la vente des pièces de rechange. Cette exemption sur les achats d'avions ne devrait surprendre personne parce qu'on ap-

prend assez tôt en économique que, lorsqu'on essaie d'imposer des choses ou des personnes qui sont très mobiles, le paiement de la taxe n'est pas effectif, le paiement de la taxe est toujours soit reporté à plus tard, soit reporté surtout sur d'autres. Je pense qu'il n'y a pas de pièce d'équipement plus mobile aujourd'hui que les avions qui se promènent.

On peut bien dire, comme je l'ai vu, je crois, dans une publication gouvernementale ou dans une déclaration l'autre jour d'un ministre: Les avions qui passent dans "notre" ciel. C'est vrai que c'était notre ciel, mais, en ce qui concerne le paiement des taxes provinciales, je pense que les avions, qui justement peuvent aller outre-frontières et qui le font de façon professionnelle, sont vite exemptés d'impôts qui peuvent être plus élevés dans une juridiction que dans une autre puisqu'il est évidemment facile au propriétaire de se déplacer.

Le ministre a fait allusion tout à l'heure au fait qu'on pouvait faire réparer des avions dans des pays aussi lointains qu'Israël. C'est justement la réaction qu'on aurait attendue d'un contribuable lorsqu'il a l'option, justement à cause de l'équipement qu'il a, de choisir, il a donc le choix des pays ou des endroits où il va faire réparer ses avions et, évidemment, il va choisir l'endroit où les impôts sont le moins élevés.

Le ministre a mentionné qu'en ce qui concerne les achats d'avions, cette exemption de la taxe de vente de 8% allait entraîner une perte de $1 500 000 en taxes pour le trésor québécois. C'est une perte très minime et peut-être plus faible que j'aurais pensé, étant donné que, simplement dans le cas de Québecair, qui achète un avion, un 737, on me dit que cela coûte de $14 millions à $15 millions, et cela fait déjà, à 8%, $1 200 000. Cette exemption n'est donc pas négligeable en ce qui concerne encore une fois les achats de pièces et d'avions en tant que tels.

Il est exact également que cet abaissement de la taxe de vente est fait pour simplement rendre le poids de cette taxe égal à celui, par exemple, de l'Ontario. Si je comprends bien, en Ontario, il n'y a pas de taxe de vente sur les achats d'avions et, à ce moment, cela introduisait immédiatement une distorsion considérable de 8% en réalité qui défavorisait le Québec. (15 h 10)

Encore une fois, je ne suis pas surpris que, dans le cas des avions, à ce moment, on aille les faire réparer ailleurs pour éviter justement le paiement de taxes de vente. Je suis même un peu surpris, en réalité, que si ce phénomène existait depuis un certain temps, on ait autant tardé à s'ajuster à la situation de nos concurrents les plus immédiats.

En ce qui concerne la taxe sur l'essence, il s'agit, au contraire, d'une augmentation de taxe dont l'effet sera négatif sur les mêmes sociétés, mais dont la justification vient, là aussi, du fait que, essentiellement, en Ontario, on a une taxe qui est à peu près de $0.013 le litre. Par conséquent, on dit: Le Québec va s'ajuster là aussi à la situation qui existe en Ontario, mais si ce n'était pas de ce cas, je pense qu'il aurait fallu certainement reconnaître qu'il s'agit là d'une augmentation considérable. D'après les informations que j'ai, par exemple, pour une société comme Québecair, cette augmentation de 85% dans le taux de la taxe sur l'essence représente un paiement de $218 000 environ par année de sorte qu'on pourra, pour une société comme celle-là, assez rapidement payer beaucoup plus cher en frais d'exploitation que l'économie qu'elle fait à l'achat soit des avions, soit des appareils, soit des pièces de rechange.

Quoi qu'il en soit, je suppose aussi que cette augmentation sur la taxe de l'essence est conforme à l'évolution récente de ces dernières années. Alors que le prix de l'essence augmente considérablement partout dans le monde et pour tous les usagers, je suppose qu'il était raisonnable de penser que les sociétés aériennes devaient, elles aussi, contribuer à une augmentation des frais d'essence et, par conséquent, accepter également de faire face à des hausses dans les taxes de vente sur ce produit.

En ce qui concerne les amendements, comme le ministre l'a dit tout à l'heure, il s'agit d'amendements essentiellement techniques là aussi, pour répondre à des problèmes d'interprétation souvent juridique, souvent aussi d'ordre purement administratif. Je me permettrai d'y revenir lors de l'étude article par article, mais de ne pas en parler davantage au cours de ce débat de deuxième lecture. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: Mme la Présidente, très bref commentaire sur ce projet de loi qui est aussi technique que l'autre peut l'être. Je sais qu'il s'agit de deux principes en particulier, l'un c'est d'imposer une taxe et l'autre est de l'enlever.

Evidemment, on a un domaine bien particulier en ce qui concerne l'aviation au Québec. Il est évident que c'est un domaine qu'on devrait peut-être s'appliquer à étudier un peu plus afin qu'on donne ici, au Québec, à ceux-là qui utilisent ce moyen de transport, un peu plus de services et une plus grande possibilité à ceux qui sont dans le domaine, à donner des services. En Ontario, on a pris les devants et surtout aux Etats-Unis. Ceux qui ont de petits avions de voyage, ceux qui s'en servent pour le commerce et d'autres pour le plaisir, auront beaucoup plus de facilité d'atterrissage un peu partout et des places beaucoup plus convenables. Ce qui arrive assez souvent, avec de petits avions, c'est que le propriétaire a souvent des troubles, qui peuvent se produire en voyageant avec ses avions, et il est souvent paralysé au sol parce qu'il ne peut pas avoir le service de réparation dans certains petits aéroports. On sait qu'au Québec, ce n'est pas tellement développé encore. Tout ce qu'on peut faire pour aider à le dévelop-

per, j'en suis. Je pense que le gouvernement devrait cependant l'accélérer un peu plus.

Enlever la taxe, comme on veut le faire, sur les pièces d'automobile et sur l'utilisation de ce système de réparation, cela va aider la situation, c'est certainement un pas en avant, c'est un départ et j'invite le ministre à en discuter avec ses collègues pour voir s'il pourrait en faire plus.

En ce qui concerne la légalisation de la taxe, si je comprends bien, ce sera uniformisé avec l'Ontario. Encore là, il y a certaines personnes qui peuvent abuser s'il y a un décalage de taxation, une différence entre les deux provinces ou les provinces voisines, on peut en prendre un certain avantage, mais c'est un avantage très limité, pour les petits usagers d'avion. Pour les gros transporteurs, oui, il pourrait y avoir un avantage marqué; par contre, je suis d'accord qu'on uniformise ces taxes qu'on veut imposer sur l'essence. J'aurai d'autres remarques à faire en commission parlementaire. Pour ne pas prolonger le débat, je conclurai immédiatement en disant au ministre que même s'il s'agit de taxes, nous allons l'appuyer dans cette lutte pour l'amélioration des conditions actuelles.

La Vice-Présidente: M. le ministre du Revenu.

M. Michel Clair

M. Clair: Mme la Présidente, très rapidement puisque nous aurons l'occasion de discuter des deux projets de loi article par article. Le député d'Outremont a souligné le caractère très mobile des avions. C'est une vérité de La Palice, effectivement: Qu'est-ce qui peut être plus mobile qu'un avion? C'est justement à cause de la mobilité de ces avions qu'il était important que le Québec s'ajuste par rapport à la réalité qui l'entoure. Maintenant, le député d'Outremont a semblé vouloir blâmer un peu le gouvernement de ne pas avoir agi assez rapidement. Tantôt, j'aurai l'occasion de lui préciser qu'on s'ajuste avec un peu de retard, il est vrai, mais ça ne fait quand même pas vingt ans que la situation est telle quelle dans les autres Etats qui entourent le Québec.

Le député de Brome-Missisquoi a minimisé l'importance de cette exemption qui couvrira dorénavant l'ensemble des avions destinés à des fins commerciales. Je voudrais simplement lui dire que l'Association québécoise des transporteurs aériens a fait savoir publiquement son intérêt pour cete exemption et les effets considérables que pourra avoir cette exemption sur le développement de l'aéronautique au Québec et des transporteurs aériens, petites et moyennes entreprises authentiquement québécoises.

En ce qui concerne les autres amendements portant sur la notion de prix d'achat et d'autres amendements techniques, j'aurai l'occasion d'y revenir au moment de l'étude en commission plénière. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette motion du ministre du Revenu proposant la deuxième lecture du projet de loi no 68, Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et la Loi concernant la taxe sur les carburants, est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Je propose que vous quittiez maintenant le fauteuil et que l'Assemblée soit transformée en commission plénière pour l'étude article par article de ces deux projets de loi.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. (15 h 20)

Projet de loi no 65

Commission plénière

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! La commission du revenu se réunit pour étudier, article par article, le projet de loi no 65 — en premier lieu — Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants.

J'appelle donc l'article 1 du projet de loi.

M. le ministre.

M. Clair: M. le Président, j'ignore si le député insiste pour avoir des exposés assez longs sur chacun des articles. En ce qui concerne l'article 1 du projet de loi, ce sont d'abord et avant tout des définitions qui sont modifiées. Je pense que la principale modification, c'est celle qu'on retrouve au sous-paragraphe 1 d), la définition du mot "coloration", où on parle de l'addition au mazout d'une quantité quelconque de produits naturels ou chimiques fournis par le ministre aux fins de colorer le mazout, alors qu'auparavant, c'était une quantité précise définie par règlement. Je crois que c'est la principale modification. Quant aux autres définitions, il y a également un mazout coloré qui est redéfini en concordance avec coloration, poste d'essence qui, comme je l'ai dit, est modifié. La modification n'a pour but que de préciser la portée de la loi à l'égard de certains établissements communément connus dans l'industrie pétrolière comme postes en vrac ou dépôts.

M. Raynauld: Oui, M. le Président. Je voudrais simplement exprimer une surprise ici en ce qui concerne les amendements 1d et 1h. Je voudrais savoir pour quelle raison on a cru nécessaire

d'ajouter que les quantités de produits naturels et chimiques devaient être fournis par le ministre. Je ne sais pas si le ministre va faire cela souvent, mais il me semblait que c'était plus élégant auparavant, puisque le ministre était mentionné, mais il était mentionné dans les règlements. Je voudrais savoir quelle est la portée de ce changement. On aurait très bien pu conserver l'essentiel de l'amendement qui est proposé, de modifier la quantité quelconque de produits naturels et chimiques, mais on aurait pu dire, comme c'était le cas auparavant, "en conformité de l'article 18", qui, lui, se rapportait à un règlement. A ce moment-là, en vertu du règlement 18-3), on prévoyait justement que ces colorations probablement — je ne sais pas quelles couleurs vous proposez — seraient fournies par le ministre.

M. Clair: Sur ce sujet, M. le Président, dans un premier temps, je dois dire que le ministre fournissait déjà la coloration et l'expression "fournis par le ministre", je pense qu'elle se retrouvait justement dans le règlement qu'on veut remplacer. C'est dans le but d'être plus précis. C'est simplement que les tribunaux ont interprété restrictive-ment l'application de la loi et s'il n'y avait pas dans le mazout le pourcentage précis de coloration, on considérait que l'infraction n'était pas commise. On a eu des interprétations de cette nature devant les tribunaux. Pour contrer cette tendance et pour faire atteindre à la loi le but qu'elle vise réellement, on a apporté cette modification et on a ramené, au niveau du texte de loi, certaines choses qui se trouvaient auparavant dans le règlement.

M. Raynauld: Si je comprends, vous supprimez le règlement qui était relié à cela. Je voudrais bien distinguer la quantité de colorant qui est l'essentiel de l'amendement et l'expression "fournis par le ministre" dans le projet de loi. Je trouve que cela manque un petit peu d'élégance.

M. Clair: C'est pour des fins de preuve que c'est inclus dans la loi. C'est plus facile d'en faire la preuve. Je souligne au député d'Outremont que l'article actuel 18.3 du règlement en cause se lit comme suit: "La coloration du mazout se fait par l'addition au mazout d'un colorant comprenant un agent traceur fourni par le ministre." On retrouvait l'expression dans le règlement. Cette addition se fait dans les proportions suivantes et c'est dans le but de remplacer toutes ces proportions qu'on parlera, dorénavant, toujours d'un colorant fourni par le ministre, mais on en parlera au niveau de la loi. Il ne s'agira plus d'une quantité déterminée précisément par règlement, mais d'une quantité quelconque. Si, au point de vue de l'élégance, mes collègues trouvent que c'est peu élégant, je pense que ce n'est quand même pas contredire l'esprit actuel de la loi que d'indiquer les mots "fournis par le ministre". C'était dans un règlement. D'habitude, d'ailleurs, nos amis d'en face nous reprochent plutôt le contraire, soit de mettre beaucoup trop de choses dans les règlements et de ne pas en mettre assez dans la loi.

M. Raynauld: M. le Président, pour ne pas éterniser, je voudrais savoir, de façon précise, qu'est-ce que cela changerait si on n'avait pas dans la loi, à l'heure actuelle, les mots "fournis par le ministre"? Qu'est-ce que cela changerait? Est-ce que c'est l'expression "fournis par le ministre" qui a été mal interprétée ou si c'est la quantité du colorant? Je pense que c'est la quantité. Cela n'a rien à voir avec "fournis par le ministre". Qu'est-ce que cela changerait si on enlevait les mots "fournis par le ministre"?

M. Clair: Je pense que le prévenu pourrait être moins bien protégé vu qu'il s'agit d'un colorant précis, soit un colorant fourni par le ministre.

M. Raynauld: Le colorant est fourni par le ministre.

M. Clair: Oui, il l'était déjà et il va continuer à l'être.

M. Raynauld: C'est vous qui allez fournir du colorant?

M. Clair: Oui, c'est déjà le cas. Je vous le dis. M. Raynauld: Ah oui!

M. Clair: Je vous lis l'ancien règlement 18.3: "La coloration du mazout se fait par l'addition au mazout d'un colorant comprenant un agent traceur fourni par le ministre." On fournit.

M. Raynauld: Je sais...

M. Clair: Je pourrai organiser une visite guidée.

M. Raynauld: Maintenant, est-ce que vous pourriez répondre à la question que j'ai posée? Qu'est-ce que cela changerait au point de vue juridique si cela n'était pas fourni par le ministre, si c'était: "L'addition au mazout d'une quantité quelconque de produits naturels ou chimiques aux fins de colorer le mazout"?

M. Clair: Je pense que cela pourrait changer assez de choses parce que c'est un colorant précis qui doit se retrouver dans le mazout, sans cela le prévenu pourrait avoir des problèmes...

C'est beaucoup plus facile pour le prévenu de dire: Regardez le colorant que j'ai; c'est celui qui est fourni par le ministre, que de dire: C'est un colorant qui est censé être conforme aux prescriptions établies par règlement par le ministre. Je pense que si on établit clairement dans la loi que c'est le colorant fourni par le ministre, c'est à l'avantage du prévenu.

M. Russell: On voit qu'il y a plusieurs personnes dans le passé qui se sont déguisées en ministre et qui ont fourni du colorant ou qui ont fait du mazout coloré. Ce n'est pas là l'expérience vécue actuellement?

M. Clair: Je ne suis pas sûr de comprendre la question du député.

M. Russell: Le ministre dit que dans le passé ou dans la réglementation présente, l'expression "fourni par le ministre" existe. Ma question est celle-ci: L'expérience vécue est qu'il y a plusieurs personnes en province qui se sont déguisées en ministre, qui en ont fourni du colorant aussi et qui ont commis des infractions à la loi. La preuve est difficile à déterminer à moins qu'elles peuvent faire la preuve qu'elles ont acheté du colorant du ministre.

M. Clair: Pour répondre à la question du député de Brome-Missisquoi, il ne semble pas qu'il y ait des précédents quand du colorant de mazout est mis dans du mazout non coloré et que ce colorant proviendrait d'autres sources. Ce qui se passe, c'est du mélange de mazout coloré et de mazout non coloré. Encore une fois, dans la mesure où un contribuable mélangeait deux sortes de mazout, il ne se retrouvait plus avec la quantité précise telle que définie par règlement, ce qui pouvait créer une ambiguïté et entraîner les tribunaux, vu qu'il n'y avait pas la proportion précise de colorant en question, de faire une interprétation trop large de ce qui en était, du privilège. C'est la raison pour laquelle, maintenant, on va continuer à parler toujours d'un colorant fourni par le ministre, mais il suffira qu'une quantité quelconque de colorant s'y retrouve.

M. Russell: Si je comprends bien, le ministre nous dit qu'on a réussi à trouver un colorant qui ne peut pas être acheté — si on peut s'exprimer ainsi — sur le marché autre comparable à celui que le ministre fournit actuellement. (15 h 30)

M. Clair: On me dit qu'on est en mesure, par des tests, d'identifier sans doute important, même sans aucun doute, chimiquement et techniquement, qu'il s'agit d'un colorant fourni par le ministre, d'où l'avantage pour le prévenu de parler dans la loi d'un colorant fourni par le ministre. Par exemple, si jamais quelqu'un s'avisait d'aller mettre du colorant pour vous jouer un tour chez vous, dans votre réservoir à essence, techniquement, il ne s'agirait peut-être pas d'une infraction, vu que le colorant n'aurait pas été fourni par le ministre. Je pense que c'est à l'avantage du contribuable; c'est un colorant unique dont il s'agit qui est fourni par le ministre.

M. Russell: Je suis bien d'accord si on a découvert un colorant unique que personne ne peut acheter sur le marché et qu'on utilise pour ces fins. Je suis convaincu qu'au point de vue des laboratoires, on peut déterminer quel colorant est utilisé par le ministre, assez facilement, je pense. Si on ne peut pas se le procurer sur le marché, de là vient l'embêtement. Les colorants sont fabriqués soit au Canada, soit à l'extérieur, aux Etats-Unis ou ailleurs. On peut les acheter et on peut rapprocher, au point de vue chimique dans les la- boratoires, les colorants, pour pouvoir déterminer un colorant qui est assez exact. De toute façon, on ne s'obstinera pas là-dessus. Je suis satisfait si le ministre est satisfait. Disons qu'on va attendre et, s'il prend des gens à violer la loi, la justice suivra son cours.

M. Clair: Je suis heureux que ma satisfaction entraîne la vôtre.

M. Russell: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: J'ai demandé tout à l'heure si le règlement demeurait. Est-ce que la définition du colorant va paraître dans un règlement? A I heure actuelle, l'article 18 n'est pas amendé.

M. Clair: La nature du colorant, c'est un colorant qui est unique et dont la recette, si vous voulez, est secrète. Il n'est pas question de mettre cela dans le règlement. Cela n'y a jamais été et cela n'y sera pas davantage.

M. Raynauld: M. le Président...

M. Clair: Le règlement va être amendé en conséquence dans la nouvelle loi. L'article 18, à ma connaissance, n'est pas aboli et c'est l'article 18 qui prévoit l'introduction d'un pouvoir réglementaire.

M. Raynauld: Et il n'est pas aboli; par conséquent, cela va être encore fait par règlement?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Clair: II va toujours y avoir une quantité déterminée par règlement de colorant, mais, aux fins de la preuve, une quantité quelconque va être suffisante pour faire la preuve. C'est cela. M. le Président, pour rassurer le député d'Outremont, il n'y aura pas des quantités variables. Le ministère ne fournira pas une quantité indéterminée de colorant pour qu'on ait toutes sortes de couleurs de mazout sur le marché. Il va toujours y avoir des prescriptions quant à l'usage normal du colorant, une quantité précise. Mais, aux fins de la preuve pour la commission d'une infraction, une quantité quelconque de colorant sera suffisante pour que l'infraction soit consommée.

M. Raynauld: Cela va.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 1 sera adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 1 adopté. Article 2, adopté?

M. Clair: L'article 2, M. le Président, concerne les remboursements de taxe sur l'essence pour les agriculteurs et les pêcheurs. Comme je l'ai dit tantôt, l'ancien texte de l'article 5 se lisait comme suit: "Toute personne a droit au remboursement lorsque l'essence a servi au fonctionnement de machinerie agricole employée exclusivement pour des travaux d'agriculture, à l'exception d'un véhicule de promenade ou d'un camion, pourvu que l'occupation principale de l'usager soit l'agriculture." Ce qu'on change, c'est ceci et le nouveau texte de loi s'appliquera par concordance pour les pêcheurs: "Lorsque l'essence a servi au fonctionnement de machinerie agricole, à l'exception d'un véhicule de promenade ou d'un camion, mais seulement pendant que cette machinerie était employée pour des travaux d'agriculture et pourvu que l'occupation principale de l'usager soit l'agriculture." C'est l'explication que je donnais tantôt au député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, c'est à propos de cet article, je pense, que le ministre a dit qu'on introduisait de la souplesse. J'avais compris, à ce moment, que c'était avantageux pour l'agriculteur. Il me paraît, a priori, que ce n'est pas évident. En effet, il pouvait y avoir de la machinerie qui était employée exclusivement pour des travaux d'agriculture par nature, mais qui pouvait être employée à autre chose en fait. A ce moment, ce sera interdit; on n'aura pas le droit d'obtenir ce remboursement.

