L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 10 avril 1980 - Vol. 21 N° 104

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures quatorze minutes)

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Déclarations ministérielles. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Déclaration ministérielle

Politique de gestion des rivières à saumon

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, je désire informer cette Assemblée de la politique de gestion des rivières à saumon du Québec du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui vient compléter la politique d'accessibilité au patrimoine faunique national mise de l'avant par notre gouvernement.

Au moment de procéder à la mise en oeuvre de l'Opération gestion faune, en 1977, une double opération qui visait à abolir les clubs privés de chasse et de pêche et à confier la gestion d'un territoire, par ailleurs, accru aux citoyens du Québec, nous nous étions imposé un moratoire au sujet de nos rivières à saumon pour des raisons qui tenaient à la fragilité de cette espèce, aux problèmes de juridiction internationale posés par sa migration et aussi à la complexité des droits de propriété des clubs privés encore existants.

Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a profité des deux dernières années pour analyser en profondeur ce dossier, analyse dont je dégage cinq grandes orientations qui forment le cadre de ma politique sur le saumon. Ces cinq principes fondamentaux sont les suivants: 1. le gouvernement du Québec favorisera l'utilisation optimale de la ressource saumon là où elle se trouve sur le territoire; 2. le gouvernement du Québec verra à réaliser une meilleure répartition de cette ressource auprès des différents groupes d'utilisateurs; 3. le gouvernement du Québec assurera un plus grand accès possible au plus grand éventail possible de la population à ce loisir de choix; 4. le gouvernement du Québec verra également, tout au long de ce processus, à accroître la participation des Québécois et des Québécoises à la gestion et au développement de cette ressource qui a toujours été la nôtre sans, pour autant, que nous en ayons été les premiers et les principaux bénéficiaires.

Enfin, le gouvernement du Québec verra à augmenter les retombées économiques pour le milieu. Par ailleurs, et ce qui est non moins fondamental, la juridiction intergouvernementale et internationale du saumon qui relève du gouvernement fédéral m'a amené à définir, dans une lettre que j'adressais, en décembre 1979, à l'ex-ministre fédéral des Pêches, M. McGrath, la position du Québec en la matière. Nous posons comme principe de base que les saumons produits au Québec doivent être exploités prioritairement au Québec, le même principe valant pour les Maritimes. Ainsi, nous entendons accentuer nos pressions auprès du gouvernement fédéral pour qu'il défende au niveau international, par tous les leviers dont dispose un pays, le principe de la primauté du pays d'origine sur la récolte des saumons. M. le Président, il est bien entendu que nous serons prêts à assumer nous-mêmes cette responsabilité lorsque les Québécois et les Québécoises nous en donneront le mandat dans quelques semaines.

En vue de redonner aux citoyens du Québec la propriété de leurs ressources et de m'assurer de leur participation à la gestion de la ressource saumon, j'annonce la création de comités locaux d'aménagement des rivières à saumon du Québec. Ces comités locaux regrouperont un gestionnaire du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, un représentant des pêcheurs sportifs, un représentant des pêcheurs commerciaux, un représentant des détenteurs de droits de pêche et un représentant des autochtones, le cas échéant.

Au niveau de l'aménagement et de l'amélioration de notre ressource saumon, si vous voulez, j'annonce que, dès 1981, dans le cadre d'un projet pilote en Gaspésie, nous reverrons totalement l'exploitation sportive de façon à obtenir le nombre de reproducteurs requis pour une production maximale. Pour ce qui est de la Côte-Nord, nous lançons un programme de rattrapage pour acquérir, dans les plus brefs délais, un niveau minimal de connaissances scientifiques nécessaires à une gestion plus rationnelle de l'exploitation de la ressource saumon.

Concernant le développement du potentiel saumon, nos actions toucheront de manière différente à la fois la Gaspésie et la Côte-Nord et la région de Québec. En Gaspésie, nous consoliderons nos équipements sur les rivières Madeleine et Métis. D'autre part, nous réaffecterons en totalité la production de saumoneaux des piscicultures de Gaspé et de l'Anse-Pleureuse à quatre rivières particulières pour une période de six ans. Ces rivières sont les rivières Sainte-Anne, Cap-Chat, Petite Cascapédia et Petit Pabos. Sur la Côte-Nord, nous reprendrons nos opérations sur la rivière Escoumain et étudierons la possibilité de développer la rivière Portneuf. (14 h 20)

Enfin, nous appuyons le projet de restauration de la rivière Jacques-Cartier, tel que présenté par un comité de citoyens, et nous entendons bien leur apporter toute la collaboration nécessaire. Cette collaboration, M. le Président, est acquise à tout autre groupe qui voudrait remettre en valeur le potentiel de rivières à saumon de leur milieu, comme, par exemple, le cas de la rivière du Gouffre, dans le comté de Charlevoix.

Enfin, conformément aux engagements pris par mon gouvernement pour ce qui a trait à une

plus grande accessibilité au patrimoine faunique national du Québec, je suis heureux d'annoncer que, dès maintenant, j'abolis les rivières de certains clubs privés et que j'ouvre au public les rivières York, Grande Rivière, Grand Pabos et Bonaventure, en Gaspésie, et les rivières Sainte-Marguerite et Godbout, sur la Côte-Nord, afin d'offrir aux citoyens du Québec un peu plus de 3500 jours-homme de pêche supplémentaire.

En conclusion, M. le Président, j'ai longtemps rêvé du jour où les Québécois et Québécoises, propriétaires de leurs ressources fauniques, pourraient se réunir démocratiquement en assemblée afin de discuter, évaluer et améliorer la gestion de leur territoire et de leurs ressources. Ce n'est pas d'ailleurs d'aujourd'hui que je me préoccupe personnellement de chasse et de pêche. Né de parents libres dans une région aux grands espaces, j'ai commencé très jeune à aimer la nature, cette nature qui nous appartenait et dont nous respections les lois en vue d'en maintenir l'équilibre, et un jour, comme dirait Menaud, maître-draveur, les étrangers sont venus. Nous avons été dépossédés de notre patrimoine auquel nous avions accès depuis des générations et des générations au profit des autres. Je n'ai jamais accepté que près de 85% du territoire de chasse et de pêche accessibles au Québec soient contrôlés par 0,5% de la population. C'était la situation il y a à peine trois ans. Les Québécois et les Québécoises avaient été littéralement transformés en braconniers par obligation, mais, M. le Président, j'ai toujours été convaincu que, lorsque l'ensemble des Québécois et des Québécoises constateront que cette immense richesse faunique leur appartient maintenant, ils prendront les moyens nécessaires pour la préserver. Les Québécois réclamaient un changement et je suis heureux de leur annoncer que ce changement se poursuit encore aujourd'hui.

Le Vice-Président: M. le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: M. le Président, l'on comprendra qu'étant donné que cette déclaration ministérielle vient de nous être remise il n'y a que quelques minutes mes remarques seront peut-être brèves. Avant de faire ces quelques remarques, je voudrais dire qu'il m'est arrivé rarement d'entendre en Chambre une déclaration ministérielle sur un sujet donné qui est tellement teintée de nationalisme.

M. le Président, je pense que le Parti libéral souscrit aux principes qui sont énoncés dans la déclaration ministérielle, selon lesquels les Québécois peuvent obtenir davantage d'accessibilité à la ressource faunique. Je voudrais, par contre, dire au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qu'il ne faudrait pas qu'il imite son collègue qui sort présentement de la Chambre et qui était titulaire, en 1977, du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Dans la libération des clubs privés, je pense qu'il n'a pas pris les précautions qui s'imposaient, car, relativement à la création des ZEC et des ZAC, on constate actuellement que dans le Québec, s'il y a eu davantage d'accessibilité à la ressource faunique dans des territoires tels que le mien, tels que celui de mon collègue de Portneuf, dans tous ces territoires, il y a eu un laisser-aller n'assurant pas la protection requise pour que la ressource puisse se renouveler. Je pense que la plupart des journalistes sportifs qui ont suivi l'ensemble de cette opération peuvent témoigner que dans la libération de l'ensemble des lacs de la province de Québec, on n'a pas pris les précautions qui s'imposaient, et, aujourd'hui, on assiste à un épuisement très significatif de cette ressource.

M. le Président, le ministre devra éclairer la Chambre, dans sa réplique tantôt, sur les moyens qu'il prendra ou qu'il a déjà pris pour éliminer les clubs privés, en disant de quelle façon le gouvernement pourra se rendre possesseur de tous les terrains qui ne sont pas propriété de la couronne, qui sont terrains privés. Quand je fais référence à une rivière, la dernière qui a été nommée est la rivière du Gouffre. Je serais pleinement d'accord qu'à 60 milles de Québec les Québécois puissent pêcher du saumon, comme il s'en est d'ailleurs pris quelques dizaines l'an passé. J'aimerais que le ministre nous dise de quelle façon il entendra, sur l'ensemble des rivières à saumon, devenir propriétaire des terrains qui n'appartiennent pas à la couronne. Je pense que la Chambre mérite d'être éclairée à ce sujet.

Dans un alinéa, le ministre disait tantôt: "II est bien entendu que nous serons prêts à assumer nous-mêmes cette responsabilité lorsque les Québécois nous en donneront le mandat dans quelques semaines." Il fait référence à ce moment-là au verdict qui sera donné lors du référendum qui s'en vient. Je pense qu'il préjuge du verdict. Mais si cela devait arriver, ce serait plutôt un mandat de réaliser que demanderait le gouvernement dans son premier référendum et non pas un mandat de négocier. Cela fait suite un peu à une déclaration que j'entendais à la télévision de la part, je pense, du député de Kamouraska-Témiscouata qui nous disait que, dans quelques semaines, les députés fédéraux n'existeront plus pour le Québec.

M. le Président, je suis quand même heureux qu'on permette davantage d'accessibilité aux Québécois pour une pêche qui fut quand même, dans le passé, principalement réservée aux gens les mieux nantis de la société. Je dis au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche — je ne parle pas des rivières comme celles de la Basse-Côte-Nord qui sont bien connues des Québécois, ni de celles de la péninsule de la Gaspésie qui, également, sont connues, que ce soit Matane et d'autres — que le citoyen moyen du Québec doit quand même faire des dépenses importantes pour se rendre à des endroits aussi éloignés, et si des tentatives sont faites dans le bassin du Québec métropolitain pour faire en sorte que la rivière Jacques-Cartier, que la rivière du Gouffre et des rivières qui sont plus près des collectivités puissent être aménagées, tant mieux.

En terminant, je dirais ceci: Le titulaire vient de faire référence à un de mes éminents concitoyens, l'auteur de Menaud, maître-draveur; il fait sien un paragraphe de Menaud,maître-draveur. Je demanderais au titulaire, s'il veut bien invoquer la pensée de l'auteur pour appuyer sa déclaration ministérielle, de relire l'ensemble de l'oeuvre de celui qui écrivit Menaud, maître-draveur, l'abbé Félix-Antoine Savard; il s'apercevra peut-être qu'il n'arrive pas aux mêmes conclusions auxquelles vient d'arriver le ministre.

M. Lalonde: II est pour le non.

Le Vice-Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: M. le Président, je viens de prendre connaissance du texte en écoutant le ministre nous en faire la lecture. Evidemment, je n'ai pas à le blâmer parce que j'étais absent; je viens juste d'arriver ici, à l'Assemblée nationale. Je dois, jusqu'à un certain point, me réjouir de cette mesure quand on pense un peu à la région-pilote, à la région de la Gaspésie, quand on sait les abus déplorables qui se sont commis dans le passé, le braconnage, parce qu'en certaines circonstances la population a voulu se venger de certains clubs privés dont l'accès lui était tout à fait interdit. Mais si on veut, par des lois, penser un peu plus au citoyen moyen, je crois que le ministre devrait tenir compte de certaines choses. Si on veut en faciliter l'accessibilité à la population en général, il serait bon de prendre des mesures de sauvegarde, des mesures de sécurité afin qu'on ne s'aventure pas et qu'on n'ouvre pas la porte à un gaspillage éhonté.

Ce qui est important là-dedans — je pense bien que le ministre qui a vécu déjà au grand air a peut-être des expériences aussi d'autres personnes — c'est de faire l'éducation populaire de nos gens. Nos gens ne sont peut-être pas pires que ceux d'ailleurs, mais s'il y a un contrôle, s'il y a une éducation qui se fait, si nos gens réalisent que la pêche sportive au saumon, ce n'est pas éternel, et s'ils apportent leur collaboration, comme on vient de le mentionner dans la déclaration, grâce à un comité où les principaux intéressés devront en faire partie ou seront invités à en faire partie, je crois que nous pourrons éviter non seulement des abus, mais que nous pourrons intéresser ceux qui n'avaient aucun accès. (14 h 30)

Quand le ministre parle de la rivière York, en particulier, on sait que nos Gaspésiens, pour avoir accès à cette rivière, devaient passer par une ligne téléphonique et appeler directement à Québec. On sait que très peu de personnes au cours de la saison ont la chance de voir leur nom sur la liste. Je me réjouis donc de cette initiative et je souhaite au ministre tout le succès voulu dans cette opération. Nous sommes prêts à collaborer avec lui tout en l'incitant, encore une fois, à prendre les précautions nécessaires pour que cet héritage qui nous reste, ce patrimoine, ne soit pas dilapidé mais, au contrarie, qu'il puisse servir à toutes les autres générations de sportifs et d'autres personnes qui voudront l'utiliser. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre. M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, je suis quand même un peu surpris d'avoir la réaction du député de Charlevoix et je m'en réjouis, parce que j'avais été plutôt habitué à voir les députés libéraux protester lorsque nous redonnions certaines ressources aux citoyens québécois. Je n'ai pas besoin de vous rappeler leur non à l'assurance automobile, leur non au zonage agricole, leur non à une meilleure sécurité au travail, leur non au contrôle d'Asbestos Corporation et leur non à tout l'avenir du Québec, en somme.

M. le Président, le député de Charlevoix a quand même évoqué certains épouvantails à corneilles qu'on évoque continuellement lorsqu'on parle d'une meilleure accessibilité au territoire. Ces remarques, M. le Président, je les ai entendues à plusieurs reprises, que ce soit en 1965 lorsque je me suis battu à Forestville pour transformer le Forestville Fishing Club en association de chasse et pêche dont le territoire était géré par des citoyens et des citoyennens de la région. Aujourd'hui, M. le Président, le territoire de Forestville est l'un des meilleurs territoires de chasse et de pêche du Québec parce qu'il est géré par les citoyens du milieu.

Que ce soit aussi, M. le Président, en ce qui concerne la rivière Baie Trinité, on s'est battu en contestant des droits qui me paraissaient illégitimes, en tout cas, en ce qui me concerne, et qui étaient exclusivement réservés à des Américains, en vue de redonner ces droits aux Québécois et aux Québécoises. Aujourd'hui, je peux dire que la rivière Baie Trinité est actuellement l'une des meilleures rivières du Québec et des mieux administrées parce qu'elle est administrée par des citoyens du Québec.

M. le Président, il est certain que j'ai voulu, cette année, toucher essentiellement aux rivières qui n'étaient pas propriété privée, c'est-à-dire ce qu'on appelle le franc-alleu, parce que ceci aurait exigé des ressources considérables pour en faire l'expropriation. Pour le moment, j'ai voulu d'abord répondre à des besoins qui étaient exprimés par des citoyens et aussi à la demande par rapport à l'offre, de telle façon qu'au cours de l'année 1980-1981 nous analyserons ou nous tenterons de négocier avec des gens qui sont propriétaires privés de ces rivières pour en évaluer le coût et voir de quelle façon, par exemple, on pourra envisager une gestion plus ouverte au public du côté de ces rivières. Je pense à la rivière Cascapédia, par exemple, qui est une rivière très longue, et il serait difficile pour le gouvernement d'en prendre entièrement la responsabilité.

M. le Président, je suis heureux aujourd'hui de participer à la continuité qui avait été commencée par mon prédécesseur. En ce qui concerne les ZEC, contrairement — je suis prêt à le prouver si une motion était présentée à ce sujet — à tout ce qu'on dit, l'Opération gestion faune a été l'une des meilleures opérations du Québec, avec quelques inconvénients. Que voulez-vous? Il faut bien payer le tribut du fait qu'on a habitué des Québécois à être des braconniers. Lorsque les citoyens prennent...

Une Voix: ...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lessard: ... leurs choses en main, ils sont capables de s'administrer. La différence entre nous du Parti québécois et l'Opposition, c'est que nous croyons au Québec, aux Québécoises et aux Québécois. Nous croyons au sens des responsabilités des Québécois. C'est pourquoi, M. le Président, dans quelques semaines, par le mandat de négociation, nous pourrons leur donner non seulement les ressources fauniques, mais aussi leur territoire.

Le Vice-Président: Merci. Des Voix: Bravo!

Le Vice-Président: Dépôt de documents. M. le ministre de l'Agriculture.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Rapport annuel de la Commission administrative

des régimes d'assurance-stabilisation des

revenus agricoles du Québec

M. Garon: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1978...

Une Voix: ... déposer le président?

M. Garon:... de la Commission administrative des régimes d'assurance-stabilisation des revenus agricoles du Québec.

M. de Beliefeuille: M. le Président.

Le Vice-Président: Document déposé. M. le député de Deux-Montagnes.

M. Garon: M. le Président. Le Vice-Président: Allez-y!

Rapport annuel de la Régie des marchés agricoles du Québec

M. Garon: II me fait également plaisir, M. le Président, de déposer le rapport annuel 1978-1979 de la Régie des marchés agricoles du Québec.

Le Vice-Président: Merci! Documents déposés.

M. le député de Deux-Montagnes.

Pétition demandant de condamner le génocide du peuple arménien par la Turquie

M. de Bellefeuille: M. le Président, je désire déposer une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec à l'occasion du 65e anniversaire du génocide du peuple arménien par la Turquie, 24 avril 1915 — 24 avril 1980. Avec la permission de mes collègues, j'aimerais lire le texte de la requête, qui ne compte qu'une douzaine de lignes.

Le Vice-Président: Consentement.

M. de Bellefeuille: Le premier génocide des temps modernes a été perpétré par la Turquie lors de la première guerre mondiale, alors que 1 500 000 Arméniens ont été massacrés et 500 000 déportés par la force de leur terre ancestrale. Compte tenu de ce qui précède et attendu que les conventions de l'ONU condamnent le génocide comme étant un crime contre l'humanité;

Attendu que la Turquie n'a pas reconnu sa responsabilité par rapport à ce génocide et que justice n'a pas été faite;

Attendu qu'à cause de l'impunité de ce génocide et de l'apathie de la communauté internationale, ce premier génocide des temps modernes a permis que d'autres pays agissent de la même façon par rapport à d'autres populations, nous, les Québécois soussignés, à la veille du 65e anniversaire de ce génocide, demandons à notre Assemblée nationale de condamner ce génocide et de déclarer le 24 avril de chaque année jour de commémoration du génocide arménien. M. le Président, suivent plus de 10 000 signatures de Québécoises et de Québécois.

Le Vice-Président: Pétition déposée. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président.

M. Rivest: M. le Président, est-ce que le député de Deux-Montagnes a l'intention de soumettre une motion non annoncée à ce sujet-là, parce que mon collègue, la députée de L'Acadie, qui est également... Ah! c'est le ministre de l'Immigration qui la fera?

M. de Bellefeuille: Oui, M. le Président, je suis informé que le ministre de l'Immigration va présenter une motion tout à l'heure aux motions non annoncées.

Le Vice-Président: Très bien! M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président, à l'article "dépôt de document", j'aurai également un bref

texte! Le petit séminaire de Nicolet, dans les bureaux duquel sont abrités...

Le Vice-Président: Est-ce une pétition, M. le député?

M. Fontaine: Non, M. le Président, c'est un dépôt de document.

Le Vice-Président: Cela va prendre un consentement unanime des députés.

Des Voix: D'accord! Consentement! Le Vice-Président: Consentement.

Document réclamant la reconstruction du petit séminaire de Nicolet

M. Fontaine: Merci, M. le Président.

Le petit séminaire de Nicolet, dans les bureaux duquel sont abrités les services de l'Ecole de police de Québec, a été détruit en partie par le feu le 27 mars 1973. Depuis ce temps ou depuis sept ans, comme vous voulez, plusieurs groupements ont fait des pressions auprès des gouvernements pour qu'on reconstruise et répare ce monument historique. Jusqu'à maintenant, rien n'a été fait. Le Comité pour la reconstruction du petit séminaire de Nicolet, dont les représentants sont ici dans les galeries, me prie donc de déposer ce document qui rappelle cette situation déplorable, ainsi que trois dossiers plus complets pour les trois ministres responsables, soit le ministre des Travaux publics, le ministre des Affaires culturelles et le ministre de la Justice. De plus, M. le Président, j'invite, au nom du comité, les trois ministres en question à aller voir la maquette de cet édifice qui est exposée au petit musée ici à côté, laquelle maquette, M. le Président, sera ensuite transportée devant le bureau du ministre des Travaux publics pour qu'elle ait toujours devant les yeux cette triste image de la détérioration d'un de nos plus beaux monuments historiques.

Le Vice-Président: Document déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés. Projets de loi au nom du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article i) du feuilleton d'aujourd'hui, s'il vous plaît.

Projet de loi no 100 Première lecture

Le Vice-Président: Le ministre d'Etat à la Réforme électorale propose la première lecture du projet de loi no 100, Loi modifiant la Loi sur la consultation populaire.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, je le ferai au nom de mon collègue, si vous le permettez. Ce projet de loi, qui porte le numéro 100, vise à modifier la Loi sur la consultation populaire afin d'appliquer au référendum à venir la substance des dispositions contenues dans la nouvelle Loi électorale en ce qui concerne, premièrement, les personnes, à l'exclusion des détenus, qui peuvent voter par anticipation et la prestation d'un simple serment pour voter; deuxièmement, la manière de marquer le bulletin de vote. De plus, le projet précise l'application, dans le cas d'un référendum, des peines prévues par la Loi régissant le financement des partis politiques.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président: Adopté. M. Charron: Je vous prierais...

Le Vice-Président: Deuxième lecture, même séance, en vertu d'un ordre de l'Assemblée. (14 h 40)

M. Charron: C'est exact, M. le Président. L'article m) du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi no 98 Première lecture

Le Vice-Président: Le ministre de l'Education propose la première lecture du projet de loi no 98, Loi abrogeant la Loi concernant les techniciens diplômés et modifiant certaines dispositions législatives.

M. le ministre de l'Education.

M. Jacques-Yvan Morin M. Morin (Sauvé): M. le Président... Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Morin (Sauvé): ... le gouvernement est autorisé, en vertu du Code des professions, à constituer par lettres patentes toute corporation professionnelle groupant les personnes auxquelles, en vue de la protection du public, il juge nécessaire ou opportun d'attribuer un titre réservé. Le gouvernement s'apprête ainsi à constituer la Corporation professionnelle des technologues des sciences appliquées du Québec, laquelle sera assujettie au Code des professions. La constitution de cette corporation aura notamment pour effet de remplacer la Corporation des techniciens professionnels du Québec, corporation existante,

constituée en vertu de la Loi concernant les techniciens diplômés.

Le présent projet de loi a pour objet d'abroger cette loi et d'adopter les dispositions transitoires, les dispositions de concordance nécessaires au remplacement de l'ancienne corporation par la nouvelle corporation professionnelle assujettie au Code des professions. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Cette motion de première lecture sera-t-elle adoptée?

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période des questions orales des députés.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Commentaires du ministre de l'Energie

et des Ressources sur une injonction

émise par trois juges de la Cour d'appel

M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais beaucoup aujourd'hui continuer à poser des questions concernant l'incroyable trou de $500 000 000...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: ... que le gouvernement a laissé créer sous ses yeux depuis trois ans, mais étant donné qu'on n'a pas de réponse, de toute façon, et étant donné surtout qu'est survenu un événement très grave en commission parlementaire récemment où le ministre de l'Energie et des Ressources a accusé les juges Lajoie, Bernier et Montgomery de la Cour d'appel de s'être immiscés dans la politique en émettant, le 13 décembre dernier, une injonction interlocutoire... Le ministre aurait dit: Qu'un juge émette une injonction à l'égard d'une loi du Québec alors qu'il n'est pas élu est disgracieux. Il a ajouté, apparemment — je le cite d'après le journal, je n'ai pas le journal des Débats devant moi: "Dans ce cas, les juges ont agi en parlementaires en révoquant la loi. C'était pour protéger le gouvernement fédéral, puisqu'ils ont invoqué des arguments purement constitutionnels."

M. le Président, c'est la loi qui est l'institution démocratique suprême, pas les ministres. C'est le tribunal qui est le protecteur suprême de nos valeurs démocratiques et de droits individuels, pas les ministres.

Cette déclaration du ministre m'apparaît être dans la tradition de sabotage des institutions démocratiques que ce gouvernement poursuit. Cela constitue une ingérence aussi dans le pouvoir judiciaire.

Une Voix: Vous êtes donc bien nerveux.

M. Lalonde: M. le Président, lorsque l'arrogance et le mépris du pouvoir politique à l'égard des tribunaux préparent...

Le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député, vous connaissez notre règlement et je vous invite donc à adresser votre question au ministre, s'il vous plaît.

M. Lalonde: M. le Président, je termine mon préambule. Vous savez que c'est extrêmement important quand un ministre méprise le tribunal. L'arrogance et le mépris du pouvoir politique, M. le Président, à l'égard des tribunaux, préparent la disparition de nos valeurs démocratiques et de nos droits individuels. C'est très vrai. Soyez patients.

Je demande au vice-premier ministre, en l'absence du premier ministre et du ministre de la Justice, s'il a l'intention de dénoncer immédiatement de son siège l'attitude méprisante de son collègue à l'égard des juges pour rétablir, au moins en partie, la confiance indispensable qui doit exister, comme le juge en chef, l'honorable juge Jules Deschênes, l'a dit lors d'une critique à l'égard du pouvoir actuel, et je vais lire quelques passages, M. le Président. Il avait dit: "II est vain..." C'est extrêmement important, M. le Président.

Le Vice-Président: S'il vous plaît, je demande votre collaboration. C'est la première période de questions que je préside. C'est normal que la présidence ait une sorte d'initiation. Mais j'ai été actuellement assez initié, M. le député. Je vous invite à poser votre question.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai entièrement confiance en la collaboration que vous allez m'offrir. C'est une question extrêmement importante. Et je vous demande, non pas pour provoquer votre ire, mais simplement pour terminer mon préambule, de citer quelques passages de la déclaration du juge en chef, l'honorable Jules Deschênes, au mois de janvier.

M. Charron: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. Lalonde: II dit ceci: "II est vain d'espérer que le citoyen se soumette de bonne grâce à la justice si l'État lui donne l'exemple..."

M. Charron: J'invoque le règlement, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Sur une question de règlement. Vous savez très bien que le député a à la fois fait

son préambule et a même posé sa question. Dans l'ordre logique, nous sommes maintenant rendus à la réponse et c'est le vice-premier ministre, à qui le député a adressé sa question, qui est maintenant appelé à répondre.

Le préambule que voudrait maintenant faire le député de Marguerite-Bourgeoys, il aurait peut-être été mieux de choisir de le faire au départ.

M. Bérubé: Question de privilège.

Le Vice-Président: M. le ministre de l'Energie et des Ressources, sur une question de privilège.

M. Bérubé: M. le Président, avant de permettre au vice-premier ministre de répondre à la question, il serait peut-être bon pour moi de rétablir les faits, de manière à ce que celui-ci puisse, à ce moment-là, donner la réponse qui est nécessaire.

Effectivement, M. le Président, à une question du député de Mont-Royal qui prétendait, en commission parlementaire, que le gouvernement avait tous les pouvoirs pour exproprier la société Asbestos et que, si nous ne le faisions pas, c'est que nous manquions d'un vouloir politique et que ce n'étaient absolument pas des questions juridiques, j'ai été obligé de lui expliquer les motifs qui ont amené la Cour d'appel à émettre l'injonction. Je lui ai souligné d'ailleurs que le juge Montgomery avait jugé bon de traiter la loi d'arbitraire et de répugnante, en plein tribunal, ce qui m'est apparu, à moi, certainement un énoncé politique. Alors, je me suis dis: Si le juge, lui, peut faire de la politique, est-ce qu'un politicien peut faire des commentaires sur les juges?

Des Voix: Non, non.

M. Bérubé: Non, hein? Ah! bien, je regrette, j'ai au moins l'immunité parlementaire ici. Boni Alors, première observation. M. le Président, ceque j'ai dit, c'est ceci: J'ai dit le Code de procédure civile ne permet pas d'injonction contre la couronne. J'ai également dit qu'il existe...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement. Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaîtl M. Bérubé: Je rectifie les faits.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: Question de règlement. J'ai posé une question au vice-premier ministre. Si le ministre de l'Energie veut nier les citations que j'ai faites de son discours en commission parlementaire, qu'il le fasse, mais qu'il ne répète pas les propos méprisants qu'il a eus à l'égard des juges.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Très brièvement, M. le ministre, sur une question de privilège.

M. Bérubé: Sur ma question de privilège, M. le Président, toujours pour rectifier les faits. Donc, j'ai indiqué, d'une part, que le Code de procédure civile avait prévu les injonctions contre la couronne et les interdisait. Deuxièmement, j'ai indiqué également qu'une certaine jurisprudence permettant l'émission d'une injonction dans le cas de décisions de l'Exécutif existait également, dans le but de protéger ce Parlement qui, ayant adopté des lois dans un sens précis, peut s'opposer à ce que l'Exécutif les interprète d'une façon erronée. Donc, j'ai indiqué que la cour... et j'acceptais le principe de l'émission d'une injonction.

M. Raynauld: Question de règlement, M. le Président.

M. Bérubé: Cependant...

Le Vice-Président: M. le député d'Outremont, sur une question de règlement.

M. Raynauld: J'ai toujours compris qu'une question de privilège, c'était pour rectifier des faits. J'exige qu'il rectifie les faits. Il ne peut pas les rectifier, il n'y a même pas eu d'accusation encore.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Raynauld: II a cité des choses, alors, qu'il nous dise...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! En concluant, M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, je pense que ces faits que je viens d'énoncer sont extrêmement importants puisqu'ils sont beaucoup plus larges et donnent beaucoup plus l'étendue de ma pensée.

Et voilà, j'en arrive maintenant au troisième point. Là, j'ai émis une opinion personnelle, exactement dans le sens d'ailleurs où le député de Marguerite-Bourgeoys vient d'intervenir. Il m'est apparu à moi, que si cette Assemblée adoptait des lois, l'émission d'une injonction par une cour de justice allant à l'encontre d'une volonté clairement exprimée par le Parlement n'était pas acceptable. Lorsque nos lois sont inconstitutionnelles... (14 h 50)

Une Voix: Le respect des juges!

Une Voix: La législature!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

Une Voix: Hypocrite! Une Voix: Patroneux!

Une Voix: Vulgaire!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît, des deux côtés de la Chambre! S'il vous plaît, à l'ordre!

M. le ministre, je vous invite à conclure rapidement, s'il vous plaît.

M. Bérubé: Donc, M. le Président, lorsqu'une de nos lois s'avère inconstitutionnelle...

M. Lalonde: II y a quand même une limite, M. le Président!

Le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je sais que vous êtes patient, M. le Président, mais il y a des limites. Ce que vous permettez actuellement, ce n'est pas une question de privilège. Vous permettez un plaidoyer de justification de propos qu'il n'a même pas eu le coeur de renier ici. Est-ce que, oui ou non, vous avez dit ce que...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez peut-être raison. Il ne s'agit peut-être pas d'une question de privilège, mais, comme le ministre avait été mentionné dans votre question, je pensais que c'était une réponse normale et non pas une question de privilège de la part du ministre.

M. Bérubé: M. le Président... Le Vice-Président: En concluant.

M. Bérubé: ... ce que je rectifie, c'est exactement ce que j'ai dit ce matin en commission parlementaire et, à ce moment-là, le ministre pourra répondre. J'ai donc indiqué que, lorsque le Parlement adoptait une loi qui s'avérait inconstitutionnelle, ce Parlement se pliait à la décision de la cour. C'est ce que nous avons fait dans le cas de la loi 101. Nous avons amendé notre loi pour la rendre constitutionnelle, mais ce que j'ai dit, c'est que je n'acceptais pas personnellement, comme membre élu de cette Chambre, qu'une cour puisse décider d'adopter des lois au-dessus de cette Assemblée nationale qui est souveraine.

