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Version finale

32e législature, 1re session
(19 mai 1981 au 18 juin 1981)

Le mercredi 17 juin 1981 - Vol. 24 N° 16

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents.

Mme la ministre de la Fonction publique.

Rapport de la Commission

administrative du régime

de retraite

Mme LeBlanc-Bantey: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel de la Commission administrative du régime de retraite pour l'année 1980.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Rapport annuel de la SDBJ

M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1980 de la Société de développement de la Baie James.

Le Président: Rapport déposé. M. le leader du gouvernement, au nom du ministre de l'Industrie et du Commerce.

Rapport annuel de la SAQ

M. Charron: Au nom du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, je dépose le rapport annuel 1980-1981 de la Société des alcools du Québec.

Le Président: Rapport déposé. Dépôt de rapports de commissions élues.

M. le député de Rousseau.

Étude du projet de loi no 4

M. Blouin: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente des transports qui a siégé le mardi 16 juin 1981 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 4 Code de la sécurité routière et l'a été adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Rousseau.

Étude du projet de loi no 5

M. Blouin: Également, M. le Président, le rapport de la commission permanente des transports qui a étudié article par article le projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives et l'a adopté sans amendement.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Terrebonne.

Étude du projet de loi no 11 et audition de témoins

M. Blais: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des finances et des comptes publics qui a siégé les 10, 11 et 16 juin 1981 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 11, Loi modifiant certaines dispositions législatives pour donner suite à la politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982 de même que pour entendre certains organismes concernant des dispositions des articles 32 et 33 du projet de loi qui a été adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de lois privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: L'article d) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 18 Première lecture

Le Président: M. le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi no 18, Loi assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile. M. le ministre.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de permettre une application harmonieuse de la Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille en instituant au Code de procédure civile un nouvel ensemble de procédures en matière familiale, en complétant les dispositions législatives

relatives à l'adoption, en transposant les principes fondamentaux du nouveau droit de la famille dans les autres lois du Québec et en modifiant certaines dispositions transitoires du droit de la famille.

Plus particulièrement, en matière de procédure civile, ce projet de loi institue la règle qu'en matière familiale, les audiences des tribunaux de première instance se tiennent à huis clos, sauf décision contraire du tribunal. La Charte des droits et libertés de la personne est modifiée en conséquence.

Il prévoit également que les procédures introductives d'instance sont faites par déclaration ou par requête et que, dans l'un et l'autre cas, les parties peuvent s'adresser au tribunal par une demande conjointe. Il prévoit aussi des règles spécifiques pour faciliter le déroulement de l'instance, la conciliation des parties ou l'instruction de la cause et il introduit le principe du droit de l'enfant à être représenté par avocat lorsque son intérêt est en jeu et que cette représentation est nécessaire pour assurer la sauvegarde de cet intérêt.

En outre, ce projet de loi vient préciser les règles applicables à certaines demandes relatives au mariage, à la nullité du mariage, à la séparation judiciaire de biens, à l'autorité parentale, au changement de nom ou à la demande du conjoint survivant pour l'établissement d'une prestation compensatoire, mais surtout, il vient établir le régime procédural applicable aux demandes conjointes en séparation de corps ou en divorce sur projet d'accord ainsi que celui qui est applicable en matière d'adoption, qu'il s'agisse des demandes en restitution de l'enfant, en déclaration d'adoptabilité, en placement ou en adoption. II précise enfin que les jugements rendus en matière d'adoption peuvent faire l'objet d'un appel à la Cour d'appel.

Ce projet de loi vient aussi modifier diverses lois pour y faire disparaître les distinctions qui y subsistent et qui sont fondées sur le sexe, la filiation ou les circonstances de la naissance, ainsi qu'on modifie dans plusieurs lois par rapport aux personnes adoptées la portée de la définition de personne liée, qu'on enlève des distinctions basées sur les anciens concepts de légitimité ou d'illégitimité de l'enfant et que, de plus, d'autres lois sont modifiées pour y faire disparaître des distinctions fondées sur le sexe.

Vous me permettrez d'abréger, M. le Président, à moins que nous soyons obligés de tout lire.

Enfin, ce projet de loi vient modifier certaines des dispositions transitoires prévues par la loi instituant un nouveau Code civil du Québec et portant réforme du droit de la famille pour permettre la mise en vigueur par étapes de certaines dispositions en matière de séparation de corps ou liées à l'établissement de la prestation compensatoire en cas de séparation de corps ou de divorce.

Le Président: Cette motion de première lecture sera-t-elle adoptée?

M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'aimerais poser une question au leader parlementaire du gouvernement, la question traditionnelle lorsqu'il s'agit d'un projet de loi comme celui-ci. Est-ce qu'il est de l'intention du gouvernement de suggérer une déférence à la commission parlementaire de la justice ou à une autre commission parlementaire jugée appropriée par le leader parlementaire du gouvernement?

Le Président: M. le leader du gouvernement. (10 h 20)

M. Charron: M. le Président, je vais laisser courir un peu le projet de loi avant de prendre une décision finale mais, pour le moment, il nous semble que la consultation exhaustive qui a été menée pour la rédaction du projet de loi devrait satisfaire ceux qui y ont participé par leurs conseils. Pour l'instant, je ne déférerai pas ce projet de loi en commission parlementaire.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, si je comprends bien, ou si je lis entre les lignes, il s'agit d'un projet de loi mort-né car, la session se terminant demain, j'imagine que le gouvernement fera une motion de prorogation de la Chambre, et non d'ajournement. S'il y avait présentement déférence en commission parlementaire, on pourrait imaginer que le gouvernement suggère qu'une commission parlementaire soit saisie, d'ici à la prochaine session, de l'étude de ce projet de loi. Mais la réponse que je viens de recevoir du leader parlementaire du gouvernement m'indique qu'il n'y aura pas de commission parlementaire d'ici à la prochaine session. C'est donc dire que le gouvernement, une fois qu'il connaîtra les réactions, devra réinscrire ce projet de loi au feuilleton pour la prochaine session, s'il le juge à propos et, à ce moment-là, il décidera s'il y aura ou non commission parlementaire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, nous n'aurions pas fait tout ce cheminement, pour reprendre l'expression du député, pour que le projet de loi soit mort-né. Dans l'hypothèse très réelle où la session sera prorogée demain, il est toujours possible, au début de

la prochaine session, de présenter une motion, que connaît bien le député de Bonaventure, pour que soient réinscrits au feuilleton, là où ils étaient lors de la précédente session, un certain nombre de projets de loi. Si celui-ci figure à l'appel de deuxième lecture dans notre feuilleton des affaires du jour, c'est là que je proposerai qu'il se retrouve.

Pour l'instant, je répète encore une fois qu'il nous semble important de laisser circuler ce projet de loi dans les milieux les plus vivement intéressés. À peu près de la même façon que le projet de loi sur le Code civil, dont celui-ci se trouve à permettre l'application en plusieurs domaines, dans les milieux informés, je pense aux milieux qui ont fait des représentations sur le Code civil pour voir si ceux-ci réclament ou non pareille décision et, en conséquence, nous agirons.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous disons substantiellement la même chose, de façon un peu différente. Mais si je comprends bien, le ministre de la Justice aura réussi à donner un avis des intentions du ministère pour la prochaine session.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période de questions orales des députés.

M. le chef de l'Opposition.

QUESTION ORALES DES DÉPUTÉS

M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord savoir si le ministre des Finances doit venir ce matin.

M. Lvesque (Taillon): Je peux m'informer tout de suite.

M. Ryan: Si le premier ministre avait l'obligeance de s'informer, j'aimerais adresser ma question au ministre des Finances.

M. Charron: On va le faire tout de suite.

Le Président: D'accord.

M. le député de Mont-Royal.

Étude sur la SHQ demeurée confidentielle

M. Ciaccia: M. le Président, hier, à la suite d'une question que j'avais adressée au premier ministre, j'ai été très étonné de voir la colère que j'ai considérée un peu démesurée du premier ministre envers M. Latouche. D'ailleurs, je ne suis pas le seul qui a été étonné de l'attitude du premier ministre.

Ma question s'adresse au ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Cette colère s'expliquerait-elle par le fait que M. Latouche a dénoncé la mauvaise administration de la SHQ dans une étude commandée par le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur, étude qui est dans un document confidentiel et que le ministre n'a pas encore rendu publique. Je cite quelques extraits de cette étude et je voudrais poser une question au ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Dans cette étude, on parle des officiers de la Société d'habitation du Québec et on dit: Ils ont exposé la Société d'habitation du Québec à l'augmentation des coûts sur certains projets en faussant le système de soumissions par l'adjudication de contrats à des soumissionnaires autres que le plus bas soumissionnaire.

Une voix: Scandale!

M. Ciaccia: On donne comme exemple une soumission pour une chambre additionnelle de 90 pieds carrés à 353,14 $ le pied carré.

Dans une autre étude, M. le Président, on constate...

Une voix: C'est une étude confidentielle.

M. Ciaccia: Oui, c'est une étude confidentielle. ... au sujet des activités de la SHQ, et je cite: "On a fait une gymnastique de chiffres qui pouvaient induire en erreur et tromper le Conseil du trésor. On réduit le coût réel des modifications jusqu'à maintenant, ce qui permet d'éliminer la procédure de présentation du présent document au Conseil du trésor - on peut retrouver dans les documents les vrais chiffres - et ceci permet de faire la preuve du comportement de certains officiers de la Société d'habitation du Québec envers les autorités gouvernementales."

M. le Président, voici ma question au ministre de l'Habitation: À la suite des études et recommandations faites par M. Latouche, qu'il vous a remises, études que vous aviez commandées, quelles mesures ou gestes concrets le ministre de l'Habitation a-

t-il prises pour remédier aux situations que le ministre connaît depuis le 6 mars 1980, soit depuis plus de quinze mois?

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

Une voix: Allez chercher M. Cyr.

M. Tardif: M. le Président, je constate que l'Opposition continue une nouvelle fois avec ses ragots d'égout et qu'à défaut d'avoir trouvé dans le rapport du Vérificateur général quelque référence à une forme quelconque de fraude ou de malversation elle en est réduite à citer un torchon qui n'a aucune valeur en autant que je suis concerné.

M. le Président, dans le dossier qui est, selon toute vraisemblance, utilisé par le député de Mont-Royal, s'il voulait être honnête, je pense qu'il conviendrait de dire que ce qu'il cite n'a rien à faire avec le dossier des vices de construction, mais se rapporte à tout autre chose, soit une poursuite entre un entrepreneur et la Société d'habitation du Québec; c'est tout autre chose que le dossier des réparations majeures.

M. Ciaccia: M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je n'ai pas fait de... Une voix: C'est vrai ou c'est faux?

M. Ciaccia: Le ministre n'a pas répondu à ma question, à savoir les gestes concrets qu'il a posés, à la suite des recommandations faites dans cette étude, recommandations qui contiennent des pièces justificatives et de la documentation. Je n'ai fait aucune représentation quant à savoir sur quels travaux ces documents portaient, j'ai seulement dit que ça portait sur l'administration de la SHQ, documents que le ministre connaît depuis le 6 mars 1980. Est-ce que le ministre a transmis une copie du dossier au président du Conseil du trésor, tel que recommandé dans l'étude? Et je cite: "Cependant, nous avons espoir que cette étude circulera et aboutira entre les mains d'hommes qui ont la responsabilité des budgets de la province, l'honorable ministre Guy Tardif et son homologue, l'honorable ministre Jacques Parizeau."

Le Président: M. le ministre délégué à l'Habitation et à la Protection du consommateur.

M. Tardif: M. le Président, je répète ce que j'ai dit. Il s'agit là de dossiers afférents à un litige qui oppose un entrepreneur et la Société d'habitation. Qu'on ait là le point de vue, disons, de cet entrepreneur par personne interposée et non pas celui de la société, je pense que ce n'est pas à moi d'évaluer qui, dans ce dossier... Si un entrepreneur pense qu'il a été lésé, il y a des tribunaux pour s'occuper de ces questions. M. le Président, dans ce dossier, je pense que l'Opposition mêle tout, c'est son habitude. Lorsqu'on fait état...

Des voix: Vous ne répondez pas à la question.

M. Tardif: M. le Président, encore une fois, ce dossier n'a rien à faire avec les réparations majeures et concerne un litige entre un entrepreneur et la société, litige qui, d'ailleurs, pourrait donner lieu à des poursuites. M. le Président, je refuse de commenter cette partie du dossier.

Quant à savoir ce que j'ai fait, dès que j'ai été informé qu'il pouvait y avoir, en rapport avec les vices de construction, un certain nombre de choses, je vais faire état d'une lettre que j'ai envoyée au président de la Société d'habitation du Québec, justement, le 4 septembre 1980. Je vais en faire état parce qu'elle a été déposée en commission parlementaire, que j'ai personnellement demandé au leader de tenir, et où le député de Mont-Royal, après avoir lancé de la boue, ne s'est pas présenté ni le matin, ni l'après-midi, mais uniquement le soir et il a utilisé tout le temps à des questions de procédure. Je vais en faire état ici. J'adresse cette lettre au président de la société en disant: "M. le président, depuis quelques jours, certains faits relatifs au dossier dit des réparations majeures - parce que c'est cela qui est en cause... (10 h 30)

Des voix: Ce n'est pas cela.

M. Tardif: Ah! Ce n'est pas cela qui est en cause. C'est ce que je voulais faire dire au député de Mont-Royal. Merci.

Des voix: Ah!

M. Ciaccia: M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... ce n'est pas par ce genre de tactique qu'on va éviter de répondre aux questions. J'aurais pu faire une question de privilège quand le ministre a dit que ce que j'ai cité représente le point de vue de l'entrepreneur. C'est absolument faux. C'est l'étude que vous avez commandée à un des employés de la SHQ qui vous a fait rapport.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Ciaccia: Répondez donc à la question que je vous ai posée.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tardif: M. le Président, le député de Mont-Royal induit cette Chambre en erreur. Je l'inviterais à relire le journal des Débats de la commission parlementaire des crédits de la Société d'habitation du Québec où j'ai précisément indiqué que je n'ai jamais commandé une telle étude. Ayant reçu les prétentions d'un entrepreneur contre la SHQ et ayant eu la version de cette société, j'ai demandé à un membre de mon cabinet de me recueillir les faits qui étaient présentés dans ces dossiers. Cette étude n'a jamais été commandée par moi, elle ne reflète le point de vue que d'une seule partie et fait fi de la règle élémentaire de droit qui dit qu'il faut entendre l'autre partie; l'autre partie, en l'occurrence, c'est la Société d'habitation du Québec.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais faire remarquer au ministre que l'étude a été soumise à M. Jean Foisy, conseiller spécial du ministre Guy Tardif, à la demande de M. Foisy. C'est votre conseiller spécial dans votre ministère.

Vu l'attitude du ministre qui refuse de répondre aux questions et aux allégations spécifiques sur des dossiers spécifiques, je voudrais revenir avec une question à l'adresse du premier ministre.

M. le premier ministre, on signale ici plus que des irrégularités, cela frôle l'illégalité. Quand on dit qu'on a écarté le système de soumissions, que ce n'est plus le plus bas soumissionnaire, quand on dit qu'on contourne le Conseil du trésor, la question que je voudrais poser au premier ministre est celle-ci: Est-ce qu'il est prêt maintenant, à la suite de ces études, à la suite de ce qui a été trouvé dans ces dossiers, à demander une enquête publique sur la Société d'habitation du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): La réponse: Le député de Mont-Royal a pris la relève du député de Marguerite-Bourgeoys dans cette entreprise de faux semblants tellement bien décrits par leur collègue le député de Saint-Louis, c'est-à-dire que ce ne sont pas les faits qui comptent, ce sont les apparences!...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Louis, sur une question de privilège.

M. Blank: C'est la deuxième fois que le premier ministre cite mes paroles, mais il a oublié que tous ces faits sont venus après la date de cette déclaration.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Enfin, puisque ce sont les apparences et non les faits qui comptent, et je regarde le député de Mont-Royal, je m'excuse, faire un grand détour à côté de la question qu'il soulève depuis longtemps pour voir s'il n'y a pas moyen de mêler encore les choses, ma réponse, c'est non.

M. Tardif: M. le Président...

Le Président: Brièvement, M. le ministre de l'Habitation.

M. Tardif: Le député de Mont-Royal, en disant que ce rapport fait état - rapport qu'il a - non seulement d'irrégularités, mais d'illégalités, se trouve en quelque sorte à jeter un discrédit sur le rapport du Vérificateur général, qui, lui, ne fait pas état de tels faits, M. le Président, ne fait pas état d'illégalités, M. le Président, ne fait pas état de fraude ou de malversation, M. le Président. Lorsque le député de Mont-Royal dit que les procédures du Conseil du trésor n'ont pas été suivies, il faudrait quand même l'inviter à prendre connaissance des directives du Conseil du trésor 3989-78 qui disent ceci: "Un contrat de construction ne peut être conclu à moins que des soumissions n'aient été sollicitées, sauf dans les cas de travaux de restauration ou de rénovation lorsque l'architecte et l'état de l'immeuble ne permettent pas d'identifier et de décrire les travaux avec précision."

M. le Président, c'est élémentaire. Dès lors qu'il s'agit de cas de restauration et de rénovation et que de l'eau s'infiltre dans un bâtiment, il n'y a pas un entrepreneur, M. le Président, qui aurait soumissionné pour corriger ces vices à moins de dire: II faut que je trouve d'abord ce qui est en cause. Il doit donc, amener sur les lieux son équipement, sa pépine, creuser tout le tour de l'immeuble, se rendre compte que vos entrepreneurs à l'époque n'avaient pas mis de drains ou les avaient mis à l'envers et qu'ils coulaient vers la bâtisse au lieu de couler vers l'extérieur ou que les drains sont écrasés, M. le Président. L'entrepreneur doit d'abord se rendre compte de ça et puis, après cela, il faudrait, pour suivre le raisonnement du député de Mont-Royal, qu'on arrête, qu'on gèle tout et qu'on dise: Maintenant, nous allons aller en appel d'offres. L'équipement est là. Les hommes sont là et il y a des locataires, des gens qui sont incommodés dans ces immeubles depuis des années, M. le Président.

Dans le cas des réparations, c'est fatal que, forcément, on doive d'abord déterminer la nature des travaux, donc faire venir des entrepreneurs, des gens sur les lieux et, subséquemment, faire faire ces travaux. M. le Président, encore une fois, rien dans le document du Vérificateur général ne fait état d'illégalités. D'accord, la liturgie gouvernementale n'a pas été suivie à la lettre, mais ce n'est pas un crime, M. le Président.

Le Président: Question principale, M. le chef de l'Opposition.

M. Ciaccia: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je crois que le ministre a apporté un supplément de réponse. J'aimerais lui poser une autre question supplémentaire à la suite de l'intervention qu'il a faite. Très courte, M. le Président.

Le Président: Voici, j'ai vérifié et, dans d'autres parlements, il est très rare que celui qui pose la question ait droit à trois ou quatre questions additionnelles. Question principale, M. le chef de l'Opposition.

Aide gouvernementale aux caisses d'entraide économique

M. Ryan: J'aurais aimé adresser ma question au ministre des Finances, mais je pense qu'étant donné l'urgence du problème, il conviendrait que je l'adresse au premier ministre.

J'ai eu connaissance qu'il y avait hier soir à Québec une réunion importante des dirigeants des caisses d'entraide économique de tout le Québec. Ils se sont réunis, évidemment, pour étudier les solutions qui peuvent être apportées au problème de liquidité qui s'est posé dans les caisses d'entraide au cours des dernières semaines. J'ai cru constater, en causant avec plusieurs d'entre eux, qu'il y avait des inquiétudes sérieuses quant à l'attitude que le gouvernement maintient ou va maintenir dans cette question. Je voudrais adresser deux questions au premier ministre. D'abord, le premier ministre est-il en mesure d'assurer cette Chambre que le gouvernement va fournir au mouvement des caisses d'entraide économique l'aide dont elles ont besoin pour traverser la période difficile qu'elles subissent depuis quelque temps et quelle forme cette aide est-elle susceptible de revêtir?

Deuxièmement, le premier ministre peut-il donner l'assurance que l'aide du gouvernement ne sera pas assortie de conditions qui obligeraient, à toutes fins utiles, les caisses d'entraide économique à se fusionner à un autre mouvement ou à une autre institution? Le premier ministre peut-il donner l'assurance, en somme, que le gouvernement va travailler de toutes ses forces à obtenir que les caisses d'entraide économique, qui ont joué un rôle original et unique dans le développement de l'économie de nos régions, gardent leur identité propre et puissent passer cette période difficile sans être obligées de se soumettre à des conditions qui les obligeraient à renoncer à leur identité.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, la réunion qu'évoque le chef de l'Opposition, qui a eu lieu hier, je ne sais pas à quelle heure elle s'est terminée, mais je sais qu'elle a duré des heures et des heures. Le ministre des Finances m'avait mis au courant de la façon dont cela se présentait à la fin de la journée hier, mais je n'ai pas eu de rapport ce matin. Le ministre des Finances est obligé, peut-être pour des raisons reliées à ce problème, d'être à Montréal aujourd'hui et j'aimerais mieux m'en tenir à cela tout simplement, si le chef de l'Opposition le permet. (10 h 40)

Peut-être que demain, avant l'ajournement, on pourra faire le point sur l'état des choses de façon plus détaillée, mais je me contenterais en ce moment de répondre au chef de l'Opposition qu'il y a des efforts de faits qui impliquent certaines conditions - cela n'a pas été caché par le ministre des Finances il y a un certain nombre de jours - et, parfois, des conditions draconiennes, mais le gouvernement veut apporter toute l'aide possible pour aider à préserver cet instrument de développement régional qui a fait ses preuves dans beaucoup de régions du Québec. Cela continue d'être notre attitude, d'apporter toute l'aide possible qui, d'abord, a pris la forme, comme on le sait, du lien qui a été établi au point de vue des liquidités entre la Société de l'assurance-dépôts fédérale et la Régie de l'assurance-dépôts du Québec. Je sais que le ministre des Finances participe presque quotidiennement, plus que cela, plusieurs fois par jour, au téléphone ou autrement, à des tractations qui essaient d'arriver à régler le problème.

C'est sûr qu'il y a des inquiétudes. C'est normal qu'elles se répercutent dans les journaux, y compris dans les journaux spécialisés et, dans ce climat un peu beaucoup difficile, on fait tout ce qu'on peut et l'intention demeure de faire tout ce qui est possible et imaginable pour empêcher que soit trop écorché, si on veut, ce mouvement qui a quand même joué un très grand rôle.

Qu'on ne me demande pas ce matin, à la suite d'une rencontre qui s'est terminée à je ne sais quelle heure hier et sur laquelle je n'ai pas eu de rapport final, d'entrer dans quelque détail que ce soit. Je suis bien placé pour ne pas le faire. Je n'en ai pas.

Une voix: ...

M. Lévesque (Taillon): Oui? On verra plus tard.

La construction du gazoduc

M. Fortier: M. le Président...

Le Président: M. le député d'Outremont, question principale.

M. Fortier: ... j'avais une question pour le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. J'ai cru le voir tout a l'heure. Est-il en Chambre ce matin?

M. le Président, la question que j'ai à poser au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre est reliée à la construction du gazoduc. Vous vous souviendrez que le 26 mai dernier, j'avais posé une question pour souligner l'urgence de ce dossier, compte tenu des investissements considérables et de la nécessité de la pénétration du gaz au Québec pour assurer notre avenir énergétique. Quand on sait que la construction du gazoduc jusqu'à Trois-Rivières coûtera quelque 540 000 000 $, que Gaz Métropolitain investira quelque 100 000 000 $ en dix ans et Gaz Inter-Cité, 540 000 000 $ pour la distribution du gaz, on s'inquiète à juste titre de la décision qui semble évidente de la compagnie Trans Québec et Maritimes d'arrêter les travaux si un accord n'est pas intervenu au cours de la semaine prochaine.

Les journaux nous ont rapporté que le médiateur avait fait rapport au ministre le 3 juin dernier. J'aimerais savoir du ministre si, effectivement, il a reçu ce rapport qui faisait état, m'a-t-on dit, de trois propositions. Qu'a-t-il fait pour régler ce problème? Peut-il confirmer les allégations de la presse à savoir que le projet pourrait être remis à l'an prochain ou remis indéfiniment si le ministre n'intervenait pas d'autorité dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Marois: M. le Président, dans la foulée de ce que j'ai déjà eu l'occasion de dire en réponse à une question antérieure de la part du député d'Outremont, effectivement, le dossier présente un caractère d'urgence parce qu'il y a des échéanciers à respecter. Il y a cet échéancier qui a été rappelé publiquement, semble-t-il, en soirée hier par le vice-président de Trans Québec et Maritimes, M. Archambault, et qui fixe la date du 25 juin comme une date charnière extrêmement importante, pour en arriver à une entente négociée dans ce dossier.

Comme je l'ai indiqué dans un premier temps, lors de la commission parlementaire qui a entendu les parties, en janvier, j'avais prié instamment les parties, conformément au rapport du médiateur de l'époque, de retourner à la table de négociations, de poursuivre leurs discussions pour en arriver à une entente. C'était en janvier. Depuis ce temps, on connaît l'état de la situation. J'ai effectivement mandaté M. Leboeuf qui m'a présenté un rapport d'étapes au début de juin. Par la suite, compte tenu de la situation, compte tenu des conséquences extrêmement sérieuses à la fois sur le plan social et sur le plan économique pour le Québec, compte tenu du fait aussi qu'il y a comme enjeu le bien-être même de la population du Québec, j'ai non seulement reconfirmé le mandat du médiateur, M. Leboeuf, mais élargi son mandat et, à titre de mesures et d'interventions d'un type absolument extraordinaire et spécial, j'ai même demandé, en plus, à M. Désilets, qui est directeur général des relations de travail du ministère, d'intervenir dans ce dossier. On voit donc à quel point c'est une mesure d'intervention extraordinaire. J'ai donc élargi le mandat de ces personnes.

Effectivement, les parties syndicales les premières intéressées et la partie patronale ont été convoquées au ministère samedi matin, à 10 heures. Les discussions, les rencontres de médiation se sont poursuivies tout au long de la journée et il y a eu, par la suite, des échanges durant la journée de dimanche. Il a commencé à se dégager un commencement de consensus et d'accord sur deux des sept points en litige, mais l'écart demeure encore considérable entre les parties. Les rencontres se poursuivent aujourd'hui.

En vertu de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, compte tenu de l'économie même des relations du travail dans ce secteur, il me paraît extrêmement important, et c'est possible pour les parties, d'en arriver à une entente, à la condition que les parties acceptent de poursuivre les rencontres de médiation sur une base de bonne foi, avec une volonté arrêtée d'en arriver à une entente, et qui puisse être fondée sur une entente qui soit à la fois raisonnable et responsable. Je crois que c'est encore possible. Il est inexact de penser qu'on puisse régler ce genre de dossier extrêmement complexe, simplement quand il y a un problème comme celui-là, en mettant tout cela entre les mains du ministre responsable des relations du travail au Québec.

II faut que les parties impliquées, patronales et syndicales, se rendent compte qu'elles ont une lourde responsabilité sur les épaules et qu'elles peuvent, avec une volonté arrêtée, convenir d'une entente qui tienne compte aussi des intérêts de l'ensemble de la population du Québec. Je les prie instamment de poursuivre dans le cadre des travaux de médiation.

Le Président: M. le député d'Outremont.

Question additionnelle.

M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de constater, tel que l'a dit le ministre, qu'il a commencé à se dégager un commencement de consensus, mais il semble qu'on soit bien loin du compte et que la gravité de la situation soit encore bien plus grande que le ministre ne l'a dit.

Le 26 mai, lorsque j'ai posé cette question, le ministre a dit qu'il n'est pas de l'autorité légale du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre d'imposer d'autorité une modification au décret. Cependant, il semblerait bien que la loi lui donne ce pouvoir, si c'est dans le meilleur intérêt public. Devant la gravité de la situation, est-ce que le ministre peut nous dire s'il a l'intention d'intervenir d'autorité d'ici une semaine, avant même que la compagnie décide d'arrêter les travaux pour de bon?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Marois: M. le Président, je pense bien que le député connaît l'économie générale, les relations du travail dans le secteur de la construction au Québec; je pense que le député connaît aussi bien la Loi sur les relations du travail dans ce secteur.

Une voix: Ce n'est pas sûr.

M. Marois: D'une part, l'économie même des relations du travail dans le secteur de la construction prévoit qu'il revient, dans un premier temps, aux parties de négocier une entente. On ne va pas revenir à la bonne vieille époque précédant les lois actuelles. On ne va certainement pas revenir à l'époque des situations décrites par la commission Cliche, c'est pourquoi j'en appelle à nouveau, instamment, à la volonté des parties. Je crois qu'il est possible que les parties puissent en arriver à un règlement raisonnable et responsable en tenant compte de l'intérêt public.

Dans un deuxième temps, le député sait aussi sans doute que le ministre peut ultimement intervenir au-delà des moyens déjà extraordinaires que je viens d'évoquer qui sont les moyens de cette médiation d'un type tout à fait spécial. Mais il sait aussi que cela suppose, le cas échéant, la convocation d'une commission parlementaire, mais une commission parlementaire qui, à toutes fins utiles, si les parties ne s'entendent pas, en viendrait à quelle conclusion? À constater un désaccord. Et constatant un désaccord, à faire en sorte que le ministre rédige, en quelque sorte, sur le coin de la table, une convention collective. (10 h 50)

Alors là, si on pense qu'on va revenir à cette vieille époque où, au-delà des règles établies de relations de négociation normale, si on remet constamment les problèmes entre les mains du ministre pour qu'il les règle, ce n'est pas conforme du tout à l'esprit nouveau qui est établi par la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. C'est pourquoi à nouveau j'invite instamment les parties, et je sais que c'est possible qu'elles puissent en arriver à une entente négociée.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, au ministre du Travail. Le ministre du Travail sait pertinemment que la loi lui permet d'intervenir de son propre chef, de convoquer une commission parlementaire et ultimement d'en arriver à une modification au décret.

Le problème soulevé par le député d'Outremont prévoit et indique que le ministre du Travail doit intervenir dans les plus brefs délais, quitte à convoquer une commission parlementaire.

Comment le ministre peut-il être justifié à ce moment-ci de refuser d'intervenir, de modifier de son propre chef le décret, alors que lui-même, en janvier dernier, à la suite du décret librement négocié entre les parties, a, comme ministre du Travail, proposé plusieurs modifications au décret, qui n'avaient pas été demandées par les parties qui ont négocié le décret? Vous l'avez déjà fait dans le passé et vous le refusez avant le 25 juin, avec les impacts que cela a. Comment pouvez-vous justifier ça?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Marois: M. le Président, il faut distinguer deux choses bien clairement. Le député de Portneuf sait fort bien que, lorsque dans la foulée de la convention collective négociée, il y a eu une première publication du décret, les parties ont été convoquées à partir d'une liste établie d'un certain nombre de questions ou de points de ce décret ou de cette convention qui nous semblaient illégaux. On a attiré l'attention des parties sur chacun de ces points et on

les a entendues sur ces questions.

En plus, à la fin - le député s'en souviendra - j'ai prié instamment les parties de retourner à la table de négociation pour convenir d'une entente sur la question des travaux du gazoduc. C'est le premier volet.

Il serait extrêmement dangereux pour l'avenir des relations du travail du secteur de la construction de laisser entendre aux parties, quelles qu'elles soient, syndicales ou patronales, que peu importe l'état normal de relations du travail, peu importe la base normale de négociation d'ententes entre les parties, ce que permet la loi, le député sait fort bien qu'en tout temps les parties peuvent s'asseoir en cours de route, convenir d'une entente, la transmettre au ministre qui, par la suite, l'intègre au décret, il connaît très bien ce mécanisme; il me paraît extrêmement dangereux, dis-je, de laisser entendre aux parties ceci: Entendez-vous; si vous ne vous entendez pas, ça n'a pas de conséquences historiques, le ministre va vous régler ça sur le bras, par le biais d'une commission parlementaire.

On voit tout de suite où ça nous mènerait dans le domaine des relations du travail, dans ce secteur en particulier. Je demeure convaincu - c'est pourquoi, jusqu'à nouvel ordre, il n'est pas de mon intention de convoquer une commission parlementaire -que les parties peuvent en arriver à une entente. Ce n'est pas vrai que deux véhicules automobiles contenant une douzaine de personnes vont faire la loi sur les chantiers de construction au Québec, qu'on va revenir à la bonne vieille époque et qu'on va nous négocier sur le bras des conditions inacceptables et qui auraient un effet de domino sur l'ensemble des autres métiers de la construction. Il faut absolument éviter cela et tout faire pour ne pas revenir à cette époque. Il est possible pour les parties de convenir d'une entente; on a pris des mesures de médiation extraordinaires, les rencontres se poursuivent encore aujourd'hui. Je demande de nouveau aux parties de convenir entre elles d'une entente, ce qu'elles peuvent faire.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Elle s'adresse au ministre de l'Énergie et des Ressources. Compte tenu du fait que le programme d'Hydro-Québec, jusqu'à l'an 1990, prévoyait une pénétration du gaz d'environ 20% en 1995, et que cette pénétration diminuait considérablement le programme d'Hydro-Québec, le ministre a-t-il consulté cette dernière pour voir si elle serait en mesure de faire face à la demande d'électricité additionnelle qui sera requise si la pénétration du gaz ne se fait pas?

Le Président: M. le député d'Outremont, il ne s'agit pas d'une question additionnelle...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Question principale, M. le député de Rosemont.

Des voix: Bravo!

M. Paquette: Merci, M. le Président.

Une voix: II l'a eue.

M. Paquette: Ce n'est pas facile, quand on est de ce côté-ci de la Chambre, d'obtenir une question, M. le Président.

Une voix: Va-t'en de l'autre bord! Des voix: Ah!

Une voix: Va-t'en dans l'Opposition! M. Paquette: M. le Président.

Le Président: M. le député de Rosemont, la patience est toujours récompensée.

Parachèvement du toit du stade olympique

M. Paquette: Merci, M. le Président. La population de Montréal connaît le gâchis olympique dont a hérité le présent gouvernement du Québec, notamment en ce qui concerne le parachèvement du toit du stade olympique. Vendredi dernier, la Société d'énergie de la Baie James soumettait un rapport préliminaire qui semble démontrer que les faiblesses connues du mât en ont révélé d'autres, ce qui amènerait une augmentation du coût de parachèvement du stade de 58 000 000 $ à 110 000 000 $.

Des voix: Ah!

M. Garon: Trop d'argent dans la caisse électorale...

M. Paquette: Ma question au ministre responsable...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, voici ma question au ministre responsable des installations olympiques. Est-ce qu'il a l'intention de redéfinir le mandat de la Société d'énergie de la Baie James de façon qu'elle étudie d'autres solutions que la solution Taillibert?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, j'ai eu l'occasion d'exprimer hier, lors de l'étude des crédits de la Régie des installations olympiques, que j'endosse entièrement la position que M. Saulnier et le conseil d'administration de la RIO ont prise à cet égard et le rapport intérimaire de nos mandataires sur cette réparation majeure que constitue le renforcement de la base du mât et la toiture mobile. L'information qui nous a été donnée et qui a été communiquée sur une base préliminaire, mais suffisamment importante pour permettre à la régie de prendre cette décision, c'est que le calendrier de réalisation, si cela devait se faire, s'étalerait sur 40 mois et qu'à cet égard, les 40 mois menant jusqu'en 1985, le parachèvement a des effets de l'ordre d'environ 33 000 000 $ sur les coûts prévus originellement.

Deuxièmement, il faut absolument renforcer la base du mât, comme chacun le sait maintenant et - cela est connu même si, de l'autre côté, on fait semblant de ne pas le savoir - de la façon que le mât a été coulé en 1976, il y a un déficit de précontrainte très grave à la base du mât qui fait que tout poids additionnel qui serait ajouté risquerait de faire apparaître des fissures. En ce sens, la solution trouvée par la Société d'énergie de la Baie James, jusqu'à ce jour, implique aussi des coûts additionnels.

Dans les circonstances, délais beaucoup plus longs que prévus et coûts additionnels plus élevés que prévus, la Régie des installations olympiques a décidé de demander à la Société d'énergie de la Baie James de lui fournir également d'autres options avant qu'elle fasse sa recommandation finale, à l'automne, au gouvernement du Québec. En ce sens-là, il m'apparaît que c'est une décision très sage.

M. Paquette: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, il y a environ un mois, on apprenait que l'architecte du stade olympique, M. Taillibert, avait intenté une poursuite de 26 000 000 $ contre la ville de Montréal et la Régie des installations olympiques.

M. Garon: Le pourcentage à la caisse électorale qui est trop fort.

M. Paquette: M. le Président.

Le Préaident: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Paquette: On me dit que le pourcentage à la caisse électorale du Parti libéral a peut-être été trop élevé.

Une voix: Demandez cela au député de Châteauguay.

M. Paquette: Dans cette vague de récupération, entre autres les 750 000 $ que nos amis libéraux doivent toujours aux fonds publics, est-ce que le ministre croit qu'il est possible d'attribuer une responsabilité pour ces faiblesses structurales dans la construction du stade olympique? Est-ce qu'une partie des responsabilités est au niveau de l'architecte ou au niveau des entrepreneurs? Est-ce qu'une étude a été entreprise là-dessus ou s'il y en aura une?

Le Président: M. le leader du gouvernement. (11 heures)

M. Charron: Dans un sens, oui, nous possédons un certain nombre d'informations que nous allons étayer dans le plaidoyer devant les tribunaux, mais puisqu'il s'agit d'un domaine sub judice actuellement, je n'oserais pas émettre d'opinion ni sur le personnage ni sur la cause qui est devant les tribunaux. Je vais simplement indiquer notre opinion et ce pourquoi nous avons mille fois conseillé à M. Taillibert, s'il n'était pas satisfait du règlement que nous lui avions offert, de recourir aux droits qui étaient les siens. Il y a recouru dans les dernières minutes, dans les derniers jours où cela lui était permis, cinq ans après la fin de son contrat.

Le gouvernement du Québec, après une analyse détaillée - nous fonctionnions sans contrat, à la pièce et sur une oeuvre unique au monde et encore non terminée - a légitimement cru bon, après plusieurs analyses, d'offrir un règlement qui nous paraissait convenable à l'architecte en question. Il a été payé, l'argent a été versé en 1977 ou 1978, il s'agit de 6 800 000 $. À nos yeux, et encore aujourd'hui, c'était déjà trop et il n'est absolument pas question d'y ajouter à moins qu'on fasse la preuve que l'architecte mérite plus; c'est ce que les tribunaux nous permettront de savoir. M. Taillibert a intenté une action contre la ville de Montréal, son employeur, et contre la Régie des installations olympiques, l'employeur substitué, de l'ordre de 26 000 000 $, mais il faut la décrire: 10 000 000 $ plutôt que les 6 800 000 $ que nous lui avons offerts et 16 000 000 $ en intérêts pour l'argent perdu depuis 1972, début de son entrée dans le dossier et ce qu'il appelle, dans l'action qu'il nous a intentée, l'érosion monétaire depuis ce temps.

L'information qu'on m'a donnée et que me transmet le contentieux de la régie est

que notre cause, à nos yeux, est fort bonne et, en conséquence, nous laisserons la justice suivre son cours.

Le Président: Question principale, M. le député de Beauce-Sud.

Indemnités versées pour des pertes non prévues

M. Mathieu: Merci, M. le Président.

M. Chevrette: Ah! Cela va être une excellente question.

M. Mathieu: Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Nous savons que le Vérificateur général a remis son rapport annuel pour l'année 1979-1980 il y a quelques semaines. Or, selon ce rapport, il y a eu illégalité dans le paiement d'indemnités par la Régie de l'assurance-récolte. Cela démontre pour le moins une mauvaise administration et si on se rapporte aux années concernées, 1979-1980, cela démontre également des faits troublants en période référendaire et électorale.

Des voix: Ah!

M. Mathieu: M. le Président, je me permets, pour la bonne compréhension du problème, de citer quelques lignes du rapport du Vérificateur général pour étayer ma question. "Indemnités versées pour des pertes non prévues par les dispositions de la loi. Les indemnités versées par la régie en 1978-1979 et 1979-1980 pour des pertes qui, à notre avis, confirmé par une opinion juridique, n'étaient pas couvertes par la loi et totalisent 856 000 $."

Des voix: Oh! Oh! M. Marx: Patronage!

M. Mathieu: "Nous trouvons inadmissible que la régie, dans le cours de ses opérations, outrepasse la loi et les règlements." Je voudrais demander au ministre s'il a pris connaissance de ce rapport; j'aimerais savoir à quelle région s'appliquait principalement ce trop-payé, combien il y a de producteurs impliqués et qu'entend faire le ministre pour que de telles situations ne se répètent plus à l'avenir, car on sait que s'il y a un trop-payé, ce sont les producteurs qui le paient par leurs primes.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Au cas où on penserait que le président de la régie est un séparatiste notoire, il a été nommé dans le temps des libéraux et il était plutôt reconnu pour ses allégeances libérales. J'aimerais vous dire que la direction de l'administration de la Régie de l'assurance-récolte qui était en activité à ce moment-là avait été nommée par le Parti libéral.

Des voix: Oh! Oh!

M. Garon: Je vous ferai remarquer qu'à la suite du rapport du Vérificateur général, la direction...

Une voix: Oh! Oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Garon: Je voudrais dire, M. le Président, que relativement à ces gens, étant donné que c'est pour dix ans, donc quand je suis arrivé en 1976, ils étaient en fonction, nommés, même, par les libéraux à ce moment, si on soulève une question d'incompétence, il faudrait peut-être accuser les nominations faites par votre propre parti. Deuxièmement, comme vous dites, dans votre rapport, qu'il s'agit d'une opinion juridique du Vérificateur général, les gens de la Régie de l'assurance-récolte, à leur décharge, me disent qu'il y a une question d'interprétation du règlement et qu'eux considéraient que, dans l'application de ce règlement, ils pouvaient payer. Maintenant, il semble qu'il y aurait un conflit d'opinions sur l'interprétation du règlement. Un instant. Il y a plusieurs régions concernées. Maintenant...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. Garon: Voulez-vous attendre?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Pardon? Alors, M. le Président, depuis ce temps, l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation des revenus ont été fusionnées et il y a de nouveaux administrateurs à la Régie des assurances agricoles. Maintenant, je peux vous dire qu'au point de vue des chiffres, il faudrait que je les vérifie pour l'ensemble des données sur le montant complet. J'ai donné un certain nombre d'informations en commission parlementaire hier pour une partie des régions mais pour avoir le montant complet - il y a une séance demain - il faudrait relever les données pour voir tous les producteurs qui sont couverts dans toutes les régions concernées.

M. Mathieu: Question additionnelle.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Je voudrais savoir, M. le Président, devant l'affirmation on ne peut plus claire du Vérificateur général que c'est un montant payé sans droit, je voudrais savoir si le ministre ou la régie entend réclamer le trop-payé et si le fonds d'assurance demeure suffisant et sécuritaire.

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, je pense que le député lui-même, dans sa question, tout à l'heure, a donné une partie de la réponse. Quand il a dit que le Vérificateur général disait que selon un avis juridique - bien oui, vous avez déjà vu ça des avis juridiques contradictoires; j'imagine que, comme avocat, vous avez déjà vu ça, comme député de Marguerite-Bourgeoys - la direction de la Régie des assurances agricoles a préféré donner le bénéfice du doute aux agriculteurs et payer, dans ces conditions.

Le Président: Fin de la période des questions. Des ministres ont des compléments de réponses à donner. Tout d'abord, le ministre de l'Habitation à une question, je pense, du député de Mont-Royal à qui je permettrai une courte question additionnelle, et par la suite, l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, à une question du député de Berthier, je pense. M. le ministre de l'Habitation.

Copie de lettre au ministre

de la Justice et autres documents relatifs à la SHQ

M. Tardif: M. le Président, en complément de réponse, et avec le consentement de cette Assemblée, j'aimerais déposer une partie des documents demandés par l'Opposition officielle à la commission parlementaire des crédits, le jeudi 11 juin dernier. Je dépose donc, M. le Président, la lettre que je faisais parvenir au ministre de la Justice et Procureur qénéral, le 12 décembre 1980. Deuxièmement, M. le Président, les documents que m'a transmis ce jour le président de la Société d'habitation du Québec relativement aux questions suivantes: 1- Le règlement hors cour des poursuites dans le dossier de l'Office municipal d'habitation de Montmagny. 2- Le présumé conflit d'intérêts à Montmagny. 3-Les rapports de M. Latouche en regard de projets d'entrepreneurs, donc les documents de la société par rapport à cela. 4- Les noms des personnes qui ont été payées entre janvier et septembre 1980 dans le dossier de la Société de logements centre-ville de Montréal. M. le Président, il y aura des exemplaires ici pour tous les membres de cette Assemblée ainsi que pour la tribune de la presse. Merci, M. le Président. (11 h 10)

Le Président: Documents déposés.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président: Question additionnelle, courte, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ...le ministre peut-il nous dire s'il a envoyé une copie du document de l'étude que son ministère et lui-même avaient demandée au ministre des Finances, tel que stipulé dans l'étude par celui qui l'a faite? Autrement dit, il y a une recommandation ici d'envoyer cette étude au ministre des Finances. L'avez-vous envoyée et, si vous l'avez envoyée, pourriez-vous déposer copie de la lettre qui indiquait de l'envoyer au ministre des Finances?

Le Président: M. le ministre.

M. Tardif: Non, M. le Président, cette étude n'a pas été envoyée. Il s'agit d'un document qui n'a aucune valeur officielle au sein de la société.

Des voix: Ah!

M. Tardif: C'est une question d'opinion par quelqu'un complètement étranger, M. le Président, et ce document...

M. Lalonde: C'est-à-dire votre opinion. Ce n'est pas étranger du tout, c'était votre employé.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tardif: ...présentement, n'a pas été transmis.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Dean: M. le Président...

M. Ciaccia: Question de privilège, M. le Président!

Le Président: Question de privilège, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le ministre vient d'induire la Chambre en erreur en disant que ce document a été préparé par quelqu'un complètement étranger, alors que le document est signé: Préparé par Yvan Latouche, division des réparations majeures, Société d'habitation du Québec.

Une voix: Un étranger, n'est-ce pas?

Une voix: Ce n'est pas votre employé?

M. Ciaccia: C'est un employé de la Société d'habitation du Québec qui transmet un document au ministre.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

Grève à la traverse de Sorel

M. Dean: M. le Président, il me fait plaisir de fournir les réponses aux questions posées hier en Chambre par M. le député de Berthier et le député de Joliette-Montcalm.