Par ailleurs, cela peut élargir un peu l'accessibilité à ce remboursement, s'il s'agissait d'exemples comme celui que le ministre a donné tout à l'heure de location d'une pièce d'équipement qui, d'habitude, peut être utilisée à d'autres fins.

Je trouve que cela va dans les deux sens. Maintenant, j'ai l'impression que cet article va soulever des problèmes d'application probablement autant, sinon plus, que ce qui existait auparavant. Quand est-ce qu'on va être capable de déterminer que cette machine est utilisée pour des travaux d'agriculture? Je vous le demande, quand est-ce qu'on va être capable de savoir cela? Avant cela, c'était peut-être restrictif, mais on disait: Cette machine, on la définit comme une machine agricole. Pour cette machine, l'utilisateur a droit à un remboursement. Là, on va dire: Ce n'est pas la machine, l'utilisateur reste ce que c'était, c'est-à-dire qu'il faut que l'utilisateur ait pour occupation principale l'agriculture ou la pêche, mais là on prend une machine et, cette machine, ce n'est pas sûr, c'est quand elle va servir. C'est quasiment un procès d'intention qu'on va faire, On va dire: Quand cela va servir pour l'agriculture, je comprends qu'il s'agit d'un remboursement et que, par conséquent, il va falloir que l'utilisateur fournisse des pièces justificatives — je comprends cela — mais une pièce justificative, cela ne comprend quand même pas le nombre d'heures, avec un inspecteur qui va venir voir sur la terre si le gars a bien fait cela pour des fins agricoles ou s'il ne s'est pas servi de ce tracteur pour couper le gazon de son jardin.

J'ai l'impression qu'on entre dans des subtilités qui vont nous amener dans un an ou deux à revenir avec un autre projet de loi en disant: Vous savez, il y a eu des difficultés d'interprétation. Je l'avais déjà d'ailleurs fait, à propos d'un autre article, il y a deux ans, et c'est exactement ce qui s'est produit.

M. Clair: M. le Président, pour répondre au député d'Outremont.

Le Président: M. le ministre.

M. Clair: Si le député veut porter attention, parce que je pensais qu'il allait être distrait, de la machinerie agricole, on pourrait dire, pour simplifier les choses, qu'il y en a deux types: il y a de la machinerie qui ne peut servir qu'à des fins autres que l'agriculture, je prends l'exemple d'une moissonneuse-batteuse motorisée. C'est évident qu'une moissonneuse-batteuse n'ira jamais travailler sur un chantier de construction. Qu'on garde l'ancien texte ou le nouveau texte pour une andaineuse, pour une moissonneuse-batteuse ou tout autre appareil mu par un moteur qui ne peut servir à cause de sa nature qu'à des fins d'agriculture, le député aurait raison, ce ne serait pas utile d'apporter des amendements à ce projet de loi.

Mais si on prend le tracteur de ferme, qui demeure quand même — le député en est sûrement conscient — le principal instrument de travail en matière agricole dans l'agriculture, un tracteur de ferme peut avoir deux vocations. Le même tracteur de ferme peut servir à ouvrir des cours en hiver, à faire du déneigement dans des rangs, il peut servir sur des chantiers de construction à l'occasion. De sorte, si on conservait l'ancienne interprétation, il fallait que, de fait, ce tracteur serve exclusivement à des fins agricoles. La nouvelle interprétation permettra plus de souplesse. Je vous donne un exemple bien pratique. Moi, mon père c'est un producteur agricole. J'ai un de mes oncles qui est entrepreneur en construction. Effectivement, il a des tracteurs de ferme qui pourraient éventuellement servir sur la ferme. Si ce tracteur de ferme travaillait sur un chantier de construction sous l'empire de la loi actuelle, il se retrouvait à faire des travaux de ferme, et, à mon avis, le texte de l'article 5.9 faisait que le remboursement ne pouvait être demandé.

Maintenant, par le texte, pendant que cette machinerie est employée pour des travaux d'agriculture, elle peut bénéficier du remboursement. Je ne nie pas le fait qu'il y aura toujours des problèmes d'application, d'exemption comme celle-là, mais que le député ne vienne pas me dire qu'on introduit un élément de confusion qui serait au désavantage des agriculteurs. 15 h 40)

C'est faux, c'est un élément de souplesse qui va permettre à des gens de bonne foi... Il ne faut pas présumer que tout le monde est fraudeur. Moi, j'ai confiance que les gens vont pouvoir effectivement se prévaloir de cette demande de remboursement, sur la base d'une location d'un trac-

teur pendant qu'un autre tracteur est en panne, par exemple. Ce sont des choses qui se produisent régulièrement sur une ferme; un tracteur, ça se brise; un tracteur, ça se loue. Le locateur du tracteur, dans une municipalité X, Y, Z, ne loue pas nécessairement des tracteurs pour des fins strictement agricoles. Le tracteur en question peut tantôt servir à ouvrir des cours, comme je l'ai dit, il peut servir à de la petite construction, à entretenir des chemins d'hiver, etc.

Le Vice-Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Sur ce point précis, parce qu'on a des cas pratiques qui nous sont soumis, qu'est-ce qui arrive à un agriculteur qui prend son tracteur de ferme, une bonne matinée, pour aller souffler la cour de huit propriétaires dans un village?

M. Clair: Techniquement, le cultivateur, le producteur agricole qui aurait une rame de cours à entretenir en hiver, normalement, il n'a pas droit au remboursement de la taxe sur l'essence pendant le temps où le tracteur est en train d'ouvrir des cours. Techniquement, c'est vrai. L'exemption est accordée pendant que la machinerie travaille — le texte le dit — pendant que cette machinerie est employée pour des fins d'agriculture. On est bien conscient des problèmes que cela peut entraîner, mais on ne peut pas avoir un régime de remboursement pour une fin particulière sans que, à un moment donné, il se pose un certain nombre de problèmes pratiques.

On a le choix: Ou bien on ne donne pas de remboursement, ou bien on en donne un et on fait face à des problèmes pratiques comme ceux-là qui sont susceptibles de se présenter.

M. Goulet: Qui va faire le partage? Qui va décider du partage?

M. Clair: Effectivement — je me souviens de la ferme chez nous — c'est le producteur agricole lui-même qui présente sa demande de remboursement d'essence et c'est lui qui détermine la proportion d'essence qui a servi pour de la machinerie employée pour des travaux d'agriculture. S'il fait de fausses déclarations, il se retrouvera dans la même situation que si vous et moi faisons une fausse déclaration en vertu d'une autre loi fiscale. Le premier à déterminer ce pourcentage d'essence utilisé à des fins agricoles, pour la machinerie employée pour des travaux d'agriculture, c'est le réclamant lui-même.

M. Raynauld: Je suppose qu'il y avait déjà des problèmes considérables, c'est pour cela que vous changez la loi. Quels étaient les problèmes considérables qui étaient posés.?

M. Clair: Je peux reprendre l'explication que je donnais au député, c'est dans le but d'assouplir la loi pour de la machinerie qui peut servir à des fins autres que l'agriculture. Les problèmes qu'on avait, c'est qu'on pouvait se retrouver face à un tracteur loué, lequel ne sert pas exclusivement à des fins agricoles, mais qui est en tran de se retrouver à faire des travaux agricoles et qui, techniquement, ne donnait pas droit au remboursement de la taxe sur le carburant. C'est pour régler ce problème.

M. Raynauld: II me paraît évident qu'on ouvre la porte, c'est une grande invitation au système D. Vous citiez vous-même, M. le ministre, le cas de votre oncle qui est dans la construction et qui a des tracteurs. Cela va être facile pour l'agriculteur de réclamer des remboursements de taxe en très grande quantité, en très grand volume. Je veux bien qu'on ne suppose pas au départ que tous les gens sont des fraudeurs, je l'ai déjà dit d'ailleurs à quelques reprises, mais il me paraît que cet amendement va ouvrir la porte à des difficultés d'application considérables. Je me demande si c'est justifié, compte tenu du problème qui existe déjà. A l'heure actuelle, un agriculteur qui a un tracteur, qui n'en a qu'un, par exemple, j'ai l'impression qu'il est admissible. Il est sur une ferme et il a un tracteur. Je suis convaincu qu'à l'heure actuelle, il se fait rembourser sa taxe. Même avec l'expression...

M. Clair: Non pas, M. le Président... J'arrête...

M. Raynauld: Les tracteurs ne sont pas admis à l'heure actuelle.

M. Clair: J'arrête le député d'Outremont tout de suite parce que si le tracteur ne servait pas, qu'il y ait un, deux ou trois tracteurs, l'ancienne loi disait — et je la relis pour le bénéfice du député — "Lorsque l'essence a servi au fonctionnement de machinerie agricole employée exclusivement pour des travaux d'agriculture." Le nouveau texte dit: "Pendant que cette machinerie est employée pour des travaux d'agriculture". Je pense que le député d'Outremont vient de découvrir la nature exacte de cette exemption qui a toujours causé un problème. J'ai grandi dans un milieu rural et, effectivement, à chaque année, il y avait un des producteurs agricoles, dans le rang, qui avait un problème à un moment donné, parce qu'il ne s'entendait pas avec le ministère pour dire quelle était la proportion de l'essence qui avait servi effectivement à de la machinerie agricole employée exclusivement pour des travaux d'agriculture.

On va continuer à avoir un certain nombre de problèmes pratiques, des problèmes de contrôle, c'est évident. Mais c'est une amélioration par rapport à ce qui existe à l'heure actuelle.

M. Raynauld: M. le Président, si j'insiste un peu, c'est parce que ce n'est pas la première fois que je découvre l'amendement. Il y a deux ans, on a eu un débat d'une demi-journée avec votre prédécesseur, justement sur ces exemptions, sur ces ristournes données pour l'agriculture. Les problèmes qui étaient posés à ce moment étaient de même nature que ceux d'aujourd'hui.

Je suis d'accord avec le ministre qu'il y a toujours des problèmes administratifs mais j'avoue que je trouve que là on crée des problèmes plutôt que les résoudre. En tout cas, je ne veux pas insister...

M. Clair: Loin de nous la prétention de dire que cet amendement va régler à tout jamais le sort des remboursements de taxe sur les carburants pour les agriculteurs. Mais je continue à affirmer qu'il s'agit là d'une amélioration du régime pour les producteurs agricoles et les pêcheurs.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Shefford.

M. Verreault: M. le Président, si j'ai compris l'explication du ministre, est-ce que cela voudrait dire que si, moi, je possède un tracteur et que j'effectue des travaux agricoles pour des voisins, je peux bénéficier également d'un rabais, d'un remboursement?

M. Clair: Pourvu que votre occupation principale soit l'agriculture, parce qu'il y a deux critères.

M. Verreault: Ah bon!

M. Clair: Dans la loi, il y a le critère de machinerie qui sert pour des travaux d'agriculture, mais il y a toujours celui de l'occupation principale de l'usager qui faut qu'elle demeure l'agriculture.

M. Verreault: Mais, à un moment donné, n'y aurait-il pas avantage d'expliciter davantage ces deux paragraphes, en disant que l'utilité exclusive à l'agriculture par des membres d'une association agricole...

M. Clair: Pardon? Je ne comprends pas. M. Raynauld: Un membre de l'UPA.

M. Verreault: Un membre de l'UPA, un membre d'une association agricole bénéficierait d'une exemption de taxe.

M. Clair: Est-ce que vous connaissez le critère pour avoir une carte de membre de l'Union des producteurs agricoles?

M. Verreault: Bien, j'imagine que quand tu es cultivateur, tu en es membre.

M. Clair: Je ne suis pas certain qu'on puisse forcer quelqu'un — je le dis sous toute réserve — à être membre de l'UPA, dans un premier temps. D'autre part, le critère, c'est $1000 de revenus agricoles par année. Troisièmement, si on ne veut pas tomber dans la confusion que nous reproche déjà le député d'Outremont, on va conserver le critère de l'occupation principale de l'usager, qui est l'agriculture.

M. Verreault: Mais, ce que je voulais dire par là...

M. Clair: Je vais vous dire bien honnêtement que si on en venait au critère de $1000, ayant grandi moi-même dans un milieu agricole, vous ne me ferez pas...

M. Verreault: Ce que je veux dire par là, M. le Président...

M. Clair:... déconsidérer qui que ce soit, mais là non plus, vous ne me ferez pas de dessin sur la facilité, dans certains cas, d'obtenir une telle carte. Je pense que le critère est raisonnable; c'est l'occupation principale de l'usager, qui est l'agriculture. C'est un critère qui est déjà connu et si on ne veut pas chambarder des choses inutilement, je pense qu'il est mieux de le conserver.

M. Verreault: En terminant, M. le Président, si j'ai mentionné tout à l'heure le fait qu'une personne pourrait bénéficier d'un remboursement si elle était membre d'une association agricole, c'est qu'on dit qu'au Québec il y a environ 40 000 membres de l'UPA et que, dans les circonstances, si quelqu'un veut faire des travaux agricoles, c'est un agriculteur — au sens propre — et, à ce moment-là, on pourrait généraliser et éviter d'avoir des exemptions ou des exceptions à la règle. Ce serait plus facile. Si j'ai un tracteur sans être membre, mon utilisation du tracteur ne sera pas exclusivement à l'agriculture; elle pourrait être pour autre chose que l'agriculture, en règle générale, parce que je ne suis pas un agriculteur. L'agriculteur qui a un tracteur, évidemment, pourrait être exempt automatiquement; cela éviterait toutes les complications. (15 h 50)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: M. le Président, je tente de m'expliquer un peu les amendements et, si je comprends bien, cela veut dire que, si je suis agriculteur, je peux louer de l'équipement de mon voisin qui n'est pas un agriculteur, faire mon travail ou faire faire mon travail et faire comme agriculteur ma réclamation pour le remboursement de l'impôt qui a été payé sur l'essence qui a été utilisée dans cet équipement lorsqu'il a travaillé sur ma ferme.

M. Clair: C'est cela. Exactement.

M. Goulet: M. le Président, seulement une petite question là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci. Un médecin, par exemple, est producteur agricole au même titre que son voisin; même nombre d'acres à cultiver, même nombre de têtes de bétail et ainsi de suite. Si je comprends bien, si ce n'est pas son ocupation principale, il n'a pas droit à ce remboursement même si les deux tracteurs servent exactement aux mêmes travaux de la ferme pour le même nombre d'acres à cultiver et ainsi de suite.

M. Clair: Non. A cet égard, le critère était et demeure que l'occupation principale de l'usager soit l'agriculture. C'est identique, d'ailleurs — je le souligne — à ce qui existe déjà.

M. Goulet: Non, non. Je comprends que c'est identique à ce qui existe déjà. Quelle différence y a-t-il, par exemple, entre un agriculteur qui ne fait que cela, qui va cultiver, par exemple, 100 ou 125 acres de terre et son voisin, par exemple, qui est médecin ou journalier ou qui travaille à un chantier maritime, mais a la même terre et fait ses travaux le soir, quelque chose comme cela? Pourquoi, s'il fait exactement les mêmes travaux dans les mêmes conditions, n'aurait-il pas droit à ce remboursement?

M. Clair: L'esprit de ce remboursement de la taxe sur les carburants a toujours été d'accorder, pour employer l'expression du député d'Outremont, un privilège fiscal aux producteurs agricoles véritables. Dans la mesure où l'occupation principale d'un individu n'est pas l'agriculture...

M. Goulet: Oui.

M. Clair: ... on transformerait la vocation, le but poursuivi par le législateur et par le gouvernement par ce remboursement. Si le député de Bellechasse me le permet, on pourrait peut-être, effectivement, un bon jour, en venir à d'autres conclusions, à d'autres critères ou à des critères plus précis pour définir ce qu'est l'occupation principale de l'usager. On pourrait mettre un montant d'argent. On pourrait se servir de la carte de l'UPA. On pourrait dire la déclaration d'impôt. Mais il nous apparaît que, dans la connaissance actuelle et dans l'interprétation actuelle de la loi, il est avantageux de maintenir, jusqu'à nouvel ordre, la notion que l'occupation principale de l'usager soit l'agriculture, qu'on a voulu viser par ce remboursement. Malheureusement pour le député qui serait intéressé à voir des "gentlemen farmers" bénéficier de cela, ce n'est pas le cas pour l'instant.

M. Goulet: M. le Président...

M. Clair: L'occupation principale doit être l'agriculture.

M. Goulet: ... très brièvement, il n'est pas question d'un "gentleman farmer" ou d'une personne qui va à sa ferme en fin de semaine pour cultiver. Je vais vous donner des exemples précis que nous avons dans cette Chambre. Le député de Kamouraska-Témiscouata, par exemple, est un agriculteur assez important à Kamouraska. Vu qu'il se présente comme député et qu'il va siéger à l'Assemblée nationale, il est obligé d'embaucher des gens pour le remplacer sur sa ferme. Cela veut dire que cette année et tout au long de son mandat il n'a pas droit à ce remboursement. Je ne vois pas... Il était agriculteur avant. Des exemples comme cela, on doit en avoir combien au Québec, je ne le sais pas, mais pourquoi cette discrimination? Il y a une différence entre quelqu'un qui fait ce genre de travail et... Je donne l'exemple du député de Kamouraska-Témiscouata. Je donne l'exemple du député de Plessisville...

M. Clair: La question qui va se poser dans le cas des personnes que vous nommez va toujours se rapporter au critère qui est établi dans la loi qui est appliquée depuis un bon bout de temps et qui continue de l'être. Si vous me le permettez, puisque vous me posez une question...

M. Goulet: Le ministre de l'Industrie et du Commerce est un "gentleman farmer", mais pas les autres.

M. Clair: J'essaie de vous donner une réponse au meilleur de ma connaissance. Je vous dis que le critère était que l'occupation principale soit l'agriculture et cela demeure ce critère-là. Je ne rendrai pas de décision sur l'interprétation dans des cas particuliers. D'ailleurs, vous savez fort bien que le ministre du Revenu ne peut faire état des revenus de qui que ce soit. Je ne commencerai pas à vous rendre des avis juridiques sur la situation de tel ou tel cas particulier. Je vous affirme que, dans la loi, il y avait un critère. Il demeure. Le remboursement de la taxe sur le carburant vaut pour la machinerie qui est employée pour des travaux d'agriculture et pourvu que l'occupation principale de l'usager de cette machinerie soit l'agriculture.

M. Goulet: II y a quand même une discrimination.

M. Clair: On me dit que le critère de l'occupation principale de l'usager existe depuis 1924, soit bien avant que...

M. Goulet: Ecoutez! Si on sent, M le Président, le besoin de modifier les lois ou d'en changer, c'est justement parce que ces lois sont désuètes. Ce n'est pas parce qu'elles sont là depuis 1924. En 1924, cela veut dire qu'elles ont été mises là dans le temps des libéraux. Ecoutez! Cela a peut-être besoin d'être changé?

Une Voix: Ce n'est pas une raison pour... M. Clair: Selon...

M. Goulet: Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que je ne vois pas la différence. Lorsqu'on parle de l'usage principal — si vous me le permettez — soit l'agriculture, je ne vois pas la différence. Peut-être que l'usage principal de l'outil comme tel, si on prend un exemple du tracteur voué à l'agriculture, cela serait correct. Mais que le tracteur soit la propriété d'un agriculteur ou la propriété d'un député qui, avant d'être ici, avait une terre et dont la profession principale était la culture, je ne vois pas la différence. C'est là que je ne vois pas la différence.

M. Clair: Le but du remboursement, dans un premier temps, l'exemption ou le remboursement — je devrais plutôt dire remboursement ici — ne s'applique pas à une machinerie en particulier, il s'appliquait à l'agriculteur pour une machinerie précise, la machinerie qui sert à des fins agricoles. Il n'a jamais été dans l'esprit de cette loi d'exempter ou de remboursr qui que ce soit d'autre que celui qui est un véritable agriculteur, soit celui dont l'occupation principale est l'agriculture.

M. Goulet: Que faites-vous des compagnies? Il y en a de plus en plus dans nos régions, des agriculteurs en compagnies. Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'ils entrent là-dedans? Est-ce que les trois ou les quatre propriétaires doivent être des agriculteurs à temps plein? C'est la même chose?

M. Clair: Je pense que, dans ce cas-là... Juste un instant, s'il vous plaît! M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Clair: La personne et l'usager peuvent effectivement inclure une personne morale aux mêmes conditions qu'une personne physique, c'est-à-dire pendant que cette machinerie est employée pour des travaux d'agriculture et pourvu que l'occupation principale de l'usager soit l'agriculture.