M. Lalonde: M. le Président...

M. Mailloux: C'est cela. Le pouvoir judiciaire vient de disparaître. Applaudissez à cela. Applaudissez à la disparition du pouvoir judiciaire!

Le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: C'est proprement répugnant d'entendre les applaudissements pour cette déclaration qui s'inspire du plus pur fascisme intellectuel qu'on ait entendu en cette Chambre.

M. Mailloux: L'abolition du pouvoir judiciaire!

M. Lalonde: Ma question...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde:... s'adresse donc au vice-premier ministre qui serait le doyen du gouvernement ici, en l'absence du premier ministre.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Etant donné que le ministre a récidivé et n'a pas démenti ce que j'ai dit tantôt en citant les propos qu'il a tenus — il les a, au contaire, confirmés — le vice-premier ministre a-t-il l'intention de dénoncer immédiatement de son siège l'attitude méprisante d'un membre du gouvernement à l'égard des tribunaux?

Le Vice-Président: M. le ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, le principe qui s'applique en l'occurrence est celui du respect des tribunaux et de l'application de leurs arrêts, surtout, lorsque ceux-ci sont devenus définitifs par la décision d'un tribunal d'appel quelconque. Toutefois, le respect des tribunaux et de leurs arrêts ne va pas jusqu'à forcer les citoyens à être d'accord avec les décisions qui sont rendues par les tribunaux.

M. le Président, on doit s'incliner devant les arrêts de nos tribunaux. C'est la règle démocratique. Or, je ne sache pas que mon collègue ait jamais prétendu le contraire. Au contraire, le gouvernement applique les arrêts des tribunaux, même ceux qui ne font pas son affaire, comme l'arrêt qui est intervenu à propos de l'un des chapitres de la Charte de la langue française.

On doit donc s'incliner devant les arrêts des tribunaux pour ce qui est de leur application, mais ce serait une nouveauté que de forcer les citoyens à être d'accord avec tout ce que disent les tribunaux. Dans nos facultés de droit, il ne se passe pas un jour sans que des professeurs dénoncent tel ou tel arrêt, parfois récent et quelquefois plus ancien. Tous ceux qui sont juristes dans cette salle le savent, M. le Président. On peut penser et on peut dire, en saine démocratie, qu'à son avis un tribunal s'est trompé. Je pense que c'est le droit le plus strict d'un citoyen.

Le Vice-Président: Une dernière question additionnelle, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Remarquez, M. le Président...

Des Voix: ...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde:... que c'est ma première question additionnelle. M. le Président, la tentative faiblarde du vice-premier ministre d'appuyer son collègue fait pitié. Je vais demander au vice-premier ministre s'il est d'accord avec trois petites déclarations que je vais prendre de la critique de l'attitude du pouvoir québécois à l'égard des tribunaux.

M. Morin (Sauvé): Avant même que le député dise quoi que ce soit, je voudrais m'assurer qu'il

ne tire pas des bribes hors du contexte. J'aurai recours à mon collègue, le ministre de l'Energie et des Ressources, pour m'assurer que les passages qu'il va nous citer correspondent bien à sa pensée.

M. Lalonde: Sûrement.

Le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Soyez vigilant comme vous l'avez fait pour le trou de $500 000 000.

Le Vice-Président: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Je cite un texte du juge Jules Deschênes.

M. Morin (Sauvé): M. le Président.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Je cite... M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député... S'il vous plaît!

M. le ministre de l'Education, sur une question de privilège.

M. Morin (Sauvé): Je pense que je n'ai aucune leçon à recevoir de l'ex-contrôleur des Jeux olympiques.

Une Voix: C'est vrai!

M. Morin (Sauvé): Avec le...

Le Vice-Président: A l'ordre!

M. Lalonde: M. le Président, vous me permettrez quand même de dire que si on avait contrôlé les Olympiques comme vous avez contrôlé les commissions scolaires, non seulement le déficit aurait été de $2 000 000 000, mais il n'y aurait même pas eu d'Olympiques.

M. le Président, le juge en chef...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: ... de la Cour supérieure du Québec, l'honorable juge Jules Deschênes, disait, le 23 janvier dernier... Je veux demander au vice-premier ministre s'il est d'accord avec ce qu'il disait. "Il est vain d'espérer que le citoyen se soumette de bonne grâce à la justice si l'Etat lui donne l'exemple du défi ou lui distribue l'enseignement de l'injure". Deuxième citation, M. le Président. "Mais il importe de rappeler, dans la conjoncture actuelle, l'importance primordiale du respect de la justice par le pouvoir civil". Et, enfin, "de son côté, l'Etat doit donner l'exemple du respect qui est dû aux tribunaux et de la légitimité qu'ils incarnent".

Est-ce que le vice-premier ministre est d'accord avec ces déclarations du juge en chef? S'il l'est, comment peut-il concilier son attitude avec l'attitude méprisante du ministre de l'Energie à l'égard des tribunaux?

Le Vice-Président: M. le ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, a-t-on entendu mon collègue dire que le gouvernement n'allait pas appliquer les décisions des tribunaux?

Une Voix: Répondez à la question!

M. Morin (Sauvé): Je ne sache pas qu'il ait dit cela. Pour ce qui est du respect des tribunaux, je rappellerai que l'un des plus grands critiques de la Cour suprême du Canada, depuis des années, a été le professeur Bora Laskin qui, depuis, a été juge en chef de la Cour suprême du Canada!

Donc, M. le Président, les citoyens doivent conserver, devant les arrêts des tribunaux, leur liberté de juger et d'estimer que les juges se sont trompés ou ont eu raison. S'il n'y avait pas cette liberté, M. le Président, ce serait la dictature des tribunaux. Or, nous sommes en démocratie et, encore une fois, mon collègue n'a jamais défié les arrêts des tribunaux. Il a simplement dit qu'il n'était pas d'accord.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président: Dernière additionnelle.

M. Lalonde: ... dernière additionnelle. Il semble que le vice-premier ministre ait oublié les citations que j'ai faites. Je lui demande s'il est d'accord qu'il soit disgracieux qu'un juge émette une injonction à l'égard d'une loi du Québec, alors qu'il n'est pas élu.

Le Vice-Président: M. le vice-premier ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, le ministre, mon collègue, a parfaitement le droit d'avoir une opinion comme celle-là. C'est l'opinion d'un citoyen, tout simplement, sur le fonctionnement des tribunaux. C'est l'opinion d'un ministre s'exprimant comme citoyen. Il a les mêmes droits que tous les citoyens.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf.

L'administration du local 144

M. Pagé: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre du Travail. Elle est relative à une vérification de la part d'une firme de comptables de Montréal, la firme Weiss, Brazeau, Rous-sin, Tremblay, Beauregard et Associés, vérification qui aurait été faite des livres du local 144 à la demande de l'Association unie des compagnons et

apprentis de l'industrie de la plomberie et de la tuyauterie des Etats-Unis et du Canada. On sait que le local 144 est sous tutelle et que le tuteur est M. Gérard Beaudry. Ce rapport aurait été déposé, ou les représentants de cette association auraient offert au ministre du Travail de prendre connaissance et de recevoir copie dudit rapport une fois qu'il eût été confectionné, soit en date du 31 mars dernier. Ce rapport porte sur la situation financière qui prévaut au local 144 sous la juridiction de M. Beaudry. Il apparaît dans ce rapport, et je vais y aller très sommairement avant d'arriver à ma première question, M. le Président... On assiste, au 31 décembre 1979, à un déficit de plus de $309 925 pour l'année 1979. Les remises prélevées qui devaient aller à l'OCQ et ainsi bénéficier aux employés du local 144 qui ont travaillé à l'extérieur pour leurs fins de vacances, leurs bénéfices marginaux, leurs avantages sociaux, etc., pour une somme totalisant $279 900, n'ont pas été versées à l'OCQ au 31 décembre 1979. Il y a une dette de $84 738 du local 144 envers l'Union internationale et, enfin, des éléments assez surprenants dans ce rapport. Celui-ci indique — je signale que ce sont les indications selon la connaissance que j'ai dudit rapport — que des avances de salaire auraient été faites par la tutelle, sous la signature du tuteur, M. Beaudry, à des personnes qui ne sont même pas à l'emploi du local 144 ni de la tutelle. M. le Président, j'aimerais demander comme première question au ministre du Travail s'il a pris connaissance dudit rapport. Est-ce que c'est bien le cas qu'il aurait refusé d'en prendre connaissance et qu'il aurait plutôt suggéré aux gens de l'association de fournir ledit rapport à M. Beaudry lui-même qui est tuteur? Suivant ses réponses, M. le Président, à la lumière des indications fournies dans ce rapport comptable qui laisse, qui présume en tout cas, qui suppose tout au moins, qu'il y a beaucoup de choses qui laissent à désirer à l'intérieur de l'administration sous la juridiction de M. Beaudry, le ministre ne croit-il pas que pour le bénéfice des travailleurs du local 144 qui en ont assez subi, je pense, depuis cinq ans, il devrait ordonner une enquête, dans les meilleurs délais, non pas sur le local mais sur l'administration du local par M. Beaudry, notamment?

Le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, je ne suis pas sûr où le député de Portneuf prend ses renseignements; j'allais dire, comme d'habitude, qu'il semble qu'il y ait des problèmes de sources, encore une fois. J'ai devant moi, ici, la conclusion du rapport daté du 3 avril 1980, signé par le bureau de comptables Maheu, Noiseux, Roy et Associés, qui dit: "Tel que mentionné dans notre rapport de vérification pour l'exercice terminé au 31 décembre, l'examen de registres comptables du local 144 et de l'Association unie des ouvriers en tuyauterie du Québec n'a révélé aucune irrégularité. Nous sommes présentement à faire la vérification des autres exercices, etc. L'exercice 1978 s'est soldé par un déficit d'opération à cause, principalement, d'une diminution des revenus des cotisations due à un taux de chômage plus élevé dans l'industrie". C'est normal, il y a moins d'heures de faites, donc il y a moins de cotisations payées. "Cette diminution n'a pas été compensée, par une augmentation du taux de cotisation et les revenus accumulés au cours des exercices antérieurs permettraient d'absorber cette perte sans entraîner de difficultés financières pour l'organisme".

Essentiellement, M. le Président, il est exact qu'une firme de comptables a constaté qu'au local 144, qui est sous tutelle gouvernementale, on le sait, il y a une balance des opérations qui rend le local dans une position moins favorable qu'antérieurement, mais c'est parce qu'il n'y a pas eu d'augmentation des cotisations; deuxièmement, parce qu'il y a moins de cotisations qui entrent parce qu'il y a moins d'heures qui se font dans ce secteur, on le sait, depuis maintenant trois ans, presque; finalement, parce que, sous la tutelle gouvernementale, il n'y a personne qui se promène sur les chantiers pour extorquer $25 aux gens.

Le Vice-Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Le ministre n'a pas répondu à ma question. Je lui ai demandé si on lui a offert de prendre connaissance... Mes informations sont que les représentants de l'association se sont rendus rencontrer le ministre ou les gens de son cabinet pour lui déposer le rapport comptable de la firme Weiss, Brazeau, Roussin, Tremblay, Beaure-gard et Associés. Est-ce que vous en avez pris connaissance, de ce rapport fait par des vérificateurs comptables en date du 31 mars dernier et qui indique un déficit, au local 144, de plus de $309 000 et plusieurs irrégularités inquiétantes. Premièrement — et, M. le Président, je vais terminer là-dessus pour que le ministre réponde bien à ma question — au sujet des travailleurs du Québec, du local 144, qui ont travaillé à l'extérieur du Québec, notamment aux Etats-Unis où des prélèvements ont été faits devant être versés au local 144 qui, lui, devait les verser à l'OCQ pour les bénéfices marginaux de ces travailleurs; le rapport indique ici que $279 900 qui appartiennent aux travailleurs du Québec, du local 144, n'ont pas été déposés à l'OCQ. C'est dans le rapport ici. Je conviens que le ministre ait refusé d'en prendre connaissance. Je peux lui en faire parvenir une copie aujourd'hui. Mais ce que je lui demande, c'est s'il en a pris connaissance, et s'il en a pris connaissance, ce qu'il entend faire. Pourquoi est-ce qu'il n'ordonne pas qu'une enquête soit menée?

D'ailleurs, dans ce rapport... J'ai des photocopies de chacun, M. le ministre. Je pourrai vous les montrer privément, parce que c'est strictement à la lumière d'une enquête que je vous demande qu'on pourra faire toute la lumière sur ces chèques, sur des avances de salaires qui ont été faites à des personnes qui ne travaillent même pas pour la tutelle, M. le Président.

M. Johnson: M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Avant que le député de Portneuf ne se coule les deux pieds dans le ciment et affirme des choses qu'il regretterait d'avoir dites, en barbouillant des gens — on sait que ça peut être l'habitude des gens d'en face— je lui conseillerais peut-être de nous faire parvenir les documents dont il parle. Quant à une demande formelle de rencontre de ces personnes pour me déposer un rapport, il n'y en a pas eu. Je sais qu'il existe cependant au local 144 un groupe parallèle qui continue à manifester une présence caractérisée un peu plus par l'épaisseur des biceps qu'autre chose et qui est constitué finalement de pêcheurs en eau trouble. Que ces gens, dans un contexte d'étude des états financiers, se trouvent des alliés objectifs dans la présence de l'Opposition en ce moment ne m'étonne pas nécessairement. Cela ressemble à des choses qu'on a déjà vues dans le passé, au Québec, dans la construction.

M. Pagé: Une question de privilège, M. le Président.

M. Johnson: Ceci dit, sur la question, cependant...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, comme d'habitude, le ministre du Travail essaie de prêter des intentions. Je lui ai formulé une question ce matin. Je viens de lui formuler une question et il apparaît sur un rapport comptable qu'il y a un déficit totalisant près de $600 000 ou $700 000 au local 144 avec les tuteurs, un autre trou de $600 000 ou $700 000, que les Québécois et les travailleurs du. local 144 vont perdre. Que le ministre arrête de me prêter des intentions, que le ministre arrête de charrier l'Opposition et de dire n'importe quoi dans sa grande suffisance et qu'il réponde donc à la question: Est-ce que vous allez ordonner une enquête, oui ou non? C'est ça qu'on vous demande.

Le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, dès qu'il a été question de ces choses dans un journal de Montréal récemment, j'ai demandé qu'on me fasse rapport. On m'a fait un rapport préliminaire. Le rapport préliminaire qu'on m'a fait, c'est celui d'une lettre de Maheu, Noiseux, Roy et Associés, maison de vérificateurs pour les fins des comptes du local 144, confirmant qu'il n'y a eu aucune irrégularité. Ceci dit, quant au rapport dont me parle le député de Portneuf, j'espère que je pourrai en prendre connaissance et je vais effectivement demander au tuteur de me faire un rapport complet sur cette chose. Mais, avant de décréter une enquête sur la tutelle, il faudrait peut-être savoir de quoi on parle.

Je comprends que ça ne préoccupe pas trop le député de Portneuf mais on aimerait savoir de quoi on parle avant de se mettre à accuser les gens.

Le Vice-Président: M. le député de Richmond.

Négociation avec la Fédération des directeurs d'école

M. Brochu: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre de l'Education et concerne les conditions salariales et les conditions de travail de la Fédération des directeurs d'école du Québec. On sait que cette fédération couvre environ 4000 membres répartis dans 24 associations dans la province de Québec. Depuis six ou sept ans, environ, ces gens sont soumis au principe de la négociation permanente et, habituellement, trois ou quatre fois par année, le ministère convoque le comité de négociation pour acheminer les demandes et tenir à jour le dossier.

Or, d'après les informations qu'il m'est possible d'avoir maintenant, le comité en question n'aurait pas été convoqué cette fois-ci depuis juin 1979. On se rappellera qu'en 1977, je pense, ces gens s'étaient vu imposer des conditions de travail par arrêté en conseil. Etant donné le silence qu'il semble y avoir du côté du ministère maintenant, ces gens sont un peu inquiets de ce qui va leur arriver.

J'aimerais demander au ministre de l'Education, dans un premier temps: Est-ce que ledit comité de négociation de cette Fédération des directeurs d'école a été ou non effectivement invité à une rencontre et, si ce n'est pas le cas, est-ce l'intention du ministère de le faire très bientôt pour déposer les offres en ce qui concerne leurs conditions de travail?

Le Vice-Président: M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Je remercie le député de sa question, M. le Président. Je voudrais le rassurer en lui disant que, s'il n'y a pas eu réunion des organismes officiels, je n'en ai pas moins rencontré personnellement la fédération des principaux, la fédération des cadres, de même que celle des directeurs généraux de commissions scolaires, tous ceux à qui s'applique ce qu'on appelle la politique administrative et salariale. J'ai rencontré ces groupes et, chaque fois, il a été question, bien sûr, des clauses salariales.

Ce qui inquiète — à juste titre, je pense — ces cadres, principaux et directeurs généraux, c'est le fait que l'écart entre leur salaire et ceux des enseignants qui relèvent des conventions collectives va s'amenuisant. Ils nous ont fait des représentations dont nous avons pris bonne note. Je ne savais pas ce que m'apprend le député, que le comité ne s'était pas réuni depuis quelque temps; je vais y voir immédiatement, mais qu'il sache que personnellement, j'ai rencontré ces groupes et que je suis sensible au problème qu'il a soulevé. (15 h 10)

Le Vice-Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président, sur une question additionnelle. Suite à l'investigation que le ministre pourra faire, est-ce qu'il peut assurer cette Chambre que le comité de négociation, qui est chargé de voir, justement, à la bonne marche des négociations permanentes, sera convoqué, dans un premier temps, et, si oui, dans quel délai?

Deuxièmement, est-ce que le ministre peut nous dire s'il est exact que, dans les offres qui auraient été soumises par le gouvernement, les 9% d'augmentation ne s'appliqueraient qu'aux directeurs d'école qui sont actuellement au minimum de l'échelle salariale, de telle sorte qu'environ 40% et même plus de toutes les directions d'école ne se verraient octroyer aucune augmentation de salaire avec les offres présentées actuellement?

Le Vice-Président: M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, il ne s'agit pas à proprement parler d'une négociation, pour la bonne et simple raison que ces organismes dont parle le député ne sont pas des organismes syndicaux. Ce sont des associations de principaux, de cadres, de directeurs généraux, de commissions scolaires. Les organismes sont donc, en quelque sorte — comment dire? — consultatifs. Ce n'est pas véritablement une négociation qui s'y déroule. Avant de promulguer sa politique administrative et salariale, le gouvernement s'enquiert auprès de ces groupes, les consulte pour savoir dans quelle mesure cette politique leur est acceptable ou leur est plus ou moins acceptable et requiert des modifications. Je m'engage auprès du député à m'assurer aujourd'hui même de ce qui s'est passé pour le comité dont il m'a parlé. Quant aux 9% qu'il a évoqués, je n'ai pas les chiffres devant moi aujourd'hui. Je prends avis de la question et j'y répondrai dès la semaine prochaine.

M. Brochu: M. le Président...

Le Vice-Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: ... une dernière question additionnelle. Etant donné que c'est l'intention du gouvernement de réviser tout le mécanisme du droit de grève et de la négociation des conventions collectives et, possiblement, d'emprunter l'avenue des négociations permanentes — ce qui s'applique actuellement dans le cas de ces directions d'école, mais comme le ministre vient de le souligner, à toutes fins pratiques on ne les consulte que pour leur dire quelles vont être leurs conditions salariales — pour éviter l'inquiétude des autres secteurs qui pourraient être concernés dans ce sens, le ministre peut-il prendre l'engagement, pour que ce secteur, qui n'a pas de pouvoirs de pression, celui de se mettre en grève ou autrement, soit respecté au même titre que les autres et puisse également avoir droit au chapitre en ce qui concerne ses conditions de travail, que le mécanisme de la négociation permanente puisse, par l'attitude du gouvernement, être revalorisé ou qu'on puisse lui donner sa valeur réelle en reconnaissant l'importance des directions d'école?

Le Vice-Président: M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je puis assurer le député que les directeurs généraux de commissions scolaires, les principaux, les cadres n'ont peut-être pas, comme les syndiqués, une force de pression brutale par le truchement de la grève, mais ils ont tout de même une force morale considérable. Quand nous les rencontrons et que nous discutons de leurs problèmes pendant plusieurs heures avec eux, nous nous rendons compte qu'ils connaissent leur dossier, qu'ils ont de bons arguments. Comme ce sont nos partenaires dans l'administration du système scolaire, nous sommes bien obligés de faire grand cas de ce qu'ils nous disent. Je puis prendre l'engagement suivant devant cette Chambre et devant le député: je vais immédiatement voir pourquoi ce comité ne s'est pas réuni et je vais faire en sorte que, rapidement, les consultations aient lieu.

Le Vice-Président: M. le député de Beauharnois et, par la suite, M. le député de Jean-Talon. M. le député de Beauharnois.

Négociations dans l'industrie de la construction

M. Lavigne: Merci, M. le Président. Depuis déjà deux jours, je fais des tentatives pour poser une question au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Cela m'inquiétait car je ne le voyais pas en Chambre. Ma question s'adresse au ministre du Travail et de la Main-d Oeuvre en ce qui a trait aux négociations qui durent dans le monde de la construction. Le ministre n'est pas sans savoir que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, depuis au-delà d'un an et demi, négocie une nouvelle convention collective avec les métiers de la construction. Il y a, au moment où on se parle, treize ou quatorze métiers de la construction qui ont déjà signé des ententes, mais il reste quatre métiers importants, soit les électriciens, les plombiers, les menuisiers charpentiers et les mécaniciens de machinerie lourde, qui n'ont pas encore conclu d'entente. Le dossier dure et je voudrais, au moment où je vous parle, poser au ministre une question à deux volets. Le premier volet: II s'agirait de faire le point sur les négociations en question. Le deuxième volet: Je voudrais que le ministre nous dise s'il a l'intention d'intervenir dans ce dossier.

Le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, en effet, le dossier de la construction est actuellement dans sa phase active de négociation, comme on le sait, depuis quelques mois. C'est un dossier d'une très grande complexité à cause du nombre d'interve-

nants, à cause des règles qui régissent cette négociation, comme on le sait, à travers la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Disons que, sommairement, on peut dire qu'il y a effectivement une négociation qui a été entreprise il y a plusieurs mois, que cela a donné lieu à des ententes de principe entre certains locaux et certains métiers de la construction et que cela n'a pas donné lieu à des ententes entre d'autres métiers ou d'autres locaux et l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

Certains phénomènes viennent encore compliquer un peu le portrait, en plus de la diversité des syndicats à l'intérieur du Conseil des métiers de la construction. On sait qu'il y a également d'autres syndicats présents, comme la Confédération des syndicats nationaux, la CSN, qu'il y a également le Syndicat de la Côte-Nord et, évidemment avant, je devrais dire numériquement, la CSD, la Confédération des syndicats démocratiques. Quant au groupe FTQ ou au groupe Conseil provincial des métiers de la construction (FTQ) du Québec, ce groupe, on le sait, en vertu de la loi, doit négocier à travers une structure. Or, dans cette structure, en ce moment, il y a certaines divergences de vues quant à qui devrait représenter les intérêts de qui. Tout cela devrait probablement sinon connaître une solution, au moins nous permettre de savoir exactement ce qui se passe, à partir de la fin de semaine prochaine alors que la centrale FTQ a convoqué une réunion spéciale de certains des métiers de la construction. Tant et aussi longtemps que cette réunion n'aura pas eu lieu, je pense que l'atmosphère ne sera pas particulièrement propice à entamer ou à continuer la conciliation en ternies de contenus. Cependant, je suis assuré que, dès le début de la semaine prochaine, on devrait pouvoir assister à des réunions de conciliation, dès lundi ou mardi prochain, dans certains de ces métiers.

M. Rivest: M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Jean-Talon.

Sondages sur différents aspects de l'administration publique

M. Rivest: La semaine dernière, le député de Nicolet a étalé devant cette Chambre l'usage et l'utilisation de la publicité à des fins de propagande référendaire. Dans cette même veine, je voudrais demander au vice-premier ministre, qui est chanceux aujourd'hui d'avoir les trous que nous trouvons dans les banquettes ministérielles et qu'on doive lui adresser toutes les questions, s'il peut confirmer ou infirmer le fait que ce gouvernement, le gouvernement du Parti québécois, aurait, depuis 1976, fait faire au-delà d'une centaine de sondages portant sur différents aspects de l'administration publique. Je pense que c'est plus de 100 sondages. J'ai ici une liste des sondages qui ont été faits par différents ministères; elle est incomplète. L'ensemble de ces sondages totalise- rait au-delà de $5 000 000 et ma liste est incomplète. Au ministère de l'Education seulement, j'en ai dénombré plus d'une vingtaine.

Avant de laisser la parole au ministre, je signale qu'en décembre 1977, le ministre de l'Education a tenu un sondage pour recueillir des informations sur le personnel oeuvrant dans le domaine de l'éducation. Les résultats de ce sondage auraient peut-être aidé le ministre à éviter le trou de $500 000 000 qu'on connaît actuellement. Je voudrais qu'aujourd'hui le ministre nous dise quelle est la politique actuelle du gouvernement concernant l'utilisation des sondages, s'il est exact qu'au-delà de 100 sondages payés à même les fonds publics ont été tenus par les différents ministères du gouvernement totalisant une somme minimale — j'ai les informations et la somme ici — de $500 000 000. Je sais qu'il y en a eu d'autres et je demande au ministre de confirmer si cette pratique existe au niveau du gouvernement. (15 h 20)

Le Vice-Président: M. le vice-premier ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ne puis, à brûle-pourpoint, répondre pour l'ensemble du gouvernement, quoique nous puissions très bien faire faire des recherches pour savoir combien de sondages il s'est fait depuis quelques années.

Je puis répondre, cependant, pour mon propre ministère qu'effectivement nous faisons assez fréquemment des sondages, et de toute nature. D'ailleurs, cela s'est toujours fait. Cela s'est fait sous mes prédécesseurs et continue de se faire, par exemple, sur la satisfaction à l'endroit des prêts et bourses chez les étudiants, et sur la satisfaction à l'endroit de leur travail chez les enseignants.

Je pense que le député a fait allusion justement à ce sondage très important, très révélateur qui a été fait l'an dernier, je crois.

M. le Président, nous avons besoin constamment, pour bien administrer la chose publique, de sondages de ce genre. Je ne suis pas étonné du nombre de vingt qu'il a mentionné pour mon ministère. Cependant, ils ne sont pas tous de la même importance ou de la même envergure. Certains sont de petits sondages sur des points précis de l'administration, d'autres sont de grande importance, comme ceux que nous avons effectués sur l'attitude des enseignants à l'endroit de leur travail. Voilà pour mon ministère, M. le Président. Si le député le veut, je puis faire établir la liste des sondages effectués depuis trois ans, je n'y ai aucune objection.

Me permettra-t-on, M. le Président, d'ajouter ceci? Récemment, on a dit dans les journaux que le gouvernement fédéral avait fait faire un sondage sur le référendum et les attitudes des Québécois. Il me souvient, je crois, que le chef de l'Opposition, le député d'Argenteuil, avait réclamé que soit publié le sondage de la maison CROP fait il y a quelques mois. J'aimerais savoir si le chef de l'Opposition va maintenant revendiquer aussi fermement la publication du sondage fédéral par le gouvernement.

M. Rivest: Courte question additionnelle, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Le ministre de l'Education vient de référer au sondage. Vous savez que, dans le domaine de l'ingénierie, avant de creuser un trou on fait des sondages également. Vous auriez peut-être dû en faire un pour votre trou de $500 000 000 que vous avez laissé dilapider. Ma question additionnelle, c'est qu'il est très important...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivest: Tiens, voilà le respectueux ministre de la magistrature! M. le Président, voici ma question additionnelle, et c'est très important pour les députés de cette Chambre. Vous savez toute la bataille qu'on a dû faire contre le ministre des Affaires intergouvemementales pour l'amener à rendre publics le questionnaire et les résultats d'un sondage qui a déterminé l'opération référendaire à laquelle on assiste, qui a déterminé la question. Je demande au ministre de l'Education si c'est dans la politique du gouvernement... Je comprends qu'on puisse, à l'occasion, utiliser les sondages. D'abord, le volume des sondages. Il y a déjà depuis au-delà d'un mois une question inscrite au feuilleton de l'Assemblée nationale qui n'a pas eu de réponse, et ne me dites pas que vous n'avez pas les informations, j'en ai la majeure partie, première chose.

Deuxième élément de ma question. Etant donné que vous utilisez les fonds publics pour ces choses et que le degré de satisfaction des étudiants au niveau du programme des prêts et bourses, ça intéresse non seulement le ministère de l'Education, mais l'opinion publique et l'ensemble des députés de cette Chambre, je demande — parce que c'est très important, les questionnaires sont intéressants, à l'occasion — au ministre s'il est dans son intention ou dans l'intention du gouvernement d'adopter comme pratique le dépôt, devant cette Chambre, du questionnaire, premièrement et, deuxièmement des résultats, puisque ce sont des sondages de gestion interne parce que souvent dans le questionnaire le danger est très grand que ce ne soient pas des questions administratives, mais des questions d'ordre politique partisane qui soient en cause. C'est ça qu'on voudrait vérifier.

Le Vice-Président: M. le vice-premier ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour ce qui est du sondage sur les prêts et bourses, il est en cours; nous sommes à établir le questionnaire et je pense qu'éventuellement je le rendrai public. Je n'ai pas d'objection à cela, mais lorsqu'il aura été effectué.

Cependant, je tiens à dire au député que le gouvernement n'est pas obligé de publier tous les sondages qu'il fait entreprendre. Le gouvernement n'a jamais été obligé et nos prédécesseurs non plus. Le député était autrefois conseiller de l'ancien premier ministre. Il est très bien placé pour savoir que les gouvernements ne publient pas tous les sondages qu'ils font entreprendre.

Je pourrais lui retourner la question. Le gouvernement qu'il conseillait a-t-il rendu publics tous les sondages qu'il a fait entreprendre? Je pense qu'on aurait la réponse assez vite, M. le Président. La réponse, ce serait non. Il le sait très bien. Le gouvernement n'est pas obligé de publier tous les sondages. Il y en a qui sont faits pour les besoins internes tout comme certains documents de travail que rédigent les fonctionnaires.

Il y a une autre considération sur laquelle je voudrais attirer l'attention du député de Jean-Talon, c'est celle-ci: certains de ces questionnaires sont entrepris avec des organismes extérieurs au gouvernement. Par exemple, dans le passé, le gouvernement a fait des sondages avec le consentement de certaines centrales syndicales, dans le domaine de l'éducation. Or, nous ne pouvons publier ces résultats sans le consentement de ceux avec qui nous avons organisé le sondage. A plusieurs reprises, même si le gouvernement voulait publier certains de ces sondages, il ne pourrait le faire, faute de consentement de la part de ceux qui y sont associés.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Rivest: Si vous me permettez, sur au-delà de 100 sondages, à ma connaissance, il y en a à peine trois ou quatre qui ont été rendus publics. Il me semble que... J'en ai une liste, ici, de ces sondages qui pourraient facilement être rendus publics.

Le Vice-Président: M. le député de Jean-Talon, s'il vous plaît. Pour un complément de réponse, le ministre m'avait demandé la parole.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, parce que, M. le Président, j'ai été mis en cause indirectement par le député de Jean-Talon et je remarque que les trois quarts de la députation libérale sont absents aujourd'hui. Je voudrais signaler ceci, que lorsque...

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: J'ai eu l'occasion de poser une question tantôt et j'ai résisté à la tentation de nommer les ministres qui étaient absents. Evidemment, j'ai été obligé de passer la question au vice-premier ministre parce que le premier ministre est... des Affaires intergouvernementales de regarder autour de lui les banquettes vides.

Le Vice-Président: A l'ordre. M. le ministre.