En ce qui regarde le traversier Sorel-Saint-Ignace, effectivement, il y a grève depuis le 12 juin à 8 h 30 et le ministère du Travail n'a pas eu d'avis de cette grève. Il y a douze salariés en grève sur 36, soit les matelots et les huileurs. Aucune demande de conciliation n'a été acheminée au ministère jusqu'à maintenant. Aujourd'hui, M. Désilets, le directeur des relations du travail du ministère, a communiqué avec les parties afin de leur offrir les services du ministère. Si les parties ne nous font pas de demande de conciliation, nous nommerons un conciliateur d'office dans les jours qui suivent. Les deux points majeurs en suspens sont les salaires et la création d'un bureau d'embauche.

Je réfère le député à la partie de réponse qui a été fournie hier par le ministre des Transports sur cette question des deux points en litige.

Le Président: Avez-vous une courte question additionnelle, M. le député de Berthier? Non?

M. Pagé: Oui, à ce sujet. Comment l'adjoint parlementaire...

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales, en complément de réponse.

M. Pagé: M. le Président, j'ai une question additionnelle très brève sur le sujet, à la suite du complément de réponse de l'adjoint parlementaire.

Le Président: D'accord.

M. Pagé: L'adjoint parlementaire vient de nous indiquer que si les parties ne demandaient pas la conciliation, le ministère lui-même verrait à nommer le conciliateur. Première question: Dans quel délai? Deuxièmement: Est-ce un nouvel usage qu'on entend instaurer au ministère, à savoir que si les parties ne le demandent pas, vous désignerez un conciliateur d'office?

Le Président: M. l'adjoint parlementaire.

M. Dean: Dans quel délai? J'ai dit dans les quelques jours qui suivent, parce qu'on reconnaît l'urgence de la situation. Il s'agit d'un service de transport public on ne peut plus essentiel à la région en question.

Deuxièmement, le Code du travail prévoit, que je sache, à défaut d'une demande de conciliation par les parties que le ministre a l'autorité de nommer un conciliateur d'office s'il le juge à propos. Or, dans ce genre de litige, le ministère le juge à propos.

Le Président: M. le ministre des

Affaires municipales, en complément de réponse à une question du député de Maskinongé.

Enquête sur le service de récréation de Shawinigan

M. Léonard: M. le Président, je voudrais simplement donner un complément de réponse. D'abord, sur la ville de Shawinigan, il ne s'agit pas d'une enquête de la Commission municipale du Québec, mais d'une vérification faite par le ministère des Affaires municipales. Mon prédécesseur avait autorisé cette vérification le 18 septembre 1980. Le travail s'est déroulé à l'automne et à l'hiver et le vérificateur ou les vérificateurs ont présenté leur rapport au directeur de la direction générale de l'analyse financière le 27 avril 1981, pour vous mettre dans les échéances. Celle-ci a présenté ses avis au sous-ministre le 14 mai et les services du contentieux du ministère ont présenté leur avis le 8 juin.

Tous les avis concordent à l'heure actuelle à ce sujet. Il y a eu des problèmes administratifs, mais qui doivent se régler dans la ville de Shawinigan par l'administration de Shawinigan. Le rapport ne justifie pas l'intervention du ministre ou de la Commission municipale du Québec dans ce dossier. Il s'agit donc de problèmes administratifs qui doivent se régler à l'interne.

Le Président: Courte question additionnelle, M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, à la suite de ce rapport, est-ce que le ministre a au moins l'intention de demander à celui qui l'a rédigé de retourner voir les gens concernés, la ville de Shawinigan, pour leur dire quelles sont les choses à corriger et faire rapport pour que les gens le sachent? On garde cela au ministère et personne ne sait ce qui s'est passé. On ne sait même pas s'il y a des correctifs à apporter.

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: II y a eu, évidemment, des

personnes interrogées et les problèmes administratifs qui ont été soulevés l'ont été, je pense bien, à la connaissance des intéressés. On me rapporte aussi que, dans la plupart des cas, les correctifs ont déjà été apportés ou sont en voie de l'être sur le plan administratif.

Le Président: Motions non annoncées. Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre.

M. le leader du gouvernement.

Avis à la Chambre

M. Charron: M. le Président, j'ai annoncé hier que ce serait la fin de l'étude des crédits, nous sommes à une heure près de l'avoir fait. Lors de la commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution, hier, ç'a pris un peu plus de temps que prévu et, finalement, les deux partis politiques présents ont convenu que la dernière heure, celle devant être consacrée aux crédits du ministre d'État au Développement économique, serait, par consentement unanime, reportée à une troisième séance qui aurait lieu ce matin, plutôt que d'avancer plus longuement dans la nuit. Je remercie mes collègues d'avoir conclu cette entente.

Je fais donc motion, sur la base du consentement donné hier, pour que, tout de suite jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures les commissions suivantes se réunissent: à la salle 81-A, celle de la présidence du conseil et de la constitution pour l'heure prévue pour l'étude des crédits du ministère d'État au Développement économique. Au salon rouge, c'est la commission de la justice, pour l'étude du projet de loi privé no 262, ce qui devrait durer jusque vers midi, puisqu'il y a un seul projet de loi et, de midi à 13 heures, c'est la commission des institutions financières qui y siégera pour l'étude des projets de loi privés nos 224, 266, 202, 254, 213 et 219. Toujours au salon rouge, mais à compter de 15 heures jusqu'à 18 heures, c'est celle des affaires municipales, qui siégera pour l'étude des projets de loi privés nos 210, 212, 245, 255 et 220. De plus, à la salle 91-A, à partir de tout de suite jusqu'à minuit - celle-là n'aura pas de substitution -la commission des engagements financiers siégera afin d'étudier les engagements financiers du gouvernement pour les mois de février, mars et avril.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Seulement une précision. Si je comprends bien, la commission des institutions financières n'aura qu'une heure pour adopter six ou sept projets de loi privés. Il est possible que ça déborde dans l'après-midi.

M. Charron: Le député fait une bonne remarque, M. le Président. On devrait plutôt dire et souhaiter que la commission de la justice commence à 11 h 45 plutôt qu'à midi, puisqu'il y a un seul projet de loi privé au nom de ce ministère et un seul article, et j'imagine que la commission, d'ici 11 h 45, pourra en disposer. Si jamais, à 11 h 45, on n'avait pas terminé, on m'en avisera sur-le-champ, à 13 heures; je ne serai pas très loin, on pourra s'entendre sur l'organisation des travaux.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Anne, en vertu de l'article 34.

M. Polak: En vertu de l'article 34...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député. J'aimerais savoir si la motion requérant le consentement pour que siègent trois commissions en même temps que l'Assemblée est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Recours à l'article 34

En vertu de l'article 34, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, j'aimerais poser une question au leader du gouvernement concernant certains renseignements. J'ai demandé aux deux ministres concernés certains renseignements. Il s'agit d'abord de la ministre de la Fonction publique, à qui j'avais demandé, il y a plus d'une semaine maintenant, le nombre d'occasionnels à l'emploi du ministère au 31 mars 1981 comparativement au 30 mars 1980. Ce renseignement est assez important et j'aimerais l'avoir immédiatement. Je ne sais pas où c'en est rendu. (11 h 20)

Deuxièmement, j'ai demandé des renseignements au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, il s'agit d'un voyage fait par le président, le vice-président et des hauts fonctionnaires de la CSST, la Commission de la santé et de la sécurité du travail, de date récente, en Italie, apparemment par le président et le vice-président, et d'un autre voyage, tout récemment, au Yukon. J'ai demandé combien de personnes cela concernait, quels étaient les frais, quel était le but, etc.

Troisièmement, j'ai demandé au ministre des renseignements sur l'achat d'un

ordinateur IBM, encore pour la CSST. Est-ce qu'il peut me renseigner là-dessus, M. le Président?

M. Charron: M. le Président, je n'ai pas interrompu le député, mettant plutôt au compte de l'inexpérience ce genre de question. Selon notre règlement - et ses collègues d'expérience lui indiqueront le chemin pour le faire - c'est le genre de question idéale pour ce qu'on appelle les questions inscrites au feuilleton. Je remarque, à moins que je ne me trompe, que l'Opposition n'en a guère inscrit au cours de cette session, mais le règlement est toujours ouvert à ce sujet.

Lorsqu'on veut avoir des renseignements sur des effectifs, et les deux questions que vient de poser le député sont typiques des questions à adresser au feuilleton, lorsqu'on a des questions sur des changements d'effectifs dans un ministère ou dans un organisme gouvernemental ou des questions sur des comptes de dépenses, des frais de voyage, etc., ce sont habituellement des questions qu'on inscrit au feuilleton et sur lesquelles une réponse est donnée par le ministre par la suite.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je pense que vous avez eu au niveau du règlement ce qui en est. À moins que ce soit vraiment en vertu de l'article 34, parce qu'en vertu de l'article 34, c'est sur les travaux de l'Assemblée nationale et des commissions parlementaires, je vous demanderais de retenir vos questions soit selon la formule proposée par le leader parlementaire du gouvernement ou encore au niveau des questions en Chambre demain matin.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je comprends que M. le leader parlementaire du gouvernement a suggéré au député de poser ses questions au feuilleton.

J'ai deux remarques brèves à faire à ce sujet. On sait fort bien que la session se termine demain et que, quelles que soient les questions que l'on puisse poser ou placer au feuilleton, elles mourront de leur belle mort avec le feuilleton et on n'en entendra plus parler.

Deuxième remarque brève que je voulais faire, c'est que, justement, l'article 34, au paragraphe 1, indique qu'à ce moment-ci un député peut poser des questions relativement aux travaux de la

Chambre. J'ai compris - et si je fais erreur, le député voudra bien me corriger - que les ministres en question s'étaient engagés à donner des renseignements, et cela à partir d'une commission parlementaire, à fournir, lors du dépôt de documents ou autrement, des réponses par écrit aux questions posées par le député.

Or, M. le Président, il n'y a rien de mieux et de plus approprié, je vous le soumets respectueusement, que cette disposition de l'article 34, elle permet justement au député de Sainte-Anne de poser la question qu'il a posée effectivement au leader parlementaire du gouvernement. Je demanderais donc au leader parlementaire du gouvernement de se conformer aux dispositions de notre règlement et de promettre gentiment au député de Sainte-Anne qu'il verra les collègues en question et que les réponses parviendront avant la fin de la session, réponses aux questions légitimes posées par le député de Sainte-Anne.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Cela va.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, au niveau de la demande faite par le leader parlementaire de l'Opposition. Le leader sait très bien qu'il a élargi énormément la teneur de l'article 34, paragraphe 1, en sachant très bien que, dans plusieurs commissions parlementaires, des demandes de ce genre sont faites et que les ministres, ordinairement, y répondent dans la majorité des cas.

Cependant, si c'était dans le but d'accélérer les réponses, le message est fait.

M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, le 26 mai, je déposais en cette Chambre une pétition - et cela s'adresse au leader du gouvernement - concernant le cas de Mme Lowrey, à l'emploi de la firme E. B. Eddy qui a été congédiée à cause des restrictions de la Loi de l'Office de la langue française. Le 28 mai j'interrogeais le ministre de l'Éducation dans cette Chambre. Le ministre, à ce moment-là, m'informait qu'il allait me convoquer dans les prochaines heures ou, sinon, la prochaine journée. Je lui ai écrit cette même journée, le 28 mai, M. le Président, et je n'ai pas eu de réponse depuis. J'aimerais savoir du leader parlementaire si...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je ne voudrais pas qu'on abuse de l'article 34. Je comprends très bien le but de votre question mais, en vertu de l'article 34, ce sont des questions qui ont été posées lors de la période de questions. Vous aurez

l'occasion de la poser à nouveau demain au ministre concerné. L'article 34 est quand même bien clair, il se rapporte aux travaux de la Chambre, et les questions sont posées au leader du gouvernement. J'aimerais, s'il vous plaît, qu'on puisse vraiment utiliser l'article 34 tel qu'il est prévu par le règlement.

M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on pourrait vous demander de vérifier si vous, ou un de vos collègues, n'auriez pas reçu une demande, de la part du ministre de l'Éducation, qui serait de nature à répondre à la question posée par le député de Hull, c'est-à-dire si le ministre de l'Éducation vous a indiqué son intention de donner un complément de réponse au député de Hull.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous vérifierons. M. le leader du gouvernement, à moins qu'il n'y ait d'autres questions en vertu de l'article 34.

M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Est-ce que le leader peut nous indiquer si le projet de loi no 20, qui établit un moratoire pour les propriétés indivises, va être approuvé d'ici demain après-midi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Oui, M. le Président, le projet de loi est à l'ordre du jour, demain matin, après la période de questions.

M. Fortier: Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Verdun.

M. Garon: Toujours au leader du gouvernement, au sujet du Placement étudiant. Le ministre du Travail devait me donner une réponse depuis deux semaines. J'étais absent hier pour m'occuper des jeunes, alors j'espère que j'aurai une très bonne réponse.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement a-t-il une réponse.

M. Charron: Non, M. le Président, je n'ai pas de réponse et le député de Verdun sait très bien pourquoi je n'ai pas de réponse.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour.

M. le leader du gouvernement.

Projet de loi no 17

Deuxième lecture

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord solliciter un consentement, selon ce que permet l'article 119a de notre règlement, pour déférer en commission parlementaire, sans débat de deuxième lecture, un projet de loi qui apparaît actuellement au feuilleton.

Mon collègue de la Justice m'a assuré, avant de se rendre en commission parlementaire, que son vis-à-vis, critique de l'Opposition en matière de justice, approuvait cette démarche. Je donne donc de bonne foi cette information que le projet loi traditionnel, qui modifie certaines lois relatives à l'administration de la justice, le projet de loi omnibus de la justice, déposé hier, et qui porte le no 17, soit considéré par la commission parlementaire de la justice ce soir. Nous nous fierons au travail de nos collègues en commission pour savoir si, demain, nous devons mettre fin à ce projet, c'est-à-dire en adopter la troisième lecture et en faire une loi de cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, s'il y a eu une telle entente, je pense bien que nous devrons y souscrire. Cependant, j'aimerais que la Chambre soit informée, au moins pour l'information du public, de ce que ça comporte. J'imagine qu'on l'a fait en lisant les notes explicatives, mais ça aurait pu nous échapper. Je me demande si M. le leader parlementaire du gouvernement ne pourrait pas, avant que le tout soit déféré à la commission parlementaire, nous rappeler au moins brièvement ce dont il s'agit, afin qu'on n'ait pas l'air de déférer dans la pénombre des choses qui intéressent les citoyens.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je crois que je peux difficilement avoir une expression plus juste que l'expression "omnibus" en ce qui concerne cette loi. En effet, si le député de Bonaventure ou n'importe quel membre de l'Assemblée prend ce texte, il verra que cette loi se trouve à modifier un article ici, un article là du Code civil, du Bureau d'enregistrement, de la Loi sur les jurés, de la Loi sur les loteries et courses - j'espère qu'il n'y a aucun rapport entre les deux - de la Loi sur les poursuites sommaires, de la Loi sur les tribunaux judiciaires et sur les permis d'alcool. Enfin,

il s'agit effectivement d'une mise à jour d'un certain nombre de petites lois et je laisserai absolument la commission libre d'adopter cette loi en tout ou en partie. Ce que je souhaite, c'est qu'avant la prorogation de la session, un examen de ce projet de loi ait pu avoir lieu en commission parlementaire et on se fiera au rapport de la commission pour prendre une décision finale. (11 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard-D. Lévesque

M. Lévesque (Bonaventure); M. le Président, nous allons donner notre consentement pour cette procédure, mais nous allons, comme l'évoque le leader parlementaire du gouvernement, soigneusement étudier chacun des articles. Je sais que mon collègue, le député de D'Arcy McGee qui est en même temps critique à la justice, va regarder de très près chacun de ces articles. Il s'agit, à première vue, de correction d'erreurs pour la plupart qui ont pu se glisser dans des projets de loi peut-être adoptés à la vapeur, je ne le sais pas.

De toute façon, M. le Président, nous allons accepter cette procédure, mais nous aurons l'occasion, à la période du rapport, de revenir sur certains articles, là où il serait approprié et opportun de revenir, pour en discuter ici même à l'Assemblée.

Une voix: D'accord.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avec le consentement, M. le leader du gouvernement, au nom du ministre de la Justice, propose la deuxième lecture du projet de loi no 17, Loi modifiant certaines lois relatives à l'administration de la justice. Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de la justice

M. Charron: Je propose que le projet de loi soit déféré à la commission parlementaire de la justice.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je propose que la commission de la justice se réunisse à la salle 81-A à 20 heures, ce soir, pour l'étude article par article de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je voudrais indiquer tout de suite à l'Assemblée qu'il nous reste environ deux heures de débat sur le discours sur le budget, dont l'heure de réplique du ministre des Finances. J'ai l'intention de garder à l'horaire d'aujourd'hui la période de 16 heures à 18 heures pour la fin du débat sur le discours sur le budget. Il nous reste deux heures cinq minutes, selon les indications que les officiers de la Chambre m'ont fournies. Donc, où que nous soyons rendus au menu, nous allons suspendre, et, de 15 h 55 à 18 heures, nous allons terminer le débat sur le discours sur le budget pour qu'il y ait le vote annoncé depuis hier, à 18 heures, sur la politique budgétaire du gouvernement.

Ce soir, c'est la période réservée à la discussion du rapport des crédits, puisque cela sera fait à ce moment-là. Les cinq heures possibles prévues au règlement débuteront à 20 heures.

D'ici 16 heures, ou 15 h 55 plus précisément, cet après-midi, je propose que nous disposions d'un certain nombre de projets de loi fort avancés déjà au feuilleton, soit l'étape de la prise en considération de la troisième lecture, et que nous fassions la deuxième lecture du projet de loi no 15. Mais je pense que mon vis-à-vis...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, le leader parlementaire du gouvernement vient d'évoquer ce qui doit se passer ce soir relativement au débat qui est prévu par notre règlement à la suite du dépôt du rapport général sur l'étude des crédits. On sait que notre règlement prévoit une période maximale de cinq heures pour ce débat. Je tiendrais simplement à indiquer immédiatement, pour faciliter les travaux de la Chambre, qu'il est de l'intention de l'Opposition d'utiliser, sinon la totalité, une bonne partie de cette période. À cette fin, nous allons déposer des avis entre les mains du secrétaire général au cours de l'après-midi. J'invite le leader parlementaire du gouvernement à prévenir le plus tôt possible ses collègues pour qu'ils soient ici lors de ce débat. Je pense bien que cela pourrait demander peut-être jusqu'à une dizaine, peut-

être moins, de ses collègues pour pouvoir répondre aux questions ou aux sujets qui seront entamés par l'Opposition.

M. Charron: M. le Président, c'est le droit le plus strict de l'Opposition de faire ce que le leader de l'Opposition annonce. Je respecte ce droit et non seulement je le respecte, mais j'essaierai d'y collaborer dans la mesure du possible dès que j'aurai la liste des sujets prévus. D'autant plus que nous serons à la réunion du Conseil des ministres, il me sera plus facile d'aviser chacun de mes collègues d'être présent durant la soirée, ici, pour ce débat.

M. Levesque (Bonaventure): Avant 18 heures, les avis auront été remis au secrétaire général.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler d'abord l'article 9 du feuilleton, M. le Président.

Prise en considération du rapport

de la commission qui a étudié

le projet de loi no 1

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission permanente de l'habitation et de la protection du consommateur qui a étudié le projet de loi no 1, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec.

M. le ministre a-t-il quelque chose à ajouter?

M. Charron: M. le Président, je n'ai été informé d'aucun amendement qui aurait été présenté à la suite du dépôt du rapport.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que ce rapport est adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Quel projet de loi?

Le Vice-Président (M. Jolivet): No 1.

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Article 10, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture?

M. Charron: Troisième lecture...

M. Levesque (Bonaventure): Prochaine séance ou séance subséquente.

M. Charron: Je vous le dis tout de suite, ce sera probablement à la prochaine séance.

M. Levesque (Bonaventure): On ne peut rien vous cacher.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Article 10, M. le Président, s'il vous plaît.

Prise en considération du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi no 7

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission permanente de l'habitation et de la protection du consommateur qui a étudié le projet de loi no 7, Loi sur le ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Il n'y a pas eu d'amendement non plus?

M. Tardif: II y en a eu un.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a eu un amendement? Il n'y en a pas, actuellement. Est-ce que ce rapport est adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Troisième lecture?

M. Charron: Prochaine séance.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Article 3 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 2 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 2, Loi sur la Société du Palais des congrès de Montréal.

M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Article 4 du feuilleton, M. le Président.

Projet dé loi no 8 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement.

M. le ministre de l'Environnement.

Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Article 5 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 15 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du projet de loi no 15, Loi sur l'abolition de la retraite obligatoire et modifiant certaines dispositions législatives.

M. le ministre d'État au Développement social.

M. le ministre.

M. Bertrand: Bravo! Bravo!

M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, je crois qu'il est important, avant de commencer l'étude de ce projet de loi no 15 qui abolit l'âge obligatoire de la retraite, de rappeler que ce que nous allons étudier aujourd'hui s'inscrit dans une série de mesures, dans un ensemble beaucoup plus vaste qui va affecter, dans un avenir prochain, les préretraités et les retraités du Québec. En somme, il s'agit d'un projet de loi qui est très simple, qui interdit toute mise à pied, tout congédiement pour la seule raison que la personne, l'employé a atteint l'âge de 65 ans ou encore a travaillé le nombre d'années qui, normalement, mènent à la retraite. C'est un projet de loi qui abolit une discrimination.

Donc, ce projet de loi est la première d'une série de mesures que le gouvernement du Parti québécois entend prendre, découlant en partie des engagements électoraux et en partie aussi, de façon encore plus vaste, du programme du Parti québécois. À cet effet, je pense qu'il est pertinent de citer un court extrait du discours inaugural prononcé par notre premier ministre le 19 mai dernier. "Quant au deuxième engagement auquel nous voulons donner suite immédiatement, c'est celui d'abolir l'obligation où se trouvent tant de nos travailleurs d'avoir à prendre leur retraite même s'ils ont le désir et la capacité de continuer de travailler. La retraite doit devenir un phénomène graduel, planifié et essentiellement volontaire. Cela exigera, bien sûr, une transformation des mentalités et des conditions de travail et on ne saurait y arriver instantanément, d'un seul coup, mais la loi qui sera présentée constituera un premier pas significatif dans cette direction." (11 h 40)

Conformément à cet engagement contenu dans le discours inaugural il y a à peine un mois, nous entamons aujourd'hui la discussion en deuxième lecture de ce projet de loi. Depuis qu'il est au pouvoir, le Parti québécois a démontré à plusieurs reprises qu'il considérait l'amélioration du sort de nos aînés comme l'une de ses plus importantes priorités: la gratuité des médicaments pour l'ensemble des personnes âgées; la gratuité des services ambulanciers; le programme d'aide à l'habitation ou Logirente, aide financière à l'habitation. Il y a aussi les investissements massifs dans les services de santé et d'hébergement, aussi bien dans la construction de 6000 unités de logement, l'habitation à loyer modique, que dans la construction massive de centres d'accueil pour personnes âgées. Une soixantaine de centres d'accueil pour personnes âgées sont, pour la plupart, au moment où on se parle, déjà terminés ou en voie d'être terminés.

Mais nous devons reconnaître, M. le Président, qu'il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la qualité de vie de ceux qui ont bâti le Québec d'aujourd'hui. C'est pourquoi le Parti québécois s'est formellement engagé à étendre progressivement le programme Logirente, c'est-à-dire le programme d'assistance financière, aux personnes âgées actuellement de 65 ans et plus qui ont un bas revenu; il s'est donc engagé à étendre cette assistance financière qu'est Logirente aux personnes de 55 ans et plus dans un avenir prochain, et aussi à faciliter la transition entre le travail et la retraite en instaurant, en mettant sur pied un régime de retraite anticipée à partir de 60 ans qui s'adressera en particulier aux travailleurs et aux travailleuses qui souffrent d'une incapacité partielle, 25% étant la limite; ces invalides partiels à 25% pouvant toucher une prestation de 100% d'invalidité.

M. le Président, aujourd'hui, il s'agit encore une fois d'une première étape et je viens d'énumérer d'autres étapes contenues dans l'engagement électoral que nous entendons tenir. Ces autres étapes seront présentées à cette Assemblée nationale au cours de la session d'automne. Le projet de loi que nous avons devant nous, abolissant la retraite obligatoire en fonction de l'âge ou

en fonction du nombre d'années de service au sein d'une entreprise, doit donc être considéré comme le premier pas vers un cheminement très important qui va viser à améliorer la qualité de vie de nos préretraités et de nos retraités au Québec. La logique conduisant à un tel geste, à l'abolition de l'âge obligatoire de la retraite, cette logique apparaît assez évidente pour l'ensemble de la population. Pas plus tard qu'il y a une dizaine de jours, à l'occasion d'un colloque organisé par la Fédération des travailleurs du Québec, j'y reviendrai tantôt, un travailleur d'une soixantaine d'années dans son langage très direct, très sain, disait ceci: II n'y a aucune raison au monde pour que moi ou n'importe qui, homme ou femme, rendu à l'âge de 65 ans, s'il ou si elle jouit toujours d'une bonne santé mentale ou physique, soit obligé de cesser de travailler.

Ce projet de loi, M. le Président, a non seulement, on le verra tantôt, reçu l'appui depuis un mois de l'ensemble des corps intermédiaires autant du côté patronal que du côté syndical, de l'ensemble des éditorialistes dans nos médias, mais il reçoit aussi, et ça c'est encore plus important, l'appui du bon sens populaire. On a beau chercher, on ne trouvera aucune base scientifique, M. le Président, pour justifier qu'à 65 ans, tout à coup, un homme ou une femme cesse d'être apte à continuer de travailler. Au contraire, plusieurs arguments militent en faveur de ce libre choix et, essentiellement, encore une fois, ce projet de loi donne le libre choix de se retirer au moment où on veut, le "free choice", le libre choix à la retraite. L'Association médicale américaine, par exemple, va très loin en ce sens. Elle affirme, et je cite, que: "L'interruption subite de tout travail productif et rémunérateur est souvent cause de maladies physiques et psychiques, voire même d'une mort prématurée".

Selon la Fédération de l'âge d'or du Québec, la FADOQ, la situation d'inactivité qui résulte, en outre de la perte de l'emploi, a une action néfaste sur le moral et sur la condition physique de l'individu qui voit s'en aller en pure perte ses énergies, ses talents, son expérience et, bien souvent, son prestige social, sa raison d'être à l'intérieur d'une communauté. Dans une société où la productivité est devenue un des critères les plus importants - toujours selon la FADOQ, la Fédération des clubs d'âge d'or du Québec - la personne âgée perd son statut social au sein de la communauté qui l'entoure très souvent à l'occasion de cette retraite obligatoire. La fédération constate qu'un autre élément qui change considérablement la vie d'une personne âgée, c'est la baisse constante du revenu. Son revenu annuel ne sera désormais - du retraité subit et obligatoire - composé que de pensions, de rentes ou d'intérêts qui, dans la majorité des cas, diminuent graduellement et de façon importante le niveau de vie auquel il ou elle a été habituée. La personne âgée doit donc s'adapter à un budget limité qui restera, ainsi dans l'état actuel des choses, jusqu'à la fin de ses jours."

La FADOQ recommandait au gouvernement, en novembre 1980, qu'il y ait donc plus de souplesse et de flexibilité quant à l'âge de la mise à la retraite et que le travailleur en pleine possession de ses moyens et qui le désire puisse continuer à travailler au-delà de 65 ans. M. le Président, j'ajouterai que dans la toute dernière édition du journal de la Fédération des clubs d'âge d'or du Québec, journal qui s'appelle Vie nouvelle, avec la photo du président de la fédération, M. Tardif, on voit, comme gros titre, - c'est l'édition du 15 juin - "Le projet de loi sur la retraite facultative, - notre projet de loi actuellement en discussion - un pas dans la bonne direction". Le président, M. Patrice Tardif, a fait un bon accueil au projet de loi no 15 sur la retraite facultative. M. Tardif a souligné, dans une entrevue accordée à ce journal, que la fédération avait déjà pris position à maintes reprises sur cette question. Je cite M. Tardif: "Nous avons acheminé plusieurs résolutions demandant au gouvernement d'instituer la retraite facultative pour les travailleurs. Je ne puis qu'être d'accord avec l'intention du gouvernement."

Un autre organisme, M. le Président, l'Association québécoise pour la défense des droits des retraités et des préretraités, l'AQDR, se disait, en décembre 1980, d'accord avec le principe du libre choix de l'âge de la retraite et l'abandon de cette limite arbitraire qui met brutalement fin à l'activité de travail. L'organisme précise qu'il n'est évidemment pas question d'abandonner le principe du droit à la retraite qui devrait permettre à chacun de choisir et d'y accéder sans être pénalisé.

Les organismes syndicaux se sont également prononcés en octobre 1978, dans un mémoire préparé pour le Sénat du Canada. Le Conseil confédéral de la CSN, Confédération des syndicats nationaux, estimait que le problème le plus frappant était sans doute la faiblesse des ressources financières des personnes âgées, et je cite la CSN: "La réalité brutale, c'est que, trop souvent, les gens se retrouvent à la retraite dans la pauvreté ou, encore, avec une telle baisse de leurs revenus qu'il ne leur reste plus qu'à regarder passer le temps, l'espoir de cette retraite heureuse étant souvent très éphémère. Bien que la CSN considère qu'il faille d'abord agir sur une foule de facteurs comme, par exemple, la santé et la sécurité des travailleurs - et c'est ce que nous avons fait avec notre loi - elle n'en recommande pas moins qu'il n'y ait aucun âge légal obligatoire de prise de retraite."

(11 h 50)

Pour sa part, la Fédération des travailleurs du Québec, la FTQ, dans ce colloque dont je parlais tantôt, qui a eu lieu tout récemment, se disait d'accord avec le principe énoncé dans le projet de loi. Les participants se sont toutefois montrés inquiets des répercussions de ce projet de loi sur ce que les syndicats ont déjà obtenu de haute lutte en matière de retraite. En outre, les participants ont également estimé que la retraite devait être facultative dès l'âge de 60 ans.

J'estime que la crainte de voir le projet de loi no 15 mettre en jeu les acquis syndicaux est non fondée. Il y a eu une bonne part de malentendus au moment du colloque de la FTQ. Plusieurs syndiqués de bonne foi ont interprété notre projet de loi comme pouvant être un obstacle à la retraite anticipée. Plusieurs syndiqués ont dit: Nous nous battons depuis des années pour nous retirer à 65 ans, 62 ans ou 60 ans, on ne veut pas continuer à travailler après 65 ans. Nous, au nom du gouvernement, disons aux syndiqués: Vous avez raison. Ce projet de loi ne fait qu'abolir l'obligation de vous retirer à 65 ans. Ce projet de loi ne vous empêchera pas de vous retirer plus tôt si votre convention collective le permet, et surtout lorsque nous aurons modifié certaines lois, certains règlements pour permettre, comme je le disais au tout début de mon allocution, la retraite anticipée à partir de 60 ans, surtout dans les tâches où le rendement du travailleur est accompagné d'un côté très pénible, ou d'un travail très difficile. 95% des cotisants québécois à un régime de rentes ont droit à la rente normale à l'âge de 65 ans ou moins. Entre parenthèses, il n'existe aucune loi qui rende obligatoire la retraite à 65 ans, mais la coutume est devenue tellement forte, tellement ancrée dans nos moeurs, autant dans les emplois publics et parapublics que privés, que ça nous prend une loi pour aider à la changer. Je parle de cette coutume qui a rendu automatique la retraite à l'âge de 65 ans. L'abolition de l'âge obligatoire de la retraite ne changera en rien la notion de l'âge normal de la retraite. 65 ans va continuer d'être non plus un âge obligatoire de retraite, mais un âge normal de retraite. Tous les cotisants pourront continuer à avoir droit à une pleine rente à l'âge de 65 ans.

J'ai dit que le projet de loi mettait fin à une discrimination. Voilà sans doute une des raisons qui ont incité la Commission des droits de la personne du Québec, ainsi que la Fondation des droits de l'homme à se prononcer pour l'abolition de la retraite obligatoire. Les organismes patronaux aussi se disent en faveur du principe de l'abolition. C'est le cas, notamment, du Conseil du patronat du Québec, qui me faisait parvenir son accord de principe par télégramme, il y a quelques jours. Le Conference Board du Canada, organisme économique prestigieux, a mené une étude, en 1979, auprès de 200 entreprises du Canada et en a déduit que les répercussions pour les employeurs canadiens seront marginales. La plupart des employeurs qui ont répondu au questionnaire du Conference Board ont affirmé... L'organisme dit: "Ils ne craignent pas que la suppression de la retraite obligatoire cause de sérieuses difficultés pour la gestion du personnel. Les employés âgés - poursuit l'organisme patronal - sont considérés comme étant tout aussi fiables et tout aussi efficaces que les employés jeunes."

Qui profitera de l'abolition de la retraite obligatoire? En 1978 - ce sont les derniers chiffres complets que nous avons -sur 2 500 000 travailleurs au Québec, nous savons que plus de 55% ne participent pas à des régimes supplémentaires privés, des régimes de retraite privés: l'entreprise ou il ou elle travaille n'a pas de plan de retraite privé. Ceux-ci seront donc soumis à la nouvelle loi. Je dirais même que cette nouvelle loi va toucher la très vaste majorité de ces 2 500 000 travailleurs, les seuls exclus étant les travailleurs sous la juridiction du gouvernement fédéral et les travailleurs qui occupent un banc de juge au Québec, si on peut employer l'expression "travailleurs". Mais tous les autres seront soumis à cette nouvelle loi.

Nous prévoyons que ceux et celles qui en profiteront le plus sont précisément ceux et celles qui travaillent dans des petites entreprises où il n'y a pas de régime supplémentaire de retraite et où, au moment de la retraite à 65 ans, l'employé n'a comme revenu que la pension de vieillesse et le supplément au revenu et aussi, évidemment, la rente du Québec, tandis que dans les 45% qui bénéficient d'un régime supplémentaire de retraite, le plan de retraite privé vient apporter parfois un supplément intéressant pour maintenir un revenu décent à la personne âgée.

Dans le secteur public, c'est la retraite à 60 ans qui prédomine avec 78% des participants à un régime de retraite. Dans le secteur privé, toutefois, l'âge de la retraite obligatoire est de 70 ans chez 60% des cotisants; l'âge de la retraite est déjà à 70 ans. C'est donc la majorité des travailleurs québécois qui seront touchés par cette mesure. Ce projet de loi ne fait qu'adapter le secteur de la retraite aux besoins changeants de la population.

En effet, la population du Québec vieillit et elle va continuer de vieillir très rapidement, alors que nous avons un peu plus de 8% de notre population qui a 65 ans et plus, c'est-à-dire environ 540 000 personnes. Nous savons que dans une vingtaine d'années, ce pourcentage montera de 2%, dépassera les

10%. Il faut donc s'attendre, à long terme, à une augmentation équivalente de citoyens âgés de 65 ans et plus sur le marché du travail.

Je suis persuadé que la mise au rancart de ces travailleurs constitue une sérieuse perte en capital humain pour notre économie. Notre système de production ne semble pas profiter suffisamment de la richesse de l'expérience acquise par nos aînés. Il nous faudra corriger cette situation d'autant plus que, le taux de natalité ayant diminué considérablement depuis une quinzaine d'années, il faut s'attendre que l'arrivée de main-d'oeuvre jeune sur le marché du travail aille en diminuant dans les années qui viennent.

Le principe du projet de loi no 15 nous semble obtenir la faveur d'une grande majorité de Québécoises et de Québécois et d'un grand nombre d'organismes intéressés. Nous avons donc voulu qu'il s'applique à tous les travailleurs et, à cette fin, le projet de loi propose un amendement à la Loi sur les normes du travail.

De plus, tous les travailleurs régis par les lois du Québec qui se verront refuser ce droit de travailler en raison de leur âge pourront exercer un recours devant un commissaire du travail et la Commission des normes du travail prendra la défense gratuitement de tout travailleur qui se sentira lésé. Et c'est l'employeur qui devra faire la preuve que le congédiement n'est pas justifié, dans sa tête, par l'âge de l'employé, mais pour d'autres raisons.

Évidemment, un travailleur qui décidera de continuer à travailler continuera également à cotiser à son régime supplémentaire de retraite s'il y en a un dans l'entreprise où il travaille, l'employé cotisera et l'employeur cotisera. La rente qu'il en retirera au moment où il prendra effectivement sa retraite, que ce soit à 66 ans ou à 70 ans, aura été revalorisée par l'ajout des cotisations de l'employé et de l'employeur durant ces années additionnelles.

D'autre part, tous les travailleurs auront le choix, après 65 ans, ou de retirer les prestations normales du régime de rentes du Québec sans égard au revenu qu'ils pourront retirer d'un emploi, ou alors continuer de verser leurs cotisations à la Régie des rentes et percevoir un montant plus élevé lorsque la retraite sera prise effectivement quelques années plus tard.

En conclusion, bien qu'il s'agisse d'un projet considéré comme un projet d'avant-garde par plusieurs éditorialistes, nous ne sommes pas les premiers à établir cette abolition de la discrimination selon l'âge. Les États-Unis, en 1978, M. le Président, ont adopté une loi semblable; la Norvège et la Suède ont, depuis quelques années, une loi semblable. Nous pensons que d'autres provinces du Canada nous suivront sûrement dans le même sillon. Nous pensons que, par ce geste essentiellement humanitaire, qui consiste à laisser à chaque travailleuse, à chaque travailleur le libre choix du moment de sa retraite, le gouvernement du Parti québécois non seulement remplit un engagement électoral important, mais marque en même temps son grand respect de la liberté individuelle. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me lever pour parler sur ce projet de loi qui prévoit l'abolition de la retraite obligatoire.

J'aimerais simplement rappeler que, sur ce point particulier, le programme de ma formation politique concordait avec le programme du Parti québécois. Nous-mêmes -j'aimerais ici le rappeler - mentionnions dans notre programme que la liberté de choix que possède la personne âgée était passablement diminuée au moment de la retraite obligatoire, sans compter qu'elle contribuait souvent à une plus grande dépendance économique. Nous disions que des règles arbitraires s'appliquent uniformément à des individus dans les positions les plus diverses quant à leur capacité ou leur désir de continuer ou de cesser leur participation à la vie économique. Nous disions que, pour nous, cette rigidité n'était à l'avantage ni de la société, ni des individus dont l'intérêt et les préférences exigaient parfois un âge plus hâtif et parfois un âge plus avancé pour la retraite ou encore une retraite graduelle. Enfin, nous nous engagions à proposer une plus grande flexibilité dans l'âge de la retraite, que ce soit du côté d'une retraite anticipée ou d'un âge de retraite plus tardif à procéder toutefois à une consultation avant d'adopter un tel projet de loi.

Je réalise qu'avec le gouvernement du Parti québécois, fondamentalement, nous n'avons pas de divergence d'opinion là-dessus. Nous avions une approche qui était peut-être davantage planifiée, mais je vois que les représentations qui ont été faites, tant par les représentants syndicaux que par le Conseil du patronat, et auxquelles le ministre faisait allusion tout à l'heure, vont corriger ce qui nous apparaissait peut-être une précipitation fondée sur d'excellents motifs, mais qui mettait de côté l'examen d'éléments ou d'aspects importants d'une telle loi, si on veut penser, par exemple, simplement à la question des répercussions actuarielles qu'un projet de loi comme celui-ci présente. Ceci ne veut pas dire qu'il faille se laisser arrêter par ce type de difficulté, mais c'est un projet de loi qui, même si, au premier abord, il semble rallier un concensus

très large dans la société québécoise sur son adoption, ne doit pas non plus nous faire mettre de côté ou nous empêcher d'envisager certaines difficultés inhérentes qui pourraient parfois rendre plus difficile l'atteinte d'objectifs que l'on veut poursuivre et qui, en soi, sont des objectifs plus que légitimes, M. le Président.

Pourquoi s'intéresse-t-on de plus en plus à cette question de l'âge de la retraite pour les personnes âgées? Je pense que le ministre a donné partiellement la réponse. Pour le Québec, il faut rappeler, par exemple, que de 1976 à 1981, le nombre de personnes dans le groupe de 65 ans et plus -c'est sur une période de cinq ans - a augmenté de 17%. Quand on regarde l'ensemble de la population du Québec, cette population de 65 ans et plus est passée de 7,7% en 1976 à 8,6% en 1981. Elle atteindra 10,3% en 1990 et sera de l'ordre de 12% ou 13% vers l'an 2000.

Évidemment, l'an 2000, comme c'est un autre siècle, cela nous apparaît toujours très lointain, mais on est déjà en bonne marche vers l'an 2000. Ceci nécessite donc que nous nous penchions sur ce problème et je pense que c'est ce que les gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis 1960 - de plus en plus, ils devront le faire - ont fait au sujet toute cette question des personnes âgées. D'ailleurs, c'est assez intéressant de voir que là où on s'est penché sur ce problème, avant le Canada ou le Québec, ce sont les pays qui sont entrés dans ce qu'on appelle le club des personnes âgées, avant le Canada ou avant le Québec. Vous avez, par exemple, la France, l'Angleterre, l'Allemagne, où on fait des adaptations à tous les régimes de rentes et où on est beaucoup plus souple à l'égard de l'âge de la retraite parce que, dans ces pays-là - je ne l'assurerais pas pour l'Allemagne, il faudrait faire une vérification, certainement pour la France et l'Angleterre il y a une population âgée de l'ordre de 13% à 15%, ce qui est encore beaucoup plus élevé que ce que nous avons.

Je pense que nous sentons, au fur et à mesure que notre population vieillit, que ces problèmes prennent énormément d'acuité et qu'il faut s'y arrêter. D'ailleurs, en 1978, il y a eu un comité sénatorial canadien, qu'on a appelé, je pense, la Commission d'étude Croll, du nom du sénateur qui la présidait et qui, en fait, âgé de 79 ans, a fait avec ses 21 collègues sénateurs un excellent travail. Je pense qu'en grande partie, ceci a servi à la réflexion du gouvernement sur le projet de loi qui est devant nous. D'ailleurs, c'est un des documents qu'on m'a remis quand j'ai demandé au gouvernement de déposer les études qu'il avait en main sur l'abolition de la retraite obligatoire.

J'ai été quand même étonnée de voir qu'il n'y avait pas d'études techniques particulièrement pertinentes pour le Québec dans les documents qu'on m'a remis, à moins que le gouvernement en ait et ne nous les ait pas remises. J'ai vraiment eu l'impression, M. le Président, qu'il y avait peut-être une - je n'oserais pas dire improvisation parce que je pense que ce serait négatif - certaine précipitation et qu'on n'avait pas d'abord examiné tous les éléments et les difficultés sur lesquels je reviendrai dans quelques minutes.

Je pense qu'on s'entend tous, d'un côté de la Chambre comme de l'autre, pour que soit mise en branle cette démarche de l'abolition de l'âge de la retraite. D'abord, pour différentes raisons, la première étant peut-être qu'il faut tenir compte des différences et des conséquences inégales du vieillissement chez les individus. II est bien clair qu'on ne vieillit pas tous au même rythme et de la même façon. Dans cette question de l'âge de la retraite, il n'y a rien d'absolu. On sait fort bien que chez les travailleurs qui font des travaux physiques très durs, l'âge de la retraite peut être vue comme devant être anticipée et, d'ailleurs, elle l'est par un grand nombre de syndicats. J'étais heureuse d'entendre le ministre dire que, dans un deuxième temps, on examinerait aussi la possibilité de la retraite anticipée pour les travailleurs.

Je pense également que cette abolition de l'âge de la retraite obligatoire va contribuer à faire disparaître certains stéréotypes qui affectent l'embauche, la promotion et la formation des travailleurs âgés, alors que les études démontrent qu'ils sont un atout très précieux dans une entreprise, ils sont aussi productifs que les jeunes quand ils occupent des fonctions ou que l'on crée des fonctions où ils peuvent mettre à profit leur esprit de travail, leur expérience, leur formation. L'observation générale, ici et ailleurs, indique que le rendement est aussi bon. Leur attitude au travail, leur ouverture générale et leur expérience générale sont des compléments extrêmement importants dans le sens de leur apport économique au travail.

Ce projet de loi a pour effet de modifier fondamentalement le sens de la retraite, c'est-à-dire d'abolir le principe de ségrégation, de rupture radicale qui a prévalu jusqu'à maintenant dans la durée humaine, une période active, basée sur la productivité et la consommation, et une période passive, qui rendait la personne âgée "hors circuit". On la mettait un peu à part, beaucoup même, dès qu'elle n'avait plus cette qualité de producteur ou ce pouvoir d'achat.

Pour toutes ces raisons, il est extrêmement important d'appuyer ce projet de loi; même si nous y apportons certaines réticences. Il faut bien se rappeler que le rôle de l'Opposition est quand même d'indiquer certaines choses au gouvernement.

Quant à lui, il est plein d'enthousiasme. D'ailleurs, on connaît le ministre d'État au Développement social qui, parfois, dans ses propos a tendance à - comme on disait dans ma jeunesse - tourner les coins un peu rond. Mais il reste que cela nous incite fortement, de toute façon, à appuyer le projet du gouvernement.

Le ministre a indiqué lui-même que ce projet de loi vise à interdire à un employeur de congédier, de suspendre ou de mettre à la retraite un salarié pour le seul motif qu'il a atteint ou dépassé l'âge ou le nombre d'années de service à compter duquel il prendrait normalement sa retraite. Le projet de loi prévoit, dans les cas où cela ne serait pas observé, un recours devant le commissaire du travail et il reviendra à l'employeur de faire le fardeau de la preuve.

Le gouvernement a décidé d'agir par le truchement de la Commission des normes du travail. En soi, c'est bon, mais on peut aussi s'interroger. C'était le sens de la recommandation de la Commission des droits et libertés de la personne. Pourquoi le gouvernement ne considère-t-il pas une inclusion ou un amendement à la Charte des droits et libertés de la personne? Il y a peut-être des raisons techniques qui l'empêchent, mais ce serait une garantie beaucoup plus grande que l'inclusion dans la Loi sur les normes minimales du travail. Il faut bien se rappeler - nous avions l'occasion d'en discuter hier à l'étude des crédits sur la condition féminine - que la Loi sur les conditions minimales de travail devait apporter un grand nombre de correctifs dans les conditions de travail chez les personnes les moins payées ou les moins rémunérées. Pourtant, on sait fort bien que quotidiennement on contrevient aux dispositions de cette loi pour diverses raisons, mais une d'entre elles étant très pratique, il ne semble pas qu'on ait les outils nécessaires pour exercer le contrôle qui s'imposerait.