M. Goulet: Est-ce que l'usager est synonyme de propriétaire? Oui? Cela veut dire la même chose dans votre texte de loi?

M. Clair: Non, l'usager n'est pas la même chose que le propriétaire, d'après moi. Attendez un peu que je relise.

M. Goulet: Je ne comprends plus rien dans votre affaire.

M. Clair: Dans le cas d'un tracteur loué, l'usager n'est pas propriétaire du tracteur, mais, pendant qu'il utilise le tracteur pour des fins agricoles, il peut bénéficier... Je n'ai jamais vu de tracteur loué, essence comprise. Le locataire fournit l'essence. Dans la mesure où l'usager peut être un locataire, effectivement, il n'est pas nécessaire qu'il soit propriétaire.

Une Voix: C'est le cultivateur qui fait la réclamation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Je ne parle pas de celui-là. La question qu'on a à l'esprit, c'est la suivante. Un propriétaire comme moi et comme un autre — pas moi, parce que je n'en ai pas, mais ce pourrait être moi — je suis propriétaire d'une terre. Je suis député, je fais cultiver ma terre par quelqu'un pour un an d'avance, ce type-là, c'est un usager. Son occupation principale, c'est l'agriculture. Il exécute des travaux de ferme. Est-ce qu'il a droit au remboursement, oui ou non? C'est moi le propriétaire. Le député de Kamouraska-Témiscouata doit se faire rembourser sa taxe sur l'essence?

M. Clair: Oui, toujours selon les mêmes critères qui sont prévus dans l'article 5.

M. Raynauld: C'est cela. A ce moment-là, ce ne sont plus les vrais agriculteurs et ils ont droit au remboursement. (16 heures)

M. Clair: II s'agit de déterminer si l'occupation principale de ces personnes est l'agriculture. Comme je l'ai dit au député tantôt, il s'agit de questions de fait. Je ne m'engagerai absolument pas en commission plénière de vous dire: Dans tel ou tel cas, cela va donner telle ou telle interprétation. C'est pas possible, vous comprenez cela.

M. Raynauld: Je comprends cela mais...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 2 sera adopté? M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Est-ce que l'occupation principale va selon le salaire? Qu'est-ce qui détermine l'occupation principale?

M. Clair: L'occupation principale est une notion qui peut être composée de divers éléments, de temps, de revenus, d'occupation. Mon sous-ministre me souligne que si on avait voulu parler de principale source de revenus, on aurait parlé de principale source de revenus. On parle ici de principale occupation. L'occupation, c'est une question de temps, de fait, à savoir à quoi tu t'occupes le plus dans ta vie de tous les jours.

M. Russell: M. le Président, simplement un cas hypothétique pour ne mentionner personne, mais je connais des cas semblables. Je me pose des questions. Où obtiennent-ils leur remboursement et de quelle façon? Je connais des fermes qui sont contrôlées par des sociétés assez grandes qui détiennent plus de 50% des actions. Il y a un copropriétaire. Qu'arrive-t-il dans ce cas, parce que la société, ce n'est pas son revenu principal; ce doit être la société qui fait la réclamation évidemment. Cela se produit actuellement chez nous dans mon comté. J'en ai vu quelques-unes.

M. Clair: II peut se produire des cas, sous l'empire de la loi telle qu'elle est actuellement, de gens qui pourraient obtenir des remboursements et qui, dans une interprétation restrictive de la volonté du législateur, ne devraient pas y avoir droit. A ce moment-là, si on voulait bloquer complètement cette porte, il faudrait en venir à remplacer le critère de l'occupation principale par un test de revenus. On pourrait, alors par exemple, frapper très durement les agriculteurs qui frisent la soixantaine ou qui dépassent les 65 ans et qui

peuvent, au niveau d'un producteur agricole qui dépasse 65 ans, se retrouver avec des revenus de pension supérieurs à leurs revenus d'agriculture et pourtant être considérés par tous et chacun d'entre nous comme étant véritablement des producteurs agricoles. Alors, on préfère garder cette interprétation qui peut, à l'occasion, laisser passer des gens qu'on aimerait mieux ne pas laisser passer, mais vaut mieux, à mon humble avis, conserver ce critère qui est beaucoup plus respectueux de la réalité de l'agriculture et des pêcheries que tout autre critère qu'on pourrait avancer avec la connaissance qu'on a actuellement.

M. Goulet: M. le Président, le ministre a répondu à une question en disant que la rémunération, le salaire de l'individu n'entrait pas en ligne de compte. Vous avez dit cela tout à l'heure?

M. Clair: Oui, au niveau de l'occupation principale de l'usager.

M. Goulet: Pourquoi, sur la formule de demande de remboursement de la taxe de carburant, il y a une nouvelle question qui se lit à peu près comme suit: Avez-vous un autre emploi et si oui, quelle en est la rémunération? Pourquoi poser une telle question si cela n'a rien à faire là?

M. Clair: Pour préciser d'abord ce que j'ai réellement dit au début, j'ai dit que la notion à mon avis — je ne vous donne pas l'interprétation de la direction de la législation ou du directeur du contentieux, je donne la mienne — de l'occupation principale peut inclure différents critères comme l'occupation effective du temps, c'est une question de temps; cela peut être une question de revenus éventuellement. Le député fait état d'une formule de demande de remboursement que je n'ai pas vue. S'il voulait me l'envoyer, on pourrait la regarder et lui dire pourquoi cette question se retrouve là-dessus.

M. Goulet: Je n'ai pas la formule devant moi, mais est-ce que sur cette formule il y aura une nouvelle question qui va être à peu près comme ceci ou est-ce qu'elle est déjà imprimée: Avez-vous un autre emploi et si oui, quelle en est la rémunération? Il n'y a pas de formule qui a une question comme celle-là dessus?

M. Clair: Pour vous donner une idée de la quantité de papiers qui peuvent circuler au ministère du Revenu... Ce n'est pas pour excuser les gens, mais simplement pour vous mettre au fait. Une des premières questions que j'ai posée, c'était: Quelle est la quantité de papiers qu'on pouvait brasser? On m'a dit que, par exemple, au niveau des rapports d'impôt et de l'ensemble des formules, cela pouvait ressembler à 90 vannes de papier. Qu'il y ait une formule qu'on ne connaisse pas par coeur... Si le député a la prétention que le ministre du Revenu devrait connaître par coeur l'ensemble des formules du ministère du Revenu, j'aime autant démissionner tout de suite devant lui.

M. Goulet: Naturellement, ma question s'adresse au ministre parce que c'est lui qui est le porte-parole, mais il doit y avoir six ou sept conseillers autour de lui. Est-ce qu'il n'y en a pas un qui peut me dire si c'est vrai que cette question est sur une formule actuellement?

M. Clair: Comme parlementaire, je dois prendre votre parole. Vous m'affirmez que vous avez une formule de demande de remboursement de la taxe sur les carburants pour laquelle il y a une question concernant la rémunération de l'individu. Moi je vous dis que c'est un critère qui peut être un critère d'appréciation pour connaître si l'occupation de l'usager est véritablement l'agriculture.

M. Goulet: M. le Président...

M. Clair: Si vous voulez que je fasse faire la vérification, M. le député, je vais le demander. Faites-moi simplement apporter par un messager votre formule et je vais la faire vérifier.

M. Goulet: M. le Président...

M. Clair: Pour voir si elle est bel et bien en circulation actuellement.

M. Goulet: M. le Président, je sais qu'en commission plénière, il n'y a pas de question de privilège. Je n'ai pas dit que j'avais en ma possession une formule. J'ai dit: Est-ce qu'il existe une formule sur laquelle il y a une question qui est exactement celle que j'ai mentionnée? Est-ce que cela existe, oui ou non? Je n'ai pas dit que j'avais une formule en main. J'ai demandé s'il y avait une question qui se lisait comme suit: Avez-vous un autre emploi et, si oui, quelle en est la rémunération? Puis, le ministre m'a dit: Cela ne rentre pas en ligne de compte.

M. Clair: On m'indique qu'une telle question aussi loin que l'on puisse se souvenir, n'apparaîtrait pas sur cette formule. Mais j'ajoute que si elle apparaissait, ce n'est pas grave parce que ce n'est pas là le critère. Le critère, ce n'est pas un test de revenu. C'est un test d'occupation principale et, tout au plus, les revenus d'un individu peuvent être un critère important d'appréciation quant à savoir quelle est l'occupation principale de l'usager. Si le député veut que je m'engage à vérifier la chose et à lui en reparler, il me fera plaisir de lire la formule de demande de remboursement de taxe sur le carburant.

Le Président (M. Vaillancout, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, juste pour continuer là-dessus. Je pense qu'effectivement ce serait une information utile, vous pourriez peut-être la faire distribuer cette demande, c'est un document public, ce n'est pas une affaire secrète.

M. Clair: Oui, il n'y a pas de secret là-dedans.

M. Raynauld: II n'y a pas de secret là-dedans, alors, je ne vois pas pourquoi vous seriez gêné de dire que vous pourriez la déposer, la distribuer aux membres dans le plus bref délai.

M. Clair: Etant donné, M. le Président, que mon ministère se trouve à environ dix kilomètres d'ici, je ne pourrai avoir cela cet après-midi à l'heure qu'il est. Je prends l'engagement de remettre en main propre aux députés de Brome-Missisquoi, de Bellechasse, de Shefford et d'Outremont une formule de demande de remboursement de la taxe sur le carburant, mais je tiens à les prévenir que je vais surveiller l'utilisation qu'ils vont en faire.

M. Raynauld: M. le Président, une dernière question. Est-ce qu'on pourrait savoir quel est à peu près le montant annuel des remboursements au titre de cet article 2?

M. Clair: Je m'excuse.

M. Raynauld: Quel est le montant annuel de remboursement qui est fait au titre de cet article 2, remboursement de la taxe sur le carburant?

M. Clair: Ce serait, sous toute réserve, de l'ordre d'environ $5 millions par année.

M. Raynauld: $5 millions par année.

M. Clair: Sous toute réserve.

M. Raynauld: Vous vérifierez aussi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 2 sera-t-il adopté?

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 2, adopté. Article 3.

M. Clair: L'article 3, M. le Président, je pense qu'on pourrait l'adopter rapidement puisqu'il s'agit simplement de reprendre les mêmes notions pour le mazout exempté que celles qu'on vient tout juste d'adopter pour le remboursement. C'est la même chose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 3, adopté? Adopté. Article 4.

M. Clair: A l'article 4, l'article 19.1 de la Loi concernant la taxe sur les carburants proposé par l'article 4 du présent projet de loi est de droit nouveau. Cet article crée une prohibition expresse et nécessaire au maintien du système d'interdiction de l'usage de mazout coloré dans un véhicule automobile, sauf si ce mazout est utilisé à l'alimentation d'un moteur de locomotive ou à certaines autres fins spécifiques visées à l'article 9, soit le moteur d'un bateau commercial ou de pêche et de la machinerie agricole. Est-ce que c'est adopté?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 4, adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 5.

M. Clair: L'article 5, M. le Président, c'est un article qui permet simplement à un poste d'essence de pouvoir avoir en stock du mazout coloré pour se chauffer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté? Adopté. Article 6, adopté?

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 7, adopté?

M. Raynauld: Article 7...

M. Clair: Précise seulement des infractions.

M. Raynauld: J'ai noté qu'il s'agit d'avoir un système un peu plus complexe pour les amendes, c'est cela? (16 h 10)

M. Clair: II s'agit de spécifier davantage certaines infractions.

M. Raynauld: Cela va.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 7 adopté. Article 8, adopté? M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, j'ai soulevé en deuxième lecture le cas de l'article 45 qui est modifié. On me dit que l'article 45.1 en particulier est un paragraphe qui suppose que des gens sont coupables même en état d'ignorance des actes qui sont posés et cela se rapporte principalement au deuxième paragraphe de l'article 45.1 que je vous lis: "La preuve que l'infraction a été commise par une personne qui est à l'emploi du propriétaire ou locataire du véhicule automobile ou du moteur propulsif est une preuve concluante que l'infraction a eu lieu avec l'autorisation ou sous la direction de ce propriétaire ou locataire." Par conséquent, simplement parce qu'il y a eu une infraction avec un certain véhicule, il est automatique, à ce moment, que celui qui est coupable, c'est le propriétaire ou le locataire de ce véhicule.

On me dit que, sur un plan juridique, c'est une grande première et que c'est inacceptable. Je pourrais même dire également qu'on fait allusion, dans les conseils juridiques que nous avons reçus, à une expression dont je ne connais pas exactement la portée parce que je ne suis pas un avocat, mais on me parle d'une présomption juris et de jure qui est absolument inacceptable. Cela vient d'un juriste qui a examiné ce paragraphe. A première vue, il semble bien que ce soit le cas. Je

pense que cela vaudrait la peine que le ministre réexamine ce paragraphe.

M. Clair: Premièrement, ce que je voudrais dire au député d'Outremont, c'est que, si cet éminent juriste de sa formation politique est le même que celui qui a conseillé au gouvernement en 1971 d'adopter l'article 134 de la Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool, il retrouvera là un article qui prévoit des dispositions quasiment identiques. Ce n'est donc pas une première. Au niveau de la Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool, l'article 134 crée une telle présomption juris tantum et non juris et de jure, c'est-à-dire que c'est une présomption qu'on peut renverser; ce n'est pas une présomption irréfragable, ce n'est pas une présomption à l'encontre de laquelle personne ne peut aller. Il y a une présomption et il y en a une autre dans un cas que je vous cite très précisément, l'article 134 de la Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool adoptée en 1971; c'était bien le gouvernement libéral à l'époque.

M. Raynauld: M. le Président... M. Clair: Je ne dis pas cela pour...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Clair: Si vous me le permettez.

M. Raynauld: M. le Président, question de règlement.

M. Goulet: Ce n'est pas une référence; en 1924, Taschereau et, en 1971, Bourassa. Ce ne sont pas des références.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, laissez le ministre répondre à la question; je vous reconnaîtrai par la suite.

M. Raynauld: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur une question de règlement.

M. Raynauld: Je pense que le ministre pourrait se dispenser d'appeler les conseillers juridiques des membres du Parti libéral ou du Parti québécois ou de quelque parti que ce soit. Je parle ici de conseillers juridiques qui exercent la profession de droit et qui sont des avocats; ce ne sont pas des députés. J'aimerais que vous respectiez l'intégrité des gens qui peuvent nous conseiller, nous, députés.

M. Clair: Je respecte parfaitement cela, sauf que je voulais simplement taquiner le député d'Outremont; il n'a pas tellement le sens de l'humour, j'ai l'impression. J'avais une belle occasion de lui dire, au sujet de ce qu'il nous reprochait dans cet article, qu'il y avait déjà d'autres dispositions législatives qui étaient absolument identiques qui avaient été adoptées par le gouvernement précédent. Je n'en fais pas le reproche; c'est simplement que la situation vécue dans le milieu requiert l'instauration de présomption de cette nature, si on ne veut pas se retrouver finalement devant une situation totalement inacceptable où on peut soit faire condamner des gens qui ne sont pas les vrais responsables, soit encore être déboutés constamment devant les tribunaux et ne pas obtenir l'application véritable de la loi.

M. Raynauld: M. le Président, je m'opposerai à l'adoption de cet article 8 et je m'y opposerai avec la conviction profonde qu'on doit faire passer les droits des gens avant la facilité de l'administration à condamner des présumés coupables. Si c'est ce que le gouvernement veut faire, se donner encore plus de facilité justement pour condamner les gens qui peuvent ne pas l'être, coupables, avec des présomptions préalables, c'est sa responsabilité, mais je ne m'y associerai pas.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 8... M. le ministre?

M. Clair: Non, allez-y, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: Dans le même sens que le député d'Outremont, même si la Régie des alcools a une loi qui lui permet d'agir de cette façon, je trouve que c'est un peu dur, à moins que le ministre du Revenu ne me prouve que c'est réellement nécessaire et qu'on retrouve ce pouvoir dans d'autres lois, à moins que pour faire respecter la loi il ait nécessairement besoin de cet article, je pense que c'est aller trop loin. Si quelqu'un se fait prendre avec mon camion et qu'il commet une infraction au sens de la loi, je suis automatiquement responsable ou coupable; je trouve que c'est aller un peu loin.

M. Clair: Je répète simplement que c'est faux d'affirmer que la présomption est automatique, que la personne est automatiquement coupable. C'est faux, ce n'est pas ce que dit le texte de loi. D'autre part, s'il est exact que le contribuable a droit au bénéfice du doute, il a une possibilité de s'en sortir, c'est tout aussi vrai que le contribuable québécois est en droit de s'attendre que les sommes qui sont dues au Trésor québécois le sont. Si vous payez vos impôts et votre taxe sur le carburant, vous êtes tout autant en droit de vous attendre que votre voisin les paie. Dans ce sens, la présomption ne crée pas une culpabilité automatique, elle crée une présomption, effectivement, mais n'entraînant pas culpabilité automatique puisqu'on dit "une preuve documentaire ou circonstanciée du paiement de la taxe" peut effectivement être plaidée à rencontre d'une accusation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 8 sera adopté?

M. Russell: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur division, l'article 8 est adopté. Article 9.

M. Russell: Sur division, oui. M. Clair: L'article 9.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sera-t-il adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 10?

Une Voix: Adopté.

Projet de loi no 68

Commission plénière

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Nous allons maintenant examiner, article par article, le projet de loi no 68, Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et la loi concernant la taxe sur les carburants. J'appelle donc l'article 1.

M. Clair: M. le Président, si vous me le permettez, je vais vous remettre une copie d'un document que j'ai remis à mes deux collègues, le député de Brome-Missisquoi et le député d'Outremont, concernant des amendements apportés à ce projet de loi. Je vous en remets une copie et je crois qu'il serait avantageux de travailler avec cette copie. Est-ce que mes collègues de l'Opposition ont leur copie entre les mains? Oui.

M. Raynauld: Le projet d'amendement est un projet qui incorpore les changements qui avaient d'abord été proposés au projet de loi no 68 ou si ce sont des amendements additionnels?

M. Clair: La copie que vous avez entre les mains devient presque, à toutes fins utiles, le projet de loi, vu qu'il n'y a que l'article 2 du projet de loi actuel qui demeure à l'article 2. Si on veut, on peut procéder plus formellement. Premièrement, M. le Président, est-ce qu'on adopte le titre du projet de loi au début ou à la fin?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A la fin.

M. Clair: A la fin, bon. Ce que je propose, c'est de modifier le projet de loi en remplaçant l'article 1 par les articles suivants. Est-ce que mes collègues m'ont retrouvé sur le document?

M. Raynauld: Oui.

M. Clair: Est-ce que vous me dispensez de la lecture de tout l'article 1? Est-ce que je peux l'expliquer immédiatement? (16 h 20)

Dans un premier temps, le nouvel article 1 dit ceci:

L'article 2 de la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail (Lois refondues du Québec, chapitre 11) est modifié: a) par le remplacement du paragraphe 3° par le suivant: 3° bien mobilier signifie tout bien qui n'est pas un immeuble d'après les lois du Québec et comprend le gaz, l'électricité, le service de téléphone et le service d'éclairage.

Sur ce point, c'est simplement s'assurer que les taxes de vente qui ont été perçues depuis belle lurette sur les services de gaz, d'électricité, de téléphone et d'éclairage ont bel et bien été perçues légalement, puisqu'un doute a surgi dans l'esprit de nos juristes et, plutôt que de courir le risque que le gouvernement du Québec fasse face à des réclamations de taxes perçues illégalement, se chiffrant à des centaines de millions de dollars, vous comprendrez qu'il y a lieu simplement de préciser cette définition dans le but d'inclure ce qui, croyait-on, y était inclus, mais ne l'était peut-être pas tout aussi nettement qu'on aurait voulu qu'il le soit.

M. Raynauld: M. le Président, j'ai lu l'article original, le gaz et l'électricité sont mentionnés.

M. Clair: Oui, le gaz et l'électricité étaient déjà mentionnés. C'est au niveau du service de téléphone et d'éclairage qu'il y avait une difficulté, et plus particulièrement le service d'éclairage.

M. Raynauld: Alors, l'électricité et le service d'éclairage, ce n'est pas la même chose. La taxe de vente ne s'applique pas au service, cela s'applique...

M. Clair: On me dit que l'électricité est un bien mobilier et qui est taxable. Mais le service d'éclairage, service qui découle du service d'électricité, pouvait faire l'objet de certains doutes. C'est pour cela qu'on inclut maintenant que bien mobilier signifie, en plus du gaz, de l'électricité et du service de téléphone, le service d'éclairage.

M. Raynauld: D'accord, cela va.

M. Clair: Cela a toujours été taxé, mais c'est un doute qui aurait pu surgir. Cela va? Adopté. b) par le remplacement du paragraphe 7° par le suivant:

Prix de vente ou prix d'achat signifie le prix en argent et aussi la valeur de services rendus, la valeur réelle de l'objet échangé et toute considération ou prestation acceptée par le vendeur comme prix de l'objet du contrat de vente. Ceci inclut tous les frais d'installation de l'objet vendu, tous frais de service, de douane, d'accise et de transport, même si aucune mention distincte n'en

est faite sur la facture ou dans les livres du vendeur."