M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, je regrette d'avoir fait remarquer au public que les trois quarts des députés libéraux sont absents; je ne le dirai plus. Je voudrais signaler que, quand on m'a demandé de rendre public le sondage qui avait été effectué par le gouvernement, nous avons accepté. Cependant, actuellement, à même les fonds publics, à même les taxes que je paie, que vous payez, le gouvernement fédéral a fait effectuer un sondage, et c'est M. Chrétien qui nous a dit ça de l'air souriant qui lui est habituel, à la télévision, hier. Il a dit qu'il ne le rendrait pas public. Etant donné l'influence que peut-être le chef libéral a dans le comité du non, est-ce qu'il ne pourrait pas implorer le chef fédéral de rendre ce sondage public? Cela pourrait être intéressant, parce que lui y a accès et nous n'y avons pas accès.

Le Vice-Président: Fin de la période des questions.

Motions non annoncées.

M. le ministre de l'Immigration.

Motion condamnant le génocide arménien

et invitant les Québécois à commémorer

cet événement le 24 avril

M. Jacques Couture

M. Couture: M. le Président, pour donner suite à la pétition présentée par plus de 10 000 citoyens à l'occasion du 65e anniversaire du génocide arménien, je propose la motion suivante: "Que cette Assemblée saisisse l'occasion du 65e anniversaire du génocide arménien perpétré en Turquie, le 24 avril 1915, pour condamner un acte aussi barbare contre ce malheureux peuple, contrairement aux principes les plus fondementaux des droits humains collectifs et individuels, et que cette Assemblée invite les Québécois à commémorer le 24 avril de chaque année comme jour anniversaire de cet événement en solidarité avec toute la communauté arménienne."

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement, M. le ministre de l'Immigration.

M. Couture: Brièvement, M. le Président, le préambule de la pétition que nous avons entendu en début de séance a dit l'essentiel sur l'objet de cette motion. Je veux simplement souligner ceci: Le silence prudent et criminel des nations devant l'extermination des Arméniens entre 1915 et 1918 est une honte pour les pays dits civilisés de ce siècle. C'est ce genre de silence qui a sans doute contribué à favoriser d'autres opérations du même ordre dont la plus récente, celle du Cambodge, nous a été tristement révélée.

Comme l'a rappelé la pétition, à cause de l'impunité de ce génocide et de l'apathie de la communauté internationale, ce premier génocide des temps modernes a permis que d'autres pays agissent de la même façon par rapport à d'autres populations.

M. le Président, souhaitons que notre collectivité reste sensibilisée à ces drames humains et continue de manifester à l'occasion sa solidarité, d'apporter sa contribution pour les prévenir, les dénoncer et surtout pour aider à en soulager les victimes. (15 h 30)

Le Vice-Président: M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, c'est avec une profonde et fraternelle sympathie envers le peuple arménien et ses fils et filles du Québec que le Parti libéral appuiera la motion présentée par le ministre de l'Immigration pour commémorer le massacre de la nation arménienne. Dans le contexte historique du Québec, le parti le fait d'autant plus volontiers que ce génocide fut perpétré au nom d'un nationalisme aveugle, dirigé contre un autre groupe ethnique et une autre nation qui avait le malheur d'être différente. Les Québécois, à cette occasion, doivent se rappeler jusqu'à quel excès l'exaltation aveugle du nationalisme a pu conduire...

Une Voix: Cela vous fatigue?

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: C'est qui, l'autre?

Le Vice-Président: M. le député de Mercier, sur une question de privilège.

M. Godin: M. le Président, je ne peux absolument pas accepter qu'à la faveur de cette résolution on fasse de la campagne référendaire dégueulasse, comme c'est l'habitude du député Ciaccia de Mont-Royal. C'est absolument dégueulasse, M. le Président!

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement. Je regrette pour le député de Mercier qui n'est pas habitué...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Ce n'était pas une question de règlement; c'était une question de privilège. D'accord, allez-y!

M. Lalonde: Je dis qu'il est contre le règlement que le député de Mercier ne laisse pas parler le député de Mont-Royal. Ce sont des faits, c'est son opinion.

Une Voix: C'est dégueulasse!

Le Vice-Président: M. le député de Mont-Royal.

Une Voix: C'est dégueulasse!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Picotte: Gang d'extrémistes, voyons donc!

M. Ciaccia: M. le Président...

M. Picotte: Laissez-le donc parler.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, un des droits qu'un membre de cette Assemblée a, c'est d'exprimer son opinion librement, ouvertement, sans se faire bâillonner, sans se faire imputer d'intentions et sans se faire dire qu'il ne doit pas se prononcer sur une motion qui a été soulevée par le ministre de l'Immigration.

Dans cet esprit démocratique que démontre le député de Mercier, ce qui fait peut-être suite aux propos du ministre de l'Energie qui, lui aussi, a démontré une certaine perception de notre démocratie, je voudrais continuer à exprimer mes voeux et mes sympathies envers le peuple arménien. Je répète, pour ceux qui n'auraient pas compris la portée de mes paroles: Dans le contexte historique du Québec, le Parti libéral le fait d'autant plus volontiers que ce génocide fut perpétré au nom d'un nationalisme aveugle, dirigé contre un autre groupe ethnique et une autre nation qui avait le malheur d'être différente.

Si le député de Mercier peut contester ces affirmations, il aura tous les droits, après que j'aurai terminé ma présentation, de donner son opinion sur la motion qui a été présentée par le ministre de l'Immigration.

Je continue: Les Québécois, à cette occasion, doivent se rappeler jusqu'à quels excès l'exaltation aveugle du nationalisme a pu conduire certains hommes et jusqu'à quel point le non-respect du droit des autres peut être néfaste pour une nation.

M. Paquette: La déportation des Acadiens.

M. Ciaccia: Le peuple arménien, plus que tout autre, peut nous dire combien l'intolérance religieuse et raciale peut conduire à la destruction des libertés individuelles et à la négation d'un peuple. Il est réconfortant pour nous, au Québec, de savoir que la plupart des nations et des groupes ethniques qui concourent à former la communauté canadienne jouissent, dans ce pays, de droits garantis par nos lois et nos coutumes, dans un climat de liberté qui permet à chaque entité nationale de s'exprimer et de s'épanouir.

A Montréal, la communauté arménienne, qui compte entre 20 000 et 22 000 membres, s'est regroupée en grande partie autour du centre communautaire très dynamique situé dans le comté de L'Acadie que fréquentent régulièrement les citoyens de la communauté de tout âge. Je suis certain que ma collègue, la députée de L'Acadie, se joint à moi dans les voeux que j'exprime envers la communauté arménienne à l'occasion de la motion qui a été présentée par le ministre de l'Immi- gration. Ce centre communautaire a été construit par étapes à partir d'un financement des membres de la communauté. La communauté attend toujours une réponse affirmative du gouvernement du Québec à qui elle s'est adressée depuis près d'un an pour obtenir une aide financière et j'espère que le gouvernement pourra donner suite aux représentations qui ont été faites par cette communauté.

En terminant, M. le Président, je pourrais dire à nos compatriotes canadiens d'origine arménienne que je me fais l'interprète du Parti libéral pour leur exprimer toute notre sympathie et j'espère que la population québécoise saura tirer avantage de leur expérience passée pour que le climat de concorde, d'harmonie, de respect et de solidarité entre groupes ethniques au Québec puisse être préservé dans la société dont nous jouissons présentement et dans le cadre de notre régime fédéral. Merci, M. le Président.

Des Voix: Bravo!

Le Vice-Président: M. le député de Richmond. M. Yvon Brochu

M. Brochu: M. le Président, j'aimerais à mon tour, au nom de l'Union Nationale, émettre certains commentaires à la suite de la présentation de cette motion par l'honorable ministre de l'Immigration. J'aimerais joindre ma voix à celle de mes collègues pour appuyer cette motion qui vise à souligner le génocide atroce qu'il y a eu au début de ce siècle envers la nation arménienne.

Dans ses propos, le ministre a souligné que, plus près de nous également, nous avons assisté à la disparition, à toutes fins pratiques, du peuple cambodgien dans les conditions les plus inhumaines et les plus atroces qu'on puisse décrire. Malheureusement, M. le Président, l'histoire du monde est écrite — et il faut le constater — avec du sang humain, et c'est ainsi depuis le début. On ne peut que le déplorer et ce qu'on constate aujourd'hui est une fois de plus la notification publique qu'il s'agit vraiment du sens malheureux de l'histoire de l'humanité. A travers cette histoire, M. le Président, on peut s'apercevoir que l'homme a à peu près toujours été un loup pour l'homme. On doit également se rendre compte, malheureusement, dans les conditions actuelles du monde, lorsqu'on regarde autour de la planète, partout sur la surface du globe, que les nations vivent dans des conditions de turbulence de plus en plus marquées. Elles font face à divers bouleversements, à divers cahots et à une agitation croissante qui ne peut que nous inquiéter.

Dans ce sens, M. le Président, j'espère que ces leçons de l'histoire sauront, si c'est possible, profiter à l'humanité, sinon immédiatement, du moins à l'avenir, pour qu'on puisse ne pas répéter ce qui s'est passé pour le peuple arménien, pour le peuple cambodgien, comme pour d'autres peuples à travers l'histoire. Pour ma part, je souhaite vivement voir le jour où, enfin, ce qui existe dans

la nature humaine, la "loi de prendre", pourra être balayée et mise de côté pour être remplacée par ce qu'on pourrait appeler "la loi de donner", c'est-à-dire se préoccuper autant des intérêts, du bien-être des autres qu'on est porté à lutter pour défendre et protéger ses propres intérêts. Je souhaite vivement, M. le Président, voir le jour où chaque humain sur la surface de cette planète pourra dire sincèrement et profondément avec l'attitude qu'il faut pour agir de la sorte: Tous les humains sont de ma race.

Le Vice-Président: Merci. M. le député de Chauveau.

M. Louis O'Neill

M. O'Neill: M. le Président, je voudrais simplement rectifier une erreur historique un peu grossière qui a été émise par M. le député de Mont-Royal. On ne doit pas confondre historiquement le nationalisme d'une petite nation qui se défend et l'impérialisme d'une nation puissante, ce qui n'est pas la même chose. Il s'agissait donc d'une petite nation écrasée par une nation impérialiste et, s'il y a une distinction que les gens d'ici comprennent bien, c'est bien celle-là parce que les Québécois y ont goûté, eux, au poids de l'impérialisme étranger s'écrasant sur eux. Alors, je trouve qu'il y a une distinction importante ici, et je déplore, M. le Président, tout comme le député de Mercier, qu'on ait utilisé ici une motion non annoncée pour se livrer à une attaque basse et vicieuse contre une idée très chère à des millions de Québécois.

Le Vice-Président: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Shaw

M. Shaw: Mr President, I would like to join with the minister in supporting his motion concerning the anniversary of the very serious genocide that followed the First World War and was experienced by the Armenian people.

The Armenian community of the City of Montreal who came basically to this country are originally in this period that followed the First World War where 1 500 000 of their compatriots were murdered in Turkey. When they moved to the other countries in the Middle-East and suffered the kinds of discrimination that they had to know, where they came to North America to find a country, wherein their wishes of living in a free and open society would be fulfilled.

I support again the suggestion that April the 24th be retained as the day commemorating an "unfortunate period in the history of mankind, because any time that any society undergoes such extreme pressure as has know the Armenian community of this province in their history, there should be a recurring period of recognition of this trauma that they have endured. I only feel that the same attitude of recognition that is expressed in this motion be translated into something that makes the Armenian people of the province of Québec feel less threatened than they do today under the aegis of this government.

Mr President, I know that the Armenian Canadians that are living in the province of Québec are deeply concerned about the forthcoming referendum. You can be sure that they will not be voting with the minister and his option of a yes. The Armenian community are Quebeckers and Canadians. They will demonstrate their pride in being Canadians the referendum day by voting a very firm no.

Le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, seulement quelques mots pour répondre aux inquiétudes du député de Chauveau, l'ancien ministre, qui reprochait au député de Mont-Royal d'avoir pris l'exemple de ce génocide...

Des Voix: ...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: ... de cette expérience malheureuse, en fait, ce génocide, ce drame, cette stratégie, pour rappeler aux Québécois où cela peut conduire de chauffer à blanc le nationalisme. C'est extrêmement important de le rappeler. Je trouve tout à fait intolérante l'attitude du député de Mercier et du député de Chauveau qui ne permettent pas aux députés de l'Opposition de faire ces rappels au moment du référendum, alors qu'eux, de l'autre côté, ne font que cela depuis trois ans. Comme le disait le ministre des Finances, tout est préréférendaire et tout est référendaire. Je pense que c'est non seulement notre droit, mais notre devoir. Je rappellerai au député de Chauveau que l'impérialisme a toutes sortes de couleurs. Il y a l'impérialisme économique. Il y a l'impérialisme racial. Il y a aussi l'impérialisme linguistique. Dans l'histoire de ces impérialismes, il y a eu quelqu'un qui a dit ceci: II va falloir chauffer à blanc le nationalisme avec tous les moyens à notre disposition, subtilement mais de façon constante, quotidienne et massive. Partout où il y a eu des excès, quelqu'un a commencé comme cela. C'est Doris Lussier, l'un des vôtres, qui l'a dit. Attention aux effets de ce que vous faites. Vous ne pourrez plus les contrôler, à un moment donné, les effets du chauffage à blanc du nationalisme. C'est un avertissement qu'il est bon de faire actuellement au moment où nous nous engageons dans le débat référendaire.

M. Jacques Couture

M. Couture: Mme la Présidente, je ne voulais pas faire de réplique en pensant qu'une motion de ce type nous permettrait tous de laisser de côté la

partisanerie et de se rallier en oubliant ce que nous sommes et ce que nous faisons devant un drame aussi considérable. Je suis certain que même parmi les membres de l'Opposition, plusieurs se sont sentis très mal à l'aise des propos du député de Mont-Royal et malheureusement ils ont été renchéris par d'autres. Je rends hommage au député de Richmond à cet effet parce qu'il a su vraiment intervenir dans le sens du débat.

Je trouve très révoltant, Mme la Présidente, qu'on utilise une motion de ce type pour des fins partisanes pour une raison bien simple: je pense que des milliers et des milliers de citoyens vont être révoltés de ce qu'on a dit tout à l'heure. Quand on est en face d'un génocide, quand on est en face d'une tragédie de cette importance, je pense que le plus grand respect qu'on puisse avoir pour ce peuple, c'est de ne pas y mêler nos débats partisans. Il serait peut-être mieux parfois d'être silencieux devant une telle tragédie et de manifester du respect devant eux en ne mêlant pas nos débats partisans à leur drame humain. Je rappelle ceci: Si la pétition de 10 000 citoyens dont la majorité est des Arméniens, a été présentée à l'Assemblée nationale, c'est aussi au nom du nationalisme, de la dignité d'une collectivité qu'elle a été présentée. Je pense que c'est justement la reconnaissance des droits collectifs qui est la meilleure garantie de la paix et de l'harmonie. Dans l'Histoire de l'humanité, trop de petits peuples ont été opprimés, massacrés parce qu'on ne respectait pas ce qu'ils étaient, ce qu'ils voulaient devenir.

Je ne veux pas m'étendre mais je pense qu'en ce qui me concerne, c'est peut-être la journée la plus triste que j'aie vécue à l'Assemblée nationale. Devant des drames comme celui du Cambodge, du génocide arménien et d'autres histoires aussi affreuses dans notre époque contemporaine, je pense que la meilleure chose qu'on aurait pu attendre de cette Chambre, c'est le respect. Merci, M. le Président.

La Vice-Présidente: La motion de M. le ministre de l'Immigration est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre

Avis à la Chambre.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Pagé: En vertu de l'article 34.

La Vice-Présidente: En vertu de l'article 34, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme la Présidente, j'avais l'occasion hier de formuler une question au leader du gouvernement sur ses intentions à l'égard des commissions parlementaires qui sont convoquées. Il y a quelque temps, on a reçu la liste des commissions parlementaires qui doivent siéger pendant tout le mois d'avril jusqu'au début de mai pour l'étude des crédits des différents ministères. Est-ce l'intention du gouvernement de faire siéger ces commissions pendant la campagne dite référendaire, parce qu'on peut présumer qu'on ajournera nos travaux d'ici quelques jours? Est-ce qu'à compter de l'émission des brefs lesdites commissions seront appelées à continuer à siéger selon le calendrier qui a déjà été déposé ou si, purement et simplement, ces travaux seront reportés après le référendum?

La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Mme la Présidente, la décision n'est pas encore prise à ce sujet. Elle sera communiquée à l'Assemblée dès qu'elle sera prise. Ce que je peux donner à ce moment-ci, c'est le menu de la semaine prochaine, ce que j'allais faire à l'instant parmi les avis à la Chambre. Je voudrais indiquer que, justement, conformément au programme établi après consultation avec l'Opposition sur la façon d'étudier les crédits, les députés savent sans aucun doute que la soirée de mardi prochain est réservée à trois commissions parlementaires qui étudieront les crédits. L'Assemblée ne siégera pas mardi soir prochain. De même, jeudi, l'Assemblée ne siégera, pour s'adonner à ses travaux habituels, que pour la séance de l'après-midi. Mercredi matin, la Chambre ne siégera pas non plus. Ce sont trois commissions parlementaires, comme il est de coutume, à ce temps-ci de l'année, qui seront plutôt appelées à travailler à l'étude des crédits. (15 h 50)

Ce qui m'amène à dire en bref que l'Assemblée sera appelée à travailler mardi après-midi jusqu'à 18 heures et jeudi après-midi jusqu'à 18 heures. Je peux donc annoncer, vu que la semaine de travail de l'Assemblée même est assez raccourcie, que nous prendrons probablement tout ce temps pour mettre fin au débat sur le budget puisque celui-ci, selon les informations que j'ai, doit encore durer sept heures et demie, ce qui va sans doute prendre les deux heures de cet après-midi et les deux heures de ce soir, même pas au complet. D'ailleurs, comme je l'indiquerai tout à l'heure, il restera du temps pour mardi et pour jeudi prochain. Si nous devons faire autre chose après la réplique du ministre des Finances qui devrait venir jeudi, j'aurai le temps mardi d'indiquer ce qui devrait venir, normalement, dans la fin de séance de jeudi après-midi.

Demain, je rappelle qu'il y a la question avec débat qui a été reportée, avant Pâques, à cette séance de vendredi. De même, je donne avis que mardi matin, de 10 h à 12 h 30, trois, pardon deux commissions seront appelées à siéger. Au salon rouge, ce sera le début de l'étude des crédits du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. A la salle 81-A, ce sera le début de l'étude des

crédits du ministère de l'Environnement. Si nécessaire, mardi matin — voilà la troisième commission que j'avais à l'esprit — comme convenu, la commission des transports achèvera l'étude des crédits, s'ils ne sont pas terminés dans la séance d'aujourd'hui.

De même, Mme la Présidente, si nécessaire, demain matin, pendant que la Chambre s'adonnera à la question avec débat, la commission de l'énergie et des ressources terminera l'étude de ses crédits, si ce n'est pas fait ce soir. Je fais motion, Mme la Présidente, au-delà de ces avis...

M. Pagé: Mme la Présidente, avant que le leader parlementaire dépose sa motion, est-ce que celui-ci m'indique que la décision n'est pas prise sur la possibilité que les commissions siègent ou ne siègent pas? Est-ce qu'il pourrait m'indiquer vers quel jour, la semaine prochaine, il pourra nous donner la réponse?

M. Charron: Mardi, Mme la Présidente.

M. Pagé: Mme la Présidente, je veux être bien certain d'avoir bien compris. Mardi nous saurons si les commissions siégeront pendant la campagne référendaire?

M. Charron: Entendons-nous. On n'est pas tombé sur la tête personne, Mme la Présidente. Il est bien entendu que, si le premier ministre décide d'émettre les brefs référendaires avant la fin du mois d'avril, par exemple, il est toujours possible que la Chambre siège et que les commissions parlementaires travaillent, je dirais, peut-être pendant deux jours au maximum, trois jours, suivant l'émission des brefs, mais chacun sait que cette importante consultation populaire va nécessiter la participation des députés. Je n'ai pas l'intention d'allonger. Je ne sais même pas — c'est pour cela que je dis que la décision n'est pas prise — à ce moment-ci si l'émission des brefs sera suivie immédiatement de l'ajournement de la Chambre ou si, comme je viens de l'évoquer, pour 48 heures additionnelles, la Chambre sera appelée à travailler. La décision n'est pas prise et je l'indiquerai mardi, quand elle sera prise.

La Vice-Présidente: Une question en vertu de l'article 34, M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Une courte question. Ce n'est pas possible que vous ayez un ajournement pour la période référendaire. Il y a de petits détails comme la politique des loisirs dans les comtés qui n'est pas faite. Normalement, nous avons tous les renseignements sur ce sujet dans nos comtés. Est-ce que le budget va continuer? Est-ce que vous avez des prévisions dans ce domaine?

M. Charron: Je n'en suis pas responsable, Mme la Présidente, mais je peux m'informer auprès de mon collègue et prendre avis de cette question pour lui fournir une réponse mardi.

La Vice-Présidente: Votre motion, sans doute, M. le leader parlementaire.

M. Charron: Je voudrais, d'abord, donner une indication du travail d'aujourd'hui, maintenant, à l'Assemblée; c'est un programme qui est fait à la suite d'une consultation menée auprès de l'Opposition également. Nous allons pour quelques instants, d'abord, madame, conformément à l'ordre de la Chambre, étudier le projet de loi no 100 que j'ai déposé tout à l'heure et qui doit être étudié au cours de la même séance, comme l'Assemblée l'avait décidé la semaine dernière. On m'informe qu'il s'agit d'un travail de quelques minutes seulement, un député ou deux choisissant d'intervenir. Par la suite, l'Assemblée reviendra sur le discours sur le budget jusqu'à 17 h 30 ou tout près. A 17 h 30, pendant la fin de la séance de cet après-midi, pour une demi-heure, un projet de loi inscrit au nom du ministre du Travail, le projet de loi no 91, sera étudié en deuxième lecture et, selon le consentement déjà obtenu, en troisième lecture également au cours de cette séance. En soirée, de 20 heures jusqu'à 22 heures, nous revenons sur le discours sur le budget.

Pendant que la Chambre fera donc ce travail aujourd'hui, je propose — et j'en fais motion — que se réunissent jusqu'à 18 heures, à partir d'immédiatement dans le cas de l'énergie et des ressources, dès la fin de la loi 100 dans le cas des transports, les deux commissions, une au salon rouge... Immédiatement? Il n'y a pas d'objection? Très bien. C'est parce qu'on m'en avait fait la demande, mais si c'est possible, c'est encore mieux. Je fais donc motion immédiatement jusqu'à 18 heures et ce soir, de 20 heures à 22 heures, au salon rouge, pour l'étude des crédits, la commission de l'énergie et des ressources et, à 81-A, la commission des transports sur les crédits du même ministère.

La Vice-Présidente: Et vendredi?

M. Charron: J'ai donné avis que vendredi, madame, j'ai...

La Vice-Présidente: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Une Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. Shaw: Quand vous avez déposé votre motion non annoncée, la semaine passée, concernant le projet de loi no 100, vous avez dit que ce serait adopté sans débat. Est-ce que nous allons avoir des débats, maintenant?

M. Charron: Oui. Il va y avoir un court débat et je vais expliquer pourquoi au député. C'est que je me sentais mal à l'aise du fait que le gouvernement ait choisi d'intercaler un nouvel amendement à la Loi sur la consultation populaire. C'est

ce que le député trouvera dans le troisième paragraphe des notes explicatives que j'ai lues cet après-midi. La semaine dernière, lorsque le leader adjoint du gouvernement avait obtenu le consentement sans débat, c'est qu'il n'y avait de prévu que premièrement et deuxièmement qui sont indiqués là. Nous avons choisi d'intercaler un troisième amendement. Comme ça ne faisait pas partie de l'entente, j'ai accepté de réouvrir le débat, ne serait-ce que pour quelques minutes au cas où le député aurait des opinions à émettre sur le nouvel amendement contenu dans la loi. Cela va? Madame, c'est le député de Châteauguay qui présentera le projet de loi no 100 au nom du gouvernement. Je vous prierais de le reconnaître pour qu'on procède immédiatement à la deuxième lecture.

La Vice-Présidente: M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: La loi sur la consultation populaire.

Projet de loi no 100

Deuxième lecture

M. Roland Dussault

M. Dussault: Effectivement, il s'agit du projet de loi no 100, Loi modifiant la Loi sur la consultation populaire. Ce projet de loi découle d'un travail qui a été fait par un comité ad hoc composé de membres des différentes formations dans cette Assemblée nationale dont le mandat était de voir quelles dispositions de la Loi électorale actuelle non promulguée, la loi no 9, pourraient s'appliquer au prochain référendum. Il y a eu unanimité à ce comité pour que deux dispositions particulières puissent s'appliquer au prochain référendum. Il s'agissait du bulletin de vote, plus précisément de la manière de marquer ce bulletin de vote pour qu'il puisse être valide et, deuxièmement, de l'élargissement du nombre de personnes qui pourraient voter lors du vote par anticipation. Quant à la troisième disposition — comme on le disait tout à l'heure — elle n'a pas fait l'unanimité. Je vais expliquer, dans quelques minutes, pourquoi elle a été ajoutée à ce projet de loi.

D'abord, il y a eu unanimité sur le fait que le bulletin de vote puisse être marqué — comme c'est prévu au projet de loi no 9 — soit par un X, un crochet ou un trait, avec un crayon à la mine noire qui serait fourni par le scrutateur à chacun des électeurs. On sait qu'actuellement plusieurs bulletins de vote, énormément même de bulletins de vote sont rejetés parce que l'électeur utilise un mauvais crayon ou parce qu'il utilise un mauvais signe. Il fallait éviter que, dorénavant, ça se répète et que plusieurs des électeurs voient leur vote rejeté pour des raisons tout à fait techniques.

Le deuxième amendement prévu par ce projet de loi no 100 vise l'élargissement du nombre de personnes qui peuvent voter par anticipation. On sait qu'actuellement très peu de personnes peuvent se prévaloir de ce droit de vote. Ce que l'on veut, c'est que, dorénavant, comme le prévoit le projet de loi no 9, les personnes handicapées, le personnel électoral de même que toute personne qui a des motifs de croire qu'elle sera absente de la section de vote ou incapable de voter le jour du scrutin puissent voter par anticipation. La condition d'admission à ce vote est relativement simple. En tout cas, cela a été simplifié au maximum. Il s'agira qu'une personne signe la formule 64 et qu'elle soit assermentée sous cette signature de façon à avoir accès au vote par anticipation. (16 heures)

Le troisième objectif du projet de loi no 100. Cette modification est faite à l'article 20 et vise à modifier la version spéciale de la loi régissant le financement des partis afin de sanctionner toute contravention aux dispositions des articles 33, 34, 36 à 39 de la Loi sur la consultation populaire. En effet, l'article 120 de la section 2 de l'appendice 2 de la Loi sur la consultation populaire ne semble créer d'infraction qu'à l'égard des articles 100,106 à 108, 113, 115 à 117 de la version spéciale de la Loi régissant le financement des partis politiques, laissant ainsi certaines autres dispositions de la Loi sur la consultation populaire régissant le financement du référendum sans sanction possible.

Cette modification permettrait de poursuivre, notamment, d'abord, toute personne qui n'est pas l'agent officiel d'un comité national et qui paie ou autorise les dépenses réglementées. Elle vise aussi à poursuivre l'agent officiel qui défraie des dépenses réglementées à même d'autres sources que celles provenant du fonds du référendum. Elle vise aussi à poursuivre toute personne qui autorise ou fait le versement de sommes au fonds du référendum, dans la mesure où ces sommes ne peuvent, en vertu de l'article 37 de la Loi sur la consultation populaire, y être versées. Aussi, toute personne qui verse dans le fonds du référendum mis à la disposition d'un agent local des sommes non visées dans l'article 38 de la Loi sur la consultation populaire. En dernier lieu, tout électeur qui verse une contribution supérieure à $3000 au fonds du référendum.

En conséquence — je termine là-dessus, Mme la Présidente — et afin de mettre fin à tout doute concernant la possibilité de sanctionner toute contravention aux articles 33, 34 et 36 à 39 de la Loi sur la consultation populaire, il est suggéré de modifier l'article 120 de la section 2 de l'appendice 2. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Gatineau. M. Michel Gratton

M. Gratton: Mme la Présidente, très brièvement. J'aimerais rappeler que c'est à la demande expresse et renouvelée à plusieurs occasions par l'Opposition officielle que le gouvernement se rend aujourd'hui à cette modification de la Loi sur

la consultation populaire pour permettre de décréter l'entrée en vigueur de certains articles de la loi 9, c'est-à-dire du nouveau code électoral, qui lui, a été adopté par l'Assemblée nationale en décembre dernier, mais qui n'entrera pas en vigueur dans son entité avant les prochaines élections générales.

Je rappellerai, Mme la Présidente, que nous avions fait allusion une première fois à cette nécessité pour le gouvernement de tâcher d'élargir le plus possible l'exercice du droit de vote des citoyens québécois au moment du référendum. Nous l'avions fait une première fois le 14 novembre 1979 à la commission parlementaire qui étudiait le projet de loi no 9 article par article. Nous y sommes revenus le 28 novembre, lors de la prise en consideration du rapport de la commission à l'Assemblée nationale. Nous y avons fait référence une troisième fois en troisième lecture le 29 novembre. Le 12 décembre 1979, je posais une question au leader du gouvernement, en vertu de l'article 34, à savoir quels seraient les articles du projet de loi no 9 qui pourraient être promulgués et entrer en vigueur à temps pour la tenue du référendum. Au cours du mois de mars, j'ai dû poser la question deux ou trois fois avant que, finalement, le 25 mars dernier, le gouvernement accepte une suggestion du leader de l'Opposition officielle, le député de Bonaventure, de créer ce comité ad hoc auquel le député de Châteauguay a fait référence, comité qui a enfin débouché sur un consensus, lequel se retrouve inscrit dans au moins deux des éléments du projet de loi no 100 que nous étudions aujourd'hui, soit la possibilité pour les citoyens, les électeurs de marquer le bulletin de vote, au moment du référendum, par des façons autres que par la croix traditionnelle.

Ce que nous visions, Mme la Présidente, en exigeant du gouvernement de faire cette modification à la Loi sur la consultation populaire, c'était d'éliminer le nombre effarant de bulletins de vote qui sont rejetés à chaque élection générale et qu'on a rejetés encore aux élections complémentaires et cette dernière qu'on a connue depuis 1976, en raison d'une façon plus ou moins orthodoxe que certains voteurs ont de marquer le bulletin.

On sait que la loi fédérale, à cet effet, est beaucoup plus large et permet à tout citoyen de voter par un crochet, une coche, un tiret, une croix, un X, à condition qu'il n'y ait aucune façon d'identifier la personne qui vote. Or, il nous semblait utile que les Québécois qui voteront au référendum puissent le faire sans risquer, pour des raisons strictement techniques, et malheureusement souvent pour des raisons partisanes, de voir leur bulletin rejeté au moment du décompte officiel.

Le deuxième article d'importance, c'est celui qui, comme la loi fédérale le permet depuis longtemps, permettra maintenant au Québécois qui voudra voter par anticipation de le faire pour des raisons autres que l'unique raison qui existait dans la loi actuelle, c'est-à-dire celle de prêter serment que son travail, et seul son travail, l'ame- nait à l'extérieur de sa circonscription électorale le jour du vote. Il sera maintenant possible à tout citoyen québécois, sur déclaration assermentée, de voter par anticipation, une semaine avant le jour décrété pour la tenue du scrutin référendaire, de le faire pour d'autres raisons, incluant la simple raison de croire, personnellement, être absent de son district électoral le jour du scrutin. Cela, évidemment, vient permettre un plus libre exercice, une plus grande ouverture à un plus grand nombre de citoyens québécois d'exercer leur droit de vote au moment du référendum. Nous sommes fort heureux que notre persistance, notre insistance auprès du gouvernement ait fait que le gouvernement nous présente maintenant ce projet de loi.