C'est simplement une remarque. Est-ce que dans ce sens-là on n'aurait pas mieux protégé les personnes âgées en introduisant une disposition dans la Charte des droits et libertés de la personne qu'en passant uniquement par le truchement des conditions de la loi touchant les normes minimales de travail?

J'ai parlé tout à l'heure des raisons qui, sur le plan humain, nous motivent et motivent non seulement le Québec, mais on a parlé d'autres pays, de reconsidérer ce problème de la retraite obligatoire, mais il ne sert à rien non plus de cacher qu'il y a aussi des éléments d'ordre économique, de nature socio-économique, qui motivent les gouvernements maintenant à agir de cette façon. D'abord, l'augmentation du nombre de personnes âgées, tant en chiffres absolus qu'en valeurs relatives, et le coût que représente l'entretien d'une population inactive aussi importante qui engendre des inquiétudes croissantes. Dans le cas de beaucoup de fonds de retraite, on pourrait se trouver dans l'incapacité, dans un certain nombre d'années, de payer les prestations pour lesquelles ont contribué les retraités. C'est le résultat du vieillissement de la population. Il y a beaucoup de gens retraités et de moins en moins de personnes pour contribuer au régime. D'ailleurs, un cri d'alarme était lancé il y a à peu près trois semaines dans les journaux: Une crise financière menace-t-elle les fonds de retraite publics? Justement, c'est à cause de ce vieillissement de la population.

Je pense qu'on a des objectifs humains et qu'il y a des considérations humaines dans la présentation d'une telle loi. Il faut dire aussi qu'au plan économique ceci pourrait peut-être corriger la crise financière à laquelle, selon les actuaires qui se penchent sur ces problèmes d'une façon très technique, on serait exposé concernant les fonds de retraite. D'ailleurs, en 1980, une commission présidentielle aux États-Unis sur la politique des pensions recommandait l'élévation de l'âge de la retraite d'un mois par année jusqu'en l'an je ne sais trop, je pense que cela doit se rendre à l'an 2000, pour rendre la retraite à l'âge de 68 ans afin de permettre d'alléger le système américain de sécurité sociale. Je pense qu'il n'y a pas de doute, s'il y a des considérations humaines, il y a aussi des considérations d'ordre économique.

M. le Président, certaines difficultés ont été soulevées par différents porte-parole. J'ai mentionné, tout à l'heure, que la loi nécessitera des adaptations et des déboursés dans le domaine des régimes de retraite où les projections actuarielles sont presque toutes basées sur une retraite à 65 ans. Ces études, nous ne les avons pas en main, mais je pense qu'on peut éventuellement les obtenir.

Il y a un autre problème aussi qui va être soulevé. Les employeurs ne pourront plus compter sur la mise à la retraite pour se départir de certains éléments qu'eux, à tort ou à raison, qualifient d'indésirables. Indésirable, c'est un mot très péjoratif, mais si on décide qu'ils ne sont plus compétents pour telle ou telle fonction, peu importent les termes qu'on utilise, cette abrogation de l'âge de la retraite obligatoire va créer un problème. L'employeur aura le fardeau de prouver que l'âge de l'employé le rend inefficace. C'est évident que ceci pourra constituer un problème au plan des tracasseries ou, enfin, du type de preuves. Quand un employeur voudra se départir d'un employé, il ne pourra plus invoquer l'âge obligatoire de la retraite, mais il devra faire la preuve de l'efficacité ou de l'inefficacité de son employé. Je pense que les syndicats

ont exprimé certaines craintes là-dessus qui réapparaissent justifiées.

On a soulevé la question du chômage à plusieurs reprises. Je pense que la FTQ l'a fait et je vous dirai même que certaines représentations un peu plus personnelles m'ont été faites à cet égard. Je suis de l'avis du ministre, du moins jusqu'à ce qu'on ait des chiffres différents ou peut-être plus précis.

Selon l'expérience faite aux États-Unis, les observations de la commission sénatoriale dont je parlais tout à l'heure, on est arrivé à la conclusion que ceci n'aurait pas d'effet négatif sur l'embauche des jeunes parce que, très souvent, les personnes qui continuent de travailler et qui sont âgées de 65 ans et plus, le type d'activités qu'ils remplissent, le type de fonctions qu'ils remplissent ne correspond pas généralement au type d'emploi que recherchent les jeunes et qu'on leur offre sur le marché du travail. (12 h 20)

On disait dans le rapport de la commission sénatoriale: "L'augmentation de la main-d'oeuvre active des personnes âgées de 65 ans et plus à la suite de l'abolition de la retraite obligatoire ne serait que d'environ 2%, selon les prévisions de Statistique-Canada, et n'entraînerait donc pas une diminution significative des possibilités d'emploi pour les plus jeunes. Cependant, si l'on considère que l'actuel taux de chômage devrait subir vraisemblablement une régression significative une fois l'explosion démographique d'après-guerre absorbée, soit dans le milieu des années quatre-vingt, les personnes âgées en mesure de demeurer sur le marché du travail pourraient constituer une main-d'oeuvre très appréciable." Enfin, le nombre des personnes âgées va sans cesse croissant pour atteindre de 11% à 12% vers l'an 2000, il demeure que le total de la population à charge va aller en décroissant jusqu'à l'an 2011, vu la diminution constante du nombre des personnes de 0 à 17 ans. Je pense que, normalement, nos charges éducatives devraient diminuer, ou du moins on peut le souhaiter pour les diriger vers d'autres priorités. Et même si je comprends l'anxiété d'un certain nombre de personnes, que ce soient les syndicats, que ce soient les parents, que ce soient des citoyens en général qui disent: Le chômage des jeunes qui est de 16% ou 17%, - il a été de 17% au Québec - est suffisamment troublant pour s'interroger au moins à savoir si cette modification sur l'abolition de l'âge obligatoire de la retraite aura des répercussions. Il ne semble pas, en tout cas jusqu'à maintenant, que, dans les données que nous possédons, ceci soit un facteur important.

M. le Président, il y a un deuxième point que je voudrais aborder très brièvement. J'ai l'impression que la façon dont le gouvernement présente cette mesure et le processus qu'il avait choisi pour son adoption et qui maintenant semble se modifier - parce que je crois comprendre que nous aurons une commission parlementaire à la fin de l'été au mois d'août ou de septembre, et je m'en réjouis - pouvait porter à croire que, pour lui, il s'agissait simplement d'une technicité. On modifiait la Loi sur les normes minimales de travail pour y introduire une nouvelle disposition et, finalement, c'était une opération très simple.

On sait fort bien, dès qu'on plonge et qu'on examine un peu le problème - et M. le Président, je ne voudrais pas prétendre ici que je suis une experte dans ce problème, j'ai quand même essayé de consulter passablement de gens, de me documenter le mieux possible, nous en avons discuté dans notre groupe de travail - nous savons fort bien que c'est beaucoup plus complexe que cela semble paraître au premier abord. Ce n'est pas une simple technicité, parce que, d'abord, il va falloir envisager des modifications au régime de retraite privé et public. Il va falloir aussi - et c'est peut-être d'un autre ordre - penser à faire évoluer les mentalités chez les employeurs et chez les employés. La retraite obligatoire avait pour avantage de prévoir le moment précis où le revenu de la personne subirait une baisse et d'entraîner une planification en conséquence. Avec la retraite facultative, l'employé devra aussi planifier ce moment, même si l'échéance devient plus vague. Dans cette perspective, M. le Président, les employeurs devront peut-être faciliter la préparation de la retraite - ils devraient déjà le faire - par des programmes d'orientation préretraite. Certaines entreprises devront aussi établir des mécanismes pour évaluer l'aptitude des personnes à poursuivre leur travail dans les années qui précèdent 65 ans et dans les années qui suivent 65 ans afin qu'elles ne puissent subir de préjudice si un employé décide de demeurer dans un emploi pour lequel il n'a plus les capacités. C'est ce problème de tracasseries et, parfois, une nouvelle forme de discrimination qui pourrait survenir, si on ne faisait pas cette opération avec beaucoup de souci et d'équité.

Il y a également le fait que nous nous retrouvons devant une inégalité accrue par rapport aux ressources. C'est un autre problème. Il est à prévoir que ce sont surtout les cols blancs qui se prévaudront de cette mesure et que les travailleurs qui ont eu à occuper un travail dur et routinier quittent leur emploi plus tôt. Il ne faut pas oublier également que l'espérance de vie au-delà de 35 ans est plus élevée pour les professionnels et les cadres supérieurs, soit 43,3 années que chez les employés de bureau, où elle se situe à 37,3 ans et chez les manoeuvres où elle se situe à 33,5 ans. À cette constatation, il faut aussi ajouter

que l'effet du vieillissement social, c'est-à-dire la perception que la société a des travailleurs vieillissants, se fait davantage sentir chez les classes laborieuses où la vieillesse vient consacrer la perte des forces physiques, alors que l'individu âgé exerçant une profession plus libérale ou un emploi plus bureaucratique se verra souvent confirmer une sagesse et une expérience plus grandes.

De plus, le rapport COFIRENTES, auquel le gouvernement actuel n'a pas accordé de suite, rapport qu'il a reçu en 1977 et qui contenait des recommandations importantes sur tout le régime de rentes et du supplément au régime de rentes, indiquait que seulement 27,9% des cols bleus sont couverts par des régimes supplémentaires de rentes, alors que 88,1% des cadres professionnels et des techniciens le sont. C'est une situation qui affecte ceux qui sont le plus susceptibles de ne pas prolonger leur période d'activité au travail.

Une autre motivation qui incite les personnes de 65 ans et plus à retarder l'âge de leur retraite. Il faut bien se dire que si, dans certains cas, c'est l'intérêt du travail, le désir de continuer à être productif, de s'intégrer aux activités courantes de la société, il est quand même reconnu dans les statistiques que le plus grand nombre de ceux qui désirent continuer de travailler, c'est parce que les régimes de retraite en cours, qu'il s'agisse de régimes privés ou de régimes publics, et avec le taux d'inflation qu'on connaît, sont nettement insuffisants pour assurer aux personnes qui prennent leur retraite des revenus décents.

Peut-être devrais-je rappeler à cet égard un article du Soleil de 1979 - j'aurai d'autres statistiques, j'ai déjà eu l'occasion d'en citer - où, dans un éditorial, M. Francoeur disait: "II est regrettable de dire qu'au Québec, 63% des personnes âgées de 65 ans et plus vivent sous le seuil de la pauvreté. Ce chiffre représentait, au début de janvier 1977, 310 000 personnes âgées sur 490 000. Ainsi, la majorité des personnes âgées d'une des sociétés les plus riches du monde sont dans l'indigence. La situation n'est pas meilleure ailleurs et, au Québec, 82% des femmes retraitées vivent sous le seuil de la pauvreté." Quand on parle des femmes retraitées, je pense bien qu'on parle des femmes de 65 ans et plus parce qu'un grand nombre d'entre elles n'ont jamais été sur le marché du travail. Je devrais dire là-dessus, M. le Président, que c'est d'ailleurs au Québec que les femmes âgées sont les plus pauvres dans l'ensemble du Canada.

Je veux, en conclusion, dire au ministre d'État au Développement social qu'en dépit des difficultés, surmontables et qu'il faut examiner avec soin, avec un esprit consciencieux pour éviter des avatars ou des désappointements dans une loi qui, en soi, poursuit un objectif auquel nous souscrivons sans réserve, nous sommes prêts à appuyer le gouvernement dans sa démarche, pour autant qu'il voudra prendre ses précautions. Je dois dire en passant que le ministre, au sujet de l'article 5 que je voulais soulever, a apporté une précision qui, je pense, va satisfaire plusieurs personnes qui s'inquiétaient du fait que si elles continuaient à travailler après 65 ans, elles n'augmenteraient pas leurs bénéfices. Il semble être bien clair qu'elles continueront à contribuer et que leur retraite se trouvera augmentée d'autant au moment où elles la prendront. Je me réjouis également de la commission parlementaire qui me semble beaucoup plus sage que la précipitation avec laquelle on semblait aller. (12 h 30)

Je voudrais également mettre en garde le gouvernement contre le fait de penser que l'adoption de cette loi va régler les problèmes des personnes âgées. C'est un problème important, mais il faut également lui demander à quel moment il va agir concernant le rapport COFIRENTES auquel je faisais allusion tout à l'heure et modifier la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes, de telle façon que les revenus provenant des régimes de retraite soient plus grands. Prenons un seul exemple, le Régime de rentes du Québec. La remarque que je vais faire s'applique au régime de rentes du Canada, parce que c'est une question de partage; quant à nous il s'agit du régime de rentes du Québec.

Ce Régime de rentes du Québec - le ministre en conviendra - devait éventuellement permettre l'abolition du supplément de revenu garanti pour les personnes âgées. Le supplément de revenu garanti pour les personnes âgées que l'on verse aux personnes de 65 ans qui n'ont pas de revenu suffisant ne devait être qu'une mesure transitoire, jusqu'au moment où les régimes de rentes du Québec ou du Canada aient atteint leur maturité, de telle sorte que des revenus suffisants auraient été accordés aux personnes âgées. Mais on voit bien dans la pratique que ces régimes sont nettement insuffisants. Les actuaires se demandent même pendant combien de temps on pourra les respecter, compte tenu de la situation particulière des fonds de retraite. Ce sont des choses qui devraient être réexaminées. Il y avait des recommandations très concrètes touchant cette réévaluation de tous les régimes de rentes publics et privés et le gouvernement, jusqu'à maintenant, n'a pas agi. Peut-être que c'est dans ses projets pour l'avenir, mais pas pour le moment.

Il ne faudrait pas non plus passer ce point sous silence. Au même moment où on abolit l'âge de la retraite obligatoire à 65 ans, je voudrais rappeler au gouvernement la situation très pénible - je ne parlerai pas du chômage des jeunes, j'en ai traité tout à l'heure - du chômage qui affecte les

personnes de 45 ans et plus. Ces dernières ne peuvent pratiquement plus se replacer sur le marché du travail, parce que, d'une façon générale, il semble que l'employeur ne privilégie peut-être pas les plus jeunes qui ont moins de vingt ans, mais les 25 à 35 ans. On peut dire aux personnes âgées: On va vous garder plus longtemps sur le marché du travail, mais il faudrait aussi que le gouvernement s'inquiète des personnes de 45 à 65 ans qui ont de plus en plus de difficultés et qui deviennent des personnes improductives à un âge où personne ne met en question le fait qu'elles sont peut-être au maximum de leur productivité, mais que notre société les tient dans une situation d'improductivité.

J'aimerais poser une question au ministre. Est-ce que l'adoption de cette loi va garantir quand même le maintien des avantages de la sécurité sociale actuelle? C'est une question importante. Est-ce que cela va maintenir, par exemple, la pension de vieillesse à 65 ans, est-ce que cela va maintenir le Régime de rentes du Québec à 65 ans?

Évidemment, on serait porté à dire non, puisque ces travailleurs continuent d'être sur le marché du travail, mais peut-être que - le ministre me donnera la réponse - si on conservait cette sécurité sociale telle qu'elle existe présentement, cela permettrait aux personnes qui décident de prolonger leurs années d'activité d'explorer des formules de temps partiel où la sécurité sociale viendrait compléter le salaire qu'elles pourraient retirer.

Enfin, je pose la question et c'est important. Dans le cas où même ceci voudrait dire un revenu supplémentaire, il reste qu'il pourrait être utilisé pour grossir, je dirais, le régime ou enfin, les revenus qui, finalement, seront les leurs quand ils seront complètement à la retraite. C'est un point important qui, je sais, soulève des points d'interrogation sérieux chez les syndicats de travailleurs. Je pense que cela vaudrait la peine d'être examiné.

Ma dernière recommandation était celle de la commission Croll, la commission sénatoriale sur l'âge de la retraite, soit de procéder par étapes. Cela ne veut pas dire un recul, je pense que j'ai été très clair sur notre approbation et sur la façon dont nous souscrivons au principe fondamental de la loi, mais la commission sénatoriale prévoyait ou recommandait d'agir une année à la fois et sur une période de cinq ans. Après cinq ans, quand on aura mesuré toutes les répercussions, que ce soient les répercussions actuarielles, que ce soient les répercussions sur les modifications ou les nouveaux modèles que les employeurs devront développer, l'adaptation des travailleurs aussi à de nouveaux modèles, l'exploration de travail adapté, de nouvelles formules de travail modulaire, etc.; après cinq ans, si tout s'avérait positif comme prévu, si tout était en place, la commission prévoyait finalement soit l'abolition complète, tel que, je pense, à long terme, on choisira de le faire. Mais cette nécessité de procéder par étapes permettra de régler des problèmes concrets et permettra également cette évolution des mentalités et cette transformation qui sera nécessaire, jusqu'à un certain point, des conditions de travail, que ce soit dans l'industrie, le secteur public ou privé, pour permettre une meilleure mise en place et une mise en place plus fructueuse que celle qui peut-être pourrait ne pas se produire si on procédait du jour au lendemain.

Je dois dire que, dans le projet de loi no 15, M. le Président, on ne prévoit pas de procéder par étapes, puisque l'article 8 dit: "La présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction."

M. le Président, en terminant, je pense que nous devons nous réjouir de voir qu'à notre tour, nous faisons comme d'autres ont fait avant nous, comme dans d'autres provinces canadiennes, là où une telle loi n'existe pas, mais où, je pense, comme en Colombie britannique et au Manitoba, les commissions des droits de la personne ont déjà rendu des décisions dans le sens que la retraite obligatoire à un âge donné est un objet de discrimination à l'égard des personnes. Éventuellement elles aussi introduiront, je pense, dans leur législation une loi beaucoup plus claire que ce recours à une commission des droits de la personne. Je crois que l'une et l'autre peuvent se compléter.

Je termine ici mes remarques et je veux assurer le gouvernement de la collaboration de l'Opposition en vue de l'amélioration de ce projet de loi et de son adoption dans les plus brefs délais possible, compte tenu des remarques que j'ai faites.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre.

M. Michel Leduc

M. Leduc: Merci, M. le Président. Certains ont qualifié cette loi comme étant la pièce législative la plus importante du gouvernement. Je n'irais pas jusque-là, M. le Président, tellement le choix est difficile à faire lorsqu'on veut identifier la pièce législative la plus importante de l'actuel gouvernement, puisqu'il y a eu quantité de lois importantes depuis 1976. Mais il reste qu'il s'agit d'une pièce législative très importante et qui constitue une première au Canada. M. le ministre a déjà mentionné qu'une loi semblable existait aux États-Unis depuis trois ans. Je voudrais ajouter qu'il s'agit d'un engagement électoral

extrêmement important que nous avons pris au cours de la dernière campagne électorale. C'est une loi qui fera du Québec une société plus tolérante et plus respectueuse de la liberté des individus et, de façon particulière, des individus âgés.

J'ai en mémoire cette femme qui enseignait dans le même établissement que moi et qui désirait poursuivre son travail puisqu'elle avait la santé et la capacité nécessaires pour l'accomplir; je me souviens que les étudiants, dans le temps, avaient même fait signer une pétition pour qu'elle demeure au collège, mais il a fallu qu'elle prenne sa retraite. On l'a obligée à prendre sa retaite. (12 h 40)

Ceci ne l'a pas empêchée de poursuivre bénévolement ses activités au collège. Je dis qu'on a été injuste envers elle et envers combien de travailleurs qui ont été brimés dans leur liberté même. Car pourquoi fixer arbitrairement à 65 ans l'âge de la retraite? Au fond, est-ce qu'il n'appartient pas à l'individu lui-même de fixer le moment de sa retraite? C'est pourquoi la raison la plus importante, quant à moi, d'abolir la retraite est reliée au respect de la liberté même de l'individu.

Mais il y a une deuxième raison, M. le Président, qui s'ajoute à celle qui me paraît fondamentale et elle est d'ordre économique. En obligeant quelqu'un à prendre sa retraite à l'âge de 65 ans, on prive, à mon avis, la société d'un apport important. On prive l'établissement, l'entreprise d'une précieuse expérience, celle qu'on accumule au fil des ans et qui demeure irremplaçable. Nous avons malheureusement développé dans nos sociétés modernes une mentalité assez curieuse vis-à-vis des personnes qui atteignent la soixantaine. On se dit: "Elle est sur le bord de la retraite, il est temps qu'elle aille se reposer pour laisser la place à d'autres plus jeunes", au lieu de se dire: "Elle a travaillé toute sa vie, elle a accumulé une expérience de travail qui ne s'acquiert qu'avec le temps, une expérience et une maturité qui pourraient profiter à la société, à l'entreprise."

Dans les temps anciens, M. le Président, et encore aujourd'hui dans certaines sociétés qui sont près de la nature, on valorise les personnes âgées. On louait la sagesse, la maturité et l'expérience des personnes, on les consultait, on leur faisait occuper des postes de responsabilité, alors qu'aujourd'hui, on est porté beaucoup plus à valoriser la jeunesse et, quelquefois, au détriment des personnes plus âgées.

Ne peut-on pas songer à une société où les mentalités concilieraient tous les âges de la société et dans laquelle chaque catégorie serait valorisée en fonction de ses qualités propres? Ne peut-on pas concilier la sagesse, la maturité, l'expérience des personnes âgées avec le dynamisme, la vitalité, l'esprit d'entreprise des plus jeunes, surtout à cette époque que nous vivons, où les jeunes aspirent à travailler tout en poursuivant leurs études, où les travailleurs retournent aux études pour des fins de recyclage ou pour des fins culturelles, où les personnes du troisième âge s'inscrivent à des cours ou s'engagent dans des activités communautaires, culturelles ou même politiques, et qui nous démontrent ainsi qu'elles refusent d'être considérées comme finies, comme devant être mises au rancart?

Ce sont ces gens, M. le Président, qui sont en train de changer les mentalités de notre société. Qu'est-ce que la société attend pour reconnaître leurs efforts et leur volonté de prendre leur place comme des agents actifs de notre société? C'est dans ce sens qu'il faut interpréter la volonté du gouvernement de reconnaître les individus plus âgés comme des agents actifs de notre société qui sont libres de décider par eux-mêmes du moment de leur retraite. Lorsqu'on dit à quelqu'un qu'il doit nécessairement prendre sa retraite à 65 ans, la société lui signifie qu'il ne peut plus fonctionner au travail, lui signifie dans un sens qu'il n'est plus bon à rien non plus, qu'il doit devenir un agent passif de la société. S'il n'y avait pas eu cette loi, on l'aurait signifié à de plus en plus de monde car, dans une vingtaine d'années, comme on l'a déjà souligné, il y aura 10% de citoyens âgés de 65 ans et plus.

Quand on entend dire que cette loi risque de léser les jeunes qui sont à la recherche d'un emploi, on accrédite encore une fois l'idée qu'une personne, à cause de son âge, doit céder sa place aux autres, alors que l'activité que démontrent présentement les personnes du troisième âge tend justement à démentir cette idée qu'il existe des frontières, une frontière bien délimitée entre les personnes qui n'ont pas encore atteint l'âge de 65 ans et les personnes qui ont atteint cet âge qui semble aujourd'hui fatidique.

En fait, n'est-il pas vrai que toute personne, quel que soit son âge, prend la place d'un jeune à la recherche d'un emploi? Pourquoi accabler davantage la personne qui a atteint 65 ans? N'est-ce pas en fonction d'une certaine mentalité révolue?

En terminant, je voudrais rappeler que cette loi constitue le premier jalon d'une politique qui vise à faciliter la transition entre le travail et la retraite par l'instauration d'un régime de retraite facultative à compter de 60 ans car, comme il a été mentionné dans le discours inaugural, la retraite doit devenir un phénomène graduel, planifié et essentiellement volontaire.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Avant de donner la parole au prochain député, je voudrais quand même rendre officiel ce qui est officieux pour le moment. Il y aurait le député de Nelligan, le député de Laurier, la réplique du ministre, ce qui nous porterait vers 13 h 15 ou 13 h 20; la reprise des travaux se fera à 16 heures, comme on le dira tout à l'heure.

M. le député de Nelligan. Oui, M. le ministre.

M. Lazure: Une mise au point, si vous me le permettez. Tout en respectant la limite d'environ 30 minutes ou 15 minutes additionnelles au calendrier habituel, je demanderais qu'on réserve quelques minutes, trois ou quatre minutes, au député de Vachon qui avait prévu prendre la parole.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que vous allez maintenant avoir trois intervenants?

M. Lazure: En réponse à la question de Mme la députée de L'Acadie, il va y en avoir un troisième, oui, le député de Vachon, pour une très brève intervention.

Mme Lavoie-Roux: Alors, nous allons aller en chercher un troisième.

M. Lazure: Non, c'est tout. Trois avec moi.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Lazure: Deux députés et le ministre, comme de votre côté.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Lazure: Les règles du jeu sont respectées.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, cela va.

M. le député de Nelligan.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, je pense que, sur la question des personnes âgées et des retraités, personne ne veut faire de politique; du moins, c'est le voeu le plus sincère que je puisse exprimer ici, c'est-à-dire que cette question déborde de l'arène politique, que ça devienne une question comme celle de la protection de la jeunesse, celle des handicapés, celle des personnes indigentes, qui ne tienne pas de l'arène politique. Je pense que c'est une question sociale fondamentale et qu'il faudrait faire abstraction de tout ce qu'un parti ou l'autre a fait de tellement bien pour l'un ou pour l'autre. Je pense que ça dépasse toute cette question politique, cette question partisane.

Je voudrais proposer au ministre, en toute sincérité, que cette fois aussi nous traitions cette question de l'âge flexible de la retraite de la même façon positive que nous avons traité la question de la protection de la jeunesse, en regardant la commission parlementaire qui va être tenue plus tard comme une grande commission bipartite où tous les intéressés des deux partis politiques vont se rencontrer avec l'esprit le plus objectif possible, avec tous les intervenants, pour décider vraiment de ce qui est le mieux pour les personnes âgées, pour les retraités, pour ceux qui veulent prendre leur retraite, abstraction faite de toute question politique.

En fait, nos deux partis sont tout à fait d'accord sur le principe de la question. Comme l'a souligné la députée de L'Acadie, notre programme électoral faisait mention de la même chose que celui du Parti québécois. Cela étant dit, nous devons vraiment regarder le fond de la question. En principe, nous sommes tous d'accord que l'âge flexible de la retraite est une mesure équitable, mesure qui doit se faire. En fait, la députée de L'Acadie et le ministre ont cité les exemples de divers pays qui vont dans cette direction. C'est l'évolution tout à fait normale d'une société et nous sommes tout à fait d'accord avec cela. Mais, en même temps, il est très sage et je dois féliciter le ministre d'avoir bien voulu laisser la question en suspens pour un laps de temps pour que justement une commission parlementaire de la plus grande envergure se tienne sur cette question fondamentale. Parce qu'on peut étudier cette question à nos risques. Il faut l'étudier en toute profondeur, il faut l'étudier en toute objectivité. Nous ne sommes pas prêts à commencer cette chose parce qu'il y a trop de questions qui demeurent sans réponse. (12 h 50)

Il y a de gros problèmes dans toute la question de la retraite. On peut dire que la même chose se passe un peu ici, peut-être que les chiffres ne sont pas exactement les mêmes, mais il y a beaucoup de corrélation entre les problèmes qui se voient aux États-Unis, des problèmes de population, de la population vieillissante, et les nôtres. En 1950, aux USA, il y avait quelque chose comme seize contribuables et demi qui aidaient un retraité. Or, maintenant, quelques années après seulement, 30 ans après, il y en a seulement 3,2 qui aident un retraité. On dit que, dans encore 20 ans, à la pointe du nouveau siècle, il y aura peut-être deux contribuables qui vont aider un retraité. C'est un problème fondamental. Le problème justement de ce nombre de plus en plus restreint de contribuables qui vont aider une

population vieillissante de plus en plus grandissante.

Le ministre lui-même a cité des chiffres au Canada et au Québec de notre population qui va vieillir d'un taux de 8%, qui va passer à 10% dans 20 ans. Après cela, après 20 ans, cela va aller à un rythme progressif de plus en plus étendu, de plus en plus rapide. Ce sera la pyramide renversée. Le tout petit nombre de contribuables qui va aider un nombre de plus en plus grandissant de personnes âgées. Alors, c'est ça la question critique qu'il faut se poser. Le ministre a encore apporté le second problème fondamental, que pour la grosse majorité des gens, que ce soit ici, dans les autres provinces, ou aux États-Unis, la même chose se passe, dépendre des fonds publics, des régimes publics pour leur subsistance après la retraite, parce que les régimes privés n'existent pas dans certaines entreprises, comme le ministre en a fait mention, les petites entreprises, ou bien ils existent seulement pour ceux qui justement travaillent dans le secteur privé.

Ils n'existent pas pour tout le monde. Comme il en a fait mention, 55% des gens dépendent uniquement des régimes publics, des fonds de retraite créés par l'État. Aux États-Unis, le chiffre est encore plus gros. Qu'est-ce qui arrive à ces fonds publics? La députée de L'Acadie a souligné que ces fonds publics sont maintenant inadéquats. Tous les calculs actuariels disent que, dans quelques années, ces fonds seront déficients. Ils commencent déjà à être déficients. Alors, la question se pose. On peut poser le principe d'une retraite flexible et tout le monde est d'accord là-dessus. Mais, en fait, est-ce un choix réel? Voilà la question primordiale. Si c'est un choix fictif, si c'est un choix qui dépend essentiellement d'une question pratique, de l'argent qu'il faudra à chaque retraité pour subvenir à ses besoins si cet argent n'est pas là, comment dire que c'est un choix vraiment réel? Je propose que, justement, dans cette commission parlementaire, nous étudiions en même temps la question fondamentale de trouver les besoins nécessaires, les besoins financiers, les besoins pratiques pour subvenir aux problèmes de gens qui voudraient cette retraite flexible, parce que la retraite flexible, cela va des deux côtés. C'est une retraite différée ou c'est une retraite anticipée. Si c'est une retraite anticipée et qu'une personne n'a pas les moyens suffisants pour subvenir à ses besoins, cela devient un choix fictif. En d'autres termes, si c'est une retraite différée et que, comme l'a souligné le ministre, la personne est obligée de travailler et de différer sa retraite parce qu'elle n'a pas assez de fonds de retraite à l'âge de 60 ou 65 ans, cela devient une retraite différée, non pas un choix libre, mais une retraite obligatoire. Parce que, si la personne est obligée de continuer à travailler et si cette loi permet à cette personne de continuer à travailler, elle le fait tout à fait légalement, mais elle est obligée, parce qu'elle n'a pas assez de revenus, de continuer à travailler. À ce moment, ce choix n'est plus réel, n'est plus un choix objectif, mais un choix fictif, un choix obligatoire. C'est paradoxal de parler d'un choix obligatoire, mais cela devient presque ça. C'est la question qu'il faudra se poser.

Excusez-moi, M. le Président, je cherche mes notes. Je reviens tout de suite.

La question est encore beaucoup plus sérieuse, beaucoup plus capitale pour ce qui a trait aux femmes, parce que les femmes, elles, par la nature même de la société qui a évolué comme elle a évolué, touchent beaucoup moins que les hommes dans leur vie, même si elles sont dotées d'un régime privé dans leur travail. Du fait même qu'elles ont touché bien moins dans la vie, elles finissent, à l'âge de la retraite, que ce soit à 55 ans, 60 ans ou 65 ans, le problème reste le même, avec une retraite inadéquate, même si elles ont un régime privé de retraite. Pendant la période électorale, j'ai parlé à des gens, à des femmes surtout qui me disaient: On est obligé de continuer de travailler pour un salaire minimum parce que, justement, les fonds de retraite publics ne sont pas adéquats pour assurer notre subsistance. On dit que la grande majorité de notre population - et la députée de L'Acadie l'a souligné - vit sous le seuil de la pauvreté, est indigente. C'est ça le problème fondamental. Il me semble que, si on dit: II faut qu'on ait une retraite flexible, facultative, il faut pouvoir assurer les fonds qui permettront ce choix à toutes les personnes, surtout aux femmes.

Nous avons proposé, durant la période électorale - et peut-être le ministre pourrait-il s'arrêter sur cette question - de donner aux veuves dont les époux étaient couverts par des régimes privés un minimum de 50% du régime privé du mari afin de s'assurer que cette personne ne devienne pas d'un jour à l'autre indigente, malgré que son mari ait contribué toute sa vie à un régime de retraite. Je pense que le problème des femmes se pose avec encore beaucoup plus d'acuité que celui des hommes.

Un autre problème se pose. Ceux qui, surtout, voudront profiter de la retraite différée, ce seront les cols blancs, les gens des grandes villes, les types qui seront au pouvoir, ceux qui, vraiment, touchent de l'argent. On fera en un sens que les riches continuent d'être riches. Pendant ce temps, on va peut-être faire cesser l'évolution normale des affaires, qui veut que les plus jeunes prennent leur place, se recyclent. C'est un autre problème sur lequel il faudra se pencher, celui des gens qui voudront

s'accrocher, malgré peut-être des capacités diminuées, malgré peut-être la sénilité, à un travail où ils vont déplacer des jeunes. Par contre, ceux qui voudront prendre leur retraite seront en majorité des cols bleus qui, eux, n'auront pas les moyens de le faire. C'est ça le grand problème.

Je voudrais laisser au ministre à penser que le point capital de notre intervention, c'est vraiment que nous examinions à fond toute la question de la retraite, la question actuarielle des fonds de retraite, la possibilité d'inclure dans les régimes privés certains critères minimaux qui vont donner la possibilité aux gens de faire un choix réel et objectif. C'est ça la clé de toute notre intervention, faire un choix non pas fictif, mais un vrai choix.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Vachon.

M. David Payne

M. Payne: II me fait grand plaisir, M. le Président, de m'adresser à l'Assemblée à ce sujet aujourd'hui, parce que ça touche les gens qui sont autour de l'âge de 65 ans ceux qu'on a l'habitude d'appeler "les personnes âgées". Cela me fait plaisir, parce que je conteste vigoureusement une telle appellation sociale. (13 heures)

Au Québec, nous avons des personnes de toutes souches, de toutes cultures, de tous âges. Je me réjouis que le ministre actuel, le ministre d'État au Développement social, présente un tel projet de loi qui nous met à l'avant-garde de la société civilisée de l'Ouest, des pays comme les États-Unis, comme la Suède, comme la Norvège. Il s'agit d'un projet de loi qui est simple. C'est simple parce que cela fait appel à la dignité de l'homme. Cela fait appel - la formation ministérielle, le Parti québécois au pouvoir, encore une fois le gouvernement - à nos instincts les plus fondamentaux de briser une fois pour toutes avec cela, et avec chaque mesure fondamentale qu'on adopte ici dans cette Assemblée nationale, cela fait appel à notre détermination d'adopter un projet de loi qui aurait comme effet et objet le bien-être des individus.

Ainsi, nous avons, au cours des trois ou quatre dernières années, aidé un peu les personnes au-delà de 65 ans, par exemple, par la gratuité des soins médicaux et des ordonnances, la gratuité du transport ambulancier et le programme de Logirente qui aide ceux qui paient plus que 30% de leur revenu pour le logement. C'est bien comme cela qu'il faut faire au Québec. Nous sommes très fiers, comme Québécois, et de ce cûté-ci de la Chambre, de proposer aujourd'hui ce projet de loi. Moi aussi, comme député de Vachon, je peux dire que nous avons beaucoup de personnes qu'on appelle âgées. Mais, comme je le disais tout à l'heure, on conteste le fait que nous sommes âgées, les personnes au-delà de 65 ans. Nous sommes actifs dans la société, dans la ville de Saint-Hubert. Nous travaillons fort, mais nous nous amusons très fort, très bien. Nous avons des sports pour les handicapés, pour les personnes âgées. Nous contestons, dans Vachon aussi, la catégorisation institutionnelle que nous faisons d'habitude entre les études, c'est-à-dire à l'école jusqu'à l'âge de 18 ans, et, par la suite, on est obligé de travailler pendant une période de temps et, ensuite, c'est la retraite.

Je préfère une philosophie sociale qui fait appel plutôt à la dignité de l'individu, où je peux me dire: Je veux réapprendre quelque chose ou remettre en question ce que j'ai appris il y a quinze ans; ou je veux également avoir le droit de prendre ma retraite, idéalement, quand je le voudrai, quand je serai fatigué, quand j'aurai fait ma part dans la société. Mais, ne me dites pas que qui que ce soit peut me dire que j'en ai fait assez, que je suis trop vieux, parce que nous voyons, chez les personnes qu'on appelle "les vieux", les plus jeunes de notre société et, chez les jeunes, les plus sages et les plus adultes de notre société.

It gives me a tremendous pleasure, Mr. Chairman, to address myself to this bill because it is an extremely progressive law which is being proposed by the present Minister of State for Social Development. Typical of him and of our government, I think it puts us in the forefront of social measures of this kind, with respect, for example, to the US, Norway, if I am not mistaken, and also Sweden.

In abolishing the obligatory retirement, we give an opportunity for any individual to choose himself when he feels he has contributed enough to his family, to his work, to society and, here in Québec, to our own homeland.

It is very important, in this basic law, to underline the fact that it is a fundamental right and that there is nothing extravagant about it, there is nothing radical about it, but it is necessary. Any progressive society like Québec must have a law like this. We must break down the categories that divide the school up to the age of 18, the school from the work place and the work place from the period of retirement.

I think that our government has the opportunity, in the next few years, to continue what it has begun over the last few years, to really help people to put into question the fact that these categories separate us. We find young among the old, we find old people with young ideas. That is the sort of measure that we have to bring in, in this government. It is an individual

right and it gives this government an opportunity to answer to the principle of dignity, the dignity which has characterized the program of the Parti québécois.

Finally, in the last minute, I would like to recommend that the government continue in the best possible way to exercise every bit of imagination possible to bring in progressive programs such as progressive retirement, such as extended leaves for people of the age of 30, 40 or 50, to make it easier to bring more people into the work force, to have a more diversified society.

In conclusion, diversification of this nature, Mr. Chairman, cannot but be for the betterment of Québec. I am happy for this bill, I support it without reservation and I am proud to be a member of the ministerial team that has proposed it. Thank you.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais aussi, à mon tour, parler sur ce projet de loi qui vise à abolir la retraite obligatoire à 65 ans. Effectivement, je pense que cela a été mentionné par les autres orateurs tout à l'heure, on a plusieurs études, sinon la quasi-totalité des études, qui démontrent que le moment d'arrivée de la retraite est souvent un choc assez sérieux pour les personnes qui, jusqu'à ce moment-là, étaient des membres productifs de la société et qui participaient à sa vie économique et quotidienne. Tout à coup, ils se sentent un peu, enfin, ils sont effectivement mis en veilleuse, mais une veilleuse qui dure beaucoup plus longtemps que deux mois.

Ces gens-là n'ont pas le loisir de se prévaloir de cette possibilité de continuer à travailler, même s'ils en ont la capacité, ils sont obligés d'arrêter de travailler et, tout à coup, tomber dans une autre phase de leur vie qui est la retraite. Souvent, on voit - le service social en particulier, dans le domaine médical également - que beaucoup de gens qui n'étaient pas préparés à la retraite se trouvent tout à coup avec un immense nombre d'heures disponibles sur le moment et ils ne savent plus quoi faire. Ils vivent de vrais problèmes. Dans ce sens-là, c'est un bon projet de loi, si on peut le qualifier ainsi, qui permettra aux gens qui se sentent la capacité de continuer à travailler, qui ont la possibilité de continuer à travailler, physiquement et mentalement, de le faire.

Je crains pourtant certaines choses avec ce projet de loi et l'une des choses que j'aimerais aborder a été soulignée tout à l'heure par le ministre et par le député de Vachon. On parlait de libre choix. Si on est très réaliste, il ne peut pas y avoir de libre choix sans qu'on ait des options. Quand on sait d'avance que la majorité des gens qui arrivent à l'âge de la retraite, qui pour le moment est fixé à 65 ans, n'ont pas les moyens de maintenir un niveau de vie avec dignité, comme disait le député de Vachon, quand on sait, comme le ministre nous le disait, que 55% des personnes âgées n'ont pas de régime enregistré de retraite, donc ils dépendent uniquement du régime de retraite de l'État, on voit qu'il n'y a pas de choix. On se trouve comme sur un chemin, dans le processus de la vie, si vous voulez, on continue à travailler pour gagner sa vie, on arrive à un moment dans la vie qui, pour l'instant, est démarqué à 65 ans et là, on ouvre une porte, mais on n'a pas ouvert deux portes pour que la personne puisse vraiment choisir laquelle elle veut prendre. Elle a effectivement deux choix: soit d'arrêter et de vivre au-dessous du seuil de la pauvreté ou de continuer à travailler pour maintenir un niveau de vie un peu plus acceptable. Dans ce sens, cette loi va permettre aux gens de continuer à travailler. Je crois aussi que les gens qui vont se prévaloir de ce droit seront de deux catégories: soit des gens qui sont dans le besoin économique et vont continuer à travailler, soit des gens qui, effectivement, ont ou ont eu une vie et un travail qui leur permettent d'avoir le loisir de rester à leur travail parce qu'ils aiment ça, parce qu'ils font quelque chose qu'ils trouvent valorisant.

On sait aussi, selon plusieurs études faites dans le service social, en psychologie, etc., qu'effectivement, quand la personne se sent valorisée dans son travail, quand elle retrouve une certaine identité avec son travail, et qu'elle aime ça, les chances sont qu'elle voudra continuer à travailler. Ce point a été touché tout à l'heure par le député de Nelligan.

Arriver en dernier, c'est toujours difficile, parce que beaucoup de choses ont été couvertes, mais je vais essayer simplement d'être bref. Effectivement, chez les gens qui travaillent dans des métiers routiers, à la chaîne, dans des emplois lourds, etc., on constate, dans d'autres pays, d'autres provinces, que la tendance serait beaucoup plus vers une retraite anticipée. J'espère que ce que le ministre a dit tout à l'heure, qu'il y aura à la session d'automne d'autres volets à ce supposé ensemble de projets qui visent à améliorer la condition des personnes âgées, comprendra la possibilité pour ces personnes de s'orienter aussi vers une retraite anticipée. Encore une fois, on ne peut pas avoir de libre choix, si on n'a pas d'option. Pour la grande majorité des personnes âgées, à l'heure actuelle, il n'y a pas d'option. (13 h 10)

II y a deux derniers points que j'aimerais soulever. Une manière serait

d'avoir une option qui faciliterait la préparation à la retraite pour les gens qui veulent la prendre à 65 ans. Il y a plusieurs projets qui ont été mis sur pied, des cours de préparation à la retraite, etc., qui pourraient la faciliter et permettre à des personnes qui voudraient se prévaloir de leur droit à 65 ans d'utiliser leur temps d'une manière qui serait valorisante pour eux pendant cette phase de leur vie. Pourtant, il y a un lien, je pense. On a constaté, dans le budget, qu'il y a une coupure quasi totale dans les cours d'enseignement aux adultes. Ce serait un moyen intéressant d'atteindre les gens par rapport aux cours de préparation à la retraite.

I would like also to add a few words, if I may, in English. Basically, you know, it was interesting hearing the deputy of Vachon speak in terms of the dignity of the individual, the progressive measures of the Government and his hope that more and more of this would happen and also his reference to certain Scandivanian countries such as Sweden and Norway. I do not have the figures of such but I really wonder if countries that can afford that kind of, I would not say luxury, but can move in that direction more rapidly than we can over here are in the same position as we are. Is it the same, for instance, in Sweden where the 55% of the population does not have access to private pension plans? It has to depend almost entirely on pension money from the state which, as we all know, is a very difficult way to make ends meet, and we find a large majority, I would say, of people over 65 who live uniquely on their pensions, finding it extremely difficult to make ends meet, and specially at a moment of time we are watching inflation at a rate of about 10% or 12%, interests rate of 20%. These of the people are having an enormous amount of difficulty.

I do not think that the kind of message is being vehiculed or put across, if you like, in terms of progressive measures and in terms of measures that give, give, give, is very much in accord with what we have been witnessing this whole month up to now. I think that, if we look at this particular bill, I find it an excellent bill in terms of abolishing the discrimination that exists because of age. I do not think that we can pretend that this bill in itself really goes a long way to correct the many social injustices that exist in terms of the needs of senior citizens specially at a time that we are witnessing some massive cuts in the budget of the Social Affairs Department. The thing I wondered in my mind is like the candy or the sugar to make the pill go down easier... Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, le droit de réplique.

M. Denis Lazure (réplique)

M. Lazure: M. le Président, je veux d'abord remercier mes collègues de l'Assemblée de leur appui à commencer par mes collègues de Vachon et de Fabre et aussi les collègues de l'Opposition.

Je me réjouis de l'atmosphère très positive, très constructive dans laquelle ce projet de loi est abordé: concordance des partis vers un même objectif, à savoir, abolir une mesure discriminatoire.

Je vais essayer de répondre en cinq ou six minutes aux trois ou quatre questions les plus importantes qui ont été soulevées. La première, c'est une suggestion de la députée de L'Acadie: Pourquoi ne pas procéder par étapes? Quand il s'agit d'abolir une discrimination sociale, il n'est jamais trop tôt pour le faire. Moi aussi, je vais dire mes quelques mots en anglais, en citant le journaliste Don McGillivray de la Gazette, journal auquel nos amis de l'Opposition accordent beaucoup de crédit, beaucoup de fiabilité. M. McGillivray, après avoir fait l'éloge du projet de loi, l'éloge du gouvernement actuel, - c'est assez rare, M. le Président, dans le journal la Gazette, il faut le noter - conclut en disant: "Si Abraham Lincoln avait écouté tous ceux qui disaient: L'esclavage, il faut faire disparaître cela graduellement, par étapes, - c'est M. McGillivray qui le dit - on aurait encore de l'esclavage partiel aux États-Unis". Mais la toute dernière phrase de l'article de M. McGillivray, que je vous engage à lire, si vous ne l'avez pas fait, mes amis d'en face conclut en disant: "In fact, conditions have never been better for ending mandatory retirement." De fait, dit-il, jamais les conditions n'ont été aussi propices pour abolir, une fois pour toutes, la retraite obligatoire.

M. le Président, sérieusement, nous avons envisagé cette possibilité de procéder par étapes. Je sais que le comité du sénateur Croll avait fait cette recommandation. Par ailleurs, la ministre Monique Bégin de la Santé nationale et du Bien-Etre social, dans une entrevue qu'elle accordait récemment à la Presse Canadienne se disait favorable à l'abolition immédiate de la retraite obligatoire.