C'est ici qu'on exclut maintenant de la notion de prix de vente ou prix d'achat, qui est le critère, la base si on veut, l'assiette de la taxe de vente de 8%, on exclut de cette définition les frais d'intérêts et les frais de finance. Autrement dit, on ne paiera plus la taxe de vente sur les frais d'intérêt et les frais de finance, ce qui est une excellente nouvelle pour l'ensemble des consommateurs québécois.

M. Raynauld: Bon!

M. Clair: Egalement pour les mandataires qui représentaient le gouvernement, le ministère du Revenu. Adopté?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un instant, s'il vous plaît! Pour les fins du journal des Débats, je comprends que l'article 1 que nous retrouvons dans le projet de loi no 68 est remplacé intégralement par l'amendement que vous nous proposez dans le document que vous nous avez soumis...

M. Clair: Effectivement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... et qui n'a pas été lu.

M. Clair: Je l'ai lu au fur et à mesure... Je pourrais...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Parce que, pour les fins du journal des Débats, j'aimerais...

M. Clair: Vous aimeriez que je le lise au complet?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, le nouvel article 1.

M. Clair: Est-ce que je pourrais le faire une fois qu'on aura fini d'étudier chacun des paragraphes?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord.

M. Clair: Alors, on en est à l'article 11. L'article 3 de cette loi est modifié par la suppression du deuxième alinéa du paragraphe 6. C'est de la concordance, du fait que, plus loin, on va retoucher à l'article concerné. Article 12: "L'article 17 de cette loi, modifié par l'article 1 du chapitre 30 des lois de 1978, etc., est de nouveau modifié par le remplacement du paragraphe d) par le suivant: "Aux créances, droits d'action, annuités, primes d'assurance, de même qu'aux droits incorporels à l'exception du service de téléphone et du service d'éclairage."

C'est de la concordance. C'est ici qu'existait la contradiction qui pouvait mettre en cause la sûreté de la taxe perçue au point de vue du service de téléphone et du service d'éclairage, cette concordance avec ce dont on a discuté précédemment.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Clair: Cela va? M. Raynauld: Cela va.

M. Clair: Au paragraphe b), on retrouve presque mot à mot l'ancien article 1 du projet de loi. C'est l'abolition de la taxe de vente sur les aéronefs. On ajoute cependant un mot. On ne parle plus seulement d'un permis d'exploitation d'un service aérien commercial délivré à l'acquéreur, mais également au locataire de l'aéronef. On dit "ou au locataire de cet aéronef". Si vous comparez les deux textes, c'est exactement la même chose que l'ancien texte, sauf qu'on ajoute après le mot "acquéreur", les mots "ou au locataire".

M. Raynauld: C'est également de la concordance avec un article existant qui se rapporte à la location, je pense, et c'est le même régime qui va s'appliquer.

M. Clair: C'est cela, oui. Le mot "vente" inclut la location. Le mot "vente" inclut la location, mais le mot "acquéreur" n'inclut pas le locataire. C'est pour cette raison qu'on l'ajoute. Cela va?

M. Raynauld: Cela va.

M. Clair: 1 3: L'article 31 de cette loi est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant: "Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours." Est-ce assez clair ou désirez-vous une explication là-dessus?

M. Raynauld: Pourrait-on indiquer le changement?

M. Clair: Auparavant, cette disposition ne s'appliquait qu'à certaines dispositions bien précises de la Loi de l'impôt sur la vente en détail. Maintenant, elle va s'appliquer à l'ensemble de la loi, dans ce cas-ci en particulier.

M. Raynauld: D'accord. Cela va.

M. Clair: M. le Président, vous me demandez de relire au complet?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, M. le ministre...

M. Clair: Ce n'est pas nécessaire?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... étant donné que vous l'avez fait par petites bribes...

M. Clair: Cela va? D'accord?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... toutes les parties faisant le tout. Le nouvel article 1 présenté par le ministre sera-t-il adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 2.

M. Clair: L'article 2, M. le Président, c'est l'article 2 du projet de loi 68. Dans ce cas-ci, ce sont les chiffres que j'ai mentionnés tantôt concernant la fixation à $0.013 le litre de la taxe sur le carburant servant à effectuer des essais de moteurs d'aéronefs ou servant à la propulsion d'un aéronef, ce qui fait que les avions de plaisance, par exemple, se trouvent à bénéficier d'une réduction de la taxe tandis que les avions destinés à des fins commerciales connaissent une augmentation de $0.007 à $0.013.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 2, adopté. Je pense qu'il y a un amendement après l'article 2. M. le ministre.

M. Clair: Effectivement. Après l'article 2, je propose d'insérer les articles suivants: l'article 2 1. Je vais lire au complet l'article 3 que je propose, M. le Président. 2 1: "L'article 56 de cette loi est remplacé par le suivant: 56. Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur le jour de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours." "2 2 La Loi concernant l'impôt sur le tabac, Lois refondues du Québec, chapitre I-2, est modifiée par le remplacement de l'article 20 par le suivant: 20. Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours. (16 h 30)

Cependant, les règlements adoptés en vertu du sous-paragraphe a) du paragraphe 3 de l'article 19 entrent en vigueur lors de leur adoption et n'ont pas à être publiés à la Gazette officielle du Québec.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que le nouvel article...

M. Clair: Je m'excuse, M. le Président. Je vais interrompre la lecture, parce que je viens de me poser une question. L'article 2.3: L'article 5 de la Loi des licences, Lois refondues du Québec, chapitre L3, modifiées par l'article 4 du chapitre 34 des lois de 1978, est de nouveau modifié par l'addition à la fin de l'alinéa suivant: Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours.

L'article 2.4 maintenant, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Clair: C'est vous qui l'avez voulu. L'article 12 de la loi concernant la taxe sur les repas et l'hôtellerie, lois refondues du Québec, chapitre T3, modifiées par l'article 4 du chapitre 33 des lois de 1978, est de nouveau modifié par le remplacement du dernier alinéa par le suivant: Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours.

L'article 2.5: L'article 12 de la Loi concernant la taxe sur les télécommunications, lois refondues du Québec, chapitre T4, est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant: Les règlements adoptés en vertu de la présente loi entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée. Ils peuvent aussi, une fois publiés et s'ils en disposent ainsi, s'appliquer à une date antérieure à leur publication, mais non antérieure à l'année en cours.

En résumé, M. le Président, il s'agit d'uniformiser les dispositions législatives régissant la rétroactivité des règlements en matière de taxe à la consommation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que le nouvel article 2.1 sera adopté?

Une Voix: Adopté.

M. Raynauld: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: J'aimerais que le ministre explique la nature — il y en a quatre ou cinq qui sont identiques — du problème au juste. Je n'ai pas compris.

M. Clair: Je vais donner un exemple pratique au député d'Outremont et je le donne parce que c'est un exemple vécu. C'est ce cas-là qui nous a amenés à corriger la situation.

En mai 1976, par exemple, le ministre des Finances de l'époque, l'honorable Raymond Gar-

neau, a modifié le régime des mandataires qui avaient droit à une indemnité ou à une commission de 2% quand ils perçoivent la taxe de vente ou la taxe sur les repas ou l'hôtellerie. Jusqu'à mai 1976, les mandataires avaient droit à 2% sans maximum. Le ministre des Finances annonce, en mai 1976, que dorénavant il allait y avoir un plafond de $1000 — de $500 dans un autre cas — à ces 2%. La loi, si ma mémoire est fidèle, découlant de ce budget est entrée en vigueur le 1er juillet 1976. Mais la réglementation en découlant, elle, n'est entrée en vigueur qu'en octobre ou novembre 1976, faisant en sorte que — la date de la publication du règlement — un mandataire s'est tourné vers le gouvernement et a dit: La loi peut avoir un effet rétroactif en quelque sorte, mais le règlement, lui, il n'y a rien dans la loi qui dit qu'il peut être rétroactif. En conséquence, du 1er juillet 1976 au 1er novembre 1976, je vous réclame la somme de $5600 représentant mes 2% sans maximum.

Ce mandataire a effectivement eu gain de cause. Ce qu'on veut faire, on veut corriger cette situation et s'assurer que d'autres gouvernements, y compris le nôtre, ne se retrouveront pas dans des difficultés semblables. Je pense que c'est respecter l'esprit des lois en matière budgétaire, en matière fiscale et que c'est simplement uniformiser. On profite de ce problème pratique auquel le ministère est confronté pour régler de la façon la plus étendue possible ce problème et éviter qu'on ne connaisse d'autres difficultés dans l'avenir. Est-ce que cela répond à la question du député?

M. Raynauld: Je vous remercie.

M. Russell: Cela donne une explication, mais cela ne répond pas tout à fait à notre inquiétude. Cela peut donner des avantages au ministre de s'assurer que la personne de qui il a perçu injustement des impôts ne peut pas retourner les chercher. Dans le cas que le ministre vient d'exposer, le gouvernement avait perçu des impôts injustement.

M. Clair: Ce n'était pas des impôts. Il s'agissait d'une commission.

M. Russell: C'était un dû, si vous voulez. Mais là, cela l'empêche d'aller percevoir ces dus.

M. Clair: Pour ceux qui ont obtenu des jugements en cour ou pour les causes pendantes, ce sera respecté et le gouvernement paiera. Le député comprendra que, si, par exemple, le soir du discours sur le budget, le ministre des Finances annonce qu'à compter de minuit ce jour-là la taxe sur les cigarettes augmente, on sait tous qu'elle va effectivement augmenter à compter du jour où il prononce son discours, par exemple, ou à compter d'une date x, y, z. Si le règlement qui découle de cette loi qui permet l'application ne peut pas être rétroactif à la même date où la loi est entrée en vigueur, c'est une situation baroque.

C'est simplement aligner le pouvoir réglementaire en matière de taxe à la consommation sur la façon usuelle de procéder en matière de lois fiscales, plus spécifiquement en matière de consommation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Avant de passer à l'adoption, je voudrais simplement noter qu'il y a une coquille de dactylographie. Je suppose que cela est corrigé automatiquement.

M. Clair: J'espère que vous nous la signalez; cela peut être très utile.

M. Raynauld: C'est à l'article 3 du projet d'amendement, alinéa 2.2 qui modifie la Loi concernant l'impôt sur le tabac. A la page suivante on voit, "non antérieur à l'année en cours", au premier paragraphe, troisième ligne; antérieur prend un "e".

M. Clair: M. le Président, vous avez fait la correction?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui. Nous en prenons acte. Alors, ce nouvel article 2.1 sera-t-il adopté?

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Est-ce que le nouvel article 2.2 sera adopté?

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 2.3?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 2.4?

M. Clair: Adopté.

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 2.5?

M. Clair: Adopté.

M. Raynauld: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. J'appelle maintenant le nouvel article 3.

M. Clair: M. le Président, je propose de remplacer l'article 3 du projet de loi par le suivant, l'article 3.1: "le paragraphe b) de l'article 1.2 et l'article 2 ont effet à compter du 1er janvier 1980." L'article 3.2: "Le paragraphe a) de l'article 1,

l'article 1.1, le paragraphe a) de l'article 1.2, l'article 1.3, ainsi que les articles 2.1 à 2.5 sont déclaratoires sauf pour les causes pendantes au 28 novembre 1979, soit la date dépôt de la loi en première lecture."

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que le nouvel article 3 tel que lu par le ministre sera adopté?

M. Clair: Ni plus ni moins, cela signifie qu'en ce qui concerne la notion de prix d'achat cela entre en vigueur au 1er janvier.

M. Raynauld: C'est la suppression de la taxe de vente.

M. Clair: En ce qui concerne la notion de prix d'achat, les exemptions de taxe et la taxe sur l'essence — toutes le nouvelles dispositions de nature un peu budgétaire vont entrer en vigueur au 1er janvier 1980, tandis que celles qui visent à couvrir des problèmes qui apportent des corrections, on dit que c'est déclaratoire et que cela entre en vigueur le jour du dépôt du projet de loi. (16 h 40)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que le nouvel article 3 sera adopté?

M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, on peut peut-être l'adopter maintenant. J'aurais deux problèmes à soulever d'ordre un peu plus général. M. le Président, je suggère d'adopter l'article...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le nouvel article 3 adopté?

M. Clair: Le nouvel article est adopté?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. Raynauld: J'ai deux remarques à faire si vous me le permettez. D'abord, la première, ce sont...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant, l'article 4, parce qu'il y a l'article 4 du projet de loi qui doit être adopté également.

M. Clair: II n'y en a plus, M. le Président, je pense qu'on a fini de... Oui, il reste l'article d'entrée en vigueur.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 4.

M. Clair: Effectivement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 4.

M. Clair: II reste l'article 4, l'entrée en vigueur, si on veut qu'elle soit un jour en vigueur.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 4 sera adopté?

M. Raynauld: Adopté. M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Oui, M. le Président, je voudrais exprimer d'abord ma surprise...

M. Clair: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue. Simplement pour vous dire qu'on a oublié d'amender le titre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n'était pas un oubli.

M. Clair: Non?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n'était pas un oubli, M. le ministre. On peut le faire immédiatement.

M. Clair: Je propose que le titre du projet de loi no 68 soit remplacé par le suivant: Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et modifiant d'autres dispositions législatives. C'est beaucoup mieux comme cela?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'amendement au titre de la loi tel que proposé par le ministre sera adopté?

M. Raynauld: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je vous remercie. Je voudrais simplement exprimer ma surprise sur la procédure qui a été suivie pour le projet de loi no 68. Je pense que cela va être la première fois qu'on adopte un projet de loi qui, en fait, est un projet de loi qui a des incidences fiscales, où somme toute on diminue, on réduit une taxe de vente. On enlève en fait une taxe de vente sur une catégorie de produits et que cela se fasse, premièrement, par le ministre du Revenu et non pas par le ministre des Finances, que cela se fasse en dehors d'un budget qui est présenté, plutôt qu'à l'intérieur ou à l'occasion d'un discours sur le budget, c'est une surprise. Je ne sais pas si sur le plan parlementaire cela soulève des difficultés particulières, mais je trouve que c'est un peu inattendu. D'habitude, ces propositions viennent après que le discours du budget a justement annoncé ce genre de mesure et on a des projets de loi qui appliquent ces choses. Cela me surprend qu'on ait présenté cela dans ce cadre-là.

La deuxième chose que je voudrais dire, elle est liée, je pense, à la première. Je regrette que les

amendements nous aient été apportés juste au début de la discussion et compte tenu du fait qu'on est passé à la commission plénière immédiatement après la deuxième lecture, on n'a pas eu l'occasion d'examiner ces amendements en détail et je trouve que ce ne serait pas un précédent à suivre pour l'avenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.

M. le ministre.

M. Clair: Sans prendre le temps de la Chambre, je voudrais simplement dire au député d'Outremont que mon collègue le ministre des Finances était parfaitement d'accord avec le contenu de ce projet de loi. C'est une décision du gouvernement. Ce projet de loi, comme tous les projets de loi, a reçu l'approbation du gouvernement avant d'être déposé à l'Assemblée nationale ici par le ministre du Revenu et cela m'étonne que dans des cas où on annonce des exemptions de taxes, des assouplissements, le député d'Outremont désire qu'on soit très formel. Je pense que dans la mesure où la nouvelle est bonne, je ne pense pas qu'il y ait lieu d'être trop formel là-dessus. D'autre part, en ce qui concerne les amendements que j'ai déposés au début de la commission, je le regrette un peu, moi le premier. J'ai cependant, pour être exact, distribué, remis aux leaders des deux partis politiques en Chambre ici, vendredi dernier, je leur ai fait expédier, le résumé concernant la substance des amendements à être apportés et, dans un cas, j'ai bien informé mes deux collègues qu'il me paraissait délicat de les prévenir de la nature précise des amendements vu que, par exemple, dans le cas de la modification, l'exclusion des frais de finance, des frais de crédit, des frais d'intérêt dans la notion de prix d'achat, j'aurais pu me faire reprocher d'avoir prévenu qui que ce soit avant le dépôt officiel de ces amendements.

Enfin, on me souligne également que si on avait su qu'en devait apporter ces amendements au moment de l'impression du projet de loi no 68, je tiens à rassurer mes deux collègues, qu'on y aurait effectivement inclus cela. Ce n'est pas plus agréable pour eux que pour moi de travailler avec des papillons. Dans un cas, il est survenu un doute, dans un autre cas, il est survenu un jugement, dans un autre cas, on corrige une situation qui vient juste de remonter à la surface.

En terminant, M. le Président, je voudrais quand même, malgré cette petite pointe du député d'Outremont, le remercier et remercier le député de Brome-Missisquoi et le député de Bellechasse pour l'excellente collaboration qu'ils m'ont offerte lors de la défense de mes deux premiers projets de loi. Je les remercie.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.

La commission a maintenant rempli le mandat qui lui avait été confié.

Mme la Présidente, j'ai le plaisir de vous faire rapport que la commission plénière a étudié le projet de loi no 65 et l'a adopté sans amendement et que cette même commission a également étudié le projet de loi no 68 et l'a adopté avec amendements, dont le titre.

La Vice-Présidente: Le rapport de la commission plénière en ce qui regarde le projet de loi no 65 est-il adopté?

M. Russell: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division.

Puisqu'il y a eu amendement au titre du projet de loi no 68, je me dois de vous demander... Le titre du projet de loi était Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et la Loi concernant la taxe sur les carburants.

Il devient Loi modifiant de nouveau la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et modifiant d'autres dispositions législatives. Cette Assemblée est-elle d'accord sur...

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Le rapport de la commission plénière, en ce qui concerne le projet de loi no 68, est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Mme la Présidente, je vais simplement attendre le retour du leader parlementaire de l'Opposition officielle, ce qui ne saurait tarder.

Je disais que j'attendais simplement que le leader parlementaire de l'Opposition officielle puisse se voir remettre un document. Avant de procéder à l'article suivant de notre menu d'aujourd'hui, il y aurait un certain nombre d'informations très importantes à fournir à nos collègues, à ce moment-ci.

Premièrement, tel qu'entendu plus tôt durant la journée, maintenant, étant donné que ces deux projets de loi du ministre du Revenu sont étudiés, la commission parlementaire permanente de l'industrie et du commerce peut se réunir à la salle 91-A pour étudier le projet de loi no 73 sur SIDBEC. J'indique immédiatement que le mandat de la commission, cet après-midi, n'est pas d'étudier la directive 02 relativement à la Société générale de financement. Ce travail se fera plutôt demain, de 10 heures à 13 heures, à la salle 91-A. (16 h 50)

A la salle 91-A, demain, il devait y avoir étude du projet de loi no 71, à la commission de l'éducation; comme ce projet de loi sera terminé dans son étude en commission parlementaire dès ce soir, demain matin la commission parlementaire de l'industrie et du commerce pourrait siéger sur le dossier de la Société générale de financement, à moins que nous n'apprenions de très mauvaises nouvelles.

M. Raynauld: Mme la Présidente, je voudrais apporter une précision. Ce qui avait été convenu, c'était que nous commencions à examiner le projet de loi relatif à SIDBEC cet après-midi et que, demain matin c'est la suite des travaux de la même commission de l'industrie et du commerce. Mais je ne voudrais pas laisser cette Assemblée sous l'impression qu'entre 17 h 55 et 18 heures, nous devions adopter le projet de loi sur SIDBEC; on ne s'est jamais engagé à cela. On pourrait très bien continuer demain matin et, à la suite, adopter l'étude de la directive relative à la SGF. Je pense que c'est ce dont on avait convenu.

La Vice-Présidente: Clarifications, M. le leader parlementaire.

M. Bertrand: Sans doute, le député d'Outremont a-t-il mal compris ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit, c'est ceci: La commission parlementaire se réunit d'abord aujourd'hui pour étudier le projet de loi no 73, d'accord? Quand, évidemment, elle aura terminé son travail sur le projet de loi no 73, elle entreprendra immédiatement l'étude de celui sur la SGF. C'était simplement pour indiquer que demain matin, entre 10 heures et 13 heures, plutôt que de voir siéger la commission de l'éducation qui aura terminé son travail, si le temps avait manqué ce soir à la commission pour étudier la directive 02, elle poursuivra demain matin à la salle 91-A l'étude de la directive 02 de la SGF. D'accord?

M. Raynauld: Cela va, d'accord.

M. Bertrand: Bien. C'était la première information, Mme la Présidente. La deuxième information, c'est simplement de la concordance. Demain matin, la commission de la justice, qui doit étudier les projets de loi nos 48 et 52, les étudiera à la salle 81-A au lieu de la salle 91-A qui, elle, recevra la commission parlementaire permanente de l'industrie et du commerce.