Le troisième élément du projet de loi no 100 vise à élargir les pénalités à certaines infractions. Je dois rappeler que cela n'a pas fait l'objet d'un consensus au niveau du comité ad hoc et je tiens pour acquis que ce que le député de Châteauguay nous a donné comme explication tantôt s'avère véridique. Je lui poserai la question immédiatement puisqu'il ne semble pas qu'il soit question d'aller en commission plénière tantôt, à savoir s'il pense que la rédaction de l'article 19, tel qu'on le retrouve au projet de loi, rend bien l'intention qu'on a d'élargir les pénalités à ces infractions. Lorsqu'on se réfère particulièrement au chiffre 119, je me pose une question malheureusement, on a pris connaissance du projet de loi seulement tantôt et, je le répète, cela n'avait pas fait l'objet d'un consensus, donc il est difficile pour nous de vérifier. Il s'agirait de vérifier si, effectivement, le chiffre 119 est bien celui qui devra précéder l'insertion du texte plutôt qu'à l'article 119 on retrouve l'expression "l'article précédent". Je demande au député de Châteauguay de nous donner cette assurance.

Je dirai, en conclusion, que, contrairement à ce que certains articles de journaux ont pu laisser entendre, l'Opposition officielle ne s'est jamais opposée au changement des heures de vote. J'ai un article du journal La Presse du 2 avril où on allègue que le gouvernement a abandonné son projet de faire changer les heures de vote le jour du scrutin, l'Opposition s'y étant opposée. C'est faux; nous ne nous y sommes jamais opposés, nous avons fait savoir au député de Châteauguay que, si l'intention du gouvernement était de faire la modification, nous y souscririons, même si nous n'en voyions pas la nécessité.

Cela étant dit, je dirai que je regrette simplement que, soi-disant à cause de raisons techniques, on n'ait pas pu permettre aux personnes hospitalisées d'exercer leur droit de vote au moment du référendum dans la circonscription électorale où l'hôpital où elles sont hospitalisées est situé, de même que je déplore que nous en soyons rendus presque à la dernière journée de session de l'Assemblée nationale avant l'émission des brefs référendaires. Ceci est un projet de loi qui, à mon avis, méritait beaucoup plus de considération de la part du gouvernement, d'autant plus que, comme je l'ai rappelé, depuis novembre dernier,

nous le réclamions, nous, de l'Opposition officielle.

Une dernière phrase, Mme la Présidente. Le directeur général des élections s'est engagé vis-à-vis du comité ad hoc, sans qu'il soit nécessaire de faire des modifications à la Loi sur la consultation populaire — et je demanderais au député de Châteauguay de le confirmer lors de sa réplique — à émettre des directives, à l'intention des directeurs de scrutin, c'est-à-dire au président d'élection de chacune des 110 circonscriptions électorales du Québec, selon les dispositions des articles de la nouvelle loi électorale, quant à la distribution de la liste électorale à chacune des habitations d'une circonscription plutôt que, comme la loi le prévoit actuellement, à chacune des personnes inscrites sur la liste. Que cette liste soit distribuée à chaque habitation. (16 h 10)

Deuxièmement, la carte de rappel qui, selon la loi no 9, devra, dans les deux jours précédant le jour d'un scrutin, être adressée à chaque habitation d'une circonscription électorale, rappelant à l'électeur où et à quelle heure il peut exercer son droit de vote, celle-là aussi, cette carte de rappel, le directeur général des élections s'est engagé à la faire distribuer par le directeur de scrutin de chaque circonscription.

Je n'insisterai pas, Mme la Présidente, sur l'importance de ces deux mesures qui permettront encore une fois, dans un premier temps, de faire en sorte que toute personne qui a le droit de vote puisse se faire inscrire sur la liste électorale si elle ne l'est pas déjà sur cette liste qui a été confectionnée en octobre dernier au cours du recensement annuel et, deuxièmement, pour ces personnes qui sont sur la liste après révision, de savoir où et quand elles pourront exercer leur droit de vote.

La Vice-Présidente: M. le député de Châteauguay, la réplique.

M. Roland DussauH

M. Dussault: Mme la Présidente, je voudrais d'abord rappeler qu'effectivement, lors des travaux du comité ad hoc, nous nous étions penchés sur cette question des heures de vote. J'étais un de ceux qui croyaient profondément qu'il fallait aller dans le sens du projet de loi no 9, mais, pour des raisons évidentes, pour des problèmes techniques que cela poserait, j'avais moi-même renoncé à cette idée. Je témoigne effectivement que l'Opposition ne s'était pas opposée formellement à cette mesure, mais qu'elle était aussi d'accord avec moi et avec les personnes qui nous accompagnaient lors des travaux sur le fait que cela causerait beaucoup trop de problèmes. Nous avons tous renoncé. J'ai été surpris, d'ailleurs, de voir cet article. C'est la première occasion que j'ai d'en parler, mais j'ai été surpris de voir le contenu de cet article sur ce point. Je voulais en témoigner.

Je voudrais aussi confirmer ce que dit M. le député de Gatineau, à savoir que la carte de rappel, comme on l'appelle généralement chez les travailleurs d'élection, serait effectivement distribuée par le directeur général des élections avant le jour du référendum, de même que la liste électorale, non plus selon les adresses des personnes, mais selon les habitations. Cela voudrait donc dire, comme le disait aussi le député, que celui qui n'est pas inscrit sur la liste pourrait constater maintenant qu'il n'est pas inscrit et se diriger en conséquence.

Je voudrais aussi dire que le comité aurait pu chercher à faire appliquer beaucoup d'autres dispositions du projet de loi no 9 — non encore promulgué — au prochain référendum, mais nous avons tous convenu qu'il est important de renoncer à chercher à appliquer des dispositions qui changeraient profondément — mais vraiment profondément — les habitudes des électeurs. C'est ce qui fait que, généralement, nous avons dû nous résoudre à essayer d'appliquer très peu de ces dispositions du projet de loi no 9. Je pense que c'est important de le dire.

Quant à l'article 19 du projet de loi no 100 qu'évoquait M. le député de Gatineau et quant à la question qu'il me posait, je voudrais dire que cet article est tout à fait dans l'esprit de l'objectif visé par le projet de loi no 100, tel que je l'explicitais tout à l'heure. A toute fins pratiques, cet article 19 n'est qu'un article de concordance par rapport aux dispositions, c'est-à-dire cette troisième disposition que l'on cherchait à mettre dans la loi, que l'on retrouve dans la dernière partie du projet de loi no 100. On me demandait de prendre un engagement à cet égard. Selon toutes les explications que j'ai pu entendre relativement à ces amendements du projet de loi no 100, c'est tout à fait dans l'esprit de l'objectif, tel que je l'explicitais tout à l'heure dans mon intervention. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 100, Loi modifiant la Loi sur la consultation populaire est-elle adoptée?

M. Gratton: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Johnson: Mme la Présidente, avec le consentement et conformément à la résolution adoptée par l'Assemblée il y a plusieurs jours, je pense que nous pourrions procéder aux écritures, à la commission plénière et, par la suite, à la troisième lecture.

Commission plénière

La Vice-Présidente: Commission plénière, adopté. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Mme la Présidente, je souscrirai volontiers à cette motion pour qu'on procède aux

écritures de façon que la commission plénière puisse étudier le projet de loi article par article, avec la seule réserve que j'ai déjà exprimée, à savoir que nous n'avons pas, nous de l'Opposition officielle, eu le temps de faire les vérifications quant aux concordances et quant à la rédaction. Dans la mesure où le gouvernement nous fournit l'assurance que tout est conforme à l'esprit de ce que nous venons d'adopter en deuxième lecture, nous souscrivons à cette motion.

M. Johnson: Mme la Présidente, je pense que je peux donner au député de Gatineau l'assurance que l'ensemble des articles et, essentiellement, le contenu de ce qu'a révélé le député de Châteauguay dans son discours de deuxième lecture, y compris les longues énumérations qu'il a faites, sont tout à fait conformes au projet de loi.

La Vice-Présidente: Commission plénière, adopté?

M. Gratton: Adopté.

La Vice-Présidente: Rapport de la commission plénière, adopté?

M. Gratton: Adopté.

Troisième lecture

La Vice-Présidente: Troisième lecture, adopté?

M. Gratton: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. Johnson: Mme la Présidente, étant donné que nous avons adopté le projet de loi, conformément aux avis donnés par le leader cet après-midi, nous pourrions procéder maintenant à la poursuite du débat sur le discours du budget. M. le ministre de l'Education, vous êtes mieux de...

Reprise du débat sur le discours

sur le budget et les trois motions

de censure

La Vice-Présidente: II s'agirait donc de l'article 3 du feuilleton d'aujourd'hui, c'est-à-dire la reprise du débat sur la motion de M. le ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure de MM. les députés d'Outremont, de Bellechasse, de Rouyn-Noranda et de Gouin. M. le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Morin (Sauvé): Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: ... vous aviez demandé l'ajournement du débat. C'est donc vous qui avez la parole. Est-ce que vous vouliez... Je vous donnerai la parole ensuite, M. le ministre.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Mme la Présidente, je pense qu'il me restait environ quinze minutes, d'après les informations qu'on m'a données, pour poursuivre mon discours dans le cadre du débat sur le discours du budget.

Le budget, en ce qui concerne les problèmes de l'éducation, n'est pas très positif. Des questions devront être posées naturellement, lors de l'étude des crédits du ministère de l'Education, en ce qui concerne un certain nombre de problèmes qui restent en suspens depuis un certain temps. Qu'on pense, par exemple, à la réforme des universités dont le rapport de la commission d'éude a déjà été produit et rendu public, dont les réactions d'ailleurs des divers milieux ont été rendues publiques. Nous n'avons devant nous rien de la part du ministère de l'Education, du ministre et du gouvernement, à savoir de quelle façon cette réforme sera faite. Nous ne pouvons que rappeler au gouvernement que nous, du Parti libéral, accordons une importance fondamentale à ce que toute réforme de nos institutions universitaires respecte d'une façon absolue la liberté de ces institutions de haut savoir.

Nous ne voulons pas que ces institutions, que les universités deviennent des succursales du gouvernement. Nous voulons aussi que le ministre prenne bien soin non seulement de continuer à encourager peut-être davantage encore, par des ressources financières et autres, le développement de nos universités, mais aussi en même temps à développer l'accès à l'université. On sait que — toutes les statistiques le disent — les francophones, entre autres, au Québec ont moins accès à l'université que les anglophones, en proportion. C'est une situation qu'une société comme la nôtre ne peut tolérer longtemps. Nous sommes quand même une société suffisamment développée pour faire les efforts nécessaires pour assurer l'accès d'une proportion acceptable de nos jeunes à l'université. J'espère que le ministre, lorsqu'il nous annoncera sa politique, en tiendra compte. (16 h 20)

II y a aussi la réforme des commissions scolaires. J'espère que le ministre ne prendra pas cette malheureuse affaire du trou de $500 000 000 qui résulte davantage de l'incompétence du ministère et du gouvernement en général que des commissions scolaires, semble-t-il, comme raison ou prétexte pour faire disparaître le caractère démocratique des commissions scolaires. Il y a l'enseignement privé qui traîne en longueur. Le ministre nous a promis sa politique depuis des mois et des années. Encore là, le gouvernement est en défaut. Pourquoi n'a-t-on pas l'énoncé de politique de la recherche scientifique, qui est extrêmement importante dans le développement d'une société?

Nous ne voulons pas non plus que la recherche scientifique devienne des officines du gouvernement. Laissons-lui la plus grande liberté possible tout en encourageant la recherche scientifique dans les milieux industriels et, naturellement et assurément, dans les milieux de l'enseignement. L'éducation des adultes: On sait qu'un comité a

été formé récemment. J'espère que ce comité saura donner au ministre et au gouvernement les éléments nécessaires pour le développement de l'éducation aux adultes.

Il y a aussi d'autres questions que nous poserons à l'étude des crédits mais revenons à un problème plus immédiat, celui du trou de $500 000 000 dans les finances du gouvernement du Québec qui a des implications référendaires directes. Nous avons posé des questions depuis trois semaines maintenant tous les jours. A force d'insister et malgré la résistance et un premier refus, nous avons réussi à obtenir le dépôt du rapport préliminaire du Vérificateur général, rapport qui est accablant pour le ministre de l'Education. Nous avons demandé une enquête publique qui nous a été refusée sous prétexte que le Vérificateur général n'a pas terminé son enquête interne. J'ai moi-même fait une motion qui a été discutée hier, le 9 avril, pendant deux heures, pour convoquer la commission parlementaire des finances et de l'éducation afin de faire la lumière sur ce que plusieurs observateurs appellent le scandale administratif du gouvernement du Parti québécois. Cela aussi nous a été refusé.

En refusant notre motion, les péquistes ont tenté de mettre la faute sur l'ancien gouvernement parce que, pour une fois, ils ne peuvent pas mettre la faute sur le fédéral. Cette situation, d'après le ministre des Finances, existe depuis la création du ministère de l'Education en 1964. Le ministre des Finances ajoute qu'il a même trouvé un déficit d'arrérages scolaires d'environ $500 000 000 à son arrivée au gouvernement en 1976 comme ministre des Finances. C'est de bonne guerre, Mme la Présidente, de mettre la faute sur les autres pour ses propres péchés, mais il y a quand même une couple de questions qu'on doit poser et que ces mêmes arguments soulèvent. S'il est vrai que cette situation existe depuis 1964 alors que le ministre des Finances était — et a été pendant plusieurs années — le principal conseiller financier du gouvernement depuis 1965, s'il est vrai aussi qu'il a trouvé un déficit important d'arrérages scolaires à payer en novembre 1976, comment se fait-il qu'il n'a pas immédiatement ordonné une étude ou une enquête sur la situation pour que le déficit ne se répète pas? C'est cela la véritable question à laquelle le ministre des Finances ne peut pas se dérober. Il est responsable de son administration vis-à-vis de cette Assemblée nationale et de tous les Québécois. C'est le trou péquiste de $500 000 000 que nous devons juger maintenant. Les administrations antérieures ont été jugées.

Quand le ministre des Finances a-t-il changé les politiques? Quand le ministre de l'Education a-t-il changé les directives, les règlements qui favorisaient dans le passé la création de ce déficit? Est-ce que c'est seulement il y a quelques semaines, si c'est à cause des politiques antérieures, que ce déficit se créait année après année dans le passé? Quand le ministre des Finances a-t-il ordonné de changer ces directives? On n'a pas de réponse à ces questions. Le ministre des Finances est bien futé, on le sait. Il aime bien se montrer habile quand il s'agit de saboter le fédéralisme, mais il reste que le cas qui nous occupe ne regarde pas le fédéral du tout. C'est une question dans laquelle nous sommes parfaitement souverains. Cela n'a pas empêché d'avoir un trou de $500 000 000 à $600 000 000 que le gouvernement péquiste, qui devait tout changer, qui devait faire le ménage des finances publiques, a laissé se creuser sous ses yeux sans le voir. C'est cela qui est incroyable, c'est cela qui est soumis aujourd'hui à l'examen de l'Assemblée nationale et sera soumis demain au jugement de la population, au référendum et aux prochaines élections générales.

Un bon gouvernement, le gouvernement que le Parti québécois nous a promis, devait changer les choses qui n'allaient pas dans le gouvernement antérieur. En 1976, durant la campagne électorale, le Parti québécois a promis de changer les choses, de changer les politiques et les directives qui faisaient en sorte que, suivant son opinion, l'ancien gouvernement ne méritait plus la confiance du peuple. Cela voulait dire qu'à l'arrivée du gouvernement, ou dans un délai raisonnable, le gouvernement nouveau du Parti québécois devait changer les politiques, devait changer les directives, devait changer les règlements pour assainir les finances publiques. Or, il ne l'a pas fait en ce qui concerne le financement scolaire du Québec. C'est évident. C'est d'autant plus incroyable que le ministre des Finances connaissait ou devait connaître le problème puisqu'il avait vécu avec ce problème comme conseiller financier du gouvernement du Québec pendant plusieurs années à partir de 1965, et comme ministre des Finances, lorsqu'il a vu le déficit scolaire de $500 000 000, dit-il, en arrivant au pouvoir. Il a laissé se perpétuer une situation qu'il avait lui-même qualifiée d'inacceptable en combattant l'ancien gouvernement.

Est-ce de la naïveté? Avons-nous les moyens d'avoir un ministre des Finances naïf, ou est-ce que cette naïveté ne friserait pas plutôt l'incompétence, incompétence nourrie largement des préoccupations référendaires de ce gouvernement qui s'est occupé davantage à démolir le Canada qu'à s'occuper des affaires où il était parfaitement souverain? N'ayant pu obtenir d'enquête publique et s'étant vu refuser les commissions parlementaires pour étudier cette question, nous devons nous en remettre aux réponses qui nous ont été données par le ministre des Finances et le ministre de l'Education. Ces réponses sont lamentables. Ces réponses ne sont que des plaidoyers d'ignorance, des manoeuvres de diversion. Fini la transparence! Nous n'en saurons pas davantage. Sûrement pas avant le référendum. Nous avons fait notre devoir malgré les injures qui nous ont été adressées, malgré les manoeuvres d'intimidation qu'on a tentées pour nous faire taire, pour nous bâillonner. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour que les Québécois sachent où est allé cet incroyable déficit de $500 000 000 à $600 000 000 creusé par le présent gouvernement depuis qu'il est au pouvoir.

L'incompétence administrative du Parti québécois est établie. Tout ce qui reste à trouver, c'est le ou les responsables. Il semble qu'il y en ait deux: le ministre des Finances et le ministre de l'Education. Mais l'intolérance du gouvernement et son mépris pour la légitime curiosité des Québécois nous empêcheront d'avoir les réponses avant le référendum. Cette intolérance et ce mépris des Québécois sont ce qu'il y a probablement de plus inquiétant pour l'après-référendum si, par malheur, le oui l'emportait. Les ténors du Parti québécois, comme le député de Mercier, par exemple — il est ici, cela me fait plaisir qu'il soit là pendant que je le lui dis — utilisant le vocabulaire du fascisme intellectuel le plus pernicieux, divisent les Québécois en bons Québécois, en authentiques Québécois, c'est-à-dire ceux qui sont d'accord avec eux, et en mauvais Québécois, ceux qui ne sont pas d'accord avec eux. Jamais je n'avais entendu de propos aussi méprisants à l'égard des libertés de pensée et des libertés d'expression.

M. Godin: Mme la Présidente, question de privilège.

La Vice-Présidente: M. le député de Mercier.

M. Godin: Je tiens à dire qu'à mes yeux le député de Marguerite-Bourgeoys est un authentique Canadien que je respecte parfaitement — je pense que ce n'est pas une injure de dire au député de Marguerite-Bourgeoys qu'il est un authentique Canadien — mais moi je serais menteur si je disais que je suis authentiquement canadien. Je suis d'abord et avant tout un Québécois. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Mme la Présidente, le député de Mercier a utilisé son privilège pour exprimer son mépris pour les libertés de pensée et les libertés d'expression en divisant les Québécois en bons Québécois et en mauvais Québécois. Je ne retire aucun des mots que je viens de dire à son égard.

M. Godin: Mme la Présidente, question de privilège.

La Vice-Présidente: M. le député de Mercier.

M. Godin: Je n'ai pas dit qu'il y avait des mauvais Québécois. J'ai dit qu'il y avait des authentiques Canadiens et des authentiques Québécois. C'est tout ce que j'ai dit. Par conséquent, dire au député de Marguerite-Bourgeoys que c'est un authentique Canadien, ce n'est pas du tout une injure. S'il se sent traité de mauvais Québécois quand je dis qu'il est authentiquement Canadien, c'est lui qui le dit, ce n'est pas moi. Il y a une nuance importante entre les deux. Ce n'est pas moi qui ai dit qu'il est mauvais Québécois. C'est lui qui le dit.

La Vice-Présidente: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vais laisser le député m'interrompre aussi souvent qu'il le veut. Il se cale à chaque fois, Mme la Présidente. Dans cette dialectique d'intolérance intellectuelle, oui, quand vous dites qu'on est un authentique Québécois seulement si on est d'accord avec vous... Oui vous avez dit cela. Vous l'avez dit. Relisez votre discours si vous n'en êtes pas gêné.

M. Godin: Est-ce que c'est être intolérant que de dire à quelqu'un qu'il est un vrai Canadien?

La Vice-Présidente: M. le député. M. Godin: Je pose la question.

La Vice-Présidente: M. le député, vous pourrez intervenir après l'intervention de M. le député de Marguerite-Bourgeoys, si vous en avez l'intention.

M. le député. (16 h 30)

M. Lalonde: N'en déplaise au député de Mercier, je suis très humblement un authentique Canadien, un authentique Québécois, un authentique Montréalais aussi. Ne serait-ce que pour sauvegarder nos valeurs démocratiques...

M. Godin: Je voudrais remercier le député d'être d'accord avec moi au moins sur ce point.

M. Lalonde: Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne suis pas d'accord du tout avec votre intolérance intellectuelle. Ne serait-ce que pour sauvegarder nos valeurs démocratiques...

M. Godin: Mme la Présidente, question de privilège.

M. Lalonde: Ecoutez, est-ce que j'ai la parole? C'est assez, quand même!

M. Godin: Mme la Présidente, question de privilège.

La Vice-Présidente: M. le député.

M. Godin: On m'accuse ici d'intolérance, Mme la Présidente. On attaque mon intégrité comme parlementaire et je pense que j'ai le droit de dire que je respecte les vrais Canadiens comme le député de Marguerite-Bourgeoys; d'ailleurs, tous les libéraux en face, je les respecte profondément, mais ce sont des Canadiens.

M. Lalonde: II s'est calé encore une fois, Mme la Présidente. Cela veut dire qu'un vrai Canadien ne peut pas être un vrai Québécois, d'après lui, et c'est avec ça que je ne suis pas d'accord.

Donc, ne serait-ce que pour sauvegarder nos valeurs démocratiques, il y aurait tellement de raisons de dire non au référendum. En fait, il y en a tellement que le seul argument qui restait au Parti québécois était le suivant: nous avons été un bon gouvernement; alors, faites-nous confiance. Votez en faveur du référendum, votez oui et nous

allons prendre soin de vous plus tard. Eh bien, ce dernier argument vient d'éclater, Mme la Présidente, et de disparaître à tout jamais avec la production du budget déficitaire du ministre des Finances.

Est-ce un bon gouvernement qui prépare un budget avec un trou de $500 000 000 à $600 000 000 dont il ne peut pas donner des explications? Est-ce un bon gouvernement, ce gouvernement péquiste qui endette l'avenir d'un déficit de $2 300 000 000, soit 15,5% des revenus totaux, un sommet jamais atteint au Québec et qui est 50% plus élevé que les années les plus coûteuses en termes de déficit sous l'ancien régime? Est-ce un bon gouvernement, ce gouvernement péquiste dont la ministre à la Condition féminine traite avec mépris les femmes qui ne sont pas d'accord avec son choix référendaire? Est-ce un bon gouvernement, ce gouvernement péquiste qui traite avec mépris et intolérance tous ceux qui ne sont pas d'accord avec la souveraineté-association, les traite de colonisés, de traîtres, injectant dans notre vie politique le venin du fascisme intellectuel? Est-ce un bon gouvernement, ce gouvernement péquiste qui a laissé le chômage monter, en moyenne, de 2% de plus durant son règne qu'il ne l'avait été, en moyenne, sous l'ancien gouvernement libéral? Regardez les chiffres, c'est ça. Est-ce un bon gouvernement, ce gouvernement péquiste qui a laissé tomber la construction au Québec de façon incroyable depuis qu'il est arrivé au pouvoir? Est-ce que c'est un bon gouvernement? Mme la Présidente, je vous le demande.

Moi, je vous dis: Non, ce n'est pas un bon gouvernement. Ce ne peut pas être un bon gouvernement. Un trou de $500 000 000, ça restera toujours un trou de $500 000 000. Un budget avec un trou de $500 000 000 ne peut pas être un budget d'un bon gouvernement. Sûrement pas, madame. Le mythe du bon gouvernement gît quelque part au milieu du déficit de $2 300 000 000, probablement au fond du trou d'un demi-milliard enfoui sous l'incompétence administrative du ministre de l'Education et du ministre des Finances. Le seul et dernier argument du Parti québécois pour qu'on l'appuie au référendum n'est plus. Décidément, Mme la Présidente, de quelque côté qu'on regarde, plus j'y pense, plus c'est non.

La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Education.

M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): Mme la Présidente, j'aimerais, brièvement, traiter des réalisations du ministère de l'Education au cours de l'année écoulée et vous faire part, à l'occasion de ce débat sur le budget, des projets que nous avons dans notre besace pour l'année prochaine. On parle très peu, dans ce débat financier, des projets de nos ministères. On oublie trop volontiers, je pense, les réalisations et tout ce que nous nous proposons de faire dans l'avenir, dans la foulée du livre vert sur l'enseignement primaire et secondaire, de l'énoncé de politique sur les collèges, des nouveaux régimes pédagogiques du primaire, du secondaire et des collèges, des nouveaux programmes et de combien d'autres projets concrets qui sont déjà réalisés ou sur le point de l'être dans le domaine de l'éducation.

Je voudrais passer en revue, brièvement, certaines de ces réalisations et vous dire ce que nous avons l'intention de faire, au cours de l'année qui vient, avec les milliards de dollars que le gouvernement met à la disposition de l'Education, comme c'est le cas depuis plusieurs années. Vous le savez, le ministère de l'Education, à lui tout seul, depuis maintenant la révolution tranquille, et la réforme scolaire, requiert le tiers du budget québécois, comme, d'ailleurs, le ministère des Affaires sociales.

Je vais traiter brièvement de chacun des niveaux, en commençant par le primaire-secondaire, en allant vers les universités, et j'ajouterai quelques mots sur l'aide financière aux étudiants, puisque c'est une question qui a retenu beaucoup l'attention depuis l'an dernier. Comme nous nous proposons d'améliorer les choses au cours de l'année prochaine, j'aimerais dire quelques mots là-dessus avant de terminer.

Au niveau primaire-secondaire, quelles sont nos principales réalisations? L'année 1980-1981 qui va s'ouvrir sera la deuxième année de la mise en oeuvre du plan d'action pour les écoles primaires et secondaires du Québec. Les nouveaux régimes pédagogiques qui ont été élaborés depuis l'an dernier sont présentement soumis à la consultation des commissions scolaires, qui auront également à élaborer leur planification en vue d'appliquer ces nouveaux régimes pédagogiques en septembre 1981.

Comme complément du plan d'action, qui a paru il y a un peu plus d'un an maintenant, le ministère de l'Education a diffusé deux politiques très importantes dont les mesures vont s'appliquer dès l'automne prochain, dès la prochaine année scolaire. Ce sont la politique à l'endroit de l'enfance en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage et la politique à l'endroit des milieux économiquement faibles, que j'ai rendue publique la semaine dernière.

Le ministère vient de soumettre à la consultation des milieux intéressés un document sur le développement de la formation professionnelle. Vous savez que nous avons eu plusieurs occasions de nous interroger sur les orientations dans le domaine de la formation professionnelle. Eh bien, le gouvernement a l'intention d'adopter une politique particulière pour ce domaine précis avant la fin de 1980 et, en ce moment même, nous procédons à la consultation des milieux intéressés.

En outre, nous procéderons à la mise à jour de tous les programmes du cours primaire et du cours secondaire, laquelle a été entreprise en 1979-1980. Certains de ces programmes font, d'ailleurs, à l'heure actuelle, l'objet d'expériences et leur implantation généralisée devrait se faire à compter de 1980.

Un second projet majeur, toujours au niveau primaire-secondaire, est le nouveau partage des

responsabilités entre les organismes scolaires, les enseignants, les parents et le ministère de l'Education. A la suite du sommet qui a eu lieu en janvier 1979 et qui a réuni les commissions scolaires et le ministère de l'Education, deux comités mixtes ont été créés qui ont étudié le financement des commissions scolaires et l'allocation des ressources financières entre elles. L'un des comités s'est penché également sur les responsabilités propres des commissions scolaires et nous avons déjà vu une partie des conclusions de ce comité mixte transformée en loi il y a quelques mois. Nous aurons l'occasion de légiférer de nouveau sur ces questions, notamment pour la mise en oeuvre du mode de financement des commissions scolaires. (16 h 40)

Le projet de loi no 71 qui a été étudié et adopté par cette Assemblée il y a quelque temps est venu préciser les compétences des directeurs d'école et le rôle des parents, de même que le rôle des enseignants dans la définition du projet éducatif de chaque école. La loi donne désormais un statut à l'école, qu'elle ne possédait pas auparavant; elle donne des responsabilités précises aux directeurs d'école; elle permet la création de conseils d'orientation dans chaque école où se retrouveront, autour du directeur, les enseignants et les parents qui pourront, ensemble, s'occuper de la vie quotidienne de l'école. Le ministère va accorder, au cours de l'année qui vient, une attention tout à fait particulière à la mise en place et au soutien nécessaire à l'exercice des nouvelles responsabilités qui ont été confiées aux enseignants, aux directeurs d'école et aux parents.

Venons-en, si vous le voulez bien, simplement pour nous rafraîchir la mémoire, à quelques priorités du ministère de l'Education pour l'an prochain. Nous entendons consacrer, au plan de développement de l'enseignement des langues, de même qu'à l'accueil des jeunes enfants qui ne parlent pas le français, la somme considérable de $34 000 000. Avec l'arrivée d'enfants de nombreux pays et, notamment, du Cambodge, au cours de l'année dernière, nous avons déjà été appelés à faire un effort financier en vue de les accueillir dans nos écoles. Cet effort et l'accueil qu'il comporte vont continuer au cours de l'année qui vient.

J'ai dit tout à l'heure que nous avions rendu public un énoncé de politique sur les milieux économiquement faibles dans un document qui est intitulé "L'école s'adapte à son milieu", qui a fait l'objet d'ailleurs d'un document d'animation qu'on a pu voir à Radio-Québec. Nous allons consacrer à cette nouvelle politique la somme de $16 000 000; en dépit de toutes nos difficultés financières. C'est là une priorité majeure pour le ministère de l'Education et pour le gouvernement.

Pour ce qui est de l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, qui a fait l'objet d'une politique il y a plus d'un an maintenant — je pense que cela remonte à l'automne 1977 — nous avons l'intention, cette année, de consacrer aux objectifs environ $11 000 000. Voilà de grands projets et des moyens considérables qui seront mis en oeuvre pour les réaliser.

On le voit donc, nous ne manquons pas de tels projets aux niveaux primaire et secondaire.

Je me tourne maintenant vers le réseau des collèges. Celui-ci va mobiliser des crédits de l'ordre de $580 000 000 en 1980-1981. Ce sont là des montants considérables, mais puis-je rappeler que ce réseau d'enseignement général et professionnel est composé, du côté francophone, d'une quarantaine d'établissements et, du côté anglophone, de six collèges. Ceux-ci accueilleront, tous ensemble, en septembre prochain, 115 500 étudiants réguliers, à plein temps, et au-delà de 23 000 étudiants adultes. On le voit, nous arrivons, en dépit de la dénatalité et du fait que, déjà, la double promotion ait traversé l'ensemble du système scolaire, à maintenir en gros, le nombre d'étudiants. Tous les efforts vont être déployés, au cours de l'année qui vient et assurément au cours des années qui viennent, pour que les collèges soient de plus en plus accessibles aux jeunes qui veulent y faire des études.

Pour assurer le fonctionnement des CEGEP, 8500 enseignants seront requis ainsi que 6630 personnes remplissant d'autres fonctions. Voilà, donc, un personnel abondant et qui explique le fait que nous allons consacrer aux collèges $580 000 000.

Alors que l'année 1978-1979 avait été, pour le niveau collégial, l'année de l'énoncé de politique gouvernementale à l'endroit des CEGEP, l'année 1979-1980 a été une année de mise en oeuvre. Il a fallu adopter deux projets de loi majeurs, on s'en souviendra, le projet de loi no 24 créant le Conseil des collèges et le projet de loi no 25 qui modernisait la vieille loi sur les collèges. Le terme "vieille", dans les circonstances, doit être nuancé, mais nos collègues ont tout de même dix ans et il fallait adapter la loi qui les institue aux réalités sociales et économiques les plus récentes. C'est ce que nous avons fait avec ce second projet de loi.

De plus, un certain nombre de mesures ponctuelles sont venues donner des suites immédiates à l'énoncé de politique. Je n'en retiendrai que quelques-unes d'ailleurs car elles sont très nombreuses; il y a plusieurs dizaines de mesures. Je m'arrête aux principales. Nous avons créé dix corporations nouvelles, collègues nouveaux qui remplacent la plupart des anciens collèges régionaux.