Dernier aspect de la question, un sondage Gallup qui a été fait à travers tout le Canada il y a un an et demi ou deux ans, démontre que 62%, - un tel pourcentage est rare lors des sondages Gallup - s'entendent pour l'abolition immédiate de la retraite obligatoire.

Deuxième remarque. Il est sûr qu'à partir du moment où un employeur ne peut plus congédier un employé ou une employée sous prétexte de l'âge, tout le processus d'évaluation du personnel, cette évaluation que tout bon employeur doit faire

régulièrement, au moins une fois par année, devra être beaucoup plus stricte, beaucoup plus raffinée. C'est clair que cette abolition de l'âge obligatoire de la retraite va imposer un certain surcroît de travail aux employeurs de manière que leur évaluation du rendement de l'employé soit vraiment plus au point.

COFIRENTES. La députée de L'Acadie a, à bon droit, posé la question: À quand la mise en application des recommandations de COFIRENTES? Nous avons maintenant en main à peu près tous les rapports semblables à COFIRENTES qui ont été faits dans d'autres provinces, ainsi que par le gouvernement fédéral. C'était une des raisons de notre attente, si vous voulez. Il y a des options fondamentales qui devront être discutées dans les prochains mois par le gouvernement et par cette Assemblée nationale. Par exemple, dans le domaine des régimes de rentes publics, le régime de rentes du Canada ou le régime de rentes du Québec qui sont équivalents, à toutes fins utiles, est-ce que ce régime public doit être bonifié, amélioré le plus tôt possible pour l'ensemble des citoyens du Québec? C'est un peu la position de la Saskatchewan qui a annoncé il y a un mois que, indépendamment de la volonté du gouvernement fédéral, elle, la province de la Saskatchewan, allait bonifier son régime public de rentes, le RPC, l'équivalent du régime de rentes du Canada.

L'Ontario, à l'extrême opposé, si vous voulez, a l'intention d'imposer des régimes supplémentaires de rentes à toutes les entreprises. C'est une option. Déjà, l'Ontario avait un projet de loi il y a plusieurs années, qui n'a jamais été sanctionné, pour rendre obligatoire le régime supplémentaire de rentes dans toute entreprise. On nous dit, aux dernières nouvelles, que l'Ontario veut revenir avec cette loi. Notre choix est loin d'être fait, il s'agit de choix fondamentaux. Je peux simplement dire aux membres de l'Opposition, ainsi qu'à mes collègues - je le répète encore une fois - que nous avons l'intention, à la prochaine session, de compléter par d'autres projets de loi cet ensemble de mesures visant à améliorer de façon notable le sort des retraités et des préretraités. (13 h 20)

Une dernière réponse à une question: le maintien des avantages sociaux. Il est bien sûr que la pension, par exemple, émise par le gouvernement fédéral continuera d'être touchée, elle sera touchée par la personne de 65 ans qui continue de travailler. Bien sûr que cette personne recevra la pension du fédéral. Quant à la pension du Régime de rentes du Québec, si la personne continue de travailler au-delà de 65 ans, elle aura le choix, elle pourra, ou bien tout de suite toucher sa pension de la Régie des rentes ou bien continuer d'investir et la toucher lorsqu'elle prendra sa retraite quelques années plus tard.

Je rappelle en passant que dès 1977 le gouvernement du Parti québécois a modifié la Loi sur la Régie des rentes pour permettre justement aux personnes de 65 ans et plus de toucher leurs rentes au complet, tout en touchant un salaire, s'il ou si elle choisissait de continuer de travailler, ce qui n'était pas possible avant, sous l'ancien gouvernement.

M. le Président, en conclusion, je suis très heureux de voir que non seulement il y a unanimité à toutes fins utiles en dehors de cette Chambre, dans le public, dans les corps intéressés, chez les individus, dans les médias et qu'ici aussi, dans cette Assemblée, les deux partis politiques s'entendent pour procéder. Nous avons décidé, étant donné la complexité de la question, de procéder un peu plus lentement que prévu, mais nous espérons être en mesure de continuer l'étude de cette loi au cours de l'été et d'en arriver à une adoption finale, lors de la session d'automne. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 15, Loi sur l'abolition de la retraite obligatoire et modifiant certaines dispositions législatives est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Charron: M. le Président, je propose la déférence de ce projet de loi à la commission parlementaire des affaires sociales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je propose la suspension des travaux jusqu'à 15 h 45 cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension des travaux jusqu'à 15 h 45.

(Suspension de la séance à 13 h 23)

(Reprise de la séance à 15 h 55)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaîtl

Veuillez vous asseoir.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord faire rapport à la Chambre du travail de plus de 150 heures au total, en commission parlementaire, impliquant tous les membres de l'Assemblée, j'en suis convaincu.

Dépôt du rapport de

l'étude des crédits pour

l'année 1981-1982

Conformément à l'article 130 du règlement de l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur, au nom du ministre des Finances, de déposer le rapport regroupant les différents rapports des commissions permanentes élues qui ont procédé à l'étude des crédits du buget de l'année financière 1981-1982, pour chacun des ministères du gouvernement du Québec.

Ces commissions ont tenu 31 séances, pour un total de 134 heures et 54 minutes. Je dépose ce document.

Sur le même sujet, M. le Président, à la suite d'une entente avec l'Opposition, nous allons procéder à la discussion de ce rapport ce soir. Je rappelle les dispositions de l'article 128 du règlement qui dit que tout député qui veut intervenir sur ce sujet, lors de la discussion de ce rapport, contrairement à tous les autres débats qu'il y a dans cette Assemblée à n'importe quel autre moment, doit donner un avis préalable qu'il a l'intention d'intervenir, et seuls les députés qui ont donné un avis écrit au secrétaire général de l'Assemblée, au cours de la séance de cet après-midi, auront ce soir le privilège d'intervenir et d'obtenir un échange avec le ministre qu'ils choisiront d'impliquer dans la discussion. J'ai, pour ma part, demandé à chacun des ministres, au Conseil des ministres qui est d'ailleurs encore en réunion, d'être disponible en soirée, selon l'appel qui viendra de ceux qui s'inscriront auprès du secrétaire général.

Jusqu'à 18 heures, il nous reste deux heures de débat sur le discours sur le budget et nous voterons à 18 heures. Je vous prie donc d'appeler l'article 2 du feuilleton, M. le Président.

M. Picotte: Je dois vous dire, au nom de l'Opposition, qu'au cours de la séance, cet après-midi, vous serez avisé du nom des gens qui désireront intervenir et il y aura possibilité d'aviser les ministres en conséquence.

M. Charron: Merci.

Reprise du débat sur le discours sur le budget

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement. M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, j'aimerais aujourd'hui profiter de l'occasion qui m'est donnée de faire part à cette Chambre, et à mes électeurs en particulier, de quelques dangers qui, à mon avis, guettent le Québec et le comté de Richmond.

J'ai eu l'occasion, au cours de l'étude des crédits du ministère des Transports, de discuter avec le ministre les problèmes avec lesquels les électeurs du comté de Richmond sont confrontés dans le domaine de la voirie. Je dois vous dire qu'après avoir pris connaissance des crédits du ministère des Transports, je ne suis guère rassuré sur l'avenir qui nous attend. Il m'apparaît, en effet, paradoxal d'entendre le ministre nous dire, par le truchement des journaux, qu'il accordera la priorité à la voirie régionale plutôt qu'aux autoroutes, alors que le budget semble bien vouloir dire exactement le contraire.

En effet, le budget de construction d'autoroutes demeure à 139 000 000 $ comme l'année dernière. Par ailleurs, la construction des routes principales passe d'un budget de 110 000 000 $ à 93 000 000 $, la construction de routes régionales passe de 59 000 000 $ à 51 000 000 $ et la construction d'autres routes de 122 000 000 $ à 119 000 000 $. Le budget de construction de routes diminue donc de 26 000 000 $ et la coupure n'est pas affectée aux autoroutes, mais bien à la construction des autres routes à caractère régional et local.

Alors, comment ne pas être alarmé quand, déjà, le budget précédent qui était de 26 000 000 $ plus élevé ne permettait pas de répondre aux besoins, en particulier ceux du milieu rural?

Est-ce de cette façon que le gouvernement compte valoriser la classe agricole? Car, ne l'oublions pas, ses représentants seront les premiers pénalisés. Les agriculteurs qui sont maintenant de véritables investisseurs et qui exploitent de véritables entreprises sont en droit de s'attendre à plus d'attention et de

considération.

Le ministre m'indiquait en commission parlementaire qu'il était impossible de paver plus de 33 000 kilomètres de routes qui ne le sont pas présentement. Évidemment, M. le ministre exagère. Il sait très bien que les électeurs ruraux du Québec ne sont pas si exigeants. Je l'ai informé qu'à mon avis, il est prioritaire qu'à tout le moins les municipalités de campagne soient reliées les unes aux autres par une voie pavée. Il n'y a pas là de commune mesure avec les 33 000 kilomètres dont nous a parlé le ministre. (16 heures)

Comment accepter une diminution de budget de voirie alors que, dans le comté de Richmond, nous sommes négligés depuis maintenant cinq ans par le gouvernement actuel? Je veux rappeler au ministre qu'il existe encore dans le comté de Richmond et sûrement dans bien d'autres comtés au Québec des municipalités qui ne sont reliées ni d'un côté ni de l'autre par une route pavée. Je songe à Saint-Fortunat, à Ham-Sud, à Sainte-Hélène-de-Chester. Il existe dans le comté de Richmond des routes qui ferment chaque printemps parce qu'elles deviennent tout simplement inutilisables. Le Parti québécois voudrait que nous nous réjouissions de son budget rapetissé de voirie. Non, M. le Président, cette situation est, pour moi, inacceptable.

Le ministre des Transports a également fait allusion, en commission parlementaire, au fait que l'échéancier de construction de la route 116, entre Richmond et Kingsey-Falls, pourrait être retardé s'il fallait que les priorités du député soient différentes. Je vais raconter une courte histoire au nouveau ministre, une histoire que son prédécesseur a permis d'écrire. Dois-je lui rappeler que la construction de l'autoroute 55, devant relier Richmond à Saint-Albert, a été stoppée, a été mise en veilleuse pour être ensuite mise à mort par le Parti québécois?

C'est d'ailleurs à la suite de cette décision très discutable que le premier ministre est venu nous annoncer, après que son ministre des Transports de l'époque l'eut lui-même fait, que la route 116 allait être reconstruite au complet et remplacerait l'autoroute 55 dont on venait de sonner le glas. Il aura fallu à peu près quatre ans avant qu'on puisse bénéficier d'un premier contrat sur une longueur de moins de deux milles. Alors, je comprends mal que le ministre veuille maintenant marchander la route 116 pour d'autres routes comme la route 216, la route 249 ou la route 255. Comment pourrait-il, d'ailleurs, contredire son premier ministre qui est venu promettre cette route aux électeurs du comté de Richmond chaque fois qu'il y a mis les pieds?

Si M. le ministre prenait la décision de mettre fin à ce projet pour donner suite à d'autres demandes, il devrait lui-même venir s'expliquer dans le comté de Richmond. Je n'ai personnellement pas l'intention de négliger l'un ou l'autre des territoires du comté de Richmond et j'espère que le ministre se rendra compte que le comté de Richmond a peut-être plus besoin que d'autres comtés de voir son réseau routier amélioré. Il reconnaîtra d'emblée que, par exemple, le comté de Richmond est confronté avec des besoins supérieurs à ceux de son propre comté qui a pu bénéficier, dans le passé, d'une manne quasi providentielle. Le ministre admettra que la voie lui a été bien pavée dans Drummond et qu'il se doit de songer à ceux qui ont trop souvent été négligés.

Donc, je souhaite que le nouveau ministre des Transports réussisse le tour de force d'accentuer la construction de routes à caractère régional et local tout en acceptant une diminution importante de son budget, surtout si on tient compte que l'inflation, à elle seule, gruge près de 50 000 000 $ de son budget de voirie. M. le Président, je veux assurer le ministre de ma sympathie en même temps que de ma collaboration, car je sais qu'il n'aura pas une mince tâche et qu'il devra dans plusieurs circonstances compter sur notre compréhension. Je veux l'assurer que cette compréhension sera proportionnelle à la volonté qu'il aura d'aider les électeurs de mon comté. Mais, M. le Président, quand on songe que certaines gens attendent depuis 25, 30, voire 40 ans la reconstruction d'une route, vous serez d'accord avec moi pour dire qu'ils ont bien raison d'être quelque peu impatients, d'autant plus qu'avec la nouvelle politique du ministère des Transports, un grand nombre de citoyens donnent leurs terrains afin de permettre l'exécution de travaux de voirie.

Ce que ces gens revendiquent, c'est un minimum décent. Ils ne demandent pas des autoroutes. Je faisais mention au ministre qu'il suffirait par exemple de construire des routes en se servant de normes un peu plus restreintes, un peu plus réduites. Des routes à 66 pieds d'emprise sont nettement acceptables pour la majorité des cas des routes à caractère local. Le ministre devrait largement s'inspirer de cette proposition pour remédier aux coupures budgétaires auxquelles il a à faire face dans son ministère. Donc, en milieu rural, il économiserait doublement en construisant des routes à standard un peu plus restreint et en éliminant les expropriations. Ces deux mesures seront certes plus efficaces qu'un ticket modérateur et ne pénaliseront personne, M. le Président.

Je voudrais à ce moment-ci m'attarder sur un autre sujet qui me tient énormément à coeur, celui de l'amiante. En ayant déjà parlé antérieurement en réponse au discours inaugural, je me limiterai à quelques points primordiaux pour le comté que je représente.

Je faisais part en commission parlementaire au ministre de l'Énergie et des Ressources de mes inquiétudes en ce qui a trait à la tendance actuelle de la Société nationale de l'amiante de localiser à Thetford-Mines les projets d'exploitation des résidus d'amiante. Le ministre n'a pas tardé à faire connaître ses intentions et il m'a informé, à mon grand regret, qu'il allait certainement privilégier Thetford-Mines puisque, si le gouvernement nationalise l'Asbestos

Corporation, il sera propriétaire de résidus d'amiante et que, par conséquent, il n'allait pas acheter des résidus situés ailleurs. Il n'y a pas là de quoi rassurer les 400 jeunes chômeurs d'Asbestos qui ont été mis à pied par la Johns-Manville Canada, faute de production.

Il n'y a pas là de quoi rassurer non plus les travailleurs actuels qui font face à des congés temporaires, faute de production. II n'y aura pas là de quoi non plus rassurer la ville d'Asbestos, qui a demandé qu'une personne de cette région puisse être nommée au conseil d'administration de la Société nationale de l'amiante. Dans ce cas précis, je crois que la décision de l'ancien ministre, M. Bérubé, de refuser de donner suite à cette demande ne pouvait être justifiée que par le fait que la région d'Asbestos ne figurait pas du tout dans ses plans. Je comprends mieux maintenant que le ministre actuel nous confirme qu'il ne considérera pas Asbestos comme site de traitement des résidus d'amiante. Je suis heureux de la franchise du ministre actuel, mais il comprendra que sa position est inacceptable pour les électeurs du comté de Richmond et je veux, en leur nom, manifester mon mécontentement. Est-ce trop demander, M. le Président, que de vouloir que la Société nationale de l'amiante soit au service de toutes les villes amiantifères et non pas seulement d'une ville où le gouvernement se prépare d'ailleurs à investir des montants fabuleux pour se porter acquéreur de la mine Asbestos Corporation? Vous comprendrez mon inquiétude, M. le Président et je veux profiter de cette tribune pour alerter la population de toute la région d'Asbestos, face à ce qui pourrait devenir le coup de force du ministre de l'Énergie et des Ressources.

Dans ce domaine comme dans celui de la voirie, je désire rappeler à cette Chambre que les électeurs de Richmond sont payeurs d'impôts et de taxes au même titre que ceux des comtés représentés par les députés ministériels. Il ne faudrait pas oublier que si le ministre des Finances a pu préparer et présenter un budget, c'est qu'il y a un autre ministère qui perçoit les impôts des électeurs, le ministère du Revenu. Que je sache, les citoyens du comté de Richmond paient bien leurs impôts et ils sont en droit d'attendre de recevoir des services équivalents à ceux que reçoivent les électeurs d'autres comtés au Québec.

M. le Président, on ne peut se réjouir des nombreuses coupures qui ont été annoncées dans les divers ministères, entre autres, au ministère de l'Éducation. Des compressions budgétaires dans certains cas, vont amener une diminution de services. Le député de Brome-Missisquoi nous parlait hier des institutions privées d'enseignement. Il est bien évident que pour des raisons idéologiques, sous le couvert de motifs budgétaires, le gouvernement actuel va sonner le glas de nombreuses institutions qui bénéficient d'une excellente réputation. Mais il n'y a pas que les institutions privées puisque, même dans le secteur public, nous assisterons à des fermetures d'écoles. C'est ainsi que dans le comté de Richmond, l'école du Mont-Saint-Patrice, dans la ville de Richmond, fermera peut-être et probablement ses portes, malgré l'opposition des parents et des professeurs concernés. J'ai d'ailleurs placé une demande officielle au ministre de l'Éducation afin qu'il intervienne personnellement dans ce dossier pour éviter la fermeture de cette école à laquelle les gens de la ville de Richmond sont profondément attachés.

Donc, M. le Président, déficit record, coupures record. Comment être d'accord avec pareille performance? Ajoutez à cela le fait qu'on veuille piger à même les profits d'Hydro-Québec pour ensuite augmenter les tarifs aux consommateurs; c'est un impôt déguisé, M. le Président. (16 h 10)

II ne faudrait pas non plus oublier l'apparition du ticket modérateur dont le ministre des Finances fera bientôt usage; même le ministre de l'Agriculture envisage de s'en servir. On n'a pas assez de couper dans certains programmes aux agriculteurs, il nous a parlé en commission parlementaire d'un ticket modérateur pour ceux qui font usage de l'insémination artificielle, et qu'il faudra envisager que seules les régions éloignées pourraient bénéficier de l'aide gouvernementale. C'est à croire que le ticket modérateur va bientôt s'appliquer jusque dans nos chambres à coucher.

M. le Président, des années de vache maigre, voilà l'essentiel de ce que nous annonce le ministre des Finances dans son budget. Dommage que ce gouvernement n'ait pas eu le courage de le dire pendant la campagne électorale, mais ce n'est pas là la seule chose qui fut cachée aux électeurs. Ce qui me paraît encore plus honteux, c'est que le Parti québécois ait volontairement caché, camouflé, enrobé son option fondamentale, la souveraineté-association.

Je voudrais dire aux ministériels, en cette Chambre, que le peuple les a crus quand ils lui ont dit qu'ils mettaient en veilleuse la souveraineté-association. II vous

a cru et il vous a donné le mandat de négocier avec le gouvernement fédéral un nouveau pacte constitutionnel. Il s'agit là de l'une des principales causes de votre réélection en tant que gouvernement. Si vous vous permettez de l'oublier et de fausser le mandat que le peuple vous a confié, le jugement qui s'ensuivra ne pourra qu'être d'une grande sévérité, et pour cause.

Comment réussir le tour de force de promouvoir la souveraineté du Québec et négocier en même temps la place qui lui revient dans un fédéralisme renouvelé, option qui, rappelons-le, constitue le choix de la majorité des Québécois? J'espère que les gens de l'équipe ministérielle se rendront compte de l'importance des enjeux qui vont se présenter au cours des prochains jours, des prochaines semaines et qu'ils s'acquitteront du mandat que la population leur a donné, soit celui de négocier une nouvelle fédération canadienne, et non pas de littéralement les amener dans un débat qui pourrait plutôt conduire le Parti québécois vers la défense de la souveraineté tout court.

M. le Président, voilà mes quelques commentaires concernant le discours sur le budget. J'espère que l'occasion nous sera donnée, au cours des prochains jours, de nous manifester sur les défis de taille qui attendent le Québec dans les mois à venir. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Maurice Dupré

M. Dupré: M. le Président, permettez-moi tout d'abord de profiter de cette première occasion qui m'est donnée d'adresser la parole devant cette Assemblée pour remercier les citoyens de mon comté, certainement le plus francophone de notre pays, de la confiance qu'ils m'ont témoignée le 13 avril dernier. La population de mon comté a déjà, par le passé, envoyé dans cette Chambre des représentants tels que Henri Bourassa et Honoré Mercier et j'éprouve des sentiments de fierté d'être un de leurs successeurs dans cette enceinte.

Étant natif de Saint-Hyacinthe, je connais très bien la population qui est composée de travailleurs et de cultivateurs pour une grande partie. La région de Saint-Hyacinthe est reconnue comme étant l'une des plus prospères et des plus dynamiques du Québec, l'industrie locale, en particulier, et l'industrie du textile et de l'agro-alimentaire ayant pris, depuis quelques années, un essor spectaculaire.

À cause de sa situation géographique particulière, la ville de Saint-Hyacinthe a développé, au cours de son histoire et, comme je le disais tantôt, encore davantage au cours des dernières années, un caractère de capitale régionale. Ce caractère a fait de cette ville un important centre de services régionaux. Choisie depuis fort longtemps par de nombreuses communautés religieuses pour y installer leur maison mère, ces communautés furent un élément déterminant dans notre développement culturel et social et dans le cheminement de notre région, demeurant encore aujourd'hui un apport enrichissant pour notre comté et pour la province toute entière.

J'aimerais ajouter l'importance de la région au point de vue de l'éducation, puisqu'elle possède l'unique école de médecine vétérinaire de niveau universitaire et l'une des deux écoles d'agriculture de niveau collégial du Québec, un cégep et une polyvalente pour compléter le décor.

Saint-Hyacinthe, appelée à juste titre Saint-Hyacinthe la jolie, compte parmi sa population un très grand nombre de citoyens hautement scolarisés, lesquels sont au service de la population du comté et qui complètent, avec nos commerçants et hommes d'affaires, les éléments du tableau que je viens d'esquisser devant cette Assemblée.

Le comté de Saint-Hyacinthe est toujours demeuré au coeur même des pages les plus actives de la politique du Québec, du réputé Petit Séminaire de Saint-Hyacinthe, où de nombreux meneurs de notre peuple furent formés, à la rébellion de 1837-1838, à la réélection du parti des Québécois comme gouvernement le 13 avril dernier.

M. le Président, ce sont des médecins et des ouvriers, des avocats et des cultivateurs, des notaires et des personnes âgées, des communautées religieuses et des jeunes qui m'ont délégué dans cette Chambre à titre de premier député péquiste de notre histoire. Comme le disait si bien le premier ministre, le soir de la victoire, cela n'avait rien d'un accident de parcours, car, à Saint-Hyacinthe, on est conscient, on est prudent.

Le mandat est impressionnant et l'honneur qui m'échoit n'est dépassé que par l'ampleur des responsabilités qui s'y rattachent. La population, après seulement quelques semaines d'activité, m'a démontré ce qu'elle attend d'un député fort, d'un député actif et présent.

Soyez sans crainte, je serai fidèle a mes engagements et je suis conscient que ce n'est pas pour mes talents d'orateur que la population m'a élu, mais bien plutôt parce qu'elle était convaincue de ma loyauté et de l'énergie que je pouvais déployer pour la bien représenter.

Dans un autre ordre d'idées, M. le Président, j'ai été choisi à certaines commissions parlementaires auxquelles je tenais beaucoup, entre autres l'habitation et la protection du consommateur, la protection de l'environnement, l'agriculture, les pêcheries et l'alimentation ainsi que les

affaires culturelles.

Au niveau de l'habitation, mes expériences antérieures me permettront, j'en suis persuadé, d'apporter un concours positif dans ce domaine. L'accès à la propriété résidentielle pour les familles québécoises et les amendements à la loi 107 sont déjà sur le plateau.

Quant à l'agriculture, les pêcheries et l'alimentation, le comté de Saint-Hyacinthe étant appelé à devenir la vraie capitale de l'aqro-alimentaire et de l'agriculture, cela allait de soi, considérant que notre comté comprend une bonne partie du jardin québécois. J'attends avec impatience la loi pour favoriser la relève agricole.

Quant à l'environnement, ce fut plus difficile de me trouver une place, mais j'y suis. Impliqué au plus haut point, ma région étant de ce côté l'une des plus touchées du Québec, tant chimiquement que biologiquement, le comté de Saint-Hyacinthe connaît depuis longtemps des problèmes majeurs pour son approvisionnement en eau potable; l'état lamentable de la rivière Yamaska est connu de tous et les raisons de cette situation ne sont pas toutes imputables à la pollution agricole; les industries y ont aussi leur part de responsabilité.

Les interventions du ministère de l'Environnement pour apporter les correctifs voulus ont été nombreuses, mais il reste que les entreprises du comté de Saint-Hyacinthe sont prisonnières des déchets qu'elles produisent.

M. le Président, depuis longtemps les industriels attendaient que s'implante au Québec une entreprise spécialisée dans le traitement des déchets industriels. En autorisant l'implantation de la compagnie Stablex, le gouvernement du Québec a fait une fois de plus la preuve de son sens des responsabilités et de son souci constant d'améliorer la qualité de vie des Québécois et des Québécoises.

Les citoyens de Saint-Hyacinthe ont actuellement les yeux fixés sur les débats qui se déroulent en cette Chambre; eux qui connaissent les affres d'un manque d'eau potable sont assez lucides pour porter un jugement sur l'attitude actuelle de l'Opposition libérale face à l'implantation de Stablex. Le débat politique que l'Opposition mène systématiquement pour tenter d'empêcher l'implantation de Stablex démontre clairement que les députés d'en face visent non seulement à empêcher Stablex de s'installer à Blainville, mais également n'importe où au Québec. Leur opportunisme politique passe bien avant le bien-être de la population, mais cela n'est pas nouveau. M. le Président, les gens de mon comté ne sont pas dupes de cette turpitude. Je veux vous assurer que le jugement qu'ils portent sur l'Opposition est extrêmement sévère.

(16 h 20)

Lorsque j'entends le député du comté de Nelligan décrier par des propos erronés et souvent malicieux le projet Stablex alors qu'il devrait s'en réjouir... Il a le sourire facile, le député de Nelligan, lorsqu'il parle de Stablex et de dépollution. Il vient faire son petit tour de piste, histoire de faire rigoler le chef de l'Opposition. C'est vrai que depuis le 13 avril, il n'a pas souvent l'occasion de rire. Pourtant, il n'y a rien de drôle là-dedans. S'il demeurait dans notre comté, s'il transportait ses cruches d'eau depuis trois ou quatre ans, il trouverait peut-être cela moins drôle.

Si, de 1970 à 1976, on avait compté un ou deux Marcel Léger dans vos rangs et si on avait construit une ou deux Stablex à Saint-Hyacinthe, on boirait peut-être de l'eau propre et de l'eau pure aujourd'hui.

On aimait mieux, M. le Président, de l'autre côté, nourrir le gouffre des Olympiques. Quand on sait que le gouffre a toujours soif, on sait ce qui arrive. C'était peut-être plus payant aussi, parfois, un petit 750 000 $ par ci, par là. Cela ne rapportait pas grand intérêt, par exemple. On l'a vu le 15 novembre et on l'a vu le 13 avril, que les intérêts étaient minimes.

M. le Président, il faudrait nous reconnaître une responsabilité individuelle et une sensibilité collective. Trop d'entre nous avons tendance à croire généralement qu'il n'appartient qu'au gouvernement de résoudre ces problèmes. Nous avons malheureusement tort. Dans notre société que l'on dit avancée, personne ne peut se passer d'un réfrigérateur, d'un ou deux téléviseurs, d'une automobile. Très peu de gens, en fait, M. le Président. Pourtant, les industries qui produisent la plupart de ces biens, considérés par tous comme essentiels, sont singulièrement et directement responsables des incidents écologiques aux conséquences souvent graves pour ne pas dire désastreuses.

On n'a qu'à regarder autour de soi pour constater la présence de biens de consommation aux procédés de fabrication polluants, souvent difficiles à récupérer ou même à éliminer. Leur nature, leur diversité et leur concentration en font souvent des produits hautement toxigues qui, lorsque répandus dans l'environnement, pénalisent toute la société.

L'industrie québécoise de pointe, respectueuse de l'environnement, dépense beaucoup en mesures d'assainissement pendant que d'autres industries ignorent totalement leurs devoirs envers l'environnement. Il faut s'éveiller à nos nouvelles responsabilités, sinon nous et nos enfants en paieront la note et elle sera monstrueuse. Déjà, l'actuel gouvernement a fait plus. Le gouvernement actuel a fait, dans ce domaine, de vastes projets très coûteux dont 1 600 000 000 $ sont déjà

engagés, dont 101 000 000 $ pour la dépollution de la rivière Yamaska, appelée sporadiquement par les Mascoutains la rivière rouge. Les travaux, chez nous, sont déjà commencés.

M. le Président, je ne demande pas, mais j'implore cette Assemblée d'apporter une attention toute particulière dans ce domaine. Malgré nos actions présentes, toutes nos rivières et tous nos lacs ne seront, dans dix ans tout au plus, que pollution et pollution et ce, par la faute des pluies acides de nos voisins du Sud et de l'Ouest sur lesquels nous avons peu ou pas de contrôle. Ottawa n'est pas bavard de ce côté. M. le Président, s'il est vrai que j'ai le goût du Québec, je préférerais un Québec propre où il fait bon vivre et j'entends bien y travailler avec mes collègues pour l'obtenir.

Je voudrais ici féliciter tout particulièrement mes collègues, mesdames les ministres, de leur nomination et les assurer de mon appui absolu dans l'exercice de leurs fonctions et dans la poursuite de nos priorités. Entre autres, de permettre aux femmes une véritable égalité de fait sur tous les plans et dans tous les domaines et, je l'espère, avec l'appui de tous les membres de cette Assemblée.

M. le Président, bien que je sois physiguement très éloigné de vous, n'allez surtout pas croire que cette situation soit à l'image de ma position réelle en cette Chambre. J'entends bien être au coeur même de toutes les activités de cette Assemblée. Attendu que je ne considère pas le pouvoir comme une fin en soi, mais comme un outil, un moyen pour améliorer le sort de ceux qui en sont dépourvus, soyez assuré que je m'efforcerai de tout mon être à contribuer au deuxième mandat de ce gouvernement compétent, dynamique, libre, fier et entièrement dévoué aux véritables intérêts des Québécoises et des Québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président encore une fois, le discours sur le budget fournit une occasion privilégiée comme on a pu le voir récemment dans cette Chambre, de parler de l'ensemble des problèmes du Québec. On a pu voir déjà, avec l'orateur qui m'a précédé, qu'on pouvait parler de pollution, qu'on pouvait se livrer à une défense, assez faible, je dois le dire, des actions du ministre de l'Environnement et, en même temps, hier, par exemple, on a eu droit à des discours sur l'étalement urbain et sur les droits d'auteur.

J'essaierai, M. le Président, de faire preuve d'originalité en parlant du budget qui nous a été soumis au mois de mars dernier. Pour le bénéfice de nos électeurs, il faudrait constater la somme extraordinaire d'information, de chiffres, de connaissances que le ministre des Finances livre à notre attention et à notre étude, qui se complètent - on n'en voit là qu'une infime partie qui se rapporte à un seul ministère - par l'étude que nous faisons tous ici des crédits des différents ministères en commission parlementaire.

Finalement, le discours sur le budget et toute la documentation qui s'y rapporte ne sont, en réalité, qu'un bilan de l'activité économique, de l'activité financière du gouvernement dans l'année qui s'est écoulée. Il fait également valoir les éléments que le gouvernement entend faire jouer afin de dicter les voies de l'avenir, les voies de notre développement économique, les voies de notre développement social et surtout la façon dont l'appareil public sera géré pendant l'année qui se terminera en mars prochain.

C'est donc, en un sens, un bulletin de santé qui comporte, d'une part, comme je le disais, le bilan des activités de l'année passée et les ordonnances ou prescriptions que, dans sa sagesse, le ministre des Finances et ses collègues du cabinet proposent à notre étude, étude qui doit finalement se limiter aux deux côtés d'une même médaille, c'est-à-dire voir jusqu'à quel point les revenus, sur lesquels compte l'État du Québec, les revenus qui viennent des impôts que le ministre des Finances détermine et désire percevoir pourront nous rendre service. Le gouvernement est ici pour nous rendre service. Le gouvernement est ici non pas pour nous dicter ce que nous devons faire, mais s'assurer que les services auxquels la population a droit lui seront rendus de façon efficace, de façon complète.

Qu'en est-il du budget que le ministre des Finances nous a soumis? On doit constater qu'encore une fois - je le rappelle pour certains de nos amis d'en face - le ministre des Finances a fait quelques grossières erreurs et ce n'est pas la première fois. Lorsqu'on regarde - j'inviterais, entre autres, le député de Roberval, qui en a parlé hier soir, à s'y référer - les discours sur le budget des trois dernières années, à titre d'exemple, on peut constater que le ministre des Finances, au chapitre des revenus, d'une part, a constamment fait des sous-évaluations et s'est trompé, il n'a jamais eu les revenus que ceux sur lesquels il comptait. (16 h 30)

D'autre part, au chapitre des dépenses, c'est exactement l'inverse qui s'est produit. Les dépenses de l'État du Québec, de la province, ont été beaucoup plus grandes que ce que le ministre des Finances, chaque année, voulait prévoir et annonçait à la Chambre. Le bilan, à ce moment-ci, si on

regarde le déficit devant lequel nous sommes, démontre que ce déficit est de plus de 1 000 000 000 $ plus élevé, en trois ans, qu'il ne l'aurait été en se fiant aux discours du ministre des Finances. En effet, pour l'an dernier, on voit une différence, une erreur de 675 000 000 $ dans les calculs du ministre des Finances, qui suit allègrement des erreurs beaucoup moindres - ce qui ne nous permet pas de croire que le ministre des Finances s'améliore avec le temps - de 140 000 000 $ et de 300 000 000 $ dans les deux années précédentes. Le résultat net, évidemment, c'est que nous avons devant nous un déficit sans précédent et ce, pour la deuxième année consécutive. Ces deux années sont sans précédent dans l'histoire du Québec et il faut voir, avec ce résultat, comment le prix que les Québécois auront à payer en sera affecté.

Le ministre, devant cette situation a pris deux engagements, si on veut. Premièrement, on peut voir dans son discours sur le budget qu'il comptait - et je cite -"prendre des mesures inédites de contrôle des dépenses". Après avoir affirmé, toujours dans les budgets des années précédentes, que des mesures de contrôle des dépenses étaient en place, contrairement d'ailleurs à ce que faisait valoir un de nos amis d'en face hier, qui évoquait un héritage qu'il aurait reçu en 1976, c'est simplement à cause du laxisme dans l'application des mesures de contrôle des dépenses que le ministre actuel des Finances aurait instaurées, qu'encore une fois nous regardons une augmentation du déficit en pleine face.

On parle de mesures inédites de contrôle. Inédites, cela veut dire sans précédent; inédites, cela veut dire qu'on n'a jamais vues et, effectivement, M. le Président, on n'a jamais vu des mesures aussi arbitraires, aussi inacceptables comme en font foi d'ailleurs les manifestations que nous avons connues ici, dans cette Chambre, la semaine dernière; comme en font foi les interventions de mes collègues; comme en font foi nos électeurs qui viennent nous voir dans nos bureaux de comté - pas simplement les bureaux de comté péquistes, mais aussi les bureaux de comté des députés de l'Opposition - pour nous faire valoir les difficultés immenses auxquelles ont à faire face, dans tous les secteurs de la société, les Québécois à la suite des coupures budgétaires.

À travers toute cette documentation, malgré des mesures de contrôle inédites, que voyons-nous? On voit simplement que les salaires continuent à augmenter dans l'appareil gouvernemental et que, par ailleurs, aucune coupure véritable, aucune coupure sensée n'est faite de façon constructive, c'est-à-dire de façon à répondre aux objectifs que les différents secteurs de notre économie ou de notre vie sociale peuvent se donner. C'est de façon tout à fait arbitraire que le ministre des Finances imposej au niveau des dépenses, ces mesures à tous les organismes qui ont charge de l'administration des différents secteurs d'activité. S'il ne s'agissait que d'un contrôle des dépenses, mais il faut voir qu'en plus, de façon indirecte cette fois-ci, les Québécois seront plus taxés qu'ils ne l'étaient. Afin de réduire le déficit qui, malgré tout, croît à une vitesse inquiétante, le ministre des Finances disait, qu'il voulait "modifier la structure des revenus du gouvernement pour qu'elle rapporte davantage".

Dans un même souffle, donc, on parle de réduction d'impôt depuis des années. "Modifier une structure de revenus pour qu'elle rapporte davantage", c'est plus d'impôt, c'est aussi simple que ça. Comment le ministre des Finances s'y est-il pris? S'y est-il pris de façon ouverte, c'est-à-dire en touchant chaque citoyen dans sa poche de façon évidente, lorsqu'il fait son rapport d'impôt, lorsqu'il produit son rapport d'impôt? Pas du tout: C'est plutôt de façon indirecte, de façon cachée que le ministre des Finances a décidé d'aller puiser dans la poche des Québécois. Je n'en donnerai que deux exemples.

Le premier exemple, on en a déjà fait état, c'est la façon dont le ministre a décidé de taxer les entreprises, et ce, non pas de façon logique. Il aurait été logique de taxer davantage celles qui font plus de profits, mais il taxe toutes les entreprises, et particulièrement celles qui ont beaucoup d'employés et qui paient mieux leurs employés. C'est exactement l'effet de l'augmentation de la contribution aux services de santé et c'est exactement ce genre d'impôt qui se répercute dans la poche des consommateurs parce qu'on a augmenté les coûts de production et on a frappé tous les citoyens qui achètent directement ou indirectement des denrées qui sont produites par des entreprises qui ont beaucoup d'employés. Le ministre des Finances a eu beau jeu de dire: "Comment voulez-vous vous opposer à une taxe qui encourage la productivité", c'est-à-dire une taxe qui, en somme, encouragerait les entreprises à se mécaniser, à s'automatiser, à remplacer les hommes et les femmes par des machines? C'est un non-sens, M. le Président, à ce moment-ci de notre activité économique, compte tenu de l'état de notre économie, de remplacer les gens au travail par des machines, de mettre sur pied une structure fiscale, une imposition, l'impôt sur les sociétés et sur les entreprises, qui les encourage à changer les gens, les hommes et les femmes qui travaillent pour des machines. C'est un non-sens, M. le Président.

La deuxième façon tout aussi

inéquitable dont le ministre tente de rejoindre la poche des Québécois, on en a vu une autre illustration lors du dépôt de la Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec. Déjà dans son discours sur le budget, le ministre des Finances en parlait. Il s'agira maintenant de modifier la loi qui régit le fonctionnement et l'administration d'Hydro-Québec de telle sorte qu'on ira, à toutes fins utiles, lui chercher tous ses profits, ce qu'il faut savoir, c'est que nous sommes tous fiers d'Hydro-Québec. Nous connaissons tous au moins ici, chacun de nous dans cette Chambre, au moins une personne qui travaille à Hydro-Québec, il y a assez de gens pour cela à Hydro-Québec; tous ces gens que nous connaissons et qui y travaillent en sont fiers, parce qu'ils ont fait un succès de leur affaire, parce qu'on leur a laissé le mandat de réaliser les grands projets dont nous avions besoin pour développer nos richesses naturelles. Or, on décide de leur enlever justement ce sentiment d'appartenance et de fierté qui fait qu'Hydro-Québec est un des plus beaus joyaux de notre développement économique. Avec quel effet, M. le Président? Avec l'effet que les taux qui seront éventuellement chargés à tous les consommateurs par Hydro-Québec ne seront plus limités par la loi que nous connaissons aujourd'hui à des taux qui sont, je me réfère à la loi actuelle, "les plus bas possible que permet une saine administration financière".

Un des articles du projet de loi qui a été déposé hier abroge tout simplement ce mandat d'Hydro-Québec de nous fournir à nous, Québécois, l'électricité au plus bas taux possible dans la mesure où le permet une saine administration financière. De la même façon, Hydro-Québec avait le mandat de conserver des réserves financières pour renouveler son réseau. Dans un premier temps, le ministre des Finances, avec la complicité du ministre de l'Énergie et des Ressources, enlève ce mandat à Hydro-Québec tout en expropriant purement et simplement les réserves qui se sont accumulées depuis des années pour le renouvellement du réseau et pour payer les actions dont le ministre des Finances sera l'heureux détenteur, si jamais cette loi était adoptée. De la même façon, Hydro-Québec avait le mandat - c'est dans la loi actuelle - de facturer, de tarifier, si on veut, les utilisateurs, qu'il s'agisse des citoyens dans leur domicile, des industries ou des commerces, à un coût qui était relié au coût de production. Encore une fois, d'un trait de plume tout simplement, le ministre des Finances et ses collègues décident qu'Hydro ne devrait pas tarifier les gens compte tenu des coûts de production.

C'est de cette façon, M. le Président, qu'on leur enlève leurs gages de succès, parce qu'on enlève leur fierté à ceux qui travaillent à Hydro-Québec et c'est de cette façon qu'on rejoint également dans leurs poches, quels que soient leurs moyens, tous les citoyens du Québec, lorsqu'ils recevront leur facture d'électricité à l'avenir. C'est cela, exactement. On n'augmente pas les impôts. On augmente le prix de l'électricité que tous doivent payer, les assistés sociaux, les démunis, les hôpitaux, les écoles, tout le monde. Ce sont là des exemples, M. le Président, de la façon absolument inédite dont le gouvernement actuel entend gérer l'appareil et l'administration québécois du côté des revenus en les augmentant au détriment, finalement, de façon extrêmement régressive et injuste, de toutes les couches de la société. (16 h 40)

Du côté des dépenses, on a vu sa façon d'agir absolument arbitraire. Il y a eu des reculs récents dans certaines matières, au chapitre de l'éducation, par exemple, mais il reste des injustices absolument flagrantes que le gouvernement ne tente pas de corriger, malgré nos représentations et les représentations de la population.

Mais ce qu'il faut retenir, à travers tout cela, comme illustration de la façon dont le gouvernement gère notre appareil gouvernemental, c'est la brutalité pure et simple des changements qu'il fait subir à nos organismes. C'est une façon brutale pour des raisons extrêmement simples: depuis cinq ans, le gouvernement a perdu le contrôle de l'appareil de l'État, le contrôle des dépenses. Le ministre des Finances a récemment fait état d'une révélation qui lui est apparue, je présume. Il a dit: Peut-être qu'à l'avenir les budgets devraient s'inscrire sur un horizon de trois ans, comme ça, on saurait où on s'en va. Il est cinq ans trop tard, M. le Président, il me semble qu'effectivement, si on veut en arriver à un contrôle des dépenses, on ne le fait pas de façon brutale, on le fait avec le temps, on se fixe un horizon avec lequel les gens peuvent vivre, on le fait d'une façon qui respecte les capacités d'adaptation des différents secteurs de la société qui sont durement affectés par la façon de procéder du gouvernement actuel.

C'est ce gradualisme qui manque, ce gradualisme que je qualifierais d'étapisme, extrêmement populaire de l'autre côté de la Chambre dans certaines autres matières. Mais lorsque vient le moment de gérer adéquatement et de façon saine nos finances publiques, l'étapisme, évidemment, n'est pas de mise, ni la mise en veilleuse, je présume.

Motion de blâme

À ce moment-là, devant une perte de contrôle de l'administration financière de l'État, devant des mesures qui, finalement, encouragent les entreprises à remplacer les gens par des machines, alors que nous vivons

un moment extrêmement difficile où le chômage est très élevé, il est de la responsabilité de l'Opposition de soumettre la proposition suivante: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois d'avoir présenté un budget qui comporte un déficit budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde année consécutive, qui compromet davantage la santé des finances publiques québécoises et notre économie, particulièrement en ce qui a trait à la création d'emplois, et qui introduit des mesures de compression budgétaire aussi arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et des affaires sociales."

Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Chambly.

M. Luc Tremblay

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Je voudrais, puisque c'est ma première intervention à l'Assemblée nationale, profiter d'une des traditions de cette Assemblée, tout en étant respectueux du règlement qui régit les délibérations de cette Chambre et avec votre permission, pour remercier tout d'abord les électeurs du comté de Chambly qui ont fait confiance, le 13 avril dernier, à un des leurs en votant majoritairement pour le Parti québécois et, par le fait même, en n'investissant de la lourde responsabilité de les représenter à l'Assemblée nationale.

J'ai l'honneur d'être le 17e député représentant cette historique circonscription électorale depuis Jean-Baptiste Jodoin qui en a été le premier en 1867. Je me permettrai, M. le Président, de relever quelques notes biographiques concernant mes prédécesseurs qui, je l'espère, sauront intéresser pour les membres de l'Assemblée nationale ainsi que mes concitoyens du comté de Chambly.

Je soulignerai tout d'abord que, dans toute l'histoire du comté de Chambly, seulement trois de ses représentants étaient natifs de ce qui est aujourd'hui la ville de Chambly. Il s'agit de Gédéon Larocque, né à Chambly, six ans avant la rébellion de 1837, il a d'ailleurs terminé sa carrière à l'Assemblée nationale appelée à l'époque l'Assemblée législative comme sergent d'armes après avoir été député de Chambly de 1871 à 1875.

Le deuxième député de cette circonscription né à Chambly, Antoine Rocheleau, un cultivateur qui est né en 1836 et député durant la période de 1896 à 1900. Ce qui fait de votre humble serviteur le premier citoyen natif de cette très belle et historique ville qu'est Chambly, et fort probablement le seul du XX siècle. C'est donc avec beaucoup de fierté, largement partagée par mes concitoyens de Chambly que j'occupe ce fauteuil dans cette illustre Chambre. Ce n'est pas non plus sans une certaine fierté qui me paraît bien légitime qu'à l'occasion de cette première intervention je me permets de souligner la carrière de certains de mes prédécesseurs qui se sont particulièrement illustrés durant leur carrière politique, bien sûr, mais aussi durant leur carrière professionnelle.

De ceux-là, je soulignerais le nom de Raymond Préfontaine, qui a été élu en 1875, à l'âge de 25 ans et qui, par la suite, est devenu maire de Montréal. Mes recherches des notes biographiques des députés de Chambly m'ont permis de constater que d'une part, Préfontaine avait été directeur de la société Saint-Jean-Baptiste et d'autre part, qu'il était le seul de tous mes prédécesseurs à avoir participé à cette illustre société.