Rapport du greffier en loi sur les projets de loi privés

Projet de loi no 252

A ce moment-ci, si j'obtenais le consentement unanime de nos collègues de l'Assemblée nationale, nous pourrions revenir à un point de notre ordre du jour, à savoir aux affaires courantes, pour procéder immédiatement au dépôt d'un projet de loi privé inscrit au nom du député de Huntingdon, le projet de loi no 252. J'ai simplement reçu un rapport du greffier en loi sur les projets de loi qui dit que le projet est conforme à l'avis et que l'avis est suffisant en nombre. Le projet a été déposé au secrétariat, il s'agirait simplement d'obtenir le consentement pour faire le dépôt de ce projet immédiatement.

La Vice-Présidente: Consentement?

M. Levesque (Bonaventure): Tout d'abord, Mme la Présidente, il faudrait recevoir le rapport.

M. Bertrand: Oui.

La Vice-Présidente: Consentement?

M. Levesque (Bonaventure): II n'y a pas de dérogation.

M. Bertrand: Non, dans l'avis que je viens de lire, il n'y a pas de dérogation.

La Vice-Présidente: Consentement.

M. Levesque (Bonaventure): Après le jour d'ouverture de la session.

M. Bertrand: Ah oui? Oui, effectivement, après le jour d'ouverture de la session. Alors, il faudrait obtenir une dérogation aux règles habituelles.

M. Levesque (Bonaventure): Motion agréée. La Vice-Présidente: Adopté.

M. Bertrand: Encore une fois, Mme la Présidente, s'il y avait consentement de la part de mes collègues, à ce moment-ci, on pourrait déposer le rapport de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi no 17.

M. Levesque (Bonaventure): Un instant, s'il vous plaît, je pense qu'il faudrait d'abord procéder, si on me le permet ou si c'est l'intention du gouvernement de permettre de le faire, au dépôt du projet de loi no 252, Mme la Présidente.

Première lecture

La Vice-Présidente: II s'agirait du dépôt d'un projet de loi privé. M. Levesque de Bonaventure, au nom de M. Dubois, député de Huntingdon, propose la première lecture du projet de loi no 252, Loi concernant certains immeubles du cadastre de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome, division d'enregistrement de Châteauguay. La première lecture sera-t-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

La Vice-Présidente: Deuxième lecture...

Renvoi à la commission de la justice

M. Bertrand: Mme la Présidente, je fais motion pour que ce projet de loi no 252 soit déféré à la commission parlementaire permanente de la justice.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. La Vice-Présidente: Adopté.

Rapport de commission élue Projet de loi no 17

M. Bertrand: Bien, si j'avais encore une fois, le consentement de mes collègues, nous pourrions aussi à ce moment-ci déposer le rapport de la commission parlementaire permanente qui a étudié le projet de loi no 17. Relativement à ce projet de loi, Mme la Présidente, normalement, nous aurions jusqu'à 22 heures, ce soir, pour la présentation des amendements; mais il y a eu entente, semble-t-il, pour que nous ayons jusqu'à demain matin, 11 heures, pour un dépôt d'amendement si telle était la volonté des collègues de l'Assemblée.

La Vice-Présidente: Est-ce qu'il y a consentement à ce que le rapport soit déposé?

Des Voix: Consentement.

La Vice-Présidente: Consentement.

M. Perron: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le député de Duplessis.

M. Perron: ... qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente du travail et de la main-d'oeuvre qui a siégé les 13, 14, 17, 18 et 19 décembre 1979, aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 17, Loi sur la santé et la sécurité du travail, et l'a adopté avec des amendements.

La Vice-Présidente: Le rapport est déposé et les amendements peuvent parvenir au bureau du secrétaire général jusqu'à 11 heures, demain matin. Consentement unanime de cette Assemblée.

M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Mme la Présidente, nous n'étudierons pas, cet après-midi, tel que nous l'avions annoncé précédemment, le projet de loi no 66, en deuxième lecture, parce que le leader parlementaire du gouvernement a été rappelé au Conseil des ministres. Mais si c'était possible, nous pourrions immédiatement, avec le consentement de nos collègues, procéder à l'adoption, en troisième lecture, des deux projets de loi que nous venons d'étudier, inscrits au nom du ministre du Revenu, à savoir les projets de loi nos 65 et 68; après quoi, nous procéderions, en commission plénière, à l'étude du projet de loi no 72; ce qui supposerait qu'il y aurait un avis de révocation d'un ordre de la Chambre donné un peu plus tôt durant la journée.

La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, pour la troisième lecture, nous attendions tout simplement une formalité. Mon collègue vient de partir; on pourrait peut-être le faire au cours de la séance, si je puis avoir ses commentaires là-dessus. Mais je pense qu'on devrait procéder à la motion pour que vous quittiez le fauteuil, Mme la Présidente, je le regrette.

La Vice-Présidente: Alors, cette motion de révocation, M. le leader?

Projet de loi no 72 Retrait du renvoi à la commission élue

M. Bertrand: Donc, il y aura probablement possibilité de s'entendre peut-être pour que vers la fin de la séance nous procédions à l'étude, en troisième lecture, des deux projets de loi inscrits au nom du ministre du Revenu. Pour l'instant, nos travaux seraient d'abord de révoquer un ordre qui a été donné un peu plus tôt pour faire siéger la commission parlementaire permanente de l'énergie sur l'étude article par article du projet de loi no 72; nous le ferions plutôt en commission plénière.

Je fais donc motion d'abord pour révoquer un ordre de la Chambre.

La Vice-Présidente: Cette motion de révocation de renvoi en commission parlementaire est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

Commission plénière

M. Bertrand: Je fais maintenant motion pour que vous quittiez votre fauteuil et que nous nous transformions en commission plénière pour étudier le projet de loi no 72.

La Vice-Présidente: Motion adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Cette Assemblée s'est transformée en commission plénière pour étudier le projet de loi no 72, Loi sur le ministère de l'Energie et des Ressources. Je ferai remarquer à M. le ministre que les consultations peuvent se faire ici, au salon bleu, si nécessaire.

Je regrette, M. le député, en commission plénière... Malheureusement, je me dois de faire observer le règlement.

M. le député de Mont-Royal. (17 heures)

M. Ciaccia: Le ministre peut et nous, on ne peut pas.

La Présidente (Mme Cuerrier): A moins que vous n'ayez des commentaires généraux, l'article 1 du projet de loi 72 sera-t-il adopté?

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Mme la Présidente, juste avant de commencer l'étude article par article, je voudrais faire un très bref commentaire préliminaire, une remarque préliminaire au sujet de la façon dont nous procédons maintenant. C'est regrettable qu'un projet de loi de ce genre, qui est un projet de loi assez important et qui contient des dispositions qu'on pourrait et qu'on devrait discuter à fond soit présenté à la fin de la session où, nécessairement, à cause de la contrainte du temps, par le fait que nous ne voulons pas bloquer d'autres projets de loi importants, nous sommes vraiment limités dans les discussions du projet de loi article par article. On aurait beaucoup préféré que le projet de loi soit présenté plus tôt dans la session. Cela nous aurait vraiment permis de l'étudier à fond, d'apporter des commentaires, beaucoup d'amendements et de suggestions nécessaires qui auraient vraiment, à notre avis, bonifié pleinement ce projet de loi. Nous nous voyons maintenant placés dans une situation où nous sommes un peu limités. Nous allons faire notre possible pour en compléter l'étude le plus tôt possible.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, Mme la Présidente. Je n'ai pas l'intention de reprendre le débat qu'on a tenu en deuxième lecture sur le projet de loi 72. Cependant, j'aimerais revenir sur un point qui n'a pas été abordé, je pense, par le ministre lors de sa réplique à la suite des interrogations que j'avais manifestées lors de l'exposé que j'avais fait au nom de l'Union Nationale sur la deuxième lecture de ce projet de loi. Il s'agit, en particulier, du mandat que devrait avoir la compagnie SOQUIP pour négocier les approvisionnements en pétrole sur les marchés étrangers. J'avais soumis le problème au ministre en lui indiquant la situation, à savoir qu'actuellement c'est le Canada, comme on le sait, qui a ce pouvoir. On sait que, dans le contexte où Pétro-Canada a un avenir incertain, les provinces peuvent, si elles le désirent, demander un mandat au gouvernement fédéral pour que leurs sociétés, le cas échéant SOQUIP au Québec, puissent jouer le rôle de négociateurs au niveau des approvisionnements, ce qui était, semble-t-il, souhaité par le président de SOQUIP, M. Cloutier.

Le ministre a été vague dans sa réponse là-dessus, préférant emprunter une autre avenue plutôt que de répondre directement. C'est pourquoi j'aimerais revenir sur cette simple question au point de départ et demander au ministre si c'est l'intention du gouvernement du Québec, dans un souci de prévoir, justement — et j'aimerais que le ministre mette de côté la question politique à ce moment — de demander le fameux mandat pour que SOQUIP puisse, le cas échéant, si besoin en est, jouer le rôle de négociateur dans les approvisionnements de pétrole pour le Québec.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: Je pense que le député de Richmond pose une question à laquelle la réponse est assez évidente. Le gouvernement n'a pas à demander de mandat au gouvernement fédéral. Je crois avoir répondu à cette question du député de Richmond. La société SOQUIP peut acheter du pétrole n'importe quand sur les marchés mondiaux, à ma connaissance. Elle peut donc s'engager dans une négociation avec non pas un pays, mais une entreprise étrangère pouvant lui vendre du pétrole. Elle peut acheter du pétrole sur le marché de Rotterdam. Elle peut acheter du pétrole où elle veut dans le monde.

Nous n'avons, à cet égard, aucun mandat à demander de la part du gouvernement fédéral, de la même façon que n'importe quelle société d'Etat au Québec, ou société privée, achète des produits de l'étranger sans demander l'autorisation du gouvernement fédéral. Ce qui préoccupe le député de Richmond, c'est que, advenant une situation d'urgence, SOQUIP peut-elle se voir confier le mandat? La réponse est non. Seul le gouvernement fédéral, en vertu de la Loi C-42 qui vient, invoquant l'intérêt national il y a maintenant deux ans, de s'approprier totalement ce champ de juridiction, y compris même la distribution intérieure au Québec des produits pétroliers. Ce qui fait que dans ces conditions, c'est une loi fédérale avec des organismes fédéraux qui gère, en cas de pénurie, l'approvisionnement en pétrole au Québec. La demande des premiers ministres des provinces au gouvernement fédéral, à l'époque, avant l'élection du gouvernement conservateur, était qu'il y ait modification, amendement à la loi fédérale de manière à ce que les provinces, désirant s'occuper de l'approvisionnement en pétrole ou en énergie de leurs concitoyens, puissent le faire.

Mais présentement le gouvernement du Québec ne peut pas signer d'entente internationale pour sécuriser les Québécois en leur garantissant un approvisionnement. Ce n'est que le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral n'a jamais interdit, dans le cadre, par exemple, de l'entente qu'il a conclue avec le Mexique, à des sociétés canadiennes, quelles qu'elles soient, que ce soit Pétro-Canada ou autres, d'aller acheter du pétrole au Mexique.

En d'autres termes, rien n'empêche une société d'Etat de pouvoir acheter du pétrole. Cependant, le problème n'est pas là. Le problème, c'est lorsque vous avez ce pétrole en main, qui vous a peut-être coûté plus cher que du pétrole acheté sur le marché régulier, et que vous voulez forcer les compagnies pétrolières québécoises à accepter ce pétrole, de manière à ce qu'il puisse être

raffiné. Qui va devoir payer le coût supplémentaire du pétrole? C'est une question qu'il faut se poser. En réponse, il faut amener une loi à cette Assemblée nationale qui conférerait au gouvernement le pouvoir de contrôler les approvisionnements pétroliers en période de crise. Mais comme le gouvernement fédéral a déjà adopté une telle loi, il y a deux ans, contre la volonté des provinces, dans ces conditions, le gouvernement du Québec est totalement soumis à la loi fédérale. La raison pour laquelle nous ne pouvons pas exproprier la société Asbestos — je m'excuse de devoir le signaler — c'est parce que le juge pense qu'il' est possible que cette loi du Québec soit en conflit avec les pouvoirs du fédéral. A cause de cette opinion du juge, sans qu'il ait même l'assurance légale que la loi est inconstitutionnelle..

M. Ciaccia: Mme la Présidente.

M. Bérubé:... le juge peut interdire au gouvernement du Québec — c'est ce qu'il fait — l'expropriation. Il faut bien se rendre compte que le gouvernement du Québec n'a pas ces pouvoirs d'intervention sur le plan politique, en vertu même de la constitution. Lorsque vous soulevez une question, il faut la soulever au niveau politique, c'est-à-dire qu'il faut amener les Québécois à ce choix: Est-ce que vous voulez que ce soit le gouvernement du Québec qui se...

M. Ciaccia: Mme la Présidente.

M. Bérubé: ... préoccupe de telle et telle question...

M. Ciaccia: Question de règlement.

M. Bérubé: ... ou le gouvernement d'Ottawa?

M. Ciaccia: Question de règlement, Mme la Présidente.

M. Bérubé: C'est cette décision-là que prennent les Québécois qui va permettre, à ce moment-là, au gouvernement du Québec...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, j'ai ici une question de règlement de la part de M. le député de Mont-Royal.

M. le député.

M. Ciaccia: Je n'ai pas voulu interrompre la question de mon collègue, ni la réponse du ministre, mais je crois que nous sommes assez limités dans le temps pour étudier le projet de loi article par article. Nous ne sommes pas en période de questions. Alors, pourrais-je suggérer bien respectueusement à mon collègue, s'il veut poser des questions à ce sujet au ministre de l'Energie et des Ressources, d'attendre demain à la période de questions et qu'on procède à l'étude article par article du projet de loi afin qu'on puisse la terminer le plus tôt possible?

La Présidente (Mme Cuerrier): Nous en étions aux commentaires généraux. M. le député de Richmond.

M. Brochu: Mme la Présidente, sur cette question de règlement, j'aimerais quand même vous rappeler les traditions et l'esprit de notre règlement en ce qui concerne, comme vous venez de l'indiquer d'ailleurs à juste titre, nos traditions. Avant de commencer l'étude de l'article 1, on peut quand même faire certains commentaires généraux ou poser certaines questions. La question que j'ai soulevée faisait suite aux interrogations que j'avais soulevées lors de mon discours de deuxième lecture. Je pense que cela fait partie du cadre premier de nos discussions. C'est pour éviter d'avoir à revenir article par article. Là-dessus, on pourra peut-être même procéder plus rapidement par la suite. Je voulais avoir l'éclaircissement de ce point-là. Je ne pense pas que cela aille à l'encontre de nos règlements. (17 h 10)

La Présidente (Mme Cuerrier): Rapidement, M. le député, si vous avez d'autres questions, ou si M. le ministre voulait compléter.

M. Brochu: Non, il y a seulement une précision que j'aimerais avoir de la part du ministre. Je n'ai pas l'intention de m'éterniser sur cette chose; on aura l'occasion d'y revenir. Je voulais avoir un éclairage supplémentaire quand même. Comment se fait-il qu'actuellement la société PEMEX, qui est la société des pétroles mexicains, dise clairement à SOQUIP dans le moment, et non pas dans un état d'urgence: Allez chercher le mandat du gouvernement fédéral pour qu'on puisse négocier directement avec vous et on est prêt à le faire. Je comprends qu'au niveau des entreprises privées, le gouvernement du Québec peut aller s'approvisionner n'importe où: il peut aller à Rotterdam sur le marché "spot" et on sait quel prix il va le payer, mais lorsqu'on parle, par exemple, du marché mexicain — c'est le ministre qui y a fait allusion — ce n'est pas dans le contexte d'une crise, c'est dans le contexte de la tournée d'exploration que M. Cloutier a faite.

La société PEMEX, des pétroles mexicains, lui a bien dit: Allez chercher un mandat de votre gouvernement fédéral et on est prêt à négocier avec vous pour vous approvisionner. Là-dessus, est-ce qu'il n'est pas exact que vous n'avez pas besoin d'attendre une situation de crise mais que, si vous avez le mandat, le cas échéant, vous pourriez l'utiliser?

M. Bérubé: Pourquoi voulez-vous acheter du pétrole?

M. Brochu: Si vous avez des besoins.

M. Bérubé: Est-ce que nous manquons présentement de pétrole livré à nos raffineries?

M. Brochu: C'est toute l'autre enveloppe. Ce que j'ai souligné dans mon discours, c'est que le

gouvernement a la responsabilité de prévoir. Ce n'est pas son rôle d'être l'approvisionneur au point de départ actuellement. Cela pourrait le devenir, si la situation se compliquait. C'est justement dans cet esprit dea prévision que le mandat ne doit pas être demandé, à mon humble avis, lorsque l'état de crise arrive, si vous avez des chambardements politiques internationaux de sorte que les approvisionnements sont coupés ou d'autres situations.

M. Bérubé: A ce moment-là, c'est lorsque et s'il y a crise. Je pense bien, pour autant que les approvisionnements sont concernés... D'ailleurs, vous avez déjà vu tout récemment, à la conférence de l'OPEP qui se tient présentement au Vénézuéla, qu'il y a surproduction de pétrole dans le monde présentement. Le problème actuel auquel font face les pays producteurs de pétrole, c'est de trop produire par rapport aux besoins. Ce n'est donc pas un problème d'aller sur le marché mondial et d'acheter du pétrole. N'importe qui peut aller sur le marché mondial acheter du pétrole.

Ce qui vous préoccupe, c'est advenant une pénurie de pétrole, si SOQUIP peut se faire donner le mandat, le gouvernement fédéral, qui est responsable de la gestion d'une pénurie, va prendre les décisions à ce moment-là. Le gouvernement fédéral pourrait très bien, par exemple, s'adresser au gouvernement du Québec et dire: Nous serions intéressés à faire acheter 100 millions de barils ou 100 000 barils de pétrole; est-ce que la société SOQUIP est prête à aller acheter du pétrole? La réponse est évidemment oui.

Mais il reste que, présentement, même si nous demandions un mandat pour aller acheter du pétrole, le gouvernement ne nous donnera pas un mandat général pour couvrir une période de crise. En période de crise, le gouvernement fédéral, qui est responsable de la gestion, prendra les décisions qui s'imposeront. Il y a une confusion absolument incroyable, à mon avis, entre deux niveaux de gouvernement, ce qui traduit d'ailleurs une des difficultés que nous avons à expliquer la souveraineté-association aux Québécois.

Tous les Québécois sont convaincus que le Québec est souverain et peut prendre toutes les décisions. Dans ces conditions, quand vous leur expliquez qu'il ne peut pas, que c'est le gouvernement fédéral qui prend cette décision, que vous êtes soumis dans ce domaine à une juridiction d'un gouvernement supérieur, là, il faut choisir. Ou on accepte le fédéralisme, ou on rejette le fédéralisme.

Nous rejetons le fédéralisme actuel. Nous disons: II faut que le peuple québécois soit en mesure de prendre les décisions qui affectent son développement, son bien-être, sa sécurité, son développement économique, sa culture, sa langue. Il faut que ce soit le peuple québécois qui décide et non pas une majorité anglophone. C'est le principe que défent le Parti québécois.

Par contre, un fédéraliste va dire: Non, je trouve normal que ce soit le gouvernement fédéral qui assure notre développement. Nous préférons que ce soit le gouvernement fédéral qui prenne telle décision. Dans le domaine du pétrole, c'est le gouvernement fédéral qui prend la décision en cas de crise. Vous n'avez pas le choix de contester le système constitutionnel actuel ou de l'accepter, mais vous ne pouvez pas jouer sur les deux tableaux, vous ne pouvez pas faire croire aux Québécois qu'ils ont ces pouvoirs et, d'un autre côté, demander les mêmes pouvoirs en même temps parce que, là, les Québécois, ne comprendront plus rien. Je ne comprends pas du tout votre objection.

M. Brochu: Je vais poser ma question autrement. Je veux être bien sûr d'avoir compris la réponse du ministre et je pense que cela pourrait être un éclairage dans la discussion actuelle. Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'il n'y a aucune possibilité actuellement, dans le cadre des lois fédérales, que le Québec, demande pour SOQUIP un quelconque mandat pour que la compagnie puisse jouer le rôle au niveau des approvisionnements. Est-ce cela que le ministre veut nous dire?

M. Bérubé: Non. Il pourrait, par exemple, y avoir une décision gouvernementale à savoir que SOQUIP achète du pétrole sur les marchés internationaux et devienne... J'ignore même si, constitutiorinellement, nous pourrions faire cela parce que je ne sais pas si nous pouvons forcer des compagnies au Québec à acheter du pétrole venant de SOQUIP. M. le député de Richmond, je ne le sais pas actuellement et mon conseiller juridique est à côté, mais je ne veux pas lui demander un avis juridique trop rapide. Je ne pense pas que le gouvernement du Québec puisse présentement forcer des entreprises privées au Québec du pétrole international que leur livrerait SOQUIP. Je ne pense pas que cela puisse se faire, parce que ce serait l'équivalent pour le gouvernement du Québec de contrôler le commerce extérieur des Québécois puisqu'on obligerait des compagnies à acheter du pétrole dont la décision d'achat aurait été prise par le gouvernement du Québec.