Nous avons mis en place un programme de bourses d'incitation destiné à encourager les étudiants qui se destinent à l'enseignement professionnel. Ces bourses ont pour but d'amener des étudiants à choisir certaines spécialités professionnelles qui sont plus prometteuses que d'autres sur le plan de l'emploi. Ces bourses, je dois le dire, ont connu un succès absolument inespéré.

Nous avons mis en place un programme de stages en industrie à l'intention des professeurs de l'enseignement professionnel de façon qu'ils puissent constamment être au courant des dernières techniques qui ont cours dans le métier qu'ils enseignent au niveau des CEGEP.

Nous avons mis en place un programme d'encouragement aux auteurs de matériel didacti-

que et nous avons créé à leur intention un prix important qui est décerné chaque année à l'ouvrage didactique le plus remarquable. M. le Président, cela fait un an que nous l'avons annoncé et cela a eu vraiment un succès inespéré. Les ouvrages didactiques, qui nous manquent tellement — pas seulement au niveau des collèges d'ailleurs, puisqu'ils nous manquent aussi bien au niveau universitaire que pour le primaire et le secondaire — voient le jour grâce à ce programme. Ils sont nombreux et d'excellente qualité. Nous avons l'intention, au cours de l'année et des années qui viennent, de pousser encore davantage dans le sens de la rédaction et de la publication au Québec de manuels didactiques, notamment pour le secteur professionnel, mais aussi de manuels destinés à l'enseignement général. C'est là, je pense, une très belle occasion pour les enseignants de faire valoir les connaissances qu'ils ont accumulées et de se mettre au service de la collectivité.

Nous avons élargi, par l'injection d'un budget supplémentaire de $3 700 000, la gratuité des cours offerts aux adultes. C'est également un progrès considérable. Nous avons commencé par le côté professionnel et, éventuellement, nous irons vers la gratuité complète de l'enseignement offert aux adultes au niveau collégial.

Ces réalisations ont, en quelque sorte, préparé le terrain au renouveau pédagogique sur lequel nos efforts porteront l'an prochain. Il y aura adoption de grandes mesures réglementaires au cours de l'année qui vient. Nous aurons certainement l'occasion d'en parler de nouveau au cours de l'étude des crédits, mais je voudrais donner déjà quelques indications de portée générale sur nos projets. Nous présenterons un projet de nouveau règlement des études qui est prêt maintenant et qui a été transmis au Conseil des collèges en vue d'obtenir son avis. En outre, répondant à un souhait explicite des collèges, le ministère élabore actuellement d'autres projets de règlements-cadres qui seront soumis au Conseil des collèges et aux collèges eux-mêmes en cours d'année comme, par exemple, un projet de règlements sur les ententes qu'un collège pourra désormais conclure avec d'autres organismes pour les fins de l'enseignement. Je vous rappelle, M. le Président — sans doute n'est-il pas nécessaire de le faire puisque vous êtes vous-même issu du milieu de l'enseignement — que dans l'énoncé de politique sur les collèges, nous avions déjà fait état de notre désir de permettre aux collèges, dans un esprit de décentralisation, de conclure des accords avec d'autres organismes.

Nous connaîtrons également des travaux importants sur le contenu de la formation au niveau collégial, notamment par la promulgation d'un nouveau régime pédagogique, par la mise en place d'une nouvelle politique de l'enseignement du français, par l'élaboration d'une politique de la formation professionnelle, par les travaux d'élaboration de nouveaux contenus des cours de philosophie. (16 h 50)

Nous verrons également à ce que se réalisent rapidement les travaux préparatoires à la mise en place des nouveaux cours d'économie et d'histoire, de même que du nouveau cours, qui ont été annoncés sur les institutions québécoises. Nous travaillerons afin que les cours complémentaires de mathématiques soient également prêts le plus rapidement possible. D'ailleurs, on y travaille déjà.

Nous travaillerons à la création d'un ou deux centres spécialisés, comme nous l'avions annoncé dans l'énoncé de politique. Nous comptons bien que ces centres spécialisés deviendront rapidement ce qu'on appelle des centres d'excellence. Nous travaillerons, enfin, à l'accélération du programme de production de matériel didactique pour les collèges et à l'innovation pédagogique, à la multiplication des subventions à l'excellence sous toutes ses formes dans nos collèges.

Voilà, M. le Président, beaucoup de pain sur la planche dans les CEGEP du Québec. Nous ne manquons pas de travail, ni de projets. C'est la raison pour laquelle le gouvernement doit consacrer ces quelque $580 000 000 aux collèges pour l'année qui vient.

J'aborde maintenant l'enseignement universitaire. Les établissements de ce niveau vont recevoir, en septembre prochain, une clientèle qui équivaut à 124 706 étudiants à temps complet. C'est une augmentation, M. le Président, je tiens à le souligner. On aurait pu s'attendre à ce que les universités connaissent un certain déclin en raison de la dénatalité qui frappe si durement, à l'heure actuelle, les niveaux primaire et secondaire. Mais nous avons des besoins considérables dans le domaine économique, dans tous les domaines, le culturel, le social. Nous avons besoin de gens de haute compétence. C'est la raison pour laquelle il faut continuer à développer les universités en dépit de la dénatalité. Il faut faire en sorte qu'un plus grand nombre de jeunes aillent à l'université. Je suis heureux de constater que, l'an prochain, l'augmentation par rapport à l'année dernière, à l'année qui se termine, sera de 3,5%, ce qui, dans les circonstances actuelles et compte tenu de la situation économique et financière du Québec et de l'Amérique du Nord, représente un progrès tout à fait remarquable. J'en suis heureux pour nos universités qui sont, je pense, d'une qualité toujours croissante. Il faut le dire à la population: Les universités font des progrès considérables au Québec et il n'est que juste que nous facilitions l'accès à ces établissements du plus grand nombre de jeunes possible.

Les travaux de la commission d'étude sur les universités, la publication du livre vert sur la recherche scientifique nous permettent de dire, je pense, sans fausse modestie, que l'année 1979-1980 a été une année de réflexion féconde sur l'enseignement supérieur et sur la recherche scientifique. Ce sont deux documents d'une très grande importance pour l'avenir de l'enseignement universitaire qui, d'ailleurs, vont, au cours de l'année qui vient, faire l'objet de nouveaux travaux. Cette année sera consacrée à l'élaboration et à la mise en oeuvre de nouvelles politiques découlant des

documents que je viens de mentionner. Nous connaîtrons donc la publication, à la suite du livre blanc sur la recherche scientifique, d'une politique ayant pour objet de le mettre en oeuvre.

De même, nous avons des projets considérables au ministère de l'Education en matière de formation des maîtres. En cours d'année, ces projets iront devant le milieu intéressé pour les fins d'une consultation qui s'étendra sur plusieurs mois avant que nous n'arrivions à un énoncé de politique.

Enfin, en troisième lieu, et toujours à propos de l'enseignement universitaire, j'entends déposer à l'automne 1980 un énoncé de politique gouvernementale à l'endroit des universités en vue de donner suite aux travaux de la commission d'étude et aux avis du Conseil des universités qui portent sur le rapport de la CEU. Ces avis du Conseil des universités sont extrêmement intéressants — je le souligne au passage — et nous y trouvons, bien sûr, matière à réflexion. Nous les avons reçus récemment et le ministère, en ce moment, est à rédiger l'énoncé de politique que je rendrai public à l'automne.

L'année qui vient sera par ailleurs, pour le ministère de l'Education, un moment où nous redoublerons d'efforts en vue d'une plus grande démocratisation de l'enseignement supérieur. J'en ai dit un mot il y a un instant et j'ajouterai que nous constatons qu'il y a encore dans ce domaine matière à amélioration, notamment du côté de l'accès à l'université d'étudiants qui proviennent de milieux socio-économiques plus modestes. Nos efforts iront pour cela dans le sens d'actions sélectives, comme l'adoption des programmes universitaires en vue d'accueillir les diplômés du secteur professionnel, l'aide financière particulière aux étudiants les plus démunis, l'information et l'orientation scolaires aux niveaux collégial et secondaire, l'ouverture de l'université sur le milieu et d'autres mesures encore que nous prendrons pour faire en sorte que l'université soit toujours davantage au service de la collectivité québécoise. Vous le constatez, Mme la Présidente, nous ne manquerons pas de travail au niveau universitaire.

On peut dire que l'ensemble du système d'éducation, à l'heure actuelle, est en pleine effervescence. Les projets qui ont été élaborés depuis quelques années sont maintenant en voie de mise en oeuvre. On peut dire que, d'ici un an ou deux, nous pourrons cueillir les fruits de tout le travail entrepris depuis trois ans.

Il me faut maintenant dire quelques mots sur l'aide financière aux étudiants. Cette aide demandera en 1980-1981 le vote de crédits de l'ordre de $113 000 000, c'est-à-dire une augmentation par rapport à l'an dernier de $3 270 000. Il est prévu que le ministère accordera pour plus de $84 000 000 de bourses aux étudiants des collèges et des universités en même temps qu'il leur garantira des prêts pour un peu plus de $70 000 000. C'est que l'aide financière réelle que le ministère de l'Education mettra à la disposition des étudiants sera de l'ordre de $154 000 000 pour l'année qui vient.

La plus grande partie des bénéficiaires de l'aide financière sera constituée, pour l'année prochaine de quelque 71 857 étudiants admissibles à un prêt et de quelque 50 739 étudiants admissibles à une bourse. A peine plus de la moitié de ces personnes fréquente les universités, le reste se trouve dans les collèges. En matière d'aide financière aux étudiants, l'année qui vient maintiendra les mêmes orientations et les mêmes ouvertures que l'année dernière. Plus spécifiquement, la seconde moitié de l'écart entre le budget des dépenses admises de l'étudiant de niveau collégial et celui de l'étudiant de niveau universitaire sera abolie. Nous consacrerons quelques millions de dollars justement pour mettre financièrement sur le même pied les étudiants des collèges et les étudiants des universités.

Enfin, on révisera la politique de reconnaissance des établissements d'enseignement pour fins d'aide financière, notamment pour trancher la question de l'élargissement du régime de prêts aux étudiants québécois inscrits dans les universités étrangères. (17 heures)

Soulignons, en terminant, que le programme de bourses aux étudiants étrangers sera ouvert à certains autres pays et qu'au total, en 1980-1981, 62 bourses complètes et 32 bourses partielles seront offertes, pour un montant de $685 000. C'était la première fois, Mme la Présidente, l'an dernier, que des bourses étaient offertes de la sorte systématiquement à des étudiants étrangers, en provenance de pays en voie de développement, pour faciliter leur venue au Québec et leur inscription dans nos universités. Parallèlement, nous implanterons des programmes d'accueil et d'encadrement à l'intention de ces étudiants étrangers, qui se sentent quelquefois un peu seuls dans nos universités.

Permettez-moi de dire, avant de conclure, quelques mots de l'éducation des adultes qui mobilise des montants considérables, à tous les niveaux de l'enseignement. Comme l'éducation aux adultes ne constitue pas, à proprement parler, un réseau: il faut se rappeler que l'on compte un service de l'éducation des adultes dans 79 commissions scolaires et dans les 46 établissements publics de niveau collégial. Il faut considérer les activités de formation de quelque 325 organismes volontaires d'éducation populaire, les OVEP, plus cinq syndicats et cinq institutions spécialisées. On prévoit de la sorte offrir pour l'année qui vient une gamme d'activités de formation générale socioculturelle ou professionnelle répondant à environ 573 000 inscriptions, soit 518 000 dans les commissions scolaires, près de 52 000 dans les CEGEP et 3000 dans les institutions spécialisées.

Un accent tout particulier sera mis sur la formation générale et la formation socio-culturelle de façon que les activités de formation reflètent de plus en plus les priorités gouvernementales déjà connues comme, par exemple, la condition féminine, les milieux socio-économiquement faibles et d'autres priorités sur lesquelles j'ai eu l'occasion de m'étendre au cours de cet exposé.

Voilà, Mme la Présidente, on voit qu'il y a beaucoup de choses à dire et, si je disposais de plus de temps, je pourrais m'étendre davantage, non seulement sur les réalisations du ministère de l'Education au cours de l'année écoulée, mais sur tous les projets qui vont nous mobiliser au cours de l'année qui vient.

On voit que le gouvernement est très actif dans le domaine de l'éducation, en dépit des difficultés financières. On voit que le gouvernement a de grands projets pour l'avenir. Je tenais à le dire devant cette Assemblée. Je vous remercie.

M. Shaw: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Shaw

M. Shaw: Thank you, Madam President. After listening to the Minister of Education, you would think that everything is shiny and beautiful in his ministry and that everyone was happy that the schools were opening, that there was no $500 000 000 deficit and, oh, yes. Madam President, this is perhaps the basis on which I would like to speak to the budget. The basis of the truth of what the government truly is doing and the basis of what it is pretending to be doing. Let us take, first of all, Madam President, Social Affairs, les Affaires sociales. C'est à la base des services à la population, Mme la Présidente. Prenons, premièrement, les hôpitaux. Combien de chambres à l'hôpital sont fermées depuis la venue au pouvoir de ce gouvernement. Les centres d'urgence, on entend presque à toutes les semaines que les médecins et les responsables des hôpitaux ont des plaintes, plus que ça, des patients font des plaintes parce que les budgets hospitaliers sont tellement coupés que c'est presque impossible de continuer de fonctionner avec efficacité. Les services spéciaux, moi j'ai vécu une expérience l'année passée à l'hôpital Notre-Dame; le gouvernement, avec ses pressions budgétaires sur les hôpitaux, a presque forcé la fermeture de cinq services d'un hôpital alors qu'il n'y avait pas d'autres services du même genre en langue française au Canada.

Imaginez-vous, Mme la Présidente, un gouvernement qui prétend protéger les droits des francophones pour avoir l'extension de tous les services pour les francophones était en train de fermer le seul service maxillo-facial francophone au Québec. C'est la réalité de ce gouvernement. Il prétend qu'il fait des choses; en réalité, il enlève des services aux Québécois. Regardons, Mme la Présidente, nos internes et résidents qui ont des grèves parce qu'ils sont les moins payés au Canada et les moins payés en Amérique du Nord avec un fardeau de travail qui est plus lourd que nulle part ailleurs.

Regardons nos citoyens de l'âge d'or. Nous en avons au Québec, maintenant, 8000, attendant de passer dans les centres d'accueil, mais, Mme la

Présidente, qu'est-ce que le gouvernement a fait? Il a enlevé tous les permis dans le secteur privé, et tous les programmes de développement pour les nouveaux centres d'accueil pour les personnes âgées ont été réduits à cause des coupures budgétaires. Mme la Présidente, il prétend faire des choses bien pour la population. En réalité, il vole à la population les services qu'elle a eus avant.

Let us take, Madam President, the closure and the socialization of agencies. Let us take, for example, the program of sectorization, Madam President. This is a new program in social affairs. Most of the members of this government are not even aware that it is going on but we have taken, in the city of Montreal, three units that were providing identifiable services to the population and we have sectorized them. In other words, where Ville Marie Social Service at one time was providing services in English to English speaking clientele organized and administered by English speaking people, we have done away with that. The Minister of Social Affairs said, the other day, that there are no longer beds that are English or French. That is true, Madame President; beds do not speak any language. But the patients that were allocated to those beds did. And a senior citizen who is located in a senior citizen's home in West Island, for example, who has to be moved to Québec City because there are no services for him in the English language in the province of Québec because of closures and because of sectorizations, this, Madam President, is inhuman. But this government pretends to be of the people, considerate for the people.

Take bill 24, Madam President. Bill 24, this great act, Loi sur la protection de la jeunesse. Quelle est la vérité sur le fameux projet de loi no 24? Nous avons eu, l'année passée, seulement dans le secteur 6-A, 16 000 clients référés au directeur de la protection de la jeunesse. 16 000. Savez-vous, M. le Président qu'un cinquième seulement ont été soignés? Cela fonctionne bien! J'ai entendu le ministre dire: Le projet de loi no 24, ça fonctionne très bien, mais savez-vous en même temps que maintenant, avec les délinquants durs qui occupent tous les services disponibles, services qui avant étaient alloués à des jeunes clients problèmes qui peuvent être soignés avec des programmes qui sont disponibles, ceux-ci ne peuvent plus prendre ces places parce que ces mêmes places sont totalement occupées par les délinquants durs qui, maintenant, engorgent totalement le système. C'est le projet de loi 24, le fameux projet de loi 24 qui va changer totalement la vie, la réalité pour les jeunes Québécois qui ont des problèmes sociaux.

Bill 24, Mr President, is a disaster because it has at its bases a fundamentally sound wish, but when the government puts in place a piece of legislation and then completely neglects to provide the services and the funds to affect its activity, this is tantamount to criminal. (17 h 10)

And the handicapped, Mr President? What is this government doing for the handicapped? Oh, it passed bill 9, a great bill, you know, suggesting that we are now going to have "un nouvel office, l'Office des handicapés". Mais demandez, maintenant, à des handicapés ce que vous avez fait. Oh, vous avez adopté un nouveau projet de loi qui va donner encore un peu de subventions aux familles qui ont des enfants handicapés. Mais demandez aux handicapés où sont les services d'instruction, les services de transport, d'amélioration pour leurs styles de vie. Nulle part, M. le Président, parce que ce gouvernement adopte des lois et ne met pas en fonction le voeu que ces lois expriment.

I have an example, Mr President, of a blind and cripple patient, a francophone in my riding, who requires transportation to get from his home to his workshop. He has been moved from one department to another by this famous "ministère des Affaires sociales" to the point where it is criminal.

Again, Mr President, returning to the budget, we have our growing rolls of welfare. We have our Educational department which is in a $600 000 000 deficit with closing schools and school boards screaming for additional funding so that they can maintain a level of education at its base. But the minister, if you would listen, will pretend that all is well. And roads? What have they done in roads, Mr President? Oh yes, they have spent money in removing all the English names from the signs; that, they have done. You can see them and I imagine every French Canadian driving down the highway should be proud to see the sections of the road signs that have the special tapings that remove the English words. That must make them very proud.

Mr President, there are many things this government has pretended to do. But let us examine with this reduction of services in Education, reduction of services in Social Affairs, in Roads, and in general. What has happened to the budget? When this government came to power, the budget was $10 724 000 000. It went to $12 052 000 000, $13 000 000 000 the following year and this year, $17 100 000 000. In spite of this reduction in services in every area of this government's responsibility, we have had a growing bureaucracy. We have, for example, compared to other provinces in Canada, the lowest rate of regional growth. Do you know that, Mr President? Ontario is at 12,9% which is not very good. We are at 12,7%, the Maritimes are at 13,1% and Canada, at the whole, is at 13,7%. That is not a figure that this government should be proud of.

Let us look at other figures, for example. Let us look at the rate of emigration from this province. Do we have realized, Mr President, that this province has recognized 34 000 fewer Québec citizens this year than last? And the previous year, we lost 24 000 and, in 1977, the first year of this government's coming to power, we lost another 24 604 Canadians. Oh yes! So, where and why is this budget growing and why are these growing deficits ocurring? That worries me, Mr President, because, you know, we have something to look at here. We see a government charging the highest taxes in the world or in Canada, anyway — it charges the highest taxes of any province in Canada — demonstrating a $2 300 000 000 deficit. However, let us look at that deficit. There is the pretention that this deficit will be $2 300 000 000 if our rate of growth is 1,5% over inflation. And all of the major economic reviewers are saying that Québec will be very lucky to demonstrate a 0,5 increase in our gross provincial product, which was $62 000 000 000 this year. And if we do not have this 1,5 increase, the deficit in real dollars will be $3 500 000 000 and not $2 500 000 000.

Let us look at the past. The first budget that the Parti québécois presented to this House said that the deficit would be $600 000 000. When the final accounts were filed last year, it was over $1 000 000 000. That was the first reckoning that we have seen. We just have the look at real things that are happening with this economy: a drop in population, a continued exodus of business and a drop in capital investment in the private sector. These things cannot be increasing rates of revenue.

If we have alone an increase of 14% in the growth of expenditures and an estimated 10% in the growth of revenues, we still move directly towards nothing but bankruptcy. That is the reality! A government that is spending more and collecting less, and not even considering the responsibility it has in creating the jobs that a deficit budget should represent. Yes, Mr President, it is accepted that an expansionist budget, a deficit budget is acceptable in management but that deficit should not be in current account, it should be in expanding production of this province. This new budget has no provision for expansion, none whatsoever. It is closing old holes and repairing old problems.

So, we have two problems. We have reduced services, reduced quality of services, we have an attriting tax base, we have real increase in taxes. The government pretends this year that it will reduce personal income tax by 3,5%. In reality, there is no reduction there at all because with tables and with increased revenues, the real increase to the government in personal income tax, this year, will be $151 000 000. So, to pretend there was a reduction of 3,5% in the income tax is misdirecting and misleading the people, which is the style of this government. The reality is that we will pay $151 000 000 more of tax and that means tax increases and not decreases.

Well, increased taxes, yes, increased deficits, yes, mismanagement of the services that are being provided, most certainly. How can this government pretend to tell the people of Québec that they are going to run and provide them a more efficient society than that which was there before? I would like to draw an example of SOQUEM's salt mine in les Iles-de-la-Madeleine, which this government claims is necessary for that area's economy. Let us examine that. They are asking for $17 000 000 from the federal government to make SOQUEM

function in les Iles-de-la-Madeleine. SOQUEM is a Crown corporation. There are three companies that sell salt in the province of Québec; one is Domtar, another Canada Salt and another one called Iroquois Salt. And they sell approximately 135 000 000 tons of salt to this province. We import salt from Pugwash, Nova Scotia, from Goderich and from Windsor, and we import some salt from the United States. Now, if the federal government through DREE makes this $17 000 000 grant, and we have then another "régie d'Etat" in the province of Québec, these three companies will have to leave because SOQUEM has already been assured by the Ministry of Transport of the Province of Québec that 90% of its salt purchases would come from that agency. (17 h 20)

So instead of any expansion going on the salt industry, there is reluctance and there is hesitation. I do not blame them because they see SIOBEC which loses money. As a matter of fact, every single Crown corporation owned fully by the government of the province of Québec lost money last year, lost money the year before and lost money the year before that. But we need another one, SOQUEM should be back in business, the private sector should be eliminated because that, Mr President, is what it will do.

This budget, Mr President, is the kind of budget that an interventionist government will always be producing, a progressively larger administrative cost, progressively greater revenues because of attrition of its tax base and progressively weakening services to its community. My colleague, the député de Gouin, said it was the most irresponsible budget he had ever seen. I say, Mr President, that it is in keeping with the style of this government, the big façade, pretending to do things which they are not doing. Not one area of activity of this government can be considered to be efficient, except la Régie de l'assurance-maladie.

Do not speak to me about the Automobile Insurance Board because that is another tragedy. The Automobile Insurance Board this year is hiding its income and deficits. It is putting its income directly into the Caisse de dépôt and using it and not filing adequately the reserves required to meet their indemnity development. What will happen, as has been demonstrated in this loss of $500 000 000 in Education, will even be greater in five-years time if the government does not properly fund its indemnities under the Automobile Insurance Board.

The second thing it is doing is hiding its costs generally instead of paying the costs to la Régie de l'assurance-maladie, that board is paying that cost. They are hiding the costs that are paid by la Commission des accidents du traval and they are hiding their costs, Mr Président, in payments made to victims of criminal acts. In fact, the Automobile Insurance Board charges 30% more for the services that any other Canadian would get and it is not properly paying its debts. It is not properly funding its indemnities. It is not properly paying for its expenses. That is the style of this government. We have a great Automobile Insurance Board. You can see the ads every day in the paper. What a beautiful job we are going! In reality, they are hiding another deficit.

We can also speak about the Société des alcools. Can you imagine, Mr President, that this year, the government actually went to la Société des alcools and asked them to borrow money so that they could pay revenues which they had projected for la régie. Incredible! Borrow money so you could pay me the money I expected to get because you were closed down for three and a half months. Incredible!

No, Mr President, there is nothing that this government can do. They can be demonstrated as being efficient and we can check department by department, Education, Social Affairs, the general administration. Imagine our new carte électorale. If you look at the figures for other provinces, the province of Québec spends $33 000 000 on the National Assembly with 110 members. Ontario pays $17 000 000 for 125 members. I think this is its style.

In closing, Mr President, I would like to say that this perhaps is really the budget that is typical of the style that is moving us into the referendum, the façade that they were performing and will perform in the future but the people have got to know and in the next month, they will progressively find out the truth, that this province has never been as badly managed, this province has never been as badly directed.

When they will move into the ballot box on referendum day, the people will then think twice before they give them that vote of confidence. They seem to smile and they think they have it in hand. I suggest, Mr President, that it will not be emotional approach that will attack the heart of Quebecers that has moved some moment in their direction. That will not direct that voter when he goes into the ballot box but the record of this government. Every Quebecer has been disadvantaged in one way or another, whether he had to wait in line for his automobile licence this year because the Department did not get his licence plate out in time, or whether he has been involved in an automobile accident and he has found out how inefficient and how unfair the settlements are or whether he has been involved in social affairs problem and saw how inhuman this is or whether he has doubted for the long stretched out labour entanglement that should have been cleared up in half the time, he will remember that this government has been the cause. I assure you that this memory will make him consider twice before he ever gives this government the right to negotiate anything for him. Thank you very much, Mr President.

M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président: Thank you. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je demanderais la suspension du débat pour permettre au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre de présenter son projet de loi.

Le Vice-Président: L'ajournement du débat. M. Brassard: L'ajournement. Bon d'accord!

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Vice-Président: La motion est adoptée. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, j'appellerais maintenant l'article de notre feuilleton relatif au projet de loi no 91 touchant les conditions minimales de travail.

Projet de loi no 91 Deuxième lecture

Le Vice-Président: J'appelle en deuxième lecture le projet de loi no 91, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, le projet de loi no 91 est essentiellement un projet de loi correcteur qui vient, à toutes fins pratiques, compléter une série de mesures administratives prises par le gouvernement et la Commission du salaire minimum qui sera, dès la semaine prochaine, transformée en la Commission des normes du travail, à la suite de l'adoption par cette Chambre de la loi no 126 au mois de juin dernier.

On se rappellera que la loi no 126 contient une série de dispositions qui viennent tranquillement, sans nécessairement soulever beaucoup de poussière, profondément et sérieusement modifier le contexte des relations employeur-salariés et particulièrement ceux qui ne vivent pas dans une organisation syndicale.

Cette loi prévoit, entre autres — on s'en souviendra — des dispositions extrêmement importantes sur une forme ou sur une amorce de sécurité d'emploi, entre autres des dispositions qui prévoient qu'une personne qui est à l'emploi d'un employeur depuis cinq ans ne pourra être congédiée pour une cause qui n'est pas juste et suffisante, et le salarié pourra se plaindre à un commissaire.

D'autre part, la loi no 126 prévoit également la protection de celui qui se plaint de l'application de la loi auprès de la commission, la protection de son emploi. Par exemple, un salarié se plaint à la Commission du salaire minimum, qui deviendra, dès la semaine prochaine, la Commission des normes du travail, qu'il n'est pas payé pour le temps supplémentaire auquel il a droit après 44 heures et l'employeur ne peut évidemment le congédier pour cette seule raison. Il en va de même pour la femme enceinte.

Il y a également, dans la loi no 126, des dispositions sur le préavis, c'est-à-dire qu'une personne qui est à l'emploi d'un employeur depuis trois mois à un an devra et pourra exiger qu'on l'avertisse une semaine à l'avance avant qu'elle ne soit mise à pied. Il en va de même pour celui qui est à l'emploi d'une même personne depuis un à cinq ans, ce sera alors deux semaines; celui qui est à l'emploi d'une même personne depuis cinq à dix ans, ce sera un mois de préavis; et celui qui est à l'emploi d'une personne depuis plus de dix ans, l'employeur devra lui donner au moins deux mois de préavis. Si le préavis n'est pas donné, il peut être compensé en argent carrément. (17 h 30)

II en va de même pour les congés payés qui passent maintenant à 4% et deux semaines de vacances, et non pas à la place des deux semaines, comme dans la loi 126, et 6% dans le cas de ceux qui ont plus de dix ans à l'emploi d'un même employeur.

Or, depuis que nous avons promulgué la loi 126 — je viens d'en résumer simplement certaines des dispositions qui sont, d'une façon ou d'une autre, peut-être touchées par le projet de loi 91 — il y a eu une revue du texte de loi par le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre et nous avons reçu des avis de différents organismes, etc. On se rappellera que le processus d'élaboration a été très vaste et complexe parce que c'est une loi d'application générale qui touche au-delà de 500 000 personnes au Québec. Ces revues ainsi qu'un jugement de la Cour d'appel nous obligent à modifier la loi, surtout au chapitre de la sécurité d'emploi, ainsi qu'à faire l'époussetage d'autres matières, qui causaient un problème, là où tout le monde s'entend, le gouvernement, les parties au CCTMO, les experts et les tribunaux.

Ces changements touchent essentiellement la notion de licenciement à cause, encore une fois, d'un jugement de la Cour d'appel qui n'acceptait pas la demande d'appel du ministère venant d'un jugement de la Cour supérieure. En pratique, les dispositions de la loi 91 feront en sorte qu'on définit, dans la loi de la qualification professionnelle et dans la loi 126 sur les normes du travail qui s'appliquent à l'ensemble des citoyens, ce qu'est un licenciement, pour faire en sorte qu'un employeur ne puisse quand même pas congédier une personne en lui disant, à toutes fins pratiques: Je vous mets à pied mais pour une période indéterminée, qui peut être de vingt ans. A ce moment-là, les personnes n'étaient pas protégées si on appelait cela une mise à pied plutôt qu'un licenciement. Donc, on corrige cela et on corrige une série de dispositions de concordance à cet égard.

La loi prévoit également une série de dispositions visant à préciser les pouvoirs de la commission ou du gouvernement en matière de législation

qui touche les moins de 18 ans. Egalement, le projet de loi 91 contient des dispositions qui tendent à régulariser le statut et l'application du congé de maternité en vertu de la loi 17 et de l'ordonnance de la Commission du salaire minimum sur le congé de maternité, bref des dispositions essentiellement techniques à cet égard. C'est pour cela qu'avec la collaboration de l'Opposition — j'en suis assuré — nous réussirons à procéder à l'adoption de ce projet de loi correctif pour que, dès la semaine prochaine, la loi des normes du travail soit en vigueur au Québec.

Le Vice-Président: M. le député de Portneuf. M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. Le projet de loi 91 que nous étudions aujourd'hui... J'apprécie que le ministre du Travail ait témoigné de son appréciation à l'égard de l'Opposition parce qu'il est vrai que nous avons convenu, lui et moi, de procéder à l'étude de ce projet dans les meilleurs délais. Nous avons convenu de notre côté de passer outre ou de suspendre la discussion normalement prévue pour aujourd'hui sur le discours sur le budget, qui permet à chacun des députés d'intervenir sur le budget présenté par le gouvernement et le ministre des Finances, pour adopter cette loi.

On se rappellera que la loi 126 a été adoptée en troisième lecture il y aura bientôt un an, si ma mémoire est fidèle, au mois de juin 1979. Cette loi visait essentiellement à protéger ou à mieux protéger les centaines de milliers de travailleurs du Québec qui n'avaient pas l'avantage et qui n'ont pas encore l'avantage, évidemment, d'être protégés par un contrat collectif de travail. La loi 126 prévoyait de véritables normes du travail pour différentes activités afférentes au travail d'une personne au Québec qui évolue au sein d'une entreprise où il n'y a pas de convention collective.

L'Opposition officielle, à l'époque — on se le rappellera — avait apporté une contribution qu'on a qualifiée du côté du gouvernement de très utile aux débats. On a tenu plusieurs séances, on a entendu des groupes, on a tenu des séances prolongées lors de l'étude article par article. Malgré tout cela, malgré tout le travail qui a été abattu de part et d'autre, on constate aujourd'hui qu'il y avait peut-être certaines petites failles dans la loi. Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre a introduit le projet de loi 91 qui a été soumis au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, lequel conseil ainsi que les différentes parties qui siègent au conseil se sont montrés favorables à l'adoption dudit projet de loi auquel, essentiellement, on ne peut que souscrire aujourd'hui.