Une autre de ces personnalités qui au long de l'histoire de la circonscription a fait la fierté de nos ancêtres, c'est Louis-Olivier Taillon qui eut une longue expérience politique durant laquelle il fut successivement élu comme député entre 1875, 1878 et 1881, Orateur de la Chambre de 1882 à 1884. Réélu en 1884 sans opposition et Procureur général dans le cabinet Ross, de 1884 à 1887. Défait dans sa circonscription de Montréal-Est en 1886, élu dans Montcalm à l'occasion d'une élection partielle la même année. Une première fois premier ministre durant quatre jours, soit du 25 au 29 janvier 1887 et chef de l'Opposition de 1887 à 1890. Défait dans Jacques-Cartier en 1890. Assermenté ministre sans portefeuille dans le cabinet Boucher de Boucherville en 1891. Élu dans Chambly aux élections de 1892. Premier ministre de 1891 à 1896. Finalement, il résigna ses fonctions pour être candidat dans la circonscription fédérale de Chambly-Verchères-Bagot, où il fut battu en 1896 et en 1900.

Plus près de nous, il y eut Hortensius Béïque, député et maire de Chambly et organisateur général de l'Union Nationale. Quant à John Redmond Roche, il eut une triple carrière. Tout d'abord comme militaire jusqu'à la fin de la guerre où il fut entre autres commandant du régiment de Maisonneuve et député de Chambly de 1948 à 1956, et enfin, comme troisième carrière, il fut juge à la Cour des sessions de la paix à Montréal.

En 1961, à l'occasion d'une élection partielle, était élu, pour un premier mandat, le journaliste Pierre Laporte. Il fut réélu en 1962, 1966 et 1970. Il a été leader parlementaire du gouvernement de la révolution tranquille, de 1964 à 1966, et il continua à jouer ce rôle auprès de l'Opposition après la défaite libérale de 1966.

Candidat défait au congrès de la direction du Parti libéral, en 1970, il fut enlevé par le Front de libération du Québec, le 9 octobre 1970.

Guy Saint-Pierre, lui, fut élu en 1970, dans la circonscription de Verchères qui, à l'époque, comprenait la presque totalité du présent comté de Chambly. Il a été réélu dans le comté de Chambly en 1973, ministre de l'Éducation de 1970 à 1972, ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche en 1972 et ministre de l'Industrie et du Commerce de 1972 à 1976.

En terminant ce bref retour en arrière, je voudrais dire que je suis très heureux de succéder à Denis Lazure, qui fut le premier député du Parti québécois a être élu dans le comté de Chambly. Comme vous le savez, à la suite du redécoupage de la carte électorale, considérant que le comté était devenu trop populeux, la Commission de la représentation électorale a dû pratiquement scinder en deux ce qui était alors le comté de Chambly, en lui conservant les villes de Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Basile-le-Grand, Carignan, Chambly, Richelieu, Saint-Mathias et Notre-Dame-de-Bon-Secours.

M. le Président, je suis heureux de dire maintenant au député de Bertrand que les citoyens du comté, qu'ils soient d'une option politique ou de l'autre, ont grandement apprécié son honnêteté, son sens du dévouement et sa présence dans le comté et ceci, même s'il cumulait efficacement ses rôles de député et de ministre des Affairs sociales. Dans ce sens, la réélection du Parti québécois est un hommage pour lui, puisqu'il en est, dans une large mesure, responsable.

Personnellement, j'ai l'intention de poursuivre ce que mon prédécesseur avait amorcé et de mettre en marche les engagements pris durant la campagne électorale, en utilisant ses vastes connaissances ainsi que son expérience de la machine gouvernementale. Ce travail, je le poursuivrai aussi avec l'appui, j'en suis certain, des centaines de militantes et militants qui ont rendu cette victoire possible et ceci, malgré des perspectives peu encourageantes avant la campagne électorale et même durant la campagne électorale.

Il faut se souvenir, M. le Président, que les journaux en général prévoyaient la perte du comté pour notre parti. À ceci, je donnerai comme exemple l'éditorial de M. Normand Girard, du Journal de Montréal; c'est là une source que l'on dit normalement bien informée et qui considérait le comté de Chambly comme assuré au Parti libéral. Mais c'est finalement par une très honorable majorité de près de 1700 votes que les militantes et militants du comté de Chambly ont conservé le comté au Parti québécois. Ce travail constant était motivé par la perspective, d'une part, de reporter au pouvoir un gouvernement qui avait tenu ses engagements et, d'autre part, que c'était là une étape importante de notre démarche vers la réalisation de la souveraineté du Québec.

M. le Président, c'est avec la conviction d'un militant que j'ai accepté de servir aux côtés de mes camarades dont la réputation de compétence, d'intégrité, de générosité et d'efficacité n'est plus à faire au niveau du parti et de la population en général. Si j'ai accepté l'appel des militantes et militants du Parti québécois de Chambly, au risque de mettre en danger une entreprise que j'ai créée et contruite, c'est que je voulais m'engager plus avant. J'ai voulu être au coeur de l'action politique, parce que tout d'abord je suis un souverainiste de la première heure, un souverainiste conscient que chaque événement dans la vie du Parti québécois est un pas dans la bonne direction.

M. le Président, ce n'est pas nous qui avons dit que nous mettions notre option en veilleuse. Ce sont nos adversaires qui refusaient de réaliser que nous étions plus déterminés que jamais à respecter, bien sûr, la décision démocratiquement rendue par les citoyens du Québec le 20 mai, mais plus déterminés que jamais à réaliser notre objectif fondamental par la voie démocratique. Nous l'avons dit, M. le Président, à peine 24 jours après le référendum, lors du Conseil national du 14 juin 1980, par une résolution votée à l'unanimité. Cette résolution se lit comme suit: "Le Conseil national tient à réaffirmer sa volonté ferme d'oeuvrer à réaliser la souveraineté du Québec par les voies démocratiques et à proposer au Canada une association économique mutuellement avantageuse respectant le principe de l'égalité absolue entre ces deux peuples. Le Conseil national demeure convaincu que seule la souveraineté-association pourra apporter une solution aux problèmes politiques, économiques, culturels et sociaux du Québec et invite la population à travailler avec lui à la réalisation de cet objectif."

Mais, malgré cela, les gens d'en face continuèrent de faire croire à la population que nous avions mis notre option en veilleuse. C'était pourtant bien clair, M. le Président, que l'on respectait simplement la démocratie.

Ce qu'on a dit au Conseil national élarqi du mois d'octobre dernier et qu'on a largement publié par la suite, c'est qu'il n'y aurait pas de référendum durant notre prochain mandat. Mais, encore une fois, les gens d'en face ont refusé de voir la réalité. Ils ont poursuivi leur stratégie visant à faire croire aux plus pressés des partisans de la souveraineté que nous avions mis nos convictions de côté. Cette stratéqie n'a pas marché, parce que les partisans de la souveraineté ont trop bien vu la tactique. Ils ont plutôt fait confiance à ceux qui, de 6% en 1966, ont convaincu plus de 40% de nos

concitoyens du bien-fondé de la souveraineté.

Les vieux militants savaient qu'en poursuivant l'information auprès de ceux qui ont voté non, on finirait bien par faire un consensus sur notre avenir collectif. On ne pouvait faire confiance à ceux qui venaient de se faire littéralement rouler comme des mangeurs de hot dogs par leur boss qui est à Ottawa quand ils ont accepté sa parole sans demander de garanties. Quand le boss disait, durant la campagne référendaire: "Un oui veut dire un non, un non veut dire un oui", les citoyens ont bien compris l'incapacité des qens d'en face de défendre les intérêts du Québec.

Maintenant, le Parti libéral a réalisé que les Québécois ne donneront jamais leur appui à un gouvernement qui n'aurait pas la défense du Québec comme priorité.

Maintenant qu'il leur apparaît plus opportun de se montrer nationalistes, ils ont adopté une stratégie visant à faire croire qu'ils sont Québécois d'abord. En effet, plusieurs d'entre eux ont troqué le drapeau du Canada pour celui du Québec sur leur revers de veston. Nous, on est bien heureux de les accueillir, à bord, mais cela va prendre beaucoup plus que des promesses du bout des lèvres. Il faudra qu'ils cessent de défendre le gouvernement fédéral en cette Chambre. Il faudra qu'ils appuient le gouvernement du Québec contre les attaques constantes pour nous enlever nos droits. Il faudra qu'ils appuient le gouvernement du Québec si le gouvernement fédéral tente de faire payer son déficit qui provient, en grande partie, d'une mauvaise gestion dans le dossier énergétique par les provinces. Il faudra qu'ils appuient le gouvernement du Québec dans ses revendications minimales que sont nos demandes traditionnelles. Il faudra, enfin, qu'ils admettent avec nous que le Québec doit être aussi français que l'Ontario est anglais.

Comment, M. le Président, ne pas être attaché à son pays lorsque l'on est né sur les rives de la rivière Richelieu? Ce que l'on appelait à l'époque le jardin du Québec, cette rivière, je me suis engagé, lors de l'élection, à travailler durant ce mandat à promouvoir sa dépollution. C'est là non seulement pour moi une affaire de coeur, c'est une affaire d'honneur, mais, en plus, un bon outil de développement économique. (17 heurres)

Comment ne pas être attaché à son pays lorsqu'on est né à l'ombre du mont Saint-Bruno? Là aussi, je me suis engagé à poursuivre l'aménagement global du parc du mont Saint-Bruno en lui conservant sa vocation récréative, mais aussi en protégeant les richesses écologiques que constitue ce véritable patrimoine naturel situé à quelques milles de la métropole qu'est Montréal.

En terminant, je voudrais assurer tous mes concitoyens et concitoyennes, et plus particulièrement ceux et celles du comté de Chambly qui ont, depuis 1968, à un moment ou à un autre, cheminé côte à côte avec moi, tous ceux-là, je veux les assurer de mon engagement total envers le Québec. Je veux les assurer qu'ici, comme lorsque je travaille dans le comté, je demeure avec fierté un militant. Merci, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je peux parler?

M. Parizeau: M. le Président, c'est normalement l'heure de la réplique.

Le Président: Normalement, c'est la réplique et M. le ministre des Finances a droit à une heure en vertu du règlement.

M. Parizeau: Nous devons prendre le vote, si je comprends bien, vers 17 h 45, est-ce que la députée de L'Acadie peut me laisser une demi-heure?

Mme Lavoie-Roux: Davantage! M. Parizeau: Parfait, volontiers.

Le Président: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Je remercie le ministre des Finances qui, comme d'habitude, sait toujours faire des compromis qui satisfont les qens d'un côté ou de l'autre de la Chambre et je l'apprécie.

M. le Président, je vais être très brève. Évidemment, on a beaucoup discuté dans cette Chambre des coupures qui ont été faites tant dans le domaine des affaires sociales que dans l'éducation. Je ne veux pas revenir en détail sur chacune de ces choses. Je voudrais simplement signaler une dernière fois, parce que je pense que c'est la dernière fois que nous aurons l'occasion de nous prononcer sur ce fameux budget, que je ne sais pas dans quelle mesure le ministre des Finances se rend compte que dans les coupures qu'il a imposées à la fois au domaine de l'éducation et au domaine des affaires sociales, dans bien des cas, c'est la même population qui est touchée.

Je veux vous donner comme exemple les coupures de l'ordre de 14 000 000 $ qui, apparemment, sont maintenant complétées dans les centres de services sociaux et auxquels viennent s'ajouter 4 000 000 $, coupures qui, selon l'avis de l'Association des centres de services sociaux, sont dues au non-respect ou à une mésentente entre le ministère des Finances et les centres de services sociaux quant au respect des conventions collectives. Je suis sûre que le ministre des Finances, à qui j'ai posé la

question à plusieurs reprises sur le respect des conventions collectives, je pense, de bonne foi, m'a toujours assurée que tout ce qui touchait ou était le résultat des conventions collectives serait respecté.

Par contre, tout ce que je l'invite à faire, c'est qu'on se rassoie une fois de plus pour essayer d'établir si vraiment, en plus des 14 000 000 $, tel que le disent les centres de services sociaux, viennent s'ajouter des coupures de 4 000 000 $ dues au non-respect ou à une mésentente quant aux obligations qui découlent des conventions collectives. Les centres de services sociaux, M. le Président, vous le savez, répondent aux besoins d'une clientèle dont 60% et même 65% vivent en dessous du seuil de la pauvreté. Ils répondent aux besoins de familles qui ont des problèmes familiaux, des problèmes d'enfant handicapé, d'individus qui ont des problèmes d'alcoolisme, des problèmes de dépendance de tous ordres. Ils s'occupent des cas de la protection de la jeunesse, des personnes âgées, et ce sont des mandats qui leur ont été confiés à un moment ou à un autre par les différents gouvernements.

Sur ce chapitre des personnes âgées, on retrouvait une coupure de 3 000 000 % quand nous avons fait l'étude des crédits rubrique par rubrique, si je peux dire, ou programme par programme. Le ministre des Affaires sociales nous a dit à ce moment-là: Non, c'est une question de réaménagement. En fait ce n'est pas là que ce sera touché. Cela va être touché finalement dans les services sociaux, dans les services scolaires.

Vous comprenez que ce n'est pas à nous à démêler, mais le résultat net, c'est qu'il y a une coupure brutale de 10% plus ces 4 000 000 $ dont je viens de vous parler. Si on examine maintenant le domaine de l'éducation non pas en détail, mais d'une façon globale, là où on a coupé, c'est dans l'éducation des adultes qui, à bien des éqards se préoccupe de travail de prévention, dans les milieux défavorisés qui là aussi viennent recouper la clientèle desservie par les centres de services sociaux. Tout le problème de l'intégration de l'enfance en difficulté, là aussi on a des coupures budgétaires et de cette même façon, dans les centres de services sociaux, souvent, il y a une coordination entre ce qui se fait dans les écoles et les services qu'offrent les centres de services sociaux.

En résumé, pour tenir ma promesse à l'égard du ministre des Finances, ce que je veux indiquer, c'est que quand on a coupé à la fois dans les centres de services sociaux et dans ces domaines particuliers reliés à l'éducation, c'est que c'est sous un double front qu'on attaque - c'est peut-être un terme un peu fort, mais je vais l'utiliser parce qu'il n'y en pas d'autres qui me viennent à l'esprit - les mêmes clientèles qui vraiment n'ont pas d'autre recours que ces services. On sait fort bien que quelqu'un qui a des moyens plus élevés pourra toujours avoir recours au psychologue, au conseiller matrimonial, à des ressources médicales que ces personnes n'ont pas à leur disposition.

M. le Président, du côté des hôpitaux. À l'étude des crédits, on nous a répondu en noir sur blanc que même s'il y a une indexation au chapitre des hôpitaux et des centres d'hébergement, cette indexation sera utilisée en totalité pour le respect des conventions collectives, si bien qu'il n'y aura pas de marge de manoeuvre. Évidemment inutile de parler de développement, ce n'est pas à ça que j'en ai, mais même pas au maintien de ce qui existe présentement.

Si c'était la première année, si c'était la deuxième année, on pourrait l'accepter. Mais il s'agit d'une opération répétée depuis plusieurs années, si bien que ce n'est pas uniguement le cri des professionnels de la santé, c'est aussi à la demande de l'Association des hôpitaux du Québec qui dit: Les déficits vont en s'accumulant. On ne peut plus resserrer. On peut resserrer dans les fournitures pendant un bout de temps, mais eux aussi connaissent l'inflation. On met les centres de santé ou les centres hospitaliers ou les centres d'hébergement dans des difficultés importantes.

Durant la campagne électorale, j'ai visité un centre d'accueil où on m'a dit: Écoutez, nous faisons des compressions budgétaires depuis trois ans, quatre ans. Cette année, nous nous trouvons devant l'éventualité de fermer notre centre de jour. Pourtant le gouvernement va nous annoncer, dans des communiqués de presse, et on a entendu les gens de l'autre côté de la Chambre à répétition, qu'avec chaque nouveau centre d'accueil, il y a un nouveau centre de jour de créé. M. le Président, avec les coupures qu'on a présentement, ce sont les centres d'accueil actuellement en fonctionnement qu'on expose à une fermeture de services.

Là je me dis, pour reprendre une expression du ministre des Finances, je n'ai jamais su ce qu'était le gras, la viande et les os, mais j'ai l'impression que cela commence à être extrêmement douloureux. Peut-être est-il trop tard cette année pour réviser certaines choses, mais je voudrais attirer l'attention du ministre des Finances sur la façon dont le gouvernement établit ses priorités dans les dépenses.

On a droit, à chaque année, à des tournées ministérielles ou à des tournées soi-disant de consultation. J'admettrai qu'il y a une part de consultation, mais vous devrez admettre avec moi, M. le Président, qu'il y a aussi une part d'électoralisme dans ce genre de tournée. Le meilleur exemple, c'est le fameux livre vert sur l'éducation. Déjà après six mois du début de cette

consultation, on admettait que sans compter les dépenses qui pouvaient être attribuées aux fonctionnaires du ministère, la tournée, la publicité, etc., étaient rendus à 700 000 $. Je n'exagère rien en disant que toute la tournée, toute la consultation, les sondages, etc., ont dépassé certainement les 2 000" 000 $. Je le demanderai de toute façon dans une question au feuilleton à l'automne, parce que ce serait intéressant de savoir, compte tenu des résultats maintenant cahin-caha de toute cette consultation, si vraiment l'argent a été dépensé à bon escient. (17 h 10)

M. le Président, on pourrait parler aussi de la publicité. J'ai eu l'occasion de le dire en Chambre, sur une période de deux ans, de 1977 à 1979, les dépenses pour la publicité ont augmenté de 10 000 000 $. Je ne voudrais pas revenir sur ce qui a été dépensé à l'automne dans la campagne publicitaire du gouvernement touchant la fameuse question constitutionnelle parce que là, on parle d'un montant d'au-delà de 3 000 000 $. M. le Président, on pourrait également parler des dépenses reliées au ministère des Affaires intergouvernementales. J'admets qu'on ait une maison en France, qu'elle ait un statut privilégié. Ce n'est pas du tout ce que je veux remettre en question, mais je me laisse dire - et on pourra me corriger - que le nombre d'employés à l'intérieur de cette maison est aussi important que celui à l'intérieur de l'ambassade canadienne, et l'ambassade canadienne en a sûrement trop, elle aussi. Quand je vois la multiplication des maisons du Québec! On est un peu partout aux États-Unis, quand on sait qu'on est dans un monde de communications extrêmement faciles et que ce sont des endroits quand même rapprochés. Je veux bien admettre qu'il y en ait une à New York et une à Washington, mais là, on est rendu qu'on en a dans je ne sais pas combien de villes.

Je sais que le gouvernement actuel n'est pas le seul responsable. Il a seulement, comme le dirait le ministre des Finances, un peu engraissé ou pris de l'embonpoint, mais, encore une fois, des services directs à la population, cela peut représenter parfois, dans une institution particulière, dans une école ou dans un établissement, des sommes qui peuvent varier entre 10 000 $ et 50 000 $ et servir à vraiment améliorer la qualité des services. Et tout à coup, on voit des millions de dollars dépensés à droite et à gauche. On se dit, à ce moment-là: Est-ce que les priorités sont bien établies?

M. le Président, j'ai reçu la semaine dernière à mon bureau, une boîte du ministre des Communications. Je pense que ce sont des drapeaux, de petits drapeaux, des grands, des moins grands, en tout cas, toute la série qu'on reçoit annuellement. Le ministre croit bon de s'excuser de ce qu'on m'a envoyé de drapeaux, de petites épinqles et de plaques pour mettre sur les voitures des gens, il y en a pour 266 $. En multipliant par 122 comtés - c'est dans la lettre du ministre - on fait face à une dépense totale de 32 450 $. Il indiquait au début du paragaphe: "Cependant, les restrictions budgétaires imposées par le gouvernement du Québec nous posent certains problèmes de distribution pour l'année 1981-1982." Vous allez me dire: Ne faites pas un plat avec 32 000 $, mais vous savez, M. le Président, que par les années précédentes, cela a été davantage que 32 000 $. Chacun a son budget. Si on en veut, des drapeaux, qu'on se les procure. Si au moins vous me disiez: On envoie cela aux gens qui ne peuvent pas les payer. Je serais curieuse de savoir où sont rendus tous ces drapeaux et qui les utilise! C'est un exemple.

Je pourrais citer un grand dépliant que j'ai reçu du ministère du Travail, un poster, une affiche, en français. C'est impressionnant! C'est haut comme cela. J'ai reçu cela la semaine dernière chez nous. J'ai ouvert cela. C'est en couleur sur papier glacé, etc. Il y avait un gros 50 et c'était marqué: Ministère du Travail, 1931 à 1981. Cela fait bien 50 ans. C'est tout ce qu'il y avait, M. le ministre. Seulement la poste pour envoyer cela, coûtait 1 $. Multipliez cela à des centaines, pour ne pas dire des milliers, d'exemplaires et vous pouvez vous demander: Est-ce la meilleure façon de dépenser l'argent quand on a des restrictions budgétaires aussi importantes?

M. le Président, en terminant, je veux simplement dire que c'est vrai que le ministre des Finances doit faire face à des contraintes budgétaires importantes du point de vue des engagements, par exemple, au niveau des conventions collectives, au niveau de l'inflation dans le fonctionnement des établissements, des institutions. Ce sont des contraintes avec lesquelles il doit vivre. Là-dessus, je sympathise avec le ministre, parce que je sais qu'elles sont considérables. Tout ce que je demande au gouvernement, par l'entremise du ministre des Finances, c'est que, vraiment, on soit plus soucieux de la façon dont on dépense l'argent des contribuables. J'aurais pu ajouter de multiples exemples, si j'avais voulu ajouter tous les voyages des fonctionnaires à l'étranger à l'intérieur des différents ministères. Est-ce qu'ils sont tous nécessaires?

Je pense qu'on pourrait arriver non pas à enlever toutes les compressions budgétaires, mais, au moins, à essayer de corriger les compressions budgétaires où, finalement, on paiera juste un peu plus tard les conséquences de ces compressions budgétaires qui n'ont pas été faites à bon escient dans des services que nous, de l'Opposition, considérons essentiels quand ils

s'adressent directement à la population, quand ce sont des services directs à la population, en particulier aux gens qui en ont le plus besoin et qui ont le moins de ressources financières, matérielles, pour faire face aux difficultés quotidiennes de la vie. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Vanier.

M. Bertrand: M. le Président, une très brève question de privilège. Mme la députée de L'Acadie a fait référence tout à l'heure à une lettre que j'ai envoyée aux 122 députés de l'Assemblée nationale. J'espère qu'elle aura noté que le ministre des Communications a voulu donner toute l'information sur les sommes que coûte justement ce matériel de promotion québécoise ainsi que le total. J'ai voulu indiquer de plus, dans un paragraphe que j'aurais aimé vous citer en entier, à quel point justement je considérais que, dans le contexte des compressions budgétaires, il fallait que les députés sachent que c'est le maximum auquel ils pouvaient s'attendre cette année, et que c'était fini l'époque où on allait sortir de tous les ministères du matériel que tous les députés nous demandent.

Je voudrais que Mme la députée le sache, il y a des collègues de votre côté, et il y en a beaucoup de ce côté-ci aussi, qui, tous les jours, me demandent: Est-ce que je pourrais avoir un paquet de ci, un paquet de ça? Je voudrais que Mme la députée sache que je suis tout à fait d'accord avec elle et que c'est justement pour vous indiquer combien ça coûte et quel est le contexte des compressions budgétaires que je vous ai informés dans cette lettre que c'était le dernier envoi auquel vous pouviez vous attendre du ministère des Communications pour l'année.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau (réplique)

M. Parizeau: M. le Président, nous terminons un débat sur le discours sur le budget qui n'aura pas duré quinze heures, mais qui s'étend, au contraire, sur plusieurs mois. Je ne me souviens pas qu'un budget ait donné lieu à une discussion aussi longue et marquée d'autant de rebondissements. En fait, pendant toute la campagne électorale, on a assisté à des discussions, à un certain moment fort intéressantes, sur les conséquences de ce budget aussi bien sur le plan fiscal que sur celui des dépenses. Lorsque la campagne électorale s'est terminée et que, soit dit en passant, les électeurs avaient l'air de ne pas avoir trouvé le budget si mal que ça, compte tenu des résultats de l'élection, nous avons repris le débat beaucoup plus officiellement dans cette Chambre et, en parallèle, en commission pour l'examen des crédits.

Je voudrais essayer de remettre peut-être dans un contexte un peu plus large certaines de nos discussions depuis quelques semaines. On me permettra de compléter le discours sur le budget dans cette espèce de perspective un peu générale. Parfois, il faut se reculer un peu, cesser de regarder chaque arbre et essayer de voir de quoi la forêt a l'air. Or, nous nous trouvons dans une situation économique, un peu partout dans le monde occidental, qui est à bien des égards très préoccupante. L'expansion de l'économie, qui a été tellement caractéristique des 20 dernières années, tout à coup s'estompe. La croissance économique fléchit. Certains pays, pour la première fois depuis bien des années, voient même un recul s'effectuer dans leur production. (17 h 20)

Tous les gouvernements un peu responsables, dans un contexte comme celui-là, se sentent évidemment forcés d'assumer des responsabilités aussi vastes que possible et d'exercer une action aussi efficace que possible, pour essayer d'accélérer ce développement économique qui reste, après tout, une des fonctions majeures, essentielles de n'importe quel gouvernement.

À cet égard, le nôtre n'est pas différent des autres. Le gouvernement de Québec ne peut pas démissionner de ce rôle majeur qui consiste à essayer d'accélérer la croissance économique, lorsque l'environnement économique est à ce point fragile. Les gouvernements des autres provinces cherchent dans la même voie. Le gouvernement fédéral aussi. Dire que la coordination de toutes ces mesures est bonne à l'heure actuelle, serait très exagéré. Je pense que derrière un problème, commun à tant de pays, de développement économique, il y a chez nous aussi, un problème d'orqanisation des gouvernements les uns par rapport aux autres pour éviter au moins qu'ils aillent dans la même direction.

À bien des égards, ce n'est pas la seule raison. La situation des déficits que nous avons encourus au Canada n'aide pas. Le gouvernement fédéral, ayant accumulé un déficit énorme, considérable, depuis plusieurs années, au moment où il devrait être en mesure de mettre le pied sur l'accélérateur de façon à être capable de faire redémarrer l'économie, est évidemment très préoccupé par son déficit, et cherche par toutes espèces de moyens à le déplacer vers d'autres gouvernements, les gouvernements de provinces en particulier. L'espèce de facilité qu'un gouvernement devrait avoir, quand la situation économique ne va pas très bien, pour essayer de faire démarrer l'économie, manifestement, n'existe pas à Ottawa, à

l'heure actuelle.

Chez nous, elle n'est pas non plus très grande, cette marge. On a fait état bien souvent des déficits du gouvernement de Québec. Jaurais souhaité que, de temps à autre, on nous parle un peu davantage du déficit du gouvernement fédéral, parce qu'en termes de poids relatif, il n'y a pas de comparaison, celui du fédéral est bien plus lourd. Mais nous, comme gouvernement de province, nous ne sommes pas à l'heure actuelle dans une situation qui nous permettrait de faire tout ce que nous voulons.

D'autre part, les politiques énergétiques suivies par le gouvernement fédéral ont eu un effet massif sur les investissements au Canada en amenant une sorte de décroissance dans ce domaine. Et même certaines des régions qui avaient un taux de croissance spectaculaire, il y a deux ans, très important il y a un an, subissent à l'heure actuelle l'impact d'une politique énergétique fédérale qui, directement dans certaines provinces, indirectement, à travers tout le Canada, affecte la croissance de l'économie.

Et comme si cela ne suffisait pas, nous sommes en face d'une politique monétaire, apparue aux États-Unis, mais qui, évidemment, déborde chez nous, extrêmement restrictive et caractérisée par des taux d'intérêt comme on n'en avait jamais vus avant. Des taux d'intérêt, remarquons-le bien, qui, à ce niveau et avec une politique restrictive de cet ordre, semblent avoir aux États-Unis un effet sur l'inflation. Je peux comprendre, à la rigueur, que les Américains, regardant la situation chez eux depuis dix mois ou un an, se disent: Cela vaut peut-être la peine d'avoir des taux d'intérêt aussi élevés et une politique monétaire restrictive si, effectivement, cela a cet impact sur l'inflation, si cela réduit le taux d'inflation. Pour nous, qui subissons à peu près automatiquement l'effet de cette politique monétaire américaine, la situation se présente très différemment. Après deux poussées des taux d'intérêt, encore une fois, tout à fait inédites en l'espace d'un an et demi où est la réduction du taux d'inflation chez nous? Nulle part. L'inflation continue, non pas se maintient au même rythme, mais s'accélère. Nous avons devant nous, pour les années à venir, les hausses du prix du pétrole. Les Américains ont eu au moins la sagesse d'absorber l'augmentation du prix du pétrole et, pour eux, c'est derrière eux maintenant. Donc, au moins certaines politiques monétaires qu'ils pratiquent ont un certain effet sur le rythme d'inflation. Nous avons le pire de tous les mondes, l'effet de la politique monétaire des États-Unis et toutes les augmentations du prix de l'énergie qui sont à venir, à cause des augmentations du prix du pétrole dans les deux ou trois ans qui viennent. C'est-à-dire, pas beaucoup d'espoir d'une réduction du rythme ou du taux d'inflation; ce n'est pas un environnement facile.

Un gouvernement ne peut pas renoncer, encore une fois, à ses responsabilités fondamentales à l'égard du développement économique, mais, d'un autre côté, dans un tel environnement, on comprend que les gouvernements sont amenés à poser des gestes qui ne sont pas nécessairement populaires dans tous les milieux, qui peuvent être considérés à certains moments comme des virages d'une certaine brutalité, mais qui permettent cependant au gouvernement d'être en mesure de continuer à assumer des fonctions que, seul, finalement, il peut assumer.

Nous avons, dans le budget de cette année, le reflet de deux orientations fondamentales. L'une qui a trait au revenu du gouvernement et, l'autre, les dépenses.

Pour ce qui a trait à nos politiques fiscales, nos politiques d'impôt, nous avons continué, une année de plus, une tendance qu'on peut apprécier diversement, à satisfaire l'objectif suivant: faire en sorte que l'impôt sur le revenu et les taxes de vente soient réduits chaque fois qu'on le peut. Par rapport à quoi? Par rapport à ce qu'étaient ces taxes lorsque nous sommes arrivés au pouvoir pour la première fois. C'est une sorte d'objectif tenace pour nous, à l'intérieur, encore une fois, de marges qui très souvent sont étroites, mais on ne pourra pas reprocher à ce gouvernement, M. le Président, de ne pas avoir eu une certaine persistance à cet égard au cours des trois dernières années.

On nous dit parfois: Oui, mais le fardeau fiscal des Québécois reste supérieur à celui des provinces voisines. Évidemment, bien sûr, on le sait, on ne s'est jamais imaginé qu'on était capable de rétablir une situation comme celle-là en l'espace de quelques années. L'accumulation d'un fardeau fiscal extraordinairement élevé au Québec, ça ne se corrigera pas en deux ou trois ans, mais au moins on peut se dire que, pendant trois ans successivement, on a franchi une partie du terrain qu'on avait à franchir. Quand je vois, cette année, le gouvernement de l'Ontario annoncer, sur deux ans, une augmentation de 10% de son impôt sur le revenu, je me dis que l'écart indéniable qui existe entre le fardeau fiscal des deux provinces continue de s'amenuiser, en partie à cause de notre propre mérite et en partie à cause de ce qui se passe ailleurs.

Ces réductions d'impôt ont évidemment un effet sur les ressources qui sont à notre disposition, cela a un effet sur le déficit et cela a un effet sur les rentrées fiscales chaque année. On pourrait considérer qu'une tendance comme celle-là est dans l'ordre normal des choses et pourtant, là encore, un

danger important nous guette. On nous a assez dit, pendant le débat référendaire, que plus du quart de tous les revenus du Québec proviennent de transferts fédéraux. C'est vrai, à cause, encore une fois, de la structure de la péréquation, des programmes établis, des ententes entre les gouvernements. Au total, c'est vrai, plus du quart des ressources de l'État du Québec nous proviennent de transferts du gouvernement fédéral. (17 h 30)

II y a quelques années, le montant de ces transferts augmentait de 18% ou 19% par année, donc approvisionnait notre caisse au moins autant que l'impôt sur le revenu avant qu'on commence à en réduire certaines des caractéristiques ou une partie de son fardeau réel. Là, les transferts fédéraux ont commencé à augmenter de plus en plus lentement. Nous en sommes arrivés au point où ces transferts fédéraux ne représentent plus 18%, 15% ou 12% d'augmentation par année, mais un taux d'augmentation qui est à peine le tiers du taux de l'inflation au Canada. Si on fait cette année, 5%, d'augmentation dans les transferts fédéraux, ce sera très beau. Il y a donc une partie des ressources du gouvernement qui augmente lentement, de plus en plus lentement, et dont on nous annonce maintenant à Ottawa qu'elle pourrait être réduite, mais alors là, en valeur absolue, par une coupure qui pourrait atteindre, pour l'ensemble des provinces canadiennes, 1 500 000 000 $ en deux ans.

C'est extrêmement préoccupant. Tout se passe comme si, sur le plan constitutionnel comme sur le plan financier, on en était à chercher à coincer le Québec. Dans le débat constitutionnel, il est évident que cette Assemblée dans laquelle nous siégeons... Si le projet du premier ministre du Canada est accepté à Londres et nous revient, une chose est parfaitement évidente: c'est que le peuple québécois et l'Assemblée nationale de ses élus n'auront plus jamais les pouvoirs qu'ils ont eus pendant non pas seulement un siècle, mais plus d'un siècle. En même temps qu'on menace les pouvoirs du peuple québécois et de ses représentants, sur le plan financier, on utilise le fait qu'une partie importante des revenus du gouvernement de Québec provient d'Ottawa pour menacer l'équilibre général de nos finances publiques. Ne nous faisons pas d'illusion, M. le Président, on sent de plus en plus que l'automne prochain ne sera pas facile parce que la crise constitutionnelle va bien finir par aboutir et on saura ce que cela donne. Les positions du gouvernement fédéral à l'égard des transferts aux provinces, c'est l'automne prochain qu'on va le savoir. Nous nous en allons possiblement vers une crise à la fois politique et financière d'une ampleur bien plus grande, je pense, que, jusqu'à maintenant, on s'est plu à le souliqner.

Sur le plan des dépenses, on a beaucoup parlé, bien sûr, des coupures. J'ai bien l'impression, M. le Président, qu'on en a tant parlé qu'on a fini par perdre un peu la perspective de l'augmentation des dépenses cette année. Entendons-nous bien, les dépenses, les crédits que nous sommes à voter, ces crédits augmentent par rapport à l'année précédente d'un peu plus de 13,5%. Lorsque les dépenses augmentent à ce rythme, parler de coupures est un peu fort. Mais pourquoi, même si ça augmente de 13,5% en un an, cette image de coupures et de compressions est-elle à ce point tenace? Il y a des raisons et ce sont des raisons non pas seulement de gestion, mais ce sont aussi, jusqu'à un certain point, des raisons qui tiennent à une sorte de phénomène de société.

Nous vivons très naturellement et, pour une bonne partie de la population, assez agréablement dans une société qui a vécu longtemps ou qui s'est développée longtemps dans une atmosphère d'expansion à peu près sans limite. Je vous rappelle qu'avant que nous arrivions au pouvoir, les dépenses du gouvernement de Québec avaient, au cours des trois années précédentes, augmenté de 21% par an; cela veut dire, à ce rythme, que les dépenses doublent tous les quatre ans. C'est prodiqieux comme rythme d'expansion. Tous les robinets étaient ouverts.

C'est très difficile, quand on a créé de telles attentes dans la population, et pas seulement à cause de ces trois années, mais sur une période de vingt ans, dans un certain sens, lorsque de telles attentes sont apparues, se sont manifestées, il est très difficile de parler le langage, de réaliser graduellement les choses, de ne pas faire de développement cette année dans tel secteur, mais de le reporter dans deux ans, cela n'est jamais facile de répondre à des attentes par un échéancier.

Il est clair que, dans une société où on voudrait, autant que possible, presque tout, tout ou presque, du gouvernement, un échancier choque, que des réalisations graduelles troublent ou dérangent. C'est une première raison, et je pense qu'elle est fondamentale. Elle n'est pas propre à la société québécoise, bien sûr, mais il y a quelque chose de profondément ancré ici et peut-être accentué, en un certain sens, par le fait que nous vivons aussi dans une société où on attend terriblement de l'État. Il y a aussi un phénomène de civilisation où, tout naturellement, tout problème doit être réglé par l'État et où tout besoin s'exprime par une demande de subvention à l'État. Ce sont de très vieilles habitudes, chez nous. Là encore, nous ne sommes pas les seuls, mais c'est assez caractéristique. S'il y a un petit

péché mignon, il est peut-être de ce côté.

Quand je vois, de temps à autre, des associations professionnelles composées de gens qui gagnent très bien leur vie venir demander une subvention de 5000 $ ou 10 000 $ pour organiser un congrès, je suis toujours un peu gêné. Cela se fait plus souvent qu'on pense. Tout se passe comme si beaucoup de choses et de plus en plus de choses dans notre société ne pouvaient pas se réaliser sans subvention, à peu près quel que soit le niveau de revenu ou de fonds dont disposent soit les individus soit les institutions. On s'est habitué à cela.

Bien sûr, dans le genre de contexte que je viens de décrire, il va falloir petit à petit se déshabituer, pas complètement, car il restera toujours des subventions, il y aura toujours énormément d'organismes de causes que l'État devra appuyer. Il y a clairement, sur le plan des mentalités, un virage à prendre. Je disais que ce n'était pas la seule raison. Non, bien sûr, parce que évidemment aussi, les conventions collectives que nous signons représentent un coût, une augmentation annuelle des dépenses de salaires qui représentent plus de la moitié du budget du gouvernement du Québec. Plus de la moitié de notre budget est consacré à des salaires, soit dans la fonction publique, soit par le truchement de subventions aux hôpitaux, aux réseaux de santé, à l'enseignement, etc. Mais plus de la moitié du budget du gouvernement de Québec est consacrée à des salaires. Et dans la mesure où ces salaires ont un taux d'augmentation prévu par les conventions collectives, forcément, cela se reflète dans une augmentation mécanique de nos dépenses.

Il y a aussi des habitudes, dans la gestion des affaires publiques, et ça à toutes espèces de niveaux, des habitudes qui ne sont pas faciles à défaire. Pendant très lonqtemps, on s'est imaginé qu'on pouvait augmenter le personnel dans les services publics à peu près indéfiniment. Il faut dire que, partant d'aussi loin qu'on partait, avant les années soixante, on comprend qu'une impression comme celle-là se soit créée. Après tout, le développement de l'enseignement secondaire, c'est en très peu de temps, en guelques années, dans les années soixante, qu'on a vu une augmentation, une flambée du nombre des enseignants. Il fallait le faire. Cela a développé des habitudes. Normalement, les effectifs doivent augmenter dans l'enseignement et s'ils n'augmentent pas, il y a quelgue chose d'anormal. L'augmentation du personnel dans les services de santé, là encore, depuis le début des années soixante, est quelque chose d'absolument spectaculaire! Et on a pris tout naturellement l'habitude de considérer que si les effectifs dans les services de santé ne continuent pas d'augmenter régulièrement, il y a quelque chose d'anormal.

Ne parlons pas de la fonction publique où, gouvernement après gouvernement, programme après programme, création de nouveaux ministères après les ministères existants, on a fonctionné sur le principe de la sédimentation. Tout ce qui était fait était bien fait et on en ajoutait chaque année à l'occasion de l'adoption d'une nouvelle loi, de la création de nouveaux programmes et de la création d'un nouveau ministère. Cela allait de soi que les effectifs de la fonction publique devaient croître indéfiniment. C'est tout ça que nous cherchons à changer à l'heure actuelle. C'est là encore, sur le plan des gestionnaires dont on ne peut pas se passer, des gestionnaires dans les ministères, des gestionnaires dans les services de santé, des gestionnaires dans l'enseignement, où il faut, tout cela ensemble, prendre l'habitude, oui, c'est possible, de faire fonctionner efficacement des services sans avoir chaque année une augmentation régulière du personnel, tous faire en sorte qu'on réexamine l'affectation du personnel. (17 h 40)

On se pose régulièrement la question à savoir si le personnel placé dans le service A ne devrait pas, pour une part, être déplacé ailleurs et s'il y serait plus efficace de cette façon. Nous avons tous à faire cet exercice. Il est commencé depuis deux ans. Il se manifeste, évidemment, de façon assez serrée cette année dans les compressions budgétaires. Il y a donc un certain nombre d'explications. Il y a un certain nombre de causes sous-jacentes à l'évolution des dépenses et ce qu'on a appelé des compressions. C'est inévitable. Nous ne pourrons pas continuer à laisser un taux exubérant aux dépenses publiques, d'autant plus que derrière tout cela se profile le coût pour l'État des taux d'intérêt dont je parlais tout à l'heure. Ces taux d'intérêt touchent tous les particuliers, tous les commerçants et tous les industriels - c'est vrai - mais ils touchent aussi le gouvernement. Le service de la dette, les intérêts que nous avons à payer chaque année augmentent à une vitesse vertigineuse. On dira, bien sûr: Cela reflète les besoins d'emprunt du gouvernement. C'est vrai,' mais cela reflète aussi de façon pas banale l'augmentation saisissante des taux d'intérêt qu'on a connus sur le marché. Si on ne veut pas laisser les déficits prendre n'importe quelle dimension, lorsque le service de la dette coûte beaucoup plus cher, il faut bien. On ne peut pas l'éviter, celui-là. Il est absolument incompressible. Je ne peux pas décréter une compression des intérêts à payer sur nos emprunts. Cet élément étant totalement incompressible, il est évident que cela va avoir des conséquences sur le rythme de dépenses des autres postes au gouvernement.

Tout cela, M. le Président, pour dire

ceci: L'avenir est assez périlleux. Nous nous rendons compte que ces négociations fiscales que nous allons aborder dans les mois qui viennent peuvent faire courir aux ressources de l'Ftat québécois des risques considérables. L'avenir est périlleux aussi parce qu'il faut tout de même assurer une reprise systématique de l'économie du Québec et que, dans l'environnement, dans nos rapports avec le gouvernement fédéral, ce n'est pas si facile que cela. Notre performance, on en est fier: trois ans de croissance économique plus rapide qu'en Ontario, il n'y a pas de quoi s'en désoler au Québec, mais on est loin du compte sur le genre de développement qu'on souhaiterait avoir. Pourtant, reconnaissons que tous les outils ne sont pas là et que les contraintes budgétaires dont je parlais tout à l'heure affectent l'usage des outils que nous avons. Un avenir périlleux aussi, parce que la politique monétaire pratiquée aux États-Unis, comme je le disais au début, ne veut pas nécessairement dire chez nous une réduction du taux d'inflation. C'est en raison de cette décision déplorable, fondamentalement politique - pas dans le grand sens du terme - que nous avons été les seuls, au Canada, de tous les pays occidentaux, à vouloir reporter l'échéance des hausses du prix du pétrole toujours un peu plus loin.

Dans cet avenir périlleux, M. le Président, le gouvernement du Québec a conscience d'avoir relevé le défi, d'avoir, avant même le déclenchement d'une campagne électorale, pris le risque de dire à la population: Voici comment ça se présente et voici quelles conséquences ça aura. C'est peut-être une preuve d'une assez extraordinaire maturité politique chez les Québécois que, ayant compris ce message, ayant compris toutes les contraintes que ça entraînerait, ayant compris que le gouvernement assumait ses responsabilités, et les assumait efficacement, ce peuple québécois ait remis le gouvernement actuel au pouvoir.

Merci, M. le Président.

Le Président: J'appelle maintenant au vote la motion de censure présentée par le député de Vaudreuil-Soulanges, qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois d'avoir présenté un budget qui comporte un déficit budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde année consécutive, qui compromet davantage la santé des finances publiques québécoises et de notre économie, particulièrement en ce qui a trait à la création d'emplois, et qui introduit des mesures de compression budgétaire aussi arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et des affaires sociales.

Qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 17 h 46) (Reprise de la séance à 17 h 58)

Mise aux voix de la motion de censure

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! ...À l'ordre, s'il vous plaît:...

Afin que chacun sache ce sur quoi nous allons voter, je vais répéter la motion de blâme du député de Vaudreuil-Soulanges. "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois d'avoir présenté un budqet qui comporte un déficit budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde année consécutive, qui compromet davantage la santé des finances publigues guébécoises et de notre économie, particulièrement en ce qui a trait à la création d'emplois et qui introduit des mesures de compressions budgétaires aussi arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et des affaires sociales."

Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît! (18 heures)

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Picotte, Pagé, Gratton, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Laurin, Bérubé, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Marois, Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Ouellette, Dussault, Gagnon, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, de Bellefeuille, Guay, Baril (Arthabaska), Dean, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Blais, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lachance, Paré, Dupré.

Le Secrétaire: Pour: 36

Contre: 64

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée.

Le second vote porte sur la motion du ministre des Finances, qui propose que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement.

Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: Même vote renversé.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote renversé?

M. Charron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Comme il s'agit d'un vote majeur, il serait plus prudent de le répéter.

Mise aux voix de la motion proposant l'approbation de la politique budgétaire du gouvernement

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Donc, que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Laurin, Bérubé, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Marois, Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Ouellette, Dussault, Gagnon, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, de Bellefeuille, Guay, Baril (Arthabaska), Dean, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Blais, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lachance, Paré, Dupré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Picotte, Pagé, Gratton, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kheoe, Houde, Middlemiss.

Une voix: On a gagné!

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Puis-je suggérer que nous notions l'arrivée du ministre de l'Énergie et des Ressources et que nous puissions lui permettre d'ajouter son nom à ces deux motions...

Le Vice-Président (M. Jolivet): De même que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Levesque (Bonaventure): ... de même que le nom du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, sachant, M. le Président, qu'on n'aura pas d'objection à ajouter mon nom sur les premier et deuxième votes?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, pour les besoins des nouveaux en cette Chambre, il serait peut-être bon de se rappeler l'article 108, qui dit que, à moins de consentement de part et d'autre, les gens qui arrivent en retard ne peuvent être inscrits au vote.

Des voix: Consentement.

Le Secrétaire: Pour: 66

Contre: 37

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion adoptée.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, avant de proposer la suspension jusqu'à 20 heures, je voudrais solliciter le consentement de l'Opposition pour qu'il soit permis, à ce moment-ci, comme j'en avais prévenu le leader de l'Opposition, au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de déposer un projet de loi en première lecture puisque nous avons, à la suite d'une consultation, choisi cette méthode plutôt que celle de greffer un amendement à un projet de loi qui est actuellement en discussion devant la commission de la justice.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Nous sommes d'accord pour permettre au gouvernement de déposer ce projet de loi à ce moment-ci. Nous n'étions pas d'accord qu'il soit en annexe, comme vient de le dire le leader parlementaire du gouvernement, à un projet de loi omnibus qui n'a même pas été discuté en deuxième lecture. Cela ne veut pas dire quelle sera notre attitude sur le projet de loi lui-même, mais nous n'avons pas d'objection, à ce que le gouvernement dépose le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, la motion est adoptée.