Or, le gouvernement du Québec n'a pas juridiction dans le domaine du commerce extérieur. Donc, je pense que ce serait inconstitutionnel. Je pense, a priori, et dès qu'on fouille... Par exemple, on veut exproprier une société qui a des actifs au Québec et un juge immédiatement dit: Attention, étant donné qu'il s'agit d'une compagnie à charte fédérale et elles sont presque toutes à charte fédérale — il est possible que vous ayez stérélisé cette compagnie, donc, peut-être est-ce inconstitutionnel. Ou encore on pourrait dire: Comme cette compagnie exporte 95% de sa production, en l'expropriant, vous agissez sur le commerce extérieur et il est possible que ce soit inconstitutionnel.

Tout prétexte est bon pour dire que c'est inconstutitionnel, parce que les pouvoirs des provinces sont très limités. C'est le gouvernement fédéral qui a tous les pouvoirs. Il suffit, par exemple, dans le cas de l'uranium, que le gouver-

nement fédéral dise, au début de la loi, que l'uranium est une matière d'intérêt national pour qu'automatiquement les provinces perdent juridiction sur cette matière. C'est ce qui a fait que le gouvernement fédéral, année après année, a grugé de plus en plus les pouvoirs des provinces à ce point qu'une province ne peut pratiquement plus faire de lois dans le domaine économique, dans le domaine de son commerce et même dans le secteur des communications sans que cette province soit en conflit avec le gouvernement supérieur. Les provinces canadiennes l'acceptent parce qu'elles voient dans le gouvernement fédéral leur gouvernement qu'elles contrôlent, puisqu'elles sont majoritairement anglophones et que ce gouvernement est majoritairement anglophone avec des fonctionnaires essentiellement anglophones et la langue de travail d'Ottawa est essentiellement l'anglais. Les autres provinces acceptent cela, sauf dans certains secteurs où les provinces aimeraient peut-être plus d'autonomie, mais le Québec n'accepte pas cela parce que le Québec se reconnaît comme un peuple francophone avec ses propres institutions, avec sa propre façon de voir, sa propre façon de penser et que chaque fois que le peuple québécois fait face à une situation difficile, il se tourne vers cette Assemblée nationale et non vers le gouvernement fédéral pour la solution à ses problèmes.

Le Québécois vit dans une espèce d'immense quiproquo où il a l'impression que c'est son gouvernement qui est à Québec, mais il a oublié les trois-quarts des pouvoirs à Ottawa. Je pense qu'il est plus honnête de dire carrément aux Québécois: Voici la réalité du fédéralisme. Nous ne pouvons faire ceci, nous ne pouvons faire cela. N'essayez pas de nous faire croire que nous pouvons le faire, on ne peut pas le faire. Maintenant, si vous voulez que nous le fassions, que le peuple québécois mandate son gouvernement. C'est le sens du référendum.

M. Brochu: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le leader parlementaire adjoint.

M. Bertrand: Mme la Présidente, c'est simplement sur une question de règlement. A ce moment-ci, je voudrais proposer à nos collègues de la commission plénière de suspendre les travaux, étant donné que ce matin, le ministre des Affaires sociales s'était engagé à donner une réponse à une question qui avait été formulée par le député de Saint-Hyacinthe — et je pense aussi que cela répondrait à des intérêts manifestés par le député de Mont-Royal — relativement aux allocations de bien-être social et qu'il y aurait possibilité qu'il le fasse à ce moment-ci. Le ministre ne peut venir à l'Assemblée nationale que pour cinq brèves minutes, il doit retourner immédiatement au Conseil des ministres, mais comme il s'était engagé à faire une déclaration devant l'Assemblée nationale avant d'aller devant les media d'information pour respecter nos collègues de l'Assemblée nationale, nous pourrions, très simplement, Mme la Présidente, suspendre les travaux de la commission plénière, faire rapport et revenir immédiatement en commission dans cinq minutes, le temps de permettre au ministre de faire sa déclaration et sans doute aux députés de Mont-Royal et de Saint-Hyacinthe de poser une brève question relativement à la déclaration du ministre. (17 h 20)

La Présidente (Mme Cuerrier): II serait question de faire rapport que la commission n'a pas terminé ses travaux; ce que je fais immédiatement.

Des Voix: Consentement.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le Président, je vous fais rapport que la commission plénière n'a pas terminé l'étude du projet de loi no 72 et demande la permission de siéger de nouveau.

Le Vice-Président: Quand siégera-t-elle? M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Même séance, M. le Président.

Le Vice-Président: Même séance. M. le ministre des Affaires sociales avec le consentement.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Indexation des prestations d'aide sociale (suite)

M. Lazure: le Président, il s'agit en fait d'un complément de réponse à une question posée par le député de Saint-Hyacinthe, ce matin, question qui visait à savoir si le gouvernement allait indexer oui ou non les prestations d'aide sociale à partir de janvier.

On sait que le gouvernement a annoncé récemment que les prestations pour ceux qui reçoivent des rentes à l'intérieur du Régime des rentes du Québec étaient indexées à partir de janvier de 9%, même chose pour les allocations familiales du Québec. Je suis très heureux d'annoncer, au nom du gouvernement, que le Conseil des ministres vient tout juste de décider, cet après-midi, d'affecter une somme de $92 millions permettant l'indexation des prestations d'aide sociale de 9%. Ce chiffre de $92 millions peut paraître élevé, mais je pense que quand on regarde les revenus que cela représente pour chaque famille de bénéficiaires de l'aide sociale, il n'y a pas lieu de parler d'extravagance. Exemple, une famille, un parent avec un enfant, même avec cette indexation de 9%, recevra au 1er janvier $301 par mois seulement. Une famille de deux adultes et de deux enfants, avec cette indexation, recevra $549 par mois.

M. le Président, je vais tout de suite faire de la prévention. Je vais essayer de faire comprendre à certaines personnes qui pourraient trouver cette somme de $92 millions affectée aux bénéficiaires d'aide sociale trop élevée, et rappeler que les

300 000 fonctionnaires de l'Etat, employés des hôpitaux, des centres d'accueil, des CLSC et personnel des écoles se sont vus assurés par les offres gouvernementales d'une protection du pouvoir d'achat pendant trois ans. Il est simplement équitable, juste, que nos 270 000 familles, ménages qui doivent vivre de l'aide sociale, pour toutes sortes de raisons, certains et certaines parce qu'ils sont invalides, d'autres parque qu'ils ne peuvent pas trouver d'emploi, il est juste, dis-je, que ces 500 000 personnes parmi les plus défavorisées de notre société se voient assurées, pour l'année prochaine, d'une protection complète de leur pouvoir d'achat. C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'indexer, à partir du 1er janvier, de 9% toutes les prestations d'aide sociale.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe, très brièvement.

M. Cordeau: Oui, merci, M. le Président.

Tout d'abord, je tiens à remercier le ministre d'avoir bien voulu annoncer à cette Chambre, tel qu'il l'avait promis, ce matin, en primeur, la décision du gouvernement concernant l'aide à ceux qui reçoivent les prestations d'aide sociale. Bien sûr que ce montant peut paraître très fort, mais on connaît les difficultés auxquelles ont à faire face ceux qui bénéficient de cette aide, ce n'est de leur faute, souvent ce sont des gens qui veulent travailler, mais ils n'en ont pas l'occasion, ils ne peuvent se trouver d'emploi. Je crois que cette décision vient à son heure. C'est un précédent pour un ministre d'annoncer à l'Assemblée nationale de telle mesure. Je félicite M. le ministre d'avoir pris cette décision et de l'annoncer ici à l'Assemblée nationale, parce qu'habituellement ces nouvelles, on les apprend par les journaux au lieu d'être informés en premier lieu à l'Assemblée nationale.

Je dois souligner ce fait, car c'est peut-être une primeur aujourd'hui d'annoncer à l'Assemblée nationale de telles politiques. Je crois que c'est ici que ces nouvelles devraient être annoncées en premier lieu. Je vous remercie.

M. Lazure: Pour conclure, M. le Président, je veux remercier le député de Saint-Hyacinthe et sa formation politique pour leurs commentaires favorables. En terminant, je trouve que c'est l'endroit normal pour annoncer ce genre de nouvelle importante. Je veux aussi m'adresser plus spécialement aux bénéficiaires de l'aide sociale en espérant que ce geste normal d'un gouvernement qui se soucie des plus défavorisés les aide à passer de meilleures Fêtes. Merci.

Le Vice-Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gosselin: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au ministre des Affaires sociales sur le même sujet?

Une Voix: Non.

Une Voix: Consentement.

M. Gosselin: C'est pertinent au sujet.

Le Vice-Président: II n'y a pas de consentement. M. le député de Sherbrooke, il ne faudrait pas reprendre ici la période des questions. Il n'y a pas de consentement.

M. Gosselin: D'accord, je reviendrai à la période des questions, au début de la prochaine session.

Le Vice-Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: En remerciant mes collègues pour leur excellente collaboration et le ministre pour s'être déplacé et être venu nous annoncer cette bonne nouvelle, je voudrais maintenant faire motion pour que vous quittiez de nouveau votre fauteuil et que nous nous retransformions en commission plénière pour terminer l'étude du projet de loi inscrit au nom du ministre de l'Energie et des Ressources.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Vice-Président: Motion adoptée.

Projet de loi no 72

Commission plénière (suite)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Nous continuons à étudier article par article le projet de loi no 72, conformément au mandat que vient de nous redonner l'Assemblée nationale. Qui avait la parole au moment de la suspension?

M. Brochu: C'est moi qui avais la parole à ce moment-là, M. le Président, si ma mémoire est bonne.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est vous qui aviez la parole? Je vous la redonne.

M. Brochu: C'est simplement pour vous dire que la discussion qu'on a entreprise est quand même beaucoup plus large que les quelques questions que j'ai posées et qu'on aura peut-être l'occasion de revenir sur ces points. En ce qui me concerne, je serais prêt immédiatement à passer à l'étude article par article du projet de loi.

M. Ciaccia: M. le Président, si vous me le permettez...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... dans la ligne des remarques préliminaires, puisqu'on a semblé ouvrir un peu la porte à certaines remarques, comme l'a dit mon collègue, en posant certaines questions maintenant et en vidant certains problèmes, on pourrait éliminer des discussions à venir sur certains articles du projet de loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est une façon de procéder, effectivement. Comme les membres le désireront. On peut l'étudier article par article ou faire une discussion générale qui débloque certains points.

M. Ciaccia: M. le Président, merci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je ne peux laisser passer sans commentaire quelques-unes des affirmations du ministre. Nous sommes ici pour discuter du projet de loi article par article. Mais, quand le ministre nous dit que les autres provinces acceptent tout le pouvoir du fédéral parce que ce sont des provinces anglophones, j'aurais espéré qu'on évite de parler de langue et de race dans un projet de loi sur la création d'un ministère de l'Energie. Je voudrais vous corriger. Les autres provinces, elles aussi, ont des revendications à faire pour ou contre le fédéral. Ce n'est pas la majorité anglophone contre la province de Québec. Vous donnez une fausse impression de la situation. (17 h 30)

Quand on parle — vous dites que vous voulez avoir tous les pouvoirs — ici dans le domaine de l'énergie, supposons que vous auriez maintenant tout le pouvoir de vous approvisionner, que faites-vous des 60% du pétrole qui pourrait augmenter, 60% du pétrole au Québec qui vient de l'Alberta? Cela n'entre pas du tout dans les remarques parce que vous ne l'avez pas mentionné, comme étant un fait, étant une des réalités que nous vivons, un des avantages. Nous n'avons pas le problème de la sécurité d'approvisionnement que d'autres pays ont, même les Etats-Unis, et quand vous parlez de la juridiction du Québec, je vais porter une situation à votre attention dont, je suis certain, vous êtes déjà au courant; cela concerne le maintien des approvisionnements. Vous semblez critiquer le fait que le fédéral a tellement de pouvoirs, mais il nous assure, et jusqu'à maintenant dans les crises internationales nous a assuré l'approvisionnement, nous n'avons pas eu cette pénurie, nous l'avons eu à des prix très avantageux. Vous savez ce que le prix international est aujourd'hui. Mais je vais vous apporter quelque chose qui semble être dans la juridiction de la province et je vais vous demander ce que vous faites comme ministère de l'Energie.

Il y a un lock-out et une grève dans les raffineries de l'Est. Cela peut affecter le maintien des approvisionnements à Petrofina, cela affecte 286 travailleurs; en tout, cela peut affecter environ 1300 travailleurs. Cela peut affecter la raffinerie

Shell qui produit 120 000 barils par jour. A titre de ministre de l'Energie, qui devez être responsable, comme vous voulez avoir de l'aide dans votre projet de loi pour le maintien des approvisionnements, pouvez-vous assurera la population qu'il n'y aura pas de pénurie à la suite des conflits de travail qui sont présentement en cours dans les raffineries et quelles mesures allez-vous prendre pour nous assurer que la distribution va se faire, que la production va être maintenue s'il y a une extension du conflit de travail?

Vendredi, c'est la dernière journée que nous siégeons et s'il y a des mesures à prendre, c'est dans votre juridiction, de la même façon que vous avez pris des mesures un peu tardives dans l'affaire d'Hydro-Québec. Vous auriez pu les prendre il y a deux ou trois semaines; vous avez attendu que la situation devienne très difficile pour toute la population. Est-ce qu'on peut vous demander quelles mesures vous entendez prendre si le conflit de travail persiste et allez-vous agir avant l'ajournement de la Chambre et pouvez-vous assurer à la population qu'il n'y aura pas, en effet — parce que vous avez fait une déclaration il y a presque un mois, je pense, qu'il n'y aurait pas de pénurie de pétrole et d'huile à chauffage spécialement — est-ce que vous pouvez nous assurer encore aujourd'hui que, cet hiver, la population du Québec va avoir suffisamment de produits pétroliers et suffisamment d'huile à chauffage, spécialement dans la région de Montréal?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bérubé: Alors, deux questions. La première question, c'est: Que faisons-nous au Québec de cette sécurité qui nous vient d'Alberta sous forme de 60% de nos approvisionnements en pétrole? Je me demande si le député de Mont-Royal a vu, mais je suis convaincu qu'il les a vus, les chiffres de l'Office national de l'énergie concernant le pétrole de l'Alberta qui sera disponible pour exportation au Québec dans les années qui viennent. Est-ce qu'il a regardé l'accroissement de la demande en pétrole pour l'ensemble du Canada, la capacité de production en pétrole pour l'ensemble du Canada, tel que le prévoit l'Office national de l'énergie dans son dernier rapport de 1978 et qui montre très clairement que, dès 1983, il faut réduire de façon très significative les livraisons de pétrole sur le marché de Montréal et qu'en fait, d'ici 1985 à 1990, le Québec doit prendre son pétrole presque exclusivement à 80% ou 90% sur les marchés internationaux. En d'autres termes, l'existence du pétrole en Alberta n'est pas une garantie que vous en ayez.

D'ailleurs, lors de la conférence des ministres provinciaux de l'Energie, il a été souligné très clairement par l'Alberta que cette province ne pourrait pas, advenant une pénurie, fournir l'ensemble du Canada. Ce ne serait pas physiquement possible et il faudrait absolument trouver des moyens tels que le stockage pour prévenir une

pénurie potentielle au cas, par exemple, d'un cataclysme international.

Donc, première observation, première réponse, l'abondance de pétrole, c'est quelque chose de très temporaire. Vous savez, par exemple, qu'avant 1974, nous prenions notre pétrole entièrement sur les marchés mondiaux. Donc, depuis cinq ans, nous prenons une partie de notre pétrole, la moitié à 60%, sur le marché canadien, mais, d'ici 1985, à nouveau, nous serons essentiellement sur le marché international.

En d'autres termes, nous n'aurons profité du pétrole canadien que pendant une période de temps très restreinte. Est-ce que cet avantage dont nous avons bénéficié mérite que l'on sacrifie les droits des Québécois, leurs instruments de développement? Devrait-on s'en remettre à Ottawa pour assurer le développement du Québec simplement parce que, pendant une dizaine d'annés, nous avons profité de pétrole albertain?

Je dis non, M. le Président. Je pense que jamais un Allemand qui, pourtant, n'a pas de pétrole chez lui, n'accepterait de sacrifier sa souveraineté. Les Allemands préfèrent acheter leur pétrole sur les marchés arabes. Les Français font la même chose et je dois constater qu'il n'y a pas de pénurie de pétrole en Europe.

Il y a des surplus de production de pétrole présentement dans le monde. Il va y avoir le développement de la mer du Nord à partir de 1982. Déjà, les premiers puits ont commencé à produire. Ils seront en pleine production en 1982. Il y aura également une augmentation importante de la production mexicaine. On sait peut-être l'attachement que manifeste le Mexique pour un pays comme le Québec, qui est un pays latin aussi, où nous avons à partager une culture latine assez différente de la culture anglo-saxonne et qui nous rapproche quand même visiblement.

En d'autres termes, le gouvernement du Québec peut assez facilement, dans un Etat souverain, s'organiser pour négocier, comme le font les pays arabes, comme le font les pays européens, de pays à pays des livraisons. Cela peut vouloir dire, par exemple, de négocier avec l'Alberta en payant le prix réel, normal. Cela peut vouloir dire d'acheter du gaz naturel de l'Alberta, comme cela peut vouloir dire d'exporter des surplus électriques aux Etats-Unis à des prix extrêmement intéressants ou, sinon aux Etats-Unis, possiblement dans les Maritimes.

Lorsque nous proposons la souveraineté-association, nous respectons les échanges économiques normaux. Nous n'essayons pas d'obtenir des faveurs, parce que ce que nous savons, c'est que personne ne fait de faveur à personne et que, pendant une période très courte, vous pouvez peut-être amener quelqu'un à partager dans une période de crise, mais l'on sait qu'à long terme, les relations entre les hommes sont basées sur des échanges économiques normaux et que, comme ce sont ces échanges économiques normaux qui prévalent à l'intérieur même du Québec, on ne voit pas pourquoi ils ne devraient pas prévaloir à l'intérieur du Canada.

On ne voit pas pourquoi on ne doit pas favoriser un système politique différent. Je ne suis pas prêt à vendre le Québec pour quelques subventions qui auront rapporté au total à peu près $3 milliards au Québec sur une période de six ans: $3 milliards en six ans, c'est négligeable, parce que si nous avions en même temps à décider de mettre notre électricité au service du reste du Canada et accepter d'augmenter nos factures d'électricité de 25%, 30%, 40%, de manière que le coût moyen de l'électricité au Canada soit constant, savez-vous combien cela aurait coûté au Québec? Aussi cher que les subventions qu'on a eues en pétrole.

En d'autres termes, nous avons dit aux Alber-tains: Vous partagez votre pétrole, mais nous ne partageons pas notre électricité. Cela peut faire un temps, mais cela ne fait pas longtemps, ce qui fait que le jour où, en toute logique, et je ne contredis pas la logique du député de Mont-Royal, il peut très bien la poursuivre, sa logique nous amènerait à partager nos richesses naturelles. D'ailleurs, son chef l'a souligné, la cohérence de sa position politique concernant l'énergie l'amènerait lui aussi à partager les ressources hydroélectriques du Québec. Les ressources hydroélectriques du Québec vont durer 100, 200 ou 300 ans. (17 h 40)

Cela veut dire que si on avait un prix moyen pour le kilowatt au Canada, au Québec nous paierions notre électricité beaucoup plus cher de manière à subventionner les autres provinces qui, elles, ont de l'électricité qui leur coûte très cher. Dans ces conditions, je ne vois absolument pas pourquoi on accepterait de sacrifier de l'énergie électrique qui va durer des centaines d'années pour avoir du pétrole pendant dix ans.

M. Ciaccia: M. le Président.

M. Bérubé: C'est la première partie. Maintenant, que peut-on faire en cas de pénurie? Je dois vous signaler que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui m'indiquait ce matin les démarches en cours dans ce conflit, m'indiquait qu'il y avait les ressources de son ministère qui se tenaient prêtes à tout moment pour intervenir. C'est un problème de relations de travail. C'est bien évident que dans les relations de travail actuelles, à un moment donné, la population peut souffrir des inconvénients. On l'a vu dans le cas de la grève d'Hydro-Québec. Tant et aussi longtemps que nous avons estimé que les pannes étaient réparées à un rythme raisonnable et qu'il pouvait y avoir certes des inconvénients d'un certain nombre d'heures de manque d'électricité, mais que, d'une façon générale, les Québécois étaient approvisionnés en électricité, il n'y avait donc pas de situation dramatique, nous ne sommes pas intervenus. Lorsqu'il y a eu une situation dramatique, nous sommes intervenus.