Sans reprendre ce que le ministre a énoncé tout à l'heure, il va de soi que le projet de loi vise à éviter qu'un congé annuel pris par un salarié bénéficiaire de prestations d'assurance-salaire, maladie ou invalidité ne le qualifie à nouveau pour une première période de prestations. C'est impor- tant parce que l'interprétation qu'on donnait au projet de loi no 126 pouvait laisser supposer qu'une personne qui recevait de telles prestations avait droit à ces prestations peu importe la durée ou la période pendant laquelle elle était en congé et que le niveau des prestations demeurait toujours ce qu'il était initialement. Il fallait corriger cette affaire. Nous y souscrivons et nous disons oui à cela. Evidemment, sur la distinction à faire entre le licenciement et une mise à pied, on sait qu'il y a un jugement. On sait que la Cour d'appel a refusé d'entendre le jugement de la Cour supérieure sur une question d'interprétation à cet égard. Il va de soi qu'il serait inadmissible — ce n'était pas là l'intention du législateur — de faire en sorte qu'un employeur puisse mettre à pied une personne pour une période très prolongée sans que cela devienne un licenciement. Il y a peut-être une étanchéité entre les deux termes mais l'interprétation qu'il faut y donner, c'est que la volonté du législateur, lorsqu'il a adopté les articles relatifs à cela dans le projet de loi no 126, c'était de véritablement protéger le travailleur contre des mises à pied éventuelles.

M. le Président, les dispositions relatives aux congés de maternité et à l'ordonnance no 17, nous y souscrivons aussi. J'aurais peut-être un dernier commentaire avant qu'on passe aux écritures ou à l'étude du projet article par article. J'aurais une demande à formuler au ministre. Le ministre nous a indiqué que, si le projet de loi était adopté aujourd'hui — d'ailleurs, c'est ce qui nous a incités à procéder dans les meilleurs délais pour l'adopter; on peut prévoir qu'on aura une première, deuxième et troisième lecture aujourd'hui, et probablement sanction aujourd'hui ou mardi au plus tard — la loi 126 s'appliquera et la promulgation sera faite probablement mercredi, le 16 avril prochain, lorsque le Conseil des ministres se réunira.

C'est une grande interrogation qu'on a eue et j'avais posé cette question à la fin des travaux en commission parlementaire lors de l'étude du projet de loi no 126 article par article, au mois de juin 1979. Le ministre m'avait répondu qu'il ne pouvait indiquer, à ce moment-là, quels seraient les chapitres du projet de loi no 126 qui s'appliqueraient et dans quels délais d'autres chapitres seraient susceptibles de s'appliquer ultérieurement seulement. Le ministre se rappellera, entre autres, les dispositions relatives au paiement des femmes de ménage, au paiement des dames qui ont à travailler comme ménagères ou encore comme aides familiales à l'intérieur de plusieurs des foyers du Québec. On se rappellera que le ministre nous avait promis un règlement qui viendrait, en fait, apporter de la chair sur l'ossature que constituait la loi, qui prévoirait les différentes dispositions relatives aux aides-ménagères. Le ministre nous avait bien indiqué à ce moment: Cela prendra un peu de temps et cela ne pourra pas être déposé dans des délais aussi brefs que les règlements relatifs à d'autres articles du projet de loi.

Le ministre pourrait peut-être profiter de l'étude dudit projet de loi aujourd'hui qui vient amen-

der la loi 126. On vient, par le projet de loi no 91, apporter des corrections qui étaient devenues nécessaires. Ce sont des mesures correctives, j'en conviens, mais le ministre pourrait profiter de l'étude de ce projet de loi aujourd'hui pour nous indiquer, d'abord, s'il entend faire en sorte que la loi 126 s'applique au complet, que tous ses chapitres s'appliquent et ce, dès le 16 avril ou dans les meilleurs délais après le 16 avril. Si ce n'est pas l'ensemble de la loi, quels chapitres, selon ce qu'il prévoit, pourront s'appliquer dans les meilleurs délais et pourquoi le gouvernement reporterait-il à plus tard certains chapitres dudit projet de loi?

C'est là l'essentiel de mes commentaires, M. le Président. On votera pour et je pense que mes collègues et moi, on n'aura pas à demander un vote enregistré.

Le Vice-Président: Merci beaucoup. M. le ministre du Travail.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, en guise de réplique en deuxième lecture, je répondrai simplement à la question du député de Portneuf. Effectivement, dès la semaine prochaine, c'est, à l'exception de deux chapitres, l'ensemble de la loi sur les conditions minimales de travail qui s'appliquera pour tous les Québécois qui sont au travail. Les deux chapitres qui font exception sont celui sur ce qu'on appelle l'indemnisation préalable, c'est-à-dire celui qui permet à la commission d'indemniser le salarié et ensuite de poursuivre l'employeur, pour des raisons essentiellement d'analyse des données que nous avons à ce niveau et, deuxièmement, le chapitre sur l'indemnisation en cas de faillite parce qu'il y a une étude qui est en cours depuis un an, mais qui n'est pas terminée étant donné que c'est un sujet d'une très grande complexité. L'ensemble des conditions minimales de travail qui viseront à protéger au-delà d'un demi-million de travailleurs au Québec seront en vigueur à compter de la semaine prochaine. (17 h 40)

Quant aux règlements qui en découlent, la plupart seront également en vigueur sauf ceux qui feront l'objet d'une consultation d'une période maximum de 60 jours. Donc, on peut dire qu'avant la fin du mois de juin 1980 l'ensemble des conditions minimales qui touchent les travailleurs au Québec seront en vigueur et protégeront tous ces travailleurs, ce qui est considérable, même si cela aura pris un an pour promulguer l'ensemble de la loi. Je pense que c'est très peu quand on considère l'application générale, le nombre de personnes impliquées, ce que ça impliquait sur le plan administratif. Je dois vous dire que je suis passablement fier du travail qui s'est fait de ce côté par tous les fonctionnaires et tous ceux qui ont été impliqués. Ce projet de loi vient nous permettre, finalement, de promulguer, dès la semaine prochaine, la loi.

Le Vice-Président: Est-ce que la motion de deuxième lecture du projet de loi no 91 sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que nous procédons aux écritures et passons en commission plénière par la suite? Je ne sais pas si l'Opposition préférera que nous procédions en commission. Il y a quatre papillons, qui sont essentiellement des questions de forme, de changement de chiffres, etc., et qui ne sont pas de substance. Est-ce que les papillons peuvent être considérés dans les écritures?

Le Vice-Président: Je pense que nous devons aller en commission. Il faudrait aller en commission.

M. Johnson: Pardon, en commission? Alors, nous allons aller...

Le Vice-Président: Vous faites motion.

M. Johnson: Je ferai donc motion, M. le Président, pour que vous quittiez votre siège pour faire en sorte que nous siégions en commission plénière.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Commission plénière

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La commission plénière se réunit pour étudier article par article le projet de loi no 91. J'appelle donc l'article 1.

M. Johnson: L'article 1, M. le Président, j'ai déposé le papillon auprès de la commission. Il s'agit, encore une fois, essentiellement d'aérer et de préciser certains des chiffres dans une formulation. L'objet de l'article 1 est essentiellement de préciser les dispositions de la loi qui s'appliquent à la salariée enceinte qui oeuvre dans l'industrie de la construction.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le nouvel article 1 se lit maintenant...

M. Johnson: Apparemment, il y en a cinq. Je ne sais pas si elles sont...

M. Pagé: Peut-être qu'avec le mécanisme du règlement de placement il y en aurait seulement deux ou trois.

M. Johnson: Peut-être qu'il va y en avoir plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le nouvel article 1 se lit maintenant comme suit:

"L'article 3 de la Loi sur les normes du travail (1979, c. 45) est modifié par l'addition, à la fin du paragraphe 3°, après les mots "de l'article 89", des mots suivants: "et, dans le cadre de l'application de ce règlement, au dernier alinéa de l'article 74, aux articles 93, 94, 97, 122, 123, au paragraphe 6° de l'article 140 et aux articles 141 à 147." Ce nouvel article 1 sera adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté, article 2.

M. Johnson: C'est un article qui corrige une imprécision quant au nombre de jours ouvrables. Il s'agit simplement de préciser ce qu'on entendait par "espèces". Alors, un chèque payable dans les deux jours est considéré, à toutes fins pratiques, comme de l'argent. Il s'agit de le préciser dans le texte.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Nous rajoutons: L'article 60 est modifié par le remplacement, dans la première ligne du deuxième alinéa du texte anglais de cette loi, du mot "section" par le mot "division". Est-ce que cet amendement sera adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 3.

M. Johnson: A l'article 3, on vise à éviter qu'un salarié n'acquière des bénéfices en vertu d'un régime d'assurance-salaire, maladie, ou invalidité parce qu'il aurait cessé d'être prestataire du régime. C'est-à-dire que c'est un effet contraire qui était recherché par la loi et, encore une fois, l'ensemble des parties, des experts et de ceux qui se sont penchés sur la question s'accorde sur le sens de ces dispositions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 3, adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 4.

M. Pagé: Papillon 3.

M. Johnson: L'article 4, M. le Président, vise à assurer à un salarié payé autrement qu'à l'heure ou au rendement une indemnité de congé qui tienne compte des sommes perçues pour le travail effectué en temps supplémentaire, et à établir l'indemnité de congé d'un salarié saisonnier sur la base du temps effectivement travaillé. En deux mots, c'est le paiement des vacances, que ce soit en termes des 4% ou des 6% au pro rata du travail accompli par le salarié.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Nous ajoutons donc l'article 4.1 à l'article 4 qui se lit comme suit: "L'article 77 de cette loi est modifié par l'abrogation, dans la deuxième ligne du paragraphe 7e, des mots "ou d'intégration". Est-ce que cet amendement sera adopté?

M. Pagé: Oui, sauf que j'aurais seulement une petite précision, M. le Président. Le ministre constatera, à la lecture du journal des Débats, à l'intervention de deuxième lecture qu'il a faite relativement à l'article 4, que pour les vacances, c'était 4% et deux semaines. Je suis convaincu que le ministre n'a pas voulu dire 4% et deux semaines. C'est 4% ou deux semaines.

M. Johnson: Non, essentiellement, il s'agit d'un lapsus. J'aurais dû dire "ou deux semaines". Il faut bien se comprendre. Ce que la loi 126 vient faire, c'est permettre aux salariés d'exiger que ces deux ou trois semaines, selon le cas, on les leur accorde en temps. On ne peut pas les remplacer par la seule indemnité des 4%, comme c'était le cas avant.

M. Pagé: D'accord.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Est-ce que l'article 4 est adopté tel qu'amendé? Article 5, adopté?

M. Johnson: II étend le droit du salarié au préavis, en cas de mise à pied, d'au moins six mois. C'est en réponse au problème soulevé par le jugement de la Cour d'appel.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 5, adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 6, adopté?

M. Johnson: II habilite le gouvernement essentiellement à maintenir le différentiel quant au salaire minimum pour les moins de 18 ans.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 7, adopté?

M. Johnson: Disposition corrective quant au décret, puisqu'il y a un oubli de copie à l'imprimerie de la loi 126 qui avait, pour une raison ou pour une autre, été adoptée par l'Assemblée et qui

prévoyait que les décrets comme les conventions collectives étaient susceptibles de continuer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté. Article 8.

M. Johnson: L'article 8 est de concordance.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 9.

M. Johnson: Dispositions correctives également quant au décret.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté. Article 10.

M. Johnson: C'est la définition, évidemment, du licenciement, cette fois-ci dans la Loi sur la formation et la qualification professionnelles.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté?

M. Johnson: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 11.

M. Johnson: II modifie l'application de l'article 45 de la Loi de la qualification professionnelle quant à la mise à pied de plus de six mois.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté. Article 12.

M. Johnson: II s'agit d'assurer l'entrée en vigueur concordante de certains articles de la loi et de certains des règlements. C'est pour cela qu'on met "qui ont effet à compter du 20 mars 1980."

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Article 12, adopté. Le nouvel article 13.

M. Pagé: Vous n'avez pas un papillon?

M. Johnson: A l'article 13, il y a un papillon également.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le nouvel article 13 qui se lit: "Les articles 1 à...

M. Johnson: A 11.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... 11 prendront effet à compter du 16 avril 1980...

M. Johnson: Sauf l'article 6.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... sauf l'article 6 qui a effet depuis le 20 mars 1980".

M. Johnson: Voilà. Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Est-ce que le nouvel article 13 sera adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté. Article 14, adopté?

M. Johnson: Adopté.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Adopté.

Mme la Présidente, j'ai l'honneur de vous apprendre que la commission plénière a étudié article par article le projet de loi no 91 et l'a adopté avec des amendements.

La Vice-Présidente: Le rapport de la commission plénière est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. On avait parlé...

M. Johnson: Mme la Présidente, j'appellerai donc la troisième lecture. Est-ce que...

La Vice-Présidente: Consentement à...

M. Johnson: ... le projet est adopté en troisième lecture?

La Vice-Présidente: ... la troisième lecture? Des Voix: Consentement.

Troisième lecture

La Vice-Présidente: Consentement. Troisième lecture adoptée? Adopté.

M. Johnson: Mme la Présidente, puisque nous en avons terminé avec le projet de loi no 91, nous sommes à douze minutes de 18 heures; je ne sais pas si le député de Portneuf consentirait à ce que nous continuions, quitte à étendre jusqu'à 18 h 5 une intervention. Non? Il préfère qu'on reprenne. Alors, Mme la Présidente, je demanderai donc que nous suspendions la séance et reprenions nos travaux à 20 heures.

La Vioe-Présidente: Avant cette suspension, je désirerais donner avis de la question avec débat de demain; il s'agit de la question de M. le député d'Outremont au ministre des Finances concernant les conséquences économiques de la souveraineté-association proposée par le gouvernement.

Je dois donner avis à cette Assemblée qu'il y aura sanction, ce soir, à 22 heures, en ce qui concerne la loi 100, Loi modifiant la Loi sur la

consultation populaire, et la loi 91, Loi modifiant la Loi sur les normes de travail et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Sur cela, cette Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 51

Reprise de la séance à 20 h 15

Le Vice-Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Veuillez vous asseoir.

M. le député de Lac-Saint-Jean.

Reprise du débat

sur le discours sur le budget

et les trois motions de censure

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, avant de faire des commentaires sur le budget, je voudrais d'abord dénoncer la propagande mensongère qu'on retrouve présentement à pleine page dans les journaux, propagande payée par le Conseil du patronat qui, comme chacun le sait, est le porte-parole au Québec des multinationales...

M. Rivest: Ah! Vous nous contez des...

M. Brassard: ... et qui fait partie du camp des... Vous n'êtes pas à votre siège, M. le député de Jean-Talon. Donc...

Une Voix: Vous n'avez pas le droit de parole. Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Une Voix: Dormez...

M. Brassard: La panique est tellement grande, M. le Président, dans le camp fédéraliste, qu'on n'hésite pas à mentir publiquement, à triturer et à manipuler les chiffres et les statistiques. On lit, dans cette publicité du Conseil du patronat titrée "La souveraineté-association, à quel prix?"... On lit ceci...

M. Rivest: Ah!

M. Brassard: M. le Président, pourriez-vous ramener à l'ordre le député de Jean-Talon?

Une Voix: II est tout seul de sa "gang".

M. Brassard: Qu'il fasse sa digestion calmement. On lit ceci: "Le gouvernement d'un Québec souverain aurait récupéré, en 1978, $4,7 milliards d'impôts payés par ses contribuables au fédérai, mais pour tenir ses nouveaux engagements, il en aurait coûté au minimum $7,1 milliards." Or, en 1978, la même année, les revenus fédéraux en provenance du Québec se chiffrent exactement par $8 145 000 000...

Des Voix: Ah?

M. Brassard: ... un détail, quoi, une différence minime de $3 445 000 000...

Une Voix: Un trou.

M. Brassard: ... un trou de $3 445 000 000, rien que cela. Le Conseil du patronat, dans sa publicité, escamote et oublie allègrement presque $3 500 000 000 de revenus fédéraux en provenance du Québec. Il pousse l'effronterie jusqu'à demander: La souveraineté-association, à quel prix? Avec de pareilles façons de calculer, on peut mettre en doute très sérieusement la compétence du Conseil du patronat pour nous apprendre le prix de la souveraineté-association.

Une chose est sûre, M. le Président, c'est qu'en diffusant publiquement des mensonges aussi grossiers le Conseil du patronat nous révèle l'immense mépris qu'il éprouve à l'égard des citoyens québécois. Je trouve un tel procédé — je pèse mes mots — proprement écoeurant, M. le Président. Si c'est un indice de la façon dont la campagne référendaire va être menée par le camp fédéraliste, ce ne sera pas beau à voir.

J'arrive au budget, M. le Président. Je voudrais tout d'abord rendre hommage au critique financier du Parti libéral du Québec, le député d'Outremont, et lui dire combien j'admire sa franchise exemplaire. Le député d'Outremont n'était pas obligé de nous révéler ce qu'aurait fait le Parti libéral du Québec s'il avait été au pouvoir. Il n'était pas tenu de nous dire qu'il aurait haussé les impôts s'il avait assumé le poste de ministre des Finances. Il n'était pas forcé de rendre publique la volonté arrêtée du Parti libéral du Québec d'accroître le fardeau fiscal du contribuable québécois. (20 h 20)

II n'était pas obligé de le faire, il l'a quand même fait avec une franchise remarquable, et, malgré la désapprobation de son chef, le député d'Outremont a déclaré sans la moindre ambiguïté: Nous, libéraux, nous aurions augmenté taxes et impôts. Je suis, quant à moi, saisi d'admiration devant une pareille franchise, et je souhaiterais que les collègues du député d'Outremont qui vont prendre la parole après moi suivent son exemple en apportant des précisions sur la pensée budgétaire du Parti libéral du Québec. Il faudrait, par exemple, qu'ils nous disent quelles sont les taxes et quels sont les impôts qu'ils auraient l'intention d'augmenter. La taxe de vente, M. le Président? Veulent-ils rétablir la taxe de vente sur les vêtements et les chaussures? Veulent-ils maintenir la taxe de vente sur les meubles? Veulent-ils augmenter l'impôt sur le revenu des salariés moyens pour réduire l'impôt sur les revenus des hauts

salariés? Veulent-ils supprimer l'indexation des exemptions personnelles? Veulent-ils introduire des taxes nouvelles, des impôts nouveaux?

Ce sont là autant de questions qui mériteraient des réponses de la part des libéraux. La population a le droit de savoir, de connaître les hausses d'impôt et les augmentations de taxe qu'elle aurait à subir advenant l'accession au pouvoir des libéraux. J'aurais aimé, bien naïvement — je m'en rends compte maintenant — que l'admirable franchise du député d'Outremont soit contagieuse. Ce ne fut malheureusement pas le cas. Le député fut vite mis en quarantaine après sa déclaration et on cherche présentement, sans doute, à le guérir de ce qui, chez les libéraux, est considéré comme une maladie honteuse, la franchise. Mais il a tout de même pu, avant qu'on le bâillonne, nous révéler les intentions réelles du Parti libéral du Québec qui souhaite augmenter les taxes et les impôts. Nous lui en sommes extrêmement reconnaissants. Je veux de nouveau dire tout le respect admiratif que m'inspire ce savant homme pour qui le droit à l'information du public est un droit sacré.

Si le député d'Outremont mérite le premier prix de la franchise, il faut dire également qu'il remporte la palme pour son incohérence. Depuis trois ans, en effet, le député d'Outremont, dans sa critique des budgets successifs du gouvernement présentés par le ministre des Finances, expose inlassablement, infatigablement, la même thèse, qui peut se résumer ainsi: La situation économique est difficile, la conjoncture est difficile, le taux de chômage est trop élevé; il faut relancer, redresser l'économie et, pour ce faire, le gouvernement doit adopter résolument des budgets expansionnistes et ne pas craindre les déficits importants. Telle est la thèse que l'on retrouve dans toutes les interventions du député d'Outremont sur les budgets successifs du gouvernement depuis 1977.

Dès cette année, d'ailleurs, dès 1977, il sert une bonne leçon au gouvernement. Ecoutons-le, cela en vaut la peine, c'est très instructif. En critiquant le budget de 1977-1978, il justifie à l'avance le budget 1980-1981. "Entre l'équilibre budgétaire et l'équilibre économique — on est en 1977 — ce gouvernement a choisi l'équilibre du budget. Il a choisi de se comporter en comptable myope et à courte vue, plutôt qu'en gestionnaire éclairé de l'économie et cela, aux dépens des intérêts des travailleurs québécois." Un peu plus loin, toujours la même année, dans la même intervention: "Cette recherche de l'équilibre comptable, outre qu'elle est chimérique dans le contexte actuel, va directement à l'encontre de l'intérêt économique et même à l'encontre de la bonne tenue des finances publiques elles-mêmes. L'équilibre rigide auquel le gouvernement veut tendre en se faisant l'apôtre d'une orthodoxie budgétaire déplacée et inopportune — c'est toujours le député d'Outremont qui parle — n'est pas en réalité au service d'une politique économique, mais bien au service d'objectifs politiques." Il concluait: "N'aurait-il pas mieux valu d'emblée un budget plus dynamique, plus résolu- ment anticyclique?" Ecoutez bien: "Un tel budget se serait certes traduit, lui aussi, par des emprunts plus importants que prévu par le ministre des Finances, mais il aurait eu le mérite de favoriser délibérément une reprise de l'activité économique."

En 1977, le député d'Outremont dit, en somme, au ministre des Finances: Vous auriez dû emprunter plus. En 1978, il doit mettre de côté sa rengaine pour se porter — vous vous en souviendrez — à la défense des hauts salariés du Québec un peu plus taxés que ceux de l'Ontario, les pauvres. Presque toute son intervention, à cette époque, a porté là-dessus. Mais en 1979, l'an dernier, à l'occasion du débat sur le budget 1979-1980, il reprend sa ritournelle et il reproche sévèrement au gouvernement de ne pas avoir présenté un budget expansionniste. "Les besoins financiers nets de l'Etat, affirme-t-il, sont réduits de $200 000 000 par rapport à l'année précédente. C'est un budget de restrictions, dit-il, sur un ton sans doute désapprobateur. Il s'agit d'un budget dont l'effet est de réduire la demande globale de $200 000 000 et qui, par conséquent, détruit des emplois plus qu'il n'en crée."

En somme, l'an dernier, le député d'Outremont dit au ministre des Finances: C'est abominable, vous empruntez moins que l'an dernier. Vous empruntez $200 000 000 de moins, vous êtes un comptable myope et à courte vue. Dans sa conclusion, le député d'Outremont fustige le gouvernement avec vigueur. "L'orientation générale de ce budget, dit-il, celui de l'an dernier, en est un de restriction de l'activité économique et d'encouragement au chômage. Il ne s'adresse donc pas aux Québécois aux prises avec l'inflation, avec la paresse des investissements ou avec le besoin impérieux qu'ils ont de conserver ou de trouver un emploi." Fin de la citation.

Encore une fois, l'an passé, le ministre des Finances, selon le savant économiste d'Outremont, s'est comporté en grippe-sou, en séraphin sans coeur, en radin. Essayons, M. le Président, c'est important, de bien comprendre la pensée du député d'Outremont.

En 1977-1978, avec une prévision de croissance réelle du produit intérieur brut de 3,5%, c'est un péché mortel de présenter un budget de restrictions et de compression des dépenses. C'est un péché mortel. En 1978-1979, avec une prévision de croissance réelle du produit intérieur brut de 4%, c'est une vraie honte de ne pas présenter un budget expansionniste. En 1979-1980, l'an dernier, avec une prévision de croissance réelle du produit intérieur brut de 3,5%, c'est un scandale épouvantable, c'est un crime impardonnable de présenter un budget de restriction, comme il l'appelle.

Pourtant, rappelons-le, ça en vaut la peine, 1979,c'est une des meilleures années de création d'emplois au Québec. A l'exception de 1973, c'est une des meilleures années depuis treize ans. Une excellente année économique, celle de l'an dernier. On pouvait lire, dans les journaux d'aujourd'hui, que le Québec, de mars 1979 à mars 1980, a créé 101 000 emplois. Il a créé plus d'emplois que l'Ontario. Bonne année économique, mais, selon le député d'Outremont,

c'est impardonnable, un véritable crime de présenter un budget de restriction. (20 h 30)

Or, en 1980-1981, cette année, avec une prévision de croissance réelle du produit intérieur brut — vous vous souvenez du discours sur le budget du ministre des Finances — de 1,5%, le gouvernement décide qu'il est temps, compte tenu de la situation économique, compte tenu de la conjoncture, de céder enfin aux exhortations pressantes du député d'Outremont. Il est temps de suivre les conseils si judicieux du réputé économiste libéral. Il présente un budget expansionniste avec un déficit plus important que la situation économique l'exige. En d'autres termes, prévoyant une année plus difficile sur le plan économique, 1,5% de prévisions de taux de croissance du produit intérieur brut par rapport à 3,4% et 3,5% pour les trois années précédentes, le ministre des Finances, se laissant guider par la vision pénétrante du député d'Outremont, entend bien cette fois-ci devenir un gestionnaire éclairé de l'économie plutôt qu'un comptable myope et à courte vue. Le soir du 25 mars, le ministre des Finances, à la fin de son discours, s'assoit et il attend les félicitations du député d'Outremont.

Voilà trois ans, se dit-il ou pense-t-il, qu'il réclame à cor et à cri un budget expansionniste. Voilà trois ans qu'il exige que l'équilibre économique passe avant l'équilibre budgétaire. Il va se lever et exprimer sa satisfaction. Oh! sans doute, va-t-il s'en attribuer une part du mérite, mais, enfin, il va sûrement manifester son contentement. C'est ce que le ministre des Finances se dit à lui-même. Ah! quelle n'est pas la surprise de tout le monde, et du ministre des Finances en plus, en entendant le critique financier du Parti libéral crier à la faillite, à l'incompétence, à l'irresponsabilité, à la banqueroute.

Avouez que c'est plutôt étonnant, M. le Président. Rendez-vous compte: on fait ce qu'il nous dit de faire depuis trois ans et il nous reproche maintenant de faire ce qu'il nous a dit de faire. Vous y comprenez quelque chose?

Une Voix: Non.

M. Brassard: A 3,5%, à 4%, à 3,5% de taux de croissance économique prévue, il exige un budget expansionniste et, à 1,5% de croissance prévue, revirement, retournement spectaculaire, virage radical, réorientation fondamentale chez le député d'Outremont: II faut un budget de restriction des dépenses et de hausses d'impôts. Avouez qu'il y a de quoi se surprendre.

Quand l'économie va relativement bien, il est scandalisé de ce qu'on présente ce qu'il appelle des budgets de restriction. Quand l'économie donne des signes de ralentissement et de faiblesse, changement de cap chez le député d'Outremont. Il réclame des budgets de restriction, alors qu'il nous a dit, depuis trois ans: Des budgets de restriction, cela signifie plus de chômage. Avouez qu'il y a de quoi être surpris, M. le Président.

Vous me rétorquerez: C'est une sommité en économique; c'est un puits de science; c'est un docteur en économique. Oui. Je vous rétorquerais, M. le Président: Se pourrait-il que ce savantissime docteur ait sombré, par inadvertance, dans l'incohérence et l'illogisme? Se pourrait-il que l'alcool frelaté de la partisanerie bornée lui soit tellement monté à la tête qu'il en ait perdu toute objectivité et, surtout, la mémoire?

Au risque de passer pour un polisson qui manque de respect à l'égard d'un eminent docteur, je dis que le député d'Outremont donne un spectacle pitoyable en désavouant avec désinvolture tous les conseils, toutes les leçons, tous les enseignements qu'il nous a prodigués depuis trois ans, et cela dans le seul but de s'ajuster au négativisme absolu de son parti et de son chef, car il s'agit bien de cela. Les libéraux sont tellement négatifs, ils sont tellement conditionnés à dire non à tout qu'ils n'hésitent pas à renier ce qu'ils ont prêché pendant trois ans. La Rochefoucauld disait: "II n'y a rien que l'on donne si libéralement que ses conseils." J'ajouterais, voyant évoluer le député d'Outremont, que les conseils, on les reprend parfois et souvent tout aussi libéralement qu'on les a donnés.

Somme toute, deux premiers prix, à mon avis, pour le député d'Outremont. Un premier prix de franchise—je l'ai reconnu au début— et un premier prix aussi d'incohérence, de contradiction et d'illogisme.

Je suis d'un naturel curieux et je m'en voudrais de terminer sans poser quelques questions à l'Opposition officielle. Je sais bien, nous savons désormais qu'ils sont contre les baisses d'impôt. Ils sont contre les baisses d'impôt puisqu'ils sont pour les hausses. Comme on le dit, une porte doit être ouverte ou fermée. On ne peut pas, en même temps, être pour l'allégement du fardeau fiscal et pour son accroissement. C'est impossible. Donc, ils sont contre les baisses d'impôt et, en plus, ils sont pour les hausses. Je ne sais pas pourquoi, mais j'aimerais le savoir, M. le Président. Il reste encore quelques heures de ce débat. Ils ont le temps de nous le dire.

Pourquoi, par exemple, sont-ils contre la réduction générale de 3% de tous les taux d'impôt sur le revenu, comme cela a été annoncé dans le discours du budget? Pourquoi sont-ils contre une réduction générale de 3% des taux d'impôt sur le revenu? Ils ont sans doute de bonnes raisons. J'aimerais les connaître. Nous aimerions les connaître. Pourquoi sont-ils contre l'indexation de 7,5% des exemptions personnelles qui va commencer le 1er janvier 1981 et qui va s'ajouter aux 12,5% qui s'appliquent à partir du 1er janvier 1980? Leur explication est certainement intéressante. Nous aimerions la connaître.

Pourquoi sont-ils opposés à l'abolition de la taxe de vente sur les meubles, telle qu'annoncée par le ministre des Finances? On connaît les réserves du député d'Outremont à ce sujet. Il se demandait l'an dernier, en 1979 — et je cite — "s'il est opportun et équitable que l'impôt serve à influencer la consommation." Il demandait cela

l'an dernier. Il n'était pas certain que ce soit équitable d'orienter les gens, par une diminution ou une abolition de taxes, à consommer certains produits. Il avait des réserves là-dessus. Est-ce que les collègues du député d'Outremont partagent ses réticences à ce sujet?

Pourquoi sont-ils contre la reconnaissance de la valeur économique de la femme collaboratrice, ce que réclame depuis des années l'AFEAS, reconnaissance qui prendra la forme d'une déduction de son salaire sur le revenu de son mari? La semaine dernière, le député de Marguerite-Bourgeoys s'est moqué, assez lourdement d'ailleurs, de cette mesure en faisant une division absurde et démagogique. On consacre $15 000 000 cette année pour cette mesure. Il a divisé les $15 000 000 par trois millions de femmes pour dire que cela donnait $5 par femme au Québec. Donc, il s'est moqué assez lourdement de cette mesure, mais il a oublié de nous dire pourquoi il n'en voulait pas. Pourquoi sont-ils contre cette mesure? Qu'ils répondent à ces questions, M. le Président, de sorte que la population connaisse mieux la pensée et les intentions des aspirants au pouvoir que sont les libéraux. (20 h 40)

Je conclurai en disant très simplement, M. le Président: Voilà un budget qui poursuit l'opération allégement fiscal amorcée il y a deux ans en portant à plus de $1 100 000 000 l'ensemble des réductions de taxes et d'impôts depuis deux ans. $1 100 000 000, c'est une réduction considérable du fardeau fiscal des contribuables québécois et c'est ce que les Québécois veulent, M. le Président. C'est un budget comme celui-là, un budget qui poursuit l'allégement fiscal que veulent les citoyens québécois. Voilà un budget qui entend mener à terme courageusement — je l'ai dit hier au sujet de la motion du député de Marguerite-Bourgeoys — la tâche d'assainissement des finances publiques et qui ne craint pas d'exhiber sur la place publique les pièces de la machine bureaucratique qui fonctionnaient mal, qui n'hésite pas à les étaler sur la place publique et qui entend bien les changer, les modifier ou les réparer. Donc, pas de cachotterie, pas de camouflage, pas d'escamotage. La différence entre leur trou et le nôtre, c'est que le nôtre, on a la pelle à la main et on est en train de le remplir, alors que le leur, ils barbotaient dans le fond.