Projet de loi no 13 Première lecture

M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu propose la première lecture du projet de loi no 13, Loi sur le Comité mixte de la construction. M. le ministre.

M. Pierre Marois

M. Marois: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le projet de loi no 13. Ce projet de loi a pour effet de permettre au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de former un nouveau Comité mixte de la construction dont la composition, contrairement à celle du comité existant, tiendra compte des nouveaux degrés de représentativité du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International) et de la Fédération des travailleurs du Québec, FTQ-Construction, obtenus par suite du scrutin tenu en vertu de la Loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et concernant la représentativité de certaines associations représentatives.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de première lecture est-elle adoptée? M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vu qu'il s'agit d'un projet de loi que nous ne pourrons pas, s'il est adopté, étudier dans les jours qui viennent vu que, normalement, la session se termine demain, pourrions-nous demander, pour l'information du public, au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de nous dire ce qui amène l'étude de ce projet de loi à ce moment-ci, quelle est l'urgence et, en même temps, quelle est la nature des modifications suggérées par le ministre?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Marois: Essentiellement, M. le Président, dans la foulée de l'adoption de la loi no 109 qui a permis de reconnaître l'existence juridique de la FTQ-Construction, il nous semble de mise, à ce moment-ci, avant qu'arrive l'automne, alors que le comité mixte a des travaux à faire, notamment concernant le règlement de placement de la construction - on l'a évoqué en commission parlementaire - et concernant aussi toute l'opération de maraudage qui vient è l'automne, qu'en toute et bonne démocratie, la FTQ-Construction, qui est maintenant reconnue légalement, comme également le Conseil des métiers de la construction, puisse siéger au comité mixte, ce que permettrait le présent projet de loi. C'est donc dans la foulée de l'adoption de la loi no 109 et avant un certain nombre d'opérations que je viens d'évoquer.

M. Pagé: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Le ministre du Travail vient de nous indiquer que le comité mixte sera appelé à se pencher sur l'application du règlement de placement. Pour utiliser un terme que le ministre utilise fréquemment, n'a-t-il pas cru bon, dans la même foulée, de prévoir, dans son projet de loi, des indemnités à verser en dommages en raison des préjudices qui ont été causés à des milliers et des milliers de travailleurs du Québec à la suite de l'application du règlement de placement qui avait été approuvé et présenté au Conseil des ministres par son prédécesseur, l'actuel ministre des Affaires sociales, et qui a été déclaré nul et illégal par une décision du tribunal de la Cour supérieure cette semaine ce qui permettrait, selon le jugement rendu par l'honorable juge, un recours collectif à tous ces travailleurs qui ont été brimés dans leur droit le plus fondamental d'exercer un travail et qui donnerait un droit acquis à tout travailleur possédant un certificat de qualification? ( 18 h 10)

Est-ce que dans le même projet de loi que vous présentez aujourd'hui vous avez l'intention d'ajouter d'ici la fin de la session des dispositions permettant d'indemniser les milliers de travailleurs qui ont été affectés par une situation que vous avez créée et qui a fait en sorte que pendant près de trois ans ces travailleurs ont été brimés et ont perdu des emplois, ils n'ont pas eu le droit de travailler?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Travail.

M. Marois: La réponse à la question du député - ce qu'il vient d'évoquer est prévu dans le présent projet de loi - est non, et il sait fort bien pourquoi. Parce que le présent projet de loi n'a pour effet, à la suite de la reconnaissance juridique de la FTQ-Construction, que de lui permettre, en toute et bonne démocratie, de pouvoir siéger au comité mixte de la construction qui a un certain nombre de travaux à faire, notamment, des travaux qui pourraient concerner le règlement de placement de la construction.

Cela dit, en ce qui concerne le jugement que vient d'évoquer le député, j'ai vu cela ce matin dans les journaux, je n'ai pas eu le temps de prendre connaissance du jugement. J'ai demandé aux conseillers juridiques du ministère d'examiner le jugement et, le cas échéant de regarder cela aussi avec mon collègue de la Justice pour voir s'il n'y a pas lieu de porter un tel jugement en appel. Il est prématuré pour moi, en toute honnêteté...

Des voix: Oh! Oh!

M. Marois: Le député comprendra que c'est un jugement de première instance et je ne peux pas me prononcer sur le fond à ce moment-ci. On ne peut pas improviser une décision comme celle-là à la suite d'un jugement dont je n'ai même pas eu le temps de prendre connaissance en détail. Je ne l'ai pas eu sur mon bureau. Les conseillers juridiques vont se pencher sur le dossier et on verra s'il y a lieu ou non d'aller en appel sur un tel jugement. S'il y avait lieu d'aller en appel, ce serait inscrit en appel. S'il n'y avait pas lieu d'aller en appel, les gens et les citoyens concernés ont des recours reconnus par la loi. Le député lui-même a rappelé une des possibilités. Les possibilités sont donc là.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci, M. le leader. Est-ce que cette motion de première lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: M. le Président, je voudrais indiquer que, conformément au règlement et à l'entente faite à l'intérieur du règlement entre l'Opposition et le parti ministériel, ce soir...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader...

M. Charron: Non, je ne le défère pas.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. Charron: C'est ça. M. le Président, ce soir, quelques députés de l'Opposition se sont inscrits auprès du secrétaire général afin d'avoir un dernier débat sur le rapport des différentes commissions qui ont étudié les crédits. J'ai consulté l'Opposition, on a privilégié, parmi les neuf députés, l'un d'entre eux qui profitera du droit à la demi-heure pour avoir un débat avec un ministre du gouvernement. L'Opposition m'a indiqué qu'il s'agirait du député de Beauce-Sud qui a inscrit une question visant le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui sera donc présent. Ce sera le tout premier, ce soir, lorsque nous entreprendrons cette étude à 20 heures. Par la suite, les autres députés ont, comme le règlement le dit et comme ils le savent, dix minutes d'intervention avec une réplique du gouvernement de même durée.

Dans l'ordre, nous entendrons ce soir le député de Gatineau, la députée de Jacques-Cartier, le député de Marguerite-Bourgeoys qui, tous les trois, ont inscrit des questions au ministre de l'Éducation. Ensuite, nous entendrons l'intervention du député de Mont-Royal qui s'adresse au ministre de l'Habitation. Ensuite, la question du député de Gatineau qui s'adresse au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Ensuite, l'intervention du député de D'Arcy McGee qui concerne le ministre de la Justice. L'autre intervention du député de D'Arcy McGee - est-ce qu'un député peut faire deux interventions? - qui concerne également le ministre de la Justice. Finalement, l'intervention du député de Nelligan qui concerne le ministre des Finances. C'est l'ordre, M. le Président, - je ne veux pas en faire un ordre formel de la Chambre - que je proposerais en vue d'un agencement de nos travaux qui soit régulier.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va? C'est adopté? M. le leader, pourrait-on, au niveau de la présidence, en savoir les détails pour qu'on puisse...

M. Charron: Oui, je vais vous remettre tout cela, mais, pour l'instant, M. le Président, je proposerais la suspension de la séance jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 16)

(Reprise de la séance à 20 h 18)

Débat sur le rapport de l'étude des crédits

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir.

Nous commençons le débat sur le rapport des crédits. La parole est au leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Je pense que nous allons procéder... Je crois que le député de Beauce-Sud s'était inscrit pour faire la première intervention.

M. Mathieu: C'est cela.

M. Bertrand: Nous allons écruter religieusement, M. le Président, le député de Beauce-Sud.

Le Vice-Président (M. Jolivet): La parole est donc au député de Beauce-Sud, sur les questions qu'il veut soulever en cette Chambre.

Agriculture, Pêcherie et Alimentation M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je vais prendre la parole du ministre des Communications qui dit qu'il va écouter religieusement.

Les questions que se posent les agriculteurs, de même que ceux qui aspirent à devenir agriculteurs, nos jeunes, ainsi que ceux qui veulent transmettre leur propriété à la nouvelle génération, ce sont les questions suivantes: S'établir, est-ce possible? Transmettre ma propriété, est-ce possible? Je tire mon thème d'un mémoire - que j'ai cité à la commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation - préparé par le Conseil d'administration de l'Association des jeunes agriculteurs de la Beauce. Cela prouve que les jeunes de la Beauce sont fidèles à la tradition et sont en mesure de perpétuer le miracle beauceron. Le thème de ce sujet, c'est: S'établir, est-ce possible, évidemment, en agriculture?

M. le Président, je voudrais démontrer, ce soir, à cette Assemblée, que le budget en cours, en ce qui concerne l'agriculture - on pourrait dire le budget dans son ensemble, mais principalement en ce qui concerne l'agriculture - accuse cette année un net recul. Le budget commence à pointer vers le bas. C'est justement ce qui est cause d'inquiétude non seulement de la part des jeunes qui aspirent à s'établir, mais également de la part de ceux qui possèdent déjà une exploitation agricole et qui veulent bien la conserver.

Le budget me fait penser à du fromage de gruyère. Vous savez, une belle brique de fromage, ça se tient, mais la caractéristique, c'est que c'est bourré de trous. Quand on veut décortiquer tranche par tranche le budget soumis par le ministre des Finances, on sort la tranche du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, la tranche du ministère des Transports, la tranche de plusieurs autres ministères: Affaires sociales, Éducation, et qu'est-ce qu'on constate? Il y a plus de trous dans votre tranche qu'il y a de fromage en réalité. Il y a des trous pour plus de 1 000 000 000 $. Vous avez vu les manchettes, comme moi, ce ne sont pas des inventions que je vous fais.

Ce qui me consterne le plus, c'est qu'il y a certaines tranches de notre brique de fromage qui n'ont pas de trou. Heureusement pour ces ministères, mais malheureusement pour l'ensemble des autres. Comme la tranche de la propagande, elle, elle n'a pas de trou. Soyez sûr, la tranche de la publicité n'a pas de trou non plus. La tranche qui va aux Affaires intergouvernementales n'a pas de trou. Mais quand on arrive vis-à-vis de la tranche de l'Agriculture, et qu'on veut la tailler en petites pièces pour la remettre aux agriculteurs de chaque région, on arrive avec un beau morceau d'un pouce carré, mais s'il y en a les trois quarts qui sont amputés par un trou, on ne remet pas grand-chose finalement pour maintenir le dynamisme de l'agriculture.

C'est justement là le drame de la situation. C'est pratiquement de la fausse représentation, le budget de cette année.

L'agriculture au Québec a connu son essor, a connu son expansion, a connu son affirmation dans le secteur économique au cours des années 1970-1976. Je vais vous le démontrer.

Le budget de 1970-1971 était de 82 000 000 $; 1971-1972, 85 000 000 $; 1972-1973, 96 000 000 $ - vous voyez qu'il y a une amélioration - 1973-1974, 112 000 000 $ - cela progresse - 1974-1975, 163 000 000 $, une hausse de 41,5% en cette seule année, cela ne s'est jamais revu depuis, 1975-1976, 203 000 000 $ et 1976-1977, 212 000 000 $, ce qui fait pendant les années 1970-1977 sous le gouvernement libéral, une augmentation de 156% .au budget de l'Agriculture.

Prenons les années, qu'on pourrait appeler "miraculeuses", M, le Président, alors que l'actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est arrivé au cabinet, à la tête du ministère avec sa baguette magique. Je voudrais bien avoir un petit bout de cette baguette magique au moins, pour pouvoir faire les mêmes miracles

au moins verbaux, comme le disent certains producteurs parfois, "des discours aratoires" aussi enflammés que le ministre est capable d'en faire et je voudrais qu'il me transmette sur son testament un petit bout de sa baguette magique, j'aimerais ça l'avoir pour faire de la prestidigitation à mon tour.

En 1977-1978, premier budget péquiste, 225 000 000 $, on passe de 212 000 000 $ à 225 000 000 $; en 1978-1979, 241 000 000 $; 1979-1980, 250 000 000 $; 1980-1981, 345 000 000 $, mais là, les pêcheries...

Des voix: Ce n'est pas fort:

M. Mathieu: M. le Président, je conviens et je me réjouis de cette augmentation. Je ne suis pas un de ces esprits négatifs qui ne voient que la petite bête noire partout, je me réjouis et je veux rendre hommage aux personnes qui ont contribué à perpétuer cet élan.

En 1981-1982, 357 000 000 $. On a augmenté, au cours de la dernière année, de 12 000 000 $, mais n'oublions pas que, depuis 1980-1981, le budget consacré aux pêcheries est inclus dans les crédits de ce ministère, ce qui fait une progression, pendant le règne du gouvernement péquiste, de 59%, comparativement à 156% sous le règne antérieur. Quand on voit la situation on se dit: Le pique-nique serait-il terminé? Le ministre des Finances aurait-il sifflé la fin de la récréation?

M. le Président, j'ai dit tout à l'heure qu'il y avait 12 000 000 $ d'augmentation au cours de la dernière année. Je crois que ça ne couvre même pas l'inflation, si on peut s'entendre sur 10% d'inflation, sans exagérer, ça ne couvre pas l'inflation. Si vous ajoutez à ça les crédits périmés, les crédits qui ont été votés par cette Assemblée pour des services, pour le développement de l'agriculture, des crédits périmés, pour un montant de 13 000 000 $. Vous arrivez avec un budget qui n'est plus positif, mais qui est négatif. On arrive avec un net recul, M. le Président, et on pique du nez. Mais il faut tout dire. Nous avons connu cette situation seulement après les élections, pas avant. Avant les élections, on n'avait pas une idée de cela. C'est une coincidence probablement, M. le ministre, je vous le concède, c'est sans doute une pure coincidence, mais elle est là quand même.

Au titre des crédits périmés, si je prends le programme de planification, recherche et enseignement, il y a 354 000 000 $. L'aide à la production, si l'on veut aider l'agriculture, M. le Président, est-il un programme plus important que l'aide à la production...

M. Baril (Arthabaska); Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! M. le député d'Arthabaska sur une question de privilège.

M. Baril (Arthabaska): Je pense, M. le Président, que personne en cette Chambre n'a le droit, la permission ou l'autorisation d'induire cette Chambre en erreur. Le député de Beauce-Sud vient d'affirmer que le budget avait été déposé après le déclenchement des élections, après les élections. Le budget de M. Parizeau a été déposé en cette Chambre le 10 mars et les élections ont été déclenchées le 13 mars 1981.

M. Mathieu: Sur la question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je ne voudrais pas qu'on utilise des moyens parce que, d'une façon ou de l'autre, le ministre a un droit de réplique qu'il pourra utiliser tout à l'heure. Donc, sur le temps du député de Beauce-Sud, s'il vous plaît!

M. Mathieu: M. le Président, je n'ai peut-être pas dit que j'avais connu l'existence des crédits périmés après les élections. Avant les élections, on ne connaissait pas l'existence des crédits périmés. Je ne crois donc pas avoir induit cette Chambre en erreur et, si je l'avais fait, j'aurais été le premier à m'en excuser, soyez-en certain, M. le député d'Arthabaska.

L'aide à la production, 3 340 000 $ de crédits périmés. Mais si on veut aider l'agriculture, le développement de l'agriculture, c'est à l'aide à la production, c'est à ce programme. Je souligne seulement les titres qui méritent d'être mentionnés. Commercialisation des produits agricoles, crédits périmés, 3 060 000 $. Le ministre nous a toujours dit qu'avant de travailler à la distribution, il fallait pour commencer, avoir des réserves. Si les crédits périmés avaient servi à leurs fins, peut-être qu'on aurait moins de réserves, mais ça irait peut-être mieux dans le domaine du sirop d'érable, ça irait peut-être mieux dans l'industrie du porc, là où on connaît des reculs, où on connaît des situations pour le moins intenables pour les producteurs. (20 h 30)

Gestion du territoire, crédits périmés: 1 588 000 $. Le pire de tout est le secteur qui mérite le plus de considération: le développement des pêches maritimes. Est-il un secteur qui mérite plus de considération que celui-là? Crédits périmés - tenez-vous bien - au montant de 4 175 000 $. J'aurais envie de dire que c'est presque rire des pêcheurs. C'est pratiquement 20% de leur budget qui s'en va en crédits périmés. J'espère que cette année, malgré le recul que nous connaissons en agriculture - je le

dis, nous piquons du nez, c'est un net recul -les crédits que cette Assemblée a votés serviront aux fins pour lesquelles ils sont destinés.

On parle de coupures. Les membres du gouvernement n'aiment pas le mot, on parle plutôt de compressions ou de ralentissement dans la progression des dépenses publiques. Appelez cela comme vous le voulez, cela fait moins d'argent dans les poches des cultivateurs et des producteurs.

Il y avait une subvention pour les silos. Le ministre se vantait de ce programme. C'est un programme qui a rendu service, et je connais plusieurs producteurs qui s'en sont prévalus, qui étaient bien contents. Cette année, le programme n'est pas reconduit. Qu'est-ce que nous donne le ministre comme explication? Cela dépend du fédéral!

Des voix: C'est cela!

M. Mathieu: Si le programme n'a pas été reconduit, cela dépend du fédéral.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Mathieu: ...puisque le fédéral a refusé de reconduire la part de subvention qu'il accordait antérieurement. Mais quand le ministre se gonflait, qu'il venait près de se tirer en l'air, quand il se gonflait de vantardise pour annoncer son programme de subventions aux silos, est-ce que le ministre disait qu'il y avait une participation fédérale?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Bertrand: Question de règlement. Je vous inviterais...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je tiens à rappeler à chacun des membres de cette Assemblée que l'article 100 existe pour le député de Beauce-Sud comme pour tous les autres députés. En conséquence, si on veut bien écouter son intervention, le ministre aura l'occasion d'y répondre dans quelques instants. M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, si mon terme est antiparlementaire, je le retire volontiers, mais je ne crois pas avoir offensé qui que ce soit. Je prends au mot le ministre des Communications qui joue son rôle à la perfection dans les communications, parce qu'il m'a promis au début qu'il écouterait religieusement.

Coupures au programme de l'emploi. Je n'insiste pas, on l'a fait en commission parlementaire. Coupures à l'amélioration foncière des sols, à l'assainissement des eaux, à la commercialisation des produits agricoles.

J'en arrive à la promesse du Parti québécois lors de la dernière campagne électorale, promesse qui s'adressait à la relève agricole, à nos jeunes, à ceux qui ont écrit le mémoire dont j'ai fait mention tout à l'heure. Je voudrais faire une mention. Je voudrais vous dire: Y a-t-il quelque chose de plus beau dans le monde que le projet d'un jeune? Quand arrive un jeune, 18, 20, 25 ans, à votre bureau, un peu timidement, qui vous fait part de son projet, vous êtes la personne déterminante pour son orientation, future, selon la manière dont vous allez l'accueillir, l'écouter et l'encourager. De là dépendra également son orientation dans bien des cas.

Je trouve que chaque jeune porte un trésor en lui. On ne doit pas passer l'éteignoir sur la tête des jeunes. On doit chercher à les stimuler, à leur donner confiance, à les aider à réaliser leur ambition, leur idéal. Y a-t-il quelque chose de plus triste qu'un jeune qui n'a pas d'ambition, d'idéal? J'arrive à votre promesse d'aide à l'établissement: la relève agricole. Si j'ai bien compris, pendant la campagne, le ministre de l'Agriculture et les membres du gouvernement - c'était leur droit tout à fait légitime et je ne le conteste pas; je suis content et j'ai hâte qu'ils le réalisent - nous disaient ceci: Nous allons prêter aux jeunes 50 000 $ sans intérêt, pendant cinq ans. C'est beau. Cela ne manque pas de poli. C'est bien présenté. Mais ce que je veux demander au ministre...

Le lendemain de l'élection, vous avez eu, messieurs, comme j'en ai eu moi-même, de nombreux appels téléphoniques qui disaient: Oui, les 50 000 $ maintenant, est-ce en vigueur? Est-ce prêt? On retarde notre projet. Ce que je demande au ministre, c'est quand vous allez mettre cette mesure en application. Quels seront les critères d'admissibilité? La personne bénéficiaire aura-t-elle besoin d'un diplôme? Si oui, de quelle institution, de quelle école d'agriculture? Quel niveau? Requerrez-vous des années d'expérience? L'aspirant agriculteur sera-t-il admissible à cette subvention? Vous savez que vous avez maintenant créé une classe d'aspirants aqriculteurs. Il faut être cinq ans aspirant agriculteur avant de devenir agriculteur. La promesse s'adresse-t-elle aux agriculteurs ou si elle sera disponible pour les aspirants agriculteurs? Après cinq ans, qu'adviendra-t-il du taux de l'intérêt? L'intérêt sera-t-il payable en entier selon le cours de cette époque par le jeune ou si l'intérêt continuera d'être subventionné? S'il y a un décès en cours de route, la succession devra-t-elle rembourser la partie qui a été subventionnée? Si oui, dans quels délais? Si la personne qui a bénéficié de cette aide vend sa terre ou que sa ferme est saisie, faudra-t-il faire un remboursement? Si oui, de quel ordre? Quel en sera le délai? Quelles

seront les garanties que vous exigerez?

Je prends un cas pratique pour appliquer votre promesse. Il y a quelques jours, le député d'Arthabaska nous disait que le prix des fermes dans sa région était d'environ 1 000 000 $. Vous avez dit cela lors de votre discours. On peut s'entendre là-dessus. Coupons en deux. Prenons une ferme de 400 000 $. Soyons beaucoup plus modestes. Vous savez, seulement 400 000 $, c'est plus que la moitié que ce qu'évoquait votre collègue d'Arthabaska. Supposons que la jeune personne, l'aspirant ou le jeune agriculteur qui désire faire carrière en agriculture, arrive à votre bureau de renseignements de l'Office du crédit agricole. On va lui demander: Quelle somme as-tu à verser comptant? Il a toujours travaillé avec son père depuis l'âge de quinze ou seize ans, depuis qu'il a quitté l'école, alors il ne faut pas s'attendre qu'il ait une somme faramineuse. Supposons qu'il ait 10 000 $. On ajoute la subvention de 50 000 $, cela fait 60 000 $. Admettons que le père se saigne à blanc et qu'il dise: Je vais diminuer ma valeur de 100 000 $, cela fait 160 000 $. Sur notre ferme de 400 000 $, moins 160 000 $, il restera au moins 240 000 $ à financer. D'abord, il faut vous dire que le père sera obligé de prendre une bonne partie du produit qui lui restera à la suite de la transaction pour payer ses dettes antérieures, pour s'acheter une maison, déménager - et on sait ce que ça coûte -finir d'élever ses enfants, les établir, tout cela. Le père sera dans la misère par la suite. (20 h 40)

En ce qui concerne le jeune, est-ce que l'Office du crédit agricole ou tout autre créancier va accepter de lui prêter 240 000 $? J'en doute assez fortement. S'il accepte, si on fait un petit calcul du coût de l'intérêt, 240 000 $ à 10%, c'est 24 000 $ d'intérêt. Remarquez bien que vos 50 000 $ de subvention sont déjà déduits, ne revenez pas pour dire: II faut que tu enlèves encore 50 000 $, c'est déjà déduit. 24 000 $ d'intérêt, la première année, et je mets l'intérêt à 10%. Est-ce que vous croyez que c'est réaliste? Si j'avais un projet un peu plus élaboré, de l'ordre de celui dont parlait mon collègue d'Arthabaska, un projet de 1 000 000 $, vous voyez qu'il y a une barrière infranchissable, il n'y a pas un jeune capable de s'installer en agriculture dans ces conditions.

Je voudrais reprendre ici une partie d'un discours du ministre de l'Agriculture il y a quelques jours. En réplique à un de mes discours, ou en réponse à une question, il a évoqué le fait qu'un des grands problèmes serait le taux élevé de l'intérêt et, encore une fois, que ça dépendait du fédéral. Avec le ministre de l'Agriculture, on le sait, ça dépend toujours du fédéral. Il y a seulement cent jours dans l'année où ça ne gèle pas au Québec, ça doit dépendre du fédéral aussi. Le ministre a déclaré que l'intérêt était élevé, que cela allait semer des inquiétudes dans le monde agricole. J'ai reçu de nombreux appels téléphoniques à ce sujet.

Je voudrais que, ce soir, le ministre prenne l'engagement ferme, devant cette Assemblée, de respecter les prêts en cours, c'est-à-dire que si un agriculteur a un prêt de 200 000 $ au taux actuellement subventionné, que cette subvention se continuera jusqu'à l'échéance de ce prêt. Le ministre a fait en cette Chambre une déclaration qui a créé de l'inquiétude dans la classe agricole. J'étais présent et j'ai reçu beaucoup d'appels téléphoniques. Je veux que le ministre en prenne l'engagement formel ce soir. Vous savez, M. le Président, si un individu emprunte 200 000 $ et qu'il paie 8% d'intérêt actuellement, à cause de la subvention de l'Office du crédit agricole, s'il a une augmentation de 5% ou de 8%, ça fait 10 000 $, 12 000 $ ou 15 000 $, et ce n'est pas long. Pour rassurer la classe agricole, je veux que le ministre prenne l'engagement que les subventions du taux d'intérêt continueront jusqu'à échéance pour les prêts actuellement en cours. On se comprend bien?

En ce qui concerne les futurs prêts, les prêts qui seront contractés quand votre promesse viendra à échéance, qu'adviendra-t- il des subventions d'intérêts? Les agriculteurs se posent la question. Si on a 50 000 $ de prêt sans intérêt pour cinq ans, mais qu'il n'y a plus de subventions d'intérêts pour les autres 250 000 $ et qu'au bout de cinq ans c'est 300 000 $ d'intérêts au taux courant il n'y a plus personne qui pourra tenir. Je veux que le ministre s'engage fermement. On ne doit pas modifier les règles du jeu en cours de route, comme on l'a fait pour l'éducation, au cours de la semaine.

Je voudrais dire un mot des chemins à vocation agricole. Le ministre, hier, en commission parlementaire, au sujet du programme - et j'ai le programme en main, c'est un programme de chemins à vocation agricole, programme 3, élément 2, en vigueur du 1er avril 1981 au 31 mars 1982 - le ministre m'a dit: J'aurai une réponse bientôt du ministère des Transports pour savoir si ce programme est reconduit, parce que j'ai beaucoup de municipalités et de cultivateurs qui en font la demande.

À ma grande stupéfaction, j'ai reçu une lettre aujourd'hui du ministre des Transports me disant ceci - je crois que je ne suis pas le seul, vous avez dû tous en recevoir, les députés de comtés ruraux: "Dans le cadre du programme d'aide à l'amélioration du réseau routier municipal, le ministère des Transports entend octroyer, au cours de l'exercice financier 1981-1982, des subventions aux municipalités pour les travaux de voirie sur

des rues et chemins de leur juridiction. Il est à remarquer que les chemins à vocation agricole seront inclus dans ce programme et qu'aucune aide gouvernementale n'y sera consacrée." J'espère que le ministre n'était pas au courant hier de cette solution, parce qu'il aurait induit la commission en erreur quand il nous a déclaré que le programme allait être reconduit cette année. Je peux vous dire que c'est un autre trou dans notre tranche de fromage, un autre trou qui va être pas mal dur à accepter. J'appelle cela pratiquement de la fausse représentation.

M. Garon: M. le Président, question de privilège.

M. Mathieu: Cela va me reposer un peu.

M. Garon: Ce serait facile de vérifier les propos que j'ai tenus hier en commission parlementaire...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste une minute, M. le ministre. Comme je suis debout, vos paroles ne sont pas enregistrées. Vous aurez l'occasion de répondre lors de votre réplique. Vous allez pouvoir le faire à un autre moment.

M. le député de Beauce-Sud, il vous reste deux minutes.

M. Mathieu: M. le Président, je voudrais juste dire un mot des programmes administrés par le ministère et subventionnés par le gouvernement fédéral: Assistance et installation de systèmes de drainage à la ferme, 21 000 000 $. Cela fait bien que le ministre annonce cela. Il ne nous dit pas que 13 500 000 $ viennent du fédéral - il ne veut pas nous le dire - dans l'installation de systèmes de drainage de ferme. Je prends votre cahier des crédits.

M. le Président, j'espère que vous tenez compte du temps qu'ils me font perdre en questions de privilège et en toutes sortes de choses. Je me fie à vous.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'une façon ou de l'autre, M. le député, il vous reste une minute.

M. Mathieu: Je voudrais faire état du vieillissement des emprunteurs à l'Office du crédit agricole. Alors qu'en 1977-1978 il y avait 42% entre 18 et 24 ans, maintenant il y en a 36,9% au dernier exercice. Alors qu'il y en avait 11,6% qui avaient 35 ans et plus, il y en a maintenant 17,2%; vous voyez un veillissement.

En ce qui concerne les prêts, il y en avait en 1977-1978, 38,9%, c'était pour s'acheter des terres; en 1979-1980, 23%. Il y en avait 4,2% qui empruntaient pour consolider leurs dettes, il y en a maintenant 12,5%; trois fois plus. Vous voyez la clientèle a vieilli, alors qu'on devrait s'adresser davantage à la jeunesse agricole.

Je peux vous le mentionner. Ce que je trouve regrettable, c'est que le Parti québécois exploite les agriculteurs et qu'il exploite les jeunes. Avant, nous étions un peuple de porteurs d'eau et de scieurs de bois; avec vous, messieurs, nous devenons un peuple de signataires de pétitions et de porteurs de pancartes.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mathieu: En guise de conclusion, il y a eu un jugement célèbre de rendu aujourd'hui. La semaine dernière j'ai dit au ministre du Travail, en commission parlementaire: Votre règlement de placement est immoral et illégitime, même s'il est légal. Aujourd'hui, la Cour supérieure vient de juger qu'il est illéqal et j'espère qu'elle va l'abolir, pour aider les jeunes.

Nos copains d'en face, quand ils s'adressent aux jeunes, les jeunes disent: Comme vous avez une belle image, comme vous avez un beau langage et eux, en riant dans leur barbe, répondent: C'est pour mieux vous exploiter. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. le ministre, selon l'entente, vous avez un maximum de 30 minutes.

M. Jean Garon

M. Garon: Merci, M. le Président. Cela me fait toujours plaisir d'entendre le député de Beauce-Sud, parce que je sais qu'il est sincère et qu'il exprime ses convictions. On peut diverger d'opinions avec lui, mais contrairement à son collègue, le député de Brome-Missisquoi, lui, au moins, on sait qu'il croit à ce qu'il dit, tandis que le député de Brome-Missisquoi, quand il parle, on n'est jamais convaincu pour qui il parle. Habituellement, il est connu pour avoir le coeur du côté de son portefeuille. (20 h 50)

On m'a dit qu'hier il a fait un grand discours pour dire que j'avais un bon tour de taille. Savez-vous, ça ne prend pas une 500 watts pour s'apercevoir de ça. Franchement, on n'a pas besoin du député de Brome-Missisquoi dans cette Chambre pour réaliser cette réalité. On aura l'occasion de voir, au cours des années qui viennent, deux députés, le député de Beauce-Sud, qui va s'initier tranquillement à son rôle et il va y avoir le député de Brome-Missisquoi qui va essayer de prendre sa place.

Par exemple, hier, en commission parlementaire, il a pris tout le temps. Le député de Beauce-Sud n'a pas pu dire un seul mot, ce fut constamment le député de Brome-Missisquoi qui a pris la parole.

M. Mathieu: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Monsieur, si c'est, à ce moment-ci, nonobstant le fait que vous avez déjà prononcé un discours, une vraie question de privilèqe, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, je ne peux pas laisser le ministre induire cette Chambre en erreur. J'ai participé à la commission parlementaire. Je suis d'accord et j'admets que le député de Brome-Missisquoi a parlé plus que moi, mais j'ai également participé pour pas mal de temps à la commission. Dire que je n'ai pas dit un mot, c'est absolument faux, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, je pourrais retirer les mots "il n'a pas dit un mot"; il a peut-être dit quelques mots, mais ces mots-là lui étaient soufflés par le député de Brome-Missisquoi.

Des voix: Ah!

M. Garon: C'est pour cela que j'ai peut-être généralisé en disant qu'il n'avait pas dit un mot.

Une voix: Quelques mots.

M. Garon: Je vais vous décrire le genre de député qu'est le député de Brome-Missisquoi. Il y avait des députés de son parti en arrière de la salle, entre autres le député de Huntington, qui discutait de la question des producteurs de porcs. Il a fait de grandes sorties pendant deux heures, deux heures et demie, pour nous dire qu'il y avait eu un gel au mois de février dans les vergers et qu'il y avait eu d'autres gels de bourgeons au printemps, au moment de la floraison. Comment se fait-il que le ministre de l'Agriculture n'avait pas encore fait quelque chose, alors que le gel datait de février? Je me sentais un peu malheureux, car je me disais: C'est vrai qu'on ne nous a pas cité de cas, qu'on n'a rien fait encore et qu'il n'y a pas eu de représentations. C'est drôle, quand il y a des malheurs comme celui-là, les cultivateurs nous font des représentations. Je prenais mon biscuit sans trop parler, en me disant: Cela doit être vrai, ils sont là. Pendant deux heures et demie, le député de Brome-Missisquoi a dit:

Comment se fait-il que vous n'ayez rien fait contre le gel de février? Quand la séance s'est terminée vers minuit, minuit et demi, j'ai parlé avec les producteurs agricoles. Ils m'ont dit: M. Garon, vous ne pouviez pas être au courant; on n'était pas au courant nous-mêmes à ce moment-là parce que...

Regardez le genre de demi-vérité. Le député de Brome-Missisquoi a fait carrière là-dessus. C'est sans doute l'homme qui a coûté le plus cher aux agriculteurs du Québec.

M. Bourbeau: Question de privilèqe, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Laporte, j'ai cru comprendre que vous vouliez vous lever sur une question de privilège.

M. Bourbeau: M. le Président, le ministre devrait avoir la décence d'attendre que le député de Brome-Missisquoi soit ici pour l'accuser.

Des voix: À l'ordre!

M. Charron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Si, pour parler de quelqu'un ici, il fallait avoir la décence d'attendre que les 37 députés libéraux qui ne sont pas ici arrivent ici, on ne pourrait jamais parler en cette Chambre.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: Je dirai en toute décence que je réplique un peu au député de Brome-Missisquoi, qui a parlé hier soir en mon absence et qui a tenu ces propos. Comme la session sera peut-être ajournée demain et que je n'aurai pas la chance de lui répondre, je le fais immédiatement.

Une voix: Très bien.

M. Garon: Alors, les producteurs agricoles sont venus me voir après et ils m'ont dit: M. Garon, c'est vrai qu'il y a eu un gel en février, mais on ne pouvait pas voir à ce moment-là quels étaient les dommages résultant de ce gel. C'est seulement lors de la floraison au printemps, dans la troisième semaine de mai - je parle de la région la plus chaude du Québec, dans le bout du comté de Huntingdon - qu'on a pu se rendre compte que plusieurs pommiers ne bourgeonnaient pas. À ce moment-là, on s'est

rendu compte qu'il y avait eu des dommages dus au gel, mais vous ne pouviez pas être au courant, parce qu'on était en train de se rendre compte de ces problèmes et on aimerait bien avoir votre aide. J'ai dit: C'est bien évident qu'on va vous envoyer nos gens. Les gens de l'assurance-récolte savent qu'il y a eu un gel en février. Maintenant, on sait qu'il y a eu, aussi pour les pommiers qui ont fleuri, un certain gel de bourgeons au printemps. On va analyser cela et, s'il y a quelque chose à faire, on va le faire pour vous donner un coup de main. Mais pourquoi faire perdre le temps du monde en faisant croire qu'on aurait dû deviner qu'il y avait des dommaqes alors que les producteurs eux-mêmes, les propriétaires des pommiers, ne pouvaient pas le savoir avant le printemps? C'est un genre de demi-vérité. C'est vrai qu'il y avait eu un gel, mais ce n'est pas vrai qu'on pouvait connaître les dommages. C'est ce sur quoi le député de Brome-Missisquoi a fait carrière.

Dans la plupart des comtés ruraux aujourd'hui, les députés du Parti québécois me disaient qu'ils avaient entendu: Si vous votez libéral, vous avez une chance d'avoir le député de Brome-Missisquoi comme ministre de l'Agriculture. Vous avez vu le résultat?

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Garon: Le député de Brome-Missisquoi peut parler aussi souvent qu'il le voudra en cette Chambre, ce n'est pas moi qui vais l'arrêter, je vais le laisser parler jusqu'au bout parce que je sais que chaque fois qu'il ouvre la bouche, il fait perdre des partisans au Parti libéral.

Il veut nous faire croire qu'il défend la veuve et l'orphelin. Je l'ai vu, dans mon bureau, alors qu'il me présentait les gens autour de la table, des gens qu'il représentait. Il disait à M. Untel: Combien de cochons par année? 90 000. M. Untel, combien de cochons par année? 60 000. M. Untel, combien de cochons par année? 35 000. M. Untel, combien? 3000 par semaine. Cela faisait 156 000 par année. Il m'a dit: M. Garon, c'est ça la production porcine au Québec, c'est ces gens-là qui la font et c'est de ces gens-là que vous devriez vous occuper.

Je lui ai dit: Comme ministre de l'Agriculture, ma principale responsabilité est de m'occuper d'abord de ceux qui ont spécifiquement besoin d'un ministre de l'Agriculture, les fermes familiales, les petites entreprises ou ceux qui sont au niveau de la ferme familiale. Les productions industrielles sont souvent capables de se défendre par elles-mêmes. Ce n'est pas mon premier rôle de défendre les productions qui appartiennent à des grandes sociétés, mais plutôt de défendre les productions des fermes familiales. Cela, les producteurs agricoles le savent. Au cours des mois et des années qui viennent, nous aurons l'occasion d'en parler.

Maintenant, le député de Beauce-Sud parle du budget. Le budget, dit-il, a commencé à pointer vers le bas et il y a des trous dans le fromage. Je vous dirai une chose. Les trous dans le fromage, c'était dans le temps du Parti libéral, quand la grande partie du budget servait à payer des fonctionnaires. Il y avait, en 1976, dans le budget du Parti libéral, 47,6% seulement qui étaient distribués aux agriculteurs. Sous le gouvernement du Parti québécois, en 1980, 61,7% du budget étaient distribués aux agriculteurs ou aux entreprises agro-alimentaires.

Des voix: Bravo!

M. Garon: II faut savoir lire un budget. Le député a dit, à un moment donné, qu'à certains endroits il y avait eu des crédits périmés. C'est évident, il peut y avoir des crédits périmés sur un budget d'un certain ordre de grandeur. Il nous dit que c'est terrible d'avoir 13 000 000 $ de crédits périmés sur un budget de 360 000 000 $. Je vous dirai que le Parti libéral avait 12 800 000 $ de crédits périmés sur un budget de moins de 200 000 000 $.

Des voix: Ah! Ah! M. Garon: En 1975. Une voix: C'est honteux.

M. Garon: En 1976, 22 900 000 $ de crédits périmés, malgré toutes les dépenses faites pendant le temps des élections. C'était un grand nombre de crédits périmés. Pourquoi? Sur un budget d'une certaine ampleur, il y a certains crédits périmés. Mais ce qu'il n'a pas dit, c'est qu'il y avait eu une entente entre le ministre des Finances et le ministre de l'Agriculture - il ne pouvait peut-être pas le savoir - qui faisait qu'en supprimant 13 000 000 $ aux crédits pour certaines fins d'ajustement, on allait chercher en même temps à peu près le même montant en budget supplémentaire à l'automne. Ce qui veut dire, au fond, que le budget a été entièrement dépensé l'an dernier puisque l'éguivalent des crédits périmés, on est allé le chercher en crédits supplémentaires en novembre dernier. Il n'y a pas de crédits périmés, véritablement.

L'efficacité du ministère, je le disais aussi, s'est accrue considérablement. De plus en plus de paiements, de transferts sont faits aux agriculteurs. Je ne veux pas dire que c'est de l'argent mal dépensé quand on paie des fonctionnaires, mais ce qu'il faut, au fond, c'est que les frais administratifs diminuent considérablement.

(21 heures)

Un exemple: On parlait de la fusion de l'assurance-récolte et de l'assurance-stabilisation des revenus. Aujourd'hui, on va abaisser considérablement le pourcentage les frais administratifs. Les frais administratifs, qui étaient autour de 27% par rapport au dollar dépensé, vont baisser à 21% par le résultat de la fusion. Cela veut dire quoi? Cela veut dire une plus grande efficacité administrative. Cela veut dire qu'une plus grande partie du budget va aux agriculteurs plutôt qu'à payer du fonctionnement interne. Quand le député de Beauce-Sud parle de coupures de l'aide à la production. C'est évident qu'il y a certaines choses qu'on a coupées parce que certains programmes ont rempli leur objectif. Quand on a coupé l'aide à la tubulure, il était le premier à dire qu'on avait trop développé les tubulures. Est-il fâché parce qu'on les aurait trop coupées cette année? Il est évident que si on ne donne pas les mêmes subventions aux tubulures en 1981-1982, il y a une coupure pour l'aide à la tubulure. Quand on dit les silos à la ferme, il y a la subvention. On a négocié une entente avec le gouvernement fédéral, c'est vrai qu'on a négocié une entente. On le cachait. Après ça, il nous dit que c'est marqué dans le rapport. Si c'est dans le rapport, c'est parce qu'on ne le cache pas.

On ne le cache tellement pas que c'est écrit sur les chèques que chacun des agriculteurs reçoit, parce que le fédéral le demandait. Mais ce qu'on n'a pas pu écrire, parce qu'on pensait qu'on serait payé en temps, c'est qu'on ne pensait pas qu'on serait obligé de financer l'affaire à 20%. Alors, les 33 500 000 $ sont dépensés. Mais on a reçu combien de paiements jusqu'à maintenant du fédéral? On a administré le programme, on a payé entièrement l'administration. On a reçu en 1978, 6 700 000 $, en 1979, 6 700 000 $ et en 1980-1981, 8 500 000 $. On n'a reçu actuellement que 21 900 000 $ sur les 35 000 000 $ et on continue à financer le programme au taux actuel d'intérêt. Cela veut dire que c'est une bonne partie maintenant du montant qui vient du gouvernement du Québec pour financer ce programme. Mais ce qu'il n'a pas dit non plus, c'est que les 33 500 000 $ qu'on a négociés avec le gouvernement d'Ottawa, les libéraux avaient essayé de les négocier lors de la coupure de subventions au transport des céréales de l'Ouest canadien vers le Québec, coupures de 6 700 000 $ sur 10 000 000 $ par le gouvernement fédéral pour le transport des céréales vers le Québec.

Le Parti libéral n'avait pas été capable d'aller chercher l'équivalent de la coupure du gouvernement fédéral alors que le gouvernement du Parti québécois est allé chercher l'équivalent de la coupure pendant cinq ans pour aider l'entreposage des céréales. Aujourd'hui, le programme a été utilisé entièrement. Les montants ont été utilisés entièrement. J'ai eu le mandat du Conseil des ministres du Québec de renouveler l'entente si le gouvernement fédéral le veut bien. Nous sommes prêts à renouveler l'entente. On ne peut pas dire qu'on n'a pas d'agrément, qu'on n'est pas aimable, on est prêt à resigner encore une entente si on veut. Mais je ne sais pas s'ils vont vouloir. Nous autres, on veut. On est prêt à signer.

La même chose pour les silos à la ferme. On est prêt à signer l'entente comme avant. Je suis prêt à signer une entente aussi avec le gouvernement fédéral, c'est quelque chose, pour le programme aux chômeurs.

Le Québec paie pour les assistés sociaux, parce que c'est sa responsabilité, les assistés sociaux. On n'a pas dit grand-chose non plus quand le gouvernement fédéral rend l'assurance-chômage plus difficile et nous passe des chômeurs qu'il ne paie plus et qui doivent être payés par l'assistance sociale au Québec. 60 000 000 $ qu'il nous a passés de cette façon, l'an dernier. On dit: Parfait, si vous nous en passez comme ça on ne peut pas payer pour tout On a seulement 50% des taxes qui viennent à Québec. À ce moment, on est d'accord pour payer pour l'assurance chômage, pour le chômage, pour subventionner les agriculteurs qui engagent les chômeurs, mais le gouvernement fédéral devra payer parce que c'est lui qui va épargner l'argent à Ottawa avec l'assurance chômage. De la même façon qu'on est prêt à payer quand il s'agit d'assistance sociale. Si un cultivateur engage un assisté social, il y a une subvention pour l'agriculteur payée entièrement par le gouvernement du Québec. Si le gouvernement fédéral est prêt à faire une entente avec le gouvernement du Québec, j'ai le mandat qui date d'aujourd'hui - c'est une primeur - du Conseil des ministres, cela a été décidé aujourd'hui, d'aller négocier avec le gouvernement fédéral si le gouvernement est prêt à payer sa part pour les chômeurs, c'est à lui que cela revient les chômeurs, en vertu de la Constitution, et il a fait changer la Constitution en 1941 pour l'inclure. Je ne me rappelle pas l'article mais il y a un a) à côté du chiffre. 91-a. Cela a été changé sous Godbout. Godbout a fait une entente avec le fédéral et c'est maintenant de juridiction fédérale. On est prêt à faire une entente par laquelle le gouvernement fédéral va dire: Pour chaque fois que vous allez faire engager un chômeur par un agriculteur, vous allez verser une subvention étant donné que je vais épargner l'argent à l'assurance- chômage, je vais vous transférer l'argent pour que vous payiez l'agriculteur. On est d'accord à 100% pour signer une entente comme celle-là. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le ministre.

Maintenant, concernant la relève. Vous avez remarqué que le député de Beauce-Sud, - je ne lui en veux pas, je suis persuadé qu'il s'est laissé entraîner par son collègue, le député de Brome-Missisquoi - quand il est arrivé à la relève, a parlé en pourcentage. Il n'a pas parlé en chiffres absolus. Mais, quand il a parlé du crédit agricole, avez-vous remarqué qu'il a parlé en pourcentage? Je vais vous dire pourquoi. Je vais vous donner les chiffres absolus. En 1976, dans le crédit à long terme, 1439 prêts, du temps des libéraux. En 1977, 1461. On n'a pas eu le temps de faire les amendements. C'est resté à peu près pareil, mais là, on a fait des amendements au cours de l'année 1978 et vous voyez le résultat tout de suite. En 1978, 2160. En 1979, - nos mesures commencent à faire effet - 3236...

Des voix: Ah!