Je pense que ce qu'il est important de se dire dans un cas comme celui-là, c'est que les gouvernements n'interviennent pas dans les conflits syndicaux d'une façon normale. En pratique, il

faut faire appel à la bonne foi non seulement des syndicats, mais également de l'entreprise. Il faut que l'entreprise se pose sérieusement la question de sa responsabilité vis-à-vis de l'approvisionnement en pétrole des citoyens québécois. Pour l'instant, on ne peut pas dire qu'on va manquer de pétrole puisque les rapports que nous obtenons et qui sont publics d'ailleurs, puisque les journalistes obtiennent les mêmes rapports, indiquent que le rythme de raffinage est suffisamment rapide actuellement pour qu'il n'y ait pas de problème de pénurie. Il ne semble pas y avoir eu de réduction dans la capacité de raffinage de pétrole au Québec.

Donc, il ne semble pas que les grèves aient un impact. Est-ce que les grèves pourront avoir un impact? Posons l'hypothèse d'un bris majeur dans une usine et qu'il faille faire rentrer les travailleurs. Je pense que c'est au syndicat et à l'entreprise à faire preuve de suffisamment de générosité pour prendre en considération le bien-être des citoyens. Une société, c'est basé sur une entente entre les citoyens. Lorsque des citoyens ne veulent pas respecter ce consensus, cette entente, il n'y a pas de société qui puisse survivre. Ce n'est pas le gouvernement du Québec, quel qu'il soit, qui va changer cela. Si les Québécois veulent l'éclatement de leur société, ils vont avoir l'éclatement de leur société. Si les Québécois pensent qu'au-delà de leur intérêt personnel, l'intérêt de la majorité doit prévaloir et qu'on est parfois prêt à faire certains sacrifices au nom de l'intérêt collectif, dans ces conditions, M. le Président, cette société devient viable. Ce que nous proposons aux Québécois, c'est exactement cela. C'est peut-être accepter que l'intérêt du peuple québécois passe avant un certain égoïsme de classe, un certain égoïsme de groupement d'intérêts, soit les uns soit les autres.

M. Ciaccia: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je ne veux pas étendre le débat. Nous avons déjà fait un débat sur certains aspects de la politique énergétique, mais il y a certains chiffres que je dois corriger. Je ne peux pas laisser passer certaines affirmations que le ministre de l'Energie et des Ressources vient de faire. Quand il a dit que nous avons eu seulement $3 milliards de bénéfices en six ans, c'est absolument faux. Les chiffres sont de $5 200 000 000 pour le pétrole. Si on ajoute les bénéfices sur le gaz naturel de 1974 à 1979, c'est $6 milliards.

Deuxième point, quand il cite le rapport de 1978 pour l'Office national de l'énergie, il omet totalement d'autres choses: premièrement, les découvertes nouvelles, la récupération de certains pétroles bruts maintenant, mais, plus important, il omet totalement les rapports et les développements des sables bitumineux. Il nous dit que dans dix ans, nous n'aurons plus de pétrole au Canada. C'est absolument faux, M. le Président.

D'après les chiffres de l'Office national de l'énergie, nous en aurions encore non seulement dans dix ans, mais les prévisions démontrent qu'avec le développement des sables bitumineux le Canada pourrait arriver à l'autosuffisance en 1995. Alors, essayer de créer une image totalement fausse des ressources énergétiques canadiennes qui nous appartiennent, je crois que c'est irresponsable de la part du ministre et que c'est seulement pour servir ses fins politiques, son idéologie politique. S'il veut citer des chiffres de l'Office national de l'énergie, qu'il les cite tous. S'il veut citer ces chiffres, qu'il cite aussi les objectifs du gouvernement actuel d'en arriver à l'autosuffisance pour 1990 et s'il veut se référer à la conférence qui a eu lieu à Québec sur l'économie de l'énergie, qu'il cite aussi les rapports qui ont été produits à cette conférence par M. Fraser par exemple, le président du Canadian Petroleum Association, qui a démontré que pour l'année 1995, d'après ses données il pourrait même y avoir un surplus d'énergie au Canada. Alors, je ne pense pas qu'on devrait essayer de vendre notre salade, comme le fait le ministre avec des représentations qui ne sont pas exactes.

Quant à la question des raffineries de l'Est, il est vrai que les Québécois doivent prendre conscience du genre de société dans laquelle ils veulent vivre. Ils ne veulent pas avoir une escalade des conflits au point où toute la population va en souffrir mais le gouvernement a le devoir de s'assurer que les services essentiels soient maintenus. Je suggère au gouvernement que c'est préférable de prévenir que de guérir parce qu'on voit ce qui s'est produit avec la grève d'Hydro. Il ne faudrait pas attendre que le désastre arrive. Je pense que, comme ministre de l'Energie, vous avez une responsabilité dans ce domaine pour nous assurer que les services essentiels soient maintenus. Je compte, parmi les services essentiels, l'électricité et l'approvisionnement d'un produit comme le mazout au Québec. C'est pour cette raison que je vous ai posé la question quant au conflit de travail dans les raffineries de l'Est.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que je puis appeler l'article 1 ?

M. Bérubé: Oui, M. le Président. M. Ciaccia: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Bérubé: Adopté. M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 2?

M. Bérubé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté, M. le député de Mont-Royal?

M. Ciaccia: Ces articles-ci sont ceux qui étaient soit dans la loi des terres et forêts, ou dans la loi des richesses naturelles. Ils sont maintenant inclus ici.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais il faut que je les fasse adopter un par un.

M. Ciaccia: Je comprends.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 2 est adopté.

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 3 est adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 4 est-il adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 5 est-il adopté?

M. Ciaccia: Oui, l'article 5 est adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 6 est-il adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 7 est-il adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 8 est-il adopté? M. le ministre.

M. Bérubé: Excusez-moi, j'ai mal lu. Je regardais un amendement mais on continue; c'est un peu plus loin.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 8 est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. L'article 9 est-il adopté?

M. Ciaccia: A l'article 9, il y a seulement une modification mineure quant aux personnes qui peuvent donner les copies conformes. Vous avez ajouté le personnel du ministère. Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 9 adopté. Article 10?

M. Ciaccia: Article 10, adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 11?

Dans l'article 11, le ministre a étendu les délais à six mois.

M. Bérubé: Oui, M. le Président. En fait, c'est compte tenu de l'expérience du passé qui démontre clairement que les rapports annuels des ministères sont presque toujours déposés dans les six mois, mais très souvent ne respectent pas la lettre de la loi actuelle. On a essayé de se fixer un objectif plus réaliste de manière qu'on puisse continuer, suivant la tradition, à les déposer le plus rapidement possible, mais, en même temps, ne pas, chaque fois, délibérément, presque violer la loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 11 adopté?

M. Ciaccia: Article 11, adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 12?

M. Ciaccia: A l'article 12...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... j'aurais préféré procéder alinéa par alinéa.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 12, paragraphe 1, adopté? Paragraphe 2?

M. Ciaccia: Un instant, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Adopté, alinéa 2.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alinéa 2 adopté. Alinéa 3? (17 h 50)

M. Ciaccia: M. le Président, le changement que le ministre fait à l'alinéa 3, c'est que dans la loi existante, le ministre a le pouvoir d'élaborer des programmes pour la mise en valeur, l'exploitation et la transformation au Québec avec l'autorisation du gouvernement et en collaboration avec d'autres ministères. Par l'alinéa 3 tel qu'il est rédigé maintenant, le ministre se donne ce pouvoir sans demander, sans avoir l'autorisation du gouvernement et sans référence à la collaboration avec d'autres ministères. Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer pourquoi il a enlevé cet aspect de l'article où il devait agir avec l'autorisation du gouvernement?

M. Bérubé: M. le Président, je suis en train de regarder les anciennes lois.

M. Ciaccia: Les pouvoirs énumérés à l'alinéa 3 sont assez larges. Vous dites: "L'élaboration et

l'exécution de plans et programmes pour la mise en valeur, l'exploitation et la transformation au Québec des ressources forestières, hydrauliques, minérales et énergétiques." Cela veut dire que vous pouvez faire des dépenses, des programmes, des mises en application qui sont assez larges. Il devrait y avoir au moins une contrainte que c'est le gouvernement qui l'autorise.

M. Bérubé: M. le Président, je pense qu'au moins une raison, c'est qu'il s'agit ici de donner les fonctions du ministre, les mandats du ministre. Ce dont parle le député de Mont-Royal, c'est plutôt à propos de conditions de l'exercice du mandat. C'est bien évident que le ministre des Terres et Forêts ou le ministre des Richesses naturelles ne peut pas dépenser des crédits de l'Assemblée nationale, sans qu'il y ait une série d'approbations, que ce soient des approbations du Conseil des ministres, du Conseil du trésor et toutes les politiques gouvernementales où il n'y a pas explicitement dans la loi une responsabilité simple du ministre, par exemple, dans l'émission de baux, de titres de propriété, le ministre se voit confier certaine latitude en vertu de règlements adoptés par le Conseil des ministres. Dans ces conditions, le ministre reçoit certains pouvoirs.

C'est bien évident que le fait de dire que les fonctions du ministre comprennent l'élaboration, l'exécution de plans de programme pour la mise en valeur, l'exploitation et la transformation au Québec des ressources forestières, hydrauliques, minérales et énergétiques, ne veut pas dire pour autant que le ministre n'est pas soumis aux contrôles gouvernementaux, aux contrôles légaux que l'Assemblée nationale peut choisir d'imposer.

Il n'y a pas vraiment de raison, si ce n'est que c'est évident.

M. Ciaccia: M. le Président, je pourrais suivre le raisonnement du ministre si l'article 12 parlait seulement des fonctions du ministre. Le ministre nous dit qu'on parle des fonctions et c'est dans ses fonctions tous les actes qu'il a stipulés au paragraphe 3.

Mais l'article 12 parle des fonctions et pouvoirs du ministre. Alors par implication ici on donne le pouvoir au ministre d'exécuter les plans et les programmes dans tous ces domaines, sans au moins un genre de restriction qu'il doit obtenir l'approbation. On sait qu'en effet il y a un certain budget qui est accordé, qui est voté par l'Assemblée nationale, mais il y a aussi des budgets supplémentaires. Il me semble que ce serait moins ambigu, ce serait une restriction qui serait plus claire si on disait, comme la loi actuelle le dit, il y a une raison pourquoi la loi actuelle a ces mots, "avec l'autorisation et en collaboration". On peut dire que c'est un voeu pieux mais au moins c'est une restriction. Cela donne des directives au ministre quant à la façon dont il doit se dégager de ses fonctions. L'article 3 est exhaustif.

M. Bérubé: En vertu du même principe, M. le député de Mont-Royal, on pourrait dire que les fonctions et pouvoirs du ministre comprennent la gestion et l'octroi des droits de propriétés d'usage. Voulez-vous dire que je n'ai pas besoin de l'approbation du gouvernement pour réaliser le paragraphe? Si je prends chacune des fonctions déjà prévues dans les paragraphes, on se rend bien compte qu'il n'y a pas de différence entre l'établissement de laboratoires de recherche... Prenons, par exemple l'article 2. "La gestion et l'octroi des droits de propriété et d'usage des terres du domaine public, sous réserve des pouvoirs qui peuvent être confiés à un autre ministre dans la mesure prévue par une loi ou un décret du gouvernement..." Est-ce que cela veut dire que je peux administrer les terres publiques sans que cela soit dans le cadre de politiques gouvernementales?

M. Ciaccia: Dans le cadre général de la politique gouvernementale, mais vous n'avez pas besoin d'y retourner pour vous faire autoriser par le cabinet, par le lieutenant-gouverneur en conseil. La réponse à votre première question est: Oui. D'après l'article 1, vous avez la gestion et l'octroi des droits de propriété et d'usage de ces ressources. C'est votre ministère qui a ce pouvoir. Naturellement, vous faites partie du gouvernement et, en général, vous allez agir de concert — je l'espère — avec vos collègues, mais il y a certains pouvoirs, certains droits qui vont au-delà de vos fonctions normales. Quand vous spécifiez, dans le paragraphe 3, tous les pouvoirs et fonctions inclus, je pense que cela va un peu loin et je pense que la restriction d'avoir l'autorisation du gouvernement, c'est le moins qu'on puisse demander.

M. Bérubé: II me semble qu'il y a maldonne. Je pense qu'on ne parle pas la même langue, sans blague. Il s'agit ici de dire quelles sont les fonctions du ministre, les fonctions et pouvoirs du ministre.

M. Ciaccia: Si vous ne parlez que des fonctions en enlevant le mot "pouvoirs" au début de l'article 12, je vais retirer mes commentaires et on va adopter l'article 3 tel qu'il est.

M. Bérubé: II est bien évident que parmi les pouvoirs du ministre, c'est de voir à l'exécution des plans et programmes mis en valeur pour l'exploitation, la transformation au Québec des richesses naturelles. Imaginons qu'il faille soumettre au Conseil des ministres toute décision à être prise par le ministre, en invoquant un article comme celui que vous suggérez, qu'il faudrait que tout plan, tout programme ayant trait à la mise en valeur soit soumis au Conseil des ministres. Cela voudrait dire que le Conseil des ministres devrait vérifier chacune des décisions du ministre et, évidemment, on engorgerait très rapidement le Conseil des ministres.

M. Ciaccia: Alors, divisez votre article 3, l'élaboration de plans. Vous pouvez faire des plans, mais quand cela vient à l'exécution...

M. Bérubé: C'est la même chose...

M. Ciaccia: ... parce que vous pourriez faire un plan qui impliquerait pas mal de conséquences au plan financier. On dit qu'avant de l'exécuter, ce plan, vous devez avoir l'autorisation du gouvernement. Pouvez-vous expliquer pourquoi, dans la loi actuelle, on a cette restriction? Est-ce que cela ne veut rien dire, d'après vous?

M. Bérubé: Comme on nous le dit à côté, c'est une vieille loi et ce n'est pas qu'on est obligé de traîner un vieil article dans une loi qui est modernisée. Vous n'avez pas d'équivalent. Prenons votre logique, au paragraphe 4, vous allez avoir l'établissement de laboratoires de recherche minéralogique, métallurgique, hydraulique, forestière et énergétique. Vous allez mettre également: Sous réserve d'approbation du gouvernement. La construction...

M. Ciaccia: Non, je ne le mettrai pas parce que c'est quelque chose qui est vraiment dans les fonctions normales de votre ministère. Mais ici, vous allez plus loin. Ici, l'article 3 vous donne des pouvoirs qui vont au-delà, qui sont plus larges, qui peuvent impliquer des sommes considérables. (78 heures)

M. Bérubé: Pas sans l'autorisation du gouvernement. Le député de Bonaventure, qui est assis à vos côtés, par exemple, pourra témoigner qu'il n'est pas possible pour un ministre de dépenser des sommes sans que ces sommes soient dans le cadre d'un programme déjà approuvé. D'abord, il faut que les sommes aient été prévues à l'Assemblée nationale, d'une part. D'autre part, il faut soumettre les demandes appropriées au Conseil du trésor, qui doit à nouveau les approuver. Et lorsque les dépenses envisagées par le ministre ne cadrent pas avec des programmes autorisés, elles doivent faire l'objet d'une approbation directe par le Conseil des ministres. En d'autres termes, il y a des étapes de contrôle à l'intérieur d'un gouvernement. Mais le sens qu'on pourrait donner, par exemple, à votre intervention, advenant un plan d'aménagement, pour la forêt du nord-ouest, d'une unité de gestion, c'est qu'il faudrait, à votre avis, que ce plan soit soumis au Conseil des ministres. Je devrais, à ce moment, submerger littéralement le Conseil des ministres chaque fois qu'un administrateur en région prépare un plan d'aménagement qui n'est même pas soumis à mon attention, les trois quarts du temps, puisque ce sont des décisions internes au ministère.

En d'autres termes, si je n'ai plus le pouvoir d'élaborer un plan de gestion d'une forêt, mon administrateur régional, qui a cette tâche de préparer un plan de gestion, devra nécessairement le soumettre au ministre, qui devra le soumettre au Conseil des ministres. Si on veut un contrôle du Conseil des ministres sur l'élaboration, sur l'exécution de plans et programmes pour la mise en valeur, par exemple, des richesses forestières, cela veut dire qu'il n'y a plus aucun fonctionnaire en région qui est en mesure de planifier sa gestion quotidienne et la gestion des coupes.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, M. le député de Mont-Royal.

M. Chevrette: Mme la Présidente, est-ce qu'on pourrait demander aux deux Oppositions, d'un commun accord, de dépasser le temps prévu, parce que le leader du gouvernement a annoncé qu'on ne siégeait pas ce soir? Théoriquement, on devait terminer à 18 heures. D'un commun accord, est-ce qu'on peut terminer ce projet de loi?

La Présidente (Mme Cuerrier): Est-ce qu'il y a consentement?

Une Voix: Oui.

M. Brochu: Mme la Présidente, je serais prêt à donner mon consentement, mais sous réserve quand même. J'aimerais savoir si l'Opposition officielle a beaucoup d'amendements ou de discussions sur le projet de loi. En ce qui me concerne, j'ai des engagements, j'aimerais savoir un peu jusqu'à quelle heure cela peut nous amener.

M. Ciaccia: Non, nous n'avons pas tellement d'amendements.

M. Brochu: D'accord.

La Présidente (Mme Cuerrier): II y a consentement à la poursuite des travaux. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Nous ne ferons pas un débat acharné là-dessus. Pour répondre au ministre, l'autorisation que je demandais, ce n'était pas pour élaborer les programmes, c'était pour l'exécution de ces programmes. Cela n'affectait pas l'administration de votre ministère; cela affectait seulement la question de la mise en application...

La Présidente (Mme Cuerrier): Article 12.3. Oh! Pardon. Je pensais que vous aviez terminé, M. le député.

M. Ciaccia: ... de l'exploitation et de tous les autres sujets qui sont inclus dans l'article 3, excepté l'élaboration des programmes. Si vous insistez, c'est une suggestion que nous vous faisons. C'est quelque chose que nous aurions préféré avoir inclus, maintenu, de la même façon que la loi se trouve présentement. La seule raison que vous nous donnez, c'est que c'est une vieille loi. Ce n'est pas vraiment une raison en soi qui est assez valable. Si vous nous aviez donné une autre raison de substance sur le fond... Nous sommes limités dans le temps. J'ai fait cette remarque au début. Nous aurions préféré que ce projet de loi soit introduit plus tôt dans la session, parce que nous aurions pu faire d'autres commentaires. C'est une suggestion que je fais. Si le ministre ne veut pas l'accepter...

M. Bérubé: Mme la Présidente, je pense...

La Présidente (Mme Cuerrier): Article 12.3, adopté?

M. Bérubé: Je préférerais ne pas l'accepter pour la raison très simple que, présentement, cet article n'existe pas dans la Loi des Richesses naturelles. Il existe, et vous y faites mention, dans la Loi des terres et forêts, mais il n'est pas appliqué, en ce sens que tout programme mis sur pied par l'administration, qui n'a pas d'incidences budgétaires autres que celles prévues dans les programmes approuvés par l'Assemblée nationale ou approuvés par le Conseil des ministres, présentement, n'est pas soumis au Conseil des ministres. Présentement, on ne peut pas parler d'une application stricte de cet article. Il n'a jamais été appliqué, d'ailleurs.

M. Ciaccia: Dans la Loi des richesses naturelles, il existe, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil, alors cela se trouve dans la Loi des terres et forêts, mais cela se trouve aussi dans la Loi des richesses naturelles.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12, troisièmement adopté.

M. Ciaccia: Troisièmement, adopté sur division.

La Présidente (Mme Cuerrier): Sur division, adopté.

Article 12, quatrièmement, adopté?

M. Ciaccia: Un instant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le libellé, dans quatrièmement, ne se réfère pas à des laboratoires dans l'entreprise privée. Référence X est faite dans la loi actuelle, non seulement aux laboratoires que le gouvernement pourrait instaurer, mais aussi à la stimulation et à l'encouragement de laboratoires dans l'entreprise privée. Nous aurions une suggestion à faire au ministre, qu'on se réfère non seulement aux activités du gouvernement, mais qu'on se réfère aussi aux laboratoires privés, qu'on donne une stimulation. La façon dont vous l'avez ici: l'établissement de laboratoires de recherche minéralogique, métallurgique, hydraulique forestière et énergétique, cela peut être interprété, vous pouvez l'interpréter et vous gardez la discrétion. Vous pouvez dire que les laboratoires sont pour les seules fins du gouvernement. Alors, on pourrait ajouter, à la fin: "et ce pour les laboratoires privés et gouvernementaux".

M. Bérubé: L'amendement...

M. Ciaccia: A quatrièmement.

M. Bérubé: ... se lirait...

M. Ciaccia: Et ce pour...

M. Bérubé: ... "Et ce pour l'établissement de laboratoires de recherche minéralogique, métallurgique, hydraulique, forestière et énergétique. "

M. Ciaccia: "Et ce, pour les laboratoires privés et gouvernementaux."

M. Bérubé: Vous voulez dire que vous voulez donner...

M. Ciaccia: Actuellement on voudrait dire...

M. Bérubé: Vous voulez donner au ministre le pouvoir de créer des laboratoires privés dans ces domaines, sans même l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil?