C'est ce que les Québécois veulent, que le gouvernement poursuive l'assainissement des finances publiques; c'est ce qu'on fait. Voilà enfin un budget qui tente de s'ajuster, dans toute la mesure du possible, avec les moyens du bord et les ressources dont on dispose, à la conjoncture économique par un déficit plus important, oui, ce qui est la meilleure façon d'aider l'économie à se relever. Ou moins, c'est ce que j'ai lu tout récemment — j'ai pris la peine d'aller à la bibliothèque de la Législature pour cela — dans un livre qui s'intitule "Economique" et qui est écrit par l'économiste Rodrigue Tremblay: "Une des meilleures façons, dans une conjoncture difficile, pour un gouvernement, d'aider à relever l'économie, c'est de présenter un budget avec un déficit plus important." C'est ce qu'on a fait.

C'est ce que les Québécois veulent, M. le Président, un budget adéquat qui réponde aux besoins et aux aspirations des Québécois, et c'est ce que le gouvernement a présenté. Je pense que c'est à la satisfaction des citoyens du Québec.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

A l'ordre s'il vous plaît!

M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président, question de privilège. Je me demande si vous me permettrez de déposer en Chambre quelques documents relativement à une déclaration qui a été faite par le député de Mercier, il y a quelques jours, touchant la question... Je ne veux pas en discuter, pour moi c'est une situation qui...

Le Vice-Président: Si vous me dites que c'est une question de privilège qui se rapporte à des propos qui ont été tenus il y a quelques jours par un membre de l'Assemblée nationale, je pense que les articles de notre règlement sont très clairs et que vous devez suivre la politique décrite dans notre règlement.

M. Scowen: Comme vous voulez. M. le Président, vous allez entendre une analyse du budget qui n'est pas du tout la même que celle du député de Lac-Saint-Jean que vous venez d'entendre, et ce sera à vous de décider qui a raison.

La première chose que je veux soulever, c'est la question du négativisme du Parti libéral. Le député disait que le Parti libéral est très négatif et que le Parti québécois est très positif. Je sais bien que la population n'est pas impressionnée par cette argumentation. Comme vous le savez, M. le Président, chaque fois que vous faites un choix dans la vie, vous êtes obligé de dire oui à quelque chose et non à quelque chose d'autre. Par exemple, le Parti québécois a souvent manifesté un négativisme; le député de Lac-Saint-Jean, ce soir était clairement contre le Conseil du patronat. Le ministre du Travail s'est prononcé souvent contre, au cours de ces derniers mois, les grèves dans le secteur privé et dans le secteur public aussi, il a adopté des lois.

M. Brassard: Question de privilège!

Le Vice-Président: M. le député de Lac-Saint-Jean, sur une question de privilège.

M. Brassard: Le député de Notre-Dame-de-Grâce dit que je suis contre le Conseil du patronat; c'est faux, je suis contre les mensonges du Conseil du patronat.

M. Scowen: La ministre d'Etat à la Condition féminine s'est récemment élevée contre les Yvettes

du Québec avec le résultat que l'on connaît très bien. Je pense qu'on peut dire de plus que le Parti québécois est contre le Parti libéral du Québec et également contre la fédération canadienne. Pour être pour l'indépendance du Québec, il faut être contre la fédération canadienne.

Je veux simplement démontrer, M. le Président, que cette attitude du Parti québécois disant que l'Opposition est négative et qu'il est positif, c'est extrêmement simpliste et c'est une attitude qui n'impressionne personne. Le député a également cité amplement mon collègue, le député d'Outremont. J'ai quelques citations qui sont du ministre des Finances que je vais vous donner dans quelques minutes et elles sont aussi très révélatrices.

Premièrement, je veux parler du budget. Au cours des deux dernières semaines, nous avons eu l'occasion d'écouter quelques débats très intéressants et très instructifs quant à l'avenir du Québec et du Canada. Avec les déclarations de M. Parizeau sur le budget suivies des réponses aux questions posées par notre chef au premier ministre, nous sommes finalement devant la possibilité de connaître le bilan de l'An I de l'indépendance du Québec pour la première fois. Je vais parler tantôt de ces chiffres où il s'est révélé très clairement, ces dernières semaines, que le bilan de l'An I de l'indépendance du Québec est un déficit de $6 000 000 000 au moins, $4000 par famille québécoise ou, si vous voulez le mettre dans les termes du ministre des Finances, qui aime beaucoup à parler en termes de caisses de bière, le coût de l'indépendance pour les Québécois, pour la première année, est à peu près de 660 caisses de bière.

Je vais revenir à ces chiffres plus tard mais, d'abord, je veux parler du budget lui-même. Comme tous les membres de l'Opposition l'ont souligné, nous sommes devant un déficit de $2 300 000 000, le pire déficit que le Québec ait jamais connu dans son histoire. C'est une prévision et il faut ajouter que les prévisions du ministre des Finances ne sont pas bonnes. Pendant trois ans, il n'a jamais réalisé ses prévisions. La première année, la réalité était de 35% pire que sa prévision. En 1978-1979, elle était de 18% pire et, l'an passé, elle était de 25% pire. En effet, en moyenne, à la fin de l'année, nous sommes obligés d'accepter le fait que le ministre des Finances n'a jamais réalisé ses objectifs. Je pense qu'il nous est permis de dire maintenant que, s'il prévoit un déficit de $2 300 000 000 pour la prochaine année, ce déficit sera d'au moins $2 800 000 000, basés sur ses propres imprécisions de l'année passée.

En effet, à la fin de cette année, les Québécois seront devant un déficit de pas loin de $3 000 000 000 avec des emprunts de $2 200 000 000 et avec une dette publique au Québec de $11 000 000 000. A la fin du mandat de M. Bourassa, le déficit le plus élevé était de $800 000 000 et la moyenne pour les années de M. Bourassa était en dessous de $400 000 000, les emprunts les plus élevés étaient de $1 350 000 000 et la dette que le Parti libéral a laissée au gouvernement actuel était une dette de $6 000 000 000.

Quand M. Parizeau a fait son premier discours sur le budget, devant cette situation qui lui avait été laissée par M. Bourassa, il a dit en 1977, et je le cite: "Les contraintes dont a hérité le nouveau gouvernement en regard de la fiscalité et du financement par emprunts sont considérables et lourdes de conséquences. La voie à suivre pour restaurer la situation financière est donc toute tracée. Il faut réduire les sommes à emprunter." M. Parizeau disait, en 1977, qu'il avait hérité d'une situation économique lourde de conséquences et que pour la résoudre il fallait réduire les sommes à emprunter. A ce moment-là, les emprunts atteignaient $1 300 000 000 et la dette publique du Québec était de $6 000 000 000. (20 h 50)

Trois ans plus tard, M. le Président, le déficit du Québec a doublé. La dette du Québec a doublé et le déficit annuel est monté de 700%. La faillite complète de l'administration du gouvernement du Québec, je pense, est clairement démontrée dans ces chiffres. Ce n'est pas une question qui est sérieuse, c'est exceptionnellement grave. Cette année, nous aurons un déficit de $1400 par famille et c'est une année où le taux d'intérêt que nous sommes obligés de payer pour financer cette dette se situe à des niveaux records. Les derniers emprunts du gouvernement du Québec ont été faits à un niveau de taux d'intérêt de 13%. Simplement pour payer l'intérêt sur les emprunts de cette année, nous serons obligés de payer $300 000 000 par année; simplement pour les emprunts de cette année. A la fin de cette année, l'intérêt payé par les citoyens du Québec sur la dette publique sera au-dessus d'un milliard de dollars.

Tout ce que le ministre nous a promis en 1977 n'est pas réalisé, n'a même pas commencé d'être réalisé.

Le deuxième sujet que je veux soulever, M. le Président, c'est que ce n'est pas un déficit expansionniste comme l'a prétendu le député de Lac-Saint-Jean. C'est un déficit imposé par les erreurs passées du gouvernement. Premièrement, c'est imposé par une erreur de $500 000 000 faite dans le fameux trou, l'erreur du ministre de l'Education. C'est fait de plus par un autre $500 000 000 que nous sommes obligés de payer aux membres de la fonction publique et du secteur public pour les conventions collectives que nous venons de signer. C'est une augmentation de $500 000 000 par année que nous allons payer aux employés dans le secteur public cette année. Une autre erreur que le ministre a admise dans son discours du budget, ce sont les $75 000 000 de la réforme municipale. En effet, nous sommes pris avec des coûts additionnels causés par un agrandissement du secteur public et l'erreur du ministre des Finances est au-dessus d'un milliard de dollars. Ce sont les raisons pour le déficit. Ce n'est pas pour stimuler l'économie. Comme vous le verrez dans une minute. M. le

Président, il n'y a rien pour stimuler l'économie. C'est un déficit imposé par les erreurs administratives du gouvernement actuel.

Oui, il y a certaines réductions d'impôt.

Il y a une réduction dérisoire de 1% dans l'impôt des particuliers. Il y a l'élimination de la taxe de vente sur les meubles. Ces diminutions se montent à $270 000 000. Il y a également, de l'autre côté, les augmentations de taxes dans des domaines comme le pétrole et les taxes sur les compagnies et sur le tabac qui vont coûter aux contribuables du Québec au-dessus de $100 000 000. En effet, la stimulation nette de l'économie cette année se situe dans les alentours de $150 000 000, ce qui est moins de 1% du budget. Il n'y a aucune stimulation économique dans ce budget. Le ministre ne pouvait pas le faire en partie à cause de l'erreur du ministre de l'Education et en partie à cause de ses propres problèmes avec ses conventions collectives. C'est grave, M. le Président. Les paroles de mon collègue, le député d'Outremont, ont été très mal comprises par le député de Lac-Saint-Jean. Pour le député de Lac-Saint-Jean, le budget expansionniste que souhaitait mon collègue depuis longtemps, ce n'est pas ce budget qui fait l'expansion du secteur public. Pour les membres du gouvernement, un budget expansionniste, c'est un budget dans lequel on augmente le nombre de régies, on augmente les contrôles, on augmente les salaires dans le secteur public et on ne fait rien pour l'expansion de l'économie. Je suis certain que le ministre de l'Industrie et du Commerce, par exemple, et les autres ministres du secteur économique dans le gouvernement sont très déçus par ce budget.

J'ai eu l'occasion de retourner en arrière et de sortir le fameux: Bâtir le Québec, l'énoncé d'une politique économique pour le Québec qui a été rendu public il y a quelques mois. Dans ce document, M. le Président, à la fin, il y a une liste de 123 recommandations très précises. Vous pouvez le vérifier vous-même, je pense que c'est exact. Il n'y a aucune de ces 123 recommandations de Bâtir le Québec qui est adoptée dans ce budget. En effet, la décision, même déclarée par le premier ministre dans son discours inaugural, de mettre l'accent sur la vie économique du Québec pour les années à venir a été complètement négligée. Bâtir le Québec est sur les tablettes, exactement de la même façon, si vous voulez, que M. Trudeau a mis le rapport Pepin-Robarts, comme vous l'avez constaté, sur les tablettes. Personne ne veut parler de Bâtir le Québec, c'est lettre morte.

Je pense que le ministre de l'Energie et des Ressources, le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre des Transports et le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre sont très déçus de savoir que la mission économique, leurs quatre ministères, va recevoir, cette année, une augmentation de 7% dans le budget et que les autres missions gouvernementales, les missions sociales et les missions culturelles, vont recevoir une augmentation de 15%. En effet, l'année de l'économie prévue par le gouvernement du Parti qué- bécois, avec toutes les déclarations au début, avec le grand livre Bâtir le Québec, est finalement, dans les détails, dans la réalité, rendue presque à zéro. 7% pour la mission économique, 15% pour le reste du gouvernement, pour l'appareil gouvernemental. Ce n'est pas la stimulation économique que vous voyez dans ce budget.

Pour stimuler, M. le Président, il y avait des idées suggérées par tout le monde. Premièrement, une réduction de l'écart dans les impôts des entrepreneurs québécois comparés avec les entrepreneurs de l'Ontario. Ils sont déjà 25% plus élevés que ceux de l'Ontario. Cet écart est très important. Un entrepreneur québécois est obligé de payer un impôt personnel 25% plus élevé qu'un entrepreneur ontarien.

Deuxièmement, élimination des droits successoraux pour permettre aux propriétaires des petites entreprises québécoises d'avoir la même opportunité que les propriétaires d'entreprises dans les autres provinces. Cela n'a pas été fait. De plus, des crédits pour stimuler l'investissement. Il y a toutes sortes de possibilités et on ne fait rien pour stimuler l'investissement. La fameuse société d'expansion des exportations promise par le premier ministre dans son discours inaugural, mise de côté complètement. On ne parle même plus de cette affaire; c'est fini, la société d'expansion des exportations.

En effet, M. le Président, tout ce qu'ils ont fait qui touche directement les compagnies, l'industrie, l'expansion économique au Québec, c'est augmenter de 1% l'impôt sur les compagnies. C'est le seul élément qu'on peut voir, qui touche ça et c'est négatif. Je le dis, M. le Président, parce que c'est très clair. Je répète que ce n'est pas un budget expansionniste; c'est un budget imposé, un déficit imposé par la mauvaise administration du gouvernement.

Le résultat, Mme la Présidente, est très révélateur et on le voit très clairement dans le chômage au Québec. En 1977, le ministre des Finances a hérité d'un taux de chômage de 9,3%. Dans son discours, en 1977, il disait: C'est 9,3% et c'est intolérable. Trois ans plus tard, qu'est-ce qu'on voit dans le discours du budget? La seule allusion au chômage est la suivante: "Le chômage restera à peu près au niveau que nous avons connu en 1979." En effet, le ministre des Finances prévoit le même niveau de chômage que l'an passé. Est-ce que vous savez quel était le niveau de chômage l'an passé, Mme la Présidente? C'était 9,6%. En effet, le taux de chômage, depuis 1977, est augmenté d'à peu près 5% ou 7%. C'était intolérable il y a trois mois et, maintenant, le ministre des Finances ne prend même pas la peine de parler de cette affaire comme d'un problème.

Alors, à nos chômeurs au Québec, aux personnes qui avaient l'espoir, cette année, d'améliorer leur situation, leur emploi, je dis: II faut que vous acceptiez que le ministre des Finances ne prévoie pas quelque chose pour vous. Si vous êtes en chômage, vous allez rester en chômage. C'est clair. Il n'y a pas de possibilité de stimuler

l'investissement, ici au Québec, parce qu'ils n'ont pas les moyens à cause de cette orgie de mauvaise administration qu'on a vécue et dont nous avons vu l'exemple parfait le plus révélateur dans le trou du ministère de l'Education. (21 heures)

En résumé, nous sommes devant un budget désastreux, un déficit sans précédent, des dépenses totalement hors contrôle, des emprunts à un niveau désastreux d'après l'opinion du ministre lui-même, avec un taux d'intérêt, aujourd'hui, de 13%, le plus élevé, je pense, dans l'histoire du Québec. Si vous ne me croyez pas, Mme la Présidente, je vous demanderais de lire le discours du ministre des Finances et les annexes. Cela vaut la peine de les lire. Je pense que vous serez persuadée que tout ce que je vous ai dit est à 100% exact. Ces trois années du Parti québécois sont des années lourdes de conséquences pour tous les Québécois. Le ministre des Finances a mis une hypothèque épouvantable sur notre avenir collectif et ce sont les gens qui ont entre 15 et 30 ans qui seront obligés de payer le prix pendant toutes leurs années productives.

Je passe maintenant brièvement à l'avenir. Comme vous le savez, le Parti québécois nous propose l'indépendance du Québec. Il propose de couper les liens fédéraux, de reprendre tous les impôts et toutes les dépenses fédérales ici, au Québec. L'idée de base, c'est que, d'après eux, ce sera mieux fait ici, nous serons plus riches et plus heureux si nous ne payons plus de taxes au gouvernement fédéral et si le gouvernement fédéral ne dépense plus de sommes au Québec.

Je veux soulever deux points seulement en ce qui concerne ce projet. Premièrement, je pense qu'avant que vous acceptiez cette idée, Mme la Présidente, vous devriez essayer de vous assurer que le programme du Parti québécois va améliorer la situation actuelle. Il n'existe rien, dans les deux pages du livre blanc qui sont consacrées à l'association économique, pour vous indiquer que ce sera mieux. Je prends, à titre d'exemple, seulement le chômage. Pendant le discours sur la question référendaire, beaucoup de députés ont fait allusion au fait qu'il y a toujours eu un écart entre le taux de chômage au Québec et celui en Ontario, et c'est vrai. Depuis plusieurs années, il y a un écart de deux points de pourcentage. Depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, c'est rendu à environ trois. C'est pire depuis 1976, comme tout le monde le sait. C'est une disparité régionale entre le Québec et l'Ontario et c'est mauvais. Je pense que tout le monde doit faire quelque chose pour la régler. Mais est-ce que la façon de la régler, c'est l'indépendance du Québec?

Avant que vous disiez oui, Mme la Présidente, je veux vous citer quelques chiffres sur les disparités régionales à l'intérieur du Québec même. Est-ce que vous savez qu'aujourd'hui, les écarts de taux de chômage dans les régions du Québec sont beaucoup plus élevés que celui entre l'Ontario et le Québec.

Prenez, par exemple, la région de Québec même, la ville de Québec et le Bas-Saint-Laurent.

Le taux de chômage en 1978, ici à Québec, était de 9,8% et dans le Bas-Saint-Laurent, c'était de 18,5%. Entre la Gaspésie et la ville de Québec, vous avez un écart du taux de chômage de 100%. Entre Montréal et le Nord-Ouest du Québec, un autre exemple, Montréal: 10%, le Nord-Ouest: 21%. Encore 100% de différence.

Le taux de chômage le plus bas en 1978 était dans les Cantons de l'Est à 8,4% et le plus élevé était dans le Nord-Ouest à 21,1%. Alors, voici les écarts des disparités régionales qui existent à l'intérieur du Québec après 110 ans de Confédération et trois ans de pouvoir du Parti québécois.

Je pense que nous serions naïfs de croire que si le Parti québécois n'a pas les moyens de réduire les disparités régionales de chômage entre les régions du Québec, s'il peut accepter ces disparités que je viens de décrire, ne pas parler de ça dans un discours sur le budget, c'est naïf de croire que ce sont les mêmes gens qui peuvent régler les écarts de taux de chômage entre le Québec et l'Ontario. Il faut au moins poser les questions.

Prenez l'exemple du revenu moyen, Mme la Présidente. En Ontario, le revenu moyen est légèrement plus élevé qu'au Québec. Les écarts à l'intérieur du Québec, entre les régions du Québec, se situent entre 10% et 25%. Si vous habitez les Cantons de l'Est, vous avez un revenu moyen annuel de 10%, à peu près, plus bas que celui de Montréal, et ce n'est pas loin. C'est un exemple seulement.

Si vous voulez donner à M. Lévesque un mandat de vendre la maison canadienne, la maison dans laquelle nous vivons depuis 110 ans, et de faire une nouvelle maison, je pense que vous devez prendre en considération ces chiffres. C'est clair, quant à moi, qu'il n'y a rien d'indiqué dans le projet qui va nous donner une meilleure vie économique ici, au Québec. Et comme je l'ai répété à plusieurs reprises, c'est toujours les plus démunis qui paient les conséquences. Nous, les politiciens et les fonctionnaires, n'avons rien à faire. Ces problèmes du chômage, ces problèmes d'impôt auront les conséquences les plus lourdes sur les personnes âgées, en chômage et sur les jeunes. Je vais revenir sur ce point.

Le dernier point que je veux soulever ici, c'est le bilan de l'année 1. Comme je vous l'ai déjà dit, quant à moi, et ce sont les chiffres mêmes du gouvernement que j'utilise, le bilan de l'année 1, c'est $4000 de déficit au moins par famille.

Une Voix: L'année 1 de l'indépendance.

M. Scowen: L'année 1 de l'indépendance, oui. Dans la question, le gouvernement vous propose de reprendre tous vos impôts fédéraux au Québec. Les impôts que vous avez payés au fédéral l'année passée étaient à peu près, au total, $8 000 000 000. Vous allez les reprendre. Si vous les reprenez, vous allez reprendre également toutes lés dépenses du gouvernement fédéral l'an passé et ces dépenses, d'après les mêmes chiffres du gouvernement du Québec, étaient de $11 600 000 000. En effet, nous allons reprendre $8 000 000 000 d'impôts et $11 600 000 000 de dépenses; est-ce que

c'est clair? L'écart sera de $3 600 000 000. Ce n'est pas un cadeau que le fédéral va nous donner, c'est un cadeau qu'il va perdre. Le reste du Canada va gagner $3 600 000 000 qu'il ne sera plus jamais obligé de verser au Québec.

Une Voix: Si on leur coûte si cher, pourquoi veulent-ils nous garder?

M. Scowen: C'est très drôle pour le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, pour les députés, pour nous qui n'avons pas la responsabilité de le payer. Mais ce sont des chiffres que vous avez sortis vous-mêmes. Ce sont des chiffres qui ne sont pas contestés. La seule chose que le ministre des Finances nous a dite, c'est: Oui, c'est vrai aujourd'hui mais ce n'était pas vrai il y a dix ou quinze ans. Je ne peux pas contester les chiffres d'il y a dix ou quinze ans mais une chose que je sais très bien, il n'y a personne au Québec qui aura l'occasion de payer ses impôts sur la base d'il y a dix ou quinze ans. Malheureusement, nous sommes pris avec la situation actuelle et l'avenir. Et, aujourd'hui, c'est $3 600 000 000 de déficit que nous allons récupérer si nous récupérons nos impôts.

Nous n'aurons plus les pensions de vieillesse canadiennes, nous serons Québécois. Aujourd'hui, les pensions de vieillesse ne sont pas francophones ou anglophones, québécoises ou ontariennes, elles sont canadiennes. Les allocations familiales sont canadiennes. L'assurance-chômage, c'est canadien. C'est la même pour tout le monde au Canada. Les subventions au pétrole ne sont pas québécoises ou ontariennes, elles sont canadiennes.

Dans les questions que le chef de l'Opposition a posées à M. le premier ministre la semaine passée, il a demandé: Qu'est-ce que vous allez faire avec cet écart de $3 600 000 000? Est-ce que vous allez réduire les services ou est-ce que vous allez augmenter les impôts ou est-ce que vous allez augmenter les déficits? Parce qu'il y a seulement ces trois choix. Si vous recevez une facture de $3 600 000 000 du gouvernement fédéral, il faut faire quelque chose avec. Si je comprends bien le premier ministre, dans sa réplique, il disait: Premièrement, il n'est pas question d'éliminer ou réduire les services. Il dit: Vous ne devez pas faire peur aux gens en disant que peut-être les pensions de vieillesse seront réduites, ou l'assurance-chômage. On s'engage à les maintenir exactement au même niveau. Très bien! Il a dit, de plus: On s'engage à ne jamais augmenter les impôts, c'est hors question. (21 h 10)

Le député d'Outremont a suggéré que si, à long terme nous dépensons plus que nous recevons par les impôts, finalement, il faut augmenter les impôts. C'est clair quant à moi aussi. Il faut, un jour, qu'on équilibre les recettes avec les dépenses. C'est élémentaire, mais ce n'est pas élémentaire pour le premier ministre. Le premier ministre disait implicitement que cet écart de $3 600000 000 entre les impôts et les dépenses fédérales, que nous sommes obligés d'accepter, est accepté ici avec un déficit additionnel de $3 600 000 000. Voilà!

J'arrive, Mme la Présidente, à la fin. Nous avons aujourd'hui un déficit québécois presque certain de $2 500 000 000 à $2 800 000 000. On n'a jamais vu quelque chose comme cela dans l'histoire du Québec. Si nous acceptons la proposition du gouvernement de reprendre nos impôts et nos dépenses, nous allons accepter, si nous voulons garder tous les services que nous donnons maintenant et donner du travail à tous les fonctionnaires fédéraux québécois pour que personne ne perdre son emploi, nous serons obligés d'accepter un déficit additionnel de $3 600 000 000, et $3 600 000 000 du fédéral plus $2 500 000 000 à $2 800 000 000 de notre propre gouvernement totalise très vite, comme vous le savez, $6 000 000 000. C'est la facture, Mme la Présidente, de l'année 1 de l'indépendance du Québec et ce n'est pas drôle.

Mme la Présidente, je suis persuadé que pour tous ceux qui sont obligés, année après année, de ne pas dépenser plus qu'ils ne gagnent en revenus, ce sera impossible à supporter. C'est un déficit de $4000 par famille au Québec, chaque année. Vous savez que c'est vers la faillite que nous allons si nous ne diminuons pas les services ou n'augmentons pas les taxes. Oui, on peut peut-être absorber un déficit de $6 000 000 000 pendant une année ou deux, mais n'oubliez pas que c'est un déficit qui sera remboursé avec un taux d'intérêt de 13%.

Je termine, Mme la Présidente, en disant que c'est un gouvernement qui administre mal, qui nous a laissés une dette publique sans précédent et qui semble prêt à augmenter de nouveau, avec le projet de l'indépendance, le déficit de $3 600 000 000, qui seront payés non pas par nous, les politiciens, mais par les citoyens du Québec.

Je pense, en terminant, Mme la Présidente, que même ceux qui sont prêts à laisser tomber, après 113 ans, le travail de nos ancêtres, de nos parents, de nos grands-parents qui ont bâti ce pays qu'est le Canada, leur citoyenneté canadienne, qui sont prêts à laisser tomber leurs députés fédéraux, qui sont prêts à laisser tomber la présence canadienne au Québec au complet — aucune présence canadienne au Québec, jamais plus — même ces personnes doivent arrêter un peu devant les chiffres que je viens de vous donner.

Je n'essaie pas de vous faire peur. Je vous dis de faire attention. Le bilan de l'année 1 de l'indépendance du Québec est un déficit de $4000 par famille québécoise. Merci.

M. Paquette: Mme la Présidente, me permettrait-on une question?

La Vice-Présidente: Je regrette, M. le député. M. le ministre d'Etat au Développement culturel et député de Bourget.

M. Camille Laurin

M. Laurin: Mme la Présidente, nous venons d'entendre plusieurs sophismes de la bouche du député qui vient de parler. Les déficits dont il fait état au débit de la souveraineté-association — nous le savons bien — sont dus au fait que le gouvernement fédéral marche sur la finance cette année et depuis plusieurs années. Il emprunte d'une façon excessive. Ses déficits sont excessifs. Pour le reste, ce dont a parlé le député pourrait facilement être rétabli si nous faisions disparaître les doubles emplois, les chevauchements de juridiction et si le Québec recevait véritablement les dépenses qui correspondent à ses besoins et non pas les prestations d'assurance-chômage et toutes les autres prestations par rapport aux dépenses créatrices d'emplois. Je ne veux pas m'attarder plus longtemps sur ces sophismes qui ont été longtemps et plusieurs fois démolis par mes collègues.

Sur chaque dollar qui se dépense au Québec, la part des deux paliers de gouvernement est de $0.42, ce qui veut dire que, si le produit national brut du Québec était de $50 000 000 000, les dépenses effectuées par les deux gouvernements y contribueraient pour 42%, soit pour une somme de $21 000 000 000. Ce n'est donc pas seulement en vertu de son pouvoir de légiférer que le gouvernement constitue l'agent économique majeur d'un pays moderne par les grandes politiques qu'il élabore, propose à ses partenaires et met en pratique, mais c'est aussi par son pouvoir de dépenser, par les sommes qu'il injecte dans l'économie et qui entraînent celle-ci en vertu de leur masse aussi bien que de leur objet.

C'est là une des raisons fondamentales qui sous-tendent le projet de souveraineté-association que le gouvernement entend bientôt négocier avec le Canada, car le Québec ne consent plus que ce pourcentage de 42% soit divisé en deux, que sa part d'un produit national brut de $50 000 000 000 ne soit que de $10 000 000 000, mais il veut aussi y injecter toutes les dépenses qui sont de son ressort pour les alimenter, les étoffer, leur donner leur maximum de pouvoir d'efficacité.

Les Québécois diront oui à ce projet parce qu'il s'impose comme une évidence, mais aussi afin d'enterrer à tout jamais le projet alternatif du Parti libéral qui, lui, constituerait un recul et une démission pour le Québec. Parmi les objectifs que le livre beige assigne, en effet, à la nouvelle constitution canadienne, celui de l'égalité des peuples du Québec et du Canada est réduit à sa seule dimension linguistique, se dilue dans les onze autres objectifs qui consacrent le rôle du gouvernement central et disparaît finalement au profit de l'égalité des individus et des régions.

Cette même régression inqualifiable apparaît de nouveau lorsque le document traite de la répartition des pouvoirs. C'est au gouvernement central que sont attribuées, en effet, les responsabilités de faire face aux défis nouveaux que pose le monde actuel, de gérer l'espace économique commun, d'assurer la redistribution de la richesse collective entre individus, provinces et régions, d'assurer la bonne marche des politiques nationales dans les domaines de l'industrie et du commerce. C'est la consécration désormais définitive d'un statu quo mortel pour le Québec. C'est l'abandon à tout jamais du pouvoir économique dont le Québec a un urgent besoin et qui conditionne sa sécurité et son développement sur tous les plans. Ce serait, enfin, la réduction du Québec au statut d'administration locale confinée pour toujours à l'exécution des tâches courantes que lui assigne le pouvoir central.

Les députés québécois qui continueraient à siéger au Parlement fédéral ne pourraient plus jamais empêcher ce glissement vers le néant, car ils ne compteraient bientôt plus que pour 20% de la députation et se soumettraient demain comme aujourd'hui, comme dans le cas actuel de la bataille des F-16, aux dures exigences pancana-diennes de leurs partis respectifs.

Avec la souveraineté-association, au contraire, le gouvernement du Québec récupérera toute sa part du produit national brut. Il aura seul le pouvoir de dépenser au Québec; il orientera ses dépenses dans le sens des seuls intérêts et besoins de la collectivité québécoise dans les divers domaines économique, social et culturel. On mettra fin ainsi au scandale actuel où le fédéral fait 50% de ses dépenses productives en Ontario en salaires, achats et investissements et n'en fait que 15% au Québec, ce qui l'oblige à compenser en haussant les prestations distribuées au Québec au titre de la péréquation et de l'assurance-chômage. (21 h 20)

Avec la souveraineté-association, au contraire, le gouvernement québécois concentrera toutes les dépenses productives au Québec. Il donnera toute son importance et tout son rôle à notre politique d'achat. Il animera et renforcera notre économie. Il entraînera à sa suite tous ses partenaires du secteur privé. Il développera toutes les régions et répondra plus adéquatement aux besoins des citoyens dont il connaît par ailleurs, mieux que tous les autres, les problèmes, besoins et aspirations.

Dans le budget 1980-1981, la mission culturelle revêt plus d'importance que jamais. Depuis son arrivée au pouvoir en 1976, le gouvernement en a fait une priorité qui se traduit aussi bien au niveau législatif que budgétaire. Le premier exemple touche le domaine linguistique. Il est affirmé et démontré dans le livre blanc sur la politique linguistique comme dans la loi 101 qui l'incarne que la langue n'est pas seulement un instrument de communication. Elle véhicule une histoire, un patrimoine, des expériences communes. Elle constitue un lieu de rassemblement, un instrument de cohésion sociale. Il s'ensuit que le Québec étant majoritairement français, la langue française doit normalement devenir la seule langue officielle, la langue de l'administration, la langue du travail, la langue de l'enseignement et de la justice.

Le Parti libéral a dit non à cette affirmation de notre identité. Il a accepté avec humilité l'humiliation que comportait le jugement de la

Cour suprême qui, au nom d'une constitution colonialiste et oppressive, a désavoué cette loi et réintroduit au Québec le bilinguisme officiel. Avec le livre beige, le Parti libéral veut même aller plus loin et enlever au Québec son droit de légiférer en matière linguistique. Jouant à l'apprenti sorcier, il s'attaque à la loi 101 qui a mis fin à une crise de dix ans par des mesures qualifiées — je cite — d'efficaces et de raisonnables par l'Institut CD. Howe, accueillies avec enthousiasme par les francophones et de plus en plus acceptées par les minorités allophones et même anglophones. Le fait de ressusciter le critère inapplicable de la langue maternelle et d'ouvrir ainsi l'école anglaise aux anglophones du monde entier et non aux immigrants d'autres langues ne peut que réveiller l'angoisse des francophones, faire surgir à nouveau le spectre de la discrimination dont la loi 101 nous avait débarrassés et ainsi mettre le feu aux poudres et mener à de nouveaux affrontements.