M. Garon: ...et en 1980, 3423.

Des voix: Oh!

M. Garon: Cela veut dire quoi? En 1976, 1439; en 1980, 3423, deux fois et demie plus. Il ne parlera plus en chiffres absolus. Il va parler en pourcentage, c'est évident. 10% de 1439, cela fait quoi? 143, mais 10% en 1980, quand la base est 3423, cela fait quoi, 10%? Cela fait 342. Alors, il a dit: 10%, 10%, cela n'a pas augmenté. C'est faux! Cela a doublé, quand on dit 10%, c'est resté le même pourcentage. Pourquoi? C'est pour cela que je parle rarement en pourcentage, parce que je me rappelle du temps où on disait que les Chinois faisaient de fausses statistiques. Ils disaient que la production après la révolution chinoise, avait augmenté de 100% en Chine et qu'elle avait augmenté de 10% aux États-Unis. Vous voyez comment c'est fort la Chine. Excepté qu'en Chine, elle avait passé de 100 000 $ à 200 000 $ et aux États-Unis, elle avait peut-être passé de 8 000 000 $ à 9 000 000 $. Les chiffres, il faut faire attention à cela. Il ne faut pas faire n'importe quel pourcentage. Cela peut ne vouloir rien dire, si on ne prend pas la même base, mais, si on regarde, c'est un changement complet.

En 1977, 1114 jeunes s'établissent.

M. Mathieu: Des jeunes de cinquante ans.

M. Garon: Non, non, la mise en valeur, les primes à l'établissement. En 1978, 1052; en 1979, 1377; en 1980, 1437. Voyez-vous? Cela est passé, en 1977, de 1114 à 1437 en 1980, soit une augmentation de 323 cette année-là, si on compare, 323 de plus. Si c'était la moyenne qu'on pouvait garder au cours des années, en disant que la vie d'un agriculteur, c'est environ 30 ou 35 ans, cela veut dire quoi, à ce moment-là? Cela veut dire 10 000 cultivateurs de plus au Québec. Vendredi, je vais donner une conférence de presse sur un sujet intéressant. Je vais avoir l'occasion de souligner... J'ai fait comparer des chiffres de 1976, de 1980 et de 1981 dans différentes régions. Amenez-en des listes de producteurs agricoles. Il y a des régions où cela passe de 600 à 700, d'autres réqions où cela passe de 800 à 937, des chiffres comme cela, une augmentation du nombre de producteurs agricoles, on l'a sur nos listes.

Les productions de producteurs agricoles augmentent au Québec, parce que des gens s'établissent et les chiffres ne trompent pas. Les chiffres sont révélateurs, quand on les regarde. À moins que le monde agricole aime souffrir, s'il avait vraiment pensé que le gouvernement actuel lui nuisait, il n'aurait pas voté pour. Il a dit: On aimerait que vous continuiez dans le même sens, mais, dans le sens de la relève le 50 000 $, le 50 000 $ sans intérêt. J'espère qu'on va pouvoir présenter ce projet de loi à l'automne. C'est mon intention de le présenter à l'automne. Cela va être une mesure vraiment utile. Quand vous dites que vous avez reçu beaucoup d'appels téléphoniques, c'est parce que c'est bon.

Des voix: Ah! Ah!

M. Garon: Autrement, vous n'auriez pas reçu d'appels téléphoniques. Je le sais, les gens du crédit agricole me disent: On reçoit des appels téléphoniques, vous n'avez pas d'idée, M. Garon, pour demander quand cela commence. C'est parce que les gens sont contents. Pourguoi? On s'est posé des questions. Qu'est-ce qui serait bon pour les agriculteurs? Quand le député des Bois-Francs dit qu'une ferme aujourd'hui, cela peut aller jusqu'à 1 000 000 $, c'est vrai qu'une ferme laitière peut aller jusqu'à 1 000 000 $ et on a vu des fermes qui se sont vendues. On a vu surtout cela quand cela s'est vendu à des immigrants européens. Souvent, le prix était indiqué dans le journal. Les gens savent que cela peut valoir jusqu'à 1 000 000 $, mais ce n'est pas la ferme moyenne au Québec, 1 000 000 $. Cela dépend des types de production et un jeune qui s'établit ne peut pas commencer, ne peut pas espérer s'établir en agriculture au même niveau que celui où son père termine sa vie.

II commence. Habituellement, quand vous commencez votre vie, vous n'avez pas le même revenu que quand vous êtes rendu à 40 ou 45 ans, quand vous vous êtes établi.

(21 h 10)

Vous avez de nouvelles productions qui

se développent au Québec, et ce sont des jeunes qui s'établissent. Regardez la production de l'agneau.

Là, on va aider un groupe de jeunes -c'est encore une primeur, je me dépêche de l'annoncer parce que le président du Conseil du trésor va l'annoncer; il est content, ce n'est pas une coupure - à faire venir des brebis de la Nouvelle-Zélande. Il y a une pénurie de brebis au Canada et ces jeunes sont allés en Nouvelle-Zélande, avec des experts, pour sélectionner des brebis de très bonne qualité. S'ils font venir le chargement complet, ils ont un meilleur prix. On va les aider pour ramener le prix au niveau du prix canadien ou du prix québécois - c'est à peu près le même prix - afin de développer la production de brebis qui vont permettre le remplacement d'autres brebis par des croisements et avoir un troupeau de base beaucoup plus développé. Ce sera dans le Bas-Saint-Laurent, dans les Basques ou la Neigette... dans les Basques. C'est un endroit où il va y avoir une reproduction et on va pouvoir commencer à s'approvisionner en brebis.

Le député de Beauce-Sud a raison, quand un jeune arrive, il est enthousiaste, il présente son projet. Je dirais que ce qui est important, quand on voit un jeune qui veut s'établir, c'est son dynamisme, sa personnalité; ce n'est pas l'argent, parce que c'est évident qu'il n'a pas d'argent. Quand on est jeune, on n'a pas d'argent; souvent, quand on est vieux, on n'en a pas non plus. Quand on est jeune, on n'a pas d'argent, mais j'ai rencontré souvent des jeunes qui arrivent avec des projets. Quand ils viennent me voir ou demandent à me rencontrer, souvent, je suis le dernier, ils disent: M. Garon, si vous dites non, c'est fini, l'affaire. Je les regarde comme il faut, il y en a, parfois, qui sont pleins de confiance, pleins d'assurance, prêts à fournir un effort considérable, je vous dis bien franchement que dans le projet, souvent, 75% de la décision, c'est la détermination des gens qui présentent leur projet. S'ils sont prêts à travailler et à faire un effort, c'est ça qui compte beaucoup plus que l'argent, à la condition que le projet ait du bon sens.

C'est pour cela que les 50 000 $ vont jouer un rôle considérable. Ils vont commencer dans des productions nouvelles qui demandent moins de capitalisation. Si un jeune pense à s'établir, à moins d'avoir travaillé un certain nombre d'années sur une ferme, c'est difficile de s'établir immédiatement avec un gros troupeau laitier, ça coûte trop cher. Il y a toutes sortes de productions dans lesquelles on peut s'établir pour commencer et, à un moment donné, développer son capital pour pouvoir agrandir, consolider sa ferme. C'est pour cela que vous voyez les consolidations augmenter considérablement dans les statistiques. C'est normal parce que les fermes, aujourd'hui, sont plus grosses qu'auparavant. Au Québec, les fermes ne sont pas très grandes. Le député de Beauce-Sud a souvent dit que c'était trop gros. Par rapport aux fermes de l'Amérique du Nord, le Québec a des fermes qui sont assez petites, elles ne sont pas grandes comparativement à ailleurs, pas très grandes comparativement à l'Ontario, et toute petites comparativement à l'Ouest. C'est évident que ce n'est pas le même genre d'agriculture. Mais c'est normal, ça fait partie du progrès parce que aujourd'hui, il y a plus de machinerie et on peut avoir un meilleur rendement.

Je dirais que le résultat, au fond, des politiques que le gouvernement a adoptées, on le voit dans les chiffres pour l'année 1980. En 1966, le taux d'autosuffisance au Québec était de 65%; il était baissé à 51,5% en 1976, baisse graduelle sous le Parti libéral; pas seulement sous le Parti libéral, mais principalement sous le Parti libéral. Quand le député de Beauce-Sud dit que, de 1970 à 1976, c'a été le progrès dans l'agriculture, non. Cela été le marasme dans l'agriculture, c'a été véritablement l'âge de pierre de l'agriculture. D'ailleurs, je pense bien que le député de Brome-Missisquoi va rester dans le Parti libéral parce que c'est le seul parti dont il n'a pas, encore fait le tour. Au début, il s'est dit péquiste, après, il est entré dans l'Union Nationale. Je l'avais dit, d'ailleurs, un jour à l'Union Nationale: L'homme qui va vous nuire le plus, c'est cet homme. C'est la même chose pour les libéraux. Vous verrez, dans le milieu agricole, l'homme qui va nuire le plus au Parti libéral, je le dis d'avance, ce sera son député de Brome-Missisquoi parce qu'il défend des intérêts contraires à ceux de l'ensemble des agriculteurs.

Alors le taux d'autosuffisance était baissé sous les libéraux jusqu'à 51,5% en 1976. Mais en 1980, il était remonté à 61,5%. Cela veut dire qu'on produisait 61,5% de ce qu'on mangeait. On prévoit encore l'augmenter au cours des années quatre-vingt-dix. Le document Nourrir le Québec, qui n'est pas un document politique, va montrer les chiffres qu'on pense atteindre.

En plus, pour la première fois sans doute de son histoire, en 1980, le revenu net des agriculteurs du Québec a dépassé celui des producteurs de l'Ontario. Cela veut dire que les agriculteurs ont fait plus de bénéfices au Québec en 1980 qu'en Ontario. Malgré que le prix de la consommation n'a pas été plus élevé au Québec que dans le reste du Canada, au contraire, c'est au Québec où c'est à peu près le meilleur marché. On ne peut pas enlever cela de la réalité. Ce ne sont pas mes statistiques à moi, ce sont les chiffres du fédéral qui nous disaient en décembre dernier que l'Ontario avait un revenu net de 585 000 000 $ et le

Québec de 600 000 000 $. Il y avait donc une augmentation.

Je ne peux pas dire qu'il n'y aura pas de problème. Il y a des difficultés. La production du porc est une difficulté. Mais actuellement, si on regarde l'ensemble du Canada, c'est une situation difficile et il y a eu des efforts de faits par le gouvernement du Ouébec. Je ne dis pas que le gouvernement fédéral n'a rien fait, il a fait quelque chose. Sa loi l'obligeait. Aussi, quand le député de Brome-Missisquoi disait hier que faire des programmes complémentaires... j'ai des petites nouvelles pour lui, c'est ce qu'on a des programmes complémentaires, parce qu'on n'a pas le choix. Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose, mais on n'a pas le choix, parce qu'il faut déduire de la stabilisation que le fédéral paie, la stabilisation que le provincial paie. Si on ne le fait pas, le fédéral ne paiera pas. C'est cela que l'Ontario vient d'apprendre cette année. Moi, je l'avais appris en 1977. À ce moment, il n'y avait pas de précédent, parce qu'il n'y avait pas d'assurance-stabilisation véritablement; cela commençait. La première province qui a été pénalisée, c'est le Québec, en 1977. J'ai agi en conséquence, mais en maintenant qu'il fallait avoir une assurance-stabilisation, des revenus au Québec. Aujourd'hui, on a des résultats. La province qui va s'en tirer le mieux - le prix du porc a augmenté de 8 $ depuis un peu plus de deux semaines - si la période se rétablit et on calcule qu'elle va se rétablir au cours du mois de juillet, le prix va devenir encore plus profitable. Je suis persuadé que parmi toutes les provinces du Canada, celle où les producteurs s'en seront le mieux tirés sera la province de Québec. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de difficulté.

Dans le sirop d'érable, il faut développer des marchés. Nous sommes à travailler au développement des marchés.

Dans le veau de grain, qu'est-ce que vous voulez, en 1978, il ne s'en faisait pas de veau de grain au Québec. Les veaux partaient pour l'Ontario et pour les États-Unis à trois ou quatre jours. Il n'y en avait pas de politique. Aujourd'hui, on est rendu que l'an dernier on a fait à peu près 10 000 veaux qui ont été engraissés au Québec. Cette année, on pense faire entre 30 000 et 40 000 veaux qui vont se rendre à 400, 450 livres au lieu de les vendre aux Américains à 100, 125 livres.

C'est évident que les structures de mise en marché ne sont pas en place, il faut les créer, les structures de mise en marché, à mesure que la production se développe. On ne peut pas me reprocher de ne pas avoir de structures de mise en marché quand on ne produisait même pas de veaux dans le temps des libéraux. Des veaux lourds, ils n'en produisaient pas de veaux lourds. On est en train de développer cette production, la production de veaux lourds. On pense atteindre 100 000 veaux lourds, à un moment donné, au Québec. Il va falloir organiser les structures de mise en marché.

Quand est arrivé le plan de la pomme, les producteurs me disaient hier: II va peut-être falloir penser à une agence de vente dans la pomme. J'aurais aimé que le député de Brome-Missisquoi soit là quand ils m'ont dit cela. Parce que le plus grand ennemi de l'agence de vente dans les oeufs a été lui. Ils les a poursuivis pendant quatre ou cinq ans, sans arrêt, ils les a traînés devant tous les tribunaux qu'il y avait au Canada, parce qu'ils avaient fait une agence de vente. Les gars de la pomme pensent faire une agence de vente. J'aurais aimé devant les producteurs dans le fond de la salle, qu'il soit là quand ils m'ont dit cela. Ils savent une chose ces producteurs, quand ils ont des difficultés et quand ils veulent s'organiser pour pouvoir néqocier leurs prix, ils savent qu'ils vont trouver un ami dans le gouvernement actuel. Pourquoi? Parce que aujourd'hui, combien y a-t-il d'acheteurs au Québec? Posez-vous la question, combien il y a d'acheteurs? Il y a des acheteurs, il y a six ou sept grands magasins à succursales au Québec, c'est cela les acheteurs au Québec. Quand vous avez compté Steinberg, Provigo, Métro-Richelieu, la Fédération des magasins Co-op, les Épiciers-Unis et guelgues autres, ce sont les acheteurs. Vous voudriez que les cultivateurs soient 1000, 2000 à se chicaner entre eux pour établir les prix qu'ils vont vendre. (21 h 20)

Nous, on dit: Non. Les producteurs ont le droit de se regrouper, quoi que fassent les économistes farfelus d'Ottawa, qui ne connaissent rien au secteur agricole. Les aqriculteurs ont le droit de se regrouper à 1000 ou 2000 pour dire: On va négocier face aux entreprises à succursales et on va établir des prix, parce qu'autrement ils vont se faire manger tout rond, en 1981, alors qu'il y a de grandes entreprises à succursales en face d'eux. Le gouvernement actuel n'est pas fâché, au contraire, et les cultivateurs savent que, quand ils se regroupent pour négocier des prix avec les acheteurs, on aime ça; oui, on aime que le cultivateur soit sur un pied d'égalité avec celui qui achète ses produits...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: ... si nos producteurs ne se regroupent pas, ils ne pourront pas y arriver.

M. le Président, je vais terminer en disant un mot "dans le poisson", parce que le député de Beauce-Sud m'a dit que je n'avais pas parlé "dans le poisson".

Dans le poisson - on vient d'avoir des

élections, le député de Duplessis est ici, à côté de moi, le député de Gaspé est un peu plus loin, ainsi que la députée des Îles-de-la-Madeleine et le député d'Ungava, je peux vous dire que ce qu'il y a de mieux à voir, c'est la confiance du territoire maritime dans le gouvernement actuel. Cette confiance, on va continuer à la mériter parce qu'on vient de rétablir à Grande-Rivière un parc industriel qui a été vide pendant treize ans. En 1968, les libéraux, par une entente fédérale-provinciale, ont fait un parc industriel à Grande-Rivière; pas une usine pendant treize ans, le parc est resté tout seul. D'un coup sec...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: ... on annonce deux constructions et je vais avoir l'occasion de lever deux pelletées de terre au cours des prochains jours ou des prochaines semaines, je vais y aller une fois par usine.

Une voix: Deux pelletées d'eau!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, s'il vous plaît:

M. Garon: Je termine, M. le Président. Maintenant, un joyau de la flotte québécoise dans le domaine des pêches, le Christina Logos, vient d'appareiller pour les côtes du Labrador, pour la Terre de Baffin, pour aller y chercher de la crevette. Jamais auparavant des pêcheurs québécois n'étaient allés y pêcher. C'étaient les étrangers, les Russes et les Japonais, qui péchaient là. On a maintenant deux permis, ils sont utilisés, et on pêche sur les côtes du Labrador et à la Terre de Baffin. Si votre amitié avec Roméo Le Blanc à Ottawa permet qu'on ait plus de permis pour le Québec et qu'on continue à pêcher sur ces côtes, on va les utiliser pour pêcher dans l'Atlantique du nord.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. M. Charron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je m'excuse auprès de Mme la députée. Je voudrais proposer, puisqu'il y a trois avis d'intervention s'adressant au même ministre, si c'est possible, que les trois intervenants puissent enchaîner ce qu'ils ont à dire et que le ministre leur donne une réponse commune.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a deux interventions.

M. Charron: C'est vrai, puisqu'un député s'est désisté.

Le Vice-Président (M. Jolivet):

D'accord, ce sera Mme la députée de

Jacques-Cartier ensuite le député de

Gatineau et, finalement M. le ministre. Mme la députée.

Education Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Comme on dit en anglais, "it is a hard act to follow", celui du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

J'aimerais franchement vous dire que j'ai assisté à plusieurs commissions parlementaires et j'ai été un peu déçue parce que j'ai trouvé que les questions y étaient abordées d'une manière très superficielle. L'approche globale et théorique du gouvernement n'a pas réussi à répondre à des questions réelles avec lesquelles le milieu local est au prise tous les jours.

Mr. Chairman, I first want to say that I have been disappointed in the manner in which the government has approached the budget cuts because my overall conclusion is that the theoretical and global way in which the government has approached the budget is really almost indifferent to the reality with which our local institutions, our local school boards and our local communities are struggling to meet the needs of the students that they are trying to serve. For many hours on end, I heard long theoretical discussions about the quality of education, the quality of our teachers, the need for all students to be accessible to education, the need for improved second language learning, the importance of a program to "aider les milieux défavorisés", to reinforce the importance of services to students, a personalized climate in the schools and so on, all of which I agree with, all of which anybody in education agrees with. But when it comes to the problems that the local milieux are facing, either the Minister is naïve or the government is unaware of the realities of the local milieux, because to every problem, to every budget cut, the answer is "arrangez-vous", organize your priorities. You have flexibility and autonomy, get your act together. You have the wherewithal to serve the community. It is only a matter of local decisions.

Mr. Chairman, that is not the way it is. I want to talk about three areas which are of tremendous importance to me, having been involved very much in school boards and the problems that education has been facing in the local milieux for a number of

years. I want to talk about three thinqs which were discussed only superficially in the parliamentary commissions, and when they were discussed, the real nitty-gritty of the problems was not addressed at all.

The first area concerns the budgetary rules for school boards. Now, the budgetary rules may not sound as though they are very important but, in fact, they are absolutely key to the possibilities of school boards to meet the real needs of their students. The government has introduced a new kind of regime with respect to the financing of school boards last year, and again this year. It is a closed budget. It is a budget which, for the first time, allows the government to know what the expenses of the government will be. That is a step forward and I think in theory, it is good because the 500 000 000 $ hole that was discovered last February was not the fault of the school boards. It was because there was a lag in the realization by the government of amounts of money that were being spent in education in an open budget system. Now, we have a closed budget.

From the government's point of view, they know the amount of money that is going to be spent. But the problem is, as it appears to me, that the government sees this closed budgetary system as a panacea. They are saying: "Okay, boards - I am using an analogy to make things clear - in the past, you have had 1 $ which was compartmentalized according to government rules to be used for specific purposes, now, you have 0,75 $; do what you want with it." And the government is sayinq that is decentralization, that is autonomy and flexibility. I think it is a false concept and the closed budget is no panacea as far as the people at the local receiving end are concerned. (21 h 30)

First of all, the boards must pay the teachers the salaries that are agreed to in the provincial agreements. The problem is that there are all kinds of difficulties for school boards and they vary from school board to school board. Some of them cannot meet the conditions of the agreements that were agreed to at the provincial level in order to provide enough teachers to fulfil the needs of the contract. The indexation, from year to year, the aging factor that is applied and the changing profile of the school board in relation to how many primary, how many secondary, how many special education children. These things change every year so there are a lot of problems with the base. So what I am saying is that regarding the base amounts that are being provided in those budgets, there are a lot of questions that need to be asked and a lot of ajustments that need to be made.

The second problem in the budgetary rules is the commitments that have been made to the teachers in terms of the security of employment. The government made commitments in the provincial negotiations for the security of employment, but because the government has admitted that they cannot afford those commitments, a large proportion of these are being passed on to the school boards. School boards are being reguired to use surplus teachers for substitution. Now, in some school boards, it works, the 70% of the surplus cost are realistic, but in other school boards, it is not. It depends on the area of the school board, the distance between schools, the different languages that are being tauqht and so on.

What I am saying is that theoretically, the theoretical global approach of the government does not make sense when it comes to the local application of those reguirements. What does that mean? It means that at the local school board level, the school boards are left with three choices since they have to pay the teachers, they have to pay the costs represented in the contract. So, their first choice, by necessity, is the non-teaching personnel. What can the school board cut? They can cut pedagogical development, people, people that are developing programs to respond to the new "régime pédagogique" of the government; they can cut liaison officers and parent advisers that are trying to animate and relate to parents, so the parents can be involved according to bill 71. They can cut psychologists, they can cut quidance people who are trying to advise teachers so that they can integrate...

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Madam, I am sorry, your time is already finished.

Mme Dougherty: My time is up?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Only one minute more, please.

Mme Dougherty: OK, all right. They can cut the very services that are the priority of the government. They can raise taxation which is limited, because of bill 57, and requires a referendum now, which is very difficult to implement, or they can raise fees to parents, a sort of "ticket modérateur" in education.

What I am saying is that the theoretical global approach to the budget cuts in education on the part of the government does not match the reality and, in fact, undermines the very priorities that the government is promoting in terms of education.

Mr. Chairman, I understand that I am over my time but what I would like to

suggest is in relation particularly to the teachers contract which has been agreed to and which the government itself has touted as the biggest problem in the cost of education. I would like to suggest to the government that it consider a cost- benefit study, on the value of the educational dollar that is being spent in Québec in relation to other provinces, because I think we are way out of line. If the biggest problem is there and if the biggest cost is there, I would suggest to the government that we undertake a cost-benefit study of the value of our educational dollar and see where it is going. I think it will give us some clues as to where we should go in the future so that we can get the best value for our dollar in education. Thank you, Mr. Chairman.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. La semaine dernière, j'avais guestionné le ministre de l'Éducation au sujet de certaines nominations au sein du conseil d'administration du cégep de l'Outaouais. Si je choisis ce soir de discuter de ce sujet, c'est que la situation que j'ai l'intention de décrire s'est produite après l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. Compte tenu de la fin des travaux de la session demain, il sera probablement impossible de guestionner le ministre de l'Éducation au cours de la période de questions normale. J'aimerais obtenir les informations que, sans doute, le ministre me fournira ou voudra bien me fournir immédiatement après mon intervention.

La semaine dernière, le ministre avait allégué les velléités de ses responsabilités ministérielles pour expliguer un retard de quatre mois à confirmer la nomination de trois parents anglophones au sein du conseil d'administration, qui avaient été élus à une réunion régulière des parents du cégep de l'Outaouais le 21 janvier dernier. Il avait également reconnu, je pense, que pendant ces quatre mois où, nous disait-il, il n'avait pas eu connaissance de l'élection des trois parents anglophones il avait quand même procédé à la nomination de six représentants de groupes sociaux et économiques à ce même conseil d'administration. Or, quoi qu'il en soit, le ministre nous confirmait mercredi dernier que les trois personnes en question seraient confirmées dans leurs tâches, l'avaient même été la veille et, effectivement, ces trois personnes ont siégé et ont pu voter lors d'une assemblée que le conseil a tenue mercredi dernier.

Or, à cette réunion de mercredi dernier, le conseil d'administration du cégep a voté une résolution par douze voix contre quatre pour donner raison, et enfin donner raison, tant aux étudiants qu'aux parents de ces étudiants anglophones du campus Heritage, campus anglophone du cégep de l'Outaouais, qui réclament depuis fort longtemps leur autonomie. En effet, le conseil d'administration, par un vote de douze contre quatre, confirmait son intention de voir le campus Heritage relever désormais du collège régional Champlain. C'était l'essence de la résolution. Or, les informations qui me sont parvenues hier sont à savoir que le ministre aurait l'intention, s'il n'en a pas déjà décidé, de surseoir à l'exécution de cette résolution jusqu'au 1er janvier 1981. Je dis que ce sont les informations que j'ai. J'espère que le ministre les niera et me dira qu'au contraire le transfert de ce campus Heritage du cégep de l'Outaouais au collège régional Champlain s'effectuera à temps pour la rentrée, en septembre prochain. (21 h 40)

Étant donné le règlement de l'Assemblée nationale, M. le Président, si le ministre n'est pas en mesure de nier cette information, je voudrais qu'il nous explique alors quels sont les motifs qui auraient pu ou qui pourraient l'inciter à ne pas confirmer, à ne pas permettre l'exécution de cette résolution. Il m'apparaît tout à fait dangereux, comme précédent, que le ministre, à la suite d'un vote de 12 contre 4, à la suite de représentations de je ne sais trop qui... Mais, me dit-on, il est possible que certaines des personnes qui auraient contacté le ministre pour le convaincre de ne pas laisser la résolution être entérinée dans les faits seraient précisément deux des membres du conseil d'administration qui ont voté contre la résolution, mercredi dernier. Je sais également, parce que les journaux en ont parlé, que la Société nationale des Québécois de l'Outaouais s'est opposée, avant même que le vote au conseil d'administration ne soit pris, à ce que le campus Héritage ne relève plus du cégep de l'Outaouais. Elle avait même indiqué qu'il serait souhaitable et peut-être même essentiel à leurs yeux qu'on fasse une étude de l'impact socioculturel, de l'impact linguistique sur la communauté de l'Outaouais avant qu'on ne procède à ce transfert du campus Héritage.

C'est là ma question, M. le Président, demander au ministre de nier, j'espère, cette information, de nous dire qu'effectivement la décision prise par le conseil d'administration du cégep de l'Outaouais, en bonne et due forme, à l'assemblée de mercredi dernier, sera confirmée par son ministère et sinon, de tenter de nous expliquer quels sont les motifs profonds qui l'amènent à ne pas donner suite à cette résolution, et à la demande de qui, pour quel motif, etc.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le

ministre.

M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier les deux députés de leurs interventions.

Tout en écoutant tout au long le discours de la députée de Jacques-Cartier, j'ai eu l'impression qu'elle était préoccupée beaucoup plus par l'aspect administratif de l'enseignement que par la mission éducative proprement dite. Lorsqu'elle se réfère à toutes les déclarations que nous avons faites lors de l'étude des crédits sur la qualité de l'enseignement - et Dieu sait s'il y a plusieurs éléments, plusieurs thèmes qualitatifs dont nous avons parlé et dont il importe de parler comme, par exemple, le développement de l'enfant, comme par exemple l'environnement éducatif, comme par exemple les régimes pédagogiques, comme par exemple l'évaluation, comme par exemple la personnalisation de l'éducation, le suivi, la récupération des élèves - j'ai l'impression que ce sont des aspects qualitatifs qui constituent la mission même de l'enseignement.

Maybe the Member for Jacques-Cartier finds this approach theoretical or global, but in our opinion, it is at the essence, at the proper essence of the mission of education in any country.

Son approche est administrative, parce que, comme beaucoup de ses collèques, elle ne voit dans le problème qu'une question de personnel ou de dollars. Et même lorsqu'elle parle des coupures, elle a omis de mentionner le contexte général économique dans lequel nous sommes, où il s'agit de combler un écart malheureusement trop grand et qui s'accroît entre le niveau incompressible des dépenses et le niveau des revenus. C'est à cause de cette donnée fondamentale que, dans l'éducation comme dans les autres secteurs, nous sommes obligés d'effectuer un ralentissement de croissance ou même parfois des coupures, afin que ce fossé soit comblé et afin que notre société apprenne à vivre davantage avec les moyens que lui offre la situation.

Je pense aussi, M. le Président, qu'on ne réglera pas les problèmes en éducation uniquement par des additions de sommes ou par des additions de personnel. Je ne pense pas que le progrès ou que le succès de l'éducation soit un corollaire obligé de l'abondance des ressources. Je continue à penser, au contraire, que le progrès de l'éducation sera bien mieux assuré par une meilleure conception du rôle de l'éducation, de la mission propre de l'enseignant, de la mission propre de tous les personnels qui gravitent autour de l'enfant, une meilleure responsabilisation des parents et une meilleure concertation entre tous les agents de l'éducation. Ensuite, on viendra demander des dollars. Dans cette évaluation coûts-bénéfices que demandait la députée de Jacques-Cartier, il faudra tenir compte de ces facteurs qualitatifs, car nous sommes justement dans la mission éducative qui est centrée sur le développement de l'enfant.

La députée de Jacques-Cartier a touché deux sujets, en particulier, celui des règles budgétaires. Elle affirme que ces rèqles budgétaires non seulement sont imparfaites, mais qu'elles sont nocives jusqu'à un certain point. De toute façon, on pourrait, bien sûr, discuter du bien-fondé de tel ou tel élément des règles budgétaires. Mais ce que je sais, en tout cas, c'est que ces rèqles budqétaires nouvelles sont de loin supérieures a celles que nous avions antérieurement et qui sont à la racine de cet écart qui a été signalé à plusieurs reprises dans cette Chambre.

En appliquant ces règles budgétaires nouvelles, nous n'avons fait que suivre les suggestions du Vérificateur général du Québec. Il convenait de le faire puisque nous savons maintenant qu'il n'y aura plus moyen d'inscrire des élèves à deux ou a trois écoles différentes. Nous savons qu'avec ces nouvelles règles, nous pourrons maintenant calculer le taux de vieillissement du personnel, nous saurons où vont les dollars, ce qui va dans l'enveloppe de base, ce qui va dans les allocations supplémentaires. Je ne dis pas, encore une fois, que le système est parfait, mais, de toute façon, il est de loin supérieur à celui que nous avions antérieurement. Les commissions scolaires elles-mêmes sont prêtes à l'admettre; dans les consultations que nous avons avec elles, en tout cas, elles l'admettent. Malgré les quelques imperfections qui restent, avec les consultations ultérieures, nous pourrons les raffiner et les améliorer.

Je pense aussi, M. le Président, que quelle que soit la valeur des rèqles budqétaires, cela n'empêchera jamais la nécessité d'une coopération, d'une harmonisation au niveau local et au niveau régional entre les commissions scolaires et les syndicats, et aussi à l'intérieur de la commission scolaire, au niveau de l'école, entre les divers éléments qui composent l'équipe école. C'est sur ces points qu'il convient de mettre de plus en plus l'accent au cours des prochaines années.

Le second reproche de la députée de Jacques-Cartier, c'est de faire porter les conséquences des conventions collectives que nous avons signées au chapitre de la sécurité d'emploi sur les commissions scolaires. Elle accuse, en somme, le gouvernement de refiler aux commissions scolaires le poids ou l'impact des conventions collectives qui ont assuré, depuis 1976, aux enseignants et au personnel non enseignant, une sécurité d'emploi. Je m'élève en faux contre cette affirmation. Lorsque la députée de Jacques-

Cartier dit, par exemple, que l'effet de la sécurité d'emploi est d'amener les commissions scolaires à couper un nombre exagéré de postes chez le personnel non enseignant, je ne pense pas que cela soit parfaitement conforme aux faits.

Il importe de répéter, au départ, que 87% du budget de l'enseignement est affecté aux salaires, que ce soient les salaires du personnel enseignant, du personnel non enseignant ou du personnel de soutien qui ont signé les conventions avec le gouvernement. Donc, il reste une marge de manoeuvre très faible. Il faut d'abord se rappeler cette contrainte que nous avons. Mais il faut aussi se rappeler que le personnel non enseignant a lui-même signé ses conventions collectives et qu'un bon nombre de personnel non enseignant jouit également de la sécurité d'emploi. Il importe de le rappeler.

Je disais aussi, lors de la commission parlementaire pour l'étude des crédits, que nous avons déjà rencontré le président de la Centrale des enseignants, que nous espérons trouver avec lui des avenues, des voies afin que le personnel mis en disponibilité, personnel enseignant ou non enseignant, puisse être affecté à des tâches qui pourront alléger, dans la plus grande mesure possible, les compressions ou le ralentissement de croissance que nous connaissons actuellement. J'espère bien en arriver à un accord avec la Centrale des enseignants du Québec, et il est entendu que des négociations semblables devront ensuite avoir lieu entre les commissions scolaires et les niveaux locaux de ces employés. Des messages devront être envoyés aussi du ministère aux commissions scolaires et de la Centrale des enseignants du Québec aux syndicats locaux. (21 h 50)

C'est ce que je veux dire en disant que l'époque que nous vivons sera de plus en plus, à cause de l'austérité, celle de la concertation autour d'objectifs communs que nous partageons et que nous inspire cette passion commune de l'enfant qui devrait être la marque de fabrique de tous ceux qui travaillent au sein de l'école.

Il est vrai que, dans le passé, une bonne partie du personnel enseignant affecté par la sécurité d'emploi était dirigé vers la suppléance, mais la députée de Jacques-Cartier sait aussi bien que moi que certaines commissions scolaires, au lieu de recourir au personnel mis en disponibilité, recouraient trop facilement et trop souvent à d'autre personnel qu'ils allaient engager sans raison véritablement justifiable. En période d'austérité, nous devrions faire l'impossible pour que la suppléance soit assurée au maximum par le personnel mis en disponibilité.

Dans nos règles budgétaires, nous avons introduit des mécanismes incitatifs à cet effet. Nous savons, cependant, que la suppléance, même si elle est exercée surtout par des enseignants mis en disponibilité, ne réussira pas à éponger le total de ces enseignants mis en disponibilité. C'est la raison pour laguelle il nous faut trouver d'autres voies, avenues, pistes que nous sommes en train d'explorer.

Je pense donc que le tableau, loin d'être aussi sombre que le décrit la députée de Jacques-Cartier, malgré les contraintes et peut-être à cause même des contraintes, contribuera à solliciter, à stimuler dans le monde de l'enseignement des qualités nouvelles qui, appliguées aux problèmes, nous permettront - je l'espère, en tout cas - de trouver des solutions. Il deviendra alors évident que les problèmes ne se règlent pas toujours par une injection nouvelle de ressources ou par une injection nouvelle de personnel, mais par une rationalisation et par une meilleure conscience de ses responsabilités dans le domaine de l'éducation.

Maintenant, j'en viens à la question sur le campus Héritage. Effectivement, j'ai rencontré à mes bureaux, au mois de février, une délégation du cégep de l'Outaouais qui comprenait des membres du conseil d'administration, du syndicat des enseignants et du comité d'école ou, du moins, d'une association de parents concernés. Après la longue conversation que nous avons tenue ensemble, où ils m'exprimaient que leur volonté commune, majoritairement commune en tout cas, était à l'effet d'en arriver à une séparation des deux campus, je me suis rendu en principe à leur raison, ajoutant cependant qu'ils devraient, dans un proche avenir, me convaincre davantage de la nécessité de cette scission en particulier, qu'ils devraient étudier les implications pédagogigues, culturelles, linguistiques, financières du changement qu'ils proposaient.

Je leur avais dit aussi qu'étant en principe favorable à ce changement je prendrais les contacts, je prendrais les mesures nécessaires pour amorcer le processus. C'est ce que j'ai fait dans une lettre que j'écrivais aux autorités du collège Champlain, je leur faisais part de la résolution du cégep de l'Outaouais et je leur demandais leur réaction. Le conseil d'administration du cégep Champlain m'a répondu qu'en principe lui aussi était d'accord pour accepter ce nouveau campus au sein de son collège, tout en me disant cependant que cette insertion pouvait causer des problèmes qui s'ajoutaient à ceux que vivait déjà le cégep Champlain du fait qu'il possède déjà trois campus, un à Lennoxville, un autre à Québec, dans la ville de Québec, ici même, et évidemment le plus gros sur la rive sud.

Plus on ajoute de campus à un cégep, plus on complique l'administration. Par exemple, quelle sera la représentation des

étudiants à ce conseil d'administration? Quelle sera la représentation des agents socio-économiques de chacune des régions où se situe le campus? On pourrait mentionner plusieurs autres exemples aussi.

Dans sa réponse, le directeur me faisait savoir qu'il était prêt lui aussi en principe à accepter cette addition, mais à condition que, par un amendement à la loi ou autrement, on puisse régler ce problème de représentation en particulier et les autres problèmes que pouvait causer l'addition d'un autre campus. En même temps, il me disait que, si nous donnions suite à notre résolution, il faudrait également augmenter d'une façon sensible le budget du collège Champlain non seulement en regard du nombre d'élèves concernés, mais simplement pour que le nouveau campus jouisse de ressources équivalentes à celles dont jouissaient déjà les trois autres campus, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Donc, la direction du cégep Champlain me posait deux conditions. Par ailleurs, la condition que je posais moi-même, c'est-à-dire celle d'une étude plus exhaustive des implications pédagogiques, financières, linguistiques, culturelles au conseil d'administration du cégep de l'Outaouais n'a pas encore été remplie.

Cependant, je répète au député de Gatineau, que je suis encore en principe favorable à cette insertion du campus Héritage au Collège Champlain, mais je lui dis cependant qu'il nous faudra trouver des moyens de satisfaire aux deux conditions posées par le collège régional Champlain et, en période d'austérité financière, si cette addition implique une augmentation de budget de quelques centaines de milliers de dollars, il faudra y penser. Aussi, j'attends que la deuxième condition que j'ai moi-même posée au conseil d'administration du cégep de l'Outaouais soit également remplie.

De toute façon, le processus est amorcé. Dès que les deux conditions dont je viens de parler seront remplies, il me fera plaisir de mettre le point final à cette question et de procéder, d'une part, à cette séparation dans la région de Hull et, d'autre part, à cette addition pour le cégep régional Champlain.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Gatineau, encore une fois.

Industrie, Commerce, Tourisme M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président, ce ne sera pas sur le même sujet, ce sera à l'intention du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Je lui dis tout de suite que s'il y a un reproche à adresser à quelqu'un, ce n'est pas à lui, à titre de ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, mais bien à son collègue du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en ce qui a trait à la renégotiation de l'entente fédérale-provinciale sur le développement touristique.

Depuis mars 1980, les propriétaires du projet du mont Saint-Marie, dans le comté de Gatineau, ont saisi les divers ministères du gouvernement du Québec, aussi bien que ceux qui sont impliqués au niveau fédéral, d'un projet d'investissement de 57 000 000 $, qui viserait à venir compléter des installations et des équipements qui sont déjà en place au mont Sainte-Marie et qui ont nécessité jusqu'à maintenant des investissements privés, sans aucune aide financière de la part d'aucun gouvernement, de plus de 20 000 000 $ et qui ont créé au moins 250 emplois permanents nouveaux à ce jour.

Ces investissements proposés de 57 000 000 $ viendraient donc terminer seulement la première phase de l'ensemble du projet, en venant ajouter au centre de congrès, à l'hôtel, aux unités de condominium déjà construites, 2500 autres unités d'hébergement, des espaces commerciaux, qui viendraient ajouter entre 400 et 450 nouveaux emplois permanents dans une localité de cette région de la Haute-Gatineau où le taux de chômage atteint, en hiver, les 50%, M. le Président. C'est donc dire que c'est non seulement toute la population de la région de la Haute-Gatineau qui est touchée, mais l'ensemble de l'Outaouais. (22 heures)

Depuis mars 1980, l'Office de planification et de développement du Québec, l'OPDQ, a donné son accord de principe. Le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a également donné son accord de principe. Je vous dirai, entre parenthèses, M. le Président, que si je m'adresse au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ce soir, c'est simplement parce que le règlement de l'Assemblée nationale exige qu'on soulève les guestions à partir des éléments et des programmes du budget et c'est au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qu'on retrouve cet élément.

Donc, l'OPDQ, le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, la Société d'aménagement de l'Outaouais, qui est, en fait, un des principaux promoteurs de la réalisation du projet, le conseil de comté et la municipalité de Lac-Sainte-Marie ont tous donné leur approbation, ont tous promis leur concours, leur collaboration pour faciliter le plus possible, le parachèvement de ce projet.

Du côté du fédéral, l'Office canadien du tourisme et le ministère de l'Expansion économique régionale ont également donné par écrit leur approbation à ce projet. D'ailleurs, tous reconnaissent qu'au moment

où on se parle, le projet de 57 000 000 $, d'investissements du mont Sainte-Marie est le plus important projet touristique de tout le Québec qui est prêt à démarrer, et qui est prêt à démarrer depuis mars 1980. Or, M. le Président, la question qu'on peut se poser, c'est: Pourquoi on ne marche pas? La raison et la seule raison, M. le Président, c'est que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'a pas encore trouvé le temps de donner son approbation au projet et d'entreprendre les négociations avec le ministère de l'Expansion économique régionale du gouvernement fédéral pour ajouter à l'entente fédérale-provinciale sur le développement touristique qui prévoit déjà des sommes de 76 000 000 $. D'ailleurs, il reste une certaine réserve au fonds, réserve qui pourrait - le gouvernement fédéral y consentirait - servir dès maintenant à faire démarrer le projet. La négociation n'est pas entreprise encore avec le fédéral, malgré le fait que le fédéral a déjà indiqué être prêt à consacrer 7 800 000 $ à ajouter à l'entente spécifiquement pour le développement de ce qu'on appelle les stations touristiques quatre saisons, c'est-à-dire des endroits comme le Mont-Tremblant, le Mont-Sainte-Anne et, bien sûr, le mont Sainte-Marie, qui ont un éventail de services à offrir à la population, de sorte que ces installations servent douze mois par année. Le fédéral est prêt à ajouter 7 800 000 $. On sait que sa contribution à ces programmes est de 60%. Ce sont quelque 13 000 000 $ dont pourrait disposer le gouvernement du Québec pour aider non seulement les promoteurs du développement au mont Sainte-Marie, mais d'autres projets de stations touristiques quatre saisons au Québec.

Le but de mon intervention, M. le Président, aurait été, à la période des questions, de demander au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pourquoi cela ne débloque pas. Il y a urgence. Il y a urgence dans le sens que les actionnaires, les investisseurs de ce projet, ceux qui ont déjà investi 20 000 000 $, créé 250 emplois permanents à mont Sainte-Marie, sont des Suisses, des gens de Zurich, qui oeuvrent non seulement dans tout le Canada, mais un peu partout dans le monde. Ils ont également un projet dans le sud de l'Ontario qui n'est pas encore amorcé. Les actionnaires doivent se réunir au mois de juin, au cours des deux prochaines semaines, pour décider de leurs investissements des trois prochaines années.

Or, de la part du gouvernement du Québec, malgré les télégrammes répétés qu'on a fait parvenir au premier ministre, il n'a même pas daigné en accuser réception, malgré des rencontres qui, il y a dix jours encore, avaient lieu avec le chef de cabinet du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, malgré que tous reconnaissent, je le répète, l'OPDQ, le ministère de l'Industrie et du Commerce, la Société d'aménagement, qu'il s'agit là du plus important projet de station touristique au Québec qui soit prêt à démarrer, malgré le fait qu'on ait raté deux saisons de construction, celle de 1980 et celle de 1981. Ces gens-là n'ont encore eu aucun témoignage du gouvernement, de façon officielle, pour les encourager à continuer d'investir chez nous, au Québec, pour faire travailler les gens de chez nous.

Non seulement on n'encourage pas ces personnes, mais on les décourage en leur faisant attendre pendant plus d'un an des décisions, des accords de principe - en tout cas, l'Ontario l'a clairement démontré - que tout gouvernement responsable devrait être avide de donner. Je le répète, le but de mon intervention est de sensibiliser le ministre de l'Industrie et du Commerce et de lui demander surtout de faire pression auprès de son collègue du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour qu'il respecte l'engagement que son chef de cabinet a pris jeudi dernier, lors d'une rencontre avec les autorités municipales aussi bien qu'avec les promoteurs du projet à savoir qu'il rendrait une décision avant le 19 juin, c'est-à-dire avant la fin prévue de cette session.

Il est important que cette décision, que la volonté du gouvernement de contribuer à ce projet, soit exprimée clairement, dans des textes écrits, de façon que les actionnaires de cette compagnie soient rassurés et sachent qu'ils pourront compter sur la collaboration du gouvernement du Québec pour que ces investissements ne nous échappent pas au profit de l'Ontario. Je le répète, il s'agit là du plus important projet que le Québec ait présentement et qui est prêt à démarrer.

J'insiste à nouveau pour que le ministre de l'Industrie et du Commerce fasse que le gouvernement du Québec soit conséquent avec la promesse qu'on retrouvait dans le discours inaugural du premier ministre que le gouvernement axerait son action sur le développement économique. Voici là une occasion excellente de faire une bonne affaire, de créer 400 ou 450 nouveaux emplois dans une région qui en a grandement besoin, de le faire, bien sûr, avec une participation financière, mais une participation financière dont le gouvernement fédéral paiera 60%.

J'indiquerai, à l'intention de ceux qui ne le sauraient pas, qu'à ce jour ces investissements privés de plus de 20 000 000 $, qui ont été faits sur place, qui indiquent bien le sérieux et la bonne volonté de ces promoteurs, tout cela n'a nécessité que la construction d'une route d'accès au gouvernement du Québec. C'est d'ailleurs le gouvernement libéral antérieur qui avait fait confiance à ces gens et qui avait consenti à y construire une route d'accès au coût de 3 000 000 $. Le

gouvernement, le ministre de l'Industrie et du Commerce et ses collègues du cabinet, le premier ministre surtout ont là une occasion rêvée de donner un vrai sens à cette phrase qu'on retrouvait dans le discours inaugural concernant le développement économique, surtout dans les régions. J'ose espérer que cette demande que je formule ce soir, dans l'intérêt et au nom des citoyens de mon comté, ne recevra pas la réponse qu'on a malheureusement l'habitude de recevoir, comme celle que j'ai reçue du ministre de l'Éducation tantôt. J'espère que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme s'engagera à tâcher par tous les moyens à faire en sorte que, d'ici la fin de juin, on ait une décision favorable dans ce dossier. (22 h 10)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je suis heureux de l'intervention du député de Gatineau et je le remercie d'ailleurs de s'occuper de ce dossier particulier dans son comté puisque cela me donne l'occasion de répondre un peu à ses questions. Comme il l'a si bien noté en fait, le dossier particulier du mont Sainte-Marie relève de la juridiction de mon collègue, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, mais, quand même, puisque le député de Gatineau a parlé de l'entente-cadre auxiliaire fédérale-provinciale sur le tourisme, cela me permet, en lui répondant, de faire un peu le tour du projet et du dossier, qui nous intéresse de façon particulière.