M. Giasson: Des laboratoires privés, Mme la Présidente, il pourrait y avoir des plans ou des programmes de stimulation vers le développement de laboratoires privés.

M. Bérubé: Est-ce que la Loi de l'administration financière ne permet pas à n'importe quel ministère d'accorder des subventions?

M. Giasson: II peut confier des mandats de recherche pratique à des organismes qui ne sont pas nécessairement des organismes reliés directement au gouvernement. Ecoutez, présentement, il se fait certainement de la recherche au plan énergétique. On parle d'énergie nouvelle, d'énergie douce. Sans doute qu'au Québec, même si ce n'est pas le ministère de l'Energie qui conduit ces recherches ou ces développements, le ministère a dû confier, soit à Hydro-Québec, soit à des centres de recherche ou à quelques organismes, que sais-je, des programmes, c'est-à-dire un mandat pour travailler sur des programmes de recherche et de développement d'énergie nouvelle.

M. Bérubé: C'est pour cela, qu'au paragraphe trois, lorsqu'on parle de l'exécution de plans, de programmes, pour la mise en valeur, l'exploitation et la transformation, évidemment, cela suppose que le ministère peut donner des contrats de recherche pour le développement de nouveaux procédés, de techniques d'abattage ou, encore, dans le domaine de l'entomologie, et le paragraphe 3 de l'article prévoit déjà ce pouvoir au ministre. Mais, à l'article 4, il s'agit de donner un pouvoir de plus au ministre: soit celui de créer des laboratoires. Je doute que le ministre puisse créer des laboratoires à caractère privé. Il peut subventionner...

M. Giasson: Stimuler, mais ne pas créer.

M. Bérubé: Oui, en vertu de la Loi de l'administration financière et dans le cadre d'un budget approuvé par l'Assemblée nationale, certes, le ministre peut subventionner un laboratoire privé.

M. Giasson: Seulement cela.

M. Ciaccia: Alors, vous pourriez inclure dans l'article quatre "l'établissement et la stimulation",

l'obligation du ministre de stimuler la création de ces laboratoires.

M. Bérubé: Est-ce que cela tient bien à coeur à l'Opposition? Dans ce cas-là, je suis prêt à faire analyser votre amendement par les conseillers juridiques du gouvernement pour être sûr que cela veut dire quelque chose et que c'est significatif. (18 h 10)

La Présidente (Mme Cuerrier): Est-ce que je comprends qu'il faut suspendre le quatrièmement de l'article 12 ou si cet amendement...

M. Ciaccia: Non, Mme la Présidente, on ne veut pas suspendre l'article.

La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, nous pourrions peut-être voter sur l'amendement. M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Ce qu'on peut faire, Mme la Présidente, c'est que le ministre offre de faire étudier cet amendement et, si mon collègue désire qu'il en soit ainsi, nous pourrions adopter l'article, faire rapport, mais, rendu à la troisième lecture, la garder pour demain. Si le ministre est d'accord, on fait simplement une motion pour les écritures pour retourner en commission et on revient. Cela dure une minute ou trente secondes de plus. Si les conseillers du ministre ont de bonnes raisons de ne pas encourager cet amendement, on n'en parlera plus.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12, quatrièmement, adopté.

M. Giasson: Quatrièmement, Mme la Présidente, dans l'ancienne loi, il y avait une définition des fonctions attribuées au laboratoire. Je crois que cela n'apparaît plus.

M. Bérubé: Cela a été simplifié.

M. Giasson: Serait-ce qu'il y aurait possibilité d'avoir des fonctions plus étendues que celles qu'avaient traditionnellement lesdits laboratoires?

M. Bérubé: J'ai la Loi sur le ministère des Terres et Forêts devant moi, mais je n'ai pas la Loi sur le ministère des Richesses naturelles, et comme...

M. Giasson: C'étaient surtout des laboratoires sur la recherche minéralogique et métallurgique dans l'ancienne Loi du ministère des Richesses naturelles. Du côté des Terres et Forêts, je ne crois pas qu'il y ait de mention de tels laboratoires.

M. Bérubé: On va continuer et quand nous aurons...

La Présidente (Mme Cuerrier): ... cinquièmement. Sixièmement, adopté?

M. Giasson: Adopté.

M. Ciaccia: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Cinquièmement, adopté. Sixièmement?

M. Giasson: Sixièmement, on a modifié quelque peu le contenu de la Loi sur le ministère des Terres et Forêts qui mentionnait, en plus du nouveau libellé, la surveillance de l'utilisation des richesses forestières. Mais je crois que l'aménagement, la conservation et l'amélioration peuvent comprendre, de façon génétique, la surveillance de l'utilisation.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté? M. Ciaccia: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Septièmement.

M. Giasson: Septièmement, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Cela va. Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Huitièmement.

M. Bérubé: A huitièmement, Mme la Présidente, j'aurais un amendement pour rendre cela un peu plus complet. Nous dirions...

La Présidente (Mme Cuerrier): A l'article 12, huitièmement, vous aviez un amendement.

M. Bérubé: Mme la Présidente, le nouvel article se lirait ainsi: "L'établissement et la gérance de la cartographie et des réseaux géodésiques officiels du Québec et l'intégration des arpentages et de la cartographie effectués par le gouvernement du Québec." En effet, depuis déjà plusieurs années, au gouvernement, on se rend compte qu'il existe un certain gaspillage des fonds publics dans la mesure où plusieurs ministères s'engagent dans ces travaux de cartographie et de levées géodésiques, d'établissements de repères géodésiques qui ne sont pas faits suivant certains standards qui permettraient à d'autres ministères, éventuellement, de pouvoir les réutiliser, ce qui fait que l'information géodésique est d'une qualité médiocre et, à la longue, finit par coûter cher à la collectivité.

Il apparaît donc important, à la lumière d'ailleurs d'un programme de cartographie auquel nous travaillons présentement, d'insister sur la gérance des réseaux géodésiques officiels et l'intégration des arpentages et de la cartographie effectués pour le gouvernement du Québec de manière que l'information, par exemple lors de travaux géodésiques applicables à la construction d'une route, soit sous une forme éventuellement

réutilisable par un autre usager qui voudrait utiliser l'information géodésique de base à d'autres fins alors que, présentement, très fréquemment, l'établissement de repères géodésiques n'est faite qu'aux fins précises du projet en question et que l'information est sous une forme qui est parfois impossible à utiliser d'une autre façon.

Le Conseil du trésor, depuis plusieurs années en fait, je dois le dire, travaillait à l'élaboration d'une politique un peu plus standardisée de cartographie de manière à minimiser les coûts de cartographie à l'Etat. A la suite de cette préoccupation du Conseil du trésor, le ministère des Terres et Forêts a repris l'analyse et on s'en vient assez rapidement au Québec vers une politique un peu intégrée en cartographie.

M. Giasson: Mais, si je comprends bien, Mme la Présidente, cela ne suppose pas que, dorénavant, ces pouvoirs seront réservés exclusivement au ministère de l'Energie et des Ressources. Ce que je veux dire par là, si, dans l'avenir, le ministère des Transports, entres autres, qui doit assumer la construction et le développement du réseau routier, a besoin d'un relevé géodésique, est-ce qu'il ne pourra plus continuer d'être meneur de jeu dans cette partie de l'exécution? Il devra donc nécessairement procéder par le nouveau ministère de l'Energie et des Ressources ou est-ce tout simplement un mandat d'uniformisation qu'aurant le nouveau ministère vis-à-vis de tous les autres ministères?

M. Bérubé: L'article, tel qu'il se lirait, dirait que les pouvoirs du ministre comprennent l'intégration des arpentages et de la cartographie effectués pour le gouvernement du Québec. En d'autres termes, le ministère des Terres et Forêts devrait — ou le ministère de l'Energie et des Ressources maintenant — voir à l'établissement de standards...

La Présidente (Mme Cuerrier): La motion d'amendement vise à remplacer le paragraphe 8 de l'article 12 par un nouveau paragraphe 8 qui se lirait: "L'établissement de l'assurance de la cartographie et des réseaux géodésiques du Québec et l'intégration des arpentages et de la cartographie effectués par le gouvernement du Québec". Cet amendement sera-t-il adopté?

M. Giasson: Adopté, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Paragraphe 9 adopté?

M. Giasson: Adopté.

M. Bérubé: Mme la Présidente, est-ce que nous pourrions revenir maintenant aux questions qui étaient posées concernant les laboratoires de recherche que le député de Montmagny-L'Islet avait soulevées, parce que j'ai maintenant devant moi le texte de la loi. On peut peut-être poursuivre?

M. Giasson: Pour quel alinéa?

M. Bérubé: L'alinéa no 4 parlant de l'établissement de laboratoires de recherche.

M. Giasson: Laboratoires, d'accord, qu'on retrouvait dans la Loi des Richesses naturelles, et je ne suis pas certain qu'on retrouverait cela dans la Loi des Terres et Forêts. C'est le pouvoir d'établir des laboratoires.

,M. Bérubé: Pas dans la Loi des Terres et Forêts vous avez raison.

M. Giasson: Uniquement dans la Loi des Richesses naturelles.

La Présidente (Mme Cuerrier): Cela va? Le paragraphe 9 étant adopté, le paragraphe 10 de l'article 12 est-il adopté? Paragraphe 10?

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi c'est un pouvoir du ministre et pas un pouvoir du gouvernement? Par exemple, au début de ce projet de loi, vous dites: "Le gouvernement nomme un sous-ministre". Ce n'est pas le ministre qui nomme le sous-ministre. (18 h 20)

II y a une distinction faite entre les pouvoirs du ministre dans le projet de loi et les pouvoirs du gouvernement. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi cela doit être le ministre qui a comme pouvoir la définition, le maintien et le respect de l'intégrité territoriale du Québec? Est-ce que le ministre tient à nous expliquer ce que cela veut dire et nous donner une explication de cet article?

M. Bérubé: Vous voulez une explication de l'article?

M. Ciaccia: Une explication de l'article. M. Bérubé: Ah! Excusez-moi.

M. Giasson: Qu'est-ce que vous entendez plutôt par la définition de l'intégrité territoriale?

M. Bérubé: Je pense que l'Opposition se souviendra qu'elle avait elle-même mis sur pied une commission — la commission dite Dorion — laquelle s'est engagée dans une longue réflexion sur l'intégrité territoriale au Québec et d'ailleurs, en début de mandat, je devais déposer à l'Assemblée nationale même ce rapport de la commission Dorion.

A la suite de ce rapport, le gouvernement libéral de l'époque, en 1971, devait créer un service de l'intégrité territoriale qui est présentement intégré au ministère des Terres et Forêts et qui, depuis ce temps, s'occupe des problèmes de frontières du Québec. Par exemple, depuis quelques mois déjà, nous sommes en négociation avec le . gouvernement de l'Ontario pour tenter de

clarifier la frontière entre l'Ontario et le Québec dans la région des Mille-Iles. C'est à ce service de l'intégrité territoriale que l'on réfère, de la même façon que le problème de l'extension des juridictions territoriales du Québec dans les eaux côtiè-res, par exemple, est un problème qui relève de ce service de l'intégrité territoriale. Comme il s'agissait d'une préoccupation qui n'existait pas au moment de la préparation de l'ancienne Loi sur le ministère des Terres et Forêts, la seule chose que nous faisons dans cet article, c'est que nous inscrivons dans la loi la volonté manifestée par le gouvernement libéral, en 1971, de confier au ministre des Terres et Forêts le soin de défendre l'intégrité territoriale du Québec.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 10, adopté.

M. Ciaccia: Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi c'est le ministre et ce n'est pas une fonction du gouvernement de définir... Vous ne voulez pas vous attribuer à vous tout seul le pouvoir de définir l'intégrité territoriale du Québec, et même d'obtenir le maintien et le respect, il me semble?

M. Giasson: Le respect, cela irait bien dans les pouvoirs et les fonctions du ministre, mais je crois que la définition, cela serait plus logique de retrouver cela entre les mains de l'Etat.

M. Bérubé: Je pense que je suis d'accord avec votre position là-dessus. Effectivement, la définition de l'intégrité territoriale par un ministre m'apparaît un peu préjuger de son pouvoir.

M. Giasson: C'est abusif un peu.

M. Bérubé: Légèrement. On pourrait amender le paragraphe en question en ayant les mots "la définition".

M. Giasson: C'est cela.

La Présidente (Mme Cuerrier): Est-ce que l'amendement serait adopté?

M. Giasson: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Voulez-vous me rappeler qui a fait l'amendement, s'il vous plaît?

M. Giasson: Le ministre a parrainé l'amendement à la suggestion de l'Opposition officielle.

La Présidente (Mme Cuerrier): Paragraphe 10, article 12, adopté tel qu'amendé?

M. Bérubé: Adopté.

M. Giasson: Un instant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Un instant. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: C'est qu'on fait une modification dans la définition de la fonction accordée au ministre. C'est que dans l'ancienne loi...

M. Bérubé: On fait l'article 11.

M. Giasson: On est à l'article 11? C'est adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 11 est adopté. L'article 12?

M. Ciaccia: L'article 12, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le ministre peut-il nous expliquer pourquoi il a enlevé, dans l'ancienne loi, les mots "où il est économiquement possible de les aménager"? Il se donne le pouvoir d'accélérer l'expansion d'Hydro-Québec, sans référence du tout au développement économique de ces projets. Nous préférions maintenir la loi, telle qu'elle l'est.

M. Bérubé: Aucune objection, Mme la Présidente.

M. Ciaccia: On proposerait un amendement: d'ajouter à la fin du paragraphe 12 "Partout où il est économiquement possible de les aménager.

M. Bérubé: Mme la Présidente, je voudrais saisir la substantifique moëlle de cet amendement. Posons l'hypothèse que nous aurions une rivière aménageable à un coût de $0.04 le kilowatt et que nous aurions la possibilité de construire une centrale nucléaire à $0.03 le kilowatt. La décision économique, c'est de construire une centrale nucléaire, si les seuls critères doivent être des critères économiques. Je devrais considérer, à.ce moment-là, que cette rivière, n'étant pas économiquement aménageable, étant donné qu'elle coûte plus cher que le nucléaire, je devrais donc ne favoriser que le nucléaire, tant et aussi longtemps que le nucléaire est bon marché. En d'autres termes, ne doit-il y avoir que des considérations économiques dans la décision?

M. Ciaccia: Mme la Présidente, cet article va plus loin que cela. Je vais vous en donner un autre exemple: le projet Archipel, le projet des rapides Lachine. S'il ne peut pas se développer d'une façon économique, on ne voudrait pas que le gouvernement décide de le développer pour d'autres raisons, politiques ou autres.

M. Bérubé: L'expérience que vous avez avec la Baie James vous rend prudent.

M. Ciaccia: Non, la Baie James est très économique.

M. Giasson: C'est très économique, la Baie James. Plus économique que d'autres développements hydrauliques qu'on va faire.

M. Bérubé: Mais dois-je vous souligner que si on s'était engagé dans la construction de MBR...

M. Ciaccia: On ne dit pas "économiquement" nécessairement par rapport à d'autres... C'est "économiquement" sur ce projet et si les taux d'électricité permettent le développement dans votre tarification, même si une autre forme peut être moins chère cela ne veut pas dire que l'exemple que vous nous avez donné n'est pas nécessairement économique. Cela peut être économique pour le développement de l'Hydro, pour la tarification et le montant que vous ne pouvez pas recevoir par les tarifs.

M. Bérubé: La problématique est exactement la même, Mme la Présidente. Lorsqu'on dit "où il est économiquement possible de les aménager", c'est une évidence en soi. Lorsque le gouvernement libéral, sous M. Bourassa, s'est engagé dans le développement de la Baie James, on parlait de la Baie James. Mais à cette époque, on parlait de Nottaway, Broadback, Rupert. Il s'est avéré que Nottaway, Broadback, Rupert coûtaient plus cher et coûtent toujours plus cher que le nucléaire. Cependant, à l'époque, on pouvait parler d'une décision tout à fait discutable. Le gouvernement, néanmoins, a demandé à Hydro-Québec de s'engager dans le projet Nottaway-Broadback-Rupert. Ce n'est qu'après avoir complété les études, qu'Hydro-Québec a pu découvrir un autre projet qui est La Grande, meilleur marché que le projet Nottaway-Broadback-Rupert et finalement, produire de l'électricité à un coût moindre que ce qui était prévisible.

Donc, il n'y a pas eu que des critères économiques qui ont amené l'ancien gouvernement à prendre la décision d'aller à la Baie James. Il y a eu des critères politiques. De la même façon et prenons le projet Archipel. Nous n'avons pas les études. On ne peut donc pas parler d'un projet réalisable et nous ne sommes pas prêts à faire des annonces quant à ce projet. Posons l'hypothèse, cependant, que le projet Archipel soit 10% plus cher qu'un projet comparable dans le Nord. Il n'est pas du tout impossible qu'un gouvernement, quel qu'il soit, se dise: Pourquoi attendre cinq ans de plus pour s'engager dans ce projet et ne pas le faire tout de suite? Ce qui va permettre de stimuler, par exemple, la construction dans la région de Montréal. Posons l'hypothèse. Dans ces conditions, même si le projet Archipel s'avérait légèrement plus coûteux, donc suivant les termes, non-économique, parce que la définition d'économique, c'est toujours: Est-ce que la production d'électricité est concurrentielle? Or, il ne fait aucun doute qu'il y a plus que des critères économiques dans une prise de décision comme celle-là. (18 h 30)

Ce que l'Opposition a à l'esprit, c'est qu ils disent qu'il ne faut pas que cela coûte les yeux de la tête. Il ne s'agirait pas de produire de l'électricité qui nous coûterait $500 du kilowatt, mais là, c'est tellement évident que...

M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, si le ministre me le permet, nous avons voulu coopérer, comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant, mais nous nous apercevons qu'il est déjà 18 h 30 et, dans les circonstances, n'y aurait-il pas lieu que vous fassiez rapport tout en assurant le gouvernement que demain, nous pourrions procéder avec la plus grande diligence possible. Je pense que les discussions qui ont lieu présentement sont trop importantes pour que nous essayions de terminer d'une façon qui ne tienne pas réellement compte de l'intérêt public.

M. Bérubé: Vous pouvez faire rapport.

La Présidente (Mme Cuerrier): Si on fait rapport, il faudrait demander à monsieur de quitter le salon bleu.

M. le Président, je vous fais rapport que la commission plénière qui étudie présentement le projet de loi no 72 article par article n'a pas fini ses travaux et qu'elle vous demande la permission de siéger à nouveau.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quand siégera-t-elle? La prochaine séance?

M. Chevrette: Avec le consentement...

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le whip du gouvernement.

M. Chevrette: Avec le consentement de l'Opposition, est-ce que vous pourriez appeler la troisième lecture du projet de loi no 65?

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président.

Projet de loi no 65 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière) :

Or, j'appelle donc la troisième lecture du projet de loi no 65, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants. Est-ce que cette motion en troisième lecture sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Sur division.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, adopté sur division.

M. Chevrette: M. le Président, toujours avec le même consentement, est-ce qu'on pourrait appeler la troisième lecture du projet de loi no 68?

Projet de loi no 68 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'appelle donc la troisième lecture du projet de loi no 68, Loi modifiant de nouveau la Loi

concernant l'impôt sur la vente en détail et modifiant d'autres dispositions législatives. Est-ce que cette motion de troisième lecture sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, motion adoptée.

M. Chevrette: M. le Président, tout en rappelant qu'il y a des...

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le leader de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): Je ne sais pas si le leader par intérim du gouvernement serait d'accord pour que nous passions à l'article 42 et que nous puissions le faire disparaître du feuilleton. Hier, il y avait eu une demande pour que nous adoptions en troisième lecture le projet de loi no 70; j'avais, à ce moment, indiqué qu'il serait préférable d'attendre une autre journée. Nous serions disposés à l'adopter sans débat en troisième lecture.

M. Chevrette: Donc, M. le Président, avec le consentement de l'Opposition, qu'on appelle la troisième lecture du projet de loi no 70.

Projet de loi no 70 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, je prends acte du consentement et j'appelle donc en troisième lecture le projet de loi no 70, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières concernant le contrat de concession et de franchisage. Est-ce que cette motion en troisième lecture sera adoptée?

Une Voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. Levesque (Bonaventure): C'est bien l'article 42 et non pas la loi no 42?

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 42, le projet de loi no 70.

M. Chevrette: C'est la loi no 70.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est bien cela, M....

M. Levesque (Bonaventure): C'est la loi no 70, c'est bien cela.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est ce qu'on a fait. Alors, adopté. M. le whip du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, en rappelant qu'il y a trois commissions qui siègent demain matin et que ce soir, les commissions siègent également, je propose l'ajournement des travaux à 15 heures demain.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que cette motion sera adoptée?

Une Voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les travaux de l'Assemblée sont ajournés jusqu'à demain, 15 heures.

Fin de la séance à 18 h 35

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