Avec la souveraineté-association, au contraire, la francisation du Québec continuera de s'effectuer dans la dignité et l'harmonie. Les trois organismes prévus par la loi sont munis à cet effet des crédits nécessaires et continueront leur excellent travail. Nos diplômés des collèges et universités occuperont en nombre toujours plus grand, dans le secteur privé anglophone en particulier, les postes supérieurs auxquels leur compétence les a préparés. Des efforts seront faits pour intensifier la présence et améliorer la qualité de notre langue partout où il en est besoin, par exemple, dans les manuels de classe, dans la publicité, dans les media, dans le monde du travail, etc. Dignité et rentabilité économique vont de pair et il n'en est pas de meilleur exemple que la loi 101.

Après avoir mis au point sa politique linguistique, le gouvernement a repris les efforts de Pierre Laporte et de Jean-Paul L'Allier et les a parachevés et élargis en rassemblant tous les éléments d'une politique ambitieuse et moderne de développement culturel fondée sur l'identité nationale et la démocratisation de la culture. Cette politique a été bien reçue dans tous les milieux et nous a même valu les éloges d'autres pays et de l'UNESCO en particulier pour son approche anthropologique, pour son caractère global et pour l'ouverture et le respect dont elle témoigne à l'endroit de nos diverses communautés culturelles.

Cette politique incluait un plan d'action à court et à moyen terme dont la réalisation s'est poursuivie depuis lors énergiquement, systématiquement et à un rythme uniformément accéléré. En témoignent entre autres les réalisations suivantes: le ministère de l'Education a fait connaître ses politiques et plans d'action sur l'enseignement primaire, secondaire et collégial, sur l'école en milieu économiquement faible, sur l'enseignement aux élèves en difficulté d'apprentissage. La Commission d'étude sur les universités a effectué une étude en profondeur de l'enseignement universitaire et un plan d'action devrait suivre d'ici quelques mois. On prépare, actuellement, une politique et un plan d'action sur la formation professionnelle.

Au ministère des Affaires culturelles, l'activité a été débordante. La loi du livre donne enfin toute la place qui convient à nos éditeurs, distributeurs et libraires en même temps qu'elle met en place les infrastructures nécessaires à une politique de la lecture. Le plan de développement des bibliothèques dotera d'ici peu toutes nos villes et villages, avec la pleine participation des municipalités, de bibliothèques vastes, bien fournies, enfin aptes à répondre à la soif du savoir qui se manifeste chez les Québécois. La Société de développement des industries culturelles maintenant fondée est en place, a été dotée d'un capital de $10 000 000 et elle aide déjà sensiblement notre industrie du disque, de l'édition et du spectacle à se développer face à la concurrence des monopoles étrangers.

L'art lyrique a été relancé et l'Opéra de Montréal a été pourvu de bases solides qui assureront un rendement de qualité et permanence. Les subventions aux troupes de théâtre national et régional ont été haussées de même que le budget général de soutien aux arts d'interprétation et aux arts plastiques. Le Québec sera bientôt doté des grands équipements culturels collectifs dont il a un tel besoin tels une Ecole nationale des métiers d'arts, un Musée national de la science et de la technologie, un Musée national des arts, un réseau de musées régionaux de toute nature en même temps que seront modernisées et agrandies les Archives nationales et la Bibliothèque nationale. Des ententes ont été conclues avec plusieurs municipalités afin qu'elles puissent mettre en valeur leur patrimoine avec l'assistance financière du gouvernement.

Le ministère des Communications n'a pas été moins actif. Les antennes de Radio-Québec parsèmeront bientôt tout le territoire québécois en même temps que se poursuit la régionalisation de la production et de la programmation afin que tous les citoyens de toutes les régions puissent avoir bientôt leur part de la télévision éducative.

De grands efforts se poursuivent également pour améliorer la qualité de la programmation nationale et pour en faire profiter toutes les communautés culturelles. Afin de rapprocher le citoyen et son gouvernement et mieux l'informer sur ses politiques, des bureaux de Communication-Québec ont été ouverts dans tous les coins du Québec. Les media communautaires écrits ou électroniques se sont multipliés également dans toutes les régions et reçoivent du ministère un soutien technique et financier croissant. L'Institut du cinéma se développe et de nouveaux projets législatifs sont à l'étude. Le soutien aux organismes de loisir est lui aussi croissant, en réponse aux demandes du milieu. La Régie des sports depuis si longtemps attendue a enfin été créée. Le gouvernement a travaillé durant deux ans à une politique du loisir qui a été soumise à la consultation et que les divers milieux

ont améliorée. Le ministère du Loisir, qui regroupe enfin chasse et pêche, a enfin été créé et un plan d'implantation de la nouvelle politique sera bientôt étudié et mis en place avec la collaboration nécessaire des municipalités et des agents du milieu. Le ministère d'Etat au Développement culturel, tout en animant et supervisant cet immense effort, a poursuivi, de son côté, ses propres travaux. L'Institut de recherche sur la culture a été créé. Huit colloques ont été tenus aux quatre coins du Québec avec les diverses communautés culturelles. Leurs recommandations ont déjà eu des effets importants, par exemple, création d'associations, programmation de Radio-Québec, subventions aux media communautaires des diverses communautés culturelles, politiques d'accueil dans la fonction publique, et le reste.

A ce sujet, il faut souligner l'effort important qui sera bientôt fait pour améliorer les conditions de vie de la population majoritairement anglophone de la Basse-Côte-Nord. J'annoncerai bientôt que $8 000 000 seront consacrés à cette région dès cette année afin de rattraper le retard causé par l'inertie des gouvernements antérieurs, autant d'Ottawa que de Québec. Pour l'actuel gouvernement du Québec, en effet, tous les citoyens sont égaux et doivent être traités comme tels. (21 h 30}

Le livre vert sur la recherche scientifique a été soumis à la consultation et débouchera, dans les semaines qui viennent, sur un plan d'action. La commission d'étude sur la formation professionnelle et socio-culturelle des adultes est actuellement au travail. Les nombreux travaux effectués depuis deux ans sur le problème complexe et délicat des droits d'auteur devrait déboucher sur un plan d'action d'ici la fin de l'année. Cette priorité accordée à la culture trouve sa traduction au niveau budgétaire. De $43 000 000 qu'il était en 1976-1977, le budget des Affaires culturelles passe à $86 300 000 en 1980-1981. Il a donc doublé en moins de quatre ans. Le ministère des Communications se voit attribuer, pour sa part, un budget record de $132 000 000, attribuable surtout au plan de régionalisation et d'amélioration de Radio-Québec, au programme d'aide aux media communautaires et à l'augmentation sensible des crédits affectés au cinéma et à l'audio-visuel.

L'implantation de la politique du loisir porte les crédits du nouveau ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche à $186 000 000, dont une bonne part ira à l'amélioration des équipements sportifs et de plein air, aux organismes locaux et régionaux de loisir, aux jeux du Québec et aux comités des fêtes populaires.

Le ministère de l'Education disposera enfin d'un crédit de $5 000 000 000 qui lui permettra de financer les commissions scolaires dans le cadre de la réforme de la fiscalité municipale, de moderniser l'appareil de gestion et d'améliorer la qualité de l'enseignement à tous les niveaux. Cette importance considérable apportée à la culture par le présent gouvernement constitue une autre des raisons fondamentales qui sous-tendent le projet de souveraineté-association. Dans une matière aussi intimement associée à l'âme et à l'identité d'un peuple, le gouvernement se veut le seul maître d'oeuvre des politiques et le seul responsable des fonds de la collectivité. L'attitude du Parti libéral est bien différente. Autant il a négligé dans le passé la mission culturelle, particulièrement durant ses six dernières années de pouvoir, autant il est prêt à laisser le pouvoir central continuer ses intrusions et ses mises de fonds considérables qui lui permettent de mettre la culture québécoise en tutelle et de l'asservir à une culture canadienne, par ailleurs mal définie. Même si la culture est liée intimement à la langue et à l'identité d'un peuple, le livre beige en fait un domaine de juridiction partagée. Il laisse ainsi le champ libre, dans un Québec essentiellement français, à un pouvoir central dominé par le Canada anglais. Celui-ci contrôle déjà toutes les institutions culturelles canadiennes telles que bibliothèque nationale, Archives nationales, Radio-Canada, Office national du film, musées nationaux, etc. Dans le domaine des arts, des lettres, du patrimoine, du loisir, le gouvernement central dépense déjà dix fois plus au Québec que ne peuvent le faire les ministères québécois avec leurs ressources limitées. Par ailleurs, ses décisions sont unilatérales, arbitraires, ne tenant aucun compte des priorités et des politiques québécoises. Le document libéral s'éloigne donc, encore ici, des positions, des protestations traditionnelles du Québec. Son projet constitutionnel maintient le statu quo, conserve au pouvoir central toutes les institutions qu'il contrôle déjà, lui permet d'utiliser son pouvoir de dépenser pour lancer d'autres politiques canadiennes dans tous les secteurs de la culture, multipliant ainsi les accrochages et conflits éventuels et contribuant surtout au génocide en douce de l'identité et de la culture québécoise.

Liée intimement à la culture d'un peuple ainsi qu'à son développement économique, la recherche scientifique est également ravalée dans le document libéral à un simple moyen d'action, ce qui permet à ce document, encore une fois, d'oublier les positions traditionnelles du Québec et de laisser au pouvoir central le monopole qu'il possède déjà. Pourtant, le Parti libéral devrait savoir que 60% des subventions fédérales en recherche industrielle sont allées, l'an dernier, à l'Ontario. Il devrait savoir aussi que, dans le domaine de la recherche universitaire, au cours des deux dernières années, l'Ontario a reçu $400 000 000 et le Québec $200 000 000. Il en a toujours été ainsi. Le Québec vient d'insister à nouveau pour corriger cette situation qualifiée de critique par les chercheurs québécois eux-mêmes qui se sont prononcés au cours de la vaste consultation qui a suivi la parution du livre vert sur la recherche scientifique.

Le gouvernement est maintenant prêt à faire connaître sa position sur toute cette question. Il le fera au cours des prochaines semaines lorsqu'il rendra publics un énoncé de politique et un plan d'action pour les prochaines années. Inspiré par

un projet fondamental de participation et de démocratisation de la science, ce plan d'action mettra de l'avant une stratégie principalement axée sur le développement du potentiel humain de recherche scientifique, développement lui-même arrimé aux priorités de développement économique, social, culturel et politique du Québec. C'est dans cette perspective qu'il proposera des aménagements institutionnels et des mécanismes de financement fondés sur la diversité et la complémentarité des responsabilités et des fonctions et sur la concertation des intervenants. Enfin, il définira les pouvoirs et le cadre politique dont le Québec a besoin pour assumer lui-même et normalement son développement scientifique et technique.

A l'aide d'une responsabilité politique et administrative bien identifiée, on s'emploiera à assurer une meilleure concertation des secteurs universitaire, industriel et gouvernemental et, par voie de conséquence, on assistera enfin à une meilleure utilisation des immenses talents de la création scientifique au Québec.

Dans le domaine de la recherche scientifique, comme dans beaucoup d'autres, le gouvernement considère que, pour mettre fin au gaspillage et au tiraillement de deux gouvernements qui se partagent la même assiette fiscale, il n'y a qu'une solution à laquelle les conférences fédérales-provinciales qui se succèdent depuis quinze ans ne sont jamais parvenues, c'est le rapatriement total et exclusif du pouvoir de lever des impôts. C'est la seule façon d'en arriver à une pratique administrative saine qui corresponde vraiment aux besoins de notre société.

Toutefois, ' le pouvoir de dépenser est incomplet s'il ne s'accompagne pas du pouvoir de légiférer. Un deuxième exemple illustre cette nécessité pour le Québec d'exercer un pouvoir exclusif en matière législative, et c'est le domaine du droit d'auteur. Le droit d'auteur, faut-il le répéter, est intimement lié au devenir de la culture et au développement des industries qui la produisent et la diffusent. Or, le Québec est tragiquement absent, tant du point de vue administratif que législatif, de ce champ d'intervention. Cette situation va nettement à rencontre des orientations fondamentales de la politique québécoise de développement culturel dans la mesure où le droit d'auteur est indissociable d'une politique globale.

Le fait que la constitution actuelle reconnaît au gouvernement fédéral juridiction exclusive en matière de droits d'auteur ne saurait plus longtemps justifier la timidité en ce domaine du gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec estime que la spécificité québécoise commande une loi du droit d'auteur conçue en fonction même de cette réalité nationale. Il en découle que tout projet de loi devant s'appliquer au Québec devrait être conçu non seulement en consultation avec, mais bien par les Québécois eux-mêmes.

L'importance de rétablir au plus tôt des conditions économiques convenables d'existence pour les créateurs québécois est telle que le gouver- nement, dans la foulée de la Conférence socio-économique sur les industries culturelles tenue en décembre 1978, a accéléré le processus de recherche et d'analyse touchant le droit d'auteur. Des rapports ont été présentés, des consultations ont été menées, des documents de travail ont été élaborés. Avec la participation des milieux de la .création, nous sommes à préciser une problématique, à esquisser un schéma de solution dans un document de travail qui sera bientôt soumis au Comité ministériel permanent du développement culturel.

L'objectif que nous poursuivons vise à améliorer le statut socio-économique des créateurs, sans toutefois restreindre l'accès des utilisateurs aux oeuvres créées. C'est le même objectif qui sera mis de l'avant dans la rédaction d'une loi québécoise du droit d'auteur. Est-il besoin de préciser que cette pièce législative sera l'une des premières lois que l'Assemblée nationale sera appelée à voter dès que la nouvelle entente recherchée avec le Canada le lui permettra. (21 h 40)

Le pouvoir exclusif de faire ses lois et de lever ses impôts accordera, d'une façon générale, au gouvernement des Québécois, le pouvoir et les moyens d'accélérer la mise en place des mécanismes de développement nécessaires à son épanouissement. Nous croyons que la majorité des Québécois a déjà compris qu'une réponse affirmative, qu'un oui massif au référendum, autorisera enfin le déblocage qui lui remettra la responsabilité de son destin. Dans le monde entier, Mme la Présidente, on parlera très bientôt du printemps québécois. Merci.

La Vice-Présidente: M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, Mme la Présidente. J'ai écouté avec attention l'honorable ministre d'Etat au Développement culturel. J'en viens à la conclusion qu'avec la souveraineté association ce sera le paradis avant la fin de nos jours. C'est merveilleux!

J'aimerais profiter de ce débat pour faire part des préoccupations profondes qui m'animent en tant que nouveau député de la belle circonscription de Beauce-Sud.

Des Voix: Encore nouveau?

Une Voix: Arrive en ville, bonhomme!

M. Mathieu: Encore nouveau, cela fait seulement trois mois et demi au lieu de trois ans et demi; il y a une différence.

Une Voix: C'est du bois vert.

M. Mathieu: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mathieu:... c'est le premier budget auquel j'ai l'honneur d'assister et, évidemment, avec un déficit record de $2 300 000 000, vous comprendrez que je ne pourrai pas oublier ce budget, surtout si l'on tient compte du trou encore inexpliqué de $500 000 000 à l'Education. J'en conclus que le Parti québécois, c'est le parti des records: record de déficit, record de chômage, record d'inflation, record surtout d'inflation verbale à certains moments.

L'élément positif du budget est, sans contredit, le versement qui provient, qui vient au Québec de la part du gouvernement du Canada, de $4 030 000 000.

M. Rivest: Combien, $4 000 000 000?

M. Mathieu: $4 000 000 000, sans tenir compte des avantages versés directement par le gouvernement du Canada au gouvernement du Québec comme, par exemple, compensation sur le pétrole, pensions de viellesse, allocations familiales, aide à la création d'emplois, aide à l'industrie, services, armée, affaires extérieures, postes; tout ceci évalué à environ $3 600 000 000.

Alors, si nous étions dans un budget de l'an I d'un Québec séparé, nous aurions à faire face à un déficit de $2 300 000 000 et un manque à gagner de $3 600 000 000 puisqu'il nous serait venu d'Ottawa $3 600 000 000 de plus que ce que nous avons donné. Ce qui fait une différence, peut-être minime aux yeux de certains ministériels, de $6 000 000 000.

M. Rivest: Pour la première année seulement.

M. Mathieu: Pour la première année seulement, $6 000 000 000. Pour la première année de l'indépendance sur la finance.

Mme la Présidente, on se fait dire dans les commissions parlementaires, nous, les libéraux: Vous voulez que nous augmentions les budgets pour les transports, pour différentes choses et vous nous reprochez notre déficit. On veut nous mettre en contradiction. Il n'y a pas de contradiction là. Notre approche dans la répartition des priorités serait grandement différente. Je suis persuadé qu'un gouvernement libéral n'aurait pas augmenté la publicité et les communications, publicité dans tous les ministères et, surtout, le budget de Radio-Québec de 32,4%. Avec toute cette publicité effarante et les millions que l'on prend, on pourrait construire des routes, des hôpitaux et donner des services à la population.

Bien sûr, il s'agit d'un budget référendaire, d'un budget d'élection. Il est important de jeter de la poudre aux yeux. On dit aux gens tout simplement... On ne leur dit pas, mais les gens qui sont assis chez eux et qui écoutent cela se disent avec leur gros bon sens: Dansez maintenant, payez plus tard. C'est ce qu'on appelle le référendum sur la finance. Mme la Présidente, cette mauvaise administration doit être jugée le plus tôt possible. De plus, ce gouvernement témoigne d'une mentalité fort pernicieuse. Ce gouvernement s'attaque aux droits individuels fondamentaux et les brime. Il supprime des droits naturels et il voudrait que la population lui fasse confiance dans son projet fallacieux, la séparation du Québec d'avec le reste du Canada. Voulez-vous des exemples d'attaques aux droits naturels?

Des Voix: Oui.

M. Mathieu: Oui? Seulement dans un secteur parce que j'ai seulement une demi-heure à ma disposition. Vous comprendrez que je ne peux pas éplucher tous les ministères concernés. Quand mes 30 minutes...

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mathieu: ... seront écoulées, je suis tout à fait désireux d'accueillir votre consentement. Ce sont les politiques en matière d'emploi, en matière de travail. Le ministre est en avant de moi. Je suis bien content. Je ne veux pas du tout... J'espère que le ministre sera content lui aussi. Evidemment, je vais tout de suite indiquer que je n'ai pas l'intention de m'en prendre à la personne du ministre.

Une Voix: Ah, bon!

M. Mathieu: Je le considère comme un gentilhomme qui fait son boulot comme il le juge à propos. Je n'ai rien à dire contre le ministre.

Des Voix: Bravo!

M. Mathieu: Seulement, je ne peux pas accepter la manière dont il applique ses politiques. Je ne sais pas si je suis le seul, mais, Mme la Présidente, mon bureau est inondé de plaintes relativement au sort fait aux travailleurs par l'application de ces décrets dictatoriaux, de ces lois injustes. Quand je suis entré sur le marché du travail — il y a pas mal de temps — le travail était considéré comme noble. La société encourageait l'insertion des jeunes sur le marché du travail. Elle les habituait à voler de leurs propres ailes et les jeunes réalisaient leurs ambitions, décuplaient leurs initiatives. On en faisait des bâtisseurs.

Maintenant, Mme la Présidente, cette question de l'insertion des jeunes sur le marché du travail me préoccupe au plus haut point, quels que soient les quolibets que l'on veuille bien jeter sur mon intervention.

En 1980, je reçois régulièrement des pères de famille, des jeunes travailleurs qui désirent travailler, qui sont compétents pour ce faire, qui ont du travail assuré auprès des employeurs, mais qui sont réduits à la torture par le règlement odieux sur la classification de la main-d'oeuvre. J'ai déjà eu l'occasion de parler de ce règlement. Le ministre du Travail a l'habitude de dire: Le député de Beauce-Sud fait de la démagogie, etc., etc. Je suis fortement préoccupé et je voudrais que le ministre et les autres membres de la députation ministérielle le soient également, soient fortement préoccupés par ce très grave problème.

Je conviens qu'il y a lieu de protéger les droits acquis des travailleurs; je suis d'accord sur cela. Je conçois dans ce sens l'utilité d'un certificat de qualification dans le but de protéger les droits acquis des travailleurs et dans le but de protéger également le public. Or, je constate une chose: Lorsqu'on fait passer les examens qui conduisent aux certificats de qualification, d'abord, on a face à nous un individu qui ne va pas à l'école depuis 20 ans, parfois depuis plus longtemps et qui n'a jamais subi un test objectif de sa vie. On lui pose des questions dans un délai fort restreint et ce sont des questions qui sont sans rapport avec ce qu'il va faire avec sa carte. (21 h 50)

Par exemple, un conducteur de chargeuse, on va lui demander à quel degré doit être l'asphalte pour être épandue, etc. Le gars ne le sait pas, il ne l'a jamais su, il n'a jamais fait cela. C'est la même chose pour un jointoyeur, on lui fait passer l'examen d'un peintre, on lui parle du mélange des couleurs, le gars est tout mêlé avec cela. Il ne le sait pas, il échoue et on le retire du marché du travail.

Quand on pose la question au ministre, il semble — j'espère qu'il ne l'est pas — insensible, il ne voit pas de problème. J'aimerais bien qu'il vienne une demi-heure à mon bureau de comté, on lui en montrerait des problèmes, ce ne serait pas long du tout. Le ministre nous dit souvent: Mais, ce sont les lois des rouges!

Une Voix: C'est vrai!

M. Mathieu: Ce sont les rouges! Qui a passé la première loi en ce sens? L'Union Nationale, en 1969.

M. Chevrette: Bon! c'est la loi des bleus!

M. Mathieu: Savez-vous une chose? Qui a imposé le contingentement de la main-d'oeuvre en 1978? Est-ce que ce sont les bleus ou les rouges? Ecoutez, c'est sûr qu'il y a des choses qui n'ont pas été correctes.

Mme la Présidente, je crois que M. le ministre et les membres de la députation ministérielle auraient dû — normalement, ce sont des gens doués pour assumer de telles responsabilités — tenir compte de la leçon que le peuple a servie au Parti libéral en 1976. Cela veut dire quelque chose. En 1978, on impose la classification, c'est-à-dire le contingentement. Là est le grand mal. Quand on parle des lois des rouges qui ne faisaient pas l'affaire du Parti québécois, est-ce qu'il les a gardées?

La loi 22 sur la langue française ne faisait pas l'affaire du Parti québécois, mais est-ce qu'il l'a gardée? Il s'est dépêché de la modifier. Mais s'il ne modifie pas les lois des bleus et des rouges sur la qualification et le placement normatif dans l'industrie de la construction, c'est pourquoi? Parce qu'il est satisfait. Au lieu de corriger la situation, on l'empire. Par ce contingentement, on ferme injustement le marché du travail à un grand nombre de travailleurs et les jeunes ne peuvent plus entrer sur le marché du travail.

Des petits fonctionnaires de l'OCQ disent aux travailleurs, aux gens qui veulent travailler: Allez à l'aide sociale. Mais, Mme la Présidente, les travailleurs ont plus d'ambition que cela. Se faire dire par des petits caporaux de l'OCQ: Allez à l'aide sociale, votre femme, vos enfants, cela ne nous intéresse pas, y a-t-il de quoi de plus odieux que cela? Y a-t-il quelque chose de plus révoltant que des petits fonctionnaires, qui sont payés grassement à même les fonds publics, qui viennent dire cela à ce qu'il y a de plus courageux, de plus valeureux dans notre population? Ces gens qui désirent gagner leur vie, celle de leur famille, se faire répondre une chose comme cela, c'est épouvantable. C'est la persécution érigée en système où les petits caporaux de l'OCQ poursuivent les honnêtes travailleurs, les traduisent devant les tribunaux comme de dangereux criminels, où, encore, certains procureurs du gouvernement — pas dans la Beauce, mais dans d'autres districts, j'ai reçu des plaintes à ce sujet — disent devant les tribunaux au pauvre type qui y est traduit et qui dit: J'ai une femme et quatre enfants, votre femme, vos enfants ne nous intéressent pas. Cela n'a pas de bon sens.

Quelle option laisse-t-on aux travailleurs? On en laisse trois: croupir sur l'aide sociale... Pourtant, le Parti québécois dit depuis longtemps: Ottawa, au lieu de nous donner...

M. Johnson: Mme la Présidente, est-ce que le député de Beauce-Sud me permettrait une question?

La Vice-Présidente: Permettez-vous la question, M. le député?

M. Mathieu: Mme la Présidente, je préférerais terminer mon intervention.

M. Johnson: II me permettrait une question après? Excellent!

Une Voix: Mardi.

Une Voix: Vous avez peur?

M. Mathieu: Je ne veux pas abuser de mon temps parce que c'est le premier débat auquel j'ai l'occasion de participer, vous comprenez.

La Vice-Présidente: M. le député de Beauce-Sud, vous avez la parole.

M. Mathieu: Je désire profiter au maximum du temps qui m'est alloué. On dit: Ottawa nous donne de l'assurance-chômage; ce n'est pas cela qu'on veut, ce sont des jobs. M. le ministre, ce n'est pas de l'aide sociale qu'on veut, c'est du travail. Ce n'est même pas du travail, c'est la possibilité de gagner notre vie. On en a du travail. Voulez-vous pour l'amour du bon Dieu arrêter de torturer le

monde et les laisser travailler. Mais, êtes-vous satisfaits de cela, les députés d'arrière-ban qui criez et gloussez, un vrai poulailler, mais êtes-vous satisfaits? En avez-vous de la population chez vous qui va vous voir? En avez-vous? Est-ce que vous en avez? Est-ce que vous êtes satisfaits de cela? Je ne suis pas satisfait, c'est la raison de mon engagement en politique. Vous semblez insensibles. C'est épouvantable, c'est une persécution. C'est épouvantable! Alors, on dit à nos travailleurs, croupissez sur l'aide sociale...

M. Johnson: Question de privilège. M. Mathieu:... ou on leur dit encore...

M. Johnson: Mme la Présidente, question de privilège. Je pense que le député de Beauce-Sud...

La Vice-Présidente: Sur une question de privilège, M. le ministre.

M. Johnson: ... dont je peux comprendre l'intérêt pour cette question qui, quant à moi, ne justifie en rien le genre d'emportement sanguin auquel il s'adonne, a insulté celui qui se lève en ce moment. Parler de tortures et utiliser un vocabulaire, j'ai bien peur qu'on me parle des feux de l'enfer bientôt, alors que ce dont il s'agit, c'est effectivement de savoir qui, s'il y a 1000 emplois et 2000 personnes qui veulent travailler, va les occuper.

M. Mathieu: Question de règlement.

La Vice-Présidente: M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Je ne vois pas en quoi le privilège du ministre a bloqué, Mme la Présidente. Est-ce que je peux continuer?

La Vice-Présidente: Vous avez la parole, M. le député.

M. Mathieu: Mme la Présidente, je continue. Je comprends que le ministre n'aime pas bien cela, je regrette d'être déplaisant à son endroit. Ecoutez, je ne peux pas rester insensible devant les crimes épouvantables qui sont subis par la population. Je ne peux pas rester insensible à cela. Première chose, on dit à notre population la plus active de toutes: Allez croupir sur l'aide sociale, ou encore, on leur dit: Allez-vous en en Alberta, à Calgary, il y a de l'ouvrage en masse. C'est commode le Canada, savez-vous, d'un coup sec. C'est commode le Canada. Dans ma petite paroisse, je peux vous nommer 25 jeunes qui sont à Calgary et qui m'écrivent. On voudrait retourner chez nous, mais le Québec ne peut pas ou ne veut pas nous recevoir. Notre terre devient inhospitalière. Vous ne trouvez pas cela terrible, vous autres?

Ensuite, la troisième option, c'est le travail dans la clandestinité. Quand on travaille dans la clandestinité, c'est-à-dire quand on veut gagner notre vie et qu'on se fait poigner par vos petits caporaux, M. le ministre, qu'est-ce qui arrive? En voulez-vous des jugements des travailleurs honnêtes condamnés à la prison? Je peux vous en sortir des centaines, M. le ministre. Voyez-vous, en voilà un ici. Condamné à $500 d'amende plus $46.05 de frais ou incarcéré à la prison commune pour deux mois. Il avait travaillé pas de carte. C'est épouvantable. Ecoutez, c'est de la persécution. On dit: Les notaires pas de carte. Je suis bien content de ce qu'on me dit là parce que c'est normal, je l'ai dit tout à l'heure que je reconnaissais le certificat de qualification pour autant qu'on modifie... D'accord, le notaire a une carte de qualification. Je le reconnais. Mais le notaire, par exemple — un instant — qui va être trois ans sans travailler comme notaire, il peut revenir au bout de trois ans. Il n'a pas de classification et ils le jettent dehors. C'est la différence, c'est là l'affaire.

Mme la Présidente, dans l'Opposition, le Parti québécois dénonçait certaines lois qu'il qualifiait d'injustes, tout ce que vous voudrez. Dès la prise du pouvoir, le ministre de la Justice a retiré les plaintes concernant les travailleurs du front commun, on s'en souvient. Mais pour les travailleurs, dans le moment, qu'est-ce qu'on fait? On continue de les torturer, Mme la Présidente. Y a-t-il un droit plus naturel, plus fondamental, Mme la Présidente, que celui au travail, droit qui est protégé dans la Charte des droits et libertés de la personne?

La commission Cliche demandait, dans un de ses rapports, que soit reconnue la primauté du droit au travail sur la réglementation syndicale. On a pris ce qui faisait notre affaire dans la commission Cliche et on a laissé tomber ce gui ne faisait pas notre affaire. Mme la Présidente — il reste deux minutes — en vertu de quoi l'Etat peut-il empêcher un individu de travailler dans le métier qu'il a choisi? On parle des libertés des citoyens dans un Québec séparé. Est-ce que c'est là un échantillon de vos libertés individuelles? Est-ce que c'est un échantillon? (22 heures)

Mme la Présidente, devant cette situation, j'ai des lettres de parents, je pourrais vous en montrer, vous en lire, qui trouvent que c'est épouvantable. Les jeunes, c'est la même chose. Je regrette, encore une fois, de déplaire au ministre et au gouvernement, mais je me sens obligé de faire part de cette situation qui préoccupe grandement les citoyens de mon comté. J'aimerais que le ministre partage ma sensibilisation pour les problèmes de ces gens. Mme la Présidente, vu qu'il est 10 heures, je demande l'ajournement.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. Lamontagne: ... mardi après-midi, si vous voulez bien nous convoquer mardi.

Une Voix: Non.

M. Lamontagne: Mardi après-midi.

Une Voix: Mardi...

M. Johnson: Mme la Présidente, je vais me lever sur une question de fin personnelle. Je ne voulais pas interrompre le député.

M. Rivest: Une question de règlement, Mme la Présidente.

M. Johnson: Mme la Présidente, je suis debout à ce moment sur une question de fin personnelle, une question de privilège.

M. Rivest: J'invoque une question de règlement et vous verrez après.

Une Voix: Une question de privilège.

M. Johnson: Je pense, Mme la Présidente, qu'étant donné que je suis debout...

La Vice-Présidente: A l'ordre!

M. Johnson: ... sur une question de privilège, je dois d'abord formuler ma question de privilège.

M. Lamontagne: Mme la Présidente, le ministre devra le faire mardi, parce qu'il est 22 heures.

M. Rivest: II est 22 heures, Mme la Présidente.

M. Lamontagne: C'est un ajournement obligatoire.

M. Johnson: Mme la Présidente, étant donnée l'attitude autoritaire... La Vice-Présidente: M. le ministre, je regrette de devoir vous interrompre. Il est déjà 22 heures.

Alors, cette Assemblée ajourne ses travaux à mardi, 14 heures.

Fin de la séance à 22 h 2

Document(s) associé(s) à la séance