Le député de Gatineau sait certainement que, depuis quelques années, le gouvernement du Québec s'est intéressé d'une façon toute particulière au développement de l'économie québécoise, des petites et des moyennes entreprises et aussi de l'industrie touristique. Pour nous, l'industrie touristique est une industrie souverainement importante dans le développement économique, dans la création d'emplois, puisque avec les sommes d'argent investies, c'est à peu près là qu'on peut créer le plus d'emplois le plus rapidement possible pour les hommes et les femmes du Québec. Le dossier que le député de Gatineau soulève dans son comté est, à juste raison, il l'a noté lui-même, un des projets touristiques les plus importants que nous ayons eus au Québec. On nous parle d'une somme d'argent de 20 000 000 $ déjà investis par des capitaux privés. Il nous reste encore certainement 80 000 000 $ et peut-être plus à investir, lorsque tout le projet sera terminé.

Cela veut dire que, pour l'économie touristique du comté de Gatineau et de la région de l'Outaouais en particulier, c'est très important. J'assure le député de Gatineau de toute mon attention dans ce dossier puisque le mont Sainte-Marie est peut-être un projet idéal parmi tous les projets qui ont été soumis jusqu'à maintenant au gouvernement du Québec et il pourrait se qualifier facilement selon la loi 37 sur le développement touristique qui a été présentée et adooptée sous mon prédécesseur, le député de Saint-Maurice, aujourd'hui ministre de l'Énergie et des Ressources. C'est un important projet touristique. C'est un important projet de ski. Mais ce qu'il est intéressant de noter, c'est que ce projet pourra se renouveler à longueur d'année et procurer de l'emploi aux citoyens de la région de l'Outaouais pendant douze mois.

Ce n'est pas tout simplement un projet de ski comme on en voit quelquefois ailleurs au Québec, c'est un projet qui pourra attirer des congrès, qui pourra attirer des gens pour jouer au golf, prendre guelgues semaines de vacances, aller à la pêche dans la région ou, finalement, pendant l'hiver, faire du ski ou même tenir d'autres congrès. M. le Président, nous nous en occupons activement et je dois même dire au député de Gatineau que, déjà, cette semaine, j'ai rencontré personnellement le ministre d'État aux petites et moyennes entreprises et au tourisme du gouvernement fédéral, le député fédéral de Charlevoix, et que nous avons déjà fixé une rencontre pour les semaines qui viennent afin de faire le tour, lui et moi, de tous les dossiers qui regardent le développement touristique. Bien sûr, nous discuterons aussi de ce dossier particulier du mont Sainte-Marie.

Concernant, M. le Président, l'entente auxiliaire sur le développement touristique, je dois dire au député de Gatineau que déjà 72 000 000 $ ont été engagés par le gouvernement du Québec dans toutes sortes de projets à l'intérieur des frontières québécoises, ce qui nous a permis de développer l'économie touristique chez nous. Mais, jusqu'à maintenant, nous sommes aussi, puisque nous avons reçu une offre, en négociation avec le gouvernement fédéral pour étendre cette entente auxiliaire et faire en sorte que de nouvelles retombées économigues aident le Québec en particulier. Il est question d'un montant de 42 800 000 $ dont 24 000 000 $ seront réservés pour le Palais des congrès de Montréal - nous en avons traité il y a déjà une quinzaine de jours - et le reste, 18 800 000 $ seront réservés à la fois pour la rénovation du Vieux-Montréal et à la fois pour d'autres programmes de développement de stations de ski international ou autres programmes suggérés par le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. C'est donc dire qu'il nous resterait environ 7 800 000 $ à dépenser, au point de vue des

infrastructures touristiques, dans tout le Québec. Je voudrais tout simplement assurer le député de Gatineau de mon ouverture d'esprit et de ma sympathie à l'égard de ce projet très intéressant pour lui et très intéressant aussi pour le gouvernement du Québec. Je discuterai, au cours des prochains jours, avec mon collègue responsable de ce dossier particulier, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et nous essaierons d'apporter les réponses le plus rapidement possible aux demandes du député de Gatineau.

Je veux quand même noter en passant que la Société d'aménagement de l'Outaouais a déjà fait beaucoup dans la région de l'Outaouais au point de vue des loisirs et nous croyons qu'elle se doit de continuer dans la même direction. Même si je ne peux pas donner une réponse plus précise que celle-ci ce soir, je sais que le député de Gatineau comprend qu'étant donné que je n'ai pas le dossier complet avec moi ce soir, après en avoir parlé avec le ministre de Loisir, de la Chasse et de la Pêche, nous pourrons, au cours des prochains jours ou des prochaines semaines, lui faire part de toute la volonté du gouvernement du Québec de participer au développement de l'industrie touristique d'une façon toute particulière dans la région de l'Outaouais et, bien sûr, aussi dans son comté de Gatineau.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

Habitation et Protection du consommateur

M. John Ciaccia M. Ciaccia: Merci, M. le Président.

Dernièrement, le Vérificateur général a déposé son rapport à l'Assemblée nationale. Ce rapport faisait état, entre autres, de la mauvaise administration de la Société d'habitation du Québec. Je voudrais relever certains faits pertinents pour situer le débat et aussi pour situer les questions que je voudrais poser au ministre.

Premièrement, M. le Président, il y a le dossier Luc Cyr et Transit Construction. Nous savons que M. Cyr a été imposé au ministre délégué à l'Habitation par le bureau du premier ministre et qu'il a été mis en charge de 42 dossiers que le ministre décrits comme étant des dossiers scabreux. Cependant, le gouvernement décide de donner la gérance des réparations à M. Cyr, sans soumissions. Dans le rapport du Vérificateur général, il y a beaucoup d'irréqularités. On soulève le cas d'un conflit d'intérêts, l'engagement du fils de M. Cyr. Je ne voudrais pas, M. le Président, parler contre l'esprit paternel, mais il ne faudrait pas que ce soit aux dépens de l'État.

Il y a plusieurs autres irrégularités dans le contrôle de la compagnie, dans le contrôle des mesures administratives de la Société d'habitation du Québec. On parle, par exemple, d'un manque d'informations quant aux travaux supplémentaires et quant aux pièces justificatives pour des coûts additionnels qui ont été payés par la Société d'habitation du Québec. J'en ai un ici, par exemple, un avenant à un certain contrat, le contrat Arteco Concept Construction Inc., sujet: Warwick, contrat de réparations, signé, d'une part, par M. Cyr où on augmente les travaux supplémentaires de 15 000 $ sans donner aucun détail. On dit: Palier de balcon et pans de murs de brique. Considérant que ces travaux supplémentaires s'inscrivent à l'intérieur d'un ensemble de travaux pour corriger des déficiences évidentes, la société autorise un crédit supplémentaire de l'ordre de 15 000 $, portant la valeur totale du contrat à un plafond de 60 000 $. Il n'y a aucun détail et c'est sur cette base qu'on paie un montant de 15 000 $. C'est l'argent des contribuables et comme le Vérificateur général en fait mention, c'est absolument inadéquat. (22 h 20)

Je demanderais au ministre quelles mesures il a prises dans les circonstances et quels correctifs il a apportés au fonctionnement de la Société d'habitation du Québec pour corriger cette lacune et cette mauvaise administration.

Nous avons aussi ce qui est communément appelé la Grande Passe, un édifice de Montréal où, comme vous le savez, il y avait des travaux de rénovation. Une soumission avait été accordée pour un prix ferme de 604 500 $. Le gouvernement -la Société d'habitation du Québec - a décidé de ne pas accorder le contrat au soumissionnaire, mais elle a accordé le contrat à Transit Construction. Même le Conseil du trésor, dans ces directives, ne voulait pas que ce soit Transit parce que, naturellement, il y a un conflit d'intérêts, c'est la même compagnie qui a la direction de l'administration et des rénovations, c'est à cette compagnie qu'on accorde un contrat avec des hypothèques, etc., pour rénover l'édifice. Nous savons tous ce qui est arrivé, les travaux sont arrêtés, la compagnie a manqué de fonds additionnels pour compléter les travaux.

On voit un peu le cheminement de ce qui s'est passé, par une citation de M. Dorion, une des personnes impliquées, c'est le président d'une des compagnies impliquées dans la rénovation. C'est dans un article de la Presse du mois de janvier: "M. Dorion admet que l'évaluation initiale des coûts qui avait été faite était mauvaise, qu'elle avait été préparée rapidement pour que des fonds soient débloqués au plus tôt avant le

printemps. Elle avait, dit-il, été faite par nous, de bonne foi, avec l'aide de quelqu'un de LOGIPOP, qui relève de la Société d'habitation du Québec. Nous voulions faire quelque chose de plus précis, plus tard, pour que l'enveloppe soit augmentée."

En d'autres termes, ce que M. Dorion dit, c'est qu'on a présenté de faux états pour commencer le projet et, plus tard, on savait qu'on était pour obtenir d'autres fonds, le montant global qui serait accordé initialement devait être augmenté, et c'est justement ce genre de procédures qui a été sévèrement critiqué, dans un rapport dont certains extraits ont été rendus publics, un rapport qui avait été commandé par le ministre délégué à l'Habitation, qui disait qu'on contournait les directives du Conseil du trésor en faussant certains chiffres et en adoptant des procédures un peu douteuses.

Comme vous le savez, les travaux ont été arrêtés à cause du manque de fonds. Les estimations, d'après les chiffres soumis lors de la commission parlementaire, au lieu d'être de 600 000 $ initialement, le montant originel que le soumissionnaire avait fourni, était de 1 000 000 $ ou de 1 200 000 $. Encore une fois, ce sont des sommes provenant des taxes des contribuables et ce sont les contribuables qui devront combler le déficit. Je voudrais demander au ministre à quel stade en est ce projet. D'après les déclarations qu'il avait faites au mois de décembre dernier, je crois qu'il devait le mettre en vente. Est-ce qu'il a réussi? Est-ce qu'il y a une estimation du coût pour compléter les travaux et sous quelles conditions ce projet sera-t-il terminé? 0e voudrais parler aussi de certains contrats de gérance. Je vais donner un exemple d'un contrat qui semble être exact et répondre à certaines normes. Je prends un exemple à Hauterive. C'est un contrat de gérance au montant de 10 000 $ pour exécuter des travaux de réparation qui ne dépassent pas 100 000 $. On voit que ce contrat semble être conforme aux normes de l'industrie. On paie un certain montant au gérant, à celui qui doit gérer les travaux, pour des travaux qui peuvent être, dans ce cas-ci, de l'ordre de 100 000 $.

J'ai un autre contrat ici. C'est un contrat avec Isolation Select Inc., pour un projet à Place Bardy. Le contrat de gérance est pour 44 000 $, mais les travaux, d'après le contrat, ne doivent pas dépasser 44 000 $. Autrement dit, le montant du contrat par la gérance est le même montant que pour les travaux qui doivent être gérés. Ce serait la même chose, par exemple, si pour une maison de 40 000 $, on paie quelqu'un qui va gérer les travaux de la construction, on lui verse 40 000 $ pour s'assurer que la maison sera construite pour 40 000 $. Il semble y avoir quelque chose qui n'est pas tout à fait correct dans ce genre de contrat.

Je pourrais en nommer d'autres, j'en ai d'autres ici, mais je demanderais une explication au ministre, parce que c'est le genre de contrat qui a été porté à l'intention du gouvernement par le Vérificateur général.

Nous avons demandé au premier ministre et au ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur une enguête publique sur l'administration de la Société d'habitation du Québec. Je crois que nous avons apporté tous les jours, en commission parlementaire, à la Chambre, à la période des guestions, à l'attention du ministre, à l'attention du premier ministre, des faits qui peuvent certainement justifier une enquête publique. Cela serait même à l'avantage et dans l'intérêt du gouvernement, parce que, tous les jours, le ministre est obligé de défendre la mauvaise administration de la Société d'habitation du Québec.

Je demanderais au ministre, en terminant, combien de faits nouveaux nous devons montrer au ministre pour qu'il comprenne que seule une enguête publique peut faire la lumière dans ce dossier et redonner à la Société d'habitation du Québec la crédibilité qu'un organisme d'État doit avoir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, au début de cette intervention, je voudrais d'abord, au nom du personnel de la SHQ, si c'était possible, faire tout comme, à tout le moins, si je soulevais une question de privilèqe, en revenant sur le texte qu'a lu ce matin le député de Mont-Royal. Ce texte disait en parlant des officiers de la Société d'habitation du Québec: "Ils ont exposé la SHQ à l'augmentation des coûts sur certains projets en faussant le système de soumissions par l'adjudication de contrats à des soumissionnaires autres que le plus bas soumissionnaire". C'est ce que le député de Mont-Royal disait ce matin.

Je pense qu'il s'aqit là d'une affirmation tout à fait injuste à l'endroit de la Socité d'habitation du Québec et de ses fonctionnaires. Replaçons ce texte dans le rapport qui a été fait à ce sujet. D'abord, ce texte concerne spécifiquement un projet, celui de Sainte-Foy. Les autorités de la Société d'habitation du Québec n'ont en aucun temps dérogé aux normes établies par le Conseil du trésor quant à l'attribution des contrats au plus bas soumissionnaire. La SHQ a rejeté une soumission d'un entrepreneur parce qu'elle n'était pas conforme au programme de construction. Et puisque cette soumission n'était pas conforme, on dit bien

qu'on doit donner le contrat au plus bas soumissionnaire conforme. Or, il n'était pas conforme, elle devait donc le rejeter, sinon, elle s'exposait automatiquement à des poursuites de la part des autres entrepreneurs qui avaient soumissionné. La SHQ ne pouvait donc retenir un entrepreneur qui n'avait pas répondu aux devis de la soumission.

Cette histoire avait d'ailleurs fait beaucoup de bruit à l'époque et la SHQ avait décidé de faire vérifier sa décision par une tierce personne dont l'expertise est reconnue dans le domaine, soit Me Cinq-Mars, associé du bureau Martineau et Walker, de Montréal. Rappelons incidemment que M. Cinq-Mars est l'ex-bâtonnier du Québec. Or, M. Cinq-Mars, dans l'opinion qu'il fournissait à la SHQ le 11 mai 1981, confirme la décision de la société et dit: "À notre avis, cette soumission était inacceptable, ne rencontrant pas les exigences de la société, et le soumissionnaire ne peut pas plaider erreur, même si, à la suite de l'ouverture des soumissions, Saramac Inc. aurait signalé son intention de modifier sa soumission pour la rendre conforme aux exigences de la société, celle-ci ne peut être acceptée puisque alors les règles du jeu des soumissions seraient complètement faussées et constitueraient une injustice pour le soumissionnaire qui, lui, a respecté les règles du jeu. Je vous ai, d'ailleurs, remis - c'est toujours Me Cinq-Mars qui parle - copie d'une décision de la Cour suprême rendue le 27 janvier 1981 dans l'affaire Sa Majesté la reine du chef de l'Ontario et The Water Resources Commission vs Ron Engineering and Construction Eastern Ltd, qui rappelle les principes devant s'appliquer au système de soumissions."

M. le Président, je pense que ce cas illustre à souhait la double tactique de l'Opposition qui, à partir de quelques détails glanés ça et là, tente de faire paraître une décision juste, équitable, fondée en droit et en fait, d'abord comme une décision injustifiée et irrégulière et, deuxièmement, de passer allègrement de ces soi-disant irrégularités à des illégalités, peu importe la vérité, comme le disait le député de Saint-Louis, puisque "the name of the game" n'est pas de trouver la vérité, c'est de discréditer; ce ne sont pas les faits, ce sont les apparences.

Revenons au dossier des réparations majeures. C'est quoi? J'ai dit déjà que c'est un lourd héritage, en arrivant au ministère. 42 dossiers, 2000 locataires affectés, 13 000 000 $ de dégâts à réparer et 6 000 000 $ de poursuites. Le nouveau président de la Société d'habitation, M. Couture, m'informe que la société n'est pas équipée pour effectuer ces réparations elle-même, en même temps que pour bâtir au-delà de 4000 HLM par année pour reprendre les retards qu'avait provoqués l'administration précédente.

Le nom de M. Cyr est suggéré; il n'est pas imposé et la Société d'habitation le teste d'abord. Elle l'envoie voir quatre chantiers et elle lui demande une expertise. Elle veut l'embaucher pour un an et ce, rétroactivement au début de son expertise. À la main, sur le CT que j'ai déposé en commission, je raie un an, je mets six mois et je dis à compter de maintenant; l'expertise qu'il a faite pour montrer sa qualification, on ne le paie pas pour ça.

Or, voilà, M. le Président, que le coordonateur est engagé, qu'il fait l'ouvrage et, selon le président de la Société d'habitation à qui j'avais demandé un rapport, M. Cyr s'est acquitté de son mandat comme il s'était engagé à le faire. Malgré les allégations de l'Opposition, fidèle à sa tactique de faire état de soi-disant irrégularités et, après ça, de parler d'illégalités, ceci n'a pas été du tout confirmé par le rapport du Vérificateur général qui, précisément dans le cours normal de son travail, contrairement à ce que prétend l'Opposition, confirme les prétentions du président de la société et les miennes à l'effet qu'il n'y a pas d'illégalité, il n'y a pas de fraude, il n'y a pas de malversation dans ces dossiers.

M. le Président, ça me confirme également que j'ai eu raison de croire qu'il n'y avait aucun motif raisonnable et probable de prendre action dans ce dossier sur le plan de conduite dérogatoire ou illégale. M. Cyr, d'accord, a commis des entorses ou des accrocs à ce que j'appelle, moi, la procédure, les règles de pratique, il a engagé son fils. M. le Président, ce n'est pas un crime et le président de la Société d'habitation, dès qu'il a été mis au courant de ce fait, a envoyé une lettre à M. Cyr, lui disant de mettre un terme à cette action.

La conclusion, M. le Président, je serais tenté de dire, en empruntant le titre d'une pièce de Shakespeare, que c'est peut-être "Much ado about nothing", beaucoup de bruit pour rien; c'aurait été ma première réaction. Cependant, après la publication du rapport Paré - qu'on a tous eu dans cette Chambre, cette semaine - qui met en lumière à juste titre le droit à l'information, le droit du citoyen aux documents des organismes publics et particulièrement, évidemment, des élus, je pense qu'il convient d'attirer l'attention de l'Opposition sur la deuxième partie de ce rapport Paré qui souligne aussi l'importance d'assurer la protection des renseignements personnels. Si l'Opposition a le droit de demander des renseignements, elle n'a pas le droit de salir des réputations par déformation, association, insinuations, sous-entendus. J'invite cependant, malgré cela, l'Opposition, si elle est en possession de faits concrets, à les transmettre à l'attention du ministre de la Justice et à arrêter de

discréditer des serviteurs de l'État.

Je sais, M. le Président, pour avoir lu sur ce qu'on appelle "la sociologie du scandale" et particulièrement pour avoir analysé à fond les études ou les travaux de Sorokyn sur le sujet que, dans nos démocraties, les dirigeants n'étant plus nommés par la grâce de Dieu, mais élus par le vote populaire, il n'est plus nécessaire d'être régicide, M. le Président, il suffit d'être iconoclaste. Mais le procédé, pour moins barbare qu'il est, n'en est pas moins condamnable. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Nous avons deux interventions à l'intention du ministre de la Justice par M. le député de D'Arcy McGee. Compte tenu des deux interventions, il a accepté de faire une seule et même intervention. Je demanderais au député de D'Arcy McGee de prendre la parole.

Une voix: Bravo!

Justice M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, tel que prévu par notre règlement, nous avons donné avis au ministre de la Justice pour qu'il ait le temps de se préparer en ce qui concerne le fonctionnement des tribunaux au Québec et, deuxièmement, en ce qui concerne l'humanisation des services de détention.

Je reviens sur ces deux sujets, M. le Président, parce que les réponses qu'on a eues en commission parlementaire étaient nettement insuffisantes et non satisfaisantes. Souvent, le ministre nous a donné comme réponse qu'il va faire une étude, qu'il y a une étude à venir ou que des études étaient faites, mais n'étaient pas encore évaluées par son ministère, etc. Il a même refusé carrément de répondre à certaines questions. Par exemple, je lui ai demandé s'il est en faveur d'un ticket modérateur en ce qui concerne les services d'aide juridique et il a bien refusé de répondre, de dire oui ou non, et je comprends pourquoi. C'est parce que le ministre des Finances et le premier ministre sont en faveur d'un ticket modérateur, quoique le Conseil national du Parti québécois ait voté contre le ticket modérateur il y a quelques jours. Donc, le ministre de la Justice n'a pas voulu tomber entre deux chaises et il n'a pas répondu à cette question.

J'en viens maintenant au premier sujet, le fonctionnement des tribunaux. Il s'agit, bien sûr, de l'accessibilité à la justice. Cela veut dire que les causes doivent être entendues et décidées dans des délais raisonnables. Pour qu'il y ait vraiment justice, il faut qu'il y ait une justice expéditive. En effet, quand il y a des délais déraisonnables, on ne peut pas parler de justice, les témoins sont difficiles à rejoindre, la décision vient quelques années après que l'action a été intentée. C'est vraiment difficile de parler de justice quand il y a ces délais déraisonnables.

Le ministre est maintenant en fonction depuis cinq ans. Ce n'est pas qu'on le presse de faire quoi que ce soit, il est en fonction depuis cinq ans, il a eu beaucoup de temps pour prendre les mesures nécessaires pour que les tribunaux fonctionnent bien. En juin 1980, à l'étude des crédits du ministère, nous avons soulevé cette question en commission parlementaire. Le ministre a admis, à cette époque, qu'il y a un problème particulier en ce qui concerne la Cour supérieure. Comme vous le savez, M. le Président, la Cour supérieure du Québec est le tribunal de droit commun. C'est le tribunal le plus important parce que c'est le tribunal qui a le droit de surveillance des tribunaux inférieurs.

En 1980, à titre d'exemple, à Montréal, à la Cour supérieure, pour une audience d'un jour, il y avait un délai de neuf mois; pour une audience de plus d'un jour, le délai était de soixante mois. Le ministre, l'an dernier, en commission parlementaire, a promis de prendre les mesures nécessaires pour faire quelque chose en ce qui concerne ces délais à la Cour supérieure de Montréal. (22 h 40)

Cette année, M. le Président, nous avons posé la même question au ministre. Pourquoi? Parce que le problème est plus aigu cette année qu'il ne l'était l'an dernier. À Montréal, comme je viens de le dire, en juin 1980, pour une audience d'un jour, il y avait un délai de 9 mois. En juin 1981, le délai est de 26 mois; c'est-à-dire que le délai a augmenté de 15 mois. Pour une audience de plus d'un jour, en 1980, le délai était de 60 mois et, cette année, en 1981, le délai est de 73 mois, donc une augmentation des délais de 13 mois.

Le ministre a admis, en commission parlementaire, que l'encombrement des rôles constitue finalement une injustice. Le ministre a travaillé a ce problème toute l'année et aujourd'hui, c'est pire que ça ne l'était au début de l'année. Peut-être que ça aurait été mieux si le ministre n'avait pas travaillé au dossier.

Le ministre nous a dit qu'il allait déposer un plan d'action à la fin de l'année. Je lui demande plus de détails sur l'action qu'il entend prendre dans ce dossier. Je n'aimerais pas que l'an prochain, quand on va poser la même question au ministre, il nous dise que c'est encore pire. Donc, d'une année a l'autre, ce serait pire. On aimerait savoir quels sont ses projets pour améliorer cette situation.

En ce qui concerne la réforme des tribunaux administratifs, nous avons aussi

posé un certain nombre de questions au ministre et on n'a pas vraiment eu de réponses satisfaisantes. Quand nous avons demandé ce que le ministre entendait faire en ce qui concerne la réforme des tribunaux administratifs, il s'est caché derrière la constitution. C'est la faute de la constitution, c'est la faute du fédéral, c'est le cri de ses collègues. Je ne pensais pas que le ministre allait jouer à cache-cache avec la constitution comme d'autres de ses collègues, mais on apprend.

Il y a, bien sûr, un problème en ce qui concerne l'article 96 de la constitution, mais ce n'est pas une raison pour ne pas faire la réforme des tribunaux administratifs au Québec. Premièrement, le tribunal administratif existe au Québec depuis au moins 60 ans; la constitution n'a pas empêché l'établissement de ces tribunaux administratifs et il y a au moins 50 de ces tribunaux au Québec à l'heure actuelle. Le citoyen se retrouve souvent devant un tribunal administratif et on veut qu'on apporte certaines réformes à ces tribunaux.

Il y a des problèmes que nous avons déjà soulevés au niveau des tribunaux administratifs. Premièrement, il y a le problème des règles de pratique parce que les règles de pratique varient d'un tribunal à l'autre et ce serait une bonne idée d'avoir des règles de pratique uniformes pour tous les tribunaux administratifs du Québec.

Il y a aussi le problème des pouvoirs octroyés à ces tribunaux par l'Assemblée nationale. Est-ce que le ministre a une politique en ce qui concerne les pouvoirs qu'on octroie à ces tribunaux administratifs? Cela va de soi qu'on ne peut pas donner tous les pouvoirs à ces tribunaux administratifs; par exemple, on ne va pas créer un tribunal administratif en ce qui concerne les mariages, on ne s'attend pas que ces questions soient traitées par un tribunal administratif, on s'attend que ces questions soient traitées par les cours, la Cour supérieure surtout.

Aussi, il y a le problème de la mentalité de certains fonctionnaires qui minimisent ou ignorent les droits des citoyens. Il y aurait quelque chose à corriger de ce côté.

C'est bien de parler de la Charte des droits et libertés de la personne; pas le ministre de la Justice, mais le leader du gouvernement nous a dit lors d'une conférence de presse durant le week-end qu'on va avoir une commission qui va rouvrir la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Il y a déjà des journalistes qui ont dit que ce sera fait dans un but de propagande et non pas dans un but de vraiment ajouter aux droits et libertés des Québécois. Peu importe, si le ministre de la Justice est sérieux en ce qui concerne les libertés et les droits des Québécois, il y a la réforme des tribunaux administratifs qui eux attendent aussi.

Je peux suggérer certaines réformes. Par exemple, le droit d'être représenté par un avocat devant un tribunal administratif. Le droit d'appel d'une décision du tribunal administratif aux cours de justice. Ce fut refusé. Le droit d'appel en ce qui concerne le Tribunal de la jeunesse fut refusé cette semaine dans cette Chambre par un collègue du ministre de la Justice parce que nous avons demandé que ce soit possible de faire appel aux cours d'une décision du Tribunal de la jeunesse qui a été établi en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse. Il y a aussi une réforme qui attend, comme je l'ai déjà souligné, l'uniformité des règles de pratique et les règles de pratique sont très importantes dans un tribunal administratif comme elles le sont devant les cours de justice parce que la forme rejoint souvent le fond. La procédure rejoint souvent la substance et l'uniformisation des règles de pratique pourrait être une bonne façon de raffermir les droits des Québécois.

Nous demandons donc une réforme globale des tribunaux administratifs pour qu'il y ait une justice plus distributive au Québec, pour qu'il y ait une justice plus juste. Nous aimerions avoir des réponses précises sur ce problème, réponses que nous n'avons pas eues en commission parlementaire. Je peux ajouter que, si la volonté politique existe, on peut faire beaucoup de choses, mais la volonté politique n'existe pas, on ne fait rien. La volonté politique ne semble pas exister aujourd'hui au ministère de la Justice pour faire cette réforme en ce qui concerne les tribunaux administratifs.

Deuxièmement, j'aimerais aborder le problème de l'humanisation des services de détention. Au Québec, il y a à peu près 16 000 Québécois qui subissent l'incarcération chaque année dans les prisons provinciales. Aussi, le suicide est treize fois plus élevé dans les prisons du Québec que dans la société en général. Il y a aussi un surpeuplement dans les prisons. Le ministre, s'il suit ses dossiers, doit être au courant de ce surpeuplement dans les prisons. J'insiste une autre fois, M. le Président, le ministre actuel est en fonction depuis 1976, donc il a eu le temps de faire des réformes; ce n'est pas comme quand on demande à un nouveau ministre de faire des réformes. J'ai appris par les journaux, il y a quelques jours, qu'à Montréal on héberge des détenus au YMCA; il y a tellement de surpeuplement à la prison de Bordeaux qu'on a envoyé des détenus au YMCA pour purger leur sentence. J'étais bien surpris d'apprendre que les policiers n'étaient même pas informés qu'on ait envoyé des prisonniers au YMCA au centre-ville de Montréal.

J'imagine qu'à l'avenir le ministre va peut-être avoir la bonne idée d'envoyer des

détenus à l'hôtel Hilton et peut-être qu'on va voir des gens qui vont briser des fenêtres pour passer quelques jours, quelques semaines à l'hôtel Hilton. Ce serait amusant d'avoir un tel genre de choses au Québec, surtout en cette année de coupures budgétaires. (22 h 50)

C'est évident qu'à cause du surpeuplement des prisons les Québécois subissent des préjudices, pas seulement dans les prisons, mais aussi les gens qui sont traduits devant les cours de justice et je vais vous donner un exemple. À cause du surpeuplement des prisons à Montréal, l'emprisonnement discontinu est très rare à Montréal. Qu'est-ce que c'est, l'emprisonnement discontinu? Il y a des lois où on prévoit que, pour certaines infractions, l'accusé, la personne trouvée coupable pourrait purger sa sentence en fin de semaine. Le but est, bien sûr, de protéqer l'emploi de ces personnes pour empêcher leur famille de tomber sous l'aide sociale. Donc, c'est l'intérêt de l'État du Québec qu'il y ait l'emprisonnement discontinu.

À cause de difficultés administratives, M. le Président, et à cause du surpeuplement à Bordeaux, à Montréal et ailleurs, c'est rare, comme je vous l'ai dit, qu'il y ait une sentence d'emprisonnement discontinu. Aujourd'hui, à Montréal, les procureurs de la couronne, - j'imagine que c'est sur les ordres du ministre - s'opposent à ces sentences et ils ne les suggèrent pas parce qu'il y a surpeuplement à Bordeaux. Les juges ne peuvent pas rendre ces sentences d'emprisonnement discontinu à Montréal, quoique, ailleurs au Québec, ce soit possible. Donc, il y a une inégalité pour les Québécois. Les Québécois à Montréal ne peuvent pas bénéficier d'une telle sentence, alors que des Québécois qui se trouvent ailleurs au Québec, disons à Chicoutimi, pourraient bénéficier de cet emprisonnement discontinu. Le ministre a admis qu'il y a un problème. Le ministre est là depuis cinq ans. Dans cinq ans, on peut faire quelque chose, si on a la volonté de le faire. Quand on n'a pas de volonté, on ne fait rien.

Dans le même ordre d'idées, - et je termine là-dessus, M. le Président - il y a eu des journées d'étude à Orsainville, il y a quelques jours, parce que les agents de la paix n'ont pas de convention collective et, durant cette journée d'étude, les détenus ont fait ce qu'on appelle dans les médias un mini-bingo. Il y a 28 autres centres de détention au Québec. J'ai demandé au ministre ce qu'il ferait si on faisait des mini-bingos ou des bingos partout. Il n'a pas donné de réponse. J'ai demandé au ministre: Que ferez-vous, s'il y a des bingos partout au Québec? Ce ne sont pas des bingos où on joue, bien sûr. J'ai demandé au ministre: Allez-vous faire appel à la Sûreté du Québec pour qu'il y ait de la sécurité dans les prisons? J'ai demandé au ministre s'il ferait appel à l'armée canadienne, comme c'est son droit et même son devoir, si les autorités civiles ne pouvaient pas garantir la sécurité dans les prisons. Il n'a pas répondu.

Il y a, pour résumer, des problèmes dans nos prisons: problème de surpeuplement, problème des services médicaux, problème des droits des prisonniers. J'ai posé toutes sortes de questions sur ces problèmes. Je n'ai pas eu de réponse satisfaisante.

En terminant, j'aimerais demander au ministre de répondre à nos questions et de ne pas commencer par une attaque contre l'Opposition, de répondre seulement à ces questions d'une façon sereine, sans attaquer l'Opposition ou les questions qu'on a posées. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: Mes remarques seront brèves, M. le Président, parce que j'ai l'impression qu'avec l'ensemble de tous les problèmes ou tous les sujets soulevés par le député de D'Arcy McGee, ce n'est pas ici, ce soir, que nous allons les régler tous. Cependant, je suis, en premier lieu, un peu surpris des remarques plutôt mesquines du député de D'Arcy McGee au sujet de la décision que nous avons prise comme gouvernement de tenir une commission parlementaire concernant l'étude de la Charte des droits et libertés de la personne.

Je pense, au contraire, que le député de D'Arcy McGee devrait se réjouir, lui qui se prétend un défenseur des droits et libertés individuelles, que le gouvernement ait décidé non pas de procéder seulement avec un projet de loi où nous évoquions la nécessité de mettre en place des programmes d'action positive, mais qu'il ait décidé plutôt d'élargir la discussion en permettant une commission parlementaire sur l'ensemble de la Charte des droits et libertés de la personne. Enfin, la population, tous les groupes concernés par les droits et libertés auront l'occasion de venir s'exprimer en commission parlementaire, de faire état de leurs préoccupations au gouvernement, aux membres de l'Opposition, de manière que, lorsque nous légiférerons, nous pourrons le faire à partir non pas d'une seule préoccupation, mais d'un ensemble de préoccupations de différents groupes qui existent dans la société.

Effectivement, la Charte des droits et libertés de la personne, après plus de cinq ans d'existence, mérite une révision totale, mérite d'être améliorée, d'autres droits doivent être consentis à l'ensemble des citoyens. Il est tout à fait normal... Si le député de D'Arcy McGee ne s'en réjouit pas,

je suis convaincu - et j'en ai déjà des échos - que de nombreux groupes au Québec se réjouissent déjà de cette décision du gouvernement de tenir une commission parlementaire concernant la Charte des droits et libertés de la personne.

Le député de D'Arcy McGee a enchaîné sur la nécessité d'une réforme des tribunaux administratifs. Il prétend que nous n'avons pas répondu à ses questions en commission parlementaire, quoique je m'aperçoive que le député de D'Arcy McGee a pris la mauvaise habitude de dire qu'on ne répond pas à ses questions lorsqu'on a le malheur de ne pas répondre ce qu'il aimerait entendre. Entre vous et moi, autant l'Opposition est maîtresse de ses questions, autant il reste au moins au gouvernement la possibilité de donner les réponses qu'il juge à propos.

Entre autres, concernant les tribunaux administratifs, c'est bien beau, de la part du député de D'Arcy McGee, de se découvrir de grandes préoccupations et de parler de réforme globale des tribunaux administratifs, alors qu'il n'est même pas capable de se rendre compte que tous ces tribunaux administratifs, que nous avons aussi au Québec, qui rendent des services incommensurables à l'ensemble des citoyens, sont en train d'être contestés d'une façon systématique, du point de vue de leurs assises juridiques. Vous le savez, il n'y a pas si longtemps, il y a eu un jugement de la Cour suprême du Canada, concernant le Tribunal des transports, qui nous oblige à présenter un projet de loi pour apporter certaines corrections. Nous avons également le Tribunal des professions dont la légalité a été mise en doute. Nous avons également eu, dernièrement, un jugement rendu en ce qui a trait à la régie du logement concernant l'Ontario, mais cela pourrait avoir des effets très importants pour la Régie québécoise du logement.

À partir du moment où on se rend compte que la sécurité juridique de ces tribunaux administratifs, qui sont pourtant nécessaires pour le Québec, est mise en cause systématiquement, une des premières préoccupations que j'ai eue, comme ministre de la Justice, a été de faire en sorte qu'il y ait des discussions avec le fédéral pour asseoir une fois pour toutes la sécurité de nos tribunaux administratifs. (23 heures)

Comme ministre de la Justice, durant quatre ans, à toutes les conférences fédérales-provinciales, ou presque, que nous avons eues, j'ai toujours évoqué devant les autorités fédérales la nécessité que le gouvernement fédéral accepte des modifications à l'article 96 pour que les citoyens ne soient pas placés dans un état d'insécurité. Jamais les autorités fédérales n'ont voulu consentir à ces demandes fondamentales de la part du Québec, en matière de justice.

Lors des discussions constitutionnelles, huit ou neuf provinces s'étaient mises d'accord pour demander aux autorités fédérales de régler, une fois pour toutes, cette insécurité juridique qui existe au niveau de nos tribunaux administratifs, en acceptant des amendements au niveau de l'article 96. Or, nous nous sommes heurtés, encore une fois, à une réponse négative de la part des autorités fédérales.

Je conviens que nous puissions faire des améliorations au niveau du fonctionnement des tribunaux administratifs, que ce soit en ce qui a trait à l'uniformisation de la procédure, ou d'autres améliorations que nous pourrions avoir à l'esprit. Cette préoccupation, nous l'avons. Le député de D'Arcy McGee aurait avantage à regarder un peu plus ce qui se fait du point de vue gouvernemental, surtout lorsqu'il faisait une suggestion concernant les tribunaux administratifs en disant qu'il faudrait donner un droit d'appel des décisions des tribunaux administratifs. S'il avait suivi un peu la législation gouvernementale, il se serait rendu compte que dans plusieurs lois, justement, depuis quelques années, nous avons donné des droits d'appel des décisions rendues par les tribunaux administratifs, pour permettre au citoyen de mieux faire valoir ses droits.

En ce qui a trait aux tribunaux administratifs, je puis vous assurer que la volonté politique non seulement du ministre de la Justice, mais du gouvernement du Québec, c'est de procéder à une réforme en profondeur de nos tribunaux administratifs, mais de le faire lorsque nous aurons au moins la certitude que ces tribunaux administratifs ne seront pas mis en danger par des contestations devant les tribunaux. C'est élémentaire.

Le député de D'Arcy McGee, en parlant tout à l'heure du surpeuplement dans les prisons, a donné entre autres comme exemple le fait que nous ayons acheminé des détenus au YMCA à Montréal. Je voudrais lui faire remarquer que le YMCA de Montréal, dont l'expérience dans les services communautaires particulièrement avec les détenus des pénitenciers fédéraux est bien connue, constitue une des meilleures maisons de réhabilitation que nous ayons. Le ministère de la Justice a conclu une entente avec le YMCA - environ 80 détenus y sont présentement - afin de suivre un programme de réhabilitation. Ce programme produit des effets très positifs. Je ne comprends vraiment pas pourquoi le député de D'Arcy McGee semble avoir quelque chose à redire par rapport à cette initiative prise par le ministère de la Justice qui va dans le sens d'une préoccupation de réinsertion sociale pour les détenus.

Le député de D'Arcy McGee semble placer la responsabilité sur les épaules du ministre de la Justice, du fait qu'il y a surpeuplement dans les prisons.

Effectivement, c'est le cas.

Ce n'était cependant pas le cas il y a deux ans. Je pense qu'aucun ministre de la Justice ne peut prévoir cet état de fait. Ici au Québec, comme dans tout le reste du Canada, nous avons assisté à une hausse du taux de la criminalité. Quoi qu'on en dise, le Québec est une des provinces où la hausse du taux de criminalité est la moins élevée en comparaison avec les autres provinces, mais je ne crois pas qu'on doive, je dirais, se consoler du fait que cette hausse de la criminalité soit moins qrande au Québec que dans les autres provinces, parce qu'effectivement cette hausse de criminalité cause un problème majeur, entre autres, le surpeuplement de nos institutions de détention.

C'est exact que ce surpeuplement au niveau des prisons crée une situation qui ne permet pas à l'expérience du système des sentences de fin de semaine de donner tous les résultats que nous aurions pu en attendre. Peut-être que l'expérience des sentences de fin de semaine n'a pas connu les résultats escomptés, M. le Président, premièrement, parce que le système a été un peu trop généralisé, je crois; deuxièmement, c'est qu'il peut être difficilement appliqué lorsqu'il y a un surpeuplement dans les prisons, et il faut en tenir compte. C'est évident que la manière d'essayer de résoudre le problème, c'est peut-être de s'attaquer à la racine même des causes de ce surpeuplement.

M. le Président, je crois qu'une des grandes causes du surpeuplement dans nos institutions carcérales, c'est que le nombre de citoyens qui choisissent de faire de la prison plutôt que de payer des amendes s'est accru considérablement. De plus en plus, nous voyons des citoyens qui décident de faire de la prison plutôt que de payer des amendes. D'ailleurs, dans nos prisons, à l'heure actuelle, au-delà de 30% des individus y sont à cause de cette décision de faire de la prison plutôt que de payer des amendes. Je crois que c'est inacceptable et qu'il y a vraiment trop de citoyens qui ne doivent pas être en prison et qui y sont à l'heure actuelle étant donné cette situation.

Il va nous falloir trouver des solutions qui vont faire en sorte que le nombre de citoyens qui choisissent la prison plutôt que de payer des amendes diminue. Nous avons travaillé au ministère de la Justice dans ce sens. H y a quelques mois, une étude a été faite sur ce phénomène. Nous avons référé cette étude au Conseil consultatif de la justice et, dès le début de l'automne, le Conseil consultatif de la justice s'est engagé à nous faire part de ses recommandations. Mais je crois qu'il y a moyen de contrer ce phénomène par d'autres solutions qui pourraient être, par exemple, la saisie des biens avant que soit accepté le fait que quelqu'un aille en prison plutôt que de payer une amende. D'autres solutions peuvent être trouvées, à condition que nous approfondissions notre étude. (23 h 10)

M. le Président, je pense que, quand le député de D'Arcy McGee essaie de faire reposer sur les épaules seules du ministre le phénomène du surpeuplement de nos institutions de détention, il exagère grandement.

Cela peut peut-être faire image, mais je crois que c'est minimiser grandement l'analyse du phénomène lui-même auquel nous avons à faire face, pas seulement ici au Québec, mais dans toutes les autres provinces. Je tiens à dire également au député de D'Arcy McGee que cette situation n'existe pas seulement a Montréal. Ce phénomène du surpeuplement de nos institutions existe aussi dans les régions et en dehors de Montréal, de telle façon que ce n'est pas vrai qu'une injustice est faite aux citoyens et aux citoyennes de Montréal par rapport au reste de la province.

Le dernier sujet qu'a abordé mon collègue de D'Arcy McGee concerne les délais devant nos cours de justice. Effectivement, M. le Président - je l'ai d'ailleurs dit en commission parlementaire -le problème des délais a toujours constitué une préoccupation prioritaire, au ministère de la Justice. Il est clair que dans certaines juridictions les délais sont trop longs et, en fin de compte, ils peuvent constituer des dénis de justice pour les citoyens ou citoyennes qui ont a aller devant les tribunaux. Cependant, je crois qu'il ne faut pas exagérer non plus. Le député de D'Arcy McGee sait très bien qu'en ce qui regarde la Cour provinciale, la Cour des sessions de la paix et le Tribunal de la jeunesse, on peut dire que les délais sont raisonnables devant ces juridictions. Il y a même eu, dans certains cas, beaucoup d'améliorations. Effectivement, le problème se situe au niveau de la Cour supérieure à Montréal, en particulier, et dans quelques autres districts au Québec.

Le député de D'Arcy McGee prétend que, comme gouvernement, nous n'avons rien fait pour essayer de décharger les rôles de la Cour supérieure de manière à diminuer les délais. Je pense qu'il est foncièrement injuste en faisant cette affirmation parce que, depuis trois ou quatre ans, nous avons pris plusieurs mesures en ce sens. Je pense, par exemple, a l'augmentation de la juridiction de la Cour provinciale de 3000 $ à 6000 $. Cette loi a été faite uniquement pour qu'il y ait moins de causes devant la Cour supérieure et que les délais soient diminués. Vous avez eu la Loi sur l'assurance

automobile qui, nous l'espérions, pouvait contribuer à faire disparaître un nombre très impressionnant de causes devant la Cour supérieure. Nous avons présenté le projet de loi no 80 aux fins de simplifier les procédures devant les Cours d'appel. Nous avons tout fait pour encourager également le système de communication de la preuve qui permet de raccourcir les délais, les frais et les tracasseries pour l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes.

Malgré tous ces efforts, M. le Président, il y a encore - nous sommes à même de le constater - des améliorations à faire. Nous allons y consacrer tous nos efforts au cours des mois qui viennent. Mais je crois que le député de D'Arcy McGee devrait savoir que lorsqu'on parle de délais devant les cours de justice, ceci ne regarde pas seulement le ministère de la Justice. Le ministère de la Justice n'est pas le seul intervenant qui puisse améliorer la situation. Je crois que raccourcir les délais, entre autres, devant les Cours supérieures représente un travail de collaboration entre le ministère de la Justice, le barreau, la magistrature. Nous avons continuellement des rencontres, nous essayons de faire la réflexion la plus approfondie possible pour trouver d'autres solutions que celles que nous avons trouvées jusqu'à maintenant.

Je puis assurer non seulement le député de D'Arcy McGee, mais la population du Québec que nous allons employer tous nos efforts pour essayer d'améliorer encore une fois la situation et, peut-être, d'ici l'automne, préparer un plan d'action plus détaillé dans ce sens.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Pour faire suite au débat sur le rapport des crédits, est-ce que le rapport des crédits est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

M. le leader adjoint, au nom du ministre des Finances, propose-t-il les première, deuxième et troisième lectures?

M. Vaugeois: Prends ton temps, M. le leader adjoint.

Projet de loi no 19

Première, deuxième et troisième lecture

M. Bertrand: Maintenant que le député de Trois-Rivières, adjoint parlementaire au ministre délégué aux Affaires parlementaires, me permet de reprendre mon siège, je voudrais effectivement procéder à une motion de première, deuxième et troisième lecture sur le projet de loi no 19, Loi octroyant à Sa Majesté des deniers requis pour les dépenses du gouvernement pour l'année financière se terminant le 31 mars 1982 et pour d'autres fins du service public.

Je fais motion pour que ce projet de loi soit adopté dans ses première, deuxième et troisième lectures.

M. Vaugeois: Cela demande réflexion, hein?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté?

Une voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première, deuxième et troisième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Bertrand: Sur ce, je ferais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain matin, 10 heures.

M. Vaugeois; Vers 10 heures, 10 h 05.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont ajournés jusqu'à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 17)

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